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Full text of "Dictionnaire des sciences naturelles, dans lequel on traite méthodiquement des différens êtres de la nature, considérés soit en eux-mêmes, d'après l'état actuel de nos connoissances, soit relativement à l'utilité qu'en peuvent retirer la médecine, l'agriculture, le commerce et les artes. Suivi d'une biographie des plus célèbres naturalistes"

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DIGTIONISAIRE 


DES 

CIENCES  NATURELLES, 

DANS    LEQUEL 

TRArrF.  MÉXMODÏQUEMENI  DES  DIFFÉRENS  ÊTKES  DE  LA  NATURE  , 
C0>::;IIJÉ!\É5  SOIT  EN  EUX-MÊMES,  d' APRES  l'ÉTAT  ACTUEL  DE  NOS 
CONXOISS ANCES  ,  SOIT  RELATIVEMENT  A  l'uTILITB  QU'eN  PEUVENT 
RF.TinER  LA  MÉDECINE,  l'agriculture,  LE  COMMERCE  ET  LES  ARTS. 

iUIYî   D'UNE   BIOGRAPHIE   DES    PLUS    CÉLÈBRES 
NATURAUSTES. 


iusiear.s  Piofos5eurs  du  Jardin  du  Roi,  et  des  principales 
Écoles  de  Paris. 

TOME   VINGT-TROISIÈME, 


lEA-IRY 


F.  G.  Leviuxjlt,  Editeur,   à  STRASBOURG, 

et  rue  des  Fossés  M.  le  Prince,  N.°  3i ,  à  PARIS. 

Le  Nor^nt,  rue  de  Seine^   N.**  8,   à  PARIS. 

1822. 


LIBRARY     OF 


1685- IQ56 


DICTIONNAIRE 


DES 


SCIENCES  NATURELLES. 

TOME  XXIII. 


IEA  =  IRY. 


Le  nomhre  ^exemplaires  prescrit  -par  la  loi  a  été 
déposé.  Tous  les  exemplaires  sont  revêtus  de  la  signature 
de  r éditeur. 


^!^/^  ^Ùi*^!:^!K^''^^) 


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DICTIONNAIRE 

DES 

SCIENCES  NATURELLES, 

DANS    LEQUEL 

ON  TRAITE  MÉTHODIQUEMENT  DES  DIFF1ÉRENS  ÊTRES  DE  LA  NATURE, 
CONSIDÉRÉS  SOIT  EN  EUX-MÊMES,  d'aPRÈS  l'ÉTAT  ACTUEL  DE 
NOS  CONNOISSANCES  ,  SOIT  RELATIVEMENT  A  l' UTILITÉ  Qu'eN 
PEUVENT  RETIRER  LA  MÉDECINE  ,  l'aGRICULTURE  ,  LE  COMMERCE 
ET    LES    ARTS. 

SUIVI  D'UNE  BIOGRAPHIE  DES  PLUS  CÉLÈBRES 
NATURALISTES. 

Ouvrage  destiné  aux  médecins,  aux  agriculteurs,  aux  commercans, 
aux  artistes,  aux  manufacturiers,  et  k  tous  ceux  qui  ont  intérêt  à 
connoître  les  productions  de  la  nature,  leurs  caractères  génériques 
et  spécifiques,  leur  lieu  natal,  leurs  propriétés  et  leurs  usages. 

PAR 

Plusieurs  Professeurs  du  Jardin  du  Roi ,'  et  des  principales 
Ecoles  de  Paris. 

TOME   VINGT-TROISIÈME. 


F.  G.  Levrault,  Éditeur,  à  STRASBOURG, 
et  rue  des  Fossés  M.  le  Prince,  N."  3i,  à  PARIS. 

Le  Nokmant,  rue  de  Seine,  N.*'  8,  à  PARIS. 

1822. 


Liste  des  Auteurs  par  ordre  de  Matières. 


Phjsitjue  générale. 
M.    LACROIX,    membre  de  l'Acadëmie  des 
Sciences     et     professeur     au     Collège     de 
France.    (  L.  ) 

Chimie. 

M.     CHEVREUL,     professeur    au     Collège 
royal   de   Charlemagne.    C*^".) 

Minéralogie  et  Géologie. 

M.  BRONGNIART,  membre  de  l'Académie 

de<  Sciences,   professeur  à  la  Faculté  des 

Sciences.    (  B.  ) 
M.    BROCHANT    DE    VILLIERS,    membre 

de  l'Acidémie  des  Sciences.  (  B.  de  V.) 
M.    DE  F  RANGE,     membre    de    plusieurs 

Sociétés    savantes.    (  D.   F.) 

Botanique. 
M.  DESFONTAINES,  membre  de  l'Ac-idémie 

des  Sciences.    (Desf.  ) 
M.    DE    JUSSIEU,    membre   de   l'Académie 

des  Sciences,  prof,  au  Jardin  du  Roi.  (J.) 
M.    MIRBEL,     membre    de    l'Académie    des 

Sciences,     professeur     à     la    Faculté     des 

Sciences.    (B.  M.) 
U.   HENRI  CASSINI ,  membre  de  la  Société 

pbilomatique   de   Paris.   (  H.  Ciss.  ) 
M.    LEMAN  ,    membre  de    la    Société  philo- 

mulique  de  Paris.   (Lem.J 
M.  LOISELEUR  DESLONGCHAMPS, 

Docteur  en  médecine,  membre  de  plusieurs 

Sociétés  savantes.  (  L.  D.  ) 
M.  MASSEY.  (  Mass.  ) 
M.  POIRET,   membre  de  plusieurs  Sociétés 

savantes     et    littéraires ,     continuateur     de 

l'Encyclopédie  botanique.   (Poir.) 
M.  DE    TUSSAC,    membre    de    plusieurs 

Sociétés  savantes,   auteur  de    la   Flore    des 

Antilles.  (De  T.) 

MM.    DE    HUMBOLDT     et     RAMOND 
nouveaux    qu'ils    ont    observés    dans     leurs    v 
plus  p.irticulièrcmcnt  occupés.   M.    DE    CAN 

M.   F.   CUVIER  est  cbargé  de   la  direction 
articles   généraux  de  loologie  et  ù  l'histoire 


Zoologie  générale,   ^natomic  et 
Physiologie- 

M.  G.  CUVIER ,  membre  et  secrétaire  per- 
pétuel de  l'Académie  des  Sciences,  prof.au 
Jardin  du  Roi ,   etc.  (  G.   C.   ou  CV.   ou  C.) 

Mammifères. 

M.  GEOFFROY  ,  membre  de  l'Académie  des 
Sciences  ,  professeur  au  Jardin  duRoi,  (  G.  ) 


M.  DUMONT,  membre  de  plusieurs  Sociétés 
savantes.    (  Ca.    D.) 

Reptiles  et  Poissons. 

M.  DELACÉPÈDE,  membre  de  l'Académie 
des  Sciences ,  professeur  au  Jardin  du 
Roi.  (L.  L.) 

M.  DUMERIL,  membre  de  l'Académie  de» 
Sciences,  professeur  à  l'École  de  méde- 
cine. (C.  D.) 

M.  CLOQUET,  Docteur  en  médecine.  (H.C) 

Insectes. 

M.  DUMERIL  ,  membre  de  l'Académie  de» 
Sciences,  professeur  à  l'Ecole  de  médecine. 
(C.   D.) 

Crustacés. 

M.  W.  E.  LEACH,  membre  de  la  Société 
royale  de  Londres,  Correspondant  du  Mu- 
séum d'histoire  naturelle  de  France. 
(W.   E.  L.) 

Mollusques,   Fers  et  Zoophytes. 
M.  DE  BLAINVILLE,  professeur  à  la  Faculté 
des  Sciences.  (  De  B.) 


M.  TURPIN,  naturaliste,  est  cbargé  de 
l'exécution  des  dessins  et  de  la  direction  de 
la   gravure. 

Jonneront     quelques    articles     sur     les     objets 
oyages ,    ou    sur    les    sujets    dout    ils    se  sont 


DOLLE   nous   a   fait   la   même   pt 
générale   de    l'ouvrage,     et  il    coopérera    aux 
des    mammifères.    (F,    C.} 


DICTIONNAIRE 

DES 

SCIENCES  NATURELLES. 


lEA 

IeAIEAMADOU.  {Bot.)  Nom  donné,  suivant  Aubîet,  par 
les  Créoles  deCayenne,  à  une  espèce  de  muscadier  sauvage, 
virola  sehifera  de  cet  auteur,  que  les  naturels  d'Oyapoc  nom- 
Bient  voirouchi,  et  les  Galibis  dayapa  et  virola.  Ses  graines 
donnent  un  suif  dont  on  fait  des  chandelles  dans  la  Guiane. 
(J.) 

1EBAL,EBAL  (Bot.)  :  noms  africains   du   chiendent  des 
boutiques,  selon  Ruellius  et  Mentzel.  (J.  ) 

lÈBLE    (Bot.),    nom  vulgaire    d'une   espèce   de   sureau, 
sambucus  ebulus,  Linn.  Voyez  Hièble.  (L.  D. ) 
lEIERECOU.  {Bot.)  Voyez  Couguerecou.  (J.) 
lELLOO  (  Orniih.  )  ,    nom    du  gypaète   chez  les  Mongols. 
(Ch.  D.) 

lEONPALA.  {Bot.)  Voyez  Jeonpala.  (J.) 
lERABOTANE.  {Bot.)  Voyez  Hierabotane.  (J.) 
lERATOUNE.  {Bot.)  Nom  grec  d'une  plante  citée  par 
Clusius  ,  dans  son  Hist.  plant.,  ayant  le  port  d'un  trèfle  ou 
d'un  lotier,  des  gousses  que  l'on  peut  manger  avant  leur 
maturité,  comme  celles  des  pois  ou  haricots.  Cet  auteur  ne 
détermine  pas  l'espèce.  (J.  ) 

lERÉE.  {Foss.)   Dans  l'exposition  méthodique  des  genres 
de  l'ordre  des  polypiers,  M.  Lamouroux  a  établi  sous   ce 
23.  '  i 


1ER 

nom  un  geui'e  nouveau ,  auquel  il  assigne  les  caractères  sul- 
vans  :  Pol/ypier  fossile ,  simple,  pjriforme  ,  pédicellé ;  pédicule 
très -gros,  cylindrique,  s' évasant  en  masse  arrondie,  à  surface 
lisse;  un  peu  au-dessus  commencent  des  corps  de  la  grosseur  d'une 
plume  de  moineau,  longs,  cylindriques ,  Jlexueux ,  solides,  plus 
nombreux  et  plus  prononcés  à  mesure  que  l'on  s'éloigne  delà  base, 
et  formant  la  masse  de  la  partie  supérieure  du  polj^pier  ;  sommet 
tronqué , présentant  la  coupe  horizontale  des  corps  cylindriques  ob- 
servés à  la  circonférence. 

Cet  auteur  dit  qu'il  est  extrêmement  difficile  de  pronon- 
cer sur  la  classe  à  laquelle  appartient  ce  singulier  corps  ;  il 
ne  peut  dire  si  c'est  une  actinie  ,  un  alcyon  ou  bien  un  po- 
lypier sarcoïde  actlnaire.  Il  croit  que,  si  c'étoit  une  actinie, 
les  corps  cylindriques  en  seroient  les  tentacules.  Si  ces  corps 
étoient  des  cellules  ou  des  tubes  polypeux ,  n'étant  pas  épars 
sur  la  surface  du  polypier,  l'ierée  ne  pourroil  appartenir  aux 
alcyonées,  et  il  le  piace  provisoirement  parmi  les  polypiers 
actinaires. 

M.  Lamouroux  a  donné  à  cette  espèce  le  nom  d'Ierée 
pyriforme  ,  et  d'après  la  figure  qui  se  trouve  dans  l'ouvrage 
ci-dessus  cité,  pi.  78,  n."  3,  ce  corps  a  quatre  pouces  et 
demi  de  longueur  sur  trois  pouces  de  diamètre.  L'individu 
qui  a  servi  à  établir  les  caractères  du  genre  ,  ayant  été  roulé 
par  les  eaux,  on  peut  croire  qu'il  dépend  d'une  couche  qut 
paroît  moins  ancienne  que  le  banc  bleu  des  Vaches  noires, 
et  qu'on  trouve  à  Saint-Himer,  près  de  Pont-l'tlvéque,  dépar- 
tement du  Calvados,  à  Laigle  et  aux  environs  de  Mortagnc  ; 
département  de  l'Orne.  Cette  couche,  qui  semble  être  crayeuse, 
renferme  une  grande  quantité  de  polypiers  dcpendans  de  l.'i 
famille  des  alcyonées. 

Dans  le  supplément  du  premier  volume  de  ce  Diction- 
naire nous  avons  décrit,  à  l'article  Alcyon,  page  loS,  une 
espèce  que  nous  rapportons  à  ce  genre,  et  à  laquelle  nous 
avons  donné  le  nom  d'alcyon  changeant  ;  mais  elle  paroît 
avoir  beaucoup  de  rapport  avec  le  genre  lerée.  Sa  forme 
n'est  pas  précisément  la  même  ;  mais  j'ai  la  preuve  que  diffé- 
rens  individus  qui  dépendent  de  cette  espèce  sont  d'une 
forme  plus  ou  moins  alongée.  Ceux  que  je  possède,  au  lieu 
de  corps  longs,  flexueux  et  solides,  ont  leur  surface  supé- 


IF  5 

i'iéùre  criblée  de  trous  arrondis,  lesquels  ont  pu  contenir  des 
corps  qui  auroient  disparu  ,  comme  il  arrive  souvent  aux 
astrées  de  certaines  localités;  ou  bien  les  corps  qu'on  remar- 
que dans  rieréc  pyriforme  ne  seroient  peut-être  qu'une 
gangue  moulée  dans  ces  trous. 

Au  surplus  je  pense  que  ces  polypiers  doivent  ttre  distin- 
gués des  alcyons,  et  surtout  de  ceux  qu'on  a  appelés  figue 
de  mer  et  haliirhoé.  (  D.  F.) 

lEUSE  ou  YEUSE.  {Bot.)  C'est  une  espèce  de  chêne, 
quercus  ilex ,  Linn.  Voyez  Chêne.  (L.  D.) 

lEUZ.  (Bot.)  Voyez  Gianzi.  (J.) 

IF;  Taxus^  Linn.  (Bot.)  Genre  de  plantes  dicotylédones, 
de  la  famille  des  conifères,  Juss. ,  et  de  la  dioécie  monadelpliic 
de  Linnœus,  dont  les  principaux  caractères  sont  les  suivans: 
Fleurs  monoïques  ou  dioïques:  dans  les  mâles,  calice  de  plu- 
sieurs écailles  imbriquées;  les  supérieures  plus  grandes,  op- 
posées ;  cinq  à  dix  étamines  ayant  leurs  fih'mens  réunis  en 
colonne  saillante  et  portant  des  anthères  rapprochées  en  tête: 
dans  les  fleurs  femelles,  calice  comme  dans  les  mâles  ;  ovaire 
ovoïde  ,  porté  sur  un  réceptacle  orbiculaire  et  surmonté  d'un 
stigmate  sessile  ;  noix  monosperme  ,  presque  entièrement  re- 
couverte par  le  réceptacle  qui  a  pris  de  l'accroisscm.ent  aprè?» 
la  fécondation  ,  est  devenu  pulpeux  et  presque  de  la  forme 
d'une  baie. 

Les  ifs  sont  des  arbres  à  rameaux  nombreux ,  à  feuilles 
simples,  toujours  vertes ,  et  à  fleurs  axillaires.  On  en  connoît 
huit  à  dix  espèces  ,  dont  l'une  croît  naturellement  en  Europe. 
Ce  sera  particulièrement  de  celle-ci  que  nous  traiterons 
dans  cet  article  ,  et  nous  ne  dirons  que  quelques  mots  des 
espèces  exotiques. 

If  baccifère  ou  If  commun:  Taxus  laecifara,  Linn.,  Spec, 
1472  ;  Nouv.  Duham.,  1  ,  pag.  .61  3  tab»  19;  Blackw. ,  Herb. , 
tab.  672.  Cette  espèce  est  un  arbre  dont  la  tige,  cylindrique 
et  très-droite,  s'élève  à  trente  ou  quarante  pieds  de  hauteur, 
pu  un  peu  plus,  en  se  partageant  latéralement  en  branches 
nombreuses,  presque  verticillées,  dont  les  dernières  ramifi- 
cations sont  garnies  de  feuilles  linéaires,  d'un  vert  foncé, 
trçs-rapprocliées  les  unes  des  autres  ,  et  disposées  de  deux 
côtés   opposés.    Les  fleurs  sont  axillaires,  sessiles,  monoïques 


4  IF 

ou  dioïques,  rouseàtres;  les  mâles  très-nombreuses,  et  les  fer 
melles  plus  rares.  Les  fruits  sont  de  petites  noix  ovoïdes  , 
contenant  une  amande  oléagineuse,  et  aux  trois  quarts  en- 
veloppées pur  le  réceptacle,  qui  a  pris  de  Taccroissement,  est 
devenu  pulpeux,  duii  rouge  vif  et  a  presque  la  forme  d'une 
haie,  d'où  l'on  donne  souvent  le  nom  de  baies  à  ces  fruits. 
L'if  croit  naturellement  dans  les  lieux  secs  et  froids  des 
montagnes  de  la  France  et  de  lEurope  ,  dans  le  nord  de  l'A- 
sie et  dans  le  Canada. 

L'histoire  de  l'if  présente  beaucoup  de  contradictions,  quand 
on  recherche  ce  que  les  divers  auteurs  ont  écrit  sur  ses  pro- 
priétés les  uns  n'en  ont  parlé  que  comme  d'un  arbre  dont 
toutes  les  parties  étoient  mal-faisantes  ;  les  autres,  au  con- 
traire, ont  prétendu  qu'il  n'avoit  pas  de  qualités  nuisibles. 
Théophraste,  le  plus  ancien  auteur  dans  leqiicl  il  soit  ques- 
tion de  l'if,  dit  que  ses  feuilles  sont  un  poison  pour  les  che- 
vaux,  mais  que  les  ruminans  peuvent  en  manger  sans  en 
éprouver  aucun  mal;  et  il  ajoute  que  ses  fruits,  mangés  par 
les  hommes ,  ne  leur  font  de  même  aucun  mal. 

Les  Gaulois  ,  d'après  le  témoignage  de  Strabon ,  em- 
ployoient  le  suc  de  l'if  pour  empoisonner  leurs  flèches  , 
et  César,  dans  ses  Commentaires  {de  heîlo  gallico ,  lib.  VI), 
rapporte  que  Cativulcus,  roi  des  Éburoniens ,  se  servit  de 
ce  même  suc  pour  s'empoisonner. 

S'il  faut  en  croire  Plutarque ,  l'if  est  surtout  mal -faisant 
pendant  qu'il  est  en  fleur;  et  c'est,  sans  doute,  parce  que 
Virgile  croyoit  aux  dangereuses  émanations  de  cet  arbre 
pendant  sa  floraison  .  qu'il  le  dit  nuisible  aux  abeilles  et  qu'il 
ne  veut  pas  qu'on  en  plante  près  des  maisons. 

Sic  tua  Cyrneas  fugiant  examina  taxas. 
Eclog.  IX  ,  vers.  3o. 

I^e  pioprius  îectis  taxum  sine  .... 

Georg.,  lib.  IV,  vers.  47- 

Lucrèce  fait  aussi  allusion  aux  dangereuses  propriétés  de 
l'if  dans  les  deux  vers  suivans: 

Est  etiam  magnis  Hcliconis  mo/itibus  arbor  ^ 
Fions  odore  homitiem  tetrg  coiisueia  necare. 


ÎF  5 

Dioscoride  confirme  tout  ce  que  nous  avons  rapporté  jus- 
qu'à présent  des  propriétés  mal-faisantes  de  l'if:  selon  lui ,  les 
fruits  de  cet  arbre  donnent  le  flux  de  ventre  aux  hommes  , 
et  il  ajoute  que,  dans  la  Caule  N.-^rbonnoise  surtout,  il  recèle 
un  venin  si  délétère  que  son  ombrage  suffit  pour  rendre  ma- 
lades ceux  qui  se  reposent  ou  s'endorment  dessous ,  et  que 
même  on  a  en  des  exemples  de  personnes  qui  avoient  péri  par 
le  seul  effet  des  émanations  reçues  de  cette  manière. 

Pline  dit  que  l'aspect  de  l'if  est  triste  et  de  mauvais  au- 
gure,  et  il  renchérit  encore  sur  les  mauvaises  qualités  que 
lui  attribue  Dioscoride:  car  il  assure  d'une  manière  positive 
que  ses  fruits  sont  vénéneux,  surtout  en  Espagne  ,  et  que  le 
bois  partage  ces  mêmes  qualités  délétères  ,  des  personnes  étant 
mortes  pour  avoir  bu  du  vin  qui  avoit  été  renfermé  dans  des 
tonneaux  de  bois  d'if.  Il  ajoute  d'ailleurs  que  quelques  au- 
teurs ont  prétendu  que  les  poisons  qui  servent  à  empoison- 
ner les  flèches  avoient  d'abord  é;é  appelés  taxica,  du  nom 
latin  de  l'if,  taxas ,  et  que  ce  n'est  que  par  la  suite  que  cette 
dénomination  fut  changée  en  celle  de  toxica.  Cette  dernière 
assertion  de  Pline  a  été  réfutée  par  plusieurs  comuienfateurs, 
qui  se  fondent,  avec  raison,  sur  ce  que  Dioscoride  emploie 
le  mot  rc^mov  1  pour  signifier  venin  ou  poison,  non  comme 
dérivé  du  latin,  mais  comme  emprunté  aux  Barbares  qui 
ont  coutume  d'empoisonner  leurs  flèches  et  qui  les  nomment 
toxa. 

En  suivant  l'histoire  de  lif  des  auteurs  anciens  dans  les 
modernes,  Matthiole  nous  apprend  qu'il  a  traité  des  bergers 
et  des  bûcherons  attaqués  de  fièvres  ardentes  pour  avoir 
mangé  des  fruits  d'if.  J.  Bauhin  rapporte  que  des  chevaux 
et  animaux  domestiques  sont  morts  après  en  avoir  brouté  les 
feuilles.  Le  jésuite  Schott  dit  que  ces  mêmes  feuilles,  jetées 
dans  des  eaux  dormantes  où  il  y  a  des  poissons,  les  étour- 
dissent et  les  engourdissent  au  poiiit  qu'on  peut  ensuite  les 
prendre  à  la  main.  Rai  confirme  aussi  ce  que  les  anciens  ont 
dit  des  dangereuses  émanations  de  l'if,  en  rapportant  que 
les  jardiniers  qui  étoient  chargés  de  tondre  un  if  très-touffu 
dans  le  jardin  de  Pise  ,  ne  pouvoient  résister  plus  d'une  demi- 
heure  de  suite  à  ce  travail,  et  qu'ils  étoient  empêchés  de  le 
continuer  par  les  violentes  douleurs  de  tête  qu'ils  ressentoient. 


IF 

On  est  très-persuadé  en  Normandie,  où  Ton  trouve  Tif  com- 
munément, que  ses  feuilles  et  même  son  bois  sont  vénéneux-, 
et  on  y  raconte  une  histoire  de  deux  curés  morts  subitement 
dans  une  chambre  lambrissée  en  if,  et  que  leur  successeur 
ne  put  habiter  sans  danger  qu'après  en  avoir  fait  enlever  la 
fatale  boiserie. 

Malgré  (ous  les  témoignages  que  nous  venons  de  citer,  quel- 
ques auteurs  n'ont  pas  craint  d'être  d'un  sentiment  contraire 
et  de  révoquer  en  doute  les  propriétés  mal-faisantes  de  Tif. 
Ainsi  ,  Suétone  .  parmi  les  anciens,  rapporte  que  l'empereur 
Claude  fit  publier  que  le  suc  des  fruits  de  cet  arbre  étoit 
l'antidote  du  venin  de  la  vipère;  et,  parmi  les  modernes, 
Lobel,  Gbnlitsch  ,  le  continuateur  delà  Matière  médicale  de 
Geoffroy  ,  et  BuUiard  ,  se  sont  prononcés  affirmativement 
pour  l'innocuité  de  ces  fruits,  et  Pena  ,  Daléchamps  et  Gérard 
ont  assuré,  le  dernier  surtout,  après  en  avoir  fait  l'expé- 
rience lui-même,  qu'on  pouvoit  impunément  s'endormir  à 
l'ombre  de  Tif. 

M.  Rêver,  dont  nous  parlerons  encore  plus  bas,  m'a  fait 
assurer  que  c'étoit  chez,  lui-même  qTi'étolt  arrivée  l'histoire 
des  curés  dont  on  attribue  la  mort  à  une  poutre  d'if  qui  se  trou- 
voit  dans  leur  chambre;  mais  qu'ayant  eu  occasion  d'habiter 
cette  même  chambre,  au  lieu  de  faire  retirer  la  poutre,  il 
en  brava  l'influence,  en  plaçant  son  lit  sans  rideaux  sous  cette 
même  pièce  de  bois ,  et  que  non-seulement  il  n'en  mourut  pas 
subitement,  comme  ses  prédécesseurs,  mais  encore  qu'il  se 
porte  bien  à  présent,   plus  de  trente  ans  après. 

Il  seroit  difficile,  d'après  ces  autorités  nombreuses  et  con- 
tradictoires, de  se  prononcer  pour  ou  contre  ce  qu'on  doit 
définitivement  penser  des  bonnes  ou  mauvaises  qualités  de 
l'if,  si  les  expériences  positives  qui  ont  été  faites,  dans  ces 
derniers  temps,  sur  les  différentes  parties  de  cet  arbre,  ne 
nous  mettoient  à  même  de  l'apprécier  maintenant  d'une  ma- 
nière plus  certaine. 

M.   Percy,  qui  a   été  chirurgien    en  chef  des  armées,    et  . 
qui    est   aujourd'hui   membre    de    l'Académie    françoise  ,   a 
fait,  il  y  a  trente  et  quelques  années,  des  observations  sui- 
vies sur  l'emploi  des  fruits  de  l'if  à  l'intérieur,   et  il   s'est 
assuré  qu'ils  étoient  adoucissans,  diurétiques  cf  laxatifs  :  qu'il 


IF  n 

faudroit  en  prendre  une  grande  quantité  pour  qu'ils  pussent 
produire  un  flux  de  ventre  abondant,  mais,  d'ailleurs,  sans 
danger. 

A  peu  prés  dans  le  même  temps  que  M.  Percy ,  M.  Har- 
mand  de  Montgarny  a  fait  connoître  les  expériences  qu'il 
avoit  faites  avec  l'extrait  et  la  poudre  de  feuilles  ou  de  l'é- 
corce  de  l'if;  et,  d'après  ses  expériences,  ces  préparations, 
quand  elles  étoient  portées  à  des  doses  un  peu  fortes  ,  comme 
douze  grains  pour  l'extrait  et  deux  gros  pour  la  poudre  , 
ont  causé  divers  accidens,  tels  que  la  diarrhée  ,  des  nausées, 
des  vomissemens,  des  vertiges,  un  assoupissement,  un  en- 
gourdissement plus  ou  moins  long,  avec  la  rigidité  des  ex_ 
trémités. 

Le  même  rapporte  qu'il  périt  une  grande  partie  de  pois- 
sons dans  un  canal  où  l'on  avoit  jeté  des  racines  d'if,  et  que 
des  gens  qui  mangèrent  de  ce  poisson  empoisonné,  eurent, 
pendant  plusieurs  jours,  un  dévoiement  copieux,  accom- 
pagné de  coliques.  Deux  faits  encore  ,  rapportés  par  le 
même  M.  de  Montgarny  ,  tendent  aussi  à  faire  croire  que 
les  vapeurs  qui  s'échappent  de  l'if  sont  véritablement  narco- 
tiques. Un  chien  tomboit  dans  une  sorte  d'assoupissement  lé- 
thargique qui  duroit  plusieurs  heures,  toutes  les  fois  qu'il 
s'endormoit  sous  un  if  très-toulTu  ;  et  une  fille  de  vingt-six 
ans  s'étant  endormie  un  soir  sous  le  même  arbre  ,  elle  de- 
meura, pendant  deux  jours,   dans  une  sorte  d'ivresse. 

Le  docteur  H.  Perceval ,  de  Manchester,  rapporte,  dans  la 
Bibliothèque  britannique  de  Juillet  1808,  plusieurs  observa- 
tions qui  prouvent  l'effet  vénéneux  des  feuilles  de  l'if,  et 
d'après  lesquelles  il  paroit  que  ces  feuilles  sont  beaucoup 
plus  mal-faisantes  lorsqu'elles  sont  fraîches  que  lorsqu'elles 
sont  desséchées.  Plusieurs  animaux  sont  morts  après  qu'on 
leur  en  eut  fait  prendre  le  suc  exprimé  pendant  qu'elles 
étoient  dans  le  premier  état. 

Enfin,  on  peut  conclure  des  expériences  récentes  rappor- 
tées ou  faites  par  M.  le  docteur  Orfila,  que  le  suc  retiré 
des  feuilles  d'if ,  ou  l'extrait  qu'on  en  peut  préparer,  sont 
vénéneux.  Environ  neuf  gros  du  premier,  qu'on  a  fait  avaler 
à  un  petit  chien,  lui  ont  donné  la  mort:  et  un  autre  animal 
de  la  même  espèce  et  de  moyenne  taille  a  également  suc- 


8  IF 

combé,  quelques  heures  après  lïnjection  dans  la  veine  jugu- 
laire de  quarante  grains  de  l'extrait  aqueux  des  feuilles,  dis- 
sous dans  une  demi-once  d'eau. 

Pour  résumer  tout  ce  que  nous  avons  dit  jusqu'à  présent 
sur  les  propriétés  de  l'if,  nous  croyons  que  les  expériences 
des  modernes  confirment  assez  ce  que  les  anciens  avoient  dit 
contre  cet  arbre,  pour  qu'on  doive  le  ranger  au  nombre  des 
espèces  végétales  suspectes  et  mal-faisantes. 

Point  de  doute  que  le  suc  des  feuilles  et  leur  extrait  ne  soient 
vénéneux  à  une  dose  un  peu  forte ,  et  que  dans  les  pays  plus 
chauds  que  le  nord  de  la  France  et  l'Angleterre,  comme  en 
Grèce,  en  Italie,  en  Espagne,  ce  suc  ne  puisse  être  encore 
plus  délétère  ;  et  que  l'ombre  des  ifs,  qui,  le  plus  souvent, 
n'a  fait  éprouver  aucun  mal  à  ceux  qui  s'y  étoient  exposés 
dans  notre  pays  ou  en  Angleterre  ,  peut  très-bien  ,  dans  des 
climats  plus  méridionaux,  avoir  causé  des  assoupissemens  lé- 
thargiques, qui  quelquefois  même  auront  été  suivis  de  la 
mort. 

Quant  aux  fruits  de  l'if,  ils  paroissent  être  exempts  des 
mauvaises  qualités  propres  aux  feuilles,  au  bois  et  àl'écorce, 
et  leur  pulpe  devient  seulemenl  laxative  lorsque  ,  comme 
celle  de  beaucoup  d'autres  fruits  ,  elle  est  prise  en  trop 
grande  quantité.  L'amande  contenue  dans  la  petite  noix, 
qui  est  le  véritable  fruit  de  l'if,  a  une  saveur  agréable,  ana- 
logue à  celle  de  la  noisette  :  elle  fournit  par  expression  une 
huile  qu'on  peut  employer  pour  l'assaisonnement  des  alimens 
et  autres  usages  économiques;  mais  on  n'est  pas  dans  l'habi- 
tude de  faire  l'extraction  de  cette  huile. 

Le  bois  d'if  est  d'un  rouge  brun,  plus  ou  moins  veiné  : 
c'est  le  plus  pesant  des  bois  de  l'Europe  après  le  buis;  le  pied 
cube  pèse,  vert,  quatre-vingts  livres  neuf  onces,  et  lorsqu'il 
est  parfaitement  sec,  soixante -une  livres  sept  à  huit  onces. 
Il  est  très- dur  et  presque  incorruptible;  il  a  le  grain  fin, 
serré ,  se  travaille  facilement  et  est  susceptible  de  recevoir 
un  très-beau  poli.  Varennes  de  Fenille  a  trouvé  le  moyen 
de  lui  donner  une  couleur  d'un  pourpre  violet  assez  vif,  qui  le 
rapproche  beaucoup  de  la  beauté  de  certainsbois  des  Indes.  Ce 
moyen  consiste  à  en  faire  immerger  des  tablettes  très-minces 
dans  l'eau  d'unl)assin  pendant  quelques  mois:  cela  développe 


IF  9 

sa  partie  colorante  au  point  qu'elle  pénètre  tout  le  bois  assez 
profondément  pour  que  Foulil  ne  l'enlève  pas  dans  le  travail 
qui  suit  le  placage.  Cette  opération  réussit  encore  plus  promp- 
tement  lorsque  le  bois  a  toute  sa  sève  au  moment  où  il  est 
plongé  dans  l'eau. 

Les  menuisiers,  les  ébénistes,  les  luthiers,  les  tourneurs, 
recherchent  le  bois  d'if;  il  est  excellent  pour  tous  les  ou- 
vrages qui  exigent  de  la  force  et  de  la  durée.  On  l'em- 
ploie pour  les  vis,  les  dents  d'engrenage  des  roues  de  mou- 
lins ,  les  essieux  de  voitures.  On  en  fait  de  très-beaux 
meubles  ,  des  vases  ,  des  tabatières ,  des  étuis  ;  on  en  a  vu  des 
ouvrages  de  marqueterie  et  de  sculpture  conservés  sans  au- 
cune vermoulure  ,  quoiqu'ils  fussent  faits  depuis  plus  de  cinq 
cents  ans.  Les  anciens  se  servoient  de  ses  branches  pour  faire 
des  arcs,  parce  que  son  bois  joint  aux  autres  qualités  dont 
nous  avons  déjà  parlé,  une  grande  élasticité.  Virgile  a  dit, 
en  parlant  de  cet  usage  , 

Ityrceos  taxi  torquenfur  in  arciis. 

Gcorf?.,  lib.    II,  V.  448. 

Aujourd'hui,  les  habitans  des  Alpes  font,  avec  les  branches 
de  cet  arbre,  des  cercles  et  des  échalas  qui  durent  très-long- 
temps. Pallas  dit  qu'en  Colchide  et  en  Géorgie  qw  se  sert 
aussi  de  ces  échalas  pour  les  vignes,  et  qu'ils  sont  presque 
incorruptibles. 

Chez  les  Romains  ,  l'if  étoit  regardé,  ainsi  que  nous  l'avons 
dit  plus  haut,  comme  un  arbre  triste  et  de  mauvais  augure, 
et  ses  rameaux  servoient  à  faire  des  couronnes  pour  les  cé- 
rémonies lugubres  ;  c'est  à  quoi  Statius  fait  allusion  dans  les 
vei's  suivans  : 

En  iaxea  marcef 

Sylva  comis ,  hilaresque  hederas  plorata  cupressus 
Excluait  ramis. 

La  verdure  continuelle  de  l'if  a  été  regardée  comme  un 
symbole  de  l'immortalité  ;  elle  Tavoit  fait  consacrer  chez  nos 
ancêtres  aux  plantations  dans  les  cimetières  :  aujourd'hui  le 
cyprès  est  plus  particulièrement  destiné  à  ombrager  les  tom- 
beaux ;  cependant,  dans  quelques  cantons  de  la  Suisse,  en 
Angleterre  et  surtout  en  Ecosse ,  on  a  conservé  l'usage  de 
placer  des  ifs  dans  les  cimetières. 


Il  y  a  cent  ans  et  plus,  l'if  étoit  très -multiplié  dans  les 
parcs  et  dans  les  grands  jardins  d'agrément  :  docile  à  la  taille  , 
il  prenoit,  sous  les  ciseaux  du  jardinier,  toutes  les  formes 
qu'on  vouloit  lui  donner.  Le  plus  souvent  on  le  tailloit  en 
boules,  en  pyramides  ,  en  palissades  ,  en  portiques  disposés 
avec  symétrie  dans  les  allées  des  parcs  et  des  parterres;  il  fut 
même  un  temps  où  on  lui  faisoit  prendre  les  formes  les  plus 
bizarres  et  les  plus  fantastiques.  On  a  vu  des  ifs  taillés  de 
manière  à  représenter  des  saints  et  des  anges,  des  dieux  et 
des  héros  de  la  fable,  quelquefois  des  animaux  et  des  vases. 
Aujourd'hui  la  mode  ridicule  de  défigurer  l'if  est  passée,  de- 
puis que  les  jardins  paysagers,  dits  jardins  anglois,  sont  de- 
venus le  goût  dominant.  Dans  ces  derniers,  on  ne  donne 
plus  de  plsce  qu'à  un  petit  nombre  de  ces  arbres,  que  l'on 
groupe  avec  les  autres  arbres  verts ,  en  les  laissant  croître  en 
liberté. 

L'if  se  multiplie  de  graines,  de  boutures  et  de  marcottes. 
Le  premier  moyen  est  préférable,  parce  que  les  arbres  qui 
en  proviennent  s'élèvent  plus  droits  et  forment  une  tête  plus 
touffue  et  plus  régulière.  Ceux,  au  contraire,  qui  sont  ve- 
nus de  boutures  ou  de  marcottes,  sont  sujets  à  se  courber 
d'un  côté  ou  de  l'autre,  et  ne  sont  jamais  aussi  vigoureux. 

Il  faut  semer  les  graines  de  l'if  avec  la  pulpe  qui  les  en- 
toure et  aussitôt  qu'elles  sont  mûres  ;  lorsqu'on  attend  au 
printemps,  elles  ne  germent  que  l'année  d'après.  On  sème 
dans  un  terrain  exposé  au  nord,  un  peu  ombragé,  et  on 
recouvre  les  graines  d'un  demi-pouce  de  terreau  de  bruyère. 
Toutes  les  graines  ne  lèvent  pas  la  première  année;  il  y  en 
a  qui  ne  poussent  que  la  deuxième  et  même  la  troisième. 
A  la.  fin  de  l'automne  de  la  deuxième  année  du  semis,  on 
peut  mettre  les  jeunes  ifs  en  pépinière,  jusqu'à  ce  qu'on  les 
place  à  demeure,  ce  que  l'on  peut  faire  depuis  l'âge  de 
quatre  jusqu'à  six  ans. 

L'if  n'est  point  délicat  :  il  s'accommode  de  presque  toutes 
les  espèces  de  terrains;  mais  il  se  plaît  mieux  à  l'ombre  qu'au 
grand  soleil.  Il  craint  peu  le  froid  .  et  depuis  l'hiver  de  1709, 
le  plus  rigoureux  dont  on  ait  mémoire  en  France  et  qui  en 
a  endommagé  plusieurs ,  on  en  a  rarement  vu  qui  aient  été 
maltraités  par  le  froid. 


IF 

L'if  vit  très -long -temps  et  acquiert  avec  les  années  une 
grosseur  coiossale.  Il  existe,  dans  le  département  de  l'Eure , 
plusieurs  ifs  remarquables  par  leur  grosseur  et  leur  vétusté. 
M.  Rêver,  correspondant  de  l'Académie  des  inscriptions  et 
belles-lettres  de  Rouen,  rapporte  (dans  un  ouvrage  ayant 
pour  titre  :  Voyage  des  élèves  de  l'école  centrale  d'Evreux 
dans  le  département  de  l'Eure)  que  l'on  voit  dans  la  com- 
mune de  FouUebec,  à  deux  lieues  de  Pont-Audemer ,  un  de 
ces  arbres  qui  a  vingt- un  pieds  de  pourtour.  Sa  grosseur 
prodigieuse  et  sa  solidité  extraordinaire  suffisent  pour  sou- 
tenir le  chœur  de  l'église  à  laquelle  il  est  adossé  ,  et  qui 
s'écrouleroit  dans  un  profond  ravin  si  l'arbre  ne  lui  prêtoit 
pas  son  appui.  .  .  .  Dans  le  feuillage  de  ce  vieux  if  nichent 
une  foule  d'oiseaux,  tels  que  fauvettes,  merles  et  grives, 
qui  dévorent  avec  avidité  les  baies  extrêmement  douces  que 
l'arbre  produit  encore  en  abondance. 

M.  Le  Prévost,  membre  de  l'Académie  de  Rouen,  qui  cul- 
tive avec  succès  les  sciences  naturelles,  et  qui  en  mtme 
temps  s'occupe  beaucoup  des  antiquités  et  des  choses  cu- 
rieuses qu'on  trouve  dans  la  ci-devant  Normandie,  en  m"an- 
nonçant  que  l'if  de  Foullebec  existe  encore  aujourd'hui,  à 
peu  près  tel  qu'il  a  été  décrit,  il  y  a  quelques  années,  par 
M.  Rêver,  m'écrit  que  l'if  est  indigène  dans  plusieurs  loca- 
lités du  département  de  l'Eure,  et  qu'on  voit  dans  le  cime- 
tière de  Boisney,  arrondissement  de  Bernay ,  deux  de  ces 
arbres  placés  à  quelques  pas  de  distance,  dont  l'un  a  vingt 
et  l'autre  seize  pieds  de  tour  ,  et  qu'il  n'est  pas  rare  d'en 
trouver  de  dimensions  à  peu  près  analogues  dans  le  même 
département. 

Mais  ces  ifs  de  l'ancienne  Normandie  paroîtront  beaucoup 
moins  étonnans  quand  on  saura  qu'il  en  existe  un  à  Fortin- 
gall,  en  Ecosse,  dont  la  grosseur  a  beaucoup  plus  du  double. 
Dans  ce  pays,  assure-t-on ,  on  montre  aux  voyageurs  un  if 
qui  a  cinquante-trois  pieds  (mesure  angloise)  de  circonfé- 
rence. Il  est  maintenant  ouvert  et  en  assez  mauvais  état  ;  un 
cimetière  est  à  côté  :  les  processions  funèbres  passent  par 
l'ouverture  du  tronc.  Quelques-unes  de  ses  branches  sont 
encore  vertes ,  et  beaucoup  de  voyageurs  en  emportent  des 
morceauxj   comme  des  reliques. 


IF 

Ce^  arbres  doivent  êfre  fort  âgés,  car  l'if  croît  très-lente- 
ment :  on  a  compté  cent  cinquante  couches  annuelles  sur  un 
tronc  qui  n'avoit  que  treize  pouces  de  diamètre,  et  deux 
cent  quatre-vingts  sur  un  autre  qui,  mesuré  de  même,  n'avoit 
que  vingt  pouces;  ce  qui  ne  suppose  guère  plus  de  cinq  pieds 
de  circonféiencc  pour  un  arbre  de  deux  cent  quatre-vingts 
ans;  et  en  prenant  ce  dernier  pour  terme  de  comparaison, 
rif  de  Foullebec  auroit  onze  à  douze  cents  ans  d'ancienneté, 
et  celui  de  Fortingall  en  auroit  peut-être  près  de  trois  mille. 
On  aura  peine  à  croire  que  ces  arbres  puissent  dater  d'une 
antiquité  aussi  reculée,  et  il  est  possible  d'ailleurs  que  la 
nature  du  terrain  et  la  vigueur  particulière  à  certains  in- 
dividus hâtent  quelquefois  ieur  croissance  :  ainsi,  parmi  plu- 
sieurs ifs  qui  ex'stent  au  Jarclin  du  Roi  à  Paris,  au  lieu  ap- 
pelé les  petites  Buttes  ,  et  qui  ptissent  pour  avoir  été  plantés 
peu  après  rétablissement  de  ce  jardin,  en  i635,  ce  qui  leur 
donne  environ  cent  quatre-vingts  ans  d'âge,  le  plus  gros 
de  ces  arbres,  mesuré  à  hauteur  d'homme,  a  cinq  pieds 
deux  pouces  de  circonférence.  En  supputant  l'âge  des  ifs 
de  Foullebec  et  de  Forting;ill  d'après  celui  du  Jardin  du  Roi, 
le  premier  auroit  environ  huit  cents  et  le  second  dix- huit 
cents  à   deux  mille  ans. 

Jusqu'à  présent  il  n'a  été  question  que  de  l'if  commun; 
il  nous  reste  à  parler  des  espèces  exotiques  qui  sont  culti- 
vées maintenant  dans  nos  jardins. 

If  nucifëre  :  Taxas  nucifera  ,  Linn. ,  Spec.  1472;  Gaertn., 
Fruct.,  fab.  91  ,  fig.  6.  C'est  un  arbre  élevé,  branchu,  à  feuil- 
lage élégant,  consistant  en  feuilles  deux  fois  ailées,  ressem- 
blant à  de  petits  rameaux,  et  composées  d'une  grande  quan- 
tité de  folioles  linéaires  ,  alternes,  presque  imbriquées,  d'un 
vert  glauque.  Ses  fruits  sont  des  noix  ovales-aiguës,  lisses, 
de  la  grosseur  d'une  olive  ,  entourées  d'une  pulpe  verdâtre, 
fibreuse,  et  contenant  une  amande  oléagineuse.  Cette  espèce 
croît  naturellement  au  Japon.  Dans  ce  pays,  on  mange  les 
amandes  de  ses  fruits,  que  l'on  préfère  lorsqu'elles  sont  sè- 
ches, parce  qu'elles  sont  moins  âpres  et  meilleures  que  fraî- 
ches. On  en  relire  par  expression  une  huile  dont  on  fait 
usage  dans  les  cuisines.  L'if  nucifère  pourra  passer  l'hiver 
en  pleine  terre  dans  nos  départemens  du  midi;  à  Paris  et 


IFL  i5 

dans  le  nord  ,  il  faut  le  rentrer  dans  l'orangerie  pendant  l'hi- 
ver. Comme  il  ne  fructifie  pas,  on  le  multiplie  de  marcottes 
et  de  boutures. 

If  verïicillé  :  Taxus  verticillata,  Thunb.,  Flor.  Jap.,  276; 
Lamk. ,  Dict.  encycl. ,  tom.  5  ,  pag.  aSo.  Arbre  de  quinze  à 
vingt  pieds  ,  dont  les  rameaux  nombreux  ,  serrés  et  plus 
courts  à  mesure  qu'ils  approchent  du  sommet,  forment  une 
cime  touffue,  conique,  n  peu  près  semblable  à  celle  du  cy- 
près. Ses  feuilles  sont  linéaires,  obtuses,  arquées  en  faux, 
glabres,  vertes  et  convexes  en-dessus,  pâles  et  concaves  en- 
dessous,  avec  deux  lignes  saillantes.  Les  ('euilles  sont  de  la 
longueur  du  doigt,  sessiles  et  verticillées  environ  huit  en- 
semble. 

Cette  espèce  croît  naturellement  au  Japon  ;  nous  ne  la 
possédons  en  France  que  depuis  quatre  ans.  On  dit  qu'en 
Angleterre  on  la  cultive  en  pleine  terre.  Comme  elle  est 
encore  fort  rare,  on  la  rentre  dans  l'orangerie  pendant  l'hi- 
ver. Elle  peut  se  multiplier  de  boutures.  Au  Japon,  on  se 
sert  de  son  bois,  qui  est  blanc,  léger  et  durable,  pour  faire 
des  boites,  des  coffrets  et  autres  petits  ustensiles;  plongé 
dans  l'eau  chaude,  il  exhale  une  odeur  agréable.  Voyez  Hi. 
(L.  D.) 

IF  (ConchyL),  nom  vulgaire  d'une  espèce  de  cérite,  C. 
aculeatum ,  Murex  aculeatus.  (De  B.) 

IFLOGE,  I/loga.  (Bot.)  [Corymbifères ,  Juss.  =  Syngénésie 
polygamie  superflue,  Linn.  ]  Ce  genre  de  plantes,  que  nous 
avons  proposé  dans  le  Bulletin  des  sciences  de  Septembre 
1819,  appartient  à  l'ordre  des  s^nanthérées ,  à  notre  tribu 
naturelle  des  inulées  ,  et  à  la  section  des  inulées-gi'abhaliées. 
Voici  les  caractères  génériques  que  nous  avons  observés  sur 
des  échantillons  secs,  dans  les  hei'biers  de  MM.  Desfontaines 
et  de  Jussieu. 

Calathide  subcylindracée,  discoïde  :  disque  pîuriflorc ,  ré- 
gulariflore,androgyninore  ;  couronne  pluriseriée,  tubuliflore, 
féminiflore.  Péricline  un  peu  supérieur  aux  fleurs,  formé  de 
squames  subunisériées ,  à  peu  près  égales,  appliquées,  con-. 
caves,  ovales-lancéolées,  acuminées  ,  coriaces-scarieuses , 
dorées,  inappendiculées.  Clinanthe  cylindrique,  court,  inap- 
pendiculé  au  sommet  qui  est  occupé  par  le  disque ,  et  garni 


^4  IFL 

du  reste  de  squameiles  imbriquées  ,  un  peu  supérieures 
aux  fleurs,  et  absolument  semblables  aux  squames  du  péri- 
cline.  Ovaires  oblongs,  glabres;  aigrettes  du  disque  compo- 
sées de  squamellules  unisériées  ,  égales,  caduques,  filiformes, 
nues  inférieurement  et  barbellées  supérieurement;  aigrettes 
de  la  couronne  nulles.  Corolles  de  la  couronne  tubuleuses, 
longues  ,  grêles  ,  filiformes. 

Les  calathides,  rapprochées  pour  la  plupart  en  capitules 
très- irréguliers,  sont  séparées  les  unes  des  autres  par  des 
bractées. 

Ifloge  de  Desfontaines  :  Tjloga  Fontanesii ,  H.  Cass.  ;  Gna-' 
phalium  caulijlorum  ,  Desf. ,  Flor.  Atl.,  tom.  II,  pag.  267.  C'est 
une  plante  herbacée,  annuelle,  tomenteuse  ,  blanchâtre, 
longue  d'un  à  trois  pouces  :  sa  racine  est  longue,  perpendi- 
culaire, filiforme,  tortueuse;  la  tige  se  divise  à  sa  base  en 
plusieurs  rameaux  simples,  filiformes,  ceux  du  centre  dres- 
sés, les  extérieurs  couchés  à  leur  base;  les  feuilles  sont  alter- 
nes ,  longues  de  six  à  huit  lignes ,  subulées  ;  les  calathides  sont 
petites,  sessiles,  axillaires  et  terminales,  éparses  tout  le  long 
delà  tige.  Cette  plante  a  été  trouvée  par  M.  Desfontaines, 
dans  les  sables  du  désert,  près  Elhamraah ,  en  Barbarie,  où 
elle  fleurit  en  hiver. 

Vifloga  ne  peut  être  convenablement  attribué,  ni  au  genre 
Gnaphalium,  danslequel  on  Ta  confondu  jusqu'à  présent,  ni  à 
notre  genre  Gifola ,  auquel  on  pourroit  être  tenté  de  le  rap- 
porter d'après  nos  observations  sur  ses  caractères  génériques, 
et  il  doit  constituer  indubitablement  un  genre  particulier. 
En  efi'et,  il  diffère  du  gnaphalium  par  le  clinanthe  squamelli- 
fère ,  et  par  l'aigrette  plumeuse  dans  le  disque,  nulle  dans 
la  couronne;  il  diffère  du  gifola  par  l'aigrette  plumeuse, 
ainsi  que  par  les  squames  et  les  squameiles  scarieuses  et  colo- 
rées. (Voyez  nos  articles  Gifole  ,  tom.  XVIII,  pag.  55i,  et 
Gnaphale,  tom.  XIX,  pag.  11 5.) 

Les  squames  du  péricline  et  les  squameiles  du  clinanthe 
sont,  chez  toutes  les  synanthérées ,  des  bractées  de  la  même 
nature  et  attachées  sur  le  même  axe.  Le  seul  moyen  de  les 
dis  ingtier  méthodiquement  dans  tous  les  cas,  est  d'attribuci' 
au  péricline  les  bractées  qui  se  trouvent  placées  en  dehors 
ou  au -dessous  des  fleurs  les  plus  extérieures  delà  calathide, 


IGI  i5 

et  d'attribuer  au  clinanthe  les  bractées  qui  se  trouvent 
placées  en  dedans  ou  au-dessus  de  ces  mêmes  fleurs  :  c'est 
pourquoi  nous  disons  que  ^ifloga  a  un  péricline  unisérié,  et 
un  clinanthe  squaniellifère.  Les  botanistes  qui  n'adoptent  pas 
la  règle  dont  il  s'agit,  devront  dire  que  le  péricîine  est  for- 
mé de  squames  imbriquées,  entre  lesquelles  sont  cachées  les 
fleurs  femelles,  et  que  le  clinanthe  portant  les  fleurs  herma- 
phrodites est  nu.  Cette  méthode  de  description  est  sans 
doute  plus  commode  et  plus  conforme  aux  apparences  exté- 
rieures ;  mais  elle  nous  paroît  moins  exacte  et  moins  régu- 
lière que  la  nôtre.  (H.  Cass.) 

IFVETEAU.  (Bot.)  Dans  quelques  cantons  on  donne  ce 
nom  à  rif  commun,  ou  à  un  ieune  if.  (  L.  D.  ) 

IGARSOK.  (Ichtlijol.)  Au  Groenland ,  on  appelle  ainsi  le 
cotte   quatre -cornes.  Voyez  Cotte.  (H.  C.) 

IGCIEGA.  [Bot.)  Dans  le  Recueil  abrégé  des  voyages  il  est 
question  d'un  arbre  de  ce  nom  dans  le  lirrsil  ,  menlionné 
anciennement  par  de  Laet ,  qui  laisse  suinter  de  son  écorce 
une  espèce  de  résine  ou  d'encens  ,  utile  en  application  sur 
les  parties  affectées  d'humeurs  froides  ,  et  que  l'on  regarde 
comme  une  espèce  de  mastic.  Un  autre  arbre  nommé  iVfaigcica, 
c'est-à-dire ,  mastic  pierreux  ,  donne  une  résine  si  dure  et 
si  transparente  ,  qu'on  la  prendroit  pour  du  verre.  Il  paroît 
que  ces  arbres  sont  les  mêmes  que  Vicicariba,  qui  fournit  la 
résine  Icica.  Voyez  ces  mots.  (J.  ) 

IGE,  IGI.  (Bot.)  Voyez  Ibara.  (J.) 

IGEL  (Mamm.),  nom  allemand  de  notre  hérisson.  (F.  C) 

IGEL-KOTT  [Mamm.],  nom  que  les  Suédois  donnent  avi 
hérisson.  (F.  C.) 

IGGLING.  (Ichthjol.)  En  Dalécarlie,  on  a  donné  ce  nom 
au  cjprinus  apJi^a  de  Linnœus.  Voyez  Kime.  (H.  C.) 

IGHUCAMICI.  {Bot.)  Dans  le  Recueil  abrégé  des  voyages 
il  est  question  d'un  arbre  de  ce  nom  qui  se  trouve  aux  en- 
virons de  Saint- Vincent ,  dans  le  Brésil,  dont  le  fruit,  assez 
semblable  à  un  coing,  est  un  puissant  remède  contre  la  dys- 
senterie.  (J.) 

IGILMA.  (Ornith,)  Cet  oiseau  du  Kamtschatka,  qui  porte 
aussi  le  nom  de  monichagatka ,  est  Vanas  arctica  cirr]iata  de 
Steller,  et  l'aica  cirrhata  de  Gmeli^  et  de  Latham.  (Ch,  D.) 


^^  IGL 

IGLICZE  {Bot.) ,  nom  donné  ,  dans  la  Hongrie  ,  à  un  genêt 
épineux,  suivant  Clusius.  (J.  ) 

JGLITE  ou  IGLOITE.  (  Min.  )  Ce  sont  les  noms  qu'on  a 
donnés  à  quelques  variétés  d'arragonite  cristallisées  en  pyra- 
mides alongées  en  forme  d'aiguilles,  qui  viennent  d'Iglo  en 
Hongrie.  Voyez  Chaux  carboixatée  arragonite,  tom.  VIII, 
pag.  261.  (B.) 

IGNAME,  Dioscorea.  (Bot.)  Genre  de  plantes  monocoly- 
lédones,  à  fleurs  incomplètes,  dioïques,  de  la  famille  des  as- 
paraginées ,  de  la  dioécie  hexandrie  de  Linnasus  ,  oBi'ant  pour 
caractère  essentiel  :  Des  fleurs  dioïques,  pourvues  d'un  ca- 
lice campanule,  à  six  divisions;  point  de  corolle;  six  éta- 
mines  :  dans  les  fleurs  femelles,  un  ovaire  supérieur,  trigone, 
surmonté  de  trois  styles;  une  capsule  triangulaire  ,  à  trois 
loges;  deux  semences  membraneuses  dans  chaque  loge. 

Ce  genre,  aujourd'hui  très-nombreux  en  espèces,  ren- 
ferme des  plantes  grimpantes,  la  plupart  pourvues  d'une  ra- 
cine tubéreuse  et  comestible  ;  les  tiges  sont  herbacées  ou  un 
peu  ligneuses  ;  les  feuilles  alternes ,  quelquefois  opposées  ; 
les  fleurs  petites  ,  disposées  sur  des  grappes  axillaires.  Je 
parlerai  des  espèces  les  plus  remarquables  ,  particulièrement 
de  celles  qui  peuvent  fournir  à  l'homme  un  aliment  sain  et 
agréable. 

Igname  ailée  :  Dioscorea  alata  ,  Linn.  ;  Katsjii-lielengu  , 
Rheed.,  Malah.,  7,  tab.  58;  Ubium  vulgare ,  Rumph.,  Ainb. , 
6,  tab.  120,  121  ,  122.  Cette  plante  intéressante  produit  une 
grosse  racine  tubéreuse,  longue  de  deux  à  trois  pieds  et  plus, 
noirâtre  à  l'extérieur,  blanche  ou  rougeâtre  en  dedans,  un 
peu  acre  ou  visqueuse  ;  de  formes  différentes ,  selon  les  va- 
riétés :  tantôt  digitécs  ou  palmées,  tantôt  contournées  en  plis 
de  serpent,  ainsi  qu'on  les  voit  représentées  dans  les  figures 
que  j'ai  citées  de  Rumph.  Ces  racines  pèsent  quelquefois  de 
trente  à  quarante  livres.  Ses  tiges  sont  herbacées,  grimpantes, 
longues  d'environ  six  pieds  et  plus,  quadrangulaires,  munies 
sur  leurs  angles  de  membranes  rougeàtres ,  crépues  et  cou- 
rantes,  garnies  de  feuilles  opposées,  pétiolées ,  en  cœur, 
acuminées,  lisses,  vertes,  traversées  par  sept  nervures;  les 
fleurs  jaunâtres  et  petites ,  disposées  en  grappes  axillaires  ,  vers 
le  commet  des  tiges  :  des  bulbes  scssiles  croissent  souvent  à  la 


IGN  17 

paMîe  supérieure  des  tiges  et  produisent  de  nouveaux  indi- 
vidus. 

Cette  espèce  croît  naturellement  dans  les  Indes  orientales, 
entre  les  tropiques;  elle  est  aujourd'hui  cultivée  dans  les 
deux  Indes,  à  cause  de  sa  grande  utilité,  en  x\frique  et 
même  dans  les  mers  du  Sud.  Cette  culture  est  irès-simple  : 
elle  consiste  à  labourer  la  terre  au  commencement  de  la  sai- 
son des  pluies,  à  y  introduire  des  morceaux  de  racines  con- 
servées à  cet  effet,  auxquels  il  suffit  qu'il  y  ait  un  œil  pour 
produire  de  nouveaux  pieds.  On  abandonne  ensuite  la  plan- 
tation à  la  nature,  jusqu'à  la  saison  sèche,  pendant  laquelle 
on  consomme  ces  racines,  en  les  arrachant  à  mesure  du  be- 
soin. Elles  varient  dans  leurs  couleurs,  leur  saveur  et  leur 
forme,  selon  les  localités  :  elles  germent,  même  exposées  à 
l'air,  avec  tant  de  facilité,  qu'il  est  difficile  de  les  conserver 
long-temps,  à  moins  qu'elles  ne  soient  tenues  dans  des  en- 
droits très-secs.  Elles  fournissent  un  aliment  très-sain,  d'une 
saveur  assez  douce;  mais  elles  ont  besoin  de  quelque  assaison- 
nement pour  les  rendre  plus  agréables.  On  les  manf^e  rôties 
sous  la  cendre  ou  simplement  cuites  à  l'eau;  elles  remplacent 
le  pain  :  on  en  fait  encore  des  bouillies  agréables  et  autres 
préparations  alimentaires. 

Igname  élevée  :  Dioscorea  altissima  ,  Lamk.  ,  Encyclop.  , 
n.°  6  ;  Burm. ,  Amer.,  tab.  117,  fig.  2;  Plum.,  Spec,  1,  et 
Mss.,  vol.  3,  tab.  144.  Cette  espèce  croît  à  la  Martinique. 
Elle  est  pourvue  d'une  racine  noueuse,  géniculée  ,  garnie  de 
fibres  ;  il  s'en  élève  une  tige  cylindrique  ,  presque  ligneuse, 
verdâtre ,  noueuse,  qui  monte  très-haut,  en  grimpant  sur  les 
arbres  ,  divisée  en  un  grand  nombre  de  rameaux  étalés  ,  longs , 
fort  menus  :  les  feuilles  sont  pétiolées,  opposées,  en  cœur, 
acuminées,  à  sept  nervures,  larges  de  deux  pouces,  et  un 
peu  plus  longues;  les  fleurs  petites,  verdàtres ,  campanulées , 
disposées  en  grappes  alongécs  ,  opposées,  grêles,  axilhiires 
et  pendantes. 

Igname  DU  Japon  :  Dioscorea  japonica ,  Thunb.,  Flor.Jap., 
pag.  i5i;  Dsojo  ,  vulgo  Jamma-imo  ,  KsBmpf. ,  Aii:er,,  828. 
Ses  racines  sont  tubéreuses  :  elles  produisent  une-  tige  fili- 
forme ,  anguleuse  ,  glabre  et  grimpante ,  garnie  de  feuilles 
opposées,    pétiolées,  oblongues  ,    en  cœur,  acuminées,   eu- 

23, 


^8  lGi\ 

tiéres,  longues  d'un  pouce,  réticulées,  k  neuf  nervures;  les 
pétioles  anguleux,  presque  de  la  longœur  des  feuilles;  les 
Heurs  disposées  en  épis  axillaires  ,  solitaires  ou  géminés  , 
plus  longs  que  les  feuilles.  Cette  plante  croît  au  Japon.  On 
mange  ses  racines  cuites  et  coupées  par  morceaux. 

Igname  a  sept  lobes  :  Dioscorea  septemloba,  Thunb. ,  Flor. 
Jap.,  pag.  1Z19.  Cette  plante  a  une  tige  cylindrique  et  grim- 
pante ,  garnie  de  feuilles  alternes,  pétiolées,  en  cœur,  gla- 
bres à  leurs  deux  faces  ,  à  sept  lobes  anguleux  ;  celui  du  mi- 
lieu très-grand  et  acuminé,  à  sept  nervures,  longues  d'envi- 
ron quatre  pouces  et  aussi  larges:  les  fleurs  petites,  disposées 
sur  des  grappes  axillaires  ;  elles  produisent  des  capsules  ovales , 
triangulaires;  à  angles  ailés,  échancrés.  Cette  plante  croît  au 
Japon.  La  Dioscorea  quinquelola,  Thunb.,  l,  c. ;  Kai ,  vulgo 
Tokoro,  Kasmpf. ,  Aman.,  827,  diffère  de  la  précédente  par 
ses  feuilles  supérieures  à  cinq  et  trois  lobes,  à  neuf  nervures  : 
les  grappes  sont  axillaires;  celles  des  individus  mâles  presque 
paniculées ,  fort  grêles. 

Igname  velue  :  Dioscorea  villosa  ,  Linn.  ;  Pluk. ,  Amnlth. , 
lab.  SyS,  fig.  5.  Cette  espèce,  originaire  de  la  Virginie  et  de 
ïa  Floride,  que  l'on  cultive  au  Jardin  du  Roi,  a  des  tiges 
grimpantes;  des  feuilles  plus  souvent  glabres  que  pubescentes, 
ovales,  élargies,  à  peine  écliancrées;  les  fleurs  alternes ,  ses- 
siles,  distantes,  ou  quelquefois  réunies  plusieurs  ensemble, 
d'un  blanc  uu  peu  jaunâtre  ,  disposées  en  grappes  étalées  , 
paniculées ,  au  moins  une  fois  plus  longues  que  les  feuilles. 

Igname  NUMMULAiRE  :  Dïoscorea  nummularia ,  Lamk. ,  Encycl.; 
Vbium  nummularium,  Rumph. ,  Amh.,  5  ,  tab  162.  Ses  racines, 
d'une  grosseur  médiocre ,  sont  d'abord  charnues  et  tubercu- 
lées;  elles  deviennent  ensuite  dures,  presque  ligneuses  :  ses 
tiges  sont  grimpantes ,  tenaces  ,  longues  et  rameuses ,  garnies  à 
leur  base  de  piquans  très-nombreux  ,  et  de  feuilles  opposées, 
glabres,  en  cœur,  mucronées,  à  trois  ou  cinq  nervures  :  les 
fleurs  disposées  en  grappes  axillaires,  opposées;  celles  des  in- 
dividus mâles  ramifiées  comme  par  verlicilles  :  les  capsules 
courtes,  plus  larges  que  longues,  à  trois  ailes  arrondies  ;  elles 
offrent  l'apparence  de  petites  pièces  de  monnoie.  Cette  plante 
croit  aux  îles  MoJuques,  dans  les  bois,  sur  le  bord  des  ri- 
vières.  Les  cochons  sont  très -avides  des  racines  de  cette 


IGN  19 

igname  ,  quaad  elles  sont  jeunes  et  tendres  :  les  naturels  du 
pays  font  avec  les  tiges  et  les  rameaux  des  liens  très-solides. 
Il  en  découle ,  surtout  dans  les  temps  pluvieux  ,  un  suc  caus- 
tique, qui  corrode  la  peau. 

Igname  DE  Cayenne  :  Dioscorea  cayennensis ,  Lamk.,  Encycl, 
Cette  espèce  pousse  des  tiges  grêles  ,  herbacées  ,  grim- 
pantes, garnies  de  feuilles  alternes,  pétiolées ,  hastées  en 
cœur,  glabres,  à  cinq  ou  sept  nervures,  tronquées  à  leur 
hase,  avec  deux  oreillettes  courtes,  un  peu  divergentes.  Les 
grappes  sont  axillaires  ,  solitaires ,  très-simples  :  leur  calice 
a  trois  folioles  une  fois  plus  petites  et  plus  aiguës  que  les 
trois  intérieures. 

Igname  a  racines  blanches  :  Dioscorea  ehurnea ,  Lour. ,  FI. 
Cochin. ,  2,  pag.  767;  AnKappa-helengu ,  Rheed.,  Hort.malab., 
7,  tab.  5o  ?  Cette  plante  a  des  racines  verticales,  pourvues 
d'une  ou  de  deux  bulbes  assez  semblables,  par  leur  forme  et 
leur  grandeur,  à  des  dents  d'éléphant,  longues  de  trois  pieds, 
un  peu  courbées:  elles  produisent  des  tiges  grimpantes ,  li- 
gneuses ,  très-longues;  les  rameaux  quadrangulaires,  ainsi  que 
les  pétioles;  les  feuilles  glabres,  alternes,  en  cœur,  à  sept 
nervures;  les  fleurs  hermaphrodites,  disposées  en  grappes 
alongées,  latérales,  très-simples;  les  trois  folioles  intérieures 
du  calice  ovales,  jaunâtres,  charnues.  Le  fruit  consiste  en  une 
capsule  oblongue ,  ovale ,  à  trois  angles  très-saillans.  Cette 
plante  croît  à  la  Cochinchine;  on  l'y  cultive  à  cause  de  ses 
racines,  dont  on  fait  le  même  usage  que  de  celle  de  l'igname 
ailée.   Elles  fournissent  un  aliment  assez  recherché.  (  Poir.  ) 

IGNAMUS.  {Bot.)  Voyez  Imhame.  (J.) 

IGNARUCU  {Erpétol.)  ,  nom  brésilien  de  I'Iguane.  Voyez 
ce  mot.  (H.  C.) 

IGNATIA.  (Bot.)  Genre  de  Linnaeus  fils,  désignant  l'arbre 
delà  fève  de  Saint-Ignace,  qui  diffère  du  vomiquier,  strych- 
nos ,  par  son  fruit  pyriforme ,  ligneux,  rempli  de  graines 
anguleuses  en  divers  sens ,  et  non  orbiculaires  comme  dans 
les  autres.  Il  nous  a  paru  que  ce  dernier  caractère  n'étoit 
pas  suffisant  pour  séparer  ces  deux  genres  :  cependant  Lou- 
reiro  fait  aussi  de  Vignatia  un  genre  sous  le  nom  de  Ignatiana, 
Voyez  VoMiyuE.  (  J.  ) 

IGJMAVUS.  {Mamm.)  Ce  nom  latin  ,  qui  signifie  paresseux. 


'^0  IGN 

a  été  donné  aux  bradypes  par  les  anciens  naturalistes  qui 
ont  écrit  sur  les  productions  de  l'Amérique  méridionale. 
(Dem.) 

IGNEOULITI.  {Bol.)  Nom  caraïbe  d'un  mélastome  de 
Fherbier  de  Surian  ,  qui  est  le  melastoma  ciliata  de  M.  de 
Lamarck ,  et  plus  récemment  le  rhexia  inconstans  de  Vahl.  (J.) 

IGNIARIA.  (Bot.)  Césalpin,  selon  Adanson ,  désigne  ainsi 
les  champignons  subéreux,  qu'il  nomme  encore /uragi  igniarii 
et  EscA.  Voyez  ce  dernier  mot.    (Lem.) 

IGNIS  SYLVESTRIS,  FEU  SAUVAGE.  (Bot.)  C'est  le  nom 
que  Césalpin  donne  au  clathrus  cancellatus ,  champignon  cu- 
rieux par  sa  structure  treillagée  et  par  sa  couleur  d'un  rouge 
de  feu.    Voyez  Clathrus.  (Lem.) 

IGNITION  et  INFLAMMATION.  {Chim.)  Ces  mots  s'ap- 
pliquent à  deux  phénomènes,  où  des  corps  deviennent  lumi- 
neux par  l'acte  de  leur  combinaison  avec  d'autres  corps; 
mais  il  y  a  cette  différence  ,  que  le  premier  s'applique  à 
un  corps  qui  est  tixe  et  qui  reste  fixe  pendant  la  combi- 
naison, et  le  second  s'applique  aux  corps  qui  produisent  de 
la  flamme,  parce  qu'ils  sont  volatiles,  ou  que  la  combinaison 
qu'ils  forment  jouit  de  cette  propriété.  (Ch.) 

IGOANA  {ErpétoL)  ,  nom  que  les  habitans  de  Saint-Do- 
mingue ,  selon  Hernandez,  donnoient  à  I'Iguane.  Voyez  ce 
mot.  (H.  C.) 

IGOUINGOUM.  {Ornilli.)  Ce  nom  kamtschadale  est  donné 
par  Kraschcninnikow  comme  désignant  une  espèce  de  ca- 
nard. (Ch.  D.) 

IGOUKOUNGOUKOU  {Omith.) ,  nom  qu'une  espèce  de 
canard  porte  au  Ramtschatka.  (Ch.  D.) 

IGTAIGCICA.  (Bot.)  Voyez  Igciega.  (J.) 

IGUANE ,  Iguana.  {ErpétoL)  Les  naturalistes  ont  donné  ce 
nom  à  un  genre  de  reptiles  de  Tordre  des  sauriens  et  de  la 
famille  des  eumérodes.  Ce  genre  est  distingué  par  les  carac- 
tères suivans : 

Doigts  arrondis ,  séparés  les  uns  des  autres ,  non  opposables  ; 
corps  et  queue  couverts  de  petites  écailles  imbriquées  ;  un  goitre 
pectine ,  comprimé  et  pendant  sous  la  gorge;  tout  le  long  du  dos, 
une  rangée  d'' épines,  ou  plutôt  d'écaillés  redressées  ,  comprimées 
et  pointues;  tête  couverte  de  plaques;  une  rangée   de  tubercules 


IGU  ai 

poreux  sur  les  cuisses;  une  rangée  de  dents  comprimées ,  triangu- 
laires, à  tranchant  dentelé  à  chaque  mâchoire;  deux  petites  ran~ 
gées  de  dents  au  bord  postérieur  du  palais  ;  queue  sans  épines; 
Jlancs  simples;  langue  charnue,  échancré''  au  sommet. 

A  l'aide  de  ces  notes  et  du  tableau  que  nous  avons  donné 
à  l'article  Eumérodes,  il  devient  très-facile  de  distinguer  les 
Iguanes  des  Caméléons  ,  qui  ont  les  doigts  opposables  et 
réunis  jusqu'aux  ongles;  des  Stellions  ,  qui  ont  la  queue 
épineuse  ;  des  Lézards  et  des  Agames  ,  qui  n'ont  point  de 
goitre  sous  la  gorge  ;  des  Drarons  ,  qui  ont  les  flancs  garnis 
d'une  membrane  en  forme  d'ailes;  des  Anolis  et  des  Geckos, 
qui  ont  les  doigts  aplatis  en -dessous.  (Voyez  ces  différens 
mots,  et  Eumérodes  et  Iguaniens.) 

Le  mot  iguane  est  originaire  de  Saint-Domingue.  (Voyez 
Igoana  et  Leguan. ) 

Les  reptiles  que  le  plus  grand  nombre  des  naturalistes 
ont  Jusqu'à  présent  regardés  comme  devant  appartenir  au 
genre  des  iguanes,  sont  assez  nombreux;  mais  des  observa- 
teurs modernes,  après  les  avoir  examinés  et  comparés  avec 
plus  d'attention  que  leurs  prédécesseurs,  en  ont  reporté 
plusieurs  parmi  les  agames,  et  ont  fait  des  genres  à  part  du 
basilic  et  de  l'iguane  marbré.  Les  espèces  principales  que  ce 
genre  renferme  aujourd'hui  sont  les  suivantes. 

L'l»;uANE  ORDINAIRE  d'Amérique  :  Iguana  tuberculata  ,  Lau- 
renti;  Lacerta  iguana  ,  Linnseus.  Dos  bleu  ,  changeant  en  vert 
et  en  violet,  piqueté  de  noir;  ventre  plus  pâle;  cinq  doigts 
à  chaque  pied;  membres  robustes  et  alongés  ;  queue  un  peu 
comprimée  sur  les  côtés;  de  grandes  épines  dorsales;  une 
grande  plaque  ronde  sous  le  tympan,  à  l'angle  des  mâchoires: 
des  écailles  pyramidales  éparses  parmi  les  autres  sur  les  côtés 
du  COU;  bord  antérieur  du  goitre  profondément  pectine- 
Taille  de  quatre  à  cinq  pieds. 

Ce  reptile  est  assez  commun  dans  toute  l'Amérique  chaude,. 
où  il  se  tient  dans  les  bois,  aux  environs  des  rivières  et  des 
sources  d'eau  vive,  se  tenant  la  plupart  du  temps  sur  les  ar- 
bres, allant  quelquefois  à  l'eau ,  et  se  nourrissant  de  fruits,  de 
graines  et  de  feuilles.  Sans  être  ni  venimeuse  ni  dangereuse, 
sa  morsure  est  extrêmement  douloureuse,  et,  lorsqu'il  est  ea 
colère  ,  le  goitre  qu'il  a  sous  la  gorge  s'enfle  et  s'étend;>. 


r 
«^  IGU 

L'iguane  a  la  vie  très-dure  et  résiste  fort  bien  aux  coups 
de  bâton  ;  aussi  le  chasse-t-on  avec  l'arc  ou  le  fusil. 

Les  femelles  sont  plus  petites  que  les  mâles,  mais  leurs 
couleurs  sont  beaucoup  plus  éclatantes.  Elles  pondent  dans 
le  sable  des  œufs  gros  comme  ceux  des  pigeons,  mais  un  peu 
plus  alongés  et  d'égale  grosseur  par  les  deux  bouts.  Ces  œufs 
ont  la  coque  blanche  ,  unie  et  molle  ;  ils  sont  totalement 
remplis  par  du  jaune  et  n'ont,  pour  ainsi  dire,  pas  d'al- 
bumen. Ils  ne  durcissent  jamais  au  feu  ;  ils  deviennent  seule- 
ment un  peu  pâteux  ;  mais  ils  n'en  sont  pas  moins  d'une 
saveur  fort  agréable,  et  à  Surinam  et  dans  la  Guiane  on  les 
mange  habituellement.  Une  seule  femelle  en  pond  quelque- 
fois jusqu'à  six  douzaines. 

La  chair  de  l'iguane  passe  aussi  pour  délicieuse  et  est  fort 
estimée  dans  toute  l'Amérique  chaude.  Elle  est  blanche  et 
délicate.  Beaucoup  de  personnes  néanmoins  la  regardent 
comme  mal-saine,  surtout  pour  les  individus  entachés  d'un 
vice  vénérien  :  on  prétend  en  effet  que,  chez  ceux-ci,  elle 
occasionne  le  retour  des  douleurs  ostéocopcs.  A  Paramaribo 
elle  se  vend  fort  cher  aux  gourmets. 

Pison,  et  plusieurs  des  anciens  voyageurs  en  Amérique, 
ont  vanté  les  vertus  du  bézoard  d'iguane,  pierre  qui,  disent- 
ils  ,  se  forme  dans  l'estomac  ou  le  crâne  de  cet  animal.  Mais 
aujourd'hui  cette  substance  est  tombée  dans  le  plus  aîfsolu 
discrédit  aux  yeux  des  médecins. 

L'Iguane  ardoisé;  Iguana  ccerulea ,  Daudin.  D'un  bleu  vio- 
làtre  uniforme,  plus  pâle  en-dessous  ;  la  crête  pectinéedu  dos 
moins  élevée  que  dans  l'espèce  précédente  ;  un  trait  blan- 
châtre oblique  sur  l'épaule ,  comme  dans  l'iguane  ordinaire  ; 
les  écailles  pyramidales  des  côtés  du  cou  disposées  par  rangées 
longitudinales.  Longueur  totale  de  trois  pieds  seulement. 

Ce  reptile  habite  les  mêujes  lieux  que  l'iguane  ordinaire, 
et  n'est  peut-être,  ainsi  que  le  pense  M.  Cuvier,  qu'une  va- 
riété d'âge  ou  de  sexe  de  celui-ci.  Séba  ,  qui  paroît  l'avoir  fait 
Êgurer  à  la  pi.  96  ,  fig.  4  ,  du  tome  1  ,  de  son  bel  ouvrage  ,  le 
fait  venir  de  l'île  Formose.  Daudin  en  possédoit  un  individu 
dans  sa  collection  ;  M.  Alex.  Brongniart  en  a  un  dans  la 
sienne. 

L'Iguane  a  col  nu,  Cuvier;  Iguana  delicatissima,  Laurent!» 


IGU  as 

il  ressemble  à  l'iguane  ordinaire,  surtout  par  les  épines  dor- 
sales; mais  il  n'a  point  la  grande  plaque  à  l'angle  de  la  mâ- 
choire, ni  les  tubercules  épars  qu'offre  celui-ci  sur  les  côtés 
du  cou.  Le  dessous  du  crâne  est  garni  de  plaques  bombées; 
le  goitre  est  médiocre  et  non  pectine. 

Laurent! ,  qui  a  trouvé  cet  animal  dans  la  collection  du 
comte  de  Turn  ,  dit  qu'il  vient  des  Indes. 

L'Iguane  cornu  de  Saint-Domingue;  Iguana  cornuta ,  Lacé- 
pède.  Assez  semblable  à  l'iguane  ordinaire  et  encore  plus  à 
l'espèce  précédente  ;  une  pointe  conique  osseuse  entre  les 
yeux;  deux  écailles  relevées  sur  les  narines  ;  point  de  grande 
plaque  à  l'angle  de  la  mâchoire  ,  ni  de  tubercules  sur  le  cou. 
Taille  d'environ  quatre  pieds. 

On  trouve  assez  communément  l'iguane  cornu  dans  les 
mornes  de  Saint-Domingue ,  entre  l'Artibonite  et  les  Gonaïves. 
Il  se  nourrit  de  fruits,  d'insectes  et  de  petits  oiseaux  qu'il 
saisit  avec  une  agilité  merveilleuse  ,  et ,  pendant  le  jour  ,  il  se 
tapit  sur  les  arbres  et  sur  les  rochers  pour  guetter  sa  proie. 
Pendant  la  nuit  et  durant  toute  la  saison  des  grandes  cha- 
leurs, il  se  retire  dans  les  creux  des  rochers  ou  dans  les  trous 
des  vieux  arbres,  et  y  passe  environ  cinq  ou  six  mois  dans 
une  sorte  d'engourdissement. 

Ce  reptile  est  regardé  par  les  Nègres  comme  un  mets  dé- 
licieux ;  aussi  le  recherchent-ils  avec  ardeur.  Au  rapport  des 
colons ,  sa  chair  a  la  saveur  de  celle  du  chevreuil ,  et  les  chiens 
marrons  en  font  un  grand  carnage.  On  ne  sait  pas  au  juste 
quelles  sont  ses  couleurs.  M.  de  Lacépéde,  le  premier,  l'a 
décrit  à  la  fin  de  son  Histoire  naturelle  des  serpens ,  et  Bon- 
naterre  en  a  ensuite  donné  une  bonne  figure  dans  le  Dic- 
tionnaire d'erpétologie  de  TEncyclopédie  méthodique. 

L'Iguane  a  bandes,  Iguana  fasciala.  Bleu  foncé  avec  des 
bandes  transversales  plus  claires;  dentelures  du  dos  petites; 
fanon  médiocre  et  non  dentelé;  point  de  grande  écaille  à 
l'angle  de  la  mâchoire. 

Cet  iguane  est  de  Java.  Peut-être  est-il  le  reptile  que 
Bontius  a  nommé  caméléon.  M.  Brongniart  l'a  figuré  dans  son 
Mémoire  sur  les  reptiles ,  pi.  i  ,  fig.  5.  C'est  probablement  aussi  à 
cette  espèce  qu'il  faut  rapporter  les  très-grands  iguanes  qu'on 
trouve  à  Batavia ,  et  qui  sont  quelquefois  aussi  gros  que  la 


c 

24  IGU 

cuisse  d'un  homme.  Dans  son  voyage  avec  Cook ,  Banks  en 
tua  un  qui  avoit  cinq  pieds  de  longueur. 

On  mange  leur  chair  aux  Indes  orientales,  comme  en  Amé- 
rique on  mange  celle  de  l'iguane  ordinaire.  Leurs  œufs  sont 
aussi  très-estiniés.  (H.  C.  ) 

IGUAINIENS.  (Erpétol.)  M.  G.  Cuvier  donne  ce  nom  à  la 
troisième  famille  des  reptiles  sauriens.  Les  animaux  qui  la 
composent  ont  la  forme  générale,  la  longue  queue  et  les 
doigts  libres  et  inégaux  des  lacerliens;  leur  œil,  leur  oreille, 
leur  anus,  leur  verge  sont  semblables;  mais  leur  langjie  est 
charnue,  épaisse,  non  extensible  et  seulement  échancrée  au 
bout.  Le  célèbre  naturaliste  que  nous  venons  de  citer,  range 
dans  cette  famille  les  genres  Steluon  ,  Cordyle  ,  Fouette- 
queue,  Agame,  Galéote  ,  Changeant,  Lophyre  ,  Basilic, 
Dragon,  Iguane,  Marbré,  Anolis.  Voyez  ces  différens  mots, 
et  Lacertiens  ,  Sauriens  et  Reptiles.  (H.  C.  ) 

IHARFA.  (Bot.)  Voyez  Iavorfa.  (J.) 

IHUR.  (BoL)  Dans  l'île  d'Amboine  on  nomme  ainsi  une 
espèce  de  palmier  rondier,   lontarus.  (J,  ) 

IIRA.  (Bot)  Nom  brésilien,  cité  par  Pison,  du  miel  sau- 
vage que  les  habitans  du  Brésil  vont  chercher  dans  les 
forêts.  (J.) 

IITO.  (Bot.)  Cet  arbre  du  Brésil,  cité  par  Marcgrave, 
n'est  pas  le  même,  selon  son  éditeur,  que  celui  qui  est  dé- 
signé par  Pison  sous  ce  nom.  Cependant  Linnaeus  les  indique 
tous  deux  pour  son  guarea  Irichilioides.  (J.  ) 

LTARSOAKALE  {Omith.) ,  un  des  noms  groenlandois  du 
petit  guillemot,  aie  a  aile  ,  Linn.  (Ch.  D.) 

IRAN.  (Bot.)  Dans  VApparatus  medicaminum  de  Murrai 
il  est  fait  mention  d'une  racine  de  ce  nom,  recueillie  en 
Chine,  dans  la  province  de  Kiang-nang,  laquelle  a  la  forme 
et  la  consistance  d'une  racine  d'orchis.  On  la  conserve  dans 
quelques  collections,  sans  indication  précise  de  ses  propriétés- 
(J.) 

lIvAN  BATOE  BOANO.  (îehth^ol.)  Dans  les  Indes  orien- 
tales, on  appelle  ainsi  l'acanthure  noiraud  de  M.  de  Lacépède, 
chœtodon  nigricans  de  Bloch.   Voyez  Acanthure.   (H.  C.) 

IRAN  BATOEJANG.  (Ichthyol.)  Nom  qu'aux  Indes  orien- 
tales, on  donne  à  l'holacanthe  anneau.  Voy.  HotACANïHE.  (H.  C.) 


IRA  25 

IKAN  CÀCATOEA  {Ichthjol.),  nom  japonois  du  spare 
noir  de  M.  de  Lacépède.  Voyez  Spare.  (H.  C.) 

IKAN  CACATOEA  IJA  {Ichlhjol.),  nom  japonois  du 
spare  cynodon  de  M.  de  Lacépède.  Voyez  Denté.  (H.  C.) 

IKAN  CAMBING.  {Ichtliyol.)  Dans  les  Indes  orientales  on 
appelle  ainsi  le  teira.   Voyez  Flatax.  (H.  C.  ) 

IKAN  DiOELON.  {Ichth.)'oL)  On  appelle  ainsi  aux  Indes 
orientales  l'aulostome  chinois ,  Jistularia  chinensis ,  Linn. 
Voyez  AiJLosTOME.  (H.  C.  ) 

IKAN  DOERIAN  [IclUhjol.) ,  nom  que  l'on  donne,  aux 
Indes,  au  guara,  diodon  hjstrix.  Voyez  Guara  et  Diodon. 
(H.  C.) 

IKAN  JORDAIN.  {Ichlhjol.)  Les  naturels  d'Aniboine 
donnent  ce  nom  au  lutjan  jourdin  de  M.  de  Lacépède  , 
lequel  est  Vanthias  bifasciatus  de  Bloch.  Voyez  Lutjan. 
(H.  C.) 

IKAN  KAKATOEA  ITAM.  (Ichthjol.)  Aux  Indes  orien- 
tales c'est  le  nom  du  chéilodactyle  fascé.  Voyez  Chéilodac- 
TYLE.    (H.  C.) 

IKAN  KAPELLE.  {IchthyoL)  Aux  Indes  orientales,  c'est 
le  nom  du  gai  A'^erdàtre.  Voyez  Gal.  (H.  C.) 

IKAN  KOELAR.  [Ichthyol.)  Aux  Indes  orientales,  on 
donne  ce  nom  à  l'holacanthe  bicolor.  Voyez  Holacanthe. 
(H.  C.) 

IKAN  LUTJANG.  {Ichthyol.)  Nom  malais,  latinisé  par 
Bloch  ,  et  que  porte  aux  Indes  la  première  espèce  de  son 
genre  Lutjanus.  Voyez  Lutjan.  (H.  C.) 

IKAN  MAKEKAE.  {ichlhjol.)  Aux  Indes  orientales  on 
nomme  ainsi   Fholocentre  tigré.  Voyez  Holocentre.  (  H.  C.  ) 

IKAN  MOELOET  BETANG.  (Ichthjol.)  Aux  Indes  orien- 
tales on  donne  ce  nom  à  l'espadon,  hemiramphus  brasiliensis, 
poisson  que  Linnasus  a  placé  parmi  les  ésoces.  Voyez  Demi- 
Bec.  (H.  C.) 

IKAN  ONGO.  {Ichthjol.)  Au  Japon  ,  c'est  le  nom  d'un 
poisson  du  genre  Holocentre ,   holocentrus  ongus.  Voyez  Ho- 

lOCENTRE.    (H.    C.  ) 

IKAN  FAMPUS  CAMBODIA.  (Ichthjol.)  Aux  Indes  orien- 
tales on  donne   ce  nom  à  Fholacanthe  anneau.  Voyez  Hoxa- 

CANTHE.    (H.    C.  ) 


^G  IRA 

IKAN  PAROOLY.  (Iclithyol.)  Aux  Indes  orientales,  on 
donne  ce  nom  au  chœtodon  cornutus  de  Linnaeus,  poisson  que 
nous  avons  décrit  à  l'article  Heniochus.  Voyez  ce  mot.  (H.C) 

IKAN  RADJABAN.  {Ichthjol.)  Aux  Indes  orientales  on 
appelle  ainsi  une  espèce  de  poisson  du  genre  Holocentre. 
Voyez  ce  mot.  (H.  C.) 

IKAN  SENGADGI  MOLUKKO  (Ichthjol.),  nom  que, 
dans  les  Indes  orientales,  on  donne  àTholacanthe  duc.  Voyez 

HOLACANTHE.    (H.     C.  ) 

IKAN  SETANG.  (Ichthfol.)  Voyez  Kakatoche  capitano. 
(H.C.) 

IKAN  SIAM.  (Ichthj'ol.)  Aux  Indes  orientales ,  on  donne 
ce  nom  au  moucharra ,   espèce  de  glyphisodon.  Voyez  Gly- 

PHISODON.    (H.    c.  ) 

IKAN  SOE  SALAT.  (Ichthjol.)  Aux  Indes  orientales  on 
appelle  ainsi  le  spare  pointillé  de  M.  de  Lacépède ,  perça 
punctulata  de  Linnaeus.  (H.  C.) 

IKAN  SUMBILANG.  (Ichthjol.)  Dans  les  grandes  Indes, 
on  donne  ce  nom  au  plotose  anguillaire  de  M.  de  Lacépède. 
Voyez  Plotose.  (H.  C.) 

IKAN  TEMBR^  CUNING.  (Ichthjol.)  Aux  Indes  orien- 
tales on  appelle  ainsi  le  spare  cuning  de  M.  de  Lacépède. 
(H.C.) 

IKAN  TERBANG  BERAMPAT  SAJAP.  (Ichthjol.)  Aux 
Indes  orientales  on  désigne  ainsi  l'exocet  sauteur.  Voyez 
Exocet.  (H.  C.  ) 

IKAN  TSJABELANG  JANG  TERBANG.  (Ichthjol.)  Aux 
Indes  orientales  on  appelle  ainsi  le  voilier.  Voyez  Istiophore. 
(H.C.) 

IKAN  TSJAKALANG  HIDJOE.  (Ichthjol.)  Nom  que, 
dans  les  Indes  orientales  on  donne  à  l'ORmiE.  Voyez  ce  mot. 
(H.   C.) 

IKAN  WARNA.  (Ichthjol.)  Aux  Indes  orientales  on  ap- 
pelle ainsi  Vanthias  diagramma  de  Bloch ,  que  nous  avons 
décrit  à  notre  article  Diagramme.  (H.  C.) 

IKARA-MOULI.  (Bot.)  Nom,  cité  dans  PHistoire  abrégée 
des  voyages,  d'une  racine  des  Indes  orientales,  extrêmement 
chaude,  et  réputée  bonne  pour  guérir  les  indigestions  et  com- 
battre les  venins.  On  ne  dit  point  à  quel  genre  de  plantes 


ILE  ^7 

elle  appartient  :  sa  propriété  peut  faire  présumer  que  c'est 
une  aujouiée.  (  J.  ) 

IKINGUSA  (Bot.),  un  des  noms  japonois  de  la  joubarbe, 
suivant  Kaeinpfer.  (  J.) 

IKIRIOU.  {Erpétol.)  A  Cayenne,  on  donne  ce  nom  à  un 
énorme  serpent  qui  paroît  être  le  même  qu'on  nomme 
boiguacu  au  Brésil.  Voyez  Boïguacu.  (H.  C.) 

IRORN  (Mamm.),  en  suédois  écureuil.  (F.  C.) 

ILAD.  (Bot.)  A  Java,  suivant  Burmann ,  on  nomme  ainsi 
le  carex  amboinica  de  VHerb.  Amboin.,  qui  est  son  scirpus 
panicutatus  ,  devant  être  reporté  au  genre  Scleria,  dans  les 
cypéracées.  (  J.  ) 

ILANDA.  {Bot.)  Suivant  Hermann  ,  ce  nom  est  donné, 
dans  l'ile  de  Ceilan ,  à  un  arbre  qui  est  le  rhamnus  jujuba 
de  Linnœus,  ziziphus  jujuba  de  Willdenovv.  Dans  un  herbier 
de  la  côte  du   Coromandel   il    est  nommé  ilindai.  (J.) 

ILATA.  {Bot.)  Les  Portugais  qui  habitent  la  côte  mala- 
bare,  nomment  ainsi  le  henné,  ia^vsonia.  (J.) 

ILAT  BOAYA.  {Bot.)  Espèce  de  joubarbe  de  Java,  que 
Rumph  nomme  sempervivum  majus  indicum  :  c'est  le  lida  boaya 
des  Malais.  (  J.  ) 

ILATHERA.  (  Ornith.  )  On  appelle  ainsi ,  dans  lile  de  Baha- 
ma,   le  canard  marec ,  anas  ia/iamens/s ,  Lath.  (Ch.  D.) 

ILATRUM.  {Bot.)  Suivant  Césalpin,  ce  nom  et  celui  de 
linternum  étoient  donnés  au  phi Ujrea  média,  qui  étoit ,  selon 
lui ,  le  phiUyra  de  Théophraste  ,  le  phillyrea  de  Dioscoride.  (J.) 

ILDBRIMER,  {Ornith.)  L'oiseau  qui  est  indiqué  sous  ce 
nom  dans  Clusius,  Exotic.  auct. ,  p.  367  ,  est  l'imbrim  ou  grand 
plongeon  de  la  mer  du  Nord,  colymbus  immer  ,Liiin.  (Ch.D.) 

ILDER,  ILLER  {Mamm.)  :  noms  danois  et  suédois  du  pu- 
tois. (F.  C.) 

ILDGEIERS-DIUR.  {Mamm.)  Nom  que  les  Norwégiens , 
suivant  Wormius,  donnent  à  son  ours  de  la  seconde  espèce, 
entièrement  noir,  plus  petit,  plus  carnassier  que  le  brun, 
qu'il  nomme  Gresdiur.  Si  cette  espèce  existe,  elle  n'est  point 
encore  connue  des  naturalistes,  (F.  C.) 

ILE  ou  ISLE.  {IchtJyyol.)  LaChesnaye  des  Bois  parle  ,  sous 
ce  nom,  d'un  poisson  des  Indes  orientales,  mentionné  par 
Ruysch  ,  et  dont  il  est  difficile  de  déterminer  la  nature. 
(H.  C.) 


28  ILE 

ILETRO.  (Bot.)  L'alaicrne  est  ainsi  nommé  aux  environs 
deLucques,  suivant  Clusius.  (J.) 

ILEVERT  (Bot.),  nom  d'une  variété  de  prunier  dont  le 
fruit  est  alongé  et  verdàtre;  (  L.  D.  ) 

ILEX.  (Bot.)  Ce  nom,  donné  par  Dioscoride  et  d'autres 
anciens  aux  diverses  espèces  d'yeuse  ou  chêne  vert,  leur  avoit 
été  conservé  parTournefort,  qui  en  faisoit  un  genre  distinct , 
à  cause  de  la  persistance  de  leurs  feuilles.  Linnaeus  ,  ne  regar- 
dant pas  ce  caractère  comme  générique ,  a  réuni  ces  espèces  au 
chêne,  quercus ;  ensuite  il  a  transporté  le  nom  ilex  au  houx, 
qui  étoit  Vaquifolium  des  anciens  et  de  Tournefort ,  mais  qui 
avoit  été  nommé  ilex  par  Lonicer  et  C.  Bauhin.  Voyez  Houx. 

(J.) 

ILIADA.  (Ornith.)  Cette  dénomination  et  celle  àdias  sont 
données,  en  grec,  à  la  grive  mauvis ,  turdus  iliacus ,  Linn.  et 
Lath.  (Ch.  D.) 

ILICIUM.  (Bot.)  Voyez  Badiane.  (Poir.) 

ILICUS.  (Ichthjol.)  Au  rapport  de  La  Chesnaye  des  Bois, 
Trallien  a  parlé  sous  ce  nom  d'un  poisson  qui  nous  est  tota- 
lement inconnu  et  dont  la  chair  étoit  recommandée  par  les 
anciens  médecins.  L'histoire  de  cet  animal  est  fort  obscure  ; 
d'après  même  ce  que  dit  le  premier  des  auteurs  précités, 
il  n'est  point  très-sûr  que  ,  par  le  mot  ilicus  ,  on  ait  désigné 
un  poisson.  (H.  C.) 

ILIGALI  (Ornith.),  nom  koriaque  d'une  espèce  de  canard. 
(Ch.  D.) 

ILINDAI.  (Bot.)  Voyez  Ilanda.  (J.) 

ILIODÉES.  (  Bot.  )  C'est  ainsi  que  M.  Palisot  de  Beauvois 
désignoit  la  première  section  de  sa  famille  des  algues.  Les 
genres  qu'il  y  ramenoit  et  qui  ont  été  cités  à  notre  article 
Algues,  Suppl.,  vol.  ]  ,  pag.  i25,  sont  caractérisés  par  leur 
substance  molle,  muqueuse,  qui  enveloppe  de  petits  corps 
ovoïdes  nus,  sans  filamcns ,  ou  à  filamens  articulés,  diver- 
sement ramifiés.  (Lem.) 

ILKIVICHA.  (Ornith.)  L'oiseau  que  lesKorivTques  appellent 
ainsi,  est  le  rouge-gorge,  motacilla  ruhecula,  Linn.  (Ch.D.) 

ILLA.  (Bot.)  Nom  malabare,  adopté  à  Ceilan  et  cité  par 
Burmann ,  donné  par  Adanson  au  tomex  tomentosa  de  Lin- 
naeus,  qui  a  été  reconnu  plus  tard,  par  Linnaeus  lui-même, 


ÏLL  29 

être  congénère  du  callicarpa ,  auquel  se  rapporte  aussi  le 
porphyra  de  Loureiro.  (J.  ) 

ILLANKEN.  (Iclith^yol.)  On  connoît  sous  ce  nom,  dans 
le  lac  de  Constance,  une  espèce  de  salmone  que  quelques 
auteurs  ont  considérée  comme  une  simple  variété  du  saumon. 
C'est  le  salmo  illanca  de  Wartmann  ,  le  salino  lacustris  de 
certains  ichthyologistes.  Voyez  Salmone.  (H.  C.) 

ILLÉCÈBRE;  Illecebrum ,  Linn.  (Bot.)  Genre  de  plantes 
dicotylédones,  de  la  famille  des  paronjchiées ,  Juss. ,  et  de  la 
pentandrie  monogynie  ,  Linn.,  dont  les  principaux  caractères 
sont  les  suivans  :  Calice  partagé  en  cinq  divisions  profondes, 
renflées  sur  le  dos  ,  acuminées  à  leur  sommet  ;  corolle  de  cinq 
pétales  filiformes  ,  insérés  au  bas  du  calice  et  alternes  avec 
ses  découpures;  cinq  étamin'es  réunies  en  tube  à  leur  base; 
ovaire  supérieur,  surmonté  d'un  style  très -court,  terminé 
par  un  stigmate  en  tête;  capsule  monosperme,  recouverte 
par  le  calice   connivent. 

Les  illécèbres  sont  de  petites  plantes  herbacées,  à  feuilles 
opposées  et  à  fleurs  ramassées  par  paquets  axillaires  ou  ter- 
minaux. La  plus  grande  partie  des  illecelrum  de  Linnaeus  a 
été  rapportée  à  d'autres  genres  par  les  botanistes  modernes, 
et  particulièrement  au  paronjcliia  de  Jussieu.  Il  ne  reste 
plus  dans  le  genre  Illecebrum  que  trois  ou  quatre  espèces 
qui  paroissent  réellement  lui  appartenir  ;  toutes  les  autres 
que  quelques  auteurs  y  placent  encore  ,  sont  assez  incer- 
taines. Comme  ces  plantes  ne  présentent  d'ailleurs  aucun 
intérêt,  nous  ne  parlerons  ici  que  de  l'espèce  suivante,  qui 
est  la  plus  connue. 

Illécèbre  verticillé  ;  Illecebrum 'verticillatum ,  Linn.,  Spec, 
2g8  ;  Flor.  Dan.,  tab.  335  ;  Polygonum  pari/um ,  flore  albo  ver- 
ticillato ,  Vaill.,  Bot.  Paris.,  tab.  li,  fig.  y.  Sa  racine  est 
fibreuse,  annuelle;  elle  produit  des  tiges  nombreuses,  ra- 
meuses, grêles,  étalées  et  couchées  sur  la  terre,  longues  de 
deux  à  six  pouces,  et  garnies  de  feuilles  ovales,  opposées, 
sessiles,  rétrécies  à  leur  base  et  glabres.  Les  fleurs  sont  blan- 
châtres, très-petites,  verticillées  aux  aisselles  des  feuilles  et 
dans  presque  toute  la  longueur  des  tiges.  Cette  plante  croit 
dans  les  lieux  humides  et  sablonneux.  (  L.  D.) 

ILLEHUE.   {Bot.)  Nom    caraïbe,    suivant  Surian ,   de  la 


3o  ILL 

poincillade  commune,  dans  les  Antilles.  Il  cite  aussi  sous  celui 
de  illahueboue  une  espèce  de  carmentine  ,  justicia  ,  mentioniée 
dans  le  Catalogue  de  Vaillant,  et,  sous  celui  de  illehuau,  une 
plante  malvacée  qui  est  le  pavonia  spicata  de  Cavanilles.  (J.) 
ILLEU.  (Bot.)  Feuillée  cite  ce  nom  péruvien  pour  une 
plante  qu'il  croit  être  une  bermudienne,  sisyrinchium.  Une 
autre  plante  du  même  genre  est  nommée  huilmo.  Une  troi- 
sième, illmu ,  du  Pérou,  étoit  aussi  une  bermudienne  de 
Feuillée;  mais  elle  a  six  étamines  au  lieu  de  trois,  et  c'est 
maintenant  le  conanthera  des  auteurs  de  la  Flore  péruvienne. 
(J.) 

ILL-HVEL.  (Mamm.)  M.  de  Lacépède  dit  que  les  Islan- 
dois  donnent  ce  nom  aux  cétacés  dont  les  mâchoires  sont 
armées  de  dents.  (F.  C.) 

ÎLLL(IchthjoL)  A  ce  que  dit  Gesner,  les  anciens  Grecs 
donnoient  le  nom  d'/AAo/  à  de  très-grands  poissons,  que  les 
naturalistes  modernes  regardent  comme  des  êtres  fabuleux. 
Il  en  est  parlé  dans  les  Géoponiques  de  Tarentin.  (H.  C.) 

ILLING.  {Ornith.)  L'oiseau  connu  aux  Philippines  sous  ce 
nom,  ou  celui  d'iting,  est  le  gulin  ou  goulin  de  J.  G.  Camel , 
le  merle  chauve  de  ces  iles,  de  Brisson  ,  et  sa  36."  grive,  gra- 
cula  calva,  Linn.  (Ch.  D.) 

ILLIPÉ ,  Bassia.  [Bot.)  Genre  de  plantes  dicotylédones, 
à  fleurs  complètes,  monopétalées,  de  la  famille  des  sapotées , 
de  la.  dodécandrie  monogjnie  de  Linna'us,  offrant  pour  caractère 
essentiel  :  Un  calice  coriace,  à  quatre  divisions  profondes; 
une  corolle  campanulée  ,  à  huit  divisions  ;  seize  étamines  , 
quelquefois  beaucoup  plus;  un  ovaire  supérieur,  surmonté 
d'un  style  simple  et  d'un  stigmate  aigu.  Le  fruit  consiste  en 
un  drupe  ovale  ,  charnu  ,  laiteux  ,  renfermant  quatre  ou  cinq 
noyaux  monospermes. 

Ce  genre  renferme  quelques  arbres  des  Indes  orientales, 
intéressans parles  usages  économiques  de  leurs  fleurs,  et  par- 
ticulièrement de  leurs  fruits.  11  est  à  regretter  que  ces  arbres 
ne  puissent  être  cultivés  en  Europe.  Nous  n'en  connois- 
sions  d'abord  qu'une  espèce  ;  Roxburg  nous  en  a  fait  con- 
noître  deux  autres,  avec  des  détails  très-curieux  sur  leurs 
usages  économiques. 

Illifé  a  longues  feuilles  :  Bassia  longifolia ,  Linn.;  Lamk. , 


ILL  3i 

IlL  gen.,  tab.  SgS  ;  Arhor  facum  major,  Rumph.,  Amh.,  3, 
tab.  49.  Grand  arbre  laiteux ,  dont  les  rameaux  sont  cylin- 
driques,  glabres,  feuilles  vers  leur  sommet,  raboteux  dans 
leur  partie  nue.  Les  feuilles  sont  éparses,  très-rapprochées  , 
pétiolées,  ovales-oblongues,  presque  lancéolées,  glabres,  en- 
tières,  aiguës,  d'un  vert  foncé  en-dessus,  plus  pâle  en-des- 
sous, longues  de  cinq  à  six  pouces  sur  un  pouce  et  demi  de 
large  :  les  pédoncules  sont  simples,  nombreux  ,  d'abord  pres- 
que verticillés,  longs  d'environ  un  pouce,  situés  près  du  som- 
met des  rameaux;  ils  s'alongent  ensuite  et  deviennent  tout- 
à-fait  pendans.  Les  fleurs  sont  blanches,  leur  calice  velouté 
au  dehors;  le  style  saillant  presque  d'un  pouce  hors  de  la  co- 
rolle ;  les  filamens  attachés  à  son  tube,  huit  entre  les  divi- 
sions du  limbe  ,  huit  autres  plus  bas  ,  alternes  avec  les  pre- 
mières ;  les  anthères  droites,  sagittées ,  velues  en  dedans. 
Le  fruit  est  un  drupe  ovale,  charnu,  laiteux,  contenant 
quatre  à  cinq  noyaux,  quelquefois  deux,  oblongs,  presque 
trigones,  monospermes.  Cette  plante  croit  dans  les  Indes 
orientales  et  au  Malabar. 

Le  bois  de  cet  arbre  est  employé  dans  les  constructions 
en  solives  et  en  poutres  :  il  est  très -combustible.  Les  na- 
turels aiguisent  par  le  bout  les  rameaux  et  les  branches; 
ils  s'en  servent  comme  de  flambeaux  pour  aller,  le  soir,  à 
la  pêche  des  poissons ,  des  crabes  et  des  coquillages  sur  les 
bords  de  la  mer.  On  mange  ses  fleurs  lorsqu'elles  tombent  : 
mises  dans  l'eau;  elles  lui  donnent  un  petit  goût  agréable  5 
et  la  rendent  rafraîchissante, 

Illipé  a  larges  feuilles  :  Bassia  latifolia ,  Roxb. ,  Corom,  , 
1  ,  pag.  20,  tab.  19  ;  Mahwahlree ,  Act.  soc.  Bengal. ,  1  ,  p. 
3oo;  Madhuca  indica,  Gmel. ,  Sjst.  Arbre  assez  fort,  chargé 
de  branches  et  de  rameaux  nombreux,  étalés  horizontale- 
ment, garnis  de  feuilles  amples,  ovales,  presque  elliptiques, 
arrondies  à  leurs  deux  extrémités  ,  longues  de  six  pouces  , 
larges  de  quatre.  Les  fleurs  sont  nombreuses  ,  pendantes  , 
réunies  en  un  paquet  terminal;  les  pédoncules  simples,  longs 
d'un  pouce;  le  calice  glabre,  à  huit  dents  ovales;  les  divi- 
sions de  la  corolle  ovales,  une  fois  plus  courtes  que  le  tube; 
les  élamines  vont  quelquefois  jusqu'au  nombre  de  trente-six. 
I-e  fruit  est  un  drupe,  de  la  grosseur  d'une  pi^une,  à  quatre. 


32  ILL 

quelquefois  deux  semences  oblongues  ,  aiguës.  Cet  arbre 
croît  sur  les  montagnes,  dans  les  Indes  orientait  s. 

Son  bois  est  d'une  dureté  médiocre,  d'un  grain  fin  et 
rougeâtre.  Lorsqu'on  l'entame  ,  il  en  découle  une  gomme- 
résine  très-abondante,  dont  on  ne  fait  aucun  usage.  Les 
fleurs  desséchées  font  un  objet  de  commerce  assez  considé- 
rable :  elles  se  mangent  sans  autre  préparation  ,  quelque- 
fois mêlées  aux  carries,  ou  bien  bouillies  avec  le  riz  :  elles 
donnent  une  nourriture  saine  et  fortifiante:  même  fraîches, 
elles  ont  un  goût  relevé  et  agréable.  Si  on  les  fait  fermejiter 
avec  de  l'eau,  et  que  l'on  en  distille  le  produit,  on  obtient 
une  liqueur  alcoolique ,  dont  une  très-petite  quantité  suffit 
pour  enivrer.  Ces  fieurs  paroissent  au  mois  de  Mars-,  lorsque 
les  feuilles  sont  toutes  touibées;  elles  forment  une  grappe  de 
trente  à  quarante  fleurs:  elles  restent  constamment  fermées, 
et  les  corolles  ne  tombent  que  vers  la  fin  d'Avril,  un  peu 
après  le  lever  du  soleil,  temps  que  Ton  choisit  pour  les  ra- 
masser,  afin  de  les  faire  sécher  au  soleil,  ce  qui  n'exige  que 
peu  de  jours;  ainsi  préparées,  elles  ont  le  goût,  l'odeur  et 
même  l'aspect  du  raisin  sec. 

Les  graines  exprimées  donnent  en  grande  abondance  une 
huile  qui  se  fige  facilement  :  en  vieillissant,  elle  contracte 
un  goût  de  beurre  un  peu  rance.  Elle  est  l'objet  d'une  grande 
consommation  et  d'un  commerce  actif  dans  diverses  parties 
de  l'Inde  :  on  la  brûle;  on  la  mêle  dans  le  beurre  clarifié, 
c'est-à-dire  ,  rendu  aussi    coulant  que  l'huile. 

Cet  arbre  est  cultivé  avec  soin  dans  son  pays  natal.  On  en 
sème  les  graines  vers  le  commencement  des  pluies,  ou  sur 
couches  (si  on  veut  le  transplanter) ,  ou  à  trente  et  quarante 
pieds  de  distance,  sur  le  terrain  qu'il  doit  occuper.  Après 
sept  ans,  il  commence  à  donner  des  fleurs;  à  dix  ans,  il 
donne  demi-récolte  ;  à  vingt  ans  ,  il  cesse  de  croître,  et  il  vit 
jusqu'à  cent  ans.  Un  arbre»,  en  plein  rapport ,  donne  trois 
cents  livres  de  fleurs,  qui  valent  soixante  irancs ,  argent  de 
France  ,  et  soixante  livres  d'huile  ,  qui  valent  cinquante- 
deux  francs;  ce  qui  forme,  pour  le  propriétaire,  un  revenu 
très-lucratif.  La  récolte  de  cet  arbre  est  plus  assurée  qu'au- 
cune autre  production  de  l'Inde  ,  parce  qu'il  ne  craint  pas 
les  sécheresses  qui,   quelquefois,    font  manquer  le  riz,  le 


ÏLL  55 

millet  et  autres  grains.  (Journ.  de  botan.,  4  vol.,  pag.  118.) 
Illipé  butyracé  :  Bassia  hutj^racea  ,  Roxb.  ,  Asiat.  rech.  , 
vol.  8;  Biblioth.  britan.,  vol.  4:  ,  pag.  22;  Fulwah  seu  Ful- 
ivarali.  Le  tronc  de  cet  arbre  a  environ  six  pieds  de  circon- 
férence ;  il  est  chargé  de  rameaux  dont  l'écorce  est  lisse ,  brune , 
parsemée  de  taches  cendrées.  Les  feuilles  sont  alternes,  pé- 
tiolées  ,  ovales ,  cunéiformes  à  leur  base ,  entières ,  velues 
en-dessous,  longues  de  six  à  douze  pouces;  les  fleurs  grandes, 
nombreuses,  pendantes,  d'un  jaune  pâle,  placées  à  la  base 
des  jeunes  pousses;  le  calice  a  de  quatre  à  six  divisions ,  cou- 
vertes d'un  duvet  ferrugineux  ;  le  tube  de  la  corolle  presque 
cylindrique  ,  de  la  longueur  du  calice  ;  les  divisions  obtuses  , 
plus  longues  que  le  tube  ;  trente  à  quarante  étamines;  l'ovaire 
à  dix  ou  douze  loges  monospermes ,  velu,  entouré  d'un  an- 
neau pubescent.  Le  fruit  est  un  drupe  oblong,  charnu,  ne 
renfermant ,   par  avortement ,  que  deux  ou  trois  noyaux. 

Cet  arbre    croît  dans   les   Indes   orientales.    Ses  semences 

donnent  une  substance  butyreuse  ,  ferme,  dont  se  nourrissent 

les  naturels  des  diverses  parties  de  l'Inde,  et  qu'ils  emploient 

dans  leur  cuisine    ordinaire  ,  seule  ou  mêlée  avec  le   ghée , 

qui  est  du  beurre  clarifié  par  l'ébuUition.  On  emploie  l'huile 

exprimée  des  fruits  mûrs  comme  l'huile  ordinaire  à  brûler , 

lorsqu'on  n'a  pas  de  quoi  se  procurer  de  l'huile  de  cocos.  La 

première  est  plus  épaisse;  elle  dure  plus  long-temps,   mais 

donne   moins  de  lumière  ;  elle  fume  un  peu  ,   et  son  odeur 

n'est  pas  agréable.  Cette  huile  est  l'ingrédient  principal  du 

savon  commun  du  pays  ;  on  la  vend  pour  cet  usage  au  même 

prix  que  celle  du  coco.    Les  naturels  la  substituent  au  ghée 

et  à  l'huile  de  cocos,  dans  la  préparation  des  mets  et  dans 

les  sauces.  On  en  fait  des  gâteaux  dont  la  vente  est  un  objet 

de  commerce  parmi  les  pauvres  :  elle  s'emploie  en  topique 

dans  les  maladies  éruptives,   telles  que  la  gaie,   etc.,    ainsi 

que  l'écorce  de  Tarbre.    Le  peuple   ramasse  les  fleurs ,   qui 

tombent  en  Mai  ;  il  les  fait  sécher  au  soleil,   les  rôtit  et  en 

fait  un  bon  aliment  :  il  les  fait  aussi   bouillir  en  consistance 

de  gelée,  en  forme  de  petites  boules,  qu'il  vend  ou  échange 

contre   du  riz,    du  poisson  ou  autres  denrées.  Le  fruit,  mûr 

ou  non,  sert  aussi  de  nourriture  :  lorsqu'il  n'est  pas  mûr, 

on  enlève  la  peau  ,   et  après  en  avoir  retiré  le  noyau  non 

25.  3 


34  ILL 

mûr,  on  fait  bouillir  le  reste  en  gelée  ,  et  on  le  mange  avec 
du  sel  ou  du  piment.  On  peut  ajouter  que  les  oiseaux  de 
nuit,  les  écureuils,  les  lézards,  les  chiens  et  les  chacals  pren- 
nent leur  part  des  fleurs  de  cet  arbre. 

Le  bois  est  aussi  dur  et  se  conserve  aussi  bien  que  le  bols 
de  tech ;  mais  on  ne  le  travaille  pas  aussi  facilement  :  il  ne 
fournit  pas  des  poutres  et  des  planches  aussi  longues,  excepté 
dans  les  terrains  argileux  ,  oii  l'arbre  s'élève  à  une  hauteur 
considérable;  mais,  dans  cette  nature  de  sol,  il  ne  fournit 
que  peu  de  branches  ,  et  moins  de  fruits  que  dans  les  terrains 
sablonneux  et  mélangés ,  qui  lui  conviennent  plus  particuliè- 
rement. 

Il  paroit  que  Tarbre  nommé  par  Mongo-Parck,  scliea,  ou 
arbre  à  beurre  d'Afrique,  est,  d'après  la  description  qu'il 
en  donne,  une  espèce  du  même  genre.  II  dit,  pag.  352  de 
ses  Voyages  dans  l'intérieur  de  l'Afrique  :  «  L'apparence  du 
«  fruit  place  évidemment  l'arbre  appelé  schea.  dans  l'ordre 
,(,  naturel  des  sapotilliers ,  auquel  appartient  le  hassia.  Il 
«  ressemble  un  peu  au  hassia  latifolia  ou  madheuca,  décrit  par 
«  le  lieutenant  Hamilto-n  ,  dans  les  Recherches  asiatiques  , 
«  vol.  1  ,  pag.  5oo.^^  On  voyoit,  ajqute  Mongo-Parck,  le 
peuple  occupé  partout  à  cueillir  le  fruit  du  schea,  avec  lequel 
on  prépare  un  beurre  végétal  :  ces  arbres  croissent  en  quan- 
tité dans  toule  cette  partie  de  Bambarra.  On  ne  les  plante 
point;  on  les  trouve  dans  les  bois,  et  lorsqu'on  abat  ceux-ci 
pour  défricher,  on  n'épargne  que  les  schea.  L'arbre  ressemble 
laeaucoup  au  chêne  d'Amérique,  et  le  fruit,  dont  le  noyau 
séché  au  soleil  fournit  la  matière  butyreuse  par  l'ébullition 
dans  l'eau ,  ressemble,  jusqu'à  un  certain  point,  à  l'olive 
d'Espagne.  Ce  noyau  est  enveloppé  d'une  matière  pulpeuse, 
d'un  goût  sucré,  recouvcî'te  d'un  épiderme  mince  de  cou- 
leur verte,  et  le  beurre  qu'il  fournit,  outre  l'avantage  de 
se  conserver  pendant  une  année  sans  être  salé,  est  plus  blanc, 
plus  ferme,  plus  savoureux  que  le  meilleur  beurre  animal. 
La  préparation  de  ce  comestible  paroît  être  l'un  des  premiers 
objets  de  l'industrie  africaine  dans  ce  pays  et  dans  les  con- 
trées voisines,  et  cette  matière  y  forme  un  des  principaux 
articles  du  commerce  intérieur.  (Poia.) 

ILLI^É,  ILLIPAT.  (Bot.)  C'est  le  bassia,  genre  de  la  famille 


ÎLT  U 

des  sapotées  ,  qui  porte  ce  nom  sur  la  côte  malabare,  suivant 
Kœnig,  cité  par  Linnaeus,  et  sur  la  côte  de  Coromandel, 
suivant  les  herbiers  envoyés  de  ce  lieu.  Voy.  Illipé  ci-dessus.  (J.) 

ILLMU.  (Bot.)  Voyez  Huilmo  ,  Illeu.  (J.) 

ILLOSPORIUM.  {Bot.)  Champignons  extrêmement  petits, 
qui  croissent  sur  les  végétaux.  Ils  sont  très-voisins  des  genres 
Bactridium  ,Sporidesmium  et  Apiosporium ;  ils  en  différent  seule- 
ment par  la  présence  d'une  membrane  extrêmement  mince, 
granuleuse,  sur  laquelle  sont  épars  ou  groupés,  en  globules 
irréguliers ,  des  sporidies  ou  séminules  colorées.  Ce  genre  a  été 
établi  par  Martius ,  dans  sa  Flore  d'Erlangen  :  Nées  et  Ehren- 
berg  l'ont  adopté.  L'Ill.  rose  {III.  roseum,  Mart.)  forme  des 
vésicules  et  des  taches  d'un  blanc  rose  sur  les  lichens  du 
genre  Peltidea.  Les  séminules  forment  de  petits  tas  plus  rose. 
Cette  espèce  est  la  même  que  le  conisporium  Linchii ,  Nées , 
Sjyst.,  p.  27,  §.  47.  (Lem.) 

ILLY-AMMANOEK.  (Bot.)  Sur  la  côte  de  Coromandel, 
suivant  Burmann ,  on  donne  ce  nom  à  un  médicinier ,  ja- 
tropha  gossypifolia.  (  J.  ) 

ILOTE,  llotus.  {Conchjl.)  Nom  de  genre  imposé  par  M. 
Denys  de  Montfort  à  un  petit  corps  crétacé,  presque  micros- 
copique., décrit  et  6guré  sous  le  nom  de  nautilus  orhiculus 
par  L.  von  Fichtel,  Test,  microscop.,  p.  112,  tab.  21  ,  fig.  a-d, 
qui  l'a  trouvé  dans  les  sables  de  la  mer  Méditerranée ,  prés 
Livourne.  Quoiqu'il  soit  presque  impossible  d'en  bien  juger 
d'après  la  simple  figure  de  l'observateur  que  nous  venons  de 
citer,  et  d'y  voir  rien  autre  chose  qu'une  sorte  de  très-petite 
nummulite  dont  la  partie  la  plus  saillante  de  chaque  face 
ne  seroit  pas  dans  le  centre  ,  M.  Denys  de  Montfort  n'y  trouve 
pas  moins  une  coquille  libre,  univalve  .  cloisonnée  et  cellulée, 
contournée  en  disque  et  presque  lenticulaire,  ayant  sa  spire 
excentrique,  apparente,  mammelonéesur  les  deux  flancs;  la 
bouche  linéale,  triangulaire,  échancrée  sur  le  dos  et  cel- 
lulée, recevant  dans  son  milieu  le  retour  de  la  spire;  le 
dernier  tour  enveloppant  tous  les  autres;  les  cloisons  unies 
,et  le  dos  caréné.  L'espèce  qui  sert  de  type  à  ce  genre  et 
qu'il  nomme  TIlote  rotalé  ,  llotus  rotalisaius ,  n'a  qu'une 
ligne  de  diamètre  au  plus  ;  elle  est  blanche  et  irisée.  (De  B.  ) 

ILTIS  {Mamm.),  nom  allemand  du  putois.  (F.  G.) 


36  ILW 

ILWARSVOGEL  (Ornilh.),  nom  dalécarlien  de  rortolaa 
de  neige,  emberiza  nivalis ,  Linn.  (Ch.  D.) 

ILY  [Bot.),  nom  malabare  du  bambou.  (J.) 

ILY-MULLU.  [Bot.)  Nom  malabare,  suivant  Rhéede , 
d'une  plante  gramince  ,  qui  est  le  stipa  littorea  de  Burmann  , 
le  spinifex  squarrosus  de  Linnseus.  (J.) 

ILYN.  [Min.)  M.  Nose  a  donné  ce  nom,  d'un  mot  grec 
qui  veut  dire  limon,  à  une  roche  qui  forme  la  masse  prin- 
cipale de  beaucoup  de  montagnes  des  deux  côtés  du  Rhin, 
et  qui  s'étendent  même  assez  loin. 

C'est  une  roche  composée  qui  paroît  avoir  subi  l'action 
du  feu  ,  et  qui  se  distingue  de  l'argile  et  de  l'argilolite 
(Thonslein)  par  sa  fusibilité.  Elle  est  connue  sur  les  bords  du 
Rhin  sons  le  nom  de  Graustein,  et  passe  au  basalte  et  à  la 
wake.  Elle  est  d'un  gris  de  cendre,  quelquefois  d'un  brun 
mordoré  ;  assez  compacte  :  sa  cassure  donne  des  surfaces 
mattes  et  raboteuses.  Elle  a  une  dureté  moyenne,  et  i^pand , 
par  l'insufflation  de  l'haleine,  l'odeur  argileuse.  On  y  trouve 
des  cristaux  de  fclspafh  et  d'haiiyne  disséminés. 

L'ilyn  ,  autant  qu'on  peut  en  juger  par  cette  description, 
paroit  avoir  beaucoup  de  rapports  avec  le  Trachyte.  Voyez 
ce  mot.   (B.) 

IMAGE,  Imago.  (Entom.)  On  no^me  ainsi  l'insecte  parfait, 
ou  le  quatrième  état  par  lequel  passe  et  où  arrive  l'insecte 
lorsqu'il  est  complètement  organisé,  c'est-à-dire  quand 
il  a  subi  toutes  ses* métamorphoses  :  d'abord  sous  la  forme 
d'œuf ,  il  a  paru  ensuite  sous  celle  de  chenille  ou  de  larve; 
après  différentes  mues  ou  changemens  de  peau,  qui  souvent 
encore  lui  ont  communiqué  des  aspects  divers,  il  prend  la 
forme  de  chrysalide  ou  de  nymphe;  enfin  il  arrive  à  l'état 
parfait  :  voilà  ce  que  Fabricius  et  d'autres  auteurs  ont 
nommé  l'image.  Sous  cette  forme  l'insecte  ne  croît  plus; 
souA^ent  il  ne  prend  plus  de  nourriture,  et  c'est  alors  seu- 
lement qu'il  peut  reproduire  sa  race  ou  son  espèce. 

Les  anciens  n'ignoroient  pas  ces  circonstances.  On  trouve 
dans  Arisfote,  livre  V,  chap.  18  ,  ce  passage,  que  nous  allons 
emprunter  à  la  traduction  de  Camus.  «  Les  papillons  vien- 
ne nent  de  chenilles  :  c'est  d'abord  moins  qu'un  grain  de 
«  millet,  ensuite  un  petit   ver  qui  grossit  et  qui  au  bout 


IMB  37 

^  de  trois  jours  est  une  petite  chenille.  Quand  ces  clienilles 
«  ont  acquis  leur  croissance,  elles  perdent  le  mouvement 
«  et  changent  de  forme.  On  les  appelle  alors  chrysalides  : 
«  elles  sont  alors  enveloppées  d'un  étui  ferme  :  cependant 
«  si  on  les  touche,  elles  remuent.  Les  chrysalides  sont  ren- 
«  fermées  dans  des  cavités  faites  d'une  matière  qui  ressemble 
«  aux  fils  d'araignées;  elles  n'ont  pas  de  bouche  ni  d'autres 
«  parties  distinctes.  Peu  de  temps  après  l'étui  se  rompt,  et 
«  il  en  sort  des  animaux  volans ,  que  nous  nommons  papil- 
«  Ions.  Dans  leur  premier  état,  celui  de  chenille,  ils  man- 
«  gent  et  rendent  des  excrémens  ;  devenus  chrysalides,  ils 
«  ne  prennent  ni  ne  rendent  rien.  Il  en  est  de  même  de 
«  tous  les  animaux  qui  viennent  de  vers.»  Voyez  Métamor- 
phoses. (  C.  D.) 

IMANTOPÉDE.  (Ornith.)  L'échasse  étant  nommée  en  grec 
imantopois ,  on  a  étendu  l'application  de  ce  terme,  et  le  mot 
imantopède  désigne  en  général  des  oiseaux  munis  de  longues 
jambes,  à  moitié  nues.  (Ch.  D.) 

IMATIDIE,  Imatidium.  (Entom.)  Fabricius  a  décrit  sous  ce 
nom,  qui  en  grec,  ijuctriS'iov ,  signifie  petit  manteau,  une 
division  de  coléoptères  étrangers,  tous  de  l'Amérique  méri- 
dionale, et  qui  paroissent  être  des  cassides,  c'est-à-dire, 
des  tétramérés  phytophages.  Leur  corps  n'est  pas  entière- 
ment caché ,  la  tête  étant  libre  et  visible  en-dessus.  Voyez 
l'article  Casside,  tome  VII.  (  C.  D.) 

IMBER.  {Ornith.)  L'oiseau  désigné  par  ce  nom  et  par  celui 
à^imher  goose   est  Vimbrim.  Voyez  ce  mot.  (Ch.  D.  ) 

IMBERBE  {Ichthyol.) ,  nom  spécifique  d'un  poisson  delà 
mer  Méditerranée  ,    Vophidium   imberbe   de  Linnaeus.    Voyez 

FlERASFEîl.    (  H.  C.  ) 

IMBERBES.  (Ornith.)  M.  Vieillot  appelle  ainsi  une  famille 
de  son  ordre  des  oiseaux  sylvains  et  de  la  tribu  des  anyso- 
dactyles,  qui  comprend  les  genres  Tacco,  Scjthrops ,  Vou- 
roudriou ,  Coulicou  ,  Coucou  ,  Indicateur ,  Toulou  et  Ani.  (Ch.  D.) 

IMBOUREL.  [Bot.)  Dans  un  herbier  de  Coromandel 
donné  à  Commerson  par  M.  Cossigny,  on  trouve  une  plante 
rubiacée  de  ce  nom ,  qui  a  beaucoup  de  rapport  avec  le 
chayaver,  espèce  d'oldenlandia.  (J.) 

IMBRIACO  ou   IMBRIAGO.  iTchthyol.)  Sur  les  côtes  de 


38  1MB 

la  mer  Méditerranée,  on  donne  ce  nom  à  la  trigla  lineaia 
de  Linnœus,  qui  est  la  trigle  lastoviza  de  M.  de  Lacépède. 
Voyez  TarcLE.  (H.  C.) 

IMBRICAIRE,  Imbricaria.  (Bot.)  Genre  de  plantes  dicoty- 
lédones,  à  fleurs  complètes,  monopétalées,  de  la  famille  des 
sapotées,  de  Voctandrie  monogjnie  de  Linnœus ,  olTrant  pour 
caractère  essentiel  :  Un  calice  à  huit  divisions  ;  une  corolle 
monopétale  à  huit  découpures  profondes,  déchiquetées  en 
lanières;  huit  appendices  filiformes;  un  ovaire  supérieur  ;  un 
style  ;  un  stigmate.  Le  fruit  est  une  baie  à  huit  loges  mono- 
spermes, très-souvent  à  quatre  semences  au  moins  par  avor- 
tement. 

Ce  genre  est  si  rapproché  des  mimusops ,  que  plusieurs 
auteurs  les  ont  réunis;  réforme  qui  doit  être  adoptée,  si, 
véritablement,  le  nombre  des  loges  est  tellement  variable 
que  de  huit,  dans  les  imbricaires ,  elles  se  réduisent  à  une 
seule  dans  les  mimusops.  Commerson  a  désigné  ce  genre  sous 
le  nom  d'imbricaria,  à  cause  de  l'usage  que  l'on  fait  de  son 
bois,  qui,  divisé  en  lames  ou  en  lattes,  est  employé  pour  la 
couverture  des  maisons,  Smith  a  employé  le  nom  d'imbricaria 
pour  un  autre  genre ,  qni  appartient  au  jungia  de  Gaertner. 
On  trouve  encore,  dans  la  Flore  d'Amérique  de  Michaux,  un 
genre  Imbricaria  qui  rentre  dans  la  famille  des  lichens. 

Imbricaire  a  gros  fruits  ;  Imbricaria  maxima ,  Lamk. ,  III. 
gen. ,  tab.  3oo;  Mimusops  imbricaria,  Willd.,  Spec,  2,  pag. 
326;  vulgairement  Nattier,  Bois  de  natte,  Bardothier.  Arbre 
observé  par  Commerson  dans  les  Indes  orientales,  dont  les 
feuilles  sont  éparses,  rapprochées  par  touffes,  coriaces,  ovales- 
oblongues  ,  entières,  glabres,  pétiolées  ,  longues  d'environ 
trois  pouces  et  plus  sur  deux  de  large;  les  pétioles  longs 
d'un  pouce  et  demi.  Les  fleurs  sont  solitaires  ,  mélangées  con- 
fusément avec  les  feuilles,  formant,  comme  elles,  des  touffes 
terminales  ;  les  pédoncules  simples  ,  couverts  d'un  duvet  fer- 
rugineux :  les  quatre  découpures  extérieures  du  calice  pu- 
bescentes;  les  intérieures  plus  étroites,  blanchâtres,  de  la 
longueur  de  la  corolle  :  le  tube  de  celle-ci  très-court;  son 
limbe  étalé  en  forme  d'une  étoile  frangée  :  les  étamines 
courtes  ,  insérées  sur  le  tube  de  la  corolle  ,  opposées  à  autant 
de  filamens  écailleux  inclinés  sur  l'ovaire.  Le  fruit  est  une 


IMB  Ss 

baie  ou  une  pomme  globuleuse,  de  la  grosseur  d'une  orange 
moyenne,  acuminée  parle  style,  divisée  en  huit,  plus  ordi- 
nairement en  quatre  loges,  avec  le  même  nombre  de  semen- 
ces :  celles-ci  sont  oblongues,  d'une  forme  irrégulière,  mar. 
quées  d'une  cicatrice  latérale.  (  Poir.) 

IMBRICARIA,  Embricaire  et  Imbricaire.  {Bot.)  Genre  de 
la  famille  des  lichens,  établi  par  Acharius ,  et  qu'il  a  réuni 
ensuite  au  parme/i'a,  qui  comprend  aussi  le  lobaria  du  même 
auteur.  M.  De  Candolle  conserve  le  genre  Imbricaria;  nous 
suivrons  ici  son  opinion  ,  tout  en  convenant  que  le  rappro- 
chement d'Acharius  ne  manque  pas  de  justesse. 

Les  imbricaria  sont  de  beaux  lichens,  qui  forment  sur  les 
écorces  d'arbres ,  sur  les  pierres  et  sur  les  rochers ,  des  plaques 
membraneuses  ou  coriacées,  adhérentes  par  leur  partie  in- 
férieure, et  disposées  en  roses  ou  étoiles  découpées,  plus  ou 
moins,  en  lanières  étroites,  obtuses,  qui  se  recouvrent  ou 
s'embriquent  les  unes  sur  les  autres,  du  centre  à  la  circonfé- 
rence. Le  dessous  est  souvent  garni  de  fibrilles.  Les  scutelles 
ou  conceptacles  sont  situés  en-dessus  ,  fixés  par  leur  centre, 
d'abord  en  forme  de  godet,  puis  plans,  et  d'une  couleur 
différente  de  celle  de  l'expansion  ,  avec  un  rebord  le  plus 
souvent  de  la  couleur  de  cette  dernière  ,  ou  plus  pâle.  Ces 
scutelles  sont  ordinairement  plus  nombreuses  dans  le  centre. 
On  voit  en  outre  sur  plusieurs  espèces  des  glomérules  pul- 
vérulens  épars  ou  marginaux ,  qui  couvrent  même  quelque- 
fois une  grande  partie  de  la  surface  du  lichen,  et  surtout  le 
centre;  alors  les  scutelles  avortent,  et  le  lichen  se  détruit 
plus  tôt   en  cette  partie. 

Ce  genre  renferme  près  de  soixante-dix  espèces,  presque 
toutes  d'Europe;  quelques-unes  sont  d'Amérique.  Trente  se 
trouvent  en  France,  dont  vingt-une  aux  environs  de  Paris. 

Beaucoup  d'espèces  méritent  d'être  citées,  parce  qu'on  les 
rerfcontre  souvent  sur  les  arbres,  dans  les  bois,  les  vergers 
et  les  promenades  :  elles  se  font  remarquer  par  leur  élégance 
et  par  leur  couleur. 

§.  i."  Expansion  hérissée  en-dessous  et  divisée  en 
lobes  linéaires. 

î ."   Imbricaria  étoile  :    Imbricaria  stellaris  ,    Decand. ,   FI. 


40  IMB 

fr. ,  1047;  Lichen  stellaris,  Linn. ,  Hoffm. ,  Enum. ,  pi.  i5, 
fig.  1  et  2  ;  Dillen.,  Musc,  t.  24,  fig.  70;  Parmelia  stellaris  , 
Ach, ,  Syn.,  216.  Expansion  rayonnante  ,  d'un  vert  griscàlre, 
plissée  ou  rugueuse,  blanche  en -dessous  avec  des  fibrilles 
grises;  découpures  presque  linéaires  ,  un  peu  convexes, 
muitifides;  scutelles  d'un  noir  voilé  de  gris  ou  glauque,  à 
rebord  d'abord  entier,  puis  flexueux  et  crénelé.  Commun 
sur  les  écorces  des  arbres. 

2.°  Imbricaria  pulvérulent  :  Imhricaria  pulverulenta ,  Dec, 
FI.  fr.,  1049;  Loharia  Tpiilverulenta  ,  Hoffm.,  PL,  llch. ,  t.  8, 
fig.  2:  Lichen  omphalodes ,  3 acq, ,,  Coll.,  2,  t.  i5,  fig.  2.  Ex- 
pansion étoilée,  d'un  blanc  bleuâtre  ou  d'un  gris  roux  et 
givreux,  couverte  en-dessous  d'un  duvet  noir;  découpures 
jnultifides  et  distinctes  sur  les  bords  ,  planes,  déprimées  ,  on- 
dulées ,  tronquées  à  leur  extrémité  ;  scutelles  d'un  gris 
bleuâtre,  à  bord  entier  ou  flexueux.  Commun  sur  les  écorces 
d'arbres.  Lorsqu'il  est  humecté,  il  prend  une  couleur  d'un 
vert  gai,  et  son  aspect  givreux  disparoit.  Il  offre  plusieurs 
variétés. 

3.°  Imbricaria  gris:  Imbricaria  grisea,  Decand.  ,  FI.  fr. . 
n."  io5o;  Lichen  griseus ,  Lamk.  ;  Lichen  lanuginosus ,  Hoffm., 
Enumer. ,  pl.  10,  fig.  4;  Lichen  pifjreus ,  Engl.  bot.,  fab. 
2064;  Parmelia  pityrea ,  Ach.,  Syn. ,  p.  201.  Expansion  orbi- 
culaire,  grise,  pulvérulente,  blanche  en -dessous  avec  des 
fibrilles  noires;  découpures  du  centre  plissées,  frisées  eÉ 
comme  rongées  ,  pulvérulentes  sur  les  bords  ;  découpures  ou 
lobes  du  pourtour  plans,  arrondis,  crénelés,  givreux;  scu- 
telles concaves ,  d'un  noir  brun ,  givreuses ,  à  bord  entier. 
Ce  lichen  n'est  point  rare;  cependant  il  n'est  pas  commun 
avec  ses  scutelles.  Il  croît  sur  les  écorces  d'arbres  et  sur  les 
murs. 

4,°  Imbricaria  orbiculaire  :  Imbricaria  cfcloselis,  Decand., 
Flore  fr. ,  io5i  ;  Lichen  orbicularis ,  Hoffm.,  Enum.,  pl.'g, 
fig.  I  ;  Parmelia  cyclo&elis ,  Ach.;  Lichen  cjcloselis ,  Engl.  bot.  y 
tab.  1942.  Orbiculaire,  d'un  gris  livide,  garni  en -dessous 
d'un  duvet  noir  spongieux  ;  découpures  embriquécs,  un  peu 
planes,  très-découpées  et  comme  digitées,  crénelées,  à  peine 
ciliées;  d'abord  entier  sur  le  bord,  puis  élevé,  crispé  et  un 
peu  pulvérulent;    scutelles  éparses  d'un  noir  brun,  à  bord, 


IMB  41 

élevé  et  entier.  Il  se  rencontre  fréquemment  sur  les  troncs 
d'arbres,  et  fait  le  passage  de  l'espèce  précédente  à  la  sui- 
vante. 

5.°  Imbricaria  a  cheveux  noirs  :  Imhricaria  ulothrix,  Dec. , 
FI.  fr.  ,n.°  1062;  Lichen  ciliatus ,  Hoffm. ,  E/xwm.,  pi.  i4i  ^ig-  i- 
Expansion  étoilée ,  d'un  gris  glauque  un  peu  livide,  garnie 
en-dessous  de  fibrilles  noires  ;  découpures  écartées,  linéaires , 
nombreuses,  dichotomes,  planes  et  ciliées  sur  les  bords; 
scutelles  d'un  noir  brun,  à  contour  entier,  garni  en-dessous 
de  cils  fibreux,  peu  apparens.  Ce  petit  lichen  croit  sur  les 
arbres  et  quelquefois  sur  les  planches  exposées  à  l'air  humide. 

6."  Imbricaria  brodé  :  Imbricaria  retiruga,  Decand.,  FI. 
fr. ,  io54;  Lichen  saxatilis,  Linn. ,  HofFm.,  Enum.,  tab.  i5, 
fig.  1,  et  tab.  16,'  fig.  1;  Engl.  bot.,  tab.  6o3  ;  ^l\uU,  in 
Jacq.,  Coll.  4,  tab.  20,  fig.  2;  Parmelia  saxatilis ,  Ach., 
Sjn.,  204  ;  Vaill. ,  Bof.  Par. ,  tab.  21  ,  fig.  1.  Expansion  orbicu- 
laire,  grise,  rude  au  toucher,  lacuneuse  et  réticulée  par 
des  nervures,  noire  et  fibreuse  en-dessous;  lanières  embri- 
quées,  sinuées  et  lobées,  planes,  dilatées  ou  arrondies  et 
presque  tronquées  aux  extrémités;  scutelles  de  couleur  baie 
et  crénelées  sur  le  bord.  Cette  espèce ,  quelquefois  assez 
étendue ,   croît  sur  les  rochers  et  sur  les  écorces  d'arljres. 

7."  Imbricaria  brûlé  :  Imbricaria  adusia  ,  Decand.,  FI.  fr. , 
n.°  io55  ;  Lichen  oinphalodes ,  Linn.;  Engl.  bot.,  pi.  604  ; 
Vaill.,  Bot.  Par.,  tab.  20,  fig.  10;  Dill. ,  Hist.  musc,  tab.  20, 
fig.  80;  Parmelia  omphalodes  ,  Ach.  Expansion  orbiculaire  , 
d'un  brun  olivâtre  ou  noirâtre,  luisante,  ponctuée  de  noir, 
fibrillifère  et  noire  en-dessous;  lanières  sinuées,  multifides, 
linéaires,  planes,  presque  tronquées ,  arrondies  et  crénelées 
au  pourtour;  scutelles  baies,  un  peu  crénelées  sur  le  bord. 
Vient  sur  les  rochers  et  les  écorces  d'arbres. 

§.  2.  Expansion  hérissée  en-dessous ,   et  divisée  en 

lobes  larges  et  arrondis. 
8.°  Imbricaria  a  feuilles  de  chêne  :  Imbricaria  quercina, 
Decand.,  n."  io56  ;  Lichen  quercinus ,  "WiHd.,  FI.  Berol. , 
tab.  7,  fig.  10;  Lichen quercifolius ,^\iU ,  ap.  Jacq.,  Coll.,  3, 
tab.  g,  fig.  2  ;  Lichen  tiliaceus,  HofTm.,  Enum.,  tab.  16,  fig.  2  ; 
Engl.  lot.,   tab,  700;  Parmelia  tiliacea,  Ach.,  Syn.,  p.  199. 


42  IMB 

Expansion  orbiculaire ,  membraneuse ,  d'un  gris  glauque  et 
un  peu  givreux,  d'un  noir  brun  en-dessous,  r.vec  des  fibrilles 
noires;  lobes  sinués,  lacinics,  les  derniers  arrondis  et  créne- 
lés; scutelles  presque  brunes,  orbiculaires ,  presque  entières 
sur  les  bords.  Cette  belle  espèce  est  fréquente  sur  les  écorces 
d'arbres,  dans  les  bois,  et  plus  rare  sur  les  rochers. 

9.°  Imrricaria  plombé  :  Imbricaria  phimbea ,  Decand. ,  FI. 
fr. ,  n."  io58;  Parmelia  plumhea,  Ach. ,  Syn.  excl.  syn.  Expan- 
sion orbiculaire,  d'un  gris  de  plomb  livide,  garnie  en-dessous 
d'un  duvet  snongieux  de  couleur  bleue  ;  découpures  du 
pourtour  aplaàes  ,  plissées ,  rayonnantes,  arrondies,  inci- 
sées et  crénelées  ;  scutelles  éparses  ,  convexes  ,  brunes  ,  à 
bord  presque  de  même  couleur  et  entier.  Cette  jolie  espèce 
croît  sur  les  troncs  d'arbres  et  sur  les  rochers.  Elle  est  com- 
mune dans  beaucoup  d'endroits.  En  France  elle  se  rencontre 
dans  les  Cévennes,  en  Gascogne  et  en  Bretagne,  à  Fontaine- 
bleau, etc.  La  figure  3  ,  pi.  45,  ord.  23  de  Micheli,  ne  pa- 
roît  point  devoir  la  représenter  ;  car  l'auteur  dit  que  le  lichen 
qu'elle  représente  ,  est  blanc  en-dessous  ;  mais  il  paroît  bien 
que  c'est  le  lichen plumbeus ,  Lightf.,  Scot.,  tab.  26. 

U Imbricaria  carulescens ,  Decand.  (excZ.  Sjn,) ,  ou  Parmelia 
ruhiginosa,  Ach.,  et  Lichen  affnis  ,  Engl.  bot.,  tab.  943,  est 
très-voisin  du  précédent  :  il  en  diffère  surtout  par  ses  scu- 
telles entassées  dans  le  centre  de  l'expansion,  planes,  d'un 
brun  roux,  crénelées  et  blanchâtres  tout  autour.  On  le  trouve 
dans  les  mêmes  lieux. 

$.  3.  Expansion  glabre ,  divisée  en  lobes  larges  et 
arrondis. 

10.°  Imbricaria  des  murailles  :  Imbricaria  parietina,  Dec., 
Fl.fr.,  n."  1060;  Lichen  parietinus ,  Linn.,  Hoffm.,  Enum., 
pi.  ]8,  fig.  i;  Engl.  bot.,  tab.  194;  Dill.,  Musc,  tab.  24, 
fig.  76.  Expansion  orbiculaire,  d'un  beau  jaune  doré  ou  jon- 
quille, plus  pâle  en -dessous  et  un  peu  fibrillifère  ;  lobes 
rayonnans,  déprimés,  plans,  dilatés  à  l'extrémité,  arrondis, 
crénelés  et  crispés  ou  frisés.  Scutelles  de  même  couleur  plus 
foncée,  entières,  et  plus  pâles  sur  les  bords.  Cette  espèce, 
des  plus  communes,  et  remarquable  par  sa  couleur,  couvre 
quelquefois  les  troncs  d'arbres  de  larges  et  nombreuses  pla- 


IMB  43 

ques,  qui  suivent  les  sinuosités  des  écorces.  Elle  croît  égale- 
ment sur  les  pierres  et  sur  les  murs.  Lorsqu'elle  vieillit , 
elle  devient  verdàtre.  On  la  trouve  partout. 

13.°  Imbricaria  olivacé  :  Imbricaria  olivacea,  Decand.  ^ 
FI.  fr.,  n.°  1061;  Lichen  olivaceus ,  Linn.,  Hoffm.,  Enum.  ^ 
tab.  i3,  fig.  3— 6;  Dill.,  Musc,  tab.  24,  fig.  77?  78;  Vaill., 
Bot.,  tab.  20,  fig.  8.  Expansion  orbiculaire ,  d'un  brun 
olive,  unie  ou  ponctuée,  plane  ou  ridée,  plus  pâle,  brune, 
scabre  et  un  peu  fibrillifère  en -dessous;  lobes  rayonnans, 
déprimés,  plans,  dilatés,  arrondis,  crénelés;  scutelles  un 
peu  aplaties,  plus  pâles  en  couleur,  crénelées  sur  le  bord. 
Croît  sur  les  rochers  et  les  écorces  d'arbres  dans  les  bois. 

12.°  Imbricaria  CIBOIRE  :  Imhricaria  acetabulum,  Decand. , 
FI.  fr. ,  n.°  1062  ;  Lichen  acetabulum,  Jacq. ,  Coll. ,  3  ,  tab.  9  , 
fig.  1  ;  Hoffm.,  Enum.,  tab.  18,  fig.  2;  Dill.,  Musc,  tab.  24, 
fig.  79  ;  Vaill. ,  Bot.  Par. ,  tab.  1 1  ,  fig.  1 3  :  Parmelia  corrugata  , 
Ach.  Expansion  orbiculaire,  membraneuse,  un  peu  ridée, 
d'un  vert  glauque  ,  brun-noir  en-dessous  et  fibrillifère;  lobes 
incisés,  arrondis,  lâches,  flexueux  et  plissés  ,  très-entiers; 
scutelles  amples,  flexueuses,  rousses  ou  brunes,  à  bord 
crénelé,  ou  ridé  et  vert.  Cette  espèce,  une  des  plus  grandes 
de  ce  genre,  et  remarquable  par  la  forme  des  scutelles,  croît 
sur  les  écorces  des  arbres  dans  les  bois. 

13."  Imbricaria  froncé  :  Imbricaria  caperata  ,  Decand., 
FI.  fr. ,  n."  io65;  Lichen  caperalus  ,  Linn.;  Wulf,  in  Jacq., 
Coll.,  4,  tab.  20,  fig.  1;  Engl.  bot.,  654;  Hofifm.,  Enum., 
tab.  19,  fig.  2  ,  et  tab.  20,  fig.  2  ;  Platisma  caperatum ,  ejusd.^ 
PI.  lich.  ,  tab.  58,  fig.  1  ,  tab.  Sg,  fig.  1 ,  tab.  42  ,  fig.  1.  Ex- 
pansion orbiculaire ,  coriace  ,  d'un  jaune  verdàtre  pâle  ou 
soufré ,  rugueuse ,  souvent  couverte  de  poussière  dans  le 
milieu,  noire  et  hispide  en -dessous;  lobes  plissés,  sinués , 
laciniés,  arrondis,  presque  entiers;  scutelles  brunes,  à  bord 
verdàtre,  recourbé,  entier  d'abord,  puis  pulvérulent.  Ce 
lichen,  qui  forme  quelquefois  des  plaques  larges  comme  la 
main  et  froncées  dans  le  centre ,  est  commun  sur  les  écorces 
d'arbre  dans  les  bois  et  sur  les  rochers.  On  remarque  que 
dans  le  premier  cas  il  offre  rarement  des  scutelles. 


44  IMB 

5.  4'  Expansion  glahre^  divisée  en  lobes  linéaires, 

i4'**  Imbricaria  lONCTUÉ  :  Imbricaria  conspersa  ,  Decand., 
FI.  fr.,  11.°  1064  ;  Lichen  centrifugus,  Hoffm.  ,  tab.  )o,  fig.  5  , 
PL  lich.,  tab.  16,  fig,  2.  Expansion  orbiculaire  ou  irrégu- 
lière, d'un  jaune  verdàlre  pâle,  lisse,  souvent  ponctuée 
de  noir,  d'un  brun  noirâtre  en-dessous  et  fibrillifère  ;  dé- 
coupures sinuées  ,  lobées  ,  arrondies  ,  crénelées  ,  un  peu 
aplaties;  scutelles  situées  au  centre,  brunes,  à  bord  jaunâtre 
presque  entier.  Cette  espèce  croît  sur  les  rochers  et  sur  les 
pierres,  dans  les  lieux  montagneux.  Elle  est  quelquefois  en- 
tièrement pulvérulente  dans  le  centre  ;  quelquefois  aussi 
la  partie  centrale  se  détruit,  et  il  ne  reste  que  les  décou- 
pures de  la  circonférence  :  c'est  ce  qui  Ta  fait  confondre 
avec  le  lichen  centrifugus ,  Linn. 

i5.°  Imbricaria  renflé  :  Imbricaria  physodes ,  Decand., 
Fl.fr.,  n."  1066;  Lichen  phy soies ,  Linn.,  Hoffm.,  Enum., 
tab.  1 5  ,  fig.  2  ;  Engl.  bot. ,  tab.  1 26  ;  Jacq. ,  Coll. ,  3  ,  tab.  8 , 
fig.  2  ,  3;  FI.  Dan. ,  tab.  118S,  fig.  2  ;  Dill. ,  Musc,  tab.  20, 
fig.  49  ;  Parmelia  physodes ,  Ach.  Expansion  arrondie  ou  ob- 
longue,  un  peu  rayonnante  sur  les  bords  ,  d'un  blanc  glauque 
ou  grisâtre,  à  découpures  imbriquées,  sinuées,  multifides, 
convexes  ,  glabres ,  renflées  à  leurs  extrémités  et  ascen- 
dantes, d'un  noir  brun  en -dessous;  scutelles  rouges,  en- 
tières sur  les  bords  et  nues.  Ce  lichen  est  quelquefois  un  peu 
plissé  ou  chargé  sur  les  bords  d'une  poussière  grisâtre  ;  quel- 
quefois aussi  il  offre  de  petits  tubercules  punctiformes  noirs  ; 
quelquefois  encore  il  est  bordé  de  noir.  Sa  couleur  varie: 
dans  une  variété  elle  est  olivâtre.  On  le  trouve  sur  les  troncs 
d'arbres,  sur  les  pierres,  à  terre,  sur  les  mousses  et  dans 
les  bois.  (  Lem.  ) 

IMBRICARIA.  (Bot.)  Ce  nom  avoit  d'abord  été  donné  par 
Commerson  à  un  genre  de  la  famille  des  sapotées,  qui  a  été 
réuni  au  mimusops  par  Willdenow.  M.  Smith  ,  suivi  par  M. 
Persoon,  a  appliqué  le  même  nom  h  un  sous  -  arbrisseau  , 
nommé  avant  lui  rnollia  par  Gmelin  ,  et  jwngia  par  Gaertner, 
mais  qui  paroît  ne  pouvoir  être  séparé  de  Yescallonia,  genre 
maintenant  voisin  de  l'airelle  dans  les  éricinées.  Un  troisième 
imbricaria  ,   qui  prévaut  maintenant,    est  celui  d'Acharius, 


IMM  45 

fait  sur  quelques  espèces  de  lichens,  et  adopté  par  MM. 
Michaux  et  De  Candolle.  Voyez  Imericaire  et  l'article  précé- 
dent. (J.) 

IMBRIM.  (Ornith.)  Ce  grand  plongeon  de  la  mer  du  Nord 
est  le  colymbus  immer  ^  Linn.  TCh.  D.) 

IMBRIQUE.  (Bot.)  Composé  de  parties  qui  se  recouvrent 
comme  les  tuiles  d'un  toit.  L'involucre  de  l'artichaut,  par 
exemple,  la  bulbe  du  lis,  etc.,  sont  imbriqués,  c'est-à-dire, 
composés  d'écaillés  en  recouvrement.  Les  étamines  et  les 
camares  du  fruit  du  tulipier ,  du  magnolia ,  etc.  ;  les  feuilles 
du  tamarix  gallica  ,  du  Juniper  us  virginiana ,  du  sedum  acre; 
les  graines  du  cobœa,  de  Vasclepias  ,  etc.;  les  divisions  du 
calice  du  liseron  ;  les  pétales  de  la  rose  ,  dans  la  préfleuraison , 
c'est-à-dire,  avant  l'épanouissement  de  la  fleur,  sont  encore 
des  exemples  de  cette  disposition  particulière.  (Mass.) 

IMBUTINI.  (Bot.)  Micheli  désigne  par  imbutini  des  bois  y 
couleur  de  feuilles  mortes,  un  champignon  du  genre  Peziza 
€t  voisin  du  peziza  acetabuliformis  ,  de  Dillenius.  Cette  espèce 
croît  en  touffe,  et  chaque  individu  forme  un  petit  entonnoir 
[imbutino  j  en  italien)  stipité.  (Lem.) 

IMBUTINO.  {Bot.)  Micheli  donne  ce  nom  à  plusieurs  es- 
pèces de  petits  agarics ,  dont  le  chapeau  a  la  forme  d'un 
petit  entonnoir.  L'un  de  ces  champignons  paroit  être  Vaga- 
ricus  rufus ,  Scop.    Ils  ne  sont  d'aucune  utilité.  (Lem.) 

IMERCOTEFLAK  (Ornith.) ,  nom  groenlandois  de  la  grande 
hirondelle  de  mer  de  Buffon,  sterna  hirundo  ,  Linn.  (Ch.  D.) 

IMGARA  ,  IMGU  {Bot.)  :  noms  arabes  généraux  des 
gommes  ou  sucs  végétaux  ,  selon  Clusius ,  lesquels  s'appli- 
quent plus  particulièrement  à  Vassa  fietida  extrait  d'une 
espèce  de  férule.  (J.) 

IMMA.  {Min.)  Valmont  de  Bomare  a  introduit  ce  mot 
dans  son  Dictionnaire,  et  c'est  le  seul  motif  qui  nous  engage 
à  en  parler  d'après  lui.  C'est,  dit-on,  le  nom  persan  d'une 
ocre  rouge.  (B.) 

IMMÉDIATE  [Insertion].  (Bot.)  Voyez  Insertion.  (Mass.) 

IMMENFRAS.  (  Ornith.)  L'oiseau  auquel  les  Allemands  don- 
nent ce  nom  et  celui  d'immenwolf ,  est  le  guêpier,  merops 
apiaster,  Linn.  (Ch.  D.) 

IMMISCE -BALUK.  {Ichthjol.)  Les  Turcs  nomment  ainsi 
l'athérine  joél,  atherina  hepsetus.  Voyez  Athéri;s^e.  (H.  C.) 


46  IMM 

IMMORTELLE  (Bot.) ,  nom  vulgaire  des  Helichrymm  et  des 
Xeranthcmum,  (H.  Cass.) 

IMMORTELLES.  {Bot.)  Adanson  a  divisé  l'ordre  des  sy- 
nanthérées  en  dix  sections,  dont  la  quatrième  porte  le  nom 
d'immortelles.  Cette  section,  que  Tauteur  distingue  de  celle 
des  chardons  parle  péricline  non  épineux,  est  tout-à-fait 
artificielle;  car  les  quinze  genres  dont  elle  se  compose  ap- 
partiennent à  neuf  tribus  naturelles  différentes.  Vacosta, 
le  cyanas ,  une  partie  du  rliacoma,  le  rhaponticum  (Ad.),  et 
Vamberboi  ,  sont  des  centauriées;  une  partie  du  rhacoma  et  le 
serratula  sont  des  carduinées;  le  plerophorus  est  une  astérée  ; 
le  tarclionanthus  est  une  vernoniée;  le  xeranthemum  (Tourn.) 
est  une  carlinée  ;  le  lonas  ,  le  santolina  et  le  gnaphalium 
(Tourn.)  sont  des  anthémidées  ;  le  polyinnia  est  une  hclian- 
thée  ;  le  gnaphalodes  est  une  inulée;  le  denira  est  une  ambro- 
siée.  (H.  Cass.) 

IMMUSSULUS.  {Oniith.)  Ce  nom,  que  divers  auteurs 
écrivent  aussi  immusculus ,  immustulus ,  est  rangé  par  M.  Savigny 
(  Système  des  oiseaux  d'Egypte)  au  nombre  des  synonymes  de 
l'aigle  commun  ,  son  aquila  fulva  et  le  falco  chrysaetos,  Linn. 
Charleton ,  Exercitationes ,  p.  71,  n."  8,  a  appliqué  le  même 
nom  d''immussulus  à  l'orfraie  ou  grand  aigle  de  mer,  falco 
ossifraga,   Linn.   (Ch.  D.  ) 

IMO.  {Bot.)  Ce  nom  japonois  est  un  de  ceux  donnés,  sui- 
vant M.  Thunberg ,  soit  à  Varum  esculentum ,  espèce  de  gouet, 
dont  on  mange,  dans  ce  pays,  la  racine  et  les  tiges  ;  soit  au 
convolvulus  edulis  de  cet  auteur,  dont  la  racine  tubéreuse, 
comme  celle  de  la  patate,  est  aussi  employée  comme  nour- 
riture dans  le  Japon.  (J.) 

IMPALUNCA.  {Mamm.)  On  trouve  ce  nom  dans  quelques 
auteurs  comme  étant,  au  Congo,  celui  d'une  espèce  de  ga- 
zelle. (F.  C.) 

IMPANGUEZZÉ.  {Mamm.)  Ce  nom,  rapporté  par  Merola, 
est,  dit -il,  au  Congo  et  à  Angola,  celui  de  gazelles  de 
différentes  couleurs ,  très-légères  à  la  course ,  et  armées  de 
cornes  extrêmement  longues.  (F.  C) 

IMPARI-PENNÉE  [Feuille],  {Bot.),  pennée  avec  impaire, 
c'est-à-dire,  pennée  et  terminée  par  une  foliole  solitaire: 
telles  sont  les  feuilles  du  frêne ,  de  la  rose ,  de  l'acacia ,  etc. 
(Mass.) 


IMP  47 

IMPATIENS.  (Bot.)  Une  espèce  de  balsamine  avoit  été 
nommée  impatiens  herba  par  Dodoens  ,  parce  que  ses  capsules, 
parvenues  à  leur  maturité ,  s'ouvrent  avec  élasticité  au 
moindre  contact.  Ce  caractère  existe  égal-ement  dans  les 
autres  espèces  connues  plus  anciennement  S'ous  le  nom  de 
lalsamina,  adopté  par  tous  les  auteurs  depuis  Tragus  jusqu'à 
Tournefort.  Cependant  Linnaeus  lui  a  substitué  pour  nom 
générique  le  mot  impatiens,  qui,  en  qualité  d'adjectif,  ne 
peut  être  employé  que  comme  nom  spécifique.  Il  a  donc  été 
nécessaire  de  rétablir  le  nom  balsamina,  maintenant  reçu.  (J.) 

IMPENNES.  (Ornith.)  Nom  latin,  donné  par  Illiger  à  sa 
41."  famille  d'oiseaux,  composée  du  seul  genre  Manchot, 
dont  les  ailes ,  courtes  et  recouvertes  de  petites  plumes  en 
forme  d'écaillés,  font  l'ofiice  de  nageoires.  (Ch.  D.) 

IMPERATA.  (Bot.)  Cyrillo  faisoit  sous  ce  nom  un  genre 
du  lagurus  cylindricus ,  qui  est  un  calamagrostis  de  M.  Kœler. 
Mais  MM.  de  Lamarck  et  Schrader  le  réunissent  au  genre 
Saccharum  .  dont  il  diffère  cependant  en  quelques  points. 
(Voyez  ci-après.)  On  trouve  encore  dans  l'ouvrage  de  Mœnch 
le  gypsophila  saxijraga ,  devenu  genre  sous  le  nom  de  Impe- 
ratia,  parce  qu'il,  a ,  comme  les  œillets,  quatre  écailles  au 
bas  du  calice.  (J.) 

IMPERATA,  Imperata.  (Bot.)  Genre  de  plantes  monoco- 
tylédones  ,  à  fleurs  glumacées ,  de  la  famille  des  graminées  , 
de  la  triandrie  monogynie  de  Linnaeus,  offrant  pour  caractère 
essentiel  :  Des  épillets  géminés  à  deux  fleurs  mutiques,  en- 
tourées d'une  touffe  lanugineuse  ;  les  valves  calicinales  plus 
longues  que  celles  de  la  corolle  ,  dont  l'inférieure  est  de 
moitié  plus  courte  ;  les  écailles  oblongues  et  ciliées  ;  deux  ou 
trois  étamines;  deux  styles;  les  stigmates  plumeux. 

Ce  genre  a  été  établi  par  Cyrilo ,  adopté  par  Rob.  Brown 
et  DeBeauvois  ,  pour  quelques  plantes  placées  d'abord  parmi 
les  saccharum,  tel  que  le  saccharum  cjlindricum  (Voyez  Ca- 
namelle),  auquel  on  a  ajouté  les  espèces  suivantes.- 

Imperata  spontané  :  Imperata  spontanea ,  Beauv.  ;  Saccha- 
rum spontaneum ,  Linn.  ;  Kerpa  ,  Rheed. ,  Malab. ,  12  ,  tab.  4C. 
Belle  graminée,  qui  croît  sur  les  côtes  du  Malabar,  aux  lieux 
aquatiques.  Ses  tiges  sont  fistuleuses,  hautes  de  douze  pieds; 
les  feuilles  étroites,  longues  de  deu<x:  pieds,  glabres,  roulées 


48  IMP 

à  leurs  bords,  velues  à  l'entrée  de  leur  gaine;  la  paniculc 
soyeuse,  argentée,  longue  d'un  pied,  chargée  de  fleurs  fort 
petites,  disposées  deux  à  deux,  l'une  sessile ,  l'autre  pédi- 
cellée  ,  munies  à  leur  base  d'un  paquet  de  poils  soyeux,  plus 
.  longs  qu'elles,  les  environnant  en  forme  de  collerette;  les 
valves  lancéolées,  aiguës,  scarieuses. 

Impérata  de  Valence  ;  Imperata  sisca  ,  Beauv.  ;  Saccharum 
sisca,  Cavan.,  Icon.  rar.,  5,  lab.  292.  Cette  espèce  est  très- 
rapprochée  du  saccharum  cjUndricum,  si  toutefois  ce  n'est 
pas  la  même.  Ses  tiges  sont  droites,  à  peine  longues  d'un 
pied  ,  à  trois  ou  quatre  nœuds,  couvertes  par  les  gaines  des 
feuilles,  dont  les  radicales  sont  roulées  ,  terminées  par  une 
pointe  très -aiguë;  les  caulinaires  courtes;  les  gaines  très- 
longues;  les  fleurs  réunies  en  un  épi  paniculé,  muni  de  poils 
argentés,  plus  longs  que  les  fleurs;  les  valves  de  la  corolle 
égales,  chargées  d'un  duvet  blanc  ;  le  calice  remplacé  par 
une  touffe  de  poils  blancs  ;  les  semences  oblongues.  Cette 
plante  croît  aux  lieux  humides,  dans  le  royaume  de  Valence. 

Impérata  de  Kœnig  :  Imperata  Kanigil ,  Beauv.;  Saccharum 
Kanigii,  Retz.,  Ohs.,fasc.  5,  pag.  16.  Les  tiges  de  cette  plante 
s'élèvent  plus  que  celles  du  saccharum  cjlindricum  ,  avec  le- 
quel, d'ailleurs,  elle  a  beaucoup  de  rapports;  elle  s'en  dis- 
tingue par  ses  feuilles  planes  et  non  roulées  :  les  articulations 
sont  garnies  de  poils;  les  fleurs  sont  disposées  en  un  épi  cylin- 
drique ;  chacune  d'elles  ne  contient  que  deux  étamines.  Cette 
plante  croit  dans  les  Indes  orientales.  (  Poir.  ) 

IMPÉRATOIRE;  Imperatoria ,  Lamk.  {Bot.)  Genre  de  plan- 
tes dicotylédones,  de  la  famille  des  ombellifères ,  Juss. ,  et  de 
la.  pentandrie  digjnie,  Linn. ,  dont  les  principaux  caractères 
sont  d'avoir  un  calice  entier,  peu  apparent;  une  corolle 
de  cinq  pétales  échancrés ,  courbés  ,  presque  égaux  ;  cinq 
étamines;  un  ovaire  inférieur,  surmonté  de  deux  styles;  un 
fruit  comprimé,  elliptique,  composé  de  deux  graines  bor- 
dées d'une  aile  membraneuse,  marquées  sur  le  dos  de  trois 
petites  côtes. 

Les  impératoires  sont  des  plantes  herbacées,  à  racines  vi- 
vaces ,  à  feuilles  alternes ,  composées,  et  à  fleurs  blanches, 
petites,  disposées  en  ombelles.  Le  nombre  des  espèces  appar- 
tenant à  ce  genre  n'est  pas  parfaitement  déterminé,  à  cause 


iMP  '^9 

des  grands  rapports  qui  existent  entre  ce  dei'nier  et  les  an- 
géliques  ;  ce  qui  fait  que  certaines  espèces  sont  placées  par 
les  uns  dans  les  inipératoîres,  et  par  les  autres  dans  les  angé- 
liques.  C.  Sprengel ,  dans  le  sixième  volume  du  Sjstema  ve- 
getalilium  de  Rœmer  et  Schultes,  fîiit  mention  de  six  espèces 
d'imperaloria.  Nous  nous  contenterons  de  parler  ici  des  deux 
espèces  suivantes  ,  dont  l'une  est  la  plus  anciennement  con- 
nue et  a  servi  de  type  au  genre. 

Lmpératoireostruthier,  vulgairement  Impératoire autruche, 
Benjoin  François;  Irnperatoria  ostruthium,  Linn. ,  Spec. ,  Syij 
Lamk, ,  Illust. ,  t.  199,  fig.  1.  Sa  racine  est  charnue  ,  noueuse, 
assez  grosse,  rameuse,  brune  en  dehors,  blanche  en  dedans, 
elle  a  une  odeur  forte,  aromatique,  et  une  saveur  amère, 
un  peu  acre.  Cette  racine  produit  une  tige  cylindrique  , 
haute  d'un  à  deux  pieds,  garnie  de  feuilles  pétiolées,  ordi- 
nairement divisées  en  trois  folioles  larges,  trilobées  et  den- 
tées. Les  fleurs  sont  blanches,  disposées  en  une  grande  om- 
belle terminale,  composée  de  vingt  à  trente  rayons.  Cette 
plante  croît  en  Europe  ,  dans  les  pressées  et  sur  les  montagnes. 

C'est  du  verbe  latin  imperare  (  commander)  que  dérive  le 
nom  d'impératoire  ,  et  il  a  été  donné  à  l'espèce  dont  il  est 
maintenant  question,  à  cause  des  grandes  vertus  qu'on  lui  a 
attribuées ,  et  parce  qu'avec  elle  on  croyoit  que  le  médecin 
pouvoit,  en  quelque  sorte,  être  le  maître  des  maladies.  La 
racine,  seule  partie  de  la  plante  qu'on  ait  employée  en  mé- 
decine, a  été  conseillée  contre  la  peste,  les  fièvres  putrides, 
les  empoisonneinens ,  le  scorbut ,  les  fièvres  intermittentes, 
la  chlorose,  les  coliques  flatulentes;  mais,  après  avoir  été 
très-préconisée  autrefois,  elle  est  maintenant  presque  entiè- 
rement tombée  en  désuétude.  Elle  jouit  cependant  d'une 
propriété  tonique  très- prononcée,  et  son  usage  peut  être 
avantageux  toutes  les  fois  qu'il  s'agit  de  relever  les  forces. 
On  peut  la  prendre  en  nature  et  en  pxjudre  ,  depuis  douze  Jus- 
qu'à trente-six  grains,  et  eu  infusion  à  la  dose  d'un  à  deux  gros. 

Impératoire  verticillée  :  Irnperatoria  verticillaris ,  Decand., 
FI.  franc.,  tom.  4,  pag.  287;  Angelica  verticillaris  ,  Linn., 
Mant.  •21'].  Sa  tige  est  cylindrique,  souvent  rougeàtre,  haute 
de  trois  à  cinq  pieds,  divisée  en  rameaux  verticillés,  d'au- 
tant plus  nombreux  qu'on  approche  davantage  du  haut  de 


5o  IMP 

la  plante.  Les  feuilles  sont  grandes,  trois  fois  ailées,  à  folioles 
ovales-deltoïdes,  fortement  dentées  en  scie,  glabres,  non  dé- 
currentes  snr  leur  pétiole.  Les  ombelles  sont  grandes,  d'un 
blanc  verdàtre ,  dépourvues  de  collerette  générale,  et  à  dix 
ou  douze  rayons.  Cette  espèce  croit  en  Italie  dans  les  mon- 
tagnes. (L.D.) 

IMPERATOR  (Conchjl.) ,  nom  latin  du  genre  de  coquilles 
que  M.  Denys  de  Montfort  a  appelé  en  françois  Empereur. 
Voyez  ce  mot.  (De  B.) 

IMPER ATORIA.  {Bot.)  Voyez  birÉRAToiEE.  (L.  D.) 
IMPÉRATRICE  BLANCHE  et  IMPÉRATRICE  VIOLETTE 
(Bot.)  :  noms  de  deux  variétés  de  prunes,  dont  la  première 
est  de  grosseur  moyenne,  ovoïde,  blanchâtre  ,  et  la  seconde 
est  plus  grosse  et  d'un  violet  bleuâtre.  (L.  D.) 

IMPÉRIALE.  (Bot.)  On  donne  ce  nom  à  trois  variétés  de 
prune.  L'une  a  le  fruit  gros,  ovoïde  ,  d'un  violet  clair;  c'est 
l'impériale  violette  :  l'autre  ,  encore  plus  grosse  et  blan- 
châtre, est  l'impériale  blanche  :  la  troisième,  qui  diffère  de 
la  seconde  par  sa  couleur  jaune,  est  l'impériale  jaune.  (L.  D.) 
IMPERTINENTE.  (Bot.)  Nom  vulgaire,  cité  dans  la  Flore 
du  Pérou,  et  donné,  on  ne  sait  pourquoi,  à  un  liseron  ,  convol- 
vulus  liermanniœ ,  nommé  aussi  dans  le  Pérou  enredadera.  (J.) 
IMPIA.  (Bot.)  On  trouve  sous  ce  nom,  dans  Pline  et  dans 
Césalpin,  la  plante  dite  cotonnière  ou  herbe  à  coton,  flago 
germanica,  que  Tragus  nommoit  hcUochrj'sos.  (J.  ) 

IMPITOYABLE.  {Entom.)  Coedaert  nomme  ainsi  les  larves 
qui  mangent  les  boutons  de  roses.  (  C.  D.) 

IMPOOF.  (Mamm.)  L'abbé  Ray  dit  que  ce  nom  est  celui 
du  canna  ,  sans  rapporter  Pautorité  sur  laquelle  il  fonde 
cette  assertion.  (F.  C.) 

IMPOliTUN.  [Ornith.)  M.  Levaillant ,  tom.  3,  pag.  27,  de 
son  Ornithologie  d'Afrique,  a  donné  ce  nom  spécifique  à  un. 
merle  très  ba'MÎlard  ,  qu'il  a  fait  figurer  pi.  106  ,  n."  2.  (Ch.  D.) 
IMPOSTEUR.  (Ichth.Yol.)  Plusieurs  auteurs  ont  parlé  sous 
ce  ncm  du  sparus  insidiator ,  poisson  que  nous  avons  décrit  a 
l'article  Filc.  Enlisant  cet  article,  on  devinera  facilement 
d'oia  li;i  est  venu  cette  épithètc.  (H.  C.) 

IMIRESSÎONS  DEPLANTES.  (Foss.)  Voyez  Vécét.vvx  i-os- 

SILES.    (D.    F.) 


INA  Si 

INACHUS.  (Crust.)  Genre  de  crustacés  décapodes  bra- 
chyures  ,  établi  par  FaÊricius.  Voyez  l'article  Malacosïracés. 
(Desm.) 

INACHUS.  (Foss.)  Le  cabinet  de  la  monnoie  possède  un 
crustacé  de  ce  genre,  auquel  M.  Desmarest  a  donné  le  nom 
d'Inachus  de  Lamarck ,  J.  Lamarchi.  Son  test,  plus  long  que 
large,  élargi  et  arrondi  en  arrière,  rétréci  en  avant,  est 
surchargé  de  tubercules  et  présente  des  indices  d'épines.  Sa 
plus  grande  largeur  est  d'un  pouce  environ  ,  et  sa  longueur 
à  peu  près  égale,  quoique  le  rostre  manque  en  entier. 

Sa  carapace  est  noire,  et  sa  forme  approche  de  celle  des 
maja;  la  région  de  l'estomac  est  arrondie  et  chargée  de  six 
tubercules  saillans,  savoir  un  en  avant,  un  second  latéral 
et  le  troisième  en  arrière  de  chaque  côté.  La  partie  anté- 
rieure de  cette  région  présente  le  commencement  d'un  sillon 
longitudinal.  Les  bords  latéraux  présentent  trois  tubercules, 
dont  le  sommet  est  altéré,  et  qui  ont  pu  être  des  épines.  La 
région  du  cœur  est  fort  saillante.  Les  deux  régions  branchiales 
sont  postérieures  et  se  touchent;  elles  sont  séparées  des  autres 
par  une  ligne  élevée  et  crénelée.  Elles  sont  ridées  et  renflées 
de  chaque  côté.  Il  se  trouve  un  sinus  très-prononcé  dans  le 
milieu  du  bord  postérieur  de  la  carapace.  La  grosse  pièce  de 
la  pince  gauche  est  courte  et  renflée,  et  porte  un  petit  tu- 
bercule sur  son  bord  supérieur.  Les  autres  parties  de  ce  crabe 
sont  enveloppées  par  la  pierre  et  ne  peuvent  être  distinguées. 

On  ignore  où  ce  crustacé  a  été  trouvé.  (D.  F.) 

INADHÉRENT  [Calice],  [Bot.),  ne  faisant  point  corps 
avec  l'ovaire.  Calice  inadhérent,  ovaire  libre,  ovaire  supère, 
sont  trois  expressions  synonymes.  Les  labiées,  les  caryophyl- 
iées,  etc.,  ont  le  calice  inadhérent.  (Mass.) 

INAIA-GUACUIBA.  (Bot.)  Marcgrave  cite  sous  ce  nom 
brasilien  le  cocotier,  dont  le  fruit  est  nommé  inajaguacu.  Le 
mot  inaia  s'applique  aussi  aux  palmiers  en  général.  (J.  ) 

INALBUMINÉ  [Embrvon],  {Bot.),  dépourvu  d^.Ibumen  , 
ou  de  périsperme  :  tel  est,  par  exemple  ,  celui  de  la  fève  ,  des 
synanthérées,  etc.  (Mass.) 

INALEL,  PERIN-NIARA  {Bof.)  :  noms  malabares,  cités 
par  Rhéede,  du  calyptranthes  carjophjUifoUa  de  Willdenow. 
dans  la  famille  des  myrtécs.  (.L) 


i^^  INA 

INANTHÉRÉE  [Étamine],  (Bot.),  dont  le  filet  est  dépourvu 
d'anthère.  Beaucoup  de  filets  du  sparmannia  africana,  par 
exemple,  sont  dans  ce  cas.  (Mass.) 

INAPANCKE  [Bot.],  nom  transcrit  dans  l'herbier  de  Ma- 
dagascar de  Commerson  pour  Vamaranthus  spinosus.  (J.) 

INAS.  {Ornith.)  Rondelet  a  prétendu  qu'il  falloit  lire 
ainsi  le  mot  grec  oenas  ou  o/nas,  et,  en  l'appliquant  au  ganga, 
tetrao  alchata,  Linn.  et  Lath.,  il  a  supposé  que,  la  racine  de 
Ce  terme  signifiant  fibre  ,  l'intention  d'Aristote  avoit  été  de 
Caractériser  la  peau  fibreuse  de  cet  oiseau.  (Ch.  D.) 

INCARVILLE,  Incarvillea.  [Bot.)  Genre  de  plantes  dico- 
tylédones ,  à  fleurs  complètes,  monopétalées,  de  la  lamllle 
des  bignoniées  ,  de  la  didynamie  angiospermie  de  Linnaeus , 
offrant  pour  caractère  essentiel  :  Un  calice  à  cinq  divisions, 
muni  de  trois  bractées  ;  une  corolle  en  tube ,  ventrue  à 
son  orifice,  à  cinq  lobes  courts,  inégaux;  quatre  étamines 
didynames;  deux  dents  sétacées  aux  anthères  des  deux  éta- 
mines inférieures;  un  ovaire  supérieur;  le  style  simple,  un 
stigmate  à  deux  lames.  Le  fruit  est  une  capsule  en  foi-nie  de 
silique  ,  bivalve  ,  à  deux  loges  ;  une  cloison  opposée  aux  ' 
valves  ;  plusieurs  semences  ailées. 

Incarville  de  Chine  :  Incarvillea  chinensis,  Juss. ,  Gen.,  pag. 
i38;  Lamk. ,  Encycl.  et  III.  gen.,  tab.  427.  Plante  herbacée, 
haute  d'environ  un  pied,  à  tige  glabre,  anguleuse,  striée, 
ïnédiocrement  rameuse.  Les  feuilles  sont  glabres,  alternes, 
pétiolées  ,  presque  deux  fois  ailées  ,  à  folioles  étroites,  aiguës 
et  conflnentes.  Les  fleurs  sont  presque  sessiles,  d'un  pourpre 
violet,  disposées  en  une  grappe,  ou  plutôt  un  épi  droit,  lâche, 
teru)inal  ;  leur  calice  est  garni  à  sa  base  de  trois  bractées 
étroites,  aiguës,  un  peu  pubescentes,  ainsi  que  le  calice 
divisé  à  son  bord  en  cinq  dents  droites,  linéaires,  étroites, 
aiguës;  la  corolle  longue  d'un  pouce,  dilatée  et  ventrue  à 
son  orifice;  ses  lobes  courts,  inégaux,  arrondis;  les  étamines 
renfermées  dans  la  corolle,  insérées  à  la  base  du  tube  ;  les 
anthères  à  deux  lobes;  l'ovaire  surmonté  d'un  style  de  la  lon- 
gueur des  étamines;  le  stigmate  élargi,  à  deux  lames  inégales 
et  ouvertes.  Le  fruit  consiste  en  une  capsule  glabre,  étroite, 
iinéaire-subulée ,  comprimée,  ayant  la  forme  d'une  silique, 
longue  au  moins  de  trois  pouces,  bivalve  ,  à  deux  loiu'S,  ren- 


INC  65 

fermant  des  semences  ailées.  Cette  plante  a  été  découverte 
aux  environs  de  Pékin  par  le  père  Incarville. 

Incara'ille  A  GRANDES  FLEURS  :  Incarvilha  grandijlora ,  Foir.  ; 
Bignonia  chinensis  ,  Lamk. ,  Encyclop.  ;  Bignonia  grandijlora  , 
Willd.,  Thunb.,  Jap.,  pag.  253;  Banck,  Icon.;  Kaempf.  , 
tab.  2  1  ;  Campsis,  Lour.  ,  Flor.  Cochin. ,  ex  herbario.  Ses  tiges 
sont  grimpantes,  radicantes  et  ligneuses;  les  feuilles  oppo- 
sées, ailées  avec  une  impaire,  composées  de  neuf  à  onze  fo- 
lioles vertes,  ovales  -  aiguës ,  glabres,  dentées  en  scie.  Les 
fleurs  sont  grandes,  très-belles,  disposées  à  l'extrémité  des 
rameaux  en  grappes  paniculées,  d'un  aspect  fort  agréable  ; 
leur  calice  est  campanule,  à  cinq  divisions  assez  profondes, 
aiguës,  presque  égales;  la  corolle  campanulée;  son  tube  aussi 
long  que  le  calice ,  puis  évasé  en  un  limbe  fort  grand,  à  cinq^ 
divisions  larges,  arrondies,  un  peu  inégales.  Le  fruit  con- 
siste en  une  capsule  presque  cylindrique  ,  un  peu  comprimée 
sur  les  côtés ,  à  peine  longue  de  trois  pouces.  Cet  arbrisseau 
croît  à  la  Cochinchine  et  à  la  Chine,  où  on  le  cultive  pour 
la  beauté  de  ses  fleurs.  (Poir.) 

INCENDIARIA.  {Omith.)  Les  noms  d'aris  incendiaria  et 
avis  incineraria  ,  employés  par  les  anciens,  ont  été  appliqués, 
peut-être  mal  à  propos,  au  jaseur  de  Bohème,  ampelis  gar- 
ruliis ,  Linn.  (Ch.  D.) 

INCENSARIA.  {Bot.)  Césalpin  nommolt  ainsi  l'/nz.'Ja  odoî-a. 
Camerarius  donne  le  même  nom  à  la  grande  aurone,  ahro- 
tanum.  (  J.  ) 

INCIENSO.  (Bot.)  Sur  le  mont  Silla,  dans  le  territoire 
de  Caracas,  on  nomme  ainsi  la  plante  qui  est  le  baillieria 
Tieriifulia  des  auteurs  de  la  Flore   équinoxiale.  (J.j 

INCINÉRATION.  {Chim.)  C'est  l'opération  par  laquelle 
on  brûle  une  matière  organique  qui  contient  des  parties 
fixes  minérales  ,  afin  d'obtenir  ces  dernières,  que  l'on  appelle 
vulgairement  cen-dr<'5.  (Ch.) 

INCISÉ.  (Bot,)  Terme  général,  employé  par  opposition  au 
mot  entier,  lorsqu'il  est  question  du  calice,  ou  pour  expri- 
mer, lorsqu'il  est  question  d'une  feuille,  que  ses  découpures 
sont  plus  profondes  que  celles  qui  forment  des  dents  ou  des 
erénelures.  (  Mass.  ) 

INC^iUSES  [Étamines],  (Bot.),  ne  saillant  point  au  dehors 


54  IJNX 

du  périanthe.  Celles  du  jasmin  ,  du  liJas ,  du  pois  et  d'autres 
légumineuses  papilionacécs ,  sont  incluses.  Le  style  du  nar- 
cisse, du  phlox  ,  du  lilas,  est  également  inclus.  (Mass.) 

1NC0MBA^TE  [Anthère],  {Bot.)-,  attachée  par  son  milieu 
et  dressée  de  manière  que  sa  moitié  inférieure  est  appliquée 
contre  le  filet;  telles  sont,  par  exemple,  les  anthères  de 
Van.aryllis  forniosissima.  (Mass.) 

INCOMPARABLE.  (Omith.)  M.  Levaillant  a  désigné  par 
cette  dénomination  une  pie  de  paradis,  représentée  pi.  20 
de  ses  Oiseaux  de  paradis,  rolliers,  etc.  (  Ch.  D.) 

INCOMPLETE  [Fleur].  (Bot.)  La  fleur  complète  réunit  les 
organes  des  deux  sexes  et  les  deux  enveloppes  floi-ales  (calice 
et  corolle).  La  fleur  incomplète  est  celle  où  il  manque  une, 
ou  deux  ,  ou  trois  de  ces  quatre  parties.  Le  lis  ,  le  noisettier, 
le  saururus,  etc.,  ont  les  fleurs  incomplètes. 

L'arille  est  dit  incomplet,  lorsqu'il  ne  recouvre  la  graine 
qu'en  partie  {e^'oiiymus  vernicosas).  Une  cloison  est  incom- 
plète ,  lorsqu'elle  ne  sépare  qu'incomplètement  la  cavité  péri- 
carpienne  .-  telles  sont  les  cloisons  du  pavot.  (Mass.) 

INCONNUE  CHENEAU  (7?of.  ),  nom  d'une  variété  de 
poire,  nommée  aussi  fondante  de  Brest.  (  L.  D.) 

INCONNUE  LAFARE.  {Bot.)  Dans  quelques  cantons  on 
appelle  ainsi  la  poire  de  Saint-Germain.  (L.  D.) 

INCRUSTATIONS.  {Foss.)  On  a  quelquefois  présenté  à  la 
crédulité  des  personnes  peu  versées  dans  la  connoissance  de 
l'histoire  naturelle,  pour  être  de  véritables  pétrifications  an- 
ciennes, des  Fruits  ,  des  oiseaux  dans  leurs  nids  et  d'autres 
corps  qui  n'étoient  qu'incrustés.  Certaines  eaux  chargées  de 
molécules  terreuses  et  calcaires,  telles  que  celles  d'Arcueil, 
celles  de  la  fontaine  de  Saint-Alyre  pi'ès  de  Clermont  en 
Auvergne,  et  autres,  ont  la  faculté  de  déposer  ces  molécules 
sur  les  corps  qui  s'y  trouvent  plongés,  de  s'y  cristalliser  et  de 
les  enduire  d'un  moule  extérieur  qui  conserve  la  forme  de 
ces  corps  ,  mais  qui  ne  les  change  point  en  pierre.  Tous 
ces  corps  intrustés  se  rapportent  à  ceux  que  nous  connoissons 
à  l'état  vivant,  et  il  n'en  est  pas  ainsi  des  véritables  pétrifi- 
cations ;  elles  ont  appartenu  à  un  monde  ancien,  différent 
de  celui  qui  txiste  auiourd'hui.  Ils  nous  présentent  aussi  des 
corps,  tels  que  des  fruits  mous  ou  des  oiseaux  emplumés, 


IND  55 

qu'on  n'a  jamais  vus  et  qu'on   ne   verra  sans   doute   jamais 
pétrifiés.    (D.  F.) 

INCUBATION.  (Ornith.)  Voyez  Œufs.   (Ch.D.) 

INDAYÉ.  (^Ornith.)  M.  d'Azara  décrit,  sous  le  n."  5o  de 
ses  Oiseaux  du  Paraguay  ,  et  à  la  suite  des  éperviers  ,  un 
oiseau  de  proie  qui  en  a  la  taille  et  la  physionomie  ,  et  dont 
les  noms  espagnols  signifient  busard  fou  et  busard  à  tète  noire; 
mais  qui  diflére  des  éperviers  en  plusieurs  points,  surtout 
en  ce  qu'il  se  nourrit  uniquement  de  vers  de  terre,  de 
limaçons,  de  grillons,  etc.,  et  quïl  paroît  aussi  indolent  et 
aussi  stupide  que  les  autres  sont  vifs  et  rusés. 

Cet  oiseau,  long  de  i3  pouces  5  lignes,  a  12  pennes  d'égale 
longueur  à  la  queue,  et  aux  ailes  20  ,  dont  la  première  est 
assez  courte  et  la  quatrième  la  plus  longue.  Sa  tête  est 
noirâtre,  à  l'exception  d'un  filet  blanc  qui  part  du  front  et 
s'élargit  de  chaque  côté,  jusqu'à  la  peau  nue  des  joues;  les 
parties  supérieures  sont  brunes,  avec  des  bandes  plus  fon- 
cées; les  pennes  caudales  sont  noirâtres,  et  l'on  remarque 
■une  teinte  rousse  sur  les  deux  du  milieu  ;  le  dessous  du  corps 
est  blanchâtre ,  avec  des  raies  transversales  dorées  ;  les  tarses 
et  l'iris  sont  jaunes  ;  le  bec  ,  garni  d'une  membrane  de  la 
même  couleur,  a  la  pointe  noire  et  le  reste  d'un  bleu  de 
ciel. 

M.  d'Azara  regarde  cet  oiseau  comme  devant  former  un 
genre  particulier  ;  mais  ni  lui  ni  M.  Vieillot  n'ont  trouvé 
des  caractères  assez  tranchés  pour  l'établir.  (Ch.  D.) 

INDÉFINIES  [Étamines].  {Bot.)  Le  nombre  des  étamines 
n'est  constant,  dans  une  espèce  donnée,  que  jusqu'à  douze  : 
dans  ce  cas  on  les  compte  ;  elles  sont  définies.  Passé  ce 
nombre ,  on  ne  les  compte  plus;  elles  sont  indéfinies.  Le  pa- 
vot ,  la  renoncule  ,  la  rose ,  ont  les  étamines  indéfinies. 
(Mass.) 

INDÉHISCENT  {Bot.),  n'ayant  pas  la  faculté  de  s'ouvrir 
spontanément:  les  camares  du  fruit  du  tulipier,  de  la  re- 
noncule, etc.,  le  légume  du  cassia  Jisiula ,  etc.,  par  exem- 
ple, sont  indéhiscens.  (Mass.) 

INDEL.  {Bot.)  M.  de  Lamarck  décrit  sous  ce  nom  le  pal- 
mier, qui  est  le  hatou-indel  du  Malabar,  Velate  des  bota- 
nistes. (J.  ) 


56  ÏND 

INDÉPENDANCE  DES  FORMATIONS.  (Mm.)  Le  moè 
formation  '  désigne,  engéognosie,  ou  lamanicre  dont  une  roche 
a  été  produite,  ou  un  assemblage  (système)  de  masses  miné- 
rales qui  sont  tellement  liées  entre  elles,  qu'on  les  suppose 
formées  à  la  même  époque,  et  qu'elles  offrent ,  dans  les  lieux 
de  la  terre  les  plus  éloignés,  les  mêmes  rapports  généraux 
de  gisement  et  de  composition.  C'est  ainsi  que  l'on  attribue 
la  forwalion  de  l'obsidienne  et  du  basalte  aux  feux  souterrains; 
c'est  ainsi  que  l'on  dit  que  laformalion  du  thonschiefer  de  tran- 
sition renferme  de  la  pierre  lydienne,  de  la  chiastolithe , 
de  l'ampélite  ,  et  des  couches  alternantes  de  calcaire  noir  et  de 
porphyre.  La  première  acception  du  mot  est  plus  conforme  au 
génie  de  la  langue;  mais  elle  a  rapport  à  l'origine  des  choses, 
à  une  science  incertaine  qui  se  fonde  sur  des  hypothèses 
géogoniques.  La  seconde  acception ,  aujourd'hui  générale- 
ment reçue  par  les  minéralogistes  françois  ,  a  été  empruntée 
à  la  célèbre  École  deWerner  :  elle  indique  ce  qui  est,  non 
ce  que  l'on  suppose  avoir  été. 

Dans  la  description  géognostique  du  globe  on  peut  distinguer 
dillerens  degrés  d'agroupement  des  substances  minérales,  sim- 
ples ou  composées,  selon  que  l'on  s'élève  à  des  idées  plus  géné- 
rales. Des  rodées  qui  alternent  les  unes  avec  les  autres,  qui 
s'accompagnent  habituellement  et  qui  offrent  les  mêmes  rap- 
ports de  gisement  ,  constituent  une  même  formation  ;  la  réu- 
nion de  plusieurs  formations  constitue  un  terrain  :  mais  ces 
mots  de  roches,  de  formations  et  de  terrains  sont  employés 
comme  synonymes  dans  beaucoup  d'ouvrages  de  géoguosie. 
(Voyez  Roche,  Terrain.) 

La  diversité  des  roches  et  la  disposition  relative  des  couches 
qui  forment  la  croûte  oxidée  du  globe  ,  ont ,  dès  les  temps 
Jesplus  reculés,  fixé  l'attention  des  hommes.  Partout  où  l'ex- 
ploitation d'une  mine  étoit  dirigée  sur  un  dépôt  de  sel,  de 
houille  ou  de  fer  argileux  ,  qui  se  trouvoit  recouvert  d'un 
grand  nombre  de  couches  de  nature  différente,  ce  travail 
fit  naître  des  idées  plus  ou  moins  précises  sur  le  système  de 


1    Cet  article   est    extrait    d'un    ouvrage  inédit  de    M.  dp  Kuniholdt  , 
ajnni  pour  titre  :   De  la   superposition  des  roches   dans  les  deux  hénii- 

sphères,  -  '      ' 


IND  57 

roches  propres  à  un  terrain  de  peu  d'étendue.  Munîs  de  ces 
connoissances  locales,  remplis  des  préjugés  qui  naissent  de 
l'habitude  ,  les  mineurs  d'un  pays  se  répandirent  dans  des 
pays  voisins.  Ils  firent  ce  que  les  géognostes  ont  souvent  fait 
de  nos  jours  :  ils  jugèrent  du  gisement  des  roches  dont  ils 
îgnoroicnt  la  nature  ,  d'après  des  analogies  incomplètes, 
d'après  les  idées  étroites  qu'ils  s'étoient  faites  dans  leur  pays 
natal.  Cette  erreur  dut  avoir  une  influence  funeste  sur  le 
succès  de  leurs  nouvelles  recherches.  Au  lieu  d'étudier  la 
liaison  de  deux  terrains  contigus,  en  suivant  quelque  couche 
généralement  répandue;  au  lieu  d'agrandir  et  d'étendre, 
pour  ainsi  dire,  le  premier  t^ye  de  formations  qui  étoit  resté 
gravé  dans  leur  esprit,  ils  se  persuadèrent  que  chaque  por- 
tion du  globe  avoit  une  constitution  géologique  entièrement 
différente.  Cette  opinion  populaire  très-ancienne  a  été  adoptée 
et  soutenue,  en  différens  pays  ,  par  des  savans  trè^-distingués  ; 
mais,  dés  que  la  géognosie  s'est  élevée  au  rang  d'une  science, 
que  l'art  d'interroger  la  nature  a  été  perfectionné,  et  que 
des  voyages  entrepris  dans  des  contrées  lointaines  ont  offert 
une  comparaison  plus  exacte  des  divers  terrains  ,  de  grandes 
et  immuables  lois  ont  été  reconnues  dans  la  structure  du 
globe  et  dans  la  superposition  des  roches.  C'est  alors  que  les 
analogies  les  plus  frappantes  de  gisement,  de  composition  et 
de  corps  organiques  renfermés  dans  des  couches  contempo- 
raines ,  'se  sont  manifestées  dans  les  deux  Mondes.  A  mesure 
qu'on  s'habitue  à  considérer  les  formations  sous  un  point  de 
vue  plus  général,  leur  idenùté  même  devient  de  jour  en  jour 
plus  probable. 

En  effet,  en  examinant  la  masse  solide  de  notre  pla- 
nète, on  s'aperçoit  bientôt  que  quelques-unes  de  ces  subs- 
tances que  l'oryctognosie  (ou  minéralogie  descriptive)  nous 
a  fait  connoître  isolément,  se  renconti^ent  dans  des  associa- 
tions constantes ,  et  que  ces  associations,  que  l'on  désigne  sous 
le  nom  de  roches  composées,  ne  varient  pas,  comme  les  êtres 
organisés,  selon  la  différence  des  latitudes  ou  des  bandes 
isothermes  sous  lesquelles  on  les  trouve.  Les  géognostes  qui 
ont  parcouru  les  pays  les  plus  éloignés,  n'ont  pas  seulement 
rencontré  dans  les  deux  hémisphères  la  plupart  des  mêmes 
substances  simples  ,  le  quarz,  le  feldspath  ,  le  mica,  le  grenat 


S8  Ijyfj) 

ou  l'amphibole  :  ils  ont  aussi  reconnu  que  les  grandes  masses 
de  montagnes  présentent  presque  partout  les  mêmes  roches, 
c'est-à-dire  les  mêmes  assemblages  de  mica ,  de  quarz  et  de 
feldspath,  dans  le  granité;  de  mica,  de  quarz  et  de  grenats, 
dans  Je  micaschiste  ;  de  feldspath  et  d'amphibole  dans  la  syé- 
nite.  Si  quelquefois  on  a  cru  d'abord  qu'une  roche  appartenoit 
exclusivement  à  une  seule  portion  du  globe,  on  l'a  constam- 
ment trouvée,  par  des  recherches  ultérieures,  dans  les 
régions  les  plus  éloignées  de  la  première  localité.  On  est  tenté 
d'admettre  que  la  formation  des  roches  a  été  indépendante 
de  la  diversité  des  climats;  que  peut-être  même  elle  leur  est 
antérieure  (Humboldt,  Géoirraphie  des  plantes ,  1807  ,  p.  ;i5; 
Idem,  Vues  des  Cordillères,  tome  1.*',  p.  122).  Il  y  a  identité 
de  roches  là  où  les  êtres  organisés  sont  le  plus  diversement 
modifiés. 

Mais  cette  identité  de  composition,  cette  analogie  que 
l'on  observe  dans  l'association  de  certaines  substances  miné- 
rales simples,  pourroit  être  indépendante  de  l'analogie  de 
gisement  et  de  superposition.  On  pourroit  avoir  rapporté 
des  iles  de  l'Océan  Pacifique,  ou  de  la  Cordillère  des  Andes, 
les  mêmes  roches  que  l'on  observe  en  Europe,  sans  qu'il 
fût  permis  d'en  conclure  que  ces  roches  sont  superposées 
dans  un  ordre  semblable,  et  qu'après  la  découverte  d'une 
d'elles  on  puisse  prédire  avec  quelque  certitude  quelles  sont 
les  autres  roches  qui  se  trouvent  dans  les  mêmes  lieux.  C'est 
a  rcconnoître  ces  analogies  de  gisement  et  de  positions  res- 
pectives, que  doivent  tendre  les  travaux  des  géognostes  qui 
se  plaisent  à  étudier  les  lois  de  la  nature  inorganique.  On  a 
tenté  de  réunir  dans  les  tableaux  suivans  ce  que  nous  savons 
de  plus  certain  sur  la  superposition  des  roches  dans  les  deux 
continens,  au  nord  et  au  sud  de  l'équateur.  Ces  types  de 
formations  ne  seront  pas  seulement  étendus ,  mais  aussi  di- 
versement modifiés  ,  à  mesure  que  le  nombre  des  voyageurs 
exercés  aux  observations  géognostiques  se  trouvera  agrandi, 
et  que  des  monographies  complètes  de  divers  cantons  très- 
éloignés  les  uns  des  autres  fourniront  des  résultats  plus 
précis. 

L'exposition  des  lois  que  l'on  reconnoît  dans  la  superpo- 
sition des  roches,  forme  la  partie  la  plus  solide  de  la  science 


IND  69 

géognostiquc.  On  ne  sauroit  nier  que  les  observations  de 
gisement  présentent  souvent  de  grandes  diflicultés ,  lors- 
qu'on ne  peut  parvenir  au  contact  de  deux  forir.alions  voi- 
sines, ou  que  celles-ci  n'offrent  pas  une  stratifica  tion  régulière^ 
ou  que  leur  gisement  n'est  pas  uniforme,  c'est-à-dire  que  les 
strates  du  terrain  supérieur  ne  sont  pas  parallèles  aux  strates 
du  terrain  inférieur.  Mais  ces  difficultés  (et  c'est  là  un  des 
grands  avantages  des  observations  qui  embrassent  une  partie 
considérable  de  notre  planète)  diminuent  en  nombre  ou  dis- 
paroissent  totalement  par  la  comparaison  de  plusieurs  terrains 
très-étendus.  La  superposition  et  l'âge  relatif  des  roches  sont 
des  faits  susceptibles  d'être  constatés  immédiatement ,  comme 
la  structure  des  organes  d'un  végétal,  comme  les  proportions 
des  élcmens  dans  l'analyse  chimique,  ou  l'élévation  d'une 
montagne  au-dessus  du  niveau  de  la  mer.  La  véritable 
géognosie  (ait  connoître  la  croûte  extérieure  du  globe 
telle  qu'elle  existe  de  nos  jours.  C'est  une  science  aussi  sûre 
que  peuvent  l'être  les  sciences  physiques  descriptives.  Au 
contraire,  tout  ce  qui  a  rapport  à  l'ancien  état  de  notre  pla- 
nète, à  ces  fluides  qui,  dit-on,  tenoient  toutes  les  substances 
minérales  en  dissolution  ,  à  ces  mers  que  l'on  élève  jusqu'aux 
sommets  des  Cordillères  pour  les  faire  disparoitre  dans  la 
suite,  est  aussi  incertain  que  le  sont  la  formation  de  Tat- 
mosphère  des  planètes  ,  les  migrations  des  végétaux  ,  et  l'ori- 
gine des  différentes  variétés  de  notre  espèce.  Cependant 
l'époque  n'est  pas  très-éloignée  où  les  géologues  s'occupoient 
de  préférence  de  ces  problèmes  presque  impossibles  à  résou- 
dre ,  de  ces  temps  fabuleux  de  l'histoire  physique  du  monde. 
Pour  faire  mieux  comprendre  les  principes  d'après  lesquels 
est  construit  le  tableau  de  la  superpositii:)n  des  roches,  nous 
devons  le  faire  précéder  de  quelques  observations  que  fournit 
l'étude  pratique  des  différens  terrains.  Nous  commencerons 
par  rappeler  qu'il  n'est  pas  aisé  de  circonscrire  les  limites 
d'une  même  formation.  Le  calcaire  du  Jura  et  le  calcaire 
alpin  ,  très-séparés  dans  une  région,  paroLssent  parfois  étroite- 
ment liés  dans  une  autre.  Ce  qui  annonce  l'indépendance  d'une 
formation ,  comme  l'a  très-bien  observé  M.  de  Buch,  c'est  sa 
superposition  immédiate  sur  des  roches  de  diverse  nature 
et  qui  par  conséquent  doivent  toutes  être  considérées  comme 


^o  IND 

plus  anciennes.  Le  grès  rouge  est  une  formation  indépen- 
dante ,  parce  qu'il  csf  superposé  indiff'crcui aient  sur  du  cal- 
caire uoir  (de  transition),  sur  du  micaschiste  ou  du  gra- 
nité primitifs;  mais,  dans  une  région  où  domine  la  grande 
formation  de  syénile  et  de  porphyre,  ces  deux  roclies  alter- 
nent constamment.  Il  en  résulte  que  la  roche  syénitique 
y  est  dépendante  du  porphyre  ,  et  n'y  recouvre  presque 
nulle  part  seule  le  thonschiefer  de  transition  ou  le  gntis  pri- 
mitif. L'indépendance  des  formations  n'exclut  d'ailleurs  au- 
cunement Vuniforiiiité  ou  concordance  de  gisement  ;  elle  exclut 
plutôt  le  pass;'ge  oryctognostique  de  deux  formations  super- 
posées. Les  terrains  de  transition  ont  très-souvent  la  même 
direction  et  la  même  inclinaison  que  les  terrains  primitifs; 
et  cependant,  quelque  rapprochée  que  puisse  être  l'époque 
de  leur  origine ,  on  n'en  est  pas  moins  fondé  à  considérer 
le  micaschiste  anthraciteux  ou  le  grauwacke  ,  alternant  avec 
du  porphyre,  comme  deux  formations  indépendantes  des 
granités  et  des  gneîs  primitifs  qu'ils  recouvrent.  L'unifor- 
mité de  gisement  {Gleichforwigkeit  dcr  Lageriing)  ne  fait  rien 
préjuger  contre  l'indépendance  des  formations,  c'est-a-dire 
sur  le  droit  que  l'on  a  de  regarder  une  roche  comme  une  for- 
mation distincte.  C'est  parce  que  les  formations  indépendantes 
sont  placées  indifféremment  sur  toutes  les  roches  plus  an- 
ciennes (la  craie  sur  le  granité,  le  grès  rouge  sur  le  mica- 
schiste primitif),  que  la  réunion  d'un  grand  nombre  d'ob- 
servations faites  sur  des  points  très-é!oignés  devient  éminem- 
ment utile  dans  la  détermination  de  Vàge  relatif  des  roches. 
Pour  reconnoître  que  la  syénite  zirconienne  est  une  roche 
de  transition,  il  faut  lavoir  vue  placée  sur  des  formations 
postérieures  à  des  calcaires  noirs  remplis  d'orthocératites. 
Des  observations  faites  sur  les  porphyres  et  syénitcs  de  la  Hon- 
grie par  M.  Beudant,  un  des  géologues  les  plus  distingués  de 
notre  temps,  peuvent  jeter  beaucoup  de  jour  sur  les  forma- 
tions des  Andes  mexicaines.  C'est  ainsi  qu'un  nouveau  végétal 
découvert  dans  l'Inde  lait  reconnoître  l'affinité  naturelle 
entre  deux  familles  de  plantes  de  l'Amérique  équinoxiale. 

L'ordre  que  Ion  a  suivi  dans  le  tableau  des  formations  est 
celui  du  gisement  et  de  la  position  respective  des  roches.  Je 
ne  prétends  pas  que  ce  gisement  et  cette  position  s'observent 


IND  61 

dans  toutes  les  régions  de  la  terre;  je  les  indique  tels  qu'ils 
m'ont  paru  le  plus  probables  d'après  la  comparaison  d'un 
grand  nombre  de  faits  que  j'ai  recueillis.  C'est  l'idée  de  Tàge 
relatif  qui  m"a  guidé  dans  ce  travail,  bien  imparfait  encore. 
Je  l'ai  commencé,  long-temps  avant  mon  voyage  dans  les  Cor- 
dillères du  Nouveau  Continent,  dès  l'année  179'-^ ,  où,  sortant 
Je  l'École  de  Freyberg,  j'étois  chargé  (comme  OierZ-ergme/sier) 
de  la  direction  des  mines  dans  les  montagnes  du  Fichtelge- 
birge.  La  même  roche  peut  varier  de  composition,  des  parties 
intégrantes  peuvent  lui  être  soustraites,  de  nouvellessubstances 
peuvent  s'y  trouver  disséminées,  sans  que  pour  cela,  aux  yeuK 
du  géognoste  qui  s'occupe  de  la  superposition  des  terrains,  la 
roche  doive  changer  de  dénomination.  Sous  l'équateur,  comme 
dans  le  nord  de  l'Europe,  des  strates  d'une  véritable  syénite  de 
transition  perdent  leur  amjihibole,  sans  que  la  m:'.sse  devienne 
une  autre  roche.  Les  granités  des  bords  de  l'Orénoque  pren- 
nent quelquefois  de  ramphi])ole  et  ne  cesstnt  guère  pour 
cela  d'être  du  granité  primitif,  quoiqu'ils  ne  soient  pas  de 
la  première  ou  plus  ancienne  formation.  Ces  faits  ont  été 
reconnus  par  tous  les  géognostes  expérimentés.  Le  caractère 
essentiel  de  l'identité  d'une  form.ation  indépendante  est  soa 
rapport  déposition,  la  place  qu'elle  occupe  dans  la  série 
générale  des  terrains.  (Voyez  le  mémoire  cliissique  de  M. 
de  Buch,  Ueber  den  Begriff  einer  Gebirgsart ,  dans  Mag.  der 
ISaturf.,  1810,  p.  128  —  i53.)  C'est  pour  cela  qu'un  fragment 
isolé ,  un  échantillon  de  roche  trouvé  dans  une  collection , 
ne  peuvent  être  déterminés  géognostiquement ,  c'est-à-dire 
comme  formation  constituant  une  des  nombreuses  assises 
dont  se  compose  la  croûte  de  notre  planète.  La  chiastolithe, 
l'accumulation  de  carbone  ou  des  nœuds  de  calcaire  com- 
pacte dans  les  thonschiefer ,  le  titane -nigrine  et  Tépidote 
dans  les  syénifes  (alternant  avec  un  granité  et  des  porphyres), 
des  conglomérais  ou  poudingues  enchâssés  dans  un  mica- 
schiste anthraciteux  ,  peuvent  sans  doute  faire  reconnoifre 
des  formations  de  transition  ;  de  même  que,  d'après  les  utiles 
travaux  de  M.  Brongniart ,  des  pélrilications  de  coquilles  bien 
conservées  indiquent  quelquefois  direcitemetit  telle  ou  telle 
couche  de  terrains  tertiaires.  Mais  ces  cas, '011  l'on  est  guidé 
par   des  substances  disséminées  ou  par  des  caractères  purç- 


^2  IND 

ment  zoologîques  ,  n'embrassent  qu'un  petit  nombre  de 
roches  d'une  origine  récente  ;  souvent  des  observations  de 
ce  genre  ne  conduisent  qu'à  des  faits  négatifs.  Les  caractères 
tirés  de  la  couleur  du  grain  et  des  petits  liions  de  carbo- 
nate de  chaux  qui  traversent  les  roches  calcaires;  ceux  que 
fournissent  la  fissilité  et  l'éclat  soyeux  du  thonschiefer.  l'aspect 
et  les  ondulations  plus  ou  moins  marquées  des  feuillets  du 
mica  dans  les  micaschistes  ;  enfin ,  la  grandeur  et  la  colo- 
ration des  cristaux  de  feldspath  dans  les  granités  de  diffé- 
rentes formations,  peuvent,  comme  tout  ce  qui  tient  sim- 
plement à  Vhahitus  des  minéraux,  induire  en  erreur  l'ob- 
servateur le  plus  habile.  Sans  doute  ,  les  teintes  blanches  et 
les  noires  distinguent  le  plus  souvent  les  calcaires  primitifs 
et  de  transition;  sans  doute,  la  formation  du  Jura,  surtout 
dans  ses  assises  supérieures,  est  généralement  divisée  en 
couches  minces,  blanchâtres,  à  cassure  matte,  égale  ou 
conchoïde,  avec  des  cavités  très- aplaties  (Jlachmuschlig) -. 
mais  dans  les  montagnes  de  calcaire  de  transition  il  y  a  des 
masses  isolées  qui,  par  leur  couleur  et  leur  texture,  se  rap- 
prochent des  caractères  oryctognostiques  de  la  formation  du 
Jura;  mais  au  sud  des  Alpes  il  y  a  des  collines  de  terrains 
tertiaires  où  ce  même  calcaire  fissile  et  mat  du  Jura  trouve 
ses  analogues  (quant  à  l'aspect)  dans  des  formations  placées 
au-dessus  de  la  craie ,  et  qui  ressemblent  au  calcaire  que  l'on 
recherche  pour  les  usages  de  la  lithographie.  Si  l'on  préfère 
de  donner  aux  formations  des  noms  tirés  de  leurs  seuls 
caractères  oryctognostiques  ,  les  divers  strates  d'une  même 
roche  composée,  dont  l'épaisseur  est  considérable  et  que  l'on 
poursuit  très-loin  dans  le  sens  de  sa  direction  {Streichungslinie), 
sembleroient  souvent  appartenir  a  des  roches  différentes, 
selon  les  points  où  l'on  en  prendroit  des  échantillons.  Par 
conséquent  on  ne  peut  guère  déterminer  géognostiquemcut 
dans  les  collections  que  des  suites  de  roches  dont  on  connoît  la 
superposition  mutuelle. 

En  énonçant  ces  idées  sur  le  sens  que  l'on  doit  attacher  au 
mot  formations  indépendantes,  lorsqu'il  s'agit  du  tableau  de 
leur  gisement,  on  est  bien  loin  de  méconnoître  les  émincns 
services  que  l'examen  oryctognostique  le  plus  rigoureux , 
l'étude  approfondie  de  la  composition  des  roches,  ont  rendus 


IND  65 

à  la  géognosie  moderne  ,   et  nommément   à  la   science   du 
gisement  ou  de  la  position  respective  des  formations.    Quoi- 
que, d'après  les  découvertes  de  M.  Haiiy  sur  la  nature  in- 
time des  substances  inorganiques  et  cristallisées,   il   n'existe 
pas,  à  proprement  parler  ,  un  passage  d'une  espèce  minérale 
à  une  autre  (Cordier,  sur  les  roches  volcan.,  p.  33,  et  Ber- 
zelius,  Nouv.  Sjst.  de  Minéral,,  pag.  119),   les  passages  des 
masses  ou  pâtes  de  roches  ne  sont  pas  restreints  aux  forma- 
tions que  l'on  distingue  généralement  par  le  nom  de  roches 
composées.    Celles  que  l'on  croit  simples,  par  exemple,  les 
calcaires  de  transition  ou  les  calcaires  secondaires,  sont  en 
partie    des  variétés  amorphes    d'espèces    minérales    dont  il 
existe  un   type  cristallisé  ,   en  partie  des  agrégats  d'argile , 
de  carbone,    etc.,    qui  ne  peuvent  être   soumis  à    aucune 
détermination    fixe.    C'est  sur  les   proportions  variables  de 
ces  mélanges  hétérogènes   que  se  fonde   le   passage  des    cal- 
caires marneux   à   d'autres   formations   schisteuses,    f  Haiiy, 
Tableau  comparatif  de  la  Cristallographie,  p.  XXVII ,  XXX.) 
Toutes   les  pâtes  amorphes  des  roches,   quelque  homogènes 
qu'elles  paroissent  au  premier  aspect,  les  bases  des  porphyres 
et  des   euphotidcs  (serpentines) ,    comme  ces  masses  noires 
problématiques  qui  constituent  le  basanite  (basalte)  des  an- 
ciens ,  et  qui  ne  sont  pas  toutes   des  griinstein   surchargés 
d'amphibole,  sont  susceptibles  d'être  soumises  à  l'analyse  mé- 
canique. M.  Cordier  a  appliqué  cette  analyse  d'une  manière 
ingénieuse  aux  diabases   (griinstein)  ,    aux  dolérites  ,    et  à 
d'autres  productions   volcaniques  plus  récentes.    L'examen 
oryctognostique  le  plus  minutieux  en  apparence  ne  peut  être 
indifférent  au  géognoste   qui    examine  l'âge   des  formations. 
C'est  par  cet  examen  qu'on  peut  se  former  une  juste  idée  de 
la  manière  progressive  dont,  -par  développement  intérieur ,  c'est- 
à-dire  par  un  changement  très-lent  dans  les  proportions  des 
élémens  de  la  masse ,  se  fait  le  passage  d'une  roche  à  une  roche 
voisine.  Les  schistes  de  transition,  dont  la  structure  paroît 
d'abord  si  différente  de  la  structure  des  porphyres  ou  des 
granités,  offrent  à  l'observateur  attentif  des  exemples  frap- 
pans  de  passages  insensibles  à  des  roches  grenues,  porphy- 
roïdes  ou  granitoïdes.  Ces  schistes  deviennent  d'abord  ver- 
dàtres  et  plus  durs.  A  mesure  que  la  pâte  amorphe  reçoit  de 


64  IjVD 

l'amphibole,  elle  passe  à  ces  amphibolithes  trappéeuncs  qU  oo 
confondoit  jadis  avec  le  basalte.  Ailleurs,  le  mica,  d'abord 
caché  dans  la  pâte  amorphe  ,  se  développe  et  se  sépare  en 
paillettes  distinctes  et  nettement  cristallisées  ;  en  même  temps 
le  feldspath  et  le  quarz  deviennent  visibles;  la  niasse  paroît 
grenue  a  grains  très-alongés  :  c'est  un  vrai  gneis  de  transition. 
Peu  à  peu  les  grains  perdent  leur  direction  commune  ;  les 
cristaux  se  groupent  autour  de  plusieurs  centres,  la  roche 
devient  un  granité  ou  une  syénite  de  transition.  Ailleurs 
encore  le  quarz  seul  se  développe  ,  il  augmente  et  s'arrondit 
en  nœuds,  et  le  schiste  passe  au  grauwacke  le  mieux  carac- 
térisé. A  ces  signes  certains  les  géognostes  qui  ont  étudié 
long-temps  la  nature,  reconnoissent  d'avance  la  proximité 
des  roches  grenues,  granitoïdcs  et  arénacées.  Des  passages 
analogues  du  micaschiste  primitif  à  une  roche  porphyroïde, 
et  le  retour  de  cette  roche  au  gneis,  s'observent  dans  la 
Suisse  orientale.  (Voyez  les  développemens  lumineux  qu'ont 
donnés  M.  de  Raumer ,  Fragmente ,  p.  lo  et  47  ;  M.  Léopold 
de  Buch  ,  dans  son  Voyage  de  Claris  à  Chiavenna ,  fait  en  i8o5 
et  inséré  dans  le  Magaz.  der  Berl.  Naturf.,  tom.  3,  p.  116.) 
Mais  ces  passages  ne  sont  pas  toujours  insensibles  et  pro- 
gressifs :  souvent  aussi  les  roches  se  succèdent  brusquement  j 
et  d'une  manière  bien  tranchée;  souvent  (par  exemple, 
au  Mexique,  entre  Guanaxuato  etOvexeras)  les  limites  entre 
les  schistes,  les  porphyres  et  les  syénites  sont  aussi  distinctes 
que  les  limites  entre  les  porphyres  et  les  calcaires;  mais  dans 
ce  cas  même  des  bancs  hétérogènes  intercalés  indiquent  des 
rapports  géognostiques  avec  les  roches  superposées.  C'est  ainsi 
que  le  granité  de  transition  de  la  formation  syénitique  offre 
des  couches  de  basanite,  en  se  chargeant  d'amphibole  :  c'est 
ainsi  que  ces  mêmes  granités  passent  quelquefois  à  l'euphotide. 
(Buch,  Voyage  en  ISorvfége,  tom.  I,  p.  i38  ,  tom.  11  ,  p.  83.) 
11  résulte  de  ces  considérations,  que  l'analyse  mécanique 
des  pâtes  amorphes,  au  moyen  de  demi- triturations  et  de 
lavages  (analyse  dont  M.  Fleuriau  de  Bellevue  a  fait  le  pre- 
mier essai  qui  ait  été  couronné  de  succès,  Journ.  de  Phjshiue, 
tom.  Ll,  p.  162) ,  répand  à  la  fois  du  jour,  1."  sur  les  grands 
cristaux  qui  s'isolent  et  se  séparent  des  cristaux  microsco- 
piques entrelacés  dans  la  masse;  2.°  sur  les  passages  mutuels 


IND  65 

de  quelques  roches  superposées  les  unes  aux  autres  ;  5."  sur 
les  couches  subordonnées  qui  sont  de  même  nature  qu'un 
des  élémens  de  la  masse  amorphe.  Tous  ces  phénomènes 
sont  produits ,  pour  ainsi  dire  ,  par  développement  inté- 
rieur,  par  une  variation  quelquefois  lente  ,  quelquefois  très- 
Lrusque,  dans  les  parties  constituantes  d'une  masse  hétérogène. 
Des  molécules  cristallines,  invisibles  à  l'œil,  se  trouvent 
agrandies  ,  dégagées  du  tissu  serré  de  la  pâte;  insensiblement 
elles  deviennent,  par  leur  agroupement  et  leur  mélange 
avec  de  nouvelles  substances,  des  bancs  intercalés  d'une 
puissance  considérable  ;  souvent  même  elleg  deviennent  de 
nouvelles  roches. 

Ce  sont  les  bancs  intercalés  qui  méritent  surtout  la  plus 
grande  attention  (  Leonhai'd  ,  Kopp  et  Gasrtner  ,  Propced.  der 
Miner. ,  p.  i58).  Lorsque  deux  formations  se  succèdent  im- 
médiatement, il  arrive  que  les  couches  de  l'une  commencent 
d'abord  à  alterner  avec  les  couches  de  l'autre  ,  jusqu'à  ce 
que  (après  ces  préludes  d'un  grand  changement)  la  forma- 
tion la  plus  nejive  se  montre  sans  aucun  mélange  de  couches 
subordonnées.  (Buch,  Geogn.  Beob.,  tome  1,  p.  104,  i56; 
Humboldt ,  Rel.  hist. ,  tome  II,  p.  140.)  Les  développemens 
progressifs  des  élémens  d'une  roche  peuvent  par  conséquent 
avoir  une  influence  marquante  sur  la  position  respective  des 
masses  minérales.  Leurs  effets  sont  du  domaine  de  la  géo- 
gnosie  ;  mais  ,  pour  les  découvrir  et  pour  les  apprécier,  l'ob- 
servateur doit  appeler  à  son  secours  les  connoissances  les 
plus  solides  de  l'oryctognosie  ,  surtout  celles  de  la  cristallo- 
graphie moderne. 

En  exposant  les  rapports  intimes  par  lesquels  nous  voyons 
souvent  liés  les  phénomènes  de  composition  aux  phénomènes 
de  gisement,  je  n'ai  point  eu  l'intention  de  parler  de  la  mé- 
thode purement  orjctognostique,  qui  considère  les  roches 
d'après  la  seule  analogie  de  leur  composition.  (Journal  des 
mines,  tome  54,  n.°  19g.  )  Ce  sont  là  de  véritables  clas- 
sifications, dans  lesquelles  on  fait  abstraction  de  toute  idée 
de  superposition,  mais  qui  n'en  peuvent  pas  moins  donner 
îieu  à  des  considérations  intéressantes  sur  l'agroupement 
constant  de  certains  minéraux.  Une  classification  purement 
«ryctognostique  multiplie  les  noms  des  roches  plus  que  ne 
-3.  5 


66  l]SI} 

l'exigent  les  besoins  de  la  géognosie,  loiirju'elle  s'occupe  des 
gisemens  seuls.  Selon  les  changemens  qu'éprouvent  les  roches 
mélangées,  un  même  strate  de  beaucoup  d'étendue  et  d'une 
grande  épaisseur  peut  (  nous  devons  le  répéter  ici)  renfermer 
des  parties  auxquelles  l'oryctognoste  ,  qui  classe  les  roches 
d'après  leur  composition  ,  donnera  des  dénominations  entiè- 
rement différentes.  Ces  remarques  n'ont  pas  échappé  au  savant 
auteur  de  la  Classification  miner alogi que  des  roches;  elles  dé- 
voient se  présenter  à  un  géognoste  expérimenté  qui  a  si  bien 
approfondi  la  superposition  des  terrains  qu'il  a  parcourus.  «II 
«  ne  faut  pas  confondre,  dit  M.Brongniart,  dans  son  mémoire 
«  récent  sur  le  Gisement  des  Ophiolithes ,  les  positions  res- 
«  pectivcs  ,  l'ordre  de  superposition  des  terrains  et  des  roches 
«  qui  les  composent,  avec  des  descriptions  purement  miné- 
«  ralogiques  (  oryctognostiques).  Leur  confusion  en  jeteroit 
«  nécessairement  dans  la  science  et  en  retarderoit  les  pro- 
«  grès.  ^^  Le  tableau  que  nous  donnons  à  la  fin  de  cet  article 
n'est  aucunement  ce  que  l'on  appelle  une  classification  des 
roches;  on  n'y  trouve  pas  même  réunies,  sous  le  titre  de  sec- 
tions particulières  (comme  dans  l'ancienne  méthode  géognos- 
tique  de  \'\'erner,  ou  dans  l'excellent  Traité  de  Géognosie  de 
M.  d'Aubuisson  ),  toutes  les  formations  primitives  de  granité, 
toutes  les  formations  secondaires  de  grès  et  de  calcaire.  On 
a  tâché,  au  contraire,  de  placer  chaque  roche  comme  elle  se 
trouve  dans  la  nature,  selon  l'ordre  de  sa  superposition  ou 
de  son  âge  respectif.  Les  différentes  formations  de  granité 
sont  se,  arées  par  des  gneis ,  des  micaschistes,  des  calcaires 
noirs  (de  transition)  et  des  grauvvackes.  Dans  les  roches  de 
trai;siiion  on  a  éloigné  les  formations  des  porphyres  et  des 
syénifes  du  Mexique  et  du  Pérou  ,  qui  sont  antérieures 
au  grauwacke  et  au  calcaire  à  orthocératites ,  de  la  forma- 
lioa.  beaucoup  plus  récente,  des  porphyres  et  des  s^énitcs 
zirconiennes  de  la  Scandinavie.  Dans  les  roches  secondaires 
on  a  éloigné  le  grès  à  oolithes  de  Nebra,  qui  (.st  ])os[érieur 
au  cah-aire  alpin  ou  zechstein,  du  grès  rouge  (grès  houiller). 
qui  appartient  à  une  même  formation  avec  le  pt.rphyre  et 
le  mandelstein  secondaires.  D'après  le  principe  que  nous 
suivons,  les  mêmes  noms  de  roches  se  retrouvent  pluiieuri 
fois  dans  le  même  tableau.  Un  micaschiste  anthracitcux  (de 


IND  C7 

transition  )  est  séparé  ,  par  un  grand  nombre  de  formations 
plus  anciennes ,  du  micaschiste  antérieur  au  thonschiefer 
primitif. 

Au  lieu  d'une  classification  des  roches  granitiques  ,  schis- 
teuses ,  calcaires  et  arénacées  (agrégées),  j'ai  voulu  pré- 
senter une  esquisse  de  la  structure  géognostique  du  globe, 
un  tableau  dans  lequel  les  roches  superposées  se  succèdent, 
de  bas  en  haut  ,  comme  dans  ces  coupes  idéales  que  j'ai 
dessinées,  en  1804,  à  l'usage  de  V  Ecole  des  mines  de  Me. vice  . 
et  dont  beaucoup  de  copies  ont  été  répandues  depuis  mon 
retour  en  Europe  {Bosquejo  de  una  Pasigrajia  geognostica . 
con  tablas  que  ensenan  la  estraiijicacion  y  el  parallelismo  de  las 
rocas  en  amhos  continentes  ,  para  el  uso  del  Lieal  Seminario  de 
Mineria  de  Mexico).  Ces  tableaux  pasigraphiques  réunissoient^ 
il  mes  propres  observations  faites  dans  les  deux  Amériques, 
ce  qu'à  cette  époque  on  avoit  recueilli  de  plus  précis  sur  le 
^gisement  des  roches  primitives,  intermédiaires  et  secondaires, 
dans  l'ancien  continent.  Elles  oflTroient,  avec  le  type  que  l'on 
pouvoit  regarder  comme  le  plus  général ,  les  types  secon- 
daires, c'est-à-dire  les  couches  que  j'ai  nommées  parallèles. 
Cette  même  méthode  a  été  suivie  dans  le  travail  que  je  publie 
aujourd'hui.  Mes  formations  para//è/«  sont  des  équi^alens  géo- 
gnostiques;  ce  sont  des  roches  qui  se  représentent  les  unes 
les  autres  (voyez  le  Traité  de  Géologie  de  M.  d'Aubaisson ^  t.  II, 
p.  255).  En  Angleterre  et  sur  le  continent  de  l'Eiirope  opposé., 
il  n'existe  pas  une  identité  de  toutes  les  forniations  :  îl  y 
existe  des  équivalens  ou  des  formations  parallèles.  Celle  de 
nos  houilles  situées  entre  les  terrains  de  transition  et  le  grès 
rouge ,  la  position  du  sel  gemme  qui  se  trouve  sur  le  continent 
dans  le  calcaire  alpin  (zechstein),  la  position  de  nos  oolithei 
dans  le  grès  de  Nebra  et  dans  le  calcaire  du  Jura  peuvent  guider 
le  géognoste  dans  le  rapprochement  des  formations  éloignées. 
On  observe  en  Angleterre  les  houilles  (eoal-mesures)  placée?, 
sur  des  formations  de  transition,  par  exemple,  sur  le  calcaire 
ou  mountain-limestone  du  Derbjshire  et  de  South-AA  aies,  et 
sur  le  grès  de  transition  ou  old  red  sandstone  rie  Herfordsliire. 
J'ai  cru  reconnoitre  dans  le  magnesian-limestone,  le  red-marl, 
le  lias  et  les  oolithes  blanches  de  Bath,  les  formations  réunies  de 
calcaire  alpin  (avec  sel  gemme),   de  grès  à  oolithes  (bunte 


08  IND 

sandstein)  -et  de  calcaire  du  Jura.  En  comparant  les  i'orma- 
tions  de  pays  plus  ou  moins  éloignés,  celles  de  l'Angle- 
terre et  de  la  France,  du  Mexique  et  de  la  Hongrie,  du 
bassin  secondaire  de  Santa-Fé  de  Bogota  et  de  laThuringe, 
il  ne  faut  pas  vouloir  opposer  à  chaque  roche  une  roche  pa- 
rallèle; il  faut  se  rappeler  qu'une  seule  formation  peut  en 
représenter  plusieurs  autres.  C'est  ainsi  que  des  bancs  d'argile 
inférieurs  a  la  craie  peuvent,  en  France  (cap  la  Hève, 
près  de  Caen),  être  séparés  de  la  manière  la  plus  tranchée 
des  couches  calcaires  oolithiques,  tandis  qu'en  Suisse,  en 
Allemagne  et  dans  l'Amérique  méridionale  ,  ils  ont  pour 
équivalens  des  bancs  de  marnes  subordonnés  au  calcaire  du 
Jura.  Les  gypses  qui,  dans  un  district,  ne  sont  quelquefois 
que  des  couches  intercalées  dans  le  calcaire  alpin  ou  le 
grès  à  oolithes,  prennent,  dans  un  autre  district,  toute  l'ap- 
parence de  formations  indépendantes  ,  et  se  trouvent  placés 
entre  le  calcaire  alpin  et  le  grès  à  oolithes,  entre  ce  grès  et 
le  muschelkalk  (calcaire  de  Guettingue  ).  Le  savant  professeur 
d'Oxford,  M.  Buckland  ,  dont  les  recherches  étendues  ont 
été  également  utiles  aux  géognostes  de  l'Angleterre  et  du 
continent,  a  publié  récemment  un  tableau  de  formations  pa- 
rallèles, ou,  comme  il  les  appelle  aussi,  équivalents  of  rocks, 
qui  ne  s'étend  que  du  44."  au  64."  degré  de  lat.  bor.  ,  mais 
qui  mérite  la  plus  grande  attention.  {On  the  structure  of  tke 
Alps ,  and  their  relation  with  the  rocks  ofEngland,   1821.) 

De  même  que  dans  l'histoire  des  peuples  anciens  il  est  plus 
facile  de  véritier  la  série  des  événemens  dans  ciiaque  pays 
que  de  déterminer  leur  coïncidence  mutuelle,  demêmeaussi 
on  parviendra  plutôt  à  connoitre  avec  la  plus  grande  exac- 
titude la  superposition  des  formations  dans  des  régions  iso- 
lées, qu'à  déterminer  l'âge  relatif  ou  le  parallélisme  des  for- 
mations qui  appartiennent  à  dilférens  systèmes  de  roches. 
Même  dans  des  pays  peu  éloignés  les  uns  des  autres,  en 
France,  en  Suisse  et  en  AUeiiiagne,  il  n'est  pas  aisé  de  fixer 
l'ancienneté  relative  du  muschelkalk,  de  la  molasse  d'Argovie 
et  du  quadersandstein  du  Harz ,  parce  que  Fou  manque  le 
plus  souvent  de  roches  généralement  répandues,  servant, 
selon  l'expression  heureuse  de  M.  de  Gruner,  d'horizon  géo^ 
gnosti-^iue,  et  auxquelles  on  pourroit  comparer  les  trois  for- 


IND  69 

mations  que  nous  venons  de  nommer.  Lorsque  des  roches  ne 
sont  pas  en  contact  immédiat ,  on  ne  peut  juger  de  leur 
parallélisme  que  par  leurs  rapports  d'âge  avec  d'autres  forma- 
lions  qui  les  unissent. 

Ces  recherches  de  géognosîe  comparée  occuperont  encore 
long-temps  la  sagacité  des  observateurs  ,  et  il  n'est  pas  sur- 
prenant que  ceux  qui  s'attendoient  à  retrouver  chaque  for- 
mation dans  toute  l'individualité  de  son  gisement,  de  sa 
structure  intérieure  et  de  ses  couches  subordonnées,  finissent 
par  nier  toute  analogie  de  superposition.  J'ai  eu  l'avantage 
de  visiter,  avant  mon  voyage  à  l'équateur,  une  grande  partie 
de  l'Allemagne,  de  la  France,  de  la  Suisse,  de  l'Angle- 
terre ,  de  rilalie  ,  de  la  Pologne  et  de  l'Espagne.  Pendant  ces 
courses,  mon  attention  étoit  particulièrement  fixée  sur  le  gi- 
sement des  formations,  phénomène  que  je  comptois  discuter 
dans  un  ouvrage  particulier.  Arrivé  dans  l'Amérique  du  Sud, 
et  parcourant  d'abord  en  différentes  directions  le  vaste  terrain 
qui  se  prolonge  de  la  chaîne  côtière  de  Venezuela  au  bassin 
de  l'Amazone  ,  je  fus  singulièrement  frappé  de  la  confor- 
mité de  superposition  qu'offrent  les  deux  continens.  (Voyez 
ma  première  esquisse  d'un  tableau  géologique  de  l'Amérique 
équinoxiale,  dans  le  Journ.  de  phjs.,  T.  LUI,  p.  5o.)  Des 
observations  postérieures,  qui  embrassoient  les  Cordillères 
du  Mexique,  de  la  Nouvelle -Grenade,  de  Quito  et  du 
Pérou,  depuis  le  21."  degré  de  latitude  boréale  jusqu'au 
12.*  degré  de  latitude  australe,  ont  confirmé  ces  premiers 
aperçus.  Le  type  des  foi'mations  s'est  plutôt  agrandi  à  mes 
yeux,  qu'il  ne  s'est  altéré  dans  ses  parties  les  plus  essen- 
tielles. Mais,  en  parlant  des  analogies  que  Ion  observe  dans 
le  gisement  des  roches  et  de  Puniformité  de  ces  lois  qui  nous 
révèlent  Tordre  de  la  nature,  je  puis  citer  un  témoignage 
bien  autrement  imposant  que  le  mien  ,  celui  du  grand  géo- 
gnoste  dont  les  travaux  ont  le  plus  avancé  la  connoissance 
de  la  structure  du  globe.  M.  Léopold  de  Buch  a  poussé  ses 
recherches  de  Parchipel  des  îles  Canaries  jusqu'au-delà  du 
cercle  polaire,  au  71."  degré  de  latitude.  Il  a  découvert  de 
nouvelles  formations  placées  entre  les  formations  ancienne- 
ment connues;  et,  dans  les  terrains  primitifs  comme  dans 
les  terrains  de  transition,  dans  les  secondaires  comme  dans 


70  IND 

les  volcaniques,  il  a  été  frappé  des  grands  traits  qui  carac- 
térisent le  tableau  des  formations  dans  les  régions  les  plus 
éloignées. 

Du  scepticisme  qui  nie  tout  ordre  dans  le  gisement  des 
roches ,  il  faut  distinguer  une  opinion  qui  renaît ,  de  temps  en 
temps,  parmi  des  observateurs  très-expérimentés,  et  d'après 
laquelle  les  foruiations  de  granite-gneis,  de  grauwacite,  de 
calcaire  alpin  et  de  craie ,  uniformément  superposées  dans 
différens  pays,  ne  correspondent  guère  entre  elles  par  rap- 
port à  làge  des  élémens  homonymes  de  chaque  série.  On  croit 
qu'une  roche  secondaire  peut  avoir  été  formée  sur  un  point 
du  globe,  lorsque  les  roches  de  transition  n'existoient  pas  en- 
core siir  un  autre  point.  Dans  cette  supposition  ,  il  ne  s'agit 
pas  de  ces  roches  granitiques  qui  recouvrent  un  calcaire  rem- 
pli d'orthocératitcs ,  et  qui  sont  par  conséquent  postérieures 
aux  roches  primitives.  C'est  un  fait  généralement  reconnu 
de  nos  jours,  que  des  formations  de  composition  analogue  se 
sont  répétées  à  des  époques  très-éloignées  les  unes  des  autres. 
Le  doute  que  nous  exposons,  sans  le  partager  nous-mêmes, 
porte  sur  un  point  beaucoup  moins  constaté,  sur  la  question 
de  savoir  si  des  micaschistes  indubitablement  placés  dans  un 
pays  au  milieu  de  roches  primitives  (au-dessous  de  celles 
dans  lesquelles  la  vie  organique  commence  à  paroître),  sont 
plus  neuves  que  les  roches  secondaires  d'un  autre  pays. 
J'avoue  que,  dans  la  partie  du  globe  que  j'ai  pu  examiner, 
je  n'ai  rien  vu  qui  semble  confirmer  cette  opinion.  Des 
roches  grenues  syéniliques  répétées  deux,  peut-être  même 
trois  fois,  dans  des  terrains  primitifs,  intermédiaires  (et  se- 
condaires?) sont  des  phénomènes  analogues  qui  nous  sont 
devenus  fiiniiiicrs  depuis  quinze  ans;  mais  la  non-concordance 
d'âge  des  g'-anf's  terrains  homonymes  ne  me  semble  guère 
prouvée  jusq[t»'ici  par  des  observations  directes,  faites  sur  le 
contact  de  formations  superposées.  La  craie  ou  le  calcaire 
du  Jura  peut,  d'un  côté,  couvrir  immédiatement  le  gra- 
nité primitif,  et  de  l'autre  en  être  séparé  par  de  nom- 
breuses roches  secondaires  et  de  transition  :  ces  faits  très- 
communs  ne  démontrent  que  la  soustraction,  l'absence,  le 
non- développement  de  plusieurs  membres  intermédiaires  de 
ja série  géognostique.  Le  grauwackc  peut,  d'un  côté,  plonger 


IND  71 

sous  une  roche  feldspathique  ,  par  exemple,  sous  du  granité 
de  transition  ou  sous  la  S)énite  zirconienne ,  et,  de  l'autre 
côté,  être  superposé  à  du  calcaire  noir  rempli  de  madré- 
pores :  ce  gisement  ne  démontre  que  la  position  intermédiaire 
d'une  couche  de  grauwacke  entre  des  roches  calcaires  et  des 
roches  feldspathiques  de  transition.  Depuis  que,  parles  tra- 
vaux importans  de  MM.  Cuvier  et  Brongniart,  l'examen  ap- 
profondi des  corps  organisés  fossiles  a  répandu  comme  une 
nouvelle  vie  dans  l'étude  des  terrains  tertiaires,  la  découverte 
des  mêmes  fossiles  dans  des  couches  analogues  de  pays  trés- 
éloignés  a  rendu  encore  plus  probable  l'isochronisme  de  for- 
mations très-généralement  répandues. 

C'est  cet  isochroiiisme  seul ,  c'est  cet  ordre  admirable  de 
succession,  qu'il  semble  donné  à  l'homme  de  reconnoître  avec 
quelque  certitude.  Les  essais  que  des  géologues  hébraï/ans  ont 
faits  pour  soumettre  les  époques  à  des  mesures  absolues  du 
temps,  et  pour  lier  la  chronologie  d'anciens  mythes  cosmo- 
goniques  aux  observations  mêmes  de  la  nature  ,  n'ont  pu  être 
qu'infructueux.  «On  a  voulu  plus  d'une  fois,  dit  M.  Ramond 
«  dans  un  discours  rempli  de  vues  philosophiques,  trouver 
«  dans  les  monumens  de  la  nature  un  supplément  à  nos 
«  courtes  annales.  C'étoit  pourtant  assez  des  siècles  histori- 
«  ques  pour  nous  apprendre  que  la  succession  des  événemens 
«  physiques  et  moraux  ne  se  règle  point  sur  la  marche 
«  uniforme  du  temps ,  et  ne  sauroit  par  conséquent  en 
«  donner  la  mesure.  Nous  voyons  derrière  nous  une  suite  de 
«  créations  et  de  destructions  par  l'arrangement  des  couches 
«  dont  la  croûte  de  la  terre  est  formée.  Elles  font  naître 
«  l'idée  d'autant  d'époques  distinctes;  mais  ces  époques  si 
«  fécondes  en  événemens  peuvent  avoir  été  très-courtes ,  eu 
«  égard  au  nombre  et  à  l'importance  des  résultats.  Entre  les 
«  créations  et  les  destructions  ,  au  contraire  ,  nous  ne  voyons 
«  rien,  quelle  que  puisse  être  l'immensité  des  intervalles.  Là 
«  où  tout  se  perd  dans  le  A^ague  d'une  antiquité  indéterminée, 
«  les  degrés  d'ancienneté  n'ont  plus  de  valeur  appréciable, 
«  parce  que  la  succession  des  phénomènes  n'a  plus  d'échelle 
«  qui  se  rapporte  à  la  division  du  temps.  >'  {Mémoires  de 
l'Institut  pour  L'année  i8i5  ,  p.  47- ) 

Dans  la  monographie  géognostique  d'un  terrain  de  peu  d'é- 


72  IND 

tendue,  par  exemple,  des  environs  d'une  ville,  on  ne  sauroit 
distinguer  assez  minutieusement  les  difi'érentes  couches  qui 
composent  les  formations  locales.  Des  hancs  de  sable  et  d'ar- 
giJe,.les  sousiiivisions  des  gypses,  les  strates  de  calcaire  mar- 
neux et  oolitliique  ,  désignés  en  Angleterre  sous  les  noms 
de  Purbeck-Beds,  l'ortland -Stone,  Coral-Ray,  Kelloway- 
Rock  et  Coru-Brash,  acquièrent  alors  beaucoup  d'impor- 
tance. De  minces  couches  de  terrains  secondaires  et  tertiaires, 
renfermant  des  assemblages  de  corps  fossiles  très-caracté- 
ristiques, ont  servi  dliorizon  au  géognosle.  On  a  pu,  dans 
leur  prolongement ,  rapporter  à  l'une  délies  ce  qui  se 
trouve  place  au-dessus  ou  au-dessous  dans  l'ordre  de  la  série 
totale.  Les  dénominations  particulières  par  lesquelles  on 
distingue  ces  couches,  offrent  même  beaucoup  d'avantage 
dans  une  description  géognostique  ,  quelque  bizarre  ou  im- 
propre que  puisse  être  leur  signification  ou  leur  origine 
puisée  dans  le  langage  des  mineurs.  Mais,  dès  que  l'on  traite  du 
gisement  des  roches  sur  une  surface  très-étendue,  il  est  indis- 
pensable de  considérer  les  formations  ou  agroupemens  habi- 
tuels de  certaines  couches  sous  un  point  de  vue  plus  général. 
C'est  alors  qu'il  faut  être  plus  sobre  et  plus  circonspect  dans 
la  distinction  des  roches  et  dans  leur  nomenclature.  L'ou- 
vrage de  M.  Freiesleben  ,  sur  les  plaines  de  la  Saxe  ,  qui 
ont  plus  de  700  lieues  carrées  [Geogr.  Beschr.  des  Kupfer- 
schiefergebirges  ,  in  4  Th.,  1807  —  i8i5),  offre  un  beau 
modèle  de  la  réunion  d'observations  locales  et  de  généra- 
lisations géognostiqucs.  Ces  généralisations,  ces  essais  de 
simplifier  le  tablrau  des  formations  et  de  ne  s'arrêter  qu'à 
de  grands  traits  caractéristiques,  doivent  être  plus  ou  moins 
timides,  selon  qu'on  décrit  le  bassin  d'un  fleuve,  une  pro- 
vince isolée  .  un  pays  grand  comme  la  France  et  l'Allemagne  , 
ou  un  continent  entier. 

Pj'us  on  apjtrofonùit  l'étude  des  terrains  ,  plus  la  liaison 
entre  des  formations  qui  nous  paroissent  d'abord  entièrement 
indé^/Cndantes,  se  manifeste  par  le  grand  phénomène  d'alter- 
nance, cest-à-dire  par  une  succession  périodique  de  couches 
qui  offrent  de  l  analogie  dans  leur  composition,  et  quelque- 
fols  même  dans  de  certains  corps  fossiles.  C'est  ainsi  que 
ilans  les  montagnes  de  transition,  par  exemple,  en  Amérique 


IND  75 

(à  l'entrée  des  plaines  de  Calabozo)  ,  des  bancs  de  griinstein 
et  d'euphotide  ;  en  Saxe  (  près  de  Friedrichswalde  et  Maxen) , 
les  schistes  avec  ampélites  ,  Icsgrauwackes  ,  les  porphyres,  les 
calcaires  noirs  elles  griinstein,  constituent,  d'après  leur  alter- 
nance fréquente  et  répétée,  une  même  formation.  Souvent  il 
arrive  que  des  bancs  subordonnés  ne  paroissent  qu'à  la  limite 
extrême  d'une  formation,  et  prennent  l'aspect  d'une  roche  in- 
dépendante. Les  marnes  cuivreuses  et  bitumineuses  (Kupfer- 
schiefer),  qui  se  trouvent  placées  en  Thuringe  entre  le  cal- 
caire alpin  (zechstein)  et  le  grès  rouge  (rothcs  liegende), 
et  qui  sont  devenues  depuis  des  siècles  l'objet  de  grandes 
exploitations  ,  sont  représentées  dans  plusieurs  parties  du 
Mexique,  de  la  Nouvelle- Andalousie  et  de  la  Bavière 
méridionale,  par  des  couches  multipliées  d'argile  marneuse, 
plus  ou  moins  carburées  ,  et  enclavées  dans  le  calcaire  alpin. 
Des  circonstances  semblables  donnent  souvent  à  des  gypses , 
à  des  grès,  et  à  de  petits  bancs  de  calcaires  compactes, 
l'apparence  de  formations  particulières.  On  reconnoit  leur 
dépendance  ou  levir  suhordinaLlon  par  leur  association  fré- 
quente avec  d'autres  roches ,  par  leur  manque  d'étendue 
et  d'épaisseur,  ou  par  leur  suppression  totale  fréquemment 
observée.  11  ne  faut  point  oublier  (et  ce  fait  m'a  beaucoup 
frappé  dans  les  deux  hémisphères)  que  les  grandes  formations 
de  calcaires,  par  exemple  le  calcaire  alpin,  ont  leurs  ^rès , 
comme  les  grès  très -généralement  répandus  ont  leurs  bancs 
calcaires.  De  minces  couches  de  grès,  de  calcaires  et  de  gypses 
caractérisent ,  sous  toutes  les  zones  ,  les  dépôts  de  houille  et  de 
sel  gemme  ou  d'argile  muriatifère  (salzthon)  ,  dépôts  isolés 
qui  le  plus  souvent  ne  sont  recouverts  que  de  ces  petites  for- 
mations locales.  C'est  en  négligeant  ces  considérations,  qui 
devroient  être  familières  à  tout  géognoçte  expérimenté,  que 
l'on  a  rendu  trop  compliqué  le  type  des  grandes  formations 
indépendantes. 

Le  phénomène  de  Valtemance  se  manifeste,  ou  localement 
dans  des  roches  sjiperposées  plusieurs  fois  les  unes  aux  au- 
tres et  constituant  une  même  formation  complexe  ,  ou 
dans  la  suite  des  formations  considérées  dans  leur  ensemble. 
Ce  sont  ou  des  grunstein  et  des  syénites,  des  schistes  et  des 
calcaires  de  transition,  des  couches  de  calcaires  et  de  marne 


74  IND 

qui  alternent  immédiatement,  ou  c'est  tout  un  système  de 
micaschisrcs  et  de  roches  fcMspalhiqnes  grenues  (granités, 
gneis  et  syénites)  qui  reparoît  parmi  les  terrains  de  transi- 
tion et  que  séparent  du  système  homonvme  primitif  les  grau- 
wackes  et  les  calcaires  à  orthocératites.  La  première  con- 
noissance  de  ce  fait,  un  des  plus  importans  et  des  plus  inatten- 
dus de  la  géognosie  moderne,  est  due  aux  belles  observations 
de  MM.  Léopolci  de  Buch  ,  Brochant  et  Haussniann.  Ce  phé- 
nomène rapproche,  non  par  rapport  au  temps  ou  a  l'ancien- 
neté relative,  mais  par  rapport  à  l'analogie  de  composition 
et  d'aspect,  le  terrain  de  transition  du  terrain  primitif. 
De  ce  que,  dans  le  premier,  des  roches  grenues  ,  dépourvues 
entièrement  de  débris  organiques,  succèdent  à  des  roches 
compactes  qui  contiennent  ces  mêmes  débris,  de  célèbres 
géognosles  ont  conclu  que  cette  alternance  de  roches  coquil- 
1ères  ef  non  coquillères  [  ourroit  bien  s'étendre  au-delà  des 
terrains  que  nous  appelons  primitifs.  On  n'a  pas  seulement 
demaiidé  si  des  thonsrhiefcr ,  des  micaschistes  et  des  gneis  ne 
supportoient  pas  les  granités  que  l'on  a  crus  les  plus  anciens; 
on  a  aussi  agité  la  question  de  savoir  si  des  grauwackes  et 
des  calcaires  noirs  à  nurlrépores  ne  pourroient  passe  retrou- 
ver sous  ces  mêmes  granités.  D'après  cet  aperçu,  les  roches 
primitives  et  de  transition  ne  formeroient  qvi'un  seul  terrain, 
et  les  premières  pourroient  être  regardées  comme  intercalées 
dans  un  terrain  postérieur  au  développement  des  êtres  orga- 
nisés et  qui  pénètreroit  a  une  profondeur  inconnue  dans 
l'intérieur  c'u  globe.  J'avoue  qu'aucune  observation  directe 
n'a  pu  être  citée  jusqu'ici  pour  étayer  ces  suppositions.  Les 
fragmens  de  roches  que  j'ai  vus  enchâssés  dans  les  laves 
îithoïdes  des  volcans  du  Mexique,  de  Quito  et  du  VésuA^e, 
et  que  l'on  croit  arrachés  aux  entrailles  de  la  terre,  semblent 
appartenir  à  des  roches  altérées  de  granité  ,  de  micascliiste  , 
de  syénite  et  de  calcaire  grenu,  et  non  à  des  grauwackes  et 
à  des  calcaires  à  madrépores. 

On  a  conservé,  dans  le  tableau  des  roches,  les  grandes 
divisions  connues  sous  le  nom  de  terrains  primitifs,  intermé- 
diaires, secondaires  et  tertiaires.  Les  limites  naturelles  de 
ces  quatre  sjstèmes  de  roches  sont  le  thonschiefer  avec  am- 
pélite  et  pierre  lydienne  ,  alternant  avec  des  calcaires  com- 


IND  75 

pactes  et  des  grauwackes,  la  formation  des  houilles  et  les  for- 
mations qui  succèdent  immédiatement  à  la  craie.  En  géognosie, 
romnie  dans  la  botanique  descriptive  (phytographie),  Icssous- 
divisions  ou  les  petits  groupes  des  familles  ont  des  caractères 
plus  tranchés  que  les  grandes  divisions  ou  les  classes.  C'est  le 
ras  de  toutes  les  sciences  dans  lesquelles  on  s'élève  de  l'indi- 
vidu aux  espèces  ,  des  espèces  aux  genres  ,  et  de  ceux-ci  cà  des 
degrés  d'abstraction  encore  supérieurs.  Une  méthoiie  repose 
nécessairement  sur  des  abstractions  diversement  graduées,  et 
les  passages  deviennent  plus  fréquens  à  mesure  que  les  carac- 
tères sont  plus  complexes.  Les  terrains  intermédiaires  de 
Werner,  que  M.  de  Buch  a  limités  le  premier  avec  la  saga- 
cité qui  le  distingue  {MoU's  Jahrb,,  1798,  B.  2,  p.  264), 
tiennent,  par  le  thonschiefer  ampéliteux  ,  les  syénites  à  zir- 
cons,  les  granités  quelquefois  dépourvus  d'amphibole,  et 
les  micaschistes  anthraciteux  ,  aux  terrains  primitifs,  tandis 
que  les  grauwackes  à  petits  grains  et  les  calcaires  madrépo- 
riques  et  compactes  les  lient  aux  grès  houillers  et  aux  cal- 
caires des  terrains  secondaires. 

Des  porphyres  de  formations  très-différentes  ont  leur  siège 
principal  parmi  les  roches  de  transition;  mais  ils  débordent, 
pour  ainsi  dire,  en  masses  considérables  vers  les  terrains  se- 
condaires, où  ils  se  lient  au  grès  houiller,  tandis  qu'ils  ne 
pénètrent  dans  le  terrain  primitif  que  comme  des  couches 
subordonnées  et  de  peu  d'épaisseur.  Le  mouvement  pro- 
gressif, ou,  si  j'ose  me  servir  de  ce  mot  impropre,  l'étendue 
de  Voscillalion  de  la  serpentine  et  de  l'euphotide  ,  est  très- 
dilTérente.  Ces  roches  de  diallage  ,  constituant  plusieurs  for- 
mations distinctes,  rarement  recouvertes,  et  d'un  gisement 
difficile  à  vérifier,  s'arrêtent  presque  à  la  limite  inférieure 
des  terrains  secondaires;  vers  le  bas  elles  percent  bien  avant 
dans  les  terrains  primitifs  au-delà  du  micaschiste.  La  craie 
semble  offrir  une  limite  naturelle  aux  terrains  tertiaires,  que 
MM.  Cuvier  et  Brongniart  ont  caractérisés  les  premiers,  et 
avec  justesse  ,  comme  des  terrains  entièrement  différens  des 
dernières  formations  secondaires ,  décrites  par  l'école  de 
Freyberg  [Géogr.  miner,  des  cmirons  de  Paris,  p.  8  et  9). 
Frappé  des  rapports  qui  existent  entre  le  terrain  tertiaire 
^t  les  couches  sous  la  craie  ,   M.  Brongniart  a  même  pro- 


rs  IND 

posé  récemment  de  désigner  les  formations  tertiaires  sous  le 
nom  de  terrains  secondaires  supérieurs.  (Sur  le  gisement  des 
ophiolithes ,  p.  57  :  comparez  aussi  les  discussions  géognosli- 
ques  très -intéressantes  que  renferme  le  Traité  des  roches  de 
M.  de  Bonnard,  p.  i38,  210  et  212.) 

La  distinction  des  quatre  terrains  que  nous  venons  de 
nommer  successivement ,  et  dont  trois  sont  postérieurs  au 
développement  de  la  vie  organique  sur  le  globe,  me  paroit 
digne  d'éire  conservée,  malgré  le  passage  de  quelques  forma- 
tions à  des  form;itions  différentes,  et  malgré  les  doutes  que 
plusieurs  géognostes  très-dist'ngués  ont  fondés  sur  ces  passages. 
La  classification  des  terrains  marque  de  grandes  époques  de  la 
nature,  par  exemple,  la  première  apparition  de  quelques  ani- 
maux pélagiques  (zoophytes,  mollusques  céphalopodes)  et  la 
destruction  simultanée  d'une  énorme  niasse  de  monocotylédo- 
nes;  elle  offre  comme  des  points  de  reposa  l'esprit,  et  tout  en 
se  rappelant  que  les  formations  mêmes  sont  bien  plus  impor- 
tantes que  les  grandes  divisions,  on  a  souvent  lieu  ,  en  avan- 
çant des  hautes  montagnes  vers  les  plaines,  de  reconnoitre 
l'influence  diverse  que  Tagroupement  des  roches  primitives 
et  intermédiaires,  celui  des  roches  secondaires  et  tertiaires  ont 
exercé  sur  l'inégalité  et  la  configuration  du  sol.  C'est  à  cause 
de  cette  influence  que  l'aspect  du  paysage,  la  forme  des  mon- 
tagnes et  des  plateaux  ,  le  caractère  de  la  végétation  ,  varient 
moins,  lorsqu'on  voyage  parallèlement  à  la  direction  des 
couches,  qu'en  les  coupant  à  angle  droit  [Greenough ,  Crit. 
examinât,  of  Géologie  ,  p.  58). 

Je  continue,  en  suivantMM.de  Buch  ,  Freiesleben,  Bro- 
chant ,  Beudant ,  Buckland  ,  Raumer  (  Geh.  von  I^'ieder-Schles. , 
3819)  et  d'autres  géognostes  célèbres,  à  grouper  les  forma- 
tions indépendantes  d'après  les  divisions  en  terrains  primitifs  , 
de  transition,  secondaires  ,  etc.  ,  sans  m'appesantir  sur  l'im- 
propriété de  la  plupart  de  ces  dénominations.  Je  continue  de 
séparer  l'argile  (avec  lignites)  superposée  à  la  craie,  de  celle 
qui  est  dessous,  et  la  craie  même  ,  des  formations  secondaires 
plus  anciennes.  Mais  ces  distinctions  par  assises  et  par  groupes 
d'assises,  si  utiles  dans  la  description  d'un  terrain  de  peu 
d'étendue,  ne  doivent  pas  empêcher  le  géognoste  ,  lorsqu'il 
tente  de  s'élever  à  un  point  de  vue  plus  général ,  de  lier  ces 


IND  77 

argiles  et  la  craie  au  calcaire  du  Jura,  et  de  les  regarder 
comme  les  derniers  strates  de  cette  grande  formation  com- 
posée de  couches  calcaires  et  marneuses.  Les  assises  inféiieures 
de  la  craie  {tujjeau)  renferment  des  ammonites.  Le  calcaire 
de  la  montagne  de  Saint -Pierre  de  Maestricht  indique, 
comme  l'ont  déjà  observé  MM.  Omalius  et  Brongniart  (  Céogr. 
miner.,  p.  i3),  le  passage  de  la  craie  à  des  calcaires  secon- 
daires plus  anciens.  Près  de  Caen ,  selon  les  belles  observa- 
tions de  M.  Prévost,  les  argiles  sous  la  craie  renferment  ces 
mêmes  lignites  qui  se  trouvent,  en  plus  grande  masse,  dans 
l'argile  superposée  à  la  craie;  des  cérites,  qui  rappellent  le 
calcaire  grossier  de  Paris,  se  montrent,  dans  un  calcaire  à 
trigonies,  placés  entre  des  argiles  inférieures  à  la  craie  et  les 
couches  oolithiques.  Je  n'insiste  pas  sur  ces  faits  particuliers; 
je  les  cite  seulement  pour  prouver,  par  un  exemple  frappant, 
comment,  en  rapprochant  des  Lits  observés  sur  différens 
points  d'un  même  pays,  le  grand  phénomène  de  YaUernance. 
nous  révèle  des  liaisons  entre  des  formations  qui,  au  premier 
abord,  paroissent  n"avoir  presque  rien  de  commun.  C'est  le 
propre  de  ces  couches  qui  alternent  les  unes  avec  les  autres, 
de  ces  roches  qui  se  succèdent  en  série  périodique  ,  d'offrir  les 
contrastes  les  plus  marqués  dans  les  deux  couches  qui  se  sui- 
vent immédiatement.  En  géognosie ,  comme  dans  lesdifférentes 
parties  de  l'histoire  naturelle  descriptive,  il  faut  reconnoître 
l'avantage  des  classifications ,  des  coupes  diversement  gra- 
duées, sans  jamais  perdre  de  vue  l'unité  de  la  nature.  Aussi, 
ceux  qui  ont  avancé  le  plus  la  philosophie  naturelle  ,  ont  eu  à 
la  fois  et  la  tendance  à  généraliser  et  la  connoissance  exacte 
d'une  grande  masse  de  faits  particuliers. 

On  a  l'habitude  de  terminer  la  série  des  terrains  par  les 
roches  volcaniques,  et  de  les  faire  succéder  aux  terrains  se- 
condaires et  tertiaires,  même  aux  terrains  de  transport.  Dans 
un  tableau  formé  d'après  le  seul  principe  de  l'ancienneté  rela- 
tive, cet  arrangement  ui'a  paru  peu  convenable.  Sans  doute  que 
des  laves  lithoides  se  sont  répandues  sur  les  formations  les  plus 
récentes,  même  sur  des  couches  de  galets.  On  ne  sauroit  nier 
qu'il  n'existe  des  productions  volcaniques  de  différentes  épo- 
ques; mais,  d'après  ce  que  j'ai  pu  observer  dans  les  Cordil- 
lères du  Pérou,  de  Quito  et  du  Mexique  ,  dans  une  partie  du 


78  IND 

inonde  si  célèbi'e  par  la  fréquence  des  volcans,  il  ma  paru 
que  le  site  principal  des  feux  souterrains  est  dans  les  roches 
de  transition  et  au-dessous  de  ces  roches.  J'ai  reconnu  que 
tous  les  cratères  enllaminés  ou  éteints  des  Andes  se  sont 
ouverts  au  milieu  de  porphyres  trappéensou  trachytes  {Berl. 
Ahhandl.  der  hbn.  Acad.,  i8i3,  p.  i5i),  et  que  ces  trachytes 
sont  liés  à  la  grande  formation  de  porphyre  et  de  sjénite  de 
transition.  D'après  cette  remarque,  il  m"a  paru  plus  naturel 
de  faire  suivre  parallèlement,  comme  par  bisection ,  les 
terrains  secondaires  et  volcaniques  aux  terrains  de  transi- 
tion. Par  cette  nouvelle  disposition  la  formation  des  porphyres 
et  des  grauwackes ,  ou  celle  des  porphyres,  des  syénites  et 
des  granités  de  transition,  se  trouve  liée  à  la  fois,  i.°  aux 
porphyres  du  grès  rouge  dans  le  terrain  houiller  secondaire, 
2.°  aux  trachytes  ou  porphyres  trappéens  qui  sont  dépour- 
vus de  quarz  et  mêlés  de  pyroxènes.  J'emploie  à  regret  le  mot 
de  terrain  volcanique ,  non  que  je  doute,  comme  ceux  qui  dé- 
signent les  trachytes,  les  basaltes  et  les  phonolithes  (porphyr- 
schiefer)  sous  le  nom  de  terrain  trappéen ,  que  tout  ce  que 
j'ai  réuni  dans  le  terrain  volcanique  ne  soit  produit  ou 
altéré  par  le  feu;  mais  parce  que  plusieurs  roches,  interca- 
lées entre  les  roches  (primitives?),  de  transition  et  secon- 
daires, pourroient  bien  aussi  être  volcaniques.  J'aurois  de  plus 
voulu  éviter  toute  idée  (historique)  de  l'origine  des  choses 
dans  un  tableau  (statistique)  de  gisement  ou  de  superposition. 
A  Skeen,  en  Norwége ,  une  syénite  basaltique  et  poreuse, 
renfermant  des  pyroxènes,  est  placée ,  d'après  l'observation 
de  M.  de  Buch,  entre  le  calcaire  de  transition  et  la  syénite 
zirconienne.  C'est  une  couche,  non  un  filon  (dyke);  c'est 
un  phénomène  bien  moins  problématique  que  le  basalte 
(urgriinstein  P  Buch,  Geogn.  Beob. ,  T.  I ,  p.  124,  et  Raumer, 
Granit  des  Riesengebirgcs ,  p.  70)  renfermé  dans  le  mica- 
schiste de  Krobsdor:  en  Silésie.  Les  trachytes  avec  obsidienne 
du  Mexique  sont  intimement  liés  aux  porphyres  de  transi- 
tion ,  qui  alternent  avec  des  syénites.  Les  mandeistein,  ap- 
partenant au  grès  rouge,  prennent,  sur  le  continent  de 
l'Europe  et  dans  l'Amérique  équinoxiale,  tout  l'aspect  d'un 
mandeistein  de  formation  basaltique.  M.  Boue,  dans  son 
intéressant  Essai  géologique   sur  l'Ecosse ^  p.    126  —   162  .  a 


IND  79 

décrit  des  roches  pyroxéniques  (dolérites)  enclavées  dans  le 
grés  rouge.  Sans  rien  préjuger  sur  l'origine  de  ces  masses, 
ni ,  en  général ,  sur  celle  de  toutes  les  roches  primitives  et 
de  transition  ,  nous  désignons  ici  par  le  nom  de  terrains 
volcaniques  la  série  la  moins  interrompue  de  roches  altérées 
par  le  feu. 

En  faisant  l'énumération  des  roches,  je  me  suis  servi  des 
noms  le  plus  généralement  employés  par  les  géognostes  de  la 
France,  de  FAllemagne,  de  l'Angleterre  et  de  Tltalie  ;  j'au- 
rois  craint,  en  essayant  de  perfectionner  la  nomenclature 
des  formations,  d'ajouter  de  nouvelles  difficultés  à  celles  que 
présente  déjà  la  discussion  des  gisemens.  J'ai  cependant  évité 
avec  soin  les  dénominations,  trop  long-temps  conservées,  de 
calcaire  inférieur  et  supérieur;  de  gypse  de  première,  seconde  ou 
troisième  formation  ;  A  ancien  ou  Ae  nouveau  grès  rouge,  etc.  Ces 
dénominations  offrent  sans  doute  un  vrai  caractère  géognos- 
tique  :  elles  ont  rapport,  non  à  la  composition  des  roches, 
mais  à  leur  âge  rehitif.  Cependant,  comme  le  type  général 
des  formations  de  l'Europe  ne  peut  être  modelé  sur  celui  d'un 
seul  canton  ,  la  nécessité  d'admettre  des  formations  parallèles 
{sich  vertretende  Gehirgsarten)  rend  les  noms  de  premier  ou 
second  gjvpse,  de  grès  ancien  ou  mitojen  ,  extrêmement  vagues 
et  obscurs.  Dans  un  pays  on  est  en  droit  de  considérer  une 
couche  de  gypse  ou  de  grès  comme  une  formation  particu- 
lière, tandis  que  dans  un  autre  on  doit  la  regarder  comme 
subordonnée  à  des  formations  voisines.  Les  meilleures  déno- 
minations sont  sans  doute  les  déno,.  r-ations  géographiques: 
elles  font  naître  des  idées  de  superposition  très-précises.  Lors- 
qu'on dit  qu'une  formation  est  identique  avec  le  porphyre  de 
Christiania,  le  lias  de  Dorsetshire  ,  le  grès  de  Nebra  (bunter 
sandstein  )  ,  le  calcaire  grossier  de  Paris ,  ces  assertions  ne 
laissent,  à  un  géognoste  instruit,  aucun  doute  sur  la  posi- 
tion que  l'on  veut  assigner  à  la  formation  que  l'on  décrit. 
Aussi  c'est  comme  par  convention  tacite  que  les  mots  :  zecJz- 
stein  de  Thuringe ,  calcaire  de  Derbyshire ,  terrain  de  Paris , 
etc.,  se  sont  introduits  dans  le  langage  minéralogique  ;  ils 
rappellent  un  calcaire  qui  succède  immédiatement  au  grès 
rouge  houiller  ,*  un  calcaire  de  transition  placé  sous  le 
grès  houiller,    enfin,    des  formations  plus  récentes  que    la 


8o  IND 

craie.  Les  seules  difficultés  que  présente  la  multiplicité  de 
ces  dénominations  géographiques,  consistent  dans  le  choix 
des  noms  et  dans  le  degré  de  certitude  que  l'on  a  acquis  sur 
le  gisement  ou  l'âge  relatif  de  la  roche  à  laquelle  on  rapporte 
les  autres.  Les  géognostes  anglois  cherchent  sur  le  continent 
leur  lias  et  leur  red-marl ;  les  géognostes  allemands  leur  hunte 
sandsteUi  et  leur  muschelkalh.  Ces  mots  se  trouvent  associés  dans 
l'esprit  des  voyageurs  à  des  souvenirs  de  localités.  11  ne  s'agit 
par  conséquent .  pour  faire  naître  des  idées  précises,  que  de 
choisir  des  localités  assez  généralement  connues  et  qui  sont 
célèbres,  soit  par  l'exploitation  des  mines,  soit  par  des  ou- 
vrages descriptifs. 

Pour  diminuer  les  effets  des  vanités  nationales,  et  pour 
rattacher  les  nouveaux  noms  à  des  objets  plus  importans  , 
j'avois  proposé ,  il  y  a  long-  temps  (  1796  ) ,  les  dénominations 
de  pierre  calcaire  alpine,  et  calcaire  du  Jura.  Une  partie  des 
Hautes-Alpes  de  la  Suisse,  et  la  majeure  partie  du  Jura, 
sont  sans  doute  formées  de  ces  deux  roches  :  cependant  les 
noms,  aujourd'hui  généralement  reçus,  de  calcaire  alpin 
f  zechstein)  et  de  calcaire  du  Jura,  devroient  être,  à  ce  que 
je  pense  ,  modifiés  ou  entièrement  abandonnés.  Les  assises 
inférieures  des  montagnes  du  Jura  ,  remplies  de  gryphites , 
appartiennent  à  une  formation  plus  ancienne,  peut-être  au 
zechstein;  et  une  très -grande  partie  du  calcaire  des  Alpes 
de  la  Suisse  n'est  certainement  pas  du  zechstein ,  mais  , 
d'après  MM.  de  Buch  et  Escher,  du  calcaire  de  transition. 
Il  vaut  donc  mieux  choisir  les  noms  géographiques  des  roches 
parmi  les  noms  de  montagnes  isolées  et  dont  toute  la  masse 
visible  n'appartient  qu'à  une  seule  formation ,  que  de  les 
emprunter,  comme  je  l'ai  fait  à  tort,  à  des  chaînes  entières. 
J'avois  pensé ,  et  beaucoup  de  géognostes  ont  partagé  cette 
opinion,  que  le  calcaire  du  Jura  (calcaire  à  cavernes  de 
Franconie  )  étoit  généralement  placé ,  sur  le  continent,  au- 
dessous  du  grès  de  Nebra  (bunte  sandstein),  entre  ce  grès 
et  le  zechstein.  Des  observations  postérieures  ont  prouvé  que 
le  nom  de  calcaire  du  Jura  avoit  été  avec  raison  appliqué 
à  des  roches  qui  sont  très -éloignées  des  montagnes  de  la 
Suisse  occidentale;  mais  que  la  véritable  place  géognostique 
de  cette  formation  (lorsqu'il  n'y  a  pas  suppression  des  forma- 


IND  81 

ïîôns  inférieures^  se  trouve  bien  au-dessus  du  gresdeNebra^ 
entre  le  muschelkalk  (ou  le  quadersandstein  ?  )  et  la  craie. 
Un  nom  géographique,  justement  appliqué  à  plusieurs  roches 
analogues,  nous  rend  attentif  à  leur  identité  de  gisement; 
mais  la  place  que  des  roches  homonymes  doivent  occuper 
dans  la  série  totale  ,  n'est  bien  déterminée  que  lorsque  le 
nom  géographique  a  été  choisi  après  avoir  acquis  une  cer- 
titude entière  sur  leur  gisement.  Les  géognostes  se  trouvent 
encore  dans  une  position  semblable,  en  fixant  l'âge  relatif 
de  la  molasse  d'Argovie  (nagelfluhe)  et  du  quadersandstein 
xle  Pirna  (grès  blanc  de  M.  de  Bonnard),  deux  roches  trés- 
7'écentes,  qui  ont  été  très-bien  étudiées  séparément  ,  mais 
dont  les  rapports  entre  elles  et  avec  la  craie  et  le  calcaire 
du  Jura  n'ont  été  que  très- récemment  éclaircis.  On  peut 
être  assez  sûr  d'avoir  rencontré  dans  le  nouveau  continent 
des  roches,  identiques  avec  la  molasse  ou  le  quadersandstein, 
sans  pouvoir  prononcer  pour  cela  sur  leurs  rapports  avec 
toutes  les  autres  roches  secondaires  ou  tertiaires.  Quand  des 
formations  ne  se  touchent  pas  immédiatement,  ei,  qu'elles 
ne  sont  pas  recouvertes  par  des  terrains  d'un  gisement  connu, 
on  ne  peut  juger  de  leur  ancienneté  relative  que  d'après  de 
simples  analogies. 

Les  termes  de  la  série  géognostique  sont  ou  simples  ou  com- 
plexes. Aux  termes  simples  appartiennent  la  plupart  des  for-» 
mations  primitives  :  les  granités,  lesgneis,  les  micaschistes,  les 
thonschiefer ,  etc.  Les  termes  complexes  se  trouvent  en  plus 
grand  nombre  parmi  les  roches  de  transition  :  c'est  là  que 
chaque  formation  comprend  un  groupe  entier  de  roches  qui 
alternent  périodiquement.  Les  termes  de  la  série  n'y  sont  pas 
des  calcaires  de  transition  ou  des  grauwackes,  constituant 
des  formations  indépendantes:  ce  sont  des  associations  de  thon- 
schiefer, griinstein  etgrauwacke;  de  porphyre  et  grauwacke- 
de  calcaire  grenu  stéatiteux  et  de  poudingues  à  roches  primi- 
tives ;  de  thonschiefer  et  de  calcaire  noir.  Lorsque  ces  asso- 
ciations sont  formées  de  trois  ou  quatre  roches  qui  alternent, 
il  est  diflicile  de  leur  donner  des  noms  significatifs,  des  noms 
qui  indiquent  toute  la  composition  du  groupe,  tous  les  mem- 
bres partiels  du  terme  complexe  de  la  série.  On  peut  alors 
aider  à  fixer  les  groupes  dans  la  mémoire,  en  rappelant  les 


S^  IND 

roches  qui  y  dominent   sans  manquer  absolument   dans  le» 
groupes  voisins.  C'est  ainsi  que  le  calcaire  grenu  stéatiteux 
caractérise  la  formation   de   la  Tarantaise  ;    le  grauwacke , 
la  grande  formation  de  transition  du  Harz  et  des  bords  du 
Rhin  ;    les  porphyres   métallifères  riches   en    amphibole    et 
presque  dépourvus  de  quarz,  la  formation  du  Mexique    et 
de  la  Hongrie.  Si  les  phénomènes  d'alternance    et   d'agrou- 
pement  atteignent  leur  maximum  dans  les   terrains  de  tran- 
sition,  ils  ne   sont   pas    entièrement   exclus  pour   cela  des 
terrains  primitifs   et  secondaires.    Dans  l'un   et  l'autre    de 
ces  terrains,  des   termes  complexes  sont  mêlés   aux  termes 
simples  de  la  série  géognostique.  Je  citerai  parmi  les  forma- 
tions secondaires  le  grès  placé  au-dessus  du  calcaire  alpin 
(le  grès   de  Nebra ,    le  bunte  sandstein),   qui  est  une  asso- 
ciation d'argile  marneuse,  de  grès  et  d'oolithes;  le  calcaire 
qui  recouvre  le  grès  rouge  houiller  (le  zechstein  ou  alpen- 
kalkstein),   qui  est  une  association  moins  constante  de  cal- 
caire,  de  gypse   (muriatifère) ,    de  stinkstein   et  de  marne 
bitumineuse  pulvérulente  (asche  des  mineurs  du  Mansfeld). 
Dans  les   terrains  primitifs  nous  trouvons  les  trois  premiers 
termes  de  la  série,   les  roches  les  plus  anciennes,  ou  isolés 
ou   alternant  deux  à  deux,  selon    qu'ils  sont  géognostique- 
ment  plus  rapprochés  par  leur  âge  relatif,  ou  bien  alternant 
tous  les  trois.  Le  granité  forme  quelquefois  avec  le  gneis, 
le  gneis  avec  le  micaschiste,  des  associations  constantes.  Ce;^ 
alternances    suivent    des  lois  particulières   :     on    voit   (par 
exemple,  au  Brésil,   et,  quoique  moins  distinctement,  dans, 
la  chaîne  du  littoral  de  Venezuela)  le  granité,  le  gneis  et 
le  micaschiste  dans  une  triple  association  ;    mais  je  ne  con- 
nois  pas  de  granité  alternant  seul  avec  du  micaschiste,  du 
gneis  et  du  micasch'ste  alternant  seuls  avec  le  thonschiefer. 
Il   ne  faut  pas   confondre  ,    et   j'ai  souvent   insisté  sur  ce 
point  dans  cet  article,  des  roches  passant  insensiblement  à 
celles  qui  sont  en  contact  immédiat  avec  elles,  par  exemple, 
des  micaschistes  qui  oscillent  entre  le  gneis  et  le  thonschiefer, 
avec   des  roches   qui  alternent  les  unes  avec  les  autres  ,   et 
qui  conservent  tous  leurs  caractères  distinctifs  de  composi- 
tion  et    de    structure.     M.   d'Aubuisson  a  fait  voir,    il  y   a 
long-temps,  combien  l'analyse  chimique  rapproche  le  fhou- 


IND  85 

schîefer  du  mica.  (Journal  de  phjsique ,  T.  68,  pag.  128; 
Traité  de  Géognosie ,  1\  II,  pag,  97.)  Le  premier,  il  est 
vrai,  n'a  pas  l'éclat  métallique  du  micaschiste;  il  renferme 
un  peu  moins  de  potasse  et  plus  de  carbone-,  la  silice  ne 
s'y  réunit  pas  en  noeuds  ou  lames  minces  de  quarz  comme 
dans  le  micaschiste  :  mais  on  ne  peut  douter  qtie  des  feuillets 
de  mica  ne  constituent  la  base  principale  du  thonschiefer.  Ces 
feuillets  sont  tellement  soudés  ensemble  ,  que  l'œil  ne  peut 
-les  distinguer  dans  le  tissu.  C'est  peut-être  cette  aflinité 
même  qui  empêche  Falternance  des  thonschiefer  et  des 
micaschistes  :  car  dans  ces  alternances  la  nature  semble 
favoriser  l'association  de  roches  hétérogènes-,  ou,  pour  me 
servir  d'une  expression  figurée,  elle  se  plaît  dans  les  asso- 
ciations dont  les  roches  alternantes  offrent  un  grand  con- 
traste de  cristallisation  ,  de  mélange  et  t'e  couleur.  Au 
Mexique  j'ai  vu  des  griinstein  vert-noiràtre  alterner  des 
milliers  de  fois  avec  des  syénites  blanc  -rougeâtre  et  qui 
abondent  plus  en  quarz  qu'en  feldspath  :  il  y  a  dans  ce 
griinstein  des  filons  de  syénite,  et  dans  la  syénite  des  filons 
de  griinstein  ;  mais  aucune  des  deux  roches  ne  passe  à 
l'autre.  (Essai  politique  sur  la  JSIouvelle  Espagne,  T.  II,  p. 
623.)  Elles  offrent  sur  la  limite  de  leur  contact  mutuel  des 
différences  aussi  tranchées  que  les  porphyres  qui  alternent 
avec  les  grauwackes  ou  avec  les  syénites ,  que  les  calcaires 
noirs  qui  alternent  avec  les  thonschiefer  de  transition  ,  et 
tant  d'autres  roches  de  composition  et  d'aspect  entièrement 
hétérogènes.  Il  y  a  plus  encore  :  lorsque  dans  des  terrains 
primitifs  des  roches  plus  rapprochées  par  la  nature  de  leur 
composition  que  par  leur  structure  ou  par  le  mode  de  leur 
agrégation,  par  exemple,  les  granités  et  les  gneis,  ou  les 
gneis  et  les  micaschistes,  alternent,  ces  roches  ne  montrent 
guère  cette  même  tendance  de  passer  les  unes  aux  autres 
qu'elles  présentent  isolément  dans  des  formations  non  com- 
plexes. Nous  avons  déjà  fait  observer  plus  haut  que  sou- 
vent une  couche  /S,  devenant  plus  fréquente  dans  la  roche  a., 
annonce  au  géognoste  voyageur  qu'à  la  formation  simple  a 
va  succéder  une  formation  complexe  dans  laquelle  a,  et  0 
alternent.  Plus  tard  il  ai'rive  que  /3  prend  un  plus  grand 
développement;  que  a  n'est  plus  une  roche  alternante^  mais 


84  ÏND 

une  simple  couche  subordonnée  k  fi ,    et  que  cette  roche  /2 
se  montre  seule  jusqu'à  ce  que  par  la  fréquente  apparition 
de  couches  y  elle  prélude  à  une  formation  complexe  de  fi 
alternant  avec  y.    On  peut  substituer  à  ces  signes  les  mots 
de  granité ,  gneis  et  micaschiste  ;  ceux  de   porphyre ,   grau- 
wacke  et  syénite  ;  de  gypse,  marne  et  calcaire  fétide  (stink- 
stein  ).    Le  langage  pasigraphique  a  l'avantage  de  généraliser 
les  problèmes  ;    il  est  plus  conforme  aux  besoins  de  la  phi- 
losophie géognostique,  dont  j'essaie  de  donner  ici  les  premiers 
élémens,   en  tant  qu'ils  ont  rapport  à  l'élude  de  la  superpo- 
sition des  roches.  Or,  si  souvent  entre  des  formations  simples 
et  très-rapprochées  dans  l'ordre  de  leur  ancienneté  relative, 
entre  les  formations  a,  fi,  y,  se  trouvent  placées  des  for- 
mations complexes,   a  fi  et  fiy  (c'est-à-dire  a.  alternant  avec 
fi,  et  fi  alternant  avec  y);   on  observe  aussi,    quoique  moins 
fréquemment,     qu'une   des    formations    (par    exemple,  a) 
prend  un  accroissement  si  extraordinaire  qu'elle  enveloppe 
la  formation   fi,    et  que   fi,   au  lieu   de  se   montrer  comme 
une  roche  indépendante,    placée   entre  a  et  y ,   n'est  plus 
qu'une  couche  dans  et.  C'est  ainsi  que  dans  la  Silésie  infé- 
rieure  le  grès  rouge    renfei-me  la  formation   du  zechstein  ; 
car  le  calcaire  de  Kunzendorf,  rempli  d'emi)rcintes  de  pois- 
sons,   et    analogue   à   la   marne  bitumineuse    et  abondante 
en  poissons  de  Thuringe ,   est  entièrement  enveloppé   dans 
le  grès  houiller.  (Buch,  Beoh. ,  T.  I,  p.  io4»  ^^7  ;  ^d.,  Reise 
nach  Norwegen,  T.  I,  p.  iS8  ;  Raumer,    Gebirge  von  Nieder- 
Schlesiea,  p.  79.)  M.  Beudant    (Voj.  min.,  T.  JII ,  p.   i85) 
a  observé  un  phénomène  semblable  en  Hongrie.  Dans  d'au- 
tres régions,  par  exemple,   en  Suisse  et  à  l'extrémité  méri- 
dionale de    la  Saxe,   le    grés  rouge  disparoît  entièrement, 
parce  qu'il    est  remplacé   et  pour  ainsi  dire  vaincu  par  un 
prodigieux  développement  de  la  grauwacke  ou  du  calcaire 
alpin.    (Freiesleben  ,    Kup/Tsch. ,    B.  IV,     109.)    Ces    effets 
de  l'altcnance  et  du   développement  inégal  des  roches  sont 
d'autant  plus  dignes  d'attention,   que  leur  étude  peut  jeter 
du  jour    sur  quelques    déviations   apparentes  d'un    type    de 
superposition  généralement  reconnu,  et  qu'elle  peut  servir  à 
ramener  à   un  type    commun  des  séries   de  gisement  obser- 
vées dans  des  pays  très-éloignés. 


IND  35 

Pour  désigner  les  formations  composées  de  deux  roches 
qui  alternent  les  unes  avec  les  autres,  j'ai  généralement 
préféré  les  mots  granité  et  gmis ,  sjénite  et  griinstein ,  aux 
expressions  plus  usitées  de  granité  - gneis  ,  sjénite- griinstein. 
J'ai  craint  que  cette  dernière  méthode  de  désigner  des  for- 
mations composées  de  roches  alternantes  ,  ne  fit  plutôt 
naître  l'idée  d'un  passage  du  granité  au  gneis,  de  la  syénite 
au  griinstein.  En  effet,  un  géognoste  dont  les  travaux  sur 
les  trachytes  de  l'Allemagne  n'ont  pas  été  assez  appréciés,  M. 
Nose,  s'étoit  déjà  servi  des  mots  granité-porphyres  et  porphjre- 
granites  ,  pour  indiquer  des  variétés  de  structure  et  d'aspect, 
pour  séparer  les  granités  porphyroïdes  des  porphyres  qui, 
par  la  fréquence  des  cristaux  empâtés  dans  la  masse,  pré- 
sentent une  structure  d'agrégation,  une  véritable  structure 
granitique.  En  adoptant  les  dénominations  de  granité  et 
gneis,  de  syénite  et  porphyre,  de  grauwacke  et  porphyre, 
de  calcaire  et  fhonschiefer ,  on  ne  laisse  aucun  doute  sur 
la  nature  des  termes  complexes  de  la  série  géognostique. 

Parmi  les  différentes  preuves  de  l'identité  des  formations 
dans  les  régions  les  plus  éloignées  du  globe,  une  des  plus 
frappantes  et  que  l'on  doit  aux  secours  de  la  zoologie  ,  est 
l'identité*  des  corps  organisés  enfouis  dans  des  couches  d'un 
gisement  analogue.  Les  recherches  qui  conduisent  à  ce  genre 
de  preuves  ont  singulièrement  exercé  la  sagacité  des  savans, 
depuis  que  MM.  de  Lamarck  et  Defrance  ont  commencé 
à  déterminer  les  coquilles  fossiles  des  environs  de  Paris,  et 
que  MM.  Cuvier  et  Brongniart  ont  publié  leurs  mémorables 
travaux  sur  les  ossemens  fossiles  et  les  terrains  tertiaires. 
Comme  la  plus  grande  masse  des  formations  qui  composent 
la  croûte  de  notre  planète  ne  renferme  pas  des  dépouilles  de 
corps  organisés  ;  que  ces  dépouilles  sont  très-rares  dans  les 
terrains  de  transition,  souvent  brisés  et  difficiles  à  séparer  de 
la  roche  dans  les  terrains  secondaires  très-anciens,  l'étude 
approfondie  des  corps  fossiles  n'embrasse  qu'une  petite  partie 
de  lagéognosie,  mais  une  partie  bien  digne  de  l'attention 
du  philosophe.  Les  problèmes  qui  se  présentent  sont  nom- 
breux :  ils  ont  rapport  à  la  géographie  des  animaux  dont  les 
races  sont  éteintes,  et  qui  par  cette  raison  appartiennent 
déjà  à  l'histoire  de  notre  planète  :  ils  nécessitent  la  discus- 


86  IND 

sion  des  caractères  zoologiqnes  par  lesquels  on  voudroit  dis- 
tinguer les  différcnles  formations  superposées.    Pour  rester 
fidèle  au  but  que  je  me  suis  proposé,  de  ne  considérer,  dans 
cette  Introduction  au  Tableau  des  roches,  les  objets  que  dans 
leur  plus   grande  généralité,  je  vais  citer  les  questions  de 
zoologie  géognostique  qui  paroissent  les  plus  importantes  dans 
l'état  actuel  de  la  science,   et  dont  la  solution  a  été  tentée 
avec  plus  ou  moins  de  succès  :  Quels  sont  les  genres  et   (si 
l'état  de   conservation    et  le  peu   d'adhérence    à    la  masse 
rocheuse    permettent    une    détermination    plus    complète  ) 
quelles  sont  les  espèces  auxquelles  on  peut  rapporter  les  dé- 
pouilles fossiles  ?  Une  détermination  exacte  des  espèces  en 
fait- elle    reconnoître    avec    certitude    qui   sont    identiques 
avec  les  plantes  et  les  animaux  du  monde  actuel  ?   Quels  sont 
les  classes ,  les   ordres  et  les  familles    d'êtres   organisés  qui 
offrent  le  plus  de  ces  analogies  P  Dans  quel  rapport  le  nom- 
bre des  genres  et  des  espèces  identiques  augmente-t-il  avec 
la  nouveauté  des  roches  ou  des  dépôts  terreux?  L'ordre  ob- 
servé   dans   la    superposition    des    terrains    intermédiaires  , 
secondaires,  tertiaires  et  d'alluvion  ,  est-il  partout  en  har- 
monie avec  l'analogie  croissante  qu'offrent  les  types  d'organi- 
sation? Ces  types  se  succèdent-ils  de  bas  en  haut  (en.  passant 
des  grauwackes  et  des  calcaires  noirs  de  transition ,  par  le 
grès  houiller,    le  calcaire  alpin,    le  calcaire  du  Jura  et  la 
craie,  au  gypse  tertiaire,  aux  terrains  d'eau  douce  et  aux 
alluvions  modernes)  dans  le  même  ordre  que  nous  adoptons 
dans    nos    systèmes    d'histoire    naturelle  .     en    disposant    les 
êtres  selon  que  leur  structure  devient  plus  compliquée,   et 
qu'aux  organes  de  la   nutrition  d'autres   systèmes  d'organes 
se  trouvent    ajoutés  ?    La    distribution    des    corps  organisés 
fossiles  indique-t-elle  un  développement  progressif  de  la  vie 
végétale   et  animale  sur  le  globe;  une  apparition  successive 
de  plantes  acotylédones  et  monocolylédones,  de  zoophytes, 
de   crustacés,     de    mollusques    (céphalopodes,    acéphales, 
gastéropodes),   de  poissons,    de  sauriens  (  quadrupèdes  ovi- 
pares),  de  plantes  dicotylédones,  de  mammifères  marins  et 
«le  mammifères  terrestres?   En  considérant  les  corps  fossiles, 
non  dans  leur  rapport  avec  telle  ou  telle  roche  dans  laquelle 
on  les  a  découverts,  mais  simplement  sous  le  point  de  vue 


IND  57 

de  leur  distribution  climatérique  ,  remarque-l-on  une  diffé- 
rence appréciable  entre  les  espèces  qui  dominent  dans  l'an- 
cien et  le  nouveau  continent,  dans  les  climats  tempérés  et  sous 
la  zone  torride,  dans  l'hémisphère  boréal  et  dans  l'hémisphère 
austral P  Y  a-t-il  un  certain  nombre  d'espèces  tropicales  que 
l'on  trouve  partout,  et  qui  semblent  annoncer  qu'indépen- 
dantes d'une  distribution  de  climats  semblables  aux  climats 
actuels,  elles  ont  éprouvé,  au  premier  âge  du  monde,  la 
haute  température  que  la  croûte  crevassée  du  globe  forte- 
ment échauffé  dans  son  intérieur  a  donnée  à  l'atmosphère 
ambiante  P  Est-on  sûr  de  distinguer  par  des  caractères  précis 
les  coquilles  d'eau  douce  et  les  coquilles  marines?  La  déter- 
mination du  genre  suffit-elle?  ou  n'y  a-t-il  pas  (comme  parmi 
les  poissons)  quelques  genres  dont  les  espèces  vivent  à  la 
fois  dans  les  fleuves  et  les  mers  ?  Quoique  dans  quelques- 
unes  des  roches  tertiaires  les  coquilles  fluviatiles  se  trou- 
vent mélangées  (par  exemple  à  l'embouchure  de  nos  ri- 
vières) avec  les  coquilles  pélagiques,  n"observe-t-on  pas  en 
général  que  les  premières  forment  des  dépôts  particuliers, 
caractérisant  des  terrains  dont  l'étude  avoit  été  négligée 
jusqu'ici ,  et  qui  sont  d'une  origine  très-récente  ?  A-t-on 
jamais  découvert  sous  le  calcaire  du  Jura  ,  près  des  pois- 
sons réputés  fluviatiles  ,  dans  le  schiste  bitumineux  du  cal- 
caire alpin,  des  coquilles  d'eau  douce?  Des  espèces  iden- 
tiques de  fossiles  se  trouvent-elles  dans  les  mêmes  formations 
sur  différens  points  du  globe?  Peuvenl-elles  fournir  des  ca- 
ractères zoologiques  pour  reconnoître  les  diverses  formations 
superposées?  ou  ne  doit-on  pasplutôtadmettre  que  des  espèces 
que  le  zoologiste  est  en  droit  de  regarder  comme  identiques, 
d'après  les  méthodes  adoptées,  pénètrent  à  travers  plusieurs 
formations;  qu'elles  se  montrent  même  dans  celles  qui  ne 
sont  pas  en  contact  immédiat  ?  Les  caractères  zoologiques 
ne  doivent-ils  pas  être  tirés  et  de  l'absence  totale  de  certaines 
espèces,  et  de  leur  fréquence  relative  ou  prédominance ,  enfin 
de  leur  association  constante  avec  un  certain  nombre  d'au- 
tres espèces?  Est-on  en  droit  de  diviser  une  formation  dont 
l'unité  a  été  reconnue  d'après  des  rapports  de  gisement  et 
d'après  l'identité  des  couches  qui  sont  également  intercalées 
aux  strates  supérieurs  et  inférieurs  ,  par  la  seule  raison  que  le? 


sa  lîSD 

premiers  de  ces  strates  renferment  des  coquilles  d'eau  donce, 
et  les  derniers  des  coquilles  marines  ?  L'îibsence  totale  de 
corps  organisés  dans  cerJaines  niasses  de  terrains  secor.daire  et 
tertiaire,  est-elle  un  motif  suflîsant  pour  considérer  ces 
masses  comme  des  formations  particulières,  si  d'autres  rap- 
ports géognostiqucs  ne  justifient  pas  cette  séparation  P 

Une  partie  de  ces  problèmes  s'étoit  présentée  depuis  long- 
temps aux  naturalistes.  Déjà  Lister  avoit  avancé,  il  y  a 
plus  de  cent  cinquante  ans,  que  chaque  roche  étoit  carac- 
térisée par  des  coquilles  fossiles  diflercntes.  [Phil.  Trans., 
n."  'jG ,  p.  2285.)  Pour  prouver  que  les  coquilles  de  nos 
mers  et  de  nos  lacs  sont  spécifiquement  différentes  des  co- 
quilles fossiles  (lapides  sui  generis),  il  affirme  «que  les  der- 
«  nières,  par  exemple,  celles  des  carrières  de  Northamp- 
«  tonshire,  portent  tous  les  caractères  de  nos  Murex ,  de  nos 
«  Tellines  et  de  nos  Troclms;  mais  que  des  naturalistes  qui 
«  ne  sont  pas  accoutumés  à  s'arrêter  à  un  aperçu  vague  et 
«  général  des  choses,  trouveront  les  coquilles  fossiles  spécifi- 
/<  quement  différentes  de  toutes  les  coquilles  du  monde  actuel. ^^ 
Presque  à  la  même  époque,  Nicolas  Stenon  (De  solido  intra 
solidum  contenlo,  1669,  p.  2,  17,  28,  63,  ^^  ,  f'g-  20 — 26) 
distingua  le  premier  «  les  roches  (primitives)  antérieures 
«  à  l'existence  des  plantes  et  des  animaux  sur  le  globe  et 
«  ne  renfermant  par  conséquent  jamais  des  débris  organi- 
«  ques,  et  les  roches  (secondaires)  superposées  aux  premières 
«  et  remplies  de  ces  débris  [lurhidi  maris  sediinenta  sibi  imd- 
^  cem  imposita).  '^  Il  considéra  chaque  banc  de  roche  secon- 
daire «comme  un  sédiment  déposé  par  un  fluide  aqueux;  ^'' 
et  exposant  un  système  entièrement  semblable  à  celui  de 
Deluc  «  sur  la  formation  des  vallées  par  des  affaissemens 
«  longitudinaux,  et  sur  l'inclinaison  de  couches  d'abord  toutes 
«  horizontales,^^  il  admet  pour  le  sol  de  la  Toscane,  à  la  ma- 
nière de  nos  géologues  modernes,  «six  grandes  époques  de 
r,  la  nature  [sex  distinctœ  Etruriœ  faciès  ,  ex  prœsenti  facie 
.<  Etruriœ  collectœ)^  selon  que  la  mer  inonda  périodiquement 
.<  le  continent,  ou  qu'elle  se  retira  dans  ses  anciennes  limites. >^ 
Oans  ces  temps  où  l'observation  de  la  nature  fit  naître  en 
italie  les  premières  idées  sur  l'âge  relatif  et  la  succession  des 
,*;Quches  primitives  et  secondaires,  la  zoologie  et  la  géognosie 


IND  89 

lie  pouvoicnt  encore  se   prêter  un   secours  mutuel,   parce 
que  les  zoologistes  ne   connoissoient  pas  les  roches,  et  que 
les  géognostes  étoient  entièrement  étrangers  à  l'histoire  na- 
turelle  des  animaux.  On  se   bornoit  à  des  aperçus  vagues, 
on  regardoit    comme  spécifiquement  identique  tout   ce  qui 
offroit  quelque  analogie  de  forme  ;  mais  en  même  temps,  et 
ceci  étoit  un  pas  fait  dans  la  bonne  route,  on  étoit  attentif 
aux  fossiles  qui  prédominoient    dans  telle    ou  telle  roche. 
C'est  ainsi  que  les  dénominations  de  calcaire  à  gijphites,  de 
calcaire  à  trochites ,  de  schistes  à  fougères ,  schistes  à  trilobiles 
(Gryphiten-  und  Trochiten-Kalk  ;  Krauter-  und  Trilobiten- 
Schiefer) ,  furent  très-anciennement  employées  par  les  miné- 
ralogistes d'Allemagne.  La  détermination  des  genres  caracté- 
risés par  les  dents,  par  les  fossettes ,  par  les  lames  saillantes 
et  crénelées  de  la  charnière  ,    par  les  plis  et  les  bourrelets 
de  l'ouverture  de  la  coquille,  est  bien  plus  dlflicile  dans  les 
roches  secondaires  très -anciennes   que   dans  les   formations 
tertiaires ,  les  premières   étant  généralement  moins  friables 
et  plus  adhérentes  au  test  du  corps  fossile.  Cette  difîiculté 
augmente  lorsqu'on  veut  distinguer  les  espèces;   elle  devient 
presque    insurmontable   dans  quelques   roches    calcaires  de 
transition    et   dans   le  muschelkalk  ,   qui    renferme  des  co- 
quilles  brisées.    Si   les  caractères  zoologiques    d'un  certain 
nombre  de  formations  pouvoient  être  tirés  de  genres  bien 
distincts,  si  les  trilobites  et  les  orthncératites  appartenoient 
exclusivement  aux  terrains  intermédiaires .  les  gryphites  au 
calcaire  alpin  (zechstein),  les  pectinites  au  bunte  sandstein 
(grès  de  Nebra),  les  trochites  et  mytulites  au  muschelkalk, 
les  tellines  au  quadersandstein ,  les  ammonites  et  turiitelles 
au  calcaire  du  Jura  et  à  ses  marnes  ,  les  oursins  ananchytes 
et  les  spatanges  à  la  craie,  les  cérites  au  calcaire  grossier; 
la  connoissance  de  ces  genres  seroit  d'un  secours  aisé  pour 
la  détermination  des  roches  :  on  n'auroit  plus  besoin  d'exa- 
miner sur  les  lieux  la  superposition  des  formations  ;    on   re- 
connoîtroit    ces   dernières   sans    sortir    de  son    cabinet  ,    en 
ne  consultant  que  les  collections.  Mais  il  s'en  faut  de  beau- 
coup que  la  nature  ait  rendu  si  facile  à  l'homme  l'étude  des 
masses   coquillères  qui  constituent  la  croûte   de  notre  pla- 
nète. Les  mêmes  types  d'organisation  se  sont  répétés  à  des 


go  ÏND 

époques  très- différentes  :  les  mêmes  genres  se  retrouvent 
dans  les  formations  les  plus  distinctes.  Il  y  a  des  orthocéra- 
tites  dans  les  calcaires  de  transition,  les  calcaires  alpins  et 
le  grès  bigarré  ;  des  térébratulitcs  dans  le  calcaire  du  Jura 
et  dans  le  muschelkalk  ;  des  trilobites  dans  les  thonschicfcr  de 
transition,  dans  le  schiste  bitumineux  du  zechstein  ,  et,  selon 
un  excellent  géi;gnosïe,  M.  de  Schlottlieim ,  même  dans  le 
calcaire  du  Jura;  il  y  a  des  pentacrinitcs  dans  le  thonschiefer 
de  transition  et  dans  le  muschelkalk  le  plus  moderne.  Les 
ammonites  pénètrent  a  travers  beaucoup  de  formations  cal- 
caires et  marneuses,  depuis  les  grauwackes  (Raumer,  Ver- 
suche,p.  22-,  Schlottheim,  Petrefacletikunde ,  p.  38)  jusque 
dans  ies  couches  inférieures  de  la  craie.  Il  y  a  des  troncs  de 
inonocotylédones  et  dans  le  grès  rouge,  et  dans  les  marnes 
du  gypse  d'eau  douce,  fii-mées  à  une  époque  où  le  monde 
étoit  déjà  rempli  de  plantes  dicotvlédones. 

Mais,  a  une  époque  où  les  naturalistes  ne  s'arrêtent  plus  à 
des  notions  vagues  et  incertaines,  on  a  reconnu  avec  saga- 
cité que  le  plus  grand  nombre  de  ces  fossiles  (gryphites. 
térébratulites ,  ammonites,  trilobites,  etc.),  enfouis  dans 
différentes  formations  ,  ne  sont  pas  spécifiquement  les  mêmes  ; 
qu'un  grand  nombre  d'espèces  qu'on  a  pu  exanuner  avec 
précision,  varient  avec  les  roches  superposées.  Les  poissons 
que  l'on  observe  dans  les  schistes  de  transition. (Claris),  dans 
les  schistes  bitumineux  du  zechstein ,  dans  le  calcaire  du 
Jura,  dans  le  calcaire  tertiaire  à  céritede  Paris  et  de  Monte 
Bolca,  et  dans  le  gypse  de  Montmartre,  son t^  des  espèces 
distinctes,  en  partie  pélagiques,  en  partie  fluviatiles.  Est- 
on  en  droit  de  conclure  de  la  réunion  de  ces  faits,  que 
toutes  les  formations  sont  caractérisées  par  des  espèces  par- 
ticulières; que  les  coquilles  fossiles  de  la  craie,  du  muschel- 
kalk ,  du  calcaire  du  Jura  et  du  calcaire  alpin ,  diffèrent 
toutes  entre  elles  ?  Je  pense  que  ce  seroit  pousser  l'induc- 
tion beaucoup  trop  loin,  et  M.  Brongniart  même ,  qui  con- 
noit  si  bien  la  valeur  des  caractères  zoologiques,  restreint 
leur  application  absolue  au  cns  <,  où  la  superposition  (les 
«  circonstances  de  gisement)  ne  s'y  opposent  pas.  ^^  Je  pour- 
rois  citer  les  cérites  du  calcaire  grossier,  qui  se  trouvent 
(près   de  Caen)   au-dessous  de  la  craie,    et  qui  semblent 


IND  9» 

indiquer  ,  comme  la  répétition  des  argiles  avec  lignitest 
en-dessus  et  au-dessous  de  la  craie,  une  certaine  connexité 
entre  des  terrains  qu'au  premier  coup  d'œil  on  croiroit  en- 
tièrement distincts.  Je  pourrois  m'arrêtcr  à  d'autres  espèces 
de  coquilles  qui  appartiennent  à  la  fois  à  plusieurs  forma- 
tions tertiaires,  et  rappeler  que  si  un  jour,  par  des  carac- 
tères peu  sensibles  et  par  de  foibles  nuances  ,  on  parvenoit 
à  séparer  des  espèces  que  l'on  croit  identiques  aujourd'hui , 
la  finesse  même  de  ces  distinctions  ne  rassureroit  pas  trop 
sur  l'universalité,  d'ailleurs  si  désirable,  des  caractères  zoolo- 
giques en  géognosie.  Une  autre  objection,  tirée  de  l'influence 
que  les  climats  exercent  même  sur  les  animaux  pélagiques, 
me  paroît  plus  importante  encore.  Quoique  les  mers,  par  des 
causes  physiques  très-connues,  offrent,  à  de  grandes  profon-, 
deurs,  la  même  température  sous  l'équateur  et  sous  la  zone 
tempérée,  nous  vo3'ons  pourtant,  dans  Tétat  actuel  de  notre 
planète  ,  les  coquilles  des  tropiques  (  parmi  lesquelles  les  uni- 
valves  dominent ,  comme  parnu  les  testacés  fossiles)  différer 
beaucoup  des  coquilles  des  climats  septentrionaux.  Le  plus 
grand  nombre  de  ces  animaux  aiment  les  récifs  elles  bas-fonds: 
d'où  il  suit  que  les  différences  spécifiques  sont  souvent  très- 
sensibles,  sous  un  même  parallèle,  sur  des  côtes  opposées.  Or, 
si  les  mêmes  formations  se  répètent  et  s'étendent,  pour  ainsi 
dire  ,  a.  de  prodigieuses  distances,  de  l'est  à  l'ouest  et  du  nord 
au  sud  ,  d'un  hémisphère  dans  l'autre,  n'est-il  pas  probable . 
quelles  que  soient  les  causes  compliquées  de  l'ancienne 
température  de  notre  globe,  que  des  variations  de  climats 
ont  modifié,  jadis  comme  de  nos  jours,  les  types  d'organisa- 
tion ,  et  qu'une  même  formation  (  c'est-à-dire  une  même  roche 
placée,  dans  les  deux  hémisphères,  entre  deux  formations 
homonymes)  a  pu  envelopper  des  espèces  distinctes  ?  Il  ar- 
l'ive  souA^ent  sans  doute  que  des  couches  superposées  présen- 
tent un  contraste  de  corps  fossiles  très-frappant.  Mais  peut- 
on  conclure  de  là  qu'après  qu'un  dépôt  s'étoit  formé,  les 
êtres  qui  habitoient  alors  la  surface  du  globe,  aient  tous 
été  détruits  ?  11  est  incontestable  que  des  générations  de  types 
différens  se  sont  succédé  les  unes  aux  autres.  Les  ammo- 
nites, que  l'on  trouve  à  peine  parmi  les  roches  de  transition, 
atteignent  leur  maximum  dans  les  couches  qui  représentent 


i)2  IND 

sur  différens  poinfs  du  globe  le  muschelkalk  et  le  calcaire 
du  Jura  ;  ils  dispavcissent  dans  les  couches  supérieures  de  la 
craie  et  au -dessus  de  cette  formation.  Les  échinilcs,  très- 
rares  dans  le  cidcaire  jîlpin  et  même  dans  le  muschelkalk  , 
deviennent  au  contraire  très-communs  dans  le  calcaire  du 
Jura ,  dans  la  craie  et  les  terrains  tertiaires.  Mais  rien  ne 
nous  prouve  que  cette  succe.ssi(>n  de  diflFérens  types  organi- 
ques, cette  destruction  graduelle  des  genres  et  des  espèces, 
coïncide  nécessairement  avec  les  époques  où  chaque  terrain 
s'est  formé.  «  La  considération  de  similitude  ou  de  différence 
«  entre  les  débris  organiques  n'est  pas  d'une  grande  impor- 
«  tance,  dit  M.  Beudant  {Voyage  min.,  T.  III,  p.  278), 
«  lorsque  l'on  compare  des  dépôts  qui  se  sont  formés  dans 
«  des  contrées  très-éloignées  les  unes  des  autres  :  elle  est  de 
«  beaucoup  d'importance,  si  l'on  compare  des  dépôts  très- 
«   rapprochés.» 

Tout  en  combattant  les  conclusions  trop  absolues  qu'on 
pourroit  être  tenté  de  tirer  de  la  valeur  des  caractères  zoolo- 
giques ,  je  suis  loin  de  nier  les  services  importans  que  l'étude 
des  corps  fossiles  rend  à  la  géognosie  ,  si  l'on  considère  cette 
science  sous  un  point  de  vue  philosophique.  La  géognosie 
ne  se  borne  pas  à  chercher  des  caractères  diagnostiques;  elle 
embrasse  l'ensemble  des  rapports  sous  lesquels  on  peut  con- 
sidérer chaque  formation  ;  \.°  son  gisement;  2.°  sa  constitu- 
tion or}  ctognostique  (c'est-à-dire,  sa  composition  chimique, 
et  le  mode  particulier  d'agrégation  plus  ou  moins  cristalline 
de  ses  molécules);  5."  l'association  des  différens  corps  orga- 
nisés que  l'on  y  trouA'e  enfouis.  Si  la  superposition  des  masses 
rocheuses  hétérogènes  nous  ré\'èle  l'ordre  successif  de  leur 
formation  ,  comment  ne  pas  nous  intéresser  aussi  à  connoître 
3'état  de  la  nature  organique  aux  différentes  époques  où  les 
dépôts  se  sent  formés?  On  ne  peut  révoquer  en  doute  que,  sur 
une  surface  de  plusieurs  milliers  de  lieues  carrées  (  en  Thu- 
ringe  et  dans  toute  la  partie  septentrionale  de  l'Allemagne), 
neuf  formations  superposées,  celles  de  calcaire  de  transition  , 
de  grau^vacke,  de  grès  rouge,  dezechstein  avec  schiste  bitu- 
mineux (de  gypse  muriatifère),  de  grès  à  oolithes  (de  gypse 
argileux),  de  muschelkalk  et  de  grès  blanc  (  quadersand- 
gtein  ) ,   ont  pu  être  reconnues    comme  distinctes ,   sans  re- 


IND  95 

coiirir  aucunement  à  l'emploi  de  caractères  zoologiques; 
mais  il  ne  suit  pas  de  là  que  la  recherche  la  plus  minu- 
tieuse de  ces  caractères  ,  ou,  pour  mieux  dire,  que  la  connois- 
sance  Ja  plus  intime  des  fossiles  contenus  dans  chacune  des 
formations  ne  soit  indispensable  pour  offrir  un  tableau 
complet  et  A'raiment  géognostique.  11  en  est  de  Fétude  des 
terrains  comme  de  celle  des  êtres  organisés.  La  botanique  et 
la  zoologie  ,  considérées  de  nos  temps  sous  un  point  de  vue 
plus  élevé,  ne  se  bornent  plus  à  la  recherche  de  quelques 
caractères  extérieurs  et  distinctifs  des  espèces  ;  ces  sciences 
approfondissent  l'ensemble  de  l'organisation  végétale  et  ani- 
male. Les  caractères  tirés  des  formes  de  la  coquille  suffisent 
pour  distinguer  les  diverses  espèces  d'acéphales  testacés.  Re- 
garderoit-on  pour  cela  comme  superflue  la  connoissance  des 
animaux  qui  habitent  ces  mêmes  coquilles?  Telle  est  la  con- 
nexité  des  phénomènes  et  de  leurs  rapports  naturels  (  de  ceux 
de  la  vie,  comme  de  ceux  qu'offrent  les  dépôts  pierreux 
formés  à  différentes  époques),  que,  si  l'on  en  néglige  quelques- 
uns  ,  on  se  forme  non-seulement  une  image  incomplète,  mais 
le  plus  souvent  une  image  infidèle. 

•  Dans  le  cas  de  la  conformité  de  gisement,  il  peut  y  avoir 
identité  de  masse  (c'est-à-dire  de  composition  minéralogique) 
et  diversité  de  fossiles,  ou  diversité  de  masse  et  identité  de 
fossiles.  Les  roches  /2  et  /S'  placées  à  de  grandes  distances 
horizontales  entre  deux  formations  identiques  «  et  y ,  ou 
appartiennent  à  une  même  formation  ,  ou  sont  des  forma- 
tions parallèles.  Dans  le  premier  cas,  leur  composition  miné- 
rale est  semblable;  mais,  à  cause  de  là  distance  des  lieux  et 
des  effets  clinintériques,  les  débris  organiques  qu'elles  rea- 
ferment,  peuvent  différer  considérablement.  Dans  le  second 
cas,  la  composition  minéralogique  est  différente,  mais  les 
débris  organiques  peuvent  être  analogues.  Je  pense  que  les 
mots,  formations  identiques  ,  formations  parallèles,  indiquent  la 
conformité  ou  non-conformité  de  composition  minéralogique, 
mais  qu'ils  ne  font  rien  préjuger  sur  l'identité  des  fossiles. 
S'il  est  assez  probable  que  des  dépôts  ^  et  &' ,  placés  à  de 
grandes  distances  horizontales  entre  les  mêmes  roches  x  et  y, 
sont  formés  à  la  même  époque  ,  parce  qu'ils  renferment  les 
mêmes  fossiles  et  une  masse  analogue  ,  il  n'est  pas  également 


94  IND 

probable  que  les  époques  de  formation  sont  tiés-éloiguée.-) 
les  unes  des  autres,  lorsque  les  fossiles  sont  distincts.  Ou 
peut  concevoir  que  sous  une  même  zone  ,  dans  un  pays  de 
peu  d'étendue,  des  générations  d'animaux  se  sont  succédé, 
et  ont  caractérisé,  comme  par  des  types  particuliers,  les 
époques  des  formations;  mais  à  de  grands  éloignemens  hori- 
zontaux des  êtres  de  formes  très-diverses  peuvent,  sous  dilfé- 
rens  climats,  avoir  occupé  simultanément  la  surface  du  globe 
ou  le  bassin  des  mers.  II  y  a  plus  encore  :  le  gisement  de  /3 
entré  a  et  'y  prouve  que  la  formation  de  /3  est  antérieure  à 
celle  de  -y,  postérieure  à  celle  de  a-,  mais  rien  ne  nous 
donne  la  mesure  absolue  de  l'intervalle  entre  les  époques- 
limites,  et  différens  dépôts  (isolés)  de  /2  peuvent  ne  pas  être 
simultanés. 

Il  semble  résulter  des  faits  que  le  zèle  et  la  sagacité  des 
naturalistes  ontréunis  depuis  un  petit  nombre  d'années,  que, 
si  l'on  ne  doit  pas  toujours  s'attendre  à  trouver,  comme  le 
prétendoit  Lister,  dans  chaque  formation  différezite  d'autres 
dépouilles  de  corps  organisés,  le  plus  souvent  des  formations 
reconnues  pour  identiques  par  leur  gisement  et  leur  compo- 
sition renferment  ,  dans  les  contrées  les  plus  éloignées  du 
globe,  des  associations  d'espèces  entièrement  semblables.  M. 
Brongniart,  dont  les  travaux,  joints  à  ceux  de  MM.  Lamarck , 
Defrance,  Beudant,  Desmarest ,  Prévost,  Férussac ,  Schlott- 
heim ,  Wahlenberg,  Buckland,  Webster,  Phillips,  Greenough , 
"Warburton  ,  Sowerby ,  Brocchi ,  Soldani ,  Cortesi ,  et  d'autres 
minéralogistes  célèbres,  ont  tant  avancé  l'étude  de  la  conchj- 
liologie  souterraine,  a  fait  voir  récemment  les  analogies  frap- 
pantes qu'offrent,  sous  le  rapport  des  corps  fossiles,  certains 
terrains  d'Europe  et  de  l'Amérique  septentrionale.  Il  a  essayé 
de  prouver  qu'une  formation  est  parfois  tellement  déguisée, 
que  ce  n'est  que  par  des  caractères  zoologiques  que  l'on  peut  la 
xeconnoître  (Brongniart,  Hist.  nat.  des  crustacés  fossiles,  p.  Sj , 
£2).  Dans  l'étude  des  formations,  comme  dans  toutes  les  sciences 
physiques  descriptives,  ce  n'est  que  l'ensemble  de  plusieurs 
caractères  qui  doit  nous  guider  dans  la  recherche  de  la  vérité. 
La  description  spécifique  des  débris  de  plantes  et  d'animaux 
renfermés  dans  les  divers  terrains,  nous  en  offre  pour  ainsi 
dire  la  Flore  ou  la  Faune.    Or,   dans  le  monde  primordial, 


IND  95 

coiniue  dans  celui  d'aujourd'hui,  la  végétation  et  les  pro- 
ductions animales  des  diverses  portions  du  globe  paroisscnt 
avoir  été  moins  caractérisées  par  quelques  formes  isolées  d'uu 
aspect  extraordinaire,  que  par  l'association  de  beaucoup  de 
formes  spécifiquement  difféicntes,  mais  analogues  entre  elles, 
malgré  la  distance  des  lieux.  En  découvrant  une  nouvelle 
terre  près  du  détroit  de  Torres ,  il  ne  seroit  pas  aisé  de  dé- 
terminer, d'après  un  petit  nombre  de  productions,  si  cette 
terre  est  contigue  à  la  Nouvelle-Hollande  ,  ou  à  l'une  des  lies 
Moluques  ou  à  la  Nouvelle -Guinée.  Comparer  des  forma- 
tions sous  le  rapport  des  fossiles,  c'est  comparer  des  Flores 
et  des  Faunes  de  divers  pays  et  de  diverses  (époques  ;  c'est 
résoudre  un  problèuie  d'autant  plus  compliqué  qu'il  est  mo- 
difié à  la  fois  par  l'espace  et  le  temps. 

Parmi  les  caractères  zoologiques  appliqués  à  la  géogaosie  , 
l'absence  de  certains  fossiles  caractérise  souvent  mieux  les  for- 
mations que  leur  présence.  C'est  le  cas  des  roches  de  transi- 
tion :  on  n'y  trouve  généralement  que  des  madrépores ,  des  en- 
criuites ,  des  trilobites,  des  orthocératites  et  des  coquilles  de 
la  famille  des  térébratules  ,  c'est-à-dire  des  fossiles  dont  quel- 
ques espèces  ,  non  identiques,  mais  analogues  ,  se  rencontrent 
dans  des  couches  secondaires  très-modernes  ;  mais  ces  roches 
de  transition  sont  privées  de  bien  d'autres  dépouilles  de  corps 
organisés,  quiparoissent  en  abondance  au-dessus  du  grès  rouge. 
Le  jugement  que  l'on  porte  sur  l'absence  de  certaines  es- 
pèces, ou  sur  l'absence  totale  des  corps  fossiles,  peut  cepen- 
dant être  fondé  sur  une  erreur  qu'il  sera  utile  de  signaler 
ici.  En  examinant  en  grand  les  formations  coquilliéres,  on 
observe  que  les  corps  organisés  ne  sont  pas  toujours  égale- 
ment distribués  dans  la  masse;  mais  1.°,  que  des  strates  en- 
tièrement dépourvus  de  fossiles  alternent  avec  d'autres  strates 
qui  en  fourmillent  ;  2."  que,  dans  une  même  formation,  des 
associations  particulières  de  fossiles  caractérisent  certains 
strates  qui  alternent  avec  d'autres  strates  à  fossiles  distincts. 
Ce  phénomène  ,  observé  depuis  long-temps  ,  se  retrouve  dans 
le  muschelkalk  et  dans  le  calcaire  alpin  (zechstein),  qu'une 
couche  de  trochites  sépare  souvent  du  grès  houiller  fBuch, 
Beob.,  T.I,p.  i35,  146,  171  );  il  est  propre  aussi  au  calcaire 
du  Jura  et  à  plusieurs  formations  tertiaires.  En  n'étudiant  que 


9^  iM) 

la  craie  des  environs  de  Paris  ,  on  pourroit  presque  croire  qur 
les  coquilles  univalvcs  manquent  entièrement  à  cette  forma-- 
tion  :  cependant  les  univalves  polythalames ,  les  ammonites  , 
comme  nous  Tavons  rappelé  déjà,  sont  très -communs  en 
Angleterre,  dans  les  couches  les  plus  anciennes  de  la  craie. 
Même  en  France  (côte  de  Sainte -Catherine  près  de  Caen  ) 
la  craie  tuffeau  et  la  craie  chloritée  contiennent  beaucoup 
de  fossiles  que  l'on  ne  trouve  pas  dans  la  craie  blanche 
(Brongniart,  Caractères  zool. ,  p.  12).  Comme  dans  difTérens 
pays  les  terrains  ne  se  sont  pas  développés  également,  et 
que  l'on  peut  prendre  des  lambeaux  de  formations  pour  des 
formations  entières  et  complètes ,  celles  qui  sont  dépourvues 
de  coquilles  dans  une  région,  peuvent  en  offrir  dans  une 
autre.  Cette  considération  est  importante  pour  obvier  à  la 
tendance  assez  générale  de  trop  multiplier  les  formations  ; 
car.  lorsque  sur  un  même  point  du  globe  un  terrain  (par 
exemple  de  grès)  abonde  dans  sa  partie  inférieure  en  corps 
fossiles,  et  que  sa  partie  supérieure  en  manque  entière- 
ment, cette  seule  absence  des  fossiles  ne  justifie  pas  la 
scission  du  même  terrain  en  deux  formations  distinctes.  Dans 
la  description  géologique  des  environs  de  Paris.  M.  Brongniart 
a  très-bien  réuni  les  meulières  sans  coquilles  avec  celles  qui 
sont  comme  pétries  de  coquilles  d'eau  douce. 

Nous  venons  de  voir  qu'une  formation  peut  renfermer 
dans  différens  strates  des  péti-ifications  spécifiquement  diffé- 
rentes, mais  que  le  plus  souvent  quelques  espèces  du  strate 
inférieur  se  mêlent  à  la  grande  masse  d'espèces  hétérogènes 
qui  se  trouvent  réunies  dans  le  strate  superposé.  Lorsque 
cette  différence  porte  sur  des  genres  dont  les  uns  sont  des 
coquilles  pélagiques,  les  autres  des  coquilles  d'eau  douce, 
le  problème  de  Punité  ou  de  Pindivisibilité  d'une  formation 
devient  plus  embarrassant.  Il  faut  d'abord  distinguer  deux 
cas  :  celui  où  quelques  coquilles  fluviatiles  se  trouvent 
mêlées  à  une  grande  masse  de  coquilles  marines,  et  celui  où 
des  coquilles  marines  et  fluviatiles  pourroient  alterner  couche 
par  couche.  MM.  Gilet  de  Laumont  et  Beudant  ont  fait 
des  observations  intéressantes  sur  ce  mélange  de  produc- 
tions marines  et  d'eau  douce  dans  une  même  couche.  M. 
Beudaot  a  prouvé,    par  des  expériences   ingénieuses,  corn- 


IND  97 

ment   beaucoup   de    mollusques  fluviatiles    s'habituent  gra- 
duellement à  vivre  dans  une  eau  qui  a  toute  la  salure  de 
l'océan.  Le  même  savant  a  examiné,  conjointement  avec  M. 
Marcel  de  Serres,  certaines  espèces  de  paludines  qui,  préfé- 
rant les  eaux  saumâtres  ,   se    trouvent   prés    de   nos   côtes, 
tantôt  avec  des  coquilles  pélagiques,    tantôt   avec    des  co- 
quilles fluviatiles.  [Journ.    dephys.,    T.  LXXXIII ,   p.  107, 
T.  LXXXVIII,  p.  211  ;  Brongniart,  Géogr.  min. ,  p.  27,  5/,, 
89.)    A  ces   faits   curieux   se    joignent    d'autres  faits,    que 
j'ai  publiés  dans  la  Relation  de  mon  Voyage  aux  régions  équi- 
noxiales  (T.  I,  p.  555   et  T.  II,  p.  606)  ,   et  qui   semblent 
expliquer  ce  qui  s'est  passé  jadis  sur  le  globe,  d'après  ce  que 
nous   observons    encore    aujourd'hui.    Sur   les    côtes    de    la 
Terre-ferme,  entre  Cumana  et  Nueva-Barcelona ,  j'ai  vu  des 
crocodiles    s'avancer  loin    dans   la    mer.    Pigafetta   a  fait  la 
même   observation    sur    les    crocodiles  de   Bornéo.    Au  sud 
de  l'île  de  Cuba,  dans  le  golfe  de  Xagua,  il  y  a  des  laman- 
tins dans  la  mer,  sur  un  point  où,  au  milieu  de  l'eau  salée  , 
jaillissent  des  sources  d'eau   douce.    Lorsqu'on  réfléchit  sur 
l'ensemble  de   ces  faits,  on  est  moins  étonné  du  mélange  de 
quelques  productions  terrestres  avec  beaucoup   de  produc- 
tions  incontestablement   marines.    Le    second   cas   que  nous 
avons  indiqué  ,  celui   de  l'alternance  ,    ne   s'est  jamais   pré- 
senté,  je   crois,  d'une  manière  aussi  prononcée  que  l'alter- 
nance du  thonschiefer  et   du  calcaire  noir   dans  un    même 
terrain   de  transition,  ou  (pour  rappeler  un  fait  qui  a  rap- 
port à  la  distribution  des  corps  organisés)   que  l'alternance 
de  deux  grandes  formations  marines  (  calcaire  à  cérites  et  grès 
de  Romainville)  avec  deux  grandes  formations  d'eau  douce 
(gypse  et  meulières   du  plateau  de  Montmorency).   Ce  que 
l'observation  attentive  des  superpositions  a  offert  jusqu'ici ,  se 
réduit  à  des  couches  alternantes  de  gypse  et  de  marne,  placées 
entre  deux  formations   marines  ,    et  renfermant    au    centre 
(dans  leur  plus  grande  masse)  des  productions  terrestres  et 
d'eau  douce,  et  vers  les  limites  supérieure  et  inférieure,  tant 
dans  le  gypse  que  dans  les  marnes,  des  productions  marines: 
telle  est  la  constitution  géologique  du  gypse  de  Montmartre. 
La  variation  spécifique    dans   les  pétrifications,    le   mélange 
observé  à  Pierrelaie,  et  le  phénomène  d'alternance  que  pré- 
a3.  7 


98  IND 

sente  Montmartre ,  ne  suffisent  pas  pour  motiver  le  morcel- 
lement d'une  même  formation.  Les  marnes  et  le  gypse,  qui 
renferment  des  coquilles  marines  (n."  126  de  la  troisième  masse), 
ne  peuvent  être  géognosfiquement  séparés  des  marnes  et  des 
gypses  qui  renferment  des  productions  d'eau  douce.  Aussi 
MM.  Cuvier  et  Brongniart  n'ont  pas  hésité  de  considérer  l'en- 
semble de  ces  marnes  et  de  ces  gypses  marins  et  d'eau  douce 
comme  un  même  terrain.  Ces  savans  ont  même  cité  cette 
réunion  de  couches  alicrnaiites  comme  un  des  exemples  les 
plus  clairs  de  ce  que  l'on  doit  entendre  par  le  mot  formation. 
{Géogr.  miner.,  p.  3i,  Sg,  189.)  En  effet,  dans  un  même 
terrain  peuvent  êtr.e  renfermés  différens  systèmes  de  couches  : 
ce  sont  des  groupes  ,  des  sous-divisions,  ou  ,  comme  disent  les 
géognostes  de  l'école  de  Freiberg  ,  des  membres  plus  ou 
moins  développés  d'une  même  formation  (Freiesleben  ,  Kupf., 

T.  I,  p.  17,  T.  in,p.  1). 

Malgré  le  mélange  de  coquilles  pélagiques  et  fluviatiles 
que  Ton  observe  quelquefois  au  contact  de  deux  formations 
d'origine  différente  ,  on  peut  donner  à  l'une  de  ces  forma- 
tions le  nom  de  calcaire  ou  de  grès  marin,  lorsqu'on  ne  veut 
tirer  la  dénomination  des  roches  que  des  espèces  qui  consti- 
tuent la  plus  grande  masse  et  le  centre  des  couches.  Cette 
terminologie  rappelle  un  fait  qui  a- rapport ,  pour  ainsi  dire  , 
à  la  géogonie  ,  à  l'ancienne  histoire  de  notre  planète  :  elle  pré- 
cise (et  peut-être  un  peu  trop)  l'alternance  des  eaux  douces 
et  des  eaux  salées.  Je  ne  conteste  pas  l'utilité  des  dénominations 
grès  ou  calcaire  marin  pour  des  descriptions  locales;  mais, 
d'après  les  principes  que  je  me  suis  proposé  de  suivre  dans 
le  tableau  général  des  formations  caractérisées  d'après  la 
place  qu'elles  occupent  comme  termes  d'une  série ,  j'ai  cru 
devoir  l'éviter  avec  soin.  Tous  les  terrains  au-dessous  de 
la  craie  et  même  au-dessous  du  calcaire  à  cérites  (  calcaire 
grossier  du  bassin  de  Paris)  sont -ils,  sans  exception,  des 
calcaires  et  des  grès  marins  ?  Ou  les  monitors  et  les  poissons 
des  schistes  cuivreux  dans  le  calcaire  alpin  de  Thuringe  : 
les  ichthyosaures  de  M.  Home,  placés  au-dessous  des  ooli- 
thes  d'Oxford  et  de  Bath ,  dans  le  lyas  de  l'Angleterre  (qui 
sur  le  continent  est  représenté  par  une  partie  du  calcaire  du 
Jura);   les  crocodiles  de  Honfleur,  enfouis  dans  des  argiles 


IND  99 

avec  bancs  calcaires  au-dessus  des  oolithes  de  Dive  et  du  cal- 
caire d'Isigny,  par  conséquent  supérieurs  au  calcaire  du  Jura, 
prouvent-ils  qu'il  y  a  déjà  au-dessous  de  la  craie,  entre  ce 
terrain  et  le  grès  rouge,  de  petites  formations  d'eau  douce, 
intercalées  aux  grandes  formations  marines  ?  Les  houilles  à 
fougères  sous  le  grès  rouge  et  sous  le  porphyre  secondaire  ne 
nous  otfrent-elles  pas  un  exemple  évident  d'une  très-ancienne 
formation  non  marine?  Ces  circonstances  prescrivent,  dans 
l'état  actuel  de  la  science,  beaucoup  de  réserve,  lorsqu'on 
se  hasarde,  d'après  des  caractères  purement  zoologiques,  de 
morceler  des  terrains  dont  l'unité  a  paru  constatée  par 
l'alternance  des  mêmes  couches  et  par  d'autres  phénomènes 
de  gisement.  (Engelhard  et  Raumer,  Geogn.  Vers.,  p.  126  — 
i53.)  Cette  réserve  est  d'autant  plus  nécessaire  que,  d'après 
le  témoignage  d'un  minéralogiste  qui  a  long-temps  approfondi 
cette  matière ,  M.  Brongniart ,  «  il  existe  une  espèce  de 
transition  entre  la  formation  du  calcaire  marin  et  du  gypse 
d'eau  douce  qui  suit  ce  calcaire,  et  que  ces  deux  terrains 
n'offrent  pas  cette  séparation  brusque  qui  se  montre,  sur  les 
mêmes  lieux  ,  entre  la  craie  et  le  calcaire  grossier,  c'est-a-dire 
entre  deux  formations  marines.  On  ne  peut  douter,  ajoute 
le  même  observateur,  que,  les  premières  couches  de  gypse 
n'aient  été  déposées  dans  un  liquide  analogue  à  la  mer ,  tan- 
dis que  les  suivantes  ont  été  déposées  dans  un  liquide  ana- 
logue à  l'eau  douce.  ^^  {Géogr.  min.,  p.  168  et  igS.) 

En  énonçant  les  motifs  qui  m'empêchent  de  généraliser 
une  terminologie  fondée  sur  le  contraste  entre  des  produc- 
tions d'eau  douce  et  des  productions  marines,  je  suis  loin 
de  contester  l'existence  d'une  formation  d'eau  douce  supé* 
rieure  à  toutes  les  autres  formations  tertiaires,  et  qui  ne 
renferme  que  des  bulimcs ,  des  limnées,  des  cyclostomes  et 
des  potaniides.  Des  observations  récentes  ont  démontré  com- 
bien cette  formation  est  plus  répandue  qu'on  ne  l'avoit 
cru  d'abord.  C'est  un  nouveau  et  dernier  terme  à  ajouter  à 
la  série  géognostique.  Nous  devons  la  connoissance  plus  in- 
time de  ce  calcaire  d'eau  douce  aux  utiles  travaux  de  M. 
Brongniart.  Les  phénomènes  qu'offrent  les  formations  d'eau 
douce,  dont  l'existence  n'étoit  anciennement  connue  que 
par  les  tuffs  de  la  Thuringe  et  par  le  Travçrtin  toujours  re- 


loo  IND 

naissant  des  plaines  de  Rome  (Reuss,  Geogn. ,  T.  II,  p.  642  ; 
Buch,  Geogn.  Beob. ,  T.  II ,  p.  21 — 3o  ) ,  se  lient  delà  ma- 
nière la  plus  satisfaisante  aux  lois  admirables  que  M.  Cuvier 
a  reconnues  dans  le  gisement  des  os  des  quadrupèdes  vivi- 
pares. (Brongniart,  Annales  du  Muséum,  T. XV,  p.  oây  ,  58i  ; 
Cuvier,  Recli.  sur  les  ossem.  fossiles ,   T.  I,    p.  LIV.  ) 

La  distinction  entre  les  coquilles  fossiles  fluviatiles  et  mari- 
nes est  l'objet  de  recherches  très-délicates  :  car  il  peut  arriver, 
lorsque  les  dépouilles  des  corps  organisés  se  détachent  diffici- 
lement de  la  niasse  du  calcaire  siliceux  qui  les  renferme,  qu'on 
confonde  des  ampullaires  avec  des  natices  ,  des  potamides 
avec  des  cérites.  Dans  la  famille  des  conques  on  ne  sépare 
avec  certitude  les  cyclades  et  les  cyrènes  ,  des  venus  et  des  Iut 
cines,  que  par  l'examen  des  dents  de  la  charnière.  Le  travail 
que  M.  de  Férussac  a  entrepris  sur  les  coquilles  terrestres  et 
fluviatiles,  jettera  beaucoup  de  jour  sur  cet  objet  important. 
D'ailleurs  ,  lorsqu'on  croit  voir  un  genre  de  .coquilles  péla- 
giques au  milieu  d'un  genre  de  coquilles  d'eau  douce,  on 
peut  agiter  la  question,  si  effectivement  les  mêmes  types  gé- 
nériques ne  peuvent  se  retrouver  dans  les  lacs  et  dans  les  mers. 
On  connoît  déjà  l'exemple  d'un  véritable  mytilus  fluviatile. 
Peut-être  les  ampullaires  et  les  corbules  offriront-ils  des  mé- 
langes analogues  de  formes  marines  et  de  formes  d'eau  douce. 
(Voyez  un  mémoire  de  M.  Valenciennes ,  inséré  dans  mon 
Recueil  d'obs.  de  zoologie  et  d'anatomie  comparée ,  T.  IJ  ,  p.  2  1  8.) 

Il  résulte  de  ces  considérations  générales  sur  les  caractères 
zoologiques  et  sur  l'étude  des  corps  fossiles,  que,  malgré  les 
beaux  et  anciens  travaux  de  Camper,  de  Blumenbach  et  de 
Sommering  ,  l'exacte  détermination  spécifique  des  espèces  , 
et  l'examen  de  leurs  rapports  avec  des  couches  très-récentes 
et  voisines  de  la  craie,  ne  datent  que  de  vingt -cinq  ans.  Je 
pense  que  cette  étude  des  corps  fossiles,  appliquée  à  toutes 
les  autres  couches  secondaires  et  intermédiaires  par  des 
géognostes  qui  consultent  en  même  temps  le  gisement  et  la 
composition  minérale  des  roches,  loin  de  renverser  tout  le 
système  des  formations  déjà  établies,  servira  plutôt  à  étayer 
ce  système,  à  le  perfectionner,  à  en  compléter  le  vaste  ta- 
bleau. On  peut  envisager  sans  doute  la  science  géognostique 
des  formations  sous  des  points  de  vue  très-différens,  selon 


IND  loi 

que  l'on  s'attache  de  préférence  à  la  superposition  des  masses 
minérales,  à  leur  composition  (c'est-à-dire,  à  leur  analyse 
chimique  et  mécanique) ,  ou  aux  fossiles  qui  se  trouvent  ren- 
fermés dans  plusieurs  de  ces  masses;  cependant  la  science 
géognostique  est  une.  Les  dénominations,  géognosie  de  gise- 
ment ou  de  superposition ,  géognosie  oiyctognostique  (analysant 
le  tissu  des  masses),  géognosie  des  fossiles ,  désignent,  je  ne 
dirai  pas  ,  des  embranchemens  d'une  même  science,  mais 
diverses  classes  de  rapports  que  l'on  tâche  d'isoler  pour  les 
étudier  plus  particulièrement.  Cette  unité  de  la  science,  et 
le  vaste  champ  qu'elle  embrasse ,  avoient  été  très-bien  reconnus 
par  Werner,  le  créateur  de  la  géognosie  positive.  Quoiqu'il  ne 
possédât  pas  les  moyens  nécessaires  pour  se  livrer  à  une  déter- 
mination rigoureuse  des  espèces  fossiles,  il  n'a  cessé,  dans  ses 
cours,  de  fixer  l'attention  de  ses  élèves  sur  les  rapports  qui 
existent  entre  certains  fossiles  et  les  formations  de  différens 
âges.  J'ai  été  témoin  de  la  vive  satisfaction  qu'il  éprouva  ,  lors- 
qu'en  1792  M.  de  Schlottheim  ,  géognoste  des  plus  distingués 
de  l'école  de  Freiberg,  commença  cà  faire  de  ces  rapports  l'objet 
principal  de  ses  études.  La  géognosie  positive  s'enrichit  de  toutes 
les  découvertes  qui  ont  été  faites  sur  la  constitution  minérale  du 
globe;  elle  fournit  à  une  autre  science,  improprement  appelée 
théorie  de  la  terre,  et  qui  embrasse  l'histoire  première  des 
catastrophes  de  notre  planète  ,  les  matériaux  les  plus  précieux* 
Elle  réfléchit  plus  de  lumières  sur  cette  science  qu'elle  n'en 
reçoit  d'elle  à  son  tour;  et,  sans  révoquer  en  doute  l'ancienne 
fluidité  ou  le  ramollissement  de  toutes  les  couches  pierreuses 
(phénomène  qui  se  manifeste  par  les  corps  fossiles,  par  l'as- 
pect cristallin  des  masses,  par  les  cailloux  roulés  ou  les  frag- 
mens  empâtés  dans  les  roches  de  transition  et  les  roches 
secondaires),  la  géognosie  positive  ne  prononce  point  sur  la 
nature  de  ces  liquides  dans  lesquels,  dit -on,  les  dépôts  se 
sont  formés  ,  sur  ces  eaux  de  granité,  de  porphjre  et  de  gypse, 
que  la  géologie  hypothétique  fait  arriver,  marée  par  marée, 
sur  un  même  point  du  globe. 

Dans  le  tableau  des  formations  je  n'ai  point  indiqué  l'incli- 
naison desstrates  comme  caractère  géognostique.  Nul  doute  que 
la  discordance  de  deux  roches  (Ungleichformigkelt  der  Lage- 
rung) ,  c'est-à-dire ,  le  manque  de  parallélisme  dans  leur  direc- 


102  IND 

tion  et  leui* inclinaison  ,  ne  soit  le  plus  souvent  une  preuve  évi- 
dente de  l'indépendance  des  formations;  nul  doute  que  la 
grande  inclinaison  du  terrain  houiller  (  coal-measures  ) ,  du 
grès  rouge  et  des  roches  de  transition  ,  si  justement  opposée  en 
Angleterre  par  M.  Buckland  à  l'horizontalité  du  calcaire  ma- 
gnésien ,  du  red-marl,  du  lyas  et  de  toutes  les  couches  plus 
modernes  encore,  ne  soit  un  phénomène  très-digne  d'atten- 
tion :  mais,  dans  d'autres  régions  de  la  terre,  sur  le  continent 
de  l'Europe  et  dans  l'Amérique  équinoxiale,  le  calcaire  alpin 
et  le  calcaire  du  Jura  ,  qui  représentent  ces  formations  horizon- 
tales de  l'Angleterre,  sont  très-inclinés  aussi.  En  embrassant 
sous  un  même  point  de  vue  de  vastes  étendues  du  globe,  les 
Alpes,  les  montagnes  métallifères  delà  Saxe,  les  Apennins, 
les  Andes  de  la  Nouvelle-Grenade  et  les  Cordillères  du  Mexi- 
que, on  observe  que  l'inclinaison  des  strates  n'augmente  pas 
du  tout  (comme  on  le  répète  encore  souvent  dans  des  ouvrages 
très-estimés)  selon  l'âge  des  formations.  11  y  a  quelquefois,  et 
sur  des  étendues  de  terrain  très-considérables,  des  couches 
presque  horizontales  parmi  les  roches  très-anciennes;  et,  qui 
plus  est,  ces  phénomènes  s'observent  plutôt  parmi  les  roches 
primitives  que  parmi  les  roches  de  transition  ,  et  dans  les 
premières  plutôt  parmi  les  gneis  et  les  granités  stratifiés  que 
parmi  les  thonschiefcr  et  les  micaschistes.  Il  m"a  paru  ,  en  gé- 
néral ,  que  les  roches  les  plus  inclinées  se  trouvent  (si  Ton  fait 
abstraction  de  couches  très-rapprochées  des  hautes  chaînes  de 
montagnes)  entre  le  micaschiste  primitif  et  le  grès  rouge. 
L'horizontalité  des  strates  n'est  bien  générale  et  bien  prononcée 
qu'au-dessus  de  la  craie,  dans  les  terrains  tertiaires,  par 
conséquent  dans  des  masses  d'une  épaisseur  comparativement 
peu  considérable. 

Ce  n'est  point  ici  le  lieu  d'approfondir  la  question  de  savoir 
si  toutes  les  couches  inclinées  sont  des  couches  relevées  , 
comme  le  prétcndoit  Stenon  dès  l'année  1667,  et  comme  le 
semble  prouver  le  phénomène  local  de  galets  ou  fragmens 
aplatis  placés  parallèlement  aux  surfaces  des  couches  inclinées 
dans  des  conglomérats  de  transition  (grauwacke)  et  dans  le 
nagelfluhe,  ou  s'il  est  possible  que  des  attractions  que  l'on 
suppose  avoir  agi  à  la  fois  sur  une  grande  partie  de  la  surface 
du  globe,  ont  produit  dans  nos  plaines  des  strates  inclinés  dés 


IND  io3 

leur  origine,  semblables  à  ces  lames  superposées,  et  sans  con- 
tredit primitivement  inclinées ,  qui  forment  le  clivage  d'un 
cristal.  Certains  grès  (Nebra)  offrent  un  parallélisme  très- 
régulier  dans  leurs  feuillets  les  plus  minces,  coupant  sous  uu 
angle  de  20°  à  55"  les  fissures  de  stratification  horizontales 
ou  inclinées.  Sans  vouloir  tenter  de  résoudre  ces  problèmcG, 
il  me  sera  permis  de  réunir  à  la  fin  de  cette  introduction 
quelques  faits  qui  se  lient  à  l'étude  des  gisemens.  Lorsqu'au 
Tnilieu  de  pays  non  montagneux  ,  ou  sur  des  plateaux  non 
interrompus  par  des  vallées,  où  la  roche  reste  constamment 
visible,  on  voyage  pendant  huit  à  dix  lieues  dans  une  direc- 
tion qui  coupe  celle  des  couches  à  angle  droit,  et  que  l'on 
trouve  ces  couches  (de  thonschiefer  de  transition)  parallèles 
entre  elles,  presque  également  inclinées  de  5o  à  60  degrés, 
vers  le  nord -ouest  par  exemple  ,  on  a  de  la  peine  à  se 
former  une  idée  d'un  relèvement  ou  d'un  abaissement  si 
uniformes,  et  des  dimensions  de  la  montagne  ou  du  creux, 
qu'on  doit  admettre  pour  expliquer  par  une  impulsion  vio- 
lente et  simultanée  cette  inclinaison  des  strates.  En  raison- 
nant sur  l'origine  des  couches  inclinées  ,  il  faut  distinguer 
deux  circonstances  très -différentes  :  leur  position  dans  la 
proximité  d'une  haute  chaîne  de  montagnes  qui  est  traversée 
par  des  vallées  longitudinales  ou  transversales,  et  leur  po- 
sition loin  de  toute  chaîne  de  montagnes,  au  milieu  des 
plaines  ou  de  plateaux  peu  élevés.  Dans  le  premier  cas,  les 
effets  du  relèvement  paroissent  souvent  incontestables,  et  les 
coucjies  inclinent  assez  généralement  vers  la  chaîne,  c'est-à- 
dire  sur  la  pente  septentrionale  des  Alpes  au  sud  ,  sur  la  pente 
méridionale,  mais  beaucoup  moins  régulièrement,  au  nord 
{Buch  ,  in  Schr.  ]S  al.  Freunde,  180g,  p.  io3,  109,  179,  181; 
Bernouilli ,  Schweiz.  Miner. ,  p.  20  )  ;  mais,  à  de  grandes  dis- 
tances de  la  chaîne ,  celle-ci  paroît  influer  sur  la  seule  direc- 
tion des  couches ,   et  non  sur  leur  inclinaison. 

J'ai  été,  dès  l'année  1792,  très-attentif  à  ce  parallélisme  ou 
plutôt  à  ce  loxodromisme  des  couches.  Habitant  des  montagnes 
de  roches  stratifiées  où  ce  phénomène  est  très-constant,  exa- 
minant la  direction  et  l'inclinaison  des  couches  primitives  et 
de  transition  ,  depuis  la  côte  de  Gênes,  à  travers  la  chaîne  de 
la  Bochetta  ,  les  plaines  de  la  Lombardie  ,  les  Alpes  du  Saint- 


104  IND 

Gothard,  le  plateau  de  la  Souabe,  les  montagnes  de  Baireuth 
et  les  plaines  de  l'AIleinagne  septentrionale,  j'avois  été  frappé, 
sinon  de  la  constance,  du  moins  de  l'extrême  fréquence  des 
directions  ?îor.  3 — 4  de  la  boussole  de  Freiberg  (du  sud-ouest 
au  nord-est).  Cette  recherche,  que  je  croyois  devoir  con- 
duire les  physiciens  à  la  découverte  d'une  grande  loi  de  la 
nature,  avoit  alors  tant  d'attraits  pour  moi,  qu'elle  est  de- 
venue un  des  motifs  les  plus  puissans  de  mon  voyage  ài'équa- 
teur.  Lorsque  J'arrivai  sur  les  côtes  de  Venezuela,  et  que  je 
parcourus  la  haute  chaîne  du  littoral ,  et  les  montagnes  de 
granite-gneis  qui  se  prolongent  du  Bas-Orénoque  au  bassin 
du  Rio  Negro  et  de  l'Amazone,  je  reconnus  de  nou\  eau  ,  dans 
la  direction  des  couches,  le  parallélisme  le  plus  surprenant. 
Cette  direction  étoit  encore  hor.  5  —  4  (ou  N.  45"  E.), 
peut-être  parce  que  la  chaîne  du  littoral  de  Venezuela  ne 
s'éloigne  pas  considérablement  de  l'angle  que  fait  avec  le 
méridien  la  chaîne  centrale  de  l'Europe.  J'ai  énoncé  les 
premiers  résultats  que  m'offroient  les  roches  primitives  et 
de  transition  de  l'Amérique  méridionale,  dans  un  mémoire 
publié  par  M.  de  Lamétherie  ,  dans  son  Journal  de  Physique, 
T.  54,  p.  46.  J'y  ai  mêlé  (comme  cela  arrive  souvent  aux 
voyageurs  ,  lorsqu'ils  publient  le  résultat  de  leurs  travaux 
pendant  le  cours  même  du  voyage),  à  des  observations 
très -précises  sur  la  grande  uniformité  dans  la  direction 
des  couches  (à  l'isthme  d'Araya  ,  à  la  Silia  de  Caracas,  au 
Cambury  près  Portocabello  ,  sur  les  rives  du  Cassiquiare  .- 
voyez  ma  Kelat.  hist. ,  T.  I,  p.  Sgo,  642,  564,  SyS,  T,.  II, 
p.  81  ,  99,  125,  141),  des  aperçus  généraux  que  j'ai  regardés 
depuis  comme  vagues  et  moins  exacts.  Quatre  années  de 
courses  dans  les  Cordillères  ont  rectifié  mes  idées  sur  un 
phénomène  qui  est  beaucoup  plus  important  qu'on  ne  l'avoit 
cru  autrefois;  et,  de  retour  en  Europe,  je  me  suis  empressé 
de  consigner  le  résultat  général  de  mes  observations  dans 
la  Géographie  des  plantes ,  p.  116,  et  dans  l'Essai  politique  sur  la 
Nouvelle-Espagne ,  T.  II,  p.  520.  L'indication  de  ce  résultat 
étoit  sans  doute  restée  inconnue  au  savant  auteur  du  Critical 
fxamination  ofGeology  {p.  276),  lorsqu'il  a  combattu  les  asser- 
tions publiées  pendant  mon  absence,  en  1799,  P^^"  ^^'  ^^ 
Lamétherie. 


IND  io5 

Il  n'existe  dans  aucun  hémisphère,  parmi  les  roches,  une 
uniformité  générale  et  absolue  de  direction;  mais,  dans  des 
régions  d'une  étendue  très-considérable,  quelquefois  sur  plu- 
sieurs milliers  de  lieues  carrées ,  on  reconnoit  que  la  direction , 
plus  rarement  l'inclinaison ,  ont  été  déterminées  par  un  sys- 
tème de  forces  particulier.  On  y  découvre,  à  des  distances 
très-grandes,  un  parallélisme  de  couches,  une  direction  dont  le 
type  se  manifeste  au  milieu  des  perturbations  partielle»,  et  qui 
reste  souvent  le  même  dans  les  terrains  primitifs  et  de  tran- 
sition. Cette  identité  de  direction  s'observe  plus  fréquemment 
loin  des  hautes  chaînes  alpines  très- élevées ,  que  dans  ces 
chaînes  mêmes  ,  où  les  strates  se  trouvent  contournés,  redres- 
sés et  brisés.  Assez  généralement,  et  ce  fait  avoit  déjà  frappé 
M.  Palassou  (Essai  sur  la  Min.  des  Pyrénées,  1781)  et  même 
M.  de  Saussure  (  Voyages  dans  les  Alpes,  §.  2002),  la  direc- 
tion de  couches  très -éloignées  des  chaînes  principales  suit 
la  direction  de  ces  chaînes  de  montagnes.  Cette  unifor- 
mité de  parallélisme  des  couches  (du  nord-est  au  sud-ouest) 
a  été  observée  dans  une  grande  partie  de  l'Allemagne  sep- 
tentrionale, au  Fichtelgebirge,  en  Franconle  et  sur  les  bords 
du  Rhin;  en  Belgique;  aux  Ardennes  ;  dans  les  Vosges;  dans 
le  Cotentin  ;  dans  la  Tarantaise  ;  dans  la  majeure  partie  des 
Alpes  delà  Suisse  et  en  Ecosse.  Je  ne  citerai  que  desgéognostes 
modernes  ,  très-exercés  à  ce  genre  d'observations,  et  d'autant 
plus  attentifs  à  la  direction  et  à  l'inclinaison  des  strates, 
que  les  assertions  que  j'avois  émises  5ur  un  parallélisme  ou 
loxo  îromisme  à  de  grandes  distances  avoient  excité  de  vives 
contestations.  «  Qu'on  vienne,  dit  M.  Boue,  examiner  en 
«  Ecosse,  la  boussole  àla'main,  la  position  des  masses  mi- 
«  nérales ,  et  qu'on  sache  s'arrêter  aux  faits  généraux  ;  l'on 
«  s'apercevra  que  la  direction  des  couches  est  constante  et 
«  correspond  à  celle  des  chaînes  du  sud-ouest  au  nord-est, 
«  mais  que  l'inclinaison  yarie  d'après  des  circonstances  lo- 
«  cales.»  (Raumer,  Geogn.  Versuche,  p.  41,  44,  48  ;  Id. , 
Fragmente,  p.  58,  64.  Goldfuss  et  Bischof,  Fichtelg.,  T.  I^ 
p.  189.  Omalius  d'Halloy ,  dans  le  Journal  des  mines,  1808, 
p.  463.  Brochant,  Obser^.  séol.  sur  les  ten^ains  de  transition ,  p.  14. 
Escher,  dansVAlpina,  T.IV,p.o5j;  Gruner,  dansl'lsis,  i8o5  , 
Oct.,  p.  181.  BernouUi,  Schiveiz.  Min. ,  p.  19 — 24.  Ehel,Alpen, 


io6  IND 

T.  I,  p.  220;  T.  Il,  p.  201,  2i5,  357.  Boue,  Géol.  à' Ecosse , 
p.  i3.)  Dans  les  Pyrénées  la  direction  générale  des  strates 
est,  d'après  les  belles  observations  de  MM.  Palassou  ,  Ra- 
mond  ,  Charpentier  et  d'Anbuisson  ,  comme  la  direction 
générale  de  la  chaîne,  N.  68"  O.,  ou  de  l'est-sud-est  à 
l'ouest- nord-ouest.  (Ramond,  Pyrén. ,  T.  I,  p.  67,  T.  II , 
p.  554;  d'Aubuisson,  Géologie,  T.  I,  p.  342.)  Cette  même 
régularité  règne  dans  le  Caucase.  Aux  États -unis  de  l'Amé- 
rique septentrionale,  les  roches  primitives  et  intermédiaires 
sont  dirigées,  d'après  M.  Maclure ,  comme  la  chaîne  des 
Alleghanys,  du  nord-est  au  sud-ouest.  Les  directions  du  nord 
au  sud  ou  du  nord-nord-est  au  sud-sud-ouest  prédominent  en 
Suède  et  en  Finlande.  (  Haussmann ,  dans  les  Mémoires  de 
V Académie  de  Munie,  1808,  P.  I,  p.  147.  Buch  ,  Lappland  , 
T.  I ,  p-  277,  298.  Hisinger,  Min.  Geogr.  von  Scluveden,  p. 
465.  Engelhardt,  Felsgebilde  Russlands ,  p.  18.)  Dans  les  Cor- 
dillères du  Mexique  on  observe  un  type  de  direction  très- 
général  :  les  couches  qui  forment  le  plateau  se  dirigent  du 
sud-est  au  nord -ouest,  parallèlement  à  la  direction  de  la 
chaîne  d'Anahuac  ,  tandis  que  V axe  volcanique  (la  ligne  qui 
passe,  entre  les  18°  69'  et  19°  12'  de  latitude,  par  le  Pic 
d'Orizaba  ,  les  deux  volcans  de  la  Puebla  ,  le  Nevado  de 
Toluca,  le  Pic  de  Tancitaro  et  le  volcan  de  Colima,  ligne 
qui  est -en  même  temps  le  parallèle  des  plus  grandes  élévations) 
se  prolonge  de  l'est  à  l'ouest,  comme  une  crevasse  qui  tra- 
verse l'isthme  mexicain  d'une  mer  à  l'autre.  [Essai politique, 
r.  If,  p.  253.) 

Comme  nous  ignorons  les  causes  'primordiales  des  phéno- 
mènes, la  philosophie  naturelle ,  dont  la  géognosie  sera  un 
jour  une  des  parties  les  plus  intéressantes,  doit  s'arrêter  à 
la  connoissance  des  lois;  et,  dans  le  phénomène  qui  nous 
occupe  ,  ces  lois  peuvent  être  soumises  à  des  mesures  exactes. 
Il  ne  faut  point  oublier  que  les  lignes  de  direction  des  couches 
(StreichungsUnien)  rencontrent  les  méridiens  ,  lorsqu'à  de 
grandes  distances  ces  couches  sont,  par  exemple,  uniformé- 
ment dirigées  N.  45° E.,  comme  les  élémens  d'une  ligne  loxo- 
dromique,  sans  être  parallèles  dans  l'espace.  I.a  direction 
des  couches  anciennes  (primitives  et  de  transition)  n'est  pas 
un  petit  phénomène  de  localité  :  c'est  au  con(raire  un  phé' 


IND  107 

nomène  indépendant  de  la  direction  des  chaînes  secondaires, 
de  leurs  embranchemens  et  de  la  sinuosité  de  leurs  vallées; 
un  phénomène  dont  la  cause  a  agi,  d'une  manière  uni- 
forme, à  de  prodigieuses  distances,  par  exemple,  dans  l'an- 
cien continent,  entre  les  43°  et  67°  de  latitude,  depuis 
l'ÉcoSse  jusqu'aux  confins  de  l'Asie.  Quelle  est  cette  influence 
apparente  des  hautes  chaînes  alpines  sur  des  couches  qui, 
quelquefois,  en  sont  éloignées  de  plus  de  cent  lieues?  J'ai 
de  la  peine  à  croire  que  la  même  catastrophe  ait  soulevé 
les  montagnes  et  incliné  les  strates  dans  les  plaines,  de  sorte 
que  la  tranche  de  ces  strates,  jadis  tous  horizontaux,  au- 
jourd'hui tous  inclinés  de  5o"  à  60",  et  formant  la  surface  du 
globe,  se  seroit  trouvée  à  de  grandes  profondeurs.  Les  chaînes 
des  montagnes  alpines  ont -elles  été  soulevées  ?  Sont -elles 
sorties  (semblables  à  cette  rangée  de  EÏmes  volcaniques  dans 
les  plaines  de  Jorullo  ,  entre  la  ville  de  Mexico  et  les  côtes 
de  la  mer  du  Sud),  sur  des  crevasses  formées  parallèlement 
à  la  direction  de  couches  inclinées  déjà  préexistantes  P 

En  traçant  le  tableau  géognostique  des  formations,  j'ai  dû 
m'abstenir  de  citer  à  chaque  observation  la  source  à  laquelle 
je  l'ai  puisée.  La  géognosie  positive  est  une  science  qui  ne 
date  que  de  la  fin  du  dernier  siècle,  et  il  n'est  pas  facile, 
je  pourrois  ajouter,  il  n'est  pas  sans  danger,  de  faire  l'histoire 
d'une  science  si  moderne.  Quoique  dans  le  cours  d'une  vie 
laborieuse  j'aie  eu  le  bonheur  de  voir  une  plus  grande  éten- 
due de  montagnes  qu'aucun  autre  géognoste,  le  peu  que  j'ai 
observé  se  perd  dans  la  grande  masse  des  faits  que  j'en- 
treprends d'exposer  ici.  Ce  que  ce  Traité  des  formations 
renferme  d'important,  est  dû  aux  efforts  réunis  de  mes  con- 
temporains. J'ai  voulu  présenter  aux  lecteurs ,  d'une  ma- 
nière concise,  l'enchaînement  des  découvertes  qui  ont  été 
faites:  j'ai  cru  pouvoir  ajouter  ce  qui  est  seulement  pro- 
bable à  ce  qui  me  paroi t  entièrement  constaté.  Si  j'avois 
atteint  le  but  que  je  me  suis  proposé,  les  hommes  supérieurs 
qui  en  Allemagne,  en  France,  en  Angleterre,  en  Suède  et 
en  Italie,  ont  contribué  à  agrandir  l'édifice  de  la  science 
géognostique,  devroient  rcconnoitre  à  chaque  page  les  résul- 
tats de  leurs  travaux.  J'ai  rejeté  dans  des  notes,  à  la  fin  du 
tableau,  lescitations  desfaits  moins  généralement  connus,  et  je 


io8  IND 

n'ai  nommé  dans  le  tableau  niéme  que  Jes  savans  qui  ont 
Lien  voulu  me  communiquer  des  observations  et  des  aperçus 
qu'ils  n'ont  point  encore  publiés.  Les  communications  les 
plus  nombreuses  et  les  plus  intéressantes  de  ce  genre  sont 
celles  que  je  dois  ,  depuis  quinze  ans ,  à  M.  Léopold  de  Buch  , 
avec  lequel  j"ai  eu  l'avantage  de  faire  mes  premières  études 
minéralogiques  sous  un  grand  maître,  et  qui,  sur  une  vaste 
étendue  de  terrains  (entre  les  28°  et  les  71°  de  latitude), 
a  recueilli  des  matériaux  précieux  pour  la  géognosie,  This- 
toire  de  l'atmosphère  et  la  géographie  des  végétaux.  J'ai  fait 
usage,  dans  le  cours  de  mon  travail,  de  plusieurs  notes 
inédites  que  ce  savant  a  bien  voulu  me  donner  sur  le  tissu 
jcristallin  des  trachytes  que  j'ai  rapportés  des  Cordillères,  et 
sur  l'ordre  des  formations  en  Suisse  .  en  Angleterre ,  en 
Ecosse,  en  Toscane  et  dans  les  environs  de  Rome.  J'ai  aussi 
eu  l'avantage  de  le  consulter,  pendant  les  difiFérens  séjours 
qu'il  a  faits  à  Paris,  sur  ce  qui  me  paroissoit  douteux  dans 
le  gisement  des  formations.  Toutes  les  observations  relatives 
à  la  Hongrie  sont  tirées  du  Voyage  minéralogique  de  M.  Beu- 
dant,  qui  est  sur  le  point  de  paroître ,  et  dans  lequel  la 
plupart  des  questions  de  gisement  sont  traitées  avec  une 
grande  supériorité.  Mon  compatriote,  M.  de  Charpentier, 
directeur  des  salines  de  Suisse,  a  bien  voulu  me  communi- 
quer son  excellente  description  des  Pyrénées,  travail  le  plus 
complet  que  l'on  possède  sur  une  grande  chaîne  de  mon- 
tagnes. Plusieurs  renseignemens  sur  les  porphyres  d'Europe 
sont  tirés  d'une  notice  que  j'ai  écrite,  pour  ainsi  dire,  sous 
la  dictée  de  M.  Werner,  lorsque  cet  homme  célèbre  est 
venu,  pour  quelques  jours  ,  de  Carlsbad  à  Vienne  (eni8ij), 
pour  s'entretenir  avec  moi  sur  la  constitution  géognostique  de 
la  Cordillère  des  Andes  et  du  Mexique.  C'est  un  devoir  bien 
doux  à  remplir  que  de  donner  un  témoignage  public  de  re- 
connoissance  à  ceux  dont  la  mémoire  nous  est  chère.  Je  n'ai 
pas  tiré  tout  le  parti  que  j'aurois  voulu  des  travaux  importans 
de  MM.  MacuUoch,  Jameson  ,  Weawer,  Berger,  et  d'autres 
membres  .des  Sociétés  géologique  et  wernérienne  ,  en  Angleterre, 
parce  que  j'ai  craint  de  prononcer  sur  l'identité  des  forma- 
tions d'un  pays  que  je  ne  connois  pas,  au  nord  des  montagnes 
du  Derbyshire,  et  qui,  dans  ce  moment,  est  exploré  avec 
tant  de  zèle  et  de  succès. 


IND  109 

En  indiquant  pour  chaque  formation  les  noitis  de  quelques- 
uns  des  lieux  où  elles  se  trouvent  (ce  que  les  botanistes  ap- 
pellent les  habitations) ,  je  n'ai  eu  aucunement  la  prétention 
d'étendre  le  domaine  de  la  géographie  minéralogique  :  je  n'ai 
voulu  que  présenter  des  exemples  de  gisement  bien  observés. 
Les  exemples  ne  sont  pas  toujours  choisis  parmi  des  contrées 
qui,  par  les  descriptions  de  géognostes  célèbres,  sont  devenues, 
pour  ainsi  dJrt,  classiques.  Il  a  fallu  nommer  quelquefois,  dans 
l'autre  hémisphère ,  des  lieux  qu'on  ne  trouve  sur  aucune 
de  nos  cartes.  Allemont,  Dudley  ,  cap  de  Gates,  Manstield  et 
Œningue  sont  plus  connus  des  minéralogistes  que  les  grandes" 
provinces  métallifères  d'Antioquia ,  des  Guamalies  et  de  Za- 
catecas.  Pour  faciliter  ce  genre  de  recherches  ,  j'ai  souvent 
ajouté,  entre  deux  parenthèses,  des  renseignemens  géogra- 
phiques, par  exemple,  Quindiu  (Nouvelle-Grenade),  Ticsan 
(Andes  de  Quito),  Tomependa  (plaines  de  l'Amazone).  A 
côté  de  l'indication  des  lieux  où  prédomine  telle  ou  telle 
formation ,  j'ai  tâché  de  faire  connoitre  l'ordre  entier  de 
superposition  qui  a  été  observé  avec  quelque  certitude  sur 
des  points  très-éloignés ,  par  exemple  ,  dans  les  Cordillères  des 
Andes,  en  Norwége,  en  Allemagne,  en  Angleterre,  en  Hon- 
grie et  au  Caucase.  Ces  descriptions  de  coupes,  qui  présentent 
des  matériaux  pour  la  construction  ,  si  long-temps  désirée, 
d'un  Atlas  géognostique ,  sont,  pour  ainsi  dire,  les  pièces 
justificatives  d'un  tableau  général  des  roches  ;  car  la  géo- 
gnosie  ,  lorsqu'elle  s'occupe  de  la  série  des  formations,  est 
à  la  géographie  minéralogique  ce  que  Vh^drographie  com- 
parée est  k  la  topographie  des  grands  fleuves  ,  tracée  isolé- 
ment. C'est  de  la  connoissance  intime  des  influences  qu'exer- 
cent les  inégalités  du  terrain,  la  fonte  des  neiges,  les  pluies 
périodiques  et  les  marées,  sur  la  vitesse,  sur  les  sinuosités,  sur 
les  étranglemens ,  sur  les  bifurcations  et  sur  la  forme  des 
embouchures  du  Danube,  du  Nil,  du  Gange,  de  l'Amazone,, 
que  résulte  une  théorie  générale  des  fleuves,  ou ,  pour  mieux 
dire,  un  système  de  lois  empiriques  qui  embrassent  ce  que  l'on 
a  trouvé  de  commun  et  d'analogue  dans  les  phénomènes  lo- 
caux et  partiels.  (Voyez  quelques  élémens  de  cette  hydrogra- 
phie comparée,  dans  ma  Relat.  liistor.,  T.  II,  p.  Siy — -526  et 
657  —  664.)  La  géognosie  des  formations  offre  aussi  des  lois 


li\D 

empiriques,  qui  ont  élé  abstraites  d'un  grand  nombre  de  cas 
particuliers.  Fondée  sur  la  géographie  niinéralngique ,  elle 
en  diffère  essentiellement,  et  cette  diETérence  entre  Fabstrac- 
lion  et  l'observation  individuelle  peut  devenir,  chez  des 
géognostes  qui  ne  connoissent  qu'un  seul  pajs,  la  cause  de 
quelques  jugeniens  erronés  sur  la  précision  d'un  tableau  gé- 
néral des  terrains. 

Les  sciences  physiques  reposent  en  grande  partie  sur  des 
inductions;  et  plus  ces  inductions  deviennent  complètes, 
plus  aussi  les  circonstances  locales  qui  accompagnent  chaque 
phénomène,  se  trouvent  exclues  de  l'énoncé  des  lois  géné- 
rales. L'histoire  même  de  la  géognosie  justifie  cette  asser- 
tion. Werner  ,  en  créant  la  science  géognostique,  a  reconnu  , 
avec  une  perspicacité  digne  d'admiration ,  tous  les  rapports 
sous  lesquels  il  faut  envisager  Findépendance  des  forma- 
tions primitives,  de  transition  et  secondaires.  Il  a  indiqué  ce 
qu'il  falloit  observer,  ce  qu'il  importoit  de  savoir  :  il  a  pré- 
paré, pressenti,  pour  ainsi  dire,  une  partie  des  découvertes 
dont  la  géognosie  s'est  enrichie  après  lui,  dans  des  pays  qu'il 
n'a  pu  visiter.  Comme  les  formations  ne  suivent  pas  les  va- 
riations de  latitude  et  de  climats,  et  que  des  phénomènes, 
observés  peut-être  pour  la  première  fois  dans  l'Himalaya 
ou  dans  les  Andes,  se  retrouvent,,  et  souvent  avec  l'asso- 
ciation de  circonstances  que  Fon  croiroit  entièrement  acci- 
dentelles, en  Allemagne,  en  Ecosse  ou  dans  les  Pyrénées; 
une  très-petite  portion  du^obe,  un  terrain  de  quelques 
lieues  carrées  dans  lequel  la  nature  a  réuni  beaucoup  de  for- 
mations, peut  (comme  un  vrai  microcosme  des  philosophes  an- 
ciens) faire  naitre,  dans  l'esprit  d'un  excellent  observateur, 
des  idées  très-précises  sur  les  vérités  fondamentales  de  la  géo- 
gnosie. En  effet,  la  plupart  des  premiers  aperçus  deWerner, 
même  ceux  que  cet  homme  illustre  s' éfoit  formés  avant  l'année 
J790,  étoient  d'une  justesse  qui  nous  frappe  encore  aujour- 
d'hui. Les  savans  de  tous  les  pays,  même  ceux  qui  ne  montrent 
aucune  prédilection  pour  Fécolc  de  Freiberg ,  les  ont  conservés 
comme  bases  des  classifications  géognostiqu  es.  Cependant,  ce 
que  l'on  savoit  en  1790  des  terrains  primitifs,  de  transition 
et  secondaires,  se  fondoit  presque  entièrement  sur  la  Thu- 
ringe,  sur  les  montagnes  métallifères  de  la  Saxe  et  sur  celles 


IND  m 

du  Harz,  sur  une  étendue  de  pays  qui  n'a  pas  76  lieues  de  lon- 
gueur. Les  mémorables  travaux  deDolomieu,  les  descriptions 
des  Alpes  de  Saussure,  furent  consultés  ;  mais  ils  ne  purent 
exercer  une  grande  influence  sur  les  travaux  de  Werner. 
Sans  doute,  Saussure  a' donné  des  modèles  inimitables  d'exac- 
titude dans  la  topographie  de  chaque  cime,  de  chaque  vallon; 
mais  cet  intrépide  vo}'ageur,  frappé  et  delà  complication 
que  présentent  les  phénomènes  de  superposition  et  du  désor- 
dre apparent  qui  règne  toujours  dans  l'intérieur  des  hautes 
chaines  alpines,  sembloit  peu  tenté  de  se  livrer  à  des  idées 
générales  sur  la  constitution  géognostique  d'un  pays.  Dans  ce 
premier  âge  de  la  science,  le  tjpe  des  formations  étoit  fondé 
sur  un  petit  nombre  d'observations;  il  ressembloit  trop  à  la 
description  des  lieux  où  il  avoit  pris  naissance.  On  prenoit 
pour  des  formations  indépendantes  les  masses  minéi^ales  qui , 
dans  d'autres  pays,  ne  sont  que  des  couches  subordonnées  ou 
accidentelles  ;  on  ignoroit  l'existence  des  formations  qui 
jouent  un  rôle  important  dans  l'Amérique  équatoriale,  dans 
le  nord  et  dans  l'ouest  de  l'Europe  ;  on  méconnoissoit  l'an- 
cienneté relative  des  porphyres,  des  syénites  et  des  eupho- 
tides  ;  on  ne  complétoit  pas  l'histoire  des  couches  plus  ré- 
centes par  une  détermination  rigoureuse  des  corps  orga- 
niques fossiles  qu'elles  renferment  :  on  observoit  avec  une 
grande  précision  le  gisement  des  basaltes,  des  phonolithes 
(phorphyrschiefer)  et  des  dolérites,  qu'on  avoit  long-temps 
confondus  avec  les  grunstein  trappéens;  mais  on  combattoit 
jusqu'à  la  possibilité  de  leur  origine  ignée,  parce  que,  dans 
le  pays  où  la  géognosie  moderne  s'est  formée,  on  n'étoit 
entouré  que  de  quelques  lambeaux  de  terrains  volcaniques, 
et  que  l'on  ne  pouvoit  examiner  les  rapports  qui  existent 
entre  les  trachytes  (  trapporphyr) ,  les  basaltes,  les  laves 
plus  modernes,  les  scories  et  les  ponces.  Si  le  tableau  des 
formations  de  Werner  ,  malgré  les  livres  qu'il  consultoit, 
malgré  la  surprenante  perspicacité  avec  laquelle  il  savoit 
démêler  la  vérité  dans  les  récits  souvent  confus  des  voya- 
geurs ,  étoit  resté  incomplet ,  ce  savant  ne  s'afïligeoit  pas 
de  voir  ses  travaux  perfectionnés  par  d'autres  mains.  Il  avoit 
enseigné  le  premier  l'art  de  reconnoitre  et  d'observer  des 
formations.  C'est  par  l'application  de  cet  art  que  la  géognosie 


IND 

est  devenue  une  science  positive.  Reconrïbissant  que  sa  véri- 
table gloire  se  fondoit  plutôt  sur  la  découverte  des  principef 
de  la  science,  sur  Tinstrument  qu'il  falloit  employer,  que 
sur  les  résultats  obtenus  à  telle  ou  telle  époque,  Werner  ne 
chérissoit  pas  moins  ceux  de  ses  élèves  qui  ne  parfa^eoient' 
pas  son  opinion  sur  l'âge  relatif  et  sur  l'origine  de  plusieurs 
terrains.  Ce  n'est  qu'en  soumettant  cà  l'observation  une  plus 
grande  partie  du  globe,  que  le  type  des  formations  a  pu 
être  à  la  fois  agrandi  et  simplifié.  On  l'a  rendu  plus  con- 
forme à  la  constitution  géognostique  des  continens  consi- 
dérés sous  un  point  de  vue  général. 

Nous  connoissons  aujourd'hui  d'une  manière  assez  exacte  le 
gisement  relatif  de  beaucoup  de  formations,  i  .*"  Dans  l'ancien 
continent:  dans  les  îles  de  la  Grande-Bretagne,  dans  le  nord 
delà  France,  et  en  Belgique,  en  Norwége,  en  Suède  et  en 
Finlande,  en  Allemagne,  en  Hongrie,  en  Suisse,  dans  les 
Pyrénées,  en  Lombardie ,  en  Toscane  et  dans  les  environs 
de  Rome;  en  Crimée  et  au  Caucase  (lat.  41"  —  71°  bor.  ; 
long.  40°  or. —  12°  oc).  2.°  Dans  le  noui^eau  continent  :  aux 
États-unis  de  l'Amérique  septentrionale  ,  entre  la  Virginie 
et  le  lac  Ontario  (lat.  36°  —  45"  bor.  ;  long.  oc.  78°  —  86°); 
au  Mexique  ,  entre  Veracruz  ,  Acapulco  et  Guanaxuato 
(  lat.  16°  5o'  —  21  °  1  '  bor.  ;  long.  oc.  98  "  29'  —  io5''22'); 
dans  l'île  de  Cuba  (lat.  23"  9'  bor.)  ;  dans  les  Provinces- 
unies  de  Venezuela,  entre  la  côte  de  Paria,  Portocabello, 
le  Haut-Orénoque  et  San  Carlos  del  Rio  Negro  ;  dans  les 
Andes  de  la  Nouvelle  -  Grenade ,  de  Popayan  ,  de  Pasto  , 
de  Quito  et  du  Pérou  ;  dans  la  vallée  de  la  Rivière  des 
Amazones  et  sur  les  côtes  de  la  mer  du  Sud  (lat.  10"  27' 
bor.  à  12"  2'austr.  ;  long.  oc.  66°  i5' — 82"  ifi);  au  Brésil, 
entre  Rio  Janeiro  et  la  limite  occidentale  de  la  province 
de  Minas  Geraes  (lat.  18" — 26"  austr.  ;  long.  oc.  46" — 49°)« 
A  mesure  que  l'on  s'élève  à  des  idées  plus  générales,  le 
tableau  des  formations ,  tout  en  devenant  plus  vaste  et 
(nous  osons  le  croire)  plus  vrai,  satisfait  m.oins  ceux  qui 
voudroient  y  trouver  fortement  prononcés  les  traits  indivi- 
duels ,  la  physionomie  locale  de  leur  canton.  Mais  ces  traits 
individuels,  cette  physionomie  locale,  ne  peuvent  y  être 
conservés  que  comme  de  simples  variations  d'u«  type  général, 


IND  3i3 

«omme  des  modifications  particulières  des  grandes  lois  de 
gisement.  Quelque  incomplète  que  soit  encore  la  connois- 
sance  de  ces  lois,  c'est  déjà  un  grand  pas  fait  dans  ce  genre 
de  recherches  que  d'avoir  acquis,  par  les  travaux  réunis  de 
nos  contemporains,  la  certitude  qu'il  en  existe  de  constantes 
et  d'imznuables  au  milieu  du  conflit  des  perturbations  locales. 


Terrains  primitifs. 

Les  plus  anciennes  formations  de  roches  primitives  que 
fon  a  pu  soumettre  aux  observations,  sont,  dans  quelques 
régions  du  globe,  le  granité  (une  formation  dans  laquelle  le 
granité  n'alterne  avec  aucune  autre  roche);  dans  d'autres 
régions,  le  granité  -  gneis  (une  formation  granitique  dans  la- 
quelle des  couches  de  granité  alternent  avec  des  couches  de 
gneis).  On  auroit  de  la  peine  à  nommer  un  granité  que  les 
géognostes  regardassent  unanimement  comme  antérieur  à 
toutes  les  autres  roches  ;  mais  cette  incertitude  tient  à  la 
nature  même  des  choses,  à  l'idée  que  nous  nous  formons  de 
l'âge  relatif  et  de  la  superposition  des  roches.  On  peut  cons- 
tater par  l'observation,  que  le  granité  du  Saint -Gothard  re- 
pose sur  du  micaschiste  ;  que  celui  de  Kielwig  ,  enNorvvége, 
repose  sur  du  thonschiefer.  Mais  comment  démontrer  un 
fait  négatif?  comment  prouver  que,  sous  un  granité  que  l'eu 
appelle  de  première  formation  ,  il  ne  se  trouve  pas  de  nou- 
veau du  gneis,  ou  quelque  autre  roche  primitive  ^  En  tra- 
çant le  tableau  des  connoissances  que  nous  avons  acquises 
sur  la  superposition  des  roches  ,  nous  dcvoiis  nous  abstenir 
de  prononcer  avec  assurance  sur  la  première  assise  de  l'édifice 
géognostique.  C'est  ainsi  (car  il  en  est  du  temps  comme  de 
l'espace)  qu'à  travers  de  longues  migrations  des  peuples  l'his- 
toire ne  reconnoit  pas  avec  certitude  quels  ont  été  les  pre- 
miers habitans  d'une  coutx'ée. 

I.    Granité  primitif. 

§.  1.  Granité  qui  n'alterne  pas  avec  le  gneis.  Comme  on. 
;i  récemment  élevé  d»?s  doutes   très-fondés  sur  l'ancienneté 

.--3.  8 


ii4  IND 

de  beaucoup  de  formations  de  granité,  on  ne  peut  désigner 
la  première  des  roches  primitives  que  par  des  caractères 
négatifs.  Il  m'a  paru  que  dans  les  deux  hémisphères,  surtout 
dans  le  nouveau  monde,  le  granité  est  d'autant  plus  ancien, 
qu'il  n'est  pas  stratifié  ,  qu'il  est  plus  riche  en  quarz  et  moins 
abondant  en  mica.  Dansles  hautes  chaînes  des  montagnes  (dans 
les  Alpes  de  la  Suisse  et  dans  la  Cordillère  des  Andes,  entre 
Loxa  et  Zaulaca},  le  granité,  par  l'abondance  et  la  direction 
uniforme  des  feuillets  de  mica,  tend  à  devenir  lamelleux  ; 
tandis  que  les  granités  qui  percent  la  terre  végétale  dans  les 
plaines,  présentent  généralement,  parleur  texture  plus  uni- 
formément grenue,  un  contraste  plus  marqué  avec  le  gneis. 
La  grosseur  du  grain,  la  régularité  de  la  cristallisation  des 
parties  constituantes ,  et  la  couleur  rouge  ou  blanche  du 
feldspath  ,  sont  des  phénomènes  très- dignes  d'attention  ,  si 
l'on  considère  de  grandes  masses  d'une  roche,  et  si  l'on 
fait  abstraction  des  bancs  subordonnés  de  granité  à  petits 
grains  que  l'on  rencontre  au  milieu  d'un  granité  à  gros  grains, 
et  lice  versa.  Ces  phénomènes  désignent  l'âge  relatif  d'une 
formation  dans  une  étendue  de  terrain  plus  ou  moins  circons- 
crite; mais  on  ne  sauroit  en  déduire  des  caractères  généraux, 
applicables  à  un  continent  entier.  Dans  les  Cordillères,  le 
granité  à  petits  grains  et  à  feldspath  blanc  et  blanc  jaunâtre 
m'a  paru  le  plus  ancien.  L'absence,  je  ne  dis  pas  de  la  tour- 
maline et  du  titane-rutile  ,  mais  de  l'amphibole  disséminé,  de 
la  stéatite  ,  des  grenats,  del'épidote,  de  l'actinote,  de  l'élain  , 
du  fer  oligiste  ,  remplaçant  le  mica  (Gottesgabe  dans  le  Haut- 
Palatinat)  ;  le  manque  de  bancs  subordonnés  hétérogènes 
(grilnstein,  calcaire  grenu)  et  de  rognons  à  très-petits  grains 
et  fortement  micacés,  qui  sont  de  formation  contempo- 
raine et  semblent  comme  enchâssés  dans  la  masse  principale  ; 
enfin  ,  le  manque  de  stratification  dans  les  couches  inférieu- 
res, et  la  structure  non  porphyroïde  ,  paroissent  caractériser 
les  granités  de  première  formation  (côtes  occidentales  de 
l'Amérique  équinoxiale  ,  Cascas ,  Santa  et  Guarmay  dans  le 
Bas-Pérou  ;  rives  du  Cumbeima  près  Ibagué  ;  Quilichao  et 
Caloto  dans  les  Andes  de  la  Nouvelle-Grenade).  Les  granités 
des  cataractes  de  l'Orénoque  et  des  montagnes  de  la  Parime 
renferment,  comme  ceux  des  Pyrénées  et  de  laPIaute-Égypte, 


IND  ii5 

quelques  couches  dans  lesquelles  on  reconnoît  des  cristaux  iso- 
lés d'amphibole  ;  ces  roches  appartiennent  probablement  à  une 
époque  un  peu  plus  récente  que  le  granité  du  Bas- Pérou. 
Quoique  les  granités  les  plus  anciens  n'offrent  généralement 
pas  de  bancs  subordonnés  de  calcaire  primitif,  la  chaux 
commence  cependant  déjà  à  se  montrer,  au  sein  des  monta- 
gnes primitives  (je  n'ose  dire  au  premier  âge  du  monde)  , 
dans  le  feldspath  et  peut-être  dans  les  tourmalines.  Plus  tard 
cette  quantité  de  chaux  augmente  par  l'addition  de  Pamphi- 
bole  dans  les  couches  syénitiques  qui  caractérisent  les  gra- 
nités les  plus  modernes. 

Granité  et  Gneïs  primitifs. 

§.  2.  Cette  formation,  si  bien  caractérisée  par  M.  de  Rau- 
mer,  offre  des  couches  de  granité  et  de  gneis  très-distinctes, 
à  peu  près  contemporaines  et  alternant  les  unes  avec  les  autres. 
.Elle  repose  quelquefois  (Riesengebirge  )  immédiatement  sur 
la  formation  précédente;  d'autres  fois  (au  sud-est  de  Rio- 
bamba,  dans  le  royaume  de  Quito)  elle  est  la  plus  ancienne 
des  roches  visibles.  Ce  retour  périodique  de  couches  hétéro- 
gènes se  retrouve  surtout  dans  les  formations  de  transition , 
par  exemple,  dans  celles  de  porphyre  et  syénite ,  de  syénite 
et  griinstein.  Je  pense  qu'il  faut  distinguer  de  la  formation, 
de  granité  et  gneis ,  et  les  granités  dont  les  couches  passent 
souvent  et  insensiblement  au  gneis,  comme  le  granité  du 
littoral  de  Venezuela ,  et  les  gneis  qui  passent  au  granité 
(pente  méridionale  de  la  Jungfrau  et  du  Titlis).  Les  bano 
subordonnés  au  granité  et  gneis  sont  :  les  micaschistes ,  qui ,  à 
leur  tour,  renferment  du  calcaire  grenu;  les  schistes  am- 
phiboliques  et  chloriteux  ;  le  weisstein. 

Granité  stannifÈre. 

§.  3.  Généralement  à  parties  constituantes  très-désagrégées. 
le  feldspath  passant  au  caolin  (  Carlsbad  ,  chemin  d'Eiben- 
stock  à  Johann-Georgenstadt  ;  et,  d'après  M.  de  Bonnard  , 
probablement  aussi  les  granités  du  département  de  la  Haute- 
Vienne).  On  reconnoitra  peut-être  dans  la  suite  que  plusieurs 
de  ces  roches  stannifères  sont  d'un  âge  plus  récent  encore  ; 
et  qu'il  faudroit  les  placer  parmi  les  granités  postérieurs  au 


^'*  INEl 

gneis  et  antérieurs  au  micaschiste.  Des  caractères  de  nou- 
veauté semblent  se  retrouver  même  dans  les  granités  du, 
Fichtelgebirge,  en  Franconie ,  qui  non -seulement  sont  très- 
régulièrement  stratifiés,  mais  qui  contiennent  aussi  des  bancs 
d'urgriinstein  (diabase  primitive,  paterlestein).  Je  ne  connois 
point  la  formation  alpine  de  granité  stannifère  dans  les 
Andes  :  le  granité  qui  constitue  les  sommets  des  Cordillères, 
est  presque  toujours  recouvert  de  formations  de  porphyre  de 
transition  et  de  trachyte. 

Weisstein  avec  Serfentine. 

§.  4.  Le  weisstein  (eurite),  dans  lequel  domine  le  feldspath 
compacte  (partie  nord-ouest  de  l'Erzgebirge) ,  repose  sur  le 
granité  ancien.  Il  est  recouvert  de  gneis,  quelquefois  de  mi- 
caschiste (Hartha) ,  ou  d'un  schiste  primitif  auquel  (Hermsdorf, 
Dobeln)  le  weisstein  paroît  passer  insensiblement.  Bancs  subor- 
donnés :  granité  tantôt  à  grains  très-gros  (Penig) ,  tantôt  à  petits 
grains ,  passant  souvent  au  weisstein ,  et  renfermant  de  la  lépi- 
dolithe  et  de  la  parenthine  lamelleuse  ;  serpentine  (  Wald- 
heim).  Le  weisstein  qui  enchâsse  quelquefois  des  grenats  et 
de  la  cyanite ,  est  en  Saxe ,  d'après  les  observations  de  MM. 
Pusch ,  Raumer  etMohs,  une  formation  indépendante,  anté- 
rieure au  gneis,  et  non  un  banc  subordonné;  en  Silésie  (En- 
gelsberg  près  Zobten,  et  Weiseritz  près  Schweidnitz) ,  il  ne 
forme  que  des  couches  dans  le  granité  et  le  gneis  primitifs. 
Ce  phénomène  n'a  rien  qui  puisse  étonner  le  géognoste.  Les 
micaschistes,  les  gneis  et  les  porphyres  se  trouvent  à  la  fois 
comme  roches  indépendantes  et  comme  bancs  subordonnés. 
La  serpentine  de  Buenavista  dans  les  montagnes  de  THigue- 
rote,  à  l'ouest  de  Caracas,  appartient  proprement  au  gneis 
talqueux;  mais  il  paroit  que,  dans  le  même  groupe  de  mon- 
tagnes, il  y  a  aussi  de  la  serpentine  liée  à  un  weisstein  qui 
est  superposé  à  la  formation  de  granité  et  gneis.  La  ser- 
pentine du  "weisstein  est  la  plus  ancienne  des  roches  d'eupho- 
tides  à  très-petits  grains,  roches  qui  passent,  pour  ainsi  dire^ 
à  travers  toutes  les  formations  suivantes  jusqu'à  la  limite 
supérieure  des  terrains  de  transition. 


IND  3'7 

II.    Gneis   primitif. 

§.  5.  Nous  distinguons  cette  formation  de  gneis  (Freiberg, 
Lyon  ,  plateau  entre  Autun  et  la  montagne  d'Aussi  ;  Arns- 
berg  dans  le  Riesengebirge ,  Lbdingen  enNorwëge,  Gram- 
pians  en  Ecosse),  qui  renferme  des  bancs  subordonnés  de 
micaschiste,  de  la  formation,  également  importante,  de  gneis 
et  micaschiste ,  dans  laquelle  des  couches  de  gneis  alternent 
avec  des  couches  de  micaschiste.  Le  gneis  est,  d'après  MM. 
de  Buch  et  Haussmann  ,  la  roche  dominante  en  Scandinavie  , 
où  le  granité  ancien  (antérieur  au  gneis)  n'est  presque 
nulle  part  visible.  Les  bancs  subordonnés  du  gneis  sont  très- 
variés  et  fréquens;  ils  le  sont  cependant  beaucoup  moins 
lorsque  le  gneis  ne  passe  pas  au  micachiste.  Nous  ne  nomme- 
rons ici  que  les  bancs  les  plus  remarquables  :  quarz  souvent 
grenatifère;  feldspath  plus  ou  moins  décomposé  et  dépourvu 
de  potasse  ;  porphyre,  généralement  rougeâtre,  à  base  pétro- 
siliceuse,  renfermant  du  feldspath,  du  quarz  et  du  mica  (lager- 
porphyr  de  la  Halsbruckc,  d'Ober-Frauendorf,  de  Liebstadt); 
calcaire  grenu  assez  rarement  (route  du  Simplom,  mine  du 
Kurprinz  près  de  Freiberg)  ;  grenat  commun  ,  mêlé  de  calcaire 
grenu,  deblendeetdeferoxidulé(Sch\varzenberg):  micaschiste 
(Bergen  en  Norwége);  syénite  (Burkersdorf  enSilésie);  gra- 
nité à  feldspath  décomposé  ,  mais  non  stannifère  ;  serpentine 
(ophyolithe)  formant,  d'après  M.  Cordier,  une  couche  d'une 
étendue  immense  dans  les  départemens  de  la  Haute-Viç^nne, 
du  Lot  et  del'Aveyron  ;  amphiboliteschistoïde  ou  hornblend- 
schiefer;  grunstein  ,  mêlé  de  fer  magnétique  (Taberg  près 
Jonkoping),  de  zircon ,  de  zoïsite  et  de  menakan  (Priocktec- 
halt,  en  Carinthie)  ;  fer  magnétique  en  couches  de  20  à  00 
toises  d'épaisseur ,  souvent  mêlé  de  calcaire  grenu  ,  d'ichthyo- 
phtalme  ,  de  spodumène  ,  de  trémolite  ,  d'amianthe  ,  d'actiaote 
et  de  bitume  (Danemora,  Gellivara  et  Kinsivara,  en  Suéde 
et  enLaponie);  pegmatite  (Loch-Lâggan  en  Ecosse);  gneis 
renfermant  des  masses  anguleuses  de  gneis  d'une  texture 
différente  de  celle  de  la  roche  principale  (Rostenberg,  en 
Norwége).  Ce  dernier  phénomène  (effet  d'une  cristallisation 
contemporaine?)  est  beaucoup  plus  analogue   aux  granités 


3i8  IND 

du  Greiffenstcin  en  Saxe,  et  du  Pic  Quairat  dans  les  Pyré- 
nées, qu'au  gneis  de  transition  renfermant  les  poudingues 
de  la  Valorsine.  La  grande  formation  de  gneis  primitif,  très- 
riche  en  minerais  d'argent  et  d'or,  en  Allemagne,  dans  quel- 
ques parties  de  la  France,  en  Grèce  et  dans  l'Asie  mineure, 
a  été  désignée  long-temps  comme  la  roche  la  plus  argentifère 
du  globe.  On  sait  aujourd'hui ,  d'après  des  recherches  faites 
dans  les  deux  Amériques  et  en  Hongrie,  que  la  grande  masse 
des  métaux  précieux  qui  circulent  dans  les  deux  continens , 
est  due  à  des  formations  de  beaucoup  postérieures  au  gneis 
et  à  toutes  les  autres  formations  primitives  ;  qu'elle  provient 
de  roches  de  transition,  de  porphyres  syénitiques  et  même 
de  trachytes.  Le  gneis  peu  métallifère  de  la  partie  équi- 
noxiale  du  nouveau  monde  se  montre  sur  une  plus  grande 
étendue  de  terrain  dans  les  montagnes  qui  courent  de  l'est 
à  l'ouest  (chaîne  du  littoral  de  Caracas,  cap  Codera,  et 
îles  du  lac  de  Tacarigua  ;  Orénoque  ,  Sierra  de  la  l'arime  ) 
et  dans  les  régions  basses  éloignées  de  la  chaîne  des  Andes 
(à  l'est  des  montagnes  du  Brésil),  que  dans  la  crête  élevée 
de  cette  chaîne  même.  Je  n'ai  pas  vu  le  gneis  (  à  la  Silla 
de  Caracas  et  au  passage  des  Andes  de  Quindiu  )  à  plus 
de  i3oo  et  1400  toises  de  hauteur  au-dessus  du  niveau  de 
l'océan.  Sur  le  dos  des  Cordillères,  entre  Ibague  et  Carthago 
(Nouvelle-Grenade  ou  Cundinamarca)  ,  comme  au  Paramo 
de  Chulucanas,  en  descendant  vers  l'Amazone  ,  un  granité  de 
nouvelle  formation  recouvre  le  gneis  à  1800  toises  de  hau- 
teur. Si  dans  les  montagnes  de  l'Europe  le  gneis,  le  mica- 
schiste et  un  granité  de  seconde  formation  constituent  les  plus 
hautes  cimes;  dans  les  Andes,  au  contraire,  les  sommets  les 
plus  élevés  ne  présentent  que  d'énormes  accumulations  de 
roches  trachy tiques.  En  suivant  une  même  chaîne,  un  même 
alignement  de  montagnes,  on  voit  les  basses  régions  de  granite- 
gneis  et  de  gneis-micaschiste  (provint  e  d'Oaxaca  dans  la  Nou- 
velle-Espagne ,  où  le  gneis  est  aurifère;  groupes  primitifs  de 
Quindiu;  Almaguer,  Guamote,  au  sud  du  Chimborazo;  Sara- 
guru  et  Loxa,  danslesAïides  du  Pérou)  alterner  avec  les  régions 
élevées  (2000  à  55oo  toises)  de  trachytes.  Ces  derniers  ter- 
rains ,  produits  ou  modifiés  par  ie  feu,  recouvrent  sans 
«ioule  et   quelquefois  immédiatement,   sans  que  des  forma- 


IND  Ï19 

tioris  porpliyriques  de  transition  soient  interposées,  le  granité 
et  le  gneis;  cependant,  là  où  j'ai  pu  voir  les  trachytes  du 
royaume  de  Quito  (volcan  de  Tunguragua ,  ravin  du  Rio- 
Puela  près  de  Penipe)  reposer  sur  un  schiste  micacé  ver- 
dàtre  rempli  de  grenats  et  recouvrant  à  son  tour  un  gra- 
nité un  peu  syénitique  avec  quarz  et  mica  (noir!),  cette 
superposition  n'a  aussi  lieu  qu'à  la  hauteur  peu  considérable 
de  1240  toises.  Il  résulte  en  général  de  mon  nivellement 
barométrique  des  Cordillères ,  que  dans  toute  cette  région 
des  tropiques  les  granités  et  les  gneis  anciens,  qu'il  ne  faut 
pas  confondre  avec  des  roches  syénitiques  et  granitiques  de 
transition,  ne  s'élèvent  guère  au-dessus  de  la  hauteur  qu'at- 
teignent les  sommets  des  Pyrénées.  Tous  les  massifs  super- 
posés aux  roches  primitives,  qui  dépassent  la  limite  des 
neiges  perpétuelles  (2000  —  2460  toises),  et  qui  donnent  aux 
Cordillères  leur  caractère  de  grandeur  et  de  majesté  ,  ne  sont 
généralement  dus  ni  à  des  formations  primitives  ni  à  des 
roches  calcaires  (il  n'y  a  que  le  calcaire  alpin  des  plateaux 
de  Gualgayoc  et  de  Guancavelica  qui  se  trouve  à  2100  et 
23oo  toises),  mais  à  des  porphyres  trachytiques ,  à  des  dolé- 
rites  et  des  phonolithes.  (Nous  ignorons  encore  de  quelles- 
Toches  sont  composés  les  sommets  de  l'Himalaya,  les  extré- 
mités de  ces  pics  récemment  mesurés  par  M.  Webb.  )  Le  gneis 
des  Cordillères  abonde  bien  plus  que  le  micaschiste  en  couches 
subordonnées  de  calcaire  grenu  (micacé  et  rempli  de  pyrites). 
Aussi ,  dans  l'Amérique  équinoxiale ,  comme  à  l'extrémité  la 
plus  boréale  de  l'Europe  et  dans  les  Pyrénées,  le  grenat  est 
le  plus  commun  dans  le  gneis,  et  cette  dernière  roche  ne 
cesse  généralement  de  contenir  des  grenats  que  lorsqu'elle 
se  rapproche  du  schiste  micacé  (montagne  d'Avila,  près  de 
Caracas  ).  Un  véritable  gneis,  dépourvu  de  grenats  ,  se  montre 
cependant  à  Pouest  de  Mariquita,  entre  Rio  Quamo  et  les 
mines  de  S.  Ana  (Nouvelle -Grenade).  Au  Brésil,  d'après 
l'observation  de  M.  d'Eschwege,  Pétain  (zinnstein)  est  dissé- 
miné, non  dans  le  granité  ,  mais  dans  le  gneis  (bords  du  Rio- 
Paraopeba  près  de  Villa-Ricca). 

Entre  les  deux  grandes  formations  de  gneis  et  de  micaschiste 
primitifs,  nous  placerons  plusieurs  formations  parallèles: 


î^e  IND 

Gneis  et  Micaschiste  ;  Sy^nite  primitive  ? 

Granité  postérieur  au  Gneis        Serpentine  primitive  ? 
ET  ANTÉRIEUR  AU  Micaschiste;  Oalcaire  grenu. 

Deux  de  ces  formations  sont  peut-être  aussi  douteuses  que 
l'est  le  porphyre  primitif,  considéré  comme  formation  indé- 
pendante. 

Gneis  et  Micaschiste. 

§.  6.  Des  couches  de  gneis  alternent  avec  des  couches  de 
micaschiste,  de  même  que  le  gneis,  dans  la  formation  §.  2, 
alterne  avec  le  granité.  Ce  ne  sont  pas  des  roches  qui  passent 
Tune  à  l'autre,  mais  des  couches  alternantes,  très-nettement 
tranchées  (Neisbach  et  Jauersberg  en  Silésie  ;  Waltersdorf 
près  Scheibenberg  en  Saxe).  Dans  les  Cordillères  de  l'Amé- 
rique, et  peut-être  dans  la  plupart  des  grandes  chaînes  de 
montagnes  de  l'ancien  continent,  comme  l'illustre  Dolo- 
mieu  me  l'avoit  fait  observer  en  Suisse  dès  l'année  lygô  , 
les  formations  mixtes  ou  d'alternance  périodique,  de  gneis  et 
granité,  et  de  gneis  et  micaschiste,  sont  beaucoup  plus  fré- 
quentes que  les  formations  simples,  de  granité,  de  gneis  et  de 
micaschiste.  La  formation  indépendante  de  gneis-micaschiste 
repose  tantôt  sur  la  formation  de  gneiss  (  §.  5),  tantôt  immé- 
diatement sur  le  granité  le  plus  ancien  (§.  1).  Dans  ce  der- 
nier cas  elle  doit  être  considérée  comme  une  formation  paral- 
lèle au  gneis.  Bancs  subordonnés  :  calcaire  grenu,  schistes 
amphiboliques,  griinstein ,  serpentine,  et  thonschiefer  avec 
actinote.  Ces  bancs  subordonnés  se  répètent  plusieurs  fois;  car, 
dans  toutes  les  formations  d'alternance  périodique ,  soit  primi- 
tives ,  soit  de  transition  (les  granités  c(  gneis,  les  gneis  et  mica- 
schistes ,  les  syénites  et  griinstein,  les  porphyres  et  syénites, 
les  porphyres  et  grauwacke ,  les  calcaires  noirs  et  schistes 
de  transition),  le  retour  périodique  des  masses  s'étend  jus- 
qu'aux bancs  subordonnés.  Cette  grande  loi  géologique  se 
manifeste  dans  toute  la  Cordillère  des  Andes,  surtout  dans  les 
itiontagnes  situées  au  sud  et  au  sud-est  du  volcan  de  Tungu- 
ragua,  au  Condorasto ,  au  Cuvillan  et  au  Paramo  del  Hatillo  , 
où  (ce  qui  est  très-rare  dans  cette  région)  le  gneis-micaschiste 
s'élève  à  plus  de  2000  toises  de  hauteur,  et  renferme  des 
filons  d'argent  jadis  très-célèbres   (  weissgultigerz   et  sprod- 


IND  i2t 

glaserz,  argent  blanc  et  argent  vitreux  aigre).  Ces  gneis- 
micaschistes  métallifères  du  Condorasto  et  de  Pomallacta  se 
cachent  vers  le  sud  sous  les  formations  de  porphyres  trachy- 
iiques  des  Andes  de  l'Assuay  ;  ils  reparoissent  (à  1700  toises 
de  hauteur)  entre  les  ruines  du  palais  de  l'inca  (Ingapilca) 
et  la  ferme  de  Turche,  et  ils  se  cachent  de  nouveau  sous  les 
grès  de  Cuença.  Les  forêts  de  Quinquina,  à  l'ouest  de  Loxa, 
couvrent  aussi  des  montagnes  de  gneis  alternant  avec  du  mica- 
schiste. Dans  le  passage  des  Andes  de  Quindiu ,  entre  les 
bassins  du  Rio  Cauca  et  du  Rio  Magdalena,  la  formation  de 
gneis-micaschiste  repose  (au-dessus  de  la  station  de  la  Fal- 
milla)  immédiatement  sur  le  granité  ancien.  Elle  atteint  une 
énorme  épaisseur,  en  s'élevant  vers  le  Paramo  de  San-Juan. 
Les  couches  de  micaschistes  alternant  avec  le  gneis  y  sont 
toujours  dépourvues  de  grenats;  elles  offrent,  au  Valle  del 
Moral  (à  1  o65  toises  de  hauteur) ,  des  filons  remplis  de  soufre, 
exhalant  des  vapeurs  sulfureuses  dont  la  température  s'élève 
à  48°  cent.,  l'air  atmosphérique  étant  à  20°.  Ce  phénomène 
est  d'autant  plus  remarquable  qu'au  sud  de  l'équateur,  dans  la 
célèbre  montagne  de  soufre  de  Ticsan,  j'ai  trouvé  le  soufre  dans 
du  quarz,.subordonné  comme  couche  au  micaschiste  primitif. 
Les  couches  de  gneis  de  Quindiu  contiennent  des  grenats 
disséminés  et  des  bancs  de  caolin  décomposé.  Dans  la  chaîne 
côtière  de  Caracas  ,  entre  Turiamo  et  Villa  de  Cura  ,  les  for- 
mations de  granite-gneis  et  de  gneis-micaschiste  occupent, 
dans  une  direction  perpendiculaire  à  l'axe  de  la  chaîne,  un 
terrain  de  dix  lieues  de  largeur;  le  gneis-micaschiste  se  cache 
vers  les  Llanos  de  Venezuela  sous  des  schistes  verts  de  transition. 
Près  de  la  Guayra ,  au  cap  Blanc,  cette  formation  renferme 
des  bancs  subordonnés  de  chlorite  schisteuse  (avec  grenats 
et  sable  magnétique)  ,  de  hornblendschiefer  et  de  griinstein 
mêlé  de  quarz  et  de  pyrites.  Sur  les  côtes  du  Brésil,  où  plu- 
sieurs chaînes  primitives  se  dirigent  parallèlement  aux  Andes 
du  Pérou  et  du  Chili  dans  le  sens  d'un  méridien,  des  couches 
de  granité,  de  gneis  et  de  micaschiste  constituent  une  seule 
formation  et  alternent  en  séries  périodiques  (  Ilha  Grande, 
au  sud  de  Rio-Janeiro  ,  près  Villa  d'Angra  dos  Reis,  selon 
"M.  d'EschAvege).  Les  trois  roches  y  sont  contemporaints  , 
comme  les  syénites  qui  alternent  périodiquement,  soit  avec 
les  thonschiefer ,  soit  avec  les  griinstein  de  transition. 


1"  rND 

Granités  postérieurs   au  Gneis  ,    antérieurs  au  Micaschiste 
primitif. 

§.  7.  Je  réunis  ici  plusieurs  formations   de  granité  à  peu 
près  parallèles,  placées  entre  le  gneis  et  le  micaschiste,  telles 
que  le    granité   stannifère    (hyalomicte,   graisen  )    de   Zinn- 
wald    et  d'Altenberg ,   en  Saxe,    qui   paroît  reposer  sur  le 
gneis  et  qui  abonde  en  tourmalines  noires  ;  la  plupart  des 
pegmatites  ou  granités  graphiques  (schriftgranite),  qui  ren- 
ferment de  la  lépidolite  (Rozena,  en  Moravie)  ;  les  granités 
avec  épidote;  les  granités  à  bancs  subordonnés  de  weisstein 
ou  eurite  (Reichenstein  en  Silésie)  ;  les  granités  avec  stéatite 
et  chlorite,    contenant  souvent  de  l'amphibole  disséminée, 
et  prenant  l'aspect  d'une  syénite  ou  d'un  schiste  chloriteux 
(protogynes  du  Mont-Blanc    et  de  presque  toute  la  chaîne 
des  Alpes  entre  le  Mont-Cenis  et  le  Saint  -  Gothard  ;  pro- 
bablement aussi  la  roche  du  Rehberg  au  Harz);  les  granités 
des   Pyrénées,    si   bien    étudiés  par  M.   de  Charpentier,    et 
renfermant   de   nombreux    bancs  de   gneis,    de  micaschiste 
et    de   calcaire  grenu.    Peut-être   les  granités  d'Altenberg 
appartiennent -ils    (c'est    l'opinion    de    M.   Rendant  )    aux 
assises  inférieures  des  porphyres  de  transition;  peut-être  les 
granités  des  Pyrénées,  qui  enchâssent  des  amas  d'urgriinstein 
(diabase  primitive)   sont-ils  même  postérieurs  à  la   grande 
formation  de  micaschiste   (§.  11),  comme  aussi  les  granités 
stannifères   du    Fichtclberg  ,    qui    renferment  du    griinstein 
(Ochsenkopf,  Schnéeberg,  en  Franconie),  et  que  nous  avons 
indiqués  provisoirement  au  §.  3.    Le  même  doute  me  reste 
sur  beaucoup  de  granités  qui  abondent  en  filons  argentifères, 
sur  tous  les  granités  avec  grenats,  et  sur  les  granités  por- 
phyroïdes    (à  très-grands   cristaux   de    feldspath    rouge   et 
blanc),  qui  sont  souvent   aussi  régulièrement  stratifiés  que 
l'est  le  calcaire  secondaire.  Je  n'ai  point  voulu  citer  ici  les 
amas   d'étain    de    Geyer   et   de   Schlackenwald ,    parce   que 
les  granités  qui  les  renferment,   ne  sont    que   des   couches 
dans  le  gneis  et  le  micaschiste  r  ce  ne  sont  pas  de  véritables 
roches,    des  formations  indépendantes,   comme  les  granités 
de   Carlsbad   et  du    Fichtelgebirgc.    Dans   l'Amérique    équi- 
noxiale  on  peut  rapporter  avec  qjielque  vraisemblance  à  la 


IND  125 

formation  de  granité  postérieure  au  gneis  et  antérieure  au 
micaschiste,  les  granités  de  la  pente  occidentale  des  Cordil- 
lères du  Mexique  (plateau  du  Papagallo  et  de  la  Moxonera) , 
qui  sont  ou  porphyroïdes ,  ou  divisés  en  boules  à  couches 
concentriques.  Ils  enchâssent  des  bancs  syénitiques  liés  à  des 
filons  de  basanite  (urgrunstein  compacte).  Je  les  ai  vus  régu- 
lièrement stratifiés  en  couches  de  7  à  8  pouces  d'épaisseur,  et 
afTectant,  non  une  même  inclinaison  ,  mais  une  même  direc- 
tion avec  les  couches  du  porphyre  de  transition  et  du  cal- 
caire alpin  superposées.  On  ne  connoît  point,  il  est  vrai ,  les 
roches  que  recouvre  cette  formation  mexicaine  de  granité  : 
c'est  celle  sur  laquelle  toutes  les  autres  roches  du  Mexique  sont 
placées;  mais  les  caractères  de  composition  et  de  structure 
qu'elle  offre  en  grand,  et  son  analogie  avec  d'autres  granités 
stratifiés  des  hautes  Andes  du  Pérou ,  me  font  croire  qu'elle 
est  d'un  âge  plus  récent  que  la  formation  §.  1.  Au  granité 
antérieur  au  micaschiste ,  mais  postérieur  au  gneis ,  appartient 
plus  positivement  celui  de  la  Garifa  del  Paramo ,  au  pied  du 
volcan  éteint  de  Tolima  (  And  es  de  Quindiu  )  ;  celui  de  la  Silla 
de  Caracas  ;  les  granités  très -régulièrement  stratifiés  (sans 
passer  au  gneiss)  de  Las  Trincheras  dans  la  chaîne  côtiére  de 
Venezuela;  les  granités  du  groupe  étendu  des  montagnes  de 
la  Parime,  qui  sont  ou  régulièrement  stratifiés  (détroit  du 
Baraguan,  vallée  du  Bas-Orénoque) ,  ou  passant  àlapegmatite 
(Esmeralda  et  confluent  de  l'Ucamu,  Haut-Orénoque) ,  ou 
amphiboliques  (cataractes  d'Atures).  Dans  ce  vaste  groupe 
granitifère  de  la  Sierra  Parime,  qui  sépare  le  bassin  du  Bas- 
Orénoque  de  celui  de  l'Amazone,  se  répètent  quelques  phé- 
nomènes de  la  Finlande  et  de  la  Norwége  :  aucune  autre  masse 
minérale  n'y  paroit  au  jour  que  la  roche  granitique.  Là  où 
i'ai  côtoyé  la  Sierra  Parime  au  nord,  à  Pouest  et  au  sud, 
i'ai  observé ,  à  quelques  petites  masses  de  grès  près  ,  une 
absence  totale  de  formations  secondaires,  même  de  roches 
postérieures  à  un  granité  de  nouvelle  formation.  Ce  granité, 
et  le  gneis  qui  le  supporte,  forment,  là  où  de  petites  plaines 
séparent  les  montagnes  entre  elles  ,  au  milieu  des  forêt*, 
et  d'une  végétation  vigoureuse  ,  des  bancs  de  rochers  nus , 
dépourvus  de  terreau,  ayant  plus  de  260,000  toises  carrées, 
et  s'élevant  à  peine  de  trois  à  quatre  pouces  au-dessus  du 


sol  environnant.  Dans  rhémisphère  méridional  je  peux  citer 
comme  granités  de  nouvelle  formation,  la  roche  du  Parefon 
(pente  orientale  des  Andes  du  Pérou,  entre  Guancabamba 
et  la  rivière  des  Amazones),  où  le  granité  stéaliteux  passe  à 
la  protogyne  ;  le  granité  du  Paramo  de  Pata  grande  et  de 
Nunaguacu,  stratifié  et  dépourvu  d'amphibole;  la  roche  de 
Yanta,  stratifiée  comme  le  granité  de  l'Ochsenkopf  en  Fran- 
conie,  se  cachant  sous  le  micaschiste  de  Gualtaquillo  et 
d'Aipata-,  et  renfermant  des  cristaux  disséminés  d'amphibole, 
sans  passer  à  la  vraie  syénite  (  Cordillères  de  Gueringa ,  à 
l'ouest  de  Guancabamba).  On  voit  par  ces  exemples  que, 
dans  les  Andes  comme  dans  les  Alpes,  surtout  à  des  hauteurs 
considérables,  une  roche  granitique  couvre  le  gneis  primitif. 
On  se  demande  si  les  griinstein  primitifs,  qui  forment  des  cou- 
ches dans  les  formations  (§.5,5,6,7,  renferment  quelque- 
fois, comme  le  prétendent  plusieurs  géognostes,  non-seule- 
ment de  l'amphibole  mêlé  au  feldspath  compacte,  mais  aussi 
du  pyroxène.  M.  de  Charpentier  a  vu  cette  dernière  subs- 
tance en  grandes  masses  dans  le  calcaire  primitif  des  Pyrénées. 
Il  y  a  aussi  du  pyroxène-coccolithe  dans  l'urgrilnstein  du  lac 
Champlain  ;  je  n'ai  vu  de  véritables  pyroxénes  identiques  avec 
ceux  des  trachytes  et  de  quelques  porphyres  de  transition 
de  Quito  que  dans  les  griinstein  et  mandelstein  de  transition 
de  Parapara  (montagnes  de  Venezuela). 

SvÉMTE     PRIMITIVE  ? 

§.  8.  La  plupart  dessyénites  de  l'ancien  et  du  nouveau  con- 
tinent, que  Ion  considéroit  autrefois  comme  des  roches  indé- 
pendantes et  de  formation  primitive,  sont  ou  des  granités  avec 
amphibole,  c'est-à-dire  des  couches  subordonnées  aux  granités 
§§.  7  et  1 1  (Syène,  non  Philae,  ou  les  premières  cataractes 
mêmes  delà  Haute-Egypte,  qui  sont  dans  le  gneis  ;  Aturès  ou 
cataractes  de  l'Orénoque;  vallée  de  Macara  et  Gualtaquillo, 
à  la  pente  orientale  des  Andes  du  Pérou),  ou  des  formations 
de  transition  (Mont  Sinaï,  d'après  les  intéressantes  observa- 
tions de  M.  Rozière  ;  vallée  de  Plauen ,  piès  de  Dresde; 
Guanaxuato,  au  Mexique),  intimement  lices  aux  porphyres, 
au  griinstein  et  au  thonschiefer  de  transition.  Quelques  véri- 
tables syénites  ne  me  paroissent  cependant  offrir  aucune  trace 


IND  12* 

de  cette  liaison;  elles  constituent  peut-être  des  formations 
primitives  indépendantes  :  telles  sont  la  syénite  (beaucoup  de 
leidspath  lamellaire  rougeàtre,  peu  d'amphibole,  presque  pas 
de  quarz,  pas  de  mica,  pas  de  fer  titane)  du  CerroMunchique 
(Cordillère  centrale  des  Andes  du  Popayan ,  à  l'est  de  la 
métairie  duCascabel),  superposée  au  gneis,  et  en  partie  (?) 
recouverte  de  micaschiste  primitif;  la  syénite  du  Paranio  de 
Yamoca  (pente  orientale  des  Andes  du  Pérou,  près  des  vil- 
lages indiens  de  Colascy  et  de  Chontaly),  placée  sur  le  gra- 
nité de  Zaulaca  et  recouverte  par  le  schiste  du  lac  de  Haca- 
tacumba.  Comme  ce  schiste,  à  son  tour,  supporte  un  porphyre 
vert  de  transition  ,  et  que  ce  porphyre  supporte  un  calcaire 
gris-noiràtre ,  mais  coquillier  (San-Felipe,  province  de  Jaen 
de  Bracamoros) ,  il  reste  très-douteux  si  la  syénite  de  Yamoca 
et  le  schiste  de  Hacatacumba  ne  sont  pas  aussi  des  roches  de 
transition,  et  par  conséquent  plus  neuves  que  les  syénites  du 
Cei-ro  Munchique  dans  les  Andes  de  Popayan.  Les  syénites 
composées  de  feldspath  blanc  et  d'amphibole  vert  du  pied 
du  Mont-Blanc  (Cormayeux),  et  les  syénites  de  Biela,  liées  à 
des  euphotides,  sont -elles  primitives? 

Serpentine  primitive  ? 

§.  g.  Les  grandes  formations  d'euphotide  (gabbro  ou  roches 
serpentineuses)  sont  postérieures  au  thonschiefej- primitif ,  et 
appartiennent  en  partie  déjà  aux  roches  de  transition.  La 
petite  formation  que  nous  désignons  ici,  est  analogue  à  celle 
de  Zœblitz  en  Saxe  :  elle  repose  sur  du  gneis  et  n'est  recouverte 
par  aucune  autre  roche.  Dans  l'Amérique  méridionale  la 
serpentine  (sans  diallage  métalloïde,  mais  avec  grenats)  des 
montagnes  de  l'Higuerote  (  près  San-Pédro  ,  entre  la  ville  de 
Caracas  et  les  vallées d'Aragua)  paroit  analogue  à  celle  de  Saxe. 
Elle  repose  sur  le  gneis  talqueux  de  Buenavista ,  qui  passe  , 
ce  qui  est  assez  rare  dans  ces  contrées,  à  un  micaschiste  gre- 
natifère.  Cependant,  comme  on  ne  voit  aucune  roche  su- 
perposée à  ces  serpentines,  leur  âge  reste  un  peu  douteux. 
Ce  qui  me  paroît  prouver  l'ancienneté  des  serpentines  de 
i'Higvierote ,  c'est  qu'avant  de  paroitre  comme  formation 
particulière  et  indépendante,  elles  se  montrent  comme  des 
couches  subordonnées  au  gneis- micaschiste ,  à  peu  près 
comme  les  serpentines  de  la  vallée  d'Aoste. 


126  IKD 

Calcaire  primitif. 
§.  lo.  Existe-t-il  une  formation  indépendante  de  calcaire 
grenu  parmi  les  roches  primitives  P  Ou  tous  ces  calcaires  gre- 
nus, comme  on  l'a  admis  assez  généralement  jusqu'ici,  ne 
sont-ils  que  des  bancs  subordonnés  au  gneis,  au  micaschiste, 
aux  granités  de  nouvelle  formation,  et  au  thonschiefer?  Dans 
les  Pyrénées  (vallée  de  Vicdessos)  M.  de  Charpentier  regarde 
le  calcaire  grenu  ,  quelquefois  noirâtre  et  mêlé  de  graphite, 
et  renfermant  de  grandes  masses  de  pyroxène  (Iherzolite, 
augitfels)  et  des  couches  degriiustein,  comme  une  formation 
étendue  et  indépendante.  Cette  autorité  est  sans  doute  de 
beaucoup  de  poids.  Au  sud  de  l'équateur,  sur  le  plateau  do 
Quito  (au  Cebollar  et  aux  bords  du  Rio  Machangara ,  près 
Cuença;  Portete,  dans  le  Llano  de  Tarqui),  on  trouve  placé 
sur  le  micaschiste  (de  Guasunto  et  du  Canar)  un  calcaire 
blanc,  à  gros  grain  ,  ressemblant  au  plus  beau  marbre  de 
Carare ,  et  alternant  avec  des  couches  calcairçs  presque 
compactes,  rubanées  et  tellement  translucides  qu'on  s'en  sert 
dans  les  couvens  et  les  chapelles  en  guise  de  glaces  pour  le,s 
fenêtres.  J'ai  regardé  long-temps  ce  calcaire  grenu  de  Cuença , 
dépourvu  de  pétrifications,  comme  une  formation  primitive 
et  indépendante  ;  mais  il  n'est  couvert  que  de  grès  rouge 
de  Nabon,  et  une  formation  très -analogue  (Tolonta  près 
de  Chillo),  placée  avi  milieu  d'un  terrain  de  trachytes  et  de 
porphyres  de  transition ,  rend  très-douteux  l'âge  de  la  for- 
mation de  Cuença.  Les  bancs  de  calcaires  primitifs,  subor- 
donnés aux  roches  de  granite-gneis  ,  sont  beaucoup  plus  rares 
dans  l'Amérique  équinoxiale  que  dans  les  Pyrénées  et  les 
Alpes.  En  examinant  avec  s  in  les  granités -gneis  de  la 
Parime,  entre  les  2.*  et  8.^  degrés  de  latitude  boréale,  je 
n'ai  pas  vu  un  seul  de  ces  bancs. 

m.  Micaschiste  primitif. 
§.11.  Le  micaschiste  (schiste  micacé,  glimmerschiefer) 
repose  le  plus  souvent  sur  le  gneis,  d'autres  fois  immédiate- 
ment sur  le  granité  (§.  1  ),  avec  lequel  il  commence  d'abord 
à  alterner  (Schnéeberg,  en  Saxe;  Minas  Geraes,  au  Brésil) 
avant  de  se  montrer  comme  une  formation  indépendante. 
Il  se  distingue  du  gneis,  lorsque  les  deux  roches  sont  nette- 


IND  127 

ment  tranchées  (ce  qui  est  bien  plus  rare  dans  la  haute 
chaîne  des  Alpes  et  des  Cordillères  du  Pérou  que  dans  ks 
plaines),  par  l'agrégation  du  mica,  qui,  dans  le  micaschiste, 
ofifre  une  surface  continue.  De  toutes  les  formations  primi- 
tives c'est  celle  qui,  dans  l'Europe  centrale,  est  la  plus  dé- 
veloppée ,  et  qiii  présente  la  plus  grande  variété  de  bancs 
subordonnés;  l'hétérogénéité  des  couches  augmente  à  mesure 
que  l'on  s'éloigne  du  granité.  Les  micaschistes  des  Pyrénées, 
que  l'on  considère  comme  bien  décidément  primitifs,  ren- 
ferment souvent  de  la  chiastolithe,  et  cette  substance  pénètre 
quelquefois  jusque  dans  les  bancs  de  thonschiefer  et  de  cal- 
caire grenu  intercalés.  Couches  subordonnées  au  micaschiste: 
schiste  chloritique  (chloritschiefer  avec  grenats);  mélange 
entrelacé  de  micaschiste  et  de  calcaire  grenu  (Spliigen,  entre 
Claris  et  Chiavenna  ;  pic  de  Midi  deT.^rbes,  dans  les  Pyré- 
nées) ;  thonschiefer;  calcaire  grenu  et  doloniie  avec  trémclite 
(grammatite) ,  épidote,  talc,  tourmaline,  lépidolithe ,  am- 
phibole, fer  magnétique  et  corindon  ;  calcaire  grenu  ren- 
fermant du  quarz  (Pyrénées);  dolomie  mêlée  de  gypse  pri- 
mitif (passage  du  Spltigen  dans  les  Alpes)  ;  quarz  schistoide 
et  micacé  ,  gestellstein  ;  griinstein  et  griinsteinschiefer  ,  dia- 
base  grenue  et  schisteuse  (Montaîïa  de  Avila,  Cabo  blanco 
près  Caracas)  ;  feldspath  compacte  vert -noirâtre  (dichtcr 
griinstein);  pierre  ollaire ,  topfstein  (Ursern);  schiste  tal- 
queux  (talkschiefer)  avec  grenats,  cyanite,  tourmaline  et 
actinote;  serpentine  pure  (SiUthal  dans  le  Tyrol)  ;  serpen- 
tine mêlée  de  calcaire  grenu  ,  «verde  antico  (montagnes  de 
Caramanie;  Reichenstein,  Rôrsdorf  et Rothzeche,  enSilésie); 
schiste  amphibolique  (Saint-Pierre,  au  sud  du  grand  Saint- 
Bernard)  ;  amphibole  commune  en  grandes  masses  (Schonberg, 
en  Tyrol);  syénite  (Mittelwald,  dans  le  Tyrol);  couches  de 
grenat  avec  fer  oxidulé  (Braunsberg  près  Freiberg,  Fraucn- 
berg  près  Ehrenfriedrichsdorf ,  en  Saxe  )  ;  grenat  avec  py- 
roxène-omphacite  et  amphibole  (  Gefrees  et  Schwarzenbach  , 
pays  de  Bareuth  ;  Saualpe  en  Carinthie);  grenat  actinote 
et  cyanite;  fluate  de  chaux  (Meffersdorf)  ;  bancs  de  mica- 
schiste renfermant  des  masses  de  gneis,  peut-être  d'une  for- 
mation contemporaine  (TofQe  ,  en  JNorwége  j  ;  bancs  de  plu- 
sieurs pieds  d'épaisseur,  composés  d'uu  mélange  intime  de 


128  IND 

feldspath  compacte,  de  quarz  et  de  imca  (Kiiliislad  près 
Drontheim,  en  Norwége);  micaschiste  avec  mica  noir  et 
carburé  (Sneehattan,  en  Norwége;  Huffiner,  dans  le  Va- 
lais). Je  ne  cite  pas  le  gypse  du  Val  Canaria  près  d'Airolo, 
que  nous  avons  cru  ,  M.  Freiesleben  et  moi ,  en  1796  ,  être 
de  formation  primitive  intercalée  au  micaschiste,  mais  que 
MM.  Brochant  et  Beudant  (qui  les  ont  étudiés  tous  deux  sépa- 
rément avec  soin  )  ont  reconnu  pour  un  gypse  de  transition  su- 
perposé au  micaschiste.  Le  micaschiste  renferme  souvent  de 
l'amphibole  disséminé  dans  toute  sa  masse  (Salzbourg;  Saint- 
Gothard  ;  Oberwiesenthal  en  Saxe  ;  Sommerleiten  prés 
Bareulh).  Les  émeraudes  de  Sabara,  dans  la  Haute -Egypte, 
retrouvées  par  l'intrépide  voyageur  M.  Cailliaud ,  et  celles 
de  Salzbourg,  sont  enchâssées  dans  la  masse  du  micaschiste 
même,  comme  le  sont ,  dans  les  deux  continens,  le  grenat, 
la  slaurotide  (  Saïnt-Gothard  ;  Sierra  Nevada  de  Merida)  et 
la  cyanite  (îles  Shetland  ;  Maniquarez,  au  nord  de  Cumana). 
Les  émeraudes  de  Muzo  ,  dans  la  Nouvelle-Grenade,  m'ont 
paru  former  une  couche  dans  un  hornblendschiefer  qui  est 
subordonné  au  micaschiste.  Si  l'on  ne  considère  les  forma- 
tions que  sous  le  rapport  de  leur  volume  et  de  leur  masse  ,  on 
doit  admettre  que  le  micaschiste ,  dans  les  chaînes  des  monta- 
gnes de  l'Europe,  joue  un  rôle  presque  aussi  important  que  le 
font,  au  Mexique  et  dans  les  Andes  de  Quito  et  du  Pérou,  les 
porphyres  de  transition  et  les  trachytes.  Les  masses  continues 
de  micaschiste  les  plus  considérables  que  j'aie  vues  dans  l'Amé- 
rique équinoxiale,  sont  celles  de  la  Cordillère  du  littoral  de 
Venezuela,  où  le  granite-gneis  domine  depuis  le  cap  Codera 
jusqu'à  la  Punta-Tucacas  (à  l'ouest  de  Portocabello)  ,  tandis 
que  la  même  Cordillère  est  composée  de  micaschiste  et  même 
d'un  micaschiste  grenatifère  vers  l'est,  dans  les  montagnes  du 
Macanao  de  l'île  de  la  Marguerite  et  dans  toute  la  péninsule 
d'Araya.  A  l'ouest  de  Chuparipari,  cette  dernière  roche 
offre  de  petites  couches  de  quarz  avec  cyanite  et  titane  rutile. 
Prés  de  Caracas  le  calcaire  grenu  forme  des  couches  ,  noa 
dans  le  micaschiste,  mais  dans  legneis;  au  contraire,  dans 
les  montagnes  du  Tuy,  c'est  un  micaschiste  passant  (comme 
dans  la  vallée  de  Capaya  )  au  schiste  talqueux,  qui  renferme 
des  bancs   de  calcaire  primitif  et  de   petites    couches  de 


IND  129 

^ekhenschlefer  (  anipéllte  graphique).  Au  sud  de  l'Oré- 
noque,  dans  le  groupe  des  montagnes  de  laParime,  sur  180 
ïieues  de  longueur,  je  n'ai  pas  a'u  de  véritable  micaschiste 
superposé  au  granite-gncis.  Cette  dernière  formation  semble 
seule  couvrir  cette  vaste  contrée;  mais  le  gneis  y  passe  quel- 
quefois au  micaschiste  :  il  rend  rcsplendissans,  au  lever  et 
au  coucher  du  soleil,  les  flancs  de  plusieurs  montagnes  éle- 
vées (  pic  Calitamini ,  Cerro  Ucucuamo ,  entre  les  sources 
de  l'Essequebo  et  du  Rio-Branco)  ,  et  a  contribué  par  là  au 
mythe  du  Dorado  et  des  richesses  de  la  Guyane  espagnole. 
Dans  les  Cordillères  des  Andes,  la  formation  indépendante 
de  micaschiste  m'a  paru  moins  rare  au  nord  qu'au  sud  de 
l'équateur.  Au  Nevado  de  Quindiu  (Nouvelle- Grenade) 
elle  atteint  une  épaisseur  de  plus  de  600  toises.  En  avançant 
de  là  par  Quito  et  Loxa  vers  les  Andes  du  Férau  ,  on  voit  sortir 
le  micaschiste  sous  les  trachytes  et  porphyres  de  transition  de 
Popayan  (au  sud  des  volcans  de  Sotara  et  de  Puracè);  plus 
loin  cette  roche  reste  visible  sur  diïférens  points ,  depuis  l'Alto 
del  Roble  (arête  qui  partage  les  eaux  entre  l'océan  Paci- 
fique et  la  mer  des  Antilles)  jusqu'à  la  vallée  de  Quilquasè  ; 
elle  se  cache  de  nouveau  par  intervalles  sous  des  porphyres 
trachytiques  ,  à  base  de  phonolithe,  et  reparoît  plusieurs  fois, 
par  exemple,  entre  Almaguer  et  le  Rio  Yacanacatu,  entre 
Voisaco  et  le  volcan  de  Pasto ,  entre  Gansce  et  le  volcan  de 
Tunguragua,  entre  Guamote  et  Ticsan  près  d'AIausi  (où  le 
micaschiste  offre  une  immense  couche  de  quarz  renfermant 
du  soufre,  et  une  autre  couche  (?)  de  gypse  primitif),  entre 
Guasunto  etPopallacta  ;  entre  le  Canar  etBurgay ,  à  la  partie 
méridionale  du  groupe  trachytique  de  l'Assuay;  enfin,  entre 
Loxa  et  Gon^anama.  C'est  près  de  ce  dernier  lieu  que,  dans 
le  ravin  de  Vinayacu ,  on  trouve  une  couche  de  graphite  la- 
mellaire dans  un  micaschiste  qui  est  certainement  primitif. 
En  descendant  de  Loxa  par  le  Paramo  de  Yanioca,  vers 
i'Amazone  ,  entre  les  4°  et  les  5'/,°  de  latitude  australe, 
un  granité  de  seconde  formation  est  recouvert  de  micaschiste 
dans  la  vallée  dePomahuaca;  mais,  en  général,  dans  cette 
partie  des  Cordillères  ce  n'est  pas  le  micaschiste,  mais  la  syé- 
îiite  et  le  thonschiefer  primitifs  qui  ont  pris  un  grand  dévc- 
ioppement ,  partout  où  le  sol  n'est  pas  couvert  de  porphyres 
23.  5 


i3o  IND 

et  de  trachytes.  Dans  la  Nouvelle -Espagne,  le  micaschiste 
abonde  (mines  d'or  de  Rio  San-Antonio)  dans  la  province 
d'Oaxaca  :  mais  plus  au  nord  (16 —  i8°lat.  bor.  ),  sur  la  pente 
orienlale  des  Cordillères  entre  Acapulco  et  Sumpango  ,  le 
granité  n'est  pas  même  recouvert  de  gneis  ;  il  l'est  immédiate- 
ment de  calcaire  alpin  (Alto  del  Peregrino)  et  de  porphyres 
de  transition  [la  Moxonera,  Acaguisofla).  Cependant  un  mica- 
schiste, dépourvu  de  grenats  et  passant  quelquefois  au  thon- 
schiefer,  se  montre  dans  les  riches  mines  de  Tehuilotepec  et 
de  Tasco  (entre  Chilpansingo  et  Mexico)  sous  le  calcaire 
ûlj)in.  Des  filons  d'argent  rouge  pénètrent  de  l'une  de  ces 
roches  dans  l'autre,  malgré  la  grande  distance  qu'on  doit 
admettre  entre  l'âge  de  leur  formation.  Je  ne  connois  dans 
les  Andes  aucun  exemple  d'une  couche  de  porphyre  dans 
le  micaschiste,  ou  d'un  passage  de  cette  dernière  roche  à 
une  ro  he  porphyroïde  ;  passage  qui,  selon  l'importante 
observation  de  M.  de  Buch,  a  lieu  dans  les  Alpes  duSpliigen, 
entre  le  village  de  ce  nom  et  la  vallée  de  Schams.  Les 
terrains  primitifs  dans  lesquels  abonde  le  micaschiste ,  sont 
ceux  qui  offrent  aux  oryctognostes  la  plus  grande  variété  de 
substances  cristallisées.  Ces  roches  ,  si  abondantes  en  po- 
tasse,  rivalisent  sous  ce  rapport  avec  les  mandelstein  (amyg- 
daloïdes)  de  transition  et  plusieurs  roches  volcaniques.  11  est 
très-rare  que  l'on  observe  dans  la  nature  un  développement 
à  peu  près  égal  des  trois  formations  de  gneis,  de  micaschiste  et 
de  ihonschicfer .  et  lorsque  ce  développement  a  eu  lieu  ,  c'est 
plutôt  dans  des  mcmtagnes  de  peu  d'élévation  et  là  oîi  elles 
se  perdent  vers  les  plaines,  que  dans  les  hautes  chaînes  des 
Andes,  des  Alpes,  des  Pyrénées  et  de  la  Norwége.  Nulle 
part,  peut-être,  la  suppression  totale  des  formations  micacées 
ou  schisteuses  n'est  plus  fréquente  que  dans  les  Cordillères  du 
Mexique  et  de  l'Amérique  méridionale.  On  y  voit  la  série  des 
roches  primitives  s'arrêter  brusquement,  soit  au  granile- 
gneis  et  à  uut'  syér.ite  que  je  crois  primitive,  soit  au  gneis- 
micaschiste.  Ce  pliénomère  a  même  lieu  là  oîi  il  y  a  (Cor- 
dillère de  la  Paruiie)  absence  de  trachytes  et  de  tout  phé- 
nomène volcanique. 


IND  -.01 

Granité  POSTÉRIEUR  AU  Micaschiste,  antérieur  au Thonschiefer. 

§.  12.  Un  granité  de  nouvelle  formation  reposant  sur  le 
micaschiste,  auquel  il  appartient  géognostiquement  (Saint- 
Gothard,  dans  les  Alpes;  Reichenstein,  en  Silésie).  Souvent 
il  est  stratifié  (Hogholm,  en  Norwége,  selon  M.  de  Buch  j 
Maifriedersdorf  et  Striegau  en  Silésie,  selon  M.  Schulze)^ 
renferme  des  grenats  et  de  rauiphibole  ,  et  passe  à  une  roche 
^yénitique  à  très-gros  grains.  Le  quarz  y  est  remarquable  par 
sa  grande  transparence,  le  feldspath  par  la  grandeur  de  ses 
cristaux.  Ce  granité  est  parfois  sléatiteux  ;  il  indique  le 
retour  des  roches  schisteuses  aux  roches  grenues  et  cristal- 
lisées. Le  granité  de  Mitteiwald ,  au  nord  de  Brixen  (  pas- 
sage des  Alpes  du  Brenner),  repose  sur  une  syénite  primi- 
tive qui  alterne  plusieurs  fois  avec  le  micaschiste.  Le  granité 
à  topazes  du  Schneckenstein  ,  en  Saxe,  que  Ton  a  consi- 
déré long -temps  comme  une  roche  ou  terrain  particulier 
(topasfels),  n'est  probablement  qu'un  amas  transversal  dans 
le  micaschiste.  Je  suppose  Texistencc  d'une  formation  de  gra- 
nité analogue  à  celle  du  Saint-Gothard  (c'est-à-dire  postérieure 
aux  micaschistes)  dans  les  Andes  du  Baraguan,  de  Quindiu 
et  d'Hervéo  ,  où  plusieurs  granités  modernes  viennent  au  Jour 
sur  la  crête  des  Cordillères,  supportant  des  pics  de  trachytes^ 
Est-ce  à  cette  même  formation  qu'appartiennent  le  granité 
de  Krieglach  enStyrie,  dans  lequel  la  lasulithe  (blauspath) 
remplace  le  feldspath  commun ,  et  la  roche  intéressante  du 
Carnatic,  dont  nous  devons  la  eonnoissance  à  M.  le  comte 
de  Bournon  ?  Cette  dernière  est  composée  d'indianite  ,  de 
feldspath  et  de  corindon  (avec  grenats,  épidote  et  fibroiife)» 

Gneis  postérieur  au  Micaschiste. 
§..  i3.  Une  petite  formation  de  gneis  grenatifère ,  observée 
par  M.  de  Buch.  Elle  couvre  le  micaschiste  (  Bergen ,  Clas- 
sness  et  Klowen  ,  en  Norwége)  ,  et  renferme  des  bancs  subor- 
donnés de  calcaire  grenu  et  même  de  micaschiste.  Celte  for- 
mation se  retrouve  dans  les  Pyrénées. 

GrUnstein-Schiefer  ? 

§.  14.  La  diabase  schistoïde  (griinstein-schiefer)  est  placée 
entre  1^   gneis   et  le    thonschiefer   primitif  (  SiebejuIeiiJî  ^ 


rj2  IND 

Rosenthai),  ou  entre  le  micaschiste  et  le  thonsc]ilefcr  pri- 
mitif (Gersdorf  et  Rosswein,  en  Saxe);  elle  renferme  des 
filons  argentifères  très-anciens.  On  trouve  aussi  le  griinstein- 
schiefer  comme  banc  subordonné  au  micaschiste.  C'est  une 
formation  de  feldspath  compacte,  dont  Tindépendance  me 
paroît  assez  douteuse. 

IV.  Thonschiefer  primitif. 

§.  )5.  Schiste  primitif  (schiste  argileux,  phyllade,  urthon- 
schiefer),  moins  carburé  et  généralement  à  couleurs  moins 
foncées  que  le  thonschiefer  de  transition.  Lorsqu'il  passe  au 
micaschiste,  le  mica  est  fendu  en  grandes  lames,  tandis  que 
le  mica,  en  petites  paillettes  isolées,  caractérise  le  thonschiefer 
de  transition.  Bancs  subordonnés  :  calcaire  grenu  bleuâtre  ; 
porphyre;  chlorite  schisteuse  aA^ec  grenats  et  spliène  dissé- 
minés; micaschiste  (  Klein-Kieivig,  en  Norvi^ége);  griinstein, 
mais  beaucoup  plus  rare  que  dans  le  thonschiefer  de  transi- 
tion ;  griinstein-schiefer  ;  quarz  avec  épidote  ;  un  mélange  de 
diallage  et  de  feldspath.  Les  bancs  subordonnés  au  thonschiefer 
primitif  sont  moins  fréquens  que  ceux  du  micaschiste,  roche 
dans  laquelle  l'hétérogénéité  des  couches ,  l'abondance  et  la. 
variété  des  substances  cristallisées  ont  atteint  leur  maximum, 
en  passant  du  granité  primitif  aux  roches  de  transition. 
Lorsqu'on  considère  en  grand  la  différence  des  thonschiefer 
primitifs  et  des  thonschiefer  de  transition ,  on  peut  indi- 
quer pour  les  premiers  plusieurs  caractères  négatifs  très- 
importans  ,  tels  que  l'absence  des  nœuds  ou  bancs  subor- 
donnés de  calcaire  compacte,  l'absence  de  chiastolithe  dissé- 
minée dans  la  masse,  de  feuillets  de  thonschiefer  luisans  et 
fortement  chargés  de  carbone  ;  enfin  ,  l'absence  de  couches 
fréquentes  de  griinstein  (en  boules),  d'ampélite  alumineuse 
et  graphique  (alaun-  und  zeichenschiefer) ,  de  pierre  ly- 
dienne et  de  kieselschiefer  :  mais  il  ne  faut  point  oublier 
que  ces  caractères  généraux  souffrent  des  exceptions  par- 
tielles ,  dont  le  géognoste  expérimenté  est  d'autant  moins 
surpris,  que  le  thonschiefer  de  transition  succède  souvent 
immédiatement,  selon  l'âge  relatif  des  formations,  au  thon- 
schiefer primitif.  On  trouve,  dans  le  dernier,  de  la  chiasto- 
lithe, aux  sommets  des  Py|énées  et  près  de  Kielvig  en  Nor- 


IND  i33 

v/ége.  M.  de  Raumer  y  a  vu ,  en  Silësie  (Rohrsdorf,  Nieder- 
Kunzendorf),  à  la  ibis  des  bancs  subordonnés  de  porphyre  à 
base  feldspathique,  de  gneis-micaschiste,  de  calcaire  grenu, 
d'ampélite  et  de  pierre  lydienne.  Dans  l'Amérique  équinoxiale 
(chaîne  du  littoral  de  Venezuela,  isthme  d'Araya ,  Cerro  de 
Chupariparu),  j'ai  observé,  dans  un  thonschiefer  qui  passe  au 
micaschiste  primitif  et  cyanilifère  sur  lequel  il  repose,  à  la  fois 
des  couches  de  titane-rutile  et  d'ampélite  luisante,  traversées 
par  de  petits  filons  d'alun  natif.  Il  est  quelquefois  très-diffi- 
cile d'indiquer  avec  précision  ,  où  cessent  les  thonschiefer 
primitifs  ,  où  commencent  ceux  de  transition.  Les  schistes 
blcu-noiràtre  de  Piedras  Azules  (entre  Villa  de  Cura  et  Pa- 
rapara),  à  l'ancien  rivage  boréal  des  Llanos  ou  steppes  de 
Venezuela),  ceux  de  Guanaxuato ,  au  Mexique,  dont  les 
strates  inférieurs  passent  au  schiste  talqueux  et  chlariteux 
(talk-  et  chloritschiefer)  ,  tandis  que  les  strates  supérieurs 
sont  chargés  de  carbone  et  enchâssent  des  bancs  de  syénite 
serpentineuse,  se  trouvent  sur  cette  limite  de  deux  ter- 
rains contigus.  Il  n'est  guères  douteux  que  dans  les  deux 
continens  la  plus  grande  masse  de  schistes  ne  soient  des  schistes 
de  transition;  mais  en  Amérique  ,  surtout  dans  la  région  équi- 
noxiale, on  est  moins  frappé  de  cette  différence  que  de  la 
rareté  absolue  de  tous  les  thonschiefer,  en  les  comparant 
aux  gneis-micaschistes.  Le  thonschiefer  paroît  manquer  en- 
tièrement dans  la  Cordillère  de  la  Parime,  à  travers  laquelle 
l'Orénoque  s'est  frayé  un  chemin  :  dans  les  Andes ,  comme 
dans  les  Pyrénées  ,  il  n'occupe  que  des  terrains  de  peu 
d'étendue.  Je  l'ai  trouvé  au  nord  de  l'équateur,  suppor- 
tant les  formations  secondaires  du  plateau  de  Santa -Fé  de 
Bogota  ,  entre  Villeta  et  Mave  ;  au  sud  de  l'équateur , 
placé  sur  les  micaschistes  du  Condorasto,  et  servant  de  base 
aux  porphyres  de  transition  de  l'Alto  de  Pilches  ,  entre 
San-Luis  et  Pomallacta  (Andes  de  Quito)  ;  sous  la  pierre 
calcaire  alpine  de  Hualgayoc ,  venant  au  jour  à  2000  toises 
de  hauteur,  dans  le  Paramo  de  Yanaguanga  (crête  des  j\ndes 
du  Pérou);  superposé  immédiatement  à  du  granité  ancien, 
entre  les  villages  indiens  de  San-Diego  et  de  Cascas  (pente 
occidentale  des  Andes  du  Pérou).  J'ignore  si  le  thonschiefer 
recouvrant   une    syénite    qui   appartient   au    granité ,    aux 


iU  IND 

bords  du  lac  de  Haratacumba  et  au  Paramo  de  Yamoca 
(pente  orientale  des  Andes  du  Pérou,  province  de  Jaen  de 
JBracamoros)  ,  est  véritablement  de  formation  primitive.  Les 
passages  insensibles  que  l'on  observe  quelquelois  entre  les 
granités,  les  gneis,  les  micaschistes  et  les  thonscliiefer,  et 
qui  trouvent  leurs  analogues  dans  les  passages  des  syénitcs 
et  des  serpentines  aux  griinstein  de  transition  ,  ont  fait 
croire  à  plusieurs  géognostes  que  ces  quatre  formations  n'en 
sont  qu'une  seule.  On  voit  en  efïet  de  vastes  étendues  de 
pays  dans  lesquelles  le  gneis  oscille  perpétuellement  entre  le 
granité  et  le  micaschiste,  le  micaschiste  entre  le  gneis  et  le 
thonschiefer  ;  mais  ce  phénomène  n'est  aucunement  général, 
îl  faut  distinguer  dans  les  deux  hémisphères,  \.°  des  terrains 
où  ces  passages  insensibles  ,  ces  oscillations  entre  des  roches 
voisines,  ont  lieu  fréquemment  et  d'une  manière  irrégu- 
lière; 2."  des  terrains  où  des  strates  distincts  de  granité  et 
de  gneis,  de  gneis  et  de  micaschiste,  alternent  et  constituent 
des  formations  complexes  de  granité  et  gneis,  de  gneis  et  mi- 
caschiste; 5."  des  terrains  où  les  formations  simples  de  gra- 
nité, gneis,  micaschiste  et  thonschiefer  sont  superposées  sans 
alternance  (avec  ou  sans  passage  au  point  du  contact  mutuel). 
Ce  dernier  cas  n'exclut  point,  dans  le  gneis,  par  exemple, 
les  couches  de  granité  qui  rappellent  les  roches  de  dessous, 
ni  les  couches  de  micaschiste,  qui  annoncent,  pour  ainsi 
dire,  d'avance  les  roches  qui  se  trouveront  superposées. 

Nous  ferons  suivre  au  thonschiefer  quatre  formations  pa- 
rallèles .- 

Roche  de  Qdarz,  Porphyre  PRiMrriF  ? 

Granit e-Gneis  postérieur  au       Euphotide  primitive. 
Thonschiefer. 

La  première  de  ces  formations  est  très-peu  connue  en  Eu- 
rope ;  la  troisième  paroit  douteuse  comme  formation  indé- 
pendante. 

Roche  de  quarz  (avec  masses  de  fer  ouciste  métalloïde). 

§.  \G,  C'est  la  grande  formation  qui  embrasse  l'Itacolumite  , 
ou  quarz  élastique  chloriteux  (gelenkquarz,  biegsamer  sand- 
etein,  chloritquarz  )  de  M.  d'Eschwege,  et  des  couches  de  fer 


Ii\D  i35 

oHgiste  micacé  et  spéculaire.  Au  sud  de  l'équateur,  dans 
les  montagnes  du  Brésil  et  dans  les  Cordillères  des  Andes, 
on  trouve  des  masses  de  quarz  ,  tantôt  entièrement  pur  , 
tantôt  mêlé  de  talc  et  de  chlorite  ,  qui  ,  par  Ténorme 
épaisseur  de  leurs  couches  et  par  l'étendue  qu'elles  occu- 
pent,  méritent  l'attention  des  géognostes.  Ces  roches  de 
quarz  m'ont  paru  offrir  plusieurs  formations  d'une  ancien- 
neté relative  très- différente.  Dans  l'Amérique  méridionale, 
les  unes  sont  liées  à  un  thonschiefer  qui  est  décidément 
primitif;  les  autres,  bien  plus  difficiles  à  saisir  dans  leurs 
rapports  de  superposition,  sont  placées  entre  les  porphyres 
de  transition  et  le  calcaire  alpin;  elles  remplacent  quelque- 
fois le  grès  rouge.  Nous  ne  parlerons  ici  que  des  premières, 
en  séparant  les  formations  dont  le  gisement  est  exactement 
connu,  de  celles  qui  offrent  plus  d'incertitude.  Sur  le  pla- 
teau de  Minas- Geraes  près  de  Villa -Rica  (selon  les  belles 
observations  de  M.  d'Eschwege  ,  directeur  général  des  mines 
du  Brésil),  un  micaschiste  qui  renferme  des  bancs  de  cal- 
caire grenu,  est  recouvert  d'un  thonschiefer  primitif.  Sur 
cette  dernière  roche  repose,  en  stratification  concordante , 
le  quarz  chloriteux  (chloritquarz)  qui  constitue  la  masse  du 
Pic  d'itacolumi,  à  looo  toises  de  hauteur  au-dessus  du  ni- 
veau de  la  mer.  Cette  formation  quarzeuse  renferme  des 
couches  alternantes,  i.°  de  quarz  aurifère  blanc,  ouverdàtre, 
ou  rubané,  mêlé  de  talc-chlorite  et  offrant  des  strates  de  quarz 
flexible,  que  l'on  a  faussem.ent  attribuées  jusqu'ici  à  l'hyalo- 
micte  (greisen),  ou  à  des  couches  de  quarz  dans  le  micaschiste; 
2.°  de  chlorite  schisteuse;  5.°  de  quarz  aurifère,  mêlé  de 
tourmaline  (schcirlschiefer  de  Freiesleben)  ;  /|.°  de  fer  oligiste 
métalloïde,  mêlé  de  quarz  aurifère  (goldhaltiger  eisenglim- 
merschiefer).  Les  couches  de  quarz  chloriteux  ont  jusqu'à 
looo  pieds  d'épaisseur.  Toute  cette  formation  est  couverte 
d'une  brèche  ferrugineuse  extrêmement  aurifère.  C'est  à  la 
destruction  des  couches  que  nous  venons  de  nommer,  et  qui 
sont  liées  géognostiquernent  les  unesauxautres,  que  M.  d'Esch- 
vvege  croit  pouvoir  attribuer  les  terrains  de  lavage  qui  ren- 
ferment à  la  fois  l'or,  le  platine  ,  le  palladium  et  les  diamans 
(Corrcgo  das  Lagens),  l'or  et  les  diamans  (Tejuco),  le  pla- 
tine et  les  diamans  (Rio  Abaete).  Le  chloritschiefer  décom- 


i5G  IND 

posé ,  dont  on  tire  les  topazes  et  les  eiiclasps  du  Brésil,  appar- 
tient à  cette  même  formation.  Quelquefois ,  dans  les  mon- 
tagnes deMinas-Geraes  ,  la  roche  de  quarz  est  d'une  structure 
plus  simple.  Sans  être  composée  de  couches  alternantes,  elle 
n'offre  qu'une  seule  masse  de  quarz  entrelacé  avec  du  fer 
spéculaire  granulaire  ou  dense  (dichter  eisenglanz  ;  fer  oli- 
giste  non  lamellaire,  non  micacé).  Cette  masse  a  jusqu'à 
1800  pieds  d'épaisseur,  et  ne  contient  pas  d'or  disséminé. 
Elle  est  placée  sur  le  thonschiefer  primitif  qui  recouvre 
immédiatement  le  gneis.  On  peut  dire  que  c'est  cette  for- 
mation peu  connue  de  quarz -Itacolumite  qui  a  fourni,  par 
sa  décomposition  (  par  les  terrains  meubles  auxquels  il  a 
donné  naissance),  dans  les  années  lyôG  —  1764,  annuelle- 
ment près  de  trente  millions  de  francs  en  or.  Elle  succède 
immédiatement  au  thonschiefer;  mais,  d'après  les  observa- 
tions faites  jusqu'ici ,  il  seroit  ditîicile  de  la  considérer  avec  les 
schistes  novaculaires  (cos,  wezschiefer),  qui  sont  gris-verdâ- 
tre  ,  gris  de  fumée  ,  mêlés  de  beaucoup  d'alumine,  comme  des 
couches  subordonnées  au  thonschiefer.  Le  qnarz-ltacolumite^ 
par  une  affinité  oryctognostique  qui  existe  entre  le  talc  et  la 
chlorite,  se  rapproche  du  schiste  talqueux  (talkschiefer),  qui 
abonde,  dans  tous  les  pays,  en  minéraux  bien  cristallisés,  et 
qui,  parla  suppression  des  lames  de  talc,  n'est  quelquefois 
que  du  quarz  pur  :  aussi  le  schiste  talqueux  forme-t-il,  dans 
les  deux  continens,  des  couches  subordonnées  au  thonschiefer 
et  au  micaschiste  primitifs.  J'ai  trouvé  une  formation  ana- 
logue à  celle  de  Minas-Geraes,  mais  dépourvue  de  fer  spé- 
culaire, à  1600  toises  de  hauteur  au-dessus  du  niveau  de  la 
mer,  dans  les  savanes  de  Tiocaxas  (au  sud  du  Chimborazo , 
entre  Guamote  etSan-Luis)  et  à  l'est  du  Paramo  de  Yamoca 
près  de  Hacatacumba  (Andes  de  Quito).  D'énormes  masses 
de  quarz  y  sont  mêlées  à  quelques  feuillets  de  mica,  et  su- 
perposées au  thonschiefer  primitif.  L'indépendance  des  for- 
mations quarzeuses  primitives,  que  nous  indiquons  ici  ,  sera 
mieux  établie  lorsqu'on  les  trouvera  immédiatement  super- 
posées,  non  toujours  à  la  même  roche  (au  thonschiefer), 
mais  à  différentes  roches  plus  anciennes ,  par  exemple  ,  au 
micaschiste,  au  gneis  et  au  granité.  C'est  dans  cette  indé- 
pendance de  gisement  que  s'observe  la  roche  de  quarz  de 


IND  i37 

Contumaza,  que  je  crois  secondaire  :  elle  recouvre  d'abord 
le  porphyre,   puis   (près  de  Cascas)  le   même   granité  qui 
forme  les  côtes  de   la  Mer  du  Sud  dans  le  Bas-Ptrou.  Une 
observation  très-imporfante  ,   que  M.  de  Buch  a  faite  dans 
le  nord   de  la  péninsule  Scandinave,  paroît  justifier  la  place 
que  nous  assignons,  parmi  les  roches  primitives,   a  la  roche 
de  quarz  de  rhémisphère  austral.  Cet  infatigable  voyageur  a 
reconnu  que  ,  dans  la  région  boréale  de  l'ancien  monde  ,  le 
thonschiefer  primitif  est  remplacé  quelquefois  par  une  roche 
de  quarz  que  colore  le  fer.  Cette  roche  de  quarz  et  le  thon- 
schiefer sont  par  conséquent,  en  Norwége,  des  roches  pai-al- 
lèles,  des  équivalens  géognostiques.  11  est  bien  remarquable 
de  voir  le  soufre  ,  l'or,  le  mercure  etle  fer  oligiste  métalloïde, 
liés  dans  l'Amérique  méridionale  à  ces  énormes  amas  de  silice. 
Quel  que  soit  l'intérêt  qu'inspirent  les  métaux  précieux,  on 
ne  sauroit  nier  que  l'abondance  du  soufre  dans  des  terrains 
primitifs   est,  sous  le  rapport  de  l'étude  des  volcans  et  des 
roches  à  travers  lesquelles  le  fau  souterrain  s'est  frayé  son 
chemin,  un  phénomène  bien  plus  important  que  l'abondance 
de  l'or.  Un  peu  au  sud  des  hautes  savanes  de  Tiocaxas  et  de 
Guamote  (Cordillères  de  Quito),  où  nous  venons  de  désigner 
la  formation,  peut-être  indépendante,  de  quarz  superposé  au 
thonschiefer,   j'ai  examiné  la  célèbre  montagne  de  soufre  de 
Ticsan,  qui  est  une  couche  de  quarz  (direction  N.  1 8°  E.  ;  incli- 
naison 70  —  80°  au  NO.;  épaisseur  de  la  couche,   200  toises; 
hauteur  au-dessus  du  niveau  de  la  mer,   i25o  toises)  dans  le 
micaschiste.  Au  Brésil,  la  formation  de  quarz  chloriteux  (Itaco- 
lumite),  superposée  au  thonschiefer  primitif,  renferme  non- 
seulement  de  l'or,  mais  aussi  du  soufre.  Des  plaques  de  cette 
Toche  ,  fortement  chauffées  ,  brûlent  avec  une  flamme  bleue. 
Un  thonschiefer  du  même  âge  que  celui  sur  lequel  est  super- 
posé le  quarz  chloriteux,  renferme  (Serra  do  Frio ,  près  de 
S.  Antonio  Pereira)   un  banc  de   calcaire  primitif  mêlé  de 
masses  de  soufre  natif.  L'or  etle  soufre  se  trouvent  aussi  (Andes 
de  Caxamarca,  au  Pérou,  entre  Curimayo  et  Alto  delïual), 
sur  la  limite  des  porphyres  de  transition  et  des  calcaires  al- 
pins, dans  des  masses  puissantes  de  quarz  qui  sont  parallèles 
au  grès  rouge.  C'est  à  ces  mêmes  roches  de  quarz  ,  ou  plutôt  à 
des  formations  plus  neuves  encore  ,   qu'appartient  le  grand 


i38  I]XD 

dépôt  (qiiarzflcUz)  ue  mercure  sulfure  de  Guancavelica,  tan- 
dis que  le  iiitrcure  de  Cueiiça  (partie  niéj-idionale  du 
royaume  de  Quito  ) ,  de  mtiue  que  celui  du  duché  de  Deux- 
ponts  ,  appartient  au  grès  rouge.  Ces  notions  sutKscnt  pour 
répandre  quelque  jour  sur  les  couches  puissantes  de  quarz 
que  nous  UAoris  obscr\ées,  M.  d'Eschwege  et  moi,  dans 
l'hémisphère  austral,  et  qu'on  ne  peut  guère  appeler  des 
grès  quarzeux.  Ces  roches  semblent  passer  ,  comme  les  for- 
mations calcaires,  à  travers  les  riitférens  terrains  primitifs , 
intermédiaires  et  secondaires.  Plusieurs  géognostes  célèbres 
ont  déjà  tenté  d'introduire  des  roches  de  quarz,  comme 
formations  indépendantes ,  dans  le  type  général  des  terrains. 
Le  qtiarzgebirge  de  Werner  est  primitif  et  repose  sur  du  gneis 
(Frauenstein,  Oberschônau  ,  en  Saxe),  dont  peut-être  il  a 
été  jadis  recouvert.  Des  couches  qui  appartiennent  essentiel- 
lement à  une  formation  ,  se  trouvent  quelquefois  à  la  limite 
supérieure  et  inférieure  de  cette  formation  (exemples: 
schiste  bitumineux  sous  le  zechslein  ou  calcaire  alpin  ;  gypse 
au-dessus  du  zechstein  ;  kieselschiefer ,  pierre  lydienne  ou 
ampélite,  au-dessus  du  thonschiefer  de  transition  et  dans  cette 
roche).  Les  petites  masses  de  quarz  primitif  observées  sur  la 
crête  des  montagnes  de  l'Europe  ne  peuvent  être  comparées, 
pour  leur  puissance  et  leur  étendue  ,  aux  roches  de  quarz 
primitives  des  Andes  et  du  Brésil.  Le  granular-quarzroch 
(avec  feldspath)  des  Hébrides  de  M.  Jameson ,  les  roches 
quarzeuses  et  chlorileuses  antérieures  au  grauwacke  et  liées 
au  grès  rouge  { priwary  red  sandstone)  de  M.  MacuUoch  , 
offrent  quelques  traits  d'analogie  géognostique  avec  les 
masses  quarzeuses  de  l'Amérique  équinoxiale;  mais  elles  sont 
beaucoup  plus  mélangées  (moins  simples  de  structure), 
et  pourroient  bien  ,  d'après  les  discussions  intéressantes  de 
M.  Boue,  appartenir  à  d'anciennes  roches  de  transition.  Le 
trappsandstein  ou  quarzfels  secondaire  de  quelques  géognostes 
allemands  entoure  les  basaltes,  et  est,  à  n'en  pas  douter, 
d'un  âge  beaucoup  plus  récent  que  la  formation  de  quarz  en 
masse  (extrêmement  pur ,  non  mélangé  et  non  agrégé  )  qui, 
placé  entre  le  porphyre  de  transition  et  le  calcaire  alpin, 
atteint,  d'après  mes  observations  à  la  pente  occidentale  des 
Andes  du  Pérou  (Contumaza,  Namas),  l'énorme  épaisseur 
de  6000  pieds. 


IND  i3s 

Granité  et  Gkeis  postérieur  au  Thonschiefer. 

§.  17.  Une  formation  de  granité  à  petits  grains,  passant 
quelquefois  à  un  gneis  grenatifère  et  alternant  avec  lui. 
Cette  formation  intéressante  (Kielvig,  à  l'extrémité  septen- 
trionale delà  Norwége  ,  et  îles  Shetland)  repose,  selon  M. 
de  Buch ,  sur  le  thonschiefer  primitif.  Elle  renferme  de 
l'amphibole  et  du  diallage  ;  elle  manifeste  par  là  son  affinité 
avec  une  des  formations  suivantes.  On  pourroit  désigner  les 
formations  de  granité  (§§.  4,  7,  12  et  17)  par  les  noms  de 
granité  du  weisstein  ,  du  gneis,  du  micaschiste  et  du  thon- 
schiefer ;  mais  ces  dénominations  feroient  croire  que  ces 
petites  formations  sont  nécessairement  dans  le  weisstein , 
dans  le  gneis  ,  dans  le  micaschiste  et  dans  le  thonschiefer  • 
elles  se  trouvent  simplement  superposées  aux  roches  dont 
elles  paroissent  dépendre.  La  présence  de  l'étain,  du  fer 
magnétique  (p),  de  l'amphibole,  de  la  diallage,  du  grenat, 
du  talc  et  de  la  chlorite  remplaçant  le  mica,  comme  la  ten- 
dance de  passer  à  la  pegmatite  (schriftgranit),  caractérisent 
les  granités  de  nouvelle  formation. 

Porphyre  primitif  P 

§.  18.  Existe-t-il  une  formation  primitive  et  indépendante 
de  porphyre?  Il  ne  peut  être  question  ici,  ni  des  porphyres 
qui  se  trouvent  comme  des  bancs  subordonnés  dans  d'autres 
roches  primitives  (§§.  5  et  i5  ) ,  ni  de  ces  gneis  et  micaschistes 
des  hautes  Alpes  qui  deviennent  grenus  et  prennent,  par 
l'isolement  des  cristaux  de  feldspath,  un  aspect  porphyroïde. 
J'hésite  de  placer  parmi  les  roches  primitives  les  porphyres 
de  Saxe  et  de  Silésie  (duché  de  Schweidnitz) ,  quoique  les 
premiers  recouvrent  immédiatement  le  gneis  (entre  Frei- 
berg  et  Tharandt  ).  Ils  sont  quelquefois  traversés  par  des 
filons  d'étain  (  Altenberg)  et  des  minerais  d'argent  (Grund). 
Les  porphyres  de  Silésie  renferment  de  famphibole  dissé- 
miné (Friediand  )  :  on  les  a  crus  jusqu'ici  plus  anciens 
que  le  thonschiefer  primitif.  11  est  certain  que  les  porphyres 
de  Saxe  sont  en  partie  des  porphyres  de  transition  ,  en 
partie  des  porphyres  de  grès  rouge.  Dans  les  Cordillères  des 
Andes   du    Pérou,    de   Quito,    de   la   Nouvelle -Grenade   et 


ï^4o  IND 

du  Mexique  ,  parmi  cette  innombrable  variété  de  roches 
porphyriques  dont  les  niasses  atteignent  ^Soo  à  Sooo  toises 
d'épaisseur,  je  n'ai  pas  vu  un  seul  porphyre  qui  me  parût 
décidément  primitif.  L,a  formation  la  plus  ancienne  que  j'aie 
observée ,  se  trouve  dans  la  vallée  profonde  de  la  Magdalena 
(entre  Guamhos  etTruxillo,  au  Pérou)  :  c'est  un  porphyre  à 
base  argileuse,  un  peu  décomposée,  avec  feldspath  commun, 
non  vitreux,  sans  amphibole,  mais  aussi  sans  quarz.  Cette 
formation,  qui  paroit  distincte  de  tous  les  porphyres  de 
transition  et  trachytiques  de  Quito  et  de  la  crête  des  Andes 
du  Pérou,  vient  au  jour  à  600  toises  de  hauteur  au-dessus 
du  niveau  de  la  mer;  elle  est  placée  immédiatement  sur  le 
granité,  et  recouverte,  à  la  pente  occidentale  des  Andes  , 
d'une  roche  de  quarz  secondaire,  à  la  pente  orientale  (vrai- 
semblablement) de  grés  rouge. 

V.     EUPHOTIDE    PRIMITIVE    POSTERIEURE    AU    ThONSCHIEFER. 

§.  39.  Une  formation  placée  à  la  limite  des  formations 
primitives  et  de  transition.  C'est  le  Gabbro  de  M.  de  Buch  ; 
l'Euphotide  de  M.  Haiiy;  le  Schillerfds  de  M.  de  Raumer; 
rOphiolithe  de  M.  Brongniart.  Cette  roche  a  été  désignée 
jadis  sous  les  noms  de  serpentinite,  granité  serpentineux  , 
granité  de  diallage,  granitone,  granito  di  gabbro,  granito  dell' 
împruneta  ,  serpentinartiger  urgriinstein.  Nous  la  caractéri- 
sons ici  telle  que  M.  de  Buch  l'a  circonscrite  le  premier.  Elle 
se  trouve  superposée  (cap  Nord  de  File  Mageroe  ,  en'Norwége) 
à  un  schiste  primitif,  qui  passe  vers  le  haut  a  l'euphotide ,  vers 
le  bas  au  micaschiste.  L'euphotide  du  Val  Sesia  recouvre  aussi , 
selon  M.  Bcudant,  immédiatement  le  micaschiste  primitif.  On 
peut  dire  qu'en  général  l'euphotide  ou  gabbro  est  un  mélange 
de  diallage  (sinaragdife),  de  jade  (saussurite,  feldspath  tenace) 
et  defel.ispath  lainelleux.  Quelquefois  (Bergen,  enNorwége) 
le  jade  manque  entièrement;  mais  dans  le  verde  di  Corsica 
(Stazzona,  au  nord  de  Corte  et  S.  Pietro  di  Rostino  dans  l'Ile 
de  Corse)  l'euphotide  n'est  qu'un  mélange  de  jade  voisin  du 
feldspath  compacte,  et  de  diallage  verte  sans  feldspath  lamel- 
leux.  Quoique,  d'après  les  intéressantes  observations  rappor- 
tées par  M.  Haiiy  dans  son  Tableau  comparatif,  les  diallages 
métalloïdes  (schillerspath  )  vertes,  à  reflets  satinés,   et  les. 


IND  141 

(Hallages  grises  passent  progressivement  (roches  du  Musinet 
près  de  Turin)  les  unes  aux  autres,  on  peut  pourtant  distin- 
guer ces  substances  par  les  caractères  géognostiques  qu'elles 
offrent  le  plus  fréquemment  en  grand.  L'euphotide  à  diallage 
grise  est  beaucoup  plus  fréquente  (un  peu  plus  ancienne  ?) 
que  l'euphotide  à  diallage  verte.  La  serpentine  e^-^t  presque 
toujours  dans  une  liaison  de  gisement  intime  avec  l'eupho- 
tide, dont  elle  ne  semble  être  qu'une  variélé  à  très -petits 
grains,  d'apparence  homogène.  Cette  liaison  se  manifeste 
aussi  en  Hongrie  (Dobscliau),  où  M.  Beudant  a  trouvé  l'eu- 
photide grenue  et  schisteuse  immédiatement  superposée  au 
micaschiste  primitif.  La  soude,  d'après  les  travaux  de  Théo- 
dore de  Saussure  et  de  Klaprofh  ,  s'observe  parmi  les  roches 
primitives  dans  le  feldspath  compacte  du  weisstein  et  du 
griinsteinschiefer,  dans  le  jade  des  euphotides,  et  dans  la  la- 
zulrte  (outre-mer)  du  Baldakschan.  Cette  dernière  substance 
paroît  appartenir  à  une  couche  de  calcaire  primitif  intercalée 
au  granité -gneis.  Bancs  subordonnés  à  l'euphotide  :  serpen- 
tine avec  asbeste  et  diallage  métalloïde;  serpentine  accom- 
pagnée de  chrysoprase,  opale  et  calcédoine  (  Kosemitz,  eu 
Silésie  )  ;  calcaire  grisâtre  compacte  ,  passant  au  calcaire  à 
petits  grains  (Alten  ,  en  Norwége).  Ce  calcaire  rapproche 
l'euphotide  de  la  Scandinavie,  qui  est  le  dernier  membre 
des  formations  primitives,  du  terrain  des  roches  intermédiaires 
très-anciennes.  Comme  l'euphotide  n'est  souvent  pas  recou- 
verte, et  que  la  superposition  d'une  roche  sur  une  autre 
très -ancienne  ne  nous  éclaire  pas  sur  l'époque  de  sa  for- 
mation ,  il  reste  des  doutes  sur  l'âge  relatif  de  beaucoup 
d'euphotides.  M.  de  Buch  a  vu  celle  du  Haut-Valais  (Saas, 
Mont-More)  placée  au-dessus  du  micaschiste;  celle  deSestri , 
au  nord  du  golfe  delà  Spezzia ,  sous  le  thonschiefer  (de  trai;^ 
sitionp)  de  l.avagna.  M.  de  Raumer,  dans  son  excellent  ou- 
vrage sur  la  Silésie  inférieure,  place  le  schillerfels  du  Zofcten- 
berg  parmi  les  formations  primitives;  M.  Keferstein  y  rancç 
l'euphotide  du  Harz  (entre  Neustadtet  Oderkrug),  qui  reu- 
ferme  du  titane  ferrifère  (  nigrine  )  disséminé.  Je  pense  ausd 
que  les  serpentines  du  Heideberg  près  de  Zell ,  et  celles  auc 
l'on  trouve  entre  Wurlitz  etKotzau,  où  elles  renfernient  du 
pyroxène-diopside ,  sont  très-anciennes.  Toutes  ces  serpent'ujç^ 


î42  IND 

des  montagnes  de  liareuth  m'ont  paru  intimement  liées  an 
schiste  amphiboliquc  (  hornblendschiefer)  et  au  schiste  chlo- 
riteux  (chloritschiefer).  Elles  offrent  des  propriétés  magné- 
tiques très-remarquables,  que  jai  fait  connoitre  en  1796,  et 
qui  depuis  ont  été  l'objet  des  recherches  plus  exactes  de  MM. 
Goldfuss,  Bischof  et  Schneider.  En  jetant  un  coup  d'œil  gé- 
néral sur  les  euphotides  des  deux  continens,  on  ne  sauroit 
se  refuser  d'admettre  plusieurs  formations,  d'un  âge  relatif 
assez  distinct.  Les  euphotides  que  j'ai  observées  à  l'île  de 
Cuba,  àGuanaxuato,  au  Mexique,  et  à  l'entrée  des Llanos de 
Venezuela  ,  sont  liées  soit  à  la  syénite  soit  au  calcaire  noir ,  et 
me  semblent  bien  décidément  des  euphotides  de  transition  , 
de  même  que  l'euphotide  (serpentine  stratifiée  en  couches 
assez  minces  :  direct.  N.  62°  E.  ;  incl.  70°  au  NO.  ;  épais- 
seur 10  toises)  de  la  cime  de  la  Bochetta  de  Gênes,  que  j'ai 
observée  en  1795  et  i8o5,  et  qui  est  intercalée  à  un  thon- 
schiefer  de  transition  qui  alterne  avec  du  calcaire  noir.  Les 
ei'photides  de  la  Spezzia ,  de  Prato  et  de  tout  le  Siennois, 
que  MM.  de  Buch  et  Brocchi  considèrent  comme  de  formation 
primitive  ou  de  formation  de  transition  très-ancienne,  pa- 
roissent  à  M.  Brongniart ,  qui  les  a  récemment  examinées 
avec  beaucoup  de  soin,  appartenir  aux  formations  secon- 
daires, ou  tout  au  plus  aux  formations  de  transition  les  plus 
récentes.  Les  géognostes  célèbres  que  je  viens  de  nommer, 
sont  assez  d'accord  sur  le  gisement  immédiat  de  ces  eupho- 
tides de  l'Italie  ,  c'est-à-dire  sur  la  détermination  oryctognos- 
lique  des  roches  qui  se  trouvent  au-dessous  et  au-dessus  de 
l'euphotide  ;  mais  ils  diffèrent  sur  l'âge  de  formation  que 
l'on  doit  assigner  géognosliquement  à  ces  roches  en  contact 
avec  l'euphotide.  C'est  ainsi  qu'en  géographie  on  connoît 
quelquefois  avec  précision  le  gisement  d'un  ilôt ,  par  rapport 
aux  lies  voisines;  tandis  que  la  longitude  absolue  de  tout 
l'archipel ,  sa  plus  grande  proximité  de  l'ancien  ou  du  nou- 
veau continent ,  restent  encore  incertaines. 

Terrains  de  transition. 

Le  terrain  de  transition  réunit,  d'après  M.  Wcruer ,   des 
roches  qui  offrent  dans  leur  composition  beaucoup  d'analogie 


IND  145 

avec  celles  des  terrains  primitifs,  mais  qui  alternent  avec  des 
roches  fragmentaires  ou  arcnacées  (élastiques,  agrégées  ;  roches 
de  transport).  Quelques  débris  de  corps  organiques  (des  em- 
preintes de  roseaux  ,  de  palmiers  et  de  fougères  arborescentes; 
des  madrépores,  pentacrinites,  orthocératites,  trilobites  , 
hystérolithes,  etc.)  y  paroissent  de  préférence,  je  ne  dirai 
pas  dans  les  roches  supérieures,  ou  les  moins  anciennes  de 
cet  ordre,  mais  en  général  dans  les  roches  non  feldspafhi- 
ques  et  dont  la  masse  ne  ])résenle  pas  un  aspect  très-cristallin. 
Ce  sont  surtout  les  belles  observations  de  MM.  de  Buch  et  Bro- 
chant qui  ont  étendu  les  limites  des  terrains  de  transition. 
Ces  limites  sont  plus  faciles  à  fixer  vers  le  haut,  où  com- 
mencent les  terrains  secondaires,  que  vers  le  bas,  oîi  finissent 
les  terrains  primitifs.  J'ai  rappelé  ailleurs  comment,  par  les 
micaschistes  anthraciteux  et  les  thonschiefer  verts  ,  les  roches 
de  transition  se  lient  aux  roches  primitives;  comment,  par 
les  porphyres  à  feldspath  vitreux,  elles  se  lient  aux  terrains 
volcaniques,  et  par  les  grauwackes  à  petits  grains  et  les  por- 
phyres abondant  en  cristaux  de  quarz,  an  grès  rouge  et  aux 
porphyres  des  terrains  secondaires.  Dans  les  régions  les  plus 
éloignées  les  unes  des  autres,  des  roches  analogues,  des  thon- 
schiefer talqueux,  cà  feuillets  fortement  contournés,  chargés 
de  carbone,  renfermant  de  l'ampélile  (alaunschiefer)  et  de 
la  pierre  lydienne  ;  des  calcaires  noirs  alternant  avec  le  thon- 
schiefer, des  grauwackes,  des  porphyres  et  des  syénites  mé- 
langés de  fer  titane  ,  se  trouvent  placés  entre  des  roches 
primitives,  c'est-à-dire  entièrement  dépourvues  de  traces 
d'organisation  et  de  masses  arénacées,  et  la  grande  formation 
de  houilles;  mais  la  succession  des  roches  homonynes  de  tran- 
sition varie  même  là  où  elles  semblent  toutes  également  dé- 
veloppées. Le  plus  grand  nombre  des  formations  de  ce  terrain 
sont  composées  de  deux  ou  trois  roches  alternantes  (calcaire 
noir  compacte  ,  griinstein  et  thonschiefer;  grauwacke  et  por- 
phyre; calcaire  grenu,  grauwacke  et  micaschiste  anthraciteux); 
et  comme  des  membres  partiels  des  groupes  ou  formations 
d'une  structure  si  compliquée  passent  d'un  groupe  à  l'autre, 
d'excellens  observateurs  ,  MM.  de  Raumer ,  d'Engelhardt  et 
Bonnard ,  ont  été  tellement  frappés  de  ce  phénomène  de 
connexité   et  d'alternance,    qu'ils  ne    reconnoissent  dans  la 


ï44  IND 

classe  entière  qu'une  seule  grande  famille  de  roches.  Si  Tort 
examine  les  formations  de  transition  d'après  leur  structure 
et  leur  composition  oryctognostique ,  on  y  distingue  cinq 
associations  très-marquées  :  les  roches  schisteuses;  les  roches 
porphyritiques  (feldspathiques  ou  syénitiques)  ;  les  roches 
calcaires  grenues  et  compactes  ,  avec  gypse  anhydre  et  sel 
gemme;  les  roches  d'euphotide  ,  et  les  roches  agrégées  (grau- 
wacke  et  brèches  calcaires).  Sur  quelques  points  du  globe  un 
seul  de  ces  groupes  ou  de  ces  associations  de  roches  cristallisées 
et  non  cristallisées  a  pris  un  développement  si  extraordi- 
naire ,  que  les  autres  groupes  paroissent  presque  entière- 
rement  supprimés.  C'est  ainsi  que  dominent  dans  les  Cor- 
dillères du  Mexique  et  de  Quito  ,  comme  en  Hongrie  et  dans 
plusieurs  parties  de  la  Norwége  ,  les  porphyres  et  les  syé- 
nites  de  transition;  dans  la  Tarantaise,  les  calcaires  grenus  et 
lalqueux  ;  dans  quelques  régions  des  Alpes  et  de  laBochetta, 
les  calcaires  noirs  presque  compactes  ou  à  très-petits  grains; 
enfin,  au  Harz  et  sur  les  bords  du  Rhin,  les  grauwackes  et 
thonschiefer  de  transition  :  mais  cette  épaisseur  et  cette 
étendue  qu'acquièrent  les  masses  minérales ,  ne  doivent  pas 
guider  le  géognoste  lorsqu'il  discute  l'âge  relatif  des  formations 
partielles.  Une  extrême  variété  de  gisement  ne  s'observe  pas 
seulement  dans  les  petites  formations;  aussi  les  grandes  for- 
mations homonymes  très-développées  ne  peuvent  guère  être 
envisagées  comme  contemporaines ,  c'est-à-dire  qu'elles  n'of- 
rent  pas  le  même  gisement  par  rapport  aux  autres  termes  de  la 
série  des  roches  intermédiaires.  Les  porphyres  de  Guanaxuato , 
par  exemple  ,  sont  superposés  à  un  thonschiefer  stéatiteux  et 
chargé  de  carbone  ;  ceux  de  la  Hongrie  ,  à  un  micaschiste  tal- 
queux  de  transition  renfermant  des  bancs  de  calcaire  gris-noi- 
ràtre.  Les  porphyres  des  Andes  de  Quito  (et  des  îles  Britan- 
niques?) recouvrent  immédiatement  des  roches  primitives, 
et  sont  par  conséquent  antérieurs  à  toute  roche  calcaire  qui 
renferme  des  vestiges  de  corps  organisés  :  au  contraire,  les 
porphyres  et  syénites  zirconiennes  de  Norwége,  comme  proba- 
blement aussi  les  porphyres  du  Caucase,  si  bien  observés  par 
MM.  d'Engelhardt  et  Parrot,  succèdent,  selon  l'âge  de  leur 
formation,  au  calcaire  remplid'orthocératites.  Les  plus  grande» 
liasses  de  grauwacke  (alternant  avec  le  grauwackenschiefer) 


IND  145 

se  sont  développées  sans  doute  au  milieu  des  schistes  de  tranr 
sition  les  plus  anciens  ;  mais  on  trouve  aussi  des  bancs  de 
grauwacke  très-puissans,  d'une  origine  beaucoup  plus  récente. 
En  général,  les  cinq  groupes  de  roches  que  nous  venons  de 
distinguer  d'après  des  rapports  de  composition  ou  des  ca- 
ractères oryctognostiques  ,  ne  conservent  pas  partout  la 
même  place  dans  la  série  des  formations  intermédiaires;  ils 
ne  se  trouvent  guère  séparés  dans  la  nature  comme  dans  une 
classification  oryctognostique  des  roches.  On  observe  que 
les  thonschiefer  et  les  calcaires  noirs,  les  thonschiefer  et  les 
porphyres,  les  thonschiefer  et  les  grauwackes,  les  porphyres 
et  les  syénites  ,  les  calcaires  grenus  et  les  micaschistes  an- 
thraciteux ,  forment  des  associations  géognostiques  dans  les 
contrées  les  plus  éloignées  les  unes  des  autres.  C'est  la  cons- 
tance de  ces  associations  binaires  ou  ternaires  qui  caractérise 
les  terrains  de  transition,  bien  plus  que  l'analogie  qu'offre 
dans  chaque  groupe  la  succession  des  roches  homonymes. 

En  discutant  les  terrains  primitifs  011  les  formations  sont 
plus  simples,  plus  tranchées,  sujettes  à  des  alternances  moins 
fréquentes,  j'ai  pu  essayer  d'énumérer  séparément  les  gra- 
nités qui  succèdent  aux  gneis ,  les  gneis  qui  succèdent  aux 
micaschistes.  11  y  a  des  granités  et  des  gneis  primitifs  de  dif- 
férens  âges ,  comme  dans  les  terrains  de  transition  il  y  a  des 
grauwackes  ou  des  calcaires  noirs,  semblables  de  composi- 
tion, mais  très-éloignés  les  uns  des  autres,  selon  leur  an- 
cienneté relative.  Si  dans  ces  derniers  terrains  le  géognoste 
ne  tente  pas  de  nommer  séparément  les  différentes  couches 
de  grauwacke  ou  de  calcaire,  c'est  parce  que  ces  couches, 
isolément,  n'ont  pas  de  valeur  comme  termes  de  la  série  des 
roches  intermédiaires;  elles  n'en  ont  qu'autant  qu'elles  font 
partie  de  certains  groupes.  Or,  ce  sont  ces  groupes  mêmes, 
ces  associations  constantes  de  thonschiefer  ,  griinstein  et 
grauwacke,  de  calcaire  stéatiteux  et  grau^vacke ,  de  por- 
phyre et  grauwacke,  etc. ,  qui  sont  les  véritables  termes  de 
la  série.  11  en  résulte  que,  d'après  les  principes  que  nous 
suivons  dans  l'arrangement  des  formations,  on  doiténumérer 
séparément  non  des  masses  isolées  de  calcaire,  de  grauwacke 
et  de  porphyre,  qui  se  mêlent  entre  elles  ou  à  d'autres 
roches,  mais  des  groupes  entiers  et  bien  caractérisés,  ceux, 
^3.  10 


146  IND 

par  exemple,  dans  lesquels  dominent  les  grauwackes  et  les 
thonschiefer  ,  ou  les  porphyres  et  les  syénites.  Parmi  ces  der-, 
niers  les  uns  sont  postérieurs ,  les  autres  antérieurs  à  des 
roches  qui  renferment  des  débris  d'êtres  organisés.  Dans  les 
terrains  primitifs  les  termes  de  la  série  sont  généralement 
simples;  dans  les  terrains  de  transition  ils  sont  tous  complexes, 
et  c'est  de  cette  complexité  même  que  naît  la  difliculté  d'étu- 
dier, par  assises,  un  édifice  dont  on  saisit  avec  peine 
l'ordonnance  au  milieu  de  l'entassement  de  tant  de  maté- 
riaux semblables.  Pour  justifier  l'ordre  que  j'assigne  aux 
dififérens  terrains  de  transition  ,  je  commencerai  par  présenter 
dans  le  tableau  suivant  la  succession  des  formations  (  en  com- 
mençant par  les  plus  anciennes)  qui  ont  été  observées  dans 
plusieurs  contrées  et  examinées  avec  soin.  Je  n'emploîrai  que 
la  description  oréographique  des  géognostes  habitués  à  suivre 
les  mêmes  principes  dans  la  dénomination  des  roches. 


1.  Andes  de  Quito  et  pd  Pinof. 

Porphyres  de  transition,  non  mé- 
tallifères ,  recouvrant  imnnédiate- 
ment  les  roches  primitives  (granité, 
thonscliiefer). 

Griinstein  en  boules  (  kugelge- 
stein  ). 

Calcaire  noir,  superposé  au  por- 
phyre. 

Je  n'y  ai  pas  vu  de  grauwackc; 
il  est  remplacé,  dans  les  Andes 
de  Quito  et  du  Pérou,  au  sud  de 
réquateur,  parla  grande  formation 
de  porphyre. 

3.    MONTAGKES    DU    MEXIQUE. 

Thonschiefer  de  transition,  char- 
gé de  carbone,  renfermant  des  cou- 
ches de  syénite  et  de  serpentine. 
Les  couches  inférieures  passent  au 
schiste  talqueux  et  reposent  sur  des 
roches  primitives. 

Syénite  alternant  avec  du  griin- 
stein- 


2.  Montagnes  de  Venezuela. 

Schistes  verts  stéatiteux  de  tran- 
sition ,  couvrant  du  gneis-niica- 
schiste  primitif. 

Calcaire  noir. 

Serpentine  et  griinstein  (recou- 
verts d'amygdaloïde  avec  pyroxène). 

C'est  la  suite  de  roches  que  j'ai 
observée  au  bord  septentrional  des 
LIanos  de  Calabozo. 

4.    HOKORIB. 

Micaschiste  de  transition  avec  des 
bancs  de  calcaire  noir  superposé 
à  des  roches  primitives. 

Porphyres  et  syénites  de  transi- 
lion.  Couches  subordonnées  :  mica- 
schiste de  transition;  calcaire  grenu 
blanc  avec  serpentine  ;  masses  de 
griinstein.  Ces  porphyres  sont,  comme 
la  plupart  de  ceux  des  Andes  ,  im- 
médiatement recouverts  par  destr»- 
chytes  syénitiques  blancs  et  noirs- 
(Observations  de  M.  Beudant.) 


IND 


147 


Porphyre  de  transition,  métalli- 
fère, placé  imniédiatenient  sur  le 
thonschiefer  de  transition.  Les  cou- 
ches supérieures  passent  à  la  pho- 
molithe. 

Telle  est  la  série  de  roches  de 
Guanaxuato.  Dans  le  chemin  de 
Mexico  à  Acapulco  j'ai  vu  les  por- 
phyres de  transition  reposer  immé- 
diatement sur  le  granité  primitif. 
Près  de  Totonilco  ces  porphyres  sont 
couverts  de  roches  secondaires,  tels 
que  le  calcaire  alpin,  le  grès  et  le 
gypse  argileux.  Je  n'ose  prononcer 
sur  les  rapports  d^àge  entre  les  cal- 
caires de  transition  des  mines  du 
Doctor  et  de  Zimapan,  et  les  por- 
phyres de  Guanaxuato  et  de  Pachu- 
ca;  mais,  d'après  MM.  Sonneschmidt 
etValencia,  on  voit  suivre  dans  les 
riches  mines  de  Zacatecas  ,  presque 
comme  à  Guanaxuato  ,  de  bas  en 
]\aut  ,  syénite  et  thonschiefer  de 
transition  (avec  griinstein  et  pierre 
lydienne),  grauwacke  ,  porphyre 
non  métallifère. 

5.  Tarahtaise. 

Une  même  formation,  reposant 
immédiatement  sur  le  terrain  pri- 
mitif, renferme  du  calcaire  grc»u 
stéatiteux,  du  micaschiste  avecgneis 
et  du  grauwacke  anthraciteux.  Ces 
différentes  roches  alternent  plu- 
sieurs fois  et  offrent  des  bancs  subor- 
donnés de  serpentine,  de  griinstein  , 
de  quaiz  compacte  et  de  gypse  de 
transition.  (  Observations  de  M. 
Brochant  de  Yilliers.  ) 


6.    SL'isse. 


Dans  le  passage  des  Alpes ,  de 
Chiavenna  à  Glaris  ,  d'après  M.  de 
Buch: 

Thonschiefer  de  transition,  avec 
des  couches  de  calcaire  gris,  repo- 
sant sur  du  thonschiefer  et  du  mi- 
caschiste primitifs. 

Serpentine  avec  grenats. 

Calcaire  noir. 

Grau^vacka. 

Thonschiefer  alternant  avec  da 
calcaire  noir. 

Thonschiefer  avec  empreintes  de 
poissons  (presque  secondaire). 

Dans  les  environs  de  Bex,  d'après 
M.  de  Charpentier  : 

Grauvvacke  superposé  au  gneis 
(primitif  ?  ). 

Calcaire  noir,  renfermant  desbé- 
lemnites,  et  alternant  avec  du  thon- 
schiefer de  transition. 

Calcaire  argileux  de  transition, 
avec  ammonites ,  offrant  des  couches 
subordonnées  de  grauwacke  ^  de 
gypse  anhydre  et  de  sel  gemme. 

M.  de  Buch  ,  d'après  des  observa- 
tions géognos tiques  faites  avant  Tan- 
née 1804,  assignoit  aux  formations 
de  transition  de  la  Suisse  occiden- 
tale,  considérées  sous  un  point  de 
vue  général,  et  en  passant  des  ro- 
ches inférieures  aux  roches  supé- 
rieures, Tordre  suivant: 

Thonschiefer  de  transition.  — « 
Calcaire  noir. —  Muriacite  salifère 
et  gypse.  —  Grauwacke. —  Calcaire 
noir.  —  Thonschiefer,  avec  em" 
preintes  de  poissons. 


148 


IND 


7.  Allemagne. 


Système  de  gisement  en  Saxe, 
entre  Freiberg,  Maxen  et  Meissen  , 
d'après  MM.  de  Raunieret  Bonnard  : 

Thonschiefer  avec  ampélile  et 
pierre  lydienne,  alternant  à  la  fois 
avec  du  grauwacke  ,  du  grUnstein  , 
du  porphyre  et  du  calcaire.  Ce  ter- 
rain repose  sur  le  gneis  primitif. 

Syénite  et  porphyre.    Dans  cette 


formation  ,    qui 


abonde    aussi 


Thiiringerwald,  selon  l'excellente 
description  de  M.  Heim,  se  trouvent 
intercales  du  granité  et  du  gneis  de 
transition. 

Le  Harz  et  l'Allemagne  occiden- 
tale (entre  le  Rhin  et  la  Lahn)  sont 
recouverts  d'une  grande  formation 
de  thonschiefer,  dans  laquelle, 
comme  par  développement  inté- 
rieur, se  montrent  des  masses  de 
grau-wacke  et  grauwackenschiefer , 
de  calcaire  (souvent  d'une  couleur 
peu  foncée),  de  griinstein,  de  quarz 
et  de  porphyre.  Cette  dernière  roche 
■y  est  cependant  plus  rare  que  dans 
la  formation  indépendante  de  syé- 
nite et  porphyre,  que  supporte  dans 
d'autres  contrées  le  thonschiefer  de 
transition. 

11.  Caucase. 

Thonschiefer,  peut-être  déjà  de 
transition. 

Calcaire  noir  avec  anipélite. 

Porphyre  de  transition,  alternant 
avec  le  thonschiefer.  Ce  porphyre  , 
souvent  colonnaire  ,  avec  feldspath 
vitreux , peu  de  quarz  et  peu  de  mica , 
ressemble    dans  les    montagnes  du 


8.    Presqu'île    du  CotertiK   et 
Bretagne. 

Thonschiefer  vert,  luisant,  stéa- 
titeux  (de  transition),  alternant 
quelquefois  avec  du  grauwaclie,avec 
du  calcaire  noir  et  avec  la  roche 
de  quarz. 

Syénite  et  granité. 

Thonschiefer  de  transition  ,  re- 
juvrant  quelquefois  de  nouveau  la 
syénite.  (Observations  de  MM.  Bron- 
gniartet  d'Omalius  d'Halloy.) 

9.    ISLES    BrITARKIQUES. 

Syénite  et  porphyre  de  transition 
reposant  sur  des  roches  primitives. 
(Chaîne  du  Snowdon,  Grampians, 
Ben-!Vevis.) 

Thonschiefer  de  transition  ,  avec 
trilobites,  renfermant  dans  les  cou- 
ches inférieures  un  aglomérat  de 
roches  primitives  ,  semblable  à  celui 
de  la  Valorsine  (  Llandrindod  ,  Kil- 
larney,  cime  du  Snowdon). 

Crauwacke  (May-hiU  et  North- 
Wales  ). 

Calcaire  de  transition  (Longbope, 
Dudley). 

Grauwacke  ,  old  red  sandstone 
(Mitchel  Dean  de  Herefordshire). 

Calcaire  de  transition,  mountain- 
limestone  (  Derbyshire),  recouvert 
par  la  grande  formation  de  houille. 
(Observations  de  M.  Buckland,  qui 
semble  cependant  regarder  la  syé- 
nite et  une  partie  des  porphyres 
comme  primitifs.) 

10.  NorwÉge. 
Gisementdes  roches  prèsde  Chris- 
tiania, d'après  les  observations  de 

M.  de  Buch- 


IND 


'49 


Kasbek  (comme  font  souvent  les 
porphyres  des  sommets  mexicains) 
à  du  trachytc  poreux. 

Gneis,  syénite  elgranile  de  tran- 
sition en  couches  alternantes. 

Thonschiefer  de  transition,  cou- 
vert d'un  calcaire  fétide,  qui  pa- 
voît  secondaire.  (Observations  de 
MM.    d'EngcIhardt  et  Parrot.  ) 


Thonschiefer  de  transition  ,  al- 
ternant avec  du  calcaire  noir,  rem- 
pli d'orthocératites  et  reposant  sur 
du  gneis  primitif. 

Grauwacke  et  kieselschiefer. 

Porphyre  k  cristaux  de  quarz, 
renfermantune  couche  degriinslein 
poreux  avec  pyroxcnc. 

Svénite  à  zircons,  et  granité  de 
transition, avec  couches  deporphyre. 


On  reconnoît,  dans  ces  différens  types  de  superposition  , 
recueillis  en  Europe,  en  Amérique  et  en  Asie,  au  nord  et 
au  sud  del'équateur,  que  parmi  les  plus  anciennes  roches 
de  transition  trois  grandes  formations,  celle  de  calcaire  grenu 
et  talqueux,  grauwacke  avec  anthracite  et  micaschiste,  celle 
de  syénite  et  porphyre  (à  cristaux  d'amphibole  et  très-peu  de 
quarz),  et  celle  de  thonschiefer,  grauwacke  et  calcaire  noir, 
occupent  à  peu  près  le  même  rang  sur  différens  points  du  globe. 
Les  calcaires  micacés  et  poudingues  à  fragincns  de  roches  pri- 
mitives de  la  Taran taise  ;  les  porphyres  et  syénites  du  Pérou  ; 
le  thonschiefer  de  transition  avec  grauwacke  (Harz,  Friedrichs- 
walde  en  Saxe,  Aggerselv  en  JNorwége,  et  Guanaxuato  au 
Mexique),  sont  peut-être  d'une  origine  contemporaine.  En 
rangeant  les  roches  comme  termes  d'une  seule  série  ,  il 
auroit  fallu  peut-être  rappeler  leur  parallélisme  de  la  manière 
suivante  :  II  (I  ou  III).  Je  distingue,  comme  termes  de  la 
série  des  roches  de  transition,  six  groupes  qui  me  paroissent 
bien  caractérisés  par  les  roches  qui  y  dominent ,  par  leur 
gisement  et  par  l'étendue  de  leur  masse.  Ces  groupes  ou 
grandes  formations  sont  :  I.  Calcaire  grenu  stéatiteux,  mica- 
schiste   de    transition    et    grauwacke    à    fragmens    primitifs. 

II.  Porphyre  (non  métallifère)  antérieur  au  calcaire  à  ortho- 
cératites,    au   thonschiefer    et  au   micaschiste  de  transition. 

III.  Thonschiefer  renfermant  des  grauwackes,  des  calcaires, 
des  porphyres  et  des  griinstein.  IV.  Porphyres  et  syénites 
(métallifères)  postérieurs  au  thonschiefer  de  transition,  an- 
térieurs à  un  calcaire  qui  renferme  des  débris  organiques. 
V.  Porphyres,  syénites  et  granités  zirconiens  (non  métalli- 
fères), postérieurs  au  thonschiefer  et  au  calcaire  avec  ortho-^ 


j5o  IND 

cératites.  VI.  Euphotide  de  transition  avec  jaspe  et  serpen- 
tine. Presque  chaque  groupe  est  composé  de  roches  alter- 
nantes, et  plusieurs  de  ces  roches,  qu'on  peut  considérer 
comme  de  petites  formations  partielles  ,  sont  communes  à 
tous  les  groupes.  C'est  cette  communauté,  cette  alternance, 
ce  retour  périodique  des  mêmes  masses,  qui  constituent  l'u- 
nité apparente  de  la  grande  famille  des  terrains  de  transi- 
tion. Cependant  chaque  groupe  a  des  roches  qui  prédominent 
et  qui  lui  donnent  un.  aspect  particulier.  Tels  sont  les  cal- 
caires grenus  et  talqueux  dans  le  premier  groupe:  les  por- 
phyres non  métallifères,  abondant  en  amphibole  et  presque 
dépourvus  de  quarz,  dans  le  second  ;  les  grauwacke  dans  le 
troisième;  les  roches  serpentineuses  dans  le  sixième.  Le  qua- 
trième et  le  cinquième  groupes  sont  caractérisés,  l'un  par  des 
porphyres  et  syénites  métallifères;  l'autre,  par  des  granités 
zirconiens.  Mais  ce  sont  là  des  caractères  en  partie  oryctognos- 
tiques  ;  la  véritable  base  de  la  division  que  nous  proposons  pro- 
visoirement aux  géognosfes,  sont  la  superposition  et  l'âge  rela- 
tif, observés  dans  différentes  parties  du  globe.  Une  partie  des 
porphyres  mexicains  et  péruviens  du  deuxième  et  même  du 
quatrième  groupe  ,  semble  avoir  des  rapports  intimes  avec  les 
trachytes,  qui  sont  les  plus  anciennes  parmi  les  roches  volca- 
niques. 

Avant  de  décrire  en  détail  les  six  grandes  formations  inter- 
médiaires, je  développerai  quelques  considérations  générales 
sur  le  terrain  de  transition  ,  superposé  le  plus  souvent  en 
gisement  concordant  au  terrain  primitif.  La  magnésie;  le  fer 
oxidulé  (magnétique),  qui  offre  des  rapports  géognostiques 
si  frappans  avec  toutes  les  substances  dans  lesquelles  domine 
la  magnésie  ;  le  fer  titane;  le  carbone  et  la  chaux  carbonatée, 
pénètrent  à  travers  la  plupart  des  formations  de  transition. 
M.  Beudant  a  fait  l'observation  importante,  que  les  syénites 
et  porphyres  de  Schemnitz,  de  Plauen  et  de  Guanaxuato  font 
effervescence  avec  les  acides,  tandis  que  les  trachytes  (por- 
phyres trachytiques)  de  la  Hongrie  n'offrent  pas  le  même 
phénomène.  Saussure  et  M.  Brochant  ont  trouvé  effervescens 
des  micaschistes  de  transition  (à  la  Tête-Noire)  et  des  quarz 
compactes  (  dans  la  Tarantaise  ) ,  là  même  où  ces  roches  sont 
très-éloignées  de  bancs  intercalés  de  calcaire  grenu  stéatiteux. 


IND  i5i 

J'ai  vu  dans  les  Cordillères  du  Pérou  (Paramo  de  Yamoca), 
comme  dans  leThiiringervvald-Gebirge  (çntre  Lauenstein  et 
Gràfenthal),  un  thonschiefer  qui  offroit  d'abord  tous  les 
caractères  d'une  roche  primitive ,  mais  qui  peu  à  peu  devenoit 
effervescent ,  et  dont  les  dernières  couches  présentoient  des 
nœuds  épars  de  calcaire  compacte  gris -noirâtre.  La  chaux 
carbonatée,  d'abord  disséminée  dans  la  masse  entière,  se 
concentre  progressivement  pour  donner  à  la  roche  une  struc- 
ture glanduleuse,  pour  former  des  strates  minces  alternans, 
des  bancs  intercalés ,  et  à  la  fin  des  roches  calcaires  grenues 
ou  compactes,  qui  remplacent  le  thonschiefer,  le  micaschiste 
ou  l'euphotide,  au  sein  desquels  elles  se  sont  développées. 
M.  Steffens,  dans  son  Traité  d'Oryctognosie,  a  consigné  des 
remarques  ingénieuses  sur  le  rôle  important  que  le  feldspath 
et  l'amphibole  jouent  dans  les  terrains  primitifs,  dans  les  ter- 
rains intermédiaires  ou  de  transition,  et  dans  le  grès  rouge.  Au 
milieu  du  second  de  ces  terrains  le  feldspath  se  montre 
jusque  dans  le  calcaire  compacte.  On  peut  croire  qu'en 
passant  du  granité  au  thonschiefer ,  par  les  gneis  et  les  mi- 
caschistes ,  cette  substance  reste  cachée  dans  la  pâte  qui 
n'est  qu'homogène  en  apparence  ;  car  nous  voyons  le  thon- 
schiefer de  transition  devenir  quelquefois  du  porphyre , 
comme,  par  d'autres  développemens  intérieurs  ,  par  des  accu-» 
mulations  de  silice  et  de  carbone  ,  et  par  l'agrégation  des  élé- 
mens  de  l'amphibole,  il  devient  du  kieselschiefer,  de  l'an- 
thracite, du  griinstein  et  de  la  syénite.  Dans  les  porphyres 
de  transition  on  distingue  souvent  deux  sortes  de  feldspath , 
le  commun,  et  le  vitreux  à  cristaux  très-effilés  (Andes  du 
Pérou,  vallée  de  Mexico).  Ce  dernier,  qui  est  moins  une 
espèce  minéralogique  qu'un  état  particulier  du  feldspath 
commun  ,  appartient  à  la  fois  aux  terrains  de  transition  et 
aux  véritables  trachytes.  La  présence  fréquente  de  l'amphi- 
bole et  le  manque  de  quarz  cristallisé  distinguent  orycto- 
gnostiquement  beaucoup  de  porphyres  de  transition  de  ceux 
des  terrains  primitifs.  Ces  derniers  ne  sont  peut-être  que  des 
couches  subordonnées  à  d'autres  roches.  L'amphibole,  qui  est 
presque  restreint  aux  bancs  intercalés  dans  le  terrain  primitif, 
n'est  nulle  part  plus  abondant  que  dans  les  terrains  de  transi- 
tion et  dans  les  terrains  trachytiques.  Parmi  les  premiers,  les 


î52  IND 

grîinstein  et  les  syénites  offrent,  par  des  changemens  de  pro- 
portions dans  les  élémens  du  tissu  cristallin,  une  espèce  de 
lutte  entre  le  feldspath  et  l'amphibole.  Lepyroxène,  que 
l'on  croit  trop  exrlusivcment  caractériser  les  trachytes ,  les 
hasaltes  et  les  dolérites,  est  propre  à  plusieurs  porphyres  de 
transition  des  Andes  et  de  la  Hongrie.  On  le  trouve  aussi  dans 
les  couches  huileuses,  noires  et  basaltiques,  de  la  syénite  zirco- 
nienne  de  Norwége.  J'ai  cru  avoir  reconnu  dans  quelques 
porphyres  de  transition  de  l'Amérique  équinoxiale  des  traces 
d'olivine  ;  mais  ce  n'étoient  sans  doute  que  des  variétés  moins 
foncées  et  verdàtres  du  pyroxéne  ,  dont  on  distinguoit  à 
peine  les  sommets  dièdres,  et  dont  je  n'ai  pu  essayer  la  fusi- 
bilité au  chalumeau.  L'olivine  appartient  proprement  aux 
formations  basaltiques,  et  il  est  même  encore  douteux  si 
elle  se  montre  dans  les  trachytes.  La  tendance  fréquente  à 
la  cristallisation,  que  l'on  observe  dans  les  terrains  de  tran- 
sition au  milieu  de  roches  à  sédiment  et  de  roches  agrégées, 
est  un  phénomène  si  extraordinaire,  que  des  géognostes  cé- 
lèbres ont  été  tenté  d'admettre  que  beaucoup  de  ces  roches 
qui  paroissenf  agrégées  (sous  forme  de  brèches  ou  poudingues; 
de  roches  élastiques  et  arénacées  ;  de  grès  de  transition  ou 
d'agglomérats),  bien  loin  de  contenir  des  débris  de  roches 
préexistantes,  ne  sont  que  l'effet  d'une  cristallisation  confuse, 
mais  contemporaine.  Des  masses  que  dans  quelques  strates  on 
a  prises  pour  des  fragmens  anguleux  et  nettement  circons- 
crits, se  fondent  à  peu  de  distance  de  là  dans  la  pâte  même 
de  la  roche;  d'autres  masses,  qui  ressemblent  à  des  cailloux 
roulés,  deviennent  des  nœuds  fortement  adhérens  aux  lames 
contournées  d'un  schiste,  s'alongent  et  s'évanouissent  peu  à 
peu.  Lorsque  Ton  compare  certains  granités  et  porphyres  , 
des  brèches  calcaires,  des  grauwackes  et  des  grès  rouges,  on 
croit  reconnoître  dans  des  roches  d'âge  si  différent,  à  de  cer- 
tains indices  de  structure  ,  le  passage  insensible  d'une  forma- 
tion contemporaine,  d'une  cristallisation  simultanée,  mais 
troublée  par  des  attractions  particulières,  à  une  véritable  agré- 
gation (agglutination)  de  débris  de  roches  préexistantes.  Sous 
toutes  les  zones  il  y  a  des  granités  à  gros  grains  ,  dans  lesquels 
des  masses  à  petits  grains  très-micacés  se  trouvent  concentrées 
çà  et  là  j  et  qui  paroissent ,  au  premier  coup  d'oeil ,  renfermer 


IND  i53 

des  fragmens  d'un  granité  plus  ancien.  Cette  apparence  est  aussi 
trompeuse  que  celles  de  tant  de  porphyres,  d'euphotides  et 
de  calcaires  de  transition,  que  les  antiquaires  et  les  mar- 
briers désignent  sous  le  nom  de  brèches  ou  de  roches  régé- 
nérées. Les  prétendus  fragmens,  souvent  striés  ou  rubanés 
(dans  le  verde  antico  et  les  calcaires  les  plus  recherchés 
comme  ornemens  intérieurs  des  édifices),  ne  sont  vraisem- 
blablement que  des  masses  qui  se  sont  consolidées  les  pre- 
mières dans  un  fluide  fortement  agité.  L'eau  congelée  de  nos 
fleuves,  et  divers  mélanges  de  sels,  dans  nos  laboratoires, 
présentent  des  phénomènes  analogues.  La  manière  dont  les 
fragmens  réunis  ou  anguleux  du  grauwacke,  ceux  des  pou- 
dingues  calcaires  à  pâte  grenue  et  à  fragmens  compactes,  ceux 
de  certains  grès  rouges ,  paroissent  quelquefois  s'évanouir  et 
se  fondre  dans  la  masse  entière  ,  est  bien  plus  difficile  à 
expliquer  dans  l'état  actuel  de  nos  connoissances.  On  ne  peut 
révoquer  en  doute  que  rallernance  fréquente  de  strates  visi- 
blement agrégés  et  de  strates  presque  homogènes  ou  légère- 
ment noduleux,  de  même  que  le  passage  de  ces  masses  les 
unes  dans  les  autres,  ont  été  constatés  par  des  observations 
très-précises  ;  et  M.  deBonnard,  dalisson  Traité  des  terrains, 
a  eu  raison  de  dire  «  que  ce  phénomène  est  un  des  plus  in- 
«  compréhensibles  de  tous  ceux  qui  peuvent  nous  frapper 
«  dans  l'étude  de  la  géognosie.  ^*  Doit-on  admettre,  lorsque 
les  contours  des  fragmens  enchâsses  disparoisseiit  presque  en 
entier,  qu'il  n'y  a  eu  qu'un  très- petit  intervalle  de  temps 
entre  la  solidification  des  fragmens  et  celle  de  la  pâte  ?  Nous 
verrons  plus  tard  que ,  dans  le  grès  rouge ,  des  cristaux  de  feld- 
spath naissent  dans  cette  pâte  même  et  la  rapprochent  du 
porphyre  du  grès  rouge.  (Steffens,  Geognostisch-geolog.  Au/s., 
p.  i3,  16,  23,  3i.  Freiesleben,  Kupfersch. ,  T.  IV,  p.  11 5.) 

î.  Calcaire  grenu  talqueux,  Micaschiste  de  transition, 
ET  Grauwacke  avec  anthracite. 

§.  20.  C'est  un  même  terrain,  une  même  formation,  qui  em- 
brasse différentes  roches  calcaires  ,  schisteuses  et  fragmen- 
taires,  alternant  les  unes  avec  les  autres.  Cette  formation 
n'est  pas  composée  de  trois  roches  isolées  (  comme  l'est  la 
formation  de  porphyre,   de  syénite  et  de  griinstein),  mais 


iH  IND 

de  trois  formations  partielles,  de  trois  séries  ou  systèmes 
de  roches.  Le  type  le  plus  compliqué  de  cet  agroupement 
de  roches  presque  contemporaines  s'est  développé  au  sud-est 
des  Alpes,  dans  la.  vallée  de  l'Isère  ,  où  il  a  été  l'objet  des 
recherches  approfondies  de  M.  Brochant.  Si  presque  tous  les 
termes  de  la  série  des  roches  intermédiaires  sont  complexes, 
ces  termes  ou  grandes  formations  n'en  varient  pas  moins ,  selon 
le  degré  de  cette  complexité,  selon  le  nombre  et  la  nature 
des  masses  alternantes.  Le  terrain  de  la  Tarantaise  (c'est  le 
nom  sous  lequel  nous  désignerons  le  terrain  §.  20)  offre 
dans  sa  structure  et  sa  composition  (  dans  ses  calcaires 
grenus  et  talqueux,  dans  ses  gneis  et  ses  micaschistes)  tel- 
lement l'apparence  d'un  terrain  primitif,  qu'on  ne  reconnoit 
son  âge  relatif  que  par  quelques  débris  de  corps  organiques 
et  par  l'intercalation  fréquente  de  couches  arénacées  (pou- 
dingues,  brèches,  grauwackes).  Aussi,  pendant  long- temps 
les  géognostes,  négligeant  l'observation  de  l'alternance  et  de 
l'unité  de  cette  formation  complexe  ,  ont  placé  les  poudingues 
de  la  Valorsine  parmi  les  roches  primitives ,  et  les  ont  consi- 
dérées comme  un  phénomène  purement  local.  Des  recherches 
qui  embrassent  une  plus  grande  partie  du  globe,  nous  ont  ré- 
vélé beaucoup  de  faits  analogues.  Ces  poudingues  à  fragmens 
primitifs  sont  des  grauwackes  qui  alternent  avec  des  calcaires 
micacés,  ou  avec  les  thonschiefer  verts,  ou  avec  des  gneis 
de  transition.  On  les  observe  dans  les  Alpes  (Trient  au  Va- 
lais) ,  dans  la  Tarantaise  ,  en  Irlande,  dans  les  montagnes  de 
Killarney  et  Saint-David  ;  enfin ,  sur  les  côtes  orientales  de 
l'Egypte,  dans  la  vallée  de  Cosseir  (  Qozir).  Les  calcaires  de 
la  Tarantaise  et  du  petit  Saint-Bernard  ,  qui  renferment  des 
cristaux  de  feldspath  disséminés ,  et  qui  constituent  une 
espèce  de  roche  porphyroïde  à  base  calcaire,  se  retrouvent 
dans  des  formations  analogues  des  Alpes  de  Carinthie.  Ce 
phénomène  d'association  de  la  chaux  et  du  feldspath  est 
d'autant  plus  remarquable  que  le  feldspath  lamelleux  et  les 
calcaires  grenus  et  compactes  paroissent  manifester  partout 
ailleurs,  dans  leurs  rapports  géognostiques ,  une  espèce  de 
répulsion  beaucoup  plus  prononcée  que  celle  qu'on  remarque 
dans  quelques  pays  entre  l'amphibole  et  le  calcaire.  Des  mi- 
caschistes et  des  gneis  de  transition  ont  été  regardés  long-temps 


> 

IND  i55 

comme  exclusivement  propres  à  la  région  sud -ouest  des 
Alpes:  mais  ils  se  retrouvent  dans  les  terrains  de  thonschiefer 
et  porphyre  du  Caucase,  et  dans  le  terrain  de  porphyre  et 
syénite  de  Saxe  et  de  Hongrie.  Cependant,  en  général,  la 
formation  qui  fait  l'objet  de  cet  article  ,  et  qui  est  caractérisée 
à  la  fois  par  Tabsence  des  porphyres  et  par  la  fréquence  des 
calcaires  grenus  et  talqueux  ,  des  quarz  micacés  et  des  anthra- 
cites, paroit  avoir  plus  favorisé  le  développement  des  mica- 
schistes et  des  gneis  de  transition  que  les  grandes  formations 
de  porphyres  et  syénites ,  ou  de  thonschiefer  et  grauwacke. 
C'est  au  contraire  dans  ces  deux  dernières  que  se  trouvent 
plus  abondamment  les  granités  de  fransition,  roches  cristal- 
lines, grenues,  non  feuilletées,  presque  dépourvues  de  mica, 
et  appartenant  géognostiquement  (lors  même  qu'elles  ne 
renferment  aucune  trace  d'amphibole)  à  la  syénite  ,  comme 
les  micaschistes  et  les  gneis  de  transition  appartiennent  au 
quarz  micacé.  Les  syénites  ,  soit  qu'elles  forment  de  simples 
couches  dans  les  thonschiefer  verts,  soit  qu'elles  constituent 
avec  les  porj)hyres  une  formation  indépendante,  préludent 
pour  ainsi  dire  aux  granités  de  transition  ;  les  quai'z  com- 
pactes, schisteux  et  mélangés  de  feuillets  de  mica  (quarz  du 
terrain  calcaire  anthraciteux ,  quarz  du  terrain  de  thon- 
schiefer et  porphyre),  préludent  aux  micaschistes  et  à  ces 
gneis  de  transition  que  Ton  a  très-justement  désignés  comme 
des  micaschistes  porphyroïdes  à  cristaux  (et  nœuds)  de  feld- 
spath. Ce  sont  ces  modes  divers  de  développement  des  gra- 
nités au  sein  des  roches  syénitiques ,  des  gneis  et  des  mica- 
schistes au  sein  des  roches  quarzeuses ,  qui  nous  font  concevoir 
pourquoi  les  gneis  et  micaschistes  se  trouvent  associés  (en- 
virons de  Meissen  en  Saxe,  et  pente  septentrionale  du  Cau- 
case) bien  plus  rarement  au  granité  des  terrains  de  transi- 
tion, que  des  terrains  primitifs.  On  pourroit  dire  que  les 
granités  du  premier  de  ces  terrains  ne  sont  que  des  bancs 
de  syénite  avec  suppression  d'amphibole,  et  que  la  plupart 
des  micaschistes  de  transition  ne  présentent  que  des  modifi- 
cations (  de  certains  états)  d'un  quarz  micacé,  dans  lequel  le 
mica  devient  plus  abondant.  Cependant  ces  changemens  par 
développement  intérieur  ne  se  font  pas  toujours  de  la  même 
manière.   Quelquefois  aussi  (vallée  de  Miiglitz  en  Saxe)  le 


i56  IND 

granité  de  transition  naît  immédiatement  du  thonschiefer , 
et  les  syénites  de  Meissen  et  de  Prasitz  passent  à  la  fois  au 
granité  et  au  gneis  intermédiaires. 

Voici  les  séries  de  roches  calcaires,  schisteuses  et  arénacées 
alternantes,  qui  constituent  la  formation  que  nous  plaçons 
à  la  tête  des  terrains  de  transition. 

Calcaires  grenus  talqueux,  souvent  veinés,  schisteux,  fétides 
(comme  le  marbre  grenu  et  blanc  de  l'ile  de  Thasos),  mêlés 
de  grains  ou  nœuds  de  quarz  ,  et  renfermant  (Sainte-l'oix) 
des  couches  d'une  serpentine  de  transition.  Calcaire  compacte 
jaunâtre,  quelquefois  gris  et  renfermant  des  cristaux  de  feld- 
spath (Bonhomme,  Petit  Saint-Bernard  et  vallée  de  la  Ta- 
rantaise).  Poudingues  ou  conglomérats  calcaires  à  pâte  grenue 
et  à  fragmens  compactes  (brèche  tarentaise  de  Villette).  Ces 
trois  roches,  qui  forment  une  sous-division  du  groupe  §.  20, 
alternent  entre  elles  et  avec  les  schistes  de  la  série  suivante. 
Les  calcaires  compactes  de  transition  ressemblent  quelque- 
fois au  calcaire  du  Jura ,  d'autres  fois  ils  passent  au  calcaire 
à  petits  grains.  Le  calcaire  saccharoïde  talqueux,  souvent 
blanc  et  veiné,  prend  l'aspect  des  beaux  marbres  primitifs 
du  Pentelique  (Cipolino),  de  THymette  et  du  Caryste  dans 
l'Eubée.  Les  débris  de  corps  organisés  manquent  générale- 
ment dans  la  série  calcaire  ;  mais,  comme  nous  le  verrons 
bientôt,  les  roches  de  cette  série  alternent  avec  des  schistes 
remplis  d'empreintes  de  plantes  monocotylédones.  M.  Bro- 
chant a  même  découvert  une  pétrification  de  nautile  ou  d'am- 
monite dans  les  poudingues  calcaires  de  la  Villette,  entre 
Moutiers  et  Saint-Maurice. 

Thonschiefer  de  transition,  ou  rubanés,  et  offrant  des  lames 
de  calcaire  interposées,  ou  onctueux,  mélangés  de  talc  fibreux 
(mine  de  Pesey)  ,  sans  parties  calcaires  visibles,  mais  faisant 
effervescence  avec  les  acides.  Ce  thonschiefer  renferme  (Bon- 
neval)   des  couches  subordonnées  de  griinstein. 

Quarz  compactes ,  ou  quarzites,  sans  mélange,  ou  micacés,  et 
appartenant  aussi  bien  aux  calcaires  grenus  qu'au  thonschiefer 
de  transition.  C'est  de  l'accumulation  du  mica  dans  ces  quarz 
compactes  que  naissent  les  micaschistes  de  cette  formation, 
et  même  les  gneis;  car  souvent  les  quarz  renferment  un  peu 
de  feldspath  disséminé  dans  la  masse.  Les  micaschistes ,  pas- 


IND  .57 

sant  à  des  schistes  noirs  bitumineux,  remplis  d'empreintes 
végétales  (Monlagny,  Petit  Saint  -  Bernard  ,  Landry),  sont 
associés  à  des  anthracites,  et  alternent  (Moutiers)  avec  les 
calcaires  stéatiteux  et  des  grauwaches  ou  poudingues  à  frag- 
mens  primitifs.  La  pâte  de  ces  conglomérats ,  qui  enchâssent 
du  quarz,  du  granité  et  du  gneis,  n'est  pas  toujours  de  la 
nature  du  thonschiefer,  comme  dans  les  grauwackes  du  Harz 
(delà  grande  formation  §.  22)  :  le  plus  souvent  elle  res- 
semble au  schiste  micacé.  Lorsque  les  fragmens  deviennent 
très-rares  dans  la  masse  ,  on  confond  ces  roches  avec  de 
vrais  micaschistes  de  transition. 

Dans  ce  terrain ,  composé  de  tant  de  couches  périodi- 
quement alternantes  ,  la  série  schisteuse  avec  anthracite 
paroit  un  peu  plus  neuve,  lorsqu'on  a  égard  aux  grandes 
masses ,  que  la  série  calcaire.  Si ,  d'un  côté ,  les  gypses  de 
la  Tarantaise  et  de  l'AUée-blanche ,  renfermant  du  muriate 
de  soude,  du  soufre  et  de  la  chaux  anhydrosulfatée ,  re- 
posent simplement  sur  les  terrains  de  transition  ,  sans  en 
être  bien  visiblement  recouverts ,  il  n'en  paroit  pas  moins 
certain,  d'après  les  discussions  intéressantes  de  M.  Brochant, 
que  les  gypses  de  Cogne,  de  Brigg  et  de  Saint -Léonard  ,  en 
Valais,  sont  intercalés  dans  le  calcaire  de  transition  même. 
Les  grandes  formations  §§.  20  et  26  sont  les  seules  des  roches 
intermédiaires  dans  lesquelles  les  porphyres  et  les  syénites  ne 
paroissent  pas  s'être  développés  .-  ce  sont  celles  aussi  dans 
lesquelles  abondent  le  plus  les  calcaires  saccharoïdes  blancs 
et  les  masses  de  talc.  Le  feldspath  lamelleux  qui  pénètre  dans 
les  roches  calcaires  (calciphyres  feldspathiques  de  M.  Bron- 
gniart),  semble  n'appartenir  qu'au  terrain  §.  20.  Les  anthra- 
cites sont  communs  à  ce  terrain  et  à  la  grande  formation  de 
thonschiefer  et  grauwacke  ,§.22;  mais  ils  sont  moins  fréquens 
dans  cette  dernière  formation,  où  le  carbone  est  plutôt  dissé- 
miné dans  la  masse  entière  des  thonschiefer,  des  lydiennes  et 
des  calcaires,  qu'il  colore  en  noir,  que  concentré  dans  des 
couches  particulières.  L'anthracite,  comme  l'observe  très-bien 
M.  Breithaupt,  est  d'une  formation  plus  ancienne  que  la 
houille,  et  d'une  formation  plus  récente  que  le  graphite  ou 
fer  carburé.  Le  carbone  devient  plus  hydrogéné  à  mesure 
qu'il  s'approche  des  roches  secondaires.  Ces  roches  sont  dans 


i58  IND 

les  mêmes  rapports  géognostiques  avec  la  houille,  que  le 
sont  l'anthracite  avec  les  roches  de  transition,  et  le  graphite 
avec  les  roches  primitives.  Je  ne  connois  dans  les  AndeS 
aucune  formation  calcaire  qui  se  rapproche  de  celles  conte- 
nues dans  le  groupe  §.  20.  Seulement  à  Contreras,  au  pied 
oriental  de  la  Cordillère  de  Quindiù  (Nouvelle-Grenade)  j'ai 
vu  un  calcaire  de  transition  non  compacte,  mais  très-grenu, 
gris-bleuàtre,  mêlé  de  grains  de  quarz,  et  enchâssant  des 
masses  siliceuses  qui  ressemblent  au  pechstein.  Ces  masses 
sont  traversées  par  des  filons  de  calcédoine.  Le  gisement  de 
ce  calcaire  de  Contreras,  au  milieu  d'un  terrain  de  grès  et 
de  gypse  secondaires,  est  difficile  à  déterminer. 

II.  Porphyres  et  Syénites  de  transition  recouvrant  immédia- 
tement LES  ROCHES  PRIMITIVES  ,   CalCAIRE  NOIR  ET   GrUNSTEIN. 

§.  2  1.  C'est  la  grande  formation,  dépourvue  de  grau- 
wacke,  de  l'Amérique  méridionale.  Elle  offre  des  problèmes 
assez  difficiles  à  résoudre  ,  et  embrasse  les  porphyres  de 
transition  des  Andes  de  Popayan  et  de  cette  partie  du  Pérou 
que  j'ai  traversée  en  revenant  de  la  rivière  des  Amazones 
aux  côtes  delà  Mer  du  Sud.  Avant  de  donner  la  description 
détaillée  de  cette  formation ,  je  jetterai  un  coup  d'œil  géné- 
ral sur  les  roches  porphyroïdes  de  l'Amérique  équinoxiale, 
roches  qui  ont  été  Pobjet  principal  de  mes  recherches  géo- 
gnostiques. Si  en  Allemagne  et  dans  une  grande  partie  de 
l'Europe,  comme  Pobserve  très-bien  M.  Mohs,  le  grauwacke 
caractérise  de  préférence  les  terrains  intermédiaires  ,  on 
peut,  dans  la  région  équinoxiale  du  nouveau  continent,  re- 
garder les  porphyres  comme  le  type  principal  de  ces  terrains. 
Aucune  autre  chaîne  de  montagnes  ne  renferme  une  plus 
grande  masse  de  porphyres  que  les  Cordillères,  qui  s'éten- 
dent presque  dans  le  sens  d'un  méridien,  sur  une  longueur 
de  2600  lieues  de  Pun  à  l'autre  hémisphère.  Ces  porphyres, 
en  partie  riches  en  minerais  d'or  et  d'argent  (§.  23),  sont 
le  plus  souvent  associés  aux  trachytes  qui  les  surmontent  et 
à  travers  lesquels  agissent  encore  les  forces  volcaniques. 
Cette  association  de  roches  métallifères  aux  roches  produites 
ou  altérées  par  le  feu  étonneroit  moins  lesgéognostes  d'Europe, 
si  elle  ne  s'étendoit  pas  à  l'or  et  à  Pargent,  mais  seulement 


IND  ,59 

au  fer  oligiste,  au  fer  oxidulé,  au  fer  titane  et  au  cuivre 
muriaté.  C'est  un  des  phénomènes  les  plus  frappans  et  les 
plus  contraires  aux  opinions  qui  ont  été  partagées  long-temps 
par  les  hommes  les  plus  célèbres.  Cependant,  et  il  est  néces- 
saire de  bien  préciser  ce  fait,  il  y  a  proximité  dans  le  gise- 
ment, quelquefois  analogie  dans  la  composition,  et  non-identité 
de  formation.  La  méthode,  que  nous  avons  adoptée,  de  cir- 
conscrire lesdifFérens  terrains  d'après  leur  superposition  et  la 
nature  des  roches  qui  les  recouvrent,  servira,  je  m'en  flatte, 
a  jeter  quelque  lumière  sur  les  rapports  qu'on  observe  entre 
les  porphyres  de  transition,  les  trachytes  et  les  porphyres 
(secondaires)  du  grès  rouge.  J'indiquerai  en  même  temps 
les  lieux  où  l'on  n'a  point  encore  découvert  dans  la  nature 
des  limites  aussi  tranchées  que  semble  l'exiger  l'état  actuel 
de  nos  divisions  systématiques. 

Les  porphyres  de  l'Amérique  méridionale  peuvent  être  con- 
sidérés de  deux  manières  .-  selon  leur  position  géographique, 
et  selon  la  différence  que  présente  l'âge  de  leur  formation. 
En  Europe,  nous  trouvons  les  porphyres  et  syénites  de  tran- 
sition (Saxe,  Vosges,  Norwége),  généralement  éloignés  des 
trachytes  (Siebengebirge  près  de  Bonn  ,  Auvergne);  il  arrive 
cependant  aussi  que  les  porphyres  et  les  trachytes  se  trou- 
vent réunis  (Hongrie),  et  alors  les  premiers  sont  quel- 
quefois métallifères.  Dans  l'Amérique  méridionale  les  por- 
phyres et  les  trachytes  sont  tous  accumulés  sur  une  bande 
étroite  dans  la  partie  la  plus  occidentale  et  la  plus  élevée 
du  continent  ,  au  bord  de  cet  immense  bassin  de  l'océan 
Pacifique,  qui  est  limité,  du  côté  de  l'Asie,  parles  volcans  et 
les  roches  trachytiques  des  îles  Kuriles,  Japonoises,  Philip- 
pines et  Moluques.  A  l'est  des  Andes,  dans  toute  la  partie 
orientale  de  l'Amérique  du  Sud  ,  sur  une  étendue  de  terrain 
de  plus  de  5oo,ooo  lieues  carrées,  soit  dans  les  plaines, 
soit  dans  des  groupes  de  montagnes  isolées,  on  ne  connoît 
encore  ni  du  porphyre  de  transition,  ni  du  véritable  basalte 
avec  olivine,  ni  du  trachyte,  ni  un  volcan  actif.  Les  phé- 
nomènes du  terrain  trachytique  paroissent  restreints  à  la 
crête  et  à  la  lisière  des  Andes  du  Chili,  du  Pérou,  de  la 
Nouvelle-Grenade  ,  de  Sainte-Marthe  et  de  Merida.  J'énonce 
ce  fait  d'une  manière  absolue ,   pouf  exciter  les  voyageurs  à 


i6o  ijND 

l'éclaircir  davantage  ou  à  le  réfuter.  Dans  cette  mênie  région , 
qui  s'étend  de  la  pente  orientale  des  Andes  vers  les  côtes  de  la 
Guiane  et  du  Brésil,  on  a  trouvé  de  l'or,  du  platine,  du  palla- 
dium, de  l'étain  et  d'immenses  amas  de  fer  spéculaire  et  ma- 
gnétique; mais,  au  milieu  de  beaucoup  d'indices  d'argent  sul- 
furé ou  muriaté,  on  n'y  a  pas  découvert  un  gite  de  minerais  que 
l'on  puisse  comparer  pour  la  richesse  aux  gîtes  du  Pérou  et  du 
Mexique.  Je  n'ai  même  pas  vu  de  porphyres  de  transition  ni 
de  porphyres  de  grès  rouge  dans  la  chaîne  côtière  de  Vene- 
zuela, dans  la  Sierra  de  la  Parime,  ni  dans  les  plaines  entre 
rOrénoque,  le  Rio  Negro  et  la  rivière  des  Amazones.  Je  ne 
connois  à  l'est  des  Andes  qu'un  petit  lambeau  de  terrain  trachy- 
tique,  près  de  Parapara  (bord  septentrional  desLlanosde  Ca- 
racas ) ,  011 ,  dans  un  lieu  infiniment  intéressant  pour  la  géogno- 
sie,  de  la  phonolithe  et  du  mandelstein  avec  pyroxène  sont 
superposés  à  des  serpentines  et  des  Ihonschiefer  de  transition  : 
mais  ces  phonolithcs  se  trouvent  sur  la  lisière  de  la  Cordillère 
de  Caracas,  qui  se  lie  par  Nirgua  ,  Tocuyo  et  le  Paramo  de 
Niquitao  aux  Andes  de  Merida.  M.  d'Eschwege  a  trouvé  au 
Brésil  quelques  porphyres  intercalés  par  couches  dans  des 
formations  primitives  de  granite-gncis;  mais  il  pense  que  ce 
vaste  pays  est  également  dépourvu  de  formations  indépen- 
dantes de  porphyre  de  transition,  de  trachyte  ,  de  basalte  ou 
de  dolérite.  En  Amérique,  la  prodigieuse  longueur  du  cours  des 
fleuves  et  le  nombre  de  leurs  affluens  facilitent,  par  l'examen 
des  pierres  roulées,  la  connoissance  des  contrées  qu'on  n'a 
pu  parcourir.  Entre  Carare  et  Honda  j'ai  ramassé,  au  mi- 
lieu d'un  terrain  de  grès  ,  des  fragmens  de  trachytes  que 
la  rivière  de  la  Magdeleine  reçoit  des  Andes  d'Antioquia  et 
de  Herveo  (Nouvelle-Grenade). 

Quant  à  la  nature  des  formations  de  porphyre  accumulées 
dans  la  bande  occidentale  et  montagneuse  de  l'Amérique  du 
Sud  et  du  Mexique,  qui  n'est  qu'une  prolongation  de  cette 
même  bande  ,  nous  y  ferons  connoître  deux  groupes  bien 
distincts.  Le  premier  (  §.  21  ),  non  métallifère,  repose 
immédiatement  sur  des  roches  primitives  ;  le  second  (§.  23), 
souvent  métallifère,  repose  sur  un  thonschiefer  ou  sur  des 
schistes  talqueux  avec  calcaire  de  transition  :  l'un  et  l'autre, 
par  leur  gisement  et  leur  composition,  se  rapprochent  quel- 


IND  161 

quefôîs  des  porphyres  trachytiques,  comme  les  porphyres  du 
groupe  §•  2ii  se  rapprochent  de  ceux  du  grès  rouge.  En  effet, 
les  porphyres  de  transition  des  Andes  du  Pérou  et  du  Mexique 
se  trouvent  souvent  recouverts  de  trachytes,  tandis  que  les 
porphyres  de  quelques  parties  de  l'Allemagne  sont  recou- 
verts de  la  formation  secondaire  du  grès  rouge,  qui  renferme 
à  son  tour  des  porphyres  et  du  mandelstein.  Dans  l'Amérique 
équinoxiale  les  limites  entre  les  porphyres  de  transition  et  les 
véritables  trachytes,  reconnus  pour  être  des  roches  volcani- 
ques, ne  sont  pas  faciles  à  fixer.  En  s'élevant  des  porphyres  qui 
renferment  les  riches  mines  d'argent  de  Pachuca,  de  Real  del 
Monte  et  de  Moran  (porphyres  dépourvus  de  quarz,  souvent 
abondans  en  amphibole  et  en  feldspath  commun),  vers  les  tra- 
chytes blancs  avec  perlite  et  obsidienne  de  l'Oyamel  et  du  Cerro 
de  las  Navajas  (montagne  des  Couteaux,  à  l'est  de  Mexico);  en 
passant,  dans  les  Andes  de  Popayan  ,  des  porphyres  de  transi- 
tion recouverts  sur  quelques  points  de  calcaire  noir  à  petits 
grains,  aux  trachytes  ponceux  qui  entourent  le  volcan  de 
Puracè  ,  on  trouve  des  roches  porphyriques  intermédiaires 
que  l'on  est  tenté  de  regarder  tantôt  comme  des  porphyres 
de  transition,  tantôt  comme  des  trachytes.  11  y  <a  plus  encore: 
au  milieu  de  ces  porphyres  du  Mexique  ,  si  riches  en  minerais 
d'or  €t  d'argent,  on  observe  des  couches  (  Villalpando  prés 
de  Guanaxuato  )  dépourvues  d'amphibole,  mais  riches  en 
cristaux  effilés  de  feldspath  vitreux.  On  ne  sauroit  les  distin- 
guer des  phonolithes  (porphj'rschiefer  )  du  Biliner-Stein  en 
Bohême.  Généralement ,  comme  le  savant  professeur  de  mi- 
néralogie à  Mexico,  M.  Andrès  del  Rio,  un  des  élèves  les 
plus  distingués  de  l'école  de  Werner,  l'avoit  observé  avant 
moi;  généralement,  les  porphyres  de  transition  de  la  Nouvelle- 
Espagne  contiennent  à  la  fois  deux  espèces  de  feldspath,  le 
commun  et  le  vitreux.  Il  m'a  paru  que  le  dernier  devient 
plus  abondant  dans  les  couches  supérieures,  à  mesure  que 
l'on  approche  des  porphyres  trachytiques. 

Dans  la  partie  équinoxiale  du  nouveau  continent  on  est  tout 
aussi  embarrassé  de  la  liaison  des  porphyres  souvent  argenti- 
fères avec  les  trachytes  qui  renferment  des  obsidiennes,  qu'on 
l'est  en  Europe  de  la  liaison  intime  des  dernières  roches 
de  transition  avec  les  plus  anciennes  roches  secondaires,  ou 
23.  1^ 


îb-  IND 

de  l'alternance  des  micaschistes  de  transition,  qui  ont  toute 
l'apparence  de  roches  primitives,  avec  les  grauwackes  et  les 
conglomérats  très-anciens.  La  source  de  cet  embarras  n'est 
cependant  pas  la  même.  Il  n'y  a  rien  de-bien  étonnant  devoir 
qu'à  des  roches  fragmentaires  ou  remplies  d"orthocératites,  de 
madrépores  et  d'encrinites  ,  puissent  succéder  de  nouveau  des 
roches  dépourvues  de  débris  organiques  ,  et  ressemblant  à  des 
gneis  et  à  des  micaschistes  primitifs.  Cette  alternance,  cette 
absence  locale  et  périot'.ique  de  la  vie,  se  manifeste  jusque 
dans  les  terrains  secondaires  et  tertiaires  :  elle  y  paj-oit  indi- 
quer différens  états  de  la  surface  du  globe  ou  du  fond  des 
bassins  dans  lesquels  les  dépôts  pierreux  se  sont  formés.  Au 
contraire,  l'association  des  porphyres  de  transition  et  des  tra- 
chytes,  l'apparence  fréquente  du  passage  de  ces  roches  les 
unes  aux  autres,  est  un  phénomène  qui  semble  attaquer  la 
base  des  idées  géogoniques  les  plus  généralement  reçues. 
Faut-il  considérer  les  trachytes,  les  perlstein  et  les  obsi- 
diennes, comme  étant  de  même  origine  que  les  thonschiefer 
à  trilobites  et  que  les  calcaires  noirs  à  orthocératites  ?  ou  ne 
doit -on  pas  plutôt  admettre  que  l'on  a  trop  restreint  le 
domaine  des  forces  volcaniques,  et  que  ces  porphyres,  en 
partie  métallifères,  dépourvus  de  quarz,  mêlés  d'amphibole, 
de  feldspath  vitreux  et  même  de  pyroxène ,  sont ,  sous  le  rap- 
port de  l'âge  relatif  et  de  l'origine,  liés  aux  trachytes,  comme 
ces  trachytes,  confondus  jadis  avec  les  porphyres  de  transition 
sous  le  nom  de  porphyres  trappéens,  sont  liés  aux  basaltes 
et  aux  véritables  coulées  de  laves  que  vomissent  Us  volcans 
actuels  ?  La  première  de  ces  hypothèses  me  paroît  répugner 
à  tout  ce  que  l'on  a  observé  en  Europe,  à  tout  ce  que  j'ai  pu 
recueillir  sur  les  obsidiennes  et  les  perlstein  au  Pic  de  Téné- 
riffe ,  aux  volcans  de  Popayan  et  de  Quito.  La  seconde  hypo- 
thèse paroîtra  moins  hardie,  moins  dénuée  de  vraisemblance 
peut-être,  lorsqu'on  ne  restreindra  plus  l'idée  d'une  action 
volcanique  aux  effets  produits  par  les  cratères  de  nos  volcans 
enflammés,  et  que  l'on  envisagera  cette  action  comme  due  à 
la  haute  température  qui  règne  partout ,  à  de  grandes  profon- 
deurs, dans  l'intérieur  de  notre  planète.  On  a  vu  dans  les  temps 
historiques,  même  dans  ceux  qui  sont  le  plus  rapprochés  de 
nous,  sans  flammes,  sans  éjection  de  scories,  des  roches  de  tra- 


IND  i65 

cliytes  s'élever  du  sein  de  la  mer  (archipel  de  la  Grèce,  iles 
Açores  et  Aleutiennes)  ;  on  a  vu  des  boules  de  basalte,  à 
couches  concentriques,  sortir  de  la  terre  toutes  formées,  et 
s'amonceler  en  petits  cônes  (  Playas  de  Jorullo  au  Mexique  )« 
Ces  phénomènes  ne  font-ils  pas  deviner,  jusqu'à  un  certain 
point,  ce  qui,  sur  une  échelle  beaucoup  plus  grande,  a  pu 
avoir  lieu  jadis  dans  la  croûte  crevassée  du  globe,  partout 
où  cette  chaleur  intérieure,  qui  est  indépendante  de  l'incli- 
naison de  Taxe  de  la  terre  et  des  petites  influences  climaté- 
riques,  a  soulevé,  par  l'intermède  de  lluides  élastiques,  des 
masses  rocheuses  plus  ou  moins  ramollies  et  liquéfiées? 

Lorsqu'on  parle  de  ces  terrains  de  transition  qui,  dans  les 
Andes  du  Mexique,  de  la  JN'ouvelle -Grenade  et  du  Pérou, 
semblent  liés  aux  trachytes  dont  ils  sont  recouverts,  on  ne 
peut  éviter  de  se  livrer  à  des  considérations  sur  l'origine  des 
roches.  C'est  l'imperfection  de  notre  classification  des  terrains 
qui  conduit  à  cette  digression.  Le  mot  roche  volcanique  an- 
nonce, comme  je  l'ai  rappelé  plus  haut,  un  principe  de  divi- 
sion tout  différent  de  celui  que  l'on  suit  en  séparant  les 
roches  primitives  des  roches  secondaires.  Dans  le  dernier 
cas  on  indique  un  fait  susceptible  d'une  observation  directe» 
Sans  remonter  plus  haut ,  en  n'examinant  que  l'état  actuel 
des  choses,  on  peut  décider  si  une  association  de  roches  est 
entièrement  dépourvue  de  débris  organiques  ,  si  aucun  bane 
arénacé  ou  fragmentaire  ne  s'y  trouve  intercalé,  ou  si  ces 
débris  et  ces  bancs  y  paroissent.  Au  contraire,  en  opposaat  les 
terrains  volcaniques  aux  terrains  primitifs  et  secondaires,  on 
agite  une  question  entièrement  historique  ;  on  engage  le  géo- 
gnoste,  malgré  lui,  à  prononcer,  comme  par  exclusion ,  sur 
l'origine  des  granités  ,  des  syénites  et  des  porphyres.  Ce 
n'est  plus  l'observation  directe  de  ce  qui  est,  la  présence 
ou  le  manque  d'empreintes  de  corps  organisés;  c'est  un  rai- 
sonnement fondé  sur  des  Inductions  et  des  analogies  plus  ou 
moins  contestées,  qui  doit  décider  sur  la  vulcaniciié  ou  la 
non-volcanicité  d'une  formation-  Entre  les  produits  que  le 
plus  grand  nombre  des  géognostes,  je  pourrois  dire  tous  ceux 
qui  ont  vu  Tltallc,  TAuvergne,  les  Canaries  et  les  Andes, 
considèrent  comme  décidément  ignés  (  porphyres  à  ha&e 
d'obsidienne^   porphyres  semi-vitreux  ,    porphyres  Jracîiy:tî- 


i64  IND 

ques),  et  les  porpliyres  qui,  parleur  composition,  par  la 
présence  du  quarz ,  par  l'absence  du  feldspath  vitreux,  de 
l'amphibole  et  du  pyroxène,  se  rapprochent  des  porphyres  du 
grauwacke,  se  trouvent  placées  dans  la  Cordillère  des  Andes 
des  couches  dont  la  base  passe  à  la  phônolithe  (à  la  base  du 
porphyrschiefer),  et  dans  lesquelles  le  feldspath  vitreux, 
l'amphibole  et  quelquefois  même  le  pyroxène  remplacent 
progressivement  le  feldspath  commun.  On  ne  sait  alors  oii 
finissent  les  porphyres  qu'on  est  convenu  d'appeler  de  tran- 
sition ,  et  où  commencent  les  trachytes. 

Je  ne  doute  pas  que  de  nouveaux  voyages,  et  l'examen  ap- 
profondi des  roches  feldspathiques  intermédiaires  et  de  celles 
que  renferme  le  grès  rouge,  ne  répandent  plus  de  jour  sur  ce 
problème  intéressant;  dans  l'état  actuel  de  nos  connoissances, 
je  me  laisserai  guider  dans  la  séparation  des  porphyres  et  des 
trachytes  des  Andes,  moins  par  des  idées  de  composition, 
que  par  des  idées  de  gisement.  Il  est  extrêmement  rare 
de  rencontrer  dans  les  véritables  trachytes  de  l'Amérique 
équinoxiale  du  feldspath  commun  ;  mais  le  feldspath  vitreux, 
l'amphibole  et  le  pyroxène  s'observent  à  la  fois  dans  ces 
roches  et  dans  les  porphyres  §§.21  et  23,  qui  sont  en  partie 
recoiiverts  d'un  calcaire  noir  de  transition  et  de  grès  rouge 
secondaire.  On  rencontre  également  peu  de  quarz  dans  les 
porphyres  de  l'Amérique  équinoxiale  et  dans  les  trachytes  , 
cette  substance  caractérise,  au  contraire,  la  plupart  des  por- 
phyres de  l'Europe,  §§.  22  et  24.  Son  absence  totale  est  ce- 
pendant si  peu  un  indice  certain  d'une  formation  trachytique. 
qu'il  se  trouve,  quoiqu'en  petites  masses,  dans  quelques  tra- 
chytes des  Dardanelles,  de  la  Hongrie  et  du  Chimborazo.  M. 
de  Buch  a  observé  près  des  basaltes  d'Antrim  un  porphyre 
très-analogue  à  ceux  du  grès  rouge  et  renfermant  à  la  fois,  et 
du  quarz  et  du  feldspath  commun  disséminés,  et  des  couches 
intercalées  de  perlstein  et  d'obsidienne.  Ce  phénomène  se 
répète  aussi  dans  les  trachytes  des  Monts  Euganéens.  Le  mica 
et  surtout  les  grenats  paroissent,  quoique  très  -  rarement , 
dans  les  porphyres  de  transition  des  deux  continens  ;  mais 
ils  se  montrent  également  dans  les  trachytes  de  l'ancien 
volcan  de  Yanaurcu ,  au  pied  du  Chimborazo  et  dans  les 
conglomérats  trachytiques  de  l'Europe.  Les  porphyres ,  aussi 


IND  i65 

bien  que  les  frachytes  des  Andes,  offrent  de  superbes  co- 
lonnes :  la  masse  des  trachytes  colonnaires  est  quelquefois 
tellement  compacte,  qu'on  a  de  la  peine  à  y  découvrir  des 
pores  et  des  gerçures. 

Il  résulte  de  ces  données,  que  les  caractères  de  compo- 
sition (caractères  absolus  et  isolés,  par  lesquels  on  voudroit 
distinguer  les  porphyres  de  transition  et  les  trachytes  des 
Cordillères)  sont  très -incertains  :  c'est  l'ensemble  de  tous 
les  caractères  oryctognostiques ,  c'est  le  passage  d'une  roche 
à  l'état  vitreux,  ce  sont  l'obsidienne,  le  peristein  et  les 
masses  scorifiées  qu'elle  enchâsse,  ce  sont  des  rapports  de 
gisement,  qui  la  font  reconnoître  comme  trachyte.  On  se  dé- 
cide d'ailleurs  plus  facilement  k  nommer  certaines  forma- 
tions des  trachytes,  qu'à  prononcer  sur  l'origine  prétendue, 
neptunienne  de  quelques  autres.  Les  trachytes  et  les  por- 
phyres de  transition  peuvent  être  également  superposés  aux 
roches  primitives  ;  ce  ne  sont  pas  les  roches  qui  les  suppor- 
tent ,  mais  celles  dont  elles  sont  recouvertes ,  qui  doivent 
guider  le  géognoste.  Le  plus  souvent  les  trachytes  et  les  por- 
phyres des  Cordillères  ne  sont  pas  recouverts  par  d'autres 
formations;  mais,  partout  où  ce  recouvrement  a  lieu  et  où 
la  roche  superposée  est  indubitablement  de  transition  ,  cette 
superposition  seule  décide,  selon  moi,  le  problème  de  classi- 
fication que  l'on  veut  résoudre.  Les  trachytes  ne  servent  de 
base  qu'à  d'autres  produits  ignés  ;  très-rarement  (Hongrie)  à 
des  formations  tertiaires  identiques  avec  le  terrain  de  Paris ^ 
plus  rarement  encore  (archipel  des  Canaries,  Andes  de  Quito) 
à  de  minces  formations  de  gypse  et  d'oolithes  intercalées  ou 
superposées  aux  tufs  ponceux.  Quelquefois  les  porphyres  de 
transition  de  l'Amérique  (  et  non  les  trachytes)  sont  recouverts 
de  calcaire  noir  à  petits  grains,  degrés  rouge  ou  de  calcaire 
alpin;  et  c'est  lorsque  ce  recouvrement  ne  s'observe  pas ,  qu'oa 
est  obligé  d'avoir  recours  à  la  méthode  peu  sûre  de  l'induc- 
tion et  des  analogies.  On  risqueroit  peut-être  moins  de  sépa- 
rer ce  que  la  nature  a  réuni  par  des  liens  assez  étroits,  si  Von 
décrivoit  provisoirement  sous  la  dénomination  vague  de  j^or- 
phjres  amphiboliques  (  hornblendiges  porphyrgebilde)  l'ensem- 
ble de  ces  roches  des  Cordillères  à  structure  porphyroïde 
(porphyres  de  transition  et  porphyres  trappéens  ou  trachytes) ,. 


qui  sont  presque  dépourvus  de  quarz,   et  qui  abondent  à  Ï3 
fois  en  amphibole  et  en  feldspath  lamelleux  ou  vitreux. 

Après  avoir  donné  cet  aperçu  général  des  porphyres  de 
transition  des  Andes,  et  de  leur  affinité  géognostique  avec 
les  trachytes,  je  vais  caractériser  le  groupe  de  porphyres  qui 
sont  antérieurs  au  calcaire  à  entroques  et  à  orthocératites  , 
au  thonschicfer  et  au  micaschiste  de  transition.  On  peut  dis- 
tinguer dans  ce  groupe  équaiorial,  là  où  je  l'ai  observé  avec 
soin  dans  rhémisphère  boréal  (  Cordillères  de  Popayan  et  d'Al- 
ïnaguer'  et  dans  Thémisphère  austral  (montagnes  d'Ayavaca 
sur  les  limites  des  Andes  de  Quito  et  du  Pérou),  plusieurs 
formations  partielles;  savoir: 
Porphyres  ; 

Griinstein  et  argiles  ferrugineuses  ; 
Syénites  ; 

(Granités  de  transition?), 
Calcaires  chargés  de  carbone; 
(Gypses  de  transition?). 
Des  porphyres  dont  l'aspect  est  souvent  frachytique  domi- 
nent dans  ce  groupe.  Je  n'y  ai  vu  alterner  ni  les  porphyres  avec 
lasyénite  ou  avec  le  calcaire  de  transition,  ni  la  syéiiite  avec 
3e  griinstein,  comme  c'est  le  cas  (§§.  ^3  et  24)  au  Mexique  et 
dans  plusieurs  parties  de  l'Europe.  La  syénite  des  Andes  de 
Baraguan,  de  Chinche  et  de  Huile  (à  l'est  du  Rio  Cauca  entre 
Quindiù  et  Cuanacas ,  lat.  bor.  2°  46'  à  4°  i  o'  )  ,  est  superposée 
a  des  roches  primitives,  à  du  granite-gneis,  peut-être  même 
à  du  micaschiste.  C'est  une  formation  partielle  qui  est  paral- 
lèle aux  porphyres  de  Popayan,  recouverts  de  calcaire  for- 
lement  chargé  de  carbone.  Cette  syénite  est  composée  de 
beaucoup  d'amphibole  et  de  feldspath  commun  blanc- rou- 
geàtre,  contenant  très-peu  de  mica  noir  et  de  quarz.  Le  feld- 
spath domine  dans  la  masse  ;  le  quarz  (ce  qui  est  assez  reuiar- 
quable  dans  une  syénite)  est  translucide,  gris -blanchâtre 
et  constamment  cristallisé,  comme  l'est  le  quarz  des  por- 
phyres d'Europe  du  groupe  §.  24.  L'agrégation  des  parties 
est  presque  en  plaques,  de  sorte  que  lasyénite  de  transi- 
tion des  Cordillères  n'a  pas  la  texture  entièrement  grenue, 
«omme  la  syénite  de  Plauen  près  de  Dresde  :  la  texture 
fflasrigeStfuctur)  de  cette  roche  se  rapproche  au  contraire 


IND  167 

de  celle  du  gneis.  Ce  qui  éloigne  la  syénite  du  Nevado  de 
Baraguan ,  des  granités  avec  amphibole  (§.7),  ou  d'une  syé- 
nite que  l'on  pourroit  croire  primitive  (§.  8)  ,  est  son  passage 
au  trachyte  et  sa  liaison  avec  les  grunstein  de  transition  qui 
lui  sont  superposés,  entre  le  Paramo  d'iraca  et  le  Ptio  Paez 
(province  de  Popayan).  Le  quarz  disparoît  peu  à  peu  dans 
cette  syénite  de  transition ,  l'amphibole  devient  plus  abondant . 
et  la  roche  prend  la  structure  porphyroïde.  On  trouve  alors 
dans  une  pâte  pétrosiliceiise  (euritique),  de  couleur  rou- 
geàtre  ou  gris-jaunàtre ,  très-peu  de  mica  noir,  beaucoup 
d'amphibole,  et  des  cristaux  épars,  très-alongés  ,  de  feldspath, 
dont  l'éclat  est  plutôt  vitreux  que  nacré,  et  dont  les  lames 
peu  prononcées  ont  des  gerçures  longitudinales.  Ce  n'est  plus 
une  syénite,  mais  un  trachyte  dont  des  masses  énormes  et 
diversement  groupées  s'élèvent,  comme  des  châteaux  forts, 
sur  la  crête  des  Andes.  Ces  passages  me  paroissent  très-remar- 
quables et  semblent  fortifier  les  doutes  qu'on  peut  avoir  sur 
l'origine  de  toutes  les  roches  primitives  grenues.  11  est  très- 
difficile,  dans  les  contrées  équatoriales,  d'appliquer  des  noms 
à  un  grand  nombre  de  formations  mêlées  de  feldspath  et 
d'amphibole,  parce  que  ces  formations  se  trouvent  sur  la 
limite  entre  les  syénites  de  transition  et  les  trachytes.  Tantôt 
grenues,  tantôt  porphyroïdes,  elles  ressemblent  ou  aux  syé- 
nites du  groupe  §.  i;5  de  Hongrie,  ou  aux  trachytes  du 
Drachenfels,  près  de  Bonn,  et  du  grand  plateau  de  Quito. 
Comme  on  observe  que  les  porphyres  de  transition  de  Popayan 
passent  aussi  aux  trachytes,  le  parallélisme  de  formation  entre 
les  syénites  et  les  porphyres  du  même  groupe  §.  2:  se  trouve 
confirmé  par  les  rapports  géognostiques  de  deux  roches  avec 
une  troisième.  Quelquefois  (pied  du  volcan  de  Puracé,  près 
de  Santa  -  Barbara  )  un  granité  de  transition ,  très-abondant  en 
mica,  semble  séparer  les  syénites  qui  enchâssent  du  quarz  et 
du  feldspath  commun  à  éclat  nacré,  des  vrais  trachytes,  dont 
la  pâte,  vers  le  sommet  des  montagnes  (à  2200  toises  de 
hauteur),  devient  vitreuse  et  passe  à  l'obsidienne. 

Dans  tout  le  groupe  des  syénites  et  des  porphyres  que  j'ai 
examinés  dans  la  Cordillère  des  Andes  (entre  le  Nevado  de 
Tolima  et  les  villes  de  Popayan,  d'Almaguer  et  dePasto),  le 
porphyre  qui  porte  le  plus   décidément  le  caractère  d'une 


iS8  ITSD 

roche  de  fransitîon ,  est  celui  qui  entoure  les  basaltes  de  Ta 
Tetilla  de  Julumito  (rive  gauche  du  Rio  Cauca  à  Touest  de 
Popayan),  et  qui  est  recouvert  (à  Los  Serillos)  d'un  calcaire 
noiràlre,  passant  du  compacte  au  calcaire  à  petits  grains,  tra- 
versé de  fiions  de  spath  calcaire  blanc  ,  et  tellement  surchargé 
de  carbone,  que  dans  quelques  parties  il  tache  fortement  les 
doigts  et  que  le  carbone  s'y  trouve  accumulé  en  poudre  sur 
les  fissures  de  stratification.  Cette  accumulation  de  carbone, 
que  Ion  observe  également  dans  les  schistes  anthraciteux  et 
alumineux  ,  et  dans  les  lydiennes  et  le  kieselschiefer,  ne 
laisse  aucun  doute  sur  la  question  de  savoir  si  le  calcaire 
noirâtre  de  Los  Serillos  (prés  de  Julumito),  dans  lequel  je 
n'ai  pu  trouver  aucune  trace  de  débris  organiques  ,  est  un 
vrai  calcaire  de  transition.  La  lydienne  que  Ton  observe  dans 
les  thonschiefer  de  transition  de  Naila  et  de  Steben  (mon- 
tagnes de  Bareuth),  offre  aussi  ce  dépôt  de  poudre  charbon- 
neuse entre  ses  fissures;  et  des  échantillons  qui  ne  tachent 
pas  les  doigts  m'ont  servi  à  exciter  les  nerfs  d'une  gre- 
nouille, en  les  employant  dans  le  cercle  galvanique  conjoin- 
tement avec  le  zinc.  Le  calcaire  noir  de  transition  {nero 
antico),  si  célèbre  parmi  les  anciens  sous  le  nom  de  marmor 
LucuUeum ,  contient  aussi,  d'après  l'analyse  de  M.  John,  J.  p.  c. 
d'oxide  de  carbone,  distribué  comme  principe  colorant  dans 
toute  la  masse  de  la  roche.  Un  porphyre  recouvert  d'un  cal- 
caire fortement  carburé,  noir-grisâtre,  à  grains  fins,  et  peut- 
être  dépourvu  de  pétrifications,  est  pour  le  géognoste,  qui 
met  plus  d'importance  au  gisement  qu'à  la  composition  des 
terrains,  un  porphyre  de  transition,  quelle  que  soit  la  nature 
oryctognostique  de  ses  parties  constituantes.  Les  trachytes, 
comme  nous  l'avons  exposé  plus  haut,  n'ont  été  trouvés 
recouverts  jusqu'ici  que  par  d'autres  roches  volcaniques  , 
par  des  tuffs  ou  par  quelques  formations  tertiaires  très- 
récentes.  Le  porphyre  de  transition  de  Popayan  ,  auquel 
le  calcaire  noir  est  superposé,  est  assez  régulièrement  stra- 
tifié; il  renferme  peu  d'amphibole,  très-peu  de  quarz  en  petits 
cristaux  implantés  dans  la  masse,  et  un  feldspath  qui  passe 
du  commun  au  feldspath  vitreux.  Je  n'y  ai  point  vu  de  py- 
Toxène,  pas  plus  que  dans  les  porphyres  de  l'isojè,  qui  for- 
ment, à  la  pente  occidentale  du  volcan  de  Puracè,  sur  la  rive 


IND  169 

droite  du  Rio  Cauca,  une  magnifique  colonnade.  Ce  porphyre 
deTisojè  est  divisé  en  prismes  à  5  — 7  pans  et  de  18  pieds  de 
long  ,  prismes  que  j'ai  pris  de  loin  pour  du  basalte,  et  que  l'on 
retrouve  en  Europe  dans  beaucoup  de  porphyresde  transition , 
même  dans  ceux  du  grès  rouge.  Une  rangée  perpendiculaire 
de  ces  colonnes  est  placée  sur  une  rangée  entièrement  horizon- 
tale. Dans  une  pâte  gris-verdàtre  ,  vraisemblablement  de  feld- 
spath compacte  coloré  par  l'amphibole,  l'on  observe  très-peu 
de  cristaux  d"amphiboIe  visibles  à  l'œil  nu,  du  mica  noir,  et 
beaucoup  de  feldspath  laiteux,  non  vitreux.  Le  quarz  manque 
dans  ces  porphyres  colonnaires,  comme  dans  presque  tous  les 
porphyres  de  transition  et  métallifères  du  Mexique.  La  roche 
de  Pisojè  étant  géographiquement  assez  éloignée  des  porphyres 
de  Julumito  liés  au  calcaire  de  transition,  il  reste  douteux 
si  elle  n'appartient  pas  déjà  à  la  formation  de  trachyte.  Quant 
aux  porphyres  de  transition  de  Julumito  ,  on  ne  sait  pas  sur 
quel  terrain  ils  reposent;  car,  depuis  Quilichao  jusqu'à  l'arête 
de  los  Robles ,  qui  est  située  à  l'ouest  du  Paramo  de  Palitarà 
et  du  volcan  de  Puracé,  et  qui  partage  les  eaux  entre  la 
mer  du  Sud  et  la  mer  des  Antilles  ,  on  ne  voit  plus  de 
roches  primitives  au  jour.  L'Alto  de  los  Robles  même  est 
composé  de  schiste  micacé  (direction  des  couches  N.  Go°E. , 
comme  le  gneis- micaschiste  des  Andes  de  Quindiù ,  incl. 
5o"  au  SO.).  Cette  roche  primitive  des  Robles  s'observe 
également  près  de  Timbio  et  près  des  sources  du  Rio  de  las 
Piedras  (hauteur  1004  toises),  sortant  au-dessous  des  trachytes 
de  Puracé  et  de  Sotarà.  Sur  le  schiste  micacé  reposent ,  comme 
je  l'ai  vu  très -clairement  dans  les  ravins  entre  le  Rio  Quil- 
quasé  et  le  Rio  Smita,  les  roches  porphyriques  du  Cerro 
Broncaso  ,  et  celles  qui  suivent  vers  le  sud  entre  Los  Robles 
et  le  Paramillo  d'AImaguer.  Aussi  de  grands  blocs  de  quarz 
que  l'on  trouve  épars  au  milieu  de  ces  terrains  de  porpliyre 
et  de  trachyte ,  annoncent  partout  la  proximité  du  micaschiste. 
C'est  ici  que  se  présente  la  question  importante  de  savoir 
si  les  roches  à  structure  porphyroïde,  au  sud  de  l'Alto  de 
los  Robles  ,  formant  la  pente  occidentale  du  volcan  de 
Sotarà  et  des  Paramos  de  las  Papas  et  de  Cujurcu  (voyez 
laa  carte  du  Rio  Grande  de  la,  Magdalena) ,  sont  de  véritables 
porphyres  de   transition  ?   Je  vais  exposer   les  faits  tels  que 


170  IT^D 

je  les  ai  observés.  Les  porphyres  de  Broncaso  (  lat.  bor.  2"  17', 
long.  79  °  3  ' ,    en   déduisant  cette  position  des  observations 
astronomiques    que   j'ai   faites   à   Popayan    et    à   Alinaguer) 
renferment  beaucoup  et  de  très-grands  cristaux  de  feldspath 
ilanc- laiteux  ,   des  cristaux  effilés  d'amphibole  qui  se  croi- 
sent ,  comme  le  feldspath  dans  le  porphyre  appelé  vulgaire- 
ment  par   les  antiquaires    serpentino    verde  antico  ou   porfido 
verde   (  griin -porphyr    de    Werner),    et  un  peu   de    quarz 
translucide  cristallisé.    Souvent  les   cristaux  d'amphibole  et 
de  feldspath  partent  d'un  même  point.   Dans  l'intérieur  du 
feldspath  on    trouve   d'autres   cristaux  très-petits   et   noirs, 
que   j'ai  cru  être  plutôt  du   pyroxène  que  de  l'amphibole. 
Le  point  central  autour  duquel  se  groupent  les  lames  cristal- 
lisées du  leucite  (amphigène)  est  également,  d'après  M.  de 
Buch  ,  un   cristal  microscopique   de  pyroxène,    et   dans  les 
griinstein  porphyriques  de  Hongrie  M.  Beudant  a  trou\é  des 
grenats  au  milieu  des  cristaux  d'amphibole.    Des  croisemens 
et  desagroupemens  bizarres  de  cristaux  de  feldspath  commun 
et  d'amphibole    caractérisent    tous   les    porphyres    entre    le 
Cerro  Broncaso   et  les  vallées  de  Quilq^uasè  et  de  Rio  Smita, 
porphyres  qui  sont  irrégulièrement  stratifiés  en  stratification 
non  concordante  (bancs  de  2  —  5  pieds;  direction  N.  55°  O. , 
inclin.  40"  au  nord -est)   avec  les  couches  du   micaschiste. 
Leur  pâte  diffère  de  celle  des  porphyres  de.  Julumito  :  elle 
est  d'un  beau  vert  d'asperge,   à  cassure  compacte  ou  écail- 
leuse,    quelquefois    assez   tendre,    offrant  une  raclure  grise 
et  prenant  au  souffle  une  couleur  très-foncée;  d'autres  fois 
elle  est  dure  et  ressemble  au  jade  ou  à  la  phonolithe  (kling- 
stein ,   base  du  porphyrschiefcr  ) ,  c'est-à-dire   qu'elle  appar- 
tient au  feldspath  compacte.  Sur  les  bords  du  Rio  Smita  j'ai 
vu  dans  ces  porphyres,  qui  passent  au  porfido  verde  des  anti- 
quaires, des  couches  presque  dépourvues  de  cristaux  dissé- 
minés :  ce  sont  des  masses  de  jade  (saussurite)  vert  d'asperge 
et  vert  poireau  ,   presque  semblables  à  celles  qu'on  trouve 
dans  les  roches  d'euphotide  de  transition  ;   elles  sont  traver- 
sées par  une  infinité  de  petits  filons  de  quarz.  Plus  au  sud  , 
les  porphyres  verts  à  base  de  feldspath  compacte  conservent 
leurs   cristaux  épars  de  quarz  ,    et  ce  caractère  les  éloigne 
du  porphyrschiefer  appartenant  au  terrain  trachytique,  dans 


IND  17^ 

lequel  le  quarz  est  un  phénomène  isolé,  d'une  rareté  extrême. 
En  même  temps  on  commence  à  y  trouver  du  mica  noir 
et  une  variété  de  pyroxcne ,  à  surface  très  -  éclatante ,  à 
cassure  transversale  conchoïde,  et  d'une  couleur  vert-olive 
si  peu  foncée  qu'on  la  prendroit  presque  pour  l'olivi^ie  des 
basaltes.  Ce  porphyre  à  mica  noir  remplit  les  vallées  des 
petites  rivières  deSan-Pedro,  Guachicon  et  Putes;  il  se 
cache  quelquefois  (vallée  de  la  Sequia)  sous  des  amas  de 
griinstein  en  boules  de  4  —  6  pouces  de  diamètre,  et  tinit 
par  ne  plus  être  stratifié,  mais  séparé,  exactement  comme  le 
griinstein  superposé  ,  en  boules  qui  se  divisent  par  décomposi- 
tion en  pièces  séparées  concentriques.  Souvent  les  boules  de 
porphyre,  d'une  extrême  dureté,  sont  d'une  composition 
identique  avec  le  porphyre  en  masse.  Leur  noyau  est  solide 
et  ne  renferme  ni  quarz  ni  calcédoine  :  elles  forment  des 
couches  particulières  de  six  pieds  d'épaisseur,  et  se  trouvent 
comme  implantées  et  fondues  dans  la  roche  non  altérée  par 
des  influences  atmosphériques  ou  galvaniques.  Cette  structure 
n'est  pas  un  effet  de  la  décomposition,  comme  on  Fa  cru  de 
quelques  basaltes  colonnaires  qui  se  séparent  en  boules.  Elle 
me  paroît  plutôt  tenir  à  un  arrangement  primitif  des  molé- 
cules. Je  crois  que  nulle  part  dans  le  monde  on  ne  trouve 
une  plus  grande  accumulation  de  roches  k  structure  globuleuse 
que  dans  la  Cordillère  des  Andes,  surtout  depuis  Ouilichao 
(  entre  Caloto  et  Popayan)  jusqu'à  la  petite  ville  d'Almaguer. 
En  descendant  du  Cerro  Broncaso,  et  en  traversant  suc- 
cessivement (toujours  dans  la  direction  du  nord  au  sud,  et 
dans  le  chemin  de  Popayan  à  Almaguer)  les  vallées  de  Smita  , 
de  San  Pedro  et  de  Guachicon  ,  on  observe  ,  au  milieu  d'un 
porphyre  qui  n'est  pas  divisé  en  boules,  et  qui  renferme 
plus  d'amphibole  et  plus  de  pyroxène  vert  d'olive  que  de 
feldspath  vitreux,  un  phénomène  géognostique  très-remar- 
quable. Des  fragmens  anguleux  de  gneis  de  3  à  4  pouces  carrés 
sont  empâtés  dans  la  masse.  C'est  un  gneis  abondant  en  mica  .- 
c'est  le  phénomène  que  présentent  les  trachytes  du  Drachenfels 
(  Siebengebirge  sur  les  bords  du  Rhin)  et,  dans  ses  couches 
inférieures,  la  phonolithe  (  porphyrschiefer  )  du  BilinerStein 
en  Bohème.  Non  loin  de  là,  dans  la  partie  nord-est  de 
cette  même  vallée  de  Rio  Guachicon  (  vallée  de  400  toises  df 


^72  IND 

profondeur,  dans  laquelle  je  me  suis  arrêté  une  journée  en- 
tière), la  roche  porphyroïde  a  la  structure  la  plus  composée 
que  j'aie  jamais  trouvée  dans  les  porphyres  de  transition  et 
dans  les  trachytes  porphyriques.  On  y  observe  à  la  fois  des 
cristaux  de  feldspath  vitreux,  d'amphibole,  de  mica  noir, 
de  quarz  et  de  pyroxène,  dont  la  couleur  se  rapproche  de 
celle  de  l'olivine.  Le  quarz  ne  se  présente  qu'en  de  très- 
petites  masses  ;  mais  il  n'est  certainement  pas  dû  à  des  in- 
filtrations postérieures.  Après  avoir  passé,  plus  au  sud  encore, 
l'arête  qui  sépare  le  Rio  Guachicon  du  Rio  Pûtes,  les  cinq 
substances  disséminées  dans  la  masse  disparoissent  presque 
entièrement:  la  roche  porphyroïde  devient  homogène,  ex- 
trêmement dure,  et  de  ce  beau  noir  que  l'on  admire  dans 
quelques  lydiennes  très-pures,  ou  dans  la  base  du  prétendu 
jaspe  porphyrique  de  l'Altaï,  ou  dans  de  certaines  statues 
égyptiennes  faussement  appelées  basaltes  ou  basanites.  Je  doute 
que  ce  soit  du  pechstein  :  c'est  plutôt  un  feldspath  com- 
pacte, coloré  en  noir  par  l'amphibole  ou  par  quelque  autre 
substance.  La  cassure  de  cette  pâte  homogène  est  unie  ou 
conchoïde,  à  grandes  cavités  aplaties;  elle  est  sans  éclat  , 
presque  entièrement  matte.  Je  n'y  ai  reconnu  que  peu  de 
cristaux  très-effilés  de  feldspath  vitreux  et  des  prismes  hexaè- 
dres de  pyroxène  conchoïde  (muschliger  augit  de  Werner), 
qui  ont  la  couleur  noire  du  mélanite  ,  et  qui  ressemblent , 
quant  à  l'éclat  et  à  la  cassure,  au  pyroxène  du  Heulenberg 
près  de  Schandau  en  Saxe. 

Je  viens  de  décrire  successivement  les  porphyres  de  Julu- 
mito,  recouverts  de  calcaire  noir  et  carburé:  ceux  de  Pisojè, 
à  feldspath  non  vitreux,  et  divisés  en  prismes;  les  porphyres 
verts  renfermant  du  quarz  ,  et  fréquemment  des  cristaux 
croisés  d'amphibole  du  Cerro  Broncaso  et  de  la  vallée  de 
Smita  ;  les  roches  porphyroïdes  du  Rio  Guachicon  ,  enchâs- 
sant des  fragmens  de  gneis;  enfin,  celles  du  Rio  Pûtes,  dont 
la  masse  noire  homogène  et  compacte  n'offre  que  très -peu 
de  cristaux  disséminés.  Toutes  ces  roches  appartiennent-elles 
à  une  même  formation,  qui  offre  des  caractères  particuliers 
dans  les  diverses  vallées  de  la  Cordillère  de  Sotarà  et  de 
Cujurcù  ?  On  ne  sauroit  révoquer  en  doute  que  les  frag- 
mens de  gneis  empâtés  dans  les  roches  qui  avoisinent  le  Rio 


IND  173 

Guachicon  ,  ne  caractérisent  de  véritables  trachytes.  Ce  sont, 
pour  ainsi  dire  ,  les  précurseurs  de  ces  trachytes  et  de  cet 
énorme  amas  de  ponces  que  j'ai  trouvés,  vingt  lieues  plus  au 
sud,  sur  les  rives  du  Mayo.  Mais  faut-il  étendre  cette  dé- 
nomination de  trachyte  sur  tous  les  porphyres  qui  se  prolon- 
gent par  le  Cerro  Broncaso  vers  les  micaschistes  de  l'Alto  de 
los  Robles,  et  qui  sont  en  partie  couverts,  non  de  dolérites, 
mais  de  griinstein  de  structure  globuleuse,  ressemblant  entiè- 
rement au  griinstein  du  terrain  de  transition  en  Allemagne? 
D'après  ce  que  j'ai  exposé  plus  haut  sur  le  passage  insensible 
des  porphyres  métallifères  du  Mexique  à  des  roches  qui  ren- 
ferment de  l'obsidienne  et  du  peristein,  et  dont  la  volcanicité 
n'est  presque  plus  contestée  aujourd'hui,  je  ne  sais  pas  com- 
ment décider  une  question  si  importante.  Elle  présente  moins 
un  problème  de  gisement  qu'un  problème  que  j'appellerois  his- 
torique, parce  qu'il  est  l'objet  de  la  géogonie,  et  ((u'il  tient  aux 
idées  que  l'on  se  forme  sur  l'origine  des  divers  dépôts  rocheux 
qui  couvrent  la  surface  du  globe.  Le  géognoste  a  rempli  sa 
tâche  lorsqu'il  a  examiné  les  rapports  de  gisement  et  de 
composition.  Il  n'est  pas  temps  encore  de  prononcer  sur  des 
masses  qui  semblent  osciller  entre  les  porphyres  de  transition 
et  ces  trachytes  exclusivement  appelés  porphyres  volcaniques. 
Ce  qui  paroit  difficile  à  débrouiller  aujourd'hui,  deviendra 
clair  peut-être  lorsque  l'Amérique  équinoxiale  ,  libre,  civi- 
lisée, plus  accessible  aux  voyageurs,  sera  explorée  par  un 
grand  nombre  d'hommes  instruits  ;  lorsque  de  nouvelles  dé- 
couvertes auront  fait  concevoir  que  des  efifets  volcaniques  , 
lents  et  progressifs,  ou  brusques  et  tumultueux,  ont  pu 
avoir  lieu  partout  où  des  crevasses  ont  ouvert  des  commu- 
nications avec  l'intérieur  du  globe  dans  lequel  règne  encore 
aujourd'hui,  d'après  toutes  les  apparences  ,  une  température 
extrêmement  élevée.  Nous  avons  déjà  des  preu\es  certaines 
que  des  roches  presque  identiques  avec  celles  qui  appar- 
tiennent au  terrain  trachytique  ou  qui  surmontent  ce 
terrain,  sont  intercalées  dans  de  véritables  porphyres  de 
transition  et  dans  des  porphyres  du  grès  rouge.  Tous  les 
géognostes  connoissent  les  observations  importantes,  faites 
par  M.  de  Buch ,  près  de  Holmstrandt,  dans  le  golfe  de 
Christiania  en  Norwége.  Un  porphyre  renfex'mant ,  outre  Iç 


Î74  IND 

feldspath  commun  (non  vitreux),   lrès-j)eu  d'amphibole  et 
de  quarz,  se  trouve  placé  entre  un  calcaire  à  ortliocératilcs 
et  une  syénite  à  zircons.  Personne   ne  s'est  encore  refusé  à 
considérer  ce  porphyre  comme  une  formation  de  transition; 
personne  ne  l'a  appelé  trachyte.    Or,  au  milieu  de  ce  por- 
phyre on  voit,  non  un  filou  (dyke),   mais  une  couche  de 
basalte   avec  pyroxène.  «Le  porphyre  de  Holmstrandt,  dit 
«   M.  de  Biich,    devient  basalte  par  ces  mêmes  passaj^es    et 
«   CCS  nuances  insensibles  que  l'on   trouve  si   communément 
«   en  Auvergne.  Ce  basalte  est   trés-noir,   presque  à  petits 
ç  grains,  dépourvu  de  feldspath,  mais  rempli  de  pyroxène. 
«   Quelquefois  il  devient  bulleux,  et  prend  un  aspect  rouge 
(fr  et  scorilié,  au  contact  avec  le  porphyre.»  Il  ne  seroit peut- 
être  pas  plus  étrange  de  découvrir  des  fragmens  de  gneis  enve- 
loppés dansce  basalte  bulleux  etscoritié,  rempli  de  pyroxènes, 
que  de  les  avoir  observés  dans  les  basaltes  du  Barenstein  (prés 
d'Annaberg  en  Saxe)  ou  dans  les  trachytes  de  la  vallée  du  Rio 
Guachicon  (dans  l'Amérique  méridionale).  Quelle  est  l'origine 
de  cette  couche  basaltique,  huileuse,  pyroxénique,  de  Holm- 
strandt ?    Est-elle,    comme   tout  le    porphyre,    une   coulée 
venue  d'en- bas  par  des  filons?  La  présence  d'une  masse  que 
l'on  croit  d'origine  ignée,  ofTre-t-elle  un  motif  suffisant  pour 
admettre  que  tout  le  terrain  auquel  cette  masse  appartient 
doive  être  séparé  des  formations  de  transition  et  classé  parmi 
les  trachytes?  J'en  doute:  les  roches  incontestablement  vol- 
caniques du  Rio  Guachicon,  enchâssant  des  fragmens  de  gneis, 
sont   géognostiquement    liées  aux   porphyres   de    transition  , 
comme,   sur  d'autres  points  du  globe,  ceux-ci  sont  géognos- 
tiquement liés  aux  porphyres  du  grès  rouge. 

Je  sépare  provisoirement  toutes  les  roches  porphyroïdcs 
placées  au  sud  d'une  arête  composée  de  micaschiste  (  Alto  de 
losRobles),  de  celles  qui  se  trouvent  au  nord-ouest  de  cette 
arête,  et  qui,  près  de  Julumito,  sont  recouvertes  d'un  cal- 
caire abondant  en  carbone.  C'est  à  cette  dernière  classe,  et 
par  conséquent  au  terrain  de  transition  (§.  21  )  qui  fait  l'objet 
spécial  de  cet  article,  que  je  rapporte,  avec  plus  de  con- 
fiance peut-être,  les  porphyres  de  Voisaco  (Andes  de  Pasto  , 
lat.  i"  134'  bor.)  et  ceux  d'Ayavaca  (Andes  du  Pérou,  lat. 
4°  38'   austr.).    Voici  les  circonstances  de  gisement  de  ces 


IND  175 

deux  roches.  Les  porphyres  et  trachytes  de  Popayan  ,  du 
Cerro  Broncaso ,  du  Rio  Guachicon  et  du  Rio  Pûtes  sont  sépa- 
rés de  ceux  de  la  province  de  Pasto  par  un  plateau  de  roches 
primitives,  qui  s'étend  depuis  Almaguer  jusqu'au  Tablori,  au 
pied  du  Paramo  de  Puruguay.  C'est  au  sud  du  Tahlon  que 
recommencent  les  porphyres  :  près  du  village  indien  de  Voi- 
saco  ils  se  distinguent  par  une  polarité  que  nous  avons  trouvée 
sensible  jusque  dans  les  plus  petits  fragmens.  On  voit  très- 
clairement  que  ces  porphyres  sont  placés  sur  le  micaschiste. 
Une  masse  gris-verdàtre  enchâsse  à  la  fois  deux  variétés  de 
feldspath,  le  commun  et  le  vitreux  :  phénomène  que  l'ou 
rencontre  souvent  dans  les  porphyres  de  transition  du  Mexique 
(§.  25).  Quelques  cristaux  aciculaires  de  pyroxène  pénètrent 
entre  les  feuillets  du  feldspath  vitreux.  Un  rocher  placé  à 
rentrée  du  village  nous  a  offert  en  petit,  à  M.  Bonpland  et 
moi ,  tous  les  phénomènes  de  la  serpentine  polarisante  de 
Bareuth  (§.   ig)   que  j'avois  découverte  en   1791^. 

Dans  rhémisphère  austral,  en  suivant  les  Andes  de  Quito 
par  Loxa  à  Ayavaca  ,  on  voit  paroitre  alternativement  au  jour 
les  roches  primitives  et  les  porphyres ,  phénomène  que  nous 
avons  déjcà  signalé  plus  haut  (§§.  5  et  6).  Presque  chaque  fois 
que  la  masse  des  montagnes  s'élève,  les  porphyres  se  montrent, 
et  cachent  aux  yeux  du  voyageur  le  gneis  et  le,  micaschiste. 
A  ces  porphyres,  qui  offrent  d'abord  plus  de  feldspath  com- 
mun que  de  feldspath  vitreux,  succèdent  des  trachytes,  et 
ces  trachytes  annoncent  assez  généralement  deux  phénomènes 
combinés,  le  voisinage  de  quelque  volcan  encore  actif,  et 
l'élévation  rapidement  croissante  de  la  Cordillère,  dont 
les  sommets  vont  atteindre  ou  dépasser  la  limite  des  neiges 
perpétuelles  (2460  toises  sous  Péquateur).  J'ajouterai  que  les 
trachytes  recouvrent  immédiatement  ou  les  roches  primitives 
ou  les  porphyres  de  transition,  et  que  dans  ceux-ci  le  feldspath 
vitreux,  l'amphibole  et  quelquefois  le  pyroxène  deviennent 
plus  fréquens  à  mesure  qu'ils  se  trouvent  plus  près  des  roches 
volcaniques.  Tel  est  le  type  que  suivent  les  phénomènes  de 
gisement  dans  la  région  équinoxiale  du  Mexique  et  de  l'Amé- 
rique méridionale;  type  que  j'ai  reconnu  surtout  dans  les 
coupes  que  j'ai  dessinées  sur  les  lieux  en  1801  et  1800. 

Les  porphyres  d'Ayavaca  forment  une  partie  de  cet  en» 


176  IND 

chainement  général  de  roches  feldspatlilques.  Sur  les  schistes 
micacés  de  Loxa ,  oîi  végètent  les  plus  beaux  arbres  de 
quinquina  que  Ton  connoisse  jusqu'ici  (Cinchona  condami- 
nea),  sont  placés  des  porphyres  qui  remplissent  tout  le  terrain 
compris  entre  les  vallées  du  Catamayo  et  du  Cutaco.  Prés 
de  Lucarque  et  d'Ayavaca  (hauteur  1407  toises),  ces  por- 
phyres se  trouvent  divisés  en  boules  à  couches  concentriques, 
et  des  amas  de  ces  boules  reposent  (vallée  du  Rio  Cutaco  ; 
hauteur  du  fond  de  ce  ravin,  766  toises)  sur  un  porphyre 
qui  renferme  du  feldspath  commun  et  de  l'amphibole,  qui  est 
régulièrement  stratifié,  et  dont  la  masse,  très-dense,  est  tra- 
versée par  une  infinité  de  petits  filons  de  spath  calcaire,  tout 
comme  le  thonschiefer  de  transition  en  Europe  est  traversé  par 
des  veines  de  quarz.  Les  mesures  barométriques  que  j'ai  faites , 
assignent  à  ces  porphyres  d'Ayavaca,  que  je  ne  crois  pas  être 
des  trachytes,  4800  pieds  d'épaisseur.  Je  ne  cite  pas,  comme 
appartenant  au  groupe  §.  21  ,  les  roches  porphyroïdes  vertes, 
dépourvues  de  quarz,  renfermant  très -peu  d'amphibole  et 
beaucoup  de  feldspath  commun  laiteux,  qui  constituent  les 
Andes  del'Assuay.  Ils  sont  placés  sur  les  micaschistes  primitifs 
de  Pomallacta ,  et  j'ai  eu  occasion  de  les  examiner  dans  leur 
énorme  épaisseur  depuis  1600  jusqu'à  2074  toises  de  hauteur 
au-dessus  du  niveau  de  l'océan.  Ils  sont  généralement  stratifiés; 
mais  cette  stratification,  souvent  très-régulièi'e  (N.  45"  O.), 
s'observe  aussi  dans  beaucoup  de  vrais  trachytes  du  Chimborazo 
et  du  volcanj  enflammé  de  Tunguragua.  En  examinant  avec 
soin,  dans  les  Cordillères  des  Andes,  les  dilférens  états  du 
feldspath  dans  les  porphyres  de  transition  et  dans  les  trachytes, 
j'ai  vu  que  des  roches  décidément  trachytiques  en  renferment 
aussi  qui  n'est  pas  vitreux,  mais  feuilleté  laiteux.  J'incline  à 
croire  que  le  porphyre  de  TAssuay ,  groupe  de  montagnes 
célèbre  par  le  passage  qu'il  offre  entre  Quito  et  Cuença, 
est   du  trachyte. 

J'ai  discuté  les  roches  qui  constituent  dans  l'Amérique  méri- 
dionale le  groupe  §.  2  1 ,  la  syénite  du  Baraguan  ,  le  granité  de 
transition  de  Santa-Barbara  ,  les  porphyres  de  Julumito,  les 
griinstein,  et  le  calcaire  noir  et  carburé:  il  me  reste  quelqueà 
observations  à  faire  sur  des  membres  moins  importans  de  ce 
groupe.  Des  sources  de  muriate  de  soude  que  l'on  trouve 


IND  ^^^ 

tiitoinëes  de  syénîte  à  une  prodigieuse  hauteur  près  de  San- 
Miguel,  à  l'est  de  Tulua ,  dans  la  Cordillère  du  Baraguan 
indiquent  peut-être  la  liaison  géognostique  de  quelque  gypse 
de  transition  avec  la  syénite  ou  avec  un  calcaire  noir  analo- 
gue à  celui  des  Seriilcs  de  Popayan.  Mais  dans  ces  contrées 
la  hauteur  seule  n'est  pas  un  motif  pour  exclure  une  forma- 
tion gypseuse  du  domaine  des  terrains  secondaires.  J'ai  vu 
sur  le  plateau  de  Santa-Fé  de  Bogota,  à  1400  toises  de  hau- 
teur, la  masse  de  sel  gemme  de  Zipaquira  reposer  sur  un 
calcaire  qui  est  décidément  de  formation  secondaire.  11  est 
pltttôt  probable  que  le  gypse  fibreux,  mêlé  d'argile,  deTicsan 
(  Pueblo  viejo  dans  le  royaume  de  Quito,  lat.  2"  \o'  austr. ), 
placé  vis-à-vis  la  fameuse  montagne  de  soufre  (§§.  1 1  et  16), 
loin  de  toute  roche  secondaire,  sur  du  micaschiste  primitif, 
est  un  gypse  de  transition  ,  analogue  à  ceux  de  Bedillac 
dans  les  Pyrénées  et  de  Saint-Michel  près  Modane  en  Savoie. 
hes  griinstein  du  groupe  §.  :2i  ,  qui  paroissent  couvrir  les 
syénites  du  Baraguan  et  des  porphyres  analogues  à  ceux  de 
Juluraito,  abondent,  au  nord  de  Popayan,  au  pied  des 
Paramos  d'Iraca  et  de  Chinche ,  surtout  dans  la  vallée  orien- 
tale du  bassin  du  Rio  Cauca(Curato  de  Quina  major  et  Qui- 
lichao).  Dans  ce  dernier  endroit  de  riches  lavages  d'or  s'o- 
pèrent entre  des  fragmens  de  griinstein  (  diabase  de  Bron- 
gniart,  diorite  de  Haiiy).  Cette  roche  n'est  décidément  pas 
une  dolérite  :  c'est  un  grunstein  de  transition  semblable  à 
celui  que  l'on  trouve  intercalé  au  thonschiefer  chargé  de 
carbone  du  Fichtelgebirge  (§.  :2  2)  et  au  micaschiste  de 
Caracas  (§.11).  Le  grunstein  de  Quina  major  devient  quel- 
quefois très-noir,  très- homogène  ,  sonore,  fissile  et  stratifié 
comme  le  schiste  amphibolique  des  terrains  primitifs  (horn- 
blendschiefer).  Il  est  rempli  de  pyrites,  n'agit  point  sur 
l'aimant,  et  prend  à  Pair  une  croûte  jaunâtre,  comme  le 
basalte.  Prés  de  Quilichao  (entre  les  villes  de  Cali  et  de 
Popayan)  il  présente  de  grands  cristaux  d'amphibole  dissé- 
minés dans  la  masse  ,  et  des  liions  qui  sont  remplis  de  pyroxènes 
d'une  couleur  vert  d'olive  très-peu  foncée.  J'ai  pris,  sur  les 
lieux,  ces  pyroxènes  pour  l'olivine  iamelleuse  de  M.  Freies- 
leben.  Les  cristaux  ne  se  trouvent  pas  disséminés  dans  la 
masse ,  m^is  seulement  tapissant  des  fentes  ;  c'est  comme 
25.  la 


278  IND 

des  filons  de  dolérife  qui  traversent  le  grilnsteîn.  Cette 
niéine  roche,  quoique  dépourvue  de  filons,  se  montre, 
comme  nous  l'avons  dit  plus  haut,  en  boules  aplaties  au  sud 
de  Popayan  et  de  TAIto  de  los  Robles ,  dans  la  vallée  de  la 
Sequia  i  entre  Je  Cerro  Broncaso  et  le  Rio  Guachicon  )  ;  elle  y 
recouvre  les  porphyres  verts  du  Rio  .Sniita,  La  superposition  du 
griinstein  est  ici  plus  manifeste  que  dans  le  Curato  de  Quina 
major  et  dans  les  lavages  d"or  de  Quilichao.  Comme  les  por- 
phyres au  nord  de  l'Alto  de  los  Robles  sont  en  partie  (Julumito) 
couverts  de  calcaire  noir  de  transition  ,  et  que  ceux  au  con- 
traire que  l'on  observe  au  sud  de  Los  Robles  paroissent 
liés  aux  trachytes  du  Rio  Guachicon ,  cette  superposition 
uniforme  du  griinstein  sur  l'un  et  l'autre  de  ces  por- 
phyres est  un  phénomène  de  gisement  qui  mérite  beau- 
coup d'attention.  D'après  les  observations  faites  jusqu'ici  dans 
les  deux  continens ,  les  trachytes  et  les  basaltes  se  trouvent 
couverts  de  dolérite  (mélange  intime  de  feldspath  et  de 
pyroxène) ,  mais  non  de  griinstein  (mélange  intime  de  feld- 
spath et  d'amphibole).  Ne  faut- il  pas  conclure  de  là.  que 
tout  ce  qui  est  au-dessous  des  griinstein  en  boules  de  la 
Sequia  et  de  Quilichao,  est  un  porphyre  de  transition  ,  et  non 
un  trachyte  P  Ne  doit-on  pas,  à  cause  de  cette  superposition 
uniforme  du  griinstein,  séparer  les  roches  porphyroïdes  du 
Rio  Smita  et  du  Cerro  Broncaso  ,  des  porphyres  trachy  tiques  et 
plus  décidément  pyrogènes  de  la  vallée  du  Guachicon  ,  c'est- 
à-dire  de  ceux  qui  enchâssent  des  fragmens  de  gneis  ?  Il  y  a 
une  certaine  probabilité  qu'une  roche  recouverte  de  griin- 
stein est  plutôt  une  formation  de  transition  qu'une  formation 
de  trachyte  :  mais  des  terrains  d'origine  ignée  peuvent  être 
d'un  âge  très-ancien.  Pourquoi  n'y  auroit-il  pas  des  masses 
de  trachytes  et  de  doléritcs  intercalées  aux  roches  de  transi- 
tion  modernes  ? 

De  plus,  et  j'adresse  cette  question  aux  savans  minéralo- 
gistes qui  se  sont  livrés  plus  spécialement  à  l'étude  des  ca- 
ractères oryctognostiques  des  roches,  les  griinstein  sont-ils 
toujours  minéralogiquement  (par  leur  composition)  aussi 
différens  des  dolérites  qu'ils  en  sont  le  plus  souvent  éloignés 
géo^nosfiquement  (par  leur  gisement)?  Les  cristaux  qui  se 
séparent   du   tissu  d'une  pâte  et  qui   deviennent   visibles   à 


IND  179 

l'oeil  nu,  existent,  à  n'en  pas  douter,  mêlés  à  d'autres  subs- 
tances dans  ce  tissu  même.  Comme  les  basaltes  renferment  sou- 
vent à  la  lois  (Saxe,  Bohème,  Rhënegebirge)  de  grands  cris- 
taux disséminés  de  pyroxène  et  d'amphibole  (basaltische  horn- 
blende), on  ne  sauroit  douter  qu'outre  le  pyroxène,  l'am- 
phibole n'entre  aussi  dans  la  masse  de  quelques  basaltes. 
Pourquoi  des  mélanges  analogues  ne  pourroient-ils  avoir  lieu 
dans  les  pâtes  des  dolérites  et  des  grunstein ,  dont  on  croit 
(pour  me  servir  de  la  nomenclature  mythologique  générale- 
ment reçue)  les  uns  d'or^ine  volcanique,  les  autres  d'ori- 
gine neptunienne  P  Le  pyroxène  en  roche,  qui,  d'après  M. 
de  Charpentier,  se  trouve  en  stratification  parallèle  dans  le 
calcaire  primitif  des  Pyrénées ,  renferme  de  l'amphibole 
disséminé.  On  assure  avoir  reconnu  des  pyroxènes  dans  les 
grunstein  qui  forment  de  vraies  couches  au  milieu  des  gra- 
nités du  Fichtelgcbirge  en  Franconie  (  §.  7  ).  M.  Beudant  a  vu 
des  grunstein  indubitablement  pyroxéniques  (p;.r  conséquent 
des  dolérites)  dans  les  porphyres  et  syénites  de  transition  de 
Hongrie  (Tepla  près  de  Schemnitz),  comme  dans  le  grès 
houiller  (secondaire)  de  Fiinfkirchen.  Les  griinstein  stratifiés 
et  globulaires  des  environs  de  Popayan  ne  passent  ni  au  mandel- 
stein ,  ni  au  porphyre  syénitique.  C'est  une  formation  très- 
nettement  tranchée,  et  qui  est  accompagnée  ici,  comme 
presque  partout  dans  la  Cordillère  des  Andes  (où  elle  se 
tient  assez  éloignée  de  la  crête  des  volcans  actifs),  de  masses 
énormes  d'argile.  Ces  masses  rappellent  plus  encore  les  ac- 
cumulations d'argile  dans  les  terrains  basaltiques  du  Miftel- 
gebirge  en  Bohème,  que  l'argile  liée  au  gypse  des  grunstein 
(ophites  de  Palassou  )  dans  les  Pyrénées  et  dans  le  départe- 
ment des  Landes.  Elles  rendent  le  passage  des  Cordillères, 
de  Popayan  à  Quito,  extrêmement  pénible  pendant  la  saison 
des  pluies. 

Les  analogies  que  nous  avons  indiquées  entre  quelques 
porphyres  du  groupe  §.21  et  les  trachytes  ou  autres  roches 
volcaniques,  se  retrouvent  dans  le  groupe  mexicain  §.  20  et 
même  dans  les  porphyres  norwégiens  du  groupe  §.  24;  mais 
généralement  (à  Pcxception  des  porphyres  du  Caucase  )  on  ne 
les  observe  presque  pas  dans  les  porphyres  subordonnés  au 
thonsclàiefer  de  transition  et  aux  grauwackes  §.  22.  11  y  a  plus 


i8o  I]\D 

encore  :  au  milieu  des  porphyres  secondaires  du  grès  rouge, 
les  mandelstein  et  d'autpes  couches  intercalées  (Allemagne, 
Lcosse,  Hongrie)  prennent  aussi  quelquefois  l'aspect  de 
roches  pyrogènes.  D'après  ces  divers  rapports  de  gisement 
et  de  composition,  je  pense  qu'on  n'est  point  en  droit, 
dans  l'état  actuel  de  nos  connoissances ,  de  nier  entièrement 
l'existence  des  porphyres  de  transition  dans  les  Cordillères 
de  l'Amérique  méridionale,  et  de  regarder  toutes  les  roches 
de  syénites  ,  de  porphyres  et  de  griinstein  ,  que  je  viens 
de  décrire  ,  comme  des  trachyt^.  Les  porphyres  des  grou- 
|)es  §§.  2  1  et  -20  sont  caractérisés  dans  l'Amérique  méridio- 
nale et  au  Mexique  par  leur  tendance  constante  à  une  stra- 
tification régulière';  tendance  très-rarement  observée  en  Eu- 
rope, sur  une  grande  étendue  de  terrain,  dans  les  groupes 
§§.  22  et  2Z|.  La  régularité  de  stratification  est  cependant 
beaucoup  plus  grande  dans  les  porphyres  mexicains  posté- 
rieurs au  thonschiefer  de  transition  que  dans  les  porphyres 
des  Andes  de  Popayan ,  de  Pasto  et  du  Pérou,  qui  reposent 
immédiatement  sur  les  roches  primitives.  Cette  dernière 
formation  (§.  21  )  ne  m'a  pas  offert  une  seule  couche  subor- 
donnée de  syénite,  de  griinstein  ,  de  calcaire  et  de  man- 
delstein, comme  on  en  trouve  dans  les  groupes  §§.  22  et  25. 
Dans  la  Nouvelle-Espagne  ,  entre  Acapulco  etTehuilotepec  , 
j'ai  vu  des  porphyres  de  transition,  qui  ne  sont  pas  métalli- 
fères, reposer  immédiatement  sur  du  granité  primitif  (Alto 
de  los  Caxones,  Acaguisotla  ,  et  plusieurs  points  entre  Sopi- 
lote  et  Sumpango);  mais,  comme  plus  au  nord  (près  de 
Guanaxuato)  des  porphyres  métallifères  d'une  composition 
semblable  couvrent  un  thonschiefer  de  transition,  il  reste 
incertain,  malgré  la  différence  de  gisement,  si  les  uns  et 
les  autres  n'appartiennent  pas  à  un  même  terrain  et  à  un 
terrain  plus  récent  que  le  groupe  §.  21.  Un  terme  «T  de  la 
série  géognostique  peut  suivre,  immédiatement  à  /3 ,  là  où  5/ 
ne  s'est  pas  développé.  C'est  ainsi  que  le  calcaire  du  Jura 
repose  près  de  Laufenbourg  immédiatement  sur  du  gneis, 
parce  que  les  termes  intermédiaires  de  la  Série  des  forma- 
tions, les  roches  situées  ailleurs  (par  exemple  dans  la  vallée 
du  Necker)  entre  le  calcaire  du  Jura  et  le  terrain  primitif, 
s'y  trouvent  supprimés.  Dans  les  Isles  Britanniques,  d'après  les 


IND  i8i 

observations  du  savant  professeur  Buckland  et  d'après  celles 
de  MM.  deBuch  et  Boue,  la  formation  desyénite,  griinstein  et 
porphyre  de  transition  (Ben  Nevis ,  Crampians)  repose  aussi  im- 
médiatement sur  des  roches  primitives  (micaschiste  et  urthon- 
schiefer).  Elle  paroit  par  conséquent  appartenir  au  premier 
groupe  de  porphyres  dont  je  viens  de  tracer  l'histoire  (§.  21). 
Les  porphyres  du  nord  de  l'Angleterre  et  ceux  de  TÉcosse 
sont  recouverts  tantôt  de  grauwacke,  tantôt  de  la  Tormation 
houillère;  ils  offrent  une  base  feldspathique,  et  se  trouvent 
souvent  dépourvus  de  quarz,  comme  les  porphyres  de  l'Amé- 
rique équinoxiale.  On  y  a  observé  des  grenats  :  ce  phénomène 
se  retrouve  dans  les  porphyres  de  transition  de  Zimapan 
(Mexique) ,  et  dans  ceux  qui  couronnent  la  fameuse  montagne 
du  Potosi  et  qui  appartiennent  probablement  aussi  au  groupe 
§.  23.  Si  le  mandelsteiu  d'Ilefeld  fait  partie,  comme  le  croit 
M.  de  Raumer,  du  terrain  de  grès  rouge,  les  porphyres 
grenatifères  du  Netzbcrg  (au  Harz)  sont  probablement  de 
formation  secondaire.  En  Hongrie,  les  grenats  se  rencon- 
trent à  la  fois  et  dans  les  porphyres  ou  griinstein  porphyri- 
ques  du  groupe  §.  20,  et  dans  les  conglomérats  du  terrain 
trachytique.  Il  en  résulte  que  les  grenats  pénètrent  depuis 
les  roches  primitives  (gneis,  weisstein ,  serpentine),  par  les 
porphyres  de  transition,  jusque  dans  les  trachytes  et  basaltei 
volcaniques,  et  que,  dans  les  zones  les  plus  éloignées  les 
unes  des  autres  ,  certains  porphyres  offrent  des  rapports  très- 
multipliés  avec  les  trachytes.  J'ignore  si  la  syénite  titanifère 
de  Keilendorf  en  Silésie ,  qui  repose  immédiatement  sur 
le  gneis  et  qui  passe  à  un  granité  de  transition  à  petits  grains 
dépourvu  d'amphibole,  appartient  à  l'ancienne  formation  du 
groupe  §.  21 ,  ou  si  c'est  un  lambeau  de  la  formation  §.  20  , 
placé  accidentellement  sur  des  roches  primitives.  Rien  n'est 
plus  difficile  que  de  reconnoitre  avec  certitude  s'il  y  a  eu  sup- 
pression de  quelques  membres  intermédiaires  de  la  série 
des  roches,  ou  si  le  contact  immédiat  que  Ton  observe,  est 
celui  que  l'on  trouveroit  partout  ailleurs  sur  le  globe,  en 
comparant  l'âge  relatif  ou  le  gisement  des  mêmes  terrains,. 


382  IND 

JII.  Thonschiefer  de  transition  renfermant  des  grauwackes  , 
des  grunstein  ,  des  calcaires  moirs  ,  des  syénites  el  des 
porphyres. 

§.  22.  C'est  la  grande  formation  de  thonschiefer  qui  traverse 
les  Pyrénées  occidentales,  les  Alpes  de  la  Suisse  entre  Ilantz  et 
Claris,  et  le  nord  de  l'Allemagne  depuis  le  Harz  jusqu'en 
Belgique  et  aux  Ardennes,  et  dans  laquelle  dominent  le  grau- 
wacke  et  les  calcaires;  ce  sont  les  thonschiefer  et  gneis  de 
transition  du  Cotentin ,  de  la  Bretagne  et  du  Caucase;  ce  sont 
les  roches  schisteuses  placées  eu  Norwége  au-dessous  des  por- 
phyres et  syénites  zirconiennes  ,  c'est-à-dire,  entre  ces  por- 
phyres et  les  roches  primitives  ;  ce  sont  les  thonschiefer  verts, 
avec  calcaires  noirs,  serpentine  et  griinstein,  de  Malpasso  dans 
la  Cordillère  de  Venezuela  ,  et  les  thonschiefer  avec  syé- 
nites de  Guanaxnato  au  Mexique.  Nous  avons  exposé  plus 
haut  le  gisement  de  ces  roches  dans  les  différens  pays  que 
nous  venons.de  nommer  :  il  s'agit  à  présent  de  les  considérer 
dans  leur  ensemble,  et  de  séparer  les  résultats  de  la  géo- 
gnosie  des  notions  purement  locales  qu'offre  la  géog^^i-phie 
ininéralogique.  Le  groupe  §.  22  repose,  comme  les  deux 
groupes  précédens,  immédiatement  sur  le  terrain  primitif, 
il  se  distingue  du  premier  (  §.  20)  par  l'absence  presque 
totale  des  calcaires  grenus  stéatiteux;  du  second  (§.21),  par 
la  fréquence  des  thonschiefer  et  des  grauwackes.  Les  forma- 
tions suivantes,  intimement  liées  entre  elles,  appartiennent 
à  ce  groupe  (§.  22),  qui  est  un  des  mieux  connus  et  des 
plus  anciennement  étudiés  : 

Thonschiefer,  avec  des  couches  de  quarz  compacte,  de 
grauwacke ,  de  calcaire  noir,  de  lydienne,  d'ampélite  car- 
burée,  de  porphyre,  de  griinstein  ,  de  granité  à  petits  grains  . 
de  syénite  et  de  serpentine; 

Grauwncke  (et  grés  quarzeux); 

Calcaire  -air. 

Ces  roches,  ou  sont  isolées,  ou  alternent  les  unes  avec  les 
autres,  ou  forment  des  couches  subordonnées. 

J'ai  discuté  plus  haut  (§.  16  )  les  caractères  qui  distinguent 
assez  généralement  le  thonschiefer  primitif  du  tlionschiefer 
de  transition  :  j'ai  fait  observer  que  les  caractères   tirés  de 


IND  i85 

ïa  composition  ininéralogique  des  roches  n'ont  pas  la  valeur 
absolue  qu'on  a  voulu  quelquefois  leur  assigner;  et  que,  pour 
les  employer  avec  succès,  il  faut  avoir  recours  en  même 
temps  au  gisement ,  à  l'intercalation  ou  à  l'absence  de  cou- 
ches fragmentaires  (grauwackes,  conglomérats),  et  aux  débris 
de  corps  organisés,  qui  manquent  totalement  aux  terrains 
primitifs  et  que  l'on  commence  à  trouver  dans  les  terrains 
de  transition.  Les  thonschiefer  de  ce  dernier  terrain  se  dis- 
tinguent par  leur  variahililé ,  par  une  tendance  continuelle  à 
changer  de  composition  et  d'aspect;  par  le  nombre  des  bancs 
intercalés;  par  des  passages  fréquens  ,  tantôt  brusques,  tan- 
tôt insensibles  et  lents,  à  l'ampélite,  au  kiesclscliiefer,  au 
griinstein,  ou  à  des  roches  porphyroïdes  et  syénitiques.  Sans 
doute  que  ces  changemens,  ces  effets  d'un  développement 
intérieur,  se  font  aussi  remarquer  dans  quelques  roches 
primitives.  M.  de  Charpentier  observe  que  les  granites- 
gneis  des  Pyrénées  ,  qui  renferment  presque  toujours  un 
peu  d'amphibole  disséminé  dans  la  masse,  sans  être  pour 
cela  des  syénites ,  et  que  l'on  croit  primitifs  sans  être  des 
plus  anciens,  présentent  un  grand  nombre  de  couches 
étrangères,  par  exemple,  des  couches  de  micaschiste  ,  de 
griinstein  et  de  calcaire  grenu.  Dans  cette  même  chaîne  de 
montagnes,  le  micaschiste  primitif  contient  de  la  chiasto- 
lithe  disséminée,  substance  généralement  plus  commune  dans 
le  thonschiefer  de  transition.  Les  Alpes  de  la  Suisse,  surtout 
le  passage  du  Spliigcn,  si  bien  décrit  par  M.  de  Buch ,  offrent 
un  micaschiste  du  terrain  primitif  qui  passe  insensiblement 
à  un  porphyre  dont  la  pâte  de  feldspath  compacte  enchâsse 
des  cristaux  de  feldspath  lameîleux  et  de  quarz.  Cependant, 
en  général,  ces  changemens  sont  moins  fréquens  parmi  les 
formations  primitives  que  parmi  les  formations  de  transition. 
Quelque  intime  que  soit  la  liaison  que  l'on  observe  entre 
les  roches  qui  constituent  un  même  groupe,  ou  entre  les 
différens  groupes  de  tout  le  terrain  intermédiaire,  on  recon- 
noît  pourtant,  sur  différens  points  du  globe,  un  certain 
degré  d'indépendance,  non-seulement  entre  les  six  groupes 
ou  termes  de  la  série  des  roches  de  transition  (par  exemple, 
entre  les  thonschiefer  avec  grauwacke  et  les  porphyres  et 
syénites),  mais  aussi  entre  les  membres  partiels  de  chaque 


i84  IND 

groupe  ou  association  de  roches  inlemiëdiaires.  Il  en  résulte 
que,  pour  bien  saisir  les  traits  qui  caractérisent  la  constitu- 
tion géologique  d'un  pays,  il  faut  étudier  ces  rapports  isolé- 
ment (par  exemple,  ceux  des  grauuackes,  des  thonschiefer 
et  des  calcaires  que  renferme  le  groupe  §.  22  ),  et  fixer  pour 
les  diA-^ers  terrains  ou  membres  partiels  d'une  même  associa- 
tion les  degrés  de  dépendance  ou  d'indépendance  qu'ils  con- 
servent entre  eux.  Nous  les  voyons  ou  alterner  périodique- 
ment, ou  s'envelopper  et  se  réduire  les  uns  les  autres  (par  un 
accroissement  inégal  de  volume  )  à  l'état  de  simples  couches 
subordonnées,  ou  enfin  se  couvrir  mutuellement  comme  fe- 
Toient  des  roches  primitives  de  différente  formation. 

Il  arrive  en  effet  que  les  termes  partiels  d'un  même  groupe, 
ot ,  /2 ,  y ,  se  succèdent  quelquefois  avec  une  certaine  régula- 
rité en  série  périodique,  a..  /2.  y.  a.  0.  -y.  et. ...  D'autres  fois 
et  prend  un  si  grand  développement  que  ^  et  y  s'y  trouvent 
renfermés  comme  de  simples  couches  :  d'autres  fois  encore  a, 
/S  5  y  sont  simplement  superposés  les  uns  aux  autres  sans  retour 
périodique.  Ce  dernier  cas  n'exclut  point  la  possibilité  que  B  , 
avant  de  succéder  à  et,  n'y  paroisse  d'abord  comme  une 
couche  subordonnée.  Il  arrive  dans  un  même  groupe  tout 
ce  que  l'on  observe  dans  des  termes  non  complexes  de 
la  série  des  terrains  primitifs.  On  peut  dire,  comme  nous 
l'avons  fait  observer  plus  haut,  qu'une  formation  de  calcaire 
noir,  qui  constitue  de  grandes  masses  de  montagnes  et  qui 
est  superposée  à  des  masses  également  considérables  de  thon- 
schiefer de  transition,  prélude  par  des  couches  de  calcaire 
noir  intercalées  au  thonscliicfer.  Lorsque  fi  et  y  forment 
des  couches  intercalées  dans  a,  ces  couchés  peuvent  être  si 
fréquemment  répétées,  qu'elles  prennent,  sur  de  grandes 
étendues  de  terrain,  l'aspect  de  roches  alternantes.  C'est  ainsi 
que  le  thonschiefer  intermédiaire  ,  qui  d'abord  enveloppoit 
le  grau\Aacke  et  le  calcaire  noir,  et  puis  alternoit  avec  eux 
(  gorge  d" Aston  dans  les  Pyrénées,  Maxen  en  Saxe  ) ,  finit  par 
recouvrir,  et  avec  un  grand  accroissement  de  masse ,  ces  roches 
alternantes  ou  ces  couches  w .  iiucmment  intercalées.  Il  en  est 
d'ailleurs  de  la  régularité  du  lype  ùi<ns  les  formations  partielles 
de  chaque  groupe  comme  de  la  direction  des  strates  ou  de 
l'angle  que  font  ces  strates  avec  le  méridien.  Au  premier  abord 


IND  i8-5 

lout  paroît  confus  et  contradictoire  ;  mais,  dès  que  l'on  exa- 
mine avec  soin  une  grande  étendue  de  pays,  on  finit  toujours 
par  reconnoître  certaines  lois  de  gisement  ou  de  slratifit-ation. 
Si  le  type  que  l'on  découvre  dans  la  suite  des  formations  par- 
tielles ,  paroit  varier  selon  les  lieux ,  c'est  que  le  dévelop- 
pement de  ces  petites  formations  n"a  pas  été  partout  le  même. 
Quelquefois  (Caucase)  le  porphyre,  le  calcaire,  la  syénite 
et  le  granité  de  transition  ,  se  sont  développés  à  la  fois  au  sein 
des  thonschiefer  de  transition  ;  d'autres  foiS  on  n'y  trouve  ni 
le  porphyre  (Cotentin,  Alpes  de  la  Suisse),  ni  le  grauiA-acke 
(chaîne  du  littoral  de  Venezuela),  ni  le  granité  et  la  syénite 
de  transition  (Pyrénées).  L'association  du  thonschiefer  de 
transition  et  du  calcaire  noir  compacte  est  presque  aussi 
constante  que  celle  du  calcaire  blanc  et  grenu  avec  le  mica- 
schiste dans  le  terrain  primitif.  On  trouve  cependant  aussi  des 
calcaires  de  transition  qui ,  n'étant  associés  ni  au  thonschiefer 
ni  au  grauvvacke,  paroissent  remplacer  géognostiquement  le 
thonschiefer;  mais  je  ne  connois  pas  un  seul  point  des  deux 
continens  où  l'on  ait  vu,  sur  une  étendue  un  peu  considé- 
rable, des  thonschiefer  de  transition  qui  ne  fussent  pas  liés 
au  calcaire. 

Nous  venons  de  voir  que  dans  quelques  parties  du  globe 
(Caucase  et  presqu'île  du  Cotentin)  le  thonschiefer  intermé- 
diaire enveloppe  ou  les  porphyres  ou  les  syénites  et  les  granités; 
dans  d'autres  parties  (  Norwége  et  Saxe,  entre  Friedrichs- 
walde,  Maxen  etDohna) ,  ces  trois  roches  se  trouvent ,  après 
avoir  préludé  comme  couches  subordonnées  au  thonschiefer, 
superposées  à  celui-ci,  soit  isolément  et  formant  des  masses 
considérables,  soit  atternant  entre  elles.  C'est  seulement 
dans  ces  cas  d'isolement  ou  d'alternance  qu'un  terrain  indé- 
pendant de  porphjre  (Mexique),  ou  un  terrain  indépendant  de 
porpli/yre  et  syénite  (Norwége),  semble  surmonter  le  terrain 
des  thonschiefer  intermédiaires.  Ce  même  isolement  (sinon 
cette  même  indépendance)  s'observe  quelquefois  dans  les 
calcaires  de  transition  et,  quoiqu'à  un  degré  moins  prononcé^ 
dans  les  grauwackes. 

La  syénite  et  le  granité  sont  liés  dans  le  terrain  de  transition 
plutôt  aux  porphyres  qu'au  micaschiste  et  au  gneis  :  dans  ce 
même  terrain  on  trouve  des  syénites  sans  granité  ;  mais  il  est 


j86  IIVD 

beaucoup  plus  rare  de  trouver  des  syénites  et  des  granités  sans 
porphyre.  Lorsque  les  membres  partiels  d'un  groupe,  et,  /3,5/, 
alternent  en  série  périodique,  et  que  par  conséquent  ils  ne 
sont  ni  inleicalés  les  uns  aux  autres  comme  couches  suboi'- 
données.  ni  superposés  comme  des  roches  ou  formations 
distinctes,  il  est  difficile  de  déterminer  si  /2  et  5/  sont  d'une 
formation  plus  récente  que  a  :  cependant,  même  dans  le  cas 
d'une  origine  que  Ton  appelle  contemporaine  ,  Texamen  atten- 
tif des  terrains  fait  reconnoitre  de  certa'mt'sprépondcrances  de 
formation,  (rénéralement  le  grauuacke  et  le  thonschiefer  de 
transition  sont  plus  anciens  que  les  calcaires  noirs,  ou,  pour 
m'appuyer  d'une  observation  très-juste  de  M.  de  Charpentier. 
tx  généralement  on  observe  que,  malgré  l'alternance  dans  la 
«  partie  du  terrain  intermédiaire  qui  est  la  plus  rapprochée 
«  du  terrait!  primitif,  c'est  le  grauwacke  elle  thonschiefer  qui 
«  dominent  en  grandes  masses,  et  le  calcaire  leur  est  subor- 
«  donné  ;  tandis  que,  dans  la  partie  plus  moderne  du  terrain 
«  de  transition ,  c'est  au  contraire  le  calcaire  qui  est  la  roche 
«  prépondérante,  et  le  thonschiefer  est  seulement  intercalé 
«  au  calcaire  en  couches  plus  ou  moins  épaisses.  ^' 

Après  avoir  exposé  les  rapports  d'âge  et  de  gisement  des 
roches  qui  constituent  un  même  groupe,  nous  allons  carac- 
tériser plus  spécialement  chacune  des  formations  partielles. 
Thonschiefer  ,  bleu  noirâtre  et  carbui:^ ,  ou  verdàtre,  onc- 
tueux et  soyeux  ;  tantôt  terreux  ou  à  Teuillets  très-épais, 
tantôt  fissile  et  parfaitement  feuilleté.  Dans  ses  couches  très- 
anciennes,  qui  passent  au  micaschiste  de  transition,  il  est 
ondulé  et  n'offre  que  de  grandes  lames  de  mica  fortement 
adhérentes.  Dans  les  couches  plus  neuves,  près  du  contact 
avec  le  grauwacke,  il  renferme  de  petites  paillettes  isolées 
de  mica,  souvent  aussi  de  la  chiastolithe  ,  de  réj)idote  et 
des  filets  de  quarz.  Le  thonschiefer  de  transition  ,  caractérisé 
par  son  extrême  variabilité ,  c'est-à-dire  par  sa  tendance  con- 
tinuelle à  changer  de  composition  et  d'aspect,  contient  un 
grand  nouibre  découches,  dont  quelques-unes  ,  par  leur  répé- 
tition fréquente,  semblent  former  des  roches  alternantes  avec 
lui.  Les  effets  les  plus  habituels  de  ce  développement  inté- 
rieur sont  les  bancs  intercalés  de  grau^vachc  et  de  grauwacke 
schisteux  ;  de  calcaire  généralement  compacte  et  noir,  ou  gris- 


IND  187 

noirâtre,  quelquefois  rougeàtre  (Braunsdorf),  et  même  grenu 
et  blanc  (  Miltitz  en  Saxe),  comme  dans  le  groupe  §.20;  de 
griinstein;  de  porphyre  (Caucase;  Saxe,  près  Friedricliswalde 
et  Seidwitzgrund)  ;  de  schiste  alumineux ,  ou  ampélite  forte- 
ment carburée;  de  quarz  compacte  (quarzite;  quarzfels  de 
Hausmann),  quelquefois  avec  de  petits  cristaux  de  feldspath 
(Kemielf  en  Finlande);  de  lydienne  et  kieseischiefer.  Ces 
deux  dernières  substances  siliceuses  se  trouvent  à  la  fois 
dans  le  thonschiefer ,  le  grau\Yacke,  le  calcaire,  et  sous  la 
forme  de  jaspe  dans  le  porphyre  :  elles  attestent  par  leur 
présence  l'affinité  géognostique  qui  unit  ces  diverses  roches 
de  transition.  Le  thonschiefer  (§.  22)  renferme  moins  habi- 
tuellement :  des  bancs  intercalés  de  gneis  (Lokwitzgrund 
et  Neutanneberg)  ;  de  micaschiste  et  granité  (Krotte  en  Saxe; 
Fiirstenstein  en  Silésie;  Honlleur  en  Normandie;  Monthermé 
dans  les  Ardennes);  de  granité  et  syénite  (Caucase,  Co- 
tentin,  Calixelf  en  Norwége  )  ;  d'argiie  schisteuse  graphique 
(schwarze  kreide  :  vallée  de  Castillon  dans  les  Pyrénées  ; 
Ludwigstadt  en  Franconie  )  ;  de  schiste  novae ulaire  (wetz- 
schiefer);  de  serpentine  (Bochclta  près  de  Gênes;  Lovezara 
et  deux  autres  points ,  plus  au  nord  ,  vers  Voltaggio  : 
voyez  §.  19);  de  feldspath  compacte  (vallée  d'Arran  dans  les 
Pyrénées,  PouUaouen  en  Bretagne),  tantôt  pur,  noirâtre, 
gris-verdàtre  ou  vert  d'olive,  tantôt  (  Pyrénées,  Harz,  et 
partie  orientale  de  la  Haute -Egypte)  mêlé  de  cristaux  dis- 
séminés de  feldspath  lamelleux,  d'amphibole,  de  schorl  et 
de  quarz.  Lorsque  le  feldspath  compacte  est  simplement 
mêlé  d'amphibole,  il  forme  le  griinsteinschiefer  de  Werner, 
qui  alterne  avec  le  thonschiefer  de  transition  (  Ulleaborg  en 
Suède)  et  se  retrouve  dans  les  terrains  primitifs.  Quoique, 
comme  j'ai  tâché  de  le  prouver  dans  mon  Mémoire  sur  le 
/Sao-at'/rxç  et  xiBoç  'H^ctKXiict ,  publié  en  1790,  la  majeure 
partie  des  basaltes  des  anciens  soit  due  à  des  roches  syéni- 
tiques  de  transition  ,  ou  à  des  bancs  de  griinstein  intercalés 
à  des  roches  primitives,  l'examen  des  statues  égyptiennes 
conservées  à  Rome,  à  Naples,  à  Londres  et  à  Paris,  m'a  cepen- 
dant fait  naitre  l'idée  que  beaucoup  de  basaltes  noirs  et  verts  de 
nos  antiquaires  ne  sont  que  des  masses  de  feldspath  compacte 
tirées  de  terrains  intermédiaires,  et  colorées  soit  en  noir  soit  en 


388  IJVD 

vert  par  de  l'amphibole  .  par  de  la  chlorite  ,  par  du  carbonp 
ou  des  oxides  mét:illiques.  11  n'y  a  que  l'analyse  chimique  de 
ces  masses  anciennes  non  mélangées  qui  pourra  résoudre  cette 
question  d'archéologie  minéralogique.  M.  Beudant  a  vu,  dans 
le  terrain  de  transition  de  la  Hongrie,  des  grunstein  porphy- 
roides  se  transformer  en  une  pâte  verte  ou  noire  d'apparence 
homogène.  Cette  pâte  n'étoit  plus  qu'un  feldspath  compacte 
coloré  par  l'amphibole. 

Nous  avons  déjà  fait  observer  plus  haut  que  le  thonschiefer 
de  transition  forme  de  beaucoup  plus  grandes  masses  dans  le 
monde  que  le  thonschiefer  primitif.  Ce  dernier  est  générale- 
ment subordonné  au  micaschiste  ;  comme  formation  indépen- 
dante il  est  aussi  rare  dans  les  Pyrénées  et  les  Alpes  que  dans  les 
Cordillères.  Je  n'ai  même  vu  dans  l'Amérique  méridionale, 
entre  les  parallèles  de  lo"  nord  et  7°  sud,  de  thonschiefer  de 
transition  que  sur  la  pente  australe  de  la  chaîne  du  littoral  de 
Venezuela,  à  l'entrée  des  Llanos  de  Calabozo.  Ce  bassin  des 
Llanos,  fond  d'un  ancien  lac  couvert  de  formations  secondaires 
(grès  rouge,  zechstein  et  gypse  argileux),  est  bordé  par  une 
bande  de  terrain  intermédiaire  de  thon'schiefer ,  de  calcaire 
noir  et  d'euphotide ,  liée  à  des  griinstein  de  transition.  Sur  les 
gneis  et  micaschistes,  qui  ne  constituent  qu'une  seule  fonda- 
tion entre  les  vallées  d'Aragua  et  la  Villa  de  Cura ,  reposent 
en  gisement  concordant,  dans  les  ravins  de  Malpasso  et  de 
Piedras  azules,  des  thonschiefer  (direction  N.  52°E.;  inclin. 
70°  vers  le  NO.),  dont  les  couches  inférieures  sont  vertes,  stéa- 
titeuses  et  mêlées  d'amphibole;  les  supérieures  d'une  couleur 
gris-perlée  et  bleu -noirâtre.  Ces  thonschiefer  renferment 
(comme  ceux  de  Steben  en  Franconie,  du  duché  de  Nassau 
et  de  la  Peschels-Miihle  en  Saxe)  des  couches  de  grunstein, 
tantôt  en  masse ,  tantôt  divisé  en  boules. 

Dans  la  Nouvelle-Espagne,  le  fameux  filon  de  Guanaxuato, 
qui,  de  1786  a  i8o3.,  a  produit,  année  commune,  556, 000 
marcs  d'argent,  traverse  aussi  un  thonschiefer  de  transition. 
Cette  roche ,  dans  ses  strates  inférieurs  ,  passe ,  dans  la 
mine  de  Valenciana  (à  g32  toises  de  hauteur  au-dessus  du 
niveau  de  la  mer),  au  schiste  talqueux ,  et  je  l'ai  décrite , 
dans  mon  Essai  politique,  comme  placée  sur  la  limite  des  ter- 
rains primitifs  et  intermédiaires.  Un  ex;imeu  plus  approfondi 


IND  189 

des  rapports  de  gisement  que  j'avois  notés  sur  les  :..!jx,   la 
comparaison  des  bancs  de  S)'énite  et  de  serpentine  que  Ton  a 
percés  en  creusant  le  liro  gênerai,  avec  les  bancs  qui  sont  in- 
tercalés dans  les  terrains  de  transition  de  Saxe,  de  la  Bo.chetta 
de  Gênes  et  du  Cotentin,  me  donnent  aujourd'hui  la  certi- 
tude que  le  thonschiefer  de  Guanaxualo- appartient  aux  plus 
anciennes  formations  intermédiaires.  Nous  ignorons  si  sa  stra- 
tification est  parallèle   et  concordante  avec  celle  des  granites- 
gneis  de  Zacatecas  et  du  Penon  blanco  ,  qui  probablement  le 
supportent;  car  le  contact  de  ces  formations  n"a  point  été  ob- 
servé ;  mais  sur  le  grand  plateau  du  Mexique  presque  toutes 
les  roches  porphyriques  suivent  la  direction  générale  de  la 
«haîne   des  montagnes  (  N.  40° —  5o"0).  Cette  concordance 
parfaite    ( Gleichformigkeit  der  Lagerung)  s'observe  entre  le 
gneis  primitif  et  les    thonschiefer  de    transition  de  la  Saxe 
(Friedrichswalde  ;  vallées  de  laMuglitz,  Seidewitz  et  Lock- 
witz)  :  elle  prouve  que  la  formation  du  terrain  intermédiaire 
a  succédé  immédiatement  à  la  formation  des  dernières  cou- 
ches du  terrain  primitif.  Dans  les  Pyrénées,  comme  l'observe 
M.  de  Charpentier,  le  premier  de  ces  deux  terrains  se  trouve 
en  gisement  différent  (non  parallèle),  quelquefois  en  gise- 
ment /ransgreisf/ (iibergreifende  Lagerung)  avec  le  second. 
Je  rappellerai  à  cette  occasion  que  le  parallélisme  entre  la 
stratification  de  deux  formations  consécutives ,  ou  l'absence  de 
ce  parallélisme,  ne  décide  pas  seul  la  question  de  savoir  si  les 
deux  formations  doivent  être  réunies  ou  non  réunies  dans  un 
même  terrain  primitif  ou  secondaire  :  c'est  plutôt  l'ensemble  de 
tous  les  rapports  géognostiques  qui  décide  le  problème.  Le 
thonschiefer  de  Guanaxuato  est  très- régulièrement  stratifié 
(direct.  N.  46"  O.;  incl.  46°  au  SO.  ) ,  et  la  forme  des  vallées 
n'a  aucune   influence    sur  la  direction    et  l'inclinaison   des 
strates.  On  y  distingue  trois  variétés,  qu'on  pourroit  désigner 
comme  trois  époques  de  formation  :   un  thonschiefer  argenté 
et  stéatiteux  passant  au  schiste  talqueux  (talkschiefer)  ;   un 
thonschiefer  verdàtre,  à  éclat  soyeux,  ressemblant  au  schiste 
chlorité;  enfin,  un  thonschiefer  noir,  à  feuillets  très-minces, 
surchargé  de  carbone,    tachant  les  doigts  comme  l'ampélite 
et  le  schiste  marneux  duzechstein,  mais  ne  faisant  point  effer- 
vescence avec  les  acides.  L'ordre  dans  lequel  j'ai  nommé  ces 


i^o  IND 

variétés,  est  celui  dans  lequel  je  lésai  observées  de  bas  eu  haut 
dans  la  uiine  de  Valenciana  ,  qui  a  j63  toises  de  profondeur 
perpendiculaire;  mais,  dans  les  mines  de  Mellado,  d'Animas 
et  de  Ra^as,    le  thonschiefer  surcarburé    [hnja  de  libro)   se 
trouve  sous  la  variété  verte  et  stéatiteuse,  et  il  est  probable 
que  des  strates  qui  passent  au  schiste  talqueux,  à  la  chlorite 
et  à  Tampélite  ,  alternent  plusieurs  fois  les  uns  avec  les  autres. 
L'épaisseur  de  cette  formation  de  thonschiefer  de  transi- 
tion, que  j'ai  retrouvée  à  la  montagne  de  Santa-Rosa  près  de 
Los  Joares ,  où  les  Indiens  ramassent  de  la  glace  dans  de  petits 
bassins  creusés  à  mains  d'hommes,   est  de  plus  de  oooo  pieds. 
Elle  renferme,  en  couches  subordonnées,  non-seulement  de  la 
syénite   (comme  les  thonschiefer  de  transition  du  Cotentiu), 
mais  aussi,  ce  qui  est  trcs-reniarquable,  de  la  serpentine  et 
un  schiste  amphibolique   qui    n'est  pas  du  grunstein.    On  a 
trouvé,  en  creusant  en  plein  roc,   dans  le  toit  du  filou,  le 
grand  puits   de  tirage  de  Valenciana   (puits  qui   a   coûté  près 
de  sept  millions  de  francs),  de  haut  en  bas,  sur  quatre-vingt- 
quatorze  toises  de  profondeur,  les  strates  suivans  :  conglo- 
mérat ancien,    représentant  le  grès  rouge;   thonschiefer  de 
'  transition  noir,   fortement  carburé,  à  feuillets  très-minces; 
thonschiefer  gris-bleuàfre.    raagnésifère ,    talqueux;  schiste 
amphibolique,  noir-verdàfre  ,  un  peu  mêlé  de  quarz  et  de 
pyrites,  dépourvu  de  feldspath  ,  ne  passant  pas  au  grunstein, 
et  entièrement  semblable    au  schiste  amphibolique    (  horn- 
blendschiefer)    qui    forme   des  couches  dans  le  gneis  et  le 
micaschiste  primitifs  (§§.  5  et  1 1  )  ;  serpentine  vert  de  prase 
passant  au  vert  d'olive,  à  cassure  inégale  et  à  grain  fin,  inté- 
rieurement matte  ,  mais  éclatante  sur  les  fissures,  remplie  de 
pyrites  ,  dépourvue   de    grenats    et    de    diallage   métalloïde 
(schillerspath),  mélangée  de  talc  et  de  stéatite;  schiste  am- 
phibolique ;    syénite,  ou  mélange  grenu  de  beaucoup  d'am- 
phibole vert  -  noirâtre ,  beaucoup  de  quarz  jaunâtre  et  peu 
de  feldspath  lameileux  et  blanc.  Cette  syénite  se  fend  en  strates 
très-minces;  le  quarz  et  le  feldspath  y  sont  si  irrégulièrement 
répartis,  qu'ils  forment  quelquefois  de  petits  filons  au  milieu 
d'une  pâte  amphibolique. De  ces  huitcouches  intercalées,  dont 
la  direction  et  Tinclinaison  sont  exactement  parallèles  a  celles 
de  la  roche  entière,  la  syénite  forme  la  couche  la  plus  puissante. 


IND  igz 

Elle  a  plus  de  3o  toises  d'épaisseur,  et  comme  dans  les  travaux 
les  plus  profonds  de  la  mine  (  j)Iancs  de  Sau-Bernardo)  j'ai  vu 
à  170  toises  au-dessous  de  la  couche  desyénite,  reparoitre  un 
thonschiefer  carburé,  identique  avec  celui  à  travers  lequel 
on  a  commencé  à  creuser  le  nouveau  puits,  il  ne  peut  rester 
douteux  que  l'amphibole  schisteuse  alternant  deux  fois  avec  la 
serpentine ,  et  que  la  serpentine  alternant  probablement  avec 
la  syéni/e,  ne  forment  des  bancs  subordonnés  à  la  grande  masse 
de  thonschiefer  de  Guauaxuafo.  La  liaison  que  nous  venons 
de  signaler  entre  des  roches  amphiboliques  et  la  serpentine, 
se  retrouve  sur  d'autres  points  du  globe,  dans  des  forma- 
tions d'euphotide  de  diffcrens  âges  :  par  exemple,  au  Hcide- 
berg  près  Zelle  en  Franconie  (§.  19);  à  Kielwig,  à  l'extré- 
mité boréale  de  la  Nonvége  ;  à  Portsoy  en  Ecosse ,  et  à  l'ile  de 
Cuba  ,  entre  Régla  et  Guanavacoa. 

Je  n'ai  rencontré  ni  des  débris  de  corps  organiques,  ni 
des  couches  de  porphyres,  de  grauwacke  et  de  lydienne, 
dans  le  thonschiefer  de  transition  de  Guanaxuato,  qui  e«t  la 
roche  la  plus  riche  en  minerai  d'argent  qu'on  ait  trouvée  jus- 
qu'ici :  mais  ce  thonschiefer  est  recouvert  en  gisement  con- 
cordant,  dans  quelques  endroits,  de  porphyres  de  transition 
très -régulièrement  stratifiés  (los  Alamos  de  la  Sierra);  en 
d'autres  endroits,  de  grunsf^in  et  de  syénites  alternant  des 
milliers  de  fois  les  uns  avec  les  autres  (entre  l'Esperanza  et 
Comangillas)  ;  en  d'autres  encore,  ou  d'un  conglomérat  cal- 
caire et  d'une  roche  calcaire  de  transition  gris-bleuàtre ,  un 
peu  argileuse  et  à  petits  grains  (ravin  d'Acabuca),  ou  de 
grès  rouge  (Marfil).  Ces  rapports  du  thonschiefer  de  Gua- 
naxuato avec  les  roches  qu'il  supporte  ,  et  dont  quelques-unes 
(les  syénites)  préludent  comme  bancs  subordonnés ,  sufDsent 
pour  le  placer  parmi  les  formations  de  transition  ;  ils  justifie- 
ront surtout  ce  résultat  aux  yeux  des  géognostes  qui  connois- 
sent  les  observations  publiées  récemment  sur  les  terrains 
intermédiaires  de  l'Europe.  Quant  à  la  pierre  lydienne,  il  ne 
peut  y  avoir  aucun  doute  que  le  thonschiefer  de  Guanaxuato 
ne  la  renferme  sur  quelques  points  non  encore  e::plorés  ;  car 
j'ai  trouvé  cette  substance  fréquemment  enchâssée  en  gros 
fragmens  dans  le  congloniérat  ancien  (grès  rouge)  qui  re- 
couvre le  thonschiefer  entre  Valenciana,  Marfil  et  Cuevas. 


192  IND 

A  dix  lieues  au  sud  de  Cuevas,  entre  Queretaro  et  la  Cuesta 
de  la  Noria,  au  milieu  du  plateau  mexicain,  on  voit  sortir, 
sous  le  porphyre,  un  thonschiefer  (de  transition)  gris-noi- 
ràtre,  peu  tissile  et  passant  à  la  fois  au  schiste  siliceux  (jaspe 
schistoïde,  kieselschiefer)  et  à  la  lydienne.  Tout  près  de  la 
Koria  beaucoup  de  fragmens  de  lydienne  se  trouvent  épars 
dans  les  champs.  Les  roclies  à  filons  argentifères  de  Zaca- 
tecas  et  une  petite  partie  des  filons  de  Catorce  traversent 
aussi,  d'après  le  rapport  de  deux  minéralogistes  instruits, 
MM,  Sonneschmidt  et  Valencia,  un  thonschiefer  de  transi- 
tion qui  renferme  de  véritables  couches  de  pierre  lydienne 
et  qui  paroit  reposer  sur  des  syénites.  Cette  superposition 
prouveroit,  d'après  ce  qui  a  été  rapporté  sur  les  couches 
percées  dans  le  grand  puits  de  Valenciana,  que  les  thon- 
schiefer mexicains  constituent  (comme  au  Caucase  et  dans  le 
Cotenliu)  une  seule  formation  avec  les  syénites  et  les  eupho- 
tides  de  transition ,  et  que  peut-être  ils  alternent  avec  elles. 
Gramvacke.  Ce  nom  bizarre,  usité  parmi  les  géognostes  alle- 
mands et  anglois,  a  été  conservé,  comme  celui  de  thonschiefer, 
pour  éviter  une  confusion  de  nomenclature  si  nuisible  à  la 
science  des  formations.  Il  désigne,  lorsqu'on  le  prend  dans 
un  sens  plus  général,  tout  conglomérat ,  tout  grès,  tout  pou- 
dingue ,  toute  roche  fragmentaire  ou  arénacée  du  terrain  de 
transition,  c'est-à-dire  ,  antérieure  au  grès  rouge  et  au  terrain 
houiller.  Le  vieux  grès  rouge  (  old  red  sandstone  du  Here- 
fordshire)  de  M.  Buckland ,  placé  sous  le  calcaire  de  transi- 
tion (mountain  limestone)  de  Dcrbyshire,  est  un  grès  du 
terrain  intermédiaire,  comme  cet  excellent  géognoste  l'a 
très-bien  indiqué  lui-même  dans  son  Mémoire  sur  la  structure 
des  Alpes.  Le  nouveau  conglomérat  rouge  (  new  red  conglo- 
merate  d'Exeter  )  est  le  grès  rouge  des  minéralogistes  fran- 
çois,  ou  todte  iiegende  des  minéralogistes  allemands;  c'est  le 
premier  grès  du  terrain  secondaire ,  c'est-à-dire  le  grès  du 
terrain  houiller,  qui  est  intimement  lié  au  porphyre  secon- 
daire, appelé  pour  cela  porphyre  du  grès  rouge.  Lorsqu'on 
prend  le  mot  grauwacke  (trauniates  de  M.  d'Aubuisson,  psam- 
mites  anciens  et  mimopliyies  quarzeux  de  M.  Brongniart) 
dans  un  sens  plus  étroit,  on  l'applique  à  des  roches  aréna- 
cées  du  terrain  de  transition ,  qui  ne  renferment  que  de 


IND  195 

petits  fragmens  plus  ou  moins  arrondis  de  substances  sim- 
ples, par  exemple,  de  quarz ,  de  lydienne,  de  feldspnth  et 
de  thonschiefer  ,  non  des  fragmens  de  roches  composées.  On 
exclut  alors  des  grauwackes ,  et  l'on  décrit  sous  le  nom  de 
brèches  ou  conglomérats  à  gros  fragmens  primilifs  (§.  20),  les 
diverses  agglutinations  de  morceaux  de  granité,  de  gneis  et 
de  syénite  :  on  sépare  également  les  poudingues  calcaires  dans 
lesquels  des  fragmens  arrondis  de  chaux  carbonatée  sont 
cimentés  par  une  pâte  de  même  nature.  Toutes  ces  distinc- 
tions (si  l'on  en  excepte  certaines  brèches  calcaires  dans 
lesquelles  le  contenu  et  le  contenant  pourroient  bien  être 
quelquefois  d'une  origine  contemporaine)  ne  sont  pas  d'une 
grande  importance  pour  l'étude  des  formations.  Le  grau- 
wacke  grossier  (grosskornige  grauwacke)  passe  peu  à  peu 
au  conglomérat  à  gros  fragmens  ;  il  alterne  dans  une  même 
contrée,  non-seulement  avec  des  couches  de  grauwacke  à 
petits  grains,  mais  aussi  avec  d'autres  dont  la  pâte  est  presque 
homogène.  Les  poudingues  et  brèches  à  gros  fragmens  de  roches 
primitives  et  composées  (urfels-conglomerate  de  la  Valorsine 
en  Savoie,  et  de  Salvan  dans  le  Bas-Valais)  sont  de  vérita- 
bles grauwackes;  ce  sont  les  couches  les  plus  anciennes  de 
cette  formation ,  couches  dans  lesquelles  les  fragmens  à 
contours  distincts  ne  sont  pas  fondus  dans  la  masse,  et  dont 
le  ciment  schisteux  à  feuillets  courbes  et  ondulés  ressemble 
au  micaschiste,  tandis  que  le  ciment  des  grauwackes  plus 
récens  du  Harz,  du  duché  de  Nassau  etduMexique,  ressemble 
au  thonschiefer.  En  général ,  les  conglomérats  ou  grauwackes 
du  groupe  §.  20  offrent  des  fragmens  de  roches  préexistantes 
d'un  volume  plus  considérable  et  plus  inégal  que  les  grau- 
wackes du  groupe  §.  22. 

Lorsqu'on  compare  ceux-ci  au  calcaire  de  transition,  on 
les  trouve  le  plus  souvent  d'une  origine  antérieure;  quel- 
quefois ils  remplacent  même  le  thonschiefer  de  transition. 
L'antériorité  du  grauwacke  au  calcaire  se  manifeste  dans 
les  Pyrénées  et  en  Hongrie.  Il  paroît  que  dans  ce  dernier 
pays  le  thonschiefer  intermédiaire  n'a  pu  prendre  un  grand 
développement  ;  car,  loin  d'y  être  une  formation  indépen- 
dante qui  renferme  le  grauwacke  ,  c'est  au  contraire  le 
grauwacke  schisteux.  (  grauwacken-schiefer),  à  paillettes  de 
23.  i3 


Î94  IND 

mica  agglutinées  ,  qui  y  prend  tous  les  caractères  d'un  vrai 
schiste  de  transition.  En  Angleterre  aussi  ,  la  grande  masse 
isolée  des  montagnes  calcaires  (comtés  de  Derby,  de  Glo- 
cester  et  de  Sommerset)  est  d'un  âge  plus  récent  que  la 
grande  masse  de  grauwackes  qui  alternent  avec  quelques 
strates  calcaires;  mais,  lorsqu'on  examine  en  détail  les  points 
où  les  diiférens  membres  du  groupe  §.22  ont  pris  un  déve- 
loppement extraordinaire,  on  reconnoit  deux  grandes  forma- 
tions calcaires  (transition-limestone  de  Longhope,  et  mountain- 
limesfone  du  Derbyshire  et  de  South-Wales),  alternant  avec 
deux  formations  degrauwacke  (greywacke  de  May-Hill  et  old 
red  sandstone  de  Mitchel-Dean  en  Herefordshire ).  Cet  ordre 
de  gisement,  cette  bisection  des  masses  calcaires  et  aréna- 
cées  se  trouve  répétée  sur  plusieurs  points  du  globe.  M.  Beu- 
dant  a  reconnu  ,  en  Hongrie,  le  vieux  grès  rouge  de  l'Angle- 
terre dans  le  grès  quarzeux  de  transition  de  Ncusohl ,  qui 
surmonte  des  grauwackes  à  gros  grains  après  y  avoir  été 
intercalé  :  il  croit  reconnoître  le  mountain-limestone,  placé 
entre  le  vieux  grès  rouge  et  le  terrain  houiller  d'Angleterre, 
dans  le  calcaire  intermédiaire  du  groupe  de  Tatra.  Si  l'Ol- 
denhorn  et  les  Diablerets,  comme  il  est  très -probable,  ap- 
parliennent  au  terrain  de  transition,  il  y  a  aussi  en  Suisse, 
an-dessus  et  au-dessous  du  g^au^vacke  de  la  Dent  de  Cha- 
mossaire,  deux  grandes  formations  de  calcaires  noirs,  que  M. 
de  Buch ,  depuis  long-temps,  a  distingués  sous  les  noms  de 
premier  et  second  calcaire  de  transition.  En  Norwége  (Chris- 
tianiafiord)  le  grauwacke  est  décidément  plus  nouveau  que 
le  thonschiefer  intermédiaire  et  le  calcaire  à  orthocératites. 

Dans  le  centre  de  l'Europe ,  le  grauwacke  à  très-petits  grains 
offre  quelquefois  des  fragmens  de  cristaux  de  feldspath  lamel- 
leux  qui  lui  donnent  un  arpect  porphyroïde  (Pont  Pelissier  prés 
Servez  ;  Elm  ,  dans  le  passage  du  Spliigen  ;  Neusohl ,  en  Hong- 
rie) ;  mais  il  ne  faut  pas  confondre  ces  variétés  d'une  roche 
arénacée  avec  des  bancs  de  porphyre  intercalés.  Nous  verrons 
bientôt  que,  dans  les  deux  continens,  ces  cristaux  brisés  de 
feldspath  se  retrouvent  dans  le  grès  rouge,  et  dans  un  con- 
glomérat feldspathique  beaucoup  plus  récent.  Dans  l'hémi- 
sphère austral  ,  le  grauwacke  forme  ,  d'après  M.  d'Eschwege, 
la  pente  orientale  des  montagnes  du  Brésil.  Aux  États- unis 


IND  195 

j'ai  trouvé  cette  même  roche  (chaîne  des  Aleghanys)  renfer- 
mant des  bancs  de  lydienne  et  de  calcaires  noirs,  entière- 
ment semblables  à  ceux  du  terrain  de  transition  du  Harz. 
M.  Maclure  a,  le  premier,  déterminé  les  véritables  limites 
des  grauwackes  depuis  la  Caroline  jusqu'au  lac  Champlain. 
Dans  le  nord  de  l'Angleterre  (Cumberland,  Westmoreland) 
cette  roche  offre  des  couches  de  porphyres  grenatifères. 

Calcaire  de  transition.  Cette  roche  commence,  ou  par  former 
des  couches  dans  le  grauwacke  et  le  thonschiefer  intermé- 
diaires, ou  par  alterner  avec  eux  :  plus  tard,  le  thonschiefer 
et  le  grauwacke  schisteux  disparoissent ,  et  le  calcaire  su- 
perposé devient  une  formation  simple,  que  l'on  seroit  tenté 
de  croire  indépendante,  quoiqu'elle  appartienne  toujours 
au  groupe  §.  22,  Lorsqu'il  y  a  alternance  de  schiste  et  de 
calcaire ,  cette  alternance  a  lieu  ,  ou  par  couches  épaisses 
(cime  de  la  Bochetta  près  de  Gênes,  et  chemin  entre  Novi 
et  Gavi),  comme  dans  les  formations  composées  de  granité  et 
gneis,  de  grauwacke  et  grauwacke  schisteux,  de  syéaite  et 
griinstein  ,  de  thonschiefer  et  porphyre  ;  ou  bien  l'alternance 
s'étend  aux  feuillets  les  plus  minces  des  roches  (calschistes), 
de  sorte  que  chaque  lame  de  schiste  est  soudée  sur  une  lame 
calcaire  (vallées  de  Campan  et  d'Oueil,  dans  les  Pyrénées  ; 
montagnes  de  Poinik  en  Hongrie). 

De  même  que  dans  les  Pyrénées  on  trouve  intercalés  au 
granite-gneis  et  au  micaschiste  primitifs  des  calcaires  que 
par  leur  seul  aspect  on  croiroit  intermédiaires  ,  savoir,  des 
calcaires  noir -grisâtre  (Col  de  la  Trappe)  colorés  par  du 
graphite,  qui  est  la  plus  ancienne  des  substances  carburées , 
des  calcaires  fétides ,  répandant  l'odeur  de  l'hydrogène  sul- 
furé, et  des  calcaires  compactes  remplis  de  chiastolithes  :  de 
même  aussi  les  terrains  de  transition  du  groupe  §.  22  présen- 
tent quelques  exemples  de  calcaires  blancs  et  grenus  (Miltitz, 
en  Saxe;  vallées  d'Ossan  et  de  Soubie ,  dans  les  Pyrénées). 
En  général,  cependant,  si  Ton  en  excepte  le  groupe  §.  20 
(celui  dont  la  Tarantaise  offre  le  type),  les  calcaires  de 
formation  intermédiaire  sont  ou  compactes ,  ou  passent  au 
grenu  à  très -petits  grains.  Leurs  teintes  sont  plus  obscures 
(gris  cendré,  gris  noir)  que  celles  des  calcaires  primitifs. 
Le  plus  grand  nombre  des  belles  variétés  de  marbres  rouges 


igG  IND 

(vallée  de  Liichon  des  Pyrénées),  verts  et  jaunes ,  célèbres 
parmi  les  antiquaires  sous  les  noms  de  marbre  africain  fleuri , 
noir  de  Lucullus  ,  jaune  et  rouge  antique,  pavonazzo  et  brèche 
dorée,  me  semblent  appartenir  à  des  calcaires  et  conglomé- 
rats calcaires  de  transition.  Nous  avons  vu  plus  haut  que  . 
la  chiastolithe  du  thonschiefer  de  transition  se  montre  par 
exception  dans  le  thonschiefer  primitif:  c'est  d'une  manière 
analogue  que  la  trémolithe ,  si  commune  dans  la  dolomie  et 
le  calcaire  blanc  primitif,  se  trouve  par  exception  (entre 
Giellebeck  et  Drammen  en  Norwége)  dans  le  calcaire  noir  de 
transition.  Certaines  espèces  minérales  appartiennent  sans 
doute  plus  à  tel  âge  qu'à  tout  autre  ;  mais  leurs  rapports  avec  les 
formations  ne  sont  pas  assez  exclusifs  pour  en  faire  des  carac- 
tères diagnostiques  dans  une  science  dans  laquelle  le  gisement 
seul  peut  décider  d'une  manière  absolue.  Souvent  des  circons- 
tances locales  ont  singulièrement  influé  sur  les  liaisons  que 
l'on  observe  entre  les  espèces  minérales  et  les  terrains.  Dans 
les  Pyrénées  et  surtout  dans  FAmérique  méridionale  ,  les 
grenats  disséminés  sont  propres  au  gneis,  tandis  que  partout 
ailleurs  ils  semblent  plutôt  appartenir  au  micaschiste. 

Les  calcaires  de  transition,  là  oii  ils  forment  de  grandes  masses 
isolées,  abondent  en  silice:  et  tantôt  (chaîne  des  Pyrénées) 
cette  silice  se  trouve  réunie  en  cristaux  de  quarz  ;  tantôt 
(chaîne  des  Alpes)  elle  est  mêlée  à  la  masse  entière ,  comme 
un  sable  très-fin.  Dans  la  première  de  ces  chaînes  le  cal- 
caire intermédiaire  renferme,  comme  le  calcaire  primitif, 
des  couches  de  griinstein  (vallée  de  Saleix)  et  même  de  feld- 
spath compacte ,  deux  roches  qui  généralement  sont  plus 
communes  dans  le  thonschiefer  intermédiaire.  Les  bancs  de 
griinstein  se  trouvent  aussi,  d'après  M.  Mohs,  dans  le  calcaire 
de  transition  de  la  Styrie  ,  et  les  mandelstein  du  mountain- 
limestone  du  Derbyshire  (entre  Sheffield  et  Castelton)  ap- 
partiennent à  un  système  de  couches  intercalées  géognosti- 
quement  analogues.  Ces  couches  prennent  souvent  l'aspect 
de  véritables  filons. 

Le  prodigieux  développement  que  le  calcaire  intermédiaire 
atteint  dans  la  haute  chaîne  des  Alpes,  pourroit  faire  croire 
que  le  groupe  §.  22  renferme  deux  formations  distinctes, 
dont  l'une,  plus  ancienne,  embrasse  les  schistes  et  les  grau- 


IND  197 

vvackes  avec  des  porphyres  et  des  calcaires  intercalés,  et 
l'autre  ,  d'un  âge  plus  récent ,  les  calcaires  considérés  corniiic 
roches  indépendantes  ;  mais  cette  séparation  ne  nie  paroï- 
troit  pas  suffisamment  justifiée  par  la  constitution  géo.^nos- 
tique  des  terrains.  En  Suisse,  comme  en  Angleterre ,  de 
grandes  masses  calcaires  alternent  avec  des  roches  Ira  uien- 
taires  de  transition,  et  ces  mûiies  calcaires,  qu'on  voudroit 
élever  au  rang  de  formations  indépendantes  ,  manifestent 
par  des  bancs  intercalés  une  liaison  intime  avec  tous  les 
autres  membres  du  groupe  §.  2j.  Dans  le  calcaire  intermé- 
diaire des  Diablerets  et  de  rOldcnhorn,  M.  de  Charpentier  a 
observé  des  couches  de  grauu  acke  schisteux.  D'après  ce  même 
géognoste  expérimenté,  le  gypse  muriatifère  de  Bex  est 
subordonné  à  un  calcaire  de  transition  qui  repose  sur  du 
grauwacke,  et  qui  alterne  à  la  fois  avec  cette  dernière  roche 
et  avec  du  thonschiefer  de  transition.  Les  assises  inférieures 
du  calcaire  de  transition  sont  très -noires  et  remplies  de  bé- 
lemnites  ;  les  assises  supérieures  sont  argileuses  et  renferment 
des  ammonites.  Le  gypse  anhydre,  dans  lequel  le  sel  gemme 
est  disséminé,  appartient  à  ces  assises  supérieures  :  il  offre 
à  son  tour  des  bancs  subordonnés  de  gypse  commun  ou 
hydraté  ,  de  calcaire  compacte ,  de  thonschiefer ,  de  grau- 
wacke et  de  brèches.  C'est  ainsi  que  chaque  dépôt  de  sel ,  de 
houille  et  de  minerai  de  fer ,  dans  les  terrains  intermédiaire 
et  secondaire,  renferme  de  petites  formations  locales,  qu'il  ne 
faut  pas  confondre  avec  les  véritables  termes  de  la  série 
géognostique.  D'après  les  observations  de  M.  de  Charpentier 
et  M.  Lardy,  le  gypse  du  terrain  secondaire,  en  ne  considé- 
rant que  de  grandes  masses,  est  toujours  hydraté  (Thuringe), 
tandis  que  le  gypse  de  transition  (Bex)  est  anhydre  ou  hy- 
draté épigène.  Les  opinions  des  géognostes  sont  d'ailleurs 
encore  partagées  sur  Tàge  du  dépôt  salifère  de  la  Suisse.  M. 
deBuch,  dans  ses  lettres  à  M.  Escher,  publiées  en  1809, 
semble  placer  le  gypse  muriatifère  de  Bex  entre  le  grauwacke 
de  la  Dent  de  Chamossaire  et  le  conglomérat  deSepey  :  MM. 
de  Bonnard  et  Beudant  le  regardent  comme  secondaire  et 
appartenant  soit  au  grès  houiller  soit  au  zechstein.  Il  nous 
avoit  paru  tel  aussi ,  à  M.  Freiesleben  et  à  moi ,  lorsque  nous 
avons  examiné  ces  contrées  en  lygS. 


'98  IND 

Dans  la  chaîne  des  P^'rénées ,  la  limite  entre  les  ferrainv 
de  transition  (  Pic  long  ,  1668  toises;  Pic  d'Estals,  i55o  toises) 
et  les  terrains  de  grès  rouge  (montagnes  de  Larry,  1100 
toises)  et  de  calcaire  alpin  (Montperdu,  1747  toises)  est 
très-nettement  tracée.  Partout  où  il  y  a  du  grès  rouge,  on 
peut  distinguer  deux  calcaires  ,  un  qui  recouvre  le  grès 
rouge  et  un  qui  le  supporte.  Le  premier  de  ces  calcaires, 
quelles  que  soient  sa  composition  et  sa  couleur,  est,  pour 
le  géognosfe  qui  nomme  les  formations  d'après  le  gisement, 
un  calcaire  alpin  (zechstein);  le  second  est  un  calcaire  de 
transition.  Dans  la  haute  chaîne  des  Alpes,  et  nous  revien- 
drons plus  tard  sur  cet  cbiet  intéressant,  le  grès  rouge  n'est 
pas  plus  caractérisé  qu'il  ne  Pest  dans  une  grande  partie  de 
la  Cordillère  des  Andes  ;  on  peut  même  révoquer  en  doute 
s'il  y  existe.  Il  est  donc  assez  naturel  que  la  limite  entre  le 
calcaire  alpin  ou  zechstein  et  le  calcaire  de  transition  le 
plus  récent  ne  puisse  pas  y  être  reconnue  avec  certitude.  Les 
calcaires  de  la  bande  méridionale  des  Alpes,  savoir,  de  la 
Dent  du  Midi  de  Saint-Maurice,  de  la  Dent  de  Morale,  des 
Diablerets  (si  Ton  en  excepte  la  sommité  très- coquillière 
au  nord-est  de  Bex),  de  l'Oldenhorn ,  du  Gemmi,  de  la 
Jungfrau,  du  Titlis  et  du  Todi ,  sont  aussi  évidemment  de 
transition,  que  les  calcaires  de  Longhope,  deDudley  ou  de 
Derbyshire,  en  Angleterre  ;  que  ceux  des  vallées  de  Campan 
et  de  Luchon  dans  les  Pyrénées;  que  ceux  de  Namur  en 
Belgique,  de  Blankenbourg  ,  d'Elbingerode,  de  Scharzfeld  et 
du  Schnéeberg  près  de  Vienne  ,  en  Allemagne.  Cette  évidence 
est  beaucoup  moins  grande  pour  la  bande  calcaire  septentrio- 
nale des  Alpes,  pour  la  roche  du  Mole,  de  la  Dent  d'Oche, 
duMolesson,  de  la  Tour  d'Ay,  de  la  Dent  de  Jament,  duStock- 
horn  ,  du  Glarnisch  et  du  Sentis  ,  que  quelques  géognostes  célè- 
bres prennent  pour  du  zechstein  ,  d'autres  pour  la  formation 
la  plus  récente  des  calcaires  de  transition.  Les  roches  de  la 
bande  méridionale  et  septentrionale  des  Alpes  ont  été  sou- 
vent confondues  sous  une  dénomination  commune,  celle  de 
calcaire  des  hautes  montagnes  (Hochgehirgslcalkstein)  ;  dénomi- 
nation qui  seroit  plus  vague  encore  que  celle  de  calcaire 
alpin  ,  si  l'on  y  attachoit  une  idée  de  gisement  géographique 
et  si  elle  n'exprimoit  que  la  position  de  certaines  roches  à 


IND  199 

de  très-grandes  hauteurs.  Le  mot  calcaire  alpin,  regardé 
dans  son  origine  comme  synonyme  de  zechstein ,  inclique  un 
gisement  géognostique ,  une  formation  placée,  fjue  ce  soit 
dans  les  plaines  ou  dans  des  chaînes  de  montagnes  trés-élevécs, 
immédiatement  au-dessus  du  près  rouge.  C'est  un  fait  assez 
remarquable  que  le  calcairea  encrinites(niountain-limertone), 
et  même  le  conglomérat  de  transition  (old  red  saiidstoise) 
qui  supporte  ce  calcaire,  contiennent,  en  Angleterre  et  en 
Ecosse,  quelques  traces  de  houille  qui  difï'ére  de  l'antliracite. 

Les  véritables rflrto/i'Ties  (Durance,  Mont-Rose),  quioHrent 
des  nodules  de  feldspath  couipacte ,  disséminés  dans  un  mé- 
lange intime  presque  homogène  d'amphibole,  de  chlorithe  (?) 
et  de  feldspath  ,  appartiennent  soit  au  groupe  que  nous  venons 
de  décrire,  soit  au  groupe  suivant.  Peut-être  ne  sont-elles  que 
des  bancs  intercalés  à  un  griinstein  porphyroide,  bancs  dans 
lesquels  une  portion  du  feldspath  s'est  dégagée  du  tissu  de  la 
masse.  On  n'a  long-temps  connu  ces  variolithes  que  comme 
galets  ou  en  gros  fragmens  détachés  :  il  ne  faut  pas  les  con- 
fondre avec  les  variolithes  à  nœuds  de  spath  calcaire  (blat- 
tersteine),  subordonnées  au  thonschiefer  vert  de  transition, 
ni  avec  les  variolithes  qui  naissent  par  infiltration  dans  le 
mandelstein  du  grès  rouge. 

Quoique  nous  soyons  bien  loin  encore  de  pouvoir  compléter 
l'histoire  de  chaque  terrain  intermédiaire  et  secondaire  par 
l'énumération  des  espèces  de  corps  fossiles  qui  s'y  trouvent, 
nous  allons  pourtant  indiquer  quelques-uns  de  ces  débris  or- 
ganiques qui  semblent  caractériser  le  groupe  §.  22.  Dans  le 
thonschiefer  et  le  grauwacke ,  surtout  dans  le  grauwacke  schis- 
teux :  plantes  monocotylédones  (arundinacécs  ou  bambou- 
sacées),  antérieures  peut-être  aux  animaux  les  plus  anciens  j 
entroques  ,  corallites  ,  ammonites  (vallées  de  CastiIJon  dans 
les  Pyrénées;  base  de  la  montagne  de  Fis,  en  Savoie;  duché 
de  Nassau  et  Hai'z  ,  en  Allemagne);  hystérolithes ,  orthocé- 
ratites ,  beaucoup  plus  rares  que  dans  le  calcaire  intermé- 
diaire; pectinites  (Gerolstein,  en  Allemagne)  ;  trilobites 
aveugles  de  M.  "VVahlerberg ,  dans  lesquels  on  ne  voit 
aucune  trace  d'yeux  (Olstorp,  en  Suède);  ogygies  de  M. 
Brongniart  ,  dans  lesquels  les  yeux  ne  sont  pour  ainsi  dire 
qu'indiqués  par  deux  tubcrosités  sur  le  chaperon  (Angers  et 


200  IND 

Amérique  septentrionale)  ;  calymène  de  Tristan  et  calyméne 
macrophtalnie  de  Brongniart  (Bretagne,  Cotcntin).  Dans  le 
calcaire,  savoir,  dans  les  couches  plus  anciennes  :  entroques, 
madrépores,  béleninites  (Bex,  en  Suisse;  Pic  de  Bedillac, 
dans  les  Pyi'f'Jiées)  ;  quelques  ammonites,  jamais  pai*  bancs, 
mais  isolés;  des  orlhocératites ,  Asaphus  Buchii,  A.  Haus- 
manni  (pays  de  Galles,  Suède);  très-peu  de  coquilles  bivalves. 
Dans  les  couches  plus  récentes  du  calcaire  :  Calymène  Blu- 
menbachii  (Dudley  en  Angleterre  ,  et  Miami  dans  l'Amé- 
rique du  nord)  ,  Asaphus  caudatus  de  Brongniart  ;  des  am- 
monites, des  térébratules,  des  orthocératites,  quelques  gry- 
phites  (Namur,  Avesnes)  ;  des  encrinites.  En  Allemagne ,  le 
calcaire  de  transition  est  quelquefois  (Eiffel  et  duché  de 
Bergen)  tout  pétri  de  coquilles.  Le  calcaire  grenu  de  File  de 
Paros  (Link,  Urwelt ,  pag.  2)  doit,  d'après  un  passage  de 
Xénophane  de  Colophon,  conservé  dans  Origène  (Pliiloso- 
phumena,  c.  14,  T.  I,p.  8g5,  B.  edit.  Delarue),  renfermer  des 
débris  organiques;  mais  il  reste  bien  douteux,  selon  qu'on 
lit  Saipvti  ou  à(pvi) ,  si  ces  débris  sont  du  règne  végétal  (  du 
Lois  de  laurier),  ou  du  règne  animal  (Fempreinte  d'un 
anchois).  Nous  n'insistons  pas  sur  cette  détermination;  car 
il  seroit  possible  que  le  marbre  de  Paros  fût  aussi  peu  primitif 
que  le  marbre  de  Carare ,  sur  lequel  je  partage  les  doutes 
de  plusieurs  géognostes  célèbres.  Le  phénomène  des  grottes 
ne  s'oppose  cependant  pas  à  la  haute  antiquité  des  calcaires 
de  l'Archipel:  il  y  en  a  dans  quelques  pays  (Silésie,  près 
Kaufungen  ;  Pyrénées,  vallées  de  Naupounts  et  montagne  de 
Meigut  )  qui  paroissent  appartenir  au  calcaire  primitif. 

IV  et  V.  Porphyres  ,    Syénites  et   Grunstein    postérieurs  au 

ThONSCHIEFER   de   transition.    gi'ELQUEFOIS    MÊME  AU    CALCAIRE 
A    ORTHOCÉRATITES. 

§.  20.  Je  réunis  en  deux  groupes,  qui  peut-être  n'en  for- 
ment qu'un  seul,  les  porphyres,  les  griinstein  porphyriques 
et  les  syénites  que,  dans  les  deux  hémisphères  ,  j'ai  vus  recou- 
vrir le  thonschiefer  de  transition.  Ces  roches,  par  leur  com- 
position et  leurs  rapports  avec  les  trachytes  qui  leur  sont  im- 
médiatement superposés,  offrent  beaucoup  d'analogie  avecle 
groupe  plus  ancien  §.21.  C'est  dans  ces  porphyres  et  grun- 


IND  201 

stein  porphyriques  que  l'on  a  découvert,  au  nord: de  Téqua- 
teur,  au  Mexique  et  en  Hoîi^rie,  d'immenses  richesst-s  de 
minerais  d'or  et  d'argent;  car,  quoique  la  roche  métallifère 
de  Schemnitz  (saxum  metalliferum  de  Born  )  soit  peut-être 
postérieure  à  des  calcaires  de  transition  renfermant  quelques 
foibles  débris  organiques,  ce  gisement,  d'après  l'opinion  d'un 
géognoste  célèbre,  M.  Beudant,  est  trop  incertain,  pour 
séparer  des  formations  aussi  étroitement  unies  que  celles  de 
la  Nouvelle -Espagne  et  de  la  Hongrie..  Les  syénites  à  zircons, 
les  granités  de  transition  et  les  porphyres  de  Norwége ,  que 
MM.  de  Buch  et  Hausmann  nous  ont  fait  connoîtrc ,  sont 
non-seulement  postérieurs  (Stromsoë,  Krogskoven)  au  grau- 
wacke  et  à  un  thonschiefer  qui  alterne  avec  le  calcaire  à 
orthocératites  ,  mais  ces  roches  recouvrent  aussi  (Skeen)  im- 
médiatement un  quarzite  (quarzfels)  qui  représente  le  grau- 
^vacke  et  qui  repose  sur  un  calcaire  noir  dépourvu  de  cou- 
ches alternantes  de  thonschiefer. 

11  résulfe  de  ces  considérations  qu'on  auroit  des  motifs 
très -valables  pour  réunir  les  groupes  §§.  ■j'S  et  24,  en  ne 
distinguant,  parmi  les  porphyres  de  transition,  que  deux 
formations  indépendantes,  antérieures  et  postérieures  au 
thonschiefer,  et  une  troisième  formation  (  §.  22)  subor- 
donnée à  cette  roche.  La  propriété  qu'ont  certains  por- 
phyres et  S}énitcs  porphyriques  d'être  éminemment  métal- 
lifères, ne  doit  pas  s'opposer,  je  pense,  à  la  réunion  des 
roches  du  Mexique,  de  1-a  Hongrie,  de  la  Saxe  et  de  la 
Norwége.  Les  minerais  d'or  et  d'argent  n'y  forment  pas 
des  couches  contemporaines,  mais  des  filons  qui  atteignent 
une  puissance  extraordinaire.  Des  porphyres  de  transition, 
dont  on  seroit  tenté  de  placer  plusieurs  parmi  les  trachytes, 
parce  qu'ils  renferment  de  véritables  couches  de  phonolithe 
avec  feldspath  vitreux,  participent  à  cette  richesse  minérale 
que  parmi  les  terrains  postérieurs  aux  terrains  primitifs  l'on 
a  crue  trop  long-temps  exclusivement  propre  aux  thonschiefer 
carburé  et  micacé,  au  grauwacke  et  au  calcaire  de  transition. 
Dans  ces  mêmes  l'égions ,  il  existe  des  groupes  de  porphyres 
et  de  syénites  très- analogues  ,  par  leur  composition  minéra- 
logique  et  leur  gisement,  aux  roches  des  plus  riches  mines 
de  Schemnitz  ou  de  la  Nouvelle -Espagne ,  et  qui  néanmoins 


=02  IND 

se  trouvent  entièrement  dépourvus  de  métaux.  C'est  presque 
le  cas  de  tous  Its  porphyres  de  transition  (et  des  roches 
trachytiques  )  de  l'Amérique  méridionale.  Les  grandes  ex- 
ploitations du  Pérou,  celles  de  Hualgayoc  ou  Chota ,  et 
de  Llauricocha  ou  Pasco ,  ne  sont  pas  dans  le  porphyre  ,  mais 
dans  le  calcaire  alpin.  Dans  la  république  de  Buénos-Ayres , 
le  fameux  Ccrro  del  Potosi  est  composé  de  thonschiefer  (de 
transition?)  recouvert  de  porphyre  qui  contient  des  grenats 
disséminé.";. 

Si  les  grands  dépôts  argentifères  et  aurifères  qui  font  de- 
puis des  siècles  la  richesse  de  la  Hongrie  et  de  la  Transyl* 
vanie ,  se  trouvent  uniquement  au  milieu  des  syénites  et 
des  griinstein  porphyriques  ,  il  ne  faut  point  en  conclure 
qu'il  en  est  de  même  dans  la  Nouvelle -Espagne.  Sans  doute 
les  porphyres  mexicains  ont  offert  des  exemples  isolés  d'une 
prodigieuse  richesse.  A  Pachuca,  le  seul  puits  de  tirage  de 
l'Encino  a  fourni  pendant  long- temps  annuellement  plus  de 
3o,ooo  marcs  d'argent  :  en  1726  et  1727  ,  les  deux  exploita- 
tions de  la  Biscaina  et  du  Xacal  ont  donné  ensemble  642,000 
marcs  ,  c'est-à-dire  presque  deux  fois  autant  qu'en  ont  donné, 
dans  le  même  intervalle  ,  toute  l'Europe  et  toute  laRussie  asia- 
tique. Ces  mêmes  porphyres  de  Real  del  Monte,  qui  par  leurs 
couches  supérieures  se  lient  aux  trachy  tes  porphyriques  et  aux 
perlites  avec  obsidiennes  du  Cerro  de  las  Navajas,  ont  fourni 
par  l'exploitation  de  la  mine  de  la  Biscaina  au  comte  de  Régla 
(de  1762  à  1781)  plus  de  onze  millions  de  piastres.  Cependant 
ces  richesses  sont  encore  inférieures  à  celles  que  l'on  retire  , 
dans  le  même  pays,  de  formations  de  transition  non  porphyri- 
ques. I,a  Veta  negra  de  Sombrerete,  qui  traverse  un  calcaire 
compacte  rempli  de  rognons  de  pierre  lydienne,  a  offert 
l'exemple  de  la  plus  grande  abondance  de  minerais  d'argent 
qu'on  ait  observée  dans  les  deux  mondes .-  la  famille  de  Fagoaga 
ou  du  marquis  del  Apartado  en  a  retiré  en  peu  de  mois  un 
profit  net  de  quatre  millions  de  piastres.  La  mine  de  Valen- 
ciana,  exploitée  dans  du  schiste  de  transition,  a  été  d'un  pro- 
duit si  constant  que  ,  jusqu'à  la  fin  du  dernier  siècle  ,  elle  n'a 
pas  cessé  de  fournir  annuellement ,  pendant  quarante  années 
consécutives,  au-delà  de  56o,ooo  marcs  d'argent.  En  général 
dans  la  partie  centrale  de  la  Nouvelle -Kspagne ,  où  les  por- 


IND  2o5 

phyres  sont  frëquens ,  ce  n'est  point  cette  roche  qui  fournit 
les  métaux  précieux  aux  trois  grandes  exploitalioi.s  ne  Gua- 
naxuato  ,  de  Zacatecas  et  de  Catorce.  Ces  trois  districts  de 
mines,  qui  donnent  la  moitié  de  tout  Fur  et  l'argent  mexi- 
cain, sont  situés  entre  les  18°  et  25"  de  latitude  boréale.  Les 
mineurs  y  travaillent  sur  des  gites  de  mii.rrjih  contenus  presque 
entièrement  dans  des  terrains  de  thonschieter  intermédiaire, 
de  grauwacke  et  de  calcaire  alpin  :  je  ois,  presque  entière- 
ment; car  la  fameuse  Veta  madré  de  Guanaxuato ,  plus  riche 
que  le  Potosi ,  et  fournissant  jusqu'en  1804,  année  com- 
mune, un  sixième  de  l'argent  que  l'Amérique  verse  dans  la 
circulation  du  monde  entier  ,  traverse  à  la  fois  le  thon- 
schiefer  et  le  porphyre.  Les  mines  de  Belgrade  ,  de  San- 
Bruno  et  de  Marisanchez,  ouvertes  dans  la  partie  porphyri- 
lique  au  sud-est  de  Valenciana,  ne  sont  que  de  très-peu 
d'importance.  D'autres  exploitations,  dirigées  sur  les  por- 
pliyres  du  groupe  §.  23  (Real  del  Monte,  Moran,  Pachuca  et 
Bolailos  )  ,  ne  fournissent  aujourd'hui  pas  au-delà  de  100,00a. 
marcs  ou  un  vingt-cinquième  de  l'argent  exporté  (i8o3) 
du  port  de  la  Vera-Cruz.  J'ai  cru  devoir  consigner  ici  ces 
faits,  parce  que  la  dénomination  de  porphyres  métallifères^ 
dont  je  me  suis  souvent  servi  dans  mes  ouvrages,  peut  donner 
lieu  à  l'erreur  de  regarder  les  richesses  métalliques  du  nouveau 
monde  comme  dues  en  très-grande  partie  aux  porphyres  de 
transition.  Plus  on  avance  dans  l'étude  de  la  constitution  du 
globe  sous  les  différens  climats  ,  plus  on  reconnoit  qu'il  existe 
à  peine  une  roche  antérieure  au  calcaire  alpin,  qui,  dans  de 
certaines  contrées,  n'ait  été  trouvée  très-argentifère.  Le  phé- 
nomène de  ces  filons  anciens  dans  lesquels  se  trouvent  dépo- 
sées nos  richesses  métalliques  (peut-être  comme  le  fer  oligiste 
spéculaire  et  le  muriale  de  cuivre  sont  déposés  et  remontent 
encore  de  nos  jours  dans  les  crevasses  des  laves),  est  un  phé- 
nomène qui  paroît  pour  ainsi  dire  indépendant  de  la  nature 
spécifique  des  roches. 

Pour  donner  une  idée  précise  de  la  composition  du  terrain 
de  porphyre,  syénite  et  griinstein ,  postérieur  au  thonschie- 
fer  de  transition  ,  il  est  nécessaire,  dans  l'état  actuel  de  la 
science,  de  distinguer  quatre  formations  partielles ,  savoir, 
celles 


204  ïfsT) 

de  la  région  équinoxiale  du  nouveau  continent, 

de  la  Hongrie  , 

de  la  Saxe  et 

de  la  Norwége. 
Malgré  les  rapports  qui  unissent  ces  formations  partielles, 
cîiacune  d'elles  offre  des  différences  assez  remarquables.  Nous 
les  désignerons  par  des  noms  purement  géographiques,  selon 
les  lieux  qui  en  présentent  les  tjpes  les  plus  distincts,  sans  vou- 
loir indiquer  par  là  qu'on  ne  puisse  trouver  la  formation  de 
Hongrie  dans  le  nouveau  continent,  ou  celle  de  Guanaxuato, 
avec  toutes  les  circonstances  qui  l'accompagnent,  dans  quel- 
ques parties  de  l'Europe. 

A.  Groupes  de  la  région  éaidnoxiale  du  nouveau  continent. 

a.  Dans  Vhémisphère  boréal.  Ce  qui  caractérise  en  général 
les  porphyres  ,  en  partie  très-métallifères ,  de  l'Amérique  équi- 
noxiale (ceux  du  groupe  §.  20  ,  comme  ceux  du  groupe  §.  21), 
c'est  l'absence  presque  totale  du  quarz ,  la  présence  de  l'am- 
phibole, du  feldspath  vitreux,  et  quelquefois  du  pyroxéne. 
J'ai  insisté  sur  ces  caractères  distinctifs  dans  tous  les  ouvrages 
que  j'ai  publiés  depuis  i8o5;  on  les  retrouve  en  grande 
partie  dans  les  porphyres  ou  grunstein  porphyriqucs,  égale- 
ment métallifères,  de  la  Hongrie  et  de  la  Transylvanie.  Les 
porphyres  mexicains,  comme  nous  l'avons  fait  observer  plus 
haut ,  présentent  souvent  à  la  fois  deux  variétés  de  feldspath , 
le  commun  et  le  vitreux  ;  le  premier  résiste  beaucoup  moins 
à  la  décomposition  que  le  second.  La  forme  de  leurs  cristaux , 
larges  ou  effilés,  les  fait  reconnoitre  presque  autant  que 
l'éclat  et  la  structure  lamelleuse  plus  ou  moins  nettement 
prononcée.  Le  quarz,  si  parfois  il  se  montre,  n'est  point 
cristallisé,  mais  en  petits  grains  informes  :  le  pyroxéne  et  le 
grenat,  qui  se  trouvent  également  dans  les  grunstein  porph)-- 
riques  de  la  Hongrie,  sont  très-rares.  Le  groupe  argentifère 
mexicain  abonde  moins  en  amphibole  :  le  mica  ,  que  l'on 
retrouve  dans  quelques  trachytcs,  manque  toujours  dans  les 
porphyres  de  la  Nouvelle-Espagne.  La  plupart  de  ces  roches 
sont  très- régulièrement  stratifiées;  et,  qui  plus  est,  la  di- 
rection de  leurs  strates  est  souvent  (entre  la  Moxonera  et 
Sopilote  au   nord   d'Acapulco  :     au   Puerto   de  Santa   Rosa 


IND  2o5 

près  de  Guanaxuato)  concordante  avec  la  direction  des  roches 
primitives  et  intermédiaires  auxquelles  elles  sont  superposées. 
Dans  la  Nouvelle-Espagne,  comme  en  Hongrie,  le  terrain 
trachytique  est  placé  immédiatement  sur  les  porphyres  mé- 
talllières  :  mais,  dans  le  premier  de  ces  pays,  les  porphyres 
sont  recouverts  sur  quelques  points  (Zimapan,  Xaschi  et 
Xacala  )  de  calcaire  gris- noirâtre  de  transition;  sur  d'autres 
points  (Villalpando),  de  grès  rouge  ;  sur  d'autres  encore  (  entre 
Masatlan  et  Chilpanzingo  ,  entre  Amajaque  et  la  Magdalena; 
entre  San  Francisco  Ocotlan  et  la  Puebla  de  los  Angeles  j 
entre  Cholula  etTotomehuacan) ,  de  calcaire  alpin. 

Les  porphyres  de  transition  de  la  Hongrie,  de  la  Saxe  et 
de  la  Norwége  ont  une  structure  très-compliquée  :  ils  alter- 
nent avec  des  syénites,  des  granités,  desgrilnstein;  et  lorsqu'il 
n'y  a  pas  d'alternance,  ces  trois  dernières  roches ,  et  même  des 
micachistes  ou  des  calcaires  stéatiteux,  se  trouvent  renfer- 
més, comme  couches  subordonnées,  dans  les  porphyres.  La 
fréquence  de  ces  bancs  intercalés  éloigne  d'une  manière  très- 
prononcée  les  porphyres  de  la  Hongrie  ou  de  la  Norwége 
des  roches  trachytiques  ;  elle  les  éloigne  aussi  des  porphyres 
de  la  Nouvelle-Espagne,  qui  leur  ressemblent  par  leur  com- 
position minéralogique  (par  la  nature  de  leur  pâte  et  des 
cristaux  enchâssés).  La  structure  des  porphyres  mexicains  est 
d'une  grande  simplicité  :  ils  forment  un  immense  terrain  non 
interrompu  par  des  bancs  intercalés.  J'ai  vu  des  syénites  dans 
les  thonschiefer  de  transition  de  Guanaxuato  (§.  22)  ;  je  les  ai 
vues ,  au-dessus  de  ce  thonschiefer ,  alterner  avec  des  griinstein  : 
mais  je  n'ai  vu  ni  syénite,  ni  micaschiste,  ni  griinstein,  ni 
calcaire  dans  les  porphyres  de  la  Moxonera ,  de  Pachuca,  de 
Moran  et  de  Guanaxuato.  Ce  n'est  qu'à  Bolaîïos  que  l'on  trouve 
du  mandelstein  dans  le  porphyre.  Ce  développement  uni- 
forme et  non  interrompu  des  porphyres  métallifères  et  non 
métallifères  de  la  Nouvelle -Espagne  est  un  phénomène  très- 
frappant  :  il  rend  plus  difficile  la  séparation  systématique 
des  terrains  de  porphyre  et  de  trachyle ,  là  oii  ces  terrains 
se  supportent  immédiatement.  Lorsqu'on  évalue  l'épaisseur 
des  deux  terrains  réunis,  c'est-à-dire,  lorsqu'on  s'élève  des 
couches  les  plus  basses  d'un  porphyre  que  Ton  peut  croire 
de  transition,  parce  qu'il  est  recouvert  de  grandes  formations 


2o6  IND 

calcaires,  analogues  au  zechstein  (Guasintlan  ,  à  la  pente 
occidentale,  et  Venta  deJ  Encero,  à  la  pente  orientale  de 
la  Cordillère),  jusqu'au  sommet  trachytique  du  grand  volcan 
de  la  Puebla  (  Popocatepetl)  ,  on  trouve,  d'après  mes  me- 
sures barométriques  et  trigonométriques,  une  épaisseur,  non 
interrompue  par  des  roches  intercalées,  de  plus  de  i3,ooo 
pieds  (  2255  toises).  L'épaisseur  des  seules  couches  de  por- 
phyre métallifère,  en  comptant  depuis  Guasintlan  et  Puente 
de  Istia  (où  les  porphyres  se  cachent  sous  les  mandelstein 
poreux  de  Guchilaque  et  de  la  vallée  de  Mexico)  jusqu'à 
l'affleurement  des  filons  argentifères  de  Cabrera  (Real  de 
Moran),  est  de  5ooo  pieds  (817  toises).  Ces  dimensions  ont 
été  déterminées  en  comparant  les  hauteurs  absolues  des  sta- 
tions ;  car,  d'après  l'inclinaison  variable  des  couches,  et 
d'après  le  rapport  entre  la  direction  des  coupes  et  la  direc- 
tion de  la  roche,  il  est  probable  que  les  épaisseurs  apparentes 
(les  différences  entre  le  maximum  et  le  minimum  de  hau- 
teurs) s'éloignent  très -peu  des  épaisseurs  véritables,  qui  sont  la 
somme  des  épaisseurs  évaluées  perpendiculairement  aux  fis- 
sures de  stratification.  Voici  les  circonstances  locales  ,  les  plus 
intéressantes,  du  gisement  des  porphyres  du  Mexique  entre 
les  1 7  °  et  2 1  "  de  latitude  boréale. 

a.  Chemin  d'Acapulco  à  Mexico.  Le  porphyre,  à  la  pente 
occidentale  de  la  Cordillère  d'Anahuac ,  ne  descend  que  jus- 
qu'à la  vallée  du  Rio  Papagallo,  un  peu  au  nord  de  la  Venta 
de  Tierra  colorada,  à  2  3o  toises  de  hauteur  au-dessus  du  ni- 
veau de  Focéan  Pacifique.  Sur  la  pente  orientale  de  la  Cor- 
dillère d'Anahuac,  entre  la  vallée  de  Mexico  et  le  port  de  la 
Vera-Cruz ,  je  n'ai  vu  aucune  trace  de  cette  roche  au- 
dessous  de  l'Encero,  à  476  toises  de  hauteur.  Le  porphyre  s'y 
cache  sous  un  grès  argileux  qui  enchâsse  des  fragmens  d'amyg- 
daloïde  trachytique.  Les  deux  groupes  principaux  de  por- 
phyres, dans  le  chemin  d'Acapulco  à  Mexico,  sont  ceux  de 
la  Moxonera  et  de  Zumpango. 

La  vallée  granitique  du  Papagallo  est  bordée  au  sud  (Alto 
del  Peregrino)  par  une  formation  de  calcaire  compacte 
(de  85  toises  d'épaisseur),  bleu -noirâtre ,  traversé  par  de 
petits  filons  blancs  de  spath  calcaire.  Elle  est  remplie  de 
grandes  cavernes,   mais  analogues  plutôt  au  calcaire  alpin 


IND  207 

qu'au  calcaire  de  transition.  Au  nord  la  vallée  est  bordée 
par  une  masse  de  porphyre  (Alto  de  la  Moxonera  et  de 
Los  Caxones)  qui  a  355  toises  d'épaisseur.  Ce  porphyre  est 
assez  régulièrement  stratifié  (dir.  N.  55°  E.,  inciin.  40°  au 
N.  O.);  quelquefois  il  est  divisé  en  boules  à  couches  con- 
centriques. Sa  base  est  verdàtre  et  argileuse,  enchâssant  du 
feldspath  vitreux  et  des  pyroxènes  décomposés  ,  qui  ont 
presque  la  couleur  de  l'olivine  :  point  de  quarz,  point  de  mica  , 
point  de  feldspath  lameileux.  De  grandes  masses  d'argile 
blanc -rougeàtre  sont  intercalées  dans  ce  porph3're  terreux, 
il  repose  immédiatement ,  comme  le  calcaire  du  Peregrino 
(dont  les  strates  ont  dir.  N.  45°  E.  ;  incl.  Co°  au  N.  O.), 
sur  le  granité  primitif.  Ce  dernier,  qui  a  été  décrit  plus  haut 
(§.  7),  renferme,  au  pied  de  la  colline  porphyritique  de  Los 
Caxones,  dans  la  vallée  même  du  Papagallo  ,  des  filons  d'am- 
phibolite  noir  et  desboules  de  granité  à  couches  concentriques, 
semblables  à  celles  que  j'ai  observées  au  Fichtelgebirge  près 
de  Seissen.  La  plus  grande  masse  de  ce  granité  à  gros  grains 
est  très-régulièrement  stratifiée  (dir.  N.  Z,o°  E.  )  et  inclinée 
par  groupes  d'une  vaste  étendue,  le  plus  souvent  au  N.  O., 
quelquefois  au  S.  E.  Les  cimes  (porphyriques  ?)  voisines 
(Cerros  de  las  Caxas  et  del  Toro)  ont  des  formes  bizarres; 
et  si,  à  cause  de  la  composition  minéralogique  du  porphyre 
de  la  Moxonera  et  de  l'Alto  de  los  Caxones,  et  à  cause  de 
son  isolement,  on  étoit  tenté  de  le  prendre  pour  du  trachyte, 
le  parallélisme  de  direction  de  ses  strates  avec  ceux  du  cal- 
caire et  du  granité ,  et  le  recouvrement  d'un  porphyre  très- 
semblable  et  très-voisin  (Masatlan)  par  de  puissantes  forma- 
tions de  calcaire  secondaire  ,  s'opposeroient  à  cette  hypo- 
thèse. En  descendant  de  la  montagne  porphyrique  de  Los 
Caxones,  vers  le  sud,  c'est-à-dire  vers  les  côtes  de  l'océan 
Pacifique,  j'ai  vu  venir  au  jour  alternativement  :  le  granité  pri- 
mitif de  la  vallée  du  Papagallo  ,  le  calcaire  alpin  de  l'Alto  del 
Peregrino,  le  granité  primitif  de  la  vallée  du  Camaron  ,  la 
syénite  de  l'Alto  del  Camaron,  enfin  le  granité  primitif  de 
l'Exido  et  des  côtes  d'Acapulco.  La  syénite  du  Camaron , 
renfermant  des  cristaux  d'amphibole  de  huit  lignes  de  long, 
ne  me  paroît  pas  liée  aux  porphyres  mexicains.  Ce  n'est 
qu'un  changement  de  composition  dans  la  masse  du  granité. 


.08  IND 

qui,  dans  cette  région,    se  mêle  à  l'amphibole,   et  devient" 
porphyroïde  sur  tous  les  sommets  des  collii^es. 

Le  second  groupe  de  porphyre  intermédiaire  dont  j'ai  pu 
examiner  la  superposition  avec  soin,  est  celui  de  Zumpango. 
Ce  groupe  commence  quelques  lieues  au  nord  de  l'Alto  de 
los  Caxones,  et  supporte,  en  s'étendant  vers  Mescala,  un 
vaste  plateau  composé  de  calcaire,  de  grès  et  de  gypse  (entre 
]\Iasatlan  et  Chilpanzingo).  C'est  dans  ce  plateau,  dont  la 
hauteur  absolue  (  c'est-à-dire,  au-dessus  du  niveau  de  la  mer) 
est  de  700  toises,  qu'un  porphyre  semblable  par  sa  compo- 
sition à  celui  de  la  Moxonera  supporte  des  terrains  secon- 
daires d'une  structure  très-compliquée.  En  descendant  de 
l'Alto  de  los  Caxones  (haut.  585  toises)  vers  le  nord,  on 
voit  d'abord  de  nouveau  reparoitre  au  jour  le  granité  primitif 
delà  vallée  du  Papagallo  ;  puis  l'on  découvre  un  lambeau  de 
calcaire  alpin,  semblable  à  celui  du  Peregrino  (lambeau  de 
200  toises  de  large,  qui  se  trouve  superposé  immédiatement 
au  granité)  ;  puis  paroit  encore  le  granité  ,  et  enfin  l'on  atteint 
le  groupe  porphyrique  de  Zumpango  ,  dans  lequel  se  conserve 
très-régulièrement  la  direction  des  strates,  N.  3o°  à  45"  E. , 
avec  une   inclinaison  très- fréquente  au  N.  O. 

Ce  porphyre,  rempli  de  feldspath  vitreux,  dépourvu  d'am- 
phibole, et  recouvrant  le  granité  primitif,  sert  d'abord  de 
base  (  Acaguisotla)  à  une  formation  d'amygdaloide  brun-rou- 
geàtre  ,  semi-vitreuse,  presque  sans  cavités,  renfermant  des 
amandes  de  calcédoine  décomposée,  des  lames  de  mica  noir 
et  du  mélanite.  Bientôt  le  uiandelstein  disparoit,  et  le  por- 
phyre se  montre  de  nouveau  sur  un  espace  de  terrain  consi- 
dérable,  jusqu'à  ce  qu'il  se  cache  sous  le  calcaire  de  Masatlan 
et  te  Chilpansingo  ,  c'est-à-dire,  sous  deux  formations  po- 
reuses très-distinctes,  dont  la  supérieure  est  blanchâtre,  argi- 
leuse et  friable  ,  l'inférieure  bleu-grisàtre  ,  intimement  mêlée 
de  spath  calcaire  grenu  et  en  masse.  Ces  deux  calcaires  sem- 
blent, au  premier  abord  ,  moins  anciens  que  le  calcaire  alpin 
du  Peregrino;  mais  ils  n'appartiennent  certainement  pas  à 
des  terrains  tertiaires  qui  en  Hongrie  reposent  sur  des  tra- 
chytes.  Je  n'y  ai  trouvé  aucune  trace  de  pétrifications  :  ils 
sont  dirigés  N.  35°  E. ,  et  généralement  inclinés  de  40",  non 
au  N.  O.,  mais  au  S.  E.  Cette  uniformité  de  direction  (non 


12\D  209 

d'inclinaison),  observée  parmi  des  rocîics  qui  paroî.ssenÇ 
d'un  âge  si  différent,  est  un  phénomène  très-rare.  Il  ajoute 
peut-être  aux  motifs  que  l'on  a  de  ne  pas  considérer  comme 
des  trachytes  les  porphyres  dont  nous  venons  de  faire  con- 
noître  le  gisement.  Les  calcaires  de  Chilpansingo  ont  des 
cavités  qui  varient  de  quatre  lignes  jusqu'à  huit  pouces  de 
diamètre.  La  formation  inférieure,  qui  est  bleq -grisâtre  , 
recouvre  immédiatement  le  porphyre  ;  elle  perce  quelqv:e- 
fois  la  formation  blanchâtre,  et  forme  à  la  surface  du  sol  de 
petits  rochers  cylindriques  ou  coralliformes  de  trois  ou 
quatre  pieds  de  haut ,  qui  présentent  l'aspect  le  plus  bizarre. 
Ces  circonstances  de  composition  et  de  structure  indiquent 
beaucoup  d'analogie  entre  le  calcaire  caverneux  trouvé  de- 
puis Masatlan  et  Tetaquillas  jusqu'à  Chilpansingo,  et  les  cou- 
ches inférieures  du  calcaire  du  Jura  (  hbhlenkalk  ;  schla- 
ckiger,  blasiger  kalkstein)  qui,  également  caverneuses  dans 
le  Haut-Palatinat  (entre  Laber  et  Ettershausen  )  et  en 
Tranconie  (entre  Pegnitz  et  Muggendorf),  donnent,  par  leurs 
aspérités,  à  la  surface  du  sol  une  physionomie  particulière. 
fion  loin  de  Zumpango  le  porphyre  sort  de  nouveau  au- 
dessous  des  calcaires  caverneux  de  Chilpansingo,  ou  plutôt 
sous  un  conglomérat  calcaire  qui,  renfermant  à  la  fois  de 
gros  fragmens  de  la  formation  bleue  et  de  la  formation, 
ilanche,  recouvre  cette  dernière  sur  plusieurs  points.  Comme 
dans  les  groupes  de  Los  Caxones  et  de  Zumpango  les  por- 
phyres s'élèvent  à  peu  près  au  même  niveau  (56o  et  585 
toises),  on  peut  supposer,  avec  quelque  probabilité,  qu'^ 
les  calcaires  caverneux  qu'ils  supportent  dans  le  plateau  de 
Chilpansingo  ,   ont  800  pieds  d'épaisseur. 

En  avançant  au  nord  vers  Sopilote  ,  Mescala  et  Tasco,  ou 
perd  de  nouveau  de  vue  le  porphyre.  Le  granité  primitif 
reparojt;  mais  bientôt  il  se  trouve  caché  par  un  porphyre 
dont  la  composition  minérnlogique  offre  des  caractères  très-» 
remarquables:  il  est  gris -bleuâtre,  nn  peu  argileux  p.Tr 
décomposition,  et  enchâsse  de  grands  cristaux  de  feldspath 
jaune -blanchâtre  (plutôt  lamelleux  que  vitreux),  du  py-^ 
roxène  presque  vert -poireau  et  un  peu  de  quarz  non  cri'-? 
tallisé.  Ce  porphyre  stratifié  est  recouvert,  vers  le  sud,  dij 
inême   conglomérat    calcaire   tjui   abonde   sur  le  plateau   de 


210  IjXD 

Chilpansingo  ;  Vers  le  nord  (Sopilote,  Estola,  Mescala),  d'un 
calcaire  compacte,  grisâtre  et  traversé  de  filons  de  carbonate 
de  chaux.  Le  calcaire  d'Estola  n'est  pas  spongieux  ou  bull'eux 
dans  sa  masse  entière  >  comme  la  formation  deMasatlan,  mais 
il  renferme  de  grandes  Cavernes  isolées,  comme  le  calcaire 
du  Peregrino  que  nous  avons  décrit  plus  haut.  Il  ne  m'est  resté 
aucun  doute,  en  voyageant  dans  ces  montagnes,  que  les  roches 
de  la  Canada  de  Sopilote  et  de  l'Alto  dcl  Peregrino  sont  iden- 
tiques avec  notre  calcaire  alpin  (zechstein)  de  l'Europe,  avec 
celui  qui  succède,  selon  l'ùge  de  sa  formation,  au  grés  rouge, 
ou,  lorsque  celui-ci  manque,  aux  roches  de  transition.  Prés 
de  Mescala,  un  peu  au  nord  de  Sopilote,  de  riches  filons  ar- 
gentifères, analogues  aux  filons  de  Tasco  et  de  Tehuilotepec, 
traversent  le  calcaire  alpin.  Dans  la  vallée  de  Sopilote,  la 
roche  qui  recouvre  le  porphyre  du  groupe  de  Zumpango  , 
présente  ces  mêmes  couches  sinueuses  et  contournées  que  l'on 
voit  à  l'Achsenberg ,  au  bord  du  lac  de  Lucerne,  et  dans 
d'autres  montagnes  de  calcaire  alpin  en  Suisse.  J'ai  observé  que 
les  couches  supérieures  de  la  formation  de  Sopilote  et  de  Mes- 
cala passent  progressivement  au  gris-blanchâtre,  et  que,  dé- 
pourvues de  filons  de  spath  calcaire,  elles  offrent  une  cassure 
matte,  compacte  ou  conchoide.  Elles  se  divisent,  presque 
comme  le  calcaire  de  Pappenheim  ,  en  plaques  très-minces. 
On  diroit  d'un  passage  du  calcaire  alpin  au  calcaire  du  Jura , 
deux  formations  qui  se  recouvrent  immédiatement  en  Suisse, 
dans  les  Apennins  et  dans  plusieurs  parties  de  l'Amérique 
équinoxiale,  mais  qui,  dans  le  Sud  de  l'Allemagne,  sont 
séparées  l'une  de  Pautre  par  plusieurs  formations  intercalées 
(  par  le  grès  de  Nebra  ou  bunte  sandstein  ,  par  le  muschelkalk 
et  le  grès  blanc  ou  quadersandstein  ). 

Près  du  village  de  Sochipala.  le  calcaire  alpin  est  couvert 
de  gypse,  et  entre  Estola  et  Tepecuacuilco ,  on  voit  sortir 
sous  le  calcaire  alpin  (dirigé  tantôt  N.  lo"  E.  avec  incl.  40* 
à  Pest,  tantôt  N.  48°  E.  avec  incl.  5o°  au  sud-est)  un  por- 
phyre vert  d'asperge  à  base  de  feldspath  compacte,  divisé  en 
strates  très-minces,  comme  celui  d'Achichintla ,  et  presque 
dépourvu  de  cristaux  disséminés.  Cette  roche  ressemble  au 
porphyre  phonolitique  (  porphyrschiefer  )  du  terrain  de  tra- 
chyte.  Si  Pon  avance  vers  les  mines  de  Tehuilotepec  et  de 


Ii\D  2U 

TaSco,  on  trouve  cette  même  roche  recouverte  d*un  grés 
cjuarzeux  à  ciment  argilo-calcaire ,  et  analogue  au  weiss 
liegende  (couche  inférieure  arénacée  du  zechstein)  de  la 
Thuringe.  Ce  grès  quarzeux  annonce  de  nouveau  la  proximité 
du  calcaire  alpin  :  aussi,  sur  ce  grés  et  peut-être  immédiate- 
ment sur  le  porphyre  (comme  c'est  le  cas  à  Zumpango  et 
à  l'Alto  de  los  Caxones),  on  voit  reposer,  près  du  lac  salé 
deTuspa,  une  masse  immense  de  calcaire  alpin  souvent  ca- 
verneux ,  renfermant  quelques  pétrifications  de  trochus  et 
d'autres  coquilles  univalves.  Ce  calcaire  de  Tuspa ,  indubitable- 
ment postérieur  à  tous  les  porphyres  que  je  viens  de  décrire  -, 
renferme  des  couches  de  gypse  spéculaire  et  des  strates  d'ar- 
gile schisteuse  et  carburée  qu'il  ne  faut  pas  confondre  avec 
du  grauwackeschiefer.  Il  est  généralement  gris- bleuâtre  , 
compacte,  et  traversé  par  des  filons  de  carbonate  de  chaux. 
Sur  beaucoup  de  points,  loi:'  d'être  caverneux,  il  fait  pas- 
sage à  une  formation  blanche,  trés-compacte,  analogue  au 
calcaire  de  Pappenheim.  J'ai  été  très-frappé  de  ces  variations 
de  texture,  que  nous  avons  observées  également,  M,  deBucK 
et  moi ,  dans  les  Ap  ennins  (entre  Fosombrono ,  Furli  et  Fuligao), 
et  qui  semblent  prouver  que ,  là  où  les  membres  intermédiaires 
de  la  série  n'ont  pu  se  développer,  les  formations  de  calcaire 
alpin  et  de  calcaire  du  Jura  sont  plus  intimement  liées  qu'on 
ne  l'admet  généralement.  Les  riches  filons  d'argent  de  Tasco, 
qui  ont  donné  jadis  160,000  marcs  d'argent  par  an,  traversent 
à  la  fois  le  calcaire  et  un  thonschiefer  qui  passe  au  micaschiste  ^ 
car,  malgré  l'identité  des  formations  calcaires,  également 
argentifères,  de  Tasco  et  de  Mescala ,  la  première  de  ce^ 
formations,  partout  où  elle  a  été  percée  dans  les  travaux  des 
mines  (Cerro  de  S.  Ignacio),  n'a  pas  été  trouvée  superposée 
au  porphyre  comme  le  calcaire  de  Mescala,  mais  recouvrant 
une  roche  plus  ancienne  que  le  porphyre,  un  micaschiste 
(dir.  N.  50°  E.  ;  incl.  40"  —  60",  le  plus  souvent  au  N.  O. , 
quelquefois  au  S.E.)  dépourvu  de  grenats  et  passant  au  thon- 
schiefer primitif.  J'ai  dû  entrer  dans  ces  détails  sur  les  ter- 
rains qui  succèdent  aux  porphyres,  parce  que  ce  n'est  qu'en 
faisant  connoître  la  nature  des  roches  superposées  qu'on  peut 
mettre  les  géognostes  en  état  de  prononcer  sur  la  place  que 
doivent  occuper  les  poi'phyres  mexicains  dans  Voi'dre  des  for- 


mations.  L'esquisse  d'un  tableau  géognostiquc  n"a  de  valeur 
qu'autant  qu'on  rattache  la  roche  qu'on  veut  faire  connoître, 
à  celles  qui  lui  succèdent  immédiatement  au-dessus  et  au- 
dessous.  Les  seuls  faits  oryctognostiques  peuvent  être  pré- 
sentés isolément  :  la  géognosie  positive  est  une  science  d'en- 
chaînemens  et  de  rapports  ,  et  l'on  ne  peut ,  en  décrivant 
une  portion  quelconque  du  globe,  borner  son  horizon  et 
s'arrêter  à  telle  ou  telle  couche  qu'on  veut  étudier  de  pré- 
férence. 

^.  Plateau  central.  Vallée  de  Mexico  ;  terrain  entre  Pacliuca , 
Moran  et  La  Puebla.  Une  énorme  masse  de  porphyre  de  tran- 
sition s'élève  à  la  hauteur  moyenne  de  1200  à  1400  toises 
au-dessus  du  niveau  de  la  mer.  Elle  est  recouverte,  dans  la 
vallée  de  Mexico  et  au  sud  vers  Cuernavaca  etGuchilaque,  de 
mandelstein  basaltique  et  celluleux  (en  mexicain  tetzontU)-, 
vers  l'est  et  le  nord-est  (entre  Tlascala  et  Totonilco),  de  for- 
mations secondaires.  Il  est  probable  que  le  porphyre,  qui 
se  cache  d'abord  sous  le  calcaire  alpin  de  Mescala ,  puis  dans 
les  Llanos  de  San -Gabriel  (près  du  pont  d'Istla),  sous  des 
conglomérats  trachytiques  et  sous  un  mandelstein  poreux,  est 
identique  avec  celui  quîreparoît,  i5  lieu  es  plus  au  nord  et  800 
toises  plus  haut,  sur  les  bords  du  lac  de  Tezcuco.  C'est  dans 
la  belle  vallée  de  Mexico  que  la  roche  porphyrique  perce 
l'amygdaloïde  celluleuse  dans  les  collines  de  Chapoltepec  , 
de  Notre-Dame  de  la  Guadeloupe  et  du  Penol  de  los  Baùos. 
Elle  présente  plusieurs  variétés  très-remarquables  :  i.°  gris- 
rougeàtres ,  un  peu  argileuses,  sans  stratification  distincte, 
renfermant  en  parties  égales  des  cristaux  d'amphibole  et 
de  feldspath  commun  (  galerie  creusée  dans  le  rocher  de 
Chapoltepec)  ;  2.°  noires  ou  gris- noirâtre  (quelquefois 
fendillées  et  bulleuses),  stratifiées  par  couches' de  5  — 4 
pouces  d'épaisseur,  à  base  de  feldspath  compacte,  à  cassure 
matte  ,  unie  ou  imparfaitement  conchoïde  (ressemblant  plus 
à  la  cassure  de  la  lydienne  qu'à  celle  du  pechstein),  renfer- 
mant de  petits  cristaux  de  feldspath  vitreux  et  de  pyroxène 
vert  d'olive  ,  presque  dépourvues  d'amphibole  ,  souvent  re- 
couvertes à  leur  surface  de  superbes  masses  de  hyalithe 
mamelonné  ou  verre  de  Millier  (Peïïol  de  los  Banos,  dir. 
N.  60°  O.,  incl.   60°  N.  E.);    5."  rouges,  terreuses,  avec 


IND  2i3 

beaucoup  de  grands  cristaux  de  feldspath  commun  décomposé 
(salines  du  lac  de  Tezcuco ,  là  où  d'anciennes  sculptures 
aztèques  couvrent  le  Penol),  Le  porphyre  de  la  vallée  de 
Mexico  offre  non-seulement  des  sources  d'eau  potable  qui 
sont  amenées  à  la  ville  par  de  longs  et  somptueux  aqueducs, 
mais  aussi  des  eaux  thermales  acidulées,  les  unes  chaudes  et 
les  autres  froides.  On  y  trouve  ,  et  ce  fait  est  bien  remarqua- 
ble, comme  dans  le  micaschiste  primitif  des  environs  d'Araya 
et  de  Cumana ,  du  naphte  et  du  pétrole  (promontoire  du 
Sanctuaire  de  Guadeloupe).  (^)uoique  ce  porphyre  sorte  au- 
dessous  de  l'amygdaloïde  poreuse,  et  qu'il  se  montre  au  jour 
(Cerro  de  las  Cruces  et  Tiangillo  ,  Cuesta  de  Varientos  et 
Capulalpan  ,  Cerro  Ventoso  et  Rio  Frio  )  dans  tout  le  pour- 
four  circulaire  du  bassin  de  Tenochtitlan,  fond  d'un  ancien 
lac  en  partie  desséché  ,  ce  n'est  que  vers  le  nord-nord-est 
seulement  (Pachuca  ,  Real  del  Monte  et  Moran  )  qu'il  a  été 
trouvé  argentifère. 

De  riches  filons  traversent,  depuis  la  mine  de  San-Pedro  à 
la  cime  du  Cerro  Ventoso  (1/161  toises)  jusqu'au  fond  de  l'an- 
cien puits  de  l'Encino  (  1 170  toises)  dans  le  Real  de  Pachuca, 
une  masse  de  porphyre  qui  a  plus  de  1700  pieds  d'épaisseur. 
Cette  roche,  que  jadis  on  auroit  appelée  pétrosiliccuse  ou 
hornsteinporphyr,  est  généralement  gris-verdàtre ,  quelque- 
fois vert  de  prase  ,  à  cassure  écaillcuse  ,  ofï'rant  des  fragmens 
à  bords  aigus.  Sa  pâte  est  probablement  un  feldspath  com- 
pacte,  chargé  de  silice  :  elle  renferme,  non  du  quarz  et  du 
mica  ,  mais  des  cristaux  de  feldspath  commun  et  d'amphibole. 
La  dernière  substance  n'est  généralement  pas  très-abondante, 
et  lorsque  le  porphyre  est  argileux  ou  plutôt  terreux,  on  ne 
reconnoit  l'amphibole  que  par  des  taches  à  surface  striée  et 
d'un  vert  très-foncé.  Les  couches  presque  argileuses  et  plus 
tendres  (  thonporphyr  de  Moran)  paroisscnt  inférieures  aux 
couches  plus  dures  et  plus  tenaces.  On  trouve  intercalés  aux 
unes  et  aux  autres  des  strates  de  phonolithe  (klingstein)  gris  de 
fumée  ou  vert-poireau ,  divisés  en  tables  ou  feuillets  très-sono- 
res. Ce  n'est  cependant  pas  entièrement  un  porphyrschiefer 
du  terrain  trachytique  ;  car  la  masse  phonoiithique  n'offre  pas 
des  cristaux  effilés  de  feldspath  vitreux,  mais  des  cristaux 
de  feldspath  commun  blanc   grisâtre,    constamment  acconi'» 


.i4  l?sD 

pagnés  d'un  peu  d'amphibole.  Tous  ces  porphyres  argenti- 
fères de  Moran  et  de  Real  del  Monte  sont  très-régulière^ 
ment  stratifiés  (direction  générale,  comme  dans  la  vallée 
(](■  Mexico  ,  N.  60"  O. ,  incl.  5o"  —  60°  au  N.  E.  )  =  i's  n'offrent 
des  divisions  en  colonnes  informes  que  dans  les  Organos 
de  Actopan  (Cerro  de  Mamancliota  ,  sommet  1627  toises) 
t't  les  Monjas  de  Totonilco  el  Chico .  si  toutefois  la  roche 
des  Organos,  dont  la  masse  a  3ooo  pieds  d'épaisseur,  en  ne 
comptant  que  les  porphyres  visibles  au-dessus  des  plaines  voi- 
sines, est  identique  avec  la  roche  de  Moran.  La  dernière 
î-enferme  un  peu  moins  de  cristaux  d'amphibole;  Tune  et 
l'autre  de  ces  roches  ne  sont  ni  fendillées  ni  poreuses,  et 
c'est  au  pied  dçs  pics  grotesques  des  Monjas  que  se  .trouvent 
les  riches  filons  de  Totonilco  el  Chico. 

Jusque-là  tous  les  porphyres  argentifères  de  Pachuca  et  de 
Aloran,  que  je  viens  de  décrire,  ne  nous  ont  rien  offert  qui 
les  éloigne  du  terrain  de  transition  :  ils  sont  même  recouverts, 
i^ntre  les  bains  de  Totonilco  el  Grande  et  la  caverne  de  la 
Madré  de  Dios  ou  Roche  percée,  d'énormes  masses  de  for-^ 
juations  calcaires,  de  grès  et  de  gypse.  La  formation  calcaire, 
de  1000  pieds  d'épaisseur,  est  gris-bleuâtre,  compacte,  non 
poreuse,  renfermant  des  filons  de  galène  et  des  couches  de 
•\Tlcaire  blanc  presque  saccharin  à  gros  grains.  C'est  pour  le 
Woins  la  formation  alpine  (alprnkalkstein) ,  si  ce  n'est  pas  un 
ralcaire  de  transition,  et  les  rapports  de  gisement  qu'on  ob- 
serve entre  cette  roche  calcaire  et  les  porphyres  de  Moran  et 
de  la  Magdalena  semblent  caractériser  ceux-ci  comme  décidé- 
.inent  non  trachytiques.  En  avançant  à  quatre  ou  cinq  lieues 
de  distance  des  mines  de  Moran,  par  Omitlan  ,  par  les  savanes 
de  Tinaxas,  et  par  une  vaste  forêt  de  chênes  vers  le  Jacal , 
dont  rOyamel  ou  la  Montagne  des  Couteaux  (Cerro  de  losNa^ 
vajas)  forme  la  pente  occidentale,  on  entre  dans  un  pays  qui 
oifre  ,  dans  sa  composition  géognostique,  la  trace  très-récente 
des  feux  souterrains.  On  trouve  d'abord  au  pied  de  l'OyameJ 
nn  porphyre  terreux  blanc -grisâtre  ,  renfermant  des  cristaux 
de  feldspath  vitreux,  et  présentant  presque  la  même  direc- 
tion (le  même  angle  avec  le  méridien,  N.  5o*  O.)  que 
les  porphyres  argentifères,  mais  une  inclinaison  (76"  au 
S.  O,)  ciamétraîcïnent  opposée.  L'état  de  la  végétation   ne 


IND  3i5 

permet  pas  de  fixer  les  l'apports  de  g-Isemcnt  entre  les  roches 
de  rOyamel  et  les  porphyres  de  transition  des  mines  d'ar- 
gent de  Moran.  Les  premières,  qui  sont  encore  dépourvues 
d'obsidienne,  servent  de  base  à  une  roche  blanc-rougeàtre  , 
à  éclat  émaillé,  à  cassure  unie,  quelquefois  grenue,  renfer- 
mant un  peu  de  feldspath  vitreux ,  et  divisée  en  une  infinité 
de  petites  couches  parallèles ,  souvent  ondulées.  Cette  roche 
est  une  perlite  porphyrique  lithoïde,  ou  plutôt  un  porphyre 
trachytique  non  spongieux,  non  fendillé,  dont  la  base  passe 
au  perlstein.  Un  tel  passage  de  la  pâte  pierreuse  à  une  masse 
composée  de  globules  agglutinés,  se  manifeste  même  dans  des 
couches  qu'à  leur  seul  aspect  on  croiroit  d'abord  composées  de 
feldspath  compacte  ou  d'un  kieseischiefer  terne  et  grisâtre.  Aux 
cristaux  effilés  de  feldspath  vitreux ,  disséminés  dans  la  pâte ,  ne 
se  trouvent  mêlés  ni  le  mica  noir,  ni  le  quarz,  mélange  que 
l'on  observe  dans  la  perlite  de  Tokai  et  de  Schemnitz  en 
Hongrie. 

L'abondance  d'obsidienne  que  renferment  les  porphyres  de 
la  montagne  des  Couteaux  ,  et  qui  les  rapproche  des  perl- 
stein de  Cinapecuaro,  ne  laisse  pas  de  doute  sur  leur  na- 
ture volcanique.  Ils  constituent  des  montagnes  isolées,  sou- 
vent jumelles,  à  couches  perpendiculaires,  rappelant,  par 
leur  aspect,  les  collines  de  basalte  et  de  trachyte  des  Monts 
Euganécns.  Ces  masses  volcaniques  sont-elles  sorties  du  sein 
des  porphyres  de  transition  de  Moran,  ou  existe-t-il  un  passage 
des  unes  aux  autres?  Les  roches  de  FOyamel  sont-elles  seu- 
lement superposées  aux  porphyres  métallifères,  comme  le 
sont  les  basaltes  colonnaires  de  Régla?  On  se  demande  de 
même  si  les  porphyres  noirs,  souvent  buUeux,  de  la  vallée 
de  Mexico  (Feîïol  de  los  Baîios) ,  recouverts  d'amygdaioïde  , 
basaltiques  et  cellulaires ,  sont  d'une  origine  différente 
des  porphyres  qui  se  cachent  (Totonilco  el  Grande)  sous 
le  calcaire  alpin?  Dans  cette  même  vallée  de  Mexico  (en 
avançant  du  lac  de  Tezcuco  au  nord  vers  Queretaro),  on 
voit  sortir,  à  la  Cuesta  de  Varientos ,  sous  le  mandelstein 
volcanique,  un  porphyre  terreux,  rouge  -  brunâtre  ,  sans 
amphibole  ,  mais  abondant  en  cristaux  eflilés  de  feldspath 
vitreux.  C'est  sur  la  prolongation  des  strates  de  cette  roche 
d'un  aspect  trachytique  que  reposent  les  formations  secon- 


dairês  et  tertiaires  (calcaire  du  Jura  ,  gypse  et  marnes  aVcC 
lisscmens  d'éléphaiis,  à  1 170  toises  de  hauteur),  qui  remplis*- 
senties  bassins  ne  rilaciendu  del  Salto,  de  Bâtas  et  du  Puerto 
de  los  Reyes.  Dix  lieues  plus  loin,  â  Lira  ,  on  trouve  des 
roches  porphyriques  à  base  seuii-vitrcuse  et  vert-olive,  re- 
C()uverles  d'iiyalithe  manielonnée  et  dépourvues  de  pyroxène. 
Ces  roches  enchâssent,  outre  un  peu  de  feldspath  ,  des  grainS 
de  quarz  :  elles  offrent  en  même  temps  de  petites  couches 
d'obsidienne  intercalées.  C'est,  à  n'en  pas  douter,  un  tra- 
chvte  (roche  à  laquelle  en  Hongrie  le  quarz  n'est  pas  non  plus 
entièrement  étranger).  Or,  comment  distinguer  les  couches 
de  porphyre  trachytique  des  porphyres  de  transition  qui  les 
Mipportent  immédiatement,  lorsque  les  uns  et  les  autres, 
iiu  mélange  près  d'obsidienne  et  de  pcrlitc,  ont  une  compo- 
eition  minéralogique  si  analogue  P 

Cette  difficulté  embarrasse  encore  plus  le  voyageui*  gco- 
gnoste,  lorsqu'il  sort  de  la  vallée  de  Mexico,  vers  l'est,  pour 
traverser  Tarête  de  montagnes  sur  laquelle  s'élèvent  les  deux 
volcans  de  la  Puebla ,  l'Iztaccihuatl  [Femme -blanche,  2466 
toises)  et  le  Popocatepetl  {Montagne  fumante,  2770  toises). 
Les  roches  porphyriques  qu'on  voit  au  jour  près  de  la 
Venta  de  Cordova  et  de  Rio  frio,  sont  intimement  liées 
aux  trachytes  du  Grand-Volcan  encore  enflamme.  Elles  sont 
recouvertes  de  brèches  ponceuses  et  de  perlitcs  avec  obsi- 
dienne (entre  Ojo  del  Agua  et  le  fort  de  Peroîe),  et  servent  de 
base  (  entre  San  Francisco  Ocotlan  ,  la  Puebla  de  los  Angeles, 
Tofomehuacan,  Tecali  et  Cholula  ;  entre  Venta  de  Soto,  El 
Pizûrro  et  Portachueîo)  à  une  puissante  formation  calcaire, 
tantôt  compacte  et  bleu  -  grisâtre ,  tantôt  à  petits  grains  et 
blanclieou  à  couleur  mélangée.  Ce  calcaire  (de  transition  ou 
alpin?)  n'est  certainement  pas  tertiaire,  comme  le  sont  les 
formations  très-récentes  de  calcaire  coquillier,  de  marnes  et 
de  gypse,  que  dans  différentes  parties  du  globe  on  voit 
placées,  par  lambeaux,  sur  le  terrain  trachytique.  M.  Son- 
iicschmidt  a  Vu,  près  de  Zimapan  ,  Xaschi  et  Xacala ,  un 
véritable  calcaire  de  transition,  gris  -  noirâtre  et  fortement 
carburé,  reposer  Sur  des  porphyres  entièrement  semblables  à 
veux  que  nous  venons  de  décrire  dans  le  plateau  central  de 
ia  Nouvelle-Espagne.  Quelques  strates  de  ces  porphyres  de 


ÏNÏ)  ^'1 

■gîmapan,  de  Xaschi  et  d'Ismiquilpan  ,  renferment,  comme 
\  îts  griinstein  porphyriques  et  les  perlites  de  la  Hongrie,  et 
\  fcomme  le  porphyre  superpose  au  thonschiefer  (de  transition?) 
tie  la  fameuse  montagne  de  Pofosi ,  des  grenats  disséminés 
xiansla  masse.  Ils  sont  traverses  de  liions  qui  présentent  cette 
magnifique  variété  d'opale  jaune-orangé  que  nous  avons  fait 
tonnoître,  M.  Sonneschmidt  et  moi,  sous  le  nom  d'opale  de 
feu  (feueropal),  et  qui  a  été  retrouvée  par  M.  lieudant 
parmi  les  tracliytes  de  Telkebânya.  J'ai  vu  enchâssés  dans 
îa  pâte  porphyrique  de  Zimapan,  des  globules  rayonnes  de 
perlilc  gris  -  bleuâtre  ,  ressemblant  par  leur  couleur  à  delà 
thermantide  jaspoïde  (porzellan-jaspis).  On  n'a  point  encore 
éclairci  les  rapports  de  gisement  entre  ces  porphyres,  qu'on 
crdiroit  trachytiques,  et  ceux  qui  supportent  les  grandes  for- 
mations calcaires.  II  est  plus  aisé  de  séparer  les  porphyres 
ïuéfallifères  des  ti^achytes  dans  nos  classifications  artiticicUcs 
qu'à  la  vue  même  des  montagnes. 

y.  Groupe  de  porphyres  de  Guanaxualo,  C'est  ce  groupe  qui 
détermine  le  plus  clairement  l'âge  relatif,  ou,  pour  m'ex- 
primer  avec  plus  de  précision,  le  maximum  de  l'ancienneté 
des  porphyres  mexicains  ,  si  toutefois  ceux  dont  nous  venons 
d'indiquer  les  gisemens  sont  d'une  même  formation  que  les 
porpliyresde  Cuanaxuato.  La  superposition  de  ces  porphyres 
sur  des  roches  appartenant  au  terrain  intermédiaire  est  ma- 
nifeste. Près  de  la  ferme  de  la  Noria  et  dans  la  Canada  de 
Querctaro,  un  porphyre  vert  d'olive  schisteux,  rempli  de 
feldspath  vitreux  en  'cristaux  microscopiques,  est  superposé 
à  un  thonschiefer  de  transition  qui  renferme  de  la  lydienne. 
Près  de  Cuanaxuato,  et  surtout  près  de  Santa  Kosa  de  la 
Sierra,  cette  superposition  est  également  certaine.  Les  por- 
phyres de  ce  district  ont  en  général  un  gisement  concordant 
(  une  direction  et  une  inclinaison  parallèles  )  avec  les  strates 
du  thonschiefer.  Ils  sont  éminemment  métallifères,  et  le 
fameux  filon  de  Cuanaxuato  (Veta  madré),  faisant  le  même 
angle  avec  le  méridien  que  les  filons  de  Zacatecas,  de  Tasco 
«t  de  jMoran  (N.  50°  O.),  a  été  exploité  successivement  sur 
une  longueur  de  12,000  toises  et  une  largeur  (puissance) 
tle  20  à  26  toises.  Il  a  fourni  en  23o  ans  plus  de  180  millions 
de  piastres,  et  il  traverse  à  la  fois  le  porphyre  et  le  schiste 


2)8  l^D 

<le  transition.  La  première  de  ces  roches  forme,  à  l'est  âe 
Guanaxuafo  ,  des  niasses  gigantesques  qui  se  présentent  de 
loin  sous  l'aspect  le  plus  étrange,  comme  des  murs  et  des 
bastions.  Ces  crêtes ,  taillées  à  pic  et  élevées  de  plus  de  200 
foises  au-dessus  des  plaines  environnantes,  portent  le  nom  de 
hajfas;  elles  sont  dépourvues  de  métaux,  paroissent  soulevées 
par  des  fluides  élastiques,  et  sont  regardées  par  les  mineurs 
mexicains,  qui  à  Zacatecas  les  voient  aussi  placées  sur  un 
i'iionschiefer  de  transition  éminemment  métallifère,  comme 
\:n  indice  naturel  de  la  richesse  de  ces  contrées.  Lorsqu'on 
embrasse  sous  un  même  point  de  vue  les  porphyres  de  la 
Buffa  de  Guanaxuato,  et  ceux  des  mines  jadis  célèbres  de 
Bclgrado  de  San  Bruno ,  de  la  Sierra  de  Santa  Rosa  et  de 
\'^iIlalpando,  on  croit  reconnoitre  dans  leurs  strates  les  plus 
récens  des  passages  à  des  roches  que  Ton  est  généralement 
convenu  en  Europe  de  placer  parmi  les  trachytes. 

Dans  les  environs  de  Guanaxuato  dominent  les  porphyres 
à  pâte  de  feldspath  compacte,  vert  de  gris  et  vert  d'olive, 
rnrhàssant  du  feldspath  lamelleux  (non  vitreux),  soit  en 
cristaux  presque  microscopiques  (Buffa),  soit  en  cristaux 
frès-grands  (Mines  de  San  Bruno  et  du  Tesoro  ).  L'amphi- 
bole décomposé,  qui  teint  probablement  en  vert  la  masse  en- 
tière de  ces  roches,  ne  se  distingue  que  par  des  taches  in- 
formes. En  s'élcvant  vers  la  Sierra  (Puerto  de  Santa  Rosa , 
Puerto  de  Varientos),  le  porphyre  est  souvent  divisé  en 
boules  à  couches  concentriques  :  sa  pâte  devient  vert-noi- 
ràtre,  semi-vitreuse  (pechsteinporphyr),  et  renferme  à  la 
fois  un  peu  de  mica  cristallisé  et  des  grains  de  quarz.  Près 
de  Villalpando  les  filons  aurifères  traversent  un  porphyre 
vert  de  prase,  à  base  de  phonolithe  ,  dans  lequel  on  ne 
reconnoit  que  quelques  petits  cristaux  effilés  de  feldspath 
vitreux.  C'est  une  roche  qu'on  a  de  la  peine  à  distinguer  du 
porphyrschicfcr  trachytique  :  je  Pai  vue  couverte  et  d'un 
porphyre  terreux  blanc- jaunâtre  (mine  de  Santa-Cruz),  et 
d'un  conglomérat  ancien  (boca  de  la  mina  de  Villalpando) , 
qui  représente  évidemment  le  grès  rouge  et  dont  les  cou- 
ches inférieures  passent  au  grauwacke. 

Les  porphyres  de  la  région  équinoxlale  du  Mexique  ren- 
ferment,  quoique  bien  rarement,   outre   quelques  grenats 


ÏND  2^ç, 

disséminés  (  Izmîquilpan  et  Xaschi),  du  mercure  sulfuré  (San 
Juan  de  la  Chica  ;  Cerro  del  Fraile  près  de  la  Villa  de  San- 
FeJipe  ;  Gasave,  à  l'extrémité  septentrionale  de  la  vallée  de 
Mexico);  de  l'étain  (EIRobedal,  et  laMesa  de  losHernandez); 
de  l'alunite  (Real  del  Monte,  d'après  M.  Sonneschmidt). 
Cette  dernière  substance  semble  rapprocher  encore  davantage 
ces  roches  porphyriques  des  véritables  trachytes  ;  quoique, 
dans  l'Amérique  méridionale  (péninsule  d'Araya ,  Cerro  del 
Distiladero  et  de  Chupariparu  ),  jaie  vu  un  thouschiefer,  qui 
îipparlient  plutôt  au  terrain  primitif  qu'au  terrain  intermé- 
diaire, traversé  par  des  liions,  je  ne  dirai  pas,  d'alunite 
(alaunstein) ,  mais  d'alun  natif  dont  les  Indiens  vendent  au 
marché  de  Cumana  des  morceaux  de  plus  d'un  pouce  de 
grosseur.  Le  cinabre  des  porphyres  de  San-Juan  de  la  Chica, 
les  couches  argileuses  du  Durasno,  mêlées  à  la  fois  de  houille 
et  de  cinabre  ,  et  placées  sur  un  porphyre  très-amphiboliquc, 
sont  des  phénomènes  bien  dignes  d'attention.  Ceux  des  géo- 
gnostes  qui  mettent  (comme  moi)  plus  d'importance  au  gise- 
ment qu'à  la  composition  oryctognostique  des  roches ,  rap- 
procheront sans  doute  les  porphyres  et  argiles  du  Durasno  des 
dépôts  de  mercure  que  présente  dans  les  deux  mondes  la  for- 
mation de  grès  rouge  et  de  porphyre  (duché  de  Deux-ponts, 
et  Cuença  ,  entre  Quito  etLoxa).  Les  dernières  couches  du 
terrain  de  transition  se  trouvent  partout  dans  une  liaison  in- 
time avec  les  couches  les  plus  anciennes  du  terrain  secondaire. 
Le  célèbre  filon  argentifère  de  Bolaiïos  a  offert  sa  plus 
grande  richesse  dans  une  amygdaloïde  intercalée  au  por- 
phyre. En  Hongrie ,  en  Angleterre ,  en  Ecosse  et  même  en 
Allemagne  ,  des  roches  d'amygdaloïde  et  de  porphyres  appar- 
tiennent à  la  fois  aux  grauwack.es,  aux  thonschiefer  et  cal» 
caires  de  transition  et  au  grès  rouge  ou  grès  houiller.  Le 
porphyre  métallifère  de  Guanaxuato  recouvre  simplement 
le  thonschiefer  :  il  n'y  forme  pas  en  même  tem.ps  des  couches 
intercalées  (comme  dans  le  groupe  §.22);  mais  une  syénite 
analogue  à  celle  que  l'on  voit  dans  la  mine  de  Valenciana , 
du  milieu  du  thonschiefer  intermédiaire,  alterne  des  milliers 
de  fois,  sur  une  surface  de  plus  de  vingt  lieues  carrées,  avec 
du  griinstein  de  transition,  entre  la  mine  del'Esperanza  et  le 
%'illage  deCpmangillas.  Dans  cette  région,  la  roche  syénitiquc: 


220  11>,]3 

est  dépout-vue  de  métaux  ;   mais  à  Comanja  elle  est  argenti- 
fère, comme  elle  l'est  aussi  en  Saxe  et  en  Hongrie. 

b.  Dans  l'hémisphère  austral.  Entre  les  5°  et  8°  de  latitude  j'ai 
vu  des  roches  porphyritiques ,  intimement  liées  entre  elles, 
rouvrir  les  pentes  orientales  et  occidentales  des  Andes  du 
Pérou.  Ces  roches  reposent,  Soit  sur  un  thonschiefer  (de 
transition?)  traversé  par  des  filons  argentifères  (Mandor,  El 
Pareton),  soit,  quand  le  thonschiefer  manque,  sur  du  gra- 
nité. Les  unes  sont  ou  divisées  en  colonnes  gigantesques 
(Paramo  de  Chulucanas),  ou  très- régulièrement  stratitiées 
(Sondorillo).  Leur  base  noire  est  presque  basaltique;  elles 
renferment  plus  de  pyroxène  que  de  feldspath,  et  alternent 
(  Qaebrada  de  Tacorpo  )  avec  des  couches  de  jaspe  et  de 
icldspath  compacte.  Ce  dernier,  dépourvu  de  cristaux  dis- 
séminés, est  noir  comme  de  la  pierre  lydienne,  et  rappelle, 
par  sa  couleur  et  son  homogénéité  ,  certains  basanites  des 
ïnonumens  anciens.  D'autres  porphyres  (N.'"  S.^'^  del  Car- 
îuen,  au  nord  du  village  indien  de  San  Felipe)  ont  une 
apparence  moins  trachytique  ;  ils  offrent  de  riches  filons  ar- 
gentifères, et  sont  recouverts  tantôt  de  couches  de  quarz  do 
trois  ou  quatre  toises  de  large  ,  tantôt  d'un  calcaire  (alpin?) 
<"oaipacte,  bleu -noirâtre,  traversé  par  de  petits  filons  de 
spath  calcaire  et  rempli  de  coquilles  pétrifiées  (  hystérolithes , 
anomics,  cardium,  et  fragmens  de  grandes  coquilles  polytha- 
lames,  qui  sont  plutôt  des  nautilites  que  des  ammonites).  En 
«lescendant  (toujours  sur  la  pente  orientale  des  Andes)  vers 
Tomependa,  aux  bords  de  la  rivière  des  Amazones,  j'ai  vu 
entre  Sonanga  et  Chamaya  ,  le  grès  ancien  (  todtcs  liegende) 
superposé  à  un  porphyre  terreux  grisâtre ,  renfermant  (comme 
celui  de  Pucara)  beaucoup  d'amphibole  et  un  peu  de  feld- 
spath commun.  Sur  la  pente  occidentale  des  Andes,  en  ap- 
prochant des  côtes  de  la  mer  du  Sud,  on  trouve  (entre 
Namas  et  Magdalena)  des  porphyres  entièrement  dépourvus 
d'amphibole,  et  supportant  cette  grande  formation  de  quarz 
<]ui  remplace  dans  cette  région  le  grès  rouge.  J'ai  indiqué 
plus  haut  {§.  i8)  que  ce  porphyre,  loin  d'être  primitif,  m'a 
paru  le  plus  ancien  des  porphyres  de  transition.  Ce  résultat 
n'a  pu  être  énoncé  qu'avec  doute  ;  car  ,  entre  Ayavaca , 
Zaulaca,  Yamoca  (§.8)  et  Namas  (province  de  Jacn  de  Bra- 


IND  22X 

ramoros  et  intendance  de  Truxillo  ) ,  il  est  bien  difficile  de 
déterminer  avec  certitude  l'âge  des  granités,  des  syénites  et 
des  thonschiefer  sur  lesquels  reposent  les  porphyres  inter- 
médiaires et  les  trachytcs  porphyriques.  Lorsque  les  rap- 
ports de  superposition  ne  sont  pas  entièrement  connus,  l'on 
ne  doit  prononcer  qu'avec  réserve  sur  un  terrain  d'une 
constitution  géognostique  si  compliquée. 

B.   Groupe  de  la  Hongrie. 

C'est  le  terrain  de  syénite  et  de  griinstein  porphyrique  qui 
renferme  la  principale  richesse  minérale  de  la  Hongrie  et 
de  la  Transylvanie  (Schemnitz,  Kremnitz ,  Hoch\viesen  et 
Kœnigsberg  ;  le  Bannat ,  Kapnak  et  Nagyag).  Nous  faisons 
connoitre  ce  terrain  d'après  les  belles  observations,  encore 
inédites,  de  M.  Beudant.  La  formation  de  Hongrie  est  beau- 
coup moins  simple  que  celle  du  Mexique,  avec  laquelle  on. 
lui  trouve  d'ailleurs  de  grandes  analogies.  Les  roches  qui 
constituent  sa  masse  principale,  sont  des  roches  porphyri- 
ques à  base  de  feldspath  compacte,  colorée  en  vert:  elles 
renferment,  comme  les  porphyres  de  l'Amérique  équinoxialo 
que  j'ai  fait  connoître  plus  haut,  de  l'amphibole,  et  sont 
presque  dépourvues  de  quarz.  Cette  dernière  substance  ne 
se  montre  que  dans  les  couches  subordonnées  de  syénite. 
de  granité,  de  gneis  et  de  griinstein  compacte,  auxquelles 
passe  la  roche  porphyrique.  Dans  la  Nouvelle -Espagne,  les 
porphyres  à  filons  aurifères  et  argentifères  ont  une  pâte  en 
apparence  homogène ,  le  plus  souvent  foiblement  colorée  ;  en 
Hongrie,  ce  ne  sont  pas  les  vrais  porphyres  qui  dominent, 
mais  les  griinstein  porphyriques.  D'après  de  simples  considé- 
rations oryctognostiques,  c'est-à-dire  de  composition,  le  ter- 
rain aurifère  de  Hongrie  ressemble  bien  plus  à  la  formation 
mexicaine  d'Ovexeras  ,  dans  laquelle  alternent  des  syénites 
et  des  grunstein  plus  ou  moins  porphyriques,  qu'à  ces  grandes 
masses  de  porphyres  que  traversent  les  célèbres  filons  de 
Pachuca,  Real  del  Monte,  Moran  et  Guanaxuato  (au  sud» 
est  de  la  mine  de  Belgrade);  mais,  considérées  géognostique- 
ment,  toutes  ces  roches  de  porphyre  et  de  syénite  ,  celles  du 
Mexique  et  de  la  Hongrie,  ne  constituent  qu'une  seule  for- 
mation, tantôt  simple,  tantôt  composée  (avec  alternance}. 


222  I]VD 

Les  roches  porphyriques  et  syénitiques  de  Hoiigl'ie  ,  ic* 
plus  compactes  comme  les  plus  mélangées,  renferment  du 
carbonate  de  chaux,  et  font  effervescence  avec  les  acides. 
Ce  caractère  se  retrouve  dans  ies  roches  d'un  gisement  ana- 
logue du  Mexique  ,  mais  non  dans  les  trachytes  qui  leur  sont 
superposés.  Le  feldspath  vitreux  est  beaucoup  plus  rare  dans 
les  porph^-res  à  base  de  grunstein  de  la  Hongrie  que  dans  les 
porphyres  mexicains:  il  ne  se  rencontre  (  Hochwiesen  , 
Bleihiitte)  que  dans  les  strates  supérieurs  et  terreux,  surtout 
là  où  commence  le  terrain  trachytique.  Le  fer  oxidulé  abonde 
lorsque  l'amphibole  se  montre  en  cristaux  très-distincts  ;  k' 
grenat  (que  nous  avons  déjà  indiqué  plus  haut  dans  les  por- 
phyres mexicains  de  Zimapan  et  dans  ceux  de  Potosi,  sur  le 
revers  oriental  des  Andes  du  Pérou)  pénètre  jusqu'au  milieu 
des  prismes  d'amphibole.  Quoique  dans  la  grande  formation 
de  syénites  et  de  grunstein  porphyriques  de  la  Hongrie  les 
diverses  variétés  de  roches  passent  fréquemment  les  unes  aux 
autres,  on  remarque  pourtant  en  général  le  type  suivant  d'as- 
sociation et  de  superposition  :  la  partie  inférieure  de  tout  le 
système  est  formée  par  des  syénites  à  gros  et  à  petits  grains  , 
passant  à  un  granité  talqueux  (Hodi-ltz)  et  au  gneis;  la  partie 
moyenne  est  composée  tantôt  de  grunstein  compacte,  à  pâte 
noire  presque  dépourvue  de  cristaux  disséminés,  tantôt  de 
roches  porphyriques,  à  base  de  feldspath  pur,  ou  à  base 
mélangée  de  feldspath  et  d'amphibole ,  enchâssant  des  cris- 
taux de  feldspath  commun  (lamelleux),  de  l'amphibole, 
un  peu  de  mica  et  des  grenats,  très- rarement  du  quarz  ;  la 
partie  supérieure  offre  des  griinstein  porphyriques  terreux 
et  particulièrement  aurifères.  C'est  seulement  cette  dernière 
assise  qui  renferme  quelquefois  du  feldspath  vitreux,  de  la 
laumonite,  du  mica  et  (comme  dans  PxVmérique  équinoxiale) 
des  filons  de  jaspe  rouge.  Dans  les  griinstein  terreux  qui  sont, 
d'une  structure  plus  simple,  parce  qu'ils  n'alternent  pas  avei- 
des  syénites,  des  granités  ou  gneis  de  transition,  on  trouve 
(vallée  de  Glashiittc)  des  masses  compactes  basaltiformes  (di- 
visées en  prismes)  et  un  grunstein  porphyrique  noir  à  base 
de  feldspath  amphiboleux.  Ce  gnïnstein  enchâsse  des  aiguilles 
très-petites  d'amphibole,  des  lamelles  nombreuses  de  mica 
noir  et  des  druscs  de  quarz  blanc  et  rouge. 


IND  223 

Les  couches  subordonnées  à  la  grande  formation  de  syé- 
nite  et  griinstein  porphyrique  de  Hongrie  sont  :  des  mica- 
schistes (vallée  d'Eisenbach  )  ;  du  quarz  compacte,  tantôt 
feuilleté  et  micacé ,  tantôt  grenu  ,  passant  partiellement  à 
un  silex  terne  à  cassure  unie  (bassin  occidental  de  Schem- 
nitz);  du  calcaire  stéatiteux ,  jaune  de  soufre,  verdàtre  ou 
rougeâtre,  avec  grenats  disséminés  dans  la  masse,  et  accom- 
pagné de  serpentine  (Hodritz).  Tout  ce  système  de  roches 
syénitiques  et  porphyriques  est  très- distinctement  stratifié 
en  Hongrie  comme  au  Mexique;  mais,  dans  le  premier  de 
ces  deux  pays ,  la  direction  et  l'inclinaison  des  strates  ne 
sont  uniformes  que  dans  un  même  groupe  de  montagnes. 
La  nature  du  terrain  sur  lequel  reposent  les  syénites  et  griin- 
stein porphyriques  de  la  Hongrie,  n'est  pas  facile  à  déter- 
miner avec  certitude.  M.  Beudant  les  croit  d'une  formation 
plus  récente  que  les  grauwackes,  qui  ne  se  sont  pas  déve- 
loppés en  Hongrie  là  où  dominent  les  griinstein  porphyri- 
ques. Des  schistes  talqueux,  alternant  avec  des  calcaires  cris- 
tallins grisâtres,  et  appartenant  probablement  au  terrain  de 
transition  le  plus  ancien  ,  ont  paru  à  ce  savant  géognoste  , 
de  même  qu'à  M.  Becker,  servir  de  base  à  la  formation  syéni- 
tique  et  porphyrique.  Ce  seroit  une  analogie  de  plus  qu'of- 
friroit  cette  formation  avec  le  terrain  homonyme  du  Mexique. 
En  Hongrie,  comme  dans  le  nouveau  continent,  les  por- 
phyres, les  syénites  et  les  griinstein  sont  immédiatement  re- 
couverts de  trachytes  et  de  conglomérats  trachytiques  avec 
obsidiennes  et  perlites.  En  Auvergne  (Mont -d'or.  Cantal)  ; 
dans  les  îles  de  la  Grèce  (Argentiera,  Milo  ,  Santorino),  visi- 
tées par  un  excellent  observateur,  M.  Hawkins  ;  à  Unalaska  , 
exploré  récemment  par  M.  de  Chamisso  et  par  l'expédition 
du  capitaine  Kotzebue,  ces  mêmes  rapports  de  gisement 
s'observent  entre  les  trachytes  et  les  porphyres  de  transition, 
A  la  montagne  du  Kasbek  ,  dans  la  chaîne  Caucasique  ,  uu 
porphyre  intermédiaire,  qui  alterne  avec  de  la  syénite,  du 
granité,  du  gneis  et  du  thonschiefer  de  transition,  renferme 
aussi  du  feldspath  vitreux  :  il  offre  même  dans  quelques 
strates  toutes  les  apparences  d'un  trachyte  poreux.  C'est  ainsi 
que  sur  les  points  les  plus  éloignés  du  globe  ,  en  Amérique, 
en  Europe  et  en  Asie,   nous  voyons  osciller  les  porphyres 


324  JISTD 

entre  des  roches  de  transition  et  des  roclics  volcaniques  tr*-s- 
onciennes, 

C-    Groupe  de  la  Saxe. 

Nous  ne  parlons  point  ici  du  porphyre  qui  forme  avec 
le  griinstcin  et  le  calcaire  gris-noiràtre  des  couches  subor- 
données (Friedrichsualde,  Seidwitzgrund)  dans  le  schiste  do 
transition  (  §.  22),  mais  de  la  grande  formation  de  syénite  et 
porphyre  que  "VVerner  désignoit  par  le  nom  de  formalion prin- 
cipale (Haiiplnicderlage).  Ce  savant  illustre  dislinguoit  quatre 
terrains  de  porphyres  :  le  premier  formant  des  couches  (ou 
plutôt  des  filons?)  dans  le  gneis  et  le  micaschiste  primitifs; 
le  second  alternant  avec  la  syénite;  le  troisième  appartenant 
au  grès  houiller,  et  renfermant  des  griinstein,  des  rétinltes  et 
des  amygdfiloïdes  agathifères;  le  quatrième  intercalé  à  des 
roches  tiappéennes  (volcaniques).  Ces  quatre  terrains,  dont 
Je  premier  ne  constitue  vraisemblablement  pas  une  formation 
indépendante ,  sont,  comme  je  l'ai  exposé  ailleurs  (  Vojage  aux 
régions  équinpxialcs  ,  T.  I,p.  i55),  les  porphyres  intercalé^ 
aux  roches  primitives,  les  porph3'res  de  transition,  les  por^ 
phyres  secondaires  et  les  trachytes  (  trapporphyre).  Lu  formai 
lion  principale  de  porphyre  et  de  syénite  de  Saxe  repose  su^* 
des  schistes  de  transition  (avec  grauwacke),  et  par  consé-^ 
quent,  là  où  les  thonschiefer  ne  se  sont  pas  développés,  sur 
des  roches  plus  anciennes.  La  syénite  qui  alterne  avec  le  por- 
phyre (Meissen,  Lçuben  et  Prasitz;  Suhl)  passe  au  granité  et 
au  gneis.  Ce  granité  de  transition  est  généralement  à  gros 
crains ,  composé  de  feldspath  rougeàtre ,  de  quarz  gris  de 
fumée,  et  de  mica  noir  bien  cristallisé  (Dohna,  Posewitz  et 
Wesenstein).  Le  gneis  de  transition  (Meissen)  est  plus  rare 
que  le  granité,  et  forme  des  couches  dans  la  syénite,  comme 
en  forment  aussi  le  calcaire  grenu  et  blanc  (Naundorf)  et  un 
griinstein  qui  passe  au  basalte  (  Wehnitz).  La  présence  de  la 
formation  de  syénite  qui  renferme,  dans  la  vallée  de  Plauen 
(comme  en  Ngrwége) ,  quelques  cristaux  disséminés  dezircon, 
jie  se  manifeste  souvent  que  par  des  bancs  de  granité;  car 
la  substitution,  fréquente  et  locale,  du  mica  à  Tamphibole  et 
de  l'amphibole  au  mica,  caractérise  la  formation  syénilique, 
abondante  en  sphène  brun  (braunmenakanerz)  ,  qui  est  un 


IND  225 

silicate  de  titane  et  de  chaux.  Le  porphyre  non  stratifié  de 
Saxe  a  généralement  une  base  rouge ,  grisâtre  et  argileuse 
(thonporphyr,  résultat  d'une  décomposition  du  feldspath 
compacte);  d'après  M.  Boue,  quelquefois  (vallée  de  Tharandt) 
cette  base  prend  l'aspect  du  klingstein.  Ce  porphyre  ne  ren- 
ferme presque  pas  d'amphibole,  et  n'est  point  dépourvu  de 
quarz  comme  ceux  du  Mexique  et  de  la  Hongrie.  On  y  trouve 
du  feldspath  commun  ,  du  quarz  cristallisé  en  doubles  pyra- 
mides hexaèdres  ,  et  quelquefois  un  peu  de  mica.  Le  groupe 
de  porphyres  et  syénites  de  Saxe  est  un  peu  métallifère  ;  la 
syénite  stratifiée  à  bancs  épais  de  Scharfenberg  offre  des  filons 
d'argent,  et  le  porphyre  d'Altenberg  contient  quelquefois  de 
l'étain. 

C'est  dans  la  vallée  de  Plan  en ,  près  de  Dresde,  que  se 
trouve  la  roche  à  laquelle  Werner  a  donné,  le  premier,  le 
nom  de  sjénite ,  croyant  par  erreur  que  les  obélisques  égyp- 
tiens conservés  à  Rome  contenoient  tous  de  l'amphibole.  M. 
Wad  {Foss.  œgjpt.  Musei  Borgiani ,  1794,  p.  6  et  48  ;  Zoega, 
de  Obeliscis,  p.  648)  a  prouvé  que  ces  obélisques,  dont  le  plus 
beau  ,  minéralogiquement  parlant,  est  celui  de  Piazza  Navona, 
sont  un  véritable  granité  avec  mica  noir  aggloméré ,  sans 
amphibole.  En  effet,  il  n'existe  point  à  Syène  de  formation 
indépendante  de  syénite  et  de  porphyre  intermédiaires  ; 
mais  le  granité  primitif,  peut-être  d'une  formation  pas  très- 
ancienne  ,  y  renferme  de  l'amphibole  (  comme  à  l'Orénoque; 
au  Spitzberg  près  Krummhiibel  en  Silésie  ;  près  Wiborg  en 
Finlande)  disséminé  dans  des  couches  subordonnées,  non 
étendues  et  d'un  prolongement  peu  régulier.  Pour  le  géognoste 
classificateur  la  roche  de  Syène  est  un  granité  qui  contient 
de  l'amphibole  :  ce  n'est  point  de  la  syénite.  Quelques  frag- 
mens  de  cette  roche,  que  Ton  trouve  isolés  parmi  les  mo- 
numens  égyptiens,  ont  trompé  Werner  par  l'analogie  oryc- 
tognostique  qu'ils  présentent  avec  la  syénite  de  la  vallée  de 
Plauen. 

Des  formations  de  porphyre  et  de  syénite  entièrement 
semblables  à  celle  de  Saxe,  et  placées  sur  le  schiste  de  tran- 
sition et  le  grauAvacke ,  sont  communes  au  Thiiringerwald  • 
d'après  M.  Boue,  en  Moravie  (  entre  Blansko,  Briinn  etZnaim)  ; 
d'après  M.  Rozière ,  dans  la  péninsule  du  Mont  Sinaï.  Ces 
23.  J  5 


226  IND 

dernières  méritent  une  attention  particulière.  Des  roches 
intermédiaires  schisteuses  et  arénacées  couvrent  une  partie  de 
l'Arabie  pétrée.  Au  milieu  de  ces  roches,  qui  renferment  des 
conglomérats  avec  fragmens  de  granité  et  de  porphyre  [brèche 
universelle  d'Égjpte ,  dans  le  langage  des  antiquaires),  sortent 
des  sy-^niles,  et  des  porphyres  à  base  de  feldspath  compacte 
silicifère,  enchâssant  des  cristaux  de  feldspath  lamelleux, 
un  peu  d'amphibole  et,  d'après  M.  Burckhardt,  du  quarz.  Les 
porphyres  sont  généralement  inférieurs  à  la  syénite,  et  cette 
dernière  ,  dont  se  composent  probablement  les  tables  de  la  loi 
que  [^on  croit  enterrées  à  Djebel  Mousa,  est  accompagnée  de 
griinstein  compacte  noirâtre  (golfe  d'Akaba)  et  de  griin- 
stein  porphyrique.  Tout  ce  terrain  de  FArabie  pétrée,  dont 
j'ai  pu  examiner  de  nombreux  échantillons,  ressemble  de  la 
manière  la  plus  frappante  au  terrain  porphyrique  etsyénitique 
d'O  vexeras  et  deGuanaxuato  ,  au  Mexique.  En  substituant  avec 
M.  Rozière  le  mot  sinaïte  à  celui  de  syénite,  on  auroit  donné 
à  la  roche  de  transition  qui  est  composée  d'amphibole  et  de 
feldspath  ,  et  mêlée  quelquefois  d'un  peu  de  quarz  et  de  mica  , 
un  nom  géographique  plus  exact,  un  nom  qui  (comme  celui 
de  calcaire  du  Jura)  auroit  rappelé  non-seulement  des  rap- 
ports de  composition  ,  mais  aussi  des  rapports  de  gisement. 

D.    Groupe  de  la  Norwége. 

§.  24.  C'est  le  terrain  décrit  par  deux  géogncstcs  célèbres, 
le  professeur  Haussmann  et  M.  Léopold  de  Buch  ;  c'est  celui 
dans  lequel  la  formation  de  granité  postérieure  à  des  roches 
calcaires  ,  remplies  de  débris  de  corps  organisés,  s'est  le  mieux 
développée,  et  qui  par  conséquent  a  répandu  le  plus  de  Jour 
sur  la  véritable  nature  des  roches  de  transition.  On  n'avoit 
d'abord  regardé  cette  classe  de  roches  que  comme  une  asso- 
ciation de  grauwacke  ,  de  schistes  carbures  et  de  calcaires 
noirs  :  peu  à  peu  l'on  reconnut  que  la  grande  masse  de  por- 
phyres appelés  long -temps  porphyres  primitifs  appartenoit, 
soit  au  terrain  de  transition,  soit  même  au  grès  rouge.  On 
réunissoitaux  porphyres  intermédiaires  les  S)'énitcs  deMeisseu; 
mais,  quoique  ces  dernières  perdent  l'amphibole  et  passent 
insensiblement  au  .granité  de  transition  (Dohna) ,  la  généra- 


IND  227 

lîté  de  ce  phénomène,  l'apparition  nouvelle  de  roches  gra- 
nitoïdes,  entièrement  analogues  aux  roches  primitives,  et 
recouvrant  à  la  fois  des  porphyres  noirs  avec  pyroxène  et 
des  calcaires  à  orthocératites,  ne  commença  à  bien  fixer  l'at- 
tention des  géognostes  que  lorsque  les  rives  du  golfe  de  Chris- 
tiania furent  décrites  dans  tous  leurs  merveilleux  rapports 
de  superposition. 

Les  zircons ,  qui  ont  donné  tant  de  célébrité  à  la  syénite  de 
Holmstrand  et  de  Stromsoë,  se  retrouvent  abondamment  dans 
les  syénites  du  Grocjiland  méridional  (d'après  M.  Giesecke. 
près  cap  Comfort,  à  Kittiksut  et  àHôlsteensberg)  :  ils  sont  aussi 
disséminés  en  très-petites  masses  dans  les  syénites  de  Meisseii 
et  de  la  vallée  de  Plauen.  Cette  substance,  dans  d'autres  loca- 
lités, appartient  plutôt  aux  roches  primitives  (par  exemple, 
au  gneis);  car,  quoique  le  zircon ,  le  fer  titane,  le  sphène, 
l'épidote,  le  feldspath  vitreux,  le  chiasloHthe,  la  pierre  ly- 
dienne, la  diallage  ,  l'amphibole  et  le  pyroxène  accompagnent 
df  préférence  certaines  forn'.ations,  il  ne  faut  point  considérer 
ces  associations  comme  des  caractères  d'une  valeur  absolue. 
L'accumulation  des  zircons  dans  les  syénites  deChristiauiafiord 
est,  sous  le  rapport  des  questions  géogoniques,  beaucoup 
moins  remarquable  que  la  multiplicité  de  vacuoles  ,  la  struc- 
ture caverneuse  et  gercée  de  ces  mêmes  syénites  de  transition, 
qui  sont  liées  à  des  porphyres  basaltiques  et  pyroxéniques. 
Depuis  que  ,  par  les  analogies  fréquentes  que  l'on  a  obser- 
vées entre  le  terrain  de  porphyre  et  de  syénite  de  Christiania 
et  les  terrains  de  transition  du  Caucase,  de  la  Hongrie,  de 
l'Allemagne  ,  de  la  France  occidentale  ,  du  Groenland  et  du 
Mexique,  les  géognostes  ne  sont  plus  étonnés  de  la  succes- 
sion de  roches  feldspathiques  et  cristallisées  aux  grau^vackes 
et  aux  calcaires  pétris  d'entroqucs  et  d'orthocératites ,  l'ap- 
parition de  ces  mêmes  roches  cristallines  dans  le  plus  ancien 
membre  de  la  série  des  roches  secondaires  commence  à  fixer 
leur  attention.  On  a  reconnu  que,  dans  les  deux  mondes, 
des  masses  cristallines ,  composées,  de  feldspath  et  d'amphi- 
bole, ou  de  feldspath  et  de  pyroxène,  oscillent  entre  le 
terrain  volcanique ,  le  terrain  intermédiaire  et  le  grès  rouge. 
Ces  oscillations ,  ces  intercalations  de  roches  problématiques  , 
que  l'on  est  tenté  de  regarder  comme  les  eS^sts  d'une  péné- 


tration  successive  de  bas  en  haut,  prouvent  la  liaison  intime 
qui  existe  entre  les  couches  les  plus  récentes  du  terrain 
de  transition  et  les  plus  anciennes  couches  des  terrains  secon- 
daires et  volcaniques.  Dans  la  partie  méridionale  du  Tyrol, 
des  masses  de  granité  et  de  porphyre  syénitique  semblent 
même  déborder  du  grès  rouge  dans  le  calcaire  alpin  ;  et 
ces  phénomènes  curieux  d'alternance ,  liés  à  tant  d'autres 
plus  anciennement  connus,  semblent  condamner  à  la  fois  et 
la  séparation  du  grès  houiller  des  porphyres  du  terrain  in- 
termédiaire,  et  la.  dénomination  historique  et  trop  exclusive 
de  terrains  pyrogènes. 

La  grande  formation  des  porphyres,  des  syénites  et  des  gra- 
nités de  la  Norwége  ,  repose  sur  un  terrain  de  schiste  de  tran- 
sition qui  renferme  des  couches  alternantes  de  calcaire  noir, 
de  pierre  lydienne  et  peut-être  même  (car  le  gisement  dans 
ce  point  est  moi-ns  évident)  de  granité.  Le  calcaire  noir  (Agger- 
selv,  Saasen)  est  pétri  d'orthocératitcs  de  plusieurs  pieds  de 
longueur,  d'entroques,  de  madrépores,  de  pectinites  et 
(quoique  très-rarement)  d'ammonites.  Des  filons  de  por- 
phyre et  de  griinstein  porphyriques  de  2  à  i5  toises  d'épais- 
seur traversent  le  thonschiefer  et  le  calcaire  (  Skiallebjerg) 
et  préludent  pour  ainsi  dire  aux  masses  analogues  de  por- 
phyres qui  reposent,  non  immédiatement  sur  le  thonschiefer, 
mais  sur  une  roche  arénacée  (grauuacke)  dont  le  thonschiefer 
est  recouvert.  Entre  Stromsoë,  Maridal  etKrogskovn,  legrau- 
wacke,  au  lieu  de  se  trouver  en  couches  dans  le  thonschiefer 
auquel  il  appartient  (§.22),  en  forme  comme  une  assise  su- 
péi-ieure,  de  sorte  que  l'on  y  voit  suivre  de  bas  en  haut  : 
gneis  primitif;  thonschiefer  de  transition  ,  alternant  avec  du 
calcaire  à  orthocéraîites  ;  grauwacke  ;  porphyre  avec  des 
couches  subordonnées  de  griinstein;  granité;  syénite  à  zir- 
cons,  alternant  avec  quelques  couches  de  porphyres.  Près  de 
Skeen  et  de  Holmstrand  le  calcaire  à  orthocératites  a  pris  un 
tel  développement  ,  que  le  thonschiefer  y  manque  entière- 
ment ;  le  grauwacke  y  est  remplacé  par  une  roche  de  quarz 
micacé.  On  y  voit  de  bas  en  haut  :  du  gneis  primitif;  du 
calcaire  de  transition  ;  la  roche  de  quarz;  le  porphyre  dont 
l'assise  inférieure  est  du  niandelstein  ;  la  syénite  à  zircons. 
Les  porphyres  de  Christianiaftord .  mélangés  par  infiltration 


IND  22^ 

de  carbonate  de  chaux,  sont  généralement  brun-rougeàtre  : 
ils  offrent  des  cristaux  quelquefois  très- effilés  de  feldspath 
lamelleux,  et  sont  presque  dépourvus  de  quarz  et  d'amphibole. 
Le  quarz  cristallisé  ne  se  montre  qu'entre  Angersklif  et  Revo. 
La  pâte  du  porphyre  devient  parfois  noire  et  boursouflée 
(Viig,  Holmstrand).  Dans  cet  état,  la  roche  ressemble  à  du 
basalte,  comme  la  syénite  de  la  péninsule  du  mont  Sinaï, 
et  renferme  des  cristaux  de  pyroxène.  M.  de  Buch ,  auquel 
j'emprunte  tous  ces  faits  importans ,  observe  que  les  cristaux 
de  feldspath  disparoissent  à  mesure  que  la  masse  prend  une 
teinte  plus  noire,  phénomène  que  m'ont  offert  aussi  plusieurs 
porphyres  de  transition  du  Mexique.  Le  mandelstein,  dont 
les  cavités  alongées  sont  remplies  de  carbonate  de  chaux,  et 
qui  forme  l'assise  inférieure  des  porphyres  nor\'^'égiens  de 
Skeen  et  de  Klaveness,  rappelle  le  mandelstein  du  porphyre 
de  Bolaïïos  (province  mexicaine  de  la  Nouvelle-Galice),  qui 
est  traversé  par  un  des  plus  riches  filons  argentifères.  Les 
sj'énites  de  Christianiafiord  ,  toujours  placés  au-dessus  des 
porphyres,  quoique  alternant  d'abord  avec  eux,  sont  com- 
posés (  Waringskullen  ,  Hackedalen  )  de  beaucoup  de  grands 
cristaux  de  feldspath  rouge ,  et  de  peu  d'amphibole  en  très- 
petits  cristaux.  Le  mica  et  le  quarz  n'y  sont  qu'accidentels. 
Quelques  vacuoles  anguleuses  de  la  syénite  offrent  des  cristaux 
de  zircons  et  d'épidote.  Le  titane  ferrifère,  commun  dans 
les  deux  mondes  aux  roches  d'euphotide  primitive  et  aux 
trachytes,  se  trouve  parfois  disséminé  dans  la  masse  des 
syénites  à  zircons, 

VI.    EUPHOTIDE    DE    TRANSITION- 

§.  25.  11  faut  distinguer,  comme  parmi  les  syénites,  entre 
les  bancs  intercalés  et  les  formations  indépendantes.  Des  cou- 
ches de  serpentine  se  trouvent  intercalées  dans  le  weisstein 
(§.  4  ) ,  dans  le  micaschiste  primitif  (§.  1 1  )  et  dans  le  thon- 
schiefer  de  transition  (§.22).  Quant  aux  terrains  indépendans 
d'euphotide  (gabbro) ,  qui  souvent  sont  d'une  structure  très- 
compliquée  ,  on  peut  en  compter  pour  le  moins  deux ,  même 
en  rejetant  la  formation  non  recouverte  et  assez  douteuse  de 
Zôblitz   en   Saxe.    La  première  de   ces  formations  indépen- 


^oo  IND 

dantes  se  trouve  (§.  nj)  sur  la  limite  des  terrains  primitifs 
et  intermédiaires  :  c'est  celle  que  M.  de  Buch  a  fait  con- 
noitre  en  Norwége  (Maggeroe,  Alten),  et  M.  Beudant  en 
Hongrie  (Dobschau).  La  seconde  formation  appartient  aux 
terrains  de  transition  les  plus  nouveaux  ;  elle  se  trouve  sur 
la  limite  des  roches  intermédiaires  et  secondaires.  On  a  re- 
gardé comme  plus  récente  encore  la  serpentine  liée  à  la  for- 
mation d'ophite,  observée  par  M.  Palassou  dans  les  Pyrénées 
(vallée  de  Baigorry ,  Riemont)  et  dans  le  département  des 
Landes.  Mais  cet  ophite  est  un  griinstein ,  mélange  intime 
de  feldspath,  d'épidote  et  d'amphibole,  auquel  sont  intercalés 
des  bancs  de  serpentine  (Pousac)j  il  passe  ,  par  le  changement 
dans  la  proportion  des  élémens ,  tantôt  à  la  syénite,  tantôt 
au  granité  graphique.  M.  Boue,  qui  a  récemment  examiné 
cet  ophite  sur  les  lieux,  le  croit  une  formation  de  transition, 
recouverte  de  grès  bigarré,  d'argile  et  de  gypse  secondaire. 

Dans  l'x\mérique  équinoxiale,  la  grande  formation  d'eupho- 
tide  de  transition  (celle  qui  constitue  le  dernier  membre 
de  la  série  des  roches  intermédiaires)  semble  presque  cous- 
<amiiient  liée  (comme  dans  le  Piémont,  entre  le  Mont  Cervin 
et  le  Breuil)  à  des  roches  amphiboliques.  Sur  le  bord  sep- 
tentrional des  Llanos  de  Venezuela  ,  recouvertes  de  grés 
rouge,  entre  Villa  de  Cura  et  Malpasso,  on  voit  des  masses 
considérables  de  serpentine  reposer  sur  un  thonschiefer  vert 
et  sur  un  calcaire  de  transition  ,  quelquefois  immédiatement 
sur  le  gneis  primitif.  Un  griinstein  à  petits  grains  forme  des 
couches  à  la  fois  dans  le  thonschiefer  et  dans  la  serpentine. 
Celle-ci  est  même  quelquefois  mêlée  de  feldspath  et  d'am- 
phibole. Les  schistes  verts  et  bleus,  le  griinstein,  le  calcaire 
noir ,  et  la  serpentine  traversée  par  des  filons  de  cuivre  , 
ne  forment  qu'un  seul  terrain ,  qui  est  recouvert  et  intime- 
ment lié  à  des  amygdaloïdes  pyroxéniques  et  à  de  la  pho- 
nolithe.  J'ai  décrit  ce  gisement  remarquable  des  roches  ser- 
pentineuses  de  Venezuela  dans  le  16.* chapitre  démon  Voyage 
eux  régions  équinoxiales  de  V Amérique. 

Dans  l'ile  de  Cuba  la  baie  de  la  Havane  sépare  le  calcaire 
du  Jura  d'une  formation  d'euphotide  dont  les  couches  les 
plus  basses  alternent ,  non  avec  du  griinstein  ,  mais  avec 
une  véritable  syénite  de  transition  composée  de  beaucoup  de 


IND  25i 

l'eldspath  blanc  ,  d'amphibole  décomposé  et  d'un  peu  de 
quarz.  Les  strates  altcrnans  de  la  syénite  et  de  la  serpen- 
tine ont  jusqu'à  trois  toises  d'épaisseur  ;  l'assise  supérieure 
de  cette  formation  mixte  est  de  la  serpentine ,  formant 
des  collines  de  3o  à  /\o  toises  de  hauteur ,  abondant  en 
diallage  métalloïde  ,  et  traversée  de  filons  remplis  de  belles 
calcédoines,  d'améthystes  et  de  minerais  de  cuivre.  Cette 
roche  est  confusément  stratifiée  (par  groupes,  N.  55°E.  ;  incL 
de  60°  au  S.O.  ou  N.  90  E.  ;  incl.  de  5o"  au  N.)  ;  il  en  sort  des 
sources  de  pétrole  et  d'eau  chargée  d'hydrogène  sulfuré. 

A  ce  même  terrain  d'euphotide  de  transition  (§.  26  )  sem- 
blent appartenir  et  la  formation  d'Ecosse  (Girvan  et  Bellan- 
traë  ) ,  composée,  d'après  M.  Boue,  de  serpentine,  de  roches 
hypersthéniques  et  de  syénite,  et  la  célèbre  formation  du 
Florentin  (Prato,  Monteferrato  ) ,  décrite  par  MM.  Viviani, 
Bardi,  Brocchi  et  Brongniart.  L'hypersthène  remplace  sou- 
vent (  Ecosse  ,  et  Gernerode  en  Allemagne  )  la  diallage. 
Quant  aux  euphotides  du  Florentin ,  elles  ont  été  récemment 
Fobjet  de  discussions  intéressantes.  Elles  renferment  des  lits 
de  jaspe  rougeàtre  ,  quelquefois  rubané,  et  paroissent  super- 
posées, d'après  M.  Brocchi,  comme  celles  de  Styrie,  à  des 
grauwackes  et  à  des  calcaires  de  transition.  M.  Brongniart 
pense  que  le  terrain  arénacé ,  ou,  comme  il  le  nomme,  le 
terrain  calcaréo-psammitique  des  Apennins,  qui  sert  de  base 
aux  euphotides  jaspifères,  est  ou  une  roche  secondaire  très- 
ancienne ,  ou  une  roche  de  transition  très-moderne.  Ce 
savant  a  fait  connoître  la  liaison  intime  qui  existe  entre  la 
serpentine  d'Italie  et  le  terrain  jaspique.  Ce  dernier  terrain 
constitue  généralement  Fassise  inférieure  des  euphotides. 

Ici  se  termine  la  série  des  formations  intermédiaires.  Nous 
avons  donné  plus  d'étendue  à  leur  description,  parce  que, 
toui  en  essayant  de  les  présenter  d'après  une  nouvelle  classi- 
fication par  groupes,  nous  avons  voulu  fixer  Faltention  des 
géognostes  sur  divers  phénomènes  de  gisement  qu'offrent  les 
montagnes  peu  connues  du  Mexique  et  de  FAmérique  duSud^ 


232 


IND 


Terrains  secondaires. 

I.  Grand  dépôt  de  houille,  grès  rouge 
et  porphyre  secondaire.  (Amygda- 
loïde,  griinsteia,  rétinite.) 

II.  Zechstein  (calcaire  alpin,  nia- 
gnesian  limestone),  quelquefois 
intercalé  au  grès  rouge.  (  Gypse  hy- 
draté, sel  gemme.) 

m.  Dépôts  alternans ,  arénacés  et 
calcaires  (imToeut  et  oolitliiqups}. 
placés  entre  le  zechstein  et  la  craie, 
fions  ne  citerons  ici  que  deux  types 
très-analogues  dans  leurs  rapports 
géognostiques  ,  et  en  commençant 
chaque  série  par  les  roches  les  plus 
anciennes. 

1."  Type. 

Grès  bigarré  (à  oolithes)  ,  et  argile 
avec  gypse  fibreux  et  traces  de  sel 
gemme. 

Muschelkalk  (calcaire  de  Gœttingue}. 

Quadersandstein. 

Calcaire  du  Jura  en  plusieurs  assises: 
calcaire  spongieux  et  caverneux; 
calcaire  marneux  avec  ossemens 
d'ichthyosaures  (lias);  oolithes; 
calcaires  à  madrépores  et  à  poly- 
piers (coral  rag);  calcaire  à  pois- 
sons et  crabes  fossiles. 

.Argile  avec  lignites. 

Grès  et  salles  verts  (craie  chloritée 
ou  plânerlalk). 

2.^  Type. 

Red  mari,  terrain  marneux  avec 
gypse  et  sel  gemme. 

Terrain  d' oolithes ,  dont  l'assise  infé- 
rieure est  le  lias. 

Salles  verts  (green  sand),  qui  repré 
sentent  la  craie  chloritée. 

IV.  Craie  blanche  et  grise ,  ou  craie- 
tuffeau. 


Terrains  exclusivement 
volcaniques. 

I.  Formations  trachjtiques. 

Trachjtes  granitoïdes  et  syéni- 
tiques. 

Trachjtes  porphyriques  (feld- 
spathiques  et  pyroxéniques  ). 

Phonolithes  des  trachytes. 

Trachytes  semi-vitreux. 

Perlites  avec  obsidienne. 

Meulières  trachjtiijues  cellu- 
leuses,  avec  nids  siliceux. 

{Conglomérats  trachftiques  et 
ponceux ,  avec  alunites,  sou- 
fre, opale  elbois  opalisé.) 

II.  Formations  basaltiques. 

Basaltes  avec  olivine,  pyroxène 
et  un  peu  d'amphibole. 

Phonolithes  des  basaltes. 

Dolérites. 

Mandelstein  celluleux. 

.Argile  avec  grenats  -pyropes. 

Cette  dernière  formation  sem- 
ble liée  à  l'argile  avec  ligni- 
tes du  terrain  tertiaire  sur 
lequel  sesontsouvent  répan- 
dues des  coulées  de  basalte. 


IND 


235 


Terrains  tertiaires. 

Dépôts  supérieurs  à  la  craie.  Leur 
ordre  de  succession  difTère  selon 
l'alternance  des  formations  par- 
tielles qui  se  trouvent  plus  ou 
moins  développées.  Nous  présen- 
tons le  type  le  plus  compliqué  et 
le  mieux  connu  : 

argiles  plas^ues  avec  lignites,  suc- 
cin  et  gr^^s  quarzeux.  (Une  forma- 
tion à  peu  près  parallèle,  peut-être 
plus  neuve  encore,  est  la  formation 
de  molasse  el  nagelfluhe  d'Argovie 
avec  lignites  et  ossemens  fossiles). 

Calcaire  (grossier)  de  Paris.  Les 
couches  supérieures  et  inférieures 
sont  du  grès. 

Marnes  et  gypse  à  ossemens.  Les  as- 
sises inférieures  sont  du  calcaire 
siliceux. 

Grès   et  sables  de  Fontainebleau. 

Terrain  lacustre ,  ou  d'eau  douce,  su- 
périeur. (  Meulières  siliceuses. 
Calcaire  d'OEningen  ,  peut-être  lié 
à   la  molasse.  Travertin.) 

Dépôts  d'alluvion. 


Suiée  des  Terrains  exclu- 
sivement VOLCANIQUES. 

(  Conglomérats  el  scories  basai- 
iitfues.  ) 

IIL  Laves  sorties  d'un  cratère 
volcanique.  (  Laves  anciennes 
à  larges  nappes,  généralement 
abondantes  en  feldspath.  Laves 
modernes  à  courans  distincts  et 
de  peu  de  largeur.  Obsidiennes 
et  ponces  des  obsidiennes.) 

IV.  Tu^s  des  volcans  avec  co- 
quilles. 

[Dépôts  de  calcaire  compacte  , 
de  marne,  de  gypse  et  d'ooli- 
thes  superposés  aux  tuffs  vol- 
caniques les  plus  modernes. 
Ces  petites  formations  loca- 
les appartiennent  peut-être 
aux  terrains  tertiaires.  Pla- 
teau de  Riobamba;  Isles  For- 
taventura  et  Lancerote.] 


J'ai  exposé  plus  haut  les  raisons  pour  lesquelles  je  fais  suc- 
céder à  la  fois ,  comme  par  bisection ,  les  terrains  secon- 
daires et  volcaniques  aux  terrains  de  transition.  Ces  derniers 
se  lient,  par  leurs  grauwackes  et  leurs  porphyres,  comme  par 
une  grande  accumulation  de  carbone,  au  grès  rouge,  aux 
porphyres  secondaires  et  aux  dépôts  de  houilles  ;  ils  se  lient 
par  leurs  porphyres  et  syénites  aux  trachytes.  Ces  liaisons 
sont  si  intimes  qu'on  a  souvent  de  la  peine  à  séparer  les 
porphyres,  les  amygdaloïdes  huileuses  et  les  roches  pyroxé- 
niques  appartenant  au  terrain  de  transition,  soit  des  grès 
rouges  avec  bancs  intercalés  de  porphyre  et  de  griinstein , 
soit  des  formations  exclusivement  volcaniques.  Je  me  sers  de 
l'expression  ferroin.  exclusivement  volcanique ,  pour  rappeler  que 


234  IND 

hors  de  ce  terrain  il  peut  y  avoir  des  roches  d'origine  ignée, 
mais  que  nulle  part  ailleurs  on  n'en  trouve  une  suite  moins 
interrompue  et  moins  contesté^. 

Terrains   secondaires. 

Ces  terrains  se  sont  très-inégalement  développés  sur  le  globe, 
et  la  cause  de  cette  inégalité  de  développement  est  un  des 
problèmes  les  plus  intéressans  de  la  géogonie  ou  géologie 
historique.  Il  est  assez  rare  de  trouver  tous  les  membres  de 
la  série  des  formations  secondaires  et  tertiaires  réunis  dans 
un  même  pays  (Thuringe,  Hanovre,  Westphalie;  Bavière; 
France  septentrionale;  centre  et  sud  de  l'Angleterre)  :  sou- 
vent de  grandes  formations,  par  exemple ,  le  grès  rouge  ou  le 
calcaire  alpin,  manquent  entièrement;  d'autres  fois  le  second 
est  contenu  dans  le  premier  comme  une  couche  subordonnée; 
d'autres  fois  encore  tous  les  termes  de  la  série  géognostique 
entre  le  calcaire  alpin  et  le  Jura,  ou  ceux  qui  sont  postérieurs 
à  la  craie,  se  trouvent  supprimés.  Dans  la  péninsule  Scandi- 
nave, sur  les  côtes  de  la  Mer  de  Behring,  et  (si  Ton  excepte 
le  grès  des  lignites  que  recouvrent  les  basaltes)  même  dans 
Je  Groenland  ,  cette  suppression  s'étend  sur  tous  les  terrains 
secondaires  et  tertiaires.  On  a  cru  long- temps  que  ce  phéno- 
mène bizarre  étoit  exclusivement  propre  à  la  zone  la  plus 
boréale,  surtout  à  celle  qui  est  contenue  entre  les  60°  et  70° 
de  latitude  ;  mais,  dans  un  immense  espace  de  laSierra  Pariine, 
prés  de  l'équateur,  entre  le  bassin  de  l'Amazone  et  celui  du 
Bas-Orénoque  (lat.  a"  —  8°,  long.  65"  —  70"),  j'ai  aussi  vu 
la  formation  primitive  dé  granité -gneis  non  recouverte  de 
terrains  intermédiaires  ,  secondaires  et  tertiaires.  Lorsque 
l'absence  des  formations  postérieures  au  développement  des 
êtres  organisés  sur  le  globe  n'est  pas  totale,  ce  sont  plutôt 
les  terrains  calcaires  que  ceux  de  grès  qui  se  trouvent  sup- 
primés; car  chaque  formation  non  schisteuse  a  des  brèches 
et  des  conglomérats  à  fragmens  ou  grains  plus  ou  moins 
gros ,  qui  lui  sont  propres.  Ces  conglomérats  sont  de  petits 
dépôts  partiels  qu'il  ne  faut  pas  confondre  avec  les  grandes 
formations  indépendantes  de  grauwacke  ,  de  grès  rouge  ,  de 
grès  bigarré  et  de  quadersandstein. 


IND  2i>h 

I.  Houille,   Grès  houge  et  Porphyre  secondaire  {a<,'ec  amjg- 
dalùïde,  griinstein  et  calcaires  intercalés). 

§.  2G.  Le  grès  houiller  et  le  porphyre  constituent  une 
même  formation  (  rothes  todtes  liegende),  variable  d'aspect, 
et  d'une  structure  souvent  très-compliquée.  Des  mandelstein 
celiuleux,  du  griinstein  ,  des  roches  grenues  feldspathiques  et 
pyroxéniques,  des  rétinites  (pechstein)  et  quelques  calcaires 
fétides  appartiennent  à  cette  formation  comme  bancs  inter- 
calés. Les  minéralogistes  anglois  nomment  noui^eau  conglomérat 
rouge  (ncvv  red  conglomerate  d'Exeter  etTeignmouth  )  notre 
formation  degrés  rouge  et  de  porphyre,  pour  la  distinguer 
de  leur  grès  rouge  ancien  (  old  red  sandstone  de  Mitchel  Dean  , 
dans  le  Herefordshire),  qui  est  une  roche  aréuacée  (grau- 
wacke)  de  transition,  placée  entre  deux  calcaires  de  transi- 
tion, ceux  du  Derbyshire  et  de  Longhope.  Cette  nomencla- 
ture ,  que  le  savant  professeur  d'Oxford,  M.  Buckland,  a 
récemment  éclaircie,  a  été  la  cause  de  beaucoup  de  méprises 
géologiques.  Il seroit  ,  je  crois,  très-utile  pour  les  progrès  de 
la  science  des  gisemens,  que  l'on  abandonnât  peu  à  peu  ces 
dénominations  vagues  de  grès  anciens ,  intermédiaires  et  nou- 
veaux  y  de  gypses  et  de  grès  inférieurs  et  supérieurs  ,  de  cal- 
caires de  première,  seconde  et  troisième  formation.  Elles  n'ont 
qu'une  vérité  relative  dans  tel  ou  tel  lieu  ;  elles  énumèrent 
ce  qui  est  numériquement  variable ,  selon  les  alternances  et 
les  suppressions  des  dilTérens  termes  de  la  série. 

Le  terrain  de  transition  n'offre  pas  seulement  de  l'anthra- 
cite ;  il  offre  déjà  de  la  véritable  houille.  On  «en  trouve  de 
petits  dépôts  en  Angleterre  dans  l'old  red  sandstone  (Bristol), 
dont  les  couches  inférieures  passent  d'un  conglomérat  tin  et 
marneux  à  un  grauwacke  très-compacte,  et  dans  le  mouu- 
tain-limestone  (Cumberland),  qui  est  analogue  au  calcaire 
de  transition  de  Namur  eu  Belgique  et  de  Prague  en 
Bohème.  Mais  le  grand  dépôt  de  houille  (  coal  measures)  se 
trouve,  comme  nous  l'avons  dit  plus  haut,  sur  la  limite  des 
roches  intermédiaires  et  secondaires.  A  cause  de  cette  posi- 
tion même,  la  houille  est  quelquefois  (Angleterre,  Hongrie, 
Autriche  au  sud  du  Danube,  Belgique)  mêlée  de  couches 
urénacées  liées  à  de  véritables  grauwackesj  d'autres  fois  (et 


c'est  là  le  type  le  plus  généralement  reconnu  sur  le  continent 
depuis  les  observations  de  Fuchs  et  de  Lehman ,  faites  vers 
l'an  lySoj,  d'autres  fois  elle  appartient  à  la  grande  formation 
de  porph\re  et  de  grès  rouge.  Dans  le  premier  cas  (Angle- 
terre), les  dépôts  de  houille  suivent  l'inclinaison  des  roches  de 
transition  auxquelles  (  comme  l'ont  judicieusement  prouvé 
MM.  Conybeare  et  Phillips)  ils  sont  plus  particulièrement 
liés;  on  les  trouve  tout  aussi  inclinés  que  les  calcaires  noirs 
et  les  grauwackes  qu'ils  surmontent.  La  série  des  forma- 
tions horizontales  et  secondaires  ne  paroît  alors  commencer 
qu'avec  le  calcaire  magnésien  ,  qui  représente  le  zechstein 
ou  calcaire  alpin.  Dans  le  second  cas  (Allemagne-,  est  de 
France),  le  dépôt  houiller  accompagne  le  grès  rouge  et  le 
porphyre,  quels  que  puissent  être  les  terrains  primitifs  ou 
intermédiaires  sur  lesquels  ces  deux  roches  sont  immédiate- 
ment placées.  Cette  union  constante  avec  des  roches  super- 
posées, et  cette  indifférence  pour  le  terrain  inférieur,  sont 
les  caractères  géognostiques  les  plus  sûrs  de  la  dépendance 
ou  de  l'indépendance  d'une  formation.  Souvent  le  grand  dé- 
pôt de  houille  n'est  ni  recouvert  de  porphyre  et  de  grès 
rouge,  ni  mêlé  de  couches  arénacées  appartenant  au  terrain 
intermédiaire.  Souvent  il  est  placé  dans  des  bassins  entourés 
de  collines  de  grès  rouge  et  de  porphyre,  et  n'offre  dans  son 
toit  que  des  couches  alternantes  dargile  schisteuse  (schiefer- 
thon),  tantôt  gris-bleuàtre,  tendres  et  remplies  d'empreintes 
de  fougères ,  tantôt  compactes,  carburées  (brandschiefer)  et 
pyriteuses.  De  minces  strates  de  grès  charbonneux  (  kohlen- 
schiefer  ) ,  de  grès  quarzeux  passant  au  quarz  grenu  ,  de  con- 
glomérats à  gros  fragmens  (steinkohlen-conglomcrat)  et  de 
calcaire  fétide,  se  rencontrent  au  milieu  du  schieferthon 
avant  qu'on  atteigne  la  houille.  Ce  sont  de  petites  forma- 
tions locales  que  présentent  également,  et  dans  des  circons- 
tances entièrement  analogues,  les  dépôts  d'argile  muriatifère 
(salzthon),  de  sel  gemme  ,  de  fer  hydraté  et  de  calamine, 
qui  ne  sont  pas  recouverts  immédiatement  par  la  grande  for- 
mation de  calcaire  alpin.  Malgré  ces  apparences  d'isolement 
et  d'indépendance,  les  houilles  et  le  sel  gemme  n'en  appar- 
tiennent pas  moins,  géognostiquement,  les  unes  au  grès  rouge 
et  l'autre  au   calcaire  alpin  ou    zechstein.    Les  empreintes 


IND  237 

de  fougères,  comme  l'ont  observé  très-bien  MM.  Voigt  et 
Brongniart,  caractérisent  l'époque  des  véritables  houilles, 
tandis  que  les  argiles  des  lignites  en  sont  dépourvues. 

Dans  la  zone  tempérée  de  l'ancien  continent  la  houille  des- 
cend jusque  dans  les  lieux  les  plus  bas  du  littoral.  Près  de  New- 
castle-on -Tyne  on  trouve,  au  niveau  et  au-dessous  du  fond 
de  la  mer,  cinquante-sept  couches  d'argile  endurcie  et  de 
conglomérat,  alternant  avec  vingt -cinq  couches  de  houille. 
Au  contraire,  dans  la  région  équinoxiale  du  nouveau  conli- 
nent ,  j'ai  vu  la  houille  intercalée  au  grès  rouge  s'élever  ,  dans 
le  plateau  de  Santa-Fé  de  Bogota  (  Chipo  entre  Canoas  et 
le  Salto  de  Tequendania  ;  montagne  de  Suba  ;  Cerro  de  los 
Tunjos),  à  i3iSo  toises  de  hauteur  au-dessus  du  niveau  de 
l'océan.  L'hémisphère  austral  offre  aussi  des  houilles  dans 
les  hautes  Cordillères  de  Huarocheri  et  de  Canta  :  on  m'a 
même  assuré  que  près  de  Huanuco  elles  se  trouvent  (inter- 
calées au  calcaire  alpin?)  très-près  de  la  limile  des  neiges 
perpétuelles,  à  ajoo  toises  de  hauteur,  par  conséquent  au- 
dessus  de  toute  végétation  phanérogame.  Les  dépôts  de  houille  ^ 
abondent  hors  des  tropiques  dans  le  Nouveau-Mexique  ,  au 
centre  des  plaines  salifères  du  Moqui  et  de  Nabajoa  ,  et  à 
l'est  des  montagnes  rocheuses,  comme  aussi  vers  les  sources 
du  Rio  Sabina  ,  dans  cet  immense  bassin  couvert  de  forma- 
tions secondaires  que  parcourent  le  Missoury  et  l'Arkansas. 
Des  masses  rhomboïdales  fibreuses  à  éclat  soyeux  et  colorant 
les  doigts  se  trouvent  enchâssées  dans  la  houille  compacte 
des  deux  continens  ;  elles  forment  une  espèce  de  brèche 
que  les  mineurs  regardent  comme  renfermant  des  fragmens 
de  bois  charbonné.  Quelquefois  ces  masses  lustrées  sont  presque 
incombustibles,  et  deviennent  une  espèce  d'anthracite  à  tex- 
ture fibreuse  (faserkohle  d"Estner;  mineralische  holzkohle  de 
"Werner).  On  les  trouve,  selon  les  observations  de  MM.  de 
Buch  et  Karsten,  accumulées  (Lagiewnick  dans  la  haute  Silésie) 
en  bancs  de  4  à  5  pouces  d'épaisseur.  Ce  phénomène  mérite 
une  attention  particulière  ;  car  les  houilles  qui  enchâssent 
les  fragmens  à  éclat  soyeux,  appartiennent  au  grès  rouge  le 
mieux  caractérisé ,  et  non  aux  liguites  des  argiles  placées 
immédiatement  au-dessous  ou  au-dessus  de  la  craie.  Dans  la 
péninsule  de  la  Crimée  de  vastes  terrains  présentent  desalter- 


so8  IjVD 

nances  sans  nombre  de  couches  d'argile  schisteuse  dépour- 
vues de  houilles,  de  conglomérats,  de  griinstein  et  de  cal- 
caires compactes.  Est-ce  là  une  formation  de  grès  rouge, 
renfermant  des  roches  amphiboliques  et  alternant  avec  le 
zechstein  P 

Il  est  difficile  d'assigner  un  type  général  à  l'ordre  des 
différentes  assises  qui  constituent  la  grande  formation  §.  26. 
La  houille  paroît  le  plus  souvent  au-dessous  du  grès  rouge; 
quelquefois  elle  est  placée  évidemment  ou  dans  cette  roche 
ou  dans  le  porphyre.  Le  porphyre  pénètre  et  déborde  de 
différentes  manières  dans  la  formation  du  grès  houiller  :  on 
le  voit  parfois  recouvrir  immédiatement  la  houille  :  plus 
généralement  il  surmonte  le  grès,  et  s'élève  en  dômes,  en 
cloches  ou  en  rochers  à  pentes  abruptes.  Lorsque  les  terrains 
de  transition  sont  immédiatement  recouverts  de  grès  rouge 
(Saxe)  ,  il  est  souvent  assez  difficile  de  décider  si  les  por- 
phyres que  l'on  rencontre  dans  la  proximité  des  houilles  sont 
des  porphyres  de  transition,  ou  s'ils  appartiennent  au  grès 
rouge.  Il  paroît  d'ailleurs  que  les  porphyres  forment  moins  sou- 
vent de  véritablescouches,  que  des  amas  transversaux  et  entre- 
lacés (stehende  Stocke  et  Stock\^'erke)  dans  le  terrain  houiller. 
Ils  varient  beaucoup  de  couleur:  ils  sont  violàtres,  gris  et 
brun-rougeàtre  ou  tirant  sur  le  blanc  (Petersberg  près  de 
Halle,  Giebichenstein  ,Wettin),  infiltrés  de  chaux  fluatée,  non 
stratifiés,  divisés  quelquefois  en  tables  minces,  et  accompa- 
gnés de  brèches  porphjriqu es.  La  pâte  de  ces  porphyres,  qui 
enchâssent,  outre  le  feldspath  lamelleux ,  quelquefois  stéati- 
teux,  du  quarz  noirâtre,  un  peu  de  mica  brun  et  d'amphi- 
bole ,  est  généralement  formée  par  du  feldspath  compacte. 
Cette  pâte  passe  au  kaolin  (Morl  près  Halle)  :  d'autres  fois 
elle  devient  noire  et  presque  basaltique  (Lobegiin  en  Saxe. 
Schulzbcrg  en  Silésie),  bulleuse  et  comme  scorifîée  (Pliz- 
grund  près  Schmiedsdorf  en  Silésie),  ou  passant  à  la  phono- 
lithe  (Zittau  en  Saxe).  Dans  les  porphyres,  les  amygda- 
loïdes,les  griinstein  et  les  roches  pyroxéniques  du  grès  rouge, 
on  remarque  quelquefois  (Saxe ,  Silésie,  Palatinat ,  Ecosse) 
ces  mêmes  analogies  avec  les  roches  exclusivement  appelées 
volcaniques,  qu'on  trouve  dans  les  porphyres  et  syénites  du 
terrain  intermédiaire  (Hongrie,  Norwége  ,  Mexique,  Pérou). 


IND  25ç> 

M.  o'e  Buch  a  vu  en  Silësie  des  porphyres  du  grès  rouge 
abonder  en  cristaux  d"amphiboIe  (  Beichmacher  près  Fried- 
]and),  ou  enchâsser  à  la  fois  (Wildenberg  près  Jauer)  du 
quarz  et  des  cristaux  effiles  de  feldspath  vitreux.  M.  Boue 
observe  que  dans  le  grès  rouge  d'Ecosse,  qui,  en  général, 
est  assez  dépourvu  de  houille  (à  l'exception  du  comté  de 
Dumfries) ,  les  roches  trapéennes  intercalées  ont  des  vacuoles 
à  enduit  lustré,  etalongécs.  Ces  mandelstein  huileux  du  grès 
rouge  prennent  toute  Tapparence  de  coulées  volcaniques  in- 
tercalées. 

L'Allemagne  offre,  à  son  extrémité  septentrionale  (lie  de 
Rugen)  ,  de  la  craie  et  des  terrains  tertiaires-,  à  son  extrémité 
méridionale,  dans  le  Tyrol  (vallée  de  l'Eisack,  Collmann , 
Botzen  ,  Pergine  ,  Neumarkt  ) ,  les  porphyres  du  grès  rouge. 
La  composition  de  ces  porphyres  du  Tyrol  est  identique  avec 
celle  des  porphyres  du  Mansfeld  ;  ils  renferment,  outre  le 
feldspath  ,  le  mica  noir  et  le  quarz  brun-de-girofle,  un  peu 
d'amphibole.  La  couleur  rouge  de  leur  pâte  pénètre  quelque- 
fois jusque  dans  les  cristaux  de  feldspath  qu'ils  enchâssent. 
Dans  un  voyage  géognostique  fait  en  lygS,  j'ai  trouvé  ces 
porphyres  assez  régulièrement  stratifiés,  près  de  Botzen  et  de 
Brandsol  (N.  25"  O.  incl.  de  5o°  au  S.  E.  ).  Ils  offrent  de 
petits  dépôts  de  houille  sur  les  bords  de  l'Adige.  entre  Saiss 
et  S.  Peter. 

Dans  toutes  les  parties  de  l'Europe,  les  porphyres  secon- 
daires offrent  l'apparence  d'un  passage  progressif  au  grès  rouge. 
Quelques  géognostes  admettent  que  des  cristaux  isolés  de 
feldspath  se  trouvent  empâtés  dans  le  ciment  de  la  roche 
aréftacée ,  ou  qu'ils  s'y  sont  développés:  d'autres  assurent  (et 
avec  plus  de  raison  peut-être)  que  ces  prétendus  passages 
des  porphyres  aux  brèches  porphyriques  et  au  grès  rouge 
ne  sont  que  l'effet  d'une  illusion  produite  par  des  porphyres 
régénérés,  c'est-à-dire ,  par  des  agglomérats  qui  se  sont  formés  à 
une  époque  où  les  fragmens  empâtés  étoient  encore  dans  un 
état  de  ramollissement  peu  propre  à  conserver  leurs  contours 
au  milieu  du  ciment  interposé.  Une  brèche  porphyrique 
(triimmerporphyr )  près  de  Duchs  en  Bohème,  (ine  nous 
avons  décrite  ,  M.  Freiesleben  et  moi ,  en  1792  ,  et  dans  la- 
quelle des  grains  informes  de  quarz  sont  mêlés  à  dçs  cristaux 


a4o  IND 

bridés  de  quarz  et  de  feldspath ,  peut  répandre  quelque  jour 
sur  un  phénomène  qui  n'est  point  encore  suffisamment  éclairci. 
Il  est  bien  remarquable  ,  et  cette  observation  a  été  faite 
depuis  long-temps,  que  les  porphyres  manquent  au  nord  des 
Alpes  de  la  Suisse  et  du  Tyrol ,  tandis  qu'ils  sont  très-com- 
muns à  la  pente  méridionale  des  Alpes,  entre  le  lac  Mag- 
giore  et  la  Carinthie. 

Le  grès  rouge  est  généralement  composé  de  fragmens  de 
roches  qui  tirent  leur  origine  des  montagnes  les  plus  voisines. 
Dans  l'Allemagne  septentrionale ,  ces  fragmens  sont  plus  sou- 
vent le  quarz,  la  lydienne,  le  silex  (hornstein),  le  porphyre, 
la  syénite  et  le  thonschiefer ,  que  le  gneis,  le  granité  et  le 
micaschiste.  La  couleur  du  grès  rouge  est  très-variable  :  elle 
passe  du  brun -rougeâtre  au  gris  (graue  liegende);  elle  est 
même  quelquefois  mélangée  par  couches  très-minces,  comme 
dans  le  grès  bigai'ré.  La  teinte  rouge  de  cette  formation  est 
due,  selon  l'opinion  de  plusieurs  géologues  célèbres,  aux  parties 
ferrugineuses  des  porphyres  voisins.  Sans  vouloir  infirmer  la 
justesse  de  cette  observation  pour  ce  qui  regarde  une  partie  de 
l'ancien  continent,  je  dois  pourtant  énoncer  quelques  doutes 
relativement  à  l'influence  des  porphyres  sur  la  formation 
du  grès  rouge  dans  les  régions  équinoxiales  du  nouveau  con- 
tinent. Le  grès  des  vastes  steppes  de  Venezuela  est  brun-rou- 
geàtre,  comme  le  todte  liegende  de  Mansfeld  ;  il  ne  renferme 
pas  de  fragmens  de  porphyre ,  et  à  plusieurs  centaines  de 
lieues  de  distance  on  n'y  connoît  aucune  couche  de  porphyre 
intermédiaire  ou  secondaire.  Il  en  est  de  même  des  grès 
rouges  de  Fiinfkirchen  et  de  'Vasas  en  Hongrie,  décrits  par 
M.  Beudant. 

Partout  où,  dans  la  formation  §.  26,  des  conglomérats  gros- 
siers alternent  avec  des  roches  arénacées  à  petits  grains,  ces 
derniers  passent  au  grès  houiller  schisteux  et  fortement  mi- 
cacé (sandsteinschiefer).  Ces  masses  alternantes  renferment 
de  l'argile  schisteuse  grise,  verdàtre  ou  brune.  Lorsque  cette 
argile  est  fortement  carburée  (kohlenschiefcr)  et  bitumi- 
neuse, elle  contient  quelquefois  (Suhl,  Goldlauter)  des  mi- 
nerais argentifères  (du  cuivre  gris,  de  la  galène  et  des  pyrites 
cuivreuses).  Elle  offre  des  empreintes  de  poissons  fossiles,  et 
prend  l'aspect  du  kupferschiefer  appartenant  au  calcaire  alpin. 


IND  .41 

D'un  autre  c6té  ,  la  désagrégation  de  roches  arénacées  à  petits 
grains  forme  des  bancs  de  sable  quarzeux  et  brunâtre  (triebsand) 
au  milieu  des  grès  rouges  les  plus  compactes  (  Walkenried  et 
Bieber).  Le  ciment  du  grès  houilJer  est  quelquefois  calcaire, 
et  les  parties  de  chaux  carbonatée  deviennent  si  fréquentes, 
qu'elles  donnent  à  la  roche  une  apparence  de  calcaire  grenu 
et  arénacé  (montagnes  houillères  sur  les  limites  de  la  Hon- 
grie et  de  la  Galicie).  Ce  sont  là  les  grès  calcarifères  de  M. 
Beudant,  mêlés  de  grains  verts  chloriteux.  Quant  aux  frag- 
mens  enchâssés  dans  les  grès  rouges  ,  ils  sont  ou  anguleux 
et  fondus  dans  la  masse,  ou  arrondis  et  aplatis  comme  les 
cailloux  roulés  de  la  nagelfluhe  la  plus  récente.  La  forma- 
tion de  grès  rouge  qui  constitue  la  majeure  partie  de  l'Ir- « 
lande,  et  qui  est  si  commune  dans  l'Allemagne  septentrio- , 
nale,  dans  la  Forêt- noire  et  dans  les  Vosges,  manque  (de 
même  que  la  formation  des  porphyres)  presque  entièrement 
dans  les  hautes  Alpes  de  la  Suisse.  Le  Niesen  appartient  pro- 
bablement déjà  au  grauwacke  ,  et  M.  de  Gruner  croit  que  les 
environs  de  Mels,  Bregentz  et  Sonthofen  offrent  les  seuls  con- 
glomérats qui,  par  leur  structure  et  leur  gisement,  se  rap- 
prochent du  grès  rouge.  Dans  les  hautes  Alpes,  comme  dans 
plusieurs  parties  de  la  Silésie  (Schweidnitz)  et  de  la  Hongrie 
(Dunajitz),  le  grès  rouge  enchâsse  pour  ainsi  dire  le  cal- 
caire alpin  et  alterne  avec  lui  :  dans  le  cercle  de  Neustadt, 
en  Saxe,  le  grès  rouge  manque  entièrement. 

Les  couches  subordonnées  au  grès  rouge  ou  alternant  avec 
lui  sont  les  suivantes  :  calcaires  fétides  et  schistes  fortement 
carbures  et  bitumineux  (kohlenschiefer  de  Freiesleben) ,  qui 
annoncent  la  liaison  intime  du  grès  rouge  avec  le  zechstein 
et  avec  les  schistes  marno-bitumineux  (kupferschiefer)  :  grun- 
stein,  mélange  de  feldspath  et  d'amphibole  (Noyant  et  Figeac 
•en  France),  quelquefois  même  pyroxénique  (Ecosse)  :  man- 
delstein  celluleux ,  quelquefois  comme  boursouflé,  renfer- 
mant (Ihlefeld  au  Harz;  rives  de  laNahe,  Oberstein  etKirnj 
Exeter,  Heavitree)  desagathes,  de  la  calcédoine  ,  delà  preh- 
nite  et  de  la  chabasie,  et  pénétrant  comme  par  des  crevasses 
dans  la  masse  du  grès  rouge  (Planitz  en  Saxe)  :  houilles  alter- 
nant avec  des  argiles  schisteuses  à  fougères;  anthracites  (Schdn. 
feld  entre  Altenberg  et  Zinnwald)  appartenant  plus  particu- 
23.  16 


242  IND 

lièrement,  d'après  M.  Beudant,  au  pQi^phyre  intercalé  au  grès 
rouge  qu'à  cette  dernière  roche  :  porphyres  alternant  d'abord 
avec  le  grès  rouge  et  puis  le  surmontant  en  grandes  masses 
rocheuses  :  pechstein  (quarz  résinite  ou  rétinite).  Le  vrai  gise- 
me»t  du  pechstein  en  Saxe  a  été  reconnu  par  MM.  Jameson, 
Raumer,  Przystanowsky  et  Schenk.  Cette  substance  forme  un 
porphyre  à  base  semi  -  vitreuse ,  renfermant  du  feldspath  sou- 
vent fendillé,  et  très-peu  de  mica,  d'amphibole  et  de  quarz 
cristallisé  (vallée  deTriebitch).  Le  pechstein  enchâsse  des  frag- 
mens  de  gneis  (  Mohorn  et  Braunsdorf  )  ;  il  est  traversé  par 
de  petits  filons  d'anthracite  fibreuse  (Planiz  prèsZwickau),  et 
il  alterne  avec  le  porphyre  commun  du  grès  rouge.  Ces  por- 
iphyres  et  ces  rctinites  reposent  (Nieder-Garsebach  )  sur  la 
syénite  de  transition.  M.  Beudant,  qui  a  récemment  donné 
une  description  détaillée  de  ce  gisement,  a  reconnu  que  le 
pechstein  de  Herzogswalde  est  enclavé  dans  un  dépôt  aré- 
nacé  à  pâte  d'argilolithe  (thonstein),  dépôt  qui  enchâsse  des 
fragmens  anguleux  de  gneis  et  de  micaschiste ,  et  qui  appar- 
tient au  grès  rouge.  Le  pechstein  de  Grantola  au  lac  Maggiore 
offre  le  même  gisement  :  celui  d'Ecosse  contient  du  naphte. 
Au  Pérou  il  y  a  des  pechstein  (gris  de  fumée,  presque  dé- 
pourvus de  feldspath,  renfermant  du  mica  cristallisé),  dans 
le  chemin  de  Couzco  à  Guamanga.  Ils  y  forment  des  mon- 
tagnes entières  ;  mais  ce  terrain ,  d'après  les  observations  de 
M.  de  Nordenflycht ,  est  subordonné,  comme  en  Europe,  au 
terrain  porphyrique. 

Toute  la  formation  §.  26,  que  nous  décrivons,  est  généra- 
lement caractérisée  par  l'absence  des  coquilles  fossiles.  Si 
l'on  en  trouve  quelques-unes,  elles  appartiennent  aux  couches 
calcaires  et  aux  schistes  carbures  (kohlenschiefer)  qui  sont  in- 
tercalés au  grès  rouge,  et  non  à  la  masse  de  celui-ci  ,  qui 
n'abonde  dans  les  deux  hémisphères  (plaines  de  laThuringe, 
Kifl'hàuser,  Tilleda  ;  plaines  de  Venezuela  entre  Calabozo  et 
Chaguaramas;  plateau  de  Cuença,  au  sud  de  Quito)  qu'en 
troncs  de  bois  fossile  et  autres  débris  de  monocotylédx)nées. 
M.  Brongriiart  fils  croit  cependant  que  les  impressions  de 
vrais  palmiers  manquent  dans  les  houilles. 

Dans  la  région  équinoxiale  du  nouveau  continent  j'ai  eu 
l'occasion  d'observer  le  terrain  de  grés  rouge  au  nord  et  au 


ÏND  .  243 

sud  de  réquatcur  sur  six  points  différens  ;  savoir  :  dans  la 
Nouvelle-Espagne  (de  1100  à  i3no  toises  de  hauteur),  dans 
les  steppes  ou  Llanos  de  Venezuela  (  3o  —  5o  toises),  dans  la 
Nouvelle-Grenade  (  5o  —  i8oo  toises),  sur  le  plateau  méri- 
dional de  la  province  de  Quito  (  i55o — 1600  toises),  dans  le 
hassin  de  Caxamarca  au  Pérou  (1470  toises),  et  dans  la  vallée 
occidentale  de  l'Amazone   (200  toises). 

i."  Nouvelle- Espagne.  Les  schistes  et  les  porphyres  de  transi- 
tion de  Guanaxuato  (plateau  d'Anahuac),  dont  nous  avons 
donné  plus  haut  (§§.  22  ,  28)  une  description  détaillée,  sont  cou- 
verts d'une  formation  de  grès  rouge.  Cette  formation  remplit 
les  plaines  deCelaya,  de  Salamanca  et  deBurras  (gootoises)j 
elle  y  supporte  un  calcaire  assez  analogue  à  celui  du  Jura  et 
un  gypse  feuilleté.  Elle  remonte  par  la  Canada  de  Marfil  aux 
montagnes  qui  entourent  la  ville  de  Guanaxuato  ,  et  se  montre 
par  lambeaux  dans  la  Sierra  de  Santa  Rosa  près  de  Villal- 
pando  (  i33o  toises).  Ce  grès  mexicain  offre  la  ressemblance 
Ja  plus  frappante  avec  le  rothe  todte  liegende  du  Mansfeld  en 
Saxe  ;  il  enchâsse  des  fragmens  constamment  anguleux  de 
lydienne,  de  syénite,  de  porphyre,  de  quarz  et  de  silex 
(splittriger  hornstein).  Le  ciment  qui  lie  ces  fragmens,  est; 
argilo  -  ferrugineux  ,  très-tenace,  brun-jaunâtre,  souvent 
(près  de  la  mine  de  Serena)  rouge  de  brique.  Des  couches 
de  conglomérat  grossier,  renfermant  des  fragmens  de  deux 
à  trois  pouces  de  diamètre,  alternent  avec  un  conglomérat 
très-fin,  quelquefois  même  (  Cuevas  )  avec  un  grès  à  grains 
de  quarz  uniformément  arrondis.  Les  conglomérats  gros- 
siers abondent  plus  dans  les  plaines  et  dans  les  ravins  que  sur 
les  hauteurs.  Dans  les  couches  les  plus  anciennes  (  mine  de 
Rayas)  j'ai  cru  voir  un  passage  du  grès  rouge  au  grauwacke  ^ 
les  morceaux  de  syénite  et  de  porphvre  enchâssés  deviennent 
très-petits;  leurs  contours  sont  peu  distincts,  et  ils  paroissent 
comme  fondus  dans  la  masse.  Il  ne  faut  pas  confondre  ce 
conglomérat  (frijolillo  de  Rayas)  avec  celui  de  la  mine 
d'Animas,  qui  est  gris- blanchâtre  et  renferme  des  fragmens 
de  calcaire  compacte.  Souvent  dans  le  grès  rouge  de  Gua- 
naxuato,  comme  dans  celui  d'Eisleben  en  Saxe,  le  ciment  est 
si  abondant  (chemin  de  Guanaxuato  à  Rayas  et  à  Salgado), 
que  l'on  n'y  distingue  plus  de  fragmens  empâtés.  Dçs  couches 


544  IND 

argileuses  de  5  à  4  loises  d'épaisseur  alternent  alors  avec  le 
conglomérat  grossier.  Généralement,  la  grande  formation  de 
grès  rouge,  superr^osée  au  thonsçhiefer  mélallilèrc  ,  ne  paroit 
(Belorado,  BulTu  de  Guanaxuato)  qu'adossée  au  porphyre 
de  transition  ;  mais  à  Villalpando  on  la  voit  clairement  re- 
poser sur  cette  dernière  roche.  Je  n'ai  point  trouvé  de  co- 
quilles pétrifiées,  ni  de  traces  de  houille  et  de  bois  fossile, 
dans  les  grès  rouges  de  Guanaxuato.  Ces  substances  combusti- 
bles se  trouvent  fréquemment  en  d'autres  parties  de  la  Nou- 
velle-Espagne, surtout  dans  celles  qui  sont  moins  élevées  au- 
dessus  du  niveau  de  la  mer.  On  connoît  la  houille  dans  l'in- 
térieur du  Nouveau-Mexique,  non  loin  des  rives  du  Rio 
del  Norte.  D'autres  dépôts  sont  probablement  cachés  dans 
les  plaines  du  Nuevo-Sant-Ander  et  du  Texas.  Au  nord  de 
Natchitoches ,  près  de  la  houillère  de  Chicha  ,  une  colline  isolée 
fait  entendre  de  temps  en  temps,  peut-être  par  l'inflammation 
du  gaz  hydrogène  mêlé  à  l'air  atmosphérique,  des  détonations 
souterraines.  Le  bois  fossile  est  commun  dans  les  grès  rouges 
qui  s'étendent  vers  le  nord-est  de  la  ville  de  Mexico.  On  le 
trouve  également  dans  les  immenses  plaines  de  l'intendance 
de  San-Luis  Potosi,  et  près  de  la  Villa  de  Altamira.  La  houille 
du  Durasno  (entre  Tierra-Nueva  et  San-Luis  de  la  Paz)  est 
placée  sous  une  couche  d'argile  renfermant  du  bois  fossile , 
et  sur  une  couche  de  mercure  sulfuré  qui  recouvre  le  por- 
phyre. Appartient-elle  à  des  lignites  très-récens?  ou  ne 
doit-on  pas  plutôt  admettre  que  ces  substances  combustibles 
du  Durasno  ,  ces  argiles  et  ces  porphyres  semi-vitreux  (pech- 
stein-porphyre) ,  globuleux  et  couverts  d'hyalithe  mamelonnée, 
porphyres  qui,  dans  d'autres  parties  du  Mexique  ^San-Juan 
de  la  Chica  ;  Cerro  del  Fraile  près  de  la  Villa  de  San- Felipe) 
renferment  des  dépôts  de  mercure  sulfuré,  sont  liés  à  la 
grande  formr.tion  du  grès  rouge  P  II  n'est  pas  douteux  que 
cette  formation  ne  soit  tout  aussi  riche  en  mercure  dans  le 
nouveau  continent,  que  dans  l'Allemagne  occidentale;  elle 
l'est  même  là  où  manquent  les  porphyres  (Cuença,  plateau 
de  Quito);  et,  si  la  réunion  de  filons  d'étain  à  des  filons  de 
cinabre,  dans  les  porphyres  de  San-Felipe ,  paroit  éloigner 
au  premier  abord  les  roches  porphyriques  qui  abondent  en 
mercure,  de  ceux  du  grès  rouge,  il  faut  se  rappeler  que  les 


IND  M& 

thonschiefer  et  porphyres  de  transition  (Hollgrund  près 
Stebeii,  Hartenstein)  sont  aussi  en  Europe  quelquefois  slan- 
nifères. 

Je  place  à  la  suite  du  grès  houiller  de  Guanaxuato  une  for- 
mation un  peu  problématique,  que  j'ai  déjà  décrite  ,  dans  mon 
Essai  politique  sur  la  ]S ouvelle-Espagne ,  sous  le  nom  de  lozero 
ou  d'agglomérat  fcldspathlque  :  c'est  une  roche  arénacée , 
blanc-rougeâtre ,  quelquefois  vert  de  pomme,  qui  se  divise, 
semblable  au  grès  à  dalles  (  Leuhen-  ou  TJ^'aldplaUcnstein  de 
Suhl),  en  plaques  très-minces  {lozas)  -.  elle  renferme  des  grains 
de  quarz ,  de  petits  fragmens  de  thonschiefer,  et  beaucoup 
de  cristaux  de  feldspath  en  partie  brisés,  en  partie  restés  in- 
tacts. Ces  diverses  substances  sont  liées  ensemble  dans  le  lozero 
du  Mexique,  comme  dans  la  roche  à  aspect  porphyrique  de 
Suhl,  par  un  ciment  argllo-ferruglneux  (Canada  de  Serena  et 
presque  toute  la  montagne  de  ce  nom).  Il  est  probable  que 
la  destruction  du  porphyre  a  eu  la  plus  grande  influence  sur 
la  formation  du  grès  fcldspathlque  de  Guanaxuato.  Le  minéra- 
logiste le  plus  exercé  serolt  tenté  de  le  prendre  au  premier 
abord  pour  un  porphyre  à  base  argileuse  ou  pour  une 
brèche  porphyrique.  Auteur  de  Valenciana  le  lozero  forme 
des  masses  de  200  toises  d'épaisseur  :  elles  excèdent  en  élé- 
vation les  montagnes  formées  par  le  porphyre  intermédialre. 
Près  de  Villalpando,  un  agglomérat  fcldspathlque  à  très-petits 
grains  alterne  par  couches  d'un  a  deux  pieds  d'épaisseur^ 
vingt -huit  fois,  avec  de  l'argile  schisteuse  brun -noirâtre. 
Partout  j'ai  vu  reposer  cet  agglomérat  ou  lozero  sur  le  grès 
rouge,  et  à  la  pente  sud -ouest  du  Cerro  de  Serena,  en 
descendant  vers  la  mine  de  Rayas,  il  m'a  paru  même  assez 
évident  que  le  lozero  forme  une  couche  dans  le  conglomérat 
grossier  de  Marfil.  Je  doute  par  conséquent  que  cette  for- 
mation remarquable  puisse  appartenir  à  des  conglomérats 
Irachjtiques  ponccux ,  comme  M.  Beudant  semble  l'admettre 
d'après  l'analogie  de  quelques  roches  de  Hongrie.  Souvent 
le  ciment  argileux  devient  si  abondant  que  les  parties  en- 
châssées sont  à  peine  visibles ,  et  que  la  masse  passe  à  l'ar- 
gllolithe  (thonstein)  compacte.  Dans  cet  état  le  lozero  offre 
la  belle  pierre  de  taille  de  Queretaro  (  carrières  de  Caretas 
et  de  Guimilpa),  qui  est   si  recherchée  pour  les  construc- 


M6  IND 

tions.  J'en  aï  vu  des  colonnes  de  quatorze  pieds  de  haut  et 
de  deux  pieds  et  demi  de  diamètre  ,  rouge  de  chair,  de  brique 
ou  de  fleurs  de  pécher.  Ces  belles  couleurs,  en  contact  avec 
l'atmosphère,  passent  au  gris,  probablement  par  raclion  de 
l'atmosphère  sur  le  manganèse  dendritiforme  que  renferme 
la  roche  dans  ses  fissures.  La  cassure  des  colonnes  de  Quere- 
taro  est  unie ,  comme  celle  de  la  pierre  lithographique  du  Jura. 
Ce  n'est  qu'avec  peine  que  Ton  découvre  dans  ces  argilolithes 
quelques  fragmens  extrêmement  petits  de  thonschiefer,  de 
quarz,  de  feldspath  et  de  mica.  Je  ne  déciderai  pas  si  les 
cristaux  non  brises  du  /ozero  ou  grès  feldspathique  se  sont 
développés  dans  la  masse  même,  ou  s'ils  s'y  trouvent  acci- 
dentellement. Je  me  borne  à  rappeler  ici  qu'en  Europe  le  grès 
rouge  et  ses  porphyres  sont  aussi  quelquefois  caractérisés  par 
une  suppression  locale  de  cristaux  et  de  fragmens  enchâssés. 
Le  lozero  me  paroît  une  formation  de  grès  superposée,  peut- 
être  même  subordonnée  au  grès  rouge  ;  et  si  l'ancien  conti- 
nent ne  nous  offre  pas  une  roche  entièrement  semblable, 
nous  voyons  du  moins  les  premiers  germes  de  ce  genre  de 
structure  pseudo-porphyrique  dans  les  bancs  de  grès  à  cris- 
taux de  feldspath,  brisés  ou  intacts,  qu'enchâsse  quelquefois 
la  grande  formation  de  grès  rouge  du  Mansfeld  et  du  Thu- 
xingerwald.  (  Freiesleben ,  Kupf.,  B.  IV,  p.  82,  85,  96,  194O 
2."  Venezuela.  Dans  l'Amérique  méridionale,  les  immenses 
plaines  de  Venezuela  (Llanos  du  Bas-Orénoque)  sont  en 
grande  partie  recouvertes  de  grès  rouge  et  de  terrains  cal- 
caires et  gypseux.  Le  grès  rouge  y  est  disposé  en  gisement 
eoncavc  (  muldenfbrmige  Lagerung)  entre  les  montagnes  du 
littoral  de  Caracas  et  celles  de  la  Parime  ou  du  Haut-Oré- 
Boque.  Il  s'adosse  au  nord  à  des  schistes  de  transition  ;  au 
sud  il  repose  immédiatement  sur  le  granité  primitif.  C'est 
un  co'iglomérat  à  fragmens  arrondis  de  quarz ,  de  pierre  ly- 
dienne et  de  kieselschiefer ,  réunis  par  un  ciment  argilo-fer- 
Tugineux,  brun -olivâtre  et  extrêmement  tenace.  Ce  ciment 
est  quelquefois  (près  de  Calabozo  )  d'un  rouge  si  vif,  que  les 
^cns  du  pays  l'ont  cru  mêlé  de  cinabre.  Le  conglomérat  à 
gros  grains  y  alterne  avec  un  grès  qnarzeux  à  grains  très^fins 
(Mesa  de  Paja).  L'un  tt  l'autre  enchâssent  de  petites  masses 
«de  fer  brun  et  du  bois  pétrifié  de  monocotylédonées.  Cette 


IND  247 

formation  arénacée  est  recouverte  (Tisnao)  par  un  calcaire 
compacte  gris-blanchàtre,  analogue  au  calcaire  du  Jura.  Au- 
dessus  de  ce  calcaire  on  trouve  (  Mesa  de  San-Diego  et  Ortiz) 
du  gypse  lamelleux  alternant  avec  des  couches  de  marne.  Je 
n'ai  vu  de  coquilles  fossiles  dans  aucune  de  ces  couches  aréna- 
cces,  calcaires ,  g)'^pseuses  et  marneuses.  Le  ciment  du  conglo- 
mérat ne  fait  nulle  part  effervescence  avec  les  acides  ;  et  par 
son  gisement  et  sa  composition  le  grès  des  steppes  de  Venezuela 
m'a  paru  très-éloigné  du  nagelfluhe  (grès  à  lignites)  du  terrain 
tertiaire,  avec  lequel  il  a  une  certaine  analogie  d'aspect  par 
la  forme  arrondie  des  fragmens  enchâssés.  Ces  formations  aré- 
nacées  et  calcaires  ne  s'élèvent  pas  au-dessus  de  3o  à  5o  toises 
de  hauteur  absolue.  Dans  la  partie  orientale  du  Oano  de 
Venezuela  (près  Curataquiche)  on  trouve  dispersés,  àlasur~ 
face  du  sot,  de  beaux  morceaux  de  jaspe  rubané  ou  cailloux 
d'Egypte.  Appartiennent- ils  au  grès  rouge,  ou  sont-ils  dus, 
comme  près  de  Suez ,    à  un  terrain  plus  moderne  ? 

3."  IS ouvelle-  Grenade.  Une  formation  de  grés  d'une  étendue 
prodigieuse  couvre,  presque  sans  interruption,  non -seule- 
ment les  plaines  septentrionales  de  la  Nouvelle -Grenade , 
entre  Mompox,  le  canal  de  Mahates  et  les  montagnes  de 
Tolu  et  de  Maria,  mais  aussi  le  bassin  du  Rio  de  la  Magda- 
lena  (entre  TenerifFe  et  Melgar)  et  celui  du  Rio  Cauca 
(entre  Carthago  et  Cali).  Quelques  fragmens  épars  de  grès 
schisteux  et  charbonneux  (kohlenschiefer)  que  j'ai  trouvés  à 
l'embouchure  du  Rio  Sinu  (à  l'est  du  golfe  deDarien),  ren- 
dent probable  que  cette  formation  s'étend  même  vers  le  Rio 
Atrato  et  vers  Tisthme  de  Panama.  Elle  s'élève  à  de  grandes 
hauteurs ,  non  sur  le  rameau  intermédiaire  ou  central  de  la 
Cordillère  (Nevados  de  Tolima  et  de  Quindiù),  mais  sur  les 
rameaux  oriental  (Paramos  de  Chingasa  et  de  Suma  Paz)  et 
occidental  (montagnes  entre  le  bassin  du  Rio  Cauca  et  le  terrain 
platinifère  du  Choco  ).  J'ai  pu  suivre  ce  grès  de  la  Nouvelle- 
Grenade,  sans  le  perdre  de  vue  un  seul  instant ,  depuis  la  vallée 
du  Rio  Magdalena  (  Honda ,  Melgar,  1 3o —  188  t.),  par  Pandi , 
jusqu'au  plateau  deSanta-Fé  de  Bogota  (i365  t.),  etmême  jus- 
qu'au-dessus du  lac  de  Guatavita  et  de  la  chapelle  de  Notre- 
Dame  de  Montserrate.  Il  s'adosse  à  la  Cordillère  orientale  (celle 
qui  sépare  les  afiduens  du  Rio  JVÏagdalena  des  affluens  du  Mets 


'4B  IND 

et  de  rOrénoque)  jusqu'à  plus  de  1800  toises  de  hauteur  au- 
dessus  du  niveau  de  l'océan.  J'insiste  sur  ces  notions  de  géo- 
graphie minéralogique,  parce  qu'elles  fournissent  de  nouvelles 
preuves  de  l'énorme  épaisseur  qu'atteignent  les  roches  dans 
les  régions  équinoxiales  de  l'Amérique.  Plusieurs  terrains 
secondaires  (grès  avec  couches  de  houille,  gypse  avec  sel 
gemme,  calcaire  presque  dépourvu  de  pétrifications  ) ,  que 
dans  le  plateau  de  Santa- Fé  de  Bogota  on  seroit  tenté  de 
prendre  pour  un  groupe  de  formations  locales  remplissant  un 
bassin,  descendent  jusque  dans  des  vallées  dont  le  niveau  est 
de  7000  pieds  plus  bas  que  ce  plateau.  En  allant  de  Honda  à 
Santa -Fé  de  Bogota,  le  grès  est  interrompu,  près  de  Villeta, 
par  des  thonschiefer  de  transition  ;  mais  la  position  des  sources 
salées  de  Pinccima  et  de  Pizarà  près  de  Muzo  me  porte  à  croire 
qu'aussi  de  ce  côté-là,  sur  les  rives  du  Rio  Negro  (entre  les 
schistes  amphiboliques  et  carbures  de  Muzo,  renfermant  des 
éméraudes,  et  les  schistes  de  transition  avec  filons  de  cuivre 
de  Villeta),  le  grès  houiller  et  le  g}^pse  mui^iatifère  du  pla- 
teau de  Bogota  et  de  Zipaquira  se  lient  aux  terrains  homo- 
nymes qui  remplissent  le  J)assin  du  Rio  Magdalena  entre  Honda 
et  le  détroit  de  Carare. 

Ce  grès  de  la  Nouvelle-Grenade  (là  où  j'ai  pu  l'examiner 
entre  les  4°  et  g)(,°  de  lat.  bor.)  est  composé  de  couches 
alternantes  de  grès  quarzeux  et  schisteux  à  petits  grains, 
et  de  conglomérats  qui  enchâssent  des  fragmcns  anguleux 
(ayant  2  à  5  pouces  de  largeur)  de  pierre  lydienne,  de 
thonschiefer,  de  gneis  et  de  quarz  (Honda  ,  Espinal).  Le  ciment 
est  argileux  et  ferrugineux,  quelquefois  siliceux.  Les  couleurs 
de  la  roche  varient  du  gris-jaunàtre  au  rouge-brunâtre.  Cette 
dernière  couleur  est  due  au  fer  :  aussi  trouve-t-on  partout 
de  la  mine  de  fer  brun,  très-compacte,  enchâssée  en  nids, 
en  petites  couches  et  en  filons  irréguliers.  Le  grès  est  stra- 
tifié en  bancs  plus  ou  moins  horizontaux.  Quelquefois  ces  bancs 
inclinent  par  groupes  et  d'une  manière  assez  constante.  Près 
de  Zambrano  ,  sur  la  rive  occidentale  du  Rio  Magdalena  ,  au 
sud  de  Teneriffe ,  la  roche  prend  une  structure  globuleuse. 
J'y  ai  vu  des  boules  de  grès  à  très-petits  grains  de  deux  à  trois 
pieds  de  diamètre  :  elles  se  séparent  en  douze  ou  quinze  couches 
concentriques.   La  pierrç  lydienne  du  plus  beau  noir,  rarç-« 


IND  ^49 

ment  traversée  de  filets  de  quarz,  est  beaucoup  plus  abon- 
dante dans  les  conglomérats  grossiers  que  ne  le  sont  les  fragmens 
de  roches  primitives.  Partout  le  grès  schisteux  à  petits  grains 
l'emporte ,  pour  sa  masse ,  sur  les  conglomérats  à  gros  fragmens. 
Sur  les  hauteurs  (au-dessus  de  800  à  1000  toises)  les  derniers 
disparoissent  presque  en  entier.  Le  grès  du  plateau  de  Bogota 
et  celui  que  l'on  observe  en  montant  aux  deux  chapelles 
placées  au-dessus  de  la  ville  deSanta-Fé,  à  i65o  et  1687  toises 
d'élévation  ,  sont  uniformément  composés  de  très-petits  grains 
quarzeux.  On  n'y  remarque  presque  plus  de  fragmens  de 
lydienne  ;  les  grains  de  quarz  se  rapprochent  tellement  que 
la  roche  prend  quelquefois  l'aspect  d'un  quarz  grenu.  C'est  ce 
même  grès  quarzeux  qui  forme  le  pont  naturel  d'icononzo. 
Nulle  part  ces  roches  arénacées  ne  font  effervescence  avec 
les  acides.  Outre  la  mine  de  fer  brun  et  (ce  qui  est  assez 
■curieux)  outre  quelques  nids  de  graphite  très-pur,  cette 
formation  renferme  aussi,  et  à  toutes  les  hauteurs,  des  cou- 
ches d'argile  brune ,  grasse  au  toucher  et  non  micacée.  Cette 
argile  (  Gachansipa ,  Chalechc  ,  Montagne  de  Suba)  devient 
quelquefois  fortement  carburée  et  passe  au  brandschiefer. 
Le  sel  purgatif  d'Honda  (sulfate  de  magnésie),  si  célèbre 
dans  ces  contrées  ,  se  montre  en  elFlorcscence  sur  ces  couches 
argileuses  (Mesa  de  Palacios  près  Honda).  Nulle  part  le  grès 
ne  présente  différentes  couleurs  mélangées  par  zones ,  ni  ces 
masses  d'argile  non  continues  et  à  forme  lenticulaire  qui  ca» 
ractérisent  le  grès  bigarré  (bunte  sandstein) ,  c'est-à-dire,  le  grès 
qui  couvre  le  calcaire  alpin  ou  zechstein.  J'ai  vu  reposer 
immédiatement  la  formation  de  grès  que  nous  venons  de 
décrire ,  sur  un  granité  rempli  de  tourmalines  (  Penon  de 
Rosa  au  nord  de  Banco,  vallée  de  la  Magdalena  ;  cascade 
de  la  Perîa  près  Mariquita),  sur  le  gneis  (Rio  Lumbi,  près 
des  mines  abandonnées  de  Sainte-Anne),  sur  le  thonschiefer 
de  transition  (  entre  Alto  de  Gascas  et  Alto  del  Roble  au 
nord -ouest  de  Santa -Fé  de  Bogota).  On  ne  connoît  aucune 
autre  roche  secondaire  sous  le  grès  de  la  Nouvelle- Grenade. 
Il  renferme  des  cavernes  (Facatativa,  Pandi)  et  offre  des 
couches  puissantes,  non  de  lignite,  mais  de  houille  feuilletée 
et  compacte  ,  mêlée  de  jayet  (pechkohle),  entre  la  Palma  et 
Guaduas  (  600  toises) ,  près   de  Vêlez  et  la  Villa  de  Leiva  , 


25o  Ijyj) 

comme  aussi  dans  le  plateau  de  Bogota  (Chipe  près  Canoas  ; 
Suba;  Cerro  de  los  Tunjos),  à  la  grande  hauteur  de  iSyo 
toises.  Les  restes  de  corps  organisés  du  règne  animal  sont 
extrêmement  rares  dans  ce  grès.  Je  n'y  ai  trouvé  qu'une  seule 
fois  des  trochilites  (  ?  )  presque  microscopiques  dans  une  couche 
d'argile  intercalée  (Cerro  del  Portachuelo,  au  sud  d'icononzo). 
Il  se  pourroit  que  ces  houilles  de  Guaduas  et  de  Canoas  fus- 
sent un  terrain  plus  récent,  superposé  au  grès  rouge  ;  mais 
rien  ne  m'a  paru  annoncer  cette  superposition.  La  houille 
piciforme  (jayet,  pechkohle)  appartient  sans  doute  de  pré- 
férence aux  lignites  du  grès  tertiaire  et  des  basaltes;  mais 
elle  forme  aussi  incontestablement  de  petites  couches  dans 
la  houille  schisteuse  (schieferkohle)  du  terrain  de  porphyre 
et  grès  rouge. 

Les  formations  qui  recouvrent  le  grès  de  la  Nouvelle- 
Grenade,  et  qui  le  caractérisent ,  je  crois,  plus  particulière- 
ment comme  grès  rouge  dans  la  série  des  roches  secondaires, 
sont  le  calcaire  fétide  (confluent  du  Caîio  Morocoy  et  du 
Rio  Magdalena),  et  le  gypse  feuilleté  (bassins  du  Ri»  Cauca 
près  de  Cali,  et  du  Rio  Bogota  près  de  Santa -Fé).  Dans  ces 
deux  bassins  du  Cauca  et  du  Bogota,  dont  la  hauteur  diffère 
de  près  de  900  toises,  on  voit  se  succéder  de  bas  en  haut , 
très-régulièrement,  les  trois  formations  de  grès  houiller,  de 
gypse  et  de  calcaire  compacte.  Les  deux  dernières  ne  sem- 
blent constituer  qu'un  même  terrain  qui  représente  le  calcaire 
alpin  ou  zechstein ,  et  qui,  généralement  dépourvu  de  pétri- 
fications, renferme  quelques  ammonites  àTocayma  (vallée  du 
Rio  Magdalena).  Le  gypse  manque  souvent;  mais  à  la  grande 
élévation  de  1400  toises  (Zîpaquira,  Enemocon  etSesquiler) 
il  est  muriatifère,  offrant  dans  l'argile  (  salzthon  )  des  dépôts 
de  sel  gemme  qui ,  depuis  des  siècles,  sont  l'objet  de  grandes 
exploitations. 

D'après  l'ensemble  des  observations  que  je  viens  de  pré- 
senter sur  le  gisement  du  grès  de  la  Nouvelle-Grenade,  je 
n'hésite  pas  de  regarder  cette  roche  ,  qui  a  pris  un  dévelop- 
pement de  cinq  ou  six  mille  pieds  d'épaisseur,  et  qui  va 
bientôt  être  examinée  de  nouveau  par  deux  voyageurs  très- 
instruits,  ]\IM.  Boussingault  et  Rivero ,  comme  un  grès  rouge 
(todtes  liegende)   et  non   comme  un  grès  bigarré  (grès  de 


IND  25i 

îvcbra).  Je  n'ignore  pas  que  des  couches  frt'quentes  d'argile 
et  de  mine  de  fer  brun  appartiennent  plus  particulièrement 
au  grès  bigarré,  et  que  les  oolithes  manquent  souvent  aussi 
dans  ce  grès.  Je  n'ignore  pas  qu  en  Europe  le  grès  bigarré 
(placé  au-dessus  du  zechstein)  présente  quelques  traces  de 
houille,  de  petites  couches  de  grès  extrêmement  quarzeux 
(quarz  grenu)  et  du  sel  gemme,  et  que  cette  dernière  subs- 
tance lui  appartient  même  exclusivement  en  Angleterre. 
Toutes  ces  analogies  me  paroitroient  très-importantes  ,  si 
des  couches  de  conglomérat  grossier  alternant  (dans  les 
basses  régions)  avec  des  couches  de  grès  à  petits  grains  ,  si 
des  fragmens  anguleux  de  pierre  lydienne,  et  même  de 
gneis  et  de  micaschiste ,  enchâssés  dans  des  conglomérats 
grossiers,  ne  caractérisoient  pas  le  grès  de  la  ]Nouvelle -Gre- 
nade comme  parallèle  au  grès  rouge  ou  grès  houiller,  c'est- 
à-dire  comme  parallèle  à  celui  qui  supporte  immédiatement 
le  calcaire  alpin  (zechstein  ),' renfermant  le  gypse  et  le  sel 
gemme.  Lorsque  le  grès  bigarré  (nord  de  l'Angleterre  et 
Wimmelburg  en  Saxe)  présente  quelquefois  des  fragmens  de 
granité  et  de  syénite,  ces  fragmens  sont  arrondis  et  simple- 
ment enveloppés  d'argile;  ils  ne  forment  pas  un  conglomérat 
compacte  et  tenace  à  fragmens  angulaires  comme  le  grès  rouge. 
Cette  dernière  roche  abonde,  dans  le  Mansfeld  comme  dans, 
la  Nouvelle- Grenade,  en  masses  intercalées  d'argile  (  Cres- 
feld  ,  Eislebcn,  Rothenberg) ,  et  en  petites  couches  de  mine 
de  fer  brun  et  rouge  (Burgorner,  Hettstedt).  La  structure 
globuleuse  qu'offre  le  grès  de  la  vallée  du  Rio  Magdalena  se 
retrouve  dans  le  grès  houiller  de  la  Hongrie  (  Klauscnburg), 
dans  le  conglomérat  blanchâtre  de  Saxe  (weiss-liegendes  de 
Helbra)  qui  lie  le  grès  houiller  au  zechstein,  et,  selon  de& 
observations  que  nous  avons  faites,  M.  Freiesleben  et  moi  ^ 
en  1795  ,  même  près  de  Lausanne,  dans  la  molasse  d'Argovie; 
(grès  tertiaire  à  ligni(es\  C'est  l'ensemble  des  rapports  de 
gisement  qui  détermine  l'âge  d'une  formation ,  ce  n'est  pas, 
sa  composition  et  sa  structure  seules.  Les  géognosles  qui 
connoissent  les  différens  terrains  de  grès,  non  d'après  des 
échantillons  de  cabinet,  mais  par  de  fréquentes  excursions, 
dans  les  montagnes ,  savent  très-bien  que ,  si  (  par  la  sup- 
pression du  calcaire  alpin,  du  muschelkalk,  du  calcaire  du 


^52  ijsB 

Jura  et  delà  craie)  le  grès  rouge,  le  grès  bigarré  mêlé  d'ar- 
gile, le  quadersandstein  qui  n'est  pas  toujours  blanc  et  très- 
quarzeux ,  et  la  molasse  alternant  avec  des  poudingues 
grossiers  (nagelfluhe)  étoient  immédiatement  superposés  les 
uns  aux  autres,  on  auroit  de  la  peine  à  prononcer  sur  les 
limites  de  ces  quatre  terrains  arénacés,  d'un  âge  si  différent. 
Le  grès  rouge  de  la  Nouvelle -Grenade  semble  plonger, 
dans  la  partie  septentrionale  du  bassin  du  Rio  Magdalena 
(entre  Mahates,  Turbaco  et  la  côte  de  la  mer  des  Antilles), 
sous  un  calcaire  tertiaire  rempli  de  madrépores  et  de  coquilles 
marines,  et  constituant,  près  du  port  de  Carthagène  des  Indes, 
le  Cerro  de  la  Popa.  Mais,  lorsqu'on  s'élève  à  la  hauteur  de 
a  400  toises  ,  la  formation  de  calcaire  et  de  gypse  que  supporte 
Je  grès  rouge,  est  couverte  (  Campo  de  Gigantes  ,  à  l'ouest  de 
Suacha  dans  le  bassin  de  Bogo(a)  de  dépôts  d"alluvion  dans 
lesquels  j'ai  trouvé  d'énormes  ossemens  de  mastodontes. 
D'après  la  tendance,  peut-être  trop  générale,  de  la  géognosie 
moderne  à  étendre  le  domaine  des  terrains  intermédiaire  et 
tertiaire  aux  dépens  du  terrain  secondaire  ,  on  pourroit  être 
tenté  de  regarder  le  grès  de  Plonda,  le  gypse  avec  sel  gemme 
de  Zipaquira ,  et  le  calcaire  de  Tocayma  et  de  Bogota, 
comme  des  formations  postérieures  à  la  craie.  Dans  cette  hy- 
pothèse, les  houilles  de  Guaduas  et  de  Canoas  deviendroicnt 
des  lignites,  et  le  sel  gemme  de  Zipaquira,  d'Enemocon , 
de  Scsquiler  et  de  Chamesa,  entièrement  dépourvu  de  débris 
végétaux  ,  seroit  une  formation  parallèle  aux  dépôts  salifères 
(avec  lignites)  de  la  Galicie  et  de  la  Hongrie,  que  M.  Beu- 
dant  croit  appartenir  au  terrain  tertiaire.  Mais  l'aspect  du 
pays;  le  manque  presque  total  de  corps  organisés  fossiles, 
observe  jusqu'à  10,000  pieds  de  hauteur  perpendiculaire  ;  la 
puissance  de  ces  couches  arénacées  et  calcaires ,  uniformé- 
ment répandues,  dépourvues  de  rognons  de  silex  et  d'in- 
filtrations siliceuses,  très- compactes  ,  et  nullement  mélan- 
gées de  sables  et  d'autres  matières  incohérentes,  s'opposent 
à  ces  idées,  j'aurois  presque  dit,  à  ces  empiètemens  du 
terrain  tertiaire  sur  le  terrain  secondaire.  L'ensemble  des 
phénomènes  que  j'ai  exposés  me  fait  croire  que  le  grès  de 
la  Nouvelle- Grenade,  enchâssant  des  fragmens  de  lydienne 
et  des  roches  primitives,  est  le  véritable  grès  rouge  de  l'an- 


IND  255 

cien  continent.  On  ignore  si  ce  grès,  que  j'ai  vu  monter 
jusqu'à  1700  toises  de  hauteur  à  la  pente  occidentale  de  la 
Cordillère  de  Chingasa  (Cordillère  qui  sépare  la  ville  de 
Santa- Fé  de  Bogota  des  plaines  du  JNIeta),  dépasse  le  som- 
met de  cette  grande  chaîne  de  montagnes ,  en  se  prolon- 
geant vers  les  plaines  de  Casanare.  On  pourroit  le  soup- 
çonner; car  les  dépôts  de  sel  gemme  et  les  sources  de  muriate 
de  soude  se  suivent,  en  traversant  la  Cordillère  orientale  de 
la  Nouvelle- Grenade  ,  depuis  Pinceima  jusqu'aux  Llanos  du 
Meta  (par  Zipaquira,  Enemocon  ,  Tausa,  Sesquiler,  Gachita  , 
Médina,  Chita,  Chamcsa  et  El  Receptor) ,  du  sud-ouest  au 
nord-est ,  dans  une  même  direction  ,  sur  une  distance  de  plus 
de  cinquante  lieues.  Dans  toutes  les  régions  du  globe  on  ob- 
serve cette  disposition  des  sources  salées  par  bandes  (ou  cre- 
vasses?) plus  ou  moins  prolongées.  Lorsque  des  plaines  sali- 
fères  de  Casanare  on  avance  vers  l'Orénoque  ,  les  formations 
secondaires  disparoissent  peu  à  peu,  et  dans  la  Sierra  Parime 
le  granite-gneisse  montre  partout  à  découvert.  Seulement  sur 
les  bords  de  l'Orénoque,  près  des  grandes  cataractes  d'Atures 
et  de  Maypures,  on  retrouve  de  petits  lambeaux  de  conglo- 
mérat ancien  superposés  h  la  roche  primitive.  Ce  conglomérat 
enchâsse  des  grains  de  quarz  et  même  (Isla  del  Guachaco) 
des  fragmens  de  feldspath  réunis  par  un  ciment  brun-olivâtre 
argileux  et  très-compacte.  Le  ciment,  là  011  il  abonde,  offre 
une  cassure  conchoïde  et  passe  au  jaspe.  Cette  roche  arénacée, 
que  je  crois  appartenir  au  grès  rouge  des  steppes  de  Vene- 
zuela, renferme  des  masses  très-aplaties  de  mine  de  fer  brun. 
Elle  rappelle  ces  grès  qui,  dans  la  Haute-Egypte  et  en  Nubie, 
reposent  aussi  immédiatement  sur  le  granité -gneis  des  cata- 
ractes du  Nil. 

4.°  P/afeau  de  QwiVo.Dansl'hémisphère  austral,  les  Cordillères 
de  Quito  m'ont  offert  la  formation  de  grès  rouge  la  plus 
étendue  de  celles  que  j'ai  observées  jusqu'ici.  Cette  roche 
couvre,  à  i3oo  et  i5oo  toises  de  hauteur  au-dessus  du 
niveau  de  la  mer,  sur  une  longueur  de  vingt-cinq  lieues, 
tout  le  plateau  de  Tarqui  et  de  Cuença,  devenu  célèbre 
par  les  opérations  des  astronomes  françois.  Elle  s'élève  dans 
le  Paramo  de  Sarar  jusqu'à  1900  toises,  et  l'épaisseur  de  sa 
masse  entière  excède  plus  de  800  toises.  Elle  repose  au  nord 


254  IND 

(Caîïar,  peute  mëndlonale  de  l'Assuay)  el  au  sud  (Aito  ùè 
PuUa  près  Loxa)  sur  du  schiste  uxicacé  primitif.  La  forma- 
tion de  grès  rouge  de  la  proA'ince  de  Quito  est  colorée  par  de 
la  mine  de  fer  brun  et  jaune,  dont  elle  renferme  de  nom- 
breux filons.  Le  grès  est  généralement  très-argileux,  à  petits 
grains  de  quarz  peu  arrondis;  mais  quelquefois  aussi  il  est 
schisteux,  et  alterne,  comme  dans  la  Thuringe,  avec  un  con- 
glomérat qui  enchâsse  des  fragmens  de  porphyre  de  trois, 
de  cinq  et  même  de  neuf  pouces  de  diamètre.  On  trouve  dans 
cette  formation  :  des  couches  d'argile,  tantôt  brune  (Tambo  de 
Burgay  et  rives  de  Vinayacu),  tantôt  blanche  et  stéatiteuse  , 
passant  à  l'argilolithe  (thonstein)  des  porphyres  du  grès  rouge 
(Rio  Uduchapa  et  Cerro  de  Coxitambo) ,  et  se  couvrant,  au 
contact  avec  Tair  atmosphérique ,  de  nitrate  de  potasse 
(Cumbe)  ;  des  troncs  de  bois  pétrifié  de  monocotylédones  (ravin 
de  Silcayacu,  où  j'en  ai  vu  des  morceaux  de  4  pieds  de  long 
et  de  14  pouces  d'épaisseur);  du  goudron  minéral  fluide  et  en- 
durci en  asphalte  a  cassure  conchoïde  (Parche  et  Coxitambo); 
des  silex  (splittrigcr  hornstein)  passant  au  silex  pyromaque  ou 
àragathe(  Delay  )  ;  des  filons  de  mercure  sulfuré  [Cerri-s  de 
Guazun,  et  Upar  au  nord-est  du  village  d'Azogues);  des  cou- 
ches de  manganèse  oxidé  noirâtre  et  pulvérulent  (à  l'ouest  de 
la  ville  de  Cuença  )  ;  du  calcaire  grenu  et  lamelleux  (  Fortete, 
au  bord  occidental  du  Llano  de  Tarqui).  Cette  formation 
calcaire,  que  dans  ce  pays  on  appelle  très- improprement 
jaspe  rubané,  présente  des  couches  alternantes  de  calcaire 
opaque  et  saccharoï;!e,  semblable  au  marbre  deCarare,  et  de 
calcaire  fibreux  et  ondulé,  en  stries  laiteuses.  La  masse  entière 
est  diaphane  comme  le  plus  bel  albâtre  oriental  (le  marbre 
memphitique  ou  phengites  des  anciens).  J'aurois  été  tenté  de 
prendre  cette  roche  de  Tarqui ,  qui  est  recherchée  par  les 
marbriers  comme  l'albâtre  de  Florence  et  le  marbre  de  Tolonta 
(  entre  Chillo  et  Quito  ) ,  pour  une  variété  de  travertin  ou  for- 
mation d'eau  douce ,  si  au  sud  de  Cuença ,  au  bord  du  Rio 
Machangara,  elle  ne  m'avoit  paru  (d'après  l'inclinaison  de 
ses  couches)  intercalée  au  grès  rouge  que  je  viens  de  dé- 
crire. 11  faut  toutelois  distinguer  de  ce  marbre  translucide 
et  rubané  de  Tarqui ,  le  calcaire  grenu  et  opaque  du  Ce- 
bollar,  qui  vient  au  jour  un  peu  au  nord  de  Cuença,    et 


IND  ^55 

qui,  recouvert  du  grès  rouge,  est  vraisemblablement  (§.  lo) 
superposé  au  micaschiste  du  Canar.  Dans  les  parties  volca- 
niques des  Andes,  des  plateaux  ou  bassins  élevés  sont  rem- 
plis, les  uns,  de  formations  secondaires,  couvrant  des  por- 
phyres de  transition  ;  les  autres ,  de  formations  tertiaires 
et  d'eau  douce,  superposées  à  des  tuffs  trachytiques.  Ce  n'est 
que  lorsque  des  géognostes  instruits  se  seront  établis  dans 
les  grandes  villes  placées  sur  le  dos  des  Cordillères  ,  villes  qui 
deviendront  les  centres  de  la  civilisation  américaine,  que 
l'on  pourra  pi-ononcer  avec  certitude  sur  ces  lambeaux  de 
terrains  calcaires,  gypseux  et  arénacés,  que  l'on  trouve  entre 
J200  et  1600  toises  de  hauteur. 

5.°  Pérou.  La  formation  de  grès  rouge  de  Cuença,  qui  est 
recouverte  sur  plusieurs  points  de  couches  de  gypse  feuilleté 
(Muney,  Juncay  et  Chalcay,  à  l'ouest  de  Nabon),  se  trouve 
répétée  dans  le  Haut-Pérou,  à  1460  toises  de  hauteur,  dans 
le  grand  plateau  de  Caxamarca.  Ce  grès  de  Caxamarca  est 
également  argileux,  dépourvu  de  coquilles  et  rempli  de 
minerai  de  fer  brun.  Il  m'a  paru  appuyé  sur  des  porphyres 
d'un  aspect  trachytique  (Cerros  deAroma  et  de  Cundurcaga). 
Il  supporte  le  calcaire  alpin  de  Montan  et  de  Micuipampa, 
qui  est  célèbre  par  ses  richesses  métalliques.  Les  eaux  ther- 
males hydrosulfureuses  qui  sortent  des  grès  de  Cuçnça  (lat. 
austr.  2°  55')  et  de  Tollacpoma  près  Caxamarca  (lat.  austr. 
7"  8'),  ont  presque  la  même  température,  72°  et  69°  cent. 

L'analogie  qu'offrent  les  grès  rouges  de  la  Nouvelle-Gre- 
nade ,  du  Pérou  et  de  Quito ,  avec  les  grès  rouges  du  pays 
où  Fiichsel  {Historia  terrœ  et  maris  ex  historia  Thuringiœ  eruta) 
a  donné  la  première  description  de  la  grande  formation 
houillère,  doit  frapper  tous  les  géognostes  expérimentés.  Je 
n'insisterai  pas  sur  les  phénomènes  si  connus  de  l'alternance 
des  conglomérats  grossiers  et  des  grès  à  grains  très -fins;  ni 
sur  l'absence  de  tout  fragment  calcaire,  fragmens  dont  on 
ne  trouve  qu'un  exemple  très-rare  dans  des  poudingues  du 
grès  rouge  des  Pyrénées  (vallée  de  Barillos)  ;  ni  sur  les 
couches  intercalées  de  houille,  d'argile,  de  fer  brun  et  de 
calcaire  .-  je  me  bornerai  à  rappeler  dans  les  grès  rouges  de 
rAllemagne  les  mines  de  mercure  (MOrsfeld  et  Moschellands- 
berg  dans  le  duché  de  Deux-ponts,  comme  Dombraya  en 


256  IND 

Hongrie);  les  bois  pétrifiés  de  plantes  monocotylédonées 
(Siebiglterode,  Kelbra  et  Rothenburg,  en  Thuringe);  les 
agathes,  les  silex  communs  et  les  silex  pyromaques  (horn- 
et  feuerstein)  passant  à  la  calcédoine  (  KiflFhauser ,  Wie- 
derstàdt,  Goldlauter  et  Grossreina ,  en  Saxe,  dans  le  con- 
glomérat grossier  du  grès  rouge  ;  Oberkirchen  et  Tholey  dans 
le  duché  de  Deux-ponts  ;  Netzberg  près  Ilefeld ,  au  Harz  , 
dans  le  mandelstein  du  grés  rouge)  ;  du  bitume  minéral 
(Naundorf  et  Gnolzig  dans  le  comté  de  Mansfeld).  Tous  ces 
phénomènes  se  retrouvent  dans  la  partie  de  TAmérique  équi- 
noxiale  que  j'ai  parcourue. 

6.°  RîVes  de  l'Amazone.  Le  grand  bassin  de  la  rivière  des 
Amazones  offre,  du  moins  dans  sa  partie  occidentale,  les 
mêmes  phénomènes  que  nous  avons  indiqués  en  traçant  le 
tableau  géognostique  des  Llanos  de  Venezuela  ou  du  bassin 
de  rOrénoque.  Lorsqu'on  descend  du  sommet  des  Andes  gra- 
nitiques de  Loxa  par  Guancabamba  aux  rives  du  Chamaya  ,  on 
trouve  superposé  aux  porphyres  de  transition  de  Sonanga  un 
grès  à  ciment  argileux,  couvert  (entre  Sonanga  et  Guanca) 
d'un  calcaire  qui  renferme  du  gypse  et  du  sel  gemme.  Ce  grès 
de  Chamaya  remplit,  à  i go  et  260  toises  de  hauteur  au-dessus 
du  niveau  de  l'océan ,  les  plaines  de  Jaen  de  Bracamoros.  11 
forme  des  collines  à  pentes  abruptes,  ressemblant  à  des  forti- 
fications en  ruines.  On  y  distingue  des  couches  à  petits  grains 
arrondis  de  quarz,  et  des  conglomérats  grossiers,  composés  de 
galets  de  porphyre  ,  de  pierre  lydienne  et  de  quarz,  de  deux 
à  trois  pouces  de  diamètre.  Les  conglomérats  grossiers  sont 
assez  rares  -.  ils  forment  cependant  le  pongo  de  Rentema,  et 
d'autres  digues  rocheuses  qui  traversent  le  Haut-Maragnon 
et  entravent  la  navigation  du  fleuve.  Parmi  les  fragmens  en- 
châssés dans  le  grès  de  Chamaya,  je  n'en  ai  jamais  pu  décou- 
vrir un  seul  qui  fût  de  roche  calcaire.  Cette  circonstance , 
la  présence  des  lydiennes  empâtées  dans  la  masse  ,  l'alternance 
du  grès  à  petits  grains  avec  les  conglomérats  grossiers  ,  partout 
si  rares  (Schochwitz  en  Saxe)  dans  le  grès  bigarré,  enfin  la 
superposition  du  zechstein  et  du  gypse  avec  sel  gemme  au  grès 
de  l'Amazone  ,  me  font  admettre  l'identité  de  cette  formation 
et  de  celles  de  Cuença  et  de  Caxamarca,  malgré  la  différence 
de  hauteur  absolue  de  plus  de  1 000  toises.  jNous  avons  déjà  vu , 


IND  25; 

dans  la  Nouvelle-Grenade  ,  le  grès  hoiiiller  descendre  du  grand 
plateau  de  Bogota  aux  plaines  du  Rio  Magdalena.  Une  parti- 
cularité bien  remarquable,  et  qui  paroit,  au  premier  abord  , 
éloigner  le  grès  de  l'Amazone  et  du  Chamaya  du  grès  rouge 
de  l'Europe,  est  l'intercalation  de  quelques  couches  de  sable 
à  parties  entièrement  désagrégées.  J'ai  vu,  entre  Chamaya 
et  Toniependa  ,  des  bancs  de  grès  quarzeux ,  de  trois  à  quatre 
pieds  d'épaisseur,  alterner  avec  des  bancs  de  sable  siliceux  de 
sept  à  huit  pieds.  Le  parallélisme  de  ces  couches  peu  incli- 
nées se  soutient  à  de  grandes  distances.  Je  n'ignore  pas  que 
le  mélange  de  sable  et  de  grès  solide  caractérise  plus  particu- 
lièrement le  grés  bigarré,  celui  qui  recouvre  le  zechstein 
(  Wimmelburg  et  Cresfeld  en  Saxe) ,  et  le  grès  tertiaire  au- 
dessus  du  gypse  à  ossemens  (Fontainebleau  près  de  Paris); 
mais  MM.  Voigt  et  Jordan  ont  aussi  trouvé  des  bancs  de 
sable  (triebsand)  dans  le  grès  rouge  ou  houiller(  Rôhrig  près 
de  Bieber,  et  le  Kupferbvrg  près  Walltenried  ).  On  pourroit 
croire  que  Faiialogie  que  nous  venons  d'indiquer  avec  les 
grès  et  sables  marins  du  terrain  tertiaire,  se  trouve  l'ortifiée 
jusqu'à  un  certain  point  par  la  fréquence  des  oursins  pétri- 
fiés que  nous  avons  vus  épars  à  la  surface  du  sol,  à  la  fois  suu 
les  plages  de  l'Amazone,  à  ig5  toises,  et  près  de  Micuipampa, 
à  plus  de  1  800  toises  de  hauteur  ;  mais  il  se  peut  que  ,  dans  ces 
régions  si  peu  examinées  jusqu'ici,  des  formations  calcaires 
très -neuves  reposant  sur  le  zechstein  ,  et  rien  ne  semble  an- 
noncer que  le  grès  de  Chamaya,  alternant  à  la  fois  avec  des 
bancs  de  sable  et  des  conglomérats  à  fragmens  de  porphyre 
et  de  pierre  lyd  enne,  soit  un  grès  tertiaire  semblable  à  celui 
du  terrain  parisien. 

Je  devrois  peut-être  placer  immédiatement  après  le  grès 
houiller  ie  zechstein  ou  calcaire  alpin  ,  parce  que  ces  deux 
roches  ne  constituent  quelquefois  qu'une  seule  formation  ; 
mais  j'aime  mieux  décrire  d'abord  le  terrain  de  quarz  deGuan- 
gamarca  (flbzquarz) ,  parce  qu'il  est  parallèle  vu  gfès  houiller. 
C'est  un  équis^alent  géognosfiipie  propre  à  l'hémisphère  austral. 

Roche  de  quarz  secondaire. 

§.  27.  Cette  formation  remarquable  et  entièrement  Incon- 
nue aux  géognostes  de  l'Europe  domine,  dans  les  Andes  du 
a3.  17 


a58  IND 

Pérou,  entre  les  7°  et  8°  de  latitude  australe.  Je  l'ai  vue  re- 
poser indifféremment  sur  des  porphyres  de  transition  (  à  la 
pente  orientale  des  Cordillères,  Cerro  de  N.  S.  del  Carmen 
près  S.  Felipe,  982  toises;  Paramo  de  Yanaguanga  entre  Micui- 
pampa  et  Caxamarca,  a 900  toises.-  à  la  pente  occidentale  des 
Cordillères,  Namas  et  Magdalena  ,  690  toises),  et  sur  du  gra- 
nité primitif  (Chala  ,  près  des  côtes  de  l'océan  Pacifique  ,212 
toises).  Cette  superposition  sur  des  roches  d'un  âge  très-diffé- 
rent prouve  Vindépendance  de  la  formation  que  nous  faisons 
connoître.  Elle  est  beaucoup  moins  développée  à  la  pente  orien- 
tale qu'à  la  pente  occidentale  des  Andes.  A  la  seconde,  elle 
atteint  une  épaisseur  de  plusieurs  milliers  de  pieds,  comptée 
perpendiculairement  aux  fentes  de  stratification  :  elle  y  rem- 
place le  grès  rouge,  supportant  immédiatement  (villages  in- 
diens de  la  Magdalena  et  de  Contumaza)  le  zechstein  ou  cal- 
caire alpin.  C'est,  ou  la  plus  récente  des  formations  de  tran- 
sition, ou  la  plus  ancienne  des  formations  secondaires:  c'est 
un  véritable  quarz  compacte  ou  grenu ,  non  carié  ou  cellu- 
leux,  le  plus  souvent  blanc-grisàlre  ou  jaunâtre  et  opaque;  il 
n'est  mélangé  ni  de  talc  ni  de  mica.  Cette  formation  est  tantôt 
compacte  et  à  cassure  écailleuse,  comme  Je  quarz  en  bancs 
(lagerquarz  du  granite-gneis  primitif);  tantôt  à  grains  très- 
fins,  semblable  au  quarz  du  terrain  calcaire  de  transition  de 
la  Tarantaise.  Ce  n'est  par  conséquent  ni  une  roche  arénacée, 
ni  une  variété  de  ces  grès  quarzeux  à  ciment  silicifère,  dans 
lesquels  le  ciment  disparoît  peu  à  peu  ,  et  qui  appartiennent 
à  la  fois  au  grès  bigarré  (Detmoid),  au  quadersandstein,  au  grès 
vert  (green  sand),  à  l'argile  plastique  (  trappsandstein)  et  au 
terrain  tertiaire  (forêt  de  Fontainebleau).  Les  ravins  pro- 
fonds dont  la  pente  des  Cordillères  est  sillonnée  ,  et  le  nombre 
immense  de  blocs  arrachés  de  leur  gîte  naturel,  facilitent 
l'observation  de  cette  formation  de  quarz,  qui  est  très-homo- 
gène et  dépourvue  de  coquilles,  comme  aussi  de  couches  subor- 
données. Je  l'ai  examinée  pendant  plusieurs  jours,  croyant 
trouver  dans  une  roche  recouverte  de  zechstein  et  remplaçant 
le  grès  rouge,  des  traces  de  ciment,  de  grains  ou  de  fragmens 
aglutinés  :  toutes  mes  recherches  ont  été  inutiles;  nulle  part 
je  n'ai  pu  me  convaincre  que  ce  quarz  compacte  ou  grenu  fût 
une  roche  arénacée  ou  fragmentaire.   Elle   est  quelquefois 


ÏND  259 

très-rëgulièrement  séparée  en  bancs  de  huit  pouces  à  deux 
pieds  d'épaisseur,  dirigés  (  Aroma ,  Magdaiena  et  Cascas  1 
N.  53° — 68°  O,  et  inclinés  de  70°  à  80°  au  S.  E.  A  la  pente 
orientale  des  Andes,  aux  rives  du  Chamaya,  une  couche  de 
quarz  semblable  à  celle  que  je  A-iens  de  décrire,  paroît  in- 
tercalée à  une  formation  de  calcaire  compacte  ,  bleu-grisâtre. 
Ce  calcaire  n'est  pas  une  roche  de  transition  (comme  on  pour- 
roit  le  croire  à  cause  de  la  position  du  quarz  compacte  de 
Pesay  et  de  Tines  en  Tarantaise ,  §.  20)  ;  le  nombre  et  la  na- 
ture de  ses  coquilles,  comme  la  sinuosité  de  ses  couches ,  sem- 
blent le  rapprocher  au  contraire  du  zechstein  ou  calcaire 
alpin.  11  n'est  pas  extraordinaire  de  voir  une  roche  siliceuse, 
qui  supporte  un  calcaire,  pénétrer  dans  celui-ci  et  y  former 
une  couche  intercalée.  Cette  pénélraiion  s'observe  aussi 
quelquefois,  mais  en  filons  (Ccrro  de  N.  S.  del  Carmen  près 
San-Felipe),  dans  la  formation  sur  laquelle  repose  la  roche 
de  quarz.  Le  calcaire  alpin  de  San-P'elipe  recouvre  cette 
roche,  et  celle-ci  est  placée  sur  un  porphyre  vert  de  tran- 
sition, qui  est  traversé  de  filons  de  quarz  de  trois  pieds  d'é- 
paisseur. 

Il  sera  utile  de  rappeler,  à  la  fin  de  cet  article,  qu'il  ne 
faut  pas  confondre  neuf  formations  de  quarz  et  de  grcs  quar- 
zeux  des  terrains  primitif,  intermédiaire,  secondaire  et  ter- 
tiaire, dont  seulement  la  seconde  et  la  quatrième  sont  indé- 
pendantes, tandis  que  les  autres  ne  forment  que  des  bancs 
subordonnés:  1.°  quarz  (lagerquarz)  des  granités- gneis  ,  des 
micaschistes  et  des  thonschicfer  primitifs  ;  2."  quarz  chloriteux; 
ou  talqueux  de  MinasGeraes  du  Brésil  et  de  Tiocaxas  dans  les 
Andes  de  Quito  :  formation  indépendante  primitive,  succé- 
dant au  thonschicfer  (§.16),  ou  le  remplaçant,  comme  en 
Norwége;  5.°  quarz  compacte  de  transition,  décrit  par  MM. 
Brochant,  Haussmann  et  Léopold  de  Bucli ,  et  subordonné 
(§.  20)  aux  roches  calcaires  et  schisteuses  de  la  Tarantaise,  de 
Kemi-Elf  en  Suéde,  et  de  Skeen  en  Norwége  (§.  20)  ;  4." 
quarz  secondaire  (§.  27),  parallèle  au  grès  rouge,  et  péné- 
trant dans  le  calcaire  alpin  des  Andes  de  Contumaza  et  de 
Huancavelica.  A  ces  formations  de  quarz  pur  on  peut  joindre 
les  masses  entièrement  qu.irzeuses,  5."  du  grès  bigarré;  6° 
du  quadersandstein  ;   7.°  du  grès  vert  ou  grès  secondaire  à 


86o  IND 

iignifes,  placé  entre  le  calcaire  jurassique  et  la  craie;  8.°  du 
grès  appartenant  au  grès  tertiaire  à  lignites  (argile  plastique) 
au-dessus  de  la  craie;  9.°  du  grès  de  Fontainebleau.  On  dé- 
termine une  roche  avec  d'autant  plus  de  sûreté,  que  Ton  a 
sous  les  yeux  le  tableau  des  formations  qui  sont  analogues 
par  leur  composition,  ruais  très-différentes  par  leur  gisement. 

II.    ZeCHSTEIN    ou    CALCAIRE    ALPIN    (mAGNESIAN    LIMESTONe)  ; 

Gypse  hydraté;  Sel  gemme. 

§.  28.  Le  mot  de  zechstein  n'est  ordinairement  appliqué  par 
les  mineurs  et  les  géognostes  d'Allemagne  qu'à  une  seule  assise 
de  la  formation  que  nous  allons  décrire  :  on  distingue  alors 
le  calcaire  compacte  (zechstein)  du  schiste  cuivreux  qu'il 
recouvre  immédiatement ,  et  des  gypses  et  des  calcaires  fétides 
qui  lui  sont  superposés.  J'appelle  zechstein  tout  le  groupe 
dont  cette  roche  est  le  représentant  géognostique.  C'est  une 
grande  formation  calcaire  qui  succède  immédiatement  au  grès 
rouge  ou  grès  houiller,  et  qui  est  quelquefois  si  intimement 
liée  avec  ce  grès  qu'elle  s'y  trouve  intercalée.  La  limite  supé- 
rieure du  zechstein  est  plus  difficile  à  fixer  :  en  Allemagne 
et  dans  plusieurs  parties  de  la  France  orientale,  cette  roche 
se  termine  là  où  commence  le  grès  bigarré  ou  grès  à  oolithes 
(bunte  sandstein).  En  Angleterre,  le  magnesian  limestone, 
représentant  par  sa  position  le  zechstein,  est  recouvert  d'une 
formation  marneuse  et muriatifère  (red  mari),  qui  offre  beau- 
coup d'analogie  avec  le  grès  bigarré  d'Allemagne  ;  car  dans  ce 
dernier  on  rencontre  aussi  plus  de  couches  d'argile  et  de 
marne  que  de  véritable  grès.  Comme,  d'un  autre  côté,  le  sel 
gemme  d'Angleterre  appartient  au  red  mari,  tandis  que  le 
sel  gemme  de  la  majeure  partie  du  continent  appartient  au 
zechstein,  on  peut  admettre  que,  des  deux  formations,  a  p-u 
près  parallèles,  de  red  mari  et  de  grès  bigarré  ,  renfermant 
des  marnes,  des  argiles  et  des  oolithes,  la  première  est  plus 
intimement  liée  au  zechstein  ,  tandis  que  la  seconde  Test  plus 
au  muschelkalk.,  et,  quand  celui-ci  et  le  quadersandstein  ne 
se  sont  pas  développés,  au  calcaire  également  marneux  et 
oolithique  du  Jura.  C'est  peut-être  d'après  des  inductions 
analogues  que,  dans  son  excellent  Tableau  des  formations 
d'Angleterre,  publié  en  1816,  M.  Buckland  avoit  réuni,  dans 


IND  ^Si 

un  même  terrain,  le  magnesian  limestone  elle  red  mari  ou 
new  red  sandstone.  Quelque  grande  que  soit  l'importance 
que  nous  attachons  à  ces  affinités  géognostiques ,  comme  aux 
phénomènes  d'alternance  et  de  pénétration  observés  dans  des 
Toclies  qui  se  succèdent  immédiatement,  nous  ne  nous  en 
croyons  pas  moins  en  droit  de  séparer  les  diverses  formations 
de  grès  rouge,  de  zechstein  et  de  grès  bigarré,  là  où,  dans 
les  deux  hémisphères,  nous  les  avons  vues  prendre  un  déve- 
loppement extraordinaire. 

Dans  le  cours  de  ce  travail  je  me  suis  souvent  servi,  à 
l'exemple  de  beaucoup  degéognostes  célèbres,  pour  désigner 
le  zechstein,  du  mot  plus  sonore  de  calcaire  alpin,  quoique  je 
sache  très-bien  que,  d'après  les  belles  recherches  de  MM.  de 
Buch  et  Escher,  la  majeure  partie  des  calcaires  qui  consti- 
tuent les  hautes  Alpes  de  la  Suisse  ,  sont  des  calcaires  de 
transition  (§.  22).  A  une  époque  où  l'on  a  tant  embrouillé 
la  géognosie  par  la  création  de  dénominations  vagues  et  qui 
ne  sont  adoptées  que  par  un  très-petit  nombre  de  savans  , 
je  n'ai  rien  voulu  changer  à  la  nomenclature  reçue  ,  quelque 
vicieuse  ou  barbare  qu'elle  me  parût.  Les  imperfections  du 
langage  des  géognostes  ne  sont  dangereuses  pour  la  science, 
que  lorsqu'on  ne  définit  pas  avec  clarté  la  position  de  chaque 
formation  et  les  limites  entre  lesquelles  ces  formations  se  trou- 
vent circonscrites.  Dans  la  Bavière  méridionale ,  dans  le  Tyrol, 
dans  la  Styrie  et  le  pays  de  Salzbourg,  les  hautes  Alpes  de 
Benedictbaiern,  deChiemsée,  de  Hall,  d'Ischel,  de  Gmunden 
et  de  l'Untersberg,  sont  très-probablement  du  zechstein.  Au 
Montperdu  ,  dans  la  chaîne  des  Pyrénées,  cette  roche,  mêlée 
de  calcaire  fétide,  s'élève  à  plus  de  1760  toises  de  hauteur* 
Dans  les  Andes  du  Pérou  ,  le  zechstein,  très -distinct  du 
calcaire  de  transition  ,  renferme  des  coquilles  pétrifiées  sur  la 
crête  des  montagnes  entre  Guambos  et  Montan,  et  près  Mi- 
cuipampa  (1400 — 2000  toises)  ;  entre  Yauricocha  et  Pasco 
(2100  toises);  près  de  Huancaveliea ,  Acoria  et  Acobamba 
(2100  —  2207  toises).  On  voit  par  ces  exemples  que  le  zech- 
stein atteint  au  nord  et  au  sud  de  l'équateur  de  très-grandes 
élévations.  On  le  trouve  bien  certainement  dans  la  région 
alpine  des  Pyrénées  ,  du  Tyrol  et  des  Andes  ;  mais  le  mot 
calcaire  a/pjri.  n'indique  pas  plus  que  toutes  les  Alpes  calcaires 


'^62  l]SI) 

dans  les  deux  mondes  sont  composées  de  zechstein ,  que  le 
mot  ;^rès  houiller  n'annonce  que  les  houilles  appartiennent 
uniquement  au  grès  rouge.  La  question  de  savoir  quelles 
cimes  alpines  de  la  Suisse  et  du  Tyrol  sont  de  zechstein  , 
quelles  cimes  sont  de  calcaire  de  transition,  est  plutôt  une 
question  de  géographie  minéralogique  ,  qu'un  problème  de 
gcognosie  générale.  La  science  des  formations  se  borne  à  décrire 
une  roche  placée  dans  la  série  des  terrains  secondaires,  entre 
le  grès  houiller  et  le  grès  bigarre  alternant  avec  des  argiles: 
elle  ne  prononce  pas  sur  ce  grand  nombre  de  roches  dont 
le  gisement  n'offre  aucun  caractère  diagnostique  certain , 
par  exemple,  sur  des  roches  Calcaires  non  recouvertes  et 
placées  immédiatement  sur  du  micaschiste  ou  des  grauwackes. 
Partout  où  le  grès  houiller  manque,  on  ne  peut  juger  de 
l'âge  des  roches  calcaires  que  d'après  des  analogies  de  com- 
position et  de  couches  intercalées  :  on  les  rapproche  de  tel 
ou  tel  groupe,  comme  le  botaniste  rapproche  préalablement 
de  telle  famille  ou  de  tel  genre  connus,  une  plante  dont  il 
n'a  pu  examiner  le  fruit.  Ces  hésitations  et  ces  doutes,  loin  de 
prouver  l'incertitude  des  classifications,  parlent  plutôt  en 
faveur  de  la  marche  méthodique  que  doit  suivre  la  géognosie 
positive. 

Le  zechstein  ,  en  le  considérant  dans  sa  plus  grande  géné- 
ralité, est  tantôt  (dans  les  montagnes  les  plus  élevées)  un 
terrain  d'une  grande  simplicité,  tantôt  (dans  les  plaines  )  il 
est  composé  de  plusieurs  petites  formations  partielles,  qui 
alternent  les  unes  avec  les  autres  (Thuringe;  Figeac  ,  Au- 
tun ,  Villefranche  ).  Sa  couleur  est  le  plus  souvent  grisâtre 
et  bleuâtre,  quelquefois  rougeâtre  :  il  passe,  et  surtout  dans 
les  hautes  régions,  du  compacte  au  grenu  à  très- petits, 
grains,  et  dans  ce  cas  il  est  traversé  par  de  petits  filons  de 
spath  calcaire.  Ces  caractères  de  couleur  et  de  cassure  ne 
sont  cependant  pas  d'une  grande  importance  ;  car  ,  selon 
que  la  matière  colorante  (carbure  d'hydrogène  et  fer)  se 
trouve  diversement  répartie ,  le  zechstein  et  le  calcaire  de 
transition  prennent  quelquefois  des  teintes  semblables  ; 
le  premier  devient  noirâtre,  et  le  second  Wanc- grisâtre. 
C'est  ainsi  que  la  couleur  noire  se  trouve  (duché  d'Anhalt- 
Dessau  ;  IIettst?;dtj  Osnabrilck)  jusque  dans  le  m.uschelkalk, 


IND  265 

M.  Freiesleben  observe  très -bien  que  le  zechstein  n'est 
généralement  pas  mat,  mais  un  peu  brillant  (schimmernd) , 
à  cause  d'un  mélange  intime  de  petites  lames  de  spath  cal- 
caire. Cet  éclat,  bien  moindre  sans  doute  que  dans  les  cal- 
caires de  transition,  se  remarque  non -seulement  dans  les 
montagnes  très-élevées,  mais  jusque  dans  les  zechstein  des 
plaines.  C'est  là  aussi  que  cette  roche  devient  parfois  grenue 
à  petits  grains  (au  Deister  et  prés  de  Hameln;  entre  Bol- 
kenhayn  et  Waldenbourg ,  et  près  de  Tarnowiz  en  Silésie), 
J'ai  trouvé  cette  même  tendance  à  la  structure  cristalline 
dans  le  zechstein  du  Mexique  et  dans  celui  des  LIanos  de 
Venezuela:  elle  n'est  pas  causée,  comme  dans  le  calcaire 
du  Jura,  par  un  entassement  de  débris  organiques,  et  ce 
seroit  à  tort  qu'on  attribueroit  cette  tendance  exclusive- 
ment au  calcaire  de  transition.  De  petits  filets  de  spath 
calcaire  blanc  traversant  un  calcaire  bleuâtre  ,  passant  du 
compacte  au  grenu  ,  caractérisent  sans  doute  plutôt  le  ter- 
rain de  transition  que  le  zechstein  des  plaines  ;  mais  dans 
les  deux  continens  ces  petits  filons  se  retrouvent  aussi  dans 
les  calcaires  des  hautes  montagnes  calcaires  que ,  par  leur 
gisement  et  par  leurs  bancs  intercalés  de  sel  gemme  et  d'ar- 
gile bitumineuse,  je  crois  appartenir  au  zechstein.  D'ailleurs, 
dans  toutesles  formations  supérieures  au  grès  rouge,  on  observe 
que  (par  une  action  probablement  galvanique)  les  calcaires 
gris-  noirâtre  perdent  leur  principe  colorant  dans  le  voisinage 
des  fentes  de  stratification.  Cette  décoloration  a  lieu  dans  les 
roches  restées  en  place.  L'accumulation  du  carbone  ne  se 
conserve  que  dans  le  centre  des  couches,  et  l'on  diroit  que 
la  pierre  ait  été  exposée  au  contact  de  la  lumière  et  de 
l'oxigène  de  l'atmosphère. 

De  toutes  les  formations  secondaires  le  zechstein  est  celle 
dont  les  diverses  assises  ont  été  le  plus  minutieusement  étu- 
diées :  c'est  aussi  celle  qui  a  le  plus  contribué  à  faire  naître 
dans  le  Nord  de  l'Allemagne  ,  dans  cette  terre  classique  de  la 
géognosie,  les  premières  idées  précises  sur  l'âge  relatif  des  ter-. 
rains  et  sur  la  régularité  avec  laquelle  ils  se  succèdent.  Comme 
les  schistes  bitumineux  et  cuivreux  du  zechstein  sont  un 
objet  très- important  d'exploitation,  il  a  fallu  percer  cin<j 
formations,  le  muschelkalk ,  le  gypse  fibreux  et  argileux. 


264  IND 

le  grès  bigarré  ou  oolithique,  le  gypse  feuilleté  et  salifère , 
et  le  zechsiein  ,  pour  parvenir  à  la  couche  argentifère  placée 
entre  le  zeclistein  et  le  grès  rouge.  On  peut  dire  que  les  tra- 
vaux des  mineurs  sur  les  schistes  bitumineux  du  Mansfeld  , 
en  Allemagne,  et  sur  les  roches  de  houille  en  Angleterre, 
ont  singulièrement  favorisé  les  progrès  de  la  géognosie  de  gise- 
mens ,  dont  Stenon  a  eu  la  gloire  d'avoir  indiqué,  le  pre- 
mier, les  véritables  principes. 

Le  zechstein  ou  calcaire  alpin,  la  plus  ancienne  des  for- 
mations secondaires,  renferme,  comme  couches  subordon- 
nées :  des  argiles  schisteuses,  carburées  et  bitumineuses;  de 
la  houille  ;  du  sel  gemme  ;  du  gypse  ;  du  calcaire  fétide , 
(Compacte  ou  en  parties  désagrégées  (asche)  ;  du  calcaire 
magnésifère  ;  du  calcaire  à  gryphites;  du  calcaire  ferrifère 
(eisenkalk);  du  calcaire  celluleux  à  grains  cristallins  (rauch- 
wacke);  du  grès;  de  la  calamine,  du  plomb,  du  fer  hydraté 
et  du  mercure.  Nous  joindrons  à  ces  indications  les  substances 
qui  se  trouvent  quelquefois  disséminées  dans  le  zechstein  , 
sans  y  former  des  couches  continues,  telles  que  le  soufre, 
le  silex  (hornstein)  et  le  cristal  de  roche.  On  distingue 
facilement  dans  l'ensemble  de  ces  masses  trois  séries  bitu- 
mineuses ou  cai'burées  ,  muriatifères  et  métalliques.  Le 
schiste  cuivreux ,  rempli  de  poissons  pétrifiés  ;  le  calcaire 
fétide ,  le  sel  gemme  et  le  gypse  ,  la  calamine  et  le  plomb 
sulfuré  sont  les  types  les  plus  importans  de  ces  trois  séries: 
ils  servent  jusqu'à  un  certain  point ,  par  leur  concomitance 
géoiimslique,  à  reconnoître  la  formation  que  nous  décrivons, 
lorsque  les  rapports  de  gisement  sont  douteux. 

Argiles  ou  marnes  schisteuses ,  carburées  ou  bitumineuses.  L'ac- 
cumulation de  carbone  qui  caractérise  les  terrains  de  transi- 
tion ,  surtout  ceux  qui  sont  les  plus  modernes,  atteint  son 
maximum  dans  le  grès  rouge  :  le  carbone  ne  s'y  montre  plus 
comme  graphite  ou  comme  anthracite  ,  mais  comme  houille 
bitumineuse.  La  formation  de  calcaire  alpin,  si  intimement 
liée  à  celle  du  grès  rouge  ou  grès  houiller,  participe  jusqu'à 
un  certain  point  à  cette  abondance  de  carbone  hydrogéné  : 
tantôt  c'est  toute  la  masse  de  la  roche  (Bavière  méiidio- 
iiale ,  et  Merlingeu  sur  le  lac  de  Thun  ;  dans  l'Amérique 
Bîéridionale  ,   montagnes   de   la   Nouvelle -x\ndalousie)    qui 


IND  265 

est  pénétrée  de  parties  bituniineuses  ;  tantAt  ce  ne  sont  que 
des' couches  d'argile  et  de  niar:ics  intercalées  qui  contien- 
nent le  bifuine.  La  plus  célèbre  de  ces  couches  est  le  schiste 
cuivreux  (kupferscliiefer)  du  Mansfeld,  que  l'on  retrouve 
dans  le  nouveau  monde,  renfermaut  des  poissons  fossiles, 
près  de  Ceara  (  plaines  du  Brésil) ,  près  dePasco  (à  2000  toises 
de  hauteur;  Andes  du  Pérou),  près  de  Mondragon  (plateau 
du  Potosi),  et  près  du  Pongo  de  Loinasiacu  (rives  de  l'Ama- 
zone ,  province  de  Jaen).  Le  plus  souvent  il  n'y  a  qu'une 
seule  couche  de  schiste  cuivreux  ,  et  cette  couche  se  trouve 
comme  repoussée  vers  la  limite  inférieure  du  zechstein. 
C'est  cette  position  qui  l'a  fait  prendre  long-temps  pour 
une  formation  indépendante  placée  entre  le  zechstein  et  le 
grès  rouge.  D'autres  fois  (Conrads\Aa!de  ,  Prausnitz  et  Hasel, 
en  Silésie  )  il  y  a  plusieurs  bancs  qui  al(ernent  avec  les 
couches  du  zechstein  et  qui  méritent  également  d'être  ex- 
ploitées. Le  cuivre  et  le  plomb  argentifères  ne  se  trouvent 
qu'accidentellement  accumulés  dans  cette  formation  partielle, 
et  j'ai  vu  dans  les  deux  continens  (  Chiemsée  et  V\  allersée 
dans  la  Bavière  méridionale  ;  mines  de  Tehuilotepec  au 
Mexique,  montagne  du  Cuchivano  près  Cumanacoa)  ces 
marnes  cuivreuses  du  Mansfeld  représentées  par  de  petites 
couches  d'argile  schisteuse  carburée  ,  brun  -  noirâtre  ,  foi- 
blement  chargée  de  bitume  et  remplie  de  pyrites.  Ce  phé- 
nomène paroit  lier  le  zechstein  des  plaines  à  celui  des  hautes 
montagnes,  dont  la  superposition  au  grès  houiller  est  moins 
évidente.  Dans  les  Andes  de  Montan  (cà  1600  toises  de 
hauteur  ;  Pérou  septentrional)  des  argiles  noires  de  cinq 
à  dix -huit  pouces  d'épaisseur  alternent  avec  le  zechstein. 
Les  argiles  schisteuses  et  marneuses  oscillent,  du  zechstein 
ou  calcaire  alpin  ,  d'un  côté  vers  le  grès  rouge  et  le  cal- 
caire de  transition,  de  Pautre  vers  le  calcaire  du  Jura.  Dans 
le  grès  rouge  se  trouve  répété  le  schiste  cuivreux  et  argen- 
tifère ,  mais  avec  une  grande  accumulation  de  carbone 
(Suhl  et  Goldlauter  en  Saxe).  Dans  le  calcaire  de  transition 
(Schwatz  en  Tyrol)  les  argiles  deviennent  plus  micacées  et 
passent  au  thonschiefer  de  transition,  renfermant  (Glaris), 
comme  les  schistes  du  zechstein  (Eisleben)  et  comme  ceux 
du  grès  rouge  (mine  de  Saint-Jacques  près  Goldlauter),  des 


266  IND 

poissons  pétrifiés.  Dans  le  calcaire  du  Jura  les  marnes  sont 
plus  calcarifères ,  d'une  teinte  plus  claire,  blanchâtres  ou 
gris-bleuàfre.  Malgré  les  analogies  que  présentent  quelque- 
fois les  argiles  schisteuses  fortement  carburées  du  zechsfein 
avec  celles  du  grès  houiller,  ce  n'est  pourtant  que  dans  ces 
derniers,  qui  recouvrent  immédiatement  les  houilles,  qu'on 
trouve  des  empreintes  de  véritables  fougères  du  groupe  des 
polypodiacées.  Les  schistes  cuivreux  ne  présentent  que  des 
lycopodiacées,  famille  que  Swartz,  depuis  long-temps,  a  sé- 
parée des  fougères. 

HouiUe.  Quoique,  comme  nous  venons  de  l'indiquer  ,  l'ac- 
cumulation du  carbone  caractérise  particulièrement  la  forma- 
tion du  grès  rouge,  de  même  le  bitume  caractérise  la  formation 
du  calcaire  alpin  :  cette  dernière  offre  cependant  aussi  des 
traces  de  véritable  houille,  soit  en  couches  (entre  Nalzon  et 
Pereilles  dans  les  Pyrénées  ;  à  Huanuco  dans  les  Andes  du  Pérou , 
à  2000  et  2  200  toises  de  hauteur) ,  soit  comme  parties  dissémi- 
nées dans  le  schiste  cuivreux  (Eisleben,  Thalitter,  en  Saxe). 
C'est  un  fait  bien  remarquable  et  anciennement  observé,  que 
la  houille  piciforme  (jayet)  se  montre  de  préférence  sur  les 
empreintes  du  corps  des  poissons  pétrifiés,  elle  remplace  dans 
ces  empreintes  organiques  le  sulfure  de  fer,  et  (  entre  Morsfeld 
et  Miinsterappel ,  dans  le  duché  de  Deux-ponts)  le  mercure 
natif  et  le  cinabre.  Les  couches  de  houille  mêlées  de  coquilles 
marines  et  d'ambre  (Hering  et  Miesbach  en  Tyrol;  Entrc- 
vernes  sur  le  lac  d'Annecy  en  Savoie)  ne  se  trouvent  pas 
dans  le  zechstein  :  ce  sont  des  lignites  qui  appartiennent  à 
des  formations  beaucoup  plus  récentes.  Ils  sont  superposés 
au  zechstein  dans  des  bassins  isolés,  et  ont ,  comme  toutes  les 
formations  locales,  leurs  grès  et  leurs  argiles. 

Sel  gemme  et  argile  muriatifère.  Les  masses  de  sel  gemme 
dans  le  calcaire  alpin  ou  zechstein  sont  moins  subordonnées  à 
des  couches  de  gypse  lamelleux,  qu'aune  formation  particu- 
lière d'argile  ,  qui  a  été  long-temps  négligée  par  les  géognostes 
et  que  j'ai  fait  connoître  sous  le  nom  de  salzthon  (argile  muria- 
tifère). Elle  caractérise,  dans  les  deux  continens ,  les  dépôts 
de  sel  gemme,  de  môme  que  l'argile  schisteuse  (schieferthon) 
ou  a.  rrile  à  fougères  caractérise  les  dépôts  de  houilles.  Cette 
formation  muriatifère ,   dans  laquelle  le  gypse  ne  se  trouve 


IND  267 

pour  ainsi  dire  qu'accidentellement,  a  été  Tobjet  principal  de 
mes  recherches  dans  les  voyages  que  j'ai  entrepris  par  ordre 
du  Gouvernement  prussien  ,  pendant  les  années  1792  et  1790, 
dans  les  mines  de  sel  gemme  de  la  Suisse,  de  TAllemagne  méri- 
dionale et  de  la  Pologne.  Je  l'ai  retrouvée,  avec  toutes  ses 
nuances  d'analogie  les  plus  petites,  dans  les  Cordillères  de 
l'Amérique  équatoriaie,  et  l'on  ne  sauroit  douter  que  sa  con- 
noissançe  physionomique  ne  soit  du  plus  grand  intérêt  pour 
ceux  qui  travaillent  à  découvrir  des  dépôts  de  sel  dans  les 
pays  que  l'on  en  a  cru  dépourvus  jusqu'à  ce  jour. 

Les  couleurs  de  l'argile  muriatifère  sont  généralement  (Hall, 
Ischel,  Aussee)  le  gris  de  fumée,  le  gris  blanchâtre  et  le  gris 
bleuâtre  (Berchtolsgaden  et  Wieliczka)  ;  quelquefois  cette 
argile  est  brun-noiràtre  ,  brun-rougeàtre  (leberstein  des  mi- 
neurs du  Tyrol  et  de  la  Styrie),  et  même  rouge  de  brique.  On 
la  trouve  ou  en  masses  très-puissantes,  ou  disséminée  en  petites 
parties  rhomboïdes,  soit  dans  le  sel  gemme  (Zipaquira,  dans  la 
Nouvelle-Grenade),  soit  dans  un  gypse  (JNeustadt  an  derAisch, 
en  Franconie;  Reichenhall  en  Bavière)  qui  est  subordonné  au 
calcaire  alpin.  Les  couleurs  de  l'argile  muriatifère  sont  beau- 
coup plus  variées  et  plus  mélangées  que  celles  de  l'argile 
schisteuse  qui  couvre  les  houilles.  La  première  fait  un  peu 
d'effervescence  avec  les  acides  ;  ses  couleurs  sont  dues  à  la 
fois  au  carbone  et  à  l'oxide  de  fer.  Sur  le  plateau  de  Bogota 
je  l'ai  vue  mêlée  d'asphalte  et  tachant  les  doigts  en  noir.  Elle 
absorbe  rapidement  l'oxigène  de  l'atmosphère,  tant  sous  des 
cloches  que  dans  ces  grandes  excavations  circulaires  (Sink- 
werke,  Wohre),  qui  sont  destinées  à  être  remplies  d'eau 
douce  pour  lessiver  la  roche  salifère.  Sa  consistance  est  extrê- 
mement variable  ;  elle  s'élève  du  tendre  à  la  dureté  du  schiste 
cuivreux.  Souvent  des  masses  tenaces  (schlief)  paroissent  mê- 
lées de  silice  et  donnent  feu  avec  l'acier  ;  leurs  pièces  sépa- 
rées sont  alors  tcstacées  et  courbes  (krumnischalig  abgeson- 
derte  Stucke  ).  Empâtées  dans  une  argile  friable,  elles  for- 
ment une  espèce  de  brèche  porphyroide.  L'argile  muriati- 
fère n'ofire  ni  les  paillettes  de  mica,  ni  les  empreintes  de 
fougères  de  l'argile  schisteuse  des  houilles  :  on  y  trouve  ce- 
pendant quelquefois  (Hallstadt,  Wieliczka)  des  coquilles  pé- 
lagiques. 


.68  IIVD 

Le  sel  gemme  se  présente  de  deux  manières  ,  ou  dissé- 
miné en  parcelles  plus  ou  moins  visibles  dans  le  salzthon  , 
ou  formant  des  couches  épaisses  alternant  avec  des  couches 
argileuses.  Cette  disposition  différente  détermine  le  maximum 
(Wieliczl>a)  ou  le  minimum  (Ischel)  de  richesse  dans  les 
mines  ;  elle  décide  si  le  sel  doit  être  exploité  en  grandes 
masses  (lapidicinorum  modo ,  dit  Pline,  cœditur  sal  nativum)  , 
ou  en  lessivant  la  roche  par  l'introduction  des  eaux  douces 
dans  des  chambres  souterraines.  Lorsque  le  muriate  de  soude 
gris  de  fumée  est  disséminé  en  grains  arrondis  ou  en  petites 
lames,  ou  d'une  manière  insensible  à  Tœil,  il  n'en  forme  pas 
moins  des  croûtes  continues  autour  des  pièces  séparées  du 
salzthon.  11  remplit  toutes  les  fentes  qui  divisent  les  masses 
en  fragmens  polyédriques.  11  en  résulte  des  brèches  argileuses 
(Haselgebirge)  cimentées  par  du  sel  gemme.  Quelquefois  de 
grandes  masses  d'argile  (Hall  en  Tyrol)  sont  absolument  dé- 
pourvues de  muriate  de  soude  ;  on  les  croit  lessivées  par 
l'action  des  eaux  qui  circulent  dans  la  terre,  et  ce  phéno- 
mène curieux  semble  favoriser  l'hypothèse  la  plus  ancienne- 
ment adoptée  sur  l'origine  des  sources  salées. 

Le  gypse  grenu,  blanc- grisâtre,  rarement  anhydre  (mu- 
riacite),  se  trouve  par  couches  plus  ou  moins  épaisses  dans 
le  salzthon;  il  y  abonde  plus  que  dans  le  sel  gemme;  tou- 
jours son  volume  est  de  beaucoup  inférieur  à  celui  de  l'ar- 
gile. Quelquefois  le  gypse  est  mêlé  de  calcaire  fétide  et  de 
cristaux  de  chaux  carbonatée  magnésifère  (rauten-  ou  bit- 
terspath).  Lorsque  le  sel  ne  forme  pas  de  véritables  bancs 
ou  des  masses  cristallines  continues,  il  se  trouve  dans  l'argile 
comme  amas  entrelacé  (Stockwerk) ,  c'est-à-dire,  en  petits 
filons  qui  se  croisent,  se  renflent  et  se  traînent  dans  tous  les 
sens.  Ses  fibres  sont  perpendiculaires  au  mur  et  au  toit  des 
filons  (Berchtolsgaden).  D'autres  fois  le  sel  est  réparti  par 
couches  très-minces,  parallèles  entre  elles,  variées  de  cou- 
leur, sinueuses,  généralement  verticales  (Hallstadt  etHallein), 
rarement  inclinées  de  moins  de  oo"  (  Aussee).  Partout  où  le 
gypse  grenu  manque  entièrement  dans  le  salzthon,  on  le  trouve 
remplacé  par  des  cristaux  épars  de  gypse  spéculaire.  Toute 
cette  formation  salifère  renferme  quelquefois  disséminées 
des  pyrites ,  de  la  blende  brune  et  de  la  galène,  AZipaquira, 


IND  269 

dans  l'Aménque  méridionale  (mine  de  Rute) ,  les  pyrites  et 
la  chaux  carbonatce  ferrifère  forment  des  concrétions  par- 
ticulières en  sphéroïdes  aplatis,  de  18  à  20  pouces  de  dia- 
mètre :  ces  sphéroïdes  sont  empâtés  dans  le  salzthon ,  et  ont 
au  centre  des  creux  de  3  à  4  pouces,  remplis  de  fer  spathique 
cristallisé.  Je  n'ai  point  observé  ce  phénomène  singulier  dans 
les  mines  de  sel  gemme  d'Allemagne,  de  Pologne  et  d'Espagne  „ 
que  j'ai  visitées;  mais  la  fréquence  des  pyrites  dans  l'argile 
muriatifère  jette  quelque  jour  sur  l'odeur  d'hydrogène  sul- 
furé qu'exhalent  si  souvent  les  sources  salées.  La  galène  ne 
se  montre  qu'en  parcelles  dans  le  dépôt  salifère  de  Hall  en 
Tyrol  ;  mais  elle  s'est  développée  en  grandes  masses  dans  les 
montagnes  de  sel  gemme  (rouge-blanc  et  gris -noirâtre)  à 
travers  lesquelles  se  sont  frayé  un  chemin,  sur  une  distance 
de  deux  lieues,  le  Rio  Guallaga  et  le  Rio  Pilluana  (province 
péruvienne  de  Chachapoyas,  sur  la  pente  orientale  des  Andes). 

Les  dépôts  de  sel  dans  les  deux  continens  se  trouvent  gé- 
néralement à  découvert,  comme  les  formations  d'euphotide 
et  de  serpentine.  Quelquefois  ils  supportent  de  petites  cou- 
ches de  gypse  et  de  calcaire  fétide  qui  leur  appartiennent 
exclusivement.  11  n'est  par  conséquent  pas  facile  de  pro- 
noncer sur  l'âge  relatif  des  dépôts  muriatifères.  La  formation 
principale  (  Hauptsalzniederlage)  me  paroît  évidemment  ap- 
partenir au  zechsti^in  ou  calcaire  alpin;  mais  cette  assertion 
n'exclut  pas  la  probabilité  que  d'autres  formations  partielles 
se  trouvent  intercalées  aux  terrains  de  transition,  peut-être 
même  aux  terrains  tertiaires.  Les  houilles,  les  oolithes  et  les 
lignites  se  sont  aussi  développés  à  des  époques  très-différentes 
les  uns  des  autres  ;  et  cependant  les  gites  principaux  de  ces 
trois  substances  sont  lé  grès  rouge  ,  le  calcaire  du  Jura  et 
l'argile  plastique.  Pour  traiter  cet  objet  dans  sa  plus  grande 
généralité,  je  vais  indiquer  successivement,  d'après  1  état 
actuel  de  nos  connoissances,  les  diverses  formations  de  sel 
gemme  dans  le  calcaire  de  transition ,  dans  le  zechstein  et  le 
grès  bigarré  avec  argile. 

Le  gypse  anhydre  de  Bex  ,  qui  renferme  du  sel  gemme 
disséminé  et  de  petites  couches  subordonnées  de  grauwaoke  ^ 
appartient,  selon  les  observations  de  MM.  de  Buch  et  Char- 
pentier ,  au  calcaire  de  transition  ,  mais  probablement  aux 


270  IND 

dernières  couches  des  terrains  intermédiaires.  De  ce  même  âge 
paroissent  être  aussi  le  gypse  salifère  de  Colancolan  (à  l'est 
d'Ayavaca,  Andes  du  Pérou),  mêlé,  comme  le  calcaire  de 
transition  de  Drammen  (Norwége) ,  de  trémolithe  asbestoïde  ; 
les  petits  dépôts  de  S.  Maurice  (Arbonne  en  Savoie),  et, 
d'après  M.  Cordier,  la  montagne  desel  de  Cardona  en  Espagne. 
Le  gypse  anhydre  caractérise  particulièrement  ces  dépôts  sali- 
féres  du  terrain  de  transition.  Dans  l'Allemagne  méridionale, 
sur  les  bords  du  Necker  (Sulz  au-dessus  de  Hcilbronn  ;  Frie- 
drichshall ,  entre  Kochendorf  et  Jaxtfeld  ;  Wimpfen  ,  au- 
dessous  de  Heilbronn) ,  on  a  découvert  par  des  sondes  de 
245  et  de  760  pieds  de  profondeur,  du  sel  gemme  dans  le 
zechstein.  Les  beaux  travaux  de  MM.  Glenk  et  Langsdorf  ne 
laissent  pas  de  doute  à  ce  sujet.  A  Sulz  on  a  percé  successi- 
vement le  muschelkalk ,  la  formation  d'argile  et  de  grès  bi- 
garré,  un  zechstein  poreux,  mais  de  très-peu  d'épaisseur, 
et  le  grès  rouge  ,  reposant  sur  le  granité  de  la  Bergstrasse  et 
du  Schvvarzvvald.  A  Friedrichshall  et  à  Wimpfen,  d'après  les 
observations  judicieuses  de  M.  de  Schmitz,  les  couches  supé- 
rieures au  zechstein  manquent  entièrement ,  et  l'on  a  trouvé 
dans  celui-ci,  qui  est  gris-bleuàtre  et  que,  par  cette  raison, 
on  a  souvent  confondu  avec  le  calcaire  de  transition,  des 
couches  alternantes  de  sel  gemme,  d'argile  salifère,  et  de 
gypse  blanc  et  grisâtre.  Dans  le  grand -duché  de  Bade,  le 
dépôt  salifère  paroit  recouvert  (Heinsheim  près  Wimpfen, 
sur  le  Necker;  Stein ,  Muhlbach  et  Beyerthal,  dans  la  vallée 
du  Rhin;  Kandern,  dans  le  Schwarzwald)  des  mêmes  roches 
dont   on  a  reconnu  la  série  à  la  saline  de  Sulz. 

Je  crois  pouvoir  citer  encore  comme  une  preuve  bien  évi- 
dente du  gisement  de  la  grande  formation  de  sel  gemme  dans 
le  zechstein  ou  calcaire  alpin ,  la  partie  septentrionale  du 
plateau  de  Santa-Fé  de  Bogota,  où  la  mine  de  Zipaquira 
(Rute,  Chilco  etGuasal)  se  trouve  à  i58o  toises  d'élévation 
au-dessus  du  niveau  de  la  mer.  Ce  dépôt  salifère,  de  plus  de 
i3o  toises  d'épaisseur,  est  recouvert  de  grandes  masses  de 
gypse  grenu,  gypse  que  l'on  voit  intercalé,  sur  plusieurs 
points  très-voisins  de  la  mine ,  au  zechstein  supporté  par  le 
grès  rouge  ou  houiller.  11  n'y  a  que  sept  lieues  de  distance 
depuis  la  mine  de  charbon" de  terre  de  Canoas  et  la  mine 


IND  271 

de  sel  gemme  de  Zipaquira.  D'autres  dépôts  de  houilles 
(Suba,  Cerro  de  Tunjos)  sont  plus  rapprochés  encore,  et 
l'on  voit  le  grès  rouge,  qui  est  très-quarzeux,  sortir  immé- 
diatement  sous  l'argile  salifère   de  Zipaquira. 

Dans  le  Salzbourg,  en  Tyrol  et  en  Styrie ,  il  ne  m'est 
resté  jamais  aucun  doute,  depuis  les  premiers  temps  que  j'ai 
visité  ces  contrées ,  sur  la  liaison  intime  du  sel  gemme  avec 
le  zechstein.  Beaucoup  de  géognostes  célèbres  (MM.  de  Buch 
et  Buckland)  partagent  cette  opinion  :  mais  il  faut  convenir 
que,  partout  où  l'âge  du  calcaire  n'est  pas  suffisamment  ca- 
ractérisé par  la  présence  du  grès  houiller,  et  partout  où  le 
recouvrement  du  dépôt  salifère  par  des  couches  d'un  âge  connu 
n'est  pas  évident,  le  résultat  des  observations  ne  peut  offrir 
une  entière  conviction.  Dans  la  mine  de  Hall  près.d'Ins- 
pruck.  ,  on  voit  (galerie  de  Mitterberg)  le  dépôt  de  sel 
gemme  immédiatement  recouvert  par  la  formation  calcaire 
qui  constitue  la  chaîne  septentrionale  des  Alpes  du  Tyrol. 
Ce  calcaire  passe  du  blanc  grisâtre  au  gris  bleuâtre  ;  les 
nuances  plus  obscures  sont  souvent  fétides.  Il  est  générale- 
ment compacte,  quelquefois  un  peu  grenu  à  petits  grains,  et 
traversé  par  des  veines  de  spath  calcaire  blanc.  Ces  veines  sont 
considérées  par  quelques  géognostes,  et  peut-être  d'une  ma- 
nière trop  absolue,  comme  caractérisant  le  calcaire  de  tran- 
sition. La  roche  n'alterne  nulle  part  ni  avec  le  thonschicfcr 
intermédiaire,  ni  avec  le  grauwackc  :  elle  forme  (Wallersée) 
des  couches  sinueuses  et  arquées,  comme  le  calcaire  du  lac 
de  Lucerne.  M.  de  Buch  y  a  trouvé  fréquemment  des  pétri- 
fications de  turbinites  très-petites.  C'est  le  seul  endroit  en 
Europe  où  j'ai  vu  une  grande  formation  calcaire  recouvrir 
immédiatement  le  sel  gemme.  Je  la  crois  du  zechstein  ,  d'après 
des  analogies  de  position  et  de  structure  ;  je  l'ai  vue  passer 
quelquefois  (Schlossberg  près  Séefeld;  Scharnitz)  à  un  calcaire 
compacte  ayant  la  cassure  matte,  égale  ou  conchoïde,  à  cavités 
très-aplaties ,  semblable  au  calcaire  lithographique  de  la  for- 
mation du  Jura  (lias).  Les  poissons  pétrifiés  qu'on  rencontre 
entre  Séefeld  et  Schonitz  dans  une  marne  bitumineuse,  éloi- 
gnent encore  plus  le  calcaire  de  Hall  des  calcaires  de  transi- 
tion; cependant,  pour  le  caractériser  indubitablement  comme 
zechstein  ,  il  fuudroit  le  voir  reposer  sur  le  grès  rouge  (todt- 


373  IND 

liegende) ,  qui ,  d'après  les  observations  de  MM.  Uttînger  et 
Keferstein  ,  paroît  superposé  aux  roches  intermédiaires  entre 
le  Ratenberg  et  Hering,  comme  près  des  anciennes  mines 
de  Schwatz.  A  Hallstadt  (Tcirringcr  Berg)  et  à  Iscliel,  nous 
avons  vu,  M.  de  Buch  et  moi,  le  calcaire  alpin  analogue  à 
celui  de  Hall,  mais  avec  des  teintes  plus  claires,  souvent 
rougeàtres,  et  plus  abondant  en  pétrifications  ,  superposé  au 
gypse  qui  couAre  les  dépôts  de  sel  gemme.  Cette  superposi- 
tion est  moins  évidente  à  Hallein  (mine  du  Durrenberg)  et 
à  Berchtesgaden  :  le  gypse  qui  couvre  Targile  salifère ,  se 
cache  sous  une  poudingue  calcaire  (nagelfluhe)  du  terrain 
tertiaire.  Les  dépôts  de  Hallein  et  de  Berchtesgaden  m'ont 
paru  ,  comme  celui  de  Wieliczka  en  Pologne,  non  intercalés 
au  zechstein ,  mais  superposés  à  cette  formation.  Je  les  crois 
postérieurs  à  la  grande  formation  de  houille,-  mais  le  grés 
rouge  manque  dans  kur  voisinage,  et  le  calcaire  du  pays 
de  Salzbourg  est  immédiatement  superposé  (vallée  de  Ramsau) 
au  grauwacke.  M.  Buckland  regarde  les  calcaires  qui  cou- 
vrent l'argile  salifère  à  Hallstadt,  et  même  à  Bex,  comme 
appartenant  au  lias,  qui  est  l'assise  inférieure  du  Jura. 

Après  le  sel  gemme  des  gypses  anhydres  de  transition  et 
après  celui  du  zechstein  vient,  selon  l'âge  des  formations,  le 
sel  du  grès  bigarré,  ou,  comme  on  dit  plus  exactement,  du 
terrain  d'argile  et  de  grès  bigarré.  Ce  terrain  arénacé,  appelé 
par  les  géognostes  anglois  nouveau  grès  rouge  et  marne  rouge 
{new  red  sandstone  and  red  mari),  renferme  les  dépôts  de 
sel  (Northwich)  de  l'Angleterre:  il  en  renferme  aussi  en  Alle- 
magne, soit  près  de  Tiède  (entre  Wolfenbiittel  et  Brunswick), 
où  MM.  Haussmann  et  Schulze  ont  trouvé  de  petites  masses 
de  sel  disséminées  dans  l'argile  rouge  du  grès  bigarré  ooli- 
thique;  soit  à  Sulz  (royauiiie  de  AVurtemberg  ),  où,  avant 
d'avoir  atteint  les  sources  salées  dans  le  zechstein ,  on  a  ren- 
contré immédiatement  sous  le  muschelkalk,  à  460  pieds  de 
profondeur,  des  rognons  ou  nids  de  sel  dans  une  argile 
marneuse  (red  mari).  Cette  argile  recouvre  ,  dans  une 
épaisseur  de  210  pieds,  le  grès  bigarré  auquel  elle  appar- 
tient. Comme  tout  près  de  Sulz  (  àFriedrichshall  et  \\  im- 
pfen)  le  sel  gemme  alterne  avec  des  marnes  et  du  gypse  in- 
tercalés au   zechstein,  on  ne  peut  douter  de  l'aflinité  géo- 


IND  275 

g'nostique  qui  existe  entre  les  deux  formations  du  zechstein 
et  du  grès  bigarré.  Les  marnes  et  argiles  salifères  avec  gypse 
grenu  se  trouvent  placées  tantôt  entre  le  zecbstein  et  le  grès, 
tantôt  dans  l'une  et  l'autre  de  ces  formations.  C'est  aussi  au 
terrain  d'argile  et  de  grès  bigarrés  qu'appartiennent  et  le  sel 
gemme  de  Pampelune  en  Espagne,  examiné  par  M.  Dufour, 
et  le  riche  dépôt  découvert,  en  1819,  en  Lorraine  près  de 
Vie.  Ce  terrain  d'argile  bigarrée  de  Vie  renferme  de  petites 
couches  de  muschelkalk,  et  est  recouvert  à  son  tour  de  cal- 
caire jurassique.  L'influence  qu'une  connoissance  plus  appro- 
fondie du  gisement  des  roches  a  eue  dans  ces  derniers  temps 
sur  les  découvertes  du  sel  en  Souabe,  en  France  et  en  Suisse 
(Églisau,  canton  de  Zuric),  est  un  phénomène  bien  digne  de 
remarque. 

Je  doute  qu'on  ait  Jusqu'ici  des  preuves  bien  certaines  de- 
là présence  du  sel  gemme  dans  le  muschelkalk;  car  il  ne  faut 
pas,  comme  nous  le  verrons  bientôt,  déduire  ce  gisement  de 
la  seule  présence  des  sources  salées.  Le  muschelkalk,  dans 
ses  couches  inférieures,  alterne  avec  la  formation  d\irgile  et 
de  grès  bigarré  :  comme  il  renferme  aussi  quelquefois  (Sulz- 
bourg  près  Naumbourg)  des  marnes  avec  gypse  fibreux,  il 
ne  seroit  pas  bien  surprenant  que  l'on  y  découvrît  quelques 
dépôts  salifères.  Des  traces  de  ces  dépôts  ont  été  observés  , 
près  de  Kandern ,  dans  le  calcaire  jurassique. 

Existe -t-il  des  couches  de  sel  dans  les  terrains  tertiaires 
au-dessus  de  la  craie?  Plusieurs  phénomènes  géognostiques 
peuvent  le  faire  supposer  ;  et  l'on  devroit  presque  être  surpris 
que  les  dernières  irruptions  de  l'océan  dans  les  continens 
n'aient  pas  produit  sinon  des  couches  de  sel  gemme,  du  moins 
de  l'argile  salifère.  Cependant,  dans  l'état  actuel  de  nos  coa- 
noissances,  le  problème  que  nous  agitons  n'est  pas  suffisam- 
ment éclairci.  M.  Steffens  regarde  les  gypses  à  boracites  de 
Luiiebourg  et  de  Seegeberg  (Holsteiu)  comme  supérieurs 
à  la  craie.  Le  second  de  ces  gypses  contient  de  petites  masses 
de  sel  gemme  disséminées;  le  premier  donne  naissance  à  des 
sources  salées  très- riches  et  très-abondantes.  D'autres  géo- 
gnostes  croient  la  formation  gypseuse  à  boracites  beaucoup 
plus  ancienne  que  le  gypse  à  ossemens  du  terrain  tertiaire , 
et  presque  identique  avec  les  gypses  du  zechstein  et  du  grés 
;j3.  '  iS 


274  IND 

bigarré.  Les  immenses  dépôts  saliféres  de  Wicliczka  et  de 
Bochnia  ,  ceux  qui  s'étendent  depuis  la  Galicie  jusqu'à  la 
Bukowine  et  en  Moldavie,  paroissent  reposer  immédiate- 
inent  sur  le  grès  houiller,  renfermant  à  la  fois  (et  ce  fait  est 
assez  extraordinaire)  du  gypse  anhydre,  des  tellines,  des 
coquilles  uuivalves  cloisonnées,  des  fruits  à  l'état  charbon- 
neux ,  des  feuilles  et  des  lignites  ;  ces  dépôts  ne  sont  recou- 
verts que  de  sables  et  de  grcs  micacés.  M.  Beudant,  dans 
son  important  ouvrage  sur  la  Hongrie,  semble  pencher  vers 
l'opinion  que  ces  sables  et  ces  grès  sont  analogues  à  la  mo- 
lasse d'Argovie ,  et  que  toutes  les  formations  saliféres  avec 
lignites  de  la  Galicie  pourroient  bien  être  contemporaines 
avec  Targile  plastique  (grès  à  lignites)  du  terrain  tertiaire, 
placée  entre  la  craie  et  le  calcaire  grossier  de  Paris  (cal- 
caire à  cérites).  Ces  bois  bitumineux  de  Wieliczka,  exha- 
lant l'odeur  de  truffes,  méritent  sans  doute  beaucoup  d'at- 
tention ;  et  si  Ton  veut  admettre  qu'ils  ne  se  sont  mêlés 
qu'accidentellement  au  sel  gemme  et  qu'ils  sont  venus  des 
couches  sablonneuses  superposées,  il  faut  encore  eji  con- 
clure que  le  sel  gemme  et  les  sables  sont  d'une  origine  très- 
rapprochée.  Mais  la  présence  des  lignites  est-elle  une  preuve 
bien  convaincante  de  la  grande  nouveauté  d'une  couche?  J'en 
doute.  Nous  savons  que  des  lignites  et  des  empreintes  de 
feuilles  dicotylédones  se  trouvent  bien  au-dessous  de  la  craie, 
et  dans  les  couches  inférieures  du  calcaire  du  Jura  (calcaire 
à  gryphées  arquées  ;  Le  Vay,  Issigny,  prcsdeCaen),  et  dans 
le  quadersandstein ,  et  dans  les  petites  couches  charbon- 
neuses et  marneuses  (  lettenkohle)  du  muschelkalk,  et  dans 
le  giès  big.irré  de  l'Allemagne ,  auquel  appartiennent  aussi 
les  schistes  argentifères  du  Frankenberg  (Hesse).  11  faut  dis- 
tinguer avec  soin  les  bois  siliceux  et  pétrifiés  des  vrais  lignites 
ou  bois  bitumineux  (braunkohle);  et  si  l'on  ne  reconnoit 
que  bien  rarement  ceux-ci  dans  les  argiles  du  grès  bigarré, 
on  les  trouve  bien  moins  encore  dans  le  zechstein ,  dont  les 
marnes  cuivreuses  renfermeut  seulement  des  fruits  pétrifiés. 
Dans  la  Toscane  on  voit  les  sources  salées  du  Volterrannois 
sourdre,  d'après  M.  Brongniart,  de  couches  marneuses  qui 
alternent  avec  du  gypse  grenu  ( albâtre  j  et  qui  sont  immé- 
diatement recouverl«s  d'un  terrain  tertiaire.    Quoiqu'il   pu- 


IND  376 

roisse  presque  impossible  de  prononcer  sur  l'âge  des  formations 
non  recouvertes ,  plusieurs  rapports  de  giseinens  que  j'ai  eu  occa- 
sion d'observer  dans  le  nouveau  continent,  me  rendent  pro- 
bable l'existence  des  dépôts  de  sel  dans  le  terrain  tertiaire.  Je 
ne  citerai  pas  les  montagnes  de  sel  gemme  dans  les  vastes  plaines 
au  nord-est  du  Nouveau -Mexique  ,  que  M.  Jcfferson  a  fait 
connoitre  le  premier,  et  qui  paroissent  liées  au  grès  houillerj 
mais  d'autres  dépôts  très-problématiques,  savoir,  les  argiles 
salifères  superposées  à  des  conglomérats  trachy tiques  de  la 
Villa  d'Ibarra  (plateau  de  Quito,  à  1 1  go  toises  de  hauteur), 
les  énormes  masses  de  sel  exploitées  à  la  surface  de  la  terre 
(  déserts  du  Bas-Pérou  et  du  Chili  )  dans  les  steppes  de  Buenos- 
Ayres  et  dans  les  plaines  arides  de  l'Afrique,  de  la  Perse  et 
de  la  Transoxane.  Près  de  Huaura  (entre  Lima  et  Santa  ,  sur 
les  côtes  de  la  mer  du  Sud)  j'ai  vu  le  porphyre  trachytique 
percer  les  couches  du  sel  gemme  le  plus  pur.  L'argile  muria- 
tifére  d'Araya  (golfe  deCariaco),  mêlée  de  gypse  lenticulaire  , 
paroit  placée  enivi;:  le  calcaire  alpin  de  Cumanacoa  ,  et  le 
calcaire  tertiaire  du  Barigon  et  de  Cumana.  Sur  tous  ces 
points  le  sel  est  accompagné  de  pétrole  et  d'asphalte  en- 
durci. 

En  comparant  les  dépôts  de  sel  gemme  d'Angleterre  (à 
5o  toises),  de  Wieliczka  (  160  t.  ),  deBex  (220  t.) ,  deBerch- 
tolsgaden  (55ot.),  d'Aussce  (460  t.),  d'ischel  (/,g6  t.),  de 
Hallein  (620  t.),  de  Hallstadt  (660  t.),  d'Arbonne  en 
Savoie  (760  t.  p)  et  de  Hall  en  Tyrol  (800  t.),  M.  de  Buck 
a  judicieusement  observé  que  la  richesse  des  dépôts  diminue 
en  Europe  avec  la  hauteur  au-dessus  du  niveau  de  l'océan. 
Dans  les  Cordillères  de  la  Nouvelle  -  Grenade  ,  à  ZIpaquira, 
d'immenses  couches  de  sel  gemme,  non  interrompues  pai' 
dePargile,  se  trouvent  jusqu'à  1400  toises  d'élévation,  il  n'y 
a  que  la  mine  de  Huaura,  sur  les  côtes  du  Pérou,  qui  m'aii 
paru  encore  plus  riche  :  j'y  ai  vu  exploiter  le  sel  en  dales  , 
comme  dans  une  carrière  de  marbre. 

En  Thuringe,  un  des  pays  dans  lesquels  on  a  reconnu,  le 
premier,  la  succession  et  l'âge  relatif  des  roches,  on  a  cru 
long-temps  que  les  sources  salées  sont  plus  fréquentes  dans 
le  gypse  grenu  du  zcchstein  que  dans  le  gypse  fibreux  et  ar- 
gileux du  grès  bigarré ,  et  on  a  regardé  le  premier  comme 


27^  IND 

exclusivement  salifère.  Les  cavernes  naturelles  du  gypse  infé- 
rieur (salzgyps  et  schlottengyps)  ont  même  été  considérées 
comme  des  cavités  jadis  remplies  de  sel  gemme.  En  hasar- 
dant ces  hypothèses,  fondées  sur  un  trop  petit  nombre  d'ob- 
servations, Ton  a  oublié  que  les  dépôts  de  sel  sont  beaucoup 
moins  caractérisés  par  le  gypse  grenu  que  par  une  argile 
(salzthon)  très-analogue  à  l'argile  du  gypse  supérieur  ou 
iibreux.  Les  sources  salées  ,  ou  jaillissent  réunies  par  groupes, 
ou  se  succèdent  par  bandes  (traînées)  sinueuses  et  diverse- 
ment alignées.  La  direction  de  ces  fleuves  souterrains  paroit 
indépendante  des  inégalités  de  la  surface  du  sol.  Telle  est 
la  circulation  des  eaux  dans  l'intérieur  du  globe,  que  les 
plus  salées  peuvent  souvent  être  les  plus  éloignées  du  lieu 
oh  elles  dissolvent  le  sel  gemme.  Un  haut  degré  de  salure 
ne  prouve  pas  plus  la  proximité  de  cette  cause ,  que  la 
violence  des  tremblemens  de  terre  ne  prouve  la  proximité 
du  feu  volcanique.  Les  sources  s'engoufrent  tantôt  dans  des 
couches  inférieures  ;  tantôt  ,  par  des  pressions  hydrostati- 
ques, elles  remontent  vers  les  couches  supérieures.  Ce  n'est 
pas  leur  position  seule  qui  peut  nous  éclairer  sur  le  gisement 
des  dépôts  salifères.  Nous  conncissons  des  sources  salées  ,  en 
Allemagne,  dans  le  grauwacke  schisteux  du  terrain  de  tran- 
sition (  VVerdohl  en  \\'estphalie)  ;  dans  le  porphyre  du  grès 
rouge  (  Creuznach  )  :  dans  le  grès  rouge  même  (  Neusalz- 
brunnen  piès  Waldenburg)  ;  dans  le  gypse  du  zechstein 
(  Friedrichshall  près  Heilbronn  ;  AVimpfen  sur  le  Necker  ; 
Durrenberg?  en  Thuringe)  ;  dans  la  formation  d'argile  et 
de  grès  bigarré  (Dax,  en  France  ;  Schônebeck,  Stasfurth  ,  Salz 
der  Helfien,  en  Allemagne) ,  et  dans  le  muschelkalk  (Halle? 
en  Saxe;  Siildorf,  Harzburg).  On  peut  ajouter  à  cette  énu- 
mération  le  calcaire  du  Jura  (Butz,  dans  le  Frickthal),  et 
peut-être  la  molasse  (grès  tertiaire  à  lignites)  de  Suisse 
(Eglisau;  essais  de  sonde  de  M.  Glenck).  Dans  la  recherche 
du  sel  gemme  il  ne  faut  pas  confondre  de  véritables  dépôts 
avec  ces  petites  masses  que  des  sources  très-salées  peuvent 
avoir  déposées  accidentellement,  par  évaporation  ,  sur  les 
fentes  des  rochers. 

Gjp&€  et  calcaire  fétide.  Des  formations  de  gypse  postérieur 
au  gypse  de  transition  (§.  20)  se  montrent  dans  toutes  les  for- 


IND  277 

mations  calcaires  au-dessus  du  grès  rouge,  dans  le  zechstein , 
dans  le  grès  rouge  même  ,  dans  le  musckelkalk  (très-rarement), 
dans  le  calcaire  du  Jura  et  dans  le  terrain  tertiaire.  Le  gypse 
(untcrer  gyps ,  schlottengyps  de  Werner)  qui  appartient  au 
zechstein ,  se  trouve  moins  en  couches  très-étendues  qu'en  amas 
irréguliers;  souvent  (Thuringe)  il  est  superposé  au  zechstein 
et  recouvert  par  le  grès  bigarré.  Il  est  compacte  ou  grenu,  et 
alterne  avec  le  calcaire  fétide  (stinkstein),  tandis  que  le  gypse 
du  grès  bigarré  (obérer  gyps,  thongyps  de  Werner)  est  plutôt 
fibreux  et  mêlé  d'argile.  Ces  caractères  de  structure  et  de 
mélange  ne  sont  cependant  pas  généraux.  Nous  avons  rappelé 
plus  haut  que,  dans  les  gypses  salifères  du  zechstein,  Tar- 
gile  (salzthon)  prend  un  développement  extraordinaire.  D'un 
autre  côté,  le  gypse  fibreux  et  argileux  du  grès  bigarré  offre 
aussi  quelquefois  des  masses  grenues  (albâtre  de  Reinbeck, 
en  Saxe),  des  brèches  de  calcaire  fétide,  et  des  cavités 
spacieuses  (gypsschlotten)  :  trois  phénomènes  qui  caractéri- 
sent plus  généralement  le  gypse  du  zechstein. 

Tous  ces  phénomènes  prouvent  l'intimité  des  rapports  qui 
lient  les  deux  grandes  formations  salifères,  le  calcaire  alpin 
et  le  grès  bigarré  avec  argile.  Sous  la  zone  équinoxiale  du 
nouveau  continent  j'ai  vu  de  fi'équens  exemples  de  couches 
de  gypse  intercalées  ou  superposées  au  zechstein  :  dans  les 
LIanos  de  Venezuela  (Orliz,  MesadePaja,  Cachipo);  dans  la 
province  de  Quito  (plateau  de  Cuença  près  Money  et  entre 
Chulcay  et  Nabon  )  ;  dans  le  plateau  de  Bogota  (Tunjuellos, 
Chccua  ,  et  à  plus  de  1600  toises  de  hauteur  au-dessus  du 
niveau  de  la  mer,  à  Cucunuva)  ;  dans  les  plaines  de  l'Ama- 
zone (Quebrada  turbia  près  Tomependa)  ;  au  Mexique,  entre 
Chilpansingo  et  Cuernavaca  (près  de  Sochipala),  et  dans  les 
montagnes  métallifères  deTasco  et  de  ïehuilotepec. 

Les  couches  de  calcaire  fétide  sont  ou  subordonnées  au 
gypse  et  à  l'argile  muriatifère  que  renferme  le  zechstein  ^ 
ou  elles  se  présentent  comme  le  résultat  d'une  accumula- 
tion accidentelle  de  bitume  dans  la  roche  du  zechstein  même. 
Cette  accumulation  donne  lieu  à  des  sources  de  goudron 
minéral ,  et  peut-être  aussi  à  ces  feux  d'hydrogène  qui  sor- 
tent du  calcaire  alpin,  en  Europe,  dans  les  Apennins 
(Pietr^  Mala,  Barigazzo)  ;  en  Amérique,  dans  les  montagnes 


^78  IjND 

de  Cumanacoa  (Cuchivano,  lat.  lo"  C).  Le  calcaire  fétide 
se  trouve  aussi,  mais  beaucotip  plus  rarement,  dans  le  grès 
bigarré  et  dans  le  muschelkalk  (couclies  à  béicmnitcs  de 
Gœftinguep).  La  cendre  {asclie)  et  le  rauhkalk  des  mineurs 
de  Thuringe  ne  sont  que  des  variétés  pulvérulentes  ou  cris- 
tallines et  poreuses  du  calcaire  fétide  appartenant  au  zech- 
stein.  Comme  le  calcaire  fétide  est  en  Europe  constamment 
dépourvu  de  pétrifications ,  je  rappellerai  ici  que  dans  les 
plaines  de  la  INouvelle- Grenade  (vallée  du  Rio  Magdalena, 
entre  Morales  et  l'embouchure  du  Cafio  Morocojo),  M. 
Bonpland  a  trouvé,  dans  une  variété  de  cette  même  roche, 
qui  étoit  noir-grisàtre ,  un  peu  brillante  à  l'extérieur,  forte- 
ment bitumineuse  et  traversée  de  veines  de  spath  calcaire 
blanc,  des  térébratulites  et  des  pectinites. 

Calcaire  magnésifère.  11  faut  distinguer,  en  géognosie,  entre 
les  couches  intercalées  au  ?echstein  (gypse,  sel  gemme,  sul- 
fure de  plomb),  dont  la  composition  chimique  diffère  entiè- 
rement de  celle  de  la  roche  principale,  et  les  modifications  par- 
tielles de  cette  même  roche.  Les  modifications  qui  aifectent 
la  structure  (le  grain  plus  ou  moins  cristallin,  la  forme 
oolithique,  la  porosité)  et  le  mélange  (calcaire  magnésifère, 
calcaire  ferrifère),  sont  moins  importantes  qu'on  ne  pour- 
Toit  le  supposer  au  premier  abord.  On  en  trouve  des  analo- 
gies dans  des  formations  d'un  âge  très-différent  :  elles  carac- 
térisent certains  terrains  dans  des  cantons  de  peu  d'étendue; 
mais,  lorsqu'on  compare  des  réglons  très  -  éloignées ,  on  voit 
qu'elles  ne  les  caractérisent  pas  même  autant  que  les  couches 
intercalées  qui  sont  chimiquement  hétérogènes.  En  Angle- 
terre, la  grande  masse  de  calcaire  magnésifère  (magnesian 
limestone,  red-land-limestone  de  M.  Smith),  souvent  pétrie 
de  madrépores  (  Mendiphills  près  Bristol)  et  liée  à  une  brèche 
calcaire  ou  à  des  couches  celluîeuses  (Yorckshire)  sem- 
blables au  rauchvvacke,  est  sans  doute  parallèle  au  ?.ech- 
stein;  elle  est  placée  entre  les  formations  de  houille  et  de  sel 
gemme  :  cependant,  en  Angleterre,  comme  dans  quelques 
parties  du  continent,  d'après  les  recherches  de  MM.  Buck- 
Jand  ,  Brongniart,  Beudant,  Conybeare,  Grccnough  et  Phi- 
lipps,  le  mélange  de  magnésie  et  de  chaux  carbonatée , 
dont    Arduin   a   reconnu    l'existence    dans   le  Vicentin    dès 


IND  .-^79 

Tannée  17(30,  se  rencontre  également  dans  le  grès  bigarré 
avec  argile  (  red-marl),  dans  le  calcaire  oolithique  du  Jura, 
dans  la  craie  et  dans  le  calcaire  grossier  (parisien)  du 
terrain  tertiaire.  Peut-être  même  qu'en  Hongrie  et  dans 
une  partie  de  l'Allemagne  les  calcaires  magnésifères  appar- 
tiennent plutôt  au  grès  bigarré  et  aux  formations  oolithi- 
ques  du  Jura  qu'aux  zechstein.  Ces  roches  sont  en  général 
jaune  de  paille  (de  Sunderland  à  Nottingham  )  ou  blanc- 
rougeàtre,  tantôt  compactes,  tantôt  un  peu  grenues,  nacrées 
et  brillantes  dans  la  cassure  ;  quelquefois  on  les  trouve 
celluleuses  et  traversées  par  des  veines  de  spath  calcaire. 
Elles  font  une  effervescence  lente  avec  les  acides,  et,  comme 
la  véritable  dolomie  des  terrains  primitifs,  elles  ne  forment 
souvent  que  de  minces  couches  dans  un  calcaire  non  magné- 
sifère.  Si,  dans  le  magncsian  limestone  et  dans  le  red-marl 
avec  sel  gemme  ,  deux  formations  placées  entre  le  dépôt 
houiller  et  le  dépôt  oolithique  ,  on  reconnoit  en  Angle- 
terre le  zechstein  et  le  grès  bigarré  du  continent,  il  ne 
faut  pas  oublier  qu'en  Allemagne  et  en  Hongrie  le  zech- 
stein est  lié  au  grès  rouge  ou  grès  houiller,  tandis  qu'en 
Angleterre  le  dépôt  de  houille  se  trouve  généralement  en 
gisement  discordant  avec  le  magnesian  limestone,  et  qu'il  y 
appartient  presque  encore  au  terrain  de  transition.  Les  trois 
grands  dépôts  de  houille,  de  5e/.  et  (Voolithes ,  qui  servent, 
pour  ainsi  dire,  de  repaires  au  géognoste,  lorsqu'il  essaie 
de  s'orienter  dans  un  pays  inconnu,  sont  partout  placés  de 
même  ;  mais  l'enchaînement  mutuel  des  formations  et  le 
degré  de  leur  développement  varient  selon  les  localités. 
Lorsqu'en  Angleterre,  par  la  suppression  du  nouveau  conglo- 
mérat rouge  (  todtes  liegende),  le  calcaire  magnésifère  (zech- 
stein) repose  immédiatement  sur  le  dépôt  de  houilles  (Dur- 
ham,  Northumberland) ,  la  houille  est  regardée  comme  d'une 
qualité  inférieure. 

Calcaire  ferrif ère ,  raucnwacle  et  calcaire  à  grjpliites.  Le  cal- 
caire ferrifère  (  eisenkalk ,  zuchtwand)  est  une  roche  bru- 
nâtre ou  jaune -Isabelle ,  tantôt  compacte,  tantôt  grenue  et 
caverneuse,  pénétrée  de  fer  spathique,  formant  des  couches 
dans  l'assise  supérieure  du  zechstein  (Cammsdorf,  Schmal- 
italden,  Henneberg).    EUle  est  quelquefois  traversée  par  les 


.80  INt) 

schistes  cuivreux ,  et  prend  un  tel  développement  qu'elle  rem- 
place toutes  les  assises  inférieures  du  zechsfein.  Lorsqu'elle 
devient  gris-noirâtre,  chargée  de  hilume  et  caverneuse  ,  on 
lui  donne  en  Allemagne  le  nom  de  rauclm'acke.  Les  cavités 
du  rauchwacke  sont  anguleuses,  longues  et  étroites,  tapis- 
sées de  cristaux  de  carbonate  de  chaux.  Cette  petite  forma- 
lion  partielle ,  que  M.  Karsten  ,  dans  sa  Classification  des 
Tioches ,  avoit  confondue  avec  la  partie  caverneuse  et  spon- 
gieuse du  calcaire  du  Jura,  est  quelquefois  magnésifère , 
imparfaitement  oolithique  (Cresfeld),  et  mtlée  de  quarz 
grenu.  La  pierre  fétide,  le  calcaire  i'errifère  et  le  rauch- 
wacke sont  intimement  liés  entre  eux.  C'est  au  rauchwacke 
aussi  qu'appartient  en  grande  partie  cet  amas  de  gryphites 
(G.  aculeatus)  que  l'on  appelle  calcaire  à  grjpliées  épineuses 
f gryphitenkalk),  qui  caractérise  le  zechstein  et  qui  (comme 
jious  le  verrons  plus  bas)  forme  une  couche  plus  ancienne 
que  le  calcaire  à  pyphées  arquées,  qui  est  une  des  assises  infé- 
rieures du  calcaire  du  Jura. 

Grès.  Partout  oîj  le  zechstein  ou  calcaire  alpin  s'est  déve- 
loppé seul  en  grandes  masses,  et  n'est  par  conséquent  pas 
Sntercalé  au  grès  rouge  ,  les  couches  de  grés  sont  très- rares. 
J'en  ai  reconnu  cependant  quelques-unes  dans  les  montagnes 
de  Cumana  (Impossible,  Tumiriquiri).  Ce  grès  intercalé  au 
y.echstein  est  extrêmement  quarzeux  ,  dépourvu  de  pétrifica- 
, lions,  et  alterne  avec  des  argiles  brun -noirâtre.  M.  de  Buch 
a  observé  un  phénomène  entièrement  analogue  en  Suisse, 
dans  le  calcaire  alpin  du  Molesson  et  dans  celui  du  Jaunthal 
près  de  Fribourg.  Dans  les  Cordillères  du  Pérou,  près  de 
Huancavelica ,  à  plus  de  2000  toises  d'élévation  au-dessus 
du  niveau  de  l'océan  (mine  de  Santa-Barbara),  une  immense 
couche  de  grès  aussi  quarzeux  qvie  le  grès  de  Fontainebleau , 
et  renfermant  un  dépôt  de  mercure,  forme  une  couche  dans 
le  calcaire  alpin.  Môme  le  zechstein  de  Thuringe  offre  quel- 
quefois de  petites  couches  de  grès,  extrêmement  quarzeuses , 
qui  traversent  le  schiste  cuivreux.  Une  marne  arénacée 
(weissliegende)  se  trouve  sur  les  limites  du  zechstein  et  du 
grès  rouge.  Elle  varie  beaucoup  dans  sa  composition  ,  et 
rappelle  les  bancs  de  grès  du  Tumiriquiri  dans  l'Amérique 
méridionale.  Le  weissliegende  de  Thuringe  est  généralement 


IND  281 

calcarîfère,  et  renrerme  des  grès  et  des  conglomérats  siliceux. 
M.  Freiesleben  y  a  trouvé  (Helbra)  des  concrétions  globu- 
leuses semblables  à  celles  que  j'ai  recueillies  dans  Targile 
salilere  du  zechstein  de  Zipaquira.  Nous  rappellerons,  à  cette 
occasion,  que  le  calcaire  alpin  des  Pyrénées  n'est  pas  seule- 
ment mêlé  de  sable  et  de  mica,  mais  qu'il  renferme  aussi  des 
bancs  de  grès  argileux. 

Plomb  sulfuré,  fer  hydraté,  calamine,  mercure.  Ces  quatre 
petites  formations  métalliques  caractérisent  le  zechstein  dans 
les  deux  hémisphères.  La  galène  argentifère  commence  déjà 
à  se  montrer  en  petites  masses  dans  le  schiste  cuivreux  de  la 
Thuringe:  mais,  en  Silésie  et  en  Pologne,  elle  forme  (Tarno- 
^vitz,  Bobro\vnik,  Sacrau ,  Olkusz,  Slawkow)  des  couches 
très-étendues  dans  le  zechstein,  par  conséquent  au-dessus  du 
riche  dépôt  de  houille  de  Ratibor  et  de  Bcuthen.  Dans  ces 
mômes  contrées  les  couches  de  fer  hydraté  (Radzionkau)  et 
de  calamine  (Piekary),  parallèles  entre  elles,  sont  d'une  ori- 
gine plus  récente  que  la  couche  de  fer  sulfuré  argentifère 
de  Tarnowitz.  Déjà  dans  le  calcaire  grenu  et  dépourvu  de 
coquilles,  qui  couvre  cette  dernière  couche,  on  trouve  dis- 
séminé dans  des  cavités  alongées  de  petites  masses  de  fer 
brun  et  de  zinc  oxidé  concrétionné.  Près  d"llefeld  au  Harz 
fout  le  zechstein  est  imprégné  de  celle  dernière  substance. 
Quant  aux  couches  de  galène  et  de  calamine  du  Sauer- 
land,  de  Brilon ,  d'Aix- la- chapelle  et  de  Limbourg ,  elles 
semblent,  d'après  les  discussions  judicieuses  de  MM.  de  Rau- 
mer  et  Nœggerath  ,  malgré  leur  analogie  apparente  avec  les 
formations  de  la  Haute -Silésie,  appartenir  aux  terrains  de 
transition  les  plus  récens.  On  diroit  que  dans  les  deux 
continens  il  existe  une  affinité  géognostique  (ou  de  gise- 
ment) bien  remarquable  entre  les  roches  calcaires  et  le 
plomb  sulfuré  plus  ou  moins  argentifère  :  nous  voyons  ce 
dernier  eh  Europe  dans  le  calcaire  intermédiaire  (  tiions  de 
Schwatz  en  Tyrol ,  et  du  mountain-limestone  de  Northum- 
berland  ,  de  Yorck  et  du  Derbyshire),  et  dans  le  calcaire 
alpin  (couches  de  la  Haute-Silésie  et  delà  Pologne;  magnesian 
limcstone  deDurham).  Sur  le  plateau  de  la  NouvePe-Espagne 
les  minerais  de  plomb  du  district  de  Zimapan  (Real  del  Cardo- 
nal ,  Lomo  del  Toro),  de  même  que  celles  de  Liïïarès  et  du 


282  IND 

Nouveau-Saint-Ander,  appartiennent  aussi  à  des  calcaires  qui 
sont  mêlés  de  pierre  fétide  et  qui  succèdent  immédiatement 
à  la  formation  houillère. 

La  calamine  se  rencontre  dans  le  calcaire  magncsifère  de 
l'Angleterre  (Mendiphills)  comme  dans  le  zechstein  de  la 
Haule-Silésie.  Quant  aux  couches  argileuses  de  fer  hydraté  . 
elles  onVe.il,  dans  le  calcaire  alpin  des  Andes  du  Pérou, 
un  caractère  particulier;  elles  sont  intimement  mêlées  d'ar- 
gent natif  filiforme  et  de  muriate  d'argent.  Ce  mélange  de 
fer  oxidé  et  d'argent,  que  nous  avons  fait  connoitre,  M. 
Klaproth  et  moi ,  est  connu  sous  le  nom  de  pacos  :  il  se  trouve 
dans  la  partie  équinoxiale  des  deux  Amériques,  remplissant 
la  partie  supérieure  des  filons ,  et  présente  dans  cette  posi- 
tion une  analogie  bien  remarquable  avec  les  masses  terreuses 
et  ochracées  (non  argentifères)  que  les  mineurs  de  l'Europe 
désignent  vulgaireuient  par  le  nom  de  chapeau  de  fer  des 
filons  (eiserne  Hut).  Le  plus  riche  exemple  que  je  connoisse 
d'une  couche  de  pacos  dans  le  calcaire  alpin,  est  le  dépôt  de 
la  montagne  de  Yauricocha  (  Cerro  de  13ombon,  Cordillère 
péruvienne  de  Fasco),  situé  à  plus  de  1800  toises  de  hauteur 
absolue.  Quoique  les  exploitations  de  ce  gite  de  fer  oxidé, 
qui  abonde  en  argent,  n'aient  généralement  atteint  jusqu'ici 
que  la  profondeur  de  i5  à  20  toises,  elles  ont  fourni,  dans  les 
dernières  vingt  années  du  dix-huitième  siècle,  plus  de  cinq 
millions  de  marcs  d'îirgent.  Aux  yP"x  f^»  géognos(e  expéri- 
menté ce  gîte  remarquable  n'est  qu'un  développement  par- 
ticulier des  couches  de  fer  hydraté  que  présente  le  zechstein 
de  la  Haute -Silcsic,  et  qui  passent  quelquefois  (Pilatus  et 
Wallensée  en  Suisse)  au  fer  lenticulaire. 

La  présence  simultanée  du  mercure  dans  le  grès  houiller 
et  dans  le  calcaire  alpin  ajoute  aux  rapports  que  nous  avons 
indiqués  entre  ces  deux  formations.  En  Carniole  (Idria),  le 
minerai  de  mercure  se  trouve,  d'après  MM.  Héron  de  Ville- 
fosse  et  Bonnard  ,  dans  un  schiste  marneux  semblable  aux 
marnes  cuivreuses  du  Mansfeld.  Au  Pérou  ,  près  de  Huan- 
cavelica ,  le  cinabre  est  en  partie  disséminé  dans  le  grès  ex- 
trêmement quarzeux  qui  forme  une  couche  (Pertinencias  del 
Brocal ,  de  Comedio  et  de  Cochapafa  ,  mine  de  Santa-Barbara  ) 
dans  le  calcaire  alpin;   en  partie  il  remplit  des  filons  (mon- 


IND  =83 

tagne  de  Sillacasa)  qui  se  réunissent  en  amas   et   {raversent 
immédiatement  le  calcaire  alpin. 

Après  avoir  nommé  cette  grande  variété  de  véritables 
couches  que  renferme  la  formation  dont  nous  tâchons  de  faire 
connoifre  les  rapports  de  gisement,  de  structure  et  de  com- 
position, il  me  reste  à  indiquer  les  substances  qui  s'y  trou- 
A'ent  simplement  disséminées.  Je  me  bornerai  à  nommer  le 
silex,    le   cristal   de   roche  et  le  soufre. 

Le  silex  commun  (hornstein),  très-rare  dans  le  zechstein 
des  plaines  (Thuringe),  caractérise  ce  même  terrain  dans  la 
région  alpine  des  Pyrénées,  de  la  Suisse  (Mont  Bovon,  la 
Rossinière) ,  du  Salzbourg  et  de  la  Styrie  (  au-dessus  deHall- 
stadt  ;  Potschenberg;  Goisernj;  il  passe  souvent  au  jaspe  et 
au  silex  pyromaque  (feuerstein).  En  Europe,  le  silex  du 
calcaire  alpin  ne  se  trouve  que  par  rognons  ou  par  nodules 
souvent  disposés  sur  une  même  ligne;  mais,  dans  les  Cor- 
dillères du  Pérou  ,  au  milieu  des  riches  mines  d'argent  de 
Chota  (près  de  Micuipampa  ,  lat.  austr.  6°  43'  3S"),  le 
silex  forme  une  couche  d'une  épaisseur  prodigieuse.  La 
montagne  de  Gualgayoc,  qui  s'élève  comme  un  chàfeau  fort 
sur  un  plateau  de  i8oo  toises  de  hauteur,  en  est  entière- 
ment composée.  Le  sommet  de  cette  montagne  est  terminé 
par  une  innombrable  quantité  de  petits  rochers  pointus  , 
ayant  chacun  de  larges  ouvertures  que  le  peuple  appelle 
fenêtres  (venlanillas).  Le  silex  (panizo)  de  Gualgayoc  est  un 
hornstein  écailleux,  blanc-grisàtre ,  à  cassure  matie,  souvent 
unie,  intimement  mêlé  de  fer  sulfuré.  11  passe  tantôt  au 
quarz,  tantôt  à  la  pierre  à  fusil.  Dans  le  premier  cas  il  est 
celluleux ,  à  cavités  irrégulières,  tapissées  de  cristaux  de 
quarz.  De  grandes  masses  de  ce  panizo,  dans  lequel  des  filons 
d'argent  gris  et  rouge  et  des  filons  de  fermagnétique  forment 
des  amas  entrelacés  d'une  richesse  extraordinaire,  ressemblent 
au  calcaire  siliceux  du  terrain  tertiaire  de  Paris  ;  mais  on  voit 
clairement,  dans  plusieurs  de  ces  mines  (Choropampa,  à  l'est 
du  Purgatorio  près  du  ravin  de  Cliiquera),  que  ce  iiornstein 
métallifère  est  une  couche  de  forme  irrégulière,  inlercalée 
au  zechstein  ou  calcaire  alpin.  Il  enchâsse  de  grandis  mt-sses 
calcaires,  et  alterne  quelquefois  (Socabon  de  Espinachl) 
avec  cette  même  argile  brun-noii'àtre  et  schisteuse  que  l'on 


284  J^D 

trouve  dans  le  calcaire  alpin  de  Montan .  et  qui  rend  les 
filons  entièrement  sîériles.  Le  liornstein  est  dépourvu  des 
coquilles  qui  abondent  o'ans  la  roche  principale  et  qui  rem- 
plissent même  quelquefois  les  filons.  Une  énorme  masse  de 
matière  siliceuse,  qu'on  trouve  comme  fondue  au  milieu  d'un 
calcaire  secondaire,  à  couches  arquées  et  renfermant  des 
ammonites  de  8  —  lo  pouces  de  diamètre,  est  sans  doute 
un  phénomène  géognostique  bien  remarquable.  Existe-t-il 
(environs  de  Florence)  des  rognons  de  silex  corné  dans  les 
calcaires  de  transition  ?  De  quel  âge  sont  les  calcédoines 
et  les  jaspes  disséminés  dans  les  Monti  Madoni  de  Sicile? 

Le  calcaire  alpin  de  Cumanacoa  (Amérique  méridionale) 
renferme,  comme  celui  de  Grosbrner  (Thuringe),  des  cristaux 
de  roche  disséminés.  Ces  cristaux  ne  se  trouvent  pas  dans 
des  cavités,  mais  enchâssés  dans  la  roche  ,  comme  le  feldspath 
Test  dans  le  porphyre  ,  et  comme  le  cristal  de  roche  ou  le  bo- 
racite  le  sont  dans  des  gypses  modernes. 

Le  soufre  natif,  que  nous  avons  déjà  vu  dans  le  quarz 
grenu  du  terrain  primitif  et  dans  le  gypse  de  transition 
(Sublin  près  de  Bex),  reparoît  dans  le  calcaire  alpin  (Py- 
rénées ,  près  d'Orthès  et  près  de  la  forge  de  Bielsa  ;  Sicile  , 
Val  de  Noto  et  Mazzara),  et  dans  le  gypse  feuilleté  (Nou- 
velle-Espagne, Pateje  près  Tecosautla  )  qui  appartient  à 
cette  dernière  formation.  Cependant  la  majeure  partie  du 
soufre  dont  abondent  les  régions  équinoxiales  de  l'Amérique , 
se  rencontre  dans  les  trachytes  porphyriques  et  dans  les  ar- 
giles du  terrain  pyrogène. 

Les  opérations  de  Bouguer  et  de  La  Condaminc  ayant  été 
faites  dans  une  portion  des  Andes  où  dominent  les  forma- 
tions de  trachytes,  il  s'est  répandu  en  Europe,  parmi  beau- 
coup de  fausses  idées  sur  la  structure  des  Cordillères,  celle 
de  l'absence  des  coquilles  et  des  formations  calcaires  dans 
la  région  équinoxiale.  Encore  vers  la  fin  du  dix- huitième 
siècle.  l'Académie  des  sciences  invita  M.  de  La  Peyrouse 
{Voyage,  T.  I,  p.  169)  de  rechei'cher,  «s'il  est  vrai  que 
«  près  de  la  ligne,  ou  plus  que  l'on  s'en  approche,  les  mon- 
«  tagnes  calcaires  s'abaissent  jusqu'à  n'être  plus  qu'au  niveau 
«  de  la  mer.  ^^  Dans  des  ouvrages  plus  récens  (Greenough, 
Crit.  examination  of  Geologj ,  p.  18b)  on  révoque  en    doute 


IND  285 

/'existence  des  ammonites  et  des  bélemnifes  dans  l'Amérique 
du  Sud.  En  faisant  connoître  la  superposition  des  roches 
en  différentes  parties  du  nouveau  continent,  j'ai  in^liqué  à 
quelle  hauteur  prodigieuse  s'élèvent  les  couches  coquilliéres 
de  zeclistein  dans  les  Cordillères  du  Pérou  et  de  la  Nouvelle- 
Grenade.  11  ne  faut  pas  croire  (]ue  les  grandes  révolutions 
qui  ont  enseveli  les  animaux  pélagiques,  se  soient  bornées  à 
tel   ou  tel  climat. 

Dans  les  régions  les  plus  éloignées  les  unes  des  antres  nous 
trouvons,  dans  la  formation  du  ztclistein  ou  calcaire  alpin, 
des  gryphitcs  (G.  aculeata),  des  entroqucs  (formant  d'après 
l'observation  curieuse  de  M.  de  ii uch ,  dans  beaucoup  de 
parties  de  l'Allemagne,  une  couche  distincte  sur  la  limite 
du  calcaire  alpin  et  du  grès  houiller)  ;  des  térébratulites 
(T.  alatus,  T.  lacunosus ,  T.  higonellus)  ;  des  pentacrinites 
d'une  grande  longueur;  un  trilobite  du  schiste  cuivreux, 
qui,  génériquement ,  n'est  peut-être  point  encore  siiflisam- 
ment  examiné  (I".  bituminosus  )  ;  des  ammonites  (plus  rares 
que  dans  le  muschelkalk  et  dans  les  marnes  du  calcaire 
du  Jura);  quelques  orthocératites;  des  poissons  qui  avoient 
déjà  fixé  fattention  des  anciens  (  Aristot.  ,  Mirab.  auscultât., 
éd.  Beckmanniana  ,  cj^;  Livius ,  lib.  42,  c.  1);  des  ossemens 
de  monitor,  peut-être  même  (Tocayma  et  Cumanacoa  dans 
l'Amérique  méridionale)  de  crocodiles;  des  empreintes  de 
lycopodiacées  et  de  bambusacées;  point  de  vraies  fouf'ères 
mais,  ce  qui  est  très-remarquable  (marnes  bitumineuses  de 
Mansfeld),  des  feuilles  de  plantes  dicotylédones  analogues  aux 
feuilles  du  saule.  On  observe  que  les  coquilles  du  calcaire 
alpin  [Ammonites  ammonius ,  A.  amaUheus,  A.  liircinus,  Naulilites 
ovatus,  Pectinites  lextorius ,  Pectinites  salinarius ,  Crjphites  c^i^as , 
G.  aculeatus,  G.  arcuatus ,  Mjtulites  rostratus)  sont  moins  dissé- 
minées dans  la  masse  entière  de  la  roche,  comme  c'est  le  cas 
dans  les  deux  formations  du  muschelkalk  et  du  calcaire  du 
Jura ,  qu'accumulées  sur  certains  points ,  et  souvent  à  de 
grandes  hauteurs.  Sur  des  étendues  de  pays  très-considéra- 
bles, le  calcaire  alpin  paroît  quelquefois  dépourvu  de  dé- 
bris organiques. 

Nous  avons  indiqué  dans  les  pages  précédentes  les  forma- 
tions de  l'Amérique  équinoxiale  qui  appartiennent  au  zech- 


286  IND 

stein.  Ce  sont,  dans  la  chaîne  du  littoral  de  Caracas,  lej 
calcaires  de  Punta  Delgrada,  de  Cumanacoa  et  du  Cocollar, 
renfermant,  non  du  grauwacke,  mais  du  grès  quarzcux  et 
des  marnes  carburées;  dans  la  Nouvelle-Grenade,  le  calcaire 
deTocayma  et  du  plateau  de  Bogota,  supportant  le  sel  gemme 
de  Zipaquira;  dans  les  Andes  de  Quito  et  du  Pérou,  les  cal- 
caires de  la  province  de  Jaen  de  Bracomoros,  de  Montan  et 
de  Micuipampa,  placés  sur  le  grès  houiller  et  enchâssant 
d'énormes  masses  de  silex  ;  dans  la  Nouvelle-Espagne  ,  les 
calcaires  du  Peregrino,  deSopilote  etdeTasco,  entre  Mexico 
et  Acapulco.  Plusieurs  de  ces  masses  calcaires  d'une  énorme 
épaisseur,  et  supportant  des  formations  de  gypse  et  de  grès, 
sont  superposées,  non  au  grès  houiller,  mais  à  des  porphyres 
de  transition  très -métallifères  et  liés,  du  moins  en  appa- 
rence, sur  quelques  points,  à  un  terrain  décidément  tra- 
chytique.  On  observe  ,  dans  le  nouveau  continent  comme 
dans  l'ancien,  que,  là  où  le  calcaire  alpin  a  pris  un  grand 
développement,  le  grès  houiller  manque  presque  entière- 
ment, et  vice  versa.  Cet  antagonisme  dans  le  développement 
de  deux  formations  voisines  m'a  frappé  surtout  à  Guaxanuato 
(plateau  central  du  Mexique)  et  à  Cuença  (plateau  central 
de  Quito),  où  abondent  les  grès  houillers  :  il  m'a  frappé 
dans  les  Cordillères  de  Montan  (Pérou)  et  à  Tasco  (Nouvelle- 
Espagne)  ,  où  abonde  le  calcaire  alpin.  Quand  le  grès  houiller, 
nous  le  répétons  ici,  n'est  point  visible  ou  qu'il  ne  s'est  pas 
développé,  les  limites  entre  le  calcaire  alpin  et  le  calcaire 
de  transition  sont  très-difliciles  à  tracer.  En  excluant  du  ter- 
rain secondaire  tous  les  calcaires  bleu -grisâtre  traversés  par 
àes  veines  de  spath  calcaire  blanc  et  par  des  couches  d'argile 
et  de  marnes,  les  formations  de  Cumanacoa,  de  Tasco  et  de 
Montan  (Venezuela,  Pérou  et  Mexique),  comme  celles  des 
Alpes  les  plus  septentrionales  du  Tyrol  et  du  Salzbourg ,  de- 
vieiidroient  des  formations  de  transition.  J'incline  à  croire 
que  les  formations  que  nous  venons  de  nommer,  de  même 
que  celles  du  Mole,  du  Haacken  et  du  Pilatus,  sont  les  plus 
anciennes  couches  du  zechstein,  qui  se  lient  au  calcaire  de 
transition  de  la  Dent  de  Midi,  de  POldenhorn  et  de  l'Ortcler. 
Beaucoup  de  roches  se  succèdent  par  un  développement  pro- 
gressif,   et  il  paroit  tout  naturel  que  les   dernières  assises 


IND  ^87 

d'une  formation  plus  ancienne  offrent  une  grande  analogie 
de  structure  avec  les  premières  assises  de  la  formation  su- 
perposée. 

On  a  récemment  voulu  placer  parmi  les  couches  interca- 
lées au  zechstein  ou  calcaire  alpin  des  griinstein  et  des  do- 
lérites,  que  nous  connoissons  déjà  connue  subordonnées  au 
grès  houiller  dans  plusieurs  parties  de  l'Europe  ;  on  a  même 
indiqué,  comme  superposé  aux  calcaires  alpin  et  jurassique, 
des  syénites,  des  porphyr(.T>  et  des  r^ratùtei  secondaires.  Ce 
sont  là  les  roches  de  la  partie  sud-est  du  Tyrol  (vallées  de 
Lavis  et  de  Fassa  ;  Recoaro  )  sur  lesquelles  le  comte  Marzari- 
Pencati  a  publié  de  si  curieuses  observations.  Le  gisement 
de  ces  substances  étant  encore  un  point  de  géologie  très- 
contesté,  je  dois  me  borner  ici  à  présenter  It^s  données  du 
problème  et  l'état  d'une  question  si  digne  de  l'attention  des 
géognostes. 

Déjà  M.  de  Buch  avoit  remarqué,  en  1798,  qu'entre  Per- 
gine  et Trento  (Lago  di  Colombo,  Monte-Corno)  le  porphyre 
de  transition  (ou  plutôt  celui  du  grès  rouge?)  alterne  avec 
le  calcaire  alpin  du  terrain  secondaire.  Ce  calcaire  est  rempli 
d'ammonites  et  de  térébratulites.  L'alternance  est  évidente, 
et  les  porphyres,  si  communs  partout  ailleurs  dans  le  grès 
houiller,  débordent  ici  dans  le  calcaire  alpin  ,  de  même  que 
sur  le  revers  oriental  des  Andes  du  Pérou  (  Chamaya)  j'ai  vu 
déborder  dans  cette  même  formation  la  roche  de  quarz 
compacte  qui  représente  le  grès  houiller.  C'est  une  pénétration 
du  terrain  inférieur  dans  un  terrain  superposé:  phénomène 
qui  peut  d'autant  moins  nous  surprendre,  qu'en  Silésie,  en 
Hongrie  et  dans  plusieurs  parties  de  l'Amérique  équinoxiale 
le  grès  rouge  ou  grès  houiller  est  intimement  lié  au  zechstein. 
Les  porphyres  du  Tyrol  méridional  s'élèvent  (montagne  de 
Forna)  jusqu'à  i5oo  toises  de  hauteur.  (  Buch,  Geogn.  Beob, , 
T.  I,p.  3o3,  309,  5i5,  3i6.)  M.  de  Marzari,  dont  les  recher- 
ches ont  commencé  en  1806,  croit  avoir  vu  se  succéder  de  bas 
en  haut ,  dans  les  environs  de  Recoaro  ,  du  micaschiste  ,  de  la 
dolérite  (remplissant  en  même  temps  les  filons  qui  traversent 
le  micaschiste,  et  renfermant  du  pyroxène  et  du  fer  titane)} 
du  grès  rouge  avec  houille  et  marnes  bitumineuses;  du  zech- 
stein ,  dont  les  couches   inférieures  sont  un   calcaire  à  gry- 


288  IND 

phites;  une   iormation   de    porphyres  syénitiques    avec   des 
airijgdaloïdcs  intercalées.  Dans  la  vallée  de  Lavis  (Avisio)  , 
M.  de iNIarzari  indique  ,  toujours  de  bas  en  haut,  du  grauwacke , 
du  porphyre,   du  grés  rouge,  du  calcaire  alpin,  du  calcaire 
du  Jura,  du  granité  et  des  masses  noires  pyroxéjiiques  dé- 
pourvues  d'olivines.    D'après    Tintéressant    mémoire    publié 
par  M.  Breislak,  le  granité  secondaire  placé  sur  le  calcaire 
alpin  est  entièrement  semblable  au  plus  beau  granité  d'Egypte  : 
il  renferme   (  Canzacoli   délie    coste ,   Pedrazzo  )    de  grandes 
massfs  de  quarz  avec  tourmaline  ■  il  rend  grenu  à  son  contact 
(à  plusieurs  toises  de  profondeur)  le  calcaire  qui  le  supporte, 
et  passe  tantôt  à  une  roche  pjroxénique,  tantôt  à  un  porphyre 
à  base  feldspathique  noire,  tantôt  à  la  serpentine.  (Marzari  , 
Cenni  geologici,   1819,   p.  46  j    Id.  ,   JSuevo    osser^atore    Vene- 
ziano,   it)20,  n."   ii3    et    127  ;    Breislak,    Sulla  giacitura  délie 
rocce  porjîritiche  e  granitose  del  Tirolo  ,    1821,  p.  22,  25,   52; 
]\îarzari ,    Lettera  al  signor  Cordier ,    1822,  p.  5;  Maraschini , 
Obs.  géogn.  sur  le  Vicentin  ,    1822,  p.   17.)  Entre  la  Piave  et 
l'Adige   un  mandelstein  agathifère ,    qui   rappelle   ceux    du 
grès  rouge,  surmonte  le  calcaire  alpin  :    c'est,  dit-on,  une 
formation  parallèle    aux   couches  du  granité  secojidaire.  Un 
excellent  géognoste,    M.  Brocchi ,    qui  a  publié  dès  Tannée 
1811   un  mémoire  sur  la  vallée  de  Passa,  n'a  pas  seulement 
vu  des  griinstein  en  partie  pyroxéniques  couvrir  des  calcaires 
qu'il  croit  de  transition,  mais  qui  passent  dans  leurs  couches 
supérieures  au  calcaire  alpin  avec  silex;  il  a  reconnu  aussi  ces 
gr.insteiu   pyroxéniques  comme  alternant  avec  les  calcaires 
(M.iignon,  Fedaja  ).  Récemment  M.    de  Marzari    a  annoncé 
avoir  vu.fGrigno  de  la  Piave,    Cimadasta)  le  granité  et  le 
mandelstein  agathifère  surmonter  le  terrain  de  craie,  et  sç 
ranger  parmi  les  roches    tertiaires. 

Je  consigne  ici  des  faits  de  gisement  bien  extraordinaires, 
et  sur  lesquels  sans  doute  M.  de  Buch  ,  qui  a  visité  récemment 
la  vijilée  de  passa  ,  va  répandre  un  nouveau  jour.  Les  rapports 
de  gisement  de  ces  contrées  paroissent  très-compliqués.  La 
roche  dans  laquelle  les  griinsfein  et  les  dolérites  se  trouvent 
intercalés,  est-elle  bien  certainement  du  zechstein,  ou  appar- 
tient-elle au  terrain  de  transition?  Ces  griinstein  et  ces  dolé- 
rites se  trouvent-ils  en  couches  ou  en  filons?  Les  roches  feld- 


IND  2B9 

spàthiques  grenues  (appelées  syénites  et  granités  à  trois  élé- 
mens)  sont-elles  oryctognostiqueinent  analogues  aux  roches 
homonymes  de  Christiania  ,  ou  sont-elles  des  trachytcs  ?  En 
admettant  que  la  superposition  des  roches  ait  été  observée  avec 
précision  ,  et  que  les  divers  terrains  aient  été  bien  nommés ,  on 
verroit  se  répéter  ici,  dans  des  formations  secondaires,  les  phé- 
nomènes que  MM.  de  Buch  et  Haussmann  ont  fait  connoître  les 
premiers  dans  la  série  des  formations  intermédiaires.  L'alter- 
nance de  roches  sédimentaires,  arénacées  et  cristallines, 
continueroit ,  comme  par  séries  périodiques,  jusque  vers  les 
terrains  les  plus  modernes.  Nous  savions  déjà,  par  les  belles 
observations  de  MM.  Mac-Culloch  et  Boue,  qu'en  Ecosse  et 
dans  plusieurs  parties  du  continent  des  roches  grenues,  por- 
phyriques,  syénitiques  et  pyroxéniques ,  pénètrent  du  terrain 
de  transition  dans  le  grès  houiller.  Le  calcaire  alpin  est  im- 
médiatement superposé  à  la  formation  de  porphyre  et  de 
grès  rouge  ;  il  est  géognostiquement  lié  avec  cette  formation. 
D'après  ces  données  il  ne  seroit  pas  très  -  surprenant ,  ce 
me  semble ,  de  voir  intercalé  au  calcaire  alpin  ces  mêmes 
couches  cristallines  (amphiboliques  et  feldspathiques  )  que 
l'on  a  déjà  reconnues  dans  le  grés  houiller.  La  géognosie  po- 
sitive doit  offrir  un  enchaînement  de  faits  bien  observés  et 
judicieusement  comparés  entre  eux.  Elle  n'enseigne  pas  que 
la  répétition  de  certains  types  cristallins  s'arrête  nécessaire- 
ment au  grès  houiller.  Les  observations  de  M.  de  Marzari  ne 
renverseront  par  conséquent  aucune  loi  géognostique.  Si 
elles  sont  confirmées  par  des  recherches  ultérieures,  elles 
agrandiront  plutôt  nos  vues  sur  ce  phénomène  curieux  d'a/- 
tcTnanot  dans  des  formations  les  plus  éloignées  les  unes  des 
autres.  Comme  des  filons  remplis  de  griinstein ,  de  syénites 
et  de  masses  pyroxéniques,  traversent,  dans  plusieurs  par- 
ties des  deux  continens ,  les  granités  primitifs,  les  thonschiefer, 
les  porphyres  de  transition,  les  calcaires  secondaires  et  même 
les  formations  supérieures  à  la  craie  ,  plusieurs  géognostes 
célèbres  ont  soupçonné  que  les  roches  problématiques  des 
rives  de  l'Avisio  (Lavis)  pourroient  bien  être  deé  masses 
volcaniques,  des  coulées  de  laves  venues  d'en- bas  (de  l'in- 
térieur de  la  terre)  par  des  crevasses.  Ce  soupçon  paroît 
fortifié  par  l'analogie  des  roches  cristallines ,  que  l'on  assure 
20.  19 


ago  IND 

Être  indifféremment  superposées  à  des  formations  d'un  âg€ 
très-  différent  f  au  calcaire  alpin  ,  au  calcaire  du  Jura  et  à  la 
craie):  mais  les  grandes  masses  de  quarz  qui  entrent  dans  la 
composition  des  roches  appelées  par  MM.  de  Marzari  et 
Breislak  granités  secondaires  ,  semblent  éloigner  ces  roches 
problématiques  des  productions  modernes  des  volcans.  Il  faut 
espérer  que  des  observations  souvent  répétées  sur  les  lieux 
vont  bientôt  lever  tous  ces  doutes.  L'incrédulité  dé  laigneuse 
est  aussi  funeste  aux  sciences  qu'une  trop  grande  facilité  à 
adopter  des  faits  incomplètement  observés.  II  faudra  surtout 
distinguer  entre  des  masses  (  trachytiquesP  )  qui  se  sont  ré- 
pandues sur  des  formations  secondaires  et  qui  seulement  leur 
sont  superposées  ,  et  des  masses  (amphibolique»,  pyroxéni- 
ques,  syénitiques)  qui  pourroient  leur  être  intercalées.  Cette 
différence  de  gisement  seule  peut  être  l'objet  d'une  observa- 
tion directe  ;  le  problème  de  l'origine  des  couches  cristal- 
lines superposées  ou  intercalées  appartient  à  la  géogonie. 
Beaucoup  de  roches  très- anciennes  ne  sont  peut-être  aussi 
que  des  nappes  de  matières  fondues;  et  les  questions  géogo- 
niques  auxquelles  donnent  lieu  les  roches  de  Passa  ,  peuvent 
en  partie  s'appliquer  aux  porphyres  et  aux  griinstein  pyroxé- 
mques  intercalés  au  grès  houiller.  Il  faut  décrire  dans  chaque 
formation  ce  qu'elle  renferme  et  ce  qui  la  caractérise.  La 
géognosie  positive  s'arrête  à  la  connoissance  des  gisemens. 

III.  Dépôts  arénacés  et   calcaires    (marneux  et  oolithiques) 

PLACÉS    entre    le   ZECHSTEIN    ET    LA    CRAIE  ,     ET    LIÉS   A    CES    DEUX 

terrains. 

En  remontant  depuis  le  terrain  de  transition  par  les  roches 
secondaires  au  terrain  tertiaire ,  le  phénomène  de  Y  aller' 
nance  entre  des  couches  calcaires  et  arénacées  devient  de 
plus  en  plus  frappant.  On  voit  alterner  d'abord  des  calcaires  ' 
intermédiaires  blancs  et  cristallins  'Tarantaise),  ou  compactes 
et  carbures,  avec  des  grauwackes  ;  puis  se  succèdent  le  grès 
rouge,  le  calcaire  alpin  ou  zechstein,  le  grès  bigarré  (red 
mari),  le  muschelkalk  (calcaire  de  Gœttingue)  ,  le  quader- 
sandstein  (  grès  de  Konigstein  ) ,  le  calcaire  du  Jura  (  formation 
oolithique),  le  grès  vert  ou  grès  secondaire  à  lignltes  (green 
sand),  la  craie  ,  le  grès  tertiaire  à  lignites  (argile  plastique)  . 


IND  .9. 

le  calcaire  parisien,  etc.  Je  rappelle  ici  six  alternances  de 
douze  formations  intermédiaires ,  secondaires  et  tertiaires 
(arénacées  et  calcaires),  d'après  leur  ancienneté  relative, 
comme  si,  dans  un  seul  point  de  la  terre,  ces  roches  s'étoient 
toutes  simultanément  développées.  Par  la  suppression  fré- 
quente de  quelques-unes  d'elles,  surtout  du  grès  bigarré,  du 
muschelkalk  et  du  quadersandstein ,  le  calcaire  (oolithique) 
du  Jura  repose  parfois  immédiatement  sur  le  calcaire  alpin 
(Andes  du  Mexique  et  du  Pérou,  Pyrénées,  Apennins). 

Les  dépôts  que  nous  réunissons  dans  cette  troisième  grande 
division  (§§.  29  —  53),  forment  à  peu  près  tout  le  terrain  de 
sédiment  moyen  de  M.  Brongniart.  J'ai  craint  d'employer  les 
dénominations  qui  ont  rapport  à  des  limites  si  différemment 
tracées  par  les  géognostes  modernes.  M.  Conybeare,  dans  l'ex- 
cellent ouvrage  qu'il  a  récemment  publié  avec  M.  Philipps 
sur  la  Géologie  de  l'Angleterre,  distingue  les  terrains  en  sur- 
moyens,  moyens  et  sousmoyens  {supermedial,  medial  et  sub- 
medial).  Tant  de  divisions  systématiques  ajoutent  peut-être 
à  la  difficulté  qu'offre  déjà  la  synonymie  des  roches. 

Argile  et  Grès  bicarré  (Grès  a  oolithes  ;    Grès   de  Nebra  ; 

New  RED  SANDSTONE   ET  ReD  MARl)   AVEC   GYPSE  ET  SEL  GEMME. 

§.  29.  Le  grès  de  Nebra  ou  grès  bigarré  (Thuiûnge)  et  le 
red  mari  de  PAngleterre  (depuis  les  rives  du  Tees  en  Dur- 
ham  jusqu'aux  côtes  méridionales  du  Devonshire)  ne  sont 
pas  seulement  des  formations  parallèles,  c'est-à-dire,  du  même 
âge  et  occupant  la  même  place  dans  la  série  des  roches  :  ce 
sont  des  formations  identiques.  Le  premier  ,  assez  pauvre  en 
pétrifications  [Strombites  speciosits  ,  Pectinites  fragilis  ,  Mjytu- 
lites  recens,  Grjphites  spiratus ,  Schl.),  est  un  terrain  composé 
de  trois  séries  de  couches  alternantes;  savoir  :  1.°  d'argiles; 
2°  de  grès  micacés  et  schisteux,  av«c  masses  de  glaise  à  formes 
aplaties  et  lenticulaires  (thongallen)  ;  3.°  d'oolithcs  générale- 
ment brun-rougeàtres.  On  trouve  dans  le  grès  bigarré  du 
continent,  en  bancs  subordonnés,  du  gypse  (thongyps),  quel- 
quefois lamelleux  ,  le  plus  souvent  fibreux,  et  dépourvu  de 
calcaire  fétide.  Nous  avons  vu  plus  haut  qu'en  Allemagne 
et  en  France  un  grand  nombre  de  sources  salées  coulent  sur 
ces  bancs  d'argile  et  de  gypse,  et  qu'ùThiede,  entre  'V^'^Qlfen-' 


292  IND 

biittel  et  Brunswic  ,  comme  à  Sulz  prés  Heilbroiiu,  de  petites 
masses  de  sel  gemme  sont  disséminées  dans  cette  formation  , 
qui,  à  Sulz  ,  a  été  atteinte  par  la  sonde  après  le  muschelkalk 
et  avant  le  zechstein.  Le  red  mari  (red  ground ,  red  rock, 
red  ford),  si  bien  examiné  par  MM.  Winch  et  Grcenough  , 
dépourvu  de  pétrifications  et  de  bancs  d'oolithes,  et  coupé 
par  des  fissures  en  masses  rhomboïdales,  est  en  Angleterre  le 
véritable  gîte  du  sel  gemme  :  il  se  compose  dans  ses  assises 
supérieures  d'argiles  marneuses,  de  gypse  (albâtre)  et  de  sel 
(Witton  près  Northwich  ;  Droitwich);  dans  ses  assises  infé- 
rieures ,  soit  de  conglomérats  avec  galets  de  roches  primitives 
et  de  transition,  soit  de  grès  à  petits  grains  (entre  Exeter  et 
Exminster).  Le  sel  gemme  d'Angleterre,  de  Lorraine  et  du 
Wurtemberg,  lie  la  formation  de  grés  et  d'argiles  bigarrés, 
vers  le  bas,  au  zechstein  et  au  calcaire  alpin  ;  vers  le  haut, 
dans  le  nord  de  l'Allemagne  ,  cette  formation  passe  au  mu- 
schelkalk, dont  les  couches  les  plus  anciennes  sont  un  peu 
arénacées.  On  pourroit  dire  aussi  que  les  oolithes  du  grès  bi- 
garré (Eisleben,  Endeborn  ,  Briindel)  et  ses  marnes  préludent 
à  la  formation  du  Jura:  mais  ces  oolithes  brun-rougeàfres 
se  perdent  insensiblement  en  une  roche  arénacée;  elles  diffè- 
rent essentiellement  des  oolithes  blanches  et  blanc- jaunâtres 
du  calcaire  du  Jura.  Sur  le  continent,  le  grès  bigarré  est  très- 
distinct  du  zechstein  ,  malgré  les  traces  de  sel  qui  le  lient  à 
cette  dernière  formation:  en  Angleterre,  le  red  mari,  le 
calcaire  magnésien  et  les  conglomérats  d'Exeter  et  de  ïeign- 
7nouth  (Devonshire),  qui,  sous  le  nom  de  nouveau  conglomérat 
rouge,  représentent  le  grès  houiller  du  Mansfeld ,  sont  aussi 
intimement  liés  entre  eux  que  le  sont  les  dépôts  de  houille 
avec  les  roches  de  transition  (mountain  limestone  et  old  red 
sandstone). 

En  décrivant  plus  haut  le  grès  rouge  de  la  Nouvelle-Gre- 
nade, }'ai  discuté  les  nuances  de  composition  et  de  struc- 
ture qui  distinguent  cette  formation  houillère  du  grès  bi- 
garré (buntesandstein) ,  par  rapport  aux  couches  intercalées 
de  sables,  d'argiles  schisteuses  et  de  conglomérats  à  gros 
grains.  Ces  conglomérats,  qui  caractérisent  les  assises  infé- 
rieures du  red  mari,  se  retrouvent  dans  la  chaîne  des  Vosges. 
Les  strates  supérieurs  du  grès  bigarré  sont  verts  ;  on  les  croit 


IND  2^93 

colorés  par  le  nickel  et  le  chrome.  Ils  sont  quelquefois  mêlés 
de  petites  lames  de  baryte  sulfatée  (Mariaspring  près  Goet- 
tingue). 

Couches  subordonnées  :  i .°  Gypse  argileux  un  peu  chlo- 
riteux ,  avec  des  aragonites  (Bastène  près  de  Dax) ,  avec  des 
cristaux  de  roche  incolores  (Langensalze,  "Wimmelburg) ,  ou 
rouges  (Dax),  et  avec  du  soufre,  disséminés  (entre  Gnolbzig 
et  Naundorf  )  ;  ce  gypse  a  été  regardé  jadis  comme  une  for- 
mation particulière  placée  entre  le  grès  bigarré  et  le  muschel- 
kalk  (Cresfeld  et  Helbra  en  Saxe,  Dblau  en  Franconie,  Neu- 
land  près  Lowenberg  en  Silésie;  Amajaque  au  Mexique):  2.° 
calcaires  en  lits  minces,  tantôt  marneux,  tantôt  magnésifères: 
3."  argile  imprégnée  de  goudron  minéral  (Kleinscheppenstedt 
près  Brunswic  )  :  4.°  sables  (triebsand  )  avec  de  grands  chamites 
et  du  bois  pétrifié  (Burgbrner)  :  5."  grès  extrêmement  quarzeux, 
presque  sans  ciment  visible,  très-caractéristique  tant  pour  le 
grès  bigarré  que  pour  Targile  plastique  qui  environne  les  cou- 
lées de  basaltes  :  G.°  mine  de  fer  brune  souvent  en  géodes  :  7.° 
traces  de  houilles,  peut-êîre  même  de  lignites,  qu'il  ne  faut 
point  confondre  avec  les  dépôts  analogues  du  quadersandstein 
et  des  grès  secondaires  et"  tertiaires  à  lignites  (au-dessous  et 
au-dessus  de  la  craie).  On  assure  avoir  trouvé  des  branches 
d'arbre  charbonisées  dans  les  argiles  avec  gypse  d'Oberwie- 
derstedt  en  Thuringe  ;  aussi  les  schistes  argentifères  de  Fran- 
kenberg  (Hesse  j,  qui  ne  sont  que  des  phytolithes  charbonisés, 
enduits  et  pénétrés  de  métaux,  paroissent  à  plusieurs  géo- 
gnostes  appartenir  au  grès  bigarré.  M.  Boue,  dont  les  obli- 
geantes communications  ont  si  souvent  enrichi  mes  tra^'aux, 
observe  que  le  grès  bigarré  existe  par  lambeaux  dans  le  sud- 
ouest  de  la  France  :  il  y  est  représenté  par  des  marnes  et 
des  gypses  fibreux  ou  compactes  (Cognac,  S.  Froult  près 
Rochefort),  et  quelquefois  immédiatement  recouvert  de 
calcaire  jurassique  et  de  craie  grossière.  Au  pied  des  Pyrénées, 
entre  S.  Giron  et  Rimont ,  le  grès  bigarré  a  pris  un  dévelop- 
pement considérable.  Comme  dans  la  partie  des  Andes  que 
j'ai  parcourue,  les  formations  du  terrain  secondaire,  c'est- 
à-dire,  celles  qui  sont  supérieures  au  calcaire  alpin,  ne  se 
sont  presque  pas  développées,  je  ne  crois  avoir  bien  reconnu 
le  grès  bigarré  que  dans  les  points  suivans. 


294  IND 

Au  Mexique,  en  descendant  des  montagnes  composées  de 
porphyres  intermédiaires  et  éminemment  métallifères  (  Real 
del  Monte  et  de  Moran  )  vers  les  bains  chauds  de  Tolonilco 
el  Grande  ,  on  trouve  une  formation  puissante  de  calcaire 
gris  -  bleuâtre ,  presque  dépourvue  de  coquilles,  générale^ 
ment  compacte,  mais  enchâssant  des  couches  très- blanches 
et  grenues  à  gros  grains.  Ce  calcaire ,  célèbre  par  ses  cavernes 
(Danto  ou  la  Montagne  percée),  et  rempli  de  filons  de 
plomb  sulfuré,  me  paroît  un  terrain  de  transition.  Il  est 
couvert  d'une  autre  formation  ,  gris-blanchâtre  et  entière- 
ment compacte,  qui  ressemble  au  zechstein.  Sur  cette  der- 
nière repose  le  grès  argileux  (bunte  sandstein),  dont  les 
assises  supérieures  sont  (près  d'Amajaque)  des  argiles  avec 
gypse  feuilleté.  Je  pense  que  le  grès  enchâssant  des  masses 
aplaties  d'argile  (  thongallen),  près  de  La  Veracruz,  et  renfer- 
mant (Acazonica)  un  beau  gypse  feuilleté,  appartient  aussi, 
comme  le  gypse  d'Amajaque,  au  grès  bigarré.  Peut-être  cette 
formation  de  Veracruz  fait-elle  le  tour  des  côtes  orientales, 
et  se  lie-t-elle  aux  dépôts  calcaires  de  Nu evo- Léon,  riche 
en  galènes  foiblement  argentifères. 

Dans  les  Llanos  ou  steppes  de  Venezuela,  les  gypses  argileux 
(Cachipo,  Ortiz)  sont  certainement  postérieurs  au  grès  houil- 
ler;  mais,  si  le  calcaire  qui  les  sépare  (entre  Tisnao  et  Cala- 
iozo),  loin  d'être  du  zechstein,  est,  comme  sa  cassure  unie 
et  son  aspect  de  calcaire  lithographique  sembleroient  l'indi- 
quer, de  formation  jurassique,  ces  g>pses  des  Llanos  seroient 
plus  modernes  encore  que  ceux  du  grès  bigarré.  A  Guire 
(côtes  orientales  de  Cumana)  ,  un  gypse  blanc  et  grenu 
(jurassique?)  contient  de  grandes  masses  de  soufre.  Les  argiles 
salifèrcs  mêlées  de  gypses  et  de  pétrole  de  la  péninsule  d'Araya , 
vis-à-vis  i'ile  de  la  Marguerite,  sont  placées  entre  le  zech- 
stein et  un  terrain  tertiaire.  Comme  des  gypses  sont  renfer- 
més dans  ce  dernier  terrain  (colline  du  château  S.  Antoine, 
à  Cumana  ;  plaines  entre  Turbaco  et  Carthagène  des  Indes), 
on  pourroit  croire  que  les  argiles  salifères  d'Ara) a  sont  aussi 
beaucoup  plus  récentes  que  le  red  mari  ou  grès  bigarré.  Mais 
je  n'ose  prononcer  avec  certitude  sur  l'âge  de  ces  forma- 
tions, dans  l'absence  de  tant  de  roches  que  Ton  trouve 
placées  ailleurs  entre  le  zechstein  et   les   terraiiis  tertiaires. 


IND  295 

Les  gypses  que  j'ai  examinés  dans  l'intérieur  de  la  ISouvelle- 
Grenade  (plateau  de  Bogota  ;  Chaparal,  à  l'ouest  de  Contreras) 
m'ont  tous  paru  de  la  formation  du  calcaire  alpin. 

Lorsqu'on  examine  le  terrain  §,  29  dans  des  contrées  si 
éloignées  les  unes  des  autres,  on  trouve  la  dénomination  de 
grès  bigarré  tout  aussi  bizarre  que  la  dénomination  de  grès 
rouge.  On  peut  substituer  à  la  dernière  celle  de  grès  houiller, 
en  rappelant  un  des  résultats  les  plus  généraux  et  les  plus  po- 
sitifs de  la  géognosie  moderne.  11  seroit  à  désirer  qu'un  géo- 
gnoste  d'une  grande  autorité  substituât  un  nom  géographique 
à  celui  de  grès  bigarré  ou  grès  à  oolithes  brunes.  Je  continuerai 
jusque-là  à  me  servir  de  la  dénomination  de  grès  de  Nebra. 

MUSCHELKALK   (CalCAIRE  COQUILLIER  ;   CaLCAIRE  DE  GœTTINGUe). 

§.  3o.  Formation  peu  variable,  et  que  la  dénomination 
beaucoup  trop  vague  de  calcaire  coquillier  a  fait  confondre, 
hors  de  l'Allemagne,  avec  les  assises  inférieures  ou  supé- 
rieures du  calcaire  jurassique  (avec  le  lias  ou  le  forest  mar- 
bre et  portlandstone).  Elle  est  bien  caractérisée  par  sa  struc- 
ture plus  simple  ,  par  la  prodigieuse  quantité  de  coquilles  en 
partie  brisées  qu'elle  renferme,  et  par  sa  position  au-dessus 
du  grès  de  Nebra  (  bunte  sandstein  )  et  au-dessous  du  qua- 
dersandstein  qui  la  sépare  du  calcaire  jurassique.  Elle  remplit 
une  vaste  partie  de  l'Allemagne  septentrionale  (Hanovre, 
Heinbergprèsde  Gœttingue;  Eichsfeld,  Cobourg;  Westphalie, 
Pyrmont  et  Bielfeld  ),  où  elle  est  plus  puissante  que  le  zech- 
stein  ou  calcaire  alpin.  Dans  l'Allemagne  méridionale  elle 
s'étend  sur  tout  le  plateau  entre  Hanau  etStutgard.  En  France, 
où ,  malgré  les  grands  et  utiles  travaux  de  M.  Omalius  d'Halloy, 
les  formations  secondaires  qui  sont  inférieures  à  la  craie,  ont 
été  si  long-temps  négligées,  MM.  de  Beaumont  et  Boue  l'ont 
reconnue  tout  autour  de  la  chaîne  des  Vosges.  Le  muschelkalk 
a  généralement  des  teintes  pâles,  blanchâtres,  grisâtres  ou 
jaunâtres  :  sa  cassure  est  compacte  et  matte  ;  mais  le  mélange 
de  petites  lames  de  spath  calcaire,  provenant  peut-être  de 
débris  de  pétrifications,  le  rend  quelquefois  un  peu  grenu  et 
brillant.  Plusieurs  couches  sont  marneuses,  arénacées,  ou 
passant  à  la  structure  oolithique  (Séeberg  près  de  Gotha  ; 
Weper  près  Gœttingue;  Preussisch-Minden;  Hildesheim).  Des 


2^6  IND 

hornsteîn,  passant  au  silex  pyromaque  et  au  jaspe  (Dransfeld, 
Kandern,  Saarbriick),  sont  ou  disséminés  par  nodules  dans 
le  muscheikalk,  ou  y  forment  de  petites  couches  peu  conti- 
nues. Les  assises  inférieures  de  cette  formation  alternent  avec 
le  grès  bigarré  (entre  Bennstedt  et  Kelme),  ou  se  lient  in- 
sensiblement au  grés,  en  se  chargeant  de  sable,  d'argile  et 
même  (à  l'est  de  Cobourg)  de  magnésie  (bancs  magnésifères 
du  muscheikalk). 

Couches  subordonnées.  Les  marnes  et  argiles,  si  fréquentes 
dans  le  calcaire  jurassique,  le  grès  bigarré  et  le  zechstein , 
sont  assez  rares  dans  le  muscheikalk.  En  Allemagne,  cette  roche 
renferme  du  fer  hydraté,  un  peu  de  gypse  fibreux  (Sulzbourg 
près  Naumbourg),  et  de  la  houille  (lettenkohle  deVoigt; 
à  Mattstedt  et  Eckardsberg  près  Weimar)  mêlée  de  schiste 
alumineux  et  de  fruits  (de  conifères?)  charbonnés.  Plus  les 
îiouilles  avancent  vers  le  terrain  tertiaire ,  plus  elles  se  rap- 
prochent, du  moins  dans  quelques-uns  de  leurs  strates,  de 
l'état  de  lignite  et  de  terre  alumineuse. 

Pétrifications.  D'après  les  recherches  de  M.  de  Schlott- 
heim,  et  en  rejetant  les  couches  qui  n'appartiennent  pas  au 
muscheikalk:  Chamites  striatus ,  Belemnites  paxillosus ,  Ammo- 
nites amalteus ,  A.  nodosus  ,  A.  angulatus ,  A.  papjraceus  ,  Nauli- 
lites  binodatiis  ,  Buccinites  s;regariiis  ,  Trochilites  lœvis ,  Turbinites 
cerithius,  Myacites  vcntricosus  ,  Pectinites  reticulatus ,  Oslraciles 
spondyloiies  ,  Terebratulites  fragilis  ,  T.  vulgaris  ,  Gryphites 
cymbium  ,  G.  suillus  ,  Mjtulites  socialis  ,  Pentacrinites  vulgaris  , 
Encrinites  liliiformis ,  etc.  Quelques  couches  isolées  du  calcaire 
jurassique  renferment  peut-être  plus  de  pétrifications  encore 
que  le  muscheikalk;  mais  dans  aucune  formation  secondaire 
les  débris  de  corps  organisés  n'abondent  si  uniformément  que 
dans  celle  que  nous  venons  de  décrire.  Une  immense  quan- 
tité de  coquilles,  en  partie  brisées,  en  partie  bien  conser- 
vées, mais  adhérant  fortement  à  la  matière  pierreuse  (en- 
troques,  turbinites,  strombites,  mytulites),  est  accumulée 
en  plusieurs  strates  de  20  à  26  millimètres  d'épaisseur,  qui 
traversent  le  muscheikalk.  Beaucoup  d'espèces  se  trouvent 
réunies  par  familles  (belemnites,  terebratulites,  chamites). 
Entre  ces  strates  éminemment  coqu'lliers  sont  disséminés 
des  ammonites,  des  turbinites,  quelques  terebratulites  avec 


IND  297 

îeur  test  nacré,  le  Gryphœa  cymhium ,  et  de  superbes  pen- 
tacrinites.  Les  coraux  ,  les  échinites  et  les  pectinites  sont 
rares.  L'abondance  des  entroques  dans  le  muschelkalk  a  fait 
donner  à  cette  formation ,  dans  quelques  parties  de  l'Alle- 
magne ,  le  nom  de  calcaire  à  entroques  (trochitenkalk).  Comme 
une  couche  d'entroque  caractérise  souvent  aussi  le  zechstein 
et  le  sépare  du  grès  houiller,  cette  dénomination  peut  faire 
confondre  deux  formations  très -distinctes.  La  dénomination 
de  calcaire  à  gryphées  (graphytenkalk  du  zechstein  et  du 
calcaire  du  Jura),  et  toutes  celles  qui  font  allusion  à  des 
corps  fossiles,  sans  indication  d'espèces,  exposent  à  ce  même 
danger.  On  assure  que  le  muschelkalk  renferme  des  osse- 
mens  de  grands  animaux  (quadrupèdes  ovipares?  Freies- 
leben,  T.  I,  p.  74;  T.  IV,  p.  24,  3o5  )  et  d'oiseaux  (ornitho- 
lithes  du  Heimberg  :  Blumenbach  ,  ISaturgesch.,  oteAuJl., 
p.  665),-  mais  ces  ossemens  pourroient  bien  appartenir ,  de 
même  que  les  dents  de  poisson  ,  à  des  brèches  ou  à  des  marnes 
superposées  au  muschelkalk. 

De  célèbres  géognostes  angîois,  MM.  Buckland  et  Con}^- 
beare,  ont  cru  reconnoitre,  dans  leur  voyage  en  Allemagne, 
le  muschelkalk  de  Werner  comme  identique  avec  le  lias  , 
qui  est  l'assise  inférieure  du  calcaire  jurassique.  J'incline  à 
croire,  malgré  les  oolithes  gris -bleuâtres  observées  dans  le 
muschelkalk  sur  les  bords  du  Weser,  qu'il  y  a  plutôt  parallé- 
lisme qu'identité  de  formation.  Le  muschelkalk  occupe  la 
même  place  que  le  lias  :  il  abonde  également  en  ammonites, 
térébratulites  et  encrinites;  mais  les  espèces  fossiles  diffèrent , 
et  sa  structure  est  beaucoup  plus  simple  et  plus  uniforme. 
Les  strates  du  muschelkalk  ne  sont  pas  séparés  par  ces  argiles 
bleues  qui  abondent  dans  les  assises  supérieures  et  inférieures 
de  la  formation  du  lias.  Les  assises  mitoyennes  de  cette  der- 
nière formation  ont  une  cassure  matte  et  unie  ,  et  ressem- 
blent bien  plus  aux  variétés lithographiquesdu  calcaire  du  Jura 
qu'au  muschelkalk  de  Gœttingue  ,  de  Jena  et  de  l'Eichsfeld. 
M.  d'Aubuisson  croit  que  cette  dernière  formation  est  repré- 
sentée en  Angleterre  parle  portlandstone  ,  le  cornbrash  et  le 
forestmarble  :  mais,  quelque  analogie  que  puissent  oflFrir  tous 
ces  lits  de  calcaire  marneux  pétris  de  coquilles  en  partie  brisées 
(forestmarble) ,  il  faut  se  rappeler  qu'ils  alternent  avec  des 


298  IND 

formations  entièrement  oolithiques,  et  qu'ils  sont  séparés  du 
red  mari  par  le  lias,  tout  comme  le  calcaire  oolilhique  du 
Jura  estséi)arépar  le  muschelkalk  du  grès  bigarré.  En  France  . 
M.  Boue  a  reconnu  le  muschelkalk.  dans  le  plateau  de  Bour- 
gogne ,  près  de  Viteaux  et  de  Coussy- les -Forges,  près  de 
Dax  dans  la  commune  de  S.  Pan  de  Lon  ,  etc.  Je  ne  l'ai  point 
reconnu  dans  la  partie  équinoxiale  de  l'Amérique.  Les  cou- 
ches très-arénacées ,  remplies  de  madrépores  et  de  coquilles 
bivalves  des  côtes  de  Cumana  et  de  Carthagène  des  Indes, 
que  j'ai  voulu  jadis  y  rapporter,  sont  probablement  des  ter- 
rains tertiaires. 

QUADERSANDSIEIN    (GrKS    DE    KoMGSTEIn). 

§.3].  Formation  très-distincte  (rives  de  l'Elbe,  au-dessus 
de  Dresde  entre Pirna,  Schandau  et  K()nigstein;  entre  Nurem- 
berg et  Weissenburg  ;  Staffelstein  en  Franconie  ;  Heuscheune, 
Adersbach;  Teufelsmauer  au  pied  du  Harz  ;  vallée  de  la  Mo- 
selle et  près  de  Luxembourg;  Vie  en  Lorraine;  Nalzen ,  dans 
le  pays  de  Foy ,  et  Navarreins,  au  pied  des  Pyrénées),  ca- 
ractérisée par  M.  Hausmann,  et  confondue  loug'-temps,  soit 
avec  les  variétés  quarzeuses  du  grès  bigarré  et  du  grès  de 
l'argile  plastique  (  trappsandstein) ,  soit  avec  le  grès  de  Fon- 
tainebleau ,  supérieur  au  calcaire  grossier  de  Paris  :  c'est  le 
grès  blanc  de  M.  de  Bonnard ,  le  grès  de  troisième  formation 
de  M.  d'Aubuisson.  Préférant  les  dénominations  géographi- 
ques,  je  nomme  souvent  cette  formation  grès  de  Kbnigstein, 
le  grès  bigarré  grès  de  Ncbra,  le  muschelkalk  calcaire  de 
Gattingiie. 

Le  quadcrsandstein  a  une  couleur  blanchâtre,  jaunâtre  ou 
grisâtre,  à  grains  très-fins,  agglutinés  par  un  ciment  argi- 
leux ou  quarzeux  presque  invisible.  Le  mica  y  est  peu  abon- 
dant,  toujours  argentin  et  disséminé  en  paillettes  isolées. 
Il  est  dépourvu,  et  de  bancs  intercalés  d'oolithes,  et  de  ces 
masses  aplaties  ou  lenticulaires  d'argile  (thongallen)  qui  ca- 
ractérisent le  grès  bigarré.  11  n'est  jamais  schisteux  ;  mais  divisé 
en  bancs  peu  inclinés,  très-épais,  qui  sont  coupés  à  angle 
droit  par  des  fissures,  et  dont  quelques-uns  se  décomposent 
très-facilement  en  un  sable  très-fin.  Il  renferme  du  fer 
hydraté  (Metz)   disposé  par  nodules.  Les  débris  organiques 


IND  299 

disséminés  dans  cette  formation  offrent ,  d'après  MM.  de 
Schlottheim ,  Haussmann  et  Raumer,  un  mélange  extraor- 
dinaire de  coquilles  pélagiques  très -analogues  à  celles  liu 
muschelkalk  ,  et  de  phytolithes  dicotylédones.  On  y  a  trouvé 
des  mytulites,  des  tellinites,  des  pectinites,  des  turritelles , 
des  huîtres  (pas  d'ammonites,  mais  des  cérites  ;  Habel- 
schwerd ,  Alt-Lomnitz  en  Silésie  ) ,  et  en  même  temps  des 
bois  de  palmier  ,  des  empreintes  de  feuilles  appartenant  à  la 
classe  des  dicotylédones  et  de  petits  dépôîs  de  houille  (Deister, 
Wefersleben  près  Qucdlinbourg) ,  très-bien  décrits  par  MM. 
Rettberg  et  Schulze,  et  passant  au  lignite.  Ces  débris  de 
bois,  d'un  aspect  bitumineux,  ont  sans  doute  de  quoi  nous 
surprendre  dans  une  formation  si  éloignée  de  la  grande  for- 
mation de  lignites  qui  est  placée  entre  la  craie  et  le  calcaire 
grossier  parisien  ;  mais  des  observations  récentes  nous  mon- 
trent des  traces  de  véritables  lignites  jusque  dans  les  calcaires 
à  gryphées  arquées  au-dessous  du  lias  (Le  Vay,  côtes  de 
Caen  )  et  jusque  dans  le  grès  bigarré.  Les  mauvaises  houilles 
du  muschelkalk ,  par  conséquent  d'une  formation  plus  an- 
cienne que  le  quadersandstein ,  passent  aussi  au  lignite. 

Déjà  M.  de  Raumer  avoit  reconnu  que  le  quadersandstein 
est  séparé  du  grès  bigarré  par  le  muschelkalk  (calcaire  de 
Gœttingue)  ;  il  est  placé  entre  ce  calcaire  et  le  calcaire  du 
Jura  ,  et  par  conséquent  inférieur  aux  grandes  formations 
oolithiques  de  l'Angleterre  et  du  continent.  Dans  cette  posi-^ 
tion  nous  ne  pouvons  guères  le  considérer ,  avec  M.  Keferstein 
(voyez  son  intéressant  Essai  fixv  la  géographie  minéralogiquc 
de  TAllemagne ,  T.  I ,  p.  i  2  et  4 8  ) ,  comme  parallèle  à  la  mo- 
lasse d'Argovie  (mergclsandstein) ,  qui  représente  l'argile 
plastique  (grès  tertiaire  à  lignites)  au-dessus  de  la  craie.  La 
nature  des  débris  végétaux  que  renferme  le  quadersandstein , 
et  ses  rapports  avec  le  plànerkalk  qui  appartient  aux  assises 
chloritées  et  arénacées  de  la  craie,  le  font  regarder  par  plu- 
sieurs géognostes  célèbres  comme  d'une  formation  postérieure 
au  calcaire  jurassique  :  c'est  ainsi  que  MM.  Buckland,  Cony- 
beare  et  Philipps  le  placent  entre  la  craie  et  les  dernières 
couches  oolithiques.  Mais,  d'après  les  observations  de  M. 
Boue  et  de  plusieurs  autres  géognostes  célèbres  d'Allemagne, 
!e  quadersandstein  (grès  de  Konigstein  ) ,  alternant  quelque- 


3oo  IIVD 

fois  avec  des  couches  marneuses  et  des  conglomérats,  reposa 
immédiatement  sur  le  gneis  près  de  Freiberg ,  sur  le  grès 
houiller  en  Silésie  et  en  Bohème  ;  sur  le  grès  bigarré  (grès 
de  Nebra) ,  prés  de  Nuremberg  ,  en  Franconie  ;  sur  le  mu- 
schelkalk  (calcaire  de  Gœttingue),  entre  Hildesheim  et  Dick- 
holzen  près  de  Helmstâdt,  et  près  de  Schweinfurt  sur  le 
Mein.  Il  est  recouvert  de  calcaire  du  Jura,  et  alterne  avec 
les  couches  marneuses  de  ce  calcaire,  en  Westphalie,  entre 
Osnabruck,  Bielfeld  et  Biickebourg. 

Calcaire  du  Jura  (Lias,  Marnes  et  grands  dépôts  oolithiques). 

§.  32.  Formation  très -complexe ,  composée  de  couches 
alternantes  de  calcaires,  marneuses  et  oolithiques,  renfermant 
du  gypse  et  un  peu  de  grès.  Le  mode  d'alternances  par- 
tielles, très- constant  dans  chaque  localité  ,  varie  dans  des 
pays  d'une  étendue  considérable  ;  cependant  sur  les  points 
les  plus  éloignés  de  l'Europe  on  reconnoît  une  analogie  frap- 
pante entre  les  grandes  divisions  ou  assises  principales. 
Dans  la  série  des  formations  les  plus  neuves  du  terrain 
secondaire  le  calcaire  du  Jura  [Jurassus)  est  placé  entre  le 
quadersandstein  et  la  craie.  Cette  dernière  y  passe  même 
insensiblement,  et  peut  souvent  être  regardée,  par  l'ana- 
logie de  ses  fossiles,  comme  une  continuation  du  calcaire 
jurassique.  La  superposition  de  ce  calcaire  au  quadersajid- 
stein ,  si  long -temps  contestée,  se  montre  en  Allemagne, 
d'après  M.  de  Schmitz ,  près  de  Wilsbourg  ;  d'après  M.  Boue  , 
près  Blumenroth  ,  Stalfelstein,  et  entre  Osnabruck  et  Bucke- 
bourg.  Lorsque  les  trois  formations  de  quadersandstein  , 
de  muschelkalk  et  de  grès  bigarré  ne  se  sont  pas  dévelop- 
pées simultanément,  le  calcaire  jurassique,  par  la  suppres- 
sion des  membres  intermédiaires  de  la  série  géognostique  , 
recouvre  immédiatement  le  zechstein  ou  calcaire  alpin.  Dans 
ce  cas  (pente  septentrionale  des  Pyrénées;  Apennins,  entre 
Fossoinbrono ,  Furli  et  Nocera  ;  Cordillères  du  Mexique , 
entre  Zumpango  et  Tepecuacuilco) ,  on  voit  ce  dernier  passer 
insensiblement  à  un  calcaire  blanchâtre ,  à  cassure  matte  égale 
(ou  conchoïde  à  cavités  très-aplaties) ,  qu'on  ne  sauroit  dis- 
tinguer des  couches  compactes  du  calcaire  du  Jura  dépour- 
vues d'oolithes.  Ce  passage  ,  dont  M.  de  Charpentier  a  aussi  été 


IND  3oi 

frappé  dans  le  Midi  de  la  France  ,  mérite  un  examen  très- 
attentif.  Malgré  la  grande  différence  qui  existe  entre  les 
débris  fossiles  du  muschelkalk  et  du  calcaire  jiirassique,  les 
dernières  formations  du  terrain  secondaire  sont  étroitement 
liées  entre  elles,  et  il  ne  faut  pas  être  surpris  que  dans  une 
série  et,  /3y7-,  cT,  s....  le  terrain  a  (zechstein)  fasse  passage 
à  £  (calcaire  du  Jura),  à  cause  de  la  suppression  fréquente 
des  termes  ^,  y  et  ^  (c'est-à-dire,  du  grès  bigarré,  du 
muschelkalk  et  du  quadersandstein  ).  Les  formations  aréna- 
cées /S  et  tT  alternent  avec  des  argiles  et  des  marnes  plus  ou 
moins  abondantes,  de  sorte  que,  par  un  grand  développe- 
ment de  leurs  couches  désagrégées  ,  celles-ci  réduisent  à 
Tétat  de  simples  bancs  intercalés  les  assises  pierreuses,  et 
finissent,  comme  c'est  le  cas  dans  l'Ouest  de  la  France,  par 
remplir  tout  l'intervalle  entre  a,  et  s. 

Le  calcaire  jurassique  couvre ,  sans  interruption ,  une  grande 
étendue  de  pays,  depuis  la  chaîne  des  Alpes  jusque  dans  le 
centre  de  l'Allemagne,  depuis  Genève  jusqu'à  Streitberg  et 
Muggendorf,  en  Franconie.  Comme,  vers  le  nord,  il  ren- 
ferme des  cavernes  à  ossemens  fossiles,  cette  formation  a 
singulièrement  fixé  l'attention  des  géognostes  allemands.  M. 
"Werner  la  croyoit  identique  avec  le  muschelkalk  :  j'ai  re- 
connu ,  dès  l'année  1796  ,  qu'elle  en  différoit  essentiellement, 
et  j'ai  proposé  de  la  désigner  par  le  nom  de  calcaire  du  Jura , 
à  cause  de  l'analogie  parfaite  que  présentent  les  montagnes 
occidentales  de  la  Suisse  avec  celles  de  la  Franconie.  Cette  dé- 
nomination est  aujourd'hui  généralement  reçue:  mais  il  a  été 
constaté  que  le  calcaire  du  Jura ,  au  lieu  d'être  placé  sous  le 
grès  bigarré  (comme  je  l'avois  cru  ,  par  erreur,  avec  le  plus 
grand  nombre  des  géognostes,  en  confondant  ce  grès  avec 
la  molasse  d'Argovie  et  le  grès  de  Dondorf  et  de  Misselgau 
près  Bareuth),  est  plus  récent  que  le  grès  bigarré,  que  le 
muschelkalk  (Bindloch)  et  le  quadersandstein  (Schwandorf; 
Phantaisie  (?);  INuremberg).  Cette  intercalation  entre  le 
quadersandstein  et  la  craie  ,  qui  se  fonde  sur  des  observations 
directes,  explique  très-bien  le  passage  graduel  (Montagne  de 
S.  Pierre  près  de  Maestricht),  de  la  craie  tuffeau  à  la  for- 
mation jurassique.  Le  nom  de  calcaire  caverneux  (hbhlen- 
kalk),  donné  souvent  à  cette  dernière,  peut  donner  lieu  à 


'602  i^jj 

des  rapprochemens  erronés.  Il  faudroit  distinguer  entre  des 
formations  dont  la  masse  entière  est  spongieuse,  caverneuse 
ou  criblée  de  trous,  et  des  roches  à  cavernes.  Plusieurs, 
sans  être  poreuses  ou  celluleuses ,  en  renferment  de  très- 
vastes.  Le  calcaire  de  transition  (mountain  limestone  de 
Derbyshire)  mériteroit,  en  Angleterre  et  au  Harz ,  presque 
autant  que  celui  du  Jura,  le  nom  de  calcaire  à  cavernes.  Au 
contraire,  le  rauchkalk  et  le  rauchwacke  ,  qui  forment  les 
assises  moyennes  du  zechstein  en  Thuringe,  et  que  l'on  a 
crus  à  tort  parallèles  au  calcaire  du  Jura,  sont,  comme  ce 
dernier,  et  dans  des  étendues  de  couches  très-considérables, 
remplis  de  petites  cavités  de  2  —  10  lignes  de  diamètre  ,  sans 
offrir  pour  cela  de  véritables  grottes.  Le  phénomène  des 
grottes  et  celui  de  la  porosité  (cavernosité  générale)  de  la 
masse  ne  se  trouvent  pas  nécessairement  réunis;  ce  sont  des 
modifications  qui,  loin  de  caractériser  telle  ou  telle  formation  , 
se  rencontrent  dans  des  formations  très-différentes. 

Quoique  sur  le  continent  les  couches  partielles  qui  com- 
posent le  calcaire  du  Jura  se  soient  très -inégalement  déve- 
loppées, et  que  l'ordre  de  leur  succession  \'arie  souvent,  on 
remarque  toujours  un  certain  nombre  d'assises  distinctes  et 
répandues  sur  des  étendues  de  terrain  très -considérables. 
Nous  les  nommerons  en  commençant  par  les  plus  anciennes  : 
calcaire  marneux  (et  marnes  calcaires  tiès-dures) ,  hleu-gri- 
sàtre,  analogue  (d'après  MM.  Boue  et  Buckland,  Essai  géogn. 
sur  l'Ecosse,  pag.  201  ,  et  Slrucl.  of  the  Alps ,  pag.  17)  au 
lias  de  lAngleterre,  quelquefois  traversé  par  des  veines  de 
spath  calcaire,  rempli  de  gryphées  arquées:  oolithes  gris- 
jaunâtres,  alternant  avec  des  marnes  en  partie  bitumineuses 
et  avec  du  gypse;  calcaire  compacte  à  cassure  unie  et  niatte, 
et  oolithes  blanches;  couches  remplies  de  madrépores  ana- 
logues au  calcaire  à  polypier  de  Normandie  et  au  coral-rag 
de  l'Angleterre;  calcaire  schisteux  avec  poissons  et  crustacés 
(Pappenheim  et  Solenhoffen).  L'assise  inférieure  de  cette 
formation  si  complexe  est  particulièrement  désignée  ,  en 
France  (Bourgogne)  et  dans  l'Allemagne  méridionale  (Wur- 
temberg), sous  le  nom  de  calcaire  à  gryphites  ;  mais  quelques 
géognostes  penchent  même  pour  l'idée  de  séparer  cette  assise 
du  calcaire  du  Jura,  en  la  regardant,   avec  MM.  de  Buch  et 


ÎND  oo3 

Brongniart ,   comme  appartenant  au  zechstein  ,   ou  avec  M. 
Keferslein,  comme  parallèle  au  muschelkalk.  Ici  se  présente 
Ja  question  importante  de  savoir  dans  quel  rapport  de  gise- 
ment  et    de    composition  se   trouve  le  calcaire  à  gryphites 
du  Jura  avec  celui  qui  porte  le  même  nom  dans  le  Nord  de 
l'Allemagne ,   et  que  M.   Voigt  a   fait  connoitre  dès  Tannée 
1792?  Une  grande  amilogie  enlre  les  couches  les  plus  voi- 
sines de  deux  formations  qui  quelquefois  se  trouvent  immé- 
diatement superposées  l'une  à  l'autre,    n'a  sans  doute  rien 
de  bien  surprenant  :   les  mêmes  espèces  de  gryphées  pour- 
roient  se  rencontrer  dans  des  formations  très-distinctes  et  plus 
éloignées  encore   entre    elles  ;    mais  la  liaison  géognostique 
observée    entre   le  calcaire    à  gryphées  arquées,    alternant 
avec  les  marnes,   et  les  autres  couches  inférieures  du  Jura, 
me  fait  pencher  pour  l'opinion  que  ce  calcaire,  et  le  calcaire 
à  gryphées  épineuses   (gryphitenkalk  de  Voigt),  placé  sous 
le  grès  bigarré,  ne  sont  pas  d'une  même  formation.  M.Mérian, 
dans  son  excellente  Monographie  des  environs  deBàle,  énonce 
aussi  cette  opinion,  et  regarde  avec  M.  Haussmann  le  grès 
argileux  de  Rheinfelden,  sur  lequel  repose  le  calcaire  juras- 
sique, comme  grès  bigarré,  tandis  que  M.  de  Buch  (Mérian, 
Umgeb.  von  Basel,  p.  110)  le  prend  pour  le  grès  houiller,  et 
suppose  que,  par  le  non-développement  du  grès  bigarré,  les 
couches  oolithiques    et   lithographiques   du    Jura    reposent, 
dans  cette  localité,  immédiatement  sur  les  couches  à  gryphites 
qui   appartiennent    au    zechstein.    J'ai  cru    de    mon    devoir 
d'exposer    dans    ce    travail    les    opinions    des   plus  célèbres 
géognostes,    lors  même   qu'elles  sont   opposées  à  celles  aux- 
quelles je  me  suis  arrêté. 

Ce  qui  est  indubitable  et  ce  que  nous  croyons  utile  de  rap- 
peler de  nouveau,  c'est  que  le  calcaire  jurassique  qui  repose 
près  de  Laufenbourg  sur  du  granité,  au  Schwarzwald  sur  le 
grès  rouge  ou  houiller  ,  et  près  de  Genève  sur  le  calcaire 
alpin,  est  placé,  dans  le  centre  et  le  nord  de  l'Allemagne , 
sur  le  quadersandstein.  La  superposition  d'une  roche  sur  la 
formation  la  plus  jeui^e  détermine  sa  place  comme  terme 
de  la  série  géognostique.  En  Franconie  et  dans  le  Haut-Pala- 
tinat  on  ne  voit  généralement  au  jour  que  les  assises  supé- 
rieures du  calcaire  jurassique ,   qui  sont  en  même  t^mps  les 


5o4  IND 

plus  compactes.  Les  marnes  et  les  oolithes  y  sont  beaucoup 
plus  rares  que  dans  la  Suisse  occidentale  et  en  France  (Caen, 
Lons-le-Saulnier).  Entre  Eichstadt  et  Ratisbonne  on  trouve  , 
de  bas  en  haut,  d'après  M.  de  Schmitz,  du  calcaire  entière- 
ment spongieux  et  bulleux  ;  des  couches  grenues  renfermant 
des  druses  remplies  de  sable;  du  calcaire  compacte  et  con- 
choïde  avec  des  nodules  de  silex  ;  du  calcaire  schisteux 
et  fissile  ,  analogue  à  celui  de  Sohlenhofen  et  aux  dales 
lithographiques  du  Heuberg  près  de  Kolbingen.  Ces  assises 
spongieuses,  remplies  de  vacuoles  (vallée  du  Laber  près 
Bcrodhausen;  Pegnitz,  Creussen,  Tumbach  ),  que  j'ai  retrou- 
vées en  Italie  (vallée  de  la  Brenta ,  entre  Carpane  et  Primo- 
lano),  à  l'ile  de  Cuba  (entre  le  Potrero  de  Jaruco  et  le  port 
du  Batabano),  au  Mexique  (plateau  de  Chilpansingo) ,  don- 
nent à  la  surface  du  sol,  qui  est  hérissé  de  petits  rochers 
pointus,  un  aspect  très- particulier. 

Dans  la  France  occidentale,  une  bande  non  interrompue 
de  calcaire  jurassique  s'étend,  d'après  M.  Boue,  du  S.  E. 
au  N.  O.,  depuis  Narbonne  et  Montpellier  jusqu'à  la  Rochelle, 
réparant  vers  le  nord  les  terrains  de  transition  de  la  Vendée 
et  le  terrain  primitif  du  Limousin.  Sur  les  c6tes  de  Nor- 
mandie, les  assises  marneuses  et  oolithiques  ont  pris  un  dé- 
veloppement beaucoup  plus  grand  qu'en  Allemagne.  Nous 
citerons,  d'après  les  recherches  intéressantes  de  M.  Prévost, 
les  couches  superposées  entre  Dieppe  et  le  Cotentin  ,  en 
commençant,  comme  toujours,  par  les  couches  les  plus  an- 
ciennes :  1,°  calcaire  à  gryphées  arquées  et  calcaire  lithogra- 
phique (Le  Vay,  Issigny),  renfermant  quelques  lignites  et 
superposé  au  terrain  de  transition:  2."  argiles  inférieures  et 
oolithes  (argile  des  Vaches- noires,  alternant  avec  du  lias  à 
débris  d'ichthyosaures;  oolithes  grises  deDive,  ferrugineuses, 
mêlées  d'argile  avec  lignites  et  avec  pétrifications  nombreuses 
de  madrépores,  de  modioles,  de  Gryphœa  cimhium  et  d'am- 
monites; oolithes  blanches)  :  3."  calcaire  de  Caen;  les  couches 
inférieures  avec  des  nodules  de  silex,  avec  peu  de  coquilles 
(ammonites,  bélemnites)  ,  et  avec  quelques  ossemens  de 
crocodiles;  les  couches  supérieures  à  polypiers  (coral-rag)  et 
à  trigonies  renfermant  des  cérites  entièrement  analogues  à 
celles  trouvées  au-dessus  de  la  craie  :  4."  argiles  supérieures 


IND  ooi 

Au  cap  la  Hève,  de  couleur  bleuâtre,  avec  lignites,  débris 
de  crocodiles  (Honfleur)  et  bancs  calcaires  moins  développés 
qu'à  Caen.  On  voit  que  dans  cette  partie  de  l'Europe  les 
lignites  percent  à  travers  toutes  les  couches  du  calcaire  juras- 
sique, et  que  cette  formation,  en  faisant  abstraction  des 
argiles  intercalées,  se  compose  de  trois  grandes  assises,  savoir, 
de  calcaire  à  gryphées  arquées,  d'oolithcs,  et  de  calcaire  à 
polypiers  et  à  trigonies. 

En  Angleterre  ,  la  formation  du  Jura  ,  se  prolongeant  sans 
interruption  du  Yorckshire  au  Dorsetshire,  remplit  tout 
l'espace  entre  le  red  mari  (grès  bigarré)  et  la  craie  ;  car  on 
n'y  connoît  entre  le  calcaire  du  Jura  et  le  red  mari  aucune 
formation  qui  soit  analogue  de  composition  au  muschelkalk 
et  au  quadersandstein  ,  deux  roches  qui  souvent  manquent 
également  sur  le  continent.  Les  géognostes  anglois  et  écossois  , 
qui,  dans  ces  derniers  temps,  ont  étudié  la  charpente  de  leur 
pays  avec  un  zèle  infatigable,  distinguent  les  assises  du  cal- 
caire jurassique  par  des  dénominations  en  partie  très-carac- 
téristiques,  et  dont  plusieurs  rappellent  les  subdivisions  re- 
connues sur  le  continent  :  i ."  Lias ,  avec  peu  de  silex,  couvrant 
le  red  mari  salifère,  analogue  au  calcaire  à  gryphées  arquées 
du  continent;  les  deux  tiers  d'en- haut  sont  une  masse  argi- 
leuse bleue  alternant  avec  des  lits  calcaires  ;  vers  le  bas  ces 
lits  augmentent  d'épaisseur,  deviennent  blancs  et  passent  à 
des  couches  lithographiques  (ossemens  d'ichthyosaures,  près 
de  vingt  espèces  d'ammonites,  bélemnites  ).  2.°  Système  infé- 
rieur d'oolitlies ,  savoir  :  oolithes  mêlées  de  sable ,  terre  à 
foulon,  grand  banc  oolithique  (great  oolithe)  avec  débris  de 
coquilles ,  schiste  oolithique  de  Stonesfield ,  forestmarble , 
cornbrash  et  kelloway-rock,  calcaires  coquilliers  et  arénacés. 
3.**  Système  moyen  d'oolithcs ,  savoir  :  argile  d'Oxford  (clunch- 
clay  de  M.  Smith),  sables  et  conglomérats  calcaires  (  calca- 
reousgrit),  coral  rag  ou  calcaire  à  polypiers,  avec  madré- 
pores et  échinites.  4.°  Système  supérieur  des  oolithes  ,  savoir  : 
argile  bleue  de  Kimmeridge,  un  peu  bitumineuse,  analogue 
aux  argiles  bleues  du  cap  la  Hève  en  Normandie ,  qui  sont 
aussi  supérieures  au  calcaire  à  polypier  et  aux  oolithes  ;  port' 
landstone,  avec  ammonites;  purbeckstone,  calcaire  argileux 
j)étri  de  coquilles ,  alternaot  avec  des  marnes  et  des  gypses. 
a3.  20 


So6  IND 

J'ai  suivi  les  divisions  de  MM.  Smith,  Philipps  et  Conybeare  . 
qui  diffèrent  un  peu  de  celles  qu'a  adoptées  M.  BncMand.  Les 
trois  systèmes  d'oolithes  d'Angleterre  sont  sépaiés  par  des 
formations  argileuses.  Quant  à  la  structure  oolifhique  même, 
nous  avons  déjà  fait  observer  plus  haut  qu'on  en  trouve  des 
traces  dans  les  formations  les  plus  différentes  :  il  y  a  quel- 
ques bancs  d'oolithes,  d'après  MM.  de  Gruncr  et  Escher 
{Alpina,  T.  IV,  p.  Sfig)  ,  dans  le  calcaire  de  transition  de  la 
Suisse  ,  dans  le  grès  houiller  (  Freiesleben  ,  Kapfersch.  ,B.IV, 
p.  123),  dans  le  calcaire  alpin  ou  zcchstein  (Hartlepool  dans 
le  Northuniberland  ) ,  dans  le  grès  bigarré  (Thuringe;  Vie 
en  Lorraine),  et  dans  le  muschelkalk. 

Couches  subordonnées  :  hornstein  (silex)  en  petits  bancs 
continus  ;  calcaire  magnésifère  (Nice)  ;  calcaire  fétide  et 
gypse  avec  des  traces  de  sel  gemme  (Kandern  ;  voyez  Mérian  , 
Umgeh.  vonBasel,  p.  56);  grès  argileux  et  micacé,  quelquer 
fois  siliceux,  intercalé  dans  les  assises  à  gryphites  (Hem- 
miken,  Waldburgstuhl  :  Lons-le-Saulnier)  ;  fer  oxidé  glo- 
buliforme  (bohnenerz),  à  la  fois  dans  le  calcaire  du  Jura 
(Neufchâtel;  Frickthal;  Wartenberg  enSouabe),  et  entre 
ce  calcaire  et  la  molasse  ou  grès  tertiaire  à  lignite  (Arau, 
Baden)  ;  houille  avec  impressions  de  fougères  (?)  et  mêlée  de 
pyrites  (Neue  Welt ,  Bretzweil). 

Pétrifications  :  après  les  formations  supérieures  à  la  craie, 
le  calcaire  du  Jura  est  celle  dont  les  débris  fossiles  ont  été 
le  mieux  déterminés  en  Angleterre ,  en  France  et  dans  la 
Suisse  occidentale.  Elle  renferme,  de  même  que  des  terrains 
plus  anciens  encore  (le  quadersandstein  et  le  zechstein  avec 
schiste  cuivreux)  ,  des  coquilles  pélagiques  mêlées  à  du 
bois,  à  des  ossemens  de  grands  sauriens  d'eau  douce,  et,  si 
l'on  ne  s'est  pas  trompé  dans  la  détermination  zoologique ,  à 
des  ossemens  de  didelphes  (marnes  de  Stonesfield  ).  J'ignore 
si  le  mélange  de  coquilles  marines  et  fluviatiles,  si  évident 
dans  la  plupart  des  formations  tertiaires  ,  a  été  observé 
avec  certitude  dans  les  terrains  au-dessous  de  la  craie.  Là 
où  la  formation  jurassique  est  presque  dépourvue  de  marnes 
et  d'oolithes  (  Franconie  ,  Haut-Palatinat  ;  Carniole  ,  entre 
S.  Sesanne  etTriest),  des  couches  très- puissantes  sont  en- 
tièrement dépourvues  de  pétrifications.  Les  débris  de  qua- 


IND  307 

rlrupèdes  ovipares,  de  poissons  et  de  tortues,  se  trouvent 
presque  dans  toutes  les  assises,  dans  les  plus  récentes  (  pup- 
beckstone),  comme  dans  les  plus  anciennes  (lias)  :  cepen- 
dant les  dernières  en  offrent  le  plus;  et  il  paroit  qu'elles  ne 
renferment  que  l'iclithyosaurus  (  proteosaurus  de  sir  Everard 
Home)  et  le  plesiosaurus,  qui  est  un  animal  analogue,  et 
non  les  véritables  crocodiles.  Celte  différence  dans  la  distri- 
hution  des  reptiles  a  été  également  observée  par  M.  Prévost 
sur  les  côtes  occidentales  de  la  France.  Les  ossemens  de  l'icli- 
thyosaurus s'y  trouvent  (principalement?)  dans  les  couches 
calcaires  (lias)  des  argiles  inférieures  aux  oolithes ,  tandis 
que  les  crocodiles  ne  se  rencontrent  qu'au-dessus  des  oolithes. 
En  Angleterre  on  distingue,  d'après  MM.  Smith,  Philipps  et 
Conybeare  ,  parmi  le  nombre  prodigieux  de  coquilles  pétri- 
fiées dont  on  n'a  encore  pu  reconnoitre  que  le  genre , 
les  espèces  suivantes  :  Ammonites  giganteus  ,  A.  exca^^atus  , 
A.  Duncani,  A.  Banksii ,  A.  angulatus,  A.  Grenoiighi ,  Nau- 
tilus  striatus ,  N.  truncatus  ,  Trochus  dimidiatus ,  T.hicari' 
nalus,  Trignnia  costata,  T.  clavellata ,  Terebralula  intermedia, 
T.  spinosa,  T.  digona ,  Ostrea  gregaria,  O.  palmata,  Modiola 
lœi>is,  M.  depressa,  M.  minima,  Pentacrinites  caput  Medusœ, 
P.  basaltiformis  ,  etc.  Quoique  les  espèces  d'ammonites  (au 
nombre  de  vingt),  de  bélemnites  et  de  pentacrinites,  dé- 
crites dans  le  lias,  ne  soient  pas  identiques  avec  celles  du 
muschelkalk,  il  me  paroît  toujours  bien  remarquable  de  voir 
accumuler  ces  trois  familles  dans  des  roches  d'un  âge  si  rap- 
proché, entre  Ics  dernières  assises  du  zechstein  (calcaire 
alpin)  et  les  premières  ou  plus  anciennes  du  calcaire  juras- 
sique. MM.  Prévost,  Lamouroux  et  Brongniart  vont  enrichir 
la  géognosie  zoologique  des  recherches  profondes  qu'ils  ont 
faites  sur  les  coquilles  et  les  zoophytes  trouvées  sur  les  côtes 
de  France  ,  entre  Dieppe  et  le  Cotentin,  en  Franche-Comté  et 
en  Suisse.  Nous  nous  contenterons,  en  attendant,  de  consi- 
gner ici  les  corps  fossiles  qu'offre  le  calcaire  jurassique  du 
continent,  depuis  Genève  jusqu'en  Franconie  ,  d'après  un  tra- 
vail que  j'ai  fait  sur  les  catalogues  de  M.  de  Schlottheim  : 
Chamites  jurensis ,  Bélemnites  giganteus,  Ammonites  planulatus , 
A.  natrix ,  A.  compriniatus ,  A.  discus ,  A.  Bucklandi,  Mj'acites 
radiatus ,  Telliniles  solenoides ,  Donacites  hemicardius,  Psctinilea 


3o8  IIVD 

articulatus,  P.œquivalvis,  P.  lens,  Ostracites grj'phœatiis,  O.crista- 
galli ,  Terebratulites  lacunosus,  T.  radiatus ,  Grjphites  arcuatus, 
Mjtulites  modiolatus,  Echinites  orificiatus  ,  E.  miliaris  ,  Asteri- 
acites  pannulafus,  des  Turritelles,  des  Hippurites  (le  Cornuco- 
piœ au  cap  Passaro  en  Sicile) ,  Grjpliites  arcuatus,  etc.  Il  est  bien 
digne  d'attention  que  cette  gryphée  arquée  que  M.  Sowçrby 
nomme  Grjphites  incurvas,  et  qui  caractérise  les  assises  infé- 
rieures de  la  formation  jurassique  en  Suisse  et  sur  les  côtes 
occidentales  de  la  France  ,  est  aussi ,  après  V Ammonites  Buck- 
landi  et  le  Plagiostoma  gigantea,  la  coquille  qui  caractérise 
le  plus  le  lias  en  Angleterre.  Les  couches  de  calcaire  blanc 
et  grenu  que  l'on  trouve  fréquemment  dans  cette  formation 
(Neurchàtel,  Monte  Baldo),  sont  dues  à  des  pétrifications 
de  madrépores. 

Nous  avons  déjà  vu  des  poissons  plus  ou  moins  accumulés, 
mais  appartenant  à  des  genres  1res- distincts ,  dans  le  thon- 
schiefer  de  transition  (Claris) ,  dans  les  schistes  carbures  du 
grès  rouge  (  Goldlauter  et  AUthal  près  de  Kleinschmalkalden) , 
dans  le  calcaire  alpin  et  ses  marnes  cuivreuses,  et  même  dans 
le  muschelkalk  (très-rarement,  Esperstedt,  Obhaussen  )  :  ces 
ichthyolithes  deviennent  plus  fréquens  dans  le  calcaire  juras- 
sique ,  surtout  dans  ses  couches  supérieures.  De  là  elles  pé- 
nètrent, au-clessusde  la  craie,  dans  le  grès  tertiaire  à  lignites 
(argile  plastique),  dans  le  calcaire  grossier  (Monte  Bolca), 
le  gypse  à  ossemens  (Montmartre)  et  le  calcaire  d'eau  douce 
(Œningen).  J'indique  dans  l'ordre  de  leur  âge  relatif  les  for- 
mations qui  offrent  des  phénomènes  analogues,  pour  prévenir 
les  erreurs  qui  naissent  de  l'ignorance  de  ces  analogies. 

Un  géognoste  justement  estimé,  M.  Buckland ,  incline  à  re- 
garder les  calcaires  fissiles  de  Pappenheim  et  de  Sohlenhofen, 
célèbres  par  leurs  empreintes  de  poissons  et  de  crustacés, 
comme  superposés  au  calcaire  du  Jura,  et  comme  apparte- 
nant au  calcaire  grossier  du  terrain  tertiaire  :  ces  calcaires 
fissiles  me  paroissent  au  contraire  entièrement  analogues  au 
purbeckstone  d'Angleterre,  qui  abonde  aussi  en  pétrifica- 
tions de  poissons ,  et  qui  forme  ,  comme  le  calcaire  de  Pap- 
penheim, la  couche  la  plus  récente  du  terrain  jurassique.  J'ai 
eu  occasion  d'examiner,  en  1796,  les  belles  carrières  de 
Sohlenhofen,  conjointement  avec  M.  Schbpf,  et  nous  avon» 


IND  309 

reconnu,  en  allant  de  Muggendorf  par  Ansbach  à  Pappen- 
heim ,  une  liaison  intime  entre  les  diverses  assises  d'une 
même  formation.  MM.  de  Buch,  Boue  et  Beudant  partagent 
cette  opinion  sur  les  ichthyolithes  de  Franconie. 

Dans  le  Vicentin  le  calcaire  jurassique  et  le  calcaire  grossier 
parisien  existent  à  la  fois.  L'un  et  l'autre  y  renferment  des 
polypiers;  cependant,  dans  un  premier  voyage  fait  en  Italie 
(lygS),  j'ai  cru  que  les  longues  bandes  de  coraux  rameux 
qui  traversent,  en  formant  des  filons  (entre  l'hôtellerie  du 
Monte  di  Diavolo  et  le  lac  Fimon  à  l'ouest  de  Lungara), 
le  sommet  du  Monte  di  Pietra  nera,  appartiennent  plutôt  au 
calcaire  du  Jura,  peut-être  à  l'assise  appelée  en  Angleterre 
coral-rag.  Ces  bandes  de  polypiers  qui  sont  restés  en  place, 
ont  deux  pieds  de  largeur  :  elles  offrent  un  aspect  très-extraor- 
dinaire ,  et  parcourent  des  masses  calcaires  presque  dépour- 
vues de  pétrifications,  en  se  dirigeant  très-régulièrement  N. 
80°  E.,  et  en  s'élevant  comme  un  mur  au-dessus  de  la  sur- 
face du  sol.  M.  Boue  a  aussi  observé  ces  polypiers  en  place 
dans  le  calcaire  jurassique  (coral-rag)  qui  entoure  le  bassin 
de  Vienne,  et  dont  les  assises  inférieures  renferment  des 
nagelfluhe  analogues  au  calcareous  grit  de  la  grande  formation 
oolithique  d'Angleterre  (Filey  dans  le  Yorkshire). 

Sous  la  zone  équinoxiale  de  l'Amérique  j'ai  cru  reconnoître 
la  formation  du  Jura  dans  beaucoup  de  calcaires  blanchâtres, 
en  partie  lithographiques,  qui  ont  la  cassure  unie  et  matte , 
ou  conchoïde  à  concavités  très -aplaties.  Ces  calcaires  sont 
ceux  de  la  caverne  de  Caripe  (au  sud-est  de  Cumana),  du 
littoral  de  Nueva  Barcelona  (Venezuela)  ,  de  l'Ile  de  Cuba 
(entre  la  Havane  et  le  Batabano  ;  entre  la  Trinidad  et  la 
boca  del  Rio  Guaurabo)  et  des  montagnes  centrales  du 
Mexique  (plaines  de  Salamanca  et  défilé  de  Bâtas).  I-e  cal- 
caire blanc  de  Caripe,  qui  ressemble  entièrement  à  celui 
des  cavernes  de  Gailenreuth  en  Franconie ,  est  superposé  au 
calcaire  alpin  gris-bleuâtre  de  Cumanacoa.  Le  terrain  juras- 
sique du  littoral  de  Nueva  Barcelona  renferme  de  petites 
couches  de  hornstein  passant  à  un  kieselschiefer  noir  (phé- 
nomène qui  se  répète  près  de  Zacatecas  au  Mexique  )  ;  il  est 
recouvert  (  Aguas  calientes  del  Bergantin) ,  comme  le  calcaire 
alpin  au  sommet  de  l'Impossible,  d'un  grès  trés-quarzeux.  Oa 


3ic.  IND 

pourroit  croire  que  ce  grès  du  Bergantin  appartient  aux  assises 
quarzeuses  du  grès  vert  ou  grès  secondaire  à  lignites  ;  mais, 
comme  il  forme  également  des  couches  dans  le  calcaire  alpin 
(Tumiriquiri) ,  il  reste  bien  douteux  si  les  grès  du  Bergantin 
et  du  Tumiriquiri  sont  des  formations  différentes,  ou  si 
des  couches  toutes  semblables  pénètrent  du  calcaire  alpin 
dans  le  terrain  jurassique.  Ce  terrain  abonde  moins  que 
toute  autre  formation  secondaire  en  roches  arénacées.  Nous 
avons  cependant  cité  plus  haut  des  couches  de  grès  dans  les 
montagnes  occidentales  de  la  Suisse,  à  W aldburgstuhl ,  Ep- 
tigen,  et  Hemmiken  près  de  Bâle.  Dans  les  vastes  steppes 
de  Venezuela,  près  de  ïisnao,  le  grès  rouge  supporte,  à  ce 
qu'il  m'a  paru,  immédiatement  (comme  au  Schwarzwald  en 
Souabe)  un  calcaire  lithographique  très -analogue  au  cal- 
caire du  Jura.  Ce  gisement  se  trouve  répété  au  Mexique , 
dans  les  plaines  de  Teniascatio  ,  au  sud-ouest  de  Guanaxuato. 
A  l'extrémité  septentrionale  de  la  vallée  de  Mexico  (entre 
rHacienda  del  Salfo ,  Bâtas  et  Puerto  de  Reyes),  une  forma- 
tion calcaire  bleu  -  grisâtre,  à  cassure  unie,  renfermant  du 
gypse  et  supportant  une  brèche  calcaire  ,  m'a  paru  appartenir 
au  terrain  jurassique  ,  malgré  la  proximité  des  marnes  ter- 
tiaires (Desaguede  Huehuetoque),  dans  lesquelles  sont  en- 
fouis des  ossemens  d'éJéphans  fossiles.  Je  pourrois  citer  aussi 
le  passage  que  l'on  observe  du  calcaire  alpin  à  un  calcaire 
entièrement  semblable  à  celui  d'Arau  et  de  Pappenheim,  à 
la  pente  occidentale  des  Cordillères  du  Mexique,  entre  So- 
pilote,  Mescala  et  les  riches  mines  de  ïehuilolepic  ;  mais 
dans  cette  région  le  terrain  du  Jura  est  inoins  prononcé  qu'à 
l'ile  de  Cuba,  qu'aux  îlots  du  Cayman  et  dans  les  montagnes 
de  Caripe  près  de  Cumana.  Nulle  part ,  dans  la  partie  du 
nouveau  monde  que  j'ai  parcourue  ,  je  n'ai  vu  le  grès  bi- 
garré,  le  muschelkalk  ni  le  quadersandstein  séparer  le  cal- 
caire alpin  des  formations  que  je  viens  de  décrire.  Dépourvues 
d'oolithes,  elles  abondent  aussi  très-peu  en  pétrifications  de 
coquilles  et  en  couches  marneuses.  Leur  cassure  matte  et  unie 
leur  donne  fout  l'aspect  du  calcaire  jurassique  de  l'Allemagne 
et  de  la  Suisse.  Ces  formations  calcaires  de  l'Amérique  ,  des 
Pyrénées  et  des  Apennins,  qui  paroissent  si  étroitement  liées 
au  calcaire   alpin  (zechstein),   ne  sont -elles  que  les  assises 


IND  3ix 

les  plus  récentes  de  ce  dernier,  et  doit -on  les  séparer  du 
véritable  calcaire  jurassique,  riche  en  coquilles,  en  oolithes 
et  en  marnes  P  Cette  question  importante  ne  peut  être  ré- 
solue qu'en  multipliant  les  observations  de  gisement,  qui 
sont  bien  plus  décisives  que  celles  de  composition  et  d'as- 
pect extérieur. 

Grks  et  Sables  ferrugineux  ,  et  Grès  et  Sables  verts  ,  Grès 

SECONDAIRE    A  LIGNITES    (  IrON   SAND     ET    GrEEN  SANd). 

§.  53.  Ce  sont  des  grès  et  des  sables  avec  lignitcs,  placés 
au-dessous  de  la  craie  ce  sont  deux  formations  arénacées, 
colorées  par  le  fer  ,  séparées  par  une  couche  d'argile  (  weald- 
clay  )  et  superposées  au  calcaire  du  Jura  (  terrain  d'oolithes). 
Elles  atteignent  en  Angleterre  jusqu'à  mille  pieds  d'épais- 
seur, et  se  retrouvent  dans  toute  la  France  occidentale,  où 
MM.  Prévost  et  Boue  en  ont  fait  l'objet  d'une  étude  appro- 
fondie. 

Les  sables  ferrugineux  brun-jaunàlre  alternent  avec  des  grès 
siliceux  et  de  petits  amas  de  mines  de  fer  souvent  exploitées 
avec  avantage  .-  ils  renferment  des  bois  fossiles  et  des  lignites 
(Bedfordshire,  Dorsetshire). 

Les  salles  verts,  colorés  par  un  protoxide  de  fer,  alternent  avec 
des  grés  calcaires  et  siliceux,  avec  des  agglomérats  ,  des  marnes 
jaunâtres  à  cristaux  de  gypse,  et  même  avec  de  petits  bancs 
de  calcaire  compacte,  qui  ont  été  quelquefois  confondus  avec 
le  portlandstone.  On  y  trouve  des  nodules  de  hornstein  et  de 
calcédoine  (Sarlat  dans  le  Périgord),  de  petits  dépôts  de  fer 
hydraté,  une  résine  qui  passe  au  succin  (  ile  d'Aix  près  de  La 
Rochelle;  Obora  et  Alstadt  en  Moravie),  et  un  grand  nombre 
de  débris  fossiles,  dont  plusieurs  {cidaris,  spatangus)  ressem- 
blent à  ceux  de  la  craie.  Les  grès  siliceux  de  cette  formation 
renferment  des  empreintes  de  feuilles  dicotylédones.  Vers  le 
haut  le  sable  vert  passe  à  une  marne  crayeuse  (chalk  marie  de 
Surrey).  La  terre  verte  ou  chloritée ,  qui  caractérise  la  couche 
de  sable  la  plus  rapprochée  de  la  craie  ,  se  retrouve  dans  des 
formations  d'un  âge  très-différent,  dans  le  grès  houiller  de  la 
Hongrie  (sur  les  frontières  de  la  Galicie),  dans  le  grès  bi- 
garré et  dans  les  gypses  qui  lui  appartiennent,  dans  le  qua- 
dersandsteia  et  dans  les  couches  inférieures  du  calcaire  gros-. 


5i2  IND 

sier  de  Paris.  D'après  les  belles  recherches  de  M.  Berthier 
sur  les  grains  verts  de  la  craie  et  du  calcaire  grossier,  ces 
grains  sont  un  silicate  de  fer;  mais  il  est  probable  que  les 
quantités  de  magnésie  et  de  potasse  varient  dans  les  différens 
terrains,  comme  elles  varient,  d'après  les  analyses  de  Klap- 
roth  et  de  Vauquelin,  dans  la  terre  verte  de  Vérone  (talc 
chlorite  zoographique  de  Haiiy  )  et  dans  la  chlorite  terreuse. 
L'analogie  qu'offrent  quelquefois  avec  le  quadersandstein  de 
l'Allemagne  les  bancs  siliceux  du  grès  vert  (ironsand),  soit 
à  l'état  solide,  soit  dans  un  état  de  désagrégation,  a  porté 
plusieurs  géognostes  à  confondre  ces  deux  terrains.  M.  Boue, 
qui  a  exploré  avec  tant  de  fruit  les  gisemens  de  l'Ecosse,  de 
l'Angleterre  et  de  l'Allemagne,  a  reconnu  le  grès  vert  (tout 
semblable  à  celui  des  environs  d'Oxford)  en  France,  le  long 
de  la  Mayenne  et  du  Loir,  depuis  la  Ferté-Bernard  jusqu'au- 
delà  de  la  Flèche,  dans  le  département  de  la  Charente ,  dans 
le  Mans,  la  Saintonge   et  le  Périgord. 

C'est  à  cette  même  formation  du  §.  33  qu'appartiennent 
aussi  les  lignites  de  Pîle  d'Aix,  sur  lesquels  M.  Fleuriau  de 
Bellevue  a  fait  de  si  intéressantes  recherches.  D'après  ce  savant 
géologue,  la  forêt  sous-marine  des  côtes  de  La  Rochelle 
consiste  en  bois  de  dicotylédones  aplatis,  en  partie  pétrifiés, 
en  partie  bitumineux  ou  fragiles,  quelquefois  à  l'état  de  jaïet. 
Ces  bois  sont  pénétrés  de  pyrites ,  et  percés  par  une  multi- 
tude de  tarets  et  de  vers  marins.  Les  trous  résultant  de  cette 
perforation  sont  remplis  de  quarz-agathe  et  de  sulfure  de  (er. 
On  trouve  les  troncs  ou  en  couches  horizontales,  tantôt  diri- 
gées parallèlement,  tantôt  accumulés  en  désordre.  Les  bois 
qui  sont  pétrifiés  en  entier  ou  seulement  en  partie,  reposent 
sur  un  sable  verdâtre  :  ceux  qui  sont  à  l'état  fibreux  et 
bitumineux,  reposent  sur  des  bancs  d'argile  plastique  d'un 
bleu  foncé.  Ils  sont  entourés  d'algues  marines  et  de  petites 
branches  de  lignites.  Parmi  ces  masses  d'algues  on  trouve 
une  résine  qui  passe  au  succin  ;  elle  est  friable  et  offre  di- 
verses couleurs.  Les  troncs  d'arbres  entassés  forment  une 
bande  d'une  lieue  et  demie  de  largeur,  depuis  l'extrémité 
nord-ouest  de  Pile  d'Oléron  jusqu'à  quatorze  lieues  dans  l'in- 
térieur du  continent,  sur  la  rive  droite  de  la  Charente. 
Cette  bande  a  plus  de  sept  pieds  d'épaisseur j  elle  est  dirigée 


IND  3'5 

de  O.  N.  O.  à  E.  S.  E. ,  et  se  trouve  à  un  mètre  au-dessus  du 
niveau  des  basses  mers.  Là  où  les  lignites  sont  couverts  par 
l'océan,  ils  sont  incorporés  (ainsi  que  des  masses  de  succin- 
asphalte  et  de  grands  ossemens  d'animaux  marins)  à  un  grès 
grossier  qui  repose  sur  l'argile  plastique.  Le  gisement  de  ces 
dépôts  est,  de  bas  en  haut  (d'après  un  mémoire  inédit  de  M. 
Fleuriau  de  Bellevue)  :  i.°  calcaire  compacte  (lithographique) 
à  cassure  unie  (La  Rochelle,  S.  Jean  d'Augely)  ;  2."  couches 
d'oolithes  (pointe  de  Chatelaillon  et  Matha);  3.°  lumachelle 
et  bancs  de  polypiers  avec  empreintes  de  Gryphœa  angustata 
(ces  trois  couches  constituent  la  formation  jurassique,  dont 
le  banc  à  polypiers  représente  le  coral-rag)  :  4.°  grande  couche 
de  lignite  avec  tourbes  marines  ,  succin-asphalte  et  argile  plas- 
tique ;  5.°  sables  ferrugineux  et  chloriteux;  argile  schisteuse; 
couches  arénacées  et  calcaires  avec  trigonies  et  cérites;  des 
fragmens  de  lignites.  Au  sud-ouest  de  la  Charente,  où  man- 
quent les  couches  n.°'  4  et  5 ,  des  bancs  horizontaux  d'un  cal- 
caire très-blanc  avec  débris  de  coquilles  (Saintonge)  repo- 
sent immédiatement  sur  les  oolithes  de  la  formation  jurassique, 
et  représentent  les  assises  inférieures  de  la  craie.  M.  Boue  a 
vu  se  prolonger  les  traces  des  lignites  depuis  Rochefort  par 
Périgueux  jusqu'à  Sarlat. 

Ces  sables  et  argiles  avec  lignites  du  grès  vert  sont  liées  vers 
le  bas  aux  argiles  bleues  avec  lignites  du  cap  la  Hève  (près 
du  Havre);  vers  le  haut  ils  préludent  pour  ainsi  dire  au 
grand  dépôt  de  lignites  du  terrain  tertiaire,  c'est-à-dire  aux 
lignites  de  l'argile  plastique  et  de  la  molasse,  qui  sont  supé- 
rieures à  la  craie.  Comme  la  craie  dans  ces  assises  inférieures 
(craie  chloritée  entre  Fécamp  et  Dives)  renferme  elle-même 
des  lignites,  et  que,  sous  de  certains  rapports,  ellepeutêtre 
regardée  comme  une  continuation  de  la  formation  jurassique, 
les  phénomènes  que  nous  venons  d'exposer  sont  bien  dignes 
de  l'attention  des  géognostes.  Le  pldnerkalk  de  l'Allemagne , 
souvent  mêlé  de  mica  et  de  grains  de  quarz ,  forme  une  des 
assises  supérieures  du  grès  vert,  représentant  à  la  fois  la 
craie  chloritée  et  une  partie  de  la  craie  grossière  ou  craie 
tuffeau. 


ia4  Î^D 

IV.    Craie. 

§.  34.  A  mesure  que  nous  nous  sommes  éloi^ës  du  calcaire 
alpin,  nous  avons  vu  les  formations  flevenir  plus  complexes. 
II  est  vrai  que  le  muschelkalk  et  le  quadersandstein  ont  une 
structure  assez  simple  ;  mais  le  calcaire  du  Jura  et  le  grès  vert, 
là  où  ils  se  sont  bien  développés,  offrent  une  grande  complica- 
tion de  couches  et  de  fréquentes  alternances.  Cette  tendance 
à  une  composition  variée,  à  un  agroupement  de  masses  hété- 
rogènes (tendance  qui  atteint  son  maximum  dans  le  terrain 
tertiaire),  se  ralentit  pour  ainsi  dire  au  terrain  de  craie. 
Placée  entre  le  grès  vert  et  l'argile  i)lastique  ou  grès  à  lignites 
tertiaire,  la  craie,  par  une  plus  grande  simplicité  de  struc- 
ture, contraste  avec  les  formations  complexes  que  nous  ve- 
nons de  nommer.  Des  couches  argileuses  (dief) ,  calcaires,  et 
arénacées  (fourtia)  ,  qui  séparent  la  formation  jurassique  (ooli- 
thique)  de  celle  de  la  craie,  ne  doivent  pas  se  confondre 
avec  cette  dernière  formation,  quoique  souvent  aussi  il  ne 
soit  pas  facile  de  fixer  les  limites  entre  les  marnes  avec  lits 
d'oolithes  du  terrain  jurassique,  les  strates  du  grès  vert,  et 
CCS  marnes  crayeuses  ou  calcaires  jaunâtres,  presque  com- 
pactes, qui  semblent  appartenir  aux  assises  inférieures  de  la 
craie. 

Ce  dernier  terrain  se  compose  ,  d'après  les  recherches  de 
MM.  Omalius  et  Brongniart,  de  trois  assises  assez  distinctes. 
L'inférieure  est  la  craie  chlaritée  ou  glauconie  crayeuse,  friable 
et  parsemée  de  grains  verts;  la  moyenne  est  la  craie  lujj'eau 
ou  craie  grossière,  grisâtre  ,  sableuse,  renfermant  des  marnes 
et,  au  lieu  de  silex  pyromaques,  des  silex  cornés,  d'une 
couleur  peu  foncée.  L'assise  supérieure  est  la  craie  blanche. 
Quelquefois  les  assises  les  plus  anciennes  prennent  des  cou- 
leurs gris -noirâtre,  et  devienncut  ou  très-compactes  (envi- 
rons de  Rochefort),  ou  grenues  et  friables  (montagne  de 
Saint- Pierre  près  de  Macstricht).  La  craie  chlôritée  passe 
souvent  insensiblement  au  sable  vert  (green  sand  ).  La  craie 
blanche  est  la  plus  pure  des  couches  calcaires  de  différens 
âges  :  elle  ne  contient  que  quelques  centièmes  de  magnésie  ;. 
mais  elle  est  mêlée  d'une  quantité  de  sable  plus  ou  moins 
grande.  La  liaison  du  terrain  de  craie  de  Paris  avec  les  autres, 


IND  3i5 

(errains  secondaires  (entre  Gueret  et  Hirson)  a  été  indiquée 
dans  une  coupe  par  M.  Omalius  (Bull,  phil.,  1814).  Dans  un 
nivellement  barométrique,  fait  en  i8o5,  de  Paris  à  Naples , 
nous  avons  vu,  M.  Gay-Lussac  et  moi,  sortir  au  jour,  succes- 
sivement sous  la  craie,  le  calcaire  du  Jura  ,  le  calcaire  alpin  , 
le  grès  rouge ,  le  gncis  et  le  granité  (  entre  Lucy-le-Bois  ,  Aval- 
Ion,  Autun  et  montagne  d'Aussy).  La  formation  de  craie, 
trop  long-temps  négligée,  est  beaucoup  plus  répandue  qu'on 
ne  le  pense  généralement.  On  l'a  reconnue  dans  plusieurs 
parties  de  l'Allemagne,  par  exemple,  dans  le  Holstein ,  en 
Westphalie  (d'Unna  à  Paderborn),  dans  le  pays  d'Hanovre, 
au  pied  du  Harz  près  Goslar,  dans  le  Brandebourg  près 
Prentzlow,  et  à  l'île  de  Rugen.  Souvent  elle  n'est  reconnois- 
sable  que  par  les  corps  fossiles  que  présentent  les  lambeaux 
de  terrains  marneux  et  arénacés.  Elle  ne  renferme  que  peu 
de  couches  hétérogènes,  par  exemple,  des  lits  d'argile  (Isle 
deWight;  Anzin);  des  silex,  soit  en  plaques  ou  en  rognons 
bien  alignés  ,  soit  en  petits  filons  (  Isle  de  Thanet;  Brighton  ) , 
et  caractérisant  les  assises  supérieures  de  la  craie.  On  y  ren- 
contre aussi  des  pyrites  globuleuses  et  de  !a  strontiane  sulfa- 
tée (Meudon). 

Pétrifications.  Dans  le  bassin  de  la  Seine  on  trouve,  d'après 
les  observations  de  MM.  Défiance  et  Brongniart ,  dans  les 
couches  supérieures  de  la  craie  :  beaucoup  de  bélemnites 
(Belemnites  mucronatus)  et  d'oursins  [Ananchites  ovata,  A.  pus- 
lulosa,  Galerites  vulgaris ,  Spatangus  cor  anguintim ,  S.  bufo)j 
des  huîtres  [Ostrea  vesicularis ,  O.  serrata)  ;  des  térébratules 
(Terebratula  Defrancii,  T.  plicatilis  ,  T.  alata)  ;  des  peignes 
{Pecten  cretosus ,  P.  quinque- costatus)  ;  le  Catillus  Cuvieri,  des 
Alcjonium,  des  astéries,  des  millepores,  etc.  La  craie  tuffeau 
et  glauconeuse  renferme  (  environs  du  Havre  ,  de  Rouen  et  de 
Honfleur;  Perte  du  Rhône  près  Bcllegarde)  :  Grjpheacolumba, 
G.  auricularis ,  G.  aquila ,  Podopsis  truncata,  P.  striala,  Tere- 
hraLula  semiglobosa,  T.galLina,  Pecten  intexlus ,  P.  asper ,  Ostrea 
carinata  ,  O.  pectinata,  Cerithium  excavatum  ,  des  trigonies  , 
des  crassatelles ,  des  encrinites  et  des  pentacrinites  (Angle- 
terre), et,  ce  qui  est  très-remarquable,  des  nautilites  et  plu- 
sieurs ammonites  (Nautilus  simplex ,  Ammonites  varians ,  A. 
Beudanti ,  A.  Coupei,  A.  injlatus,  A.  Gentoni ,  A^  rhotomagensis) , 


SiG  IIVD 

tandis  que  les  couches  supérieures  de  la  craie  ,  près  de  Paris, 
ne  renferment  (à  l'exception  du  Trochus  Basleroti)  pas  une 
seule  coquille  univalve  à  spire  simple  et  régulière.  D'après 
les  recherches  de  MM.  Buckland  ,  Webster,  Greenough,  Phi- 
lipps  ctMantell,  comparées  à  celles  de  M.  Brongniart ,  il  existe 
la  plus  grande  analogie  entre  les  débris  organiques  trouvés  , 
en  France  et  eu  Angleterre,  dans  les  assises  de  la  craie  du 
même  âge.  Ce  sont  partout  les  assises  les  plus  anciennes  qui 
renferment  des  ossemens  de  grands  sauriens  (monitor)  et  de 
tortues  de  mer,  des  dents  et  des  vertèbres  de  poissons  (squales). 
Malgré  les  analogies  que  présentent  les  grès  à  lignites  (sables 
verts  et  argiles  plastiques  )  au-dessous  et  au-dessus  de  la  craie  , 
cette  formation  pourtant  appartient  plutôt  au  terrain  secon- 
daire qu'au  terrain  tertiaire ,  auquel  plusieurs  géognostes 
célèbres  le  rapportent.  Aussi,  selon  M.  Brongniart,  les  co- 
quilles de  la  formation  crayeuse  se  rapprochent  beaucoup 
plus  de  celles  de  la  formation  jurassique  que  des  coquilles  du 
calcaire  grossier,  dont  la  craie  est  séparée  géognostiquement 
de  la  manière  la  plus  tranchée. 

Terrains    tertiaires. 

Les  considérations  que  j'ai  exposées  plus  haut  sur  la  liaison 
intime  entre  les  dernières  assises  du  terrain  de  transition  et 
les  premières  du  terrain  secondaire ,  peuvent  s'appliquer 
en  grande  partie  à  la  liaison  que  Ton  observe  entre  les  terrains 
secondaires  et  tertiaires.  Les  roches  de  transition  sont  ce- 
pendant plus  étroitement  liées  au  terrain  houiller  que  ne  Pest 
la  craie  aux  formations  qui  lui  succèdent.  Ce  qu'il  y  a  de  plus 
important  en  géognosie,  c'est  de  bien  distinguer  les  forma- 
tions partielles;  c'est  de  ne  pas  confondre  ce  que  la  nature  a 
nettement  limité;  c'est  d'assigner  à  chaque  terme  de  la  série 
géognostique  sa  véritable  position  relative.  Quant  aux  ten- 
tatives qui  ont  été  faites  récemment  pour  réunir  plusieurs  de 
ces  formations  par  groupes  et  par  sections,  elles  ont  eu  le 
sort  de  toutes  les  généralisations  diversement  graduées.  Les 
opinions  des  géognostes  sont  restées  plus  partagées  à  Pégard 
des  grandes  que  tles  petites  divisions.  Presque  partout  les 
mêmes  formations  ont   été  admises  ;    mais  on  varie  dans  la 


IND  3i7 

nomenclature  des  groupa  qui  doivent  les  réunir.  C'est  ainsi 
que  les  botanistes  s'accordent  plus  facilement  sur  la  fixation 
des  genres  que  sur  la  répartition  de  ces  mêmes  genres  entre 
des  familles  voisines.  J'ai  préféré  de  conserver  dans  le  tableau 
des  formations  les  anciennes  classifications  les  plus  générale- 
ment reçues.  Dans  cette  longue  série  de  roches,  dans  cet 
assemblage  de  monumens  de  diverses  époques,  on  distingue 
surtout  trois  phénomènes  bien  marquans  :  la  première  lueur 
de  la  vie  organique  sur  le  globe,  l'apparition  de  roches  frag- 
mentaires, et  la  débâcle  qui  a  enseveli  l'ancienne  végétation 
monocotylédone.  Ces  phénomènes  marquent  l'époque  des 
roches  intermédiaires  et  celle  du  grès  houiller  ,  premier 
chaînon  des  roChes  secondaires.  Malgré  l'importance  des  phé- 
nomènes que  nous  venons  de  signaler,  les  roches  d'une  époque 
ont  toujours  quelque  profot3'pe  dans  les  roches  de  l'époque 
précédente,  et  tout  annonce  l'effet  d'un  développement 
continu. 

Comme  les  noms,  terrains  de  sédiment  moj^en,  calcaire  alpin 
nouveau,  etc.,  sont  employés  dans  beaucoup  d'ouvrages  géo- 
gnostiques  modernes,  sans  que  l'on  désigne  chaque  fois  indi- 
viduellement les  roches  que  renferment  ces  terrains,  il  sera 
utile  de  rappeler  ici  la  synonymie  de  cette  nomenclature  des 
gisemens.  M.  Brongniart,  distinguant  entre  pr/mif// et  prnnor- 
dial,  comprend  avec  M.  Omalius  d'Halloy,  sous  la  dénomina- 
tion de  terrains  primordiaux ,  toutes  les  roches  primitives  et  in- 
termédiaires cristallines  de  l'école  de  Freiberg  :  il  divise  les 
terrains  secondaires  (  Flotzgebirge)  en  trois  classes.  Dans  la 
première,  celle  de  sédiment  inférieur  [Descr.  géol.  des  environs 
de  Paris,  p.  8  ;  Sur  le  gisement  des  ophiolithes ,  p.  36),  sont 
compris  le  mountain-limestone  ou  calcaire  de  transition,  le 
grès  rouge  ou  houiller,  le  calcaire  alpin  ou  zechstein  et  le 
lias;  dans  la  seconde,  celle  de  sédiment  moyen,  le  calcaire 
du  Jura  et  la  craie  ;  dans  la  troisième,  celle  de  sédiment 
supérieur,  toutes  les  couches  qui  sont  plus  neuves  que  la 
craie.  Le  terrain  de  sédiment  supérieur  remplace  par  conséquent 
le  terrain  tertiaire ,  dénomination  tout  aussi  impropre  pour 
désigner  un  quatrième  terrain  ,  succédant  aux  terrains  primitif , 
intermédiaire  et  secondaire,  que  l'étoient  les  anciens  noms  de 
terrains  à  couches  (roches  secondaires)  et  de  terrains  à  /lions 


« 

(roches  primitives  et  de  transition).  M.  de  Bonnard  ,  dans 
son  intéressant  Aperçu  géognostique  des  formations ,  exclut  des 
terrains  primordiaux  les  porphyres,  les  syénites  de  transition 
et  toutes  les  roches  cristallines  postérieures  à  celles  qui  ren- 
ferment quelques  débris  de  corps  organisés;  il  regarde,  et 
nous  préférons  sa  manière  de  voir,  le  mot  primordial  comme 
synonyme  de  primitif.  Les  terrains  secondaires  supérieurs  de  M. 
de  Bonnard  diifèrent  beaucoup  du  terrain  de  sédiment  supérieur 
de  M.  Brongniart  :  ce  sont  plutôt  ceux  q\ie  ce  savant  esti- 
mable appelle  terrain  de  sédiment  moj  en.  Toutes  les  formations , 
depuis  la  craie  jusqu'au  grès  rouge,  à  l'exception  des  houilles, 
sont  comprises  dans  l'ordj-e  surmojen  de  M.  Conjbeare.  tandis 
que  Id  liaison  intime  que  l'on  observe  en  Angleterre  entre 
les  dépôts  de  houilles  et  les  roches  qui  les  supportent,  ont 
engagé  M.  Buckland  {Structure  of  the  Alps ,  18-21  ,  p.  8  et  17  ) 
à  étendre  les  formations  secondaires  depuis  la  craie  jusqu'au 
mountain  limestone  et  à  la  grauwacke  (old  red  sandstone). 
Jl  nomme  notre  zechstein  avec  dépôts  salifères,  calcaire  alpin 
ancien  (  elder  alpine  limestone);  le  lias,  lesoolithes.  le  sable 
vert  et  la  craie  ,  calcaire  alpin  nouveau  (j^ounger  alpine  lime- 
stone). Ces  indications  suffiront,  jepense,  pourl'intelligence 
de  la  synonymie  des  grandes  divisions  géognostiques. 

Le  mélange  fréquent  de  couches  pierreuses  et  de  terrains 
meubles  ou  masses  désagrégées  a  fait  confondre  long-temps  les 
formations  tertiaires,  c'est-à-dire  ,  celles  qui  sont  postérieures 
à  la  craie,  avec  les  terrains  d'aï  lu  ^-ion  et  de  transport .  que  Guet- 
lard  (  1746)  avoit  appelés  la  zone  des  sables.  On  a  faussement 
considéré  les  formations  tertiaires  comme  peu  importantes, 
comme  irrégulières  dans  leur  stratification  et  restreintes  à 
de  petites  étendues  de  pays.  L'école  de  Freiberg  ne  plaçoit 
d'abord  (i8o5)  au-dessus  du  muschelkalk  et  de  la  craie 
que  quatre  formations,  savoir  :  les  sables  et  argiles  avec  li- 
gnites,  déjà  reconnues  par  Hollmann  en  1760  {Phil.  Trans., 
vol.  LI ,  p.  5o5);  le  nagelfluhe  calcaire,  le  travertin,  et  le 
tufF  d'eau  douce  (Reuss,  Geogn.,  T.  II,  p.  470,  63o,  644). 
Bruguières  avoit  déjà  observé  que  les  meulières  de  Mont- 
morency ne  renfermoient  que  des  coquilles  d'eau  douce. 
Le  gypse  à  ossemens  de  Montmartre,  que  Karsten  croyoit 
encore   analogue  au  gypse  salifère  du  zechstein,   avoit  été 


IND  3iy 

considéré  par  Lamanon  et  par  M.  Voigt  (1799)  comme  un 
dépAt  d'eau  douce.  Werner  le  regarda  (1806)  comme  en- 
tièrement différent  des  formations  de  gypse  d'Allemagne,  et 
comnie  d'une  époque  beaucoup  plus  récente  (  Freiesleben, 
Kttpfersch.,  T.  I,  p.  174).  Les  observations  recueillies  par 
la  Socié'é  géologique  de  Londres  et  la  Société  l^Vemérienne 
à  Edimbourg  ,  les  utiles  voyages  de  M.  Omalius  d'Halloy 
(1808)  et  de  quelques  géogiiostes  italiens,  avoient  fourni 
une  masse  assez  considérable  de  matériaux  pour  l'étude  des 
terrains  tertiaires  ;  mais  la  connoissance  plus  approfondie 
des  différentes  formations  qui  constituent  ce  terrain  et  qui 
offrent  les  mêmes  caractères  dans  les  pays  les  plus  éloignés, 
ne  date  que  de  l'époque  où  a  paru  la  Description  géologique 
des  environs  de  Paris,  par  MM.  Brongniart  et  Cuvier  (  1.'^*'  édit. , 
tBio;  2.'  édition,  1822).  C'est  dans  le  bassin  qui  entoure 
cette  capitale,  que  toutes  les  formations  tertiaires  (à  l'ex- 
ception peut-être  du  grès  à  lignites,  qui  ne  s'y  montre  que 
comme  argile  plastique)  se  trouvent  le  plus  développées. 
Toutes  celles  qui  manquent  dans  d'autres  parties  de  l'Eu- 
rope ,  ou  qui  ne  s'y  rencontrent  que  par  lambeaux,  sont 
réunies  sur  les  bords  de  la  Seine. 

En  caractérisant  succinctement  les  termes  de  la  série  ter' 
tiaire,  je  profiterai  à  la  fois  du  grand  ouvrage  de  M.  Brongniart, 
de  celui  que  MM.  Conybeare  et  Philipps  viennent  de  faire  pa- 
roitre  sur  le  sol  de  l'Angleterre,  du  Voyage  géologique  de  M. 
Beudant  enHongrie,  et  desobservations  récentes  deMM.  Boue 
et  Prévost,  qui,  en  remplissant  la  lacune  entre  les  formations 
tertiaires  et  oolithiques,  ont  rendu  de  grands  services  à  la 
géognosie  positive.  C'est  par  la  comparaison  de  terrains  très- 
éloignéslesunsdes  autres,  qu'on  peut  éviter,  jusqu'à  un  certain 
point,  de  confondre  le  tableau  général  des  gisemens  avec  la 
description  géographique  d'un  bassin  isolé.  Il  est  assez  remar- 
quable de  voir  que  la  dernière  assise  du  grand  édifice  géognos- 
tique  ,  celle  dont  l'époque  de  formation  est  le  plus  rapprochée 
de  nos  temps,  ait  été  examinée  si  tard.  Comme  les  couches 
meubles  du  terrain  tertiaire  renferment  des  coquilles  fossiles 
dans  un  haut  degré  de  conservation  ,  c'est  ce  terrain  aussi 
qui  a  donné  lieu  au  perfectionnement  de  la  conchyliologie 
souterraine.  La  prédilection  que  dans  divers  pays  on  a  donnée 


32b  IND 

à  cette  science,  deviendra  également  utile  à  l'étude  des  fof-' 
mations  secondaires  et  intermédiaires ,  si  on  ne  néglige  pas 
de  combiner  les  caractères  zoologiques  avec  ceux  qu'offrent 
le  gisement  et  Tàge  relatif  des  roches. 

J"ai  exposé  plus  haut  les  motifs  pour  lesquels  j'ai  cru  devoir 
éviter  les  dénominations  de  premier,  de  deuxième  et  de  troi- 
sième terrain  marin,  ou  d'eau  douce.  J'ai  substitué  le  plus  sou- 
vent des  noms  géographiques  à  ces  dénominations  numéri- 
ques, très-susceptibles  de  faire  naître  des  idées  erronées.  Les 
formations  les  plus  récentes  sont  celles  dont  les  gisemens 
paroissent  avoir  été  le  plus  modifiés  par  des  circonstances 
locales.  Une  alternance  périodique  des  matières  calcaires  et 
siliceuses  (l'argile  même  renferme  près  de  70  pour  cent  de 
silice)  se  manifeste  jusque  dans  les  strates  qui  appartiennent 
à  une  même  formation.  Les  couches  hétérogènes  et  les  subdi- 
visions des  terrains  calcaires  ou  gypseux  prennent ,  dans  quel- 
ques pays,  un  accroissement  si  considérable  qu'on  les  prend 
pour  des  terrains  particuliers  ou  indépendans.  Il  en  résulte 
que  la  succession  et  le  parallélisme  des  roches  tertiaires,  si  ré- 
centes et  d'une  structure  si  complexe  ,  peut  différer  quelque- 
fois du  type  que  nous  leur  assignons  dans  le  tableau  des 
formations. 

Argiles  et  Grès  tertiaire  a  lignites   (Argile  plastique, 
Molasse  et  Nagelfluhe  d'Argovie). 

§.  35.  A  l'entrée  du  terrain  tertiaire ,  comme  aussi  au- 
dessous  de  la  craie,  entre  cette  roche  et  le  calcaire  juras- 
sique, nous  trouvons  des  dépôts  de  lignites  :  c'est  ainsi  que 
sur  la  limite  des  terrains  intermédiaires  et  secondaires  nous 
avons  vu  placé  un  grand  dépôt  de  houilles  (coal- mesures). 
Les  deux  terrains  secondaire  et  tertiaire  commencent  par 
des  amas  de  végétaux  enfouis.  A  mesure  que  1  on  avance  du 
grès  houiller  vers  les  formations  plus  récentes,  on  voit  les 
plantes  monocotylédones  peu  à  peu  remplacées  par  des  plantes 
dicotylédones  ;  il  y  en  a  encore  des  premières  (  endogénites 
de  M.Adolphe  Brongniart ,  mais  non  des  fougères)  au-dessus 
de  la  craie  jusque  dans  le  gypse  à  ossemens  :  cependant, 
en  général,  les  dicotylédones  (  exogénites)  dominent  dans  les 
dépôts  de  lignites.  Je  suis  moins  surpris  de  ce  mélange  que  de 


•  IND  521 

funiformilé  de  la  végétation  monocotylédone  de  l'ancieil 
inonde,  dont  nous  voyons  les  débris  dans  les  terrains  intermé- 
diaires et  dans  le  grès  houiller.  Au  milieu  des  forêts  de  l'Oré- 
noque,  qui  sont  extrêmement  riches  en  moaocotylédones, 
la  proportion  de  celles-ci  aux  dicotylédones  est ,  quant  à  la 
masse,  c'est-à-dire  au  nombre  des  individus,  comme  i  à  40. 
La  proportion  que  présentent  les  terrains  houilliers  n'est  donc 
pas  tropicale.  Auroit-elle  été  modifiée  parla  résistance  inégale 
qu'opposent  à  la  destruction  les  nïonocotylédones  et  les  dico*- 
tylédones  P 

Nous  réunirons  dans  le  grès  à  lignites  supérieur  à  la  craie, 
les  formations  parallèles  d'argiles  plastiques,  de  marnes  et 
sables  avec  lignites,  de  molasse  et  de  nagelfluhe. 

Dans  les  environs  de  Londres  et  de  Paris  il  n'y  a  qu'un 
lambeau  de  ce  terrain  ,  que  l'on  trouve  beaucoup  plus  déve- 
loppé dans  la  France  méridionale,  en  Suisse  et  en  Hongrie* 
La  eraie,  en  France  et  en  Angleterre,  est  recouverte  d'une 
couche  à'' argile  plastique,  sans  coquilles  et  sans  débris  organi- 
ques, entièrement  dépourvue  de  chaux,  renfermant  quelques 
silex  et  de  la  sélénite.  Une  couche  de  sable  sépare  l'argile 
plastique  des  fausses  glaises,  qui  sont  plus  siliceuses  et  noirâ- 
tres. Ces  dernières  renferment  du  lignite  ou  bois  fossile  bitu- 
mineux, provenant  de  plantes  monocotylédones  et  dicotylé- 
dones ;  du  vrai  succin  (d'après  la  découverte  de  M.  Bequerel)  ; 
du  bitume ,  et  (Soissonnois,  Montrouge ,  Bagneux)  un  mé- 
lange de  coquilles  pélagiques  et  fluviatiles  (  cyrènes  ,  cérites 
d'eau  douce  ou  potamides,  mélanies  ,  limnées ,  paludines). 
Ce  mélange  ne  s'observe  ordinairement  qu'à  la  limite  supé- 
rieure de  l'argile  plastique  et  des  lignites.  Les  coquilles  ma- 
rines ressemblent ,  d'après  M.  Prévost,  à  celles  du  calcaire 
grossier.  Couches  intercalées  :  sables  et  grès  avec  coquilles, 
masses  de  calcaire  coucrétionné  avec  cristaux  de  strontiane 
sulfaté.  Fossiles,  d'après  MM.  d'Audebard  de  Férussac  et 
Brorigniart  :  Planorbis  rotundatus ,  Paludina  virgula,  P.  unico- 
lor,  Melanopsis  buccinoidea,  Nerita  globulosa,  Melania  triticea, 
—  Ceritiumfunaium,  Ampullaria  depressa ,  Ostrea  bellovaca  ,  etc. 

En  Angleterre,  l'argile  plastique,  qu'il  ne  faut  pas  con- 
fondre avec  le  London  claj  (  représentant  le  calcaire  grossier 
de  Paris  )  ni  avec  VOxford  ou  Clunch  elay  (  de  la  formation 
23.  ai 


^22  IND 

jurassique),  abonde  plus  en  saWes  qu'en  argile:  elle  ren- 
ferme des  lignitcs  (  Isle  de  Wight,  Newhaven  ) ,  et,  ce  qui 
est  remarquable  à  cause  de  l'analogie  de  cette  formation  avec 
les  molasses  d'Argovie  et  de  Hongrie,  un  grès  friable  (Stut- 
land  en  Dorsetshire).  On  y  a  trouvé,  d"après  MM.  Webster 
et  Bucklaud,  des  impressions  de  feuilles,  des  fruits  de  pal- 
mier, des  cyclades  {Cyclas  cuneiformis ,  C.  deperdita) ,  des 
turritelles,  des  cérites  {Cerilium  melanoides ,  C.  inlermedium) 
et  des  huitres  (  Ostrea  pulchra ,  O.  tennis). 

Le  terrain  à  succin  de  laPoméranie  et  de  la  Prusse  ,  vraisem- 
blablement superposé  à  la  craie  ,  est  composé  d'argile,  de  li- 
gnites  et  de  nodules  de  succin.  Les  corps  organisés  qu'il  ren- 
ferme ,  ont  été  récemment  examinés  par  M.  Schweigger.  Par 
son  gisement,  comme  Fobserve  judicieusement  M.  Brongniart, 
il  appartient  à  la  formation  §.  35. 

Les  grès  à  lignites  (molasse  etmaolgno)  sont  répandus  dans 
les  plaines  de  la  Hongrie  ,  comme  dans  le  grand  bassin  de 
la  Suisse,  entre  les  Alpes  et  le  Jura,  ou  plutôt  entre  le  lac 
d'Annecy  et  celui  de  Constance.  La  formation  de  Hongrie, 
que  M.  Beudant  a  fait  connoître,  est  géognostiquement  la 
plus  importante ,  parce  qu'on  la  voit  superposée  au  calcaire 
jurassique  (Sari  Sap  aux  environs  de  Gran,  et  bords  du  lac 
Balaton  ).  Elle  est  Immédiatement  recouverte  (près  de  Bude) 
de  calcaires  coquiUiers  analogues  au  calcaire  grossier  de  Paris. 
Elle  est  composée  de  poudingues  (nagellluhc)  et  de  brèches 
calcaires  qui  alternent  avec  des  grès  micacés,  friables,  schis- 
teux, à  petits  grains  anguleux  de  quarz,  avec  dessables  et  avec 
des  lits  d'argile.  Elle  renferme  de  grands  dépôts  de  lignites 
(Csolnok,  au  sud  de  Gran  ,  Wandorf  près  de  Œdenbourg  ), 
des  sources  de  bitume,  des  minerais  granuleux  de  fer  ])ydraté, 
des  coquilles  d'eau  douce  et,  au  contact  avec  le  calcaire  gros- 
sier superposé,  des  coquilles  marines.  Le  terrain  arénacé  de  la 
Suisse,  qui  comprend  la  molasse  et  le  nageltluhe,  se  compose, 
d'après  les  nouvelles  recherches  de  MM.  de  Charpentier  et 
Lardy  (en  commençant  par  les  couches  inférieures),  i."  de 
calcaires  sableux,  un  peu  ferrugineux,  passant  souvent  à  un 
véritable  grès  à  ciment  calcaire  ;  2.°  de  poudingue  (  nageljluhe) 
enchâssant  des  fragmens  calcaires  et  siliceux,  toujours  arron- 
dis et  agglutinés  par  un  ciment  calcaire:  3."  de  ?no/asse  ou  grès 


IND  323 

àpetifs  grains  de  tjuarzet  à  ciment  argileux  ou  marneux.  Des 
filons  de  spath  calcaire  traversent  souventle  nagelfluhe,  et  la 
molasse  (grès  fin  et  friable)  alterne  avec  des  lits  de  marnes-. 
Le  nagelfluhe  qui  empâte  à  la  fois  des  galets  de  porphyre  et 
de  calcaire  compacte  (  Rigi ,  Fi'ibourg,  Entlibuch) ,  n'est  pas 
toujours  recouvert  par  la  molasse  ;  et  M.  de  Buch  a  remarqué 
depuis  long -temps  qu'entre  Habkern  et  le  petit  Emmethal  la 
molasse  alterne  plusieurs  fois  avec  le  nagelfluhe.  Tout  ce  ter- 
rain ,  dont  la  surface  est  généralement  à  nu  ,  git  immédiate- 
ment,  vers  le  nord  (Arau,  Porentruy,  Boudry j ,  sur  le  cal-* 
caire  jurassique;  vers  le  sud,  sur  le  calcaire  alpin  (environs 
de  Genève  et  Teufenbachtobel,  au  sud-ouest  du  Rigi).  D'après 
l'inclinaison  des  couches  quelques  géognostes  célèbres  ont  re- 
gardé long-temps  le  nagelfluhe  comme  antérieur  au  calcaire 
alpin.  M.  Keferstein  crf/.^  encore  la  molasse  (mergelsandstein) 
inférieure  à  la  craie,  et  même  au  calcaire  jurassique.  Un  cal- 
caire fétide  et  bitumineux,  un  gypse  fibreux  et  argileux,  al- 
ternant avec  des  marnes  qui  renferment  des  ammonites  ,  un 
calcaire  compacte  briin-jaunàtre  ,  et  deslignites,  forment  des 
couches  subordonnées  à  la  molasse  de  la  Suisse.  Le  dépôt  de 
lignites  qu'on  exploite  près  de  S.  Saphorin,  entre  Vevay  et 
Lausanne,  est  recouvert  de  nagelfluhe;  celui  de  Paudex  est 
intercalé  à  la  molasse.  Tout  ce  terrain  renferme,  en  Suisse, 
à  la  fois-d es  coquilles  marines  (ammonites,  cythérées,  donax), 
des  coquilles  d'eau  douce  (lymnées,  planorbes) ,  des  palma-» 
cites  à  feuilles  flabelliformes  (Montrepos),  et  des  ossemens 
de  quadrupèdes  (  Aarberg,  Estavayer,  Kœpfnach  sur  les  bords 
du  lac  de  Zuric),  ossemens  qui,  selon  les  recherches  de  M. 
Meisaer,  appartiennent  à  VAnaplotherium ,  au  Mastodon  an- 
gustidens  et  au  Castor.  Dans  la  molasse  de  Creniin  et  Combre- 
mont  une  brèche  coquillière  marine  repose  sur  un  calcaire 
brun,  rempli  de  planorbes.  M.  Brongniart,  dès  l'année  1817, 
a  insisté  sur  l'analogie  qu'offre  l'argile  plastique  de  Paris  avec 
une  partie  de  la  formation  de  nagelfluhe  et  de  molasse  de 
Suisse,  si  long-tempS  confondue  avec  le  grès  bigarré  d'Alle- 
magne. Ce  savant  pense  aussi  que  les  molasses  qui  renferment 
des  ossemens  de  mastodontes  et  A^anthracoterium  (Cadibona 
prés  de  Savone)  sont  plus  récentes  encore  que  l'argile  plas- 
tique; qu'elles  sont  peut-être  ou  liées  au  calcaire  grossier  quî 


3M  IND 

est  souvent  arénacé ,  ou  parallèles  au  gypse  de  Montmartre.  Les 
ossemens  fl'aiiimaux  vertébrés,  trouvés  rarement  dans  l'argile 
plastique  de  Taris  et  de  Londres  (prèsd'Auteuil  etdeMargate), 
n'ont  point  encore  été  dét«;rininés  zoologiquement ,  et  jus- 
qu'ici i\l.  Cuvier ,  dans  la  suite  de  ses  importantes  recherches 
sur  le  gisement  des  fossiles,  n'a  reconnu  des  débris  de  mam- 
mipres  terrestres  que  dans  les  terrains  postérieurs  au  calcaire 
grossier.  Il  se  pourroit,  d'après  ces  considérations,  que  les 
molasses  ou  grès  à  lignites  de  Hongrie  fussent  antérieurs  <à 
ceux  de  la  Suisse;  mais,  comme  dans  ce  dernier  pays  les 
formations  de  calcaire  grossier  (parisien)  et  de  gypse  à  osse- 
mens ne  se  sont  presque  pas  développées,  et  qu'en  général 
ralternance  fréquente  des  roches  tertiaires  rend  leur  paraZ- 
lélisme  un  peu  incertain,  il  se  pourroit  aussi  que  la  longue 
époque  de  la  formation  de  molasse  et  de  nagelfluhe  en 
Suisse  (celle  des  couches  inférieures  et  supérieures,  aréna- 
cées,  marneuses,  calcaires  et  gypseuses )  eût  été  contempo- 
raiue  aux  trois  formations  d'argile  plastique,  de  calcaire 
grossier  et  de  gypse  des  environs  de  Paris. 

Le  terrain  qui  nous  occupe  est ,  selon  les  observations  ré- 
centes de  M.  Boue,  extrêmement  développé  dans  le  sud- 
ouest  de  la  France ,  de  Libourne  à  Agen  ,  surtout  au  nord  de 
la  Dordogne  et  de  la  Gironde,  où  il  repose  sur  la  craie.  Il  y 
est  composé  (en  commençant  par  les  couches  supérieures)  de 
grès  calcaires  remplis  de  débris  de  coquilles  et  d'ossemens 
d'animaux  vertébrés,  de  petites  couches  de  fer  globulaire, 
de  marnes  grises  et  verdàtres,  de  calcaires  jaunâtres  avec 
cérites.  Des  dépôts  de  lignites  y  ont  été  reconnus  par  M. 
Bi'ongniart  {Descr.  géoL,  art.  II,  §.  i  )  ;  mais  ils  n"y  sont  pas 
nombreux,  et  la  position  de  cette  formation  arénacée  entre 
la  craie  et  le  calcaire  grossier  de  Bordeaux  la  caractérise 
suffisamment  comme  molasse.  Le  grès  à  lignites  peut  locale- 
ment être  dépourvu  de  lignites,  de  même  que  le  grès  rouge 
ou  houiller  est  souvent  dépourvu  de  houilles.  Comme  presque 
foutes  les  formations  secondaires  ont  leurs  grès  et  leurs  con- 
glomérats ,  il  ne  faut  pas  regarder  comme  appartenant  à  la 
même  formation  §.  35  tous  les  nagelfluhe  de  l'Europe  (pou- 
dingues  polygéniques  de  la  classification  de  M.  Brongniart)  : 
il  y  en  a  qui  ne  paroissent  que  des  formations  locales  et  peu 


IND  3^5 

étendues;  d'autres  (Salzbourg  et  S.  Gall?),  selon  l'observa- 
tion judicieuse  de  M.  Boue,  sont  peut-être  plus  anciens  que 
la  craie  et  le  calcaire  du  Jura.  D'ailleurs  l'analogie  qu'offrent 
certaines  couches  placées  entre  le  quadersandstein  et  la  craie 
avec  celles  qui  sont  placées  entre  la  craie  et  le  gypse  à  os- 
semens ,  est  un  phénomène  bien  digne  de  l'attention  des  géo- 
gnostes. 

D'immenses  dépôts  de  sables ,  d'argile  et  de  lignites  avec 
mellite  (Artern)  et  avec  succin  (  bernstein  de  Muskau  et 
bernerde  deZittau),  couvrent  une  partie  de  rAllemagne.  On 
y  trouve  des  lits  de  grès  extrêmement  quarzeux  (Carlsbad, 
Habichtswald  ,  Meissner,  Wilhelmshohe  près  Cassel ,  Wolfs- 
"  eck),  surtout  là  où  des  coulées  de  basaltes  sont  superposées 
à  l'argile  avec  lignites.  A  cause  de  cette  proximité  on  a 
donné  anciennement  à  ces  grès  ,  qu'on  pourroit  minéralo- 
giquement  confondre  avec  les  grès  également  quarzeux  du 
grès  bigarré  et  avec  ceux  de  Fontainebleau  ,  la  déuomînation 
impropre  de  grès  trappéens  {trapp-sandstein)^  Les  sables  à 
grenats  (granatensand  ) ,  c'est-à-dire  les  argiles  et  marnes  de 
Meronitz  et  de  Podsedlitz  en  Bohème ,  qui  renferment  des 
pyropes  disséminés,  appartiennent- ils  à  cette  même  forma- 
tion §.  55,  ou,  comme  plusieurs  phénomènes  observés  dans 
la  Cordillère  du  Mexique  et  à  File  de  la  Graciosa  {archipel 
des  Canaries)  mêle  feroient  supposer,  appartiennent-ils  k 
des  argiles  basaltiques  du  terrain  igné  ? 

Calcaire  de  Paris  (Calcaire  grossier  ou  Calcaire  a  cérites), 

FORMATION    PARALLliLE  A  l'ArGILE  DE  Lo>'DRES     EX   AU    CaLCAIRE 
ARÉNACÉ   DE  BoGNOR, 

§.36.  Cette  formation  très-compliquée,  retrouvée  en  Hon- 
grie ,  en  Italie  et  dans  le  nouveau  continent,  a  été  entièrement 
méconnue  avant  la  publication  de  la  Géographie  minéralogique 
des  environs  de  Paris.  Le  calcaire  grossier,  séparé  par  une 
couche  de  sable  de  l'argile  plastique,  consiste,  d'après  M. 
Brongniart,  dans  le  bassin  de  la  Seine  ,  de  bancs  minces  et 
très -régulièrement  alternans  ,  de  calcaires  plus  ou  moins 
durs,  et  de  marnes  argileuses  ou  calcaires.  Sur  des  étendues 
de  terrains  très-considérables,  les  coquilles  fossiles  sont  géné- 
ralement les  mêmes  dans  les  couches  correspondantes,  et 


32S  IND 

présentent,  d'un  système  de  couches  à  un  autre  système,  des 
difTérences  d'espèces  assez  notables.  Ce  phénomène  d'unifor- 
mité dans  la  distribution  des  animaux  caractérise  surtout 
le  teri'ain  tertiaire  ;  on  commence  déjà  à  le  reconnoitre' 
dans  les  différens  bancs  qui  composent,  en  Suisse  et  en  Angle- 
terre ,  la  formation  jurassique.  Les  couches  inférieures  du 
calcaire  grossier  de  Paris  sont  chloriteuses  (glauconeuses  ), 
arénacées,  remplies  de  madrépores  et  de  nummulites.  Dans 
les  couches  moyennes  on  trouve  beaucoup  d'empreintes  de 
feuilles  et  de  tiges  de  végétaux  {Endogenites  échinât  us ,  Fla- 
iellites  parisiensis ,  Pinus  Defrancii ,  d'après  le  travail  de  M. 
Adolphe  Brongniart  sur  la  Végétation  fossile),  des  millio- 
litcs,  des  ovulites,  des  cythérées,  mais  presque  point  de  cé- 
rithes.  Les  couches  supérieures  offrent  des  lucines,  des  am- 
pullaires,  des  corbulcs  striées,  et  une  grande  variété  (près 
de  soixante  espèces)  de  cérithes  ;  mais,  en  général,  cette 
dernière  assise  est  moins  abondante  en  corps  fossiles  que  les 
assises  moyenne  et  inférieure,  dans  lesquelles  MM.  Defrance 
et  Brongniart  ont  recueilli  près  de  600  espèces  de  coquilles. 
Le  fameux  banc  coquillier  de  Grignon  et  les  fossiles  du 
Falun  de  Tourraine  appartiennent  principalement  aux  assises 
moyennes.  Dans  celles-ci  et  dans  le  système  des  couches  su- 
périeures les  bancs  calcaires  sont  quelquefois  entièrement 
remplacés  par  des  grès  ou  des  masses  de  silex  corné  (horn- 
stein).  Ce  sont  ces  grès  qui  ont  offert  (entre  Pierreîaie  et 
Franconville  près  Beaachamp  )  ,  à  MM.  Gillet  de  Laumont  et 
Beudant,  un  mélange  de  coquilles  marines  avec  des  coquilles 
d'eau  douce  (limnées  et  paludines).  Les  fossiles  du  calcaire 
parisien,  parmi  lesquels  on  ne  trouve  jamais  de  bélemnites, 
d'orthocératifes ,  de  baculites  oif  d'ammonites,  diffèrent  en- 
tièrement de  ceux  de  la  craie. 

Les  dépôts  coquilliers  qui  représentent  dans  les  diEFérentes 
parties  de  l'Europe  la  formation  que  nous  décrivons,  sont 
les  uns  identiques  de  composition  et  d'aspect  (plaines  de 
Vienne  décrites  par  M.  Prévost  ;  collines  de  Pest  et  de  Teteny 
tn  Hongrie»,  décrites  par  M.  Beudant),  tantôt  seulement 
.''nalogues  par  leur  position  géognoslique  et  par  les  débris 
fossiles  qu'ils  renferment  (Angleterre).  Les  calcaires  gros- 
^çrs  de  \i\  Hongrie  ,  pétris  de  cérithes ,  de  turritelles ,  d'ampuL 


IND  327 

iaires,  de  venus  et  de  crassatclles,  peureconnoissables,  parce 
qu'il  n'en  est  resté  que  le  moule,  offrent  jusqu'aux  caractères 
en]p3'riques  les  plus  minutieux  auxquels  on  rcconnoit  le  cal- 
caire parisien.  Ils  sont  liés  à  des  sables  coquilliers  (Czerhat, 
Raab),  qui  sont  en  partie  mêles  de  grains  verts  et  qui  ont 
beaucoup  d'analogie  avec  les  dépôts  coquilliers  des  plaines 
de  la  Lombardie. 

Les  calcaires  grossiers  de  la  Dordogne  et  de  la  Gironde, 
géographiquement  plus  rapprochés  du  bassin  de  la  Seine,  ne 
montrent  pas  toujours  cette  ressemblance  de  composition  que 
nous  venons  de  signaler  dans  ceux  de  la  Hongrie.  Ils  sont, 
d'après, les  observations  récentes  de  M.  Boue,  composés  de 
deux  assises  bien  distinctes.  L'inférieure  est  peu  coquillière 
ou  à  corps  fossiles  brisés;  elle  renferme  du  calcaire  com- 
pacte blanc -jaunâtre,  quelquefois  tachant  comme  la  craie, 
des  marnes  et  des  bancs  de  galets  quarzeux.  L'assise  supé- 
rieure est  un  calcaire  sableux,  extrêmement  coquillier,  et 
ressemblant  presque  quelquefois  à  une  molasse  brunâtre. 

En  Angleterre ,  d"après  les  recherches  de  MM.  Buckland , 
"VVebster  et  Sowerby ,  ïargile  de  Londres  (  London  clay  )  est 
non-seulement,  par  sa  superposition  à  l'argile  plastique,  une 
formation  parallèle  au  calcaire  de  Paris  ;  elle  renferme  aussi 
presque  toutes  les  espèces  de  coquilles  qui  semblent  appar- 
tenir plus  particulièrement  aux  couches  inférieure*  de  ce 
calcaire.  Dans  le  bassin  de  la  Tamise ,  la  formation  que  les 
géognostes  anglois  désignent  communément  sous  le  nom  de 
London  claj;  n'est  qu'un  dépôt  d'argile  et  de  marnes  brunâ- 
tres, renfermant  du  fer  sulfuré  et  quelques  lames  de  sélénite  ; 
mais,  sur  d'autres  points  de  l'Angleterre,  cette  couche  se 
lapproche  beaucoup  plus,  par  sa  composition  minéralogique, 
du  calcaire  grossier.  Elle  présente ,  d'après  MM.  Conybeare 
et  Philipps,  sur  les  côtes  de  Sussex,  à  Bognor  et  près  de  Har- 
■wich  (Essex),  des  lits  de  calcaire  compacte  et  sableux.  On  y 
a  trouvé ,  outre  les  corps  fossiles  propres  à  la  formation  qui 
lui  est  analogue  dans  le  bassin  de  Paris,  des  empreintes  de 
poissons,  des  ossemens  de  tortues  et  de  crocodiles  (Islington), 
une  espèce  d'ammonites  (Ammonites  acutus,  à  Minstercliff) 
et  des  lignites.  Le  Cerithium  giganleum ,  assez  commun  dans 
l'argile  de  Londres^  n'appartient  en.  France  qu'à  l'assise  in- 


528  IND 

férieure  du  calcaire  grossier,  qui  est  d'ailleurs  dépourvue 
de  toute  autre  espèce  de  cérithes.  Le  London  claj,  dans  le- 
quel on  assure  avoir  trouvé  du  succin  (Holderness  dans  le 
yorckshire),  paroît  avoir  des  rapports  plus  intimes  avec 
l'argile  plastique  (grès  tertiaire  à  lignitcs)  que  le  calcaire 
grossier  de  Paris. 

M.  Brongniart  rapporte  à  cette  formation  (§.  36)  la  ma- 
jeure partie  des  terrains  calcaréo-trappéens  du  Vicentin  (Val 
Ronca,  Montecchio  maggiore  .  Monte  Bolca  ) ,  la  colline  de 
la  Supergue  de  Turin,  le  cap  S.  Hospice  près  de  Nice,  la 
Grande -Terre  de  la  Guadeloupe,  etc.  Les  célèbres  impres- 
sions de  poissons  de  Monte  Bolca,  sur  lesquelles  M.  de  Blain- 
ville  a  entrepris  un  travail  intéressant,  ne  se  trouvent,  d'a- 
près les  recherches  de  M.  Maraschini,  pas  proprement  dans 
le  calcaire  grossier,  mais  (comme  on  le  reconnoît  surtout 
à  Novale  et  à  Lugo  près  de  Salceo)  dans  un  calcaire  fétide 
et  schisteux  ,  séparé  du  calcaire  grossier  par  une  couche 
d'argile  avec  lignites.  Cette  position  me  semble  lier  les  marnes 
bitumineuses  (de  Monte  Bolca)  avec  empreintes  de  poissons 
et  de  feuilles  aux  marnes  du  gypse  à  ossemens  de  Montmartre, 

Dans  l'Amérique  équinoxiale,  où  je  n'ai  point  reconnu  les 
formations  de  craie  et  de  grès  à  lignites  ,  les  collines  qui 
bordent  sur  quelques  points  la  Cordillère  de  Venezuela,  du 
côté  de  la  mer  (Castillo  de  San  Antonio  de  Cumana,  Cerro 
del  Barigon  dans  la  péninsule  d'Araya ,  Vigia  de  la  Popa 
près  du  port  de  Carthagène  des  Indes),  me  paroissent  ap- 
partenir au  calcaire  grossier.  Ces  collines  sont  composées, 
3.°  d'un  calcaire  compacte  et  arénacé  gris -blanchâtre,  dont  les 
couchas,  tantôt  horizontales,  tantôt  irrégulièrement  incli- 
nées, ont  cinq  k  six  pouces  d'épaisseur  (quelques  bancs  sont 
presque  dépourvus  de  pétrifications,  d'autres  sont  pétris  de 
madrépores,  de  cardites  ,  d'ostracites  et  de  turbinites,  et 
mêlés  de  gros  grains  de  quarz)  ;  2.°  d'un  s,rès  calcaire,  dans 
lequel  les  grains  de  sable  sont  plus  fréquens  que  les  coquilles 
(plusieurs  bancs  de  ce  grès  enchâssent,  non  des  paillettes 
de  mica  ,  mais  des  rognons  de  mine  de  fer  brun  ,  et  deviennent 
si  siliceux  qu'ils  ne  font  presque  plus  d'effervescence  avec 
les  acides,  et  que  les  corps  fossiles  y  disparoissent  entière- 
ment) ;  3.°  de  hancs  d'argile  endurcie  avec  séJénite.  L'assise 


IND  329 

calcaire  ,  dont  j'ai  déposé  de  grands  échantillons  dans  le  ca- 
binet d'histoire  naturelle  de  Madrid,  offre  1  entrePunta  Gorda 
et  ies  ruines  du  chàti-au  de  Santiago  d'Araya)  une  innom- 
brable quantité  de  solens,  d'ampullaires,  d'huitres  et  de  po- 
lypiers lithophytes,  en  partie  disposés  par  familles.  Cette  for- 
mation tertiaire,  composée  de  calcaires  coquilliers ,  avec 
grains  de  quarz ,  de  marnes  argileuses  et  degrés  calcaire,  se 
trouve  géographiquement  liée  aux  terrains  tertiaires  des  îles 
opposées  aux  côtes  de  Cumana,  par  exemple,  de  celles  de 
la  Guadeloupe  et  de  la  Martinique.  Elle  repose  tantôt  immé- 
diatement sur  le  calcaire  alpin  (Punta  Delgada),  tantôt  sur 
les  argiles  salifères  d'Araya,  dont  j'ai  parlé  plus  haut  (§.  28, 
p.  275). 

Calcaire  siliceux  et  Gypse  a  ossemens  ,   alternant  avec  des 
MARNES  (  Gypse  de  Montmartre). 

§.  07.  D'après  les  principes  de  classification  que  j'ai  suivis 
dans  ce  travail  ,  j'aurois  pu  séparer  le  calcaire  siliceux 
(Champigny)  du  gypse  alternant  avec  des  marnes  appelées 
marines  et  d'eau  douce  ;  mais,  n'ayant  pu,  dans  le  cours  de 
mes  voyages,  faire  des  terrains  supérieurs  à  la  craie  un  objet 
particulier  de  mes  études,  je  n'ai  rien  voulu  changer  aux 
coupes  générales  indiquées  dans  l'ouvrage  de  MM.  Brongniart 
et  Cuvier. 

Le  calcaire  siliceux  du  bassin  de  Paris,  qui  est  tantôt  tendre 
et  blanc,  tantôt  grisâtre,  à  grains  très-fins  et  caverneux,  est 
comme  pénétré  dans  toute  sa  masse  de  silex  ou  matière  quar- 
zeuse.  11  est  intimement  lié  ,  \ers  le  haut ,  au  gypse,  par  les 
marnes  argileuses  et  gypseuses  qui  alternent  également  avec 
le  calcaire  siliceux  et  le  gypse  à  ossemens  (  butte  de  la  Briffe 
de  S.  Denys;  Crecy;  Coulommiers)  ;  vers  le  bas,  au  calcaire 
grossier ,  dont  les  dernières  couches  offrent  aussi  quelquefois 
des  infiltrations  siliceuses  :  mais  les  silex  cornés  du  calcaire 
grossier  renferment  des  coquilles  marines,  tandis  que  les 
calcaires  siliceux  du  terrain  gypseux  qui  servent  de  meu- 
lières, présentent  dans  leurs  bancs  supérieurs  des  coquilles 
lluviatiles.  J'ai  déjà  fait  observer  plus  haut  (§.  28,  p.  283) 
que  sur  le  dos  des  Cordillères  du  Pérou,  à  1800  toises  de 
hauteur,   une  formation  calcaire  très -ancienne  (le  calcaire 


r 

alpin)  oflTre  ce  même  phénomène  curieux  dinfiUrations  sili- 
ceuses. Des  modifications  analogues  dans  la  composition  des 
roches  et  dans  le  mélange  chimique  des  matières  ont  eu  lieu 
à  des  époques  très-différentes.  Les  marnes  calcaires  qui  al- 
ternent avec  le  calcaire  siliceux  de  Paris,  renferment  une 
magnésite  remarquable,  que  MM.  Brongniarl  et  Berthier  ont 
fait  connoitre,  et  qui  est  un  silicate  de  unignésie  hydraté 
presque  pur.  Les  infiltrations  siliceuses  de  cette  formation 
passent  quelquefois  à  une  calcédoine  divisée  par  plaques,  et 
à  un  hornstein  mamelonné  coloré  en  rouge,  en  violet  et  en 
brun. 

Le  terrain  gypseux  est  composé,  dans  le  bassin  de  Paris, 
de  couches  alternantes  de  marnes  schisteuses  et  de  gypse 
saccharoïdc  compacte  ou  feuilleté.  Il  renferme  au  centre 
et  dans  sa  plus  grande  masse  des  productions  terrestres  et 
d'eau  douce  ,  mais  vers  ses  limites  supérieures  et  irtférieures, 
tant  dans  le  gypse  que  dans  les  marnes,  il  offre  des  productions 
marines.  L'assise  inférieure  de  la  formation  gypseuse  est  carac- 
térisée par  des  silex  ménilites  et  de  gros  cristaux  de  sélénite 
lenticulaires  et  jaunâtres.  Les  bancs  de  marnes  deviennent 
plus  rares  vers  le  milieu  ,  où  Ton  trouve  plus  particulière- 
ment la  strontiane  sulfatée  et  des  squelettes  de  poissons. 
L'assise  supérieure  est  caractérisée  par  la  multitude  d'osse- 
mens  de  mammifères  terrestres  qui  sont  aujourd'hui  inconnus 
sur  le  globe  (Palœotheriuni  crassum  ,  P.  médium,  P.  magnum^ 
P.  lalum ,  P.  curtum  ,  Anaplotheriiim  commune,  A.  secundarium  , 
A.  marinum  ,  le  Chaeropotame  et  VAdapis  de  M.  Cuvier)  : 
par  des  os  d'oiseaux,  de  crocodiles,  de  tryonix,  de  poissons 
d'eaxi  douce:  elle  est  recouverte  de  bancs  de  marnes  calcaires 
et  argileuses,  renfermant,  les  uns  du  bois  de  palmier,  des 
planorbes,  des  limnées  et  des  cythérées  (Cjtherea  elegans)  ; 
les  autres,  des  cérites  {Ceritliinm  plicatum  ,  C.  cinctum),  des 
venus  et  de  grandes  huîtres  très-épaisses  (Ostreahippopus ,  O. 
pseudocliama,  O.  longirostris ,  O.  cjatula).  Une  couche  de 
marne  verte  sépare,  vers  la  limite  supérieure  de  la  formation 
gypseuse,  les  coquilles  d'eau  douce  des  coquilles  pélagiques. 
Vers  le  bas  le  gypse  même  (n.°  26  de  la  troisième  masse  de 
Montmartre)  offre  des  fossiles  marins.  Quelquefois  cette  for- 
mation ne  s'est  pas  développée  en  entier  j   les  gypses  man- 


IND  33i 

quent,  et  l'on  ne  reconnoît  sa  place  que  par  des  marnes  vertes 
accompagnées  de  strontianc.  Comme  le  gypse  à  ossemens  n'a 
encore  été  étudié  qu'en  très-peu  d'endroits  (bassin  de  Paris, 
Puy-en-Vélay,  Aix  en  Provence),  les  caractères  que  nous 
attribuons  à  cette  formation  si  importante  pour  la  géogonie 
ou  pour  l'histoire  des  anciennes  révolutions  de  notre  planète, 
ne  sont  vraisemblablement  pas  assez  généraux. 

Grès  et  Sables  supérieurs  au  gypse  a  assEjiENS  (  Grès  de 
Fontainebleau). 

§.  58.  Ce  terrain  est  formé  de  deux  assises  :  l'une,  infé- 
rieure, sans  coquilles;  l'autre,  supérieure,  renfermant  des 
coquillt's  marines.  Des  sables  siliceux  et  des  grès  formertt 
des  bancs  très-épais,  très- étendus,  mais  dont  les  surfaces  ne 
sont  pas  parallèles.  Dans  l'assise  dépourvue  de  coquilles  en 
place  (celles  de  Villers-Cotterets  et  de  Thury  paroissent  à  M. 
ï3rongniart  usées,  comme  si  elles  avoient  été  roulées),  on 
trouve  sur  quelques  points  beaucoup  de  paillettes  de  mica, 
des  rognons  de  fer  brun  disposés  par  lits,  un  peu  de  gypse, 
beaucoup  de  marnes  argileuses  et  des  infiltrations  de  chaux 
carbonatée  (forêt  de  Fontainebleau).  Les  assises  supérieures, 
qui  renferment  des  coquilles  marines  {Olua  mitreola,  Ceri- 
thium  cristatum ,  C.  lamellosum ,  Corbula  rugusa,  Ostrea  Jlahel- 
lula) ,  passent  quelquefois  à  un  calcaire  arénacé  (Romain- 
ville,  Montmartre).  L'immense  terrain  tertiaire  de  l'Italie . 
celui  des  collines  subapennines ,  avec  ossemens  de  cétacés  et 
Ostrea  hippopus,  qui  s'étend  depuis  Asti  en  Piémont  jusqu'à 
Monteleone  en  Calabre ,  et  que  M.  Brocchi  a  si  bien  décrit, 
appartient  en  grande  partie  ,  d'après  les  discussions  de  MM. 
Prévost  et  Brongniart,  aux  grès  et  sables  qui  reposent  sur 
le  gypse  de  Montmartre. 

Terrain  lacustre  avec  Meulières  poreuses  ,  supérieur  au 
Grès  de  Fontainebleau  (Calcaire  a  lymnbes). 

§.  3g.  C'est  le  grand  terrain  d'eau  douce  supérieur,  com- 
posé sur  quelques  points  de  sables  argilo  -  ferrugineux  ,  de 
marnes  et  de  meulières  siliceuses,  criblées  de  cavités  (avec 
coquilles,  plateau  de  Montmorency j  sans  coquilles^  LaFerté- 


532  ITVD 

Bous-Jouarre);  sur  d'autres,  de  silex,  de  marnes  et  de  calcaires 
compactes  (Chàteau-Landon).  Ces  calcaires  renferment  des 
potauiides  ,  des  lymnées,  des  planorbes  ,  des  bulimes,  des 
hélix,  et  beaucoup  d'empreintes  de  végétaux  [Culmiles  ano- 
malus,  Lycopodites  sqitammatiis ,  Chara  medicaginula  ,  Nj'mphœa 
Aretiiusœ  de  M.  Brongniart  fils).  Nous  renvoyons  pour  l'his- 
toire du  grand  terrain  lacustre  ,  qui  a  déjà  été  retrouvé  dans 
presque  toutes  les  parties  de  l'Europe,  à  la  2/  édition  de  la 
Description  géologique  des  environs  de  Paris    [art.  VIII), 

Une  contrée  du  globe  où  la  plupart  des  formations  ter- 
tiaires ont  acquis  un  grand  développement,  et  où,  pour 
cette  même  cause,  ces  formations  sont  restées  assez  distinctes, 
nous  a  servi  de  type  dans  le  tableau  géognostique  des  forma- 
tions tertiaires  ;  mais  il  ne  faut  point  oublier  que  dans  d'autres 
contrées  ce  développement  s'arrête  à  l'argile  plastique  ou  au 
calcaire  grossier  :  alors  le  gypse  de  Montmartre  et  le  grés 
de  Fontainebleau  ne  paroissent  indiqués  que  par  les  places 
qu'occupent  les  marnes  et  les  sables.  Le  terrain  tertiaire 
réunit  des  formations  qui  se  confondent  partout  où  elles 
n'ont  pas  pris  un  égal  accroissement,  et  où  la  fréquente  alter- 
nance des  marnes  tend  à  masquer  les  limites  des  différentes 
assises.  Il  me  resteroit  à  parler  des  dépôts  d'allusion ,  qui  pré- 
sentent d'importans  problèmes  sur  l'origine  des  sables  dans 
les  déserts  et  les  steppes  (provenant  du  grès  rouge,  du  grès 
bigarré  ,  du  quadersandstein,  du  terrain  tertiaire?);  mais  ces 
dépôts  si  variés  dans  leur  alternance,  ne  peuvent  être  l'objet 
d'un  travail  sur  la  superposition  des  roches. 

Terrains  volcaniques. 

J'ai  fait  succéder,  par  des  motifs  que  j'ai  exposés  plus 
haut,  au  terrain  intermédiaire  (Uebergangsgebirge) ,  comme 
par  mode  de  bisection ,  les  formations  secondaires  et  volca- 
niques. Cet  an-angement  ofl're  l'avantage  de  rapprocher  les 
porphyres  et  les  syénites  de  transition,  avec  leurs  couches  hui- 
leuses et  pyroxéniques  intercalées  (  §§.  -20  et  24,  Holmstrand 
en  Norwége  ;  Andes  de  Popayan  ;  Cordillères  du  Mexique), 
des  porphyres  ,  des  amygdaloïdes  et  des  dolérites  du  grès 
rouge  (§.  26 ,   Noyant  et  Figeac  en  France  j  Ecosse) ,  des  tra- 


IND  533 

chytes  ,  des  phonolitlies  et  des  basaltes  du  terrain  exclusive- 
ment pjrrogène.  Dans  un  tableau  de  gisement  ,  c'est  déjà 
gagner  beaucoup  que  de  ne  pas  séparer  ce  qui  se  trouve  lié 
dans  la  nature  par  des  affinités  vraiment  géognostiques. 

On  peut  considérer  le  groupe  de  roches  que  l'on  réunit 
généralement  dans  le  terrain  volcanique ,  sous  un  double 
point  de  vue,  ou  d'après  une  certaine  conformité  observée 
dans  leur  gisement  et  leur  superposition,  ou  d'après  les  rap- 
ports de  leur  composition  et  de  leur  origine  communes. 
Dans  le  premier  cas,  sans  opposer  le  mode  de  formation  des 
trachytes  et  des  basaltes  a  celui  des  terrains  primitifs  et  in- 
termédiaires,  on  examine  la  place  que  doivent  occuper, 
comme  termes  de  la  série  géognostique ,  les  grands  systèmes 
de  roches  composées  de  feldspath,  de  pyroxène,  d'amphi- 
bole, d'olivine  et  de  fer  titane  ,  que  l'on  trouve,  au  nord  et 
au  sud  de  l'équateur,  non  recouvertes  et  comme  surajoutées 
à  d'autres  terrains  plus  anciens,  dans  des  circonstances  en- 
tièrement analogues.  Cette  manière  d'envisager  et  déclasser 
les  roches  volcaniques  est  la  plus  conforme  aux  besoins  de 
la  géognosie  positive.  On  réunit  les  roches  trachytiques  et 
basaltiques  ,  non  d'après  leur  composition  minéralogique  et 
la  conformité  apparente  de  leur  origine  ,  mais  d'après  leur 
agroupement  et  leur  position  ;  on  les  distribue  parmi  les 
autres  roches  d'après  leur  âge  relatif,  comme  on  a  fait  , 
dans  les  terrains  primitifs  et  intermédiaires ,  avec  les  diflTé- 
rentes  formations  de  calcaires  grenus  (§§.  loetao),  d'eupho* 
tides  (§§.  19  et  26  )  et  de  porphyres  (  §§.  18 ,  22  ,  23  et  26  ). 
Dans  le  second  cas,  on  isole,  sous  la  dénomination  de  terrain 
volcanique,  tout  ce  que  l'on  croit  être  incontestablement 
d'une  origine  ignée;  on  oppose  les  termes  de  la  série  pyro- 
gène à  d'autres  séries  de  roches  que  l'on  dit  être  d'une  origine 
aqueuse.  Par  là  on  sépare  d'une  manière  absolue  ee  qui  otfrç 
dans  la  nature  des  passages  graduels;  au  lieu  d'explorer  le 
gisement ,  ou  de  placer  les  roches  dans  l'ordre  de  leur  succes- 
sion ,  on  s'attache  de  préférence  aux  questions  historiques 
sur  le  mode  de  leur  formation. 

J'avoue,  et  Ion  ne  sauroit  se  prononcer  avec  assez  de  fran- 
chise sur  les  premiers  fondemens  d'une  science;  j'avoue  que 
ces  classitications ,   d'après  les  diverses  hypothèses  que  Von 


354  IND 

se  forme  sur  l'origine  des  choses ,  ne  me  paroîssent  pas  seu- 
lement vagues  et  arbitraires,  mais  aussi  très- nuisibles  au  s 
progrès  de  la  géognosie  de  gisement;  elles  préjugent,  d'une 
manière  arbitraire  et  surtout  trop  absolue  ,  ce  qui  est  pour 
le  moins  encore  extrêmement  douteux.  En  divisant,  d"après 
un  usage  suranné,  les  formations  en  primitives  ,  inte-médiaires, 
secondaires  )  tertiaires  et  volcaniques ,  onadmet,  pour  ainsi  dire, 
un  double  principe  de  division,  celui  de  l'âge  relatif  ou  de 
la  succession  des  formations,  et  celui  de  leur  origine.  Si  l'on 
distingue  entre  des  nappes  de  laves  et  des  roches,  ou  bien 
entre  des  roches  volcaniques  ,  des  roches  d'une  origine  neptu- 
nienne,  et  des  matières  formées  par  une  prétendue  liquéfac- 
tion aquoso-ignée,  on  attribue  tacitement  aux  granités,  aux 
porphyres  et  aux  syénites  intermédiaires,  aux  dolérites  et  aux 
amygdaloïdes  du  grès  rouge,  un  mode  de  formation  diamé- 
tralement opposé  à  celui  d'une  fusion  ignée.  D'après  cette 
manière  de  procéder,  qui  appartient  plutôt  k  la  géogonie 
qu'à  la  géognosie  positive ,  on  considère  tout  ce  qui  n'est  pas 
compris  dans  le  terrain,  ro/cajifg^ue,  dans  les  roches  de  trachyte 
et  de  basalte  qui  surmontent  les  autres  terrains ,  comme 
formé  par  la  voie  humide,  ou  comme  précipité  d'une  solution 
aqueuse.  11  est  presque  inutile,  dans  l'état  actuel  des  sciences 
physiques,  de  rappeler  combien  l'hypothèse  d'une  solution 
aqueuse  est  peu  applicable  aux  granités  et  aux  gneis,  aux 
porphyres  et  aux  syénites,  aux  euphotidcs  et  aux  jaspés.  Je  ne 
hasarderai  pas  de  prononcer  ici  sur  les  circonstances  qui  peu- 
vent avoir  accompagné  la  première  formation  de  la  croûte 
oxidée  de  notre  planète  ;  mais  je  n'hésite  pas  à  me  ranger  du 
côté  des  géognostes  qui  conçoivent  plutôt  la  formation  des 
roches  cristallines  siliceuses  par  le  feu  que  par  une  solution 
aqueuse,  à  la  manière  des  travertins  et  d'autres  calcaires  la- 
custres. Les  mots  laves  et  roches  volcaniques  sont  d'ailleurs  aussi 
vagues  que  l'est  le  mot  volcan,  qui  désigne  tantôt  une  mon- 
tagne terminée  par  une  bouche  ignivome,  tantôt  la  cause 
souterraine  de  tout  phénomène  volcanique.  Les  trachyfes  qui 
surmontent  le  dos  des  Cordillères,  appartiennent  indubitable- 
ment aux  roches  pyrogènes,  et  cependant  le  mode  de  leur 
formation  n'est  pas  celui  des  courans  de  laves  postérieurs  au 
creusement  des  vallées.  L'action  du  feu  volcanique  par  un 


•  IND  535 

cône  isolé,  par  le  cratère  d'un  volcan  moderne,  diffère  né- 
cessairement de  Faction  de  ce  feu  à  travers  l'ancienne  croûte 
crevassée  de  notre  planète. 

En  considérant  les  phénomènes  volcaniques  dans  leur  plus 
grande  généralité  ,  en  réunissant  ce  qui  a  été  observé  dans  les 
différentes  parties  du  globe  ,  on  voit  différer  ces  phénomènes 
entre  eux,  même  de  nos  jours,  de  la  manière  la  plus  frap- 
pante. Ce  ne  sont  pas  les  volcans  de  la  Méditerranée,  les 
seuls  que  l'on  a  étudiés  avec  soin  ,  qui  peuvent  servir  de  type 
au  géognoste  et  lui  présenter  la  solution  des  grands  problèmes 
géogoniques.  L'élévation  absolue  des  bouches  ignivomes , 
variant  depuis  cent  à  deux  mille  neuf  cent  cinquante  toises 
(Stromboli  et  Cotopaxi),  influe  non-seulement  sur  la  fré- 
quence des  éruptions,  elle  modifie  aussi  la  nature  des  masses 
rejetées.  Quelques  volcans  n'agissent  plus  que  par  leurs 
flancs,  quoiqu'ils  offrent  encore  un  cratère  à  leur  sommet 
(Pic  de  Ténériffe);  d'autres  ont  des  éruptions  latérales  (j'en 
ai  trouvé  à  Anlisana  dans  les  Andes  de  Quito,  à  2140 
toises  de  hauteur)  ,  sans  que  leur  cime  ait  jamais  été  percée; 
d'autres  encore,  également  creux  dans  le-.ir intérieur,  comme 
l'indiquent  beaucoup  de  phénomènes  (dôme  trachytiqne  du 
Chimborazo,  35 5c)  toises),  n'offrent  aucune  ouverture  per- 
manente au  sommet  et  sur  leur  flanc  (le  Yana-Urcu  , 
petit  cône  d'éruption ,  est  placé  dans  le  plateau  de  Calpi 
même),  et  n'agissent  pour  ainsi  dire  que  dynamiquement, 
en  ébranlant  les  terrains  d'alentour,  en  fracturant  les  cou- 
ches et  en  changeant  la  surface  du  sol.  Ruru-Pichincha 
(2490  toises),  qui  a  été  l'objet  particulier  de  mes  recherches, 
n'a  jamais  jeté  un  courant  de  laves  postérieur  au  creusement 
des  vallées  actuelles,  pas  plus  que  Capac-Urcu  (près  Rio- 
bamba  nuevo),  qui,  avant  l'écrouleinent  de  sa  cime,  a  été 
plus  élevé  que  le  Chimborazo.  Le  grand  volcan  mexicain  de 
Popocatepetl  (2771  toises),  au  contraire,  a  eu  des  épaiiche- 
mens  de  laves  sous  la  forme  de  bandes  étroites,  tout  comme 
les  petits  volcans  de  l'Auvergne  et  de  Pltalie  méridionale. 
Les  îles  qui  sortent  (  dans  quelques  parages  presque  périodi- 
quement) du  fond  des  mers,  ne  sont  pas,  connue  on  le  dit 
souvent  par  erreur,  des  amas  de  scories  semblables  au  Monte 
novo  de  Pouzzolc  ;  ce  sont  des  masses  rocheuses  soulevées,  (,i, 


356  IND 

dans  lesquelles  le  cratère  ne  s'ouvre  que  postérieurement  à 
leur  soulèvement.  {Relat.  histor.  de  mon  Voyage  aux  régions 
équin.,  T.  I ,  p.  171  ,  et  Essai  politique,  T.  I ,  p.  254.)  Au 
Mexique,  dans  Tlntérieur  des  terres,  sur  un  plateau  trachy- 
tique  à  plus  de  trente  -  six  lieues  de  distance  de  la  mer, 
et  loin  de  tout  volcan  brûlant,  des  montagnes  de  1600  pieds 
de  hauteur  sont  sorties  (2g  Septembre  1769)  sur  une  cre- 
vasse, et  ont  jeté  des  laves  qui  enchâssent  des  fragmens  gra- 
nitiques. Tout  à  Tentour,  un  terrain  de  quatre  milles  carrés 
s'est  soulevé  en  forme  de  vessie,  et  des  milliers  de  petits 
cônes  (hornitos  de  Jorullo),  composés  d'argile  et  de  boules 
de  basaltes  à  couches  concentriques,  ont  hérissé  celte  sur- 
face bombée.  Tous  les  volcans  brûlans  et  toutes  les  citnes  de 
la  Nouvelle -Espagne  qui  s'élèvent  au-dessus  de  la  limite  des 
neiges  perpétuelles,  se  trouvent  sur  une  zone  étroite  {Paral- 
lèle des  grandes  hauteurs,  entre  les  18°  69'  et  19°  12'  de  lati- 
tude), qui  est  perpendiculaire  à  la  grande  chaîne  des  mon- 
tagnes. C'est  comme  une  crevasse  de  107  lieues  de  long,  qui 
s'étend  depuis  les  côtes  de  l'océan  Atlantique  jusqu'à  celles 
de  la  Mer  du  Sud,  et  qui  semble  se  prolonger  encore  120 
lieues  plus  loin,  vers  l'archipel  de  Revillagigedo ,  couvert 
de  tuffs  ponceux. 

Ces  alignemens  des  volcans,  ces  soulèvemens  à  travers 
des  fentes  continues,  ces  bruits  souterrains  {braniidos  j  true- 
nos  subteraneos  de  Guanaxuato ,  en  3784)  qui  se  sont  fait  en- 
tendre au  milieu  d'un  terrain  de  schistes  et  de  porphyres 
de  transition,  rappellent,  dans  les  forces  encore  actives  du 
nouveau  monde,  les  forces  qui,  dans  les  temps  les  plus  re- 
culés, ont  soulevé  les  chaînes  de  montagnes,  crevassé  le 
sol,  et  fait  jaillir  des  sources  de  terres  liquéfiées  (laves, 
roches  volcaniques  fluides)  au  milieu  de  strates  plus  ancien- 
nement consolidés.  Même  de  nos  jours  ces  terres  liquéfiées 
ne  sortent  pas  constamment  des  mêmes  ouvertures  de  l'ori- 
lice  d'une  montagne  (cratère  au  sommet  d'un  volcan)  ou  de 
son  flanc  déchiré  ;  quelquefois  (Islande  ,  plateau  de  Quito  )  la 
terre  s'ouvre  dans  les  plaines,  et  l'on  en  voit  sortir  ou  des 
nappes  de  laves  qui  s'entrecroisent,  se  refoulent  et  se  sur- 
montent, ou  de  petits  cônes  d'une  matière  boueuse  {moja 
de  Pelileo  et  de  Riobamba  viejo ,  4  Février  1797)  qui  semble 


•  IND  337 

avoir  été  un  trachyte  ponceux,  et  qui,  combustible  et  tachant 
les  doigts  en  noir,  est  mêlé  de  carbure  d'hydrogène.  (  Hiunb., 
Essai  politique  sur  la  Nou^'.  Espagne,  T.  I,  p.  l^j  ,  254.  Id., 
Relut,  historique,  T.  l ,  p.  12g,  140,  i54,  3i5;  T.  II ,  p.  iS  , 
20,  25.  Klaproth,  Chem.  Unterr.  der  Min.,   T.  IV,  p.  28g.) 

Les  roches  que  l'on  a  l'habitude  de  réunir  sous  le  nom  de 
substances  du  terrain  (exclusivement)  volcanique,  ont  été 
envisagées  jusqu'ici  beaucoup  plus  d'après  les  rapports  orycto- 
gnostiques  et  chimiques  de  leur  composition,  ou  d'après 
ceux  de  leur  origine,  que  d'après  les  rapports  gcognos- 
tiques  de  leur  gisement  et  de  leur  âge  relatif.  Le  feu  des 
volcans  a  agi  à  toutes  les  époques,  lors  de  la  première  oxi- 
dation  de  la  croûte  du  globe  ,  à  travers  les  roches  de  tran- 
sition,  les  terrains  secondaires  et  tertiaires.  A  l'exception 
de  quelques  roches  lacustres  ou  d'eau  douce  ,  les  roches  vol- 
caniques sont  les  seules  dont  la  formation  continue  ,  pour 
ainsi  dire,  sous  nos  yeux.  Si  les  laves  des  mêmes  volcans 
(sources  intermittentes  de  terres  liquéfiées)  varient  à  diverses 
époques  de  leurs  éruptions,  on  conçoit  combien  des  matières 
volcaniques  qui,  pendant  des  milliers  d'années,  se  sont  pro- 
gressivement élevées  vers  la  surface  de  notre  planète,  dans 
des  circonstances  de  mélange,  de  pression,  de  refroidisse- 
ment, si  différentes,  doivent  offrir  à  la  fois  de  contrastes  et 
d'analogies.  Il  y  a  des  trachytes,  des  phonolithes,  des  ba- 
saltes, des  obsidiennes  et  des  perlites  de  diffcrens  à<^es 
comme  il  y  a  différentes  formations  de  granités,  de  «rneis 
de  micaschistes,  de  calcaires,  de  grauwacke,  de  syénites  et 
de  porphyres.  Plus  on  approche  des  temps  modernes,  plus 
les  formations  volcaniques  paroissent  isolées ,  surajoutées 
étrangères  au  sol  sur  lequel  elles  se  sont  répandues.  Une 
longue  intermittence  de  la  source  semble  produire,  même 
dans  les  volcans  actuels,  une  grande  variété  dans  les  produits, 
et  s'opposer  à  l'agroupement  de  matières  analogues.  Dans  les 
formations  de  transition  (Andes  de  la  Nouvelle -Grenade  et 
du  Pérou  ;  Cordillères  du  Mexique  )  les  différens  termes  de 
la  série  géognostique  se  lient  les  uns  aux  autres;  ils  se  mon- 
trent dans  cette  dépendance  mutuelle  que  l'on  observe  entre 
les  porphyres  et  les  syénites,  entre  les  thonschiefer,  les 
grunstein  et  les  calcaires  de  transition  ,  entre  les  serpentines, 

23.  23 


338  IND 

les  jaspes  et  les  euphotides.  Dans  ce  dédale  de  formations 
volcaniques  de  différens  âges  on  n'a  reconnu  jusqu'à  présent 
que  quelques  lois  de  gisement  qui  paroissent,  sinon  géné- 
rales, du  moins  en  harmonie  avec  des  phénomènes  observés 
dans  les  deux  continens  sur  une  grande  étendue  de  terrain. 
Ce  sont  ces  rapports  de  gisement  seuls  qui  peuvent  être  dis- 
cutés ici  ;  tout  ce  qui  regarde  la  composition  des  roches  vol- 
cauiques,  l'analyse  mécanique  de  leur  tissu  et  leurs  classifi- 
cations oryctognostiques ,  objets  importans  traités  dans  deux 
mémoires  célèbres  de  M.  Fleurian  de  Bellevue  et  de  M.  Cor- 
dier  {Journ.  de  physique ,  T.LI,  LX  et  LXXXIll),  n'est  pas 
du  domaine  de  la  géognosie  des  formations.  On  peut  sans 
doute  indiquer  certains  caractères  par  lesquels  des  roches 
ressemblent  dune  manière  plus  évidente  aux  productions 
des  volcans  modernes  :  mais  la  couleur  noire;  la  porosité  à 
cellules  aiongées,  couvertes  d'un  enduit  lustré;  la  propriété 
de  faire  des  gelées  avec  les  acides;  l'absence  du  quarz ,  du 
feldspalji  commun  et  des  filons  métalliques  (aurifères  et  ar- 
gentifères) ;  la  présence  du  pyroxène  ,  du  fer  titane,  du 
feldspalli  vitreux  et  fendillé,  et  des  alcalis,  ne  peuvent  plus, 
dans  l'état  actuel  de  nos  connoissances .  être  considérées  comme 
des  caractères  généraux  des  roches  volcaniques.  (Voyez  plus 
haut,  §§.  2  1,  25 ,  26.) 

Les  masses  volcaniques,  ou  regardées  comme  telles  (roches 
empjrodoxes  de  M.  Mohs,  Charaktc?-  der  Classen,  1821  ,  p.  177), 
se  trouvent  ou  par  filons  (  dykes  ,  dans  toutes  les  formations, 
depuis  le  granité  j)rimitif  jusqu'à  la  craie  et  les  formations 
tertiaires;  Ecosse,  Allemagne,  Italie),  ou  en  couches  inter- 
calées (calcaires  et  porphyres  de  transition;  grès  rouge), 
ou  superposées,  surajoutées  à  des  terrains  d'âges  très-diHé- 
rens.  Le  contraste  entre  les  roches  volcaniques  ou  empyro- 
doxes  intercalées  ,  et  les  roches  qui  les  renferment ,  est 
d'autant  plus  frappant  que  les  dernières  sont  indubitablement 
non  volcaniques,  calcaires  (Derbyshire)  ou  fragmentaires 
(grauwacke,  grès  houiller).  Lorsque  des  masses  empyro- 
doxes  se  trouvent,  ou  comme  couches  subordonnées,  entre 
les  strates  de  roches  interiuédiaires  cristallines  (  porphyres 
et  syénites) ,  ou  comme  filons  traversant  les  strates  de  roches 
primitives  (granite-gneis) ,  ces  roches  primitives  et  intermé- 


IND  339 

diaires  feldspathiques  peuvent  avoir,  selon  l'opinion  de  quel- 
ques géognostes,  la  même  origine  ignée  que  la  masse  des 
couches  intercalées  ou  des  filons  (  niandelstein,  dolérites, 
basaltes)  ,  sans  que  les  époques  de  formation  et  les  circons- 
tances dans  lesquelles  les  forces  volcaniques  ont  agi,  aient 
été  identiques.  Les  limites  entre  les  filons  et  les  bancs  inter- 
calés trappéens,  pyroxcniques  ou  porphyriques ,  ne  sont  pas 
toujours  si  tranchées  qu'on  pourroit  le  croire  d'après  les  dé- 
jSnitions  que  l'on  a  coutume  de  donner  des  gites  parf!culiers 
des  minerais.  Plusieurs  de  ces  bancs  ne  soiit  que  des  amas 
entrelacés  et  formés  par  la  réunion  d'un  grand  nombre  de 
filons.  Lorsque  ceux-ci  suivent  dans  une  grande  épaisseur 
(voyez  mes  coupes  du  célèbre  filon  de  Guanaxuato  )  la  direc- 
tion et  l'inclinaison  des  strates  de  la  roche  ,  ils  prennent 
tout  l'aspect  d'une  couche.  Nous  insistons  sur  ces  remarques, 
parce  que  la  nouvelle  géogonie  a  une  tendance  à  faire  monter, 
de  bas  en  haut,  des  masses  liquéfiées  à  travers  des  crevasses, 
tandis  que  l'ancienne  géogonie  expl'quoit  fout  par  des  pré- 
cipitations, par  des  mouvemens  dans  un  sens  opposé.  On 
peut  croire  que  ces  directions  doivent  avoir  été  différentes 
selon  la  nature  des  matières  qui  se  sont  consolidées,  seloa 
qu'elles  étoient  cristallines  et  siliceuses,  calcaires  ou  frag- 
mentaires. La  géognosie  positive  a  profité  de  ces  discussions 
sur  l'origine  ignée  ou  neptunienne  des  roches  .-  mais  elle  rend 
les  classifications  indépendantes  des  résultats  géogoniques  ; 
elle  ne  sépare  pas  les  masses  intercalées  des  terrains  dans 
lesquels  on  les  trouve,  et  elle  ne  laisse  réunies,  dans  la  divi- 
sion des  roches  dont  nous  nous  occupons  ici  sous  le  nom 
de  terrain  volcanique ,  que  des  formations  superposées,  sur- 
ajoutées à  des  formations  primitives,  intermédiaires,  secon- 
daires et  tertiaires. 

La  place  que  doit  occuper  une  roche  cT^  dans  la  série  géo' 
gnostique,  est  déterminée  par  la  roche  la  plus  récente,  y, 
qu'elle  recouvre,  et  par  la  roche  la  plus  ancienne,  s,  dont  elle 
est  recouverte.  Si  cT  est  superposé  à  ê,  il  est  tout  naturel  qu'on 
le  trouve  aussi  placé  sur  les  roches  plus  anciennes  a,  ^S,  y, 
qui  sont  les  termes  précédens  de  la  série.  L'application  de 
ce  principe  très- simple  de  la  géognosie  de  gisement  exige 
beaucoup  de  circonspection,   lorsqu'il  s'agit  de  roches  tra- 


S40  IND 

chyfiques,  basaltiques  et  phonolithiques.  Un  même  courant 
de  laves,  une  même  nappe  de  niasses  pyroxéniques  répandues 
à  la  fois  sur  du  granile,  sur  du  micaschiste  et  sur  un  terrain 
d'eau  douce,  oflrent  sans  doute  des  preuves  incontestables 
d'une  origine  postérieure  aux  formations  tertiaires  les  plus 
modernes  :  mais  l'âge  dune  formation  volcanique  est  plus 
diOicile  à  déterminer  quand  il  n'y  a  pas  continuité  de  masse. 
et  quand  on  confond,  sous  une  dénomination  générale,  des 
matières  qui  se  sont  épanchées  latéralement,  avec  d'autres 
qui  ont  percé  de  bas  en  haut,  par  soulèvement,  à  travers 
des  roches  préexistantes.  Là  oii  des  trachytes  et  des  basaltes 
se  trouvent  réunis,  la  formation  la  plus  récente  sur  laquelle 
sont  appuyés  les  basaltes  ,  ne  fixe  pas  nécessairement  l'âge  des 
trachytes:  l'une  et  l'autre  de  ces  roches  ont,  sans  doute,  été 
produites  d'une  manière  différente  et  non  simultanée.  Il  se 
pourroit  même  que,  dans  une  région  de  peu  d'étendue,  di- 
verses masses  trachytiques  isolées  ,  mais  d'une  composition 
analogue,  ne  fussent  pas  d'une  même  forôiation,  les  unes  sor- 
tant d'une  syénite  de  transition,  les  autres  de  roches  primi- 
tives. Le  plus  souvent  l'accumulation  des  conglomérats  trachy- 
tiques masque  à  tel  point  le  gisement  des  trachytes,  que  l'on 
ne  peut  deviner  leur  superposition.  C'est  ainsi  que  Ion  croit 
les  trachytes  du  Siebengebirge,  près  de  Bonn,  sortis  du  grau- 
Avacke  ,  et  ceux  d'Auvergne  sortis  d'un  plateau  de  granité  qui 
pourroit  bien  déjà  appartenir  au  terrain  intermédiaire.  De 
même  qu'il  faut  distinguer  entre  les  véritables  coulées  basalti- 
ques avec  olivine  et  les  masses  pyroxéniques  noires,  huileuses, 
intercalées  aux  trachytes  et  à  quelques  porphyres  de  transi- 
tion ,  de  même  aussi  il  ne  faut  pas  confondre  les  véritables 
trachytes  (Drachenfels ,  Chiniborazo  ,  Antisana)  avec  des 
laves  feldspathiques(  leucostiniques)  qui  ont  coulé  par  bandes 
étroites  (ancien  cratère  de  la  Solfatare  près  Naples)  et  qui 
peuvent  se  répandre  sur  des  conglomérats  tuffacés.  (Dolomieu, 
dans  le  Jotirn.  des  mines,  n."*  41  ,  42  et  69;  Nose,  IS'iederrh. 
Reise,  T.  II,  p.  428;  Spallanzani,  Voy.  dans  les  deux  Siciles , 
T.  IIT ,  p.  196  ;  Ramond  ,  JSii'ell.  géogn.  de  l'Auvergne,  p.  1 1  , 
91  ;  Buch  ,  Geogn.  'Beoh. ,  T.  II ,  p.  178,  2o5  ;  Id. ,  dans  les 
Menu  del'Acad.  deBerlin,  181a,  p.  129  —  164;  Beudant,  Vo)'. 
en  Hongrie,   T.  III,  p.  5o8  — 5i3,  621  — 627  et  53o — 644.) 


IND  341 

En  Hongrie ,  le  terrain  trachytique  paroit  s'être  formé 
entre  l'époque  des  terrains  secondaires  et  celle  des  terrains 
tertiaires.  M.  Bendant,  qui  a  donné  sur  les  roches  de  tra- 
chyte  le  traité  le  plus  complet  que  nous  possédions,  les  a  vues 
reposer  sur  des  griinstein  (Krenniilz,  Dregely,  Matra)  et  sur 
des  calcaires  de  transition  (Glashiitte,  INeusohl).  Les  con- 
glomérats trachytiques  recoururent  aussi  en  Hongrie  desgrau- 
wackes  schisteux ,  et  même  un  calcaire  magnésifère  ,  qui  pa- 
roit appartenir  à  la  formation  du  Jura.  Dans  cette  partie 
orientale  de  l'Europe,  le  grès  à  lignites,  le  calcaire  grossier  et 
d'autres  roches  tertiaires  sont  superposés  à  leur  tour  à  ces 
conglomérats.  Des  superpositions  semblables  de  grès,  de  gypse 
et  de  calcaires  d'une  origine  très-récente,  ont  été  observées 
par  M.  de  Buch  et  par  moi  aux  iles  Canaries  et  dans  les 
Cordillères  des  Andes.  D'après  un  excellent  observateur, 
M.  Breislak  (Atlas  géol.,pL  Sg),  les  trachytes  dei  iMontsEuga- 
néens  reposent  (Schivanoja,  près  de  Castelnuovo)  sur  le  cal- 
caire du  Jura  ;  mais  dans  la  région  du  monde  la  plus  abon- 
dante en  roches  trachytiques,  dans  la  partie  occidentale  du 
nouveau  continent,  tant  au  nord  qu'au  sud  de  l'équateur,  je 
n'ai  vu  nulle  part  les  trachytes  se  faire  jour  à  travers  des 
formations  si  modernes. 

Les  résultats  de  gisement  les  plus  imporlans  qu'ont  offerts 
mes  voyages  dans  la  zone  volcanique  des  Andes  (1801  —  1804), 
se  réduisent  aux  faits  suivans.  Toutes  les  cimes  les  plus 
élevées  des  Cordillères  sont  des  trachytes.  Les  volcans  actuels 
agissent  tous  par  des  ouvertures  formées  dans  le  terrain  tra- 
chytique.  Ce  terrain  embrasse  par  zones  une  grande  partie 
des  Cordillères;  mais  il  s'étend  rarement  vers  les  plaines,  et 
les  volcans  encore  enflammés,  loin  d'être  solitaires  ou  associés 
par  groupes  de  forme  irrégulière  plus  ou  moins  circulaire, 
comme  en  Europe  (Ramond  ,  IV jV.,  p.  45  ;  Humb. ,  Rel.  hist, , 
T.  Il,  p.  16),  se  suivent,  à  la  manière  des  volcans  éteints  de 
l'Auvergne  et  des  cratères  brûlans  de  l'île  de  Java,  par  files, 
tantôt  dans  une  série ,  tantôt  sur  deux  lignes  parallèles.  Ces 
lignes  sont  dirigées  généralement  (montagnes  de  Guatimala, 
de  Fopayan ,  de  los  Pastos ,  de  Quito,  du  Pérou  et  du 
Chili)  dans  le  sens  de  l'axe  des  Cordillères,  quelquefois 
(Mexique)    elles  font  avec   cet  axe  un   apgle  de   70°.    Là 


34^  IND 

même  où  les  trachytes,  par  leur  accumulation,  ne  couvrent 
pas  le  sol  entier,  ils  se  trouvent  comme  éparpillés  en  pe- 
tites masses  sur  le  dos  et  la  crête  des  Andes,  s'élevant  en 
forme  de  rochers  pointus  au  sein  des  roches  primitives  et 
de  transition.  Les  trachytes  et  les  basaltes  se  montrent  rare- 
ment réunis,  et  ces  deux  systèmes  de  roches  semblent  se 
repousser  mutuellement.  De  véritables  basaltes  avec  olivine 
ne  forment  pas  des  couches  intercalées  dans  le  trachyte  ;  mais 
lorsqu'ils  se  trouvent  rapprochés  des  trachytes  (  entre  Quito 
et  la  Villa  de  Ibarra;  Julumito  à  Touest  de  Popayan  ;  vallée 
de  Santiago  dans  la  Nouvelle-Espagne;  Cerros  de  las  Cucvas 
et  de  Canoas  près  du  volcan  de  JoruUo)  ,  ce  sont  les  basaltes 
et  les  mandelstein  qui  recouvrent  ces  derniers.  Les  roches 
trachytiques  ont  leur  siège  principal  dans  le  terrain  de  tran- 
sition ,  dans  les  grandes  formations  de  syénites  et  de  por- 
phyres (§§.  2  1  et  25),  antérieures  et  postérieures  aux  grau- 
Avackes  et  aux  thonschiefer ,  surtout  dans  la  première  de  ces 
formations,  qui  recouvre  immédiatement  les  roches  primi- 
tives. Lorsque,  dans  les  Andes  ,  les  trachytes  paroissent  cou- 
vrir des  granités  avec  amphibole,  ou  des  gneis  et  des  mica- 
schistes verls  et  stéatiteux ,  il  reste  douteux  si  ces  dernières 
rcchcs,  loin  d'être  primitives,  n'appartiennent  pas  plutôt  au 
terrain  de  transition.  On  peuf  regarder  comme  également 
problématique,  si  ces  apparences  de  recoinrewens,  ces  super- 
positions des  roches  trachytiques  sur  des  formations  préexis- 
tantes ne  sont  pas  plutôt  de  simples  appositions ,  et  si  le  tra- 
chyte (  Exlentam  tumefecit  humum  ,  ceu  spirilus  oris  Tendere  vesi- 
cam  solet,  aut  direpta  bicornis  Terga  capri ;  tuivor  ille  loci  per- 
mansit ,  et  alli  Collis  habet  speciem  ,  longoque  induruit  œvo  ,  dit 
Ovide,  Metamorph. ,  lib.  IX,  du  cône  soulevé  de  Trécène 
dans  l'Argolide),  si  le  trachyte,  dis -je,  en  soulevant  et  en 
brisant  l'ancienne  croûte  du  globe,  n'est  pas  sorti  perpendi- 
culairement sous  la  forme  de  cloches  (Chimborazo) ,  ou  bien 
sous  celle  de  châteaux  forts  en  ruines  (sommet  des  Cordil- 
lères du  Pérou,  entre  Loxa  et  Caxamarca).  Les  trachytes 
des  Andes  et  du  Mexique,  qui  renferment  du  perlite  et 
de  l'obsidienne ,  ne  sont  généralement  recouverts  que  par 
d'autres  roches  volcaniques  (  phonolithes ,  basalles,  mandel- 
stein,   conglomérats  et    tuffs  ponceux).    Quelquefois  de  pe- 


IND  343 

tites  formations  locales,  calcaires  et  gypseuses,  que  Ton  peut 
appeler  tertiaires,  parce  qu'elles  sont  certainement  posté-» 
rieures  à  la  craie,  surmontent  les  trachytes  ;  mais  vers  le  bas 
ces  mêmes  trachytes  des  Cordillères,  surtout  lorsqu'ils  ne 
sont  pas  recoui>erts ,  sont  géognostiquement  liés  de  la  manière 
la  plus  intime  avec  les  porphyres  poreux  et  fendilles  du 
terrain  de  transition  :  porphyres  dépourvus  de  quarz  et  ren- 
fermant du  pyroèiie  et  du  feldspath  vitreux,  quelquefois 
riches  en  filons  argentifères  et  supportant  sur  d'auires  points 
des  formations  secondaires,  même  du  calcaire  de  transition, 
noir  et  carburé  (  voyez  plus  haut,  p.  161,  i58  —  i8i,  2o5  — 
2i3).  Cette  liaison  pourra  motiver  un- jour ,  dans  nos  mé- 
thodes, la  suppression  du  terrain  volcanique,  en  tant  qu  on 
le  considère  comme  opposé,  par  le  mode  de  sa  formation  et 
de  son  origine,  aux  roches  de  tous  les  autres  terrains.  Il  y  a 
des  roches  volcaniques  dans  le  terrain  de  transition  et  dans 
le  grès  rouge,  comme  il  y  a  des  roches  fragmentaires,  agglo- 
mérées, remaniées  par  les  eaux,  dans  le  terrain  volcanique. 
Ce  dernier  mot,  pour  lui  donner  un  sens  précis,  seroil  le 
mieux  appliqué  aux  seules  productions  des  volcans  qui  ont 
agi  postérieurement  à  l'existence  de  nos  vallées. 

Quoique ,  d'après  ks  observations  faites  dans  les  deux 
continens,  les  trachytes  et  d'autres  roches  analogues  qui 
paroissent  dus  à  la  même  action  des  forces  volcaniques ,  et 
dans  lesquels  le  feldspath  compacte  ou  vitreux  domine  sur 
l'amphibole  et  le  pyrcxènc  ,  se  trouvent  principalement  dans 
le  terrain  de  transition  et  sur  les  limites  de  ce  terrain  et  des 
roches  secondaires  les  plus  anciennes,  on  ne  peut  étendre 
cette  conclusion  aux  basaltes,  qui  sont  souvent  enclavés  dans 
le  granité  primitif  (Schneekoppe  enSilésie;  Roche  rouge,  près 
de  Serassac  dans  le  Vélay),  et  qui  sont  peut-être  antérieurs  à 
certaines  formations  de  trachytes?  Dans  une  contrée  très-cir- 
eonscrite ,  dans  un  même  agroupemcnt  de  roches  volcaniques , 
les  trachytes  grenus  ou  porphyres  trachytiques  ,  qu'il  ne  faut 
pas  confondre  avec  des  roches  fragmentaires  ou  des  conglo- 
mérats de  trachytes  beaucoup  plus  modernes,  sont  générale- 
ment d'une  formation  plus  ancienne  que  les  basaltes  qui  les 
recouvrent  en  coulées  ou  en  larges  nappes.  Au  contraire,  les 
basaltes,  postérieurs  aux  conglomérats  trachytiques  et  pon- 


344  IND 

ceux,  sont  le  plus  souvent  antérieurs  aux  conglon^érats  et  tiiffs 
basaltiques;  mais,  nous  le  répétons,  dès  que  nous  devons  com- 
parer ries  lambeaux  épars  d'un  terrain  de  trachytes ,  de 
phonolithes  ou  de  basaltes,  lambeatix  non  recouverts  et 
gisant  dans  des  formations  granitiques,  intermédiaires  ou 
secondaires,  ces  roches  ^e  trachytes,  de  basaltes  et  de  pho- 
nolithes ne  peuvent  plus  être  rangées  comme  termes  d'une 
même  série  géognostique.  Ce  qui  sort  du  granité  le  plus 
ancien  ,  peut  être  postérieur  à  une  roche  analogue  qui  s'est 
fait  jour  à  la  fois  à  travers  des  roches  de  transition.  L'oryc- 
tognosie  ou  minéralogie  descriptive,  qui  analyse  le  tissu 
des  substances  volcaniques  ,  parviendra  à  les  classer  d'après 
les  principes  que  M.  Cordier  a  si  bien  établis  dans  son  mé- 
moire sur  la  composition  des  roches  pyrogènes  de  tous  les  àgeSf 
mais  la  géognosic,  qui  ne  considère  que  l'âge  relatif  et  les 
gisemens,  sera  forcée  de  compter  un  grand  nombre  de  roches 
incertœ  sedis ,  même  lorsqu'une  plus  vaste  partie  de  la  terre 
aura  été  examinée  avec  soin.  Cette  incertitude  ne  tient  pas 
à  l'imperfection  des  méthodes,  mais  à  l'impossibilité  de  com- 
parer, sous  le  rapport  de  leur  succession  ou  de  l'époque  de 
leur  origine  ,  des  masses  rocheuses  éparses  et  non  recouvertes. 
L'historien  de  la  nature,  comme  celui  des  révolutions  du 
genre  humain,  recueille,  compare  et  discute  tous  les  faits; 
mais  il  ne  peut  coordonner  parsériçs  ceux  qui  ne  présentent 
aucun  caractère  chronologique. 

Dans  cet  état  des  choses,  loin  de  mêler  des  considérations 
oryctognostiques  aux  classifications  delà  géognosie positive,  il 
meparoit  convenable  de  ranger  les  roches  volcaniques  d'après 
le  type  de  aisément  que  l'on  observe  le  plus  généralement  dans 
les  deux  hémisphères,  là  où  le  plus  grand  nombre  de  ces  roches 
se  trouve  agroupé.  La  grande  masse  des  substances  dans  les- 
quelles le  feldspath  prédomine  (trachytes,  leucostines),  sera 
suivie,  comme  dans  les  tableaux  oryctognostiques,  de  la  grande 
masse  des  substances  dans  lesquelles  prédomine  le  pyroxène 
(basaltes,  dolérites);  mais  cette  harmonie  apparente  entre 
des  méthodes  fondées  sur  deux  principes  dilférens,  celui  de 
la  composition  et  celui  de  l'ordre  des  gisemens  ,  disparoit 
dès  ({ue  l'on  examine  les  formations  partielles  ou  intercalées. 
Le  géugnoste  distingue  alors  entre  les  phonolithes  des  trachjytes 


IND  345 

et  les phonolith es  des  basaltes  ;  il  place  desleucostines  compactes 
dans  le  terrain  pyroxénique  ,  comme  il  indique  une  forma- 
tion de  doléritcs  (mélange  de  feldspath  et  depyroxène,  dans 
lequel  la  dernière  substance  est  la  plus  fréquente  )  au  uiilieu 
desleucostines  ou  trachytes.  C'est  d'après  ces  principes  que 
j'ai  esquissé  la  distribution  des  roches  volcaniques,  dont  le  ta- 
bleau a  été  placé  à  la  tin  des  terrains  de  transition  (p.  232). 
Cette  distribution  se  fonde  sur  les  observations  vraiment  géo- 
gnosriques  publiées  par  MM.  Léopold  deBuch,  Breislak,  Boue 
et  Beudant,  et  sur  celles  que  j'ai  eu  occasion  de  faire  moi- 
même  en  Italie,  au  Pic  deTénériffe,  dans  les  Cordillères  de 
la  Nouvelle -Grenade,  de  Quito  et  du  Mexique.  J'ajouterai 
à  la  nomenclature  des  terrains  l'indication  succincte  des 
gisemens  les  plus  intéressans  de  l'Amérique  ^quinoxiale. 

J.  Formations  trachytiques  ,  comprenant  les  trachytes  grenus 
(granitoïdes  et  syénitiques)  ;  les  trachytes  porplijriques  ou 
porphyres  tracliytiques,  en  partie  pyroxéniques ,  en  partie 
celluleux  ,  avec  nids  siliceux  (  meulières  trachytiques  ou 
porphyres  molaires  de  M.  Beudant);  les  trachytes  semi-vitreux; 
les  perlites  avec  obsidienne ,  et  les  phonolithes  des  trachytes.  On 
peut  ajouter  à  cette  série  les  conglomérats  trachytiques  et  pon- 
ceux ,  avec  alunite,  soufre,  opale  et  bois  opalisé  ;  car  chaque 
terrain  volcanique  ,  comme  chaque  roche  intermédiaire  et 
secondaire,  a  ses  conglomérats,  c'est-à-dire,  ses  roches  frag- 
mentaires, dont  elle  a  fourni  les  premiers  élémens.  Les  tra- 
chytes (granités  chauffés  en  place  des  anciens  minéralogistes, 
porphyres  trappéens,  beaucoup  de  laves  pétrosiliceuses  de 
Dolomieu  ,  domites  de  MM.  de  Buch  et  Ramond  ,  nécroli- 
thes  de  M.  Brocchi ,  leucostine  granulaire  de  M.  Cordier) 
n'offrent  généralement,  dans  l'ancien  continent,  que  peu  de 
traces  de  stratitication  ;  mais  dans  les  Cordillères  des  Andes 
ils  sont  souvent  très -régulièrement  stratifiés  (ChimborazOj 
N.  60°  E.  ;  Assuay,  N.  i5°  E.  ),  mais  variant  par  groupe  et 
de  direction  et  d'inclinaison  ,  comme  font  les  phonolithes  du 
terrain  basaltique  (  Mittelgebirge  en  Bohème).  La  structure 
en  colonnes  (prismes  de  4  à  7  pans)  est  très-commune  dans 
les  trachytes  porphyriques  des  Cordillères,  non -seulement 
dans  les  roches  noires  à  base  de  rétinite  (pechstein)  avec 


346  Il\-D 

feldspath  vitreux  et  pyroxèue  (  Passuchoa,  près  de  la  ville  de 
Quito,  au  sud  des  collines  de  Poingasi  ;  Faldas  de  Pichincha; 
Paranios  de  Chulucanas ,  Aroina  et  Cunturcaga  ,  dans  les  Andes 
du  Pérou,  entre  Loxa  cl  Caxamarca);  mais  aussi  dans  les 
trachytes  gris-verdàtre  du  Chinriborazo  (prismes  minces  de 
5o  pieds  de  long  ;  hauieur  du  plateau,  2180  toises),  comme 
dans  les  tracliytes  granitoïdes  de  Pisojè  ,  au  pied  du  volcan 
de  Puracé.  Ces  derniers  sont  gris-verdàtre,  renferment  du 
mica  noir,  du  feldspath  commun  et  un  peu  d'anipiiibole, 
et  leur  ressemblance  avec  les  graniU  colonnari  des  Monts 
Euganéens  les  éloigne  beaucoup  (p.  169)  des  porphyres  du 
terrain  de  transition.  La  structure  globulaire  (en  sphéroïdes 
à  couches  concentriques )  paroît  plutôt  appartenir  aux  for- 
mations basaltiques  qu'aux  véritables  trachytes.  I,es  teintes 
pâles  dominent  dans  les  trachytes  des  Cordillères,  et  les  masses 
noires  de  cette  roche  m'on.t  paru  en  général  postérieures  aux 
masses  blanches  ,  grises  et  rouges.  La  même  différence  de 
gisement  paroit  avoir  lieu  en  Hongrie.  Les  trachytes  noirs 
prennent  quelquefois  (  P^ucu- Pichincha  près  de  Quito,  sur- 
tout à  l'arête  de  Tablahuma.  2556  toises)  tout  l'aspect  du 
basalte;  mais  Folivine  y  manque  toujours,  et  Ton  n'y  recon- 
noit  que  de  petits  cristaux  de  pyroxène  qui  pénètrent  jusque 
dans  l'intérieur  des  cristaux  du  feldspath  vitreux.  Dans  les 
Andes,  comme  dans  l'ancien  continent,  chaque  cône  ou 
dôme  trachytique  (les  premiers  ne  paroissent  que  des  dômes 
ou  cloches  percées  à  leur  sommet  et  couvertes  sur  leurs 
flancs  d'éjections  ponceuses  et  scoriliées)  présente  des  roches 
entièrement  différentes  dans  leur  composition  ,  selon  que  Pun 
des  élémens  prédomine  dans  le  tissu  cristallin.  Le  mica  noir 
est  le  plus  commun  dans  les  trachytes  du  Cotopaxi  (entre  le 
Nevado  de  Quelendana  et  le  ravin  deSuniguaicu  ,  2265  t.), 
volcan  qui  abonde  en  même  temps  en  masses  vitreuses  et  en 
obsidiennes  :  l'amphibole  domine  dans  les  trachytes  souvent 
noirs  de  Pichincha  et  d'Antisana:  le  pyroxène  dans  la  région 
inférieure  et  moyenne  du  Chimbora?o  ,  dont  les  trachytes 
renferment  quelquefois  des  pyrites ,  du  quarz ,  et  deux  va- 
riétés de  feldspath  ,  le  vitreux  et  le  commun.  L'ancien  volcan 
de  Yana-Urcu,  adossé  au  Chimborazo  (du  côté  du  village  de 
Calpi)  ,    est    dépourvu   de  pyroxène   et   contient  de   grands 


IND  547 

cristaux  d'amphibole.  Dans  les  trachytes  du  Nevado  de  To- 
luca  (Mexique)  et  d'Antisana  on  observe  somment,  comme 
dans  les  trachytes  du  Puy-de-Dôme,  des  parties  huileuses  et 
scorifiées  à  cellules  lustrées,  enchâssées  dans  des  masses  com- 
pactes et  terreuses.  Les  phonolithes  des  trachytes  sont  plus 
caractérisés  dans  le  volcan  de  Pichincha  (Pic  des  Ladrillos  et 
Guagua-Pichincha),  de  même  qu'à  la  pente  orientale  du  Clùm- 
borazo,  prés  de  Yanacoche  (hauteur,  aSoo  t.).  A  Antisana 
(Machay  de  San-Simon  )  et  au  nord  de  la  Villa  de  Ibarra 
(  Azufralde  Cuesaca  ,  plateau  de  Quito)  les  trachytes  à  base  de 
feldspath  compacte ,  mêlé  d'amphibole  ,  renferment  du  soufre 
natif,  comme  le  trachyte  du  Puy-de-Dôme  et  des  bortls  de 
la  Dordogne  (Ramond,  Niv.  géogn.,  p.  -jS  ,  86).  Il  ne  faut 
pas  confondre  cette  formation  de  soufre  natif  avec  celles 
des  solfatares  ou  cratères  éteints,  des  mandeîstein  celluleux 
(entre  Pâte  et  Tecosautia  au  Mexique)  et  des  argiles  du  ter- 
rain basaltique  (province  de  los  Pastes).  L'épaisseur  des  cou- 
ches de  trachytes  est  telle  que  sur  le  plateau  de  Quito  elle 
atteint  indubitablement  et  en  masses  continues  (Chimborazo, 
Picliincha)  14,000  à  18,000  pieds.  Comme  très-peu  de  vol- 
cans des  Andes  ont  donné  de  véritables  coulées  de  laves 
lithoïdes,  les  trachytes  y  sont  presque  partout  à  découvert. 
Il  n'y  a  que  les  conglomérats  trachytiques,  et  des  formations 
problématiques  argileuses  (tepetate),  dont  nous  parlerons 
bientôt,  qui  les  cachent  quelquefois  à  l'examen  des  géo- 
gnostes. 

J'ai  trouvé  du  feldspath  commun  et  laiteux  dans  les  tra- 
chytes poreux,  légei's  et  blancs,  du  Cerro  de  Santa  Polonia 
(  i552  toises,  près  deCaxamarca,  Andes  du  Pérou)  ;  à  la  cime 
du  Cofre  de  Perote  au  Mexique  (le  Peua  del  Nauhcampale- 
petl,  2098  toises),  dans  un  trachyte  gris-rougecàfre,  abondant 
en  cristaux  aciculaircs  d'amphibole  et  très-régulièrement  stra- 
tifié (N.  28°  E.  avec  3o°  au  N.  O.)  ;  au  volcan  encore  actif  de 
Tunguragua ,  au  sud  de  Quito  (Cuchilla  de  Guandisava , 
i658  t.),  dans  des  trachytes  rouge -de- brique  et  celluleux  ; 
enfin  ,  à  la  base  du  Chimborazo,  près  du  petit  volcan  éteint 
de  Yana-Urcu  (  1700  t.) ,  dans  des  trachytes  noirs  et  vitreux. 
M.  de  Buch,  qui  a  examiné  avec  soin  ces  dernières  roches, 
y  a  même  reconnu  à  la  fois  des  cristaux  de  feldspath  vitreux 


348  iiST)       . 

et  de  feldspath  commun,    phénomène  que  j'ai  trouvé  répété 

dans  plusieurs  porphj^res  de  transition  du  Mexique. 

Les  petits  cristaux  acirulaires  d'amphibole  sont  quelquefois 
placés  comme  par  files  sur  plusieurs  lignes  parallèles,  etalfec- 
tent  tous  la  même  direction  (vallée  du  Cer  au  Cantal;  tra- 
chytes  gris -blanchâtre  de  Rioliamba  viejo,  avec  rhombcs  de 
feldspath  décomposé  en  une  terre  jaunâtre). 

Le  mica  est  beaucoup  plus  rare  dans  les  tracbytes  du 
Mexique  et  des  Andes  que  dans  ceux  du  Siebengebirge ,  des 
Gleichen  en  Styrie ,  près  de  Radkersburg,  et  de  Hongrie  : 
j'en  ai  trouvé  cependant  de  belles  tables  noires  hexagones, 
tant  à  la  base  du  volcan  de  Pichincha  (près  deJavirac  ou  du 
Panecillo  de  Quito,  1600  t.),  que  dans  les  trachytes  semi- 
vitreux  gris -bleuâtre  de  Cotopaxi  ,  et  dans  les  trachytes 
rouges  et  poreux  du  Nevado  de  Toluca  (sommet  du  Fraile , 
20J2  toises). 

Le  titane  ferrifère  ne  manque  pas  dans  les  trachytes  de 
Quito  et  du  Mexique  ;  mais  les  lames  de  fer  oligiste  spécu- 
iaire  ,  également  communs  dans  les  trachytes  et  les  laves  de 
l'Italie  et  de  la  France,  sont  assez  rares  dans  les  roches  vol- 
caniques fendillées  de  l'Amérique  équinoxiaie. 

En  considérant  les  trachytes  des  Cordillères  sous  un  point 
de  vue  général,  il  n'y  a  pas  de  doute  qu'on  ne  les  trouve 
caractérisés  par  une  absence  de  quarz  en  cristaux  et  en  grains. 
Ce  caractère  ,  comme  nous  l'avons  vu  plus  haut,  s'étend  même 
sur  la  plupart  des  porphyres  métallifères  de  l'Amérique  équi- 
noxiaie (§§.  20  et  24),  qui  semblent  liés  aux  tracliytes;  mais 
l'une  et  l'autre  de  ces  roches  offrent  des  exceptions  frappantes 
à  une  loi  que  l'on  auroit  pu  croire  générale.  Ces  exceptions 
prouvent  de  nouveau  que  le  géognoste  ne  doit  pas  attacher 
une  grande  importance  à  la  présence  ou  à  l'absence  de  cer- 
taines substances  disséminées  dans  les  roches.  La  plus  grande 
masse  du  Chimborazo  est  formée  par  un  trachyte  semi-vitreux, 
vert-brunâtre  (à  base  cireuse,  comme  de  résinite),  dépourvu 
d'amphibole  ,  abondant  en  pyroxène,  très-compacte,  tabu- 
laire ,  ou  divisé  en  colonnes  minces  ,  irrégulières  et  tétraèdres. 
Ce  trachyte  renferme  ,  comme  couche  intercalée ,  un  banc 
rouge  pourpré,  celluleux,  à  cristaux  de  feldspath  à  peine 
visibles,  et  parsemé  de  nodules  alongés  de  quarz  blanc.  Plus 


IND  349 

haut  (à  3o]6  toises  de  hauteur,  où  nous  vjmes  descendre  le 
mercure  dans  le  baromètre  à  i3  pouces  1 1 /,„  lignes),  le 
quarz  disparoit,  et  Taréte  de  rocher  sur  laquelle  nous  mar- 
châmes étoit  couverte  d'une  traînée  de  masses  rouges,  hui- 
leuses, dcsagrëgces  et  assez  seuiblables  aux  amygdaloides  de 
la  vallée  de  Mexico.  Ces  masses,  les  plus  élevées  de  celles 
qu'on  a  recueillies  jusqu'ici  à  la  surface  de  la  terre,  étoient 
rangées  en  file,  et  pourroient  fiaire  croire  à  l'exisfence  d'une 
petite  bouche  près  du  sommet  du  Chimborazo,  bouche  qui 
s'est  vraisemblablement  refermée  ,  comme  celles  de  l'Epomeo, 
à  l'ile  d'Ischia  ,  et  de  Guambalo  et  d'Igualata,  entre  Mocha 
et  Penipe  (province  de  Quito).  Sur  le  plateau  central  du 
Mexique  les  trachytes  de  Lira  enchâssent  à  la  fois  du  quarz 
laiteux,  de  l'obsidienne  et  de  l'hyalithe.  M.  Beudant  a  aussi 
reconnu  récemment  des  cristaux  de  quarz  dans  les  trachytes 
porphyriques  (à  globules  vitro-lithoïdes),  dans  les  trachytes 
meulières  et  les  perlites  de  Hongrie  (  Voj.  en  Hongrie,  T.  III, 
p.  346,  565,  5ig,  575).  Le  même  phénomène  se  trouve  ré- 
pété dans  quelques  trachytes  de  l'Auvergne  (  Puy  Baladou  ; 
Cantal,  Col  de  Caboe),  des  Dardanelles  et  du  Kamtschatka. 
Lorsqu'on  se  rappelle  qu'il  y  a,  d'après  l'analyse  deM.Vau- 
quelin,  92  pour  cent  de  silice  dans  les  trachytes  duSarcouy, 
que  tous  les  basaltes  et  les  laves  en  abondent,  il  faut  plutôt 
être  surpris  que  cette  substance  disséminée  dans  des  silicates 
de  fer  et  d'alumine  n'ait  pu  se  réunir  plus  souvent  sans  mé- 
lange en  cristaux  ou  grains  de  quarz  pur.  Ce  n'est  que  la 
difficulté  opposée  à  la  concentration  de  la  silice  autour  d'un 
noyau  qui  caractérise  une  grande  partie  des  roches  volcani- 
ques. (Voyez  plus  haut,  p.  164.) 

Le  pyroxène  a  été  regardé  jusqu'ici  comme  extrêmement 
rare  dans  les  trachytes  d'Europe.  La  couche  de  pyroxène 
queM.  Weissa  découverte  entre  Muret  etThiezac  (au-dessus 
d'Aurillac  en  Auvergne;  Buch,  iiber  Trapp-Porphyr,  p.  i55), 
semble  plutôt  appartenir  à  une  formation  basaltique  super- 
posée au  trachyte.  Mais  en  Hongrie  (Beudant^  T.  111,  p.  5i-j, 
619),  comme  dans  la  Cordillère  des  Andes,  le  pyroxène  se 
trouve  assez  souvent  dans  les  trachytes  porphyroïdes  :  il  y 
remplace  l'amphibole  (Chimborazo,  ïunguragua,  base  du 
volcan  de  Pasto,  région  moyenne  du  volcan  de  Puracè  ,  près 


35o    '  IND 

de  Popayan).  L'espèce  de  répulsion  qu'on  croit  observe? 
entre  le  pyroxène  et  ramjihibole ,  est  d'autant  plus  frappante 
que  dans  le  terrain  basaltique  res  deux  substances  se  trouvent 
assez  souvent  réunies  (Rhonegebirge  en  Allemagne).  Les  tra- 
cli3rtes  du  Mexique  m'ont  paru  assez  généralement  dépourvus 
de  pyroxène. 

Le  grenat,  que  nous  avons  déjà  vu  dans  les  porphyres  de 
transition  du  Potosi  et  d'Izmiquilpan ,  reparoit,  quoique 
très-rarement,  dans  les  trachytes  des  Andes:  j'en  ai  trouvé 
dans  le  volcan  de  Yana-Urcu  (trachyte  noir)  ;  M.  Beudant  en 
a  recueilli  dans  les  perlites  iithoïdes  d'Hongrie. 

Je  doute  aujourd'hui  de  l'existence  de  l'olivine  dans  le 
terrain  trachytique  des  Cordillères  :  ce  que  j'avois  pris  pour 
cette  substance,  étoient  des  grains  de  pyroxène  d'une  teinte 
très-peu  foncée.  L'olivine  appartient  peut-être  exclusivement 
aux  terrains  basaltiques  et  à  quelques  laves  lithoïdes.  M.  de 
Buch  l'a  reconnue  parmi  les  éjections  du  volcan  de  Jorullo, 
qui  forment  un  tissu  à  petit  grain  d'olivine,  de  feldspath 
vitreux  et  de  mica  jaune.  Il  n'y  a  aucune  trace  d'amphibole 
ni  de  pyroxène,  quoique  ce  volcan  se  soit  fait  jour  à  travers 
un  terrain  de  trachyte.  M.  Beudant  doute  aussi  de  la  pré- 
sence de  l'olivine  dans  les  trachytes  de  Hongrie,  même  dans 
ceux  du  groupe  de  Vihorlet.  Lorsque  des  chimistes  se  seront 
occupés  plus  spécialement  des  trachytes  des  Cordillères,  qui 
offrent  une  si  grande  variété  de  roches,  on  y  découvrira  pro- 
bablement aussi  de  l'ijcide  muriatique  (comme  au  Sarcouy 
en  Auvergne)  et  du  mica  commun  mélangé  de  tifaue  oxidé  , 
comme  au  Vésuve.  (Soret,  Sur  les  axes  de  double  réfraction , 
1821 ,  p.  69.) 

Les  observations  que  l'on  peut  faire  sur  le  gisement  des 
ro.ches  volcaniques,  offrent  plus  d'intérêt  encore  que  Fétude 
de  leur  composition.  Les  trachytes  du  volcan  éteint  de 
Tolima  (§•  7  )  semblent  sortir  d'un  granité  postérieur  au  gneis 
primitif.  J'ai  vu  paroitre  (Alto  de!  Roble)  le  micaschiste 
(p.  129)  sous  les  trachytes  des  volcans  encore  brûlans  de 
Popayan.  Les  granités  à  travers  lesquels  les  dômes  trachyti- 
ques  du  Baraguan  et  de  Herveo  (Ervè)  se  sont  fait  jour,  sont 
peut-être  d'un  âge  plus  récent  que  le  micaschiste.  L'obser- 
vation de  gisement  la  plus  importante  que  j'aie  faite  dans 


•  IND  ,    35i 

l'immense  plateau  entièrement  trachytique  de  Quito  (espèce 
de  volcan  polystouie  ) ,  a  rapport  aux  trachytes  de  Tungu- 
ragua.  Après  avoir  cherché  en  vain  ,  pendant  plus  de  six 
mois,  quelque  trace  de  roches  vulgairement  appelées  d'ori- 
gine neptunienne,  j'ai  trouvé,  près  du  pont  de  cordage  de 
Penipe  (Rio  Puela,  1240  toises),  sous  les  trachytes  noirs  semi- 
vitreux,  souvent  colonnaires,  du  cône  encore  enflammé  de 
Tunguragua  ,  un  micaschiste  verdàtre  ,  à  surlace  striée  et 
soyeuse ,  renfermant  des  grenats  et  ressemblant  aux  mica- 
schistes du  terrain  primitif  (voyez  plus  haut,  p.  119).  Cette 
roche  repose  sur  un  granité  syénitique,  composé  de  beau- 
coup de  feldspath  verdàtre  lamelleux  et  à  gros  grains,  de 
peu  dequarz  blanc,  de  tables  hexagones  de  mica  noir,  et  de 
quelques  cristaux  effilés  d'amphibole.  La  cassure  du  granité 
offre  un  aspect  stcatitcux ,  et  prend,  au  souffle,  une  teinte 
vert-d'asperge.  Ces  syénites  et  ces  micaschistes  avec  grenats 
rappellent  ceux  que  MM.  de  Buch  et  Escolar  ont  découverts 
dans  l'archipel  des  Canaries,  en  blocs,  au  milieu  des  ter- 
rains trachytiques  de  Fortavenfura  et  de  Palma.  (Humboldt, 
Rel.  Jiist. ,  T.  I ,  p.  640.)  Il  est  très-certain  que  les  roches  de 
Penipe  ,  qui  n'appartiennent  peut-être  qu'au  terrain  de  tran- 
sition, sont  en  place;  qu'elles  viennent  au  jour  sous  un  véri- 
table trachyte  grenu,  et  non  sous  une  roche  fragmentaire, 
sous  un  conglomérat  trachytique  ,  comme  c'est  le  cas  à  Vie, 
à  Aurillac  et  à  S.  Sigismond  (Buch,  Trapp-Porphyr,  p.  141)  : 
mais,  sans  percer  une  galerie  dans  le  flanc  de  Tunguragua ,  il 
est  impossible  de  décider  s'il  y  a  superposition  ,  si  le  trachyte 
recouvre  le  micaschiste  sur  une  grande  étendue,  comme  la 
craie  recouvre  le  calcaire  du  Jura,  ou  si  le  trachyte,  en 
brisant  les  roches  plus  anciennes  et  en  s'élevant  perpendi- 
culairement,  s'est  simplement  incliné  vers  les  bords  sur  le 
micaschiste  adjacent.  Autour  du  cône  trachytique  de  Cayambe 
on  trouve  aussi  du  micaschiste  avecépidote,  et  un  granité  qui 
abonde  en  mica  brun  et  jaune.  Plus  au  nord,  dans  les  Cor- 
dillères du  Popayan  ,  en  montant  au  village  de  Piiracè,  j'ai 
vu,  sous  le  grand  volcan  de  ce  nom,  près  de  Santa-Barbara , 
le  trachyte  semi-vitreux  appuyé  sur  une  syénite  porphyrique 
(avec  feldspath  commun)  :  cette  syénite  est  bien  visible- 
ment superposée  sur   un  granité  de  transition  abondant  ea 


352  .  IND 

mica  (p.  167).  Au  pied  des  volcans  mexicains  encore  actifs- 
(le  Popocatepetl  et  le  Jorullo),  nous  n'avons  pas  été  assez 
heureux,  M.  Bonpland  et  moi,  de  découvrir  des  roches  de 
granité,  de  micaschiste  ou  de  syénite  en  place;  mais  nous 
avons  vu  enchâssées,  au  milieu  des  laves  lithoïdes  noires  et 
basaltiques  de  Jorullo,  des  fragmens  anguleux  blancs  ou 
blanc-verdàtre  de  syénite,  composés  de  peu  d'amphibole  et 
de  beaucoup  de  feldspath  lamelleux.  Là  où  ces  masses  ont 
été  crevassées  par  la  chaleur  ,  le  feldspath  est  devenu  filan- 
dreux,  de  sorte  que  les  bords  de  la  fente  sont  réunis  dans 
quelques  endroits  par  les  fibres  alongées  de  la  masse.  Dans 
l'Amérique  du  Sud,  entre  Almaguer  et  Popayan  ,  au  pied 
du  Cerro  Broncaso ,  j'ai  trouvé  de  véritables  fragmens  de 
gneis  compactes  dans  un  trachyte  abondant  en  pyroxène 
(p.  171).  Ces  phénomènes,  auxquels  je  pourrois  en  ajouter 
beaucoup  d'autres,  prouvent  que  les  formations  trachytiques 
sont  sorties  au-dessous   de  la   croûte  granitique  du  globe. 

Les  obsidiennes  dont  nous  avons  rapporté,  M.  Sonncsclunidt 
et  moi,  de  si  curieuses  variétés  en  Europe,  m'ont  paru  ap- 
partenir, dans  les  Cordillères  ,  à  deux  sections  bien  distinctes 
du  terrain  trachytique,  aux  véritables  trachytes  noirs  (Cerro 
del  Quinche,  au  nord  de  Quito)  et  blancs  (Cerro  de  las 
Novajas  cuOyamel,  au  nord-est  de  Mexico),  et  à  la  perlite 
(Cinapecuaro  ,  entre  Mexico  et  Valladolid).  11  faut  distin- 
guer de  ces  deux  formations  les  obsidiennes  des  courans  de 
laves  modernes  (Pic  de  Ténériffe),  formant  la  partie  supé- 
rieure de  ces  courans.  Les  fragmens  de  roches  vomis  par  le 
cratère  deCotopaxi,  et  remplis  de  rognons  d'obsidienne,  pa- 
roissent  arrachés  aux  parois  du  cratère  ;  mais  les  morceaux 
d'obsidiennelancéspar  le  volcan  de  Sotara,  près  de  Popayan, 
à  des  distances  de  plusieurs  lieues,  méritent  plus  d'attention. 
Les  champs  de  los  Serillos ,  des  Uvales  et  de  Palace,  en  sont 
couverts.  On  les  trouve  disséminés  comme  des  fragmens  de 
silex;  ils  reposent  sur  des  roches  basaltiques,  auxquelles  ce- 
pendant ils  sont  entièrement  étrangers.  Ces  obsidiennes  de 
Popayan  ont  souvent  la  forme  de  larmes  ou  même  de  boules 
à  surface  tuberculeuse  :  elles  offrent,  ce  que  je  n'ai  vu  nulle 
part  ailleurs,  toutes  les  nuances  de  couleurs,  depuis  le  noir 
foncé,  jusqu'à  celle  d'un  verre  artificiel  entièrement  iuco- 


•  IND  •   353 

lore.  Elles  sont  quelquefois  mêlées  de  fragmens  d'émaux 
lancés  par  le  même  volcan  de  Sotara ,  et  que  l'on  seroit 
tenté  de  prendre  pour  de  la  porcelaine  de  Réaumur.  La  pâte 
des  trachytes  semi -vitreux  gris- bleuâtre  et  à  cassure  con- 
choïde  (volcan  de  Puracè  ,  près  Popayan  ,  dans  la  plaine 
du  Cascajal,  à  2274  toises  de  hauteur),  passe  sans  doute 
quelquefois  à  l'obsidienne;  mais  les  grandes  masses  de  véri- 
tables obsidiennes,  disposées  par  couches  ou  par  rognons  à 
contours  bien  prononcés,  se  trouvent  dans  d'autres  variétés 
de  trachytes.  Nous  avons  déjà  décrit  plus  haut  les  roches  du 
Cerro  de  las  Navajas  (§.23),  où  se  trouvent  les  obsidiennes 
chatoyantes,  striées  et  argentées  (plateadas) ,  généralement 
disséminées  par  fragmens,  mais  formant  quelquefois  aussi  des 
couches  dans  un  trachyte  blanc.  Des  couches  analogues  ,  mais 
d'une  épaisseur  de  14  à  16  pouces,  sont  intercalées  aux  tra- 
chytes noirs  pyroxéniques  du  Cerro  del  Quinchè  (plateau  de 
Quito).  Elles  offrent  des  obsidiennes  noir-verdàtre  et  vei- 
nées de  bandes  rouge-de-brique.  Près  de  l'Hacienda  de  Lira, 
au  nord  de  Queretaro  (plateau  du  Mexique,  gyS  toises), 
j'ai  trouvé  dans  des  trachytes  vert-d'olive  et  à  base  de  réti- 
nite  (trachytes  qui  renferment  à  la  fois  du  feldspath  vitreux 
et  des  grains  de  quarz  disséminés)  ,  des  couches  d'obsidienne 
noire  de  trois  pouces  d'épaisseur.  Sur  d'autres  points  du 
plateau  de  la  Nouvelle -Espagne ,  à  Cinapecuaro,  au  pied 
du  Cerro  Ucareo  (dans  le  chemin  de  Valladolid  de  Mechoa- 
can  à  Toluca  ,  hauteur  968  toises),  et  entre  Ojo  del  agua 
et  El  Pinal  (dans  le  chemin  de  la  Puebla  de  los  Angeles  à 
Perote,  hauteur  1180  toises),  les  obsidiennes  se  trouvent  par 
rognons  dans  un  perlite  (perlstein)  à  éclat  émaillé,  composé  de 
petits  globules  semi-vitreux  blanc-grisàtrc.  Je  n'y  ai  pas  vu 
de  mica,  mais  des  infiltrations  d'hyalithe  et  quelques  petits 
cristaux  de  feldspath  filandreux,  presque  ponceux.  A  Cina- 
pecuaro, le  perlite  forme  de  petites  collines  coniques,  en- 
tourées de  pics  de  basaltes  et  de  dômes  trachytiques.  La 
roche  est  très- régulièrement  stratifiée  (N.  22"  E.,  incl.de 
8tf°  au  Nord-ouest)  :  on  la  prendroit  de  loin  pour  un  grès 
schisteux.  L'obsidienne  noire,  vert-noiràtre  et  vert-grisàtre, 
s'y  trouve  par  nids  ou  rognons  de  deux  à  cinq  pouces  d'é- 
paisseur, de  softe  que,  par  la  juxtaposition  de  ces  rognons, 

23.  ■  23 


354  '  IND 

le  perlite  paroît  quelquefois  enchâssé  dans  une  véritable 
roche  d'obsidienne.  Dans  les  plaines  orientales  du  Mexique, 
entre  Acaxete,  Ojo  del  agua  et  El  Final,  l'obsidienne  est 
moins  abondante,  mais  souvent  rubanée  comme  du  jaspe. 
Le  periite  y  renferme  beaucoup  de  tables  hexagones  de  mica 
noir  ;  il  est  souvent  fibreux  et  passe  à  ce  que  M.  Beudant 
appelle  (ï.  III,  p.  364,  5 89 )  perZ/^e  po;iceu.r. 

En  général  ,  les  obsidiennes  du  Mexique  et  des  Andes 
de  Quito  offrent,  et  souvent  sur  une  plus  grande  échelle, 
les  mêmes  phénomènes  de  composition  que  l'on  observe  dans 
ceux  de  Lipari  et  de  Volcano ,  et  que  quelques  géognostes 
ont  attribués  jadis  à  une  dévitrijication  (glaslinisalion).  On  y 
trouve  enchâssés  de  petits  cristaux  de  feldspath  vitreux  ;  des 
masses  polyèdres  de  perlstein  remplissant  entièrement  les 
vacuoles  dans  lesquelles  on  les  suppose  formés;  des  agrégations 
de  grains  cendrés,  d'un  aspect  terreux  et  distribués  par  zones 
parallèles  souvent  interrompues;  enfin,  des  fragmens  de  tra- 
chyte  brun-rougeâtre,  à  demi- fondus,  placés  tous  d'un  même 
côté,  à  l'extrémité  de  A^acuoles  très  -  alongées  et  parallèles 
entre  elles.  M.  de  Buch ,  qui  a  fait  un  examen  particulier 
des  substances  volcaniques  recueillies  dans  la  région  équi- 
noxiale  du  nouveau  monde,  observe  que  les  masses  de  per- 
lites,  tantôt  sphéroïdales,  tantôt  octogones  dans  leur  coupe, 
ont  constamment  au  centre  un  cristal  très-petit  de  feldspath 
vitreux  ou  d'amphibole,  et  que  la  position  de  ce  cristal  a 
déterminé  la  forme  de  tout  le  système.  (Buch  ,  dans  les  Sc/!r//fera. 
Nàtiirf.  Freunde,  1809,  p.  3oi.  Humboldt,  Rel.  hist.,  T.  I, 
p.  161.)  M.  Beiidant  a  trouvé  des  grenats  rouges  dans  les 
perlitesrétinitiques  de  Hongrie  (Vissegrad),  qui  ressemblent 
au  pechstein-porphjyr  du  terrain  de  transition  :  j'en  ai  vu 
d'également  rouges  au  sommet  du  volcan  de  Puracè  ,  dans  un 
trachyte  bleuâtre,  semi- vitreux,  à  cassure  conchoïde,  dé- 
pourvu de  mica  et  d'amphibole,  mais  enchâssant,  outre  le 
pyroxène  et  le  feldspath  vitreux,  des  points  cendrés  sembla- 
bles à  ceux  que  l'on  remarque  dans  les  obsidiennes  de  Lipari 
et  du  Cerro  de  las  Navajas.  La  présence  des  grenats  dans  des 
roches  généralement  mêlées  d'amphibole  reçoit  quelque  im- 
portance par  les  observations  ingénieuses  de  M.  Berzelins 
{Nouy.  Sjsième  de  minéralogie;,  p.  001)   sur  les  aniultés  chi- 


IND  355 

iniques  du  grenat  et  de  l'amphibole  renfermant  des  silicates 
d'alumine  et  d'oxidule  de  fer.  C'est  dans  les  obsidiennes  que 
j'ai  rapportées  de  la  Nouvelle-Espagne,  que  M.  Collet-Des- 
cotils  a  trouvé  le  premier  exemple  de  la  présence  simultanée 
de  deux  alcalis  dans  une  même  substance  minérale.  Ce 
phénomène  a  été  observé  depuis  dans  quelques  variétés  de 
feldspath,  de  Avernerite ,  desodalite,  de  chabasie  et  d'éléo- 
lithe  (pierre  grasse  de  Hauy).  J'ai  observé  que  beaucoup 
d'obsidiennes  noires  et  rouges  du  Quinchè  et  du  Cerro  de 
las  Navajas  ont  des  pôles  magnétiques,  fout  comme  les  por- 
phyres (de  transition  P  ,  p.  lyS),  de  Voisaco  et  comme  un 
beau  groupe  de  trachytes  colonnaires  du  Chimborazo  (hau- 
teur 2  1  GO  toises).  Ces  trachytes  étoient  gris-verdàtre  et  en- 
chàssoient  quelques  cristaux  de  feldspath  lamelleux  et  laiteux. 
La  dernière  assise  du  terrain  trachytique  est  formée  par 
des  conglomérats  ou  débris  agglutinés  et  remaniés  par  les 
eaux.  Ces  conglomérats  couvrent  d'immenses  surfaces,  non 
au  pied  des  Cordillères,  maissur  leurs  flancs  et  sur  des  plateaux 
de  1  200  à  1  6oo  toises  de  hauteur.  Dans  une  région  où  presque 
tous  les  volcans  actifs  s'élèvent  au-dessus  de  la  limite  des  neiges 
perpétuelles,  et  oii  les  eaux,  lentement  infiltrées  dans  des 
cavernes,  et  les  neiges  qui  se  fondent  au  moment  de  l'érup- 
tion ,  causent  d'affreux  ravages,  l'étendue  et  l'épaisseur  des 
terrains  de  transport  et  des  roches  fragmentaires  régénérées 
doit  nécessairement  être  en  rapport  avec  les  forces  qui 
amènent  encore  de  nos  jours  ces  masses  désagrégées.  Les 
conglomérats  sont  tantôt  friables  et  tuffacés  (base  de  Coto- 
paxi  et  de  l'AItar),  tantôt  compactes  et  endurcies  comme 
le  grès  (base  de  Pichincha).  Les  ponces  en  masses  pulvé- 
rulentes et  en  blocs  de  26  à  3o  pieds  de  longueur  forment 
la  partie  la  plus  intéressante  de  ces  conglomérats  du  terrain 
trachytique.  Nous  ferons  observer ,  à  cette  occasion  ,  que  le 
mot  pierre-ponce  est  très-vague  en  minéralogie  :  il  ne  désigne 
pas  un  fossile  simple,  comme  le  font  les  dénominations  de  cal- 
céioine  ou  de  pyroxène;  il  indique  plutôt  un  certain  état  ^ 
une  forme  capillaire  ou  filandreuse  sous  laquelle  se  présen- 
tent des  substances  diverses,  rejetées  par  les  volcans.  La 
nature  de  ces  substances  est  aussi  différente  que  l'épaisseur, 
la  ténacité ,  la  flexibilité  et  le  parallélisme   ou  la  direction 


556  IND 

de  leurs  fibres  (Huniboldt,  Relat.  hist. ,  T.  I,  p.  162).  II 
exisfe  des  ponces  noires  d'une  contexture  J)ulleuse,  à  fibres 
croisées;  on  y  reconnoît  beaucoup  de  pyroxène,  et  elles 
paroissent  dues  à  des  laves  basaltiques  scorifiées  (plaine  qui 
entoure  le  cratère  de  Rucu-Pichincha  ;  tuff  du  Pausilippe 
près  de  Najjles).  Quelques  volcans  rrjettent  des  trachytes 
blancs,  con?posé5  de  feldspath  compacte,  de  beaucoup  d'am- 
phibole, de  très-peu  de  mica,  et  dont  une  partie  est  devenue 
fibreuse  (Rucu-Pichincha  et  Cotopaxi ,  sur  le  plateau  de 
Quito;  volcan  de  Cumbal  près  Chilanquer ,  dans  le  plateau 
de  los  Pastos;  Sotara  près  dcPopajan;  Popocatepetl  à  l'est 
de  Mexico).  Souvent,  dans  des  trachytes  assez  compactes  et 
d'un  tissu  non  fibreux,  les  fragmens  rhomboidaux  du  feld- 
spath deviennent  creux  et  conmie  filandreux  (plateau  de 
Quito  et  du  Mexique).  Quelques  variétés  de  perlstein  offrent 
une  texture  fibreuse  (plaine  de  la  Nouvelle-Espagne  ,  entre  la 
Venta  del  Ojo  del  agua  et  la  Venta  de  Soto  ;  vallée  de  Gran 
et  de  Glashiitte,  en  Hongrie).  Enfin,  des  obsidiennes  noir- 
verdàtre  ou  gris  de  fumée  alterneiit  avec  des  couchts  de 
pierre  ponce  à  fibres  asbestoïdes  blanc -verdàtre ,  rarement 
parallèles  entre  elles,  quelquefois  cependant  perpendicu- 
laires aux  couches  de  Pobsidienne  et  semblables  à  une  écume 
filamenteuse  de  Acrre  (  Plaine  des  Genêts,  au  Pic  deTénériffe). 
Ces  dernières  variétés  ont  fait  naître  chez  quelques  géologues 
l'idée  que  toutes  les  ponces  étoient  dues  à  la  fusion  et  au 
gonflement  des  laves  vitreuses;  on  confondoit  les  obsidiennes 
ponceuses  (asclérines  de  M.  Cordier)  avec  les  véritables 
ponces  à  libres  parallèles  (pumites  légères  de  M.  Cordier), 
caractérisées  par  de  grandes  tables  hexagones  de  mica,  et 
probablement  dues  à  un  mode  d'action  particulier  que  le  feu 
des  volcans  exerce  sur  les  trachytes  blancs  (granités  des 
Isles  Ponces  de  Dolomieu).  Un  savant  qui  a  profondément 
étudié  les  rocliCS  trachytiques  de  l'Europe,  a  conliruié  ces 
aperçus.  «La  j)once,  dit  M.  Beudant,  dans  Fétat  actuel  de 
«  la  science  ,  ne  peut  pas  même  être  regardée  comme  une 
«  espèce  distincte  de  roche  :  c'est  un  état  celluleux  et  fila- 
«  nienteux,  sous  lequel  plusieurs  roches  des  terrains  trachy- 
«  tiques  et  volcaniques  sont  susceptibles  de  se  présenter.  * 
{Voyage  minéral.,  T.  III ,  p.  ob^.) 


IND  .    357 

Les  immenses  carrières  souterraines  de  pierre -ponce  ex- 
ploitées au  pied  du  Cotopaxi,  entre  la  ville  de  Tacunga 
(  Llactacunga)  et  le  village  indien  de  San-Felipe  (plateau  de 
Çuito  ,  hauteur  1482  toises),  uront  paru  les  plus  instructives 
pour  décider  la  question  du  gisement  de  cette  substance  dans 
■un  terrain  de  rapport.  Elles  avoient  déjà  Tait  naître  chez 
Bouguer  (Figure  de  la  terre,  p.  LXVIII),  dans  un  temps  où 
la  géognosie  n'existoit  presque  pas,  plusieurs  questions  inté- 
ressantes sur  l'origine  des  ponces.  Les  petites  collines  de 
Guapulo  et  de  Zumbalica,  qui  s'élèvent  jusqu'à  80  toises  de 
hauteur,  paroissent  au  premier  abord  entièrement  formées 
d'une  roche  blanclie  fibreuse,  à  couches  horizontales  et  à 
fibres  perpendiculaires  :  on  pourroit  en  tirer  des  blocs  dé- 
pourvus de  fentes  de  plus  de  60  pieds  de  longueur.  En 
examinant  ces  prétendues  couches  de  plus  près,  on  voit  que 
ce  sont  des  masses  de  quatre  pouces  à  trois  pieds  d'épais- 
seur ,  enchâssées  dans  une  terre  blanche  argileuse.  Elles 
ne  forment  pas,  à  proprement  parler,  un  conglomérat;  les 
blocs  ne  sont  que  déposés  dans  l'argile  ,  et  recouverts  de 
fragmens  menus  de  ponces  (de  8  à  g  toises  d'épaisseur)  qui 
sont  divisés  en  bancs  horizontaux.  Ces  blocs  de  ponces 
blanches,  quelquefois  bleuâtres,  sont  arrondis  vers  les  bords; 
ils  renferment  du  mica  jaune  et  noir,  des  cristaux  effilés 
d'amphibole  (non  de  pyroxène)  et  un  peu  de  feldspath  vi- 
treux. J'incline  à  croire  que  les  collines  de  Zumbalica,  qui 
ressemblent  beaucoup  à  celles  de  Sirok  en  Hongrie  (  Beudant, 
Vojy.  ruiner.,  T.  H ,  p.  22) ,  ne  sont  pas  les  parois  intérieures 
d'un  ancien  volcan  écroulé:  les  grands  blocs,  qui  ressemblent 
à  des  couches  fracturées,  sont  gécgnostiquement  liés  aux  petits 
fragmens  des  assises  supérieures;  les  uns  et  les  autres  ont 
sans  doute  été  déposés  par  les  eaux,  quoique  dans  des  cir- 
constances bien  diflerentes  de  celles  qui  accompagnent  les 
éruptions  actuelles  de  Cotopaxi.  L'aspect  de  tout  le  pays 
d'alentour  nous  prouve  l'ancienne  sphère  d'activité  de  ce 
volcan,  qui  a  une  hauteur  de  2962  toises  et  un  volume  énorme. 
A  l'ouest  du  volcan  ,  depuis  l'Alto  de  Chisinche  jusqu'à 
Tacunga,  sur  plus  de  quarante  lieues  carrées,  tout  le  sol  est 
couvert  de  pierre -ponce  et  de  trachytes  scoritiés. 

Il  est  bien  remarquable  que  le  mode  d'action  volcanique 


558     ,  IND 

propre  à  produire  des  ponces  soit  restreint,  pour  ainsi  dire, 
à  un  certain  noiiibre  de  montagnes  iguivomes.  L'Altar  ou 
Capac-Urcu  .  anciennement  plus  élevé  que  leChimborazo,  est 
placé  dans  la  plaine  de  Tapia  ,  vis-à-\is  du  volcan  encore 
actif  de  1  nnguragua.  Le  premier  a  vomi  une  immense  quan- 
tité de  ponces,  le  second  n'en  produit  pas  du  tout.  Cette 
même  différence  existe  entre  les  deux  volcans  voisins  de  la 
ville  dePopayan,  le  Puracè  et  le  Sotarà.  Celui-ci  a  rejeté 
à  la  fois  des  obsidiennes  et  des  ponces,  tout  comme  le 
volcan  de  Cotopaxi.  A  Rucu-Pichincha ,  où  je  suis  parvenu 
jusqu'à  une  des  tours  trachytiques  (hauteur  2491  toises) 
qui  dominent  l'immense  cratère  du  volcan,  j'ai  trouvé  beau- 
coup de  ponces ,  et  pas  d'obsidiennes  :  aussi  les  ponces  de 
Sotarà  et  de  Cotopaxi,  qui  renferment,  outre  le  feldspath 
vitreux  et  un  peu  d'amphibole,  de  grandes  tables  hexagones 
de  mica  ,  ne  sont  certainement  pas  dues  à  l'obsidienne  ;  elles 
diffèrent  entièrenjent  de  ces  ponces  vitreuses  et  capillaires 
que  j'ai  vues  couvrir  la  pente  du   Pic  de  Ténériffe. 

Les  superbes  opales  de  Zimapan,  au  Mexique,  ne  parois- 
sent  pas  appartenir,  comme  celles  de  Hongrie,  aux  conglo- 
mérats trachytiques,  mais  à  des  trachytes  porphyriques  qui 
renferment   des  globules  rayonnes  de  perlite  gris -bleuâtre. 

(§.23.) 

II.  Formations  basaltiques,  comprenant  les  basaltes  avec 
divine,  pyroxène  et  un  peu  d'amphibole;  \es  phonolithes  du 
"basalte,  les  dolériles ,  Vamygdaloïde  celliileuse ,  les  argiles  avec 
grenat  s -pyr  opes ,  et  les  roches  fragmentaires  basaltiques  (con- 
glomérats et  scories).  Le  terrain  basaltique  se  lie  d'un  côté 
aux  trachytes  ,  dans  lesquels  le  pyroxène  devient  progressi- 
vement plus  abondant  que  le  feldspath  (Cordier,  sur  les 
masses  des  Roches  volcaniques ,  p.  26)  ,  en  partie  et,  je  crois, 
d'une  manière  plus  intime,  aux  laves  des  volcans  qui  ont 
coulé  sous  forme  de  courans.  Les  phonolithes  appartiennent 
à  la  fois  au  terrain  trachytique  et  au  terrain  basaltique. 
Je  doute  qu'un  véritable  basalte  avec  olivine  se  trouve  in- 
tercalé comme  couche  subordonnée  au  trachyte.  La  phono- 
lithe,  qui  forme  de  ces  couches  dans  les  trachytes  des  Cor- 
dillères et  de  l'Auvergne,  n'est  que  superposée  aux  basaltes. 


IND  •>    359 

Lorsqu'elle  ne  s'élève  pas  en  pics  isolés  dans  les  plaines,  elle 
couronne  généralement  les  collines  basaltiques.  L'amphibole 
et  le  pyroxène  se  trouvent  disséminés  dans  les  trachytes  et 
les  basaltes  ;  la  première  de  ces  substances  appartient  peut- 
être  même  plus  particulièrement  aux  formations  trachytiques. 
L'olivine  caractérise  les  formations  basaltiques,  les  laves  très- 
anciennes  de  l'Europe  et  les  laves  très-modernes  (courant  de 
175g)  du  volcan  de  Jorullo  au  Mexique. 

Lorsqu'on  ne  considère  que  sous  le  rapport  du  volume  les 
groupes  de  roches  trachytiques  et  basaltiques  répandues  dans 
les  deux  continens,  on  observe  que  les  grandes  masses  de  ces 
groupes  se  trouvent  très-éloignées  les  unes  des  autres.  Les  pays 
qui  abondent  le  plus  en  basaltes  (la  Bohème,  la  Hesse)  n'ont 
pas  de  trachytes,  et  les  Cordillères  des  Andes,  trachytiques 
sur  d'immenses  étendues, sontsouvent  entièrementdépourvues 
de  basaltes.  Ni  le  Chimborazo,  ni  le  Cotopaxi ,  ni  l'Antisana, 
ni  le  Pichincha,  n'offrent  de  véritables  roches  basaltiques; 
tandis  que  ces  roches ,  caractérisées  par  l'olivine  ,  séparées 
en  belles  colonnes  de  trois  pieds  d'épaisseur,  se  rencontrent 
sur  le  même  plateau  de  Quito  ,  mais  loin  de  ces  volcans  à 
l'est  de  Guallabamba ,  dans  la  vallée  dii  Rio  Pisque.  Près  de 
Popayan  les  basaltes  ne  recouvrent  pas  les  dômes  trachytiques 
de  Sotarà  et  de  Furacè  ;  ils  se  trouvent  isolés  sur  la  rive  oc- 
cidentale du  Cauca  ,  dans  les  plaines  de  Julumito.  Au  Mexi- 
que ,  Je  grand  terrain  basaltique  du  Valle  de  Santiago  (entre 
Valladolid  et  Cuanaxuato),  est  très-éloigné  des  volcans  tra- 
chitiques  du  Popocatepetl  et  de  FOrizava.  Tous  ces  basaltes 
que  nous  venons  de  nommer  (Guallabamba,  Julumito  et 
Santiago)  reposent  probablement  aussi,  à  de  grandes  pro- 
fondeurs, sur  un  sol  trachytique;  mais  nous  ne  considérons 
ici  que  l'isolement,  la  séparation  des  montagnes  de  basaltes 
et  de  trachytes. 

En  général,  dans  les  Cordillères  du  Mexique,  de  la  Nou- 
velle-Grenade, de  Quito  et  du  Pérou ,  les  formations  trachy- 
tiques remportent,  pour  la  masse,  de  beaucoup  sur  les  for- 
mations basaltiques;  ces  dernières  peuvent  même  être  consi- 
dérées comme  très-rares,  en  les  comparant  à  celles  qui  tra- 
versent FAllemagne  de  l'est  à  l'ouest,  entre  les  parallèles  de 
5o°  et  de  5i°.  Cette  même  prépondérance  du  terrain  trachy- 


56o     *  IND 

tique  sur  le  terrain  basaltique  s'observe  en  Hongrie.  «Partout, 
«  dif  M.  Beuflant  avec  beaucoup  de  justesse,  partout  où  les 
«  masses  de  tracbyte  se  sont  développées  sur  une  grande 
«  échelle,  on  ne  trouve  que  des  lau)beaux  peu  considérables 
«  de  basalte,  et  réciproquement ,  dans  les  lieux  où  le  ter- 
«  rain  basaltique  est  extrêmement  développé,  il  n'existe  que 
«  peu  ou  même  point  du  tout  de  Iriichyte.  •  {Voyage  miner, 
en  Hongrie,  t.  III ,  p.  600,  687  —  589.)  On  diroit  que  ces 
deux  terrains  se  repoussent  ;  et  comme  les  cratères  des  vol- 
cans encore  actifs  se  sont  constamment  ouverts  dans  les  tra- 
chytes,  il  ne  faut  pas  être  surpris  que  ces  volcans  et  leurs 
laves  restent  aussi  éloignés  des  basaltes  anciens.  (Humboldt, 
Rel.  histor. ,  t.  J,  p.  1  64.  ) 

Malgré  cet  antagonisme,  ou  plutôt  cette  inégalité  de  dé- 
veloppement ,  que  nous  avons  déjà  remarqué  dans  les  gra- 
nités et  les  gneis- micaschistes ,  dans  les  calcaires  et  les  schis- 
tes de  transition,  dans  le  grès  rouge  et  le  zechsfein  ou  cal- 
caire alpin,  les  trachytes  et  les  basaltes  offrent  sur  d'autres 
poinîs  du  globe  les  aflinités  géognostiques  les  plus  intimes. 
Si  les  grandes  masses  basaltiques  (Hesse;  Forez,  Vélay  et  Vi- 
varais;  Ecosse;  Veszprim  et  lac  Balaton)  restent  géographi- 
quement  éloignées  des  grandes  masses  de  trachytes  (Sieben- 
gebirge  ;  Auvergne  ;  montagnes  de  Matra  ,  Vihorlet  et  To- 
tay  ;  Cordillère  occidentale  des  Andes  de  Quito),  des  lam- 
beaux du  terrain  basaltique  ;ie  s'en  trouvent  pas  moins  pour 
cela  superposés  à  ces  mêmes  trachytes.  (Buch  ,  Briefe  aus  Au- 
vergne,  p.  28y;  Id. ,  Trapp-Porphjr ,  p.  107  —  141.  Ramond  . 
JViV.  géologique ,  p.  iS,  60  —  73.)  Les  Monts  Euganéens  (ba- 
saltes du  Monte  Venda  près  des  cônes  trachytiques  de  Monte 
Pradio,  Monte  Ortone  et  Monte  Rosso)  ,  les  penchans  des 
montagnes  qui  constituent  le  groupe  du  Mont  Dore,  les 
environs  de  Guchilaque  au  Mexique  (Cerro  del  Marques, 
lS3j  toises)  et  de  Xalapa  (Cerro  de  Macultepec  ,  788  toises), 
présentent  des  exemples  frappans  de  cette  réunion  des  deux 
terrains  feldspathiques  et  pyroxéniques.  Tantôt  ce  sont  des 
buttes  de  basalte  prismatique  qui  sortent  du  terrain  de  tra- 
chyle  ;  tantôt  ce  sont  de  larges  coulées  de  basaltes,  souvent 
interrompues  et  formant  des  gradins  et  des  plateaux,  qui 
sillonnent  et  recouvrent  ce  terrain. 


IND  36i 

Il  résuKe  de  ces  oliservations,  que  les  plus  grandes  masses 
de  basaltes  gisent  immédiatement  dans  les  formations  pri- 
mitives intermédiaires  et  secondaires ,  tandis  que  d'autres 
masses  beaucoup  moins  considérables,  d'un  tissu  entièrement 
identique,  et  présentant  le  plus  souvent  l'apparence  d'an- 
ciennes coulées  de  laves  lithoïdes,  sont  superposées  au  ter- 
rain trachytique.  Les  uns  et  les  autres  enveloppent  quelque- 
fois des  fragmens  de  granile,  de  gneis  ou  d'une  syénite  très- 
abondante  en  feldspath.  Ce  même  phénomène,  comme  nous 
l'avons  vu  tantôt,  s'observe  (volcan  de  Jorullo)  dans  des 
laves  récentes  et  d'une  époque  connue;  mais  ces  indices  in- 
contestables d'une  fhiidité  ignée  ne  nous  autorisent  pas  à  ad- 
mettre que  les  montagnes  coniques  de  basaltes,  dispersées 
dans  des  plaines  ou  couronnant  la  crête  des  montagnes  pri- 
mitives, se  soient  tontes  formées  comme  les  nappes  de  ba- 
salte qui  couvrent  les  trachytes,  ou  comme  les  laves  lithoïdes 
basaltiques  (avec  olivine)  de  quelques  volcans  très-modernes. 
Le  mélange  des  matières  qui  constituent  les  roches  volcani- 
ques se  fait  dans  l'intérieur  du  globe,  et  probablement  à 
d'immenses  profondeurs.  Des  matières  analogues  et  compo- 
sées des  mêmes  élémens  peuvent  venir  an  jour  (paroître 
à  la  surface  du  globe)  par  des  voies  très-différentes,  tantôt 
par  soulèvement  (en  cloches,  en  dômes  ou  en  buttes  coni- 
ques), tantôt  par  des  crevasses  longitudinales,  formées  dans 
la  croûte  du  globe  ,  tantôt  par  des  ouvertures  circulaires  au 
sommet  d'une  montagne.  La  géognosie  des  volcans  distingue 
ces  modes  de  formations,  et  si  elle  s'oppose  à  confondre  sous 
le  nom  de  laves  toutes  les  roches  des  terrains  trachytiques 
et  basaltiques,  c'est  parce  qu'elle  se  refuse  à  admettre  que 
les  dômes  du  Puy  de  Cliersou,  du  grand  Sarcouy  et  du  Chim- 
borazo ,  de  même  que  toutes  les  montagnes  coniques  de  ba- 
saltes, soient  des  portions  de  courans  de  laves.  Des  volcans, 
en  partie  très-modernes,  ont  jeté  des  laves  feldspathiques 
(Ischia,  Solfatare  de  Pouzzole)  et  pyroxéniqnes  avec  olivine 
(Jorullo),  qui  ressemblent  aux  trachytes  et  aux  basaltes  les 
plus  anciens.  Souvent  des  masses  volcaniques  (laves  feldspa- 
thiques et  pyroxéniques  ;  trachytes  ;  basaltes  en  cônes  isolés), 
considérées  minéralogiquement ,  sont  les  mêmes;  on  peut 
supposer  que  les  circonstances  dans  lesquelles  elles  ont  été 


062  ITXD 

produites  dans  l'intérieur  du  glol)e  ,  différoient  très- peu  ; 
mais,  ce  qui  les  éloigne  géognostiquement  les  unes  des  autres, 
c'est  la  différence  marquante  dans  le  mode  de  leur  apparition 
à  la  surface  du  sol. 

Parmi  le  grand  nombre  d'observations  curieuses  que  pré- 
sentent les  environs  du  nouveau  vokvin  de  Jorullo  au  Mexique, 
aucune  ne  me  paroit  plus  importante  et  plus  inattendue  que 
celles  qui  concernent  la  double  origine  des  masses  basalti- 
ques. On  y  voit  à  la  fois  de  petits  cônes  de  basaltes,  composés 
de  boules  à  couches  concentriques,  et  un  promontoire  de 
laves  basaltiques,  lithoïdes  et  compactes  dans  l'intérieur, 
spongieuses  à  la  surface.  Ce  courant  de  laves  est  une  masse 
noire  à  très-petits  grains,  renfermant,  non  de  l'amphibole 
ou  du  pyroxène,  mais  indubitablement  de  l'olivine  (péri- 
dote  granuliforme  de  Haii)^)  et  de  petits  cristaux  de  feldspath 
vitreux.  M.  de  Buch  a  reconnu  ,  dans  des  fragmens  que  j'ai 
rapportés,  outre  l'olivine  disséminée  (vert  d'olive  clair,  con- 
choide  et  à  pièces  séparées  grenues),  quelques  tables  hexa- 
gones de  mica  jaune  de  laiton.  C'est  dans  ces  laves  que  sont 
empâtés  les  fragmens  anguleux  et  crevassés  de  syénite  grani- 
tique dont  j"ai  parlé  plusieurs  fois;  elles  tirent  probablement 
leur  origine  d'un  terrain  de  transition  placé  sous  le  trachyte. 
Des  morceaux  extrêmement  petits  de  trachyte  grisâtre,  avec 
feldspath  vitreux  et  cristaux  effilés  d'amphibole  ,  que  nous 
avons  été  assez  heureux  de  trouver  sur  le  bord  du  cratère 
au  milieu  des  scories,  prouvent  même  que  l'éruption  a  agi 
à  la  fois  à  travers  la  syénite  et  le  trachyte  superposé.  Les 
laves  s'élèvent  jusqu'à  678  pieds  d'épaisseur;  et  comme  elles 
se  sont  épanchées  non  latéralement ,  mais  du  cratère  du 
volcan  actuel,  c'est  en  suivant  leur  courant  vers  le  S.  S.  E. 
que  nous  avons  pu  ,  M.  Bonpiand  et  moi,  pénétrer,  non 
sans  quelque  danger  .  dans  l'intérieur  du  cratère  encore 
brûlant  pour  y  recueillir  de  l'air.  Il  ne  faut  pas  confondre 
avec  ce  courant  de  laves  lithoïdes  basaltiques,  qui  ne  sont 
pas  des  scories  entassées  comme  au  Monte  Novo  de  Pouzzole  , 
les  basaltes  en  boules  (Kugelbasalt)  qui  composent  les  petits 
cônes  appelés  par  les  indigènes /ours  (hornitos),  à  cause 
de  leur  forme,  et  parce  qu'ils  dégagent  par  des  crevasses 
des  filets  de  vapeurs  aqueuses ,  mêlées  d'acides  sulfureux.  11 


IND  363 

ne  peut  rester  aucun  doute,  même  à  l'observateur  le  moins 
accoutumé  à  l'aspect  de  terrains  bouleversés  par  le  feu  des 
volcans,  que  tout  le  sol  du  Mal-pais,  qni  a  pour  le  moins 
1,800.000  toises  carrées,  n'ait  été  soulevé.  Là  où  ce  terrain 
soulevé  est  contigu  à  la  plaine  des  Playas  de  JoruUo  ,  qui 
n'a  éprouvé  aucun  changement  et  dont  il  a  fait  partie  jadis, 
il  y  a  (à  l'est  de  San-Isidoro)  un  saut  brusque  de  vingt- 
cinq  à  trente  pieds  de  hauteur  perpendiculaire.  Les  couches 
noirâtres  et  argileuses  de  Mal-pais  y  paroisseiit  comme  frac- 
turées, et  offrent,  dans  une  coupe  dirigée  du  N.  E.  au 
S.  O. ,  des  fentes  de  stratification  horizontales  et  ondulées. 
Après  avoir  passé  ce  saut  ou  gradin,  on  s'élève,  sur  un 
terrain  bombé  en  forme  de  vessie ,  vers  la  crevasse  sur  la- 
quelle sont  sortis  les  grands  volcans,  dont  un  seul ,  celui  du 
milieu  {EL  volcan  grande  de  Jorullo) ,  est  encore  enflammé.  La 
convexité  de  ce  terrain  est,  dans  quelques  endroits,  de  78, 
en  d'autres  de  go  toises;  c'est-à-dire  que  le  pied  du  grand 
volcan  ,  ou  plutôt  la  portion  centrale  de  la  plaine  du  Mal- 
pais,  où  s'élève  brusquement  (près  de  l'ancienne  Hacienda 
de  San-Pedro  de  Jorullo)  le  Grand  Volcan,  est  à  peu  près 
de  5 10  pieds  plus  élevé  que  le  bord  du  Mal-pais  près  du 
premier  saut  ou  gradin.  Toute  cette  pente  du  sol  bombé  est  si 
douce ,  qu'elle  peut  échapper  à  l'attention  de  ceux  qui  ne  sont 
pas  pourvus  d'instrumens  propres  à  la  mesurer.  C'est,  comme 
disent  très-bien  les  indigènes,  un  terrain  creux,  une  tierra 
hueca.  Cette  opinion  est  confirmée  par  le  bruit  que  fait  un 
cheval  en  marchant  ,  par  la  fréquence  des  crevasses  ,  par 
des  affaissemens  partiels ,  et  par  l'engouffrement  des  rivières 
de  Cuitimba  et  de  San-Pedro  ,  qui  se  perdent  à  Test  du 
volcan  et  reparoissent  au  jour,  comme  des  eaux  thermales 
de  62°  cent.,  au  bord  occidental  du  Mal-pais.  Ce  sont  les 
bancs  d'argile  noire  ou  brun-jaunâtre  qui  ont  été  soulevés 
eux-mêmes  :  la  surface  du  sol  n'est  couverte  que  de  quel- 
ques cendres  volcaniques,  et  aucun  entassement  de  scories 
ou  de  déjections  sorties  d'un  cratère  n'a  causé  la  convexilé 
du  Mal-pais.  Sur  ce  terrain  soulevé  (Sept.  lySg)  sont  sortis 
plusieurs  milliers  de  petits  cônes  ou  buttes  basaltiques  à 
sommets  très-convexes  {les  fours  ou  hornitos).  Ils  sont  tous 
isolés  et  disséminés ,  de  manière  que  ,  pour  s'approcher  Q.u 


364  IND 

pied  du  grand  volcan  ,  on  passe  par  des  ruelles  torfueiises 
(los  callciones  del  Mal-pais).  f,enr  élévation  est  de  6  à  9  pieds. 
La  fuiiipe  sort  généraleuienf  un  peu  au-dessous  de  la  pointe 
du  c6i'e.  et  resle  visible  jusqu'à  ?o  pieds  de  hauteur.  D'au- 
tres filets  de  fumée  sortent  des  larges  crevasses  qui  traversent 
les  ruelles;  ils  sont  dus  au  sol  même  de  la  plaine  soulevée. 
En  i7"o,  la  chaleur  des  hornilos  étoit  encore  si  grande 
qu'on  pouvoit  allumer  un  cigarre  en  l'attachant  à  une 
perche  et  en  le  plongeant  à  deux  ou  trois  pouces  de  pro- 
fondeur dans  une  des  ouvertures  latérales.  Les  cônes  [hor- 
nilos )  sont  uniformément  composés  de  sphéroïdes  de  basaltes, 
souvent  aplatis  de  huit  pouces  à  trois  pieds  de  diamètre, 
et  enchâssés  dans  une  masse  d'argile  à  couches  diversement 
contournées.  L'aspect  de  ces  cônes  est  absolument  le  même 
que  celui  des  buttes  coniques  de  basalte  globuleux  {Kugel- 
hasalt-Kuppen)  que  l'on  voit  si  fréquemment  en  Saxe,  sur 
les  frontières  du  Haut-Palatinat  et  de  la  Franconie  ,  et  sur- 
tout dans  le  Mittelgebirg  de  la  Boîième  :  la  différence  ne 
consiste  que  dans  les  dimensions  des  buttes.  Cependant  en 
Bohème  nous  en  avons  aussi  trouvé,  M.  Frtiesleben  et  moi, 
qui  étoient  parfaitement  isolées  et  n'avoient  que  i5  à  20 
pieds  de  hauteur.  Le  noyau  des  boules  est  dans  les  hornitos, 
comme  dans  les  basaltes  globulaires  aiiciens,  un  peu  plus 
frais  et  plus  compacte  que  les  couches  concentriques  qui 
enveloppent  le  noyau,  et  dont  j'ai  pu  compter  souvent  25 
à  28.  La  masse  entière  de  ces  basaltes,  constamment  tra- 
versée par  des  vapeurs  acidulés  et  chaudes,  est  extrêmement 
décomposée.  Elles  n'oflf'rent  souvent  qu'une  argile  noire  et 
ferrugineuse,  à  taches  jaunes  et  peut-ê(re  trop  grandes  pour 
être  attribuées  à  la  décomposition  de  l'olivine.  En  approchant 
l'oreille  d'un  de  ces  cônes,  on  entend  un  bruit  sourd  qui 
paroît  celui  d'une  cascade  souterraine;  il  est  peut-être  causé 
par  les  eaux  du  Rio  Cuitamba  qui  s'engouffrent  dans  le 
Mal-pais.  Voilà  donc  bien  certainement  des  sphéroïdes 
aplatis  de  basalte,  agglomérés  en  buttes  coniques,  qui  ont  été 
soulevés  de  terre  de  mémoire  d'hommes,  et  qui  ne  sont 
par  conséquenfni  des  lambeaux  d'anciens  courans  de  laves, 
ni  le  résultat  d'une  décomposition  de  prismes  basaltiques 
articulés,  ni  celui  d'un  entassejnent  fortuit  de  déjections  d'un 


IND  '      365 

cratère  éloigné.  Il  est  probable  que  c'est  la  force  élastique  des 
vapeurs  qui  a  couvert  de  ces  honiitos ,  en  forme  d'ampoules, 
la  plaine  bombée  du  Mal-pais,  tout  cousme  la  surface  d'un 
fluide  visqueux  se  couvre  de  l)ulles  par  l'action  des  gaz  qui 
tendent  à  se  dégager.  La  croûte  qui  forme  les  petits  dômes 
des  hornitos  est  si  peu  solide,  qu'elle  s'enfonce  sous  les  pieds 
de  devant  d'un  mulet  que  l'on  force  d'y  monter. 

Les  faits  que  je  viens  d'exposer  me  paroissent  d'autant 
plus  importans  pour  la  géognosie  ,  qu'il  existe  dans  les  ter- 
rains basaltiques  les  plus  anciens  une  grande  analogie  entre 
les  buttes  isolées  de  basaltes  globuleux  et  les  buttes  de  basaltes 
colonnaires.  Depuis  long- temps  des  géologues  célèbres  ont 
combattu  l'hypothèse  qui  considère  tant  de  montagnes  ba- 
saltiques, d'une  forme  si  régulière  et  d'un  agroupement  symé- 
trique ,  comme  des  restes  d'un  courant,  d'une  coulée  de 
laves,  qui  a  avancé  progressivement  sur  un  terrain  incliné. 
Il  faut  distinguer,  dans  les  plaines  de  Jorullo  ,  trois  grands 
phénomènes  :  le  soulèvement  général  du  Mal-pais,  hérissé 
de  plusieurs  milliers  de  petits  cônes  basaltiques;  l'entassement 
des  scories  et  d'autres  matières  incohérentes  dans  les  collines 
les  plus  éloignées  du  grand  volcan ,  et  les  laves  lithoides  que 
ce  volcan  a  vomies  sous  la  forme  ordinaire  d'un  courant. 
L'intérieur  du  cratère  du  Vésuve  otïroit,  au  mois  d'Août  i8o5, 
époque  où  je  l'ai  visité  plusieurs  fois,  conjointement  avec 
MM.  de  Buch  et  Gay-Lussac ,  cette  même  différence  entre  le 
fond  du  cratère  soulevé,  c'est-à-dire  plus  ou  moins  bombé, 
selon  que  l'on  s'approchoit  de  l'époque  de  la  grande  érup- 
tion, et  les  cônes  de  scox'ies  désagrégées  qui  se  forment  autour 
de  plusieurs  soupiraux  entlammés.  Ce  sont  ces  accumula- 
tions de  matières  incohérentes  seules  qui  ressemblent  au 
Monte  Novo  de  Pouzzole.  La  croûte  de  laves  qui  constitue  le 
fond  des  cratères,  s'élève  ou  s'abaisse  comme  un  plancher 
mobile.  (Buch,  geogn.  Beob.,  T.  II ,  p.  124.)  Au  Vésuve,  ce 
fond  étoit  tellement  bouihé  (en  i8o5),  que  sa  partie  centrale 
dépassoit  le  niveau  du  bord  méridional  du  volcan.  Vintuines- 
cence  que  l'on  observe  périodiquement  dans  les  cratères  acces- 
sibles des  volcans  enflammés,  au  fond  de  la  vallée  circulaire 
ou  alongée  qui  termine  leurs  sommets,  présente  une  analogie 
frappante  avec  le  terrain  souleyé  du  Mal-pais  de  Jorullo  :  il  en 


366      '  IND 

présente  vraisemblablement  aussi  avec  ces  ilôts  volcaniques 
qui  paroissent  comme  des  roches  noires  au-dessus  de  la  sur- 
face de  rOcéan,  avant  de  se  crevasser  et  de  lancer  des  flam- 
mes. Il  paroit  que  M.  d'Aubuisson  n"a  pas  eu  occasion  de 
consulter  les  coupes  que  j'ai  publiées  du  volcan  de  JoruUo 
(Humboldt,  Essai  politique,  T.  I,  p.  253.  Id.,  Nivellement 
barom.  des  Andes,  n°  070  —  374.  Id.,  Vues  des  Cordillères ,  p. 
242  ,  pi.  43.  Id. ,  Atlas  géographique  et  physique  du  Voyage  aux 
rég.  équin.,pl.  28  et  29),  lorsque,  dans  son  intéressant  Traité 
de  géognosie ,  T.  I ,  p.  ^64,  il  suppose  que  j'ai  confondu  un 
terrain  soulevé  avec  un  entassement  de  déjections  dont  l'é- 
paisseur augmente  à  mesure  qu'on  approche  de  la  bouche 
volcanique. 

La  composition  du  basalte,  ou  plutôt  la  fréquence  plus  ou 
moins  grande  de  certaines  substances  cristallisées,  disséminées 
dans  les  basaltes,  varie  dans  les  différentes  parties  de  l'Amé- 
rique équinoxiale,  comme  dans  celles  de  l'Europe.  L'olivine, 
si  commune  dans  les  basaltes  d'Allemagne  ,  de  France  et 
d'Italie,  est  très-rare,  d'après  MM.  Macculloch  et  Boue,  dans 
l'ouest  de  TÉcosse  et  le  nord  de  l'Irlande.  L'amphibole  abonde 
en  grands  cristaux,  en  Saxe  (Obervviesenthal  et  Carlsfeld  ) , 
en  Bohème,  dans  le  pays  de  Fulde  et  en  Hongrie  (Medue), 
tandis  qu'elle  manque  le  plus  souvent  dans  les  basaltes  d'Au- 
vergne et  des  Canaries.  Le  feldspath  vitreux  et  l'olivine  se 
trouvent  presque  constamment  associés  dans  le  terrain  basal- 
tique du  Mexique  et  de  la  Nouvelle-Grenade  ;  souvent  (Valle 
de  Santiago,  Alberca  de  Palangeo  )  l'amphibole  et  le  py- 
roxène  manquent  :  d'autres  fois  (Cerro  del  Marques,  au-dessus 
de  San -Augustin  de  lasCuevas;  Chichimequillo  près  Silao) 
le  basalte  renferme  à  la  fois  de  l'olivine,  du  feldspath  vitreux, 
de  l'amphibole  et  du  pyroxène.  Dans  la  belle  vallée  de  San- 
tiago (Nouvelle-Espagne)  l'hyalite  est  si  commune  que,  par 
une  prédilection  bien  difficile  à  expliquer,  les  fourmis  eu 
recueillent  partout  où  le  basalte  se  décompose,  et  la  trans- 
portent dans  leurs  nirls.  Je  n'ai  jamais  vu  de  très- grandes 
masses  d'olivine  dans  la  Cordillère  des  Andes:  celles  de  l'Eu- 
rope appartiennent  plus  particulièrement  aux  brèches  basal- 
tiques (  Weissenstein  près  de  Cassel  ;   Kapfenstein  en  Styrie). 

Les  formations  d'argiles  et  de  marnes  que  nous  avons  indi- 


•  IND  •     3C7 

quées  dans  le  tableau  précédent  comme  appartenant  au  ter- 
rain volcanique,  méritent  beaucoup  d'attention  dans  la  Cor- 
dillère des  Andes,  dans  l'archipel  des  îles  Canaries  et  dans 
le  Mittelgebirge  de  la  Bohème  (Trzeblitz,  Hruvka).  Dans  ces 
trois  régions,  que  j'ai  visitées  successivement,  l'argile  ne  m'a 
point  paru  accidentellement  englobée  dans  la  masse  liquide, 
comme  c'est  le  cas  quelquefois  dans  l'argile  plastique  (grès  à 
lignites,  §.  55)  au-dessus  de  la  craie,  ou  dans  les  calcaires 
secondaire  et  tertiaire  (calcaire  du  Jura  et  calcaire  grossier) 
duVicentin,  que  j'ai  trouvés  enchâssés  par  fragmens  anguleux 
dans  le  basalte,  et  qui  pénètrent  tellement  dans  les  basaltes 
que  ces  derniers  même  font  elfervcscence  avec  les  acides. 
Les  marnes  argileuses  des  Cordillères  (Cascade  de  Régla  et 
chemin  de  Régla  àTolomilco  el  grande;  Guchilaque,  au  nord 
de  Cuernavaca  ;  Cubilcte  près  Guanaxuato  )  et  celles  de  Tîle 
de  la  Graciosa  (  près  Lancerote)  alternent  avec  les  couches  de 
basaltes,  et  sont  peut-être  d'une  formation  contemporaine, 
comme  les  argiles  schisteuses  qui  alternent  avec  le  calcaire 
alpin  (Humboldt,  Relat.  hist.,  T.  I,  p.  88).  Leur  position 
même  semble  prouver  qu'ils  ne  sont  pas  dus  à  la  décomposi- 
tion des  basaltes.  On  y  trouve  souvent  des  cristaux  de  pvro- 
xène  et  des  grenats-pyropes.  Je  ne  déciderai  pas  si  les  masses 
d'argile  qui  entourent,  dans  les  Andes  de  la  Nouvelle-Grenade 
Centre  Topayan,  Quilichao  et  Almaguer),  ces  immenses  amas 
de  boules  de  dolérites  et  de  grilnstein  à  feldspath  vitreux  et 
fendillé,  appartiennent  aux  formations  de  basaltes,  ou  aux 
syénites  et  porphyres  du  terrain  de  transition;  mais,  ce  qui 
est  indubitable,  c'est  que  les  bancs  d'argile  (trpetate),  qui 
rendent  stérile  une  partie  de  la  belle  province  de  Quito  ,  sont 
sortis  du  flanc  des  volcans,  non  mêlés  à  des  matières  en  fusion, 
mais  suspendus  dans  l'eau.  Les  inondations  qui  accompagnent 
toujours  les  éruptions  du  Cotopaxi ,  de  Tunguragua  et  d'au- 
tres volcans  encore  enflammés  des  Andes,  ne  sont  pas  dues, 
comme  au  Vésuve  [Mémoires  de  l'Académie ,  ijS/^,  p.  18), 
aux  torrens  d'eaux  pluviales  que  répandent  les  nuages  qui  se 
forment  pendant  l'éruption  (  par  le  dégagement  de  la  vapeur 
d"eau  dans  le  cratère)  :  elles  sont  principalement  le  résultat 
de  la  fonte  des  neiges  et  des  lentes  intil (rations  qui  ont  lieu 
sur  la  pente  des  volcans,  dont  la  hauteur  dépasse  2460  toises 


368  IPsB 

(celle  de  la  limite  des  neiges  perpétuelles).  Les  secousses  de 
violens  fremblemens  de  terre,  qui  ne  sont  pas  toujours  suivies 
d'érupfions  de  flammes,  ouvrent  des  cavernes  remplies  d'eau, 
et  ces  eaux  entraînent  des  trachytes  broyés,  des  argiles,  des 
ponces  et  d'autres  matières  incohérentes.  C'est  là  peut-être 
ce  que  Ion  pourroit  appeler  des  éruptions  boueuses,  si  cette 
dénomination  ne  rapprochoit  pas  trop  un  phénomène  d'inon- 
dation des  phénomènes  essentiellement  volcaniques.  Lor  que 
(le  19  Juin  1698)  le  Pic  du  Carguairazo  s'aHaissa,  plus  de 
quatre  lieues  carrées  d'alentour  furent  couvertes  de  boues  ar<ri- 
leuses,  que  dans  le  pays  l'on  appelle  ludazales.  De  petits  pois- 
sons, connus  sous  le  nom  de  preiïadiUas  (Pimelodes  cyclopum)^ 
et  dont  l'espèce  habite  les  ruisseaux  de  la  province  de  Quito  , 
se  trouvoient  enveloppés  dans  les  éjections  liquides  du  Car- 
guairazo. Ce  sont  là  les  poissons  que  l'on  dit  lancés  par  les 
volcans,  parce  qu'ils  vivent  par  milliers  dans  des  lacs  souter- 
rains, et  parce  que,  au  moment  des  grandes  éruptions,  ils 
sortent  par  des  crevasses,  entraînés  par  l'impulsion  de  l'eau 
boueuse  qui  descend  sur  la  pente  des  raontagnçs.  Le  volcan 
presque  éteint  d'imbaburu  a  A^omi,  en  1691  ,  une  si  grande 
quantité  de  preiïadiUas ,  que  les  fièvres  putrides  ,  qui  régnoient 
à  cette  époque  ,  furent  attribuées  aux  miasmes  qu'exhaloient 
les  poissons.  (Humboldt,  Recueil  d'obs.  de  zoologie  et  d'ana- 
loinie  comparée,  T.  I ,  p.  22,  et  T.  II,  p.  i5o.  ) 

La  dolérite  du  terrain  basaltique  (D'Aubuisson ,  Journ.des 
mines,  T. XVIII ,  p.  197;  Leonhard  et  Gmelin,  lom  Dolerit , 
p.  17  —  35)  est  très-rare  dans  les  Cordillères,  qui  abondent 
plutôt  en  roches  trachytiques  dans  lesquelles  le  feldspath 
prédomine  sur  le  pyroxène.  Je  pense  cependant  qu'une  dolé- 
rite que  j'ai  trouvée  dans  le  chemin  d'Ovexeras  aux  sources 
chaudes  de  Comangillo  près  de  Guanaxuato  ,  appartient  aux 
basallesj.de  la  Caldera  et  d'Aguas  buenas,  et  non  à  de  véri- 
tables trachytes.  11  y  a  de  même  quelque  incertitude  sur  le 
gisement  des  phonolithes,  lorsqu'elles  se  trouvent  isolées  ou 
éloignées  de  montagnes  basaltiques  et  trachytiques.  Cet  iso- 
lement caractérise  les  phonolithes  du  Peuon  ,  qui  forment 
un  écueil  dans  le  Rio  Magdalena  ,  et  qui  paroissent  immédia- 
tement superposées  au  granité  de  Banco  ;  les  phonolithes  que 
j'ai  vues  percer  la  couche  de  sel  gemme  de  Huaura  (Bas- 


Pérou,  prés  des  côtes  de  la  mer  du  Sud);  enfin  celles  qui 
s'élèvent  au  bord  septentrional  des  steppes  de  Calabozo 
(Cerro  de  Flores).  Les  dernières  sont  géognostiqucment  liées 
à  de  l'amygdaloïde  pyroxénique  ,  alternant  avec  un  griinstein 
de  transition  (Humboldt,  Rel.hist.,  T.  I ,  p.  iS^).  Les  amyg- 
daloïdes  celluleuses  (tezontli),  renfermant  du  feldspath  vi- 
treux, des  pyroxènes  et  de  la  lithomarge,  sont  le  plus  ré- 
pandues sur  le  plateau  central  de  la  Nouvelle-Espagne.  Elles 
sont  tantôt  recouvertes  par  des  basaltes,  tantôt  elles  forment 
(Cuesta  de  Capulalpan  )  des  boules  de  deux  à  trois  pieds 
d'épaisseur,  réunies  en  cônes  ou  buttes  hémisphériques  et 
superposées  à  des  porphyres  de  transition. 

m.  Laves  sorties  d'un  cratère  soos  forme  de  courans.  Laves 
lithoïdes  feldspathiques ,  semblables  aux  trachjtes.  hâves  basal- 
tiques. Obsidiennes  des  laves.  Ponces  vitreuses  des  obsidiennes, 
Nous  avons  déjà  rappelé  plus  haut  combien  les  véritables 
courans  de  laves  sont  rares  dans  les  Cordillères.  Celles  que 
j'ai  vues  sont  dues  à  des  éruptions  latérales  d'Antisana,  du 
Popocatepetl  et  du  Jorullo.  Beaucoup  de  courans  (Mal~pais) 
sont  sortis  de  bouches  volcaniques  qui  se  sont  refermées  depuis 
et  qu'il  est  impossible  de  reconnoître  aujourd'hui.  D'autres 
courans  dirigés  sur  un  même  point,  se  confondent  les  uns  avec 
les  autres  :  ils  se  présentent  en  larges  nappes  ,  semblables  à  des 
roches  pyroxéniques  beaucoup  plus  anciennes.  Dans  les  laves 
de  la  vallée  deTenochtitlan  (  entre  San  Augustin  de  las  Cuevas 
et  Coyoacan)  lamphibole  est  beaucoup  moins  rare  que  dans 
les  laves  d'Europe.  Un  minéralogiste  mexicain  très-instruit, 
M.  Bustamante,  les  a  soumises  récemment  avec  succès  à  l'a- 
nalyse mécanique  ,  d'après  la  méthode  ingénieuse  exposée  par 
M.  Cordier.  [Semanario  de  Mexico  ,  1820,  n.°XX,  p,3o — 90.) 

IV.  Tufs  des  volcans  ,  souvent  pétris  de  coquilles. 

V.  Formations  locales  calcaires  et  gyfsedses  superposées 
aux  tufs  volcaniques,  au  terrain  basaltique  (mandelstein)  ou 
auxtrachytes.  Je  compte  parmi  ces  formations  très-modernes, 
dans  le  plateau  de  Quito,  les  gypses  feuilletés  de  Fuluiagua, 
le  gypse  argileux  et  fibreux  de  Yaruquies,  les  argiles  schis- 
teuses carburées  et  vitrioliques  de  San-x\ntonio  ,  les  argiles 
salifères  (?)  de  la  Villa  de  Ibarra ,  les  sables  avec  lignites  du 

20.  24 


Syo  (  IND 

Llano  de  Tapia  (au  pied  du  Cerro  dcl  Altar)  ,  et  les  tufs 
calcaires  (caleras)  de  Agua  santa.  Dans  les  îles  Canaries,  des 
formations  calcaires  oolithiques  et  gypseusessont  aussi  subor- 
données aux  tufs  volcaniques  (Lancerote  et  Fortaventura). 
On  ne  peut  indiquer  l'âge  relatif  de  ces  petits  dépôts  en  les 
comparant  à  la  craie  ou  aux  formations  tertiaires  les  plus 
modernes  (  §§.  Sy  —  Sg)  :  nous  les  avons  placés  ici  selon  l'ordre 
de  leur  gisement  au-dessus  des  roches  volcaniques.  En  Hon- 
grie, d'après  l'intéressante  observation  de  M.  Beudant,  un 
grès  à  lignite  (§.  35),  superposé  au  conglomérat  trachytique 
(Dregely),  au  conglomérat  ponceux  (Palojta)  et  même  au 
trachyfe  (Tokai) ,  est  recouvert,  à  son  tour,  ou  de  calcaire 
grossier  (§.  56)  du  terrain  tertiaire,  ou  de  calcaire  d'eau 
douce,  ou  enfin  de  coulées  basaltiques. 

Telles  sont  les  formations  principales  du  terrain  pyrogène, 
dues  à  des  soulèvemens ,  ou  à  un  épanchement  latéral,  ou  à 
de  simples  éjections.  Nous  nous  bornons  à  l'indication  des 
faits,  sans  aborder  des  problèmes  dont  les  données  sont  en- 
core trop  imparfaitement  connues.  Naus  craindi-ions  qu'on 
n'appliquât  avec  raison  à  la  géognosit  ce  que  Montaigne  dit 
d'un  certain  genre  de  philosophie  .-  «  elle  vient  de  ce  que 
«  nous  avons  l'esprit  curieux  et  de  mauvais  yeux.  ^^ 


TABLEAU 

DES    FORMATIOISS     OBSERVÉES     DANS     LES    DEUX 
HÉMISPHÈRES    (1822). 

[Des  chiffres  romains  précèdent  les  noms  des  formations  qui ,  rarement  supprimées  et 
par  conséquent  le  plus  généralement  répandues  ,  peuvent  servir  d'horizon  géoguostique. 
On  a  indiqué  en  même  temps  les  SS-  et  les  pages  où  se  trouvent  les  descriptions.] 

Introduction  renfermant  quelques  principes  de  philosophie 
géoguostique,  pag.  56  — 11 3. 

Terrains  primitifs. 
Vues  générales,  p.  11 3. 

î.     Granité  primitif,  §.  1,  pag.  ii3 — -iiS. 
Granité  et  Gneis  primitifs,  §.  2,  p.  11 5. 
Granité  stannifère,  §.3,  p.  ii5 — 116. 
Weisstein  aa'ec  Serpentine,  §,  4,  p.  116. 


IND  *    371 

II.  Gneis  primitif,  §.  5j  p.  117  — 120. 

Gneis  et  Micaschiste,  §.  6,p.i20 — 121. 

Granités  postérieurs  au  Gneis,  antérieurs  au  Micaschiste 

PRIMITIF  ,   §.   7  y.  p.    12  2 1  2  /|  . 

Syénite  primitive?  §.  8,  p.  124 125. 

[Les  cinq  dernières  forinalions ,  placées  enUe  le  gueis  et  le  micaschiste  primitifs, 
sout  des  formations  parallèles.] 

Serpentine  primitive?  §.  9,  p.  12  5. 
Calcaire  primitif?  §.  10,  p.  126. 

III.  Micaschiste  primitif,  §.  11,  p.  12G  —  a3o. 

Granité  postérieur  au    Micaschiste,  antérieur  au   Thon- 

schiefer,  §.  12,  p.  )3i. 
Gneis  postérieur  au  Micaschiste,  §.  i3,  p.  i3i. 

GrUNSTEIN-ScHIEFER  ?    §.    14,    p.    l3l  ]32. 

IV.Thonschiefer  primitif,  §.  i5,  p.  102  — 134. 

Roche  de  Quarz  primitive  (avec  masses  de  fer  oUgiste  mé- 
talloïde), §.  16,   p.  104  —  i58. 
Granité  et  Gneis  postérieur  au  Thonschiefer  ?  §•  17 ,  p.  i3g. 
Porphyre  primitif?  §,  18,  p.  iSg  —  140. 
V.  Eufhotide  primitive,  postérieure  au  Thonschiefer,  §.19, 
p.   140—142. 

[Les  quatre  dernières  formations  sont  des   formations  parallèles  entre  elles,  quel- 
quefois même  au  Thonschiefer  prhnilif.] 

Terrains  de  transition. 

Vues  générales,  p.  142,  146  et  149  — 153.  Types  de  su- 
perpositions locales,  p.  146  —  14g. 

I.  Calcaire  grenu  talqueux,  Micaschiste  de  transition,  et 

Grauwacke  avec  Anthracite,  §.  20,  p.  i53  — 158. 

II.  Porphyres  et  Syénites  de  transition  ,  recouvrant  immédia- 

tement  les    roches   primitives  ,    calcaire  noir  et  Grun- 
stein,  §.  21  ,  p.  i58  — 181. 
III. Thonschiefer  de  transition,  renfermant  des  Grauwackes, 

DES    GrUNSTEIN  ,    DES    CaLCAIRES  NOIRS  ,    DES  SyÉNITES  ET  DES 

Porphyres,  §.  22,  p.  182 — 200. 
IV  ET  V.    Porphyres  ,    Syénites   et  Grunstein  postérieurs  au 
Thonschiefer  de  transition  ,  quelquefois  même  au  Cal- 
caire  A    ORTHOCÉRATITE3  ,    §§.   23,    24  >    p«   200  229. 

VI.Euphoïide  de  transition,  §.  25,  p.  229. 


J72 


IND 


Terrains  secondaires. 

Vues  générales,  p.  254. 

I.  Grand  dépôt  de  Houille  , 
Grès  rouge  et  Porphyre  secon- 
daire (avec  Amygdaloïde  , 
Griinstein  et  Calcaires  inter- 
calés), §.  26,  p.  235  —  267. 

Roche  de  Quarz  secondaire,  §. 
27,  p.  267  —  260. 

[Cette  dernière  formation  est  parallèle  au 
grès  honiller] 

II.  Zechstein  ou  Calcaire  alpin 
(Magnesian  limestone)  ;  Gypse 
hydraté;  Sel  gemme,  §.  28, 
p.  260  —  290. 

Les  cinq  formations  suivantes  ,  trts-iné- 
galement  développées ,  peuvent  être  comprises 
sous  le  nom  général  de 

m.  Dépôts  arénacbs ET  calcaires 
(marneux  et  oolithiques)  ,  pla- 
cés entre  le  zechstein  et  la 
craie,  et  liés  à  ces  deux  ter- 
rains ,  p.  290. 

Argile  et  Grès  bigarré  (Grès  à 
oolithes;  Grès  de  Nebra-,  New 
red  sandstone  et  red  mari)  avec 
Gypse  et  sel  gemme,  §.  29,  p. 
291—295. 

Muschelkalk  (Calcaire  coquil- 
lier  ;  Calcaire  de  Gœttingue), 
§.  3o  ,  p.  295  —  298. 

Qdadersandstein  (Grès  de  Kœ- 
nigstein),  §.  5i,p.  298  —  3oo. 

Calcaire  du  Jura  (Lias,  Marnes 
et  grands  dépôts  oolithiques, 
§.  02  ,  p.  3oo  —  3ji. 


Terrains  (exclusivement) 

VOLCANIQUES. 

Vues  générales,  p.  552 — 545, 

I.  Formations  TRACHYTiQUEs , 
p.  545  —  558. 

Trachytes  granitoïdes  et  syé- 

NITIQUE3. 

Trachytes  porphyriques  (feld- 
spathiques  et  pyroxéniques). 
Phonolithes  des  Trachytes. 
Trachytes  semi-vitreux. 
Perlites  avec  obsidienne. 

Trachytes  meulières,    ceîlu- 
leiises  avec  nids  siliceux. 
(  Conglomérats     trachyti- 
ques  etponceux,  avec  alu- 
nites ,  soufre  ,  opale  et  bois 
opalisé). 

II.  Formations   basaltiques  , 
p.  358  —  568. 

Basaltes    avec   olîvine  ,   pv- 

ROXÈNE  ET  UN  PEU  d'aMPHIBOLE. 

Phonolithes  des  basaltes. 

Dolérites. 

Makdelstein  celluleux. 

Argile  avec  grenats-pyropes. 
(Cette  petite  formation 
semble  liée  à  Pargile  avec 
lignites  du  terrain  tertiai- 
re sur  lequel  se  sont  sou- 
vent répandues  des  cou- 
lées de  basalte.) 


Grès  et  Sables  ferrugineux  ,  et 
Grès  et  Sables  verts  ,  Grès  se- 
condaire A  LiGNiTEs  (Ironsand 
et  Greensand),  §.  55  ,  p.3n  — 
5  i3. 

IV.  Craie,  §.  04,  p.  014  —  016. 

Terrains  tertiaires. 
Vues  générales,  p.  5i6  —  020. 

I.  Argiles  et  Grès  tertiaire  a 
LiGNiTEs  (  Argile  plastique ,  Mo- 
lasse, etNagelfluhe  d'Argovie), 
§.  55  ,  p.  320  —  525. 

II.  Calcaire  DE  Paris  (Calcaire 
grossier  ou  Calcaire  à  cérites, 
formation  parallèle  à  l'argile 
de  Londres  et  au  Calcaire  aré- 
nacé  de  Bognor) ,  §.36,  p.  525 
—  32g. 

III.  Calcaire  siliceux  ,  Gypse  a 

OSSEMENS,     alternant    AVEC   DES 

marnes  (Gypse  de  Montmar- 
tre), §.  37,  p.  329  —  331. 

IV.  Grès  et  sables  supérieurs 
au  gypse  a  OSSEMENS  (  Grès  de 
Fontainebleau)  ,§.  38  ,  p.  33 1. 

V.  Terrain  lacustre  avec  meu- 
lières poreuses,  supérieur  au 
GRÈS  DE  Fontainebleau  (  Cal- 
caire àlymnées),  §.  59,  p.33i. 


IND  375 

Conglomérats  et  scories  ba- 


III.  Laves  sorties  d'un  cratère 
volcanique  (Laves  ancien- 
nes ,  larges  nappes,  généra- 
lement abondantes  en  feld- 
spath. Laves  modernes  à 
courans  distincts  et  de  peu 
de  largeur.  Obsidiennes  des 
laves  et  Ponces  des  obsidien- 
nes) ,  p. 36g. 

IV.  Tufs  des  volcans  avec 
coquilles,  p.  36g. 

(Dépôts  de  calcaire  com- 
pacte, de  marne,  d'argi- 
les avec  lignites,  de  gyp- 
se et  d'oolithes ,  superpo- 
sés aux  tufs  volcaniques 
les  plus  modernes.  Ces  pe- 
tites formations  locales 
appartiennent  peut-être 
aux  terrains  tertiaires. 
Plateau  de  Riobamba; 
îles  de  Fortaventura  et 
Lancerote). 


Pour  s'élever  à  des  idées  plus  générales,  et  pour  mieux 
comprendre  les  rapports  de  superposition  indiqués  dans  le  ta- 
bleau des  roches,  on  peut  se  servir  d'une  méthode  pasigra- 
phique,  dont  il  sera  utile  de  rappeler  ici  les  principes  fon- 
damentaux. Cette  méthode  est  double  :  elle  est  ou  figurative 


574     '  IND 

(graphique,  imitative),  représentant  les  couches  superpo- 
sées par  des  parallélogrammes  placés  les  uns  sur  les  autres  ; 
ou  algoritliinique,  indiquant  la  superposition  des  roches  et 
l'âge  de  leur  formation ,  comme  des  termes  d'une  série. 

La  première  méthode  est  celle  que  j'ai  suivie  dans  les 
Tables  de  pasigrafia  geognostica,  que  je  traçai,  en  1804, 
pour  l'usage  de  l'école  des  mines  de  Mexico  ;  c'est  celle  que 
l'on  désigne  assez  généralement  sous  le  nom  de  coupes  des 
terrains.  Elle  offre  l'avantage  de  parler  plus  vivement  aux 
yeux,  et  d'exprimer  simultanément  dans  l'espace  deux  séries 
ou  systèmes  de  roches  qui  couvrent  une  même  formation. 
Elle  offre  des  moyens  faciles  pour  indiquer  les  équwalens 
géognostiqiies  ou  roches  parallèles ,  de  même  que  le  cas  oîi , 
par  la  suppression  locale  de  la  formation  [è,  la  formation  a 
supporte  immédiatement  y.  Deux  roches  parallèles  ,  par 
exemple,  le  thonschiefer  et  la  roche  de  quarz  (page  107), 
superposées  toutes  les  deux  à  du  micaschiste  primitif,  sont 
représentées  dans  la  méthode  figurative  par  deux  parallélo- 
grammes de  même  hauteur  placés  sur  un  troisième.  Les 
noms  des  roches  sont  inscrits  dans  les  parallélogrammes,  ou, 
comme  on  le  verra  plus  bas,  on  caractérise  ceux-ci,  en  les 
couvrant  de  hachures  ou  d'une  espèce  de  réseau  différemment 
modifié,  selon  que  les  roches  représentées  graphiquement  pas- 
sent ou  ne  passent  pas  les  unes  aux  autres.  Par  la  suppres- 
sion locale  du  grès  de  Nebra  (grès  bigai-ré)  et  du  calcaire 
deGœttingue  (muschelkalk) ,  le  calcaire  du  Jura  peut  reposer 
d'une  part  immédiatement  (pages  3oo  et  3io)  sur  le  calcaire 
alpin  (zechstein),  taudis  que  d'un  autre  côté  on  voit  suivre, 
de  bas  en  haut,  le  calcaire  alpin,  le  muschelkalk,  le  grès 
tigarré  et  le  calcaire  du  Jura.  Ces  rapports  de  gisement  se- 
ront exprimés  dans  une  coupe  idéale,  en  retranchant  de  la 
partie  inférieure  du  parallélogramme  qui  représente  le  cal- 
caire jurassique,  d'un  seul  côté  ,  un  quadrilatère  représentant 
les  deux  formations  du  muschelkalk  et  du  grès  bigarré. 

La  seconde  méthode  ,  qui  procède  par  séries  et  qu'on 
pourroit  appeler  algorithmique,  indique  les  roches,  non 
d'une  manière  imitative ,  non  par  Véienduc  fgurée,  mais 
par  une  notation  spéciale.  Toute  la  géognosie  de  giscmens 
ptant  un  problème  de  séries  ou  de  succession,  simple  ou  pé- 


IND  375 

rîodique,  de  certains  ternies,  les  diverses  formations  superpo- 
sées peuvent  être  exprimées  par  des  caractères  généraux, 
par  exemple,  par  les  lettres  de  l'alphabet.  Ces  notations, 
appliquées  à  différentes  parties  de  la  physique  générale  • 
dans  lesquelles  on  examine  la  juxlaposilion  des  choses,  ne 
sont  pas  des  jeux  de  l'esprit.  Dans  la  géognosie  positive, 
elles  ont  le  grand  avantage  de  fixer  l'attention  sur  les  rap- 
porls  les  plus  généraux  de  position  relative,  d'alternance  et  de 
suppression  de  certains  termes  de  la  série.  Plus  ou  fera  abs- 
traction de  la  valeur  des  signes  (de  la  composition  et  de  la 
structure  des  roches),  mieux  on  saisira,  parla  concision  d'un 
langage  pour  ainsi  dire  algébrique,  les  rapports  les  plus  com- 
pliqués du  gisement  et  du  retour  périodique  des  formations. 
Les  signes  a,  /S,  y,  ne  seront  plus  pour  nous  du  granité, 
du  gneis  et  du  micaschiste;  du  grès  rouge,  du  zechstein  et 
du  grès  bigarré:  de  la  craie,  du  grès  tertiaire  à  lignites,  et 
du  calcaire  parisien  .-  ce  ne  seront  que  des  termes  d'une 
série,  de  simples  abstractions  de  l'entendement.  Nous  sommes 
loin  de  prétendre  que  le  géognoste  ne  doive  pas  étudier, 
jusque  dans  ses  rapports  les  plus  intimes,  la  composition 
minéralogique  et  chimique  des  roches,  la  nature  de  leur 
tissu  cristallin  ou  de  leurs  masses;  nous  voulons  seulement 
qu'on  fasse  abstraction  de  ces  phénomènes  lorsqu'il  ne  s'agit 
que  de  la  succession  et  de  Vàge  relatif. 

Si  les  lettres  de  l'alphabet  représentent  ces  roches  super- 
posées, des  deux  séries, 

«,  /2,o^,cr 

la  première  indique  la  succession  des  formations  simples 
et  indépendantes  :  granité,  gneis,  micaschiste,   thonschiefer 


I  Avant  la  grande  découverte  de  la  pile  de  Volta,  j'avois,  dans  mon 
ouvrage  sur  V Irritation  de  la  fibre  nerveuse,  indiqué  par  une  notation 
particulière  quels  étoient  les  cas  où,  dans  une  chaîne  de  métaux  liété- 
rogèues  et  de  parties  humides  interposées,  l'excitation  musculaire  avoit 
lieu,  quels  éloient  les  cas  où  le  courant  galvanique  étoit  arrêté.  La 
simple  inspection  des  séries  et  de  la  position  respective  des  termes 
(élémens  de  la  pile)  pouvoit  faire  juger  du  résultat  de  l'expérience. 
(  Ilumboldt,  Fersiiche  iiber  die  gereizte  Muskel-  und  Nervenfaser,  T.  1, 
p.  a36.) 


376  IND 

ou  muschelkalk,  grès  de  Konigsstein  (quadersandstein  ),  cal- 
caire juriissique  et  grès  vert  à  lignites  (sous  la  craie).  La 
seconde  indique  l'alternance  de  formations  simples  avec  des 
formations  complexes  :  granité,  granité -gneis,  gneis,  gneis- 
micaschiste ,  micaschiste,  tlionschiefer  (pag.  iiS,  ii5);  ou, 
pour  donner  un  exemple  tiré  de  terrains  de  transition  (p.  i  20 
et  145),  calcaire  à  orthocératites,  calcaire  alternant  avec  du 
schiste,  schiste  de  transition  seul,  schiste  et  grauwacke, 
grauwacke  seul,  porphyre  de  transition Dans  les  forma- 
tions complexes,  c'est-à-dire,  dans  celles  qui  ofiVent  l'alter- 
nance périodique  de  plusieurs  couches,  on  distingue  quel- 
quefois trois  roches  différentes,  qui  ne  passent  pas  les  unes 
Q  ux  autres  dans  le  même  groupe  , 
ou  a,/2,  aBy,  >  .  .  .  , 
a^-y,  afiS",  ^as  .  .  ,  .  .  , 
selon  que  dans  le  terrain  de  transition  des  couches  alter- 
nantes de  granité,  de  gneis  et  de  micaschiste;  dans  le  terrain 
de  transition,  des  couches  alternantes  de  grauwacke,  de 
schiste  et  de  calcaire,  ou  de  grauwacke,  de  schiste  et  de  por- 
phyre, ou  de  schiste,  de  grauwacke  et  de  griinstein,  consti- 
tuent une  même  formation.  Dans  le  terrain  de  transition, 
comme  nous  l'avons  exposé  plus  haut,  le  thonschiefer  ou  le 
grauwacke  seuls  ne  sont  pas  les  termes  de  la  série.  Ces 
termes  sont  tous  complexes;  ce  sont  des  groupes,  et  le  grau- 
wacke appartient  à  la  fois  à  plusieurs  de  ces  groupes.  Il 
en  résulte,  que  le  terme /brniafio/i  de  grauwacke  n'a  rapport 
qu'à  la  prédominance  de  cette  roche  dans  son  association 
avec  d'autres  roches. 

Tous  les  terrains  offrent  l'exemple  de  formations  indépen- 
dantes qui  préludent  comme  couches  subordonnés.  Si  a^y,  ou 
a/2,  /èy  indiquent  des  formations  complexes  de  granité,  gneis 
et  micaschistes,  ou  de  granité  et  gneis,  de  thonschiefer  et 
porphyre,  de  porphyre  et  syénite,  de  marnes  et  de  gypse, 
c'est-à-dire,  des  formations  dans  lesquelles  des  couches  de 
deux  et  même  de  trois  roches  alternent  indéfiniment;  a-l-^, 
jS-f-^,  indiqueront  que  le  gneis  fait  simplement  une  couche 
dans  le  granité,  le  porphyre  dans  le  schiste,  etc.  Alors 

a ,  a-+-/2 ,  ^  ,  ^-h-y ,  y  .  .   .  . 
çxprime  le  phénomène  curieux  de  formations  qui  préludent^ 


IND  577 

qui  s'annoncent  d'avance  comme  des  bancs  subordonnés. 
Ces  bancs  rappellent  tantôt  des  termes  qui  précèdent  {ro- 
ches de  dessous),  tantôt  les  termes  qui  suivent  {roches  de 
dessus).  Ainsi  nous  aurons  : 

a,  ^,12-hct,  ,/2,  /2H-0,,  y  .  .  .  . 
Les  porphyres  et  syénites  grenues  du  terrain  de  transition 
pénètrent  dans  le  grès  rouge  et  y  forment  des  couches  subor- 
données. Si  le  gisement  des  formations  de  la  vallée  de  Passa 
est  tel  qu'on  Fa  récemment  annoncé  (pag.  288),  un  terme 
précédent  (la  syénitc)  déborde  jusque  dans  le  calcaire  alpin 
ou  zechstein  ;  c'est  le  cas  dans  la  série  : 
et,  pi-\—ct ,  y-\-Ai  «T  .   .   .   . 

Lorsqu'on  veut  appliquer  la  notation  pasigraphique  jus- 
qu'aux élémcns  des  roches  composées,  cette  notation  peut 
indiquer  aussi  comment,  par  l'augmentation  progressive  d'un 
des  élémens  de  la  masse,  surtout  par  l'isolement  des  cris- 
taux, il  se  forme  des  couches  par  une  espèce  de  développe- 
ment intérieur  : 

abc,  abc',  abc^  ....  abc— hb. 

Nous  avons  préféré,  dans  ce  cas  particulier  (bancs  de  feld- 
spath dans  le  granité  ,  bancs  de  quarz  dans  le  micaschiste  ou 
dans  le  gneis,  bancs  d'amphibole  dans  la  syénite ,  bancs  de 
pyroxène  dans  une  dolérite  de  transition),  les  lettres  de  l'al- 
phabet romain  à  celles  de  l'alphabet  grec,  pour  ne  pas  con- 
fondre les  élémens  d'une  roche  (feldspath,  quarz,  mica, 
amphibole,  pyroxène)  avec  les  roches  qui  entrent  dans  la 
composition  des  formations  complexes. 

Jusqu'ici  nous  avons  montré  comment,  en  faisant  entière- 
ment abstraction  de  la  composition  et  des  propriétés  physi- 
ques des  roches,  la  notation  pasigraphique  peut  réduire  à  une 
grande  simplicité  les  problèmes  de  gisement  les  plus  compli- 
qués. Cette  notation  indique  comment  les  mêmes  couches 
subordonnées  (le  sel  gemme  dans  le  zechstein  et  dans  le  red 
mari,  §§.  a 8  et  29;  les  houilles  dans  le  grès  rouge,  le  zech- 
stein et  le  muschelkalk)  passent  à  travers  plusieurs  forma- 
tions superposées  les  unes  aux  autres  : 

ct-^jW,  P>-\-jUL,  y-,  S'-h-fJi  .... 
Elle  rappelle  aussi  le  retour  des  formations  feldspathiques  et 
fristallines  dans  les  terrains  de  transition  et  de  grès  rouge 


378  IND 

(Nonvége,  Ecosse);  retour  qui  est  analogue  à  celui  du  gra- 
nité après  le  gneis  et  après  le  micaschiste  primitif: 
^5  /3,  ac,  y, S" ?:,  À,  a,  yS.  .  . 

Les  premiers  termes  de  la  série  reparoissent,  même  après 
un  long  intervalle  ,  après  le  grauwackc  et  le  calcaire  à  or- 
thocéralilcs,  c'est-à-dire ,  après  les  roches  fragmentaires  et 
coqiiillières. 

En  terminant  cet  ouvrage,  je  vais  montrer  que,  si  l'on 
donne  moins  de  généralité  à  la  notation  et  si  on  la  modifie 
d'après  quelques  considérations  physiques  (de  structure  et 
de  composition),  on  peut,  par  le  moyen  de  douze  signes 
géognostiques,  présenter  les  phénomènes  de  gisemens  les  plus 
importans  des  terrains  primitifs,  intermédiaires,  secondaires 
et  tertiaires.  Ces  douze  signes  embrassent  sept  séries  de  ro- 
ches, savoir  :  les  micaschistes  (et  leurs  modifications  d'un 
côté  en  granité  et  gneis,  de  l'autre  en  thonschiefer) ,  les 
euphotides,  les  amphiboliques  (griinstcin  ,  syénites),  lespor- 
phyres,  les  calcaires  et  les  roches  fragmentaires.  On  y  a 
ajouté  des  caractères  pour  les  grands  dépôts  de  houilles  et 
de  sel  gemme,  qui  servent  à  orienter  les  géognostes,  leur 
position  indiquant  celle  du  grès  rouge  et  du  calcaire  alpin. 

Tableau  et  valeur  des  signes. 

et,  Granité. 

.S ,  Gneis. 

y,  Micaschiste. 

cT,  Thonschiefer.  On  a  employé  les  quatre  premières  lettres 
de  l'alphabet  pour  désigner  les  quatre  formations  primitives 
les  plus  anciennes.  Comme  ces  formations  passent  graduel- 
lement les  unes  aux  autres,  on  a  choisi  des  lettres  qui  se 
succèdent  immédiatement  dans  l'ordre  alphabétique.  Le  gra- 
jiite  passe  au  gneis,  le  gneis  au  micaschiste,  celui-ci  au 
thonschiefer.  D'autres  formations  (porphyre,  grunstein,  eu- 
photide)  paroissent  pour  ainsi  dire  isolées,  souvent  comme 
surajoutées  aux  terrains  plus  anciens;  aussi  les  a-t-on  repré- 
sentées par  des  lettres  qui  ne  se  succèdent  pas  immédiate- 
ment entre  elles,  et  qui  ne  font  pas  suite  aux  lettres  a,  /3, 
y-,  (T.  C'est  par  ce  moyen  que  les  formations  qui  se  lient 
moins  aux  autres  que  quelquefois  (euphotide  et  griinslein) 


IND  379 

elles  se  lient  entre  elles,  se  distinguent  dans  récriture  pasi- 
graphique  d'une  manière  aussi  tranchée  que  dans  la  nature. 
0,  Ophiolithes,  euphotide ,  gabbro  et  serpentine;  eu  géné- 
ral toutes  les  formations  abondantes  en  diallage. 

ç,  syénite,  griinstein;  en  général  toutes  les  formations  abon- 
dantes en  amphibole. 

vr,  Porphyre.  On  voit  quelquefois  t  passer  à  ç,  et  ç  passer 
à  0. 

T,  Formations  calcaires  et  gypseuses  (T/Tavoç).Si  l'on  veuf 
individualiser  davantage  les  formations  calcaires,  on  peut 
distinguer  les  primitives  (t)  ,  et  celles  qui  renferment  des 
débris  organiques  (t');  on  peut  même,  par  des  exposans, 
indiquer  séparément  le  calcaire  de  transition  (t'),  le  calcaire 
alpin  ou  zechstein  (t°)  ,  le  calcaire  de  Gœttingue  ou  muschel- 
kalk  (t"),  le  calcaire  du  Jura  ou  la  grande  formation  ooli- 
Ihique  (t"),  la  craye  (t"),  le  calcaire  grossier  parisien 
(tP)  etc. 

;£,  Roches  fragmentaires,  arénacées,  agrégées,  conglomérats, 
grauwacke  ,  grès,  brèches,  roches  élastiques  de  M.  Bron- 
gniart  (xAstç/zct). 

L'accentuation  {■/)  indique  comme  dans  t,  que  le  grès  est 
coquillier.  On  peut  distinguer  les  grauvvackes  ou  roches  frag- 
mentaires de  transition  (jt^);  le  grès  rouge  (k"),  renfermant 
le  grand  dépôt  de  houille  (anthrax);  le  grès  bigarré  ou 
grès  de  Nebra  (^");  le  grès  de  Konigstein  ou  quadersand- 
stein  {yJ^);  le  grès  vert  ou  grès  tertiaire  à  lignites  sous  la 
craie  («');  le  grès  plus  abondant  en  lignites  au-dessus  de 
la  craie  (;t'')  ;  le  grès  de  Fontainebleau  (  )t),  etc.  Une  bonne 
notation  doit  avoir  l'avantage  de  pouvoir  modifier  la  valeur 
des  signes  selon  que  l'on  s'arrête  à  des  divisions  diverse- 
ment graduées.  Les  exposans  font  allusion  aux  noms  des 
roches. 

^,  Houille,  dont  le  plus  grand  dépôt  se  trouve  à  l'entrée 
du  terrain  secondaire  :  le  même  signe  accentué  (^')  indique 
les  lignites,  dont  le  grand  dépôt  est  placé  à  l'entrée  du  ter- 
rain tertiaire  et  qui  sont  quelquefois  des  houilles  coquil- 
lières.  {^vXov). 

■3;  Sel  gemme ,  dont  la  formation  principale  se  trouve 
tantôt  dans  le  calcaire  alpin,  tantôt  dans  le  red  mari  ou 


38o  I^TD 

grés   bigarré.   Ne  pouvant   employer  la  première  lettre   dn 
mot  grec  ciM  (  elle  indique  déjà  le  granité),  j'ai  fait  allusion 

à  '3'ctXctççct. 

Il,  La  division  des  formations,  anciennement  reçue,  en  ter- 
rain primitif,  intermédiaire,  secondaire,  etc.,  est  indiquée 
par  deux  barres  perpendiculaires.  Lorsque  les  séries  géognosti- 
ques  ont  des  termes  très-nombreux,  ce  signe  offre  comme 
des  points  de  repos.  Le  géognoste  expérimenté  sait  d'avance 
où  est  placée  la  première  roche  de  transition ,  le  grès  houiller, 
ou  la  craie.  L'accentuation  d'un  caractère  ((T',  t' ,  k)  rap- 
pelle en  général  qu'une  roche  renferme  des  débris  de  co- 
quilles, qu'elle  n'est  pas  primitive. 

Voici  quelques  exemples  de  l'emploi  de  ces  douze  signes 
pasigraphiques  des  roches  : 

ût,   y~+-7r,  cTt',  x',  tt,  (T,  a. 

Le  terrain  de  transition  commence  après  y-i-Tr  (le  mica- 
schiste avec  des  bancs  de  porphyre  primitif).  C'est  presque 
la  suite  des  formations  de  Norwége  (page  148).  On  voit 
suivre  une  formation  complexe  de  thonschiefer  et  de  cal- 
caire (noir)  avec  débris  de  coquilles,  du  grauvvacke ,  un 
porphyre ,  de  la  syénite  et  du  granité.  Les  termes  Sr  et  k', 
qui  précèdent  TT,  ç,  et,  caractérisent  ces  trois  roches  comme 
des  roches  de  transition.  En  Angleterre,  oîi  le  terrain  inter- 
médiaire offre  deux  formations  calcaires  bien  distinctes  (celle 
de  Dudley  et  du  Derbyshire),  on  voit  se  succéder.- 

^  ,  a-TT-,  cT',  K^,  t',  ;t',  t',  ^ ,  ;i",  t",  k"-{-^,  t°,  k  .  t"-,  tt^ .  ,  ,  , 
Le  terrain  de  transition  commence  avec  la  formation  de  syé- 
nite et  porphyre  (Snowdon)  placée  sur  un  gneis  qu'on  croit 
primitif;  puis  se  suivent  :  un  thonschiefer  avec  trilobites,  le 
grauwacke  de  May-Hill ,  le  calcaire  de  transition  de  Long- 
hopc,  le  old  red  sandstone  de  Mitchel  Dean,  le  mountain 
limestone  du  Derbyshire,  la  grande  formation  de  houille, 
le  new  red  conglomerate  qui  représente  le  grès  rouge,  le 
calcaire  magnésifère,  le  red  mari  avec  sel  gemme,  le  cal- 
caire oolithique ,  le  grès  secondaire  à  lignites  (greensand), 
la  craie,  le  grès  tertiaire  à  lignites  ou  argile  plastique,  etc. 
Sur  le  continent,  les  formations  secondaires,  si  elles  s'étoient 
toutes  développées  ,  se  succédcroient  de  la  manière  suivante  : 

t',  ;t«   Il   TTK'-^^.T-^d'y  K,  t",  k\  T%   k\  t'    \\    iCK  .  .  . 


IND  381 

En  comparant  ce  type  avec  celui  de  V Angleterre , 

^ ,  k",  t°,  ;t"-f— S-,  T°,  il ,  t" 

on  voit  qu'entre  les  oolithes  (t")  et  le  rcd  mari  ou  grès 
de  Nebra  (^")  il  y  a,  en  Angleterre,  deux  formations  suppri- 
mées, savoir,  le  muschelkalk  et  le  quadersandstein  ;  les  houilles 
(^),  le  sel  gemme  (^)  et  les  oolilhcs  (î<")  servent  de  termes 
de  comparaison,  d'horizon  géognostique.  Mais,  sur  le  con- 
tinent, ^  et  ^  sont  liés  au  grès  rouge  et  au  calcaire  alpin, 
tandis  qu'en  Angleterre  ces  dépôts  sont  plutôt  liés  aux  ro- 
ches de  transition  et  au  red  mari.  Quelquefois  t*  est  subor- 
donné (pag.  269),  intercalé  à  k"  :  ces  deux  termes  de  la  série 
(le  calcaire  alpin  et  le  grès  rouge)  n'en  forment  alors  qu'un 
seul.  L'incertitude  de  savoir  si  un  calcaire  est  alpin  (zech- 
stein)  ou  de  transition,  naît  généralement  de  la  suppression 
du  grès  rouge  et  du  dépôt  de  houille  que  renferme  ée  grès. 
Des  deux  séries, 

T  ,    kH-^  ,    T  .  .  .  , 
T  ,    K,     T .  .  .  , 

la  première  seule  offre  la  certitude  que  le  dernier  t  est  du 
calcaire  alpin.  Dans  la  seconde  série,  les  deux  calcaires  et 
la  roche  fragmentaire  qui  les  sépare  pourroient  être  de 
transition.  La  liaison  intime  de  la  craie  avec  le  calcaire  du 
Jura  est  évidente,  d'après  l'alternance  des  couches  (t°,  x}, 
t',  «*\),  et  d'après  l'analogie  des  grès  à  lignites  au-dessous 
et  au-dessus  de  la  ci\iie. 

Pour  réunir  les  principaux  phénomènes  de  gisement  des 
roches  dans  les  terrains  primitifs,  intermédiaires  ,  secondaires 
et  tertiaires  ,  j'offre  la  série  suivante  : 

a,  tt;S,  /3-i-7r,  ^y,  y-\-r,  st,  7^,  J",  «t,  /2,  «T,  0  ||  y.",  t,  cTt', 
<r',  <r'  H-  TT  ,  -y,  t\  CTT  t  T  -4-  a ,  cTTT ,  0  11  TTV^  — (-  ^ ,  t"-!—^  ,  k", 
t™,At%.,',t'  Il   ;t'^  tP.... 

Il  seroit  inutile  de  donner  l'explication  de  ces  caractères; 
elle  résulte  de  leur  comparaison  avec  le  tableau  de  forma- 
tion. Je  me  borne  à  fixer  l'attention  du  lecteur  sur  l'accu- 
mulation des  porphyres  {tt)  ,  sur  les  limites  des  terrains  de 
transition  et  secondaires,  sur  la  position  des  formations  d'eu- 
photide  (0),  sur  les  grands  dépôts  de  houille  et  des  lignites 
C^),  et  sur  le  retour  (presque  périodique)  des  formations 


382  IND 

feldspathiques,  des  granités,  gneis  et  micaschistes  («,  ^,  y) 
de  transition.  Comme  la  notation  que  je  présente  ici  peut 
être  diversement  graduée,  en  accentuant  les  caractères,  en 
les  réunissant  comme  des  coefliciens  dans  les  formations 
complexes,  ou  en  ajoutant  des  exposans,  je  doute  que  les 
noms  des  roches  rangées  par  séries  les  unes  à  côté  des  au- 
tres puissent  parler  aussi  vivement  aux  yeux  que  la  notation 
algorithmique. 

Dans  la  méthode  figurative  ou  graphique  ,  celle  qui  repré- 
sente les  formations  par  des  parallélogrammes  superposés 
les  uns  aux  autres,  on  peut  aussi  indiquer  les  rapports  de 
composition  et  de  structure  par  des  caractères  qui  couvrent, 
comme  un  réseau,  toute  la  surface  des  parallélogrammes. 
En  alongcant  les  parties  grenues  du  granité  et  en  divisant 
le  parallélogramme  en  couches  assez  épaisses,  on  obtient  le 
caractère  du  gneis.  En  rendant  le  tissu  feuilleté  onduleux 
et  en  l'interrompant  par  des  nœuds  (de  quarz),  le  caractère 
du  gneis  se  change  en  celui  de  micaschiste.  De  la  même 
manière,  la  syénite  sera  représentée  par  le  signe  de  granité 
auquel  on  ajoute  des  points  noirs  (Tamphibole).  Ces  carac- 
tères passent  les  uns  aux  autres,  comme  les  roches  qu'ils  in- 
diquent. En  les  réunissant  dans  des  coupes,  j'ai  formé  sur 
les  lieux  des  dessins  très -détaillés  des  vallées  de  Mexico 
et  de  Totonilco,  des  environs  de  Guanaxuato  ,  et  du  chemin 
de  Cuernavaca  à  la  mer  du  Sud  ;  dessins  qui  ont  l'avan- 
tage de  ne  pas  exiger  l'emploi  des  couleurs.  Je  n'entrerai 
pas  dans  un  plus  grand  détail  sur  les  caractères  que  l'on 
peut  employer.  Ces  caractères  peuvent  être  diversement 
modifiés  :  il  n'y  a  d'essentiel  que  la  concision  de  la  notation 
et  l'esprit  des  méthodes  pasigraphiques. 

NOTES. 

§.  1.  Léopold  de  Bucli  ,  Geogn.  Beobachf. ,  Tomel,  page  16,  23;  Id., 
Reise  nach  Norwegen ,  II,  p.  iQ&;  Id.,  dans  Gilbert's  yénnalen ,  1820, 
Avril,  p.  i3o.  Leonhard,  Taschenhuch ,  1814,  p.  17.  Freiesicben  ,  Bemer- 
kungen  ïiher  den  Harz  ,  I,  p.  I42.  Lconliard  ,  Kopp  et  Gaertner,  Pro- 
pœdeutik,  p.  iSg.  Bonnard,  Essai  géogn.  sur  l'Erzgehirge ,  p.  i8,  48; 
Id.,  aperçu  géogn.  des  terrains ,  p.  32.  D'Aubuisson,  Traité  de  géogn. , 
II,  12.  Jameson,  Sfst.  of  Miner.,  III,  107.  Goldfuss  et  Bischof, 
Beschreihuiig  des  Fichtelgehirges ,  \,  145  ;  II,  38.  Bouc,  Géologie 
d'Ecosse,    p.   i6,    348;    GeoL  Trans.,    II,    i58.      Edinb.  Phil.    Trans., 


•  IND  »  583 

TII,  35o.  BeuJant,  Voyage  miner,  et  s^éol.  en  Hongrie,  III,  19,27. 
Humboldt.  Essai  sur  la  géogr.  des  plantes  ,  p.  122  ;  Id. ,  Relat.  hislor.  de 
vof.  aux  rég.  éfjuin.,   \l,    100,  299,607. 

§.  2.  Raunier,  Geb.  von  Nieder-Schlesien  ,  p.  10. 

§.  3.  Bonnard,  Erzgeb. ,  p.  62,  118.  Goldfuss,  Fichtelg. ,l,i^^ ,  148, 
172;   II ,  32. 

§.4.  Pusch,  dans  Leonh. ,  Tt^schenh.,  1813,  p.  42.  Raumer,  Fragm.  ^ 
p.  33,36,  70.  Bonnard,  Erzgeh.,  p.  104,  121.  Maineke  et  Keferstein  j 
dans  Leonh.  ,  Taschenh.  ,  1820,   p.   io3. 

§.5.  hwch.  ,  Beob.,  1,33,  Id.,  Norw.,\,  197,358,  11,240;  /<f,  dans 
Mag.  naturf.  Freunde  ,  1809,  p.  46.  D'Aubuisson  ,  Géogn.  ,11,  60  —  66) 
II,  i83,  187.  Blode,  dans  Leonh.  Taschenb.  ,  1812,  p.  17.  Huinboldt, 
Nivell.  géogn.  des  Andes ,  dans   son  Recueil  d'observ.  aslron.  ,1 ,  3io. 

§.6.   Bonnard,  Erzgeb. ,  \>. 'j2.  Huuil)oldt,  Rel.  hist.  ,  I,  556  ,  II,  i3g. 

§.7.  Goldfuss,  Fichtelgeb. ,  I,  172 —  174.  Bonnard,  Terrains,  p.  34 , 
40,  83,66;  Id.  Roches ,  p.  34.  Humboldt,  Rel.  hist.,  I,  610;  II,  142, 
233,  491,   569,  715. 

§.8.  Burckhardt,  Travels  in  Sj'ria ,  p.  142.  D'Aubuisson,  Géogn. , 
II,    .9. 

§.9.  Stcffens  Orjktognosie,  1,  270.  Bouc,  Ecosse,  p.  55.  Humboldt, 
Rel.  hist.,  II,  40. 

§.  10.  Beudant,  Hongrie,  II,  21 3.  Bonnard,    Terrains ,  p.  79. 

§.  11.  Buch,  Geogn.  Beob.,I,  45,  5i,  124,257;  Id.  ,  Norwegen  ,1, 
191,  209,  219;  Id.,  dans  JVat.  lUag. ,  1809,  p.  ii5  Cordier,  dans  Journ. 
des  mines ,  XVI,  264.  Bonnard,  Terrains  ,  p.  46.  D'Aubuisson,  Géogn., 
II,  78  —  g3  ;  Id.  dans  Journal  de  physique  ,  1807,  p.  402.  Eschwege, 
Journal  von  Brasilien ,  II,  14.  Freiesleben  ,  Geogn,  Beytrag  zur  Kennt- 
niss  des  Kiipfersch. ,  V,  257.  Goldfuss,  Fichtelg. ,  p.  9. 

§.  12.   Buch,  Norwegen  ,  I,  272,  41 3. 

J.  i3.  Buch,  Geogn.  Beobacht.,  I,  3o  ;  Id. ,  Norwegen,  II,  27,  3i. 
Ilaumer,   Geogn.  f'ersuche  ,  p.  5o. 

S.  14.   Freiesleben,  Ilarz,  II,  66.   ^onnar  A ,  Erzgeh. ,  p.  109 — i33. 

§.  i5.  Beudant,  Hongrie,  II,  84,  III,  3o,  40.  Buch,  Norwegen,  II, 
03,   87;  Id.  ,  dans  Mag.   naturf.  Fr.,  1810,  p.  147.  Boue,  Ecosse ,^.3^6. 

§.  i6.  Eschwege,  Journ.  von  Brasilien,  1,  aS,  34,  36  ,  38. 

§.  17.  Eschwege,  Bras.,  II,  241. 

S.   18.   Bonnard,    Terrains,  p.  56. 

§.  19.  Buch,  dans  Mag.  nat.  Fr. ,  i3io,  p.  137;  Id.  Geogn.  Beoh.  , 
1,68,71:  Id.,  A'orwci^eH,  I,  479  ,  II,  29,  84,  87,  i35.  Esniark  ,  dans 
Pfaff,  Nord.  Arch.,  III,  199.  Saussure,  Voyages  dans  les  Alpes ,  §.  i362. 
Journ.  de  phys.,  XXXV,  298.  Targieni  Tozzetti,  Viaggi  ,11.  433.  Brocchi, 
Bibl.  ital.,  ix,  76,  356.   Beudant,  Hongrie,  III,  49. 

§.  20.  Brochant,  Observ.  géol.  sur  les  terrains  de  transition  de  la 
Taranlaise ,  p.  16,  19,  3i,  33,  37,  39,  44,  5o  ,  53;  Id.,  Mémoire 
sur  les  gypses  anciens,  p.  12  —  46.  Buch,  dans  Mag.  nat.  Fr.,  1809, 
p.  181;  Id.  dans  Leonhard's  Taschenb. ,  1811,  p.  335.  Kaunier,  Fra."- 
mente,  p.  10,  24.  D'Aubuisson,  Journ.  des  mines ,  n.°  128,  p.  161. 

,S-  21.  Beudant,  Hongrie,  III,  96,  i33,  199.  Raumcr,  Nieder-Schle- 
sien,  p.  72. 


584  ,  IND 

§.  22.  Cliarpenlier ,  Description  ^éogn.  des  Pyrénées  ( manuscrit  )' 
§§.35,  66,  89,  100,  io5,  141  —  1G7;  Id. ,  Mém.  sur  le  gisement  des 
gypses  de  Bex  ,  dans  Naturw.  Anzeiger  dcr  Schweiz.  Gesellsch.,  1819, 
n.°9,p.  65.  K^inmer ,  Fragmente  ,  ■ç.  10 ,  J2,  74;  Id- ,  Fersuche  ,  f.  41. 
Buch ,  Korwegen  ,U ,  281  ;  Id.  dans  .Vag.  nat.  Fr. ,  1809,  p.  lyS.  Mei- 
necke  et  Kcferstein  ,  Taschenh. ,  p.  63.  Haussraann,  Nord.  Beytr.,  II, 
77  ,  IV,  653  ;  Id.,  Reise  durch  Scandinavien  ,  11,  239.  Engelhardt,  Fels- 
gehaude  Russlavds,  I,  37.  Referstein,  Teutschland  geognostisch  darge- 
stellt ,  I,  i36.  Eschwege  ,  Brasil. ,  Il ,  253.  Maclure  ,  Géol.  des  Etats- 
Unis,  p.  24.  Brongniart ,  iV^o//ce  sur  l'histoire  géogn.  du  Cotentin,  p.  i  7  ; 
Id.  Crustacés  fossiles,  p.  46 —  63.  Beudant,  Hongrie,  III,  76,  578. 
Saussure,  Alpes,  §.  5oi.  'V^'^ahlenberg ,  dans  Acta  Soc.  L'psal  ,  YIII , 
p.  19.  Link,  Urwelt ,  p.  2.  Caslelazo  ,  de  la  ri/jueza  de  la  f^eta  Biscaina 
(Mexico,  1820),  p.  q.  Humboldt,  Essai  polit,  sur  la  Nouvelle -Espagne , 
II,  534,  537,  519—526. 

§§.  23  et  24.  Del  Rio  dans  la  Gaseta  de  Rlexico,  XI,  416.  Humboldt, 
Essai  polit.,  11,494,  52i,  58i,  583.  Beudant,  Hongrie,  II,  157,  III, 
67 — 124,  1h8.  Boue,  Ecosse,  p.  147.  Burckhardt ,  Travels  in  Syria, 
1823,  p.  493,  567.  Raumer,  Fragm. ,  -p.  24. — 26,37,48.  Haussuiann  , 
dans  Moll's  Neuein  Jahrb.,  I,  34.   Bticli,  Norw.,  I,  96 —  144. 

§.  25.  Boue,  Ecosse ,  p.  94,  353.  Palassou,  Supplément  aux  Mémoires 
pour  seri'ir  à  l'Jiist.  nat.  des  Pyrénées,  p.  iSg — i53.  Brougniart,  sue 
les  Ophiolitkes ,  p.  26,  46,  56,  Sg ,  61. 

§.  26.  Beudant,  Hongrie, U,  5j5  —  58o,  584 — ^94,  III],  171,  184, 
194,  204.  Geol.  Trans.,  IV,  p.  9.  Annales  des  mines,  III,  p.  45  et  568. 
Steffens,  Geogn.  Aufsiiize  ,  p.  11.  Buch  ,  Beoh.  ,  I,  p.  104,  157.  Heini , 
Geogn.  Beytr.  zur  Kennin.  des  Thiiring.  7'Valdes ,  II,  5te  Abth.,  236. 
Conjbeaie  and   PLilipps  Geol.  ofEngland ,  1 ,  2g8,  3i2 ,  324 — ^"jo. 

§.  27.  Humboldt,  Géogr.  des  plantes,  p.  128;  Id.,  Essai  politif/ue, 
II,   589. 

§.  28.  Esclier,  dans  Leonb.  Taschenh. ,  1804,  p.  347  ;  Id.  dans  Keue 
Ziircher  Zeiiung,  1821,  n."  60,  p.  237.  Utlinger,  dans  Leonh.  Ti/JcAeni. , 
1819,  p.  42.  Keferstein  ,  Teutschland,  III,  239,  263,  273,  340,  372. 
390,407.  Mohs,  dans  MoU's  Ephem. ,  1807,  p.  161.  Lupin,  ih.  ,  1809, 
p.  359.  Ramond,  f'oy-  au  sommet  du  Mont-perdu,  p.  J  5  ,  26.  Traill,  dans 
Geol.  Trans.,  III,  108.  Bill.  unii\,\lX,  38.  Buckland,  On  the  struc- 
ture of  the  Alps  ,  t^.  g.  "ijucXi ,  Geog.  Beob.,  I,i53 — 171,  194,216,256. 
Freiesleben,  A'u/>/èr5c7j.,  IV,  284.  Tondi.dans  Lucas,  Tahl.  méth.  des  esp. 
min.,  11,243.  Haussmaun,  Nord.  Beytr.,  IV,  88.  Jenaer  litter.  Zeit.  , 
i8i3,  p.  100.  Steffens  Geogn.  Aufs.,  p.  49.  Beudant,  Hongiie ,  III, 
23i  —  237.  Conybeare  and  Philipps,  £nj§r/and,  I,  3oi.  Marzari  Pencati, 
Cenni  geologici  ,  p.  21.  Breislak,  Sulla  giacilura  di  alcune  rocce  porji- 
ritiche  e  granitose  ,   p.  25 —  35. 

§.  29.  Conybeare  and  Pbilipps,  Engl. ,  I,  61,  269.  Freiesleben , 
Kupfersch.,  I,  90—  188,  IV,  276  — 284. 

§.  3o.  Freiesleben,  Kupfersch.,  I,  65,  89,  IV,  295 — 317.  Raumer/ 
Versuche ,  p.  112—  11 5. 

§.  3i.  Haussmann,  Nord.  Beytr.,  i3o6,St.  \,  p.  73,98.  Freiesleben, 
Kupfersch.,  I,  102 — 107  ,  IV,  283  ,  293.  Conjbeare  and  Philipps  ,  £ng^/., 
I,  122.  'Bt-AVivacr ,  Nieder-Schlesien ,  p.  121,  123,  i53. 


•  IND  ^     385 

S.  32.  Humboldt,  ûler  die  unteri.d.  Gasarlen,  p.  Sg.  Karsten,  Min. 
Tab.  p.  f).l  — 65.  Bucli,  Landek..  p.  7;  Id.,  d.Tiis  Helvet.  yllm. ,  1818, 
p.  42.  Gilb.  Jnnalen  ,  1806,  St.  5  ,  p.  ?>b.  Kschrr,  IS'aturw.  yinzeiger  der 
Schweis.  Ges.  ,  Jtihi g.  IV  p.  29.  Cliarbaut,  Mém.  sur  la  géolngie  des 
environs  de  Lons-le-Saunier,  p.  7,9,  24,  7.7.  Mérian^  Beschuffenheit  der 
Geiirgshild.  von  Basel,  p.  2J ,  36,  46,  88. 

§.  Si    Coujbtarc  and  Pliilipps,  Engl.,  I,   127—  164. 

§.34.  Broiigiiia-l  ctCuvier ,  Descr.  géol.  des  environs  de  Paris ,  1821, 
p.  10—  17,  68 — 101.  Steirens,  Geogn.  Aufs.  ,  p.  121.  Raumer,  fers., 
p.  85,  116    Conjbearc  and  Pbilipps,  Engl.,\,Ç:0  —  126. 

§.  35.  Bonnaid,  Tf/rninf ,  p. 226.  Brongiiiart ,  De^cr.  g'e'o/. ,  p.  17 — aS, 
102 —  122.  Conyl)('aie  and  Philipps  ,  Engl.,  1,2"]  —  57.  Raunier  ,  f-^ers.  , 
p.  120  —  122.  Bciidant,  Hongrie,  III,  242  ■—  264.  Lardj,  dans  la  fJihl. 
univ.,  Mars  i8:!2,  p.  i?>o ,  iii>.  KeiVrslein  ,  Teutschland ,  I,  ..6.  Fn  ies- 
lebfn  ,  Kupfersch.  ,  V,  255.  Adolphe  Brongniart,  Classijic.  des  vcgctaux 
fossiles ,  p.  .5^. 

§.36.  Beudant,  Hongrie,  III,  264  —  282.  Brongniart,  Descr.  géoL, 
p.  29  —  38,    i:'^  —  ïo3. 

§.  37.  Raunier,  Vers.,  p.  i23  —  125.  Biongniait^  Descr.  gêcl.,  p. 
38  —  5o ,  2o3  —  J.63. 

§.  33.  Raunier,  Vers.,  p.  125.  D'Aubuisson ,  Géognosie ,  11,414, 
417.  Lrongniart,  Descr.  géol. ,  p.  5o  —  56,  264  — 274.  Bonnard  ,  Ter- 
rains ,  p.  2  1  7. 

§.  39.  Brongniart,  Descr,  géol.,  p.  57  — Oo,  275  —  320.  Beudant, 
Hongrie,  III,   282  —288. 

§.40.  Bucli,  Geogn.  Beob, ,  II,  172 — 190.  Id. ,  dans  Mag.  nat.  Fr.  , 
1809.  p.  ^99  —  3o3  ;  Id.,  dans  Mém.  de  Berlin,  1812,  p.  129 —  i54. 
Fleiniau  de  Bellcvue,  Journ.  de  jihjs.  ,  LI  et  LX.  Cordier,  Mém.  sur 
les  substances  minérales  ,  dites  en  masse  ,  qiti  entrent  dans  la  composi- 
tion des  roches  volcaniques  ,  p.  17  —  69.  Bustamente  sobre  las  Imas  del 
Padregul  de  San  Augustin  de  la  Cuevas ,  dans  le  Seman.  de  Mexico. 
1820,  p.  80.  Leonhard  ,  Proprsdeulik  ,  p.  168 —  ijS.  Ramond,  JVivelle- 
ment  barométt  ique  et  géognostique  de  l' Auvergne  ,  p.  32- — 45.  Breislak, 
Introd.  Il  la  géologie ,  \,  234,  261,  3i6.  Heini,  Thûringer-JVald,  p, 
229.  Singer,  dans  Karsttn's  Archiv  fiir  Bergbaukunde ,  ill  ,  88.  Robi- 
quet,  dans  Annales  de  physique  et  de  chimie ,  XI,  206.  Nose,  Kieder- 
rheinische  Reise  ,  II,  p  428.  Boue,  Ecosse,  p.  219  —  287.  Beudant, 
Hongrie,  111,298  —  ^\4-  numhoidt.  Essai  sur  la  géographie  des  plantes , 
et  tableau  phjsique  des  régions  équinoxiales ,  p.  129;  Id. ,  Essai  polit. , 
I,  249  —  254;  là.,  Nivellem.  géogn.  des  Cordillères  ,  dans  le  Recueil 
d'obs.  asfron.,  I,  309  — 3ii,  327.  332;  Id. ,  Recueil  d'ohs.  de  zool.  et 
d'anat.  comparée,  1,  21;  Id.,  Relat.  kist. ,  l ,  91,  >i6,  1.9^  i33,  i36, 
148,  i5.  ,  i53  —  i55  ,  171  ,  176,  180,  3o8,  3 12,  394,  640;  II,  4, 
14,   i6,    20,  25,  27,  39,  452,  5i5,5b5,  719. 


INDI,  MAHA-INDI  {Bot.)  -.  noms  donnés,  dans  l'île  de 
Ceilan,  au  palmier  dattier,  pl:œni.T.  (J.  ) 

INDIAMAS.  [Bot.)  Le  grand  Recueil  des  voyages,  publié 
par  Théodore  Debry  ,  fait  mention  de   plusieurs  espèces  dç 


30. 


386     ^  IL\D 

fruits  que  l'on  poi'ie  clans  les  marchés  de  la  Guinée  ,  et  nom- 
mément des  bananes,  des  bachoves  et  des  indianias;  mais  il 
n'ajoute  rien  qui  puisse  faire  connoitre  la  plante  qui  produit 
ces  derniers.  (  J.  ) 

INDIANISK  STOR  {Ichthjol.)  ,  nom  suédois  du  guacari, 
h^'postomus  guacari.  Voyez  Hypostome.  (H.  C.) 

JNDJx\NITE.  (Min.)  C'est  une  des  substances  minérales 
qui  accompagnent  assez  ordinairement  le  corindon  adamantin 
de  Carnate,  et  qui,  comme  on  le  dit,  lui  sert  de  gangue. 
Quoique  ce  minéral  ne  se  soit  pas  encore  présenté  cristallisé, 
et  par  conséquent  doué  de  toutes  les  propriétés  qui  lui  sont 
particulières,  M.  le  comte  de  Bournon,  n'ayant  pu  le  rapporter 
à  aucune  espèce  minérale  connue  ,  a  cru  devoir  le  distinguer 
par  la  dénomination  spécifique  d'indianite  et  par  les  carac- 
tères suivans. 

On  n'a  encore  vu  ce  minéral  que  sous  forme  de  masse 
granuleuse  à  grains  assez  gros  ,  ce  qui  lui  donne  l'aspect  d'un 
grès;  ils  sont  généralement  très-adhérens.  Chaque  grain  a  une 
structure  laminaire;  les  lames  semblent ,  par  leur  incidence, 
indiquer  un  rhomboïde  obtus. 

L'indianite  pure  est  incolore  ou  un  peu  grisâtre,  et  trans- 
lucide. Lorsqu'elle  est  verte  ou  rougeàtre  ,  elle  doit  ces  cou- 
leurs soit  à  l'épidote,  soit  au  grenat. 

Sa  pesanteur  spécifique  est,  suivant  M.  de  Bournon  ,  de 
12,742  ,  et  jiar  coiiséquent  un  peu  plus  l'orte  que  celle  du 
felspath. 

Ce  minéral  raie  le  verre,  mais  il  est  rayé  par  le  felspath. 
11  ne  paroît  pas  électrique  par  frottement.  Il  ne  fait  pas 
effervescence  avec  l'acide  nitrique  ,  mais  ses  parties  perdent 
dans  cet  acide  leur  adhérence  et  y  font  même  quelquefois 
gelée.  Il  est  absolument  infusible  au  chalumeau.  M.  Chenevix, 
qui  l'a  analysé ,  y  a  trouvé  : 

Silice 42,5 

Alumine 37,5 

Chaux j5 

Fer 5 

Manganèse ,  une  trace. 


IND  •    387 

L'indianite,  outre  le  corindon  qu'elle  enveloppe,  est  sou- 
vent associée  avec  l'amphibole  noir,  l'épidote  ,  le  grenat,  du 
quarz,  du  talc. 

Elle  est  très -susceptible  de  s'altérer  par  les  météores  at- 
mosphériques. (B.) 

INDICATEUR.  {Ornith.)  M.  Vieillot  a  établi  sous  ce  nom, 
en  latin  indicator,  un  genre  qui ,  dans  ce  Dictionnaire  (  tom. 
XI,  pag.  147),  ne  forme  que  la  cinquième  section  des  coucous. 
(Ch.  D.) 

INDICOLITHE.  {Min.)  M.  Dandrada  a  regardé  ce  minéral 
d'Uton  ,  en  Suède  ,  d'une  couleur  bleu-foncé  d'indigo  ,  comme 
une  espèce  particulière;  mais  on  le  recounoît  généralement 
pour  une  Tourmaline.  Voyez  ce  mot.  (  B.  ) 

INDICUM.  (Bot.)  Rumph  nomme  ainsi  l'indigo,  indigofera 
tinctoria.   (J.) 

INDIEN  (Iclithjol.) ,  nom  spécifique  d'un  calliomore  de 
M.  de  Lacépède.  (Voyez  Calliomore.)  C'est  le  callionymus 
indus  de  Liunaeus.  (H.  C.  ) 

INDIGÈNES  [Plantes],  (Bot.) ,  naturelles  au  sol  sur  lequel 
elles  croissent ,  n'y  ayant  pas  été  apportées  d'un  autre  pays. 
Le  chêne- rouvre ,  par  exemple,  est  indigène  en  Europe. 
La  canne  à  sucre  est  indigène  en  Asie.  Le  baobab  est  indi- 
gène en  Afrique.  Le  mais  est  indigène  en  Amérique.  La 
plupart  des  metrosideros  et  des  melaleuca  sont  indigènes  dans 
les  Terres  australes.  (Mass.) 

INDIGO.  (Chim.)  Substance  colorante,  provenant  des  végé- 
taux ;  considérée  par  la  plupart  des  chimistes  comme  un 
composé  d'oxigène  ,  d'azote  ,  de  carbone  et  d'hydrogène. 
Suivant  M.  Dœbereiner,  le  carbone  est  à  l'azote  dans  le  rap- 
port des  élémens  du  charbon  animal. 

Propriétés  physiques. 

L'indigo,  à  l'état  de  pureté  où  je  l'ai  obtenu,  le  premier, 
en  1807,  est  sous  forme  d'aiguilles  pourpres  avec  des  reflets 
dorés  ,  ou  en  poussière  d'un  violet  pourpre.  Il  est  plus  dense 
que  l'eaii.  Il  est  susceptible  de  se  volatiliser.  Sa  vapeur  est 
d'un  violet  pourpre  semidable  à  celle  de  l'iode.  Pour  ob- 
server cette  propriété,  il  sutlit  de  le  projeter  sur  un   fer 


388   '  IND 

presque  rouge  de  feu ,  ou  de  présenter  au-dessus  d'un  charboji 
ardent  un  papier  sur  lequel  on  a  mis  l'indigo. 
Il  est  insipide  et  inodore. 

Propriétés  chùnitjues. 
a)   Cas  ou  rindigo  néprom^e  pas  ^altération  connue. 

Il  est  sans  action  sur  les  réactifs  colorés. 

Il  est  insoluble  dans  l'eau,  dans  l'éther  hydratique  .  dans 
l'alcool  froid;  dans  t;»us  les  acides  oxigénés,  étendus  d"eau  ; 
dans  l'acide  hydrochlorique,  dans  tous  les  liquides  alcalins. 

Il  est  très-légèrement  soluble  dans  l'alcool  bouillant,  qu'il 
colore  en  bleu. 

Lorsqu'on  jette  de  l'indigo  dans  l'acide  sulfurique  con- 
centré, il  se  développe  d'abord  une  couleur  jaune ,  qui  passe 
bientôt  au  vert,  puis  au  bleu.  Il  n'est  pas  douteux  que  la 
couleur  verte  est  produite  par  le  mélange  du  jaune  et  du  bleu. 
La  liqueur  bleue  est  considérée  comme  une  dissolution  d'in- 
digo dans  l'acide  sulfurique  ,  abstraction  faite  de  l'altération 
que  peut  avoir  subie  une  portion  de  la  substance.  Plusieurs 
personnes  l'ont  désignée  par  l'expression  de  sulfate  d'indigo. 
Lorsqu'on  sature  l'acide  sulfurique  par  une  base  saiiliable  , 
on  obtient  un  léger  précipité  bien  ,  soluble  dans  un  très- 
grand  nombre  de  liquides  qui  sont  sans  action  sur  l'indigo 
pur.  Ce  précipité,  jeté  sur  un  fer  chaud,  ne  produit  plus 
la  vapeur  d'un  violet  pourpre  que  répand  l'indigo  qui  n'a 
pas  été  dissous.  Nous  ignorons  tout-à-fait  le  changement  que 
peut  subir  l'indigo   par  son   union   avec  l'acide  sulfurique. 

La  liqueur  bleue  qui  porte  le  nom  de  bleu  de  Saxe,  de 
hleu  en  liqueur ,  dans  le  commerce  et  les  ateliers  de  teinture, 
se  prépare  avec  l'indigo  du  commerce.  Bergman  a  prescrit 
le  procédé  suivant.  On  mêle  intimen)ent  i  partie  d'indigo 
réduit  en  poudre  subtile  avec  7  à  8  parties  d'acide  sulfu- 
rique à  66  .  On  fait  digérer  les  matières  pendant  vingt- 
qv.atre  heures  à  une  température  de  20  à  40  degrés;  après 
cela  on  les  étend  de  91  parties  d'eau,  et  on  emploie  cette 
liqueur  pour  teindre  la  laine  et  la  soie.  11  y  a  des  ateliers 
où  l'on  fait  le  hleu  de  Saxe  avec  1  partie  d'indigo,  6  d'acide 
et  4  de  potasse.  Fœrner  et  Bancroft  assurent  que  4  parties 


IND  .   389 

d'acide  sulfurîque  ,   au  lieu  des  7  à  8  parties  prescrites  par 
Bergman  ,  sont  suffisantes  pour  cette  préparation. 

b)   Cas  où  rîndigo  se  décompose  complètement. 

L"indigo  ,  soumis  à  l'action  de  la  chaleur  dans  une  petite 
cornue,  donne  de  l'eau  tenant  du  sous- carbonate  d'ammo- 
niaque, de  l'hydrocyanate  et  de  l'acétate;  une  huile  épaisse 
ammoniacale  ,  de  l'indigo  sublimé  en  aiguilles ,  du  gaz  acide 
carbonique,  un  gaz  inflammable;  enfin,  un  charbon  azoté 
abondant. 

L'acide  nitrique  très-concentré  agit  avec  une  telle  force 
sur  l'indigo  qu'il  peut  y  avoir  inflammation,  ainsi  que  M. 
Sage  Ta  observé.  S'il  est  étendu  d'eau ,  il  convertit  l'indigo 
en  produits  extrêmement  remarquables,  que  nous  avons 
étudiés  avec  beaucoup  de  soin.  Voici  comment  on  peut 
opérer  pour  se  les  procurer. 

On  met  dans  une  cornue  tubutée  4  parties  d'acide  nitrique 
à  02''  ar.  de  liaumé ,  étendu  de  4  parties  d'eau.  On  place  le 
vaisseau,  auquel  on  a  adapté  une  alonge  et  un  récipient,  sur 
un  bain  de  sable  légèrement  chaud;  puis  on  jette  peu  à  peu 
dans  l'acide  2  parties  d'indigo.  Le  mélange  s'échauffe;  il  se 
dégage  beaucoup  de  vapeur  nitreuse,  de  l'acide  carbonique, 
etc.  :  alors  il  faut  retirer  la  cornue  du  bain  de  sable  et  aban- 
donner les  matières  à  la  température  de  l'atmosphère  pen- 
dant vingt- quatre  heures.  Pendant  ce  temps  on  recueille 
dans  le  récipient,  de  l'eau  tenant  de  l'acide  nitrique,  de 
l'acide  hydrocyanique,  et  un  peu  de  matière  jaune  amère. 

On  distingue  dans  la  cornue  trois  substances  différentes; 
1°  une  matière  concrète  rougeàtre  résinoïde;  2.°  une  matière 
concrète  d'un  jaune  orangé;  3."  un  liquide  d'un  jaune  rou- 
geàtre. Les  deux  premières  se  trouvent  principalement  dans, 
la  partie  supérieure  du  liquide. 

On  sépare  les  substances  solides  de  la  substance  liquide; 
on  les  fait  égoutter  ,  on  les  lave  avec  un  peu  d'eau  froide  :  on 
réunit  le  lavage  avec  le  liquide  jaune. 

En  faisant  bouillir  les  deux  matières  concrètes  dans  l'eau, 
la  seconde  se  dissout ,  tandis  que  la  matière  résinoïde  se 
fond  à  la  surface  de  l'eau;  par  le  refroidissement,  celle-ci  se 
fige,  et  l'autre  se  dépose  pour  la  plus  grande  partie  sous  h. 


oc)0    r  IND 

forme  de  cristaux.  On  enlève  la  matière  résinoïde  et  on  la 
purifie  en  la  lavant  avec  de  Teau  ,  la  dissolvant  dans  l'alcool 
chaud,  et  précipitant  la  solution  par  l'eau.  La  matière  oran- 
gée est  un  composé  d'un  corps  que  nous  avons  appelé  amer 
au  minimum  d'acide  nitrique,  et  d'un  peu  de  ma'ière  résinoïde. 
L'eau  d'où  elle  s'est  séparée  par  le  refroidissement,  doit  être 
ajoutée  au  liquide  n.°  3.  Celui-ci,  étant  un  peu  concentré, 
I.isse  déposer  par  le  refroidissement  des  cristaux  d'amer  au 
ïninimum,  retenant  encore  de  la  matière  résinoïde,  et  des 
cristaux  d'amer  de  TVelther ,  que  nous  nommerons  aiissi  amer 
au  maximum  d'acide  nitrique.  Comme  celui-ci  est  plus  soluble 
que  le  premier .  il  est  facile  de  les  séparer  par  la  cristallisa- 
tion. L'eau -mère  des  dewx  amers,  concentrée,  donne  une 
matière  qui  a  l'apparence  d'une  huile  rouge.  Enfin  ,  le  li- 
quide ,  séparé  de  celle-ci  et  évaporé  à  siccité,  laisse  un  résidu 
qui  est  formé  des  mêmes  principes  que  celte  huile  ,  avec  la 
diflTérence  des  proportions  :  il  contient  en  outre  de  l'acide 
oxalique.  Cette  huile  est  formée  des  deux  amers  de  résine 
et  peut-être  d'acide  nitrique.  JNous  renverrons  l'examen  de 
ces  produits  au  mot  Substances  tannantes  artificielles.  Nous 
nous  résumerons,  en  disant  que  l'acide  niti'ique  change  l'in- 
digo en  quatre  substances  concrètes  .-  i.°  en  matière  résinoïde  ; 
2.°  en  amer  au  minimum  d'acide  nitrique  ;  5."  en  amer  au  maxi- 
mum diacide  nitrique;  /(.°  en  acide  oxalique. 

c)  Cas  oii  l  indigo  perd  sa  couleur  bleue  sans  s^altérer 
essentiellement ,  vuisauil  est  susceptible  de  reprendre  sa 
couleur  bleue  par  le  contact  de  l'oxigène. 

L'indigo  ,  mis  en  contact  avec  les  alcalis  les  plus  énergiques , 
n'en  éprouve  aucune  action  sensible  ,  ainsi  que  nous  l'avons  dit 
plus  haut.  Le  résultat  est  le  même  avec  tous  les  combusti- 
bles simples  et  presque  tous  les  combustibles  composés  qui 
ne  sont  pas  alcalins.  Mais  les  phénomènes  sont  absolument 
diflérens  si  l'on  met,  dans  de  l'eau  privée  d'air,  de  l'indigo 
en  poudre  avec  un  alcali  énergique  ,  tel  que  la  potasse  ou  la 
soude,  et  un  corps  combustible,  tel  que  des  protoxides  de 
fer,  d'étain  ,  du  sulfure  d'arsenic,  du  sulfure  d'antimoine. 
Au  bout  d'un  certain  temps  on  trouve  que  la  matière  com- 
bustible s'est  oxigénée  ;  et ,  en  second  lieu ,  que  lindigo  a  perdu 


IND  •    091 

sa  couleur  bleue,  et  qu'il  a  formé  avec  la  potasse  ou  la  soude 
un  composé  soluble  dans  l'eau.  On  observe  en  outre,  1° 
qu'en  neutralisant  l'alcali  par  un  acide,  on  obtient  un  pre'-- 
cipité  dindigo  d'un  blanc  jaunâtre  ;  2.°  qu'en  mettant  le 
précipité  en  contact  avec  l'oxigéne  de  l'air,  il  repasse  sur-le- 
champ  à  l'état  d'indigo  bleu.  11  n'est  pas  nécessaire,  pour 
que  cet  efFet  soit  produit,  de  saturer  l'alcali  par  un  acide. 

Ces  faits  sont  susceptibles  d'être  expliqués  de  deux  ma- 
nières :  1 ."  En  admettant  que  l'indigo  décoloré  est  de  l'indigo 
désoxigéné.  Dans  cette  hypothèse,  on  dit  que  l'indigo  bleu  , 
qui  est  en  contact  avec  la  potasse  et  le  protoxide  de  fer,  par 
exemple,  cède  son  oxigène  mi  protoxide,  et  qu'ainsi  désoxi- 
géné ,  il  s'unit  à  l'alcali,  qu'il  sature  à  la  manière  d'un  acide. 
On  ajoute  que,  quand  cette  solution  alcaline  a  le  contact  de 
l'air ,  l'oxigéne  est  absorbé  ;  l'indigo  reparoit  avec  sa  cou- 
leur bleue,  et  perd  en  même  temps  son  affinité  pour  la  po- 
tasse. 2."  En  admettant  que  l'indigo  décoloré  est  de  Vindigo  uni 
à  de  l'hydrogène ,  ce  qui  revient  à  considérer  l'indigo  déco- 
loré comme  un  hjdracide  dont  le  comburent  est  l'indigo  bleu. 
Dans  cette  hypothèse  on  dit  que,  quand  l'indigo  bleu  est  en 
contact  avec  l'eau,  la  potasse  et  le  protoxide  de  fer.  il  y  a 
une  portion  d'eau  qui  est  décomposée  ;  pendant  que  son 
oxigène  se  porte  sur  le  protoxide,  son  hydrogène  s'unit  à 
l'indigo,  et  donne  naissance  à  un  hydracide  qui  sature  la  po- 
tasse. 

La  première  explication  a  été  généralement  admise  jusqu'à 
la  théorie  du  chlore;  mais  depuis  cette  époque  elle  a  perdu 
beaucoup  de  ses  partisans.  Ainsi,  en  Allemagne,  M.  Dœ- 
bereiner  la  rejetée  pour  adopter  la  seconde  :  il  a  nommé 
l'indigo  décoloré  acide  isatinique.  M.  Berthoîlet  a  eu  le  grand 
mérite  devoir,  plusieurs  années  avant  la  théorie  du  chlore, 
que  tous  les  phénomènes  attribues  à  la  désoxigçnation  de 
l'indigo  pouvoient  s'expliquer  en  admettant  la  combinaison 
de  ce  corps  avec  l'hydrogène.  11  a  fait,  pour  la  théorie  de 
l'indigo  qui  est  aujourd'hui  la  plus  vraisemblable,  ce  que 
MM.  Gay-Lussac  et  Thenard  avoicnt  fait  pour  l'acide  muria- 
tique  oxigéné  avant  le  travail  de  M.  H.  Davy. 

J'ai  reconnu,  il  y  a  long-temps,  que  l'indigo  hydrogéné 
étoit  précipité,  à  l'éiat  d'une  matière  floconneuse  d'un  blanc 


r 

jaunâtre,  de  ses  solutions  alcalines,  lorsqu'on  neutralisoit 
celles-ci  par  un  acide.  En  outre  j'ai  observé  l'indigo  hydro- 
géné cristallisé  en  1807.  Voici  les  circonstances  où  je  fis  cette 
observation.  Après  avoir  épuisé  le  pastel  du  commerce  de 
tout  ce  qu'il  contient  de  soluble  dans  l'eau  bouillante,  je 
l'avois  traité  à  plusieurs  reprises  par  l'alcool  bouillant.  Les 
seconds  lavages  que  j'obtins,  ayant  été  concentrés  dans  une 
cornue,  déposèrent  de  l'indigo  en  petites  paillettes  pourpres. 
La  liqueur  filtrée,  concentrée  de  nouveau  dans  une  cornue, 
puis  refroidie  lentement,  avoit  déposé,  an  bout  de  huit 
heures,  de  petits  grains  qui  paroissoient  blancs,  et  qui, 
ayant  été  exposés  à  l'air  ,  acquirent  le  pourpre  métallique 
de  l'indigo  sublimé. 

Le  deutoxide  de  cuivre,  mis  en  contact  avec  l'indigo  hy- 
drogéné, en  sépare  sur-le-champ  l'hydrogène.  J'ignore  si  le 
cuivre  est  complètement  désoxidé  ,  où  s'il  est  seulement 
ramené  à  l'état  de  protoxide. 

L'indigo,  dissous  dans  l'acide  sulfurique,  est  décoloré,  sui- 
vant l'observation  de  M.  Vauquelin  ,  quand  on  sature  sa 
dissolution,  étendue  d'eau,  d'acide  hydro-sulfurique;  il  suffit 
d'exposer  la  liqueur  à  l'oxigène  pour  faire  reparoitre  la  cou- 
leur bleue. 

Elat  de  l'indigo  dans  les  ve'ge'taux ;  extraction  et 
purijication  de  l'indigo  du  commerce. 

D'après  des  expériences  que  j'ai  faites  en  1807  et  en  1811, 
je  me  suis  assuré  que  l'indigo  existoit  tout  formé  dans  les 
végétaux,  et  qu'il  n'étoit  pas,  comme  on  l'avoit  généralement 
pensé  jusqu'alors  ,  le  produit  d'une  fermentation  de  la  plante. 
Je  retirai  l'indigo  de  Visatis  tinctoria  et  de  Vindigofera  anil, 
cultivés  à  Paris,  sans  que  ces  plantes  eussent  éprouvé  la 
plus  légère  fermentation.  Voici  l'expérience  qu'on  peut  faire 
pour  s'assurer  que  l'indigo  est  à  l'état  incolore  dans  les  feuilles 
de  pastel.  On  remplit  un  ballon  d'eau;  on  fait  bouillir  celle- 
ci  pendant  quelque  temps;  ensuite  on  renverse  le  vase  qui 
la  contient  sur  le  mercure,  et  on  la  fait  passer  dans  une 
cloche  pleine  de  ce  métal.  Quand  la  température  de  l'eau 
est  à  35''centig. ,  on  introduit  dans  la  cloche  des  feuilles  de 
pastel  déchirées.  On  maintient  la  température  du  liquide  à 


IND  "  395 

35°  pendant  deux  ou  trois  heures:  l'eau  devient  jaune  rou- 
geàlre;  elie  dissout  de  Tindigo  ,  des  principes  colorans  jaune 
et  rouge ,  etc.  On  la  fait  passer  dans  une  cloche  remplie  de 
mercure  ;  on  y  mêle  de  l'eau  de  chaux  qui  a  bouilli  ,  et 
qu'on  a  laissée  refroidir  sur  le  mercure  :  la  couleur  devient 
orangée;  il  se  dépose  peu  à  peu  des  flocons  blancs  qui  tirent 
très-légèrement  au  verdàtre  '.  On  agite  la  liqueur,  on  en  fait 
passer  la  moitié  dans  une  cloche  contenant,  du  gaz  oxigène , 
et  aussitôt  il  se  manifeste  une  couleur  bleue  foncée,  qui 
finit  par  se  déposer  en  flocons,  tandis  que  la  liqueur  qui 
n'a  pas  eu  le  contact  de  l'oxigène,  ne  se  colore  pas.  11  ne 
faut  que  peu  d'oxigène  pour  rendre  l'in'digo  bleu  ;  car,  si 
l'on  verse  de  l'eau  de  chaux  non  bouillie  dans  la  liqueur 
jaune  ,  on  obtient  un  précipité  qui  parolt  vert  tant  qu'il 
est  suspendu  dans  la  liqueur  jaune  où  il  s'est  formé  ,  mais 
qui  est  bleu  quand  il  est  déposé  :  il  est  certain  que  dans 
ce  cas  c'est  l'oxigène  atmosphérique  contenu  dans  l'eau  de 
chaux  qui  fait  passer  l'indigo  au  bleu.  S'il  en  étoit  autre- 
ment, pourquoi  l'eau  qui  a  digéré  sur  les  feuilles  de  pastel, 
ne  seroit-elle  pas  bleue  ouverte,  et  pourquoi  l'indigo  qu'elle 
contient  se  décomposeroit-il  avec  tant  de  rapidité?  car  on 
ne  retrouve  plus  d'indigo  dans  cette  liqueur  abandonnée  à 
elle-même  pendant  vingt-quatre  heures. 

On  peut  voir,  tome  XVI,  page  88  ,  le  résultat  de  l'analyse 
que  j'ai  faite,  en  1811  ,  des  feuilles  de  pastel.  J'exposerai 
maintenant  celui  de  l'analyse  de  plusieurs  indigos  du  com- 
merce. 

Analyse  d'un  indigo  de  commerce. 

Exlrait  aqueux. 

1.  De  l'indigo  réduit  en  poudre  fine  a  été  traité  par  l'eau 
distillée   à  une  température  de  60  à  80  degrés  centigrades j 

1  Ce  précipité  est  principalement  formé  de  matières  terreuses  : 
lorsqu'on  a  opéré  sur  une  infusion  riche  eu  indigo,  et  lorsqu'on  n'y  a 
versé  que  très-peu  d'eau  de  chaux,  il  peut  contenir  de  l'indigo  hydro- 
géné; mais,  dans  le  cas  où  la  chaux  a  été  employée  en  excès,  il  n'en 
contient  pas  ou  presque  pas;  la  totalité  ou  la  presque- totalité  de  ce 
principe  reste  eu  dissolution. 


^94  '  IND 

lorsque  l'eau  ne  s'est  plus  colorée,  on  a  fait  concentrer  les 
lavages  qui  contenoient  de  Tindigo  en  suspension,  et  on  les 
a  filtrés  dans  un  papier  double.  L'eau  filtrée  étoit  d'un  jaune 
rougeàtre  :  le  produit  qu'elle  a  donné  à  la  distillation  étoit 
trcs-ammoniacal  et  aromatique;  il  ne  paroissoit  pas  contenir 
de  soufre ,  car  il  étoit  sans  action  sur  les  papiers  imprégnés 
de  dissolutions  métalliques.  La  liqueur  concentrée  par  la 
distillation  a  déposé ,  lorsqu'on  l'a  fait  évaporer  dans  une 
capsule,  de  l'indigo  d'un  beau  bleu  et  des  flocons  verts,  qui 
éloient  formés  d'une  combinaison  de  matière  animale,  de 
principe  colorant  jaune  et  d'indigo.  On  a  séparé  ces  flocons 
par  le  filtre  ;  on  a  fait  concentrer  la  liqueur  ,  puis  on  l'a 
mêlée  à  l'alcool  ;  on  a  renouvelé  celui-ci  jusqu'à  ce  quil  ait 
cessé  d"avoir  de  l'action  sur  le  résidu. 

A.  Résidu  insoluble  dans  l'alcool. 

2.  Il  étoit  jaunâtre,  mais  en  se  desséchant  il  est  devenu 
brun;  on  l'a  traité  par  l'eau  :  tout  a  été  dissous ,  à  l'excep- 
tion de  quelques  flocons  bruns,  qui  ont  pris  une  couleur  grise 
rougeàtre  par  la  dessiccation.  Ces  flocons  contenoient  un 
peu  de  la  combinaison  de  matière  animale  et  de  principe  colo- 
rant jaune ,  beaucoup  ôe  phosphate  de  chaux  et  de  pliosphate 
de  magnésie ,  et  un  peu  cVoxidt  de  fer.  Ils  ont  donné  du  car- 
bonate d'ammoniaque  à  la  distillation  ,  et  un  charbon  très- 
abondant,  dont  la  cendre  ne  faisoit  qu'une  très-légère  effer- 
vescence avec  l'acide  hydrochlorique. 

3.  L'eau  qui  avoit  été  en  contact  avec  le  résidu  insoluble 
dans  l'alcool  (2),  a  été  concentrée;  elle  étoit  d'un  jaune-brun 
rougeàtre.  Elle  contenoit,  ].°  une  combinaison  de  principe  co- 
lorant jaune  de  matière  animale  et  d'un  acide  végétal  dont  je 
n'ai  pu  déterminer  précisément  la  nature  ;  cette  combinaison 
donnoit  à  la  distillation  de  l'acétate  d'ammoniaque  très-acide: 
2."  du  sulfate  de  potasse  :  3."  du  phosphate  de  magnésie  :  4."  du 
phosphate  de  chaux.  Ce  qu'il  y  a  de  remarquable,  c'est  que 
l'ammoniaque  versée  dans  la  liqueur  n'en  précipitoit  que  du 
phosphate  ammoniaco  -  magnésien  ;  le  phosphate  de  chaux 
restoit  en  dissolution,  et  pour  le  découvrir  il  falloit  faire 
évaporer  la  liqueur  et  en  incinérer  le  résidu. 


IND  '^    395 

B.  Matières  solullcs  dans  l'alcool  de  V extrait  aqueux  (1). 

4.  La  solution  alcoolique  (i)  a  été  évaporée;  quand  tout 
l'alcool  a  été  chassé  ,  il  s'est  fait  un  dépôt  de  matière  d'un 
rouge  brun;  celle-ci  a  été  traitée  par  l'alcool,  et  le  lavage  a 
été  réuni  au  liquide  d'où  elle  s'étoit  séparée:  après  ce  traite- 
ment ,  elle  s"est  comportée  comme  une  combinaison  de  ma- 
tière animale  de  principes  colorans  jaune  et  rouge,  et  d'un  acide 
végétal.  Elle  a  donné  à  la  distillation  du  carbonate  d'ammo- 
niaque et  un  produit  dont  l'odeur  approchoit  de  l'indigo 
qui  brûle. 

5.  La  partie  soluble  dans  l'alcool  (4)  a  été  évaporée  jusqu'à 
siccité  ;  le  résidu,  mêlé  à  l'alcool,  a  laissé  déposer  une  com- 
binaison analogue  à  la  précédente,  si  ce  n'est  qu'elle  conte- 
noit  moins  de  matière  animale.  Lorsqu'elle  eut  perdu  l'al- 
cool qui  la  pénétroit,  elle  ressembloit  à  une  résine;  mais 
elle  en  différoit  par  sa  solubilité  dans  l'eau. 

6.  La  solution  alcoolique  (5),  concentrée  et  mêlée  à  l'eau, 
a  précipité  une  matière  qui  étoit  redissoute  quand  on  chauf- 
foit  le  liquide,  et  qui  ne  différoit  de  celle  du  n.°  5  que  parce 
qu'elle  contenoit  plus  de  principes  colorans  :  la  liqueur  fil- 
trée précipitoit  la  gélatine  à  la  manière  d'un  tannin  ;  les 
acides  y  faisoient  des  précipités  de  combinaison  de  matière 
animale,  de  principe  colorant  et  d'acide;  l'acide  sulfurique 
en  dégageoit  en  même  temps  de  l'acide  acétique.  Outre  ces 
matières,  la  liqueur  contenoit  encore  de  la  potasse  et  de 
l'ammoniaque  unies  à  de  l'acide  acétique  ,  du  chlorure  de  po- 
tassium ,  des  atonies  de  phosphate  de  magnésie  et  de  sulfate 
de  potasse. 

6lis.  L'alcool  avoit  donc  enlevé  à  l'extrait  aqueux,  outre 
un  peu  de  chlorure  de  potassium  ,  de  sulfate,  d'' acétate  dépotasse, 
d'aoétaie  d'ammoniaque  et  de  phosphate  de  magnésie,  une  com- 
binaison de  matière  animale  ,  de  principes  colorans  et  d'un 
acide  végétal,  laquelle,  traitée  successivement  par  l'eau  et 
l'alcool,  s'est  réduite  en  deux  combinaisons,  dont  l'une  étoit 
avec  excès  de  matière  animale ,  et  l'autre  avec  excès  de 
principes  colorans  et  d'acide  :  celle-ci  avoit  la  propriété 
astringente. 


39S    »  I^D 

Extrait  alcooIi(jfiie. 

7.  On  a  fait  digérer  de  l'alcool  sur  rindigo  qui  avoit  été 
traité  par  Teau  ;  on  a  réuni  les  sept  premiers  lavages  et  on 
les  a  distillés  :  l'alcool  qui  a  passé  d'abord  ,  ne  contenoit 
pas  de  quantité  notable  de  principes  étrangers  ;  mais  celui 
qui  a  passé  ensuite,  avoit  une  odeur  un  peu  sulfurée.  Ce- 
pendant, l'ayant  mêlé  à  du  chlore  et  à  du  chlorure  de  ba- 
rium  ,  il  n'a  point  donné  de  sulfate  de  baryte.  Le  résidu  de 
la  distillation  ,  qui  étoit  encore  très-alcoolique,  a  été  mêlé  à 
de  l'eau  ,  puis  chauffé  :  quand  tout  l'alcool  a  été  évaporé, 
on  a  filtré  ;  une  matière  rouge,  qu'on  a  appelée  résine,  est 
restée  sur  le  papier.  La  liqueur  filtrée  étoit  d'un  jaune  rou- 
geàtre;  elle  a  donné  à  la  distillation  un  produit  très-odorant, 
qui  tenoit  de  Tammoniaque  en  dissolution  et  un  peu  de  ma- 
tière colorée  en  suspension. 

8.  Le  produit  odorant  a  donné  à  la  distillation  un  liquide 
limpide  et  incolore  qui  avoit  l'odeur  de  l'indigo,  c'est-à-dire, 
celle  dont  sont  imprégnées  les  étoffes  qui  ont  été  teintes  en 
bleu  de  cuve  et  qui  n'ont  pas  été  suffisamment  lavées.  Le 
résidu  de  la  distillation  étoit  odorant:  il  ne  contenoit  pas 
sensiblement  de  matière  huileuse;  car,  l'ayant  fait  évaporer 
doucement  et  ayant  repris  le  résidu  par  l'alcool,  celui-ci 
ne  s'est  pas  troublé  lorsqu'on  l'a  mêlé  à  l'eau  :  cependant 
l'alcool  contenoit  une  quantité  sensible  de  principe  odorant. 
Quoi  qu'il  en  soit,  cette  expérience  ne  prouve  pas  absolu- 
ment que  le  principe  odorant  ne  soit  pas  d'une  nature  hui- 
leuse ,  parce  qu'il  est  possible  que  la  petite  quantité  de 
matière  mise  en  expérience  n'ait  pas  permis  d'apercevoir  le 
trouble  qui  auroit  pu  avoir  lieu  avec  une  solution  plus 
chargée. 

9.  Le  liquide  jaune  ,  qui  avoit  donné  du  principe  odorant 
(8),  a  été  évaporé  dans  une  capsule,  et  a  déposé  une  matière 
à  demi  fondue,  un  peu  rougeàtre  ,  et  des  flocons  d'un  jaune 
brun  ;  il  est  resté  une  liqueur  d'un  beau  rouge  orangé. 

10.  Matière  demi-fondue.  Elle  étoit  formée  de  matière  ani- 
male, colorée  par  du  principe  jaune  et  un  peu  de  principe 
rouge.  Elle  rougissoit  le  papier  de  tournesol.  Les  flocons 
d'un  jaune  brun  n'en  différoient  que  par  la  proportion  de 
ees  principes. 


•  IND  .    597 

11.  Liqueur  d'un  leau  rouge  orangé.  Elle  avoît  une  saveur 
assez  amère  et  un  peu  astringente;  cependant  elle  ne  préci- 
piloitpas  par  la  gélatine  :  elle  déposoit,  après  avoir  été  con- 
centrée ,  une  matière  jaunâtre  qui  devenoit  rouge  en  se 
desséchant,  et  qui  ressembloit  alors  à  un  extrait.  Cette  ma- 
tière étoit  acide  ;  elle  donnoit  à  la  distillation  beaucoup  de 
carbonate  d'ammoniaque  et  d'huile  :  elle  contenoit  donc  de 
la  matière  animale.  Le  produit  avoit  l'odeur  qu"exhale  l'in- 
digo du  commerce  qu'on  projette  sur  un  charbon  ,  de  sorte 
que  je  ne  doute  pas  que  la  matière  jaunâtre  ne  contribue  à 
lui  donner  cette  propriété.  La  matière  jaunâtre  étoit  ana- 
logue à  la  matière  demi-fondue  (10);  elle  paroissoit  seule- 
ment contenir  une  moindre  quantité  de  matière  animale.  La 
liqueur  d'où  elle  s'étoit  déposée,  étoit  d'un  rouge  jaunâtre; 
elle  devoit  cette  couleur  à  un  mélange  de  principe  colorant 
jaune,  et  de  pi'incipe  colorant  rouge,  que  je  crois  analogue 
à  la  résine.  Lorsque  cette  liqueur  a  été  étendue  d'eau  ,  puis 
évaporée,  elle  a  déposé  une  poudre  d'un  très-beau  rouge, 
qui  étoit  peu  soluble  dans  l'alcool  et  insoluble  dans  l'eau. 
La  liqueur,  mêlée  à  l'acide  sulfurique,  laissoit  précipiter 
un  dépôt  semblable  à  la  matière  jaune  qui  étoit  formée  de 
matière  animale,  d'acide  et  de  principes  colorans  :  il  se  dé- 
gageoit  en  même  temps  de  l'acide  acétique.  La  liqueur, 
d'un  beau  rouge  orangé,  étoit  donc  principalement  formée 
de  matière  animale,  de  principes  colorans  et  d'acide  acétique. 
On  y  reconnut  de  plus  des  acétates  de  chaux  et  de  magnésie. 

Examen  de  la  résine  rouge  (7). 

12.  On  l'a  purifiée  par  l'eau  bouillante  :  ce  liquide  a  dis- 
sous du  principe  colorant  jaune,  de  la  matière  animale,  du 
principe  odorant  ,  et,  ce  qu'il  y  a  de  remarquable,  un  peu 
de  résine  :  ce  résultat  peut  faire  croire  que  la  liqueur  rou- 
geâtre  du  premier  lavage  aqueux  de  Tindigo  peut  être  due, 
au  moins  en  partie,  à  cette  résine.  La  résine  a  été  dissoute 
par  l'alcool ,  puis  précipitée  par  l'eau;  enfin,  traitée  parce 
liquide  bouillant,  jusqu'à  ce  qu'elle  ne  lui  ait  plus  rien 
cédé.  La  résine,  lavée  et  séchée,  a  été  mise  en  digestion  avec 
différentes  quantités  d'alcool,  à  la  température  de  jo  degics: 
le  premier  alcool  avoit  une  couleur  rouge,   mêlée  d'un  peu 


598     ,  INI) 

de  jaune  ;  les  autres  lavages  tiroient  de  plus  en  plus  sur  le 
violet,  parce  qu'ils  avoient  dissous  avec  la  résine  une  cer- 
taine quantité  d'indigo;  enfin,  le  résidu  étoit  formé  dïn- 
digo  retenant  un  peu  de  matière  animale  et  de  résine  rouge. 
La  meilleure  manière  de  séparer  la  résine  de  l'indigo  qui 
s'est  dissous  avec  elle,  est  de  faire  évaporer  la  solution  à 
siccité,  et  de  traiter  le  résidu  par  l'éther  hydratique  froid. 
L'indigo  est  séparé,  et,  en  faisant  évaporer  l'éther,  on  obtient 
une  résine  rouge  qui  n'exhale  pas  de  vapeur  pourpre  quand 
on  l'expose  à  l'action  de  la  chaleur. 

i3.  La  résine  rouge  est  insoluble  dans  l'eau;  elle  est  plus 
soluble  dans  l'éther  que  dans  l'alcool.  Ces  dissolutions  sont  d'un 
très-beau  rouge  tirant  très-légèrement  sur  Je  pourpre;  quand 
elles  ont  une  teinte  écarlate  ,  elles  contiennent  un  principe 
colorant  jaune.  La  solution  alcoolique  est  troublée  par  l'eau; 
plusieurs  acides  en  précipitent  des  flocons  rouges.  La  résine 
ne  paroît  pas  se  dissoudre  dans  les  alcalis  ;  ces  corps  n'en 
changent  pas  la  couleur. 

14.  L'indigo  qui  avoit  subi  sept  lavages  alcooliques,  fut 
traité  par  l'alcool  bouillant  jusqu'à  ce  qu'il  colorât  ce  liquide 
en  bleu.  Ces  lavages  contenoient  proportionnellement  plus 
de  résine  et  d'indigo  que  les  premiers,  et  cela  devoit  être, 
d'après  les  faits  qui  sont  exposés  (n.°  12). 

Indigo  et  acide  hydrochlorique. 

i5.  L'indigo  a  été  soumis  à  l'action  de  l'acide  hydrochlo- 
rique. Celui-ci  a  dissous  de  Voxiàe  de  fer ,  de  Valuminc,  des 
phosphates  de  chaux,  de  magnésie,  et  des  carbonates  de  ces 
hases. 

16.  Enfin,  on  a  achevé  de  purifier  l'indigo  en  le  traitant 
par  l'alcool  bouillant,  jusqu'à  ce  que  le  liquide  se  teignit 
d'un  bleu  franc. 

Tous  les  indigos  du  commerce  ne  se  comportent  pas  abso- 
lument de  la  même  manière  que  celui  dont  nous  venons  de 
parler.  Par  exemple ,  les  indigos  de  Java  ,  de  Guatimala  et 
de  Chine  donnent  à  l'eau  une  matière  que  j'ai  appelée  verte , 
et  qui  a  quelques  propriétés  remarquables  :  on  l'obtient  en 
traitant  par  l'alcool  froid  et  concentré  l'extrait  des  lavages 
aqueux.  La  solution  alcoolique  est  d'un  beau  rouge;   elle  est 


•  IND  •  399 

iégèrement  acide;  elle  ne  se  trouble  pas  quand  ou  la  mêle  avec 
l'eau.  La  solution  aqueuse  de  cette  matière  devient  verte  par 
les  acides  :  si  ces  corps  sont  concentrés,  ils  forment  des  flocons 
verts  qui  sont  une  combinaison  dacidc  et  de  principe  colo- 
rant. La  combinaison  d'acide  sulfurique  et  de  principe  co- 
lorant se  dissout  dans  l'alcool.  La  solution,  vue  en  masse, 
est  rouge ,  tandis  que  la  surface  est  verte.  Quand  on  la 
mêle  à  feau  ,  elle  ne  précipite  pas,  mais  elle  devient  verte. 
Il  paroit  que  ,  dans  le  cas  où  la  combinaison  est  dissoute  par 
l'alcool ,  ce  liquide  affoiblit  l'action  de  Facii'e  sur  la  couleur, 
et  que  ,  quand  o'i  ajoute  de  l'eau  ,  celle-ci  diminue  i'aflinité 
de  l'alcool,  et  permet  à  l'acide  de  réagir  avec  sa  première 
énergie  sur  le  principe  colorant. 

Quelques  indigos  m'ont  présenté  dans  leurs  lavages  alcoo- 
liques une  matière  bleue  qui  n'étoit  pas  de  findigo  ,  et  qui 
m'a  paru  susceptible  de  passer  au  rouge  dans  plusieurs  cir- 
constances. 

Les  indigos  du  commerce  perdent  dans  la  purification  de 
55  à  65  pour  cent  de  matières  étrangères  à  l'indigo. 


L'indigo  est  une  des  substances  organiques  les  plus  pré- 
cieuses pour  la  teinture.  Il  n'en  est  aucune  qui  lui  soit  com- 
parable sous  le  rapport  de  la  solidité,  lorsque  l'indigo  a  été 
appliqué  sur  les  étoffes  à  l'état  d'indigo  hydrogéné;  car  les 
étoffes  teintes  avec  la  dissolution  sulfurique  en  bleu  dit  de 
Saxe,  sont  loin  d'avoir  une  couleur  aussi  solide  que  celles 
qui  l'ont  été  avec  l'indigo  hydrogéné. 

Nous  allons  indiquer  très -brièvement  les  procédés  au 
moyen  desquels  on  applique  l'indigo  sur  les  étoffes  de  laine, 
de  soie,  de  coton  et  de  lil. 

Etoj^es  de  laine. 

On  fait  usage  ,  i."  de  la  cuve  de  pastel;  2."  de  la  cuve  d'Inde; 
5.°  de  la  cuve  à  V urine. 

Cuve  de  pastel. 

On  la  prépare  en  jetant  sur  du  pastel  que  l'on  a  disposé 
au  fond  d'une  cuve  de  bois,  une  décoction  de  gaude ,  de  ga- 
rance et  de  son  (la  partie  indissoute  de  la  garance  et  du  son 


4oo  ,  ÎND 

se  trouvent  en  suspension  dans  la  décoction).  On  couvre  la 
cuve;  on  la  laisse  en  repos  pendant  six  heures:  ensuite  on 
la  pallie  ])endant  une  demi-heure.  On  l'abandonne  pendant 
trois  heures;  on  la  pallie  ensuite,  et  cela  jusqu'à  ce  qu'il  se 
manifeste  à  la  surface  du  liquide  des  veines  bleues  :  alors 
on  y  introduit  de  la  chaux  vive  et  de  l'indigo  moulu  avec 
de  l'eau. 

La  cuve  est  en  état  de  teindre  ,  lorsqu'elle  est  recouverte 
d'une  belle  pellicule  cuivrée. 

Je  vais  exposer  quelques  propriétés  que  j'ai  reconnues , 
en  1814,  à  une  cuve  de  pastel  qu'un  des  teinturiers  de 
Reims  les  plus  distingués,  M.  Oudin  ,  me  permit  d'examiner 
dans  ses  ateliers. 

La  liqueur  de  cette  cuve  étoit  d'un  beau  jaune  :  elle  exha- 
loit  une  odeur  d'ammoniaque  et  d'hydrosulfale  de  cette  base; 
exposée  au  contact  de  l'air,  elle  se  couvroit  d'une  pellicule 
bleue-violette. 

Un  courant  de  gaz  acide  carbonique  qu'on  y  fit  passer,  en 
précipita  de  la  chaux  à  l'état  de  carbonate  et  de  l'indigo  ;  il 
se  maidfesta  une  odeur  de  bouillon,  que  j'attribue  à  un 
principe  volatil  que  j'ai  rencontré  dans  les  feuilles  de  pastel , 
et  que  j'ai  comparé  à  l'osmazome  ;  enfin  il  se  dégagea  de 
l'acide  hydrosulfurique. 

La  liqueur  donna  à  la  distillation,  1."  de  l'ammoniaque  pure 
(l'acide  hydrosulfurique  fut  retenu  par  la  chaux);  ■j."\eprin- 
cipe  aromatique  de  l'indigo.  Enfin,  la  liqueur  distillée  avec 
l'acide  sulfurique  donna  del'ûciiie  hydrosulfurique  et  àeVacide 
acétique  en  quantité  notable. 

Je  suis  porté  à  croire  que  dans  cette  cuve  l'indigo  étoit 
dissous  et  par  la  chaux  et  par  l'ammoniaque,  et  que  celle-ci 
s'y  trouvoit  à  l'état  caustique  :  l'excès  d'eau  de  chaux  s'op- 
posoit  à  ce  qu'il  y  eût  de  l'acide  carbonique  dans  la  liqueur. 

Cuve  d'Inde. 

On  la  prépare  en  faisant  bouillir  du  son  et  de  la  garance 
dans  une  lessive  de  cendres  gravelées ,  puis  ajoutant  à  ces 
matières  de  l'indigo  broyé  à  Feau. 

Celte  cuve  ne  présente  pas  autant  de  diflicultés  dans  sod 
usage  que  la  cuve  de  pastel;  elle  est  plus  riche  en  couleur, 


•  IND  .    401 

maïs  elle  est  moins  économique.  Les  draps  qu'on  y  passe 
sont  plus  doux  que  ceux  qui  sont  teints  dans  l'autre  cuve. 
Cuve  à  Vurine. 
On  la  prépare  avec  de  Turine,  de  l'indigo,  de  la  garance 
et  une  substance  acide  qui  est  ou  du  vinaigre  ou  un  mélange 
de  tartre  et  d'alun.  Dans  cette  cuve  l'indigo  hydrogéné  est 
uni  à  l'ammoniaque. 

Eloffes  de  soie. 

On  les  teint  dans  la  cuve  d'Inde  ;  mais  celle-ci  doit  con- 
tenir une  proportion  d'indigo  plus  forte  que  celle  qu'on 
emploie  pour  les  étoffes  de  laine. 

La  soie  a  moins  de  tendance  que  la  laine  à  prendre  l'in- 
digo :  c'est  pour  cette  raison  que,  dans  la  préparation  des 
bleus  foncés,  tels  que  le  lieu  de  roi  et  surtout  le  hleu  turc  , 
on  plonge  la  soie  dans  un  bain  d'orseille  ,  avant  de  la  plonger 
dans  le  bain  d'indigo. 

Etapes  de  coton  et  de  lin. 

On  les  teint  dans  des  cuves  où  l'indigo  hydrogéné  est  uni 
à  la  potasse  ou  à  la  chaux.  Dans  ce  cas  on  ajoute  à  la  matière 
alcaline  du  sulfate  de  protoxide  de  fer  :  il  se  produit  alors 
du  sulfate  de  potasse  ou  de  chaux.  Le  protoxide  qui  est  mis 
à  nu,  se  combine  avec  l'oxigéne  de  l'eau  ,  tandis  que  l'hy- 
drogène de  ce  même  liquide  forme  avec  l'indigo  et  l'alcali 
libre  un  composé  soluble. 

On  peut  encore  teindre  le  coton  et  le  fil  dans  une  cuve 
où  l'indigo,  dissous  par  la  potasse,  s'est  uni  à  l'hydrogène 
par  l'intermède  de  l'orpiment  ou  sulfure  d'arsenic. 

Le  hleu  d'application,  dont  on  fait  un  si  grand  usage  pour 
les  toiles  peintes,  ne  difiere  de  la  cuve  précédente  que  par 
une  proportion  plus  forte   d'orpiment  et  d'indigo. 

Bleu  de  Saxe. 
Le  lieu  de  Saxe  ne  peut  servir  à  la  teinture  du  fil  et  des 
étoffes  de  coton.  Appliqué  sur  la  soie ,  il  la  teint  en  bleu  : 
la  couleur  résiste  à  l'eau  ;  mais  elle  est  enlevée  par  l'eau  de 
savon.  La  laine ,  préparée  avec  l'alun  et  le  tartre ,  se  teint 
mieux  que  la  soie,  surtout  si  on  ajoute  au  bleu  de  Saxe  une 
23.  «6 


4o2    ,  IND 

petite  quantité  rie  potasse  ;  mais  cette  teinture  n'est  jamais 
très-solide  :  l'eau  de  savon  Taltère  sensiblement:  elle  en 
affoiblit  la  nuance,  en  même  temps  qu'elle  la  fait  tourner 
au  Jaune.  (Ch.) 

INDIGO  BATARD  DE  CAYENNE.  (Bot.)  C'est,  suivant 
M.  Richard  ,  le  cassia  occidentalis.  On  donne  aussi  le  même 
nom  et  celui  de  faux  indigo  à  Vamorplia.  (  J.) 

INDIGO  DE  LA  GUADELOUPE.  {Bot.)  Dans  les  colonies 
on  désigne  par  ce  nom  le  crotolaria  incana.  Voyez  Crotolaire 
blanchâtre ,  à  l'arlicle  Crotolaire.  (Lem.) 

INDIGOLITHE.  (Mm.)  Voyez  Indicolithe.  (Lem.) 

INDIGOTIER,  Indigofera.  {Bot.)  Genre  de  plantes  à  fleurs 
complètes,  papillonacées ,  de  la  famille  des  légumineuses, 
de  la  diadelphie  décandrie  àe  Linnaeus;  offrant  pour  caractère 
essentiel  :  Un  calice  à  cinq  dents;  une  corolle  papillonacée; 
la  carène  munie  de  chaque  côté  d'un  éperon  subulé,  étalé; 
un  ovaire  supérieur,  surmonté  d'un  style  court,  ascendant, 
et  d'un  stigmate  obtus.  Le  fruit  est  une  gousse  oblongue , 
linéaire,  un  peu  cylindrique,  droite  ou  courbée,  renfer- 
mant plusieurs  semences. 

Ce  genre  est  intéressant  par  les  espèces  qu'il  renferme  en 
très-grand  nombre,  parmi  lesquelles  plusieurs  fournissent  ce 
bel  indigo  si  répandu  dans  le  commerce.  11  se  rapproche  beau- 
coup des  galégas,  distingué  par  ses  gousses  menues,  rarement 
comprimées.  U  comprend  des  herbes  ou  arbustes  à  feuilles 
ternées,  rarement  simples,  plus  souvent  ailées  avec  une  im- 
paire; quelquefois  les  folioles  sont  articulées  et  comme  aris- 
tées  à  leur  base;  les  fleurs  petites,  ordinairement  disposées 
en  grappes  axillaires. 

'*  Indigotiers  a  feuilles  ailées. 

Indigotier  franc  :  Indigofera  anil ,  Linn.  ;  Lamk.  ,  III.  gen,, 
lab.  626,  fig.  2;  Rumph.,  Amb. ,  5,  tab.  80.  Cette  espèce, 
une  des  plus  intéressantes  de  ce  genre,  est  un  petit  arbuste 
de  deux  ou  trois  pieds  de  haut,  dont  la  tige  est  droite  ,  cy- 
lindrique, rameuse,  blanchâtre,  chargée  de  poils  courts  et 
couchés.  Les  feuilles  sont  alternes,  pétiol'^es ,  ailées  avec  une 
impaire,  composét^s  de  neuf  à  onze  f(dioles  ovales -obtuses, 
entières,  un  peu  blanchâtres  en -dessous,  à  peine  longues 


•  IND  •     4o3 

d'un  pouce;  des  stipules  petites,  subulêes.  Les  fleurs  sont 
petites,  d'un  vert rougeàtre  ou  pourpré,  disposées  en  grappes 
fort  courtes,  simples,  coniques,  moins  longues  que  les  feuil- 
les ;  les  calices  couverts  de  petits  poils  couchés  et  blanchâtres; 
les  bractées  sétacécs.  Les  fruits  sont  des  gousses  grêles  , 
longues  de  huit  à  dix  lignes ,  courbées  en  faucille ,  presque 
glabres,  bordées  par  la  saillie  latérale  de  leurs  sutures,  ren- 
fermant cinq  à  six  semences  quadrangulaires.  Cette  p'ante 
croit  dans  les  Indes  orientales.  On  la  cultive  dans  les  Antilles 
et  dans  plusieurs  autres  contrées  de  l'Amérique  méridionale, 
pour  eu  obtenir  cette  belle  couleur  bleue  connue  sous  le 
nom  d'indigo. 

L'indigo  est  une  fécule  précipitée,  desséchée  et  réduite  en 
masses  solides  ,  légères,  cassantes  ,  d'un  bleu  dazur  très-foncé. 
Les  teinturiers  l'emploient,  avec  le  pastel,  pour  teindre  en 
bleu  les  étoffes  de  soie  et  de  laine;  les  peintres  s'en  servent, 
en  le  mêlant  avec  d'autres  couleurs  ,  dans  la  peinture  en 
détrempe;  les  blanchisseuses  l'emploient  pour  donner  une 
teinte  bleuâtre  à  leur  linge. 

L'indigo  est  d'un  usage  si  répandu,  d'un  prix  si  excessif 
lorsque  les  relations  commerciales  sont  interrompues,  qu'on 
s'est  proposé  ,  il  y  a  quelques  années,  d'en  essayer  la  culture 
en  France,  surtout  dans  les  départemens  méridionaux  :  on  a 
trouvé  peu  de  localités  qui  lui  soient  favorables,  excepté 
quelques  endroits  aux  environs  de  Toulon,  deNarbonne,  etc. 
Mais,  la  valeur  territoriale  de  ces  terrains  étant  fort  élevée, 
on  n'auroit  pu  mettre  l'indigo  qu'ils  auroient  produit  en 
concurrence  pour  le  prix  avec  celui  des  colonies;  ce  qui  a 
déterminé  à  se  rejeter  sur  le  pastel,  et  à  en  perfectionner  la 
culture,  pour  en  obtenir  une  couleur  bleue  d'une  belle  qua- 
lité. 

Dans  les  colonies  américaines,  la  culture  de  l'indigo  riva- 
lise presque  avec  celle  du  sucre  et  du  café ,  quoiqu'elle  soit 
moins  productive;  mais  aussi  elle  n'exige  pas  d'aussi  grandes 
avances,  et  les  résultats  en  sont  plus  prompts.  Les  terrains 
nouvellement  défrichés  sont  ceux  où  l'indigo  réussit  le  mieux, 
parce  qu'ils  conservent  la  portion  d'humidité  nécessaire  à  sa 
croissance.  Des  abris  naturels  ou  artificiels  contre  les  grands 
vents  sont  très-avantageux  pour  sa  végétation  :   on  doit  en 


404     ,  IND 

conséquence  préférer  de  le  semer  sur  le  bord  des  bois,  dans 
les  vallons,  et,  lorsqu'on  ne  le  peut  pas,  l'entourer  d'une 
lisière  de  roseau  ou  autres  grandes  plantes  d'une  rapide  crois- 
sance. 

Quoique  l'indigo  soit  un  arbuste ,  on  est  dans  l'usage  de 
le  semer  tous  les  ans,  parce  qu'on  a  remarqué  que  les  jeunes 
pieds  fournissent  des  feuilles  plus  grandes  et  plus  nombreuses. 
On  le  sème  à  Saint-Domingue  depuis  Novembre  jusqu'en  Mai , 
immédiatement  après  les  pluies;  dans  la  parue  septentrionale, 
on  choisit  Novembre  ou  Décembre,  époque  où  il  tombe  des 
pluies  amenées  du  nord;  dans  la  partie  sud,  il  faut  attendre 
les  pluies  d'orage  en  Mars  et  Avril.  Lorsqu'on  peut  faire  des 
irrigations  ,  on  doit  toujours  semer  de  bonne  heure. 

Quoique  les  graines  de  deux  ou  trois  ans  lèvent  assez  bien, 
il  faut  toujours  préférer  les  plus  nouvelles;  elles  lèvent  au 
bout  de  trois  ou  quatre  jours  :  il  faut  peu  après  faire  un 
sarclage,  le  répéter  tous  les  quinze  jours  ,  jusqu'à  ce  que  les 
pieds  d'indigo  soient  assez  forts  pour  empêcher  les  mauvaises 
herbes  de  repousser.  Cette  plante  craint  la  sécheresse  ,  les 
vents  brûlans  et  impétueux  ,  les  pluies  trop  fortes  ou  trop 
prolongées,  les  chenilles  et  quelques  autres  insectes.  On  s'op- 
pose à  la  sécheresse  par  des  irrigations  ,  aux  vents  par  des 
abris;  difficilement  aux  longues  pluies,  qui  font  prospérer 
la  plante  ,  mais  empêchent  la  fécule  de  se  former.  Le  moment 
où  l'indigo  doit  être  coupé,  est  celui  où  commencent  à  pa- 
roitre  ses  premières  fleurs,  ce  qui  a  lieu  dans  le  cours  du 
troisième  mois  après  les  semailles.  La  première  coupe  de 
l'indigo  est  suivie  d'une  seconde,  six  ou  sept  semaines  après  ; 
d'une  troisième  et  plus  ,  selon  la  nature  du  terrain.  En 
Egypte,  la  culture  de  l'indigo  est  moins  sujette  aux  accidens 
qu'à  Saint-Domingue,  et  semble  mieux  entendue.  On  choisit 
pour  la  faire  des  terrains  élevés,  et  l'on  a  soin  de  les  en- 
tourer d'une  chaussée,  pour  empêcher  l'inondation  du  Nil 
d'y  pénétrer,  parce  qu'on  ne  renouvelle  la  plante  que  tous 
les  trois  ou  quatre  ans.  Chaque  année  on  fait  quatre  coupes, 
deux  avant  et  deux  après  la  crue  du  Nil. 

Il  y  a  quelques  variétés  dans  les  procédés  employés  pour 
retirer  des  feuilles  et  des  tiges  la  fécule  de  l'indigo.  A  Saint- 
Domingue,  un  établissement  destiné  à  la  fabrication  de  l'indigo 


IND  •     4o5 

est  composé  de  trois  cuves  d'une  moyenne  capacité,  et  d'un 
petit  vase  :  elles  sont ,  au  moyen  d'une  bâtisse  en  pierres  , 
élevées  les  unes  au-dessus  des  autres,  de  manière  que  l'eau 
contenue  dans  la  plus  haute,  qu'on  nomme  le  trempiir ,  puisse 
se  vider  dans  la  seconde,  qui  s'appelle  la  batterie,  et  celle-ci 
dans  la  troisième  ,  qu'on  désigne  sous  le  nom  de  reposnir.  Le 
petit  vase,  nommé  le  bassinot  ou  le  diablotin,  est  placé  entre 
la  seconde  et  la  troisième  cuve  :  il  est  destiné  à  recevoir  la 
fécule  qui  en  sort,  et  est  terminé  en  cul-de-lampe,  pour  fa- 
ciliter l'enlèvement  de  cette  fécule.  Quatre  poteaux  soné 
fixés  aux  coins  du  trempoir,  et  servent  à  maintenir  les  plan- 
ches qu'on  place  sur  l'indigo  ,  pour  l'empêcher  d'être  rejeté 
dehors  par  l'effet  delà  fermentation.  On  emploie,  pour  battre 
l'indigo  ,  un  instrument  que  l'on  nomme  baquet ,  qu'un  nègre 
fait  mouvoir  en  tout  sens,  afin  d'introduire  dans  l'eau  la  plus 
grande  quantité  d'air  possible.  On  emploie  aussi,  pour  battre 
l'indigo,  des  machines  mues  par  des  hommes,  par  des  che- 
vaux ou  par  un  courant  d'eau  :  le  mouvement  est  excité  par 
des  patelles  fixées  à  un  arbre  horizontal.  Toutes  les  eaux  ne 
sont  pas  indifférentes  à  la  préparation  de  l'indigo  :  celles  qui 
sont  crues,  qui  tiennent  en  dissolution  de  la  craie  ou  de  la 
sélénite  ,  comme  celles  de  la  plupart  des  puits ,  ne  valent 
rien. 

On  place  dans  le  trempoir  les  tiges  et  les  feuilles  de  l'in- 
digo de  manière  à  ce  qu'elles  ne  soient  ni  trop  ni  trop  peu 
pressées;  on  les  recouvre  de  trois  ou  quatre  pouces  d'eau, 
et  on  fixe  les  planches  qui  doivent  les  empêcher  de  déborder. 
La  fermentation  s'établit  dans  la  masse  plus  ou  moins  rapi- 
dement, selon  la  chaleur  de  l'atmosphère.  On  juge  qu'il  est 
temps  de  l'arrêter,  en  mettant  un  peu  d'eau  prise  dans  la 
cuve  à  diverses  profondeurs ,  dans  une  tasse  d'argent  :  si  la 
fermentation  est  parvenue  au  degré  convenable  à  la  prépa- 
ration de  la  fécule ,  celle-ci  se  précipite  au  fond  de  la  tasse 
en  grains  bien  caractérisés.  Alors  on  fait  écouler  toute  l'eau 
du  trempoir  dans  la  batterie,  et  on  l'agite  en  tout  sens  avec 
les  baquets.  Il  suffit  de  deux  ou  trois  heures  à  une  cuve 
convenablement  battue  pour  que  toute  la  fécule  qu'elle  con- 
tient soit  précipitée;  alors  l'eau  est  très-claire  ,  d'une  belle 
couleur  ambrée.  On  ouvre  d'abord  le  premier  robinet,  afin 


4o6      .  IND 

de  faire  écouler,  sans  troubler  le  fond  de  la  cuve  ,  l'eau  qui 
lui  est  supérieure:  ensuite  on  en  fait  autant  au  second;  le 
troisième  est  drsfiné  à  faire  écouler  dans  le  diablotin  l'indigo, 
qui  resseuible  alors  à  une  vase  noire  liquide. 

La  fécule  retirée  du  diablotin  est  d'abord  mise  dans  des 
sacs  suspendus,  afin  de  faire  écouler  l'eau  surabondante;  en- 
suite dans  des  caisses  plates,  qu'on  expose  en  plein  air  sous 
des  hangars,  oii  elle  prend  encore  plus  de  consistance  :  enfin, 
on  divise  la  fécule  en  petits  parallélogrammes,  qu'on  expose 
au  soleil  jusqu'à  ce  qu'ils  soient  secs  ,  du  moins  en  apparence  ; 
placé  ensuite  en  cet  état  dans  une  barrique.,  il  y  éprouve 
une  nouvelle  fermentation  ,  s'échauffe  ,  rend  de  grosses  gout- 
tes d'eau  ,  exhale  une  odeur  désagréable  ,  et  se  couvre  d'une 
poussière  fine  et  blanchâtre.  Au  bout  d'un  mois,  on  l'ôte  de 
cette  barrique,  et  on  le  fait  sécher  de  nouveau;  ce  qui  ne 
deu)ande  pas  plus  de  cinq  à  six  jours.  En  cet  état  il  peut  entrer 
dans  le  commerce  ,  quoiqu'il  faille  encore  six  mois  avant 
qu'il  soit  arrivé  à  son  dernier  point  de  perfection  :  alors  il 
n'est  plus  dans  le  cas  de  subir  de  déchet  ni  d'altération,  s'il 
est  tenu  dans  un  lieu  bien  sec. 

On  distingue  dans  le  commerce  plusieurs  sortes  d'indigo  , 
qui  offrent  des  caractères  fort  différens,  et  qui  paroisscnt  ce- 
pendant provenir  tous  de  la  même  plante.  Celui  de  Guatimala 
passe  pour  le  meilleur,  ensuite  celui  de  Saint-Domingue. 

Dans  plusieurs  contrées  de  l'Inde  on  sépare  les  feuilles 
des  tiges,  et  l'on  ne  met  dans  le  trempoir  que  les  premières. 
On  prétend  que  par  cette  méthode  on  obtient  une  plus 
belle  fécule  :  mais  elle  occasionne  une  grande  perte  de  temps 
et  de  main-d'œuvre  ;  elle  fait  perdre  une  grande  portion  de 
fécule,  étant  certain  que  Técorce  des  tiges  en  contient  comme 
les  feuilles.  Les  Chinois  font  entrer  de  la  chaux  dans  le  trem- 
poir, comme  nos  teinturiers  dans  leur  cuve  ;  mais  il  est  tou- 
jours possible  de  s'en  dispenser,  lorsqu'on  sait  conduire  con- 
venablement la  fermentation  et  l'arrêter  à  propos.  Sur  la 
côte  occidentale  d'Afrique  ,  on  fabrique  l'indigo  comme 
nous  fabriquons  le  pastel  en  France  :  on  pile  les  feuilles  et 
les  tiges,  et  on  en  form(^  des  boules,  qu'on  fait  dessécher  à 
l'ombre. 

En  Egypte  on  emploie  pour  la  fabrication  de  l'indigo  une 


IND  •     /,o7 

méthode  peu  connue,  qui  n'en  est  pas  moins  la  plus  simple, 
la  plus  sûre  et  la  plus  économique  ,  à  laquelle  les  (;himisles 
françois  ont  donné  leur  approbation  ,  en  proposant  de  l'ap- 
pliquer au  pastel.  Les  Égyptiens  ne  coupent  de  chaque  tige 
d'indigo  que  ce  que  peuvent  en  employer  quatre  ou  cinq 
hommes.  On  jette  ces  tiges  avec  les  feuilles  dans  de  grandes 
chaudières  remplies  d'eau,  qu'on  fait  bouillir  pendant  trois 
heures;  après  quoi,  l'eau  chargée  de  fécule  est  conduite  dans 
d'autres  vaisseaux  ,  où  on  la  bat  avec  de  larges  pelles ,  jus- 
qu'à ce  que  la  fécule  se  soit  précipitée;  puis  on  décante  l'eau, 
et  on  fait  sécher  la  pâte.  L'ébullition  fait  ici  en  peu  d'heures 
le  même  effet  que  la  fermentation,  c'est-à-dire  qu'elle  désor- 
ganise le  parenchyme  des  feuilles  et  de  l'écorce ,  et  facilite 
la  séparation  de  la  fécule.  Par  ce  moyen  ,  on  ne  perd  jamais 
le  produit  de  la  récolte,  comme  il  arrive  assez  souvent  en 
Amérique,  quand  l'opération  delà  fermentation  estm.anquée, 
qu'elle  n'est  point  conduite  au  point  convenable. 

IiNDiGOTiER  DES  It^DEs  :  Indigofcra  indica,  La.mk.  ;  IncUsofera 
tincloria,  Linn.  ;  Moris. ,  §.  2,  tab.  22  ;  Pluken.,  tab.  i65,  fig. 
5.  Cette  plante,  très-rapprochée  de  la  précédente  ,  en  diffère 
par  ses  fruits,  qui  ne  sont  point  courbés  en  faucille  ,  qui  sont 
plus  cylindriques,  et  ont  leurs  sutures  moins  saillantes  :  sa 
tige  est  glabre  dans  toute  sa  longueur;  les  folioles  ovales- 
cunéiformes,  verdàtres  à  leurs  deux  faces,  chargées,  dans 
leur  jeunesse  ,  de  poils  rares  et  couchés;  les  gousses  glabres, 
menues,  d'un  rouge  brun  ,  pendantes,  longues  de  quinze  à 
dix-huit  lignes,  mucronécs  obliquement.  Cette  plante  croît 
dans  les  Indes,  à  l'Isle-de-France  ,  à  Madagascar.  Elle  est, 
ainsi  que  la  précédente,  employée  ,  dans  les  Indes  et  en  Amé- 
rique, à  faire  de  l'indigo;  cependant,  comme  ses  tiges  sont 
plus  ligneuses  et  ses  feuilles  moins  succulentes  ,  on  lui  préfère 
la  première. 

Indigotier  glauque  :  Indigofera  glauca  ,  Lamk. ,  Encycl.  ; 
Zanon.,  Hist.,  tab.  12;  Indigofera  argentea,  Linn.,  l'Hérit.  , 
Slirp.  nov,,  tab.  79;  Indigofera  articulata  ,  Goum.  ,  lll, ,  4g; 
Indigofera  tinctoria  ,  Forsk. ,  Agypl.,  pag.  i58.  Cette  espèce 
est  très-remarquable  par  sa  belle  (ouleur  glauque,  argentée. 
Ses  tiges  sont  herbacées,  couvertes  d'un  duvet  court,  très- 
blanc  ;  les  feuilles  inférieures  souvent  tern-ées ,  les  supérieures 


4o8     ♦  IND 

ailées,  à  cinq  ou  sept  folioles  ovales- obtuses ,  chargées  en 
leurs  deux  faces  d'un  duvet  très -court;  les  fleurs  petites  , 
purpurines,  disposées  en  grappes  lâches  et  courtes;  le  calice 
cotonneux.  Cette  espèce  croît  en  Egypte,  dans  l'Arabie,  en 
Barbarie  :  on  la  cultive  dans  les  environs  de  Tunis  pour  la 
fabrication  de  l'indigo. 

Indigotier  velu  :  Indigofera  liirsuta  jhinn.  ;  Lamk. ,  III.  gen.  ^ 
tab.  626  ,  fig.  3  ;  Beauv. ,  FI.  d'Oware  ,  tab.  1 1 9  ;  Kattu-tagera , 
Rheed. ,  Malab. ,  9,  tab.  3o  ;  Burm. ,  Zeyl. ,  tab.  14.  Cette 
plante  est  velue  sur  presque  toutes  ses  parties.  Ses  tiges  sont 
herbacées,  anguleuses,  velues;  les  feuilles  ailées,  composées 
de  cinq  à  sept  folioles  et  plus,  ovales  -  obtuses ,  velues  à  leurs 
deux  faces;  les  stipules  sétacées  ;  les  fleurs  roussàtres ,  très- 
velues,  disposées  en  épis  axillaires  ;  les  divisions  du  calice 
sétacées,  très  -  barbues;  la  corolle  pourprée,  à  peine  plus 
longue  que  le  calice;  les  gousses  droites,  tétragones,  lai- 
neuses, toutes  pendantes,  longues  d'environ  neuf  lignes. 
Cette  plante  croit  aux  lieux  sablonneux  ,  dans  les  Indes  orien- 
tales et  sur  la  côte  du  Malabar. 

Indigotier  a  onze  folioles  :  Indigofera  endecaphylla ,  "Willd.; 
Jacq. ,  Jcon.  rar. ,  5  ,  tab.  669  ;  Beauv. ,  FI.  d'Oware,  tab.  84. 
Cette  espèce  a  des  racines  fusiformes  ,  épaisses  et  charnues; 
des  tiges  couchées,  herbacées,  longues  d'environ  deux  pieds. 
Ses  feuilles  sont  ailées ,  composées  d'environ  onze  folioles 
presque  sessiles,  glabres,  oblongues  ,  obtuses,  très-entières, 
un  peu  rétrécies  à  leur  base;  les  fleurs  presque  sessiles,  d'un 
beau  rouge  ,  disposées  en  grappes  axillaires,  plus  courtes  que 
les  feuilles;  les  gousses  tétragones,  brunes,  réfléchies,  un 
peu  velues,  longues  d'un  pouce,  légèrement  mucronées  à 
leur  sommet.  Cette  plante  croît  en  Guinée  et  dans  les  royau- 
mes d'Oware  et  de  Bénin.  M.  de  Beauvois  pense  que  les 
nègres  se  servent  de  la  partie  colorante  de  cette  plante  pour 
teindre  en  bleu  le  coton  avec  lequel  ils  font  leurs  pagnes. 

Indigotier  a  feuilles  menues  :  Indigofera  tenuifolia ,  Lamk.  , 
Encyclop.  Espèce  très-remarquable  par  la  ténuité  de  ses  fo- 
lioles, par  les  longs  pédoncules  de  ses  épis.  Ses  tiges  sont 
grêles,  longues  de  six  à  sept  pouces,  un  peu  rameuses;  ses 
feuilles  ailées,  composées  de  onze  à  treize  folioles  très-étroi- 
tes ,  presque  filiformes;  les  pédoncules  axillaires,  beaucoup 


IND  •   409 

plus  longs  que  les  feuilles,  soutenant  un  épi  de  douze  à 
quinze  petites  fleurs  rougeàtres,  un  peu  pédicellées;  les  ca- 
lices noirâtres  ,  à  cinq  dents  aiguës ,  chargés  de  poils  cou- 
chés et  blanchâtres.  Cette  plante  croît  au  cap  de  Bonne- 
Espérance. 

**  Indigotiers  à  feuilles  digitées  ^  ou  ternées  ^  ou 
géminées. 

Indigotier  épineux  ;  Indigofera  spinosa  ,  Forsk.  ,  ^gjpt-  , 
pag.  iSy.  Arbrisseau  à  tige  ligneuse,  diffuse,  garnie  d'épines 
de  la  grosseur  d'un  fil.  Les  feuilles  sont  ternées;  les  stipules 
droites,  petites  ;  les  fleurs  rouges;  leur  calice  ouvert;  les 
gousses  scabres ,  cylindriques  ,  géminées  ,  situées  dans  les 
aisselles  des  feuilles.  Cette  plante  a  été  déeouverte  par  Forskal 
dans  l'Arabie. 

Indigotier  couché  ;  Indigofera  procumbens ,  Linn. ,  Manf, 
Plante  à  tige  couchée,  herbacée,  longue  d'un  pied ,  un  peu 
anguleuse,  à  peine  pileuse,  garnie  de  feuilles  ternées,  à 
folioles  ovoïdes,  égales,  un  peu  mucronées  à  leur  sommet, 
légèrement  pubescentcs  en -dessus,  pileuses  en-dessous;  les 
stipules  subulées  ;  les  fleurs  d'un  pourpre  noirâtre ,  dépour- 
vues de  bractées,  réunies  en  un  épi  latéral,  axillaire ,  pé- 
doncule :  le  pédoncule  plus  long  que  les  feuilles.  Cette  plante 
croît  sur  les  montagnes,   au  cap  de  Bonne-Espérance. 

Indigotier  psoraloïde  :  Indigofera  psoraloides ,  Linn.;  Pluk. , 
tab.  320,  fig.  3;  Rîvini,  Tetr.,  71,  fig.  i55;  Indigofera 
racemosa,  Linn. ,  Aman. ,  6  ,  pag.  55.  Ses  tiges  sont  grisâtres, 
un  peu  ligneuses,  anguleuses;  les  feuilles  ternées;  les  folioles 
linéaires-lancéolées,  pileuses  à  leurs  deux  faces;  les  stipules 
linéaires-subulées;  les  pédoncules  anguleux,  plus  longs  que 
les  feuilles,  portant  à  leur  sommet  une  vingtaine  de  fleurs 
petites,  rougeàtres,  disposées  en  épis;  les  calices  pileux, 
leurs  dents  subulées.  Cette  plante  croit  au  cap  de  Bonne- 
Espérance. 

Indigotier  digité  :  Indigofera  digitata ,  Linn. fils,  Sup.,  535. 
Sa  tige  est  grêle  ,  cylindrique  et  rameuse  ,  velue  vers  son 
sommet;  les  feuilles  assez  semblables  à  celles  du  lotus  dorjch- 
nium ,  presque  sessiles,  digitées ,  composées  de  cinq  folioles 
oblongues,  presque  linéaires,  chargées  de  petits  poils  cou- 


4>o    '  Ï]SJ} 

chés  et  blanchâtres;  les  pédoncules  plus  longs  que  les  feuilles, 
filiformes  ,  chargés  de  petites  fleurs  en  épi:  les  calices  blan- 
châtres et  velus,  à  cinq  dents  sétacées.  Cette  espèce  croit  au 
cap  de  Bonne-Espérance. 

Indigotier  a  deux  folioi.es;  Indigofera  diphylla,  Venten., 
Choix  de  pi.,  tab.  3o.  Cette  plante  a  des  tiges  cylindriques, 
pubesccntes,  renversées,  rameuses,  d'un  blanc  cendré;  les 
feuilles  alternes,  pétiolées  ,  à  deux  folioles,  une  latérale, 
l'autre  terminale  ,  disj)osition  qui  feroit  soupçonner  Tavor- 
tenient  d"unc  troisième  foliole  :  elles  sont  ovales,  pileuses, 
d'un  vert  cendré;  la  terminale  longue  d'environ  un  pouce, 
l'inférieure  deux  fois  plus  pelile  ,  pédicelléc  :  les  stipules  lan- 
céolées ,  pubescentes,  roussàtres,  aiguës,  persistantes;  les 
grappes  touffues,  axillaires,  de  la  longueur  des  feuilles;  les 
ileurs  petites,  couleur  de  rose;  les  gousses  ovales,  arquées, 
comprimées,  velues,  renfermant  deux  ou  trois  semences 
brunes.  Cette  plante  croit  au  Sénégal. 

*  •'•'  *  Indigotiers  a  feuilles  simples. 
Indigotier  a  feuilles  simples;  Indigofera  simplicifoUa,  Lamk., 
Encycl.  Ses  tiges  sont  grêles,  simples,  un  peu  ligneuses  ;  ses 
feuilles  alternes,  très-simples,  étroites,  linéaires,  presque 
sessiles  ,  longues  d'un  pouce  et  demi,  sur  à  peine  deux  lignes 
de  largeur;  les  pédoncules  axillaires,  beaucoup  plus  courts 
que  les  feuilles  ,  chargés  de  trois  ou  quatre  petites  fleurs 
alternes,  légèrement  pédicellées  ;  les  gousses  linéaires,  cy- 
lindriques, droites  ,  mucronées,  presque  glabres,  longues 
d'environ  un  pouce.  Cette  plante  croit  en  Afrique,  dans  les 
environs  de  Sierra-Léone. 

Indigotier  a  longues  feuilles  :  Indigofera  oblongifolia ,  Forsk., 
jEgypt. ,  pag.  157;  Vahl,  Symb. ,  1  ,  pag.  55.  Plante  de  l'A- 
rabie heureuse,  dont  les  tiges  sont  ligneuses,  divisées  en  ra- 
meaux tomenteux  et  soyeux,  garais  de  feuilles  simples, 
presque  sessiles,  alternes,  distantes,  alongées  ,  couvertes  d'un 
duvet  soyeux,  longues  de  deux  lignes;  les  stipules  petites, 
sétacées  :  les  grappes  axillaires  ,  beaucoup  plus  longues  que 
les  feuilles;  les  fleurs  nombreuses;  le  calice  soyeux  et  pu- 
bescent;  l'étendard  delà  corolle  médiocrement  velu. 

UIndigofera  sumatrana,  Lamk.,  Ut.  gen. ,   tab.  626,  fig.  1  , 


IND  •  4M 

n'est  connu  que  par  ses  fruits,  figures  par  Gasrtner,  fab.  iZ|8. 
Ce  sont  des  gousses  pendantes,  pédicellées ,  légèrement  té- 
tragones,  un  peu  courbées  en  faucille  ,  renfermant  une  dou- 
zaine de  semences  réniformes.  (Pom.) 

IjNDIOT  [Ornith.) ,  nom  catalan  du  dindon,  meleagris  gallo- 
pavo  ,  Linn.,  qu'on  appelle  en  Pologne  indijlc.  (Ch.  D.) 

INDIVIA.  {Bot.)  Nom  latin  de  l'endive,  espèce  de  chi- 
corée. (Lem.) 

INDIVIDU.  {Bot.)  Une  giroflée,  un  abricotier,  un  chên-e, 
une  mousse,  qui  sont  provenus  de  graine,  ou  de  bouture, 
ou  de  marcotte  ,  et  dont  l'existence  est  indépendante  de 
celle  des  végétaux  qui  les  ont  engendrés,  sont  autant  d'in- 
dividus du  règne  végétal.  Voyez  Théorie  élémentaire.  (Mass.) 

INDIYCK  (Ornith.),  v.  Indiot.  (Ch.  D.) 

INDOU.  {Bot.)  Dans  un  herbier  de  Coromandel  on  trouve 
sous  ce  nom  V acacia  pennata.  (J.) 

IJNDRI.  {Matnm.)  Nom  d'une  espèce  de  quadrumane. 
Voyez   Maki.  (F.   C.  ) 

INDURU.  {Bot.)  A  Ceilan  on  nomme  ainsi  l'o/âx,  suivant 
Gacrtner.  (J.) 

INDUSIE.  {Bol.)  Dans  la  plupart  des  fougères  la  fructifi- 
cation est  placée  sur  la  face  inférieure  des  feuilles,  sous  la 
forme  de  taches  (sores)  plus  ou  moins  grandes,  dont  la  dis- 
tribution, la  forme  et  la  couleur  varient  suivant  les  espèces. 
Ces  taches  sont  de  petites  masses  de  conccptacles  dans  les- 
quels sont  contenus  les  corps  réproducteurs.  Elles  commen- 
cent à  se  développer  sous  l'épiderme ,  qu'elles  soulèvent  et 
déchirent  en  grossissant.  La  partie  de  l'épiderme  qui  re- 
couvre chaque  groupe  de  conccptacles  ,  est  ce  qu'on  nomme 
indusie.  (Mass.) 

INDUSIE.  {Foss.)  On  trouve  auprès  de  Clermont  en  Au- 
vergne, au  sommet  du  Puy-de-Jussat ,  et  dans  d'autres  en- 
droits aux  environs  ,  un  dépôt  calcaire  considérable  qui  n'offre 
aucune  trace  de  corps  marins  :  il  est  formé  d'une  très-grande 
quantité  de  tubes  d'environ  un  pouce  de  longueur  sur  quatre 
à  cinq  lignes  de  diamètre.  Ceux  de  ces  tubes  que  nous  avons 
pu  voir,  sont  composés  de  petites  paludines  réunies  par  une 
incrustation  calcaire  ;  mais  il  paroît  qu'on  en  trouve  aussi 
qui  sont  composés  de  petits  grains  de  sable  de  diverse  nature. 


412    •  IPyD 

Ils  sont  ouverts  à  l'un  des  bouts,  et  l'autre  est  terminé  par 
une  calotte  hémisphérique.  Ils  sont  souvent  agglutinés  paral- 
lèlement les  uns  aux  autres  :  quelqjiefois  ils  se  croisent  dans 
tous  hs  sens;  d'autres  fois  ils  sont  divergens,  et  forment  des 
espèces  de  bassins  circulaires  d'un  pied  et  demi  à  deux  pieds 
de  diamètre. 

M.  Bosc,  qui  a  le  premier  fait  connoître  ce  singulier  fos- 
sile, Ta  trouvé  à  Saint-Gérar.l-le-Puy ,  près  de  Moulins.  Il 
croit  que  ces  tubes  ont  servi  d'enveloppe  à  des  animaux  ,  tels 
que  des  larves  de  friganes,  et  il  l'a  nommé  indusia  tubulata. 
M.  Ramond  admet  aussi  cette  origine  ,  et  il  en  a  fait  mention 
dans  une  Notice  sur  la  constitution  minéralogique  des  prin- 
cipaux peints  de  l'Auvergne. 

Dans  un  Mémoire  sur  les  terrains  qui  paroissent  avoir  été 
formés  sous  leau  douce  ,  inséré  dans  le  lô."  vol.  des  Ann. 
du  Mus.  d'hist.  nat. ,  et  dont  nous  empruntons  une  partie  des 
renseignemens  sur  ce  fossile  ,  M.  Brongniart  croit  qu'une 
infiltration  calcaire,  postérieure  à  la  formation  de  ces  tubes, 
les  a  réunis  dans  beaucoup  d'endroits  plus  solidement  qu'ils 
ne  l'eussent  été  sans  cette  circonstance  ,  et  a  tapissé  leurs 
parois  ,  tant  extérieures  qu'intérieures ,  de  manière  à  les  défor- 
mer. Quelques  personnes,  au  nombre  desquelles  nous  nous 
sommes  trouvés,  avoicnt  pensé  que  ces  tubes  n'avoient  pu 
avoir  été  des  demeures  d'insectes,  et  ont  cru  qu'une  con- 
crétion calcaire  dans  laquelle  se  trouvoient  de  petites  palu- 
dines,  auroit  enveloppé  une  multitude  de  brins  de  végétaux 
détruits  par  lasuiie.  Mais  le  savant  auteur  du  Mémoire  n'ad- 
met point  cette  conjecture,  et  trouve  qu'il  y  a  une  très- 
grande  ressemblance  entre  certains  de  ces  tubes  et  ceux  que 
forment  les  larves  de  quelques  espèces  de  friganes. 

Le  peu  de  longueur  de  ces  tubes,  l'uniformité  de  cette 
longueur  et  de  leur  diamètre,  et  surtout  celle  de  leur  ex- 
trémité qui  se  trouve  bouchée,  nous  empêchent  de  croire  que 
des  roseaux  auroient  servi  de  moule  à  ces  tubes,  comme  on 
le  voit  souvent  dans  des  incrustations  de  ces  derniers;  mais 
il  est  difficile  d'expliquer  leur  véritable  origine.  (D.  F.) 

INDUVIE.  (But.)  On  donne  ce  nom  aux  parties  de  la  fleur 
qui  persistent  et  recouvrent  le  fruit  à  sa  maturité.  Dans  la 
baselle,  le  salsola  Iragus,  etc.,  par  exemple,  c'est  le  përian- 


•  INE  •  4i5 

the  simple  de  la  fleur  qui  forme  l'induvie  ;  dans  la  rose,  lea 
labiées,  le  frifoliuw.  repens  ^  etc.,  c'est  le  calice;  dans  Je  riz, 
ce  sont  les  gluu>ellt'S  :  de  là  fruit  induvié,  calice  induvial,  etc. 
(  Mass.  ) 

INEKOU.  {Bot.)  Nom  carinbe,  cité  par  Barrère,  d'un, 
hignonia  grimpant,  de  la  Guiane,  que  l'on  ne  peut  rap- 
porter, d'après  son  indication  incomplète,  à  aucune  espèce  ■ 
connue.  Barrère  ajoute  seulement  que  la  ràpure  de  son  bois, 
mêlée  dans  Teau  ,  enivre  le  poisson.  Un  autre  inecou,  cité 
dans  l'herbier  de  Vaillant,  est  le  bois  d'acouma,  homalium 
racemosuin.   (J.) 

INEMBKYONNÉS.  (^of.)  Ce  nom  convient  bien  aux  plantes 
cryptogames,  puisque  leur  mode  de  germination  nous  est 
inconnu,  et  qu'elles  ne  nous  montrent  pas  de  véritable  em- 
tryon.  Cette  expression  a  été  créée  par  M.  Richard,  que  les 
sciences  viennent  de  perdre.  (Lem.) 

INEPTf.  {Ornitli.)  llliger  applique  ce  nom  à  une  famille 
d'oiseaux  qui  paroit  avoir  été  entièrement  détruite,  et  qui 
ne  renferuioit  que  le  dronte  ,  didtis  ineptus  ,  Linn.  Voyez 
Lmertes.  (Ch.  D.) 

INÉQUITELES.  {Entom.)  M.  Latreille  a  désigné  sous  ce 
nom  les  araignées  tilandières  ou  fileuses.  (C.  D.) 

INERME.  {Bot.)  Lorsque  les  végétaux  sont  munis  de  pi- 
quans  ,  tels  qu'épines  ,  aiguillons  ,  etc.  ,  on  dit  qu'ils  sont 
armés;  par  opposition  on  les  dit  inermes  (sans  armes),  lors- 
qu'ils sont  dépourvus  de  piquans.  (Mass.) 

INERTES.  {Ornith.)  M.  Temminck. ,  dans  l'Analyse  du  sys- 
tème général  d'ornithologie  qui  précède  la  2.'"  édition  de 
son  Manuel  ,  substitue  ce  terme  à  celui  d'inepli ,  et  donne 
pour  caractère  à  son  16.*  ordre  un  bec  de  forme  diverse;  le 
corps  probablement  trapu,  couvert  de  duvet  et  de  plumes 
à  barbes  distinctes;  les  pieds  retirés  dans  l'abdomen  ;  le  tarse 
court;  trois  doigts  dirigés  en  avant,  entièrement  divisés  jus- 
qu'à la  base;  le  doigt  postérieur  court,  articulé  intérieure- 
ment; les  ongles  gros  et  acérés;  les  ailes  impropres  au  vol. 

Le  naturaliste  hoUandois  dit  que  ,  sans  égard  à  leurs  doigts 
divisés,  il  n'a  pas  trouvé  à  placer  plus  convenablement  que 
dans  cet  ordre,  voisin  des  sphénisques  et  des  apténodytes, 
les  genres  Dronte  et  Apterix  :  il  faut  avouer,  toutefois,  que 


4i4  •  INF 

c'est  là  un  assez  grand  écart  aux  règles  ordinaires.  Quoi  qu'il 
en  soit,  Shavv  a  établi,  sur  un  individu  qui  seul  existe  dans 
les  collections  et  qu'il  nomme  apterix  australis  ,  les  caractères 
du  dernier  de  ces  genres,  qui  sont  d'avoir  un  bec  très-long, 
droit,  subulé  ,  mou,  sillonné  dans  toute  sa  longueur,  fléchi 
et  renflé  à  la  pointe;  la  mandibule  inférieure  droite,  évasée 
latéralement,  subulée  à  l'extrémité;  de  très- longues  soies  à 
la  base  du  bec,  jusqu'au  bout  duquel  la  fosse  nasale  est  pro- 
longée ;  des  narines  paroissant  s'ouvrir  à  la  pointe  de  la 
mandibule  en  deux  petits  trous,  dont  les  tubes  sont  cachés 
dans  la  masse  du  bec:  des  pieds  courts,  emplumés  jusqu'aux 
genoux;  les  trois  doigts  de  devant  entièrement  divisés  ;  celui 
du  milieu  de  la  longueur  du  tarse,  et  le  postérieur  court 
et  garni  d'un  ongle  gros  et  droit  ;  les  ailes  impropres  au  vol 
et  terminées  par  une  sorte  d'ongle  courbé;  la  queue  nulle. 

A  l'égard  du  dronte,  dont  les  caractères  génériques  ont  déjà 
été  exposés  dans  ce  Dictionnaire,  tom.  i5,  pag.  522,  ses 
principales  différences  consistent  dans  les  sillons  transversaux 
de  la  mandibule  supérieure  ,  le  redressement  de  l'inférieure 
à  sa  pointe ,  et  le  placement  des  narines  au  milieu  du  bec. 
(Ch.  D.) 

INFACTI  (  Bot.  ) ,  nom  arabe  du  sureau  ,  selon  Daléchamps. 
(J.)    ^ 

INFÈRE  [Ovaire].  (Bot.)  On  nomme  ainsi  l'ovaire,  lors- 
qu'il est  adhérent  au  tube  du  calice  et  couronné  par  son 
limbe,  de  manière  qu'il  paroît  inférieur  à  toutes  les  autres 
parties  de  la  fleur  :  tel  il  est,  par  exemple,  dans  le  poirier. 
(Mass.) 

INFÉROBRANCHES,  Inferohranchia.  (Malacoz.)  Dénomi- 
nation employée  pour  la  première  fois  par  M.  G.  Cuvier , 
pour  désigner  une  famille  de  mollusques  gastéropodes,  dont 
les  branchies  sont  situées  au-dessous  du  rebord  libre  du  man- 
teau :  il  y  rangeoit  d'abord  les  phyllidies  ,  les  patelles  et  les 
genres  qu'on  a  démembrés  du  genre  Patella  de  Linnœus  ,  ainsi 
que  les  oscabrions. 

Dans  notre  système  de  classification  des  mollusques,  nous 
avions  déjà  retiré  de  ce  groupe  des  inférobranches  ,  dont 
nous  formons  un  ordre,  les  différens  genres  démembrés  des 
patelles  de  Linneeus,  et  dont  les  branchies  sont  sous  le  cou 


•  INF,  %   4i5 

et  véritablement  pectiiiées,  et  surtout  les  oscabrions,  quoi- 
que leurs  branchies  soient  un  peu  comme  dans  les  phyllidies , 
parce  que  nous  les  regardons  comme  des  animaux  subarticulés. 
Dans  son  Ilégne animal,  M.Cuvier  ne  conserve  non  plus  dans 
ses  inféi'obranches  que  les  phyllidies  et  un  nouveau  genre 
qu'il  nomme  Diphyllidie.  JNous  y  avons  aussi  établi  un  genre 
nouveau  sous  le  nom  de  Linguelle.  Voyez  ce  mot  et  Mala- 
cozoAiREs.  (De  B.  ) 

INFLAMMATION.  (Chim.)  Voyez  Ignition.  (Ch.) 
INFLAMMATION   DES  HUILES.    {Cliim.}     Voyez  Huiles 

VÉGKTALES     FIXES.     tOUlC   XXI  ,     p.    5  1  8.    (Ch.  ) 

INFLAMMATION  SPONTANÉE.  [Chim.)  C'est  l'inflamma- 
tion que  présentent  des  substances  qui  ont  été  abandonnées 
à  elles-mêmes  à  la  température  ordinaire  :  par  ex.,  le  foin 
humide  entassé  dans  un  grenier  ;  le  coton  filé ,  imprégné  d'huile 
siccative.    (Ch.) 

INFLÉCHI.  (Bot.)  Fléchi  ou  courbé  en  dedans.  On  appli- 
que cette  épithète  aux  aiguillons,  par  exemple,  lorsqu'étant 
courbés  ils  dirigent  leur  pointe  vers  la  partie  supérieure  de 
la  tige  ou  de  la  branche  (rosa  muscosa,  etc.);  aux  feuilles 
dans  le  bouton,  lorsqu'elles  sont  pliées  de  haut  en  bas  [cj- 
clamen ,  aconit,  tulipier,  etc.);  à  la  lèvre  supérieure  d'une 
corolle,  lorsqu'elle  se  renverse  sur  la  lèvre  inférieure  (bru- 
nelle,  etc.),  et  à  la  lèvre  inférieure,  lorsqu'elle  se  recourbe 
vers  l'orifice  du  tube  (chelone  barhata  ,  etc.);  aux  pétales, 
aux  étamines,  au  style,  lorsqu'ils  se  courbent  vers  le  centre 
de  la  fleur  :  tels  sont  les  pétales  de  Vastrantia  major,  les  éta- 
mines de  la  fraxinelle  ,  le  style  de  ^e^^'U)n  tetraspcrmum. 
(Mass.) 

INFLORESCENCE.  (Bot.)  La  manière  dont  les  fleurs  sont 
disposées  sur  le  végétal,  est  ce  qu'on  appelle  inflorescence. 
Les  fleurs  sont  pl.icées  ,  ou  sur  la  racine  (colchique  ,  pissenlit, 
etc.),  ou  sur  la  ti<^e  (carica  papaya  ,  cactus  peruvianus),  ou 
sur  les  rameaux  (poirier,  etc.),  ou  sur  les  feuilles  (xjlo- 
phjlla  falcata  ,  etc.),  ou  sur  les  pétioles  (hibiscus  moschatus, 
etc.);  dans  l'aisselle  des  feuilles  (pervenche),  ou  hors  des  ais- 
selles des  feuilles  (s.Aanum  nigrum ,  vigne,  etc.).  Elles  nais- 
sent une  à  une  (azaruni,  etc.),  ou  deux  à  deux  [linnœa 
borealis ,  vicia  saliva,  etc.)  ,  ou  trois  à  trois  (teucrium  chamce- 


A^G   ,  INF 

dris,  etc.),  ou  en  plus  grand  nombre  ;  et  alors  elles  sont  réu* 
nies  en  groupes,  qui  ont  chacun  un  nom  particulier  :  tels 
sont  le  Chaton,  TÉpi  ,  la  Grapie,  la  Panicule  ,  le  Thyrse,  le 
CoRYMBÈ ,  la  Cime,  le  Faisceau,  I'Ombelle  ,  le  Verticille,  le 
Capitule,  la  Calathide.  Voyez  ces  mots.   (Mass.) 

INFUNDIBULIFORME  [Corolle].  (Bot.)  On  nomme  ainsi 
celle  dont  le  limbe  ,  plan  comme  une  soucoupe  très-évasée , 
est  terminé  inférieurement  par  un  tube  droit.  On  en  a  des 
exemples  dans  la  pulmonaire,  le  laurier-rose,  etc.  Le  style 
du  hura  crepitans  ,  le  stigmate  du  kœmpferia  longa  ,  sont  aussi 
infundibuliformes.  (  Mass.  ) 

INFUNDIBULUM  (Conaiiyl.) ,  nom  latin  du  genre  Enton- 
noir,  établi  par  M.  Dcnys  de  Montfort.  (De  B.) 

INFUSION.  (Chim.)  Opération  par  laquelle  on  met  une 
substance  organique,  composée  de  plusieurs  principes  immé- 
diats, dans  un  liquide  que  l'on  expose  ensuite  à  une  chaleur 
insuflisante  pour  le  faire  bouillir.  Cette  opération  a  pour 
objet  de  séparer  les  principes  qui  sont  solubles ,  de  ceux  qui 
ne  le  sont  pas.  On  peut  faire  Finfusion  avec  de  l'eau  ,  de 
l'alcool,  des  huiles,  etc. 

Le  mot  infusion  s'applique  aussi  au  résultat  de  Fopération. 
(Ch.) 

INFUSOIRES,  Infusoria.  (Zoolog.).  C'est  à  Otton-Fréderir. 
Muller  que  la  zoologie  doit  l'introduction  de  cette  dénomi- 
nation, pour  désigner  une  classe  d'animaux  qui  se  développent 
dans  les  infusions  végétales  ou  animales ,  et  qu"à  cause  de 
leur  extrême  petitesse  on  a  quelquefois  aussi  nommés  ani- 
maux microscopiques,  parce  qu'on  ne  peut  que  rarement 
les  apercevoir  sans  microscope.  Tous  les  auteurs  systémati- 
ques ,  depuis  Gmelin ,  qui  l'a  fait  le  premier ,  ont  adopté  cette 
coupe  classique  et  ce  nom,  quoique  quelques-uns,  et  entre 
autres  M.dc  Lamarck  ,  en  aient  un  peu  restreint  l'application, 
ou  ne  l'aient  admise  qu'en  faisant  l'observation  qu'elle  étoit 
fort  mal  circonscrite.  Le  fait  est  que  Muller  n'a  été  guidé 
dans  l'établissement  de  cette  classe  par  aucun  principe,  et 
que  par  conséquent  il  est  probable  qu'elle  contient  un  as- 
semblage informe  d'animaux  de  degrés  d'organisation  ou 
de  types  très-différens,  à  des  degrés  de  développement  sans 
doute  également  différens,  qui  n'ontpour  caractères  communs, 


•  INF  •     417 

51  l'on  peut  appeler  cela  des  caractères,  que  d'être  d'une 
petitesse  et  d'une  transparence  extrêmes,  et  par  conséquent 
de  n'être  appréciables  qu'au  microscope;  de  vivre  toujours  et 
forcément  dans  un  fluide,  ce  qui  est  une  suite  de  leur  peti- 
tesse, et  de  ne  se  développer  pour  la  plupart  que  dans  des 
infusions  de  plantes  ou  d'animaux,  ce  qui  est  encore  assez 
douteux.  Lelir  forme  générale  et  particulière ,  la  seule  chose 
qu'il  soit  permis  à  l'observateur  de  saisir,  confirme  les  diffé- 
rences d'organisation  :  en  effet,  il  y  en  a  qui  ont  une  forme 
bien  paire,  bien  symétrique,  non-seulement  dans  leur 
corps,  mais  aussi  dans  les  appendices  plus  ou  moins  nom- 
breux qui  s'y  joignent,  et  qui  en  outre  sont  revêtus  d'une  vé- 
ritable enveloppe  cornée,  comme  les  brachions;  quelques- 
uns  ont  le  corps  alongé,  vermiforme  ou  déprimé,  symétrique, 
sans  trace  d'appendices,  comme  les  vibrions,  les  paramé- 
cies, etc.;  d'autres  ont,  au  contraire,  une  forme  évidem- 
ment radiaire,  avec  une  bouche  ou  cavité  apparente,  comme 
la  plupart  des  vorticelles  ;  enfin  ,  il  en  est  dont  le  corps  est 
amorphe  ou  sans  forme  déterminée  susceptible  de  défini- 
tion ,  sans  ouverture  buccale  et  sans  trace  d'appendice, 
comme  les  protées,  les  volvoces  et  les  monades.  Que  ceux 
de  la  première  sorte  soient  de  véritables  animaux  et  même 
fort  élevés  dans  l'échelle  ,  cela  est  évident  ,  puisqu'on 
leur  trouve  des  appendices  locomoteurs  ,  bien  distincts , 
qu'on  a  désignés  sous  le  nom  de  roues  ,  de  filamens ,  etc.  ; 
une  queue  composée  de  plusieurs  articles,  et  terminée  sou- 
vent par  des  appendices  variables  en  forme  et  en  nombre; 
un  véritable  bouclier  céphalothoracique,  recouvrant  un  tronc 
plus  ou  moins  distinct  :  on  y  a  même  remarqué  un  cœur, 
des  yeux,  des  ovaires,  et  par  conséquent  on  ne  peut  douter 
que  ces  animaux  ne  soient  pourvus  d'un  canal  intestinal  com- 
plet, et  n'aient  beaucoup  de  rapports  avec  plusieurs  des  ani- 
maux que  Muller  lui-même  a  nouimés  des  enlomostracés.  Il 
se  pourroit  même  que  quelques-uns  des  infusoires  de  cette 
première  section  ne  fussent  que  des  degrés  de  développe- 
ment d'espèces  d'entomostracés  bien  connues  à  l'état  adulte, 
ces  animaux  étant  susceptibles  de  métamorphoses  très -dis- 
tinctes, comme  M.  de  Jurinel'a  fait  voir  pour  lesnauplies  et  les 
amynomes.  Quant  à  la  seconde  forme  que  l'on  trouve  parmi 
23.  uj 


4i8    e  INF 

les  infusoires,  celle  qui  se  voit  clans  les  vibrions,  on  peut 
concevoir  qu'elle  doit  appartenir  à  des  animaux  de  la  classe 
des  apodes,  puisque  le  corps  est  alongc,  symétrique,  sans 
articulations  visibles  et  certainement  sans  appendices;  mais 
c'est  ce  qu'il  seroit  trop  hardi  d'assurer,  puisque  les  obser- 
vateurs ne  parlent  pas  de  canal  intestinal,  ni  par  conséquent 
de  bouche  et  d'anus.  Cependant  les  mouvemens  nombreux 
de  ces  corps  organisés,  et  cela  dans  des  sens  que  l'on  regarde 
comme  déterminés,  ne  permettent  guères  de  douter  de  leur 
animalité.  Il  en  est  de  même  de  la  troisième  forme  que  l'on 
trouve  dans  les  animaux  infusoires,  c'est-à-dire,  des  vérita- 
bles vorticelles  :  quoiqu'on  n'ait  pu  y  apercevoir  qu'une  sorte 
de  cavité  buccale,  entourée  de  cils  ou  de  tentacules  courts 
à  son  entrée,  il  est  encore  indubitable  que  ce  sont  de  véri- 
tables animaux  ayant  beaucoup  d'analogie  avec  les  hydres 
ou  les  polypes.  Il  reste  donc  les  protées  ,  les  volvoces,  que 
nous  ne  pouvons  rapporter  à  aucun  type  connu;  et,  en 
effet,  ce  sont  des  corps  organisés,  sans  forme  déterminée, 
sans  aucun  organe,  et  qui  ne  sont  autre  chose  qu'une  petite 
masse  de  tissu  cellulaire,  dans  les  mailles  duquel  sont  conte- 
nus des  fluides  ,  et  qui  est  à  peine  condensé  à  la  circonfé- 
rence ,  pour  former  une  enveloppe,  en  sorte  que  toutes  les 
fonctions  sont  réduites  dans  ces  corps  à  l'absorption  immédiate 
de  molécules  toutes  préparées  d'avance  et  contenues  dans  le 
fluide  ambiant,  et  à  l'exhalation.  C'est,  pour  ainsi  dire,  le 
terme  ou  la  fin  d'un  animal  très -élevé,  le  point  où  l'on  ne 
peut  plus  distinguer  dans  le  tissu  de  ses  parties  d'autres  or- 
ganes que  du  tissu  cellulaire,  ou  les  premiers  momens  de  son 
origine.  Aussi  ne  trouve-t-on  plus  dans  ces  êtres  d'autres  fonc- 
tions que  celles  qui  existent  à  ce  terme.  Mais  sont- ce  réel- 
lement des  animaux,  c'est-à-dire,  une  certaine  combinaison 
d'organes  affectant  une  forme  déterminée  et  agissant  d'une 
manière  également  déterminée  sur  les  corps  extérieurs  P 
C'est  ce  qui  me  paroît  plus  douteux.  En  effet,  ils  n'offrent 
aucune  des  trois  conditions  qui  me  semblent  devoir  entrer 
dans  la  définition  d'un  animal  :  on  ne  peut  pas  dire  qu'ils 
soient  une  combinaison  d'organes  ,  ni  à  priori ,  ni  à  posteriori, 
s'ils  n'ont  pas  de  forme  déterminée  ;  et  ils  sont  tellement  dé- 
pendans  des  circonstances  extérieures ,  qu'il  paroit  qu'ils  ne 


•  INF  •    4-.9 

peuvent  absolument  en  modifier  aucune.  D'après  cela,  ne 
pourroif-on  pas  les  considérer  comnie  des  molécules  élémen- 
taires des  animaux,  et  peut-être  même  des  végétaux? 

Quoi  qu'il  en  soit,  car  ce  n'est  pas  le  lieu  de  développer 
et  de  soutenir  cette  idée,  il  résulle  de  ce  que  je  viens  de 
dire  dans  cet  article,  que  la  classe  des  infiisoires  ne  peut 
être  en  aucune  manière  admise  ,  parce  qu'elle  contient  des 
animaux  de  types  très-différeiis  :  ce  que  l'on  ne  pouvoit,  il 
est  vrai,  reconnoitre  avant  l'établissement  du  principe,  que 
la  forme  générale  du  corps  emporte  un  degré  déterminé 
d'organisation  ;  car,  dans  de  si  petits  animaux,  ce  n'est  guère 
que  la  forme  que  l'on  peut  apercevoir.  Aussi  pensons-nous 
que  les  genres  Brachion  ,  Urcéolaire,  Cercaire,  Furculaii-e, 
Kérone,  Trichocerque  et  Himantope  appartiennent  au  type 
des  entomozoaires  ou  aux  animaux  articulés,  et  spéciale- 
ment à  la  classe  des  hétéropodes,  ordre  des  entomostracés. 
Plusieurs  espèces  de  Vibrions  me  paroissent  pouvoir  être 
regardées  comme  des  apodes,  ainsi  que  les  genres  Paramé- 
cie, Kolpode;  le  reste  des  Vibrions  ,  les  Cyclidcs,  et  peut- 
être  les  r.eucophes,  doivent  être  très-probablement  rangés 
près  des  planaires.  Dans  ce  genre  même  il  y  a  une  espèce 
qui  me  paroit  n'être  autre  chose  qu'une  ascidie.  Les  véri- 
tables Vorticelles  sont  des  polypiaires.  Enfin  ,  les  genres  Go- 
nium,  Protée,  Volvoce  et  Monade,  si  on  peut  les  regarder 
bien  certainement  comme  des  animaux,  me  semblent  devoir 
former  un  t3^pc  distinct,  que  j'ai  désigné  sous  les  dénomi- 
nations d'amorphes  et  d'agastraires,  tirées  de  ce  qu'ils  n'ont 
pas  de  forme  déterminée ,  et  que  l'enveloppe  extérieure  ne 
rentre  pas  pour  former  un  estomac,  comme  il  y  en  a  dans 
tous  les  véritables  animaux. 

Les  auteurs  qui  se  sont  le  plus  occupés  des  animaux  dits 
infusoires,  sont  Leuwenhocck  ,  Hill,  Baker,  Joblot,  Leder- 
muller,  Pallas,  R;vsel ,  et  surtout  Spallanzani  ei  O.  F.  Muller, 
et,  en  général,  les  personnes  qui  ont  fait  des  observations 
microscopiques.  L'ouvrage  de  Muller  a  été  presque  entière- 
nient  traduit  et  ses  figures  ont  été  copiées  dans  l'Encyclopédie 
méthodique.  Ce  seroit  une  chose  importante  que  ce  travail  fut 
repris  avec  des  idées  plus  justes,  et  dans  le  but  de  s'ass(M\r 
si  la  plupart  de  ces  animaux  sont  véritablement    adultes   et 


( 

/,2o  '  ma 

s'ils  jouissent  réellement  des  singulières  facultés  qu'on  leur 
attribue.  On  trouveroit  sans  doute  beaucoup  de  choses  à 
rectifier,  et  cela  seroit  non -seulement  important  pour  la 
zoologie  proprement  dite,  car  je  ne  doute  pas  qu'il  n'y  ait 
beaucoup  d'innovations  à  faire,  mais  encore  pour  la  physio- 
logie générale:  en  effet,  beaucoup  d'auteurs,  admettant  d'une 
manière  trop  étendue  que  ces  animaux  naissent  pour  ainsi 
dire  dans  les  infusions  végétales  ou  animales  ,  se  sont  servis 
de  cette  observation  pour  soutenir  la  génération  spontanée  , 
et  beaucoup  d'autres  idées  plus  ou  moins  erronées  ;  mais  le 
fait  est  que  ce  ne  peut  être  pour  tous  les  animaux  rangés 
parmi  les  infusoires  que  cela  peut  se  supposer,  mais  seule- 
ment pour  ceux  que  nous  plaçons  parmi  les  amorphes,  et 
alors  il  s'agiroit  auparavant  de  déterminer  si  ce  sont  de  vé- 
ritables animaux,  ce  qui  n'est  pas  aussi  aisé  qu'il  le  paroît 
au  premier  coup  d'œil.  C'est  aussi  d'après  ce  qu'on  a  cru 
remarquer  sur  les  dernières  espèces  d'infusoires ,  qu'on  a 
admis  une  génération  par  scissure  spontanée  intérieure,  ou 
par  déchirement  de  la  mère,  dans  le  corps  de  laquelle  se  se- 
roieiit  formées  des  espèces  de  gemmules.  Quoique  l'on  puisse 
réellement  concevoir  la  chose  à  priori  jusqu'à  un  certain 
point,  ilseroit  cependant  important  de  voir  si  elle  a  certaine- 
ment lieu.  C'est  au  contraire  l'étude  d'une  des  espèces  les 
plus  élevées  qui  a  fait  constater  qu'un  animal  étoit  pour 
ainsi  dire  une  sorte  de  combinaison  définie,  au  moins  pijur 
l'eau  ,  en  sorte  qu'en  lui  rendant  l'eau  qui  lui  avoit  été  re- 
tirée par  la  dessiccation  ,  l'animal ,  qui  sembloit  mort ,  reprend 
ses  mouvemens  habituels  :  c'est  ce  qui  a  été  constaté  pour 
le  rotifère  de  Spallanzani  [vorticella  convallaria  de  Muller). 
Mais  ,  dans  la  série  d'observations  qui  restent  à  faire  sur 
ces  animaux,  il  faudroit  surtout  avoir  le  plus  grand  soin 
d'éviter  les  erreurs  provenant  de  l'instrument  qu'on  est  forcé 
d'employer;  ce  qui  paroît  être  diflicile ,  à  moins  que  l'obser- 
vateur ne  réunit  la  connoissance  des  principes  de  la  science 
des  animaux  à  celle  du  microscope  ,  ce  qui ,  jusqu'ici ,  ne  s'est 
peut-être  pas  encore  rencontré.   (Dk  B.) 

INGA.  [Bot.)  Ce  nom  brésilien,  cité  primitivement  par 
Marcgrave  pour  un  arbrisseau  de  la  famille  des  légumi- 
neuses, avoit  été  adopté  par  Plumier  pour  ce  même  végétal, 


•        *  ma  ^   431 

, dont  il  faisoit  un  genre,  réuni  ensuite  au  mimosa  par  Lin- 
naeus.  Willdenow  a  rétabli  le  genre  Inga,  en  lui  réunissant 
plusieurs  espèces.  Aublet  cite  pour  son  genre  Gnlipea  le  même 
nom  donné  par  les  sauvages  de  la  Guiane.  (J.) 

INGA.  (Bot.)  Genre  de  plantes  dicotylédones,  à  fleurs 
incomplètes,  polygames,  de  la  famille  des  légumineust^s,  de 
la  polygamie  monoécie  de  Linnaeus  ,  offrant  pour  caractère 
essentiel  :  Dans  les  fleurs  hermaphrodites,  un  calice  à  cinq 
dents;  une  corolle  tubuleuse  ,  à  cinq  dents;  des  étamines 
nombreuses,  monadelphes;  un  ovaire  supérieur;  un  style. 
Le  fruit  est  une  gousse  à  une  seule  loge  ;  les  semences  en- 
tourées de  pulpe  ou  d'un  arille.  Le  pistil  manque  dans  les 
fleurs  mâles. 

Ce  genre  a  d'abord  fait  partie  des  mimosa  de  Linnaeus.  Le 
très-grand  nombre  d'espèces  qu'il  renfermoit,  et  qui  aujour- 
d'hui monte  à  plus  de  deux  cents;  la  différence  qui,  d'ail- 
leurs, existoit  entre  les  fleurs  de  beaucoup  d'espèces,  dans 
la  forme  de  leur  corolle,  dans  le  nombre  des  étamines,  dans 
la  caractère  des  fruits  et  des  semences,  ont  fourni  le  moyen 
de  séparer  en  plusieurs  autres  genres  celui  des  Mimosa: 
genre  remarquable  par  ses  formes  élégantes  et  variées,  très- 
curieux  par  les  phénomènes  singuliers  qu'il  présente  et  par 
les  résines  et  les  gommes  que  fournissent  au  commerce  plu- 
sieurs de  ses  espèces  ;  par  les  bois  de  construction  qu'elles 
produisent  en  abondance  (voy.  Acacie,  tom.  i.*',  et  Supplé- 
ment ,  idem)  ;  enfin  ,  par  la  pulpe  succulente  ,  sucrée  et  mus- 
quée ,   contenue  dans  les  gousses  de  beaucoup  d'inga. 

*  Feuilles  deux  fois  géminées. 

Inga  a  bois  rouge  :  ïnga  higemina,  Willd.;  Mimosa  hige- 
mina,  Linn.,  Spec;  Katou-conna,  Rheed.  ,  Malah.,  6,  tab.  12. 
Grand  et  bel  arbre  des  Indes  orientales,  dont  le  tronc  est 
d'une  telle  grosseur  qu'à  peine  deux  hommes  peuvent  l'em- 
brasser. Son  bois  est  rouge,  d'une  odeur  assez  agréable;  ses 
feuilles  sont  composées  de  deux  paires  de  folioles  ovales-lan- 
céolées,  acuniinées,  un  peu  rudes,  d'un  vertbrun,  luisantes 
en-dessus.  Les  fleurs  sont  blanches  ,  réunies  par  bouquets  sur 
un  pédoncule  commun,  ramifié  en  panicule;  les  gousses  sont 


h^-'^     ,  ING 

contournées  en  spirale,  médiocremenf  comprimëes ,  renflées 
aux  endroits 'les  semences,  et  se  oispent  eu  s'ouvrant. 

Inga  lancéolé  ;  IngcL  lanccolala  ,  ^A'illrl.  ,  Spec.  Grand 
arbre  de  l'Amérique  méridionale,  qui  s'élève  à  la  hau- 
teur de  quarante  à  cinquante  pieds,  et  dont  les  rameaux 
sont  glabres,  flexueux  ,  cylindriques,  bruns,  piquetés  de 
blanc  .  armés  d'épines  droites,  subulées,  stipulaircs ,  très- 
fortes;  les  feuilles  deux  fois  géminées,  coriaces,  luisantes; 
les  folioles  lancéolées,  obtuses,  longues  d'un  pouce  et  demi, 
calleuses  et  glanduleuses  à  leur  base  ;  les  pétioles  munis  d'une 
glande  dans  leur  bifurcation  ;  les  fleurs  alternes,  terminales, 
réunies  en  grappes  paniculées  ;  les  gousses  contournées  en 
spirale. 

Inga  a  PETILLES  DE  TROENE;  Juga  ligustrîna ,  Willd.  ,  Spec; 
Jacq.  ,  Fragm. ,  tab.  02  ,  fig.  5.  Arbrisseau  d'environ  quinze 
pieds,  dont  les  rameaux  sont  cylindriques;  les  plus  vieux 
armés  de  deux  é|»ines  courtes,  subulées;  les  feuilles  deux 
fois  géminées  ;  les  folioles  glabres,  oblongues,  obtuses  à  leurs 
deux  extrémités,  longues  de  deux  pouces  et  plus;  les  pétioles 
pubescens  ,  glanduleux  à  leur  base;  les  fleurs  disposées  en 
grappes  axillciires  ,  alternes,  simples  ou  composées;  les  gousses 
oblongues,  noueuses;  les  seuiences  noirâtres,  à  moitié  recou- 
vertes par  une  pulpe  fongueuse.  Cette  plante  croît  dans  l'A- 
mérique méridionale,  aux  lieux  sablonneux. 

**  Feuilles  trois  fois  géminées. 

Inga  trigÉiMINé  :  Inga  tergemina ,  "\'\  illd.  ,  Spec.  ;  Jacq.  , 
Amer.,  tab*.  1  77,  fig.  81  ;  Acacia purpurea ,  Lamk.,  Encyc.  Arbris- 
seau dont  l'écorce  est  de  couleur  grisâtre.  Les  feuilles  sont 
alternes;  les  pétioles  divisés  a  leur  sommet  en  deux  branches 
soutenant  chacune  six  folioles,  glabres,  ovales- oblongues , 
obtuses,  longues  d'environ  un  pouce  ;  les  fleurs  rouges  ,  dis- 
posées en  bouquets  courts  sur  des  pédoncules  longs  d'environ 
un  pouce  :  elles  produisent  des  gousses  longues  de  cinq  à  six 
poucLS  ,  étroites  ,  comprimées,  uu  peu  courbées  en  sabre  vers 
leur  sommet.  Cette  plante  croit  dans  l'Amérique  méridionale. 

Inga  des  Caripes  ;  Inga  caripensis  ,  W'illd.,  Spec.  ,  /^ .  P^g- 
1009.  Arbrisseau  de  la  Nouvelle-Andalousie,  qui  a  de  grands 
rapports  avec  l'espèce  précédente,  mais  dont  les  folioles sonl 


•  ^  ING  «      423 

plus  grandes,  aiguës  à  leurs  deux  extrëmités,  veinées,  réti- 
culées; les  rameaux  cendrés,  ponctués,  verruqueux;  les  pé- 
doncules solitaires,  axillaires,  supportant  un  paqu'et  de  dix 
à  douze  fleurs  sessiles  ;  les  pétioles  ,  dépourvus  de  glandes,  de 
la  longueur  des  feuilles. 

Inga  a  feuilles  coriaces  :  Inga  coriacea  ,  'VN'illd.,  Spec,  l.  c. 
Ses  tiges  se  divisent  en  rameaux  bruns,  cylindriques,  garnis 
de  feuilles  alternes,  trois  fois  géminées,  dépourvues  de  glan- 
des à  leur  pétiole  ;  à  folioles  roides,  oblongues,  lancéolées, 
coriaces  ;  deux  ou  (rois  pédoncules  réunis  dans  l'aisselle  des 
feuilles,  soutenant  environ  douze  fleurs  sessiles,  fasciculées , 
auxquelles  succèdent  des  gousses  planes,  droites,  linéaires, 
longues  de  trois  pouces.  Celte  espèce  croit  dans  l'Amérique 
méridionale. 

***  Feuilles  ailées;  pétiole  commun  membraneux 
ou  nu. 
A.  Pétiole  ailé  ou  membraneux. 
Inga  a  fruits  sucrés  :  Inga  vera ,  AVilld.  :  Mimosa  inga, 
Linn.  ;  Sloane  ,  Jam.  hist. ,  i  ,  tab.  i83,  fig.  i.  Grand  arbre 
assez  commun  dans  l'Amérique  méridionale,  dont  le  bois  est 
dur  et  blanc,  et  Técorce  grisâtre.  Ses  feuilles  sont  simplement 
ailées,  composées  de  trois  fà  cinq  paires  de  folioles  fort  grandes, 
qui  ont  quelquefois  plus  de  six  pouces  de  long,  sur  trois  de 
large,  lisses,  ovales-lancéolées,  un  peu  velues  en-dessous,  à 
pétiole  commun ,  ailé  et  articulé  ;  les  fleurs  sont  grandes  ,  blan- 
châtres, disposées  en  bouquets,  munies  d'un  calice  pileux, 
tubulé,  et  d'une  corolle  velue,  tubulée ,  a.  cinq  dents;  les 
gousses,  pubescentes,  renferment  une  matière  spongieuse, 
blanchâtre  et  sucrée,  d"un  goût  assez  agréable,  d'où  vient 
que  les  créoles  ont  donné  à  ces  fruits  le  nom  de  pois  sucrins. 
Les  semences  sont  noires  ,  de  forme  irrégulière,  au  nombre 
de  dix  à   quinze,   placées  dans  autant  de  loges. 

Inga  fastueux:  Ingafastuosa,  "VN'iUd.;  Jacq.,  Fragm.  bot., 
tab.  jo.  Ses  tiges  se  divisent  en  branches  très-étalées;  les  ra- 
meaux sont  velus,  couleur  de  rouille  ;  les  feuilles  ailées,  com- 
posées de  quatre  ou  cinq  paires  de  folioles  ovales-oblongues, 
luisantes  en-dessus  ,  chargées  ,  principalement  sur  les  nervu- 
res,  de  poils  épars,  couchés,   hérissés  eu -dessous  de  poils 


424      r  ING 

nombreux,  couleur  de  rouille  ;  le  pétiole  est  ailé,  quelquefois 
muni  de  deux  glandes  pédicellées  entre  les  folioles;  les  fleurs 
sont  disposées  en  épis  axiilaires,  portées  sur  un  pédoncule 
velu,  à  la  corolle  velue  succède  une  gousse  linéaire,  élargie, 
comprimée  ,  tortueuse.  Cette  plante  croît  dans  les  environs 
de  Caracas,  dans  l'Amérique  méridionale. 

Inga  a  feuilles  de  hêtre  :  Inga  fagifolia  ,  Willd.,  Spec. , 
l.  c.  ;  Mimosa  fagifolia ,  Linn. ,  Spec;  Pluk.  ,  Almag.^  tab.  141  , 
fig.  2  ;  vulgairement  le  Pois  doux  d'Amérique.  Arbre  d'un  port 
agréable,  qui  s'élève  à  la  hauteur  de  trente  pieds,  et  supporte 
une  cime  ample,  assez  régulière;  son  écorce  est  blanchâtre  et 
unie  ;  ses  feuilles ,  simplement  ailées ,  sont  munies  de  deux  ou 
trois  paires  de  folioles  ovales ,  glabres  ,  entières  ;  le  pétiole 
commun  est  légèrement  ailé;  les  fleurs  sont  petites,  blanchâ- 
tres ,  disposées  en  épis  linéaires,  un  peu  moins  longs  que  les 
feuilles;  les  gousses  oblongues,  d'un  blanc  jaunâtre,  coriaces, 
légèrement  comprimées,  renfermant  une  pulpe  douce,  que 
les  habitans  du  pays  où  se  trouvent  ces  arbres  aiment  à  sucer. 
Cette  espèce  croît  aux  Antilles  et  à  Cayenne. 

B.  Pétiole  nu. 

Inga  noueux:  Inga  nodosa ,  Willd.,  Spec,  L  c.  ;  Mimosa 
nodosa ,  Linn.,  Spec;  Pluk.,  tab.  211  ,  lig.  5.  Arbre  de  File 
de  Cayenne  ,  dont  les  feuilles  sont  ailées,  composées  de  deux 
paires  de  folioles  au  sommet  d'un  pétiole  nu  ,  très-menu  ; 
les  folioles  inférieures  munies,  dans  leur  aisselle,  d'une  petite 
glande.  Le  fruit  est  une  gousse  longue  de  trois  ou  quatre 
pouces,  un  peu  contournée  et  aplatie,  d'un  brun  rougeàtre, 
noueuse  aux  endroits  des  semences.  Cette  plante  croît  éga- 
lement dans  les  deux  Indes. 

Inga  élégant  :  Inga  spectahilis  ,yVilld.  ;  Mimosa  spectabilis, 
"Vahl  ,  Act.  soc  hist.  nal.  Hafn. ,  2,  tab.  10.  Plante  des  con- 
trées méridionales  de  l'Amérique  ,  cultivée  à  l'île  Sainte- 
Marthe,  Ses  rameaux  sont  glabres  ,  légèrement  flexueux  , 
rendus  anguleux  par  trois  lignes  saillantes  partant  de  la 
base  des  pétioles,  revêtus  d'une  écorce  grisâtre  ,  ferrugineuse 
et  ponctuée.  Les  feuilles  sont  distantes,  composées  de  deux 
paires  de  folioles  opposées,  presque  sessiles,  ovales  -  élargies  , 
membraneuses,   glabres,  luisantes;   les  supérieures  longues 


•  ING  •>    425 

de   sept  pouces  ;  les  inférieures  une  fois  plus  petites  ;  les 
fleurs  disposées  en  épis  terminaux;  les  corolles  velues. 

Inga  a  baguettes  :  Inga  virgultosa ,  Poir. ,  Encycl. ,  Suppl.  ; 
Mimosa  virguUosa  ,  Vahl ,  Egl.  dec. ,  2,  tab.  20.  Ses  rameaux 
sont  grêles,  cylindriques,  alongés  ,  pubescens  ,  divisés  en 
d'autres  très-courts,  sans  épines,  garnis  de  feuilles  composées 
de  trois  à  cinq  paires  de  folioles  glabres ,  sessiies ,  coriaces , 
luisantes,  ovales,  longues  de  cinq  à  six  lignes;  les  pétioles 
sont  articulés,  presque  nus;  les  fleurs  disposées  en  ombelle 
simple,  à  peine  plus  longues  que  les  feuilles;  les  pédoncules 
filiformes;  les  calices  petits,  à  cinq  dents  à  peine  sensibles; 
les  corolles  tubulées,  à  cinq  dents  droites,  aiguës;  lesfilamens 
nombreux,  réunis  en  un  tube  grêle,  saillant,  terminé  par 
une  troupe  de  filets  capillaires.  Celle  plante  croît  à  Tile  de 
Cayenne. 

*  *  *  *  Feuilles  conjuguées  -  a  ilées, 

Inga  a  larges  feuilles  :  Tiiga  lalifolia,  Willd.  ;  Mimosa  la- 
tifolia ,  Linn.  ,  Spcc;  Flum.  ,  Icon.  ,  tab.  9.  Ses  rameaux  sont 
sans  épines,  garnis  de  feuilles  en  aile  conjuguée;  les  pinnules 
partielles  composées  de  cinq  folioles  glabres,  ovales,  lui- 
santes, pédicellées  ,  longues  d'environ  deux  pouces  et  demi , 
alternes;  les  deux  terminales  opposées;  les  fleurs  purpurines, 
latérales,  placées  sur  les  vieux  bois,  presque  sessiies  ,  réunies 
par  peiiis  paquets  presque  en  ombelle.  Cette  espèce  croît 
dan'  l'Amérique  méridionale. 

Inga  a  fleurs  purpurines:  Inga purpurea,  "Willd.;  Mimosa 
purpurea y  Linn.;  Plum.,  Icon.,  tab.  10,  fig.  i.  Arbrisseau  non 
épineux,  dont  l'écorce  est  grisâtre,  garni  de  feuilles  dont 
les  pétioles  se  divisent  en  deux  à  leur  sommet,  et  portent  sur 
chaque  bifurcation  trois  à  quatre  folioles  glabres,  ovales- 
oblongues,  obtuses,  longues  d'environ  un  pouce  :  les  deux 
dernières  opposées  et  plus  grandes.  Les  fleurs  sont  rouges,  dis- 
posées en  bouquets  pédoncules.  Les  gousses  étroites,  compri- 
mées, longues  d'un  demi- pied  ,  un  peu  courbées  vers  leur 
sommet.  Cette  plante  croît  dans  l'Amérique  méridionale. 

**••'**  Feuilles  deux  fois  ailées. 
Inga  saman  :  Inga  saman  ,   Willd.;   Mimosa  saman,   Jacq. , 
Fragm,  bot. ,  5  ,  tab.  g.  Grand  arbre  des  environs  de  Caracas 


426     ,  IIS-G  ' 

dans  l'Amérique  méridionale.  Son  tronc  est  épais  et  très-fort; 
ses  feuilles  sont  deux  fois  ailées,  composées  de  six  paires  de 
pinnulcs  i  les  supérieures  composées  de  sept  à  huit  paires  de 
folioles;  les  inférieures  de  deux  ou  trois  :  toutes  les  folioles 
glabres,  ovales-obiongues ,  obtuses;  les  supérieures  longues 
de  trois  pouces;  les  inférieures  d'un  demi-pouce  :  une  glande 
comprimée  en  godet  est  entre  toutes  les  folioles  :  les  Heurs, 
réunies  quatre  à  six  en  une  petite  tête  globuleuse  ,  pédon- 
culée  ,  produisent  une  gousse  plane  ,  linéaire,  longue  de  sept 
à  huit  pouces,  canaliculée  sur  ses  deux  sutures, 

Inga  a  fruits  ronds  :  Inga  cjclucarpa,  Willd.  ;  Mimosa 
cyclocarpa,  Jacq. ,  Fragm.bot.,  3o  ,  tab.  34,  fig.  i.  Grand 
arbre  de  l'Amérique  méridionale  ,  des  environs  de  Caracas. 
Son  tronc  est  revêtu  d'une  écorce  crevassée;  les  branches  et 
les  rameaux  sont  très-étalés:  les  feuilles  deux  fois  ailées,  for- 
mées de  quatre  à  neuf  paires  de  pinnules,  composées  chacune 
de  vingt  à  trente  paires  de  folioles  tronquées  à  leur  base  ,  acu- 
minées  à  leur  sommet;  les  Heurs  disposées  en  épis  axillaires, 
pédoncules,  rapprochés  en  tèie  ;  les  corolles  blanches;  les 
gousses  planes,  orbiculaircs,  noueuses  et  sinuées  cà  leur  bord 
extérieur.  Les  semences  sont  enveloppées  d'une  pulpe  grasse, 
visqueuse ,  savonneuse.  Les  naturels  du  pays  s'en  servent 
comme  de  savon.  (Poir.) 

INGHURU  {Bot.),  nom  du  gingembre  ,  à  Ceilan,  suivant 
Hermann.  (  J.  ) 

INGNAMOS.  {Bot.)  Voyez  Inhame.  (J.) 

INGRAIN  {Bot.),  nom  de  Tépeautre  dans  quelques  par- 
ties de  la  France.  (  Lem.  ) 

INGUINALIS  {Bot.),  ancien  nom  du  buphthalmum  spino- 
sum  ,  cité  dans  la  table  d'Adanson.  (H.  Cass.) 

Dioscoride  donne  ce  nom  à  Vaster  atticus ,  qu'il  dit  à  fleurs 
rougrs  ou  jaunes.  Celui  qui  les  a  rouges  parott  être  Vaster 
omellus.  Les  fleurs  jaunes  semblent  désigner  un  buphthalmum 
ou  un  inula.  (  J.  ) 

INGUINARIA.  {Bot.)  Pline  donne  ce  nom,  au  rapport 
de  C.  Bauhin  ,  et  celui  d'alysson,  suivant  Césalpin  ,  à  la  croi- 
sette  velue,  valantia  cruciata.  (J.) 

INHAME.  {Bot.)  Nom  donné  en  divers  lieux  à  plusieurs 
espèces  de  dioscorea,  au  nombre  desquelles  est  l'igname  cul- 


•  *  INO  •    427 

tivë,  qui  donne  son  nom  au  genre,  et  dont  on  mange  la  ra- 
cine sous  la  forme  d'un  pain  nommé  cassave  ,  après  lui  avoir 
fitil  subir  diverses  préparations,  Barrère,  dans  sa  France 
équiiioxiale ,  la  nomme  inhyama.  Ailleurs  ou  la  retrouve 
sous   les  dénoiiiinations  de  iniamos  .  ingnamos,  ignamus.  (J.) 

INHAMKHAVELLA.  {Bot.)  Voyez  Hamehavella.  (J.) 

IlSHAZARAS.  (Mamm.)  Nom  que  Purchass  donne  a  une 
espèce  de  fourmilier  de  la  côte  de  Zanguebar ,  qu'il  ne 
décrit  qu'iuiparfaiîement ,  et  qu'il  n'est  pas  possible  de  re- 
connoitre  a  ce  qu'il  en  rapporte.  (F.  C.  ) 

INHYAMA.     5o^j   Vovez  Inhame.  (J.) 

INÎA^!OS.  (Bot.)  Voyez  I^HAME.  (J.) 

INIMA.  (iV/n.)  Valmont  de  Bomare  a  introduit  ce  mot 
dans  son  Diciionnaire,  et  c'est  le  seul  motif  qui  nous  engage 
à  en  parler  d'après  lui.  C'est,  dit-on,  le  nom  persan  d'une 
ocre  roi;ge.  Voyez  Imma.  (B.) 

INIMHIA  {Bot.),  nom  brésilien  du  bonduc,  guilandina 
honduc,  cité  par  Pison  :  Marcgrave  le  nomme  inimboy.  (J.) 

INIPH.AGALAN.  {Ornith.)  Nom  koriaque  d'un  oiseau  de 
mer,  qui  est  le  stariki  des  Russes,  alca  cristateUa  ,  Gmel.  et 
Lath.  (Ch.  D.) 

INIQUIMI,  TOULICHITl  {Bot.)-,  noms  caraïbes,  cités  dans 
l'herbier  de  Surian ,  pour  une  plante  que  Plumier  prenoit 
pour  un  haricot,  et  qui  paroit  être  le  gljcine  phaseoloides 
de  Suartz.  (  J.) 

INLANKEN.  {Ichthjol.)  Voyez  Illanken.   (H.  C.) 

INNIL.  (Bot.)  Nom  péruvien  d'une  espèce  d'onagre  ,  dé- 
crite et  citée  par  l'euillée,  mais  non  nientionnée  par  les 
auteurs  niodernes.  Elle  a  de  l'affinité  avec  ïunothera  pro' 
strata  de  la  Flore  du  Pérou.     J.) 

INNUMMA  {Bot.},  uoui  sous  lequel  le  coton  est  connu  à 
Sierra-Leone  en  Afrique,  suivant  l'auteur  du  Recueil  des 
voyages.  (J.) 

INNUUS  {Mamm.)  ,  nom  latin  donné  par  Linnœus  au 
magot.  (  F.  C.  ) 

INO  {Entom.),  nom  d'un  papillon.  (CD.) 

INOCARPE,  Inocarpus.  (Bot.)  Genre  de  plantes  dicotylé- 
dones, à  fleurs  coniplètes,  monopétalées,  de  la  fauiille  des 
sapotées,  delà  décandrie  monogjnie  de  Linnaeusj  oflTrant  pour 


428    ,  ITyo  •  f 

caractère  essentiel  :  Un  calice  bifide  ;  une  corolle  infundi- 
bulifornie,  à  cinq  découpures  linéaires;  dix  étamines  non 
saillantes,  insérées  sur  le  tube  de  la  corolle  en  deux  rangées; 
les  filamens  très-courts  ;  un  ovaire  supérieur,  dépourvu  de 
style;  un  stigmate  concave.  Le  fruit  consiste  en  un  drupe 
renfermant  un  noyau  réticulé  monosperme. 

Inocarpe  comestible  :  Inocarpus  edulis ,  Forsf .  ,  A'oi'  gen. , 
tab.  55  :  Lamk.,  lll.  gen.,  tab.  562  ;  Gœrtn.,  F.  CaipoL,  tab. 
199  et  200.  Arbre  découvert  par  Forster ,  dans  les  iles  de  la 
mer  du  Sud  ,  aux  nouvelles  Hébrides,  à  l'île  d'Otahiti.  Ses 
rameaux  sont  garnis  de  feuilles  alternes,  oblongues ,  un  peu 
en  cœur,  très-entières,  glabres  et  veinées,  longues  d'environ 
neuf  pouces  ,  portées  sur  des  pétioles  très -courts.  Les  fleurs 
sont  petites,  alternes,  accompagnées  de  petites  bractées, 
disposées  en  épis  solitaires,  petits,  velus,  axillaires.  Leur 
calice  est  petit,  partagé  en  deux  découpures  égales,  oblon- 
gues, obtuses;  le  tube  de  la  corolle  cylindrique  plus  long 
que  le  calice;  le  limbe  divisé  en  cinq  découpures  linéaires, 
plus  longues  que  le  tube  ;  les  étamines  ont  leurs  filamens 
très-courts ,  disposés  en  deux  rangées  sur  le  tube  de  la  corolle , 
soutenant  des  anthères  ovales.  L'ovaire  est  oblong  ,  velu  , 
déjiOurvu  de  style,  à  stigmate  concave.  Le  fruit  est  un  drupe 
grand,  ovale,  comprimé,  un  peu  courbé  au  sommet,  ren- 
fermant un  noyau  fibreux,  réticulé  et  monosperme.  Il  pa- 
roît  qu'il  est  bon  à  manger.  (Poir.) 

INOCERAMUS.  (Foss.  )  On  trouve  dans  les  couches  de 
craie  ,  tant  en  France  qu'en  Angleterre  ,  des  débris  de  grandes 
coquilles  bivalves  dont  la  contexture ,  analogue  à  celle  des 
pinnes  marines ,  avoit  fait  croire  à  quelques  naturalistes 
qu'elles  dépendoient  de  ce  genre  ;  mais,  ces  débris  ayant  été 
mieux  observés,  il  a  été  reconnu  que,  comme  beaucoup  de 
coquilles  bivalves  très- épaisses,  elles  n'avoient  d'autres  rap- 
ports avec  les  pinnes  que  leur  contexture. 

On  trouve  des  morceaux  cylindriques  des  charnières  de 
ces  coquilles  qui  sont  de  la  grosseur  et  de  la  longueur  du 
pouce.  Ils  portent  un  profond  sillon  garni  au  fond  de  cré- 
nelures  serrées  et  diminuant  de  grandeur  par  l'un  des  bouts 
de  ces  morceaux.  Quelques-uns,  qui  sont  plats  et  qui  ont 
plus  de  six  lignes  d'épaisseur  ,  portent  dans  leur  intérieur  des 


•  INO  •    429 

traces  d'une  très-grande  impression  musculaire.  Les  coquilles 
dont  ils  dépendent  ont  été  brisées  avant  ou  pendant  le  dépôt 
de  la  craie  ,  car  ils  sont  presque  tous  isolés  et  ils  s'en  trou- 
vent entourés.  Des  personnes  dignes  de  foi  assurent  qu'elles 
ont  vu  dans  les  falaises  crayeuses  de  Dieppe  de  ces  coquilles 
brisées  qui  pouvoient  avoir  quatre  à  cinq  pieds  de  longueur. 

M.  Sowerby  a  rangé  ces  coquilles  dans  un  genre  auquel  il 
a  donné  le  nom  d'Inoceramus  ;  mais  M.  Brongniart  (Géogr. 
min.  des  env.  de  Paris),  n'ayant  pas  trouvé  qu'elles  eussent 
assez  de  rapports  avec  les  autres  coquilles  de  ce  genre,  en  a 
formé  pour  elles  un  particulier  auquel  il  a  donné  le  nom 
de  Calillus.  Les  caractères  de  ces  deux  genres  ne  sont  pas 
encore  publiés ,  ou  au  moins  ne  nous  sont  point  encore 
connus  au  moment  où  nous  écrivons  cet  article  ,  et  quoique 
nous  ayons  une  assez  grande  quantité  de  ces  débris  sous  les 
ytux  ,  nous  ne  pouvons  saisir  la  véritable  forme  de  ces 
grandes  co(}uilles  ;  mais  leur  charnière  linéaire,  marginale 
et  crénelée,  paroît  devoir  les  rapprocher  des  pernes  et  sur- 
tout des  crénatules.  Des  débris  de  ces  grandes  coquilles, 
portant  des  stries  circulaires  régulières,  prouveroient  qu'elles 
présentoient  des  variétés  ou  des  espèces  particulières. 

Je  possède  des  coquilles  de  plusieurs  espèces,  trouvées  dans 
des  marnes  crayeuses  à  Folkstone  et  àHamscy  en  Angleterre, 
qui  paroissent  dépendre  du  genre  Inoceramus;  elles  ont  deux 
à  trois  pouces  de  longueur,  et  sont  couvertes  de  fines  stries 
circulaires  :  l'une  d'elles  porte  sous  les  crochets  une  char- 
nière linéaire  et  crénelée;  mais  du  reste  son  mauvais  état  de 
conservation  ne  permet  pas  d'en  saisir  tous  les  caractères. 

On  trouve  dans  le  mont  Salève  près  de  Genève,  et  dans  les 
couches  du  calcaire  compacte  des  environs  de  Caen  et  de  Ca- 
rentan,  des  débris  de  coquilles  bivalves  qui  ont  quelquefois  plus 
d'un  pouce  d'épaisseur,  et  dont  la  contexture  ressemble  à 
celle  des  inoceramus  et  des  pinnes  marines.  Jusqu'à  présent 
nous  n'avons  pu  nous  procurer  des  portions  assez  considéra- 
bles de  ces  coquilles  powr  en  connoître  tous  les  caractères; 
mais  nous  en  avons  vu  assez  pour  croire  qu'elles  ne  dépen- 
dent pas  de  ces  deux  genres.  (D.  F.) 

INODERMA.  (Bot.)  Sous-genre  établi  dans  le  genre  Ver- 
rucaria  par  Acharius.    Il  comprend  des  lichens  à  expansion 


r 

43o    '  INO  ' 

arachnoïde  et  mince,  ou  presque  spongieuse  et  molle  comme 
de  l'étoupe.    Voyez  Verricaria.    (Lem.) 

INO-KADSITZ  ou  INO-KUSITZ,  ou  GOOSITZ  (But.): 
noms  japonois  du  celosia  argentea  ,  suivant  M.  Thunberg. 
Vino-matla  est  une  espèce  de  lichen,  cladonia  subulala  de 
Hoffmann,  hœomyces  5uiu/a/a  d'Acharius.   (J.  ) 

INOLITHE.  {Min.)  Ferber  dit  que  les  Italiens  nomment 
ainsi  le  gypse  strié.  Gallitzin  applique  ce  nom  à  une  variété 
de  chaux  carbonatée,  concrétionnée  ,  à  structure  fibreuse.  '^B.) 

INONDE.  (Ornith.)  L'oiseau  dont  Sonnini  a  traduit  le  nom 
parl'inon,de,  estV anegadizos  de  M.d'Azara,  Apuntamientos,  etc., 
tom.  2,  n."  233.  espèce  du  genre  des  Queues  -  aiguës ,  qui  a 
six  pouces  de  longueur  ,  dont  les  parties  supérieures  sont 
roussàtres,  la  gorge  d'un  jaune  clair,  et  le  dessous  blancliàlre. 
Cet  oiseau  est  remarquable  par  la  circonstance  qu'aux  six 
intérieures  des  douze  pennes  caudales  les  barbes  finissent 
tout  à  coup,  comme  si  on  les  avoit  coupées  à  deux  lignes  du 
bout;  que  les  deux  du  milieu  ont  dix-huit  lignes  de  plus 
que  l'extérieure,  laquelle  en  a  six  de  moins  que  la  suivante  : 
les  autres  sont  étagées.  Leur  habitude  est  de  sautiller  sur  les 
buissons  et  les  plantes  aquatiques,  où  ils  se  tiennent  toujours 
cachés.  (Ch.  D.) 

INOPHYLLUM.  (BoL)  Burmann  avoit  donné  ce  nom  à 
une  espèce  de  calaba ,  calophyllum.  (J.) 

INOPSIS.  {Bot.)  Genre  de  plantes  monocot^lédones ,  à 
fleurs  incomplètes,  de  la  famille  des  orchidées,  de  la  gynan- 
drie  monogynie  de  LinnEeus;  offrant  pour  caractère  csseritiel  : 
Une  corolle  à  six  pétales,  dont  cinq  presque  égaux,  étalés; 
les  deux  extérieurs  latéraux  soudés  à  leur  base  ,  ayant  la 
forme  d'un  éperon;  le  sixième  pétale  plan,  très-grand  ,  libre, 
non  éperonné,  tubercule  à  sa  base;  la  colonne  des  organes 
sexuels  ailée  à  son  sommet;  une  anthère  operculée,  termi- 
nale; le  pollen  réuni  en  deux  paquets. 

Ce  genre  se  rapproche  beaucoup  des  oncidium  ;  il  en  diffère 
pi'incipalement  par  la  forme  des  deux  pétales  extérieurs  la- 
téraux, soudés  à  leur  base,  ayant  la  forme  d'un  é])eron.  Son 
nom  est  composé  de  deux  mots  grecs,  qui  annoncent  que  ses 
fleurs  ressemblent  à  celles  de  la  violette  par  leur  forme  et 
leur  couleur,  tcv  {viola),  cÇicriç  {faciès). 


•  INS  •    43i 

Inopsis  élégante;  Inopsis  pitlchella  ,  Kunth  in  Huinb.  et 
Bonpl.,  Nov.  gen.,  i  ,  png.  5/|8  ,  lab.  83.  Plante  parasite  de 
la  Nouvelle-Grenade  ,  qui  croît  sur  le  tronc  du  psidium  po- 
miferum  et  du  crescenlia  cujetes.  Ses  racines  sont  blanches  , 
filiformes;  ses  feuilles  planes,  glabres,  linéaires-lancéolées, 
longues  de  deux  ou  trois  pouces;  les  hampes  droites,  cylin- 
driques, simples,  quelquefois  munies  d'un  ou  de  deux  ra- 
meaux, terminées  par  un  épi  de  fleurs  pédicellées,  accompa- 
gnées de  petites  bractées  linéaires.  La  corolle  est  violette; 
les  trois  pétales  extérieurs  lancéolés,  les  latéraux  plus  étroits 
que  le  supérieur;  les  deux  intérieurs  une  fois  plus  grands 
que  les  extérieurs  ;  la  lèvre  ou  le  sixième  pétale  grand,  à 
trois  lobes;  le  lobe  du  milieu  plus  grand  ,  échancré  en  cœur; 
les  latéraux  très-petits;  la  colonne  terminée  par  un  bec  court; 
l'oviiire  glabre.  (Poir.) 

INOTA-INODIEN  (Bot.),  espèce  de  coqueret  ou  alke- 
kenge  du  Malabar,  plijsalis  pubescens.  (J.) 

INOUART,  INQUARTATION.  {Chim.)  Opération  par  la- 
quelle on  ajoute  à  de  For  allié  de  cuivre,  qu'on  veut  passer 
à  la  coupelle,  une  quantité  d'argent,  qui  doit  être  environ 
trois  fois  plus  grande  que  la  quantité  d'or  pur  contenue  dans 
l'alliage.  V^oyez  tome  XV,   p.  56o  et  36 1.  (Ch.) 

INSALA.  (Bot.)  Burmann,  dans  son  Thés.  Zejl.,  cite  sous 
ce  nom  une  plante  de  Ceilan  ,  qui  est  la  même  que  le  kurha 
desMalabares  :  c'est  une  cataire  existant  aussi  à  Madagascar, 
et  que  M.  de  Lamarck  nomme  nepeta  madagascariensis.   (J.) 

INSCHl  (Bot.),  nom  du  gingembre  chez  les  Malabares, 
suivant  Rhéede.  (J.) 

INSECTA  VAGINI  PENNIA.  {Foss.)  Bromel  a  désigné 
ainsi  les  trilobites,  auxquels  on  a  donné  depuis  le  nom  de 
calymènes.  Voyez  Trilobites.  (D.  F.) 

INSECTES,  Insecta.  [Enfom.)  Ce  nom  exprime  la  confor- 
mation la  plus  générale  des  animaux  auxquels  on  l'applique; 
car  leur  corps  est  composé  de  petites  portions  distinctes,  qui 
forment  autant  d'anneaux  ou  de  segmens,  articulés  les  uns 
sur  les  autres  de  manière  à  présenter  autant  d'intersections. 
Il  est  évident  que  le  mot  insecte,  en  latin  insectum ,  vient 
d'intersectum ,  entrecoupé,  nom  qui  lui-même  est  la  traduc- 
tion littérale  du  mot  grec  «vto/xoj',  exprimant  la  même  idée. 


432   <  ms 

Dans  l'état  actuel  des  connoissances  acquises  en  histoire 
naturelle,  voici  la  définition  la  plus  exacte  que  Ion  puisse 
donner  d'un  insccfeparfait,  c'est-à-dire soussa  dernière  forme. 
Animal  sans  ver'.èhres;  à  tronc ,  ou  partie  moyenne  du  corps, 
articulé  en  dehors;  muni  de  membres  articulés;  el  respirant  par 
des  stigmates ,  qui  sont  les  orifices  des  tracliées  intérieures. 

Tous  ces  caractères,  comme  nous  allons  i'indi((uer,  distin- 
guent la  classe  des  insectes  de  celles  auxquelles  on  doit  rap- 
porter les  autres  espèces  d'animaux. 

Le  défaut  d'os  intérieurs  ou  de  vertèbres  est  un  caractère 
essentiel,  qui  se  joint  cependant  à  un  très-grand  nombre 
d'autres  qu'on  pourroit  également  nommer  négatifs,  parce 
qu'on  ne  les  retrouve  pas  dans  les  insectes  :  tels  sont  l'absence 
d'un  cœur  et  de  vaisseaux  propres  à  la  circulation;  d'organes 
distincts,  isolés,  pour  la  respiration,  comme  les  poumons  et 
les  branchies,  etc.;  et  ces  caractères  sulîiscnt  pour  faire  dis- 
tinguer cette  classe  delà  zoologie  d'avec  les  quatre  premières 
classes,  auxquelles  on  rapporte  les  Mammifères,  les  Oiseaux, 
les  Reptiles  et  les  Poissons. 

Les  articulations  qu'offre  la  partie  moyenne  du  corps  ou 
le  tronc,  éloignent  les  insectes  des  Mollusques  et  de  la  plu- 
part des  ZooFHVTEs.  Les  membres  articulés,  situés  sur  les 
parties  latérales  et  le  plus  ordinairement  au  nombre  de  six, 
peuvent  servir  à  les  faire  distinguer  des  Vers  ou  des  Anne- 
lires,  comme  la  présence  des  stigmates,  qui  sont  les  orifices 
des  trachées,  les  fait  reconnoître  d'avec  les  Crustacés,  qui 
respirent  par  des  branchies,  et  qui  ont  par  conséquent  des 
vaisseaux,  tandis  que  les  insectes  en  sont  constamment  privés. 
(Voyez  l'article  Entomologie,  où  nous  avons  cru  devoir  in- 
sister sur  ces  caractères  et  sur  le  rang  que  les  insectes  pa- 
roissent  devoir  occuper  dans  l'échelle  des  êtres.  ) 

Nous  nous  proposons,  dans  cet  article,  de  présenter  d'a- 
bord des  idées  générales  sur  la  structure  des  insctes .  de 
faire  ensuite  connoître  les  fonctions  pr-ncipales  et  l'organi- 
sation de  ces  animaux;  après  quoi  nous  exposerons  la  classi- 
fication ou  la  méthode  que  nous  avons  employée  pour  con- 
duire facilement  à  la  connoissance  des  insectes;  enfin,  nous 
présenterons  une  histoire  abrégée  des  auteurs  qui  ont  traité 
des  insectes  en  général ,  en  indiquant  principalement  les 
systèmes,  ou  les  méthodes,  qu'ils  ont  successivement  proposés. 


♦  •  INS  •     453 

§.  i."  Idées  générales  sur  la  conformation  et  sur 
la  structure  des  insectes. 

La  plupart  des  insectes  ont  six  pattes  et  sont  dits  ,  pour  cela 
même,  hexapodes.  Beaucoup  ont  des  ailes.  Leur  corps  est  le 
plus  souvent  formé  de  seize  pièces  ou  articulations  distinctes, 
que  l'on  considère  comme  formant  trois  régions  principales: 
la  tète,  le  corselet  ou  thorax^  et  Vabdomen  ou  le  ventre.^ 

La  tête  s'articule  constamment  avec  le  corselet  ou  thorax; 
mais  ce  mode  d'articulation  varie  suivant  les  ordres,  les  fa- 
milles et  les  genres.  11  n'y  a  que  les  araignées,  les  scorpions, 
les  faucheurs  et  les  autres  insectes  sans  ailes  de  la  famille 
des  acères,  dont  la  tête  n'est  pas  articulée  et  mobile  sur  le 
tronc  et  ne  porte  pas  d'antennes. 

On  distingue  dans  la  tête  des  insectes  la  houche ,  dont  les 
parties  diffèrent  beaucoup,  non -seulement  dans  tous  les 
ordres,  mais  même  par  de  petites  modifications  dans  tous  les 
genres  et  très -probablement  aussi  dans  toutes  les  espèces. 
Ces  modifications  des  parties  de  la  bouche  ont  été  étudiées 
avec  beaucoup  de  détails  i)ar  quelques  entomologistes,  qui 
ont  établi,  d'après  cette  considération,  non-seulement  des 
ordres  qu'ils  ont  appelés  à  tort  des  classes  parmi  les  insectes, 
mais  qui  même  en  ont  tiré  tous  les  caractères  des  genres. 

Nous  ne  nous  étendrons  pas  beaucoup  ici  sur  ce  sujet, 
l'ayant  exposé  à  l'article  Bouche.  Il  suffira  cle  rappeler  que, 
sous  ce  point  de  vue,  tous  les  insectes  peuvent  être  rap- 
portés à  deux  grandes  divisions  :  les  espèces  à  mandibules 
et  à  mâchoires  libres,  disposées  par  paires  mobiles  isolément; 
ce  sont  les  insectes  màcheurs  ou  broyeurs:  tels  sont  les  quatre 
premiers  ordres,  les  coléoptères,  orthoptères,  névroptères  et 
hyménoptères  ,  et  la  plupart  des  familles  des  insectes  parmi  les 
aptères.  j\Tais,  déjà  dans  l'ordre  des  insérâtes  hyménoptères,  et 
en  particulier  dans  les  familles  des  melliles,  des  ptérodiples 
et   des   chrysides,    les  mâchoires  s'alongent,  s'aplatissent  et 


1  Pour  éviter  les  répétitions,  nous  prévenons  le  lecteur  qu'il  trouvera 
dans  ce  Dictionnaire  ,  et  dans  l'ordre  alphabétique ,  des  détails  beaucoup 
plus  circonstanciés  sur  chacune  de  ces  parties  dont  les  noms  sont  ipi- 
priuiés  en  caractères  italiques. 

23.  38 


454     '  INS  < 

forment,  à  l'aide  de  la  lèvre  inférieure,  une  sorte  de  tube 
et  de  langue  qui  donne  à  ces  insectes  la  double  faculté  de 
broyer  les  alimens  et  de  les  pomper  par  une  sorte  de  succion. 

Dans  les  insectes  suceurs  proprement  dits,  les  alimens  ne 
peuvent  être  avalés  qu'autant  qu'ils  sont  liquides  ;  mais 
les  organes  qui  serA^ent  à  produire  cette  succion ,  sont  très- 
diversifiés  dans  les  différens  ordres.  Ainsi  chez  les  hémiptères 
c'est  un  hec  articulé,  sorte  de  tube  composé  de  plusieurs 
pièces  qui  vont,  en  diminuant  de  grosseur,  de  la  base  à  la 
pointe  ,  et  dans  l'intérieur  desquelles  sont  contenues  des  soies 
fines  et  aiguës,  espèces  de  lancettes,  ordinairement  au  nom- 
bre de  trois. 

Chez  d'autres,  comme  dans  les  lépidoptères,  la  bouche 
consiste  en  un  instrument  particulier,  roulé  ordinairement 
en  spirale  sur  lui-même,  auquel  on  donne  le  nom  de  langue. 
Cette  langue  forme  un  canal  composé  de  deux  demi-gaines 
qui  correspondent  aux  mâchoires  des  autres  insectes,  mais 
excessivem.ent  alongées,  à  la  base  desquelles  on  retrouve  les 
palpes  souvent  très -velus,  et  tous  les  rudimens  des  autres 
parties  de  la  bouche. 

Enfin,  dans  les  diptères,  la  bouche  forme  tantôt  une  trompe 
charnue  ,  terminée  par  deux  lèvres  qui  font  f  office  d'une 
ventouse ,  au  centre  de  laquelle  se  trouve  l'orifice  du  canal 
de  la  digestion  ;  et  les  genres  dans  lesquels  on  observe  cette 
sorte  d'instrument,  sont  forcés  de  prendre  leur  nourriture 
telle  qu'elle  se  trouve  à  la  surface  des  corps,  ou  de  la  dis- 
soudre en  la  liquéfiant,  afin  de  pouvoir  ensuite  l'avaler. 
Dans  d'autres  il  y  a  ce  que  les  entomologistes  sont  convenus 
d'appeler  un  suçoir:  c'est  une  sorte  de  trompe  non  évasée  à 
son  extrémité  libre  et  dans  laquelle  se  retrouvent  des  soies, 
instrumens  vulnérans  dont  l'insecte  se  sert  pour  percer  la 
peau  des  êtres  organisés,  des  humeurs  desquels  il  doit  se 
nourrir. 

Après  la  bouche,  les  parties  les  plus  constantes  de  la  tète 
sont  les  antennes ,  sortes  de  cornes  de  formes  très- variables  ,  ar- 
ticulées ,  et  au  nombre  de  deux  dans  tous  les  Insectes ,  excepté 
dans  la  famille  des  araignées.  On  ignore  encore  complètement 
l'i'sage  des  antennes,  et  il  est  probable  qu'elles  sont  destinées 
à  faire  percevoir  divers  modes  de  sensation.  Il  est  évident 


0  INS  •     435 

en  particulier  que  beaucoup  d'espèces  s'en  servent  comme 
de  tentacules  pour  explorer  les  circonstances  dans  lesquelles 
ils  se  trouvent  ;  mais  il  est  notoire  aussi  que  leur  existence 
ef  en  même  temps  leur  excessive  brièveté  dans  quelques 
espèces,  en  particulier  dans  la  plupart  des  diptères  et  dans 
quelques  hémiptères  et  névroptères,  ne  peut  pas  s'accorder 
avec  cet  usage.  Au  reste ,  nous  reviendrons  par  la  suite  à 
l'étude  des  modes  de  sensation  dans  les  insectes. 

Les  ^eux  sont  encore  des  organes  dont  la  présence  est 
constante  à  la  tête  des  insectes.  Ils  sont  aussi  le  plus  souvent 
au  nombre  de  deux,  situés  sur  les  parties  latérales.  Ils  ne 
sont  pas  couverts  par  des  paupières;  leur  surfiice  est  taillée 
à  facettes,  dont  le  nombre  varie  excessivement.  On  les  dis- 
tingue très-bien  sur  les  yeux  des  demoiselles,  des  papillons, 
de  certaines  mouches.  Leur  couleur  varie.  Dans  les  diptères, 
les  mâles  se  distinguent  souvent  par  la  grosseur  des  yeux,  qui 
occupent  toute  la  tête. 

Outre  ces  yeux  à  facettes  ou  composés ,  qui  sont  constans 
dans  tous  les  insectes  sous  l'état  parfait,  on  en  observe  dans 
plusieurs  ordres  d'autres,  petits,  le  plus  souvent  au  nombre 
de  trois,  situés  non  sur  les  côtés  de  la  tête,  mais  dans  la  ligne 
moyenne  du  front,  au-dessus  de  la  bouche  et  entre  les  an- 
tennes. Ces  petits  jeux  ne  sont  pas  taillés  à  facettes  :  aussi, 
les  nomme- 1- on  lisses,  ou  en  un  seul  mot,  qui  convient, 
mieux,  les  stemmates.  On  ignore  leur  usage.  On  croit  cepen- 
dant qu'ils  servent  également  à  la  vision  ,  parce  que  les  yeux 
des  araignées  ont  à  peu  près  la  même  forme ,  et  que  ces  der- 
niers insectes  n'en  ont  pas  d'autres.  Il  est  vrai  que  la  plupart 
en  ont  huit ,  de  la  forme  de  ceux  qu'on"nomme  stemmates. 

On  distingue  encore  sur  la  tète  des  insectes  diverses  ré- 
gions, dont  le  développement,  les  couleurs  ou  les  enfonce- 
mens,  et  d'autres  particularités  ont  offert  quelques  caractères 
que  nous  croyons  en  conséquence  devoir  faire  connoître. 
Tel  est  Vocciput,  qui  sert  à  l'articulation  avec  le  corselet, 
tantôt  par  un  seul  condjle,  tantôt  par  deux.  Il  est  quelque- 
fois tronqué,  arrondi,  aplati,  déprimé,  prolongé  en  une 
sorte  de  col,  etc.;  le  vertex  ou  le  sommet  de  la  tête;  le  front, 
le  chaperon,  qui  supportent  immédiatement  la  bouche  ou  la 
lèvre  supérijeure:  les  joues,  entre  les  yeux  et  la  bouche;  la 


436     '  INS  ' 

ganache  ou  le  menton,  sur  lequel  s'articule  la  lèvre  inférieure. 
Telles  sont  les  diverses  régions  de  la  tête  des  insectes. 

Le  corselet  ou  le  thorax  est  la  partie  du  tronc  qui  est  pla- 
cée entre  la  tète  et  le  ventre  ou  l'abdomen  :  elle  supporte 
constamment  les  membres ,  tels  que  les  pattes  et  les  ailes. 
Voilà  la  définition  la  plus  générale  que  l'on  puisse  donner  de 
cette  région  du  corps;  car  elle  se  compose  de  plusieurs  autres 
parties,  que  quelques  auteurs  avoient  déjà  distinguées,  mais 
sur  lesquelles  M.  Audouin  vient  de  présenter  (Mai  1820)  un 
Mémoire  très-curieux,  dont  nous  allons  extraire  les  faits  qui 
suivent ,  d'après  le  rapport  que  M.  Cuvier  en  a  fait  à  l'Institut. 

M.  Audouin  distingue  dans  le  thorax  trois  anneaux  ou 
segmens  du  corps,  dont  chacun  porte  une  paire  de  pattes, 
et  que,  d'après  leur  position  de  la  tête  à  l'anus,  l'auteur 
nomme  prothorax  ,  mésothorax  et  métathorax.  Chacun  de  ces 
trois  segmens  présente  quatre  faces  :  une  supérieure,  que 
nous  décrirons  par  la  suite,  et  qui  correspond  au  dos,  en 
latin  tergum;  deux  latérales  et  une  inférieure,  constituant,  à 
elles  trois,  la  région  de  la  poitrine.  La  portion  ou  face  infé- 
rieure forme  le  sternum  ,  et  les  latérales  portent  le  nom  géné- 
ral de  flancs.  On  y  distingue  trois  pièces  principales:  la  plus 
voisine  de  la  ligne  moyenne  ou  inférieure ,  et  qui  s'appelle  épi- 
sternum  ;  l'autre,  placée  plus  en  arrière,  quireçoit  la  première 
articulation  de  la  patte,  se  nomme  épimcre;  et  la  troisième, 
enfin,  porte  le  nom  d'hjpoptère.  C'est  par  cette  troisième 
pièce  du  flanc  que  les  ailes  sont  supportées  dans  les  segmens 
appelés  moyen  et  postérieur,  ou  méso-  etméta-thorax  :  de  plus, 
il  y  a  quelquefois  une  petite  pièce  autour  du  stigmate,  que 
l'on  nomme  péritrènie. 

Le  dos  ou  le  tergum  se  compose  de  quatre  régions  dans 
chaque  segment;  l'auteur  les  nomme  de  devant  en  arrière.- 
prœscutum^  scutum ,  scutellum  et  postscutellum.  Les  deux  ex- 
trêmes sont  souvent  cachées  dans  l'intérieur. 

D'après  cette  étude  extérieure  du  thorax,  on  conçoit  qu'il 
doit  y  avoir  de  très- grandes  différences  pour  la  forme  et 
rétendue  de  ces  diverses  parties  dans  les  différens  ordres. 
Ainsi  le  mé-othorax  est  peu  développé  dans  les  coléoptères 
et  les  orthoptères ,  qui  ont  des  élytres  de  peu  d'usage  «Jans 
l'action  de  voler.  Dans  les  cigales  5  c'est  l'épimère  qui  se  pro- 


o  INS  •     437 

longe  sous  le  premier  anneau  de  l'abdomen  ,  pour  former 
la  grande  plaque  concave  qui  recouvre  l'instrument  du  chant 
chez  ces  insectes.  Les  quatre  régions  du  dos  sont  plus  sensi- 
bles et  mieux  divisées  sur  le  mésothorax,  dans  les  ordres  des 
lépidoptères,  des  hyménoptères  et  des  diptères.  Dans  leslibeK 
Iules  ou  demoiselles,  c'est  lépislernum  qui  a  pris  le  plus  grand, 
développement.  Dans  les  coléoptères,  c'est  le  métathorax 
qui  offre  la  même  augmentation  d'étendue,  en  raison  de 
l'usage  auquel  il  est  destiné ,  puisqu'il  reçoit  les  véritables 
organes  du  mouvement ,  les  ailes  membraneuses. 

Vabdomen  ou  le  ventre  est  la  troisième  région  du  tronc 
dans  les  insectes;  il  ne  porte  pas  de  pattes  articulées.  (Nous 
l'avons  fait  connoitre  avec  détails,  tome  ï",  page  6.)  Le 
nombre  des  anneaux  qui  composent  cette  région,  varie  d'un 
à  quatorze  ou  quinze.  La  plupart  portent  un  trou  ou  un  pore 
qui  se  nomme  stigmate  ,  et  qui  est  l'orifice  d'une  trachée. 
L'abdomen  est  articulé  avec  le  métathorax  dans  la  région 
postérieure ,  tantôt  par  une  large  surface  ;  il  est  alors  dit 
sessile ,  comme  dans  les  coléoptères,  les  orthoplères,  etc.: 
tantôt,  au  contraire,  l'articulation  offre  un  rétrécissement 
marqué,  qu'on  nomme  pétiole  ou  pédicule,  comme  dans  le» 
guêpes,  les  sphéges. 

L'extrémité  libre  de  l'abdomen  est  le  plus  souvent  percée 
jtar  Vanus.  Le  dernier  anneau  varie  beaucoup  pour  la  forme.- 
car  souvent  il  est  disposé  de  manière  à  favoriser  le  rappro- 
chement des  sexes,  ou  à  faciliter  la  ponte  ou  l'introduction 
des  œufs  dans  les  matières  qui  doivent  les  recevoir;  souvent 
encore  il  est  organisé  de  manière  à  devenir  une  arme  d'of- 
fense ou  de  défense.  Les  crochets,  les  tarières,  les  aiguil- 
lons, les  pinces,  les  lames,  les  scies,  les  queues,  les  filières 
et  les  autres  instrumens  font  souvent  partie  de  cette  région 
du  tronc. 

On  distingue  également  dans  chacun  des  anneaux  du  ventre 
les  régions  inférieure,  supérieure  et  latérales,  pour  en  in- 
diquer la  forme,  la  structure,  les  taches,  les  mouvemens,  qui 
fournissent  de  très-bons  caractères ,  non-seulement  pour  les 
genres,  mais  même  pour  les  espèces  et  les  différences  de  sexe. 
(Voyez  Abdome>'.) 

Les  ailes  sont  de  véritables  membres,  à  l'aide  desquels  les 


^^58       .  INS  ^ 

insectes  s'appuient  sur  l'air  et  se  transportent  dans  l'atmos- 
phère (voyez  Vol).  Elles  consistent  en  pièces  articulées  sur 
le  méso-  et  sur  le  méta-thorax ,  dans  l'intérieur  desquels  sont 
placés  des  muscles  très-puissans,  qui  les  meuvent,  les  étendent, 
les  plissent  et  les  déplissent,  les  élèvent,  les  abaissent  alter- 
nativement, et  les  portent  en  dehors  et  en  dedans;  enfin, 
ce  sont  de  véritables  rames  légères,  mais  solides,  constituées 
par  des  membranes,  soutenues  par  des  rayons  ou  touches, 
diversement  disposés  pour  leur  donner  la  souplesse,  la  résis- 
tance et  la  mobilité  dont  elles  ont  besoin. 

Aucun  insecte  ne  naît  véritablement  ailé,  et  quelques- 
uns,  qu'on  dit  Aptères,  ne  prennent  jamais  d'ailes;  tantôt 
les  insectes  n'en  ont  que  deux  ,  on  les  nomme  alors  Diptères, 
ou  ils  en  ont  quatre,  et  on  les  dits  alors  Tétraptères.  Quand 
il  y  a  quatre  ailes,  on  nomme  supérieures  celles  qui  sont 
insérées  plus  près  de  la  tête  ou  sur  le  mésothorax  ;  on  ap- 
pelle inférieures,  celles  que  supporte  le  métathorax. 

Dans  les  insectes  à  quatre  ailes  ,  lorsque  les  supérieures 
sont  plus  épaisses ,  lorsqu'elles  ont  une  autre  consistance  que 
les  inférieures  et  qu'elles  servent  comme  de  gaines  ou  d'é- 
tuis aux  véritables  ailes  membraneuses ,  on  les  nomme  des 
élytres  ou  des  demi-éljytres  :  tels  sont  les  Coléoptères,  les  Or- 
liHOPTEREs  en  général  et  les  Hémiptères. 

Chez  les  autres  insectes ,  qui  ont  quatre  ailes  à  peu  près 
d'égale  consistance  et  qui  servent  également  à  l'action  du 
vol  ,  on  distingue  celles  qui  sont  comme  couvertes  d'une 
poussière  écailleuse,  et  celles  qui  sont  à  peu  près  nues.  Les 
premières  sont  celles  des  Lépidoptères,  et  les  autres  s'obser- 
vent dans  les  Gymnoptères.  Ces  dernières  se  distinguent  en 
ailes  à  nervures  disposées  principalement  dans  la  longueur, 
comme  chez  les  Hyménoptères,  et  en  celles  dont  les  nervures 
transversales  sont  nombreuses,  comme  en  réseau  :  telles  sont 
celles  des  Névroptères. 

C'est  d'après  la  présence,  le  nombre  et  la  forme  des  ailes, 
qu'où  a  classé  ou  plutôt  formé  les  huit  ordres  dans  la  classe 
des  insectes,  comme  on  le  voit  par  le  tableau  que  nous 
présenterons  dans  la  suite  de  cet  article.  11  y  a  en  outre 
beaucoup  de  modifications  dans  la  forme  des  ailes,  dans  leur 
structure,   et  même  dans  quelques  appendices,  qui  tantôt 


'>  *  INS  •>     439 

lient  les  ailes  entre  elles,  comme  les  anneaux,  les  boucles, 
les  crochets,  les  ardillons,  les  balanciers,  les  caillerons  ou 
ailerons,  etc.  Tous  ces  détails  seront  présentés  à  l'article  Vol 
dans  les  insectes,  où  ils  peuvent  être  beaucoup  mieux  exposés. 

Les  pattes  ou  les  pieds  des  insectes  sont ,  comme  nous 
l'avons  déjà  dit,  le  plus  souvent  au  nombre  de  six  dans  les 
véritables  insectes  .-  elles  sont  disposées  par  paires ,  reçues 
chacune  dans  une  des  pièces  du  thontx.  On  distingue  en 
général  dans  les  pattes  des  insectes  quatre  régions,  savoir,  la 
hanche,  la  cuisse ,  la  jambe  et  le  tarse. 

La  hanche  [coxa)  est  une  pièce  courte,  le  plus  souvent  en- 
châssée ,  mais  mobile,  dans  le  prothorax  pour  la  première 
paire  de  pattes,  dans  le  mésothorax  pour  la  paire  moyenne, 
et  dans  le  métathorax  pour  la  paire  postérieure.  La  forme 
de  cette  hanche  et  son  mode  d'articulation  varient  le  plus 
souvent;  il  est  le  même  pour  les  postérieures,  mais  tout-à- 
fait  différent  pour  la  paire  de  pattes  qui  se  porte  en  avant, 
tandis  que  les  deux  autres  sont  dirigées  en  arrière.  Tantôt 
cette  pièce  de  la  hanche  est  globuleuse  et  ressemble  à  une 
sphère  reçue  dans  une  cavité  arrondie,  comme  le  genou  des 
mécaniciens  ;  tantôt  elle  est  aplatie  ,  ovale ,  alongée ,  linéaire , 
et  tellement  engagée  dans  la  pièce  correspondante  du  tronc 
qu'elle  semble  en  faire  partie  et  s'y  confondre  ;  voilà  pour- 
quoi la  plupart  des  auteurs  n'en  font  pas  mention.  Cependant 
on  l'a  observée  dans  quelques  dytiques,  où  elle  forme  une 
sorte  d'oreille,  ce  qui  leur  a  fait  donner  le  nom  de  cnémi- 
dotes.  On  l'a  aussi  remarquée  dans  les  blattes,  les  forbicines. 

La  ouiise  ou  le  fémur  est  la  seconde  articulation  de  la  patte; 
sa  forme  varie  beaucoup  ,  ainsi  que  ses  proportions.  Quel- 
quefois elle  porte  à  sa  base  une  sorte  d'appendice  mobile 
qu'on  nomme  trochantei  ,  et  dont  on  ignore  encore  l'usage  : 
il  a  été  observé  en  particulier  dans  les  coléoptères  créophages. 
Cette  cuisse  est  remarquable  ,  tantôt  par  sa  grosseur,  comme 
dans  les  alurnes,  les  altises,  les  donacies,  les  œdémères,  quel- 
ques syrphes  ,  les  hirtées  ;  tantôt  par  sa  longueur,  comme 
dans  les  sauterelles,  les  criquets,  les  truxales,  les  puces,  les 
chalcides  :  on  y  observe  aussi  les  pointes,  les  épines,  les 
membranes,  les  rainures ,  les  arêtes  et  plusieurs  autres  par- 
ticularités. 


44o     f  LNS  *^  ' 

La  jambe  ou  le  lihia  est  la  troisième  portion  ou  articula- 
tion de  la  patte ,  placée  entre  le  tarse  et  la  cuisse.  Elle  pré- 
sente autant  de  variétés  que  le  fémur  par  sa  conformation: 
elle  en  a  ordinairement  la  longueur.  Sa  forme  varie  suivant 
les  usages  :  son  bord  est  dentelé  et  sa  surface  aplatie  dans  les 
insectes  fouisseurs.  Ce  tibia  est  cilié  dans  les  insectes  nageurs; 
garni  de  brosses  ou  de  poils  roides  dans  quelques  abeilles, 
comme  celle  dite  à  manchettes;  garni  d"épines  mobiles  dans 
beaucoup  de  lépidoptères,  dans  les  hydrophiles,  etc. 

Le  tarse  ou  le  doigt  est  ordinairement  composé  de  plusieurs 
articulations  ou  phalanges  qui  terminent  la  patte.  Ces  articles 
varient,  pour  le  nombre,  depuis  un  jusqu'à  dix  ou  douze, 
selon  les  ordres.  Il  est  à  peu  près  constant  dans  certains 
prdres  ;  quelques  aptères  en  ont  seuls  plr.s  de  cinq.  Ce 
nombre  est  le  plus  considérable  qui  ait  été  observé  dans  les 
autres  ordres.  Ordinairement  les  pattes  moyennes  ont  le 
même  nombre  d'articles  aux  tarses  que  les  antérieures  ;  mais 
celles  qu'on  nomme  postérieures  ont  souvent  moins  d'ar- 
ticles que  les  autres.  On  a  étudié  avec  soin  ,  depuis  Geolîroy , 
ce  nombre  des  articles  aux  tarses;  il  a  même  fourni  de  bons 
caractères  pour  établir  des  sous-ordres  parmi  les  coléoptères. 
Ainsi  ,  on  a  nommé  dimérés ,  ceux  qui  n'ont  que  deux  articles 
aux  tarses;  triméres ,  ceux  qui  en  ont  trois;  létramérés ,  ceux 
qui  en  ont  quatre;  pentan.érés,  ceux  qui  en  ont  cinq;  enfin, 
on  a  désigné  sous  le  nom  de  coléoptères  hétéromérés  ,  les  es- 
pèces qui  n'ont  que  quatre  articles  aux  pattes  de  derrière, 
tandis  qu'on  leur  en  compte  cinq  aux  deux  autres  paires. 
L'avanl-dernier  article  des  tarses,  ou  le  pénultième,  présente 
quelques  variétés  pour  la  conformation  et  les  usages  auxquels 
il  est  destiné  dans  les  insectes.  11  en  est  de  même  du  dernier, 
qui  supporte  un,  deux,  trois  ou  qiiatre  crochets  ou  ongles, 
dont  la  forme  présente  également  beaucoup  de  modifications; 
quelijuefois  il  est  tellement  réduit  qu'il  semble  manquer 
tout-à-fait.  Dans  quelques  espèces  il  n'offre  qu'une  seule 
pièce,  et  les  màles  ont  souvent  les  tarses  antérieurs  disposés 
de  manière  à  pouvoir  adhérer  sur  le  corps  des  femelles,  qui 
sont,  à  cet  égard,  autrement  conformées  :  tels  sont  quel- 
ques hydrophiles  ,  quelques  dytiques,  quelques  crabrons , 
quelques  asiles.    Chez  d'autres ,  cette  dilatation  des  tarses  a 


«  INS  ''  4/.1 

des  usages  diffërens,  comme  dans  les  abeilles.  Chez  quelques- 
uns  tous  les  articles  des  tarses  sont  velus  en-dessous,  comme 
dans  quelques  donacies,  dans  quelques  charansons  ;  parfois, 
quelques  articles  seulement,  comme  le  pénultième  ou  le  der- 
nier, offrent  cette  conformation,  ou  une  sorte  de  pelote,  de 
houppe,  de  ventouse,  de  disque  ou  de  demi-disque  épaté, 
comme  dans  les  capricornes,  les  asiles,  les  mouches. 

Les  crochets  ou  les  ongles  sont  aussi  différemment  orga- 
nisés ;  car  ils  forment  la  pince,  la  griffe,  la  serre,  le  tire- 
bourre.    (Voyez  Tarses  dans  les  insectes.) 

Telles  sont  à  peu  près  les  formes  extérieures  des  insectes. 
Notre  intention  ne  peut  être  d'exposer  toute  l'organisation 
de  ces  animaux,  ce  qui  exigeroit  des  détails  qui  ne  sont  i;as 
de  la  nature  de  cet  ouvrage.  Nous  croyons  cependant  devoir 
indiquer  avec  plus  de  détails  les  modifications  que  les  fonctions 
principales  paroissent  avoir  éprouvées,  dans  les  insectes,  sous 
le  rapport  des  mouvemens ,  des  sensations,  de  la  nutrition 
et  de  la  reproduction. 

§.  2.  Fonctions  des  insectes. 

Nous  avons  déjà  insisté,  à  l'article  Entomologie,  sur  le 
rang  élevé  que  paroit  devoir  occuper  la  classe  des  insectes 
dans  l'échelle  des  êtres  :  qu'il  nous  suffise  de  rappeler  ici 
que,  sous  le  rapport  de  l'animalité,  ou  pour  ce  qui  constitue 
essentiellement  l'être  vivant  et  animé,  les  insectes  viennent 
immédiatement  après  les  animaux  vertébrés,  puisqu'ils  ont 
un  tronc  articulé,  supporté  par  des  mem.bres  articulés,  et 
qu'ils  jouissent  de  toutes  les  espèces  de  mouvement;  que,  rela- 
tivement à  leur  masse,  ils  le  manifestent  à  un  degré  tel  que 
plusieurs  se  transportent  sur  la  terre,  dans  l'air,  dans  l'eau 
et  à  sa  surface,  avec  la  plus  grande  rapidité;  qu'ils  sont  doués 
également  de  la  faculté  de  percevoir  vivement  et  à  distance  , 
au  moyen  des  organes  des  sens,  la  plupart  des  qualités  des 
corps,  et  peut-être  plus  et  mieux  que  nous  ne  pouvons  les 
apprécier  nous-mêmes  ;  que ,  chez  eux  ,  les  organes  de  la  res- 
piration ,  répandus  par  tout  le  corps ,  sont  mis  en  contact  avec 
les  humeurs,  pour  les  rendre  propres  à  l'excitation  de  la  vie, 
ce  qui  compense  et  peut-être  dépasse  en  énergie  le  défaut 
de  la  circulation  :  de  sorte  que  les  organes  de  la  nutrition  et 


442  '  IIVS  ' 

leur  complément,  ceux  de  La  génëralion ,  ne  sont  pas  moins 
énergiques  ni  moins  parfaits  que  ceux  des  crustacés,  des 
annelides,  des  mollusques  et  des  zoophytes. 

Les  Movp^EMENs  dans  les  insectes,  quoique  très-A'ariés,  ont 
exigé  peu  de  complication  :  comme  les  parties  de  leur  corps 
sont,  en  général,  très-symétriques,  on  retrouve  à  gauche  ce 
qui  s'observe  de  l'autre  côté ,  de  sorte  que  ,  sous  ce  rapport, 
l'étude  de  la  moitié  de  leur  corps  donne  l'idée  de  la  partie 
correspondante.  Ensuite,  quant  au  tronc,  la  tête  et  ses  an- 
nexes, comme  les  parties  de  la  bouche  et  les  antennes,  sont 
seules  très- mobiles.  Les  trois  régions  du  thorax  sont  mues 
en  totalité  par  les  membres,  et  elles  servent  plutôt  de  point 
d'appui  qu'elles  ne  déterminent  le  transport.  Enfin ,  les  an- 
neaux de  l'abdomen  sont  en  général  articulés  les  uns  sur  les 
autres  de  la  même  manière ,  de  sorte  que  les  muscles  de  l'un 
des  segmens  se  retrouvent  à  peu  près  les  mêmes  sur  les  seg- 
mens  qui  précèdent  et  sur  ceux  qui  les  suivent. 

La  plupart  des  articulations  s'opérant  en  ginglyme  ou  en 
charnière,  deux  muscles  ont  suffi  pour  les  produire  :  un  ex- 
tenseur, en  général  plus  petit,  et  un  fléchisseur  ou  adducteur, 
beaucoup  plus  volumineux.  Ces  muscles  sont  toujours  placés 
à  l'intérieur  ou  dans  la  cavité  des  articulations,  de  sorte  que 
les  pièces  cornées  des  membres,  par  exemple,  sont  des  étuis 
pour  les  muscles  :  absolument  comme  on  le  voit  dans  les 
pinces  des  homards  et  des  écrcvisses,  qui  sont  très-propres 
à  servir  de  démonstration  dans  ce  cas. 

Les  muscles  des  insectes  offrent  cette  difficulté  dans  leur 
étude,  qu'ils  ne  sont  réellement  circonscrits  et  distincts  que 
par  leur  insertion  ou  par  la  terminaison  de  leurs  fibres  sur 
un  tendon  solide  ou  prolongement  articulé  de  la  pièce  qu'elles 
doivent  mouvoir.  Comme  il  n'y  a  point  de  vaisseaux  ni  de 
tissu  tonienteux  cellulaire  dans  les  insectes,  ces  fibres  ne  sont 
pas  liées  entre  elles  ,  et  quand  elles  sont  séparées  de  leur 
insertion  ou  de  leur  attache  fixe ,  elles  restent  flottantes 
comme  des  houppes,  ce  qui  rend  leur  étude  fort  difiicile. 
Dans  les  insectes  mous,  comme  dans  les  orthoptères,  tels 
que  les  sauterelles;  dans  les  diptères,  mais  surtout  dans  les 
larves  et  les  chenilles,  cette  étude  est  beaucoup  plus  facile. 
Lyonnet,  dans  son  beau  Traité  sur  l'anatomie  de  la  chenille 


'•  INS  *  445 

du  cossus,  a  donné  d'excellentes  figures  de  ces  organes  du 
mouvement;  on  retrouve  également  des  descriptions  et  des 
dessins  exacts  des  muscles ,  dans  la  Bible  de  la  nature  de 
Swammerdam.  Nous-mêmes  nous  nous  sommes  livrés  à  cette 
étude,  et  nous  avons  consigné,  dans  le  premier  volume  de 
TAnatomie  comparée  de  M.  Cuvier,  les  recherches  que  nous 
avons  jointes  à  celles  de  ce  savant,  lorsqu'il  a  bien  voulu  nous 
associer  à  ses  travaux  et  à  la  publication  de  cet  ouvrage,  au- 
quel nous  croyons  devoir  renvoyer  le  lecteur  pour  de  plus 
amples  détails. 

Sensibilité.  Les  insectessont  évidemment  doués  d'un  système 
nerveux,  et  ce  système  est  absolument  le  même  que  celui 
qu'on  retrouve  dans  les  crustacés  et  les  annelides.  Il  consiste 
dans  une  moelle  nerveuse  assez  homogène,  composée  le  plus 
souvent  de  douze  ganglions  ou  renflemens  successifs  ,  placés 
à  la  file  les  uns  des  autres,  dans  toute  la  longueur  du  corps, 
depuis  la  tête  jusqu'à  l'extrémité  opposée  du  tronc.  De  ces 
renflemens  partent  constamment  deux  nerfs  qui  vont  se 
joindre  au  renflement  suivant,  et  de  plus  d'autres  nerfs,  en 
nombre  variable  ,  qui  partent  en  irradiant  pour  se  rendre 
dans  tous  les  organes  circonvoisins ,  et  qui  sont  d'autant  plus 
gros  ou  plus  alongés  que  ces  organes  sont  eux-mêmes  plus 
développés  ou  plus  éloignés  du  ganglion.  Ces  renflemens 
principaux  sont  généralement  disposés  ainsi  :  le  premier, 
qui  a  été  regardé  comme  un  cerveau,  est  situé  dans  la  tète, 
au-dessus  de  la  bouche  et  de  l'origine  du  conduit  des  alimens  ; 
outre  les  filets  qu'il  fournit  aux  diverses  parties  de  la  bouche , 
qu'il  est  inutile  d'examiner  ici ,  il  en  envoie  de  plus  gros  aux 
yeux  ,  aux  antennes ,  et  deux  en  arrière ,  qui  lient  le  premier 
ganglion  au  suivant.  Ces  deux  filets  embrassent  consiamment 
l'œsophage  ,  et  lui  forment  ainsi  une  sorte  de  collier  que  les 
alimens  doivent  traverser.  La  série  des  autres  ganglions  reste 
alors  sous  les  intestins  et  dans  la  partie  inférieure  du  corps, 
îl  y  en  a  trois  dans  la  poitrine  :  un  pour  le  prothorax,  qui 
donne  les  nerfs  des  pattes  de  devant  ;  un  pour  le  mésothorax, 
qui  fournit  les  nerfs  des  ailes  supérieures  ou  des  élyfres,  et 
ceux  des  pattes  moyennes;  enfin,  dans  le  métathorax ,  le 
ganglion  correspondant,  qui  est  le  quatrième  de  la  série, 
fournit  les  nerfs  des  ailgs  inférieures  et  des  pattes  postérieures. 


444  '  INS  ' 

Chacun  (Feux  donne  les  deux  filets  qui  établissent  la  série 
des  renflcmens  :  arrivés  dans  l'ahdoinen  ,  cette  série  offre 
autant  de  rentlemens  qu'il  y  a  d'anneaux,  et  ces  ganglions 
fournissent  les  nerfs  des  muscles,  ceux  qui  accompagnent  les 
vaisseaux  à  air,  les  viscères  génitaux,  digestifs  et  sécréteurs. 
On  conçoit  que  les  larves  ont  les  nerfs  autrement  disposés; 
cependant  ce  sont  absolument  les  mêmes  que  ceux  qui  se 
manifesteront  dans  l'insecte  parfait,  avec  cette  différence,  par 
exemple ,  que  les  renflemens  ou  les  ganglions  s'éloignent  les  uns 
des  autres  ou  se  rapprochent,  suivant  que  la  larve,  de  courte 
qu'elle  étoit,  comme  celle  du  fourmilion,  donne  un  insecte 
alongé.  ou  bien  que  d'une  larve  alongée ,  comme  de  celle 
du  scarabée  ou  du  hanneton,  il  en  provient  un  insecte  beau- 
coup plus  court. 

Il  n'y  a  pas  le  moindre  doute  que  les  parties  dont  nous 
venons  de  parler,  ne  soient  les  instrumens  par  lesquels  l'in- 
secte perçoit  ses  sensations,  et  que  ces  filets  nerveux  ne 
transmettent  dans  les  organes  la  sensibilité  dont  ils  sont 
doués,  en  liant  entre  elles  toutes  les  parties  du  corps.  Des 
expériences  positives  l'auroient  démontré,  lors  même  que 
l'analogie  n'eût  pas  été  évidente.  Mais  il  s'agit  d'examiner 
maintenant  comment  les  insectes  perçoivent  les  sensations  : 
nous  allons  successivement  exposer  les  notions  acquises  sur 
les  organes  des  sens  dans  les  insectes. 

Vue.  Les  yeux  existent  évidemment  dans  tous  les  insectes 
parfaits,  et  même  dans  les  larves  qui  sont  obligées  d'aller  cher- 
cher elles-mêmes  leur  nourriture.  Quant  à  celles  qui  se  déve- 
loppent au  milieu  de  leurs  alimens ,  si  elles  y  ont  été  dépo- 
sées par  leur  mère,  et  quant  aux  espèces  qui  sont  condam- 
nées à  vivre  dans  une  obscurité  profonde  où  l'on  ne  peut 
supposer  que  la  lumière  arrive  jamais,  on  n'observe  pas  chez 
elles  les  instrumens  de  la  vision. 

Nous  avons  déjà  dit  que  beaucoup  d'insectes  avoient  deux 
sortes  d'yeux  :  i.°  ceux  qu'on  nomme  lisses  ou  stemmates, 
dont  le  nombre  varie  et  dont  les  usages  réels  ne  sont  pas 
encore  bien  connus,  quoique,  par  analogie ,  on  les  croie 
propres  à  la  vision,  puisque  les  araignées,  les  scorpions,  les 
faucheurs  n'en  ont  pas  d'autres;  2.°  les  véritables  yeux,  dont 
la  surface  est  à  facettes  ou  à  réseau,  ce  qui  leur  donne  une 


a-  INS  .  445 

organisation  très-compliquée.  Quand  on  examine,  en  effet, 
la  superficie  de  ces  yeux  à  la  loupe,  et  quelquefois  à  la  vue 
simple,  comme  dans  les  papillons,  les  demoiselles,  les  mou- 
ches, les  taons,  on  voit  qu'ils  sont  taillés  de  manière  à  pré- 
senter beaucoup  de  petits  tubercules  ou  de  plans  diversement 
combinés,  qui  paroissent  former  autant  de  cornées  ou  de 
petits  o])jectifs,  c'est-à-dire,  de  premières  lames,  que  doivent 
traverser  les  rayons  lumineux  émanés  de  la  surface  des  objets. 
Chacun  de  ces  petits  plans  est  distingué  de  ceux  qui  l'avoi- 
sinent  par  des  lignes  ou  des  sillons  ,  sur  lesquels  ii  n'est  pas 
rare  d'observer  des  poils. 

Quand  on  enlève  ainsi  l'ensemble  de  cette  cornée  géné- 
rale, et  qu'on  l'applique  à  l'objectif  d'un  microscope,  après 
l'avoir  nettoyé  ou  débarrassé  de  la  matière  colorante  qui 
semble  foriiier  autant  d'iris  et  de  trous  pupillaires  qu'il  y  a 
de  plans  divers,  les  objets  vus  à  travers  se  répètent  autant  de 
fois  qu'il  y  a  de  facettes.  On  présume  que  les  apparences  des 
corps  se  peignent  ainsi  dans  les  yeux  des  insectes,  qui  sont 
toujours  immobiles  ou  adhérens  à  la  partie  solide  de  la  tête. 
On  voit  se  rendre  de  très-gros  nerfs  optiques  dans  ces 
yeux.  Leur  teinte  varie  beaucoup  :  car  il  en  est  de  noirs, 
de  blancs,  de  jaunes,  de  verts,  de  bleus,  de  rouges;  enfin, 
de  toutes  les  teintes  et  de  toutes  les  nuances,  souvent  même 
avec  l'éclat  métallique  de  l'argent  ,  de  l'or  et  du  cuivre. 
Cette  matière  colorante  est  une  sorte  de  membrane  cho- 
roïde, dans  laquelle  on  distingue  autant  de  cellules  qu'il 
y  a  de  facettes,  et  dans  chacune  de  ces  cellules,  ainsi  que 
Swammerdam  l'a  décrit  dans  sa  Bible  de  la  nature  et 
représenté  à  la  planche  XX  de  cet  immortel  ouvi-age,  on 
voit  parvenir  un  filet  nerveux  de  la  masse  optique.  Il  est 
évident,  d'après  les  expériences  de  Delahire  ,  insérées  dans 
les  Mémoires  de  l'Académie  des  sciences  de  Paris,  tome  X, 
page  609  et  suiv. ,  et  d'après  les  recherches  de  Stancari,  de 
Bologne  ,  que  les  yeux  sont,  chez  les  insectes,  organisés  de  ma- 
nière à  leur  faire  percevoir  l'image  des  corps;  car,  quand  les 
yeux  sont  couverts  d'un  enduit  opaque,  quand  leur  surface 
est  altérée  par  quelque  caustique  ou  par  un  instrument  tran- 
chant ,  et  lors  même  qu'elle  n'est  couverte  que  d'une  poussière 
très-fine ,  l'insecte  est  aveuglé  et  va  se  heurter  contre  tous 


446  r  I]VS  f 

les  corps,  sïl  ne  s'élève  pas  verticalement  dans  l'atmosphère  , 
comme  cela  arrive  aux  oiseaux  sur  lesquels  on  fait  la  cruelle 
expérience  de  les  aveugler  ou  de  leur  obscurcir  les  yeux 
subitement.  Leuwenhœck.  a  reconnu  3,i8i  facettes  dans  l'œil 
d'un  scarabée,  8000  sur  celui  d'une  mouche.  Dupuget ,  dans 
ses  Observations  sur  la  structure  des  yeux  des  divers  in- 
sectes, imprimées  à  Lyon  en  1706,  a  compté  sur  l'œil  d'un 
papillon  17,025  facettes. 

Ouie.  Tous  les  naturalistes  sont  persuadés  que  les  insectes  sont 
doués  de  la  faculté  de  percevoir  les  sons  ou  les  ébranlemens 
de  l'air,  puisque  plusieurs  en  produisent  dans  les  circons- 
tances de  la  vie  où  il  leur  devient  important  de  se  manifester 
réciproquement  leur  existence.  Le  chant  de  la  cigale ,  le 
bruissement  des  sauterelles  et  la  stridulation  des  criquets,  le 
grognement  des  courtilières ,  le  bourdonnement  des  abeilles, 
le  tintement  des  cousins,  le  piaulement  des  syrphes,  le  tic 
et  tac  des  psoques,  le  tapotement  des  vrillettes,  et  tous  ces 
bruits,  ces  strideurs,  ces  frémissemens ,  ces  oscillations,  ces 
murmures  des  criocères,  desleptures,  des  capricornes,  des 
donacies,  des  ateuches,  des  blaps,  des  sphinx,  sont  certai- 
nement destinés  à  être  perçus  par  un  organe  spécial;  mais 
on  en  ignore  le  siège  dans  les  insectes  :  c'est  peut-être  parce 
qu'on  a  voulu  par  analogie  en  rechercher  l'existence  vers  la 
tête.  Jusqu'ici  on  n'a  établi  que  des  conjectures  a  cet  égard. 
Il  faut  avouer  que  tout  porte  à  croire  que  les  insectes  per- 
çoivent les  sons;  mais  on  ne  sait  pas  encore  où  réside  chez 
eux  l'organe  destiné  à  en  transuiettre  l'idée  ou  l'image. 

Odorat.  Quant  à  l'organe  de  l'odorat,  quand  on  réfléchit  à 
la  nature  même  de  cette  perception  ,  on  est  étonné  que  les 
physiologistes  aient  voulu,  par  une  analogie  peu  réfléchie, 
trouver  vers  la  tête  des  insectes  l'instrument  destiné  à  arrêter 
les  odeurs  et  à  en  apprécier  les  qualités.  Que  les  mammifères, 
les  oiseaux,  les  reptiles  soient  organisés  comme  l'homme, 
sous  le  rapport  de  l'olfaction,  cela  devoit  être,  puisque  tous 
respirent  par  des  poumons,  et  que  l'air  qui  pénètre  dans 
leur  corps  pour  cet  usage  n'y  peut  parvenir  que  par  une 
seule  route ,  qui  est  la  double  entrée  des  narines  :  c'est  sur 
ce  passage  forcé,  et  à  l'orifice  même,  que  l'essai  de  la  nature 
de  cet  air  doit  être  fait,  pour  que  l'animal  soit  averti  du 
danger  de  l'admettre  ou  de  la  nécessité  de  le  repousser. 


i>  "  INS  •  447 

Les  odeurs  ont  en  effet  la  plus  grande  analogie  avec  les 
saveurs.  Elles  consistent  matériellement  dans  les  particules 
des  corps  tenus  en  suspension  ,  les  unes  dans  les  gaz ,  les  autres 
dans  les  liquides.  Les  fluides  élastiques  dissolvent  continuel- 
lement les  corps  à  leur  surface  ;  ils  se  chargent  par  cela 
même  de  quelques  atomes  de  leurs  parties  constituantes,  et 
ils  les  retiennent  ainsi  suspendues  dans  une  sorte  de  dissolu- 
tion,  disposés  à  les  abandonner  lorsqu'elles  auront  plus  de 
tendance  à  s'unir  à  d'autres  substances.  Dans  quelques  cir- 
constances les  corps  très-volatiles,  et  souvent  par  cela  même 
trés-odorans ,  prennent  momentanément  la  forme  de  vapeurs 
ou  de  gaz  non  permanens,  qui  jouissent  de  la  plupart  des 
propriétés  de  l'air  ou  des  fluides  élastiques  avec  lesquels  ils 
se  mêlent.  C'est  donc  sous  ce  point  de  vue,  et  comme  des 
corpuscules  gazéifiés  ou  des  fluides  aériformes,  que  Ton  doit 
étudier  la  manière  d'agir  des  oder.rs. 

Transmises  nécessairement  par  l'air,  qui  est  leur  seul  véhi- 
cule, les  odeurs  tendent  à  pénétrer  avec  lui  dans  le  corps 
de  l'animal  ;  arrêtées ,  sur  leur  passage  ,  dans  une  sorte  de 
bureau  de  douane  où  elles  doivent  être  promptement  visitées 
et  analysées,  elles  sont  mises  là  en  contact  avec  une  surface 
humide  ,  avec  laquelle  elles  ont  quelque  aflînifé  :  elles  s'y 
combinent  aussitôt;  mais  en  même  temps  elles  touchent  et 
avertissent  de  leur  présence  des  nerfs  distribués  sur  ces 
mêmes  parties,  qui  reportent  au  cerveau,  dont  ils  sont  le 
prolongement,  l'action  chimique  ou  physique,  en  un  mot, 
la  sorte  de  sensation  qu'ils  dénotent  ou  que  peut-être  ils  ont 
éprouvée. 

Les  odeurs  sont  donc  ,  comme  toutes  les  autres  sensations 
physiques,  une  sorte  de  toucher,  dans  lequel  le  corps,  quelle 
que  soit  sa  nature,  vient  au-devant  de  l'organe  et  se  trans- 
porte sur  la  seule  partie  de  l'animal  où  son  action  puisse 
manifester  toutes  ses  propriétés.  En  dernière  analyse,  toutes 
nos  sensations  se  réduisent  ainsi,  ou  à  une  taction  passive, 
c'est-à-dire  à  l'action  d'être  touché  ;  ou  à  un  tact  actif,  qui 
nous  donne  la  faculté  de  porter  notre  corps  ,  ou  quelques 
parties  de  notre  corps,  sur  la  surface  des  objets,  pour  en 
apprécier  quelques  qualités. 

Par  cette  admirable  disposition  nous  éprouvons  l'action  de 


448  .  l]yS 

la  plupart  des  corps.  C'est  ainsi  que  la  lumière,  fluide  impon- 
dérable, qui  se  modifie  si  diversement  à  la  surface  des  objets , 
en  transmet  l'image  dans  l'œil  ,  en  s'appliquant  exactement 
sur  le  nerf  de  la  rétine;  que  la  matière  de  la  chaleur  ou  le 
calorique  se  met  en  équilibre  avec  notre  corps,  s'y  applique 
ou  s'en  échappe,  en  manifestant  ainsi  sa  présence  ou  son  dé- 
faut ;  que  les  vibrations  communiquées  aux  corps  se  trans- 
mettent,  soit  directement  par  le  contact,  soit  par  l'intermède 
de  l'air  ou  des  gaz,  à  une  petite  quantité  d'air  renfermée  dans 
l'un  de  nos  organes,  avec  laquelle  elles  se  mettent  en  harmonie 
parfaite,  pour  faire  apprécier  les  sons  et  produire  Taudition; 
que  les  matières,  enfin  ,  qui  sont  susceptibles  de  se  dissoudre 
dans  les  liquides ,  viennent  manifester  leurs  qualités  sur  la 
région  de  l'animal  oii  elles  avoient  le  plus  grand  besoin 
d'être  appréciées  avant  de  parvenir  dans  l'intérieur  de  son 
économie,  puisque  la  saveur  est  une  des  qualités  de  l'ali- 
ment. 

En  dernière  analyse ,  tous  les  organes  des  sens  sont  constitués 
par  des  appareils  chimiques  ou  physiques,  véritables  éprou- 
vettes  où  des  nerfs  aboutissent,  pour  faire  naître  à  l'instant 
même  l'idée  complète  de  la  perception  et  de  la  sensation 
réelle. 

Nous  avions  besoin  d'entrer  dans  ces  détails  physiologiques 
pour  exposer  nettement  comment  on  conçoit  que  se  fait 
dans  les  insectes  ia  sensation  des  odeurs. 

Il  est  bon  de  rapporter  d'abord  des  faits  qui  prouvent  que 
les  insectes  jouissent  de  cette  sensation. 

II  semble  que  la  nature ,  en  douant  de  l'existence  cette 
innombrable  quantité  d'êtres  destructeurs,  ait  eu  pour  but 
de  les  employer  à  faire  disparoîtie  les  tristes  restes  des  êtres 
organisés  privés  de  la  vie,  afin  de  rendre  plus  tôt  à  la  masse 
générale  les  élémens  qui  les  composent,  pour  en  former 
promptement  de  nouveaux  par  un  cercle  continu  de  créa- 
tions et  de  destructions. 

Pour  parvenir  à  ce  but,  elle  a,  pour  ainsi  dire,  intéressé  à 
ses  travaux  tous  les  êtres  qu'elle  destinoit  à  cet  emploi  im- 
portant, en  leur  donnant  des  goûts  et  une  manière  de  vivre 
analogues  aux  fonctions  qu'ils  étoient  appelés  à  remplir;  et, 
afin  de  porter  ici,  comme  dans  toutes  ses  œuvres,  la  perfec- 


c,  •  INS  •     449 

tion  à  son  plus  haut  degré,  elle  a  doué  ces  animaux  d'une 
sensation  toute  particulière  et  propre  à  leur  genre  de  vie. 

C'est  par  le  milieu  même  dans  lequel  ils  habitent,  que  les 
insectes  sont  avertis  de  la  présence  des  corps  qui  peuvent 
servir  à  leur  nourriture  :  l'air,  en  se  chargeant  des  émana- 
tions odorantes  qui  s'en  dégagent  continuellement,  va  porter 
dans  l'organe  respiratoire  toutes  les  molécules  qu'il  tient  en 
suspension  ;  il  devient  ainsi  le  guide  invisible  de  l'animal 
qui  cherche  à  subvenir  à  ses  besoins. 

Les  premiers  observateurs  de  la  nature  n'avoient  point 
suivi  avec  l'attention  convenable  le  mode  de  décompositioa 
des  êtres  organisés.  Voyant  paroître  presque  subitement  des 
insectes  destructeurs,  des  larves,  ou,  comme  ils  le  disoient, 
des  vers,  dans  les  cadavres,  ils  les  regardoient  comme  le 
produit  de  la  corruption.  Il  n'y  a  pas  deux  siècles  que  Rédi 
prouva ,  par  des  expériences  concluantes ,  que  les  vers  y 
étoient  déposés  par  des  mouches  et  d'autres  insectes  ailés,  et 
que  ceux-ci  avoient  été  attirés  par  ce  qu'on  nommoit  Vins- 
tinct  sur  les  corps  qui  se  décomposoient  :  c'est  ce  qu'on 
observe  maintenant  tous  les  jours. 

C'est  ainsi  qu'on  voit  arriver  de  toutes  parts  des  insectes 
sur  le  résidu  des  alimens  qui  ont  été  soumis  à  l'action  diges- 
tive.  Tels  sont  particulièrement  les  bousiers,  les  sphéridies , 
les  escarbots ,  les  stpphylins,  les  mouches,  qui  soulèvent 
ces  matières,  les  perforent,  leur  font  présenter  plus  de  sur- 
face à  l'humidité,  au  dessèchement,  à  la  dissolution,  en  les 
dispersant  ou  en  les  étendant  sur  un  plus  grand  espace.  Tels 
sont  encore  les  nécrophores,  les  boucliers,  les  dermestes, 
les  anthrènes ,  les  ptines,  qui  paroissent  principalement 
attaquer  et  appelés  à  détruire  les  matières  organiques  ani- 
males privées  de  la  vie. 

On  refusoit  à  ces  insectes  l'organe  de  l'odorat;  mais  on  les 
supposoit  doués  d'une  vue  si  perçante  qu'elle  suppléoit  à  ce 
défaut.  Quelques  expériences  cependant  peuvent  combattre 
cette  opinion  et  en  faire  adopter  une  tout-à-fait  opposée. 

Certaines  fleurs  prennent  une  odeur  fétide  et  cadavéreuse 

tellement  prononcée  ,  qu'on  y  voit  arriver,  lors  de  leur  plus 

grand  épanouissement,   un  très-grand  nombre  d'insectes  qui 

vivent  ordinairement  dans  les  matières  animales  soumises  à 

23.  25 


45o     ,  IJXS  ' 

la  décomposition  putride.  C'est  ainsi  que  les  spathes  de  la  ser- 
pentaire [arum  dracunculiis) ,  les  corolles  de  la  stapelia  variée, 
se  trouvent  souvent  couvertes  ou  remplies  de  sylphes,  d'escar- 
bofs,  delà  mouche  delà  viande  et  autres  insectes,  qui  vien- 
nent non-seulement  dans  l'espoir  d'y  trouver  leur  nourriture, 
mais  même  pour  y  déposer  leur  prog^éniture.  Peut-on  se  re- 
fuser ici  à  l'évidence  ,  et  ne  pas  reconnoître  ,  d'abord ,  que  ces 
insectes  ont  été  trompés  par  leurs  organes  de  la  vision;  qu'en- 
suite ceux  de  Todoration  ont  produit  non-seulement  le  mou- 
vement volontaire  ou  le  transport  de  l'insecte  vers  le  lieu 
où  se  volatilisoient  les  molécules  odorantes,  mais  que,  de 
plus,  trompé  par  cette  sensation  illusoire,  l'insecte  a  été 
jusqu'à  déposer  ses  œufs  sur  une  matière  que  son  odorat  seul 
lui  avoit  indiquée  comme  propre  à  recevoir  ces  dépôts  pré- 
cieux ? 

Ne  voit -on  pas  les  abeilles,  les  guêpes,  les  sphinx,  les 
papillons  et  tous  les  insectes  qui  se  nourrissent  du  suc  des 
végétaux  ou  du  nectar  des  fleurs,  arriver  en  grand  nombre 
vers  la  plante  qui  le  produit,  aussitôt  qu'il  en  découle  ou  que 
les  pétales  sont  ouverts? 

C'est  encore  en  vain  qu'on  chercheroit  à  expliquer  ici  cette 
attraction  ,  ce  mouvement,  par  la  sensation  visuelle  de  l'in- 
secte :  car,  malgré  le  soin  des  fleuristes,  qui  enveloppent  leurs 
tulipes  dans  des  châssis  de  toile;  malgré  ceux  de  l'épicier, 
dont  le  miel  est  caché  par  les  douves  du  baril  qui  le  ren- 
ferme,  l'insecte  arrive,  averti  par  l'odeur,  et  fait  toutes  les 
tentatives  possibles  pour  parvenir  vers  le  lieu  d'où  elle  émane 
directement. 

Les  insectes  jouissent  donc  du  sens  de  l'odorat.  Mais  dans 
quelle  partie  de  leur  corps  réside  l'organe  propre  à  cette 
perception  P  II  est  probable  que  cette  sensation  s'opère  chez 
eux  ,  comme  dans  tous  les  autres  animaux  ,  par  l'organe  res- 
piratoire. Mais,  dans  les  insectes,  comme  nous  allons  bientôt 
l'exposer,  la  respiration  a  lieu  par  des  orifices  nombreux 
qui  correspondent  à  la  plupart  des  anneaux  du  corps,  excepté 
à  la  tête.  On  nomme  stigmates,  ces  ouvertures,  qui  toutes 
aboutissent  aux  trachées  ou  aux  vaisseaux  à  parois  élastiques, 
toujours  remplis  de  l'air  ambiant,  qui  y  arrive  sans  doute 
chargé  de  tous  les  corpuscules  odorans,  comme  chez  les  autres 


INS  •     ^s^ 

animaux.  Maïs  ce  gaz  pénètre-t-il  ainsi  dans  le  lacis  des  vais- 
seaux aériens  ?  ou  bien  dépose-t-il  ces  molécules  à  l'entrée 
même  des  stigmates  ?  C'esl^^ce  qu'il  est  difficile  de  décider, 
quand  on  n'éprouve  pas  soi-même  cette  sorte  de  sensation  ; 
car  certainement  nous  n'aurions  aucune  idée  de  la  fonction 
admirable  de  la  membrane  pituitaire  des  animaux,  si  nous 
n'éprouvions  pas  évidemment  la  sensation  des  odeurs,  et  si, 
dans  certaines  circonstances  appréciables,  nous  n'étions  pas 
privés  de  l'olfaction^' 

Goût.  On  conçoit  aisément  que  les  insectes  ont  la  faculté 
de  distinguer  les  saveurs.  On  a  cru  long-temps  qu'elle  rési- 
doit  dans  les  palpes  ,  parce  que  ces  parties  de  la  bouche  sont 
continuellement  en  mouvement  et  appliquées  sur  tous  les 
points  de  l'aliment,  à  mesure  qu'il  est  divisé  et  broyé  par  les 
mandibules  et  les  mâchoires.  On  étoit  porté  à  cette  idée, 
parce  que,  dans  un  très-grand  nombre  d'espèces,  l'extrémité 
des  palpes  se  renfle  ,  se  ramollit  et  devient  comme  vésicu- 
leuse;  c'est  encore  à  cause  de  cette  particularité  que  quel" 
ques  physiologistes  ont  émis  l'opinion  que  l'organe  de  l'odo- 
ration  pouvoit  siéger  dans  cette  partie.  Cependant  les  palpes 
n'existent  pas  dans  un  très-grand  nombre  d'insectes,  ou  bien 
ils  sont  très-courts  et  ne  peuvent  en  aucune  manière  servir  à 
cet  usage.  Il  vaut  mieux  présumer  que  les  saveurs  se  mani- 
festent chez  les  insectes,  comme  dans  la  plupart  des  animaux, 
dans  l'intérieur  même  du  canal  digestif,  et  principalement  à 
son  origine  ou  dans  la  bouche.  Chez  tous,  en  effet,  les  ali- 
mens  pénètrent,  ou  sous  la  forme  liquide,  comme  dans  les 
insectes  suceurs,  les  diptères,  les  hémiptères,  les  lépidop- 
tères, beaucoup  d'hyménoptères,  ou  ils  sont  liquéfiés  par  la 
salive  que  l'animal  unit  aux  particules  qu'il  détache  et  qu'il 
broie  avec  les  mâchoires  pour  les  porter  sur  le  prolongement 
de  la  lèvre  inférieure ,  qui  porte  à  l'intérieur  le  nom  de  langue 
ou  de  languette  [ligula]  ,  parce  qu'elle  en  remplit  les  fonc- 
tions. Il  se  rend,  en  eff'et ,  vers  cette  partie,  des  rerfs  très- 
distincts.    Lyonnet  les   a  représentés  parfaitement  dans  son 


i  Nous  avons  extrait  ces  détails,  relatifs  à  l'organe  de  l'odorat,  duti 
Mémoire  que  nous  avons  publié  sur  cet  objet  en  l'an  V  (1796)^  Magasi» 
«ncjclopéUi'jue,  tome   II,  p.  ^35  et  suiv. 


452      *  INS 

Histoire  analomique  de  la  chenille  des  cossus.  Ainsi,  c'est 
dans  la  bouche  que  Ton  doit  supposer  le  siège  de  l'organe  du 
goût,  dont  les  insectes  sont  certeinement  doués,  puisqu'ils 
recherchent  ou  abandonnent  certaines  sortes  d'alimens  après 
en  avoir  opéré  la  dégustation. 

Le  toucher,  dans  les  insectes,  paroît  être  l'un  des  sens  les 
moins  développés.  Ce  n'est  pas  que  ces  animaux  soient  privés 
de  parties  propres  à  être  mises  en  contact  avec  les  différens 
points  de  la  surface  des  corps;  mais  ces  parties  sont  générale- 
ment couvertes  d'une  peau  dure,  souvent  cornée,  et  qui  se 
refuse  par  conséquent  à  une  application  immédiate,  comme 
l'exige  l'appréciation  des  qualités  tangibles  descorps.  D'ailleurs, 
l'idée  de  la  température  plus  ou  moins  élevée  ,  de  la  mollesse  ou 
de  la  solidité,  delà  masse  ou  de  l'étendue  en  longueur,  largeur 
et  épaisseur,  ne  peut  pas  être  facilement  acquise  par  l'insecte 
au  moyen  du  toucher.  Les  organes  que  l'on  suppose  destinés 
à  cet  usage  dans  les  insectes,  sont  d'abord  les  antennes.  Il  est 
vrai  que  ces  sortes  de  cornes  ,  surtout  lorsqu'elles  sont  alon- 
gées  et  formées  d'un  grand  nombre  d'articulations,  semblent 
être  des  sortes  de  tentacules  que  l'insecte  met  continuelle- 
ment en  mouvement  pour  explorer  sa  route  et  pour  con- 
noître  les  obstacles  :  c'est  ce  que  l'on  voit  dans  les  sphèges, 
les  ichneumons  ,  les  chrysides,  qui  ont  les  antennes,  comme 
on  le  dit,  très-vibratiles  ;  c'est  ce  qu'on  observe  encore  dans 
les  capricornes  et  la  plupart  des  xyiophages,  dans  les  créo- 
phages ,  comme  les  carabes,  les  cicindèles  :  mais  dans  d'au- 
tres insectes  les  antennes  sont  formées  par  un  simple  poil 
ou  par  quelques  anneaux  très-courts.  A  quoi  servii'oient  ces 
antennes  dans  les  mouches ,  les  cigales,  les  demoiselles?  Se- 
condement, on  a  cru  pouvoir  attribuer  aux  palpes  cette 
même  faculté  du  toucher  ;  mais  ces  palpes ,  à  la  vérité  très- 
mobiles  dans  les  insectes  màcheurs,  sont  à  peine  en  rudiment 
ou  tout-à-fait  nuls  dans  les  insectes  suceurs ,  comme  les  hé- 
miptères, et  leur  forme  est  tout-à-fait  changée. 

Enfin,  les  tarses  sont  certainement  les  parties  les  plus  pro- 
pres à  donner  à  l'insecte  l'idée  de  la  nature  des  corps  sur 
lesquels  ils  s'appliquent.  Ils  offrent,  en  effet,  chez  la  plupart 
une  assez  large  surface  spongieuse  qui,  dans  les  mouches, 
les  chrysomèies ;  les  capricornes,  peut  facilement  s'adapter 


INS  •      455 

à  la  superficie  du  corps.  Chez  d'autres,  comme  dans  les  hé- 
miptères, les  hyménoptères  ,  ces  tarses  sont  en  général  alon- 
gés  ,  composés  d'articulations  très-mobiles.  Enfin,  dans  les 
araignées,  les  faucheurs  et  beaucoup  d'autres  aptères,  ces 
tarses  sont  évidemment  des  instrumens  qu'ils  emploient  pour 
explorer  la  solidité  et  la  nature  des  corps  sur  lesquels  ils  vont 
se  transporter, 

KuTRiTioN.  Tels  sont  les  organes  des  sensations  dans  les  in- 
sectes :  étudions  maintenant,  chez  ces  animaux,  la  fonction 
nutritive. 

Nous  avons  déjà  vu  que  quelques  insectes  se  nourrissent 
de  matières  liquides,  et  qu'ils  sont  dits  suceurs;  tandis  que 
d'autres,  attaquant  les  substances  solides,  sont  obligés  de  les 
diviser,  de  les  humecter,  de  les  broyer,  et  qu'à  cet  effet 
ces  insectes  sont  munis  de  mandibules  et  de  mâchoires  à 
l'aide  desquelles  ils  écrasent  et  réduisent  en  pulpe  leurs  ali- 
mens ,  et  qu'on  les  nomme  ,  dans  ce  cas ,  mâcheurs.  Les 
insectes,  comme  tous  les  êtres  animés,  tirent  les  élémens  de 
leur  nutrition  des  corps  organisés  ou  des  matières  qui  ont 
été  déjà  empruntées  par  d'autres  êtres  vivans  à  la  nature 
brute  ou  inorganique  ;  mais  les  modes  de  l'alimentation  sont 
extrêmement  variés,  comme  nous  allons  brièvement  l'expo- 
ser ici ,  nous  proposant  de  développer  ce  sujet,  avec  tous  les 
détails  qu'il  eomporte  ,  à  Tarticle  Nutrition  dans  les  insectes. 

Il  faut  d'abord  savoir  que  très-souvent  le  genre  de  nourri- 
ture varie  extrêmement,  dans  une  seule  et  même  espèce  d'in- 
secte, aux  diverses  époques  de  sa  vie.  Telle  espèce  est  car- 
nassière ou  se  nourrit  du  suc  des  animaux,  dans  son  premier 
âge,  qui  devient  ensuite  herbivore;  telle  autre,  au  con- 
traire ,  est  forcée  de  se  nourrir  d'abord  de  débris  de  végé- 
taux,  qui,  par  la  suite,  ne  pourra  se  sustenter  qu'avec  les 
humeurs  ou  les  parties  solides  des  animaux.  Quelques-uns 
également  pourront,  pendant  un  temps  de  leur  existence, 
absorber  ou  sucer  leur  nourriture  sous  forme  liquide,  et,  par 
conséquent,  sans  la  mâcher;  tandis  que,  dans  d'autres  cir- 
constances, les  parties  de  la  bouche  ayant  changé  de  forme, 
ils  n'attaqueront  que  les  solides.  Il  seroit  nécessaire  d'apporter 
ici  un  si  grand  nombre  d'exemples  de  ces  modifications,  que 
nous  nous  contacterons  d'en  citer  quelques-uns  des  plus  re- 
marquables. 


4^4       r  INS  ' 

L,es  hydrophiles,  qui  dans  leur  premier  âge  sont  ce  qu'on 
appelle  des  vers  assassins  ,  qui  attaquent  et  sucent  les  têtards 
des  reptiles,  les  petits  poissons,  les  mollusques,  les  insectes 
mous,  et  qui,  sous  leur  dernière  forme,  ne  recherchent 
plus  que  les  plantes  aquatiques  et  les  feuilles  à  demi  décom- 
posées des  A'égétaux  qui  tombent  dans  leau ,  nous  présentent 
un  cas  évident  d'un  zoophage  qui  devient  phytophage  :  il  en 
est  de  même  des  anthrènes ,  des  téléphores,  etc.  Dun  autre 
côté,  les  larves  des  fourmilions  sucent  leur  proie  sans  la  mâ- 
cher ,  et  l'insecte  parfait  a  la  bouche  parfaitement  organisée 
pour  broyer  les  alimens.  En  sens  inverse,  ne  voyons -nous 
pas  les  chenilles  des  lépidoptères,  comme  le  ver  à  soie  ,  ronger 
et  mâcher  les  feuilles;  tandis  que  les  papillons,  les  bombyces 
ne  peuvent  que  sucer  le  nectar  des  fleurs  avec  leur  langue 
ou  trompe  ,  qui  se  roule  en  spirale?  Ces  différences  de  mœurs 
et  de  conformation  dans  les  parties  de  la  bouche  sont  tou- 
jours liées  avec  d'importantes  modifications  dans  les  autres 
organes  digestifs. 

Tous  les  insectes  sont  doués  d'une  sorte  d'instinct  qui  les 
porte  à  déposer  leurs  œufs ,  ou  les  germes  de  leur  progéni- 
ture, dans  le  lieu  qui  leur  présentera  une  nourriture  plus 
facile  ,  ou  bien  les  parens  pourvoient  d'avance  aux  besoins 
de  la  famille  qui  doit  leur  succéder.  Quelques-uns,  comme 
les  abeilles,  les  fourmis,  les  termites,  travaillent  en  commun 
à  la  nourriture  des  petits,  et  leur  préparent  une  pâtée  dont 
les  molécules  ont  été  soumises  à  une  sorte  de  préparation 
digestive,  comme  le  font  les  oiseaux  et  surtout  les  pigeons. 
Toutes  les  familles  des  plantes,  et  leurs  parties  diverses,  de- 
viennent l'aliment  de  certaines  espèces  d'insectes,  qui  sucent 
ou  dévorent  les  racines,  les  tiges,  les  feuilles,  les  fleurs,  les 
différentes  parties  des  fruits;  d'autres  recherchent  les  ani- 
maux, vivent  à  leur  surface,  dans  leur  intérieur  :  chaque 
espèce  semble  être  attachée  à  telle  ou  telle  race  ,  ou  attaquer 
quelques  animaux  pendant  leur  vie  ou  après  leur  mort.  Ci- 
tons,  par  exemple,  les  œstres,  les  hippobosques,  les  mélo- 
bosques,  les  tiques,  les  puces,  les  poux ,  les  ricins,  les  cou- 
sins, les  taons,  les  stomoxes  ,  les  asiles,  les  araignées,  les 
demoiselles,  les  carabes,  les  cicindèles,  les  staphylins ,  les 
téléphores,  les  coccinelles,  les  mantes,  les  gpunaises ,  les  ré- 


INS  •>      455 

duves,  les  notonectes  ,  les  naucores,  etc. ,  qui  sucent  ou  ron- 
gent les  animaux  pendant  qu'ils  vivent  encore  ;  tandis  que 
d'autres  les  détruisent  après  leur  mort,  ou  s'attachent  a  leurs 
dépouilles  dans  toutes  les  circonstances  possibles,  dans  l'eau, 
dans  la  terre  ou  dans  l'air  :  tels  sont,  entre  autres,  les  der- 
mestes,  les  boucliers,  les  nécrophores ,  les  nitidules,  les  an- 
thrénes,  les  ptines ,  les  nécrobies ,  les  blattes,  les  teignes, 
etc.  Quelques-uns  se  développent  dans  l'intérieur  même  des 
animaux  vivans,  comme  les  larves  d'œstres ,  d'échinomyes , 
de  mouches,  de  conops  ,  d'ichneumons,  de  chalcides,  de 
sphèges,  etc. 

Quant  aux  organes  de  la  nutrition,  ils  varient  non-seule- 
ment dans  les  dilFérens  ordres,  mais  même  sous  les  formes 
diverses  que  les  insectes  prennent  lorsqu'ils  subissent  leurs 
métamorphoses. 

On  distingue  parmi  les  organes  digestifs,  la  bouche  ,  l'œso- 
phage ou  le  conduit  qui  s'étend  de  la  bouche  à  l'estomac  , 
l'estomac  même,  le  tube  digestif  ou  canal  intestinal  et  ses 
annexes,  tels  que  les  canaux  salivaircs,  pancréatiques,  biliai- 
res, qui  ne  forment  pas  chez  les  insectes  de  véritables  glandes 
sécrétoires. 

Nous  avons  déjà  étudié  les  parties  de  la  bouche,  d'abord 
au  commencement  de  cet  article  Insectes  et  à  celui  de 
Bouche.  Nous  ne  reviendrons  pas  sur  ce  sujet,  la  conforma- 
tion des  organes  destinés  à  saisir  et  à  absorber  les  alimens  , 
ou  ,  comme  on  l'a  dit,  la  disposition  des  instrumens  cibaires 
variant  excessivement  et  ayant  fourni  non-seulement  les  ca- 
ractères des  ordres,  mais  même  ceux  des  genres. 

L'œsophage  vient  immédiatement  après  l'arrière-bouche. 
C'est  un  canal  plus  ou  moins  alongé  et  étroit,  suivant  que 
l'insecte  a  le  corselet,  ou  les  trois  pièces  qui  forment  cette 
région  du  corps,  plus  étendu  de  devant  en  arrière.  11  est 
constamment  embrassé  à  son  origine  par  deux  cordons  ner- 
veux, qui  proviennent  du  premier  renflement  de  la  moelle 
épinière  contenue  dans  le  crâne,  et  que  l'on  regarde  comme 
le  cerveau.  C'est  au-dessous  de  lui ,  et  ensuite  dans  toute  sa 
longueur,  que  l'on  distingue  les  trois  ganglions  suivans  de  la 
série  des  nerfs  noueux,  qui  se  trouvent  ainsi  au-dessous  des 
intestins,  tandis  que,  dans  tous  les  animaux  à  vertèbres,  la 


'456     f  INS 

moelle  de  l'épîne  est  située  au-dessus  ou  en  arrière  dans  la 
cavité  vertébrale  :  l'œsophage  est  musculeux,  et  les  fibres  con- 
tractiles qu'on  y  observe ,  sont  principalement  disposées  en 
longueur.  11  est  vrai  qu'étant  sujet  à  se  dilater  partiellement , 
pour  laisser  passer  le  bol  alimentaire,  pour  ainsi  dire  calibré 
par  la  cavité  du  pharynx  ,  il  doit  offrir  des  rides  quand  il  n'est 
pas  rempli.  Au  surplus,  d'après  la  remarque  de  M.  Marcel 
de  Serres,  qui  a  donné  un  très-bon  Mémoire  sur  le  tube 
intestinal  dans  les  insectes  (mémoire  qui  a  été  imprimé  dans 
les  Annales  du  Muséum  en  i8i3),  les  fibres  circulaires  de 
l'œsophage  sont  beaucoup  moins  visibles  que  dans  cette  partie 
du  canal  qu'on  regarde  comme  le  duodénum. 

I.'estomac,  dans  les  insectes,  varie  beaucoup,  et  par  sa 
forme,  et  surtout  parle  nombre  des  poches  ou  des  renflemens 
qu'il  présente.  Ainsi,  il  y  a  un  véritable  gésier  ou  une  poche 
musculaire  et  fibreuse  dans  les  insectes  qui  avalent  goulûment  : 
leurs  alimens  sont  pour  ainsi  dire  broyés  à  l'intérieur,  après 
avoir  été  ramollis  soit  par  la  bouche  ,  soit  par  leur  séjour 
dans  l'œsophage,  qui  constitue  alors  une  sorte  de  jabot. 

Quelquefois  ce  gésier  est  garni  à  l'intérieur  d'écaillés  ou 
de  lames  de  corne  tranchantes  ou  dentelées,  et  on  l'observe 
ainsi  dans  les  espèces  carnassières ,  comme  dans  les  herbi- 
vores ;  cependant  ce  gésier  n'existe  que  chez  les  insectes 
mâcheurs. 

L'estomac  est  tantôt  simple,  ou  n'offre  qu'une  légère  dila- 
tation de  l'œsophage,  dont  il  est  à  peine  distinct;  chez  d'au- 
tres insectes  il  est  membraneux  et  très -dilaté  :  tels  sont  en 
particulier  ceux  qui,  sous  leur  dernier  état,  ne  font  que 
pomper  le  nectar  des  fleurs ,  comme  les  abeilles ,  les  papillons. 
Chez  d'autres  suceurs  ,  mais  qui  ne  pompent  que  les  humeurs 
animales,  comme  les  zoadelges  parmi  les  hémiptères,  on 
trouve  un  estomac  simple  encore,  mais  à  parois  musculeuses. 

Le  tube  intestinal  est  d'autant  plus  étendu ,  et  surtout 
plus  long ,  que  l'insecte  dans  lequel  on  l'observe  est  moins 
carnassier.  C'est  une  observation  qui  est  commune  au  sur- 
plus à  tous  les  animaux.  Les  espèces  qui  se  nourrissent  de 
matières  végétales ,  sont  obligées  d'en  ingérer  une  grande 
quantité  pour  en  obtenir  une  alimentation  égale;  car,  sur 
tin  poids  donné,  il  y  a  infiniment  plus  de  matière  alibile  ou 


INS  '^    /.57 

nourrissante  clans  une  substance  animale,  que  dans  celles  que 
contiennent  les  plantes  :  aussi  les  lapins,  les  ruminans,  tels 
que  la  vache,  le  mouton,  par  exemple,  ont-ils  le  ventre  plus 
volumineux  et  les  intestins  plus  longs  que  le  loup ,  les  be- 
lettes,  les  lions,  etc.  Au  reste,  ce  cas  général  est  démontré 
par  quelques  circonstances  propres  à  la  vie  des  insectes  : 
ainsi  les  larves  du  grand  hydrophile  noir  sont  carnassières, 
et  leur  tube  intestinal  n'a  guères  que  la  longueur  totale  du 
corps.  L'insecte  parfait  est  herbivore  :  ses  intestins,  roulés 
en  spirale,  offrent  plus  de  quatre  fois  la  longueur  de  la  larve. 
Les  têtards  des  grenouilles  nous  offrent  un  exemple,  en  sens 
inverse,  d'un  animal  herbivore  qui  devient  zoophage. 

On  distingue  dans  les  intestins  la  portion  qui  vient  immé- 
diatement après  l'estomac,  ou  les  estomacs  (car  souvent  il 
se  compose  de  plusieurs  poches),  et  la  portion  qui  avoisine 
l'anus.  La  première  est  regardée  comme  un  duodénum,  et 
l'autre  comme  le  rectum.  Quelquefois,  près  de  l'origine  du 
duodénum  ,  il  y  a  des  sortes  d'appendices  ou  de  prolongemens, 
en  forme  de  cul -de-sac,  qu'on  nomme  alors  des  cœcums, 
dans  lesquels  on  trouve  souvent  une  humeur  qu'on  a  regardée 
comme  une  sorte  de  bile  ou  de  suc  pancréatique,  parce  qu'il 
y  aboutit  en  effet  des  filamens  qui  paroissent  appelés  à  opérer 
une  sécrétion  d'une  humeur  propre  à  la  digestion. 

La  bile  proprement  dite  paroît  être  fournie  par  un  appa- 
reil de  filamens  beaucoup  plus  longs  et  plus  grêles,  qui  cons- 
tituent une  sorte  de  houppe,  qui  aboutissent  quelquefois  à  un 
canal  cholédoque  commun  ,  ou  qui  se  rendent  chacun  isolé- 
ment au  canal  digestif,  qu'ils  perforent  en  s'y  terminant. 

Le  rectum,  ou  la  dernière  portion  du  tube  intestinal, 
aboutit  à  l'anus,  ou  plutôt  à  l'orifice  commun  ,  qu'on  peut 
appeler  le  cloaque  :  on  y  remarque  des  fibres  circulaires  qui 
y  forment  une  sorte  de  sphincter.  On  y  observe  en  outre 
des  lignes  saillantes,  qui  y  forment  des  côtes  variables  qui 
probablement  déterminent  la  forme  que  prennent  les  ma- 
tières excrémentitielles  lorsqu'elles  sortent  du  corps  de  l'in- 
secte. Cette  diversité  de  forme  est  surtout  notable  dans  cer- 
taines larves  ou  chenilles,  comme  dans  celles  des  sphinx, 
des  bombyces,  qui  dénotent  ainsi  leur  présence  sous  les 
branches  des  arbres  ou  des  arbrisseaux  qu'elles  dévorent. 


458     '  IT^S 

Consultez  principalement  sur  cet  objet  le  Mémoire  de  M. 
Marcel  de  Serres,  déjà  cité,  et  qui  a  été  publié  dans  le  ving- 
tième volume  des  Annales  du  Muséum,  et  l'article  111  de 
l'Anatomie  comparée  de  M.  Cuvier,  tome  IV,  pages  1 1 2  et 
suivantes. 

Quant  à  la  nutrition  en  elle-même,  il  n'y  a  pas  le  moindre 
doute  qu'elle  ne  s'opère  au  moyen  des  alimens  qui  doivent 
fournir  aux  organes  non-seulement  les  moyens  de  se  réparer, 
mais  surtout  de  s'accroître  et  de  remplir  leurs  fonctions. 
Mais  comment  s'opère  cette  absorption  ?  C'est  une  question 
qui  n'est  pas  encore  complètement  résolue.  M.  Cuvier  a  ex- 
posé les  raisons  qui  font  croire  que  cetle  absorption,  dans 
les  insectes,  s'opère  par  une  sorte  d"imbibition  ,  parce  qu'ils 
sont  privés  d'organes  circulatoires,  ou  de  vaisseaux  lympha- 
tiques ,  artériels  et  veineux.  Il  est  vrai  qu'il  arrive  à  cette 
opinion  par  des  indications  négatives,  mais  il  y  est  tellement 
conduit  par  l'analogie ,  que  ses  raisonnemens  deviennent 
une  sorte  de  preuve  concluante.  Nous  allons  présenter  ici 
un  extrait  de  son  travail  à  ce  sujet,  tel  qu'il  est  consigné 
dans  les  Mémoires  de  la  société  d'histoire  naturelle  de  Paris, 
tome  I.*"^,  page  5/j. 

Il  est  de  fait  qu'on  n'observe  aucun  vaisseau  sanguin  dans 
les  insectes:  on  n'en  connoit  qu'un,  qui  est  une  sorte  de 
canal  régnant  le  long  de  la  partie  moyenne  du  dos  dans 
toutes  les  régions.  On  le  voit  très -bien  dans  les  chenilles, 
surtout  chez  celles  qui  ont  le  corps  ras,  comme  le  ver  à 
soie  ,  le  cossus  :  on  y  dislingue  une  sorte  de  mouvement 
alternatif  de  systole  et  de  diastole,  ou  de  dilatation  et  de 
contraction,  qui  semble  passer  de  la  tcte  à  la  queue;  mais 
on  n'a  jamais  pu  y  observer  des  branches  ou  des  racines  qui 
y  apportent  un  fluide  liquide  ou  qui  en  sortent. 

D'un  autre  côté,  quand  on  sait  de  quelle  manière  s'opère, 
dans  les  insectes,  la  respiration  ,  on  ne  voit  pas  une  aussi 
grande  nécessité,  que  chez  les  autres  animaux,  delà  présence 
d'un  agent  central  de  la  circulation,  ni  de  canaux  propres 
à  porter  les  humeurs  vers  le  lieu  où  l'air  vient  se  mettre 
spécialement  en  contact  avec  les  humeurs  nutritives.  C'est 
ce  que  nous  chercherons  à  développer  par  la  suite.  Enfin , 
par  cela  même  qu"il  y  a  dans  les  animaux  doués  de  la  cir- 


"  INS  "  459 

culatîon  ,  des  vaisseaux  artériels  et  veineux,  ou  qui  viennent 
du  cœur  et  qui  s'y  rendent,  on  conçoit  qu'il  existe  chez  eux 
des  glandes  conglomérées,  destinées  à  opérer  les  sécrétions: 
ainsi  le  foie,  le  pancréas;  les  glandes  parotides,  salivaires  ; 
les  testicules,  etc.  Mais  cela  devoit  être  autremwif  dans  les 
espèces  privées  de  la  circulation;  aussi  n'y  a-t-il  pas  de 
glandes  destinées  à  ces  fonctions.  Ces  organes  sécréteurs  sont 
formés  de  filamens  nombreux  et  distincts,  qui  plongent  au 
milieu  même  du  fluide  nourricier  dont  ils  doivent  emprunter 
les  matériaux  ,  pour  les  travailler  chacun  suivant  son  mode 
et  opérer  ainsi  les  sécrétions. 

Voilà  comment  il  faut,  dans  l'état  actuel  de  la  science 
anatomique  et  physiologique,  croire  que  la  nutrition  s'opère 
chez  les  insectes.  C'est  par  la  porosité  du  tube  intestinal  que 
les  matériaux  les  plus  propres  à  l'alimentation  se  séparent 
delà  masse  ingérée;  leur  division  est  telle,  qu'ils  forment 
alors  une  sorte  de  vapeur  dont  les  molécules,  peut-être  en- 
core plus  fluides  que  les  liquides,  sont  absorbées  vraisembla- 
blement sous  la  forme  de  gaz,  que  conliendroient  alors  les 
nombreuses  trachées  dont  le  tube  intestinal  est  couvert. 

Cependant  d'autres  sécrétions  s'opèrent  encore  dans  les 
insectes;  mais  le  mode  de  cette  séparation  des  humeurs  nous 
est  à  peu  près  inconnu.  Nous  savons,  par  exemple,  que 
l'acide  produit  par  les  fourmis  ,  et  qui  est  analogue  à  celui  du 
vinaigre,  est  dégorgé  par  l'insecte;  que  plusieurs  autres  ani- 
maux de  la  même  classe  vomissent  ainsi  à  volonté  ou  dégor- 
gent quelques  matières,  soit  fétides,  soit  nuisibles,  au  mo- 
ment 011  elles  se  croient  en  danger.  C'est  ainsi  que  les  bou- 
cliers, les  carabes,  les  larves  et  les  chenilles,  rendent,  par 
la  bouche,  une  humeur  dégoûtante  ;  que  d'autres ,  comme 
les  cétoines,  les  blaps,  laissent  sortir  du  cloaque  quelque 
liqueur  fétide;  que  les  méloës,  les  chrysomèles  font  suinter 
de  leurs  articulations  une  sorte  d'huile  d'une  odeur  désa- 
gréable ;  que  les  coccinelles  font  exhaler,  du  bord  de  leur 
corselet,  une  humeur  jaunâtre  d'une  grande  volatilité  et 
dune  saveur  amère;  que  plusieurs  larves,  comme  celles  de 
la  chrysomèle  du  peuplier,  les  chenilles  des  papillons  po- 
dalire  et  machaon ,  celle  du  bombyce  vinule  ou  queue-four- 
chue font  sortir  des  tubercules,  des  tentacules,  de  la  surface 


46o   '  I]y§  • 

desquels  s'exhale  une  humeur  particulière  ;  que  les  staphylîns 
font  également  saillir  de  l'anus  deux  vésicules  qui  transsudent 
une  liqueur  acide  et  très -odorante  ;  que  chez  les  brachins 
qu'on  nomme  fumant  et  fêtard ,  il  s'échappe  de  l'anus  ,  à  la 
volonté  de  l'animal,  un  gaz  acide,  produit  par  une  liqueur 
contenue  dans  deux  vésicules;  que  d'autres  portent  des  odeurs 
plus  ou  moins  fortes  :  ainsi  l'hémérobe  aux  yeux  d'or ,  au 
moment  du  danger,  exhale  une  odeur  d'excrémens  humains; 
lespentatomcsetles  punaises,  des  émanations  toutes  désagréa- 
bles; tandis  que  les  capricornes,  lescicindèles  ,  les  fourmilions 
et  plusieurs  autres  insectes  des  sables,  portent  une  sorte  d'o- 
deur suave  d'ambre  ou  de  rose.  C'est<lans  cette  catégorie  des 
sécrétions  qu'il  faut  également  ranger  les  fils  déliés  que  pro- 
duisent les  hydrophiles,  quelques  ichneumons  qu'on  nomme 
à  coton,  la  plupart  des  chenilles  des  bombyces,  et  en  parti- 
culier celle  du  mûrier,  qui  donne  la  soie.  Les  sécrétions  de 
la  laque,  de  la  cire  ;  l'humeur  de  l'aiguillon  de  la  guêpe  et 
des  abeilles  ;  celle  de  la  trompe  des  réduves,  des  naucores; 
la  liqueur  phosphorique  des  scolopendres  ,  de  la  fulgore 
porte-lanterne,  des  taupins  phosphorescens  et  noctiluque  , 
des  lampyres  vers- luisans;  la  graisse  qui  se  sécrète  dans  le 
corps  des  larves  pour  l'époque  où  aura  lieu  la  métamorphose 
sous  létat  de  nymphe  ,  offrent  encore  un  autre  mode  desécré- 
tions.  On  conçoit  qu'il  nous  est  impossible  d'entrer  ici  dans 
ces  détails  ,  que  nous  avons  dû  cependant  indiquer. 

Passons  maintenant  à  l'étude  de  la  Respiration  chez  les 
insectes.  Nous  avons  déjà  eu  occasion  de  parler  des  orifices 
par  lesquels  Tair  pénètre  dans  le  corps  des  insectes.  Nous 
savons  que  ces  ouvertures ,  qu'on  nomme  les  stigmates  ou 
les  spiracules,sont  à  peu  près  au  nombre  de  seize  à  dix-huit, 
correspondant  chacun  à  l'un  des  côtés  des  segmens  du  cor- 
selet et  des  anneaux  de  l'abdomen.  Ces  stigmates  sont  l'ori- 
gine des  trachées  ou  des  vaisseaux  aériens,  dont  la  structure 
est  l'une  des  plus  singulières.  1-a  plupart  sont  formés  d'une  lame 
mince,  élastique,  contournée  en  spirale  sur  elle-même,  de 
manière  à  former  un  tube  continu:  et,  pour  en  donner  une 
idée  fort  exacte,  qu'on  se  figure  l'un  de  ces  fils  d'or,  d'ar- 
gent ou  de  cuivre,  tirés  à  la  filière,  et  aplatis  ensuite  comme 
ceux  dont  on  se  sert  pour  en  former  les  galons.  On  sait  que 


»  INS  -    46i 

ces  fils  métalliques  ne  font  que  recouvrir  un  autre  fil  de  soie 
ou  de  matière  végétale ,  de  manière  à  le  masquer  complè- 
tement. Si  l'on  soumet  un  fil  de  galon  ainsi  disposé  à  l'action 
du  feu,  la  matière  végétale  ou  animale  se  brûle,  se  réduit 
en  cendre,  et  cette  cendre  peut  sortir  par  les  deux  extré- 
mités du  tube,  qui  reste  abrs  creux  et  formé  d'une  lame 
spirale  ,  dont  les  tranches  sont  parfaitement  en  rapport  les 
unes  avec  les  autres  :  telles  sont  les  trachées  chez  la  plupart 
des  insectes.  En  effet,  si  l'on  en  tire  une  à  l'aide  d'une 
petite  pince,  on  la  voit  se  détordre  ou  se  défiler^  et,  aban- 
donnée à  elle-même,  elle  tend  à  reprendre  sa  disposition  en 
spirale.  C'est  à  cette  propriété  qu'est  due  leur  aptitude  à 
former  des  tuyaux  élastiques,  se  soutenant  par  eux-mêmes, 
et  restant  toujours  propres  à  recevoir  l'air,  qui  y  pénètre, 
à  ce  qu'il  paroît,  par  sa  propre  pesanteur  et  par  sa  fluidité 
extrême. 

Ces  canaux  aériens  sont  en  général  cylindriques  dans  une 
certaine  étendue  de  leur  longueur;  cependant  il  en  est  qui 
sont  comme  étranglés  d'espace  en  espace ,  et  qui  forment 
alors  comme  des  vésicules  plus  ou  moins  renflées,  arrondies, 
ovales  ou  sphériques.  Les  larves  ont  des  trachées,  comme  les 
insectes  parfaits;  mais  il  s'opère  dans  ces  organes,  à  l'époque 
de  la  transmutation  ou  de  la  métamorphose ,  un  changement 
presque  aussi  remarquable  que  celui  qui  a  lieu  dans  le  reste 
du  corps.  Quelques  insectes  aquatiques,  en  particulier,  ont 
une  manière  de  respirer  tout-à-fait  différente  sous  les  trois 
états  de  larves,  de  nymphes  et  d'insectes  parfaits. 

On  voit  dans  un  grand  nombre  de  diptères,  lorsqu'ils  sont 
encore  sous  l'état  de  larves,  les  orifices  des  trachées  groupés 
diversement  vers  les  derniers  anneaux  du  corps.  Chez  les 
larves  des  mouches  armées  ou  stratiomys ,  par  exemple,  on 
remarque  une  sorte  d'aigrette  formée  de  poils  barbus,  comme 
ceux  qui  couronnent  les  semences  des  pissenlits,  des  scorzo- 
nères  et  autres  plantes  composées  :  c'est  au  centre  de  cette 
aigrette,  comme  huilée,  que  s'observe  l'orifice  respiratoire. 
Dans  les  larves  et  les  nymphes  des  libellules  ou  demoiselles, 
le  mode  de  respiration  est  surtout  singulier.  L'eau  pénètre 
dans  leur  rectum  par  une  sorte  d'inspiration  :  il  est  probable 
qu'elle  abandonne  là  le  gaz  oxigène  qui  s'y  trouve  combiné. 


^•.C2    r  INS    -  • 

On  voit,  en  effet,  dans  l'épaisseur  des  parois  de  cet  intestin 
un  grand  nombre  de  trachées,  qui  représentent  cinq  grandes 
feuilles  ou  nervures  de  feuilles  composées  de  petites  trachées 
qui  se  rendent  dans  quatre  troncs  principaux,  dont  deux, 
plus  gros  encore,  se  subdivisent  dans  toutes  les  parties  du 
corps.  On  rend  sensible  à  l'œil  ce  mode  de  respiration  des 
larves  dont  nous  parlons,  en  les  laissant  séjourner  pendant 
quelques  minutes  dans  une  eau  colorée,  puis  en  les  transpor- 
tant dans  une  autre  eau  très-limpide  :  à  chaque  mouvement 
d'expiration  l'eau  sort  colorée  de  l'anus,  après  avoir  lavé  les 
tuniques  de  l'intestin.  D'ailleurs  ,  l'animal  emploie  ce  mode 
de  respiration  pour  faciliter  son  transport  ou  son  mouvement 
dans  l'eau,  en  profitant  de  la  résistance  que  le  jet  sortant  de 
l'anus  éprouve  sur  la  masse  du  liquide;  le  corps  de  l'insecte  , 
s'appuyant  ainsi  en  arrière,  avance  du  côté  opposé,  où  est 
la  tête.  Dans  les  larves  des  éphémères,  dans  celles  des  phry- 
ganesj  des  cousins,  des  tourniquets,  il  faut  avouer  qu'il 
semble  exister  de  véritables  branchies,  toujours  en  mouve- 
ment quand  l'animal  respire.  C'est  une  sorte  d'anomalie 
parmi  les  insectes,  qui  mérite  une  attention  toute  particu- 
lière ,  surtout  dans  les  éphémères  ,  si ,  comme  Swammerdam 
l'a  pensé  ,  ces  insectes  ont  en  outre  la  faculté  de  féconder 
les  œufs  après  qu'ils  sont  séparés  du  corps  de  leur  mère;  ce 
qui  est  une  analogie  marquée  avec  les  poissons  et  quelques 
reptiles  batraciens. 

Il  résulte  des  recherches  anatomiques,  que,  comme  les 
insectes  n'ont  ni  cœur  ni  vaisseaux  ,  ce  n'est  pas  le  sang  qui 
va  chercher  l'air,  mais  l'air  qui  se  porte  partout  oii  se  trou- 
vent les  humeurs;  de  ';orte  que,  par  le  fait,  le  résultat  est 
le  même,  puisque  les  deux  fonctions  s'exécutent  réellement 
comme  deux  nombres  qui  sont  multipliés  indifféremment 
l'un  par   l'autre  et  qui  donnent  le  même   quotient. 

D'après  les  expériences  de  M.  Vauquelin,  insérées  dans 
les  Annales  de  chimie,  tome  XII,  page  273  ,  il  a  été  constaté 
que  l'oxigène  est  nécessaire  à  la  respiration  des  insectes;  que 
ce  gaz  est  absorbé;  que  l'acide  carbonique  est  dégagé,  et  que 
la  matière  de  la  chaleur  se  développe  dans  cette  opération 
animale. 

Quoique  la  température   des  insectes  soit  à  peu  près  la 


.5  •  INS  •    465 

même  que  celle  de  l'atmosphère,  il  faut  avouer  qu'on  ne  la 
connoit  pas  positivement  :  d'une  part,  parce  qu'il  est  très- 
difficile  de  l'observer  et  de  l'estimer,  et  que,  de  l'autre,  le 
corps  de  l'insecte  est  bientôt  mis  en  équilibre  avec  les  ma- 
tières qui  l'environnent.  Cependant  on  a  observé  que  les  in- 
sectes qui  vivent  en  société,  et  surtout,  dans  nos  climats, 
les  fourmis  et  les  abeilles,  lorsqu'elles  sont  réunies,  déve- 
loppent une  température  presque  égale  à  celle  de  l'homme, 
si  elle  ne  la  dépasse  pas.  Un  thermomètre,  placé  pendant 
l'hiver  au  centre  d'une  ruche,  y  reste  constamment  élevé  à 
28  à  5o°  Rcaumur;  et  quand  on  excite  ces  insectes,  leur 
respiration  devient  plus  active,  et  ils  développent  alors  pres- 
que subitement  une  température  qui  monte  à  deux  ou  trois 
degrés  au-dessus  de  celle  qu'ils  inarquoient  d'abord. 

Nous  allons  parler  ici  de  la  voix  des  insectes,  quoique 
réellement  les  sons  produits  par  ces  animaux  ne  puissent  pas 
toujours  être  attribués  à  l'air  qui  sort  de  leur  corps.  En  trai- 
tant du  bourdonnement  dans  les  abeilles ,  nous  avons  exposé 
quelques  faits  qui  semblent  porter  à  croire  que  peut-être  la 
vibration  communiquée  à  l'atmosphère  est  due  à  l'ébranle- 
ment de  l'air  qui  sort  des  stigmates  du  corselet;  et  en  par- 
lant, au  commencement  de  cet  article,  de  la  faculté  audi- 
tive ,  nous  avons  exposé  quelques  faits  entomologiques  re- 
latifs aux  différens  bruits  que  les  insectes  produisent.  La 
plupart  sont  dus  à  des  frottemens  ou  des  vibrations  rapides, 
communiqués  soit  aux  corps  voisins,  soit  à  certaines  parties 
conformées  de  manière  à  représenter  des  cordes  ou  des  mem- 
branes ;  aussi  a-t-on  dit,  en  parlant  des  insectes  :  Aninialia 
muta,  nisi  alio  proprio  instrumenta  sonora.  Les  uns  font  mou- 
voir la  tête  sur  le  corselet,  ou  celui-ci  sur  les  élytres,  comme 
les  capricornes  ,  les  criocères  :  d'autres  font  vibrer  les  anneaux 
de  l'abdomen  contre  l'extrémité  libre  de  ces  mêmes  élytres; 
tels  sont  les  trox  ,  les  ateuches.  Chez  quelques-uns  c'est  un 
bouquet  de  poils  roides,  comme  une  brosse  qui  frotte  contre 
un  corps  solide;  c'est  ce  qui  a  lieu  dans  les  blaps  :  d'autres 
frappent  fortement  le  bois  qu'ils  rongent,  avec  quelques 
parties  de  la  tête,  comme  les  taupins,  les  vrillettes;  chez  les 
cigales  mâles  ,  c'est  une  sorte  de  tambour  ou  d'écaillé  con- 
cave ,  sous  laquelle  roule  un  cylindre  garni  de  cordes  sail- 


464   (  ÎNS 

lantes:  ceux-ci ,  comme  les  mâles  des  sauterelles,  des  criquets, 
font  résonner  quelques  parties  de  leurs  élytres  en  les  croisant 
rapidement,  ou  en  les  agitant  avec  les  jambes,  comme  les 
cordes  de  certains  instrumens  résonnent  sous  l'archet  qui  les 
frotte,  etc.  (Voyez  Sons  produits  par  les  insectes.) 

Génération.  Après  avoir  étudié  dans  les  insectes  les  or- 
ganes du  mouvement  et  des  sensations  qui  établissent  la  vie 
de  rapport  ou  de  relation  dans  ces  animaux,  nous  avons  fait 
connoître ,  d'une  manière  générale  ,  les  parties  qui  servent 
à  la  nutrition  ou  à  l'augmentation  de  volume  du  corps  de 
l'insecte,  et  à  la  réparation  des  matériaux  qu'il  emploie  pour 
exécuter  ses  fonctions;  nous  avons  traité  en  particulier  des 
organes  de  la  digestion ,  de  la  respiration  ,  de  la  voix  et  des 
sécrétions.  11  nous  reste  à  parler  de  celle  de  ces  sécrétions 
qui  est  la  plus  importante  ,  puisqu'elle  donne  aux  êtres  vivans 
la  faculté  de  reproduire  d'autres  individus  en  tout  semblables 
à  eux-mêmes  ou  destinés  à  le  devenir  :  nous  allons  donc  faire 
connoître  les  organes  de  la  génération  dans  les  insectes. 

Nous  prions  le  lecteur  de  vouloir  bien  consulter  sur  ce 
sujet  les  trois  articles  que  nous  allons  lui  indiquer,  afin 
d'éviter  ici  les  répétitions.  Nous  avons  présenté  au  mot  Accou- 
plement dans  les  insectes  ,  toutes  les  particularités  les  plus 
curieuses  sur  le  rapprochement  des  sexes.  Aux  mots  Repro- 
duction et  Ponte,  nous  nous  proposons  de  donner  le  com- 
plément de  cette  fonction. 

Tous  les  insectes  proviennent  d'autres  individus  absolu- 
ment semblables  à  eux,  et  dont  ils  se  sont  séparés  d'abord 
sous  forme  d'cfu/s,  c'est-à-dire  que  ce  germe  a  été  déposé, 
avec  une  certaine  quantité  de  nourriture  appropriée  à  son 
premier  âge,  dans  une  coque  membraneuse  plus  ou  moins 
solide.  La  configuration  de  ces  œufs,  et  la  manière  dont  ils 
sont  pondus  et  disposés,  chacun  selon  les  besoins  futurs,  sont 
des  plus  admirables.  Il  en  est  de  mous,  et  d'autres  dont  la 
coque  acquiert  quelquefois  une  très-grande  solidité.  Les  uns 
sont  agglomérés,  collés  les  uns  aux  autres,  réunis  par  des 
pédicules  communs  ou  distincts;  il  en  est  de  sphériques , 
d'ovales,  de  cylindriques,  de  plats,  de  déprimés,  de  com- 
primés, de  prismatiques,  d'anguleux,  etc.  ;  quelques-uns  sont 
enveloppés  de  matières  protectrices  propres  à  en  éloigner  les 


»  INS  .      465 

animaux  qui  en  seroient  avides  :  ce  sont  tantôt  des  odeurs, 
des  pointes  acérées,  des  liqueurs  corrosives  ,  des  enveloppes 
serrées  et  impénétrables,  ou  d'autres  moyens  astucieux  et 
trompeurs  que  la  femelle  a  mis  en  usage  pour  garantir  sa 
progéniture,  jusqu'à  les  couvrir  de  son  propre  corps,  qui  se 
dessèche  et  les  protège  comme  un  bouclier,  ainsi  qu'on  le 
voit  dans  les  cochenilles.  On  conçoit  aussi  que  la  couleur  de 
ces  œufs  varie  beaucoup  selon  les  espèces  et  Tépoque  depuis 
laquelle  ils  ont  été  pondus,  parce  qu'alors  le  germe  déve- 
loppé communique  ses  teintes  aux  membranes  qui  les  recè- 
lent. Quelques-uns  de  ces  œufs  éclosent  dans  l'intérieur  du 
corps  de  leur  mère  :  c'est  ce  qui  arrive  à  ceux  des  pucerons 
dans  certaines  époques  de  l'année ,  k,  ceux  de  la  mouche 
bleue  de  la  viande  ,  des  hippobosques  ;  enfin  ,  chez  tous  les 
insectes  dits,  pour  cela  même  ,  ovovivipares. 

Le  plus  souvent  les  sexes  sont  distincts  et  séparés,  ou  sur 
des  individus  différens  ;  les  uns  sont  mâles  et  les  autres  fe- 
melles. Le  nombre  des  individus  de  l'un  et  de  l'autre  sexe 
est  en  général  à  peu  près  le  même;  cependant  il  en  est  quel- 
ques-uns qui  sont  condamnés  dès  l'enfance  à  n'avoir  jamais 
les  organes  sexuels  complètement  développés.  Quand  cette 
anomalie  existe,  ce  sont  les  femelles  qui  sont  ainsi  privées 
des  organes  sexuels ,  au  moins  apparens  ,  et  on  les  dit  alors 
neutres  ou  mulets  :  c'est  ce  qu'on  observe  dans  quelques  genres 
d'hyménoptères,  principalement  dans  les  fourmis,  les  guêpes, 
les  abeilles,  et  dans  quelques  névroptères  ou  hémiptères, 
comme  les  termites,  les  pucerons.  11  est  cependant  rare  que 
les  insectes  d'une  même  espèce  vivent  par  paires  ou  en 
monogamie.  Le  seul  besoin  de  la  fécondation  les  rapproche 
pour  un  temps  très-court  ;  le  mâle  périt  peu  de  temps  après 
l'accouplement,  tandis  que  la  femelle  survit  jusqu'après  la 
ponte.  Nous  avons  déjà  dit  qu'il  sembloit  qu'il  n'y  avoit  que 
les  sucs  élaborés  dans  le  jeune  âge  de  l'insecte  qui  pussent 
servir  à  l'-œuvre  de  la  génération;  car,  aussitôt  que  ces  ani- 
maux ont  pris  leur  dernière  forme,  et  qu'ils  ont  acquis  le 
pouvoir  de  donner  ou  de  recevoir  le  fluide  qui  transmet  la 
vie,  ils  s'accouplent,  pondent  et  meurent.  Les  mâles  sont  en 
général  plus  petits  que  les  femelles  :  ils  sont  plus  sveltes,  plus 
brillans  et  mieux  colorés;  la  forme  des  antennes,  des  ailes, 
23.  3o 


466      ,  I>^S  ( 

et  surtout  l'extrémité  de  rabdomeu  ou  résident  les  organes 
sexuels  et  les  instrumens  destinés  à  placer  les  œufs  dans  les 
circonstances  les  plus  favorables  à  leur  développement,  offrent 
souvent  de  notables  différences. 

Ainsi  les  màlcs  des  fourmis ,  des  cochenilles ,  des  puce- 
rons ,  de  (juelques  coléoptères  herbivores ,  sont  excessivement 
petits  de  taille,  si  on  les  compare  avec  leurs  femelles.  Les 
antennes  des  bombyces,  celles  des  rhipiphores,  des  taupins, 
sont  beaucoup  plus  développées  dans  les  mâles;  les  ailes  du 
bombyce  disparate,  du  tau,  de  l'étoilée,  n'ont  presque  pas 
de  rapports  avec  celles  des  femelles;  quelques-unes  des  fe- 
melles sont  même  tout-à-fait  sans  ailes  ,  comme  dans  notre 
espèce  de  lampyre  dite  à  cause  de  cela  ver  luisant. 

Chez  la  plupart  des  insectes  les  organes  sexuels  sont  y)lacés 
à  l'extrémité  de  l'abdomen;  elles  font  le  plus  souvent  saillie 
au  dehors  dans  les  mâles,  quebjuefois  aussi  chez  les  femelles. 
Dans  quelques  espèces,  cependant,  comme  dans  les  demoi- 
selles et  les  araignées  ,  les  parties  sexuelles  femelles  sont 
autrement  disposées  que  celles  des  mâles. 

Nous  avons  fait  connoitre  ,  à  l'article  Accouplement,  toutes 
les  particularités  les  plus  remarquables  que  développent  les 
insectes  à  l'époque  où  les  deux  sexes  sentent  la  nécessité  de 
se  manifester  réciproquement,  ou  de  se  faire  connoître  le 
besoin  impérieux  de  la  reproduction  et  de  la  conservation 
de  l'espèce  ,  en  s'adressant  h  tous  les  sens  :  les  uns  en  produi- 
sant des  bruits  particuliers  ;  d'autres,  en  développant  des  effets 
de  lumière  pendant  l'obscurité  des  nuits;  plusieurs  en  exhalant 
des  odeurs  qui  manifestent  au  loin  leur  présence  ,  et  qui  at- 
tirent ainsi  les  deux  sexes  l'un  vers  l'autre  par  une  sorte  de 
véhicule   ou  de  guide  invisible. 

L'acte  de  la  reproduction  s'opère  dans  les  insectes  par  le 
rapprochement  des  sexes  et  par  le  contact  plus  ou  moins 
prolongé  des  organes ,  qui  se  pénètrent  de  Uianière  que  la 
liqueur  prolifique  ou  séminale  peut  aller  vivifier  les  œufs, 
dont  les  rudimens  préexistent  dans  les  ovaires;  le  plus  sou- 
vent ce  sont  des  organes  mâles,  solides  et  cornés,  qui  sont 
introduits  dans  le  cloaque  de  la  femelle.  Ces  organes  mâles 
consistent  ordinairement  dans  des  pièces  qui  se  présentent 
d'abord  avec  peu  de  volume,  mais  quij  s'écartant  bientôt, 


•  INS  •     467 

permettent  aux  parties  molles  de  se  porter  plus  avant,  et 
qui,  en  outre,  se  renversent  ou  s'accrochent  de  manière  que 
la  séparation  des  deux  individus  ainsi  accouplés  ne  peut  plus 
s'opérer,  à  moins  que  les  parties  ne  soient  restituées  dans 
leur  situation  primitive,  ce  qui  n'arrive  que  lorsque  la  fé- 
condation est  complète. 

La  configuration  des  organes  mâles  et  femelles  varie  trop  , 
non-seulement  dans  les  ordres,  mais  même  dans  les  genres 
et  les  espèces,  pour  que  nous  essayions  d'en  présentrr  une 
idée  générale.  Nous  dirons  seulement  que  chez  les  mâles  on. 
trouve  des  vaisseaux  spermatiques  très- nombreux  et  fort 
gonflés  avant  l'accouplement;  que  ces  vaisseaux,  qui  ont 
douze  ou  quinze  fois  la  longueur  du  corps  ,  sont  plies  et 
repliés  sur  eux-mêmes,  de  manière  à  occuper  une  grande 
partie  de  la  cavité  de  l'abdomen  :  ils  aboutissent  quelquefois, 
à  un  réservoir  commun  ,  à  des  vésicules  séminales  qu'on  a 
comparées  à  des  prostates,  à  des  épidydimes  ,  à  des  canaux 
déférens,  qui  se  rendent  plus  ou  moins  médiatement  à  une 
sorte  de  pénis  ayant  pour  fourreau  les  écailles  cornées 
qui  font  l'office  de  gorgeret  dilatateur. 

Dans  les  femelles,  outre  l'orifice  destiné  à  recevoir  les 
organes  du  mâle  ,  il  existe  souvent  des  instrumens  qui  faci- 
litent la  ponte,  ou  la  manière  diverse  dont  les  œufs  doivent 
être  déposés.  La  vulve  s'ouvre  dans  le  cloaque;  c'est  là  qu'a- 
boutissent les  oviductes  :  ce  sont  des  canaux  très-prolongés  , 
comme  les  vaisseaux  spermatiques,  mais  beaucoup  plus  gros. 
On  y  distingue  les  œufs ,  qui  sont  d'autant  plus  développés, 
qu'ils  sont  plus  près  du  canal  commun  qui  les  mène  dans  le 
cloaque  :  c'est  le  plus  souvent  dans  ce  canal  commun  qu'ils 
reçoivent  la  glu  ou  l'humeur  visqueuse  qui  sert  à  les  fixer 
ou  à  les  suspendre  par  des  pédicules  quelquefois  très-alongés, 
comme  on  l'observe  dans  les  œMifs  des  hémérobes.  Il  est  des 
insecies  qui  pondent  tous  les  œufs  à  la  fois,  comme  deux 
grappes,  c'est  ce  qui  arrive  aux  éphémères;  mais  le  plus 
souvent  ces  œufs  passent  successivement ,  un  à  un ,  par 
l'orifice  du  cloaque.  Les  pondoirs  ont  tantùt  la  forme  de 
couteaux,  de  sabres  ,  de  scies,  de  gouches ,  de  vrilles,  de 
perçoirs,  desondes  :  c'est  ce  qu'on  observe  dans  les  saute- 
relles, les  grillons,  les  mouches  à  scie,  les  ichneumons  ,  les 


468       '  IJSS 

chalcides,  les  évanies,  les  leucopsides,  les  nèpes ,  les  panor- 
pes,  quelques  trichies,  lespriones,  hes  cossus,  etc. 

Le  mode  même  du  rapprochement  des  sexes  est  déterminé 
par  la  configuration  générale  du  corps,  ou  par  la  position 
des  organes  sexuels.  Le  mâle  est  ordinairement  placé  au- 
dessus  de  la  femelle,  qui  est  plus  grosse.  La  puce,  les  éphé- 
mères, dit-on,  et  quelques  autres,  font  seuls  exception.  Quel- 
quefois les  mâles  ont  les  pattes  de  devant  plus  alongées , 
comme  on  l'observe  dans  les  clytres ,  quelques  scarabées  :  ou 
leurs  tarses  sont  très- dilatés  en  devant,  et  garnis  de  houp- 
pes, de  lames  ou  d'écaillés  pour  adhérer  sur  le  corps  de  la 
femelle,  qui  est  trop  lisse  ,  comme  on  l'observe  dans  les  mâles 
des  hydrophiles,  des  dytiques,  des  crabrons  ;  et  c'est  alors 
aussi  qu'on  remarque  quelquefois  une  différence  notable 
dans  les  élytresdes  femelles,  qui  sont  sillonnés  en  long  ou  en 
travers,  tandis  que  ceux  du  mâle  ne  le  sont  pas.  La  position 
des  organes  sexuels  a  aussi  déterminé  de  singuliers  modes 
d'accouplement.  Dans  les  libellules,  par  exemple,  le  mâle 
saisit  la  femelle  par  le  cou ,  ou  dans  l'intervalle  de  la  poi- 
trine avec  la  tête,  au  moyen  de  deux  crochets  qui  font 
l'office  de  tenailles  et  qui  sont  placés  à  l'extrémité  de  sa 
queue  :  il  s'envole  ainsi  avec  elle,  et  la  force  de  venir  appli- 
quer son  ventre  contre  sa  poitrine  ,  ou  à  la  base  de  son 
abdomen ,  qui  loge  là  les  organes  sexuels.  Dans  les  araignées 
le  mode  de  fécondation  est  encore  plus  singulier,  les  organes 
du  mâle  étant  situés  dans  les  palpes,  et  ceux  de  la  femelle 
à  la  base  de  l'abdomen,  au-dessous  des  pattes.  Dans  l'acte 
de  l'accouplement  le  plus  souvent  les  insectes  restent  tran- 
quilles et  immobiles;  d'autres  continuent  de  marcher  ou  de 
voler  :  quelques-uns,  comme  les  hannetons,  prennent  une 
position  singulière ,  le  mâle  restant  presque  renversé  sur  le 
dos  :  dans  les  bombyces,  comme  dans  les  vers  à  soie,  les  têtes 
du  mâle  et  de  la  femelle  sont  en  sens  opposés,  et  ce  rappro- 
chement dure  plus  ou  moins  de  temps;  il  exige  des  journées 
entières,  ou  il  s'accomplit  en  moins  d'une  seconde.  Nous 
croyons  même  que  les  éphémères  n'ont  pas  de  véritable  accou- 
plement, mais  que  les  mâles  fécondent  les  œufs  dans  l'eau, 
après  la  ponte. 

L'histoire  des  changemens  qui  surviennent  chez  les  ijisec- 


INS  •       4^9 

tes,  depuis  l'instant  où  ils  sortent  de  l'œuf  jusqu'à  celui  où 
ils  sont  aptes  à  reproduire  leur  espèce  ou  à  propager  leur 
race ,  doit  trouver  ici  sa  place.  Chez  la  plupart  des  insectes 
ces  changemens  sont  de  trois  sortes  ;  on  les  nomme ,  dans 
leur  ensemble,  la  transmutation  ou  la  métamorphose.  Le  pre- 
mier état  de  l'insecte  ,  lorsqu'il  sort  de  l'œuf,  est  celui  de 
lari'e  ou  de  chenille  ;  le  second  est  celui  de  chrysalide  ,  de 
nymphe,  de  pupe  ou  d'aurélie;  enfin,  sous  le  dernier  état, 
l'insecte  est  accompli  :  il  est,  comme  on  le  dit,  parfait  ou 
déclaré;  c'est  ce  qu'on  a  nommé  aussi  Vimage,  ou  l'insecte 
reproduit  (imago  revelata). 

Les  métamorphoses  des  insectes  ont  été  connues  imparfai- 
tement par  les  anciens.  On  voit  dans  beaucoup  de  passages 
d'Aristote,  qu'il  savoit  que  plusieurs  insectes,  et  il  nomme 
Cn  particulier  les  papillons,  les  abeilles,  provenoient  de 
chenilles  ,  de  vers  ;  mais  ce  n'est  guères  que  depuis  les  re- 
cherches de  Swammerdam  ,  de  Kédi  et  de  Goedaert,  que  ces 
transformations  ont  été  bien  connues,  et  que  la  reproduction 
des  insectes  a  été  expliquée  comme  elle  devoit  l'être. 

Outre  les  mutations  notables  dans  la  forme  que  subissent 
les  insectes  dans  les  trois  états  qui  suivent  leur  sortie  de  l'œuf, 
ils  changent  souvent  de  peau  ou  d'épiderme,  et  souvent  cet 
épiderme  est  d'une  tout  autre  apparence  que  celui  qui  lui 
succède,  ce  qui  donne  encore  à  l'insecte  un  autre  aspect; 
c'est  ce  qui  arrive  à  la  chenille  du  mûrier,  dite  ver  à  soie: 
lorsqu'elle  sort  de  l'œuf,  cette  chenille  est  velue-,  dans  les 
mues  suivantes,  elle  a  le  corps  ras  ou  sans  poils j  mais  sa 
teinte  varie  beaucoup.  Il  en  est  de  même  dans  un  grand 
nombre  d'autres  larves. 

Fabricius ,  dans  sa  Philosophie  entomologique ,  a  consacré 
une  section  entière  à  l'exposition  des  modifications  de  la 
métamorphose  dans  les  insectes.  Depuis  cet  auteur  la  science 
a  fait  de  grands  progrès,  et  M.  Latreille  en  particulier  a 
publié  sur  ce  sujet  des  observations  très- judicieuses ,  dont 
nous  donnerons  une  analyse  après  avoir  présenté  celle  du 
travail  de  Fabricius,  qui  met  parfaitement  sur  la  voie. 

Ainsilalarve,  qu'on  nomme  quelquefois  chenille  ou  ver,  est 
l'enfance  de  l'insecte  dès  le  moment  où  il  sort  de  l'œuf.  Cette 
larve ,  toujours  stérile,  est  molle ,  très-vorace  ;  elle  se  dépouille 


■47e      •  INS 

à  mesure  que  sa  peau  ne  peut  plus  suivre  le  développe- 
ment de  SCS  organes.  A  sa  dernière  mue,  la  larve  prend  le 
nom  de  pupe  ,  de  nymphe,  de  chrysalide  ou  d'aurélie  ;  c'est, 
dit  Fabricius.  l'adolescence  de  Tiiisecte  :  il  ne  croit  plus;  il 
se  durcit;  quelquefois,  ou  dans  quelques  cas,  cette  nymphe 
est  immobile,  et,  pendant  ce  repos,  elle  acquiert  plus  de 
consistance. 

Fabricius  distingue  cinq  ordres  de  métamorpJioses,  d'après 
les  modifications  de  formes  et  de  mouvemens  de  la  larve  et 
de  la  nymphe. 

Dai's  ta  première  métamorphose,  qu'il  nomme  complète, 
à  laquelle  il  rapporte  les  araignées,  les  scorpions,  les  pinces, 
les  cirons,  etc.,  il  n'y  a  pas  de  différence  entre  les  larves, 
les  nymphes  et  les  insectes  parfaits. 

Il  rapporte  au  second  ordre  de  métamorphose ,  qu'il 
nomme  demi-complète ,  les  demoiselles,  les  punaises,  dont  les 
larves  ont  six  pattes  et  sont  agiles,  ainsi  que  les  nymphes, 
qui  ont  de  plus  des  rudimens  d'ailes. 

Au  troisième  ordre ,  qu'il  appelle  métamorphose  incom- 
plète, il  rapporte  les  coléoptères,  les  hyménoptères,  qui  pro- 
viennent de  larves  motiles,  et  qui  produisent  une  chrysalide 
à  pattes  distinctes  ,  mais  repliées  et  immobiles. 

Les  lépidoptères  ,  qui  ont  des  larves  ou  chenilles  avec 
des  pattes,  et  agiles,  dont  la  chrysalide  est  couverte  d'une 
enveloppe  commune  qui  prive  les  pattes  du  mouvement, 
mais  sur  laquelle  on  distingue  cejiendant  la  forme  de  la 
tête,  du  corselet  et  du  ventre,  sont  rapportés  au  quatrième 
ordre  de  métamorphose,  qu'il  nomme  ohtectée. 

Entin,  les  diptères  forment  un  cinquième  ordre  de  trans- 
mutation, qu'il  appelle  coarctee,  parce  que  la  larve  apode, 
annelée  et  mobile ,  se  change  en  une  nymphe  qui  paroît  apode 
et  qui  est  toujours  immobile  ,  et  parce  qu'il  se  forme  en  dehors 
ane  enveloppe  qui  ne  permet  de  distinguer  aucune  partie 
du  corps. 

M.  Latreille  distingue  trois  sortes  de  métamorphoses  :  1.° 
celle  qu'il  nomme  ébauchée,  2.°  la  demi-métamorphose,  et 
3.°  la  métamorphose  complète. 

Dans  les  deux  premiers  modes,  l'insecte  n'éprouve  de 
transmutation  que  dans  les  organes  du  mouvement,  dans  les 


INS  •       47i 

ailes  Ou  les  pattes  ;  la  larve  ,  la  nymphe  ,  sont  toujours  actives , 
et  l'insecte  parfait  conserve  les  mêmes  habitudes. 

C'est  le  troisième  mode  de  métamorphose  qui  offre  le  plus 
d'intérêt;  car  Finsecte  parfait  et  sa  larve  n'ont  réellement 
aucun  rapport  de  formes  :  la  nymphe  ne  se  nourrit  plus  et 
reste  immobile,  soit  qu'elle  ait  les  membres  libres  et  dis- 
tincts, soit  qu'elle  reste,  comme  on  le  dit,  emmaillottée  ;  et 
cette  sorte  de  maillot  prend  la  forme  d'une  momie  ,  lors- 
qu'on aperçoit  les  linéamens  des  pattes,  des  antennes,  des 
yeux ,  etc.  ;  ou  bien  elle  est  en  forme  d'œufs ,  et  alors  on  ne 
voit  qu'une  sorte  de  peau  ou  de  coque  arrondie. 

Ce  sont  ces  formes  qu'il  est  curieux  de  connoître  :  nous 
les  indiquerons  avec  plus  de  détails  à  l'article  Thansforma- 
TioN  ou  Métamorphose. 

§.  3.  De  la  méthode  employée  dans  cet  ouvrage  pour 

conduire  a  la  connoissance  des  insectes  et  a  leur 

classijîcation. 

Quoique  la  classe  des  insectes  comprenne  à  elle  seule  un 
plus  grand  nombre  d'espèces  bien  connues  que  les  autres 
sections  du  règne  animal ,  et  même  que  toutes  celles  aux- 
quelles on  rapporte  les  animaux  sans  vertèbres  ,  considérés 
dans  leur  totalité  ,  nous  pouvons  assurer  qu'aucune  n'est  plus 
facile  à  étudier.  Nous  avons  déjà  exposé,  au  commencement 
de  cet  article  et  dans  celui  qui  est  inséré  sous  le  titre  d'ENxo- 
MOLOGiE,  que  les  insectes  diffèrent  de  tous  les  autres  animaux 
par  le  défaut  de  vertèbres  .  par  la  disposition  des  organes  du 
mouvement ,  qui  offrent  des  articulations  nombreuses  dans  la 
partie  moyenne  du  corps  et  dans  les  appendices  articulés 
qui  constituent  leurs  membres;  en  même  temps  que  tous 
respirent  par  des  trous  ou  des  orifices  extérieurs  nombreux  , 
nommés  stigmates,  qui  correspondent  à  des  canaux  aériens 
élastiques  ou  à  des  frachées. 

Les  insectes  ont  été  divisés  en  huit  ordres,  qui  ont  tiré 
leur  dénomination  des  modifications  des  organes  du  vol  ou 
des  ailes,  suivant  qu'on  en  aperçoit,  ce  qui  arrive  au  plus 
grand  nombre,  ou  qu'il  n'en  existe  pas.  Ce  défaut  des  ailes 
réunit,  comme  nous  le  verrons,  des  insectes  fort  différens 
les  uns  des  autres  ;  cependant  c'est  un  moyen  comaiode  et 


r 

47^      '  INS 

artificiel  de  distinguer  certains  groupes  ou  familles ,  qu'on 
a  réunis  sous  un  nom  commun  ,  qui  indique  principale- 
ment cette  absence  constante  des  ailes  à  toutes  les  époques 
de  la  vie  dans  certaines  espèces,  qui  forment  ainsi  Tordre 
des  Aptères,  ou  le  huitième  de  la  classe.  Tous  les  autres 
insectes  ont  des  ailes,  mais  leur  nombre  varie  :  un  ordre 
réunit  les  espèces  qui  n'en  ont  que  deux  ;  c'est  le  septième 
de  la  classe  ,  celui  des  Diptères,  chez  lesquels  on  trouve 
beaucoup  d'autres  caractères  bien  plus  importans  que  ce 
nombre  des  ailes. 

On  observe  quatre  ailes  chez  tous  les  autres  insectes,  qu'on 
pourroit  appeler ,  à  cause  de  cela,  les  tétraptères;  mais  ce 
grand  ordre  se  subdivise  en  six  autres  bien  distincts  :  d'abord 
par  la  nature  des  alimens  que  ces  animaux  sont  forcés  de 
rechercher,  les  uns  ne  pouvant  se  nourrir  que  de  liquides, 
de  sucs  ou  d'humeurs  qu'ils  pompent  ou  absorbent  à  la  sur- 
face ou  dans  l'intérieur  des  corps  organisés;  ceux-ci  forment 
deux  ordres. 

Dans  les  uns,  la  bouche  consiste  en  un  bec  articulé,  formé 
de  pièces  coudées  ou  courbées  ,  qui  peuvent  rentrer  les  unes 
dans  les  autres,  et  on  observe,  le  plus  souvent,  dans  leurs 
ailes,  une  différence  notable  entre  les  supérieures,  qui  sont 
à  demi  coriaces,  ou  qui  ressemblent  à  des  demi-étuis,  ce  qui 
les  a  fait  nommer  Hémiptères. 

Chez  les  autres  insectes  à  quatre  ailes  et  sans  mâchoires , 
la  bouche  consiste  en  une  sorte  de  langue  ou  de  trompe 
roulée  en  spirale  sur  elle-même,  ce  qui  a  fait  donner  à 
l'ordre  auquel  on  les  rapporte,  le  nom  de  Gi.ossates  ;  mais, 
comme  en  général ,  dans  ces  insectes ,  les  quatres  ailes  sou- 
tiennent de  petites  écailles  ou  lamelles  colorées  diversement 
et  placées  souvent  les  unes  au-dessus  des  autres  à  la  manière 
des  écailles  des  poissons  ,  on  les  a  désignés  sous  le  nom  de 
LépinoPïÈREs,  ou  à  ailes  écailleuses. 

Tous  les  autres  insectes  à  quatre  ailes  ont  la  bouche  com- 
posée de  mâchoires  et  de  mandibules  propres  à  diviser  les 
matières  solides  dont  ils  font  leur  nourriture.  Ils  ont  été 
rapportés  à  quatre  ordres,  dont  les  noms  sont  tirés  de  la 
forme,  de  la  consistance  et  de  la  disposition  des  ailes. 
Ainsi ,  les  uns  ont  les  ailes  supérieures  plus  épaisses  que  les 


•  ÏNS  •    ^73 

inférieures,  auxquelles  elles  servent  comme  de  gaîne  ou  de 
fourreau ,  et  alors  les  inférieures  sont  membraneuses,  et  tantôt 
pliées  en  travers  seulement  ;  c'est  ce  qui  arrive  dans  les 
Coléoptères,  qui  composent  le  premier  ordre  :  ou  bien  les 
ailes  inférieures  membraneuses  sont  surtout  plissées  dans  leur 
longueur,  et  le  plus  souvent  non  pliées  sous  des  élytres  ou 
sous  les  gaines  que  leur  forment  les  ailes  supérieures,  qu'elles 
dépassent  ;  tels  sont  les  Orthoptères. 

Chez  les  autres  insectes  à  quatre  ailes  ou  tétraptères ,  et  chez 
lesquels  les  supérieures  et  les  inférieures  sont  à  peu  près  de 
semblable  consistance  ,  on  distingue  la  structure  de  ces  ailes, 
pour  en  faire  le  caractère  des  deux  ordres  qui  ont  emprunté 
leur  nom  de  cette  disposition  :  ainsi,  chez  les  Névroptèhes  , 
les  ailes  sont  comme  formées  de  mailles  par  de»  nervures 
en  réseau  ,  tandis  que  dans  les  Hyménoptères  on  distingue 
principalement  des  lignes  ou  côtes  saillantes  sur  les  ailes,  qui 
sont  en  général  plus  étroites  et  plus  consistantes. 

Le  tableau  suivant  donne  une  idée  synoptique  de  cette 
classification  des  insectes,  d'après  les  ailes  et  les  parties  de 
la  bouche. 

Tableau  analytique  de  la  classification  des  insectes  en  huit 
ordres,  d'après  les  ailes. 

Ideconsistance  in- f  travers...  i.   Coléoptères. 
égale  :    les   infé- 1  ,  _ 

,.,.......    Heures  pliées  en  ('«"g ..  Okthopx.k.s. 

ailes      Isemblables,  à  ner- 1  réticulées.  3.  Névroptères. 

[  vures  (veinées...  4.  Hvméwoptères. 

sans  mâchoires,    1  un  bec  non  roulé. .  5.  Hémiptères. 

formant  j  une  langue  roulée.  6.  Lépidoptères. 

deux  :  jamais  de  mâchoires 7.  Diptères. 

^nulles 8-  Aptères. 

Cet  arrangement  systématique  des  insectes,  qui  est  à  peu 
près  celui  qui  a  été  proposé  par  Linnaeus ,  se  trouve  cependant 
établi  ici  d'après  d'autres  caractères  que  ceux  tirés  uniquement 
des  ailes,  comme  les  noms  des  ordres sembleroient  l'indiquer. 
Il  faut  avouer,  comme  nous  l'avons  déjà  fait  connoitre  au 
mot  Aptère,  qu'un  assez  grand  nombre  d'insectes,  même  sous 
l'état  parfait,  se  soustrait  à  cette  classification  par  les  ailes, 


c 
474     ^  INS  ' 

puisqu'on  retrouve  dans  presque  tous  les  ordres  quelques 
individus  ,  soit  des  deux  sexes,  soit  de  l'un  des  sexes  en 
particulier,  qui,  quoique  analogues  par  la  conformation 
générale,  par  les  moeurs,  les  habitudes,  et  surtout  par  la 
manière  de  vivre  forcée  ou  déterminée  d'après  la  structure 
des  parties  de  la  bouche,  devroient  être  rapportés  à  l'ordre 
des  aptères,  si  l'on  ne  considéroit  que  la  seule  privation 
des  ailes. 

Nous  ferons  connoître  ces  espèces  qui  restent  toujours  pri- 
vées d'ailes  ,  dans  chacun  des  articles  qui  seront  consacrés  soit 
aux  ordres,  soit  aux  genres;  niais  nous  croyons  devoir  indi- 
quer ici  un  moyen  accessoire  de  les  distinguer  d'abord.  La 
structure  des  parties  de  la  bouche  devient  très-utile  à  étudier 
pour  celte  classification  des  insectes  qui,  quoique  privés 
d'ailes,  n'appartiennent  pas  à  l'ordre  des  aptères. 

Ainsi  le  défaut  des  mâchoires ,  ce  qui  est  très-rare  dans 
les  aptères,  excepté  dans  les  pous,  les  tiques  et  les  puces, 
distingue  très-bien  quelques  hémiptères,  comme  les  punaises 
des  lits,  quelques  réduves,  cochenilles,  pucerons,  etc., 
qui  ont  tous  un  bec  articulé;  quelques  diptères,  comme  des 
hippobosques,  mélobosques,  qui  ont  un  suçoir  corné;  enfin, 
quelques  lépidoptères  qui,  comme  les  femelles  de  quelques 
bombyces ,  de  quelques  teignes,  ont  une  langue  roulée  en 
spirale. 

Tous  les  autres  insectes  faussement  ou  seulement  en  appa- 
rence privés  d'ailes,  ont  des  mâchoires,  et  ont  alors  leur 
ventre  immédiatement  accolé  au  corselet,  et  ils  n'ont  que 
six  pattes;  ce  qui  les  distingue  des  vrais  aptères,  qui  ont  le 
ventre  réuni  au  tronc  :  tels  sont,  parmi  les  coléoptères, 
les  femelles  du  lampyre  ver-luisant,  et  beaucoup  d'espèces 
qui  ont  des  élytres  soudés ,  ou  sous  lesquels  il  n'y  a  pas 
d'ailes  membraneuses.  Tels  sont  encore  parmi  les  orthop- 
tères quelques  sauterelles,  gryllons,  blattes,  mantes;  mais 
ces  derniers  ont  tous  les  mâchoires  garnies  d'un  appendice 
particulier  propre  à  cet  ordre.  Enfin ,  parmi  les  faux  ap- 
tères à  ventre  pédicule  et  qui  n'ont  que  six  pattes,  et  non 
huit  comme  les  acères,  on  distingue  assez  facilement  les  four- 
mis, lesmutilles,  les  ichneumons  et  les  autres  hyménoptères, 
par  la   forme  de  leur  bouche  et  les  cinq  articles  de  leurs 


•  INS  "    47? 

tarses;  tandis  q'ue  quelques  névroptères,  comme  les  psoques, 
les  termites,  n'ont  que  deux  ou  trois  articles  aux  tarses. 

Nous  avons  indiqué,  sous  les  noms  de  chacun  des  ordres, 
l'histoire  générale  des  insectes  qu'ils  comprennent;  de  même 
que  dans  les  articles  consacrés  à  l'examen  de  chaque  famille, 
nous  avons  fait  connoitre  les  détails  relatifs  aux  genres  ef 
aux  mœurs  des  espèces  qu'on  y  rapporte.  Nous  ne  présente- 
rons donc  ici  qu'une  sorte  de  résumé  propre  à  donner  l'idée 
de  l'ensemble  de  la  classe  des  insectes. 

I.  L'ordre  des  COLÉOPTÈRES  comprend  les  insectes  à 
quatre  ailes,  dont  les  supérieures  forment  des  étuis  ou  des 
gaines  pour  les  inférieures ,  qui  sont  membraneuses  et  le 
plus  ordinairement  pliées  en  travers.  Ces  dernières  portent 
seules  le  nom  d'ailes  ,  parce  qu'elles  servent  au  vol;  les 
autres  sont  appelées  des  élytres  ;  de  là  le  nom  d'élytroptères 
qu'on  a  proposé  de  donner  à  cet  ordre. 

Quand  on  commençoit  à  étudier  les  insectes,  on  désignoit 
ceux  dont  nous  parlons  sous  le  nom  très-vague  de  scarabées. 
Ils  forment  en  effet  un  ordre  très-naturel,  et  qui  comprend 
des  insectes  qui  ont  entre  eux  la  plus  grande  analogie  sous 
le  rapport  des  métamorphoses  et  de  la  structure. 

Les  coléoptères  naissent  tous  sous  la  forme  d'un  œuf  qui 
donne  une  larve  à  six  pattes ,  le  plus  souvent  fort  agile,  à 
tête  mobile,  distincte  ,  garnie  de  mâchoires  ,  et  qui  garde  cette 
forme  plus  ou  moins  de  temps,  en  changeant  de  peau  cinq 
ou  six  fois.  Ces  larves,  lorsqu'elles  ont  acquis  tout  leur  dé- 
veloppement, subissent  une  métamorphose  complète,  c'est- 
à-dire  qu'elles  se  changent  en  nymphes ,  dont  toutes  les  parties 
sont  distinctes  et  semblables  à  celles  de  l'insecte  parfait  ; 
mais  elles  sont  immobiles  et  elles  ne  prennent  plus  alors  de 
nourriture. 

Les  coléoptères,  sous  l'état  parfait,  ont  la  bouche  munie 
de  mandibules  et  de  mâchoires  ;  ils  peuvent  se  nourrir  de 
matières  solides,  animales  et  végétales.  Leurs  sexes  sont  dis- 
tincts ;  il  n'y  a  pas  chez  eux  de  mulets.  En  général,  les  fe- 
melles sont  plus  grosses  que  les  mâles  :  ceux-ci  ont  les  cou- 
leurs plus  vives  et  les  antennes  plus  développées. 

L'ordre  des  coléoptères  est  le  plus  nombreux  de  la  classe  ; 
il  comprend  à  lui  seul  près  de  deux  cents  genres  d'insectes  : 


A76    '  INS  • 

aussi  a-t-on  été  forcé  de  le  subdiviser  en  sous-ordres  ou  sec- 
tions. Geoffroy  ,  l'historien  des  insectes  des  enA'irons  de  Paris , 
a  trouvé  une  méthode  facile,  et  qui  paroît  très-propre  à 
rapprocher  entre  elles  les  espèces  qui  semblent  avoir  le  plus 
d'analogie  dans  la  structure  et  les  habitudes  :  c'est  le  nombre 
des  articulations  que  présentent  leurs  tarses.  Ces  articles  des 
tarses  sont  analogues,  jusqu'à  un  certain  point,  aux  pha- 
langes qui  composent  chacun  de  nos  doigts.  Ils  se  terminent 
par  des  grappins  de  forme  variable ,  qui  servent  à  l'insecte 
pour  s'accrocher  sur  les  corps. 

On  a  lait  la  remarque  que  les  pattes  intermédiaires ,  dans 
tous  les  coléoptères,  ont  toujours  le  même  nombre  d'articles 
aux  tarses  que  les  antérieures,  de  sorte  qu'on  n'a  recours 
à  l'examen  de  ce  nombre  qu'autant  que  les  tarses  antérieurs 
auroient  été  mutilés  dans  les  individus  chez  lesquels  on 
étudie  les  pattes. 

Pour  déterminer  le  nombre  des  articles  aux  tarses  dans  un 
coléoptère,  le  naturaliste  commence  à  constater  celui  des 
pattes  postérieures  ;  car,  s'il  en  observe  cinq  ou  trois,  il 
peut  être  assuré,  d'après  l'état  actuel  de  la  science,  que  ce 
même  nombre  de  cinq  ou  de  trois  se  retrouvera  aux  pattes 
moyennes  ou  antérieures.  Mais,  s'il  y  a  quatre  articles  aux 
tarses  de  derrière  ,  il  faut  absolument  observer  ceux  des 
deux  autres  paires,  car  les  uns  en  ont  cinq  et  les  autres 
quatre  également. 

On  distingue  ainsi  quatre  sous-ordres  et  même  cinq  parmi 
les  coléoptères,  et  le  nombre  des  articles  aux  tarses  a  fourni 
les  dénominations  sous  lesquelles  on  les  désigne ,  comme  il 
suit  : 

I.*"^  Sous-ordre  :  Coi.éoptères  pentamérés  ou  à  cinq  articles 
à  tous  les  tarses ,  ce  qui  souvent  se  dénote  comme  il  suit  : 
6,  5,   5. 

IL*  Sous-ordre  ,  Coléoptères  hétéromérés  ou  à  cinq  articles 
aux  pattes  antérieures  et  moyennes,  et  quatre  seulement 
aux  tarses  postérieurs;   ou  5,  5,  4. 

III. '^  Sous- ordre,  Coléoptères  tétramérés,  c'est-à-dire,  à 
quatre  articles  à  tous  les  tarses;   ou  4,  4,  4. 

IV.*"  Sous-ordre  ,  Coléoptères  trimérés  ,  ou  ceux  qui  n'ont 
que  trois  articles  à  tous  les  tarses  ;  ou  5  ,  3  ,  3. 


•  INS  .     477 

V.' Sous-ordre,  Coléoptères  dimér^s,  ou  ceux  quin'auroient 

que  deux  articles  seulement  aux  tarses  ;  ou  2  ,  2  ,  2. 
Le  premier  sons-ordre  des  coléoptères,  celui  des  penta- 
mérés,  comprend  des  insectes  nombreux  ,  et  qui  présentent 
de  très-grandes  différences  dans  les  mœurs  et  dans  les  habi- 
tudes. On  a  trouvé  des  moyens  commodes  de  les  distribuer 
en  familles  ou  petits  groupes  naturels,  d'après  la  considéra- 
tion de  quelques  parties  extérieures,  comme  la  longueur  ou 
la  brièveté  des  élytres,  leur  plus  ou  moins  grande  consis- 
tance, la  forme  des  antennes  ou  des  autres  régions  du  corps. 
Dix  familles  ont  été  rapportées  à  ce  premier  sous-ordre 
des  coléoptères  pentamérés.  Nous  allons  présenter  ici,  d'abord 
sous  forme  d'un  tableau  analytique,  les  indications  princi- 
pales ,  que  nous  exposerons  ensuite  avec  plus  de  détails. 

'  très- courts  ,    ne    couvrant  pas   le    ventre;    an- 
tennes grenues S.Brachéljtres. 

,  .     (nondenléesjfsimples.  .  .     i.  Créophases. 

ensoie        aplati;)  l        '^    _  ^     » 

M  (        tarses       {natatoires..    2.  Nectopodes. 

nii  en  fil    lanlennesl  ,        ,  ^ 

uuciiui,(  (dentées;  sternum  pointu.  8.  Sternoxes. 


■i    \^     I     corps 


arrondi,  alongé,  convexe 9.   Térédjle 


■W   J       \  _^\  .feuilletée.  .1  ^'""  *^"'  *="'^---  *  '    ^-  P'^ochr^^- 

en       j  (à  rextrémité 4.  Pétaloceres. 

masse    j         non         (  ronde,  solide 7.  Stéréoceres. 

\    laniellce  .  (  longue,  perfoliée. .    6.  Héloceres. 
mous;  corselet  plat;  antennes  filiformes  variables. .    10.   ^fjulytres. 

Les  coléoptères  Créophages  ou  carnassiers  composent  une 
famille  très-nombreuse  du  sous-ordre  des  coléoptères  penta- 
mérés. En  général  ,  leurs  élytres  sont  durs  et  recouvrent  le 
ventre,  et  quelquefois  il  n'}'^  a  pas  en-dessous  d'ailes  mem- 
braneuses; leurs  pattes  sont  très- propres  à  marcher,  n'étant 
pas  comprimées  et  présentant  des  crochets  bien  distincts; 
leurs  antennes  sont  en  général  en  fil  ou  en  soie. 

Les  uns  ont  le  corselet  plus  étroit  que  la  tête  :  tels  sont 
les  cicindèles  ,  les  élaphres,  les  manticores.  Les  autres, 
comme  les  carabes,  les  cychres,  les  scariles ,  etc.,  ont  géné- 
ralement la  tête  plus  étroite  que  les  élytres. 

Les  Nectopodes  ou  rémitarses,  comme  les  tourniquets,  les 


'■n'^   ♦  INS  •  • 

ilytiqucs  ,  ne  diffèrent  des  coléoptères  de  la  famille  qui 
précède,  que  par  la  forme  générale  de  leur  corps  et  par  la 
forme  des  tarses,  qui  sont  aplatis  en  manière  de  nageoires; 
par  leurs  mœurs  et  le  mode  du  développement  des  larves. 

Les  Brachélytres  ou  brévipennes  ,  ainsi  nommés  à  cause 
de  la  forme  et  de  la  brièveté  de  leurs  élytres  comparés  à 
l'alongement  extraordinaire  de  l'abdomen,  ont  les  antennes 
composées  de  petites  articulations  grenues  ,  arrondies  en 
forme  de  grains  de  chapelet,  lisse  nourrissent  encore,  comme 
les  précédens,  de  matière  animale;  mais  la  plupart  ne  re- 
cherchent que  les  cadavres.  Quelques  auteurs  en  ont  fait  un 
ordre  particulier,  sous  le  nom  de  microptères  :  c'est  à  cette 
famille  qu'on  rapporte  les  staphylins,  les  pœdères,  les 
oxypores. 

Les  Pétalocères  ou  lamellicornes  correspondent  au  genre 
Scarabée  de  Linnœus  ;  leurs  antennes  en  masse  feuilletée  à 
l'extrémité,  et  le  nombre  des  articles  aux  tarses,  les  caracté- 
risent suffisamment.  D'ailleurs  tous  les  genres  rapportés  à 
cette  famille  ont  les  mêmes  mœurs.  Ils  ne  se  nourrissent,  sous 
l'état  parfait,  que  de  végétaux  ,  de  leurs  débris,  après  même 
qu'ils  ont  passé  dans  le  corps  des  animaux.  La  plupart  ne 
volent  que  le  soir  ;  leurs  larves  se  développent  à  l'abri  de  la 
lumière.  La  plupart  sont  étiolées  ,  courbées  en  arc  ,  ce  qui  gêne 
beaucoup  leurs  mouvemens.  Les  hannetons,  les  cétoines,  les 
bousiers,    les  scarabées,  ont  été  rangés  dans  cette  famille. 

Les  PRiociiREs  ou  serricornes  ont  aussi  les  antennes  feuille- 
tées, mais  d'un  seul  côté,  ce  qui  leur  donne  souvent  la  forme 
d'une  scie  dentée.  La  plupart  vivent  dans  l'intérieur  du  bois, 
et  ils  ont  avec  les  genres  de  la  famille  qui  précède  une 
grande  analogie  dans  les  mœurs  et  dans  la  structure.  Les 
mâles  diffèrent  souvent  beaucoup  des  femelles  pour  la  taille 
et  le  développement  de  certaines  parties.  I,es  cerfs- volans 
ou  lucanes,  les  passales  et  les  synodendres,  sont  des  coléop- 
tères priocères. 

La  famille  des  Hélocères  ou  des  clavicornes  est  aussi  carac- 
térisée,  comme  leur  nom  l'indique,  par  la  forme  des  an- 
tennes constituant  une  masse  alongée,  composée  de  feuil- 
lets ou  de  lames  qui  semblent  perforées,  perfoliées  ou  trans- 
percées par  la  tige  centrale.  La  plupart  recherchent  les  ma- 


.  »  INS  •    479 

tiéres  animales  ou  végétales  qui  commencent  à  se  décom- 
poser :  tels  sont  les  hydrophiles,  les  dermestes,  les  boucliers, 
les  nécrophores,  les  nitidules,  etc. 

Les  Stkréocères  ou  solidicornes  composent  une  très-petite 
famille  de  coléoptères  à  élytres  durs,  dont  les  antennes  for- 
ment une  masse  arrondie,  qui  paroît  solide,  tant  les  articu- 
lations qui  la  composent  sont  rapprochées  les  unts  des  autres  : 
les  escarbots,  les  anthrènes,  les  lèthres  appartiennent  à  ce 
groupe. 

C'est  dans  le  bois,  et  quelquefois  dans  le  tronc  même  des 
arbres  vivans,  que  se  développent  les  insectes  de  la  famille 
des  Sternoxes  ou  thoraciques.  Leur  corps  est  alongé,  étroit, 
quelquefois  aplati;  leurs  antennes  en  fil ,  souvent  dentelées; 
leur  corselet  se  termine  suit  en  pointe  en  arrière ,  soit  en- 
dessous  sous  la  forme  d'un  sternum  pointu  ,  qui  souvent 
même  fait  l'office  d'un  ressort  :  tels  sont  les  buprestes,  les 
taupins,  les  cébrions  ,  etc. 

Les  Tbbédyles  ou  perce-bois  ont  les  mêmes  mœurs  et  à  peu 
près  les  mêmes  formes  que  les  sternoxes  ;  mais  leur  corselet 
n'est  point  prolongé  en  pointe  ;  au  contraire,  il  se  trouve 
arrondi  en  cylindre,  et  les  élytres  sont  à  peu  près  conformés 
de  même  :  tels  sont  les  vrillettes,  les  panaches,  les  ruinebois 
ou  lymexylons,  les  mélasis,  les  ptines,  etc. 

Enfin,  la  dernière  famille  des  coléoptères  pentamérés  est 
celle  des  Apalytres  ou  mollipennes,  dont  le  nom  a  été  em- 
prunté de  la  mollesse  des  élytres;  ils  ont  en  outre  le  curselet 
aplati  elles  antennes  en  fil.  La  plupnrtsont  carnassiers  dans 
leur  dernier  état.  Le  mode  de  leur  développement  est  encore 
peu  connu.  Tels  sont  les  téléphores,  les  malachies,  les  oma- 
lises,  les  vers  luisans  ou  lampyres,  les  driles ,  leslyques,  etc. 

Il  n'y  a  que  six  familles  dans  le  sous-ordre  des  coléoptères 
dont  les  tarses  postérieurs  n'ont  pas  le  même  nombre  d'ar- 
ticles que  ceux  de  devant  ou  du  milieu.  En  général  ce  sont 
des  insectes  nocturnes  ;  au  moins  le  plus  grand  nombre 
fuient  la  lumière  trop  vive  ,  et  recherchent  les  lieux  obscurs. 
La  plupart  préfèrent  pour  leur  nourriture  les  matières  végé- 
tales. Voici  le  tableau  des  familles  qui  forment  le  groupe 
des  Hétéromérks. 


A  élytres  c 

j     durs; 


!  antennes 


480   ,  INS 

fmous,   flexibles;   à  antennes  très-variables,    w.  Epispastiquei. 
filiformes,    souvent   (larges....     i3.    Ornéphiles. 
dentées;   élj'tres       (rétrécis...     12.  Sténoptères. 

(  "°"   '""'^^^  '  )  longue.  .     14.  LrgopMles. 
grenupsjl   anlenues   en!        ^ 
élytres)    masse  )  ronde...     16.  Mfcéiobies. 

(soudés,  pas  d'ailes i5.  Photophyges. 

Les  Epispastiques  ou  vésicans  ont  tiré  leur  nom  de  la  pro- 
priété qu'a  le  corps  du  plus  grand  nombre,  lorsqu'il  est  mis 
en  contact  prolongé  avec  la  peau  ,  d"y  produire  une  sorte  de 
cloche,  de  vessie  ou  de  brûlure.  C'est  à  cette  famille  qu'on 
rapporte  les  cantharides,  les  mylabres,  les  méloës  ou  pro- 
scarabées, les  lagries,  les  notoxes ,  etc.  Leurs  caractères  sont 
très-distincts. 

Dans  les  Sténoptères  ou  angustipennes ,  comme  les  nécy- 
dales,  lesœdéméres,  les  mordelles,  les  anaspes,  etc.,  le  ré- 
trécissement bizarre  et  presque  monstrueux  des  élytres  à  leur 
extrémité  libre  les  fait  distinguer  au  premier  aperçu.  Quoique 
cette  famille  soit  assez  naturelle ,  il  paroît  que  les  mœurs 
sont  très  -  différentes  selon  les  genres,  si  l'on  en  juge  du 
moins  d'après  celles  des  sitarides  ,  qui  semblent  vivre  en 
parasites  dans  les  nids  des  abeilles  maçonnes  ,  tandis  que  les 
mordelles  se  développent  dans  le  bois. 

Les  Ornéphiles  ou  sylvicoles vivent  aussi,  à  ce  qu'il  paroît, 
aux  dépens  de  la  partie  ligneuse  des  végétaux  ;  leurs  élytres 
durs,  larges,  leurs  antennes  filiformes,  les  distinguent  au 
reste  de  tous  les  autres  coléoptères  hétéromérés.  Tels  sont 
les  cistèles,  les  pyrochres,  les  serropalpes,  les  hélops ,  les 
calopes,  etc. 

Quant  aux  Lygophiles  ou  ténébricoles ,  leurs  antennes  gre- 
nues en  masse  alongée ,  leurs  élytres  durs ,  non  soudés ,  et 
les  ailes  membraneuses  qu'ils  recouvrent ,  ainsi  que  leurs 
habitudes  exprimées  par  le  nom  qui  sert  à  les  désigner  ,  tout 
porte  à  les  considérer  comme  formant  une  famille  fort  na- 
turelle ;  et  c'est  là  qu'on  range  les  ténébrions,  les  opatres, 
les  pédines,  les  sarrotries,  qui  mènent  insensiblement  à  la 
famille  suivante. 

C'est  celle  des  Photophyges  ou  lucifuges  ,  qui  fuient  la 
lumière,  qui  ne  peuvent  voler,  parce  qu'ils  n'ont  pas  d'ailes, 


^  »  INS  •     481 

■et  que  leurs  élytres  durs  sont  soudés  par  la  suture  et  ne 
sont  aptes  qu'à  protéger  l'abdomen  qu'ils  ret'ouvrent.  Tels 
sont  les  blaps ,  les  pimélies ,  les  eurychores,  les  sépidies ,  les 
érodies ,  lesscaures,  etc.:  famille  nombreuse  d'insectes  ,  la 
plupart  des  pays  chauds  et  arides. 

Les  foiigivoresou  Mycétobies  constituent  la  dernière  famille 
du  sous-ordre  des  coléojjtères  hétéroiuérés.  Ils  se  nourrissent^, 
comme  leur  nom  l'indique,  de  moisissures,  de  ch.Tuipignons: 
leurs  élytres  sont  durs,  non  soudés;  leurs  antennes  grenues, 
en  masse  arrondie.  C'est  à  cette  famille  qu'on  rapporte  les 
bolétophases,  les  diapères  ,  les  tétratomes,  les  agafhidies , 
les  hypophlées,  les  cossyphes  ,    etc. 

Le  troisième  groupe  ou  sous-ordre  des  coléoptères,  celui 
des  Tétr-Amérks,  qui  réunit  tontes  les  espèces  dont  les  tarses 
de  devant  et  ceux  de  derrière  n'ont  que  quatre  articles,  com- 
prend seulement  des  insectes  dont  les  matières  végétales  font 
la  nourriture  principale.  Ils  correspondent  en  majeure  par- 
tie aux  trois  grands  genres  que  Linnœus  désiguoit  sous  les 
noms  de  Chrysomèle ,  Charanson  et  Capricorne,  dont  les 
premiers  s'alimentent  principalement  avec  les  feuilles,  les 
seconds  avec  les  semences,  et  les  troisièmes  avec  les  matières 
ligneuses.  Quelques  genres  anomaux  viennent  se  place?  ici 
d'après  le  nombre  des  articles  aux  tarses,  quoique  sous  cer- 
tains rapports  ils  semblent  se  rapprocher  d'autres  familles. 
Voici  l'indication  des  familles  de  ce  sous-ordre. 

portées  sur  un  bec  ou  prolongement  du  front.  17.   Hhinocer  es. 

masse  :  corps j  arrondi..   18.    Cjllndroïcles. 

[ap!r.ti...    ig.    Onialoïdes. 

Antennes  /  """  ""''  )  ,  soie 30.  Xrlophagcs. 

1  un  bec,  •.   non   en  l       ,  ^      <       c? 

„,  1  )       [aplati Genre   Spontlyle 

et  I    masse,  ,'       l    '  r         j 


''' j     rond:    \.xxToniyi. .  2\.  Phjthophages. 
\     corps     (plat  ....   Genre  Cucuje. 

La  famille  desRniNOCÈi\ES  ou  roslricornes  correspond,  comme 
nous  venons  de  le  dire ,  au  genre  Charanson  ou  Curculio  de 
Linnaeus  :  leur  tête  se  prolonge  eu  une  sorte  de  bec  ou  de 
trompe  qui  supporte  les  antennes.  C'est  un  groupe  très- 
nombreux  ,  qui  a  été  subdivisé  en  beaucoup  de  genres.  Ils 
proviennent  d'une  larve  molle  qui  vit  à  l'abri,  soit  dans  l'in- 
23.  01 


482      ,  INS 

térieur  des  tiges,  soit  dans  les  fruits  et  les  semences  les  plus 
dures.  Quelques-uns,  sous  l'état  parfait,  se  nourrissent  de 
feuilles.  Les  uns  ont  les  antennes  en  masse  droites  ou  brisées, 
c'est-à-dire,  coudées  dans  le  milieu.  Les  attélabes,  les  anthri- 
bes,  les  oxystomes,  les  brachycères,  appartiennent  au  pre- 
mier groupe;  les  charansons ,  les  rhynchénes,  les  ramphes 
sont  rangés  dans  le  second.  Parmi  les  rhinocères  dont  les 
antennes  ne  forment  pas  une  masse  on  place  les  brentes, 
les  bruches  et  les  becmares. 

LesCvuNDROÏDEs  ou  cylindriformes,  ainsi  rapprochés  par  la 
forme  de  leur  corps  qui  est  arrondi  ,  ont  en  outre  les  antennes 
en  masse,  non  portées  sur  un  prolongement  de  leur  front;  ils 
ressemblent  beaucoup  aux  térédyles ,  dont  ils  s'éloignent  par 
le  nombre  des  articles  de  leurs  tarses.  Tels  sont  les  apates , 
les  bostryches,  les  scolytes ,  les  corynètes  et  les  clairons. 
C^s  deux  derniers  genres  ne  sont  placés  ici  que  par  l'arran- 
gement du  système  que  nous  adoptons,  leurs  mœurs  étant 
tout-à-fait  différentes. 

C'est  encore  par  la  conformation  de  leur  corps  que  les 
insectes  coléoptères,  désignés  sous  le  nom  d'OMALOïnEs  ou 
planiformes ,  sont  ainsi  rapprochés.  Leur  corps  est  très-dé- 
priujé;  leurs  antennes  sont  en  masse;  leur  tête  n'est  pas  pro- 
longée en  une  sorte  de  trompe  ou  de  bec  :  ils  se  nourrissent 
de  matières  végétales.  Tels  sont  les  ips,  hétérocères,  mycé- 
tophages,  cucujes  ou  uléiotes,  trogosites  ou  ronge-blés,  lyctes, 
colydies ,  etc. 

Les  Xylophages  ou  lignivores  composent  une  famille  des 
plus  naturelles.  Ils  correspondent  au  grand  genre  des  ceram- 
hyxAe  Linnœus  :  tous,  et  sans  exception,  sous  l'état  de  larves, 
ils  se  développent  dans  le  tronc  des  arbres;  ils  ont  les  mêmes 
mœurs  sous  l'état  parfait,  et  une  ressemblance  frappante  dans 
le  port  et  dans  la  forme  des  membres.  La  plupart  sont  ornés 
de  couleurs  vives  et  brillantes;  ils  ont  de  longues  antenne* 
en  soie,  quelquefois  plus  étendues  que  le  corps;  leurs  arti- 
culations sont  nombreuses,  et  ils  peuvent  les  diriger  en  arrière. 
Les  femelles  sont  plus  grosses  et  moins  vives  que  les  mâles  : 
les  larves  sont  des  espèces  de  vers  ou  de  chenilles  molles  ,  plus 
ou  moins  étiolées,  alongées,  aplaties  ou  quadrangulaires  ,  à 
six  pattes  courtes,  garnies  de  mamelons  ou  de  tubercules, 


,  •  INS  •      485 

ijfui  servent  à  leur  progression  dans  les  galeries  qu'elles  se 
creusent  au  milieu  du  bois,  quelquefois  en  pleine  \égéta- 
tion.  C'est  à  la  famille  des  xylophagcs  qu'il  faut  rapporter 
les  genres  Rhagie  ,  Lepture  ,  Molorque,  Callidie  ,  Saperde  , 
Capricorne,  Lamie ,  Prione  et  un  grand  nombre  d'autres 
subdivisions. 

La  dernière  famille  des  coléoptères  tétramérés,  qui  com- 
prend les  herbivores  ou  Phytophages,  est  dans  le  même  cas 
que  la  précédente.  Linnaeus  avoit  rangé  toutes  les  espèces 
qui  composent  aujourd'hui  ce  groupe,  dans  le  grand  genre 
Chrjsornela.  Ils  ont,  en  effet,  les  mêmes  mœurs  et  beaucoup 
d'analogie  dans  l'organisation  et  dans  quelques  parties  du 
corps,  en  particulier  dans  les  antennes,  quoique  leur  forme 
générale  présente  de  grandes  modifications,  qui  ont  principa- 
lement servi  à  les  distribuer  en  genres  naturels.  Tous  pro- 
viennent de  larves  qui  vivent  ordinairement  en  sociétés  sur 
les  feuilles  des  plantes.  Leur  corps  est  souvesit  coloré,  trapu, 
ridé  en  travers.  Quelques-unes  laissent  exsuder  de  leur  sur- 
face ou  de  leurs  articulations  des  humeurs  colorées  ou  odo- 
rantes ;  leurs  pattes  sont  alongées ,  et  elles  marchent  avec 
facilité.  Toutes  ont  des  moyens  de  se  soustraire  à  leurs  nom- 
breux ennemis,  qui  sont  les  oiseaux.  Sous  l'état  parfait,  les 
coléoptères  phytophages  ont  généralement  le  corps  bombé, 
les  antennes  en  forme  de  fil  à  articles  arrondis,  et  l'avant- 
dernière  pièce  de  leurs  tarses  est  comme  partagée  en  deux 
lobes  :  ils  adhèrent ,  par  ce  moyen  ,  avec  beaucoup  de  force^ 
aux  surfaces  des  feuilles  même  les  plus  lisses. 

Les  uns  ont  les  antennes  à  peu  près  de  même  grosseur  dans 
toute  leur  étendue,  comme  les  lupères,  les  altises  ,  les  galé- 
ruques;  d'autres  ont  le  corselet  très-convexe,  comme  les 
clytres,  les  gribouris  :  les  hispes,  les  criocères,  les  donacies , 
les  alurnes  n'ont  pas  le  corselet  rebordé  ;  les  chryscmèles^ 
les  hélodes ,  les  cassides  offrent  un  léger  renflement  à  l'ex- 
trémité libre  de  leurs  antennes,  qui  est  encore  plus  sensible 
et  aplati  dans  les  érotyles. 

Les  coléoptères,  qui  n'ont  que  trois  articles  aux  tarses,  ne 
composent  qu'une  seule  famille,  qui  est  la  vingt-deuxième, 
et  qui  a  été  nommée  celle  des  Trimékés  ou  tridactyles  ;  elle 
forme  en  même  temps  le  quatrième  sous-ordre.  .Réunis  par  ce 


484       <  INS  '  r 

caractère  artificiel,  les  genres  qu'on  y  rapporte  n'offrent  pas 
entre  eux  une  très- grande  analogie.  Jusqu'ici  on  n'a  pas 
encore  observé  beaucoup  d'insectes  ainsi  conformes,  excepté 
le  genre  des  coccinelles,  qui  est  fort  nombreux  eu  espèces, 
et  qui  constitue,  à  lui  seul,  une  sorte  de  famille  naturelle, 
comprenant  des  insectes  carnassiers  sous  les  deux  états  de 
larve  et  d'insecte  parfait.  Les  scymnes  ne  diffèrent  guèrcs 
des  coccinelles  que  par  la  disposition  du  corselet  relative- 
ment aux  élytres  ;  les  genres  Eumorphe  ,  Endomyque  et 
Dasycère  soi^t  plus  voisins  des  Mycélobies. 

Quant  au  cinquième  sous-ordre  des  coléoptères,  celui  des 
DiJiÉr.És,  qui  seroit  une  vingt-troisième  famille,  à  laquelle 
on  auroit  rapporté  les  psélaphes ,  les  chennies  et  les  clavi- 
gères,  lUiger  et  Reichenbach  ont  reconnu  que  cette  division 
n'éloit  qu'apparente  dans  ces  insectes,  d'ailleurs  très-petits, 
l'article  près  du  tibia  ou  de  la  jambe  étant  très- grêle,  de 
sorte  que  ce  sous-ordre  ne  peut  encore  être  établi,  et  que 
nous  ne  l'indiquons  ici  que  pour  mémoire. 

Le  second  ordre  de  la  classe  des  insectes  ,  celui  des 
ORTHOPTÈRES,  que  Degéer  nommoit  dermaptères,  et  Fa- 
bricius  ulonates ,  comprend  bien  moins  d'espèces  que  la 
plupart  des  autres  ordres,  quoique  le  nom  indique  par  son 
étymologie  la  disposition  particulière  des  ailes  inférieures, 
qui  sont  plissées  en  longueur  et  non  en  travers,  le  seul  genre 
des  perce-oreilles  ou  forficules  excepté  :  ce  n"est  pas  ce  qui 
a  autorisé  la  formation  de  cet  ordre,  qui  est  fort  naturel; 
mais  bien  le  mode  de  transformation  ou  l'analogie  dans  les 
métamorphoses.  En  elfet,  les  larves  des  orthoptères  sont 
agiles,  les  nymphes  le  sont  également,  et  sous  les  trois  états 
le  genre  de  nourriture  reste  le  même.  En  général  leurs  ély- 
tres sont  flexibles  et  non  réunis  par  une  suture  moyenne. 
La  plupart  ont  des  stemniates  entre  les  antennes,  et  ils  offrent, 
à  leur  mâchoire,  un  appendice  particulier  qu'on  a  appelé 
une  galète.  Quatre  familles  seulement  composent  cet  ordre, 
et  deux  de  ces  familles  ne  comprennent  encore  qu'un  seul 
genre.  Voici  l'indication  de  ces  familles  :  i.°  d'après  l'obser- 
vation de  la  longueur  respective  des  pattes  postérieures;  2." 
d'après  le  nombre  des  articles  aux  tarses;  3.'\  enfin  .  d'après 
la  forme  du  corselet. 


INS  485 

^     Leaucoup  plus   grosses,    plus    longurs, 

propres  au    ^luit 27.    Gryîloîdes. 

!l  plus  Ions  que  laiec-.  .   zQt.    ^nomides. 
cinq  ■■,    y   ,       ,      ^    '             ^ 
(  très  -  larce  ,    couvrant 
corselet]      ,           " 
(       la  tête v.5.    BluUes. 
trois   :      alidomcn     toriiune     en 
pince ?:f.    Lahidourcs. 

Les  Laeidoures  ou  forficules  appartiennent  réellement  à 
une  famille  distincte  ,  dont  les  mœurs  et  l'organisation  sont 
fort  remarquables  ;  les  perce -oreilles  forment  ce  groupe, 
différent  de  tous  les  autres  par  les  élytres  ,  qui  sont  semblables 
à  ceux  des  staphylins,  puisqu'ils  ont  une  véritable  suture 
moyenne;  les  ailes,  quoique  plissées  sur  leur  longueur,  n'en 
sont  pas  moins  pliécs  trois  fois  en  travers,  et  peuvent,  par 
un  mécanisme  admirable ,  se  ployer  et  se  déployer  comme 
par  ressort. 

Les  Blattes  forment  également  un  genre  anomal  ou  une 
véritable  famille  bien  distincte.  Ce  sont  des  insectes  très- 
plats,  à  antennes  très-longues,  en  soie;  à  pattes  grêles,  très- 
aplaties  et  semblables  cà  celles  des  forbiciues,  avec  lesquelles 
elles  ont  les  plus  grands  rapports.  Leur  corselet,  large,  en 
bouclier,  couvre  la  tèie  et  les  élytres.  Leur  abdomen  se  ter- 
mine, comme  dans  plusieurs  genres  de  grylloïdes,  par  deux 
organes  coniques,  qui  servent  à  une  sécrétion  de  matière 
fétide  dans  quelques  espèces.  Beaucoup  restent  aptères. 

Les  Ano.mides  ou  orthoptères  difformes  ont  reçu  cette  dé- 
nomination à  cause  du  mode  singulier  de  l'articulation  et  de 
la  foi'me  du  corselet ,  susceptible  de  faire  un  angle  avec  le 
ventre.  Leur  tête  est  dégagée;  leurs  pattes  de  derrière  ne 
servent  pas  au  saut  :  les  uns  ,  comme  les  phasmes  ou  les 
spectres,  ressemblent  à  des  bâtons  alongés  ;  d'autres,  comme 
les  phyllies,  à  des  feuilles  vertes  réunies  en  paquet  trois  à 
trois;  enfin,  les  mantes  ont  les  pattes  de  devant  armées  d'un 
crochet  mobile ,  dont  elles  se  servent  comme  de  mains ,  qu'elles 
portent  à  la  bouche.  Leurs  antennes  varient  beaucoup. 

La  quatrième  et  dernière  famille  de  l'ordre  des  orthop- 
tères ,  celle  des  Grylloïdes  ou  grylliformes ,  comprend  beau- 
coup de  genres  qui  ont  entre  eux  la  plus  grande  analogie  ; 
leur  corps   est  alongé;  leur  tête  le  plus  souvent  dans  une 


^86     '  INS 

position  verticale,  à  mandibules  saillantes  ;  leurs  ailes  infé- 
rieures dépassent  le  plus  souA'ent  les  élytres  ;  leurs  cuisses 
postérieures  sont  renflées,  très-musculeuses  ;  les  jambes  sont 
aussi  longues  que  les  cuisses,  ce  qui  donne  à  ces  insectes  la 
faculté  de  s'élancer  dans  l'air  pour  s'envoler.  Les  antennes 
varient  beaucoup  ,  ce  qui  a  permis  d'en  former  plusieurs 
genres  :  ainsi,  elles  sont  en  prisme  ou  en  fuseau  aplati 
dans  les  truxales  ;  en  fil  ou  légèrement  renflées,  dans  les  sau- 
terelles ,  les  criquets,  les  tridact}les;  enfin,  en  soie  ou  beau- 
coup plus  grêles  à  l'extrémité  libre,  dans  les  locustes,  les 
courtiliéres  et  les  gryllons. 

Les  NE\'ROPTERES  ou  les  insectes  à  mâchoires,  à  quatre 
ailes  nues,  de  semblable  consistance  entre  elles,  et  à  nervures 
en  réseau  ou  anastomosées,  forment  le  troisième  ordre  de  la 
classe  et  composent  trois  familles  bien  distinctes  ,  comme 
nous  allons  d'abord  l'indiquer. 

!,      .  .,  ,       (couverte  par  les  lèvre';....     3o.    Odonates. 
'  j  nue 28.  Stégopi'eres. 
à  peine  distincte,  les  palpes  exceptés.  .  .     29.    ^gnathes. 

Cet  ordre  ,  quoique  fondé  sur  la  forme  des  ailes  et  sur 
l'existence  des  parties  de  la  bouche  disposées  de  manière  à 
couper  les  matières  solides,  n'est  cependant  pas  très-naturel, 
parce  que  les  mœurs  et  les  métamorphoses  offrent  souvent , 
dans  une  même  famille  ,  de  fort  grandes  dissemblances. 

hes  Stkgoftères  ou  tectipennes ,  par  exemple,  dont  la 
bouche  est  toujours  formée  de  parties  très-distinctes ,  et  qui 
portent  les  ailes  en  toit,  comme  leur  nom  l'indique,  pro- 
viennent pour  la  plupart  de  larves  carnassières  qui  souvent 
tendent  des  pièges  aux  insectes  dont  elles  se  nourrissent,  ou 
qui  attaquent  ceux  qui  vivent  en  familles  et  dont  la  marche 
est  lente  :  elles  se  filent  un  cocon  ,  et  leur  nymphe  est  immo- 
bile comme  celle  des  coléoptères.  D'autres  larves  se  déve- 
loppent sous  les  écorces  et  dans  le  bois;  quelques-unes  vivent 
en  grandes  familles,  et  on  observe  dans  ces  sortes  de  sociétés 
gynocratiques,  comme  chez  les  abeilles,  un  grand  nombre 
de  femelles  neutres,  une  seule  femelle  féconde,  et  un  grand 
nombre  de  mâles,  qui  ne  viAcnt  que  le  temps  nécessaire  à 
leur  développement  et  à  la  fécondation.   Enfin,   il    en   est 


•  •  INS  •     487 

quelques-unes  qui  paroissent  se  développer  sous  Tcau.  La 
plupart,  sous  l'état  parfait,  ne  vivent  que  quelques  jours-, 
tels  sont  les  fourmilions ,  qui  ont  les  antennes  en  fuseau  ;  les 
ascalaphes,  qui  les  ont  terminées  par  une  petite  masse,  comme 
les  papillons;  les  hémérobes,  qui  les  ont  en  soie,  et  les  pa- 
norpes  et  les  semblides ,  qui  les  ont  en  forme  de  fil.  Tous 
ces  genres  ont  cinq  articles  aux  tarses,  tandis  qu'il  n'y  en  a 
que  quatre  dans  les  rapliidies,  deux  dans  les  psoques,  et  trois 
dans  les  perles  et  les  termites. 

Les  Agnathes  ou  buccellés,  c'est-à-dire,  abouche  très- 
petite,  distincte  seulement  par  les  palpes,  n'ayant  pas  d'or- 
ganes propres  à  saisir  la  nourriture  solide  ni  à  sucer  les 
liquides,  ne  vivent  que  très-peu  de  temps  sous  l'état  parfait  : 
leurs  larves  se  développent  dans  l'eau  ;  elles  ont  des  branchies 
qui  servent  à  la  respiration  aquatique;  leurs  nymphes,  quoi- 
que immobiles  au  moment  où  elles  viennent  de  prendre  cette 
forme,  en  quittant  celle  de  larves,  acquièrent  ensuite  plus 
de  solidité  et  deviennent  agiles.  Telles  sont  les  éphéirières , 
qui  ont  les  antennes  plus  courtes  que  la  tête;  dont  les  ailes 
supérieures ,  dans  l'état  de  repos ,  se  relèvent  verticalement 
sur  le  dos ,  et  dont  les  inférieures  sont  généralement  très- 
peu  développées;  leur  ventre  est  terminé  par  deux  ou  trois 
soies  très-longues.  Les  phryganes  ,  ainsi  nommées  de  l'habi- 
tude qu'ont  leurs  larves  de  couvrir  de  petits  morceaux  de  bois, 
ou  de  substances  étrangères ,  les  fourreaux  qu'elles  se  filent 
à  la  manière  des  teignes,  ont  les  antennes  très-longues. 
Tous  ces  agnathes  ne  volent  guères  que  le  soir  :  ils  ne  vivent 
que  quelques  momens ,  et  tous  les  individus  d'une  même 
espèce  éclosent  à  la  fois  dans  le  même  pays. 

La  troisième  famille  des  névroptères,  celle  des  Odonates 
ou  libelles,  se  distingue  par  la  forme  de  la  bouche,  qui  est 
très  -  développée ,  mais  recouverte  par  la  lèvre  inférieure. 
C'est  un  groupe  des  plus  naturels  :  toutes  proviennent  de 
larves  aquatiques,  qui  nagent,  en  introduisant  dans  leurs 
intestins  une  certaine  quantité  d'eau,  qu'elles  expulsent  tout 
à  coup  comme  avec  une  seringue;  l'eau  environnante  résiste 
à  ce  jet  et  éloigne  l'insecte  dans  le  sens  opposé.  Leur  nymphe 
est  agile ,  et  ne  diffère  de  la  larve  que  par  des  moignons 
d'ailes.  Les  organes  de   la  génération  présentent  une  dispo- 


488       •  l^S  ' 

sition  des   plus  bizarres,  qui  influe   sur  leur  mode  d'accou- 
plement. Les  libellules  et  les  agrions  composent  cette  famille. 

Le  quatrième  ordre  de  la  classe  des  insectes  est,  comme 
nous  l'avons  dit,  celui  des  HYMENOPTERES  :  il  comprend 
encore  des  insectes  màchcurs,  ou  dont  la  bouche  est  confor- 
mée de  manière  à  diviser  les  matières  solides,  mais  cepen- 
dant à  pomper  en  même  temps  les  liquides.  Leurs  quatre 
ailes  sont  nues,  membraneuses,  avec  des  nervures  principales 
.sur  la  longueur  ;  les  inférieures,  plus  minces  et  plus  étroites  , 
s'accrochent,  par  leur  bord  externe  ,  au  bord  interne  des  su- 
périeures, au  moyen  de  petites  pointes  courbées,  pour  ne 
former  avec  elles  qu'un  seul  plan,  lorsqu'elles  sont  écartées 
du  corps.  La  plupart  ont  cinq  articles  aux  tarses.  Les  femelles 
ont  le  plus  souvent  une  tarière  ou  un  aiguillon. 

Neuf  familles  composent  cet  ordre  des  hyménoptères.  Voici 
le  tableau  analytique  qui  les  indique  : 

'sessile  :    nne  tar'ère  d?as  les  femelles;  à  antennes  non  brisées 30.  Vropristes. 

(plus  longue  que  les  man-'ibiiles  :  ventre  ;i  pédicule  liés-couit.  'il  M.llites. 
concave    en-diessous  ,     se    roulant    en    boule,    corps 

métallique 33.  Chijsides. 

(doublées  sur  la  longueur:  antennes  brisées.  3z.  Pterodiples, 
fbrisées    ou    filiformes;     ventre 

.,■-■(  conique 36.  Mjrmeses 

à  ailes  su-    non  d—    ' 

périeures  /     blées ,     i  i  .       i      ■  o        ..    ,     ,  -, 

y  I      "■!"   '(...,       lau  plus;     nique...    34.  AiUhophiles . 

anleunes  )ni  brisées  ,1       '.^'1        '  ^„  ,. , 

en   fil;(   ^^^"-^  (compriiiié.    38.  ISeottociyptes. 

[icles:   i       ,^1^,        ji^.  à   17.  3?.  Oryclères. 

Ide    treize. 1 1-7  à  3o.  35.  Emoinotilles. 

La  seule  famille  indiquée  sous  le  n."  Sg  comprend  des 
insectes  dont  la  larve  ressemble  tout- à -fait  à  une  chenille 
munie  de  pattes,  et  qui  se  nourrit  comme  toutes  les  che- 
nilles; tandis  que  les  larves  de  toutes  les  autres  familles  ont 
la  forme  de  vers  mous  sans  pattes,  près  desquelles  les  pa- 
rcns  déposent  une  certaine  quantité  d'alimens ,  ou  qu'ils  se 
chargent  de  nourrir. 

Les  Apîaires  ou  mellites ,  dont  le  ventre  est  attaché  au 
métaïhorax  par  un  petit  pédicule  court  ,  et  dont  la  lèvre 
inférieure  est  pins  longue  que  les  mandibules,  ont  toutes 
des  antennes  brisées  ou  coudées.  Sous  l'état  parfait,  ces  in- 
sectes sucent  le  nectar  des  fleurs,  et  ils  nourrissent  leurs 
larves  du  pollen  àes,  végétaux.  Il  j  a  souvent,  parmi  les  es- 


pédiculé : 

à  lèvre    ' 
inférieure  1 


•  INS  •    ^«9 

pèces  qui  Aivent  en  société,  des  femelles  condamnées  dès 
l'enfance  à  une  stérilité  absolue,  mais  que  le  sentiment  de 
l'amour  maternel  porte  à  se  charger  de  l'éducation  des  petits 
qui  proviennent  d'une  ou  de  plusieurs  femelles  fécondes. 
C'est  à  cette  famille  qu'il  faut  rapporter  les  abeilles  ,  les 
xylocopes,  les  bourdons,  ainsi  que  les  andrènes,  les  bylées, 
les  nomades  :  enfin,  le  genre  des  bembèces,  dont  la  lèvre 
supérieure  forme  une  sorte  de  bec  qui  couvre  les  parties  de 
la  bouche. 

Les  Ptérodivles  ou  duplicipennes,  comme  les  guêpes  et  les 
masares ,  forment  la  famille  suivante,  dont  les  mœurs  sont 
analogues  à  celles  des  abeilles,  mais  dont  les  mâchoires  sont 
moins  alongées,  et  qui  sont  surtout  remarquables  par  le  pli 
longitudinal  qui  se  forme  dans  les  ailes  supérieures  lorsque 
l'insecte  est  dans  le  repos ,  ce  qui  les  rétrécit  beaucoup. 
Leurs  antennes  sont  aussi  brisées;  mais  elles  forment  une 
masse  ou  un  fuseau  vers  les  articles  libres. 

Les  Chrysides  et  les  parnopès,  qui  composent  à  elles  seules' 
une  petite  famille  ,  sont  surtout  remarquables  par  la  forme 
des  anneaux  de  l'abdomen,  qui  sont  concaves  en-dessous  et 
qui  peuvent  se  rouler  en  boule  comme  les  armadilles. 

Les  Anthophiles  ou  florilèges  se  trouvent  sur  les  fleurs 
dans  l'état  parfait  :  ils  se  nourrissent  du  pollen,  mais  ils  ne 
le  recueillent  pas  comme  les  apiaires.  Ils  nourrissent  ,  au 
contraire,  leurs  larves  avec  d'autres  insectes,  qu'ils  saisissent 
et  qu'ils  paralysent  en  les  piquant  de  leur  aiguillon,  ou  qu'ils 
mutilent,  afin  qu'ils  n'off'rent  aucune  résistance  à  ces  sortes 
de  vers  qui ,  le  plus  ordinairement ,  sont  déposés  dans  des 
nids  construits  avec  artifice.  Les  uns  ont  les  antennes  ren- 
flées, comme  les  philanthes  et  les  scolies;  d'autres  les  ont  à 
peu  près  de  même  grosseur  dans  toute  leur  étendue  :  tels  sont 
les  mellines  et  les  crabrons. 

La  famille  des  Entomotilies  ou  insectirodes,  c'est-à-dire 
rongeurs  dinsectes,  provient  de  larves  qui,  pour  la  plupart, 
se  développent  dans  1  intérieur  du  corps  des  autres  insectes, 
dont  elles  absorbent  fous  les  sucs,  en  ménageant  les  organes 
de  kl  digestion  jusqu'à  l'époque  où  elles  sont  prêtes  à  se  mé- 
tamorphoser. Ce  sont  des  insectes  parasites,  dont  les  mœurs 
sont   extrêmement  curieuses    à  étudier.    On  rapporte   à  ce 


490     '  INS  ^  ' 

groupe  les  genres  Ichneumon ',  Ophion  ,  Banche  ,  Foene  , 
Evanie. 

Les  Myrmiîges  ou  formicaires,  c'est-à-dire  A^oisins  des  four- 
mis ,  comprennent  en  effet  ce  genre  et  ceux  des  niulilles  et  des 
dor^'les.  II  y  a  parmi  eux  des  individus  condamnés  ,  comme 
chez  les  abeilles,  à  une  stérilité  complète.  La  plupart  vivent 
en  sociétés  nombreuses.  Les  neutres  seuls  travaillent.  Les 
inàles  périssent  peu  de  temps  après  qu'ils  ont  rempli  leurs 
fonctions,  ou  queTépoque  de  la  fécondation  est  passée.  Leurs 
mœurs  présentent  aussi  le  plus  grand  intérêt.  Les  insectes 
parfaits  sucent  les  pucerons ,  semblent  les  élever  en  domes- 
ticité; ils  se  livrent  des.  guerres ,  font  de  leurs  prisonniers 
des  sortes  d'esclaves  qu'ils  chargent  des  soins  domestiques  in- 
térieurs. (Voyez  en  particulier  l'article  Fourmi.) 

Les  Oryctères  ou  fouisseurs  ont  des  mœurs  analogues  à  celles 
des  anthophiles,  quoique  leurs  caractères,  ou  la  disposition 
de  leurs  parties  extérieures,  soient  fort  différens  :  tels  sont 
les  pompilcs,  les  larres,  les  sphèges  et  les  tiphies. 

La  famille  des  abditolarves  ou  Néottocrvptf.s  ,  noms  qui 
indiquent  que  les  larves  de  ces  insectes  sont  soigneusement 
cachées,  comprend  des  espèces  qui  ont  beaucoup  de  rapports 
de  ma'urs  avec  les  enfomotilles;  mais  leurs  formes  sont  aussi 
très -différentes.  La  plupart  déposent  leurs  œufs  sous  l'épi- 
derme  ou  dans  le  tissu  même  des  végétaux;  les  plaies  qu'ils 
produisent,  appellent  en  cet  endroit  les  sucs  qui s'extravasent, 
produisent  des  tumeurs  ou  des  gales,  dans  l'intérieur  des- 
quelles les  larves  se  développent  et  se  nourrissent  parfaite- 
ment à  Fabri  :  telles  sont  les  mœurs  des  diplolèpes,  des  cynips, 
des  eulophes,  des  diapries.  D'autres,  comme  les  leucopsides, 
les  chalcides,  se  nourrissent  dans  le  corps  des  insectes,  à  peu 
près  comme  les  ichneumons. 

Enfin ,  la  dernière  famille  des  hyménoptères  réunit  des 
insectes  tellement  différens  des  autres,  sous  le  rapport  des 
métamorphoses,  qu'on  seroit  tenté  d'en  former  un  ordre 
particulier.  C'est  celle  des  Urofristes  ou  serricaudes,  ainsi 
nommée  à  cause  de  la  tarière  en  scie  que  les  femelles  por- 
tent à  l'extrémité  du  ventre  ,  et  qui  sert  à  faire  des  entailles 
aux  écorces  des  plantes  sous  lesquelles  l'insecte  veut  déposer 
ses  œufs.  Dans  toutes  les  espèces  mâles  et  femelles  l'abdomen 


•  INS  491 

est  absolument  scssile  ou  appliqué  immédiatement  au  corse- 
let :  foutes  proviennent  de  chenilles  à  tête  écailleuse  ,  qui  se 
nourrissent  de  matières  solides  végétales,  feuilles  et  écorces. 
Elles  ont  plus  de  dix-huit  pattes,  et  quelquefois,  quoique 
rarement,  au-delà  de  vingt-deux.  A  l'époque  de  leur  trans- 
mutation, elles  se  filent  un  double  cocon,  quelquefois  très- 
solide  ,  où  la  nymphe  reste  immobile  ,  quoique  ses  parties 
soient  distinctes,  enveloppées  cependant  dans  un  épiderme 
qui  reste  dans  la  coque,  que  l'insecte  déchire  ou  coupe  très- 
régulièrement  en  travers  ,  lorsqu'il  prend  sa  dernière  forme 
et  qu'il  sort,  comme  ressuscité,  de  cette  sorte  de  tombeau. 
Deux  groupes  partagent  cette  famille  :  dans  l'un,  auquel  on 
rapporte  les  cimbèces  et  les  sirèces,  les  antennes  ne  sont  ni 
en  fil  ni  en  soie,  comme  dans  les  tenthrèdes  ou  mouches 
à  scie,  les  urocères  et  les  orysses. 

Cette  famille  des  uropristes  est  un  chaînon  qui  lie  l'ordre 
des  hyménoptères  à  celui  des  lépidoptères  par  la  forme  et 
les  moeurs  des  larves. 

Les  HEMIPTERES  forment  le  cinquième  ordre  de  la  classe. 
Ce  nom,  qui  signifie  moitié  d'ailes  ou  demi-ailes,  et  auquel 
on  a  proposé  de  substituer  ceux  d'hémélytres  et  d'hémimé- 
roptères,  ne  convient  pas  à  toutes  les  espèces. 

Quoique  ces  insectes  aient  le  plus  souvent  quatre  ailes, 
dont  la  base  ou  la  moitié  de  la  longueur  qui  y  correspond 
reste  plus  opaque;  il  en  est  quelques-uns,  comme  les  cigales 
et  les  pucerons,  par  exemple  ,  dont  les  ailes  supérieures  sont 
semblables  aux  inférieures.  Leur  véritable  caractère  consiste 
dans  la  forme  de  leur  bouche ,  qui  a  déterminé  la  nature 
de  leurs  alimens  ,  et  par  conséquent  leurs  mœurs.  Ainsi , 
quoique  le  nom  donné  à  cet  ordre  soit  mauvais  ,  les  in- 
sectes qu'il  réunit  n'en  ont  pas  moins  les  plus  grands  rap- 
ports par  la  métamorphose,  qui  est  incomplète,  c'est-à-dire 
que  l'insecte,  sous  les  trois  états,  est  semblable  à  lui-même, 
les  ailes  ou  les  rudimens  d'ailes  exceptés ,  comme  chez  les 
orthoptères,  et  surtout  par  la  présence  d'un  lec ,  ou  d'une 
bouche  consistant  en  une  sorte  de  tube  formé  de  plusieurs 
pièces  qui  contiennent  des  soies  fines  et  aiguës.  L'animal  se 
sert  de  cet  instrument  pour  piquer  les  corps  organisés  dont 
il  suce  ou  pompe  les  humeurs  pour  se  nourrir. 


coriaces,  \  anleinies 
roisées 


f 

492    '  I.NS  ' 

Six  familles  fort  nahirelles  composent  cet  orJrc  :  voici  le 
tableau  analytique  qui  les  indique,  d'après  l'examen  des  par- 
ties extérieures. 

'    I    .„     .    (  longiiP?,  1'°'^ ^'-  '^'^"'^'"'«Ç'"- 

^.'"^  "^      I        ea       (fil  ou  en  masse.    40.   Fihinostomes. 
lrès-court:s  ,  en  soie  .  .  .     42.   Iljdrocorées. 

très-étroites  ,  linéaires  :   tarses  vé- 

siculcux ; .  45.  Physafwdes. 

non  croisées; (trois 43.  yiuchénorinques. 

des  tarses  (deux  au  plus.  44.  Pk^tadelges. 

Les  insectes  de  la  famille  des  hémiptères  Rhinostomes  ou 
frontirostrcs  a,  comme  leur  nom  l'indique  ,  un  bec  qui  paroît 
naître  du  front;  leurs  antennes  ne  sont  pas  en  soie,  e(  leurs 
tarses  ne  sont  pas  propres  à  nager  ,  mais  bien  à  s'accrocher  sur 
les  corps  solides.  Ils  paroissent  tous  sucer  de  préférence  les  vé- 
gétaux ,  dont  ils  absorbent  la  sève  sous  les  trois  états  de  larves, 
de  nymphes  agiles  et  d'insectes  parfaits.  Les  uns  ont  les  an- 
tennes en  masse  ,  ce  sont  les  podicères  et  les  corées;  d'autres 
les  ont  en  fil  ;  mais  parmi  ceux-là  il  en  est  qui  ont  cinq 
articles  aux  tarses,  comme  les  pentatomes  et  les  scutellaires , 
tandis  que  d'autres  n'en  ont  que  trois,  comme  les  acanthies, 
les  gerres  et  les  lygées. 

Les  Z0ADELGE3  ou  sanguisuges  sucent  les  humeurs  des  ani- 
maux ;  leur  bec  paroît  aussi  être  un  prolongement  arqué  du 
front ,  mais  leurs  antennes  longues  se  terminent  par  un  article 
trèï-grêle  ou  en  soie  :  tels  sont  les  punaises  des  lits,  les  mi- 
rides,  les  réduves,  les  ployères  et  les  hydrom.ètrcs. 

Les  HvDRocoKÉEs,  ou  les  punaises  qui  vivent  dans  l'eau  , 
qu'on  peut  encore  appeler  rémitarses,  parce  que  leurs  pattes 
postérieures  sont  propres  à  nager,  à  raison  de  l'aplatisse- 
meiit  de  leurs  tarses  qui  souvent  sont  ciliés  sur  la  tranche 
et  composés  de  deux  articles,  sont  surtout  remarquables  par 
l'extrême  brièveté  de  leurs  antennes,  qui  ressemblent  à  un 
petit  poil  ou  à  une  soie.  C'est  dans  cette  famille  qu'on  range 
les  genres  dent  les  espèces  portent  des  tilets  au  ventre,  comme 
les  scorpions  aquatiques  ou  les  nèpes  et  les  ranatres;  ainsi 
que  celles  qui  n'ont  pas  ces  sortes  de  filets,  comme  les sigares, 
les  naucores  et  les  notonectes. 

Les  cigales  et  les  autres  genres  voisins,  dont  le  bec,  dans 


,  •  INS  •   493 

rëtat  (le  repos,  reste  couché  sous  le  ventre  entre  les  pattes  , 
et  dont  la  base  paroit  naître  du  cou  ,  portent ,  à  raison  de 
cette  conformation ,  le  nom  de  coUirostres  ou  d'AucHÉNORiN- 
(^)i'K.s.  Leurs  ailes  supérieures,  qui  ne  sont  pas  croisées,  sont 
cà  peu  près  de  sen.blable  consistance  dans  touie  leur  lon- 
gueur ;  ils  n'ont  pour  la  plupart  que  trois  articles  aux  tarses. 
On  rapporte  à  cette  famille,  comme  nous  venons  de  le  dire, 
les  cigales,  cicadellcs,  membraccs ,  cercopes  ,  fiâtes,  ful- 
gorcs ,  etc. 

Les  Phytadelges  ou  plantisuges  ont  aussi  les  ailes  non 
croisées  et  semblables  entre  elles,  souvent  étendues  et  trans- 
parentes; leur  bec  paroit  encore  prendre  son  origine  à  la  base 
de  la  tête  en-dessous,  au  devant  du  corselet,  ou  vers  le  cou. 
Leurs  tarses  sont  en  général  très-mal  organisés  pour  la  mar- 
che; ils  n'ont  que  deux  articles.  Aussi  la  plupart  des  espèces 
sont-elles  très-lentes  et  restent-elles  fixées  sur  les  végétaux,  au 
lieu  même  où  leurs  mères  ont  déposé  leurs  œufs.  Il  en  est 
beaucoup  qui  n'ont  pas  d'ailes,  et  dont  les  pattes,  très  courtes, 
ne  peuvent  servir  qu'à  retenir  ces  insectes  sur  les  feuilles  ou 
les  écorces:  tels  sont  les  gallin-fctes,  les  cochenilles  femelles, 
les  chermès ,  les  psylles.  D'autres,  comme  les  pucerons,  les 
aleyrodes,  peuvent  se  transporter  d'un  lieu  à  un  autre  à  l'aide 
des  ailes.  Le  mode  de  génération  de  ces  insectes  est  des  plus 
curieux  à  connoitre.  (  Voyez  les  articles  Phytadelges  et  Pu- 
cerons.) 

Enfin,  le  seul  genre  anomal  des  thrips  constitue  la  famille 
des  Thysapodes  ou  vésitarses ,  noms  qui  indiquent  la  confor- 
mation singulière  des  tarses,  lesquels  sont  garnis  de  petites 
vessies  qui  font,  à  ce  qu'il  paroit ,  l'oflice  de  petites  ventouses 
pour  faire  adhérer  l'inseeie  sur  les  surfaces  les  plus  lisses. 
Ce  sont  de  très-petites  espèces,  dont  le  bec  est,  l'ar  consé- 
quent, très-court.  Ils  ont  à  peu  près  le  port  des  staphylins; 
mais  leurs  tr:.nsrorniations  sont  bien  celles  des  hémiptères, 
puisqu'on  a  observé  leurs  larves  et  leurs  nymphes.  Cependant 
ils  diffèrent  réellement  de  tous  les  insectes  de  cet  ordre. 
Les  plus  grandes  espèces  atteignent  a  peine  une  ligne  de 
longueur. 

Après  les  insectes  à  quatre  ailes  qui  ont  un  bec,  viennent 
ceux  qui  ne  p«uvent  aussi  se  nourrir  que  de  liquides ,  mais 


494    •  INS  * 

à  l'aide  d'une  langue  roulée  en  spirale.  Ils  forment  le  sixième 
ordre,  celui  des  LEPIDOPTERES.  Leur  corps  est  toujours 
velu  et  leurs  ailes  couvertes  de  petites  écailles  colorées,  pla- 
cées en  recouvrement  les  unes  sur  les  autres,  ce  qui  leur  a 
valu  le  nom  qui  les  désigne  d'une  manière  générale.  Jamais 
Ils  n'ont  de  stemmates  ou  d'yeux  lisses,  et  leurs  antennes  sont 
toujours  alongées. 

Les  lépidoptères  proviennent  de  larves  agiles,  alongées, 
qui  ont  d'abord ,  du  côté  de  la  tête ,  six  pattes  articulées ,  et 
ensuite  plusieurs  autres  fausses -pattes,  disposées  par  paires 
sur  les  anneaux  du  corps,  dont  le  nombre  n'excède  pas  seize. 
On  les  nomme  chenilles;  leur  tête  est  formée  d'une  sorte  de 
grande  écaille  qui  la  recouvre  entièrement,  et  dont  les 
formes  varient;  leur  bouche  est  munie  de  mâchoires.  Elles 
se  nourrissent  de  feuilles,  de  fruits,  d'écorccs ,  de  bois; 
quelques-unes  de  substances  animales;  la  plupart  peuvent 
filer.  Outre  les  mues  ou  les  changemens  de  peau  qui  sou- 
vent changent  l'aspect  de  ces  chenilles,  elles  subissent,  quand 
elles  ont  acquis  tout  leur  développement,  une  véritable  mé- 
tamorphose complète.  Elles  se  changent  en  une  chrysalide 
immobile,  plus  grosse  du  côté  de  la  tête,  et  sur  laquelle  on 
distingue  des  traits  qui  dessinent  la  position  de  toutes  les 
parties  de  Pinsecte  parfait  qu'elles  renferment.  Plusieurs 
s'accrochent  par  la  queue,  et  subissent  leur  transformation 
à  l'air  libre;  d'autres,  qui  se  sont  construit  un  étui  ou  un 
fourreau  ouvert  du  côté  de  la  tête,  le  ferment  à  cette  époque. 
Enfin  ,  le  plus  grand  nombre  se  tissent,  avec  une  soie  plus  ou 
moins  grossière,  un  follicule  ou  un  cocon,  dans  lequel  elles 
restent  long-temps ,  souvent  six  mois,  dans  une  sorte  de  som- 
meil léthargique  et  sans  prendre  de  nourriture.  La  forme 
des  antennes  a  permis  de  diviser  cet  ordre  en  quatre  familles, 
comme  il  suit  : 

i                                             ,              (  bout 46.   Ronaloceres. 
en  masse,    ou   renflées    au  S 
„_ (milieu ^T.Closteroceres. 

]  non  renflées,  et  en..  .  j  ^^  ""  «"^  peigne..    48.  Nématoccres. 
[  I  soie /,9.   Chétoches. 

Les  RoPALocÈREs  ou  globulicornes  correspondent  au  genre 
Papillon  dé  Linnasus.  Ils  ne  se  filent  pas  de  coque.  La  plu- 
part s'accrochent  par  la  queue  :  les  uns  restent  suspendus 


^  »  INS  •    495 

verticalement;  d'autres,  avant  de  se  changer  en  chrysalide  , 
ont  eu  la  précaution  de  passer  quelques  fils  qui  les  entourent 
en  dehors,  comme  une  sorte  de  sangle  transversale,  pour  se 
maintenir  rapprochés  des  corps  sur  lesquels  ils  se  sont  fixés. 
Toutes  les  espèces  volent  pendant  le  jour,  et  non  le  soir  ;  tek 
sont  les  papillons,  les  hespéries  ,  les  hétéropfères. 

Les  Clostérocères  ou  fusicornes  ont  les  antennes  en  fuseau 
ou  en  prisme  ,  plus  gros  au  milieu.  Leur  corselet  est  en 
général  plus  gros  que  dans  les  papillons .-  leurs  ailes  inférieures 
s'accrochent  aux  supérieures  par  un  poil  roide,  qui  est  reçu 
dans  une  sorte  d'anneau  du  bord  interne  près  de  la  base.  Ces 
ailes  ne  peuvent  pas  s'éiever  verticalement.  La  plupart  ne 
volent  qu'au  crépuscule,  principalement  le  soir.  On  rapporte 
à  cette  famille  les  sphinx,  les  sésie*,  les  Z3'gènes. 

Les  Nématoceres  ou  filicornes  offrent,  comme  leur  nom 
l'indique,  des  antennes  à  peu  près  en  fil,  dentelées,  ou  en 
peigne  .-  leurs  ailes  sont  en  toit,  le  plus  souvent  arrondies; 
elles  sont  aussi  accrochées  par  un  fil  roicie.  La  plupart  des 
chenilles  se  filent  un  cocon.  Les  bombyces,  les  cossus,  les 
hépiales  composent  cette  famille. 

Enfin,  la  dernière  famille,  celle  des  Chétocères  ou  fili~ 
cornes,  comprend  tousles  lépidoptères  dont  les  antennes  sont 
plus  grêles  à  leur  extrémité  libre  ou  en  forme  de  soie.  C'est 
le  groupe  le  plus  nombreux.  Il  comprend  des  espèces  qui 
n'ont  entre  elles  d'autre  analogie  que  dans  la  forme  des  an- 
tennes; car,  sous  l'état  parfait,  elles  ont  un  port  très-varié, 
principalement  par  la  forme  des  ailes  :  ensuite  les  chenilles 
diffèrent  beaucoup  encore  pour  la  conformation,  les  mœurs 
et  les  habitudes.  Parmi  les  espèces  de  cette  famille  ,  les 
unes,  comme  celles  des  genres  Phalène  et  Ptérophore , 
ont  les  ailes  étendues,  même  dans  l'état  de  repos  ou  d'inac- 
tion ;  les  autres ,  lorsque  l'insecte  ne  vole  pas  ,  ont  des  ailes  dis- 
posées de  manière  à  former  une  sorte  de  fourreau  ou  de  gaine 
au  corps,  comme  les  lithosies  et  les  teignes;  enfin,  chez,  un 
plus  grand  nombre,  comme  dans  les  pyrales ,  les  alucites, 
les  cranibes  et  les  noctuelles  ,  les  ailes  i'orment ,  dans  l'état 
de  repos,  une  sorte  de  toit  sur  le  corps. 

Le  septième  ordre  de  la  clause  comprend  tous  les  insectes 
qui,  sous  leur  dernier  état,  n'ont  que  deux  ailes  meœbra.-. 


496     <  INS  « 

neuscs ,  et  qui  sont  privés  de  mâchoires  distinctes  :  ce  sont 
les  DIPTÈRES.  Ces  insectes  ont ,  pour  bouche,  un  instrument 
propre  à  la  succion  des  liquides ,  qui  offre  trois  principales 
modifications  dans  sa  structure.  Quelquefois  c'est  une  avance 
cornée,  qui  fait  toujours  saillie  au  dehors,  et  qui  sert  de 
gaine  à  des  soies  roides,  mobiles  les  unes  sur  les  autres.  C'est 
une  sorte  de  pipette  ou  de  chalumeau  garni  de  petites  lan- 
cettes ;  c'est  un  suçoir  qu'on  nomme  en  latin  haustellum. 
Quelquefois  ce  tuyau  est  charnu  ,  protractile,  rétractile  ,  pou- 
vant être  alongé  et  rentrer  dans  une  cavité  particulière  de  la 
tête  .  terminé  le  plus  ordinairement  par  une  partie  plus  large, 
divisée  en  deux  lèvres,  et  au  centre  de  laquelle  est  un  pore 
absorbant,  forrnant  ainsi  une  sorte  de  petite  ventouse;  c'est 
ce  qu'on  nomme  une  trompe  ,  en  latin  proboscis.  Enfin  ,  cette 
bouche  offre  une  troisième  modification  :  elle  représente 
une  sorte  de  museau  aplati,  garni  d'une  trompe  très-courte, 
et  peut-être  d'un  petit  suçoir,  avec  des  palpes  ou  des  barbil- 
lons articulés  fort  distincts. 

Les  métamorphoses  varient  un  peu  dans  les  difflérentes  fa- 
milles ,  et  même  dans  quelques  genres  :  la  plupart  pon- 
dent des  œufs.  Les  larves  qui  en  proviennent,  quoique  de 
formes  et  de  mœurs  très-variées ,  sont  le  plus  souvent  privées 
de  pattes  et  d'yeux,  et  celles-là  se  développent  au  milieu  de 
leur  nourriture  ou  dans  l'eau.  Elles  se  meuvent  souvent  à  la 
manière  des  sangsues  ,  c'est-à-dire ,  en  s'accrochant  avec  la 
bouche.  La  plupart  des  nymphes,  à  l'exception  de  celles  des 
cousins  et  de  quelques  tipules,  sont  toujours  immobiles,  el 
leurs  parties  sont  tantôt  recouvertes  par  la  peau  de  la  larve 
qui  se  dessèche,  tantôt  par  une  sorte  de  coque  membraneuse, 
arrondie,  lisse,  à  la  surface  de  laquelle  on  ne  distingue  au- 
cune partie  de  l'insecte ,  comme  dans  les  œufs  des  oiseaux. 
Cette  coque  s'ouvre  le  plus  souvent  en  travers,  sans  que  les 
deux  parties  de  l'enveloppe  se  séparent  entièrement,  en  lais- 
sant un  pont  qui  fait  Toffice  d'une  charnière  élastique. 

Les  deux  ailes  membraneuses  des  diptères  offrent  le  plus 
souvent  en-dessous  deux  rudimens  d'ailes  inférieures  recour- 
bées sur  elles-mêmes,  en  forme  d'écaillés  doubles  ou  simples, 
qu'on  nomme  des  cuillerons  ;  et  en-dessous  se  voit  presque 
toujours  un  petit  appendice  plus  ou  moins  alongé,  et  terminé 


•  '  INS  •      497 

à  son  extrémité  libre  par  un  petit  bouton  renflé  :  c'est  ce 
qu'on  nomme  les  balanciers.  Leur  usage  est  encore  ignoré. 
Ils  n'existent  pas  dans  les  cousins. 

L'ordre  des  diptères  ne  comprend  pas,  comme  le  nom 
pourroit  porter  à  le  croire ,  tous  les  insectes  qui  n'ont  que 
deux  ailes  ;  il  en  réunit  plusieurs  qui ,  par  leur  organisa- 
tion, leurs  mœurs  et  leur  analogie  avec  quelques  espèces  du 
même  ordre  ,  doivent  y  être  rapportés  ,  quoiqu'ils  n'aient 
pas  d'ailes  du  tout  :  tels  sont  les  mélobosques  et  peut-être 
quelques  espèces  du  genre  de  la  puce.  Les  insectes  à  deux 
ailes  seulement  et  qui  ne  sont  cependant  pas  des  diptères, 
sont  quelques  coléoptères  à  élytres  sans  ailes  membraneuses  ; 
et  d'autres  chez  lesquels  les  élytres  sont  tellement  courts 
par  rapport  aux  ailes  toujours  étendues,  que  les  ailes  supé- 
rieures semblent  leur  manquer  :  tel  est  le  molorque;  tels  sont 
aussi  quelques  ripiphores.  Plusieurs  éphémères  n'ont  aussi 
que  deux  ailes  ,  quoique  la  plupart  en  aient  quatre  réticulées. 
Quelques  pucerons,  les  mâles  des  psylles,  des  kermès,  des 
cochenilles ,  qui  sont ,  par  la  structure  de  leur  bec ,  de  vérita- 
bles hémiptères,  n'ont  cependant  réellement  que  deux  ailes. 

Nous  avons  donné,  à  l'article  Diptères,  de  plus  grands  dé- 
tails sur  cet  ordre;  nous  croyons  devoir  y  renvoyer  le  lec- 
teur, en  lui  présentant  seulement  ici  l'analyse  qui  mène  à  la 
distinction  des  cinq  familles  qui  le  composent. 

!  cornée,  saillante  j  suçoir  rond.  .  5o.  Sclérostomes. 
en                (museau   plat.  54.   Hydromjes. 
charnue,enfon- J  à  poil  latéral.  52.   Chéioloxes. 
cée  ;  antennes  j  sans  poil  isolé.  5  1.   Aplochres. 
luUe,  remplacée  par  trois  pores 53.   Astomes. 


A  bouche 


La  famille  des  ScLÉaosTOMEs  ou  haustellés  est  caractérisée 
par  la  présence  du  suçoir  saillant,  souvent  coudé,  qui  est  évi- 
dent, même  dans  l'état  de  repos.  Les  espèces  réunies  par  ce 
caractère  sucent  presque  toutes  les  animaux ,  sous  l'état  parfait; 
mais  leurs  larves  ont  des  manières  de  vivre  lout-a-fait  diffé- 
rentes, et  par  conséquent  ces  larves  et  souvent  leurs  nym- 
phes n'ont  aucune  analogie  avec  les  insectes  qu'ils  produisent. 

Les  cousins,  par  exemple,  ressemblent  aux  tipules  de  la 
famille  des  hydromyes  par  leur  forme  générale  et  par  celle  des 

23.  32 


498      I  INS 

antennes  ;  mais  ils  diffèrent  de  tous  les  autres  diptères  par 
la  forme  et  par  la  mobilité  dont  est  douée  leur  nymphe  , 
qui  a ,  sous  ce  rapport ,  plus  d'analogie  avec  celle  des  phry- 
ganes  parmi  les  névroptères. 

Les  stomoxes ,  qui  ont  les  habitudes  des  cousins ,  ressem- 
blent beaucoup  plus  a  des  mouches. 

Les  mœurs  des  larves  varient  beaucoup.  On  en  trouve  dans 
le  sable,  où  elles  dressent  des  embûches  aux  autres  insectes; 
dans  la  terre,  dans  le  fumier,  dans  l'eau  ;  dans  l'intérieur 
des  animaux,   des  végétaux. 

Les  moyens  que  Ton  emploie  pour  diviser  en  genres  les  in- 
sectes à  deux  ailes,  sont  tout-à-fait  systématiques.  11  faut  avouer 
qu'on  connoît  encore  très-peu  ces  insectes,  et  que  leurs  méta- 
morphoses sont  à  peu  près  ignorées.  Les  uns,  comme  les  hip- 
pobosques,  lesmélobosques,  lesornithomyzes,  ont  les  antennes 
terminées  par  un  poil  isolé;  leur  tête  est  à  peine  distincte  du 
corselet;  les  crochets  de  leurs  tarses  sont  souvent  contournés 
en  tire-bourre,  pour  adhérer  sur  la  peau  des  animaux.  Leurs 
larves,  à  ce  qu'il  paroît,  se  développent  et  subissent  leurs  mé- 
tamorphoses dans  le  corps  de  lumière;  d'autres,  comme  les 
myopes  ,  les  rhingics  ,  les  stomoxes ,  portent  sur  l'un  des  côtés 
de  l'antenne  qn  poil  roide  isolé,  qu'on  ne  retrouve  pas  dans 
les  autres  genres,  qui  tantôt,  comme  les  conops ,  ont  les  an- 
tennes en  fuseau,  et  tantôt  en  fer  d'alêne,  comme  les  bom- 
byles,  les  taons,  les  chrysopsides ,  les  empis. 

La  famille  des  Aplocères  ou  simplicicornes,  c'est-à-dire 
celle  qui  renferme  les  espèces  à  trompe  charnue,  rétractile, 
et  dont  les  antennes  n'ont  pas,  comme  celles  du  groupe  sui- 
vant, un  poil  isolé  latéral ,  renferme  des  genres  dont  l'histoire 
est  encore  peu  connue.  Elle  réunit  ceux  que  nous  allons  énu- 
mérer  ,  en  renvoyant  pour  d'autres  détails  aux  articles  qui  les 
concernent,  et  principalement  au  mot  Aplocères.  Ce  sont, 
parmi  ceux  qui  offrent  un  poil  terminal  aux  antennes,  les 
rhagions,  les  bibions,  les  anthrax,  les  cyrtes  et  les  hypoléous  ; 
et  parmi  les  autres  les  stratyomes  ou  mouches  armées,  les 
siques ,  les  némotèles  ,  qui  ont  l'abdomen  ovale,  aplati,  et 
les  mydas  et  les  céries,  qui  l'ont  arrondi  et  alongé. 

Les  Chetoloxes  oh  latéralisètes  ,  dont  les  mouches  com- 
munes pourroient  être  considérées  comme  les  prototypes. 


•  •  INS  •     499 

ont,  comme  le  nom  de  la  famille  l'indique,  un  poil  isolé  sur 
les  antennes;  ce  poil  est  tantôt  simple,  tantôt  comme  plu- 
meux  ou  barbu  :  les  genres  Cénogastre  et  Mouche  sont  dans 
ce  dernier  cas.  Les  échinomyes  et  les  tétanoccres  ont  l'article 
intermédiaire  des  antennes  plus  long  que  les  autres.  Viennent 
ensuite  se  ranger  dans  le  même  groupe  les  ceyx  ,  qui  ont 
les  pattes  très  -  longues ,  le  corps  linéaire,  la  tête  comme 
portée  sur  un  cou  ;  les  dolychopes  et  les  cosijiies ,  qui  ont  le 
ventre  courbé  en-dessous;  les  mulions,  qui  ont  les  antennes 
en  fuseau  ,  tandis  qu'elles  se  terminent  par  une  sorte  de 
palette  dans  les  syrphes  ,  les  thérèves  et  les  sarges. 

La  petite  famille  des  Astomes  ne  comprend  que  le  genre 
des  oestres,  chez  lesquels  la  bouche  paroît  être  remplacée 
par  trois  tubercules.  L'insecte  ne  prend  cette  forme  ailée 
que  j)our  vaquer  à  l'œuvre  de  la  génération,  ou  pour  trans- 
mettre sa  race  dans  les  lieux  singuliers  que  la  nature  a  des- 
tinés à  son  développement,  tels  que  les  sinus  frontaux  des 
ruminans  ,  les  intestins  ,  les  furoncles  ou  les  ulcères  sous- 
cutanés  que  leurs  larves  déterminent  dans  les  animaux. 

Enfin,  sous  le  nom  d'HyoROMYEs  ou  de  bec-mouches  sont 
réunies  toutes  les  espèces  dont  le  front  se  prolonge  en  une 
sorte  de  bec  ou  de  museau  ,  sur  lequel  on  distingue  seulement 
des  bai'billons  ou  des  palpes  articulés.  Leurs  antennes,  sou- 
vent très-longues  et  en  peigne  ,  ont  toujours  un  grand  nombre 
d'articles.  La  plupart  proviennent  de  larves  de  formes  parti- 
culières, bien  différentes  de  celles  des  autres  diptères;  car 
les  nymphes  surtout  laissent  apercevoir  au  dehors  les  mem- 
bres de  l'insecte  parfait,  comme  dans  les  lépidoptères  :  telles 
sont  les  tipules,  les  cératoplates ,  les  hirtées,  et  quelques 
autres ,  comme  les  psychodes  et  les  scathopses.  Cette  famille 
semble  former  un  ordre  distinct  parmi  les  insectes;  mais  on 
n'en  connoit  encore  les  mœurs  que  très-imparfaitement. 

Le  huitième  et  dernier  ordre  de  la  classe  des  insectes  a, 
comme  nous  l'avons  déjà  annoncé ,  bien  moins  de  caractères 
positifs  que  ceux  que  nous  avons  étudiés  jusqu'ici. 

C'est  une  division  tout -à- fait  arbitraire  et  systématique, 
comprenant  plusieurs  groupes  d'insectes  qui  n'ont  entre  eux 
aucun  rapport  d'organisation  ni  de  mœurs;  ils  sont  privés 
d'ailes,  et  cependant,  sous  cette  forme,  ils  peuvent  repro- 


6oo     '  INS  '  ' 

duire  leur  race.  Voilà  le  seul  caractère,  qui  est,  comme  on 
pourroit  le  dire,  négatif,  puisqu'il  consiste  en  un  défaut  ou 
une  privation  de  parties  :  on  les  désigne  sous  le  nom  d' AP- 
TÈRES. Dans  le  second  volume  de  ce  Dictionnaire  nous 
avons  fait  connoître  quels  sont  les  insectes  des  différens  ordres 
qui,  quoique  privés  d'ailes,  ne  sont  pas  rangés  parmi  les 
aptères  :  il  a  fallu,  pour  cela,  comparer  ces  insectes,  et  em- 
ployer ce  qu'on  peut  appeler  la  méthode  d'exclusion,  n'ayant 
pas  d'autres  moyens  d'exprimer  les  caractères  des  ordres. 
Nous  renvoyons  à  cet  article,  qu'il  faudroit  reproduire  ici 
en  entier.  Nous  en  empruntons  cependant  le  tableau  suivant, 
qui  indique  les  six  familles  naturelles  de  cet  ordre. 

i,.    .  ,  j  tous  les  anneaux.  .  5q.  Myriapodes. 

peu  distinct  :  pattes  a  <  /.       „   ,  , 

(  quelques  anneaux.  60.  Polygnathes. 

,.    .  (   nulles:   8  pattes 58.  Aceres. 

très -distinct;»    ,.     .  ,      ., 

{   distinctes;  Ipoilu 57.  I\ematouies. 

antennes  ,  'T  .  /  . 

\       a  anus       [sans  poils....  .>d.  hicins. 

Pas  de  niâclioircs:  un  bec  ou  un  suçoir 55.  Rhinapleres. 

Parmi  les  Rhinaptères  ou  parasites  on  range  les  aptères  qui 
n'ont  pas  de  mâchoires,  mais  un  suçoir;  leur  tête  est  mobile 
ou  distincte  du  reste  du  corps:  tels  sont  les  poux,  les  cirons 
et  les  puces. 

La  petite  famille  suivante  comprend  seulement  les  ricins 
ou  les  poux  des  oiseaux  ,  qui  ont  de  petites  mandibules  pour 
s'accrocher  aux  plumes  :   on  les  a  appelés  Avislges  ou  Orni- 

THOMYZONS. 

Les  Nématoures  ou  séticaudes  comprennent  trois  petits 
genres  qui  ont  beaucoup  d'analogie  avec  les  blattes,  insectes 
orthoptères,  et  avec  quelques  névroptères  ,  par  la  forme 
des  antennes,  de  la  bouche,  des  pattes  et  par  les  tuyaux  qui 
souvent  terminent  l'abdomen  :  tels  sont  les  genres  Forbicine, 
Lépisme  et  Podure  ,  qui  sont  nocturnes  et  se  nourrissent  de 
débris  de  végétaux. 

Les  Aranéides  ou  les  acères  sont  tellement  différens  des 
autres  insectes,  que  quelques  auteurs,  dans  ces  derniers 
temps,  en  ont  fait  une  classe  à  part.  Ils  diffèrent,  en  effet, 
des  insectes  ,  d'abord  ,  parce  qu'ils  n'ont  pas  de  tête  distincte 
et  surtout  pas  d'antennes ,  parce  que  le  corselet  et  la  tête 
sont  réunis ,  parce  que  la  plupart  ont  huit  pattes  ;  ils  n'ont  pas 


•  INS  •    Soi 

d'yeux  à  réseaux  simples ,  mais  comme  huit  yeux  lisses  ou 
stemmates  :  il  y  aune  sorte  de  sac  pulmonaire  distinct,  avec 
très- peu  de  stigmates  ou  d'orifices  extérieurs.  Ils  pondent 
plusieurs  fois  pendant  leur  vie.  Tous  se  nourrissent  d'ani- 
maux qu'ils  blessent  h  mort  et  qu'ils  sucent  ou  dévorent 
ensuite.  C'est  une  famille  très- nombreuse ,  q»ii  se  subdivise 
en  genres  et  sous -genres,  d'abord  d'après  la  forme  des 
mandibules  ,  qui  se  terminent  tantôt  par  un  simple  crochet 
acéré  ,  mobile  ,  comme  les  araignées  ,  les  mygales ,  les  trom- 
bidies;  ensuite,  en  espèces  dont  les  mandibules  forment  la 
pince,  et  dont  l'abdomen  est  accolé  au  corselet  sans  pédicule 
distinct:  tels  sont  les  scorpions,  caractérisés  en  outre  par  les 
anneaux  postérieurs  de  l'abdomen  ,  qui  sont  articulés  en  forme 
de  queue  terminée  par  un  aiguillon  ou  crochet  venimeux  ; 
tels  sont  encore  les  phrynes,  les  galéodes  et  les  faucheurs. 

Les  Myriapodes  ou  millepieds  ont  des  paires  de  pattes  à 
presque  tous  les  anneaux  :  ils  ont  quelques  analogies  d'une 
part  avec  les  crustacés,  et  de  l'autre  avec  les  annelides;  ils 
n'ont  pas  de  corselet  distinct,  et  leur  tête  ne  porte  que  deux 
antennes.  Les  scolopendres  et  les  scutigères  n'ont  qu'une 
seule  paire  de  pattes  à  chaque  segment  de  leur  tronc  ,  tandis 
que  les  jules,  les  polyxènes  ,  les  glomérides  et  les  polydesraes 
en  ont  deux  à  chaque  anneau. 

Enfin,  les  Polygnathes  ou  quadricornes ,  comme  les  clo- 
portes, les  armadilles  et  les  physodes,  qui  ont  quatre  an- 
tennes, semblent  faire  le  passage  évident  à  la  classe  des 
crustacés;  car  la  plupart  portent  les  œufs  sous  les  derniers 
anneaux  du  corps  :  ces  œufs  y  éclosent,  et  les  petits  y  restent 
quelque  temps  vivans.  Ils  respirent  par  des  trachées.  Voilà  en 
quoi  ils  diffèrent  de  certains  crustacés,  comme  les  crevettes. 

Nous  venons  d'exposer  la  méthode  de  classification  que 
nous  avons  adoptée  pour  ce  Dictionnaire.  Nous  croyons  de- 
voir répéter  que  nous  n'avons  pu  qu'énoncer  les  faits,  qu'on 
trouvera  développés  avec  beaucoup  plus  de  détails  sous  cha- 
cun des  noms  principaux.  Nous  allons  seulement  ajouter  ici 
la  liste  des  familles  dans  l'ordre  que  nous  avons  suivi,  afin 
d'en  présenter  l'ensemble ,  et  pour  qu'elle  puisse  servir  de 
guide  dans  l'arrangement  méihodique  des  planches  qui  repré- 
sentent tous  les  genres  d'insectes  dans  l'Atlas.  Nous  indique- 


6o2 


INS 


rons  aussi  celles  des  livraisons  qui  ont  paru  jusques  et  com- 
pris la  vingt-troisième.  Par  la  suite,  quand  nous  aurons  oc- 
casion de  citer  une  planche  ,  nous  l'indiquerons  sous  le 
numéro  qui  sera  gravé  au  bas. 

I."  Ordre.    COLÉOPTÈRES. 

Premier  Sous-ordre.      PENTAMÉR  ES. 
i.''^  Famille.    Créophages  ;    3.*  livraison,    deux   planches, 

n."'  12    et  i3. 
2.^         —         Nectopodes  ;  4.*  livraison,  n."  11. 
3."  —  Brachélytres  ;        idem,  id. 

4.*         —         Pétalocères  ;  4."  livraison  ,  n.°  10. 
5.*         —  Priocères;  8."  livraison,  n.°'   9  et  10, 

6.*  —  Hblocéres  ;  idem  ,  idem. 

7.®         —         Stéréockres;    iG.*"  livraison,  n."  10. 
8."         —         Sternoxes;    1 1  .*"  livraison  ,  n.°  10. 
g.^  —  Térédyles;  idem,  id. 

10.*         —  Apalytres;    1  .'"livraison  ,  n,"  9. 

Second  Sous-ordre.  HÉTÉROMÉRÉS. 

11.*  Famille.  Épispastiques ;  8.*^  livraison,  n.°  12. 

12."         —  Sténoftères  ;    1 5.^  livraison  ,  n.°   i3. 

i3.*  —  Ornéphiles  ;  idem,  i).°  11. 

14.^  —  Lygophiles,  idem,  n."  10. 

i5.*  —  PhoïOphyges,  idem,  n.°   12. 

16."         —  Mycétobies;   18.*  livraison,  n."  11. 

Troisième  Sous- ordre.    TÉTRAMÉR  ES. 
17.*  Famille.     Rhinocères;   16.*  livraison,  n.°  9. 
18.*         —         Cylindroïdes  ;    1 1  ."^  livraison ,  n.°  9. 
19."         —         Omaloïdes;   16.*  livraison,  n.°  10. 
20.*         —         Xylophages  ;  8."  livraison  ,  n.°  11. 
21.*         —         Phytophages;   17.*^  livraison ,   n.°' 9   et  10. 

Les   genres  anomaux  Spondyle   et  Cucuje, 
11.^  livraison,    n.°  9. 

Quatrième  Sous-ordre.  TRIMÉRÉS. 
22.'  et  23."  Familles.    Tridactyles  et  Dxmbrés. 


INS  •       5o5 


IL*  Ordre.    O 

RTHOPTÈRES. 

24/ 

Famille. 

Labidoures 

;  1."  livraison,  n."  12. 

25." 

— 

Blattes  ; 

idem ,                id. 

26/ 

— 

AnOiMIPES  ; 

idem ,                 id. 

27.^ 

— 

Grylloïdes  ; 

i3.*  livraison,  n."'  i3  et  14. 

III."  Ordre.    NÉVROPTÈRES. 

28.*    Famille.    Stégoftères  ;  i5."  livraison,   n."  12  ,  et  14.' 

livraison  ,  n."  11. 
29.^         —         Odonates  ;   iJ^  livraison,  n."  11. 
00. °  —  Agnathes;  idem,  id. 

IV."  Ordre.    HYMÉNOPTÈRES. 

3 1 ."  Famille.  Mellites. 

32."  —  Ptérodiples  ;    1.'"  livraison,  n."  10. 

53."  —  Chrysides  ;              idem,              id. 

34.*  —  Anthophiles;           idem,              id. 

35."  —  Entomotilles  ;  9."  livraison  ,  n."  9. 

36."  —  Myrméges;               idem,              id. 

37."  —  Oryctères. 

38."  —  Néottocryptes. 

39."  —  Uropristes. 

V."  Ordre.  HÉMIPTÈRES. 

40."  Famille.  Rhinostomes  ;   1 1."  livraison,  n.°  1 1. 

41."         —  Zoadelges  ;   11."  livraison  ,  n.°  12. 

42."  —  Hydrocorées;    •      idem,  id. 

43."         —  AucHÉNORiNQUEs  ;    1 .'"  livpaison ,  n.°  9. 

44."         —  Phytadelges. 

45."         ■ —  Physapodes  ;   1 1."  livraison  ,  n."  1 1. 

VI."  Ordre.    LÉPIDOPTÈRES. 

46."    Famille.    Ropalocères;  9."  livraison,   n.°  10. 
47."         —         Clostérocères  ;  8."  livraison  ,  n.°  i  3. 
48."         —         Nbmatocères;  6."  livraison  ,  n.°*  10  et  11. 
49."         —         Chétocères  ;  8."  livraison,   n.°   i3,  el  9."  li- 
vraison, n.°  1 1. 


INS 
VII."  Ordre.  DIPTÈRES. 


50." 

Famille. 

SCLÉROSTOMES. 

.51." 

— 

Aploceres;   2."  livraison,  n.°  8. 

52.'- 

— 

CnÉToroxEs. 

55.' 

— 

ASTOMES. 

54.-= 

— 

Hydromyes. 

VIII.*= 

ET    DERNIER    OrDRE.    APTÈRES. 

55." 

Famille. 

Rhinaptères  ;    18."  livraison,  n.°  10. 

56." 

— 

Ornithomyzons. 

67." 

— 

Nématoures. 

58." 

— 

Aceres;   2."  livraison,  n.°'  10  et  11. 

69." 

— 

Myriapodes;    22."  livraison,  n.°' 9  et 

60." 

— 

Polygnathes  ;   idem,    n.°  10. 

Après  avoir  fait  connoître  successivement,  dans  les  pages 
qui  précèdent,  1.°  la  conformation  des  insectes,  en  donnant 
une  description  générale  des  parties  dont  leur  corps  se  com- 
pose ;  2.°  l'organisation  intérieure,  ou  l'exposé  des  fonctions 
que  ces  animaux  remplissent;  5.°  l'arrangement  méthodique 
ou  la  classification  particulière  que  nous  avons  employée  pour 
les  faire  connoître,  il  nous  reste  à  traiter,  comme  nous 
l'avons  indiqué  au  commencement  de  cet  article,  de  l'his- 
toire de  la  science  eutomologique  ,  en  indiquant  les  auteurs 
principaux  qui  ont  écrit  sur  les  insectes  ;  mais,  en  donnant 
les  titres  de  leurs  ouvrages,  nous  en  présenterons  une  courte 
analyse. 

Ce  sujet  a  été  l'objet  de  plusieurs  traités  particuliers,  dont 
nous  profiterons.  Cependant  il  sera  facile  de  voir  que  nous 
sommes  loin  de  les  avoir  copiés.  Les  principaux  sont  Brunnich 
(1764);  Fabricius,  dans  le  premier  livre  de  sa  Philosophie 
eutomologique  (1778),  intitulé  Bibliothèque;  les  auteurs 
de  l'Encyclopédie  méthodique  (1789);  une  dissertation  inau- 
gurale de  M.  Gravenhorst  (]8oi  ) ,  publiée  en  latin,  à  Helm- 
sta^dt,  dans  laquelle  l'auteur  a  voulu  donner  principalement 
un  abrégé  des  systèmes  d'entomologie  ;  enfin,  un  opuscule 
de  M,  Charles  Nodier,  qui  a  pour  titre  Bibliographie  euto- 
mologique ,  ou  Catalogue  raisonné  des  ouvrages  relatifs  aux 
insectes  (an  IX). 


•  INS  •     5o5 

Voici  d'abord  la  liste  chronologique  de  cinquante -six  des 
auteurs  principaux  :  c'est  dans  cet  ordre  que  nous  allons 
successivement  les  faire  connoître. 


1.  Gesner  ,   i54i. 

2.  Aldrovande ,   160; 

3.  Hoefnagel,   i65o. 

4.  Mouffet,   1654. 

5.  Rédi,  1646. 

6.  Goedaert,    1662. 

7.  Malpighi ,  1669. 

8.  Swammerdani , 
g.  làster,    1678. 

10.  Mérian,    167g. 

11.  Leuvvenhœck, 


1675. 


695. 


1700. 


12.  Vallisnieri 

i5.  Rai,   1708. 

14.  Albin ,  1751. 

i5.  Réaumur,   1734. 

16.  Seba,    1754. 

xj.  Linnaeus,    i735. 

18.  Frisch,    1758. 

ig.  Edwards,   1743. 

20.  Rœsel ,  1744. 


Bonnet,    1745. 
L'Admirai,  1746. 
Degéer,  1752. 
Clerk,  1767. 
Lyonnet,    1760. 

26.  Scopoli ,    1763. 

27.  Geoffroy,  1762. 

28.  Schaeffer,  1764. 
2g.  Bruniiich  ,    1764. 


3o.  Pallas,  17G6. 
3i.  Schluga ,    1767, 

32.  Drury ,    1768. 

33.  Ernst ,  176g. 

34.  Cramer,    1775. 

35.  Fabricius,    1775. 

36.  Esper,   1777. 

37.  Stoll,   1780. 

38.  Schrank,   1781. 
3g.  Laicharting,  1781. 

40.  Thunberg,   1784* 

41.  Olivier,  178g. 

42.  Latreille,  i7g6. 

43.  Panzer,  1796. 

44.  Clairville,  i7g8. 

45.  Cuvier,    1798. 

46.  Herbst ,  i7g9. 

47.  llliger,   1801. 

48.  Duméril,   1801. 

4g.  Faykull ,  1800  et  1811. 

50.  Meigen  ,  1804. 

51.  Kirby,   1802. 

52.  Jurine ,   1807. 

53.  Huber,   1808. 

64.  Schœnherr,  1806,  1808 
et  1817. 

55.  Gyllenthal,    1808,   1810 

et  i8i3. 

56.  Duftschmid,  i8o5,  1812. 


Voici  une  autre  liste  des  auteurs,  que  nous  avons  disposée 
de  manière  à  donner  une  idée  générale  de  la  nature  de  leurs 
ouvrages. 

Ceux  qu'il  est  utile  d'étudier  comme  observateurs  des  mœurs 
et  de  l'histoire  des  insectes  en  général ,  sont  les  suivans  : 

Sw^ammerdam  ,  Goedaert,  Réaumur,  Rœsel,  Degéer, 
Bonnet,  Huber. 


6o6     '  INS  ' 

Parmi  les  anafomisies ,  nous  citerons  Leuwenhœck ,  Swam- 
mcrdam,  Vallisnicri,  Lyonnet,  Cuvier,   Marcel  de  Serres. 

Les  auteurs  que  nous  considérerons  comme  systématiques 
et  descripteurs,  sont: 

Linnœus,  Degéer,  Fabricius,  Latreille. 

Puis  ceux  qui  n'ont  décrit  que  les  insectes  d'un  pays,  ou 
topographes  :  comme 

Geoffroy,  Fourcroy  et  Walckenaer ,  ceux  des  enviro  de 
Paris. 

Frisch  et  Panzer,    ceux  de  rAUemagne. 

Thunberg,  Paykull  et  Gyllenthal  ,  ceux  de  la  Suéde. 

llliger  et  Kugelan  ,  ceux  de  la  Prusse. 

Schranck,  ceux  des  environs  de  Vienne  en  Autriche. 

Scopoli ,  ceux  de  la  Carniole. 

Laicharting,  ceux  du  Tyrol. 

Rossi ,  ceux  de  l'Etrurie. 

Spinola,  ceux  de  la  Ligurie. 

Cyrillo,  ceux  de  Naples. 

Voët,  ceux  de  la  Belgique. 

Nous  citerons  ensuite  ceux  des  auteurs  qui  ont  décrit,  soit 
les  insectes  d'un  ordre  entier,  soit  seulement  les  espèces  d'un 
seul  genre ,   ou  les  mono  graphes. 

Ainsi,  pour  les  coléoptères-.   Olivier,  llliger,  Herbst. 

Pour  les  escarbots  ,  Paykull  ;  les  charansons  ,  Clairville  ;  les 
niéloës,  Leach  ;  les  staphylins,  Gravenhorst. 

Pour  les  orthoptères,  Stoll. 

Pour  les  hémiptères:  Fallen ,  Schellenberg  ;  Stol  ,  pour 
les  cigales  ;  Wolff ,  pour  les  punaises. 

Pour  les  hyménoptères,  Jurine  ;  pour  les  abeilles  ,  Kirby  ; 
pour  les  guêpes,  Réaumur  ;  pour  les  uropristes ,  Klug  ; 
pour  les  fourmis  ,  Huber,  Latreille. 

Pour  les  névroptères  ,  Swammerdam  ;  Degéer,  sur  les 
éphémères;  Smeathan,  sur  les  termites. 

Pour  les  lépidoptères  ;  Esper  ,  Cramer,  Hubner ,  Ernst , 
Sepp  ,  Hoefnagel. 

Pour  les  diptères  :  Meigen,  Schellenberg,  Fallen. 

Pour  les  aptères  :  Clerck ,  Walckenaër. 


•  INS  •       5o7 

1.  CoKRAB  Cesser  ,  Jont  les  ouvrages  nombreux  sont  consacres  à 
l'histoire  générale  des  animaux  ,  navoit  pas  publié  lui-même  ses  obser- 
valious,  ni  surtout  ses  recherches  historiques  sur  les  insectes  ,  puisqu'il 
est  mort  en  i558,  et  que  le  livre  5  ,  où  il  est  question  <lu  scorpion 
et  de  quelques  autres  insectes  ,  n'a  été  publié  par  Wolpf  que  de  i5oo 
à  \[^(i-j.  MoufTet  avoue  cependant  qu'il  a  eu  connoissance  des  manuscrits 
de  Gesner,  qui  avoient  été  achetés  par  Canierarius  ,  puis  envoyés  à 
Thomas  Penn,  à  Londres,  lequel  les  communiqua  à  Thomas  Mouffel. 
C'est  sous  le  rapport  de  l'érudition  que  l'ouvr.ige  de  Gesner  mérite 
l'attention  des  naturalistes. 

2.  Ulysse  Aldrovaindi  n'est  aussi  qu'un  érudit  et  un  compilateur 
instruit.  Son  traité  des  insectes^  de  animalibus  inseclis  lihri  sepleiii  , 
a  eu  deux  éditions  in-folio  :  la  première  ,  avec  des  gravures  en  bois  , 
à  Bologne,  1602;  et  la  seconde,  à  Francfort,  1618,  avec  des  gra- 
vures sur  cuivre.  On  3'  trouve  un  premier  arrangement  systématique. 
Les  insectes  y  sont  divisés  en  deux  classes,  les  terrestres  et  les  aqua- 
tiques, avec  des  ordres  tirés  de  la  présence  ,  du  nombre  et  de  la  dis- 
position des  pattes  et  des  ailes  ;  mais  ces  ordres  sont  si  arbitraires, 
que  dans  le  premier,  par  exemple,  il  range  les  insectes  qui  font  des 
rayons  d'alvéoles  et  du  miel  (favijîca)  ,  et  dans  un  autre  tous  ceux  qui 
n'en    font  pas. 

3.  J.  HoEFNAGEL  éloil  Un  peintre  observateur,  qui  a  laissé  des  figures 
très-exactes  d'un  grand  nombre  d'insectes  :  elles  ont  été  gravées  à  An- 
vers, en  i63o  et  1646,  sous  le  titre  suivant:  Diversœ  inseciorum  vola- 
t'tUum  icônes  ad  vivum  depictœ.  C'est  son  ouvrage  principal  ,  et  il 
n'offre  d'intérêt  que  par  les  figures. 

4.  Thomas  Mot;FFET  a  publié  l'un  des  premiers  ouvrages  consacrés 
spécialement  à  l'histoire  des  insectes;  il  a  pour  titre  :  Inseciorum  sive 
minimorum  animalium  theatrum  ,  etc.  Il  a  élé  publié  à  Londres,  en 
i63.j  ,  en  petit  in-folio  de  326  pages,  avec  des  figures  en  bois.  C'est 
encore  un  ouvrage  érudit,  dans  le  genre  de  ceux  de  Gesner,  dont  il 
a  beaucoup  profité,  puisqu'il  paroit  avoir  eu  connoissance  des  manus- 
crits laissés  par  ce  savant,  que  Boerhaave  appeloit  un  prodige  d'érudi- 
tion (monstrum  eruditionis). 

5.  Francesco  RÉd!  ,  savant  observateur  ;  qui  a  surtout  éclairé  l'histoire 
de  la  génération  des  insectes,  qu'on  regardoit  comme  le  produit  de 
la  corruption.  Il  a  publié  ses  observations  d'abord,  en  italien,  à  Flo- 
rence ,  en  1668;  mais  il  en  a  paru  une  traduction  eu  latin  à  Amsterdam  , 
en  1671  :  Expérimenta  circa  generationem  inseciorum,  sous  format 
în-12^  avec   quelques  planches  en   cuivre. 

6.  Jean  Goedaert  avoit  publié  d'abord  en  hollandois  un  ouvrage 
sur  la  métamorphose  des  insectes,  qui  a  été  ensuite  traduit  en  latin 
et  publié  sous  ce  titre  :  Metamorphosis  et  historia  naturalis  inseciorum , 
cum  commentariis  et  appendicihus  Joli,  de  M:'y  et  F  Ferzaerdt ,  3  vol. 
in-8.°,  depuis  1662  jusqu'en  1667,  avec  figures.  Cet  ouvrage  a  été  traduit 
en  françois,  et  Lister,  comme  nous  le  verrons  sous  le  nom  de  cet  au- 
teur, en  a  publié  une  édition  latine  d'après  une  méthode  particulière. 
Il  y  a  beaucoup  de  faits  dans  l'ouvrage  de  Goedaert.  Malheureusement 
on  croyoit  alors  à  la  naissance  spontanée.  Cependant  quelques  obser- 
vations sont  bien  faites,  et  les  figures  assez  exactes  pour  que  beaucoup 
d'iusectes  y  soient   reconnus. 


5o8       ♦  IjyS  ♦ 

7.  Marcellus  Malpighi  a  donné  un  des  meilleurs  traités  d'anatomie 
sur  les  insectes,  à  l'occasion  de  ses  recherches  sur  la  structure  du  ver 
à  soie,  d'nbord  dans  une  lettre  laline,  Dissertatio  de  bombjce,  impri- 
mée à  Londres,  en  1669.  C'est  un  petit  volume  de  100  pages  in  -  ^.^ 
avec  douze  planches  ;  mais  celle  dissertation  a  été  réimprimée  dans 
les  OEuvres  complètes  de  l'auteur,  en   1686. 

8.  Jean  Swammerdatvi  a  publié  en  hollandois,  d'abord  en  }Ci6o,  une 
histoire  générale  des  insectes  ,  qui  a  été  traduite  successivement  en 
françois  et  en  latin  :  ce  sont  de  petits  volumes  in-4.",  avec  i3  planches 
qui  sont  les  mêmes  dans  les  trois  éditions,  dont  la  dernière,  de  Lryde, 
est  de  i685.  Mais  le  grand  ouvrage  de  cet  auteur  est  sa  Bible  de  la 
nature,  en  deux  volumes  in-folio,  avec  53  planches  supérieurement 
gravées  sur  cuivre,  publiée  en  17S7  et  17.Î8,  à  Leyde,  sous  ce  titre: 
Biblia  naliirœ ,  seu  historia  insectormn ,  helgice ,  cum  versione  latina  H- 
D.  Gauhii ,  et  vita  auctoris  per  Herin.  Boerhaave.  Les  travaux  de 
Swammerdam  ont  été  une  époque  reniarqu;ible  pour  la  science.  Cet 
auteur  a  découvert  les  principaux  modes  de  la  transformation  ou  de  la 
métamorphose,  et  par  conséquent  il  a  donné  la  base  de  la  meilleure 
classification  pour  les  ordres.  Parmi  les  insectes  sans  métamorphose  et 
qui  ne  changent  que  de  peau  ,  en  conservant  pendant  toute  leur  vie  la 
forme  qu'ils  avoient  en  sortant  de  l'œuf,  il  raAge  les  araignées,  la 
tique,  le  pou,  le  cloporte,  le  scolopendre,  etc.;  il  donne  en  particu- 
lier l'histoire  très -détaillée  de  la  structure  et  de  l'organisation  des 
pous.  Au  second  ordre,  qui  comprend  les  insectes  agiles,  sous  les  trois 
états  de  larve,  de  nymphe  et  de  perfection,  mais  qui,  sous  le  second, 
ont  des  rudimens  d'ailes,  il  rapporte  ceux  qu'on  a  nommés  depuis 
iiévroptères,  orthoptères  et  hémiptères  ;  c'est  là  que  se  trouvent  décrites 
rhistoire  de  la  demoiselle,  celle  de  la  nèpe  ou  scorpion  aquatique, 
de  l'éphémère.  Au  troisième  ordre,  dans  lequel  les  nymphes,  quoique 
munies  de  parties  distinctes,  ne  sont  plus  susceptibles  de  mouvement 
prononcé,  Swammerdam  rapporte  d'abord  les  insectes  nommés  depuis 
hyménoptères  et  coléoptères  ;  il  donne  pour  exemple  l'organisation  et 
l'histoire  de  la  fourmi,  de  l'abeille  et  du  scarabée  nasicorne  ,  et  même 
celle  du  cousin  (  quoique  cet  insecte  forme  ,  pour  ainsi  dire  ,  un  ordre 
à  part,  puisque  sa  nymphe  est  agile).  C'est  à  ce  même  ordre  troisième 
que  l'auteur  rapporte  encore  les  insectes  à  chrysalide  emmaiilottée  ;  il 
décrit  très  en  détail,  à  cette  occasion,  l'organisation  et  içs  métamor- 
phoses des  papillons  dits  la  petite  tortue,  et  de  celui  du  chou.  Enfin, 
dans  son  quatrième  ordre  sont  rangés  les  insectes  à  chrysalide  obtectée 
ou  semblable  à  un  œuf;  il  y  rapporte  les  diptères  :  il  y  donne  l'histoire 
d'un  stratyome  ou  de  la  mouche  armée  de  GcolVroy,  celle  de  la  mouche 
du  fromage.  L'ouvrage  dont  nous  venons  de  présenter  une  bien  courte 
analyse,  est  un  des  plus  importans  pour  l'étude  de  l'organisation  des 
insectes;  il  contient  en  outre  beaucoup  de  faits  curieux  pour  l'histoire 
naturelle  en  général  et  pour  l'anatomic  des  animaux. 

9.  Martin  Lister.  Cet  Anglois,  eu  donnant  une  édition  de  Gocdaert, 
en  i685  ,  a  présenté  une  sorte  de  méthode  de  classification,  qu'il  a 
perfectionnée  ensuite  dans  l'ouvrage  de  John  Kai,  qu'il  a  publié  eu 
1710.  Ses  divisions  sont  tirées  de  la  forme  des  œufs  et  de  la  méta- 
morphose; ensuite  de  la  présence  ou  du  défaut  des  pattes,  des  élytres 
et  des  ailes.  Mais  cette  méthode,  comme  on  va  le  voir,  est  l'enfance 
de  l'art.  Les  insectes  sont  ou  sans  métamorphoses,  intransmutahilia ,  ou 


•  •  INS  •       5o9 

ils  subissent  des  transformations  ,  transmutahilia.  Ceus-cî  se  subdivisent 
en  vaginipennia  (les  coléoptères),  papiliones  (les  lépidoptères),  quadri- 
pennia  f  hyménoptères  et  névroptères  )  et  hipennia  (les  diptères)  :  vien- 
nent ensuite  d'autres  subdivisions,  d'après  les  Inrves,  la  forme,  la  cou- 
leur, les  proportions  des  parties  du  corps,  ou  d'autres  particularités  de 
conformation. 

10.  Méri AN  (Mademoiselle  Marie-Sibylle  de)  a  composé  plusieurs  ou- 
vrages en  hollandois  sur  l'bistoire  des  insectes.  Ses  œuvres  ont  ensuite 
été  traduites  en  latin  et  en  françois,  le  plus  souvent  avec  les  mêmes 
planches,  de  1679  à  1730.  L'histoire  des  insectes  d'Europe,  publiée  in- 
folio, à  Amsterdam,  se  compose  de  184  planches  enluminées.  La  dis- 
sertation ayant  pour  titre ,  Erucarum  oitus ,  alimentum  et  paradera  me- 
tamorphosis ,  publiée  à  Amsterdam,  en  1718,  comprend  5o  planches.  Il 
y  a  encore  plusieurs  autres  ouvrages,  entre  autres  celui  qui  a  pour  titre, 
Metamorphosis  insectorum  Surînamensium ,  qui  a  paru  en  1705.  Tous 
ces  ouvrages  sont  principalement  recherchés  des  amateurs  ou  des  biblio- 
mi'nes  pour  la  beauté  des  planches,  et  surtout  pour  leur  rareté,  ayant 
été  tirés  à  un  très -petit  nombre  d'exemplaires. 

11.  Aktoike  de  LErwEsnoECK  a  principalement  étudié  les  insectes  ou 
leurs  parties  à  l'aide  du  microscope.  L'ouvrage  dans  lequel  il  a  con- 
signé ses  observations,  formant  cinq  petits  volumes  in-4.",  est  intitulé: 
Ricana  natunv  ,  ope  micioscopiorum  détecta;  Delphis ,  itigS  à  1721. 
Les  trois  derniers  sont  imprimés  à  Amsterdam.  Toutes  les  observations 
sont  sous  forme  de  lettres  écrites  de  manière  à  inspirer  beaucoup 
d'intérêt,  quoique  un  peu  longues,  comme  cela  arrive  à  toutes  les  per- 
sonnes qui  font  des  observations  minutieuses,  et  qui  croient  devoir 
en  publier  les  procès- verbaux.  Cet  ouvrage  est  cependant  plein  de 
faits  sur  les  larves  des  tenthrèdes,  sur  les  galles  des  végétaux  produits 
par  diverses  espèces  d'insectes  très-bien  décrites;  sur  les  fourmis,  les 
abeilles,  les  cousins.  On  y  trouve  une  description  du  pou,  très-curieuse, 
même  après  celle  de  Swammerdam;  l'histoire  de  la  mouche  commune, 
de  la  puce,  etc.  Mais  les  objets  sont  décrits  presque  au  hasard,  suivant 
les  occasions  qui  se  sont  ofl'ertes.  Il  n'y  a  pas  d'ordre  dans  l'ouvrage, 
ce  qui  en  rend  la  lecture  fort  pénible. 

12.  Aktokio  Valliskieri  a  écrit  tous  ses  ouvrages  en  italien.  Le  pre- 
mier ,  qui  a  pour  titre  ,  Dialoghi  sopià  la  curiosa  origine ,  sviluppi 
e  coslumi  di  varii  insetti,  a  été  publié  à  Venise  en  1700;  mais  toutes 
ses  recherches  sont  recueillies  dans  ses  OEuvres,  qui  forment  trois 
volumes  petit  in-folio ,  avec  beaucoup  de  planches  fort  bien  gravées. 
Les  insectes  les  plus  curieux,  ou  ceux  qui  y  sont  le  mieux  décrits  et 
pour  la  première  fois,  sont  les  suivans  :  le  fourmilion,  l'ichneumon, 
la  guêpe  menuisière  ou  xylocope,  l'œstre  hémorrhoïdal ,  le  nasal,  le 
criocère  louge  du  lis,  la  mouche  à  scie  ouhylotome  du  rosier,  la  puce, 
le  kermès,  le  charanson  du  blé  ou  la  calandre.  En  général,  cet  ou- 
vrage joint  à  beaucoup  d'érudition  un  art  admirable  dans  la  manière 
d'observer. 

i3.  John  Rai  n'a  pas  publié  lui-même  ses  ouvrages,  étant  mort  trois 
ans  avant  que  Lister  en  eût  donné  une  édition,  en  1710,  sous  le  titre 
d'Hisioria  insectorum  ,  in-4.°  Cependant  il  avoit  publié,  en  1706,  une 
petite  feuille  in-8.°,  qui  a  été  réimprimée  comme  le  prolégomène  de 
l'ouvrage  ci  -  dessus  mis  au  jour  par  Lister.  Cette  brochure  in-ô."  avoit 
pour   titre,  Methodus  imeçtorum,    seu  inseeta  in  methodum  aliijualem 


digesla.  C'est  le  premier  ouvrage  mélhodic^e  sur  l'entomologie,  comnu 
pour  tou";  les  animaux  dits  vertébrés.  Nous  l'avcas  fait  connoître  à 
l'article  de  Lister. 

14.  Eléazar  Albiji-,  peintre  anglois,  a  publié  son  ouvrage  sous  le 
titre  d'Histoire  naturelle  des  insectes  d'Angleterre,  A  nalut al  Historv 
of  english  insects ,  with  notes  and  observations  hy  JT.  Derham.  Cet 
ouvrage  n'est  estimé  que  pour  les  figures  coloriées,  qui  sont  au  nombre 
de  100  planches,  et  fort  exactes. 

i5.  RÉAUMUR  (René-Antoine  Feicbault  de)  a  écrit  l'un  des  ouvrages 
les  plus  importans  pour  les  observateurs  de  la  nature;  il  est  composé 
de  six  volumes  in-^.",  qui  ont  paru  de  1734  à  1740,  sous  le  titre  de 
Mémoires  pour  servir  à  1  histoire  des  insectes.  L'auteur  s'y  est  acquis 
tine  gloire  immortelle  pour  l'art  et  la  patience  avec  lesquels  il  a  scruté 
les  mœurs  de  ces  animaux,  afan  de  les  dévoiler  à  ses  lecteurs.  Des 
planches  fort  exactes  accompagnent  ses  descriptions.  Il  est  à  regretter 
que  la  méthode  n'ait  pas  présidé  à  l'arrangement  des  faits  et  des  détails, 
<[u'il  est  fort  pénible  de  chercher  dans  un  ouv:  agc  d'aussi  longue  haleine. 
11  paroît  que  son  travail  devoit  être  continué.  On  assure  même  que 
le  manuscrit  du  septième  volume,  prêt  à  être  livré  à  la  presse,  ne  l'a 
jamais  été.  Il  nous  est  impossible  de  présenter  une  analyse  de  cet  ou- 
vrage immense,  qui  comprend  3672  pages,  et  qui  est  orné  de  267 
planches  in-^."  doublées.  Nous  en  avons  profité  dans  la  plupart  des  ai-li- 
clcs  de   ce  Dictionnaire,  et  nous  le  citons  fort  souvent. 

16.  Albert  Seba,  apothicaire  à  Amslerdanï,  avoit  recueilli  beaucoup 
d'insectes  ,  qu'il  avoit  achetés  pour  en  orner  son  cabinet,  dont  il  a  donné 
la  description  en  quatre  volumes  in-folio,  avec  figures.  La  plupart  des 
espèces  figurées  sont  étrangères;  mais  il  y  en  a  beaucoup  qui  sont  citées 
par  les  auteurs  comme  prototypes,  quoiqu'en  général  les  dessins  soient 
grossiers,  et  les  couleurs  presque  constamment  fausses  et  mal  distri- 
buées, même  d'après  la  description  qui  accompagne  les  planches.  Les 
quatre-vingt-dix-neuf  planehes  du  tome  troisième,  en  particulier,  sont 
entièrement  consacrées  à  la  représentation  des  insectes,  la  plupart 
d'Amérique,  de  Surinam  et  de  Ceilan. 

17.  Charles  LmuiECS,  Suédois,  professeur  à  Ups  l ,  fondateur  des 
méthodes  et  de  la  nomenclature  dans  toutes  les  parties  de  l  histoire 
naturelle,  principalement  en  botanique  et  en  zoologie.  Ce  n'est  pas  à 
nous  déjuger  ici  cet  homme  célèbre,  dont  le  nom  se  rattache  d'une 
manière  si  éclatante  à  toutes  les  branches  de  la  science;  nous  indique- 
rons seulement  le  mérite  principal  deLinnaeus,  qui  est  dans  la  méthode, 
les  considérations  générales ,  et  dans  le  mode  uniforme  du  développe- 
ment des  caractères  et  de  la  description.  Ses  ouvrages,  qui  ont  paru  de 
17.^:';  à  1770,  ont  subi  dans  chaque  édition  de  grands  ch>:ugemens,  et 
par  conséquent  ils  ont  offert  des  améliorations  et  des  perfeutiounouens 
successifs.  Ainsi,  dans  les  premières  éditions  du  Systema  naturœ ,  dont 
Lyonnet  a  fait  une  critique  judicieuse  dans  les  notes  qu'il  a  ajoutées 
1  la  Théologie  des  insectes  de  Lesser  (  livre  i.^"^,  chapitre  3),  on  voit 
que  Linnœus  divisoit  les  insectes  en  sept  classes  générales:  1.°  les 
espèces  à  élytres  ou  ailes  couvertes,  comme  les  scarabées  ;  2."  celles  qui 
ont  les  ailes  découvertes,  comme  les  papillons,  les  demoiselles,  les 
guêpes,  les  mouches;  3.°  celles  qu'il  nommoit  demi -ailées,  qui  n'ont 
pas  toutes  des  ailes,    ou   qui  les  portent  sans  étuis,  comme  les  saute- 


,  •  INS  •    5ii 

relies^  les  fourmis,  les  punaises,  le  scorpion  aquatique}  4."  les  non- 
ailées,  comme  le  cloporte,  les  millepieds,  le  pou,  la  puce,  etc.  Les 
trois  .iutres  classes  couiprenoient  tous  les  autres  animaux  sans  vertèbres, 
que  Fauteur  regardait  alors  comme  des  insectes;  savoir:  la  5/,  les 
vers  de  terre  lombrics,  les  tœiiias  ,  les  sangsues  ;  la  6.",  les  animaux 
mollusques  à  coquilles  terres'res  et  aquatiques;  la  7.",  enfn,  les  zoo- 
phytes  ,  corn  i.e  les  oursins,  les  astéries,  orties  de  mer  ou  méduses, 
etc.  Mais  par  la  suite  ,  et  surtout  dans  la  t  2.'  édition  ,  qu'il  publia  lui- 
même,  en  17S8,  il  réfiirma  ce -premier  arrangement,  et  nous  retrou- 
vons sa  classidcation  en  sept  ordres,  d'après  les  ailes,  et  sous  les  déno- 
minations que  niius  employons  encore  ,  en  y  intercalant  un  second 
ordre,  celui  des  orthoptères.  Charles  de  Villers  a  publié  à  Lyon,  ea 
4  volumes  in-Ô."  et  en  latin,  une  entomologie  d'Europe,  d'après  la  mé- 
thode   Lintiéeiine. 

18.  Jeam  -  LÉONARD  Frisch  a  publié,  de  1730  a  1766,  une  descriptioa 
des  insectes  d'Alltniagne,  qui  forme  treize  cahiers  iii-4.",  avec  trente- 
huit  planches,  souvent  citée-^  par  les  auteurs.  Le  texte  est  allemand  : 
Beschreihung  von  allerlej  Insekten  in  Deutschland. 

19.  George  Edwards,  peintre  anglois  ,  a  donné  de  très-bonnes 
figures  en  couleur  de  beaucoup  d  insectes  étrangers  et  européens, 
dans  les  sept  volumes  in--,."  qu'il  a  j-ubliés,  soit  avec  ses  Oiseaux  rares, 
soit   dans  ses  Glanures  d  histoire  naturelle. 

20.  AuGtJsTE  -  Jean  Roesel  de  Rosenhof,  observateur  exact  et  peintre 
habile,  de  Nuremberg,  qui,  outre  son  admirable  ouvrage  sur  les  rep- 
tiles baraciens,  en  a  publié  un  en  quatre  volumes  in-4.'',  dont  le  texte 
est  allemand  (Die  monatlich  herausgegebene  Insecten  -  Delitstigung)  : 
Auiusemens  sur  les  insectes,  de  17.^6  à  i7r>i.  Les  planches  sont  au 
nombre  de  plus  de  cent  dans  chaque  volume,  parfaitement  exécutées  et 
coloriées.  L'auteur  entre  dans  beaucoup  de  détails  sur  les  métamorphoses, 
les  mœurs,  la  structure.  Cet  ouvrage  a  été  continué  par  Klecnian , 
gendre  de  Rœsel.  On  ne  connoi't  pas  encore  complètement  en  France 
les  faits  que  les  planches  indiquent,  parce  que  ce  livre  n'a  pas  étu 
traduit. 

21.  Chaules  Bowsit,  Genevois.  A  vingt  ans,  en  17.-10,  il  piil)lia  son 
beau  Mémoire  sur  les  pucerons,  et  beaucoup  d'autres  observations  sur 
les  insectes,  qui  sont  en  grande  partie  réunies  dans  son  Traité  d'insec- 
tologie  ;  Paris,  2  vol.  in-12,  avec  3  planches.  Toutes  ses  recherches 
sont  en  outre  consignées  dans  ses  Œuvres,  9  vol.  in-4.",  avec  lig.,1779. 
C'est  un  des  meilleurs  observateurs. 

22.  Jacob  L'Admiral  a  publié,  en  1740,  un  ouvrage,  en  hollandois  , 
sur  les  papillons,  sous  format  in-folio.  Il  y  a  vingt-cinq  planches  co- 
loriées qui  sont  fort  estimées. 

2^.  Le  Baron  Charles  De  Géer,  Suédois,  peut  être  considéré  comme 
l'un  des  principaux  entomologistes.  Ses  ouvrages  sont  en  même  temps 
très  -  méthodiques  et  reiuilis  d'observations.  Quoique  imprimés  à 
Stockholm,  ils  sont  écrits  en  françois  et  forment  huit  volumes  in-4.°, 
avec  226  planches.  Ils  portent  le  titre  de  Mémoires  pour  servir  à. 
i'htStoire  des  insectes.  Ils  ont  paru  de  17^2  à  1778.  Le  second  volume 
n'a  été  publié  qu'en  1771  :  c'est  une  particularité  remarquable  par  le 
fait  que  voici.  L'auteur,  n'ayant  pas  placé  ,  comme  il  l'espéroit ,  le 
premier  volume^  prit  le  parti  U  eavoyer  eu  présent  tous  les  volumes 


5i2    '  ,INS 

suivans  à  ceux  qui  avoienl  fait  acheter  le  premier,  et  il  ne  fit  tirer 
les  sept  derniers  volumes  qu'à  un  très -petit  nombre  d'exemplaires. 
Les  mémoires  de  De},«éer  ont  beaucoup  d  analogie  avec  ceux  de  Rcau- 
mur;  mais  ils  sont  rédigés  avec  beaucoup  plus  de  méthode,  surtout  les 
cinq  derniers  volumes.  On  trouve  dans  le  premier  seize  mémoires  sur 
les  chenilles,  et  un  dix -septième  sur  les  ennemis  des  chenilles  et 
en  particulier  sur  les  ichneumons ,  dont  il  présente  une  très-bonne 
di  ision.  Le  second  volume,  divisé  en  deux  parties,  est  consacré  d'abord 
à  l'histoire  des  insectes  à  quatre  ailes  nues  :  il  est  précédé  de  plusieurs 
discours  généraux  sur  la  demeure,  la  nourriture,  la  i;éncration  ,  la 
transformation  des  insectes;  la  classe  des  iiisectes  à  ailes  farineuses  ; 
celle  des  insectes  à  ailes  membraneuses  ,  à  bouche  sans  dents  ni  trompe, 
qu'il  distingue  de  ceux  qui,  ayant  aussi  des  ailes  membraneuses,  ont 
des  dents  avec  ou  sans  aiguillon  ou  tarière.  Dans  le  tome  III  se 
trouvent  l'histoire  et  la  description  des  insectes  à  quatre  ailes,  tantôt 
tout-à-fait  membraneuses,  tantôt  à  demi  coriacées,  et  à  bec  ou  à  suçoir; 
enfin,  celle  des  insectes  qui  correspondent  aux  orthoptères.  Les  tomes 
IV  et  V  comprennent  l'histoire  des  coléoptères  rangés  suivant  le 
nombre  des  articles  aux  tarses.  11  faut  reconnoitre  ici  que  ces  volumes 
ont  paru  en  1774  et  1 775 ,  c'est-à-dire  ,  douze  ans  après  l'ouvrage  de 
Geoffroy,  auquel  on  doit  l'observation  de  l'excellent  caractère  tiré  du 
nombre  des  articles  aux  tarses.  Le  tome  Vl  est  consacré  à  l'histoire 
des  diptères  et  des  kermès,  qui  forment  la  9.'  et  la  10.^  classe.  Enfin, 
dans  le  VU."  volume  se  trouve  l'histoire  des  aptères.  Degéer  a  donné 
les  meilleures  bases  de  la  classification  des  insectes.  Il  les  a  prises 
dans  toutes  les  parties  apparentes  des  insectes.  Nous  allons  en  présenter 
ici  un  court  aperçu,  que  nous  emprunterons  à  l'extrait  qu'en  a  donné 
Retzius  en  un  petit  volume  in-8.",  Leipsic,  1783,  sous  le  titre  de 
Gênera  et  species  insectorum. 

Degéer  a  rapporté  les  1446  insectes  qu'il  connoissoit,  à  100  genres, 
qui  correspondent  à  quatorze  sous-ordres  et  à  deux  sous -classes  princi- 
pales ,   les  insectes  ailés  et  les  aptères. 

Les  insectes  ailés  ont  ou  quatre  ailes  nues  (  Gymkoptera)  ,  ou  deux 
ailes  sous  des  étuis  (Vaginat*  ) ,  ou  deux  ailes  seulement  (  Diptera). 

Les  Gymkoptères  forment  cinq  sous-ordres:  Les  lépidoptères  ,  qui 
ont  quatre  ailes  farineuses  et  une  langue  en  spirale;  ce  sont  les  genres 
Papillon,  Sphinx  ,  Adscite,  Plérophore,  1  haléne.  hesaglosses  {elmguia), 
qui  ont  quatre  ailes  nues,  ni  bec,  ni  dents;  telles  que  les  pl.rvganes, 
les  éphémères.  Les  névropteres ,  qui  ont  quatre  ailes  nues,  égales  entre 
elles,  en  réseau,  la  bouche  dentée  :  comme  les  libelles,  hémérobes, 
fourmilions,  perles,  panorpes  ,  raphidies.  Les  hyménoptères  qui  ont 
quatre  ailes  nues,  inégales,  avec  des  nervures  longitudinales,  la  bouche 
dentée  ;  l'anus  le  plus  souvent  aiguillonné  :  comme  les  abeilles,  les  no- 
mades,'guêpes ,  sphèges  ,  chrysides,  sirèces,  ichneumons,  cynips,  ten- 
thrèdes  et  fourmis.  Enfin  les  siphonés,  qui  ont  quatre  ailes  membra- 
neuses et  un  bec  plié  sous  le  corselet,  comme  les  thrips,  les  pucerons, 
les  cochenilles  ,  les  cigales. 

Les  insectes  à  étuis,  Vaginés,  se  rapportent  à  trois  sous-ordres,  les 
hémiptères,  les  dermaptères  et  les  coléoptères. 

Les  hémiptères  ont  deux  gaines  ou  étuis  à  demi  coriaces  ou  denn- 
membraneux,  croisés;  deux  ailes  membraneuses  et  un  bec  sous  la 
poitrine:  tels  sont  les  punaises,  les  nêpes. 

Les  dermaptères  portent  deux  gaines  coriaces  en  forme  d'ailes;  deux 


^  •  INS  ,      5,3 

ailes  membraneuses  ,  et  leur  bouche  est  garnie  de  mâchoires  :  on  y 
rapporte  les  mantes  ^  sauterelles,  criquets,  gryllons,  blattes,  perce- 
oreilles. 

Les  coléoptères  ont  deux  étuis  durs  ,  couvrant  doux  ailes  membra- 
neuses ,  et  la  bouclie  dentée.  C'est  la  division  la  plus  nombreuse. 
Presque  tous  les  genres  de  GeoCfroy  s'y  trouvent  rangés  aussi  par  le 
nombre  des  articles  aux  tarses  :  il  en  a  trente-trois,  qu'il  est  inutile 
de  répéter  ici. 

Les  insectes   \  deux  ailes  constituent  deux  sous-ordres  : 

1.°  Ceux  qui  ont  des  balanciers,  hallerates;  la  bouche  sans  dents, 
niais  avec  une  trompe  :  tels  sont  les  genres  Mouche,  Stratyonie,  Némo- 
tèle.  Taon,  Asile,  Eiupis ,  Conops  ,  Bombyle  ,  Ilippobosque  ,  OEstre, 
Cousin  ,  Tipule. 

■2.  Les  proboscidés  diffèrent  suivant  les  sexes  :  les  mâles  ont  deux 
ailes  sans  balancier,  sans  dents,  ni  trompe  j  les  femelles  n'ont  pas 
d'ailes,  mais  une  trompe   sous  le  corselet. 

La  seconde  sous -classe  des  insectes,  celle  des  Aptères,  se  divise  en 
deux  grandes  sections  :  l'une  qui  comprend  la  puce  uniquement,  qui 
subit  des  mélanjorphoscs ,  sauteurs  et  suceurs;  l'autre  comprend  les 
aptères,  marcheurs  (gressoria) ,  et  se  subdivise  en   trois  ordres  ;   savoir: 

1.°  Ceux  qui  ont  un  cou  (  auchenates) ,  qui  ont  la  tête  distincte  du 
corselet,  et  six  pattes  au  plus;  tels  que  les  forbicines  ,  podures,  ter- 
mites, pous  ,  ricins. 

2.°  Ceux  qui  n'ont  pas  de  cou  (alrachélies) ,  qui  ont  la  tête  con- 
fondue avec  le  corselet,  et  six  pattes  au  plus.  Ils  forment  huit  genres: 
Mitte,  Faucheur,  Araignée ,  Scorpion  ,  Chélifcre,  Écrevisse,  Crabe  et 
Monocle. 

3."  Enfin,  les  crustacés ,  qui  ont  quatorze  pattes  ou  plus,  et  la  tète 
distincte  du  corselet,  comme  les  squilles,  cloportes,  scolopendres  et 
iules. 

24.  Charles  Clerck  a  publié  en  suédois  et  en  latin,  à  Stockholm, 
en  1757,  un  petit  volume  sur  les  araignées  de  la  Suède,  avec  sis  plan- 
ches coloriées,  et  un  autre  ouvrage  qui  représente  beaucoup  d'insectes 
rares.  L'ouvrage  sur  les  araignées  est  estimé.  L'auteur  a  bien  observé 
et  bien  décrit  les  mœurs  de  ces  animaux. 

25.  Pierre  Lyonket  avoit  donné,  dès  1742  ,  la  traduction  de  laThéo- 
logie  des  insectes  de  Lesser,  et  il  y  avoit  joint  des  notes  très-savantes, 
en  même  temps  que  des  dessins  originaux.  11  avoit  réuni  à  cette  époque 
les  insectes  des  environs  de  la  Haye,  et  il  se  proposoit  de  les  décrire 
et  de.  les  représenter  ;  mais  il  ne  publia  son  admirable  Traité  de  la, 
chenille  tjui  ronge  le  bois  de  saule  qu'en  1760.  C'est  un  ouvrage  in-4.'*, 
de  6i5  pages,  avec  iK  planches  en  cuivre,  gravées  par  l'auteur  même. 
Ce  chef-d'œuvre  d'eyécution ,  de  patience  et  d'adresse,  a  placé  Lyonnet 
à  la  tête  dos  graveurs  1  des  anatomistes.  C'étoit  un  génie  rare.  11  parloit 
neuf  langues,  et  possédoit  beaucoup  d'arts  d'agrément.  11  fut  secrétaire 
des  Etats  de  Hollande.  On  rCj^rette  que  la  seconde  partie  de  l'Aiiatomie 
du  cossus,  qui  avoit  été  décrite,  dessinée  et  gravée  par  lui,  n'ait  pas 
été  publiée  :  c'est  une  grande  perte  pour  la  science. 

26.  jEiPi -AisToiNE  Scopon,  professeur  à  Pavie,  critique  de  Linnaeus  , 
avoit  publié,  en  17^3,  son  Eiuomoloj'ie  de  la  Carniole  en  latin.  Il 
paroit  quH  avoit  fait  graver  une  quarantaime  de  planches  pour  y  être 

23.  53 


5i4     '  INS  * 

jointes;  mais  elles  sont  très -rares  ,  et  la  plupart  des  exemplaires  qui 
nous  sont  tnniLcs  entre  les  mains,  en  sont  privés.  C'est  dans  l'ouvrage 
intitule  .  Introdiictio  adhistoriarn  iiaf  liraient ,  Piagœ  ,  i  777,  que  se  trouve 
exposé  le  système  dr  l'auteur.  En  voici  l'abrégé.  Il  rapporte  les  insectes  à 
cinq  des  tribus  dans  lesquelles  il  range  les  animaux.  La  4.%  les  Li'Ci- 
ri;.;E'!  deS\.animerdaiM,qu  il  divise  en  deux  na  lions  (^'f-n/e.?):  lescrusfarés, 
parmi  lesquels  r.n  vrit  les  araignées,  les  scolojiendres,  les  cloportes, 
les  forbicines  ;  les  pi'diculiiires ,  comme  les  cirons,  les  pous ,  les  puces. 
La  .'"«.^  tribu  est  celle  des  Gymnoi-i  kies  de  Geoffroy,  qu'il  divise  en 
dj.. tores  et  en  tétraptères,  qu'il  subdivise  en  aiguillonnés,  et  ceux  qui 
ont  une  queue  et  une  chrysalide  agile.  La  6.'  tribu  comprend  les 
Li.MooPTÈiifcs  de  Rœsel  .  elle  comprend  trois  nations:  les  sphinx,  les 
phalènes,  les  papillons.  Lu  7.*"  tribu,  les  PaoBosciDÉs  de  Réaumur, 
correspond  aux  hémiptères,  et  comprend  deux  nations,  les  terrestres 
et  les  aquati  jius.  Enfin,  la  8."  et  dernière  tribu  des  insectes  comprend 
les  Coi.F-OPTtHEs  de  Frisrh  (à  la  page  372)  ou  de  Falricius  (peut-être 
par  erreur  typographique,  à  la  page  438),  divisés  d'abord  en  aqua- 
tiques et  en  terrestres  ,  ceux-ci   d'après  la  forme  des  antennes. 

Quoique  la  méthode  ou  plutôt  l'arrangement  de  Scopoli  soit  très- 
mauvais,  surtout  pour  Tépoque  oii  il  a  été  proposé,  on  ne  peut  dis- 
convenir que  les  genres  sont  assez  bien  rapprochés  entre  eux,  et  que 
plusieurs  ne  soient  établis  sur  Je  très-bons  caractères:  aussi  ont-ils 
été  conservés,  ou  proposés    et  adoptés  depuis,  sous  d'autres  noms. 

27.  Geoffroy,  médecin  de  Paris,  a  publié,  en  1762,  un  ouvrage  en 
deux  volumes  in-4.'',  sous  le  titre  d'Histoire  abrégée  des  insectes  des 
environs  de  Paris,  avec  22  planches  en  cuivre  représentant  les  prin- 
cipaux genres.  C'est  un  ouvrage  très- méthodique  et  très -commode. 
Malheureusement  l'auteur  n'y  a  décrit  que  les  espèces  qui  se  rencon- 
trent aux  environs  de  la  capitale.  Les  divisions  sont  à  peu  près  celles 
de  Linnœus,  d'après  les  ailes.  Cejiendant  les  tétraptères  à  ailes  nues, 
hyménoptères  et  névroptères,  sont  compris  dans  un  même  ordre.  Les 
orthoptères  forment  une  section  seulement  dans  l'ordre  des  coléoptères. 
Le  nombre  des  articles  aux  tarse.î,  la  forme  des  antennes  et  celle  de 
toutes  les  autres  parties  du  corps,  ont  été  employés  comme  caractères 
dans  l'établissement  des  genres,  qui  ont  tous  été  adoptés,  au  moin-; 
quant  à  la  réunion  des  espèces  ;  car  les  noms  en  ont  été  changés  quel- 
quefois. L'ouvrage  que  nous  faisons  connoître  ici,  est  indispensable 
pour  l'étude  des  insectes.  Fourcroy,  en  1785,  en  a  publié  un  petit  abrégé 
en  latin,  en  deux  volumes  in-i8  ou  petit  in-12  ,  sous  le  titre  d'Entomu- 
logia  parisiensis ,  siçe  calalogus  inscctoruni  ,  etc.  ,  et  il  y  a  intercalé 
quelques  espèces.  Il  a  paru  aussi  une  seconde  édition  de  l'ouvrage  in-4.°, 
qui  n'en  est  qu'une  réimpression,  avec  les  courtes  additions  de  Fourcroy. 

28.  Jeak- Christian  ScayTiFrER  est  auteur  de  plusieurs  ouvrages  sur  les 
insectes.  Ijc  premier,  écrit  en  latin,  n'est  qu'un  Catalogue  des  figures 
des  insectes  qui  se  trouvent  aux  environs  de  P.atisbonne.  Il  se  conipos.e 
de  280  planches,  qui  îr.rment  trois  volumes,  publiés  en  1769.  La  mé- 
thode employée,  ou  plutôt  la  dénomination,  est  celle  de  Linna.nis.  Les 
planches  sont  belles  et  exactes  :  elles  ^ilirent  surtout  des  développemeni 
de  caractères  qui  sniit  d'une  grande  utilité.  Il  a  aussi  publié  à  part,  sous 
format  in-.,.',  des  Elémens  d  entomologie ,  en  latin  et  en  allemand, 
avec  i3r>  planches,  et  un  Supplément  de  texte  et  de  cinq  planches,  qui 
ont  paru  en  1777.  Quoique  les  noms  des  classes  soie»t  changés ,  elle* 
sout  à  peu  près  les  mêmes  que  celles  de  Geoll'roy. 


*  INS  ,  •     5i5 

2p.  Martin- Thrane  Brunnich  n'a  publié  qu'un  très-petit  ouvrage  sur 
.les  iiisccles,  en  danois  et  en  latin;  il  a  pour  titre  :  Eiitomotngia , 
sislens  inseclorum  tabulas  sj  st  email  cas ,  Hafniœ ,  1764,  avec  une  planche 
en  cuivre  qui  représente,  au  simple  trait,  les  parties  caractéristiques 
des  insectes.  Dans  une  courte  introduction  l'auteur  fait  connaître  la 
conforination  et  l'organisation  des  insectes.  11  présente  aussi  une  clas- 
sification des   entomologistes,    iwjeci/if  te  ,  qu'il  divise   ainsi: 

I.  Entomologues.  A.  Collecteurs  :    1.°  anciens  (jjatres),  comme  Aris- 
tote,  Pline,   Dioscoride;   2."   commentateui  s ,  les  mêmes;   3.°  ich- 
niographes  ou  (iguristes,    tels  que   Goedaert,  Hoefuagel  ,   Mérian, 
Valisnieri ,  Albin  ,    Frisch  ;   4.°  niétamorpliosistes  ,    Svvammerdam  5 
5.°  descripteurs  ,  Rai,  Linnœus  ;   6."  nionograplics.  Lister,  SclisefTer 
Clerck  ;  7."  curieux,  Catesb  y,Mérian ,  Strom,  Poritoppidan;  8.°  niu- 
séograpbes,   Linnaeus  ,    Poda  ;    9.°   topographes,    Mérian,   Albin, 
Frisch;    io.°  voyageurs,   Marcgrave,    Bumphius,    Sloane ,    Hassel- 
quist.  Osbeck.  —  B.   Les  Méthodistes,  qu'il  divise,    i."  en   philo- 
sophes,  Swaninierdam  ,  Réaumur,   Degéer,   Linnaîus;  2."  systéma- 
tiques, les  mêmes  ;   3.°  nomenclateurs. 
IL  Entomophiles  :     1.°  anatomistes,   Malpighi  ,   Swammerdam  ,    Leu- 
wenhreck  ,  Lyonnet,    etc.;   2.°  médecins,  Dioscoride,  Galien,    Al- 
drovandi,  l>Talhioli,    Glauber,  Dale,  etc.;    3.°  mélangistes    {mis- 
cellanei) ,  Bochart,   Lesser  ,   Derhan,  etc. 
Tiennent  ensuite  les  tables  systématiques  et  analytiques,  qui  mènent 
à  la  détermination  des  genres   et  sous-genres    par   la    considération  suc- 
cessive et  comparée  des  diverses  parties  du  corps  des  insectes. 

3o.  PiERRE-SiMOW  Pallas.  Nous  nc  citons  ce  célèbre  naturaliste  que 
pour  le  petit  ouvrage  in-4.°  publié  à  Erlangen,  en  1781  ,  sous  ce  titre  : 
Icônes  inseclorum,  prœsertim  llossia  Sibiriœcjue  pcculiarium. 

3i.  Jean -Baptiste  Schluga  a  donné  des  Élémen's  d'entomologie,  à. 
Vienne,  en  1766.  C'est  un  petit  volume  en  latin,  où  l'on  remarque 
beaucoup  d'ordre  et  de  précision.  Il  y  a  deux  planches  en  cuivre 
pour  représenter  les  caractères.  L'auteur  a  proposé  quelques  dénomi- 
nations qui  ont  été  approuvées  par  Fabricius  ;  telles  sont  en  particu- 
lier les  synonymes  latins  des  noms  de  classes  de  Linnseus  :  vnginantia, 
semi-vaginantia  ,  furinacea,  reticulata ,  venosa,  lialata,   nuda. 

3?..  Dru  Drury  a  publié,  avec  un  te^te  anglois  et  françois  formant 
trois  volumes  in-4.",  ornés  de  168  planches  en  couleur,  un  très-bel 
ouvrage  qui  a  pour  titre  :  Illustrations  of  natural  history  ,  wherin  are 
exhihiled  Jigures  of  exotic  insects.  La  plupart  de  ces  insectes  sont  des 
papillons  et  des   coléoptères. 

33.  Erkst  et  Engramelle.  Le  père  Engramelle,  moine  augustin,  a 
décrit,  et  Ernst  a  peint  d'après  nature,  un  bel  ouvrage  qui  a  paru  à 
Paris,  sous  format  in-4.'',  d<^  '779  ^  '790/  sous  le  titre  d*  Papillons 
d'Europe,  en  sept  volumes,  avec  environ  000  planches.  En  général 
les  planches  représentent  l'insecte  sous  les  trois  états.  Le  texte  est 
peu  estimé. 

04.  Pierre  Cramer,  d'Amsterdam  _,  a  publié  en  hollr.ndois  et  en, 
françois  400  planches  de  papillons  exotiques  des  trois  parties  du 
monde.  C'est  un  ouvrage  magnifique  pour  la  netteté  et  l'élégance  des 
figures.  11  est  très-r^gheich(^  des  aiwaieurs  d'hist9ire  naturçUe. 


5ic    '  INS      • 

35.  Jeak-Chbisttah  Fabricils,  professeur  à  Kiel,  en  Danemarck,  morf 
en  1807,  à  1  âge  de  65  ans,  a  publié  un  très-grand  nombre  d'ouvrages 
sur  ks  insectes.  A  l'exception  de  quelques  dissertations  ,  ses  écrits 
sont  on  latin.  Il  a  surtout  excellé  dans  l'art  de  décrire.  IMalbeureuse- 
inenl  il  n'a  point  dessiné  ni  donné  de  figures  des  espèces  qu'il  décrivoit 
pour  la  première  fois,  de  sorte  qu'il  s'est  glissé  beaucoup  d'erreurs  et 
de  doubles  emplois  dans  le  nombre  de  celles  qu'il  a  fait  connoître.  Ses 
genres  ont  été  établis  d'après  un  sjstènic  particulier,  qui  s'est  perfec- 
tionné successivement,  il  est  vrai,  mais  qui  est  devenu  beaucoup  plus 
minutieux  et  dilncilc,  à  mesure  qu'il  s'appliquoit  à  un  plus  grand 
nombre  d'espèces.  Les  seules  parties  de  la  bouche  lui  ont  présente  ,  dans 
les  moditJcations,  non- seulement  les  caractères  des  ordres,  mais  même 
ceux  des  genres.  La  difficulté  qu'il  y  avoit  à  distinguer  les  espèces  par 
leur  seul  secours,  a  fait  que  l'auteur  lui-même  s'en  est  tenu  le  plus 
souvent  à  la  description  d'une  seule  espèce,  qu'il  a  regardée  comme 
le  prototype  d'un  groupe  qu'il  a  eu  l'art,  nous  dirions  presque  l'ins- 
tinct admirable,  de    former  par  une  réunion  très- naturelle. 

Voulant  faire  adopter  son  système  ingénieux,  l'auteur  a  employé  la 
foible  ressource  d'exprimer  ou  de  peindre  des  formes  analogues  jet 
mènje  semblables  par  des  termes  diilérens,  et  d'éloigner,  autant  que 
possible,  le;  genres  les  plus  voisins,  afin  de  faire  trancher  en  appa- 
rence les  caractères,  comme  nous  l'avons  prouvé  par  des  exemples  dans 
la  préface  de  notre  Zoologie  analytique.  Au  reste,  Fabricius,  disciple 
célèbre  de  Linnseus,  n'a  adopté  la  classification  arliiicielle  des  insectes 
que  parce  qu'il  a  voulu  appliquer  à  l'entomologie  le  principe  de  son 
maître,  de  tirer  les  caractères  d'une  seule  et  même  paitie,  comme  la 
botanique  l'avoit  permis  pour  le  système  sexuel,  fondé  uniquement  sur 
la  considération  des  Heurs.  Fabricius  ne  concevoit  pas  qu''il  put  être 
fondé  un  autre  système  meilleur;  aussi  dit-il  :  Çuafe  tjua:so  SYsteina  , 
si  inox  a  radice ,  vtox  a.  caiile  aut  a  foliis  ,  inox  a  Jlorihiis  caractères 
desumerenttir  ?  La  méthode  naturelle,  presque  généralement  adoptée 
aujourd'hui  ,  répond  d'une  manière  pércmptoire   à   cette    question. 

Les  ouvrages  de  Fabricius  n'en  ont  pas  moins  rendu  le  plus  grand 
service    à   la   science.   Nous  allons  indiquer  les   principaux. 

Son  Système  d'après  ses  parties  de  la  bouche,  ou  les  instruinens  ci- 
taires  ,  comme  il  les  appelle,  a  paru,  en  1775,  sous  ce  litre  :  Sjstema 
cntomologiœ ,  shtens  insectorum  classes,  ovdines ,  gênera,  species ,  en 
un  gros  volume  de  832  pages.  IS'ous  n'en  présenterons  pas  ici  l'analyse, 
parce  qu'il  a  été  beaucoup  motlilié  par  l'auteur  dans  ses  publications 
subséquentes. 

En  i77t>,  Fabricius  publia  un  volume  de  Sic  pages,  tout-à-fait  systé- 
iiiaii que,  sous  le  titre  de  Gênera  insectormn. 

En  177^*,  il  donna  un  très-petit  volume  de  178  pages,  qui  est  un 
de  ses  plus  beaux  titres  dans  la  science,  quoiqu'il  soit  à  peu  près 
calqué  sur  le  plan  d'un  semblable  ouvrage  de  Linnaeus  relatif  à  la  bola- 
îiique  :  c'est  sa  Philosophia  entotno/ogica.  M.  Saint  -  Ajuand ,  d'Agen, 
en  a  donné  une  sorte  de  traduction  françoise,  ce  qui  nous  a  empêché 
de  pubii.r  celle  que  nous  en  avions  faiie  nous -même,  il  y  a  plus 
de  trente  ans,  et  pour  laquelle  iM.  Fabricius  avoit  eu  la  complaisance 
de  nous  remettre  un  grand  nombre  de  notes  et  de  corrections  ,  que 
nous  conservons   préci(>usoment. 

En  1781  parut  le  Species  insectorum,  en  2  vol.  in-8.",  qui  renferme 
la  descrjptioa   des  espèces;    l'auteur,  en    1787,  y  a  ajouté  deux  autre* 


•  INS  •       5i7 

volumes,  sons   le   titre   de  Mantissa  insecloriim,  sistens  eonim    species 
nuper  détectas.  Ces  quatre  volumes  forment  ensenihle   1800  pages. 

De  1792  à  i79*>  i'  publia  le  même  ouvrage,  refondu  sous  ce  titre: 
Entomologia  sfstematica  et  aucta  ,  4  vol.  in-8.";  plus,  en  179a,  un  autre 
>oluin»'  de  Supplément. 

De  1801  jusqu'en  1806  il  publia  successivement  ce  qu'il  a  appelé 
ses  systèmes  :  Eleutheratorum ,  1  vol.;  Hhjngotoriim  ,  1  vol.;  Piezato- 
rum ,  i  vol.  ;  yintllatoruni  ,  \  vol.  Il  n'a  paru  qu  un  premier  volume 
des  Glossatorum ,  et  il  est  encore  rare  en  France. 

Voici  en  abrégé  la  disposition  ■îj'stémalique  des  insectes  ,  d'après 
Fabricius.  Les  uns  ont  d.-s  mâchoires  :  les  autres  n  en  ont  pas.  Ces 
derniers  sont  les  glossates ,  comme  l>s  lépidoptères,  qui  ontune  langue 
en  spirale;  l-s  rhjngotes ,  coinnie  les  hémiptères,  qui  ont  un  liée  arti- 
culé; les  antliiites ,  comme  les  diptères,  qui  ont  une  trompe  ou  un 
suçoir. 

Les  insectis  qui  ont  des  mâchoires,  ou  n'en  ont  que  deux,  ou  en  ont 
1111  plus  grand  uombr- ;  ils  forment  deux  grandes  sections. 

A  la  première  sont  rapportés  : 

1."  La  éleuthèrates ,  qui  ont  les  mâchoires  nues,  composées,  pal- 
pigèri-s  ;   tels   sont  les   coléoptères. 

2."  Les  ulonates ,  qui  ont  les  mâchoires  simples,  découvertes  ,  palpi- 
gères,  surmontées  d'une  galète  ;    ce  sont  les  dermaptères  ou  orthoptères. 

3."  Les  synista/es ,  qui  ont,  comme  les  eleuthérates  ,  les  mâchoires 
découvertes,  juais  réunies,  à  la  base,  à  une  lèvre  palpigère  :  ce  sont  la 
plupart  des  névroptèrcs. 

4.°  Les  odonates ,  qui  ont  les  mâchoires  cachées,  simples;  les  lèvres 
sans  palpes  :   telles  sent  L  s   libelles. 

5."^  Les  piézates,  dont  les  mâchoires,  comprimées,  alongées,  engai- 
nent  une  lèvre  palpigère  :  ce  sonl  les  hyménoptères. 

6.°  Les  mitosates ,  qui  ontdeux  mandibules  composées,  deuxmàchoires 
et  deux  palpes  distinctes  ,  ou  soudées  et  réunies  avec  la  lèvre  :  ce  sont 
les   myriapodes  ou   millepieds. 

7.°  Les  unogates ,  qui  ont  deux  mandibules  en  pinces  sans  lèvre 
sxipéricure  :   tels  sont  les   aranéides  ou  acèrts. 

Trois  ordres  offrent  l'existence  de  plusieurs  mâchoires  :  ce  sont  les 
poljgnathes  ,  les  exochnntes  et  les  kleislagnathes.  Le  premier  seul  com- 
prend les  cloportes  et  autres  genres  voisins.  11  réunit  aussi  les  mono- 
cles, qui  sont  de  véritables  crustacés,  ainsi  que  les  crabes  et  les  écre- 
visses,  que  Fabricius  a  décrits  comme  des  insectes. 

36.  Eugène- Jean- Christophe  Esper  a  publié,  de  1777  à  1786,  à  Er- 
langen,  quatre  volumes  iu-4.°  sur  les  lépidoptères  d'Europe,  Èuropuische 
S'chmetCerlinge.  C'est  un  ouvrage  très-estiiué  et  fort  recherché  pour  les 
ligures  coloriées,  qui  sont  très-exactes  et   parfaitement  exécutées. 

37.  C.4SPARD  Stoli,  ,  d'origine  hollandoise,  a  donné  la  description  en 
cette  langue  et  eu  françois  ,  en  même  tensps  que  les  figures,  des  lépi- 
doptères, des  orthoptères  et  surtout  des  hémiptères.  Les  deux  derniers 
ouvrages  sont  très-précieux  comme  monographie,  ou  plutôt  comme  une 
collection  de  très-bonnes  figures;  car  il  y  a  peu  d'observations,  et 
surtout  un  défaut  de  synonymie  qui  ne  peut  être  rétabli  que  par  des 
entomologistes  déjà  instiuits. 

38.  François-de- Paule  SchPvAkck  a  publié,  sous  le  titre  modeste  de 
Catalogue  des  insectes  d'Autriche,  Enumeiatio  insectorum  .Justriœ  indi' 


5iS      ^  ITVS 

genarum ,  vienne ,  1781 ,  în-S.",  un  très-fort  volume  avec  quatre  plancTiej 
en  cuivre  «ni  représenteni  ,  pour  la  plupart,  des  insectes  il-?  la  famille 
des  cirons  et  des  ricins.  L'auleur  a  suivi  à  peu  près  la  classification Lin- 
néenne  ,  en  omettant  exprès  l'ordre  des  lépidoptères,  dont  son  compa- 
triote SchiffermiiUer  venoit  de  faire  l'histoire.  Cet  ouvrage  est  princi- 
palement estimé  à  cause  des  soins  que  l'auteur  a  mis  à  la  synonymie 
et  à  la  description  exacte  des  espèces,  dont,  à  l'exemple  de  CeofirO)^ 
il  a  conslaninient  indiqué  les  dimensions  d'après  une  échelle  qui  se 
trouve  à  la  fin  de  l'ouvrage. 

39.  Jeak-NÉpomucène  de  LàiciiARTiKG  a  décrit  en  allemand  les  in- 
sectes du  T\rol,  en  :>  vol.  in-8.",  imprimés  à  Zurich.  11  paroit  qu  il  n'a 
publié  que  les  coléoptères  11  est  souvent  cité  par  les  auteurs  alle- 
mands. Heiibst  a  continué  ce  travail  en  10  volumes  in-S.",  avec  un  atlas 
de  planches  coloriées. 

40.  Charles-Pi ERBE  Thukberc,  professeur  à  Upsal  ,  après  avoir  vojagé 
au  Cap  et  au  Japon,  a  fait  puijlier,  dans  des  dissertations  soutenues 
par  de  ieunes  docteurs  à  l'Académie  d'Upsal  ,  la  description  de  beau- 
coup d  insectes  de  Suède.  11  y  en  a  une,  entre  autres,  qui  a  pour  titre: 
Ca^  acteres  generum  insectorum ,  qui  fait  partie  du  7."  volume  des  Actes 
de  l'Académie,  et  qui  a  été  réimprimée  à  Ga'tlingue,  en  1791,  avec  des 
annotations  de  Meyer.  On  y  trouve  de  fès-bons  caractères  tirés  de  la 
conformation  générale,  et  l'établissement  de  plusieurs  genres  nouveaux, 
entre   autres  de  ceux  de  la  manticore,  du  coUiure,  etc. 

4r.  Aktoiive-Cuii.laume  Olivier  a  publié  deux  ouvrages  principaux  : 
l'un  est  la  partie  des  insectes  dans  l'Encyclopédie  méthodique  ,  4  vol. 
în-4."  ;  l'autre  est  son  Histoire  naturelle  des  coléoptères ,  sous  le  titre 
^'Entomologie ,  en  4  gros  vol.  gr.  in-4.",  avec  des  planches  enluminées, 
publiée  d'abord  en  1790  et  années  suivantes,  interrompue  ensuite,  et 
continuée  en  1808,  époque  à  laquelle  a  paru  le  quatrième  volume,  par- 
tage en  deux  parties.  Ce  dernier  ouvrage  est  parfaitement  exécuté. 
Toutes  les  espèces  de  coléoptères  connues  sont  décrites  et  figurées,  surtout 
dans  les  trois  premiers  volumes.  Dans  le  quatrième,  le  nombre  de  celles 
qui  ont  été  rapportées  aux  genres  étant  devenu  trop  considérable, 
l'auteur  n'a  pu  suivre  son  premier  plan,  en  particulier  pour  la  famille 
des  chrvsomèles  et  celle  des  charansons.  Quoi  qu'il  en  soit,  l'Entomo- 
logie d'Olivier  est  le  principal  ouvrage  sur  l'ordre  des  coléoptères.  Les 
planch>'s  sont  disposées  de  manière  que  chacune  d'elles  correspond  à 
tin  genre  dont  elle  porte  le  numéro,  et  il  y  a  autant  de  planches  sous 
le  même  numéro  que  le  nombre  des  espèces  l'a  exigé.  L'auteur  avoit 
eu  en  vue  d'ajouter  par  la  suite  des  planches  à  l'ouvrage  ,  quand  il 
auroit  réuni  assez  d  espèces  pour  les  remplir.  Dans  l'Encyclopédie 
Olivier  a  suivi  la  classification  de  Linnœus  ,  par  les  ailes,  en  adop- 
tant cependant  l'ordre  des  dermaptères  de  Degéer  ,  qu'il  a  désigné 
sous  le  nom  d'orthoptères  ,  adopté  depuis  par  les  François.  On  sait 
que  la  disposition  de  l'ouvrage  est  dans  l'ordre  alphabétique.  Plusieurs 
auteurs  ont  contribué  à  la  rédaction  des  derniers  volumes  :  MM.  Al. 
Brongniart,  Latreille,  Desniarets  ,  Godard,  etc. 

42.  Pierre -André  Latreille  a  publié  un  grand  nombre  d'ouvrageà 
sur  l'entomologie  ,  et  il  les  a  successivement  perfectionnés  par  l'occasion 
très-heureuse  qu'il  a  eue  d'observer  la  belle  et  nombreuse  collection 
du  Musée  royal  de  Paris,  qui  a  été  confiée  à  ses  soins  éclairés.  Les 
titres   de  ces  ouvrages  sont: 


•  *  INS  •     519 

î."  Précis  des  caractères  génériques  des  insectes  disposés  dans  un 
ordre  naturel;   in-8.°,  201   pages;  Brive,  an   V  (  i  ygrt  ). 

2."  Histoire  générale  et  particulière  des  crustacés  et  des  insectes, 
faisant  suite  à  l'édition  de  BulTon  ,  par  Sonninj;  14  vol.  in-8.''j  avec 
ligures;    Piiris,   an   X   (  1 802  —  iSo'i). 

3.°  Gênera  cruslaceorum  et  insectorum  ;  4  vol.  in-8.";  Pariç^  1806 
et    1807. 

4."  Considérations  générales  sur  l'ordre  naturel  des  animaux  compo- 
sant les  classes  des  crustacés,  des  arachnides  et  des  insectes,  avec  un 
tableau  méthodique  de  leurs  genres  distribués  en  familles  ;  in-8.°,  1810, 
Paris,    1  vol. 

5.°  Le  troisième  volume  de  l'ouvrage  de  M.  Cuvier,  intitulé  le  Règne 
animal;    1817. 

En  outre,  la  plupart  des  articles  d'entomologie  dans  la  i.''"  et  la  2." 
édition  du  Dictionnaire  d'histoii'e  naturelle  de  Déterville  ;  plusieurs 
mémoires  imprimés  à  part,  ou  publiés  dans  les  Annales  du  Muséum  : 
l'Histoire  des  Jourmis  ;  sur  la  Géographie  des  insectes,  ou  les  climats 
qu'ils  habitent;   Sur  les  insectes  vivant  en  société,   rtc. 

L'auteur  a,  le  premier,  eu  l'idée  de  ranger  les  insectes  par  familles, 
auxquelles  il  n'avoit  pas  donné  de  noms  ,  et  qu'il  avoit  presque  toutes 
formées  de  la  réunion  des  genres  correspondant  à  celui  de  Linnseus, 
dont  ils  étoient  un  démembrement;  puis  il  donna  à  ces  familles  des 
noms  analogues  à  leur  origine  :  acaridies,  acrydiens,  andrénètes,  aphi- 
diens,  arachnides,  asellotes,  asiliques,  bembicites,  bomhyliers  ,  bombj- 
cines,  bostrichines,  etc  ,  etC;,  l'auteur  voulant,  dit-il,  s'assurer  par  ces 
dénominations  la  propriété  exclusive  de  l'établissement  des  principales 
familles. 

M.  Latreille  ayant  successivement  corrigé  ses  ouvrages,  voici  l'extrait 
de  son  dernier  travail,  inséré,  en  1819,  à  l'article  Entomologie ,  dans 
le  Dictionnaire  de  Déterville. 

Il  partage  en  trois  classes  les  animaux  articulés  et  pourvus  de  pieds 
articulés,  qu'il  nomme  ENTOMES  j  ce  sont:  1.°  les  Crustacés;  2°  les 
Arachhides;  3.°  les  Iksectzs.  Nous  ne  parlerons  ici  que  des  deux  der- 
nières classes. 

Les  AnAciiPfiDES  se  divisent  en   deux  ordres: 

i."  Les  pulmonaires ,  qui  forment  trois  familles:  les  aranéides,  les 
pédipalpes  et  les  scorpionides. 

z.°  Les  trachéennes,  qui  composent  également  trois  familles,  savoir: 
les  faux  -  scorpions  ,  les   pygnogonidcs  et   les  holètres. 

La  classe  des  insectes  forme  douze  ordres  ,  dont  voici  les  noms  : 
myriapodes,  thysanoures  ,  parasites,  suceurs,  coléoptères,  orthoptères, 
hémiptères,  névroptères  ,  hyménoptères,  lépidoptères,  rhipiptères  et 
diptères. 

Les  quatre  premiers  ordres  ne  comprennent  qu'un  très-petit  nombre 
de  familles  et  de  genres. 

Ordre  I.  Les  myriapodes  se  partagent  en  deux  familles,  les  chilo- 
gnathes  et  les  chilopodes. 

II.  Les  thysanoures ,  en  deux  familles  également,  les  lépismènes  et 
les  podurelles. 

III.  Les  parasites,  de  même ,  en   mandibules  et  en    édentulés. 

IV.  Los  suceurs  ne  comprennent  que  la  puce. 

"V.  Les  coléoptères  forment  quatre  sections,  d'après  le  nombre  des 
articles  aux  tarses  ,  et  M.  Latreille  adopte  nos  noms  autrement  accentués. 


520       *  INS  ' 

§.  1.  Pentamères  ;  six  familles  :  carnassiers  ,  bracTiclytres^  serricorncSj 
clavicoriics,  lalpicornes,  lamellicornes  ,  qii,  cliaci  ne  ,  se  subilivisent 
en  tribns,  puis  en  sections  ;  ainsi  les  lamellicornes  forment  deux  tribus, 
les  scarab  'iiles  et  les  lucanides  ;  et  en  sii.  .".eciions  naturelles,  que  l'au- 
teur nomme  les  c<  prophiiges,  les  j^éotrupins,  les  xjlophiles,  les  pbjl- 
lopluigfs,  les  antliobies  ,    les    mélitopbiles 

§.  2.  Hétéromèics;  quatre  familles:  mélasomes,  taxicornes ,  sténc- 
lytres,  trachélides. 

§  3.  Tétramtres  ;  six  familles  :  rbincopbores ,  x^lopbages,  platjso- 
mes,  longi- ornes,  eupodes  ,  cycliques,   clavipalpes. 

§.   4.  Tiimèresj  deux   lamilles  :   aphidipbages  ,  fongicoles. 

Vî.  Les  orthoptères  comprennent  deux  familles  :  les  coureurs  et  les 
sauteurs. 

Yll.   Les  liémiptéres  sont  partagés  en  deux   sections. 

§.    1.   Héicroplères;   deux  familles  :   géocorises  ,  h^drocorises. 

§.  2.  Homopteres  ;  trois  familles  ;  cicadaires  ,  h^ménélytres,  gallin- 
sectes. 

VIII.  Les  névroptèresj  en  trois  familles  :  les  subulicornes ,  les  planl- 
pennes  ,  les  plicipennes. 

IX.  Les   hyménoptères   composent  deux  sections. 

§.  1.  Térébraus  •   deux  familles  :  porte-scies,  pupivores. 
§.  2.   Porte- iiiguillon  ;    quatre  familles:   hétérogynes,  fouisseurs,  di- 
ploptères  et  mcUifères. 

X.  Les  léj  idoptères;  troi<!  familles:  diurnes,  crépusculaires,  nocturnes. 
XL   Les  rhipij'tères  ;  genre   unique  et  anomal  :  xénos. 

XII  et  dernier.   Les  t'iptf'rcs  forment  deux  sections. 

§.  I.  Proboscidés  ;  quatre  familles  :  némocères,  tanyslomes  ,  nola- 
cantbes,  athéricères. 

§.  2.  Eproboscidés  ;  une   seule   famille,  les  pupipares. 

En  tout  cinquante-six  familles,  dont  cinquante  pour  les  insectes,  et 
six  pour  les  arachnides. 

43.  George- AVoLFGAKG -François  Pakzer,  de  Nuremberg,  a  composé 
plusieurs  ouvrages  sur  les  insectes,  et  le  premier  en  date  est  le  princi- 
pal :  c'est  une  collection  de  petits  cahiers  de  feuilles  détachées,  dont 
chacune  représente  un  insecte  gravé  et  enluminé,  avec  la  de.cription  en 
regard,  de  manière  que  chacune  des  ligures  et  des  descriptions  peut 
être  rangée  dans  les  ordres,  en  suivant  les  sj'stèmes  divers  et  les  mé- 
thide*  adoptées.  Les  premiers  cahiers  de  cet  ouvrage,  dont  cliacun  se 
com)o>e  de  vingt-quatre  insectes  décrits  et  figurés,  ont  paru  en  1793; 
ils  ont  cominué  de  paroître  jusqu'en  1814  :  il  y  en  avoit  alors  cent 
douze,  ce  qui  porte  le  nombre  total  des  insectes  figurés  à  2688.  L'ou- 
vrage a  pour  tiire  Deittsrhlands  Insekten  ,  ou  Faunte  insectorum  germa- 
nicœ  initia.  La  svnonymie  en  est  soignée,  et  les  planches  très-exactes. 
C'est  un  livre  très  -  précieux  pour  la  science.  Les  autres  ouvrages  de 
Panzcr  ont  paru  plus  tard  et  sont  moins  importaus.  L'un  concerne  les 
coléoptcies  d'Allemagne;  c'est  un  vol.  in-12  de  Syo  pages  ,  avec  douze 
planciies.  Un  autre  concerne  les  hyménoptères.  En  général,  l'auteur  ne 
s'est  attaché  qu'aux  descriptions,  et  non  à  l'observation  des  mœurs  et 
de  l'organisation. 

44-  Ci.iiKViLLE,  Anglois,  mais  habitant  la  Suisse,  est  auteur,  avec  le 
peintre  et  graveur  ScHELLEKBERG,  de  deux  minces  volumes  gr.  in-8.°, 
avec  ligures,  qui  ont  pour  titre,  en   allemand  et   en   françois,  ffntomo- 


INS  5.1 

logie  hehitîejue.  Ils  ont  paru  en  1798  et  1806.  L'auteur  n'y  décrit  que 
quelques  gcures.  Le  preniin-  voluine  en  particulier  ne  comprend  que 
les  insectes  coléoptères  de  la  famille  des  rhinocères  ou  charansons.  Il 
y  a  seize  planches,  qui  repiésentcnt  onze  genres  seulement.  C'est  un 
travail  minutieux,  parfaitement  exécuté,  imprimé  avec  beaucoup  de 
luxe  et  en  morne  temps  avec  grand  nombre  de  fautes  typographiques. 
L'au'eur  a  présenté,  à  la  page  44,  un  tableau  analytique  que  nous 
allons  copier  ici  ,  pour  donner  une  idée  des  noms  qu'il  a  proposé  de 
substituer  aux  ordres  de  Linuteus,  et  qui  pour  la  plupart  ne  sont  pas 
heureusement  choisis. 

Sections. 
[ .  ÉlylToplèies  :  ailes  crustacées. 


Pférophores  ; 
à  ailes  : 


Insectes. 


mandibules  ; 
avec  mâchoires. 


haustellés  ; 
avec  suçoir. 


;:.  Déiatoptères 

3.  Diclyoptères 

4.  Pblébopteres 

5.  Haltéri|)tères 

lanciers. 

6.  Lépidoptères 

lentes. 


ailes  coriacées. 
ailes  réticulées, 
ailes  veinées, 
ailes  avec  ba- 

ailes  pulvéru- 


Aptères  ; 


Hémiméroptères  :  ailes  mixtes. 

i  haustellés 8.  Ropliotères   :    suceurs  en  pi- 
quant, 
mandibules 9.  Pododtinères  :   coureurs. 

45.    GEOBGE-LÉOPOLU-CHRISTlAN-FRÉDERiC-DAGOnERT    CuVIER     a    donué 

en  France  la  plus  grande  impulsion  à  la  méthode  naturelle.  Il  a,  le 
premier,  indiqué  un  grand  nombre  de  familles,  en  considérant  les 
genres  de  Linnœus  comme  types  primitifs,  et  eu  ayant  le  plus  grand 
égard  aux  métamorphoses,  d'après  Swammerdaui,  et  aux  organes  delà 
mastication  ou  de  la  déglutition,   d'après  Fabricius. 

Dans  son  premier  ouvrage,  publié  en  l'an  VI  (1798),  les  crustacés 
sont  encore  placés  avec  les  insectes  dans  le  premier  ordre  des  insectes 
pourvus  de  mâchoires  et  sans  ailes.  Les  familles  naturelles  qu'il  in- 
dique, sont:  1.°  les  Crustacés,  les  monocles,  les  écrevisses ,  les  clo- 
portes; 2.°  les  MiLLEpiEDs,  tels  que  les  Jules,  les  scolopendres  ;  3."  les 
Aracnéides,  comme  les  scorpions,  les  araignées,  les  faucheurs,  les 
hydrachués;  4.°  les  Phtyréides,  auxquels  sont  rapportés  les  podures, 
les  forhicines,  les  ricins. 

Le  second  ordre  est  celui  des  névroptcres,  partagé  en  trois  familles: 
1."  les  Libelles;  2°  les  Perles,  comme  les  termites,  les  hémérobes  , 
les  panorpes,  les  raphidies  ;  3.°  les  Agnathes  ,  tels  que  les  friganes  , 
les  éphémères. 

Les  hyménoptères  forment  le  troisième  ordre.  M.  Cuvier  le  divisé 
en  genres:  les  abeilles,  les  guêpes,  les  sphex,  les  chrysides,  les 
mouches  à  scie,  les  ichneumons  ,  les  urocères,  les  cynips,  les  fourmis, 
les  mutilles.  Chacun  de  ces  grands  genres  est  ensuite  subdivisé  en 
sous -genres,  la  plupart  iiidiijués  par  Fabricius. 

Vient  ensuite  le  quatrième  ordre,  c<  lui  des  coléoptères,  subdivisés 
par  la  forme  des  antennes  et  le  nombre  des  articles  aux  tarses,  en 
trente-un  grands  genres  :  les  lucanes,  les  scarabées,  les  charansons,  les 
bruches,  les  coccinelles,  les  silphes,  les  hydrophiles,  les  sphéridies , 
les  escarbots  ,  les  birrhes,  les  dermestes,  les  bostriches,  les  ptines, 
les  taupins ,    les  richards,  les  lampyres,   les  c;intharides,    les  meloés , 


522  I]^^rg 

les  ténébrions,  les  morclellcs,  !es  cas^idcs,  les  cKrr<loiMè1<'s,  les  lilspes, 
les  capricornes,  les  leptures,  les  néodales,  les  dytiques,  lesgyrins, 
les  carabes,  les  cicindelles  et  les  staphylins;  et  tous  ces  grands  genres 
sont  subdivisés  en   sous -genres. 

Les  orthoptères  sont  rapportés  à  quatre  genres  ou  tvpes  :  les  perce- 
oreille»,  les  blattes  ,  les  niantes  et  les  sauterelles. 

Les  hémiptères  comprennent  les  punaises,  les  nèpes,  les  notonectes, 
les  cigales,  les  thrips   et   les    pucerons. 

Les  lépidoptères  sont  de  même  rapnortésaux  grands  genres  :  papillons, 
sphinx,    phalènes. 

Les  diptères  sont  subdivisés  en  tipules,  cousins,  mouches,  taons, 
cmpis,  bombyces  ,  conops,  asiles,  hippobosques  et  œstres. 

Enfin,  dans  un  dernier  ordre  sont  rangés  les  aptères  sans  mâchoires, 
tels  que  les  puces,  les  poux   et  les  mittes. 

Deux  ans  après,  M.  Cuvier  ayant  bien  voulu  associer  à  ses  travaux 
r'auleur  de  cet  article,  qui  publioit  les  premiers  volumes  de  son 
Anatomie  comparée,  la  division  précédemment  adoptée  fut  corrigée, 
et  des  familles  naturelles,  au  nombre  de  quarante-huit,  furent  pro- 
posées avec  des  dénominations  particulières  qui,  pour  la  plupart,  ont 
été  conservées  dans  la  Zoologie  analytique.  Ce  travail,  pour  la  clas- 
sification des  insectes,   forme  le  huitième  tableau  synoptique. 

Enfin,  en  1817,  lorsqu'il  publia  l'ouvrage  qui  a  pour  titre  le  Règne 
tinimal  distribué  d'après  sou  organisation  ,  M.  Cuvier  confia  la  rédaction 
au  3."  volume,  comprenant  les  insectes  en  particulier,  à  M.  Latreili>e, 
qui,  en  conservant  quelques-unes  des  divisions  premières,  a  introduit 
presque  dans  tous  les  ordres  ses  divisions,  subdivisions,  et  sa  nomencla- 
ture, à  peu  près  telle  que  nous  en  avons  ci-dessus  donné  l'analyse. 

46.  Jean -FfiÉDERTC- Guillaume  Herbst  ,  de  Berlin,  a  donné  plusieurs 
ouvrages  au  public  :  la  plupart  sont  ornés  de  planches  enluminées  très- 
exactes  ;  mais  ils  sont  écrits  en  allemand.  Il  y  a  des  monographies 
des  genres  Araignée,  Faucheur,  Scorpion  ,  Papillon,  et  un  grand  ou- 
vrage sur  les  coléoptères,  de  format  in -4.°,  et  sur  les  lépidoptères 
(avec  Jablonski),   dans  lequel  il  y  après  de  trois  cents  planches. 

47.  Jea^-Charles-Guillaume  Illtger  a  publié  d'abord  ,  en  1798 
.sous  son  nom  et  celui  de  Tviigellan,  en  tin  volume  in-8.",  en  allemand 
un  ouvrage  important,  sous  le  titre  modeste  de  Catalogue  (  f^erzeich 
niss),  contenant  la  description  des  coléoptères  de  la  Prusse.  Les  deS' 
criptions  y  sont  faites  avec  le  plus  grand  soin,  et  la  synon^mie  très 
scrupuleusement  vérifiée.  Il  a  publié  en  outre  plusieurs  ouvrages,  un 
sur  les  lépidoptères  des  environs  de  Vienne,  en  1801,  et  un  dernier 
sous  ce  titre  Magazin  fur  Insekteukunde ,   7  vol.  in-8.° 

48.  André -Makie -  CoTiSTAPiT  Diiméril.  J'ai  inséré  dans  le  premier 
volume  de  l'Anatoniie  comparée  de  M.  Cuvier,  en  1798,  les  premières 
tentatives  que  j'ai  faites  de  la  classification ,  par  familles  naturelles, 
des  genres  d'insectes.  Dans  les  deux  années  suivantes,  j'ai  continue  ce 
travail,  que  jai  présenté,  le  3  Brumaire  an  IX,  à  la  Société  philoma- 
tique.  J'en  ai  publié  un  extrait  la  même  année,  dans  le  Journal  de 
physique  et  dans  le  Magasin  encyclopédique,  an  VI,  tome  I,  p.  289. 
On  me  pardonnera  ces  petits  détails,  parce  qu'il=:  constatent  les  époques 
principales  de  mes  études.  En  i8o-f  parut  la  première  édition  de  mon 
Traité  élémeiUaire  d'histoire  naturelle ,  dans  lequel  j'ai  exposé  avec 
plus  d'étendue  le  plan  que  je  suivois  depuis  près  de  quatre   aas  dans 


•  INS  •     525 

mes  cours  d'histoire  naturelle  aux  écoles  centrales.  Cependant  ce  n'est 
réellement  qu'en  l'année  lôofi  que  mon  travail  sur  les  insectes  parut 
en  entier  dans  la.  Zoologie  analytique,  eu  soixante -douze  tableaux  sy- 
noptiques, avec  des  détails  explicatifs.  C'est  d'après  cfittc  mJtliode  que 
les  insectes  ont  été  exposés  dans  la  2.*  édition  du  Traité  élémentaire 
qui  a  paru  en  1807,  et  dans  les  divers  volumes  de  ce  Dictionnaire, 
d'après  le  plan  adopté  et  annoncé  en  1804,  que  j'ai  constamment  suivi 
et  exposé  avec  détails  dans  la  section  précédente  de  cet  article  Irsectes. 
(Voyez  pages  471    et  suivantes.) 

49.  Gustave  de  PAYKrM,  a  mis  au  jour,  en  1800,  à  Upsal ,  troi* 
volumes  in-S."  sur  les  insectes  de  Suède  ,  Fauna  Suecica.  Il  n'y  a  décrit 
que  les  coléoptères;  mais  ce  travail  est  complet.  Les  descriptions  sont 
faites  d'après  nature,  et  très-soignées  :  c'est  un  modèle  dans  ce  genre. 
Le  même  auteur  a  donné  d'excellentes  monographies  de  plusieurs 
genres:  en  1789,  celle  des  carabes  et  celle  des  staphjlins;  en  1792, 
celle  des   charansons,    et  en  1811   celle   des  escarbots.  • 

50.  Jeapî- Guillaume  Meigek  s'est  principalement  occupé  de  l'ordre 
des  diptères.  Avant  qu'il  ait,  en  1804,  publié  son  ouvrage  in -4.°,  avec 
figures,  en  allemand,  sous  le  titre  de  Classification  et  description  des 
insectes  diptères  de  l'Europe  v  Beschieibung  der  Europœischen  zweyfiii- 
gcligen  Insrkten),  M.  haumhauer  avoit  donné  à  Paris,  en  Tan  VIII 
(  i8ooJ,  un  evtrait  de  ce  travail  en  François.  Quoique  les  caractères  ne 
soient  pas  tirés  spécialement  de  la  disposition  et  du  nombre  des  ner- 
vures des  ailes,  l'auteur  s'en  est  cependant  beaucoup  occupé,  et  il 
avoue  que  cette  considération  lui  a  fourni   la  base  de  sou  travail. 

5i.  William  Kirby  ,  auteur  anglois  ,  a  publié  en  anglois ,  avec 
des  descriptions  en  latin,  la  monographie  dus  abeilles  d'Angleterre, 
2  vol.  in-8.°,  1802:  c'est  un  très-bon  ouvrage.  Il  a  aussi  donné,  avec  le 
docteur  Sphvce,  des  Elémens  d'entomologie ,  dont  le  premier  volume  a 
paru  à  Londres,  en  i8i5. 

52.  Louis  Jurine,  très-habile  professeur  de  chirurgie  à  Genève, 
s'est  beaucoup  occupé  de  l'histoire  naturelle  des  oiseaux,  des  crustacés 
et  surtout  des  insectes  de  ce  pajs.  Il  a  publié,  en  1807,  en  un  volume 
in-4.°,  un  très-bel  ouvrage ,  orné  de  gravures  en  couleurs,  qui  représen- 
tent une  espèce  de  chacun  des  genres  de  l'ordre  des  hyménoptères, 
sous  le  titre  de  Nouvelle  méthode  de  classer  ces  insectes.  L'auteur  a 
pris  pour  base  de  sa  méthode  la  disposition  des  nervures  des  ailes. 

53.  Frakçois  et  Pierre  Huher  ,  père  et  fils,  de  Genève.  Le  premier 
a  publié  d'excellentes  Observations  sur  les  abeilles,  et  le  second  sur 
les  Mœurs  des  fourmis  indigènes.  Nous  en  avons  fait  des  analyses  détail- 
lées dans  les  articles  qui  concernent  ces  insectes,  et  là  aussi  nous  en 
avons  fait  un  éloge  bien   mérité. 

54.  Charles- Jean  Schoenherr  a  donné  en  trois  volumes  in -8.°,  nu- 
bliés  à  Stockholm  ,  en  1806 — i8o8  et  1817,  une  synonymie  complète 
et  très-soignée  des  insectes  coléoptères,  d'après  l'ordre  du  S/stema 
eleutheratorum  de  Fabricius,  jusqucs  et  compris  le  147."  genre  ,  Molor- 
chus  :  il  porte  pour  titre  Sy'nony?nia  insectorum.  Il  a  fallu  une  patience 
infinie  pour  exécuter  un  travail  aussi  pénible,  mais  qui  devient  indis- 
pensable à  tout  entomologiste  descripteur  par  les  grandes  recherches 
qu'il  peijt  éviter  pour  remonter  aux  sources. 


524  INS  • 

55.  LÉoSTARD  Gyixïkthai.  a  aussi  décrit,  en  trois  volumes,  les  coléop- 
tères, en  se  bornant  à  ceux  de  la  Suède,  à  peu  près  d'après  le  système 
de  iNT.  r.atreille  :  il  manque  rncore  à  ce  travail  les  genres  voisins  de.s 
ceranihfx  et  ceux  du  gfnre  Coccinelle ,  dont  Fauteur  s'occupe  actuel- 
lement. I.es  descriptions  ont  l'inconvénient  d'être  trop  longues,  et  de 
répéter  des  détails  communs  à  toutes  les  espèces  du  genre.  Les  volumes 
écrits  en   latin  ont  paru  en  1808  -   1810  et  i8i.3. 

56.  Gaspard  Duftsch>ud  a  publié,  en  langue  allemande,  en  180.^  — 
l3i2,  la  description  d'un  grand  nombre  de  coléoptères  par  familles 
naturelles,  les  scarabées,  les  clavicornes,  les  créophages,  les  rénii- 
tarses,  etc.  L'ouvrage,  qui  a  pour  titre  Fauna  Austriœ,  ne  se  com- 
pose que  de  deux  volumes.  Ils  sont  très  -  estimés.  Il  paroît  que  l'au- 
teur a  cessé  de  s'occuper  de  la  science.  (  C.  D.) 

INSECTES*  (Fo55.)  Les  insectes  fossiles  auxquels  on  a 
donné  le  nom  d'entomolithes ,  se  présentent  dans  le  succin 
ou  dans  des  pierres  fissiles.  Les  premiers  sont  parfaitement 
conservés  dans  toutes  leurs  parties ,  et  on  pourroit  même 
reconnoître  les  espèces.  On  a  trouvé  dans  cette  substance  des 
mouches,  des  tipules ,  des  ichneumons  ,  des  fourmis,  etc. 
J'en  possède  un  morceau  aplati  et  de  la  grosseur  du  pouce, 
dans  lequel  on  voit  distinctement  dix-huit  insectes,  tels  que 
des  fourmis,  des  tipules,  de  petits  coléoptères,  et  un  cha- 
rançon ,  que  M.  le  baron  Dejean  ,  qui  a  rassemblé  une  si  grande 
collection  de  coléoptères ,  n"a  point  reconnu  pour  être  un 
insecte  vivant  actuellement  en  Europe. 

Après  les  tempêtes  on  trouve  le  succin  et  les  insectes  qu'il 
renferme  sur  les  côtes  de  la  mer  Baltique ,  principalement 
sur  celles  de  la  Poméranie  et  de  la  Prusse ,  sur  quelques-unes 
de  la  Méditerranée  ,  telles  que  celles  de  la  Marche  d'Ancône  , 
de  Gênes  et  de  la  Sicile. 

On  découvre  aussi  cette  résine  fossile  dans  l'intérieur  de 
la  terre,  en  Lithuanie ,  en  Pologne  ,  en  Italie  et  en  Provence 
près  de  Sisteron.  Elle  est  ordinairement  dans  des  sables  noirâ- 
tres ,  parmi  des  bois  fossiles,  pyriteux  ou  bitumineux. 

Les  insectes  que  l'on  rencontre  dans  les  pierres  ,  y  sont  dans 
un  état  de  conservation  bien  moins  parfait  que  dans  le  succin; 
on  aperçoit  pourtant  distinctement  la  tête,  le  corselet,  et 
le  corps  souvent  divisé  par  anneaux  :  mais  il  est  ditiicile  d'être 
assuré  si  ce  sont  des  insectes  parfaits  ou  seulement  des  larves 
ou  des  chrysalides  de  ntvroptères  qui  vivent  dans  les  eaux 
douces  jusqu'à  leur  entier  développement. 


•  •"*  INS  •       525 

Quelques-uns  de  ces  fossiles  se  trouvent  accompagnés  de 
débris  de  petites  coquilles  ,  et  il  y  a  lieu  de  croire  que  la 
catastrophe  qui  les  a  saisis  s'est  opérée  dans  des  eaux  qui 
avoient  été  tranquilles  ,  et  où  pouvoient  vivre  ces  larves  ou  ces 
chrysalides. 

On  voit  des  figures  de  ces  insectes  fossiles  dans  l'ouvrage 
de  Knorr  sur  les  Pétrifications,  part,  i/*,  tab.  XXXITI,  fig. 
2-6,  et  dans  celui  de  Scheuchzer,  Herb.  diluv.,  tab.  V,  fig. 
1  et  2.  Ce  dernier  auteur  a  annoncé  qu'on  avoit  trouvé  une 
libellule  avec  s<^s  ailes  au  mont  Bolca  dans  le  Véronnois, 
un  grand  scarabée  dans  une  pierre  d'Œningen  et  une  scolo- 
pendre dans  une  pierre  grise  de  Lubeck. 

Aldrovande  cite  un  insecte  de  ce  dernier  genre  et  des 
pucerons  pétrifiés  sur  une  pierre  noire  du  canton  de  Glaris. 

Vallerius  dit  que,  dans  les  pierres  d'Œningen,  on  a  trouvé 
des  insectes  volans  ,  tels  que  les  scarabées,  auxquels  on  a 
donné  le  nom  de  cerf-volant,  des  mouches,  des  libellules 
et  des  papillons. 

Bromel  annonce  qu'on  trouve  des  vestiges  d'insectes  ,  des 
ailes  de  papillons  et  de  scarabées  sur  des  ardoises  alumineuses 
des  carrières  d'Andrn-Rumen  dans  la  province  de  Scanie  eu 
Suède  [Acta  litt.  Sueciœ ,  tom.  3,  pag.  446).  Il  cite  aussi  des 
ailes  de  mouches  dans  des  pierres  de  Frankenberg,  et  de  gros 
insectes  avec  des  pyrites  brillantes  dans  celles  de  VVurtzburg. 

On  a  trouvé  dans  les  carrières  de  Vestena  nova,  avec  des 
squelettes  de  poissons,  un  insecte  marin  qu'on  a  rapporté  au 
genre  Pygnogonum  de  Fabricius.  On  voit  une  figure  de  cet 
insecte  dans  les  Annales  du  Musée,  tom.  3,  pi.  I.'*,  fig.  3. 

Différens  auteurs,  tels  que  Buttner,  Richter,  Vogel,  Lan- 
gius  ,  Lippi  et  Bruckmann,  ont  annoncé  que  dans  les  schistes 
d'Œningen  on  a  trouvé  des  mouches  ichneumones ,  des  hé- 
mérobes ,  des  insectes  diptères  ,  des  enveloppes  de  larves  d'in- 
sectes ,  des  nymphes,  et  qu'en  Ethiopie  on  a  vu  à  l'état  fos- 
sile des  cellules  d'abeilles  et  des  œufs  d"insecfes. 

Une  observation  peu  approfondie  a  pu  faire  voira  certains 
auteurs  autre  chose  que  ce  qui  étoit.  Il  est  difficile  de  croire, 
par  exemple  ,  que  des  pucerons  aient  pu  passer  à  l'état  fossile  , 
et  il  est  extrêmement  probable  qu'on  a  pris  des  oolites  pour 
des  œufs  d'insectes.    On  s'est  trompé  en  prenant  pour  des 


526       '^  IIVS  • 

ruches  crabeilles  des  astrces  fossiles,  dont  les  lames  qui  rem- 
plissoient  chaque  cellule  ont  été  détruites  ,  comme  cela  arrive 
souvent.  L'on  peut  croire  que  des  scarabées  soient  devenus 
fossiles  ;  mais  il  y  a  lieu  de  penser  que  souvent  l'on  a  pu 
prendre  pour  eux  des  paradoxites  pjriteux  et  de  leurs  débris, 
comme  j'en  possède,  et  qui  se  trouvent  dans  des  roches  ani- 
phiboliques  noires. 

On  voit  sur  des  schistes  de  Solenhofen  ,  de  Pappenheim 
et  d'Eichstaedt ,  des  empreintes  que  Ion  a  prises  pour  des  vers 
de  terre  ,  et  auxquelles  on  a  donné  le  nom  d'helmintolithes  ; 
mais,  d'après  les  figures  qu^on  en  trouve  dans  l'ouvrage  de 
Knorr  ci-dessus  cité  ,  part,  i  .'*,  tab.  XII ,  fig.  2-10,  il  est  pro- 
bable que  ces  pétrifications  ont  une  tout  autre  origine,  au 
moins  pour  quelques-unes,  qui  paroissent  avoir  quatre  à  cinq 
fois  plus  de  longueur  que  n'en  ont  les  vers  de  terre  que  nous 
connoissons  aujourd'hui  à  l'état  vivant. 

Le  corps  représenté  fig.  i."^"  de  la  même  planche,  se  rap- 
porteroit  assez  à  un  ou  à  plusieurs  dragonneaux  de  sources 
qui  auroient  été  saisis  par  la  pétrification. 

Je  possède  une  pierre  de  Solenhofen  qui  contient  de  pe- 
tites astéries,  et  sur  laquelle  on  voit  une  sorte  de  tube  que 
l'on  pourroit  prendre  pour  une  portion  de  ver  fossile,  mais 
auquel  paroissent  être  attachées  à  plusieurs  places  des  co- 
quilles bivalves  avec  leurs  deux  valves  striées  circulairement 
et  ouvertes.  Tout  porte  a  croire  que  ce  corps,  ainsi  que  la 
plupart  de  ceux  dont  il  est  question  ci-dessus,  ne  sont  point 
des  restes  de  vers  de  terre.  (D.  F.) 

INSECTES  HONTEUX.  [Mamm.)  Le  Père Tachard  nomme 
ainsi,  dans  son  Voyage  àSiam,  une  espèce  de  pangolins, 
sans  doute  à  cause  de  la  faculté  qu'ont  ces  animaux  de  se 
rouler  en  boule,  lorsqu'ils  éprouvent  quelque  crainte.  (F.  C.) 

INSECTIRODES  ou  ENTOMOTILLES.  (Ertfom.)  Noms  sous 
lesquels  est  désignée  une  famille  naturelle  d'insectes  hymé- 
noptères, dont  les  larves  se  développent  dans  l'intérieur  des 
autres  insectes,  qu'elles  rongent  ;  c'est  de  cette  particularité 
qu'est  emprunté  le  nom  tiré  des  deux  mots  litins ,  insecta 
rodo  :  tels  sont  les  ichneumons ,  les  fanes,  les  ophions ,  les 
hanches,  les  évanies ,  etc.  Voyez  Entomotilles.  (C.  D.) 

INSECTIVORES.  {Omith.)  On  appelle  ainsi  les  oiseaux  ou 


.  ^  INS  '     527 

autres  animaux  qui  se  nourrissent  principalement  d'insectes. 
(Ch.  D.) 

INSENS.  {Bol.  )  C'est  un  des  noms  vulgaires  de  l'absinthe  , 
artemisia'-absintliium.   (H.  Cass.) 

INSERTION  DES  ÉTAMINES.  (Bot.)  C'est  leur  position 
dans  la  fleur,  leur  point  d'attache  dans  les  fleurs  hermaphro- 
dites. L'insertion  des  étamines  a  lieu,  tantôt  au  niveau  de  la 
base  du  pistil  (blé,  saururus ,  kalreute.ria)  ;  tantôt  au-dessous 
de  la  base  du  pistil  [cleome  pcntapliylla,  helicteres  ,  sterculia); 
tantôt  sur  le  pistil,  au  sommet  de  l'ovaire  (ombellifères),  ou 
à  la  base  du  style  (balisier),  ou  au  sommet  du  style  (limcdo- 
rum,  serapias),,  ou  sous  le  stigmate  (aristoloche);  tantôt  sur 
le  périauthe  simple  (aletris),  sur  le  calice  (rose),  sur  la 
corolle  .  labiées). 

Ou  nomme  insertion  absolue ,  celle  où  on  ne  considère  que 
le  point  où  elle  a  lieu,  abstraction  faite  du  pistil,  et  inser- 
tion relative  celle  où  Ton  considère  le  point  où  elle  a  lieu 
par  rapport  au  pistil. 

L'insertion  relative  est  dite  hypogyne,  lorsqu'elle  a  lieu  au- 
dessous  de  la  base  du  pistil,  ou  au  niveau  de  la  base  du  pistil 
(graminées,  renoncules):  elle  estpérigyne,  lorsqu'elle  a  lieu 
autour  du  pistil .  sur  la  paroi  du  calice  ou  du  périanthe  simple 
(  thymelées,  rosacées)  ;  épigyne,  lorsqu'elle  a  lieu  sur  le  pistil 
même  (orchidées,  ombellifères). 

L'insertion  est  immédiate  ou  médiate.  Elle  est  immédiate 
lorsque  les  étamines  sont  attachées,  sans  intermédiaire,  sous 
le  pistil,  sur  le  calice  ou  sur  le  pistil.  Elle  est  médiate  ,  lors- 
qu'elles sont  attachées  à  la  corolle.  Dans  ce  cas,  l'insertion 
se  fait  par  l'intermédiaire  de  cette  enveloppe  florale,  qui, 
comme  les  étamines,  se  trouvant  attachée  sous  le  pistil, 
sur  le  calice  ou  sur  le  pistil ,  prend ,  comme  elles ,  sui- 
vant ces  positions,  la  dénomination  de  corolle  h3^pogyne , 
corolle  périgyne  et  corolle  épigyne.  Les  étamines  et  la  co- 
rolle sont  censées  avoir  la  même  insertion.  En  général,  l'in- 
sertion est  semblable  dans  les  plantes  d'une  même  famille  et 
dans  les  plantes  de  familles  voisines.  (Mass.) 

INSERTIONS  MÉDULLAIRES.  (Bot.)  Voyez  Ratons  mé- 
dullaires. (Mass.) 

INSIDIATOK.  {Ichlhj'ol.)  Les  auteurs  ont  désigné  par  ce 


528     .  INS  i 

nom  latin  le  poisson  que  d'autres  ont  appelé  imposteur  en 
françois.  '^''oyez  Filou.  (H.  C.) 

IISSIRE.  [Mamm.)  Nom  que  l'on  trouve  employé  au  Congo , 
comme  étant  celui  d'un  animal  carnassier  qui  a  quelque 
rapport  avec  les  martes.  (F.  C.) 

INSOLATION.  {Cliim.)  C'est  l'exposition  aux  rayons  du 
soleil  de  matières  quelconques.  On  fait  cette  opération,  i.° 
quand  on  veut  séparer  d'une  substance  fixe  un  liquide  qu'elle 
contient  et  qui  est  susceptible  de  s'évaporer;  2°  pour  sou- 
mettre à  l'action  de  la  lumière  des  corps  qui  en  éprouvent 
quelque  changement,  soit  dans  leur  composition,  soit  sim- 
plement dans  l'état  d'agrégation  de  leurs  particules.  (Ch.) 

INSOLUBILITÉ.  [Chim.)  Propriété  qu'a  un  solide  de  ne 
pas  se  dissoudre  dans  un  liquide  ;  un  liquide,  v'j  ne  pas  se 
dissoudre  dans  un  autre  liquide;  un  gaz,  de  ne  pas  se  dis- 
soudre dans  un  liquide.  (Ch.) 

INSTINCT.  L'idée  qu'on  a  généralement  de  l'instinct,  est 
celle  d'une  force,  d'une  faculté  particulière,  cause  immé- 
diate des  actions'  auxquelles  les  animaux  sont  aveuglément 
et  nécessairement  portés.* 

Ce  n'est  cependant  point  une  de  ces  idées  claires  que  l'on 
peut  circonscrire  d'une  manière  précise  :  en  effet,  on  a 
beaucoup  varié  et  on  est  loin  d'être  d'accord  sur  les  actions 
instinctives.  Les  uns  en  ont  étendu  le  nombre,  et  les  autres 
l'ont  restreint,  suivant  qu'il  convenoit  à  leurs  systèmes  de 
refuser  ou  d'accorder  de  l'intelligence  aux  animaux  ,  de  faire 
dépendre  ces  actions  d'une  influence  mécanique  des  organes 
ou  d'une  détermination  plus  ou  moins  libre  de  l'esprit.  Pour 


1  Par  une  action,  un  acte,  j'entends  simplement  un  fait,  un  phe'- 
nomène,  sans   y  ajouter  nécessairement  l'idée    d'activité. 

2  Quelques  auteurs  ont  mis  au  nombre  des  instincts  les  penchans  , 
les  dispositions,  et  même  les  appétits,  les  besoins  naturels.  Ces  ptiéno- 
mènes  nous  paroissent  être  d'un  tout  autre  ortlre  ;  nous  n'en  parlerons 
pas.  En  effet,  les  dispositions  et  les  besoins  ne  conduisent  pas  néces- 
sairement à  des  actions  aveugles  :  les  premières  sont  au  contraire  des 
aptitudes  à  être  frappées  de  telles  ou  telles  modifications,  plutôt  que 
de  telle  ou  telle  autre,  ce  qui  suppose  l'expérience;  et  si  les  seconds 
poussent  irrésistiblement  à  certaines  actions,  ils  doivent  plutôt  être 
considérés  comme  occasion ,  que  comme  causes  de  ces   actions. 


•  '  INS  629 

assurer  h  cette  idée  toute  la  netteté  dont  elle  a  besoin,  il 
auroit  fallu ,  comme  dans  toutes  les  sciences  d'observation , 
où  l'on  ne  peut  remonter  aux  causes  que  par  les  faits  ,  il 
auroit  fallu,  dis-je,  établir  d'abord  ceux-ci,  c'est-à-dire, 
distinguer,  par  des  caractères  fixes,  les  actions  aveugles  eÉ 
nécessaires,  de  celles  qui  sont  électives  et  contingentes,  de 
celles  qui ,  en  un  mot ,  sont  le  résultat  de  l'expérience  ;  et  c'est 
ce  qu'on  est  loin  d'avoir  fait  :  il  n'est  pas  même  possible  d'ar- 
river sur  ce  sujet  à  toute  la  précision  que  l'on  doit  désirer, 
parce  que  la  science  de  l'intelligence  des  brutes  n'est  encore 
qu'à  son  enfance,  et  que  les  principes  dont  pourroit  s'aider 
celui  qui  voudroit  s'y  livrer,  n'existent  point.  Si  je  m'en 
occupe  ici,  c'est  donc  bien  moins  dans  l'intention  de  donner 
la  solution  de  ce  problème  ,  que  pour  faire  envisager  les  faits 
qui  s'y  rapportent  sous  le  point  de  vue  que  je  crois  le  plus 
propre  à  conduire  à  ce  but  important  :  aussi  ne  traiterai-je 
cette  question  que  d'une  manière  sommaire,  et  en  me  bor- 
nant à  citer  les  faits  qui  me  paroîtront  indispensables. 

Mais,  avant  que  d'entrer  en  matière,  il  est  nécessaire  que 
je  fasse  remarquer  que  nous  ne  pouvons  étudier  le  principe 
des  actions  des  animaux  que  dans  nos  propres  actions  ,  et  que 
les  bornes  de  notre  intelligence  sont  pour  nous  les  bornes  du 
monde  intellectuel.  Nous  ne  devons  qu'aux  lumières  que  nous 
puisons  en  nous-mêmes  le  pouvoir  d'éclairer  les  actions  des 
brutes,  pour  en  distinguer  les  différens  caractères  et  en  ap- 
précier la  nature.  La  comparaison  de  nos  actions  avec  les  leurs 
est  ici  notre  unique  guide  ;  et  ce  que  nous  reconnoitrons  être 
la  cause  des  unes,  sera  la  cause  des  autres.  Si  la  toute-puis- 
sance eût  créé,  pour  les  actions  des  animaux,  une  faculté  diffé- 
rente de  celle  qui  détermine  les  nôtres,  ce  seroit  en  vain  que 
nous  nous  efforcerions  de  la  découvrir;  elle  résisteroità  toutes 
nos  tentatives,  et  resteroit  éternellement  cachée  à  nos  yeux. 
Lorsque  nous  considérons  d'une  manière  générale  les  ac- 
tions des  animaux',  nous  remarquons  qu'elles  sont  simples 

»  loute  aclion  consiste  dans  un  ou  plusieurs  actes  intellectuels,  qui 
sont  causes,  et  dans  un  ou  plusieurs  actes  corporels,  qui  sont  effets^ 
C'est  là  le  sens  que,  dans  cer  article,  nous  donnons  aux  mots  acte  et 
action,  sans  rien  préjuger  sur  les  actions  instinctives,  dont  nous  no 
sommes  point  encore  censés  connoître  les  élémen'î. 

23,,  54 


55o      '  INS 

ou  complexes,  c'est-à-dire  que  les  unes  ne  paroîssent  ûc^ 
mander  ou  ne  demanderoient  de  notre  part,  pour  être  pro- 
duites, qu'un  très-petit  nombre  de  laits,  d'actes  intellectuels, 
comme  une  perception ,  un  jugement,  parexemple,  tandis  que 
les  autres  semblent  nécessiter  le  concours  d'un  nombre  plus 
grand  de  ces  actes,  et  même  rendre  indispensables  des  com- 
binaisons de  l'ordre  le  plus  élevé-,  nous  voyons  en  outre  que 
les  plus  simples,  comme  les  plus  compliquées,  se  manifestent, 
ou  avant  qu'aucune  expérience  ait  pu  avoir  lieu  ,  ou  après 
l'emploi  et  par  coi>iséquent  le  développement  des  facultés 
qui,  dans  l'état  ordinaire  des  choses,  doivent  agir  pour 
qu'une  action  contingente  se  produise. 

Il  n'y  a  jamais  eu  de  contestation  fondée  sur  les  actions 
antérieures  à  toute  expérience:  simples  ou  complexes,  elles 
Ont  toujours  été  considérées  par  les  naturalistes  comme  ins- 
tinctives ;  et,  en  effet,  il  faut  bien  qu'une  force  aveugle  et 
nécessaire  les  ait  fait  naître,  puisqu'aucune  expérience  n'avoit 
encore  pu  mettre  en  jeu  les  facultés  de  l'être  qui  les  luani- 
festoit. 

Les  cris  de  l'enfant  qui  souffre  et  qui  a  besoin  de  secours; 
la  recherche  de  la  mamelle  par  le  petit  qui  vient  de  naître, 
et  l'action  de  téter;  la  fuite,  déterminée  parla  crainte,  d'un 
Jeune  animal  qui  n'a  point  encore  appris  à  connoitre  le 
danger;  la  défense  qu'il  oppose  à  qui  veut  le  saisir;  l'obéis- 
sance du  nouveau -né  accourant  à  la  voix  de  sa  mère,  etc.. 
sont  des  actions  de  cette  nature. 

Celles  qui  se  sont  produites  après  que  des  influences  exté- 
rieures ont  pu  agir  sur  l'intelligence,  ont  seules  inspiré  des 
doutes,  quant  aux  principes  sur  lesquels  elles  reposent  y 
faute  de  moyens  pour  distinguer  les  contingentes  des  néces- 
saires, ainsi  que  nous  l'avons  dit  plus  haut.  En  effet,  d'une 
part  elles  avoient  été  mal  observées  ,  et  de  l'autre  on  man- 
quoit  de  règles  pour  les  juger  et  pour  déterminer  leurs  vé- 
ritables caractères  :  deux  conditions  qui  se  lient  si  inti- 
mement dans  toutes  les  sciences  d'observation  ,  qii'on  peut 
affirmer  que  l'observation  de  tout  phénomène  est  incomplète, 
si  Ton  ne  peut  pas  en  même  tempsTattacher  ce  phénomène, 
par  des  vues  générales,  à  ceux  qui  sont  du  même  ordre 
que  lui. 


INS  53i 

I,a  première  marque,  le  premier  signe  d'une  action  élec- 
tive, c'est  de  pouvoir  être  modifiée  par  l'expérience ,  de  la 
même  manière  qu'elle  a  été  produite,  et,  l'expérience  ne 
pouvant  agir  que  sur  Tesprit,  c'est  dire,  en  d'autres  termes, 
que  le  premiersigne  d'une  faculté  contingente  est  de  dépendre 
de  rintclligence  et  de  toujours  pouvoii'  agir  conformément 
aux  circonstances  variables  dont  elle  est  de  nature  à  éprouver 
l'influence.  Ainsi,  ce  que  par  la  suite  nous  dirons  d'une 
action  ,  nous  entendrons  le  dire  d'une  faculté,  et  récipro- 
quement. 

Les  exemples  de  ce  genre  d'action  sont  communs  :  le  chien 
qui  obéit ,  au  lieu  de  fuir,  à  la  vue  d'un  fouet  dès  qu'il  le  voit 
en  main  ;  qui  va  chercher  l'objet  qu'on  lui  désigne  ,  au  lieu  de 
rester  indifférent  à  l'ordre  qu'il  reçoit;  qui  s'agite  et  déchire 
les  barreaux  de  sa  cage,  s'ils  sont  de  bois,  et  qui  se  résigne 
à  son  esclavage,  si  ces  barreaux  sont  de  fer,  fait  donc  des 
actions  contingentes  ;  et  la  faculté  qui  en  est  le  principe ,  est 
une  faculté  modifiable,  puisqu'elle  reçoit  l'influence  des  diffé- 
rentes circonstances  pourlesquelles  ces  actions  se  produisent. 

Ce  sont  encore  des  actions  du  même  genre  que  celles  que 
nous  voyons  faire  au  cheval  qui,  ayant  à  choisir  entre  deux 
chemins  dont  un  lui  est  connu  ,  prend  constamment  ce  der- 
nier, quelque  éloigné  que  soit  le  temps  où  il  l'a  pris  pour  la 
dernière  fois  :  lorsque  le  chien  court  au  devant  de  son 
maître  et  le  couvre  de  ses  caresses,  s'il  le  voit  se  disposer  à 
sortir  et  qu'il  ait  envie  de  l'accompagner  ;  lorsqu'il  con- 
tient le  troupeau  dont  la  garde  lui  est  confiée,  dans  les  li- 
mites précises  que  son  maître  lui  a  tracées  :  lorsque  le  loup 
attaque  sa  proie  à  force  ouverte  dans  la  solitude  des  bois, 
ou  s'en  empare  par  surprise  dans  le  voisinage  des  habita- 
tions, etc.  Ces  actions  ,  comme  les  précédentes,  n'ont  rien 
de  nécessaire  et  pouvoient  ne  point  avoir  lieu.  La  moindre 
circonstance  suffisoit  pour  déterminer  le  cheval"  à  prendre  le 
chemin  qu'il  n'avoit  point  encore  parcouru:  si  le  chien,  par 
sa  propre  désobéissance,  avoit  mécontenté  son  maître,  bien 
loin  d'accourir  à  lui  avec  joie,  il  ne  s'en  seroit  approché 
qu'en  tremblant,  et  l'on  sait  que  cet  animal  n'acquiert  que 
par  l'éducation  le  talent  admirable  que  nous  lui  connoissons 
pourla  earde  des  troupeaux,  etc. 


532  INS 

Par-contre  le  caractère  des  actions  instinctives  sera  d'être 
lixes  et  de  se  reproduire  constamment  les  mêmes  dans  toutes 
les  situations.  En  conséquence  nous  rangeons  parmi  ces 
actions  celles  que  nous  présentent  le  chien  ,  lorsqu'il  va  en- 
fouir dans  la  terre  les  restes  de  son  repas  :  le  cheval  et  le  renne , 
lorsqu'ils  enlèvent  la  neige  qui  recouvre  la  terre,  pour  dé- 
couvrir la  nourriture  dont  ils  ont  besoin;  les  vaches,  lorsque, 
menacées  par  la  présence  d'un  loup  ,  elles  placent  leurs 
petits  au  milieu  d'un  cercle  dont  leurs  tttes  et  leurs  cornes 
forment  la  circonférence;  les  castors,  lorsqu'ils  élèvent  leurs 
huttes  et  leurs  digues,  lorsqu'ils  Aont  couper  le  bois  néces- 
saire à  leurs  constructions,  lorsqu'ils  réparent  les  ravages 
que  leurs  ennemis  ou  le  temps  peuvent  avoir  faits  à  leur 
habitation  ;  le  lapin,  lorsqu'il  se  creuse  un  terrier;  l'oiseau, 
lorsqu'il  se  construit  un  nid,  etc.  En  effet,  toutes  ces  actions 
se  présentent  constamment  à  nous  comme  invariables  dans 
ce  qu'elles  ont  d'essentiel.  Le  chien  cache  ses  alimens  super- 
flus, quand  même  il  n"a  jamais  eu  besoin  d'y  avoir  recours; 
le  cheval  qui  enlève  avec  ses  pieds  la  neige  sous  laquelle 
l'herbe  ou  la  mousse  sont  cachées,  le  fait  même  quand  il  voit 
la  neige  pour  la  première  fois,  et  quand  il  est  repu  ,  comme 
quand  il  a  faim.  Le  castor  construit  dans  toutes  les  situations, 
dans  Tesclavage  le  plus  étroit ,  comme  au  sein  de  la  plus 
grande  liberté;  quand  les  abris  lui  sont  les  plus  inutiles, 
comme  lorsqu'ils  lui  sont  le  plus  nécessaires.  Ces  vaches,  si 
ingénieuses  pour  défendre  leurs  petits  quand  elles  sont  en 
troupe,  ne  changeroient  rien  à  leurs  moyens  de  défense, 
quand  elles  seroient  réduites  au  plus  petit  nombre  ,  et  que 
ces  moyens  deviendroient  insuffisans  ;  ce  lapin,  si  soigneux 
à  se  creuser  une  retraite ,  ne  sait  ni  la  cacher  ni  la  construire 
suivant  les  lieux  ,  la  nature  de  ses  ennemis  ou  celle  des  saisons, 
etc.;  et  les  dernières  classes  du  règne  animal  nous  offriroi^nt 
des  exemples  encore  plus  frappans ,  plus  extraordinaires. 

Cette  distinction  étant  bien  établie  empiriquement  entre  les 
actions  contingentes  et  les  actions  instinctives,  si  nous  nous 
arrêtons  à  considérer  ces  dernières ,  nous  trouvons  qu'elles 
sont  de  nature  très- différente ,  qu'elles  s'exercent  constam- 
ment ou  ne  se  manifestent  qu'à  certaines  époques  ;  qu'elles 
sont  toujours  en  petit  nombre,:  mais  qu'elles  vont  en  gugmen- 


mS     ,  •       533 

tant  et  de  nombre  et  d'importance,  à  mesure  que  les  ani- 
maux, sous  le  rapport  de  l'organisation,  s'éloignent  davantage 
de  l'espèce  humaine. 

Pour  établir  ces  propositions ,  il  nous  suffira  de  quelques 
exemples  :  les  animaux  dont  nous  A'^enons  de  parler,  nous  les 
fourniront  eux-mêmes.  IN'y  a-t-ilpas,  en  effet,  une  différence 
immense  entre  les  actions  involontaires  et  toujours  très- 
simples  qui  sont  occasionées  par  la  peur,  la  colère,  l'amour, 
la  faim ,  etc. ,  et  celles  que  nous  venons  de  citer,  toutes  re- 
marquables par  leur  complication?  Les  unes  semblent  pure- 
ment organiques,  tandis  que  pour  les  autres  Tintelligence 
paroit  indispensable.  De  plus,  ce  n'est  qu'à  certaines  époques 
et  durant  un  temps  limité  que  beaucoup  d'animaux  vont  à 
la  recherche  de  leurs  femelles,  qu'ils  se  préparent  des  gîtes, 
qu'ils  construisent  leurs  nids.  Enfin  le  chien,  le  cheval, 
le  bœuf,  nous  présentent  peu  d'actions  que  Ton  puisse  attri- 
buer à  l'instinct;  et  cependant  leur  vie  est  assez  active,  c'est- 
à-dire  que  leurs  actions  contingentes  la  remplissent  presque 
tout  entière  et  suffisent  à  la  plupart  des  situations  assez 
nombreuses  dans  lesquelles  ils  sont  à  portée  de  se  trouver.  Ils 
nous  présentent  de  même  cette  espèce  de  dégradation  de 
l'intelligence  qui  se  manifeste  par  la  diminution  des  actions 
électives,  comparativement  aux  actions  instinctives  et  né- 
cessaires. Le  chien  nous  fait  voir  un  très-grand  nombre  des 
premières,  et  un  très-petit  nombre  des  secondes;  le  bœuf, 
au  contraire,  passe  sa  vie  active  dans  d'assez  étroites  limites, 
et  si  ses  actions  instinctives  ne  sont  pas  très- nombreuses, 
elles  le  deviennent  par  comparaison  avec  le  nombre  de  ses 
actions  contingentes. 

Mais  ces  vérités  acquerroient  beaucoup  plus  d'évidence,  si 
nous  parcourions  le  règne  animal  dans  son  entier  :  nous 
verrions  que  les  quadrumanes  et  les  carnassiers,  qui  se  trou- 
vent placés  au  haut  de  l'éclielle  des  êtres  intelligeiis,  sont  en 
quelque  sorte  des  animaux  libres,  en  comparaison  des  insectes, 
par  exemple,  dont  toute  l'existence  semble  dominée  par 
une  force  uniforme  et  constante  ,  qu'on  pourroit  comparer 
à  celles  qui  mettent  en  mouvement  les  machines  que  nous 
construisons ,  si  nous  étions  fondés  à  trouver  une  véritable 
analogie  entre  les  puissances  de  l'intelligence  et  celles  du 


534      '  IN$ 

monde  matériel.  Enfin,  l'action  instinctive  du  chien  la  pins 
compliquée,  celle  qui  exigeroit  de  notre  part  le  concours 
du  plus  grand  nombre  d'actes  intellectuels ,  n'est  absolument 
rien  en  comparaison  des  actions  de  cette  nature  que  nous  ob- 
servons chez  les  animaux  invertébrés,  et  principalement  chez 
les  insectes.  Quelques  actes  isolés  de  prévoyance  sont  en 
effet  ce  qu'en  ce  genre  le  chien  et  les  mammifères  voisins 
Tious  offrent  de  plus  remarquable  :  chez  les  insectes,  au  con- 
traire, toute  l'existence,  quelque  variée  qu'elle  paroisse, 
ne  semble  se  composer  que  d'une  seule  action  nécessaire  , 
mais  compliquée  à  l'infini ,  de  laquelle  rien  d'extérieur  ne 
peut  les  détourner  et  vers  laquelle  ils  tendent  invincible- 
ment. Pour  ne  citer  qu'une  des  espèces  les  plus  connues  , 
l'abeille,  qu'y  a-t-il  dans  les  actions  d'aucun  mammifère 
qui  approche  de  la  sagacité,  de  la  prévoyance,  de  la  force 
de  combinaison  que  fait  supposer  l'industrie  de  cet  animal  ? 
Rien  ,  après  l'intelligence  de  l'homme  ,  ne  paroît  plus 
propre  à  exciter  notre  étonnement  et  notre  admiration  que 
cette  puissance  qui  porte  invariablement  un  vtre  k  suivre 
nn  plan  compliqué  d'actions  qui  se  lient  intimement  en  une 
seule,  dont  la  durée  peut  être  de  plusieurs  jours,  de  plu- 
sieurs mois,  at  qui  n'ont  toiitcs  qu'tin  même  but.  C'est  que 
ce  ne  sont  point  les  actions  qui  paroissent  naître  de  combi- 
naisons profondes,  de  calculs  compliqués,  de  vues  ingé- 
nieuses qui  distinguent  véritablement  l'homme  des  autres 
êtres  intelligens:  nous  trouvons,  comme  nous  venons  de  le 
voir,  des  preuves  de  l'existence  de  ces  actions  chez  les 
animaux  les  plus  imparfaits,  et  à  un  degré  que  nous  ne 
pouvons  peut-être  pas  dépasser  de  beaucoup  ■  c'est  la  liberté 
seule,  la  faculté  de  connoître  ,  qui  fait  la  véritable  supé- 
riorité de  l'intelligence  humaine. 

Le  caractère  de  variabilité  qui  est  donné  aux  actions  con- 
tingentes, et  celui  d'invariabilité  qui  est  attribué  aux  actions 
nécessaires,  ne  doivent  cependant  pas  être  pris  dans  un  sens 
tout-à-fait  absolu.  L'animal  conserve  toujours  l'exercice  de 
ses  sens  et  le  degré  d'intelligence  qui  lui  est  propre,  et  il 
les  emploie  l'un  et  l'autre  de  la  manière  la  plus  favorable 
a  l'action  nécessaire  à  laquelle  il  est  porté.  L'exercice  de 
ces  facultés  est  même  toujours  proportionné  au  degré  de  né- 


INS  535' 

ccssité  des  actions;  plus  le  besoin,  le  sentiment  qui  entraî- 
nent l'animal  à  agir,  sont  impérieux,  plus  aussi  ses  facultés 
sont  captives  :  c'est  pourquoi  l'instinct  nous  paroit  beau- 
coup plus  fort  chez  les  uns  que  chez  les  autres.  11  n'y  a 
aucune  comparaison  à  faire  à  cet  égard  entre  le  hamster  qui 
se  forme  des  magasins  pour  Thiver  et  le  chien  qui  cache  sa 
nourriture  surabondante  :  rien  ne  peut  détourner  le  premier 
de  son  action,  et,  au  contraire,  la  moindre  circonstance 
peut  distraire  le  second  de  la  sienne.  Mais  il  y  a  plus  :  de 
nombreuses  observations  font  penser  qu'une  longue  habitude 
transforme  en  quelque  sorte  les  actions  contingentes  en  ac- 
tions nécessaires,  et  que  celles-ci  ne  sont  pas  soustraites  sans 
réserve  à  une  action  long-temps  continuée  des  circonstances 
extérieures  et  accidentelles,  et  qu'elles  prennent  quelque 
ehose  des  actions  électives.  Plusieurs  animaux,  en  effet,  nous 
en  donnent  la  preuve  :  les  chiens  de  chasse  proprement  dits 
n'ont  besoin  d'aucune  éducation  pour  se  livrer  à  cet  exercice 
et  poursuivre  les  bêtes  fauves,  tandis  que  les  barbets,  les  dogues, 
par  exemple,  n'y  sont  point  naturellement  portés.  D'un  autre 
côté,  on  assure  que  les  lapins,  tenus  pendant  plusieurs  géné- 
rations dans  des  lieux  oîi  ils  ne  peuvent  fouir,  donnent  nais- 
sance à  des  races  qui  ne  sont  plus  portées  à  se  creuser  des 
terriers;  et  Leroi  dit  positivement  que  les  jeunes  renards 
qui  se  trouvent  près  des  lieux  habités,  montrent  par  leurs 
actions,  même  avant  d'avoir  quitté  le  nid,  beaucoup  plus 
de  prudence  et  de  ruse  que  ceux  qui  vivent  dans  les  con- 
trées sauvages  où  ils  ont  peu  d'ennemis  à  craindre  et  à  fuir. 
C'est  qu'il  n'est  pas  plus  ici  qu'ailleurs  de  lois  absolues.  La  na- 
ture est  un  ensemble  harmonieux  dont  toutes  les  parties  sont 
liées,  où  toutes  les  transitions  sont  adoucies,  et  qui  présente 
avec  d'autant  plus  de  force  ce  caractère  d'unité  qu'elle  a  dû 
recevoir  de  son  auteur,  que  l'intelligence  qui  la  contemple 
a  su  se  placer  dans  un  point  plus  élevé  et  enibrasser  une  plus 
grande  étendue  de  phénomènes;  mais  cet  ordre  suppose  des 
rapports  différens ,  permet  des  rapprochemens  et  des  distinc- 
tions, et  ce  sont  eux  que  nous  avons  dû  d'abord  chercher  à 
faire  connoître. 

Après  avoir  considéré  les   actions  des  animaux  en  elles- 
«itmes,  et  avoir  essayé  de  distinguer,  par  leurs  propres  ca- 


556  INS 

ractéres,  celles  qui  sont  électives  et  contingentes  de  celles 
qui  paroissent  nécessaires,  nous  devrions  montrer  à  quels 
actes  intellectuels  ou  plutôt  à  quelle  cause  les  unes  et  les 
autres  sont  dues;  par  là  nous  établirions  le  point  de  sépara- 
lion  présumable  entre  l'intelligence  de  l'espèce  humaine  et 
rintelligcnce  des  animaux,  séparation  qui  doit  être  le  but 
principal  de  toutes  les  recherches  de  la  nature  de  celles  qui 
font  l'objet  de  cet  article. 

Malheureusement  l'entière  solution  de  ce  problème  ne  nous 
paroît  point  encore  possible.  Pour  le  résoudre,  il  faudroit 
que  l'on  possédât,  ce  qu'on  n'a  pu  encore  obtenir,  une  clas- 
sitication  méthodique  et  complète  des  modifications  que 
notre  esprit  peut  éprouver ,  c'est-à-dire,  des  opérations  dont 
il  est  susceptible  ou  des  idées  qu'il  peut  acquérir.  En  effet, 
comme  nous  l'avons  dit,  nous  ne  pouvons  avoir  que  la  con- 
science de  nos  propres  actes  intellectuels;  ceux  des  animaux 
seront  éternellement  cachés  à  notre  perception.  Nous  ne 
parvenons  à  les  concevoir  que  par  induction  ,  qu'au  travers 
de  leurs  actions,  qu'au  milieu  des  mouvemens  de  leurs  or- 
ganes ;  et  l'on  sait  combien  de  causes  différentes  peuvent 
produire  des  mouvemens  semblables. 

Nous  voyons  cependant  que  les  animaux  ,  ceux  des  pre- 
mières classes  surtout,  sont  susceptibles  d'attention;  qu'ils 
reçoivent  par  leurs  sens  des  impressions  analogues  à  celles 
que  nous  recevons  par  les  nôtres  ;  que  ces  impressions  lais- 
sent des  traces  qui  se  conservent  et  qui  les  rappellent  ;  qu'elles 
forment  les  unes  avec  les  autres  des  associations  nombreuses 
et  variées;  qu'il  s'en  déduit  plusieurs  jugemens,  plusieurs 
rapports,  etc.  C'est  là  que  se  bornent  les  facultés  dont  nous 
pouvons  apercevoir  en  eux  des  traces  avec  une  certaine 
apparence  de  fondement  ;  mais  les  modes,  les  formes,  aux 
quels  leurs  perceptions  sont  soumises,  nous  les  ignorons;  et 
nous  ne  pouvons  établir  quelles  sont  les  espèces  de  rapports 
qu'ils  ne  saisissent  pas,  et  qui  formeroient  conséquemment 
l'apanage  exclusif  de  l'homme.  Au  reste,  si  nous  ne  trou- 
vons pas  réunies  dans  une  seule  espèce  d'animal  toutes  les 
facultés  de  cette  nature  que  nous  rencontrons  en  nous,  il 
çeroit  possible  qu'un  examen  attentif  en  fît  reconnoître  un 
grand  nombre  dans  l'ensemble  des  espèces   qui  constituent 


•  ms  557 

îe  règne  animal,  ef  de  telle  sorte  que  ces  facultés  pussent 
elles-mêmes,  comme  les  qualités  physiques,  servir  à  faire 
distinguer  ces  espèces  l'une  de  l'autre.  Mais,  ce  qui  nous 
paroit  hors  de  doute  ,  c'est  que  tous  les  animaux  sans  excep- 
tion sont  dépourvus  du  sens  intime  de  la  perception  du  moi 
et  de  la  faculté  de  réfléchir;  c'est-à-dire,  de  considérer  intel- 
lectuellement, par  un  retour  sur  eux-mêmes,  leurs  propres 
modifications  :  ils  ignorent  qu'ils  reçoivent  l'impression  des 
corps  extérieurs,  qu'ils  pensent,  qu'ils  agissent  ;  les  actes  de 
leur  esprit,  comme  les  mouvemens  de  leur  corps,  n'ont  que 
des  causes  extérieures.  Dépourvus  ainsi  de  toute  connois- 
sance,  ils  le  sont  de  toute  liberté;  car  c'est  par  l'acte  seyl 
qui  nous  apprend  à  nous  counoitre  ,  que  nous  apprenons  à 
vouloir  librement. 

C'est  principalement  à  la  privation  du  sens  intime  de  cette 
qualité  précieuse  qu'il  faut  attribuer  l'infériorité  des  animaux 
à  l'égard  de  l'homme;  car,  leur  accordàt-on  toutes  les  autres 
facultés  que  nous  reconnoissons  en  nous,  ils  seroient  encore 
loin  de  nous  égaler.  Tout  chez  eux,  dans  ce  cas -là  même, 
n'auroit  lieu  que  fortuitement;  les  phénomènes  ne  se  présen- 
teroient  encore  à  eux  qu'au  hasard  :  ils  ne  pourroient  ni  en 
faire  un  choix,  ni  les  réunir,  ni  les  accumuler,  ni  les  classer 
de  manière  que  leurs  facultés  pussent  en  tirer  ces  rapports 
nombreux  et  variés  que  nous  parvenons  à  en  obtenir  ;  et 
il  résulteroit  encore  de  là  cet  autre  caractère,  propre  à 
distinguer  les  actions  instinctives  de  toutes  les  autres,  que 
toutes  celles  qui  supposeroient  la  réflexion  seroient  des 
actions  de  ce  genre. 

Je  sais  que  plusieurs  auteurs,  et  principalement  Condillac, 
ont  pensé  que  les  animairx  réfléchissent  ;  mais  ils  n'ont  pu  faire 
reposer  cette  opinion  que  sur  leurs  actions  invariables,  que 
nous  avons  dû  regarder  comme  instinctives.  Et  comment  la 
faculté  la  plus  indépendante ,  celle  d'où  toute  liberté  découle , 
seroit-elle  exclusivement  enchaînée  dans  des  actions  néces- 
saires? 11  seroit  contradictoire  de  l'admettre.  Si  les  provi- 
sions que  nous  voyons  faire  au  chien  étoient  l'effet  d'une 
véritable  connoissance ,  c'est-à-dire,  si  la  réflexion  lui  avoit 
appris  tout  ce  qu'il  auroit  fallu  qu'il  sût ,  et  ce  qu'il  ne  pou- 
voit  e"Videmment  savoir  sans  elle ,  pour  prévoir  et  pour  agir  en 


538  IIS^S 

conséquence  ,  îl  ne  se  serolt  pas  borné  à  faire  des  provisions  de 
bouche,  il  en  auroit  fait  pour  s'abriter,  pour  se  coucher, 
en  un  mot,  pour  tous  ses  besoins;  et  nous  pouvons  appliquer 
ce  raisonnement  à  tous  les  animaux  pourvus  d'instinct,  et 
formés  de  manière  à  produire  ces  actions  isolées  dont  l'exis- 
tence ne  peut  être  conçue  par  nous  qu'autant  que  nous  con- 
sidérons la  perception  du  moi  et  la  réflexion  comme  en  étant 
les  causes. 

D'autres  psychologlstes ,  ayant  remarqué  que  la  force  de 
réflexion  étoit  ordinairement  proportionnée  à  l'intensité  des 
idées,  et  que  celles-ci  avoient  d'autant  plus  d'empire,  sur 
l'esprit  que  nous  avons  plus  de  disposition  à  les  acquérir,  en 
avoient  conclu  que  cette  faculté  étoit  constamment  dépen- 
dante de  chaque  dispositioh  ,  de  chaque  penchant,  et  que, 
si  les  animaux  ne  la  manifestent  que  dans  quelques  cas  seule- 
ment, c'est  que  leurs  penchans  sont  en  petit  nombre.  Mais 
cette  explication  ne  concorde  pas  plus  que  la  précédente  avec 
les  faits,  et  surtout  avec  ce  caractère  de  liberté  qui  distingue 
le  sens  intime  de  toutes  nos  autres  facultés.  En  effet,  son  pre- 
mier acte  nous  apprend  notre  puissance  sur  nous-mêmes,  et 
c'est  dans  cette  puissance  seule  que  nous  trouvons  un  témoi- 
gnage de  notre  liberté.  Lorsque  nous  avons  besoin  d'une  image, 
d'un  souvenir,  d'un  jugement,  ils  se  présentent,  ou  non,  sui- 
vant la  disposition  de  nos  organes,  et  s'ils  naissent,  c'est, 
comme  on  sait,  toujours  spontanément  et  d'eux-mêmes,  dans 
le  cas  où  nous  les  appelons'  avec  le  plus  d'ardeur,  comme 
dans  celui  où  ils  se  présentent  sans  que  nous  les  sollicitions. 
La  réflexion  .  au  contraire,  lorsqu'elle  s'est  une  fois  manifestée, 
qu'elle  nous  a  une  fois  révélés  à  nous-mêmes,  reparoit  dès  que 
nous  réclamons  son  secours,  dès  que  nous  voulons  qu'elle  de- 
vienne active  ;  nous  ne  pouvons  pas  nous  séparer  de  notre  moi, 
et  vouloir  la  réflexion,  c'est  réfléchir.  Il  suit  de  là  que  les  ani- 
maux exerceroient  cette  faculté,  s'ils  la  possédoient,  dans  leurs 
penchans  les  plus  foibîes ,  comme  dans  leurs  besoins  les  plus 
pressans,  dès  qu'elle  pourroit  les  servir;  et  les  faits  nous 
prouvent  qu'ils  n'en  agissent  point  ainsi.  Il  est  bien  certain 

i  Je  n'emploie  pas  le  mot  de  volonté,  parce  qu'il  est  inséparable 
de  l'idée  de  liberté  pour  la  plupart  des  esprits. . 


»  INS  •        55o 

que,  pour  fous  les  animaux  iiidistincfcir.enf ,  le  besoin  de 
nourriture  est  le  plus  puissant  sur  les  individus,  et  qu'il  est 
bien  plus  important  pour  leur  existence,  pour  leur  moi,  de 
le  satisfaire,  que  de  satisfaire  le  besoin  de  s'abriter;  et  nous 
voyons  cependant  beaucoup  d'animaux  se  creuser  des  ter- 
riers, c'est-à-dire,  paroître  prévoir  la  nécessité  d'un  abri,  et 
ne  pas  prévoir,  lorsqu'elle  devra  se  faire  le  plus  vivement 
sentir,  la  nécessité  d'une  provision  d'alimens. 

Toutes  les  autres  tentatives  qui  ont  eu  pour  objet  d'expli- 
quer d'une  manière  générale,  et  sans  admettre  de  faculté 
particulière,  les  actions  des  animaux,  n'ont  pas  été  plus 
heureuses;  et  on  pourroit  en  dire  autant  des  explications 
qui  ont  été  données  des  actions  instinctives  en  particulier. 

Pour  éviter  les  contradictions  que  nous  venons  de  faire 
remarquer,  des  philosophes  ont  pensé  que  les  actions  de  ce 
dernier  genre  dcpendoient  d'une  forme  particulière  du  cer- 
veau, et  n'étoient  en  quelque  sorte  qne  des  actions  méca- 
niques. Renfern;f!c  dans  ces  simples  termes ,  cette  théorie 
scroit  plus  difficile  à  admettre  encore  que  les  précédentes, 
et  ne  tireroit  d'un  embarras  que  pour  plonger  dans  un  autre: 
car  qr'est-ce  que  cette  forme,  et  sur  quelle  analogie  porte- 
t-clle  ?  Elle  suppose  un  genre  de  preuves  qu'on  n'a  point 
encore  données.  Sans  doute  on  trouvera  dans  la  struc- 
ture du  cerveau  des  animaux  des  formes  qui  se  lieront  avec 
leurs  facultés  intellectuelles  ;  mais,  si  cette  idée  repose  sur 
des  vraisemblances  très-fortes,  aucune  expérience  ne  la  dé- 
montre encore  ;  et  l'extrême  difficulté  d"un  tel  travail  le 
rendra  peut-être  long-temps  encore  impossible.  Si  quelques- 
unes  de  nos  idées  qui  paroissent  ùtre  complexes  n'ont  point 
encore  été  analysées  ,  si  on  n'en  a  point  encore  démontré 
l'origine  et  séparé  les  élémens,  on  n'a  pas  démontré  non 
plus  l'impossibilité  de  cette  analyse  ;  et  on  ne  peut  faire 
reposer  une  théorie  de  la  nature  de  celle  qui  nous  occupe, 
sur  des  analogies  négatives,  sur  des  suppositions  que,  d'un 
moment  à  l'autre,   on  peut  voir  détruire. 

Il  est  un  ordre  de  phénomènes  différens  des  précédens, 
dans  lequel  on  pourroit,  avec  plus  de  fondement  et  en 
s'appuyant  sur  des  analogies  plus  sûres,  trouver  une  expli- 
cation aux  actions  instinctives  :  ce  sont  les  phénomènes  de 


540  IiyS 

l'habitude.  Nous  en  avons  dit  un  mot  au  commencement  de 
cet  article  ,  et  auparavant  nous  en  avions  parlé  d'une  manière 
plus  spéciale  dans  le  tome  XI  des  Annales  du  Muséum  d'histoire 
naturelle,  en  donnant  la  description  du  chien  des  habitans 
de  la  Nouvelle-Hollande.  L'habitude  d'une  action  consiste  en 
ce  que  l'acte  corporel  se  reproduit  sans  qu'il  y  ait  effort  et 
qu'on  ait  conscience  de  l'acte  intellectuel  qui  en  a  été  la 
cause  primitive.  Il  semble  qu'il  s'établisse  alors  entre  les  or- 
ganes et  les  besoins  naturels,  les  appétits,  lespenchans,  les 
idées,  etc.  (qui,  dans  l'origine,  avoient  mis  l'intelligence  en 
mouvement  pour  qu'à  son  tour  elle  fit  agir  les  membres), 
une  dépendance  immédiate  telle  que  l'intermédiaire  de 
l'esprit  n'est  plus  nécessaire  pour  que  les  actions  se  pro- 
duisent. Dans  ce  cas  ces  actions  ne  paroissent  plus  se  com- 
poser d'actes  intellectuels  et  d'actes  corporels,  mais  seule- 
ment de  ces  derniers,  et  des  différentes  modifications  de 
nous-mêmes  qui  sont  de  nature  à  mettre  en  activité  notre 
intelligence  '  et  par  suite  nos  organes.  Px'esque  toutes  nos 
actions  peuvent  prendre  ce  caractère  de  l'habitude ,  et  le 
plus  simple  examen  de  nous-mêmes  suffit  poumons  en  donner 
une  foule  de  preuves.  Or,  si  cette  espèce  de  dépendance 
pouvoit  exister  naturellement  entre  les  besoins  et  les  organes, 
les  phénomènes  de  l'instinct  trouvcroient  une  explication 
facile  :  la  nature  auroit  primitivement  établi  cette  relation 
entre  eux;  et,  en  effet,  nous  la  découvrons  en  nous-mêmes, 
pour  les  actions  compliquées  comme  pour  les  actions  simples. 
Nous  n'avons  pas  plus  besoin  du  secours  de  la  pensée  que 
les  animaux  pour  nous  arrêter,  reculer  ou  fuir  à  la  vue  d'un 
objet  nouveau  qui  nous  effraie.  I,e  sentiment  de  la  peur 
suspend  dans  ce  cas  le  mouvement  des  muscles  ou  les  excite, 
sans  que  l'intelligence  paroisse  y  prendre  la  moindre  part. 
Et  tout  ne  semble-t-il  pas  être  organique  dans  l'exercice  de 
la  lecture,  dans  celui  des  armes,  dans  le  mouvement  des 
doigts  sur  un  instrument  de  musique  ?  Nous  reconnoissons 
les    caractères     et    articulons   les   sons    qu'ils   représentent  , 


1  Je  n'ai  pas  besoin  de  faire  remarquer  que  je  n'envisage  ici  que  la 
succession  naturelle  des  faits,  et  que  je  ne  m'occupe  ni  de  leur  cause  ni 
du  principe  général  de  l'activité. 


*  INS  541 

quoique  notre  esprit  soit  entièrement  préoccupé  par  le  sens 
de  ce  que  nous  lisons  :  le  maître  d'armes  suit  de  son  fleuret 
le  fleuret  de  son  adversaire ,  sans  qu'aucune  pensée  vienne 
contribuer  à  ses  rapides  mouvemens  :  le  pianiste  parcourt 
des  deux  mains  son  clavier  dans  tous  les  sens  et  suivant 
toutes  les  combinaisons  que  les  dix  doigts  peuvent  former, 
malgré  l'attention  exclusive  qu'il  donne  aux  notes  placées 
sous  ses  yeux  et  qu'il  fait  rendre  à  son  instrument.  Tous 
ces  exercices,  comme  toutes  les  pratiques  de  l'industrie, 
sont  même  d'autant  plus  parfaits  que  la  pensée  leur  est 
devenue  plus  étrangère  ;  tant  qu'elle  leur  est  encore  né- 
cessaire ,  on  les  possède  mal  ,  et  en  ce  point  c'est  vérita- 
Llement  en  se  rapprochant  des  animaux  qu'on  se  perfec- 
tionne. Il  n'y  a  rien  d'absolument  diff'érent  dans  ce  que  pro- 
duit l'instinct,  et  la  comparaison  du  tisserand  et  de  l'araignée 
est  bien  plus  exacte  et  plus  juste  qu'on  ne  l'a  pu  penser.  Ces 
deux  ordres  de  phénomènes  pourroient  même  tellement  se 
confondre,  qu'on  feroit  en  quelque  sorte  de  l'instinct  avec 
de  l'habitude,  si  ce  n'est  de  l'habitude  avec  de  l'instinct: 
une  personne  qui  seroit  exercée  ,  dès  son  enfance,  à  ramasser 
et  à  cacher  tout  ce  qui  lui  reste  de  ses  repas,  finiroit  par  le 
faire  aussi  machinalement  et  aussi  inutilement  que  le  chien 
domestique. 

Les  principes  de  psychologie  qui  sont  professés  dans  nos 
écoles,  ne  sont  point  contraires  aux  idées  que  nous  venons 
d'exposer.  On  a  toujours  distingué  en  philosophie  deux  or- 
dres de  phénomènes  ,  ceux  de  l'intelligence  et  ceux  de  l'ac- 
tivité; d'où  l'on  admettoit  implicitement  deux  systèmes  d'or- 
ganes, sièges  de  ces  phénomènes.  L'intelligence,  c'est-à-dire, 
les  perceptions  et  les  idées  de  toute  nature,  agissant  d'une 
manière  quelconque  sur  l'activité  ,  déterminoient  la  volonté, 
et  les  actions  se  produisoient.  Malheureusement  on  a  obscurci 
cette  idée,  d'ailJeurs  très- claire,  en  séparant  des  puissances 
propres  à  agir  à  la  manière  des  pensées,  pour  les  réunir  au 
système  de  l'activité:  puissances  d'un  ordre  très- particu- 
lier, il  est  vrai ,  mais  qui  ne  sont  pas  moins  que  les  premières 
des  causes  d'actions.  Je  veux  parler  des  sentimens,  des  be- 
soins, des  passions,  dont  le  siège  doit  être  aussi  distinct  de 
celui  j^es  pensées  que  ce  dernier  l'est  du  siège  de  la  volonté. 


542  INS  " 

D'après  ce  que  nous  avons  dit,  ce  seroit  sinon  dans  îe  prin- 
cipe, du  moins  dans  les  organes  de  l'activité,  que  résideroient 
les  facultés  instinctives;  et  les  phénomènes  de  Ihabitude, 
considérés  sous  ce  point  de  vue,  s'expliquant  très-naturelie- 
ment,  présenteroient  un  nouveau  genre  de  preuves  aux  idées 
que  nous  avons  émises  dans  cet  article.  En  effet,  on  conçoit 
que  l'impression  fréquente  de  l'intelligence  ou  de  toute  autre 
cause  sur  l'activité,  ou  plutôt  sur  l'organe  qui  en  est  le  siège  , 
doit  s'approfondir  par  l'influence  répétée  de  Tune  et  par 
l'exercice  de  l'autre,  et  finir  par  devenir  ainsi  une  forme 
nécessaire  d'action,  comme  les  actions  instinctives  sont  le 
résultat  d'une  forme  nécessaire,  mais  d'une  forme  qui,  au 
lieu  d'être  acquise,  est  primitive  et  essentielle  à  la  nature 
des  êtres  qui  présentent  ces  actions.  En  rapportant  un  exemple 
à  l'appui  de  cette  explication,  nous  la  rendrons  encore  plus 
sensible.  Lorsqu'un  homme  ,  après  avoir  bien  conçu  et  bien 
gravé  dans  sa  mémoire  les  principes  de  l'équitation,  essaie 
pour  la  première  fois  d'exercer  cet  art,  aucun  de  ses  mou- 
vemens,  arcjnc  de  ses  attitudes,  malgré  sa  science,  ne 
sont  ce  qu'ils  doivent  être  -.  son  corps  se  porte  en  avant  ou  en 
arrière,  tandis  qu'il  devroit  rester  dans  une  situation  verti- 
cale ;  ses  jambes  se  remuent  quand  elles  devroient  être  im- 
mobiles ;  les  mcuvemens  de  sa  main  ne  sont  point  en  accord 
avec  ceux  de  ses  pieds  ;  en  un  mot,  aucune  harmonie  n'existe 
entre  lui  et  son  cheval.  D'abord  ,  ce  n'est  que  par  une  grande 
contention  d'esprit  qu'il  parvient  à  faire  un  des  mouvemens 
prescrits  dans  un  cas  donné ,  puis  un  autî"e  qui  soit  en 
accord  avec  le  premier,  et  enfin  à  exécuter  tous  ceux  que 
l'art  commande  ;  et  ce  que  je  dis  pour  ce  cas  particulier,  ]e 
pourrois  le  dire  pour  tous  les  autres.  Petit  à  petit  le  même 
effort  d'esprit  devient  de  moins  en  moins  nécessaire  ;  les 
mouvemens  qui  se  fuisoient  avec  le  plus  de  difficultés  et  le 
plus  lentement,  se  font  avec  aisance  et  promptitude,  et  cela 
dès  que  l'esprit  le  juge  nécessaire;  enfin,  après  un  exercice 
plus  ou  moins  long,  l'intelligence  ne  prend  plus  aucune 
part  à  la  pratique  de  cet  art  :  tout  ce  qu'il  exige,  se  fait  en 
quelque  sorte  de  soi-même.  Si  le  cheval  fait  un  mouvement 
contraire  à  celui  dont  on  lui  avoit  donné  le  signe,  c'est  ce 
xaouveiiient  seul .   ou  plutôt   celui  qu'il  communique  à  sof« 


•  •  INS  •     543 

cavalier ,  qui  appelle  de  la  part  de  celui-ci  le  mouvement 
qui  le  redressera,  et  cela  instantanément,  avec  la  prompti- 
tude de  la  paupière  qui  se  ferme  pour  garantir  l'œil ,  ou  de 
la  tète  qui  se  détourne  pour  éviter  un  coup  :  dès-lors  tous 
ces  principes  raisonnes  par  lesquels  nous  avons  vu  commencer 
l'exemple  que  nous  venons  de  détailler,  sont  transformés  en 
desimpies  associations  de  mouvemeus,  en  un  pur  mécanisme. 

Presque  toutes  nos  actions  peuvent  prendre  ce  caractère; 
aussi  rencontrons-nous  tous  les  degrés  par  lesquels  l'hommepeut 
passer  en  ce  genre  de  moditicalion ,  lorsque  nous  parcourons 
les  différentes  classes  dont  se  compose  une  nation  et  l'ensemble 
ou  la  succession  des  divers  peuples,  comme  nous  trouvons  tous 
les  degrés  de  l'instinct ,  lorsque  nous  parcourons  l'ensemble 
des  animaux.  Il  n''y  auroit  même  rien  de  trop  fort  à  supposer 
des  hommes  réduits  à  un  tel  état  d'abrutissement,  qu'ils 
fussent  incapables  d'exercer  aucune  des  facultés  libres  de  leur 
intelligence;  et  je  ne  serois  point  étonné  qu'on  en  eût  trouvé 
de  semblables  autrefois  chez  les  Egyptiens,  et  qu'aujourd'hui 
il  ne  s'en  rencontrât  encore  de  tels  chez  les  Chinois  et  chez  les 
Indiens.  Cependant  la  différence  entre  ces  hommes  dégradés 
et  les  animaux  seroit  encore  immense.  Ceux-ci  sont  condaznnés 
à  rester  éternellement  soumis  à  l'influence  fortuite  des  cir- 
constances; nous,  au  contraire,  qui  sommes  susceptibles  d'ap- 
précier et  de  connoitre  ces  circonstances,  nous  pouvons  exer- 
cer sur  elles  une  autorité  puissante  :  d'où  il  suit  que  l'homiue 
seul  est  susceptible  d'une  éducation  véritable. 

L'exercice  peut  développer  les  facultés  des  animaux;  en. 
peut  leur  faire  contracter  des  habitudes  profondes,  et,  par 
le  secours  de  l'homme,  renforcer  ou  affoiblir  les  penchant 
qui  lui  seroient  utiles  ou  nuisibles. 

L'espèce  humaine,  exclusivement  à  toute  autre,  a  la  fa- 
cullé  d'être  éclairée  ,  d'acquérir  des  idées  pures  ,  de  s'en  faire 
le  type  du  juste ,  du  beau ,  du  vrai ,  et  de  travailler  à  son 
perfectionnement  :  c'est  là  son  véritable  apanage ,  et  c'est  à  la 
faculté  de  se  connoître  et  à  la  réflexion  qu'elle  en  est  redevable. 
C'est  donc  cette  faculté  qui  doit  faire  le  principal  objet  de 
nos  soins  e!  le  but  de  nos  efforts  dans  la  culture  de  I0U3 
les  autres.  C'est  par  la  réilexion,  en  effet,  que  celles-ci  se 
fortifient ,    s'élèvent ,    s'agrandissent ,    quoiqu'elles  scient  le 


544     '  INT  '' 

partage  des  animaux,  comme  le  nôtre.  Ainsi,  l'instrument  le 
plus  méprisable  s'ennoblit  suivant  la  main  qui  le  dirige,  et  la 
fin  pour  laquelle  on  l'emploie.  (F.  C.  ) 

INTELLIGENCE.  Voyez  Instinct. 

INTERMÈDE.  [Chim.)  Un  intermède  étoit ,  pour  les  an- 
ciens chimistes,  i."  un  corps  au  moyen  duquel  on  pouvoit 
séparer  un  autre  corps  d'un  troisième  auquel  il  étoit  uni; 
tel  étoit  l'acide  sulfurique  ,  au  moyen  duquel  on  sépare 
l'acide  nitrique  du  nitrate  de  potasse  ;  2.°  un  corps  qui  ser- 
voit  à  opérer  la  combinaison  d'un  second  corps  avec  un 
troisième,  auquel  ce  second  corps,  à  l'état  de  liberté  ,  ne  se 
seroit  pas  uni.  Ainsi  la  potasse  étoit  un  intermède  par  le- 
quel l'huile,  qui,  à  l'état  de  pureté,  est  insoluble  dans  l'eau, 
devient  susceptible  de  s'y  dissoudre  lorsqu'elle  est  unie  à  cet 
alcali.  (  Ch.) 

INTERMÉDIAIRES  [Stipules],  {Bot.)-,  naissant  sur  la  tige 
entre  des  feuilles  opposées.  On  en  a  des  exemples  dans  le 
café,  le  gardénia,  etc.  Ces  stipules,  dans  les  rubiacées,  for- 
ment verticille  avec  les  feuilles,  et  semblent  n'être  que  des 
feuilles  avortées.  (Mass.) 

INTERNE  [Bouton,  Gemma].  {Bot.)  Au  lieu  de  faire  saillie 
à  l'extérieur  dès  qu'il  commence  à  se  former,  il  reste  caché 
sous  Técorce  jusqu'à  l'époque  du  bourgeonnement  :  tels  sont 
ceux  de  l'acacia,  du  sumac,  etc.  (Mass.) 

INTERPOSITIVES  [Cloisons].  {Bot.)  M.  Mirbel  nomme 
ainsi  les  cloisons  placentériennes  qui ,  partant,  en  divergeant, 
de  l'axe  central  d'un  péricarpe  multivalve,  vont  chacune 
s'unir  à  Tune  des  sutures,  en  sorte  qu'elles  alternent  avec 
les  valves  :  on  en  a  des  exemples  dans  le  convoL'ulus ,  le  do- 
donœa,  etc.  Au  contraire,  les  cloisons  placentéi-iennes  sont 
dites  oppositives  (î^aZv/s  contraria) ,  lorsqu'elles  rencontrent, 
par  leur  bord  ,  le  milieu  des  valves  .-  on  en  a  un  exemple 
dans  le   paullinia  pinnata.   (Mass.) 

INTERPRÈTE.  {Omith.)  L'oiseau  auquel  Linnseus  a  donné 
cette  épithète  ,  est  le  tourne-pierre  ou  coulon  chaud  ,  tringa 
interpres.  (Ch.  D.) 

INTERROMPU  [Épi],  {Bot.),  composé  de  ileurs  disposées 
sur  Taxe  en  groupes  qui  ne  se  touchent  point  :  tel  est  l'épi 
de  la  lavande,  du  bananier,  etc.  (Mass.) 


»  •  INT  •     64S 

INTERRUPTÉ- PENNÉE  [Feuille],  (Bot,)-,  pennée  avec 
interruption,  c'est-à-dire,  pennée  avec  des  folioles  alterna- 
tivement grandes  et  petites  ;  telles  sont  les  feuilles  de  là 
pomme  de  terre,  de  l'aigremoine,  de  la  reine  des  prés,  etc. 
(Mass.) 

INTESTINAUX.  (Entomoz.)  Dénomination  que  l'on  em- 
ploie quelquefois  seule  pour  désigner  les  animaux  qui  vivent 
dans  l'intérieur  des  autres,  que  M.  Rudolphi  a  appelés  erz-fo- 
zoaires,  et  dont  nous  donnerons  l'histoire  générale  à  l'article 
Vers  intestinaux.  Voyez  ce  mot.  (De  B. ) 

INTESTINS.  (Anat.)  Voyez  Tube  intestinal-  (F.  C.) 

INTORSION.  {Bot.)  Beaucoup  de  plantes  grimpantes  n'ont 
ni  vrilles ,  ni  griffes;  mais  elles  roulent  leurs  tiges  flexibles 
autour  des  végétaux  voisins  ,  et  s'élèvent  en  les  serrant  étroi- 
tement. Linnaeus  a  donné  à  ce  phénomène  le  nom  d'intor- 
sion.  Dans  certaines  espèces  (  haricot ,  liseron),  les  circonvo- 
lutions de  la  tige  vont  toujours  de  droite  à  gauche  :  dans 
d'autres  (houblon,  chèvre -feuille),  elles  vont  toujours  de 
gauche  à  droite.  Si  on  roule  ces  plantes  dans  la  directioa 
qui  ne  leur  est  pas  naturelle,  elles  languissent  comme  des 
animaux  contrariés  dans  leurs  habitudes;  aussitôt  qu'on  leur 
rend  la  liberté,  elles  rebroussent  chemin  pour  reprendre  la 
direction  qui  leur  est  propre.  (Mass.) 

INTOUM.  (Bot.)  Plante  corymbifère  des  Antilles,  rangée 
avec  doute  par  Jacquin  dans  le  genre  Bellis,  et  nommée  avec 
raison  par  Linnaeus  edrpta  punctata.  Jacquin  ditqu'on  peuten 
extraire  un  suc  vert  qui  noircit  à  l'air,  et  qu'on  pourroit, 
en  fixant  cette  couleur  par  quelque  moyen,  remployer  pour 
les  teintures  noires  et  pour  faire  de  l'encre.  II  ajoute  qu'un 
esclave ,  originaire  de  la  Guinée ,  lui  avoit  assuré  que  ,  dans 
son  pays,  où  cette  plante  étoit  nommée  intoum ,  on  l'em- 
ployoit  à  Fextérieur  pour  augmenter  la  couleur  noire  de  la 
peau.  (J.) 

INTRAFOLIÉE  [Hampe].  {Bot.)  Il  y  a  des  hampes  qui  nais- 
sent d'un  autre  point  que  les  feuilles  {convallavia  majaUs , 
etc.);  mais  ordinairement  elles  naissent  entre  les  feuilles 
radicales  (  pissenlit ,  bellis  perennis  ,  etc.  ).  (  Mass.  ) 

INTRANSMUTABLES.  {Entom.)  Ce  nom,  qui  est  tiré  du 
latin ,  signifie  qui  ne  subissent  pa$  de  transformation  ou  de  mé- 
ili  •  35 


546     '  îNt 

tamorpliose,  et  il  a  été  donné  par  John  Rai  aux  insectes  qui 
ne  changent  pas  de  formes,  comme  les  araignées,  les  pous, 
les  cloportes,  par  opposition  à  la  plupart  des  insectes  ailés, 
qui  étoient  appelés  transmûtables.  (  C.  D.) 

INTRICARIE.  (Foss.)  M.  de  Gerville  ,  auquel  on  doit  déjà 
la  connoissance  d'une  très -grande  quantité  de  corps  organisés 
fossiles  des  départemens  de  la  Manche  et  du  Calvados,  a 
trouvé  à  Saint-lloxcl  près  de  Bayeux  un  polypier  fragile, 
dégagé  de  toute  gangue  et  d'un  genre  nouveau.  Ce  corps j 
dont  la  grandeur  est  inconnue,  étoit  déposé  à  quatre  pieds  au^ 
dessous  de  la  surface  du  sol,  dans  une  cavité  qui  contenoit 
tine  sorte  d'ocre  ferrugineuse  en  poussière.  Les  couches  des 
environs  étant  du  calcaire  à  oolites,  et  celles  qui  se  trouvent 
à  quelques  pieds  au-dessous  du  lieli  oii  étoit  ce  polypier 
étant  une  argile  ancienne ,  grise  et  dure ,  dans  laquelle  oii 
trouve  de  grandes  coquilles  bivalves,  auxquelles  M.  Sowerby 
a  donné  le  nom  de  plagiostoma  gigantea,  il  y  a  tout  lieu  de 
croire  que  ce  polypier  dépend  d'une  couche  plus  ancienne 
que  la  craie  :  tous  les  corps  que  l'on  trouve  fossiles  aux  en- 
virons étant  entourés  de  gangue  dure,  il  est  très- étonnant 
que  ce  polypier  se  soit  trouvé  libre  et  dégagé  de  toute 
pétrification. 

Je  propose  d'en  former,  sous  le  nom  d'Intricarie ,  un  genre! 
nouveau  dont  voici  les  caractères  :  Polypier  pierreux,  solide 
intérieurement,  à  expansions  composées  de  rameaux  cylindriques 
aimstomosés  en  filets;  cellules  des  polypes  hexagones,  alongéesi 
à  bords  relevés  et  couvrant  toute  la  surface  des  rameaux. 

Les  débris  de  la  seule  espèce  que  je  connoisse  ,  à  laquelle! 
J'ai  donné  le  nom  d'intricaire  de  Bayeux  ,  mfrfcarm  bajocensiSf 
ont  plus  d'un  pouce  de  longueur,  sur  neuf  lignes  de  diamè- 
tre ,  et  sont  composés  de  rameaux  anastomosés  en  dillérens 
sens  et  imitant  des  mailles  irrégulières  d'un  filet  qui  ont 
d'une  à  cinq  lignes  d'ouverture.  Ces  rameaux  ont  environ 
une  demi -ligne  de  diaujétre  et  sont  couverts  de  cellules 
qui  sont  moitié  plus  longues  que  larges.  Leurs  bords  relevés 
forment  une  sorte  d'écorce  raboteuse  qui  les  recouvre. 

On  voit  la  figure  de  ce  polypier  dans  l'atlas  de  ce  Diction- 
naire. (D.  F.) 

IISTRIT.  {Min.)  M.  Pinkerton  a  donné  ce  nom  aux  roches 


mr  *   547, 

mélangées  dans  lesquelles  une  espèce  minérale  est  cimentée 
avec  d'autres  par  une  pâte.  (B,) 

INTSI.  (  Bot.  )  Genre  indiqué  par  M.  du  Petit -ThouarSr 
{Geti.  noi'.  Madag.,  pag,  22  )  pour  une  plante  de  l'ile  de 
Madagascar  ,  de  la  famille  des  légumineuses ,  die  Vennéandrie 
monogjnie  de  Linnœus  ,  qui  se  rapproche  des  guilandina  par 
son  fruit;  des  amorpha,  par  sa  corolle;  des  tamarindus,  par 
ses  étamines. 

C'est  un  grand  arbre,  dont  les  feuilles  sont  ailées ,  com- 
posées de  cinq  folioles;  les  fleurs  disposées  en  corymbe.  Leur 
calice  est  campanule  à  sa  base,  partagé  en  quatre  lobes  à 
son  limbe;  la  corolle  composée  d'un  seul  pétale  onguiculé, 
opposé  à  l'ovaire;  les  étamines  au  nombre  de  neuf;  les  fila- 
mens  inégaux,  dont  trois  sont  seuls  fertiles,  inclinés  et  pluâ 
longs;  l'ovaire  supérieur,  surmonté  d'un  style  et  d'un  stigmate- 
Le  fruit  consiste  en  une  gousse  oblongue,  comprimée,  renfer- 
mant trois  à  quatre  semences  aloagées,  dont  l'intervalle  est 
rempli  de  moelle. 

Cette  plante  se  rapproche  beaucoup  du  cain  heàsi,  seu  me- 
trosideros  amboinensis,  Rumph  ,  Amh.,  3,  pag.  21  ,  tab.  10, 
(PoiR.) 

INTSIA.  {Bot.)  Nom  malabare,  cité  par  Rhéede,  d'ua 
acacie,  acacia  intsîa,  rangé  dans  la  section  des  espèces  épi- 
neuses à  feuilles  bipennées.  Il  ne  faut  pas  le  confondre  avec 
Vintsi  de  Madagascar,  genre  nouveau  de  légumineuses  ,  établt 
par  M.  du  Petit-Thouars  sous  le  même  nom  intsia.  Voyez  ci- 
dessus.  (J.) 

INTSJIN  [Bot.),  nom  japonoîs,  cité  par  Kœmpfcr,  d'une 
aurone,  qui  est  Yartemisia  capiUaris  de  M.  Thunberg.  (J.) 

IN-ïSTA.  {Bot.)  Kœmpfer  cite  ce  nom  japonois  pour  une 
plante  laiteuse,  rampante,  à  feuilles  de  nummulaire,  tapis'^ 
sant  les  rochers;  et  qu'il  prend  pour  un  lierre.  M.  Thunberg 
croit  que  c'est  plutôt  un  figuier  ,  ce  qui  est  probable,  si  elle 
a  des  stipules,  comme  il  le  dit  ;  et  alors  on  peut  la  rapprocher 
Au  ficus  scandens  de  M.  de  Lamarck,  qui  est  vivant  au  jardin 
du  Roi.    (J.) 

IînTURIS  {Bot.),  nom  substitué  par  Gaza  au  nom  grec 
capparis,  suivant  C.   Bauhin,  pour  désigner  le  câprier.  (J.) 

INTYÇELLIE,  IntjbeUia.  {Bot.)  [Chicoracées ,  /uss.  ~  Sjn^ 


54S    '  INT  ' 

^énésie  polygamie  égale ,  Linn.]  Ce  genre  de  phintes,  que  nous 
avons  proposé  dans  le  Bulletin  des  sciences  de  1821,  p.  124, 
appartient  à  l'ordre  des  synanthérécs ,  et  à  la  tribu  naturelle 
des  laclucées,  dans  laquelle  nous  le  plaçons  immédiatement 
auprès  de  notre  genre  Pterotheca.  Voici  ses  caractères. 

Calathide  incouronnée,  radiatiforme,  multiflore,  fissiflore, 
androgyniflore.  Péricline  subcampanulé  ,  très- inférieur  aux 
Heurs  extérieures;  iformé  de  squames  égales,  unisériées ,  ap- 
pliquées, oblongues,  coriaces -foliacées  ,  membraneuses  sur 
les  bords,  accompagnées  à  la  base  de  squamules  surnuméraires 
nombreuses,  très  -  inégales  ,  irrégulièrement  imbriquées,  ap- 
pliquées. Clinanthe  plan,  garni  de  fimbrilles  très-longues, 
inégales,  laminées  inférieurement,  filiformes  supérieurement. 
ÎFruits  oblongs,  cylindracés,  striés,  glabres;  aigrette  blanche, 
composée  de  squamellules  nombreuses,  inégales,  filiformes, 
capillaires,  à  peine  barbellulées.  Corolles  pourvues  de  poils 
longs,  fins,  flexueux ,  comme  frisés,  occupant  la  partie  su- 
périeure du  tube  et  la  partie  inférieure  du  limbe. 

Intybeluerose;  latyhellia  rosea,  H.  Cass.,  Bull,  des  se.  1821  , 
p.  124*  C'est  une  plante  herbacée,  dont  les  tiges  sont  scapi- 
Formes  ^  hautes  d'environ  un  pied  et  demi ,  dressées  oblique- 
ment ou  inclinées,  cylindriques,  àpeine  pubescentes,  un  peu 
ramifiées  ,  pourvues  d'une  feuille  courte  à  la  base  du  rameau 
ïe  plus  inférieur,  et  d'une  bractée  squamiforme  à  la  base  de 
chacun  des  autres  rameaux.  Les  feuilles  radicales  sont  nom- 
breuses, étalées,  longues  de  six  pouces,  larges  d'un  pouce  et 
demi,  un  peu  charnues,  d'un  vert  glauque  ou  cendré,  cou-' 
"vertes  dans  leur  jeunesse  d'un  duvet  blanchâtre  de  poils  frisés, 
glabriuscules  dans  l'âge  adulte  ;  leur  partie  inférieure  est  pétio- 
liforme;  la  supérieure  est  oblongue,  comme  lyrée  ,  divisée 
profondément  sur  les  deux  côtés  en  lobes,  dont  les  supérieurs 
surtout  sont  divariqués,  ondulés,  sinués,  inégalement  et  irré- 
gulièrement découpés  en  dents  aiguës.  Les  calathides,  larges 
d'environ  un  pouce  et  composées  de  fleurs  roses,  sont  soli- 
taires au  sommet  de  la  lige  et  de  ses  rameaux  nus  et  pédon- 
culiformes  •  leur  péricline  est  pubescent. 

Nous  avons  observé  les  caractères  génériques  et  spécifiques 
qu'ion  Aàent  de  lire,  sur  quelques  individus  vivans,  cultivés 
au  Jardin  du  Roi ,  oii  ils  ileurissoient  au  mois  d'Août.  JNoii« 
àguorons  leur  originct 


mu  •   549 

On  pourroit  décrire  assez  exactement  cette  plante ,  en  di-. 
sant  qu'elle  a  la  tige  du  leonlodon  autumnale ,  les  feuilles  de 
Vhjoseris  radiata,  le  péricline,  le  fruit  et  l'aigrette  des  crépis, 
le  clinanthe  des  andrjala,  les  corolles  du  barkhausia  ruhra. 
Mais  ses  rapports  naturels  et  essentiels  la  rapprochent  da- 
vantage des  crépis,  et  surtout  du  crépis  nemausensis  de  Gouan, 
dont  nous  avons  fait,  en  1816,  un  genre  distinct,  sous  le 
nom  de  pterotlieca. 

Le  genre  Inijbellia  diffère  du  genre  Pterotlieca  ,  en  ce  que 
tous  les  fruits  de  la  calathide  sont  uniformes,  aigrettes,  non 
ailés  et  incollifères.  Dans  le  pLerotheca  ,  les  fruits  marginaux 
sont  inaigrettés  et  munis  sur  leur  face  intérieure  de  trois 
à  cinq  ailes  longitudinales  très- saillantes ,  tandis  que  les  au- 
tres fruits  sont  cylindriques  et  un  peu  amincis  supérieure-? 
ment  en  un  col  court,  portant  une  aigrette. 

Vintjbellia  n'a  point  d'affinité  naturelle  avec  les  andrjala, 
dont  elle  diffère  beaucoup  par  le  port;  elle  en  diffère  aussi 
par  plusieurs  caractères  du  péricline,  du  fruit,  de  l'aigrette 
et  de  la  corolle.  En  eS'et,  dans  les  andrjala,  le  péricline  est 
très-simple,  le  fruit  est  muni  de  dix  grosses  côtes  formant 
au  sommet  de  petites  cornes  saillantes  ;  l'aigrette  est  trè?- 
barbellulée  ;  la  corolle  est  pourvue  de  longs  poils  charnus, 
(H.  Cass.) 

INTYBUM,  INTYBUS  [Bot,)  ■  anciens  noms  des  cichorium 
endivia  et  intjbus,  et  de  Yliieraciurn  prœmorsum.  Voyez  Endivia. 
(H.  Cass.) 

INU.  {Bot.)  Prénom  adjectif,  dans  la  langue  japonoise, 
signifiant  que  le  nom  auquel  il  est  joint  n'est  pas  celui  de 
l'espèce  préférée.  Ainsi  Yinu-mald  ou  mahi-spuria,  selon 
K^œmpfer,  est  une  espèce  d'if  à  petites  feuilles,  dilTércnle 
de  l'if  à  grandes  feuilles,  qui  est  le  fon-mald  ou  ma/et /egi- 
tima.  Vinu-itabu  est  un  figuier  sauvage  ,  ^îcus  pumj/a ,  suivant 
M.  Thunberg.  L'inu-tade  est  une  persicaire ,  variété  du  poly-- 
gonum  barbattim.  Vinn-fugi  est  Vhedjysaruni  tomentosum  de  Ivl.' 
Thunberg.  Uinu-ganeb  est  Vhedj/saruni  microphj'llum  du  même. 
Il  nomme  viiis  heterophjlla ,  une  vigne  sauvage  qui  çst  Vinu-, 
ganabtt ,  différent  du  ganabu  ou  vitis  labrusca.  lJinu-\impoga 
ou  inu-tegaras  est  le  géranium  palustre  de  Linnœus,  Le  draba, 
muralis  et  le  turritis  hirsuta  sont  également  nommés  inu-nas^. 


65ft     <  INU  *  ( 

suna,  Uinii-sansjo    est  un  fagaricr ,  fagara  piperita.  TJinu-seri 
est  le  pigamon  des  prés,   thalictrum  Jlavum.  (J.) 

INULE,  Initia.  (Bot.)  [Corymbifcres  ,  Juss.  =  Sjngénésie 
j)olrgamie  superflue,  Linn»]  Ce  genre  de  plantes  appartient  à 
Tordre  des  synanthérées ,  à  notre  tribu  naturelle  desinulées, 
et  à  la  section  des  inulées-prototypes  ,  dans  laquelle  nous  le 
plaçons  immédiatement  auprès  du  genre  Conjza.  Voici  les 
caractères  génériques,  tels  qu'ils  résultent  de  nos  observa- 
tions faites  comparativement  sur  des  individus  vivans  de  neuf 
espèces  véritables  d'inula,  et  sur  beaucoup  d'autres  espèces 
faussement  attribuées  à  ce  genre. 

Calathlde  radiée  :  disque  muUiflorc,  régulariflore ,  andro- 
gyniflore  ;  couronne  subunisériée  ,  multiflore,  liguliflore  ,  fé- 
miniflore.  Péricline  égal  ou  supérieur  aux  fleurs  du  disque, 
formé   de   squames  imbriquées,    pxtradilatées  ,   appliquées: 
les  extérieures  plus  larges  ,  coriaces,  surmontées  d'un  appen- 
dice étalé,  foliacé;  les  intérieures  étroites,  linéaires,  inap 
pendiculées,  submembraneuses.  Clinanthe  plan  ,  ou  convexe 
inappendiculé.  Ovaires  oblongs,  cylindracés;  aigrette  simple 
formée  de  squamellules  subunisériées,  inégales,  filiformes 
iarbellulées ,  souvent  entregreffées  à  la  base.  Anthères  mu 
jîies  de  longs  appendices  basilaires  plumeux.  Corolles  de  la 
couronne  à  languette  ordinairement  longue,  étroite,  linéaire, 
tridentée  au  sommet. 

Jncle  hélénion  :  Inula  lielenium  ,  Linn.:  Corvisartia  helenium , 
IVIérat.  C'est  une  plante  herbacée ,  à  racine  vivace  ,  produi- 
sant des  tiges  hautes  d'environ  quatre  pieds,  dressées,  rameuses, 
cylindriques  ,  épaisses  ,  pubescentes.  Les  feuilles  radicales  sont 
longues  de  deux  pieds  et  demi,  y  compris  le  pétiole,  qui  est 
long,  presque  cylindrique,  bordé  supérieurement  parla  dé- 
currence  du  limbe:  celui-ci,  large  de  six  à  sept  pouces,  est 
feruie ,  lancéolé ,  aigu  aux  deux  bouts  ,  à  bords  inégalement 
dentés  ,  à  face  supérieure  scabre ,  à  face  inférieure  subtomen- 
teuse  ,  blanchâtre,  munie  de  nervures  réticulées  ,  Irès-saiilan- 
tes.  Les  feuilles  çaulinaires  sont  alternes,  graduellement  plus 
courtes  de  la  base  au  sommet  de  la  tige;  les  inférieures  ob- 
longues-lancéolées,  à  base  élargie,  subcordiforme,  amplexi- 
caule  ,  à  partie  inférieure  étrécie  ,  subpétioliforme  ;  les  supé- 


»  mu  .      55i 

lécs,  un  peu  cordiformes  à  la  base.  Les  calaûiides,  larges  de 
trois  pouces  et  composées  de  fleurs  jaunes,  sont  solitaires 
au  sommet  dés  tiges  et  des  rameaux.  Leur  péricline  est  su- 
périeur aux  fleurs  du  disque,  formé  de  squames  imbriquées,, 
appliquées,  dont  les  extérieures  sont  larges,  coriaces,  sur- 
montées d"un  appendice  étalé ,  foliacé ,  élargi  à  sa  base ,  ovale- 
lancéolé,  et  les  intérieures  étroites,  linéaires,  coriaces-mem- 
braneuses ,  inappendiculées;  le  clinanthe  est  large,  plan, 
fovéolé,  à  réseau  finement  papillulé  ;  les  ovaires  sont  striés, 
glabres;  leur  aigrette  est  composée  de  squameilules  nombreu- 
ses, entregreffées  à  la  base;  les  anthères  sont  pourvues  de 
longs  appendices  basilaires  plumeux.  L'inule  hcicnion,  plus 
connue  sous  les  noms  d'aulnée  ou  à'enula  canipana ,  se  trouve 
aux  environs  de  Paris,  dans  les  prés  et  les  bois  humides; 
elle  fleurit  en  Juillet  et  Août  :  sa  racine,  amère  et  aromati- 
que, est  employée  en  médecine. 

Inule  britannique:  Inulahritaiiica  ,  Decand. ,  FI.  fr. ,  tom.45 
p.  149;  Inula  britannica,  Linn. ,  Mérat.  Sa  racine  est  vivace; 
ses  tiges,  hautes  de  trois  pieds,  sont  dressées,  rameuses  su- 
périeurement, cylindriques,  hérissées  de  longs  poils  mous; 
les  feuilles  sont  alternes,  çessiles,  étalées,  semi-amplexi- 
caules,  oblongues-lancéolées,  cordiformes  à  la  base,  entières  ^ 
ou  légèrement  denticulées  sur  les  bords  de  leur  partie  infé- 
rieure,  garnies  sur  les  deux  faces  de  longs  poils  mous;  leg 
feuilles  inférieures  longues  de  six  pouces,  larges  de  quinze 
lignes,  les  supérieures  plus  petites.  Les  calathides,  larges 
d'un  pouce  et  demi,  et  composées  de  fleurs  jaunes,  sont  dis- 
posées en  panicule  corymbiforme  au  sommet  des  tiges.  Leur 
péricline ,  supérieur  aux  fleurs  du  disque  ,  est  formé  de 
squames  irrégulièrement  imbriquées,  linéaires,  à  partie  in- 
férieure coriace,  appliquée,  la  supérieure  appendiciforiue, 
étalée  ,  foliacée  ,  quelquefois  élargie  et  foliiforme  sur  les 
squames  extérieures,  qui  se  trouvent  alors  très-manifeste- 
ment appendiculées,  comme  dans  les  autres  espèces  du  genre  ; 
les  ovaires  sont  hispides,  et  ne  nous  ont  jamais  offert  le  ca- 
ractère essentiel  des  pi/ i/c aria,  que  M.  Mérat  prétend  cepen- 
dant y  trouver,  et  qu'il  décrit,  dans  la  seconde  édition  de 
sa  Flore  parisienne  (tom.  2  ,  pag.  260),  comme  un  très-petit 
appendice   terminal  denticulé.    Cette   plante   est  commune 


S5a      .-  INU 

aux  environs  de  Paris,  sur  les  bords  de  la  Seine  et  de  la 
Marne ,  où  elle  fleurit  en  Juillet  et  Août.  M.  De  Candolle 
remarque  qu'elle  ne  croît  point  dans  les  îles  britanniques , 
et  que  les  anciens  l'ont  nommée  hritanica  ,  et  non  point  hri- 
tannica. 

Inui.e  a  feuilles  de  sai  le  ;  Jnula  salicina  ,  Linn.  ,  Mérat. 
Racine  A ivace;  tiges  hautes  de  deux  pieds,  dressées,  cylin- 
driques, glabres,  simples  inférieurement ,  rameuses  supé- 
rieurenîcnt;  garnies  de  feuilles  alternes,  sessiles,  demi-am- 
plexicaules,  étalées,  longues  d'environ  deux  pouces ,  larges 
d'environ  sept  lignes,  oblongues,  arrondies  à  la  base,  aiguës 
au  sommet,  glabres,  garnies  sur  les  bords  de  poils  roides 
imitant  des  dentelures  en  scie;  calathides  solitaires  au  som- 
met de  la  lige  et  des  rameaux,  larges  de  quinze  lignes,  et 
composées  de  fleurs  jaunes.  Le  péricline  campaniforme,  égal 
aux  fleurs  du  disque,  est  formé  de  squames  imbriquées,  ap-, 
pliquées,  glabres;  les  extérieures  plus  larges,  coriaces,  mu- 
nies d'une  petite  bordure  noirâtre,  scarieuse  ,  ciliée,  et  d'un 
appendice  terminal  étalé,  foliacé,  lancéolé,  cilié;  les  inté- 
ïieures  très  -  étroites ,  linéaires ,  inappendiculées  ,  appliquées  , 
presque  entièrement  coriaces-scarieuses.  Les  ovaires  sont 
glabriusculcs.  Cette  espèce  habite  plusieurs  parties  de  la 
France ,  et  se  trouve  aux  environs  de  Paris,  dans  les  prairies 
îiumides  :  elle  fleurit  en  Juin  et  Juillet. 

ÏNULE  EN  glaive  ;  Inula  ensifolia,  Linn.  Racine  vivace  ;  tiges 
hautes  d'un  pied  et  demi,  dressées,  simples  inférieurement, 
rameuses  supérieurement,  cylindriques,  parsemées  de  longs 
poils  blancs,  mous,  fugaces;  garnies  de  feuilles  alternes,  ses- 
siles, semi-amplexicaules,  étalées,  longues  de  deux  pouces 
et  demi,  larges  de  quatre  lignes,  étroites- lancéolées,  roides, 
lin  peu  glauques,  ponctuées  sur  les  deux  faces,  bordées  de 
longs  poils  blancs  et  mous,  dont  la  base  est  roide  et  cartilagi- 
neuse ;  calathides  solitaires  au  sommet  de  la  tige  et  des  ra- 
meaux, qui  forment  ensemble  une  sorte  de  corymbe  ;  cha- 
cune d'elles  large  d'un  pouce  et  demi ,  et  composée  de  fleurs 
jaunes.  Le  péricline  subcampanulé,  égal  aux  fleurs  du  disque 
et  hérissé  de  longs  poils  blancs,  est  formé  de  squames  nom- 
breuses,  régulièrement  imbriquées ,  appliquées;  les  extérieu- 
ïes  plus   larges,   coriiices,  surmontées  d'un  long  appendice 


INU  553 

tUaîé,  recourbé,  foliacé,  lancéolé;  les  inférieures  étroites, 
linéaires,  inappendiculées,  comme  scarieuses  au  sommet. 
Les  ovaires  sont  glabriuscules.  Cette  espèce  habite  l'Alle- 
magne et  ritalie. 

Inule  puante  :  Iniila  graveolens ,  Desf. ,  Tabl.  de  l'éc.  de  bot. , 
2."  édit. ,  pag.  121  ;  Solidago  graveolens,  Lam. ,  Decand. ,  Mé- 
rat  ;  Erigeron  graveolens ,  Linn.,  Pers. ,  Loisel.  Plante  herba- 
cée ,  annuelle,  pubescente  ,  un  peu  visqueuse  ,  douée  d'une 
odeur  forte  et  désagréable.  Sa  tige,  haute  de  deux  à  trois 
pieds,  est  dressée,  cylindrique,  très-rameuse,  garnie  de 
feuilles  alternes  :  les  inférieures  longues  de  trois  à  quatre 
pouces,  larges  d'environ  dix  lignes,  oblongues-lancéolées, 
à  peine  dentées,  ayant  leur  partie  inférieure  étrécie,  pétio- 
liforme;  les  supérieures  graduellement  plus  petites,  sessiles, 
très -entières.  Les  calathides  ,  hautes  et  larges  de  trois  lignes, 
et  composées  de  fleurs  jaunes,  sont  très -nombreuses  ,  pédon- 
culées,  dressées,  disposées  eu  panicules  pyramidales  autour 
de  la  tige  et  de  ses  branches.  Elles  sont  très-courtement  ra- 
diées ;  leur  disque  est  multiflore  ;  leur  couronne  est  unisériée  ; 
le  péricline,  supérieur  aux  fleurs  du  disque,  est  formé  de  squa- 
mes imbriquées,  oblongues-lancéolées  ;  les  extérieures  ont 
leur  partie  inférieure  appliquée  ,  et  la  supérieure  étalée  , 
foliacée,  appendiciforme  ;  les  intérieures  sont  entièrement 
appliquées,  et  membraneuses  sur  les  bords;  le  clinanthe  est 
plan,  profondément  alvéolé,  à  cloisons  charnues,  dentées; 
les  fruits  sont  oblongs,  presque  obovoïdes,  un  peu  compri- 
més, hérissés  de  longs  poils,  pourvus  d'un  bourrelet  basilaire 
glabre,  annulaire,  et  d'un  col  épais,  très-court,  glabre, 
mais  entouré  de  poils  capités,  implantés  sur  le  sommet  du 
fruit;  l'aigrette  est  simple  ,  formée  de  squamellulcs  nombreu- 
ses ,  inégales,  unisériées,  filiformes,  très-barbellulées  ,  entre- 
greffées  à  la  base  et  formant  par  leur  réunion  une  sorte  de 
cupule  ;  les  anthères  sont  munies  de  longs  appendices  basi- 
laires  ;  les  corolles  de  la  couronne  ont  leur  languette  tridentée 
au  sommet  ;  les  styles  sont  conformes  à  ceux  des  inulées-pro- 
totypes. 

Cette  plante  ,  qui  fleurit  en  Août  et  Septembre,  habite  les 
départemens  méridionaux  de  la  France  ,  et  même  les  environs 
àe  Paris,  où  on  la  trouve  dans  les  champs.  Les  botanistes  ont 


554       ^  INU  • 

commis  une  grave  erreur  en  attribuant  cette  espèce  aux 
genres  Erigcron  ou  Solidago  ,  qui  ne  sont  pas  de  la  même 
tribu  naturelle.  M.  Desfontaines  est  le  seul  qui  Tait  rapportée 
à  son  véritable  genre.  Cependant  ses  caractères  génériques 
offrent  quelques  particularités  qu'on  aura  sans  doute  remar- 
quées en  lisant  la  description  ci-dessus  ;  et  nous  étions  tenté 
de  fonder  là- dessus  un  genre  distinct,  lorsque  nous  avons 
été  arrêté  par  la  crainte  de  nous  exposer  trop  souvent  au 
reproche  de  multiplier  les  genres  sans  nécessité.  En  effet , 
malgré  les  différences  dont  il  s'agit,  la  plante  en  question 
peut  très -bien  rester  dans  le  genre  Inula. 

Inule  blanche  :  Inula  candida ,  H.  Cass.  j  Conyza  candida , 
Linn.  Cette  espèce  remarquable,  qui  habite  l'ile  de  Candie , 
a  une  souche  ligneuse  ,  rameuse,  épaisse  ,  raboteuse,  divisée 
au  sommet  en  plusieurs  branches  courtes,  terminées  chacune 
par  un  asseniblage  de  feuilles  rapprochées  en  rosette,  tomen-: 
teuses  ,  blanchâtres  ,  épaisses  ;  leur  pétiole  est  long  d'un  pouce 
et  demi  ,  semi-amplexicaule  ,  demi-cylindrique;  leur  limbe 
est  lonp;  de  deux  pouces  et  demi,  large  de  quinze  lignes, 
elliptique,  à  peine  crénelé  sur  les  bords,  à  nervures  réticu- 
lées, saillantes  en-dessous.  Les  tiges  naissant  de  l'aisselle  des 
feuilles  susdites,  sont  herbacées,  étalées,  flexueuses,  foibles, 
grêles,  simples,  cylindriques,  tomenleuses ,  blanches,  gar- 
nies de  feuilks  alternes,  petites,  courtement  pétiolées,  lan- 
céolées. Les  calathides  sont  jaunes,  radiées,  larges  de  sept  à 
huit  lignes,  et  au  nombre  de  trois  environ,  l'une  terminale, 
les  deux  autres  presque  sessiles  dans  l'aisselle  des  feuilles  su- 
périeures, près  du  sommet  de  la  tige.  La  calathide  est  cour- 
tement radiée  :  composée  d'un  disque  multîflore ,  régulari- 
flore ,  androgyniflore  ;  et  d'une  couronne  unisériée ,  multi- 
flore,liguliflore,  féminiflore.  Lepéricline,  tomenteux,  blanc, 
campanule,  à  peu  près  égal  aux  fleurs  du  disque,  est  formé 
de  squames  nombreuses,  imbriquées,  appliquées;  les  exté- 
rieures courtes,  larges,  oblongues,  ou  ovales,  coriaces,  sur- 
montées d'un  appendice  variable,  étalé,  foliacé,  oblong ,  ou 
subspatulé,  d'autant  plus  long  que  la  squame  dont  il  dépend 
est  plus  extérieure  ;  les  squames  intérieures  sont  longues , 
étroites,  linéaires-subulées ,  presque  mçmbraneuses ,  inap- 
pendiculées.   Le  clinanthe  est  large,  un  peu  convexe,  nu. 


i  •  INU  •        655 

ppnctué.  Les  ovaires  sont  longs,  grêles,  cylindriques,  striés, 
hispides  ;  leur  aigrette  est  composée  de  trois  à  dix  squamellulcs 
longues,  un  peu  inégales ,  unisériées  ,  distancées,  filiformes, 
peu  barbellulées.  Les  anthères  sont  pourvues  d'appendices 
^asilaires  longs ,  linéaires ,  barbus  ou  pîuineux.  Les  corolles 
de  la  couronne  ont  le  tube  long  et  la  languette  courte,  li- 
néaire ,  tridentée  au  sommet,  plus  ou  moins  chargée  de 
glandes  en-dessous.  Les  fleurs  du  disque  et  de  la  couronne 
sont  jaunes.  Nous  avons  observé  des  calathides  dont  les  lan- 
guettes étoient  très-courtes ,  et  des  calathides  dont  les  lan- 
gufttes  étoient  Irès-loiigues. 

Les  six  descriptions  spécifiques  qu'on  vient  de  lire  ont  élé 
faites  par  nous  sur  des  individus  vivans ,  cultivés  au  Jardin 
du  Roi. 

Tournefort  confondoit  les  inula  dans  le  genre  Aster  ,  et  cette 
grave  erreur  de  classification  a  été  reproduite  avec  beaucoup 
de  confiance  par  quelques  botanistes  modernes  ,  tels  que 
Haller,  Allioni,  Mœnch.  Vaillant  est  le  premier  auteur  du 
genre  Inula ,  qu'il  nommoit  lielenium  :  mais  il  le  caractérisa 
fort  mal  ;  car  il  ne  le  distingua  du  genre  Aster  que  par  la  cour 
leur  des  Heurs,  et  du  genre  Solidago ,  par  la  disposition  des 
calathides.  Linné,  en  adoptant  le  genre  de  Vaillant,  substitua 
mal  à  propos  le  nom  d'muZa  à  celui  dUielenium  :  mais  il  le 
caractérisa  parfaitement  bien  ,  et  il  insista  surtout  avec  rai- 
son sur  le  caractère  fourni  par  les  appendices  basilaires  d.e& 
anthères.  Cependant ,  depuis  Linné,  Gaertner  et  d'autres  bo- 
tanistes ont  rejeté  ce  caractère  aussi  constant  qu'important, 
et  ils  ont  fondé,  comme  Vaillant,  la  distinction  générique 
des  aster  et  des  inula  seulement  sur  la  couleur  des  Heurs. 
Adanson  a  voulu  rétablir  l'ancien  nom  d^helenium  ,  et  il  a 
séparé  de  ce  genre  l'inula  crithmoides ,  qui  en  diffère  par  la 
structure  du  péricline.  Nous  adoptons  ce  genr;^  d'Adanson, 
nommé  Liinbarda.  Gaertner  a  séparé  des  inula  quelques  espèces 
qu'on  y  avoit  confondues ,  et  qui  en  diflerent  esscatiellenienf; 
par  la  structure  de  l'aigrette.  Nous  adoptons  ce  geiire  de 
Gaertner,  nommé  pi//icaria  ,  et  qui  est  peut-être  le  même  que 
le  doria  ,  proposé  plus  anciennement  par  Adanson  :  mais 
Gœrtner  a  mal  à  propos  attribué  à  son  palicaria  Vasfer  an- 
nuui ,  Linn. ,  qui   n'est  pas  de  la  même  tribu  naturelle ,  et 


556  INU 

qui  appartient  à  notre  genre  Diplopappus.  Necker  nomme 
enula  le  genre  Inula ,  et  il  propose,  sous  le  nom  de  lioydia, 
un  nouveau  genre  ,  comprenant ,  suivant  lui  ,  quelque  espèce 
rapportée  par  Linné  à  Vinula,  et  qui  en  diffère  par  le  péri- 
cline  formé  de  dix  squames  unisériées  et  par  l'aigrette  pres- 
que plumeuse.  Nous  avons  fait  de  vains  efforts  pour  deviner 
l'espèce  que  Necker  attribue  à  son  lioydia ,  et  les  affinités 
naturelles  de  ce  genre,  que  l'auteur  dit  être  voisin  des  tiissilago 
et  pétasites  :  c'est  un  problème  qui  nous  paroît  insoluble,  et 
nous  osons  à  peine  soupçonner  que  le  liojdia  pourroit  être 
xine  mutisiée.  M.  Mérat ,  dans  la  première  édition  de  sa 
Flore  parisienne  (page  528),  a  cru  pouvoir  séparer  Tnit/Za. 
heleniiim  des  autres  espèces  d'inula,  pour  en  faire  un  genre 
nommé  Corvisarlia ,  qu'il  distingue  par  le  péricline,  dont  les 
squames  extérieures  sont  larges,  ovales- trapézoïdes  ,  velues, 
et  les  intérieures  linéaires,  nombreuses,  colorées,  glabres. 
L'auteur  attribue  en  outre  à  son  corvisartia  des  anthères  dé- 
pourvues d'appendices  basilaires  ,  et  un  stigmate  entier  dans 
les  fleurs  femelles  delà  couronne.  Enfin,  il  déclare  que  cette 
plante  ,  encore  peu  étudiée,  étoit  confondue  dans  un  genre  dont 
elle  est  aussi  distincte  par  ses  caractères  botaniques  que  par 
son  port. 

Nous  observons,  i."  que  Linné,  Adanson  ,  Jussieu  ,  Smith 
et  presque  tous  les  botanistes  ont  mentionné  ce  qu'il  y  a  d'es- 
sentiel et  de  vrai  dans  la  structure  décrite  par  M.  Mérat,  et 
qui  se  réduit  à  ce  que  les  squames  extérieures  du  péricline 
sont  étalées  et  plus  larges  que  les  intérieures;  2."  que  le  stig- 
mate n'est  jamais  entier,  c'est-à-dire  indivis,  dans  Vinula  he- 
lenium,  non  plus  que  dans  les  autres  inula;  o."  que  Vinula  he- 
leniuma,  comme  les  autres  inula,  les  anthères  pourvues  de 
longs  appendices  basilaires  plumeux  ;  4.°  que  les  caractères 
essentiels  du  péricline  sont  absolument  les  mêmes  dans  Vinula 
lielenium  et  dans  les  autres  véritables  espèces  d^inula,  notam- 
ment dans  Vinula  salicina,  laissée  par  M.  Mérat  dans  le  genre 
Inula  ■■  c'est  ce  dont  on  peut  se  convaincre  en  lisant  les  six 
descriptions  spécifiques  que  nous  avons  présentées;  ô.^que, 
si  Vinula  lielenium  différoit  génériquement  des  autres  espèces, 
il  faudroit  encore,  dans  cette  fausse  hypothèse,  conserver 
pour    cette    espèce    primitive    et   principale    l'ancien   nom 


^  •  INU  •        557 

à:inuia  ,  et  donner  le  nouveau  nom  générique  aux  espèces 
qui  en  seroient  séparées.  Dans  notre  article  Corvisartia  (torn. 
X,  pag.  672),  nous  avions  déj<à  remarqué  que  toutes  les  espè- 
ces (Vlnula  qui  ont  les  squames  extérieures  du  péricline  ter- 
minées par  un  appendice  étalé,  foliacé,  étoient  congénères 
de  l'inula  lieleniuin;  c'est  pourquoi  nous  avions  niodilié  et  rec- 
tifié, d'après  nos  propres  observations,  les  caractères  attri- 
bués par  M.  Mérat  à  son  genre.  Mais,  en  adoptant  le  nom 
générique  de  corvisartia ,  nous  ne  songions  pas  que  presque 
tous  les  inula  deviendroient  des  corvisartia ,  et  que  le  genre 
Inula  se  trouveroit  réduit  au  limh arda  d^Adanson,  ce  qui  n'est 
pas  admissible. 

Il  résulte  des  remarques  précédentes,  que  le  genre  Inula 
de  Linné  doit  être  divisé  en  (rois  genres,  nommés  Inula,  Lim- 
larda ,  Pulicaria.  Vinula  est  caractérisé  par  l'aigrette  simple  , 
et  par  le  péricline  dont  les  squames  extérieures  sont  surmon- 
tées d'un  appendice  étalé,  foliacé.  Le  liniharda  est  caractérisé 
par  l'aigrette  simple ,  et  par  le  péricline  formé  de  squames 
absolument  inappendiculées  et  par  conséquent  entièrement 
appliquées.  Le  pulicaria  est  caractérisé  par  l'aigrette  double, 
et  par  le  péricline  appendiculé.  Nous  ne  répéterons  point 
ici  ce  que  nous  avons  déjà  dit,  dans  notre  article  Eurybie 
(tom.  XVI,  pag.  4G),  sur  la  valeur  du  caractère  résultant  de 
l'appendiculation  des  squames  du  péricline;  et  nous  ne  pen- 
sons pas  que  l'importance  du  caractère  résultant  delà  dupli- 
cité de  l'aigrette  ait  besoin  d'être  Justifiée. 

Indépendamment  des  espèces  appartenant  au  limharda  et 
au  pulicaria,  quelques  autres  synanthérées,  mal  à  propos  at- 
tribuées à  Vinula,  passent  dans  d'autres  genres.  Vinula gossy^ 
pina  de  Michaux  est  un  diplopappus  ,  que  nous  avons  décrit 
dans  ce  Dictionnaire  (tom.  Xlll ,  pag.  3og)  sous  le  nom  de 
diplopappus  lanatus.  Vinula  saxalilis  de  Lamarck ,  ou  erigeron 
glutinosum  de  Linné,  appartient  à  notre  genre  Mjyriadenus, 
Vinula  subaxillaris  de  Lamarck  est  notre  lieterotheca,  Vinula 
crispa  de  Persoon  est  notre  duchesnia,  Vinula  serrata  de  Per- 
soon  est  le  grindelia.  Vinula  glutinosa  de  Persoon  fait  partie 
de  notre  genre  Aurélia.  Quoique  nous  n'ayons  point  vu  Vinula 
cœruleade  Linné,  que  Vaillant  attribuoit  à  son  genre  ^5iero- 
^terus  j  caractérisé  par  l'aigrette  plumeuse ,  nous  sommes  très- 


553        *  ÎIXU  f 

convaincu  que  cette  espèce  ne  peut  pas  appartenir  au  genre 
Inula.  Seroit-ce  le  liqydia  de  Necker? 

Si  l'on  adopte  les  caractères  proposés  dans  cet  article  pour 
le  genre  Inula  ,  et  ceux  que  nous  avons  assignés  au  genre 
Comza  (  tom.  X,  pag.  3o5),  on  reconnoîtra ,  en  comparant 
nos  deux  descriptions  génériques,  que  les  genres  Inula  et 
Conjza  se  touchent  immédiatement  dans  la  série  naturelle  , 
qu'ils  diflrèrent  très -peu  ,  et  même  qu'ils  peuvent  se  confon- 
dre en  certains  cas.  En  effet,  le  seul  caractère  qui  les  dis- 
tingue consiste  en  ce  que  la  couronne  de  la  calathide  est 
liguliflore  et  radiante  dans  Vinula,  tandis  qu'elle  est  tubuli- 
flore  et  non  radiante  dans  le  conjza;  et  ce  caractère  distinctif , 
qui  résulte  uniquement  de  l'alongement  ou  de  raccourcisse- 
ment du  limbe  des  fleurs  femelles,  peut  disparoitre  acciden- 
tellement. C'est  ce  qui  a  lieu  dans  Vinula  candida,  qui  appar- 
tient tantôt  au  genre  Inula  et  tantôt  au  genre  Conjza^  selon 
que  le  limbe  des  fleurs  femelles  est  alongé  ou  accourci.  Il 
en  est  de  même  de  beaucoup  de  genres  de  synanthérées,  qui 
ne  diffèrent  que  par  la  radiation  de  la  calathide,  et  qui  se 
confondent  entièrement  par  l'effet  de  la  variation  acciden- 
telle dont  il  s'agit.  Faut- il  en  conclure  que  les  espèces  qui 
ne  diffèrent  que  par  la  radiation  ou  la  non-radiation  de  leurs 
calalhides,  doivent  être  réunies  dans  le  même  genre  P  Nous 
ne  le  pensons  pas.  S'il  falloit  exclure  des  caractères  généri- 
ques tous  ceux  qui  sont  susceptibles  de  varier,  il  en  resteroit 
bien  peu,  et  la  science  retoml)erolt  dans  une  grande  confu- 
sion, produite  par  le  mélange  de  presque  tous  les  genres; 
Nous  avons  souvent  observé  àes  synanthérées  dont  le  rlinan- 
the,  habituellement  nu,  portoit  acci>1entelîeuient  des  squa- 
melles  très-manifestes.  D'autres  synanthérées,  à  ovaires  habi- 
tuellement aigrettes  ,  offrent  accidentellement  des  ovaires 
nus  par  avortement  de  l'aigrette;  et  réciproquement,  des 
ovaires  habituellement  nus  sont  accidentelkment  aigrettes. 
Conservons  tous  ces  caractères  génériques,  en  faisaîit  remar- 
quer qu'aucun  d'eux  n'est  infaillible  ;  et,  dans  les  cas  douteux  , 
ayons  recours  à  l'état  le  plus  habituel  des  parties  variables 
et  à  l'observalion  des  autres  parties.  Ainsi,  pour  décider  si 
Vinula  candida  doit  être  attribuée  au  genre  Jnw/a. plutôt  qu'au 
genre  Conjza ,  il  faut  observer  si  sa  calathide  est  plus  habi- 


,  •  ÎNU  •        55ç, 

tueilement  radiée  que  discoïde,  et  si  les  aufres  caractères 
de  cette  plante  la  rapprochent  davantage  des  inula  que  des 
conj'za. 

U  n'est  peut-être  pas  inutile  d'avertir  que  l'afllnité  établie 
par  nous  entre  les  genres  Inula  et  Conjza,  suppose  nécessai- 
rement que  ces  deux  genres  sont  restreints  dans  les  limites 
que  nous  leur  avons  assignées.  Le  genre  Conjza  des  autres 
botanistes  est  un  chaos  sur  lequel  il  est  impossible  de  fonder 
aucun  rapport  naturel.  M.  Robert  Brown  est  jusqu'à  présent 
le  seul  qui  s'accorde  avec  nous  sur  la  limitation  du  genre 
Confza  et  sur  ses  rapports  avec  V Inula'  :  mais,  en  énonçant 
son  opinion  sur  ce  point,  il  auroit  peut-être  dû  nous  citer 
comme  ayant  établi  long- temps  avant  lui  les  véritables  fon- 
demens  de  cette  opinion  ,  en  démontrant  que  les  vraies 
c»njza  font  partie  de  la  tribu  des  inulées,  tandis  que  les  bac- 
charis  appartiennent  à  celle  des  astérées.  (H.  Cass.  ) 

INULÉES,  Inuleœ.  {Bot.)  C'est  la  douzième  des  vingt  tribus 
naturelles  dont  se  compose  l'ordre  des  synanthérées,  suivant 
notre  méthode  de  classification.  La  tribu  des  inulées  est  in- 
termédiaire entre  celle  des  anthémidées,  qui  la  précède,  et 
celle  des  astérées  qui  la  suit.  Elle  comprend  un  plus  grand 
nombre  de  genres  qu'aucune  autre  tribu,  si  l'on  excepte 
celle  des  hélianthées ,  qui  est  encore  plus  nombreuse. 

Nous  avons  établi  la  tribu  des  inulées^,  dans  notre  pre- 
mier Mémoire  sur  les  synanthérées ,  lu  à  la  première  classe 
de  l'Institut,  le  6  Avril  1812,  publié  par  extrait  dans  le 
Bulletin  des  sciences  de  Décembre  1812  ,  en  totalité  dans  le 
Journal  de  physique  de  Février,  Mars,  Avril  181 3,  et  en 
abrégé  dans  le  Journal  de  botanique  d'Avril  i8i5.  Les  carac- 
tères de  cette  tribu  ,  qui  se  trouvoient  disséminés  dans  nos 
premier,  deuxième,   troisième  et  quatrième  Mémoires,  ont 

1  Observations  on  the  iiatural  familj  of  plants  called  compositœ;  hy 
Robert  Brown,  pag.  114.  Journal  de  physique,  de  Juillet  1818,  pag. 
10  et   25. 

2  Le  lecteur  voudra  bien  me  pardonner  les  détails  que  je  suis  trop 
souvent  forcé  de  rappeler  pour  soutenir  mes  droits,  depuis  que  cer* 
tains  botanistes  ont  élevé  des  prétentions  tendant  à  m'enlever.  I&  fruit 
iie  douze  années  de  travaux.  (Voyez  le  Journal  de  physique  de  M^% 
j8i8  et  de  Juillet  i8ig.) 


56o       .  INU 

été  réunis  et  présentés,  sous  la  forme  d'une  description  conï* 
plète ,  dans  le  sixième  Mémoire  publié  dans  le  Journal  de 
physique  de  Février  et  Mars  181  g;  et  cette  description  est 
reproduite  dans  le  Dictionnaire,  tom.  XX,  pag.  574.  Nous 
avons  indiqué  la  division  de  la  tribu  des  inulées  en  trois 
sections  naturelles  dans  plusieurs  de  nos  Mémoires  et  de  nos 
articles,  notamment  dans  Tarlicle  Gnaphaliées  ,  tom.  XIX, 
pag.  122.  La  désignation  des  genres  composant  la  tribu  dont 
il  s'agit  se  trouve  déjcà  en  très-grande  partie  ,  soit  dans  nos 
articles  de  ce  Dictionnaire ,  soit  dans  nos  Mémoires  publiés 
dans  le  Journal  de  phjsique  ou  dans  le  Bulletin  des  sciences. 
Mais  il  est  nécessaire  d'exposer  méthodiquement  la  série  de 
tous  ces  genres  :  c'est  l'objet  du  présent  article. 

XII.'TaiBU.    Les  INULÉES  {Inukœ). 
(Voyez  les  caractères  de  cette  tribu  ,  tome  XX,  pag.  r,74.) 

PREMIÈRE     SECTION. 
Inulées- Gnaphaliées  { Inuleœ- Gnaphalieœ). 
Caractères  ordinaires.  Péricline  scarieux.  Stigmatophores  tron- 
qués au  sommet.  Article  anthérifère  long;  appendice  api- 
cilaire  de  l'anthère,  obtus;    appendices   basilaires  longs, 
non  polUnifères. 

I.   Aigrette  stéphanoïde,  paléacée  ,  ou  mixte. 
1.*  Relhania.  =  ??  Bellidiastrum. Y aili.  (1720).  — Atliana- 
éiœ ,  Leyserœ,  Zoegeœ  sp.  Lin.  —  Lin.  fil.  —  Relhania;  sp.  L'Hér. 
(  1788).  —  Lejsera  et  Eclopes.   Gœrtn.  (1791).  —  Michauxia. 
Neck.  (1791).  —  Relhania.  Pers. 

2.  t  ??  RosENiA.  =  Rosenia.   Thunb.  (  1800). 

3.  t??  Lapeirousia.  =  Osmitis  sp.  Lin.  fil.  —  Rethaniœ  sp. 
L'Hér.  —  Lapeirousia.  Thunb.  (i8oo)< 

4.*  Leysera.  =  Asteris  sp.  Tourn.  —  Asteropterus.  Vaill. 
(  1720).  —  Adans.  —  Gaertn.  (  1791  ).  —  Lejyserœ  sp.  Lin.  — * 
Callicornia.  Burm.  —  Leysera.    Neck.  {  1791). 

6.  *  Leptofhytus.  =  Gnaphalium  lejseroides.  Desf.  —  Lepto- 
phytus.  H.  Cass.  Bull.  janv.  1817.  p;  11. 

6.t  hQ^(ic:^.\^\^,:=ihongchavn2iO'%  TV^Jd.  JVIag.  der  nat.  fjr. 
(1811). 


,  •  INU  •       56i 

IL  Corolles  très-grêles. 
7.*  Chevreulia.  ^=  Chaptaliœ   s^.  Pers.  — ■   Xeranthemi  sp, 
Petit-Th.  —  Cheyreulia.   H.  Cass.  Bull,  mai  1817.  p.  69.  Dict. 
V.  8.  p.  5i6. 

8.*  Lu ciLi A.  =  Serratula  acutifolia,  Poir.  — Lucilia.  H.  Cass. 
Bull.  févr.  1817.   p.  52. 

g.  '•'  Facelis.  =:  Gnaphalium  retusum.  Lam.  —  Facelis.  H.  Cass. 
Bull,  juin   1819.  p.  94.  Dicf.  v.   16.   p.  104. 

ïo.'^  FoDOTHECA.  =  Podosperma.  Labill.  (1806).  —  Podotheca» 
H.  Cass.  Dict. 

m.  Péricline  à  peine  scarieux. 

11.'''!  SyKCAVxVii\.  =  Stœhelinœ  sp.  Lin.  — ?  Roccardia.  Neck. 
(1791).  —  Lejserœsp.  Thunb.  — WiHd.  —  Serratulœ  sp.  Poir. 
—  Sjncarpha.  Decand.  (1  8  1  o). 

12.^'  Faustula.  —  Chrj'socoma  reliculata.  Labill.  —  Faustula, 
H.  Cass.  Bull.  sept.  1818.  p.  140.  Dict.  v.  16.  p.  2S1. 

IV.  Péricline  peu  coloré. 

iS.^*"!  Phagnalon.  =  Elichrysi  sp.  ïourn.  —  Conyzce  et  Gna- 
phalii  sp.  Lin.  —  Conjzce  sp.  Lag.  —  Phagnalon.  H.  Cass.  Bull, 
nov.  1819.  p.  173.  Dict.  V.  19.  p.  118.   11g. 

14.'''  Gnaphaliom.  =  Elichrysi  sp.  Tourn.  —  Adans.  —  Heli- 
clirjsi  sp.  Vaill. —  Gnaphalii  sp.  {Fiiaginoidea)  Lin.  —  Filaginis 
sp.  Gaertn.  —  Archyrocomœ  sp.  Pers.  —  Gnaphalium.  R.  Br. 
Obs.  comp.  p.  122  (1817).  Journ.  de  phys.  v.  87.  p,  i5.  — 
H.  Cass.  Dict.  v.  19.  p.  1 15.  —  P  Gjnemœ  sp.  Rafin.  —  H.  Cass. 
Dict.  V.  20.  p,  167. 

iS.'''  Lasiopogon.  =  Gnaphalium  muscoides.  Desf.  —  Lasio- 
pogon.   H.  Cass.  Bull,  mai  1818.  p.  76. 

V.  Clinanthe  squamellifère. 

16.*  Ifloga.  =  Gnaphalium  caulijlorum.  Desf. —  Ijloga.  H. 
Cass.  Bull.  sept.  1819.  p.  142.  Dict. 

17.  t  PiPTOCARPHA.  =  Piptocarpha.  R.  Br.  Obs.  comp.  p.  121 
(1817).  Journ.  de  phys.  v.  87.  p.  22. 

18.*!  Cassinia.  =  Caleœ  sp.  Labill.  —  H.  Cass.  Dict.  v.  6. 
suppl.  p.  32.  —  Cassinia.  R.  Br.  Observ.  compos.  p.  126. 
(1817).  Journ.  de  phys.  v.  87.  p.  17.  (Non  Cassinia.  Hort, 
kew.) 

23,  56 


5G2        '  INU  "^  f 

icj.'^'  IxoDiA.=  Irodia.  R.  Br.  Hort.  kew.  éd.  2.  v.  4.  p.  5 17. 
(1812)  —  Sinis.   Bot.  mag.  —  H.  Cass.    Dict. 
VI.  Péricline  pétaloïdc. 
20.'"'^  Lepkcline.  =^  Gnaphalium  cymosum.  Lin.  —  Lepiscline. 
H.  Cass.  Bull.  févr.  1818.   p.  3). 

2i.t  Anaxeton.  =  Gnaphalii  sp.  Berg.  —  Aniixelon.  Gairtn. 
(1791)  —  ?  Arg^yranfhiis.  Neck.   (lygi). 

2J.'''  Edmondia.  =  Eiiclnysi  sp.  Tourn.  —  Xeranthemum 
sesamoides.  làn.  —  ?  Argjranthi  sp.  Neck.  —  Edmondia.  H. 
Cass.  Bull,  mai  1818.   p.  75.  Dict.  v.  14.   p.  262. 

23.  '•■  ArsGYRocoME.  =  EUclirjsi  sp.  Tourn.  —  Helichrjsi  sp. 
Vaill.  —  Xeranlhemoides.  Dill.  —  Xeranthenii  et  Gnaphalii  sp. 
Lin.  ■ —  Argyrocome.  Gasrtn.  (  1791  ).  —  Xeranlhenniin.  Neck. 
(1791).  —  Helichrysum.    Pers.  (1807). 

24.'''  Helichryshm.  =  Elichrj'si  sp.  Tourn.  —  Adans.  — 
Helichrjsi  sp.  Vaill.  —  Gnaphalii  sp.  Lin.  —  Juss.  —  Willd. — 
Pers.  —  Elichrysum.  Gsertn.  (1791). —  Trichandrum.  Neck. 
(1791).  —  Helichrysum.  H.  Cass.  Dict.  v.  20.  p.  449. 
26. ''^  PoDOLEPis.  ==  Podolepis.  Labill.  (1806). 
26.  *  Antennaria.  =  Elichrjsi  sp.  Tourn.  —  Gnaphalii  sp. 
Lin.  —  Anlennariœ  sp.  Gœrtn.  (  1791  ).  —  Antennaria.  R.  Br. 
(1817).  Obs.  comp.  p.  122.  Journ.  de  phys.  v.  87.  p.  i5.  23. 
—  Disj'nanthus.  Rafin. 

27.1  OzoTHAMNUs.  =  Caleœ  sp.  Forst.  —  Willd.  —  Ozo- 
thamni  sp.  R.  Br.  Obs.  comp.  p.  126.  (1817).  Journ.  de  phys. 
V.  87.  p.  14." —  Ozothamnus.  H.  Cass.  Journ.  de  phys.  v.  87.  p.  29. 
28.'"^  Petalolepis.  =  Eupatorii  sp,  Labill.  —  Qzolhamni  sp. 
R.  Br.  (1817).  —  Petalolepis.  H.  Cass.  Bull.  sept.  1817.  p.  i38. 
Journ.  de  phys.  v.  87.  p.  29. 

29.  ^'^  Metalasia.  =  Gnaphalii  sp.  Lin.  —  Antennarlœ  sp. 
Gaertn.  —  Metalasia.  R.  Br.  Obs.  comp.  p.  124  (1817).  Journ. 
de  phys.  v.  87.  p.  iG. 

,  VII.  Calathides  rassemblées  en  capitule. 

§.   Tige  ligneuse. 
3o.*  Endoleuca.  —  Gnaphalii  muricati  var.  Lin.  —  Gnapha- 
lium capilatum.  Lam. —  ?  Anlennariœ  sp.  Ga?rtn.  —  pMetalasiœ 
5p.  R.  Br. —  Endoleuca.  Il,  Cass.  Bull,  mars  2819.  p.  47.  Dict. 
V.  14.  p.  474. 


»  •  INU  •        563 

5] .  t  ?  Shawia.  ~  Shawia.  Forst.  (1776).  —  Scopol.  —  Juss. 
■ —  Schreb. 

0:2.  ^'  Perotriche.  =  Seriphii  sp.  Lin.  —  Juss.  —  Perotriche. 
H.  Cass.  Bull,  mai  1818.   p.  76. 

33. '''  Seriphivm.  =  Ahsinthii  sp.  Tourn.  —  Helichrjsoidis  sp. 
Vaill.  (171g).  —  Seriphium.  Lin.  —  Juss.  —  Gœrtn.  —  Filaginis 
sp.   Adans.  —  Seriphii  sp.   Pers. 

34.*  StvEBe.  :=  Ahsinthii  sp.  Tourn.  —  Helichrysoidis  sp. 
Vain.  (1719").  — Stcebes  sp.  Lin.  — Juss. —  Stœbe.  Gaertn. — 
Keck.  —  Filaginis  sp.   Adans.  —  Seriphii  sp.   Pers. 

55.t  DisFARAGo.  =  Stœbes  sp.  Berg.  —  Lin.  —  Disparago. 
Gaertn.  (1791).  —  IVigandia.    Neck.  (1791). 

36.*!  Œdeka.  —  Biiphthalmi  sp.  Lin.  (1764).  —  Œdera,  Lin. 
(1771  ).  —  Gaertn.  ~  H.  Cass.  BuU.  févr.  1820.  p.  26.  — 
Œderœ  sp.  Lin.  fih  —  Thunb.  —  Jacq.  —  Willd.  —  Pers. 

37.'''  Elytropappus.  ■=?  Gnaphalium  hispidum,  Wilid.  — 
Eljtropappus.  H.  Cass,  BulL  déc.  1816.  p.  jqg.  Dict.  v.  14. 
p.  376. 

§§.  Tige  herbacée. 
38.'''  SiLoxERUs.  =  Siloxerus.    LabilL  (1S06). 
39."''  HiRNELLiA.  =  Hirnellia.  H.  Cass.  BulL  avr.  1820.  p.  67. 
Dict.  V.  21.  p.  199. 

40.'''  Gnephosis.  —  Gnepliosis.  H.  Cass.  Bull,  mars  1820.  p. 
43.  Dict.  V.  19.   p.  1  27. 

41.1  Angianthus.  =  Angianthus.  WendL  ColL  pL  v.  2.  p. 
32.  t.  48.  (1809).  —  R.  Br.  Obs.  comp.  p.  io3.  Journ.  de 
phys.  V.  86.  p.  406.  — ■  Cassinia.  R.  Br.  (i8i3).  Hort.  kew. 
éd.  2.  V.  5.  (Non  Cassinia.   Obs.  comp.) 

42.  t  Calocephalus.  =  Calocephalus.  R.  Br.  Obs.  comp.  p. 
106  (1817).  Journ.  de  phys.  v.  86.  p.  409. 

43.*  Leucophyta.  =  Leucophj'ta.  R.  Br.  Obs.  comp.  p.  106 
(1817).  Journ.  de  phys.  v.  86.  p.  409. 

44.'''  RiCHEA.  =  Cartodium.  Soland.  ined.  —  Slœhelinœ  sp. 
Forst.  ined.  —  Craspedia.  Forst.  (1786.  malè.).  —  H.  Cass.  Dict. 
V.  11.  p.  355.  — Rie fica.  LabilL  (1800). 

45.  *"■  Leontonyx.  =  Gnaphalium  squarrosum.  Lin.  —  Leon- 
tonyx.  H.  Cass.  Dict. 

46.*  Leontopodium.  =  Fi/agmis  sp.  Tourn. —  Lin. — Juss. — ■ 
Gnaphalii  sp.  Lam.  —  V/iHd.  —  Jacq.  —  Decand.  —  Anten- 


564  IfSU  ' 

narice  sp.  Gsertn.  —  Leontopodium.  Pers.  (1807).  —  R.  Br. 
Obs.  comp.  p.  123.  (1817).  Journ.  de  phys.  v.  87.  p.  i5. — 
H.  Cass.  Bull.  sept.  1819.  p.  144. 

SECONDE    SECTION. 
Inulées- PROTOTYPES  (  Inuleœ -  Arche^jpœ) . 
Caractères  ordinaires.  Péricline  non  scaricux.  Stigmatophores 
arrondis  au  sommet.  Article  anthérifère  long;   appendice 
apicilaire  de  l'anthère,  obtus  ;  appendices  basildires  longs, 
non  pollinifères. 

I.  Cliuanlhe  ordinairement  nu  sur  une  partie  et  squamellé 
sur  Pautre. 

47.'''  FiLAGO.  =  Filaginis  sp.  Tourn.  —  Lin.  —  Gnaphalium. 
Vaill.  (1719).  —  Gnaphulii  sp.  Lam. —  E^'ax.  Gaertn.(]  791). — 
Micropi  sp.  Desf.  —  Decand.  —  Filago.  Willd.  —  H.  Cass. 
Bull.  sept.  1819.   p.  141.  Dict.  v.  17.   p.  2. 

48.  'î'  GiFOLA.  =  Filaginis  sp.  Tourn.  —  Vaill.  —  Lin.  — 
Adans.  — Juss. —  Gaertn.  —  Gnaplialii  sp.  Lam.  —  "\Villd.  — 
Smith.  —  Decand.  —  Gifola.  H.  Cass.  Bull.  sept.  1819.  p. 
342.  Dict.  V.  18.  p.  53i. 

49.*  LoGKiA.  =  Filaginis  sp.  Tourn.  —  Vaill.  —  Lin. — 
Adans.  —  Juss.  —  Ga*rtn.  —  Gnaplialii  sp.  Lam. —  Willd.  — 
Smith.  —  Decand. —  Log^î^.  H.  Cass.  Bull.  sept.  1819.  p.  140. 

5o.  *  MiCROPUs.  =  Gnaphalodrs.  Tourn.  —  Adans.  —  Fila- 
ginis sp.  Vaill.  —  Micropus.  Lin.  —  Gasrtn.  —  Micropi  sp. 
Desf.  —  Decand. 

61.*  Oglifa.  =  Filaginis  sp.  Tourn.  —  Vaill.  —  Lin.  — 
Gnaphalii  sp.  Lam.  —  Decand.  —  Oglifa.  H.  Cass.  Bull.  sept. 
181g.  p.   143. 

II.  Clinanthe  nu. 

62. 'î'  CoNVZA.  =  Conj'zœ  sp.  Tourn.  —  Vaill.  —  Lin.  — 
(3œteri  omnesbotanici ,  excepto  R.  Brown.  Obs.  comp.  p.  114. 
Journ.  de  phys.  v.  87.  p.  10.  2  5.  26.  —  Conjza.  H.  Cass. 
Dict.  V.   10.    p.  oo5  (1818). 

53.'''  Inula.  =  Asteris  sp.  Tourn.  —  Haller.  —  Alli.  — 
Mœnch.  —  Helenii  sp.  Vaill.  (1720).  —  Inulœ  sp.  Lin. —  He- 
leniinn.  Adans.  (1763). —  Inula.  Gaertn.  —  H.  Cass.  Dict.  — 
Enula.  JSeck.  —  Corvisartia  et  inulœ  sp.  Mérat.  —  Coryisarlia. 
H.  Cass.  Dict.  V.  10.  p.  572. 


,  •  INU  •        565 

54.*  LiMBARDA.  =  Asterîs  sp.  Tourn.  —  Inula  crithmoides. 
Lin.  —  Limbarda.  Adans.  (1763). 

65.*  DucHESNiA.  =  Aster  crispus.  Forsk.  —  Inulœ  sp.  Vent. 
—  Pers.  —  Desf.  —  Duchesnia.  H.  Cass.  Bull.  oct.  1817. 
p.  i53.  Dict.  V.  i3.   p.  545. 

56.^'  PtJLicARiA. =  ^sfen's  5p.  Tourn.  —  Alli.  — Helenii  sp. 
Vaill.  —  Inulœ  sp.  Lin.  —  ???Doria.  Adans.  —  Pulicariœ  sp. 
Gaertn.  (1791). 

67.*  TuBiLiUM.  =:  Erigeron  inuloides  ^  Poir. —  Tubilium.  H. 
Cass.  Bull.  oct.  1817.  p.  i55. 

58.'''  Jasonia.  =  Erigeron  tuberosum.  Lin. —  Inula  tuherosa. 
Lam.  —  Jasonia.  H.  Cass.  Bull.  oct.  i8i5.  p.  176.  Journ.  de 
phys.  V.  82.  p.    144.   145.  Dict. 

6g.  *  Myriadenl's.  =  Erigeron  glutinosum.  Lin.  —  Inula  saxa- 
lilis.   Lam.  —  Mjriadenus.  H.  Cass.  Bull.  sept.  1817.  p.  i38. 

60.*  Carpesium.  =  Conjzuides.  Tourn.  (1706).  —  Balsamitas 
sp.  Vaill.  —  Carpesium.    Lin.  (1741).  —  Adans. 

6].t?  Denekia.  =  Denekia.  Thunb.  (1800). 

62.  t  ?  Columellea.  =  Columellea.  Jacq.  (1798). 

63.  *  Pentanema.  =  Pentanema.  H.  Cass.  Bull,  mai  1 8 1 8.  p.  74. 
64.*  Î¥Hioî^A.  =  Chrjsocomœ  sp.  Forsk.  —   Conyza  pungens. 

Lam.  —  StœlieHnœ  sp.  Vahl.  —   Iphiona.  H.  Cass.  Bull.  oct. 
1817.  p.   i53.  Dict. 

III.  Clinanthe  squamellé. 

65. ''■  Rhanterium.  =  Rhanterium.    Desf.  (1799). 

66.  *!  Cylindrocline.  =??  Conyza  hirsuta.  Lin.  —  Cylin- 
drocline.  H.  Cass.  Bull.  janv.  1817.  p.  11.  Dict.  v.  12.   p.  3 18. 

67.*  MoLPADiA.  =  BupJitlialmum  cordifolium.  "Waldst.  — 
Molpadia.    H.  Cass.  Bull.  nov.  :8i8.    p.  j66. 

68.  '•■  !  ?  ?  Neurol.ena.  =  Conjzœ  sp.  Lin.  —  Caleœ  sp. 
Swartz.  —  Gaertn.  —  "Willd.  — JSeurolœna.  K.  Br.  Obs.  comp. 
p.  120  (1817).  Journ.  de  phys.  v.  87.  p.   14. 

TROISIÈME    SECTION. 

Inulbes-Buphïhalmées  (  Inulece - Buphthalmeœ). 
Caractères  ordinaires.  Péricline  non  scarieux.   Stigmalophores 
arrondis  au  sommet.  Article  anthérifère  court;  appendice 
apicilaire  de  l'anlhère ,  aigu;  appendices  basilaires  courts, 
poUinifères. 
-       »  ' 


566        /  INU  ♦  , 

I.  Clinanthe  squamelHfére. 
69.*  BiJPHTHALMUM.  =  Astcvoidis  sp.  Toum.  —  Biiphlhalwi 
sp.  Lin.  —   Gaertn.   —   Mœnch. —  Bustia.   Adans.  (i763). — 
? Buphthalmum.'ÎStck.-'- Buphthalinum.  H.  Cass.  Bull.  r.ov.  J&i8é 


P- 


166. 


70.  '''  Paixe^jis.  =  Asterisci  sp.  Tourn.  —  Vaill.  —  Buphthal- 
mi  sp.  Lin. —  Obeliscolhecœ  sp.  Adans.  —  ?  ?  Athalmum.  Neck- 
(1791).  —  Pallenis.   H.  Cass.  Bull.  nov.  1818.  p.  1G6. 

71.*  Nauplius.  =  Asterisci  sp.  Tourn.  —  Vaill.  —  Buph- 
thalmi  sp.  Lin.  —  Gœrtn.  —  ISauplius.  H.  Cass.  Bull.  nov. 
î8i8.    p.    166. 

72.*  Ceruana.  =   Ceruana.  Forsk.  (1775).  —  Juss.    —  H. 
Cass.  Dict.  V.   8.    p.   12.  ■ —  Buphilialmi  5p.  Vahl. 
IL  Clinanthe  inappendiculé. 

yS.  *  Egletes.  =  Malricaria  prostrala.  Swarlz.  —  Pyrethri 
sp.  Willd.  —  Chrjsanthemi  sp.  Pers.  —  Egletes.  H.  Cass.  Bull, 
oct.  1817.  p.  i53.  Dict.  V.  14.  p.  265.  V.  19.  p.  006. 

74.*  Changea.  =  Artemisiœ  sp.  Lin.  —  Grangea.  Adans. 
(1760). —  H.  Cass.  Dict.  v.  ig.  p.  5o4.  —  Grangeœ  sp.  Juss. 
—  Desf. —  Lam.  —  Poir.  —  Cotulœ  sp.  "WiHd.  —  Centipedce 
Sp.  Pers. 

76.'''  Centipeda.  =  Artemisiœ  sp.  Lin.  —  Sphœranthi  sp. 
Burm.  —  Grangeœ  sp.  Juss.  —  Desf,  —  Lam.  —  Poir.  — 
Centipeda.  Leur.  (1790).  —  H.  Cass.  Dict.  v.  19.  p.  3o5.  — 
Cotulœ  sp.  Willd.  —  Ccntipcdœ  sp.  Pers. 

IIL  Calathides  rassemblées  en  capitule. 

']G.'^'  ?  ?  Sph.eranthus.  ^^  Sphœranthos.  Vaill.  (1719).  — 
Sphœranthiis.  Ijn.  —  Polj'cephalos.  Forsk.  —  Scop.  —  (Non 
Sphœranthus.    Scop.  Intr.  ad  hist.  nat.  ) 

77.*  P  ?  ?  GvMNARRHENA.  =  Gj  miiarrh  en  a .  Desf.  Mém.  du 
mus.  d'hist.  nat.  v.  4.  {1818).  —  H.  Cass.  Dict.  v.  20.  p.  111. 

Remaj^ques  sur  le  tableau  précédent. 

I.  L'astérisque  placé  à  la  suite  du  numéro  d'ordre  indi- 
que qu'une  ou  plusieurs  espèces  du  genre  ont  été  soigneu- 
sement et  complètement  étudiées  par  nous- même  sur  des 
individus  vivans  ou  secs.  La  croix  indique  ,  au  contraire  , 
que  nous  n'avons  pu  ,  jusqu'à  présent,  étudier  le  genre  dont 


•  •  INU  •       567 

il  s'agit  que  sur  les  descriptions  ou  les  figures  publiées  par 
d'autres  botanistes.  Le  point  d'exclamation  simple  ,  double 
ou  triple ,  placé  à  la  suite  de  Tastérisque  ou  de  la  croix , 
signifie  que  le  genre  offre  une  ou  plusieurs  anomalies  graves, 
c'est-à-dire,  des  caractères  insolites  remarquables  et  qui  font 
une  exception  notable  au  signalement  du  groupe  général  ou 
partiel  dans  lequel  ce  genre  est  placé.  Le  point  d'interro- 
gation simple,  double  ou  triple,  placé  immédiatement  avant 
le  titre  du  genre ,  signifie  que  nous  avons  plus  ou  moins  de 
doute  sur  la  classification  de  ce  genre.  Le  même  signe,  placé 
immédiatement  avant  un  synonyme,  témoigne  nos  doutes  sur 
cette  partie  de  la  synonymie.  Les  chifTres  compris  entre  deux 
parenthèses  à  la  suite  du  nom  d'un  auteur  ou  de  la  citation 
de  son  ouvrage  ,  ont  pour  objet  de  faire  connoître  la  date 
précise  de  rétablissement  du  genre,  et  de  fixer  ainsi  le  droit 
légitime  de  l'inventeur.  Cette  indication  ,  omise  jusqu'à  pré- 
sent dans  toutes  les  synonymies  ,  auroit  incontestablement 
plusieurs  avantages  notables  ;  et  elle  n'est  qu'imparfaitement 
suppléée  par  l'ordre  suivant  lequel  on  dispose  les  synonymes. 
Il  seroit  encore  à  désirer,  pour  perfectionner  la  synonymie 
et  augmenter  son  utilité,  que  l'on  indiquât  par  les  adverbes 
henè  et  malè ,  ou  par  quelques  signes  équivalens,  le  mérite 
de  la  chose  que  l'on  cite.  Nous  n'avons  point  osé  exécuter 
une  innovation  aussi  délicate  ;  mais  nous  la  recommandons 
aux  botanistes  qui  ont  plus  de  crédit  et  d'autorité  que  nous. 
Au  moyen  des  deux  perfectionncmens  que  nous  proposons , 
et  qui  out  pour  objet  l'indication  des  dates  et  l'appréciation 
des  choses  ,  la  synonymie  devicndroit  ce  qu'elle  doit  être  , 
c'est-à-dire,  un  tableau  historique,  très-abrégé  ,  mais  instruc- 
tif, des  travaux  des  botanistes  sur  chaque  classe  ,  chaque 
ordre,  chaque  genre  et  chaque  espèce,  en  sorte  que  toute 
l'histoire  de  la  botanique  descriptive  se  trouveroit  dans  les 
synonymies.  Rédigée  suivant  ce  système,  la  synonymie  pour- 
roit  n'être  pas  trop  prolixe,  parce  qu'on  eu  exclueroit  sévè- 
rement toute  citation  d'auteurs  qui  n'ont  fait  que  copier 
leurs  devanciers.  Il  faudroit  bien  pourtant  citer  ceux  dont 
tout  le  travail  se  réduit  à  un  changement  de  nom  ;  mais  l'ad- 
verbe yr«s/rà,  un  zéro  ou  quelque  autre  signe  de  même  valeur, 
feroit  aussitôt  apprécier  le  mérite  de  la  chose  citée  avec 
cette  indication. 


668        '  INU  r 

Dans  la  crainte  de  donner  trop  d'étendue  à  notre  tableau , 
nous  MOUS  sommes  borné  à  indiquer  les  noms  des  auteurs, 
sans  citer  leurs  ouvrages.  Nous  avons  dû  toutefois  faire  excep- 
tion à  cette  règle  en  faveur  des  genres  les  moins  connus, 
tels  que  sont  tous  ceux  dont  nous  sommes  Tauteur,  et  qui 
se  trouvent  disséminés  soit  dans  ce  Dictionnaire  ,  soit  dans 
le  Bulletin  des  sciences.  Dans  le  tableau  ci-dessus,  Bull,  dé-» 
signe  le  Bulle'indes  sciences  par  la  société  phiîomatiqtte  de  Paris, 
et  Dict.  désigne  le  Dictionnaire  des  sciences  naturelles.  Lorsque 
notre  nom  se  trouve  cité  dans  la  synonymie  d'un  genre  qui 
ne  nous  appartient  pas,  c'est  que  nous  avons  réformé,  d"a 
près  nos  propre*  observations,  les  caractères  du  genre  ou  sa 
composition. 

II.  Pour  mériter  d'être  considéré  comme  le  véritable  au- 
teur d'un  genre,  il  ne  suOit  pas,  suivant  nous,  d'avoir  le 
premier  donné  à  ce  genre  un  nom  rendu  public  par  la  voie 
de  l'impression  :  il  faut  encore  l'avoir  décrit,  caractérisé  ou 
désigné  avec  une  exactitude  au  moins  suffisante  pour  qu'il 
puisse  être  reconnu  par  les  botanistes.  La  loi  contraire, 
quoique  généralement  admise ,  nous  paroit  aussi  déraisonnable 
qu'injuste,  et  nous  n'hésitons  pas  à  l'enfreindre.  C'est  pour- 
quoi, malgré  l'autorité  imposante  de  M.  R.  Brown  ,  nous 
avons  rejeté  le  nom  générique  de  craspedia  ,  jadis  inventé 
par  Forster ,  et  nqus  avons  donné  la  préférence  au  nom  de 
ric/iea,  beaucoup  plus  nouvellement  attribué  au  même  genre 
par  M.  Labillardière.  Notre  règle  s'applique  à  la  plupart  des 
genres  de  Neckcr,  à  beaucoup  de  genres  d'Adanson  ,  et  à  ceux 
de  quelques  autres  botanistes.  Les  genres  de  Necker,  surtout, 
sont  des  espèces  d'énigmes  fort  difficiles  à  deviner,  et  nous 
avons  eu  beaucoup  de  peine  à  établir  leur  synonymie,  qui 
le  plus  souvent  est  restée  douteuse ,  malgré  nos  efforts  pour 
l'éclaircir.  Cependant  nous  avons  reconnu,  parmi  les  genres 
de  ce  botaniste,  un  grand  nombre  de  ceux  qui  ont  été  pro- 
posés après  lui  comme  nouveaux  :  mais  nous  ne  pensons  pas 
que  les  noms  génériques  de  Necker  méritent  la  préférence , 
parce  qu'ils  sont  plus  anciens;  ils  doivent  perdre  ce  privi- 
lège par  l'inexactitude  des  descriptions,  et  par  le  défaut 
d'indication  des  espèces. 

Le  genre  Podospermum  de  M.  De,  Candolle    et  le   genre 


•  *  INU  •       569 

/ 
Podosperma  de  M.  Labillardiére  sont  très- différens  l'un  de 

l'autre,  et  doivent  subsister  tous  les  deux  :  mais,  comme  ils 
se  confondoient  par  leurs  noms ,  nous  avons  dû  nécessaire- 
ment changer  le  nom  de  podosperma,  qui  est  le  moins  an- 
cien; car  le  podospernmm  a  été  publié  en  i8o5  ,  et  le  podo- 
sperma en  f8o6. 

III.  Les  deux  genres  Liovdia  de  Necker  et  Lachnospermum 
de  Willdcnow  ne  sont  point  compris  dans  notre  tableau  , 
quoiqu'ils   appartiennent  peut-être  a  la  tribu  des  inulées. 

Il  nous  paroit  impossible  de  déterminer  avec  certitude  la 
plante  que  Necker  a  voulu  désigner  par  le  nom  de  liojdia. 
C'est,  suivant  lui,  une  espèce  linnéenne  cVinula,  qui  diffère 
des  vraies  inula  par  l'aigrette  presque  plumeuse  ,  et  le  péri- 
clinede  dix  squames  unisériées,  enfregreffces  inférieurement. 
Nous  serions  très-disposé  à  croire  que  c'est  Vinula  cœriilea  de 
Linnœus,  dont  le  péricline  auroit  été  fort  mal  décrit  par 
Necker  ;  mais  cette  conjecture  ne  s'accorde  guères  avec  une 
remarque  de  ce  botaniste,  qui  dit  que  les  genres  Tussitago 
et  Petasites  ont  de  l'affinité  avec  son  liojdia.  Au  reste,  Vinula 
cœrulea  ou  cernua  nous  semble,  d'après  la  description  de  Ber- 
gius,  devoir  être  rapporté  à  la  tribu  des  aslérées  plutôt  qu'à 
celle  des  inulées. 

Le  lachnosperm.um  de  Willdenow  appartient  sans  doute  à 
la  tribu  des  inulées  ou  à  celle  des  carlinées.  Ces  deux  tribus 
ont  beaucoup  d'aflinité  ;  mais  elles  diffèrent  essentiellement 
par  la  structure  du  style  ,  que  Willdenow  a  malheureusement 
négligé  de  décrire.  Cependant,  comme  ce  botaniste  attribue 
au  lachnospermum  un  clinanthe  garni  de  très -longues  fim- 
brilles ,  s'il  n'a  pas  pris  pour  des  fimbrilles  les  poils  dont  les 
fruits  sont  hérissés,  il  est  infiniment  probable  que  ce  genre 
est  une  carlinée.  Dans  le  cas  contraire,  ce  seroit  vine  inulée- 
gnaphaliée,  qu'il  faudroit  placer  entre  les  deux  genres  Sjn- 
carpha  et  Faustula. 

IV.  Le  tableau  desinulées  comprend  soixante-dix-septgenres, 
dont  trente-un  ont  été  fabriqués  par  nous.  On  ne  manquera 
pas  de  se  récrier  contre  une  telle  multiplicité  de  genres, 
car  ces  sortes  de  critiques  sont  très  à  la  mode  aujourd'hui.  Il 
nous  sera  facile  de  démontrer  que  ce  dont  on  se  plaint  comme 
d'un  abus  intolérable,  e;t  une  suite  nécessaire  du  perfection- 


570    ♦  mv  < 

nement  de  ]a  science.  Quel  est  le  but  de  la  botanique  des- 
criptive, et  quels  sont  ses  moyens?  Son  but  est  de  connoître 
les  véi^étaux  par  leurs  ressenibliinces  et  leurs  différences  :  ses 
moyens  sont  de  réunir  ceux  qui  se  ressemblent  et  de  séparer 
ceux  qui  diffèrent.  Plus  les  observations  deviendront  exactes, 
plus  on  découvrira  de  resseniblances  et  de  différences  entre 
les  êtres  que  Ton  comparera.  Si,  pour  exprimer  ces  ressem- 
blances et  ces  différences,  on  se  bornoit ,  comme  le  veulent 
nos  adversaires,  à  les  exposer  par  des  descriptions,  on  peut 
assurer  que  l'esprit  saisiroit  mal  les  rapports  et  que  la  mé- 
moire ne  les  retiendroit  point.  L'expérience  prouve  que  le 
seul  moyen  de  fixer  l'attention  et  d'aider  la  mémoire,  c'est 
d'attacher  un  nom  propre  aux  choses  que  l'on  décrit.  Pour 
nous  faire  mieux  comprendre ,  examinons  en  quoi  consiste 
le  travail  d'un  botaniste  qui  divise  un  ancien  genre  en  plu- 
sieurs genres  nouveaux,  et  tâchons  de  juger,  sans  partialité, 
ce  qu'il  peut  y  avoir,  dans  cette  opération,  d'utile  ou  de 
nuisible  aux  progrès  de  la  science. 

L'opération  dont  il  s'agit  suppose  nécessairement  que 
l'on  a  découvert  ou  remarqué,  entre  les  espèces  de  l'ancien 
genre ,  de  nouveaux  rapports  résultant  de  ressemblances  et 
de  différences  inaperçues  ou  négligées  précédemment.  En 
effet,  chacun  des  nouveaux  groupes  doit  être  distinct  des 
autres  par  quelques  différences,  et  il  doit  comprendre  des 
espèces  qui  se  ressemblent  plus  entre  elles  qu'elles  ne  res- 
semblent aux  espèces  des  autres  groupes.  Jusque-là  il  est 
incontestable  que  le  botaniste  novateur  a  fait  un  travail 
utile,  et  qu'il  ne  peut  mériter  aucun  blâme.  Mais  il  ne  se 
borne  pas  à  diviser  l'ancien  genre  en  plusieurs  groupes,  et  à 
les  caractériser  ;  il  veut  encore  désigner  chacun  d'eux  par  un 
nom  propre,  et  c'est  là  ce  qui  lui  attire  les  reproches  de  nos 
adversaires.  Nous  leur  répondons  d'abord  qu'ils  peuvent  d'un 
trait  do  plume  effacer  ces  noms  génériques  qui  leur  déplai- 
sent tant ,  et  que  l'utilité  du  travail  n'en  subsiste  pas  moins. 
Mais  nous  allons  plus  loin,  et  nous  soutenons  que  ces  noms 
eux-mêmes  sont  très-utiles  et  presque  indispensables,  surtout 
lorsque  les  caractères  des  groupes  sont  compliqués;  car,  ainsi 
que  nous  l'avons  dit ,  il  n'y  a  que  les  noms  propres  qui  puis- 
sent fixer  l'attention  et  aider  la  môipnoWe. 


^  *  INU  •      571 

La  seule  objection  sérieuse   qu'on  pourroit  nous  faire  est 
précisément  celle  à  laquelle  on  ne  songe  pas.  La  voici  dans 
toute  sa   force.    L'histoire   naturelle  n'est    pas  seulement  la 
science  des  différences  qui  existent  entre  les  êtres;  elle  est 
aussi  celle  de  leui^s  ressemblances.  En  divisant  un  grand  genre 
en  plusieurs  petits  genres,  on  perfectionne  en  effet  la  science 
des  différences  ;   mais  il  semble   qu'on   détériore   en  même 
proportion  Ja  science  des  ressemblances.  Oui,  sans  doute,  si 
l'on  néglige  de  subordonner  les  groupes  selon   leurs  divers 
degrés  d'importance.  Mais,  si  l'on  a   soin  d'établir  convena- 
blement cette  subordination  ,  on  perfectionne  tout  à  la  fois 
la  science  des  ressemblances  et  celle  des  différences.  Citons 
un  exciiiple.  Les  cinq  genres  Fi7ago  ,  Gifola,  Logjia ,  Micro- 
pus  ,  OgUfa,  peuvent  être  considérés  comme  ne  formant  qu'un 
seul    genre    aux  yeux  de  ceux  qui  n"aiment  point  la  multi- 
plicité de   ces  sortes  de    groupes.    En  les   distinguant,   nous 
croyons  avoir   perfectionné   la  connoissance   des  différences 
qiii  existent  entre  ces  plantes.  Mais,  en  les  réunissant  en  un 
groupe  d'ordre  supérieur,  dans  notre   tableau   des  inulées- 
prototypes,  dont  ce  groupe  fait  partie,  nous  avens  conservé 
et  peut-être  même  perfectionné   la   connoissance   de   leurs 
ressemblances.    Au   lieu   de   nous   borner  à   caractériser  ce 
groupe,  nous  aurions  pu  et  peut-être  dû  lui  donner  un  nom, 
tel  que  celui  de  Filago  ,  si  nous  voulions  le  considérer  comme 
un  genre    primaire   ou    proprement    dit,    comprenant    cinq 
genres  secondaires  ou  sous -genres;  ou  bien  celui  de  Filu- 
ginées   ou  de   Gnaphaloïdées ,  si  nous   voulions  le  considérer 
comme  une  petite  section  naturelle  comprenant  cinq  genres 
proprement  dits. 

Ainsi ,  pour  perfectionner  tout  à  la  fois  la  science  des 
différences  et  celle  des  ressemblances  ,  il  faut  multiplier  beau- 
coup les  divisions,  et  ne  point  les  ranger  sur  la  même  ligne, 
mais  établir  entre  elles  une  subordination  proportionnée  à 
leurs  différens  degrés  d'importance.  C'est  pourquoi  nous  pen- 
sons que  désormais  les  progrés  de  la  botanique  descriptive 
exigent  absolument  la  distinction  des  genres  primaires  et  des 
genres  secondaires,  et  celle  des  espèces  primaires  et  des  es- 
pèces secondaires.  Chaque  genre  primaire  ou  secondaire  doit 
porter  un  nom  substantM'  :  chaque  espèce  primaire  ou  secon- 


672      '  lîSU  •  c 

daire  doit  être  distinguée  par  un  adjectif.  Plusieurs  botanistes 
admettent,  comme  nous,  les  deux  sortes  de  genres,  et  les 
subordonnent  convenablement:  mais  il  nous  semble  qu'ils  ré- 
duisent à  peu  de  chose  l'utilité  des  genres  secondaires  ou  sous- 
genre/.,  en  attachant  les  noms  spécifiques  au  nom  du  genre 
primsiire,  au  lieu  de  les  attacher  au  nom  du  genre  secon- 
daire. Ceti'e  méthode  est  évidemment  contraire  à  l'ordre 
naturel  des  idées. 

Pour  achever  l'apologie  de  la  multiplicité  des  genres,  nous 
devons  encore  faire  observer  que  les  caractères  d'un  genre 
sont  d'autant  plus  instructifs  qu'ils  sont  plus  nombreux, 
parce  qu'alors  ils  donnent  une  connoissance  plus  complète 
de  la  structure  propre  au  genre  qu'ils  caractérisent.  Or,  il 
est  certain  que  des  caractères  génériques  nombreux  ne  peu- 
vent presque  jamais  convenir  tous  exactement  à  beaucoup 
d'espèces  différentes.  Pour  restreindre  le  nombre  des  genres, 
il  faut  donc  nécessairement  de  deux  choses  l'une  :  ou  leur 
attribuer  des  caractères  fautifs  et  trompeurs,  qui  ne  s'appli- 
quent exactement  qu'à  une  ou  quelques-unes  des  espèces  de 
chaque  genre;  ou  bien  réduire  les  caractères  génériques  à 
un  signalement  très-vague  et  très-succinct,  qui  ne  fait  pres- 
que point  connoîlre  le  genre  ainsi  caractérisé.  Cependant  le 
but  de  la  science  est  de  parvenir,  autant  qu'il  est  possible, 
à  la  connoissance  la  plus  exacte  et  la  plus  complète  des  choses 
qu'elle  étudie. 

Au  reste,  nous  sommes  loin  de  prétendre  que  la  multipli- 
cité des  genres  soit  exempte  d'inconvéniens,  et  nous  avouons 
qu'elle  peut  dégénérer  en  abus  ;  mais  nous  soutenons  que 
l'abus  du  S3stènie  inverse  est  beaucoup  plus  contraire  aux 
progrès  de  la  science,  que  ce  système  a  bien  plus  d'incon- 
véniens que  l'autre,  et  que  la  confusion  des  genres  mal  à 
propos  distingués  est  une  opération  beaucoup  plus  facile  que 
la  distinction  des  genres  mal  à  propos  confondus. 

Disons  aussi  un  mot  sur  les  noms  génériques.  Dans  le  but 
de  rendre  ces  noms  significatifs  et  caractéristiques,  on  a  cou- 
tume de  les  composer  de  l'assemblage  de  plusieurs  mots  grecs. 
Cette  méthode  produit  le  plus  souvent  des  noms  prolixes, 
des  noms  désagréables  à  l'oreille  ,  des  noms  qui  se  ressemblent 
en  partie  et  peuvent  facilement  se  confondre.  Loin  d'aider 


»  INU  *    575 

notre  mémoire  et  de  guider  notre  esprit,  ces  noms  ne  sont 
bons  qu'à  nous  égarer,  parce  que  le  caractère  exprimé  par 
chacun  d'eux  est  tantôt  commun  à  beaucoup  de  genres  diffé- 
rens,  et  tantôt  particulier  à  une  seule  espèce  du  genre.  Con- 
vaincu qu'un  nom  générique  est  d'autant  meilleur  qu'il  est 
plus  insignifiant  et  moins  désagréable  à  l'oreille  ,  nous  avons 
donné  à  la  plupart  de  nos  genres  des  noms  tout-à-fait  con- 
traires aux  lois  arbitrairement  établies,  ce  qui  procurera 
sans  doute  à  quelques  botanistes  le  moyen  facile  de  s'appro- 
prier nos  genres  en  changeant  leurs  noms. 

Il  est  digne  de  remarque  que  les  deux  ordres  de  plantes 
qui  renferment  le  plus  de  genres,  c'est-à-dire,  l'ordre  des 
synanthérées  et  celui  des  graminées,  sont  précisément  ceux 
où  la  fleur  proprement  dite  offre  le  moins  de  variations  dans 
sa  structure,  en  sorte  que  chacun  de  ces  deux  ordres  pour- 
roit  être  considéré,  par  un  botaniste  systématique,  comme 
ne  formant  qu'un  seul  genre,  puisque,  dans  les  autres  ordres 
de  végétaux  ,  les  genres  sont  fondés  sur  les  différences  qui 
existent  dans  la  structure  des  fleurs.  Les  synanthérées  et  les 
graminées  ont  encore  ceci  de  commun,  que  les  fleurs  sont 
petites,  d'une  structure  très-simple,  presque  toujours  grou- 
pées plusieurs  ensemble ,  et  toujours  accompagnées  de  bractées 
qui  leur  servent  d'enveloppe.  Les  modifications  de  l'inflores- 
cence et  les  parties  accessoires  étrangères  à  la  fleur  propre- 
ment dite  acquièrent ,  dans  ces  deux  ordres  ,  une  prépon- 
dérance qu'ils  n'ont  point  ailleurs,  et  deviennent  la  source 
féconde  et  presque  unique  où  les  botanistes  puisent  la  plu- 
part des  différences  génériques.  Cette  remarque  est  une  nou- 
velle preuve  d'un  principe  sur  lequel  nous  allons  bientôt 
insister  :  ce  principe,  reconnu  par  quelques  botanistes ,  mais 
dont  en  général  on  n'apprécie  pas  assez  l'importcince ,  est  que 
les  mêmes  parties  ou  les  mêmes  caractères  n'ont  pas  la  même 
valeur  dans  les  différens  groupes  de  végétaux.  Nous  croyons 
avoir  indiqué  la  vraie  cause  de  cette  variation  de  valeur  dans 
notre  premier  Mémoire  sur  la  Graminoîogie  :  voyez  le  Journal 
de  -phjsique  de  Décembre  1820,  pag.  z,58. 

V.  En  divisant  naturellement  l'ordre  des  synanthérées  en 
tribus,  les  tribus  en  sections,  et  les  sections  en  sous-sections 
composées  de  plusieurs  Q^uves ,  nous  avons  dû  nous  efforcer 


574  INU  € 

de  caractériser  tous  ces  groupes  ;  car,  en  nous  bornant  à  les 
désigner  par  des  noms,  comme  a  faitM.Kunth,  nous  eussions 
rendu  notre  travail  très-facile  sans  doute,  mais  aussi  complè- 
tement inutile.  Les  résultats  de  nos  recherches  ont  été  peu 
satisfaisans  ;  et  cependant  nous  avons  persévéré  dans  notre 
entreprise,  parce  que  nous  pensons  que  Timpossibilité  d'at- 
teindre la  perfection,  el  même  d'en  approcher,  ne  doit  jamais 
empêcher  de  se  diriger  vers  elle  jusqu'au  point  où  il  est  per- 
mis de  parvenir. 

Nous  avons  reconnu  qu'aucune  partie  de  l'organisation  des 
synanthérées  ne  pouvoit  être  employée  seule  pour  caractériser 
un  groupe  naturel,  et  à  plus  forte  raison  pour  caractériser 
tous  les  groupes  de  même  importance.  Les  caractères  de  cha- 
que groupe  doivent  donc  être  fournis  par  le  concours  de 
plusieurs  parties  :  d'où  il  suit  que  l'exposition  de  ces  carac- 
tères esi  nécessairement  très-longue,  très-compliquée  et  très- 
minutieuse.  Remarquez  que  la  même  partie  n'a  pas  la  même 
valeur  dans  les  diflférens  groupes  de  même  importance.  Par 
exemple,  la  structure  du  style,  qui  caractérise  en  général 
assez  bien  la  plupart  des  tribus  ,  caractérise  mal  celle  des 
inulées  ;  et  les  étamines  obtiennent,  dans  la  tribu  des  inulées, 
une  prééminence  qu'elles  n'ont  point  dans  la  plupart  des 
autres  tribus.  De  même,  la  corolle  caractérise  fort  bien  quel- 
ques tribus  et  fort  mal  plusieurs  autres,  et  l'on  peut  en  dire 
autant  de  toutes  les  parties  dés  synanthérées. 

Les  cai'aclères  d'un  groupe  naturel  de  synanthérées  sont 
tous,  ou  presque  tous,  sujets  à  des  modifications  ou  varia- 
tions qui  les  rendent  très-souvent  inexacts;  mais,  comme  ils 
sont  nombreux  et  fournis  par  diverses  parties ,  ils  se  suppléent 
mutuellement,  cest-à-dire  que,  l'un  ou  quelques-uns  d'eux  se 
trouvant  en  défaut,  les  autres  suffisent  presque  toujours  pour 
déterminer  la  classification  avec  assez  de  certitude. 

Ces  considérations,  et  plusieurs  autres  que  nous  avons  ex- 
posées ailleurs ,  prouvent  qu'il  est  impossible  de  faire  pour 
les  synanthérées  une  méthode  de  classification  naturelle,  et 
qui  soit  en  même  temps  simple,  claire,  facile,  commode, 
exacte,  infaillible,  régulièie  et  symétrique.  Ceux  qui  ne 
croient  pas  ces  divers  genres  de  perfection  incompatibles,  et 
qui  nous  reprochent  de  n'avoir  pasïu  les  concilier  dans  notre 


.  '  INU  •     575 

méthode,  n'ont  sans  doute  étudié  que  bien  superficiellement 
l'orclre  des  synanthérées. 

Noire  tableau  de  la  tribu  des  iuulées  oOre  trois  sections 
très-naturelles,  mais  distinguées  par  des  caractères  assez  com- 
pliqués, minutieux ,  équivoques,  qui  se  réduisent  à  des  nuan- 
ces souvent  fort  légères,  et  sont  sujets  à  beaucoup  d'exceo- 
tions. 

La  première  section,  celle  des  gnaphaliées ,  est  la  plus 
nombreuse.  Nous  avons  d"abord  essayé  de  la  diviser  en  plu- 
sieurs groupes  caractérisés  par  la  structure  de  l'aigrelte;  puis 
nous  avons  tenté  d'établir  cette  division  sur  la  composition 
de  lacalathide;  un  troisième  essai  a  été  fait  sur  leclinanthe, 
et  un  quatrième  sur  le  péricline.  Il  n'est  pas  inutile  de  pré- 
senter ici  ces  quatre  essais,  en  omettant,  pour  abréger,  la 
liste  des  genres. 

Distribution  des  gnaphaliées,  fondée  sur  Vaigrette.  1."  Ai- 
grette nulle.  2.°  Aigrette  stéphanoide.  5."  Aigrette  mixte  : 
en  partie  sféphanoïde,  laminée  ou  paléiforme  ;  en  partie 
filiforme,  péniciUée  ou  plumeuse.  4.°  Aigrette  de  squamel- 
lules  filiformes,  non  manifestement  plumeuses  ,  mais  souvent 
épaissies  supérieurement.  5.°  Aigrette  manifestement  plu- 
meuse. 

Distribution  des  gnaphaliées ,  fondée  sur  la  composition 
delà  calathide.  1."  Ca.athide  radiée.  2."  Calathide  semi-radiéc. 
5.^  Calathide  discoïde.  4.°  Calathide  incouronnée ,  pluriflore. 
5."  Calathide  incouronnée,  souvent  uniflore  ou  biflore. 

Distribution  des  gnaphaliées,  fondée  sur  le  clinanlhe,  1.» 
Clmanthe  nu.  2."  Clinanthe  pourvu  d'appendices  irréguliers. 
.'.°  Clinanthe  pourvu  de  vraies  squamelles. 

Distribution  des  gnaphaliées,  fondée  sur  le  péricline.  1.° 
Squames  inappendiculées,  entièrement  appliquées.  2."  Squa- 
mes pourvues  d'un  appendice  inappliqué,  mais  non  pétaloïde, 
3.°  Squames  pourvues  d'un  appendice  pétaloïde ,  c'est-à-dire, 
étalé,  radiant  et  d'une  couleur  éclatante.  4.°  Squames  pour- 
vues d'un  appendice  rélléchi ,  coriace,  roide ,  de  coule"ur 
brune. 

Aucune  de  ces  tentatives  n'ayant  produit  une  distribution 
naturelle  des  genres,  nous  avons  dû  abandonner  cette  mé- 
thode artificielle  et  systématique  ,   et   recourir  a  la  combi- 


576      .  INU 

naison  des  affinités.  Cette  combinaison  a  eu  pour  résultat  la 
di\ision  des  gna;)haliées  en  sept  groupes,  dont  le  dernier, 
plus  nombreux,  est  subdivisé  en  deux  parties.  Tous  ces  groupes 
sont  plus  ou  moins  naturels,  et  plusieurs  pourroient  être 
considérés  comme  des  genres  composés  de  sous-geiires.  Leurs 
caractères  distinctifs,  fournis  tantAt  par  telle  partie  de  la 
structure,  tantôt  par  telle  autre,  n'offrent  point  la  symétrie, 
la  corrélation  ,  l'opposition  ,  que  l'on  admire  dans  les  classifi- 
cations artificielles ,  et  ils  ne  sont  pas  toujours  d'une  rigou- 
reuse exactitude.  S'ils  paroissent  être  plus  simples  que  ceux 
des  sections  et  des  tribus,  c'est  que,  pour  abréger,  nous  avons 
omis,  peut-être  à  tort,  d'exposer  l'ensemble  des  caractères 
de  ces  petits  groupes,  pour  nous  borner  à  présenter  le  signa- 
lement qui  nous  a  paru  le  plus  notable. 

La  plupart  de  ces  remarques  sont  également  applicables 
aux  groupes  formés  dans  les  deux  autres  sections.  En  général, 
et  sauf  exceptions,  on  peut  observer  que  ces  petits  groupes 
sont  d'autant  plus  difficiles  à  caractériser  exactement  qu'ils 
sont  plus  naturels.  C'est  ainsi  que,  dans  la  section  des  inu- 
lées- prototypes,  le  premier  groupe,  qui  est  le  plus  naturel, 
ne  pourroit  être  bien  caractérisé  que  par  une  assez  longue 
description. 

Les  difficultés  que  nous  avons  éprouvées  pour  établir,  dans 
l'ordre  des  synanthérées,  des  tribus,  des  sections  et  dessous- 
sections,  résultent  principalement  d'une  chose  que  les  bota- 
nistes semblent  méconnoitre,  et  que  nous  ne  saurions  trop 
répéter:  c'est  que  la  valeur  d'un  même  organe  ou  d'un  même 
caractère  n'est  pas  égale  dans  les  différeus  groupes  de  même 
importance.  L'évaluation  ou  la  subordination  régulière  et 
graduelle  des  organes  vu  des  caractères  est  donc  impossible 
à  établir  d'une  manière  générale  ,  et  il  faut  chercher  péni- 
blement celle  qui  est  propre  à  chaque  groupe,  à  chaque 
genre,  sans  quoi  l'on  retombe  aussitôt  dans  l'arbitraire,  et 
Ion  n'obtient  qu'une  classification  très-peu  concordante  avec 
l'ensemble  des  affinités. 

VL  Nous  avons  éprouvé  aussi  de  très- grandes  difficultés 
pour  coordonner  convenabkment  les  soixante-dix-sept  genres 
de  la  tribu  des  inulées  suivant  une  série  linéaire,  simple  et 
droite.    En   effet ,  cette  disposition    exprime   seulement  les 


,  •  INU  '       677 

affinités  de  chaque  genre  avec  celui  qui  le  précède  et  avec 
celui  qui  le  suit;  mais  elle  ne  peut  indiquer  ses  affinités  avec 
plusieurs  autres  genres  du  même  groupe.  Rebuté  d'abord 
par  ces  difficultés,  et  séduit  par  des  apparences  trompeuses, 
nous  avons  essayé  de  disposer  les  genres  suivant  un  autre 
mode,  prôné  depuis  long-temps  par  quelques  botanistes  spécu- 
latifs, comme  le  vrai  moyen  d'élever  la  classification  natu- 
relle au  plus  haut  degré  de  perfection.  Cette  métiiode  con- 
siste à  disposer  les  genres  sur  un  plan  ,  à  peu  près  comme 
les  différentes  parties  d'une  région  de. la  terre  sont  disposées 
sur  une  carte  géographique  représentant  cette  région*  Nous 
avons  multiplié  nos  tentatives  avec  beaucoup  de  persévé- 
rance, en  les  combinant  et  les  variant  de  toutes  sortes  de 
manières,  et  le  dernier  résultat  de  ce  travail  pénible  a  été 
de  nous  convaincre  1."  que  l'exécution  parfaite  de  cette 
méthode  est  absolument  impossible;  2.°  que  son  exécution 
imparfaite  et  praticable  produit  une  disposition  beaucoup 
moins  bonne  que  la  série  linéaire,  simple  et  droite;  3."  que 
cette  méthode  est  contraire  à  la  nature  de  notre  entende- 
ment; 4."  que  la  série  linéaire,  simple  et  droite,  est  et  sera 
toujours,  malgré  ses  imperfections,  la  meilleure  de  toutes 
les  dispositions  et  la  plus  naturelle  ,  ou  ,  pour  mieux  dire 
la  seule  bonne  et  la  seule  naturelle;  5.°  qu'il  y  a  des  moyens 
fort  simples  pour  remédier  aux  défauts  de  la  série  linéaire. 
Le  but  de  la  njéthode  géographique,  appliquée  à  la  dispo- 
sition des  genres,  est  d'exprimer  1.°  toutes  les  affinités  de 
ces  genres;  2.°  les  différens  degrés  de  leurs  affinités;  3."  les 
différentes  sortes  d'affinités.  JNous  avons  appris  par  notre 
propre  expérience  que  ,  môme  en  se  bornant  à  un  groupe 
de  genres  peu  nombreux,  une  simple  surface  ne  suffi't  pas 
pour  la  disposition  convenable  des  signes  qui  doivent  indi- 
quer, qualifier  et  mesurer  toutes  les  affinités.  11  faudroit, 
pour  approcher  du  but  qu'on  se  propose,  construire  Un  ré- 
seau dont  une  partie  s'étendroit  sur  cette  surface,  tandis 
qu'une  autre  s'éieveroit  au-dessus,  et  qu'une  autre  encore 
s'abaisseroit  au-dessous  d'elle.  Remarquez  bien  qu'en  suppo- 
sant possible  la  construction  de  ce  réseau  à  trois  dimensions,' 
on  n'atteindroit  pas  encore  au  but;  car,  pour  offrir  le  tableau 
complet  des  affinités  d'un  genre  avec  les  autres  genres  dii 
23.»  37 


57»       '  INU 

même  groupe,  il  faut  placer  au  centre  ïe  genre  dontîl  s'agît^ 
et  disposer  autour  de  lui  tous  les  autres  genres ,  à  des  dis- 
tances plus  ou  moins  grandes  selon  les  degrés  d'à flfini tés.  Mais, 
comme  il  est  impossible  que  tous  les  genres  se  trouvent  en 
même  temps  au  centre  et  à  la  circonférence  ,  il  est  clair  qu'on 
ne  peut  pas  exprimer,  par  un  seul  et  même  réseau,  les  alB- 
nités  respectives  de  tous  les  genres  d'im  groupe. 

La  représentation  exacte  et  complète  des  divers  degrés 
d'affinités  est  tout  aussi  impraticable  que  la  simple  indication 
de  ces  affinités.  Telle  plante  ressemble  beaucoup  à  telle  autre 
par  une  partie  de  sa  structure,  et  en  diffère  beaucoup  par 
une  antre  partie.  La  méthode  seroit  très-imparfaite  et  man- 
queroitson  but,  si  elle  n'exprimoit  pas  ces  divers  rapports; 
et  cependant  il  est  impossible  d'établir  une  disposition  telle 
que  deux  plantes  se  trouvent  à  la  fois  rapprochées  et  éloignées 
Tune  de  l'autre. 

Les  obstacles  que  nous  avons  signalés,  et  plusieurs  autres 
également  insurmontables,  prouvent  qu'il  faut  renoncer  pour 
toujours  à  l'exécution  parfaite  de  la  méthode  géographique 
ou  réticulaire.  Mais  nous  convenons  qu'il  est  possible  et  même 
très-facile  de  tracer,  sur  une  feuille  de  papier,  un  tableau 
représentant,  non  pas  toutes,  mais  quelques-unes  des  affini- 
tés; non  pas  les  mesures  exactes  de  ces  affinités,  mais  des 
mesures  très-peu  approximatives;  non  pas.,  enfin,  les  diffé- 
rentes sortes,  mais  une  seule  sorte  d'affinité. -De  petits  cercles, 
contenant  chacun  un  nom  générique,  indiqueront  les  genres; 
des  lignes  droites  rayonnant  de  chaque  cercle  vers  plusieurs 
autres  exprimeront  les  affinités  des  genres  Joints  parées  lignes; 
les  différetiles  longueurs  de  ces  rayons  mesureront  les  affi- 
nités, et  des  noms  d'organes  écrits  parallèlement  aux  lignes 
de  ce  réseau  feront  connoîfre  quelle  sorte  d'afïïnité  se  trouve 
indiquée  et  mesurée.  Maintenant  il  faut  juger  si  un  tableau 
aussi  incomplet  et  aussi  imparfait  seroit  préférable  à  une 
série  linéaire  bien  ordonnée.  Nous  n'hésitons  pas  à  préférer 
la  série  linéaire,  pour  deux  principaux  motifs.  i.°  Elle  n'est 
point  trompeuse  :  chacun  sait  qu'elle  n'exprime  que  les  affi- 
nités de  chaque  genre  avec  celui  qui  le  précède  et  ct'lui  qui 
le  suit,  tandis  que  le  réseau  annonce  la  prétention  illusoire 
et  mensongère   d'exprimer  toutesjles  affinités.    2.°  La  série 


«  '  INU  •      579 

iînéaire  est  infiniment  moins  arbitraire  que  le  réseau,  parce 
que  celui  qui  dispose  une  série  est  lirtiité  dans  ses  choix 
d'affinités  par  des  bornes  trés-étroites,  tandis  que  le  cons- 
tructeur du  réseau,  beaucoup  moins  restreint  dans  ses  choix, 
se  perd  dans  le  vague  des  combinaisons  et  ne  sait  à  quoi  se 
fixer.  On  peut  affirmer  que  plusieurs  botanistes  d'égale  force  , 
travaillant  séparément  sur  un  même  groupe  de  genres,  se 
trouveront  à  peu  près  d'accord  dans  la  disposition  d'une 
série  linéaire  ,  tandis  que  les  différens  réseaux  tracés  par  eux 
n'auront  entre  eux  aucune  ressemblance. 

L'idée  d'une  disposition  géographique  ou  réticulaire,  qui 
semble,  au  premier  aperçu,  très-philosophique,  est  repous- 
sée par  la  vraie  philosophie.  li'erreur  capitale  des  partisans 
de  cette  méthode   est  de  ne  considérer  dans  la  science  que 
les  choses  quelle  étudie  :   ils  oublient  tout -à -fait  que  nous 
ne  pouvons  étudier  ces  choses  qu'à  l'aide  de  nos  facultés  in- 
tellectuelles,  et    qu'ainsi   la  science  doit   nécessairement  se 
conformer  à  la  nature  de  notre  entendement  et  se  propor- 
tionner à  sa  foiblesse.    La  nature  de  notre  entendement  est 
telle  que  nous  ne  pouvons  comparer  que   deux  objets  à  la 
fois  :  d'où  il  suit  que  les  vrais  rapports  des  choses,  quoique 
réellement  simultanés ,  ne  peuvent  être  envisagés  par  nous 
que  dans  un  ordre  successif.  C'est  pour  cela  que  le  langage, 
qui  est  une  image  fidèle  des   opérations  de  notre  entende- 
ment ,  se  présente  sous  la  forme  d'une  série  linéaire  ,  simple 
et  droite.  Vainement  on  nous  objectera  l'exemple  des  cartes 
géographiques.  Une  mappemonde  est  un  portrait  de  la  terre 
en  miniature,  mais  n'est  point  une  géographie;  de  même  que 
la  figure  dune  plante  n'est  point  sa  description  ni  son   his- 
toire. Le  géographe,  qui  fait  un  traité  sur  la  science  dont  il 
s'occupe,  est  obligé  de  décrire  successivement  les  différentes 
régions ,  et  de  les  présenter  ainsi  a  ses  lecteurs  dans  un  ordre 
linéaire.    L'historien  n'a-t-il  pas  aussi  à  retracer  des  événe- 
mens  multipliés  qui  ont  eu  lieu  simultanément  P  Cependant 
il  faut  bien  qu'il  les  dispose  dans  un  ordre  linéaire  et  successif. 
Le  philosophe  lui-même  aperçoit   plusieurs  rapports  qui  se 
pressent  tous  à  la  fois  autour  du  point  qu'il  discute  ,  et  il  ne 
peut  les  développer  que  l'un  après  l'autre. 

Il  n'y  a  rien  de  plus  f^x  que  la  comparaison  qu'on  veut 


58o  INU 

établir  entre  une  carte  géographique  et  un  réseau  expri- 
mant les  affinités  des  êtres.  Nous  le  répétons,  la  carte  géo- 
graphique n'est  rien  autre  chose  qu'un  portrait  parfaitement 
ressenjblant  :  le  réseau  est  une  analyse  ,  une  combinaison 
d'abstmctions,  une  conception  plus  ou  moins  ingénieuse  de 
notre  esprit,  et  dont  le  type  ne  se  trouve  nulle  part  dans 
la  nature.  Il  est  vrai  que  l'exécution  complète  et  parfaite  de 
la  méthode  réticulairc,  si  elle  étoit  possible,  produiroit  aussi 
une  sorte  de  portrait  fait  avec  des  signes  de  pure  convention , 
ou  plutôt  une  description  écrite  en  caractères  hiéroglyphi- 
ques; mais,  dans  ce  cas,  le  réseau  seroit  si  compliqué  qu'il 
seroit  inintelligible,  et  les  rapports  indiqués  seroient  si  mul- 
tipliés qu'on  n'en  remarqueroit  aucun.  D'ailleurs,  présenter 
l'image  ou  le  portrait  d'un  objet  matériel,  c'est  le  faire  con- 
noître  à  nos  yeux,  mais  non  point  à  notre  entendement. 
L'analyse  opérée  par  le  langage  est  le  meilleur  moyen  de' 
convertir  cette  connoissance  empirique  ou  visuelle  en  une 
connoissance  intellectuelle  et  scientifique.  Le  réseau  est  aussi, 
comme  le  langage,  une  méthode  d'analyse;  mais  une  mauvaise 
méthode,  parce  qu'elle  n'est  point  en  harmonie  avec  l'ordre 
de  nos  idées  et  les  formes  de  notre  intelligence.  Un  aiitre 
défaut  de  cette  méthode  d'analyse,  c'est  qu'elle  a  besoin  elle- 
même  d'être  analysée;  ce  qui  la  rend  à  peu  près  inutile.  En 
effet ,  le  réseau  sera  d'autant  plus  compliqué  qu'il  sera  plus 
parfait  ,  c'est-à-dire  qu'il  exprimera  un  plus  grand  nombre 
de  rapports;  mais,  pour  comprendre  ce  réseau  si  compliqué 
et  se  rendre  propres  les  notions  qu'il  exprime  ,  il  faudra 
l'expliquer,  le  développer,  l'analyser,  le  décomposer,  par 
un  discours,  ou  tout  au  moins  par  une  suite  d'opérations 
mentales  :  et  ne  voyez-vous  pas  que  cette  nouvelle  analyse 
indispensable  n'est  autre  chose  que  la  substitution  de  la  mé- 
thode linéaire  à  la  méthode  réticulaire  ?  Enfin,  et  sous  un 
autre  rapport  bien  évident,  le  réseau  le  plus  parfait  ne  pour- 
roit  jamais  dispenser  de  recourir  à  la  série  linéaire  ;  car,  pour 
écrire  dans  un  livre  l'histoire  ou  la  description  des  êtres,  il 
faut  bien  nécessairement  les  présenter  dans  un  ordre  successif. 
Ainsi,  la  disposition  réticulaire  ne  peut  se  passer  du  secours 
de  Id  disposition  linéaire  ,  tandis  que  la  disposition  linéaire 
peut  se  passer  du  secours  de  la  disprîsition  réticulaire  ,  comme 
nous  allons  bientôt  le  démontrer. 


»        »  mu  •    ss, 

i\ous  pourrions  approfondir  davantage  ce  sujet  important; 
car  les  argumens  se  présentent  en  foule  pour  réfuter  le  sys- 
tème dont  il  s'agit,  et  nous  ne  sommes  embai'rassé  que  du 
choix;  mais  nous  en  avons  assez  et  peut-être  trop  dit  pour 
établir  que  la  série  linéaire  ,  simple  et  droite ,  est  la  meilleure 
et  la  plus  naturelle  de  toutes  les  dispositions  imaginables. 
Nous  disons  la  plus  naturelle  ,  parce  que  ,  si  elle  n'est  pas 
entièrement  conforme  à  la  nature  des  objets  extérieurs  que 
nous  étudions,  elle  est  au  moins  parfaitement  conforme  à 
la  nature  de  notre  propre  entendement  qui  ks  éîudic. 

Pour  terminer  cette  discussion  ,  démontrons  que  les  défauts 
de  la  série  linéaire  peuvent  être  corrigés  ou  atténués  par 
deux  moyens,  qu'il  faut  employer  concurremment.  Le  pre- 
mier consiste  à  faire  un  choix  judicieux  entre  les  affinités 
des  genres  dont  on  combine  la  disposition.  Chaque  genre  a 
de  l'affinité  avec  plusieurs  autres  ;  mais  ces  affinités  sont 
presque  toujours  inégales ,  et  il  est  bien  rare  qu'on  n'en 
trouve  pas  deux  assez  prépondérantes  pour  fixer  la  place  du 
genre  dont  il  s'agit  entre  celui  qui  doit  le  précéder  et  celui 
qui  doit  le  suivre.  Il  est  vrai  que  ces  combinaisons  partielles, 
faites  d'abord  séparément  pour  chaque  genre,  sont  souvent 
inconciliables  avec  la  disposition  générale  à  laquelle  il  faut 
définitivement  parvenir  :  c'est  alors  que  le  classificateur  doit 
faire  preuve  de  talent  et  de  connoissances ,  en  opérant, 
avec  ménagement  et  sagacité  ,  des  concessions  réciproques 
entre  les  combinaisons  partielles  et  la  combinaison  géné- 
rale, de  manière  à  sacrifier  le  moins  possible  les  premières 
à  la  seconde,  et  la  seconde  aux  premières.  Le  second  moyen 
est  plus  facile  :  il  remédie  à  l'imperfection  du  premier,  et  il 
procure  tout  ce  qu'on  pourroit  obtenir  par  la  disposition 
réticulaire  la  plus  parfaite.  Ce  moyen  est  d'énoncer,  sous 
le  titre  de  chaque  genre,  avant  ou  après  sa  description, 
toutes  les  affinités  qui  n'ont  pas  pu  être  exprimées  par  la 
position  de  ce  genre  dans  la  série,  ainsi  que  les  degrés  de 
ces  affinités,  et  la  nature  particulière  de  chacune  d'elles. 

VII.  On  jugera  sans  doute  que  toutes  les  considérations 
théoriques  que  nous  venons  d'exposer,  sont  déplacées  dans 
un  article  de  Dictionnaire  destiné  à  offrir  la  liste  nominale 
des  genres  de  la  tribu  de|.inulées.  Les  considérations  dont  il. 


58o       '  lîVV  *  f 

s'agit  sont  extraites  d'un  discours  servant  d'introduction  à 
notre  tableau  général,  inédit,  de  la  classification  naturelle  des 
gienres  de  l'ordre  des  synanthcrées.  Ce  tableau,  très-étendu  , 
doit  trouver  place  dans  le  Dictionnaire;  mais  quelques  mo- 
tifs nous  engagent  à  le  diviser  en  plusieurs  articles,  sous 
diflérens  titres.  Kos  considérations  préiiuiinaires  dévoient 
être  admises  de  préférence  dans  le  premier  de  ces  articles. 
(H.  Cass.) 

INVERSE  [Anthère].  [Bot.)  En  général,  l'anthère  est  atta- 
chée de  manière  que  la  suture  de  ses  valves  regarde  le  cen- 
tre de  la  fleur  :  on  la  dit  adverse.  Mais  quelquefois  la  suture 
des  valves  est  tournée  vers  la  circonférence  de  la  fleur  (iri-. 
dées ,  cucumis,  etc.)  :  alors  l'anthère  est  inverse. 

La  radicule  est  inverse,  lorsqu'au  lieu  de  se  tourner  du 
côté  du  hyle,  elle  se  dirige  du  côté  diamétralement  opposé; 
on  en  a  un  exemple  dans  l'acanthe. 

Les  stigmates  sont  inverses,  lorsqu'étant  plusieurs  dans  une 
fleur,  chacun  d'eux  regarde  le  centre  de  la  fleur,  au  lieu 
d'être  tourné  du  côté  des  étamines  (  renonculacées ,  saxi- 
frages, etc.).    (Mass.) 

INVISIBLE  [Radicule].  {Bot.)  Dans  certaines  espèces, 
dans  la  fève,  par  exemple  ,  la  radicule,  la  plumule  et  même 
la  tigelle  ,  sont  visibles  avant  la  germination  de  la  graine  ; 
dans  d'autres  (oignon ,  pin,  commeline,  etc.),  elles  sont  invi- 
sibles avant  la  germination.  (Mass.) 

INVOLUCRE,  INVOLUCELLE.  {Bot.)  Dans  une  ombelle 
composée ,  les  bractées  qui  forment  une  collerette  à  la  base 
de  l'ombelle  générale,  portent  le  nom  d'involucre,  et  celles 
qui  se  trouvent  à  la  base  des  ombelles  partielles  ou  ombel- 
lules  .  portent  le  nom  d'involucelles  :  l'ombelle  de  la  carotte  , 
par  exemple,  a  un  involucre  et  des  involucelles.  (Mass.) 

INVOLUTÉE  [Feuille].  (Bot.)  La  feuille ,  considérée  dans  le 
bouton  ,  est  dite  involutée ,  lorsque  ses  deux  bords  sont  roulés 
en  dedans:  on  en  a  des  exemples  dans  le  chèvre-feuille,  la 
violette,  le  poirier,  le  peuplier,  etc.  (Mass.) 

lO.  [Entom.)  C'est  le  nom  latin  du  papillon  appelé  le 
paon  de  jour.   (  C.  D.  ) 

JODATES.  {Chim.)  Combinaisons  salines  de  l'acide  iodique 
atcc  les  bases  salifiubles.  .^ 


^  »  lOD  •       585 

Composition. 
loo   parties   d'acide   iodique  ,     conlenant    24,1201   parties 
d'oxigéne,  neutralisent  une  quantité  d'oxide  métallique  qui 
contient  /|,84  parties  d'oxigéne.  Donc  roxigène  de  l'acide  est  à 
celui  de  la  base  ::  5  :  1. 

Propriétés  génériques. 

L'eau  dissout  les  iodates  de  potasse,  de  soude  et  d'ammo- 
niaque ,   et  l'iodate  de  zinc  en  très-petite  quantité. 

Les  iodates  sont  insolubles  dans  l'alcool  d'une  densité  de 
0,82. 

Le  chlore  ne  les  altère  pas. 

Les  acides  sulfurique  ,  nitrique  et  phospliorique ,  n'ont 
d'action  sur  eux  qu'autant  qu'ils  s'emparent  d'une  portion 
de  leur  base. 

A  la  chaleur  d'un  rouge  obscur  tous  les  iodates  sont  dé- 
composés. Le  plus  grand  nombre  des  iodates  métalliques 
donnent  de  l'oxide  et  de  l'iode  :  quelques-uns^  de  l'oxigène 
et  un  iodure. 

Plusieurs  iodates  fusent  sur  les  charbons  ardens  ;  celui 
d'ammoniaque  est  fulminant. 

Ils  sont  décomposés  par  l'acide  hydrochlorique,  et  il  y  a 
dégagement  de  chlore,  formation  d'eau  et  d'acide  chlorio- 
dique  ioduré. 

L'acide  sulfureux ,  en  s'emparant  de  l'oxigène  de  l'acide 
iodique  ,  met  l'iode  à  nu. 

L'acide  hydrosulfurique  en  sépare  l'iode. 
Préparation, 

On  prépare  l'iodate  d'ammoniaque  directement  en  neu- 
tralisant l'acide  iodique  par  l'ammoniaque. 

Les  iodates  de  potasse,  de  soude,  de  baryte,  de  stron- 
tiane  et  de  chaux,  s'obtiennent  par  le  procédé  décrit  au  mot 
Hydriodates.  Nous  ajouterons  ici  que  M.  Gay-Lussac  pense 
que  les  sels  se  forment  au  moment  même  où  l'iode  est  dis- 
sous par  ces  alcalis.  Il  fonde  son  opinion  sur  ce  qu'un  excès 
de  potasse,  mis  avec  une  solution  mixte  d'iodate  et  d'hydrio- 
date  de  potasse  neutres,  produit  une  liqueur  semblable  à 
celle  qu'on  obtient  en  mettant  de  l'iode  dans  l'eau  de  potasse. 
Les  autres  iodates  s'obtiennent  en  mêlant  la  solution  des 


584        f  lOD  «  ( 

iodates  de  potasse ,  de  soude  ou  d'ammoniaque ,  avec  la  solu- 
tion d'un  sel  contenant  la  base  que  l'on  veut  unir  à  l'acide 
iodiquc. 

C'est  à  M.  Gay-Lussac  que  nous  devons  tout  ce  que  l'on 
sait  sur  ce  genre  de  sels. 

i."  Section.  Iodates  solubles. 
lodate  d'ammoniaque. 
Il  cristallise  en  petits  grains. 

Il  détone  par  la  chaleur,  en  répandant  une  foible  lumière 
violette. 

Lorsqu'on  le  décompose  par  la  chaleur,  on  obtient  de 
l'eau,  et  des  volumes  égaux  d'oxigène  et  d'azote;  ce  qui  doit 
être,  puisqu'il  est  formé, 

. j         (    acide ,    loo 

en  poids..  .  l 

[    ammoniaque 10j94 

Ioxigène .......    2,5 
iode 1 
(    azote 1 
ammoniaque...   2...^ 

l    hydrogène 5 

lodate  de  potasse. 

Il  est  en  petits  cristaux  qui  se  groupent  sous  la  forme 
cubique. 

H  est  inaltérable  à  l'air. 

loo  parties  d'eau ,  à  14/-  degrés,  dissolvent  7,45  parties 
d'iodate  de  potasse. 

Projcié  sur  les  charbons  ardens ,  il  fuse. 

Il  détone  légèrement  par  la  percussion  ,  quand  il  est  mêlé 
au  soufre. 

A  une  chaleur  rouge  il  se  réduit  en  oxigène  ,  et  en  un 
iodure  de  potassium  qui,  avec  l'eau,  donne  une  dissolution 
d'hydriodate  de  potasse  neutre. 


Il  est  formé,  suivant  M.  Gay 

Acide 7757H    •  ♦ 

Potasse 22,1^46    .. 


100  partiçs  d'iodate  de  potasse  chauffées  donnent  donc 

'  iode , 58,907 


^7,410  iodure  de  potassium. 


Lussac,  de 
. . . .    100 
....      28,6] 


[potassium 18,473 


12,59  oxigène,  dont. 


lOD  •       585 

(  18,817  proviennent  de  l'acide, 
(    3,775  proviennent  de  la  potasse. 

Une  conséquence  de  cette  composition  de  l'iodate  de  po- 
tasse ,  c'est  que ,  quand  on  dissout  l'iode  dans  la  potasse  ,  il  se 
forme,  pour  100  parties  d"iodate,  407,381  d'hydriodate,  qui 
contiennent  086,067  d'iodure  de  potassium,  cest-à-dire , 
cinq  fois  plus  que  n'en  donnent  les  100  parties  d'iodate  dis- 
tillées. 

L'iodate  de  potasse  ne  pourroit  pas  remplacer  avec  avan- 
tage le  nitre  dans  la  fabrication  de  la  poudre  à  canon  ,  car 
la  quantité  de  gaz  qu'il  donne  est  à  celle  du  nitre  ::  1  :  2,5. 

L'iodate  de  potasse  est  susceptible  de  former  un  sous- 
iodate  cristallisable. 

On  sait  que  l'acide  iodique  décompose  l'acide  hydriodique. 
Lorsque  ces  deux  acides  sont  unis  à  la  potasse,  ils  ne  se  dé- 
composent plus ,  parce  que  l'affinité  de  la  base  pour  les 
acides  surmonte  celle  de  l'oxigène  pour  l'hydrogène  ;  mais 
elle  ne  les  surmonte  que  foiblement  :  car,  en  faisant  passer 
un  courant  d'acide  carbonique  dans  la  solution  mixte  de 
l'hydriodate  et  de  liodate  de  potasse,  on  obtient  un  préci- 
pité d'iode  ,  parce  que  l'affinité  des  acides  est  assez  affoiblie 
pour  qu'ils  se  décomposent  mutuellement;  et  cependant, 
lorsque  les  sels  sont  isolés ,  l'acide  carbonique  ne  les  altère  pas. 

lodate  de  soude. 

11  cristallise  en  petits  grains  qui  paroissent  cubiques,  ou 
en  petits  prismes  qui  sont  ordinairement  réunis  en  houppe. 

II  fuse  sur  les  charbons  comme  le  nitre. 

100  parties  d'eau  ,  à  14'/.  degrés,  en  dissolvent  7,3. 

]1  ne  contient  pas  d'eau  de  cristallisation. 

Le  mélange  de  ce  sel  et  de  soufre  détone  légèrement  par 
la  percussion. 

11  contient, 

Oxigène 24,432 

lodure   de  sodium 73,568. 

A  la  distillation  il  laisse  dégager  avec  son  oxigène  une 
petite  quantité  d'iode  :  c'est  pourquoi  le  résidu  forme  avec 
l'eau  un  hydriodate  légèrement  alcalin. 

Il  existe  un  sous-ioda^  de  soude  qui  cristallise  en  petites 


586        r  jQj)  e  ^ 

aiguilles  soyeuses  réunies   en  houppe  ,  lorsqu'on  le  prépare 
avec  de  riodate  neutre  et  de  la  soude. 

2.*  Section.  lodales  insolubles  ou  peu  soluhlcs. 
lodale  de  harjle. 
II  est  pulvérulent,  incolore  et  pesant, 
loo  parties  d'eau  en  ont  dissous  o,iG  à   loo'^ 
—  —  —  —  o,oo   à      18. 

II  ne  fuse  pas  sur  les  charbons  ardens,  ce  qui  tient  à  deux 
causes  :  1.°  à  ce  qu'il  ne  donne  pas  autant  d'oxigène  par  la 
chaleur  que  l'iodate  de  potasse;  2.°  et  surtout  à  ce  que,  le  sel 
ne  se  fondant  pas,  le  contact  du  charbon  avec  l'oxigène  qui 
se  dégaj^e  est  très-limité. 

Lors  même  qu'il  a  été  séché  a  100  ,  il  donne  de  l'eau  a 
la  distillation,  ce  qui  prouve  qu'il  contient  de  l'eau  de  cris- 
tallisation; après  ce  produit  on  obtient  de  l'oxigène,  de  l'iode 
et  de  la  baryte  sensiblement  pure  ou  simplement  hydratée. 

Acide 100 

Baryte 46,34.  (  Gay-Lussac.) 

Jodate  de  strontiane. 
11  paroit  cristalliser  en  octaèdres.  11  laisse  dégager  de  l'eau 
de   cristallisation  avant  de  se    décomposer  par  le  feu.  II  se 
comporte  d'ailleurs  comme  le  précédent, 

100  parties  d'eau  en  dissolvent  0,70  à   100 
—  —  —  —r  0,34   à      l5. 

lodate  de  chaux. 
11  est  pulvérulent  ;  il  cristallise  en  prismes  quadrangulaires, 
en   se  déposant  d'une  solution  d'hydriodate  ou  d'hydrochlo- 
rate  de  chaux. 

100  parties  d'eau  en  dissolvent  0,98  à  100 

Il  paroît  contenir  o,o3  d'eau  de  cristallisation;  il  se  com-j 
porte  au  feu  comme  les  deux  derniers. 
lodate  de  zinc. 
Il  est  très -peu  soluble  dans  l'eau;  il  fuse  légèrement  sur 
les  charbons. 

loddte  d'argent. 
Il  est  blanc,  insoluble  dans  l'eai^,  très-soluble  dans  l'am- 


,  »  lOD  •         587 

moniaque;  en  quoi  il  diffère  de  Thydriodate,  qui  ne  s'y  dis- 
sout  pas. 

L'acide  sulfureux  ,  versé  dans  la  solution  ammoniacale,  en 
précipite  de  l'iodure  d'argent. 

lodatcs  de  plomb  ,  de  protoxide  de  mercure ,  de  pcroxide  de  fer , 
de  bismuth,    de  deu'oxide  ds  cuivre. 

Ils  sont  Lianes,  et  solubles  dans  les  acides. 

L'iodate  de  potasse  ne  précipite  ni  les  sels  de  peroxide 
de  mercure,   ni  ceux  de  manganèse. 

Il  n'existe  pas  d'iodates  iodurés.  (Cii.) 

IODE.  {Chim.)  Nom  donné  par  M.  Gay-Lussac  à  un  corps 
simple,  qui  est  éleclro-négatif  dans  la  plupart  de  ses  combi- 
naisons, et  qui  se  réduit  en  une  vapeur  d'une  belle  couleur 
violette.  C'est  cette  propriété  qui  lui  a  fait  donner  le  nom 
d'iode;  iode  dérive  de  luS^nç -,  violet. 

Prop/'ic/es  physiques. 

L'iode,  à  la  température  ordinaire,  est  solide,  d'un  gris 
noir  ;  à  17  degrés  sa  densité  est  de  4,348. 

11  se  liquéfie  à  107  degrés,  et  entre  en  ébullition  de  176  à 
180.  Sa  vapeur  est  violette,  ainsi  que  nous  l'avons  dit;  la 
densité  de  cette  vapeur,  calculée,  est  de  8,6t)5. 

L'iode ,  mis  sur  la  peau  ,  y  fait  une  tache  Jaune-brune  très- 
foncée,  qui  finit  par  se  dissiper  à  l'air.  11  a  une  saveur  très- 
àcre ,  et  une  odeur  qui  a  beaucoup  d'analogie  avec  celle  du 
chlore  étendu  d'eau. 

11  ne  paroît  pas  conducteur  de  l'électricité;  car,  M.  Gay- 
Lussac  en  ayant  mis  un  très- petit  morceau  dans  une  chaîne 
galvanique,  la  décomposition  de  l'eau,  qui  se  faisoit  aupara- 
vant, cessa  tout  à  coup. 

11  se  présente  sous  des  formes  variées  :  tantôt  il  est  en 
masses  lamelleuses,  ayant  un  aspect  gras  dans  les  parties 
qu'on  vient  de  mettre  à  découvert  ;  tantôt  il  est  en  paillettes 
micacées;  enfin,  il  cristallise  en  lames  rhomboidales,  très- 
brillantes  et  très-larges,   puis  en  octaèdres  alongcs. 

Propriétés  chimiques. 
Iode  et  corps  simple. 
Il  n'éprouve  aucune^action  de  la  part  de  l'oxigène  avec 


588  ^  lOD  '  f 

lequel  on  le  met  en  contact,  soit  qu'on  le  chauffe,  soit 
qu'on  ne  le  chauffe  pas;  mais,  s'il  rencontre  l'oxigène,  au 
inonienl  oii  celui-ci  cesse  de  faire  partie  de  quelques  com- 
binaisons, il  pourra  s'y  unir  en  une  proportion  définie,  et 
donner  naissance  à  Vacide  iodique  (voyez  Iodkjif. .  aeide). 

Le  chlore  s'unit  à  l'iode  avec  une  grande  facilité  :  il  pro- 
duit Vacide  chloriodique ,  qui  peut,  en  se  combinant  avec  de 
l'iode,  former  l'acide  chloriodique  ioduré  (voyez  tom.  IX  ,  p.  5o). 

L'iode  ne  s'unit  pas  à  l'azote  libre  ;  mais  il  est  susceptible 
de  s'y  combiner,  quand  celui-ci  est  à  l'état  naissant. 

L'iode  peut  se  dissoudre  dyns  le  phosphore  en  un  grand 
nombre  de  proportions  :  pendant  que  la  combinaison  s'o- 
père, il  se  dégage  delà  chaleur  qui  n'est  point  accompagnée 
de  lumière. 

L'iode  s'unit  au  soufre  directement. 

Il  ne  se  combine  ni  au  bore  ni  au  carbone. 

Il  s'unit  à  l'hydrogène,  lorsque  les  deux  corps  sont  exposés 
à  une  chaleur  rouge:  il  en  résulte  l'acide hydriodiquc  (voyez 
HvDRioDiQUE    (acide). 

L'iode  que  l'on  fait  passer  sur  le  potassium  chauffé  dans 
un  tube  de  verre,  s'y  combine,  en  dégageant  une  lumière 
qui  paroît  violette  au  travers  de  la  vapeur  de  l'iode  qui  n'est 
pas  absorbé  par  le  métal. 

L'iode  se  combine  également  au  sodium. 

Il  se  combine,  aune  température  peu  élevée,  avec  le  zinc, 
le  fer,  l'étain,  l'antimoine,  le  cuivre,  le  plomb,  le  bismuth, 
le  mercure,  l'argent,  etc.  ;  avec  le  mercure  il  forme  deux 
combinaisons  définies. 

Les  combinaisons  de  l'iode  avec  les  métaux  se  font,  en  gé- 
néral,  facilement  à  une  température  peu  élevée  :  il  se  dé- 
gage de  la  chaleur  et  très-rarement  de  la  lumière. 

.action  de  lioJe  sur  les  corps  oxigénés ,  Veau  exceptée. 

L'iode  n'a  pas  d'action  sur  les  acides  nitrique,  sulfurique, 
phosphorique,  carbonique,  borique,  ni  sur  la  silice;  il  n'en 
a  pas  sur  les  acides  sulfureux,  nitreux  secs. 

Au  rouge  obscur  il  décompose  les  oxides  de  potassium, 
de  sodium ,  de  plomb  et  de  bismuth.  L'oxigène  se  dégage,, 
et  l'iode  se  combine  au  métal  réduitr 


^  •  lOD  •         589 

A  cette  température  l'iode  décompose  les  sous-carbonates 
de  potasse  et  de  soude  ;  il  se  dégage  i  volume  d'oxigèiie 
con(re  2  d'acide  carbonique ,  et  le  métal  complètement  ré- 
duit forme  un  iodure. 

L'iode  exerce  une  action  moins  forte  sur  les  protoxides 
d'étain  et  de  cuivre.  Quand  ces  corps  sont  en  contact  à 
chaud ,  il  ne  se  dégage  pas  d'oxigène ,  par  la  raison  que 
celui-ci  se  concentre  sur  la  moitié  du  métal  pour  former  un 
peroxide,  tandis  que  l'autre  moitié  forme  un  iodure. 

L'iode  que  Ton  fait  passer  sur  de  la  chaux,  de  la  stron- 
tiane  et  de  la  baryte  ,  s'y  combine  sans  dégager  d'oxigéne. 
Il  forme  avec  ces  bases  des  sous-iodures  d'oxides.  Ces  iodures 
d'oxides  sont  les  seuls  qui  puissent  subsister  à  une  tempéra- 
ture rouge. 

action  de  Viode  sur  les  corps  hjdrogénés  non  organiques. 

L'eau  dissout  0,007  ^^  ^O"  poids  d'iode  ;  la  solution  est 
jaune.  Si  on  la  chauffe  jusqu'à  la  faire  bouillir,  elle  se  dé- 
colore ;  on  trouve  alors  dans  Teau  des  acides  hydriodique 
et  iodique:  la  présence  du  premier  est  indiquée  par  le  pré- 
cipité d'iode  ,  qui  se  fait  lorsqu'on  y  mêle  du  chlore;  la  pré- 
sence du  second  ,  par  le  précipité  d'iode  qu'on  obtient  lors- 
que, après  l'avoir  neutralisé  par  l'ammoniaque  et  l'avoir  con- 
centré ,   on  y  mêle  de  l'acide  sulfureux. 

M.  Gay-Lussac  pense  qu'il  est  probable  que  l'iode  ne  se 
dissout  daiîs  l'eau  que  par  l'intermède  de  l'acide  hydrio- 
dique, qui  se  forme  en  même  temps  que  la  dissolution  a 
lieu  ,  et  que,  si  l'on  peut  décolorer  cette  dissolution,  en  en 
chassant  l'iode  qui  n'est  pas  acidifié,  soit  en  l'exposant  à  la 
lumière  du  soleil ,  soit  en  l'exposant  à  la  chaleur,  tandis  qu'on 
ne  peut  pas  décolorer  Tacide  hydriodique  iodure  ,  cela  tient  à 
ce  que,  dans  le  premier  liquide  ,  l'aftinité  de  l'acide  hydrio- 
dique pour  l'iode  est  diminuée  par  la  présence  de  l'acide 
iodique  qui  s'est  formé  en  même  temps  que  le  premier 
acide.  La  décomposition  de  l'eau  par  l'iode  doit  toujours 
être  peu  considérable,  eu  égard  au  poids  du  liquide,  parla 
raison  que ,  quand  les  acides  hydriodique  et  iodique  sont 
concentrés,  ils  se  réduisent  en  eau  et  en  iode. 

L'iode  paroit  susceptible  de  s'unir  avec  l'hydrogène  per- 


590        '  lOD 

carburé,  lorsqu'on  fait  passer  Téther  hytiriodique  dans  un 
tube   de  verre  rouge  de  feu.  (^'oyez  tome  XV,   p.  470.) 

M.  Thomson  prétend  que  l'iode  décompose  Thydrogène 
perphosphuré  ,  en  s'emparant  de  son  phosphore ,  et  en  met- 
tant l'hydrogène  en  liberté. 

L'iode  décompose  le  gaz  hydrosulfurique  :  il  se  produit 
de  l'acide  hydriodique.  La  décomposition  a  lieu  lorsque 
l'acide  hydrosulfurique  est  dissous  dans  l'eau. 

L'iode  absorbe  le  gax  ammoniaque:  il  en  résulte  un  liquide 
d'abord  visqueux,  très-éclatant  et  d'un  brun  noir,  qui  perd 
ensuite  de  son  éclat  et  de  sa  viscosité  en  absorbant  de  nou- 
veaux gaz.  11  ne  se  dégage  rien  pendant  la  formation  de  ce 
composé,  qui  est  un  véritable  iodure  d'ammoniaque.  Lors- 
qu'on le  met  dans  l'eau,  une  portion  d'ammoniaque  est 
décomposée  :  ses  élément  s'unissent  à  l'iode  ;  ils  forment  de 
l'acide  hydriodique  qui  reste  dans  la  liqueur  combiné  à 
l'ammoniaque  indécomposée,  et  de  l'iodure  d'azote  qui  se 
dépose  sous  la  forme  d'une  poudre  noire.  (Voyez  tome  III, 
Suppl.,  p.  iSli') 

Si  nous  admettons  qu'il  y  ait  1  volume  d'ammoniaque 
décomposé,  on  aura  1 '/,  volume  d'hydrogène  qui,  en  s'unis- 
sant  à  1  y,  volume  d'iode,  produiront  3  volumes  de  gaz  hy- 
driodique, qui  satureront  3  volumes  de  gaz  ammoniaque; 
en  second  lieu  ,  '/j,  volume  d'azote  qui  s'unira  à  1  'l.  d'iode  : 
d'où  il  suit  que,  sur  la  quantité  d'ammoniaque  qui  prend 
part  à  l'action   de  l'iode,  il  y  en  a  '/^  qui  est  décomposé. 

action  de  Viode  sur  les  corps  oxigénës  humides. 

A  une  température  basse  ,  l'iode  mis  dans  de  l'eau  con- 
tenant de  l'acide  sulfureux  détermine  une  décomposition 
d'eau  :  il  en  résulte  de  l'acide  sulfurique  et  de  l'acide  hydrio- 
dique. Si  l'on  exposoit  les  corps  à  l'action  de  la  chaleur,  il 
arriveroit  un  moment  où  l'acide  sulfurique  réduiroit  l'acide 
hydriodique  en  eau  et  en  iode,  en  cédant  le  tiers  de  son 
oxigènc. 

L'acide  arsénieux ,  l'hydrochlorate  de  protoxide  d'élain, 
les  sulfites,  les  hyposulfites,  mis  en  contact  avec  de  l'eau 
et  de  l'iode,  s'oxigènent  aux  dépens  de  l'eau,  tandis  que 
l'iode  passe  à  l'état  d'acide  hydriodi«?ue. 


y  •  lOD  •       591 

Lorsqu'on  verse  de  l'eau  de  potasse  concentrée  sur  l'iode, 
c^-lui-ci  est  dissous  avec  rapidité.  La  liqueur  dépose  une 
matière  blanche,  grenue,  qui  est  de  Fiodate  de  potasse,  et 
retient  de  Thydriodate  de  potasse  ou  de  l'iodure  de  potassium, 
suivant  qu'on  admet  que  Toxigénation  de  l'iode  s'est  faite  aux 
dépens  de  l'eau  ,  ou  bien  aux  dépens  d'une  portion  de  la  po- 
tasse. Nous  adopterons  la  première  opinion.  Suivant  que  c'est 
l'alcali  qui  domine  ou  l'iode  ,  la  couleur  de  la  liqueur  est  le 
jaune-orangé  ou  le  rouge-brun  très-foncé.  Dans  ce  dernier 
cas  c'est  l'hydriodate  qui  tient  de  liode  en  dissolution,  et 
malgré  cela  il  y  a  un  excès  sensible  d'alcali.  11  paroit'  que, 
quand  la  liqueur  est  saturée  d'iode,  et  qu'elle  est  assez  éten- 
due pour  ve  pas  laisser  précipiter  d'iodate  ,  elle  contient 
une  quantité  d'iode  à  l'état  de  dissolution  égale  à  celle  qui 
a  été  acidifiée  par  les  deux  élémens  de  l'eau. 

L'eau  de  soude  se  conduit  comme  celle  de  potasse. 

Il  en  est  de  u.ême  des  eaux  de  chaux,  de  strontiane  et 
de  baryte.  La  seule  différ.  iice  qu'on  observe,  c'est  que  leurs 
iodates,  éta.it  très-peu  soiubles ,  se  précipitent  :  c'est  pour- 
quoi on  peut  obtenir  par  ce  moyen  les  iodates  de  ces  bases 
à  l'état  de  pureté. 

Lorsque  la  magnésie  est  mise  avec  de  l'eau  et  de  l'iode, 
il  y  a  pareillement  formation  d'un  hydriodate  et  d'un  iodate. 

Les  oxides  qui,  comme  ceux  de  zinc  et  de  fer,  tiennent 
beaucoup  à  l'oxigène  ,  sans  posséder  une  aussi  grande  alca- 
linité que  les  bases  précédentes,  ne  déterminent  pas  la  dé- 
composition de  l'eau  par  l'iode. 

Les  oxides  qui  tiennent  peu  à  l'oxigène  ,  tels  que  les 
peroxides  de  mercure  et  d'or,  ne  déterminent  pas  la  décom- 
position de  l'eau  ,  mais  sont  eux-mêmes  en  partie  décomposés 
par  l'iode.  Aussi  ,  en  exposant  le  peroxide  de  mercure  , 
comme  l'a  fait  M.  Colin  ,  à  une  température  de  60  à  i  00  de- 
grés ,  dans  de  l'eau  où  il  y  a  de  l'iode,  une  portion  d'oxide 
cède  son  oxigène  à  une  portion  d'iode  :  il  en  résulte  du 
suriodate  de  mercure  qui  reste  en  dissolution  ,  et  du  sous- 
iodate  insoluble;  en  même  temps  le  mercure  réduit  forme 
un  iodure  rouge  avec  la  portion  d'iode  qui  ne  s'est  pas  aci- 
difiée. L'oxide  d'or  produit,  dans  les  mêmes  circonstances, 
du  suriodate  d'or  solutj^e;  mais  l'or  qui  a  été  réduit  ne  forme 
pas  d'foîlure. 


59-^  lOD 

Aclioji  de  Viode  sur  les  matières  organiaues  en  général. 

MM.  Colin  et  H.  Gaultier  de  Claubry  sont  les  seuls  chimistes 
qui  aient  examiné  d'une  manière  générale  l'action  de  l'iode 
sur  les  matières  végétales  et  animales.  Ils  sont  arrivés  aux 
résultats  suivans. 

y."  Iode,  et  substances  organiques  formées  de  carbone,  d'h^'dro- 
gène  et  d'une  portion  d'oxigène  plus  grande  que  celle  nécessaire 
pour  coni>ertir  l'iiydrogène  en  eau, 

A  froid  il  n'y  a  pas  d'action.  A  une  température  suffisante 
pour  décomposer  la  matière  organique,  il  se  produit  de  l'a- 
cide hydriodique. 

Si  l'on  fait  bouillir  le  mélange  des  corps  dans  l'eau,  il  se 
dégage  de  la  vapeur  d'iode,  et  si  la  matière  organique  est 
soluble,  elle  est  dissoute  sans  éprouver  d'altération. 

2.°  Iode,  et  suJistances  organiques  formées  de  carbone,  d'oxigène 
et  d'une  quantité  d'hjdrogène  plus  grande  que  celle  nécessaire 
pour  convertir  l'oxigène  en  eau. 

A  la  température  ordinaire,  ainsi  qu'à  loo  degrés,  il  se 
forme  de  l'acide  hydriodique,  qu'on  sépare  au  moyen  de 
l'eau.  Tel  est  le  résultat  qu'on  obtient  en  traitant  par  l'iode 
le  camphre  ,  les  huiles  fixes  et  volatiles,  l'alcool,  l'éthcr  et 
les  graisses  animales. 

3."  Iode,  et  substances  végétales  formées  de  carbone ,  plus  d'oxigène 
et  d'iiydrogcne  dans  la  proportion  qui  constitue  l'eau. 

A  froid  ,  il  y  a  formation  de  composés  plus  ou  moins  colorés, 
dont  l'eau  bouillante  ne  dégage  pas  d'iode  ou  n'en  dégage 
qu'une  portion;  à  loo  degrés  il  ne  se  produit  pas  d'acide 
hydriodique  ,  mais  il  se  forme  à  la  température  où  la  subs- 
tance organique  peut  se  décomposer. 

L'iode  s'unit  à  l'amidon  en  deux  proportions.  La  combi- 
naison neutre  est  bleue;  celle  avec  excès  d'amidon  est  blanche: 
on  peut  la  considérer  comme  un  sous-iodure.  Nous  allons 
exposer  ses  propriétés,  par  la  raison  que  nous  ne  l'avons  pas 
fait  en  traitant  de  l'amidon. 

On  obtient  Viodure  d'amidon  en  triturant  de  l'amidon  sec 


»  lOD  5,j1 

provenant  du  blé  avec  un  excès  d'iode  également  sec.  Lé 
mélange  devient  noir  :  on  le  dissout  dans  la  potasse  ;  on  sa- 
ture l'alcali  par  un  acide  végétal  :  l'iodure  se  précipite.  Le 
salep ,  l'empois,  le  mucilage  de  racine  de  guimauve  ,  l'ami- 
don de  pommes  de  terre ,  se  comportent  comme  l'amidon 
du  blé. 

L'iodure  d'amidon  est  soluble  dans  l'eau  froide  :  la  disso- 
lution est  violette  ;  elle  passe  au  bleu  quand  on  y  met  de 
l'iode.  Si  on  la  fait  bouillir,  tout  l'iode  qui  est  en  excès  à 
la  composition  du  sous-iodure  se  dégage  :  il  reste  du  sous- 
iodure  blanc  dans  la  liqueur.  Si  on  fait  évaporer  cette  der- 
nière, on  obtient  un  résidu  un  peu  jaunâtre,  qui  devient 
bleu  par  l'addition  de  l'iode. 

L'acide  nitrique  étendu  ,  l'acide  sulfurique  très-concentré, 
l'acide  hydrochlorique ,  le  chlore,  versés  dans  la  solution  de 
sous-iodure  d'amidon,  font  passer  la  couleur  du  liquide  au 
bleu,  parce  qu'ils  mettent  à  nu  de  l'iodure  neutre,  en  se 
combinant  avec  l'excès  d'amidon,  ou  bien  en  l'altérant. 

L'acide  nitrique  concentré  décompose  l'iodure  d'amidon 
en  altérant  ce  dernier. 

L'acide  sulfureux  liquide  ea  précipite  l'amidon,  et  il  y 
a  en  même  temps  de  l'eau  décomposée  ;  son  oxigène  convertit 
l'acide  sulfureux  en  acide  sulfurique ,  et  son  hydrogène  con- 
vertit l'iode  en  acide  hydriodique. 

L'acide  hydrosulfurique  le  décompose  ;  l'amidon  et  le 
soufre  sont  précipités,  tandis  que  l'hydi^ogène  de  l'acide  s'unit 
à  l'iode. 

La  potasse,  la  soude  dissolvent  l'iodure  d'amidon.  MM. 
Colin  et  Gaultier  considèrent  cette  dissolution  comme  un 
composé  de  sous-iodure  d'amidon  ,  d'iode  et  de  potasse. 

A  froid  ,  l'alcool  convertit  l'iodure  en  sous-iodure.  A  quel- 
ques degrés  au-dessous  de  celui  oîi  il  entre  en  ébuUition,  il 
sépare  tout  l'iode  de  l'amidon,  en  le  convertissant  en  acide 
hydriodique.  Un  corps  huileux  ajouté  à  Talcool  accélère  la 
décomposition  du  sous-iodure. 

A  ces  faits  nous  ajouterons  que  l'iode  agit  sur  les  réactifs 

colorés,   humides,    de  nature  végétale  ,    à    la  manière    du 

chlore;  il  en  détruit  la  couleur,  parce  que  sans  doute  il  y  a 

une  décomposition  d'eai»  ;  l'oxigène  de  celle-ci  se  porte  sur  1# 

2*.  58 


594        '  lOD  ^ 

carbone  et  l'hydrogène  de  la  matière  organique .  tandis  que- 
son  hydrogène  s'unit  à  l'iode. 

Etat  naturel  de  l'iode. 

Ce  corps  existe  dans  un  grand  nombre  de  fucus.  Suivant 
M.  Gaultier  de  Claubry,  il  y  est  à  l'état  d'acide  hydrio- 
dique,  uni  à  la  potasse  et  à  la  soude.  M.  Fife  l'a  trouvé  dans 
les  éponges. 

Préparation. 

Après  avoir  incinr'ré  des  espèces  ào.  fucus  qui  contiennent 
Je  l'iode,  on  lessive  la  cendre;  en  fait  concentrer  le  lavage, 
et,  en  l'abandonnant  à  lui-même,  on  l'épuisé  de  tout  ce  qu'il 
contient  de  matières  cristallisables  :  Feau-mère  ainsi  obtenue 
renferme  des  hydriodates  de  potasse  et  de  soude.  On  la  met 
dans  une  cornue  tubulée  à  laquelle  on  a  adapté  une  alonge 
et  un  récipient  tubulés.  On  verse  peu  à  peu  dans  la  cornue 
de  l'acide  sulfurique  concenti'é  et  en  excès:  une  portion  de 
cet  acide  s'unit  à  la  potasse  et  à  la  soude,  tandis  que  celle 
qui  ne  s'y  combine  point,  passe  en  partie  à  Fétat  d'acide 
sulfureux.,  parce  qu'elle  cède  de  l'oxigène  à  Fhydrogène  de 
Facide  hydriodique.  De  cette  réaction  résulte  de  Fiode  qui 
passe  dans  le  récipient  avec  de  la  vapeur  d'eau,  lorsqu'on 
vient  à  porter  à  Fébullition  le  liquide  contenu  dans  la  coiv 
nue.  Il  se  volatilise,  outre  l'iode" et  Fcau  ,  de  Facide  sulfu- 
reux et  de  Facide  hydrochlorique  :  ce  dernier  provient  des 
chlorures  qui  n'ont  pas  été  séparés  par  les  cristallisations  aux- 
quelles on  a  soumis  les  lavages  des  cendres  de  fucus.  On  lave 
l'iode,  puis  on  le  distille  avec  de  Feau  de  potasse  foible. 
Par  ce  moyen  on  l'obtient  sous  la  forme  de  lames  brillantes 
comme  le  carbure  de  fer.  11  ne  s'agit  plus  que  de  le  sécher; 
on  y  parvient  en  le  pressant  entre  des  papiers  Joseph  ,  jusqu'à 
ce  qu'il  cesse  de  les  mouiller.-  on  l'introduit  ensuite  dans  une 
cloche  de  verre  fermée  par  un  bout,  où  on  le  foule  avec 
un  tube  de  verre,  puis  on  le  chauffe  jusqu'à  ce  qu'il  soifc 
fondu. 

M.  Wollaston  a  proposé  d'ajouter  du  peroxide  de  manga- 
nèse,  après  qu'on  a  saturé  les  bases  des  hydriodates  par  Fa- 
cide sulfurique,  L'oxid^-,  en  cédant  une  portion  de  son  oxigène 
à  l'acide  hydriodique  devenu  libre ,  ^^orme  de  Feau.  et  met 


»  lOD  SgS 

ainsi  l'iode  à  nu.  ^cxiJe  de  manganèse,  qui  a  perdu  de  l'oxi- 
gène  ,  s'unit  à  l'acide  sulfurique  qui  est  en  excès. 

Les  eaux-mères  des  lessives  de  cendres  de  fucus  que  l'on 
trouve  à  Paris,  dans  le  commerce,  sous  le  nom  d^eaux-mères 
de  soude  de  vareck ,  contiennent  ordinairement  du  nitrate  de 
potasse  et  une  quantité  très-notable  de  chlorures.  C'est  pour 
cette  raison  que,  quand  on  y  verse  de  l'acide  sulfurique  con- 
centré, il  y  a  une  vive  effervescence,  occasionée  surtout  par 
du  chlore  et  de  l'acide  nitreux. 

Histoire. 

C'est  en  France  que  l'iode  a  été  trouvé  dans  Xdi^soude  ds 
vareck.  M.  Courtois,  auteur  de  cette  découverte,  après 
l'avoir  tenue  secrète  pendant  plusieurs  années,  la  commu- 
niqua, au  commencement  de  1812,  à  MM.  Clément  et 
Désormes,  qui  l'annoncèrent  publiquement  à  l'Institut,  le 
:2g  Novembre  i8i5,  dans  une  note  composée  de  leurs  pro- 
pres observations  et  de  celles  de  M.  Courtois.  Dans  la  séance 
du  6  Décembre,  M.  Gay-Lussac,  qui  avoit  reçu  quelques 
jours  auparavant  de  M.  Clément  une  certaine  quantité 
d'iode,  avec  l'invitation  de  l'examiner  d'une  manière  spé- 
ciale ,  lut  un  mémoire  dans  lequel  il  établissoit  les  rap- 
ports qu'il  avoit  avec  le  chlore ,  et  proposoit  de  lui  donner 
le  nom  qu'il  porte  depuis  cette  époque.  Les  rapprochemens 
que  M.  Gay-Lussac  avoit  faits,  furent  pleinement  confirmés 
par  M.  H.  Davy,  qui  se  trouvoit  alors  à  Paris,  et  qui  con- 
signa ses  observations  dans  une  lettre  datée  du  1 1  Décembre, 
qui  fut  lue  à  l'Institut  le  i5  du  même  mois.  Enfin,  dans  le 
mois  d'Août  1814,  M.  Gay-Lussac  lut  un  mémoire  à  l'Insti- 
tut, où  il  assigna  définitivement  le  rang  que  l'iode  doit 
occuper  dans  le  système  chimique  des  corps  simples.  Il  fit 
voir  que  ses  propriétés  le  rangeoient  entre  le  chlore  et  le 
soufre;  que  l'azote  devoit  être  placé  à  la  suite  de  ce  dernier, 
à  cause  de  la  ressemblance  qui  existe  entre  l'acide  nitrique  et 
les  acides  iodique  et  chlorique  ,  soit  par  la  facilité  avec  la- 
quelle ces  trois  acides  cèdent  leur  oxigène ,  soit  par  leur 
composition,  qui  est  telle  que,  pour  1  volume  de  chlore. 
d'iode  et  d'azote,  il  y  a  2 '/^  volumes  d'oxigène.  11  fit  voir  en- 
core que,  si  quelques  iodQîes  se  rapprochent  entièrement  des 


59^  lOD 

chlorates  ,  la  plupart  ont  plus  d'analogie  avec  les  sulfates, 
et  que  les  sulfures  ,  les  iodures  et  les  chlorures  se  compor- 
tent de  la  même  manière  avec  l'eau  ;  enfin,  que  l'action  du 
soufre  et  du  chlore  sur  les  ox/dcs,  avec  ou  sans  le  concours 
de  l'eau,  est  semblable  à  celle  que  l'iode  exerce  sur  les 
mêmes  composés. 

C'est  du  travail  de  M.  Gay-Lussac  que  nous  avons  em- 
prunté presque  toute  la  matière  de  cet  article.  (Ch.) 

lO-DIEB.  {Ornith.)  L'oiseau  que  David  Crantz  désigne 
sous  ce  nom  dans  son  histoire  du  Groenland,  publiée  en.alle- 
mand ,  et  qui  est  nommé  io-fugl  par  Pontoppidan,  tom.  2, 
pag.  ii3  ,  est  le  labbe  à  longue  queue,  larus  stercorarius ,  Linn. 
(Ch.  D.) 

lODIQUE.  [Cliim.)  Combinaison  acide  de  l'iode  avec 
l'oxigène. 

Composition. 

Poids.  Volume. 

O'^^S^"^ ^''9^7    ^l     j    Gay-Lussac. 

Iode 100  1        ) 

La  quantité  d'oxigène  est  le  multiple  par  5  de  la  première 
quantité  qui  peut  s'unir  à  l'iode. 

Propinélés. 

Il  est  solide  quand  il  est  anhydre,  incolore  et  demi -trans- 
parent. Sa  densité  est  supérieure  à  celle  de  l'acide  sulfurique 
hydraté. 

Il  est  inodore  ;  sa  saveur  est  très-aigre  et  astringente. 

Il  rougit  la  teinture  de  tournesol,  et  finit  par  la  détruire. 

Il  est  légèrement  déliquescent  dans  un  air  humide.  Sa  so- 
lution dans  l'eau  est  susceptible  d'être  concentrée  en  sirop, 
et  dans  cet  état  elle  peut  être  réduite  en  une  matière  pâteuse , 
qui  paroît  être  un  hydrate  :  cette  matière,  chauffée  davan- 
tage, perd  la  totalité  de  son  eau,  sans  que  l'acide  soit  altéré. 

U  forme  des  sels  dont  la  plupart  sont  insolubles  à  l'état 
neutre. 

L'acide  iodique  précipite  les  nitrates,  de  plomb  et  de 
mercure. 

Les  acides  sulfurique,  phosphorique,  nitrique,  forment 
avec  lui  des   composés  cristallisabies.  Si,  dans  une,  solution 


»  lOD  ^       597 

d'acide  iodique  concentrée  et  chaude,  on  verse  goutte  à 
goutte  de  l'acide  sulfurique  ,  les  deux  acides  s'unissent,  et 
leur  combinaison  se  précipite.  Ce  précipité,  fondu  avec 
précaution,  est  susceptible  de  cristalliser,  par  le  refroidis- 
sement, en  cristaux  rhomboïdaux  d'une  couleur  jaune-pàle, 
qui  peuvent  être  volatilisés  sans  altération,  lorsqu'on  ne  les 
chauffe  pas  brusquement.  Dans  le  cas  où  la  chaleur  est  trop 
forte,  une  partie  se^  sublime ,  et  une  autre  est  réduite  en 
acide  sulfurique ,   en  iode  et  en  oxigène. 

L'acide  iodique  forme  avec  l'acide  phosphorique  hydraté 
un  composé  solide,  jaune,  incristallisable.  On  peut  encore 
obtenir  un  composé,  en  mettant  l'acide  iodique  dans  l'acide 
phosphoreux,  et  faisant  chauffer  :  alors  une  portion  du  pre- 
mier acide  cède  son  oxigène  à  l'acide  phosphoreux,  et  le 
convertit  en  acide  phosphorique  ;  l'iode  désoxigéné  se  vola- 
tilise, et  la  partie  d'acide  iodique  non  décomposée  s'unit  à 
l'acide  phosphoriqtie. 

L'acide  iodique  et  l'acide  nitrique  forment  un  composé 
qui  cristallise  en  rhomboïdes  aplatis.  Ces  rhomboïdes  secs , 
exposés  à  une  chaleur  de  beaucoup  inférieure  à  celle  qui 
volatilise  le  composé  sulfurique ,  se  réduisent  en  deux  por- 
tions :  l'une  se  décompose  en  oxigène,  en  iode  et  en  acide 
nitrique  ;  l'autre  se  sublime  sans  altération. 

L'acide  iodique ,  exposé  à  une  température  inférieure  de 
quelques  degrés  à  celle  qu'il  faut  pour  porter  l'huile  d'olive 
à  l'ébullition ,  se  fond  et  se  réduit  en  iode  et  en  oxigène. 

Cette  action  explique  comment  il  forme,  avec  le  soufre, 
le  charbon,  le  sucre,  les  résines,  les  métaux  combustibles 
divisés  ,  des  mélanges  qui  détonent  quand  on  en  élève  la 
température. 

La  solution  d'acide  iodique  corrode  presque  tous  les  mé- 
taux, même  l'or  et  le  platine  (l'or  surtout). 

L'acide  iodique  et  l'acide  hydriodique  liquide  qui  n'est 
pas  très-étendu  d'eau,  se  décomposeot  mutuellement  en  eau 
et  en  iode. 

L'acide  iodique  et  l'acide  bydrochlorique  liquide  se  ré- 
duisent en  eau  et  en  acide  chloriodique  ; 

L'acide  iodique  et  l'acide  hydrosuif urique  liquide  se  rédui- 
sent en  eau ,  en  soufre  et  en  iode. 
o 


598       ,  lOD  <  , 

L'acide  sulfureux  liquide,  en  lui  enlevant  son  oxigène ,  se 
transforme  en  acide  sulfurique,   et  met  Tiode  en  liberté. 

Histoire  et  préparation. 

Nous  sommes  redevables  à  M.  Gay-Lussac  de  la  décou- 
verte de  Tacide  iodique.  11  en  détermina  la  composition  et 
les  propriétés  principales  dans  le  mémoire  qu'il  présenta  à 
l'Institut  en  Août  1814.  Il  le  retira  de  l'iodatc  de  baryte 
au  moyen  de  l'acide  sulfurique;  mais  l'acide  iodique,  pré- 
paré par  ce  procédé,  est  en  dissolution  dans  l'eau ,  et  il 
retient  toujours  une  petite  quantité  de  l'acide  qui  a  servi  à 
son  extraction.  En  181  5,  M.  H.  Davy  obtint  l'acide  iodique 
parfaitement  pur,  en  faisant  réagir,  à  la  température  ordi- 
naire, l'oxide  de  chlore  sur  l'iode.  Voici  son  procédé: 

On  introduit  dans  un  tube  fermé  par  un  bout  2'/,  parties 
de  chlorate  de  potasse  et  lo  d"acide  hydrochlorique ,  d'une 
densité  de  i,io5:  après  avoir  placé  le  tube  verticalement,  on 
y  adapte  un  tube  horizontal  rempli  de  chlorure  de  calcium  ;  ce 
tube,  au  moyen  d'un  tube  coudé,  plus  étroit ,  communique 
avec  un  récipient  de  verre  mince  à  long  col,  dans  lequel 
on  a  mis  j  partie  d'iode.  On  chauflTe  avec  précaution  l'extré- 
mité du  tube  de  verre  où  est  le  mélange  de  chlorate  et 
d'acide,  a6n  d'éviter  l'explosion  que  détermineroit  infail- 
liblement une  chaleur  trop  forte.  Il  se  dégage  de  l'oxide  de 
chlore,  qui  arrive  à  l'état  sec  dans  le  récipient  :  là  l'iode  se 
combine  aux  deux  élémens  de  l'oxide  gazeux;  il  en  résulte 
de  l'acide  chloriodique  ioduré  et  de  l'acide  iodique.  Quand 
l'opération  est  terminée,  on  chauRTe  doucement  le  récipient; 
l'acide  chloriodique  ioduré  se  volatilise,  et  l'acide  iodique 
reste  à  l'état  solide. 

C'est  M.  H.  Davy  qui  a  fait  connoître  la  combinaison  de 
l'acide  iodique  avec  les  acides  qui  ne  sont  pas  susceptibles 
de  le  décomposer.  (Cpk) 

lODURES.  (Chim.)  Combinaisons  non  acides,  que  l'iode 
forme  avec  les  bases  salifiables ,  et  avec  les  corps  simples  qui 
sont  électro-positifs  par  rapport  à  lui. 

aj  Les  iodiires  de  corps  simples  non  métalliques  sont  ceux  de 
phosphore,  de  soufre  et  d'azote. 

h)  Les  iodures  de  corps  simples  métalliaues ,  connus,  sont  ceux 


»  '  lOL  ♦         5og 

^c  potassium,  de  sodium,  de  fer,  de  zinc,  d'étaîn,  d'anti- 
moine, de  cuivre,  de  plomb,  de  bismuth,  de  mercure  (il 
y  en  a  deux),  d'argent  et  d'or. 

Tous  les  iodures  métalliques  sont  décomposés  par  les  acides 
nitrique  et sulfurique  concentrés:  le  métal  est  oxidé,  et  l'iode 
est  mis  en  liberté. 

A  l'exception  des  iodures  de  potassium,  de  sodium,  de 
plomb  et  de  bismuth,  tous  les  autres  sont  décomposés,  lors- 
qu'après  les  avoir  portés  au  rouge  dans  un  tube  on  y  fait 
passer  un  courant  d'oxigènc. 

J.e  chlore  les  décompose  tous. 

Enfin  les  iodures  de  potassium,  de  sodium,  de  fer,  de 
zinc,  sont  dissous  par  l'eau,  vraisemblablement  en  donnant 
lieu  à  des  hydriodates. 

Les  iodures  d'étain  et  d'antimoine  sont  réduits  par  l'eau 
en  acide  hydriodique  et  en  oxides,  qui  se  déposent  pour  la 
plus  grande  partie  lorsqu'il  y  a  assez  d'eau. 

Les  iodures  de  cuivre,  de  plomb,  de  bismuth,  de  mer- 
cure et  d'argent,  sont  insolubles  dans  l'eau. 

La  composition  des  iodures  métalliques  est  facile  à  déter- 
miner, d'après  celle  de  l'iodure  de  zinc,  par  la  raison  que 
les  quantités  d'iode  qui  se  combinent  à  un  métal  sont  pro- 
portionnelles à  la  quantité  d'oxigène  que  celui-ci  absorbe. 
Ainsi  loo  d'iode  se  combinent  à  26,226  de  zinc,  qui  absor- 
])ent  6,402  d'oxigène.  Qu'on  cherche  maintenant  la  quantité 
d'un  métal  quelconque  à  laquelle  cette  quantité  d'oxigène 
peut  s'unir,  et  l'on  aura  la  quantité  de  ce  métal  qui  s'unit  à 
300  d'iode,  en  supposant  toutefois  que  le  métal  en  question 
soit  susceptible  de  former  un  iodure. 

# 
c)   Iodures  de  bases  salifiables. 

On  ne  connoît  guère  parmi  les  bases  salifiables  que  l'am- 
moniaque qui  soit  susceptible  de  former  un  iodure.  Voyez 
Iode.  (  Ch.  ) 

lOLITHE.  {Min.)  Nom  donné  par  les,  minéralogistes  de 
l'école  de  Freyberg  à  l'espèce  minérale  que  M.  Cordier  a 
décrite  sous  celui  de  DichroÏte.  Voyez  ce  mot.  (Bb.) 

lOLITHUS  ou  JOLITHUS.(Bo^),  c'est-à-dire ,  pierre  t^io- 
ktte,  en  grec.   Schvvc^ckfeld ,  dans  son. Catalogue  des  végé- 


Cc.o        ,  10  L  «  , 

taux  ef  des  fossiles  de  la  Silésie  ,  nomme  iolilhus  ou  lapis 
violaceus ,  une  pierre  qui  répand  l'odeur  de  la  violette. 
ÎVIicheli  pense  qu'il  s'agit  d'une  petite  plante,  et  ne  balance 
pas  à  la  donner  pour  Yherbula  muscosa ,  d'Agricola  ,  qui  ex- 
hale l'odeur  de  violette,  et  pour  la  pierre  d'Aldenberg,  à 
odeur  de  violette,  de  Besler  {Mus.  rar. ,  tab.  29);  enfin, 
pour  son  bjssus  germanica  {Nov.  gen. ,  tab.  89,  fig.  3),  que 
Linnasus  rapporte  à  son  Ijssus  ioliihus ,  qui  ,  s'il  n'a  pas 
toujours  l'odeur  de  la  violette ,  en  a  au  moins  souvent  la 
couleur.  Cette  odeur  se  fait  sentir  surfout  lorsque  ce  byssus  , 
après  avoir  été  desséché,  vient  à  être  humecté.  Il  forme  sur 
les  pierresde  grandes  plaques  pourpres,  ouviolcftes,  ou  oran- 
gées. Agardh  et  Lyngbye  le  considèreiif  comme  une  espèce  de 
conferve  terrestre ,  formée  de  petits  filamens  droit* ,  excessive- 
ment courts,  dichotomes ,  articulés  ,  et  à  articulations  une  fois 
et  demie  plus  longues  que  larges. 

11  y  a  aussi  des  pierres  qui  sentent  la  violette  ,  mais  qui 
doivent  leur  odeur  à  une  autre  cause,  comme  nous  l'avons 
dit  ailleurs.  (Lem.) 

lOLO-SUCHIL.  (Bot.)  Ce  nom  indien ,  signifiant /Zeur 
cordiale,  est  donné,  au  rapport  d'Acosta  ,  cité  par  C.  Bauhin, 
à  une  fleur  qui  a  la  forme  et  le  volume  d'un  cœur.  Elle  est 
mentionnée  dans  l'article  où  il  est  question  des  oeillets  d'Inde, 
tagetes.  (J.  ) 

JON  (Bot.),  nom  grec  de  la  violette.  (J.) 

lOJSESIE,  lonesia.  {Bol.)  Genre  de  plantes  dicotylédones, 
à  fleurs  complètes,  monopétaîées ,  de  la  famille  des  légumi- 
neuses ,  appartenant  à  ïheptandrie  monogynie  de  Linnseus, 
offrant  pour  caractère  essentiel  :  Un  calice  à  deux  folioles  ; 
une  corolle  infitndibuliforme  ;  le  tube  charnu  et  fermé;  le 
limbe  à  quatre  lobes;  un  appendice  en  forme  d'anneau,  in- 
séré à  l'orifice  du  tube  de  la  corolle  ,  supportant  sept  éta- 
mines  ;  un  ovaire  pédicellé ,  auquel  succède  une  gousse  en 
forme  de  sabre,  contenant  quatre  à  huit  semences. 

Ce  genre,  établi  par  Roxburg  pour  un  arbre  des  Indes 
orientales,  paroît  avoir  des  rapports  avec  les  palovea  et  les 
lauhinia,  et  devoir  être  rangé  parmi  les  légumineuses.  Il  ne 
renferme  qu'une  seule  espèce. 

loNÉsiE  AILÉE  :  lonesia  pinnala  ^  Roxb^,  Asiat.  researcli. ,  4  , 


,  ♦  ION  •     Soi 

pag.  355  ;  Willd.,  Spec,  2  ,  pag.  287  ;  Asjogâm  ,  Rh€eà.,Hort. 
Malab. ,  5,  pag.  117,  tab.  5g.  Arbre  des  Indes  orientales, 
d'une  médiocre  grandeur,  dont  les  rameaux  sont  garnis  de 
feuilles  alternes,  pétiolées ,  ailées  avec  une  impaire,  compo- 
sées de  quatre  à  six  paires  de  foiioles  glabres,  fermes,  ob- 
longucs ,  lancéolées,  luisantes  les  fleurs  sont  disposées  en 
cime,  médiocrement  pédonculées,  terminales  et  axillaires  : 
la  corolle  en  forme  d'entonnoir,  d'un  jaune  orangé;  les  gousses 
courbées  en  sabre.  (  Poir.  ) 

lONlA  (  Bot.  )  ,  nom  athénien  de  l'yvetf e  ,  chamœpjtis  ,  sui- 
vant Ruellius.  (J.  ) 

lONIDIUM.  {Bot.)  Genre  de  plantes  dicotylédones,  à  fleurs 
complètes,  polypétalées,  irrégulières,  de  la  famille  des  vio- 
lacées, de  la  pentandrie  monogjnie  de  Linnagus,  offrant  pour 
caractère  essentiel  :  Un  calice  à  cinq  folioles,  sans  prolon- 
gement à  sa  base  ;  une  coiollc  irrégulière ,  à  cinq  pétales ,  sans 
éperon,  presque  à  deux  lèvres  :  la  supérieure  à  deux  pétales; 
trois  pétales  à  l'inférieure;  celui  du  milieu  plus  large  et  plus 
long:  cinq  étamines,  les  anthères  non  réunies;  un  ovaire  su- 
périeur, surmonté  d'un  seul  style  et  d'un  stigmate.  Le  fruit 
est  une  capsule  entourée  par  le  calice,  à  une  seule  loge,  à 
trois  valves  ;  graines  attachées  au  milieu  des  valves. 

Ce  genre  renferme  des  espèces  herbacées  ou  des  sous-ar- 
hrisseaux,  que  Linnacus  avoit  d'abord  réunis  aux  violettes, 
que  Ventenat  en  a  exclus  pour  en  former  un  genre  particu- 
lier sous  le  nom  d^ionidium.  On  n'en  cultive  aucune  espèce 
en  Europe,  une  ou  deux  exceptées,  l'ionidium  polj'galœfoliuni 
et  Vionidium  suherosum.  Elles  exigent  une  bonne  terre,  l'oran- 
gerie en  hiver  et  de  la  chaleur  en  été  :  on  les  multiplie  de 
boutures. 

loNiDiUM  iTOtBou  :  lonidium  itouhoa  ^  Vent.;  Viola  itouhoa , 
Aubl. ,  Guian.,  tab.  3  1 8  ;  Viola  calceolaria,  Linn.  Ses  racines 
sont  blanches,  rameuses,  cylindriques  et  traçantes;  ses  tiges 
droites,  rameuses,  herbacées,  tomenteuses;  les  feuilles  pétio- 
lées, ovales,  dentées  en  scie,  tomenteuses  à  leurs  deux  faces; 
les  fleurs  blanches,  très-grandes,  axillaires;  leur  calice  velu, 
à  cinq  folioles  inégales;  quatre  pétales  onguiculés,  roulés  à 
leurs  bords,  un  cinquième  beaucoup  plus  grand;  l'ovaire 
yelu  ;  le  stigmate  urcéolé  ;  la  capsule  arrondie  ,  à  trois  faces. 


Co2      *  ION  •  f 

s'ouvrant  en  trois  valves  ;  les  semences  ovales  ,  petites  e( 
blanches.  Celte  plante  croit  à  Tile  de  Cayenne  et  dans  les 
contrées  méridionales  de  l'Amérique.  Ses  racines,  d'après 
Aublet,  ont  les  propriétés  de  l'ipécacuanha  blanc,  prises  en 
petite  dose;  en  poudre,  elles  sont  purgatives  :  elles  devien- 
nent émétiques,  lorsqu'on  augmente  la  dose,  qui  est  ordinai- 
rement d'un  gros. 

loNiDiUM  ÉMKTiQUE  :  lonidium  ïpecacuanlia ,  Vent.,  /.  c;  Viola 
ipecacuanlia,  Linn.  ;  Pomhalia  ipecacuanha,  Vandell. ,  Fasc, 
pag.  7,  tab.  i.  Cette  plante  a  des  racines  blanches,  fibreuses 
et  ramifiées;  elles  produisent  des  tiges  droites,  rameuses, 
hautes  de  deux  pieds  :  les  feuilles  sont  ovales,  elliptiques, 
vertes,  glabres  ou  un  peu  pileuses  en-dessous,  dentées  en 
scie;  les  pétioles  courts;  les  fleurs  blanches,  solitaires,  axil- 
laires,  inclinées  sur  leur  pédoncule,  accompagnées  de  deux 
bractées  très-courtes,  pileuses  au  sommet;  les  pétales  ongui- 
culés  ,  deux  plus  longs,  rabattus;  trois  inférieurs,  dont  un 
très-grand  ,  pubescent  en-dessous.  Cette  espèce  croît  au  Brésil. 
On  soupçonne  fortement  que  ce  sont  ses  racines  qui  four- 
nissent l'ipécacuanha  blanc  ;  au  reste,  il  est  reconnu  aujour- 
d'hui que  cet  émétique  provient  de  plusieurs  plantes  diffé- 
rentes, non-seulement  parmi  les  violettes,  mais  d'espèces  qui 
appartiennent  à  d'autres  genres.  (Voyez  Ipecacuanha.) 

loNiDiUM  Hi^,TÉROPHVLLE  :  Jonidium  heteroplijllum ,Vent. ,  /.  c; 
T'iolaheterophjdla ,  Poir. ,  Encycl.  ;  Viola surrecta,  etc.,  Pluken., 
tab.  120,  fig.  8.  Espèce  remarquable  par  ses  feuilles  de  deux 
sortes.  Ses  racines  sont  grêles,  longues,  tortueuses  et  blan- 
châtres; les  tiges  dures;  les  rameaux  glabres,  presque  fili- 
formes: les  feuilles  presque  sessiles;  les  inférieures  petites, 
ovales;  les  supérieures  linéaires-lancéolées:  les  fleurs  petites, 
axillaires;  les  pédoncules  capillaires,  plus  courts  que  les 
feuilles.  Cette  plante  croit  à  la  Chine. 

loNiDiUM  A  PETITES  KLEURS  :  lonidiuni  parvijlorum ,  Vent. ,  /.  c; 
Viola  parviflora,  Linn.  fils,  Sup.;  Cavan. ,  Icon.  rar. ,  var.  C, 
pag.  21.  Plante  herbacée  de  l'Amérique  méridionale,  qui  a 
le  port  du  veronica  serpiUifolia ,  et  dont  les  tiges  filiformes, 
presque  grimpantes,  sont  garnies  de  feuilles  nombreuses, 
pétiolécs ,  glabres,  ovales,  munies  de  cinq  dents  à  chaque 
bord.  Les  fleurs  sont  droites,  axillates,  fort  petites  ;  la  co- 


,  >  ION  *      Co5 

roîie  ù'un  blanc  de  lait;  les  quatre  pc'lales  supérieurs  à  peine 
plus  lor,"S  que  le  calice  :  le  cinquième  pendant,  une  fois 
plus  long;  le  stigmate  en  entonnoir;  la  capsule  petite,  à 
trois  loges. 

loNiDiUM  GLUTiNEux  :  Jonidium  glutinosum  ,  Vent.,  Malm., 
]iag.  27.  Ses  tiges  sont  herbacées,  un  peu  pileuses  vers  leur 
sommet  :  les  feuilles  alternes,  ovales-elliptiques,  glabres  ,  den- 
tées; les  pédoncules  pileux,  filiformes;  les  fleurs  blanches, 
petites  ;  leur  calice  pubcscent.  Commerson  a  découvert  cette 
plante  à  Buenos -Ayres.  Dans  l'ionidium  Unifolium  (Poir. , 
Encycl.  ,  suh  viola),  autre  espèce  recueillie  par  Commerson 
à  Madagascar,  les  feuilles  sont  éparses  ,  fort  petites,  étroites, 
linéaires;  les  fleurs  solitaires,  petites,  blanchiUrcs;  les  cap- 
sules glabres. 

lONIDIUM    A    FEUILLES    DE   POLYGALA    :    Jonidium  polygcdcrfoUuin  y 

Vent.  ,  Le,  tab.  27  ;  Viola  verticillata  ,  Ort. ,  Dec.  4  ,  pag.  5o  ; 
Cavan.,  Lee.  lot.,  2,  pag.  075.  Espèce  originaire  de  la  Nou- 
velle-Espagne, dont  les  tiges  sont  dures,  touffues,  presque 
ligneuses,  à  peine  rameuses;  les  feuilles  opposées,  presque 
sessiles,  lancéolées,  rudes  à  leurs  bords;  les  fleurs  d'un  vert 
jaunâtre,  petites,  inclinées,  puis  redressées.  Dans  Vionidiiim 
linartœfolium  (Poir.,  Encycl.,  suh  viola),  les  feuilles  sont 
linéaires,  très -étroites;  les  stipules  sétacés  ;  les  fleurs  bleuâ- 
tres, petites;  la  corolle  à  peine  de  la  longueur  du  calice. 
Dans  l'ionidium  strictum,  Vent.,  l.  c. ,  les  tiges  sont  ligneuses, 
élancées;  les  feuilles  opposées,  lancéolées,  très- entières , 
glabres,  longues  d'un  pouce;  les  stipules  très-courtes,  subu- 
lées;  les  fleurs  petites;  la  corolle  blanchâtre;  les  capsules 
courtes,  à  trois  petites  valves  concaves,  renfermant  des  se- 
mences blanchâtres.  Cette  espèce  a  été  découverte  à  l'île  de 
Saint-Thomas  par  M.  Ledru ,  et  à  Saint-Domingue  par  M. 
Poiteau. 

loNiDiuM  giumpant:  lonîdiii'm  hjhantlius,  Vent,:  Viola  hj'han- 
tlius,  Linn.  ;  Aubl. ,  Guian.,'2,  tab.  Si^;  Bjhanthus  ,  Jacq. , 
y1/?ier.,lab.  176,  fig.  24,  26.  Arbrisseau  de  Caycnne,  que  les 
Galipons  nomment  pira-aia.  Ses  liges  se  divisent  en  rameaux 
grêles,  roulés  les  uns  sur  les  autres  ou  autour  des  arbres  qui 
les  avoisinent  ;  garnis  de  feuilles  alternes,  lisses,  ovales, 
longues  d'environ  six  pc^îces.  Les  fleurs  sont  ou  solitaires  ou 


^o4      f  ION  * 

réunies  plusieurs  ensemble  sur  un  pëtioncule  commun  ,  axil- 
laires,  soutenues  par  des  pédicelles  courts,  articulés;  la  co- 
rolle fort  grande,  jaunâtre;  le  pétale  supérieur  concave, 
éperonné  à  sa  base;  les  deux  latéraux  arrondis,  onguiculés; 
les  deux  inférieurs  fort  petits  ;  les  étamines  appliquées  contre 
l'ovaire,  surmontées  d'un  corps  membraneux,  portant  à  sa 
face  intérieure  une  anthère  qui  s'ouvre  en  deux  valves. 

loNiDiUM  A  LONGUES  FEUILLES  :  lonidium  longifoUum  ,  Poir.  , 
Encycl. ,  sub  viola.  Plante  découverte  à  Cayenne  ,  remarqua- 
ble par  la  grandeur  et  la  longueur  de  ses  feuilles,  par  ses 
petites  fleurs  à  longs  éperons,  par  ses  tiges  ligneuses,  garnies 
de  rameaux  roides,  tortueux.  Les  feuilles  sont  alternes,  pé- 
tiolées ,  oblongues-lancéolées ,  longues  de  quatre  à  cinq  pouces  ; 
les  fleurs  solitaires,  ou  réunies  sur  un  pédoncule  simple,  pres- 
que capillaire;  le  calice  fort  petit;  la  corolle  blanchâtre; 
l'éperon  étroit,  subulé. 

loNiDiUM  A  FEUILLES  DE  THESiVM  :  lonidlum  tliesUfoUum ,  To'ir. , 
Encycl.,  sub  viola.  Adanson  a  découvert,  au  Sénégal,  cette 
plante  à  tige  herbacée,  presque  simple,  glabre,  striée, 
garnie  de  feuilles  alternes,  sessiles,  très-étroites,  longues  de 
deux  ou  trois  pouces,  glabres,  très-entières;  les  stipules  su- 
bulées;  les  fleurs  fort  petites,  solitaires,  axillaires,  presque 
sessiles  ;  les  folioles  du  calice  étroites ,  aiguës  ;  la  corolle 
blanche,  à  peine  plus  longue  que  le  calice;  la  capsule  ovale, 
obtuse,  un  peu  arrondie. 

Parmi  les  autres  espèces  de  ce  genre  placées  d'abord 
parmi  les  violettes,  on  peut  distinguer  le  riola  buxifolia , 
(Poir.,  Encycl.),  à  feuilles  alternes,  en  ovale  renversé,  en- 
tières, roulées  à  leurs  bords,  de  l'île  de  Madagascar:  le  viola 
capensis ,  Thunb. ,  dont  les  tiges  sont  droites,  ligneuses;  les 
feuilles  en  ovale  renversé ,  dentées  en  scie  :  le  viola  cnneasperma , 
Linn.;  nelam-parenda ,  Rheed. ,  Hort.  Malab.,  9,  tab.  60;  très- 
rameuse  dès  la  base  de  la  tige ,  à  feuilles  alternes ,  linéaires- 
lancéolées,  distantes,  entières,  dépourvues  de  stipules;  elle 
croît  dans  les  Indes  orientales.  (Poir.) 

lONISCUS.  {Ichthjol,)  Au  rapport  d'Athénée,  les  anciens 
Ephésiens  nommoient  luvivitoç,  la  daurade ,  aurata  vulgaris. 
Voyez  Daurade.  (H.  C) 

lONITES.  (Bot.)  Ruellius  cite  ce  nom  comme  un  de  ceux 
donnés  anciennement  au  câprier.   (J.)  l 


»  IPE  6o5 

lONTITIS  (Bof.),  nom  grec,  suivant  Mentzel ,  de  l'aris- 
toloche clématite.  (J.) 

lONUS.  {Ichthyol.)  On  trouve  désigné,  sous  le  nom  grec 
à'idivoç,  par  Hesychius  et  Varinus,  un  poisson  qui  nous  est 
totalement  inconnu.  (H.  C) 

lONYGRON.  (Bot.)  Nom  grec  de  la  grassette ,  pmguicw/a, 
qui  étoit  un  sanicula  montana  de  C.  Bauhin  ,  la  viola  hurnida 
de  quelques  autres,   et  le  dodecatheon  de  Pline.  (J. ) 

lOPS.  {Ichthj'ol.)  Par  le  nom  d'jW?ç,  les  anciens  Athé- 
niens paroissent  avoir  désigné  l'anchois.  Voyez  Engraule. 
(H.  C.) 

IOTA.  (Entom.)  Nom  d'une  noctuelle  qui  porte  sur  les 
ailes  supérieures  deux  traits  longitudinaux  de  couleur  noire, 
que  l'on  a  compares  à  la  lettre  majuscule  grecque,  I.  La  che- 
nille se  nourrit  des  feuilles  de  plusieurs  espèces  d'armoise , 
telles  que  l'absinthe,  l'aurone  ,  la  citronelle  ,  la  santoline, 
etc.  (CD.) 

lOUAITOBOU.  {Bot.)  Nom  caraïbe,  suivant Surian  ,  d'une 
plante  caryophyllée  des  Antilles,  qui  étoit  un  alsine  de  Plu- 
mier, et  que  Swartz  nomme  plia  rnaceum  spatulalum.   (J.  ) 

lOUANTAN.  {Bot.)  Aublet  dit  que  les  Noiragues,  habi- 
fans  d'une  partie  de  la  Guiane  ,  nomment  ainsi  son  genre 
Vantanea,  que  l'on  n'a  pas  encore  rapporté  à  une  famille 
connue.  (J.  ) 

lOUTAY.  {Bot.)  Les  Garipons  de  la  Guiane  nomment  ainsi 
Voutea  d'Aublet,  genre  de  plante  légumineuse.  (J.) 

lOUÏZIOU.  {Ichthjrol.)  Voyez  Jousion.  (H.  C.) 
lOWAIOU.  {Ornith.)  Nom  koriaque  d'une  espèce  de  ga- 
gari,   colymhus   maximus ,    Stell. ,    et  colymbus    immer ,    Linn. 
(Ch.  D.) 

IPATKA.  {Ornith.)  L'oiseau  qui  porte  ce  nom  au  Kamts- 
chatka  ,  est  Vanas  arctica  de  Clusius ,  de  Willughby,  etc., 
Valea  arctica  de  Linnaeus ,  le  puffin  de  la  zoologie  arctique 
dePennant,  le  macareux  de  BufFon,  pi.  enl.  275.  (Ch.D.) 

IPÉCACUANHA.  {Bot.)  La  plante  connue  au  Brésil  sous 
ce  nom,  décrite  et  figurée  par  Marcgrave  et  Pison  ,  est  le 
véritable  ipécacuanha  du  commerce.  Les  auteurs  qui  se  sont 
succédé,  ont  émis  diverses  opinions  sur  l'origine  de  cette  ra- 
cine.employée  en  méJècine  ,  qu'ils  attribuoient  à  différentes 


6o€       «  IPE  '  , 

plantes.  On  avoît  cru  que  c'étoit  un  paris  ou  une  pjTola , 
ou  un  chèvrefeuille  ou  un  euphorbe.  Vandclli  croyoit  que 
(•"étoit  son  pombalia,  genre  voisin  de  la  violette  ,  réuni'pos- 
térieureinent  à  Vionidium  de  \^entenat ,  dans  la  même  l'a- 
mille.  Cette  racine  ressembloit  encore  à  celle  d'une  violette 
du  Pérou,  existante  dans  nos  herbiers  et  reportée  aussi  a 
Vionidium-  mais  Técorce  de  celle-ci  est  beaucoup  moins 
épaisse  ,  ce  qui  aide  à  la  distinguer  facilement.  M.  Mutis, 
célèbre  botaniste,  résidant  àSanta-Fé,  en  Amérique,  a,  le 
premier,  fait  connoitre  un  psjchotria,  appartenant  à  la  fa- 
mille des  rubiacées,  que  Linnœus  fils  a  nommé  psjchotria 
emetica,  en  le  regardant  comme  le  véritable  ipécacuanha  , 
et  citant  comme  synonyme  la  figure  de  Marcgrave ,  sans 
faire  attention  que  dans  celle-ci  la  disposition  des  fleurs  en 
tête  est  bien  diiférente.  Postérieurement,  M.  Brotero  ,  bota- 
niste portugais,  a  mieux  connu  la  plante  du  Brésil,  dont  il 
a  donné  une  bonne  figure  et  une  description  exacte,  qui 
prouvent  que  cette  plante,  quoique  également  rubiacée, 
appartient  à  un  genre  différent,  qu'il  nomme  callicocca,  en 
ajoutant  le  nom  spécifique  ipécacuanha.  Ce  genre  doit  se 
confondre  avec  celui  du  cephaelis ,  publié  auparavant  par 
Swartz. 

Comme  on  distingue  dans  les  pharmacies  deux  ipécacuanha, 
à  raison  de  la  couleur  grise  ou- brune  de  leurs  racines,  quel- 
ques auteurs,  les  regardant  comme  différens,  ont  cru  que 
Fipécacuanha  gris  étoit  fourni  parle  callicocca  ou  cephaelis, 
et  le  brun  par  le  psjchotria.  Cette  erreur  a  subsisté  tant 
qu'on  n'a  pas  possédé  ici  les  deux  plantes  en  herbier  avec 
leurs  racines.  M.  Richard ,  fils ,  ayant  eu  occasion  de  les 
observer  dans  Pherbler  de  son  père,  en  a  fait  Fobjet  d'un 
mémoire  présenté  à  la  société  de  médecine,  et  consigné  dans 
le  n."  4  des  Bulletins  de  cette  société,  année  1818.  Il  a  ob- 
servé que  la  racine  de  cephaelis,  absolument  semblable  à  celle 
du  commerce ,  variant  du  gris  au  brun ,  avoit  la  partie  li- 
gneuse amincie  comme  un  fil,  et  l'écorce  épaisse,  raboteuse 
à  l'extérieur,  marquée  de  plusieurs  fentes  circulaires  très- 
rapprochées,  et  présentant  ainsi  la  forme  d'anneaux  très- 
courts.  Au  contraire,  la  racine  du  psjchotria  ,  plus  volumi- 
neuse, a  une  écorce  lisse,  plus  miucecjue  la  partie  3igue;ise^ 


IPE  *      607 

offrant  à  l'extérieur  des  espèces  d'éiranglemens  ou  sillons 
circulaires,  assez  éloignés  les  uns  des  autres.  Il  propose  en 
conséquence,  pour  les  bien  distinguer,  de  nommer  ipéca- 
cuanhu  annelé  la  racine  du  eephaelis,  et  ipécacuanha  non 
annelé  celle  du  psjcliolria.  Cette  dernière  est  plus  rare  dans 
les  pharmacies  et  dans  les  collections  de  matière  médicale. 
La  première,  au  contraire,  est  très-usitée,  et  l'on  emploie 
indifféremment  les  deux  variétés,  grise  ou  brune.  Cette 
identité,  indiquée  par  M.  Richard,  est  combattue  par  M. Virey, 
qui  a  publié  récemment  l'extrait  d'une  dissertation  plus  an- 
cienne de  M.  Gomez  ,  botaniste  américain  ,  tendant  à  prouver 
que  l'ipéoacuanha  gris,  le  même  qiie  Vipécacuanha  blanc  de 
Pison  ,  diffère  du  brun  ,  et  provient  d'un  richardia  ,  autre 
rubiacée  ,  qu'il  nomme  richardia  brasiliensis ,  et  dont  il  a 
communiqué  des  échantillons  à  M.  Virey.  Sa  racine,  de 
même  forme  que  celle  du  brun  ,  est  également  annelée  ,  à 
anneaux  un  peu  moins  courts,  à  écorce  pareillement  épaisse, 
blanchâtre  ,  un  peu  plus  molle,  entourant  une  partie  ligneuse 
filiforme,  et  ayant  la  même  saveur  acre,  ainsi  que  l'odeur 
nauséeuse.  L'auteur  détaille  ensuite  les  autres  caractères  qui 
rattachent  cette  plante  au  genre  Richardia,  dédié  ancienne- 
ment par  Linnœus  k  Richardson,  botaniste  anglois.  Cette 
indication  d'un  observateur  qui  a  vu  et  décrit  les  plantes 
vivantes,  semble  prouver  que  les  ipécacuanha  bruns  et  gris 
proviennent  de  deux  plantes  différentes. 

La  propriété  soit  antidyssentérique ,  soit  émétique,  est  à 
peu  près  la  même  dans  ces  deux  racines;  elle  est  moindre 
dans  celles  du  psychotria  et  des  deux  ionidium  cités  plus  haut. 

On  supprime  ici  les  détails  relatifs  à  leur  emploi ,  qui 
sont  du  ressort  de  la  matière  médicale  et  de  la  médecine  ^ 
nous  rappellerons  seulement  que  l'ipéeacuanha  a  été  connu  , 
vers  1649,  par  l'éloge  que  faisoit  Pison  de  son  utilité  dans 
la  dyssenterie.  Sa  réputation  s'établit  lentement.  Un  médecin 
nommé  Legros  en  avoit  apporté,  en  1672,  une  provision, 
qui  fut  mise  en  vente  dans  une  pharmacie  célèbre  de  Paris  j- 
mais  y  resta  presque  dans  Poubli.  Un  marchand  plus  adroit, 
nommé  Grenier,  qui  en  avoit  apporté  i5o  livres  en  ]68S, 
associa  à  sa  vente  et  mit  dans  son  secret  le  médecin  Helvetius 
le  père.  Celui-ci  obtint^e  Louis  XIV  qu'on  en  feroit  Teisai 
« 


6o8      '  ÎPE  ' 

dans  les  hôpitaux,  et  en  cas  de  succès  il  devoit  avoir,  avec 
une  récompense,  le  privilège  exclusif  de  la  vente.  L'un  et 
l'autre  furent  accordés  àHelvetius.  Le  marchajid,  qui  voulut 
entrer  en  partage,  lui  intenta  un  procès;  mais  Helvetius  fut 
maintenu  dans  la  jouissance  du  privilège,  à  la  charge  de 
l'indemniser.  Grenier,  mécontent,  vendit  de  l'ipécacuanha 
à  beaucoup  de  personnes,  et  le  secret  fut  bientôt  divulgué. 
Ce  remède  ne  tarda  pas  à  trouver  des  preneurs  très-zélés. 
D'abord  on  ne  connoissoit  que  sa  propriété  antidyssentérique; 
ensuite  on  a  découvert  son  action  émétique,  qui  Ta  fait 
placer  au  premier  rang  parmi  les  médicamens  végétaux  de 
cette  classe. 

Dans  les  environs  de  Rio-Janéiro,  suivant  M.  Gomez,  le 
nom  de  poaia  est  donné  en  général  aux  divers  ipécacuanha. 
Le  cephaelis  est  nommé  poaia  do  malo  ou  cipo  ;  le  richardia 
est  le  poaia  do  campo  ou  des  champs  ;  et  M.  Gomez  parle 
aussi  d'un  poaia  grossa,  qu'il  ne  put  examiner  que  superH- 
ciellement,  et  dont  les  rugosités  transversales  lui  parurent 
jjIus  écartées  que  dans  les  espèces  ordinaires.  Chomel,  dans 
ses  Plantes  usuelles,  dit  aussi  que  les  Portugais  donnent  à 
l'ipécacuanha   les  noms  de  hexuquillo ,  cagosanga,  et  beloculo. 

Plusieurs  plantes  employées  en  divers  pays  comme  émcti- 
ques  y  portent,  pour  cette  raison,  le  nom  d'ipécacuanhd. 
Telles  sont  d'abord,  à  Cayenne  et  à  Saint-Domingue,  quel- 
ques violettes  autres  que  celles  citées  précédemment.  Le 
cjnanchum  vomitorium,  de  la  famille  des apocinées,  est  l'ipé- 
cacuanha blanc  de  l'île  de  France.  Ç)uelques  autres  apoci- 
nées sont  employées  dans  l'Inde  sous  le  même  nom  comme 
émétiques.  Le  hoerhaavia  diandra  est  nommé  de  même  à 
Cayenne.  On  trouve  dans  quelques  livres  le  trientalis  sous 
le  nom  de  ipécacuanha  europœa.  Un  rueltia  de  Saint-Domingue, 
nommé  coccis ,  est  cité  comme  ipécacuanha  faux  par  Nicolson. 
Voyez  Emétiine.  (J.) 

IPECA-GUACU.  {Ornith.)  L'oiseau  que  Pison ,  Hist.  nat. , 
pag.  85,  désigne  sous  ce  nom,  est  le  canard  musqué,  anas 
moschata,  Linn.   (Ch.  D.) 

IPECATI-APOA.  (Ornith.)  Cet  oiseau,  dont  Marcgrave  a 
donné  la  description  et  la  figure,  pag.  218  de  son  Histoire 
naturelle  du  Brésil,   et  auquel   cff'TCspond   Vopeca  oiwa  Cic 


,  '  IPH  *       Ço^ 

Eai  5  Synops.  148,  est  rapporté  à  l'oie  bronzée,  anas  mêla-- 
notos,  Gmel.  et  Lath.  (Ch.  D.) 

IPECU.  {Ornith.)  L'oiseau  que  les  Brésiliens  nomment  ainsi, 
et  qui  est  figuré  dans  Marcgrave  ,  pag,  207,  est  l'ouantou  ou 
pic  noir  huppé  de  Cayenne ,  picus  linealus ,  Lirin.  (Cu.  D.) 

IPECUTIRI.  {Ornith.)  he  canard  auquel  on  dohne  ce  nom 
au  Paraguay,  à  causé  de  Son  cri  tiri  ou  cutiri,  et  qui  est  dé- 
crit par  M.  d'Azara  sous  le  n.°  437  ,  a  le  front  d'un  brun  rous- 
sâtré,  les  cètés  de  la  tête,  la  gorge  et  le  devant  du  cou  blan- 
châtres, le  derrière  de  la  tête  et  la  nuque  noirs;  le  dessous 
du  corps  d'un  brun  roussàtre ,  avec  quelques  taches  noires 
sur  les  flancs;  les  parties  supérieures  du  corps  d'un  noir  chan- 
geant, le  bec  d'un  rouge  obscur.  (Cit.  D.) 

IPÉRUCUIBA  (IchthjoL),  nom  brésilien  du  rémora.  Voyez: 

ECHÉNÉÏDE.     (H.     C.  ) 

IPHIONE,  Iphiona.  (Bot.)  [Corfmhiferes,  Juss.  =  Sfngéné- 
sie  poij'gamie  égale,  Linn.]  Ce  genre  de  plantes,  que  nous 
avons  proposé  dans  le  Bulletin  des  sciences  d'Octobre  1817, 
appartient  à  Tordre  des  synanthérées ,  à  notre  tribu  natu- 
relle des  iniJlées,  et  à  la  section  des  inulées-prototypes,  dans 
laquelle  nous  l'avons  placé  entre  les  deux  genres  Pentanema 
et  Rhanterium.  Il  présente  les  caractères  suivâns  : 

Calathide  incouronnée,  équaliflore ,  pluriflore,  régulari- 
flore,  androgyniflore.  Péricline  formé  de  squ'ammes  imbri- 
quées. Clinanthe  inappendiculé ,  planiuscule.  Fruits  cylin- 
dracés,  hispides  ;  aigrette  composée  de  squammellules  inégales, 
filiformes ,  barbéllulées.  Anthères  munies  d'appendices  basi- 
Jaires. 

Iphione  ponctuée;  Iphiona  punctata,  H.  CasS. ,  Bulletin  des 
sciences  d'Octobre  1817.  C'est  une  plante  herbacée,  dont  la 
tige  est  simple,  grêle,  cylindrique,  striée,  à  peine  pubes- 
cénte;  ses  feuilles  sont  alternes,  sessiles ,  oblongùes,  sagittées 
à  la  base,  dentées  en  scie,  ou  presque  entières,  glabrius- 
culès,  parsemées  en-dessous  de  points  glanduleux;  les  cala- 
thides ,  composées  de  fleurs  jaunes,  sont  tantôt  disposées  ea 
panicule  corymbée,  tantôt  peu  nombreuses  et  disposées  en 
un  petit  corymbe  terminal.  Elles  sont  multiflores  ;  leur  péri- 
cline est  égal  aux  fleurs,  subcylindracé ,  formé  de  squammei 
irrégulièrement  imbrio^uées  ,    foliacées  ,   linéaires  ,    aiguès  , 


6io         ,  IPH 

ùninervëes,  parsemées  de  glandes;  le  cHnanthe  est  planius- 
cule  ;  les  fruits  sont  cylindriques,  hispides  ,  munis  d'un  bour- 
relet basilaire  ;  leur  aigrette  est  composée  de  squammellulcs 
peu  nombreuses,  unisériées,  inégales,  filiformes,  barbellulées  j 
les  anthères  sont  pourvues  d'appendices  basilaires  sétiformes; 
les  corolles  ont  leurs  divisions  garnies  de  glandes.  Nous  avons 
bbscrvé  cette  plante  dans  un  herbier  de  M.  de  Jussieu  j  qui 
a  été  fait  à  Galam  en  Afrique. 

IpHior^E  A  FEUILLES  DE  GENÉVRIER  :  Ipliiona  juniperlfoUa ,  H. 
Cass.,  Dictionnaire;  Iphioria  diihia ,  H.  Cass. ,  Bulletin  des 
sciences  d'Octobre  1817  ;  Conj'za  pungens  ,  Lamk.  ;  Chrjsocoma 
mucronata,  Forsk.  ;  Stœlielina  spinosa,  Vahl.  Cette  plante  her- 
bacée ,  ou  peut-être  ligneuse  ,  est  entièrement  glabre ,  et  haute 
de  six  pouces  dans  l'échantillon  incomplet  que  nous  décri- 
vons ;  sa  tige  est  dure,  roide,  cannelée,  anguleuse,  très-ra- 
meuse, à  rameaux  paniculés,  divariqués,  roides  et  droits; 
les  feuilles  sont  peu  nombreuses,  éparses,  alternes,  sessiles, 
longues  de  cinq  lignes,  subulées ,  roides,  épaisses,  coriaces, 
spinescEntes  au  sommet,  portant,  sur  chacun  des  deux  côtés 
de  leur  partie  basilaire  ,  une  lanière  courte,  subulée ,  roide, 
spinescente  ;  les  calathides ,  hautes  de  quatre  lignes  et  com- 
posées de  fleurs  jaunes,  sont  solitaires  au  sommet  de  la  tige 
et  des  rameaux.  Elles  sont  pluriflores  ;  leur  péricline ,  infé- 
rieur aux  fleurs,  est  formé  de  squammes  imbriquées,  appli- 
quées, ovales,  glabres,  coriaces,  membraneuses  sur  les  bords; 
le  fclinanthe  est  petit.  Les  fruits  sont  cylindracés ,  profondé- 
ment cannelés  ,  hispidesj  leur  aigrette  ,  égale  à  la  corolle  ,  est 
composée  de  squammellulcs  filiformes  ,  épaisses,  très-barbellu- 
lëes  ,  nombreuses ,  plurisériées ,  et  d'autant  plus  petites  qu'elles 
sont  plus  extérieures;  les  anthères  ont  l'appendice  apicilaire 
long,  et  les  appendices  basilaires  courts;  les  corolles  sont  cy- 
lindriques, à  tube  nul,  ou  presque  nul,  ou  confondu  avec 
le  limbe;  les  styles  sont  conformes  à  ceux  des  inulécs.  Cette 
plante  a  été  découverte  par  Lippi ,  en  Egypte ,  aux  environs 
du  Caire,  sur  les  montagnes.  Nous  avons  étudié  ses  caractères 
génériques  et  spécifiques  sur  un  échantillon  de  l'herbier  de 
M.  Desfontaines ,  qui  ne  nous  a  point  offert  une  particu- 
larité décrite  par  M.  de  Lamarck  en  ces  termes  :  «  A  la  base 
«  de  la  plupart  des  feuilles,  on  trouve ,  entre  lesdeux  piquans 


,  »  IPO  •        Gii 

«  latéraux,  deux  très-petites  oreillettes  qui  se  courbent poui* 
^<  eihbrasser  la  tige.» 

Les  deux  espèces  cViphionâ  diffèrent  beaucoup  l'une  dû 
l'autre,  non-seulement  par  le  port,  mais  aussi  par  quelques 
caractères  génériques  ,  ainsi  qu'on  peut  le  remarquer  en 
comparant  leurs  descriptions  :  cependant,  pour  ne  pas  trop 
multiplier  les  genres,  nous  avons  dû  associer  ces  deux  plantesi 
La  première  a  beaucoup  d'affinité  avec  notre  genre  Penta-^ 
nema,  et  la  seconde  avec  le  genre  Rhanterium;  mais  les  carac-^ 
tères  des  trois  genres  sont  bien  distincts.  Viphiona  janiperi- 
folia  avoit  été  attribuée  par  M.  de  Lamarck  au  genre  Confza^ 
par  Forskal  au  genre  Chrysocoma ,  et  par  Vahl  au  genre 
Stœhelina  :  mais  la  calathide  des  coriyza  çst  pourvue  d'une  cou- 
ronne féminiflore  ;  les  chrysocoma  sont  de  la  tribu  des  asté* 
rées;  les  stœhelina  sont  des  carlinées,  et  elles  diffèrent  d'ail- 
leurs des  iphiona  par  le  clinanthe  fimbrillifère  et  l'aigrette 
raïneusci  (H.  Cass.) 

IPHISE.  {Erpétol.)  Feu  Daudin  a  donné  ce  nom  à  une 
espèce  de  couleuvre,  coluber  iphisa,  qtii  est  encore  fort  peu 
connue.  Décrite  d'abord  parMerrem,  qui  l'a  reçue  de  l'Inde, 
cette  espèce  a  été  nommée  par  lui  Hjgiem  natter.  Seba  pa- 
roît  l'avoir  figurée  aussi  sous  la  dénomination  de  serpens  sia-' 
mensis  {Thés.  Il,  tab.  04,  fig.  Ô).  (H.  C.) 

IPHYON.  {Bot.)  Anguillara,  cité  pai»  Ci  Bauhin  j,  croit  que 
ce  nom  est  donné  par  Théophraste  4  l'asphodèle  jaune.  (J.) 

IPICAY.  {Bot.)  La  plante  du  Brésil  citée  sous  ce  nom  pat* 
Mentzel,  est  le  Jupicai,  Voyez  ce  mot.  (J.) 

IPO.  {Bot.)  Voyez  Antiare  et  Hvpo.  (J.) 

IPOMEA,  Ipomœa^  {Bot.)  Genre  de  plantes  dicotylédones^ 
à  fleurs  complètes,  monopétalées,  régulières,  très-voisin  des 
liserons,  de  la  famille  des  convolvulacées,  de  la  pentandrie 
monogjnie  de  Linnœus  ;  offrant  pour  caractère  essentiel  :  Un. 
calice  à  cinq  découpures;  une  corolle  infundibuliforme  ou 
en  cloche;  cinq  étamines  attachées  à  la  base  de  la  corolle,- 
un  ovaire  supérieur  ;  un  stigmate  en  tête  ;  une  capsule  à  trois 
loges  polyspermes. 

Ce  genre  n'est  que  médiocrement  séparé  des  liserons.  Les 
caractères  qui  l'en  distinguent,  ne  se  trouventpas  toujours  réu- 
nis dans  les  nombreuse^espèces  qui  le  composent;  mais  il  ca 


Cid       '  ÏPO  ^  . 

existe  au  moins  un  ou  deux  sufiisans  pour  les  fcnîr'  séparées 
des  liserons.  Le  plus  saillant  scroit  la  forme  de  la  corolle^ 
^i  elle  ctoit  constamment  en  entonnoir,  c'est-à-dire,  à  tube 
alongé  et  rétréci ,  comme  dans  le  quamoclit  ;  mais  souvent 
elle  est  presque  campanulée  :  il  faut  alors  avoir  recours  au 
Stigmate  en  tête  ou  à  deux  lobes  très-courfs,  tandis  qu'il  est 
bifide  dans  les  liserons.  Le  nombre  des  loges  et  des  semences 
n'est  pas  non  plus  constant  :  d'où  il  résulte  qu'il  y  a ,  parmi 
les  auteurs,  peu  d'uniformité  dans  les  espèces,  placées  tantôt 
dans  l'uo  ,  tantôt  dans  l'autre  de  ces  deux  genres. 

Les  ipbméa  se  composent  d'une  suite  nombreuse  de  très- 
belles  espèces,  dont  plusieurs  sont  cultivées  dans  nos  jardins 
comme  pbintes  d'ornement ,  propres ,  par  leur  tige  grimpante , 
à  couvrir  les  berceaux  ou  à  palissader  les  murs.  On  sème  leurs 
graines  sur  couche  ,  dès  que  les  gelées  ne  sont  plus  à  craindre , 
dans  des  pots  de  terre  de  bruyère  mêlée  avec  moitié  de  terre 
franche  :  on  repique  ensuite  les  jeunes  plantes,  seule  à  seule, 
dans  des  pots  qu'on  enterre  au  pied  d'un  mur  exposé  au  midi. 
Les  espèces  les  plus  remarquables  de  ce  genre  sont: 

Ipoméa  quamoclit  :  Ipomœa  quamoclit,  Linn.  ;  Lamk. ,  III, 
getu,  tab.  104,  fig.  1  ;  F/05  cardinalis,  Rumph.,  Amb,,  5,  tab. 
i55,  fig.  2;  Tsiuria-cranti,  Rheed.,  Malab.  ii  ,  tab.  Go.  La 
délicatesse  de  son  feuillage  et  l'éclat  de  ses  fleurs  rendent 
fcetté  belle  espèce  très-remarquable.  Ses  tiges  sont  grêles  et 
s'élèvent,  en  grimpant,  à  la  hauteur  de  sept  à  huit  pieds  ; 
les  feuilles  d'un  bea*  vert,  pectinées,  élégamment  pinnati- 
fides;  les  pinnules  linéaires,  presque  filiformes.  Les  fleurs 
sont  axillaires,  solitaires,  quelquefois  deux  sur  un  très-long 
pédoncule;  la  corolle  en  entonnoir,  de  couleur  écarlate  très- 
Vive,  longue  de  plus  d'un  pouce.  Cette  plante  est  originaire 
des  Indes  orientales.  Rhéede  dit  que  son  suc  est  sternu- 
tatoire  et  employé  comme  tel  avec  succès  dans  quelques 
înaux  de  tête. 

Ifoméa  tObéredx  :  Ipomœa  tulerosa ,  Linn.;  Sloan.,  Juin, 
hist.,  1,  tab.  96,  fig.  2;  Pluken.,  Almag. ,  tab.  276,  fig,  6; 
vulgairement  Ltane  a  tonnelles.  Cette  espèce  est ,  par  ses 
longs  rameaux  plians,  la  plus  propre  à  couvrir  les  berceaux 
les  plus  étendus ,  à  les  décorer  par  ses  belles  fleurs  odorantes  j 
d'un  jaune  clair  ou  blanchâtre;  maicril  lui  faut,  pour  proa» 


,  »  IPO  •       Bi'é 

jiérer  en  pleine  terre,  un  climat  tempéré,  tel  que  celui  des 
contrées  méridionales  de  l'Europe.  Ses  feuilles  sont  vertes, 
un  peu  pubescentes  en-dessous  ,  divisées  en  sept  digitations 
inégales,  très-profondes  ;  ses  fleurs  grandes,  latérales,  axil- 
Liires,  un  peu  purpurines  à  leur  base,  en  forme  d'enton- 
noir, réunies  deux  ou  trois  sur  un  pédoncule  commun.  Elle 
croît  dans  les  îles  et  les  contrées  méridionales  de  l'Amérique. 

IroMÉA  PIED-DE-TIGRE  :  Ipomcpa  pes  tigridis,  Linn.;  Herm. , 
Lugdb.,  tab.  187  ;  Pulli-Schonadi ,  Rheed.,  Malal.,  11  ,  tab.  ôg. 
Ses  tiges  sont  rudes,  grimpantes;  ses  feuilles  palmées,  divi- 
sées en  cinq  ou  sept  digitations,  couvertes  à  leurs  deux  faces 
de  poils  fins  et  couchés.  Leç  pédoncules  sont  ::xillaires,  ter- 
minés par  une  tête  de  fleurs  serrées,  touffues,  très-velues; 
la  corolle  infundibuliforme^  les  capsules  à  trois  loges;  les  se- 
mences un  peu  velues.  Cette  plante  croit  dansles  Indes  et  à  Java. 
Vipomœa  papirii ,  Flor.  Per. ,  2  ,  tab.  120  ,  fig.  ^  ,  a  de  grosses 
racines  tubéreuses  ,  employées  en  infusion  par  les  Péruviens 
dans  les  diarrhées  et  les  djssenteries.  Les  feuilles  sont  pal- 
mées, en  cœur,  à  cinq  digitations;  les  fleurs  axillaires  ,  soli- 
taires, amples,  purpurines,  en  entonnoir. 

Ipoméa  purgatif  :  Ipomœa cailiartica ,  Poir.,  Encycî.  ,Suppl,; 
Convolvtilus  africanus,  Niçois.,  Hist.  de  Saint-Domingue  ,  pag. 
260;  vulgairement  Lïane  purgative,  P-ue  purgative,  Liane 
A  Bauduit,  Arepéea.  Plante  recueillije  à  l'ile  de  Saint-Do- 
mingue par  M.  Poiteau.  Ses  tiges  sont  glabres,  herbacées, 
grimpantes;  ses  feuilles  en  cœur,  glabres,  à  trois  lobes  acu- 
minés ,  inégaux  ;  les  pédoncules  axillaires  ,  uniflores  ;  les  fleurs 
grandes;  la  corolle  d'un  rouge  vif,  infundibuliforme;  le  tube 
renflé,  long  d'un  pouce;  le  limbe  ample,  à  cinq  lobes,  mar- 
qué en-dessous  d'une  étoile  4  cinq  rayons.  Au  rapport  de 
I^icolson,  on  en  tirp  un  suc  résineux  qui  se  coagule  et  dont 
on  se  sert  pour  purger.  Un  habitant  de  Saint-Domingue, 
nommé  Bauduit,  en  faisqit  un  sirop  purgatif  qui  porte  son 
liom.  Quoiqu'il  soit  fort  en  usage  parmi  les  habitans  du  pays, 
il  ne  laisse  pas  d'être  dangereux,  en  ce  qu'il  occasionne  quel- 
quefois des  superpurgations. 

Ipoméa  écarlate  :  Ipomœa  coccinea ,  Linn.  ;  Commel. ,  Rar. , 
t^ib.  21;  Plum.,  Amer.,  8g,  tab.  io3  ;  Curtis  ,  Bot.  Magaz.^ 
.t;ab.  221.    Cettp  espèce  est  cultivée  dans  les  jardins  comme 


6i4        '  IPO  ^  f 

plante  d'ornement  :  elle  y  produit  un  cfiFet  très-agreable  par 
ses  belles  fleurs,  d'un  rouge  écarlate,  ou  d'un  jaune  orangé- 
Ses  feuilles  sont  simples,  en  cœur;  un  pédoncule  commun 
et  axillaire  supporte,  vers  son  sommet,  cinq  à  six  fleurs 
pédicrllées;  les  divisions  du  calice  se  terminent  par  un  filet 
sétacé  ,•  les  capsules  sont  globuleuses.  Cette  plante  croît  à  l'île 
de  Saint-Dominguf,  Vipomœa  angulata,  Lamk.  ,  ILL,  i  ,  pag. 
464,  diffère  de  l'espèce  précédente  par  ses  feuilles  angu- 
leuses, presque  à  trois  lobes,  par  ses  pédoncules  beaucoup 
plus  longs  que  les  feuilles.  La  corolle  est  d'un  rouge  écarlate. 
Gommerson  a  découvert  cettp  plante  à  TIsle-de-France. 

Ifoméa  épineux  :  Ipomœa  bona  nox ,  Linn.  ;  Curtis ,  Bot. 
Magaz.,  tab,  762  ;  Jacq.  ,  Hort.  Schanbr.  ,  1  ,  tab.  56  et  96. 
Plante  originaire  de  la  Floride  et  de  la  Jamaïque,  cultivée 
au  Jardin  du  Roi ,  facile  à  reconnoitre  par  sa  belle  et  très- 
grande  corolle  blanchâtre,  verte  à  sa  base,  marquée  égale- 
ment de  zones  verdàtres  à  son  limbe  :  le  tube  est  très-long, 
cylindrique  ;  les  feuilles  simples,  avales,  en  cœur  à  leur  base  , 
quelquefois  un  peu  sinuées  à  leur  bord;  les  supérieures  plus 
étroites,  lancéolées,  auriculées. 

Ipomiîa  BicotORE  :  Ifomœa  bicolor ,  Lamk. ,  JIL,  1  ,  pag.  ^65  ; 
ConvoLyulus  Nil,  Linn.;  Dillen.,  EUh. ,  tab.  80,  fig.  yo,  92. 
Espèce  des  Antilles,  dont  la  corolle  est  grande,  très-belle, 
çampanulée ,  blanche  vers  sa  base ,  d'un  bleu  céleste  à  sou 
]imbe.  Ses  tiges  sont  rudes,  grimpantes;  les  feuilles  ovales, 
en  cœur,  acuminées,  un  peu  velues,  les  unes  entières, 
d'autres  à  trois  lobes  aigus;  les  pédoncules  courts,  à  une  ou 
deux  fleurs;  les  découpures  du  calice  très-longues,  linéaires. 
On  cultive  cette  plante  au  Jardin  du  Roi.  Vipomœa  hederacea, 
Jacq.,  Icon.  rar. ,  1  ,  tab.  3G  ,  est  très-rapproclié  de  l'espèce 
précédente  :  mais  ses  tiges  sont  couvertes  de  poils  fins  et  mous  ; 
ses  feuilles  trilobées,  velues  à  leurs  deux  faces  ;  les  décou- 
pureç  du  calice  courbées  en  corne,  garnies  à  leur  base  d'une 
touffe  de  poils  longs  et  très-fins  ;  la  corolle  grande ,  campa- 
aulée  ,  puj'purine. 

Ipo.méa  a  stipules  palmées  :  Ipomœa  stipulaccea ,  Jacq. ,  Hort. 
Schanbr.y  2,  tab.  199;  Corn'olvulus  tuberculosus  ,  Linn.  Plante 
originaire  de  l'Isle-de-France  ,  cultivée  au  Jardin  du  Roi.  Ses 
xiges  s'élèvent,  en  grimpant,  à  la  haut,^ur  de  douze  pieds  et 


•  •  IPO  •         6i5 

plus,  garnies  de  feuilles  à  cinq  lobes  glabres,  lancéolés, 
aigus;  accompagnées  de  deux  stipules  palmées,  à  trois  ou 
cinq  lobes  courts ,  étroits  :  la  corolle  est  purpurine,  campa- 
nulée ,  longue  de  trois  pouces,  à  dix  crénelures  ;  les  pédon- 
cules de  la  longueur  des  pétioles,  soutenant  trois  fleurs  pédi- 
cellées.  Dans  VIpomœa  mauritiana  ,  Jacq. ,  Hort.  Sclianhr. ,  2, 
tab.  200  ,  les  feuilles  sont  découpées  en  sept  lobes;  les  pédon- 
cules soutiennent  un  corymbe  de  grandes  et  belles  fleurs  d'un 
pourpre  clair,  campanulées. 

Ipoméa  pourpre  :  Ipom/ra  purpurea ,  Lamk. ,  III. ,  1  ,  pag.  466  ; 
Convolvulus  purpureus  ,  Linn.  ;  DiUe n. ,  Elth. ,  tab.  82  ,  fig.  945 
Cavan. ,  Icon. ,  2,  tab.  107.  Cette  belle  espèce  est  une  des 
plus  généralement  cultivées  :  elle  fait  l'ornement  de  tous  les 
jardins,  parmi  les  plantes  grimpantes,  propres  à  décorer  les 
berceaux,  les  treillages,  etc.  Ses  tiges  sont  herbacées,  un 
peu  velues;  ses  feuilles  simples,  molles,  ovales  en  cœur, 
presque  glabres  ;  les  pédoncules  axillaires ,  de  la  longueur: 
des  feuilles ,  chargées  die  plusieurs  fleurs  purpurines  ou  d'un 
beau  violet,  grandes,  blanches  à  leur  base,  quelquefois  cou- 
pées de  bandes  blanches,  assez  semblables  à  celles  du  grand 
liseron:  le  calice  est  hispide.  Cette  plante  est  originaire  dç 
l'Amérique  piéridionalc. 

Ipojiéa  sAGiTTÉ  :  Ipomœu  sagittata,  Poir,,  Voyage  en  Barb., 
2  ,  pag.  122  ;  Desf. ,  FI.  atl.,  1 ,  pag.  177  ;  Lamk.,  ILL,  tab. 
104,  fig.  1;  Convolvulus  IVheleri,  Vahl,  Sjmb.,  2,  pag.  36. 
Cette  jolie  plante,  que  M.  Desfontaines  et  moi  avons  décou- 
verte sur  les  côtes  de  Barbarie,  que  depuis  Cavanilles  a  éga- 
lement trouvée  en  Espagne,  seroit  propre  à  figurer  avec  la 
précédente  par  ses  grandes  corolles  campanulées  d'un  rose 
pourpre;  ses  tiges  sont  glabres,  grimpantes;  ses  feuilles  lan- 
céolées, sagittées  à  leur  base  par  deux  oreillettes  aiguës  j 
les  pédoncules  axillaires,  à  une  ou  deux  fleurs,  les  filamens 
velus  à  leur  base.  (Poir.) 

IPOMOPSIS.  {Bol.)  Spus  ce  nom  générique,  Michaux, 
dans  sa  Flore  de  l'Amérique  septentrionale,  désigne  VIpomœa 
rubra  de  Linnaeus,  que  nous  avions  antérieurement  réuni  au 
çantua,  dans  les  polémoniacées  ,  et  qui  paroît  n'en  devoir 
pas  être  séparé.  Voyez  Cantu.  (J.  ) 

IPpTARAGUAPIN»(Bof.)  Arbrisseau  de  l'Amérique  me'ri- 


f^i6       ^  IPO  ^  f 

dionale,  cité  par  I.œfling ,  qui  n'eu  a  pas  vu  la  fleui*,  et  qui 
£n  décrit  seulement  Je  fruit,  lequel  est  un  brou  un  peu  alongé, 
recouvrant  une  noix  ^e  même  forme,  à  deux  loges  monq- 
spcrmes,  dpnt  une  est  plus  centrale.  Cet  arbrisseau  a  des 
feuilles  opposées,  des  épines  également  opposées  et  axillaires  , 
des  stipules  intermédiairjes  et  planes  ;  les  fruits  sont, portés 
également  sur  des  pédoncules  axillaires.  Cette  description, 
quoique  incomplète,  peift  faire  supposer  que  cet  arbrisseau 
est  une  rubiacée  qui  se  rapproclie  du  canthium,  (J.) 

Il'OTlS.  (Bot.)  Voyez  Hippotis.  (Poiiy.) 

IPPOCAMPOS.  (Ichthj'ol.)  Les  Grecs  ont  désigné  le  cheval 
marin  par  le  nom  de  i7r7roKa.fJL7roç.  Voyez  Hippocampe.  (H.  C.) 

IPPOKA.  (Bot.)  Barrère,  dans  sa  France  équinoxiale,  cite 
ce  nom  dp  pays  pour  le  cassia  bijlora.  (J.) 

IPPOUROS.  {Ichtlij'ol.)  Aristote  a  désigné  la  dorade  par 
le  nom  grec  d'iTTTrov^oç.  Voyez  Coryfhène.  (H.  C.) 

iPRÉAU.  {Bot.)  Nom  vulgaire  d'une  espèce  de  peuplier. 
(L.  D.) 

IP3.  (Ëiitom.)  Nom  sous  lequel  on  désigne  un  genre  d'ir^- 
pecles  coléoptères  tétramérés  ou  à  quatre  articles  à  tous  les 
tarses,  à  antennes  en  masse  non  portées  sur  un  bec  ou  pro- 
longement du  front  ,  et  à  corps  déprimé,  de  la  famille  des 
pmaloïdes,  c'est-à-dire,  planiformes. 

Ce  nom  d'ips  est  tout-à-fait  grec;  on  le  trouve  dans  Théq- 
phraste  et  dans  l'Odyssée  d'Homère  :  /4  est  dérivé  lui-même  de 
i-^a  ,  noceo  ,  jp  nuis;  /-v).,  Irroi; ,  vermis  cornu  corrodens ,  ver  qui 
j-onge  la  corne.  11  est  probable  qu'Ald^ovande,  et  par  suite 
Degéer,  en  epiployant  ce  nom  pour  l'appliquer  à  quelques 
espèces  de  dermestes ,  avoient  beaucoup  plus  de  raison  que 
Fabricius,  qui  s'en  est  servi  pour  indiquer  des  insectes  très- 
petits,  plats,  linéaires,  vivant  sous  les  écorces  et  dans  l'in- 
férieur du  bois,  qu'ils  ropgent  sous  les  deux  états  de  larve 
et  d'insecte  parfait. 

Aucun  genre  de  coléoptères  ne  présente  plus  de  variations 
et  de  difficultés  pour  la  nomenclature.  Nous  venons  déjà  de 
dire  que  Degéer  avoit  donné  ce  noni  d'ips  à  des  espèces  de 
dermestes  de  Linn^us,  que  Geoffroy  avoit  en  effet  cru  devoif 
en  séparer  sous  le  nom  de  scolytes.  Lorsque  Fabricius  publia  ses 
jPI-emiers  ouvrages  descriptifs,  il  comprit,  sous  le  nom  d'/ps.. 


,  '  IPS  ^       617 

(des  nitidules,  des  tritomes ,  des  mycétophages.  Olivier,  dans 
son  grand  ouvrage  sur  les  coléoptères,  réunit  dans  ce  genre 
fps ,  sous  le  n."  18,  vingt-quatre  espèces  d'insectes  fort  diffé- 
rens  les  uns  des  autres,  dont  on  a  fait  depuis  un  très-grand 
jiomhre  de  genres.  Nous  nous  contenterons  d'indiquer  ici  les 
noms  des  principaux  :  colydie  ,  boros ,  méline  ,  triplace ,  hyture , 
cerque,  colobfque,  tliymale,  catérètes ,  micropèple,  dacne ,  engis, 
cryptophage ,  sphérite.  Nous  étions  d'abord  dans  l'intention  de 
«Jonner  un  précis  des  considérations  d'après  lesquelles  ces 
divers  genres  avoient  été  établis;  mais,  en  voyant  les  varia- 
tions nombreuses  des  parties  d'après  lesquelles  les  genres 
avoient  été  formés,  nous  avons  reconnu  que  c'étoit  un  dé- 
dale dont  il  nous  seyoit  fort  difficile  de  tirer  le  lecteur:  car 
tantôt  les  genres  ont  été  établis  d'après  la  disposition  des 
tarses,  tantôt  d'après  la  forme  du  corselet;  ici  d'après  la  dis- 
position des  mandibules,  là  d'après  le  nombre  des  articles  et 
la  forme  de  la  masse  des  antennes, 

M.  Latreille ,  qui  est  beaucoup  plus  versé  dans  ces  sorte? 
de  détails,  n'a  pu  lui-même  trouver  le  fil  de  ce  labyrinthe, 
comme  on  peut  le  voir  dans  l'article  Nitidule  du  Règne 
animal,  5/  volume  j  page  260,  et  dans  le  Nouveau  Diction- 
naire de  Déterville. 

Nous  nous  contenterons,  comme  lui ,  de  décrire  une  espèce 
du  genre  Jps;  c'est  celle  dont  nous  avons  donné  la  figure  dans 
l'atlas  de  ce  Dictionnaire,  planches  XVI  et  XIX  de  la  livr. 
n.°  6  des  Omaloïdes.   (Voyez  ce  mot.) 

C'est  rips  CELLpHiEPi  ou  DES  CELfiERs ,  Ips  ccllaris ,  figuré  aussi 
sous  ce  nom  par  Olivier,  planche  1  ,  fig.  5,  a,  b.  C'est  un 
dermeste  deScopoli,  et  de  Fuesly,  qui  l'a  également  fait  con- 
noître  dans  ses  Archives  :  il  est  ovale,  noirâtre;  les  bords  du 
corselet  sont  crénelés  légèrement;  les  éiytres  et  le  corselet 
sont  finement  pointillés  et  pubcscens. 

Il  est  commun  à  Paris  ;  mais  on  ne  connoît  ni  sa  larve 
ni  ses  mœurs.  (  C.  D.) 

IPSIDES.  [Eiitom.)  M.  Latreille  a  nommé  ainsi  la  petite 
famille  qu'il  a  établie  pour  y  ranger  les  genres  Dacné  et  Ips. 
C'est  une  division  des  clavicornes.  (CD.) 

IPSUS  (Bot.),  un  des  noms  grecs  du  liège,  suivant  Mev,- 

W-  (J.)  , 


5iS         ^  IQU" 

IQUETAYA.  (Bot.)  Plante  dont  l'espèce  n'est  pas  encore 
déterminée  par  les  botanistes,  et  qu'au  Brésil  on  mélange 
à  égale  dose  avec  le  séné  pour  lui  enlever  son  goût  désagréable 
et  sans  nuire  à  ses  qualités.  (Lem.) 

IR.  {Bot.)  Les  Nègres  du  Sénégal  nomment  ainsi  un  arbre 
dont  le  bois,  étant  sec,  leur  sert  à  faire  du  feu,  en  tour- 
nant avec  force  un  morceau  pointu  dans  le  creux  d'un  autre 
morceau  préparé  à  cet  effet.  (  Lem.) 

IR.  (Ornith.)  Nom  polonois  du  (riquet ,  fringilla  montana, 
Linn.  (Ch.  D.) 

IRA.  [Bot.)  Nom  malabare  ,  cité  par  Rhéede  ,  d'une  espèce 
de  souchet ,  cyperus  ligularis ,  selon  Rottboll.  Willdenow  a 
retranché  ce  synonyme  à  cette  espèce  sans  l'appliquer  à  une 
autre.  On  ne  confondra  pas  Vira  avec  l'iRrA.  Voyez  ce  mot.  (J.) 

IRABUBO.  [Mamm.)  Un  des  noms  américains  du  cabiaï  ; 
il  est  rapporté  par  Gumila.  (F.  C) 

IRAGNO.  (Entom.)  Nom  patois  des  araignées  dans  le  Midi. 
(C.  D.) 

IRAIBA.  (Bot.)  Pison  parle  d'un  palmier  de  ce  nom,  au 
Brésil,  qui  contient,  dit-il,  à  l'extrémité  de  sa  tige,  une 
moelle  très-blanche  ,  que  l'on  mange  crue  ou  cuite  avec  de 
l'huile,  et  qui  est  un  bon  aliment.  La  partie  plus  ferme, 
également  blanche  et  semblable  à  de  la  farine,  sert  à  faire 
de  la  bouillie  ou  une  espèce  de  pain.  On  mange  aussi  le  fruit, 
qui  a  une  saveur  désagréable.  (J.  ) 

IRAITUCH  et  AIAWE.  [Bot.)  Clusius,  dans  ses  Exotica , 
dit  qu'un  suc  ainsi  nommé  est  envoyé  de  l'Amérique,  enve- 
loppé dans  des  feuilles  de  bananier.   (J.) 

IRAMBÈRE.  [Bot.)  Dans  un  herbier  ancien  de  Coroman- 
del,  on  trouve  sous  ce  nom  le  ferreola  buxifolia  de  Roxburg, 
qui  paroit  devoir  être  réuni  au  maba  de  Forster  dans  les 
ébénacées.  (J. ) 

IRAMUSU.  (Bot,)  On  donne,  suivant  Hermann ,  ce  nom, 
dans  l'ile  de  Ceilan,  à  une  plante  dont  la  racine,  nommée 
par  les  Portugais  ras  de  amor ,  racine  d'amour,  est  employée 
pour  rétablir  les  forces  et  pour  combattre  les  affections 
goutteuses  et  les  douleurs  d'entrailles.  Linnaeus  ne  la  rap- 
porte à  aucun  genre  connu.  (J.  ) 

IRANDJA.  {Bot.)   On  donne   ce  ^.om ,  aux  environs  de 


,  ^  IRE  •       619 

Montpellier,  à  deux  exciellentes  espèces  de  champignons: 
ïune  est  l'oronge  vraie,  et  l'autre  l'agaric  engainë  de  Bulliard  , 
qui  appartiennent  tous  deux  aux  mêmes  genres,  I'Ammanitp 
(  voyez  ce  mot)  et  Oronge.  (|-.em.) 

IRANE.  {Bot.)  Chez  les  anciens  Grecs,  irane  étoit  syno- 
nyme de  hallaris  et  de  hryon  thalassion,  qui  répondent  au 
muscus  mariniis  des  Latins,  et  à  mousse  de  mer.  11  pi^roit  que 
plusieurs  espèces  furent  confondues  sous  ces  dénominations; 
ce  qui  le  prouve,  c'est  la  grande  différence  qui  existe  entre 
Ja  description  de  la  mousse  de  mer  donnée  par  Pline ,  et 
celle  de  Dioscoride.  Il  se  peut  que  ce  dernier  naturaliste 
ait  voulu  désigner  la  coralline  officinale,  comme  le  croient 
la  plupart  de  ses  commentateurs.  Ce  polypier  a  été,  en  effet, 
connu  des  anciens;  il  doit  son  nom  de  coralli^ie,  qui  depuis 
est  devenu  celui  du  genre  dont  il  fait  partie,  à  sa  petite 
taille ,  à  sa  consistance  solide  et  à  sa  manière  de  vivre  fré- 
quemment aux  pieds  du  corail.  Il  n'est  guère  probable  que 
V irane  soit  une  espèce  de  conferve ,  comme  le  pense  Adan- 
son  ;  mais  il  est  impossible  de  dire  si  c'est  un  animal  plutôt 
qu'un  végétal.  (Lem.) 

IRASSE.  {Bot.)  Nom  d'un  palmier,  probablement  du 
genre  Martinezia,  qui  croît  dans  l'Amérique  méridionale.  (Lem.) 

IRE.  (Bot.)  Ce  nom  est  cité,  dans  la  table  d'Adanson  , 
comme  synonyme  du  gnaphalium  de  ïournefort ,  qui  est  le 
(liotis  de  M.  Desfontaines.  (H.  Cass.) 

IREMEMINAY.  {Bot.)  Nom  donné  sur  la  côte  de  Coror 
mandel ,  suivant  un  herbier  de  ce  pays ,  au  premna  serrati- 
folia,  genre  de  la  famille  des  verbenacées.  (  J.  ) 

IREON.  {Bot.)  Nom  sous  lequel  P.  Browne  désigne  le 
genre  Sauvagesia,  dans  son  Histoire  de  la  Jamaïque.  Bur- 
mann,  fils,  dans  son  Flora  Capensis ,  a  fait  un  autre  ireon, 
qui  est,  selon  lui,  le  roridula  dentata  de  Linnaeus ,  et,  selon 
Scopoli,  le  lobelia  parvijlora  de  Bergius  :  ce  genre  de  Bur- 
mann  et  de  Scopoli  n'a  pas  été  adopté.  (J.) 

IRÉOS.  {Bot.)  L'iris  de  Florence,  iris  florentina,  a  reçu 
ce  nom  anciennement,  comme  le  témoignent  les  écrits  de 
Dodonée  et  de  Mentzel.  (Lem.  ) 

IRÉSINE,  Iresine.  {Bot.)  Genre  de  plantes  dicotylédones, 
k  fleurs  dioiques  ,  de  la  ^mille  des  amaranthacés^ ,  de  la  dioécie 


6:^0         .  IRE  •  , 

pentandrie  de  Linnœus ,  dont  le  caractère  essentiel  consiste 
dans  des  fleurs  dioïques  ,  offrant  un  calice  à  cinq  petites 
folioles,  accompagné  à  sa  base  de  deux  petites  écailles  exté- 
rieures :  dans  les  fleurs  mâles,  cinq  étamines  libres,  séparées 
par  cinq  écailles  internes;  dans  les  fleurs  femelles,  un  ovaire 
supérieur,  dépourvu  de  style,  surmonté  de  deux  stigmates. 
Le  fruit  consiste  dans  une  capsule  uniloculaire ,  renfermant 
plusieurs  semences  enveloppées  d'un  duvet  très-fin,  lanugi- 
neux. 

Parmi  les  espèces  qui  composent  ce  genre,  et  qui  ont  peu 
d'éclat,  une  seule  est  cultivée  dans  les  jardins  de  botanique. 
C'est  une  plante  peu  délicate  sur  la  nature  du  terrain:  cepen- 
dant elle  exige  au  moins  la  serre  tempérée  dans  la  mauvaise 
saison  ,  et  des  arrosemens  fréquens  en  été.  Comme  ses  graines 
ne  parviennent  jamais  à  maturité ,  on  la  multiplie  de  boutures 
faites  au  printemps  par  déchirement  des  vieux  pieds. 

Irbsine  faux-celosia  :  Iresine  celosioides ,  Linn.  ;  Pluk. , 
Almag.,  tab.  261  ,  fig,  1  ?  Sloan.,  Hist. ,  1  ,  tab.  90,  fig.  2. 
Cette  plante  s'élève  à  la  hauteur  de  deux  ou  trois  pieds,  sur 
une  tige  glabre,  cannelée,  rameuse,  un  peu  renflée  à  ses 
nœuds,  garnie  de  feuilles  ovales  -  lancéolées ,  un  peu  rudes 
et  jjonctuées  en-dessus;  les  inférieures  oblongues,  acuminées. 
Les  fleurs  sont  très-petites,  disposées  en  une  panicule  rameuse 
et  serrée.  Cette  plante  croit  dans  la  Floride  et  la  Virginie. 
VIresine  diffusa,  "VViUd. ,  diffère  peu  de  cette  espèce;  elle 
en  a  le  port,  l'inflorescence  :  mais  ses  feuilles  sont  parfaite- 
ment glabres,  cuspidées  ;  la  panicule  plus  étalée.  Elle  croît 
dans  l'Amérique  méridionale. 

Irésine  a  fleurs  velues  :  Ires/rtc  eriauf?;o5,  Poir. ,  Encycl., 
Suppl.  ;  Lamk. ,  IlL,  tab.  2i3,  fig.  1.  Espèce  découverte  au 
Brésil  par  Commerson,  dont  les  tiges  sont  glabres,  presque 
ligneuses,  un  peu  striées,  rameuses;  les  feuilles  opposées, 
pétiolées  ,  glabres,  ovales  -  lancéolées  ;  la  panicule  ample, 
étalée  ;  les  ramifications  inférieures  géminées ,  toutes  oppo- 
sées,  roides,  velues;  les  fleurs  petites,  lanugineuses  et  blan- 
châtres. 

Irésine  a  grappes  :  Iresine  mcemosa,  Poir. ,  Encycl.,  Suppl.  ; 
Lamk.,  ///.,  tab.  2i3,  fig.  2.  Cette  plante  est  remarquiible 
par  la  dispositiqn   de  ses  fleurs  en  grappes  alternes,   très- 


%  •  IRI  •       c.i 

simples  ,  formant  par  leur  ensemble  une  longue  panicule 
terminale;  les  pédicelles  accompagnés  chacun  d'une  petite 
bractée.  Les  rameaux  sont  glabres,  Cylindriques;  les  feuilles 
alternes,  pétiolées,  glabres,  étroites,  lancéolées,  très-entières^ 
Cette  espèce  croit  à  la  Martinique.  Dans  VIresine paniculata , 
Poir. ,  Encycl. ,  les  ramifications  de  la  panicule  sont  rameuse^ 
et  non  en  grappes  simples;  les  feuilles  presque  opposées,  à 
peine  pétiolées  ,  étroites,  lancéolées,  aiguës;  les  tiges  glabres, 
cylindriques  et  rameuses.  Elle  croît  dans  l'Amérique  méri- 
dionale. 

MM.  Humboldt  et  Bonpland  ont  découvert,  dans  l'Amé- 
rique méridionale,  plusieurs  autres  espèces  d'irésine,  décrite* 
par  M.  Kunth  dans  le  Nova  gênera,  etc.  :  telles  que  Viresine 
parvifolia,  à  petites  feuilles  ovales- aiguës ,  pubescentes  en- 
dessous  et  à  leurs  bords;  la  panicule  simple,  étalée,  composée 
d'épis  oblongs,  sessiles ,  cylindriques.  Viresine  Hamnensis  en 
est  très- voisine  :  mais  ses  tiges  sont  rampantes;  ses  feuilles 
glabres,  ciliées;  la  panicule  rameuse.  Dans  Viresine  Mutisii , 
les  tiges  ont  leurs  rameaux  tétragones;  les  feuilles  glabres, 
ovales-oblongues;  la  panicule  très-rameuse,  etc.  (Poir.) 

IRGENDIR.  {Mamm.)  C'est  le  nom  que  les  Tunguses  don- 
nent, dit-on,  à  la  loutre  commune.  (F.  C.) 

IRI.  [Bot.)  Racine  que  les  naturels  du  Brésil  emploient 
à  fabriquer  des  arcs  :  la  plante  qui  la  fournit  nous  est  in- 
connue. (Lem.) 

IRIA  ou  BALARI.  (  Bot.  )  Noms  malabarCs  d'un  souchef 
de  l'Inde,  nommé  pour  cette  raison  cjperus  iria  par  Linnœus. 
MM.  Richard  et  Persoon  nomment  aussi  iria  le  cjperus  mono" 
stachjos ,  dont  la  spicule  est  solitaire,  terminale,  et  les  fleurs 
munies  seulement  de  trois  étamines  :  ce  genre  peut  être 
réuni    à  Vahilgardia.  (J.) 

IRIARTEA.  {Bot.)  Voyez  Ceroxylon.  (Poir.) 

IRIBIN.  (Ornith.)  M.  Vieillot  a  donné  pour  caractères  à 
ce  genre  d'oiseaux  de  la  famille  des  vautours,  daptrius ,  la 
mandibule  inférieure  du  bec  anguleuse  en-dessous  ,  échancrée 
vers  le  bout,  obtuse;  le  jabot  et  la  gorge  glabres  chez  les 
adultes;  la  cire  velue;  les  tarses  grêles.  Le  même  auteur  a 
fait  du  rancanca  un  genre  particulier  sous  le  nom  d^Ibycter, 
en  le  caractérisant  p%r  sa  mandibule  inférieure  entière  et 


622  »  IRI  •  , 

un  peu  pointue,  la  cïre  et  les  joues  nues.  Son  genre  Csl^ 
racara,  polyhorus,  a  le  bec  rétréci  en -dessous,  la  cire  large 
et  velue,  le  jabot  laineux,  avec  l'ongle  postérieur  le  plus 
fort  de  tous. 

On  a  dit,  dans  ce  Dictionnaire  ,  toin.  7  ,  pag.  10,  qu'il  y 
avoit  au  Muséum  d'histoire  naturelle  trois  oiseaux  de  plus 
petite  taille  que  le  caracara  proprement  dit  et  sous  la  même 
dénomination  générique  ,  en  ajoutant  que  le  premier  indi- 
vidu ,  le  caracara  noir,  y  portoit^  pour  synonymie,  le  nom 
de  dtiptrius  ater;  le  second,  c'est-à-dire  le  caracara  à  queue 
rayée  ,  celui  de  daptrius  striatus  ,  Vieil.  ;  et  que  le  troisième, 
dont  M.  Vieillot  a  fait  son  genre  Rancatica,  Ihjcter ,  y  étoit 
nommé  caracara  rancanca.  M.  Vieillot,  qui  ne  reconnoît  dans 
les  deux  îribins  du  Muséum  que  des  variétés  d*àge  ou  de 
sexe  de  son  daptrius  ater,  se  plaint,  p.  187  du  i6.*  vol.  de  la 
2."  édition  du  Dictionnaire  dont  il  est  un  des  collaborateurs 
les  plus  distingués,  de  ce  qu'on  a  donné  dans  celui  des  Sciences 
naturelles  la  dénomination  fautive  de  daptrius  striatus,  Vieil., 
au  second  individu;  mais  il  auroit  pu  remarquer  que  Fauteur 
de  l'article  Caracara  s'est  borné  à  exposer  que  l'étiquette  de 
l'individu  dont  il  s'agit  présentoit  cette  synonymie.  (Ch*  D.) 

IRIBU.  {Ornith.)  Ce  nom  est  employé  d'une  manière  gé- 
nérique, au  Paraguay,  pour  désigner  les  vautours,  dont  M. 
d'Azara  décrit  trois  espèces.  La  première ,  n.°  1  j  est  Viribu 
rubicha,  chef  ou  roi  des  iribus,  qui  se  rapporte  au  roi  des 
vautours,  vultur  papa,  Linn.  et  Lath.,  zopilote,  gfpagus,  de 
M.  Vieillot.  Le  second  estl'iribu  proprement  dit  des  Guarinis, 
n,"  2  ,  et  le  troisième  est  Viribu-acabiray  ,  n."  5 ,  ou  simplement 
Yacabiray ,  mot  qui  signifie  tête  chauve.  Sonnini  rapporte 
celui-là  à  l'urubu  de  BuflFon,  et  celui-ci  à  l'aura  5  mais  l'aura 
et  l'urubu  ont  été  confondus,  tant  par  le  naturaliste  françois 
que  par  Gmetin  et  Latham ,  sous  le  nom  de  vultur  aura,  et 
c'est  M.  Vieillot  qui,  en  établissant  le  genre  Gallinaze,  Catha- 
rista,  a  désigné  avec  précision  les  deux  espèces  sOus  les  noms 
de  catharista  aura  et  catharista  urubu*  Ces  espèces,  dont  la 
couleur  est  à  peu  près  la  même,  se  distinguent  en  ce  que  la 
première  a  la  peau  de  la  tête  et  du  cou  ridée  et  la  queue 
arrondie  ,  et  que  chez  la  seconde  la  tête  et  le  cou  sont  garnis 
jde  mamelons,  et  les  pennes  caudales  çgales.  (Ch.  D«) 


,  IRI  •       625 

JRIDAPS.  (  Bol.  )  Coramerson  nommoit  ainsi  le  rima  ou 
aï"bre  du  fruit  à  pain,  artocarpus.  (J.) 

IRIDEA.  (Bot.)  Stackhouse  pense  qu'on  peut  établir  sous 
ce  nom  un  genre  dans  la  famille  des  algues ,  auquel  il  rapporte 
son  fucus  Jluitans ,  qui  se  fait  remarquer  par  sa  fronde  carti- 
lagineuse ,  cylindrique,  très  -  rameuse  ,  à  rameaux  opposés, 
plusieurs  fois  découpés  et  à  divisions  capillaires.  Sa  fructifi- 
cation est  inconnue. 

Ce  fucus  est  figuré  planche  17  de  la  deuxième  édition  de 
la  Néréide  britannique. 

Viridea  est  placé  par  Stackhouse  entre  ses  genres  Hippurina 
et  Herbacea,  qui  représentent  le  Delesseria  de  Lamouroux. 
(Lem.) 

IRIDÉES.  (Bot.)  Famille  de  plantes  de  la  classe  des  mono- 
périgynes  ou  monocotylédones,  apétales,  à  étamines  insérées 
au  calice.  Elles  ont  un  calice  toujours  supére,  c'est-à-dire, 
adhérent  inférieurement  à  l'ovaire ,  qu'il  ne  déborde  que 
par  son  limbe  divisé ,  plus  ou  moins  profondément ,  en  six 
lobes  égaux  ou  inégaux  ;  d'où  résultent  des  fleurs  régulières 
ou  irrégulières.  Les  étamines,  au  nombre  de  trois,  sont  in- 
sérées au  bas  des  trois  divisions  plus  intérieures  du  calice. 
Leurs  anthères  sont  alongées  et  appliquées  contre  la  surface 
extérieure  de  l'extrémité  supérieure  des  filets,  qui  sont  tan- 
tôt distincts,  tantôt  réunis  en  un  tube  traversé  par  le  style. 
L'ovaire,  toujours  infère,  faisant  corps  avec  le  calice,  est 
surmonté  d'un  style  plus  ou  moins  long,  terminé  par  trois 
stigmates.  Il  devient  une  capsule  à  trois  loges  polyspermes  , 
s'ouvrant  dans  sa  longueur  en  trois  valves,  dont  chacune, 
en  s'écartant  à  l'époque  de  la  maturité,  emporte  avec  elle 
une  cloison  qui  lui  adhère  et  la  partage  dans  son  milieu. 
Les  graines,  attachées  à  l'angle  intérieur  des  loges,  au  point 
de  leur  réunion  ,  sont  souvent  disposées  sur  deux  rangs. 
Elles  sont  remplies  par  un  périsperme  de  substance  solide 
et  comme  cornée,  creusé,  vers  le  hile  ou  point  d'attache, 
d'une  petite  cavité  dans  laquelle  est  niché  un  embryon  mo- 
nocotylédone  très-petit.  Les  tiges  de  ces  plantes  sont  herba- 
cées, ou  quelquefois  ligneuses,  ou  rarement  presque  nulles. 
Les  feuilles,  toujours  alternes,  sont  engainées  à  leur  base, 
souvent  distiques  et  conformées   en  lames  aplaties  d'épée. 


624        '  IRI 

Les  fleurs  sont  terminales,  accompagnées  de  spathes  uni-  ou 
multiflores,  qui  sont  ordinairement  bivalves. 

On  peut  établir  dans  cette  famille  deux  sections  carac- 
lérisées  par  la  réunion  ou  la  séparation  des  filets  d'étauiines. 
Dans  crlle  des  lilets  réunis  sont  rapportés  les  genres  Ga- 
laxia,  Sisjrinchium,  Tigridia,  Ferraria ,  Vieusseiiria  et  Pater- 
sonia  de  M.  Brown  ,  dont  on  regarde  le  genosiris  de  M.  La- 
Lillardière  comme  congénère. 

Là  section  plus  nonibreuse  des  filets  non  réunis  renferme 
d'abord  les  genres  anciens,  Iris,  Mcrœa  ,  dont  le  Bobarlia  dé 
Linnaeus  et  le  Diplarrena  de  M.  Labillardlère  sont  congénères; 
Ixia,  auquel  on  rapporte  le  Tapeinia,  Cipura ,  Walsonia, 
Gladiolus,  Antholyza,  IVilsenia,  Crocus:  ensuite  les  genres 
plusrécéns,  Parianthus ,  Bahiana,  Sparaxis,  Hesperantha ,  Geis- 
iorhiza,  Tritonià ,  Anomatheca ,  Triclionema  de  M.  Gawlèr  j 
Aristea  de  M.  Aiton ,  Diasia  de  M.  De  Candolle  :  les  uns 
et  les  autres  disposés  ensemble  suivant  un  ordre  qui  n'est 
j)as  définitivement  arrêté. 

Les  Dilalris  ,  le  J'Vachendorfia  et  le  Xipliidium ,  laissés  aupa- 
ravant à  la  suite  des  iridé^es ,  comme  ayant  avec  elles  de 
l'affinité  ,  devront  former  la  nouvelle  famille  des  dilatridées. 
Elle  sera  caractérisée  principalement  par  une  capsule  à  trois 
loges  et  trois  valves  libres,  munie  d'un  réceptacle  central 
triangulaire ,  portant  sur  ses  trois  faces  une  ou  plusieurs 
<'raines,  et  Sur  les  angles  duquel  s'insèrent  les  bords  des 
valves,  formant  ainsi  chacune  leur  loge  entière,  comme  dans 
les  convolvulacées.  Le  Conostj'lis  paroît  appartenir  à  cette 
série,  et  le  port  y  ramène  aussi  les  genres  v^rgo/asja,  Anigo- 
santJios,  Lophiola,  Heritiera  de  Michaux  ,  Hœmodorum  ;  mais 
il  faudroit  vérifier  s"ils  ont  ce  réceptacle  central  qui  doit 
distinguer  les  dilatridées  de  toutes  les  autres  familles  mono- 
périgynes,  ou  si,  ayant  le  fruit  des  iridéeâ,  ils  doÏLvent  for- 
mer une  famille  distincte.  (  J.  ) 

IRIDIUM.  [Chim.)  Corps  simple  appartenant  à  la  5."  sec- 
tion des  métaux.  (Voyez  Corps.) 
Il  est  solide,  d'un  blanc  d'argent. 

D'après  l'observation  de   M.  Vauqueïin  ,  il  jouiroit  d'une 
légère  ductilité. 

Il  est  infusible  au  feu  de  nos  fovT-neaux  ;    cependant  M. 


•  •  IRI  •        6^5 

Children  est  parvenu  à  le  fondre  en  globule  au  moyen  de 
son  appareil  voltaïque.  La  densité  de  ce  globule  étuit  de 
18.68;  mais,  comme  il  étoit  poreux,  cette  densité  est  trop 
foible. 

L'iridium  nous  paroît  être  essentiellement  électro-négatif , 
parce  que  les  combinaisons  qu'il  forme  avec  Toxigène  et 
avec  le  chlore  sont  évidemment  plutôt  électro-négativ-  ou 
acides,  qu'électro  -  positives  ou  alcalines,  et  en  outre  ces 
combinaisons  ne  se  font  que  dans  très-peu  de  circonstances. 

Action  de  Voxigène  et  des  corps  cjui  peui-'cnt  agir  par 
leur  o  xi  gène. 

L'iridium,  exposé  à  l'air  et  même  à  l'oxigéne  pur,  à 
toutes  les*  températures  connues,  n'éprouve  aucune  alté- 
ration. 

Tous  les  acides  oxigénés  sont  sans  action  sur  lui  ;  car 
Peau  régale,  le  seul  liquide  acide  qui  puisse  l'attaquer,  ne 
le  fait,  suivant  nous,  que  par  le  chlore,  et  non  par  l'oxi- 
géne. On  doit  attribuer  ce  manque  d'action  autant  au  peu 
d'affinité  du  métal  pour  Foxigène ,  qu'cà  la  foible  affinité  de 
l'oxide  d'iridium  pour  les  acides  :  ce  qui  le  prouve,  c'est, 
qu'en  le  faisant  rougir  dans  un  creuset  d'argent  avec  la  po- 
tasse, ou,  ce  qui  revient  au  même,  avec  le  nitrate  de  cette 
base,  on  l'oxide  très-bien,  parce  qu'alors  l'oxide  s'unit  à 
l'alcali. 

Action  des  hjdracides  ^  du  chlore  et  de  ses  composés. 

Aucun  hydracide  pur  n'attaque  l'iridium. 

Il  en  est  de  même  du  chlore.  Mais,  quand  on  met  l'iridium 
dans  de  l'eau  régale  très- concentrée ,  le  chlore  à  l'état  nais- 
sant, qui  vient  de  céder  son  hydrogène  à  une  portion  de 
l'acide  nitrique  qui  se  trouve  convertie  en  acide  nitreux,  se 
porte  sur  le  métal,  et  une  petite  quantité  de  ce  dernier  est 
dissoute  :   la  dissolution  est  rouge. 

Action  des  corps  simples. 
Le  soufre  est  susceptible  de  s'unir  à  l'iridium,  quand  il  le 
rencontre  dans  un  degré  extrême  de  division. 

Au  rouge  blanc  l'iridium  se  combine  à  l'étain,  au  cuivre, 
au  plomb  et  à  l'argen^ 

^5.  40 


620  IRl 

Exiraclioii  et  hisluirt: 

Nous  ne  parlerons  de  l'extraction  de  l'iridium  qu'au  mot 
Platine. 

lia  été  découvert  par  Descotils,  en  i8o3,  et  examiné  peu 
de  temps  après  par  M.  Vauquclin  et  par  Tcnnant. 

Des  coinh maisons  de  l'iridium. 

Alliage  cVune  parlie  d'iridium  et  de  4  parties  d'étain.  Il  est 
d'un  blanc  mat,   dur  et  malléable.  (  Vauquelin.) 

Alliage  d'une  parlie  d'iridium  et  de  4  parties  de  cuivre.  Rouge 
pâle  ;  il  paroit  blanc  quand  il  a  été  limé.  Il  est  ductile  et 
beaucoup  plus  dur  que  le  cuivre.  (  ^^^uquelin.  ) 

Alliage  d'une  parlie  d'iridium  et  de  8  parties  de  plomi.  Blanc 
et  dur  (Vauquelin).  Tennant  dit  que  ,  par  la  coupellation  , 
on  en  sépare  le  plomb  :  l'iridium  reste  dans  la  coupelle. 

Une  partie  d'iridium  et  2  parties  d'argent  étant  exposées  au 
feu,  il  se  produit  un  alliage;  mais  il  y  a  une  portion  d'iri- 
dium qui  ne  se  combine  pas  (\^auquelin).  L'alliage  est  ductile- 
suivant  Tennant. 

Iridium  et  or.  Suivant  Tennant,  l'iridium  s'allie  à  l'or 
sans  en  changer  la  couleur.  Cet  alliage  est  malléable.  II  ne 
peut  être  décomposé  par  la  coupellation,  lors  même  qu'on  y 
a  ajouté  de  l'argent.  L'eau  régale  foible  sépare  bien  l'or  de 
l'iridium,  mais  ne  le  dissout  pas. 

Sulfure  d''iridutm. 

M.  "Vauquelin  l'a  obtenu  en  exposant  au  feu ,  dans  un 
creuset  fermé,  un  mélange  de  100  parties  de  soufre  et  de 
îoo  parties  de  sel  animoniaco  -  d'iridium  ,  qui  représentent 
45  parties  de  métal.  Le  sulfure  produit  pcsoit  60  parties  : 
d'où  il  suit  que  100  parties  d'iridium  avoient  absorbé  53,54 
parties  de  soufre. 

Ce  sulfure  ne  se  fond  pas  au  fourneau  de  réverbère  : 
quand  il  est  calciné  à  l'air,  le  soufre  se  réduit  en  acide  sul- 
fureux, et  le  métal  reste  à  l'état  de  pureté. 

Oxides  et  sels  d'iridium. 
Jusqu'ici  on  n'a  point  obtenu  les  oxides  d'iridium  à  l'état 
de  pureté.  On    croit  qu'il  y  en  a  au  moins  deux.  L'oxide, 
qui  passe  pour  être  au  minimum,  a  «-ne   couleur  bleue.  Le 


•  IRI  G.; 

composé  d'iridium,  qu'on  a  regardé  comme  Toxide  au  maxi- 
mum, est  d'un  rouge  jaunâtre. 

Quand  on  lient  au  rouge,  dans  un  creuset  d'argent^ 
pendant  une  heure  environ,  un  mélange  d'iridium  et  de 
potasse  pure  ou  de  nilre  ,  le  métal  s'oxide  et  s'unit  ù  l'alcali. 
L'eau,  appliquée  au  résidu,  le  sépare  en  deux  composés; 
l'un  soluble,  avec  excès  d'alcali  ;  l'autre  insoluble,  avec  excèsi 
d'oxide  d'iridium. 

Composé  soluble.  Il  est  bleu. 

Composé  insoluble.  Il  paroit  noir  ;  mais  ,  si  on  le  traite  par 
l'acide  hydrochlorique  ,  il  s'y  dissout  au  moins  en  partie  ; 
la  dissolution  est  bleue. 

Propriétés  de  la  dissohilioii  hjdrochloricjue   lieue, 
diaprés  M.  Faucjuelin. 

Celle  dissolution,  qu'on  a  appelée  muriate  ou  hjdroclilorate  dé 
protoxide  d'iridium,  ne  précipite  par  aucun  alcali.  Si  elle  con- 
tenoit  du  fer  ou  du  titane,  on  auroit  un  précipité  vert  :  si 
elle  contenoit  de  la  silice  ou  de  l'alumine  ,  le  précipité  seroit 
bleu.  M.  Vauquelin,  d'après  la  forte  affinité  de  l'oxide  d'iri- 
dium pour  l'alumine,  et  la  couleur  de  cette  combinaison, 
pense  que  l'iridium  pourroit  bien  être  le  principe  colorant 
du  saphir. 

Les  corps  désoxigénans,  comme  l'acide  hydrosulfurique  , 
le  fer,  son  sulfate  de  protoxide,  le  zinc  et  l'étain,  décolorent 
celle  dissolution;  et  ce  qui  est  remarquable  ,  c'est  que  l'addi- 
lion  du  chlore  rétablit  la  couleur  bleue  ,  et  que ,  si  on  en  met 
un  excès,  la  couleur  passe  au  pourpre;  mais  il  paroit  que 
dans  ce  dernier  cas  l'oxidation  n'est  pas  changée,  parce  qu'en 
exposant  la  liqueur  à  l'air  elle  repasse  au  bleu. 

Lorsqu'on  la  fait  bouillir  avec  le  contact  de  l'air,  elle 
passe  au  vert,  au  violet,  au  pourpre  et  au  rouge  jaunâtre. 
Y  a-t-il  absorption  d'oxigèné  ?  Cela  est  probable. 

Propriétés  de  la  dissolution  d'' iridium  dans  Veau  régale  y 
anand  on  en  a  chassé  Vexcès  diacide. 

Cette  dissolution,  qu'on  a  appelée  muriate  ou  hjdrochlorafe. 
de  peroxide  d'iridium,  est  rouge.  Elle  a  une  saveur  acide  et 
irès-a^ringente:   elle  précipite  la  gélatine, 


02  8  IRf 

Elle  est  décolorée  par  le  sulfate  de  piotoxide  de  fer,  et 
re  qu'il  y  a  de  très-remarquable,  c'est  que,  si  l'on  verse  du 
chlore  dans  la  liqueur  décolorée  ,  la  couleur  passe  immédia- 
lement  au  rouge  ,  et  ne  change  pas  lorsque  l'excès  de  chlore 
qu'on  peut  y  avoir  mis  est  dissipé  :  c'est  le  contraire  de  ce 
qui  arrive  à  la  dissolution  bleue  précédente ,  qui  a  été  décolorée 
d'abord ,  et  qu'on  a  fait  passer  ensuite  au  pourpre  avec  un 
excès  de  chlore. 

La  dissolution  rouge  d'iridium  ne  passe  au  bleu  dans  aucune 
circonstance. 

Lorsqu'elle  est  concentrée ,  si  on  y  aj  oute  de  l'ammoniaque , 
on  obtient  un  composé  qu'on  a  appelé  muriate  ammoniaco- 
d'iridium.  Il  est  d'une  couleur  pourpre  si  foncée  qu'il  paroit 
noir  comme  du  charbon.  Lorsqu'il  est  sec  ,  il  donne  ,  à  la  dis- 
tillation ,  de  l'azote,  de  l'acide  hydrochlorique,  de  Thydro- 
chlorate  d'ammoniaque,  et  45  pour  loo  d'iridium  métal- 
lique. Ce  composé  exige  20  parties  d'eau  froide  pour  se  dis- 
soudre :  la  liqueur  est  rouge-orangé;  1  partie  de  ce  composé 
colore  40000  parties  d'eau.  L'ammoniaque,  l'acide  hydro- 
sulfurique,  le  fer,  le  zinc  et  l'étain,  décolorent  la  liqueur  : 
le  chlore  fait  reparoître  la  couleur. 

"La  dissolution  rouge  d'iridium,  mêlée  au  chlorure  de  potassium  , 
forme  un  composé  qu'on  a  appelé  muriate  de  potasse  et  d'iridium. 
En  masse  ce  composé  est  noir;  mais,  divisé,  il  est  pourpre: 
a 00  parties  cristallisées,  chauffées  fortement,  se  réduisent  à 
i)o  parties,  dont  07  sont  de  l'iridium  et  i5  du  chlorure  de 
potassium.  (Ch.) 

IRIDORKIS.  (Bot.)  Genre  de  la  famille  des  orchidées ,  éta- 
bli par  M.  Aubert  du  Petit-Thouars,  pour  placer  Vangrœcuw, 
distichnm,  Lamk. ,  caractéi'isé  par  sa  fleur  renversée,  dont  le 
labelle  est  plan ,  élargi  et  denté  au  sommet.  Il  n'a  pas  été 
admis  par  les  botanistes.  (Lem.) 

IRIDROGALVIA.  {Bot.)  Voyez  Narthèce.  (Poir.) 

IRIGENIUM.  {Bot.)  Synonyme  de  Hierobotane  (voyez  ce 
mot)  chez  les  anciens.  (Lem.) 

IRINGIO.  {Bot.)  Voyez  Irungus.  (J.) 

IRIO,  IRION.  {Bot.)  Les  Latins,  suivant  Dioscoride  et 
son  commentateur  Ruellius,  nommoient  ainsi  le  velar,  erj- 
simon  des  Grecs.    Fuchs   appliquoit   tte  nom   à   la  sanve   ou 


^  •  IRI  •        629 

moularde  sauvage,  sinapis  aiwensis  ;  Daléchamps  et  Columna  , 
à  deux  sisymbres,  sisymbrium  irio  et  polyceration ;  plus  récem- 
raeut  Burmann  le  donnoit  au  rori^ula.  (J.) 

IRIPA.  [Bot.)  Nom  malabare  ,  suivant  Rhéede,  d'un  arbre 
de  l'Inde,  qui  est  le  cjnomorium  sylvestre  de  Rumph,  le  cy~ 
noinetra  ramijlora  de  Linnacus.   (J.) 

IRIS;  Jm  ,  Lin  n.  (Bot.)  Genre  de  plantes  monocotylé- 
dones,  type  de  la  famille  naturelle  des  iridées  ,  et  de  la  trian- 
drie  monogynie  du  système  sexuel,  dont  les  principaux  carac- 
tères sont  les  suivans  :  Spathe  de  plusieurs  folioles  membra- 
neuses, enveloppant  une  ou  plusieurs  fleurs;  calice  nul  ;  co- 
rolle monopétale  ,  irrégulière  ,  tubulée  inférieurement,  ayant 
son  limbe  partagé  très-profondément  en  six  découpures  on- 
guiculées ,  inégales,  alternativement  redressées  et  étalées,  ou 
réfléchies  en  dehors  ;  trois  étamines  à  filamens  plus  courts 
que  les  divisions  de  la  corolle,  insérés  dans  le  haut  du  tube 
devant  les  découpures  réfléchies,  et  portant  à  leur  extrémité 
des  anthères  oblongues;  un  ovaire  inférieur,  ovoïde  ou  ob- 
long,  surmonté  d'un  style  court,  adhérent  avec  le  tube  de 
la  corolle,  et  terminé  par  trois  grands  stigmates  pétaloïdes, 
bifid'es  à  leur  extrémité,  recouvrant  les  étamines  ;  capsule 
oblongue ,  à  trois  valves  et  à  trois  loges ,  contenant  chacune 
plusieurs  graines  assez  grosses  et  communément  arrondies. 

Les  iris  sont  des  plantes  herbacées,  à  racines  tubéreuses 
ou  bulbeuses  :  leurs  feuilles  sont  ordinairement  alongées  , 
planes,  aiguës,  tranchantes  sur  les  bords,  ayant  la  forme 
d'une  lame  d'épée  ou  de  sabre  ,  et  s'engainant  par  leur 
côté  interne  et  inférieur;  dans  quelques  espèces,  les  feuilles 
sont  linéaires,  canaliculécs  ou  anguleuses  :  leurs  fleurs  sont 
en  général  grandes,  belles,  A'ariéçs  de  différentes  couleurs, 
iijiifant  en  quelque  sorte  celles  de  l'arc-en-ciel  ,  et  c'est  de 
là  que  ces  plantes  ont  reçu  le  nom  qu'elles  portent,  l'arc- 
en-cicl  étant,  selon  les  poètes  anciens,  rcmblème  d'Iris,  mes- 
sagère des  dieux  et  principalement  de  Junon. 

On  connoît  aujourd'hui  au-delà  de  quatre-vingts  espèces 
d'iris,  dont  un  assez  grand  nombre  croît  naturellement  en 
Europe;  les  autres  se  trouvent  dans  l'Orient  et  en  Asie,  au 
cap  de  Bonne-Espérance  ,  quelques-unes  en  Amérique. 

Si  nous  voulions  considérer  ces  plantes  sous  le  rapport  de 


53a  IRI 

la  beauté  de  leurs  fletirs  ,  presque  toutes  mêrileroient  de 
Kous  occuper;  mais,  comme  cela  donneroit  trop  d'étendue 
à  cet  article,  nous  nous  bqrnerons  à  parler  ici  des  espèces 
les  plus  remarquables  sous  le  rapport  de  leurs  proprié(és , 
ou  de  celles  qu'on  emploie  le  plus  communément  à  la  décora- 
tion des  jardins. 

*  Dàisions  extcrieurcs  de  la  corolle  chargées  d'une 
raie  barbue i  feuilles  ensiformes. 

Iris  de  Suse  ;  vulgairement  Iris  deuil,  Iris  tigrée  :  Jr'is  Su- 
siana,  Linn. ,  Spec. ,  55;  Redout. ,  Lil.,  i  ,  t.  18.  Sa  racine 
est  tubéreuse,  horizontale;  elle  produit  une  tige  cylindrique, 
haute  d'un  pied  et  demi  à  deux  pieds,  terminée  par  une  ou 
deux  fleurs  plus  grandes  que  dans  aucune  autre  espèce  ,  d'une 
couleur  brunâtre  claire  ,  panachée  de  veines  et  de  lignes  d'un 
violet  pourpre.  Les  trois  divisions  réfléchies  de  la  corolle 
sont  plus  larges  que  les  autres,  d'une  couleur  brune  plus 
foncée,  avec  une  tache  noirâtre.  Les  feuilles  sont  ensiformes, 
droites,  glabres,  d'un  vert  glauque,  plus  courtes  que  la  tige. 
Cette  belle  espèce  croit  naturellement  aux  environs  de  Suse 
dans  le  Levant,  et,  selon  Linnœus  ,  elle  a  été  envoyée,  en 
3570,  de  Constantinople  dans  les  Pays-Bas,  d'o-ù  elle  s'est 
répandue  en  Europe  dans  les  jardins  de  botanique  et  des  ama- 
teurs. 

L'iris  de  Suse  demande  plus  de  précautions  pour  être  cul- 
tivée avec  succès  que  la  plupart  des  espèces  dont  nous  par- 
lerons ci-après  :  elle  craint  la  gelée,  et  il  faut  l'en  garantir 
en  la  plantant  dans  un  pot  un  peu  grand,  ou  mieux  en  la 
plaçant  en  pleine  terre  au  pied  d'un  mur,  oîi  elle  fleurit 
plus  sûrement;  dans  ce  dernier  cas,  il  faut  avoir  soin  de  la 
jiiettre  à  l'abri  des  grands  froids,  en  la  couvrant  avec  delà 
litière  ou  de  la  paille  toutes  les  fois  que  la  rigueur  de  la 
saison  l'exige.  Il  lui  faut  une  terre  légère ,  sèche  et  l'expo- 
sition au  soleil.  Ses  fleurs  paroissent  en  Mai  dans  les  jardins 
du  Nord  ,  et  en  Avril  dans  ceux  du  Midi.  Elle  perd  ses  feuilles 
tous  les  ans,  après  avoir  fleuri,  et  les  nouvelles  commencent 
à  pousser  en  automne.  Le  moment  favorable  pour  la  trans- 
planter est  celui  où  sa  végétation  est  suspendue  ,  depuis  la 
dessiccation  des  anciennes  feuilles  jusqu'à  ce  que  les  nouvelles 
comîTiencent  à  paroifre. 


•  •  ÎRI  •         65i 

Tris  de  Florence  :  Irisflorencina,  Linn. ,  .Sjiec.  55  ;  Redouté, 
Liliac. ,  1,  tab.  23.  Sa  racine  est  tubéreuse,  noueuse,  odo- 
rante; elle  produit  une  tige  haute  d'un  pied  ou  environ,  mu- 
nie de  quelques  feuilles  à  sa  base,  et  chargée  dans  sa  partie 
supérieure  de  deux  à  trois  fleurs  blanches,  grandes,  d'une 
odeur  douce  et  agréable;  leur  tube  est  toujours  plus  long  que 
l'ovaire.  Les  feuilles  sont  plus  courtes  que  la  tige,  droites, 
planes,  en  forme  de  lame  d'épce ,  glabres  et  d'un  vert 
glauque.  Cette  iris  croît  naturellement  dans  les  parties  méri- 
dionales de  l'Europe  ;  on  la  trouve  en  Provence  ,  et  elle 
fleurit  à  la  fin  d'Avril  ou  au  commencement  de  Mai. 

Sa  racine  récente  est  émétique  et  purgative  ;  on  peut  en 
donner  le  suc  à  la  dose  d'une  à  deux  onces  dans  quatre  fois 
autant  de  vin  blanc  :  ce  remède  convient  principalement  dans 
les  hydropisies.  Mais  aujourd'hui  cette  racine  n'est  guère  em- 
ployée qu'à  son  état  de  dessiccation  et  en  poudre.  De  cette 
dernière  manière  les  pharmaciens  l'emploient  comme  ac- 
cessoire pour  rouler  des  pilules  ou  leur  donner  de  la  con- 
sistance. Autrefois  cette  poudre  entroit  dans  la  composition 
de  plusieurs  préparations  pharmaceutiques  maintenant  tom- 
bées en  désuétude.  Mais  un  usage  auquel  cette  racine  sert 
communément  aujourd'hui,  c'est  à  faire,  lorsqu'elle  est  en 
morceaux  parfaitement  desséchés,  ces  petites  boules  nom- 
mées po/s  d'iris ,  et  qu'on  emploie  pour  entretenir  la  suppu- 
ration des  cautères.  Les  parfumeurs  se  servent  aussi  de  la 
racine  d'iris  de  Florence,  à  cause  deson  odeur,  qui  ressemble 
à  celle  de  la  violette. 

Iris  germanioue  :  Iris  germanica ,  Linn. ,  Spcc,  55;  Bull., 
Herb.,  t.  141.  Sa  racine  est  tubéreuse,  charnue,  noueuse, 
horizontale,  et  elle  donne  naissance  à  une  tige  haute  d'un 
pied  et  demi  à  deux  pieds ,  un  peu  rameuse.  Ses  feuilles  sont 
planes,  en  forme  de  lame  d'épée  ou  de  sabre,  distiques, 
moins  longues  que  la  tige.  Les  fleurs,  d'un  bleu  violet  foncé, 
sont  disposées,  au  nombre  de  trois  à  quatre,  dans  la  partie 
supérieure  de  la  tige  ;  le  tube  de  leur  corolle  est  à  peine 
aussi  long  que  l'ovaire.  Cette  plante  croît  en  France,  en  Ita- 
lie, en  Allemagne,  en  Suisse,  etc.  ,  dans  les  lieux  secs  et 
arides,  sur  les  vieux  murs.  On  la  plante  dans  les  grands  par- 
terres; ses  fleurs,  aya%t  beaucoup  d'éclat,  sont  très-propres  à 
les  orner  au  printemps. 


632         .  II\I  '  , 

Le  suc  exprimé  de  la  racine  récente  de  Tiris  germanique, 
plus  vulgairement  flambe,  est  fortement  émétique  et  même 
purgatif.  On  le  conseille  dans  l'hydropisie,  à  la  dose  de  quatre 
gros  à  deux  onces  :  mais,  comme  il  a  beaucoup  d'àcreté,  il 
doit  être  mêlé  à  quelque  véhicule  qui  tempère  et  diminue 
son  action  irritante;  car,  employé  seul,  il  peut  exciter  une 
sensation  brûlante  dans  la  gorge  et  par  suite  de  cruelles  tran- 
chées. On  peut  aussi  donner  Tinfusion  vineuse  de  cette  ra- 
cine coupée  en  morceaux.  Quand  elle  est  sèche,  elle  perd 
aine  grande  partie  de  ses  propriétés  :  on  peut  alors,  après 
l'avoir  réduite  en  poudre,  la  substituer  dans  quelques  usages 
pharmaceutiques  a  celle  de  l'iris  de  Florence, 

On  prépare,  en  faisant  macérer  avec  de  la  chaux  les  co- 
rolles de  riris  germanique,  une  couleur  d'un  beau  vert, 
connue  sous  le  nom  de  vert  d'iris ,  dont  les  peintres  font  usage, 
principalement  pour  la  miniature.  En  faisant  infuser  ces  fleurs 
dans  du  vitriol  de  Mars ,  on  en  retire  une  couleur  noire. 

Iris  a  fleors  pales;  Iris  pallida ,  Lamk.,  Dict.  encyclop., 
îom.  3,  pag.  294-  Cette  espèce  diffère  de  la  précédente  par 
sa  tige  plus  élevée,  par  ses  feuiUes  plus  larges,  plus  glauques, 
par  ses  fleurs  d'un  bleu  pâle  ,  et  surtout  par  ses  spathes  mem- 
braneuses, très-blanches,  même  avant  l'épanouissement  des 
fleurs;  tandis  que  dans  liris  germanique  elles  sont  d"abord 
•vertes,  ensuite  teintes  de  pourpre  ou  de  violet  sur  les  bords, 
et  qu'elles  prennent,  en  se  desséchant,  une  couleur  sale, 
•un  peu  roussâtre.  M.  de  Lamarck  croit  cette  plante  origi- 
naire du  Levant  :  on  la  cultive  en  pleine  terre  dans  les  jar- 
dins; elle  fleurit  en  Mai. 

Iris  a  odeur  de  sureau  :  Iris  samhucina,  Linn.,  Spec. ,  55  ; 
Bot.Magaz,,  n."  et  t.  187;  Iris  major  lalifolia,  Vlll ,  Glus., 
Hist. ,  1,  pag.  219.  Cette  espèce  ressemble  beaucoup  à  l'iris 
germanique;  mais  ses  feuilles  sont  beaucoup  plus  vertes,  ses 
fleurs  plus  pâles,  et  les  divisions  redressées  de  la  corolle  sont 
échancrées.  Elle  croit  dans  le  Midi  de  l'Europe;  on  la  cultive 
au  Jardin  du  Roi. 

Iris  jaune-sale  :  Iris  squalens ,  Linn.,5p;c. ,  56;  Jacq.,  FI, 
Aust.,  1  ,  p.  7,  t.  5.  Sa  racine  est  tubéreuse  et  horizontale, 
comme  dans  les  espèces  précédentes;  elle  produit  une  tige 
cylindrique,  une  fois  plus  longue  qu^  les  feuilles  et  hautç 


^  •  IRI  •        63? 

d'environ  deux  pieds,  portant,  dans  sa  partie  supérieure, 
trois  à  quatre  fleurs  assez  grandes,  dont  l'inférieure  est  pé- 
donculée  et  placée  dans  l'aisselle  d'une  feuille.  Les  feuilles 
sont  ensiformes,  glabres,  vertes,  un  peu  rougeàtres  à  leur 
base.  Les  corolles ,  enveloppées  a^ant  leur  épanouissement 
dans  des  spathcs  vertes,  ont  leurs  trois  pétales  réfléchis  d'un 
pourpre  livide  ,  et  veinés  vers  leur  base  qui  est  jaunâtre  ; 
les  trois  pétales  ,  redressés,  sont  échancrés  à  leur  sommet 
et  d'un  jaune  sale.  Cette  espèce  croît  dans  le  Midi  de  l'Eu- 
rope ,  et  on  la  cultive  dans  les  jardins  du  Nord  ,  où  elle 
fleurit  en  Mai. 

Iris  panachée  :  Iris  variegala ,  Liqn.,  Spec,  56;  Jacq. ,  FI. 
Aust.,  t.  5.  Sa  racine  est  de  même  forme  que  celle  des  espèces 
précédentes.  Ses  feuilles,  d'une  forme  aussi  à  peu  près  sem- 
blable, sont  longues  d'environ  un  pied  et  un  peu  plus  courtes 
que  la  tige,  qui  porte  dans  sa  partie  supérieure  trois  à  cinq 
fleurs  jaunes,  mais  dont  les  trois  divisions  rélléchies  de  la  co- 
rolle sont  élégamment  veinées  ou  rayées  de  pourpre  brun. 
Cette  plante  croît  naturellement  en  Autriche;  on  la  cultive 
dans  les  jardins  :  elle  fleurit  à  Paris  à  la  fin  de  Mai  ou  au 
commencement  de  Juin. 

Iris  naine  :  Iris  pumila,  Linn. ,  Spec,  56;  Jacq.,  FI.  Aust., 
t.  1.  Sa  tige  n'est  haute  que  de  deux  à  trois  pouces  et  de  la 
longueur  des  feuilles,  qui  sont  ensiformes.  La  fleur  est  soli- 
taire,  terminale,  à  tube  grêle,  saillant  hors  de  la  spathe, 
et  au  moiiîs  de  la  longueur  des  divisions  de  la  corolle;  sa 
couleur  est  le  plus  souvent  violette,  quelquefois  purpurine, 
bleuâtre  ou  même  blanchâtre.  Cette  espèce  croit  naturelle- 
ment dans  les  lieux  secs  et  pierreux;  on  la  trouve  fréquem- 
ment sur  les  murs  et  les  toits  rustiques  :  elle  fleurit  de  bonne 
heure,  à  la  lin  de  Mars  ou  au  commencement  d'Avril.  Ses 
fleurs,  qui  sont  grandes  comparativement  à  l'élévation  de  la 
plante,  font  un  joli  effet  et  sont  très-propres  à  la  décoration 
des  grottes  et  djgs  rocailles  que  l'on  place  dans  les  jardins 
paysagers. 

Iris  jaunatiu'.  ;  Iris  lufescens ,  Lamk. ,  Dict.  encycl. ,  tom. 
5,  pag.  297.  Cette  espèce  difl'ère  de  la  précédente  parla, 
couleur  de  sa  fleur,  qui  est  constamment  jaune;  par  ses  feuilles 
moins  longues  que  la^ige,  et  par  le  tube  de  sa  corolle  plus 


634  '  IRI  '  , 

court,  renfermé  dans  la  spathe.  Elle  croit  dans  les  lieux 
pierreux  et  montagneux  en  France,  en  Allemagne,  etc.  :  elle 
fleurit  en  Avril  et  Mai. 

Iris  frangée;  Iris  fimhriata ,  Vent..  Horl.  Ccls.,  pag.  et  tab. 
g.  Sa  racine  est  tubéreuse  ;  ses  feuilles  sont  alongées ,  larges 
d'un  pouce,  très -aiguës,  planes,  un  peu  recourbées  en 
fornie  de  sabre;  ses  tiges  sont  droites,  comprimées,  à  peine 
plus  longues  que  les  feuilles,  hautes  de  six  à  dix  pouces,  un 
peu  rameuses  dans  leur  partie  supérieure  ,  qui  porte  deux 
à  trois  fleurs  d'un  bleu  pâle ,  à  divisions  ondulées  et  créne- 
lées en  leurs  bords  :  les  trois  extérieures  presque  cunéiformes, 
parsemées  de  taches  jaunâtres;  les  intérieures  plus  étroites, 
sans  aucune  tache  :  les  stigmates  sont  déchiquetés  et  frangés 
en  leurs  bords.  Cette  plante  est  originaire  de  la  Chine  ;  on 
la  cultive  au  Jardin  du  Roi  à  Paris,  et  on  la  rentre  dans 
l'orangerie  pendant  l'hiver. 

**  Divisions   extérieures   de   la   corolle  sans  raie 
barbue  ;  feuilles  planes  et  ensif ormes. 

Iris  des  marais,  vulgairement  Glaveul  des  marais  :  Iris 
pseudo-acorus .  Linn. ,  Spec,  56;  Bull.,  Herh.,  tab.  iSy.  Sa 
racine  est  tubéreuse,  oblonguc ,  horizontale;  elle  produit 
une  tige  droite,  haute  de  deux  à  trois  pieds,  un  peu  moins 
élevée  que  les  feuilles,  qui  sont  ensiformes ,  droites,  d'un 
vert  gai.  Les  fleurs  sont  jaunes,  au  nombre  de  trois  à  quatre  : 
les  unes  axillaires ,  longuement  pédonculées;  les  autres  ter- 
minales :  leurs  pétales  intérieurs  sont  plus  courts  et  plus  étroits 
que  les  stigmates.  Cette  espèce  est  commune  en  Europe  , 
dans  les  marais,  sur  les  bords  des  rivières  et  des  étangs.- 
elle  fleurit  en  Juin  et  Juillet. 

La  racine  de  l'iris  des  marais  n'a  point  d'odeur  :  elle  a 
beaucoup  d'àcreté  lorsqu'elle  est  fraîche  ,  et  en  cet  état  elle 
est  fortement  purgative;  mais  les  médecins  n'en  font  guère 
usage  :  les  gens  de  la  campagne  l'emploient  empiriquement 
dans  les  hydropisies.  Sèche  et  réduite  en  poudre  ,  elle  pro- 
voque la  sécrétion  muqueuse  du  nez,  quand  on  la  met  en 
contact  avec  cette  partie,  et  la  salivation,  si  c'est  dans  la 
bouche  qu'on  la  place.  Quelques  auteurs  ont  prétendu  que  , 
parla  dessiccation,  cette  racine    dev(.noit  astringente,  et^ 


,  •  IRl  »         655 

comme  telle  ,  ils  Vont  conseillée  dans  la  diarrhée  et  dans  la 
dyssenterie;  mais  l'irritation  qu'elle  produit  quand  on  l'ap- 
plique à  l'intérieur  du  nez,  prouve  assez  qu'elle  ne  doit  [as 
avoir  perdu  toutes  les  propriétés  qu'elle  avoit  étant  récente. 

En  Ecosse,  les  habilans  des  montagnes  se  servent  de  la 
décoction  de  cette  racine  mêlée  à  des  préparations  de  fer  , 
pour  en  faire  de  l'encre  ;  et  dans  quelques  parties  de  ce  même 
pays  on  l'emploie  pour  teindre  les<li'aps  en  noir.  H  y  a  quel- 
ques années,  lorsque  les  denrées  coloniales  étoient  à  un  prix 
très-élevé ,  on  a  proposé  les  graines  de  l'iris  des  marais,  tor- 
réfiées, pour  remplacer  le  café;  mais  l'usage  de  ces  graines 
ne  s'est  nullement  répandu  sous  ce  rapport. 

Iris  fétide  ;  vulgairement  Iris  gigot  ,  Glayeul  puant  ou  spa- 
tule :  Iris  fcclidissima ,  Linn.  ,  Spec,  67;  Iris  sjlvestris ,  spa- 
liilata,  fatida,  Blackw.  ,  Heri. ,  tab.  i58.  Sa  racine,  qui  est 
tubéreuse  ,  comme  dans  l'espèce  précédente  ,  produit  des 
feuilles  ensiformes,  un  peu  étroites,  d'un  vert  foncé,  ren- 
dant, quand  on  les  froisse  entre  les  doigts,  une  odeur  désa- 
gréable qui  peut  être  comparée  à  celle  de  l'ail.  Sa  tige  est 
haute  d'un  pied  et  demi  à  deux  pieds,  imparfaitement  cylin- 
drique, anguleuse  d'un  seul  côté;  elle  porte  dans  sa  partie 
supérieure  trois  à  quatre  fleurs  d'un  violet  obscur ,  tirant  sur 
le  pourpre,  dont  les  divisions  intérieures  sont  un  peu  plus 
longues  que  les  stigmates.  Cette  plante  croit  en  France  ,  en 
Angleterre,  en  Allemagne,  en  Italie  ,  etc. ,  dans  les  bois  mon- 
tagneux ,  les  lieux  humides  et  ombragés  :  elle  fleurit  en  Mai 
et  Juin. 

Les  racines  et  les  graines  de  cette  iris  ont,  selon  quelques 
auteurs,  une  propriété  anti-hystérique  et  fondante  :  elles  ont 
aussi  passé  pour  hydragogues  :  mais  aujourd'hui  on  ne  les 
emploie  plus  sous  aucun  rapport. 

Iris  de  Sibérie,  A'ulgairement  Iris  des  fkés  :  Iris  sibirica, 
Linn.,  Spec,  67;  Jacq. ,  Flor.  Aust. ,  tab.  3.  Ses  racines  sont 
fibreuses  et  noirâtres;  elles  produisent  des  feuilles  ensiformes , 
étroites,  droites,  d'un  vert  un  peu  foncé,  plus  courtes  que 
les  tiges ,  qui  sont  hautes  de  deux  pieds  ou  plus ,  nues  ou  peu 
feuillées  dans  leur  partie  supérieure,  qui  porte  deux  à  quatre 
fleurs  inégalement pédonculées,  d'un  beau  bleu,  panachées  de 
blanc  et  d'un  peu  de  gtune  à  leur  base;  les  divisions  exté- 


636        »  IRI  ■  ^ 

ricurcs  Je  la  corolle  sont  ovales.  Cette  espèce  croît  naturelle- 
ment dans  les  prés  et  les  bois  en  France,  en  Allemagne,  en 
Suisse,  en  Autriche,  en  Hongrie,  etc.  :  elle  fleurit  en  Mai 
et  en  Juin. 

Iris  variée:  Iris  versicolor ,  Linn. ,  Spec,  67  ;  Bot.  Magaz., 
n."  et  t.  2  1  ;  Iris  aw.ericana  versicolor ,  stylo  non  crenato ,  Dill., 
Hor't.  Elth.,  187,  tab.  ]55,  fig.  187.  Ses  feuilles  sont  ensi- 
formes,  un  peu  étroites  , «vertes ,  recourbées  au  sommet,  à 
peine  moins  longues  que  la  tige,  qui  est  cylindrique,  haute 
d'un  pied  à  un  pied  et  demi ,  terminée  par  deux  à  trois  fleurs , 
dont  les  divisions  extérieures  sont  grandes,  ovales,  bleues, 
mais  panachées  vers  leur  base  de  blanc,  de  jaune  et  de  vei- 
nes violettes,  et  dont  les  divisions  redressées  sont  plus  petites, 
lancéolées,  d'un  pourpre  violet  ou  bleuâtre.  Cette  espèce  est 
originaire  de  l'Amérique  septentrionale  ;  on  la  cultive  au 
Jardin  du  Roi. 

Iris  bâtarde  :  Iris  spuria,  Linn. ,  Spec,  58  ;  Jacq. ,  Flor.  Aust, 
fab.  4.  Sa  tige  est  haute  d'un  pied  et  demi  à  deux  pieds, 
droite,  feuillée  et  un  peu  comprimée  inférieurement.  Ses 
feuilles  sont  ensiformes,  étroites,  droites,  presque  aussi  lon- 
gues que  les  tiges.  Ses  fleurs  sont  terminales ,  ordinairement 
au  nombre  de  deux,  l'une  au-dessous  de  l'autre  ,  ayant  leurs 
divisions  extérieures  en  forme  de  spatule  ,  leurs  ovaires  à 
six  angles,  et  leurs  spathes  vertes  :  ces  fleurs  sont  veinées  de 
bleu. ou  de  violet  sur  un  fond  blanc  jaunâtre,  et  elles  parois- 
sent  en  Mai  et  Juin.  Cette  plante  croît  en  Allemagne ,  en 
Autriche,  dans  le  Midi  de  la  France  et  de  FEurope. 

Iris  jaune  :  Iris  ochroleuca,  Linn. ,  Mant. ,  1 76.  ;  Bot.  Magaz. , 
n."  et  tab.  61.  Cette  espèce  a  quelques  rapports  avec  la  pré- 
cédente ;  mais  elle  en  diffère  par  ses  racines  tubéreuses ,  ho- 
rizontales, qui  poussent  çà  et  là  leurs  tiges,  au  lieu  que  dans 
l'iris  bâtarde  les  tiges  et  les  feuilles  naissent  rapprochées  en 
toufi'e ,  de  même  que  dans  Firis  de  Sibérie.  Elle  se  distingue 
aussi  par  la  couleur,  constamment  jaunâtre  ou  d'un  jaune 
blanchâtre,  de  ses  fleurs.  L'iris  jaune  croît  dans  la  Sibérie  et 
le  Levant;  on  la  cultive  au  Jardin  du  Roi. 

&u\u>  p'eiiiiif;^^;  linéaires^  canaliculées  ou  jonv  if  ormes, 
Ifiià  GRAMiNÉE  :  Iris  gramïnea;  Linn.,  Spec.  58;  Jacq.,  Flor. 


»  IRI  637 

Auslr.,  tab.  2.  Ses  racines  sont  fibreuses,  et  elles  produisent 
des  tiges  et  des  feuilles  réunies  en  touffe.  Ces  dernières  sont 
linéaires,  étroites,  presque  semblables  à  celles  des  graminées, 
une  fois  plus  longues  que  les  tiges,  qui  sont  comprimées, 
Jiautesde  troisàsix  pouces,  terminées  par  une  ou  deux  fleurs, 
don*t  l'ovaire  est  à  six  angles,  et  la  spathe  de  deux  pièces 
lorsqu'il  n'y  a  qu'une  fleur,  de  trois  lorsqu'il  y  en  a  deux. 
Ces  fleurs  sont  d'un  pourpre  violet,  avec  des  lignes  plus  fon- 
cées :  elles  paroissent  en  Juin  et  Juillet.  Cette  espèce  croît 
naturellement  sur  les  collines  et  au  bord  des  bois,  en  Alsace, 
dans  les  Vosges,  en  Autriche  ,  en  Hongrie. 

Iris  œil-de-faon  ;  Iris  pavonia ,  Thunb.,  Diss.  de  ir. ,  n."35, 
tab.  3 1 .  Sa  racine  est  bulbeuse  ;  elle  produit  une  tige  simple , 
cylindrique,  haute  d'un  pied,  velue,  garnie  inférieurement 
de  quelques  feuilles  linéaires  ,  striées,  velues,  de  la  longueur 
de  la  tige  elle-même,  qui  porte  à  son  sommet  une  ou  deux 
fleurs  d'une  belle  couleur  orangée ,  dont  les  trois  divisions 
extérieures  sont  plus  grandes  que  les  autres ,  ovales  ,  entières , 
marquées  de  points  noirs  à  leur  base,  avec  une  tache  bleue, 
en  cœur,  noire  et  veloutée  en  sa  partie  inférieure,  et  dont 
les  trois  divisions  intérieures  sont  une  fois  plus  courtes,  plus 
étroites,  et  presque  lancéolées.  Ces  fleurs  ne  durent  qu'un 
jour.  La  plante  est  originaire  du  cap  de  Bonne-Espérance  ;  on 
la  plante  en  pot  et  on  la  rentre  dans  l'orangerie  ou  la  serre 
tempérée. 

Iris  BULBEUSE  :  Iris  xiphium ,  Linn.,  Spec.  58;  Lois.,  Herh. 
amat.,v.°et  tab.  1 10.  Sa  racine  est  une  bulbe  ovale,  pointue;  elle 
produit  une  tige'droite,  haute  d'un  pied  et  demi  ou  environ, 
garnie  à  sa  base  de  feuilles  linéaires-subulécs ,  creusées  en 
gouttière,  striées,  glabres,  un  peu  moins  longues  que  la 
tige.  Ses  fleurs  sont  terminales  ,  agréablement  odorantes  ,  or- 
dinairement au  nombre  de  deux,  dans  des  spathes  vertes  et 
pointues;  leur  couleur  est  communément  bleue,  avec  une 
tache  jaune  à  la  base  des  divisions  étalées ,  qui  ne  sont  pas 
plus  larges  que  les  stigmates  :  mais  il  y  a  plusieurs  variétés 
dans  lesquelles  les  différentes  divisions  de  la  corolle  sont  ou 
blanches,  ou  Jaunes,  bleues  foncées  ou  claires ,  et  ménie  ver- 
dàtres,  comme  bronzées.  Cette  espèce  croît  naturellement 
en  Esgagne  et  en  rorti%al  ;  on  la  cultive  pour  l'ornement  des 


658  IRI 

jardins.  Ses  difTérentes  variétés,  plantées  en  mélange  dans 
une  plate-bande,  y  forment,  quand  elles  sont  en  fleurs,  à 
la  fin  de  Mai  ou  au  commencement  de  Juin,  un  charmant 
coup  d'oeil,  mais  qui  ne  dure  que  quatre  à  cinq  jours  :  on 
peut  prolonger  sa  jouissance  le  double  de  ce  temps,  en  garan- 
tissant les  fleurs  du  soleil  au  moyen  d'une  grande  toile  étendue 
au-dessus.  Les  oignons  peuvent  être  retirés  de  (erre  tous  les 
ans  ,  après  que  les  tiges  et  les  feuilles  sont  sèches,  et  on  les 
replante  au  mois  d'Octobre  ou  au  commencement  de  No- 
vembre. Ils  ne  craignent  que  les  très-fortes  gelées,  et  surtout 
lorsque  la  terre  n'est  pas  couverte  de  neige,  comme  cela 
arriva  en  Janvier  1820.  Lorsqu'on  laisse  les  oignons  plusieurs 
années  de  suite  sans  les  remuer,  ils  fournissent  une  grande 
quantité  de  caïeux.  Une  terre  franche,  légère,  est  celle  qui 
leur  convient  le  mieux. 

Iris  xirnioÏDE  :  Iris  xipliioides  ,  Willd.,  Spec,  1  ,  pag.  201  : 
Red.,  Lil. ,  t.  •212;  Lois.,  Herb.  amat.,  n."  et  tab.  166-  Cette 
espèce  a  beaucoup  de  rapports  avec  la  précédente;  mais  elle 
en  diffère  par  ses  feuilles  plus  larges,  plus  longues  que  la 
tige  ,  et  par  les  divisions  étalées  de  sa  corolle  ,  qui  sont  beau- 
coup plus  larges  que  les  stigmates.  Ses  fleurs  sont  inodores, 
larges  de  trois  à  quatre  pouces,  d'un  beau  bleu  clair  dans 
l'état  sauvage;  blanches,  pourpres  ou  violettes,  dans  les  va- 
riétés cultivées.  Cette  plante  croît  naturellement  dans  les 
montagnes  en  Espagne  et  dans  les  Pyrénées.  Nous  l'avons  vue 
très -commune  dans  les  prairies  un  peu  élevées  de  ces  der- 
nières montagnes,  à  Luz  ,  àCauterets,  au  Tourmalet ,  etc.; 
elle  y  fleurit  en  Juin  et  Juillet.  Dans  les  jardins  de  Paris  elle 
est  en  fleur  dès  le  mois  de  Mai.  Quoiqu'elle  se  trouve  très- 
fréquemment  dans  les  Pyrénées,  comme  nous  venons  de  le 
dire  ,  les  botanistes  ont  long- temps  ignoré  qu'elle  fiU  indigène 
en  France,  et  M.  de  Lamarck  n'en  avoit  point  fait  mention 
dans  la  première  édition  de  sa  Flore  françoise.  Depuis,  M. 
de  Lapeyrouse  et  M.  Ramond  ont  revendiqué  l'honneur  de 
lavoir  découverte  en  France  ;  mais  il  paroît  que  Tourncfort 
l'avoit  vue  dans  les  Pyrénées  avant  eux  ;  et ,  en  effet ,  il  seroit 
difficile  d'herboriser  pendant  quelques  jours  dans  ces  mon- 
tagnes, à  Fépoque  où  elle  fleurit,  sans  la  rencontrer,  et  iî 
j/cst  paç  possihlr  que  la  beauté  de  seV  fleurs,  dans  ces  lieux 


^  •  IRI  '         639 

agrestes,  ne  frappe  non -seulement  un  botamistc,  mais  la 
première  personne  à  la  vue  de  laKjuelle  elles  s'offrent. 
Quoi  qu'il  en  soit,  il  y  a  long- temps  que  les  HoUandois  ont 
tiré  cette  plante  de  l'Espagne  et  l'ont  cultivée  chez  eux,  où 
ils  en  ont  obtenu  un  grand  nombre  de  variétés,  dont  par 
suite  les  jardins  françois  se  sont  enrichis.  La  culture  de  l'iris 
xiphioide  est  la  même  que  celle  de  l'espèce  précédente.  Ses 
bulbes  sont,  dit-on,  fortement  éméîiques,  quand  elles  sont 
fraîches. 

Iris  de  Perse:  Iris  persica ,  Linn. ,  Spec,  5g;  Herb.de  l'amat. , 
n."  et  tab.  48.  Sa  racine  est  une  bulbe  alongée  .  pyramidale, 
de  la  grosseur  du  pouce;  elle  pousse  cinq  à  six  feuilles  linéai- 
res-subulées,  canaliculées,  d'un  vert  un  peu  glauque  ,  longues 
d'environ  trois  pouces,  du  milieu  desquelles  s'élève,  à  la  hau- 
teur de  trois  à  quatre  pouces,  une  fleur  assez  grande,  d'une 
odeur  suave,  enveloppée  avant  son  épanouissement  dans  une 
spathe  bivalve.  La  corolle  de  cette  fleur,  à  laquelle  une 
seconde  succède  quelquefois,  est  partagée  profondément  en 
six  divisions,  dont  les  trois  intérieures  sont  très-petites, 
étroites,  horizontales  ou  un  peu  pendantes,  tout-à-fait  blan- 
ches; les  trois  extérieures  sont  grandes,  redressées  ou  demi- 
ouvertes,  blanches,  marquées  d'une  raie  jaune  dans  leur 
milieu  et  à  leur  sommet  d'une  large  tache  veloutée  et  vio- 
lette. Les  trois  stigmates  sont  grands,  pétaliformes  ,  blancs, 
avec  uae  raie  d'un  bleu  pâle  dans  leur  milieu.  Cette  plante 
est  originaire  de  la  Perse;  on  la  cultive  en  Europe  depuis 
près  de  deux  cents  ans.  Elle  craint  la  gelée  et  l'humidité. 
Quand  on  la  plante  en  pleine  terre  ,  il  faut  la  placer  à  une 
exposition  chaude  et  avoir  soin  de  la  couvrir  de  litière  pen- 
dant les  froids.  On  en  jouit  davantage  en  la  plantant  dans 
des  pots  remplis  d'une  terre  légère  et  sablonneuse  ,  et  en  pla- 
çant ces  pots  dans  les  appartemens ,  lorsque  la  plante  est  en 
fleur;  ce  qui  arrive  dès  le  mois  de  Février  pour  les  oignons  qui 
ont  été  tenus  à  une  douce  chaleur  pendant  tout  l'hiver  :  en 
pleine  terre  ils  ne  fleurissent  qu'à  la  fin  de  Mars.  On  peut 
aussi  mettre  les  oignons  dans  des  carafes  remplies  d'eau, 
comme  on  fait  pour  les  narcisses  et  les  jacinthes. 

Iris  sisvrinchion  ,  vulgairement  Iris  double- bulbe  :  Iris 
sisjrincliium  ,  Linn.  ,  Sfec. ,  6g;   Si^yrincliium  mai  us  et  minus  ^ 


640  IRI 

Clus. ,  Hist.,  216.  La  tige  de  cette  espèce  est  haute  de  trois 
à  six  pouces,  et  elle  porte  une  à  trois  fleurs.  Ses  feuilles  sont 
subulées,  canaliculées ,  plus  longues  que  la  tige.  Ses  fleurs 
sont  bleues,  marquées  de  taches  jaunes  à  leur  base;  elles 
paroissent  en  Avril  et  Mai.  Cette  plante  croit  naturellement 
en  Espagne  ,  en  Portugal ,  sur  les  côtes  de  Barbarie  ,  et  en 
Provence,  dans  les  environs  de  Toulon.  Clusius  dit  qu'en 
Portugal  les  enfans  mangent  ses  bulbes  comme  des  noisettes. 
La  bulbe  de  cette  espèce  n"est  point  double,  mais  simple. 
Ce  qui  en  a  imposé  à  ceux  qui  ont  cru  voir  la  racine  formée 
de  deux  bulbes ,  c'est  que  chaque  année  il  se  forme  une 
nouvelle  bulbe,  non  latéralement,  comme  dans  les  orchis, 
les  tulipes,  les  aux,  etc.;  mais  naissant  immédiatement  au- 
dessus  de  l'ancienne,  comme  dani  les  safrans  et  les  glaïeuls. 
Dans  ces  derniers  et  dans  l'espèce  dont  il  est  ici  question, 
l'ancienne  bulbe  est  desséchée  et  ne  forme  qu'une  sorte  de 
plateau  au-dessous  de  la  jeune  bulbe,  lorsqu'on  n'arrache  la 
plante  qu'au  terme  de  la  végétation  ;  mais,  si  on  la  retire  de 
terre  pendant  la  floraison,  on  trouve  deux  bulbes,  l'une  qui 
n'a  pas  encore  acquis  toute  la  grosseur  à  laquelle  elle  doit 
parvenir,  et  l'autre  n'ayant  pas  encore  perdu  sa  forme. 

Iris  tubéreuse  ,  vulgairement  Faux-hermodacte;  Ii-is  tuberosa, 
Linn. ,  Spec,  58;  Dod..  Pempt.,  249  ;  Herb.  de  l'amat. ,  n."  et 
lab.  53.  La  racine  de  cette  iris  est  formée  d'un  à  quatre  tu- 
bercules alongés,  à  peu  près  de  la  grosseur  du  petit  doigt; 
elle  produit  une  tige  de  six  pouces  à  un  pied ,  terminée  par 
une  seule  fleur,  d'un  vert  brun ,  avec  une  teinte  d'un  violet 
obscur.  Les  feuilles  sont  linéaires,  étroites,  quadrangulai.res  , 
plus  longues  que  les  tiges.  Cette  plante  croît  dans  le  Midi 
de  l'Europe  ;  elle  a  été  trouvée  depuis  quelques  années  en 
Provence ,  en  Languedoc  et  dans  le  Poitou.  Dans  les  pays 
méridionaux  elle  fleurit  en  lévrier,  et  à  Paris  à  la  fin  de 
Mars  ou  au  commencement  d'Avril.  Elle  vient  bien  en  pleine 
terre. 

Linnaeus,  dans  sa  Matière  médicale,  regarde  les  racines  de 
celte  iris  comme  fournissant  les  hermodattes,  dont  l'usage 
étoit  autrefois  beaucoup  plus  répandu  en  médecine  qu'il  ne 
lest  aujourd'hui  ;  car  il  est  presque  entièrement  tombé  en  dé- 
suétude: mais  Linnasus  paroît  avoirrété  dans  Terreur;   c'est 


,  »  IRI  •        641 

à  une  autre  plante  que  sont  dues  les  Hermodattes,  et  l'opi- 
nion la  plus  probable  à  cet  égard  est  celle  de  Miller,  de 
Forskal  et  de  Spielman  ,  qui  pensent  qu'elles  sont  formées 
avec  les  bulbes  d'une  liliacée  figurée  dans  Matthiole,  p.  1108, 
sous  le  nom  de  colchicum  orientale,  mais  qui  appartient  réel- 
lement à  une  espèce  de  fritillaire.  (L.  D.) 

IRIS.  (Enlom.)  C'est  ainsi  qu'on  désigne  en  latin  le  papillon 
qu'on  appelle  en  France  le  grand  Mars  changeant.  (C.  D.) 

IRIS.  {Ichthjol.)  M.  de  Lacépède  a  donné  ce  nom  à  un 
poisson  des  eaux  douces  de  la  Caroline  ,  où  il  a  été  décou- 
vert par  M.  Bosc.  qui  l'avoit  appelé  perça  iridea.  M.  de  La- 
cépède en  a  fait  le  labrus  irideus.  Voyez  Labre.  (H.  C.) 

IRIS.  (Min.)  Pline,  liv.  XXXVII,  chap.  g,  dit  que  l'iris 
est  un  vrai  cristal  ayant  six  angles  comme  lui,  et  que,  placé 
au  soleil  dans  une  chambre  ,  il  renvoie  sur  les  murailles , 
d'une  manière  admirable,  les  couleurs  de  l'arc-en-ciel  ;  que 
ces  couleurs  ne  lui  sont  pas  propres,  etc. 

Derosnel  (Merc.  ind. ,  part.  2,  pag.  26)  donne  ce  nom 
à  une  pierre  qui  est  d'un  gris  de  lin  tirant  sur  le  rougeàtre, 
réfléchissant  un  peu  les  couleurs  de  l'arc-en-ciel;  mais  qui, 
étant  laiteuse  et  n'ayant  pas  la  vivacité  de  l'opale,  est 
peu  estimée.  Cette  description  convient  assez  bien  à  la  variété 
grisâtre  du  quarz  chatoyant,  qu'on  nomme  vulgairement 
icil  de  chat. 

La  circonstance  des  six  angles  attribués  par  Pline  à  l'iris, 
a  fait  présumer  à  M.  Hauy  que  ce  nom  pouvoit  également 
s'appliquer  «aux  cristaux  de  quarz  limpides,  durs,  polis, 
«  assez  égaux  pour  que  deux  de  leurs  plans  inclinés  entre 
«  eux  fassent  l'oQlce  de  l'angle  réfringeant  du  prisme  trian- 
«  gulaire,  en  sorte  qu'étant  exposés  au  soleil,  ils  projettent 
«  l'image  colorée  de  cet  astre  sur  une  muraille  située  à  une 
«  distance  convenable.^  Wallerius,  tom.  1,  pag.  227,  dit 
à  peu  près  la  même  chose  en  parlant  de  cette  variété  de 
quarz. 

Une  troisième  sorte  de  phénomène,  résultant  de  l'action 
du  quarz  sur  la  lumière  ,  a  fait  donner  aussi  le  nom  d'iris 
aux  variétés  qui  le  présentent  :  ce  sont  des  quarz  hyalins  par- 
faitement limpides ,  renfermant  dans  leur  intérieur  des  fissures 
extrêmement  minces,  ^ui  ont  la  propriété  de  donner  les 
2».  41 


643  IRI  •  , 

couleurs  de  Tiris  ou  de  l'arc-en-ciel  avec  la  plus  grande  viva- 
cité. Ces  quarz  sont  fendillés  ainsi  naturellement,  et  alors 
leurs  fissures  moins  nombreuses  et  leur  limpidité  plus  com- 
plète rendent  ces  couleurs  plus  belles  et  plus  durables,  ou 
ils  le-  sont  artificiellement,  soit  par  la  percussion,  soit  par 
leur  immersion  dans  l'eau  en  état  d'incandescence. 

Ainsi  il  y  auroit  trois  sortes  d'iris  : 

1."  Le  gris  de  lin  de  Derosnel,  qui  seroit  un  quarz  cha- 
toyant ; 

2."  Le  cristallisé  ou  le  quarz  poli  sous  un  certain  angle, 
qui  est  probablement  l'iris  connu  des  physiciens  modernes  , 
et  peut-être  aussi  celui  de  Pline  ; 

3.°  Le  quarz  hyalin,  limpide,  fendillé,  qui,  étant  cristal- 
lisé ,  peut  fort  bien  convenir  à  l'iris  indiqué  par  Pline  comme 
hexagonal.  Cette  dernière  pierre  d'iris  est  la  plus  connue , 
la  plus  recherchée,  et  les  plus  belles  viennent  du  Mexique 
et  du  Brésil.  (B.) 

IRIS.  {Ornith.)  On  appelle  ainsi  le  prolongement  de  la 
membrane  choroïde  autour  de  la  pupille  ;  sa  couleur  varie 
suivant  les  difierentes  espèces  d'oiseaux.  L'iris  est  blanc 
dans  la  grue  couronnée  ou  oiseau  royal  ,  dans  la  cigogne 
maguari ,  dans  le  petit  tétras  à  queue  fourchue;  blanchâtre 
dans  le  choucas;  noir  dans  beaucoup  de  passereaux;  d"un  noir 
bleuâtre  dans  la  fresaie  ;  bleu  dans  le  geai;  brun  dans  un 
grand  nombre  d'oiseaux  ;  d'un  jaune  brun  dans  le  cravant; 
jaune  dans  le  faisan  doré,  l'éperonnier,  le  goéland  à  man- 
teau gris;  d'un  jaune  brillant  dans  le  héron  commun,  le  bu- 
tor, le  grand  et  le  moyen  ducs,  le  cariama,  le  garrot,  i'hui- 
trier;  orangé  dans  plusieurs  coucous;  rouge  dans  le  jaseur 
de  Bohème,  le  coq  de  Bantam ,  le  canard  huppé  de  la  Loui- 
siane, le  geai  blanc  ,  le  pinson  noir;  d'un  rouge  vif  dans  le 
guêpier;  d'un  rouge  de  feu  dans  le  courlis  brun  ;  d'un  rouge 
aurore  dans  les  tourterelles  blanches,  dans  quelques  variétés 
de  pigeons,  dans  les  coqs,  les  poules;  de  couleur  noisette 
dans  le  casse -noix,  le  coucou  ordinaire,  etc. 

La  connoissance  de  ces  variations,  très-utile  pour  le  choix 
des  yeux  d'émail  dans  là  préparation  des  oiseaux  empaillés, 
fournit  aussi  quelquefois  des  caractères  pour  la  désignation 
des  espèces.  Wolf  observe ,  dans  sop  Histoire  naturelle  des 


,  »  IRR  ^         645 

oiseaux  de  Franconie,  que  l'iris  change  de  couleur  avec  l'âge; 
mais  il  est  probable  que  ce  changement  ne  devient  sensible 
que  chez  des  individus  très- vieux.  (Ch.  D.) 

IRIS  MARINA.  (Ichthjol.)  Quelques  anciens  naturalistes, 
Aldrovandi  entre  autres,  ont  ainsi  appelé  une  espèce  de 
ruban  ou  de  flamme  de  mer,  qui  me  paroît  être  la  cépole 
serpentiforme  en  particulier.  Voyez  Cépole.  (H.  C.) 

IRISCH.  (Ornith.)  On  appelle  ainsi,  en  Norwége,  la  li- 
notte,  fringilla  linaria,  Linn.  (Ch.  D.) 

IRIWYA  (Bot.),  nom  donné,  suivant  Hermann ,  à  une 
espèce  de  haricot  non  déterminée.  (J.  ) 

IRLIN  (Ornith.),  un  des  noms  allemands  ,  suivantSchwenck- 
feld ,  de  la  bergeronnette  du  printemps,  motacïila  Jlava, 
Linn.  (Ch.  D.) 

IRON  (  Bot.  ) ,  nom  vulgaire  de  l'absinthe  dans  la  Hongrie , 
«uivant  Clusius.  (J.) 

IROUCANA.  {Bot.)  Ce  genre  de  plante,  observé  dans  la 
Guiane  par  Aublet,  nommé  moellaria  par  Scopoli  et  Necker, 
athenœa  par  Schreber ,  a  été  supprimé  par  nous  et  réuni  au 
genre  ^n.at'fn.go.  d'Adanson  et  deLamarck,  que  quelques  au- 
teurs préfèrent  de  nommer  Casearia,  avec  Jacquin.  (J.  ) 

IROUDA  (OrniUi.) ,  nom  vulgaire  de  Thirondelle  en  Lan- 
guedoc, où  le  petit  s'appelle  iroundou.  (Ch.  D.) 

IRRÉGULIER  (Bot.),  dont  les  parties  correspondantes 
diffèrent  entre  elles,  soit  par  la  forme,  soit  par  la  grandeur. 
On  a  des  exemples  de  calice  irrégulier,  de  corolle  irrégu- 
lière, etc.,  dans  la  sauge,  le  pied-d'alouette,  la  capucine, 
le  robinia  pseudo-  acacia ,  etc.  L'irrégularité  du  calice  et  de 
la  corolle  est  ordinairement  indiquée  par  la  déviation  des 
étamines  vers  un  même  côté  de  la  fleur.  Les  parties  peuvent 
ne  pas  être  toutes  semblables  et  former  cependant  un  tout 
régulier,  si  la  dissemblance  suit  un  ordre  symétrique  :  tel 
est,  par  exemple,  le  calice  de  la  potentille,  du  fraisier, 
etc.  (Mass.) 

IRRITABILITÉ  et  CONTRACTILITÉ.  Voyez  Moelle  éfi- 
NiÈRE  pour  le  premier,  et  Motilité,  Muscles,  pour  le  second. 
(F.) 

IRRITABLE  {Bot.)  ,  se  contractant  et  exécutant  divers 
mouvemens  par  suit^de  l'acte  même  de  la  végétation  ,  ou 


G44  1RS 

par  le  contact  de  certains  stimulans.  Ces  effets  se  manifestent 
d'une  manière  plus  ou  moins  sensible  dans  diverses  parties 
des  plantes,  principalement  dans  les  feuilles,  les  étamines , 
les  vaisseaux  du  tissu  interne.  Ils  sont  très-marqués  dans  les 
feuilles  de  la  sensitive,  du  sainfoin  du  ganp;e  (voyez  au  mot 
Feuilles),  ainsi  que  dans  les  étamines  des  berberis  ,  du  ruLa 
graveolens  ,  du  parnassia ,  etc.  M.  Desfontaines  a  fait  voir  que 
presque  toutes  les  étamines  exécutent  spontanément  des  mou- 
vemens  particuliers  au  mnment  de  la  fécondation.  Les  expé- 
riences de  MM.  Brugmann  .  Coulon  ,  Th.  de  Saussure,  démon- 
trent que  les  vaisseaux  des  plantes  sont  susceptibles  de  con- 
traction ,  et  qu'on  peut  anéantir  leur  irritabilité  par  plusieurs 
des  agens  physiques  ou  chimiques  qui  anéantissent  lïrrita- 
hilité  chez  les  animaux. 

I.a  force  par  laquelle  les  fruits  de  la  balsamine  éclatent , 
ou  les  étamines  de  la  pariétaire,  du  kalmia ,  etc.,  se  déban- 
dent, n'est  pas  l'irritabilité.  Ces  phénomènes  sont  dus  à  l'é- 
lasticité; ils  ne  se  répètent  point.  Ceux  qui  sont  l'effet  de 
l'irritabilité  peuvent  se  répéter.  (Mass.) 

IRSIOLA.  {Bot.)  Les  plantes  de  la  famille  des  vinifères,  que 
P.  Browne  nommoit  ainsi  dans  son  Histoire  de  la  Jamaïque  , 
sont  le  cissus  sycioides  et  le  cissus  acida  de  Linneeus.  (J.  ) 

IRSKER.  (Ornith.)  Eggède  se  borne  à  désigner  cet  oiseau 
du  Groenland  comme  un  petit  moineau  chanteur.  (Ch.  D.  ) 

IRUNGUS.  {Bot.)  Dodoens  dit  que  dans  les  pharmacies 
on  nommoit  ainsi  le  panicaut,  qui  est  Viringio  des  Italiens, 
Verjngium  des  Latins  et  des  botanistes.  (J.  ) 

IRUPERO.  {Ornith.)  On  applique,  au  Paraguay,  le  nom  de 
pepoaza ,  qui  signifie  aile  traversée,  aux  oiseaux  dont  les  ailes 
sont  traversées  par  une  bande  d'une  autre  couleur  que  le 
fond.  M.  d'Azara  en  a  formé  une  petite  famille,  qui  a  de  l'a- 
nalogie avec  les  moucherolles  et  les  tyrans,  et  dont  une 
espèce,  par  lui  décrite  sous  le  n."  204,  porte  dans  le  pays 
la  dénomination  particulière  d'iri/pero.  Cet  oiseau,  long  de 
sept  pouces  et  demi,  est  tout  blanc  ,  à  l'exception  du  bout 
de  la  queue  ,  des  couvertures  supérieures  des  ailes ,  de  ses 
quatre  premières  pennes,  de  l'extrémité  des  quatre  suivantes, 
de  l'iris,  du  bec  et  du  tarse,  qui  sont  noirs.  (Ch.  D.) 

IRUS.  {Conchyl.)  C'est  le  nom  sors  lequel  M.  Ocken  a 


^  •  IRY  '        6/.5 

formé  une  petite  coupe  générique  avec  les  espèces  de  coquilles 
bivalves  dont  M.  de  Lamarck  a  fait  ses  genres  Pandore, 
Petricole,  Rupellaire  et  Saxicave.  Le  caractère  qu'il  assigne 
à  ce  genre ,  est  d'avoir  le  manteau  terminé  par  deux  tubes 
courts,  et  d'avoir  le  pied  également  très-court.  Il  y  range 
la  tellina  inœquivalvis ,  Linn. ,  Gmel. ,  le  type  du  genre  Pan- 
dore de  M.  de  Lamarck;  le  mjtilus  rugosus  deL. ,  Gmelin , 
et  le  Donax  Irus  du  genre  Pétricole  de  M.  de  Lamarck.  Ce 
genre  Irus  de  M.  Ocken  correspond  à  celui  que  Poli  avoit 
nommé  depuis  long-temps  Hjpogœa.  (De  B.) 

IRUSCULE.  (Bot.)  Dans  les  Pyrénées  orientales  on  donne 
ce  nom  cà  Veuphorhia  characias,   Linn.  (L.  D.) 

IRYA ,  IRYAGHAS  (Bot.)  :  noms  d'une  noix  muscade  de 
Ceilan,  qui  est  petite,  inodore  et  conséquemment  négligée. 
(J.) 

IRYAGHEDHI.  {Bot.)  Noix  muscade  sauvage  de  Ceilan, 
suivant  Hermann.  La  plante  est  citée  et  figurée  dans  le  Thés. 
Zeyl.  de  Biirmann ,  t.  yq.  C'est  un  arbre  à  feuilles  opposées, 
différant  en  ce  point  des  autres  muscadiers.  Comme  on  ne 
connoît  point  sa  fructification,  il  est  difficile  de  déterminer 
son  vrai  genre.  (  J.  ) 


FIN    nu    VINGT-TROISIÈME    VOLUME. 


Strasbocrc,  de  l'imprime-te  de  F.  G.  Levrault  ,  imprimeur  du  Roi. 


OUVRAGES  NOUVEAUX 

Que  Ion  troui^e  che-  les  mêmes  libraires  a  Strasbourg  et 
a   Paris  : 

DE  L'OUGAMSATION  DES  ANIMAUX,  ou  Prin- 
cipes d'r.naiomlc  comparée,  par  M.  H.  DUCROTAY 
DE  BL  A  IN  VILLE,  Professeur  ù  la  faculté  des  scien- 
ces de  Paris  j  [  volumes  in- 8.",  avec  planches. 
Le  premier  volume,  cpii  trnite  des  généralités. or,  des  ap- 
pareils des  sens,  est  en  vente. 

SYNOPSiè  PLANTARLiM,  quas,  in  ilinere  ad  plagani 
aequinbctialein  orbis  novi ,  collcgerunt  Alex.  DE 
HUMROLDT  ci  Am.  BONPLAND  ;  auctore  C.  S. 
KUNTH,  Prof.  Reg.,  Acad.  Berol.,  Insiit.  Gail. , 
Socict.  Philom.  et  Ilist.  nat.  Paris.;  4  vol.  in-3." 

Le  premier  vol-irae  est  en  vente. 

DES  DENTS  DES  MAMMIFÈRES,  considérées 
comme  caractères  zoologiques;  par  M.  F.  CUVIER  , 
in -8."  devant  contenir  loo  planches. 

Cet  ouvrage  formera  9  ou  lo  livraisons,  fj-o/V  sont  en  vente. 

ESSAI  GÉOGNOSTKjUE  SUR  LE  GISEMENT  DES 
ROCHER  dans  les  deux  hémisphères  ;  par  M. 
Alexandre  DE  HUMBOLDT  ;   i  vol.  m-8.*' 

©eognoftifcïjer  ^erfuc^  «t)cr  bic  Sa^erung  ber 
©ebirgèarten  irt-  beibcn  (îrbl;atftcn  ;  t>on  S^vn, 
2(tej:anbcï  «on  ^umbolbt;  beutfc^  bcarbeitct  t>cn 
^atl  Safar  eon  geonbavt;  i  Dftaçbflub, 


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