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DIGTIONISAIRE
DES
CIENCES NATURELLES,
DANS LEQUEL
TRArrF. MÉXMODÏQUEMENI DES DIFFÉRENS ÊTKES DE LA NATURE ,
C0>::;IIJÉ!\É5 SOIT EN EUX-MÊMES, d' APRES l'ÉTAT ACTUEL DE NOS
CONXOISS ANCES , SOIT RELATIVEMENT A l'uTILITB QU'eN PEUVENT
RF.TinER LA MÉDECINE, l'agriculture, LE COMMERCE ET LES ARTS.
iUIYî D'UNE BIOGRAPHIE DES PLUS CÉLÈBRES
NATURAUSTES.
iusiear.s Piofos5eurs du Jardin du Roi, et des principales
Écoles de Paris.
TOME VINGT-TROISIÈME,
lEA-IRY
F. G. Leviuxjlt, Editeur, à STRASBOURG,
et rue des Fossés M. le Prince, N.° 3i , à PARIS.
Le Nor^nt, rue de Seine^ N.** 8, à PARIS.
1822.
LIBRARY OF
1685- IQ56
DICTIONNAIRE
DES
SCIENCES NATURELLES.
TOME XXIII.
IEA = IRY.
Le nomhre ^exemplaires prescrit -par la loi a été
déposé. Tous les exemplaires sont revêtus de la signature
de r éditeur.
^!^/^ ^Ùi*^!:^!K^''^^)
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DICTIONNAIRE
DES
SCIENCES NATURELLES,
DANS LEQUEL
ON TRAITE MÉTHODIQUEMENT DES DIFF1ÉRENS ÊTRES DE LA NATURE,
CONSIDÉRÉS SOIT EN EUX-MÊMES, d'aPRÈS l'ÉTAT ACTUEL DE
NOS CONNOISSANCES , SOIT RELATIVEMENT A l' UTILITÉ Qu'eN
PEUVENT RETIRER LA MÉDECINE , l'aGRICULTURE , LE COMMERCE
ET LES ARTS.
SUIVI D'UNE BIOGRAPHIE DES PLUS CÉLÈBRES
NATURALISTES.
Ouvrage destiné aux médecins, aux agriculteurs, aux commercans,
aux artistes, aux manufacturiers, et k tous ceux qui ont intérêt à
connoître les productions de la nature, leurs caractères génériques
et spécifiques, leur lieu natal, leurs propriétés et leurs usages.
PAR
Plusieurs Professeurs du Jardin du Roi ,' et des principales
Ecoles de Paris.
TOME VINGT-TROISIÈME.
F. G. Levrault, Éditeur, à STRASBOURG,
et rue des Fossés M. le Prince, N." 3i, à PARIS.
Le Nokmant, rue de Seine, N.*' 8, à PARIS.
1822.
Liste des Auteurs par ordre de Matières.
Phjsitjue générale.
M. LACROIX, membre de l'Acadëmie des
Sciences et professeur au Collège de
France. ( L. )
Chimie.
M. CHEVREUL, professeur au Collège
royal de Charlemagne. C*^".)
Minéralogie et Géologie.
M. BRONGNIART, membre de l'Académie
de< Sciences, professeur à la Faculté des
Sciences. ( B. )
M. BROCHANT DE VILLIERS, membre
de l'Acidémie des Sciences. ( B. de V.)
M. DE F RANGE, membre de plusieurs
Sociétés savantes. ( D. F.)
Botanique.
M. DESFONTAINES, membre de l'Ac-idémie
des Sciences. (Desf. )
M. DE JUSSIEU, membre de l'Académie
des Sciences, prof, au Jardin du Roi. (J.)
M. MIRBEL, membre de l'Académie des
Sciences, professeur à la Faculté des
Sciences. (B. M.)
U. HENRI CASSINI , membre de la Société
pbilomatique de Paris. ( H. Ciss. )
M. LEMAN , membre de la Société philo-
mulique de Paris. (Lem.J
M. LOISELEUR DESLONGCHAMPS,
Docteur en médecine, membre de plusieurs
Sociétés savantes. ( L. D. )
M. MASSEY. ( Mass. )
M. POIRET, membre de plusieurs Sociétés
savantes et littéraires , continuateur de
l'Encyclopédie botanique. (Poir.)
M. DE TUSSAC, membre de plusieurs
Sociétés savantes, auteur de la Flore des
Antilles. (De T.)
MM. DE HUMBOLDT et RAMOND
nouveaux qu'ils ont observés dans leurs v
plus p.irticulièrcmcnt occupés. M. DE CAN
M. F. CUVIER est cbargé de la direction
articles généraux de loologie et ù l'histoire
Zoologie générale, ^natomic et
Physiologie-
M. G. CUVIER , membre et secrétaire per-
pétuel de l'Académie des Sciences, prof.au
Jardin du Roi , etc. ( G. C. ou CV. ou C.)
Mammifères.
M. GEOFFROY , membre de l'Académie des
Sciences , professeur au Jardin duRoi, ( G. )
M. DUMONT, membre de plusieurs Sociétés
savantes. ( Ca. D.)
Reptiles et Poissons.
M. DELACÉPÈDE, membre de l'Académie
des Sciences , professeur au Jardin du
Roi. (L. L.)
M. DUMERIL, membre de l'Académie de»
Sciences, professeur à l'École de méde-
cine. (C. D.)
M. CLOQUET, Docteur en médecine. (H.C)
Insectes.
M. DUMERIL , membre de l'Académie de»
Sciences, professeur à l'Ecole de médecine.
(C. D.)
Crustacés.
M. W. E. LEACH, membre de la Société
royale de Londres, Correspondant du Mu-
séum d'histoire naturelle de France.
(W. E. L.)
Mollusques, Fers et Zoophytes.
M. DE BLAINVILLE, professeur à la Faculté
des Sciences. ( De B.)
M. TURPIN, naturaliste, est cbargé de
l'exécution des dessins et de la direction de
la gravure.
Jonneront quelques articles sur les objets
oyages , ou sur les sujets dout ils se sont
DOLLE nous a fait la même pt
générale de l'ouvrage, et il coopérera aux
des mammifères. (F, C.}
DICTIONNAIRE
DES
SCIENCES NATURELLES.
lEA
IeAIEAMADOU. {Bot.) Nom donné, suivant Aubîet, par
les Créoles deCayenne, à une espèce de muscadier sauvage,
virola sehifera de cet auteur, que les naturels d'Oyapoc nom-
Bient voirouchi, et les Galibis dayapa et virola. Ses graines
donnent un suif dont on fait des chandelles dans la Guiane.
(J.)
1EBAL,EBAL (Bot.) : noms africains du chiendent des
boutiques, selon Ruellius et Mentzel. (J. )
lÈBLE (Bot.), nom vulgaire d'une espèce de sureau,
sambucus ebulus, Linn. Voyez Hièble. (L. D. )
lEIERECOU. {Bot.) Voyez Couguerecou. (J.)
lELLOO ( Orniih. ) , nom du gypaète chez les Mongols.
(Ch. D.)
lEONPALA. {Bot.) Voyez Jeonpala. (J.)
lERABOTANE. {Bot.) Voyez Hierabotane. (J.)
lERATOUNE. {Bot.) Nom grec d'une plante citée par
Clusius , dans son Hist. plant., ayant le port d'un trèfle ou
d'un lotier, des gousses que l'on peut manger avant leur
maturité, comme celles des pois ou haricots. Cet auteur ne
détermine pas l'espèce. (J. )
lERÉE. {Foss.) Dans l'exposition méthodique des genres
de l'ordre des polypiers, M. Lamouroux a établi sous ce
23. ' i
1ER
nom un geui'e nouveau , auquel il assigne les caractères sul-
vans : Pol/ypier fossile , simple, pjriforme , pédicellé ; pédicule
très -gros, cylindrique, s' évasant en masse arrondie, à surface
lisse; un peu au-dessus commencent des corps de la grosseur d'une
plume de moineau, longs, cylindriques , Jlexueux , solides, plus
nombreux et plus prononcés à mesure que l'on s'éloigne delà base,
et formant la masse de la partie supérieure du polj^pier ; sommet
tronqué , présentant la coupe horizontale des corps cylindriques ob-
servés à la circonférence.
Cet auteur dit qu'il est extrêmement difficile de pronon-
cer sur la classe à laquelle appartient ce singulier corps ; il
ne peut dire si c'est une actinie , un alcyon ou bien un po-
lypier sarcoïde actlnaire. Il croit que, si c'étoit une actinie,
les corps cylindriques en seroient les tentacules. Si ces corps
étoient des cellules ou des tubes polypeux , n'étant pas épars
sur la surface du polypier, l'ierée ne pourroil appartenir aux
alcyonées, et il le piace provisoirement parmi les polypiers
actinaires.
M. Lamouroux a donné à cette espèce le nom d'Ierée
pyriforme , et d'après la figure qui se trouve dans l'ouvrage
ci-dessus cité, pi. 78, n." 3, ce corps a quatre pouces et
demi de longueur sur trois pouces de diamètre. L'individu
qui a servi à établir les caractères du genre , ayant été roulé
par les eaux, on peut croire qu'il dépend d'une couche qut
paroît moins ancienne que le banc bleu des Vaches noires,
et qu'on trouve à Saint-Himer, près de Pont-l'tlvéque, dépar-
tement du Calvados, à Laigle et aux environs de Mortagnc ;
département de l'Orne. Cette couche, qui semble être crayeuse,
renferme une grande quantité de polypiers dcpendans de l.'i
famille des alcyonées.
Dans le supplément du premier volume de ce Diction-
naire nous avons décrit, à l'article Alcyon, page loS, une
espèce que nous rapportons à ce genre, et à laquelle nous
avons donné le nom d'alcyon changeant ; mais elle paroît
avoir beaucoup de rapport avec le genre lerée. Sa forme
n'est pas précisément la même ; mais j'ai la preuve que diffé-
rens individus qui dépendent de cette espèce sont d'une
forme plus ou moins alongée. Ceux que je possède, au lieu
de corps longs, flexueux et solides, ont leur surface supé-
IF 5
i'iéùre criblée de trous arrondis, lesquels ont pu contenir des
corps qui auroient disparu , comme il arrive souvent aux
astrées de certaines localités; ou bien les corps qu'on remar-
que dans rieréc pyriforme ne seroient peut-être qu'une
gangue moulée dans ces trous.
Au surplus je pense que ces polypiers doivent ttre distin-
gués des alcyons, et surtout de ceux qu'on a appelés figue
de mer et haliirhoé. ( D. F.)
lEUSE ou YEUSE. {Bot.) C'est une espèce de chêne,
quercus ilex , Linn. Voyez Chêne. (L. D.)
lEUZ. (Bot.) Voyez Gianzi. (J.)
IF; Taxus^ Linn. (Bot.) Genre de plantes dicotylédones,
de la famille des conifères, Juss. , et de la dioécie monadelpliic
de Linnœus, dont les principaux caractères sont les suivans:
Fleurs monoïques ou dioïques: dans les mâles, calice de plu-
sieurs écailles imbriquées; les supérieures plus grandes, op-
posées ; cinq à dix étamines ayant leurs fih'mens réunis en
colonne saillante et portant des anthères rapprochées en tête:
dans les fleurs femelles, calice comme dans les mâles ; ovaire
ovoïde , porté sur un réceptacle orbiculaire et surmonté d'un
stigmate sessile ; noix monosperme , presque entièrement re-
couverte par le réceptacle qui a pris de l'accroisscm.ent aprè?»
la fécondation , est devenu pulpeux et presque de la forme
d'une baie.
Les ifs sont des arbres à rameaux nombreux , à feuilles
simples, toujours vertes , et à fleurs axillaires. On en connoît
huit à dix espèces , dont l'une croît naturellement en Europe.
Ce sera particulièrement de celle-ci que nous traiterons
dans cet article , et nous ne dirons que quelques mots des
espèces exotiques.
If baccifère ou If commun: Taxus laecifara, Linn., Spec,
1472 ; Nouv. Duham., 1 , pag. .61 3 tab» 19; Blackw. , Herb. ,
tab. 672. Cette espèce est un arbre dont la tige, cylindrique
et très-droite, s'élève à trente ou quarante pieds de hauteur,
pu un peu plus, en se partageant latéralement en branches
nombreuses, presque verticillées, dont les dernières ramifi-
cations sont garnies de feuilles linéaires, d'un vert foncé,
trçs-rapprocliées les unes des autres , et disposées de deux
côtés opposés. Les fleurs sont axillaires, sessiles, monoïques
4 IF
ou dioïques, rouseàtres; les mâles très-nombreuses, et les fer
melles plus rares. Les fruits sont de petites noix ovoïdes ,
contenant une amande oléagineuse, et aux trois quarts en-
veloppées pur le réceptacle, qui a pris de Taccroissement, est
devenu pulpeux, duii rouge vif et a presque la forme d'une
haie, d'où l'on donne souvent le nom de baies à ces fruits.
L'if croit naturellement dans les lieux secs et froids des
montagnes de la France et de lEurope , dans le nord de l'A-
sie et dans le Canada.
L'histoire de l'if présente beaucoup de contradictions, quand
on recherche ce que les divers auteurs ont écrit sur ses pro-
priétés les uns n'en ont parlé que comme d'un arbre dont
toutes les parties étoient mal-faisantes ; les autres, au con-
traire, ont prétendu qu'il n'avoit pas de qualités nuisibles.
Théophraste, le plus ancien auteur dans leqiicl il soit ques-
tion de l'if, dit que ses feuilles sont un poison pour les che-
vaux, mais que les ruminans peuvent en manger sans en
éprouver aucun mal; et il ajoute que ses fruits, mangés par
les hommes , ne leur font de même aucun mal.
Les Gaulois , d'après le témoignage de Strabon , em-
ployoient le suc de l'if pour empoisonner leurs flèches ,
et César, dans ses Commentaires {de heîlo gallico , lib. VI),
rapporte que Cativulcus, roi des Éburoniens , se servit de
ce même suc pour s'empoisonner.
S'il faut en croire Plutarque , l'if est surtout mal -faisant
pendant qu'il est en fleur; et c'est, sans doute, parce que
Virgile croyoit aux dangereuses émanations de cet arbre
pendant sa floraison . qu'il le dit nuisible aux abeilles et qu'il
ne veut pas qu'on en plante près des maisons.
Sic tua Cyrneas fugiant examina taxas.
Eclog. IX , vers. 3o.
I^e pioprius îectis taxum sine ....
Georg., lib. IV, vers. 47-
Lucrèce fait aussi allusion aux dangereuses propriétés de
l'if dans les deux vers suivans:
Est etiam magnis Hcliconis mo/itibus arbor ^
Fions odore homitiem tetrg coiisueia necare.
ÎF 5
Dioscoride confirme tout ce que nous avons rapporté jus-
qu'à présent des propriétés mal-faisantes de l'if: selon lui , les
fruits de cet arbre donnent le flux de ventre aux hommes ,
et il ajoute que, dans la Caule N.-^rbonnoise surtout, il recèle
un venin si délétère que son ombrage suffit pour rendre ma-
lades ceux qui se reposent ou s'endorment dessous , et que
même on a en des exemples de personnes qui avoient péri par
le seul effet des émanations reçues de cette manière.
Pline dit que l'aspect de l'if est triste et de mauvais au-
gure, et il renchérit encore sur les mauvaises qualités que
lui attribue Dioscoride: car il assure d'une manière positive
que ses fruits sont vénéneux, surtout en Espagne , et que le
bois partage ces mêmes qualités délétères , des personnes étant
mortes pour avoir bu du vin qui avoit été renfermé dans des
tonneaux de bois d'if. Il ajoute d'ailleurs que quelques au-
teurs ont prétendu que les poisons qui servent à empoison-
ner les flèches avoient d'abord é;é appelés taxica, du nom
latin de l'if, taxas , et que ce n'est que par la suite que cette
dénomination fut changée en celle de toxica. Cette dernière
assertion de Pline a été réfutée par plusieurs comuienfateurs,
qui se fondent, avec raison, sur ce que Dioscoride emploie
le mot rc^mov 1 pour signifier venin ou poison, non comme
dérivé du latin, mais comme emprunté aux Barbares qui
ont coutume d'empoisonner leurs flèches et qui les nomment
toxa.
En suivant l'histoire de lif des auteurs anciens dans les
modernes, Matthiole nous apprend qu'il a traité des bergers
et des bûcherons attaqués de fièvres ardentes pour avoir
mangé des fruits d'if. J. Bauhin rapporte que des chevaux
et animaux domestiques sont morts après en avoir brouté les
feuilles. Le jésuite Schott dit que ces mêmes feuilles, jetées
dans des eaux dormantes où il y a des poissons, les étour-
dissent et les engourdissent au poiiit qu'on peut ensuite les
prendre à la main. Rai confirme aussi ce que les anciens ont
dit des dangereuses émanations de l'if, en rapportant que
les jardiniers qui étoient chargés de tondre un if très-touffu
dans le jardin de Pise , ne pouvoient résister plus d'une demi-
heure de suite à ce travail, et qu'ils étoient empêchés de le
continuer par les violentes douleurs de tête qu'ils ressentoient.
IF
On est très-persuadé en Normandie, où Ton trouve Tif com-
munément, que ses feuilles et même son bois sont vénéneux-,
et on y raconte une histoire de deux curés morts subitement
dans une chambre lambrissée en if, et que leur successeur
ne put habiter sans danger qu'après en avoir fait enlever la
fatale boiserie.
Malgré (ous les témoignages que nous venons de citer, quel-
ques auteurs n'ont pas craint d'être d'un sentiment contraire
et de révoquer en doute les propriétés mal-faisantes de Tif.
Ainsi , Suétone . parmi les anciens, rapporte que l'empereur
Claude fit publier que le suc des fruits de cet arbre étoit
l'antidote du venin de la vipère; et, parmi les modernes,
Lobel, Gbnlitsch , le continuateur delà Matière médicale de
Geoffroy , et BuUiard , se sont prononcés affirmativement
pour l'innocuité de ces fruits, et Pena , Daléchamps et Gérard
ont assuré, le dernier surtout, après en avoir fait l'expé-
rience lui-même, qu'on pouvoit impunément s'endormir à
l'ombre de Tif.
M. Rêver, dont nous parlerons encore plus bas, m'a fait
assurer que c'étoit chez, lui-même qTi'étolt arrivée l'histoire
des curés dont on attribue la mort à une poutre d'if qui se trou-
voit dans leur chambre; mais qu'ayant eu occasion d'habiter
cette même chambre, au lieu de faire retirer la poutre, il
en brava l'influence, en plaçant son lit sans rideaux sous cette
même pièce de bois , et que non-seulement il n'en mourut pas
subitement, comme ses prédécesseurs, mais encore qu'il se
porte bien à présent, plus de trente ans après.
Il seroit difficile, d'après ces autorités nombreuses et con-
tradictoires, de se prononcer pour ou contre ce qu'on doit
définitivement penser des bonnes ou mauvaises qualités de
l'if, si les expériences positives qui ont été faites, dans ces
derniers temps, sur les différentes parties de cet arbre, ne
nous mettoient à même de l'apprécier maintenant d'une ma-
nière plus certaine.
M. Percy, qui a été chirurgien en chef des armées, et .
qui est aujourd'hui membre de l'Académie françoise , a
fait, il y a trente et quelques années, des observations sui-
vies sur l'emploi des fruits de l'if à l'intérieur, et il s'est
assuré qu'ils étoient adoucissans, diurétiques cf laxatifs : qu'il
IF n
faudroit en prendre une grande quantité pour qu'ils pussent
produire un flux de ventre abondant, mais, d'ailleurs, sans
danger.
A peu prés dans le même temps que M. Percy , M. Har-
mand de Montgarny a fait connoître les expériences qu'il
avoit faites avec l'extrait et la poudre de feuilles ou de l'é-
corce de l'if; et, d'après ses expériences, ces préparations,
quand elles étoient portées à des doses un peu fortes , comme
douze grains pour l'extrait et deux gros pour la poudre ,
ont causé divers accidens, tels que la diarrhée , des nausées,
des vomissemens, des vertiges, un assoupissement, un en-
gourdissement plus ou moins long, avec la rigidité des ex_
trémités.
Le même rapporte qu'il périt une grande partie de pois-
sons dans un canal où l'on avoit jeté des racines d'if, et que
des gens qui mangèrent de ce poisson empoisonné, eurent,
pendant plusieurs jours, un dévoiement copieux, accom-
pagné de coliques. Deux faits encore , rapportés par le
même M. de Montgarny , tendent aussi à faire croire que
les vapeurs qui s'échappent de l'if sont véritablement narco-
tiques. Un chien tomboit dans une sorte d'assoupissement lé-
thargique qui duroit plusieurs heures, toutes les fois qu'il
s'endormoit sous un if très-toulTu ; et une fille de vingt-six
ans s'étant endormie un soir sous le même arbre , elle de-
meura, pendant deux jours, dans une sorte d'ivresse.
Le docteur H. Perceval , de Manchester, rapporte, dans la
Bibliothèque britannique de Juillet 1808, plusieurs observa-
tions qui prouvent l'effet vénéneux des feuilles de l'if, et
d'après lesquelles il paroit que ces feuilles sont beaucoup
plus mal-faisantes lorsqu'elles sont fraîches que lorsqu'elles
sont desséchées. Plusieurs animaux sont morts après qu'on
leur en eut fait prendre le suc exprimé pendant qu'elles
étoient dans le premier état.
Enfin, on peut conclure des expériences récentes rappor-
tées ou faites par M. le docteur Orfila, que le suc retiré
des feuilles d'if , ou l'extrait qu'on en peut préparer, sont
vénéneux. Environ neuf gros du premier, qu'on a fait avaler
à un petit chien, lui ont donné la mort: et un autre animal
de la même espèce et de moyenne taille a également suc-
8 IF
combé, quelques heures après lïnjection dans la veine jugu-
laire de quarante grains de l'extrait aqueux des feuilles, dis-
sous dans une demi-once d'eau.
Pour résumer tout ce que nous avons dit jusqu'à présent
sur les propriétés de l'if, nous croyons que les expériences
des modernes confirment assez ce que les anciens avoient dit
contre cet arbre, pour qu'on doive le ranger au nombre des
espèces végétales suspectes et mal-faisantes.
Point de doute que le suc des feuilles et leur extrait ne soient
vénéneux à une dose un peu forte , et que dans les pays plus
chauds que le nord de la France et l'Angleterre, comme en
Grèce, en Italie, en Espagne, ce suc ne puisse être encore
plus délétère ; et que l'ombre des ifs, qui, le plus souvent,
n'a fait éprouver aucun mal à ceux qui s'y étoient exposés
dans notre pays ou en Angleterre , peut très-bien , dans des
climats plus méridionaux, avoir causé des assoupissemens lé-
thargiques, qui quelquefois même auront été suivis de la
mort.
Quant aux fruits de l'if, ils paroissent être exempts des
mauvaises qualités propres aux feuilles, au bois et àl'écorce,
et leur pulpe devient seulemenl laxative lorsque , comme
celle de beaucoup d'autres fruits , elle est prise en trop
grande quantité. L'amande contenue dans la petite noix,
qui est le véritable fruit de l'if, a une saveur agréable, ana-
logue à celle de la noisette : elle fournit par expression une
huile qu'on peut employer pour l'assaisonnement des alimens
et autres usages économiques; mais on n'est pas dans l'habi-
tude de faire l'extraction de cette huile.
Le bois d'if est d'un rouge brun, plus ou moins veiné :
c'est le plus pesant des bois de l'Europe après le buis; le pied
cube pèse, vert, quatre-vingts livres neuf onces, et lorsqu'il
est parfaitement sec, soixante -une livres sept à huit onces.
Il est très- dur et presque incorruptible; il a le grain fin,
serré , se travaille facilement et est susceptible de recevoir
un très-beau poli. Varennes de Fenille a trouvé le moyen
de lui donner une couleur d'un pourpre violet assez vif, qui le
rapproche beaucoup de la beauté de certainsbois des Indes. Ce
moyen consiste à en faire immerger des tablettes très-minces
dans l'eau d'unl)assin pendant quelques mois: cela développe
IF 9
sa partie colorante au point qu'elle pénètre tout le bois assez
profondément pour que Foulil ne l'enlève pas dans le travail
qui suit le placage. Cette opération réussit encore plus promp-
tement lorsque le bois a toute sa sève au moment où il est
plongé dans l'eau.
Les menuisiers, les ébénistes, les luthiers, les tourneurs,
recherchent le bois d'if; il est excellent pour tous les ou-
vrages qui exigent de la force et de la durée. On l'em-
ploie pour les vis, les dents d'engrenage des roues de mou-
lins , les essieux de voitures. On en fait de très-beaux
meubles , des vases , des tabatières , des étuis ; on en a vu des
ouvrages de marqueterie et de sculpture conservés sans au-
cune vermoulure , quoiqu'ils fussent faits depuis plus de cinq
cents ans. Les anciens se servoient de ses branches pour faire
des arcs, parce que son bois joint aux autres qualités dont
nous avons déjà parlé, une grande élasticité. Virgile a dit,
en parlant de cet usage ,
Ityrceos taxi torquenfur in arciis.
Gcorf?., lib. II, V. 448.
Aujourd'hui, les habitans des Alpes font, avec les branches
de cet arbre, des cercles et des échalas qui durent très-long-
temps. Pallas dit qu'en Colchide et en Géorgie qw se sert
aussi de ces échalas pour les vignes, et qu'ils sont presque
incorruptibles.
Chez les Romains , l'if étoit regardé, ainsi que nous l'avons
dit plus haut, comme un arbre triste et de mauvais augure,
et ses rameaux servoient à faire des couronnes pour les cé-
rémonies lugubres ; c'est à quoi Statius fait allusion dans les
vei's suivans :
En iaxea marcef
Sylva comis , hilaresque hederas plorata cupressus
Excluait ramis.
La verdure continuelle de l'if a été regardée comme un
symbole de l'immortalité ; elle Tavoit fait consacrer chez nos
ancêtres aux plantations dans les cimetières : aujourd'hui le
cyprès est plus particulièrement destiné à ombrager les tom-
beaux ; cependant, dans quelques cantons de la Suisse, en
Angleterre et surtout en Ecosse , on a conservé l'usage de
placer des ifs dans les cimetières.
Il y a cent ans et plus, l'if étoit très -multiplié dans les
parcs et dans les grands jardins d'agrément : docile à la taille ,
il prenoit, sous les ciseaux du jardinier, toutes les formes
qu'on vouloit lui donner. Le plus souvent on le tailloit en
boules, en pyramides , en palissades , en portiques disposés
avec symétrie dans les allées des parcs et des parterres; il fut
même un temps où on lui faisoit prendre les formes les plus
bizarres et les plus fantastiques. On a vu des ifs taillés de
manière à représenter des saints et des anges, des dieux et
des héros de la fable, quelquefois des animaux et des vases.
Aujourd'hui la mode ridicule de défigurer l'if est passée, de-
puis que les jardins paysagers, dits jardins anglois, sont de-
venus le goût dominant. Dans ces derniers, on ne donne
plus de plsce qu'à un petit nombre de ces arbres, que l'on
groupe avec les autres arbres verts , en les laissant croître en
liberté.
L'if se multiplie de graines, de boutures et de marcottes.
Le premier moyen est préférable, parce que les arbres qui
en proviennent s'élèvent plus droits et forment une tête plus
touffue et plus régulière. Ceux, au contraire, qui sont ve-
nus de boutures ou de marcottes, sont sujets à se courber
d'un côté ou de l'autre, et ne sont jamais aussi vigoureux.
Il faut semer les graines de l'if avec la pulpe qui les en-
toure et aussitôt qu'elles sont mûres ; lorsqu'on attend au
printemps, elles ne germent que l'année d'après. On sème
dans un terrain exposé au nord, un peu ombragé, et on
recouvre les graines d'un demi-pouce de terreau de bruyère.
Toutes les graines ne lèvent pas la première année; il y en
a qui ne poussent que la deuxième et même la troisième.
A la. fin de l'automne de la deuxième année du semis, on
peut mettre les jeunes ifs en pépinière, jusqu'à ce qu'on les
place à demeure, ce que l'on peut faire depuis l'âge de
quatre jusqu'à six ans.
L'if n'est point délicat : il s'accommode de presque toutes
les espèces de terrains; mais il se plaît mieux à l'ombre qu'au
grand soleil. Il craint peu le froid . et depuis l'hiver de 1709,
le plus rigoureux dont on ait mémoire en France et qui en
a endommagé plusieurs , on en a rarement vu qui aient été
maltraités par le froid.
IF
L'if vit très -long -temps et acquiert avec les années une
grosseur coiossale. Il existe, dans le département de l'Eure ,
plusieurs ifs remarquables par leur grosseur et leur vétusté.
M. Rêver, correspondant de l'Académie des inscriptions et
belles-lettres de Rouen, rapporte (dans un ouvrage ayant
pour titre : Voyage des élèves de l'école centrale d'Evreux
dans le département de l'Eure) que l'on voit dans la com-
mune de FouUebec, à deux lieues de Pont-Audemer , un de
ces arbres qui a vingt- un pieds de pourtour. Sa grosseur
prodigieuse et sa solidité extraordinaire suffisent pour sou-
tenir le chœur de l'église à laquelle il est adossé , et qui
s'écrouleroit dans un profond ravin si l'arbre ne lui prêtoit
pas son appui. . . . Dans le feuillage de ce vieux if nichent
une foule d'oiseaux, tels que fauvettes, merles et grives,
qui dévorent avec avidité les baies extrêmement douces que
l'arbre produit encore en abondance.
M. Le Prévost, membre de l'Académie de Rouen, qui cul-
tive avec succès les sciences naturelles, et qui en mtme
temps s'occupe beaucoup des antiquités et des choses cu-
rieuses qu'on trouve dans la ci-devant Normandie, en m"an-
nonçant que l'if de Foullebec existe encore aujourd'hui, à
peu près tel qu'il a été décrit, il y a quelques années, par
M. Rêver, m'écrit que l'if est indigène dans plusieurs loca-
lités du département de l'Eure, et qu'on voit dans le cime-
tière de Boisney, arrondissement de Bernay , deux de ces
arbres placés à quelques pas de distance, dont l'un a vingt
et l'autre seize pieds de tour , et qu'il n'est pas rare d'en
trouver de dimensions à peu près analogues dans le même
département.
Mais ces ifs de l'ancienne Normandie paroîtront beaucoup
moins étonnans quand on saura qu'il en existe un à Fortin-
gall, en Ecosse, dont la grosseur a beaucoup plus du double.
Dans ce pays, assure-t-on , on montre aux voyageurs un if
qui a cinquante-trois pieds (mesure angloise) de circonfé-
rence. Il est maintenant ouvert et en assez mauvais état ; un
cimetière est à côté : les processions funèbres passent par
l'ouverture du tronc. Quelques-unes de ses branches sont
encore vertes , et beaucoup de voyageurs en emportent des
morceauxj comme des reliques.
IF
Ce^ arbres doivent êfre fort âgés, car l'if croît très-lente-
ment : on a compté cent cinquante couches annuelles sur un
tronc qui n'avoit que treize pouces de diamètre, et deux
cent quatre-vingts sur un autre qui, mesuré de même, n'avoit
que vingt pouces; ce qui ne suppose guère plus de cinq pieds
de circonféiencc pour un arbre de deux cent quatre-vingts
ans; et en prenant ce dernier pour terme de comparaison,
rif de Foullebec auroit onze à douze cents ans d'ancienneté,
et celui de Fortingall en auroit peut-être près de trois mille.
On aura peine à croire que ces arbres puissent dater d'une
antiquité aussi reculée, et il est possible d'ailleurs que la
nature du terrain et la vigueur particulière à certains in-
dividus hâtent quelquefois ieur croissance : ainsi, parmi plu-
sieurs ifs qui ex'stent au Jarclin du Roi à Paris, au lieu ap-
pelé les petites Buttes , et qui ptissent pour avoir été plantés
peu après rétablissement de ce jardin, en i635, ce qui leur
donne environ cent quatre-vingts ans d'âge, le plus gros
de ces arbres, mesuré à hauteur d'homme, a cinq pieds
deux pouces de circonférence. En supputant l'âge des ifs
de Foullebec et de Forting;ill d'après celui du Jardin du Roi,
le premier auroit environ huit cents et le second dix- huit
cents à deux mille ans.
Jusqu'à présent il n'a été question que de l'if commun;
il nous reste à parler des espèces exotiques qui sont culti-
vées maintenant dans nos jardins.
If nucifëre : Taxas nucifera , Linn. , Spec. 1472; Gaertn.,
Fruct., fab. 91 , fig. 6. C'est un arbre élevé, branchu, à feuil-
lage élégant, consistant en feuilles deux fois ailées, ressem-
blant à de petits rameaux, et composées d'une grande quan-
tité de folioles linéaires , alternes, presque imbriquées, d'un
vert glauque. Ses fruits sont des noix ovales-aiguës, lisses,
de la grosseur d'une olive , entourées d'une pulpe verdâtre,
fibreuse, et contenant une amande oléagineuse. Cette espèce
croît naturellement au Japon. Dans ce pays, on mange les
amandes de ses fruits, que l'on préfère lorsqu'elles sont sè-
ches, parce qu'elles sont moins âpres et meilleures que fraî-
ches. On en relire par expression une huile dont on fait
usage dans les cuisines. L'if nucifère pourra passer l'hiver
en pleine terre dans nos départemens du midi; à Paris et
IFL i5
dans le nord , il faut le rentrer dans l'orangerie pendant l'hi-
ver. Comme il ne fructifie pas, on le multiplie de marcottes
et de boutures.
If verïicillé : Taxus verticillata, Thunb., Flor. Jap., 276;
Lamk. , Dict. encycl. , tom. 5 , pag. aSo. Arbre de quinze à
vingt pieds , dont les rameaux nombreux , serrés et plus
courts à mesure qu'ils approchent du sommet, forment une
cime touffue, conique, n peu près semblable à celle du cy-
près. Ses feuilles sont linéaires, obtuses, arquées en faux,
glabres, vertes et convexes en-dessus, pâles et concaves en-
dessous, avec deux lignes saillantes. Les ('euilles sont de la
longueur du doigt, sessiles et verticillées environ huit en-
semble.
Cette espèce croît naturellement au Japon ; nous ne la
possédons en France que depuis quatre ans. On dit qu'en
Angleterre on la cultive en pleine terre. Comme elle est
encore fort rare, on la rentre dans l'orangerie pendant l'hi-
ver. Elle peut se multiplier de boutures. Au Japon, on se
sert de son bois, qui est blanc, léger et durable, pour faire
des boites, des coffrets et autres petits ustensiles; plongé
dans l'eau chaude, il exhale une odeur agréable. Voyez Hi.
(L. D.)
IF (ConchyL), nom vulgaire d'une espèce de cérite, C.
aculeatum , Murex aculeatus. (De B.)
IFLOGE, I/loga. (Bot.) [Corymbifères , Juss. = Syngénésie
polygamie superflue, Linn. ] Ce genre de plantes, que nous
avons proposé dans le Bulletin des sciences de Septembre
1819, appartient à l'ordre des s^nanthérées , à notre tribu
naturelle des inulées , et à la section des inulées-gi'abhaliées.
Voici les caractères génériques que nous avons observés sur
des échantillons secs, dans les hei'biers de MM. Desfontaines
et de Jussieu.
Calathide subcylindracée, discoïde : disque pîuriflorc , ré-
gulariflore,androgyninore ; couronne pluriseriée, tubuliflore,
féminiflore. Péricline un peu supérieur aux fleurs, formé de
squames subunisériées , à peu près égales, appliquées, con-.
caves, ovales-lancéolées, acuminées , coriaces-scarieuses ,
dorées, inappendiculées. Clinanthe cylindrique, court, inap-
pendiculé au sommet qui est occupé par le disque , et garni
^4 IFL
du reste de squameiles imbriquées , un peu supérieures
aux fleurs, et absolument semblables aux squames du péri-
cline. Ovaires oblongs, glabres; aigrettes du disque compo-
sées de squamellules unisériées , égales, caduques, filiformes,
nues inférieurement et barbellées supérieurement; aigrettes
de la couronne nulles. Corolles de la couronne tubuleuses,
longues , grêles , filiformes.
Les calathides, rapprochées pour la plupart en capitules
très- irréguliers, sont séparées les unes des autres par des
bractées.
Ifloge de Desfontaines : Tjloga Fontanesii , H. Cass. ; Gna-'
phalium caulijlorum , Desf. , Flor. Atl., tom. II, pag. 267. C'est
une plante herbacée, annuelle, tomenteuse , blanchâtre,
longue d'un à trois pouces : sa racine est longue, perpendi-
culaire, filiforme, tortueuse; la tige se divise à sa base en
plusieurs rameaux simples, filiformes, ceux du centre dres-
sés, les extérieurs couchés à leur base; les feuilles sont alter-
nes , longues de six à huit lignes , subulées ; les calathides sont
petites, sessiles, axillaires et terminales, éparses tout le long
delà tige. Cette plante a été trouvée par M. Desfontaines,
dans les sables du désert, près Elhamraah , en Barbarie, où
elle fleurit en hiver.
Vifloga ne peut être convenablement attribué, ni au genre
Gnaphalium, danslequel on Ta confondu jusqu'à présent, ni à
notre genre Gifola , auquel on pourroit être tenté de le rap-
porter d'après nos observations sur ses caractères génériques,
et il doit constituer indubitablement un genre particulier.
En efi'et, il diffère du gnaphalium par le clinanthe squamelli-
fère , et par l'aigrette plumeuse dans le disque, nulle dans
la couronne; il diffère du gifola par l'aigrette plumeuse,
ainsi que par les squames et les squameiles scarieuses et colo-
rées. (Voyez nos articles Gifole , tom. XVIII, pag. 55i, et
Gnaphale, tom. XIX, pag. 11 5.)
Les squames du péricline et les squameiles du clinanthe
sont, chez toutes les synanthérées , des bractées de la même
nature et attachées sur le même axe. Le seul moyen de les
dis ingtier méthodiquement dans tous les cas, est d'attribuci'
au péricline les bractées qui se trouvent placées en dehors
ou au -dessous des fleurs les plus extérieures delà calathide,
IGI i5
et d'attribuer au clinanthe les bractées qui se trouvent
placées en dedans ou au-dessus de ces mêmes fleurs : c'est
pourquoi nous disons que ^ifloga a un péricline unisérié, et
un clinanthe squaniellifère. Les botanistes qui n'adoptent pas
la règle dont il s'agit, devront dire que le péricîine est for-
mé de squames imbriquées, entre lesquelles sont cachées les
fleurs femelles, et que le clinanthe portant les fleurs herma-
phrodites est nu. Cette méthode de description est sans
doute plus commode et plus conforme aux apparences exté-
rieures ; mais elle nous paroît moins exacte et moins régu-
lière que la nôtre. (H. Cass.)
IFVETEAU. (Bot.) Dans quelques cantons on donne ce
nom à rif commun, ou à un ieune if. ( L. D. )
IGARSOK. (Ichtlijol.) Au Groenland , on appelle ainsi le
cotte quatre -cornes. Voyez Cotte. (H. C.)
IGCIEGA. [Bot.) Dans le Recueil abrégé des voyages il est
question d'un arbre de ce nom dans le lirrsil , menlionné
anciennement par de Laet , qui laisse suinter de son écorce
une espèce de résine ou d'encens , utile en application sur
les parties affectées d'humeurs froides , et que l'on regarde
comme une espèce de mastic. Un autre arbre nommé iVfaigcica,
c'est-à-dire , mastic pierreux , donne une résine si dure et
si transparente , qu'on la prendroit pour du verre. Il paroît
que ces arbres sont les mêmes que Vicicariba, qui fournit la
résine Icica. Voyez ces mots. (J. )
IGE, IGI. (Bot.) Voyez Ibara. (J.)
IGEL (Mamm.), nom allemand de notre hérisson. (F. C)
IGEL-KOTT [Mamm.], nom que les Suédois donnent avi
hérisson. (F. C.)
IGGLING. (Ichthjol.) En Dalécarlie, on a donné ce nom
au cjprinus apJi^a de Linnœus. Voyez Kime. (H. C.)
IGHUCAMICI. {Bot.) Dans le Recueil abrégé des voyages
il est question d'un arbre de ce nom qui se trouve aux en-
virons de Saint- Vincent , dans le Brésil, dont le fruit, assez
semblable à un coing, est un puissant remède contre la dys-
senterie. (J.)
IGILMA. (Ornith,) Cet oiseau du Kamtschatka, qui porte
aussi le nom de monichagatka , est Vanas arctica cirr]iata de
Steller, et l'aica cirrhata de Gmeli^ et de Latham. (Ch, D.)
^^ IGL
IGLICZE {Bot.) , nom donné , dans la Hongrie , à un genêt
épineux, suivant Clusius. (J. )
JGLITE ou IGLOITE. ( Min. ) Ce sont les noms qu'on a
donnés à quelques variétés d'arragonite cristallisées en pyra-
mides alongées en forme d'aiguilles, qui viennent d'Iglo en
Hongrie. Voyez Chaux carboixatée arragonite, tom. VIII,
pag. 261. (B.)
IGNAME, Dioscorea. (Bot.) Genre de plantes monocoly-
lédones, à fleurs incomplètes, dioïques, de la famille des as-
paraginées , de la dioécie hexandrie de Linnasus , oBi'ant pour
caractère essentiel : Des fleurs dioïques, pourvues d'un ca-
lice campanule, à six divisions; point de corolle; six éta-
mines : dans les fleurs femelles, un ovaire supérieur, trigone,
surmonté de trois styles; une capsule triangulaire , à trois
loges; deux semences membraneuses dans chaque loge.
Ce genre, aujourd'hui très-nombreux en espèces, ren-
ferme des plantes grimpantes, la plupart pourvues d'une ra-
cine tubéreuse et comestible ; les tiges sont herbacées ou un
peu ligneuses ; les feuilles alternes , quelquefois opposées ;
les fleurs petites , disposées sur des grappes axillaires. Je
parlerai des espèces les plus remarquables , particulièrement
de celles qui peuvent fournir à l'homme un aliment sain et
agréable.
Igname ailée : Dioscorea alata , Linn. ; Katsjii-lielengu ,
Rheed., Malah., 7, tab. 58; Ubium vulgare , Rumph., Ainb. ,
6, tab. 120, 121 , 122. Cette plante intéressante produit une
grosse racine tubéreuse, longue de deux à trois pieds et plus,
noirâtre à l'extérieur, blanche ou rougeâtre en dedans, un
peu acre ou visqueuse ; de formes différentes , selon les va-
riétés : tantôt digitécs ou palmées, tantôt contournées en plis
de serpent, ainsi qu'on les voit représentées dans les figures
que j'ai citées de Rumph. Ces racines pèsent quelquefois de
trente à quarante livres. Ses tiges sont herbacées, grimpantes,
longues d'environ six pieds et plus, quadrangulaires, munies
sur leurs angles de membranes rougeàtres , crépues et cou-
rantes, garnies de feuilles opposées, pétiolées , en cœur,
acuminées, lisses, vertes, traversées par sept nervures; les
fleurs jaunâtres et petites , disposées en grappes axillaires , vers
le commet des tiges : des bulbes scssiles croissent souvent à la
IGN 17
paMîe supérieure des tiges et produisent de nouveaux indi-
vidus.
Cette espèce croît naturellement dans les Indes orientales,
entre les tropiques; elle est aujourd'hui cultivée dans les
deux Indes, à cause de sa grande utilité, en x\frique et
même dans les mers du Sud. Cette culture est irès-simple :
elle consiste à labourer la terre au commencement de la sai-
son des pluies, à y introduire des morceaux de racines con-
servées à cet effet, auxquels il suffit qu'il y ait un œil pour
produire de nouveaux pieds. On abandonne ensuite la plan-
tation à la nature, jusqu'à la saison sèche, pendant laquelle
on consomme ces racines, en les arrachant à mesure du be-
soin. Elles varient dans leurs couleurs, leur saveur et leur
forme, selon les localités : elles germent, même exposées à
l'air, avec tant de facilité, qu'il est difficile de les conserver
long-temps, à moins qu'elles ne soient tenues dans des en-
droits très-secs. Elles fournissent un aliment très-sain, d'une
saveur assez douce; mais elles ont besoin de quelque assaison-
nement pour les rendre plus agréables. On les manf^e rôties
sous la cendre ou simplement cuites à l'eau; elles remplacent
le pain : on en fait encore des bouillies agréables et autres
préparations alimentaires.
Igname élevée : Dioscorea altissima , Lamk. , Encyclop. ,
n.° 6 ; Burm. , Amer., tab. 117, fig. 2; Plum., Spec, 1, et
Mss., vol. 3, tab. 144. Cette espèce croît à la Martinique.
Elle est pourvue d'une racine noueuse, géniculée , garnie de
fibres ; il s'en élève une tige cylindrique , presque ligneuse,
verdâtre , noueuse, qui monte très-haut, en grimpant sur les
arbres , divisée en un grand nombre de rameaux étalés , longs ,
fort menus : les feuilles sont pétiolées, opposées, en cœur,
acuminées, à sept nervures, larges de deux pouces, et un
peu plus longues; les fleurs petites, verdàtres , campanulées ,
disposées en grappes alongécs , opposées, grêles, axilhiires
et pendantes.
Igname DU Japon : Dioscorea japonica , Thunb., Flor.Jap.,
pag. i5i; Dsojo , vulgo Jamma-imo , KsBmpf. , Aii:er,, 828.
Ses racines sont tubéreuses : elles produisent une- tige fili-
forme , anguleuse , glabre et grimpante , garnie de feuilles
opposées, pétiolées, oblongues , en cœur, acuminées, eu-
23,
^8 lGi\
tiéres, longues d'un pouce, réticulées, k neuf nervures; les
pétioles anguleux, presque de la longœur des feuilles; les
Heurs disposées en épis axillaires , solitaires ou géminés ,
plus longs que les feuilles. Cette plante croît au Japon. On
mange ses racines cuites et coupées par morceaux.
Igname a sept lobes : Dioscorea septemloba, Thunb. , Flor.
Jap., pag. 1Z19. Cette plante a une tige cylindrique et grim-
pante , garnie de feuilles alternes, pétiolées, en cœur, gla-
bres à leurs deux faces , à sept lobes anguleux ; celui du mi-
lieu très-grand et acuminé, à sept nervures, longues d'envi-
ron quatre pouces et aussi larges: les fleurs petites, disposées
sur des grappes axillaires ; elles produisent des capsules ovales ,
triangulaires; à angles ailés, échancrés. Cette plante croît au
Japon. La Dioscorea quinquelola, Thunb., l, c. ; Kai , vulgo
Tokoro, Kasmpf. , Aman., 827, diffère de la précédente par
ses feuilles supérieures à cinq et trois lobes, à neuf nervures :
les grappes sont axillaires; celles des individus mâles presque
paniculées , fort grêles.
Igname velue : Dioscorea villosa , Linn. ; Pluk. , Amnlth. ,
lab. SyS, fig. 5. Cette espèce, originaire de la Virginie et de
ïa Floride, que l'on cultive au Jardin du Roi, a des tiges
grimpantes; des feuilles plus souvent glabres que pubescentes,
ovales, élargies, à peine écliancrées; les fleurs alternes , ses-
siles, distantes, ou quelquefois réunies plusieurs ensemble,
d'un blanc uu peu jaunâtre , disposées en grappes étalées ,
paniculées , au moins une fois plus longues que les feuilles.
Igname NUMMULAiRE : Dïoscorea nummularia , Lamk. , Encycl.;
Vbium nummularium, Rumph. , Amh., 5 , tab 162. Ses racines,
d'une grosseur médiocre , sont d'abord charnues et tubercu-
lées; elles deviennent ensuite dures, presque ligneuses : ses
tiges sont grimpantes , tenaces , longues et rameuses , garnies à
leur base de piquans très-nombreux , et de feuilles opposées,
glabres, en cœur, mucronées, à trois ou cinq nervures : les
fleurs disposées en grappes axillaires, opposées; celles des in-
dividus mâles ramifiées comme par verlicilles : les capsules
courtes, plus larges que longues, à trois ailes arrondies ; elles
offrent l'apparence de petites pièces de monnoie. Cette plante
croit aux îles MoJuques, dans les bois, sur le bord des ri-
vières. Les cochons sont très -avides des racines de cette
IGN 19
igname , quaad elles sont jeunes et tendres : les naturels du
pays font avec les tiges et les rameaux des liens très-solides.
Il en découle , surtout dans les temps pluvieux , un suc caus-
tique, qui corrode la peau.
Igname DE Cayenne : Dioscorea cayennensis , Lamk., Encycl,
Cette espèce pousse des tiges grêles , herbacées , grim-
pantes, garnies de feuilles alternes, pétiolées , hastées en
cœur, glabres, à cinq ou sept nervures, tronquées à leur
hase, avec deux oreillettes courtes, un peu divergentes. Les
grappes sont axillaires , solitaires , très-simples : leur calice
a trois folioles une fois plus petites et plus aiguës que les
trois intérieures.
Igname a racines blanches : Dioscorea ehurnea , Lour. , FI.
Cochin. , 2, pag. 767; AnKappa-helengu , Rheed., Hort.malab.,
7, tab. 5o ? Cette plante a des racines verticales, pourvues
d'une ou de deux bulbes assez semblables, par leur forme et
leur grandeur, à des dents d'éléphant, longues de trois pieds,
un peu courbées: elles produisent des tiges grimpantes , li-
gneuses , très-longues; les rameaux quadrangulaires, ainsi que
les pétioles; les feuilles glabres, alternes, en cœur, à sept
nervures; les fleurs hermaphrodites, disposées en grappes
alongées, latérales, très-simples; les trois folioles intérieures
du calice ovales, jaunâtres, charnues. Le fruit consiste en une
capsule oblongue , ovale , à trois angles très-saillans. Cette
plante croît à la Cochinchine; on l'y cultive à cause de ses
racines, dont on fait le même usage que de celle de l'igname
ailée. Elles fournissent un aliment assez recherché. ( Poir. )
IGNAMUS. {Bot.) Voyez Imhame. (J.)
IGNARUCU {Erpétol.) , nom brésilien de I'Iguane. Voyez
ce mot. (H. C.)
IGNATIA. (Bot.) Genre de Linnaeus fils, désignant l'arbre
delà fève de Saint-Ignace, qui diffère du vomiquier, strych-
nos , par son fruit pyriforme , ligneux, rempli de graines
anguleuses en divers sens , et non orbiculaires comme dans
les autres. Il nous a paru que ce dernier caractère n'étoit
pas suffisant pour séparer ces deux genres : cependant Lou-
reiro fait aussi de Vignatia un genre sous le nom de Ignatiana,
Voyez VoMiyuE. ( J. )
IGJMAVUS. {Mamm.) Ce nom latin , qui signifie paresseux.
'^0 IGN
a été donné aux bradypes par les anciens naturalistes qui
ont écrit sur les productions de l'Amérique méridionale.
(Dem.)
IGNEOULITI. {Bol.) Nom caraïbe d'un mélastome de
Fherbier de Surian , qui est le melastoma ciliata de M. de
Lamarck , et plus récemment le rhexia inconstans de Vahl. (J.)
IGNIARIA. (Bot.) Césalpin, selon Adanson , désigne ainsi
les champignons subéreux, qu'il nomme encore /uragi igniarii
et EscA. Voyez ce dernier mot. (Lem.)
IGNIS SYLVESTRIS, FEU SAUVAGE. (Bot.) C'est le nom
que Césalpin donne au clathrus cancellatus , champignon cu-
rieux par sa structure treillagée et par sa couleur d'un rouge
de feu. Voyez Clathrus. (Lem.)
IGNITION et INFLAMMATION. {Chim.) Ces mots s'ap-
pliquent à deux phénomènes, où des corps deviennent lumi-
neux par l'acte de leur combinaison avec d'autres corps;
mais il y a cette différence , que le premier s'applique à
un corps qui est tixe et qui reste fixe pendant la combi-
naison, et le second s'applique aux corps qui produisent de
la flamme, parce qu'ils sont volatiles, ou que la combinaison
qu'ils forment jouit de cette propriété. (Ch.)
IGOANA {ErpétoL) , nom que les habitans de Saint-Do-
mingue , selon Hernandez, donnoient à I'Iguane. Voyez ce
mot. (H. C.)
IGOUINGOUM. {Ornilli.) Ce nom kamtschadale est donné
par Kraschcninnikow comme désignant une espèce de ca-
nard. (Ch. D.)
IGOUKOUNGOUKOU {Omith.) , nom qu'une espèce de
canard porte au Ramtschatka. (Ch. D.)
IGTAIGCICA. (Bot.) Voyez Igciega. (J.)
IGUANE , Iguana. {ErpétoL) Les naturalistes ont donné ce
nom à un genre de reptiles de Tordre des sauriens et de la
famille des eumérodes. Ce genre est distingué par les carac-
tères suivans :
Doigts arrondis , séparés les uns des autres , non opposables ;
corps et queue couverts de petites écailles imbriquées ; un goitre
pectine , comprimé et pendant sous la gorge; tout le long du dos,
une rangée d'' épines, ou plutôt d'écaillés redressées , comprimées
et pointues; tête couverte de plaques; une rangée de tubercules
IGU ai
poreux sur les cuisses; une rangée de dents comprimées , triangu-
laires, à tranchant dentelé à chaque mâchoire; deux petites ran~
gées de dents au bord postérieur du palais ; queue sans épines;
Jlancs simples; langue charnue, échancré'' au sommet.
A l'aide de ces notes et du tableau que nous avons donné
à l'article Eumérodes, il devient très-facile de distinguer les
Iguanes des Caméléons , qui ont les doigts opposables et
réunis jusqu'aux ongles; des Stellions , qui ont la queue
épineuse ; des Lézards et des Agames , qui n'ont point de
goitre sous la gorge ; des Drarons , qui ont les flancs garnis
d'une membrane en forme d'ailes; des Anolis et des Geckos,
qui ont les doigts aplatis en -dessous. (Voyez ces différens
mots, et Eumérodes et Iguaniens.)
Le mot iguane est originaire de Saint-Domingue. (Voyez
Igoana et Leguan. )
Les reptiles que le plus grand nombre des naturalistes
ont Jusqu'à présent regardés comme devant appartenir au
genre des iguanes, sont assez nombreux; mais des observa-
teurs modernes, après les avoir examinés et comparés avec
plus d'attention que leurs prédécesseurs, en ont reporté
plusieurs parmi les agames, et ont fait des genres à part du
basilic et de l'iguane marbré. Les espèces principales que ce
genre renferme aujourd'hui sont les suivantes.
L'l»;uANE ORDINAIRE d'Amérique : Iguana tuberculata , Lau-
renti; Lacerta iguana , Linnseus. Dos bleu , changeant en vert
et en violet, piqueté de noir; ventre plus pâle; cinq doigts
à chaque pied; membres robustes et alongés ; queue un peu
comprimée sur les côtés; de grandes épines dorsales; une
grande plaque ronde sous le tympan, à l'angle des mâchoires:
des écailles pyramidales éparses parmi les autres sur les côtés
du COU; bord antérieur du goitre profondément pectine-
Taille de quatre à cinq pieds.
Ce reptile est assez commun dans toute l'Amérique chaude,.
où il se tient dans les bois, aux environs des rivières et des
sources d'eau vive, se tenant la plupart du temps sur les ar-
bres, allant quelquefois à l'eau , et se nourrissant de fruits, de
graines et de feuilles. Sans être ni venimeuse ni dangereuse,
sa morsure est extrêmement douloureuse, et, lorsqu'il est ea
colère , le goitre qu'il a sous la gorge s'enfle et s'étend;>.
r
«^ IGU
L'iguane a la vie très-dure et résiste fort bien aux coups
de bâton ; aussi le chasse-t-on avec l'arc ou le fusil.
Les femelles sont plus petites que les mâles, mais leurs
couleurs sont beaucoup plus éclatantes. Elles pondent dans
le sable des œufs gros comme ceux des pigeons, mais un peu
plus alongés et d'égale grosseur par les deux bouts. Ces œufs
ont la coque blanche , unie et molle ; ils sont totalement
remplis par du jaune et n'ont, pour ainsi dire, pas d'al-
bumen. Ils ne durcissent jamais au feu ; ils deviennent seule-
ment un peu pâteux ; mais ils n'en sont pas moins d'une
saveur fort agréable, et à Surinam et dans la Guiane on les
mange habituellement. Une seule femelle en pond quelque-
fois jusqu'à six douzaines.
La chair de l'iguane passe aussi pour délicieuse et est fort
estimée dans toute l'Amérique chaude. Elle est blanche et
délicate. Beaucoup de personnes néanmoins la regardent
comme mal-saine, surtout pour les individus entachés d'un
vice vénérien : on prétend en effet que, chez ceux-ci, elle
occasionne le retour des douleurs ostéocopcs. A Paramaribo
elle se vend fort cher aux gourmets.
Pison, et plusieurs des anciens voyageurs en Amérique,
ont vanté les vertus du bézoard d'iguane, pierre qui, disent-
ils , se forme dans l'estomac ou le crâne de cet animal. Mais
aujourd'hui cette substance est tombée dans le plus aîfsolu
discrédit aux yeux des médecins.
L'Iguane ardoisé; Iguana ccerulea , Daudin. D'un bleu vio-
làtre uniforme, plus pâle en-dessous ; la crête pectinéedu dos
moins élevée que dans l'espèce précédente ; un trait blan-
châtre oblique sur l'épaule , comme dans l'iguane ordinaire ;
les écailles pyramidales des côtés du cou disposées par rangées
longitudinales. Longueur totale de trois pieds seulement.
Ce reptile habite les mêujes lieux que l'iguane ordinaire,
et n'est peut-être, ainsi que le pense M. Cuvier, qu'une va-
riété d'âge ou de sexe de celui-ci. Séba , qui paroît l'avoir fait
Êgurer à la pi. 96 , fig. 4 , du tome 1 , de son bel ouvrage , le
fait venir de l'île Formose. Daudin en possédoit un individu
dans sa collection ; M. Alex. Brongniart en a un dans la
sienne.
L'Iguane a col nu, Cuvier; Iguana delicatissima, Laurent!»
IGU as
il ressemble à l'iguane ordinaire, surtout par les épines dor-
sales; mais il n'a point la grande plaque à l'angle de la mâ-
choire, ni les tubercules épars qu'offre celui-ci sur les côtés
du cou. Le dessous du crâne est garni de plaques bombées;
le goitre est médiocre et non pectine.
Laurent! , qui a trouvé cet animal dans la collection du
comte de Turn , dit qu'il vient des Indes.
L'Iguane cornu de Saint-Domingue; Iguana cornuta , Lacé-
pède. Assez semblable à l'iguane ordinaire et encore plus à
l'espèce précédente ; une pointe conique osseuse entre les
yeux; deux écailles relevées sur les narines ; point de grande
plaque à l'angle de la mâchoire , ni de tubercules sur le cou.
Taille d'environ quatre pieds.
On trouve assez communément l'iguane cornu dans les
mornes de Saint-Domingue , entre l'Artibonite et les Gonaïves.
Il se nourrit de fruits, d'insectes et de petits oiseaux qu'il
saisit avec une agilité merveilleuse , et , pendant le jour , il se
tapit sur les arbres et sur les rochers pour guetter sa proie.
Pendant la nuit et durant toute la saison des grandes cha-
leurs, il se retire dans les creux des rochers ou dans les trous
des vieux arbres, et y passe environ cinq ou six mois dans
une sorte d'engourdissement.
Ce reptile est regardé par les Nègres comme un mets dé-
licieux ; aussi le recherchent-ils avec ardeur. Au rapport des
colons , sa chair a la saveur de celle du chevreuil , et les chiens
marrons en font un grand carnage. On ne sait pas au juste
quelles sont ses couleurs. M. de Lacépéde, le premier, l'a
décrit à la fin de son Histoire naturelle des serpens , et Bon-
naterre en a ensuite donné une bonne figure dans le Dic-
tionnaire d'erpétologie de TEncyclopédie méthodique.
L'Iguane a bandes, Iguana fasciala. Bleu foncé avec des
bandes transversales plus claires; dentelures du dos petites;
fanon médiocre et non dentelé; point de grande écaille à
l'angle de la mâchoire.
Cet iguane est de Java. Peut-être est-il le reptile que
Bontius a nommé caméléon. M. Brongniart l'a figuré dans son
Mémoire sur les reptiles , pi. i , fig. 5. C'est probablement aussi à
cette espèce qu'il faut rapporter les très-grands iguanes qu'on
trouve à Batavia , et qui sont quelquefois aussi gros que la
c
24 IGU
cuisse d'un homme. Dans son voyage avec Cook , Banks en
tua un qui avoit cinq pieds de longueur.
On mange leur chair aux Indes orientales, comme en Amé-
rique on mange celle de l'iguane ordinaire. Leurs œufs sont
aussi très-estiniés. (H. C. )
IGUAINIENS. (Erpétol.) M. G. Cuvier donne ce nom à la
troisième famille des reptiles sauriens. Les animaux qui la
composent ont la forme générale, la longue queue et les
doigts libres et inégaux des lacerliens; leur œil, leur oreille,
leur anus, leur verge sont semblables; mais leur langjie est
charnue, épaisse, non extensible et seulement échancrée au
bout. Le célèbre naturaliste que nous venons de citer, range
dans cette famille les genres Steluon , Cordyle , Fouette-
queue, Agame, Galéote , Changeant, Lophyre , Basilic,
Dragon, Iguane, Marbré, Anolis. Voyez ces différens mots,
et Lacertiens , Sauriens et Reptiles. (H. C. )
IHARFA. (Bot.) Voyez Iavorfa. (J.)
IHUR. (BoL) Dans l'île d'Amboine on nomme ainsi une
espèce de palmier rondier, lontarus. (J, )
IIRA. (Bot) Nom brésilien, cité par Pison, du miel sau-
vage que les habitans du Brésil vont chercher dans les
forêts. (J.)
IITO. (Bot.) Cet arbre du Brésil, cité par Marcgrave,
n'est pas le même, selon son éditeur, que celui qui est dé-
signé par Pison sous ce nom. Cependant Linnaeus les indique
tous deux pour son guarea Irichilioides. (J. )
LTARSOAKALE {Omith.) , un des noms groenlandois du
petit guillemot, aie a aile , Linn. (Ch. D.)
IRAN. (Bot.) Dans VApparatus medicaminum de Murrai
il est fait mention d'une racine de ce nom, recueillie en
Chine, dans la province de Kiang-nang, laquelle a la forme
et la consistance d'une racine d'orchis. On la conserve dans
quelques collections, sans indication précise de ses propriétés-
(J.)
lIvAN BATOE BOANO. (îehth^ol.) Dans les Indes orien-
tales, on appelle ainsi l'acanthure noiraud de M. de Lacépède,
chœtodon nigricans de Bloch. Voyez Acanthure. (H. C.)
IRAN BATOEJANG. (Ichthyol.) Nom qu'aux Indes orien-
tales, on donne à l'holacanthe anneau. Voy. HotACANïHE. (H. C.)
IRA 25
IKAN CÀCATOEA {Ichthjol.), nom japonois du spare
noir de M. de Lacépède. Voyez Spare. (H. C.)
IKAN CACATOEA IJA {Ichlhjol.), nom japonois du
spare cynodon de M. de Lacépède. Voyez Denté. (H. C.)
IKAN CAMBING. {Ichtliyol.) Dans les Indes orientales on
appelle ainsi le teira. Voyez Flatax. (H. C. )
IKAN DiOELON. {Ichth.)'oL) On appelle ainsi aux Indes
orientales l'aulostome chinois , Jistularia chinensis , Linn.
Voyez AiJLosTOME. (H. C. )
IKAN DOERIAN [IclUhjol.) , nom que l'on donne, aux
Indes, au guara, diodon hjstrix. Voyez Guara et Diodon.
(H. C.)
IKAN JORDAIN. {Ichlhjol.) Les naturels d'Aniboine
donnent ce nom au lutjan jourdin de M. de Lacépède ,
lequel est Vanthias bifasciatus de Bloch. Voyez Lutjan.
(H. C.)
IKAN KAKATOEA ITAM. (Ichthjol.) Aux Indes orien-
tales c'est le nom du chéilodactyle fascé. Voyez Chéilodac-
TYLE. (H. C.)
IKAN KAPELLE. {IchthyoL) Aux Indes orientales, c'est
le nom du gai A'^erdàtre. Voyez Gal. (H. C.)
IKAN KOELAR. [Ichthyol.) Aux Indes orientales, on
donne ce nom à l'holacanthe bicolor. Voyez Holacanthe.
(H. C.)
IKAN LUTJANG. {Ichthyol.) Nom malais, latinisé par
Bloch , et que porte aux Indes la première espèce de son
genre Lutjanus. Voyez Lutjan. (H. C.)
IKAN MAKEKAE. {ichlhjol.) Aux Indes orientales on
nomme ainsi Fholocentre tigré. Voyez Holocentre. ( H. C. )
IKAN MOELOET BETANG. (Ichthjol.) Aux Indes orien-
tales on donne ce nom à l'espadon, hemiramphus brasiliensis,
poisson que Linnasus a placé parmi les ésoces. Voyez Demi-
Bec. (H. C.)
IKAN ONGO. {Ichthjol.) Au Japon , c'est le nom d'un
poisson du genre Holocentre , holocentrus ongus. Voyez Ho-
lOCENTRE. (H. C. )
IKAN FAMPUS CAMBODIA. (Ichthjol.) Aux Indes orien-
tales on donne ce nom à Fholacanthe anneau. Voyez Hoxa-
CANTHE. (H. C. )
^G IRA
IKAN PAROOLY. (Iclithyol.) Aux Indes orientales, on
donne ce nom au chœtodon cornutus de Linnaeus, poisson que
nous avons décrit à l'article Heniochus. Voyez ce mot. (H.C)
IKAN RADJABAN. {Ichthjol.) Aux Indes orientales on
appelle ainsi une espèce de poisson du genre Holocentre.
Voyez ce mot. (H. C.)
IKAN SENGADGI MOLUKKO (Ichthjol.), nom que,
dans les Indes orientales, on donne àTholacanthe duc. Voyez
HOLACANTHE. (H. C. )
IKAN SETANG. (Ichthfol.) Voyez Kakatoche capitano.
(H.C.)
IKAN SIAM. (Ichthj'ol.) Aux Indes orientales , on donne
ce nom au moucharra , espèce de glyphisodon. Voyez Gly-
PHISODON. (H. c. )
IKAN SOE SALAT. (Ichthjol.) Aux Indes orientales on
appelle ainsi le spare pointillé de M. de Lacépède , perça
punctulata de Linnaeus. (H. C.)
IKAN SUMBILANG. (Ichthjol.) Dans les grandes Indes,
on donne ce nom au plotose anguillaire de M. de Lacépède.
Voyez Plotose. (H. C.)
IKAN TEMBR^ CUNING. (Ichthjol.) Aux Indes orien-
tales on appelle ainsi le spare cuning de M. de Lacépède.
(H.C.)
IKAN TERBANG BERAMPAT SAJAP. (Ichthjol.) Aux
Indes orientales on désigne ainsi l'exocet sauteur. Voyez
Exocet. (H. C. )
IKAN TSJABELANG JANG TERBANG. (Ichthjol.) Aux
Indes orientales on appelle ainsi le voilier. Voyez Istiophore.
(H.C.)
IKAN TSJAKALANG HIDJOE. (Ichthjol.) Nom que,
dans les Indes orientales on donne à l'ORmiE. Voyez ce mot.
(H. C.)
IKAN WARNA. (Ichthjol.) Aux Indes orientales on ap-
pelle ainsi Vanthias diagramma de Bloch , que nous avons
décrit à notre article Diagramme. (H. C.)
IKARA-MOULI. (Bot.) Nom, cité dans PHistoire abrégée
des voyages, d'une racine des Indes orientales, extrêmement
chaude, et réputée bonne pour guérir les indigestions et com-
battre les venins. On ne dit point à quel genre de plantes
ILE ^7
elle appartient : sa propriété peut faire présumer que c'est
une aujouiée. ( J. )
IKINGUSA (Bot.), un des noms japonois de la joubarbe,
suivant Kaeinpfer. ( J.)
IKIRIOU. {Erpétol.) A Cayenne, on donne ce nom à un
énorme serpent qui paroît être le même qu'on nomme
boiguacu au Brésil. Voyez Boïguacu. (H. C.)
IRORN (Mamm.), en suédois écureuil. (F. C.)
ILAD. (Bot.) A Java, suivant Burmann , on nomme ainsi
le carex amboinica de VHerb. Amboin., qui est son scirpus
panicutatus , devant être reporté au genre Scleria, dans les
cypéracées. ( J. )
ILANDA. {Bot.) Suivant Hermann , ce nom est donné,
dans l'ile de Ceilan , à un arbre qui est le rhamnus jujuba
de Linnœus, ziziphus jujuba de Willdenovv. Dans un herbier
de la côte du Coromandel il est nommé ilindai. (J.)
ILATA. {Bot.) Les Portugais qui habitent la côte mala-
bare, nomment ainsi le henné, ia^vsonia. (J.)
ILAT BOAYA. {Bot.) Espèce de joubarbe de Java, que
Rumph nomme sempervivum majus indicum : c'est le lida boaya
des Malais. ( J. )
ILATHERA. ( Ornith. ) On appelle ainsi , dans lile de Baha-
ma, le canard marec , anas ia/iamens/s , Lath. (Ch. D.)
ILATRUM. {Bot.) Suivant Césalpin, ce nom et celui de
linternum étoient donnés au phi Ujrea média, qui étoit , selon
lui , le phiUyra de Théophraste , le phillyrea de Dioscoride. (J.)
ILDBRIMER, {Ornith.) L'oiseau qui est indiqué sous ce
nom dans Clusius, Exotic. auct. , p. 367 , est l'imbrim ou grand
plongeon de la mer du Nord, colymbus immer ,Liiin. (Ch.D.)
ILDER, ILLER {Mamm.) : noms danois et suédois du pu-
tois. (F. C.)
ILDGEIERS-DIUR. {Mamm.) Nom que les Norwégiens ,
suivant Wormius, donnent à son ours de la seconde espèce,
entièrement noir, plus petit, plus carnassier que le brun,
qu'il nomme Gresdiur. Si cette espèce existe, elle n'est point
encore connue des naturalistes, (F. C.)
ILE ou ISLE. {IchtJyyol.) LaChesnaye des Bois parle , sous
ce nom, d'un poisson des Indes orientales, mentionné par
Ruysch , et dont il est difficile de déterminer la nature.
(H. C.)
28 ILE
ILETRO. (Bot.) L'alaicrne est ainsi nommé aux environs
deLucques, suivant Clusius. (J.)
ILEVERT (Bot.), nom d'une variété de prunier dont le
fruit est alongé et verdàtre; ( L. D. )
ILEX. (Bot.) Ce nom, donné par Dioscoride et d'autres
anciens aux diverses espèces d'yeuse ou chêne vert, leur avoit
été conservé parTournefort, qui en faisoit un genre distinct ,
à cause de la persistance de leurs feuilles. Linnaeus , ne regar-
dant pas ce caractère comme générique , a réuni ces espèces au
chêne, quercus ; ensuite il a transporté le nom ilex au houx,
qui étoit Vaquifolium des anciens et de Tournefort , mais qui
avoit été nommé ilex par Lonicer et C. Bauhin. Voyez Houx.
(J.)
ILIADA. (Ornith.) Cette dénomination et celle àdias sont
données, en grec, à la grive mauvis , turdus iliacus , Linn. et
Lath. (Ch. D.)
ILICIUM. (Bot.) Voyez Badiane. (Poir.)
ILICUS. (Ichthjol.) Au rapport de La Chesnaye des Bois,
Trallien a parlé sous ce nom d'un poisson qui nous est tota-
lement inconnu et dont la chair étoit recommandée par les
anciens médecins. L'histoire de cet animal est fort obscure ;
d'après même ce que dit le premier des auteurs précités,
il n'est point très-sûr que , par le mot ilicus , on ait désigné
un poisson. (H. C.)
ILIGALI (Ornith.), nom koriaque d'une espèce de canard.
(Ch. D.)
ILINDAI. (Bot.) Voyez Ilanda. (J.)
ILIODÉES. ( Bot. ) C'est ainsi que M. Palisot de Beauvois
désignoit la première section de sa famille des algues. Les
genres qu'il y ramenoit et qui ont été cités à notre article
Algues, Suppl., vol. ] , pag. i25, sont caractérisés par leur
substance molle, muqueuse, qui enveloppe de petits corps
ovoïdes nus, sans filamcns , ou à filamens articulés, diver-
sement ramifiés. (Lem.)
ILKIVICHA. (Ornith.) L'oiseau que lesKorivTques appellent
ainsi, est le rouge-gorge, motacilla ruhecula, Linn. (Ch.D.)
ILLA. (Bot.) Nom malabare, adopté à Ceilan et cité par
Burmann , donné par Adanson au tomex tomentosa de Lin-
naeus, qui a été reconnu plus tard, par Linnaeus lui-même,
ÏLL 29
être congénère du callicarpa , auquel se rapporte aussi le
porphyra de Loureiro. (J. )
ILLANKEN. (Iclith^yol.) On connoît sous ce nom, dans
le lac de Constance, une espèce de salmone que quelques
auteurs ont considérée comme une simple variété du saumon.
C'est le salmo illanca de Wartmann , le salino lacustris de
certains ichthyologistes. Voyez Salmone. (H. C.)
ILLÉCÈBRE; Illecebrum , Linn. (Bot.) Genre de plantes
dicotylédones, de la famille des paronjchiées , Juss. , et de la
pentandrie monogynie , Linn., dont les principaux caractères
sont les suivans : Calice partagé en cinq divisions profondes,
renflées sur le dos , acuminées à leur sommet ; corolle de cinq
pétales filiformes , insérés au bas du calice et alternes avec
ses découpures; cinq étamin'es réunies en tube à leur base;
ovaire supérieur, surmonté d'un style très -court, terminé
par un stigmate en tête; capsule monosperme, recouverte
par le calice connivent.
Les illécèbres sont de petites plantes herbacées, à feuilles
opposées et à fleurs ramassées par paquets axillaires ou ter-
minaux. La plus grande partie des illecelrum de Linnaeus a
été rapportée à d'autres genres par les botanistes modernes,
et particulièrement au paronjcliia de Jussieu. Il ne reste
plus dans le genre Illecebrum que trois ou quatre espèces
qui paroissent réellement lui appartenir ; toutes les autres
que quelques auteurs y placent encore , sont assez incer-
taines. Comme ces plantes ne présentent d'ailleurs aucun
intérêt, nous ne parlerons ici que de l'espèce suivante, qui
est la plus connue.
Illécèbre verticillé ; Illecebrum 'verticillatum , Linn., Spec,
2g8 ; Flor. Dan., tab. 335 ; Polygonum pari/um , flore albo ver-
ticillato , Vaill., Bot. Paris., tab. li, fig. y. Sa racine est
fibreuse, annuelle; elle produit des tiges nombreuses, ra-
meuses, grêles, étalées et couchées sur la terre, longues de
deux à six pouces, et garnies de feuilles ovales, opposées,
sessiles, rétrécies à leur base et glabres. Les fleurs sont blan-
châtres, très-petites, verticillées aux aisselles des feuilles et
dans presque toute la longueur des tiges. Cette plante croit
dans les lieux humides et sablonneux. ( L. D.)
ILLEHUE. {Bot.) Nom caraïbe, suivant Surian , de la
3o ILL
poincillade commune, dans les Antilles. Il cite aussi sous celui
de illahueboue une espèce de carmentine , justicia , mentioniée
dans le Catalogue de Vaillant, et, sous celui de illehuau, une
plante malvacée qui est le pavonia spicata de Cavanilles. (J.)
ILLEU. (Bot.) Feuillée cite ce nom péruvien pour une
plante qu'il croit être une bermudienne, sisyrinchium. Une
autre plante du même genre est nommée huilmo. Une troi-
sième, illmu , du Pérou, étoit aussi une bermudienne de
Feuillée; mais elle a six étamines au lieu de trois, et c'est
maintenant le conanthera des auteurs de la Flore péruvienne.
(J.)
ILL-HVEL. (Mamm.) M. de Lacépède dit que les Islan-
dois donnent ce nom aux cétacés dont les mâchoires sont
armées de dents. (F. C.)
ÎLLL(IchthjoL) A ce que dit Gesner, les anciens Grecs
donnoient le nom d'/AAo/ à de très-grands poissons, que les
naturalistes modernes regardent comme des êtres fabuleux.
Il en est parlé dans les Géoponiques de Tarentin. (H. C.)
ILLING. {Ornith.) L'oiseau connu aux Philippines sous ce
nom, ou celui d'iting, est le gulin ou goulin de J. G. Camel ,
le merle chauve de ces iles, de Brisson , et sa 36." grive, gra-
cula calva, Linn. (Ch. D.)
ILLIPÉ , Bassia. [Bot.) Genre de plantes dicotylédones,
à fleurs complètes, monopétalées, de la famille des sapotées ,
de la. dodécandrie monogjnie de Linna'us, offrant pour caractère
essentiel : Un calice coriace, à quatre divisions profondes;
une corolle campanulée , à huit divisions ; seize étamines ,
quelquefois beaucoup plus; un ovaire supérieur, surmonté
d'un style simple et d'un stigmate aigu. Le fruit consiste en
un drupe ovale , charnu , laiteux , renfermant quatre ou cinq
noyaux monospermes.
Ce genre renferme quelques arbres des Indes orientales,
intéressans parles usages économiques de leurs fleurs, et par-
ticulièrement de leurs fruits. 11 est à regretter que ces arbres
ne puissent être cultivés en Europe. Nous n'en connois-
sions d'abord qu'une espèce ; Roxburg nous en a fait con-
noître deux autres, avec des détails très-curieux sur leurs
usages économiques.
Illifé a longues feuilles : Bassia longifolia , Linn.; Lamk. ,
ILL 3i
IlL gen., tab. SgS ; Arhor facum major, Rumph., Amh., 3,
tab. 49. Grand arbre laiteux , dont les rameaux sont cylin-
driques, glabres, feuilles vers leur sommet, raboteux dans
leur partie nue. Les feuilles sont éparses, très-rapprochées ,
pétiolées, ovales-oblongues, presque lancéolées, glabres, en-
tières, aiguës, d'un vert foncé en-dessus, plus pâle en-des-
sous, longues de cinq à six pouces sur un pouce et demi de
large : les pédoncules sont simples, nombreux , d'abord pres-
que verticillés, longs d'environ un pouce, situés près du som-
met des rameaux; ils s'alongent ensuite et deviennent tout-
à-fait pendans. Les fleurs sont blanches, leur calice velouté
au dehors; le style saillant presque d'un pouce hors de la co-
rolle ; les filamens attachés à son tube, huit entre les divi-
sions du limbe , huit autres plus bas , alternes avec les pre-
mières ; les anthères droites, sagittées , velues en dedans.
Le fruit est un drupe ovale, charnu, laiteux, contenant
quatre à cinq noyaux, quelquefois deux, oblongs, presque
trigones, monospermes. Cette plante croit dans les Indes
orientales et au Malabar.
Le bois de cet arbre est employé dans les constructions
en solives et en poutres : il est très -combustible. Les na-
turels aiguisent par le bout les rameaux et les branches;
ils s'en servent comme de flambeaux pour aller, le soir, à
la pêche des poissons , des crabes et des coquillages sur les
bords de la mer. On mange ses fleurs lorsqu'elles tombent :
mises dans l'eau; elles lui donnent un petit goût agréable 5
et la rendent rafraîchissante,
Illipé a larges feuilles : Bassia latifolia , Roxb. , Corom, ,
1 , pag. 20, tab. 19 ; Mahwahlree , Act. soc. Bengal. , 1 , p.
3oo; Madhuca indica, Gmel. , Sjst. Arbre assez fort, chargé
de branches et de rameaux nombreux, étalés horizontale-
ment, garnis de feuilles amples, ovales, presque elliptiques,
arrondies à leurs deux extrémités , longues de six pouces ,
larges de quatre. Les fleurs sont nombreuses , pendantes ,
réunies en un paquet terminal; les pédoncules simples, longs
d'un pouce; le calice glabre, à huit dents ovales; les divi-
sions de la corolle ovales, une fois plus courtes que le tube;
les élamines vont quelquefois jusqu'au nombre de trente-six.
I-e fruit est un drupe, de la grosseur d'une pi^une, à quatre.
32 ILL
quelquefois deux semences oblongues , aiguës. Cet arbre
croît sur les montagnes, dans les Indes orientait s.
Son bois est d'une dureté médiocre, d'un grain fin et
rougeâtre. Lorsqu'on l'entame , il en découle une gomme-
résine très-abondante, dont on ne fait aucun usage. Les
fleurs desséchées font un objet de commerce assez considé-
rable : elles se mangent sans autre préparation , quelque-
fois mêlées aux carries, ou bien bouillies avec le riz : elles
donnent une nourriture saine et fortifiante: même fraîches,
elles ont un goût relevé et agréable. Si on les fait fermejiter
avec de l'eau, et que l'on en distille le produit, on obtient
une liqueur alcoolique , dont une très-petite quantité suffit
pour enivrer. Ces fieurs paroissent au mois de Mars-, lorsque
les feuilles sont toutes touibées; elles forment une grappe de
trente à quarante fleurs: elles restent constamment fermées,
et les corolles ne tombent que vers la fin d'Avril, un peu
après le lever du soleil, temps que Ton choisit pour les ra-
masser, afin de les faire sécher au soleil, ce qui n'exige que
peu de jours; ainsi préparées, elles ont le goût, l'odeur et
même l'aspect du raisin sec.
Les graines exprimées donnent en grande abondance une
huile qui se fige facilement : en vieillissant, elle contracte
un goût de beurre un peu rance. Elle est l'objet d'une grande
consommation et d'un commerce actif dans diverses parties
de l'Inde : on la brûle; on la mêle dans le beurre clarifié,
c'est-à-dire , rendu aussi coulant que l'huile.
Cet arbre est cultivé avec soin dans son pays natal. On en
sème les graines vers le commencement des pluies, ou sur
couches (si on veut le transplanter) , ou à trente et quarante
pieds de distance, sur le terrain qu'il doit occuper. Après
sept ans, il commence à donner des fleurs; à dix ans, il
donne demi-récolte ; à vingt ans , il cesse de croître, et il vit
jusqu'à cent ans. Un arbre», en plein rapport , donne trois
cents livres de fleurs, qui valent soixante irancs , argent de
France , et soixante livres d'huile , qui valent cinquante-
deux francs; ce qui forme, pour le propriétaire, un revenu
très-lucratif. La récolte de cet arbre est plus assurée qu'au-
cune autre production de l'Inde , parce qu'il ne craint pas
les sécheresses qui, quelquefois, font manquer le riz, le
ÏLL 55
millet et autres grains. (Journ. de botan., 4 vol., pag. 118.)
Illipé butyracé : Bassia hutj^racea , Roxb. , Asiat. rech. ,
vol. 8; Biblioth. britan., vol. 4: , pag. 22; Fulwah seu Ful-
ivarali. Le tronc de cet arbre a environ six pieds de circon-
férence ; il est chargé de rameaux dont l'écorce est lisse , brune ,
parsemée de taches cendrées. Les feuilles sont alternes, pé-
tiolées , ovales , cunéiformes à leur base , entières , velues
en-dessous, longues de six à douze pouces; les fleurs grandes,
nombreuses, pendantes, d'un jaune pâle, placées à la base
des jeunes pousses; le calice a de quatre à six divisions , cou-
vertes d'un duvet ferrugineux ; le tube de la corolle presque
cylindrique , de la longueur du calice ; les divisions obtuses ,
plus longues que le tube ; trente à quarante étamines; l'ovaire
à dix ou douze loges monospermes , velu, entouré d'un an-
neau pubescent. Le fruit est un drupe oblong, charnu, ne
renfermant , par avortement , que deux ou trois noyaux.
Cet arbre croît dans les Indes orientales. Ses semences
donnent une substance butyreuse , ferme, dont se nourrissent
les naturels des diverses parties de l'Inde, et qu'ils emploient
dans leur cuisine ordinaire , seule ou mêlée avec le ghée ,
qui est du beurre clarifié par l'ébuUition. On emploie l'huile
exprimée des fruits mûrs comme l'huile ordinaire à brûler ,
lorsqu'on n'a pas de quoi se procurer de l'huile de cocos. La
première est plus épaisse; elle dure plus long-temps, mais
donne moins de lumière ; elle fume un peu , et son odeur
n'est pas agréable. Cette huile est l'ingrédient principal du
savon commun du pays ; on la vend pour cet usage au même
prix que celle du coco. Les naturels la substituent au ghée
et à l'huile de cocos, dans la préparation des mets et dans
les sauces. On en fait des gâteaux dont la vente est un objet
de commerce parmi les pauvres : elle s'emploie en topique
dans les maladies éruptives, telles que la gaie, etc., ainsi
que l'écorce de Tarbre. Le peuple ramasse les fleurs , qui
tombent en Mai ; il les fait sécher au soleil, les rôtit et en
fait un bon aliment : il les fait aussi bouillir en consistance
de gelée, en forme de petites boules, qu'il vend ou échange
contre du riz, du poisson ou autres denrées. Le fruit, mûr
ou non, sert aussi de nourriture : lorsqu'il n'est pas mûr,
on enlève la peau , et après en avoir retiré le noyau non
25. 3
34 ILL
mûr, on fait bouillir le reste en gelée , et on le mange avec
du sel ou du piment. On peut ajouter que les oiseaux de
nuit, les écureuils, les lézards, les chiens et les chacals pren-
nent leur part des fleurs de cet arbre.
Le bois est aussi dur et se conserve aussi bien que le bols
de tech ; mais on ne le travaille pas aussi facilement : il ne
fournit pas des poutres et des planches aussi longues, excepté
dans les terrains argileux , oii l'arbre s'élève à une hauteur
considérable; mais, dans cette nature de sol, il ne fournit
que peu de branches , et moins de fruits que dans les terrains
sablonneux et mélangés , qui lui conviennent plus particuliè-
rement.
Il paroit que Tarbre nommé par Mongo-Parck, scliea, ou
arbre à beurre d'Afrique, est, d'après la description qu'il
en donne, une espèce du même genre. II dit, pag. 352 de
ses Voyages dans l'intérieur de l'Afrique : « L'apparence du
« fruit place évidemment l'arbre appelé schea. dans l'ordre
,(, naturel des sapotilliers , auquel appartient le hassia. Il
« ressemble un peu au hassia latifolia ou madheuca, décrit par
« le lieutenant Hamilto-n , dans les Recherches asiatiques ,
« vol. 1 , pag. 5oo.^^ On voyoit, ajqute Mongo-Parck, le
peuple occupé partout à cueillir le fruit du schea, avec lequel
on prépare un beurre végétal : ces arbres croissent en quan-
tité dans toule cette partie de Bambarra. On ne les plante
point; on les trouve dans les bois, et lorsqu'on abat ceux-ci
pour défricher, on n'épargne que les schea. L'arbre ressemble
laeaucoup au chêne d'Amérique, et le fruit, dont le noyau
séché au soleil fournit la matière butyreuse par l'ébullition
dans l'eau , ressemble, jusqu'à un certain point, à l'olive
d'Espagne. Ce noyau est enveloppé d'une matière pulpeuse,
d'un goût sucré, recouvcî'te d'un épiderme mince de cou-
leur verte, et le beurre qu'il fournit, outre l'avantage de
se conserver pendant une année sans être salé, est plus blanc,
plus ferme, plus savoureux que le meilleur beurre animal.
La préparation de ce comestible paroît être l'un des premiers
objets de l'industrie africaine dans ce pays et dans les con-
trées voisines, et cette matière y forme un des principaux
articles du commerce intérieur. (Poia.)
ILLI^É, ILLIPAT. (Bot.) C'est le bassia, genre de la famille
ÎLT U
des sapotées , qui porte ce nom sur la côte malabare, suivant
Kœnig, cité par Linnaeus, et sur la côte de Coromandel,
suivant les herbiers envoyés de ce lieu. Voy. Illipé ci-dessus. (J.)
ILLMU. (Bot.) Voyez Huilmo , Illeu. (J.)
ILLOSPORIUM. {Bot.) Champignons extrêmement petits,
qui croissent sur les végétaux. Ils sont très-voisins des genres
Bactridium ,Sporidesmium et Apiosporium ; ils en différent seule-
ment par la présence d'une membrane extrêmement mince,
granuleuse, sur laquelle sont épars ou groupés, en globules
irréguliers , des sporidies ou séminules colorées. Ce genre a été
établi par Martius , dans sa Flore d'Erlangen : Nées et Ehren-
berg l'ont adopté. L'Ill. rose {III. roseum, Mart.) forme des
vésicules et des taches d'un blanc rose sur les lichens du
genre Peltidea. Les séminules forment de petits tas plus rose.
Cette espèce est la même que le conisporium Linchii , Nées ,
Sjyst., p. 27, §. 47. (Lem.)
ILLY-AMMANOEK. (Bot.) Sur la côte de Coromandel,
suivant Burmann , on donne ce nom à un médicinier , ja-
tropha gossypifolia. ( J. )
ILOTE, llotus. {Conchjl.) Nom de genre imposé par M.
Denys de Montfort à un petit corps crétacé, presque micros-
copique., décrit et 6guré sous le nom de nautilus orhiculus
par L. von Fichtel, Test, microscop., p. 112, tab. 21 , fig. a-d,
qui l'a trouvé dans les sables de la mer Méditerranée , prés
Livourne. Quoiqu'il soit presque impossible d'en bien juger
d'après la simple figure de l'observateur que nous venons de
citer, et d'y voir rien autre chose qu'une sorte de très-petite
nummulite dont la partie la plus saillante de chaque face
ne seroit pas dans le centre , M. Denys de Montfort n'y trouve
pas moins une coquille libre, univalve . cloisonnée et cellulée,
contournée en disque et presque lenticulaire, ayant sa spire
excentrique, apparente, mammelonéesur les deux flancs; la
bouche linéale, triangulaire, échancrée sur le dos et cel-
lulée, recevant dans son milieu le retour de la spire; le
dernier tour enveloppant tous les autres; les cloisons unies
,et le dos caréné. L'espèce qui sert de type à ce genre et
qu'il nomme TIlote rotalé , llotus rotalisaius , n'a qu'une
ligne de diamètre au plus ; elle est blanche et irisée. (De B. )
ILTIS {Mamm.), nom allemand du putois. (F. G.)
36 ILW
ILWARSVOGEL (Ornilh.), nom dalécarlien de rortolaa
de neige, emberiza nivalis , Linn. (Ch. D.)
ILY [Bot.), nom malabare du bambou. (J.)
ILY-MULLU. [Bot.) Nom malabare, suivant Rhéede ,
d'une plante gramince , qui est le stipa littorea de Burmann ,
le spinifex squarrosus de Linnseus. (J.)
ILYN. [Min.) M. Nose a donné ce nom, d'un mot grec
qui veut dire limon, à une roche qui forme la masse prin-
cipale de beaucoup de montagnes des deux côtés du Rhin,
et qui s'étendent même assez loin.
C'est une roche composée qui paroît avoir subi l'action
du feu , et qui se distingue de l'argile et de l'argilolite
(Thonslein) par sa fusibilité. Elle est connue sur les bords du
Rhin sons le nom de Graustein, et passe au basalte et à la
wake. Elle est d'un gris de cendre, quelquefois d'un brun
mordoré ; assez compacte : sa cassure donne des surfaces
mattes et raboteuses. Elle a une dureté moyenne, et i^pand ,
par l'insufflation de l'haleine, l'odeur argileuse. On y trouve
des cristaux de fclspafh et d'haiiyne disséminés.
L'ilyn , autant qu'on peut en juger par cette description,
paroit avoir beaucoup de rapports avec le Trachyte. Voyez
ce mot. (B.)
IMAGE, Imago. (Entom.) On no^me ainsi l'insecte parfait,
ou le quatrième état par lequel passe et où arrive l'insecte
lorsqu'il est complètement organisé, c'est-à-dire quand
il a subi toutes ses* métamorphoses : d'abord sous la forme
d'œuf , il a paru ensuite sous celle de chenille ou de larve;
après différentes mues ou changemens de peau, qui souvent
encore lui ont communiqué des aspects divers, il prend la
forme de chrysalide ou de nymphe; enfin il arrive à l'état
parfait : voilà ce que Fabricius et d'autres auteurs ont
nommé l'image. Sous cette forme l'insecte ne croît plus;
souA^ent il ne prend plus de nourriture, et c'est alors seu-
lement qu'il peut reproduire sa race ou son espèce.
Les anciens n'ignoroient pas ces circonstances. On trouve
dans Arisfote, livre V, chap. 18 , ce passage, que nous allons
emprunter à la traduction de Camus. « Les papillons vien-
ne nent de chenilles : c'est d'abord moins qu'un grain de
« millet, ensuite un petit ver qui grossit et qui au bout
IMB 37
^ de trois jours est une petite chenille. Quand ces clienilles
« ont acquis leur croissance, elles perdent le mouvement
« et changent de forme. On les appelle alors chrysalides :
« elles sont alors enveloppées d'un étui ferme : cependant
« si on les touche, elles remuent. Les chrysalides sont ren-
« fermées dans des cavités faites d'une matière qui ressemble
« aux fils d'araignées; elles n'ont pas de bouche ni d'autres
« parties distinctes. Peu de temps après l'étui se rompt, et
« il en sort des animaux volans , que nous nommons papil-
« Ions. Dans leur premier état, celui de chenille, ils man-
« gent et rendent des excrémens ; devenus chrysalides, ils
« ne prennent ni ne rendent rien. Il en est de même de
« tous les animaux qui viennent de vers.» Voyez Métamor-
phoses. ( C. D.)
IMANTOPÉDE. (Ornith.) L'échasse étant nommée en grec
imantopois , on a étendu l'application de ce terme, et le mot
imantopède désigne en général des oiseaux munis de longues
jambes, à moitié nues. (Ch. D.)
IMATIDIE, Imatidium. (Entom.) Fabricius a décrit sous ce
nom, qui en grec, ijuctriS'iov , signifie petit manteau, une
division de coléoptères étrangers, tous de l'Amérique méri-
dionale, et qui paroissent être des cassides, c'est-à-dire,
des tétramérés phytophages. Leur corps n'est pas entière-
ment caché , la tête étant libre et visible en-dessus. Voyez
l'article Casside, tome VII. ( C. D.)
IMBER. {Ornith.) L'oiseau désigné par ce nom et par celui
à^imher goose est Vimbrim. Voyez ce mot. (Ch. D. )
IMBERBE {Ichthyol.) , nom spécifique d'un poisson delà
mer Méditerranée , Vophidium imberbe de Linnaeus. Voyez
FlERASFEîl. ( H. C. )
IMBERBES. (Ornith.) M. Vieillot appelle ainsi une famille
de son ordre des oiseaux sylvains et de la tribu des anyso-
dactyles, qui comprend les genres Tacco, Scjthrops , Vou-
roudriou , Coulicou , Coucou , Indicateur , Toulou et Ani. (Ch. D.)
IMBOUREL. [Bot.) Dans un herbier de Coromandel
donné à Commerson par M. Cossigny, on trouve une plante
rubiacée de ce nom , qui a beaucoup de rapport avec le
chayaver, espèce d'oldenlandia. (J.)
IMBRIACO ou IMBRIAGO. iTchthyol.) Sur les côtes de
38 1MB
la mer Méditerranée, on donne ce nom à la trigla lineaia
de Linnœus, qui est la trigle lastoviza de M. de Lacépède.
Voyez TarcLE. (H. C.)
IMBRICAIRE, Imbricaria. (Bot.) Genre de plantes dicoty-
lédones, à fleurs complètes, monopétalées, de la famille des
sapotées, de Voctandrie monogjnie de Linnœus , olTrant pour
caractère essentiel : Un calice à huit divisions ; une corolle
monopétale à huit découpures profondes, déchiquetées en
lanières; huit appendices filiformes; un ovaire supérieur ; un
style ; un stigmate. Le fruit est une baie à huit loges mono-
spermes, très-souvent à quatre semences au moins par avor-
tement.
Ce genre est si rapproché des mimusops , que plusieurs
auteurs les ont réunis; réforme qui doit être adoptée, si,
véritablement, le nombre des loges est tellement variable
que de huit, dans les imbricaires , elles se réduisent à une
seule dans les mimusops. Commerson a désigné ce genre sous
le nom d'imbricaria, à cause de l'usage que l'on fait de son
bois, qui, divisé en lames ou en lattes, est employé pour la
couverture des maisons, Smith a employé le nom d'imbricaria
pour un autre genre , qni appartient au jungia de Gaertner.
On trouve encore, dans la Flore d'Amérique de Michaux, un
genre Imbricaria qui rentre dans la famille des lichens.
Imbricaire a gros fruits ; Imbricaria maxima , Lamk. , III.
gen. , tab. 3oo; Mimusops imbricaria, Willd., Spec, 2, pag.
326; vulgairement Nattier, Bois de natte, Bardothier. Arbre
observé par Commerson dans les Indes orientales, dont les
feuilles sont éparses, rapprochées par touffes, coriaces, ovales-
oblongues , entières, glabres, pétiolées , longues d'environ
trois pouces et plus sur deux de large; les pétioles longs
d'un pouce et demi. Les fleurs sont solitaires , mélangées con-
fusément avec les feuilles, formant, comme elles, des touffes
terminales ; les pédoncules simples , couverts d'un duvet fer-
rugineux : les quatre découpures extérieures du calice pu-
bescentes; les intérieures plus étroites, blanchâtres, de la
longueur de la corolle : le tube de celle-ci très-court; son
limbe étalé en forme d'une étoile frangée : les étamines
courtes , insérées sur le tube de la corolle , opposées à autant
de filamens écailleux inclinés sur l'ovaire. Le fruit est une
IMB Ss
baie ou une pomme globuleuse, de la grosseur d'une orange
moyenne, acuminée parle style, divisée en huit, plus ordi-
nairement en quatre loges, avec le même nombre de semen-
ces : celles-ci sont oblongues, d'une forme irrégulière, mar.
quées d'une cicatrice latérale. ( Poir.)
IMBRICARIA, Embricaire et Imbricaire. {Bot.) Genre de
la famille des lichens, établi par Acharius , et qu'il a réuni
ensuite au parme/i'a, qui comprend aussi le lobaria du même
auteur. M. De Candolle conserve le genre Imbricaria; nous
suivrons ici son opinion , tout en convenant que le rappro-
chement d'Acharius ne manque pas de justesse.
Les imbricaria sont de beaux lichens, qui forment sur les
écorces d'arbres , sur les pierres et sur les rochers , des plaques
membraneuses ou coriacées, adhérentes par leur partie in-
férieure, et disposées en roses ou étoiles découpées, plus ou
moins, en lanières étroites, obtuses, qui se recouvrent ou
s'embriquent les unes sur les autres, du centre à la circonfé-
rence. Le dessous est souvent garni de fibrilles. Les scutelles
ou conceptacles sont situés en-dessus , fixés par leur centre,
d'abord en forme de godet, puis plans, et d'une couleur
différente de celle de l'expansion , avec un rebord le plus
souvent de la couleur de cette dernière , ou plus pâle. Ces
scutelles sont ordinairement plus nombreuses dans le centre.
On voit en outre sur plusieurs espèces des glomérules pul-
vérulens épars ou marginaux , qui couvrent même quelque-
fois une grande partie de la surface du lichen, et surtout le
centre; alors les scutelles avortent, et le lichen se détruit
plus tôt en cette partie.
Ce genre renferme près de soixante-dix espèces, presque
toutes d'Europe; quelques-unes sont d'Amérique. Trente se
trouvent en France, dont vingt-une aux environs de Paris.
Beaucoup d'espèces méritent d'être citées, parce qu'on les
rerfcontre souvent sur les arbres, dans les bois, les vergers
et les promenades : elles se font remarquer par leur élégance
et par leur couleur.
§. i." Expansion hérissée en-dessous et divisée en
lobes linéaires.
î ." Imbricaria étoile : Imbricaria stellaris , Decand. , FI.
40 IMB
fr. , 1047; Lichen stellaris, Linn. , Hoffm. , Enum. , pi. i5,
fig. 1 et 2 ; Dillen., Musc, t. 24, fig. 70; Parmelia stellaris ,
Ach, , Syn., 216. Expansion rayonnante , d'un vert griscàlre,
plissée ou rugueuse, blanche en -dessous avec des fibrilles
grises; découpures presque linéaires , un peu convexes,
muitifides; scutelles d'un noir voilé de gris ou glauque, à
rebord d'abord entier, puis flexueux et crénelé. Commun
sur les écorces des arbres.
2.° Imbricaria pulvérulent : Imhricaria pulverulenta , Dec,
FI. fr., 1049; Loharia Tpiilverulenta , Hoffm., PL, llch. , t. 8,
fig. 2: Lichen omphalodes , 3 acq, ,, Coll., 2, t. i5, fig. 2. Ex-
pansion étoilée, d'un blanc bleuâtre ou d'un gris roux et
givreux, couverte en-dessous d'un duvet noir; découpures
jnultifides et distinctes sur les bords , planes, déprimées , on-
dulées , tronquées à leur extrémité ; scutelles d'un gris
bleuâtre, à bord entier ou flexueux. Commun sur les écorces
d'arbres. Lorsqu'il est humecté, il prend une couleur d'un
vert gai, et son aspect givreux disparoit. Il offre plusieurs
variétés.
3.° Imbricaria gris: Imbricaria grisea, Decand. , FI. fr. .
n." io5o; Lichen griseus , Lamk. ; Lichen lanuginosus , Hoffm.,
Enumer. , pl. 10, fig. 4; Lichen pifjreus , Engl. bot., fab.
2064; Parmelia pityrea , Ach., Syn. , p. 201. Expansion orbi-
culaire, grise, pulvérulente, blanche en -dessous avec des
fibrilles noires; découpures du centre plissées, frisées eÉ
comme rongées , pulvérulentes sur les bords ; découpures ou
lobes du pourtour plans, arrondis, crénelés, givreux; scu-
telles concaves , d'un noir brun , givreuses , à bord entier.
Ce lichen n'est point rare; cependant il n'est pas commun
avec ses scutelles. Il croît sur les écorces d'arbres et sur les
murs.
4,° Imbricaria orbiculaire : Imbricaria cfcloselis, Decand.,
Flore fr. , io5i ; Lichen orbicularis , Hoffm., Enum., pl.'g,
fig. I ; Parmelia cyclo&elis , Ach.; Lichen cjcloselis , Engl. bot. y
tab. 1942. Orbiculaire, d'un gris livide, garni en -dessous
d'un duvet noir spongieux ; découpures embriquécs, un peu
planes, très-découpées et comme digitées, crénelées, à peine
ciliées; d'abord entier sur le bord, puis élevé, crispé et un
peu pulvérulent; scutelles éparses d'un noir brun, à bord,
IMB 41
élevé et entier. Il se rencontre fréquemment sur les troncs
d'arbres, et fait le passage de l'espèce précédente à la sui-
vante.
5.° Imbricaria a cheveux noirs : Imhricaria ulothrix, Dec. ,
FI. fr. ,n.° 1062; Lichen ciliatus , Hoffm. , E/xwm., pi. i4i ^ig- i-
Expansion étoilée , d'un gris glauque un peu livide, garnie
en-dessous de fibrilles noires ; découpures écartées, linéaires ,
nombreuses, dichotomes, planes et ciliées sur les bords;
scutelles d'un noir brun, à contour entier, garni en-dessous
de cils fibreux, peu apparens. Ce petit lichen croit sur les
arbres et quelquefois sur les planches exposées à l'air humide.
6." Imbricaria brodé : Imbricaria retiruga, Decand., FI.
fr. , io54; Lichen saxatilis, Linn. , HofFm., Enum., tab. i5,
fig. 1, et tab. 16,' fig. 1; Engl. bot., tab. 6o3 ; ^l\uU, in
Jacq., Coll. 4, tab. 20, fig. 2; Parmelia saxatilis , Ach.,
Sjn., 204 ; Vaill. , Bof. Par. , tab. 21 , fig. 1. Expansion orbicu-
laire, grise, rude au toucher, lacuneuse et réticulée par
des nervures, noire et fibreuse en-dessous; lanières embri-
quées, sinuées et lobées, planes, dilatées ou arrondies et
presque tronquées aux extrémités; scutelles de couleur baie
et crénelées sur le bord. Cette espèce , quelquefois assez
étendue , croît sur les rochers et sur les écorces d'arljres.
7." Imbricaria brûlé : Imbricaria adusia , Decand., FI. fr. ,
n.° io55 ; Lichen oinphalodes , Linn.; Engl. bot., pi. 604 ;
Vaill., Bot. Par., tab. 20, fig. 10; Dill. , Hist. musc, tab. 20,
fig. 80; Parmelia omphalodes , Ach. Expansion orbiculaire ,
d'un brun olivâtre ou noirâtre, luisante, ponctuée de noir,
fibrillifère et noire en-dessous; lanières sinuées, multifides,
linéaires, planes, presque tronquées , arrondies et crénelées
au pourtour; scutelles baies, un peu crénelées sur le bord.
Vient sur les rochers et les écorces d'arbres.
§. 2. Expansion hérissée en-dessous , et divisée en
lobes larges et arrondis.
8.° Imbricaria a feuilles de chêne : Imbricaria quercina,
Decand., n." io56 ; Lichen quercinus , "WiHd., FI. Berol. ,
tab. 7, fig. 10; Lichen quercifolius ,^\iU , ap. Jacq., Coll., 3,
tab. g, fig. 2 ; Lichen tiliaceus, HofTm., Enum., tab. 16, fig. 2 ;
Engl. lot., tab, 700; Parmelia tiliacea, Ach., Syn., p. 199.
42 IMB
Expansion orbiculaire , membraneuse , d'un gris glauque et
un peu givreux, d'un noir brun en-dessous, r.vec des fibrilles
noires; lobes sinués, lacinics, les derniers arrondis et créne-
lés; scutelles presque brunes, orbiculaires , presque entières
sur les bords. Cette belle espèce est fréquente sur les écorces
d'arbres, dans les bois, et plus rare sur les rochers.
9.° Imrricaria plombé : Imbricaria phimbea , Decand. , FI.
fr. , n." io58; Parmelia plumhea, Ach. , Syn. excl. syn. Expan-
sion orbiculaire, d'un gris de plomb livide, garnie en-dessous
d'un duvet snongieux de couleur bleue ; découpures du
pourtour aplaàes , plissées , rayonnantes, arrondies, inci-
sées et crénelées ; scutelles éparses , convexes , brunes , à
bord presque de même couleur et entier. Cette jolie espèce
croît sur les troncs d'arbres et sur les rochers. Elle est com-
mune dans beaucoup d'endroits. En France elle se rencontre
dans les Cévennes, en Gascogne et en Bretagne, à Fontaine-
bleau, etc. La figure 3 , pi. 45, ord. 23 de Micheli, ne pa-
roît point devoir la représenter ; car l'auteur dit que le lichen
qu'elle représente , est blanc en-dessous ; mais il paroît bien
que c'est le lichen plumbeus , Lightf., Scot., tab. 26.
U Imbricaria carulescens , Decand. (excZ. Sjn,) , ou Parmelia
ruhiginosa, Ach., et Lichen affnis , Engl. bot., tab. 943, est
très-voisin du précédent : il en diffère surtout par ses scu-
telles entassées dans le centre de l'expansion, planes, d'un
brun roux, crénelées et blanchâtres tout autour. On le trouve
dans les mêmes lieux.
$. 3. Expansion glabre , divisée en lobes larges et
arrondis.
10.° Imbricaria des murailles : Imbricaria parietina, Dec.,
Fl.fr., n." 1060; Lichen parietinus , Linn., Hoffm., Enum.,
pi. ]8, fig. i; Engl. bot., tab. 194; Dill., Musc, tab. 24,
fig. 76. Expansion orbiculaire, d'un beau jaune doré ou jon-
quille, plus pâle en -dessous et un peu fibrillifère ; lobes
rayonnans, déprimés, plans, dilatés à l'extrémité, arrondis,
crénelés et crispés ou frisés. Scutelles de même couleur plus
foncée, entières, et plus pâles sur les bords. Cette espèce,
des plus communes, et remarquable par sa couleur, couvre
quelquefois les troncs d'arbres de larges et nombreuses pla-
IMB 43
ques, qui suivent les sinuosités des écorces. Elle croît égale-
ment sur les pierres et sur les murs. Lorsqu'elle vieillit ,
elle devient verdàtre. On la trouve partout.
13.° Imbricaria olivacé : Imbricaria olivacea, Decand. ^
FI. fr., n.° 1061; Lichen olivaceus , Linn., Hoffm., Enum. ^
tab. i3, fig. 3— 6; Dill., Musc, tab. 24, fig. 77? 78; Vaill.,
Bot., tab. 20, fig. 8. Expansion orbiculaire , d'un brun
olive, unie ou ponctuée, plane ou ridée, plus pâle, brune,
scabre et un peu fibrillifère en -dessous; lobes rayonnans,
déprimés, plans, dilatés, arrondis, crénelés; scutelles un
peu aplaties, plus pâles en couleur, crénelées sur le bord.
Croît sur les rochers et les écorces d'arbres dans les bois.
12.° Imbricaria CIBOIRE : Imhricaria acetabulum, Decand. ,
FI. fr. , n.° 1062 ; Lichen acetabulum, Jacq. , Coll. , 3 , tab. 9 ,
fig. 1 ; Hoffm., Enum., tab. 18, fig. 2; Dill., Musc, tab. 24,
fig. 79 ; Vaill. , Bot. Par. , tab. 1 1 , fig. 1 3 : Parmelia corrugata ,
Ach. Expansion orbiculaire, membraneuse, un peu ridée,
d'un vert glauque , brun-noir en-dessous et fibrillifère; lobes
incisés, arrondis, lâches, flexueux et plissés , très-entiers;
scutelles amples, flexueuses, rousses ou brunes, à bord
crénelé, ou ridé et vert. Cette espèce, une des plus grandes
de ce genre, et remarquable par la forme des scutelles, croît
sur les écorces des arbres dans les bois.
13." Imbricaria froncé : Imbricaria caperata , Decand.,
FI. fr. , n." io65; Lichen caperalus , Linn.; Wulf, in Jacq.,
Coll., 4, tab. 20, fig. 1; Engl. bot., 654; Hofifm., Enum.,
tab. 19, fig. 2 , et tab. 20, fig. 2 ; Platisma caperatum , ejusd.^
PI. lich. , tab. 58, fig. 1 , tab. Sg, fig. 1 , tab. 42 , fig. 1. Ex-
pansion orbiculaire , coriace , d'un jaune verdàtre pâle ou
soufré , rugueuse , souvent couverte de poussière dans le
milieu, noire et hispide en -dessous; lobes plissés, sinués ,
laciniés, arrondis, presque entiers; scutelles brunes, à bord
verdàtre, recourbé, entier d'abord, puis pulvérulent. Ce
lichen, qui forme quelquefois des plaques larges comme la
main et froncées dans le centre , est commun sur les écorces
d'arbre dans les bois et sur les rochers. On remarque que
dans le premier cas il offre rarement des scutelles.
44 IMB
5. 4' Expansion glahre^ divisée en lobes linéaires,
i4'** Imbricaria lONCTUÉ : Imbricaria conspersa , Decand.,
FI. fr., 11.° 1064 ; Lichen centrifugus, Hoffm. , tab. )o, fig. 5 ,
PL lich., tab. 16, fig, 2. Expansion orbiculaire ou irrégu-
lière, d'un jaune verdàlre pâle, lisse, souvent ponctuée
de noir, d'un brun noirâtre en-dessous et fibrillifère ; dé-
coupures sinuées , lobées , arrondies , crénelées , un peu
aplaties; scutelles situées au centre, brunes, à bord jaunâtre
presque entier. Cette espèce croît sur les rochers et sur les
pierres, dans les lieux montagneux. Elle est quelquefois en-
tièrement pulvérulente dans le centre ; quelquefois aussi
la partie centrale se détruit, et il ne reste que les décou-
pures de la circonférence : c'est ce qui Ta fait confondre
avec le lichen centrifugus , Linn.
i5.° Imbricaria renflé : Imbricaria physodes , Decand.,
Fl.fr., n." 1066; Lichen phy soies , Linn., Hoffm., Enum.,
tab. 1 5 , fig. 2 ; Engl. bot. , tab. 1 26 ; Jacq. , Coll. , 3 , tab. 8 ,
fig. 2 , 3; FI. Dan. , tab. 118S, fig. 2 ; Dill. , Musc, tab. 20,
fig. 49 ; Parmelia physodes , Ach. Expansion arrondie ou ob-
longue, un peu rayonnante sur les bords , d'un blanc glauque
ou grisâtre, à découpures imbriquées, sinuées, multifides,
convexes , glabres , renflées à leurs extrémités et ascen-
dantes, d'un noir brun en -dessous; scutelles rouges, en-
tières sur les bords et nues. Ce lichen est quelquefois un peu
plissé ou chargé sur les bords d'une poussière grisâtre ; quel-
quefois aussi il offre de petits tubercules punctiformes noirs ;
quelquefois encore il est bordé de noir. Sa couleur varie:
dans une variété elle est olivâtre. On le trouve sur les troncs
d'arbres, sur les pierres, à terre, sur les mousses et dans
les bois. ( Lem. )
IMBRICARIA. (Bot.) Ce nom avoit d'abord été donné par
Commerson à un genre de la famille des sapotées, qui a été
réuni au mimusops par Willdenow. M. Smith , suivi par M.
Persoon, a appliqué le même nom h un sous - arbrisseau ,
nommé avant lui rnollia par Gmelin , et jwngia par Gaertner,
mais qui paroît ne pouvoir être séparé de Yescallonia, genre
maintenant voisin de l'airelle dans les éricinées. Un troisième
imbricaria , qui prévaut maintenant, est celui d'Acharius,
IMM 45
fait sur quelques espèces de lichens, et adopté par MM.
Michaux et De Candolle. Voyez Imericaire et l'article précé-
dent. (J.)
IMBRIM. (Ornith.) Ce grand plongeon de la mer du Nord
est le colymbus immer ^ Linn. TCh. D.)
IMBRIQUE. (Bot.) Composé de parties qui se recouvrent
comme les tuiles d'un toit. L'involucre de l'artichaut, par
exemple, la bulbe du lis, etc., sont imbriqués, c'est-à-dire,
composés d'écaillés en recouvrement. Les étamines et les
camares du fruit du tulipier , du magnolia , etc. ; les feuilles
du tamarix gallica , du Juniper us virginiana , du sedum acre;
les graines du cobœa, de Vasclepias , etc.; les divisions du
calice du liseron ; les pétales de la rose , dans la préfleuraison ,
c'est-à-dire, avant l'épanouissement de la fleur, sont encore
des exemples de cette disposition particulière. (Mass.)
IMBUTINI. (Bot.) Micheli désigne par imbutini des bois y
couleur de feuilles mortes, un champignon du genre Peziza
€t voisin du peziza acetabuliformis , de Dillenius. Cette espèce
croît en touffe, et chaque individu forme un petit entonnoir
[imbutino j en italien) stipité. (Lem.)
IMBUTINO. {Bot.) Micheli donne ce nom à plusieurs es-
pèces de petits agarics , dont le chapeau a la forme d'un
petit entonnoir. L'un de ces champignons paroit être Vaga-
ricus rufus , Scop. Ils ne sont d'aucune utilité. (Lem.)
IMERCOTEFLAK (Ornith.) , nom groenlandois de la grande
hirondelle de mer de Buffon, sterna hirundo , Linn. (Ch. D.)
IMGARA , IMGU {Bot.) : noms arabes généraux des
gommes ou sucs végétaux , selon Clusius , lesquels s'appli-
quent plus particulièrement à Vassa fietida extrait d'une
espèce de férule. (J.)
IMMA. {Min.) Valmont de Bomare a introduit ce mot
dans son Dictionnaire, et c'est le seul motif qui nous engage
à en parler d'après lui. C'est, dit-on, le nom persan d'une
ocre rouge. (B.)
IMMÉDIATE [Insertion]. (Bot.) Voyez Insertion. (Mass.)
IMMENFRAS. ( Ornith.) L'oiseau auquel les Allemands don-
nent ce nom et celui d'immenwolf , est le guêpier, merops
apiaster, Linn. (Ch. D.)
IMMISCE -BALUK. {Ichthjol.) Les Turcs nomment ainsi
l'athérine joél, atherina hepsetus. Voyez Athéri;s^e. (H. C.)
46 IMM
IMMORTELLE (Bot.) , nom vulgaire des Helichrymm et des
Xeranthcmum, (H. Cass.)
IMMORTELLES. {Bot.) Adanson a divisé l'ordre des sy-
nanthérées en dix sections, dont la quatrième porte le nom
d'immortelles. Cette section, que Tauteur distingue de celle
des chardons parle péricline non épineux, est tout-à-fait
artificielle; car les quinze genres dont elle se compose ap-
partiennent à neuf tribus naturelles différentes. Vacosta,
le cyanas , une partie du rliacoma, le rhaponticum (Ad.), et
Vamberboi , sont des centauriées; une partie du rhacoma et le
serratula sont des carduinées; le plerophorus est une astérée ;
le tarclionanthus est une vernoniée; le xeranthemum (Tourn.)
est une carlinée ; le lonas , le santolina et le gnaphalium
(Tourn.) sont des anthémidées ; le polyinnia est une hclian-
thée ; le gnaphalodes est une inulée; le denira est une ambro-
siée. (H. Cass.)
IMMUSSULUS. {Oniith.) Ce nom, que divers auteurs
écrivent aussi immusculus , immustulus , est rangé par M. Savigny
( Système des oiseaux d'Egypte) au nombre des synonymes de
l'aigle commun , son aquila fulva et le falco chrysaetos, Linn.
Charleton , Exercitationes , p. 71, n." 8, a appliqué le même
nom d''immussulus à l'orfraie ou grand aigle de mer, falco
ossifraga, Linn. (Ch. D. )
IMO. {Bot.) Ce nom japonois est un de ceux donnés, sui-
vant M. Thunberg , soit à Varum esculentum , espèce de gouet,
dont on mange, dans ce pays, la racine et les tiges ; soit au
convolvulus edulis de cet auteur, dont la racine tubéreuse,
comme celle de la patate, est aussi employée comme nour-
riture dans le Japon. (J.)
IMPALUNCA. {Mamm.) On trouve ce nom dans quelques
auteurs comme étant, au Congo, celui d'une espèce de ga-
zelle. (F. C.)
IMPANGUEZZÉ. {Mamm.) Ce nom, rapporté par Merola,
est, dit -il, au Congo et à Angola, celui de gazelles de
différentes couleurs , très-légères à la course , et armées de
cornes extrêmement longues. (F. C)
IMPARI-PENNÉE [Feuille], {Bot.), pennée avec impaire,
c'est-à-dire, pennée et terminée par une foliole solitaire:
telles sont les feuilles du frêne , de la rose , de l'acacia , etc.
(Mass.)
IMP 47
IMPATIENS. (Bot.) Une espèce de balsamine avoit été
nommée impatiens herba par Dodoens , parce que ses capsules,
parvenues à leur maturité , s'ouvrent avec élasticité au
moindre contact. Ce caractère existe égal-ement dans les
autres espèces connues plus anciennement S'ous le nom de
lalsamina, adopté par tous les auteurs depuis Tragus jusqu'à
Tournefort. Cependant Linnaeus lui a substitué pour nom
générique le mot impatiens, qui, en qualité d'adjectif, ne
peut être employé que comme nom spécifique. Il a donc été
nécessaire de rétablir le nom balsamina, maintenant reçu. (J.)
IMPENNES. (Ornith.) Nom latin, donné par Illiger à sa
41." famille d'oiseaux, composée du seul genre Manchot,
dont les ailes , courtes et recouvertes de petites plumes en
forme d'écaillés, font l'ofiice de nageoires. (Ch. D.)
IMPERATA. (Bot.) Cyrillo faisoit sous ce nom un genre
du lagurus cylindricus , qui est un calamagrostis de M. Kœler.
Mais MM. de Lamarck et Schrader le réunissent au genre
Saccharum . dont il diffère cependant en quelques points.
(Voyez ci-après.) On trouve encore dans l'ouvrage de Mœnch
le gypsophila saxijraga , devenu genre sous le nom de Impe-
ratia, parce qu'il, a , comme les œillets, quatre écailles au
bas du calice. (J.)
IMPERATA, Imperata. (Bot.) Genre de plantes monoco-
tylédones , à fleurs glumacées , de la famille des graminées ,
de la triandrie monogynie de Linnaeus, offrant pour caractère
essentiel : Des épillets géminés à deux fleurs mutiques, en-
tourées d'une touffe lanugineuse ; les valves calicinales plus
longues que celles de la corolle , dont l'inférieure est de
moitié plus courte ; les écailles oblongues et ciliées ; deux ou
trois étamines; deux styles; les stigmates plumeux.
Ce genre a été établi par Cyrilo , adopté par Rob. Brown
et DeBeauvois , pour quelques plantes placées d'abord parmi
les saccharum, tel que le saccharum cjlindricum (Voyez Ca-
namelle), auquel on a ajouté les espèces suivantes.-
Imperata spontané : Imperata spontanea , Beauv. ; Saccha-
rum spontaneum , Linn. ; Kerpa , Rheed. , Malab. , 12 , tab. 4C.
Belle graminée, qui croît sur les côtes du Malabar, aux lieux
aquatiques. Ses tiges sont fistuleuses, hautes de douze pieds;
les feuilles étroites, longues de deu<x: pieds, glabres, roulées
48 IMP
à leurs bords, velues à l'entrée de leur gaine; la paniculc
soyeuse, argentée, longue d'un pied, chargée de fleurs fort
petites, disposées deux à deux, l'une sessile , l'autre pédi-
cellée , munies à leur base d'un paquet de poils soyeux, plus
. longs qu'elles, les environnant en forme de collerette; les
valves lancéolées, aiguës, scarieuses.
Impérata de Valence ; Imperata sisca , Beauv. ; Saccharum
sisca, Cavan., Icon. rar., 5, lab. 292. Cette espèce est très-
rapprochée du saccharum cjUndricum, si toutefois ce n'est
pas la même. Ses tiges sont droites, à peine longues d'un
pied , à trois ou quatre nœuds, couvertes par les gaines des
feuilles, dont les radicales sont roulées , terminées par une
pointe très -aiguë; les caulinaires courtes; les gaines très-
longues; les fleurs réunies en un épi paniculé, muni de poils
argentés, plus longs que les fleurs; les valves de la corolle
égales, chargées d'un duvet blanc ; le calice remplacé par
une touffe de poils blancs ; les semences oblongues. Cette
plante croît aux lieux humides, dans le royaume de Valence.
Impérata de Kœnig : Imperata Kanigil , Beauv.; Saccharum
Kanigii, Retz., Ohs.,fasc. 5, pag. 16. Les tiges de cette plante
s'élèvent plus que celles du saccharum cjlindricum , avec le-
quel, d'ailleurs, elle a beaucoup de rapports; elle s'en dis-
tingue par ses feuilles planes et non roulées : les articulations
sont garnies de poils; les fleurs sont disposées en un épi cylin-
drique ; chacune d'elles ne contient que deux étamines. Cette
plante croit dans les Indes orientales. ( Poir. )
IMPÉRATOIRE; Imperatoria , Lamk. {Bot.) Genre de plan-
tes dicotylédones, de la famille des ombellifères , Juss. , et de
la. pentandrie digjnie, Linn. , dont les principaux caractères
sont d'avoir un calice entier, peu apparent; une corolle
de cinq pétales échancrés , courbés , presque égaux ; cinq
étamines; un ovaire inférieur, surmonté de deux styles; un
fruit comprimé, elliptique, composé de deux graines bor-
dées d'une aile membraneuse, marquées sur le dos de trois
petites côtes.
Les impératoires sont des plantes herbacées, à racines vi-
vaces , à feuilles alternes , composées, et à fleurs blanches,
petites, disposées en ombelles. Le nombre des espèces appar-
tenant à ce genre n'est pas parfaitement déterminé, à cause
iMP '^9
des grands rapports qui existent entre ce dei'nier et les an-
géliques ; ce qui fait que certaines espèces sont placées par
les uns dans les inipératoîres, et par les autres dans les angé-
liques. C. Sprengel , dans le sixième volume du Sjstema ve-
getalilium de Rœmer et Schultes, fîiit mention de six espèces
d'imperaloria. Nous nous contenterons de parler ici des deux
espèces suivantes , dont l'une est la plus anciennement con-
nue et a servi de type au genre.
Lmpératoireostruthier, vulgairement Impératoire autruche,
Benjoin François; Irnperatoria ostruthium, Linn. , Spec. , Syij
Lamk, , Illust. , t. 199, fig. 1. Sa racine est charnue , noueuse,
assez grosse, rameuse, brune en dehors, blanche en dedans,
elle a une odeur forte, aromatique, et une saveur amère,
un peu acre. Cette racine produit une tige cylindrique ,
haute d'un à deux pieds, garnie de feuilles pétiolées, ordi-
nairement divisées en trois folioles larges, trilobées et den-
tées. Les fleurs sont blanches, disposées en une grande om-
belle terminale, composée de vingt à trente rayons. Cette
plante croît en Europe , dans les pressées et sur les montagnes.
C'est du verbe latin imperare ( commander) que dérive le
nom d'impératoire , et il a été donné à l'espèce dont il est
maintenant question, à cause des grandes vertus qu'on lui a
attribuées , et parce qu'avec elle on croyoit que le médecin
pouvoit, en quelque sorte, être le maître des maladies. La
racine, seule partie de la plante qu'on ait employée en mé-
decine, a été conseillée contre la peste, les fièvres putrides,
les empoisonneinens , le scorbut , les fièvres intermittentes,
la chlorose, les coliques flatulentes; mais, après avoir été
très-préconisée autrefois, elle est maintenant presque entiè-
rement tombée en désuétude. Elle jouit cependant d'une
propriété tonique très- prononcée, et son usage peut être
avantageux toutes les fois qu'il s'agit de relever les forces.
On peut la prendre en nature et en pxjudre , depuis douze Jus-
qu'à trente-six grains, et eu infusion à la dose d'un à deux gros.
Impératoire verticillée : Irnperatoria verticillaris , Decand.,
FI. franc., tom. 4, pag. 287; Angelica verticillaris , Linn.,
Mant. •21']. Sa tige est cylindrique, souvent rougeàtre, haute
de trois à cinq pieds, divisée en rameaux verticillés, d'au-
tant plus nombreux qu'on approche davantage du haut de
5o IMP
la plante. Les feuilles sont grandes, trois fois ailées, à folioles
ovales-deltoïdes, fortement dentées en scie, glabres, non dé-
currentes snr leur pétiole. Les ombelles sont grandes, d'un
blanc verdàtre , dépourvues de collerette générale, et à dix
ou douze rayons. Cette espèce croit en Italie dans les mon-
tagnes. (L.D.)
IMPERATOR (Conchjl.) , nom latin du genre de coquilles
que M. Denys de Montfort a appelé en françois Empereur.
Voyez ce mot. (De B.)
IMPER ATORIA. {Bot.) Voyez birÉRAToiEE. (L. D.)
IMPÉRATRICE BLANCHE et IMPÉRATRICE VIOLETTE
(Bot.) : noms de deux variétés de prunes, dont la première
est de grosseur moyenne, ovoïde, blanchâtre , et la seconde
est plus grosse et d'un violet bleuâtre. (L. D.)
IMPÉRIALE. (Bot.) On donne ce nom à trois variétés de
prune. L'une a le fruit gros, ovoïde , d'un violet clair; c'est
l'impériale violette : l'autre , encore plus grosse et blan-
châtre, est l'impériale blanche : la troisième, qui diffère de
la seconde par sa couleur jaune, est l'impériale jaune. (L. D.)
IMPERTINENTE. (Bot.) Nom vulgaire, cité dans la Flore
du Pérou, et donné, on ne sait pourquoi, à un liseron , convol-
vulus liermanniœ , nommé aussi dans le Pérou enredadera. (J.)
IMPIA. (Bot.) On trouve sous ce nom, dans Pline et dans
Césalpin, la plante dite cotonnière ou herbe à coton, flago
germanica, que Tragus nommoit hcUochrj'sos. (J. )
IMPITOYABLE. {Entom.) Coedaert nomme ainsi les larves
qui mangent les boutons de roses. ( C. D.)
IMPOOF. (Mamm.) L'abbé Ray dit que ce nom est celui
du canna , sans rapporter Pautorité sur laquelle il fonde
cette assertion. (F. C.)
IMPOliTUN. [Ornith.) M. Levaillant , tom. 3, pag. 27, de
son Ornithologie d'Afrique, a donné ce nom spécifique à un.
merle très ba'MÎlard , qu'il a fait figurer pi. 106 , n." 2. (Ch. D.)
IMPOSTEUR. (Ichth.Yol.) Plusieurs auteurs ont parlé sous
ce ncm du sparus insidiator , poisson que nous avons décrit a
l'article Filc. Enlisant cet article, on devinera facilement
d'oia li;i est venu cette épithètc. (H. C.)
IMIRESSÎONS DEPLANTES. (Foss.) Voyez Vécét.vvx i-os-
SILES. (D. F.)
INA Si
INACHUS. (Crust.) Genre de crustacés décapodes bra-
chyures , établi par FaÊricius. Voyez l'article Malacosïracés.
(Desm.)
INACHUS. (Foss.) Le cabinet de la monnoie possède un
crustacé de ce genre, auquel M. Desmarest a donné le nom
d'Inachus de Lamarck , J. Lamarchi. Son test, plus long que
large, élargi et arrondi en arrière, rétréci en avant, est
surchargé de tubercules et présente des indices d'épines. Sa
plus grande largeur est d'un pouce environ , et sa longueur
à peu près égale, quoique le rostre manque en entier.
Sa carapace est noire, et sa forme approche de celle des
maja; la région de l'estomac est arrondie et chargée de six
tubercules saillans, savoir un en avant, un second latéral
et le troisième en arrière de chaque côté. La partie anté-
rieure de cette région présente le commencement d'un sillon
longitudinal. Les bords latéraux présentent trois tubercules,
dont le sommet est altéré, et qui ont pu être des épines. La
région du cœur est fort saillante. Les deux régions branchiales
sont postérieures et se touchent; elles sont séparées des autres
par une ligne élevée et crénelée. Elles sont ridées et renflées
de chaque côté. Il se trouve un sinus très-prononcé dans le
milieu du bord postérieur de la carapace. La grosse pièce de
la pince gauche est courte et renflée, et porte un petit tu-
bercule sur son bord supérieur. Les autres parties de ce crabe
sont enveloppées par la pierre et ne peuvent être distinguées.
On ignore où ce crustacé a été trouvé. (D. F.)
INADHÉRENT [Calice], [Bot.), ne faisant point corps
avec l'ovaire. Calice inadhérent, ovaire libre, ovaire supère,
sont trois expressions synonymes. Les labiées, les caryophyl-
iées, etc., ont le calice inadhérent. (Mass.)
INAIA-GUACUIBA. (Bot.) Marcgrave cite sous ce nom
brasilien le cocotier, dont le fruit est nommé inajaguacu. Le
mot inaia s'applique aussi aux palmiers en général. (J. )
INALBUMINÉ [Embrvon], {Bot.), dépourvu d^.Ibumen ,
ou de périsperme : tel est, par exemple , celui de la fève , des
synanthérées, etc. (Mass.)
INALEL, PERIN-NIARA {Bof.) : noms malabares, cités
par Rhéede, du calyptranthes carjophjUifoUa de Willdenow.
dans la famille des myrtécs. (.L)
i^^ INA
INANTHÉRÉE [Étamine], (Bot.), dont le filet est dépourvu
d'anthère. Beaucoup de filets du sparmannia africana, par
exemple, sont dans ce cas. (Mass.)
INAPANCKE [Bot.], nom transcrit dans l'herbier de Ma-
dagascar de Commerson pour Vamaranthus spinosus. (J.)
INAS. {Ornith.) Rondelet a prétendu qu'il falloit lire
ainsi le mot grec oenas ou o/nas, et, en l'appliquant au ganga,
tetrao alchata, Linn. et Lath., il a supposé que, la racine de
Ce terme signifiant fibre , l'intention d'Aristote avoit été de
Caractériser la peau fibreuse de cet oiseau. (Ch. D.)
INCARVILLE, Incarvillea. [Bot.) Genre de plantes dico-
tylédones , à fleurs complètes, monopétalées, de la lamllle
des bignoniées , de la didynamie angiospermie de Linnaeus ,
offrant pour caractère essentiel : Un calice à cinq divisions,
muni de trois bractées ; une corolle en tube , ventrue à
son orifice, à cinq lobes courts, inégaux; quatre étamines
didynames; deux dents sétacées aux anthères des deux éta-
mines inférieures; un ovaire supérieur; le style simple, un
stigmate à deux lames. Le fruit est une capsule en foi-nie de
silique , bivalve , à deux loges ; une cloison opposée aux '
valves ; plusieurs semences ailées.
Incarville de Chine : Incarvillea chinensis, Juss. , Gen., pag.
i38; Lamk. , Encycl. et III. gen., tab. 427. Plante herbacée,
haute d'environ un pied, à tige glabre, anguleuse, striée,
ïnédiocrement rameuse. Les feuilles sont glabres, alternes,
pétiolées , presque deux fois ailées , à folioles étroites, aiguës
et conflnentes. Les fleurs sont presque sessiles, d'un pourpre
violet, disposées en une grappe, ou plutôt un épi droit, lâche,
teru)inal ; leur calice est garni à sa base de trois bractées
étroites, aiguës, un peu pubescentes, ainsi que le calice
divisé à son bord en cinq dents droites, linéaires, étroites,
aiguës; la corolle longue d'un pouce, dilatée et ventrue à
son orifice; ses lobes courts, inégaux, arrondis; les étamines
renfermées dans la corolle, insérées à la base du tube ; les
anthères à deux lobes; l'ovaire surmonté d'un style de la lon-
gueur des étamines; le stigmate élargi, à deux lames inégales
et ouvertes. Le fruit consiste en une capsule glabre, étroite,
iinéaire-subulée , comprimée, ayant la forme d'une silique,
longue au moins de trois pouces, bivalve , à deux loiu'S, ren-
INC 65
fermant des semences ailées. Cette plante a été découverte
aux environs de Pékin par le père Incarville.
Incara'ille A GRANDES FLEURS : Incarvilha grandijlora , Foir. ;
Bignonia chinensis , Lamk. , Encyclop. ; Bignonia grandijlora ,
Willd., Thunb., Jap., pag. 253; Banck, Icon.; Kaempf. ,
tab. 2 1 ; Campsis, Lour. , Flor. Cochin. , ex herbario. Ses tiges
sont grimpantes, radicantes et ligneuses; les feuilles oppo-
sées, ailées avec une impaire, composées de neuf à onze fo-
lioles vertes, ovales - aiguës , glabres, dentées en scie. Les
fleurs sont grandes, très-belles, disposées à l'extrémité des
rameaux en grappes paniculées, d'un aspect fort agréable ;
leur calice est campanule, à cinq divisions assez profondes,
aiguës, presque égales; la corolle campanulée; son tube aussi
long que le calice , puis évasé en un limbe fort grand, à cinq^
divisions larges, arrondies, un peu inégales. Le fruit con-
siste en une capsule presque cylindrique , un peu comprimée
sur les côtés , à peine longue de trois pouces. Cet arbrisseau
croît à la Cochinchine et à la Chine, où on le cultive pour
la beauté de ses fleurs. (Poir.)
INCENDIARIA. {Omith.) Les noms d'aris incendiaria et
avis incineraria , employés par les anciens, ont été appliqués,
peut-être mal à propos, au jaseur de Bohème, ampelis gar-
ruliis , Linn. (Ch. D.)
INCENSARIA. {Bot.) Césalpin nommolt ainsi l'/nz.'Ja odoî-a.
Camerarius donne le même nom à la grande aurone, ahro-
tanum. ( J. )
INCIENSO. (Bot.) Sur le mont Silla, dans le territoire
de Caracas, on nomme ainsi la plante qui est le baillieria
Tieriifulia des auteurs de la Flore équinoxiale. (J.j
INCINÉRATION. {Chim.) C'est l'opération par laquelle
on brûle une matière organique qui contient des parties
fixes minérales , afin d'obtenir ces dernières, que l'on appelle
vulgairement cen-dr<'5. (Ch.)
INCISÉ. (Bot,) Terme général, employé par opposition au
mot entier, lorsqu'il est question du calice, ou pour expri-
mer, lorsqu'il est question d'une feuille, que ses découpures
sont plus profondes que celles qui forment des dents ou des
erénelures. ( Mass. )
INC^iUSES [Étamines], (Bot.), ne saillant point au dehors
54 IJNX
du périanthe. Celles du jasmin , du liJas , du pois et d'autres
légumineuses papilionacécs , sont incluses. Le style du nar-
cisse, du phlox , du lilas, est également inclus. (Mass.)
1NC0MBA^TE [Anthère], {Bot.)-, attachée par son milieu
et dressée de manière que sa moitié inférieure est appliquée
contre le filet; telles sont, par exemple, les anthères de
Van.aryllis forniosissima. (Mass.)
INCOMPARABLE. (Omith.) M. Levaillant a désigné par
cette dénomination une pie de paradis, représentée pi. 20
de ses Oiseaux de paradis, rolliers, etc. ( Ch. D.)
INCOMPLETE [Fleur]. (Bot.) La fleur complète réunit les
organes des deux sexes et les deux enveloppes floi-ales (calice
et corolle). La fleur incomplète est celle où il manque une,
ou deux , ou trois de ces quatre parties. Le lis , le noisettier,
le saururus, etc., ont les fleurs incomplètes.
L'arille est dit incomplet, lorsqu'il ne recouvre la graine
qu'en partie {e^'oiiymus vernicosas). Une cloison est incom-
plète , lorsqu'elle ne sépare qu'incomplètement la cavité péri-
carpienne .- telles sont les cloisons du pavot. (Mass.)
INCONNUE CHENEAU (7?of. ), nom d'une variété de
poire, nommée aussi fondante de Brest. ( L. D.)
INCONNUE LAFARE. {Bot.) Dans quelques cantons on
appelle ainsi la poire de Saint-Germain. (L. D.)
INCRUSTATIONS. {Foss.) On a quelquefois présenté à la
crédulité des personnes peu versées dans la connoissance de
l'histoire naturelle, pour être de véritables pétrifications an-
ciennes, des Fruits , des oiseaux dans leurs nids et d'autres
corps qui n'étoient qu'incrustés. Certaines eaux chargées de
molécules terreuses et calcaires, telles que celles d'Arcueil,
celles de la fontaine de Saint-Alyre pi'ès de Clermont en
Auvergne, et autres, ont la faculté de déposer ces molécules
sur les corps qui s'y trouvent plongés, de s'y cristalliser et de
les enduire d'un moule extérieur qui conserve la forme de
ces corps , mais qui ne les change point en pierre. Tous
ces corps intrustés se rapportent à ceux que nous connoissons
à l'état vivant, et il n'en est pas ainsi des véritables pétrifi-
cations ; elles ont appartenu à un monde ancien, différent
de celui qui txiste auiourd'hui. Ils nous présentent aussi des
corps, tels que des fruits mous ou des oiseaux emplumés,
IND 55
qu'on n'a jamais vus et qu'on ne verra sans doute jamais
pétrifiés. (D. F.)
INCUBATION. (Ornith.) Voyez Œufs. (Ch.D.)
INDAYÉ. (^Ornith.) M. d'Azara décrit, sous le n." 5o de
ses Oiseaux du Paraguay , et à la suite des éperviers , un
oiseau de proie qui en a la taille et la physionomie , et dont
les noms espagnols signifient busard fou et busard à tète noire;
mais qui diflére des éperviers en plusieurs points, surtout
en ce qu'il se nourrit uniquement de vers de terre, de
limaçons, de grillons, etc., et quïl paroît aussi indolent et
aussi stupide que les autres sont vifs et rusés.
Cet oiseau, long de i3 pouces 5 lignes, a 12 pennes d'égale
longueur à la queue, et aux ailes 20 , dont la première est
assez courte et la quatrième la plus longue. Sa tête est
noirâtre, à l'exception d'un filet blanc qui part du front et
s'élargit de chaque côté, jusqu'à la peau nue des joues; les
parties supérieures sont brunes, avec des bandes plus fon-
cées; les pennes caudales sont noirâtres, et l'on remarque
■une teinte rousse sur les deux du milieu ; le dessous du corps
est blanchâtre , avec des raies transversales dorées ; les tarses
et l'iris sont jaunes ; le bec , garni d'une membrane de la
même couleur, a la pointe noire et le reste d'un bleu de
ciel.
M. d'Azara regarde cet oiseau comme devant former un
genre particulier ; mais ni lui ni M. Vieillot n'ont trouvé
des caractères assez tranchés pour l'établir. (Ch. D.)
INDÉFINIES [Étamines]. {Bot.) Le nombre des étamines
n'est constant, dans une espèce donnée, que jusqu'à douze :
dans ce cas on les compte ; elles sont définies. Passé ce
nombre , on ne les compte plus; elles sont indéfinies. Le pa-
vot , la renoncule , la rose , ont les étamines indéfinies.
(Mass.)
INDÉHISCENT {Bot.), n'ayant pas la faculté de s'ouvrir
spontanément: les camares du fruit du tulipier, de la re-
noncule, etc., le légume du cassia Jisiula , etc., par exem-
ple, sont indéhiscens. (Mass.)
INDEL. {Bot.) M. de Lamarck décrit sous ce nom le pal-
mier, qui est le hatou-indel du Malabar, Velate des bota-
nistes. (J. )
56 ÏND
INDÉPENDANCE DES FORMATIONS. (Mm.) Le moè
formation ' désigne, engéognosie, ou lamanicre dont une roche
a été produite, ou un assemblage (système) de masses miné-
rales qui sont tellement liées entre elles, qu'on les suppose
formées à la même époque, et qu'elles offrent , dans les lieux
de la terre les plus éloignés, les mêmes rapports généraux
de gisement et de composition. C'est ainsi que l'on attribue
la forwalion de l'obsidienne et du basalte aux feux souterrains;
c'est ainsi que l'on dit que laformalion du thonschiefer de tran-
sition renferme de la pierre lydienne, de la chiastolithe ,
de l'ampélite , et des couches alternantes de calcaire noir et de
porphyre. La première acception du mot est plus conforme au
génie de la langue; mais elle a rapport à l'origine des choses,
à une science incertaine qui se fonde sur des hypothèses
géogoniques. La seconde acception , aujourd'hui générale-
ment reçue par les minéralogistes françois , a été empruntée
à la célèbre École deWerner : elle indique ce qui est, non
ce que l'on suppose avoir été.
Dans la description géognostique du globe on peut distinguer
dillerens degrés d'agroupement des substances minérales, sim-
ples ou composées, selon que l'on s'élève à des idées plus géné-
rales. Des rodées qui alternent les unes avec les autres, qui
s'accompagnent habituellement et qui offrent les mêmes rap-
ports de gisement , constituent une même formation ; la réu-
nion de plusieurs formations constitue un terrain : mais ces
mots de roches, de formations et de terrains sont employés
comme synonymes dans beaucoup d'ouvrages de géoguosie.
(Voyez Roche, Terrain.)
La diversité des roches et la disposition relative des couches
qui forment la croûte oxidée du globe , ont , dès les temps
Jesplus reculés, fixé l'attention des hommes. Partout où l'ex-
ploitation d'une mine étoit dirigée sur un dépôt de sel, de
houille ou de fer argileux , qui se trouvoit recouvert d'un
grand nombre de couches de nature différente, ce travail
fit naître des idées plus ou moins précises sur le système de
1 Cet article est extrait d'un ouvrage inédit de M. dp Kuniholdt ,
ajnni pour titre : De la superposition des roches dans les deux hénii-
sphères, - ' '
IND 57
roches propres à un terrain de peu d'étendue. Munîs de ces
connoissances locales, remplis des préjugés qui naissent de
l'habitude , les mineurs d'un pays se répandirent dans des
pays voisins. Ils firent ce que les géognostes ont souvent fait
de nos jours : ils jugèrent du gisement des roches dont ils
îgnoroicnt la nature , d'après des analogies incomplètes,
d'après les idées étroites qu'ils s'étoient faites dans leur pays
natal. Cette erreur dut avoir une influence funeste sur le
succès de leurs nouvelles recherches. Au lieu d'étudier la
liaison de deux terrains contigus, en suivant quelque couche
généralement répandue; au lieu d'agrandir et d'étendre,
pour ainsi dire, le premier t^ye de formations qui étoit resté
gravé dans leur esprit, ils se persuadèrent que chaque por-
tion du globe avoit une constitution géologique entièrement
différente. Cette opinion populaire très-ancienne a été adoptée
et soutenue, en différens pays , par des savans trè^-distingués ;
mais, dés que la géognosie s'est élevée au rang d'une science,
que l'art d'interroger la nature a été perfectionné, et que
des voyages entrepris dans des contrées lointaines ont offert
une comparaison plus exacte des divers terrains , de grandes
et immuables lois ont été reconnues dans la structure du
globe et dans la superposition des roches. C'est alors que les
analogies les plus frappantes de gisement, de composition et
de corps organiques renfermés dans des couches contempo-
raines , 'se sont manifestées dans les deux Mondes. A mesure
qu'on s'habitue à considérer les formations sous un point de
vue plus général, leur idenùté même devient de jour en jour
plus probable.
En effet, en examinant la masse solide de notre pla-
nète, on s'aperçoit bientôt que quelques-unes de ces subs-
tances que l'oryctognosie (ou minéralogie descriptive) nous
a fait connoître isolément, se renconti^ent dans des associa-
tions constantes , et que ces associations, que l'on désigne sous
le nom de roches composées, ne varient pas, comme les êtres
organisés, selon la différence des latitudes ou des bandes
isothermes sous lesquelles on les trouve. Les géognostes qui
ont parcouru les pays les plus éloignés, n'ont pas seulement
rencontré dans les deux hémisphères la plupart des mêmes
substances simples , le quarz, le feldspath , le mica, le grenat
S8 Ijyfj)
ou l'amphibole : ils ont aussi reconnu que les grandes masses
de montagnes présentent presque partout les mêmes roches,
c'est-à-dire les mêmes assemblages de mica , de quarz et de
feldspath, dans le granité; de mica, de quarz et de grenats,
dans Je micaschiste ; de feldspath et d'amphibole dans la syé-
nite. Si quelquefois on a cru d'abord qu'une roche appartenoit
exclusivement à une seule portion du globe, on l'a constam-
ment trouvée, par des recherches ultérieures, dans les
régions les plus éloignées de la première localité. On est tenté
d'admettre que la formation des roches a été indépendante
de la diversité des climats; que peut-être même elle leur est
antérieure (Humboldt, Géoirraphie des plantes , 1807 , p. ;i5;
Idem, Vues des Cordillères, tome 1.*', p. 122). Il y a identité
de roches là où les êtres organisés sont le plus diversement
modifiés.
Mais cette identité de composition, cette analogie que
l'on observe dans l'association de certaines substances miné-
rales simples, pourroit être indépendante de l'analogie de
gisement et de superposition. On pourroit avoir rapporté
des iles de l'Océan Pacifique, ou de la Cordillère des Andes,
les mêmes roches que l'on observe en Europe, sans qu'il
fût permis d'en conclure que ces roches sont superposées
dans un ordre semblable, et qu'après la découverte d'une
d'elles on puisse prédire avec quelque certitude quelles sont
les autres roches qui se trouvent dans les mêmes lieux. C'est
a rcconnoître ces analogies de gisement et de positions res-
pectives, que doivent tendre les travaux des géognostes qui
se plaisent à étudier les lois de la nature inorganique. On a
tenté de réunir dans les tableaux suivans ce que nous savons
de plus certain sur la superposition des roches dans les deux
continens, au nord et au sud de l'équateur. Ces types de
formations ne seront pas seulement étendus , mais aussi di-
versement modifiés , à mesure que le nombre des voyageurs
exercés aux observations géognostiques se trouvera agrandi,
et que des monographies complètes de divers cantons très-
éloignés les uns des autres fourniront des résultats plus
précis.
L'exposition des lois que l'on reconnoît dans la superpo-
sition des roches, forme la partie la plus solide de la science
IND 69
géognostiquc. On ne sauroit nier que les observations de
gisement présentent souvent de grandes diflicultés , lors-
qu'on ne peut parvenir au contact de deux forir.alions voi-
sines, ou que celles-ci n'offrent pas une stratifica tion régulière^
ou que leur gisement n'est pas uniforme, c'est-à-dire que les
strates du terrain supérieur ne sont pas parallèles aux strates
du terrain inférieur. Mais ces difficultés (et c'est là un des
grands avantages des observations qui embrassent une partie
considérable de notre planète) diminuent en nombre ou dis-
paroissent totalement par la comparaison de plusieurs terrains
très-étendus. La superposition et l'âge relatif des roches sont
des faits susceptibles d'être constatés immédiatement , comme
la structure des organes d'un végétal, comme les proportions
des élcmens dans l'analyse chimique, ou l'élévation d'une
montagne au-dessus du niveau de la mer. La véritable
géognosie (ait connoître la croûte extérieure du globe
telle qu'elle existe de nos jours. C'est une science aussi sûre
que peuvent l'être les sciences physiques descriptives. Au
contraire, tout ce qui a rapport à l'ancien état de notre pla-
nète, à ces fluides qui, dit-on, tenoient toutes les substances
minérales en dissolution , à ces mers que l'on élève jusqu'aux
sommets des Cordillères pour les faire disparoitre dans la
suite, est aussi incertain que le sont la formation de Tat-
mosphère des planètes , les migrations des végétaux , et l'ori-
gine des différentes variétés de notre espèce. Cependant
l'époque n'est pas très-éloignée où les géologues s'occupoient
de préférence de ces problèmes presque impossibles à résou-
dre , de ces temps fabuleux de l'histoire physique du monde.
Pour faire mieux comprendre les principes d'après lesquels
est construit le tableau de la superpositii:)n des roches, nous
devons le faire précéder de quelques observations que fournit
l'étude pratique des différens terrains. Nous commencerons
par rappeler qu'il n'est pas aisé de circonscrire les limites
d'une même formation. Le calcaire du Jura et le calcaire
alpin , très-séparés dans une région, paroLssent parfois étroite-
ment liés dans une autre. Ce qui annonce l'indépendance d'une
formation , comme l'a très-bien observé M. de Buch, c'est sa
superposition immédiate sur des roches de diverse nature
et qui par conséquent doivent toutes être considérées comme
^o IND
plus anciennes. Le grès rouge est une formation indépen-
dante , parce qu'il csf superposé indiff'crcui aient sur du cal-
caire uoir (de transition), sur du micaschiste ou du gra-
nité primitifs; mais, dans une région où domine la grande
formation de syénile et de porphyre, ces deux roclies alter-
nent constamment. Il en résulte que la roche syénitique
y est dépendante du porphyre , et n'y recouvre presque
nulle part seule le thonschiefer de transition ou le gntis pri-
mitif. L'indépendance des formations n'exclut d'ailleurs au-
cunement Vuniforiiiité ou concordance de gisement ; elle exclut
plutôt le pass;'ge oryctognostique de deux formations super-
posées. Les terrains de transition ont très-souvent la même
direction et la même inclinaison que les terrains primitifs;
et cependant, quelque rapprochée que puisse être l'époque
de leur origine , on n'en est pas moins fondé à considérer
le micaschiste anthraciteux ou le grauwacke , alternant avec
du porphyre, comme deux formations indépendantes des
granités et des gneîs primitifs qu'ils recouvrent. L'unifor-
mité de gisement {Gleichforwigkeit dcr Lageriing) ne fait rien
préjuger contre l'indépendance des formations, c'est-a-dire
sur le droit que l'on a de regarder une roche comme une for-
mation distincte. C'est parce que les formations indépendantes
sont placées indifféremment sur toutes les roches plus an-
ciennes (la craie sur le granité, le grès rouge sur le mica-
schiste primitif), que la réunion d'un grand nombre d'ob-
servations faites sur des points très-é!oignés devient éminem-
ment utile dans la détermination de Vàge relatif des roches.
Pour reconnoître que la syénite zirconienne est une roche
de transition, il faut lavoir vue placée sur des formations
postérieures à des calcaires noirs remplis d'orthocératites.
Des observations faites sur les porphyres et syénitcs de la Hon-
grie par M. Beudant, un des géologues les plus distingués de
notre temps, peuvent jeter beaucoup de jour sur les forma-
tions des Andes mexicaines. C'est ainsi qu'un nouveau végétal
découvert dans l'Inde lait reconnoître l'affinité naturelle
entre deux familles de plantes de l'Amérique équinoxiale.
L'ordre que Ion a suivi dans le tableau des formations est
celui du gisement et de la position respective des roches. Je
ne prétends pas que ce gisement et cette position s'observent
IND 61
dans toutes les régions de la terre; je les indique tels qu'ils
m'ont paru le plus probables d'après la comparaison d'un
grand nombre de faits que j'ai recueillis. C'est l'idée de Tàge
relatif qui m"a guidé dans ce travail, bien imparfait encore.
Je l'ai commencé, long-temps avant mon voyage dans les Cor-
dillères du Nouveau Continent, dès l'année 179'-^ , où, sortant
Je l'École de Freyberg, j'étois chargé (comme OierZ-ergme/sier)
de la direction des mines dans les montagnes du Fichtelge-
birge. La même roche peut varier de composition, des parties
intégrantes peuvent lui être soustraites, de nouvellessubstances
peuvent s'y trouver disséminées, sans que pour cela, aux yeuK
du géognoste qui s'occupe de la superposition des terrains, la
roche doive changer de dénomination. Sous l'équateur, comme
dans le nord de l'Europe, des strates d'une véritable syénite de
transition perdent leur amjihibole, sans que la m:'.sse devienne
une autre roche. Les granités des bords de l'Orénoque pren-
nent quelquefois de ramphi])ole et ne cesstnt guère pour
cela d'être du granité primitif, quoiqu'ils ne soient pas de
la première ou plus ancienne formation. Ces faits ont été
reconnus par tous les géognostes expérimentés. Le caractère
essentiel de l'identité d'une form.ation indépendante est soa
rapport déposition, la place qu'elle occupe dans la série
générale des terrains. (Voyez le mémoire cliissique de M.
de Buch, Ueber den Begriff einer Gebirgsart , dans Mag. der
ISaturf., 1810, p. 128 — i53.) C'est pour cela qu'un fragment
isolé , un échantillon de roche trouvé dans une collection ,
ne peuvent être déterminés géognostiquement , c'est-à-dire
comme formation constituant une des nombreuses assises
dont se compose la croûte de notre planète. La chiastolithe,
l'accumulation de carbone ou des nœuds de calcaire com-
pacte dans les thonschiefer , le titane -nigrine et Tépidote
dans les syénifes (alternant avec un granité et des porphyres),
des conglomérais ou poudingues enchâssés dans un mica-
schiste anthraciteux , peuvent sans doute faire reconnoifre
des formations de transition ; de même que, d'après les utiles
travaux de M. Brongniart , des pélrilications de coquilles bien
conservées indiquent quelquefois direcitemetit telle ou telle
couche de terrains tertiaires. Mais ces cas, '011 l'on est guidé
par des substances disséminées ou par des caractères purç-
^2 IND
ment zoologîques , n'embrassent qu'un petit nombre de
roches d'une origine récente ; souvent des observations de
ce genre ne conduisent qu'à des faits négatifs. Les caractères
tirés de la couleur du grain et des petits liions de carbo-
nate de chaux qui traversent les roches calcaires; ceux que
fournissent la fissilité et l'éclat soyeux du thonschiefer. l'aspect
et les ondulations plus ou moins marquées des feuillets du
mica dans les micaschistes ; enfin , la grandeur et la colo-
ration des cristaux de feldspath dans les granités de diffé-
rentes formations, peuvent, comme tout ce qui tient sim-
plement à Vhahitus des minéraux, induire en erreur l'ob-
servateur le plus habile. Sans doute , les teintes blanches et
les noires distinguent le plus souvent les calcaires primitifs
et de transition; sans doute, la formation du Jura, surtout
dans ses assises supérieures, est généralement divisée en
couches minces, blanchâtres, à cassure matte, égale ou
conchoïde, avec des cavités très- aplaties (Jlachmuschlig) -.
mais dans les montagnes de calcaire de transition il y a des
masses isolées qui, par leur couleur et leur texture, se rap-
prochent des caractères oryctognostiques de la formation du
Jura; mais au sud des Alpes il y a des collines de terrains
tertiaires où ce même calcaire fissile et mat du Jura trouve
ses analogues (quant à l'aspect) dans des formations placées
au-dessus de la craie , et qui ressemblent au calcaire que l'on
recherche pour les usages de la lithographie. Si l'on préfère
de donner aux formations des noms tirés de leurs seuls
caractères oryctognostiques , les divers strates d'une même
roche composée, dont l'épaisseur est considérable et que l'on
poursuit très-loin dans le sens de sa direction {Streichungslinie),
sembleroient souvent appartenir a des roches différentes,
selon les points où l'on en prendroit des échantillons. Par
conséquent on ne peut guère déterminer géognostiquemcut
dans les collections que des suites de roches dont on connoît la
superposition mutuelle.
En énonçant ces idées sur le sens que l'on doit attacher au
mot formations indépendantes, lorsqu'il s'agit du tableau de
leur gisement, on est bien loin de méconnoître les émincns
services que l'examen oryctognostique le plus rigoureux ,
l'étude approfondie de la composition des roches, ont rendus
IND 65
à la géognosie moderne , et nommément à la science du
gisement ou de la position respective des formations. Quoi-
que, d'après les découvertes de M. Haiiy sur la nature in-
time des substances inorganiques et cristallisées, il n'existe
pas, à proprement parler , un passage d'une espèce minérale
à une autre (Cordier, sur les roches volcan., p. 33, et Ber-
zelius, Nouv. Sjst. de Minéral,, pag. 119), les passages des
masses ou pâtes de roches ne sont pas restreints aux forma-
tions que l'on distingue généralement par le nom de roches
composées. Celles que l'on croit simples, par exemple, les
calcaires de transition ou les calcaires secondaires, sont en
partie des variétés amorphes d'espèces minérales dont il
existe un type cristallisé , en partie des agrégats d'argile ,
de carbone, etc., qui ne peuvent être soumis à aucune
détermination fixe. C'est sur les proportions variables de
ces mélanges hétérogènes que se fonde le passage des cal-
caires marneux à d'autres formations schisteuses, f Haiiy,
Tableau comparatif de la Cristallographie, p. XXVII , XXX.)
Toutes les pâtes amorphes des roches, quelque homogènes
qu'elles paroissent au premier aspect, les bases des porphyres
et des euphotidcs (serpentines) , comme ces masses noires
problématiques qui constituent le basanite (basalte) des an-
ciens , et qui ne sont pas toutes des griinstein surchargés
d'amphibole, sont susceptibles d'être soumises à l'analyse mé-
canique. M. Cordier a appliqué cette analyse d'une manière
ingénieuse aux diabases (griinstein) , aux dolérites , et à
d'autres productions volcaniques plus récentes. L'examen
oryctognostique le plus minutieux en apparence ne peut être
indifférent au géognoste qui examine l'âge des formations.
C'est par cet examen qu'on peut se former une juste idée de
la manière progressive dont, -par développement intérieur , c'est-
à-dire par un changement très-lent dans les proportions des
élémens de la masse , se fait le passage d'une roche à une roche
voisine. Les schistes de transition, dont la structure paroît
d'abord si différente de la structure des porphyres ou des
granités, offrent à l'observateur attentif des exemples frap-
pans de passages insensibles à des roches grenues, porphy-
roïdes ou granitoïdes. Ces schistes deviennent d'abord ver-
dàtres et plus durs. A mesure que la pâte amorphe reçoit de
64 IjVD
l'amphibole, elle passe à ces amphibolithes trappéeuncs qU oo
confondoit jadis avec le basalte. Ailleurs, le mica, d'abord
caché dans la pâte amorphe , se développe et se sépare en
paillettes distinctes et nettement cristallisées ; en même temps
le feldspath et le quarz deviennent visibles; la niasse paroît
grenue a grains très-alongés : c'est un vrai gneis de transition.
Peu à peu les grains perdent leur direction commune ; les
cristaux se groupent autour de plusieurs centres, la roche
devient un granité ou une syénite de transition. Ailleurs
encore le quarz seul se développe , il augmente et s'arrondit
en nœuds, et le schiste passe au grauwacke le mieux carac-
térisé. A ces signes certains les géognostes qui ont étudié
long-temps la nature, reconnoissent d'avance la proximité
des roches grenues, granitoïdcs et arénacées. Des passages
analogues du micaschiste primitif à une roche porphyroïde,
et le retour de cette roche au gneis, s'observent dans la
Suisse orientale. (Voyez les développemens lumineux qu'ont
donnés M. de Raumer , Fragmente , p. lo et 47 ; M. Léopold
de Buch , dans son Voyage de Claris à Chiavenna , fait en i8o5
et inséré dans le Magaz. der Berl. Naturf., tom. 3, p. 116.)
Mais ces passages ne sont pas toujours insensibles et pro-
gressifs : souvent aussi les roches se succèdent brusquement j
et d'une manière bien tranchée; souvent (par exemple,
au Mexique, entre Guanaxuato etOvexeras) les limites entre
les schistes, les porphyres et les syénites sont aussi distinctes
que les limites entre les porphyres et les calcaires; mais dans
ce cas même des bancs hétérogènes intercalés indiquent des
rapports géognostiques avec les roches superposées. C'est ainsi
que le granité de transition de la formation syénitique offre
des couches de basanite, en se chargeant d'amphibole : c'est
ainsi que ces mêmes granités passent quelquefois à l'euphotide.
(Buch, Voyage en ISorvfége, tom. I, p. i38 , tom. 11 , p. 83.)
11 résulte de ces considérations, que l'analyse mécanique
des pâtes amorphes, au moyen de demi- triturations et de
lavages (analyse dont M. Fleuriau de Bellevue a fait le pre-
mier essai qui ait été couronné de succès, Journ. de Phjshiue,
tom. Ll, p. 162) , répand à la fois du jour, 1." sur les grands
cristaux qui s'isolent et se séparent des cristaux microsco-
piques entrelacés dans la masse; 2.° sur les passages mutuels
IND 65
de quelques roches superposées les unes aux autres ; 5." sur
les couches subordonnées qui sont de même nature qu'un
des élémens de la masse amorphe. Tous ces phénomènes
sont produits , pour ainsi dire , par développement inté-
rieur, par une variation quelquefois lente , quelquefois très-
Lrusque, dans les parties constituantes d'une masse hétérogène.
Des molécules cristallines, invisibles à l'œil, se trouvent
agrandies , dégagées du tissu serré de la pâte; insensiblement
elles deviennent, par leur agroupement et leur mélange
avec de nouvelles substances, des bancs intercalés d'une
puissance considérable ; souvent même elleg deviennent de
nouvelles roches.
Ce sont les bancs intercalés qui méritent surtout la plus
grande attention ( Leonhai'd , Kopp et Gasrtner , Propced. der
Miner. , p. i58). Lorsque deux formations se succèdent im-
médiatement, il arrive que les couches de l'une commencent
d'abord à alterner avec les couches de l'autre , jusqu'à ce
que (après ces préludes d'un grand changement) la forma-
tion la plus nejive se montre sans aucun mélange de couches
subordonnées. (Buch, Geogn. Beob., tome 1, p. 104, i56;
Humboldt , Rel. hist. , tome II, p. 140.) Les développemens
progressifs des élémens d'une roche peuvent par conséquent
avoir une influence marquante sur la position respective des
masses minérales. Leurs effets sont du domaine de la géo-
gnosie ; mais , pour les découvrir et pour les apprécier, l'ob-
servateur doit appeler à son secours les connoissances les
plus solides de l'oryctognosie , surtout celles de la cristallo-
graphie moderne.
En exposant les rapports intimes par lesquels nous voyons
souvent liés les phénomènes de composition aux phénomènes
de gisement, je n'ai point eu l'intention de parler de la mé-
thode purement orjctognostique, qui considère les roches
d'après la seule analogie de leur composition. (Journal des
mines, tome 54, n.° 19g. ) Ce sont là de véritables clas-
sifications, dans lesquelles on fait abstraction de toute idée
de superposition, mais qui n'en peuvent pas moins donner
îieu à des considérations intéressantes sur l'agroupement
constant de certains minéraux. Une classification purement
«ryctognostique multiplie les noms des roches plus que ne
-3. 5
66 l]SI}
l'exigent les besoins de la géognosie, loiirju'elle s'occupe des
gisemens seuls. Selon les changemens qu'éprouvent les roches
mélangées, un même strate de beaucoup d'étendue et d'une
grande épaisseur peut ( nous devons le répéter ici) renfermer
des parties auxquelles l'oryctognoste , qui classe les roches
d'après leur composition , donnera des dénominations entiè-
rement différentes. Ces remarques n'ont pas échappé au savant
auteur de la Classification miner alogi que des roches; elles dé-
voient se présenter à un géognoste expérimenté qui a si bien
approfondi la superposition des terrains qu'il a parcourus. «II
« ne faut pas confondre, dit M.Brongniart, dans son mémoire
« récent sur le Gisement des Ophiolithes , les positions res-
« pectivcs , l'ordre de superposition des terrains et des roches
« qui les composent, avec des descriptions purement miné-
« ralogiques ( oryctognostiques). Leur confusion en jeteroit
« nécessairement dans la science et en retarderoit les pro-
« grès. ^^ Le tableau que nous donnons à la fin de cet article
n'est aucunement ce que l'on appelle une classification des
roches; on n'y trouve pas même réunies, sous le titre de sec-
tions particulières (comme dans l'ancienne méthode géognos-
tique de \'\'erner, ou dans l'excellent Traité de Géognosie de
M. d'Aubuisson ), toutes les formations primitives de granité,
toutes les formations secondaires de grès et de calcaire. On
a tâché, au contraire, de placer chaque roche comme elle se
trouve dans la nature, selon l'ordre de sa superposition ou
de son âge respectif. Les différentes formations de granité
sont se, arées par des gneis , des micaschistes, des calcaires
noirs (de transition) et des grauvvackes. Dans les roches de
trai;siiion on a éloigné les formations des porphyres et des
syénifes du Mexique et du Pérou , qui sont antérieures
au grauwacke et au calcaire à orthocératites , de la forma-
lioa. beaucoup plus récente, des porphyres et des s^énitcs
zirconiennes de la Scandinavie. Dans les roches secondaires
on a éloigné le grès à oolithes de Nebra, qui (.st ])os[érieur
au cah-aire alpin ou zechstein, du grès rouge (grès houiller).
qui appartient à une même formation avec le pt.rphyre et
le mandelstein secondaires. D'après le principe que nous
suivons, les mêmes noms de roches se retrouvent pluiieuri
fois dans le même tableau. Un micaschiste anthracitcux (de
IND C7
transition ) est séparé , par un grand nombre de formations
plus anciennes , du micaschiste antérieur au thonschiefer
primitif.
Au lieu d'une classification des roches granitiques , schis-
teuses , calcaires et arénacées (agrégées), j'ai voulu pré-
senter une esquisse de la structure géognostique du globe,
un tableau dans lequel les roches superposées se succèdent,
de bas en haut , comme dans ces coupes idéales que j'ai
dessinées, en 1804, à l'usage de V Ecole des mines de Me. vice .
et dont beaucoup de copies ont été répandues depuis mon
retour en Europe {Bosquejo de una Pasigrajia geognostica .
con tablas que ensenan la estraiijicacion y el parallelismo de las
rocas en amhos continentes , para el uso del Lieal Seminario de
Mineria de Mexico). Ces tableaux pasigraphiques réunissoient^
il mes propres observations faites dans les deux Amériques,
ce qu'à cette époque on avoit recueilli de plus précis sur le
^gisement des roches primitives, intermédiaires et secondaires,
dans l'ancien continent. Elles oflTroient, avec le type que l'on
pouvoit regarder comme le plus général , les types secon-
daires, c'est-à-dire les couches que j'ai nommées parallèles.
Cette même méthode a été suivie dans le travail que je publie
aujourd'hui. Mes formations para//è/« sont des équi^alens géo-
gnostiques; ce sont des roches qui se représentent les unes
les autres (voyez le Traité de Géologie de M. d'Aubaisson ^ t. II,
p. 255). En Angleterre et sur le continent de l'Eiirope opposé.,
il n'existe pas une identité de toutes les forniations : îl y
existe des équivalens ou des formations parallèles. Celle de
nos houilles situées entre les terrains de transition et le grès
rouge , la position du sel gemme qui se trouve sur le continent
dans le calcaire alpin (zechstein), la position de nos oolithei
dans le grès de Nebra et dans le calcaire du Jura peuvent guider
le géognoste dans le rapprochement des formations éloignées.
On observe en Angleterre les houilles (eoal-mesures) placée?,
sur des formations de transition, par exemple, sur le calcaire
ou mountain-limestone du Derbjshire et de South-AA aies, et
sur le grès de transition ou old red sandstone rie Herfordsliire.
J'ai cru reconnoitre dans le magnesian-limestone, le red-marl,
le lias et les oolithes blanches de Bath, les formations réunies de
calcaire alpin (avec sel gemme), de grès à oolithes (bunte
08 IND
sandstein) -et de calcaire du Jura. En comparant les i'orma-
tions de pays plus ou moins éloignés, celles de l'Angle-
terre et de la France, du Mexique et de la Hongrie, du
bassin secondaire de Santa-Fé de Bogota et de laThuringe,
il ne faut pas vouloir opposer à chaque roche une roche pa-
rallèle; il faut se rappeler qu'une seule formation peut en
représenter plusieurs autres. C'est ainsi que des bancs d'argile
inférieurs a la craie peuvent, en France (cap la Hève,
près de Caen), être séparés de la manière la plus tranchée
des couches calcaires oolithiques, tandis qu'en Suisse, en
Allemagne et dans l'Amérique méridionale , ils ont pour
équivalens des bancs de marnes subordonnés au calcaire du
Jura. Les gypses qui, dans un district, ne sont quelquefois
que des couches intercalées dans le calcaire alpin ou le
grès à oolithes, prennent, dans un autre district, toute l'ap-
parence de formations indépendantes , et se trouvent placés
entre le calcaire alpin et le grès à oolithes, entre ce grès et
le muschelkalk (calcaire de Guettingue ). Le savant professeur
d'Oxford, M. Buckland , dont les recherches étendues ont
été également utiles aux géognostes de l'Angleterre et du
continent, a publié récemment un tableau de formations pa-
rallèles, ou, comme il les appelle aussi, équivalents of rocks,
qui ne s'étend que du 44." au 64." degré de lat. bor. , mais
qui mérite la plus grande attention. {On the structure of tke
Alps , and their relation with the rocks ofEngland, 1821.)
De même que dans l'histoire des peuples anciens il est plus
facile de véritier la série des événemens dans ciiaque pays
que de déterminer leur coïncidence mutuelle, demêmeaussi
on parviendra plutôt à connoitre avec la plus grande exac-
titude la superposition des formations dans des régions iso-
lées, qu'à déterminer l'âge relatif ou le parallélisme des for-
mations qui appartiennent à dilférens systèmes de roches.
Même dans des pays peu éloignés les uns des autres, en
France, en Suisse et en AUeiiiagne, il n'est pas aisé de fixer
l'ancienneté relative du muschelkalk, de la molasse d'Argovie
et du quadersandstein du Harz , parce que Fou manque le
plus souvent de roches généralement répandues, servant,
selon l'expression heureuse de M. de Gruner, d'horizon géo^
gnosti-^iue, et auxquelles on pourroit comparer les trois for-
IND 69
mations que nous venons de nommer. Lorsque des roches ne
sont pas en contact immédiat , on ne peut juger de leur
parallélisme que par leurs rapports d'âge avec d'autres forma-
lions qui les unissent.
Ces recherches de géognosîe comparée occuperont encore
long-temps la sagacité des observateurs , et il n'est pas sur-
prenant que ceux qui s'attendoient à retrouver chaque for-
mation dans toute l'individualité de son gisement, de sa
structure intérieure et de ses couches subordonnées, finissent
par nier toute analogie de superposition. J'ai eu l'avantage
de visiter, avant mon voyage à l'équateur, une grande partie
de l'Allemagne, de la France, de la Suisse, de l'Angle-
terre , de rilalie , de la Pologne et de l'Espagne. Pendant ces
courses, mon attention étoit particulièrement fixée sur le gi-
sement des formations, phénomène que je comptois discuter
dans un ouvrage particulier. Arrivé dans l'Amérique du Sud,
et parcourant d'abord en différentes directions le vaste terrain
qui se prolonge de la chaîne côtière de Venezuela au bassin
de l'Amazone , je fus singulièrement frappé de la confor-
mité de superposition qu'offrent les deux continens. (Voyez
ma première esquisse d'un tableau géologique de l'Amérique
équinoxiale, dans le Journ. de phjs., T. LUI, p. 5o.) Des
observations postérieures, qui embrassoient les Cordillères
du Mexique, de la Nouvelle -Grenade, de Quito et du
Pérou, depuis le 21." degré de latitude boréale jusqu'au
12.* degré de latitude australe, ont confirmé ces premiers
aperçus. Le type des foi'mations s'est plutôt agrandi à mes
yeux, qu'il ne s'est altéré dans ses parties les plus essen-
tielles. Mais, en parlant des analogies que Ion observe dans
le gisement des roches et de Puniformité de ces lois qui nous
révèlent Tordre de la nature, je puis citer un témoignage
bien autrement imposant que le mien , celui du grand géo-
gnoste dont les travaux ont le plus avancé la connoissance
de la structure du globe. M. Léopold de Buch a poussé ses
recherches de Parchipel des îles Canaries jusqu'au-delà du
cercle polaire, au 71." degré de latitude. Il a découvert de
nouvelles formations placées entre les formations ancienne-
ment connues; et, dans les terrains primitifs comme dans
les terrains de transition, dans les secondaires comme dans
70 IND
les volcaniques, il a été frappé des grands traits qui carac-
térisent le tableau des formations dans les régions les plus
éloignées.
Du scepticisme qui nie tout ordre dans le gisement des
roches , il faut distinguer une opinion qui renaît , de temps en
temps, parmi des observateurs très-expérimentés, et d'après
laquelle les foruiations de granite-gneis, de grauwacite, de
calcaire alpin et de craie , uniformément superposées dans
différens pays, ne correspondent guère entre elles par rap-
port à làge des élémens homonymes de chaque série. On croit
qu'une roche secondaire peut avoir été formée sur un point
du globe, lorsque les roches de transition n'existoient pas en-
core siir un autre point. Dans cette supposition , il ne s'agit
pas de ces roches granitiques qui recouvrent un calcaire rem-
pli d'orthocératitcs , et qui sont par conséquent postérieures
aux roches primitives. C'est un fait généralement reconnu
de nos jours, que des formations de composition analogue se
sont répétées à des époques très-éloignées les unes des autres.
Le doute que nous exposons, sans le partager nous-mêmes,
porte sur un point beaucoup moins constaté, sur la question
de savoir si des micaschistes indubitablement placés dans un
pays au milieu de roches primitives (au-dessous de celles
dans lesquelles la vie organique commence à paroître), sont
plus neuves que les roches secondaires d'un autre pays.
J'avoue que, dans la partie du globe que j'ai pu examiner,
je n'ai rien vu qui semble confirmer cette opinion. Des
roches grenues syéniliques répétées deux, peut-être même
trois fois, dans des terrains primitifs, intermédiaires (et se-
condaires?) sont des phénomènes analogues qui nous sont
devenus fiiniiiicrs depuis quinze ans; mais la non-concordance
d'âge des g'-anf's terrains homonymes ne me semble guère
prouvée jusq[t»'ici par des observations directes, faites sur le
contact de formations superposées. La craie ou le calcaire
du Jura peut, d'un côté, couvrir immédiatement le gra-
nité primitif, et de l'autre en être séparé par de nom-
breuses roches secondaires et de transition : ces faits très-
communs ne démontrent que la soustraction, l'absence, le
non- développement de plusieurs membres intermédiaires de
ja série géognostique. Le grauwackc peut, d'un côté, plonger
IND 71
sous une roche feldspathique , par exemple, sous du granité
de transition ou sous la S)énite zirconienne , et, de l'autre
côté, être superposé à du calcaire noir rempli de madré-
pores : ce gisement ne démontre que la position intermédiaire
d'une couche de grauwacke entre des roches calcaires et des
roches feldspathiques de transition. Depuis que, parles tra-
vaux importans de MM. Cuvier et Brongniart, l'examen ap-
profondi des corps organisés fossiles a répandu comme une
nouvelle vie dans l'étude des terrains tertiaires, la découverte
des mêmes fossiles dans des couches analogues de pays trés-
éloignés a rendu encore plus probable l'isochronisme de for-
mations très-généralement répandues.
C'est cet isochroiiisme seul , c'est cet ordre admirable de
succession, qu'il semble donné à l'homme de reconnoître avec
quelque certitude. Les essais que des géologues hébraï/ans ont
faits pour soumettre les époques à des mesures absolues du
temps, et pour lier la chronologie d'anciens mythes cosmo-
goniques aux observations mêmes de la nature , n'ont pu être
qu'infructueux. «On a voulu plus d'une fois, dit M. Ramond
« dans un discours rempli de vues philosophiques, trouver
« dans les monumens de la nature un supplément à nos
« courtes annales. C'étoit pourtant assez des siècles histori-
« ques pour nous apprendre que la succession des événemens
« physiques et moraux ne se règle point sur la marche
« uniforme du temps , et ne sauroit par conséquent en
« donner la mesure. Nous voyons derrière nous une suite de
« créations et de destructions par l'arrangement des couches
« dont la croûte de la terre est formée. Elles font naître
« l'idée d'autant d'époques distinctes; mais ces époques si
« fécondes en événemens peuvent avoir été très-courtes , eu
« égard au nombre et à l'importance des résultats. Entre les
« créations et les destructions , au contraire , nous ne voyons
« rien, quelle que puisse être l'immensité des intervalles. Là
« où tout se perd dans le A^ague d'une antiquité indéterminée,
« les degrés d'ancienneté n'ont plus de valeur appréciable,
« parce que la succession des phénomènes n'a plus d'échelle
« qui se rapporte à la division du temps. >' {Mémoires de
l'Institut pour L'année i8i5 , p. 47- )
Dans la monographie géognostique d'un terrain de peu d'é-
72 IND
tendue, par exemple, des environs d'une ville, on ne sauroit
distinguer assez minutieusement les difi'érentes couches qui
composent les formations locales. Des hancs de sable et d'ar-
giJe,.les sousiiivisions des gypses, les strates de calcaire mar-
neux et oolitliique , désignés en Angleterre sous les noms
de Purbeck-Beds, l'ortland -Stone, Coral-Ray, Kelloway-
Rock et Coru-Brash, acquièrent alors beaucoup d'impor-
tance. De minces couches de terrains secondaires et tertiaires,
renfermant des assemblages de corps fossiles très-caracté-
ristiques, ont servi dliorizon au géognosle. On a pu, dans
leur prolongement , rapporter à l'une délies ce qui se
trouve place au-dessus ou au-dessous dans l'ordre de la série
totale. Les dénominations particulières par lesquelles on
distingue ces couches, offrent même beaucoup d'avantage
dans une description géognostique , quelque bizarre ou im-
propre que puisse être leur signification ou leur origine
puisée dans le langage des mineurs. Mais, dès que l'on traite du
gisement des roches sur une surface très-étendue, il est indis-
pensable de considérer les formations ou agroupemens habi-
tuels de certaines couches sous un point de vue plus général.
C'est alors qu'il faut être plus sobre et plus circonspect dans
la distinction des roches et dans leur nomenclature. L'ou-
vrage de M. Freiesleben , sur les plaines de la Saxe , qui
ont plus de 700 lieues carrées [Geogr. Beschr. des Kupfer-
schiefergebirges , in 4 Th., 1807 — i8i5), offre un beau
modèle de la réunion d'observations locales et de généra-
lisations géognostiqucs. Ces généralisations, ces essais de
simplifier le tablrau des formations et de ne s'arrêter qu'à
de grands traits caractéristiques, doivent être plus ou moins
timides, selon qu'on décrit le bassin d'un fleuve, une pro-
vince isolée . un pays grand comme la France et l'Allemagne ,
ou un continent entier.
Pj'us on apjtrofonùit l'étude des terrains , plus la liaison
entre des formations qui nous paroissent d'abord entièrement
indé^/Cndantes, se manifeste par le grand phénomène d'alter-
nance, cest-à-dire par une succession périodique de couches
qui offrent de l analogie dans leur composition, et quelque-
fols même dans de certains corps fossiles. C'est ainsi que
ilans les montagnes de transition, par exemple, en Amérique
IND 75
(à l'entrée des plaines de Calabozo) , des bancs de griinstein
et d'euphotide ; en Saxe ( près de Friedrichswalde et Maxen) ,
les schistes avec ampélites , Icsgrauwackes , les porphyres, les
calcaires noirs elles griinstein, constituent, d'après leur alter-
nance fréquente et répétée, une même formation. Souvent il
arrive que des bancs subordonnés ne paroissent qu'à la limite
extrême d'une formation, et prennent l'aspect d'une roche in-
dépendante. Les marnes cuivreuses et bitumineuses (Kupfer-
schiefer), qui se trouvent placées en Thuringe entre le cal-
caire alpin (zechstein) et le grès rouge (rothcs liegende),
et qui sont devenues depuis des siècles l'objet de grandes
exploitations , sont représentées dans plusieurs parties du
Mexique, de la Nouvelle- Andalousie et de la Bavière
méridionale, par des couches multipliées d'argile marneuse,
plus ou moins carburées , et enclavées dans le calcaire alpin.
Des circonstances semblables donnent souvent à des gypses ,
à des grès, et à de petits bancs de calcaires compactes,
l'apparence de formations particulières. On reconnoit leur
dépendance ou levir suhordinaLlon par leur association fré-
quente avec d'autres roches , par leur manque d'étendue
et d'épaisseur, ou par leur suppression totale fréquemment
observée. 11 ne faut point oublier (et ce fait m'a beaucoup
frappé dans les deux hémisphères) que les grandes formations
de calcaires, par exemple le calcaire alpin, ont leurs ^rès ,
comme les grès très -généralement répandus ont leurs bancs
calcaires. De minces couches de grès, de calcaires et de gypses
caractérisent , sous toutes les zones , les dépôts de houille et de
sel gemme ou d'argile muriatifère (salzthon) , dépôts isolés
qui le plus souvent ne sont recouverts que de ces petites for-
mations locales. C'est en négligeant ces considérations, qui
devroient être familières à tout géognoçte expérimenté, que
l'on a rendu trop compliqué le type des grandes formations
indépendantes.
Le phénomène de Valtemance se manifeste, ou localement
dans des roches sjiperposées plusieurs fois les unes aux au-
tres et constituant une même formation complexe , ou
dans la suite des formations considérées dans leur ensemble.
Ce sont ou des grunstein et des syénites, des schistes et des
calcaires de transition, des couches de calcaires et de marne
74 IND
qui alternent immédiatement, ou c'est tout un système de
micaschisrcs et de roches fcMspalhiqnes grenues (granités,
gneis et syénites) qui reparoît parmi les terrains de transi-
tion et que séparent du système homonvme primitif les grau-
wackes et les calcaires à orthocératites. La première con-
noissance de ce fait, un des plus importans et des plus inatten-
dus de la géognosie moderne, est due aux belles observations
de MM. Léopolci de Buch , Brochant et Haussniann. Ce phé-
nomène rapproche, non par rapport au temps ou a l'ancien-
neté relative, mais par rapport à l'analogie de composition
et d'aspect, le terrain de transition du terrain primitif.
De ce que, dans le premier, des roches grenues , dépourvues
entièrement de débris organiques, succèdent à des roches
compactes qui contiennent ces mêmes débris, de célèbres
géognosles ont conclu que cette alternance de roches coquil-
1ères ef non coquillères [ ourroit bien s'étendre au-delà des
terrains que nous appelons primitifs. On n'a pas seulement
demaiidé si des thonsrhiefcr , des micaschistes et des gneis ne
supportoient pas les granités que l'on a crus les plus anciens;
on a aussi agité la question de savoir si des grauwackes et
des calcaires noirs à nurlrépores ne pourroient passe retrou-
ver sous ces mêmes granités. D'après cet aperçu, les roches
primitives et de transition ne formeroient qvi'un seul terrain,
et les premières pourroient être regardées comme intercalées
dans un terrain postérieur au développement des êtres orga-
nisés et qui pénètreroit a une profondeur inconnue dans
l'intérieur c'u globe. J'avoue qu'aucune observation directe
n'a pu être citée jusqu'ici pour étayer ces suppositions. Les
fragmens de roches que j'ai vus enchâssés dans les laves
îithoïdes des volcans du Mexique, de Quito et du VésuA^e,
et que l'on croit arrachés aux entrailles de la terre, semblent
appartenir à des roches altérées de granité , de micascliiste ,
de syénite et de calcaire grenu, et non à des grauwackes et
à des calcaires à madrépores.
On a conservé, dans le tableau des roches, les grandes
divisions connues sous le nom de terrains primitifs, intermé-
diaires, secondaires et tertiaires. Les limites naturelles de
ces quatre sjstèmes de roches sont le thonschiefer avec am-
pélite et pierre lydienne , alternant avec des calcaires com-
IND 75
pactes et des grauwackes, la formation des houilles et les for-
mations qui succèdent immédiatement à la craie. En géognosie,
romnie dans la botanique descriptive (phytographie), Icssous-
divisions ou les petits groupes des familles ont des caractères
plus tranchés que les grandes divisions ou les classes. C'est le
ras de toutes les sciences dans lesquelles on s'élève de l'indi-
vidu aux espèces , des espèces aux genres , et de ceux-ci cà des
degrés d'abstraction encore supérieurs. Une méthoiie repose
nécessairement sur des abstractions diversement graduées, et
les passages deviennent plus fréquens à mesure que les carac-
tères sont plus complexes. Les terrains intermédiaires de
Werner, que M. de Buch a limités le premier avec la saga-
cité qui le distingue {MoU's Jahrb,, 1798, B. 2, p. 264),
tiennent, par le thonschiefer ampéliteux , les syénites à zir-
cons, les granités quelquefois dépourvus d'amphibole, et
les micaschistes anthraciteux , aux terrains primitifs, tandis
que les grauwackes à petits grains et les calcaires madrépo-
riques et compactes les lient aux grès houillers et aux cal-
caires des terrains secondaires.
Des porphyres de formations très-différentes ont leur siège
principal parmi les roches de transition; mais ils débordent,
pour ainsi dire, en masses considérables vers les terrains se-
condaires, où ils se lient au grès houiller, tandis qu'ils ne
pénètrent dans le terrain primitif que comme des couches
subordonnées et de peu d'épaisseur. Le mouvement pro-
gressif, ou, si j'ose me servir de ce mot impropre, l'étendue
de Voscillalion de la serpentine et de l'euphotide , est très-
dilTérente. Ces roches de diallage , constituant plusieurs for-
mations distinctes, rarement recouvertes, et d'un gisement
difficile à vérifier, s'arrêtent presque à la limite inférieure
des terrains secondaires; vers le bas elles percent bien avant
dans les terrains primitifs au-delà du micaschiste. La craie
semble offrir une limite naturelle aux terrains tertiaires, que
MM. Cuvier et Brongniart ont caractérisés les premiers, et
avec justesse , comme des terrains entièrement différens des
dernières formations secondaires , décrites par l'école de
Freyberg [Géogr. miner, des cmirons de Paris, p. 8 et 9).
Frappé des rapports qui existent entre le terrain tertiaire
^t les couches sous la craie , M. Brongniart a même pro-
rs IND
posé récemment de désigner les formations tertiaires sous le
nom de terrains secondaires supérieurs. (Sur le gisement des
ophiolithes , p. 57 : comparez aussi les discussions géognosli-
ques très -intéressantes que renferme le Traité des roches de
M. de Bonnard, p. i38, 210 et 212.)
La distinction des quatre terrains que nous venons de
nommer successivement , et dont trois sont postérieurs au
développement de la vie organique sur le globe, me paroit
digne d'éire conservée, malgré le passage de quelques forma-
tions à des form;itions différentes, et malgré les doutes que
plusieurs géognostes très-dist'ngués ont fondés sur ces passages.
La classification des terrains marque de grandes époques de la
nature, par exemple, la première apparition de quelques ani-
maux pélagiques (zoophytes, mollusques céphalopodes) et la
destruction simultanée d'une énorme niasse de monocotylédo-
nes; elle offre comme des points de reposa l'esprit, et tout en
se rappelant que les formations mêmes sont bien plus impor-
tantes que les grandes divisions, on a souvent lieu , en avan-
çant des hautes montagnes vers les plaines, de reconnoitre
l'influence diverse que Tagroupement des roches primitives
et intermédiaires, celui des roches secondaires et tertiaires ont
exercé sur l'inégalité et la configuration du sol. C'est à cause
de cette influence que l'aspect du paysage, la forme des mon-
tagnes et des plateaux , le caractère de la végétation , varient
moins, lorsqu'on voyage parallèlement à la direction des
couches, qu'en les coupant à angle droit [Greenough , Crit.
examinât, of Géologie , p. 58).
Je continue, en suivantMM.de Buch , Freiesleben, Bro-
chant , Beudant , Buckland , Raumer ( Geh. von I^'ieder-Schles. ,
3819) et d'autres géognostes célèbres, à grouper les forma-
tions indépendantes d'après les divisions en terrains primitifs ,
de transition, secondaires , etc. , sans m'appesantir sur l'im-
propriété de la plupart de ces dénominations. Je continue de
séparer l'argile (avec lignites) superposée à la craie, de celle
qui est dessous, et la craie même , des formations secondaires
plus anciennes. Mais ces distinctions par assises et par groupes
d'assises, si utiles dans la description d'un terrain de peu
d'étendue, ne doivent pas empêcher le géognoste , lorsqu'il
tente de s'élever à un point de vue plus général , de lier ces
IND 77
argiles et la craie au calcaire du Jura, et de les regarder
comme les derniers strates de cette grande formation com-
posée de couches calcaires et marneuses. Les assises inféiieures
de la craie {tujjeau) renferment des ammonites. Le calcaire
de la montagne de Saint -Pierre de Maestricht indique,
comme l'ont déjà observé MM. Omalius et Brongniart ( Céogr.
miner., p. i3), le passage de la craie à des calcaires secon-
daires plus anciens. Près de Caen , selon les belles observa-
tions de M. Prévost, les argiles sous la craie renferment ces
mêmes lignites qui se trouvent, en plus grande masse, dans
l'argile superposée à la craie; des cérites, qui rappellent le
calcaire grossier de Paris, se montrent, dans un calcaire à
trigonies, placés entre des argiles inférieures à la craie et les
couches oolithiques. Je n'insiste pas sur ces faits particuliers;
je les cite seulement pour prouver, par un exemple frappant,
comment, en rapprochant des Lits observés sur différens
points d'un même pays, le grand phénomène de YaUernance.
nous révèle des liaisons entre des formations qui, au premier
abord, paroissent n"avoir presque rien de commun. C'est le
propre de ces couches qui alternent les unes avec les autres,
de ces roches qui se succèdent en série périodique , d'offrir les
contrastes les plus marqués dans les deux couches qui se sui-
vent immédiatement. En géognosie , comme dans lesdifférentes
parties de l'histoire naturelle descriptive, il faut reconnoître
l'avantage des classifications , des coupes diversement gra-
duées, sans jamais perdre de vue l'unité de la nature. Aussi,
ceux qui ont avancé le plus la philosophie naturelle , ont eu à
la fois et la tendance à généraliser et la connoissance exacte
d'une grande masse de faits particuliers.
On a l'habitude de terminer la série des terrains par les
roches volcaniques, et de les faire succéder aux terrains se-
condaires et tertiaires, même aux terrains de transport. Dans
un tableau formé d'après le seul principe de l'ancienneté rela-
tive, cet arrangement ui'a paru peu convenable. Sans doute que
des laves lithoides se sont répandues sur les formations les plus
récentes, même sur des couches de galets. On ne sauroit nier
qu'il n'existe des productions volcaniques de différentes épo-
ques; mais, d'après ce que j'ai pu observer dans les Cordil-
lères du Pérou, de Quito et du Mexique , dans une partie du
78 IND
inonde si célèbi'e par la fréquence des volcans, il ma paru
que le site principal des feux souterrains est dans les roches
de transition et au-dessous de ces roches. J'ai reconnu que
tous les cratères enllaminés ou éteints des Andes se sont
ouverts au milieu de porphyres trappéensou trachytes {Berl.
Ahhandl. der hbn. Acad., i8i3, p. i5i), et que ces trachytes
sont liés à la grande formation de porphyre et de sjénite de
transition. D'après cette remarque, il m"a paru plus naturel
de faire suivre parallèlement, comme par bisection , les
terrains secondaires et volcaniques aux terrains de transi-
tion. Par cette nouvelle disposition la formation des porphyres
et des grauwackes , ou celle des porphyres, des syénites et
des granités de transition, se trouve liée à la fois, i.° aux
porphyres du grès rouge dans le terrain houiller secondaire,
2.° aux trachytes ou porphyres trappéens qui sont dépour-
vus de quarz et mêlés de pyroxènes. J'emploie à regret le mot
de terrain volcanique , non que je doute, comme ceux qui dé-
signent les trachytes, les basaltes et les phonolithes (porphyr-
schiefer) sous le nom de terrain trappéen , que tout ce que
j'ai réuni dans le terrain volcanique ne soit produit ou
altéré par le feu; mais parce que plusieurs roches, interca-
lées entre les roches (primitives?), de transition et secon-
daires, pourroient bien aussi être volcaniques. J'aurois de plus
voulu éviter toute idée (historique) de l'origine des choses
dans un tableau (statistique) de gisement ou de superposition.
A Skeen, en Norwége , une syénite basaltique et poreuse,
renfermant des pyroxènes, est placée , d'après l'observation
de M. de Buch, entre le calcaire de transition et la syénite
zirconienne. C'est une couche, non un filon (dyke); c'est
un phénomène bien moins problématique que le basalte
(urgriinstein P Buch, Geogn. Beob. , T. I , p. 124, et Raumer,
Granit des Riesengebirgcs , p. 70) renfermé dans le mica-
schiste de Krobsdor: en Silésie. Les trachytes avec obsidienne
du Mexique sont intimement liés aux porphyres de transi-
tion , qui alternent avec des syénites. Les mandeistein, ap-
partenant au grès rouge, prennent, sur le continent de
l'Europe et dans l'Amérique équinoxiale, tout l'aspect d'un
mandeistein de formation basaltique. M. Boue, dans son
intéressant Essai géologique sur l'Ecosse ^ p. 126 — 162 . a
IND 79
décrit des roches pyroxéniques (dolérites) enclavées dans le
grés rouge. Sans rien préjuger sur l'origine de ces masses,
ni , en général , sur celle de toutes les roches primitives et
de transition , nous désignons ici par le nom de terrains
volcaniques la série la moins interrompue de roches altérées
par le feu.
En faisant l'énumération des roches, je me suis servi des
noms le plus généralement employés par les géognostes de la
France, de FAllemagne, de l'Angleterre et de Tltalie ; j'au-
rois craint, en essayant de perfectionner la nomenclature
des formations, d'ajouter de nouvelles difficultés à celles que
présente déjà la discussion des gisemens. J'ai cependant évité
avec soin les dénominations, trop long-temps conservées, de
calcaire inférieur et supérieur; de gypse de première, seconde ou
troisième formation ; A ancien ou Ae nouveau grès rouge, etc. Ces
dénominations offrent sans doute un vrai caractère géognos-
tique : elles ont rapport, non à la composition des roches,
mais à leur âge rehitif. Cependant, comme le type général
des formations de l'Europe ne peut être modelé sur celui d'un
seul canton , la nécessité d'admettre des formations parallèles
{sich vertretende Gehirgsarten) rend les noms de premier ou
second gjvpse, de grès ancien ou mitojen , extrêmement vagues
et obscurs. Dans un pays on est en droit de considérer une
couche de gypse ou de grès comme une formation particu-
lière, tandis que dans un autre on doit la regarder comme
subordonnée à des formations voisines. Les meilleures déno-
minations sont sans doute les déno,. r-ations géographiques:
elles font naître des idées de superposition très-précises. Lors-
qu'on dit qu'une formation est identique avec le porphyre de
Christiania, le lias de Dorsetshire , le grès de Nebra (bunter
sandstein ) , le calcaire grossier de Paris , ces assertions ne
laissent, à un géognoste instruit, aucun doute sur la posi-
tion que l'on veut assigner à la formation que l'on décrit.
Aussi c'est comme par convention tacite que les mots : zecJz-
stein de Thuringe , calcaire de Derbyshire , terrain de Paris ,
etc., se sont introduits dans le langage minéralogique ; ils
rappellent un calcaire qui succède immédiatement au grès
rouge houiller ,* un calcaire de transition placé sous le
grès houiller, enfin, des formations plus récentes que la
8o IND
craie. Les seules difficultés que présente la multiplicité de
ces dénominations géographiques, consistent dans le choix
des noms et dans le degré de certitude que l'on a acquis sur
le gisement ou l'âge relatif de la roche à laquelle on rapporte
les autres. Les géognostes anglois cherchent sur le continent
leur lias et leur red-marl ; les géognostes allemands leur hunte
sandsteUi et leur muschelkalh. Ces mots se trouvent associés dans
l'esprit des voyageurs à des souvenirs de localités. 11 ne s'agit
par conséquent . pour faire naître des idées précises, que de
choisir des localités assez généralement connues et qui sont
célèbres, soit par l'exploitation des mines, soit par des ou-
vrages descriptifs.
Pour diminuer les effets des vanités nationales, et pour
rattacher les nouveaux noms à des objets plus importans ,
j'avois proposé , il y a long- temps ( 1796 ) , les dénominations
de pierre calcaire alpine, et calcaire du Jura. Une partie des
Hautes-Alpes de la Suisse, et la majeure partie du Jura,
sont sans doute formées de ces deux roches : cependant les
noms, aujourd'hui généralement reçus, de calcaire alpin
f zechstein) et de calcaire du Jura, devroient être, à ce que
je pense , modifiés ou entièrement abandonnés. Les assises
inférieures des montagnes du Jura , remplies de gryphites ,
appartiennent à une formation plus ancienne, peut-être au
zechstein; et une très -grande partie du calcaire des Alpes
de la Suisse n'est certainement pas du zechstein , mais ,
d'après MM. de Buch et Escher, du calcaire de transition.
Il vaut donc mieux choisir les noms géographiques des roches
parmi les noms de montagnes isolées et dont toute la masse
visible n'appartient qu'à une seule formation , que de les
emprunter, comme je l'ai fait à tort, à des chaînes entières.
J'avois pensé , et beaucoup de géognostes ont partagé cette
opinion, que le calcaire du Jura (calcaire à cavernes de
Franconie ) étoit généralement placé , sur le continent, au-
dessous du grès de Nebra (bunte sandstein), entre ce grès
et le zechstein. Des observations postérieures ont prouvé que
le nom de calcaire du Jura avoit été avec raison appliqué
à des roches qui sont très -éloignées des montagnes de la
Suisse occidentale; mais que la véritable place géognostique
de cette formation (lorsqu'il n'y a pas suppression des forma-
IND 81
ïîôns inférieures^ se trouve bien au-dessus du gresdeNebra^
entre le muschelkalk (ou le quadersandstein ? ) et la craie.
Un nom géographique, justement appliqué à plusieurs roches
analogues, nous rend attentif à leur identité de gisement;
mais la place que des roches homonymes doivent occuper
dans la série totale , n'est bien déterminée que lorsque le
nom géographique a été choisi après avoir acquis une cer-
titude entière sur leur gisement. Les géognostes se trouvent
encore dans une position semblable, en fixant l'âge relatif
de la molasse d'Argovie (nagelfluhe) et du quadersandstein
xle Pirna (grès blanc de M. de Bonnard), deux roches trés-
7'écentes, qui ont été très-bien étudiées séparément , mais
dont les rapports entre elles et avec la craie et le calcaire
du Jura n'ont été que très- récemment éclaircis. On peut
être assez sûr d'avoir rencontré dans le nouveau continent
des roches, identiques avec la molasse ou le quadersandstein,
sans pouvoir prononcer pour cela sur leurs rapports avec
toutes les autres roches secondaires ou tertiaires. Quand des
formations ne se touchent pas immédiatement, ei, qu'elles
ne sont pas recouvertes par des terrains d'un gisement connu,
on ne peut juger de leur ancienneté relative que d'après de
simples analogies.
Les termes de la série géognostique sont ou simples ou com-
plexes. Aux termes simples appartiennent la plupart des for-»
mations primitives : les granités, lesgneis, les micaschistes, les
thonschiefer , etc. Les termes complexes se trouvent en plus
grand nombre parmi les roches de transition : c'est là que
chaque formation comprend un groupe entier de roches qui
alternent périodiquement. Les termes de la série n'y sont pas
des calcaires de transition ou des grauwackes, constituant
des formations indépendantes: ce sont des associations de thon-
schiefer, griinstein etgrauwacke; de porphyre et grauwacke-
de calcaire grenu stéatiteux et de poudingues à roches primi-
tives ; de thonschiefer et de calcaire noir. Lorsque ces asso-
ciations sont formées de trois ou quatre roches qui alternent,
il est diflicile de leur donner des noms significatifs, des noms
qui indiquent toute la composition du groupe, tous les mem-
bres partiels du terme complexe de la série. On peut alors
aider à fixer les groupes dans la mémoire, en rappelant les
S^ IND
roches qui y dominent sans manquer absolument dans le»
groupes voisins. C'est ainsi que le calcaire grenu stéatiteux
caractérise la formation de la Tarantaise ; le grauwacke ,
la grande formation de transition du Harz et des bords du
Rhin ; les porphyres métallifères riches en amphibole et
presque dépourvus de quarz, la formation du Mexique et
de la Hongrie. Si les phénomènes d'alternance et d'agrou-
pement atteignent leur maximum dans les terrains de tran-
sition, ils ne sont pas entièrement exclus pour cela des
terrains primitifs et secondaires. Dans l'un et l'autre de
ces terrains, des termes complexes sont mêlés aux termes
simples de la série géognostique. Je citerai parmi les forma-
tions secondaires le grès placé au-dessus du calcaire alpin
(le grès de Nebra , le bunte sandstein), qui est une asso-
ciation d'argile marneuse, de grès et d'oolithes; le calcaire
qui recouvre le grès rouge houiller (le zechstein ou alpen-
kalkstein), qui est une association moins constante de cal-
caire, de gypse (muriatifère) , de stinkstein et de marne
bitumineuse pulvérulente (asche des mineurs du Mansfeld).
Dans les terrains primitifs nous trouvons les trois premiers
termes de la série, les roches les plus anciennes, ou isolés
ou alternant deux à deux, selon qu'ils sont géognostique-
ment plus rapprochés par leur âge relatif, ou bien alternant
tous les trois. Le granité forme quelquefois avec le gneis,
le gneis avec le micaschiste, des associations constantes. Ce;^
alternances suivent des lois particulières : on voit (par
exemple, au Brésil, et, quoique moins distinctement, dans,
la chaîne du littoral de Venezuela) le granité, le gneis et
le micaschiste dans une triple association ; mais je ne con-
nois pas de granité alternant seul avec du micaschiste, du
gneis et du micasch'ste alternant seuls avec le thonschiefer.
Il ne faut pas confondre , et j'ai souvent insisté sur ce
point dans cet article, des roches passant insensiblement à
celles qui sont en contact immédiat avec elles, par exemple,
des micaschistes qui oscillent entre le gneis et le thonschiefer,
avec des roches qui alternent les unes avec les autres , et
qui conservent tous leurs caractères distinctifs de composi-
tion et de structure. M. d'Aubuisson a fait voir, il y a
long-temps, combien l'analyse chimique rapproche le fhou-
IND 85
schîefer du mica. (Journal de phjsique , T. 68, pag. 128;
Traité de Géognosie , 1\ II, pag, 97.) Le premier, il est
vrai, n'a pas l'éclat métallique du micaschiste; il renferme
un peu moins de potasse et plus de carbone-, la silice ne
s'y réunit pas en noeuds ou lames minces de quarz comme
dans le micaschiste : mais on ne peut douter qtie des feuillets
de mica ne constituent la base principale du thonschiefer. Ces
feuillets sont tellement soudés ensemble , que l'œil ne peut
-les distinguer dans le tissu. C'est peut-être cette aflinité
même qui empêche Falternance des thonschiefer et des
micaschistes : car dans ces alternances la nature semble
favoriser l'association de roches hétérogènes-, ou, pour me
servir d'une expression figurée, elle se plaît dans les asso-
ciations dont les roches alternantes offrent un grand con-
traste de cristallisation , de mélange et t'e couleur. Au
Mexique j'ai vu des griinstein vert-noiràtre alterner des
milliers de fois avec des syénites blanc -rougeâtre et qui
abondent plus en quarz qu'en feldspath : il y a dans ce
griinstein des filons de syénite, et dans la syénite des filons
de griinstein ; mais aucune des deux roches ne passe à
l'autre. (Essai politique sur la JSIouvelle Espagne, T. II, p.
623.) Elles offrent sur la limite de leur contact mutuel des
différences aussi tranchées que les porphyres qui alternent
avec les grauwackes ou avec les syénites , que les calcaires
noirs qui alternent avec les thonschiefer de transition , et
tant d'autres roches de composition et d'aspect entièrement
hétérogènes. Il y a plus encore : lorsque dans des terrains
primitifs des roches plus rapprochées par la nature de leur
composition que par leur structure ou par le mode de leur
agrégation, par exemple, les granités et les gneis, ou les
gneis et les micaschistes, alternent, ces roches ne montrent
guère cette même tendance de passer les unes aux autres
qu'elles présentent isolément dans des formations non com-
plexes. Nous avons déjà fait observer plus haut que sou-
vent une couche /S, devenant plus fréquente dans la roche a.,
annonce au géognoste voyageur qu'à la formation simple a
va succéder une formation complexe dans laquelle a, et 0
alternent. Plus tard il ai'rive que /3 prend un plus grand
développement; que a n'est plus une roche alternante^ mais
84 ÏND
une simple couche subordonnée k fi , et que cette roche /2
se montre seule jusqu'à ce que par la fréquente apparition
de couches y elle prélude à une formation complexe de fi
alternant avec y. On peut substituer à ces signes les mots
de granité , gneis et micaschiste ; ceux de porphyre , grau-
wacke et syénite ; de gypse, marne et calcaire fétide (stink-
stein ). Le langage pasigraphique a l'avantage de généraliser
les problèmes ; il est plus conforme aux besoins de la phi-
losophie géognostique, dont j'essaie de donner ici les premiers
élémens, en tant qu'ils ont rapport à l'élude de la superpo-
sition des roches. Or, si souvent entre des formations simples
et très-rapprochées dans l'ordre de leur ancienneté relative,
entre les formations a, fi, y, se trouvent placées des for-
mations complexes, a fi et fiy (c'est-à-dire a. alternant avec
fi, et fi alternant avec y); on observe aussi, quoique moins
fréquemment, qu'une des formations (par exemple, a)
prend un accroissement si extraordinaire qu'elle enveloppe
la formation fi, et que fi, au lieu de se montrer comme
une roche indépendante, placée entre a et y , n'est plus
qu'une couche dans et. C'est ainsi que dans la Silésie infé-
rieure le grès rouge renfei-me la formation du zechstein ;
car le calcaire de Kunzendorf, rempli d'emi)rcintes de pois-
sons, et analogue à la marne bitumineuse et abondante
en poissons de Thuringe , est entièrement enveloppé dans
le grès houiller. (Buch, Beoh. , T. I, p. io4» ^^7 ; ^d., Reise
nach Norwegen, T. I, p. iS8 ; Raumer, Gebirge von Nieder-
Schlesiea, p. 79.) M. Beudant (Voj. min., T. JII , p. i85)
a observé un phénomène semblable en Hongrie. Dans d'au-
tres régions, par exemple, en Suisse et à l'extrémité méri-
dionale de la Saxe, le grés rouge disparoît entièrement,
parce qu'il est remplacé et pour ainsi dire vaincu par un
prodigieux développement de la grauwacke ou du calcaire
alpin. (Freiesleben , Kup/Tsch. , B. IV, 109.) Ces effets
de l'altcnance et du développement inégal des roches sont
d'autant plus dignes d'attention, que leur étude peut jeter
du jour sur quelques déviations apparentes d'un type de
superposition généralement reconnu, et qu'elle peut servir à
ramener à un type commun des séries de gisement obser-
vées dans des pays très-éloignés.
IND 35
Pour désigner les formations composées de deux roches
qui alternent les unes avec les autres, j'ai généralement
préféré les mots granité et gmis , sjénite et griinstein , aux
expressions plus usitées de granité - gneis , sjénite- griinstein.
J'ai craint que cette dernière méthode de désigner des for-
mations composées de roches alternantes , ne fit plutôt
naître l'idée d'un passage du granité au gneis, de la syénite
au griinstein. En effet, un géognoste dont les travaux sur
les trachytes de l'Allemagne n'ont pas été assez appréciés, M.
Nose, s'étoit déjà servi des mots granité-porphyres et porphjre-
granites , pour indiquer des variétés de structure et d'aspect,
pour séparer les granités porphyroïdes des porphyres qui,
par la fréquence des cristaux empâtés dans la masse, pré-
sentent une structure d'agrégation, une véritable structure
granitique. En adoptant les dénominations de granité et
gneis, de syénite et porphyre, de grauwacke et porphyre,
de calcaire et fhonschiefer , on ne laisse aucun doute sur
la nature des termes complexes de la série géognostique.
Parmi les différentes preuves de l'identité des formations
dans les régions les plus éloignées du globe, une des plus
frappantes et que l'on doit aux secours de la zoologie , est
l'identité* des corps organisés enfouis dans des couches d'un
gisement analogue. Les recherches qui conduisent à ce genre
de preuves ont singulièrement exercé la sagacité des savans,
depuis que MM. de Lamarck et Defrance ont commencé
à déterminer les coquilles fossiles des environs de Paris, et
que MM. Cuvier et Brongniart ont publié leurs mémorables
travaux sur les ossemens fossiles et les terrains tertiaires.
Comme la plus grande masse des formations qui composent
la croûte de notre planète ne renferme pas des dépouilles de
corps organisés ; que ces dépouilles sont très-rares dans les
terrains de transition, souvent brisés et difficiles à séparer de
la roche dans les terrains secondaires très-anciens, l'étude
approfondie des corps fossiles n'embrasse qu'une petite partie
de lagéognosie, mais une partie bien digne de l'attention
du philosophe. Les problèmes qui se présentent sont nom-
breux : ils ont rapport à la géographie des animaux dont les
races sont éteintes, et qui par cette raison appartiennent
déjà à l'histoire de notre planète : ils nécessitent la discus-
86 IND
sion des caractères zoologiqnes par lesquels on voudroit dis-
tinguer les différcnles formations superposées. Pour rester
fidèle au but que je me suis proposé, de ne considérer, dans
cette Introduction au Tableau des roches, les objets que dans
leur plus grande généralité, je vais citer les questions de
zoologie géognostique qui paroissent les plus importantes dans
l'état actuel de la science, et dont la solution a été tentée
avec plus ou moins de succès : Quels sont les genres et (si
l'état de conservation et le peu d'adhérence à la masse
rocheuse permettent une détermination plus complète )
quelles sont les espèces auxquelles on peut rapporter les dé-
pouilles fossiles ? Une détermination exacte des espèces en
fait- elle reconnoître avec certitude qui sont identiques
avec les plantes et les animaux du monde actuel ? Quels sont
les classes , les ordres et les familles d'êtres organisés qui
offrent le plus de ces analogies P Dans quel rapport le nom-
bre des genres et des espèces identiques augmente-t-il avec
la nouveauté des roches ou des dépôts terreux? L'ordre ob-
servé dans la superposition des terrains intermédiaires ,
secondaires, tertiaires et d'alluvion , est-il partout en har-
monie avec l'analogie croissante qu'offrent les types d'organi-
sation? Ces types se succèdent-ils de bas en haut (en. passant
des grauwackes et des calcaires noirs de transition , par le
grès houiller, le calcaire alpin, le calcaire du Jura et la
craie, au gypse tertiaire, aux terrains d'eau douce et aux
alluvions modernes) dans le même ordre que nous adoptons
dans nos systèmes d'histoire naturelle . en disposant les
êtres selon que leur structure devient plus compliquée, et
qu'aux organes de la nutrition d'autres systèmes d'organes
se trouvent ajoutés ? La distribution des corps organisés
fossiles indique-t-elle un développement progressif de la vie
végétale et animale sur le globe; une apparition successive
de plantes acotylédones et monocolylédones, de zoophytes,
de crustacés, de mollusques (céphalopodes, acéphales,
gastéropodes), de poissons, de sauriens ( quadrupèdes ovi-
pares), de plantes dicotylédones, de mammifères marins et
«le mammifères terrestres? En considérant les corps fossiles,
non dans leur rapport avec telle ou telle roche dans laquelle
on les a découverts, mais simplement sous le point de vue
IND 57
de leur distribution climatérique , remarque-l-on une diffé-
rence appréciable entre les espèces qui dominent dans l'an-
cien et le nouveau continent, dans les climats tempérés et sous
la zone torride, dans l'hémisphère boréal et dans l'hémisphère
austral P Y a-t-il un certain nombre d'espèces tropicales que
l'on trouve partout, et qui semblent annoncer qu'indépen-
dantes d'une distribution de climats semblables aux climats
actuels, elles ont éprouvé, au premier âge du monde, la
haute température que la croûte crevassée du globe forte-
ment échauffé dans son intérieur a donnée à l'atmosphère
ambiante P Est-on sûr de distinguer par des caractères précis
les coquilles d'eau douce et les coquilles marines? La déter-
mination du genre suffit-elle? ou n'y a-t-il pas (comme parmi
les poissons) quelques genres dont les espèces vivent à la
fois dans les fleuves et les mers ? Quoique dans quelques-
unes des roches tertiaires les coquilles fluviatiles se trou-
vent mélangées (par exemple à l'embouchure de nos ri-
vières) avec les coquilles pélagiques, n"observe-t-on pas en
général que les premières forment des dépôts particuliers,
caractérisant des terrains dont l'étude avoit été négligée
jusqu'ici , et qui sont d'une origine très-récente ? A-t-on
jamais découvert sous le calcaire du Jura , près des pois-
sons réputés fluviatiles , dans le schiste bitumineux du cal-
caire alpin, des coquilles d'eau douce? Des espèces iden-
tiques de fossiles se trouvent-elles dans les mêmes formations
sur différens points du globe? Peuvenl-elles fournir des ca-
ractères zoologiques pour reconnoître les diverses formations
superposées? ou ne doit-on pasplutôtadmettre que des espèces
que le zoologiste est en droit de regarder comme identiques,
d'après les méthodes adoptées, pénètrent à travers plusieurs
formations; qu'elles se montrent même dans celles qui ne
sont pas en contact immédiat ? Les caractères zoologiques
ne doivent-ils pas être tirés et de l'absence totale de certaines
espèces, et de leur fréquence relative ou prédominance , enfin
de leur association constante avec un certain nombre d'au-
tres espèces? Est-on en droit de diviser une formation dont
l'unité a été reconnue d'après des rapports de gisement et
d'après l'identité des couches qui sont également intercalées
aux strates supérieurs et inférieurs , par la seule raison que le?
sa lîSD
premiers de ces strates renferment des coquilles d'eau donce,
et les derniers des coquilles marines ? L'îibsence totale de
corps organisés dans cerJaines niasses de terrains secor.daire et
tertiaire, est-elle un motif suflîsant pour considérer ces
masses comme des formations particulières, si d'autres rap-
ports géognostiqucs ne justifient pas cette séparation P
Une partie de ces problèmes s'étoit présentée depuis long-
temps aux naturalistes. Déjà Lister avoit avancé, il y a
plus de cent cinquante ans, que chaque roche étoit carac-
térisée par des coquilles fossiles diflercntes. [Phil. Trans.,
n." 'jG , p. 2285.) Pour prouver que les coquilles de nos
mers et de nos lacs sont spécifiquement différentes des co-
quilles fossiles (lapides sui generis), il affirme «que les der-
« nières, par exemple, celles des carrières de Northamp-
« tonshire, portent tous les caractères de nos Murex , de nos
« Tellines et de nos Troclms; mais que des naturalistes qui
« ne sont pas accoutumés à s'arrêter à un aperçu vague et
« général des choses, trouveront les coquilles fossiles spécifi-
/< quement différentes de toutes les coquilles du monde actuel. ^^
Presque à la même époque, Nicolas Stenon (De solido intra
solidum contenlo, 1669, p. 2, 17, 28, 63, ^^ , f'g- 20 — 26)
distingua le premier « les roches (primitives) antérieures
« à l'existence des plantes et des animaux sur le globe et
« ne renfermant par conséquent jamais des débris organi-
« ques, et les roches (secondaires) superposées aux premières
« et remplies de ces débris [lurhidi maris sediinenta sibi imd-
^ cem imposita). '^ Il considéra chaque banc de roche secon-
daire «comme un sédiment déposé par un fluide aqueux; ^''
et exposant un système entièrement semblable à celui de
Deluc « sur la formation des vallées par des affaissemens
« longitudinaux, et sur l'inclinaison de couches d'abord toutes
« horizontales,^^ il admet pour le sol de la Toscane, à la ma-
nière de nos géologues modernes, «six grandes époques de
r, la nature [sex distinctœ Etruriœ faciès , ex prœsenti facie
.< Etruriœ collectœ)^ selon que la mer inonda périodiquement
.< le continent, ou qu'elle se retira dans ses anciennes limites. >^
Oans ces temps où l'observation de la nature fit naître en
italie les premières idées sur l'âge relatif et la succession des
,*;Quches primitives et secondaires, la zoologie et la géognosie
IND 89
lie pouvoicnt encore se prêter un secours mutuel, parce
que les zoologistes ne connoissoient pas les roches, et que
les géognostes étoient entièrement étrangers à l'histoire na-
turelle des animaux. On se bornoit à des aperçus vagues,
on regardoit comme spécifiquement identique tout ce qui
offroit quelque analogie de forme ; mais en même temps, et
ceci étoit un pas fait dans la bonne route, on étoit attentif
aux fossiles qui prédominoient dans telle ou telle roche.
C'est ainsi que les dénominations de calcaire à gijphites, de
calcaire à trochites , de schistes à fougères , schistes à trilobiles
(Gryphiten- und Trochiten-Kalk ; Krauter- und Trilobiten-
Schiefer) , furent très-anciennement employées par les miné-
ralogistes d'Allemagne. La détermination des genres caracté-
risés par les dents, par les fossettes , par les lames saillantes
et crénelées de la charnière , par les plis et les bourrelets
de l'ouverture de la coquille, est bien plus dlflicile dans les
roches secondaires très -anciennes que dans les formations
tertiaires , les premières étant généralement moins friables
et plus adhérentes au test du corps fossile. Cette difîiculté
augmente lorsqu'on veut distinguer les espèces; elle devient
presque insurmontable dans quelques roches calcaires de
transition et dans le muschelkalk , qui renferme des co-
quilles brisées. Si les caractères zoologiques d'un certain
nombre de formations pouvoient être tirés de genres bien
distincts, si les trilobites et les orthncératites appartenoient
exclusivement aux terrains intermédiaires . les gryphites au
calcaire alpin (zechstein), les pectinites au bunte sandstein
(grès de Nebra), les trochites et mytulites au muschelkalk,
les tellines au quadersandstein , les ammonites et turiitelles
au calcaire du Jura et à ses marnes , les oursins ananchytes
et les spatanges à la craie, les cérites au calcaire grossier;
la connoissance de ces genres seroit d'un secours aisé pour
la détermination des roches : on n'auroit plus besoin d'exa-
miner sur les lieux la superposition des formations ; on re-
connoîtroit ces dernières sans sortir de son cabinet , en
ne consultant que les collections. Mais il s'en faut de beau-
coup que la nature ait rendu si facile à l'homme l'étude des
masses coquillères qui constituent la croûte de notre pla-
nète. Les mêmes types d'organisation se sont répétés à des
go ÏND
époques très- différentes : les mêmes genres se retrouvent
dans les formations les plus distinctes. Il y a des orthocéra-
tites dans les calcaires de transition, les calcaires alpins et
le grès bigarré ; des térébratulitcs dans le calcaire du Jura
et dans le muschelkalk ; des trilobites dans les thonschicfcr de
transition, dans le schiste bitumineux du zechstein , et, selon
un excellent géi;gnosïe, M. de Schlottlieim , même dans le
calcaire du Jura; il y a des pentacrinitcs dans le thonschiefer
de transition et dans le muschelkalk le plus moderne. Les
ammonites pénètrent a travers beaucoup de formations cal-
caires et marneuses, depuis les grauwackes (Raumer, Ver-
suche,p. 22-, Schlottheim, Petrefacletikunde , p. 38) jusque
dans ies couches inférieures de la craie. Il y a des troncs de
inonocotylédones et dans le grès rouge, et dans les marnes
du gypse d'eau douce, fii-mées à une époque où le monde
étoit déjà rempli de plantes dicotvlédones.
Mais, a une époque où les naturalistes ne s'arrêtent plus à
des notions vagues et incertaines, on a reconnu avec saga-
cité que le plus grand nombre de ces fossiles (gryphites.
térébratulites , ammonites, trilobites, etc.), enfouis dans
différentes formations , ne sont pas spécifiquement les mêmes ;
qu'un grand nombre d'espèces qu'on a pu exanuner avec
précision, varient avec les roches superposées. Les poissons
que l'on observe dans les schistes de transition. (Claris), dans
les schistes bitumineux du zechstein , dans le calcaire du
Jura, dans le calcaire tertiaire à céritede Paris et de Monte
Bolca, et dans le gypse de Montmartre, son t^ des espèces
distinctes, en partie pélagiques, en partie fluviatiles. Est-
on en droit de conclure de la réunion de ces faits, que
toutes les formations sont caractérisées par des espèces par-
ticulières; que les coquilles fossiles de la craie, du muschel-
kalk , du calcaire du Jura et du calcaire alpin , diffèrent
toutes entre elles ? Je pense que ce seroit pousser l'induc-
tion beaucoup trop loin, et M. Brongniart même , qui con-
noit si bien la valeur des caractères zoologiques, restreint
leur application absolue au cns <, où la superposition (les
« circonstances de gisement) ne s'y opposent pas. ^^ Je pour-
rois citer les cérites du calcaire grossier, qui se trouvent
(près de Caen) au-dessous de la craie, et qui semblent
IND 9»
indiquer , comme la répétition des argiles avec lignitest
en-dessus et au-dessous de la craie, une certaine connexité
entre des terrains qu'au premier coup d'œil on croiroit en-
tièrement distincts. Je pourrois m'arrêtcr à d'autres espèces
de coquilles qui appartiennent à la fois à plusieurs forma-
tions tertiaires, et rappeler que si un jour, par des carac-
tères peu sensibles et par de foibles nuances , on parvenoit
à séparer des espèces que l'on croit identiques aujourd'hui ,
la finesse même de ces distinctions ne rassureroit pas trop
sur l'universalité, d'ailleurs si désirable, des caractères zoolo-
giques en géognosie. Une autre objection, tirée de l'influence
que les climats exercent même sur les animaux pélagiques,
me paroît plus importante encore. Quoique les mers, par des
causes physiques très-connues, offrent, à de grandes profon-,
deurs, la même température sous l'équateur et sous la zone
tempérée, nous vo3'ons pourtant, dans Tétat actuel de notre
planète , les coquilles des tropiques ( parmi lesquelles les uni-
valves dominent , comme parnu les testacés fossiles) différer
beaucoup des coquilles des climats septentrionaux. Le plus
grand nombre de ces animaux aiment les récifs elles bas-fonds:
d'où il suit que les différences spécifiques sont souvent très-
sensibles, sous un même parallèle, sur des côtes opposées. Or,
si les mêmes formations se répètent et s'étendent, pour ainsi
dire , a. de prodigieuses distances, de l'est à l'ouest et du nord
au sud , d'un hémisphère dans l'autre, n'est-il pas probable .
quelles que soient les causes compliquées de l'ancienne
température de notre globe, que des variations de climats
ont modifié, jadis comme de nos jours, les types d'organisa-
tion , et qu'une même formation ( c'est-à-dire une même roche
placée, dans les deux hémisphères, entre deux formations
homonymes) a pu envelopper des espèces distinctes ? Il ar-
l'ive souA^ent sans doute que des couches superposées présen-
tent un contraste de corps fossiles très-frappant. Mais peut-
on conclure de là qu'après qu'un dépôt s'étoit formé, les
êtres qui habitoient alors la surface du globe, aient tous
été détruits ? 11 est incontestable que des générations de types
différens se sont succédé les unes aux autres. Les ammo-
nites, que l'on trouve à peine parmi les roches de transition,
atteignent leur maximum dans les couches qui représentent
i)2 IND
sur différens poinfs du globe le muschelkalk et le calcaire
du Jura ; ils dispavcissent dans les couches supérieures de la
craie et au -dessus de cette formation. Les échinilcs, très-
rares dans le cidcaire jîlpin et même dans le muschelkalk ,
deviennent au contraire très-communs dans le calcaire du
Jura , dans la craie et les terrains tertiaires. Mais rien ne
nous prouve que cette succe.ssi(>n de diflFérens types organi-
ques, cette destruction graduelle des genres et des espèces,
coïncide nécessairement avec les époques où chaque terrain
s'est formé. « La considération de similitude ou de différence
« entre les débris organiques n'est pas d'une grande impor-
« tance, dit M. Beudant {Voyage min., T. III, p. 278),
« lorsque l'on compare des dépôts qui se sont formés dans
« des contrées très-éloignées les unes des autres : elle est de
« beaucoup d'importance, si l'on compare des dépôts très-
« rapprochés.»
Tout en combattant les conclusions trop absolues qu'on
pourroit être tenté de tirer de la valeur des caractères zoolo-
giques , je suis loin de nier les services importans que l'étude
des corps fossiles rend à la géognosie , si l'on considère cette
science sous un point de vue philosophique. La géognosie
ne se borne pas à chercher des caractères diagnostiques; elle
embrasse l'ensemble des rapports sous lesquels on peut con-
sidérer chaque formation ; \.° son gisement; 2.° sa constitu-
tion or} ctognostique (c'est-à-dire, sa composition chimique,
et le mode particulier d'agrégation plus ou moins cristalline
de ses molécules); 5." l'association des différens corps orga-
nisés que l'on y trouA'e enfouis. Si la superposition des masses
rocheuses hétérogènes nous ré\'èle l'ordre successif de leur
formation , comment ne pas nous intéresser aussi à connoître
3'état de la nature organique aux différentes époques où les
dépôts se sent formés? On ne peut révoquer en doute que, sur
une surface de plusieurs milliers de lieues carrées ( en Thu-
ringe et dans toute la partie septentrionale de l'Allemagne),
neuf formations superposées, celles de calcaire de transition ,
de grau^vacke, de grès rouge, dezechstein avec schiste bitu-
mineux (de gypse muriatifère), de grès à oolithes (de gypse
argileux), de muschelkalk et de grès blanc ( quadersand-
gtein ) , ont pu être reconnues comme distinctes , sans re-
IND 95
coiirir aucunement à l'emploi de caractères zoologiques;
mais il ne suit pas de là que la recherche la plus minu-
tieuse de ces caractères , ou, pour mieux dire, que la connois-
sance Ja plus intime des fossiles contenus dans chacune des
formations ne soit indispensable pour offrir un tableau
complet et A'raiment géognostique. 11 en est de Fétude des
terrains comme de celle des êtres organisés. La botanique et
la zoologie , considérées de nos temps sous un point de vue
plus élevé, ne se bornent plus à la recherche de quelques
caractères extérieurs et distinctifs des espèces ; ces sciences
approfondissent l'ensemble de l'organisation végétale et ani-
male. Les caractères tirés des formes de la coquille suffisent
pour distinguer les diverses espèces d'acéphales testacés. Re-
garderoit-on pour cela comme superflue la connoissance des
animaux qui habitent ces mêmes coquilles? Telle est la con-
nexité des phénomènes et de leurs rapports naturels ( de ceux
de la vie, comme de ceux qu'offrent les dépôts pierreux
formés à différentes époques), que, si l'on en néglige quelques-
uns , on se forme non-seulement une image incomplète, mais
le plus souvent une image infidèle.
• Dans le cas de la conformité de gisement, il peut y avoir
identité de masse (c'est-à-dire de composition minéralogique)
et diversité de fossiles, ou diversité de masse et identité de
fossiles. Les roches /2 et /S' placées à de grandes distances
horizontales entre deux formations identiques « et y , ou
appartiennent à une même formation , ou sont des forma-
tions parallèles. Dans le premier cas, leur composition miné-
rale est semblable; mais, à cause de là distance des lieux et
des effets clinintériques, les débris organiques qu'elles rea-
ferment, peuvent différer considérablement. Dans le second
cas, la composition minéralogique est différente, mais les
débris organiques peuvent être analogues. Je pense que les
mots, formations identiques , formations parallèles, indiquent la
conformité ou non-conformité de composition minéralogique,
mais qu'ils ne font rien préjuger sur l'identité des fossiles.
S'il est assez probable que des dépôts ^ et &' , placés à de
grandes distances horizontales entre les mêmes roches x et y,
sont formés à la même époque , parce qu'ils renferment les
mêmes fossiles et une masse analogue , il n'est pas également
94 IND
probable que les époques de formation sont tiés-éloiguée.-)
les unes des autres, lorsque les fossiles sont distincts. Ou
peut concevoir que sous une même zone , dans un pays de
peu d'étendue, des générations d'animaux se sont succédé,
et ont caractérisé, comme par des types particuliers, les
époques des formations; mais à de grands éloignemens hori-
zontaux des êtres de formes très-diverses peuvent, sous dilfé-
rens climats, avoir occupé simultanément la surface du globe
ou le bassin des mers. II y a plus encore : le gisement de /3
entré a et 'y prouve que la formation de /3 est antérieure à
celle de -y, postérieure à celle de a-, mais rien ne nous
donne la mesure absolue de l'intervalle entre les époques-
limites, et différens dépôts (isolés) de /2 peuvent ne pas être
simultanés.
Il semble résulter des faits que le zèle et la sagacité des
naturalistes ontréunis depuis un petit nombre d'années, que,
si l'on ne doit pas toujours s'attendre à trouver, comme le
prétendoit Lister, dans chaque formation différezite d'autres
dépouilles de corps organisés, le plus souvent des formations
reconnues pour identiques par leur gisement et leur compo-
sition renferment , dans les contrées les plus éloignées du
globe, des associations d'espèces entièrement semblables. M.
Brongniart, dont les travaux, joints à ceux de MM. Lamarck ,
Defrance, Beudant, Desmarest , Prévost, Férussac , Schlott-
heim , Wahlenberg, Buckland, Webster, Phillips, Greenough ,
"Warburton , Sowerby , Brocchi , Soldani , Cortesi , et d'autres
minéralogistes célèbres, ont tant avancé l'étude de la conchj-
liologie souterraine, a fait voir récemment les analogies frap-
pantes qu'offrent, sous le rapport des corps fossiles, certains
terrains d'Europe et de l'Amérique septentrionale. Il a essayé
de prouver qu'une formation est parfois tellement déguisée,
que ce n'est que par des caractères zoologiques que l'on peut la
xeconnoître (Brongniart, Hist. nat. des crustacés fossiles, p. Sj ,
£2). Dans l'étude des formations, comme dans toutes les sciences
physiques descriptives, ce n'est que l'ensemble de plusieurs
caractères qui doit nous guider dans la recherche de la vérité.
La description spécifique des débris de plantes et d'animaux
renfermés dans les divers terrains, nous en offre pour ainsi
dire la Flore ou la Faune. Or, dans le monde primordial,
IND 95
coiniue dans celui d'aujourd'hui, la végétation et les pro-
ductions animales des diverses portions du globe paroisscnt
avoir été moins caractérisées par quelques formes isolées d'uu
aspect extraordinaire, que par l'association de beaucoup de
formes spécifiquement difféicntes, mais analogues entre elles,
malgré la distance des lieux. En découvrant une nouvelle
terre près du détroit de Torres , il ne seroit pas aisé de dé-
terminer, d'après un petit nombre de productions, si cette
terre est contigue à la Nouvelle-Hollande , ou à l'une des lies
Moluques ou à la Nouvelle -Guinée. Comparer des forma-
tions sous le rapport des fossiles, c'est comparer des Flores
et des Faunes de divers pays et de diverses (époques ; c'est
résoudre un problèuie d'autant plus compliqué qu'il est mo-
difié à la fois par l'espace et le temps.
Parmi les caractères zoologiques appliqués à la géogaosie ,
l'absence de certains fossiles caractérise souvent mieux les for-
mations que leur présence. C'est le cas des roches de transi-
tion : on n'y trouve généralement que des madrépores , des en-
criuites , des trilobites, des orthocératites et des coquilles de
la famille des térébratules , c'est-à-dire des fossiles dont quel-
ques espèces , non identiques, mais analogues , se rencontrent
dans des couches secondaires très-modernes ; mais ces roches
de transition sont privées de bien d'autres dépouilles de corps
organisés, quiparoissent en abondance au-dessus du grès rouge.
Le jugement que l'on porte sur l'absence de certaines es-
pèces, ou sur l'absence totale des corps fossiles, peut cepen-
dant être fondé sur une erreur qu'il sera utile de signaler
ici. En examinant en grand les formations coquilliéres, on
observe que les corps organisés ne sont pas toujours égale-
ment distribués dans la masse; mais 1.°, que des strates en-
tièrement dépourvus de fossiles alternent avec d'autres strates
qui en fourmillent ; 2." que, dans une même formation, des
associations particulières de fossiles caractérisent certains
strates qui alternent avec d'autres strates à fossiles distincts.
Ce phénomène , observé depuis long-temps , se retrouve dans
le muschelkalk et dans le calcaire alpin (zechstein), qu'une
couche de trochites sépare souvent du grès houiller fBuch,
Beob., T.I,p. i35, 146, 171 ); il est propre aussi au calcaire
du Jura et à plusieurs formations tertiaires. En n'étudiant que
9^ iM)
la craie des environs de Paris , on pourroit presque croire qur
les coquilles univalvcs manquent entièrement à cette forma--
tion : cependant les univalves polythalames , les ammonites ,
comme nous Tavons rappelé déjà, sont très -communs en
Angleterre, dans les couches les plus anciennes de la craie.
Même en France (côte de Sainte -Catherine près de Caen )
la craie tuffeau et la craie chloritée contiennent beaucoup
de fossiles que l'on ne trouve pas dans la craie blanche
(Brongniart, Caractères zool. , p. 12). Comme dans difTérens
pays les terrains ne se sont pas développés également, et
que l'on peut prendre des lambeaux de formations pour des
formations entières et complètes , celles qui sont dépourvues
de coquilles dans une région, peuvent en offrir dans une
autre. Cette considération est importante pour obvier à la
tendance assez générale de trop multiplier les formations ;
car. lorsque sur un même point du globe un terrain (par
exemple de grès) abonde dans sa partie inférieure en corps
fossiles, et que sa partie supérieure en manque entière-
ment, cette seule absence des fossiles ne justifie pas la
scission du même terrain en deux formations distinctes. Dans
la description géologique des environs de Paris. M. Brongniart
a très-bien réuni les meulières sans coquilles avec celles qui
sont comme pétries de coquilles d'eau douce.
Nous venons de voir qu'une formation peut renfermer
dans différens strates des péti-ifications spécifiquement diffé-
rentes, mais que le plus souvent quelques espèces du strate
inférieur se mêlent à la grande masse d'espèces hétérogènes
qui se trouvent réunies dans le strate superposé. Lorsque
cette différence porte sur des genres dont les uns sont des
coquilles pélagiques, les autres des coquilles d'eau douce,
le problème de Punité ou de Pindivisibilité d'une formation
devient plus embarrassant. Il faut d'abord distinguer deux
cas : celui où quelques coquilles fluviatiles se trouvent
mêlées à une grande masse de coquilles marines, et celui où
des coquilles marines et fluviatiles pourroient alterner couche
par couche. MM. Gilet de Laumont et Beudant ont fait
des observations intéressantes sur ce mélange de produc-
tions marines et d'eau douce dans une même couche. M.
Beudaot a prouvé, par des expériences ingénieuses, corn-
IND 97
ment beaucoup de mollusques fluviatiles s'habituent gra-
duellement à vivre dans une eau qui a toute la salure de
l'océan. Le même savant a examiné, conjointement avec M.
Marcel de Serres, certaines espèces de paludines qui, préfé-
rant les eaux saumâtres , se trouvent prés de nos côtes,
tantôt avec des coquilles pélagiques, tantôt avec des co-
quilles fluviatiles. [Journ. dephys., T. LXXXIII , p. 107,
T. LXXXVIII, p. 211 ; Brongniart, Géogr. min. , p. 27, 5/,,
89.) A ces faits curieux se joignent d'autres faits, que
j'ai publiés dans la Relation de mon Voyage aux régions équi-
noxiales (T. I, p. 555 et T. II, p. 606) , et qui semblent
expliquer ce qui s'est passé jadis sur le globe, d'après ce que
nous observons encore aujourd'hui. Sur les côtes de la
Terre-ferme, entre Cumana et Nueva-Barcelona , j'ai vu des
crocodiles s'avancer loin dans la mer. Pigafetta a fait la
même observation sur les crocodiles de Bornéo. Au sud
de l'île de Cuba, dans le golfe de Xagua, il y a des laman-
tins dans la mer, sur un point où, au milieu de l'eau salée ,
jaillissent des sources d'eau douce. Lorsqu'on réfléchit sur
l'ensemble de ces faits, on est moins étonné du mélange de
quelques productions terrestres avec beaucoup de produc-
tions incontestablement marines. Le second cas que nous
avons indiqué , celui de l'alternance , ne s'est jamais pré-
senté, je crois, d'une manière aussi prononcée que l'alter-
nance du thonschiefer et du calcaire noir dans un même
terrain de transition, ou (pour rappeler un fait qui a rap-
port à la distribution des corps organisés) que l'alternance
de deux grandes formations marines ( calcaire à cérites et grès
de Romainville) avec deux grandes formations d'eau douce
(gypse et meulières du plateau de Montmorency). Ce que
l'observation attentive des superpositions a offert jusqu'ici , se
réduit à des couches alternantes de gypse et de marne, placées
entre deux formations marines , et renfermant au centre
(dans leur plus grande masse) des productions terrestres et
d'eau douce, et vers les limites supérieure et inférieure, tant
dans le gypse que dans les marnes, des productions marines:
telle est la constitution géologique du gypse de Montmartre.
La variation spécifique dans les pétrifications, le mélange
observé à Pierrelaie, et le phénomène d'alternance que pré-
a3. 7
98 IND
sente Montmartre , ne suffisent pas pour motiver le morcel-
lement d'une même formation. Les marnes et le gypse, qui
renferment des coquilles marines (n." 126 de la troisième masse),
ne peuvent être géognosfiquement séparés des marnes et des
gypses qui renferment des productions d'eau douce. Aussi
MM. Cuvier et Brongniart n'ont pas hésité de considérer l'en-
semble de ces marnes et de ces gypses marins et d'eau douce
comme un même terrain. Ces savans ont même cité cette
réunion de couches alicrnaiites comme un des exemples les
plus clairs de ce que l'on doit entendre par le mot formation.
{Géogr. miner., p. 3i, Sg, 189.) En effet, dans un même
terrain peuvent êtr.e renfermés différens systèmes de couches :
ce sont des groupes , des sous-divisions, ou , comme disent les
géognostes de l'école de Freiberg , des membres plus ou
moins développés d'une même formation (Freiesleben , Kupf.,
T. I, p. 17, T. in,p. 1).
Malgré le mélange de coquilles pélagiques et fluviatiles
que Ton observe quelquefois au contact de deux formations
d'origine différente , on peut donner à l'une de ces forma-
tions le nom de calcaire ou de grès marin, lorsqu'on ne veut
tirer la dénomination des roches que des espèces qui consti-
tuent la plus grande masse et le centre des couches. Cette
terminologie rappelle un fait qui a- rapport , pour ainsi dire ,
à la géogonie , à l'ancienne histoire de notre planète : elle pré-
cise (et peut-être un peu trop) l'alternance des eaux douces
et des eaux salées. Je ne conteste pas l'utilité des dénominations
grès ou calcaire marin pour des descriptions locales; mais,
d'après les principes que je me suis proposé de suivre dans
le tableau général des formations caractérisées d'après la
place qu'elles occupent comme termes d'une série , j'ai cru
devoir l'éviter avec soin. Tous les terrains au-dessous de
la craie et même au-dessous du calcaire à cérites ( calcaire
grossier du bassin de Paris) sont -ils, sans exception, des
calcaires et des grès marins ? Ou les monitors et les poissons
des schistes cuivreux dans le calcaire alpin de Thuringe :
les ichthyosaures de M. Home, placés au-dessous des ooli-
thes d'Oxford et de Bath , dans le lyas de l'Angleterre (qui
sur le continent est représenté par une partie du calcaire du
Jura); les crocodiles de Honfleur, enfouis dans des argiles
IND 99
avec bancs calcaires au-dessus des oolithes de Dive et du cal-
caire d'Isigny, par conséquent supérieurs au calcaire du Jura,
prouvent-ils qu'il y a déjà au-dessous de la craie, entre ce
terrain et le grès rouge, de petites formations d'eau douce,
intercalées aux grandes formations marines ? Les houilles à
fougères sous le grès rouge et sous le porphyre secondaire ne
nous otfrent-elles pas un exemple évident d'une très-ancienne
formation non marine? Ces circonstances prescrivent, dans
l'état actuel de la science, beaucoup de réserve, lorsqu'on
se hasarde, d'après des caractères purement zoologiques, de
morceler des terrains dont l'unité a paru constatée par
l'alternance des mêmes couches et par d'autres phénomènes
de gisement. (Engelhard et Raumer, Geogn. Vers., p. 126 —
i53.) Cette réserve est d'autant plus nécessaire que, d'après
le témoignage d'un minéralogiste qui a long-temps approfondi
cette matière , M. Brongniart , « il existe une espèce de
transition entre la formation du calcaire marin et du gypse
d'eau douce qui suit ce calcaire, et que ces deux terrains
n'offrent pas cette séparation brusque qui se montre, sur les
mêmes lieux , entre la craie et le calcaire grossier, c'est-a-dire
entre deux formations marines. On ne peut douter, ajoute
le même observateur, que, les premières couches de gypse
n'aient été déposées dans un liquide analogue à la mer , tan-
dis que les suivantes ont été déposées dans un liquide ana-
logue à l'eau douce. ^^ {Géogr. min., p. 168 et igS.)
En énonçant les motifs qui m'empêchent de généraliser
une terminologie fondée sur le contraste entre des produc-
tions d'eau douce et des productions marines, je suis loin
de contester l'existence d'une formation d'eau douce supé*
rieure à toutes les autres formations tertiaires, et qui ne
renferme que des bulimcs , des limnées, des cyclostomes et
des potaniides. Des observations récentes ont démontré com-
bien cette formation est plus répandue qu'on ne l'avoit
cru d'abord. C'est un nouveau et dernier terme à ajouter à
la série géognostique. Nous devons la connoissance plus in-
time de ce calcaire d'eau douce aux utiles travaux de M.
Brongniart. Les phénomènes qu'offrent les formations d'eau
douce, dont l'existence n'étoit anciennement connue que
par les tuffs de la Thuringe et par le Travçrtin toujours re-
loo IND
naissant des plaines de Rome (Reuss, Geogn. , T. II, p. 642 ;
Buch, Geogn. Beob. , T. II , p. 21 — 3o ) , se lient delà ma-
nière la plus satisfaisante aux lois admirables que M. Cuvier
a reconnues dans le gisement des os des quadrupèdes vivi-
pares. (Brongniart, Annales du Muséum, T. XV, p. oây , 58i ;
Cuvier, Recli. sur les ossem. fossiles , T. I, p. LIV. )
La distinction entre les coquilles fossiles fluviatiles et mari-
nes est l'objet de recherches très-délicates : car il peut arriver,
lorsque les dépouilles des corps organisés se détachent diffici-
lement de la niasse du calcaire siliceux qui les renferme, qu'on
confonde des ampullaires avec des natices , des potamides
avec des cérites. Dans la famille des conques on ne sépare
avec certitude les cyclades et les cyrènes , des venus et des Iut
cines, que par l'examen des dents de la charnière. Le travail
que M. de Férussac a entrepris sur les coquilles terrestres et
fluviatiles, jettera beaucoup de jour sur cet objet important.
D'ailleurs , lorsqu'on croit voir un genre de .coquilles péla-
giques au milieu d'un genre de coquilles d'eau douce, on
peut agiter la question, si effectivement les mêmes types gé-
nériques ne peuvent se retrouver dans les lacs et dans les mers.
On connoît déjà l'exemple d'un véritable mytilus fluviatile.
Peut-être les ampullaires et les corbules offriront-ils des mé-
langes analogues de formes marines et de formes d'eau douce.
(Voyez un mémoire de M. Valenciennes , inséré dans mon
Recueil d'obs. de zoologie et d'anatomie comparée , T. IJ , p. 2 1 8.)
Il résulte de ces considérations générales sur les caractères
zoologiques et sur l'étude des corps fossiles, que, malgré les
beaux et anciens travaux de Camper, de Blumenbach et de
Sommering , l'exacte détermination spécifique des espèces ,
et l'examen de leurs rapports avec des couches très-récentes
et voisines de la craie, ne datent que de vingt -cinq ans. Je
pense que cette étude des corps fossiles, appliquée à toutes
les autres couches secondaires et intermédiaires par des
géognostes qui consultent en même temps le gisement et la
composition minérale des roches, loin de renverser tout le
système des formations déjà établies, servira plutôt à étayer
ce système, à le perfectionner, à en compléter le vaste ta-
bleau. On peut envisager sans doute la science géognostique
des formations sous des points de vue très-différens, selon
IND loi
que l'on s'attache de préférence à la superposition des masses
minérales, à leur composition (c'est-à-dire, à leur analyse
chimique et mécanique) , ou aux fossiles qui se trouvent ren-
fermés dans plusieurs de ces masses; cependant la science
géognostique est une. Les dénominations, géognosie de gise-
ment ou de superposition , géognosie oiyctognostique (analysant
le tissu des masses), géognosie des fossiles , désignent, je ne
dirai pas , des embranchemens d'une même science, mais
diverses classes de rapports que l'on tâche d'isoler pour les
étudier plus particulièrement. Cette unité de la science, et
le vaste champ qu'elle embrasse , avoient été très-bien reconnus
par Werner, le créateur de la géognosie positive. Quoiqu'il ne
possédât pas les moyens nécessaires pour se livrer à une déter-
mination rigoureuse des espèces fossiles, il n'a cessé, dans ses
cours, de fixer l'attention de ses élèves sur les rapports qui
existent entre certains fossiles et les formations de différens
âges. J'ai été témoin de la vive satisfaction qu'il éprouva , lors-
qu'en 1792 M. de Schlottheim , géognoste des plus distingués
de l'école de Freiberg, commença cà faire de ces rapports l'objet
principal de ses études. La géognosie positive s'enrichit de toutes
les découvertes qui ont été faites sur la constitution minérale du
globe; elle fournit à une autre science, improprement appelée
théorie de la terre, et qui embrasse l'histoire première des
catastrophes de notre planète , les matériaux les plus précieux*
Elle réfléchit plus de lumières sur cette science qu'elle n'en
reçoit d'elle à son tour; et, sans révoquer en doute l'ancienne
fluidité ou le ramollissement de toutes les couches pierreuses
(phénomène qui se manifeste par les corps fossiles, par l'as-
pect cristallin des masses, par les cailloux roulés ou les frag-
mens empâtés dans les roches de transition et les roches
secondaires), la géognosie positive ne prononce point sur la
nature de ces liquides dans lesquels, dit -on, les dépôts se
sont formés , sur ces eaux de granité, de porphjre et de gypse,
que la géologie hypothétique fait arriver, marée par marée,
sur un même point du globe.
Dans le tableau des formations je n'ai point indiqué l'incli-
naison desstrates comme caractère géognostique. Nul doute que
la discordance de deux roches (Ungleichformigkelt der Lage-
rung) , c'est-à-dire , le manque de parallélisme dans leur direc-
102 IND
tion et leui* inclinaison , ne soit le plus souvent une preuve évi-
dente de l'indépendance des formations; nul doute que la
grande inclinaison du terrain houiller ( coal-measures ) , du
grès rouge et des roches de transition , si justement opposée en
Angleterre par M. Buckland à l'horizontalité du calcaire ma-
gnésien , du red-marl, du lyas et de toutes les couches plus
modernes encore, ne soit un phénomène très-digne d'atten-
tion : mais, dans d'autres régions de la terre, sur le continent
de l'Europe et dans l'Amérique équinoxiale, le calcaire alpin
et le calcaire du Jura , qui représentent ces formations horizon-
tales de l'Angleterre, sont très-inclinés aussi. En embrassant
sous un même point de vue de vastes étendues du globe, les
Alpes, les montagnes métallifères delà Saxe, les Apennins,
les Andes de la Nouvelle-Grenade et les Cordillères du Mexi-
que, on observe que l'inclinaison des strates n'augmente pas
du tout (comme on le répète encore souvent dans des ouvrages
très-estimés) selon l'âge des formations. 11 y a quelquefois, et
sur des étendues de terrain très-considérables, des couches
presque horizontales parmi les roches très-anciennes; et, qui
plus est, ces phénomènes s'observent plutôt parmi les roches
primitives que parmi les roches de transition , et dans les
premières plutôt parmi les gneis et les granités stratifiés que
parmi les thonschiefcr et les micaschistes. Il m"a paru , en gé-
néral , que les roches les plus inclinées se trouvent (si Ton fait
abstraction de couches très-rapprochées des hautes chaînes de
montagnes) entre le micaschiste primitif et le grès rouge.
L'horizontalité des strates n'est bien générale et bien prononcée
qu'au-dessus de la craie, dans les terrains tertiaires, par
conséquent dans des masses d'une épaisseur comparativement
peu considérable.
Ce n'est point ici le lieu d'approfondir la question de savoir
si toutes les couches inclinées sont des couches relevées ,
comme le prétcndoit Stenon dès l'année 1667, et comme le
semble prouver le phénomène local de galets ou fragmens
aplatis placés parallèlement aux surfaces des couches inclinées
dans des conglomérats de transition (grauwacke) et dans le
nagelfluhe, ou s'il est possible que des attractions que l'on
suppose avoir agi à la fois sur une grande partie de la surface
du globe, ont produit dans nos plaines des strates inclinés dés
IND io3
leur origine, semblables à ces lames superposées, et sans con-
tredit primitivement inclinées , qui forment le clivage d'un
cristal. Certains grès (Nebra) offrent un parallélisme très-
régulier dans leurs feuillets les plus minces, coupant sous uu
angle de 20° à 55" les fissures de stratification horizontales
ou inclinées. Sans vouloir tenter de résoudre ces problèmcG,
il me sera permis de réunir à la fin de cette introduction
quelques faits qui se lient à l'étude des gisemens. Lorsqu'au
Tnilieu de pays non montagneux , ou sur des plateaux non
interrompus par des vallées, où la roche reste constamment
visible, on voyage pendant huit à dix lieues dans une direc-
tion qui coupe celle des couches à angle droit, et que l'on
trouve ces couches (de thonschiefer de transition) parallèles
entre elles, presque également inclinées de 5o à 60 degrés,
vers le nord -ouest par exemple , on a de la peine à se
former une idée d'un relèvement ou d'un abaissement si
uniformes, et des dimensions de la montagne ou du creux,
qu'on doit admettre pour expliquer par une impulsion vio-
lente et simultanée cette inclinaison des strates. En raison-
nant sur l'origine des couches inclinées , il faut distinguer
deux circonstances très -différentes : leur position dans la
proximité d'une haute chaîne de montagnes qui est traversée
par des vallées longitudinales ou transversales, et leur po-
sition loin de toute chaîne de montagnes, au milieu des
plaines ou de plateaux peu élevés. Dans le premier cas, les
effets du relèvement paroissent souvent incontestables, et les
coucjies inclinent assez généralement vers la chaîne, c'est-à-
dire sur la pente septentrionale des Alpes au sud , sur la pente
méridionale, mais beaucoup moins régulièrement, au nord
{Buch , in Schr. ]S al. Freunde, 180g, p. io3, 109, 179, 181;
Bernouilli , Schweiz. Miner. , p. 20 ) ; mais, à de grandes dis-
tances de la chaîne , celle-ci paroît influer sur la seule direc-
tion des couches , et non sur leur inclinaison.
J'ai été, dès l'année 1792, très-attentif à ce parallélisme ou
plutôt à ce loxodromisme des couches. Habitant des montagnes
de roches stratifiées où ce phénomène est très-constant, exa-
minant la direction et l'inclinaison des couches primitives et
de transition , depuis la côte de Gênes, à travers la chaîne de
la Bochetta , les plaines de la Lombardie , les Alpes du Saint-
104 IND
Gothard, le plateau de la Souabe, les montagnes de Baireuth
et les plaines de l'AIleinagne septentrionale, j'avois été frappé,
sinon de la constance, du moins de l'extrême fréquence des
directions ?îor. 3 — 4 de la boussole de Freiberg (du sud-ouest
au nord-est). Cette recherche, que je croyois devoir con-
duire les physiciens à la découverte d'une grande loi de la
nature, avoit alors tant d'attraits pour moi, qu'elle est de-
venue un des motifs les plus puissans de mon voyage ài'équa-
teur. Lorsque J'arrivai sur les côtes de Venezuela, et que je
parcourus la haute chaîne du littoral , et les montagnes de
granite-gneis qui se prolongent du Bas-Orénoque au bassin
du Rio Negro et de l'Amazone, je reconnus de nou\ eau , dans
la direction des couches, le parallélisme le plus surprenant.
Cette direction étoit encore hor. 5 — 4 (ou N. 45" E.),
peut-être parce que la chaîne du littoral de Venezuela ne
s'éloigne pas considérablement de l'angle que fait avec le
méridien la chaîne centrale de l'Europe. J'ai énoncé les
premiers résultats que m'offroient les roches primitives et
de transition de l'Amérique méridionale, dans un mémoire
publié par M. de Lamétherie , dans son Journal de Physique,
T. 54, p. 46. J'y ai mêlé (comme cela arrive souvent aux
voyageurs , lorsqu'ils publient le résultat de leurs travaux
pendant le cours même du voyage), à des observations
très -précises sur la grande uniformité dans la direction
des couches (à l'isthme d'Araya , à la Silia de Caracas, au
Cambury près Portocabello , sur les rives du Cassiquiare .-
voyez ma Kelat. hist. , T. I, p. Sgo, 642, 564, SyS, T,. II,
p. 81 , 99, 125, 141), des aperçus généraux que j'ai regardés
depuis comme vagues et moins exacts. Quatre années de
courses dans les Cordillères ont rectifié mes idées sur un
phénomène qui est beaucoup plus important qu'on ne l'avoit
cru autrefois; et, de retour en Europe, je me suis empressé
de consigner le résultat général de mes observations dans
la Géographie des plantes , p. 116, et dans l'Essai politique sur la
Nouvelle-Espagne , T. II, p. 520. L'indication de ce résultat
étoit sans doute restée inconnue au savant auteur du Critical
fxamination ofGeology {p. 276), lorsqu'il a combattu les asser-
tions publiées pendant mon absence, en 1799, P^^" ^^' ^^
Lamétherie.
IND io5
Il n'existe dans aucun hémisphère, parmi les roches, une
uniformité générale et absolue de direction; mais, dans des
régions d'une étendue très-considérable, quelquefois sur plu-
sieurs milliers de lieues carrées , on reconnoit que la direction ,
plus rarement l'inclinaison , ont été déterminées par un sys-
tème de forces particulier. On y découvre, à des distances
très-grandes, un parallélisme de couches, une direction dont le
type se manifeste au milieu des perturbations partielle», et qui
reste souvent le même dans les terrains primitifs et de tran-
sition. Cette identité de direction s'observe plus fréquemment
loin des hautes chaînes alpines très- élevées , que dans ces
chaînes mêmes , où les strates se trouvent contournés, redres-
sés et brisés. Assez généralement, et ce fait avoit déjà frappé
M. Palassou (Essai sur la Min. des Pyrénées, 1781) et même
M. de Saussure ( Voyages dans les Alpes, §. 2002), la direc-
tion de couches très -éloignées des chaînes principales suit
la direction de ces chaînes de montagnes. Cette unifor-
mité de parallélisme des couches (du nord-est au sud-ouest)
a été observée dans une grande partie de l'Allemagne sep-
tentrionale, au Fichtelgebirge, en Franconle et sur les bords
du Rhin; en Belgique; aux Ardennes ; dans les Vosges; dans
le Cotentin ; dans la Tarantaise ; dans la majeure partie des
Alpes delà Suisse et en Ecosse. Je ne citerai que desgéognostes
modernes , très-exercés à ce genre d'observations, et d'autant
plus attentifs à la direction et à l'inclinaison des strates,
que les assertions que j'avois émises 5ur un parallélisme ou
loxo îromisme à de grandes distances avoient excité de vives
contestations. « Qu'on vienne, dit M. Boue, examiner en
« Ecosse, la boussole àla'main, la position des masses mi-
« nérales , et qu'on sache s'arrêter aux faits généraux ; l'on
« s'apercevra que la direction des couches est constante et
« correspond à celle des chaînes du sud-ouest au nord-est,
« mais que l'inclinaison yarie d'après des circonstances lo-
« cales.» (Raumer, Geogn. Versuche, p. 41, 44, 48 ; Id. ,
Fragmente, p. 58, 64. Goldfuss et Bischof, Fichtelg., T. I^
p. 189. Omalius d'Halloy , dans le Journal des mines, 1808,
p. 463. Brochant, Obser^. séol. sur les ten^ains de transition , p. 14.
Escher, dansVAlpina, T.IV,p.o5j; Gruner, dansl'lsis, i8o5 ,
Oct., p. 181. BernouUi, Schiveiz. Min. , p. 19 — 24. Ehel,Alpen,
io6 IND
T. I, p. 220; T. Il, p. 201, 2i5, 357. Boue, Géol. à' Ecosse ,
p. i3.) Dans les Pyrénées la direction générale des strates
est, d'après les belles observations de MM. Palassou , Ra-
mond , Charpentier et d'Anbuisson , comme la direction
générale de la chaîne, N. 68" O., ou de l'est-sud-est à
l'ouest- nord-ouest. (Ramond, Pyrén. , T. I, p. 67, T. II ,
p. 554; d'Aubuisson, Géologie, T. I, p. 342.) Cette même
régularité règne dans le Caucase. Aux États -unis de l'Amé-
rique septentrionale, les roches primitives et intermédiaires
sont dirigées, d'après M. Maclure , comme la chaîne des
Alleghanys, du nord-est au sud-ouest. Les directions du nord
au sud ou du nord-nord-est au sud-sud-ouest prédominent en
Suède et en Finlande. ( Haussmann , dans les Mémoires de
V Académie de Munie, 1808, P. I, p. 147. Buch , Lappland ,
T. I , p- 277, 298. Hisinger, Min. Geogr. von Scluveden, p.
465. Engelhardt, Felsgebilde Russlands , p. 18.) Dans les Cor-
dillères du Mexique on observe un type de direction très-
général : les couches qui forment le plateau se dirigent du
sud-est au nord -ouest, parallèlement à la direction de la
chaîne d'Anahuac , tandis que V axe volcanique (la ligne qui
passe, entre les 18° 69' et 19° 12' de latitude, par le Pic
d'Orizaba , les deux volcans de la Puebla , le Nevado de
Toluca, le Pic de Tancitaro et le volcan de Colima, ligne
qui est -en même temps le parallèle des plus grandes élévations)
se prolonge de l'est à l'ouest, comme une crevasse qui tra-
verse l'isthme mexicain d'une mer à l'autre. [Essai politique,
r. If, p. 253.)
Comme nous ignorons les causes 'primordiales des phéno-
mènes, la philosophie naturelle , dont la géognosie sera un
jour une des parties les plus intéressantes, doit s'arrêter à
la connoissance des lois; et, dans le phénomène qui nous
occupe , ces lois peuvent être soumises à des mesures exactes.
Il ne faut point oublier que les lignes de direction des couches
(StreichungsUnien) rencontrent les méridiens , lorsqu'à de
grandes distances ces couches sont, par exemple, uniformé-
ment dirigées N. 45° E., comme les élémens d'une ligne loxo-
dromique, sans être parallèles dans l'espace. I.a direction
des couches anciennes (primitives et de transition) n'est pas
un petit phénomène de localité : c'est au con(raire un phé'
IND 107
nomène indépendant de la direction des chaînes secondaires,
de leurs embranchemens et de la sinuosité de leurs vallées;
un phénomène dont la cause a agi, d'une manière uni-
forme, à de prodigieuses distances, par exemple, dans l'an-
cien continent, entre les 43° et 67° de latitude, depuis
l'ÉcoSse jusqu'aux confins de l'Asie. Quelle est cette influence
apparente des hautes chaînes alpines sur des couches qui,
quelquefois, en sont éloignées de plus de cent lieues? J'ai
de la peine à croire que la même catastrophe ait soulevé
les montagnes et incliné les strates dans les plaines, de sorte
que la tranche de ces strates, jadis tous horizontaux, au-
jourd'hui tous inclinés de 5o" à 60", et formant la surface du
globe, se seroit trouvée à de grandes profondeurs. Les chaînes
des montagnes alpines ont -elles été soulevées ? Sont -elles
sorties (semblables à cette rangée de EÏmes volcaniques dans
les plaines de Jorullo , entre la ville de Mexico et les côtes
de la mer du Sud), sur des crevasses formées parallèlement
à la direction de couches inclinées déjà préexistantes P
En traçant le tableau géognostique des formations, j'ai dû
m'abstenir de citer à chaque observation la source à laquelle
je l'ai puisée. La géognosie positive est une science qui ne
date que de la fin du dernier siècle, et il n'est pas facile,
je pourrois ajouter, il n'est pas sans danger, de faire l'histoire
d'une science si moderne. Quoique dans le cours d'une vie
laborieuse j'aie eu le bonheur de voir une plus grande éten-
due de montagnes qu'aucun autre géognoste, le peu que j'ai
observé se perd dans la grande masse des faits que j'en-
treprends d'exposer ici. Ce que ce Traité des formations
renferme d'important, est dû aux efforts réunis de mes con-
temporains. J'ai voulu présenter aux lecteurs , d'une ma-
nière concise, l'enchaînement des découvertes qui ont été
faites: j'ai cru pouvoir ajouter ce qui est seulement pro-
bable à ce qui me paroi t entièrement constaté. Si j'avois
atteint le but que je me suis proposé, les hommes supérieurs
qui en Allemagne, en France, en Angleterre, en Suède et
en Italie, ont contribué à agrandir l'édifice de la science
géognostique, devroient rcconnoitre à chaque page les résul-
tats de leurs travaux. J'ai rejeté dans des notes, à la fin du
tableau, lescitations desfaits moins généralement connus, et je
io8 IND
n'ai nommé dans le tableau niéme que Jes savans qui ont
Lien voulu me communiquer des observations et des aperçus
qu'ils n'ont point encore publiés. Les communications les
plus nombreuses et les plus intéressantes de ce genre sont
celles que je dois , depuis quinze ans , à M. Léopold de Buch ,
avec lequel j"ai eu l'avantage de faire mes premières études
minéralogiques sous un grand maître, et qui, sur une vaste
étendue de terrains (entre les 28° et les 71° de latitude),
a recueilli des matériaux précieux pour la géognosie, This-
toire de l'atmosphère et la géographie des végétaux. J'ai fait
usage, dans le cours de mon travail, de plusieurs notes
inédites que ce savant a bien voulu me donner sur le tissu
jcristallin des trachytes que j'ai rapportés des Cordillères, et
sur l'ordre des formations en Suisse . en Angleterre , en
Ecosse, en Toscane et dans les environs de Rome. J'ai aussi
eu l'avantage de le consulter, pendant les difiFérens séjours
qu'il a faits à Paris, sur ce qui me paroissoit douteux dans
le gisement des formations. Toutes les observations relatives
à la Hongrie sont tirées du Voyage minéralogique de M. Beu-
dant, qui est sur le point de paroître , et dans lequel la
plupart des questions de gisement sont traitées avec une
grande supériorité. Mon compatriote, M. de Charpentier,
directeur des salines de Suisse, a bien voulu me communi-
quer son excellente description des Pyrénées, travail le plus
complet que l'on possède sur une grande chaîne de mon-
tagnes. Plusieurs renseignemens sur les porphyres d'Europe
sont tirés d'une notice que j'ai écrite, pour ainsi dire, sous
la dictée de M. Werner, lorsque cet homme célèbre est
venu, pour quelques jours , de Carlsbad à Vienne (eni8ij),
pour s'entretenir avec moi sur la constitution géognostique de
la Cordillère des Andes et du Mexique. C'est un devoir bien
doux à remplir que de donner un témoignage public de re-
connoissance à ceux dont la mémoire nous est chère. Je n'ai
pas tiré tout le parti que j'aurois voulu des travaux importans
de MM. MacuUoch, Jameson , Weawer, Berger, et d'autres
membres .des Sociétés géologique et wernérienne , en Angleterre,
parce que j'ai craint de prononcer sur l'identité des forma-
tions d'un pays que je ne connois pas, au nord des montagnes
du Derbyshire, et qui, dans ce moment, est exploré avec
tant de zèle et de succès.
IND 109
En indiquant pour chaque formation les noitis de quelques-
uns des lieux où elles se trouvent (ce que les botanistes ap-
pellent les habitations) , je n'ai eu aucunement la prétention
d'étendre le domaine de la géographie minéralogique : je n'ai
voulu que présenter des exemples de gisement bien observés.
Les exemples ne sont pas toujours choisis parmi des contrées
qui, par les descriptions de géognostes célèbres, sont devenues,
pour ainsi dJrt, classiques. Il a fallu nommer quelquefois, dans
l'autre hémisphère , des lieux qu'on ne trouve sur aucune
de nos cartes. Allemont, Dudley , cap de Gates, Manstield et
Œningue sont plus connus des minéralogistes que les grandes"
provinces métallifères d'Antioquia , des Guamalies et de Za-
catecas. Pour faciliter ce genre de recherches , j'ai souvent
ajouté, entre deux parenthèses, des renseignemens géogra-
phiques, par exemple, Quindiu (Nouvelle-Grenade), Ticsan
(Andes de Quito), Tomependa (plaines de l'Amazone). A
côté de l'indication des lieux où prédomine telle ou telle
formation , j'ai tâché de faire connoitre l'ordre entier de
superposition qui a été observé avec quelque certitude sur
des points très-éloignés , par exemple , dans les Cordillères des
Andes, en Norwége, en Allemagne, en Angleterre, en Hon-
grie et au Caucase. Ces descriptions de coupes, qui présentent
des matériaux pour la construction , si long-temps désirée,
d'un Atlas géognostique , sont, pour ainsi dire, les pièces
justificatives d'un tableau général des roches ; car la géo-
gnosie , lorsqu'elle s'occupe de la série des formations, est
à la géographie minéralogique ce que Vh^drographie com-
parée est k la topographie des grands fleuves , tracée isolé-
ment. C'est de la connoissance intime des influences qu'exer-
cent les inégalités du terrain, la fonte des neiges, les pluies
périodiques et les marées, sur la vitesse, sur les sinuosités, sur
les étranglemens , sur les bifurcations et sur la forme des
embouchures du Danube, du Nil, du Gange, de l'Amazone,,
que résulte une théorie générale des fleuves, ou , pour mieux
dire, un système de lois empiriques qui embrassent ce que l'on
a trouvé de commun et d'analogue dans les phénomènes lo-
caux et partiels. (Voyez quelques élémens de cette hydrogra-
phie comparée, dans ma Relat. liistor., T. II, p. Siy — -526 et
657 — 664.) La géognosie des formations offre aussi des lois
li\D
empiriques, qui ont élé abstraites d'un grand nombre de cas
particuliers. Fondée sur la géographie niinéralngique , elle
en diffère essentiellement, et cette diETérence entre Fabstrac-
lion et l'observation individuelle peut devenir, chez des
géognostes qui ne connoissent qu'un seul pajs, la cause de
quelques jugeniens erronés sur la précision d'un tableau gé-
néral des terrains.
Les sciences physiques reposent en grande partie sur des
inductions; et plus ces inductions deviennent complètes,
plus aussi les circonstances locales qui accompagnent chaque
phénomène, se trouvent exclues de l'énoncé des lois géné-
rales. L'histoire même de la géognosie justifie cette asser-
tion. Werner , en créant la science géognostique, a reconnu ,
avec une perspicacité digne d'admiration , tous les rapports
sous lesquels il faut envisager Findépendance des forma-
tions primitives, de transition et secondaires. Il a indiqué ce
qu'il falloit observer, ce qu'il importoit de savoir : il a pré-
paré, pressenti, pour ainsi dire, une partie des découvertes
dont la géognosie s'est enrichie après lui, dans des pays qu'il
n'a pu visiter. Comme les formations ne suivent pas les va-
riations de latitude et de climats, et que des phénomènes,
observés peut-être pour la première fois dans l'Himalaya
ou dans les Andes, se retrouvent,, et souvent avec l'asso-
ciation de circonstances que Fon croiroit entièrement acci-
dentelles, en Allemagne, en Ecosse ou dans les Pyrénées;
une très-petite portion du^obe, un terrain de quelques
lieues carrées dans lequel la nature a réuni beaucoup de for-
mations, peut (comme un vrai microcosme des philosophes an-
ciens) faire naitre, dans l'esprit d'un excellent observateur,
des idées très-précises sur les vérités fondamentales de la géo-
gnosie. En effet, la plupart des premiers aperçus deWerner,
même ceux que cet homme illustre s' éfoit formés avant l'année
J790, étoient d'une justesse qui nous frappe encore aujour-
d'hui. Les savans de tous les pays, même ceux qui ne montrent
aucune prédilection pour Fécolc de Freiberg , les ont conservés
comme bases des classifications géognostiqu es. Cependant, ce
que l'on savoit en 1790 des terrains primitifs, de transition
et secondaires, se fondoit presque entièrement sur la Thu-
ringe, sur les montagnes métallifères de la Saxe et sur celles
IND m
du Harz, sur une étendue de pays qui n'a pas 76 lieues de lon-
gueur. Les mémorables travaux deDolomieu, les descriptions
des Alpes de Saussure, furent consultés ; mais ils ne purent
exercer une grande influence sur les travaux de Werner.
Sans doute, Saussure a' donné des modèles inimitables d'exac-
titude dans la topographie de chaque cime, de chaque vallon;
mais cet intrépide vo}'ageur, frappé et delà complication
que présentent les phénomènes de superposition et du désor-
dre apparent qui règne toujours dans l'intérieur des hautes
chaines alpines, sembloit peu tenté de se livrer à des idées
générales sur la constitution géognostique d'un pays. Dans ce
premier âge de la science, le tjpe des formations étoit fondé
sur un petit nombre d'observations; il ressembloit trop à la
description des lieux où il avoit pris naissance. On prenoit
pour des formations indépendantes les masses minéi^ales qui ,
dans d'autres pays, ne sont que des couches subordonnées ou
accidentelles ; on ignoroit l'existence des formations qui
jouent un rôle important dans l'Amérique équatoriale, dans
le nord et dans l'ouest de l'Europe ; on méconnoissoit l'an-
cienneté relative des porphyres, des syénites et des eupho-
tides ; on ne complétoit pas l'histoire des couches plus ré-
centes par une détermination rigoureuse des corps orga-
niques fossiles qu'elles renferment : on observoit avec une
grande précision le gisement des basaltes, des phonolithes
(phorphyrschiefer) et des dolérites, qu'on avoit long-temps
confondus avec les grunstein trappéens; mais on combattoit
jusqu'à la possibilité de leur origine ignée, parce que, dans
le pays où la géognosie moderne s'est formée, on n'étoit
entouré que de quelques lambeaux de terrains volcaniques,
et que l'on ne pouvoit examiner les rapports qui existent
entre les trachytes ( trapporphyr) , les basaltes, les laves
plus modernes, les scories et les ponces. Si le tableau des
formations de Werner , malgré les livres qu'il consultoit,
malgré la surprenante perspicacité avec laquelle il savoit
démêler la vérité dans les récits souvent confus des voya-
geurs , étoit resté incomplet , ce savant ne s'afïligeoit pas
de voir ses travaux perfectionnés par d'autres mains. Il avoit
enseigné le premier l'art de reconnoitre et d'observer des
formations. C'est par l'application de cet art que la géognosie
IND
est devenue une science positive. Reconrïbissant que sa véri-
table gloire se fondoit plutôt sur la découverte des principef
de la science, sur Tinstrument qu'il falloit employer, que
sur les résultats obtenus à telle ou telle époque, Werner ne
chérissoit pas moins ceux de ses élèves qui ne parfa^eoient'
pas son opinion sur l'âge relatif et sur l'origine de plusieurs
terrains. Ce n'est qu'en soumettant cà l'observation une plus
grande partie du globe, que le type des formations a pu
être à la fois agrandi et simplifié. On l'a rendu plus con-
forme à la constitution géognostique des continens consi-
dérés sous un point de vue général.
Nous connoissons aujourd'hui d'une manière assez exacte le
gisement relatif de beaucoup de formations, i .*" Dans l'ancien
continent: dans les îles de la Grande-Bretagne, dans le nord
delà France, et en Belgique, en Norwége, en Suède et en
Finlande, en Allemagne, en Hongrie, en Suisse, dans les
Pyrénées, en Lombardie , en Toscane et dans les environs
de Rome; en Crimée et au Caucase (lat. 41" — 71° bor. ;
long. 40° or. — 12° oc). 2.° Dans le noui^eau continent : aux
États-unis de l'Amérique septentrionale , entre la Virginie
et le lac Ontario (lat. 36° — 45" bor. ; long. oc. 78° — 86°);
au Mexique , entre Veracruz , Acapulco et Guanaxuato
( lat. 16° 5o' — 21 ° 1 ' bor. ; long. oc. 98 " 29' — io5''22');
dans l'île de Cuba (lat. 23" 9' bor.) ; dans les Provinces-
unies de Venezuela, entre la côte de Paria, Portocabello,
le Haut-Orénoque et San Carlos del Rio Negro ; dans les
Andes de la Nouvelle - Grenade , de Popayan , de Pasto ,
de Quito et du Pérou ; dans la vallée de la Rivière des
Amazones et sur les côtes de la mer du Sud (lat. 10" 27'
bor. à 12" 2'austr. ; long. oc. 66° i5' — 82" ifi); au Brésil,
entre Rio Janeiro et la limite occidentale de la province
de Minas Geraes (lat. 18" — 26" austr. ; long. oc. 46" — 49°)«
A mesure que l'on s'élève à des idées plus générales, le
tableau des formations , tout en devenant plus vaste et
(nous osons le croire) plus vrai, satisfait m.oins ceux qui
voudroient y trouver fortement prononcés les traits indivi-
duels , la physionomie locale de leur canton. Mais ces traits
individuels, cette physionomie locale, ne peuvent y être
conservés que comme de simples variations d'u« type général,
IND 3i3
«omme des modifications particulières des grandes lois de
gisement. Quelque incomplète que soit encore la connois-
sance de ces lois, c'est déjà un grand pas fait dans ce genre
de recherches que d'avoir acquis, par les travaux réunis de
nos contemporains, la certitude qu'il en existe de constantes
et d'imznuables au milieu du conflit des perturbations locales.
Terrains primitifs.
Les plus anciennes formations de roches primitives que
fon a pu soumettre aux observations, sont, dans quelques
régions du globe, le granité (une formation dans laquelle le
granité n'alterne avec aucune autre roche); dans d'autres
régions, le granité - gneis (une formation granitique dans la-
quelle des couches de granité alternent avec des couches de
gneis). On auroit de la peine à nommer un granité que les
géognostes regardassent unanimement comme antérieur à
toutes les autres roches ; mais cette incertitude tient à la
nature même des choses, à l'idée que nous nous formons de
l'âge relatif et de la superposition des roches. On peut cons-
tater par l'observation, que le granité du Saint -Gothard re-
pose sur du micaschiste ; que celui de Kielwig , enNorvvége,
repose sur du thonschiefer. Mais comment démontrer un
fait négatif? comment prouver que, sous un granité que l'eu
appelle de première formation , il ne se trouve pas de nou-
veau du gneis, ou quelque autre roche primitive ^ En tra-
çant le tableau des connoissances que nous avons acquises
sur la superposition des roches , nous dcvoiis nous abstenir
de prononcer avec assurance sur la première assise de l'édifice
géognostique. C'est ainsi (car il en est du temps comme de
l'espace) qu'à travers de longues migrations des peuples l'his-
toire ne reconnoit pas avec certitude quels ont été les pre-
miers habitans d'une coutx'ée.
I. Granité primitif.
§. 1. Granité qui n'alterne pas avec le gneis. Comme on.
;i récemment élevé d»?s doutes très-fondés sur l'ancienneté
.--3. 8
ii4 IND
de beaucoup de formations de granité, on ne peut désigner
la première des roches primitives que par des caractères
négatifs. Il m'a paru que dans les deux hémisphères, surtout
dans le nouveau monde, le granité est d'autant plus ancien,
qu'il n'est pas stratifié , qu'il est plus riche en quarz et moins
abondant en mica. Dansles hautes chaînes des montagnes (dans
les Alpes de la Suisse et dans la Cordillère des Andes, entre
Loxa et Zaulaca}, le granité, par l'abondance et la direction
uniforme des feuillets de mica, tend à devenir lamelleux ;
tandis que les granités qui percent la terre végétale dans les
plaines, présentent généralement, parleur texture plus uni-
formément grenue, un contraste plus marqué avec le gneis.
La grosseur du grain, la régularité de la cristallisation des
parties constituantes , et la couleur rouge ou blanche du
feldspath , sont des phénomènes très- dignes d'attention , si
l'on considère de grandes masses d'une roche, et si l'on
fait abstraction des bancs subordonnés de granité à petits
grains que l'on rencontre au milieu d'un granité à gros grains,
et lice versa. Ces phénomènes désignent l'âge relatif d'une
formation dans une étendue de terrain plus ou moins circons-
crite; mais on ne sauroit en déduire des caractères généraux,
applicables à un continent entier. Dans les Cordillères, le
granité à petits grains et à feldspath blanc et blanc jaunâtre
m'a paru le plus ancien. L'absence, je ne dis pas de la tour-
maline et du titane-rutile , mais de l'amphibole disséminé, de
la stéatite , des grenats, del'épidote, de l'actinote, de l'élain ,
du fer oligiste , remplaçant le mica (Gottesgabe dans le Haut-
Palatinat) ; le manque de bancs subordonnés hétérogènes
(grilnstein, calcaire grenu) et de rognons à très-petits grains
et fortement micacés, qui sont de formation contempo-
raine et semblent comme enchâssés dans la masse principale ;
enfin , le manque de stratification dans les couches inférieu-
res, et la structure non porphyroïde , paroissent caractériser
les granités de première formation (côtes occidentales de
l'Amérique équinoxiale , Cascas , Santa et Guarmay dans le
Bas-Pérou ; rives du Cumbeima près Ibagué ; Quilichao et
Caloto dans les Andes de la Nouvelle-Grenade). Les granités
des cataractes de l'Orénoque et des montagnes de la Parime
renferment, comme ceux des Pyrénées et de laPIaute-Égypte,
IND ii5
quelques couches dans lesquelles on reconnoît des cristaux iso-
lés d'amphibole ; ces roches appartiennent probablement à une
époque un peu plus récente que le granité du Bas- Pérou.
Quoique les granités les plus anciens n'offrent généralement
pas de bancs subordonnés de calcaire primitif, la chaux
commence cependant déjà à se montrer, au sein des monta-
gnes primitives (je n'ose dire au premier âge du monde) ,
dans le feldspath et peut-être dans les tourmalines. Plus tard
cette quantité de chaux augmente par l'addition de Pamphi-
bole dans les couches syénitiques qui caractérisent les gra-
nités les plus modernes.
Granité et Gneïs primitifs.
§. 2. Cette formation, si bien caractérisée par M. de Rau-
mer, offre des couches de granité et de gneis très-distinctes,
à peu près contemporaines et alternant les unes avec les autres.
.Elle repose quelquefois (Riesengebirge ) immédiatement sur
la formation précédente; d'autres fois (au sud-est de Rio-
bamba, dans le royaume de Quito) elle est la plus ancienne
des roches visibles. Ce retour périodique de couches hétéro-
gènes se retrouve surtout dans les formations de transition ,
par exemple, dans celles de porphyre et syénite , de syénite
et griinstein. Je pense qu'il faut distinguer de la formation,
de granité et gneis , et les granités dont les couches passent
souvent et insensiblement au gneis, comme le granité du
littoral de Venezuela , et les gneis qui passent au granité
(pente méridionale de la Jungfrau et du Titlis). Les bano
subordonnés au granité et gneis sont : les micaschistes , qui , à
leur tour, renferment du calcaire grenu; les schistes am-
phiboliques et chloriteux ; le weisstein.
Granité stannifÈre.
§. 3. Généralement à parties constituantes très-désagrégées.
le feldspath passant au caolin ( Carlsbad , chemin d'Eiben-
stock à Johann-Georgenstadt ; et, d'après M. de Bonnard ,
probablement aussi les granités du département de la Haute-
Vienne). On reconnoitra peut-être dans la suite que plusieurs
de ces roches stannifères sont d'un âge plus récent encore ;
et qu'il faudroit les placer parmi les granités postérieurs au
^'* INEl
gneis et antérieurs au micaschiste. Des caractères de nou-
veauté semblent se retrouver même dans les granités du,
Fichtelgebirge, en Franconie , qui non -seulement sont très-
régulièrement stratifiés, mais qui contiennent aussi des bancs
d'urgriinstein (diabase primitive, paterlestein). Je ne connois
point la formation alpine de granité stannifère dans les
Andes : le granité qui constitue les sommets des Cordillères,
est presque toujours recouvert de formations de porphyre de
transition et de trachyte.
Weisstein avec Serfentine.
§. 4. Le weisstein (eurite), dans lequel domine le feldspath
compacte (partie nord-ouest de l'Erzgebirge) , repose sur le
granité ancien. Il est recouvert de gneis, quelquefois de mi-
caschiste (Hartha) , ou d'un schiste primitif auquel (Hermsdorf,
Dobeln) le weisstein paroît passer insensiblement. Bancs subor-
donnés : granité tantôt à grains très-gros (Penig) , tantôt à petits
grains , passant souvent au weisstein , et renfermant de la lépi-
dolithe et de la parenthine lamelleuse ; serpentine ( Wald-
heim). Le weisstein qui enchâsse quelquefois des grenats et
de la cyanite , est en Saxe , d'après les observations de MM.
Pusch , Raumer etMohs, une formation indépendante, anté-
rieure au gneis, et non un banc subordonné; en Silésie (En-
gelsberg près Zobten, et Weiseritz près Schweidnitz) , il ne
forme que des couches dans le granité et le gneis primitifs.
Ce phénomène n'a rien qui puisse étonner le géognoste. Les
micaschistes, les gneis et les porphyres se trouvent à la fois
comme roches indépendantes et comme bancs subordonnés.
La serpentine de Buenavista dans les montagnes de THigue-
rote, à l'ouest de Caracas, appartient proprement au gneis
talqueux; mais il paroit que, dans le même groupe de mon-
tagnes, il y a aussi de la serpentine liée à un weisstein qui
est superposé à la formation de granité et gneis. La ser-
pentine du "weisstein est la plus ancienne des roches d'eupho-
tides à très-petits grains, roches qui passent, pour ainsi dire^
à travers toutes les formations suivantes jusqu'à la limite
supérieure des terrains de transition.
IND 3'7
II. Gneis primitif.
§. 5. Nous distinguons cette formation de gneis (Freiberg,
Lyon , plateau entre Autun et la montagne d'Aussi ; Arns-
berg dans le Riesengebirge , Lbdingen enNorwëge, Gram-
pians en Ecosse), qui renferme des bancs subordonnés de
micaschiste, de la formation, également importante, de gneis
et micaschiste , dans laquelle des couches de gneis alternent
avec des couches de micaschiste. Le gneis est, d'après MM.
de Buch et Haussmann , la roche dominante en Scandinavie ,
où le granité ancien (antérieur au gneis) n'est presque
nulle part visible. Les bancs subordonnés du gneis sont très-
variés et fréquens; ils le sont cependant beaucoup moins
lorsque le gneis ne passe pas au micachiste. Nous ne nomme-
rons ici que les bancs les plus remarquables : quarz souvent
grenatifère; feldspath plus ou moins décomposé et dépourvu
de potasse ; porphyre, généralement rougeâtre, à base pétro-
siliceuse, renfermant du feldspath, du quarz et du mica (lager-
porphyr de la Halsbruckc, d'Ober-Frauendorf, de Liebstadt);
calcaire grenu assez rarement (route du Simplom, mine du
Kurprinz près de Freiberg) ; grenat commun , mêlé de calcaire
grenu, deblendeetdeferoxidulé(Sch\varzenberg): micaschiste
(Bergen en Norwége); syénite (Burkersdorf enSilésie); gra-
nité à feldspath décomposé , mais non stannifère ; serpentine
(ophyolithe) formant, d'après M. Cordier, une couche d'une
étendue immense dans les départemens de la Haute-Viç^nne,
du Lot et del'Aveyron ; amphiboliteschistoïde ou hornblend-
schiefer; grunstein , mêlé de fer magnétique (Taberg près
Jonkoping), de zircon , de zoïsite et de menakan (Priocktec-
halt, en Carinthie) ; fer magnétique en couches de 20 à 00
toises d'épaisseur , souvent mêlé de calcaire grenu , d'ichthyo-
phtalme , de spodumène , de trémolite , d'amianthe , d'actiaote
et de bitume (Danemora, Gellivara et Kinsivara, en Suéde
et enLaponie); pegmatite (Loch-Lâggan en Ecosse); gneis
renfermant des masses anguleuses de gneis d'une texture
différente de celle de la roche principale (Rostenberg, en
Norwége). Ce dernier phénomène (effet d'une cristallisation
contemporaine?) est beaucoup plus analogue aux granités
3i8 IND
du Greiffenstcin en Saxe, et du Pic Quairat dans les Pyré-
nées, qu'au gneis de transition renfermant les poudingues
de la Valorsine. La grande formation de gneis primitif, très-
riche en minerais d'argent et d'or, en Allemagne, dans quel-
ques parties de la France, en Grèce et dans l'Asie mineure,
a été désignée long-temps comme la roche la plus argentifère
du globe. On sait aujourd'hui , d'après des recherches faites
dans les deux Amériques et en Hongrie, que la grande masse
des métaux précieux qui circulent dans les deux continens ,
est due à des formations de beaucoup postérieures au gneis
et à toutes les autres formations primitives ; qu'elle provient
de roches de transition, de porphyres syénitiques et même
de trachytes. Le gneis peu métallifère de la partie équi-
noxiale du nouveau monde se montre sur une plus grande
étendue de terrain dans les montagnes qui courent de l'est
à l'ouest (chaîne du littoral de Caracas, cap Codera, et
îles du lac de Tacarigua ; Orénoque , Sierra de la l'arime )
et dans les régions basses éloignées de la chaîne des Andes
(à l'est des montagnes du Brésil), que dans la crête élevée
de cette chaîne même. Je n'ai pas vu le gneis ( à la Silla
de Caracas et au passage des Andes de Quindiu ) à plus
de i3oo et 1400 toises de hauteur au-dessus du niveau de
l'océan. Sur le dos des Cordillères, entre Ibague et Carthago
(Nouvelle-Grenade ou Cundinamarca) , comme au Paramo
de Chulucanas, en descendant vers l'Amazone , un granité de
nouvelle formation recouvre le gneis à 1800 toises de hau-
teur. Si dans les montagnes de l'Europe le gneis, le mica-
schiste et un granité de seconde formation constituent les plus
hautes cimes; dans les Andes, au contraire, les sommets les
plus élevés ne présentent que d'énormes accumulations de
roches trachy tiques. En suivant une même chaîne, un même
alignement de montagnes, on voit les basses régions de granite-
gneis et de gneis-micaschiste (provint e d'Oaxaca dans la Nou-
velle-Espagne , où le gneis est aurifère; groupes primitifs de
Quindiu; Almaguer, Guamote, au sud du Chimborazo; Sara-
guru et Loxa, danslesAïides du Pérou) alterner avec les régions
élevées (2000 à 55oo toises) de trachytes. Ces derniers ter-
rains , produits ou modifiés par ie feu, recouvrent sans
«ioule et quelquefois immédiatement, sans que des forma-
IND Ï19
tioris porpliyriques de transition soient interposées, le granité
et le gneis; cependant, là où j'ai pu voir les trachytes du
royaume de Quito (volcan de Tunguragua , ravin du Rio-
Puela près de Penipe) reposer sur un schiste micacé ver-
dàtre rempli de grenats et recouvrant à son tour un gra-
nité un peu syénitique avec quarz et mica (noir!), cette
superposition n'a aussi lieu qu'à la hauteur peu considérable
de 1240 toises. Il résulte en général de mon nivellement
barométrique des Cordillères , que dans toute cette région
des tropiques les granités et les gneis anciens, qu'il ne faut
pas confondre avec des roches syénitiques et granitiques de
transition, ne s'élèvent guère au-dessus de la hauteur qu'at-
teignent les sommets des Pyrénées. Tous les massifs super-
posés aux roches primitives, qui dépassent la limite des
neiges perpétuelles (2000 — 2460 toises), et qui donnent aux
Cordillères leur caractère de grandeur et de majesté , ne sont
généralement dus ni à des formations primitives ni à des
roches calcaires (il n'y a que le calcaire alpin des plateaux
de Gualgayoc et de Guancavelica qui se trouve à 2100 et
23oo toises), mais à des porphyres trachytiques , à des dolé-
rites et des phonolithes. (Nous ignorons encore de quelles-
Toches sont composés les sommets de l'Himalaya, les extré-
mités de ces pics récemment mesurés par M. Webb. ) Le gneis
des Cordillères abonde bien plus que le micaschiste en couches
subordonnées de calcaire grenu (micacé et rempli de pyrites).
Aussi , dans l'Amérique équinoxiale , comme à l'extrémité la
plus boréale de l'Europe et dans les Pyrénées, le grenat est
le plus commun dans le gneis, et cette dernière roche ne
cesse généralement de contenir des grenats que lorsqu'elle
se rapproche du schiste micacé (montagne d'Avila, près de
Caracas ). Un véritable gneis, dépourvu de grenats , se montre
cependant à Pouest de Mariquita, entre Rio Quamo et les
mines de S. Ana (Nouvelle -Grenade). Au Brésil, d'après
l'observation de M. d'Eschwege, Pétain (zinnstein) est dissé-
miné, non dans le granité , mais dans le gneis (bords du Rio-
Paraopeba près de Villa-Ricca).
Entre les deux grandes formations de gneis et de micaschiste
primitifs, nous placerons plusieurs formations parallèles:
î^e IND
Gneis et Micaschiste ; Sy^nite primitive ?
Granité postérieur au Gneis Serpentine primitive ?
ET ANTÉRIEUR AU Micaschiste; Oalcaire grenu.
Deux de ces formations sont peut-être aussi douteuses que
l'est le porphyre primitif, considéré comme formation indé-
pendante.
Gneis et Micaschiste.
§. 6. Des couches de gneis alternent avec des couches de
micaschiste, de même que le gneis, dans la formation §. 2,
alterne avec le granité. Ce ne sont pas des roches qui passent
Tune à l'autre, mais des couches alternantes, très-nettement
tranchées (Neisbach et Jauersberg en Silésie ; Waltersdorf
près Scheibenberg en Saxe). Dans les Cordillères de l'Amé-
rique, et peut-être dans la plupart des grandes chaînes de
montagnes de l'ancien continent, comme l'illustre Dolo-
mieu me l'avoit fait observer en Suisse dès l'année lygô ,
les formations mixtes ou d'alternance périodique, de gneis et
granité, et de gneis et micaschiste, sont beaucoup plus fré-
quentes que les formations simples, de granité, de gneis et de
micaschiste. La formation indépendante de gneis-micaschiste
repose tantôt sur la formation de gneiss ( §. 5), tantôt immé-
diatement sur le granité le plus ancien (§. 1). Dans ce der-
nier cas elle doit être considérée comme une formation paral-
lèle au gneis. Bancs subordonnés : calcaire grenu, schistes
amphiboliques, griinstein , serpentine, et thonschiefer avec
actinote. Ces bancs subordonnés se répètent plusieurs fois; car,
dans toutes les formations d'alternance périodique , soit primi-
tives , soit de transition (les granités c( gneis, les gneis et mica-
schistes , les syénites et griinstein, les porphyres et syénites,
les porphyres et grauwacke , les calcaires noirs et schistes
de transition), le retour périodique des masses s'étend jus-
qu'aux bancs subordonnés. Cette grande loi géologique se
manifeste dans toute la Cordillère des Andes, surtout dans les
itiontagnes situées au sud et au sud-est du volcan de Tungu-
ragua, au Condorasto , au Cuvillan et au Paramo del Hatillo ,
où (ce qui est très-rare dans cette région) le gneis-micaschiste
s'élève à plus de 2000 toises de hauteur, et renferme des
filons d'argent jadis très-célèbres ( weissgultigerz et sprod-
IND i2t
glaserz, argent blanc et argent vitreux aigre). Ces gneis-
micaschistes métallifères du Condorasto et de Pomallacta se
cachent vers le sud sous les formations de porphyres trachy-
iiques des Andes de l'Assuay ; ils reparoissent (à 1700 toises
de hauteur) entre les ruines du palais de l'inca (Ingapilca)
et la ferme de Turche, et ils se cachent de nouveau sous les
grès de Cuença. Les forêts de Quinquina, à l'ouest de Loxa,
couvrent aussi des montagnes de gneis alternant avec du mica-
schiste. Dans le passage des Andes de Quindiu , entre les
bassins du Rio Cauca et du Rio Magdalena, la formation de
gneis-micaschiste repose (au-dessus de la station de la Fal-
milla) immédiatement sur le granité ancien. Elle atteint une
énorme épaisseur, en s'élevant vers le Paramo de San-Juan.
Les couches de micaschistes alternant avec le gneis y sont
toujours dépourvues de grenats; elles offrent, au Valle del
Moral (à 1 o65 toises de hauteur) , des filons remplis de soufre,
exhalant des vapeurs sulfureuses dont la température s'élève
à 48° cent., l'air atmosphérique étant à 20°. Ce phénomène
est d'autant plus remarquable qu'au sud de l'équateur, dans la
célèbre montagne de soufre de Ticsan, j'ai trouvé le soufre dans
du quarz,.subordonné comme couche au micaschiste primitif.
Les couches de gneis de Quindiu contiennent des grenats
disséminés et des bancs de caolin décomposé. Dans la chaîne
côtière de Caracas , entre Turiamo et Villa de Cura , les for-
mations de granite-gneis et de gneis-micaschiste occupent,
dans une direction perpendiculaire à l'axe de la chaîne, un
terrain de dix lieues de largeur; le gneis-micaschiste se cache
vers les Llanos de Venezuela sous des schistes verts de transition.
Près de la Guayra , au cap Blanc, cette formation renferme
des bancs subordonnés de chlorite schisteuse (avec grenats
et sable magnétique) , de hornblendschiefer et de griinstein
mêlé de quarz et de pyrites. Sur les côtes du Brésil, où plu-
sieurs chaînes primitives se dirigent parallèlement aux Andes
du Pérou et du Chili dans le sens d'un méridien, des couches
de granité, de gneis et de micaschiste constituent une seule
formation et alternent en séries périodiques ( Ilha Grande,
au sud de Rio-Janeiro , près Villa d'Angra dos Reis, selon
"M. d'EschAvege). Les trois roches y sont contemporaints ,
comme les syénites qui alternent périodiquement, soit avec
les thonschiefer , soit avec les griinstein de transition.
1" rND
Granités postérieurs au Gneis , antérieurs au Micaschiste
primitif.
§. 7. Je réunis ici plusieurs formations de granité à peu
près parallèles, placées entre le gneis et le micaschiste, telles
que le granité stannifère (hyalomicte, graisen ) de Zinn-
wald et d'Altenberg , en Saxe, qui paroît reposer sur le
gneis et qui abonde en tourmalines noires ; la plupart des
pegmatites ou granités graphiques (schriftgranite), qui ren-
ferment de la lépidolite (Rozena, en Moravie) ; les granités
avec épidote; les granités à bancs subordonnés de weisstein
ou eurite (Reichenstein en Silésie) ; les granités avec stéatite
et chlorite, contenant souvent de l'amphibole disséminée,
et prenant l'aspect d'une syénite ou d'un schiste chloriteux
(protogynes du Mont-Blanc et de presque toute la chaîne
des Alpes entre le Mont-Cenis et le Saint - Gothard ; pro-
bablement aussi la roche du Rehberg au Harz); les granités
des Pyrénées, si bien étudiés par M. de Charpentier, et
renfermant de nombreux bancs de gneis, de micaschiste
et de calcaire grenu. Peut-être les granités d'Altenberg
appartiennent -ils (c'est l'opinion de M. Rendant ) aux
assises inférieures des porphyres de transition; peut-être les
granités des Pyrénées, qui enchâssent des amas d'urgriinstein
(diabase primitive) sont-ils même postérieurs à la grande
formation de micaschiste (§. 11), comme aussi les granités
stannifères du Fichtclberg , qui renferment du griinstein
(Ochsenkopf, Schnéeberg, en Franconie), et que nous avons
indiqués provisoirement au §. 3. Le même doute me reste
sur beaucoup de granités qui abondent en filons argentifères,
sur tous les granités avec grenats, et sur les granités por-
phyroïdes (à très-grands cristaux de feldspath rouge et
blanc), qui sont souvent aussi régulièrement stratifiés que
l'est le calcaire secondaire. Je n'ai point voulu citer ici les
amas d'étain de Geyer et de Schlackenwald , parce que
les granités qui les renferment, ne sont que des couches
dans le gneis et le micaschiste r ce ne sont pas de véritables
roches, des formations indépendantes, comme les granités
de Carlsbad et du Fichtelgebirgc. Dans l'Amérique équi-
noxiale on peut rapporter avec qjielque vraisemblance à la
IND 125
formation de granité postérieure au gneis et antérieure au
micaschiste, les granités de la pente occidentale des Cordil-
lères du Mexique (plateau du Papagallo et de la Moxonera) ,
qui sont ou porphyroïdes , ou divisés en boules à couches
concentriques. Ils enchâssent des bancs syénitiques liés à des
filons de basanite (urgrunstein compacte). Je les ai vus régu-
lièrement stratifiés en couches de 7 à 8 pouces d'épaisseur, et
afTectant, non une même inclinaison , mais une même direc-
tion avec les couches du porphyre de transition et du cal-
caire alpin superposées. On ne connoît point, il est vrai , les
roches que recouvre cette formation mexicaine de granité :
c'est celle sur laquelle toutes les autres roches du Mexique sont
placées; mais les caractères de composition et de structure
qu'elle offre en grand, et son analogie avec d'autres granités
stratifiés des hautes Andes du Pérou , me font croire qu'elle
est d'un âge plus récent que la formation §. 1. Au granité
antérieur au micaschiste , mais postérieur au gneis , appartient
plus positivement celui de la Garifa del Paramo , au pied du
volcan éteint de Tolima ( And es de Quindiu ) ; celui de la Silla
de Caracas ; les granités très -régulièrement stratifiés (sans
passer au gneiss) de Las Trincheras dans la chaîne côtiére de
Venezuela; les granités du groupe étendu des montagnes de
la Parime, qui sont ou régulièrement stratifiés (détroit du
Baraguan, vallée du Bas-Orénoque) , ou passant àlapegmatite
(Esmeralda et confluent de l'Ucamu, Haut-Orénoque) , ou
amphiboliques (cataractes d'Atures). Dans ce vaste groupe
granitifère de la Sierra Parime, qui sépare le bassin du Bas-
Orénoque de celui de l'Amazone, se répètent quelques phé-
nomènes de la Finlande et de la Norwége : aucune autre masse
minérale n'y paroit au jour que la roche granitique. Là où
i'ai côtoyé la Sierra Parime au nord, à Pouest et au sud,
i'ai observé , à quelques petites masses de grès près , une
absence totale de formations secondaires, même de roches
postérieures à un granité de nouvelle formation. Ce granité,
et le gneis qui le supporte, forment, là où de petites plaines
séparent les montagnes entre elles , au milieu des forêt*,
et d'une végétation vigoureuse , des bancs de rochers nus ,
dépourvus de terreau, ayant plus de 260,000 toises carrées,
et s'élevant à peine de trois à quatre pouces au-dessus du
sol environnant. Dans rhémisphère méridional je peux citer
comme granités de nouvelle formation, la roche du Parefon
(pente orientale des Andes du Pérou, entre Guancabamba
et la rivière des Amazones), où le granité stéaliteux passe à
la protogyne ; le granité du Paramo de Pata grande et de
Nunaguacu, stratifié et dépourvu d'amphibole; la roche de
Yanta, stratifiée comme le granité de l'Ochsenkopf en Fran-
conie, se cachant sous le micaschiste de Gualtaquillo et
d'Aipata-, et renfermant des cristaux disséminés d'amphibole,
sans passer à la vraie syénite ( Cordillères de Gueringa , à
l'ouest de Guancabamba). On voit par ces exemples que,
dans les Andes comme dans les Alpes, surtout à des hauteurs
considérables, une roche granitique couvre le gneis primitif.
On se demande si les griinstein primitifs, qui forment des cou-
ches dans les formations (§.5,5,6,7, renferment quelque-
fois, comme le prétendent plusieurs géognostes, non-seule-
ment de l'amphibole mêlé au feldspath compacte, mais aussi
du pyroxène. M. de Charpentier a vu cette dernière subs-
tance en grandes masses dans le calcaire primitif des Pyrénées.
Il y a aussi du pyroxène-coccolithe dans l'urgrilnstein du lac
Champlain ; je n'ai vu de véritables pyroxénes identiques avec
ceux des trachytes et de quelques porphyres de transition
de Quito que dans les griinstein et mandelstein de transition
de Parapara (montagnes de Venezuela).
SvÉMTE PRIMITIVE ?
§. 8. La plupart dessyénites de l'ancien et du nouveau con-
tinent, que Ion considéroit autrefois comme des roches indé-
pendantes et de formation primitive, sont ou des granités avec
amphibole, c'est-à-dire des couches subordonnées aux granités
§§. 7 et 1 1 (Syène, non Philae, ou les premières cataractes
mêmes delà Haute-Egypte, qui sont dans le gneis ; Aturès ou
cataractes de l'Orénoque; vallée de Macara et Gualtaquillo,
à la pente orientale des Andes du Pérou), ou des formations
de transition (Mont Sinaï, d'après les intéressantes observa-
tions de M. Rozière ; vallée de Plauen , piès de Dresde;
Guanaxuato, au Mexique), intimement lices aux porphyres,
au griinstein et au thonschiefer de transition. Quelques véri-
tables syénites ne me paroissent cependant offrir aucune trace
IND 12*
de cette liaison; elles constituent peut-être des formations
primitives indépendantes : telles sont la syénite (beaucoup de
leidspath lamellaire rougeàtre, peu d'amphibole, presque pas
de quarz, pas de mica, pas de fer titane) du CerroMunchique
(Cordillère centrale des Andes du Popayan , à l'est de la
métairie duCascabel), superposée au gneis, et en partie (?)
recouverte de micaschiste primitif; la syénite du Paranio de
Yamoca (pente orientale des Andes du Pérou, près des vil-
lages indiens de Colascy et de Chontaly), placée sur le gra-
nité de Zaulaca et recouverte par le schiste du lac de Haca-
tacumba. Comme ce schiste, à son tour, supporte un porphyre
vert de transition , et que ce porphyre supporte un calcaire
gris-noiràtre , mais coquillier (San-Felipe, province de Jaen
de Bracamoros) , il reste très-douteux si la syénite de Yamoca
et le schiste de Hacatacumba ne sont pas aussi des roches de
transition, et par conséquent plus neuves que les syénites du
Cei-ro Munchique dans les Andes de Popayan. Les syénites
composées de feldspath blanc et d'amphibole vert du pied
du Mont-Blanc (Cormayeux), et les syénites de Biela, liées à
des euphotides, sont -elles primitives?
Serpentine primitive ?
§. g. Les grandes formations d'euphotide (gabbro ou roches
serpentineuses) sont postérieures au thonschiefej- primitif , et
appartiennent en partie déjà aux roches de transition. La
petite formation que nous désignons ici, est analogue à celle
de Zœblitz en Saxe : elle repose sur du gneis et n'est recouverte
par aucune autre roche. Dans l'Amérique méridionale la
serpentine (sans diallage métalloïde, mais avec grenats) des
montagnes de l'Higuerote ( près San-Pédro , entre la ville de
Caracas et les vallées d'Aragua) paroit analogue à celle de Saxe.
Elle repose sur le gneis talqueux de Buenavista , qui passe ,
ce qui est assez rare dans ces contrées, à un micaschiste gre-
natifère. Cependant, comme on ne voit aucune roche su-
perposée à ces serpentines, leur âge reste un peu douteux.
Ce qui me paroît prouver l'ancienneté des serpentines de
i'Higvierote , c'est qu'avant de paroitre comme formation
particulière et indépendante, elles se montrent comme des
couches subordonnées au gneis- micaschiste , à peu près
comme les serpentines de la vallée d'Aoste.
126 IKD
Calcaire primitif.
§. lo. Existe-t-il une formation indépendante de calcaire
grenu parmi les roches primitives P Ou tous ces calcaires gre-
nus, comme on l'a admis assez généralement jusqu'ici, ne
sont-ils que des bancs subordonnés au gneis, au micaschiste,
aux granités de nouvelle formation, et au thonschiefer? Dans
les Pyrénées (vallée de Vicdessos) M. de Charpentier regarde
le calcaire grenu , quelquefois noirâtre et mêlé de graphite,
et renfermant de grandes masses de pyroxène (Iherzolite,
augitfels) et des couches degriiustein, comme une formation
étendue et indépendante. Cette autorité est sans doute de
beaucoup de poids. Au sud de l'équateur, sur le plateau do
Quito (au Cebollar et aux bords du Rio Machangara , près
Cuença; Portete, dans le Llano de Tarqui), on trouve placé
sur le micaschiste (de Guasunto et du Canar) un calcaire
blanc, à gros grain , ressemblant au plus beau marbre de
Carare , et alternant avec des couches calcairçs presque
compactes, rubanées et tellement translucides qu'on s'en sert
dans les couvens et les chapelles en guise de glaces pour le,s
fenêtres. J'ai regardé long-temps ce calcaire grenu de Cuença ,
dépourvu de pétrifications, comme une formation primitive
et indépendante ; mais il n'est couvert que de grès rouge
de Nabon, et une formation très -analogue (Tolonta près
de Chillo), placée avi milieu d'un terrain de trachytes et de
porphyres de transition , rend très-douteux l'âge de la for-
mation de Cuença. Les bancs de calcaires primitifs, subor-
donnés aux roches de granite-gneis , sont beaucoup plus rares
dans l'Amérique équinoxiale que dans les Pyrénées et les
Alpes. En examinant avec s in les granités -gneis de la
Parime, entre les 2.* et 8.^ degrés de latitude boréale, je
n'ai pas vu un seul de ces bancs.
m. Micaschiste primitif.
§.11. Le micaschiste (schiste micacé, glimmerschiefer)
repose le plus souvent sur le gneis, d'autres fois immédiate-
ment sur le granité (§. 1 ), avec lequel il commence d'abord
à alterner (Schnéeberg, en Saxe; Minas Geraes, au Brésil)
avant de se montrer comme une formation indépendante.
Il se distingue du gneis, lorsque les deux roches sont nette-
IND 127
ment tranchées (ce qui est bien plus rare dans la haute
chaîne des Alpes et des Cordillères du Pérou que dans ks
plaines), par l'agrégation du mica, qui, dans le micaschiste,
ofifre une surface continue. De toutes les formations primi-
tives c'est celle qui, dans l'Europe centrale, est la plus dé-
veloppée , et qiii présente la plus grande variété de bancs
subordonnés; l'hétérogénéité des couches augmente à mesure
que l'on s'éloigne du granité. Les micaschistes des Pyrénées,
que l'on considère comme bien décidément primitifs, ren-
ferment souvent de la chiastolithe, et cette substance pénètre
quelquefois jusque dans les bancs de thonschiefer et de cal-
caire grenu intercalés. Couches subordonnées au micaschiste:
schiste chloritique (chloritschiefer avec grenats); mélange
entrelacé de micaschiste et de calcaire grenu (Spliigen, entre
Claris et Chiavenna ; pic de Midi deT.^rbes, dans les Pyré-
nées) ; thonschiefer; calcaire grenu et doloniie avec trémclite
(grammatite) , épidote, talc, tourmaline, lépidolithe , am-
phibole, fer magnétique et corindon ; calcaire grenu ren-
fermant du quarz (Pyrénées); dolomie mêlée de gypse pri-
mitif (passage du Spltigen dans les Alpes) ; quarz schistoide
et micacé , gestellstein ; griinstein et griinsteinschiefer , dia-
base grenue et schisteuse (Montaîïa de Avila, Cabo blanco
près Caracas) ; feldspath compacte vert -noirâtre (dichtcr
griinstein); pierre ollaire , topfstein (Ursern); schiste tal-
queux (talkschiefer) avec grenats, cyanite, tourmaline et
actinote; serpentine pure (SiUthal dans le Tyrol) ; serpen-
tine mêlée de calcaire grenu , «verde antico (montagnes de
Caramanie; Reichenstein, Rôrsdorf et Rothzeche, enSilésie);
schiste amphibolique (Saint-Pierre, au sud du grand Saint-
Bernard) ; amphibole commune en grandes masses (Schonberg,
en Tyrol); syénite (Mittelwald, dans le Tyrol); couches de
grenat avec fer oxidulé (Braunsberg près Freiberg, Fraucn-
berg près Ehrenfriedrichsdorf , en Saxe ) ; grenat avec py-
roxène-omphacite et amphibole ( Gefrees et Schwarzenbach ,
pays de Bareuth ; Saualpe en Carinthie); grenat actinote
et cyanite; fluate de chaux (Meffersdorf) ; bancs de mica-
schiste renfermant des masses de gneis, peut-être d'une for-
mation contemporaine (TofQe , en JNorwége j ; bancs de plu-
sieurs pieds d'épaisseur, composés d'uu mélange intime de
128 IND
feldspath compacte, de quarz et de imca (Kiiliislad près
Drontheim, en Norwége); micaschiste avec mica noir et
carburé (Sneehattan, en Norwége; Huffiner, dans le Va-
lais). Je ne cite pas le gypse du Val Canaria près d'Airolo,
que nous avons cru , M. Freiesleben et moi , en 1796 , être
de formation primitive intercalée au micaschiste, mais que
MM. Brochant et Beudant (qui les ont étudiés tous deux sépa-
rément avec soin ) ont reconnu pour un gypse de transition su-
perposé au micaschiste. Le micaschiste renferme souvent de
l'amphibole disséminé dans toute sa masse (Salzbourg; Saint-
Gothard ; Oberwiesenthal en Saxe ; Sommerleiten prés
Bareulh). Les émeraudes de Sabara, dans la Haute -Egypte,
retrouvées par l'intrépide voyageur M. Cailliaud , et celles
de Salzbourg, sont enchâssées dans la masse du micaschiste
même, comme le sont , dans les deux continens, le grenat,
la slaurotide ( Saïnt-Gothard ; Sierra Nevada de Merida) et
la cyanite (îles Shetland ; Maniquarez, au nord de Cumana).
Les émeraudes de Muzo , dans la Nouvelle-Grenade, m'ont
paru former une couche dans un hornblendschiefer qui est
subordonné au micaschiste. Si l'on ne considère les forma-
tions que sous le rapport de leur volume et de leur masse , on
doit admettre que le micaschiste , dans les chaînes des monta-
gnes de l'Europe, joue un rôle presque aussi important que le
font, au Mexique et dans les Andes de Quito et du Pérou, les
porphyres de transition et les trachytes. Les masses continues
de micaschiste les plus considérables que j'aie vues dans l'Amé-
rique équinoxiale, sont celles de la Cordillère du littoral de
Venezuela, où le granite-gneis domine depuis le cap Codera
jusqu'à la Punta-Tucacas (à l'ouest de Portocabello) , tandis
que la même Cordillère est composée de micaschiste et même
d'un micaschiste grenatifère vers l'est, dans les montagnes du
Macanao de l'île de la Marguerite et dans toute la péninsule
d'Araya. A l'ouest de Chuparipari, cette dernière roche
offre de petites couches de quarz avec cyanite et titane rutile.
Prés de Caracas le calcaire grenu forme des couches , noa
dans le micaschiste, mais dans legneis; au contraire, dans
les montagnes du Tuy, c'est un micaschiste passant (comme
dans la vallée de Capaya ) au schiste talqueux, qui renferme
des bancs de calcaire primitif et de petites couches de
IND 129
^ekhenschlefer ( anipéllte graphique). Au sud de l'Oré-
noque, dans le groupe des montagnes de laParime, sur 180
ïieues de longueur, je n'ai pas a'u de véritable micaschiste
superposé au granite-gncis. Cette dernière formation semble
seule couvrir cette vaste contrée; mais le gneis y passe quel-
quefois au micaschiste : il rend rcsplendissans, au lever et
au coucher du soleil, les flancs de plusieurs montagnes éle-
vées ( pic Calitamini , Cerro Ucucuamo , entre les sources
de l'Essequebo et du Rio-Branco) , et a contribué par là au
mythe du Dorado et des richesses de la Guyane espagnole.
Dans les Cordillères des Andes, la formation indépendante
de micaschiste m'a paru moins rare au nord qu'au sud de
l'équateur. Au Nevado de Quindiu (Nouvelle- Grenade)
elle atteint une épaisseur de plus de 600 toises. En avançant
de là par Quito et Loxa vers les Andes du Férau , on voit sortir
le micaschiste sous les trachytes et porphyres de transition de
Popayan (au sud des volcans de Sotara et de Puracè); plus
loin cette roche reste visible sur diïférens points , depuis l'Alto
del Roble (arête qui partage les eaux entre l'océan Paci-
fique et la mer des Antilles) jusqu'à la vallée de Quilquasè ;
elle se cache de nouveau par intervalles sous des porphyres
trachytiques , à base de phonolithe, et reparoît plusieurs fois,
par exemple, entre Almaguer et le Rio Yacanacatu, entre
Voisaco et le volcan de Pasto , entre Gansce et le volcan de
Tunguragua, entre Guamote et Ticsan près d'AIausi (où le
micaschiste offre une immense couche de quarz renfermant
du soufre, et une autre couche (?) de gypse primitif), entre
Guasunto etPopallacta ; entre le Canar etBurgay , à la partie
méridionale du groupe trachytique de l'Assuay; enfin, entre
Loxa et Gon^anama. C'est près de ce dernier lieu que, dans
le ravin de Vinayacu , on trouve une couche de graphite la-
mellaire dans un micaschiste qui est certainement primitif.
En descendant de Loxa par le Paramo de Yanioca, vers
i'Amazone , entre les 4° et les 5'/,° de latitude australe,
un granité de seconde formation est recouvert de micaschiste
dans la vallée dePomahuaca; mais, en général, dans cette
partie des Cordillères ce n'est pas le micaschiste, mais la syé-
îiite et le thonschiefer primitifs qui ont pris un grand dévc-
ioppement , partout où le sol n'est pas couvert de porphyres
23. 5
i3o IND
et de trachytes. Dans la Nouvelle -Espagne, le micaschiste
abonde (mines d'or de Rio San-Antonio) dans la province
d'Oaxaca : mais plus au nord (16 — i8°lat. bor. ), sur la pente
orienlale des Cordillères entre Acapulco et Sumpango , le
granité n'est pas même recouvert de gneis ; il l'est immédiate-
ment de calcaire alpin (Alto del Peregrino) et de porphyres
de transition [la Moxonera, Acaguisofla). Cependant un mica-
schiste, dépourvu de grenats et passant quelquefois au thon-
schiefer, se montre dans les riches mines de Tehuilotepec et
de Tasco (entre Chilpansingo et Mexico) sous le calcaire
ûlj)in. Des filons d'argent rouge pénètrent de l'une de ces
roches dans l'autre, malgré la grande distance qu'on doit
admettre entre l'âge de leur formation. Je ne connois dans
les Andes aucun exemple d'une couche de porphyre dans
le micaschiste, ou d'un passage de cette dernière roche à
une ro he porphyroïde ; passage qui, selon l'importante
observation de M. de Buch, a lieu dans les Alpes duSpliigen,
entre le village de ce nom et la vallée de Schams. Les
terrains primitifs dans lesquels abonde le micaschiste , sont
ceux qui offrent aux oryctognostes la plus grande variété de
substances cristallisées. Ces roches , si abondantes en po-
tasse, rivalisent sous ce rapport avec les mandelstein (amyg-
daloïdes) de transition et plusieurs roches volcaniques. 11 est
très-rare que l'on observe dans la nature un développement
à peu près égal des trois formations de gneis, de micaschiste et
de ihonschicfer . et lorsque ce développement a eu lieu , c'est
plutôt dans des mcmtagnes de peu d'élévation et là oîi elles
se perdent vers les plaines, que dans les hautes chaînes des
Andes, des Alpes, des Pyrénées et de la Norwége. Nulle
part, peut-être, la suppression totale des formations micacées
ou schisteuses n'est plus fréquente que dans les Cordillères du
Mexique et de l'Amérique méridionale. On y voit la série des
roches primitives s'arrêter brusquement, soit au granile-
gneis et à uut' syér.ite que je crois primitive, soit au gneis-
micaschiste. Ce pliénomère a même lieu là oîi il y a (Cor-
dillère de la Paruiie) absence de trachytes et de tout phé-
nomène volcanique.
IND -.01
Granité POSTÉRIEUR AU Micaschiste, antérieur au Thonschiefer.
§. 12. Un granité de nouvelle formation reposant sur le
micaschiste, auquel il appartient géognostiquement (Saint-
Gothard, dans les Alpes; Reichenstein, en Silésie). Souvent
il est stratifié (Hogholm, en Norwége, selon M. de Buch j
Maifriedersdorf et Striegau en Silésie, selon M. Schulze)^
renferme des grenats et de rauiphibole , et passe à une roche
^yénitique à très-gros grains. Le quarz y est remarquable par
sa grande transparence, le feldspath par la grandeur de ses
cristaux. Ce granité est parfois sléatiteux ; il indique le
retour des roches schisteuses aux roches grenues et cristal-
lisées. Le granité de Mitteiwald , au nord de Brixen ( pas-
sage des Alpes du Brenner), repose sur une syénite primi-
tive qui alterne plusieurs fois avec le micaschiste. Le granité
à topazes du Schneckenstein , en Saxe, que Ton a consi-
déré long -temps comme une roche ou terrain particulier
(topasfels), n'est probablement qu'un amas transversal dans
le micaschiste. Je suppose Texistencc d'une formation de gra-
nité analogue à celle du Saint-Gothard (c'est-à-dire postérieure
aux micaschistes) dans les Andes du Baraguan, de Quindiu
et d'Hervéo , où plusieurs granités modernes viennent au Jour
sur la crête des Cordillères, supportant des pics de trachytes^
Est-ce à cette même formation qu'appartiennent le granité
de Krieglach enStyrie, dans lequel la lasulithe (blauspath)
remplace le feldspath commun , et la roche intéressante du
Carnatic, dont nous devons la eonnoissance à M. le comte
de Bournon ? Cette dernière est composée d'indianite , de
feldspath et de corindon (avec grenats, épidote et fibroiife)»
Gneis postérieur au Micaschiste.
§.. i3. Une petite formation de gneis grenatifère , observée
par M. de Buch. Elle couvre le micaschiste ( Bergen , Clas-
sness et Klowen , en Norwége) , et renferme des bancs subor-
donnés de calcaire grenu et même de micaschiste. Celte for-
mation se retrouve dans les Pyrénées.
GrUnstein-Schiefer ?
§. 14. La diabase schistoïde (griinstein-schiefer) est placée
entre 1^ gneis et le thonschiefer primitif ( SiebejuIeiiJî ^
rj2 IND
Rosenthai), ou entre le micaschiste et le thonsc]ilefcr pri-
mitif (Gersdorf et Rosswein, en Saxe); elle renferme des
filons argentifères très-anciens. On trouve aussi le griinstein-
schiefer comme banc subordonné au micaschiste. C'est une
formation de feldspath compacte, dont Tindépendance me
paroît assez douteuse.
IV. Thonschiefer primitif.
§. )5. Schiste primitif (schiste argileux, phyllade, urthon-
schiefer), moins carburé et généralement à couleurs moins
foncées que le thonschiefer de transition. Lorsqu'il passe au
micaschiste, le mica est fendu en grandes lames, tandis que
le mica, en petites paillettes isolées, caractérise le thonschiefer
de transition. Bancs subordonnés : calcaire grenu bleuâtre ;
porphyre; chlorite schisteuse aA^ec grenats et spliène dissé-
minés; micaschiste ( Klein-Kieivig, en Norvi^ége); griinstein,
mais beaucoup plus rare que dans le thonschiefer de transi-
tion ; griinstein-schiefer ; quarz avec épidote ; un mélange de
diallage et de feldspath. Les bancs subordonnés au thonschiefer
primitif sont moins fréquens que ceux du micaschiste, roche
dans laquelle l'hétérogénéité des couches , l'abondance et la.
variété des substances cristallisées ont atteint leur maximum,
en passant du granité primitif aux roches de transition.
Lorsqu'on considère en grand la différence des thonschiefer
primitifs et des thonschiefer de transition , on peut indi-
quer pour les premiers plusieurs caractères négatifs très-
importans , tels que l'absence des nœuds ou bancs subor-
donnés de calcaire compacte, l'absence de chiastolithe dissé-
minée dans la masse, de feuillets de thonschiefer luisans et
fortement chargés de carbone ; enfin , l'absence de couches
fréquentes de griinstein (en boules), d'ampélite alumineuse
et graphique (alaun- und zeichenschiefer) , de pierre ly-
dienne et de kieselschiefer : mais il ne faut point oublier
que ces caractères généraux souffrent des exceptions par-
tielles , dont le géognoste expérimenté est d'autant moins
surpris, que le thonschiefer de transition succède souvent
immédiatement, selon l'âge relatif des formations, au thon-
schiefer primitif. On trouve, dans le dernier, de la chiasto-
lithe, aux sommets des Py|énées et près de Kielvig en Nor-
IND i33
v/ége. M. de Raumer y a vu , en Silësie (Rohrsdorf, Nieder-
Kunzendorf), à la ibis des bancs subordonnés de porphyre à
base feldspathique, de gneis-micaschiste, de calcaire grenu,
d'ampélite et de pierre lydienne. Dans l'Amérique équinoxiale
(chaîne du littoral de Venezuela, isthme d'Araya , Cerro de
Chupariparu), j'ai observé, dans un thonschiefer qui passe au
micaschiste primitif et cyanilifère sur lequel il repose, à la fois
des couches de titane-rutile et d'ampélite luisante, traversées
par de petits filons d'alun natif. Il est quelquefois très-diffi-
cile d'indiquer avec précision , où cessent les thonschiefer
primitifs , où commencent ceux de transition. Les schistes
blcu-noiràtre de Piedras Azules (entre Villa de Cura et Pa-
rapara), à l'ancien rivage boréal des Llanos ou steppes de
Venezuela), ceux de Guanaxuato , au Mexique, dont les
strates inférieurs passent au schiste talqueux et chlariteux
(talk- et chloritschiefer) , tandis que les strates supérieurs
sont chargés de carbone et enchâssent des bancs de syénite
serpentineuse, se trouvent sur cette limite de deux ter-
rains contigus. Il n'est guères douteux que dans les deux
continens la plus grande masse de schistes ne soient des schistes
de transition; mais en Amérique , surtout dans la région équi-
noxiale, on est moins frappé de cette différence que de la
rareté absolue de tous les thonschiefer, en les comparant
aux gneis-micaschistes. Le thonschiefer paroît manquer en-
tièrement dans la Cordillère de la Parime, à travers laquelle
l'Orénoque s'est frayé un chemin : dans les Andes , comme
dans les Pyrénées , il n'occupe que des terrains de peu
d'étendue. Je l'ai trouvé au nord de l'équateur, suppor-
tant les formations secondaires du plateau de Santa -Fé de
Bogota , entre Villeta et Mave ; au sud de l'équateur ,
placé sur les micaschistes du Condorasto, et servant de base
aux porphyres de transition de l'Alto de Pilches , entre
San-Luis et Pomallacta (Andes de Quito) ; sous la pierre
calcaire alpine de Hualgayoc , venant au jour à 2000 toises
de hauteur, dans le Paramo de Yanaguanga (crête des j\ndes
du Pérou); superposé immédiatement à du granité ancien,
entre les villages indiens de San-Diego et de Cascas (pente
occidentale des Andes du Pérou). J'ignore si le thonschiefer
recouvrant une syénite qui appartient au granité , aux
iU IND
bords du lac de Haratacumba et au Paramo de Yamoca
(pente orientale des Andes du Pérou, province de Jaen de
JBracamoros) , est véritablement de formation primitive. Les
passages insensibles que l'on observe quelquelois entre les
granités, les gneis, les micaschistes et les thonscliiefer, et
qui trouvent leurs analogues dans les passages des syénitcs
et des serpentines aux griinstein de transition , ont fait
croire à plusieurs géognostes que ces quatre formations n'en
sont qu'une seule. On voit en efïet de vastes étendues de
pays dans lesquelles le gneis oscille perpétuellement entre le
granité et le micaschiste, le micaschiste entre le gneis et le
thonschiefer ; mais ce phénomène n'est aucunement général,
îl faut distinguer dans les deux hémisphères, \.° des terrains
où ces passages insensibles , ces oscillations entre des roches
voisines, ont lieu fréquemment et d'une manière irrégu-
lière; 2." des terrains où des strates distincts de granité et
de gneis, de gneis et de micaschiste, alternent et constituent
des formations complexes de granité et gneis, de gneis et mi-
caschiste; 5." des terrains où les formations simples de gra-
nité, gneis, micaschiste et thonschiefer sont superposées sans
alternance (avec ou sans passage au point du contact mutuel).
Ce dernier cas n'exclut point, dans le gneis, par exemple,
les couches de granité qui rappellent les roches de dessous,
ni les couches de micaschiste, qui annoncent, pour ainsi
dire, d'avance les roches qui se trouveront superposées.
Nous ferons suivre au thonschiefer quatre formations pa-
rallèles .-
Roche de Qdarz, Porphyre PRiMrriF ?
Granit e-Gneis postérieur au Euphotide primitive.
Thonschiefer.
La première de ces formations est très-peu connue en Eu-
rope ; la troisième paroit douteuse comme formation indé-
pendante.
Roche de quarz (avec masses de fer ouciste métalloïde).
§. \G, C'est la grande formation qui embrasse l'Itacolumite ,
ou quarz élastique chloriteux (gelenkquarz, biegsamer sand-
etein, chloritquarz ) de M. d'Eschwege, et des couches de fer
Ii\D i35
oHgiste micacé et spéculaire. Au sud de l'équateur, dans
les montagnes du Brésil et dans les Cordillères des Andes,
on trouve des masses de quarz , tantôt entièrement pur ,
tantôt mêlé de talc et de chlorite , qui , par Ténorme
épaisseur de leurs couches et par l'étendue qu'elles occu-
pent, méritent l'attention des géognostes. Ces roches de
quarz m'ont paru offrir plusieurs formations d'une ancien-
neté relative très- différente. Dans l'Amérique méridionale,
les unes sont liées à un thonschiefer qui est décidément
primitif; les autres, bien plus difficiles à saisir dans leurs
rapports de superposition, sont placées entre les porphyres
de transition et le calcaire alpin; elles remplacent quelque-
fois le grès rouge. Nous ne parlerons ici que des premières,
en séparant les formations dont le gisement est exactement
connu, de celles qui offrent plus d'incertitude. Sur le pla-
teau de Minas- Geraes près de Villa -Rica (selon les belles
observations de M. d'Eschwege , directeur général des mines
du Brésil), un micaschiste qui renferme des bancs de cal-
caire grenu, est recouvert d'un thonschiefer primitif. Sur
cette dernière roche repose, en stratification concordante ,
le quarz chloriteux (chloritquarz) qui constitue la masse du
Pic d'itacolumi, à looo toises de hauteur au-dessus du ni-
veau de la mer. Cette formation quarzeuse renferme des
couches alternantes, i.° de quarz aurifère blanc, ouverdàtre,
ou rubané, mêlé de talc-chlorite et offrant des strates de quarz
flexible, que l'on a faussem.ent attribuées jusqu'ici à l'hyalo-
micte (greisen), ou à des couches de quarz dans le micaschiste;
2.° de chlorite schisteuse; 5.° de quarz aurifère, mêlé de
tourmaline (schcirlschiefer de Freiesleben) ; /|.° de fer oligiste
métalloïde, mêlé de quarz aurifère (goldhaltiger eisenglim-
merschiefer). Les couches de quarz chloriteux ont jusqu'à
looo pieds d'épaisseur. Toute cette formation est couverte
d'une brèche ferrugineuse extrêmement aurifère. C'est à la
destruction des couches que nous venons de nommer, et qui
sont liées géognostiquernent les unesauxautres, que M. d'Esch-
vvege croit pouvoir attribuer les terrains de lavage qui ren-
ferment à la fois l'or, le platine , le palladium et les diamans
(Corrcgo das Lagens), l'or et les diamans (Tejuco), le pla-
tine et les diamans (Rio Abaete). Le chloritschiefer décom-
i5G IND
posé , dont on tire les topazes et les eiiclasps du Brésil, appar-
tient à cette même formation. Quelquefois , dans les mon-
tagnes deMinas-Geraes , la roche de quarz est d'une structure
plus simple. Sans être composée de couches alternantes, elle
n'offre qu'une seule masse de quarz entrelacé avec du fer
spéculaire granulaire ou dense (dichter eisenglanz ; fer oli-
giste non lamellaire, non micacé). Cette masse a jusqu'à
1800 pieds d'épaisseur, et ne contient pas d'or disséminé.
Elle est placée sur le thonschiefer primitif qui recouvre
immédiatement le gneis. On peut dire que c'est cette for-
mation peu connue de quarz -Itacolumite qui a fourni, par
sa décomposition ( par les terrains meubles auxquels il a
donné naissance), dans les années lyôG — 1764, annuelle-
ment près de trente millions de francs en or. Elle succède
immédiatement au thonschiefer; mais, d'après les observa-
tions faites jusqu'ici , il seroit ditîicile de la considérer avec les
schistes novaculaires (cos, wezschiefer), qui sont gris-verdâ-
tre , gris de fumée , mêlés de beaucoup d'alumine, comme des
couches subordonnées au thonschiefer. Le qnarz-ltacolumite^
par une affinité oryctognostique qui existe entre le talc et la
chlorite, se rapproche du schiste talqueux (talkschiefer), qui
abonde, dans tous les pays, en minéraux bien cristallisés, et
qui, parla suppression des lames de talc, n'est quelquefois
que du quarz pur : aussi le schiste talqueux forme-t-il, dans
les deux continens, des couches subordonnées au thonschiefer
et au micaschiste primitifs. J'ai trouvé une formation ana-
logue à celle de Minas-Geraes, mais dépourvue de fer spé-
culaire, à 1600 toises de hauteur au-dessus du niveau de la
mer, dans les savanes de Tiocaxas (au sud du Chimborazo ,
entre Guamote etSan-Luis) et à l'est du Paramo de Yamoca
près de Hacatacumba (Andes de Quito). D'énormes masses
de quarz y sont mêlées à quelques feuillets de mica, et su-
perposées au thonschiefer primitif. L'indépendance des for-
mations quarzeuses primitives, que nous indiquons ici , sera
mieux établie lorsqu'on les trouvera immédiatement super-
posées, non toujours à la même roche (au thonschiefer),
mais à différentes roches plus anciennes , par exemple , au
micaschiste, au gneis et au granité. C'est dans cette indé-
pendance de gisement que s'observe la roche de quarz de
IND i37
Contumaza, que je crois secondaire : elle recouvre d'abord
le porphyre, puis (près de Cascas) le même granité qui
forme les côtes de la Mer du Sud dans le Bas-Ptrou. Une
observation très-imporfante , que M. de Buch a faite dans
le nord de la péninsule Scandinave, paroît justifier la place
que nous assignons, parmi les roches primitives, a la roche
de quarz de rhémisphère austral. Cet infatigable voyageur a
reconnu que , dans la région boréale de l'ancien monde , le
thonschiefer primitif est remplacé quelquefois par une roche
de quarz que colore le fer. Cette roche de quarz et le thon-
schiefer sont par conséquent, en Norwége, des roches pai-al-
lèles, des équivalens géognostiques. 11 est bien remarquable
de voir le soufre , l'or, le mercure etle fer oligiste métalloïde,
liés dans l'Amérique méridionale à ces énormes amas de silice.
Quel que soit l'intérêt qu'inspirent les métaux précieux, on
ne sauroit nier que l'abondance du soufre dans des terrains
primitifs est, sous le rapport de l'étude des volcans et des
roches à travers lesquelles le fau souterrain s'est frayé son
chemin, un phénomène bien plus important que l'abondance
de l'or. Un peu au sud des hautes savanes de Tiocaxas et de
Guamote (Cordillères de Quito), où nous venons de désigner
la formation, peut-être indépendante, de quarz superposé au
thonschiefer, j'ai examiné la célèbre montagne de soufre de
Ticsan, qui est une couche de quarz (direction N. 1 8° E. ; incli-
naison 70 — 80° au NO.; épaisseur de la couche, 200 toises;
hauteur au-dessus du niveau de la mer, i25o toises) dans le
micaschiste. Au Brésil, la formation de quarz chloriteux (Itaco-
lumite), superposée au thonschiefer primitif, renferme non-
seulement de l'or, mais aussi du soufre. Des plaques de cette
Toche , fortement chauffées , brûlent avec une flamme bleue.
Un thonschiefer du même âge que celui sur lequel est super-
posé le quarz chloriteux, renferme (Serra do Frio , près de
S. Antonio Pereira) un banc de calcaire primitif mêlé de
masses de soufre natif. L'or etle soufre se trouvent aussi (Andes
de Caxamarca, au Pérou, entre Curimayo et Alto delïual),
sur la limite des porphyres de transition et des calcaires al-
pins, dans des masses puissantes de quarz qui sont parallèles
au grès rouge. C'est à ces mêmes roches de quarz , ou plutôt à
des formations plus neuves encore , qu'appartient le grand
i38 I]XD
dépôt (qiiarzflcUz) ue mercure sulfure de Guancavelica, tan-
dis que le iiitrcure de Cueiiça (partie niéj-idionale du
royaume de Quito ) , de mtiue que celui du duché de Deux-
ponts , appartient au grès rouge. Ces notions sutKscnt pour
répandre quelque jour sur les couches puissantes de quarz
que nous UAoris obscr\ées, M. d'Eschwege et moi, dans
l'hémisphère austral, et qu'on ne peut guère appeler des
grès quarzeux. Ces roches semblent passer , comme les for-
mations calcaires, à travers les riitférens terrains primitifs ,
intermédiaires et secondaires. Plusieurs géognostes célèbres
ont déjà tenté d'introduire des roches de quarz, comme
formations indépendantes , dans le type général des terrains.
Le qtiarzgebirge de Werner est primitif et repose sur du gneis
(Frauenstein, Oberschônau , en Saxe), dont peut-être il a
été jadis recouvert. Des couches qui appartiennent essentiel-
lement à une formation , se trouvent quelquefois à la limite
supérieure et inférieure de cette formation (exemples:
schiste bitumineux sous le zechslein ou calcaire alpin ; gypse
au-dessus du zechstein ; kieselschiefer , pierre lydienne ou
ampélite, au-dessus du thonschiefer de transition et dans cette
roche). Les petites masses de quarz primitif observées sur la
crête des montagnes de l'Europe ne peuvent être comparées,
pour leur puissance et leur étendue , aux roches de quarz
primitives des Andes et du Brésil. Le granular-quarzroch
(avec feldspath) des Hébrides de M. Jameson , les roches
quarzeuses et chlorileuses antérieures au grauwacke et liées
au grès rouge { priwary red sandstone) de M. MacuUoch ,
offrent quelques traits d'analogie géognostique avec les
masses quarzeuses de l'Amérique équinoxiale; mais elles sont
beaucoup plus mélangées (moins simples de structure),
et pourroient bien , d'après les discussions intéressantes de
M. Boue, appartenir à d'anciennes roches de transition. Le
trappsandstein ou quarzfels secondaire de quelques géognostes
allemands entoure les basaltes, et est, à n'en pas douter,
d'un âge beaucoup plus récent que la formation de quarz en
masse (extrêmement pur , non mélangé et non agrégé ) qui,
placé entre le porphyre de transition et le calcaire alpin,
atteint, d'après mes observations à la pente occidentale des
Andes du Pérou (Contumaza, Namas), l'énorme épaisseur
de 6000 pieds.
IND i3s
Granité et Gkeis postérieur au Thonschiefer.
§. 17. Une formation de granité à petits grains, passant
quelquefois à un gneis grenatifère et alternant avec lui.
Cette formation intéressante (Kielvig, à l'extrémité septen-
trionale delà Norwége , et îles Shetland) repose, selon M.
de Buch , sur le thonschiefer primitif. Elle renferme de
l'amphibole et du diallage ; elle manifeste par là son affinité
avec une des formations suivantes. On pourroit désigner les
formations de granité (§§. 4, 7, 12 et 17) par les noms de
granité du weisstein , du gneis, du micaschiste et du thon-
schiefer ; mais ces dénominations feroient croire que ces
petites formations sont nécessairement dans le weisstein ,
dans le gneis , dans le micaschiste et dans le thonschiefer •
elles se trouvent simplement superposées aux roches dont
elles paroissent dépendre. La présence de l'étain, du fer
magnétique (p), de l'amphibole, de la diallage, du grenat,
du talc et de la chlorite remplaçant le mica, comme la ten-
dance de passer à la pegmatite (schriftgranit), caractérisent
les granités de nouvelle formation.
Porphyre primitif P
§. 18. Existe-t-il une formation primitive et indépendante
de porphyre? Il ne peut être question ici, ni des porphyres
qui se trouvent comme des bancs subordonnés dans d'autres
roches primitives (§§. 5 et i5 ) , ni de ces gneis et micaschistes
des hautes Alpes qui deviennent grenus et prennent, par
l'isolement des cristaux de feldspath, un aspect porphyroïde.
J'hésite de placer parmi les roches primitives les porphyres
de Saxe et de Silésie (duché de Schweidnitz) , quoique les
premiers recouvrent immédiatement le gneis (entre Frei-
berg et Tharandt ). Ils sont quelquefois traversés par des
filons d'étain ( Altenberg) et des minerais d'argent (Grund).
Les porphyres de Silésie renferment de famphibole dissé-
miné (Friediand ) : on les a crus jusqu'ici plus anciens
que le thonschiefer primitif. 11 est certain que les porphyres
de Saxe sont en partie des porphyres de transition , en
partie des porphyres de grès rouge. Dans les Cordillères des
Andes du Pérou, de Quito, de la Nouvelle -Grenade et
ï^4o IND
du Mexique , parmi cette innombrable variété de roches
porphyriques dont les niasses atteignent ^Soo à Sooo toises
d'épaisseur, je n'ai pas vu un seul porphyre qui me parût
décidément primitif. L,a formation la plus ancienne que j'aie
observée , se trouve dans la vallée profonde de la Magdalena
(entre Guamhos etTruxillo, au Pérou) : c'est un porphyre à
base argileuse, un peu décomposée, avec feldspath commun,
non vitreux, sans amphibole, mais aussi sans quarz. Cette
formation, qui paroit distincte de tous les porphyres de
transition et trachytiques de Quito et de la crête des Andes
du Pérou, vient au jour à 600 toises de hauteur au-dessus
du niveau de la mer; elle est placée immédiatement sur le
granité, et recouverte, à la pente occidentale des Andes ,
d'une roche de quarz secondaire, à la pente orientale (vrai-
semblablement) de grés rouge.
V. EUPHOTIDE PRIMITIVE POSTERIEURE AU ThONSCHIEFER.
§. 39. Une formation placée à la limite des formations
primitives et de transition. C'est le Gabbro de M. de Buch ;
l'Euphotide de M. Haiiy; le Schillerfds de M. de Raumer;
rOphiolithe de M. Brongniart. Cette roche a été désignée
jadis sous les noms de serpentinite, granité serpentineux ,
granité de diallage, granitone, granito di gabbro, granito dell'
împruneta , serpentinartiger urgriinstein. Nous la caractéri-
sons ici telle que M. de Buch l'a circonscrite le premier. Elle
se trouve superposée (cap Nord de File Mageroe , en'Norwége)
à un schiste primitif, qui passe vers le haut a l'euphotide , vers
le bas au micaschiste. L'euphotide du Val Sesia recouvre aussi ,
selon M. Bcudant, immédiatement le micaschiste primitif. On
peut dire qu'en général l'euphotide ou gabbro est un mélange
de diallage (sinaragdife), de jade (saussurite, feldspath tenace)
et defel.ispath lainelleux. Quelquefois (Bergen, enNorwége)
le jade manque entièrement; mais dans le verde di Corsica
(Stazzona, au nord de Corte et S. Pietro di Rostino dans l'Ile
de Corse) l'euphotide n'est qu'un mélange de jade voisin du
feldspath compacte, et de diallage verte sans feldspath lamel-
leux. Quoique, d'après les intéressantes observations rappor-
tées par M. Haiiy dans son Tableau comparatif, les diallages
métalloïdes (schillerspath ) vertes, à reflets satinés, et les.
IND 141
(Hallages grises passent progressivement (roches du Musinet
près de Turin) les unes aux autres, on peut pourtant distin-
guer ces substances par les caractères géognostiques qu'elles
offrent le plus fréquemment en grand. L'euphotide à diallage
grise est beaucoup plus fréquente (un peu plus ancienne ?)
que l'euphotide à diallage verte. La serpentine e^-^t presque
toujours dans une liaison de gisement intime avec l'eupho-
tide, dont elle ne semble être qu'une variélé à très -petits
grains, d'apparence homogène. Cette liaison se manifeste
aussi en Hongrie (Dobscliau), où M. Beudant a trouvé l'eu-
photide grenue et schisteuse immédiatement superposée au
micaschiste primitif. La soude, d'après les travaux de Théo-
dore de Saussure et de Klaprofh , s'observe parmi les roches
primitives dans le feldspath compacte du weisstein et du
griinsteinschiefer, dans le jade des euphotides, et dans la la-
zulrte (outre-mer) du Baldakschan. Cette dernière substance
paroît appartenir à une couche de calcaire primitif intercalée
au granité -gneis. Bancs subordonnés à l'euphotide : serpen-
tine avec asbeste et diallage métalloïde; serpentine accom-
pagnée de chrysoprase, opale et calcédoine ( Kosemitz, eu
Silésie ) ; calcaire grisâtre compacte , passant au calcaire à
petits grains (Alten , en Norwége). Ce calcaire rapproche
l'euphotide de la Scandinavie, qui est le dernier membre
des formations primitives, du terrain des roches intermédiaires
très-anciennes. Comme l'euphotide n'est souvent pas recou-
verte, et que la superposition d'une roche sur une autre
très -ancienne ne nous éclaire pas sur l'époque de sa for-
mation , il reste des doutes sur l'âge relatif de beaucoup
d'euphotides. M. de Buch a vu celle du Haut-Valais (Saas,
Mont-More) placée au-dessus du micaschiste; celle deSestri ,
au nord du golfe delà Spezzia , sous le thonschiefer (de trai;^
sitionp) de l.avagna. M. de Raumer, dans son excellent ou-
vrage sur la Silésie inférieure, place le schillerfels du Zofcten-
berg parmi les formations primitives; M. Keferstein y rancç
l'euphotide du Harz (entre Neustadtet Oderkrug), qui reu-
ferme du titane ferrifère ( nigrine ) disséminé. Je pense ausd
que les serpentines du Heideberg près de Zell , et celles auc
l'on trouve entre Wurlitz etKotzau, où elles renfernient du
pyroxène-diopside , sont très-anciennes. Toutes ces serpent'ujç^
î42 IND
des montagnes de liareuth m'ont paru intimement liées an
schiste amphiboliquc ( hornblendschiefer) et au schiste chlo-
riteux (chloritschiefer). Elles offrent des propriétés magné-
tiques très-remarquables, que jai fait connoitre en 1796, et
qui depuis ont été l'objet des recherches plus exactes de MM.
Goldfuss, Bischof et Schneider. En jetant un coup d'œil gé-
néral sur les euphotides des deux continens, on ne sauroit
se refuser d'admettre plusieurs formations, d'un âge relatif
assez distinct. Les euphotides que j'ai observées à l'île de
Cuba, àGuanaxuato, au Mexique, et à l'entrée des Llanos de
Venezuela , sont liées soit à la syénite soit au calcaire noir , et
me semblent bien décidément des euphotides de transition ,
de même que l'euphotide (serpentine stratifiée en couches
assez minces : direct. N. 62° E. ; incl. 70° au NO. ; épais-
seur 10 toises) de la cime de la Bochetta de Gênes, que j'ai
observée en 1795 et i8o5, et qui est intercalée à un thon-
schiefer de transition qui alterne avec du calcaire noir. Les
ei'photides de la Spezzia , de Prato et de tout le Siennois,
que MM. de Buch et Brocchi considèrent comme de formation
primitive ou de formation de transition très-ancienne, pa-
roissent à M. Brongniart , qui les a récemment examinées
avec beaucoup de soin, appartenir aux formations secon-
daires, ou tout au plus aux formations de transition les plus
récentes. Les géognostes célèbres que je viens de nommer,
sont assez d'accord sur le gisement immédiat de ces eupho-
tides de l'Italie , c'est-à-dire sur la détermination oryctognos-
lique des roches qui se trouvent au-dessous et au-dessus de
l'euphotide ; mais ils diffèrent sur l'âge de formation que
l'on doit assigner géognosliquement à ces roches en contact
avec l'euphotide. C'est ainsi qu'en géographie on connoît
quelquefois avec précision le gisement d'un ilôt , par rapport
aux lies voisines; tandis que la longitude absolue de tout
l'archipel , sa plus grande proximité de l'ancien ou du nou-
veau continent , restent encore incertaines.
Terrains de transition.
Le terrain de transition réunit, d'après M. Wcruer , des
roches qui offrent dans leur composition beaucoup d'analogie
IND 145
avec celles des terrains primitifs, mais qui alternent avec des
roches fragmentaires ou arcnacées (élastiques, agrégées ; roches
de transport). Quelques débris de corps organiques (des em-
preintes de roseaux , de palmiers et de fougères arborescentes;
des madrépores, pentacrinites, orthocératites, trilobites ,
hystérolithes, etc.) y paroissent de préférence, je ne dirai
pas dans les roches supérieures, ou les moins anciennes de
cet ordre, mais en général dans les roches non feldspafhi-
ques et dont la masse ne ])résenle pas un aspect très-cristallin.
Ce sont surtout les belles observations de MM. de Buch et Bro-
chant qui ont étendu les limites des terrains de transition.
Ces limites sont plus faciles à fixer vers le haut, où com-
mencent les terrains secondaires, que vers le bas, oîi finissent
les terrains primitifs. J'ai rappelé ailleurs comment, par les
micaschistes anthraciteux et les thonschiefer verts , les roches
de transition se lient aux roches primitives; comment, par
les porphyres à feldspath vitreux, elles se lient aux terrains
volcaniques, et par les grauwackes à petits grains et les por-
phyres abondant en cristaux de quarz, an grès rouge et aux
porphyres des terrains secondaires. Dans les régions les plus
éloignées les unes des autres, des roches analogues, des thon-
schiefer talqueux, cà feuillets fortement contournés, chargés
de carbone, renfermant de l'ampélile (alaunschiefer) et de
la pierre lydienne ; des calcaires noirs alternant avec le thon-
schiefer, des grauwackes, des porphyres et des syénites mé-
langés de fer titane , se trouvent placés entre des roches
primitives, c'est-à-dire entièrement dépourvues de traces
d'organisation et de masses arénacées, et la grande formation
de houilles; mais la succession des roches homonynes de tran-
sition varie même là où elles semblent toutes également dé-
veloppées. Le plus grand nombre des formations de ce terrain
sont composées de deux ou trois roches alternantes (calcaire
noir compacte , griinstein et thonschiefer; grauwacke et por-
phyre; calcaire grenu, grauwacke et micaschiste anthraciteux);
et comme des membres partiels des groupes ou formations
d'une structure si compliquée passent d'un groupe à l'autre,
d'excellens observateurs , MM. de Raumer , d'Engelhardt et
Bonnard , ont été tellement frappés de ce phénomène de
connexité et d'alternance, qu'ils ne reconnoissent dans la
ï44 IND
classe entière qu'une seule grande famille de roches. Si Tort
examine les formations de transition d'après leur structure
et leur composition oryctognostique , on y distingue cinq
associations très-marquées : les roches schisteuses; les roches
porphyritiques (feldspathiques ou syénitiques) ; les roches
calcaires grenues et compactes , avec gypse anhydre et sel
gemme; les roches d'euphotide , et les roches agrégées (grau-
wacke et brèches calcaires). Sur quelques points du globe un
seul de ces groupes ou de ces associations de roches cristallisées
et non cristallisées a pris un développement si extraordi-
naire , que les autres groupes paroissent presque entière-
rement supprimés. C'est ainsi que dominent dans les Cor-
dillères du Mexique et de Quito , comme en Hongrie et dans
plusieurs parties de la Norwége , les porphyres et les syé-
nites de transition; dans la Tarantaise, les calcaires grenus et
lalqueux ; dans quelques régions des Alpes et de laBochetta,
les calcaires noirs presque compactes ou à très-petits grains;
enfin, au Harz et sur les bords du Rhin, les grauwackes et
thonschiefer de transition : mais cette épaisseur et cette
étendue qu'acquièrent les masses minérales , ne doivent pas
guider le géognoste lorsqu'il discute l'âge relatif des formations
partielles. Une extrême variété de gisement ne s'observe pas
seulement dans les petites formations; aussi les grandes for-
mations homonymes très-développées ne peuvent guère être
envisagées comme contemporaines , c'est-à-dire qu'elles n'of-
rent pas le même gisement par rapport aux autres termes de la
série des roches intermédiaires. Les porphyres de Guanaxuato ,
par exemple , sont superposés à un thonschiefer stéatiteux et
chargé de carbone ; ceux de la Hongrie , à un micaschiste tal-
queux de transition renfermant des bancs de calcaire gris-noi-
ràtre. Les porphyres des Andes de Quito (et des îles Britan-
niques?) recouvrent immédiatement des roches primitives,
et sont par conséquent antérieurs à toute roche calcaire qui
renferme des vestiges de corps organisés : au contraire, les
porphyres et syénites zirconiennes de Norwége, comme proba-
blement aussi les porphyres du Caucase, si bien observés par
MM. d'Engelhardt et Parrot, succèdent, selon l'âge de leur
formation, au calcaire remplid'orthocératites. Les plus grande»
liasses de grauwacke (alternant avec le grauwackenschiefer)
IND 145
se sont développées sans doute au milieu des schistes de tranr
sition les plus anciens ; mais on trouve aussi des bancs de
grauwacke très-puissans, d'une origine beaucoup plus récente.
En général, les cinq groupes de roches que nous venons de
distinguer d'après des rapports de composition ou des ca-
ractères oryctognostiques , ne conservent pas partout la
même place dans la série des formations intermédiaires; ils
ne se trouvent guère séparés dans la nature comme dans une
classification oryctognostique des roches. On observe que
les thonschiefer et les calcaires noirs, les thonschiefer et les
porphyres, les thonschiefer et les grauwackes, les porphyres
et les syénites , les calcaires grenus et les micaschistes an-
thraciteux , forment des associations géognostiques dans les
contrées les plus éloignées les unes des autres. C'est la cons-
tance de ces associations binaires ou ternaires qui caractérise
les terrains de transition, bien plus que l'analogie qu'offre
dans chaque groupe la succession des roches homonymes.
En discutant les terrains primitifs 011 les formations sont
plus simples, plus tranchées, sujettes à des alternances moins
fréquentes, j'ai pu essayer d'énumérer séparément les gra-
nités qui succèdent aux gneis , les gneis qui succèdent aux
micaschistes. 11 y a des granités et des gneis primitifs de dif-
férens âges , comme dans les terrains de transition il y a des
grauwackes ou des calcaires noirs, semblables de composi-
tion, mais très-éloignés les uns des autres, selon leur an-
cienneté relative. Si dans ces derniers terrains le géognoste
ne tente pas de nommer séparément les différentes couches
de grauwacke ou de calcaire, c'est parce que ces couches,
isolément, n'ont pas de valeur comme termes de la série des
roches intermédiaires; elles n'en ont qu'autant qu'elles font
partie de certains groupes. Or, ce sont ces groupes mêmes,
ces associations constantes de thonschiefer , griinstein et
grauwacke, de calcaire stéatiteux et grau^vacke , de por-
phyre et grauwacke, etc. , qui sont les véritables termes de
la série. 11 en résulte que, d'après les principes que nous
suivons dans l'arrangement des formations, on doiténumérer
séparément non des masses isolées de calcaire, de grauwacke
et de porphyre, qui se mêlent entre elles ou à d'autres
roches, mais des groupes entiers et bien caractérisés, ceux,
^3. 10
146 IND
par exemple, dans lesquels dominent les grauwackes et les
thonschiefer , ou les porphyres et les syénites. Parmi ces der-,
niers les uns sont postérieurs , les autres antérieurs à des
roches qui renferment des débris d'êtres organisés. Dans les
terrains primitifs les termes de la série sont généralement
simples; dans les terrains de transition ils sont tous complexes,
et c'est de cette complexité même que naît la difliculté d'étu-
dier, par assises, un édifice dont on saisit avec peine
l'ordonnance au milieu de l'entassement de tant de maté-
riaux semblables. Pour justifier l'ordre que j'assigne aux
dififérens terrains de transition , je commencerai par présenter
dans le tableau suivant la succession des formations ( en com-
mençant par les plus anciennes) qui ont été observées dans
plusieurs contrées et examinées avec soin. Je n'emploîrai que
la description oréographique des géognostes habitués à suivre
les mêmes principes dans la dénomination des roches.
1. Andes de Quito et pd Pinof.
Porphyres de transition, non mé-
tallifères , recouvrant imnnédiate-
ment les roches primitives (granité,
thonscliiefer).
Griinstein en boules ( kugelge-
stein ).
Calcaire noir, superposé au por-
phyre.
Je n'y ai pas vu de grauwackc;
il est remplacé, dans les Andes
de Quito et du Pérou, au sud de
réquateur, parla grande formation
de porphyre.
3. MONTAGKES DU MEXIQUE.
Thonschiefer de transition, char-
gé de carbone, renfermant des cou-
ches de syénite et de serpentine.
Les couches inférieures passent au
schiste talqueux et reposent sur des
roches primitives.
Syénite alternant avec du griin-
stein-
2. Montagnes de Venezuela.
Schistes verts stéatiteux de tran-
sition , couvrant du gneis-niica-
schiste primitif.
Calcaire noir.
Serpentine et griinstein (recou-
verts d'amygdaloïde avec pyroxène).
C'est la suite de roches que j'ai
observée au bord septentrional des
LIanos de Calabozo.
4. HOKORIB.
Micaschiste de transition avec des
bancs de calcaire noir superposé
à des roches primitives.
Porphyres et syénites de transi-
lion. Couches subordonnées : mica-
schiste de transition; calcaire grenu
blanc avec serpentine ; masses de
griinstein. Ces porphyres sont, comme
la plupart de ceux des Andes , im-
médiatement recouverts par destr»-
chytes syénitiques blancs et noirs-
(Observations de M. Beudant.)
IND
147
Porphyre de transition, métalli-
fère, placé imniédiatenient sur le
thonschiefer de transition. Les cou-
ches supérieures passent à la pho-
molithe.
Telle est la série de roches de
Guanaxuato. Dans le chemin de
Mexico à Acapulco j'ai vu les por-
phyres de transition reposer immé-
diatement sur le granité primitif.
Près de Totonilco ces porphyres sont
couverts de roches secondaires, tels
que le calcaire alpin, le grès et le
gypse argileux. Je n'ose prononcer
sur les rapports d^àge entre les cal-
caires de transition des mines du
Doctor et de Zimapan, et les por-
phyres de Guanaxuato et de Pachu-
ca; mais, d'après MM. Sonneschmidt
etValencia, on voit suivre dans les
riches mines de Zacatecas , presque
comme à Guanaxuato , de bas en
]\aut , syénite et thonschiefer de
transition (avec griinstein et pierre
lydienne), grauwacke , porphyre
non métallifère.
5. Tarahtaise.
Une même formation, reposant
immédiatement sur le terrain pri-
mitif, renferme du calcaire grc»u
stéatiteux, du micaschiste avecgneis
et du grauwacke anthraciteux. Ces
différentes roches alternent plu-
sieurs fois et offrent des bancs subor-
donnés de serpentine, de griinstein ,
de quaiz compacte et de gypse de
transition. ( Observations de M.
Brochant de Yilliers. )
6. SL'isse.
Dans le passage des Alpes , de
Chiavenna à Glaris , d'après M. de
Buch:
Thonschiefer de transition, avec
des couches de calcaire gris, repo-
sant sur du thonschiefer et du mi-
caschiste primitifs.
Serpentine avec grenats.
Calcaire noir.
Grau^vacka.
Thonschiefer alternant avec da
calcaire noir.
Thonschiefer avec empreintes de
poissons (presque secondaire).
Dans les environs de Bex, d'après
M. de Charpentier :
Grauvvacke superposé au gneis
(primitif ? ).
Calcaire noir, renfermant desbé-
lemnites, et alternant avec du thon-
schiefer de transition.
Calcaire argileux de transition,
avec ammonites , offrant des couches
subordonnées de grauwacke ^ de
gypse anhydre et de sel gemme.
M. de Buch , d'après des observa-
tions géognos tiques faites avant Tan-
née 1804, assignoit aux formations
de transition de la Suisse occiden-
tale, considérées sous un point de
vue général, et en passant des ro-
ches inférieures aux roches supé-
rieures, Tordre suivant:
Thonschiefer de transition. — «
Calcaire noir. — Muriacite salifère
et gypse. — Grauwacke. — Calcaire
noir. — Thonschiefer, avec em"
preintes de poissons.
148
IND
7. Allemagne.
Système de gisement en Saxe,
entre Freiberg, Maxen et Meissen ,
d'après MM. de Raunieret Bonnard :
Thonschiefer avec ampélile et
pierre lydienne, alternant à la fois
avec du grauwacke , du grUnstein ,
du porphyre et du calcaire. Ce ter-
rain repose sur le gneis primitif.
Syénite et porphyre. Dans cette
formation , qui
abonde aussi
Thiiringerwald, selon l'excellente
description de M. Heim, se trouvent
intercales du granité et du gneis de
transition.
Le Harz et l'Allemagne occiden-
tale (entre le Rhin et la Lahn) sont
recouverts d'une grande formation
de thonschiefer, dans laquelle,
comme par développement inté-
rieur, se montrent des masses de
grau-wacke et grauwackenschiefer ,
de calcaire (souvent d'une couleur
peu foncée), de griinstein, de quarz
et de porphyre. Cette dernière roche
■y est cependant plus rare que dans
la formation indépendante de syé-
nite et porphyre, que supporte dans
d'autres contrées le thonschiefer de
transition.
11. Caucase.
Thonschiefer, peut-être déjà de
transition.
Calcaire noir avec anipélite.
Porphyre de transition, alternant
avec le thonschiefer. Ce porphyre ,
souvent colonnaire , avec feldspath
vitreux , peu de quarz et peu de mica ,
ressemble dans les montagnes du
8. Presqu'île du CotertiK et
Bretagne.
Thonschiefer vert, luisant, stéa-
titeux (de transition), alternant
quelquefois avec du grauwaclie,avec
du calcaire noir et avec la roche
de quarz.
Syénite et granité.
Thonschiefer de transition , re-
juvrant quelquefois de nouveau la
syénite. (Observations de MM. Bron-
gniartet d'Omalius d'Halloy.)
9. ISLES BrITARKIQUES.
Syénite et porphyre de transition
reposant sur des roches primitives.
(Chaîne du Snowdon, Grampians,
Ben-!Vevis.)
Thonschiefer de transition , avec
trilobites, renfermant dans les cou-
ches inférieures un aglomérat de
roches primitives , semblable à celui
de la Valorsine ( Llandrindod , Kil-
larney, cime du Snowdon).
Crauwacke (May-hiU et North-
Wales ).
Calcaire de transition (Longbope,
Dudley).
Grauwacke , old red sandstone
(Mitchel Dean de Herefordshire).
Calcaire de transition, mountain-
limestone ( Derbyshire), recouvert
par la grande formation de houille.
(Observations de M. Buckland, qui
semble cependant regarder la syé-
nite et une partie des porphyres
comme primitifs.)
10. NorwÉge.
Gisementdes roches prèsde Chris-
tiania, d'après les observations de
M. de Buch-
IND
'49
Kasbek (comme font souvent les
porphyres des sommets mexicains)
à du trachytc poreux.
Gneis, syénite elgranile de tran-
sition en couches alternantes.
Thonschiefer de transition, cou-
vert d'un calcaire fétide, qui pa-
voît secondaire. (Observations de
MM. d'EngcIhardt et Parrot. )
Thonschiefer de transition , al-
ternant avec du calcaire noir, rem-
pli d'orthocératites et reposant sur
du gneis primitif.
Grauwacke et kieselschiefer.
Porphyre k cristaux de quarz,
renfermantune couche degriinslein
poreux avec pyroxcnc.
Svénite à zircons, et granité de
transition, avec couches deporphyre.
On reconnoît, dans ces différens types de superposition ,
recueillis en Europe, en Amérique et en Asie, au nord et
au sud del'équateur, que parmi les plus anciennes roches
de transition trois grandes formations, celle de calcaire grenu
et talqueux, grauwacke avec anthracite et micaschiste, celle
de syénite et porphyre (à cristaux d'amphibole et très-peu de
quarz), et celle de thonschiefer, grauwacke et calcaire noir,
occupent à peu près le même rang sur différens points du globe.
Les calcaires micacés et poudingues à fragincns de roches pri-
mitives de la Taran taise ; les porphyres et syénites du Pérou ;
le thonschiefer de transition avec grauwacke (Harz, Friedrichs-
walde en Saxe, Aggerselv en JNorwége, et Guanaxuato au
Mexique), sont peut-être d'une origine contemporaine. En
rangeant les roches comme termes d'une seule série , il
auroit fallu peut-être rappeler leur parallélisme de la manière
suivante : II (I ou III). Je distingue, comme termes de la
série des roches de transition, six groupes qui me paroissent
bien caractérisés par les roches qui y dominent , par leur
gisement et par l'étendue de leur masse. Ces groupes ou
grandes formations sont : I. Calcaire grenu stéatiteux, mica-
schiste de transition et grauwacke à fragmens primitifs.
II. Porphyre (non métallifère) antérieur au calcaire à ortho-
cératites, au thonschiefer et au micaschiste de transition.
III. Thonschiefer renfermant des grauwackes, des calcaires,
des porphyres et des griinstein. IV. Porphyres et syénites
(métallifères) postérieurs au thonschiefer de transition, an-
térieurs à un calcaire qui renferme des débris organiques.
V. Porphyres, syénites et granités zirconiens (non métalli-
fères), postérieurs au thonschiefer et au calcaire avec ortho-^
j5o IND
cératites. VI. Euphotide de transition avec jaspe et serpen-
tine. Presque chaque groupe est composé de roches alter-
nantes, et plusieurs de ces roches, qu'on peut considérer
comme de petites formations partielles , sont communes à
tous les groupes. C'est cette communauté, cette alternance,
ce retour périodique des mêmes masses, qui constituent l'u-
nité apparente de la grande famille des terrains de transi-
tion. Cependant chaque groupe a des roches qui prédominent
et qui lui donnent un. aspect particulier. Tels sont les cal-
caires grenus et talqueux dans le premier groupe: les por-
phyres non métallifères, abondant en amphibole et presque
dépourvus de quarz, dans le second ; les grauwacke dans le
troisième; les roches serpentineuses dans le sixième. Le qua-
trième et le cinquième groupes sont caractérisés, l'un par des
porphyres et syénites métallifères; l'autre, par des granités
zirconiens. Mais ce sont là des caractères en partie oryctognos-
tiques ; la véritable base de la division que nous proposons pro-
visoirement aux géognosfes, sont la superposition et l'âge rela-
tif, observés dans différentes parties du globe. Une partie des
porphyres mexicains et péruviens du deuxième et même du
quatrième groupe , semble avoir des rapports intimes avec les
trachytes, qui sont les plus anciennes parmi les roches volca-
niques.
Avant de décrire en détail les six grandes formations inter-
médiaires, je développerai quelques considérations générales
sur le terrain de transition , superposé le plus souvent en
gisement concordant au terrain primitif. La magnésie; le fer
oxidulé (magnétique), qui offre des rapports géognostiques
si frappans avec toutes les substances dans lesquelles domine
la magnésie ; le fer titane; le carbone et la chaux carbonatée,
pénètrent à travers la plupart des formations de transition.
M. Beudant a fait l'observation importante, que les syénites
et porphyres de Schemnitz, de Plauen et de Guanaxuato font
effervescence avec les acides, tandis que les trachytes (por-
phyres trachytiques) de la Hongrie n'offrent pas le même
phénomène. Saussure et M. Brochant ont trouvé effervescens
des micaschistes de transition (à la Tête-Noire) et des quarz
compactes ( dans la Tarantaise ) , là même où ces roches sont
très-éloignées de bancs intercalés de calcaire grenu stéatiteux.
IND i5i
J'ai vu dans les Cordillères du Pérou (Paramo de Yamoca),
comme dans leThiiringervvald-Gebirge (çntre Lauenstein et
Gràfenthal), un thonschiefer qui offroit d'abord tous les
caractères d'une roche primitive , mais qui peu à peu devenoit
effervescent , et dont les dernières couches présentoient des
nœuds épars de calcaire compacte gris -noirâtre. La chaux
carbonatée, d'abord disséminée dans la masse entière, se
concentre progressivement pour donner à la roche une struc-
ture glanduleuse, pour former des strates minces alternans,
des bancs intercalés , et à la fin des roches calcaires grenues
ou compactes, qui remplacent le thonschiefer, le micaschiste
ou l'euphotide, au sein desquels elles se sont développées.
M. Steffens, dans son Traité d'Oryctognosie, a consigné des
remarques ingénieuses sur le rôle important que le feldspath
et l'amphibole jouent dans les terrains primitifs, dans les ter-
rains intermédiaires ou de transition, et dans le grès rouge. Au
milieu du second de ces terrains le feldspath se montre
jusque dans le calcaire compacte. On peut croire qu'en
passant du granité au thonschiefer , par les gneis et les mi-
caschistes , cette substance reste cachée dans la pâte qui
n'est qu'homogène en apparence ; car nous voyons le thon-
schiefer de transition devenir quelquefois du porphyre ,
comme, par d'autres développemens intérieurs , par des accu-»
mulations de silice et de carbone , et par l'agrégation des élé-
mens de l'amphibole, il devient du kieselschiefer, de l'an-
thracite, du griinstein et de la syénite. Dans les porphyres
de transition on distingue souvent deux sortes de feldspath ,
le commun, et le vitreux à cristaux très-effilés (Andes du
Pérou, vallée de Mexico). Ce dernier, qui est moins une
espèce minéralogique qu'un état particulier du feldspath
commun , appartient à la fois aux terrains de transition et
aux véritables trachytes. La présence fréquente de l'amphi-
bole et le manque de quarz cristallisé distinguent orycto-
gnostiquement beaucoup de porphyres de transition de ceux
des terrains primitifs. Ces derniers ne sont peut-être que des
couches subordonnées à d'autres roches. L'amphibole, qui est
presque restreint aux bancs intercalés dans le terrain primitif,
n'est nulle part plus abondant que dans les terrains de transi-
tion et dans les terrains trachytiques. Parmi les premiers, les
î52 IND
grîinstein et les syénites offrent, par des changemens de pro-
portions dans les élémens du tissu cristallin, une espèce de
lutte entre le feldspath et l'amphibole. Lepyroxène, que
l'on croit trop exrlusivcment caractériser les trachytes , les
hasaltes et les dolérites, est propre à plusieurs porphyres de
transition des Andes et de la Hongrie. On le trouve aussi dans
les couches huileuses, noires et basaltiques, de la syénite zirco-
nienne de Norwége. J'ai cru avoir reconnu dans quelques
porphyres de transition de l'Amérique équinoxiale des traces
d'olivine ; mais ce n'étoient sans doute que des variétés moins
foncées et verdàtres du pyroxéne , dont on distinguoit à
peine les sommets dièdres, et dont je n'ai pu essayer la fusi-
bilité au chalumeau. L'olivine appartient proprement aux
formations basaltiques, et il est même encore douteux si
elle se montre dans les trachytes. La tendance fréquente à
la cristallisation, que l'on observe dans les terrains de tran-
sition au milieu de roches à sédiment et de roches agrégées,
est un phénomène si extraordinaire, que des géognostes cé-
lèbres ont été tenté d'admettre que beaucoup de ces roches
qui paroissenf agrégées (sous forme de brèches ou poudingues;
de roches élastiques et arénacées ; de grès de transition ou
d'agglomérats), bien loin de contenir des débris de roches
préexistantes, ne sont que l'effet d'une cristallisation confuse,
mais contemporaine. Des masses que dans quelques strates on
a prises pour des fragmens anguleux et nettement circons-
crits, se fondent à peu de distance de là dans la pâte même
de la roche; d'autres masses, qui ressemblent à des cailloux
roulés, deviennent des nœuds fortement adhérens aux lames
contournées d'un schiste, s'alongent et s'évanouissent peu à
peu. Lorsque Ton compare certains granités et porphyres ,
des brèches calcaires, des grauwackes et des grès rouges, on
croit reconnoître dans des roches d'âge si différent, à de cer-
tains indices de structure , le passage insensible d'une forma-
tion contemporaine, d'une cristallisation simultanée, mais
troublée par des attractions particulières, à une véritable agré-
gation (agglutination) de débris de roches préexistantes. Sous
toutes les zones il y a des granités à gros grains , dans lesquels
des masses à petits grains très-micacés se trouvent concentrées
çà et là j et qui paroissent , au premier coup d'oeil , renfermer
IND i53
des fragmens d'un granité plus ancien. Cette apparence est aussi
trompeuse que celles de tant de porphyres, d'euphotides et
de calcaires de transition, que les antiquaires et les mar-
briers désignent sous le nom de brèches ou de roches régé-
nérées. Les prétendus fragmens, souvent striés ou rubanés
(dans le verde antico et les calcaires les plus recherchés
comme ornemens intérieurs des édifices), ne sont vraisem-
blablement que des masses qui se sont consolidées les pre-
mières dans un fluide fortement agité. L'eau congelée de nos
fleuves, et divers mélanges de sels, dans nos laboratoires,
présentent des phénomènes analogues. La manière dont les
fragmens réunis ou anguleux du grauwacke, ceux des pou-
dingues calcaires à pâte grenue et à fragmens compactes, ceux
de certains grès rouges , paroissent quelquefois s'évanouir et
se fondre dans la masse entière , est bien plus difficile à
expliquer dans l'état actuel de nos connoissances. On ne peut
révoquer en doute que rallernance fréquente de strates visi-
blement agrégés et de strates presque homogènes ou légère-
ment noduleux, de même que le passage de ces masses les
unes dans les autres, ont été constatés par des observations
très-précises ; et M. deBonnard, dalisson Traité des terrains,
a eu raison de dire « que ce phénomène est un des plus in-
« compréhensibles de tous ceux qui peuvent nous frapper
« dans l'étude de la géognosie. ^* Doit-on admettre, lorsque
les contours des fragmens enchâsses disparoisseiit presque en
entier, qu'il n'y a eu qu'un très- petit intervalle de temps
entre la solidification des fragmens et celle de la pâte ? Nous
verrons plus tard que , dans le grès rouge , des cristaux de feld-
spath naissent dans cette pâte même et la rapprochent du
porphyre du grès rouge. (Steffens, Geognostisch-geolog. Au/s.,
p. i3, 16, 23, 3i. Freiesleben, Kupfersch. , T. IV, p. 11 5.)
î. Calcaire grenu talqueux, Micaschiste de transition,
ET Grauwacke avec anthracite.
§. 20. C'est un même terrain, une même formation, qui em-
brasse différentes roches calcaires , schisteuses et fragmen-
taires, alternant les unes avec les autres. Cette formation
n'est pas composée de trois roches isolées ( comme l'est la
formation de porphyre, de syénite et de griinstein), mais
iH IND
de trois formations partielles, de trois séries ou systèmes
de roches. Le type le plus compliqué de cet agroupement
de roches presque contemporaines s'est développé au sud-est
des Alpes, dans la. vallée de l'Isère , où il a été l'objet des
recherches approfondies de M. Brochant. Si presque tous les
termes de la série des roches intermédiaires sont complexes,
ces termes ou grandes formations n'en varient pas moins , selon
le degré de cette complexité, selon le nombre et la nature
des masses alternantes. Le terrain de la Tarantaise (c'est le
nom sous lequel nous désignerons le terrain §. 20) offre
dans sa structure et sa composition ( dans ses calcaires
grenus et talqueux, dans ses gneis et ses micaschistes) tel-
lement l'apparence d'un terrain primitif, qu'on ne reconnoit
son âge relatif que par quelques débris de corps organiques
et par l'intercalation fréquente de couches arénacées (pou-
dingues, brèches, grauwackes). Aussi, pendant long- temps
les géognostes, négligeant l'observation de l'alternance et de
l'unité de cette formation complexe , ont placé les poudingues
de la Valorsine parmi les roches primitives , et les ont consi-
dérées comme un phénomène purement local. Des recherches
qui embrassent une plus grande partie du globe, nous ont ré-
vélé beaucoup de faits analogues. Ces poudingues à fragmens
primitifs sont des grauwackes qui alternent avec des calcaires
micacés, ou avec les thonschiefer verts, ou avec des gneis
de transition. On les observe dans les Alpes (Trient au Va-
lais) , dans la Tarantaise , en Irlande, dans les montagnes de
Killarney et Saint-David ; enfin , sur les côtes orientales de
l'Egypte, dans la vallée de Cosseir ( Qozir). Les calcaires de
la Tarantaise et du petit Saint-Bernard , qui renferment des
cristaux de feldspath disséminés , et qui constituent une
espèce de roche porphyroïde à base calcaire, se retrouvent
dans des formations analogues des Alpes de Carinthie. Ce
phénomène d'association de la chaux et du feldspath est
d'autant plus remarquable que le feldspath lamelleux et les
calcaires grenus et compactes paroissent manifester partout
ailleurs, dans leurs rapports géognostiques , une espèce de
répulsion beaucoup plus prononcée que celle qu'on remarque
dans quelques pays entre l'amphibole et le calcaire. Des mi-
caschistes et des gneis de transition ont été regardés long-temps
>
IND i55
comme exclusivement propres à la région sud -ouest des
Alpes: mais ils se retrouvent dans les terrains de thonschiefer
et porphyre du Caucase, et dans le terrain de porphyre et
syénite de Saxe et de Hongrie. Cependant, en général, la
formation qui fait l'objet de cet article , et qui est caractérisée
à la fois par Tabsence des porphyres et par la fréquence des
calcaires grenus et talqueux , des quarz micacés et des anthra-
cites, paroit avoir plus favorisé le développement des mica-
schistes et des gneis de transition que les grandes formations
de porphyres et syénites , ou de thonschiefer et grauwacke.
C'est au contraire dans ces deux dernières que se trouvent
plus abondamment les granités de fransition, roches cristal-
lines, grenues, non feuilletées, presque dépourvues de mica,
et appartenant géognostiquement (lors même qu'elles ne
renferment aucune trace d'amphibole) à la syénite , comme
les micaschistes et les gneis de transition appartiennent au
quarz micacé. Les syénites , soit qu'elles forment de simples
couches dans les thonschiefer verts, soit qu'elles constituent
avec les porj)hyres une formation indépendante, préludent
pour ainsi dire aux granités de transition ; les quai'z com-
pactes, schisteux et mélangés de feuillets de mica (quarz du
terrain calcaire anthraciteux , quarz du terrain de thon-
schiefer et porphyre), préludent aux micaschistes et à ces
gneis de transition que Ton a très-justement désignés comme
des micaschistes porphyroïdes à cristaux (et nœuds) de feld-
spath. Ce sont ces modes divers de développement des gra-
nités au sein des roches syénitiques , des gneis et des mica-
schistes au sein des roches quarzeuses , qui nous font concevoir
pourquoi les gneis et micaschistes se trouvent associés (en-
virons de Meissen en Saxe, et pente septentrionale du Cau-
case) bien plus rarement au granité des terrains de transi-
tion, que des terrains primitifs. On pourroit dire que les
granités du premier de ces terrains ne sont que des bancs
de syénite avec suppression d'amphibole, et que la plupart
des micaschistes de transition ne présentent que des modifi-
cations ( de certains états) d'un quarz micacé, dans lequel le
mica devient plus abondant. Cependant ces changemens par
développement intérieur ne se font pas toujours de la même
manière. Quelquefois aussi (vallée de Miiglitz en Saxe) le
i56 IND
granité de transition naît immédiatement du thonschiefer ,
et les syénites de Meissen et de Prasitz passent à la fois au
granité et au gneis intermédiaires.
Voici les séries de roches calcaires, schisteuses et arénacées
alternantes, qui constituent la formation que nous plaçons
à la tête des terrains de transition.
Calcaires grenus talqueux, souvent veinés, schisteux, fétides
(comme le marbre grenu et blanc de l'ile de Thasos), mêlés
de grains ou nœuds de quarz , et renfermant (Sainte-l'oix)
des couches d'une serpentine de transition. Calcaire compacte
jaunâtre, quelquefois gris et renfermant des cristaux de feld-
spath (Bonhomme, Petit Saint-Bernard et vallée de la Ta-
rantaise). Poudingues ou conglomérats calcaires à pâte grenue
et à fragmens compactes (brèche tarentaise de Villette). Ces
trois roches, qui forment une sous-division du groupe §. 20,
alternent entre elles et avec les schistes de la série suivante.
Les calcaires compactes de transition ressemblent quelque-
fois au calcaire du Jura , d'autres fois ils passent au calcaire
à petits grains. Le calcaire saccharoïde talqueux, souvent
blanc et veiné, prend l'aspect des beaux marbres primitifs
du Pentelique (Cipolino), de THymette et du Caryste dans
l'Eubée. Les débris de corps organisés manquent générale-
ment dans la série calcaire ; mais, comme nous le verrons
bientôt, les roches de cette série alternent avec des schistes
remplis d'empreintes de plantes monocotylédones. M. Bro-
chant a même découvert une pétrification de nautile ou d'am-
monite dans les poudingues calcaires de la Villette, entre
Moutiers et Saint-Maurice.
Thonschiefer de transition, ou rubanés, et offrant des lames
de calcaire interposées, ou onctueux, mélangés de talc fibreux
(mine de Pesey) , sans parties calcaires visibles, mais faisant
effervescence avec les acides. Ce thonschiefer renferme (Bon-
neval) des couches subordonnées de griinstein.
Quarz compactes , ou quarzites, sans mélange, ou micacés, et
appartenant aussi bien aux calcaires grenus qu'au thonschiefer
de transition. C'est de l'accumulation du mica dans ces quarz
compactes que naissent les micaschistes de cette formation,
et même les gneis; car souvent les quarz renferment un peu
de feldspath disséminé dans la masse. Les micaschistes , pas-
IND .57
sant à des schistes noirs bitumineux, remplis d'empreintes
végétales (Monlagny, Petit Saint - Bernard , Landry), sont
associés à des anthracites, et alternent (Moutiers) avec les
calcaires stéatiteux et des grauwaches ou poudingues à frag-
mens primitifs. La pâte de ces conglomérats , qui enchâssent
du quarz, du granité et du gneis, n'est pas toujours de la
nature du thonschiefer, comme dans les grauwackes du Harz
(delà grande formation §. 22) : le plus souvent elle res-
semble au schiste micacé. Lorsque les fragmens deviennent
très-rares dans la masse , on confond ces roches avec de
vrais micaschistes de transition.
Dans ce terrain , composé de tant de couches périodi-
quement alternantes , la série schisteuse avec anthracite
paroit un peu plus neuve, lorsqu'on a égard aux grandes
masses , que la série calcaire. Si , d'un côté , les gypses de
la Tarantaise et de l'AUée-blanche , renfermant du muriate
de soude, du soufre et de la chaux anhydrosulfatée , re-
posent simplement sur les terrains de transition , sans en
être bien visiblement recouverts , il n'en paroit pas moins
certain, d'après les discussions intéressantes de M. Brochant,
que les gypses de Cogne, de Brigg et de Saint -Léonard , en
Valais, sont intercalés dans le calcaire de transition même.
Les grandes formations §§. 20 et 26 sont les seules des roches
intermédiaires dans lesquelles les porphyres et les syénites ne
paroissent pas s'être développés .- ce sont celles aussi dans
lesquelles abondent le plus les calcaires saccharoïdes blancs
et les masses de talc. Le feldspath lamelleux qui pénètre dans
les roches calcaires (calciphyres feldspathiques de M. Bron-
gniart), semble n'appartenir qu'au terrain §. 20. Les anthra-
cites sont communs à ce terrain et à la grande formation de
thonschiefer et grauwacke ,§.22; mais ils sont moins fréquens
dans cette dernière formation, où le carbone est plutôt dissé-
miné dans la masse entière des thonschiefer, des lydiennes et
des calcaires, qu'il colore en noir, que concentré dans des
couches particulières. L'anthracite, comme l'observe très-bien
M. Breithaupt, est d'une formation plus ancienne que la
houille, et d'une formation plus récente que le graphite ou
fer carburé. Le carbone devient plus hydrogéné à mesure
qu'il s'approche des roches secondaires. Ces roches sont dans
i58 IND
les mêmes rapports géognostiques avec la houille, que le
sont l'anthracite avec les roches de transition, et le graphite
avec les roches primitives. Je ne connois dans les AndeS
aucune formation calcaire qui se rapproche de celles conte-
nues dans le groupe §. 20. Seulement à Contreras, au pied
oriental de la Cordillère de Quindiù (Nouvelle-Grenade) j'ai
vu un calcaire de transition non compacte, mais très-grenu,
gris-bleuàtre, mêlé de grains de quarz, et enchâssant des
masses siliceuses qui ressemblent au pechstein. Ces masses
sont traversées par des filons de calcédoine. Le gisement de
ce calcaire de Contreras, au milieu d'un terrain de grès et
de gypse secondaires, est difficile à déterminer.
II. Porphyres et Syénites de transition recouvrant immédia-
tement LES ROCHES PRIMITIVES , CalCAIRE NOIR ET GrUNSTEIN.
§. 2 1. C'est la grande formation, dépourvue de grau-
wacke, de l'Amérique méridionale. Elle offre des problèmes
assez difficiles à résoudre , et embrasse les porphyres de
transition des Andes de Popayan et de cette partie du Pérou
que j'ai traversée en revenant de la rivière des Amazones
aux côtes delà Mer du Sud. Avant de donner la description
détaillée de cette formation , je jetterai un coup d'œil géné-
ral sur les roches porphyroïdes de l'Amérique équinoxiale,
roches qui ont été Pobjet principal de mes recherches géo-
gnostiques. Si en Allemagne et dans une grande partie de
l'Europe, comme Pobserve très-bien M. Mohs, le grauwacke
caractérise de préférence les terrains intermédiaires , on
peut, dans la région équinoxiale du nouveau continent, re-
garder les porphyres comme le type principal de ces terrains.
Aucune autre chaîne de montagnes ne renferme une plus
grande masse de porphyres que les Cordillères, qui s'éten-
dent presque dans le sens d'un méridien, sur une longueur
de 2600 lieues de Pun à l'autre hémisphère. Ces porphyres,
en partie riches en minerais d'or et d'argent (§. 23), sont
le plus souvent associés aux trachytes qui les surmontent et
à travers lesquels agissent encore les forces volcaniques.
Cette association de roches métallifères aux roches produites
ou altérées par le feu étonneroit moins lesgéognostes d'Europe,
si elle ne s'étendoit pas à l'or et à Pargent, mais seulement
IND ,59
au fer oligiste, au fer oxidulé, au fer titane et au cuivre
muriaté. C'est un des phénomènes les plus frappans et les
plus contraires aux opinions qui ont été partagées long-temps
par les hommes les plus célèbres. Cependant, et il est néces-
saire de bien préciser ce fait, il y a proximité dans le gise-
ment, quelquefois analogie dans la composition, et non-identité
de formation. La méthode, que nous avons adoptée, de cir-
conscrire lesdifFérens terrains d'après leur superposition et la
nature des roches qui les recouvrent, servira, je m'en flatte,
a jeter quelque lumière sur les rapports qu'on observe entre
les porphyres de transition, les trachytes et les porphyres
(secondaires) du grès rouge. J'indiquerai en même temps
les lieux où l'on n'a point encore découvert dans la nature
des limites aussi tranchées que semble l'exiger l'état actuel
de nos divisions systématiques.
Les porphyres de l'Amérique méridionale peuvent être con-
sidérés de deux manières .- selon leur position géographique,
et selon la différence que présente l'âge de leur formation.
En Europe, nous trouvons les porphyres et syénites de tran-
sition (Saxe, Vosges, Norwége), généralement éloignés des
trachytes (Siebengebirge près de Bonn , Auvergne); il arrive
cependant aussi que les porphyres et les trachytes se trou-
vent réunis (Hongrie), et alors les premiers sont quel-
quefois métallifères. Dans l'Amérique méridionale les por-
phyres et les trachytes sont tous accumulés sur une bande
étroite dans la partie la plus occidentale et la plus élevée
du continent , au bord de cet immense bassin de l'océan
Pacifique, qui est limité, du côté de l'Asie, parles volcans et
les roches trachytiques des îles Kuriles, Japonoises, Philip-
pines et Moluques. A l'est des Andes, dans toute la partie
orientale de l'Amérique du Sud , sur une étendue de terrain
de plus de 5oo,ooo lieues carrées, soit dans les plaines,
soit dans des groupes de montagnes isolées, on ne connoît
encore ni du porphyre de transition, ni du véritable basalte
avec olivine, ni du trachyte, ni un volcan actif. Les phé-
nomènes du terrain trachytique paroissent restreints à la
crête et à la lisière des Andes du Chili, du Pérou, de la
Nouvelle-Grenade , de Sainte-Marthe et de Merida. J'énonce
ce fait d'une manière absolue , pouf exciter les voyageurs à
i6o ijND
l'éclaircir davantage ou à le réfuter. Dans cette mênie région ,
qui s'étend de la pente orientale des Andes vers les côtes de la
Guiane et du Brésil, on a trouvé de l'or, du platine, du palla-
dium, de l'étain et d'immenses amas de fer spéculaire et ma-
gnétique; mais, au milieu de beaucoup d'indices d'argent sul-
furé ou muriaté, on n'y a pas découvert un gite de minerais que
l'on puisse comparer pour la richesse aux gîtes du Pérou et du
Mexique. Je n'ai même pas vu de porphyres de transition ni
de porphyres de grès rouge dans la chaîne côtière de Vene-
zuela, dans la Sierra de la Parime, ni dans les plaines entre
rOrénoque, le Rio Negro et la rivière des Amazones. Je ne
connois à l'est des Andes qu'un petit lambeau de terrain trachy-
tique, près de Parapara (bord septentrional desLlanosde Ca-
racas ) , 011 , dans un lieu infiniment intéressant pour la géogno-
sie, de la phonolithe et du mandelstein avec pyroxène sont
superposés à des serpentines et des Ihonschiefer de transition :
mais ces phonolithcs se trouvent sur la lisière de la Cordillère
de Caracas, qui se lie par Nirgua , Tocuyo et le Paramo de
Niquitao aux Andes de Merida. M. d'Eschwege a trouvé au
Brésil quelques porphyres intercalés par couches dans des
formations primitives de granite-gncis; mais il pense que ce
vaste pays est également dépourvu de formations indépen-
dantes de porphyre de transition, de trachyte , de basalte ou
de dolérite. En Amérique, la prodigieuse longueur du cours des
fleuves et le nombre de leurs affluens facilitent, par l'examen
des pierres roulées, la connoissance des contrées qu'on n'a
pu parcourir. Entre Carare et Honda j'ai ramassé, au mi-
lieu d'un terrain de grès , des fragmens de trachytes que
la rivière de la Magdeleine reçoit des Andes d'Antioquia et
de Herveo (Nouvelle-Grenade).
Quant à la nature des formations de porphyre accumulées
dans la bande occidentale et montagneuse de l'Amérique du
Sud et du Mexique, qui n'est qu'une prolongation de cette
même bande , nous y ferons connoître deux groupes bien
distincts. Le premier ( §. 21 ), non métallifère, repose
immédiatement sur des roches primitives ; le second (§. 23),
souvent métallifère, repose sur un thonschiefer ou sur des
schistes talqueux avec calcaire de transition : l'un et l'autre,
par leur gisement et leur composition, se rapprochent quel-
IND 161
quefôîs des porphyres trachytiques, comme les porphyres du
groupe §• 2ii se rapprochent de ceux du grès rouge. En effet,
les porphyres de transition des Andes du Pérou et du Mexique
se trouvent souvent recouverts de trachytes, tandis que les
porphyres de quelques parties de l'Allemagne sont recou-
verts de la formation secondaire du grès rouge, qui renferme
à son tour des porphyres et du mandelstein. Dans l'Amérique
équinoxiale les limites entre les porphyres de transition et les
véritables trachytes, reconnus pour être des roches volcani-
ques, ne sont pas faciles à fixer. En s'élevant des porphyres qui
renferment les riches mines d'argent de Pachuca, de Real del
Monte et de Moran (porphyres dépourvus de quarz, souvent
abondans en amphibole et en feldspath commun), vers les tra-
chytes blancs avec perlite et obsidienne de l'Oyamel et du Cerro
de las Navajas (montagne des Couteaux, à l'est de Mexico); en
passant, dans les Andes de Popayan , des porphyres de transi-
tion recouverts sur quelques points de calcaire noir à petits
grains, aux trachytes ponceux qui entourent le volcan de
Puracè , on trouve des roches porphyriques intermédiaires
que l'on est tenté de regarder tantôt comme des porphyres
de transition, tantôt comme des trachytes. 11 y <a plus encore:
au milieu de ces porphyres du Mexique , si riches en minerais
d'or €t d'argent, on observe des couches ( Villalpando prés
de Guanaxuato ) dépourvues d'amphibole, mais riches en
cristaux effilés de feldspath vitreux. On ne sauroit les distin-
guer des phonolithes (porphj'rschiefer ) du Biliner-Stein en
Bohême. Généralement , comme le savant professeur de mi-
néralogie à Mexico, M. Andrès del Rio, un des élèves les
plus distingués de l'école de Werner, l'avoit observé avant
moi; généralement, les porphyres de transition de la Nouvelle-
Espagne contiennent à la fois deux espèces de feldspath, le
commun et le vitreux. Il m'a paru que le dernier devient
plus abondant dans les couches supérieures, à mesure que
l'on approche des porphyres trachytiques.
Dans la partie équinoxiale du nouveau continent on est tout
aussi embarrassé de la liaison des porphyres souvent argenti-
fères avec les trachytes qui renferment des obsidiennes, qu'on
l'est en Europe de la liaison intime des dernières roches
de transition avec les plus anciennes roches secondaires, ou
23. 1^
îb- IND
de l'alternance des micaschistes de transition, qui ont toute
l'apparence de roches primitives, avec les grauwackes et les
conglomérats très-anciens. La source de cet embarras n'est
cependant pas la même. Il n'y a rien de-bien étonnant devoir
qu'à des roches fragmentaires ou remplies d"orthocératites, de
madrépores et d'encrinites , puissent succéder de nouveau des
roches dépourvues de débris organiques , et ressemblant à des
gneis et à des micaschistes primitifs. Cette alternance, cette
absence locale et périot'.ique de la vie, se manifeste jusque
dans les terrains secondaires et tertiaires : elle y paj-oit indi-
quer différens états de la surface du globe ou du fond des
bassins dans lesquels les dépôts pierreux se sont formés. Au
contraire, l'association des porphyres de transition et des tra-
chytes, l'apparence fréquente du passage de ces roches les
unes aux autres, est un phénomène qui semble attaquer la
base des idées géogoniques les plus généralement reçues.
Faut-il considérer les trachytes, les perlstein et les obsi-
diennes, comme étant de même origine que les thonschiefer
à trilobites et que les calcaires noirs à orthocératites ? ou ne
doit -on pas plutôt admettre que l'on a trop restreint le
domaine des forces volcaniques, et que ces porphyres, en
partie métallifères, dépourvus de quarz, mêlés d'amphibole,
de feldspath vitreux et même de pyroxène , sont , sous le rap-
port de l'âge relatif et de l'origine, liés aux trachytes, comme
ces trachytes, confondus jadis avec les porphyres de transition
sous le nom de porphyres trappéens, sont liés aux basaltes
et aux véritables coulées de laves que vomissent Us volcans
actuels ? La première de ces hypothèses me paroît répugner
à tout ce que l'on a observé en Europe, à tout ce que j'ai pu
recueillir sur les obsidiennes et les perlstein au Pic de Téné-
riffe , aux volcans de Popayan et de Quito. La seconde hypo-
thèse paroîtra moins hardie, moins dénuée de vraisemblance
peut-être, lorsqu'on ne restreindra plus l'idée d'une action
volcanique aux effets produits par les cratères de nos volcans
enflammés, et que l'on envisagera cette action comme due à
la haute température qui règne partout , à de grandes profon-
deurs, dans l'intérieur de notre planète. On a vu dans les temps
historiques, même dans ceux qui sont le plus rapprochés de
nous, sans flammes, sans éjection de scories, des roches de tra-
IND i65
cliytes s'élever du sein de la mer (archipel de la Grèce, iles
Açores et Aleutiennes) ; on a vu des boules de basalte, à
couches concentriques, sortir de la terre toutes formées, et
s'amonceler en petits cônes ( Playas de Jorullo au Mexique )«
Ces phénomènes ne font-ils pas deviner, jusqu'à un certain
point, ce qui, sur une échelle beaucoup plus grande, a pu
avoir lieu jadis dans la croûte crevassée du globe, partout
où cette chaleur intérieure, qui est indépendante de l'incli-
naison de Taxe de la terre et des petites influences climaté-
riques, a soulevé, par l'intermède de lluides élastiques, des
masses rocheuses plus ou moins ramollies et liquéfiées?
Lorsqu'on parle de ces terrains de transition qui, dans les
Andes du Mexique, de la JN'ouvelle -Grenade et du Pérou,
semblent liés aux trachytes dont ils sont recouverts, on ne
peut éviter de se livrer à des considérations sur l'origine des
roches. C'est l'imperfection de notre classification des terrains
qui conduit à cette digression. Le mot roche volcanique an-
nonce, comme je l'ai rappelé plus haut, un principe de divi-
sion tout différent de celui que l'on suit en séparant les
roches primitives des roches secondaires. Dans le dernier
cas on indique un fait susceptible d'une observation directe»
Sans remonter plus haut , en n'examinant que l'état actuel
des choses, on peut décider si une association de roches est
entièrement dépourvue de débris organiques , si aucun bane
arénacé ou fragmentaire ne s'y trouve intercalé, ou si ces
débris et ces bancs y paroissent. Au contraire, en opposaat les
terrains volcaniques aux terrains primitifs et secondaires, on
agite une question entièrement historique ; on engage le géo-
gnoste, malgré lui, à prononcer, comme par exclusion , sur
l'origine des granités , des syénites et des porphyres. Ce
n'est plus l'observation directe de ce qui est, la présence
ou le manque d'empreintes de corps organisés; c'est un rai-
sonnement fondé sur des Inductions et des analogies plus ou
moins contestées, qui doit décider sur la vulcaniciié ou la
non-volcanicité d'une formation- Entre les produits que le
plus grand nombre des géognostes, je pourrois dire tous ceux
qui ont vu Tltallc, TAuvergne, les Canaries et les Andes,
considèrent comme décidément ignés ( porphyres à ha&e
d'obsidienne^ porphyres semi-vitreux , porphyres Jracîiy:tî-
i64 IND
ques), et les porpliyres qui, parleur composition, par la
présence du quarz , par l'absence du feldspath vitreux, de
l'amphibole et du pyroxène, se rapprochent des porphyres du
grauwacke, se trouvent placées dans la Cordillère des Andes
des couches dont la base passe à la phônolithe (à la base du
porphyrschiefer), et dans lesquelles le feldspath vitreux,
l'amphibole et quelquefois même le pyroxène remplacent
progressivement le feldspath commun. On ne sait alors oii
finissent les porphyres qu'on est convenu d'appeler de tran-
sition , et où commencent les trachytes.
Je ne doute pas que de nouveaux voyages, et l'examen ap-
profondi des roches feldspathiques intermédiaires et de celles
que renferme le grès rouge, ne répandent plus de jour sur ce
problème intéressant; dans l'état actuel de nos connoissances,
je me laisserai guider dans la séparation des porphyres et des
trachytes des Andes, moins par des idées de composition,
que par des idées de gisement. Il est extrêmement rare
de rencontrer dans les véritables trachytes de l'Amérique
équinoxiale du feldspath commun ; mais le feldspath vitreux,
l'amphibole et le pyroxène s'observent à la fois dans ces
roches et dans les porphyres §§.21 et 23, qui sont en partie
recoiiverts d'un calcaire noir de transition et de grès rouge
secondaire. On rencontre également peu de quarz dans les
porphyres de l'Amérique équinoxiale et dans les trachytes ,
cette substance caractérise, au contraire, la plupart des por-
phyres de l'Europe, §§. 22 et 24. Son absence totale est ce-
pendant si peu un indice certain d'une formation trachytique.
qu'il se trouve, quoiqu'en petites masses, dans quelques tra-
chytes des Dardanelles, de la Hongrie et du Chimborazo. M.
de Buch a observé près des basaltes d'Antrim un porphyre
très-analogue à ceux du grès rouge et renfermant à la fois, et
du quarz et du feldspath commun disséminés, et des couches
intercalées de perlstein et d'obsidienne. Ce phénomène se
répète aussi dans les trachytes des Monts Euganéens. Le mica
et surtout les grenats paroissent, quoique très - rarement ,
dans les porphyres de transition des deux continens ; mais
ils se montrent également dans les trachytes de l'ancien
volcan de Yanaurcu , au pied du Chimborazo et dans les
conglomérats trachytiques de l'Europe. Les porphyres , aussi
IND i65
bien que les frachytes des Andes, offrent de superbes co-
lonnes : la masse des trachytes colonnaires est quelquefois
tellement compacte, qu'on a de la peine à y découvrir des
pores et des gerçures.
Il résulte de ces données, que les caractères de compo-
sition (caractères absolus et isolés, par lesquels on voudroit
distinguer les porphyres de transition et les trachytes des
Cordillères) sont très -incertains : c'est l'ensemble de tous
les caractères oryctognostiques , c'est le passage d'une roche
à l'état vitreux, ce sont l'obsidienne, le peristein et les
masses scorifiées qu'elle enchâsse, ce sont des rapports de
gisement, qui la font reconnoître comme trachyte. On se dé-
cide d'ailleurs plus facilement k nommer certaines forma-
tions des trachytes, qu'à prononcer sur l'origine prétendue,
neptunienne de quelques autres. Les trachytes et les por-
phyres de transition peuvent être également superposés aux
roches primitives ; ce ne sont pas les roches qui les suppor-
tent , mais celles dont elles sont recouvertes , qui doivent
guider le géognoste. Le plus souvent les trachytes et les por-
phyres des Cordillères ne sont pas recouverts par d'autres
formations; mais, partout où ce recouvrement a lieu et où
la roche superposée est indubitablement de transition , cette
superposition seule décide, selon moi, le problème de classi-
fication que l'on veut résoudre. Les trachytes ne servent de
base qu'à d'autres produits ignés ; très-rarement (Hongrie) à
des formations tertiaires identiques avec le terrain de Paris ^
plus rarement encore (archipel des Canaries, Andes de Quito)
à de minces formations de gypse et d'oolithes intercalées ou
superposées aux tufs ponceux. Quelquefois les porphyres de
transition de l'Amérique ( et non les trachytes) sont recouverts
de calcaire noir à petits grains, degrés rouge ou de calcaire
alpin; et c'est lorsque ce recouvrement ne s'observe pas , qu'oa
est obligé d'avoir recours à la méthode peu sûre de l'induc-
tion et des analogies. On risqueroit peut-être moins de sépa-
rer ce que la nature a réuni par des liens assez étroits, si Von
décrivoit provisoirement sous la dénomination vague de j^or-
phjres amphiboliques ( hornblendiges porphyrgebilde) l'ensem-
ble de ces roches des Cordillères à structure porphyroïde
(porphyres de transition et porphyres trappéens ou trachytes) ,.
qui sont presque dépourvus de quarz, et qui abondent à Ï3
fois en amphibole et en feldspath lamelleux ou vitreux.
Après avoir donné cet aperçu général des porphyres de
transition des Andes, et de leur affinité géognostique avec
les trachytes, je vais caractériser le groupe de porphyres qui
sont antérieurs au calcaire à entroques et à orthocératites ,
au thonschicfer et au micaschiste de transition. On peut dis-
tinguer dans ce groupe équaiorial, là où je l'ai observé avec
soin dans rhémisphère boréal ( Cordillères de Popayan et d'Al-
ïnaguer' et dans Thémisphère austral (montagnes d'Ayavaca
sur les limites des Andes de Quito et du Pérou), plusieurs
formations partielles; savoir:
Porphyres ;
Griinstein et argiles ferrugineuses ;
Syénites ;
(Granités de transition?),
Calcaires chargés de carbone;
(Gypses de transition?).
Des porphyres dont l'aspect est souvent frachytique domi-
nent dans ce groupe. Je n'y ai vu alterner ni les porphyres avec
lasyénite ou avec le calcaire de transition, ni la syéiiite avec
3e griinstein, comme c'est le cas (§§. ^3 et 24) au Mexique et
dans plusieurs parties de l'Europe. La syénite des Andes de
Baraguan, de Chinche et de Huile (à l'est du Rio Cauca entre
Quindiù et Cuanacas , lat. bor. 2° 46' à 4° i o' ) , est superposée
a des roches primitives, à du granite-gneis, peut-être même
à du micaschiste. C'est une formation partielle qui est paral-
lèle aux porphyres de Popayan, recouverts de calcaire for-
lement chargé de carbone. Cette syénite est composée de
beaucoup d'amphibole et de feldspath commun blanc- rou-
geàtre, contenant très-peu de mica noir et de quarz. Le feld-
spath domine dans la masse ; le quarz (ce qui est assez reuiar-
quable dans une syénite) est translucide, gris -blanchâtre
et constamment cristallisé, comme l'est le quarz des por-
phyres d'Europe du groupe §. 24. L'agrégation des parties
est presque en plaques, de sorte que lasyénite de transi-
tion des Cordillères n'a pas la texture entièrement grenue,
«omme la syénite de Plauen près de Dresde : la texture
fflasrigeStfuctur) de cette roche se rapproche au contraire
IND 167
de celle du gneis. Ce qui éloigne la syénite du Nevado de
Baraguan , des granités avec amphibole (§.7), ou d'une syé-
nite que l'on pourroit croire primitive (§. 8) , est son passage
au trachyte et sa liaison avec les grunstein de transition qui
lui sont superposés, entre le Paramo d'iraca et le Ptio Paez
(province de Popayan). Le quarz disparoît peu à peu dans
cette syénite de transition , l'amphibole devient plus abondant .
et la roche prend la structure porphyroïde. On trouve alors
dans une pâte pétrosiliceiise (euritique), de couleur rou-
geàtre ou gris-jaunàtre , très-peu de mica noir, beaucoup
d'amphibole, et des cristaux épars, très-alongés , de feldspath,
dont l'éclat est plutôt vitreux que nacré, et dont les lames
peu prononcées ont des gerçures longitudinales. Ce n'est plus
une syénite, mais un trachyte dont des masses énormes et
diversement groupées s'élèvent, comme des châteaux forts,
sur la crête des Andes. Ces passages me paroissent très-remar-
quables et semblent fortifier les doutes qu'on peut avoir sur
l'origine de toutes les roches primitives grenues. 11 est très-
difficile, dans les contrées équatoriales, d'appliquer des noms
à un grand nombre de formations mêlées de feldspath et
d'amphibole, parce que ces formations se trouvent sur la
limite entre les syénites de transition et les trachytes. Tantôt
grenues, tantôt porphyroïdes, elles ressemblent ou aux syé-
nites du groupe §. i;5 de Hongrie, ou aux trachytes du
Drachenfels, près de Bonn, et du grand plateau de Quito.
Comme on observe que les porphyres de transition de Popayan
passent aussi aux trachytes, le parallélisme de formation entre
les syénites et les porphyres du même groupe §. 2: se trouve
confirmé par les rapports géognostiques de deux roches avec
une troisième. Quelquefois (pied du volcan de Puracé, près
de Santa - Barbara ) un granité de transition , très-abondant en
mica, semble séparer les syénites qui enchâssent du quarz et
du feldspath commun à éclat nacré, des vrais trachytes, dont
la pâte, vers le sommet des montagnes (à 2200 toises de
hauteur), devient vitreuse et passe à l'obsidienne.
Dans tout le groupe des syénites et des porphyres que j'ai
examinés dans la Cordillère des Andes (entre le Nevado de
Tolima et les villes de Popayan, d'Almaguer et dePasto), le
porphyre qui porte le plus décidément le caractère d'une
iS8 ITSD
roche de fransitîon , est celui qui entoure les basaltes de Ta
Tetilla de Julumito (rive gauche du Rio Cauca à Touest de
Popayan), et qui est recouvert (à Los Serillos) d'un calcaire
noiràlre, passant du compacte au calcaire à petits grains, tra-
versé de fiions de spath calcaire blanc , et tellement surchargé
de carbone, que dans quelques parties il tache fortement les
doigts et que le carbone s'y trouve accumulé en poudre sur
les fissures de stratification. Cette accumulation de carbone,
que Ion observe également dans les schistes anthraciteux et
alumineux , et dans les lydiennes et le kieselschiefer, ne
laisse aucun doute sur la question de savoir si le calcaire
noirâtre de Los Serillos (prés de Julumito), dans lequel je
n'ai pu trouver aucune trace de débris organiques , est un
vrai calcaire de transition. La lydienne que Ton observe dans
les thonschiefer de transition de Naila et de Steben (mon-
tagnes de Bareuth), offre aussi ce dépôt de poudre charbon-
neuse entre ses fissures; et des échantillons qui ne tachent
pas les doigts m'ont servi à exciter les nerfs d'une gre-
nouille, en les employant dans le cercle galvanique conjoin-
tement avec le zinc. Le calcaire noir de transition {nero
antico), si célèbre parmi les anciens sous le nom de marmor
LucuUeum , contient aussi, d'après l'analyse de M. John, J. p. c.
d'oxide de carbone, distribué comme principe colorant dans
toute la masse de la roche. Un porphyre recouvert d'un cal-
caire fortement carburé, noir-grisâtre, à grains fins, et peut-
être dépourvu de pétrifications, est pour le géognoste, qui
met plus d'importance au gisement qu'à la composition des
terrains, un porphyre de transition, quelle que soit la nature
oryctognostique de ses parties constituantes. Les trachytes,
comme nous l'avons exposé plus haut, n'ont été trouvés
recouverts jusqu'ici que par d'autres roches volcaniques ,
par des tuffs ou par quelques formations tertiaires très-
récentes. Le porphyre de transition de Popayan , auquel
le calcaire noir est superposé, est assez régulièrement stra-
tifié; il renferme peu d'amphibole, très-peu de quarz en petits
cristaux implantés dans la masse, et un feldspath qui passe
du commun au feldspath vitreux. Je n'y ai point vu de py-
Toxène, pas plus que dans les porphyres de l'isojè, qui for-
ment, à la pente occidentale du volcan de Puracè, sur la rive
IND 169
droite du Rio Cauca, une magnifique colonnade. Ce porphyre
deTisojè est divisé en prismes à 5 — 7 pans et de 18 pieds de
long , prismes que j'ai pris de loin pour du basalte, et que l'on
retrouve en Europe dans beaucoup de porphyresde transition ,
même dans ceux du grès rouge. Une rangée perpendiculaire
de ces colonnes est placée sur une rangée entièrement horizon-
tale. Dans une pâte gris-verdàtre , vraisemblablement de feld-
spath compacte coloré par l'amphibole, l'on observe très-peu
de cristaux d"amphiboIe visibles à l'œil nu, du mica noir, et
beaucoup de feldspath laiteux, non vitreux. Le quarz manque
dans ces porphyres colonnaires, comme dans presque tous les
porphyres de transition et métallifères du Mexique. La roche
de Pisojè étant géographiquement assez éloignée des porphyres
de Julumito liés au calcaire de transition, il reste douteux
si elle n'appartient pas déjà à la formation de trachyte. Quant
aux porphyres de transition de Julumito , on ne sait pas sur
quel terrain ils reposent; car, depuis Quilichao jusqu'à l'arête
de los Robles , qui est située à l'ouest du Paramo de Palitarà
et du volcan de Puracé, et qui partage les eaux entre la
mer du Sud et la mer des Antilles , on ne voit plus de
roches primitives au jour. L'Alto de los Robles même est
composé de schiste micacé (direction des couches N. Go°E. ,
comme le gneis- micaschiste des Andes de Quindiù , incl.
5o" au SO.). Cette roche primitive des Robles s'observe
également près de Timbio et près des sources du Rio de las
Piedras (hauteur 1004 toises), sortant au-dessous des trachytes
de Puracé et de Sotarà. Sur le schiste micacé reposent , comme
je l'ai vu très -clairement dans les ravins entre le Rio Quil-
quasé et le Rio Smita, les roches porphyriques du Cerro
Broncaso , et celles qui suivent vers le sud entre Los Robles
et le Paramillo d'AImaguer. Aussi de grands blocs de quarz
que l'on trouve épars au milieu de ces terrains de porpliyre
et de trachyte , annoncent partout la proximité du micaschiste.
C'est ici que se présente la question importante de savoir
si les roches à structure porphyroïde, au sud de l'Alto de
los Robles , formant la pente occidentale du volcan de
Sotarà et des Paramos de las Papas et de Cujurcu (voyez
laa carte du Rio Grande de la, Magdalena) , sont de véritables
porphyres de transition ? Je vais exposer les faits tels que
170 IT^D
je les ai observés. Les porphyres de Broncaso ( lat. bor. 2" 17',
long. 79 ° 3 ' , en déduisant cette position des observations
astronomiques que j'ai faites à Popayan et à Alinaguer)
renferment beaucoup et de très-grands cristaux de feldspath
ilanc- laiteux , des cristaux effilés d'amphibole qui se croi-
sent , comme le feldspath dans le porphyre appelé vulgaire-
ment par les antiquaires serpentino verde antico ou porfido
verde ( griin -porphyr de Werner), et un peu de quarz
translucide cristallisé. Souvent les cristaux d'amphibole et
de feldspath partent d'un même point. Dans l'intérieur du
feldspath on trouve d'autres cristaux très-petits et noirs,
que j'ai cru être plutôt du pyroxène que de l'amphibole.
Le point central autour duquel se groupent les lames cristal-
lisées du leucite (amphigène) est également, d'après M. de
Buch , un cristal microscopique de pyroxène, et dans les
griinstein porphyriques de Hongrie M. Beudant a trou\é des
grenats au milieu des cristaux d'amphibole. Des croisemens
et desagroupemens bizarres de cristaux de feldspath commun
et d'amphibole caractérisent tous les porphyres entre le
Cerro Broncaso et les vallées de Quilq^uasè et de Rio Smita,
porphyres qui sont irrégulièrement stratifiés en stratification
non concordante (bancs de 2 — 5 pieds; direction N. 55° O. ,
inclin. 40" au nord -est) avec les couches du micaschiste.
Leur pâte diffère de celle des porphyres de. Julumito : elle
est d'un beau vert d'asperge, à cassure compacte ou écail-
leuse, quelquefois assez tendre, offrant une raclure grise
et prenant au souffle une couleur très-foncée; d'autres fois
elle est dure et ressemble au jade ou à la phonolithe (kling-
stein , base du porphyrschiefcr ) , c'est-à-dire qu'elle appar-
tient au feldspath compacte. Sur les bords du Rio Smita j'ai
vu dans ces porphyres, qui passent au porfido verde des anti-
quaires, des couches presque dépourvues de cristaux dissé-
minés : ce sont des masses de jade (saussurite) vert d'asperge
et vert poireau , presque semblables à celles qu'on trouve
dans les roches d'euphotide de transition ; elles sont traver-
sées par une infinité de petits filons de quarz. Plus au sud ,
les porphyres verts à base de feldspath compacte conservent
leurs cristaux épars de quarz , et ce caractère les éloigne
du porphyrschiefer appartenant au terrain trachytique, dans
IND 17^
lequel le quarz est un phénomène isolé, d'une rareté extrême.
En même temps on commence à y trouver du mica noir
et une variété de pyroxcne , à surface très - éclatante , à
cassure transversale conchoïde, et d'une couleur vert-olive
si peu foncée qu'on la prendroit presque pour l'olivi^ie des
basaltes. Ce porphyre à mica noir remplit les vallées des
petites rivières deSan-Pedro, Guachicon et Putes; il se
cache quelquefois (vallée de la Sequia) sous des amas de
griinstein en boules de 4 — 6 pouces de diamètre, et tinit
par ne plus être stratifié, mais séparé, exactement comme le
griinstein superposé , en boules qui se divisent par décomposi-
tion en pièces séparées concentriques. Souvent les boules de
porphyre, d'une extrême dureté, sont d'une composition
identique avec le porphyre en masse. Leur noyau est solide
et ne renferme ni quarz ni calcédoine : elles forment des
couches particulières de six pieds d'épaisseur, et se trouvent
comme implantées et fondues dans la roche non altérée par
des influences atmosphériques ou galvaniques. Cette structure
n'est pas un effet de la décomposition, comme on Fa cru de
quelques basaltes colonnaires qui se séparent en boules. Elle
me paroît plutôt tenir à un arrangement primitif des molé-
cules. Je crois que nulle part dans le monde on ne trouve
une plus grande accumulation de roches k structure globuleuse
que dans la Cordillère des Andes, surtout depuis Ouilichao
( entre Caloto et Popayan) jusqu'à la petite ville d'Almaguer.
En descendant du Cerro Broncaso, et en traversant suc-
cessivement (toujours dans la direction du nord au sud, et
dans le chemin de Popayan à Almaguer) les vallées de Smita ,
de San Pedro et de Guachicon , on observe , au milieu d'un
porphyre qui n'est pas divisé en boules, et qui renferme
plus d'amphibole et plus de pyroxène vert d'olive que de
feldspath vitreux, un phénomène géognostique très-remar-
quable. Des fragmens anguleux de gneis de 3 à 4 pouces carrés
sont empâtés dans la masse. C'est un gneis abondant en mica .-
c'est le phénomène que présentent les trachytes du Drachenfels
( Siebengebirge sur les bords du Rhin) et, dans ses couches
inférieures, la phonolithe ( porphyrschiefer ) du BilinerStein
en Bohème. Non loin de là, dans la partie nord-est de
cette même vallée de Rio Guachicon ( vallée de 400 toises df
^72 IND
profondeur, dans laquelle je me suis arrêté une journée en-
tière), la roche porphyroïde a la structure la plus composée
que j'aie jamais trouvée dans les porphyres de transition et
dans les trachytes porphyriques. On y observe à la fois des
cristaux de feldspath vitreux, d'amphibole, de mica noir,
de quarz et de pyroxène, dont la couleur se rapproche de
celle de l'olivine. Le quarz ne se présente qu'en de très-
petites masses ; mais il n'est certainement pas dû à des in-
filtrations postérieures. Après avoir passé, plus au sud encore,
l'arête qui sépare le Rio Guachicon du Rio Pûtes, les cinq
substances disséminées dans la masse disparoissent presque
entièrement: la roche porphyroïde devient homogène, ex-
trêmement dure, et de ce beau noir que l'on admire dans
quelques lydiennes très-pures, ou dans la base du prétendu
jaspe porphyrique de l'Altaï, ou dans de certaines statues
égyptiennes faussement appelées basaltes ou basanites. Je doute
que ce soit du pechstein : c'est plutôt un feldspath com-
pacte, coloré en noir par l'amphibole ou par quelque autre
substance. La cassure de cette pâte homogène est unie ou
conchoïde, à grandes cavités aplaties; elle est sans éclat ,
presque entièrement matte. Je n'y ai reconnu que peu de
cristaux très-effilés de feldspath vitreux et des prismes hexaè-
dres de pyroxène conchoïde (muschliger augit de Werner),
qui ont la couleur noire du mélanite , et qui ressemblent ,
quant à l'éclat et à la cassure, au pyroxène du Heulenberg
près de Schandau en Saxe.
Je viens de décrire successivement les porphyres de Julu-
mito, recouverts de calcaire noir et carburé: ceux de Pisojè,
à feldspath non vitreux, et divisés en prismes; les porphyres
verts renfermant du quarz , et fréquemment des cristaux
croisés d'amphibole du Cerro Broncaso et de la vallée de
Smita ; les roches porphyroïdes du Rio Guachicon , enchâs-
sant des fragmens de gneis; enfin, celles du Rio Pûtes, dont
la masse noire homogène et compacte n'offre que très -peu
de cristaux disséminés. Toutes ces roches appartiennent-elles
à une même formation, qui offre des caractères particuliers
dans les diverses vallées de la Cordillère de Sotarà et de
Cujurcù ? On ne sauroit révoquer en doute que les frag-
mens de gneis empâtés dans les roches qui avoisinent le Rio
IND 173
Guachicon , ne caractérisent de véritables trachytes. Ce sont,
pour ainsi dire , les précurseurs de ces trachytes et de cet
énorme amas de ponces que j'ai trouvés, vingt lieues plus au
sud, sur les rives du Mayo. Mais faut-il étendre cette dé-
nomination de trachyte sur tous les porphyres qui se prolon-
gent par le Cerro Broncaso vers les micaschistes de l'Alto de
los Robles, et qui sont en partie couverts, non de dolérites,
mais de griinstein de structure globuleuse, ressemblant entiè-
rement au griinstein du terrain de transition en Allemagne?
D'après ce que j'ai exposé plus haut sur le passage insensible
des porphyres métallifères du Mexique à des roches qui ren-
ferment de l'obsidienne et du peristein, et dont la volcanicité
n'est presque plus contestée aujourd'hui, je ne sais pas com-
ment décider une question si importante. Elle présente moins
un problème de gisement qu'un problème que j'appellerois his-
torique, parce qu'il est l'objet de la géogonie, et ((u'il tient aux
idées que l'on se forme sur l'origine des divers dépôts rocheux
qui couvrent la surface du globe. Le géognoste a rempli sa
tâche lorsqu'il a examiné les rapports de gisement et de
composition. Il n'est pas temps encore de prononcer sur des
masses qui semblent osciller entre les porphyres de transition
et ces trachytes exclusivement appelés porphyres volcaniques.
Ce qui paroit difficile à débrouiller aujourd'hui, deviendra
clair peut-être lorsque l'Amérique équinoxiale , libre, civi-
lisée, plus accessible aux voyageurs, sera explorée par un
grand nombre d'hommes instruits ; lorsque de nouvelles dé-
couvertes auront fait concevoir que des efifets volcaniques ,
lents et progressifs, ou brusques et tumultueux, ont pu
avoir lieu partout où des crevasses ont ouvert des commu-
nications avec l'intérieur du globe dans lequel règne encore
aujourd'hui, d'après toutes les apparences , une température
extrêmement élevée. Nous avons déjà des preu\es certaines
que des roches presque identiques avec celles qui appar-
tiennent au terrain trachytique ou qui surmontent ce
terrain, sont intercalées dans de véritables porphyres de
transition et dans des porphyres du grès rouge. Tous les
géognostes connoissent les observations importantes, faites
par M. de Buch , près de Holmstrandt, dans le golfe de
Christiania en Norwége. Un porphyre renfex'mant , outre Iç
Î74 IND
feldspath commun (non vitreux), lrès-j)eu d'amphibole et
de quarz, se trouve placé entre un calcaire à ortliocératilcs
et une syénite à zircons. Personne ne s'est encore refusé à
considérer ce porphyre comme une formation de transition;
personne ne l'a appelé trachyte. Or, au milieu de ce por-
phyre on voit, non un filou (dyke), mais une couche de
basalte avec pyroxène. «Le porphyre de Holmstrandt, dit
« M. de Biich, devient basalte par ces mêmes passaj^es et
« CCS nuances insensibles que l'on trouve si communément
« en Auvergne. Ce basalte est trés-noir, presque à petits
ç grains, dépourvu de feldspath, mais rempli de pyroxène.
« Quelquefois il devient bulleux, et prend un aspect rouge
(fr et scorilié, au contact avec le porphyre.» Il ne seroit peut-
être pas plus étrange de découvrir des fragmens de gneis enve-
loppés dansce basalte bulleux etscoritié, rempli de pyroxènes,
que de les avoir observés dans les basaltes du Barenstein (prés
d'Annaberg en Saxe) ou dans les trachytes de la vallée du Rio
Guachicon (dans l'Amérique méridionale). Quelle est l'origine
de cette couche basaltique, huileuse, pyroxénique, de Holm-
strandt ? Est-elle, comme tout le porphyre, une coulée
venue d'en- bas par des filons? La présence d'une masse que
l'on croit d'origine ignée, ofTre-t-elle un motif suffisant pour
admettre que tout le terrain auquel cette masse appartient
doive être séparé des formations de transition et classé parmi
les trachytes? J'en doute: les roches incontestablement vol-
caniques du Rio Guachicon, enchâssant des fragmens de gneis,
sont géognostiquement liées aux porphyres de transition ,
comme, sur d'autres points du globe, ceux-ci sont géognos-
tiquement liés aux porphyres du grès rouge.
Je sépare provisoirement toutes les roches porphyroïdcs
placées au sud d'une arête composée de micaschiste ( Alto de
losRobles), de celles qui se trouvent au nord-ouest de cette
arête, et qui, près de Julumito, sont recouvertes d'un cal-
caire abondant en carbone. C'est à cette dernière classe, et
par conséquent au terrain de transition (§. 21 ) qui fait l'objet
spécial de cet article, que je rapporte, avec plus de con-
fiance peut-être, les porphyres de Voisaco (Andes de Pasto ,
lat. i" 134' bor.) et ceux d'Ayavaca (Andes du Pérou, lat.
4° 38' austr.). Voici les circonstances de gisement de ces
IND 175
deux roches. Les porphyres et trachytes de Popayan , du
Cerro Broncaso , du Rio Guachicon et du Rio Pûtes sont sépa-
rés de ceux de la province de Pasto par un plateau de roches
primitives, qui s'étend depuis Almaguer jusqu'au Tablori, au
pied du Paramo de Puruguay. C'est au sud du Tahlon que
recommencent les porphyres : près du village indien de Voi-
saco ils se distinguent par une polarité que nous avons trouvée
sensible jusque dans les plus petits fragmens. On voit très-
clairement que ces porphyres sont placés sur le micaschiste.
Une masse gris-verdàtre enchâsse à la fois deux variétés de
feldspath, le commun et le vitreux : phénomène que l'ou
rencontre souvent dans les porphyres de transition du Mexique
(§. 25). Quelques cristaux aciculaires de pyroxène pénètrent
entre les feuillets du feldspath vitreux. Un rocher placé à
rentrée du village nous a offert en petit, à M. Bonpland et
moi , tous les phénomènes de la serpentine polarisante de
Bareuth (§. ig) que j'avois découverte en 1791^.
Dans rhémisphère austral, en suivant les Andes de Quito
par Loxa à Ayavaca , on voit paroitre alternativement au jour
les roches primitives et les porphyres , phénomène que nous
avons déjcà signalé plus haut (§§. 5 et 6). Presque chaque fois
que la masse des montagnes s'élève, les porphyres se montrent,
et cachent aux yeux du voyageur le gneis et le, micaschiste.
A ces porphyres, qui offrent d'abord plus de feldspath com-
mun que de feldspath vitreux, succèdent des trachytes, et
ces trachytes annoncent assez généralement deux phénomènes
combinés, le voisinage de quelque volcan encore actif, et
l'élévation rapidement croissante de la Cordillère, dont
les sommets vont atteindre ou dépasser la limite des neiges
perpétuelles (2460 toises sous Péquateur). J'ajouterai que les
trachytes recouvrent immédiatement ou les roches primitives
ou les porphyres de transition, et que dans ceux-ci le feldspath
vitreux, l'amphibole et quelquefois le pyroxène deviennent
plus fréquens à mesure qu'ils se trouvent plus près des roches
volcaniques. Tel est le type que suivent les phénomènes de
gisement dans la région équinoxiale du Mexique et de l'Amé-
rique méridionale; type que j'ai reconnu surtout dans les
coupes que j'ai dessinées sur les lieux en 1801 et 1800.
Les porphyres d'Ayavaca forment une partie de cet en»
176 IND
chainement général de roches feldspatlilques. Sur les schistes
micacés de Loxa , oîi végètent les plus beaux arbres de
quinquina que Ton connoisse jusqu'ici (Cinchona condami-
nea), sont placés des porphyres qui remplissent tout le terrain
compris entre les vallées du Catamayo et du Cutaco. Prés
de Lucarque et d'Ayavaca (hauteur 1407 toises), ces por-
phyres se trouvent divisés en boules à couches concentriques,
et des amas de ces boules reposent (vallée du Rio Cutaco ;
hauteur du fond de ce ravin, 766 toises) sur un porphyre
qui renferme du feldspath commun et de l'amphibole, qui est
régulièrement stratifié, et dont la masse, très-dense, est tra-
versée par une infinité de petits filons de spath calcaire, tout
comme le thonschiefer de transition en Europe est traversé par
des veines de quarz. Les mesures barométriques que j'ai faites ,
assignent à ces porphyres d'Ayavaca, que je ne crois pas être
des trachytes, 4800 pieds d'épaisseur. Je ne cite pas, comme
appartenant au groupe §. 21 , les roches porphyroïdes vertes,
dépourvues de quarz, renfermant très -peu d'amphibole et
beaucoup de feldspath commun laiteux, qui constituent les
Andes del'Assuay. Ils sont placés sur les micaschistes primitifs
de Pomallacta , et j'ai eu occasion de les examiner dans leur
énorme épaisseur depuis 1600 jusqu'à 2074 toises de hauteur
au-dessus du niveau de l'océan. Ils sont généralement stratifiés;
mais cette stratification, souvent très-régulièi'e (N. 45" O.),
s'observe aussi dans beaucoup de vrais trachytes du Chimborazo
et du volcanj enflammé de Tunguragua. En examinant avec
soin, dans les Cordillères des Andes, les dilférens états du
feldspath dans les porphyres de transition et dans les trachytes,
j'ai vu que des roches décidément trachytiques en renferment
aussi qui n'est pas vitreux, mais feuilleté laiteux. J'incline à
croire que le porphyre de TAssuay , groupe de montagnes
célèbre par le passage qu'il offre entre Quito et Cuença,
est du trachyte.
J'ai discuté les roches qui constituent dans l'Amérique méri-
dionale le groupe §. 2 1 , la syénite du Baraguan , le granité de
transition de Santa-Barbara , les porphyres de Julumito, les
griinstein, et le calcaire noir et carburé: il me reste quelqueà
observations à faire sur des membres moins importans de ce
groupe. Des sources de muriate de soude que l'on trouve
IND ^^^
tiitoinëes de syénîte à une prodigieuse hauteur près de San-
Miguel, à l'est de Tulua , dans la Cordillère du Baraguan
indiquent peut-être la liaison géognostique de quelque gypse
de transition avec la syénite ou avec un calcaire noir analo-
gue à celui des Seriilcs de Popayan. Mais dans ces contrées
la hauteur seule n'est pas un motif pour exclure une forma-
tion gypseuse du domaine des terrains secondaires. J'ai vu
sur le plateau de Santa-Fé de Bogota, à 1400 toises de hau-
teur, la masse de sel gemme de Zipaquira reposer sur un
calcaire qui est décidément de formation secondaire. 11 est
pltttôt probable que le gypse fibreux, mêlé d'argile, deTicsan
( Pueblo viejo dans le royaume de Quito, lat. 2" \o' austr. ),
placé vis-à-vis la fameuse montagne de soufre (§§. 1 1 et 16),
loin de toute roche secondaire, sur du micaschiste primitif,
est un gypse de transition , analogue à ceux de Bedillac
dans les Pyrénées et de Saint-Michel près Modane en Savoie.
hes griinstein du groupe §. :2i , qui paroissent couvrir les
syénites du Baraguan et des porphyres analogues à ceux de
Juluraito, abondent, au nord de Popayan, au pied des
Paramos d'Iraca et de Chinche , surtout dans la vallée orien-
tale du bassin du Rio Cauca(Curato de Quina major et Qui-
lichao). Dans ce dernier endroit de riches lavages d'or s'o-
pèrent entre des fragmens de griinstein ( diabase de Bron-
gniart, diorite de Haiiy). Cette roche n'est décidément pas
une dolérite : c'est un grunstein de transition semblable à
celui que l'on trouve intercalé au thonschiefer chargé de
carbone du Fichtelgebirge (§. :2 2) et au micaschiste de
Caracas (§.11). Le grunstein de Quina major devient quel-
quefois très-noir, très- homogène , sonore, fissile et stratifié
comme le schiste amphibolique des terrains primitifs (horn-
blendschiefer). Il est rempli de pyrites, n'agit point sur
l'aimant, et prend à Pair une croûte jaunâtre, comme le
basalte. Prés de Quilichao (entre les villes de Cali et de
Popayan) il présente de grands cristaux d'amphibole dissé-
minés dans la masse , et des liions qui sont remplis de pyroxènes
d'une couleur vert d'olive très-peu foncée. J'ai pris, sur les
lieux, ces pyroxènes pour l'olivine iamelleuse de M. Freies-
leben. Les cristaux ne se trouvent pas disséminés dans la
masse , m^is seulement tapissant des fentes ; c'est comme
25. la
278 IND
des filons de dolérife qui traversent le grilnsteîn. Cette
niéine roche, quoique dépourvue de filons, se montre,
comme nous l'avons dit plus haut, en boules aplaties au sud
de Popayan et de TAIto de los Robles , dans la vallée de la
Sequia i entre Je Cerro Broncaso et le Rio Guachicon ) ; elle y
recouvre les porphyres verts du Rio .Sniita, La superposition du
griinstein est ici plus manifeste que dans le Curato de Quina
major et dans les lavages d"or de Quilichao. Comme les por-
phyres au nord de l'Alto de los Robles sont en partie (Julumito)
couverts de calcaire noir de transition , et que ceux au con-
traire que l'on observe au sud de Los Robles paroissent
liés aux trachytes du Rio Guachicon , cette superposition
uniforme du griinstein sur l'un et l'autre de ces por-
phyres est un phénomène de gisement qui mérite beau-
coup d'attention. D'après les observations faites jusqu'ici dans
les deux continens , les trachytes et les basaltes se trouvent
couverts de dolérite (mélange intime de feldspath et de
pyroxène) , mais non de griinstein (mélange intime de feld-
spath et d'amphibole). Ne faut- il pas conclure de là. que
tout ce qui est au-dessous des griinstein en boules de la
Sequia et de Quilichao, est un porphyre de transition , et non
un trachyte P Ne doit-on pas, à cause de cette superposition
uniforme du griinstein, séparer les roches porphyroïdes du
Rio Smita et du Cerro Broncaso , des porphyres trachy tiques et
plus décidément pyrogènes de la vallée du Guachicon , c'est-
à-dire de ceux qui enchâssent des fragmens de gneis ? Il y a
une certaine probabilité qu'une roche recouverte de griin-
stein est plutôt une formation de transition qu'une formation
de trachyte : mais des terrains d'origine ignée peuvent être
d'un âge très-ancien. Pourquoi n'y auroit-il pas des masses
de trachytes et de doléritcs intercalées aux roches de transi-
tion modernes ?
De plus, et j'adresse cette question aux savans minéralo-
gistes qui se sont livrés plus spécialement à l'étude des ca-
ractères oryctognostiques des roches, les griinstein sont-ils
toujours minéralogiquement (par leur composition) aussi
différens des dolérites qu'ils en sont le plus souvent éloignés
géo^nosfiquement (par leur gisement)? Les cristaux qui se
séparent du tissu d'une pâte et qui deviennent visibles à
IND 179
l'oeil nu, existent, à n'en pas douter, mêlés à d'autres subs-
tances dans ce tissu même. Comme les basaltes renferment sou-
vent à la lois (Saxe, Bohème, Rhënegebirge) de grands cris-
taux disséminés de pyroxène et d'amphibole (basaltische horn-
blende), on ne sauroit douter qu'outre le pyroxène, l'am-
phibole n'entre aussi dans la masse de quelques basaltes.
Pourquoi des mélanges analogues ne pourroient-ils avoir lieu
dans les pâtes des dolérites et des grunstein , dont on croit
(pour me servir de la nomenclature mythologique générale-
ment reçue) les uns d'or^ine volcanique, les autres d'ori-
gine neptunienne P Le pyroxène en roche, qui, d'après M.
de Charpentier, se trouve en stratification parallèle dans le
calcaire primitif des Pyrénées , renferme de l'amphibole
disséminé. On assure avoir reconnu des pyroxènes dans les
grunstein qui forment de vraies couches au milieu des gra-
nités du Fichtelgcbirge en Franconie ( §. 7 ). M. Beudant a vu
des grunstein indubitablement pyroxéniques (p;.r conséquent
des dolérites) dans les porphyres et syénites de transition de
Hongrie (Tepla près de Schemnitz), comme dans le grès
houiller (secondaire) de Fiinfkirchen. Les griinstein stratifiés
et globulaires des environs de Popayan ne passent ni au mandel-
stein , ni au porphyre syénitique. C'est une formation très-
nettement tranchée, et qui est accompagnée ici, comme
presque partout dans la Cordillère des Andes (où elle se
tient assez éloignée de la crête des volcans actifs), de masses
énormes d'argile. Ces masses rappellent plus encore les ac-
cumulations d'argile dans les terrains basaltiques du Miftel-
gebirge en Bohème, que l'argile liée au gypse des grunstein
(ophites de Palassou ) dans les Pyrénées et dans le départe-
ment des Landes. Elles rendent le passage des Cordillères,
de Popayan à Quito, extrêmement pénible pendant la saison
des pluies.
Les analogies que nous avons indiquées entre quelques
porphyres du groupe §.21 et les trachytes ou autres roches
volcaniques, se retrouvent dans le groupe mexicain §. 20 et
même dans les porphyres norwégiens du groupe §. 24; mais
généralement (à Pcxception des porphyres du Caucase ) on ne
les observe presque pas dans les porphyres subordonnés au
thonsclàiefer de transition et aux grauwackes §. 22. 11 y a plus
i8o I]\D
encore : au milieu des porphyres secondaires du grès rouge,
les mandelstein et d'autpes couches intercalées (Allemagne,
Lcosse, Hongrie) prennent aussi quelquefois l'aspect de
roches pyrogènes. D'après ces divers rapports de gisement
et de composition, je pense qu'on n'est point en droit,
dans l'état actuel de nos connoissances , de nier entièrement
l'existence des porphyres de transition dans les Cordillères
de l'Amérique méridionale, et de regarder toutes les roches
de syénites , de porphyres et de griinstein , que je viens
de décrire , comme des trachyt^. Les porphyres des grou-
|)es §§. 2 1 et -20 sont caractérisés dans l'Amérique méridio-
nale et au Mexique par leur tendance constante à une stra-
tification régulière'; tendance très-rarement observée en Eu-
rope, sur une grande étendue de terrain, dans les groupes
§§. 22 et 2Z|. La régularité de stratification est cependant
beaucoup plus grande dans les porphyres mexicains posté-
rieurs au thonschiefer de transition que dans les porphyres
des Andes de Popayan , de Pasto et du Pérou, qui reposent
immédiatement sur les roches primitives. Cette dernière
formation (§. 21 ) ne m'a pas offert une seule couche subor-
donnée de syénite, de griinstein , de calcaire et de man-
delstein, comme on en trouve dans les groupes §§. 22 et 25.
Dans la Nouvelle-Espagne , entre Acapulco etTehuilotepec ,
j'ai vu des porphyres de transition, qui ne sont pas métalli-
fères, reposer immédiatement sur du granité primitif (Alto
de los Caxones, Acaguisotla , et plusieurs points entre Sopi-
lote et Sumpango); mais, comme plus au nord (près de
Guanaxuato) des porphyres métallifères d'une composition
semblable couvrent un thonschiefer de transition, il reste
incertain, malgré la différence de gisement, si les uns et
les autres n'appartiennent pas à un même terrain et à un
terrain plus récent que le groupe §. 21. Un terme «T de la
série géognostique peut suivre, immédiatement à /3 , là où 5/
ne s'est pas développé. C'est ainsi que le calcaire du Jura
repose près de Laufenbourg immédiatement sur du gneis,
parce que les termes intermédiaires de la Série des forma-
tions, les roches situées ailleurs (par exemple dans la vallée
du Necker) entre le calcaire du Jura et le terrain primitif,
s'y trouvent supprimés. Dans les Isles Britanniques, d'après les
IND i8i
observations du savant professeur Buckland et d'après celles
de MM. deBuch et Boue, la formation desyénite, griinstein et
porphyre de transition (Ben Nevis , Crampians) repose aussi im-
médiatement sur des roches primitives (micaschiste et urthon-
schiefer). Elle paroit par conséquent appartenir au premier
groupe de porphyres dont je viens de tracer l'histoire (§. 21).
Les porphyres du nord de l'Angleterre et ceux de TÉcosse
sont recouverts tantôt de grauwacke, tantôt de la Tormation
houillère; ils offrent une base feldspathique, et se trouvent
souvent dépourvus de quarz, comme les porphyres de l'Amé-
rique équinoxiale. On y a observé des grenats : ce phénomène
se retrouve dans les porphyres de transition de Zimapan
(Mexique) , et dans ceux qui couronnent la fameuse montagne
du Potosi et qui appartiennent probablement aussi au groupe
§. 23. Si le mandelsteiu d'Ilefeld fait partie, comme le croit
M. de Raumer, du terrain de grès rouge, les porphyres
grenatifères du Netzbcrg (au Harz) sont probablement de
formation secondaire. En Hongrie, les grenats se rencon-
trent à la fois et dans les porphyres ou griinstein porphyri-
ques du groupe §. 20, et dans les conglomérats du terrain
trachytique. Il en résulte que les grenats pénètrent depuis
les roches primitives (gneis, weisstein , serpentine), par les
porphyres de transition, jusque dans les trachytes et basaltei
volcaniques, et que, dans les zones les plus éloignées les
unes des autres , certains porphyres offrent des rapports très-
multipliés avec les trachytes. J'ignore si la syénite titanifère
de Keilendorf en Silésie , qui repose immédiatement sur
le gneis et qui passe à un granité de transition à petits grains
dépourvu d'amphibole, appartient à l'ancienne formation du
groupe §. 21 , ou si c'est un lambeau de la formation §. 20 ,
placé accidentellement sur des roches primitives. Rien n'est
plus difficile que de reconnoitre avec certitude s'il y a eu sup-
pression de quelques membres intermédiaires de la série
des roches, ou si le contact immédiat que Ton observe, est
celui que l'on trouveroit partout ailleurs sur le globe, en
comparant l'âge relatif ou le gisement des mêmes terrains,.
382 IND
JII. Thonschiefer de transition renfermant des grauwackes ,
des grunstein , des calcaires moirs , des syénites el des
porphyres.
§. 22. C'est la grande formation de thonschiefer qui traverse
les Pyrénées occidentales, les Alpes de la Suisse entre Ilantz et
Claris, et le nord de l'Allemagne depuis le Harz jusqu'en
Belgique et aux Ardennes, et dans laquelle dominent le grau-
wacke et les calcaires; ce sont les thonschiefer et gneis de
transition du Cotentin , de la Bretagne et du Caucase; ce sont
les roches schisteuses placées eu Norwége au-dessous des por-
phyres et syénites zirconiennes , c'est-à-dire, entre ces por-
phyres et les roches primitives ; ce sont les thonschiefer verts,
avec calcaires noirs, serpentine et griinstein, de Malpasso dans
la Cordillère de Venezuela , et les thonschiefer avec syé-
nites de Guanaxnato au Mexique. Nous avons exposé plus
haut le gisement de ces roches dans les différens pays que
nous venons.de nommer : il s'agit à présent de les considérer
dans leur ensemble, et de séparer les résultats de la géo-
gnosie des notions purement locales qu'offre la géog^^i-phie
ininéralogique. Le groupe §. 22 repose, comme les deux
groupes précédens, immédiatement sur le terrain primitif,
il se distingue du premier ( §. 20) par l'absence presque
totale des calcaires grenus stéatiteux; du second (§.21), par
la fréquence des thonschiefer et des grauwackes. Les forma-
tions suivantes, intimement liées entre elles, appartiennent
à ce groupe (§. 22), qui est un des mieux connus et des
plus anciennement étudiés :
Thonschiefer, avec des couches de quarz compacte, de
grauwacke , de calcaire noir, de lydienne, d'ampélite car-
burée, de porphyre, de griinstein , de granité à petits grains .
de syénite et de serpentine;
Grauwncke (et grés quarzeux);
Calcaire -air.
Ces roches, ou sont isolées, ou alternent les unes avec les
autres, ou forment des couches subordonnées.
J'ai discuté plus haut (§. 16 ) les caractères qui distinguent
assez généralement le thonschiefer primitif du tlionschiefer
de transition : j'ai fait observer que les caractères tirés de
IND i85
ïa composition ininéralogique des roches n'ont pas la valeur
absolue qu'on a voulu quelquefois leur assigner; et que, pour
les employer avec succès, il faut avoir recours en même
temps au gisement , à l'intercalation ou à l'absence de cou-
ches fragmentaires (grauwackes, conglomérats), et aux débris
de corps organisés, qui manquent totalement aux terrains
primitifs et que l'on commence à trouver dans les terrains
de transition. Les thonschiefer de ce dernier terrain se dis-
tinguent par leur variahililé , par une tendance continuelle à
changer de composition et d'aspect; par le nombre des bancs
intercalés; par des passages fréquens , tantôt brusques, tan-
tôt insensibles et lents, à l'ampélite, au kiesclscliiefer, au
griinstein, ou à des roches porphyroïdes et syénitiques. Sans
doute que ces changemens, ces effets d'un développement
intérieur, se font aussi remarquer dans quelques roches
primitives. M. de Charpentier observe que les granites-
gneis des Pyrénées , qui renferment presque toujours un
peu d'amphibole disséminé dans la masse, sans être pour
cela des syénites , et que l'on croit primitifs sans être des
plus anciens, présentent un grand nombre de couches
étrangères, par exemple, des couches de micaschiste , de
griinstein et de calcaire grenu. Dans cette même chaîne de
montagnes, le micaschiste primitif contient de la chiasto-
lithe disséminée, substance généralement plus commune dans
le thonschiefer de transition. Les Alpes de la Suisse, surtout
le passage du Spliigcn, si bien décrit par M. de Buch , offrent
un micaschiste du terrain primitif qui passe insensiblement
à un porphyre dont la pâte de feldspath compacte enchâsse
des cristaux de feldspath lameîleux et de quarz. Cependant,
en général, ces changemens sont moins fréquens parmi les
formations primitives que parmi les formations de transition.
Quelque intime que soit la liaison que l'on observe entre
les roches qui constituent un même groupe, ou entre les
différens groupes de tout le terrain intermédiaire, on recon-
noît pourtant, sur différens points du globe, un certain
degré d'indépendance, non-seulement entre les six groupes
ou termes de la série des roches de transition (par exemple,
entre les thonschiefer avec grauwacke et les porphyres et
syénites), mais aussi entre les membres partiels de chaque
i84 IND
groupe ou association de roches inlemiëdiaires. Il en résulte
que, pour bien saisir les traits qui caractérisent la constitu-
tion géologique d'un pays, il faut étudier ces rapports isolé-
ment (par exemple, ceux des grauuackes, des thonschiefer
et des calcaires que renferme le groupe §. 22 ), et fixer pour
les diA-^ers terrains ou membres partiels d'une même associa-
tion les degrés de dépendance ou d'indépendance qu'ils con-
servent entre eux. Nous les voyons ou alterner périodique-
ment, ou s'envelopper et se réduire les uns les autres (par un
accroissement inégal de volume ) à l'état de simples couches
subordonnées, ou enfin se couvrir mutuellement comme fe-
Toient des roches primitives de différente formation.
Il arrive en effet que les termes partiels d'un même groupe,
ot , /2 , y , se succèdent quelquefois avec une certaine régula-
rité en série périodique, a.. /2. y. a. 0. -y. et. ... D'autres fois
et prend un si grand développement que ^ et y s'y trouvent
renfermés comme de simples couches : d'autres fois encore a,
/S 5 y sont simplement superposés les uns aux autres sans retour
périodique. Ce dernier cas n'exclut point la possibilité que B ,
avant de succéder à et, n'y paroisse d'abord comme une
couche subordonnée. Il arrive dans un même groupe tout
ce que l'on observe dans des termes non complexes de
la série des terrains primitifs. On peut dire, comme nous
l'avons fait observer plus haut, qu'une formation de calcaire
noir, qui constitue de grandes masses de montagnes et qui
est superposée à des masses également considérables de thon-
schiefer de transition, prélude par des couches de calcaire
noir intercalées au thonscliicfer. Lorsque fi et y forment
des couches intercalées dans a, ces couchés peuvent être si
fréquemment répétées, qu'elles prennent, sur de grandes
étendues de terrain, l'aspect de roches alternantes. C'est ainsi
que le thonschiefer intermédiaire , qui d'abord enveloppoit
le grau\Aacke et le calcaire noir, et puis alternoit avec eux
( gorge d" Aston dans les Pyrénées, Maxen en Saxe ) , finit par
recouvrir, et avec un grand accroissement de masse , ces roches
alternantes ou ces couches w . iiucmment intercalées. Il en est
d'ailleurs de la régularité du lype ùi<ns les formations partielles
de chaque groupe comme de la direction des strates ou de
l'angle que font ces strates avec le méridien. Au premier abord
IND i8-5
lout paroît confus et contradictoire ; mais, dès que l'on exa-
mine avec soin une grande étendue de pays, on finit toujours
par reconnoître certaines lois de gisement ou de slratifit-ation.
Si le type que l'on découvre dans la suite des formations par-
tielles , paroit varier selon les lieux , c'est que le dévelop-
pement de ces petites formations n"a pas été partout le même.
Quelquefois (Caucase) le porphyre, le calcaire, la syénite
et le granité de transition , se sont développés à la fois au sein
des thonschiefer de transition ; d'autres foiS on n'y trouve ni
le porphyre (Cotentin, Alpes de la Suisse), ni le grauiA-acke
(chaîne du littoral de Venezuela), ni le granité et la syénite
de transition (Pyrénées). L'association du thonschiefer de
transition et du calcaire noir compacte est presque aussi
constante que celle du calcaire blanc et grenu avec le mica-
schiste dans le terrain primitif. On trouve cependant aussi des
calcaires de transition qui , n'étant associés ni au thonschiefer
ni au grauvvacke, paroissent remplacer géognostiquement le
thonschiefer; mais je ne connois pas un seul point des deux
continens où l'on ait vu, sur une étendue un peu considé-
rable, des thonschiefer de transition qui ne fussent pas liés
au calcaire.
Nous venons de voir que dans quelques parties du globe
(Caucase et presqu'île du Cotentin) le thonschiefer intermé-
diaire enveloppe ou les porphyres ou les syénites et les granités;
dans d'autres parties ( Norwége et Saxe, entre Friedrichs-
walde, Maxen etDohna) , ces trois roches se trouvent , après
avoir préludé comme couches subordonnées au thonschiefer,
superposées à celui-ci, soit isolément et formant des masses
considérables, soit atternant entre elles. C'est seulement
dans ces cas d'isolement ou d'alternance qu'un terrain indé-
pendant de porphjre (Mexique), ou un terrain indépendant de
porpli/yre et syénite (Norwége), semble surmonter le terrain
des thonschiefer intermédiaires. Ce même isolement (sinon
cette même indépendance) s'observe quelquefois dans les
calcaires de transition et, quoiqu'à un degré moins prononcé^
dans les grauwackes.
La syénite et le granité sont liés dans le terrain de transition
plutôt aux porphyres qu'au micaschiste et au gneis : dans ce
même terrain on trouve des syénites sans granité ; mais il est
j86 IIVD
beaucoup plus rare de trouver des syénites et des granités sans
porphyre. Lorsque les membres partiels d'un groupe, et, /3,5/,
alternent en série périodique, et que par conséquent ils ne
sont ni inleicalés les uns aux autres comme couches suboi'-
données. ni superposés comme des roches ou formations
distinctes, il est difficile de déterminer si /2 et 5/ sont d'une
formation plus récente que a : cependant, même dans le cas
d'une origine que Ton appelle contemporaine , Texamen atten-
tif des terrains fait reconnoitre de certa'mt'sprépondcrances de
formation, (rénéralement le grauuacke et le thonschiefer de
transition sont plus anciens que les calcaires noirs, ou, pour
m'appuyer d'une observation très-juste de M. de Charpentier.
tx généralement on observe que, malgré l'alternance dans la
« partie du terrain intermédiaire qui est la plus rapprochée
« du terrait! primitif, c'est le grauwacke elle thonschiefer qui
« dominent en grandes masses, et le calcaire leur est subor-
« donné ; tandis que, dans la partie plus moderne du terrain
« de transition , c'est au contraire le calcaire qui est la roche
« prépondérante, et le thonschiefer est seulement intercalé
« au calcaire en couches plus ou moins épaisses. ^'
Après avoir exposé les rapports d'âge et de gisement des
roches qui constituent un même groupe, nous allons carac-
tériser plus spécialement chacune des formations partielles.
Thonschiefer , bleu noirâtre et carbui:^ , ou verdàtre, onc-
tueux et soyeux ; tantôt terreux ou à Teuillets très-épais,
tantôt fissile et parfaitement feuilleté. Dans ses couches très-
anciennes, qui passent au micaschiste de transition, il est
ondulé et n'offre que de grandes lames de mica fortement
adhérentes. Dans les couches plus neuves, près du contact
avec le grauwacke, il renferme de petites paillettes isolées
de mica, souvent aussi de la chiastolithe , de réj)idote et
des filets de quarz. Le thonschiefer de transition , caractérisé
par son extrême variabilité , c'est-à-dire par sa tendance con-
tinuelle à changer de composition et d'aspect, contient un
grand nouibre découches, dont quelques-unes , par leur répé-
tition fréquente, semblent former des roches alternantes avec
lui. Les effets les plus habituels de ce développement inté-
rieur sont les bancs intercalés de grau^vachc et de grauwacke
schisteux ; de calcaire généralement compacte et noir, ou gris-
IND 187
noirâtre, quelquefois rougeàtre (Braunsdorf), et même grenu
et blanc ( Miltitz en Saxe), comme dans le groupe §.20; de
griinstein; de porphyre (Caucase; Saxe, près Friedricliswalde
et Seidwitzgrund) ; de schiste alumineux , ou ampélite forte-
ment carburée; de quarz compacte (quarzite; quarzfels de
Hausmann), quelquefois avec de petits cristaux de feldspath
(Kemielf en Finlande); de lydienne et kieseischiefer. Ces
deux dernières substances siliceuses se trouvent à la fois
dans le thonschiefer , le grau\Yacke, le calcaire, et sous la
forme de jaspe dans le porphyre : elles attestent par leur
présence l'affinité géognostique qui unit ces diverses roches
de transition. Le thonschiefer (§. 22) renferme moins habi-
tuellement : des bancs intercalés de gneis (Lokwitzgrund
et Neutanneberg) ; de micaschiste et granité (Krotte en Saxe;
Fiirstenstein en Silésie; Honlleur en Normandie; Monthermé
dans les Ardennes); de granité et syénite (Caucase, Co-
tentin, Calixelf en Norwége ) ; d'argiie schisteuse graphique
(schwarze kreide : vallée de Castillon dans les Pyrénées ;
Ludwigstadt en Franconie ) ; de schiste novae ulaire (wetz-
schiefer); de serpentine (Bochclta près de Gênes; Lovezara
et deux autres points , plus au nord , vers Voltaggio :
voyez §. 19); de feldspath compacte (vallée d'Arran dans les
Pyrénées, PouUaouen en Bretagne), tantôt pur, noirâtre,
gris-verdàtre ou vert d'olive, tantôt ( Pyrénées, Harz, et
partie orientale de la Haute -Egypte) mêlé de cristaux dis-
séminés de feldspath lamelleux, d'amphibole, de schorl et
de quarz. Lorsque le feldspath compacte est simplement
mêlé d'amphibole, il forme le griinsteinschiefer de Werner,
qui alterne avec le thonschiefer de transition ( Ulleaborg en
Suède) et se retrouve dans les terrains primitifs. Quoique,
comme j'ai tâché de le prouver dans mon Mémoire sur le
/Sao-at'/rxç et xiBoç 'H^ctKXiict , publié en 1790, la majeure
partie des basaltes des anciens soit due à des roches syéni-
tiques de transition , ou à des bancs de griinstein intercalés
à des roches primitives, l'examen des statues égyptiennes
conservées à Rome, à Naples, à Londres et à Paris, m'a cepen-
dant fait naitre l'idée que beaucoup de basaltes noirs et verts de
nos antiquaires ne sont que des masses de feldspath compacte
tirées de terrains intermédiaires, et colorées soit en noir soit en
388 IJVD
vert par de l'amphibole . par de la chlorite , par du carbonp
ou des oxides mét:illiques. 11 n'y a que l'analyse chimique de
ces masses anciennes non mélangées qui pourra résoudre cette
question d'archéologie minéralogique. M. Beudant a vu, dans
le terrain de transition de la Hongrie, des grunstein porphy-
roides se transformer en une pâte verte ou noire d'apparence
homogène. Cette pâte n'étoit plus qu'un feldspath compacte
coloré par l'amphibole.
Nous avons déjà fait observer plus haut que le thonschiefer
de transition forme de beaucoup plus grandes masses dans le
monde que le thonschiefer primitif. Ce dernier est générale-
ment subordonné au micaschiste ; comme formation indépen-
dante il est aussi rare dans les Pyrénées et les Alpes que dans les
Cordillères. Je n'ai même vu dans l'Amérique méridionale,
entre les parallèles de lo" nord et 7° sud, de thonschiefer de
transition que sur la pente australe de la chaîne du littoral de
Venezuela, à l'entrée des Llanos de Calabozo. Ce bassin des
Llanos, fond d'un ancien lac couvert de formations secondaires
(grès rouge, zechstein et gypse argileux), est bordé par une
bande de terrain intermédiaire de thon'schiefer , de calcaire
noir et d'euphotide , liée à des griinstein de transition. Sur les
gneis et micaschistes, qui ne constituent qu'une seule fonda-
tion entre les vallées d'Aragua et la Villa de Cura , reposent
en gisement concordant, dans les ravins de Malpasso et de
Piedras azules, des thonschiefer (direction N. 52°E.; inclin.
70° vers le NO.), dont les couches inférieures sont vertes, stéa-
titeuses et mêlées d'amphibole; les supérieures d'une couleur
gris-perlée et bleu -noirâtre. Ces thonschiefer renferment
(comme ceux de Steben en Franconie, du duché de Nassau
et de la Peschels-Miihle en Saxe) des couches de grunstein,
tantôt en masse , tantôt divisé en boules.
Dans la Nouvelle-Espagne, le fameux filon de Guanaxuato,
qui, de 1786 a i8o3., a produit, année commune, 556, 000
marcs d'argent, traverse aussi un thonschiefer de transition.
Cette roche , dans ses strates inférieurs , passe , dans la
mine de Valenciana (à g32 toises de hauteur au-dessus du
niveau de la mer), au schiste talqueux , et je l'ai décrite ,
dans mon Essai politique, comme placée sur la limite des ter-
rains primitifs et intermédiaires. Un ex;imeu plus approfondi
IND 189
des rapports de gisement que j'avois notés sur les :..!jx, la
comparaison des bancs de S)'énite et de serpentine que Ton a
percés en creusant le liro gênerai, avec les bancs qui sont in-
tercalés dans les terrains de transition de Saxe, de la Bo.chetta
de Gênes et du Cotentin, me donnent aujourd'hui la certi-
tude que le thonschiefer de Guanaxualo- appartient aux plus
anciennes formations intermédiaires. Nous ignorons si sa stra-
tification est parallèle et concordante avec celle des granites-
gneis de Zacatecas et du Penon blanco , qui probablement le
supportent; car le contact de ces formations n"a point été ob-
servé ; mais sur le grand plateau du Mexique presque toutes
les roches porphyriques suivent la direction générale de la
«haîne des montagnes ( N. 40° — 5o"0). Cette concordance
parfaite ( Gleichformigkeit der Lagerung) s'observe entre le
gneis primitif et les thonschiefer de transition de la Saxe
(Friedrichswalde ; vallées de laMuglitz, Seidewitz et Lock-
witz) : elle prouve que la formation du terrain intermédiaire
a succédé immédiatement à la formation des dernières cou-
ches du terrain primitif. Dans les Pyrénées, comme l'observe
M. de Charpentier, le premier de ces deux terrains se trouve
en gisement différent (non parallèle), quelquefois en gise-
ment /ransgreisf/ (iibergreifende Lagerung) avec le second.
Je rappellerai à cette occasion que le parallélisme entre la
stratification de deux formations consécutives , ou l'absence de
ce parallélisme, ne décide pas seul la question de savoir si les
deux formations doivent être réunies ou non réunies dans un
même terrain primitif ou secondaire : c'est plutôt l'ensemble de
tous les rapports géognostiques qui décide le problème. Le
thonschiefer de Guanaxuato est très- régulièrement stratifié
(direct. N. 46" O.; incl. 46° au SO. ) , et la forme des vallées
n'a aucune influence sur la direction et l'inclinaison des
strates. On y distingue trois variétés, qu'on pourroit désigner
comme trois époques de formation : un thonschiefer argenté
et stéatiteux passant au schiste talqueux (talkschiefer) ; un
thonschiefer verdàtre, à éclat soyeux, ressemblant au schiste
chlorité; enfin, un thonschiefer noir, à feuillets très-minces,
surchargé de carbone, tachant les doigts comme l'ampélite
et le schiste marneux duzechstein, mais ne faisant point effer-
vescence avec les acides. L'ordre dans lequel j'ai nommé ces
i^o IND
variétés, est celui dans lequel je lésai observées de bas eu haut
dans la uiine de Valenciana , qui a j63 toises de profondeur
perpendiculaire; mais, dans les mines de Mellado, d'Animas
et de Ra^as, le thonschiefer surcarburé [hnja de libro) se
trouve sous la variété verte et stéatiteuse, et il est probable
que des strates qui passent au schiste talqueux, à la chlorite
et à Tampélite , alternent plusieurs fois les uns avec les autres.
L'épaisseur de cette formation de thonschiefer de transi-
tion, que j'ai retrouvée à la montagne de Santa-Rosa près de
Los Joares , où les Indiens ramassent de la glace dans de petits
bassins creusés à mains d'hommes, est de plus de oooo pieds.
Elle renferme, en couches subordonnées, non-seulement de la
syénite (comme les thonschiefer de transition du Cotentiu),
mais aussi, ce qui est trcs-reniarquable, de la serpentine et
un schiste amphibolique qui n'est pas du grunstein. On a
trouvé, en creusant en plein roc, dans le toit du filou, le
grand puits de tirage de Valenciana (puits qui a coûté près
de sept millions de francs), de haut en bas, sur quatre-vingt-
quatorze toises de profondeur, les strates suivans : conglo-
mérat ancien, représentant le grès rouge; thonschiefer de
' transition noir, fortement carburé, à feuillets très-minces;
thonschiefer gris-bleuàfre. raagnésifère , talqueux; schiste
amphibolique, noir-verdàfre , un peu mêlé de quarz et de
pyrites, dépourvu de feldspath , ne passant pas au grunstein,
et entièrement semblable au schiste amphibolique ( horn-
blendschiefer) qui forme des couches dans le gneis et le
micaschiste primitifs (§§. 5 et 1 1 ) ; serpentine vert de prase
passant au vert d'olive, à cassure inégale et à grain fin, inté-
rieurement matte , mais éclatante sur les fissures, remplie de
pyrites , dépourvue de grenats et de diallage métalloïde
(schillerspath), mélangée de talc et de stéatite; schiste am-
phibolique ; syénite, ou mélange grenu de beaucoup d'am-
phibole vert - noirâtre , beaucoup de quarz jaunâtre et peu
de feldspath lameileux et blanc. Cette syénite se fend en strates
très-minces; le quarz et le feldspath y sont si irrégulièrement
répartis, qu'ils forment quelquefois de petits filons au milieu
d'une pâte amphibolique. De ces huitcouches intercalées, dont
la direction et Tinclinaison sont exactement parallèles a celles
de la roche entière, la syénite forme la couche la plus puissante.
IND igz
Elle a plus de 3o toises d'épaisseur, et comme dans les travaux
les plus profonds de la mine ( j)Iancs de Sau-Bernardo) j'ai vu
à 170 toises au-dessous de la couche desyénite, reparoitre un
thonschiefer carburé, identique avec celui à travers lequel
on a commencé à creuser le nouveau puits, il ne peut rester
douteux que l'amphibole schisteuse alternant deux fois avec la
serpentine , et que la serpentine alternant probablement avec
la syéni/e, ne forment des bancs subordonnés à la grande masse
de thonschiefer de Guauaxuafo. La liaison que nous venons
de signaler entre des roches amphiboliques et la serpentine,
se retrouve sur d'autres points du globe, dans des forma-
tions d'euphotide de diffcrens âges : par exemple, au Hcide-
berg près Zelle en Franconie (§. 19); à Kielwig, à l'extré-
mité boréale de la Nonvége ; à Portsoy en Ecosse , et à l'ile de
Cuba , entre Régla et Guanavacoa.
Je n'ai rencontré ni des débris de corps organiques, ni
des couches de porphyres, de grauwacke et de lydienne,
dans le thonschiefer de transition de Guanaxuato, qui e«t la
roche la plus riche en minerai d'argent qu'on ait trouvée jus-
qu'ici : mais ce thonschiefer est recouvert en gisement con-
cordant, dans quelques endroits, de porphyres de transition
très -régulièrement stratifiés (los Alamos de la Sierra); en
d'autres endroits, de grunsf^in et de syénites alternant des
milliers de fois les uns avec les autres (entre l'Esperanza et
Comangillas) ; en d'autres encore, ou d'un conglomérat cal-
caire et d'une roche calcaire de transition gris-bleuàtre , un
peu argileuse et à petits grains (ravin d'Acabuca), ou de
grès rouge (Marfil). Ces rapports du thonschiefer de Gua-
naxuato avec les roches qu'il supporte , et dont quelques-unes
(les syénites) préludent comme bancs subordonnés , sufDsent
pour le placer parmi les formations de transition ; ils justifie-
ront surtout ce résultat aux yeux des géognostes qui connois-
sent les observations publiées récemment sur les terrains
intermédiaires de l'Europe. Quant à la pierre lydienne, il ne
peut y avoir aucun doute que le thonschiefer de Guanaxuato
ne la renferme sur quelques points non encore e::plorés ; car
j'ai trouvé cette substance fréquemment enchâssée en gros
fragmens dans le congloniérat ancien (grès rouge) qui re-
couvre le thonschiefer entre Valenciana, Marfil et Cuevas.
192 IND
A dix lieues au sud de Cuevas, entre Queretaro et la Cuesta
de la Noria, au milieu du plateau mexicain, on voit sortir,
sous le porphyre, un thonschiefer (de transition) gris-noi-
ràtre, peu tissile et passant à la fois au schiste siliceux (jaspe
schistoïde, kieselschiefer) et à la lydienne. Tout près de la
Koria beaucoup de fragmens de lydienne se trouvent épars
dans les champs. Les roclies à filons argentifères de Zaca-
tecas et une petite partie des filons de Catorce traversent
aussi, d'après le rapport de deux minéralogistes instruits,
MM, Sonneschmidt et Valencia, un thonschiefer de transi-
tion qui renferme de véritables couches de pierre lydienne
et qui paroit reposer sur des syénites. Cette superposition
prouveroit, d'après ce qui a été rapporté sur les couches
percées dans le grand puits de Valenciana, que les thon-
schiefer mexicains constituent (comme au Caucase et dans le
Cotenliu) une seule formation avec les syénites et les eupho-
tides de transition , et que peut-être ils alternent avec elles.
Gramvacke. Ce nom bizarre, usité parmi les géognostes alle-
mands et anglois, a été conservé, comme celui de thonschiefer,
pour éviter une confusion de nomenclature si nuisible à la
science des formations. Il désigne, lorsqu'on le prend dans
un sens plus général, tout conglomérat , tout grès, tout pou-
dingue , toute roche fragmentaire ou arénacée du terrain de
transition, c'est-à-dire , antérieure au grès rouge et au terrain
houiller. Le vieux grès rouge ( old red sandstone du Here-
fordshire) de M. Buckland , placé sous le calcaire de transi-
tion (mountain limestone) de Dcrbyshire, est un grès du
terrain intermédiaire, comme cet excellent géognoste l'a
très-bien indiqué lui-même dans son Mémoire sur la structure
des Alpes. Le nouveau conglomérat rouge ( new red conglo-
merate d'Exeter ) est le grès rouge des minéralogistes fran-
çois, ou todte iiegende des minéralogistes allemands; c'est le
premier grès du terrain secondaire , c'est-à-dire le grès du
terrain houiller, qui est intimement lié au porphyre secon-
daire, appelé pour cela porphyre du grès rouge. Lorsqu'on
prend le mot grauwacke (trauniates de M. d'Aubuisson, psam-
mites anciens et mimopliyies quarzeux de M. Brongniart)
dans un sens plus étroit, on l'applique à des roches aréna-
cées du terrain de transition , qui ne renferment que de
IND 195
petits fragmens plus ou moins arrondis de substances sim-
ples, par exemple, de quarz , de lydienne, de feldspnth et
de thonschiefer , non des fragmens de roches composées. On
exclut alors des grauwackes , et l'on décrit sous le nom de
brèches ou conglomérats à gros fragmens primilifs (§. 20), les
diverses agglutinations de morceaux de granité, de gneis et
de syénite : on sépare également les poudingues calcaires dans
lesquels des fragmens arrondis de chaux carbonatée sont
cimentés par une pâte de même nature. Toutes ces distinc-
tions (si l'on en excepte certaines brèches calcaires dans
lesquelles le contenu et le contenant pourroient bien être
quelquefois d'une origine contemporaine) ne sont pas d'une
grande importance pour l'étude des formations. Le grau-
wacke grossier (grosskornige grauwacke) passe peu à peu
au conglomérat à gros fragmens ; il alterne dans une même
contrée, non-seulement avec des couches de grauwacke à
petits grains, mais aussi avec d'autres dont la pâte est presque
homogène. Les poudingues et brèches à gros fragmens de roches
primitives et composées (urfels-conglomerate de la Valorsine
en Savoie, et de Salvan dans le Bas-Valais) sont de vérita-
bles grauwackes; ce sont les couches les plus anciennes de
cette formation , couches dans lesquelles les fragmens à
contours distincts ne sont pas fondus dans la masse, et dont
le ciment schisteux à feuillets courbes et ondulés ressemble
au micaschiste, tandis que le ciment des grauwackes plus
récens du Harz, du duché de Nassau etduMexique, ressemble
au thonschiefer. En général , les conglomérats ou grauwackes
du groupe §. 20 offrent des fragmens de roches préexistantes
d'un volume plus considérable et plus inégal que les grau-
wackes du groupe §. 22.
Lorsqu'on compare ceux-ci au calcaire de transition, on
les trouve le plus souvent d'une origine antérieure; quel-
quefois ils remplacent même le thonschiefer de transition.
L'antériorité du grauwacke au calcaire se manifeste dans
les Pyrénées et en Hongrie. Il paroît que dans ce dernier
pays le thonschiefer intermédiaire n'a pu prendre un grand
développement ; car, loin d'y être une formation indépen-
dante qui renferme le grauwacke , c'est au contraire le
grauwacke schisteux. ( grauwacken-schiefer), à paillettes de
23. i3
Î94 IND
mica agglutinées , qui y prend tous les caractères d'un vrai
schiste de transition. En Angleterre aussi , la grande masse
isolée des montagnes calcaires (comtés de Derby, de Glo-
cester et de Sommerset) est d'un âge plus récent que la
grande masse de grauwackes qui alternent avec quelques
strates calcaires; mais, lorsqu'on examine en détail les points
où les diiférens membres du groupe §.22 ont pris un déve-
loppement extraordinaire, on reconnoit deux grandes forma-
tions calcaires (transition-limestone de Longhope, et mountain-
limesfone du Derbyshire et de South-Wales), alternant avec
deux formations degrauwacke (greywacke de May-Hill et old
red sandstone de Mitchel-Dean en Herefordshire ). Cet ordre
de gisement, cette bisection des masses calcaires et aréna-
cées se trouve répétée sur plusieurs points du globe. M. Beu-
dant a reconnu , en Hongrie, le vieux grès rouge de l'Angle-
terre dans le grès quarzeux de transition de Ncusohl , qui
surmonte des grauwackes à gros grains après y avoir été
intercalé : il croit reconnoître le mountain-limestone, placé
entre le vieux grès rouge et le terrain houiller d'Angleterre,
dans le calcaire intermédiaire du groupe de Tatra. Si l'Ol-
denhorn et les Diablerets, comme il est très -probable, ap-
parliennent au terrain de transition, il y a aussi en Suisse,
an-dessus et au-dessous du g^au^vacke de la Dent de Cha-
mossaire, deux grandes formations de calcaires noirs, que M.
de Buch , depuis long-temps, a distingués sous les noms de
premier et second calcaire de transition. En Norwége (Chris-
tianiafiord) le grauwacke est décidément plus nouveau que
le thonschiefer intermédiaire et le calcaire à orthocératites.
Dans le centre de l'Europe , le grauwacke à très-petits grains
offre quelquefois des fragmens de cristaux de feldspath lamel-
leux qui lui donnent un arpect porphyroïde (Pont Pelissier prés
Servez ; Elm , dans le passage du Spliigen ; Neusohl , en Hong-
rie) ; mais il ne faut pas confondre ces variétés d'une roche
arénacée avec des bancs de porphyre intercalés. Nous verrons
bientôt que, dans les deux continens, ces cristaux brisés de
feldspath se retrouvent dans le grès rouge, et dans un con-
glomérat feldspathique beaucoup plus récent. Dans l'hémi-
sphère austral , le grauwacke forme , d'après M. d'Eschwege,
la pente orientale des montagnes du Brésil. Aux États- unis
IND 195
j'ai trouvé cette même roche (chaîne des Aleghanys) renfer-
mant des bancs de lydienne et de calcaires noirs, entière-
ment semblables à ceux du terrain de transition du Harz.
M. Maclure a, le premier, déterminé les véritables limites
des grauwackes depuis la Caroline jusqu'au lac Champlain.
Dans le nord de l'Angleterre (Cumberland, Westmoreland)
cette roche offre des couches de porphyres grenatifères.
Calcaire de transition. Cette roche commence, ou par former
des couches dans le grauwacke et le thonschiefer intermé-
diaires, ou par alterner avec eux : plus tard, le thonschiefer
et le grauwacke schisteux disparoissent , et le calcaire su-
perposé devient une formation simple, que l'on seroit tenté
de croire indépendante, quoiqu'elle appartienne toujours
au groupe §. 22, Lorsqu'il y a alternance de schiste et de
calcaire , cette alternance a lieu , ou par couches épaisses
(cime de la Bochetta près de Gênes, et chemin entre Novi
et Gavi), comme dans les formations composées de granité et
gneis, de grauwacke et grauwacke schisteux, de syéaite et
griinstein , de thonschiefer et porphyre ; ou bien l'alternance
s'étend aux feuillets les plus minces des roches (calschistes),
de sorte que chaque lame de schiste est soudée sur une lame
calcaire (vallées de Campan et d'Oueil, dans les Pyrénées ;
montagnes de Poinik en Hongrie).
De même que dans les Pyrénées on trouve intercalés au
granite-gneis et au micaschiste primitifs des calcaires que
par leur seul aspect on croiroit intermédiaires , savoir, des
calcaires noir -grisâtre (Col de la Trappe) colorés par du
graphite, qui est la plus ancienne des substances carburées ,
des calcaires fétides , répandant l'odeur de l'hydrogène sul-
furé, et des calcaires compactes remplis de chiastolithes : de
même aussi les terrains de transition du groupe §. 22 présen-
tent quelques exemples de calcaires blancs et grenus (Miltitz,
en Saxe; vallées d'Ossan et de Soubie , dans les Pyrénées).
En général, cependant, si Ton en excepte le groupe §. 20
(celui dont la Tarantaise offre le type), les calcaires de
formation intermédiaire sont ou compactes , ou passent au
grenu à très -petits grains. Leurs teintes sont plus obscures
(gris cendré, gris noir) que celles des calcaires primitifs.
Le plus grand nombre des belles variétés de marbres rouges
igG IND
(vallée de Liichon des Pyrénées), verts et jaunes , célèbres
parmi les antiquaires sous les noms de marbre africain fleuri ,
noir de Lucullus , jaune et rouge antique, pavonazzo et brèche
dorée, me semblent appartenir à des calcaires et conglomé-
rats calcaires de transition. Nous avons vu plus haut que .
la chiastolithe du thonschiefer de transition se montre par
exception dans le thonschiefer primitif: c'est d'une manière
analogue que la trémolithe , si commune dans la dolomie et
le calcaire blanc primitif, se trouve par exception (entre
Giellebeck et Drammen en Norwége) dans le calcaire noir de
transition. Certaines espèces minérales appartiennent sans
doute plus à tel âge qu'à tout autre ; mais leurs rapports avec les
formations ne sont pas assez exclusifs pour en faire des carac-
tères diagnostiques dans une science dans laquelle le gisement
seul peut décider d'une manière absolue. Souvent des circons-
tances locales ont singulièrement influé sur les liaisons que
l'on observe entre les espèces minérales et les terrains. Dans
les Pyrénées et surtout dans FAmérique méridionale , les
grenats disséminés sont propres au gneis, tandis que partout
ailleurs ils semblent plutôt appartenir au micaschiste.
Les calcaires de transition, là oii ils forment de grandes masses
isolées, abondent en silice: et tantôt (chaîne des Pyrénées)
cette silice se trouve réunie en cristaux de quarz ; tantôt
(chaîne des Alpes) elle est mêlée à la masse entière , comme
un sable très-fin. Dans la première de ces chaînes le cal-
caire intermédiaire renferme, comme le calcaire primitif,
des couches de griinstein (vallée de Saleix) et même de feld-
spath compacte , deux roches qui généralement sont plus
communes dans le thonschiefer intermédiaire. Les bancs de
griinstein se trouvent aussi, d'après M. Mohs, dans le calcaire
de transition de la Styrie , et les mandelstein du mountain-
limestone du Derbyshire (entre Sheffield et Castelton) ap-
partiennent à un système de couches intercalées géognosti-
quement analogues. Ces couches prennent souvent l'aspect
de véritables filons.
Le prodigieux développement que le calcaire intermédiaire
atteint dans la haute chaîne des Alpes, pourroit faire croire
que le groupe §. 22 renferme deux formations distinctes,
dont l'une, plus ancienne, embrasse les schistes et les grau-
IND 197
vvackes avec des porphyres et des calcaires intercalés, et
l'autre , d'un âge plus récent , les calcaires considérés corniiic
roches indépendantes ; mais cette séparation ne nie paroï-
troit pas suffisamment justifiée par la constitution géo.^nos-
tique des terrains. En Suisse, comme en Angleterre , de
grandes masses calcaires alternent avec des roches Ira uien-
taires de transition, et ces mûiies calcaires, qu'on voudroit
élever au rang de formations indépendantes , manifestent
par des bancs intercalés une liaison intime avec tous les
autres membres du groupe §. 2j. Dans le calcaire intermé-
diaire des Diablerets et de rOldcnhorn, M. de Charpentier a
observé des couches de grauu acke schisteux. D'après ce même
géognoste expérimenté, le gypse muriatifère de Bex est
subordonné à un calcaire de transition qui repose sur du
grauwacke, et qui alterne à la fois avec cette dernière roche
et avec du thonschiefer de transition. Les assises inférieures
du calcaire de transition sont très -noires et remplies de bé-
lemnites ; les assises supérieures sont argileuses et renferment
des ammonites. Le gypse anhydre, dans lequel le sel gemme
est disséminé, appartient à ces assises supérieures : il offre
à son tour des bancs subordonnés de gypse commun ou
hydraté , de calcaire compacte , de thonschiefer , de grau-
wacke et de brèches. C'est ainsi que chaque dépôt de sel , de
houille et de minerai de fer , dans les terrains intermédiaire
et secondaire, renferme de petites formations locales, qu'il ne
faut pas confondre avec les véritables termes de la série
géognostique. D'après les observations de M. de Charpentier
et M. Lardy, le gypse du terrain secondaire, en ne considé-
rant que de grandes masses, est toujours hydraté (Thuringe),
tandis que le gypse de transition (Bex) est anhydre ou hy-
draté épigène. Les opinions des géognostes sont d'ailleurs
encore partagées sur Tàge du dépôt salifère de la Suisse. M.
deBuch, dans ses lettres à M. Escher, publiées en 1809,
semble placer le gypse muriatifère de Bex entre le grauwacke
de la Dent de Chamossaire et le conglomérat deSepey : MM.
de Bonnard et Beudant le regardent comme secondaire et
appartenant soit au grès houiller soit au zechstein. Il nous
avoit paru tel aussi , à M. Freiesleben et à moi , lorsque nous
avons examiné ces contrées en lygS.
'98 IND
Dans la chaîne des P^'rénées , la limite entre les ferrainv
de transition ( Pic long , 1668 toises; Pic d'Estals, i55o toises)
et les terrains de grès rouge (montagnes de Larry, 1100
toises) et de calcaire alpin (Montperdu, 1747 toises) est
très-nettement tracée. Partout où il y a du grès rouge, on
peut distinguer deux calcaires , un qui recouvre le grès
rouge et un qui le supporte. Le premier de ces calcaires,
quelles que soient sa composition et sa couleur, est, pour
le géognosfe qui nomme les formations d'après le gisement,
un calcaire alpin (zechstein); le second est un calcaire de
transition. Dans la haute chaîne des Alpes, et nous revien-
drons plus tard sur cet cbiet intéressant, le grès rouge n'est
pas plus caractérisé qu'il ne Pest dans une grande partie de
la Cordillère des Andes ; on peut même révoquer en doute
s'il y existe. Il est donc assez naturel que la limite entre le
calcaire alpin ou zechstein et le calcaire de transition le
plus récent ne puisse pas y être reconnue avec certitude. Les
calcaires de la bande méridionale des Alpes, savoir, de la
Dent du Midi de Saint-Maurice, de la Dent de Morale, des
Diablerets (si Ton en excepte la sommité très- coquillière
au nord-est de Bex), de l'Oldenhorn , du Gemmi, de la
Jungfrau, du Titlis et du Todi , sont aussi évidemment de
transition, que les calcaires de Longhope, deDudley ou de
Derbyshire, en Angleterre ; que ceux des vallées de Campan
et de Luchon dans les Pyrénées; que ceux de Namur en
Belgique, de Blankenbourg , d'Elbingerode, de Scharzfeld et
du Schnéeberg près de Vienne , en Allemagne. Cette évidence
est beaucoup moins grande pour la bande calcaire septentrio-
nale des Alpes, pour la roche du Mole, de la Dent d'Oche,
duMolesson, de la Tour d'Ay, de la Dent de Jament, duStock-
horn , du Glarnisch et du Sentis , que quelques géognostes célè-
bres prennent pour du zechstein , d'autres pour la formation
la plus récente des calcaires de transition. Les roches de la
bande méridionale et septentrionale des Alpes ont été sou-
vent confondues sous une dénomination commune, celle de
calcaire des hautes montagnes (Hochgehirgslcalkstein) ; dénomi-
nation qui seroit plus vague encore que celle de calcaire
alpin , si l'on y attachoit une idée de gisement géographique
et si elle n'exprimoit que la position de certaines roches à
IND 199
de très-grandes hauteurs. Le mot calcaire alpin, regardé
dans son origine comme synonyme de zechstein , inclique un
gisement géognostique , une formation placée, fjue ce soit
dans les plaines ou dans des chaînes de montagnes trés-élevécs,
immédiatement au-dessus du près rouge. C'est un fait assez
remarquable que le calcairea encrinites(niountain-limertone),
et même le conglomérat de transition (old red saiidstoise)
qui supporte ce calcaire, contiennent, en Angleterre et en
Ecosse, quelques traces de houille qui difï'ére de l'antliracite.
Les véritables rflrto/i'Ties (Durance, Mont-Rose), quioHrent
des nodules de feldspath couipacte , disséminés dans un mé-
lange intime presque homogène d'amphibole, de chlorithe (?)
et de feldspath , appartiennent soit au groupe que nous venons
de décrire, soit au groupe suivant. Peut-être ne sont-elles que
des bancs intercalés à un griinstein porphyroide, bancs dans
lesquels une portion du feldspath s'est dégagée du tissu de la
masse. On n'a long-temps connu ces variolithes que comme
galets ou en gros fragmens détachés : il ne faut pas les con-
fondre avec les variolithes à nœuds de spath calcaire (blat-
tersteine), subordonnées au thonschiefer vert de transition,
ni avec les variolithes qui naissent par infiltration dans le
mandelstein du grès rouge.
Quoique nous soyons bien loin encore de pouvoir compléter
l'histoire de chaque terrain intermédiaire et secondaire par
l'énumération des espèces de corps fossiles qui s'y trouvent,
nous allons pourtant indiquer quelques-uns de ces débris or-
ganiques qui semblent caractériser le groupe §. 22. Dans le
thonschiefer et le grauwacke , surtout dans le grauwacke schis-
teux : plantes monocotylédones (arundinacécs ou bambou-
sacées), antérieures peut-être aux animaux les plus anciens j
entroques , corallites , ammonites (vallées de CastiIJon dans
les Pyrénées; base de la montagne de Fis, en Savoie; duché
de Nassau et Hai'z , en Allemagne); hystérolithes , orthocé-
ratites , beaucoup plus rares que dans le calcaire intermé-
diaire; pectinites (Gerolstein, en Allemagne) ; trilobites
aveugles de M. "VVahlerberg , dans lesquels on ne voit
aucune trace d'yeux (Olstorp, en Suède); ogygies de M.
Brongniart , dans lesquels les yeux ne sont pour ainsi dire
qu'indiqués par deux tubcrosités sur le chaperon (Angers et
200 IND
Amérique septentrionale) ; calymène de Tristan et calyméne
macrophtalnie de Brongniart (Bretagne, Cotcntin). Dans le
calcaire, savoir, dans les couches plus anciennes : entroques,
madrépores, béleninites (Bex, en Suisse; Pic de Bedillac,
dans les Pyi'f'Jiées) ; quelques ammonites, jamais pai* bancs,
mais isolés; des orlhocératites , Asaphus Buchii, A. Haus-
manni (pays de Galles, Suède); très-peu de coquilles bivalves.
Dans les couches plus récentes du calcaire : Calymène Blu-
menbachii (Dudley en Angleterre , et Miami dans l'Amé-
rique du nord) , Asaphus caudatus de Brongniart ; des am-
monites, des térébratules, des orthocératites, quelques gry-
phites (Namur, Avesnes) ; des encrinites. En Allemagne , le
calcaire de transition est quelquefois (Eiffel et duché de
Bergen) tout pétri de coquilles. Le calcaire grenu de File de
Paros (Link, Urwelt , pag. 2) doit, d'après un passage de
Xénophane de Colophon, conservé dans Origène (Pliiloso-
phumena, c. 14, T. I,p. 8g5, B. edit. Delarue), renfermer des
débris organiques; mais il reste bien douteux, selon qu'on
lit Saipvti ou à(pvi) , si ces débris sont du règne végétal ( du
Lois de laurier), ou du règne animal (Fempreinte d'un
anchois). Nous n'insistons pas sur cette détermination; car
il seroit possible que le marbre de Paros fût aussi peu primitif
que le marbre de Carare , sur lequel je partage les doutes
de plusieurs géognostes célèbres. Le phénomène des grottes
ne s'oppose cependant pas à la haute antiquité des calcaires
de l'Archipel: il y en a dans quelques pays (Silésie, près
Kaufungen ; Pyrénées, vallées de Naupounts et montagne de
Meigut ) qui paroissent appartenir au calcaire primitif.
IV et V. Porphyres , Syénites et Grunstein postérieurs au
ThONSCHIEFER de transition. gi'ELQUEFOIS MÊME AU CALCAIRE
A ORTHOCÉRATITES.
§. 20. Je réunis en deux groupes, qui peut-être n'en for-
ment qu'un seul, les porphyres, les griinstein porphyriques
et les syénites que, dans les deux hémisphères , j'ai vus recou-
vrir le thonschiefer de transition. Ces roches, par leur com-
position et leurs rapports avec les trachytes qui leur sont im-
médiatement superposés, offrent beaucoup d'analogie avecle
groupe plus ancien §.21. C'est dans ces porphyres et grun-
IND 201
stein porphyriques que l'on a découvert, au nord: de Téqua-
teur, au Mexique et en Hoîi^rie, d'immenses richesst-s de
minerais d'or et d'argent; car, quoique la roche métallifère
de Schemnitz (saxum metalliferum de Born ) soit peut-être
postérieure à des calcaires de transition renfermant quelques
foibles débris organiques, ce gisement, d'après l'opinion d'un
géognoste célèbre, M. Beudant, est trop incertain, pour
séparer des formations aussi étroitement unies que celles de
la Nouvelle -Espagne et de la Hongrie.. Les syénites à zircons,
les granités de transition et les porphyres de Norwége , que
MM. de Buch et Hausmann nous ont fait connoîtrc , sont
non-seulement postérieurs (Stromsoë, Krogskoven) au grau-
wacke et à un thonschiefer qui alterne avec le calcaire à
orthocératites , mais ces roches recouvrent aussi (Skeen) im-
médiatement un quarzite (quarzfels) qui représente le grau-
^vacke et qui repose sur un calcaire noir dépourvu de cou-
ches alternantes de thonschiefer.
11 résulfe de ces considérations qu'on auroit des motifs
très -valables pour réunir les groupes §§. ■j'S et 24, en ne
distinguant, parmi les porphyres de transition, que deux
formations indépendantes, antérieures et postérieures au
thonschiefer, et une troisième formation ( §. 22) subor-
donnée à cette roche. La propriété qu'ont certains por-
phyres et S}énitcs porphyriques d'être éminemment métal-
lifères, ne doit pas s'opposer, je pense, à la réunion des
roches du Mexique, de 1-a Hongrie, de la Saxe et de la
Norwége. Les minerais d'or et d'argent n'y forment pas
des couches contemporaines, mais des filons qui atteignent
une puissance extraordinaire. Des porphyres de transition,
dont on seroit tenté de placer plusieurs parmi les trachytes,
parce qu'ils renferment de véritables couches de phonolithe
avec feldspath vitreux, participent à cette richesse minérale
que parmi les terrains postérieurs aux terrains primitifs l'on
a crue trop long-temps exclusivement propre aux thonschiefer
carburé et micacé, au grauwacke et au calcaire de transition.
Dans ces mêmes l'égions , il existe des groupes de porphyres
et de syénites très- analogues , par leur composition minéra-
logique et leur gisement, aux roches des plus riches mines
de Schemnitz ou de la Nouvelle -Espagne , et qui néanmoins
=02 IND
se trouvent entièrement dépourvus de métaux. C'est presque
le cas de tous Its porphyres de transition (et des roches
trachytiques ) de l'Amérique méridionale. Les grandes ex-
ploitations du Pérou, celles de Hualgayoc ou Chota , et
de Llauricocha ou Pasco , ne sont pas dans le porphyre , mais
dans le calcaire alpin. Dans la république de Buénos-Ayres ,
le fameux Ccrro del Potosi est composé de thonschiefer (de
transition?) recouvert de porphyre qui contient des grenats
disséminé.";.
Si les grands dépôts argentifères et aurifères qui font de-
puis des siècles la richesse de la Hongrie et de la Transyl*
vanie , se trouvent uniquement au milieu des syénites et
des griinstein porphyriques , il ne faut point en conclure
qu'il en est de même dans la Nouvelle -Espagne. Sans doute
les porphyres mexicains ont offert des exemples isolés d'une
prodigieuse richesse. A Pachuca, le seul puits de tirage de
l'Encino a fourni pendant long- temps annuellement plus de
3o,ooo marcs d'argent : en 1726 et 1727 , les deux exploita-
tions de la Biscaina et du Xacal ont donné ensemble 642,000
marcs , c'est-à-dire presque deux fois autant qu'en ont donné,
dans le même intervalle , toute l'Europe et toute laRussie asia-
tique. Ces mêmes porphyres de Real del Monte, qui par leurs
couches supérieures se lient aux trachy tes porphyriques et aux
perlites avec obsidiennes du Cerro de las Navajas, ont fourni
par l'exploitation de la mine de la Biscaina au comte de Régla
(de 1762 à 1781) plus de onze millions de piastres. Cependant
ces richesses sont encore inférieures à celles que l'on retire ,
dans le même pays, de formations de transition non porphyri-
ques. I,a Veta negra de Sombrerete, qui traverse un calcaire
compacte rempli de rognons de pierre lydienne, a offert
l'exemple de la plus grande abondance de minerais d'argent
qu'on ait observée dans les deux mondes .- la famille de Fagoaga
ou du marquis del Apartado en a retiré en peu de mois un
profit net de quatre millions de piastres. La mine de Valen-
ciana, exploitée dans du schiste de transition, a été d'un pro-
duit si constant que , jusqu'à la fin du dernier siècle , elle n'a
pas cessé de fournir annuellement , pendant quarante années
consécutives, au-delà de 56o,ooo marcs d'argent. En général
dans la partie centrale de la Nouvelle -Kspagne , où les por-
IND 2o5
phyres sont frëquens , ce n'est point cette roche qui fournit
les métaux précieux aux trois grandes exploitalioi.s ne Gua-
naxuato , de Zacatecas et de Catorce. Ces trois districts de
mines, qui donnent la moitié de tout Fur et l'argent mexi-
cain, sont situés entre les 18° et 25" de latitude boréale. Les
mineurs y travaillent sur des gites de mii.rrjih contenus presque
entièrement dans des terrains de thonschieter intermédiaire,
de grauwacke et de calcaire alpin : je ois, presque entière-
ment; car la fameuse Veta madré de Guanaxuato , plus riche
que le Potosi , et fournissant jusqu'en 1804, année com-
mune, un sixième de l'argent que l'Amérique verse dans la
circulation du monde entier , traverse à la fois le thon-
schiefer et le porphyre. Les mines de Belgrade , de San-
Bruno et de Marisanchez, ouvertes dans la partie porphyri-
lique au sud-est de Valenciana, ne sont que de très-peu
d'importance. D'autres exploitations, dirigées sur les por-
pliyres du groupe §. 23 (Real del Monte, Moran, Pachuca et
Bolailos ) , ne fournissent aujourd'hui pas au-delà de 100,00a.
marcs ou un vingt-cinquième de l'argent exporté (i8o3)
du port de la Vera-Cruz. J'ai cru devoir consigner ici ces
faits, parce que la dénomination de porphyres métallifères^
dont je me suis souvent servi dans mes ouvrages, peut donner
lieu à l'erreur de regarder les richesses métalliques du nouveau
monde comme dues en très-grande partie aux porphyres de
transition. Plus on avance dans l'étude de la constitution du
globe sous les différens climats , plus on reconnoit qu'il existe
à peine une roche antérieure au calcaire alpin, qui, dans de
certaines contrées, n'ait été trouvée très-argentifère. Le phé-
nomène de ces filons anciens dans lesquels se trouvent dépo-
sées nos richesses métalliques (peut-être comme le fer oligiste
spéculaire et le muriale de cuivre sont déposés et remontent
encore de nos jours dans les crevasses des laves), est un phé-
nomène qui paroît pour ainsi dire indépendant de la nature
spécifique des roches.
Pour donner une idée précise de la composition du terrain
de porphyre, syénite et griinstein , postérieur au thonschie-
fer de transition , il est nécessaire, dans l'état actuel de la
science, de distinguer quatre formations partielles , savoir,
celles
204 ïfsT)
de la région équinoxiale du nouveau continent,
de la Hongrie ,
de la Saxe et
de la Norwége.
Malgré les rapports qui unissent ces formations partielles,
cîiacune d'elles offre des différences assez remarquables. Nous
les désignerons par des noms purement géographiques, selon
les lieux qui en présentent les tjpes les plus distincts, sans vou-
loir indiquer par là qu'on ne puisse trouver la formation de
Hongrie dans le nouveau continent, ou celle de Guanaxuato,
avec toutes les circonstances qui l'accompagnent, dans quel-
ques parties de l'Europe.
A. Groupes de la région éaidnoxiale du nouveau continent.
a. Dans Vhémisphère boréal. Ce qui caractérise en général
les porphyres , en partie très-métallifères , de l'Amérique équi-
noxiale (ceux du groupe §. 20 , comme ceux du groupe §. 21),
c'est l'absence presque totale du quarz , la présence de l'am-
phibole, du feldspath vitreux, et quelquefois du pyroxéne.
J'ai insisté sur ces caractères distinctifs dans tous les ouvrages
que j'ai publiés depuis i8o5; on les retrouve en grande
partie dans les porphyres ou grunstein porphyriqucs, égale-
ment métallifères, de la Hongrie et de la Transylvanie. Les
porphyres mexicains, comme nous l'avons fait observer plus
haut , présentent souvent à la fois deux variétés de feldspath ,
le commun et le vitreux ; le premier résiste beaucoup moins
à la décomposition que le second. La forme de leurs cristaux ,
larges ou effilés, les fait reconnoitre presque autant que
l'éclat et la structure lamelleuse plus ou moins nettement
prononcée. Le quarz, si parfois il se montre, n'est point
cristallisé, mais en petits grains informes : le pyroxéne et le
grenat, qui se trouvent également dans les grunstein porph)--
riques de la Hongrie, sont très-rares. Le groupe argentifère
mexicain abonde moins en amphibole : le mica , que l'on
retrouve dans quelques trachytcs, manque toujours dans les
porphyres de la Nouvelle-Espagne. La plupart de ces roches
sont très- régulièrement stratifiées; et, qui plus est, la di-
rection de leurs strates est souvent (entre la Moxonera et
Sopilote au nord d'Acapulco : au Puerto de Santa Rosa
IND 2o5
près de Guanaxuato) concordante avec la direction des roches
primitives et intermédiaires auxquelles elles sont superposées.
Dans la Nouvelle-Espagne, comme en Hongrie, le terrain
trachytique est placé immédiatement sur les porphyres mé-
talllières : mais, dans le premier de ces pays, les porphyres
sont recouverts sur quelques points (Zimapan, Xaschi et
Xacala ) de calcaire gris- noirâtre de transition; sur d'autres
points (Villalpando), de grès rouge ; sur d'autres encore ( entre
Masatlan et Chilpanzingo , entre Amajaque et la Magdalena;
entre San Francisco Ocotlan et la Puebla de los Angeles j
entre Cholula etTotomehuacan) , de calcaire alpin.
Les porphyres de transition de la Hongrie, de la Saxe et
de la Norwége ont une structure très-compliquée : ils alter-
nent avec des syénites, des granités, desgrilnstein; et lorsqu'il
n'y a pas d'alternance, ces trois dernières roches , et même des
micachistes ou des calcaires stéatiteux, se trouvent renfer-
més, comme couches subordonnées, dans les porphyres. La
fréquence de ces bancs intercalés éloigne d'une manière très-
prononcée les porphyres de la Hongrie ou de la Norwége
des roches trachytiques ; elle les éloigne aussi des porphyres
de la Nouvelle-Espagne, qui leur ressemblent par leur com-
position minéralogique (par la nature de leur pâte et des
cristaux enchâssés). La structure des porphyres mexicains est
d'une grande simplicité : ils forment un immense terrain non
interrompu par des bancs intercalés. J'ai vu des syénites dans
les thonschiefer de transition de Guanaxuato (§. 22) ; je les ai
vues , au-dessus de ce thonschiefer , alterner avec des griinstein :
mais je n'ai vu ni syénite, ni micaschiste, ni griinstein, ni
calcaire dans les porphyres de la Moxonera , de Pachuca, de
Moran et de Guanaxuato. Ce n'est qu'à Bolaîïos que l'on trouve
du mandelstein dans le porphyre. Ce développement uni-
forme et non interrompu des porphyres métallifères et non
métallifères de la Nouvelle -Espagne est un phénomène très-
frappant : il rend plus difficile la séparation systématique
des terrains de porphyre et de trachyle , là oii ces terrains
se supportent immédiatement. Lorsqu'on évalue l'épaisseur
des deux terrains réunis, c'est-à-dire, lorsqu'on s'élève des
couches les plus basses d'un porphyre que Ton peut croire
de transition, parce qu'il est recouvert de grandes formations
2o6 IND
calcaires, analogues au zechstein (Guasintlan , à la pente
occidentale, et Venta deJ Encero, à la pente orientale de
la Cordillère), jusqu'au sommet trachytique du grand volcan
de la Puebla ( Popocatepetl) , on trouve, d'après mes me-
sures barométriques et trigonométriques, une épaisseur, non
interrompue par des roches intercalées, de plus de i3,ooo
pieds ( 2255 toises). L'épaisseur des seules couches de por-
phyre métallifère, en comptant depuis Guasintlan et Puente
de Istia (où les porphyres se cachent sous les mandelstein
poreux de Guchilaque et de la vallée de Mexico) jusqu'à
l'affleurement des filons argentifères de Cabrera (Real de
Moran), est de 5ooo pieds (817 toises). Ces dimensions ont
été déterminées en comparant les hauteurs absolues des sta-
tions ; car, d'après l'inclinaison variable des couches, et
d'après le rapport entre la direction des coupes et la direc-
tion de la roche, il est probable que les épaisseurs apparentes
(les différences entre le maximum et le minimum de hau-
teurs) s'éloignent très -peu des épaisseurs véritables, qui sont la
somme des épaisseurs évaluées perpendiculairement aux fis-
sures de stratification. Voici les circonstances locales , les plus
intéressantes, du gisement des porphyres du Mexique entre
les 1 7 ° et 2 1 " de latitude boréale.
a. Chemin d'Acapulco à Mexico. Le porphyre, à la pente
occidentale de la Cordillère d'Anahuac , ne descend que jus-
qu'à la vallée du Rio Papagallo, un peu au nord de la Venta
de Tierra colorada, à 2 3o toises de hauteur au-dessus du ni-
veau de Focéan Pacifique. Sur la pente orientale de la Cor-
dillère d'Anahuac, entre la vallée de Mexico et le port de la
Vera-Cruz , je n'ai vu aucune trace de cette roche au-
dessous de l'Encero, à 476 toises de hauteur. Le porphyre s'y
cache sous un grès argileux qui enchâsse des fragmens d'amyg-
daloïde trachytique. Les deux groupes principaux de por-
phyres, dans le chemin d'Acapulco à Mexico, sont ceux de
la Moxonera et de Zumpango.
La vallée granitique du Papagallo est bordée au sud (Alto
del Peregrino) par une formation de calcaire compacte
(de 85 toises d'épaisseur), bleu -noirâtre , traversé par de
petits filons blancs de spath calcaire. Elle est remplie de
grandes cavernes, mais analogues plutôt au calcaire alpin
IND 207
qu'au calcaire de transition. Au nord la vallée est bordée
par une masse de porphyre (Alto de la Moxonera et de
Los Caxones) qui a 355 toises d'épaisseur. Ce porphyre est
assez régulièrement stratifié (dir. N. 55° E., inciin. 40° au
N. O.); quelquefois il est divisé en boules à couches con-
centriques. Sa base est verdàtre et argileuse, enchâssant du
feldspath vitreux et des pyroxènes décomposés , qui ont
presque la couleur de l'olivine : point de quarz, point de mica ,
point de feldspath lameileux. De grandes masses d'argile
blanc -rougeàtre sont intercalées dans ce porph3're terreux,
il repose immédiatement , comme le calcaire du Peregrino
(dont les strates ont dir. N. 45° E. ; incl. Co° au N. O.),
sur le granité primitif. Ce dernier, qui a été décrit plus haut
(§. 7), renferme, au pied de la colline porphyritique de Los
Caxones, dans la vallée même du Papagallo , des filons d'am-
phibolite noir et desboules de granité à couches concentriques,
semblables à celles que j'ai observées au Fichtelgebirge près
de Seissen. La plus grande masse de ce granité à gros grains
est très-régulièrement stratifiée (dir. N. Z,o° E. ) et inclinée
par groupes d'une vaste étendue, le plus souvent au N. O.,
quelquefois au S. E. Les cimes (porphyriques ?) voisines
(Cerros de las Caxas et del Toro) ont des formes bizarres;
et si, à cause de la composition minéralogique du porphyre
de la Moxonera et de l'Alto de los Caxones, et à cause de
son isolement, on étoit tenté de le prendre pour du trachyte,
le parallélisme de direction de ses strates avec ceux du cal-
caire et du granité , et le recouvrement d'un porphyre très-
semblable et très-voisin (Masatlan) par de puissantes forma-
tions de calcaire secondaire , s'opposeroient à cette hypo-
thèse. En descendant de la montagne porphyrique de Los
Caxones, vers le sud, c'est-à-dire vers les côtes de l'océan
Pacifique, j'ai vu venir au jour alternativement : le granité pri-
mitif de la vallée du Papagallo , le calcaire alpin de l'Alto del
Peregrino, le granité primitif de la vallée du Camaron , la
syénite de l'Alto del Camaron, enfin le granité primitif de
l'Exido et des côtes d'Acapulco. La syénite du Camaron ,
renfermant des cristaux d'amphibole de huit lignes de long,
ne me paroît pas liée aux porphyres mexicains. Ce n'est
qu'un changement de composition dans la masse du granité.
.08 IND
qui, dans cette région, se mêle à l'amphibole, et devient"
porphyroïde sur tous les sommets des collii^es.
Le second groupe de porphyre intermédiaire dont j'ai pu
examiner la superposition avec soin, est celui de Zumpango.
Ce groupe commence quelques lieues au nord de l'Alto de
los Caxones, et supporte, en s'étendant vers Mescala, un
vaste plateau composé de calcaire, de grès et de gypse (entre
]\Iasatlan et Chilpanzingo). C'est dans ce plateau, dont la
hauteur absolue ( c'est-à-dire, au-dessus du niveau de la mer)
est de 700 toises, qu'un porphyre semblable par sa compo-
sition à celui de la Moxonera supporte des terrains secon-
daires d'une structure très-compliquée. En descendant de
l'Alto de los Caxones (haut. 585 toises) vers le nord, on
voit d'abord de nouveau reparoitre au jour le granité primitif
delà vallée du Papagallo ; puis l'on découvre un lambeau de
calcaire alpin, semblable à celui du Peregrino (lambeau de
200 toises de large, qui se trouve superposé immédiatement
au granité) ; puis paroit encore le granité , et enfin l'on atteint
le groupe porphyrique de Zumpango , dans lequel se conserve
très-régulièrement la direction des strates, N. 3o° à 45" E. ,
avec une inclinaison très- fréquente au N. O.
Ce porphyre, rempli de feldspath vitreux, dépourvu d'am-
phibole, et recouvrant le granité primitif, sert d'abord de
base ( Acaguisotla) à une formation d'amygdaloide brun-rou-
geàtre , semi-vitreuse, presque sans cavités, renfermant des
amandes de calcédoine décomposée, des lames de mica noir
et du mélanite. Bientôt le uiandelstein disparoit, et le por-
phyre se montre de nouveau sur un espace de terrain consi-
dérable, jusqu'à ce qu'il se cache sous le calcaire de Masatlan
et te Chilpansingo , c'est-à-dire, sous deux formations po-
reuses très-distinctes, dont la supérieure est blanchâtre, argi-
leuse et friable , l'inférieure bleu-grisàtre , intimement mêlée
de spath calcaire grenu et en masse. Ces deux calcaires sem-
blent, au premier abord , moins anciens que le calcaire alpin
du Peregrino; mais ils n'appartiennent certainement pas à
des terrains tertiaires qui en Hongrie reposent sur des tra-
chytes. Je n'y ai trouvé aucune trace de pétrifications : ils
sont dirigés N. 35° E. , et généralement inclinés de 40", non
au N. O., mais au S. E. Cette uniformité de direction (non
12\D 209
d'inclinaison), observée parmi des rocîics qui paroî.ssenÇ
d'un âge si différent, est un phénomène très-rare. Il ajoute
peut-être aux motifs que l'on a de ne pas considérer comme
des trachytes les porphyres dont nous venons de faire con-
noître le gisement. Les calcaires de Chilpansingo ont des
cavités qui varient de quatre lignes jusqu'à huit pouces de
diamètre. La formation inférieure, qui est bleq -grisâtre ,
recouvre immédiatement le porphyre ; elle perce quelqv:e-
fois la formation blanchâtre, et forme à la surface du sol de
petits rochers cylindriques ou coralliformes de trois ou
quatre pieds de haut , qui présentent l'aspect le plus bizarre.
Ces circonstances de composition et de structure indiquent
beaucoup d'analogie entre le calcaire caverneux trouvé de-
puis Masatlan et Tetaquillas jusqu'à Chilpansingo, et les cou-
ches inférieures du calcaire du Jura ( hbhlenkalk ; schla-
ckiger, blasiger kalkstein) qui, également caverneuses dans
le Haut-Palatinat (entre Laber et Ettershausen ) et en
Tranconie (entre Pegnitz et Muggendorf), donnent, par leurs
aspérités, à la surface du sol une physionomie particulière.
fion loin de Zumpango le porphyre sort de nouveau au-
dessous des calcaires caverneux de Chilpansingo, ou plutôt
sous un conglomérat calcaire qui, renfermant à la fois de
gros fragmens de la formation bleue et de la formation,
ilanche, recouvre cette dernière sur plusieurs points. Comme
dans les groupes de Los Caxones et de Zumpango les por-
phyres s'élèvent à peu près au même niveau (56o et 585
toises), on peut supposer, avec quelque probabilité, qu'^
les calcaires caverneux qu'ils supportent dans le plateau de
Chilpansingo , ont 800 pieds d'épaisseur.
En avançant au nord vers Sopilote , Mescala et Tasco, ou
perd de nouveau de vue le porphyre. Le granité primitif
reparojt; mais bientôt il se trouve caché par un porphyre
dont la composition minérnlogique offre des caractères très-»
remarquables: il est gris -bleuâtre, nn peu argileux p.Tr
décomposition, et enchâsse de grands cristaux de feldspath
jaune -blanchâtre (plutôt lamelleux que vitreux), du py-^
roxène presque vert -poireau et un peu de quarz non cri'-?
tallisé. Ce porphyre stratifié est recouvert, vers le sud, dij
inême conglomérat calcaire tjui abonde sur le plateau de
210 IjXD
Chilpansingo ; Vers le nord (Sopilote, Estola, Mescala), d'un
calcaire compacte, grisâtre et traversé de filons de carbonate
de chaux. Le calcaire d'Estola n'est pas spongieux ou bull'eux
dans sa masse entière > comme la formation deMasatlan, mais
il renferme de grandes Cavernes isolées, comme le calcaire
du Peregrino que nous avons décrit plus haut. Il ne m'est resté
aucun doute, en voyageant dans ces montagnes, que les roches
de la Canada de Sopilote et de l'Alto dcl Peregrino sont iden-
tiques avec notre calcaire alpin (zechstein) de l'Europe, avec
celui qui succède, selon l'ùge de sa formation, au grés rouge,
ou, lorsque celui-ci manque, aux roches de transition. Prés
de Mescala, un peu au nord de Sopilote, de riches filons ar-
gentifères, analogues aux filons de Tasco et de Tehuilotepec,
traversent le calcaire alpin. Dans la vallée de Sopilote, la
roche qui recouvre le porphyre du groupe de Zumpango ,
présente ces mêmes couches sinueuses et contournées que l'on
voit à l'Achsenberg , au bord du lac de Lucerne, et dans
d'autres montagnes de calcaire alpin en Suisse. J'ai observé que
les couches supérieures de la formation de Sopilote et de Mes-
cala passent progressivement au gris-blanchâtre, et que, dé-
pourvues de filons de spath calcaire, elles offrent une cassure
matte, compacte ou conchoide. Elles se divisent, presque
comme le calcaire de Pappenheim , en plaques très-minces.
On diroit d'un passage du calcaire alpin au calcaire du Jura ,
deux formations qui se recouvrent immédiatement en Suisse,
dans les Apennins et dans plusieurs parties de l'Amérique
équinoxiale, mais qui, dans le Sud de l'Allemagne, sont
séparées l'une de Pautre par plusieurs formations intercalées
( par le grès de Nebra ou bunte sandstein , par le muschelkalk
et le grès blanc ou quadersandstein ).
Près du village de Sochipala. le calcaire alpin est couvert
de gypse, et entre Estola et Tepecuacuilco , on voit sortir
sous le calcaire alpin (dirigé tantôt N. lo" E. avec incl. 40*
à Pest, tantôt N. 48° E. avec incl. 5o° au sud-est) un por-
phyre vert d'asperge à base de feldspath compacte, divisé en
strates très-minces, comme celui d'Achichintla , et presque
dépourvu de cristaux disséminés. Cette roche ressemble au
porphyre phonolitique ( porphyrschiefer ) du terrain de tra-
chyte. Si Pon avance vers les mines de Tehuilotepec et de
Ii\D 2U
TaSco, on trouve cette même roche recouverte d*un grés
cjuarzeux à ciment argilo-calcaire , et analogue au weiss
liegende (couche inférieure arénacée du zechstein) de la
Thuringe. Ce grès quarzeux annonce de nouveau la proximité
du calcaire alpin : aussi, sur ce grés et peut-être immédiate-
ment sur le porphyre (comme c'est le cas à Zumpango et
à l'Alto de los Caxones), on voit reposer, près du lac salé
deTuspa, une masse immense de calcaire alpin souvent ca-
verneux , renfermant quelques pétrifications de trochus et
d'autres coquilles univalves. Ce calcaire de Tuspa , indubitable-
ment postérieur à tous les porphyres que je viens de décrire -,
renferme des couches de gypse spéculaire et des strates d'ar-
gile schisteuse et carburée qu'il ne faut pas confondre avec
du grauwackeschiefer. Il est généralement gris- bleuâtre ,
compacte, et traversé par des filons de carbonate de chaux.
Sur beaucoup de points, loi:' d'être caverneux, il fait pas-
sage à une formation blanche, trés-compacte, analogue au
calcaire de Pappenheim. J'ai été très-frappé de ces variations
de texture, que nous avons observées également, M, deBucK
et moi , dans les Ap ennins (entre Fosombrono , Furli et Fuligao),
et qui semblent prouver que , là où les membres intermédiaires
de la série n'ont pu se développer, les formations de calcaire
alpin et de calcaire du Jura sont plus intimement liées qu'on
ne l'admet généralement. Les riches filons d'argent de Tasco,
qui ont donné jadis 160,000 marcs d'argent par an, traversent
à la fois le calcaire et un thonschiefer qui passe au micaschiste ^
car, malgré l'identité des formations calcaires, également
argentifères, de Tasco et de Mescala , la première de ce^
formations, partout où elle a été percée dans les travaux des
mines (Cerro de S. Ignacio), n'a pas été trouvée superposée
au porphyre comme le calcaire de Mescala, mais recouvrant
une roche plus ancienne que le porphyre, un micaschiste
(dir. N. 50° E. ; incl. 40" — 60", le plus souvent au N. O. ,
quelquefois au S.E.) dépourvu de grenats et passant au thon-
schiefer primitif. J'ai dû entrer dans ces détails sur les ter-
rains qui succèdent aux porphyres, parce que ce n'est qu'en
faisant connoître la nature des roches superposées qu'on peut
mettre les géognostes en état de prononcer sur la place que
doivent occuper les poi'phyres mexicains dans Voi'dre des for-
mations. L'esquisse d'un tableau géognostiquc n"a de valeur
qu'autant qu'on rattache la roche qu'on veut faire connoître,
à celles qui lui succèdent immédiatement au-dessus et au-
dessous. Les seuls faits oryctognostiques peuvent être pré-
sentés isolément : la géognosie positive est une science d'en-
chaînemens et de rapports , et l'on ne peut , en décrivant
une portion quelconque du globe, borner son horizon et
s'arrêter à telle ou telle couche qu'on veut étudier de pré-
férence.
^. Plateau central. Vallée de Mexico ; terrain entre Pacliuca ,
Moran et La Puebla. Une énorme masse de porphyre de tran-
sition s'élève à la hauteur moyenne de 1200 à 1400 toises
au-dessus du niveau de la mer. Elle est recouverte, dans la
vallée de Mexico et au sud vers Cuernavaca etGuchilaque, de
mandelstein basaltique et celluleux (en mexicain tetzontU)-,
vers l'est et le nord-est (entre Tlascala et Totonilco), de for-
mations secondaires. Il est probable que le porphyre, qui
se cache d'abord sous le calcaire alpin de Mescala , puis dans
les Llanos de San -Gabriel (près du pont d'Istla), sous des
conglomérats trachytiques et sous un mandelstein poreux, est
identique avec celui quîreparoît, i5 lieu es plus au nord et 800
toises plus haut, sur les bords du lac de Tezcuco. C'est dans
la belle vallée de Mexico que la roche porphyrique perce
l'amygdaloïde celluleuse dans les collines de Chapoltepec ,
de Notre-Dame de la Guadeloupe et du Penol de los Baùos.
Elle présente plusieurs variétés très-remarquables : i.° gris-
rougeàtres , un peu argileuses, sans stratification distincte,
renfermant en parties égales des cristaux d'amphibole et
de feldspath commun ( galerie creusée dans le rocher de
Chapoltepec) ; 2.° noires ou gris- noirâtre (quelquefois
fendillées et bulleuses), stratifiées par couches' de 5 — 4
pouces d'épaisseur, à base de feldspath compacte, à cassure
matte , unie ou imparfaitement conchoïde (ressemblant plus
à la cassure de la lydienne qu'à celle du pechstein), renfer-
mant de petits cristaux de feldspath vitreux et de pyroxène
vert d'olive , presque dépourvues d'amphibole , souvent re-
couvertes à leur surface de superbes masses de hyalithe
mamelonné ou verre de Millier (Peïïol de los Banos, dir.
N. 60° O., incl. 60° N. E.); 5." rouges, terreuses, avec
IND 2i3
beaucoup de grands cristaux de feldspath commun décomposé
(salines du lac de Tezcuco , là où d'anciennes sculptures
aztèques couvrent le Penol), Le porphyre de la vallée de
Mexico offre non-seulement des sources d'eau potable qui
sont amenées à la ville par de longs et somptueux aqueducs,
mais aussi des eaux thermales acidulées, les unes chaudes et
les autres froides. On y trouve , et ce fait est bien remarqua-
ble, comme dans le micaschiste primitif des environs d'Araya
et de Cumana , du naphte et du pétrole (promontoire du
Sanctuaire de Guadeloupe). (^)uoique ce porphyre sorte au-
dessous de l'amygdaloïde poreuse, et qu'il se montre au jour
(Cerro de las Cruces et Tiangillo , Cuesta de Varientos et
Capulalpan , Cerro Ventoso et Rio Frio ) dans tout le pour-
four circulaire du bassin de Tenochtitlan, fond d'un ancien
lac en partie desséché , ce n'est que vers le nord-nord-est
seulement (Pachuca , Real del Monte et Moran ) qu'il a été
trouvé argentifère.
De riches filons traversent, depuis la mine de San-Pedro à
la cime du Cerro Ventoso (1/161 toises) jusqu'au fond de l'an-
cien puits de l'Encino ( 1 170 toises) dans le Real de Pachuca,
une masse de porphyre qui a plus de 1700 pieds d'épaisseur.
Cette roche, que jadis on auroit appelée pétrosiliccuse ou
hornsteinporphyr, est généralement gris-verdàtre , quelque-
fois vert de prase , à cassure écaillcuse , ofï'rant des fragmens
à bords aigus. Sa pâte est probablement un feldspath com-
pacte, chargé de silice : elle renferme, non du quarz et du
mica , mais des cristaux de feldspath commun et d'amphibole.
La dernière substance n'est généralement pas très-abondante,
et lorsque le porphyre est argileux ou plutôt terreux, on ne
reconnoit l'amphibole que par des taches à surface striée et
d'un vert très-foncé. Les couches presque argileuses et plus
tendres ( thonporphyr de Moran) paroisscnt inférieures aux
couches plus dures et plus tenaces. On trouve intercalés aux
unes et aux autres des strates de phonolithe (klingstein) gris de
fumée ou vert-poireau , divisés en tables ou feuillets très-sono-
res. Ce n'est cependant pas entièrement un porphyrschiefer
du terrain trachytique ; car la masse phonoiithique n'offre pas
des cristaux effilés de feldspath vitreux, mais des cristaux
de feldspath commun blanc grisâtre, constamment acconi'»
.i4 l?sD
pagnés d'un peu d'amphibole. Tous ces porphyres argenti-
fères de Moran et de Real del Monte sont très-régulière^
ment stratifiés (direction générale, comme dans la vallée
(](■ Mexico , N. 60" O. , incl. 5o" — 60° au N. E. ) = i's n'offrent
des divisions en colonnes informes que dans les Organos
de Actopan (Cerro de Mamancliota , sommet 1627 toises)
t't les Monjas de Totonilco el Chico . si toutefois la roche
des Organos, dont la masse a 3ooo pieds d'épaisseur, en ne
comptant que les porphyres visibles au-dessus des plaines voi-
sines, est identique avec la roche de Moran. La dernière
î-enferme un peu moins de cristaux d'amphibole; Tune et
l'autre de ces roches ne sont ni fendillées ni poreuses, et
c'est au pied dçs pics grotesques des Monjas que se .trouvent
les riches filons de Totonilco el Chico.
Jusque-là tous les porphyres argentifères de Pachuca et de
Aloran, que je viens de décrire, ne nous ont rien offert qui
les éloigne du terrain de transition : ils sont même recouverts,
i^ntre les bains de Totonilco el Grande et la caverne de la
Madré de Dios ou Roche percée, d'énormes masses de for-^
juations calcaires, de grès et de gypse. La formation calcaire,
de 1000 pieds d'épaisseur, est gris-bleuâtre, compacte, non
poreuse, renfermant des filons de galène et des couches de
•\Tlcaire blanc presque saccharin à gros grains. C'est pour le
Woins la formation alpine (alprnkalkstein) , si ce n'est pas un
ralcaire de transition, et les rapports de gisement qu'on ob-
serve entre cette roche calcaire et les porphyres de Moran et
de la Magdalena semblent caractériser ceux-ci comme décidé-
.inent non trachytiques. En avançant à quatre ou cinq lieues
de distance des mines de Moran, par Omitlan , par les savanes
de Tinaxas, et par une vaste forêt de chênes vers le Jacal ,
dont rOyamel ou la Montagne des Couteaux (Cerro de losNa^
vajas) forme la pente occidentale, on entre dans un pays qui
oifre , dans sa composition géognostique, la trace très-récente
des feux souterrains. On trouve d'abord au pied de l'OyameJ
nn porphyre terreux blanc -grisâtre , renfermant des cristaux
de feldspath vitreux, et présentant presque la même direc-
tion (le même angle avec le méridien, N. 5o* O.) que
les porphyres argentifères, mais une inclinaison (76" au
S. O,) ciamétraîcïnent opposée. L'état de la végétation ne
IND 3i5
permet pas de fixer les l'apports de g-Isemcnt entre les roches
de rOyamel et les porphyres de transition des mines d'ar-
gent de Moran. Les premières, qui sont encore dépourvues
d'obsidienne, servent de base à une roche blanc-rougeàtre ,
à éclat émaillé, à cassure unie, quelquefois grenue, renfer-
mant un peu de feldspath vitreux , et divisée en une infinité
de petites couches parallèles , souvent ondulées. Cette roche
est une perlite porphyrique lithoïde, ou plutôt un porphyre
trachytique non spongieux, non fendillé, dont la base passe
au perlstein. Un tel passage de la pâte pierreuse à une masse
composée de globules agglutinés, se manifeste même dans des
couches qu'à leur seul aspect on croiroit d'abord composées de
feldspath compacte ou d'un kieseischiefer terne et grisâtre. Aux
cristaux effilés de feldspath vitreux , disséminés dans la pâte , ne
se trouvent mêlés ni le mica noir, ni le quarz, mélange que
l'on observe dans la perlite de Tokai et de Schemnitz en
Hongrie.
L'abondance d'obsidienne que renferment les porphyres de
la montagne des Couteaux , et qui les rapproche des perl-
stein de Cinapecuaro, ne laisse pas de doute sur leur na-
ture volcanique. Ils constituent des montagnes isolées, sou-
vent jumelles, à couches perpendiculaires, rappelant, par
leur aspect, les collines de basalte et de trachyte des Monts
Euganécns. Ces masses volcaniques sont-elles sorties du sein
des porphyres de transition de Moran, ou existe-t-il un passage
des unes aux autres? Les roches de FOyamel sont-elles seu-
lement superposées aux porphyres métallifères, comme le
sont les basaltes colonnaires de Régla? On se demande de
même si les porphyres noirs, souvent buUeux, de la vallée
de Mexico (Feîïol de los Baîios) , recouverts d'amygdaioïde ,
basaltiques et cellulaires , sont d'une origine différente
des porphyres qui se cachent (Totonilco el Grande) sous
le calcaire alpin? Dans cette même vallée de Mexico (en
avançant du lac de Tezcuco au nord vers Queretaro), on
voit sortir, à la Cuesta de Varientos , sous le mandelstein
volcanique, un porphyre terreux, rouge - brunâtre , sans
amphibole , mais abondant en cristaux eflilés de feldspath
vitreux. C'est sur la prolongation des strates de cette roche
d'un aspect trachytique que reposent les formations secon-
dairês et tertiaires (calcaire du Jura , gypse et marnes aVcC
lisscmens d'éléphaiis, à 1 170 toises de hauteur), qui remplis*-
senties bassins ne rilaciendu del Salto, de Bâtas et du Puerto
de los Reyes. Dix lieues plus loin, â Lira , on trouve des
roches porphyriques à base seuii-vitrcuse et vert-olive, re-
C()uverles d'iiyalithe manielonnée et dépourvues de pyroxène.
Ces roches enchâssent, outre un peu de feldspath , des grainS
de quarz : elles offrent en même temps de petites couches
d'obsidienne intercalées. C'est, à n'en pas douter, un tra-
chvte (roche à laquelle en Hongrie le quarz n'est pas non plus
entièrement étranger). Or, comment distinguer les couches
de porphyre trachytique des porphyres de transition qui les
Mipportent immédiatement, lorsque les uns et les autres,
iiu mélange près d'obsidienne et de pcrlitc, ont une compo-
eition minéralogique si analogue P
Cette difficulté embarrasse encore plus le voyageui* gco-
gnoste, lorsqu'il sort de la vallée de Mexico, vers l'est, pour
traverser Tarête de montagnes sur laquelle s'élèvent les deux
volcans de la Puebla , l'Iztaccihuatl [Femme -blanche, 2466
toises) et le Popocatepetl {Montagne fumante, 2770 toises).
Les roches porphyriques qu'on voit au jour près de la
Venta de Cordova et de Rio frio, sont intimement liées
aux trachytes du Grand-Volcan encore enflamme. Elles sont
recouvertes de brèches ponceuses et de perlitcs avec obsi-
dienne (entre Ojo del Agua et le fort de Peroîe), et servent de
base ( entre San Francisco Ocotlan , la Puebla de los Angeles,
Tofomehuacan, Tecali et Cholula ; entre Venta de Soto, El
Pizûrro et Portachueîo) à une puissante formation calcaire,
tantôt compacte et bleu - grisâtre , tantôt à petits grains et
blanclieou à couleur mélangée. Ce calcaire (de transition ou
alpin?) n'est certainement pas tertiaire, comme le sont les
formations très-récentes de calcaire coquillier, de marnes et
de gypse, que dans différentes parties du globe on voit
placées, par lambeaux, sur le terrain trachytique. M. Son-
iicschmidt a Vu, près de Zimapan , Xaschi et Xacala , un
véritable calcaire de transition, gris - noirâtre et fortement
carburé, reposer Sur des porphyres entièrement semblables à
veux que nous venons de décrire dans le plateau central de
ia Nouvelle-Espagne. Quelques strates de ces porphyres de
ÏNÏ) ^'1
■gîmapan, de Xaschi et d'Ismiquilpan , renferment, comme
\ îts griinstein porphyriques et les perlites de la Hongrie, et
\ fcomme le porphyre superpose au thonschiefer (de transition?)
tie la fameuse montagne de Pofosi , des grenats disséminés
xiansla masse. Ils sont traverses de liions qui présentent cette
magnifique variété d'opale jaune-orangé que nous avons fait
tonnoître, M. Sonneschmidt et moi, sous le nom d'opale de
feu (feueropal), et qui a été retrouvée par M. lieudant
parmi les tracliytes de Telkebânya. J'ai vu enchâssés dans
îa pâte porphyrique de Zimapan, des globules rayonnes de
perlilc gris - bleuâtre , ressemblant par leur couleur à delà
thermantide jaspoïde (porzellan-jaspis). On n'a point encore
éclairci les rapports de gisement entre ces porphyres, qu'on
crdiroit trachytiques, et ceux qui supportent les grandes for-
mations calcaires. II est plus aisé de séparer les porphyres
ïuéfallifères des ti^achytes dans nos classifications artiticicUcs
qu'à la vue même des montagnes.
y. Groupe de porphyres de Guanaxualo, C'est ce groupe qui
détermine le plus clairement l'âge relatif, ou, pour m'ex-
primer avec plus de précision, le maximum de l'ancienneté
des porphyres mexicains , si toutefois ceux dont nous venons
d'indiquer les gisemens sont d'une même formation que les
porpliyresde Cuanaxuato. La superposition de ces porphyres
sur des roches appartenant au terrain intermédiaire est ma-
nifeste. Près de la ferme de la Noria et dans la Canada de
Querctaro, un porphyre vert d'olive schisteux, rempli de
feldspath vitreux en 'cristaux microscopiques, est superposé
à un thonschiefer de transition qui renferme de la lydienne.
Près de Cuanaxuato, et surtout près de Santa Kosa de la
Sierra, cette superposition est également certaine. Les por-
phyres de ce district ont en général un gisement concordant
( une direction et une inclinaison parallèles ) avec les strates
du thonschiefer. Ils sont éminemment métallifères, et le
fameux filon de Cuanaxuato (Veta madré), faisant le même
angle avec le méridien que les filons de Zacatecas, de Tasco
«t de jMoran (N. 50° O.), a été exploité successivement sur
une longueur de 12,000 toises et une largeur (puissance)
tle 20 à 26 toises. Il a fourni en 23o ans plus de 180 millions
de piastres, et il traverse à la fois le porphyre et le schiste
2)8 l^D
<le transition. La première de ces roches forme, à l'est âe
Guanaxuafo , des niasses gigantesques qui se présentent de
loin sous l'aspect le plus étrange, comme des murs et des
bastions. Ces crêtes , taillées à pic et élevées de plus de 200
foises au-dessus des plaines environnantes, portent le nom de
hajfas; elles sont dépourvues de métaux, paroissent soulevées
par des fluides élastiques, et sont regardées par les mineurs
mexicains, qui à Zacatecas les voient aussi placées sur un
i'iionschiefer de transition éminemment métallifère, comme
\:n indice naturel de la richesse de ces contrées. Lorsqu'on
embrasse sous un même point de vue les porphyres de la
Buffa de Guanaxuato, et ceux des mines jadis célèbres de
Bclgrado de San Bruno , de la Sierra de Santa Rosa et de
\'^iIlalpando, on croit reconnoitre dans leurs strates les plus
récens des passages à des roches que Ton est généralement
convenu en Europe de placer parmi les trachytes.
Dans les environs de Guanaxuato dominent les porphyres
à pâte de feldspath compacte, vert de gris et vert d'olive,
rnrhàssant du feldspath lamelleux (non vitreux), soit en
cristaux presque microscopiques (Buffa), soit en cristaux
frès-grands (Mines de San Bruno et du Tesoro ). L'amphi-
bole décomposé, qui teint probablement en vert la masse en-
tière de ces roches, ne se distingue que par des taches in-
formes. En s'élcvant vers la Sierra (Puerto de Santa Rosa ,
Puerto de Varientos), le porphyre est souvent divisé en
boules à couches concentriques : sa pâte devient vert-noi-
ràtre, semi-vitreuse (pechsteinporphyr), et renferme à la
fois un peu de mica cristallisé et des grains de quarz. Près
de Villalpando les filons aurifères traversent un porphyre
vert de prase, à base de phonolithe , dans lequel on ne
reconnoit que quelques petits cristaux effilés de feldspath
vitreux. C'est une roche qu'on a de la peine à distinguer du
porphyrschicfcr trachytique : je Pai vue couverte et d'un
porphyre terreux blanc- jaunâtre (mine de Santa-Cruz), et
d'un conglomérat ancien (boca de la mina de Villalpando) ,
qui représente évidemment le grès rouge et dont les cou-
ches inférieures passent au grauwacke.
Les porphyres de la région équinoxlale du Mexique ren-
ferment, quoique bien rarement, outre quelques grenats
ÏND 2^ç,
disséminés ( Izmîquilpan et Xaschi), du mercure sulfuré (San
Juan de la Chica ; Cerro del Fraile près de la Villa de San-
FeJipe ; Gasave, à l'extrémité septentrionale de la vallée de
Mexico); de l'étain (EIRobedal, et laMesa de losHernandez);
de l'alunite (Real del Monte, d'après M. Sonneschmidt).
Cette dernière substance semble rapprocher encore davantage
ces roches porphyriques des véritables trachytes ; quoique,
dans l'Amérique méridionale (péninsule d'Araya , Cerro del
Distiladero et de Chupariparu ), jaie vu un thouschiefer, qui
îipparlient plutôt au terrain primitif qu'au terrain intermé-
diaire, traversé par des liions, je ne dirai pas, d'alunite
(alaunstein) , mais d'alun natif dont les Indiens vendent au
marché de Cumana des morceaux de plus d'un pouce de
grosseur. Le cinabre des porphyres de San-Juan de la Chica,
les couches argileuses du Durasno, mêlées à la fois de houille
et de cinabre , et placées sur un porphyre très-amphiboliquc,
sont des phénomènes bien dignes d'attention. Ceux des géo-
gnostes qui mettent (comme moi) plus d'importance au gise-
ment qu'à la composition oryctognostique des roches , rap-
procheront sans doute les porphyres et argiles du Durasno des
dépôts de mercure que présente dans les deux mondes la for-
mation de grès rouge et de porphyre (duché de Deux-ponts,
et Cuença , entre Quito etLoxa). Les dernières couches du
terrain de transition se trouvent partout dans une liaison in-
time avec les couches les plus anciennes du terrain secondaire.
Le célèbre filon argentifère de Bolaiïos a offert sa plus
grande richesse dans une amygdaloïde intercalée au por-
phyre. En Hongrie , en Angleterre , en Ecosse et même en
Allemagne , des roches d'amygdaloïde et de porphyres appar-
tiennent à la fois aux grauwack.es, aux thonschiefer et cal»
caires de transition et au grès rouge ou grès houiller. Le
porphyre métallifère de Guanaxuato recouvre simplement
le thonschiefer : il n'y forme pas en même tem.ps des couches
intercalées (comme dans le groupe §.22); mais une syénite
analogue à celle que l'on voit dans la mine de Valenciana ,
du milieu du thonschiefer intermédiaire, alterne des milliers
de fois, sur une surface de plus de vingt lieues carrées, avec
du griinstein de transition, entre la mine del'Esperanza et le
%'illage deCpmangillas. Dans cette région, la roche syénitiquc:
220 11>,]3
est dépout-vue de métaux ; mais à Comanja elle est argenti-
fère, comme elle l'est aussi en Saxe et en Hongrie.
b. Dans l'hémisphère austral. Entre les 5° et 8° de latitude j'ai
vu des roches porphyritiques , intimement liées entre elles,
rouvrir les pentes orientales et occidentales des Andes du
Pérou. Ces roches reposent, Soit sur un thonschiefer (de
transition?) traversé par des filons argentifères (Mandor, El
Pareton), soit, quand le thonschiefer manque, sur du gra-
nité. Les unes sont ou divisées en colonnes gigantesques
(Paramo de Chulucanas), ou très- régulièrement stratitiées
(Sondorillo). Leur base noire est presque basaltique; elles
renferment plus de pyroxène que de feldspath, et alternent
( Qaebrada de Tacorpo ) avec des couches de jaspe et de
icldspath compacte. Ce dernier, dépourvu de cristaux dis-
séminés, est noir comme de la pierre lydienne, et rappelle,
par sa couleur et son homogénéité , certains basanites des
ïnonumens anciens. D'autres porphyres (N.'" S.^'^ del Car-
îuen, au nord du village indien de San Felipe) ont une
apparence moins trachytique ; ils offrent de riches filons ar-
gentifères, et sont recouverts tantôt de couches de quarz do
trois ou quatre toises de large , tantôt d'un calcaire (alpin?)
<"oaipacte, bleu -noirâtre, traversé par de petits filons de
spath calcaire et rempli de coquilles pétrifiées ( hystérolithes ,
anomics, cardium, et fragmens de grandes coquilles polytha-
lames, qui sont plutôt des nautilites que des ammonites). En
«lescendant (toujours sur la pente orientale des Andes) vers
Tomependa, aux bords de la rivière des Amazones, j'ai vu
entre Sonanga et Chamaya , le grès ancien ( todtcs liegende)
superposé à un porphyre terreux grisâtre , renfermant (comme
celui de Pucara) beaucoup d'amphibole et un peu de feld-
spath commun. Sur la pente occidentale des Andes, en ap-
prochant des côtes de la mer du Sud, on trouve (entre
Namas et Magdalena) des porphyres entièrement dépourvus
d'amphibole, et supportant cette grande formation de quarz
<]ui remplace dans cette région le grès rouge. J'ai indiqué
plus haut {§. i8) que ce porphyre, loin d'être primitif, m'a
paru le plus ancien des porphyres de transition. Ce résultat
n'a pu être énoncé qu'avec doute ; car , entre Ayavaca ,
Zaulaca, Yamoca (§.8) et Namas (province de Jacn de Bra-
IND 22X
ramoros et intendance de Truxillo ) , il est bien difficile de
déterminer avec certitude l'âge des granités, des syénites et
des thonschiefer sur lesquels reposent les porphyres inter-
médiaires et les trachytcs porphyriques. Lorsque les rap-
ports de superposition ne sont pas entièrement connus, l'on
ne doit prononcer qu'avec réserve sur un terrain d'une
constitution géognostique si compliquée.
B. Groupe de la Hongrie.
C'est le terrain de syénite et de griinstein porphyrique qui
renferme la principale richesse minérale de la Hongrie et
de la Transylvanie (Schemnitz, Kremnitz , Hoch\viesen et
Kœnigsberg ; le Bannat , Kapnak et Nagyag). Nous faisons
connoitre ce terrain d'après les belles observations, encore
inédites, de M. Beudant. La formation de Hongrie est beau-
coup moins simple que celle du Mexique, avec laquelle on.
lui trouve d'ailleurs de grandes analogies. Les roches qui
constituent sa masse principale, sont des roches porphyri-
ques à base de feldspath compacte, colorée en vert: elles
renferment, comme les porphyres de l'Amérique équinoxialo
que j'ai fait connoître plus haut, de l'amphibole, et sont
presque dépourvues de quarz. Cette dernière substance ne
se montre que dans les couches subordonnées de syénite.
de granité, de gneis et de griinstein compacte, auxquelles
passe la roche porphyrique. Dans la Nouvelle -Espagne, les
porphyres à filons aurifères et argentifères ont une pâte en
apparence homogène , le plus souvent foiblement colorée ; en
Hongrie, ce ne sont pas les vrais porphyres qui dominent,
mais les griinstein porphyriques. D'après de simples considé-
rations oryctognostiques, c'est-à-dire de composition, le ter-
rain aurifère de Hongrie ressemble bien plus à la formation
mexicaine d'Ovexeras , dans laquelle alternent des syénites
et des grunstein plus ou moins porphyriques, qu'à ces grandes
masses de porphyres que traversent les célèbres filons de
Pachuca, Real del Monte, Moran et Guanaxuato (au sud»
est de la mine de Belgrade); mais, considérées géognostique-
ment, toutes ces roches de porphyre et de syénite , celles du
Mexique et de la Hongrie, ne constituent qu'une seule for-
mation, tantôt simple, tantôt composée (avec alternance}.
222 I]VD
Les roches porphyriques et syénitiques de Hoiigl'ie , ic*
plus compactes comme les plus mélangées, renferment du
carbonate de chaux, et font effervescence avec les acides.
Ce caractère se retrouve dans ies roches d'un gisement ana-
logue du Mexique , mais non dans les trachytes qui leur sont
superposés. Le feldspath vitreux est beaucoup plus rare dans
les porph^-res à base de grunstein de la Hongrie que dans les
porphyres mexicains: il ne se rencontre ( Hochwiesen ,
Bleihiitte) que dans les strates supérieurs et terreux, surtout
là où commence le terrain trachytique. Le fer oxidulé abonde
lorsque l'amphibole se montre en cristaux très-distincts ; k'
grenat (que nous avons déjà indiqué plus haut dans les por-
phyres mexicains de Zimapan et dans ceux de Potosi, sur le
revers oriental des Andes du Pérou) pénètre jusqu'au milieu
des prismes d'amphibole. Quoique dans la grande formation
de syénites et de grunstein porphyriques de la Hongrie les
diverses variétés de roches passent fréquemment les unes aux
autres, on remarque pourtant en général le type suivant d'as-
sociation et de superposition : la partie inférieure de tout le
système est formée par des syénites à gros et à petits grains ,
passant à un granité talqueux (Hodi-ltz) et au gneis; la partie
moyenne est composée tantôt de grunstein compacte, à pâte
noire presque dépourvue de cristaux disséminés, tantôt de
roches porphyriques, à base de feldspath pur, ou à base
mélangée de feldspath et d'amphibole , enchâssant des cris-
taux de feldspath commun (lamelleux), de l'amphibole,
un peu de mica et des grenats, très- rarement du quarz ; la
partie supérieure offre des griinstein porphyriques terreux
et particulièrement aurifères. C'est seulement cette dernière
assise qui renferme quelquefois du feldspath vitreux, de la
laumonite, du mica et (comme dans PxVmérique équinoxiale)
des filons de jaspe rouge. Dans les griinstein terreux qui sont,
d'une structure plus simple, parce qu'ils n'alternent pas avei-
des syénites, des granités ou gneis de transition, on trouve
(vallée de Glashiittc) des masses compactes basaltiformes (di-
visées en prismes) et un grunstein porphyrique noir à base
de feldspath amphiboleux. Ce gnïnstein enchâsse des aiguilles
très-petites d'amphibole, des lamelles nombreuses de mica
noir et des druscs de quarz blanc et rouge.
IND 223
Les couches subordonnées à la grande formation de syé-
nite et griinstein porphyrique de Hongrie sont : des mica-
schistes (vallée d'Eisenbach ) ; du quarz compacte, tantôt
feuilleté et micacé , tantôt grenu , passant partiellement à
un silex terne à cassure unie (bassin occidental de Schem-
nitz); du calcaire stéatiteux , jaune de soufre, verdàtre ou
rougeâtre, avec grenats disséminés dans la masse, et accom-
pagné de serpentine (Hodritz). Tout ce système de roches
syénitiques et porphyriques est très- distinctement stratifié
en Hongrie comme au Mexique; mais, dans le premier de
ces deux pays , la direction et l'inclinaison des strates ne
sont uniformes que dans un même groupe de montagnes.
La nature du terrain sur lequel reposent les syénites et griin-
stein porphyriques de la Hongrie, n'est pas facile à déter-
miner avec certitude. M. Beudant les croit d'une formation
plus récente que les grauwackes, qui ne se sont pas déve-
loppés en Hongrie là où dominent les griinstein porphyri-
ques. Des schistes talqueux, alternant avec des calcaires cris-
tallins grisâtres, et appartenant probablement au terrain de
transition le plus ancien , ont paru à ce savant géognoste ,
de même qu'à M. Becker, servir de base à la formation syéni-
tique et porphyrique. Ce seroit une analogie de plus qu'of-
friroit cette formation avec le terrain homonyme du Mexique.
En Hongrie, comme dans le nouveau continent, les por-
phyres, les syénites et les griinstein sont immédiatement re-
couverts de trachytes et de conglomérats trachytiques avec
obsidiennes et perlites. En Auvergne (Mont -d'or. Cantal) ;
dans les îles de la Grèce (Argentiera, Milo , Santorino), visi-
tées par un excellent observateur, M. Hawkins ; à Unalaska ,
exploré récemment par M. de Chamisso et par l'expédition
du capitaine Kotzebue, ces mêmes rapports de gisement
s'observent entre les trachytes et les porphyres de transition,
A la montagne du Kasbek , dans la chaîne Caucasique , uu
porphyre intermédiaire, qui alterne avec de la syénite, du
granité, du gneis et du thonschiefer de transition, renferme
aussi du feldspath vitreux : il offre même dans quelques
strates toutes les apparences d'un trachyte poreux. C'est ainsi
que sur les points les plus éloignés du globe , en Amérique,
en Europe et en Asie, nous voyons osciller les porphyres
324 JISTD
entre des roches de transition et des roclics volcaniques tr*-s-
onciennes,
C- Groupe de la Saxe.
Nous ne parlons point ici du porphyre qui forme avec
le griinstcin et le calcaire gris-noiràtre des couches subor-
données (Friedrichsualde, Seidwitzgrund) dans le schiste do
transition ( §. 22), mais de la grande formation de syénite et
porphyre que "VVerner désignoit par le nom de formalion prin-
cipale (Haiiplnicderlage). Ce savant illustre dislinguoit quatre
terrains de porphyres : le premier formant des couches (ou
plutôt des filons?) dans le gneis et le micaschiste primitifs;
le second alternant avec la syénite; le troisième appartenant
au grès houiller, et renfermant des griinstein, des rétinltes et
des amygdfiloïdes agathifères; le quatrième intercalé à des
roches tiappéennes (volcaniques). Ces quatre terrains, dont
Je premier ne constitue vraisemblablement pas une formation
indépendante , sont, comme je l'ai exposé ailleurs ( Vojage aux
régions équinpxialcs , T. I,p. i55), les porphyres intercalé^
aux roches primitives, les porph3'res de transition, les por^
phyres secondaires et les trachytes ( trapporphyre). Lu formai
lion principale de porphyre et de syénite de Saxe repose su^*
des schistes de transition (avec grauwacke), et par consé-^
quent, là où les thonschiefer ne se sont pas développés, sur
des roches plus anciennes. La syénite qui alterne avec le por-
phyre (Meissen, Lçuben et Prasitz; Suhl) passe au granité et
au gneis. Ce granité de transition est généralement à gros
crains , composé de feldspath rougeàtre , de quarz gris de
fumée, et de mica noir bien cristallisé (Dohna, Posewitz et
Wesenstein). Le gneis de transition (Meissen) est plus rare
que le granité, et forme des couches dans la syénite, comme
en forment aussi le calcaire grenu et blanc (Naundorf) et un
griinstein qui passe au basalte ( Wehnitz). La présence de la
formation de syénite qui renferme, dans la vallée de Plauen
(comme en Ngrwége) , quelques cristaux disséminés dezircon,
jie se manifeste souvent que par des bancs de granité; car
la substitution, fréquente et locale, du mica à Tamphibole et
de l'amphibole au mica, caractérise la formation syénilique,
abondante en sphène brun (braunmenakanerz) , qui est un
IND 225
silicate de titane et de chaux. Le porphyre non stratifié de
Saxe a généralement une base rouge , grisâtre et argileuse
(thonporphyr, résultat d'une décomposition du feldspath
compacte); d'après M. Boue, quelquefois (vallée de Tharandt)
cette base prend l'aspect du klingstein. Ce porphyre ne ren-
ferme presque pas d'amphibole, et n'est point dépourvu de
quarz comme ceux du Mexique et de la Hongrie. On y trouve
du feldspath commun , du quarz cristallisé en doubles pyra-
mides hexaèdres , et quelquefois un peu de mica. Le groupe
de porphyres et syénites de Saxe est un peu métallifère ; la
syénite stratifiée à bancs épais de Scharfenberg offre des filons
d'argent, et le porphyre d'Altenberg contient quelquefois de
l'étain.
C'est dans la vallée de Plan en , près de Dresde, que se
trouve la roche à laquelle Werner a donné, le premier, le
nom de sjénite , croyant par erreur que les obélisques égyp-
tiens conservés à Rome contenoient tous de l'amphibole. M.
Wad {Foss. œgjpt. Musei Borgiani , 1794, p. 6 et 48 ; Zoega,
de Obeliscis, p. 648) a prouvé que ces obélisques, dont le plus
beau , minéralogiquement parlant, est celui de Piazza Navona,
sont un véritable granité avec mica noir aggloméré , sans
amphibole. En effet, il n'existe point à Syène de formation
indépendante de syénite et de porphyre intermédiaires ;
mais le granité primitif, peut-être d'une formation pas très-
ancienne , y renferme de l'amphibole ( comme à l'Orénoque;
au Spitzberg près Krummhiibel en Silésie ; près Wiborg en
Finlande) disséminé dans des couches subordonnées, non
étendues et d'un prolongement peu régulier. Pour le géognoste
classificateur la roche de Syène est un granité qui contient
de l'amphibole : ce n'est point de la syénite. Quelques frag-
mens de cette roche, que Ton trouve isolés parmi les mo-
numens égyptiens, ont trompé Werner par l'analogie oryc-
tognostique qu'ils présentent avec la syénite de la vallée de
Plauen.
Des formations de porphyre et de syénite entièrement
semblables à celle de Saxe, et placées sur le schiste de tran-
sition et le grauAvacke , sont communes au Thiiringerwald •
d'après M. Boue, en Moravie ( entre Blansko, Briinn etZnaim) ;
d'après M. Rozière , dans la péninsule du Mont Sinaï. Ces
23. J 5
226 IND
dernières méritent une attention particulière. Des roches
intermédiaires schisteuses et arénacées couvrent une partie de
l'Arabie pétrée. Au milieu de ces roches, qui renferment des
conglomérats avec fragmens de granité et de porphyre [brèche
universelle d'Égjpte , dans le langage des antiquaires), sortent
des sy-^niles, et des porphyres à base de feldspath compacte
silicifère, enchâssant des cristaux de feldspath lamelleux,
un peu d'amphibole et, d'après M. Burckhardt, du quarz. Les
porphyres sont généralement inférieurs à la syénite, et cette
dernière , dont se composent probablement les tables de la loi
que [^on croit enterrées à Djebel Mousa, est accompagnée de
griinstein compacte noirâtre (golfe d'Akaba) et de griin-
stein porphyrique. Tout ce terrain de FArabie pétrée, dont
j'ai pu examiner de nombreux échantillons, ressemble de la
manière la plus frappante au terrain porphyrique etsyénitique
d'O vexeras et deGuanaxuato , au Mexique. En substituant avec
M. Rozière le mot sinaïte à celui de syénite, on auroit donné
à la roche de transition qui est composée d'amphibole et de
feldspath , et mêlée quelquefois d'un peu de quarz et de mica ,
un nom géographique plus exact, un nom qui (comme celui
de calcaire du Jura) auroit rappelé non-seulement des rap-
ports de composition , mais aussi des rapports de gisement.
D. Groupe de la Norwége.
§. 24. C'est le terrain décrit par deux géogncstcs célèbres,
le professeur Haussmann et M. Léopold de Buch ; c'est celui
dans lequel la formation de granité postérieure à des roches
calcaires , remplies de débris de corps organisés, s'est le mieux
développée, et qui par conséquent a répandu le plus de Jour
sur la véritable nature des roches de transition. On n'avoit
d'abord regardé cette classe de roches que comme une asso-
ciation de grauwacke , de schistes carbures et de calcaires
noirs : peu à peu l'on reconnut que la grande masse de por-
phyres appelés long -temps porphyres primitifs appartenoit,
soit au terrain de transition, soit même au grès rouge. On
réunissoitaux porphyres intermédiaires les S)'énitcs deMeisseu;
mais, quoique ces dernières perdent l'amphibole et passent
insensiblement au .granité de transition (Dohna) , la généra-
IND 227
lîté de ce phénomène, l'apparition nouvelle de roches gra-
nitoïdes, entièrement analogues aux roches primitives, et
recouvrant à la fois des porphyres noirs avec pyroxène et
des calcaires à orthocératites, ne commença à bien fixer l'at-
tention des géognostes que lorsque les rives du golfe de Chris-
tiania furent décrites dans tous leurs merveilleux rapports
de superposition.
Les zircons , qui ont donné tant de célébrité à la syénite de
Holmstrand et de Stromsoë, se retrouvent abondamment dans
les syénites du Grocjiland méridional (d'après M. Giesecke.
près cap Comfort, à Kittiksut et àHôlsteensberg) : ils sont aussi
disséminés en très-petites masses dans les syénites de Meisseii
et de la vallée de Plauen. Cette substance, dans d'autres loca-
lités, appartient plutôt aux roches primitives (par exemple,
au gneis); car, quoique le zircon , le fer titane, le sphène,
l'épidote, le feldspath vitreux, le chiasloHthe, la pierre ly-
dienne, la diallage , l'amphibole et le pyroxène accompagnent
df préférence certaines forn'.ations, il ne faut point considérer
ces associations comme des caractères d'une valeur absolue.
L'accumulation des zircons dans les syénites deChristiauiafiord
est, sous le rapport des questions géogoniques, beaucoup
moins remarquable que la multiplicité de vacuoles , la struc-
ture caverneuse et gercée de ces mêmes syénites de transition,
qui sont liées à des porphyres basaltiques et pyroxéniques.
Depuis que , par les analogies fréquentes que l'on a obser-
vées entre le terrain de porphyre et de syénite de Christiania
et les terrains de transition du Caucase, de la Hongrie, de
l'Allemagne , de la France occidentale , du Groenland et du
Mexique, les géognostes ne sont plus étonnés de la succes-
sion de roches feldspathiques et cristallisées aux grau^vackes
et aux calcaires pétris d'entroqucs et d'orthocératites , l'ap-
parition de ces mêmes roches cristallines dans le plus ancien
membre de la série des roches secondaires commence à fixer
leur attention. On a reconnu que, dans les deux mondes,
des masses cristallines , composées, de feldspath et d'amphi-
bole, ou de feldspath et de pyroxène, oscillent entre le
terrain volcanique , le terrain intermédiaire et le grès rouge.
Ces oscillations , ces intercalations de roches problématiques ,
que l'on est tenté de regarder comme les eS^sts d'une péné-
tration successive de bas en haut, prouvent la liaison intime
qui existe entre les couches les plus récentes du terrain
de transition et les plus anciennes couches des terrains secon-
daires et volcaniques. Dans la partie méridionale du Tyrol,
des masses de granité et de porphyre syénitique semblent
même déborder du grès rouge dans le calcaire alpin ; et
ces phénomènes curieux d'alternance , liés à tant d'autres
plus anciennement connus, semblent condamner à la fois et
la séparation du grès houiller des porphyres du terrain in-
termédiaire, et la. dénomination historique et trop exclusive
de terrains pyrogènes.
La grande formation des porphyres, des syénites et des gra-
nités de la Norwége , repose sur un terrain de schiste de tran-
sition qui renferme des couches alternantes de calcaire noir,
de pierre lydienne et peut-être même (car le gisement dans
ce point est moi-ns évident) de granité. Le calcaire noir (Agger-
selv, Saasen) est pétri d'orthocératitcs de plusieurs pieds de
longueur, d'entroques, de madrépores, de pectinites et
(quoique très-rarement) d'ammonites. Des filons de por-
phyre et de griinstein porphyriques de 2 à i5 toises d'épais-
seur traversent le thonschiefer et le calcaire ( Skiallebjerg)
et préludent pour ainsi dire aux masses analogues de por-
phyres qui reposent, non immédiatement sur le thonschiefer,
mais sur une roche arénacée (grauuacke) dont le thonschiefer
est recouvert. Entre Stromsoë, Maridal etKrogskovn, legrau-
wacke, au lieu de se trouver en couches dans le thonschiefer
auquel il appartient (§.22), en forme comme une assise su-
péi-ieure, de sorte que l'on y voit suivre de bas en haut :
gneis primitif; thonschiefer de transition , alternant avec du
calcaire à orthocéraîites ; grauwacke ; porphyre avec des
couches subordonnées de griinstein; granité; syénite à zir-
cons, alternant avec quelques couches de porphyres. Près de
Skeen et de Holmstrand le calcaire à orthocératites a pris un
tel développement , que le thonschiefer y manque entière-
ment ; le grauwacke y est remplacé par une roche de quarz
micacé. On y voit de bas en haut : du gneis primitif; du
calcaire de transition ; la roche de quarz; le porphyre dont
l'assise inférieure est du niandelstein ; la syénite à zircons.
Les porphyres de Christianiaftord . mélangés par infiltration
IND 22^
de carbonate de chaux, sont généralement brun-rougeàtre :
ils offrent des cristaux quelquefois très- effilés de feldspath
lamelleux, et sont presque dépourvus de quarz et d'amphibole.
Le quarz cristallisé ne se montre qu'entre Angersklif et Revo.
La pâte du porphyre devient parfois noire et boursouflée
(Viig, Holmstrand). Dans cet état, la roche ressemble à du
basalte, comme la syénite de la péninsule du mont Sinaï,
et renferme des cristaux de pyroxène. M. de Buch , auquel
j'emprunte tous ces faits importans , observe que les cristaux
de feldspath disparoissent à mesure que la masse prend une
teinte plus noire, phénomène que m'ont offert aussi plusieurs
porphyres de transition du Mexique. Le mandelstein, dont
les cavités alongées sont remplies de carbonate de chaux, et
qui forme l'assise inférieure des porphyres nor\'^'égiens de
Skeen et de Klaveness, rappelle le mandelstein du porphyre
de Bolaïïos (province mexicaine de la Nouvelle-Galice), qui
est traversé par un des plus riches filons argentifères. Les
sj'énites de Christianiafiord , toujours placés au-dessus des
porphyres, quoique alternant d'abord avec eux, sont com-
posés ( Waringskullen , Hackedalen ) de beaucoup de grands
cristaux de feldspath rouge , et de peu d'amphibole en très-
petits cristaux. Le mica et le quarz n'y sont qu'accidentels.
Quelques vacuoles anguleuses de la syénite offrent des cristaux
de zircons et d'épidote. Le titane ferrifère, commun dans
les deux mondes aux roches d'euphotide primitive et aux
trachytes, se trouve parfois disséminé dans la masse des
syénites à zircons,
VI. EUPHOTIDE DE TRANSITION-
§. 25. 11 faut distinguer, comme parmi les syénites, entre
les bancs intercalés et les formations indépendantes. Des cou-
ches de serpentine se trouvent intercalées dans le weisstein
(§. 4 ) , dans le micaschiste primitif (§. 1 1 ) et dans le thon-
schiefer de transition (§.22). Quant aux terrains indépendans
d'euphotide (gabbro) , qui souvent sont d'une structure très-
compliquée , on peut en compter pour le moins deux , même
en rejetant la formation non recouverte et assez douteuse de
Zôblitz en Saxe. La première de ces formations indépen-
^oo IND
dantes se trouve (§. nj) sur la limite des terrains primitifs
et intermédiaires : c'est celle que M. de Buch a fait con-
noitre en Norwége (Maggeroe, Alten), et M. Beudant en
Hongrie (Dobschau). La seconde formation appartient aux
terrains de transition les plus nouveaux ; elle se trouve sur
la limite des roches intermédiaires et secondaires. On a re-
gardé comme plus récente encore la serpentine liée à la for-
mation d'ophite, observée par M. Palassou dans les Pyrénées
(vallée de Baigorry , Riemont) et dans le département des
Landes. Mais cet ophite est un griinstein , mélange intime
de feldspath, d'épidote et d'amphibole, auquel sont intercalés
des bancs de serpentine (Pousac)j il passe , par le changement
dans la proportion des élémens , tantôt à la syénite, tantôt
au granité graphique. M. Boue, qui a récemment examiné
cet ophite sur les lieux, le croit une formation de transition,
recouverte de grès bigarré, d'argile et de gypse secondaire.
Dans l'x\mérique équinoxiale, la grande formation d'eupho-
tide de transition (celle qui constitue le dernier membre
de la série des roches intermédiaires) semble presque cous-
<amiiient liée (comme dans le Piémont, entre le Mont Cervin
et le Breuil) à des roches amphiboliques. Sur le bord sep-
tentrional des Llanos de Venezuela , recouvertes de grés
rouge, entre Villa de Cura et Malpasso, on voit des masses
considérables de serpentine reposer sur un thonschiefer vert
et sur un calcaire de transition , quelquefois immédiatement
sur le gneis primitif. Un griinstein à petits grains forme des
couches à la fois dans le thonschiefer et dans la serpentine.
Celle-ci est même quelquefois mêlée de feldspath et d'am-
phibole. Les schistes verts et bleus, le griinstein, le calcaire
noir , et la serpentine traversée par des filons de cuivre ,
ne forment qu'un seul terrain , qui est recouvert et intime-
ment lié à des amygdaloïdes pyroxéniques et à de la pho-
nolithe. J'ai décrit ce gisement remarquable des roches ser-
pentineuses de Venezuela dans le 16.* chapitre démon Voyage
eux régions équinoxiales de V Amérique.
Dans l'ile de Cuba la baie de la Havane sépare le calcaire
du Jura d'une formation d'euphotide dont les couches les
plus basses alternent , non avec du griinstein , mais avec
une véritable syénite de transition composée de beaucoup de
IND 25i
l'eldspath blanc , d'amphibole décomposé et d'un peu de
quarz. Les strates altcrnans de la syénite et de la serpen-
tine ont jusqu'à trois toises d'épaisseur ; l'assise supérieure
de cette formation mixte est de la serpentine , formant
des collines de 3o à /\o toises de hauteur , abondant en
diallage métalloïde , et traversée de filons remplis de belles
calcédoines, d'améthystes et de minerais de cuivre. Cette
roche est confusément stratifiée (par groupes, N. 55°E. ; incL
de 60° au S.O. ou N. 90 E. ; incl. de 5o" au N.) ; il en sort des
sources de pétrole et d'eau chargée d'hydrogène sulfuré.
A ce même terrain d'euphotide de transition (§. 26 ) sem-
blent appartenir et la formation d'Ecosse (Girvan et Bellan-
traë ) , composée, d'après M. Boue, de serpentine, de roches
hypersthéniques et de syénite, et la célèbre formation du
Florentin (Prato, Monteferrato ) , décrite par MM. Viviani,
Bardi, Brocchi et Brongniart. L'hypersthène remplace sou-
vent ( Ecosse , et Gernerode en Allemagne ) la diallage.
Quant aux euphotides du Florentin , elles ont été récemment
Fobjet de discussions intéressantes. Elles renferment des lits
de jaspe rougeàtre , quelquefois rubané, et paroissent super-
posées, d'après M. Brocchi, comme celles de Styrie, à des
grauwackes et à des calcaires de transition. M. Brongniart
pense que le terrain arénacé , ou, comme il le nomme, le
terrain calcaréo-psammitique des Apennins, qui sert de base
aux euphotides jaspifères, est ou une roche secondaire très-
ancienne , ou une roche de transition très-moderne. Ce
savant a fait connoître la liaison intime qui existe entre la
serpentine d'Italie et le terrain jaspique. Ce dernier terrain
constitue généralement Fassise inférieure des euphotides.
Ici se termine la série des formations intermédiaires. Nous
avons donné plus d'étendue à leur description, parce que,
toui en essayant de les présenter d'après une nouvelle classi-
fication par groupes, nous avons voulu fixer Faltention des
géognostes sur divers phénomènes de gisement qu'offrent les
montagnes peu connues du Mexique et de FAmérique duSud^
232
IND
Terrains secondaires.
I. Grand dépôt de houille, grès rouge
et porphyre secondaire. (Amygda-
loïde, griinsteia, rétinite.)
II. Zechstein (calcaire alpin, nia-
gnesian limestone), quelquefois
intercalé au grès rouge. ( Gypse hy-
draté, sel gemme.)
m. Dépôts alternans , arénacés et
calcaires (imToeut et oolitliiqups}.
placés entre le zechstein et la craie,
fions ne citerons ici que deux types
très-analogues dans leurs rapports
géognostiques , et en commençant
chaque série par les roches les plus
anciennes.
1." Type.
Grès bigarré (à oolithes) , et argile
avec gypse fibreux et traces de sel
gemme.
Muschelkalk (calcaire de Gœttingue}.
Quadersandstein.
Calcaire du Jura en plusieurs assises:
calcaire spongieux et caverneux;
calcaire marneux avec ossemens
d'ichthyosaures (lias); oolithes;
calcaires à madrépores et à poly-
piers (coral rag); calcaire à pois-
sons et crabes fossiles.
.Argile avec lignites.
Grès et salles verts (craie chloritée
ou plânerlalk).
2.^ Type.
Red mari, terrain marneux avec
gypse et sel gemme.
Terrain d' oolithes , dont l'assise infé-
rieure est le lias.
Salles verts (green sand), qui repré
sentent la craie chloritée.
IV. Craie blanche et grise , ou craie-
tuffeau.
Terrains exclusivement
volcaniques.
I. Formations trachjtiques.
Trachjtes granitoïdes et syéni-
tiques.
Trachjtes porphyriques (feld-
spathiques et pyroxéniques ).
Phonolithes des trachytes.
Trachytes semi-vitreux.
Perlites avec obsidienne.
Meulières trachjtiijues cellu-
leuses, avec nids siliceux.
{Conglomérats trachftiques et
ponceux , avec alunites, sou-
fre, opale elbois opalisé.)
II. Formations basaltiques.
Basaltes avec olivine, pyroxène
et un peu d'amphibole.
Phonolithes des basaltes.
Dolérites.
Mandelstein celluleux.
.Argile avec grenats -pyropes.
Cette dernière formation sem-
ble liée à l'argile avec ligni-
tes du terrain tertiaire sur
lequel sesontsouvent répan-
dues des coulées de basalte.
IND
235
Terrains tertiaires.
Dépôts supérieurs à la craie. Leur
ordre de succession difTère selon
l'alternance des formations par-
tielles qui se trouvent plus ou
moins développées. Nous présen-
tons le type le plus compliqué et
le mieux connu :
argiles plas^ues avec lignites, suc-
cin et gr^^s quarzeux. (Une forma-
tion à peu près parallèle, peut-être
plus neuve encore, est la formation
de molasse el nagelfluhe d'Argovie
avec lignites et ossemens fossiles).
Calcaire (grossier) de Paris. Les
couches supérieures et inférieures
sont du grès.
Marnes et gypse à ossemens. Les as-
sises inférieures sont du calcaire
siliceux.
Grès et sables de Fontainebleau.
Terrain lacustre , ou d'eau douce, su-
périeur. ( Meulières siliceuses.
Calcaire d'OEningen , peut-être lié
à la molasse. Travertin.)
Dépôts d'alluvion.
Suiée des Terrains exclu-
sivement VOLCANIQUES.
( Conglomérats el scories basai-
iitfues. )
IIL Laves sorties d'un cratère
volcanique. ( Laves anciennes
à larges nappes, généralement
abondantes en feldspath. Laves
modernes à courans distincts et
de peu de largeur. Obsidiennes
et ponces des obsidiennes.)
IV. Tu^s des volcans avec co-
quilles.
[Dépôts de calcaire compacte ,
de marne, de gypse et d'ooli-
thes superposés aux tuffs vol-
caniques les plus modernes.
Ces petites formations loca-
les appartiennent peut-être
aux terrains tertiaires. Pla-
teau de Riobamba; Isles For-
taventura et Lancerote.]
J'ai exposé plus haut les raisons pour lesquelles je fais suc-
céder à la fois , comme par bisection , les terrains secon-
daires et volcaniques aux terrains de transition. Ces derniers
se lient, par leurs grauwackes et leurs porphyres, comme par
une grande accumulation de carbone, au grès rouge, aux
porphyres secondaires et aux dépôts de houilles ; ils se lient
par leurs porphyres et syénites aux trachytes. Ces liaisons
sont si intimes qu'on a souvent de la peine à séparer les
porphyres, les amygdaloïdes huileuses et les roches pyroxé-
niques appartenant au terrain de transition, soit des grès
rouges avec bancs intercalés de porphyre et de griinstein ,
soit des formations exclusivement volcaniques. Je me sers de
l'expression ferroin. exclusivement volcanique , pour rappeler que
234 IND
hors de ce terrain il peut y avoir des roches d'origine ignée,
mais que nulle part ailleurs on n'en trouve une suite moins
interrompue et moins contesté^.
Terrains secondaires.
Ces terrains se sont très-inégalement développés sur le globe,
et la cause de cette inégalité de développement est un des
problèmes les plus intéressans de la géogonie ou géologie
historique. Il est assez rare de trouver tous les membres de
la série des formations secondaires et tertiaires réunis dans
un même pays (Thuringe, Hanovre, Westphalie; Bavière;
France septentrionale; centre et sud de l'Angleterre) : sou-
vent de grandes formations, par exemple , le grès rouge ou le
calcaire alpin, manquent entièrement; d'autres fois le second
est contenu dans le premier comme une couche subordonnée;
d'autres fois encore tous les termes de la série géognostique
entre le calcaire alpin et le Jura, ou ceux qui sont postérieurs
à la craie, se trouvent supprimés. Dans la péninsule Scandi-
nave, sur les côtes de la Mer de Behring, et (si Ton excepte
le grès des lignites que recouvrent les basaltes) même dans
Je Groenland , cette suppression s'étend sur tous les terrains
secondaires et tertiaires. On a cru long- temps que ce phéno-
mène bizarre étoit exclusivement propre à la zone la plus
boréale, surtout à celle qui est contenue entre les 60° et 70°
de latitude ; mais, dans un immense espace de laSierra Pariine,
prés de l'équateur, entre le bassin de l'Amazone et celui du
Bas-Orénoque (lat. a" — 8°, long. 65" — 70"), j'ai aussi vu
la formation primitive dé granité -gneis non recouverte de
terrains intermédiaires , secondaires et tertiaires. Lorsque
l'absence des formations postérieures au développement des
êtres organisés sur le globe n'est pas totale, ce sont plutôt
les terrains calcaires que ceux de grès qui se trouvent sup-
primés; car chaque formation non schisteuse a des brèches
et des conglomérats à fragmens ou grains plus ou moins
gros , qui lui sont propres. Ces conglomérats sont de petits
dépôts partiels qu'il ne faut pas confondre avec les grandes
formations indépendantes de grauwacke , de grès rouge , de
grès bigarré et de quadersandstein.
IND 2i>h
I. Houille, Grès houge et Porphyre secondaire {a<,'ec amjg-
dalùïde, griinstein et calcaires intercalés).
§. 2G. Le grès houiller et le porphyre constituent une
même formation ( rothes todtes liegende), variable d'aspect,
et d'une structure souvent très-compliquée. Des mandelstein
celiuleux, du griinstein , des roches grenues feldspathiques et
pyroxéniques, des rétinites (pechstein) et quelques calcaires
fétides appartiennent à cette formation comme bancs inter-
calés. Les minéralogistes anglois nomment noui^eau conglomérat
rouge (ncvv red conglomerate d'Exeter etTeignmouth ) notre
formation degrés rouge et de porphyre, pour la distinguer
de leur grès rouge ancien ( old red sandstone de Mitchel Dean ,
dans le Herefordshire), qui est une roche aréuacée (grau-
wacke) de transition, placée entre deux calcaires de transi-
tion, ceux du Derbyshire et de Longhope. Cette nomencla-
ture , que le savant professeur d'Oxford, M. Buckland, a
récemment éclaircie, a été la cause de beaucoup de méprises
géologiques. Il seroit , je crois, très-utile pour les progrès de
la science des gisemens, que l'on abandonnât peu à peu ces
dénominations vagues de grès anciens , intermédiaires et nou-
veaux y de gypses et de grès inférieurs et supérieurs , de cal-
caires de première, seconde et troisième formation. Elles n'ont
qu'une vérité relative dans tel ou tel lieu ; elles énumèrent
ce qui est numériquement variable , selon les alternances et
les suppressions des dilTérens termes de la série.
Le terrain de transition n'offre pas seulement de l'anthra-
cite ; il offre déjà de la véritable houille. On «en trouve de
petits dépôts en Angleterre dans l'old red sandstone (Bristol),
dont les couches inférieures passent d'un conglomérat tin et
marneux à un grauwacke très-compacte, et dans le mouu-
tain-limestone (Cumberland), qui est analogue au calcaire
de transition de Namur eu Belgique et de Prague en
Bohème. Mais le grand dépôt de houille ( coal measures) se
trouve, comme nous l'avons dit plus haut, sur la limite des
roches intermédiaires et secondaires. A cause de cette posi-
tion même, la houille est quelquefois (Angleterre, Hongrie,
Autriche au sud du Danube, Belgique) mêlée de couches
urénacées liées à de véritables grauwackesj d'autres fois (et
c'est là le type le plus généralement reconnu sur le continent
depuis les observations de Fuchs et de Lehman , faites vers
l'an lySoj, d'autres fois elle appartient à la grande formation
de porph\re et de grès rouge. Dans le premier cas (Angle-
terre), les dépôts de houille suivent l'inclinaison des roches de
transition auxquelles ( comme l'ont judicieusement prouvé
MM. Conybeare et Phillips) ils sont plus particulièrement
liés; on les trouve tout aussi inclinés que les calcaires noirs
et les grauwackes qu'ils surmontent. La série des forma-
tions horizontales et secondaires ne paroît alors commencer
qu'avec le calcaire magnésien , qui représente le zechstein
ou calcaire alpin. Dans le second cas (Allemagne-, est de
France), le dépôt houiller accompagne le grès rouge et le
porphyre, quels que puissent être les terrains primitifs ou
intermédiaires sur lesquels ces deux roches sont immédiate-
ment placées. Cette union constante avec des roches super-
posées, et cette indifférence pour le terrain inférieur, sont
les caractères géognostiques les plus sûrs de la dépendance
ou de l'indépendance d'une formation. Souvent le grand dé-
pôt de houille n'est ni recouvert de porphyre et de grès
rouge, ni mêlé de couches arénacées appartenant au terrain
intermédiaire. Souvent il est placé dans des bassins entourés
de collines de grès rouge et de porphyre, et n'offre dans son
toit que des couches alternantes dargile schisteuse (schiefer-
thon), tantôt gris-bleuàtre, tendres et remplies d'empreintes
de fougères , tantôt compactes, carburées (brandschiefer) et
pyriteuses. De minces strates de grès charbonneux ( kohlen-
schiefer ) , de grès quarzeux passant au quarz grenu , de con-
glomérats à gros fragmens (steinkohlen-conglomcrat) et de
calcaire fétide, se rencontrent au milieu du schieferthon
avant qu'on atteigne la houille. Ce sont de petites forma-
tions locales que présentent également, et dans des circons-
tances entièrement analogues, les dépôts d'argile muriatifère
(salzthon), de sel gemme , de fer hydraté et de calamine,
qui ne sont pas recouverts immédiatement par la grande for-
mation de calcaire alpin. Malgré ces apparences d'isolement
et d'indépendance, les houilles et le sel gemme n'en appar-
tiennent pas moins, géognostiquement, les unes au grès rouge
et l'autre au calcaire alpin ou zechstein. Les empreintes
IND 237
de fougères, comme l'ont observé très-bien MM. Voigt et
Brongniart, caractérisent l'époque des véritables houilles,
tandis que les argiles des lignites en sont dépourvues.
Dans la zone tempérée de l'ancien continent la houille des-
cend jusque dans les lieux les plus bas du littoral. Près de New-
castle-on -Tyne on trouve, au niveau et au-dessous du fond
de la mer, cinquante-sept couches d'argile endurcie et de
conglomérat, alternant avec vingt -cinq couches de houille.
Au contraire, dans la région équinoxiale du nouveau conli-
nent , j'ai vu la houille intercalée au grès rouge s'élever , dans
le plateau de Santa-Fé de Bogota ( Chipo entre Canoas et
le Salto de Tequendania ; montagne de Suba ; Cerro de los
Tunjos), à i3iSo toises de hauteur au-dessus du niveau de
l'océan. L'hémisphère austral offre aussi des houilles dans
les hautes Cordillères de Huarocheri et de Canta : on m'a
même assuré que près de Huanuco elles se trouvent (inter-
calées au calcaire alpin?) très-près de la limile des neiges
perpétuelles, à ajoo toises de hauteur, par conséquent au-
dessus de toute végétation phanérogame. Les dépôts de houille ^
abondent hors des tropiques dans le Nouveau-Mexique , au
centre des plaines salifères du Moqui et de Nabajoa , et à
l'est des montagnes rocheuses, comme aussi vers les sources
du Rio Sabina , dans cet immense bassin couvert de forma-
tions secondaires que parcourent le Missoury et l'Arkansas.
Des masses rhomboïdales fibreuses à éclat soyeux et colorant
les doigts se trouvent enchâssées dans la houille compacte
des deux continens ; elles forment une espèce de brèche
que les mineurs regardent comme renfermant des fragmens
de bois charbonné. Quelquefois ces masses lustrées sont presque
incombustibles, et deviennent une espèce d'anthracite à tex-
ture fibreuse (faserkohle d"Estner; mineralische holzkohle de
"Werner). On les trouve, selon les observations de MM. de
Buch et Karsten, accumulées (Lagiewnick dans la haute Silésie)
en bancs de 4 à 5 pouces d'épaisseur. Ce phénomène mérite
une attention particulière ; car les houilles qui enchâssent
les fragmens à éclat soyeux, appartiennent au grès rouge le
mieux caractérisé , et non aux liguites des argiles placées
immédiatement au-dessous ou au-dessus de la craie. Dans la
péninsule de la Crimée de vastes terrains présentent desalter-
so8 IjVD
nances sans nombre de couches d'argile schisteuse dépour-
vues de houilles, de conglomérats, de griinstein et de cal-
caires compactes. Est-ce là une formation de grès rouge,
renfermant des roches amphiboliques et alternant avec le
zechstein P
Il est difficile d'assigner un type général à l'ordre des
différentes assises qui constituent la grande formation §. 26.
La houille paroît le plus souvent au-dessous du grès rouge;
quelquefois elle est placée évidemment ou dans cette roche
ou dans le porphyre. Le porphyre pénètre et déborde de
différentes manières dans la formation du grès houiller : on
le voit parfois recouvrir immédiatement la houille : plus
généralement il surmonte le grès, et s'élève en dômes, en
cloches ou en rochers à pentes abruptes. Lorsque les terrains
de transition sont immédiatement recouverts de grès rouge
(Saxe) , il est souvent assez difficile de décider si les por-
phyres que l'on rencontre dans la proximité des houilles sont
des porphyres de transition, ou s'ils appartiennent au grès
rouge. Il paroît d'ailleurs que les porphyres forment moins sou-
vent de véritablescouches, que des amas transversaux et entre-
lacés (stehende Stocke et Stock\^'erke) dans le terrain houiller.
Ils varient beaucoup de couleur: ils sont violàtres, gris et
brun-rougeàtre ou tirant sur le blanc (Petersberg près de
Halle, Giebichenstein ,Wettin), infiltrés de chaux fluatée, non
stratifiés, divisés quelquefois en tables minces, et accompa-
gnés de brèches porphjriqu es. La pâte de ces porphyres, qui
enchâssent, outre le feldspath lamelleux , quelquefois stéati-
teux, du quarz noirâtre, un peu de mica brun et d'amphi-
bole , est généralement formée par du feldspath compacte.
Cette pâte passe au kaolin (Morl près Halle) : d'autres fois
elle devient noire et presque basaltique (Lobegiin en Saxe.
Schulzbcrg en Silésie), bulleuse et comme scorifîée (Pliz-
grund près Schmiedsdorf en Silésie), ou passant à la phono-
lithe (Zittau en Saxe). Dans les porphyres, les amygda-
loïdes,les griinstein et les roches pyroxéniques du grès rouge,
on remarque quelquefois (Saxe , Silésie, Palatinat , Ecosse)
ces mêmes analogies avec les roches exclusivement appelées
volcaniques, qu'on trouve dans les porphyres et syénites du
terrain intermédiaire (Hongrie, Norwége , Mexique, Pérou).
IND 25ç>
M. o'e Buch a vu en Silësie des porphyres du grès rouge
abonder en cristaux d"amphiboIe ( Beichmacher près Fried-
]and), ou enchâsser à la fois (Wildenberg près Jauer) du
quarz et des cristaux effiles de feldspath vitreux. M. Boue
observe que dans le grès rouge d'Ecosse, qui, en général,
est assez dépourvu de houille (à l'exception du comté de
Dumfries) , les roches trapéennes intercalées ont des vacuoles
à enduit lustré, etalongécs. Ces mandelstein huileux du grès
rouge prennent toute Tapparence de coulées volcaniques in-
tercalées.
L'Allemagne offre, à son extrémité septentrionale (lie de
Rugen) , de la craie et des terrains tertiaires-, à son extrémité
méridionale, dans le Tyrol (vallée de l'Eisack, Collmann ,
Botzen , Pergine , Neumarkt ) , les porphyres du grès rouge.
La composition de ces porphyres du Tyrol est identique avec
celle des porphyres du Mansfeld ; ils renferment, outre le
feldspath , le mica noir et le quarz brun-de-girofle, un peu
d'amphibole. La couleur rouge de leur pâte pénètre quelque-
fois jusque dans les cristaux de feldspath qu'ils enchâssent.
Dans un voyage géognostique fait en lygS, j'ai trouvé ces
porphyres assez régulièrement stratifiés, près de Botzen et de
Brandsol (N. 25" O. incl. de 5o° au S. E. ). Ils offrent de
petits dépôts de houille sur les bords de l'Adige. entre Saiss
et S. Peter.
Dans toutes les parties de l'Europe, les porphyres secon-
daires offrent l'apparence d'un passage progressif au grès rouge.
Quelques géognostes admettent que des cristaux isolés de
feldspath se trouvent empâtés dans le ciment de la roche
aréftacée , ou qu'ils s'y sont développés: d'autres assurent (et
avec plus de raison peut-être) que ces prétendus passages
des porphyres aux brèches porphyriques et au grès rouge
ne sont que l'effet d'une illusion produite par des porphyres
régénérés, c'est-à-dire , par des agglomérats qui se sont formés à
une époque où les fragmens empâtés étoient encore dans un
état de ramollissement peu propre à conserver leurs contours
au milieu du ciment interposé. Une brèche porphyrique
(triimmerporphyr ) près de Duchs en Bohème, (ine nous
avons décrite , M. Freiesleben et moi , en 1792 , et dans la-
quelle des grains informes de quarz sont mêlés à dçs cristaux
a4o IND
bridés de quarz et de feldspath , peut répandre quelque jour
sur un phénomène qui n'est point encore suffisamment éclairci.
Il est bien remarquable , et cette observation a été faite
depuis long-temps, que les porphyres manquent au nord des
Alpes de la Suisse et du Tyrol , tandis qu'ils sont très-com-
muns à la pente méridionale des Alpes, entre le lac Mag-
giore et la Carinthie.
Le grès rouge est généralement composé de fragmens de
roches qui tirent leur origine des montagnes les plus voisines.
Dans l'Allemagne septentrionale , ces fragmens sont plus sou-
vent le quarz, la lydienne, le silex (hornstein), le porphyre,
la syénite et le thonschiefer , que le gneis, le granité et le
micaschiste. La couleur du grès rouge est très-variable : elle
passe du brun -rougeâtre au gris (graue liegende); elle est
même quelquefois mélangée par couches très-minces, comme
dans le grès bigai'ré. La teinte rouge de cette formation est
due, selon l'opinion de plusieurs géologues célèbres, aux parties
ferrugineuses des porphyres voisins. Sans vouloir infirmer la
justesse de cette observation pour ce qui regarde une partie de
l'ancien continent, je dois pourtant énoncer quelques doutes
relativement à l'influence des porphyres sur la formation
du grès rouge dans les régions équinoxiales du nouveau con-
tinent. Le grès des vastes steppes de Venezuela est brun-rou-
geàtre, comme le todte liegende de Mansfeld ; il ne renferme
pas de fragmens de porphyre , et à plusieurs centaines de
lieues de distance on n'y connoît aucune couche de porphyre
intermédiaire ou secondaire. Il en est de même des grès
rouges de Fiinfkirchen et de 'Vasas en Hongrie, décrits par
M. Beudant.
Partout où, dans la formation §. 26, des conglomérats gros-
siers alternent avec des roches arénacées à petits grains, ces
derniers passent au grès houiller schisteux et fortement mi-
cacé (sandsteinschiefer). Ces masses alternantes renferment
de l'argile schisteuse grise, verdàtre ou brune. Lorsque cette
argile est fortement carburée (kohlenschiefcr) et bitumi-
neuse, elle contient quelquefois (Suhl, Goldlauter) des mi-
nerais argentifères (du cuivre gris, de la galène et des pyrites
cuivreuses). Elle offre des empreintes de poissons fossiles, et
prend l'aspect du kupferschiefer appartenant au calcaire alpin.
IND .41
D'un autre c6té , la désagrégation de roches arénacées à petits
grains forme des bancs de sable quarzeux et brunâtre (triebsand)
au milieu des grès rouges les plus compactes ( Walkenried et
Bieber). Le ciment du grès houilJer est quelquefois calcaire,
et les parties de chaux carbonatée deviennent si fréquentes,
qu'elles donnent à la roche une apparence de calcaire grenu
et arénacé (montagnes houillères sur les limites de la Hon-
grie et de la Galicie). Ce sont là les grès calcarifères de M.
Beudant, mêlés de grains verts chloriteux. Quant aux frag-
mens enchâssés dans les grès rouges , ils sont ou anguleux
et fondus dans la masse, ou arrondis et aplatis comme les
cailloux roulés de la nagelfluhe la plus récente. La forma-
tion de grès rouge qui constitue la majeure partie de l'Ir- «
lande, et qui est si commune dans l'Allemagne septentrio- ,
nale, dans la Forêt- noire et dans les Vosges, manque (de
même que la formation des porphyres) presque entièrement
dans les hautes Alpes de la Suisse. Le Niesen appartient pro-
bablement déjà au grauwacke , et M. de Gruner croit que les
environs de Mels, Bregentz et Sonthofen offrent les seuls con-
glomérats qui, par leur structure et leur gisement, se rap-
prochent du grès rouge. Dans les hautes Alpes, comme dans
plusieurs parties de la Silésie (Schweidnitz) et de la Hongrie
(Dunajitz), le grès rouge enchâsse pour ainsi dire le cal-
caire alpin et alterne avec lui : dans le cercle de Neustadt,
en Saxe, le grès rouge manque entièrement.
Les couches subordonnées au grès rouge ou alternant avec
lui sont les suivantes : calcaires fétides et schistes fortement
carbures et bitumineux (kohlenschiefer de Freiesleben) , qui
annoncent la liaison intime du grès rouge avec le zechstein
et avec les schistes marno-bitumineux (kupferschiefer) : grun-
stein, mélange de feldspath et d'amphibole (Noyant et Figeac
•en France), quelquefois même pyroxénique (Ecosse) : man-
delstein celluleux , quelquefois comme boursouflé, renfer-
mant (Ihlefeld au Harz; rives de laNahe, Oberstein etKirnj
Exeter, Heavitree) desagathes, de la calcédoine , delà preh-
nite et de la chabasie, et pénétrant comme par des crevasses
dans la masse du grès rouge (Planitz en Saxe) : houilles alter-
nant avec des argiles schisteuses à fougères; anthracites (Schdn.
feld entre Altenberg et Zinnwald) appartenant plus particu-
23. 16
242 IND
lièrement, d'après M. Beudant, au pQi^phyre intercalé au grès
rouge qu'à cette dernière roche : porphyres alternant d'abord
avec le grès rouge et puis le surmontant en grandes masses
rocheuses : pechstein (quarz résinite ou rétinite). Le vrai gise-
me»t du pechstein en Saxe a été reconnu par MM. Jameson,
Raumer, Przystanowsky et Schenk. Cette substance forme un
porphyre à base semi - vitreuse , renfermant du feldspath sou-
vent fendillé, et très-peu de mica, d'amphibole et de quarz
cristallisé (vallée deTriebitch). Le pechstein enchâsse des frag-
mens de gneis ( Mohorn et Braunsdorf ) ; il est traversé par
de petits filons d'anthracite fibreuse (Planiz prèsZwickau), et
il alterne avec le porphyre commun du grès rouge. Ces por-
iphyres et ces rctinites reposent (Nieder-Garsebach ) sur la
syénite de transition. M. Beudant, qui a récemment donné
une description détaillée de ce gisement, a reconnu que le
pechstein de Herzogswalde est enclavé dans un dépôt aré-
nacé à pâte d'argilolithe (thonstein), dépôt qui enchâsse des
fragmens anguleux de gneis et de micaschiste , et qui appar-
tient au grès rouge. Le pechstein de Grantola au lac Maggiore
offre le même gisement : celui d'Ecosse contient du naphte.
Au Pérou il y a des pechstein (gris de fumée, presque dé-
pourvus de feldspath, renfermant du mica cristallisé), dans
le chemin de Couzco à Guamanga. Ils y forment des mon-
tagnes entières ; mais ce terrain , d'après les observations de
M. de Nordenflycht , est subordonné, comme en Europe, au
terrain porphyrique.
Toute la formation §. 26, que nous décrivons, est généra-
lement caractérisée par l'absence des coquilles fossiles. Si
l'on en trouve quelques-unes, elles appartiennent aux couches
calcaires et aux schistes carbures (kohlenschiefer) qui sont in-
tercalés au grès rouge, et non à la masse de celui-ci , qui
n'abonde dans les deux hémisphères (plaines de laThuringe,
Kifl'hàuser, Tilleda ; plaines de Venezuela entre Calabozo et
Chaguaramas; plateau de Cuença, au sud de Quito) qu'en
troncs de bois fossile et autres débris de monocotylédx)nées.
M. Brongriiart fils croit cependant que les impressions de
vrais palmiers manquent dans les houilles.
Dans la région équinoxiale du nouveau continent j'ai eu
l'occasion d'observer le terrain de grés rouge au nord et au
ÏND . 243
sud de réquatcur sur six points différens ; savoir : dans la
Nouvelle-Espagne (de 1100 à i3no toises de hauteur), dans
les steppes ou Llanos de Venezuela ( 3o — 5o toises), dans la
Nouvelle-Grenade ( 5o — i8oo toises), sur le plateau méri-
dional de la province de Quito ( i55o — 1600 toises), dans le
hassin de Caxamarca au Pérou (1470 toises), et dans la vallée
occidentale de l'Amazone (200 toises).
i." Nouvelle- Espagne. Les schistes et les porphyres de transi-
tion de Guanaxuato (plateau d'Anahuac), dont nous avons
donné plus haut (§§. 22 , 28) une description détaillée, sont cou-
verts d'une formation de grès rouge. Cette formation remplit
les plaines deCelaya, de Salamanca et deBurras (gootoises)j
elle y supporte un calcaire assez analogue à celui du Jura et
un gypse feuilleté. Elle remonte par la Canada de Marfil aux
montagnes qui entourent la ville de Guanaxuato , et se montre
par lambeaux dans la Sierra de Santa Rosa près de Villal-
pando ( i33o toises). Ce grès mexicain offre la ressemblance
Ja plus frappante avec le rothe todte liegende du Mansfeld en
Saxe ; il enchâsse des fragmens constamment anguleux de
lydienne, de syénite, de porphyre, de quarz et de silex
(splittriger hornstein). Le ciment qui lie ces fragmens, est;
argilo - ferrugineux , très-tenace, brun-jaunâtre, souvent
(près de la mine de Serena) rouge de brique. Des couches
de conglomérat grossier, renfermant des fragmens de deux
à trois pouces de diamètre, alternent avec un conglomérat
très-fin, quelquefois même ( Cuevas ) avec un grès à grains
de quarz uniformément arrondis. Les conglomérats gros-
siers abondent plus dans les plaines et dans les ravins que sur
les hauteurs. Dans les couches les plus anciennes ( mine de
Rayas) j'ai cru voir un passage du grès rouge au grauwacke ^
les morceaux de syénite et de porphvre enchâssés deviennent
très-petits; leurs contours sont peu distincts, et ils paroissent
comme fondus dans la masse. Il ne faut pas confondre ce
conglomérat (frijolillo de Rayas) avec celui de la mine
d'Animas, qui est gris- blanchâtre et renferme des fragmens
de calcaire compacte. Souvent dans le grès rouge de Gua-
naxuato, comme dans celui d'Eisleben en Saxe, le ciment est
si abondant (chemin de Guanaxuato à Rayas et à Salgado),
que l'on n'y distingue plus de fragmens empâtés. Dçs couches
544 IND
argileuses de 5 à 4 loises d'épaisseur alternent alors avec le
conglomérat grossier. Généralement, la grande formation de
grès rouge, superr^osée au thonsçhiefer mélallilèrc , ne paroit
(Belorado, BulTu de Guanaxuato) qu'adossée au porphyre
de transition ; mais à Villalpando on la voit clairement re-
poser sur cette dernière roche. Je n'ai point trouvé de co-
quilles pétrifiées, ni de traces de houille et de bois fossile,
dans les grès rouges de Guanaxuato. Ces substances combusti-
bles se trouvent fréquemment en d'autres parties de la Nou-
velle-Espagne, surtout dans celles qui sont moins élevées au-
dessus du niveau de la mer. On connoît la houille dans l'in-
térieur du Nouveau-Mexique, non loin des rives du Rio
del Norte. D'autres dépôts sont probablement cachés dans
les plaines du Nuevo-Sant-Ander et du Texas. Au nord de
Natchitoches , près de la houillère de Chicha , une colline isolée
fait entendre de temps en temps, peut-être par l'inflammation
du gaz hydrogène mêlé à l'air atmosphérique, des détonations
souterraines. Le bois fossile est commun dans les grès rouges
qui s'étendent vers le nord-est de la ville de Mexico. On le
trouve également dans les immenses plaines de l'intendance
de San-Luis Potosi, et près de la Villa de Altamira. La houille
du Durasno (entre Tierra-Nueva et San-Luis de la Paz) est
placée sous une couche d'argile renfermant du bois fossile ,
et sur une couche de mercure sulfuré qui recouvre le por-
phyre. Appartient-elle à des lignites très-récens? ou ne
doit-on pas plutôt admettre que ces substances combustibles
du Durasno , ces argiles et ces porphyres semi-vitreux (pech-
stein-porphyre) , globuleux et couverts d'hyalithe mamelonnée,
porphyres qui, dans d'autres parties du Mexique ^San-Juan
de la Chica ; Cerro del Fraile près de la Villa de San- Felipe)
renferment des dépôts de mercure sulfuré, sont liés à la
grande formr.tion du grès rouge P II n'est pas douteux que
cette formation ne soit tout aussi riche en mercure dans le
nouveau continent, que dans l'Allemagne occidentale; elle
l'est même là où manquent les porphyres (Cuença, plateau
de Quito); et, si la réunion de filons d'étain à des filons de
cinabre, dans les porphyres de San-Felipe , paroit éloigner
au premier abord les roches porphyriques qui abondent en
mercure, de ceux du grès rouge, il faut se rappeler que les
IND M&
thonschiefer et porphyres de transition (Hollgrund près
Stebeii, Hartenstein) sont aussi en Europe quelquefois slan-
nifères.
Je place à la suite du grès houiller de Guanaxuato une for-
mation un peu problématique, que j'ai déjà décrite , dans mon
Essai politique sur la ]S ouvelle-Espagne , sous le nom de lozero
ou d'agglomérat fcldspathlque : c'est une roche arénacée ,
blanc-rougeâtre , quelquefois vert de pomme, qui se divise,
semblable au grès à dalles ( Leuhen- ou TJ^'aldplaUcnstein de
Suhl), en plaques très-minces {lozas) -. elle renferme des grains
de quarz , de petits fragmens de thonschiefer, et beaucoup
de cristaux de feldspath en partie brisés, en partie restés in-
tacts. Ces diverses substances sont liées ensemble dans le lozero
du Mexique, comme dans la roche à aspect porphyrique de
Suhl, par un ciment argllo-ferruglneux (Canada de Serena et
presque toute la montagne de ce nom). Il est probable que
la destruction du porphyre a eu la plus grande influence sur
la formation du grès fcldspathlque de Guanaxuato. Le minéra-
logiste le plus exercé serolt tenté de le prendre au premier
abord pour un porphyre à base argileuse ou pour une
brèche porphyrique. Auteur de Valenciana le lozero forme
des masses de 200 toises d'épaisseur : elles excèdent en élé-
vation les montagnes formées par le porphyre intermédialre.
Près de Villalpando, un agglomérat fcldspathlque à très-petits
grains alterne par couches d'un a deux pieds d'épaisseur^
vingt -huit fois, avec de l'argile schisteuse brun -noirâtre.
Partout j'ai vu reposer cet agglomérat ou lozero sur le grès
rouge, et à la pente sud -ouest du Cerro de Serena, en
descendant vers la mine de Rayas, il m'a paru même assez
évident que le lozero forme une couche dans le conglomérat
grossier de Marfil. Je doute par conséquent que cette for-
mation remarquable puisse appartenir à des conglomérats
Irachjtiques ponccux , comme M. Beudant semble l'admettre
d'après l'analogie de quelques roches de Hongrie. Souvent
le ciment argileux devient si abondant que les parties en-
châssées sont à peine visibles , et que la masse passe à l'ar-
gllolithe (thonstein) compacte. Dans cet état le lozero offre
la belle pierre de taille de Queretaro ( carrières de Caretas
et de Guimilpa), qui est si recherchée pour les construc-
M6 IND
tions. J'en aï vu des colonnes de quatorze pieds de haut et
de deux pieds et demi de diamètre , rouge de chair, de brique
ou de fleurs de pécher. Ces belles couleurs, en contact avec
l'atmosphère, passent au gris, probablement par raclion de
l'atmosphère sur le manganèse dendritiforme que renferme
la roche dans ses fissures. La cassure des colonnes de Quere-
taro est unie , comme celle de la pierre lithographique du Jura.
Ce n'est qu'avec peine que Ton découvre dans ces argilolithes
quelques fragmens extrêmement petits de thonschiefer, de
quarz, de feldspath et de mica. Je ne déciderai pas si les
cristaux non brises du /ozero ou grès feldspathique se sont
développés dans la masse même, ou s'ils s'y trouvent acci-
dentellement. Je me borne à rappeler ici qu'en Europe le grès
rouge et ses porphyres sont aussi quelquefois caractérisés par
une suppression locale de cristaux et de fragmens enchâssés.
Le lozero me paroît une formation de grès superposée, peut-
être même subordonnée au grès rouge ; et si l'ancien conti-
nent ne nous offre pas une roche entièrement semblable,
nous voyons du moins les premiers germes de ce genre de
structure pseudo-porphyrique dans les bancs de grès à cris-
taux de feldspath, brisés ou intacts, qu'enchâsse quelquefois
la grande formation de grès rouge du Mansfeld et du Thu-
xingerwald. ( Freiesleben , Kupf., B. IV, p. 82, 85, 96, 194O
2." Venezuela. Dans l'Amérique méridionale, les immenses
plaines de Venezuela (Llanos du Bas-Orénoque) sont en
grande partie recouvertes de grès rouge et de terrains cal-
caires et gypseux. Le grès rouge y est disposé en gisement
eoncavc ( muldenfbrmige Lagerung) entre les montagnes du
littoral de Caracas et celles de la Parime ou du Haut-Oré-
Boque. Il s'adosse au nord à des schistes de transition ; au
sud il repose immédiatement sur le granité primitif. C'est
un co'iglomérat à fragmens arrondis de quarz , de pierre ly-
dienne et de kieselschiefer , réunis par un ciment argilo-fer-
Tugineux, brun -olivâtre et extrêmement tenace. Ce ciment
est quelquefois (près de Calabozo ) d'un rouge si vif, que les
^cns du pays l'ont cru mêlé de cinabre. Le conglomérat à
gros grains y alterne avec un grès qnarzeux à grains très^fins
(Mesa de Paja). L'un tt l'autre enchâssent de petites masses
«de fer brun et du bois pétrifié de monocotylédonées. Cette
IND 247
formation arénacée est recouverte (Tisnao) par un calcaire
compacte gris-blanchàtre, analogue au calcaire du Jura. Au-
dessus de ce calcaire on trouve ( Mesa de San-Diego et Ortiz)
du gypse lamelleux alternant avec des couches de marne. Je
n'ai vu de coquilles fossiles dans aucune de ces couches aréna-
cces, calcaires , g)'^pseuses et marneuses. Le ciment du conglo-
mérat ne fait nulle part effervescence avec les acides ; et par
son gisement et sa composition le grès des steppes de Venezuela
m'a paru très-éloigné du nagelfluhe (grès à lignites) du terrain
tertiaire, avec lequel il a une certaine analogie d'aspect par
la forme arrondie des fragmens enchâssés. Ces formations aré-
nacées et calcaires ne s'élèvent pas au-dessus de 3o à 5o toises
de hauteur absolue. Dans la partie orientale du Oano de
Venezuela (près Curataquiche) on trouve dispersés, àlasur~
face du sot, de beaux morceaux de jaspe rubané ou cailloux
d'Egypte. Appartiennent- ils au grès rouge, ou sont-ils dus,
comme près de Suez , à un terrain plus moderne ?
3." IS ouvelle- Grenade. Une formation de grés d'une étendue
prodigieuse couvre, presque sans interruption, non -seule-
ment les plaines septentrionales de la Nouvelle -Grenade ,
entre Mompox, le canal de Mahates et les montagnes de
Tolu et de Maria, mais aussi le bassin du Rio de la Magda-
lena (entre TenerifFe et Melgar) et celui du Rio Cauca
(entre Carthago et Cali). Quelques fragmens épars de grès
schisteux et charbonneux (kohlenschiefer) que j'ai trouvés à
l'embouchure du Rio Sinu (à l'est du golfe deDarien), ren-
dent probable que cette formation s'étend même vers le Rio
Atrato et vers Tisthme de Panama. Elle s'élève à de grandes
hauteurs , non sur le rameau intermédiaire ou central de la
Cordillère (Nevados de Tolima et de Quindiù), mais sur les
rameaux oriental (Paramos de Chingasa et de Suma Paz) et
occidental (montagnes entre le bassin du Rio Cauca et le terrain
platinifère du Choco ). J'ai pu suivre ce grès de la Nouvelle-
Grenade, sans le perdre de vue un seul instant , depuis la vallée
du Rio Magdalena ( Honda , Melgar, 1 3o — 188 t.), par Pandi ,
jusqu'au plateau deSanta-Fé de Bogota (i365 t.), etmême jus-
qu'au-dessus du lac de Guatavita et de la chapelle de Notre-
Dame de Montserrate. Il s'adosse à la Cordillère orientale (celle
qui sépare les afiduens du Rio JVÏagdalena des affluens du Mets
'4B IND
et de rOrénoque) jusqu'à plus de 1800 toises de hauteur au-
dessus du niveau de l'océan. J'insiste sur ces notions de géo-
graphie minéralogique, parce qu'elles fournissent de nouvelles
preuves de l'énorme épaisseur qu'atteignent les roches dans
les régions équinoxiales de l'Amérique. Plusieurs terrains
secondaires (grès avec couches de houille, gypse avec sel
gemme, calcaire presque dépourvu de pétrifications ) , que
dans le plateau de Santa- Fé de Bogota on seroit tenté de
prendre pour un groupe de formations locales remplissant un
bassin, descendent jusque dans des vallées dont le niveau est
de 7000 pieds plus bas que ce plateau. En allant de Honda à
Santa -Fé de Bogota, le grès est interrompu, près de Villeta,
par des thonschiefer de transition ; mais la position des sources
salées de Pinccima et de Pizarà près de Muzo me porte à croire
qu'aussi de ce côté-là, sur les rives du Rio Negro (entre les
schistes amphiboliques et carbures de Muzo, renfermant des
éméraudes, et les schistes de transition avec filons de cuivre
de Villeta), le grès houiller et le g}^pse mui^iatifère du pla-
teau de Bogota et de Zipaquira se lient aux terrains homo-
nymes qui remplissent le J)assin du Rio Magdalena entre Honda
et le détroit de Carare.
Ce grès de la Nouvelle-Grenade (là où j'ai pu l'examiner
entre les 4° et g)(,° de lat. bor.) est composé de couches
alternantes de grès quarzeux et schisteux à petits grains,
et de conglomérats qui enchâssent des fragmcns anguleux
(ayant 2 à 5 pouces de largeur) de pierre lydienne, de
thonschiefer, de gneis et de quarz (Honda , Espinal). Le ciment
est argileux et ferrugineux, quelquefois siliceux. Les couleurs
de la roche varient du gris-jaunàtre au rouge-brunâtre. Cette
dernière couleur est due au fer : aussi trouve-t-on partout
de la mine de fer brun, très-compacte, enchâssée en nids,
en petites couches et en filons irréguliers. Le grès est stra-
tifié en bancs plus ou moins horizontaux. Quelquefois ces bancs
inclinent par groupes et d'une manière assez constante. Près
de Zambrano , sur la rive occidentale du Rio Magdalena , au
sud de Teneriffe , la roche prend une structure globuleuse.
J'y ai vu des boules de grès à très-petits grains de deux à trois
pieds de diamètre : elles se séparent en douze ou quinze couches
concentriques. La pierrç lydienne du plus beau noir, rarç-«
IND ^49
ment traversée de filets de quarz, est beaucoup plus abon-
dante dans les conglomérats grossiers que ne le sont les fragmens
de roches primitives. Partout le grès schisteux à petits grains
l'emporte , pour sa masse , sur les conglomérats à gros fragmens.
Sur les hauteurs (au-dessus de 800 à 1000 toises) les derniers
disparoissent presque en entier. Le grès du plateau de Bogota
et celui que l'on observe en montant aux deux chapelles
placées au-dessus de la ville deSanta-Fé, à i65o et 1687 toises
d'élévation , sont uniformément composés de très-petits grains
quarzeux. On n'y remarque presque plus de fragmens de
lydienne ; les grains de quarz se rapprochent tellement que
la roche prend quelquefois l'aspect d'un quarz grenu. C'est ce
même grès quarzeux qui forme le pont naturel d'icononzo.
Nulle part ces roches arénacées ne font effervescence avec
les acides. Outre la mine de fer brun et (ce qui est assez
■curieux) outre quelques nids de graphite très-pur, cette
formation renferme aussi, et à toutes les hauteurs, des cou-
ches d'argile brune , grasse au toucher et non micacée. Cette
argile ( Gachansipa , Chalechc , Montagne de Suba) devient
quelquefois fortement carburée et passe au brandschiefer.
Le sel purgatif d'Honda (sulfate de magnésie), si célèbre
dans ces contrées , se montre en elFlorcscence sur ces couches
argileuses (Mesa de Palacios près Honda). Nulle part le grès
ne présente différentes couleurs mélangées par zones , ni ces
masses d'argile non continues et à forme lenticulaire qui ca»
ractérisent le grès bigarré (bunte sandstein) , c'est-à-dire, le grès
qui couvre le calcaire alpin ou zechstein. J'ai vu reposer
immédiatement la formation de grès que nous venons de
décrire , sur un granité rempli de tourmalines ( Penon de
Rosa au nord de Banco, vallée de la Magdalena ; cascade
de la Perîa près Mariquita), sur le gneis (Rio Lumbi, près
des mines abandonnées de Sainte-Anne), sur le thonschiefer
de transition ( entre Alto de Gascas et Alto del Roble au
nord -ouest de Santa -Fé de Bogota). On ne connoît aucune
autre roche secondaire sous le grès de la Nouvelle- Grenade.
Il renferme des cavernes (Facatativa, Pandi) et offre des
couches puissantes, non de lignite, mais de houille feuilletée
et compacte , mêlée de jayet (pechkohle), entre la Palma et
Guaduas ( 600 toises) , près de Vêlez et la Villa de Leiva ,
25o Ijyj)
comme aussi dans le plateau de Bogota (Chipe près Canoas ;
Suba; Cerro de los Tunjos), à la grande hauteur de iSyo
toises. Les restes de corps organisés du règne animal sont
extrêmement rares dans ce grès. Je n'y ai trouvé qu'une seule
fois des trochilites ( ? ) presque microscopiques dans une couche
d'argile intercalée (Cerro del Portachuelo, au sud d'icononzo).
Il se pourroit que ces houilles de Guaduas et de Canoas fus-
sent un terrain plus récent, superposé au grès rouge ; mais
rien ne m'a paru annoncer cette superposition. La houille
piciforme (jayet, pechkohle) appartient sans doute de pré-
férence aux lignites du grès tertiaire et des basaltes; mais
elle forme aussi incontestablement de petites couches dans
la houille schisteuse (schieferkohle) du terrain de porphyre
et grès rouge.
Les formations qui recouvrent le grès de la Nouvelle-
Grenade, et qui le caractérisent , je crois, plus particulière-
ment comme grès rouge dans la série des roches secondaires,
sont le calcaire fétide (confluent du Caîio Morocoy et du
Rio Magdalena), et le gypse feuilleté (bassins du Ri» Cauca
près de Cali, et du Rio Bogota près de Santa -Fé). Dans ces
deux bassins du Cauca et du Bogota, dont la hauteur diffère
de près de 900 toises, on voit se succéder de bas en haut ,
très-régulièrement, les trois formations de grès houiller, de
gypse et de calcaire compacte. Les deux dernières ne sem-
blent constituer qu'un même terrain qui représente le calcaire
alpin ou zechstein , et qui, généralement dépourvu de pétri-
fications, renferme quelques ammonites àTocayma (vallée du
Rio Magdalena). Le gypse manque souvent; mais à la grande
élévation de 1400 toises (Zîpaquira, Enemocon etSesquiler)
il est muriatifère, offrant dans l'argile ( salzthon ) des dépôts
de sel gemme qui , depuis des siècles, sont l'objet de grandes
exploitations.
D'après l'ensemble des observations que je viens de pré-
senter sur le gisement du grès de la Nouvelle-Grenade, je
n'hésite pas de regarder cette roche , qui a pris un dévelop-
pement de cinq ou six mille pieds d'épaisseur, et qui va
bientôt être examinée de nouveau par deux voyageurs très-
instruits, ]\IM. Boussingault et Rivero , comme un grès rouge
(todtes liegende) et non comme un grès bigarré (grès de
IND 25i
îvcbra). Je n'ignore pas que des couches frt'quentes d'argile
et de mine de fer brun appartiennent plus particulièrement
au grès bigarré, et que les oolithes manquent souvent aussi
dans ce grès. Je n'ignore pas qu en Europe le grès bigarré
(placé au-dessus du zechstein) présente quelques traces de
houille, de petites couches de grès extrêmement quarzeux
(quarz grenu) et du sel gemme, et que cette dernière subs-
tance lui appartient même exclusivement en Angleterre.
Toutes ces analogies me paroitroient très-importantes , si
des couches de conglomérat grossier alternant (dans les
basses régions) avec des couches de grès à petits grains , si
des fragmens anguleux de pierre lydienne, et même de
gneis et de micaschiste , enchâssés dans des conglomérats
grossiers, ne caractérisoient pas le grès de la ]Nouvelle -Gre-
nade comme parallèle au grès rouge ou grès houiller, c'est-
à-dire comme parallèle à celui qui supporte immédiatement
le calcaire alpin (zechstein ),' renfermant le gypse et le sel
gemme. Lorsque le grès bigarré (nord de l'Angleterre et
Wimmelburg en Saxe) présente quelquefois des fragmens de
granité et de syénite, ces fragmens sont arrondis et simple-
ment enveloppés d'argile; ils ne forment pas un conglomérat
compacte et tenace à fragmens angulaires comme le grès rouge.
Cette dernière roche abonde, dans le Mansfeld comme dans,
la Nouvelle- Grenade, en masses intercalées d'argile ( Cres-
feld , Eislebcn, Rothenberg) , et en petites couches de mine
de fer brun et rouge (Burgorner, Hettstedt). La structure
globuleuse qu'offre le grès de la vallée du Rio Magdalena se
retrouve dans le grès houiller de la Hongrie ( Klauscnburg),
dans le conglomérat blanchâtre de Saxe (weiss-liegendes de
Helbra) qui lie le grès houiller au zechstein, et, selon de&
observations que nous avons faites, M. Freiesleben et moi ^
en 1795 , même près de Lausanne, dans la molasse d'Argovie;
(grès tertiaire à ligni(es\ C'est l'ensemble des rapports de
gisement qui détermine l'âge d'une formation , ce n'est pas,
sa composition et sa structure seules. Les géognosles qui
connoissent les différens terrains de grès, non d'après des
échantillons de cabinet, mais par de fréquentes excursions,
dans les montagnes , savent très-bien que , si ( par la sup-
pression du calcaire alpin, du muschelkalk, du calcaire du
^52 ijsB
Jura et delà craie) le grès rouge, le grès bigarré mêlé d'ar-
gile, le quadersandstein qui n'est pas toujours blanc et très-
quarzeux , et la molasse alternant avec des poudingues
grossiers (nagelfluhe) étoient immédiatement superposés les
uns aux autres, on auroit de la peine à prononcer sur les
limites de ces quatre terrains arénacés, d'un âge si différent.
Le grès rouge de la Nouvelle -Grenade semble plonger,
dans la partie septentrionale du bassin du Rio Magdalena
(entre Mahates, Turbaco et la côte de la mer des Antilles),
sous un calcaire tertiaire rempli de madrépores et de coquilles
marines, et constituant, près du port de Carthagène des Indes,
le Cerro de la Popa. Mais, lorsqu'on s'élève à la hauteur de
a 400 toises , la formation de calcaire et de gypse que supporte
Je grès rouge, est couverte ( Campo de Gigantes , à l'ouest de
Suacha dans le bassin de Bogo(a) de dépôts d"alluvion dans
lesquels j'ai trouvé d'énormes ossemens de mastodontes.
D'après la tendance, peut-être trop générale, de la géognosie
moderne à étendre le domaine des terrains intermédiaire et
tertiaire aux dépens du terrain secondaire , on pourroit être
tenté de regarder le grès de Plonda, le gypse avec sel gemme
de Zipaquira , et le calcaire de Tocayma et de Bogota,
comme des formations postérieures à la craie. Dans cette hy-
pothèse, les houilles de Guaduas et de Canoas deviendroicnt
des lignites, et le sel gemme de Zipaquira, d'Enemocon ,
de Scsquiler et de Chamesa, entièrement dépourvu de débris
végétaux , seroit une formation parallèle aux dépôts salifères
(avec lignites) de la Galicie et de la Hongrie, que M. Beu-
dant croit appartenir au terrain tertiaire. Mais l'aspect du
pays; le manque presque total de corps organisés fossiles,
observe jusqu'à 10,000 pieds de hauteur perpendiculaire ; la
puissance de ces couches arénacées et calcaires , uniformé-
ment répandues, dépourvues de rognons de silex et d'in-
filtrations siliceuses, très- compactes , et nullement mélan-
gées de sables et d'autres matières incohérentes, s'opposent
à ces idées, j'aurois presque dit, à ces empiètemens du
terrain tertiaire sur le terrain secondaire. L'ensemble des
phénomènes que j'ai exposés me fait croire que le grès de
la Nouvelle- Grenade, enchâssant des fragmens de lydienne
et des roches primitives, est le véritable grès rouge de l'an-
IND 255
cien continent. On ignore si ce grès, que j'ai vu monter
jusqu'à 1700 toises de hauteur à la pente occidentale de la
Cordillère de Chingasa (Cordillère qui sépare la ville de
Santa- Fé de Bogota des plaines du JNIeta), dépasse le som-
met de cette grande chaîne de montagnes , en se prolon-
geant vers les plaines de Casanare. On pourroit le soup-
çonner; car les dépôts de sel gemme et les sources de muriate
de soude se suivent, en traversant la Cordillère orientale de
la Nouvelle- Grenade , depuis Pinceima jusqu'aux Llanos du
Meta (par Zipaquira, Enemocon , Tausa, Sesquiler, Gachita ,
Médina, Chita, Chamcsa et El Receptor) , du sud-ouest au
nord-est , dans une même direction , sur une distance de plus
de cinquante lieues. Dans toutes les régions du globe on ob-
serve cette disposition des sources salées par bandes (ou cre-
vasses?) plus ou moins prolongées. Lorsque des plaines sali-
fères de Casanare on avance vers l'Orénoque , les formations
secondaires disparoissent peu à peu, et dans la Sierra Parime
le granite-gneisse montre partout à découvert. Seulement sur
les bords de l'Orénoque, près des grandes cataractes d'Atures
et de Maypures, on retrouve de petits lambeaux de conglo-
mérat ancien superposés h la roche primitive. Ce conglomérat
enchâsse des grains de quarz et même (Isla del Guachaco)
des fragmens de feldspath réunis par un ciment brun-olivâtre
argileux et très-compacte. Le ciment, là 011 il abonde, offre
une cassure conchoïde et passe au jaspe. Cette roche arénacée,
que je crois appartenir au grès rouge des steppes de Vene-
zuela, renferme des masses très-aplaties de mine de fer brun.
Elle rappelle ces grès qui, dans la Haute-Egypte et en Nubie,
reposent aussi immédiatement sur le granité -gneis des cata-
ractes du Nil.
4.° P/afeau de QwiVo.Dansl'hémisphère austral, les Cordillères
de Quito m'ont offert la formation de grès rouge la plus
étendue de celles que j'ai observées jusqu'ici. Cette roche
couvre, à i3oo et i5oo toises de hauteur au-dessus du
niveau de la mer, sur une longueur de vingt-cinq lieues,
tout le plateau de Tarqui et de Cuença, devenu célèbre
par les opérations des astronomes françois. Elle s'élève dans
le Paramo de Sarar jusqu'à 1900 toises, et l'épaisseur de sa
masse entière excède plus de 800 toises. Elle repose au nord
254 IND
(Caîïar, peute mëndlonale de l'Assuay) el au sud (Aito ùè
PuUa près Loxa) sur du schiste uxicacé primitif. La forma-
tion de grès rouge de la proA'ince de Quito est colorée par de
la mine de fer brun et jaune, dont elle renferme de nom-
breux filons. Le grès est généralement très-argileux, à petits
grains de quarz peu arrondis; mais quelquefois aussi il est
schisteux, et alterne, comme dans la Thuringe, avec un con-
glomérat qui enchâsse des fragmens de porphyre de trois,
de cinq et même de neuf pouces de diamètre. On trouve dans
cette formation : des couches d'argile, tantôt brune (Tambo de
Burgay et rives de Vinayacu), tantôt blanche et stéatiteuse ,
passant à l'argilolithe (thonstein) des porphyres du grès rouge
(Rio Uduchapa et Cerro de Coxitambo) , et se couvrant, au
contact avec Tair atmosphérique , de nitrate de potasse
(Cumbe) ; des troncs de bois pétrifié de monocotylédones (ravin
de Silcayacu, où j'en ai vu des morceaux de 4 pieds de long
et de 14 pouces d'épaisseur); du goudron minéral fluide et en-
durci en asphalte a cassure conchoïde (Parche et Coxitambo);
des silex (splittrigcr hornstein) passant au silex pyromaque ou
àragathe( Delay ) ; des filons de mercure sulfuré [Cerri-s de
Guazun, et Upar au nord-est du village d'Azogues); des cou-
ches de manganèse oxidé noirâtre et pulvérulent (à l'ouest de
la ville de Cuença ) ; du calcaire grenu et lamelleux ( Fortete,
au bord occidental du Llano de Tarqui). Cette formation
calcaire, que dans ce pays on appelle très- improprement
jaspe rubané, présente des couches alternantes de calcaire
opaque et saccharoï;!e, semblable au marbre deCarare, et de
calcaire fibreux et ondulé, en stries laiteuses. La masse entière
est diaphane comme le plus bel albâtre oriental (le marbre
memphitique ou phengites des anciens). J'aurois été tenté de
prendre cette roche de Tarqui , qui est recherchée par les
marbriers comme l'albâtre de Florence et le marbre de Tolonta
( entre Chillo et Quito ) , pour une variété de travertin ou for-
mation d'eau douce , si au sud de Cuença , au bord du Rio
Machangara, elle ne m'avoit paru (d'après l'inclinaison de
ses couches) intercalée au grès rouge que je viens de dé-
crire. 11 faut toutelois distinguer de ce marbre translucide
et rubané de Tarqui , le calcaire grenu et opaque du Ce-
bollar, qui vient au jour un peu au nord de Cuença, et
IND ^55
qui, recouvert du grès rouge, est vraisemblablement (§. lo)
superposé au micaschiste du Canar. Dans les parties volca-
niques des Andes, des plateaux ou bassins élevés sont rem-
plis, les uns, de formations secondaires, couvrant des por-
phyres de transition ; les autres , de formations tertiaires
et d'eau douce, superposées à des tuffs trachytiques. Ce n'est
que lorsque des géognostes instruits se seront établis dans
les grandes villes placées sur le dos des Cordillères , villes qui
deviendront les centres de la civilisation américaine, que
l'on pourra pi-ononcer avec certitude sur ces lambeaux de
terrains calcaires, gypseux et arénacés, que l'on trouve entre
J200 et 1600 toises de hauteur.
5.° Pérou. La formation de grès rouge de Cuença, qui est
recouverte sur plusieurs points de couches de gypse feuilleté
(Muney, Juncay et Chalcay, à l'ouest de Nabon), se trouve
répétée dans le Haut-Pérou, à 1460 toises de hauteur, dans
le grand plateau de Caxamarca. Ce grès de Caxamarca est
également argileux, dépourvu de coquilles et rempli de
minerai de fer brun. Il m'a paru appuyé sur des porphyres
d'un aspect trachytique (Cerros deAroma et de Cundurcaga).
Il supporte le calcaire alpin de Montan et de Micuipampa,
qui est célèbre par ses richesses métalliques. Les eaux ther-
males hydrosulfureuses qui sortent des grès de Cuçnça (lat.
austr. 2° 55') et de Tollacpoma près Caxamarca (lat. austr.
7" 8'), ont presque la même température, 72° et 69° cent.
L'analogie qu'offrent les grès rouges de la Nouvelle-Gre-
nade , du Pérou et de Quito , avec les grès rouges du pays
où Fiichsel {Historia terrœ et maris ex historia Thuringiœ eruta)
a donné la première description de la grande formation
houillère, doit frapper tous les géognostes expérimentés. Je
n'insisterai pas sur les phénomènes si connus de l'alternance
des conglomérats grossiers et des grès à grains très -fins; ni
sur l'absence de tout fragment calcaire, fragmens dont on
ne trouve qu'un exemple très-rare dans des poudingues du
grès rouge des Pyrénées (vallée de Barillos) ; ni sur les
couches intercalées de houille, d'argile, de fer brun et de
calcaire .- je me bornerai à rappeler dans les grès rouges de
rAllemagne les mines de mercure (MOrsfeld et Moschellands-
berg dans le duché de Deux-ponts, comme Dombraya en
256 IND
Hongrie); les bois pétrifiés de plantes monocotylédonées
(Siebiglterode, Kelbra et Rothenburg, en Thuringe); les
agathes, les silex communs et les silex pyromaques (horn-
et feuerstein) passant à la calcédoine ( KiflFhauser , Wie-
derstàdt, Goldlauter et Grossreina , en Saxe, dans le con-
glomérat grossier du grès rouge ; Oberkirchen et Tholey dans
le duché de Deux-ponts ; Netzberg près Ilefeld , au Harz ,
dans le mandelstein du grés rouge) ; du bitume minéral
(Naundorf et Gnolzig dans le comté de Mansfeld). Tous ces
phénomènes se retrouvent dans la partie de TAmérique équi-
noxiale que j'ai parcourue.
6.° RîVes de l'Amazone. Le grand bassin de la rivière des
Amazones offre, du moins dans sa partie occidentale, les
mêmes phénomènes que nous avons indiqués en traçant le
tableau géognostique des Llanos de Venezuela ou du bassin
de rOrénoque. Lorsqu'on descend du sommet des Andes gra-
nitiques de Loxa par Guancabamba aux rives du Chamaya , on
trouve superposé aux porphyres de transition de Sonanga un
grès à ciment argileux, couvert (entre Sonanga et Guanca)
d'un calcaire qui renferme du gypse et du sel gemme. Ce grès
de Chamaya remplit, à i go et 260 toises de hauteur au-dessus
du niveau de l'océan , les plaines de Jaen de Bracamoros. 11
forme des collines à pentes abruptes, ressemblant à des forti-
fications en ruines. On y distingue des couches à petits grains
arrondis de quarz, et des conglomérats grossiers, composés de
galets de porphyre , de pierre lydienne et de quarz, de deux
à trois pouces de diamètre. Les conglomérats grossiers sont
assez rares -. ils forment cependant le pongo de Rentema, et
d'autres digues rocheuses qui traversent le Haut-Maragnon
et entravent la navigation du fleuve. Parmi les fragmens en-
châssés dans le grès de Chamaya, je n'en ai jamais pu décou-
vrir un seul qui fût de roche calcaire. Cette circonstance ,
la présence des lydiennes empâtées dans la masse , l'alternance
du grès à petits grains avec les conglomérats grossiers , partout
si rares (Schochwitz en Saxe) dans le grès bigarré, enfin la
superposition du zechstein et du gypse avec sel gemme au grès
de l'Amazone , me font admettre l'identité de cette formation
et de celles de Cuença et de Caxamarca, malgré la différence
de hauteur absolue de plus de 1 000 toises. jNous avons déjà vu ,
IND 25;
dans la Nouvelle-Grenade , le grès hoiiiller descendre du grand
plateau de Bogota aux plaines du Rio Magdalena. Une parti-
cularité bien remarquable, et qui paroit, au premier abord ,
éloigner le grès de l'Amazone et du Chamaya du grès rouge
de l'Europe, est l'intercalation de quelques couches de sable
à parties entièrement désagrégées. J'ai vu, entre Chamaya
et Toniependa , des bancs de grès quarzeux , de trois à quatre
pieds d'épaisseur, alterner avec des bancs de sable siliceux de
sept à huit pieds. Le parallélisme de ces couches peu incli-
nées se soutient à de grandes distances. Je n'ignore pas que
le mélange de sable et de grès solide caractérise plus particu-
lièrement le grés bigarré, celui qui recouvre le zechstein
( Wimmelburg et Cresfeld en Saxe) , et le grès tertiaire au-
dessus du gypse à ossemens (Fontainebleau près de Paris);
mais MM. Voigt et Jordan ont aussi trouvé des bancs de
sable (triebsand) dans le grès rouge ou houiller( Rôhrig près
de Bieber, et le Kupferbvrg près Walltenried ). On pourroit
croire que Faiialogie que nous venons d'indiquer avec les
grès et sables marins du terrain tertiaire, se trouve l'ortifiée
jusqu'à un certain point par la fréquence des oursins pétri-
fiés que nous avons vus épars à la surface du sol, à la fois suu
les plages de l'Amazone, à ig5 toises, et près de Micuipampa,
à plus de 1 800 toises de hauteur ; mais il se peut que , dans ces
régions si peu examinées jusqu'ici, des formations calcaires
très -neuves reposant sur le zechstein , et rien ne semble an-
noncer que le grès de Chamaya, alternant à la fois avec des
bancs de sable et des conglomérats à fragmens de porphyre
et de pierre lyd enne, soit un grès tertiaire semblable à celui
du terrain parisien.
Je devrois peut-être placer immédiatement après le grès
houiller ie zechstein ou calcaire alpin , parce que ces deux
roches ne constituent quelquefois qu'une seule formation ;
mais j'aime mieux décrire d'abord le terrain de quarz deGuan-
gamarca (flbzquarz) , parce qu'il est parallèle vu gfès houiller.
C'est un équis^alent géognosfiipie propre à l'hémisphère austral.
Roche de quarz secondaire.
§. 27. Cette formation remarquable et entièrement Incon-
nue aux géognostes de l'Europe domine, dans les Andes du
a3. 17
a58 IND
Pérou, entre les 7° et 8° de latitude australe. Je l'ai vue re-
poser indifféremment sur des porphyres de transition ( à la
pente orientale des Cordillères, Cerro de N. S. del Carmen
près S. Felipe, 982 toises; Paramo de Yanaguanga entre Micui-
pampa et Caxamarca, a 900 toises.- à la pente occidentale des
Cordillères, Namas et Magdalena , 690 toises), et sur du gra-
nité primitif (Chala , près des côtes de l'océan Pacifique ,212
toises). Cette superposition sur des roches d'un âge très-diffé-
rent prouve Vindépendance de la formation que nous faisons
connoître. Elle est beaucoup moins développée à la pente orien-
tale qu'à la pente occidentale des Andes. A la seconde, elle
atteint une épaisseur de plusieurs milliers de pieds, comptée
perpendiculairement aux fentes de stratification : elle y rem-
place le grès rouge, supportant immédiatement (villages in-
diens de la Magdalena et de Contumaza) le zechstein ou cal-
caire alpin. C'est, ou la plus récente des formations de tran-
sition, ou la plus ancienne des formations secondaires: c'est
un véritable quarz compacte ou grenu , non carié ou cellu-
leux, le plus souvent blanc-grisàlre ou jaunâtre et opaque; il
n'est mélangé ni de talc ni de mica. Cette formation est tantôt
compacte et à cassure écailleuse, comme Je quarz en bancs
(lagerquarz du granite-gneis primitif); tantôt à grains très-
fins, semblable au quarz du terrain calcaire de transition de
la Tarantaise. Ce n'est par conséquent ni une roche arénacée,
ni une variété de ces grès quarzeux à ciment silicifère, dans
lesquels le ciment disparoît peu à peu , et qui appartiennent
à la fois au grès bigarré (Detmoid), au quadersandstein, au grès
vert (green sand), à l'argile plastique ( trappsandstein) et au
terrain tertiaire (forêt de Fontainebleau). Les ravins pro-
fonds dont la pente des Cordillères est sillonnée , et le nombre
immense de blocs arrachés de leur gîte naturel, facilitent
l'observation de cette formation de quarz, qui est très-homo-
gène et dépourvue de coquilles, comme aussi de couches subor-
données. Je l'ai examinée pendant plusieurs jours, croyant
trouver dans une roche recouverte de zechstein et remplaçant
le grès rouge, des traces de ciment, de grains ou de fragmens
aglutinés : toutes mes recherches ont été inutiles; nulle part
je n'ai pu me convaincre que ce quarz compacte ou grenu fût
une roche arénacée ou fragmentaire. Elle est quelquefois
ÏND 259
très-rëgulièrement séparée en bancs de huit pouces à deux
pieds d'épaisseur, dirigés ( Aroma , Magdaiena et Cascas 1
N. 53° — 68° O, et inclinés de 70° à 80° au S. E. A la pente
orientale des Andes, aux rives du Chamaya, une couche de
quarz semblable à celle que je A-iens de décrire, paroît in-
tercalée à une formation de calcaire compacte , bleu-grisâtre.
Ce calcaire n'est pas une roche de transition (comme on pour-
roit le croire à cause de la position du quarz compacte de
Pesay et de Tines en Tarantaise , §. 20) ; le nombre et la na-
ture de ses coquilles, comme la sinuosité de ses couches , sem-
blent le rapprocher au contraire du zechstein ou calcaire
alpin. 11 n'est pas extraordinaire de voir une roche siliceuse,
qui supporte un calcaire, pénétrer dans celui-ci et y former
une couche intercalée. Cette pénélraiion s'observe aussi
quelquefois, mais en filons (Ccrro de N. S. del Carmen près
San-Felipe), dans la formation sur laquelle repose la roche
de quarz. Le calcaire alpin de San-P'elipe recouvre cette
roche, et celle-ci est placée sur un porphyre vert de tran-
sition, qui est traversé de filons de quarz de trois pieds d'é-
paisseur.
Il sera utile de rappeler, à la fin de cet article, qu'il ne
faut pas confondre neuf formations de quarz et de grcs quar-
zeux des terrains primitif, intermédiaire, secondaire et ter-
tiaire, dont seulement la seconde et la quatrième sont indé-
pendantes, tandis que les autres ne forment que des bancs
subordonnés: 1.° quarz (lagerquarz) des granités- gneis , des
micaschistes et des thonschicfer primitifs ; 2." quarz chloriteux;
ou talqueux de MinasGeraes du Brésil et de Tiocaxas dans les
Andes de Quito : formation indépendante primitive, succé-
dant au thonschicfer (§.16), ou le remplaçant, comme en
Norwége; 5.° quarz compacte de transition, décrit par MM.
Brochant, Haussmann et Léopold de Bucli , et subordonné
(§. 20) aux roches calcaires et schisteuses de la Tarantaise, de
Kemi-Elf en Suéde, et de Skeen en Norwége (§. 20) ; 4."
quarz secondaire (§. 27), parallèle au grès rouge, et péné-
trant dans le calcaire alpin des Andes de Contumaza et de
Huancavelica. A ces formations de quarz pur on peut joindre
les masses entièrement qu.irzeuses, 5." du grès bigarré; 6°
du quadersandstein ; 7.° du grès vert ou grès secondaire à
86o IND
iignifes, placé entre le calcaire jurassique et la craie; 8.° du
grès appartenant au grès tertiaire à lignites (argile plastique)
au-dessus de la craie; 9.° du grès de Fontainebleau. On dé-
termine une roche avec d'autant plus de sûreté, que Ton a
sous les yeux le tableau des formations qui sont analogues
par leur composition, ruais très-différentes par leur gisement.
II. ZeCHSTEIN ou CALCAIRE ALPIN (mAGNESIAN LIMESTONe) ;
Gypse hydraté; Sel gemme.
§. 28. Le mot de zechstein n'est ordinairement appliqué par
les mineurs et les géognostes d'Allemagne qu'à une seule assise
de la formation que nous allons décrire : on distingue alors
le calcaire compacte (zechstein) du schiste cuivreux qu'il
recouvre immédiatement , et des gypses et des calcaires fétides
qui lui sont superposés. J'appelle zechstein tout le groupe
dont cette roche est le représentant géognostique. C'est une
grande formation calcaire qui succède immédiatement au grès
rouge ou grès houiller, et qui est quelquefois si intimement
liée avec ce grès qu'elle s'y trouve intercalée. La limite supé-
rieure du zechstein est plus difficile à fixer : en Allemagne
et dans plusieurs parties de la France orientale, cette roche
se termine là où commence le grès bigarré ou grès à oolithes
(bunte sandstein). En Angleterre, le magnesian limestone,
représentant par sa position le zechstein, est recouvert d'une
formation marneuse et muriatifère (red mari), qui offre beau-
coup d'analogie avec le grès bigarré d'Allemagne ; car dans ce
dernier on rencontre aussi plus de couches d'argile et de
marne que de véritable grès. Comme, d'un autre côté, le sel
gemme d'Angleterre appartient au red mari, tandis que le
sel gemme de la majeure partie du continent appartient au
zechstein, on peut admettre que, des deux formations, a p-u
près parallèles, de red mari et de grès bigarré , renfermant
des marnes, des argiles et des oolithes, la première est plus
intimement liée au zechstein , tandis que la seconde Test plus
au muschelkalk., et, quand celui-ci et le quadersandstein ne
se sont pas développés, au calcaire également marneux et
oolithique du Jura. C'est peut-être d'après des inductions
analogues que, dans son excellent Tableau des formations
d'Angleterre, publié en 1816, M. Buckland avoit réuni, dans
IND ^Si
un même terrain, le magnesian limestone elle red mari ou
new red sandstone. Quelque grande que soit l'importance
que nous attachons à ces affinités géognostiques , comme aux
phénomènes d'alternance et de pénétration observés dans des
Toclies qui se succèdent immédiatement, nous ne nous en
croyons pas moins en droit de séparer les diverses formations
de grès rouge, de zechstein et de grès bigarré, là où, dans
les deux hémisphères, nous les avons vues prendre un déve-
loppement extraordinaire.
Dans le cours de ce travail je me suis souvent servi, à
l'exemple de beaucoup degéognostes célèbres, pour désigner
le zechstein, du mot plus sonore de calcaire alpin, quoique je
sache très-bien que, d'après les belles recherches de MM. de
Buch et Escher, la majeure partie des calcaires qui consti-
tuent les hautes Alpes de la Suisse , sont des calcaires de
transition (§. 22). A une époque où l'on a tant embrouillé
la géognosie par la création de dénominations vagues et qui
ne sont adoptées que par un très-petit nombre de savans ,
je n'ai rien voulu changer à la nomenclature reçue , quelque
vicieuse ou barbare qu'elle me parût. Les imperfections du
langage des géognostes ne sont dangereuses pour la science,
que lorsqu'on ne définit pas avec clarté la position de chaque
formation et les limites entre lesquelles ces formations se trou-
vent circonscrites. Dans la Bavière méridionale , dans le Tyrol,
dans la Styrie et le pays de Salzbourg, les hautes Alpes de
Benedictbaiern, deChiemsée, de Hall, d'Ischel, de Gmunden
et de l'Untersberg, sont très-probablement du zechstein. Au
Montperdu , dans la chaîne des Pyrénées, cette roche, mêlée
de calcaire fétide, s'élève à plus de 1760 toises de hauteur*
Dans les Andes du Pérou , le zechstein, très -distinct du
calcaire de transition , renferme des coquilles pétrifiées sur la
crête des montagnes entre Guambos et Montan, et près Mi-
cuipampa (1400 — 2000 toises) ; entre Yauricocha et Pasco
(2100 toises); près de Huancaveliea , Acoria et Acobamba
(2100 — 2207 toises). On voit par ces exemples que le zech-
stein atteint au nord et au sud de l'équateur de très-grandes
élévations. On le trouve bien certainement dans la région
alpine des Pyrénées , du Tyrol et des Andes ; mais le mot
calcaire a/pjri. n'indique pas plus que toutes les Alpes calcaires
'^62 l]SI)
dans les deux mondes sont composées de zechstein , que le
mot ;^rès houiller n'annonce que les houilles appartiennent
uniquement au grès rouge. La question de savoir quelles
cimes alpines de la Suisse et du Tyrol sont de zechstein ,
quelles cimes sont de calcaire de transition, est plutôt une
question de géographie minéralogique , qu'un problème de
gcognosie générale. La science des formations se borne à décrire
une roche placée dans la série des terrains secondaires, entre
le grès houiller et le grès bigarre alternant avec des argiles:
elle ne prononce pas sur ce grand nombre de roches dont
le gisement n'offre aucun caractère diagnostique certain ,
par exemple, sur des roches Calcaires non recouvertes et
placées immédiatement sur du micaschiste ou des grauwackes.
Partout où le grès houiller manque, on ne peut juger de
l'âge des roches calcaires que d'après des analogies de com-
position et de couches intercalées : on les rapproche de tel
ou tel groupe, comme le botaniste rapproche préalablement
de telle famille ou de tel genre connus, une plante dont il
n'a pu examiner le fruit. Ces hésitations et ces doutes, loin de
prouver l'incertitude des classifications, parlent plutôt en
faveur de la marche méthodique que doit suivre la géognosie
positive.
Le zechstein , en le considérant dans sa plus grande géné-
ralité, est tantôt (dans les montagnes les plus élevées) un
terrain d'une grande simplicité, tantôt (dans les plaines ) il
est composé de plusieurs petites formations partielles, qui
alternent les unes avec les autres (Thuringe; Figeac , Au-
tun , Villefranche ). Sa couleur est le plus souvent grisâtre
et bleuâtre, quelquefois rougeâtre : il passe, et surtout dans
les hautes régions, du compacte au grenu à très- petits,
grains, et dans ce cas il est traversé par de petits filons de
spath calcaire. Ces caractères de couleur et de cassure ne
sont cependant pas d'une grande importance ; car , selon
que la matière colorante (carbure d'hydrogène et fer) se
trouve diversement répartie , le zechstein et le calcaire de
transition prennent quelquefois des teintes semblables ;
le premier devient noirâtre, et le second Wanc- grisâtre.
C'est ainsi que la couleur noire se trouve (duché d'Anhalt-
Dessau ; IIettst?;dtj Osnabrilck) jusque dans le m.uschelkalk,
IND 265
M. Freiesleben observe très -bien que le zechstein n'est
généralement pas mat, mais un peu brillant (schimmernd) ,
à cause d'un mélange intime de petites lames de spath cal-
caire. Cet éclat, bien moindre sans doute que dans les cal-
caires de transition, se remarque non -seulement dans les
montagnes très-élevées, mais jusque dans les zechstein des
plaines. C'est là aussi que cette roche devient parfois grenue
à petits grains (au Deister et prés de Hameln; entre Bol-
kenhayn et Waldenbourg , et près de Tarnowiz en Silésie),
J'ai trouvé cette même tendance à la structure cristalline
dans le zechstein du Mexique et dans celui des LIanos de
Venezuela: elle n'est pas causée, comme dans le calcaire
du Jura, par un entassement de débris organiques, et ce
seroit à tort qu'on attribueroit cette tendance exclusive-
ment au calcaire de transition. De petits filets de spath
calcaire blanc traversant un calcaire bleuâtre , passant du
compacte au grenu , caractérisent sans doute plutôt le ter-
rain de transition que le zechstein des plaines ; mais dans
les deux continens ces petits filons se retrouvent aussi dans
les calcaires des hautes montagnes calcaires que , par leur
gisement et par leurs bancs intercalés de sel gemme et d'ar-
gile bitumineuse, je crois appartenir au zechstein. D'ailleurs,
dans toutesles formations supérieures au grès rouge, on observe
que (par une action probablement galvanique) les calcaires
gris- noirâtre perdent leur principe colorant dans le voisinage
des fentes de stratification. Cette décoloration a lieu dans les
roches restées en place. L'accumulation du carbone ne se
conserve que dans le centre des couches, et l'on diroit que
la pierre ait été exposée au contact de la lumière et de
l'oxigène de l'atmosphère.
De toutes les formations secondaires le zechstein est celle
dont les diverses assises ont été le plus minutieusement étu-
diées : c'est aussi celle qui a le plus contribué à faire naître
dans le Nord de l'Allemagne , dans cette terre classique de la
géognosie, les premières idées précises sur l'âge relatif des ter-.
rains et sur la régularité avec laquelle ils se succèdent. Comme
les schistes bitumineux et cuivreux du zechstein sont un
objet très- important d'exploitation, il a fallu percer cin<j
formations, le muschelkalk , le gypse fibreux et argileux.
264 IND
le grès bigarré ou oolithique, le gypse feuilleté et salifère ,
et le zechsiein , pour parvenir à la couche argentifère placée
entre le zeclistein et le grès rouge. On peut dire que les tra-
vaux des mineurs sur les schistes bitumineux du Mansfeld ,
en Allemagne, et sur les roches de houille en Angleterre,
ont singulièrement favorisé les progrès de la géognosie de gise-
mens , dont Stenon a eu la gloire d'avoir indiqué, le pre-
mier, les véritables principes.
Le zechstein ou calcaire alpin, la plus ancienne des for-
mations secondaires, renferme, comme couches subordon-
nées : des argiles schisteuses, carburées et bitumineuses; de
la houille ; du sel gemme ; du gypse ; du calcaire fétide ,
(Compacte ou en parties désagrégées (asche) ; du calcaire
magnésifère ; du calcaire à gryphites; du calcaire ferrifère
(eisenkalk); du calcaire celluleux à grains cristallins (rauch-
wacke); du grès; de la calamine, du plomb, du fer hydraté
et du mercure. Nous joindrons à ces indications les substances
qui se trouvent quelquefois disséminées dans le zechstein ,
sans y former des couches continues, telles que le soufre,
le silex (hornstein) et le cristal de roche. On distingue
facilement dans l'ensemble de ces masses trois séries bitu-
mineuses ou cai'burées , muriatifères et métalliques. Le
schiste cuivreux , rempli de poissons pétrifiés ; le calcaire
fétide , le sel gemme et le gypse , la calamine et le plomb
sulfuré sont les types les plus importans de ces trois séries:
ils servent jusqu'à un certain point , par leur concomitance
géoiimslique, à reconnoître la formation que nous décrivons,
lorsque les rapports de gisement sont douteux.
Argiles ou marnes schisteuses , carburées ou bitumineuses. L'ac-
cumulation de carbone qui caractérise les terrains de transi-
tion , surtout ceux qui sont les plus modernes, atteint son
maximum dans le grès rouge : le carbone ne s'y montre plus
comme graphite ou comme anthracite , mais comme houille
bitumineuse. La formation de calcaire alpin, si intimement
liée à celle du grès rouge ou grès houiller, participe jusqu'à
un certain point à cette abondance de carbone hydrogéné :
tantôt c'est toute la masse de la roche (Bavière méiidio-
iiale , et Merlingeu sur le lac de Thun ; dans l'Amérique
Bîéridionale , montagnes de la Nouvelle -x\ndalousie) qui
IND 265
est pénétrée de parties bituniineuses ; tantAt ce ne sont que
des' couches d'argile et de niar:ics intercalées qui contien-
nent le bifuine. La plus célèbre de ces couches est le schiste
cuivreux (kupferscliiefer) du Mansfeld, que l'on retrouve
dans le nouveau monde, renfermaut des poissons fossiles,
près de Ceara ( plaines du Brésil) , près dePasco (à 2000 toises
de hauteur; Andes du Pérou), près de Mondragon (plateau
du Potosi), et près du Pongo de Loinasiacu (rives de l'Ama-
zone , province de Jaen). Le plus souvent il n'y a qu'une
seule couche de schiste cuivreux , et cette couche se trouve
comme repoussée vers la limite inférieure du zechstein.
C'est cette position qui l'a fait prendre long-temps pour
une formation indépendante placée entre le zechstein et le
grès rouge. D'autres fois (Conrads\Aa!de , Prausnitz et Hasel,
en Silésie ) il y a plusieurs bancs qui al(ernent avec les
couches du zechstein et qui méritent également d'être ex-
ploitées. Le cuivre et le plomb argentifères ne se trouvent
qu'accidentellement accumulés dans cette formation partielle,
et j'ai vu dans les deux continens ( Chiemsée et V\ allersée
dans la Bavière méridionale ; mines de Tehuilotepec au
Mexique, montagne du Cuchivano près Cumanacoa) ces
marnes cuivreuses du Mansfeld représentées par de petites
couches d'argile schisteuse carburée , brun - noirâtre , foi-
blement chargée de bitume et remplie de pyrites. Ce phé-
nomène paroit lier le zechstein des plaines à celui des hautes
montagnes, dont la superposition au grès houiller est moins
évidente. Dans les Andes de Montan (cà 1600 toises de
hauteur ; Pérou septentrional) des argiles noires de cinq
à dix -huit pouces d'épaisseur alternent avec le zechstein.
Les argiles schisteuses et marneuses oscillent, du zechstein
ou calcaire alpin , d'un côté vers le grès rouge et le cal-
caire de transition, de Pautre vers le calcaire du Jura. Dans
le grès rouge se trouve répété le schiste cuivreux et argen-
tifère , mais avec une grande accumulation de carbone
(Suhl et Goldlauter en Saxe). Dans le calcaire de transition
(Schwatz en Tyrol) les argiles deviennent plus micacées et
passent au thonschiefer de transition, renfermant (Glaris),
comme les schistes du zechstein (Eisleben) et comme ceux
du grès rouge (mine de Saint-Jacques près Goldlauter), des
266 IND
poissons pétrifiés. Dans le calcaire du Jura les marnes sont
plus calcarifères , d'une teinte plus claire, blanchâtres ou
gris-bleuàfre. Malgré les analogies que présentent quelque-
fois les argiles schisteuses fortement carburées du zechsfein
avec celles du grès houiller, ce n'est pourtant que dans ces
derniers, qui recouvrent immédiatement les houilles, qu'on
trouve des empreintes de véritables fougères du groupe des
polypodiacées. Les schistes cuivreux ne présentent que des
lycopodiacées, famille que Swartz, depuis long-temps, a sé-
parée des fougères.
HouiUe. Quoique, comme nous venons de l'indiquer , l'ac-
cumulation du carbone caractérise particulièrement la forma-
tion du grès rouge, de même le bitume caractérise la formation
du calcaire alpin : cette dernière offre cependant aussi des
traces de véritable houille, soit en couches (entre Nalzon et
Pereilles dans les Pyrénées ; à Huanuco dans les Andes du Pérou ,
à 2000 et 2 200 toises de hauteur) , soit comme parties dissémi-
nées dans le schiste cuivreux (Eisleben, Thalitter, en Saxe).
C'est un fait bien remarquable et anciennement observé, que
la houille piciforme (jayet) se montre de préférence sur les
empreintes du corps des poissons pétrifiés, elle remplace dans
ces empreintes organiques le sulfure de fer, et ( entre Morsfeld
et Miinsterappel , dans le duché de Deux-ponts) le mercure
natif et le cinabre. Les couches de houille mêlées de coquilles
marines et d'ambre (Hering et Miesbach en Tyrol; Entrc-
vernes sur le lac d'Annecy en Savoie) ne se trouvent pas
dans le zechstein : ce sont des lignites qui appartiennent à
des formations beaucoup plus récentes. Ils sont superposés
au zechstein dans des bassins isolés, et ont , comme toutes les
formations locales, leurs grès et leurs argiles.
Sel gemme et argile muriatifère. Les masses de sel gemme
dans le calcaire alpin ou zechstein sont moins subordonnées à
des couches de gypse lamelleux, qu'aune formation particu-
lière d'argile , qui a été long-temps négligée par les géognostes
et que j'ai fait connoître sous le nom de salzthon (argile muria-
tifère). Elle caractérise, dans les deux continens , les dépôts
de sel gemme, de môme que l'argile schisteuse (schieferthon)
ou a. rrile à fougères caractérise les dépôts de houilles. Cette
formation muriatifère , dans laquelle le gypse ne se trouve
IND 267
pour ainsi dire qu'accidentellement, a été Tobjet principal de
mes recherches dans les voyages que j'ai entrepris par ordre
du Gouvernement prussien , pendant les années 1792 et 1790,
dans les mines de sel gemme de la Suisse, de TAllemagne méri-
dionale et de la Pologne. Je l'ai retrouvée, avec toutes ses
nuances d'analogie les plus petites, dans les Cordillères de
l'Amérique équatoriaie, et l'on ne sauroit douter que sa con-
noissançe physionomique ne soit du plus grand intérêt pour
ceux qui travaillent à découvrir des dépôts de sel dans les
pays que l'on en a cru dépourvus jusqu'à ce jour.
Les couleurs de l'argile muriatifère sont généralement (Hall,
Ischel, Aussee) le gris de fumée, le gris blanchâtre et le gris
bleuâtre (Berchtolsgaden et Wieliczka) ; quelquefois cette
argile est brun-noiràtre , brun-rougeàtre (leberstein des mi-
neurs du Tyrol et de la Styrie), et même rouge de brique. On
la trouve ou en masses très-puissantes, ou disséminée en petites
parties rhomboïdes, soit dans le sel gemme (Zipaquira, dans la
Nouvelle-Grenade), soit dans un gypse (JNeustadt an derAisch,
en Franconie; Reichenhall en Bavière) qui est subordonné au
calcaire alpin. Les couleurs de l'argile muriatifère sont beau-
coup plus variées et plus mélangées que celles de l'argile
schisteuse qui couvre les houilles. La première fait un peu
d'effervescence avec les acides ; ses couleurs sont dues à la
fois au carbone et à l'oxide de fer. Sur le plateau de Bogota
je l'ai vue mêlée d'asphalte et tachant les doigts en noir. Elle
absorbe rapidement l'oxigène de l'atmosphère, tant sous des
cloches que dans ces grandes excavations circulaires (Sink-
werke, Wohre), qui sont destinées à être remplies d'eau
douce pour lessiver la roche salifère. Sa consistance est extrê-
mement variable ; elle s'élève du tendre à la dureté du schiste
cuivreux. Souvent des masses tenaces (schlief) paroissent mê-
lées de silice et donnent feu avec l'acier ; leurs pièces sépa-
rées sont alors tcstacées et courbes (krumnischalig abgeson-
derte Stucke ). Empâtées dans une argile friable, elles for-
ment une espèce de brèche porphyroide. L'argile muriati-
fère n'ofire ni les paillettes de mica, ni les empreintes de
fougères de l'argile schisteuse des houilles : on y trouve ce-
pendant quelquefois (Hallstadt, Wieliczka) des coquilles pé-
lagiques.
.68 IIVD
Le sel gemme se présente de deux manières , ou dissé-
miné en parcelles plus ou moins visibles dans le salzthon ,
ou formant des couches épaisses alternant avec des couches
argileuses. Cette disposition différente détermine le maximum
(Wieliczl>a) ou le minimum (Ischel) de richesse dans les
mines ; elle décide si le sel doit être exploité en grandes
masses (lapidicinorum modo , dit Pline, cœditur sal nativum) ,
ou en lessivant la roche par l'introduction des eaux douces
dans des chambres souterraines. Lorsque le muriate de soude
gris de fumée est disséminé en grains arrondis ou en petites
lames, ou d'une manière insensible à Tœil, il n'en forme pas
moins des croûtes continues autour des pièces séparées du
salzthon. 11 remplit toutes les fentes qui divisent les masses
en fragmens polyédriques. 11 en résulte des brèches argileuses
(Haselgebirge) cimentées par du sel gemme. Quelquefois de
grandes masses d'argile (Hall en Tyrol) sont absolument dé-
pourvues de muriate de soude ; on les croit lessivées par
l'action des eaux qui circulent dans la terre, et ce phéno-
mène curieux semble favoriser l'hypothèse la plus ancienne-
ment adoptée sur l'origine des sources salées.
Le gypse grenu, blanc- grisâtre, rarement anhydre (mu-
riacite), se trouve par couches plus ou moins épaisses dans
le salzthon; il y abonde plus que dans le sel gemme; tou-
jours son volume est de beaucoup inférieur à celui de l'ar-
gile. Quelquefois le gypse est mêlé de calcaire fétide et de
cristaux de chaux carbonatée magnésifère (rauten- ou bit-
terspath). Lorsque le sel ne forme pas de véritables bancs
ou des masses cristallines continues, il se trouve dans l'argile
comme amas entrelacé (Stockwerk) , c'est-à-dire, en petits
filons qui se croisent, se renflent et se traînent dans tous les
sens. Ses fibres sont perpendiculaires au mur et au toit des
filons (Berchtolsgaden). D'autres fois le sel est réparti par
couches très-minces, parallèles entre elles, variées de cou-
leur, sinueuses, généralement verticales (Hallstadt etHallein),
rarement inclinées de moins de oo" ( Aussee). Partout où le
gypse grenu manque entièrement dans le salzthon, on le trouve
remplacé par des cristaux épars de gypse spéculaire. Toute
cette formation salifère renferme quelquefois disséminées
des pyrites , de la blende brune et de la galène, AZipaquira,
IND 269
dans l'Aménque méridionale (mine de Rute) , les pyrites et
la chaux carbonatce ferrifère forment des concrétions par-
ticulières en sphéroïdes aplatis, de 18 à 20 pouces de dia-
mètre : ces sphéroïdes sont empâtés dans le salzthon , et ont
au centre des creux de 3 à 4 pouces, remplis de fer spathique
cristallisé. Je n'ai point observé ce phénomène singulier dans
les mines de sel gemme d'Allemagne, de Pologne et d'Espagne „
que j'ai visitées; mais la fréquence des pyrites dans l'argile
muriatifère jette quelque jour sur l'odeur d'hydrogène sul-
furé qu'exhalent si souvent les sources salées. La galène ne
se montre qu'en parcelles dans le dépôt salifère de Hall en
Tyrol ; mais elle s'est développée en grandes masses dans les
montagnes de sel gemme (rouge-blanc et gris -noirâtre) à
travers lesquelles se sont frayé un chemin, sur une distance
de deux lieues, le Rio Guallaga et le Rio Pilluana (province
péruvienne de Chachapoyas, sur la pente orientale des Andes).
Les dépôts de sel dans les deux continens se trouvent gé-
néralement à découvert, comme les formations d'euphotide
et de serpentine. Quelquefois ils supportent de petites cou-
ches de gypse et de calcaire fétide qui leur appartiennent
exclusivement. 11 n'est par conséquent pas facile de pro-
noncer sur l'âge relatif des dépôts muriatifères. La formation
principale ( Hauptsalzniederlage) me paroît évidemment ap-
partenir au zechsti^in ou calcaire alpin; mais cette assertion
n'exclut pas la probabilité que d'autres formations partielles
se trouvent intercalées aux terrains de transition, peut-être
même aux terrains tertiaires. Les houilles, les oolithes et les
lignites se sont aussi développés à des époques très-différentes
les uns des autres ; et cependant les gites principaux de ces
trois substances sont lé grès rouge , le calcaire du Jura et
l'argile plastique. Pour traiter cet objet dans sa plus grande
généralité, je vais indiquer successivement, d'après 1 état
actuel de nos connoissances, les diverses formations de sel
gemme dans le calcaire de transition , dans le zechstein et le
grès bigarré avec argile.
Le gypse anhydre de Bex , qui renferme du sel gemme
disséminé et de petites couches subordonnées de grauwaoke ^
appartient, selon les observations de MM. de Buch et Char-
pentier , au calcaire de transition , mais probablement aux
270 IND
dernières couches des terrains intermédiaires. De ce même âge
paroissent être aussi le gypse salifère de Colancolan (à l'est
d'Ayavaca, Andes du Pérou), mêlé, comme le calcaire de
transition de Drammen (Norwége) , de trémolithe asbestoïde ;
les petits dépôts de S. Maurice (Arbonne en Savoie), et,
d'après M. Cordier, la montagne desel de Cardona en Espagne.
Le gypse anhydre caractérise particulièrement ces dépôts sali-
féres du terrain de transition. Dans l'Allemagne méridionale,
sur les bords du Necker (Sulz au-dessus de Hcilbronn ; Frie-
drichshall , entre Kochendorf et Jaxtfeld ; Wimpfen , au-
dessous de Heilbronn) , on a découvert par des sondes de
245 et de 760 pieds de profondeur, du sel gemme dans le
zechstein. Les beaux travaux de MM. Glenk et Langsdorf ne
laissent pas de doute à ce sujet. A Sulz on a percé successi-
vement le muschelkalk , la formation d'argile et de grès bi-
garré, un zechstein poreux, mais de très-peu d'épaisseur,
et le grès rouge , reposant sur le granité de la Bergstrasse et
du Schvvarzvvald. A Friedrichshall et à Wimpfen, d'après les
observations judicieuses de M. de Schmitz, les couches supé-
rieures au zechstein manquent entièrement , et l'on a trouvé
dans celui-ci, qui est gris-bleuàtre et que, par cette raison,
on a souvent confondu avec le calcaire de transition, des
couches alternantes de sel gemme, d'argile salifère, et de
gypse blanc et grisâtre. Dans le grand -duché de Bade, le
dépôt salifère paroit recouvert (Heinsheim près Wimpfen,
sur le Necker; Stein , Muhlbach et Beyerthal, dans la vallée
du Rhin; Kandern, dans le Schwarzwald) des mêmes roches
dont on a reconnu la série à la saline de Sulz.
Je crois pouvoir citer encore comme une preuve bien évi-
dente du gisement de la grande formation de sel gemme dans
le zechstein ou calcaire alpin , la partie septentrionale du
plateau de Santa-Fé de Bogota, où la mine de Zipaquira
(Rute, Chilco etGuasal) se trouve à i58o toises d'élévation
au-dessus du niveau de la mer. Ce dépôt salifère, de plus de
i3o toises d'épaisseur, est recouvert de grandes masses de
gypse grenu, gypse que l'on voit intercalé, sur plusieurs
points très-voisins de la mine , au zechstein supporté par le
grès rouge ou houiller. 11 n'y a que sept lieues de distance
depuis la mine de charbon" de terre de Canoas et la mine
IND 271
de sel gemme de Zipaquira. D'autres dépôts de houilles
(Suba, Cerro de Tunjos) sont plus rapprochés encore, et
l'on voit le grès rouge, qui est très-quarzeux, sortir immé-
diatement sous l'argile salifère de Zipaquira.
Dans le Salzbourg, en Tyrol et en Styrie , il ne m'est
resté jamais aucun doute, depuis les premiers temps que j'ai
visité ces contrées , sur la liaison intime du sel gemme avec
le zechstein. Beaucoup de géognostes célèbres (MM. de Buch
et Buckland) partagent cette opinion : mais il faut convenir
que, partout où l'âge du calcaire n'est pas suffisamment ca-
ractérisé par la présence du grès houiller, et partout où le
recouvrement du dépôt salifère par des couches d'un âge connu
n'est pas évident, le résultat des observations ne peut offrir
une entière conviction. Dans la mine de Hall près.d'Ins-
pruck. , on voit (galerie de Mitterberg) le dépôt de sel
gemme immédiatement recouvert par la formation calcaire
qui constitue la chaîne septentrionale des Alpes du Tyrol.
Ce calcaire passe du blanc grisâtre au gris bleuâtre ; les
nuances plus obscures sont souvent fétides. Il est générale-
ment compacte, quelquefois un peu grenu à petits grains, et
traversé par des veines de spath calcaire blanc. Ces veines sont
considérées par quelques géognostes, et peut-être d'une ma-
nière trop absolue, comme caractérisant le calcaire de tran-
sition. La roche n'alterne nulle part ni avec le thonschicfcr
intermédiaire, ni avec le grauwackc : elle forme (Wallersée)
des couches sinueuses et arquées, comme le calcaire du lac
de Lucerne. M. de Buch y a trouvé fréquemment des pétri-
fications de turbinites très-petites. C'est le seul endroit en
Europe où j'ai vu une grande formation calcaire recouvrir
immédiatement le sel gemme. Je la crois du zechstein , d'après
des analogies de position et de structure ; je l'ai vue passer
quelquefois (Schlossberg près Séefeld; Scharnitz) à un calcaire
compacte ayant la cassure matte, égale ou conchoïde, à cavités
très-aplaties , semblable au calcaire lithographique de la for-
mation du Jura (lias). Les poissons pétrifiés qu'on rencontre
entre Séefeld et Schonitz dans une marne bitumineuse, éloi-
gnent encore plus le calcaire de Hall des calcaires de transi-
tion; cependant, pour le caractériser indubitablement comme
zechstein , il fuudroit le voir reposer sur le grès rouge (todt-
373 IND
liegende) , qui , d'après les observations de MM. Uttînger et
Keferstein , paroît superposé aux roches intermédiaires entre
le Ratenberg et Hering, comme près des anciennes mines
de Schwatz. A Hallstadt (Tcirringcr Berg) et à Iscliel, nous
avons vu, M. de Buch et moi, le calcaire alpin analogue à
celui de Hall, mais avec des teintes plus claires, souvent
rougeàtres, et plus abondant en pétrifications , superposé au
gypse qui couAre les dépôts de sel gemme. Cette superposi-
tion est moins évidente à Hallein (mine du Durrenberg) et
à Berchtesgaden : le gypse qui couvre Targile salifère , se
cache sous une poudingue calcaire (nagelfluhe) du terrain
tertiaire. Les dépôts de Hallein et de Berchtesgaden m'ont
paru , comme celui de Wieliczka en Pologne, non intercalés
au zechstein , mais superposés à cette formation. Je les crois
postérieurs à la grande formation de houille,- mais le grés
rouge manque dans kur voisinage, et le calcaire du pays
de Salzbourg est immédiatement superposé (vallée de Ramsau)
au grauwacke. M. Buckland regarde les calcaires qui cou-
vrent l'argile salifère à Hallstadt, et même à Bex, comme
appartenant au lias, qui est l'assise inférieure du Jura.
Après le sel gemme des gypses anhydres de transition et
après celui du zechstein vient, selon l'âge des formations, le
sel du grès bigarré, ou, comme on dit plus exactement, du
terrain d'argile et de grès bigarré. Ce terrain arénacé, appelé
par les géognostes anglois nouveau grès rouge et marne rouge
{new red sandstone and red mari), renferme les dépôts de
sel (Northwich) de l'Angleterre: il en renferme aussi en Alle-
magne, soit près de Tiède (entre Wolfenbiittel et Brunswick),
où MM. Haussmann et Schulze ont trouvé de petites masses
de sel disséminées dans l'argile rouge du grès bigarré ooli-
thique; soit à Sulz (royauiiie de AVurtemberg ), où, avant
d'avoir atteint les sources salées dans le zechstein , on a ren-
contré immédiatement sous le muschelkalk, à 460 pieds de
profondeur, des rognons ou nids de sel dans une argile
marneuse (red mari). Cette argile recouvre , dans une
épaisseur de 210 pieds, le grès bigarré auquel elle appar-
tient. Comme tout près de Sulz ( àFriedrichshall et \\ im-
pfen) le sel gemme alterne avec des marnes et du gypse in-
tercalés au zechstein, on ne peut douter de l'aflinité géo-
IND 275
g'nostique qui existe entre les deux formations du zechstein
et du grès bigarré. Les marnes et argiles salifères avec gypse
grenu se trouvent placées tantôt entre le zecbstein et le grès,
tantôt dans l'une et l'autre de ces formations. C'est aussi au
terrain d'argile et de grès bigarrés qu'appartiennent et le sel
gemme de Pampelune en Espagne, examiné par M. Dufour,
et le riche dépôt découvert, en 1819, en Lorraine près de
Vie. Ce terrain d'argile bigarrée de Vie renferme de petites
couches de muschelkalk, et est recouvert à son tour de cal-
caire jurassique. L'influence qu'une connoissance plus appro-
fondie du gisement des roches a eue dans ces derniers temps
sur les découvertes du sel en Souabe, en France et en Suisse
(Églisau, canton de Zuric), est un phénomène bien digne de
remarque.
Je doute qu'on ait Jusqu'ici des preuves bien certaines de-
là présence du sel gemme dans le muschelkalk; car il ne faut
pas, comme nous le verrons bientôt, déduire ce gisement de
la seule présence des sources salées. Le muschelkalk, dans
ses couches inférieures, alterne avec la formation d\irgile et
de grès bigarré : comme il renferme aussi quelquefois (Sulz-
bourg près Naumbourg) des marnes avec gypse fibreux, il
ne seroit pas bien surprenant que l'on y découvrît quelques
dépôts salifères. Des traces de ces dépôts ont été observés ,
près de Kandern , dans le calcaire jurassique.
Existe -t-il des couches de sel dans les terrains tertiaires
au-dessus de la craie? Plusieurs phénomènes géognostiques
peuvent le faire supposer ; et l'on devroit presque être surpris
que les dernières irruptions de l'océan dans les continens
n'aient pas produit sinon des couches de sel gemme, du moins
de l'argile salifère. Cependant, dans l'état actuel de nos coa-
noissances, le problème que nous agitons n'est pas suffisam-
ment éclairci. M. Steffens regarde les gypses à boracites de
Luiiebourg et de Seegeberg (Holsteiu) comme supérieurs
à la craie. Le second de ces gypses contient de petites masses
de sel gemme disséminées; le premier donne naissance à des
sources salées très- riches et très-abondantes. D'autres géo-
gnostes croient la formation gypseuse à boracites beaucoup
plus ancienne que le gypse à ossemens du terrain tertiaire ,
et presque identique avec les gypses du zechstein et du grés
;j3. ' iS
274 IND
bigarré. Les immenses dépôts saliféres de Wicliczka et de
Bochnia , ceux qui s'étendent depuis la Galicie jusqu'à la
Bukowine et en Moldavie, paroissent reposer immédiate-
inent sur le grès houiller, renfermant à la fois (et ce fait est
assez extraordinaire) du gypse anhydre, des tellines, des
coquilles uuivalves cloisonnées, des fruits à l'état charbon-
neux , des feuilles et des lignites ; ces dépôts ne sont recou-
verts que de sables et de grcs micacés. M. Beudant, dans
son important ouvrage sur la Hongrie, semble pencher vers
l'opinion que ces sables et ces grès sont analogues à la mo-
lasse d'Argovie , et que toutes les formations saliféres avec
lignites de la Galicie pourroient bien être contemporaines
avec Targile plastique (grès à lignites) du terrain tertiaire,
placée entre la craie et le calcaire grossier de Paris (cal-
caire à cérites). Ces bois bitumineux de Wieliczka, exha-
lant l'odeur de truffes, méritent sans doute beaucoup d'at-
tention ; et si Ton veut admettre qu'ils ne se sont mêlés
qu'accidentellement au sel gemme et qu'ils sont venus des
couches sablonneuses superposées, il faut encore eji con-
clure que le sel gemme et les sables sont d'une origine très-
rapprochée. Mais la présence des lignites est-elle une preuve
bien convaincante de la grande nouveauté d'une couche? J'en
doute. Nous savons que des lignites et des empreintes de
feuilles dicotylédones se trouvent bien au-dessous de la craie,
et dans les couches inférieures du calcaire du Jura (calcaire
à gryphées arquées ; Le Vay, Issigny, prcsdeCaen), et dans
le quadersandstein , et dans les petites couches charbon-
neuses et marneuses ( lettenkohle) du muschelkalk, et dans
le giès big.irré de l'Allemagne , auquel appartiennent aussi
les schistes argentifères du Frankenberg (Hesse). 11 faut dis-
tinguer avec soin les bois siliceux et pétrifiés des vrais lignites
ou bois bitumineux (braunkohle); et si l'on ne reconnoit
que bien rarement ceux-ci dans les argiles du grès bigarré,
on les trouve bien moins encore dans le zechstein , dont les
marnes cuivreuses renfermeut seulement des fruits pétrifiés.
Dans la Toscane on voit les sources salées du Volterrannois
sourdre, d'après M. Brongniart, de couches marneuses qui
alternent avec du gypse grenu ( albâtre j et qui sont immé-
diatement recouverl«s d'un terrain tertiaire. Quoiqu'il pu-
IND 376
roisse presque impossible de prononcer sur l'âge des formations
non recouvertes , plusieurs rapports de giseinens que j'ai eu occa-
sion d'observer dans le nouveau continent, me rendent pro-
bable l'existence des dépôts de sel dans le terrain tertiaire. Je
ne citerai pas les montagnes de sel gemme dans les vastes plaines
au nord-est du Nouveau -Mexique , que M. Jcfferson a fait
connoitre le premier, et qui paroissent liées au grès houillerj
mais d'autres dépôts très-problématiques, savoir, les argiles
salifères superposées à des conglomérats trachy tiques de la
Villa d'Ibarra (plateau de Quito, à 1 1 go toises de hauteur),
les énormes masses de sel exploitées à la surface de la terre
( déserts du Bas-Pérou et du Chili ) dans les steppes de Buenos-
Ayres et dans les plaines arides de l'Afrique, de la Perse et
de la Transoxane. Près de Huaura (entre Lima et Santa , sur
les côtes de la mer du Sud) j'ai vu le porphyre trachytique
percer les couches du sel gemme le plus pur. L'argile muria-
tifére d'Araya (golfe deCariaco), mêlée de gypse lenticulaire ,
paroit placée enivi;: le calcaire alpin de Cumanacoa , et le
calcaire tertiaire du Barigon et de Cumana. Sur tous ces
points le sel est accompagné de pétrole et d'asphalte en-
durci.
En comparant les dépôts de sel gemme d'Angleterre (à
5o toises), de Wieliczka ( 160 t. ), deBex (220 t.) , deBerch-
tolsgaden (55ot.), d'Aussce (460 t.), d'ischel (/,g6 t.), de
Hallein (620 t.), de Hallstadt (660 t.), d'Arbonne en
Savoie (760 t. p) et de Hall en Tyrol (800 t.), M. de Buck
a judicieusement observé que la richesse des dépôts diminue
en Europe avec la hauteur au-dessus du niveau de l'océan.
Dans les Cordillères de la Nouvelle - Grenade , à ZIpaquira,
d'immenses couches de sel gemme, non interrompues pai'
dePargile, se trouvent jusqu'à 1400 toises d'élévation, il n'y
a que la mine de Huaura, sur les côtes du Pérou, qui m'aii
paru encore plus riche : j'y ai vu exploiter le sel en dales ,
comme dans une carrière de marbre.
En Thuringe, un des pays dans lesquels on a reconnu, le
premier, la succession et l'âge relatif des roches, on a cru
long-temps que les sources salées sont plus fréquentes dans
le gypse grenu du zcchstein que dans le gypse fibreux et ar-
gileux du grès bigarré , et on a regardé le premier comme
27^ IND
exclusivement salifère. Les cavernes naturelles du gypse infé-
rieur (salzgyps et schlottengyps) ont même été considérées
comme des cavités jadis remplies de sel gemme. En hasar-
dant ces hypothèses, fondées sur un trop petit nombre d'ob-
servations, Ton a oublié que les dépôts de sel sont beaucoup
moins caractérisés par le gypse grenu que par une argile
(salzthon) très-analogue à l'argile du gypse supérieur ou
iibreux. Les sources salées , ou jaillissent réunies par groupes,
ou se succèdent par bandes (traînées) sinueuses et diverse-
ment alignées. La direction de ces fleuves souterrains paroit
indépendante des inégalités de la surface du sol. Telle est
la circulation des eaux dans l'intérieur du globe, que les
plus salées peuvent souvent être les plus éloignées du lieu
oh elles dissolvent le sel gemme. Un haut degré de salure
ne prouve pas plus la proximité de cette cause , que la
violence des tremblemens de terre ne prouve la proximité
du feu volcanique. Les sources s'engoufrent tantôt dans des
couches inférieures ; tantôt , par des pressions hydrostati-
ques, elles remontent vers les couches supérieures. Ce n'est
pas leur position seule qui peut nous éclairer sur le gisement
des dépôts salifères. Nous conncissons des sources salées , en
Allemagne, dans le grauwacke schisteux du terrain de tran-
sition ( VVerdohl en \\'estphalie) ; dans le porphyre du grès
rouge ( Creuznach ) : dans le grès rouge même ( Neusalz-
brunnen piès Waldenburg) ; dans le gypse du zechstein
( Friedrichshall près Heilbronn ; AVimpfen sur le Necker ;
Durrenberg? en Thuringe) ; dans la formation d'argile et
de grès bigarré (Dax, en France ; Schônebeck, Stasfurth , Salz
der Helfien, en Allemagne) , et dans le muschelkalk (Halle?
en Saxe; Siildorf, Harzburg). On peut ajouter à cette énu-
mération le calcaire du Jura (Butz, dans le Frickthal), et
peut-être la molasse (grès tertiaire à lignites) de Suisse
(Eglisau; essais de sonde de M. Glenck). Dans la recherche
du sel gemme il ne faut pas confondre de véritables dépôts
avec ces petites masses que des sources très-salées peuvent
avoir déposées accidentellement, par évaporation , sur les
fentes des rochers.
Gjp&€ et calcaire fétide. Des formations de gypse postérieur
au gypse de transition (§. 20) se montrent dans toutes les for-
IND 277
mations calcaires au-dessus du grès rouge, dans le zechstein ,
dans le grès rouge même , dans le musckelkalk (très-rarement),
dans le calcaire du Jura et dans le terrain tertiaire. Le gypse
(untcrer gyps , schlottengyps de Werner) qui appartient au
zechstein , se trouve moins en couches très-étendues qu'en amas
irréguliers; souvent (Thuringe) il est superposé au zechstein
et recouvert par le grès bigarré. Il est compacte ou grenu, et
alterne avec le calcaire fétide (stinkstein), tandis que le gypse
du grès bigarré (obérer gyps, thongyps de Werner) est plutôt
fibreux et mêlé d'argile. Ces caractères de structure et de
mélange ne sont cependant pas généraux. Nous avons rappelé
plus haut que, dans les gypses salifères du zechstein, Tar-
gile (salzthon) prend un développement extraordinaire. D'un
autre côté, le gypse fibreux et argileux du grès bigarré offre
aussi quelquefois des masses grenues (albâtre de Reinbeck,
en Saxe), des brèches de calcaire fétide, et des cavités
spacieuses (gypsschlotten) : trois phénomènes qui caractéri-
sent plus généralement le gypse du zechstein.
Tous ces phénomènes prouvent l'intimité des rapports qui
lient les deux grandes formations salifères, le calcaire alpin
et le grès bigarré avec argile. Sous la zone équinoxiale du
nouveau continent j'ai vu de fi'équens exemples de couches
de gypse intercalées ou superposées au zechstein : dans les
LIanos de Venezuela (Orliz, MesadePaja, Cachipo); dans la
province de Quito (plateau de Cuença près Money et entre
Chulcay et Nabon ) ; dans le plateau de Bogota (Tunjuellos,
Chccua , et à plus de 1600 toises de hauteur au-dessus du
niveau de la mer, à Cucunuva) ; dans les plaines de l'Ama-
zone (Quebrada turbia près Tomependa) ; au Mexique, entre
Chilpansingo et Cuernavaca (près de Sochipala), et dans les
montagnes métallifères deTasco et de ïehuilotepec.
Les couches de calcaire fétide sont ou subordonnées au
gypse et à l'argile muriatifère que renferme le zechstein ^
ou elles se présentent comme le résultat d'une accumula-
tion accidentelle de bitume dans la roche du zechstein même.
Cette accumulation donne lieu à des sources de goudron
minéral , et peut-être aussi à ces feux d'hydrogène qui sor-
tent du calcaire alpin, en Europe, dans les Apennins
(Pietr^ Mala, Barigazzo) ; en Amérique, dans les montagnes
^78 IjND
de Cumanacoa (Cuchivano, lat. lo" C). Le calcaire fétide
se trouve aussi, mais beaucotip plus rarement, dans le grès
bigarré et dans le muschelkalk (couclies à béicmnitcs de
Gœftinguep). La cendre {asclie) et le rauhkalk des mineurs
de Thuringe ne sont que des variétés pulvérulentes ou cris-
tallines et poreuses du calcaire fétide appartenant au zech-
stein. Comme le calcaire fétide est en Europe constamment
dépourvu de pétrifications , je rappellerai ici que dans les
plaines de la INouvelle- Grenade (vallée du Rio Magdalena,
entre Morales et l'embouchure du Cafio Morocojo), M.
Bonpland a trouvé, dans une variété de cette même roche,
qui étoit noir-grisàtre , un peu brillante à l'extérieur, forte-
ment bitumineuse et traversée de veines de spath calcaire
blanc, des térébratulites et des pectinites.
Calcaire magnésifère. 11 faut distinguer, en géognosie, entre
les couches intercalées au ?echstein (gypse, sel gemme, sul-
fure de plomb), dont la composition chimique diffère entiè-
rement de celle de la roche principale, et les modifications par-
tielles de cette même roche. Les modifications qui aifectent
la structure (le grain plus ou moins cristallin, la forme
oolithique, la porosité) et le mélange (calcaire magnésifère,
calcaire ferrifère), sont moins importantes qu'on ne pour-
Toit le supposer au premier abord. On en trouve des analo-
gies dans des formations d'un âge très-différent : elles carac-
térisent certains terrains dans des cantons de peu d'étendue;
mais, lorsqu'on compare des réglons très - éloignées , on voit
qu'elles ne les caractérisent pas même autant que les couches
intercalées qui sont chimiquement hétérogènes. En Angle-
terre, la grande masse de calcaire magnésifère (magnesian
limestone, red-land-limestone de M. Smith), souvent pétrie
de madrépores ( Mendiphills près Bristol) et liée à une brèche
calcaire ou à des couches celluîeuses (Yorckshire) sem-
blables au rauchvvacke, est sans doute parallèle au ?.ech-
stein; elle est placée entre les formations de houille et de sel
gemme : cependant, en Angleterre, comme dans quelques
parties du continent, d'après les recherches de MM. Buck-
Jand , Brongniart, Beudant, Conybeare, Grccnough et Phi-
lipps, le mélange de magnésie et de chaux carbonatée ,
dont Arduin a reconnu l'existence dans le Vicentin dès
IND .-^79
Tannée 17(30, se rencontre également dans le grès bigarré
avec argile ( red-marl), dans le calcaire oolithique du Jura,
dans la craie et dans le calcaire grossier (parisien) du
terrain tertiaire. Peut-être même qu'en Hongrie et dans
une partie de l'Allemagne les calcaires magnésifères appar-
tiennent plutôt au grès bigarré et aux formations oolithi-
ques du Jura qu'aux zechstein. Ces roches sont en général
jaune de paille (de Sunderland à Nottingham ) ou blanc-
rougeàtre, tantôt compactes, tantôt un peu grenues, nacrées
et brillantes dans la cassure ; quelquefois on les trouve
celluleuses et traversées par des veines de spath calcaire.
Elles font une effervescence lente avec les acides, et, comme
la véritable dolomie des terrains primitifs, elles ne forment
souvent que de minces couches dans un calcaire non magné-
sifère. Si, dans le magncsian limestone et dans le red-marl
avec sel gemme , deux formations placées entre le dépôt
houiller et le dépôt oolithique , on reconnoit en Angle-
terre le zechstein et le grès bigarré du continent, il ne
faut pas oublier qu'en Allemagne et en Hongrie le zech-
stein est lié au grès rouge ou grès houiller, tandis qu'en
Angleterre le dépôt de houille se trouve généralement en
gisement discordant avec le magnesian limestone, et qu'il y
appartient presque encore au terrain de transition. Les trois
grands dépôts de houille, de 5e/. et (Voolithes , qui servent,
pour ainsi dire, de repaires au géognoste, lorsqu'il essaie
de s'orienter dans un pays inconnu, sont partout placés de
même ; mais l'enchaînement mutuel des formations et le
degré de leur développement varient selon les localités.
Lorsqu'en Angleterre, par la suppression du nouveau conglo-
mérat rouge ( todtes liegende), le calcaire magnésifère (zech-
stein) repose immédiatement sur le dépôt de houilles (Dur-
ham, Northumberland) , la houille est regardée comme d'une
qualité inférieure.
Calcaire ferrif ère , raucnwacle et calcaire à grjpliites. Le cal-
caire ferrifère ( eisenkalk , zuchtwand) est une roche bru-
nâtre ou jaune -Isabelle , tantôt compacte, tantôt grenue et
caverneuse, pénétrée de fer spathique, formant des couches
dans l'assise supérieure du zechstein (Cammsdorf, Schmal-
italden, Henneberg). EUle est quelquefois traversée par les
.80 INt)
schistes cuivreux , et prend un tel développement qu'elle rem-
place toutes les assises inférieures du zechsfein. Lorsqu'elle
devient gris-noirâtre, chargée de hilume et caverneuse , on
lui donne en Allemagne le nom de rauclm'acke. Les cavités
du rauchwacke sont anguleuses, longues et étroites, tapis-
sées de cristaux de carbonate de chaux. Cette petite forma-
lion partielle , que M. Karsten , dans sa Classification des
Tioches , avoit confondue avec la partie caverneuse et spon-
gieuse du calcaire du Jura, est quelquefois magnésifère ,
imparfaitement oolithique (Cresfeld), et mtlée de quarz
grenu. La pierre fétide, le calcaire i'errifère et le rauch-
wacke sont intimement liés entre eux. C'est au rauchwacke
aussi qu'appartient en grande partie cet amas de gryphites
(G. aculeatus) que l'on appelle calcaire à grjpliées épineuses
f gryphitenkalk), qui caractérise le zechstein et qui (comme
jious le verrons plus bas) forme une couche plus ancienne
que le calcaire à pyphées arquées, qui est une des assises infé-
rieures du calcaire du Jura.
Grès. Partout oîj le zechstein ou calcaire alpin s'est déve-
loppé seul en grandes masses, et n'est par conséquent pas
Sntercalé au grès rouge , les couches de grés sont très- rares.
J'en ai reconnu cependant quelques-unes dans les montagnes
de Cumana (Impossible, Tumiriquiri). Ce grès intercalé au
y.echstein est extrêmement quarzeux , dépourvu de pétrifica-
, lions, et alterne avec des argiles brun -noirâtre. M. de Buch
a observé un phénomène entièrement analogue en Suisse,
dans le calcaire alpin du Molesson et dans celui du Jaunthal
près de Fribourg. Dans les Cordillères du Pérou, près de
Huancavelica , à plus de 2000 toises d'élévation au-dessus
du niveau de l'océan (mine de Santa-Barbara), une immense
couche de grès aussi quarzeux qvie le grès de Fontainebleau ,
et renfermant un dépôt de mercure, forme une couche dans
le calcaire alpin. Môme le zechstein de Thuringe offre quel-
quefois de petites couches de grès, extrêmement quarzeuses ,
qui traversent le schiste cuivreux. Une marne arénacée
(weissliegende) se trouve sur les limites du zechstein et du
grès rouge. Elle varie beaucoup dans sa composition , et
rappelle les bancs de grès du Tumiriquiri dans l'Amérique
méridionale. Le weissliegende de Thuringe est généralement
IND 281
calcarîfère, et renrerme des grès et des conglomérats siliceux.
M. Freiesleben y a trouvé (Helbra) des concrétions globu-
leuses semblables à celles que j'ai recueillies dans Targile
salilere du zechstein de Zipaquira. Nous rappellerons, à cette
occasion, que le calcaire alpin des Pyrénées n'est pas seule-
ment mêlé de sable et de mica, mais qu'il renferme aussi des
bancs de grès argileux.
Plomb sulfuré, fer hydraté, calamine, mercure. Ces quatre
petites formations métalliques caractérisent le zechstein dans
les deux hémisphères. La galène argentifère commence déjà
à se montrer en petites masses dans le schiste cuivreux de la
Thuringe: mais, en Silésie et en Pologne, elle forme (Tarno-
^vitz, Bobro\vnik, Sacrau , Olkusz, Slawkow) des couches
très-étendues dans le zechstein, par conséquent au-dessus du
riche dépôt de houille de Ratibor et de Bcuthen. Dans ces
mômes contrées les couches de fer hydraté (Radzionkau) et
de calamine (Piekary), parallèles entre elles, sont d'une ori-
gine plus récente que la couche de fer sulfuré argentifère
de Tarnowitz. Déjà dans le calcaire grenu et dépourvu de
coquilles, qui couvre cette dernière couche, on trouve dis-
séminé dans des cavités alongées de petites masses de fer
brun et de zinc oxidé concrétionné. Près d"llefeld au Harz
fout le zechstein est imprégné de celle dernière substance.
Quant aux couches de galène et de calamine du Sauer-
land, de Brilon , d'Aix- la- chapelle et de Limbourg , elles
semblent, d'après les discussions judicieuses de MM. de Rau-
mer et Nœggerath , malgré leur analogie apparente avec les
formations de la Haute -Silésie, appartenir aux terrains de
transition les plus récens. On diroit que dans les deux
continens il existe une affinité géognostique (ou de gise-
ment) bien remarquable entre les roches calcaires et le
plomb sulfuré plus ou moins argentifère : nous voyons ce
dernier eh Europe dans le calcaire intermédiaire ( tiions de
Schwatz en Tyrol , et du mountain-limestone de Northum-
berland , de Yorck et du Derbyshire), et dans le calcaire
alpin (couches de la Haute-Silésie et delà Pologne; magnesian
limcstone deDurham). Sur le plateau de la NouvePe-Espagne
les minerais de plomb du district de Zimapan (Real del Cardo-
nal , Lomo del Toro), de même que celles de Liïïarès et du
282 IND
Nouveau-Saint-Ander, appartiennent aussi à des calcaires qui
sont mêlés de pierre fétide et qui succèdent immédiatement
à la formation houillère.
La calamine se rencontre dans le calcaire magncsifère de
l'Angleterre (Mendiphills) comme dans le zechstein de la
Haule-Silésie. Quant aux couches argileuses de fer hydraté .
elles onVe.il, dans le calcaire alpin des Andes du Pérou,
un caractère particulier; elles sont intimement mêlées d'ar-
gent natif filiforme et de muriate d'argent. Ce mélange de
fer oxidé et d'argent, que nous avons fait connoitre, M.
Klaproth et moi , est connu sous le nom de pacos : il se trouve
dans la partie équinoxiale des deux Amériques, remplissant
la partie supérieure des filons , et présente dans cette posi-
tion une analogie bien remarquable avec les masses terreuses
et ochracées (non argentifères) que les mineurs de l'Europe
désignent vulgaireuient par le nom de chapeau de fer des
filons (eiserne Hut). Le plus riche exemple que je connoisse
d'une couche de pacos dans le calcaire alpin, est le dépôt de
la montagne de Yauricocha ( Cerro de 13ombon, Cordillère
péruvienne de Fasco), situé à plus de 1800 toises de hauteur
absolue. Quoique les exploitations de ce gite de fer oxidé,
qui abonde en argent, n'aient généralement atteint jusqu'ici
que la profondeur de i5 à 20 toises, elles ont fourni, dans les
dernières vingt années du dix-huitième siècle, plus de cinq
millions de marcs d'îirgent. Aux yP"x f^» géognos(e expéri-
menté ce gîte remarquable n'est qu'un développement par-
ticulier des couches de fer hydraté que présente le zechstein
de la Haute -Silcsic, et qui passent quelquefois (Pilatus et
Wallensée en Suisse) au fer lenticulaire.
La présence simultanée du mercure dans le grès houiller
et dans le calcaire alpin ajoute aux rapports que nous avons
indiqués entre ces deux formations. En Carniole (Idria), le
minerai de mercure se trouve, d'après MM. Héron de Ville-
fosse et Bonnard , dans un schiste marneux semblable aux
marnes cuivreuses du Mansfeld. Au Pérou , près de Huan-
cavelica , le cinabre est en partie disséminé dans le grès ex-
trêmement quarzeux qui forme une couche (Pertinencias del
Brocal , de Comedio et de Cochapafa , mine de Santa-Barbara )
dans le calcaire alpin; en partie il remplit des filons (mon-
IND =83
tagne de Sillacasa) qui se réunissent en amas et {raversent
immédiatement le calcaire alpin.
Après avoir nommé cette grande variété de véritables
couches que renferme la formation dont nous tâchons de faire
connoifre les rapports de gisement, de structure et de com-
position, il me reste à indiquer les substances qui s'y trou-
A'ent simplement disséminées. Je me bornerai à nommer le
silex, le cristal de roche et le soufre.
Le silex commun (hornstein), très-rare dans le zechstein
des plaines (Thuringe), caractérise ce même terrain dans la
région alpine des Pyrénées, de la Suisse (Mont Bovon, la
Rossinière) , du Salzbourg et de la Styrie ( au-dessus deHall-
stadt ; Potschenberg; Goisernj; il passe souvent au jaspe et
au silex pyromaque (feuerstein). En Europe, le silex du
calcaire alpin ne se trouve que par rognons ou par nodules
souvent disposés sur une même ligne; mais, dans les Cor-
dillères du Pérou , au milieu des riches mines d'argent de
Chota (près de Micuipampa , lat. austr. 6° 43' 3S"), le
silex forme une couche d'une épaisseur prodigieuse. La
montagne de Gualgayoc, qui s'élève comme un chàfeau fort
sur un plateau de i8oo toises de hauteur, en est entière-
ment composée. Le sommet de cette montagne est terminé
par une innombrable quantité de petits rochers pointus ,
ayant chacun de larges ouvertures que le peuple appelle
fenêtres (venlanillas). Le silex (panizo) de Gualgayoc est un
hornstein écailleux, blanc-grisàtre , à cassure matie, souvent
unie, intimement mêlé de fer sulfuré. 11 passe tantôt au
quarz, tantôt à la pierre à fusil. Dans le premier cas il est
celluleux , à cavités irrégulières, tapissées de cristaux de
quarz. De grandes masses de ce panizo, dans lequel des filons
d'argent gris et rouge et des filons de fermagnétique forment
des amas entrelacés d'une richesse extraordinaire, ressemblent
au calcaire siliceux du terrain tertiaire de Paris ; mais on voit
clairement, dans plusieurs de ces mines (Choropampa, à l'est
du Purgatorio près du ravin de Cliiquera), que ce iiornstein
métallifère est une couche de forme irrégulière, inlercalée
au zechstein ou calcaire alpin. Il enchâsse de grandis mt-sses
calcaires, et alterne quelquefois (Socabon de Espinachl)
avec cette même argile brun-noii'àtre et schisteuse que l'on
284 J^D
trouve dans le calcaire alpin de Montan . et qui rend les
filons entièrement sîériles. Le liornstein est dépourvu des
coquilles qui abondent o'ans la roche principale et qui rem-
plissent même quelquefois les filons. Une énorme masse de
matière siliceuse, qu'on trouve comme fondue au milieu d'un
calcaire secondaire, à couches arquées et renfermant des
ammonites de 8 — lo pouces de diamètre, est sans doute
un phénomène géognostique bien remarquable. Existe-t-il
(environs de Florence) des rognons de silex corné dans les
calcaires de transition ? De quel âge sont les calcédoines
et les jaspes disséminés dans les Monti Madoni de Sicile?
Le calcaire alpin de Cumanacoa (Amérique méridionale)
renferme, comme celui de Grosbrner (Thuringe), des cristaux
de roche disséminés. Ces cristaux ne se trouvent pas dans
des cavités, mais enchâssés dans la roche , comme le feldspath
Test dans le porphyre , et comme le cristal de roche ou le bo-
racite le sont dans des gypses modernes.
Le soufre natif, que nous avons déjà vu dans le quarz
grenu du terrain primitif et dans le gypse de transition
(Sublin près de Bex), reparoît dans le calcaire alpin (Py-
rénées , près d'Orthès et près de la forge de Bielsa ; Sicile ,
Val de Noto et Mazzara), et dans le gypse feuilleté (Nou-
velle-Espagne, Pateje près Tecosautla ) qui appartient à
cette dernière formation. Cependant la majeure partie du
soufre dont abondent les régions équinoxiales de l'Amérique ,
se rencontre dans les trachytes porphyriques et dans les ar-
giles du terrain pyrogène.
Les opérations de Bouguer et de La Condaminc ayant été
faites dans une portion des Andes où dominent les forma-
tions de trachytes, il s'est répandu en Europe, parmi beau-
coup de fausses idées sur la structure des Cordillères, celle
de l'absence des coquilles et des formations calcaires dans
la région équinoxiale. Encore vers la fin du dix- huitième
siècle. l'Académie des sciences invita M. de La Peyrouse
{Voyage, T. I, p. 169) de rechei'cher, «s'il est vrai que
« près de la ligne, ou plus que l'on s'en approche, les mon-
« tagnes calcaires s'abaissent jusqu'à n'être plus qu'au niveau
« de la mer. ^^ Dans des ouvrages plus récens (Greenough,
Crit. examination of Geologj , p. 18b) on révoque en doute
IND 285
/'existence des ammonites et des bélemnifes dans l'Amérique
du Sud. En faisant connoître la superposition des roches
en différentes parties du nouveau continent, j'ai in^liqué à
quelle hauteur prodigieuse s'élèvent les couches coquilliéres
de zeclistein dans les Cordillères du Pérou et de la Nouvelle-
Grenade. 11 ne faut pas croire (]ue les grandes révolutions
qui ont enseveli les animaux pélagiques, se soient bornées à
tel ou tel climat.
Dans les régions les plus éloignées les unes des antres nous
trouvons, dans la formation du ztclistein ou calcaire alpin,
des gryphitcs (G. aculeata), des entroqucs (formant d'après
l'observation curieuse de M. de ii uch , dans beaucoup de
parties de l'Allemagne, une couche distincte sur la limite
du calcaire alpin et du grès houiller) ; des térébratulites
(T. alatus, T. lacunosus , T. higonellus) ; des pentacrinites
d'une grande longueur; un trilobite du schiste cuivreux,
qui, génériquement , n'est peut-être point encore siiflisam-
ment examiné (I". bituminosus ) ; des ammonites (plus rares
que dans le muschelkalk et dans les marnes du calcaire
du Jura); quelques orthocératites; des poissons qui avoient
déjà fixé fattention des anciens ( Aristot. , Mirab. auscultât.,
éd. Beckmanniana , cj^; Livius , lib. 42, c. 1); des ossemens
de monitor, peut-être même (Tocayma et Cumanacoa dans
l'Amérique méridionale) de crocodiles; des empreintes de
lycopodiacées et de bambusacées; point de vraies fouf'ères
mais, ce qui est très-remarquable (marnes bitumineuses de
Mansfeld), des feuilles de plantes dicotylédones analogues aux
feuilles du saule. On observe que les coquilles du calcaire
alpin [Ammonites ammonius , A. amaUheus, A. liircinus, Naulilites
ovatus, Pectinites lextorius , Pectinites salinarius , Crjphites c^i^as ,
G. aculeatus, G. arcuatus , Mjtulites rostratus) sont moins dissé-
minées dans la masse entière de la roche, comme c'est le cas
dans les deux formations du muschelkalk et du calcaire du
Jura , qu'accumulées sur certains points , et souvent à de
grandes hauteurs. Sur des étendues de pays très-considéra-
bles, le calcaire alpin paroît quelquefois dépourvu de dé-
bris organiques.
Nous avons indiqué dans les pages précédentes les forma-
tions de l'Amérique équinoxiale qui appartiennent au zech-
286 IND
stein. Ce sont, dans la chaîne du littoral de Caracas, lej
calcaires de Punta Delgrada, de Cumanacoa et du Cocollar,
renfermant, non du grauwacke, mais du grès quarzcux et
des marnes carburées; dans la Nouvelle-Grenade, le calcaire
deTocayma et du plateau de Bogota, supportant le sel gemme
de Zipaquira; dans les Andes de Quito et du Pérou, les cal-
caires de la province de Jaen de Bracomoros, de Montan et
de Micuipampa, placés sur le grès houiller et enchâssant
d'énormes masses de silex ; dans la Nouvelle-Espagne , les
calcaires du Peregrino, deSopilote etdeTasco, entre Mexico
et Acapulco. Plusieurs de ces masses calcaires d'une énorme
épaisseur, et supportant des formations de gypse et de grès,
sont superposées, non au grès houiller, mais à des porphyres
de transition très -métallifères et liés, du moins en appa-
rence, sur quelques points, à un terrain décidément tra-
chytique. On observe , dans le nouveau continent comme
dans l'ancien, que, là où le calcaire alpin a pris un grand
développement, le grès houiller manque presque entière-
ment, et vice versa. Cet antagonisme dans le développement
de deux formations voisines m'a frappé surtout à Guaxanuato
(plateau central du Mexique) et à Cuença (plateau central
de Quito), où abondent les grès houillers : il m'a frappé
dans les Cordillères de Montan (Pérou) et à Tasco (Nouvelle-
Espagne) , où abonde le calcaire alpin. Quand le grès houiller,
nous le répétons ici, n'est point visible ou qu'il ne s'est pas
développé, les limites entre le calcaire alpin et le calcaire
de transition sont très-difliciles à tracer. En excluant du ter-
rain secondaire tous les calcaires bleu -grisâtre traversés par
àes veines de spath calcaire blanc et par des couches d'argile
et de marnes, les formations de Cumanacoa, de Tasco et de
Montan (Venezuela, Pérou et Mexique), comme celles des
Alpes les plus septentrionales du Tyrol et du Salzbourg , de-
vieiidroient des formations de transition. J'incline à croire
que les formations que nous venons de nommer, de même
que celles du Mole, du Haacken et du Pilatus, sont les plus
anciennes couches du zechstein, qui se lient au calcaire de
transition de la Dent de Midi, de POldenhorn et de l'Ortcler.
Beaucoup de roches se succèdent par un développement pro-
gressif, et il paroit tout naturel que les dernières assises
IND ^87
d'une formation plus ancienne offrent une grande analogie
de structure avec les premières assises de la formation su-
perposée.
On a récemment voulu placer parmi les couches interca-
lées au zechstein ou calcaire alpin des griinstein et des do-
lérites, que nous connoissons déjà connue subordonnées au
grès houiller dans plusieurs parties de l'Europe ; on a même
indiqué, comme superposé aux calcaires alpin et jurassique,
des syénites, des porphyr(.T> et des r^ratùtei secondaires. Ce
sont là les roches de la partie sud-est du Tyrol (vallées de
Lavis et de Fassa ; Recoaro ) sur lesquelles le comte Marzari-
Pencati a publié de si curieuses observations. Le gisement
de ces substances étant encore un point de géologie très-
contesté, je dois me borner ici à présenter It^s données du
problème et l'état d'une question si digne de l'attention des
géognostes.
Déjà M. de Buch avoit remarqué, en 1798, qu'entre Per-
gine et Trento (Lago di Colombo, Monte-Corno) le porphyre
de transition (ou plutôt celui du grès rouge?) alterne avec
le calcaire alpin du terrain secondaire. Ce calcaire est rempli
d'ammonites et de térébratulites. L'alternance est évidente,
et les porphyres, si communs partout ailleurs dans le grès
houiller, débordent ici dans le calcaire alpin , de même que
sur le revers oriental des Andes du Pérou ( Chamaya) j'ai vu
déborder dans cette même formation la roche de quarz
compacte qui représente le grès houiller. C'est une pénétration
du terrain inférieur dans un terrain superposé: phénomène
qui peut d'autant moins nous surprendre, qu'en Silésie, en
Hongrie et dans plusieurs parties de l'Amérique équinoxiale
le grès rouge ou grès houiller est intimement lié au zechstein.
Les porphyres du Tyrol méridional s'élèvent (montagne de
Forna) jusqu'à i5oo toises de hauteur. ( Buch, Geogn. Beob, ,
T. I,p. 3o3, 309, 5i5, 3i6.) M. de Marzari, dont les recher-
ches ont commencé en 1806, croit avoir vu se succéder de bas
en haut , dans les environs de Recoaro , du micaschiste , de la
dolérite (remplissant en même temps les filons qui traversent
le micaschiste, et renfermant du pyroxène et du fer titane)}
du grès rouge avec houille et marnes bitumineuses; du zech-
stein , dont les couches inférieures sont un calcaire à gry-
288 IND
phites; une iormation de porphyres syénitiques avec des
airijgdaloïdcs intercalées. Dans la vallée de Lavis (Avisio) ,
M. de iNIarzari indique , toujours de bas en haut, du grauwacke ,
du porphyre, du grés rouge, du calcaire alpin, du calcaire
du Jura, du granité et des masses noires pyroxéjiiques dé-
pourvues d'olivines. D'après Tintéressant mémoire publié
par M. Breislak, le granité secondaire placé sur le calcaire
alpin est entièrement semblable au plus beau granité d'Egypte :
il renferme ( Canzacoli délie coste , Pedrazzo ) de grandes
massfs de quarz avec tourmaline ■ il rend grenu à son contact
(à plusieurs toises de profondeur) le calcaire qui le supporte,
et passe tantôt à une roche pjroxénique, tantôt à un porphyre
à base feldspathique noire, tantôt à la serpentine. (Marzari ,
Cenni geologici, 1819, p. 46 j Id. , JSuevo osser^atore Vene-
ziano, it)20, n." ii3 et 127 ; Breislak, Sulla giacitura délie
rocce porjîritiche e granitose del Tirolo , 1821, p. 22, 25, 52;
]\îarzari , Lettera al signor Cordier , 1822, p. 5; Maraschini ,
Obs. géogn. sur le Vicentin , 1822, p. 17.) Entre la Piave et
l'Adige un mandelstein agathifère , qui rappelle ceux du
grès rouge, surmonte le calcaire alpin : c'est, dit-on, une
formation parallèle aux couches du granité secojidaire. Un
excellent géognoste, M. Brocchi , qui a publié dès Tannée
1811 un mémoire sur la vallée de Passa, n'a pas seulement
vu des griinstein en partie pyroxéniques couvrir des calcaires
qu'il croit de transition, mais qui passent dans leurs couches
supérieures au calcaire alpin avec silex; il a reconnu aussi ces
gr.insteiu pyroxéniques comme alternant avec les calcaires
(M.iignon, Fedaja ). Récemment M. de Marzari a annoncé
avoir vu.fGrigno de la Piave, Cimadasta) le granité et le
mandelstein agathifère surmonter le terrain de craie, et sç
ranger parmi les roches tertiaires.
Je consigne ici des faits de gisement bien extraordinaires,
et sur lesquels sans doute M. de Buch , qui a visité récemment
la vijilée de passa , va répandre un nouveau jour. Les rapports
de gisement de ces contrées paroissent très-compliqués. La
roche dans laquelle les griinsfein et les dolérites se trouvent
intercalés, est-elle bien certainement du zechstein, ou appar-
tient-elle au terrain de transition? Ces griinstein et ces dolé-
rites se trouvent-ils en couches ou en filons? Les roches feld-
IND 2B9
spàthiques grenues (appelées syénites et granités à trois élé-
mens) sont-elles oryctognostiqueinent analogues aux roches
homonymes de Christiania , ou sont-elles des trachytcs ? En
admettant que la superposition des roches ait été observée avec
précision , et que les divers terrains aient été bien nommés , on
verroit se répéter ici, dans des formations secondaires, les phé-
nomènes que MM. de Buch et Haussmann ont fait connoître les
premiers dans la série des formations intermédiaires. L'alter-
nance de roches sédimentaires, arénacées et cristallines,
continueroit , comme par séries périodiques, jusque vers les
terrains les plus modernes. Nous savions déjà, par les belles
observations de MM. Mac-Culloch et Boue, qu'en Ecosse et
dans plusieurs parties du continent des roches grenues, por-
phyriques, syénitiques et pyroxéniques , pénètrent du terrain
de transition dans le grès houiller. Le calcaire alpin est im-
médiatement superposé à la formation de porphyre et de
grès rouge ; il est géognostiquement lié avec cette formation.
D'après ces données il ne seroit pas très - surprenant , ce
me semble , de voir intercalé au calcaire alpin ces mêmes
couches cristallines (amphiboliques et feldspathiques ) que
l'on a déjà reconnues dans le grés houiller. La géognosie po-
sitive doit offrir un enchaînement de faits bien observés et
judicieusement comparés entre eux. Elle n'enseigne pas que
la répétition de certains types cristallins s'arrête nécessaire-
ment au grès houiller. Les observations de M. de Marzari ne
renverseront par conséquent aucune loi géognostique. Si
elles sont confirmées par des recherches ultérieures, elles
agrandiront plutôt nos vues sur ce phénomène curieux d'a/-
tcTnanot dans des formations les plus éloignées les unes des
autres. Comme des filons remplis de griinstein , de syénites
et de masses pyroxéniques, traversent, dans plusieurs par-
ties des deux continens , les granités primitifs, les thonschiefer,
les porphyres de transition, les calcaires secondaires et même
les formations supérieures à la craie , plusieurs géognostes
célèbres ont soupçonné que les roches problématiques des
rives de l'Avisio (Lavis) pourroient bien être deé masses
volcaniques, des coulées de laves venues d'en- bas (de l'in-
térieur de la terre) par des crevasses. Ce soupçon paroît
fortifié par l'analogie des roches cristallines , que l'on assure
20. 19
ago IND
Être indifféremment superposées à des formations d'un âg€
très- différent f au calcaire alpin , au calcaire du Jura et à la
craie): mais les grandes masses de quarz qui entrent dans la
composition des roches appelées par MM. de Marzari et
Breislak granités secondaires , semblent éloigner ces roches
problématiques des productions modernes des volcans. Il faut
espérer que des observations souvent répétées sur les lieux
vont bientôt lever tous ces doutes. L'incrédulité dé laigneuse
est aussi funeste aux sciences qu'une trop grande facilité à
adopter des faits incomplètement observés. II faudra surtout
distinguer entre des masses ( trachytiquesP ) qui se sont ré-
pandues sur des formations secondaires et qui seulement leur
sont superposées , et des masses (amphibolique», pyroxéni-
ques, syénitiques) qui pourroient leur être intercalées. Cette
différence de gisement seule peut être l'objet d'une observa-
tion directe ; le problème de l'origine des couches cristal-
lines superposées ou intercalées appartient à la géogonie.
Beaucoup de roches très- anciennes ne sont peut-être aussi
que des nappes de matières fondues; et les questions géogo-
niques auxquelles donnent lieu les roches de Passa , peuvent
en partie s'appliquer aux porphyres et aux griinstein pyroxé-
mques intercalés au grès houiller. Il faut décrire dans chaque
formation ce qu'elle renferme et ce qui la caractérise. La
géognosie positive s'arrête à la connoissance des gisemens.
III. Dépôts arénacés et calcaires (marneux et oolithiques)
PLACÉS entre le ZECHSTEIN ET LA CRAIE , ET LIÉS A CES DEUX
terrains.
En remontant depuis le terrain de transition par les roches
secondaires au terrain tertiaire , le phénomène de Y aller'
nance entre des couches calcaires et arénacées devient de
plus en plus frappant. On voit alterner d'abord des calcaires '
intermédiaires blancs et cristallins 'Tarantaise), ou compactes
et carbures, avec des grauwackes ; puis se succèdent le grès
rouge, le calcaire alpin ou zechstein, le grès bigarré (red
mari), le muschelkalk (calcaire de Gœttingue) , le quader-
sandstein ( grès de Konigstein ) , le calcaire du Jura ( formation
oolithique), le grès vert ou grès secondaire à lignltes (green
sand), la craie , le grès tertiaire à lignites (argile plastique) .
IND .9.
le calcaire parisien, etc. Je rappelle ici six alternances de
douze formations intermédiaires , secondaires et tertiaires
(arénacées et calcaires), d'après leur ancienneté relative,
comme si, dans un seul point de la terre, ces roches s'étoient
toutes simultanément développées. Par la suppression fré-
quente de quelques-unes d'elles, surtout du grès bigarré, du
muschelkalk et du quadersandstein , le calcaire (oolithique)
du Jura repose parfois immédiatement sur le calcaire alpin
(Andes du Mexique et du Pérou, Pyrénées, Apennins).
Les dépôts que nous réunissons dans cette troisième grande
division (§§. 29 — 53), forment à peu près tout le terrain de
sédiment moyen de M. Brongniart. J'ai craint d'employer les
dénominations qui ont rapport à des limites si différemment
tracées par les géognostes modernes. M. Conybeare, dans l'ex-
cellent ouvrage qu'il a récemment publié avec M. Philipps
sur la Géologie de l'Angleterre, distingue les terrains en sur-
moyens, moyens et sousmoyens {supermedial, medial et sub-
medial). Tant de divisions systématiques ajoutent peut-être
à la difficulté qu'offre déjà la synonymie des roches.
Argile et Grès bicarré (Grès a oolithes ; Grès de Nebra ;
New RED SANDSTONE ET ReD MARl) AVEC GYPSE ET SEL GEMME.
§. 29. Le grès de Nebra ou grès bigarré (Thuiûnge) et le
red mari de PAngleterre (depuis les rives du Tees en Dur-
ham jusqu'aux côtes méridionales du Devonshire) ne sont
pas seulement des formations parallèles, c'est-à-dire, du même
âge et occupant la même place dans la série des roches : ce
sont des formations identiques. Le premier , assez pauvre en
pétrifications [Strombites speciosits , Pectinites fragilis , Mjytu-
lites recens, Grjphites spiratus , Schl.), est un terrain composé
de trois séries de couches alternantes; savoir : 1.° d'argiles;
2° de grès micacés et schisteux, av«c masses de glaise à formes
aplaties et lenticulaires (thongallen) ; 3.° d'oolithcs générale-
ment brun-rougeàtres. On trouve dans le grès bigarré du
continent, en bancs subordonnés, du gypse (thongyps), quel-
quefois lamelleux , le plus souvent fibreux, et dépourvu de
calcaire fétide. Nous avons vu plus haut qu'en Allemagne
et en France un grand nombre de sources salées coulent sur
ces bancs d'argile et de gypse, et qu'ùThiede, entre 'V^'^Qlfen-'
292 IND
biittel et Brunswic , comme à Sulz prés Heilbroiiu, de petites
masses de sel gemme sont disséminées dans cette formation ,
qui, à Sulz , a été atteinte par la sonde après le muschelkalk
et avant le zechstein. Le red mari (red ground , red rock,
red ford), si bien examiné par MM. Winch et Grcenough ,
dépourvu de pétrifications et de bancs d'oolithes, et coupé
par des fissures en masses rhomboïdales, est en Angleterre le
véritable gîte du sel gemme : il se compose dans ses assises
supérieures d'argiles marneuses, de gypse (albâtre) et de sel
(Witton près Northwich ; Droitwich); dans ses assises infé-
rieures , soit de conglomérats avec galets de roches primitives
et de transition, soit de grès à petits grains (entre Exeter et
Exminster). Le sel gemme d'Angleterre, de Lorraine et du
Wurtemberg, lie la formation de grés et d'argiles bigarrés,
vers le bas, au zechstein et au calcaire alpin ; vers le haut,
dans le nord de l'Allemagne , cette formation passe au mu-
schelkalk, dont les couches les plus anciennes sont un peu
arénacées. On pourroit dire aussi que les oolithes du grès bi-
garré (Eisleben, Endeborn , Briindel) et ses marnes préludent
à la formation du Jura: mais ces oolithes brun-rougeàfres
se perdent insensiblement en une roche arénacée; elles diffè-
rent essentiellement des oolithes blanches et blanc- jaunâtres
du calcaire du Jura. Sur le continent, le grès bigarré est très-
distinct du zechstein , malgré les traces de sel qui le lient à
cette dernière formation: en Angleterre, le red mari, le
calcaire magnésien et les conglomérats d'Exeter et de ïeign-
7nouth (Devonshire), qui, sous le nom de nouveau conglomérat
rouge, représentent le grès houiller du Mansfeld , sont aussi
intimement liés entre eux que le sont les dépôts de houille
avec les roches de transition (mountain limestone et old red
sandstone).
En décrivant plus haut le grès rouge de la Nouvelle-Gre-
nade, }'ai discuté les nuances de composition et de struc-
ture qui distinguent cette formation houillère du grès bi-
garré (buntesandstein) , par rapport aux couches intercalées
de sables, d'argiles schisteuses et de conglomérats à gros
grains. Ces conglomérats, qui caractérisent les assises infé-
rieures du red mari, se retrouvent dans la chaîne des Vosges.
Les strates supérieurs du grès bigarré sont verts ; on les croit
IND 2^93
colorés par le nickel et le chrome. Ils sont quelquefois mêlés
de petites lames de baryte sulfatée (Mariaspring près Goet-
tingue).
Couches subordonnées : i .° Gypse argileux un peu chlo-
riteux , avec des aragonites (Bastène près de Dax) , avec des
cristaux de roche incolores (Langensalze, "Wimmelburg) , ou
rouges (Dax), et avec du soufre, disséminés (entre Gnolbzig
et Naundorf ) ; ce gypse a été regardé jadis comme une for-
mation particulière placée entre le grès bigarré et le muschel-
kalk (Cresfeld et Helbra en Saxe, Dblau en Franconie, Neu-
land près Lowenberg en Silésie; Amajaque au Mexique): 2.°
calcaires en lits minces, tantôt marneux, tantôt magnésifères:
3." argile imprégnée de goudron minéral (Kleinscheppenstedt
près Brunswic ) : 4.° sables (triebsand ) avec de grands chamites
et du bois pétrifié (Burgbrner) : 5." grès extrêmement quarzeux,
presque sans ciment visible, très-caractéristique tant pour le
grès bigarré que pour Targile plastique qui environne les cou-
lées de basaltes : G.° mine de fer brune souvent en géodes : 7.°
traces de houilles, peut-êîre même de lignites, qu'il ne faut
point confondre avec les dépôts analogues du quadersandstein
et des grès secondaires et" tertiaires à lignites (au-dessous et
au-dessus de la craie). On assure avoir trouvé des branches
d'arbre charbonisées dans les argiles avec gypse d'Oberwie-
derstedt en Thuringe ; aussi les schistes argentifères de Fran-
kenberg (Hesse j, qui ne sont que des phytolithes charbonisés,
enduits et pénétrés de métaux, paroissent à plusieurs géo-
gnostes appartenir au grès bigarré. M. Boue, dont les obli-
geantes communications ont si souvent enrichi mes tra^'aux,
observe que le grès bigarré existe par lambeaux dans le sud-
ouest de la France : il y est représenté par des marnes et
des gypses fibreux ou compactes (Cognac, S. Froult près
Rochefort), et quelquefois immédiatement recouvert de
calcaire jurassique et de craie grossière. Au pied des Pyrénées,
entre S. Giron et Rimont , le grès bigarré a pris un dévelop-
pement considérable. Comme dans la partie des Andes que
j'ai parcourue, les formations du terrain secondaire, c'est-
à-dire, celles qui sont supérieures au calcaire alpin, ne se
sont presque pas développées, je ne crois avoir bien reconnu
le grès bigarré que dans les points suivans.
294 IND
Au Mexique, en descendant des montagnes composées de
porphyres intermédiaires et éminemment métallifères ( Real
del Monte et de Moran ) vers les bains chauds de Tolonilco
el Grande , on trouve une formation puissante de calcaire
gris - bleuâtre , presque dépourvue de coquilles, générale^
ment compacte, mais enchâssant des couches très- blanches
et grenues à gros grains. Ce calcaire , célèbre par ses cavernes
(Danto ou la Montagne percée), et rempli de filons de
plomb sulfuré, me paroît un terrain de transition. Il est
couvert d'une autre formation , gris-blanchâtre et entière-
ment compacte, qui ressemble au zechstein. Sur cette der-
nière repose le grès argileux (bunte sandstein), dont les
assises supérieures sont (près d'Amajaque) des argiles avec
gypse feuilleté. Je pense que le grès enchâssant des masses
aplaties d'argile ( thongallen), près de La Veracruz, et renfer-
mant (Acazonica) un beau gypse feuilleté, appartient aussi,
comme le gypse d'Amajaque, au grès bigarré. Peut-être cette
formation de Veracruz fait-elle le tour des côtes orientales,
et se lie-t-elle aux dépôts calcaires de Nu evo- Léon, riche
en galènes foiblement argentifères.
Dans les Llanos ou steppes de Venezuela, les gypses argileux
(Cachipo, Ortiz) sont certainement postérieurs au grès houil-
ler; mais, si le calcaire qui les sépare (entre Tisnao et Cala-
iozo), loin d'être du zechstein, est, comme sa cassure unie
et son aspect de calcaire lithographique sembleroient l'indi-
quer, de formation jurassique, ces g>pses des Llanos seroient
plus modernes encore que ceux du grès bigarré. A Guire
(côtes orientales de Cumana) , un gypse blanc et grenu
(jurassique?) contient de grandes masses de soufre. Les argiles
salifèrcs mêlées de gypses et de pétrole de la péninsule d'Araya ,
vis-à-vis i'ile de la Marguerite, sont placées entre le zech-
stein et un terrain tertiaire. Comme des gypses sont renfer-
més dans ce dernier terrain (colline du château S. Antoine,
à Cumana ; plaines entre Turbaco et Carthagène des Indes),
on pourroit croire que les argiles salifères d'Ara) a sont aussi
beaucoup plus récentes que le red mari ou grès bigarré. Mais
je n'ose prononcer avec certitude sur l'âge de ces forma-
tions, dans l'absence de tant de roches que Ton trouve
placées ailleurs entre le zechstein et les terraiiis tertiaires.
IND 295
Les gypses que j'ai examinés dans l'intérieur de la ISouvelle-
Grenade (plateau de Bogota ; Chaparal, à l'ouest de Contreras)
m'ont tous paru de la formation du calcaire alpin.
Lorsqu'on examine le terrain §, 29 dans des contrées si
éloignées les unes des autres, on trouve la dénomination de
grès bigarré tout aussi bizarre que la dénomination de grès
rouge. On peut substituer à la dernière celle de grès houiller,
en rappelant un des résultats les plus généraux et les plus po-
sitifs de la géognosie moderne. 11 seroit à désirer qu'un géo-
gnoste d'une grande autorité substituât un nom géographique
à celui de grès bigarré ou grès à oolithes brunes. Je continuerai
jusque-là à me servir de la dénomination de grès de Nebra.
MUSCHELKALK (CalCAIRE COQUILLIER ; CaLCAIRE DE GœTTINGUe).
§. 3o. Formation peu variable, et que la dénomination
beaucoup trop vague de calcaire coquillier a fait confondre,
hors de l'Allemagne, avec les assises inférieures ou supé-
rieures du calcaire jurassique (avec le lias ou le forest mar-
bre et portlandstone). Elle est bien caractérisée par sa struc-
ture plus simple , par la prodigieuse quantité de coquilles en
partie brisées qu'elle renferme, et par sa position au-dessus
du grès de Nebra ( bunte sandstein ) et au-dessous du qua-
dersandstein qui la sépare du calcaire jurassique. Elle remplit
une vaste partie de l'Allemagne septentrionale (Hanovre,
Heinbergprèsde Gœttingue; Eichsfeld, Cobourg; Westphalie,
Pyrmont et Bielfeld ), où elle est plus puissante que le zech-
stein ou calcaire alpin. Dans l'Allemagne méridionale elle
s'étend sur tout le plateau entre Hanau etStutgard. En France,
où , malgré les grands et utiles travaux de M. Omalius d'Halloy,
les formations secondaires qui sont inférieures à la craie, ont
été si long-temps négligées, MM. de Beaumont et Boue l'ont
reconnue tout autour de la chaîne des Vosges. Le muschelkalk
a généralement des teintes pâles, blanchâtres, grisâtres ou
jaunâtres : sa cassure est compacte et matte ; mais le mélange
de petites lames de spath calcaire, provenant peut-être de
débris de pétrifications, le rend quelquefois un peu grenu et
brillant. Plusieurs couches sont marneuses, arénacées, ou
passant à la structure oolithique (Séeberg près de Gotha ;
Weper près Gœttingue; Preussisch-Minden; Hildesheim). Des
2^6 IND
hornsteîn, passant au silex pyromaque et au jaspe (Dransfeld,
Kandern, Saarbriick), sont ou disséminés par nodules dans
le muscheikalk, ou y forment de petites couches peu conti-
nues. Les assises inférieures de cette formation alternent avec
le grès bigarré (entre Bennstedt et Kelme), ou se lient in-
sensiblement au grés, en se chargeant de sable, d'argile et
même (à l'est de Cobourg) de magnésie (bancs magnésifères
du muscheikalk).
Couches subordonnées. Les marnes et argiles, si fréquentes
dans le calcaire jurassique, le grès bigarré et le zechstein ,
sont assez rares dans le muscheikalk. En Allemagne, cette roche
renferme du fer hydraté, un peu de gypse fibreux (Sulzbourg
près Naumbourg), et de la houille (lettenkohle deVoigt;
à Mattstedt et Eckardsberg près Weimar) mêlée de schiste
alumineux et de fruits (de conifères?) charbonnés. Plus les
îiouilles avancent vers le terrain tertiaire , plus elles se rap-
prochent, du moins dans quelques-uns de leurs strates, de
l'état de lignite et de terre alumineuse.
Pétrifications. D'après les recherches de M. de Schlott-
heim, et en rejetant les couches qui n'appartiennent pas au
muscheikalk: Chamites striatus , Belemnites paxillosus , Ammo-
nites amalteus , A. nodosus , A. angulatus , A. papjraceus , Nauli-
lites binodatiis , Buccinites s;regariiis , Trochilites lœvis , Turbinites
cerithius, Myacites vcntricosus , Pectinites reticulatus , Oslraciles
spondyloiies , Terebratulites fragilis , T. vulgaris , Gryphites
cymbium , G. suillus , Mjtulites socialis , Pentacrinites vulgaris ,
Encrinites liliiformis , etc. Quelques couches isolées du calcaire
jurassique renferment peut-être plus de pétrifications encore
que le muscheikalk; mais dans aucune formation secondaire
les débris de corps organisés n'abondent si uniformément que
dans celle que nous venons de décrire. Une immense quan-
tité de coquilles, en partie brisées, en partie bien conser-
vées, mais adhérant fortement à la matière pierreuse (en-
troques, turbinites, strombites, mytulites), est accumulée
en plusieurs strates de 20 à 26 millimètres d'épaisseur, qui
traversent le muscheikalk. Beaucoup d'espèces se trouvent
réunies par familles (belemnites, terebratulites, chamites).
Entre ces strates éminemment coqu'lliers sont disséminés
des ammonites, des turbinites, quelques terebratulites avec
IND 297
îeur test nacré, le Gryphœa cymhium , et de superbes pen-
tacrinites. Les coraux , les échinites et les pectinites sont
rares. L'abondance des entroques dans le muschelkalk a fait
donner à cette formation , dans quelques parties de l'Alle-
magne , le nom de calcaire à entroques (trochitenkalk). Comme
une couche d'entroque caractérise souvent aussi le zechstein
et le sépare du grès houiller, cette dénomination peut faire
confondre deux formations très -distinctes. La dénomination
de calcaire à gryphées (graphytenkalk du zechstein et du
calcaire du Jura), et toutes celles qui font allusion à des
corps fossiles, sans indication d'espèces, exposent à ce même
danger. On assure que le muschelkalk renferme des osse-
mens de grands animaux (quadrupèdes ovipares? Freies-
leben, T. I, p. 74; T. IV, p. 24, 3o5 ) et d'oiseaux (ornitho-
lithes du Heimberg : Blumenbach , ISaturgesch., oteAuJl.,
p. 665),- mais ces ossemens pourroient bien appartenir , de
même que les dents de poisson , à des brèches ou à des marnes
superposées au muschelkalk.
De célèbres géognostes angîois, MM. Buckland et Con}^-
beare, ont cru reconnoitre, dans leur voyage en Allemagne,
le muschelkalk de Werner comme identique avec le lias ,
qui est l'assise inférieure du calcaire jurassique. J'incline à
croire, malgré les oolithes gris -bleuâtres observées dans le
muschelkalk sur les bords du Weser, qu'il y a plutôt parallé-
lisme qu'identité de formation. Le muschelkalk occupe la
même place que le lias : il abonde également en ammonites,
térébratulites et encrinites; mais les espèces fossiles diffèrent ,
et sa structure est beaucoup plus simple et plus uniforme.
Les strates du muschelkalk ne sont pas séparés par ces argiles
bleues qui abondent dans les assises supérieures et inférieures
de la formation du lias. Les assises mitoyennes de cette der-
nière formation ont une cassure matte et unie , et ressem-
blent bien plus aux variétés lithographiquesdu calcaire du Jura
qu'au muschelkalk de Gœttingue , de Jena et de l'Eichsfeld.
M. d'Aubuisson croit que cette dernière formation est repré-
sentée en Angleterre parle portlandstone , le cornbrash et le
forestmarble : mais, quelque analogie que puissent oflFrir tous
ces lits de calcaire marneux pétris de coquilles en partie brisées
(forestmarble) , il faut se rappeler qu'ils alternent avec des
298 IND
formations entièrement oolithiques, et qu'ils sont séparés du
red mari par le lias, tout comme le calcaire oolilhique du
Jura estséi)arépar le muschelkalk du grès bigarré. En France .
M. Boue a reconnu le muschelkalk. dans le plateau de Bour-
gogne , près de Viteaux et de Coussy- les -Forges, près de
Dax dans la commune de S. Pan de Lon , etc. Je ne l'ai point
reconnu dans la partie équinoxiale de l'Amérique. Les cou-
ches très-arénacées , remplies de madrépores et de coquilles
bivalves des côtes de Cumana et de Carthagène des Indes,
que j'ai voulu jadis y rapporter, sont probablement des ter-
rains tertiaires.
QUADERSANDSIEIN (GrKS DE KoMGSTEIn).
§.3]. Formation très-distincte (rives de l'Elbe, au-dessus
de Dresde entre Pirna, Schandau et K()nigstein; entre Nurem-
berg et Weissenburg ; Staffelstein en Franconie ; Heuscheune,
Adersbach; Teufelsmauer au pied du Harz ; vallée de la Mo-
selle et près de Luxembourg; Vie en Lorraine; Nalzen , dans
le pays de Foy , et Navarreins, au pied des Pyrénées), ca-
ractérisée par M. Hausmann, et confondue loug'-temps, soit
avec les variétés quarzeuses du grès bigarré et du grès de
l'argile plastique ( trappsandstein) , soit avec le grès de Fon-
tainebleau , supérieur au calcaire grossier de Paris : c'est le
grès blanc de M. de Bonnard , le grès de troisième formation
de M. d'Aubuisson. Préférant les dénominations géographi-
ques, je nomme souvent cette formation grès de Kbnigstein,
le grès bigarré grès de Ncbra, le muschelkalk calcaire de
Gattingiie.
Le quadcrsandstein a une couleur blanchâtre, jaunâtre ou
grisâtre, à grains très-fins, agglutinés par un ciment argi-
leux ou quarzeux presque invisible. Le mica y est peu abon-
dant, toujours argentin et disséminé en paillettes isolées.
Il est dépourvu, et de bancs intercalés d'oolithes, et de ces
masses aplaties ou lenticulaires d'argile (thongallen) qui ca-
ractérisent le grès bigarré. 11 n'est jamais schisteux ; mais divisé
en bancs peu inclinés, très-épais, qui sont coupés à angle
droit par des fissures, et dont quelques-uns se décomposent
très-facilement en un sable très-fin. Il renferme du fer
hydraté (Metz) disposé par nodules. Les débris organiques
IND 299
disséminés dans cette formation offrent , d'après MM. de
Schlottheim , Haussmann et Raumer, un mélange extraor-
dinaire de coquilles pélagiques très -analogues à celles liu
muschelkalk , et de phytolithes dicotylédones. On y a trouvé
des mytulites, des tellinites, des pectinites, des turritelles ,
des huîtres (pas d'ammonites, mais des cérites ; Habel-
schwerd , Alt-Lomnitz en Silésie ) , et en même temps des
bois de palmier , des empreintes de feuilles appartenant à la
classe des dicotylédones et de petits dépôîs de houille (Deister,
Wefersleben près Qucdlinbourg) , très-bien décrits par MM.
Rettberg et Schulze, et passant au lignite. Ces débris de
bois, d'un aspect bitumineux, ont sans doute de quoi nous
surprendre dans une formation si éloignée de la grande for-
mation de lignites qui est placée entre la craie et le calcaire
grossier parisien ; mais des observations récentes nous mon-
trent des traces de véritables lignites jusque dans les calcaires
à gryphées arquées au-dessous du lias (Le Vay, côtes de
Caen ) et jusque dans le grès bigarré. Les mauvaises houilles
du muschelkalk , par conséquent d'une formation plus an-
cienne que le quadersandstein , passent aussi au lignite.
Déjà M. de Raumer avoit reconnu que le quadersandstein
est séparé du grès bigarré par le muschelkalk (calcaire de
Gœttingue) ; il est placé entre ce calcaire et le calcaire du
Jura , et par conséquent inférieur aux grandes formations
oolithiques de l'Angleterre et du continent. Dans cette posi-^
tion nous ne pouvons guères le considérer , avec M. Keferstein
(voyez son intéressant Essai fixv la géographie minéralogiquc
de TAllemagne , T. I , p. i 2 et 4 8 ) , comme parallèle à la mo-
lasse d'Argovie (mergclsandstein) , qui représente l'argile
plastique (grès tertiaire à lignites) au-dessus de la craie. La
nature des débris végétaux que renferme le quadersandstein ,
et ses rapports avec le plànerkalk qui appartient aux assises
chloritées et arénacées de la craie, le font regarder par plu-
sieurs géognostes célèbres comme d'une formation postérieure
au calcaire jurassique : c'est ainsi que MM. Buckland, Cony-
beare et Philipps le placent entre la craie et les dernières
couches oolithiques. Mais, d'après les observations de M.
Boue et de plusieurs autres géognostes célèbres d'Allemagne,
!e quadersandstein (grès de Konigstein ) , alternant quelque-
3oo IIVD
fois avec des couches marneuses et des conglomérats, reposa
immédiatement sur le gneis près de Freiberg , sur le grès
houiller en Silésie et en Bohème ; sur le grès bigarré (grès
de Nebra) , prés de Nuremberg , en Franconie ; sur le mu-
schelkalk (calcaire de Gœttingue), entre Hildesheim et Dick-
holzen près de Helmstâdt, et près de Schweinfurt sur le
Mein. Il est recouvert de calcaire du Jura, et alterne avec
les couches marneuses de ce calcaire, en Westphalie, entre
Osnabruck, Bielfeld et Biickebourg.
Calcaire du Jura (Lias, Marnes et grands dépôts oolithiques).
§. 32. Formation très -complexe , composée de couches
alternantes de calcaires, marneuses et oolithiques, renfermant
du gypse et un peu de grès. Le mode d'alternances par-
tielles, très- constant dans chaque localité , varie dans des
pays d'une étendue considérable ; cependant sur les points
les plus éloignés de l'Europe on reconnoît une analogie frap-
pante entre les grandes divisions ou assises principales.
Dans la série des formations les plus neuves du terrain
secondaire le calcaire du Jura [Jurassus) est placé entre le
quadersandstein et la craie. Cette dernière y passe même
insensiblement, et peut souvent être regardée, par l'ana-
logie de ses fossiles, comme une continuation du calcaire
jurassique. La superposition de ce calcaire au quadersajid-
stein , si long -temps contestée, se montre en Allemagne,
d'après M. de Schmitz , près de Wilsbourg ; d'après M. Boue ,
près Blumenroth , Stalfelstein, et entre Osnabruck et Bucke-
bourg. Lorsque les trois formations de quadersandstein ,
de muschelkalk et de grès bigarré ne se sont pas dévelop-
pées simultanément, le calcaire jurassique, par la suppres-
sion des membres intermédiaires de la série géognostique ,
recouvre immédiatement le zechstein ou calcaire alpin. Dans
ce cas (pente septentrionale des Pyrénées; Apennins, entre
Fossoinbrono , Furli et Nocera ; Cordillères du Mexique ,
entre Zumpango et Tepecuacuilco) , on voit ce dernier passer
insensiblement à un calcaire blanchâtre , à cassure matte égale
(ou conchoïde à cavités très-aplaties) , qu'on ne sauroit dis-
tinguer des couches compactes du calcaire du Jura dépour-
vues d'oolithes. Ce passage , dont M. de Charpentier a aussi été
IND 3oi
frappé dans le Midi de la France , mérite un examen très-
attentif. Malgré la grande différence qui existe entre les
débris fossiles du muschelkalk et du calcaire jiirassique, les
dernières formations du terrain secondaire sont étroitement
liées entre elles, et il ne faut pas être surpris que dans une
série et, /3y7-, cT, s.... le terrain a (zechstein) fasse passage
à £ (calcaire du Jura), à cause de la suppression fréquente
des termes ^, y et ^ (c'est-à-dire, du grès bigarré, du
muschelkalk et du quadersandstein ). Les formations aréna-
cées /S et tT alternent avec des argiles et des marnes plus ou
moins abondantes, de sorte que, par un grand développe-
ment de leurs couches désagrégées , celles-ci réduisent à
Tétat de simples bancs intercalés les assises pierreuses, et
finissent, comme c'est le cas dans l'Ouest de la France, par
remplir tout l'intervalle entre a, et s.
Le calcaire jurassique couvre , sans interruption , une grande
étendue de pays, depuis la chaîne des Alpes jusque dans le
centre de l'Allemagne, depuis Genève jusqu'à Streitberg et
Muggendorf, en Franconie. Comme, vers le nord, il ren-
ferme des cavernes à ossemens fossiles, cette formation a
singulièrement fixé l'attention des géognostes allemands. M.
"Werner la croyoit identique avec le muschelkalk : j'ai re-
connu , dès l'année 1796 , qu'elle en différoit essentiellement,
et j'ai proposé de la désigner par le nom de calcaire du Jura ,
à cause de l'analogie parfaite que présentent les montagnes
occidentales de la Suisse avec celles de la Franconie. Cette dé-
nomination est aujourd'hui généralement reçue: mais il a été
constaté que le calcaire du Jura , au lieu d'être placé sous le
grès bigarré (comme je l'avois cru , par erreur, avec le plus
grand nombre des géognostes, en confondant ce grès avec
la molasse d'Argovie et le grès de Dondorf et de Misselgau
près Bareuth), est plus récent que le grès bigarré, que le
muschelkalk (Bindloch) et le quadersandstein (Schwandorf;
Phantaisie (?); INuremberg). Cette intercalation entre le
quadersandstein et la craie , qui se fonde sur des observations
directes, explique très-bien le passage graduel (Montagne de
S. Pierre près de Maestricht), de la craie tuffeau à la for-
mation jurassique. Le nom de calcaire caverneux (hbhlen-
kalk), donné souvent à cette dernière, peut donner lieu à
'602 i^jj
des rapprochemens erronés. Il faudroit distinguer entre des
formations dont la masse entière est spongieuse, caverneuse
ou criblée de trous, et des roches à cavernes. Plusieurs,
sans être poreuses ou celluleuses , en renferment de très-
vastes. Le calcaire de transition (mountain limestone de
Derbyshire) mériteroit, en Angleterre et au Harz , presque
autant que celui du Jura, le nom de calcaire à cavernes. Au
contraire, le rauchkalk et le rauchwacke , qui forment les
assises moyennes du zechstein en Thuringe, et que l'on a
crus à tort parallèles au calcaire du Jura, sont, comme ce
dernier, et dans des étendues de couches très-considérables,
remplis de petites cavités de 2 — 10 lignes de diamètre , sans
offrir pour cela de véritables grottes. Le phénomène des
grottes et celui de la porosité (cavernosité générale) de la
masse ne se trouvent pas nécessairement réunis; ce sont des
modifications qui, loin de caractériser telle ou telle formation ,
se rencontrent dans des formations très-différentes.
Quoique sur le continent les couches partielles qui com-
posent le calcaire du Jura se soient très -inégalement déve-
loppées, et que l'ordre de leur succession \'arie souvent, on
remarque toujours un certain nombre d'assises distinctes et
répandues sur des étendues de terrain très -considérables.
Nous les nommerons en commençant par les plus anciennes :
calcaire marneux (et marnes calcaires tiès-dures) , hleu-gri-
sàtre, analogue (d'après MM. Boue et Buckland, Essai géogn.
sur l'Ecosse, pag. 201 , et Slrucl. of the Alps , pag. 17) au
lias de lAngleterre, quelquefois traversé par des veines de
spath calcaire, rempli de gryphées arquées: oolithes gris-
jaunâtres, alternant avec des marnes en partie bitumineuses
et avec du gypse; calcaire compacte à cassure unie et niatte,
et oolithes blanches; couches remplies de madrépores ana-
logues au calcaire à polypier de Normandie et au coral-rag
de l'Angleterre; calcaire schisteux avec poissons et crustacés
(Pappenheim et Solenhoffen). L'assise inférieure de cette
formation si complexe est particulièrement désignée , en
France (Bourgogne) et dans l'Allemagne méridionale (Wur-
temberg), sous le nom de calcaire à gryphites ; mais quelques
géognostes penchent même pour l'idée de séparer cette assise
du calcaire du Jura, en la regardant, avec MM. de Buch et
ÎND oo3
Brongniart , comme appartenant au zechstein , ou avec M.
Keferslein, comme parallèle au muschelkalk. Ici se présente
Ja question importante de savoir dans quel rapport de gise-
ment et de composition se trouve le calcaire à gryphites
du Jura avec celui qui porte le même nom dans le Nord de
l'Allemagne , et que M. Voigt a fait connoitre dès Tannée
1792? Une grande amilogie enlre les couches les plus voi-
sines de deux formations qui quelquefois se trouvent immé-
diatement superposées l'une à l'autre, n'a sans doute rien
de bien surprenant : les mêmes espèces de gryphées pour-
roient se rencontrer dans des formations très-distinctes et plus
éloignées encore entre elles ; mais la liaison géognostique
observée entre le calcaire à gryphées arquées, alternant
avec les marnes, et les autres couches inférieures du Jura,
me fait pencher pour l'opinion que ce calcaire, et le calcaire
à gryphées épineuses (gryphitenkalk de Voigt), placé sous
le grès bigarré, ne sont pas d'une même formation. M.Mérian,
dans son excellente Monographie des environs deBàle, énonce
aussi cette opinion, et regarde avec M. Haussmann le grès
argileux de Rheinfelden, sur lequel repose le calcaire juras-
sique, comme grès bigarré, tandis que M. de Buch (Mérian,
Umgeb. von Basel, p. 110) le prend pour le grès houiller, et
suppose que, par le non-développement du grès bigarré, les
couches oolithiques et lithographiques du Jura reposent,
dans cette localité, immédiatement sur les couches à gryphites
qui appartiennent au zechstein. J'ai cru de mon devoir
d'exposer dans ce travail les opinions des plus célèbres
géognostes, lors même qu'elles sont opposées à celles aux-
quelles je me suis arrêté.
Ce qui est indubitable et ce que nous croyons utile de rap-
peler de nouveau, c'est que le calcaire jurassique qui repose
près de Laufenbourg sur du granité, au Schwarzwald sur le
grès rouge ou houiller , et près de Genève sur le calcaire
alpin, est placé, dans le centre et le nord de l'Allemagne ,
sur le quadersandstein. La superposition d'une roche sur la
formation la plus jeui^e détermine sa place comme terme
de la série géognostique. En Franconie et dans le Haut-Pala-
tinat on ne voit généralement au jour que les assises supé-
rieures du calcaire jurassique , qui sont en même t^mps les
5o4 IND
plus compactes. Les marnes et les oolithes y sont beaucoup
plus rares que dans la Suisse occidentale et en France (Caen,
Lons-le-Saulnier). Entre Eichstadt et Ratisbonne on trouve ,
de bas en haut, d'après M. de Schmitz, du calcaire entière-
ment spongieux et bulleux ; des couches grenues renfermant
des druses remplies de sable; du calcaire compacte et con-
choïde avec des nodules de silex ; du calcaire schisteux
et fissile , analogue à celui de Sohlenhofen et aux dales
lithographiques du Heuberg près de Kolbingen. Ces assises
spongieuses, remplies de vacuoles (vallée du Laber près
Bcrodhausen; Pegnitz, Creussen, Tumbach ), que j'ai retrou-
vées en Italie (vallée de la Brenta , entre Carpane et Primo-
lano), à l'ile de Cuba (entre le Potrero de Jaruco et le port
du Batabano), au Mexique (plateau de Chilpansingo) , don-
nent à la surface du sol, qui est hérissé de petits rochers
pointus, un aspect très- particulier.
Dans la France occidentale, une bande non interrompue
de calcaire jurassique s'étend, d'après M. Boue, du S. E.
au N. O., depuis Narbonne et Montpellier jusqu'à la Rochelle,
réparant vers le nord les terrains de transition de la Vendée
et le terrain primitif du Limousin. Sur les c6tes de Nor-
mandie, les assises marneuses et oolithiques ont pris un dé-
veloppement beaucoup plus grand qu'en Allemagne. Nous
citerons, d'après les recherches intéressantes de M. Prévost,
les couches superposées entre Dieppe et le Cotentin , en
commençant, comme toujours, par les couches les plus an-
ciennes : 1,° calcaire à gryphées arquées et calcaire lithogra-
phique (Le Vay, Issigny), renfermant quelques lignites et
superposé au terrain de transition: 2." argiles inférieures et
oolithes (argile des Vaches- noires, alternant avec du lias à
débris d'ichthyosaures; oolithes grises deDive, ferrugineuses,
mêlées d'argile avec lignites et avec pétrifications nombreuses
de madrépores, de modioles, de Gryphœa cimhium et d'am-
monites; oolithes blanches) : 3." calcaire de Caen; les couches
inférieures avec des nodules de silex, avec peu de coquilles
(ammonites, bélemnites) , et avec quelques ossemens de
crocodiles; les couches supérieures à polypiers (coral-rag) et
à trigonies renfermant des cérites entièrement analogues à
celles trouvées au-dessus de la craie : 4." argiles supérieures
IND ooi
Au cap la Hève, de couleur bleuâtre, avec lignites, débris
de crocodiles (Honfleur) et bancs calcaires moins développés
qu'à Caen. On voit que dans cette partie de l'Europe les
lignites percent à travers toutes les couches du calcaire juras-
sique, et que cette formation, en faisant abstraction des
argiles intercalées, se compose de trois grandes assises, savoir,
de calcaire à gryphées arquées, d'oolithcs, et de calcaire à
polypiers et à trigonies.
En Angleterre , la formation du Jura , se prolongeant sans
interruption du Yorckshire au Dorsetshire, remplit tout
l'espace entre le red mari (grès bigarré) et la craie ; car on
n'y connoît entre le calcaire du Jura et le red mari aucune
formation qui soit analogue de composition au muschelkalk
et au quadersandstein , deux roches qui souvent manquent
également sur le continent. Les géognostes anglois et écossois ,
qui, dans ces derniers temps, ont étudié la charpente de leur
pays avec un zèle infatigable, distinguent les assises du cal-
caire jurassique par des dénominations en partie très-carac-
téristiques, et dont plusieurs rappellent les subdivisions re-
connues sur le continent : i ." Lias , avec peu de silex, couvrant
le red mari salifère, analogue au calcaire à gryphées arquées
du continent; les deux tiers d'en- haut sont une masse argi-
leuse bleue alternant avec des lits calcaires ; vers le bas ces
lits augmentent d'épaisseur, deviennent blancs et passent à
des couches lithographiques (ossemens d'ichthyosaures, près
de vingt espèces d'ammonites, bélemnites ). 2.° Système infé-
rieur d'oolitlies , savoir : oolithes mêlées de sable , terre à
foulon, grand banc oolithique (great oolithe) avec débris de
coquilles , schiste oolithique de Stonesfield , forestmarble ,
cornbrash et kelloway-rock, calcaires coquilliers et arénacés.
3.** Système moyen d'oolithcs , savoir : argile d'Oxford (clunch-
clay de M. Smith), sables et conglomérats calcaires ( calca-
reousgrit), coral rag ou calcaire à polypiers, avec madré-
pores et échinites. 4.° Système supérieur des oolithes , savoir :
argile bleue de Kimmeridge, un peu bitumineuse, analogue
aux argiles bleues du cap la Hève en Normandie , qui sont
aussi supérieures au calcaire à polypier et aux oolithes ; port'
landstone, avec ammonites; purbeckstone, calcaire argileux
j)étri de coquilles , alternaot avec des marnes et des gypses.
a3. 20
So6 IND
J'ai suivi les divisions de MM. Smith, Philipps et Conybeare .
qui diffèrent un peu de celles qu'a adoptées M. BncMand. Les
trois systèmes d'oolithes d'Angleterre sont sépaiés par des
formations argileuses. Quant à la structure oolifhique même,
nous avons déjà fait observer plus haut qu'on en trouve des
traces dans les formations les plus différentes : il y a quel-
ques bancs d'oolithes, d'après MM. de Gruncr et Escher
{Alpina, T. IV, p. Sfig) , dans le calcaire de transition de la
Suisse , dans le grès houiller ( Freiesleben , Kapfersch. ,B.IV,
p. 123), dans le calcaire alpin ou zcchstein (Hartlepool dans
le Northuniberland ) , dans le grès bigarré (Thuringe; Vie
en Lorraine), et dans le muschelkalk.
Couches subordonnées : hornstein (silex) en petits bancs
continus ; calcaire magnésifère (Nice) ; calcaire fétide et
gypse avec des traces de sel gemme (Kandern ; voyez Mérian ,
Umgeh. vonBasel, p. 56); grès argileux et micacé, quelquer
fois siliceux, intercalé dans les assises à gryphites (Hem-
miken, Waldburgstuhl : Lons-le-Saulnier) ; fer oxidé glo-
buliforme (bohnenerz), à la fois dans le calcaire du Jura
(Neufchâtel; Frickthal; Wartenberg enSouabe), et entre
ce calcaire et la molasse ou grès tertiaire à lignite (Arau,
Baden) ; houille avec impressions de fougères (?) et mêlée de
pyrites (Neue Welt , Bretzweil).
Pétrifications : après les formations supérieures à la craie,
le calcaire du Jura est celle dont les débris fossiles ont été
le mieux déterminés en Angleterre , en France et dans la
Suisse occidentale. Elle renferme, de même que des terrains
plus anciens encore (le quadersandstein et le zechstein avec
schiste cuivreux) , des coquilles pélagiques mêlées à du
bois, à des ossemens de grands sauriens d'eau douce, et, si
l'on ne s'est pas trompé dans la détermination zoologique , à
des ossemens de didelphes (marnes de Stonesfield ). J'ignore
si le mélange de coquilles marines et fluviatiles, si évident
dans la plupart des formations tertiaires , a été observé
avec certitude dans les terrains au-dessous de la craie. Là
où la formation jurassique est presque dépourvue de marnes
et d'oolithes ( Franconie , Haut-Palatinat ; Carniole , entre
S. Sesanne etTriest), des couches très- puissantes sont en-
tièrement dépourvues de pétrifications. Les débris de qua-
IND 307
rlrupèdes ovipares, de poissons et de tortues, se trouvent
presque dans toutes les assises, dans les plus récentes ( pup-
beckstone), comme dans les plus anciennes (lias) : cepen-
dant les dernières en offrent le plus; et il paroit qu'elles ne
renferment que l'iclithyosaurus ( proteosaurus de sir Everard
Home) et le plesiosaurus, qui est un animal analogue, et
non les véritables crocodiles. Celte différence dans la distri-
hution des reptiles a été également observée par M. Prévost
sur les côtes occidentales de la France. Les ossemens de l'icli-
thyosaurus s'y trouvent (principalement?) dans les couches
calcaires (lias) des argiles inférieures aux oolithes , tandis
que les crocodiles ne se rencontrent qu'au-dessus des oolithes.
En Angleterre on distingue, d'après MM. Smith, Philipps et
Conybeare , parmi le nombre prodigieux de coquilles pétri-
fiées dont on n'a encore pu reconnoitre que le genre ,
les espèces suivantes : Ammonites giganteus , A. exca^^atus ,
A. Duncani, A. Banksii , A. angulatus, A. Grenoiighi , Nau-
tilus striatus , N. truncatus , Trochus dimidiatus , T.hicari'
nalus, Trignnia costata, T. clavellata , Terebralula intermedia,
T. spinosa, T. digona , Ostrea gregaria, O. palmata, Modiola
lœi>is, M. depressa, M. minima, Pentacrinites caput Medusœ,
P. basaltiformis , etc. Quoique les espèces d'ammonites (au
nombre de vingt), de bélemnites et de pentacrinites, dé-
crites dans le lias, ne soient pas identiques avec celles du
muschelkalk, il me paroît toujours bien remarquable de voir
accumuler ces trois familles dans des roches d'un âge si rap-
proché, entre Ics dernières assises du zechstein (calcaire
alpin) et les premières ou plus anciennes du calcaire juras-
sique. MM. Prévost, Lamouroux et Brongniart vont enrichir
la géognosie zoologique des recherches profondes qu'ils ont
faites sur les coquilles et les zoophytes trouvées sur les côtes
de France , entre Dieppe et le Cotentin, en Franche-Comté et
en Suisse. Nous nous contenterons, en attendant, de consi-
gner ici les corps fossiles qu'offre le calcaire jurassique du
continent, depuis Genève jusqu'en Franconie , d'après un tra-
vail que j'ai fait sur les catalogues de M. de Schlottheim :
Chamites jurensis , Bélemnites giganteus, Ammonites planulatus ,
A. natrix , A. compriniatus , A. discus , A. Bucklandi, Mj'acites
radiatus , Telliniles solenoides , Donacites hemicardius, Psctinilea
3o8 IIVD
articulatus, P.œquivalvis, P. lens, Ostracites grj'phœatiis, O.crista-
galli , Terebratulites lacunosus, T. radiatus , Grjphites arcuatus,
Mjtulites modiolatus, Echinites orificiatus , E. miliaris , Asteri-
acites pannulafus, des Turritelles, des Hippurites (le Cornuco-
piœ au cap Passaro en Sicile) , Grjpliites arcuatus, etc. Il est bien
digne d'attention que cette gryphée arquée que M. Sowçrby
nomme Grjphites incurvas, et qui caractérise les assises infé-
rieures de la formation jurassique en Suisse et sur les côtes
occidentales de la France , est aussi , après V Ammonites Buck-
landi et le Plagiostoma gigantea, la coquille qui caractérise
le plus le lias en Angleterre. Les couches de calcaire blanc
et grenu que l'on trouve fréquemment dans cette formation
(Neurchàtel, Monte Baldo), sont dues à des pétrifications
de madrépores.
Nous avons déjà vu des poissons plus ou moins accumulés,
mais appartenant à des genres 1res- distincts , dans le thon-
schiefer de transition (Claris) , dans les schistes carbures du
grès rouge ( Goldlauter et AUthal près de Kleinschmalkalden) ,
dans le calcaire alpin et ses marnes cuivreuses, et même dans
le muschelkalk (très-rarement, Esperstedt, Obhaussen ) : ces
ichthyolithes deviennent plus fréquens dans le calcaire juras-
sique , surtout dans ses couches supérieures. De là elles pé-
nètrent, au-clessusde la craie, dans le grès tertiaire à lignites
(argile plastique), dans le calcaire grossier (Monte Bolca),
le gypse à ossemens (Montmartre) et le calcaire d'eau douce
(Œningen). J'indique dans l'ordre de leur âge relatif les for-
mations qui offrent des phénomènes analogues, pour prévenir
les erreurs qui naissent de l'ignorance de ces analogies.
Un géognoste justement estimé, M. Buckland , incline à re-
garder les calcaires fissiles de Pappenheim et de Sohlenhofen,
célèbres par leurs empreintes de poissons et de crustacés,
comme superposés au calcaire du Jura, et comme apparte-
nant au calcaire grossier du terrain tertiaire : ces calcaires
fissiles me paroissent au contraire entièrement analogues au
purbeckstone d'Angleterre, qui abonde aussi en pétrifica-
tions de poissons , et qui forme , comme le calcaire de Pap-
penheim, la couche la plus récente du terrain jurassique. J'ai
eu occasion d'examiner, en 1796, les belles carrières de
Sohlenhofen, conjointement avec M. Schbpf, et nous avon»
IND 309
reconnu, en allant de Muggendorf par Ansbach à Pappen-
heim , une liaison intime entre les diverses assises d'une
même formation. MM. de Buch, Boue et Beudant partagent
cette opinion sur les ichthyolithes de Franconie.
Dans le Vicentin le calcaire jurassique et le calcaire grossier
parisien existent à la fois. L'un et l'autre y renferment des
polypiers; cependant, dans un premier voyage fait en Italie
(lygS), j'ai cru que les longues bandes de coraux rameux
qui traversent, en formant des filons (entre l'hôtellerie du
Monte di Diavolo et le lac Fimon à l'ouest de Lungara),
le sommet du Monte di Pietra nera, appartiennent plutôt au
calcaire du Jura, peut-être à l'assise appelée en Angleterre
coral-rag. Ces bandes de polypiers qui sont restés en place,
ont deux pieds de largeur : elles offrent un aspect très-extraor-
dinaire , et parcourent des masses calcaires presque dépour-
vues de pétrifications, en se dirigeant très-régulièrement N.
80° E., et en s'élevant comme un mur au-dessus de la sur-
face du sol. M. Boue a aussi observé ces polypiers en place
dans le calcaire jurassique (coral-rag) qui entoure le bassin
de Vienne, et dont les assises inférieures renferment des
nagelfluhe analogues au calcareous grit de la grande formation
oolithique d'Angleterre (Filey dans le Yorkshire).
Sous la zone équinoxiale de l'Amérique j'ai cru reconnoître
la formation du Jura dans beaucoup de calcaires blanchâtres,
en partie lithographiques, qui ont la cassure unie et matte ,
ou conchoïde à concavités très -aplaties. Ces calcaires sont
ceux de la caverne de Caripe (au sud-est de Cumana), du
littoral de Nueva Barcelona (Venezuela) , de l'Ile de Cuba
(entre la Havane et le Batabano ; entre la Trinidad et la
boca del Rio Guaurabo) et des montagnes centrales du
Mexique (plaines de Salamanca et défilé de Bâtas). I-e cal-
caire blanc de Caripe, qui ressemble entièrement à celui
des cavernes de Gailenreuth en Franconie , est superposé au
calcaire alpin gris-bleuâtre de Cumanacoa. Le terrain juras-
sique du littoral de Nueva Barcelona renferme de petites
couches de hornstein passant à un kieselschiefer noir (phé-
nomène qui se répète près de Zacatecas au Mexique ) ; il est
recouvert ( Aguas calientes del Bergantin) , comme le calcaire
alpin au sommet de l'Impossible, d'un grès trés-quarzeux. Oa
3ic. IND
pourroit croire que ce grès du Bergantin appartient aux assises
quarzeuses du grès vert ou grès secondaire à lignites ; mais,
comme il forme également des couches dans le calcaire alpin
(Tumiriquiri) , il reste bien douteux si les grès du Bergantin
et du Tumiriquiri sont des formations différentes, ou si
des couches toutes semblables pénètrent du calcaire alpin
dans le terrain jurassique. Ce terrain abonde moins que
toute autre formation secondaire en roches arénacées. Nous
avons cependant cité plus haut des couches de grès dans les
montagnes occidentales de la Suisse, à W aldburgstuhl , Ep-
tigen, et Hemmiken près de Bâle. Dans les vastes steppes
de Venezuela, près de ïisnao, le grès rouge supporte, à ce
qu'il m'a paru, immédiatement (comme au Schwarzwald en
Souabe) un calcaire lithographique très -analogue au cal-
caire du Jura. Ce gisement se trouve répété au Mexique ,
dans les plaines de Teniascatio , au sud-ouest de Guanaxuato.
A l'extrémité septentrionale de la vallée de Mexico (entre
rHacienda del Salfo , Bâtas et Puerto de Reyes), une forma-
tion calcaire bleu - grisâtre, à cassure unie, renfermant du
gypse et supportant une brèche calcaire , m'a paru appartenir
au terrain jurassique , malgré la proximité des marnes ter-
tiaires (Desaguede Huehuetoque), dans lesquelles sont en-
fouis des ossemens d'éJéphans fossiles. Je pourrois citer aussi
le passage que l'on observe du calcaire alpin à un calcaire
entièrement semblable à celui d'Arau et de Pappenheim, à
la pente occidentale des Cordillères du Mexique, entre So-
pilote, Mescala et les riches mines de ïehuilolepic ; mais
dans cette région le terrain du Jura est inoins prononcé qu'à
l'ile de Cuba, qu'aux îlots du Cayman et dans les montagnes
de Caripe près de Cumana. Nulle part , dans la partie du
nouveau monde que j'ai parcourue , je n'ai vu le grès bi-
garré, le muschelkalk ni le quadersandstein séparer le cal-
caire alpin des formations que je viens de décrire. Dépourvues
d'oolithes, elles abondent aussi très-peu en pétrifications de
coquilles et en couches marneuses. Leur cassure matte et unie
leur donne fout l'aspect du calcaire jurassique de l'Allemagne
et de la Suisse. Ces formations calcaires de l'Amérique , des
Pyrénées et des Apennins, qui paroissent si étroitement liées
au calcaire alpin (zechstein), ne sont -elles que les assises
IND 3ix
les plus récentes de ce dernier, et doit -on les séparer du
véritable calcaire jurassique, riche en coquilles, en oolithes
et en marnes P Cette question importante ne peut être ré-
solue qu'en multipliant les observations de gisement, qui
sont bien plus décisives que celles de composition et d'as-
pect extérieur.
Grks et Sables ferrugineux , et Grès et Sables verts , Grès
SECONDAIRE A LIGNITES ( IrON SAND ET GrEEN SANd).
§. 53. Ce sont des grès et des sables avec lignitcs, placés
au-dessous de la craie ce sont deux formations arénacées,
colorées par le fer , séparées par une couche d'argile ( weald-
clay ) et superposées au calcaire du Jura ( terrain d'oolithes).
Elles atteignent en Angleterre jusqu'à mille pieds d'épais-
seur, et se retrouvent dans toute la France occidentale, où
MM. Prévost et Boue en ont fait l'objet d'une étude appro-
fondie.
Les sables ferrugineux brun-jaunàlre alternent avec des grès
siliceux et de petits amas de mines de fer souvent exploitées
avec avantage .- ils renferment des bois fossiles et des lignites
(Bedfordshire, Dorsetshire).
Les salles verts, colorés par un protoxide de fer, alternent avec
des grés calcaires et siliceux, avec des agglomérats , des marnes
jaunâtres à cristaux de gypse, et même avec de petits bancs
de calcaire compacte, qui ont été quelquefois confondus avec
le portlandstone. On y trouve des nodules de hornstein et de
calcédoine (Sarlat dans le Périgord), de petits dépôts de fer
hydraté, une résine qui passe au succin ( ile d'Aix près de La
Rochelle; Obora et Alstadt en Moravie), et un grand nombre
de débris fossiles, dont plusieurs {cidaris, spatangus) ressem-
blent à ceux de la craie. Les grès siliceux de cette formation
renferment des empreintes de feuilles dicotylédones. Vers le
haut le sable vert passe à une marne crayeuse (chalk marie de
Surrey). La terre verte ou chloritée , qui caractérise la couche
de sable la plus rapprochée de la craie , se retrouve dans des
formations d'un âge très-différent, dans le grès houiller de la
Hongrie (sur les frontières de la Galicie), dans le grès bi-
garré et dans les gypses qui lui appartiennent, dans le qua-
dersandsteia et dans les couches inférieures du calcaire gros-.
5i2 IND
sier de Paris. D'après les belles recherches de M. Berthier
sur les grains verts de la craie et du calcaire grossier, ces
grains sont un silicate de fer; mais il est probable que les
quantités de magnésie et de potasse varient dans les différens
terrains, comme elles varient, d'après les analyses de Klap-
roth et de Vauquelin, dans la terre verte de Vérone (talc
chlorite zoographique de Haiiy ) et dans la chlorite terreuse.
L'analogie qu'offrent quelquefois avec le quadersandstein de
l'Allemagne les bancs siliceux du grès vert (ironsand), soit
à l'état solide, soit dans un état de désagrégation, a porté
plusieurs géognostes à confondre ces deux terrains. M. Boue,
qui a exploré avec tant de fruit les gisemens de l'Ecosse, de
l'Angleterre et de l'Allemagne, a reconnu le grès vert (tout
semblable à celui des environs d'Oxford) en France, le long
de la Mayenne et du Loir, depuis la Ferté-Bernard jusqu'au-
delà de la Flèche, dans le département de la Charente , dans
le Mans, la Saintonge et le Périgord.
C'est à cette même formation du §. 33 qu'appartiennent
aussi les lignites de Pîle d'Aix, sur lesquels M. Fleuriau de
Bellevue a fait de si intéressantes recherches. D'après ce savant
géologue, la forêt sous-marine des côtes de La Rochelle
consiste en bois de dicotylédones aplatis, en partie pétrifiés,
en partie bitumineux ou fragiles, quelquefois à l'état de jaïet.
Ces bois sont pénétrés de pyrites , et percés par une multi-
tude de tarets et de vers marins. Les trous résultant de cette
perforation sont remplis de quarz-agathe et de sulfure de (er.
On trouve les troncs ou en couches horizontales, tantôt diri-
gées parallèlement, tantôt accumulés en désordre. Les bois
qui sont pétrifiés en entier ou seulement en partie, reposent
sur un sable verdâtre : ceux qui sont à l'état fibreux et
bitumineux, reposent sur des bancs d'argile plastique d'un
bleu foncé. Ils sont entourés d'algues marines et de petites
branches de lignites. Parmi ces masses d'algues on trouve
une résine qui passe au succin ; elle est friable et offre di-
verses couleurs. Les troncs d'arbres entassés forment une
bande d'une lieue et demie de largeur, depuis l'extrémité
nord-ouest de Pile d'Oléron jusqu'à quatorze lieues dans l'in-
térieur du continent, sur la rive droite de la Charente.
Cette bande a plus de sept pieds d'épaisseur j elle est dirigée
IND 3'5
de O. N. O. à E. S. E. , et se trouve à un mètre au-dessus du
niveau des basses mers. Là où les lignites sont couverts par
l'océan, ils sont incorporés (ainsi que des masses de succin-
asphalte et de grands ossemens d'animaux marins) à un grès
grossier qui repose sur l'argile plastique. Le gisement de ces
dépôts est, de bas en haut (d'après un mémoire inédit de M.
Fleuriau de Bellevue) : i.° calcaire compacte (lithographique)
à cassure unie (La Rochelle, S. Jean d'Augely) ; 2." couches
d'oolithes (pointe de Chatelaillon et Matha); 3.° lumachelle
et bancs de polypiers avec empreintes de Gryphœa angustata
(ces trois couches constituent la formation jurassique, dont
le banc à polypiers représente le coral-rag) : 4.° grande couche
de lignite avec tourbes marines , succin-asphalte et argile plas-
tique ; 5.° sables ferrugineux et chloriteux; argile schisteuse;
couches arénacées et calcaires avec trigonies et cérites; des
fragmens de lignites. Au sud-ouest de la Charente, où man-
quent les couches n.°' 4 et 5 , des bancs horizontaux d'un cal-
caire très-blanc avec débris de coquilles (Saintonge) repo-
sent immédiatement sur les oolithes de la formation jurassique,
et représentent les assises inférieures de la craie. M. Boue a
vu se prolonger les traces des lignites depuis Rochefort par
Périgueux jusqu'à Sarlat.
Ces sables et argiles avec lignites du grès vert sont liées vers
le bas aux argiles bleues avec lignites du cap la Hève (près
du Havre); vers le haut ils préludent pour ainsi dire au
grand dépôt de lignites du terrain tertiaire, c'est-à-dire aux
lignites de l'argile plastique et de la molasse, qui sont supé-
rieures à la craie. Comme la craie dans ces assises inférieures
(craie chloritée entre Fécamp et Dives) renferme elle-même
des lignites, et que, sous de certains rapports, ellepeutêtre
regardée comme une continuation de la formation jurassique,
les phénomènes que nous venons d'exposer sont bien dignes
de l'attention des géognostes. Le pldnerkalk de l'Allemagne ,
souvent mêlé de mica et de grains de quarz , forme une des
assises supérieures du grès vert, représentant à la fois la
craie chloritée et une partie de la craie grossière ou craie
tuffeau.
ia4 Î^D
IV. Craie.
§. 34. A mesure que nous nous sommes éloi^ës du calcaire
alpin, nous avons vu les formations flevenir plus complexes.
II est vrai que le muschelkalk et le quadersandstein ont une
structure assez simple ; mais le calcaire du Jura et le grès vert,
là où ils se sont bien développés, offrent une grande complica-
tion de couches et de fréquentes alternances. Cette tendance
à une composition variée, à un agroupement de masses hété-
rogènes (tendance qui atteint son maximum dans le terrain
tertiaire), se ralentit pour ainsi dire au terrain de craie.
Placée entre le grès vert et l'argile i)lastique ou grès à lignites
tertiaire, la craie, par une plus grande simplicité de struc-
ture, contraste avec les formations complexes que nous ve-
nons de nommer. Des couches argileuses (dief) , calcaires, et
arénacées (fourtia) , qui séparent la formation jurassique (ooli-
thique) de celle de la craie, ne doivent pas se confondre
avec cette dernière formation, quoique souvent aussi il ne
soit pas facile de fixer les limites entre les marnes avec lits
d'oolithes du terrain jurassique, les strates du grès vert, et
CCS marnes crayeuses ou calcaires jaunâtres, presque com-
pactes, qui semblent appartenir aux assises inférieures de la
craie.
Ce dernier terrain se compose , d'après les recherches de
MM. Omalius et Brongniart, de trois assises assez distinctes.
L'inférieure est la craie chlaritée ou glauconie crayeuse, friable
et parsemée de grains verts; la moyenne est la craie lujj'eau
ou craie grossière, grisâtre , sableuse, renfermant des marnes
et, au lieu de silex pyromaques, des silex cornés, d'une
couleur peu foncée. L'assise supérieure est la craie blanche.
Quelquefois les assises les plus anciennes prennent des cou-
leurs gris -noirâtre, et devienncut ou très-compactes (envi-
rons de Rochefort), ou grenues et friables (montagne de
Saint- Pierre près de Macstricht). La craie chlôritée passe
souvent insensiblement au sable vert (green sand ). La craie
blanche est la plus pure des couches calcaires de différens
âges : elle ne contient que quelques centièmes de magnésie ;.
mais elle est mêlée d'une quantité de sable plus ou moins
grande. La liaison du terrain de craie de Paris avec les autres,
IND 3i5
(errains secondaires (entre Gueret et Hirson) a été indiquée
dans une coupe par M. Omalius (Bull, phil., 1814). Dans un
nivellement barométrique, fait en i8o5, de Paris à Naples ,
nous avons vu, M. Gay-Lussac et moi, sortir au jour, succes-
sivement sous la craie, le calcaire du Jura , le calcaire alpin ,
le grès rouge , le gncis et le granité ( entre Lucy-le-Bois , Aval-
Ion, Autun et montagne d'Aussy). La formation de craie,
trop long-temps négligée, est beaucoup plus répandue qu'on
ne le pense généralement. On l'a reconnue dans plusieurs
parties de l'Allemagne, par exemple, dans le Holstein , en
Westphalie (d'Unna à Paderborn), dans le pays d'Hanovre,
au pied du Harz près Goslar, dans le Brandebourg près
Prentzlow, et à l'île de Rugen. Souvent elle n'est reconnois-
sable que par les corps fossiles que présentent les lambeaux
de terrains marneux et arénacés. Elle ne renferme que peu
de couches hétérogènes, par exemple, des lits d'argile (Isle
deWight; Anzin); des silex, soit en plaques ou en rognons
bien alignés , soit en petits filons ( Isle de Thanet; Brighton ) ,
et caractérisant les assises supérieures de la craie. On y ren-
contre aussi des pyrites globuleuses et de !a strontiane sulfa-
tée (Meudon).
Pétrifications. Dans le bassin de la Seine on trouve, d'après
les observations de MM. Défiance et Brongniart , dans les
couches supérieures de la craie : beaucoup de bélemnites
(Belemnites mucronatus) et d'oursins [Ananchites ovata, A. pus-
lulosa, Galerites vulgaris , Spatangus cor anguintim , S. bufo)j
des huîtres [Ostrea vesicularis , O. serrata) ; des térébratules
(Terebratula Defrancii, T. plicatilis , T. alata) ; des peignes
{Pecten cretosus , P. quinque- costatus) ; le Catillus Cuvieri, des
Alcjonium, des astéries, des millepores, etc. La craie tuffeau
et glauconeuse renferme ( environs du Havre , de Rouen et de
Honfleur; Perte du Rhône près Bcllegarde) : Grjpheacolumba,
G. auricularis , G. aquila , Podopsis truncata, P. striala, Tere-
hraLula semiglobosa, T.galLina, Pecten intexlus , P. asper , Ostrea
carinata , O. pectinata, Cerithium excavatum , des trigonies ,
des crassatelles , des encrinites et des pentacrinites (Angle-
terre), et, ce qui est très-remarquable, des nautilites et plu-
sieurs ammonites (Nautilus simplex , Ammonites varians , A.
Beudanti , A. Coupei, A. injlatus, A. Gentoni , A^ rhotomagensis) ,
SiG IIVD
tandis que les couches supérieures de la craie , près de Paris,
ne renferment (à l'exception du Trochus Basleroti) pas une
seule coquille univalve à spire simple et régulière. D'après
les recherches de MM. Buckland , Webster, Greenough, Phi-
lipps ctMantell, comparées à celles de M. Brongniart , il existe
la plus grande analogie entre les débris organiques trouvés ,
en France et eu Angleterre, dans les assises de la craie du
même âge. Ce sont partout les assises les plus anciennes qui
renferment des ossemens de grands sauriens (monitor) et de
tortues de mer, des dents et des vertèbres de poissons (squales).
Malgré les analogies que présentent les grès à lignites (sables
verts et argiles plastiques ) au-dessous et au-dessus de la craie ,
cette formation pourtant appartient plutôt au terrain secon-
daire qu'au terrain tertiaire , auquel plusieurs géognostes
célèbres le rapportent. Aussi, selon M. Brongniart, les co-
quilles de la formation crayeuse se rapprochent beaucoup
plus de celles de la formation jurassique que des coquilles du
calcaire grossier, dont la craie est séparée géognostiquement
de la manière la plus tranchée.
Terrains tertiaires.
Les considérations que j'ai exposées plus haut sur la liaison
intime entre les dernières assises du terrain de transition et
les premières du terrain secondaire , peuvent s'appliquer
en grande partie à la liaison que Ton observe entre les terrains
secondaires et tertiaires. Les roches de transition sont ce-
pendant plus étroitement liées au terrain houiller que ne Pest
la craie aux formations qui lui succèdent. Ce qu'il y a de plus
important en géognosie, c'est de bien distinguer les forma-
tions partielles; c'est de ne pas confondre ce que la nature a
nettement limité; c'est d'assigner à chaque terme de la série
géognostique sa véritable position relative. Quant aux ten-
tatives qui ont été faites récemment pour réunir plusieurs de
ces formations par groupes et par sections, elles ont eu le
sort de toutes les généralisations diversement graduées. Les
opinions des géognostes sont restées plus partagées à Pégard
des grandes que tles petites divisions. Presque partout les
mêmes formations ont été admises ; mais on varie dans la
IND 3i7
nomenclature des groupa qui doivent les réunir. C'est ainsi
que les botanistes s'accordent plus facilement sur la fixation
des genres que sur la répartition de ces mêmes genres entre
des familles voisines. J'ai préféré de conserver dans le tableau
des formations les anciennes classifications les plus générale-
ment reçues. Dans cette longue série de roches, dans cet
assemblage de monumens de diverses époques, on distingue
surtout trois phénomènes bien marquans : la première lueur
de la vie organique sur le globe, l'apparition de roches frag-
mentaires, et la débâcle qui a enseveli l'ancienne végétation
monocotylédone. Ces phénomènes marquent l'époque des
roches intermédiaires et celle du grès houiller , premier
chaînon des roChes secondaires. Malgré l'importance des phé-
nomènes que nous venons de signaler, les roches d'une époque
ont toujours quelque profot3'pe dans les roches de l'époque
précédente, et tout annonce l'effet d'un développement
continu.
Comme les noms, terrains de sédiment moj^en, calcaire alpin
nouveau, etc., sont employés dans beaucoup d'ouvrages géo-
gnostiques modernes, sans que l'on désigne chaque fois indi-
viduellement les roches que renferment ces terrains, il sera
utile de rappeler ici la synonymie de cette nomenclature des
gisemens. M. Brongniart, distinguant entre pr/mif// et prnnor-
dial, comprend avec M. Omalius d'Halloy, sous la dénomina-
tion de terrains primordiaux , toutes les roches primitives et in-
termédiaires cristallines de l'école de Freiberg : il divise les
terrains secondaires ( Flotzgebirge) en trois classes. Dans la
première, celle de sédiment inférieur [Descr. géol. des environs
de Paris, p. 8 ; Sur le gisement des ophiolithes , p. 36), sont
compris le mountain-limestone ou calcaire de transition, le
grès rouge ou houiller, le calcaire alpin ou zechstein et le
lias; dans la seconde, celle de sédiment moyen, le calcaire
du Jura et la craie ; dans la troisième, celle de sédiment
supérieur, toutes les couches qui sont plus neuves que la
craie. Le terrain de sédiment supérieur remplace par conséquent
le terrain tertiaire , dénomination tout aussi impropre pour
désigner un quatrième terrain , succédant aux terrains primitif ,
intermédiaire et secondaire, que l'étoient les anciens noms de
terrains à couches (roches secondaires) et de terrains à /lions
«
(roches primitives et de transition). M. de Bonnard , dans
son intéressant Aperçu géognostique des formations , exclut des
terrains primordiaux les porphyres, les syénites de transition
et toutes les roches cristallines postérieures à celles qui ren-
ferment quelques débris de corps organisés; il regarde, et
nous préférons sa manière de voir, le mot primordial comme
synonyme de primitif. Les terrains secondaires supérieurs de M.
de Bonnard diifèrent beaucoup du terrain de sédiment supérieur
de M. Brongniart : ce sont plutôt ceux q\ie ce savant esti-
mable appelle terrain de sédiment moj en. Toutes les formations ,
depuis la craie jusqu'au grès rouge, à l'exception des houilles,
sont comprises dans l'ordj-e surmojen de M. Conjbeare. tandis
que Id liaison intime que l'on observe en Angleterre entre
les dépôts de houilles et les roches qui les supportent, ont
engagé M. Buckland {Structure of the Alps , 18-21 , p. 8 et 17 )
à étendre les formations secondaires depuis la craie jusqu'au
mountain limestone et à la grauwacke (old red sandstone).
Jl nomme notre zechstein avec dépôts salifères, calcaire alpin
ancien ( elder alpine limestone); le lias, lesoolithes. le sable
vert et la craie , calcaire alpin nouveau (j^ounger alpine lime-
stone). Ces indications suffiront, jepense, pourl'intelligence
de la synonymie des grandes divisions géognostiques.
Le mélange fréquent de couches pierreuses et de terrains
meubles ou masses désagrégées a fait confondre long-temps les
formations tertiaires, c'est-à-dire , celles qui sont postérieures
à la craie, avec les terrains d'aï lu ^-ion et de transport . que Guet-
lard ( 1746) avoit appelés la zone des sables. On a faussement
considéré les formations tertiaires comme peu importantes,
comme irrégulières dans leur stratification et restreintes à
de petites étendues de pays. L'école de Freiberg ne plaçoit
d'abord (i8o5) au-dessus du muschelkalk et de la craie
que quatre formations, savoir : les sables et argiles avec li-
gnites, déjà reconnues par Hollmann en 1760 {Phil. Trans.,
vol. LI , p. 5o5); le nagelfluhe calcaire, le travertin, et le
tufF d'eau douce (Reuss, Geogn., T. II, p. 470, 63o, 644).
Bruguières avoit déjà observé que les meulières de Mont-
morency ne renfermoient que des coquilles d'eau douce.
Le gypse à ossemens de Montmartre, que Karsten croyoit
encore analogue au gypse salifère du zechstein, avoit été
IND 3iy
considéré par Lamanon et par M. Voigt (1799) comme un
dépAt d'eau douce. Werner le regarda (1806) comme en-
tièrement différent des formations de gypse d'Allemagne, et
comnie d'une époque beaucoup plus récente ( Freiesleben,
Kttpfersch., T. I, p. 174). Les observations recueillies par
la Socié'é géologique de Londres et la Société l^Vemérienne
à Edimbourg , les utiles voyages de M. Omalius d'Halloy
(1808) et de quelques géogiiostes italiens, avoient fourni
une masse assez considérable de matériaux pour l'étude des
terrains tertiaires ; mais la connoissance plus approfondie
des différentes formations qui constituent ce terrain et qui
offrent les mêmes caractères dans les pays les plus éloignés,
ne date que de l'époque où a paru la Description géologique
des environs de Paris, par MM. Brongniart et Cuvier ( 1.'^*' édit. ,
tBio; 2.' édition, 1822). C'est dans le bassin qui entoure
cette capitale, que toutes les formations tertiaires (à l'ex-
ception peut-être du grès à lignites, qui ne s'y montre que
comme argile plastique) se trouvent le plus développées.
Toutes celles qui manquent dans d'autres parties de l'Eu-
rope , ou qui ne s'y rencontrent que par lambeaux, sont
réunies sur les bords de la Seine.
En caractérisant succinctement les termes de la série ter'
tiaire, je profiterai à la fois du grand ouvrage de M. Brongniart,
de celui que MM. Conybeare et Philipps viennent de faire pa-
roitre sur le sol de l'Angleterre, du Voyage géologique de M.
Beudant enHongrie, et desobservations récentes deMM. Boue
et Prévost, qui, en remplissant la lacune entre les formations
tertiaires et oolithiques, ont rendu de grands services à la
géognosie positive. C'est par la comparaison de terrains très-
éloignéslesunsdes autres, qu'on peut éviter, jusqu'à un certain
point, de confondre le tableau général des gisemens avec la
description géographique d'un bassin isolé. Il est assez remar-
quable de voir que la dernière assise du grand édifice géognos-
tique , celle dont l'époque de formation est le plus rapprochée
de nos temps, ait été examinée si tard. Comme les couches
meubles du terrain tertiaire renferment des coquilles fossiles
dans un haut degré de conservation , c'est ce terrain aussi
qui a donné lieu au perfectionnement de la conchyliologie
souterraine. La prédilection que dans divers pays on a donnée
32b IND
à cette science, deviendra également utile à l'étude des fof-'
mations secondaires et intermédiaires , si on ne néglige pas
de combiner les caractères zoologiques avec ceux qu'offrent
le gisement et Tàge relatif des roches.
J"ai exposé plus haut les motifs pour lesquels j'ai cru devoir
éviter les dénominations de premier, de deuxième et de troi-
sième terrain marin, ou d'eau douce. J'ai substitué le plus sou-
vent des noms géographiques à ces dénominations numéri-
ques, très-susceptibles de faire naître des idées erronées. Les
formations les plus récentes sont celles dont les gisemens
paroissent avoir été le plus modifiés par des circonstances
locales. Une alternance périodique des matières calcaires et
siliceuses (l'argile même renferme près de 70 pour cent de
silice) se manifeste jusque dans les strates qui appartiennent
à une même formation. Les couches hétérogènes et les subdi-
visions des terrains calcaires ou gypseux prennent , dans quel-
ques pays, un accroissement si considérable qu'on les prend
pour des terrains particuliers ou indépendans. Il en résulte
que la succession et le parallélisme des roches tertiaires, si ré-
centes et d'une structure si complexe , peut différer quelque-
fois du type que nous leur assignons dans le tableau des
formations.
Argiles et Grès tertiaire a lignites (Argile plastique,
Molasse et Nagelfluhe d'Argovie).
§. 35. A l'entrée du terrain tertiaire , comme aussi au-
dessous de la craie, entre cette roche et le calcaire juras-
sique, nous trouvons des dépôts de lignites : c'est ainsi que
sur la limite des terrains intermédiaires et secondaires nous
avons vu placé un grand dépôt de houilles (coal- mesures).
Les deux terrains secondaire et tertiaire commencent par
des amas de végétaux enfouis. A mesure que 1 on avance du
grès houiller vers les formations plus récentes, on voit les
plantes monocotylédones peu à peu remplacées par des plantes
dicotylédones ; il y en a encore des premières ( endogénites
de M.Adolphe Brongniart , mais non des fougères) au-dessus
de la craie jusque dans le gypse à ossemens : cependant,
en général, les dicotylédones ( exogénites) dominent dans les
dépôts de lignites. Je suis moins surpris de ce mélange que de
• IND 521
funiformilé de la végétation monocotylédone de l'ancieil
inonde, dont nous voyons les débris dans les terrains intermé-
diaires et dans le grès houiller. Au milieu des forêts de l'Oré-
noque, qui sont extrêmement riches en moaocotylédones,
la proportion de celles-ci aux dicotylédones est , quant à la
masse, c'est-à-dire au nombre des individus, comme i à 40.
La proportion que présentent les terrains houilliers n'est donc
pas tropicale. Auroit-elle été modifiée parla résistance inégale
qu'opposent à la destruction les nïonocotylédones et les dico*-
tylédones P
Nous réunirons dans le grès à lignites supérieur à la craie,
les formations parallèles d'argiles plastiques, de marnes et
sables avec lignites, de molasse et de nagelfluhe.
Dans les environs de Londres et de Paris il n'y a qu'un
lambeau de ce terrain , que l'on trouve beaucoup plus déve-
loppé dans la France méridionale, en Suisse et en Hongrie*
La eraie, en France et en Angleterre, est recouverte d'une
couche à'' argile plastique, sans coquilles et sans débris organi-
ques, entièrement dépourvue de chaux, renfermant quelques
silex et de la sélénite. Une couche de sable sépare l'argile
plastique des fausses glaises, qui sont plus siliceuses et noirâ-
tres. Ces dernières renferment du lignite ou bois fossile bitu-
mineux, provenant de plantes monocotylédones et dicotylé-
dones ; du vrai succin (d'après la découverte de M. Bequerel) ;
du bitume , et (Soissonnois, Montrouge , Bagneux) un mé-
lange de coquilles pélagiques et fluviatiles ( cyrènes , cérites
d'eau douce ou potamides, mélanies , limnées , paludines).
Ce mélange ne s'observe ordinairement qu'à la limite supé-
rieure de l'argile plastique et des lignites. Les coquilles ma-
rines ressemblent , d'après M. Prévost, à celles du calcaire
grossier. Couches intercalées : sables et grès avec coquilles,
masses de calcaire coucrétionné avec cristaux de strontiane
sulfaté. Fossiles, d'après MM. d'Audebard de Férussac et
Brorigniart : Planorbis rotundatus , Paludina virgula, P. unico-
lor, Melanopsis buccinoidea, Nerita globulosa, Melania triticea,
— Ceritiumfunaium, Ampullaria depressa , Ostrea bellovaca , etc.
En Angleterre, l'argile plastique, qu'il ne faut pas con-
fondre avec le London claj ( représentant le calcaire grossier
de Paris ) ni avec VOxford ou Clunch elay ( de la formation
23. ai
^22 IND
jurassique), abonde plus en saWes qu'en argile: elle ren-
ferme des lignitcs ( Isle de Wight, Newhaven ) , et, ce qui
est remarquable à cause de l'analogie de cette formation avec
les molasses d'Argovie et de Hongrie, un grès friable (Stut-
land en Dorsetshire). On y a trouvé, d"après MM. Webster
et Bucklaud, des impressions de feuilles, des fruits de pal-
mier, des cyclades {Cyclas cuneiformis , C. deperdita) , des
turritelles, des cérites {Cerilium melanoides , C. inlermedium)
et des huitres ( Ostrea pulchra , O. tennis).
Le terrain à succin de laPoméranie et de la Prusse , vraisem-
blablement superposé à la craie , est composé d'argile, de li-
gnites et de nodules de succin. Les corps organisés qu'il ren-
ferme , ont été récemment examinés par M. Schweigger. Par
son gisement, comme Fobserve judicieusement M. Brongniart,
il appartient à la formation §. 35.
Les grès à lignites (molasse etmaolgno) sont répandus dans
les plaines de la Hongrie , comme dans le grand bassin de
la Suisse, entre les Alpes et le Jura, ou plutôt entre le lac
d'Annecy et celui de Constance. La formation de Hongrie,
que M. Beudant a fait connoître, est géognostiquement la
plus importante , parce qu'on la voit superposée au calcaire
jurassique (Sari Sap aux environs de Gran, et bords du lac
Balaton ). Elle est Immédiatement recouverte (près de Bude)
de calcaires coquiUiers analogues au calcaire grossier de Paris.
Elle est composée de poudingues (nagellluhc) et de brèches
calcaires qui alternent avec des grès micacés, friables, schis-
teux, à petits grains anguleux de quarz, avec dessables et avec
des lits d'argile. Elle renferme de grands dépôts de lignites
(Csolnok, au sud de Gran , Wandorf près de Œdenbourg ),
des sources de bitume, des minerais granuleux de fer ])ydraté,
des coquilles d'eau douce et, au contact avec le calcaire gros-
sier superposé, des coquilles marines. Le terrain arénacé de la
Suisse, qui comprend la molasse et le nageltluhe, se compose,
d'après les nouvelles recherches de MM. de Charpentier et
Lardy (en commençant par les couches inférieures), i." de
calcaires sableux, un peu ferrugineux, passant souvent à un
véritable grès à ciment calcaire ; 2.° de poudingue ( nageljluhe)
enchâssant des fragmens calcaires et siliceux, toujours arron-
dis et agglutinés par un ciment calcaire: 3." de ?no/asse ou grès
IND 323
àpetifs grains de tjuarzet à ciment argileux ou marneux. Des
filons de spath calcaire traversent souventle nagelfluhe, et la
molasse (grès fin et friable) alterne avec des lits de marnes-.
Le nagelfluhe qui empâte à la fois des galets de porphyre et
de calcaire compacte ( Rigi , Fi'ibourg, Entlibuch) , n'est pas
toujours recouvert par la molasse ; et M. de Buch a remarqué
depuis long -temps qu'entre Habkern et le petit Emmethal la
molasse alterne plusieurs fois avec le nagelfluhe. Tout ce ter-
rain , dont la surface est généralement à nu , git immédiate-
ment, vers le nord (Arau, Porentruy, Boudry j , sur le cal-*
caire jurassique; vers le sud, sur le calcaire alpin (environs
de Genève et Teufenbachtobel, au sud-ouest du Rigi). D'après
l'inclinaison des couches quelques géognostes célèbres ont re-
gardé long-temps le nagelfluhe comme antérieur au calcaire
alpin. M. Keferstein crf/.^ encore la molasse (mergelsandstein)
inférieure à la craie, et même au calcaire jurassique. Un cal-
caire fétide et bitumineux, un gypse fibreux et argileux, al-
ternant avec des marnes qui renferment des ammonites , un
calcaire compacte briin-jaunàtre , et deslignites, forment des
couches subordonnées à la molasse de la Suisse. Le dépôt de
lignites qu'on exploite près de S. Saphorin, entre Vevay et
Lausanne, est recouvert de nagelfluhe; celui de Paudex est
intercalé à la molasse. Tout ce terrain renferme, en Suisse,
à la fois-d es coquilles marines (ammonites, cythérées, donax),
des coquilles d'eau douce (lymnées, planorbes) , des palma-»
cites à feuilles flabelliformes (Montrepos), et des ossemens
de quadrupèdes ( Aarberg, Estavayer, Kœpfnach sur les bords
du lac de Zuric), ossemens qui, selon les recherches de M.
Meisaer, appartiennent à VAnaplotherium , au Mastodon an-
gustidens et au Castor. Dans la molasse de Creniin et Combre-
mont une brèche coquillière marine repose sur un calcaire
brun, rempli de planorbes. M. Brongniart, dès l'année 1817,
a insisté sur l'analogie qu'offre l'argile plastique de Paris avec
une partie de la formation de nagelfluhe et de molasse de
Suisse, si long-tempS confondue avec le grès bigarré d'Alle-
magne. Ce savant pense aussi que les molasses qui renferment
des ossemens de mastodontes et A^anthracoterium (Cadibona
prés de Savone) sont plus récentes encore que l'argile plas-
tique; qu'elles sont peut-être ou liées au calcaire grossier quî
3M IND
est souvent arénacé , ou parallèles au gypse de Montmartre. Les
ossemens fl'aiiimaux vertébrés, trouvés rarement dans l'argile
plastique de Taris et de Londres (prèsd'Auteuil etdeMargate),
n'ont point encore été dét«;rininés zoologiquement , et jus-
qu'ici i\l. Cuvier , dans la suite de ses importantes recherches
sur le gisement des fossiles, n'a reconnu des débris de mam-
mipres terrestres que dans les terrains postérieurs au calcaire
grossier. Il se pourroit, d'après ces considérations, que les
molasses ou grès à lignites de Hongrie fussent antérieurs <à
ceux de la Suisse; mais, comme dans ce dernier pays les
formations de calcaire grossier (parisien) et de gypse à osse-
mens ne se sont presque pas développées, et qu'en général
ralternance fréquente des roches tertiaires rend leur paraZ-
lélisme un peu incertain, il se pourroit aussi que la longue
époque de la formation de molasse et de nagelfluhe en
Suisse (celle des couches inférieures et supérieures, aréna-
cées, marneuses, calcaires et gypseuses ) eût été contempo-
raiue aux trois formations d'argile plastique, de calcaire
grossier et de gypse des environs de Paris.
Le terrain qui nous occupe est , selon les observations ré-
centes de M. Boue, extrêmement développé dans le sud-
ouest de la France , de Libourne à Agen , surtout au nord de
la Dordogne et de la Gironde, où il repose sur la craie. Il y
est composé (en commençant par les couches supérieures) de
grès calcaires remplis de débris de coquilles et d'ossemens
d'animaux vertébrés, de petites couches de fer globulaire,
de marnes grises et verdàtres, de calcaires jaunâtres avec
cérites. Des dépôts de lignites y ont été reconnus par M.
Bi'ongniart {Descr. géoL, art. II, §. i ) ; mais ils n"y sont pas
nombreux, et la position de cette formation arénacée entre
la craie et le calcaire grossier de Bordeaux la caractérise
suffisamment comme molasse. Le grès à lignites peut locale-
ment être dépourvu de lignites, de même que le grès rouge
ou houiller est souvent dépourvu de houilles. Comme presque
foutes les formations secondaires ont leurs grès et leurs con-
glomérats , il ne faut pas regarder comme appartenant à la
même formation §. 35 tous les nagelfluhe de l'Europe (pou-
dingues polygéniques de la classification de M. Brongniart) :
il y en a qui ne paroissent que des formations locales et peu
IND 3^5
étendues; d'autres (Salzbourg et S. Gall?), selon l'observa-
tion judicieuse de M. Boue, sont peut-être plus anciens que
la craie et le calcaire du Jura. D'ailleurs l'analogie qu'offrent
certaines couches placées entre le quadersandstein et la craie
avec celles qui sont placées entre la craie et le gypse à os-
semens , est un phénomène bien digne de l'attention des géo-
gnostes.
D'immenses dépôts de sables , d'argile et de lignites avec
mellite (Artern) et avec succin ( bernstein de Muskau et
bernerde deZittau), couvrent une partie de rAllemagne. On
y trouve des lits de grès extrêmement quarzeux (Carlsbad,
Habichtswald , Meissner, Wilhelmshohe près Cassel , Wolfs-
" eck), surtout là où des coulées de basaltes sont superposées
à l'argile avec lignites. A cause de cette proximité on a
donné anciennement à ces grès , qu'on pourroit minéralo-
giquement confondre avec les grès également quarzeux du
grès bigarré et avec ceux de Fontainebleau , la déuomînation
impropre de grès trappéens {trapp-sandstein)^ Les sables à
grenats (granatensand ) , c'est-à-dire les argiles et marnes de
Meronitz et de Podsedlitz en Bohème , qui renferment des
pyropes disséminés, appartiennent- ils à cette même forma-
tion §. 55, ou, comme plusieurs phénomènes observés dans
la Cordillère du Mexique et à File de la Graciosa {archipel
des Canaries) mêle feroient supposer, appartiennent-ils k
des argiles basaltiques du terrain igné ?
Calcaire de Paris (Calcaire grossier ou Calcaire a cérites),
FORMATION PARALLliLE A l'ArGILE DE Lo>'DRES EX AU CaLCAIRE
ARÉNACÉ DE BoGNOR,
§.36. Cette formation très-compliquée, retrouvée en Hon-
grie , en Italie et dans le nouveau continent, a été entièrement
méconnue avant la publication de la Géographie minéralogique
des environs de Paris. Le calcaire grossier, séparé par une
couche de sable de l'argile plastique, consiste, d'après M.
Brongniart, dans le bassin de la Seine , de bancs minces et
très -régulièrement alternans , de calcaires plus ou moins
durs, et de marnes argileuses ou calcaires. Sur des étendues
de terrains très-considérables, les coquilles fossiles sont géné-
ralement les mêmes dans les couches correspondantes, et
32S IND
présentent, d'un système de couches à un autre système, des
difTérences d'espèces assez notables. Ce phénomène d'unifor-
mité dans la distribution des animaux caractérise surtout
le teri'ain tertiaire ; on commence déjà à le reconnoitre'
dans les différens bancs qui composent, en Suisse et en Angle-
terre , la formation jurassique. Les couches inférieures du
calcaire grossier de Paris sont chloriteuses (glauconeuses ),
arénacées, remplies de madrépores et de nummulites. Dans
les couches moyennes on trouve beaucoup d'empreintes de
feuilles et de tiges de végétaux {Endogenites échinât us , Fla-
iellites parisiensis , Pinus Defrancii , d'après le travail de M.
Adolphe Brongniart sur la Végétation fossile), des millio-
litcs, des ovulites, des cythérées, mais presque point de cé-
rithes. Les couches supérieures offrent des lucines, des am-
pullaires, des corbulcs striées, et une grande variété (près
de soixante espèces) de cérithes ; mais, en général, cette
dernière assise est moins abondante en corps fossiles que les
assises moyenne et inférieure, dans lesquelles MM. Defrance
et Brongniart ont recueilli près de 600 espèces de coquilles.
Le fameux banc coquillier de Grignon et les fossiles du
Falun de Tourraine appartiennent principalement aux assises
moyennes. Dans celles-ci et dans le système des couches su-
périeures les bancs calcaires sont quelquefois entièrement
remplacés par des grès ou des masses de silex corné (horn-
stein). Ce sont ces grès qui ont offert (entre Pierreîaie et
Franconville près Beaachamp ) , à MM. Gillet de Laumont et
Beudant, un mélange de coquilles marines avec des coquilles
d'eau douce (limnées et paludines). Les fossiles du calcaire
parisien, parmi lesquels on ne trouve jamais de bélemnites,
d'orthocératifes , de baculites oif d'ammonites, diffèrent en-
tièrement de ceux de la craie.
Les dépôts coquilliers qui représentent dans les diEFérentes
parties de l'Europe la formation que nous décrivons, sont
les uns identiques de composition et d'aspect (plaines de
Vienne décrites par M. Prévost ; collines de Pest et de Teteny
tn Hongrie», décrites par M. Beudant), tantôt seulement
.''nalogues par leur position géognoslique et par les débris
fossiles qu'ils renferment (Angleterre). Les calcaires gros-
^çrs de \i\ Hongrie , pétris de cérithes , de turritelles , d'ampuL
IND 327
iaires, de venus et de crassatclles, peureconnoissables, parce
qu'il n'en est resté que le moule, offrent jusqu'aux caractères
en]p3'riques les plus minutieux auxquels on rcconnoit le cal-
caire parisien. Ils sont liés à des sables coquilliers (Czerhat,
Raab), qui sont en partie mêles de grains verts et qui ont
beaucoup d'analogie avec les dépôts coquilliers des plaines
de la Lombardie.
Les calcaires grossiers de la Dordogne et de la Gironde,
géographiquement plus rapprochés du bassin de la Seine, ne
montrent pas toujours cette ressemblance de composition que
nous venons de signaler dans ceux de la Hongrie. Ils sont,
d'après, les observations récentes de M. Boue, composés de
deux assises bien distinctes. L'inférieure est peu coquillière
ou à corps fossiles brisés; elle renferme du calcaire com-
pacte blanc -jaunâtre, quelquefois tachant comme la craie,
des marnes et des bancs de galets quarzeux. L'assise supé-
rieure est un calcaire sableux, extrêmement coquillier, et
ressemblant presque quelquefois à une molasse brunâtre.
En Angleterre , d"après les recherches de MM. Buckland ,
"VVebster et Sowerby , ïargile de Londres ( London clay ) est
non-seulement, par sa superposition à l'argile plastique, une
formation parallèle au calcaire de Paris ; elle renferme aussi
presque toutes les espèces de coquilles qui semblent appar-
tenir plus particulièrement aux couches inférieure* de ce
calcaire. Dans le bassin de la Tamise , la formation que les
géognostes anglois désignent communément sous le nom de
London claj; n'est qu'un dépôt d'argile et de marnes brunâ-
tres, renfermant du fer sulfuré et quelques lames de sélénite ;
mais, sur d'autres points de l'Angleterre, cette couche se
lapproche beaucoup plus, par sa composition minéralogique,
du calcaire grossier. Elle présente , d'après MM. Conybeare
et Philipps, sur les côtes de Sussex, à Bognor et près de Har-
■wich (Essex), des lits de calcaire compacte et sableux. On y
a trouvé , outre les corps fossiles propres à la formation qui
lui est analogue dans le bassin de Paris, des empreintes de
poissons, des ossemens de tortues et de crocodiles (Islington),
une espèce d'ammonites (Ammonites acutus, à Minstercliff)
et des lignites. Le Cerithium giganleum , assez commun dans
l'argile de Londres^ n'appartient en. France qu'à l'assise in-
528 IND
férieure du calcaire grossier, qui est d'ailleurs dépourvue
de toute autre espèce de cérithes. Le London claj, dans le-
quel on assure avoir trouvé du succin (Holderness dans le
yorckshire), paroît avoir des rapports plus intimes avec
l'argile plastique (grès tertiaire à lignitcs) que le calcaire
grossier de Paris.
M. Brongniart rapporte à cette formation (§. 36) la ma-
jeure partie des terrains calcaréo-trappéens du Vicentin (Val
Ronca, Montecchio maggiore . Monte Bolca ) , la colline de
la Supergue de Turin, le cap S. Hospice près de Nice, la
Grande -Terre de la Guadeloupe, etc. Les célèbres impres-
sions de poissons de Monte Bolca, sur lesquelles M. de Blain-
ville a entrepris un travail intéressant, ne se trouvent, d'a-
près les recherches de M. Maraschini, pas proprement dans
le calcaire grossier, mais (comme on le reconnoît surtout
à Novale et à Lugo près de Salceo) dans un calcaire fétide
et schisteux , séparé du calcaire grossier par une couche
d'argile avec lignites. Cette position me semble lier les marnes
bitumineuses (de Monte Bolca) avec empreintes de poissons
et de feuilles aux marnes du gypse à ossemens de Montmartre,
Dans l'Amérique équinoxiale, où je n'ai point reconnu les
formations de craie et de grès à lignites , les collines qui
bordent sur quelques points la Cordillère de Venezuela, du
côté de la mer (Castillo de San Antonio de Cumana, Cerro
del Barigon dans la péninsule d'Araya , Vigia de la Popa
près du port de Carthagène des Indes), me paroissent ap-
partenir au calcaire grossier. Ces collines sont composées,
3.° d'un calcaire compacte et arénacé gris -blanchâtre, dont les
couchas, tantôt horizontales, tantôt irrégulièrement incli-
nées, ont cinq k six pouces d'épaisseur (quelques bancs sont
presque dépourvus de pétrifications, d'autres sont pétris de
madrépores, de cardites , d'ostracites et de turbinites, et
mêlés de gros grains de quarz) ; 2.° d'un s,rès calcaire, dans
lequel les grains de sable sont plus fréquens que les coquilles
(plusieurs bancs de ce grès enchâssent, non des paillettes
de mica , mais des rognons de mine de fer brun , et deviennent
si siliceux qu'ils ne font presque plus d'effervescence avec
les acides, et que les corps fossiles y disparoissent entière-
ment) ; 3.° de hancs d'argile endurcie avec séJénite. L'assise
IND 329
calcaire , dont j'ai déposé de grands échantillons dans le ca-
binet d'histoire naturelle de Madrid, offre 1 entrePunta Gorda
et ies ruines du chàti-au de Santiago d'Araya) une innom-
brable quantité de solens, d'ampullaires, d'huitres et de po-
lypiers lithophytes, en partie disposés par familles. Cette for-
mation tertiaire, composée de calcaires coquilliers , avec
grains de quarz , de marnes argileuses et degrés calcaire, se
trouve géographiquement liée aux terrains tertiaires des îles
opposées aux côtes de Cumana, par exemple, de celles de
la Guadeloupe et de la Martinique. Elle repose tantôt immé-
diatement sur le calcaire alpin (Punta Delgada), tantôt sur
les argiles salifères d'Araya, dont j'ai parlé plus haut (§. 28,
p. 275).
Calcaire siliceux et Gypse a ossemens , alternant avec des
MARNES ( Gypse de Montmartre).
§. 07. D'après les principes de classification que j'ai suivis
dans ce travail , j'aurois pu séparer le calcaire siliceux
(Champigny) du gypse alternant avec des marnes appelées
marines et d'eau douce ; mais, n'ayant pu, dans le cours de
mes voyages, faire des terrains supérieurs à la craie un objet
particulier de mes études, je n'ai rien voulu changer aux
coupes générales indiquées dans l'ouvrage de MM. Brongniart
et Cuvier.
Le calcaire siliceux du bassin de Paris, qui est tantôt tendre
et blanc, tantôt grisâtre, à grains très-fins et caverneux, est
comme pénétré dans toute sa masse de silex ou matière quar-
zeuse. 11 est intimement lié , \ers le haut , au gypse, par les
marnes argileuses et gypseuses qui alternent également avec
le calcaire siliceux et le gypse à ossemens ( butte de la Briffe
de S. Denys; Crecy; Coulommiers) ; vers le bas, au calcaire
grossier , dont les dernières couches offrent aussi quelquefois
des infiltrations siliceuses : mais les silex cornés du calcaire
grossier renferment des coquilles marines, tandis que les
calcaires siliceux du terrain gypseux qui servent de meu-
lières, présentent dans leurs bancs supérieurs des coquilles
lluviatiles. J'ai déjà fait observer plus haut (§. 28, p. 283)
que sur le dos des Cordillères du Pérou, à 1800 toises de
hauteur, une formation calcaire très -ancienne (le calcaire
r
alpin) oflTre ce même phénomène curieux dinfiUrations sili-
ceuses. Des modifications analogues dans la composition des
roches et dans le mélange chimique des matières ont eu lieu
à des époques très-différentes. Les marnes calcaires qui al-
ternent avec le calcaire siliceux de Paris, renferment une
magnésite remarquable, que MM. Brongniarl et Berthier ont
fait connoitre, et qui est un silicate de unignésie hydraté
presque pur. Les infiltrations siliceuses de cette formation
passent quelquefois à une calcédoine divisée par plaques, et
à un hornstein mamelonné coloré en rouge, en violet et en
brun.
Le terrain gypseux est composé, dans le bassin de Paris,
de couches alternantes de marnes schisteuses et de gypse
saccharoïdc compacte ou feuilleté. Il renferme au centre
et dans sa plus grande masse des productions terrestres et
d'eau douce , mais vers ses limites supérieures et irtférieures,
tant dans le gypse que dans les marnes, il offre des productions
marines. L'assise inférieure de la formation gypseuse est carac-
térisée par des silex ménilites et de gros cristaux de sélénite
lenticulaires et jaunâtres. Les bancs de marnes deviennent
plus rares vers le milieu , où Ton trouve plus particulière-
ment la strontiane sulfatée et des squelettes de poissons.
L'assise supérieure est caractérisée par la multitude d'osse-
mens de mammifères terrestres qui sont aujourd'hui inconnus
sur le globe (Palœotheriuni crassum , P. médium, P. magnum^
P. lalum , P. curtum , Anaplotheriiim commune, A. secundarium ,
A. marinum , le Chaeropotame et VAdapis de M. Cuvier) :
par des os d'oiseaux, de crocodiles, de tryonix, de poissons
d'eaxi douce: elle est recouverte de bancs de marnes calcaires
et argileuses, renfermant, les uns du bois de palmier, des
planorbes, des limnées et des cythérées (Cjtherea elegans) ;
les autres, des cérites {Ceritliinm plicatum , C. cinctum), des
venus et de grandes huîtres très-épaisses (Ostreahippopus , O.
pseudocliama, O. longirostris , O. cjatula). Une couche de
marne verte sépare, vers la limite supérieure de la formation
gypseuse, les coquilles d'eau douce des coquilles pélagiques.
Vers le bas le gypse même (n.° 26 de la troisième masse de
Montmartre) offre des fossiles marins. Quelquefois cette for-
mation ne s'est pas développée en entier j les gypses man-
IND 33i
quent, et l'on ne reconnoît sa place que par des marnes vertes
accompagnées de strontianc. Comme le gypse à ossemens n'a
encore été étudié qu'en très-peu d'endroits (bassin de Paris,
Puy-en-Vélay, Aix en Provence), les caractères que nous
attribuons à cette formation si importante pour la géogonie
ou pour l'histoire des anciennes révolutions de notre planète,
ne sont vraisemblablement pas assez généraux.
Grès et Sables supérieurs au gypse a assEjiENS ( Grès de
Fontainebleau).
§. 58. Ce terrain est formé de deux assises : l'une, infé-
rieure, sans coquilles; l'autre, supérieure, renfermant des
coquillt's marines. Des sables siliceux et des grès formertt
des bancs très-épais, très- étendus, mais dont les surfaces ne
sont pas parallèles. Dans l'assise dépourvue de coquilles en
place (celles de Villers-Cotterets et de Thury paroissent à M.
ï3rongniart usées, comme si elles avoient été roulées), on
trouve sur quelques points beaucoup de paillettes de mica,
des rognons de fer brun disposés par lits, un peu de gypse,
beaucoup de marnes argileuses et des infiltrations de chaux
carbonatée (forêt de Fontainebleau). Les assises supérieures,
qui renferment des coquilles marines {Olua mitreola, Ceri-
thium cristatum , C. lamellosum , Corbula rugusa, Ostrea Jlahel-
lula) , passent quelquefois à un calcaire arénacé (Romain-
ville, Montmartre). L'immense terrain tertiaire de l'Italie .
celui des collines subapennines , avec ossemens de cétacés et
Ostrea hippopus, qui s'étend depuis Asti en Piémont jusqu'à
Monteleone en Calabre , et que M. Brocchi a si bien décrit,
appartient en grande partie , d'après les discussions de MM.
Prévost et Brongniart, aux grès et sables qui reposent sur
le gypse de Montmartre.
Terrain lacustre avec Meulières poreuses , supérieur au
Grès de Fontainebleau (Calcaire a lymnbes).
§. 3g. C'est le grand terrain d'eau douce supérieur, com-
posé sur quelques points de sables argilo - ferrugineux , de
marnes et de meulières siliceuses, criblées de cavités (avec
coquilles, plateau de Montmorency j sans coquilles^ LaFerté-
532 ITVD
Bous-Jouarre); sur d'autres, de silex, de marnes et de calcaires
compactes (Chàteau-Landon). Ces calcaires renferment des
potauiides , des lymnées, des planorbes , des bulimes, des
hélix, et beaucoup d'empreintes de végétaux [Culmiles ano-
malus, Lycopodites sqitammatiis , Chara medicaginula , Nj'mphœa
Aretiiusœ de M. Brongniart fils). Nous renvoyons pour l'his-
toire du grand terrain lacustre , qui a déjà été retrouvé dans
presque toutes les parties de l'Europe, à la 2/ édition de la
Description géologique des environs de Paris [art. VIII),
Une contrée du globe où la plupart des formations ter-
tiaires ont acquis un grand développement, et où, pour
cette même cause, ces formations sont restées assez distinctes,
nous a servi de type dans le tableau géognostique des forma-
tions tertiaires ; mais il ne faut point oublier que dans d'autres
contrées ce développement s'arrête à l'argile plastique ou au
calcaire grossier : alors le gypse de Montmartre et le grés
de Fontainebleau ne paroissent indiqués que par les places
qu'occupent les marnes et les sables. Le terrain tertiaire
réunit des formations qui se confondent partout où elles
n'ont pas pris un égal accroissement, et où la fréquente alter-
nance des marnes tend à masquer les limites des différentes
assises. Il me resteroit à parler des dépôts d'allusion , qui pré-
sentent d'importans problèmes sur l'origine des sables dans
les déserts et les steppes (provenant du grès rouge, du grès
bigarré , du quadersandstein, du terrain tertiaire?); mais ces
dépôts si variés dans leur alternance, ne peuvent être l'objet
d'un travail sur la superposition des roches.
Terrains volcaniques.
J'ai fait succéder, par des motifs que j'ai exposés plus
haut, au terrain intermédiaire (Uebergangsgebirge) , comme
par mode de bisection , les formations secondaires et volca-
niques. Cet an-angement ofl're l'avantage de rapprocher les
porphyres et les syénites de transition, avec leurs couches hui-
leuses et pyroxéniques intercalées ( §§. -20 et 24, Holmstrand
en Norwége ; Andes de Popayan ; Cordillères du Mexique),
des porphyres , des amygdaloïdes et des dolérites du grès
rouge (§. 26 , Noyant et Figeac en France j Ecosse) , des tra-
IND 533
chytes , des phonolitlies et des basaltes du terrain exclusive-
ment pjrrogène. Dans un tableau de gisement , c'est déjà
gagner beaucoup que de ne pas séparer ce qui se trouve lié
dans la nature par des affinités vraiment géognostiques.
On peut considérer le groupe de roches que l'on réunit
généralement dans le terrain volcanique , sous un double
point de vue, ou d'après une certaine conformité observée
dans leur gisement et leur superposition, ou d'après les rap-
ports de leur composition et de leur origine communes.
Dans le premier cas, sans opposer le mode de formation des
trachytes et des basaltes a celui des terrains primitifs et in-
termédiaires, on examine la place que doivent occuper,
comme termes de la série géognostique , les grands systèmes
de roches composées de feldspath, de pyroxène, d'amphi-
bole, d'olivine et de fer titane , que l'on trouve, au nord et
au sud de l'équateur, non recouvertes et comme surajoutées
à d'autres terrains plus anciens, dans des circonstances en-
tièrement analogues. Cette manière d'envisager et déclasser
les roches volcaniques est la plus conforme aux besoins de
la géognosie positive. On réunit les roches trachytiques et
basaltiques , non d'après leur composition minéralogique et
la conformité apparente de leur origine , mais d'après leur
agroupement et leur position ; on les distribue parmi les
autres roches d'après leur âge relatif, comme on a fait ,
dans les terrains primitifs et intermédiaires , avec les diflTé-
rentes formations de calcaires grenus (§§. loetao), d'eupho*
tides (§§. 19 et 26 ) et de porphyres ( §§. 18 , 22 , 23 et 26 ).
Dans le second cas, on isole, sous la dénomination de terrain
volcanique, tout ce que l'on croit être incontestablement
d'une origine ignée; on oppose les termes de la série pyro-
gène à d'autres séries de roches que l'on dit être d'une origine
aqueuse. Par là on sépare d'une manière absolue ee qui otfrç
dans la nature des passages graduels; au lieu d'explorer le
gisement , ou de placer les roches dans l'ordre de leur succes-
sion , on s'attache de préférence aux questions historiques
sur le mode de leur formation.
J'avoue, et Ion ne sauroit se prononcer avec assez de fran-
chise sur les premiers fondemens d'une science; j'avoue que
ces classitications , d'après les diverses hypothèses que Von
354 IND
se forme sur l'origine des choses , ne me paroîssent pas seu-
lement vagues et arbitraires, mais aussi très- nuisibles au s
progrès de la géognosie de gisement; elles préjugent, d'une
manière arbitraire et surtout trop absolue , ce qui est pour
le moins encore extrêmement douteux. En divisant, d"après
un usage suranné, les formations en primitives , inte-médiaires,
secondaires ) tertiaires et volcaniques , onadmet, pour ainsi dire,
un double principe de division, celui de l'âge relatif ou de
la succession des formations, et celui de leur origine. Si l'on
distingue entre des nappes de laves et des roches, ou bien
entre des roches volcaniques , des roches d'une origine neptu-
nienne, et des matières formées par une prétendue liquéfac-
tion aquoso-ignée, on attribue tacitement aux granités, aux
porphyres et aux syénites intermédiaires, aux dolérites et aux
amygdaloïdes du grès rouge, un mode de formation diamé-
tralement opposé à celui d'une fusion ignée. D'après cette
manière de procéder, qui appartient plutôt k la géogonie
qu'à la géognosie positive , on considère tout ce qui n'est pas
compris dans le terrain, ro/cajifg^ue, dans les roches de trachyte
et de basalte qui surmontent les autres terrains , comme
formé par la voie humide, ou comme précipité d'une solution
aqueuse. 11 est presque inutile, dans l'état actuel des sciences
physiques, de rappeler combien l'hypothèse d'une solution
aqueuse est peu applicable aux granités et aux gneis, aux
porphyres et aux syénites, aux euphotidcs et aux jaspés. Je ne
hasarderai pas de prononcer ici sur les circonstances qui peu-
vent avoir accompagné la première formation de la croûte
oxidée de notre planète ; mais je n'hésite pas à me ranger du
côté des géognostes qui conçoivent plutôt la formation des
roches cristallines siliceuses par le feu que par une solution
aqueuse, à la manière des travertins et d'autres calcaires la-
custres. Les mots laves et roches volcaniques sont d'ailleurs aussi
vagues que l'est le mot volcan, qui désigne tantôt une mon-
tagne terminée par une bouche ignivome, tantôt la cause
souterraine de tout phénomène volcanique. Les trachyfes qui
surmontent le dos des Cordillères, appartiennent indubitable-
ment aux roches pyrogènes, et cependant le mode de leur
formation n'est pas celui des courans de laves postérieurs au
creusement des vallées. L'action du feu volcanique par un
• IND 535
cône isolé, par le cratère d'un volcan moderne, diffère né-
cessairement de Faction de ce feu à travers l'ancienne croûte
crevassée de notre planète.
En considérant les phénomènes volcaniques dans leur plus
grande généralité , en réunissant ce qui a été observé dans les
différentes parties du globe , on voit différer ces phénomènes
entre eux, même de nos jours, de la manière la plus frap-
pante. Ce ne sont pas les volcans de la Méditerranée, les
seuls que l'on a étudiés avec soin , qui peuvent servir de type
au géognoste et lui présenter la solution des grands problèmes
géogoniques. L'élévation absolue des bouches ignivomes ,
variant depuis cent à deux mille neuf cent cinquante toises
(Stromboli et Cotopaxi), influe non-seulement sur la fré-
quence des éruptions, elle modifie aussi la nature des masses
rejetées. Quelques volcans n'agissent plus que par leurs
flancs, quoiqu'ils offrent encore un cratère à leur sommet
(Pic de Ténériffe); d'autres ont des éruptions latérales (j'en
ai trouvé à Anlisana dans les Andes de Quito, à 2140
toises de hauteur) , sans que leur cime ait jamais été percée;
d'autres encore, également creux dans le-.ir intérieur, comme
l'indiquent beaucoup de phénomènes (dôme trachytiqne du
Chimborazo, 35 5c) toises), n'offrent aucune ouverture per-
manente au sommet et sur leur flanc (le Yana-Urcu ,
petit cône d'éruption , est placé dans le plateau de Calpi
même), et n'agissent pour ainsi dire que dynamiquement,
en ébranlant les terrains d'alentour, en fracturant les cou-
ches et en changeant la surface du sol. Ruru-Pichincha
(2490 toises), qui a été l'objet particulier de mes recherches,
n'a jamais jeté un courant de laves postérieur au creusement
des vallées actuelles, pas plus que Capac-Urcu (près Rio-
bamba nuevo), qui, avant l'écrouleinent de sa cime, a été
plus élevé que le Chimborazo. Le grand volcan mexicain de
Popocatepetl (2771 toises), au contraire, a eu des épaiiche-
mens de laves sous la forme de bandes étroites, tout comme
les petits volcans de l'Auvergne et de Pltalie méridionale.
Les îles qui sortent ( dans quelques parages presque périodi-
quement) du fond des mers, ne sont pas, connue on le dit
souvent par erreur, des amas de scories semblables au Monte
novo de Pouzzolc ; ce sont des masses rocheuses soulevées, (,i,
356 IND
dans lesquelles le cratère ne s'ouvre que postérieurement à
leur soulèvement. {Relat. histor. de mon Voyage aux régions
équin., T. I , p. 171 , et Essai politique, T. I , p. 254.) Au
Mexique, dans Tlntérieur des terres, sur un plateau trachy-
tique à plus de trente - six lieues de distance de la mer,
et loin de tout volcan brûlant, des montagnes de 1600 pieds
de hauteur sont sorties (2g Septembre 1769) sur une cre-
vasse, et ont jeté des laves qui enchâssent des fragmens gra-
nitiques. Tout à Tentour, un terrain de quatre milles carrés
s'est soulevé en forme de vessie, et des milliers de petits
cônes (hornitos de Jorullo), composés d'argile et de boules
de basaltes à couches concentriques, ont hérissé celte sur-
face bombée. Tous les volcans brûlans et toutes les citnes de
la Nouvelle -Espagne qui s'élèvent au-dessus de la limite des
neiges perpétuelles, se trouvent sur une zone étroite {Paral-
lèle des grandes hauteurs, entre les 18° 69' et 19° 12' de lati-
tude), qui est perpendiculaire à la grande chaîne des mon-
tagnes. C'est comme une crevasse de 107 lieues de long, qui
s'étend depuis les côtes de l'océan Atlantique jusqu'à celles
de la Mer du Sud, et qui semble se prolonger encore 120
lieues plus loin, vers l'archipel de Revillagigedo , couvert
de tuffs ponceux.
Ces alignemens des volcans, ces soulèvemens à travers
des fentes continues, ces bruits souterrains {braniidos j true-
nos subteraneos de Guanaxuato , en 3784) qui se sont fait en-
tendre au milieu d'un terrain de schistes et de porphyres
de transition, rappellent, dans les forces encore actives du
nouveau monde, les forces qui, dans les temps les plus re-
culés, ont soulevé les chaînes de montagnes, crevassé le
sol, et fait jaillir des sources de terres liquéfiées (laves,
roches volcaniques fluides) au milieu de strates plus ancien-
nement consolidés. Même de nos jours ces terres liquéfiées
ne sortent pas constamment des mêmes ouvertures de l'ori-
lice d'une montagne (cratère au sommet d'un volcan) ou de
son flanc déchiré ; quelquefois (Islande , plateau de Quito ) la
terre s'ouvre dans les plaines, et l'on en voit sortir ou des
nappes de laves qui s'entrecroisent, se refoulent et se sur-
montent, ou de petits cônes d'une matière boueuse {moja
de Pelileo et de Riobamba viejo , 4 Février 1797) qui semble
• IND 337
avoir été un trachyte ponceux, et qui, combustible et tachant
les doigts en noir, est mêlé de carbure d'hydrogène. ( Hiunb.,
Essai politique sur la Nou^'. Espagne, T. I, p. l^j , 254. Id.,
Relut, historique, T. l , p. 12g, 140, i54, 3i5; T. II , p. iS ,
20, 25. Klaproth, Chem. Unterr. der Min., T. IV, p. 28g.)
Les roches que l'on a l'habitude de réunir sous le nom de
substances du terrain (exclusivement) volcanique, ont été
envisagées jusqu'ici beaucoup plus d'après les rapports orycto-
gnostiques et chimiques de leur composition, ou d'après
ceux de leur origine, que d'après les rapports gcognos-
tiques de leur gisement et de leur âge relatif. Le feu des
volcans a agi à toutes les époques, lors de la première oxi-
dation de la croûte du globe , à travers les roches de tran-
sition, les terrains secondaires et tertiaires. A l'exception
de quelques roches lacustres ou d'eau douce , les roches vol-
caniques sont les seules dont la formation continue , pour
ainsi dire, sous nos yeux. Si les laves des mêmes volcans
(sources intermittentes de terres liquéfiées) varient à diverses
époques de leurs éruptions, on conçoit combien des matières
volcaniques qui, pendant des milliers d'années, se sont pro-
gressivement élevées vers la surface de notre planète, dans
des circonstances de mélange, de pression, de refroidisse-
ment, si différentes, doivent offrir à la fois de contrastes et
d'analogies. Il y a des trachytes, des phonolithes, des ba-
saltes, des obsidiennes et des perlites de diffcrens à<^es
comme il y a différentes formations de granités, de «rneis
de micaschistes, de calcaires, de grauwacke, de syénites et
de porphyres. Plus on approche des temps modernes, plus
les formations volcaniques paroissent isolées , surajoutées
étrangères au sol sur lequel elles se sont répandues. Une
longue intermittence de la source semble produire, même
dans les volcans actuels, une grande variété dans les produits,
et s'opposer à l'agroupement de matières analogues. Dans les
formations de transition (Andes de la Nouvelle -Grenade et
du Pérou ; Cordillères du Mexique ) les différens termes de
la série géognostique se lient les uns aux autres; ils se mon-
trent dans cette dépendance mutuelle que l'on observe entre
les porphyres et les syénites, entre les thonschiefer, les
grunstein et les calcaires de transition , entre les serpentines,
23. 23
338 IND
les jaspes et les euphotides. Dans ce dédale de formations
volcaniques de différens âges on n'a reconnu jusqu'à présent
que quelques lois de gisement qui paroissent, sinon géné-
rales, du moins en harmonie avec des phénomènes observés
dans les deux continens sur une grande étendue de terrain.
Ce sont ces rapports de gisement seuls qui peuvent être dis-
cutés ici ; tout ce qui regarde la composition des roches vol-
cauiques, l'analyse mécanique de leur tissu et leurs classifi-
cations oryctognostiques , objets importans traités dans deux
mémoires célèbres de M. Fleurian de Bellevue et de M. Cor-
dier {Journ. de physique , T.LI, LX et LXXXIll), n'est pas
du domaine de la géognosie des formations. On peut sans
doute indiquer certains caractères par lesquels des roches
ressemblent dune manière plus évidente aux productions
des volcans modernes : mais la couleur noire; la porosité à
cellules aiongées, couvertes d'un enduit lustré; la propriété
de faire des gelées avec les acides; l'absence du quarz , du
feldspalji commun et des filons métalliques (aurifères et ar-
gentifères) ; la présence du pyroxène , du fer titane, du
feldspalli vitreux et fendillé, et des alcalis, ne peuvent plus,
dans l'état actuel de nos connoissances . être considérées comme
des caractères généraux des roches volcaniques. (Voyez plus
haut, §§. 2 1, 25 , 26.)
Les masses volcaniques, ou regardées comme telles (roches
empjrodoxes de M. Mohs, Charaktc?- der Classen, 1821 , p. 177),
se trouvent ou par filons ( dykes , dans toutes les formations,
depuis le granité j)rimitif jusqu'à la craie et les formations
tertiaires; Ecosse, Allemagne, Italie), ou en couches inter-
calées (calcaires et porphyres de transition; grès rouge),
ou superposées, surajoutées à des terrains d'âges très-diHé-
rens. Le contraste entre les roches volcaniques ou empyro-
doxes intercalées , et les roches qui les renferment , est
d'autant plus frappant que les dernières sont indubitablement
non volcaniques, calcaires (Derbyshire) ou fragmentaires
(grauwacke, grès houiller). Lorsque des masses empyro-
doxes se trouvent, ou comme couches subordonnées, entre
les strates de roches interiuédiaires cristallines ( porphyres
et syénites) , ou comme filons traversant les strates de roches
primitives (granite-gneis) , ces roches primitives et intermé-
IND 339
diaires feldspathiques peuvent avoir, selon l'opinion de quel-
ques géognostes, la même origine ignée que la masse des
couches intercalées ou des filons ( niandelstein, dolérites,
basaltes) , sans que les époques de formation et les circons-
tances dans lesquelles les forces volcaniques ont agi, aient
été identiques. Les limites entre les filons et les bancs inter-
calés trappéens, pyroxcniques ou porphyriques , ne sont pas
toujours si tranchées qu'on pourroit le croire d'après les dé-
jSnitions que l'on a coutume de donner des gites parf!culiers
des minerais. Plusieurs de ces bancs ne soiit que des amas
entrelacés et formés par la réunion d'un grand nombre de
filons. Lorsque ceux-ci suivent dans une grande épaisseur
(voyez mes coupes du célèbre filon de Guanaxuato ) la direc-
tion et l'inclinaison des strates de la roche , ils prennent
tout l'aspect d'une couche. Nous insistons sur ces remarques,
parce que la nouvelle géogonie a une tendance à faire monter,
de bas en haut, des masses liquéfiées à travers des crevasses,
tandis que l'ancienne géogonie expl'quoit fout par des pré-
cipitations, par des mouvemens dans un sens opposé. On
peut croire que ces directions doivent avoir été différentes
selon la nature des matières qui se sont consolidées, seloa
qu'elles étoient cristallines et siliceuses, calcaires ou frag-
mentaires. La géognosie positive a profité de ces discussions
sur l'origine ignée ou neptunienne des roches .- mais elle rend
les classifications indépendantes des résultats géogoniques ;
elle ne sépare pas les masses intercalées des terrains dans
lesquels on les trouve, et elle ne laisse réunies, dans la divi-
sion des roches dont nous nous occupons ici sous le nom
de terrain volcanique , que des formations superposées, sur-
ajoutées à des formations primitives, intermédiaires, secon-
daires et tertiaires.
La place que doit occuper une roche cT^ dans la série géo'
gnostique, est déterminée par la roche la plus récente, y,
qu'elle recouvre, et par la roche la plus ancienne, s, dont elle
est recouverte. Si cT est superposé à ê, il est tout naturel qu'on
le trouve aussi placé sur les roches plus anciennes a, ^S, y,
qui sont les termes précédens de la série. L'application de
ce principe très- simple de la géognosie de gisement exige
beaucoup de circonspection, lorsqu'il s'agit de roches tra-
S40 IND
chyfiques, basaltiques et phonolithiques. Un même courant
de laves, une même nappe de niasses pyroxéniques répandues
à la fois sur du granile, sur du micaschiste et sur un terrain
d'eau douce, oflrent sans doute des preuves incontestables
d'une origine postérieure aux formations tertiaires les plus
modernes : mais l'âge dune formation volcanique est plus
diOicile à déterminer quand il n'y a pas continuité de masse.
et quand on confond, sous une dénomination générale, des
matières qui se sont épanchées latéralement, avec d'autres
qui ont percé de bas en haut, par soulèvement, à travers
des roches préexistantes. Là oii des trachytes et des basaltes
se trouvent réunis, la formation la plus récente sur laquelle
sont appuyés les basaltes , ne fixe pas nécessairement l'âge des
trachytes: l'une et l'autre de ces roches ont, sans doute, été
produites d'une manière différente et non simultanée. Il se
pourroit même que, dans une région de peu d'étendue, di-
verses masses trachytiques isolées , mais d'une composition
analogue, ne fussent pas d'une même forôiation, les unes sor-
tant d'une syénite de transition, les autres de roches primi-
tives. Le plus souvent l'accumulation des conglomérats trachy-
tiques masque à tel point le gisement des trachytes, que l'on
ne peut deviner leur superposition. C'est ainsi que Ion croit
les trachytes du Siebengebirge, près de Bonn, sortis du grau-
Avacke , et ceux d'Auvergne sortis d'un plateau de granité qui
pourroit bien déjà appartenir au terrain intermédiaire. De
même qu'il faut distinguer entre les véritables coulées basalti-
ques avec olivine et les masses pyroxéniques noires, huileuses,
intercalées aux trachytes et à quelques porphyres de transi-
tion , de même aussi il ne faut pas confondre les véritables
trachytes (Drachenfels , Chiniborazo , Antisana) avec des
laves feldspathiques( leucostiniques) qui ont coulé par bandes
étroites (ancien cratère de la Solfatare près Naples) et qui
peuvent se répandre sur des conglomérats tuffacés. (Dolomieu,
dans le Jotirn. des mines, n."* 41 , 42 et 69; Nose, IS'iederrh.
Reise, T. II, p. 428; Spallanzani, Voy. dans les deux Siciles ,
T. IIT , p. 196 ; Ramond , JSii'ell. géogn. de l'Auvergne, p. 1 1 ,
91 ; Buch , Geogn. 'Beoh. , T. II , p. 178, 2o5 ; Id. , dans les
Menu del'Acad. deBerlin, 181a, p. 129 — 164; Beudant, Vo)'.
en Hongrie, T. III, p. 5o8 — 5i3, 621 — 627 et 53o — 644.)
IND 341
En Hongrie , le terrain trachytique paroit s'être formé
entre l'époque des terrains secondaires et celle des terrains
tertiaires. M. Bendant, qui a donné sur les roches de tra-
chyte le traité le plus complet que nous possédions, les a vues
reposer sur des griinstein (Krenniilz, Dregely, Matra) et sur
des calcaires de transition (Glashiitte, INeusohl). Les con-
glomérats trachytiques recoururent aussi en Hongrie desgrau-
wackes schisteux , et même un calcaire magnésifère , qui pa-
roit appartenir à la formation du Jura. Dans cette partie
orientale de l'Europe, le grès à lignites, le calcaire grossier et
d'autres roches tertiaires sont superposés à leur tour à ces
conglomérats. Des superpositions semblables de grès, de gypse
et de calcaires d'une origine très-récente, ont été observées
par M. de Buch et par moi aux iles Canaries et dans les
Cordillères des Andes. D'après un excellent observateur,
M. Breislak (Atlas géol.,pL Sg), les trachytes dei iMontsEuga-
néens reposent (Schivanoja, près de Castelnuovo) sur le cal-
caire du Jura ; mais dans la région du monde la plus abon-
dante en roches trachytiques, dans la partie occidentale du
nouveau continent, tant au nord qu'au sud de l'équateur, je
n'ai vu nulle part les trachytes se faire jour à travers des
formations si modernes.
Les résultats de gisement les plus imporlans qu'ont offerts
mes voyages dans la zone volcanique des Andes (1801 — 1804),
se réduisent aux faits suivans. Toutes les cimes les plus
élevées des Cordillères sont des trachytes. Les volcans actuels
agissent tous par des ouvertures formées dans le terrain tra-
chytique. Ce terrain embrasse par zones une grande partie
des Cordillères; mais il s'étend rarement vers les plaines, et
les volcans encore enflammés, loin d'être solitaires ou associés
par groupes de forme irrégulière plus ou moins circulaire,
comme en Europe (Ramond , IV jV., p. 45 ; Humb. , Rel. hist, ,
T. Il, p. 16), se suivent, à la manière des volcans éteints de
l'Auvergne et des cratères brûlans de l'île de Java, par files,
tantôt dans une série , tantôt sur deux lignes parallèles. Ces
lignes sont dirigées généralement (montagnes de Guatimala,
de Fopayan , de los Pastos , de Quito, du Pérou et du
Chili) dans le sens de l'axe des Cordillères, quelquefois
(Mexique) elles font avec cet axe un apgle de 70°. Là
34^ IND
même où les trachytes, par leur accumulation, ne couvrent
pas le sol entier, ils se trouvent comme éparpillés en pe-
tites masses sur le dos et la crête des Andes, s'élevant en
forme de rochers pointus au sein des roches primitives et
de transition. Les trachytes et les basaltes se montrent rare-
ment réunis, et ces deux systèmes de roches semblent se
repousser mutuellement. De véritables basaltes avec olivine
ne forment pas des couches intercalées dans le trachyte ; mais
lorsqu'ils se trouvent rapprochés des trachytes ( entre Quito
et la Villa de Ibarra; Julumito à Touest de Popayan ; vallée
de Santiago dans la Nouvelle-Espagne; Cerros de las Cucvas
et de Canoas près du volcan de JoruUo) , ce sont les basaltes
et les mandelstein qui recouvrent ces derniers. Les roches
trachytiques ont leur siège principal dans le terrain de tran-
sition , dans les grandes formations de syénites et de por-
phyres (§§. 2 1 et 25), antérieures et postérieures aux grau-
Avackes et aux thonschiefer , surtout dans la première de ces
formations, qui recouvre immédiatement les roches primi-
tives. Lorsque, dans les Andes , les trachytes paroissent cou-
vrir des granités avec amphibole, ou des gneis et des mica-
schistes verls et stéatiteux , il reste douteux si ces dernières
rcchcs, loin d'être primitives, n'appartiennent pas plutôt au
terrain de transition. On peuf regarder comme également
problématique, si ces apparences de recoinrewens, ces super-
positions des roches trachytiques sur des formations préexis-
tantes ne sont pas plutôt de simples appositions , et si le tra-
chyte ( Exlentam tumefecit humum , ceu spirilus oris Tendere vesi-
cam solet, aut direpta bicornis Terga capri ; tuivor ille loci per-
mansit , et alli Collis habet speciem , longoque induruit œvo , dit
Ovide, Metamorph. , lib. IX, du cône soulevé de Trécène
dans l'Argolide), si le trachyte, dis -je, en soulevant et en
brisant l'ancienne croûte du globe, n'est pas sorti perpendi-
culairement sous la forme de cloches (Chimborazo) , ou bien
sous celle de châteaux forts en ruines (sommet des Cordil-
lères du Pérou, entre Loxa et Caxamarca). Les trachytes
des Andes et du Mexique, qui renferment du perlite et
de l'obsidienne , ne sont généralement recouverts que par
d'autres roches volcaniques ( phonolithes , basalles, mandel-
stein, conglomérats et tuffs ponceux). Quelquefois de pe-
IND 343
tites formations locales, calcaires et gypseuses, que Ton peut
appeler tertiaires, parce qu'elles sont certainement posté-»
rieures à la craie, surmontent les trachytes ; mais vers le bas
ces mêmes trachytes des Cordillères, surtout lorsqu'ils ne
sont pas recoui>erts , sont géognostiquement liés de la manière
la plus intime avec les porphyres poreux et fendilles du
terrain de transition : porphyres dépourvus de quarz et ren-
fermant du pyroèiie et du feldspath vitreux, quelquefois
riches en filons argentifères et supportant sur d'auires points
des formations secondaires, même du calcaire de transition,
noir et carburé ( voyez plus haut, p. 161, i58 — i8i, 2o5 —
2i3). Cette liaison pourra motiver un- jour , dans nos mé-
thodes, la suppression du terrain volcanique, en tant qu on
le considère comme opposé, par le mode de sa formation et
de son origine, aux roches de tous les autres terrains. Il y a
des roches volcaniques dans le terrain de transition et dans
le grès rouge, comme il y a des roches fragmentaires, agglo-
mérées, remaniées par les eaux, dans le terrain volcanique.
Ce dernier mot, pour lui donner un sens précis, seroil le
mieux appliqué aux seules productions des volcans qui ont
agi postérieurement à l'existence de nos vallées.
Quoique , d'après ks observations faites dans les deux
continens, les trachytes et d'autres roches analogues qui
paroissent dus à la même action des forces volcaniques , et
dans lesquels le feldspath compacte ou vitreux domine sur
l'amphibole et le pyrcxènc , se trouvent principalement dans
le terrain de transition et sur les limites de ce terrain et des
roches secondaires les plus anciennes, on ne peut étendre
cette conclusion aux basaltes, qui sont souvent enclavés dans
le granité primitif (Schneekoppe enSilésie; Roche rouge, près
de Serassac dans le Vélay), et qui sont peut-être antérieurs à
certaines formations de trachytes? Dans une contrée très-cir-
eonscrite , dans un même agroupemcnt de roches volcaniques ,
les trachytes grenus ou porphyres trachytiques , qu'il ne faut
pas confondre avec des roches fragmentaires ou des conglo-
mérats de trachytes beaucoup plus modernes, sont générale-
ment d'une formation plus ancienne que les basaltes qui les
recouvrent en coulées ou en larges nappes. Au contraire, les
basaltes, postérieurs aux conglomérats trachytiques et pon-
344 IND
ceux, sont le plus souvent antérieurs aux conglon^érats et tiiffs
basaltiques; mais, nous le répétons, dès que nous devons com-
parer ries lambeaux épars d'un terrain de trachytes , de
phonolithes ou de basaltes, lambeatix non recouverts et
gisant dans des formations granitiques, intermédiaires ou
secondaires, ces roches ^e trachytes, de basaltes et de pho-
nolithes ne peuvent plus être rangées comme termes d'une
même série géognostique. Ce qui sort du granité le plus
ancien , peut être postérieur à une roche analogue qui s'est
fait jour à la fois à travers des roches de transition. L'oryc-
tognosie ou minéralogie descriptive, qui analyse le tissu
des substances volcaniques , parviendra à les classer d'après
les principes que M. Cordier a si bien établis dans son mé-
moire sur la composition des roches pyrogènes de tous les àgeSf
mais la géognosic, qui ne considère que l'âge relatif et les
gisemens, sera forcée de compter un grand nombre de roches
incertœ sedis , même lorsqu'une plus vaste partie de la terre
aura été examinée avec soin. Cette incertitude ne tient pas
à l'imperfection des méthodes, mais à l'impossibilité de com-
parer, sous le rapport de leur succession ou de l'époque de
leur origine , des masses rocheuses éparses et non recouvertes.
L'historien de la nature, comme celui des révolutions du
genre humain, recueille, compare et discute tous les faits;
mais il ne peut coordonner parsériçs ceux qui ne présentent
aucun caractère chronologique.
Dans cet état des choses, loin de mêler des considérations
oryctognostiques aux classifications delà géognosie positive, il
meparoit convenable de ranger les roches volcaniques d'après
le type de aisément que l'on observe le plus généralement dans
les deux hémisphères, là où le plus grand nombre de ces roches
se trouve agroupé. La grande masse des substances dans les-
quelles le feldspath prédomine (trachytes, leucostines), sera
suivie, comme dans les tableaux oryctognostiques, de la grande
masse des substances dans lesquelles prédomine le pyroxène
(basaltes, dolérites); mais cette harmonie apparente entre
des méthodes fondées sur deux principes dilférens, celui de
la composition et celui de l'ordre des gisemens , disparoit
dès ({ue l'on examine les formations partielles ou intercalées.
Le géugnoste distingue alors entre les phonolithes des trachjytes
IND 345
et les phonolith es des basaltes ; il place desleucostines compactes
dans le terrain pyroxénique , comme il indique une forma-
tion de doléritcs (mélange de feldspath et depyroxène, dans
lequel la dernière substance est la plus fréquente ) au uiilieu
desleucostines ou trachytes. C'est d'après ces principes que
j'ai esquissé la distribution des roches volcaniques, dont le ta-
bleau a été placé à la tin des terrains de transition (p. 232).
Cette distribution se fonde sur les observations vraiment géo-
gnosriques publiées par MM. Léopold deBuch, Breislak, Boue
et Beudant, et sur celles que j'ai eu occasion de faire moi-
même en Italie, au Pic deTénériffe, dans les Cordillères de
la Nouvelle -Grenade, de Quito et du Mexique. J'ajouterai
à la nomenclature des terrains l'indication succincte des
gisemens les plus intéressans de l'Amérique ^quinoxiale.
J. Formations trachytiques , comprenant les trachytes grenus
(granitoïdes et syénitiques) ; les trachytes porplijriques ou
porphyres tracliytiques, en partie pyroxéniques , en partie
celluleux , avec nids siliceux ( meulières trachytiques ou
porphyres molaires de M. Beudant); les trachytes semi-vitreux;
les perlites avec obsidienne , et les phonolithes des trachytes. On
peut ajouter à cette série les conglomérats trachytiques et pon-
ceux , avec alunite, soufre, opale et bois opalisé ; car chaque
terrain volcanique , comme chaque roche intermédiaire et
secondaire, a ses conglomérats, c'est-à-dire, ses roches frag-
mentaires, dont elle a fourni les premiers élémens. Les tra-
chytes (granités chauffés en place des anciens minéralogistes,
porphyres trappéens, beaucoup de laves pétrosiliceuses de
Dolomieu , domites de MM. de Buch et Ramond , nécroli-
thes de M. Brocchi , leucostine granulaire de M. Cordier)
n'offrent généralement, dans l'ancien continent, que peu de
traces de stratitication ; mais dans les Cordillères des Andes
ils sont souvent très -régulièrement stratifiés (ChimborazOj
N. 60° E. ; Assuay, N. i5° E. ), mais variant par groupe et
de direction et d'inclinaison , comme font les phonolithes du
terrain basaltique ( Mittelgebirge en Bohème). La structure
en colonnes (prismes de 4 à 7 pans) est très-commune dans
les trachytes porphyriques des Cordillères, non -seulement
dans les roches noires à base de rétinite (pechstein) avec
346 Il\-D
feldspath vitreux et pyroxèue ( Passuchoa, près de la ville de
Quito, au sud des collines de Poingasi ; Faldas de Pichincha;
Paranios de Chulucanas , Aroina et Cunturcaga , dans les Andes
du Pérou, entre Loxa cl Caxamarca); mais aussi dans les
trachytes gris-verdàtre du Chinriborazo (prismes minces de
5o pieds de long ; hauieur du plateau, 2180 toises), comme
dans les tracliytes granitoïdes de Pisojè , au pied du volcan
de Puracé. Ces derniers sont gris-verdàtre, renferment du
mica noir, du feldspath commun et un peu d'anipiiibole,
et leur ressemblance avec les graniU colonnari des Monts
Euganéens les éloigne beaucoup (p. 169) des porphyres du
terrain de transition. La structure globulaire (en sphéroïdes
à couches concentriques ) paroît plutôt appartenir aux for-
mations basaltiques qu'aux véritables trachytes. I,es teintes
pâles dominent dans les trachytes des Cordillères, et les masses
noires de cette roche m'on.t paru en général postérieures aux
masses blanches , grises et rouges. La même différence de
gisement paroit avoir lieu en Hongrie. Les trachytes noirs
prennent quelquefois ( P^ucu- Pichincha près de Quito, sur-
tout à l'arête de Tablahuma. 2556 toises) tout l'aspect du
basalte; mais Folivine y manque toujours, et Ton n'y recon-
noit que de petits cristaux de pyroxène qui pénètrent jusque
dans l'intérieur des cristaux du feldspath vitreux. Dans les
Andes, comme dans l'ancien continent, chaque cône ou
dôme trachytique (les premiers ne paroissent que des dômes
ou cloches percées à leur sommet et couvertes sur leurs
flancs d'éjections ponceuses et scoriliées) présente des roches
entièrement différentes dans leur composition , selon que Pun
des élémens prédomine dans le tissu cristallin. Le mica noir
est le plus commun dans les trachytes du Cotopaxi (entre le
Nevado de Quelendana et le ravin deSuniguaicu , 2265 t.),
volcan qui abonde en même temps en masses vitreuses et en
obsidiennes : l'amphibole domine dans les trachytes souvent
noirs de Pichincha et d'Antisana: le pyroxène dans la région
inférieure et moyenne du Chimbora?o , dont les trachytes
renferment quelquefois des pyrites , du quarz , et deux va-
riétés de feldspath , le vitreux et le commun. L'ancien volcan
de Yana-Urcu, adossé au Chimborazo (du côté du village de
Calpi) , est dépourvu de pyroxène et contient de grands
IND 547
cristaux d'amphibole. Dans les trachytes du Nevado de To-
luca (Mexique) et d'Antisana on observe somment, comme
dans les trachytes du Puy-de-Dôme, des parties huileuses et
scorifiées à cellules lustrées, enchâssées dans des masses com-
pactes et terreuses. Les phonolithes des trachytes sont plus
caractérisés dans le volcan de Pichincha (Pic des Ladrillos et
Guagua-Pichincha), de même qu'à la pente orientale du Clùm-
borazo, prés de Yanacoche (hauteur, aSoo t.). A Antisana
(Machay de San-Simon ) et au nord de la Villa de Ibarra
( Azufralde Cuesaca , plateau de Quito) les trachytes à base de
feldspath compacte , mêlé d'amphibole , renferment du soufre
natif, comme le trachyte du Puy-de-Dôme et des bortls de
la Dordogne (Ramond, Niv. géogn., p. -jS , 86). Il ne faut
pas confondre cette formation de soufre natif avec celles
des solfatares ou cratères éteints, des mandeîstein celluleux
(entre Pâte et Tecosautia au Mexique) et des argiles du ter-
rain basaltique (province de los Pastes). L'épaisseur des cou-
ches de trachytes est telle que sur le plateau de Quito elle
atteint indubitablement et en masses continues (Chimborazo,
Picliincha) 14,000 à 18,000 pieds. Comme très-peu de vol-
cans des Andes ont donné de véritables coulées de laves
lithoïdes, les trachytes y sont presque partout à découvert.
Il n'y a que les conglomérats trachytiques, et des formations
problématiques argileuses (tepetate), dont nous parlerons
bientôt, qui les cachent quelquefois à l'examen des géo-
gnostes.
J'ai trouvé du feldspath commun et laiteux dans les tra-
chytes poreux, légei's et blancs, du Cerro de Santa Polonia
( i552 toises, près deCaxamarca, Andes du Pérou) ; à la cime
du Cofre de Perote au Mexique (le Peua del Nauhcampale-
petl, 2098 toises), dans un trachyte gris-rougecàfre, abondant
en cristaux aciculaircs d'amphibole et très-régulièrement stra-
tifié (N. 28° E. avec 3o° au N. O.) ; au volcan encore actif de
Tunguragua , au sud de Quito (Cuchilla de Guandisava ,
i658 t.), dans des trachytes rouge -de- brique et celluleux ;
enfin , à la base du Chimborazo, près du petit volcan éteint
de Yana-Urcu ( 1700 t.) , dans des trachytes noirs et vitreux.
M. de Buch, qui a examiné avec soin ces dernières roches,
y a même reconnu à la fois des cristaux de feldspath vitreux
348 iiST) .
et de feldspath commun, phénomène que j'ai trouvé répété
dans plusieurs porphj^res de transition du Mexique.
Les petits cristaux acirulaires d'amphibole sont quelquefois
placés comme par files sur plusieurs lignes parallèles, etalfec-
tent tous la même direction (vallée du Cer au Cantal; tra-
chytes gris -blanchâtre de Rioliamba viejo, avec rhombcs de
feldspath décomposé en une terre jaunâtre).
Le mica est beaucoup plus rare dans les tracbytes du
Mexique et des Andes que dans ceux du Siebengebirge , des
Gleichen en Styrie , près de Radkersburg, et de Hongrie :
j'en ai trouvé cependant de belles tables noires hexagones,
tant à la base du volcan de Pichincha (près deJavirac ou du
Panecillo de Quito, 1600 t.), que dans les trachytes semi-
vitreux gris -bleuâtre de Cotopaxi , et dans les trachytes
rouges et poreux du Nevado de Toluca (sommet du Fraile ,
20J2 toises).
Le titane ferrifère ne manque pas dans les trachytes de
Quito et du Mexique ; mais les lames de fer oligiste spécu-
iaire , également communs dans les trachytes et les laves de
l'Italie et de la France, sont assez rares dans les roches vol-
caniques fendillées de l'Amérique équinoxiaie.
En considérant les trachytes des Cordillères sous un point
de vue général, il n'y a pas de doute qu'on ne les trouve
caractérisés par une absence de quarz en cristaux et en grains.
Ce caractère , comme nous l'avons vu plus haut, s'étend même
sur la plupart des porphyres métallifères de l'Amérique équi-
noxiaie (§§. 20 et 24), qui semblent liés aux tracliytes; mais
l'une et l'autre de ces roches offrent des exceptions frappantes
à une loi que l'on auroit pu croire générale. Ces exceptions
prouvent de nouveau que le géognoste ne doit pas attacher
une grande importance à la présence ou à l'absence de cer-
taines substances disséminées dans les roches. La plus grande
masse du Chimborazo est formée par un trachyte semi-vitreux,
vert-brunâtre (à base cireuse, comme de résinite), dépourvu
d'amphibole , abondant en pyroxène, très-compacte, tabu-
laire , ou divisé en colonnes minces , irrégulières et tétraèdres.
Ce trachyte renferme , comme couche intercalée , un banc
rouge pourpré, celluleux, à cristaux de feldspath à peine
visibles, et parsemé de nodules alongés de quarz blanc. Plus
IND 349
haut (à 3o]6 toises de hauteur, où nous vjmes descendre le
mercure dans le baromètre à i3 pouces 1 1 /,„ lignes), le
quarz disparoit, et Taréte de rocher sur laquelle nous mar-
châmes étoit couverte d'une traînée de masses rouges, hui-
leuses, dcsagrëgces et assez seuiblables aux amygdaloides de
la vallée de Mexico. Ces masses, les plus élevées de celles
qu'on a recueillies jusqu'ici à la surface de la terre, étoient
rangées en file, et pourroient fiaire croire à l'exisfence d'une
petite bouche près du sommet du Chimborazo, bouche qui
s'est vraisemblablement refermée , comme celles de l'Epomeo,
à l'ile d'Ischia , et de Guambalo et d'Igualata, entre Mocha
et Penipe (province de Quito). Sur le plateau central du
Mexique les trachytes de Lira enchâssent à la fois du quarz
laiteux, de l'obsidienne et de l'hyalithe. M. Beudant a aussi
reconnu récemment des cristaux de quarz dans les trachytes
porphyriques (à globules vitro-lithoïdes), dans les trachytes
meulières et les perlites de Hongrie ( Voj. en Hongrie, T. III,
p. 346, 565, 5ig, 575). Le même phénomène se trouve ré-
pété dans quelques trachytes de l'Auvergne ( Puy Baladou ;
Cantal, Col de Caboe), des Dardanelles et du Kamtschatka.
Lorsqu'on se rappelle qu'il y a, d'après l'analyse deM.Vau-
quelin, 92 pour cent de silice dans les trachytes duSarcouy,
que tous les basaltes et les laves en abondent, il faut plutôt
être surpris que cette substance disséminée dans des silicates
de fer et d'alumine n'ait pu se réunir plus souvent sans mé-
lange en cristaux ou grains de quarz pur. Ce n'est que la
difficulté opposée à la concentration de la silice autour d'un
noyau qui caractérise une grande partie des roches volcani-
ques. (Voyez plus haut, p. 164.)
Le pyroxène a été regardé jusqu'ici comme extrêmement
rare dans les trachytes d'Europe. La couche de pyroxène
queM. Weissa découverte entre Muret etThiezac (au-dessus
d'Aurillac en Auvergne; Buch, iiber Trapp-Porphyr, p. i55),
semble plutôt appartenir à une formation basaltique super-
posée au trachyte. Mais en Hongrie (Beudant^ T. 111, p. 5i-j,
619), comme dans la Cordillère des Andes, le pyroxène se
trouve assez souvent dans les trachytes porphyroïdes : il y
remplace l'amphibole (Chimborazo, ïunguragua, base du
volcan de Pasto, région moyenne du volcan de Puracè , près
35o ' IND
de Popayan). L'espèce de répulsion qu'on croit observe?
entre le pyroxène et ramjihibole , est d'autant plus frappante
que dans le terrain basaltique res deux substances se trouvent
assez souvent réunies (Rhonegebirge en Allemagne). Les tra-
cli3rtes du Mexique m'ont paru assez généralement dépourvus
de pyroxène.
Le grenat, que nous avons déjà vu dans les porphyres de
transition du Potosi et d'Izmiquilpan , reparoit, quoique
très-rarement, dans les trachytes des Andes: j'en ai trouvé
dans le volcan de Yana-Urcu (trachyte noir) ; M. Beudant en
a recueilli dans les perlites iithoïdes d'Hongrie.
Je doute aujourd'hui de l'existence de l'olivine dans le
terrain trachytique des Cordillères : ce que j'avois pris pour
cette substance, étoient des grains de pyroxène d'une teinte
très-peu foncée. L'olivine appartient peut-être exclusivement
aux terrains basaltiques et à quelques laves lithoïdes. M. de
Buch l'a reconnue parmi les éjections du volcan de Jorullo,
qui forment un tissu à petit grain d'olivine, de feldspath
vitreux et de mica jaune. Il n'y a aucune trace d'amphibole
ni de pyroxène, quoique ce volcan se soit fait jour à travers
un terrain de trachyte. M. Beudant doute aussi de la pré-
sence de l'olivine dans les trachytes de Hongrie, même dans
ceux du groupe de Vihorlet. Lorsque des chimistes se seront
occupés plus spécialement des trachytes des Cordillères, qui
offrent une si grande variété de roches, on y découvrira pro-
bablement aussi de l'ijcide muriatique (comme au Sarcouy
en Auvergne) et du mica commun mélangé de tifaue oxidé ,
comme au Vésuve. (Soret, Sur les axes de double réfraction ,
1821 , p. 69.)
Les observations que l'on peut faire sur le gisement des
ro.ches volcaniques, offrent plus d'intérêt encore que Fétude
de leur composition. Les trachytes du volcan éteint de
Tolima (§• 7 ) semblent sortir d'un granité postérieur au gneis
primitif. J'ai vu paroitre (Alto de! Roble) le micaschiste
(p. 129) sous les trachytes des volcans encore brûlans de
Popayan. Les granités à travers lesquels les dômes trachyti-
ques du Baraguan et de Herveo (Ervè) se sont fait jour, sont
peut-être d'un âge plus récent que le micaschiste. L'obser-
vation de gisement la plus importante que j'aie faite dans
• IND , 35i
l'immense plateau entièrement trachytique de Quito (espèce
de volcan polystouie ) , a rapport aux trachytes de Tungu-
ragua. Après avoir cherché en vain , pendant plus de six
mois, quelque trace de roches vulgairement appelées d'ori-
gine neptunienne, j'ai trouvé, près du pont de cordage de
Penipe (Rio Puela, 1240 toises), sous les trachytes noirs semi-
vitreux, souvent colonnaires, du cône encore enflammé de
Tunguragua , un micaschiste verdàtre , à surlace striée et
soyeuse , renfermant des grenats et ressemblant aux mica-
schistes du terrain primitif (voyez plus haut, p. 119). Cette
roche repose sur un granité syénitique, composé de beau-
coup de feldspath verdàtre lamelleux et à gros grains, de
peu dequarz blanc, de tables hexagones de mica noir, et de
quelques cristaux effilés d'amphibole. La cassure du granité
offre un aspect stcatitcux , et prend, au souffle, une teinte
vert-d'asperge. Ces syénites et ces micaschistes avec grenats
rappellent ceux que MM. de Buch et Escolar ont découverts
dans l'archipel des Canaries, en blocs, au milieu des ter-
rains trachytiques de Fortavenfura et de Palma. (Humboldt,
Rel. Jiist. , T. I , p. 640.) Il est très-certain que les roches de
Penipe , qui n'appartiennent peut-être qu'au terrain de tran-
sition, sont en place; qu'elles viennent au jour sous un véri-
table trachyte grenu, et non sous une roche fragmentaire,
sous un conglomérat trachytique , comme c'est le cas à Vie,
à Aurillac et à S. Sigismond (Buch, Trapp-Porphyr, p. 141) :
mais, sans percer une galerie dans le flanc de Tunguragua , il
est impossible de décider s'il y a superposition , si le trachyte
recouvre le micaschiste sur une grande étendue, comme la
craie recouvre le calcaire du Jura, ou si le trachyte, en
brisant les roches plus anciennes et en s'élevant perpendi-
culairement, s'est simplement incliné vers les bords sur le
micaschiste adjacent. Autour du cône trachytique de Cayambe
on trouve aussi du micaschiste avecépidote, et un granité qui
abonde en mica brun et jaune. Plus au nord, dans les Cor-
dillères du Popayan , en montant au village de Piiracè, j'ai
vu, sous le grand volcan de ce nom, près de Santa-Barbara ,
le trachyte semi-vitreux appuyé sur une syénite porphyrique
(avec feldspath commun) : cette syénite est bien visible-
ment superposée sur un granité de transition abondant ea
352 . IND
mica (p. 167). Au pied des volcans mexicains encore actifs-
(le Popocatepetl et le Jorullo), nous n'avons pas été assez
heureux, M. Bonpland et moi, de découvrir des roches de
granité, de micaschiste ou de syénite en place; mais nous
avons vu enchâssées, au milieu des laves lithoïdes noires et
basaltiques de Jorullo, des fragmens anguleux blancs ou
blanc-verdàtre de syénite, composés de peu d'amphibole et
de beaucoup de feldspath lamelleux. Là où ces masses ont
été crevassées par la chaleur , le feldspath est devenu filan-
dreux, de sorte que les bords de la fente sont réunis dans
quelques endroits par les fibres alongées de la masse. Dans
l'Amérique du Sud, entre Almaguer et Popayan , au pied
du Cerro Broncaso , j'ai trouvé de véritables fragmens de
gneis compactes dans un trachyte abondant en pyroxène
(p. 171). Ces phénomènes, auxquels je pourrois en ajouter
beaucoup d'autres, prouvent que les formations trachytiques
sont sorties au-dessous de la croûte granitique du globe.
Les obsidiennes dont nous avons rapporté, M. Sonncsclunidt
et moi, de si curieuses variétés en Europe, m'ont paru ap-
partenir, dans les Cordillères , à deux sections bien distinctes
du terrain trachytique, aux véritables trachytes noirs (Cerro
del Quinche, au nord de Quito) et blancs (Cerro de las
Novajas cuOyamel, au nord-est de Mexico), et à la perlite
(Cinapecuaro , entre Mexico et Valladolid). 11 faut distin-
guer de ces deux formations les obsidiennes des courans de
laves modernes (Pic de Ténériffe), formant la partie supé-
rieure de ces courans. Les fragmens de roches vomis par le
cratère deCotopaxi, et remplis de rognons d'obsidienne, pa-
roissent arrachés aux parois du cratère ; mais les morceaux
d'obsidiennelancéspar le volcan de Sotara, près de Popayan,
à des distances de plusieurs lieues, méritent plus d'attention.
Les champs de los Serillos , des Uvales et de Palace, en sont
couverts. On les trouve disséminés comme des fragmens de
silex; ils reposent sur des roches basaltiques, auxquelles ce-
pendant ils sont entièrement étrangers. Ces obsidiennes de
Popayan ont souvent la forme de larmes ou même de boules
à surface tuberculeuse : elles offrent, ce que je n'ai vu nulle
part ailleurs, toutes les nuances de couleurs, depuis le noir
foncé, jusqu'à celle d'un verre artificiel entièrement iuco-
• IND • 353
lore. Elles sont quelquefois mêlées de fragmens d'émaux
lancés par le même volcan de Sotara , et que l'on seroit
tenté de prendre pour de la porcelaine de Réaumur. La pâte
des trachytes semi -vitreux gris- bleuâtre et à cassure con-
choïde (volcan de Puracè , près Popayan , dans la plaine
du Cascajal, à 2274 toises de hauteur), passe sans doute
quelquefois à l'obsidienne; mais les grandes masses de véri-
tables obsidiennes, disposées par couches ou par rognons à
contours bien prononcés, se trouvent dans d'autres variétés
de trachytes. Nous avons déjà décrit plus haut les roches du
Cerro de las Navajas (§.23), où se trouvent les obsidiennes
chatoyantes, striées et argentées (plateadas) , généralement
disséminées par fragmens, mais formant quelquefois aussi des
couches dans un trachyte blanc. Des couches analogues , mais
d'une épaisseur de 14 à 16 pouces, sont intercalées aux tra-
chytes noirs pyroxéniques du Cerro del Quinchè (plateau de
Quito). Elles offrent des obsidiennes noir-verdàtre et vei-
nées de bandes rouge-de-brique. Près de l'Hacienda de Lira,
au nord de Queretaro (plateau du Mexique, gyS toises),
j'ai trouvé dans des trachytes vert-d'olive et à base de réti-
nite (trachytes qui renferment à la fois du feldspath vitreux
et des grains de quarz disséminés) , des couches d'obsidienne
noire de trois pouces d'épaisseur. Sur d'autres points du
plateau de la Nouvelle -Espagne , à Cinapecuaro, au pied
du Cerro Ucareo (dans le chemin de Valladolid de Mechoa-
can à Toluca , hauteur 968 toises), et entre Ojo del agua
et El Pinal (dans le chemin de la Puebla de los Angeles à
Perote, hauteur 1180 toises), les obsidiennes se trouvent par
rognons dans un perlite (perlstein) à éclat émaillé, composé de
petits globules semi-vitreux blanc-grisàtrc. Je n'y ai pas vu
de mica, mais des infiltrations d'hyalithe et quelques petits
cristaux de feldspath filandreux, presque ponceux. A Cina-
pecuaro, le perlite forme de petites collines coniques, en-
tourées de pics de basaltes et de dômes trachytiques. La
roche est très- régulièrement stratifiée (N. 22" E., incl.de
8tf° au Nord-ouest) : on la prendroit de loin pour un grès
schisteux. L'obsidienne noire, vert-noiràtre et vert-grisàtre,
s'y trouve par nids ou rognons de deux à cinq pouces d'é-
paisseur, de softe que, par la juxtaposition de ces rognons,
23. ■ 23
354 ' IND
le perlite paroît quelquefois enchâssé dans une véritable
roche d'obsidienne. Dans les plaines orientales du Mexique,
entre Acaxete, Ojo del agua et El Final, l'obsidienne est
moins abondante, mais souvent rubanée comme du jaspe.
Le periite y renferme beaucoup de tables hexagones de mica
noir ; il est souvent fibreux et passe à ce que M. Beudant
appelle (ï. III, p. 364, 5 89 ) perZ/^e po;iceu.r.
En général , les obsidiennes du Mexique et des Andes
de Quito offrent, et souvent sur une plus grande échelle,
les mêmes phénomènes de composition que l'on observe dans
ceux de Lipari et de Volcano , et que quelques géognostes
ont attribués jadis à une dévitrijication (glaslinisalion). On y
trouve enchâssés de petits cristaux de feldspath vitreux ; des
masses polyèdres de perlstein remplissant entièrement les
vacuoles dans lesquelles on les suppose formés; des agrégations
de grains cendrés, d'un aspect terreux et distribués par zones
parallèles souvent interrompues; enfin, des fragmens de tra-
chyte brun-rougeâtre, à demi- fondus, placés tous d'un même
côté, à l'extrémité de A^acuoles très - alongées et parallèles
entre elles. M. de Buch , qui a fait un examen particulier
des substances volcaniques recueillies dans la région équi-
noxiale du nouveau monde, observe que les masses de per-
lites, tantôt sphéroïdales, tantôt octogones dans leur coupe,
ont constamment au centre un cristal très-petit de feldspath
vitreux ou d'amphibole, et que la position de ce cristal a
déterminé la forme de tout le système. (Buch , dans les Sc/!r//fera.
Nàtiirf. Freunde, 1809, p. 3oi. Humboldt, Rel. hist., T. I,
p. 161.) M. Beiidant a trouvé des grenats rouges dans les
perlitesrétinitiques de Hongrie (Vissegrad), qui ressemblent
au pechstein-porphjyr du terrain de transition : j'en ai vu
d'également rouges au sommet du volcan de Puracè , dans un
trachyte bleuâtre, semi- vitreux, à cassure conchoïde, dé-
pourvu de mica et d'amphibole, mais enchâssant, outre le
pyroxène et le feldspath vitreux, des points cendrés sembla-
bles à ceux que l'on remarque dans les obsidiennes de Lipari
et du Cerro de las Navajas. La présence des grenats dans des
roches généralement mêlées d'amphibole reçoit quelque im-
portance par les observations ingénieuses de M. Berzelins
{Nouy. Sjsième de minéralogie;, p. 001) sur les aniultés chi-
IND 355
iniques du grenat et de l'amphibole renfermant des silicates
d'alumine et d'oxidule de fer. C'est dans les obsidiennes que
j'ai rapportées de la Nouvelle-Espagne, que M. Collet-Des-
cotils a trouvé le premier exemple de la présence simultanée
de deux alcalis dans une même substance minérale. Ce
phénomène a été observé depuis dans quelques variétés de
feldspath, de Avernerite , desodalite, de chabasie et d'éléo-
lithe (pierre grasse de Hauy). J'ai observé que beaucoup
d'obsidiennes noires et rouges du Quinchè et du Cerro de
las Navajas ont des pôles magnétiques, fout comme les por-
phyres (de transition P , p. lyS), de Voisaco et comme un
beau groupe de trachytes colonnaires du Chimborazo (hau-
teur 2 1 GO toises). Ces trachytes étoient gris-verdàtre et en-
chàssoient quelques cristaux de feldspath lamelleux et laiteux.
La dernière assise du terrain trachytique est formée par
des conglomérats ou débris agglutinés et remaniés par les
eaux. Ces conglomérats couvrent d'immenses surfaces, non
au pied des Cordillères, maissur leurs flancs et sur des plateaux
de 1 200 à 1 6oo toises de hauteur. Dans une région où presque
tous les volcans actifs s'élèvent au-dessus de la limite des neiges
perpétuelles, et oii les eaux, lentement infiltrées dans des
cavernes, et les neiges qui se fondent au moment de l'érup-
tion , causent d'affreux ravages, l'étendue et l'épaisseur des
terrains de transport et des roches fragmentaires régénérées
doit nécessairement être en rapport avec les forces qui
amènent encore de nos jours ces masses désagrégées. Les
conglomérats sont tantôt friables et tuffacés (base de Coto-
paxi et de l'AItar), tantôt compactes et endurcies comme
le grès (base de Pichincha). Les ponces en masses pulvé-
rulentes et en blocs de 26 à 3o pieds de longueur forment
la partie la plus intéressante de ces conglomérats du terrain
trachytique. Nous ferons observer , à cette occasion , que le
mot pierre-ponce est très-vague en minéralogie : il ne désigne
pas un fossile simple, comme le font les dénominations de cal-
céioine ou de pyroxène; il indique plutôt un certain état ^
une forme capillaire ou filandreuse sous laquelle se présen-
tent des substances diverses, rejetées par les volcans. La
nature de ces substances est aussi différente que l'épaisseur,
la ténacité , la flexibilité et le parallélisme ou la direction
556 IND
de leurs fibres (Huniboldt, Relat. hist. , T. I, p. 162). II
exisfe des ponces noires d'une contexture J)ulleuse, à fibres
croisées; on y reconnoît beaucoup de pyroxène, et elles
paroissent dues à des laves basaltiques scorifiées (plaine qui
entoure le cratère de Rucu-Pichincha ; tuff du Pausilippe
près de Najjles). Quelques volcans rrjettent des trachytes
blancs, con?posé5 de feldspath compacte, de beaucoup d'am-
phibole, de très-peu de mica, et dont une partie est devenue
fibreuse (Rucu-Pichincha et Cotopaxi , sur le plateau de
Quito; volcan de Cumbal près Chilanquer , dans le plateau
de los Pastos; Sotara près dcPopajan; Popocatepetl à l'est
de Mexico). Souvent, dans des trachytes assez compactes et
d'un tissu non fibreux, les fragmens rhomboidaux du feld-
spath deviennent creux et conmie filandreux (plateau de
Quito et du Mexique). Quelques variétés de perlstein offrent
une texture fibreuse (plaine de la Nouvelle-Espagne , entre la
Venta del Ojo del agua et la Venta de Soto ; vallée de Gran
et de Glashiitte, en Hongrie). Enfin, des obsidiennes noir-
verdàtre ou gris de fumée alterneiit avec des couchts de
pierre ponce à fibres asbestoïdes blanc -verdàtre , rarement
parallèles entre elles, quelquefois cependant perpendicu-
laires aux couches de Pobsidienne et semblables à une écume
filamenteuse de Acrre ( Plaine des Genêts, au Pic deTénériffe).
Ces dernières variétés ont fait naître chez quelques géologues
l'idée que toutes les ponces étoient dues à la fusion et au
gonflement des laves vitreuses; on confondoit les obsidiennes
ponceuses (asclérines de M. Cordier) avec les véritables
ponces à libres parallèles (pumites légères de M. Cordier),
caractérisées par de grandes tables hexagones de mica, et
probablement dues à un mode d'action particulier que le feu
des volcans exerce sur les trachytes blancs (granités des
Isles Ponces de Dolomieu). Un savant qui a profondément
étudié les rocliCS trachytiques de l'Europe, a conliruié ces
aperçus. «La j)once, dit M. Beudant, dans Fétat actuel de
« la science , ne peut pas même être regardée comme une
« espèce distincte de roche : c'est un état celluleux et fila-
« nienteux, sous lequel plusieurs roches des terrains trachy-
« tiques et volcaniques sont susceptibles de se présenter. *
{Voyage minéral., T. III , p. ob^.)
IND . 357
Les immenses carrières souterraines de pierre -ponce ex-
ploitées au pied du Cotopaxi, entre la ville de Tacunga
( Llactacunga) et le village indien de San-Felipe (plateau de
Çuito , hauteur 1482 toises), uront paru les plus instructives
pour décider la question du gisement de cette substance dans
■un terrain de rapport. Elles avoient déjà Tait naître chez
Bouguer (Figure de la terre, p. LXVIII), dans un temps où
la géognosie n'existoit presque pas, plusieurs questions inté-
ressantes sur l'origine des ponces. Les petites collines de
Guapulo et de Zumbalica, qui s'élèvent jusqu'à 80 toises de
hauteur, paroissent au premier abord entièrement formées
d'une roche blanclie fibreuse, à couches horizontales et à
fibres perpendiculaires : on pourroit en tirer des blocs dé-
pourvus de fentes de plus de 60 pieds de longueur. En
examinant ces prétendues couches de plus près, on voit que
ce sont des masses de quatre pouces à trois pieds d'épais-
seur , enchâssées dans une terre blanche argileuse. Elles
ne forment pas, à proprement parler, un conglomérat; les
blocs ne sont que déposés dans l'argile , et recouverts de
fragmens menus de ponces (de 8 à g toises d'épaisseur) qui
sont divisés en bancs horizontaux. Ces blocs de ponces
blanches, quelquefois bleuâtres, sont arrondis vers les bords;
ils renferment du mica jaune et noir, des cristaux effilés
d'amphibole (non de pyroxène) et un peu de feldspath vi-
treux. J'incline à croire que les collines de Zumbalica, qui
ressemblent beaucoup à celles de Sirok en Hongrie ( Beudant,
Vojy. ruiner., T. H , p. 22) , ne sont pas les parois intérieures
d'un ancien volcan écroulé: les grands blocs, qui ressemblent
à des couches fracturées, sont gécgnostiquement liés aux petits
fragmens des assises supérieures; les uns et les autres ont
sans doute été déposés par les eaux, quoique dans des cir-
constances bien diflerentes de celles qui accompagnent les
éruptions actuelles de Cotopaxi. L'aspect de tout le pays
d'alentour nous prouve l'ancienne sphère d'activité de ce
volcan, qui a une hauteur de 2962 toises et un volume énorme.
A l'ouest du volcan , depuis l'Alto de Chisinche jusqu'à
Tacunga, sur plus de quarante lieues carrées, tout le sol est
couvert de pierre -ponce et de trachytes scoritiés.
Il est bien remarquable que le mode d'action volcanique
558 , IND
propre à produire des ponces soit restreint, pour ainsi dire,
à un certain noiiibre de montagnes iguivomes. L'Altar ou
Capac-Urcu . anciennement plus élevé que leChimborazo, est
placé dans la plaine de Tapia , vis-à-\is du volcan encore
actif de 1 nnguragua. Le premier a vomi une immense quan-
tité de ponces, le second n'en produit pas du tout. Cette
même différence existe entre les deux volcans voisins de la
ville dePopayan, le Puracè et le Sotarà. Celui-ci a rejeté
à la fois des obsidiennes et des ponces, tout comme le
volcan de Cotopaxi. A Rucu-Pichincha , où je suis parvenu
jusqu'à une des tours trachytiques (hauteur 2491 toises)
qui dominent l'immense cratère du volcan, j'ai trouvé beau-
coup de ponces , et pas d'obsidiennes : aussi les ponces de
Sotarà et de Cotopaxi, qui renferment, outre le feldspath
vitreux et un peu d'amphibole, de grandes tables hexagones
de mica , ne sont certainement pas dues à l'obsidienne ; elles
diffèrent entièrenjent de ces ponces vitreuses et capillaires
que j'ai vues couvrir la pente du Pic de Ténériffe.
Les superbes opales de Zimapan, au Mexique, ne parois-
sent pas appartenir, comme celles de Hongrie, aux conglo-
mérats trachytiques, mais à des trachytes porphyriques qui
renferment des globules rayonnes de perlite gris -bleuâtre.
(§.23.)
II. Formations basaltiques, comprenant les basaltes avec
divine, pyroxène et un peu d'amphibole; \es phonolithes du
"basalte, les dolériles , Vamygdaloïde celliileuse , les argiles avec
grenat s -pyr opes , et les roches fragmentaires basaltiques (con-
glomérats et scories). Le terrain basaltique se lie d'un côté
aux trachytes , dans lesquels le pyroxène devient progressi-
vement plus abondant que le feldspath (Cordier, sur les
masses des Roches volcaniques , p. 26) , en partie et, je crois,
d'une manière plus intime, aux laves des volcans qui ont
coulé sous forme de courans. Les phonolithes appartiennent
à la fois au terrain trachytique et au terrain basaltique.
Je doute qu'un véritable basalte avec olivine se trouve in-
tercalé comme couche subordonnée au trachyte. La phono-
lithe, qui forme de ces couches dans les trachytes des Cor-
dillères et de l'Auvergne, n'est que superposée aux basaltes.
IND •> 359
Lorsqu'elle ne s'élève pas en pics isolés dans les plaines, elle
couronne généralement les collines basaltiques. L'amphibole
et le pyroxène se trouvent disséminés dans les trachytes et
les basaltes ; la première de ces substances appartient peut-
être même plus particulièrement aux formations trachytiques.
L'olivine caractérise les formations basaltiques, les laves très-
anciennes de l'Europe et les laves très-modernes (courant de
175g) du volcan de Jorullo au Mexique.
Lorsqu'on ne considère que sous le rapport du volume les
groupes de roches trachytiques et basaltiques répandues dans
les deux continens, on observe que les grandes masses de ces
groupes se trouvent très-éloignées les unes des autres. Les pays
qui abondent le plus en basaltes (la Bohème, la Hesse) n'ont
pas de trachytes, et les Cordillères des Andes, trachytiques
sur d'immenses étendues, sontsouvent entièrementdépourvues
de basaltes. Ni le Chimborazo, ni le Cotopaxi , ni l'Antisana,
ni le Pichincha, n'offrent de véritables roches basaltiques;
tandis que ces roches , caractérisées par l'olivine , séparées
en belles colonnes de trois pieds d'épaisseur, se rencontrent
sur le même plateau de Quito , mais loin de ces volcans à
l'est de Guallabamba , dans la vallée dii Rio Pisque. Près de
Popayan les basaltes ne recouvrent pas les dômes trachytiques
de Sotarà et de Furacè ; ils se trouvent isolés sur la rive oc-
cidentale du Cauca , dans les plaines de Julumito. Au Mexi-
que , Je grand terrain basaltique du Valle de Santiago (entre
Valladolid et Cuanaxuato), est très-éloigné des volcans tra-
chitiques du Popocatepetl et de FOrizava. Tous ces basaltes
que nous venons de nommer (Guallabamba, Julumito et
Santiago) reposent probablement aussi, à de grandes pro-
fondeurs, sur un sol trachytique; mais nous ne considérons
ici que l'isolement, la séparation des montagnes de basaltes
et de trachytes.
En général, dans les Cordillères du Mexique, de la Nou-
velle-Grenade, de Quito et du Pérou , les formations trachy-
tiques remportent, pour la masse, de beaucoup sur les for-
mations basaltiques; ces dernières peuvent même être consi-
dérées comme très-rares, en les comparant à celles qui tra-
versent FAllemagne de l'est à l'ouest, entre les parallèles de
5o° et de 5i°. Cette même prépondérance du terrain trachy-
56o * IND
tique sur le terrain basaltique s'observe en Hongrie. «Partout,
« dif M. Beuflant avec beaucoup de justesse, partout où les
« masses de tracbyte se sont développées sur une grande
« échelle, on ne trouve que des lau)beaux peu considérables
« de basalte, et réciproquement , dans les lieux où le ter-
« rain basaltique est extrêmement développé, il n'existe que
« peu ou même point du tout de Iriichyte. • {Voyage miner,
en Hongrie, t. III , p. 600, 687 — 589.) On diroit que ces
deux terrains se repoussent ; et comme les cratères des vol-
cans encore actifs se sont constamment ouverts dans les tra-
chytes, il ne faut pas être surpris que ces volcans et leurs
laves restent aussi éloignés des basaltes anciens. (Humboldt,
Rel. histor. , t. J, p. 1 64. )
Malgré cet antagonisme, ou plutôt cette inégalité de dé-
veloppement , que nous avons déjà remarqué dans les gra-
nités et les gneis- micaschistes , dans les calcaires et les schis-
tes de transition, dans le grès rouge et le zechsfein ou cal-
caire alpin, les trachytes et les basaltes offrent sur d'autres
poinîs du globe les aflinités géognostiques les plus intimes.
Si les grandes masses basaltiques (Hesse; Forez, Vélay et Vi-
varais; Ecosse; Veszprim et lac Balaton) restent géographi-
quement éloignées des grandes masses de trachytes (Sieben-
gebirge ; Auvergne ; montagnes de Matra , Vihorlet et To-
tay ; Cordillère occidentale des Andes de Quito), des lam-
beaux du terrain basaltique ;ie s'en trouvent pas moins pour
cela superposés à ces mêmes trachytes. (Buch , Briefe aus Au-
vergne, p. 28y; Id. , Trapp-Porphjr , p. 107 — 141. Ramond .
JViV. géologique , p. iS, 60 — 73.) Les Monts Euganéens (ba-
saltes du Monte Venda près des cônes trachytiques de Monte
Pradio, Monte Ortone et Monte Rosso) , les penchans des
montagnes qui constituent le groupe du Mont Dore, les
environs de Guchilaque au Mexique (Cerro del Marques,
lS3j toises) et de Xalapa (Cerro de Macultepec , 788 toises),
présentent des exemples frappans de cette réunion des deux
terrains feldspathiques et pyroxéniques. Tantôt ce sont des
buttes de basalte prismatique qui sortent du terrain de tra-
chyle ; tantôt ce sont de larges coulées de basaltes, souvent
interrompues et formant des gradins et des plateaux, qui
sillonnent et recouvrent ce terrain.
IND 36i
Il résuKe de ces oliservations, que les plus grandes masses
de basaltes gisent immédiatement dans les formations pri-
mitives intermédiaires et secondaires , tandis que d'autres
masses beaucoup moins considérables, d'un tissu entièrement
identique, et présentant le plus souvent l'apparence d'an-
ciennes coulées de laves lithoïdes, sont superposées au ter-
rain trachytique. Les uns et les autres enveloppent quelque-
fois des fragmens de granile, de gneis ou d'une syénite très-
abondante en feldspath. Ce même phénomène, comme nous
l'avons vu tantôt, s'observe (volcan de Jorullo) dans des
laves récentes et d'une époque connue; mais ces indices in-
contestables d'une fhiidité ignée ne nous autorisent pas à ad-
mettre que les montagnes coniques de basaltes, dispersées
dans des plaines ou couronnant la crête des montagnes pri-
mitives, se soient tontes formées comme les nappes de ba-
salte qui couvrent les trachytes, ou comme les laves lithoïdes
basaltiques (avec olivine) de quelques volcans très-modernes.
Le mélange des matières qui constituent les roches volcani-
ques se fait dans l'intérieur du globe, et probablement à
d'immenses profondeurs. Des matières analogues et compo-
sées des mêmes élémens peuvent venir an jour (paroître
à la surface du globe) par des voies très-différentes, tantôt
par soulèvement (en cloches, en dômes ou en buttes coni-
ques), tantôt par des crevasses longitudinales, formées dans
la croûte du globe , tantôt par des ouvertures circulaires au
sommet d'une montagne. La géognosie des volcans distingue
ces modes de formations, et si elle s'oppose à confondre sous
le nom de laves toutes les roches des terrains trachytiques
et basaltiques, c'est parce qu'elle se refuse à admettre que
les dômes du Puy de Cliersou, du grand Sarcouy et du Chim-
borazo , de même que toutes les montagnes coniques de ba-
saltes, soient des portions de courans de laves. Des volcans,
en partie très-modernes, ont jeté des laves feldspathiques
(Ischia, Solfatare de Pouzzole) et pyroxéniqnes avec olivine
(Jorullo), qui ressemblent aux trachytes et aux basaltes les
plus anciens. Souvent des masses volcaniques (laves feldspa-
thiques et pyroxéniques ; trachytes ; basaltes en cônes isolés),
considérées minéralogiquement , sont les mêmes; on peut
supposer que les circonstances dans lesquelles elles ont été
062 ITXD
produites dans l'intérieur du glol)e , différoient très- peu ;
mais, ce qui les éloigne géognostiquement les unes des autres,
c'est la différence marquante dans le mode de leur apparition
à la surface du sol.
Parmi le grand nombre d'observations curieuses que pré-
sentent les environs du nouveau vokvin de Jorullo au Mexique,
aucune ne me paroit plus importante et plus inattendue que
celles qui concernent la double origine des masses basalti-
ques. On y voit à la fois de petits cônes de basaltes, composés
de boules à couches concentriques, et un promontoire de
laves basaltiques, lithoïdes et compactes dans l'intérieur,
spongieuses à la surface. Ce courant de laves est une masse
noire à très-petits grains, renfermant, non de l'amphibole
ou du pyroxène, mais indubitablement de l'olivine (péri-
dote granuliforme de Haii)^) et de petits cristaux de feldspath
vitreux. M. de Buch a reconnu , dans des fragmens que j'ai
rapportés, outre l'olivine disséminée (vert d'olive clair, con-
choide et à pièces séparées grenues), quelques tables hexa-
gones de mica jaune de laiton. C'est dans ces laves que sont
empâtés les fragmens anguleux et crevassés de syénite grani-
tique dont j"ai parlé plusieurs fois; elles tirent probablement
leur origine d'un terrain de transition placé sous le trachyte.
Des morceaux extrêmement petits de trachyte grisâtre, avec
feldspath vitreux et cristaux effilés d'amphibole , que nous
avons été assez heureux de trouver sur le bord du cratère
au milieu des scories, prouvent même que l'éruption a agi
à la fois à travers la syénite et le trachyte superposé. Les
laves s'élèvent jusqu'à 678 pieds d'épaisseur; et comme elles
se sont épanchées non latéralement , mais du cratère du
volcan actuel, c'est en suivant leur courant vers le S. S. E.
que nous avons pu , M. Bonpiand et moi, pénétrer, non
sans quelque danger . dans l'intérieur du cratère encore
brûlant pour y recueillir de l'air. Il ne faut pas confondre
avec ce courant de laves lithoïdes basaltiques, qui ne sont
pas des scories entassées comme au Monte Novo de Pouzzole ,
les basaltes en boules (Kugelbasalt) qui composent les petits
cônes appelés par les indigènes /ours (hornitos), à cause
de leur forme, et parce qu'ils dégagent par des crevasses
des filets de vapeurs aqueuses , mêlées d'acides sulfureux. 11
IND 363
ne peut rester aucun doute, même à l'observateur le moins
accoutumé à l'aspect de terrains bouleversés par le feu des
volcans, que tout le sol du Mal-pais, qni a pour le moins
1,800.000 toises carrées, n'ait été soulevé. Là où ce terrain
soulevé est contigu à la plaine des Playas de JoruUo , qui
n'a éprouvé aucun changement et dont il a fait partie jadis,
il y a (à l'est de San-Isidoro) un saut brusque de vingt-
cinq à trente pieds de hauteur perpendiculaire. Les couches
noirâtres et argileuses de Mal-pais y paroisseiit comme frac-
turées, et offrent, dans une coupe dirigée du N. E. au
S. O. , des fentes de stratification horizontales et ondulées.
Après avoir passé ce saut ou gradin, on s'élève, sur un
terrain bombé en forme de vessie , vers la crevasse sur la-
quelle sont sortis les grands volcans, dont un seul , celui du
milieu {EL volcan grande de Jorullo) , est encore enflammé. La
convexité de ce terrain est, dans quelques endroits, de 78,
en d'autres de go toises; c'est-à-dire que le pied du grand
volcan , ou plutôt la portion centrale de la plaine du Mal-
pais, où s'élève brusquement (près de l'ancienne Hacienda
de San-Pedro de Jorullo) le Grand Volcan, est à peu près
de 5 10 pieds plus élevé que le bord du Mal-pais près du
premier saut ou gradin. Toute cette pente du sol bombé est si
douce , qu'elle peut échapper à l'attention de ceux qui ne sont
pas pourvus d'instrumens propres à la mesurer. C'est, comme
disent très-bien les indigènes, un terrain creux, une tierra
hueca. Cette opinion est confirmée par le bruit que fait un
cheval en marchant , par la fréquence des crevasses , par
des affaissemens partiels , et par l'engouffrement des rivières
de Cuitimba et de San-Pedro , qui se perdent à Test du
volcan et reparoissent au jour, comme des eaux thermales
de 62° cent., au bord occidental du Mal-pais. Ce sont les
bancs d'argile noire ou brun-jaunâtre qui ont été soulevés
eux-mêmes : la surface du sol n'est couverte que de quel-
ques cendres volcaniques, et aucun entassement de scories
ou de déjections sorties d'un cratère n'a causé la convexilé
du Mal-pais. Sur ce terrain soulevé (Sept. lySg) sont sortis
plusieurs milliers de petits cônes ou buttes basaltiques à
sommets très-convexes {les fours ou hornitos). Ils sont tous
isolés et disséminés , de manière que , pour s'approcher Q.u
364 IND
pied du grand volcan , on passe par des ruelles torfueiises
(los callciones del Mal-pais). f,enr élévation est de 6 à 9 pieds.
La fuiiipe sort généraleuienf un peu au-dessous de la pointe
du c6i'e. et resle visible jusqu'à ?o pieds de hauteur. D'au-
tres filets de fumée sortent des larges crevasses qui traversent
les ruelles; ils sont dus au sol même de la plaine soulevée.
En i7"o, la chaleur des hornilos étoit encore si grande
qu'on pouvoit allumer un cigarre en l'attachant à une
perche et en le plongeant à deux ou trois pouces de pro-
fondeur dans une des ouvertures latérales. Les cônes [hor-
nilos ) sont uniformément composés de sphéroïdes de basaltes,
souvent aplatis de huit pouces à trois pieds de diamètre,
et enchâssés dans une masse d'argile à couches diversement
contournées. L'aspect de ces cônes est absolument le même
que celui des buttes coniques de basalte globuleux {Kugel-
hasalt-Kuppen) que l'on voit si fréquemment en Saxe, sur
les frontières du Haut-Palatinat et de la Franconie , et sur-
tout dans le Mittelgebirg de la Boîième : la différence ne
consiste que dans les dimensions des buttes. Cependant en
Bohème nous en avons aussi trouvé, M. Frtiesleben et moi,
qui étoient parfaitement isolées et n'avoient que i5 à 20
pieds de hauteur. Le noyau des boules est dans les hornitos,
comme dans les basaltes globulaires aiiciens, un peu plus
frais et plus compacte que les couches concentriques qui
enveloppent le noyau, et dont j'ai pu compter souvent 25
à 28. La masse entière de ces basaltes, constamment tra-
versée par des vapeurs acidulés et chaudes, est extrêmement
décomposée. Elles n'oflf'rent souvent qu'une argile noire et
ferrugineuse, à taches jaunes et peut-ê(re trop grandes pour
être attribuées à la décomposition de l'olivine. En approchant
l'oreille d'un de ces cônes, on entend un bruit sourd qui
paroît celui d'une cascade souterraine; il est peut-être causé
par les eaux du Rio Cuitamba qui s'engouffrent dans le
Mal-pais. Voilà donc bien certainement des sphéroïdes
aplatis de basalte, agglomérés en buttes coniques, qui ont été
soulevés de terre de mémoire d'hommes, et qui ne sont
par conséquenfni des lambeaux d'anciens courans de laves,
ni le résultat d'une décomposition de prismes basaltiques
articulés, ni celui d'un entassejnent fortuit de déjections d'un
IND ' 365
cratère éloigné. Il est probable que c'est la force élastique des
vapeurs qui a couvert de ces honiitos , en forme d'ampoules,
la plaine bombée du Mal-pais, tout cousme la surface d'un
fluide visqueux se couvre de l)ulles par l'action des gaz qui
tendent à se dégager. La croûte qui forme les petits dômes
des hornitos est si peu solide, qu'elle s'enfonce sous les pieds
de devant d'un mulet que l'on force d'y monter.
Les faits que je viens d'exposer me paroissent d'autant
plus importans pour la géognosie , qu'il existe dans les ter-
rains basaltiques les plus anciens une grande analogie entre
les buttes isolées de basaltes globuleux et les buttes de basaltes
colonnaires. Depuis long- temps des géologues célèbres ont
combattu l'hypothèse qui considère tant de montagnes ba-
saltiques, d'une forme si régulière et d'un agroupement symé-
trique , comme des restes d'un courant, d'une coulée de
laves, qui a avancé progressivement sur un terrain incliné.
Il faut distinguer, dans les plaines de Jorullo , trois grands
phénomènes : le soulèvement général du Mal-pais, hérissé
de plusieurs milliers de petits cônes basaltiques; l'entassement
des scories et d'autres matières incohérentes dans les collines
les plus éloignées du grand volcan , et les laves lithoides que
ce volcan a vomies sous la forme ordinaire d'un courant.
L'intérieur du cratère du Vésuve otïroit, au mois d'Août i8o5,
époque où je l'ai visité plusieurs fois, conjointement avec
MM. de Buch et Gay-Lussac , cette même différence entre le
fond du cratère soulevé, c'est-à-dire plus ou moins bombé,
selon que l'on s'approchoit de l'époque de la grande érup-
tion, et les cônes de scox'ies désagrégées qui se forment autour
de plusieurs soupiraux entlammés. Ce sont ces accumula-
tions de matières incohérentes seules qui ressemblent au
Monte Novo de Pouzzole. La croûte de laves qui constitue le
fond des cratères, s'élève ou s'abaisse comme un plancher
mobile. (Buch, geogn. Beob., T. II , p. 124.) Au Vésuve, ce
fond étoit tellement bouihé (en i8o5), que sa partie centrale
dépassoit le niveau du bord méridional du volcan. Vintuines-
cence que l'on observe périodiquement dans les cratères acces-
sibles des volcans enflammés, au fond de la vallée circulaire
ou alongée qui termine leurs sommets, présente une analogie
frappante avec le terrain souleyé du Mal-pais de Jorullo : il en
366 ' IND
présente vraisemblablement aussi avec ces ilôts volcaniques
qui paroissent comme des roches noires au-dessus de la sur-
face de rOcéan, avant de se crevasser et de lancer des flam-
mes. Il paroit que M. d'Aubuisson n"a pas eu occasion de
consulter les coupes que j'ai publiées du volcan de JoruUo
(Humboldt, Essai politique, T. I, p. 253. Id., Nivellement
barom. des Andes, n° 070 — 374. Id., Vues des Cordillères , p.
242 , pi. 43. Id. , Atlas géographique et physique du Voyage aux
rég. équin.,pl. 28 et 29), lorsque, dans son intéressant Traité
de géognosie , T. I , p. ^64, il suppose que j'ai confondu un
terrain soulevé avec un entassement de déjections dont l'é-
paisseur augmente à mesure qu'on approche de la bouche
volcanique.
La composition du basalte, ou plutôt la fréquence plus ou
moins grande de certaines substances cristallisées, disséminées
dans les basaltes, varie dans les différentes parties de l'Amé-
rique équinoxiale, comme dans celles de l'Europe. L'olivine,
si commune dans les basaltes d'Allemagne , de France et
d'Italie, est très-rare, d'après MM. Macculloch et Boue, dans
l'ouest de TÉcosse et le nord de l'Irlande. L'amphibole abonde
en grands cristaux, en Saxe (Obervviesenthal et Carlsfeld ) ,
en Bohème, dans le pays de Fulde et en Hongrie (Medue),
tandis qu'elle manque le plus souvent dans les basaltes d'Au-
vergne et des Canaries. Le feldspath vitreux et l'olivine se
trouvent presque constamment associés dans le terrain basal-
tique du Mexique et de la Nouvelle-Grenade ; souvent (Valle
de Santiago, Alberca de Palangeo ) l'amphibole et le py-
roxène manquent : d'autres fois (Cerro del Marques, au-dessus
de San -Augustin de lasCuevas; Chichimequillo près Silao)
le basalte renferme à la fois de l'olivine, du feldspath vitreux,
de l'amphibole et du pyroxène. Dans la belle vallée de San-
tiago (Nouvelle-Espagne) l'hyalite est si commune que, par
une prédilection bien difficile à expliquer, les fourmis eu
recueillent partout où le basalte se décompose, et la trans-
portent dans leurs nirls. Je n'ai jamais vu de très- grandes
masses d'olivine dans la Cordillère des Andes: celles de l'Eu-
rope appartiennent plus particulièrement aux brèches basal-
tiques ( Weissenstein près de Cassel ; Kapfenstein en Styrie).
Les formations d'argiles et de marnes que nous avons indi-
• IND • 3C7
quées dans le tableau précédent comme appartenant au ter-
rain volcanique, méritent beaucoup d'attention dans la Cor-
dillère des Andes, dans l'archipel des îles Canaries et dans
le Mittelgebirge de la Bohème (Trzeblitz, Hruvka). Dans ces
trois régions, que j'ai visitées successivement, l'argile ne m'a
point paru accidentellement englobée dans la masse liquide,
comme c'est le cas quelquefois dans l'argile plastique (grès à
lignites, §. 55) au-dessus de la craie, ou dans les calcaires
secondaire et tertiaire (calcaire du Jura et calcaire grossier)
duVicentin, que j'ai trouvés enchâssés par fragmens anguleux
dans le basalte, et qui pénètrent tellement dans les basaltes
que ces derniers même font elfervcscence avec les acides.
Les marnes argileuses des Cordillères (Cascade de Régla et
chemin de Régla àTolomilco el grande; Guchilaque, au nord
de Cuernavaca ; Cubilcte près Guanaxuato ) et celles de Tîle
de la Graciosa ( près Lancerote) alternent avec les couches de
basaltes, et sont peut-être d'une formation contemporaine,
comme les argiles schisteuses qui alternent avec le calcaire
alpin (Humboldt, Relat. hist., T. I, p. 88). Leur position
même semble prouver qu'ils ne sont pas dus à la décomposi-
tion des basaltes. On y trouve souvent des cristaux de pvro-
xène et des grenats-pyropes. Je ne déciderai pas si les masses
d'argile qui entourent, dans les Andes de la Nouvelle-Grenade
Centre Topayan, Quilichao et Almaguer), ces immenses amas
de boules de dolérites et de grilnstein à feldspath vitreux et
fendillé, appartiennent aux formations de basaltes, ou aux
syénites et porphyres du terrain de transition; mais, ce qui
est indubitable, c'est que les bancs d'argile (trpetate), qui
rendent stérile une partie de la belle province de Quito , sont
sortis du flanc des volcans, non mêlés à des matières en fusion,
mais suspendus dans l'eau. Les inondations qui accompagnent
toujours les éruptions du Cotopaxi , de Tunguragua et d'au-
tres volcans encore enflammés des Andes, ne sont pas dues,
comme au Vésuve [Mémoires de l'Académie , ijS/^, p. 18),
aux torrens d'eaux pluviales que répandent les nuages qui se
forment pendant l'éruption ( par le dégagement de la vapeur
d"eau dans le cratère) : elles sont principalement le résultat
de la fonte des neiges et des lentes intil (rations qui ont lieu
sur la pente des volcans, dont la hauteur dépasse 2460 toises
368 IPsB
(celle de la limite des neiges perpétuelles). Les secousses de
violens fremblemens de terre, qui ne sont pas toujours suivies
d'érupfions de flammes, ouvrent des cavernes remplies d'eau,
et ces eaux entraînent des trachytes broyés, des argiles, des
ponces et d'autres matières incohérentes. C'est là peut-être
ce que Ion pourroit appeler des éruptions boueuses, si cette
dénomination ne rapprochoit pas trop un phénomène d'inon-
dation des phénomènes essentiellement volcaniques. Lor que
(le 19 Juin 1698) le Pic du Carguairazo s'aHaissa, plus de
quatre lieues carrées d'alentour furent couvertes de boues ar<ri-
leuses, que dans le pays l'on appelle ludazales. De petits pois-
sons, connus sous le nom de preiïadiUas (Pimelodes cyclopum)^
et dont l'espèce habite les ruisseaux de la province de Quito ,
se trouvoient enveloppés dans les éjections liquides du Car-
guairazo. Ce sont là les poissons que l'on dit lancés par les
volcans, parce qu'ils vivent par milliers dans des lacs souter-
rains, et parce que, au moment des grandes éruptions, ils
sortent par des crevasses, entraînés par l'impulsion de l'eau
boueuse qui descend sur la pente des raontagnçs. Le volcan
presque éteint d'imbaburu a A^omi, en 1691 , une si grande
quantité de preiïadiUas , que les fièvres putrides , qui régnoient
à cette époque , furent attribuées aux miasmes qu'exhaloient
les poissons. (Humboldt, Recueil d'obs. de zoologie et d'ana-
loinie comparée, T. I , p. 22, et T. II, p. i5o. )
La dolérite du terrain basaltique (D'Aubuisson , Journ.des
mines, T. XVIII , p. 197; Leonhard et Gmelin, lom Dolerit ,
p. 17 — 35) est très-rare dans les Cordillères, qui abondent
plutôt en roches trachytiques dans lesquelles le feldspath
prédomine sur le pyroxène. Je pense cependant qu'une dolé-
rite que j'ai trouvée dans le chemin d'Ovexeras aux sources
chaudes de Comangillo près de Guanaxuato , appartient aux
basallesj.de la Caldera et d'Aguas buenas, et non à de véri-
tables trachytes. 11 y a de même quelque incertitude sur le
gisement des phonolithes, lorsqu'elles se trouvent isolées ou
éloignées de montagnes basaltiques et trachytiques. Cet iso-
lement caractérise les phonolithes du Peuon , qui forment
un écueil dans le Rio Magdalena , et qui paroissent immédia-
tement superposées au granité de Banco ; les phonolithes que
j'ai vues percer la couche de sel gemme de Huaura (Bas-
Pérou, prés des côtes de la mer du Sud); enfin celles qui
s'élèvent au bord septentrional des steppes de Calabozo
(Cerro de Flores). Les dernières sont géognostiqucment liées
à de l'amygdaloïde pyroxénique , alternant avec un griinstein
de transition (Humboldt, Rel.hist., T. I , p. iS^). Les amyg-
daloïdes celluleuses (tezontli), renfermant du feldspath vi-
treux, des pyroxènes et de la lithomarge, sont le plus ré-
pandues sur le plateau central de la Nouvelle-Espagne. Elles
sont tantôt recouvertes par des basaltes, tantôt elles forment
(Cuesta de Capulalpan ) des boules de deux à trois pieds
d'épaisseur, réunies en cônes ou buttes hémisphériques et
superposées à des porphyres de transition.
m. Laves sorties d'un cratère soos forme de courans. Laves
lithoïdes feldspathiques , semblables aux trachjtes. hâves basal-
tiques. Obsidiennes des laves. Ponces vitreuses des obsidiennes,
Nous avons déjà rappelé plus haut combien les véritables
courans de laves sont rares dans les Cordillères. Celles que
j'ai vues sont dues à des éruptions latérales d'Antisana, du
Popocatepetl et du Jorullo. Beaucoup de courans (Mal~pais)
sont sortis de bouches volcaniques qui se sont refermées depuis
et qu'il est impossible de reconnoître aujourd'hui. D'autres
courans dirigés sur un même point, se confondent les uns avec
les autres : ils se présentent en larges nappes , semblables à des
roches pyroxéniques beaucoup plus anciennes. Dans les laves
de la vallée deTenochtitlan ( entre San Augustin de las Cuevas
et Coyoacan) lamphibole est beaucoup moins rare que dans
les laves d'Europe. Un minéralogiste mexicain très-instruit,
M. Bustamante, les a soumises récemment avec succès à l'a-
nalyse mécanique , d'après la méthode ingénieuse exposée par
M. Cordier. [Semanario de Mexico , 1820, n.°XX, p,3o — 90.)
IV. Tufs des volcans , souvent pétris de coquilles.
V. Formations locales calcaires et gyfsedses superposées
aux tufs volcaniques, au terrain basaltique (mandelstein) ou
auxtrachytes. Je compte parmi ces formations très-modernes,
dans le plateau de Quito, les gypses feuilletés de Fuluiagua,
le gypse argileux et fibreux de Yaruquies, les argiles schis-
teuses carburées et vitrioliques de San-x\ntonio , les argiles
salifères (?) de la Villa de Ibarra , les sables avec lignites du
20. 24
Syo ( IND
Llano de Tapia (au pied du Cerro dcl Altar) , et les tufs
calcaires (caleras) de Agua santa. Dans les îles Canaries, des
formations calcaires oolithiques et gypseusessont aussi subor-
données aux tufs volcaniques (Lancerote et Fortaventura).
On ne peut indiquer l'âge relatif de ces petits dépôts en les
comparant à la craie ou aux formations tertiaires les plus
modernes ( §§. Sy — Sg) : nous les avons placés ici selon l'ordre
de leur gisement au-dessus des roches volcaniques. En Hon-
grie, d'après l'intéressante observation de M. Beudant, un
grès à lignite (§. 35), superposé au conglomérat trachytique
(Dregely), au conglomérat ponceux (Palojta) et même au
trachyfe (Tokai) , est recouvert, à son tour, ou de calcaire
grossier (§. 56) du terrain tertiaire, ou de calcaire d'eau
douce, ou enfin de coulées basaltiques.
Telles sont les formations principales du terrain pyrogène,
dues à des soulèvemens , ou à un épanchement latéral, ou à
de simples éjections. Nous nous bornons à l'indication des
faits, sans aborder des problèmes dont les données sont en-
core trop imparfaitement connues. Naus craindi-ions qu'on
n'appliquât avec raison à la géognosit ce que Montaigne dit
d'un certain genre de philosophie .- « elle vient de ce que
« nous avons l'esprit curieux et de mauvais yeux. ^^
TABLEAU
DES FORMATIOISS OBSERVÉES DANS LES DEUX
HÉMISPHÈRES (1822).
[Des chiffres romains précèdent les noms des formations qui , rarement supprimées et
par conséquent le plus généralement répandues , peuvent servir d'horizon géoguostique.
On a indiqué en même temps les SS- et les pages où se trouvent les descriptions.]
Introduction renfermant quelques principes de philosophie
géoguostique, pag. 56 — 11 3.
Terrains primitifs.
Vues générales, p. 11 3.
î. Granité primitif, §. 1, pag. ii3 — -iiS.
Granité et Gneis primitifs, §. 2, p. 11 5.
Granité stannifère, §.3, p. ii5 — 116.
Weisstein aa'ec Serpentine, §, 4, p. 116.
IND * 371
II. Gneis primitif, §. 5j p. 117 — 120.
Gneis et Micaschiste, §. 6,p.i20 — 121.
Granités postérieurs au Gneis, antérieurs au Micaschiste
PRIMITIF , §. 7 y. p. 12 2 1 2 /| .
Syénite primitive? §. 8, p. 124 125.
[Les cinq dernières forinalions , placées enUe le gueis et le micaschiste primitifs,
sout des formations parallèles.]
Serpentine primitive? §. 9, p. 12 5.
Calcaire primitif? §. 10, p. 126.
III. Micaschiste primitif, §. 11, p. 12G — a3o.
Granité postérieur au Micaschiste, antérieur au Thon-
schiefer, §. 12, p. )3i.
Gneis postérieur au Micaschiste, §. i3, p. i3i.
GrUNSTEIN-ScHIEFER ? §. 14, p. l3l ]32.
IV.Thonschiefer primitif, §. i5, p. 102 — 134.
Roche de Quarz primitive (avec masses de fer oUgiste mé-
talloïde), §. 16, p. 104 — i58.
Granité et Gneis postérieur au Thonschiefer ? §• 17 , p. i3g.
Porphyre primitif? §, 18, p. iSg — 140.
V. Eufhotide primitive, postérieure au Thonschiefer, §.19,
p. 140—142.
[Les quatre dernières formations sont des formations parallèles entre elles, quel-
quefois même au Thonschiefer prhnilif.]
Terrains de transition.
Vues générales, p. 142, 146 et 149 — 153. Types de su-
perpositions locales, p. 146 — 14g.
I. Calcaire grenu talqueux, Micaschiste de transition, et
Grauwacke avec Anthracite, §. 20, p. i53 — 158.
II. Porphyres et Syénites de transition , recouvrant immédia-
tement les roches primitives , calcaire noir et Grun-
stein, §. 21 , p. i58 — 181.
III. Thonschiefer de transition, renfermant des Grauwackes,
DES GrUNSTEIN , DES CaLCAIRES NOIRS , DES SyÉNITES ET DES
Porphyres, §. 22, p. 182 — 200.
IV ET V. Porphyres , Syénites et Grunstein postérieurs au
Thonschiefer de transition , quelquefois même au Cal-
caire A ORTHOCÉRATITE3 , §§. 23, 24 > p« 200 229.
VI.Euphoïide de transition, §. 25, p. 229.
J72
IND
Terrains secondaires.
Vues générales, p. 254.
I. Grand dépôt de Houille ,
Grès rouge et Porphyre secon-
daire (avec Amygdaloïde ,
Griinstein et Calcaires inter-
calés), §. 26, p. 235 — 267.
Roche de Quarz secondaire, §.
27, p. 267 — 260.
[Cette dernière formation est parallèle au
grès honiller]
II. Zechstein ou Calcaire alpin
(Magnesian limestone) ; Gypse
hydraté; Sel gemme, §. 28,
p. 260 — 290.
Les cinq formations suivantes , trts-iné-
galement développées , peuvent être comprises
sous le nom général de
m. Dépôts arénacbs ET calcaires
(marneux et oolithiques) , pla-
cés entre le zechstein et la
craie, et liés à ces deux ter-
rains , p. 290.
Argile et Grès bigarré (Grès à
oolithes; Grès de Nebra-, New
red sandstone et red mari) avec
Gypse et sel gemme, §. 29, p.
291—295.
Muschelkalk (Calcaire coquil-
lier ; Calcaire de Gœttingue),
§. 3o , p. 295 — 298.
Qdadersandstein (Grès de Kœ-
nigstein), §. 5i,p. 298 — 3oo.
Calcaire du Jura (Lias, Marnes
et grands dépôts oolithiques,
§. 02 , p. 3oo — 3ji.
Terrains (exclusivement)
VOLCANIQUES.
Vues générales, p. 552 — 545,
I. Formations TRACHYTiQUEs ,
p. 545 — 558.
Trachytes granitoïdes et syé-
NITIQUE3.
Trachytes porphyriques (feld-
spathiques et pyroxéniques).
Phonolithes des Trachytes.
Trachytes semi-vitreux.
Perlites avec obsidienne.
Trachytes meulières, ceîlu-
leiises avec nids siliceux.
( Conglomérats trachyti-
ques etponceux, avec alu-
nites , soufre , opale et bois
opalisé).
II. Formations basaltiques ,
p. 358 — 568.
Basaltes avec olîvine , pv-
ROXÈNE ET UN PEU d'aMPHIBOLE.
Phonolithes des basaltes.
Dolérites.
Makdelstein celluleux.
Argile avec grenats-pyropes.
(Cette petite formation
semble liée à Pargile avec
lignites du terrain tertiai-
re sur lequel se sont sou-
vent répandues des cou-
lées de basalte.)
Grès et Sables ferrugineux , et
Grès et Sables verts , Grès se-
condaire A LiGNiTEs (Ironsand
et Greensand), §. 55 , p.3n —
5 i3.
IV. Craie, §. 04, p. 014 — 016.
Terrains tertiaires.
Vues générales, p. 5i6 — 020.
I. Argiles et Grès tertiaire a
LiGNiTEs ( Argile plastique , Mo-
lasse, etNagelfluhe d'Argovie),
§. 55 , p. 320 — 525.
II. Calcaire DE Paris (Calcaire
grossier ou Calcaire à cérites,
formation parallèle à l'argile
de Londres et au Calcaire aré-
nacé de Bognor) , §.36, p. 525
— 32g.
III. Calcaire siliceux , Gypse a
OSSEMENS, alternant AVEC DES
marnes (Gypse de Montmar-
tre), §. 37, p. 329 — 331.
IV. Grès et sables supérieurs
au gypse a OSSEMENS ( Grès de
Fontainebleau) ,§. 38 , p. 33 1.
V. Terrain lacustre avec meu-
lières poreuses, supérieur au
GRÈS DE Fontainebleau ( Cal-
caire àlymnées), §. 59, p.33i.
IND 375
Conglomérats et scories ba-
III. Laves sorties d'un cratère
volcanique (Laves ancien-
nes , larges nappes, généra-
lement abondantes en feld-
spath. Laves modernes à
courans distincts et de peu
de largeur. Obsidiennes des
laves et Ponces des obsidien-
nes) , p. 36g.
IV. Tufs des volcans avec
coquilles, p. 36g.
(Dépôts de calcaire com-
pacte, de marne, d'argi-
les avec lignites, de gyp-
se et d'oolithes , superpo-
sés aux tufs volcaniques
les plus modernes. Ces pe-
tites formations locales
appartiennent peut-être
aux terrains tertiaires.
Plateau de Riobamba;
îles de Fortaventura et
Lancerote).
Pour s'élever à des idées plus générales, et pour mieux
comprendre les rapports de superposition indiqués dans le ta-
bleau des roches, on peut se servir d'une méthode pasigra-
phique, dont il sera utile de rappeler ici les principes fon-
damentaux. Cette méthode est double : elle est ou figurative
574 ' IND
(graphique, imitative), représentant les couches superpo-
sées par des parallélogrammes placés les uns sur les autres ;
ou algoritliinique, indiquant la superposition des roches et
l'âge de leur formation , comme des termes d'une série.
La première méthode est celle que j'ai suivie dans les
Tables de pasigrafia geognostica, que je traçai, en 1804,
pour l'usage de l'école des mines de Mexico ; c'est celle que
l'on désigne assez généralement sous le nom de coupes des
terrains. Elle offre l'avantage de parler plus vivement aux
yeux, et d'exprimer simultanément dans l'espace deux séries
ou systèmes de roches qui couvrent une même formation.
Elle offre des moyens faciles pour indiquer les équwalens
géognostiqiies ou roches parallèles , de même que le cas oîi ,
par la suppression locale de la formation [è, la formation a
supporte immédiatement y. Deux roches parallèles , par
exemple, le thonschiefer et la roche de quarz (page 107),
superposées toutes les deux à du micaschiste primitif, sont
représentées dans la méthode figurative par deux parallélo-
grammes de même hauteur placés sur un troisième. Les
noms des roches sont inscrits dans les parallélogrammes, ou,
comme on le verra plus bas, on caractérise ceux-ci, en les
couvrant de hachures ou d'une espèce de réseau différemment
modifié, selon que les roches représentées graphiquement pas-
sent ou ne passent pas les unes aux autres. Par la suppres-
sion locale du grès de Nebra (grès bigai-ré) et du calcaire
deGœttingue (muschelkalk) , le calcaire du Jura peut reposer
d'une part immédiatement (pages 3oo et 3io) sur le calcaire
alpin (zechstein), taudis que d'un autre côté on voit suivre,
de bas en haut, le calcaire alpin, le muschelkalk, le grès
tigarré et le calcaire du Jura. Ces rapports de gisement se-
ront exprimés dans une coupe idéale, en retranchant de la
partie inférieure du parallélogramme qui représente le cal-
caire jurassique, d'un seul côté , un quadrilatère représentant
les deux formations du muschelkalk et du grès bigarré.
La seconde méthode , qui procède par séries et qu'on
pourroit appeler algorithmique, indique les roches, non
d'une manière imitative , non par Véienduc fgurée, mais
par une notation spéciale. Toute la géognosie de giscmens
ptant un problème de séries ou de succession, simple ou pé-
IND 375
rîodique, de certains ternies, les diverses formations superpo-
sées peuvent être exprimées par des caractères généraux,
par exemple, par les lettres de l'alphabet. Ces notations,
appliquées à différentes parties de la physique générale •
dans lesquelles on examine la juxlaposilion des choses, ne
sont pas des jeux de l'esprit. Dans la géognosie positive,
elles ont le grand avantage de fixer l'attention sur les rap-
porls les plus généraux de position relative, d'alternance et de
suppression de certains termes de la série. Plus ou fera abs-
traction de la valeur des signes (de la composition et de la
structure des roches), mieux on saisira, parla concision d'un
langage pour ainsi dire algébrique, les rapports les plus com-
pliqués du gisement et du retour périodique des formations.
Les signes a, /S, y, ne seront plus pour nous du granité,
du gneis et du micaschiste; du grès rouge, du zechstein et
du grès bigarré: de la craie, du grès tertiaire à lignites, et
du calcaire parisien .- ce ne seront que des termes d'une
série, de simples abstractions de l'entendement. Nous sommes
loin de prétendre que le géognoste ne doive pas étudier,
jusque dans ses rapports les plus intimes, la composition
minéralogique et chimique des roches, la nature de leur
tissu cristallin ou de leurs masses; nous voulons seulement
qu'on fasse abstraction de ces phénomènes lorsqu'il ne s'agit
que de la succession et de Vàge relatif.
Si les lettres de l'alphabet représentent ces roches super-
posées, des deux séries,
«, /2,o^,cr
la première indique la succession des formations simples
et indépendantes : granité, gneis, micaschiste, thonschiefer
I Avant la grande découverte de la pile de Volta, j'avois, dans mon
ouvrage sur V Irritation de la fibre nerveuse, indiqué par une notation
particulière quels étoient les cas où, dans une chaîne de métaux liété-
rogèues et de parties humides interposées, l'excitation musculaire avoit
lieu, quels éloient les cas où le courant galvanique étoit arrêté. La
simple inspection des séries et de la position respective des termes
(élémens de la pile) pouvoit faire juger du résultat de l'expérience.
( Ilumboldt, Fersiiche iiber die gereizte Muskel- und Nervenfaser, T. 1,
p. a36.)
376 IND
ou muschelkalk, grès de Konigsstein (quadersandstein ), cal-
caire juriissique et grès vert à lignites (sous la craie). La
seconde indique l'alternance de formations simples avec des
formations complexes : granité, granité -gneis, gneis, gneis-
micaschiste , micaschiste, tlionschiefer (pag. iiS, ii5); ou,
pour donner un exemple tiré de terrains de transition (p. i 20
et 145), calcaire à orthocératites, calcaire alternant avec du
schiste, schiste de transition seul, schiste et grauwacke,
grauwacke seul, porphyre de transition Dans les forma-
tions complexes, c'est-à-dire, dans celles qui ofiVent l'alter-
nance périodique de plusieurs couches, on distingue quel-
quefois trois roches différentes, qui ne passent pas les unes
Q ux autres dans le même groupe ,
ou a,/2, aBy, > . . . ,
a^-y, afiS", ^as . . , . . ,
selon que dans le terrain de transition des couches alter-
nantes de granité, de gneis et de micaschiste; dans le terrain
de transition, des couches alternantes de grauwacke, de
schiste et de calcaire, ou de grauwacke, de schiste et de por-
phyre, ou de schiste, de grauwacke et de griinstein, consti-
tuent une même formation. Dans le terrain de transition,
comme nous l'avons exposé plus haut, le thonschiefer ou le
grauwacke seuls ne sont pas les termes de la série. Ces
termes sont tous complexes; ce sont des groupes, et le grau-
wacke appartient à la fois à plusieurs de ces groupes. Il
en résulte, que le terme /brniafio/i de grauwacke n'a rapport
qu'à la prédominance de cette roche dans son association
avec d'autres roches.
Tous les terrains offrent l'exemple de formations indépen-
dantes qui préludent comme couches subordonnés. Si a^y, ou
a/2, /èy indiquent des formations complexes de granité, gneis
et micaschistes, ou de granité et gneis, de thonschiefer et
porphyre, de porphyre et syénite, de marnes et de gypse,
c'est-à-dire, des formations dans lesquelles des couches de
deux et même de trois roches alternent indéfiniment; a-l-^,
jS-f-^, indiqueront que le gneis fait simplement une couche
dans le granité, le porphyre dans le schiste, etc. Alors
a , a-+-/2 , ^ , ^-h-y , y . . . .
çxprime le phénomène curieux de formations qui préludent^
IND 577
qui s'annoncent d'avance comme des bancs subordonnés.
Ces bancs rappellent tantôt des termes qui précèdent {ro-
ches de dessous), tantôt les termes qui suivent {roches de
dessus). Ainsi nous aurons :
a, ^,12-hct, ,/2, /2H-0,, y . . . .
Les porphyres et syénites grenues du terrain de transition
pénètrent dans le grès rouge et y forment des couches subor-
données. Si le gisement des formations de la vallée de Passa
est tel qu'on Fa récemment annoncé (pag. 288), un terme
précédent (la syénitc) déborde jusque dans le calcaire alpin
ou zechstein ; c'est le cas dans la série :
et, pi-\—ct , y-\-Ai «T . . . .
Lorsqu'on veut appliquer la notation pasigraphique jus-
qu'aux élémcns des roches composées, cette notation peut
indiquer aussi comment, par l'augmentation progressive d'un
des élémens de la masse, surtout par l'isolement des cris-
taux, il se forme des couches par une espèce de développe-
ment intérieur :
abc, abc', abc^ .... abc— hb.
Nous avons préféré, dans ce cas particulier (bancs de feld-
spath dans le granité , bancs de quarz dans le micaschiste ou
dans le gneis, bancs d'amphibole dans la syénite , bancs de
pyroxène dans une dolérite de transition), les lettres de l'al-
phabet romain à celles de l'alphabet grec, pour ne pas con-
fondre les élémens d'une roche (feldspath, quarz, mica,
amphibole, pyroxène) avec les roches qui entrent dans la
composition des formations complexes.
Jusqu'ici nous avons montré comment, en faisant entière-
ment abstraction de la composition et des propriétés physi-
ques des roches, la notation pasigraphique peut réduire à une
grande simplicité les problèmes de gisement les plus compli-
qués. Cette notation indique comment les mêmes couches
subordonnées (le sel gemme dans le zechstein et dans le red
mari, §§. a 8 et 29; les houilles dans le grès rouge, le zech-
stein et le muschelkalk) passent à travers plusieurs forma-
tions superposées les unes aux autres :
ct-^jW, P>-\-jUL, y-, S'-h-fJi ....
Elle rappelle aussi le retour des formations feldspathiques et
fristallines dans les terrains de transition et de grès rouge
378 IND
(Nonvége, Ecosse); retour qui est analogue à celui du gra-
nité après le gneis et après le micaschiste primitif:
^5 /3, ac, y, S" ?:, À, a, yS. . .
Les premiers termes de la série reparoissent, même après
un long intervalle , après le grauwackc et le calcaire à or-
thocéralilcs, c'est-à-dire , après les roches fragmentaires et
coqiiillières.
En terminant cet ouvrage, je vais montrer que, si l'on
donne moins de généralité à la notation et si on la modifie
d'après quelques considérations physiques (de structure et
de composition), on peut, par le moyen de douze signes
géognostiques, présenter les phénomènes de gisemens les plus
importans des terrains primitifs, intermédiaires, secondaires
et tertiaires. Ces douze signes embrassent sept séries de ro-
ches, savoir : les micaschistes (et leurs modifications d'un
côté en granité et gneis, de l'autre en thonschiefer) , les
euphotides, les amphiboliques (griinstcin , syénites), lespor-
phyres, les calcaires et les roches fragmentaires. On y a
ajouté des caractères pour les grands dépôts de houilles et
de sel gemme, qui servent à orienter les géognostes, leur
position indiquant celle du grès rouge et du calcaire alpin.
Tableau et valeur des signes.
et, Granité.
.S , Gneis.
y, Micaschiste.
cT, Thonschiefer. On a employé les quatre premières lettres
de l'alphabet pour désigner les quatre formations primitives
les plus anciennes. Comme ces formations passent graduel-
lement les unes aux autres, on a choisi des lettres qui se
succèdent immédiatement dans l'ordre alphabétique. Le gra-
jiite passe au gneis, le gneis au micaschiste, celui-ci au
thonschiefer. D'autres formations (porphyre, grunstein, eu-
photide) paroissent pour ainsi dire isolées, souvent comme
surajoutées aux terrains plus anciens; aussi les a-t-on repré-
sentées par des lettres qui ne se succèdent pas immédiate-
ment entre elles, et qui ne font pas suite aux lettres a, /3,
y-, (T. C'est par ce moyen que les formations qui se lient
moins aux autres que quelquefois (euphotide et griinslein)
IND 379
elles se lient entre elles, se distinguent dans récriture pasi-
graphique d'une manière aussi tranchée que dans la nature.
0, Ophiolithes, euphotide , gabbro et serpentine; eu géné-
ral toutes les formations abondantes en diallage.
ç, syénite, griinstein; en général toutes les formations abon-
dantes en amphibole.
vr, Porphyre. On voit quelquefois t passer à ç, et ç passer
à 0.
T, Formations calcaires et gypseuses (T/Tavoç).Si l'on veuf
individualiser davantage les formations calcaires, on peut
distinguer les primitives (t) , et celles qui renferment des
débris organiques (t'); on peut même, par des exposans,
indiquer séparément le calcaire de transition (t'), le calcaire
alpin ou zechstein (t°) , le calcaire de Gœttingue ou muschel-
kalk (t"), le calcaire du Jura ou la grande formation ooli-
Ihique (t"), la craye (t"), le calcaire grossier parisien
(tP) etc.
;£, Roches fragmentaires, arénacées, agrégées, conglomérats,
grauwacke , grès, brèches, roches élastiques de M. Bron-
gniart (xAstç/zct).
L'accentuation {■/) indique comme dans t, que le grès est
coquillier. On peut distinguer les grauvvackes ou roches frag-
mentaires de transition (jt^); le grès rouge (k"), renfermant
le grand dépôt de houille (anthrax); le grès bigarré ou
grès de Nebra (^"); le grès de Konigstein ou quadersand-
stein {yJ^); le grès vert ou grès tertiaire à lignites sous la
craie («'); le grès plus abondant en lignites au-dessus de
la craie (;t'') ; le grès de Fontainebleau ( )t), etc. Une bonne
notation doit avoir l'avantage de pouvoir modifier la valeur
des signes selon que l'on s'arrête à des divisions diverse-
ment graduées. Les exposans font allusion aux noms des
roches.
^, Houille, dont le plus grand dépôt se trouve à l'entrée
du terrain secondaire : le même signe accentué (^') indique
les lignites, dont le grand dépôt est placé à l'entrée du ter-
rain tertiaire et qui sont quelquefois des houilles coquil-
lières. {^vXov).
■3; Sel gemme , dont la formation principale se trouve
tantôt dans le calcaire alpin, tantôt dans le red mari ou
38o I^TD
grés bigarré. Ne pouvant employer la première lettre dn
mot grec ciM ( elle indique déjà le granité), j'ai fait allusion
à '3'ctXctççct.
Il, La division des formations, anciennement reçue, en ter-
rain primitif, intermédiaire, secondaire, etc., est indiquée
par deux barres perpendiculaires. Lorsque les séries géognosti-
ques ont des termes très-nombreux, ce signe offre comme
des points de repos. Le géognoste expérimenté sait d'avance
où est placée la première roche de transition , le grès houiller,
ou la craie. L'accentuation d'un caractère ((T', t' , k) rap-
pelle en général qu'une roche renferme des débris de co-
quilles, qu'elle n'est pas primitive.
Voici quelques exemples de l'emploi de ces douze signes
pasigraphiques des roches :
ût, y~+-7r, cTt', x', tt, (T, a.
Le terrain de transition commence après y-i-Tr (le mica-
schiste avec des bancs de porphyre primitif). C'est presque
la suite des formations de Norwége (page 148). On voit
suivre une formation complexe de thonschiefer et de cal-
caire (noir) avec débris de coquilles, du grauvvacke , un
porphyre , de la syénite et du granité. Les termes Sr et k',
qui précèdent TT, ç, et, caractérisent ces trois roches comme
des roches de transition. En Angleterre, oîi le terrain inter-
médiaire offre deux formations calcaires bien distinctes (celle
de Dudley et du Derbyshire), on voit se succéder.-
^ , a-TT-, cT', K^, t', ;t', t', ^ , ;i", t", k"-{-^, t°, k . t"-, tt^ . , , ,
Le terrain de transition commence avec la formation de syé-
nite et porphyre (Snowdon) placée sur un gneis qu'on croit
primitif; puis se suivent : un thonschiefer avec trilobites, le
grauwacke de May-Hill , le calcaire de transition de Long-
hopc, le old red sandstone de Mitchel Dean, le mountain
limestone du Derbyshire, la grande formation de houille,
le new red conglomerate qui représente le grès rouge, le
calcaire magnésifère, le red mari avec sel gemme, le cal-
caire oolithique , le grès secondaire à lignites (greensand),
la craie, le grès tertiaire à lignites ou argile plastique, etc.
Sur le continent, les formations secondaires, si elles s'étoient
toutes développées , se succédcroient de la manière suivante :
t', ;t« Il TTK'-^^.T-^d'y K, t", k\ T% k\ t' \\ iCK . . .
IND 381
En comparant ce type avec celui de V Angleterre ,
^ , k", t°, ;t"-f— S-, T°, il , t"
on voit qu'entre les oolithes (t") et le rcd mari ou grès
de Nebra (^") il y a, en Angleterre, deux formations suppri-
mées, savoir, le muschelkalk et le quadersandstein ; les houilles
(^), le sel gemme (^) et les oolilhcs (î<") servent de termes
de comparaison, d'horizon géognostique. Mais, sur le con-
tinent, ^ et ^ sont liés au grès rouge et au calcaire alpin,
tandis qu'en Angleterre ces dépôts sont plutôt liés aux ro-
ches de transition et au red mari. Quelquefois t* est subor-
donné (pag. 269), intercalé à k" : ces deux termes de la série
(le calcaire alpin et le grès rouge) n'en forment alors qu'un
seul. L'incertitude de savoir si un calcaire est alpin (zech-
stein) ou de transition, naît généralement de la suppression
du grès rouge et du dépôt de houille que renferme ée grès.
Des deux séries,
T , kH-^ , T . . . ,
T , K, T . . . ,
la première seule offre la certitude que le dernier t est du
calcaire alpin. Dans la seconde série, les deux calcaires et
la roche fragmentaire qui les sépare pourroient être de
transition. La liaison intime de la craie avec le calcaire du
Jura est évidente, d'après l'alternance des couches (t°, x},
t', «*\), et d'après l'analogie des grès à lignites au-dessous
et au-dessus de la ci\iie.
Pour réunir les principaux phénomènes de gisement des
roches dans les terrains primitifs, intermédiaires , secondaires
et tertiaires , j'offre la série suivante :
a, tt;S, /3-i-7r, ^y, y-\-r, st, 7^, J", «t, /2, «T, 0 || y.", t, cTt',
<r', <r' H- TT , -y, t\ CTT t T -4- a , cTTT , 0 11 TTV^ — (- ^ , t"-!—^ , k",
t™,At%.,',t' Il ;t'^ tP....
Il seroit inutile de donner l'explication de ces caractères;
elle résulte de leur comparaison avec le tableau de forma-
tion. Je me borne à fixer l'attention du lecteur sur l'accu-
mulation des porphyres {tt) , sur les limites des terrains de
transition et secondaires, sur la position des formations d'eu-
photide (0), sur les grands dépôts de houille et des lignites
C^), et sur le retour (presque périodique) des formations
382 IND
feldspathiques, des granités, gneis et micaschistes («, ^, y)
de transition. Comme la notation que je présente ici peut
être diversement graduée, en accentuant les caractères, en
les réunissant comme des coefliciens dans les formations
complexes, ou en ajoutant des exposans, je doute que les
noms des roches rangées par séries les unes à côté des au-
tres puissent parler aussi vivement aux yeux que la notation
algorithmique.
Dans la méthode figurative ou graphique , celle qui repré-
sente les formations par des parallélogrammes superposés
les uns aux autres, on peut aussi indiquer les rapports de
composition et de structure par des caractères qui couvrent,
comme un réseau, toute la surface des parallélogrammes.
En alongcant les parties grenues du granité et en divisant
le parallélogramme en couches assez épaisses, on obtient le
caractère du gneis. En rendant le tissu feuilleté onduleux
et en l'interrompant par des nœuds (de quarz), le caractère
du gneis se change en celui de micaschiste. De la même
manière, la syénite sera représentée par le signe de granité
auquel on ajoute des points noirs (Tamphibole). Ces carac-
tères passent les uns aux autres, comme les roches qu'ils in-
diquent. En les réunissant dans des coupes, j'ai formé sur
les lieux des dessins très -détaillés des vallées de Mexico
et de Totonilco, des environs de Guanaxuato , et du chemin
de Cuernavaca à la mer du Sud ; dessins qui ont l'avan-
tage de ne pas exiger l'emploi des couleurs. Je n'entrerai
pas dans un plus grand détail sur les caractères que l'on
peut employer. Ces caractères peuvent être diversement
modifiés : il n'y a d'essentiel que la concision de la notation
et l'esprit des méthodes pasigraphiques.
NOTES.
§. 1. Léopold de Bucli , Geogn. Beobachf. , Tomel, page 16, 23; Id.,
Reise nach Norwegen , II, p. iQ&; Id., dans Gilbert's yénnalen , 1820,
Avril, p. i3o. Leonhard, Taschenhuch , 1814, p. 17. Freiesicben , Bemer-
kungen ïiher den Harz , I, p. I42. Lconliard , Kopp et Gaertner, Pro-
pœdeutik, p. iSg. Bonnard, Essai géogn. sur l'Erzgehirge , p. i8, 48;
Id., aperçu géogn. des terrains , p. 32. D'Aubuisson, Traité de géogn. ,
II, 12. Jameson, Sfst. of Miner., III, 107. Goldfuss et Bischof,
Beschreihuiig des Fichtelgehirges , \, 145 ; II, 38. Bouc, Géologie
d'Ecosse, p. i6, 348; GeoL Trans., II, i58. Edinb. Phil. Trans.,
• IND » 583
TII, 35o. BeuJant, Voyage miner, et s^éol. en Hongrie, III, 19,27.
Humboldt. Essai sur la géogr. des plantes , p. 122 ; Id. , Relat. hislor. de
vof. aux rég. éfjuin., \l, 100, 299,607.
§. 2. Raunier, Geb. von Nieder-Schlesien , p. 10.
§. 3. Bonnard, Erzgeb. , p. 62, 118. Goldfuss, Fichtelg. ,l,i^^ , 148,
172; II , 32.
§.4. Pusch, dans Leonh. , Tt^schenh., 1813, p. 42. Raumer, Fragm. ^
p. 33,36, 70. Bonnard, Erzgeh., p. 104, 121. Maineke et Keferstein j
dans Leonh. , Taschenh. , 1820, p. io3.
§.5. hwch. , Beob., 1,33, Id., Norw.,\, 197,358, 11,240; /<f, dans
Mag. naturf. Freunde , 1809, p. 46. D'Aubuisson , Géogn. ,11, 60 — 66)
II, i83, 187. Blode, dans Leonh. Taschenb. , 1812, p. 17. Huinboldt,
Nivell. géogn. des Andes , dans son Recueil d'observ. aslron. ,1 , 3io.
§.6. Bonnard, Erzgeb. , \>. 'j2. Huuil)oldt, Rel. hist. , I, 556 , II, i3g.
§.7. Goldfuss, Fichtelgeb. , I, 172 — 174. Bonnard, Terrains, p. 34 ,
40, 83,66; Id. Roches , p. 34. Humboldt, Rel. hist., I, 610; II, 142,
233, 491, 569, 715.
§.8. Burckhardt, Travels in Sj'ria , p. 142. D'Aubuisson, Géogn. ,
II, .9.
§.9. Stcffens Orjktognosie, 1, 270. Bouc, Ecosse, p. 55. Humboldt,
Rel. hist., II, 40.
§. 10. Beudant, Hongrie, II, 21 3. Bonnard, Terrains , p. 79.
§. 11. Buch, Geogn. Beob.,I, 45, 5i, 124,257; Id. , Norwegen ,1,
191, 209, 219; Id., dans JVat. lUag. , 1809, p. ii5 Cordier, dans Journ.
des mines , XVI, 264. Bonnard, Terrains , p. 46. D'Aubuisson, Géogn.,
II, 78 — g3 ; Id. dans Journal de physique , 1807, p. 402. Eschwege,
Journal von Brasilien , II, 14. Freiesleben , Geogn, Beytrag zur Kennt-
niss des Kiipfersch. , V, 257. Goldfuss, Fichtelg. , p. 9.
§. 12. Buch, Norwegen , I, 272, 41 3.
J. i3. Buch, Geogn. Beobacht., I, 3o ; Id. , Norwegen, II, 27, 3i.
Ilaumer, Geogn. f'ersuche , p. 5o.
S. 14. Freiesleben, Ilarz, II, 66. ^onnar A , Erzgeh. , p. 109 — i33.
§. i5. Beudant, Hongrie, II, 84, III, 3o, 40. Buch, Norwegen, II,
03, 87; Id. , dans Mag. naturf. Fr., 1810, p. 147. Boue, Ecosse ,^.3^6.
§. i6. Eschwege, Journ. von Brasilien, 1, aS, 34, 36 , 38.
§. 17. Eschwege, Bras., II, 241.
S. 18. Bonnard, Terrains, p. 56.
§. 19. Buch, dans Mag. nat. Fr. , i3io, p. 137; Id. Geogn. Beoh. ,
1,68,71: Id., A'orwci^eH, I, 479 , II, 29, 84, 87, i35. Esniark , dans
Pfaff, Nord. Arch., III, 199. Saussure, Voyages dans les Alpes , §. i362.
Journ. de phys., XXXV, 298. Targieni Tozzetti, Viaggi ,11. 433. Brocchi,
Bibl. ital., ix, 76, 356. Beudant, Hongrie, III, 49.
§. 20. Brochant, Observ. géol. sur les terrains de transition de la
Taranlaise , p. 16, 19, 3i, 33, 37, 39, 44, 5o , 53; Id., Mémoire
sur les gypses anciens, p. 12 — 46. Buch, dans Mag. nat. Fr., 1809,
p. 181; Id. dans Leonhard's Taschenb. , 1811, p. 335. Kaunier, Fra."-
mente, p. 10, 24. D'Aubuisson, Journ. des mines , n.° 128, p. 161.
,S- 21. Beudant, Hongrie, III, 96, i33, 199. Raumcr, Nieder-Schle-
sien, p. 72.
584 , IND
§. 22. Cliarpenlier , Description ^éogn. des Pyrénées ( manuscrit )'
§§.35, 66, 89, 100, io5, 141 — 1G7; Id. , Mém. sur le gisement des
gypses de Bex , dans Naturw. Anzeiger dcr Schweiz. Gesellsch., 1819,
n.°9,p. 65. K^inmer , Fragmente , ■ç. 10 , J2, 74; Id- , Fersuche , f. 41.
Buch , Korwegen ,U , 281 ; Id. dans .Vag. nat. Fr. , 1809, p. lyS. Mei-
necke et Kcferstein , Taschenh. , p. 63. Haussraann, Nord. Beytr., II,
77 , IV, 653 ; Id., Reise durch Scandinavien , 11, 239. Engelhardt, Fels-
gehaude Russlavds, I, 37. Referstein, Teutschland geognostisch darge-
stellt , I, i36. Eschwege , Brasil. , Il , 253. Maclure , Géol. des Etats-
Unis, p. 24. Brongniart , iV^o//ce sur l'histoire géogn. du Cotentin, p. i 7 ;
Id. Crustacés fossiles, p. 46 — 63. Beudant, Hongrie, III, 76, 578.
Saussure, Alpes, §. 5oi. 'V^'^ahlenberg , dans Acta Soc. L'psal , YIII ,
p. 19. Link, Urwelt , p. 2. Caslelazo , de la ri/jueza de la f^eta Biscaina
(Mexico, 1820), p. q. Humboldt, Essai polit, sur la Nouvelle -Espagne ,
II, 534, 537, 519—526.
§§. 23 et 24. Del Rio dans la Gaseta de Rlexico, XI, 416. Humboldt,
Essai polit., 11,494, 52i, 58i, 583. Beudant, Hongrie, II, 157, III,
67 — 124, 1h8. Boue, Ecosse, p. 147. Burckhardt , Travels in Syria,
1823, p. 493, 567. Raumer, Fragm. , -p. 24. — 26,37,48. Haussuiann ,
dans Moll's Neuein Jahrb., I, 34. Bticli, Norw., I, 96 — 144.
§. 25. Boue, Ecosse , p. 94, 353. Palassou, Supplément aux Mémoires
pour seri'ir à l'Jiist. nat. des Pyrénées, p. iSg — i53. Brougniart, sue
les Ophiolitkes , p. 26, 46, 56, Sg , 61.
§. 26. Beudant, Hongrie, U, 5j5 — 58o, 584 — ^94, III], 171, 184,
194, 204. Geol. Trans., IV, p. 9. Annales des mines, III, p. 45 et 568.
Steffens, Geogn. Aufsiiize , p. 11. Buch , Beoh. , I, p. 104, 157. Heini ,
Geogn. Beytr. zur Kennin. des Thiiring. 7'Valdes , II, 5te Abth., 236.
Conjbeaie and PLilipps Geol. ofEngland , 1 , 2g8, 3i2 , 324 — ^"jo.
§. 27. Humboldt, Géogr. des plantes, p. 128; Id., Essai politif/ue,
II, 589.
§. 28. Esclier, dans Leonb. Taschenh. , 1804, p. 347 ; Id. dans Keue
Ziircher Zeiiung, 1821, n." 60, p. 237. Utlinger, dans Leonh. Ti/JcAeni. ,
1819, p. 42. Keferstein , Teutschland, III, 239, 263, 273, 340, 372.
390,407. Mohs, dans MoU's Ephem. , 1807, p. 161. Lupin, ih. , 1809,
p. 359. Ramond, f'oy- au sommet du Mont-perdu, p. J 5 , 26. Traill, dans
Geol. Trans., III, 108. Bill. unii\,\lX, 38. Buckland, On the struc-
ture of the Alps , t^. g. "ijucXi , Geog. Beob., I,i53 — 171, 194,216,256.
Freiesleben, A'u/>/èr5c7j., IV, 284. Tondi.dans Lucas, Tahl. méth. des esp.
min., 11,243. Haussmaun, Nord. Beytr., IV, 88. Jenaer litter. Zeit. ,
i8i3, p. 100. Steffens Geogn. Aufs., p. 49. Beudant, Hongiie , III,
23i — 237. Conybeare and Philipps, £nj§r/and, I, 3oi. Marzari Pencati,
Cenni geologici , p. 21. Breislak, Sulla giacilura di alcune rocce porji-
ritiche e granitose , p. 25 — 35.
§. 29. Conybeare and Pbilipps, Engl. , I, 61, 269. Freiesleben ,
Kupfersch., I, 90— 188, IV, 276 — 284.
§. 3o. Freiesleben, Kupfersch., I, 65, 89, IV, 295 — 317. Raumer/
Versuche , p. 112— 11 5.
§. 3i. Haussmann, Nord. Beytr., i3o6,St. \, p. 73,98. Freiesleben,
Kupfersch., I, 102 — 107 , IV, 283 , 293. Conjbeare and Philipps , £ng^/.,
I, 122. 'Bt-AVivacr , Nieder-Schlesien , p. 121, 123, i53.
• IND ^ 385
S. 32. Humboldt, ûler die unteri.d. Gasarlen, p. Sg. Karsten, Min.
Tab. p. f).l — 65. Bucli, Landek.. p. 7; Id., d.Tiis Helvet. yllm. , 1818,
p. 42. Gilb. Jnnalen , 1806, St. 5 , p. ?>b. Kschrr, IS'aturw. yinzeiger der
Schweis. Ges. , Jtihi g. IV p. 29. Cliarbaut, Mém. sur la géolngie des
environs de Lons-le-Saunier, p. 7,9, 24, 7.7. Mérian^ Beschuffenheit der
Geiirgshild. von Basel, p. 2J , 36, 46, 88.
§. Si Coujbtarc and Pliilipps, Engl., I, 127— 164.
§.34. Broiigiiia-l ctCuvier , Descr. géol. des environs de Paris , 1821,
p. 10— 17, 68 — 101. Steirens, Geogn. Aufs. , p. 121. Raumer, fers.,
p. 85, 116 Conjbearc and Pbilipps, Engl.,\,Ç:0 — 126.
§. 35. Bonnaid, Tf/rninf , p. 226. Brongiiiart , De^cr. g'e'o/. , p. 17 — aS,
102 — 122. Conyl)('aie and Philipps , Engl., 1,2"] — 57. Raunier , f-^ers. ,
p. 120 — 122. Bciidant, Hongrie, III, 242 ■— 264. Lardj, dans la fJihl.
univ., Mars i8:!2, p. i?>o , iii>. KeiVrslein , Teutschland , I, ..6. Fn ies-
lebfn , Kupfersch. , V, 255. Adolphe Brongniart, Classijic. des vcgctaux
fossiles , p. .5^.
§.36. Beudant, Hongrie, III, 264 — 282. Brongniart, Descr. géoL,
p. 29 — 38, i:'^ — ïo3.
§. 37. Raunier, Vers., p. i23 — 125. Biongniait^ Descr. gêcl., p.
38 — 5o , 2o3 — J.63.
§. 33. Raunier, Vers., p. 125. D'Aubuisson , Géognosie , 11,414,
417. Lrongniart, Descr. géol. , p. 5o — 56, 264 — 274. Bonnard , Ter-
rains , p. 2 1 7.
§. 39. Brongniart, Descr, géol., p. 57 — Oo, 275 — 320. Beudant,
Hongrie, III, 282 —288.
§.40. Bucli, Geogn. Beob, , II, 172 — 190. Id. , dans Mag. nat. Fr. ,
1809. p. ^99 — 3o3 ; Id., dans Mém. de Berlin, 1812, p. 129 — i54.
Fleiniau de Bellcvue, Journ. de jihjs. , LI et LX. Cordier, Mém. sur
les substances minérales , dites en masse , qiti entrent dans la composi-
tion des roches volcaniques , p. 17 — 69. Bustamente sobre las Imas del
Padregul de San Augustin de la Cuevas , dans le Seman. de Mexico.
1820, p. 80. Leonhard , Proprsdeulik , p. 168 — ijS. Ramond, JVivelle-
ment barométt ique et géognostique de l' Auvergne , p. 32- — 45. Breislak,
Introd. Il la géologie , \, 234, 261, 3i6. Heini, Thûringer-JVald, p,
229. Singer, dans Karsttn's Archiv fiir Bergbaukunde , ill , 88. Robi-
quet, dans Annales de physique et de chimie , XI, 206. Nose, Kieder-
rheinische Reise , II, p 428. Boue, Ecosse, p. 219 — 287. Beudant,
Hongrie, 111,298 — ^\4- numhoidt. Essai sur la géographie des plantes ,
et tableau phjsique des régions équinoxiales , p. 129; Id. , Essai polit. ,
I, 249 — 254; là., Nivellem. géogn. des Cordillères , dans le Recueil
d'obs. asfron., I, 309 — 3ii, 327. 332; Id. , Recueil d'ohs. de zool. et
d'anat. comparée, 1, 21; Id., Relat. kist. , l , 91, >i6, 1.9^ i33, i36,
148, i5. , i53 — i55 , 171 , 176, 180, 3o8, 3 12, 394, 640; II, 4,
14, i6, 20, 25, 27, 39, 452, 5i5,5b5, 719.
INDI, MAHA-INDI {Bot.) -. noms donnés, dans l'île de
Ceilan, au palmier dattier, pl:œni.T. (J. )
INDIAMAS. [Bot.) Le grand Recueil des voyages, publié
par Théodore Debry , fait mention de plusieurs espèces dç
30.
386 ^ IL\D
fruits que l'on poi'ie clans les marchés de la Guinée , et nom-
mément des bananes, des bachoves et des indianias; mais il
n'ajoute rien qui puisse faire connoitre la plante qui produit
ces derniers. ( J. )
INDIANISK STOR {Ichthjol.) , nom suédois du guacari,
h^'postomus guacari. Voyez Hypostome. (H. C.)
JNDJx\NITE. (Min.) C'est une des substances minérales
qui accompagnent assez ordinairement le corindon adamantin
de Carnate, et qui, comme on le dit, lui sert de gangue.
Quoique ce minéral ne se soit pas encore présenté cristallisé,
et par conséquent doué de toutes les propriétés qui lui sont
particulières, M. le comte de Bournon, n'ayant pu le rapporter
à aucune espèce minérale connue , a cru devoir le distinguer
par la dénomination spécifique d'indianite et par les carac-
tères suivans.
On n'a encore vu ce minéral que sous forme de masse
granuleuse à grains assez gros , ce qui lui donne l'aspect d'un
grès; ils sont généralement très-adhérens. Chaque grain a une
structure laminaire; les lames semblent , par leur incidence,
indiquer un rhomboïde obtus.
L'indianite pure est incolore ou un peu grisâtre, et trans-
lucide. Lorsqu'elle est verte ou rougeàtre , elle doit ces cou-
leurs soit à l'épidote, soit au grenat.
Sa pesanteur spécifique est, suivant M. de Bournon , de
12,742 , et jiar coiiséquent un peu plus l'orte que celle du
felspath.
Ce minéral raie le verre, mais il est rayé par le felspath.
11 ne paroît pas électrique par frottement. Il ne fait pas
effervescence avec l'acide nitrique , mais ses parties perdent
dans cet acide leur adhérence et y font même quelquefois
gelée. Il est absolument infusible au chalumeau. M. Chenevix,
qui l'a analysé , y a trouvé :
Silice 42,5
Alumine 37,5
Chaux j5
Fer 5
Manganèse , une trace.
IND • 387
L'indianite, outre le corindon qu'elle enveloppe, est sou-
vent associée avec l'amphibole noir, l'épidote , le grenat, du
quarz, du talc.
Elle est très -susceptible de s'altérer par les météores at-
mosphériques. (B.)
INDICATEUR. {Ornith.) M. Vieillot a établi sous ce nom,
en latin indicator, un genre qui , dans ce Dictionnaire ( tom.
XI, pag. 147), ne forme que la cinquième section des coucous.
(Ch. D.)
INDICOLITHE. {Min.) M. Dandrada a regardé ce minéral
d'Uton , en Suède , d'une couleur bleu-foncé d'indigo , comme
une espèce particulière; mais on le recounoît généralement
pour une Tourmaline. Voyez ce mot. ( B. )
INDICUM. (Bot.) Rumph nomme ainsi l'indigo, indigofera
tinctoria. (J.)
INDIEN (Iclithjol.) , nom spécifique d'un calliomore de
M. de Lacépède. (Voyez Calliomore.) C'est le callionymus
indus de Liunaeus. (H. C. )
INDIGÈNES [Plantes], (Bot.) , naturelles au sol sur lequel
elles croissent , n'y ayant pas été apportées d'un autre pays.
Le chêne- rouvre , par exemple, est indigène en Europe.
La canne à sucre est indigène en Asie. Le baobab est indi-
gène en Afrique. Le mais est indigène en Amérique. La
plupart des metrosideros et des melaleuca sont indigènes dans
les Terres australes. (Mass.)
INDIGO. (Chim.) Substance colorante, provenant des végé-
taux ; considérée par la plupart des chimistes comme un
composé d'oxigène , d'azote , de carbone et d'hydrogène.
Suivant M. Dœbereiner, le carbone est à l'azote dans le rap-
port des élémens du charbon animal.
Propriétés physiques.
L'indigo, à l'état de pureté où je l'ai obtenu, le premier,
en 1807, est sous forme d'aiguilles pourpres avec des reflets
dorés , ou en poussière d'un violet pourpre. Il est plus dense
que l'eaii. Il est susceptible de se volatiliser. Sa vapeur est
d'un violet pourpre semidable à celle de l'iode. Pour ob-
server cette propriété, il sutlit de le projeter sur un fer
388 ' IND
presque rouge de feu , ou de présenter au-dessus d'un charboji
ardent un papier sur lequel on a mis l'indigo.
Il est insipide et inodore.
Propriétés chùnitjues.
a) Cas ou rindigo néprom^e pas ^altération connue.
Il est sans action sur les réactifs colorés.
Il est insoluble dans l'eau, dans l'éther hydratique . dans
l'alcool froid; dans t;»us les acides oxigénés, étendus d"eau ;
dans l'acide hydrochlorique, dans tous les liquides alcalins.
Il est très-légèrement soluble dans l'alcool bouillant, qu'il
colore en bleu.
Lorsqu'on jette de l'indigo dans l'acide sulfurique con-
centré, il se développe d'abord une couleur jaune , qui passe
bientôt au vert, puis au bleu. Il n'est pas douteux que la
couleur verte est produite par le mélange du jaune et du bleu.
La liqueur bleue est considérée comme une dissolution d'in-
digo dans l'acide sulfurique , abstraction faite de l'altération
que peut avoir subie une portion de la substance. Plusieurs
personnes l'ont désignée par l'expression de sulfate d'indigo.
Lorsqu'on sature l'acide sulfurique par une base saiiliable ,
on obtient un léger précipité bien , soluble dans un très-
grand nombre de liquides qui sont sans action sur l'indigo
pur. Ce précipité, jeté sur un fer chaud, ne produit plus
la vapeur d'un violet pourpre que répand l'indigo qui n'a
pas été dissous. Nous ignorons tout-à-fait le changement que
peut subir l'indigo par son union avec l'acide sulfurique.
La liqueur bleue qui porte le nom de bleu de Saxe, de
hleu en liqueur , dans le commerce et les ateliers de teinture,
se prépare avec l'indigo du commerce. Bergman a prescrit
le procédé suivant. On mêle intimen)ent i partie d'indigo
réduit en poudre subtile avec 7 à 8 parties d'acide sulfu-
rique à 66 . On fait digérer les matières pendant vingt-
qv.atre heures à une température de 20 à 40 degrés; après
cela on les étend de 91 parties d'eau, et on emploie cette
liqueur pour teindre la laine et la soie. 11 y a des ateliers
où l'on fait le hleu de Saxe avec 1 partie d'indigo, 6 d'acide
et 4 de potasse. Fœrner et Bancroft assurent que 4 parties
IND . 389
d'acide sulfurîque , au lieu des 7 à 8 parties prescrites par
Bergman , sont suffisantes pour cette préparation.
b) Cas où rîndigo se décompose complètement.
L"indigo , soumis à l'action de la chaleur dans une petite
cornue, donne de l'eau tenant du sous- carbonate d'ammo-
niaque, de l'hydrocyanate et de l'acétate; une huile épaisse
ammoniacale , de l'indigo sublimé en aiguilles , du gaz acide
carbonique, un gaz inflammable; enfin, un charbon azoté
abondant.
L'acide nitrique très-concentré agit avec une telle force
sur l'indigo qu'il peut y avoir inflammation, ainsi que M.
Sage Ta observé. S'il est étendu d'eau , il convertit l'indigo
en produits extrêmement remarquables, que nous avons
étudiés avec beaucoup de soin. Voici comment on peut
opérer pour se les procurer.
On met dans une cornue tubutée 4 parties d'acide nitrique
à 02'' ar. de liaumé , étendu de 4 parties d'eau. On place le
vaisseau, auquel on a adapté une alonge et un récipient, sur
un bain de sable légèrement chaud; puis on jette peu à peu
dans l'acide 2 parties d'indigo. Le mélange s'échauffe; il se
dégage beaucoup de vapeur nitreuse, de l'acide carbonique,
etc. : alors il faut retirer la cornue du bain de sable et aban-
donner les matières à la température de l'atmosphère pen-
dant vingt- quatre heures. Pendant ce temps on recueille
dans le récipient, de l'eau tenant de l'acide nitrique, de
l'acide hydrocyanique, et un peu de matière jaune amère.
On distingue dans la cornue trois substances différentes;
1° une matière concrète rougeàtre résinoïde; 2.° une matière
concrète d'un jaune orangé; 3." un liquide d'un jaune rou-
geàtre. Les deux premières se trouvent principalement dans,
la partie supérieure du liquide.
On sépare les substances solides de la substance liquide;
on les fait égoutter , on les lave avec un peu d'eau froide : on
réunit le lavage avec le liquide jaune.
En faisant bouillir les deux matières concrètes dans l'eau,
la seconde se dissout , tandis que la matière résinoïde se
fond à la surface de l'eau; par le refroidissement, celle-ci se
fige, et l'autre se dépose pour la plus grande partie sous h.
oc)0 r IND
forme de cristaux. On enlève la matière résinoïde et on la
purifie en la lavant avec de Teau , la dissolvant dans l'alcool
chaud, et précipitant la solution par l'eau. La matière oran-
gée est un composé d'un corps que nous avons appelé amer
au minimum d'acide nitrique, et d'un peu de ma'ière résinoïde.
L'eau d'où elle s'est séparée par le refroidissement, doit être
ajoutée au liquide n.° 3. Celui-ci, étant un peu concentré,
I.isse déposer par le refroidissement des cristaux d'amer au
ïninimum, retenant encore de la matière résinoïde, et des
cristaux d'amer de TVelther , que nous nommerons aiissi amer
au maximum d'acide nitrique. Comme celui-ci est plus soluble
que le premier . il est facile de les séparer par la cristallisa-
tion. L'eau -mère des dewx amers, concentrée, donne une
matière qui a l'apparence d'une huile rouge. Enfin , le li-
quide , séparé de celle-ci et évaporé à siccité, laisse un résidu
qui est formé des mêmes principes que celte huile , avec la
diflTérence des proportions : il contient en outre de l'acide
oxalique. Cette huile est formée des deux amers de résine
et peut-être d'acide nitrique. JNous renverrons l'examen de
ces produits au mot Substances tannantes artificielles. Nous
nous résumerons, en disant que l'acide niti'ique change l'in-
digo en quatre substances concrètes .- i.° en matière résinoïde ;
2.° en amer au minimum d'acide nitrique ; 5." en amer au maxi-
mum diacide nitrique; /(.° en acide oxalique.
c) Cas oii l indigo perd sa couleur bleue sans s^altérer
essentiellement , vuisauil est susceptible de reprendre sa
couleur bleue par le contact de l'oxigène.
L'indigo , mis en contact avec les alcalis les plus énergiques ,
n'en éprouve aucune action sensible , ainsi que nous l'avons dit
plus haut. Le résultat est le même avec tous les combusti-
bles simples et presque tous les combustibles composés qui
ne sont pas alcalins. Mais les phénomènes sont absolument
diflérens si l'on met, dans de l'eau privée d'air, de l'indigo
en poudre avec un alcali énergique , tel que la potasse ou la
soude, et un corps combustible, tel que des protoxides de
fer, d'étain , du sulfure d'arsenic, du sulfure d'antimoine.
Au bout d'un certain temps on trouve que la matière com-
bustible s'est oxigénée ; et , en second lieu , que lindigo a perdu
IND • 091
sa couleur bleue, et qu'il a formé avec la potasse ou la soude
un composé soluble dans l'eau. On observe en outre, 1°
qu'en neutralisant l'alcali par un acide, on obtient un pre'--
cipité dindigo d'un blanc jaunâtre ; 2.° qu'en mettant le
précipité en contact avec l'oxigéne de l'air, il repasse sur-le-
champ à l'état d'indigo bleu. 11 n'est pas nécessaire, pour
que cet efFet soit produit, de saturer l'alcali par un acide.
Ces faits sont susceptibles d'être expliqués de deux ma-
nières : 1 ." En admettant que l'indigo décoloré est de l'indigo
désoxigéné. Dans cette hypothèse, on dit que l'indigo bleu ,
qui est en contact avec la potasse et le protoxide de fer, par
exemple, cède son oxigène mi protoxide, et qu'ainsi désoxi-
géné , il s'unit à l'alcali, qu'il sature à la manière d'un acide.
On ajoute que, quand cette solution alcaline a le contact de
l'air , l'oxigéne est absorbé ; l'indigo reparoit avec sa cou-
leur bleue, et perd en même temps son affinité pour la po-
tasse. 2." En admettant que l'indigo décoloré est de Vindigo uni
à de l'hydrogène , ce qui revient à considérer l'indigo déco-
loré comme un hjdracide dont le comburent est l'indigo bleu.
Dans cette hypothèse on dit que, quand l'indigo bleu est en
contact avec l'eau, la potasse et le protoxide de fer. il y a
une portion d'eau qui est décomposée ; pendant que son
oxigène se porte sur le protoxide, son hydrogène s'unit à
l'indigo, et donne naissance à un hydracide qui sature la po-
tasse.
La première explication a été généralement admise jusqu'à
la théorie du chlore; mais depuis cette époque elle a perdu
beaucoup de ses partisans. Ainsi, en Allemagne, M. Dœ-
bereiner la rejetée pour adopter la seconde : il a nommé
l'indigo décoloré acide isatinique. M. Berthoîlet a eu le grand
mérite devoir, plusieurs années avant la théorie du chlore,
que tous les phénomènes attribues à la désoxigçnation de
l'indigo pouvoient s'expliquer en admettant la combinaison
de ce corps avec l'hydrogène. 11 a fait, pour la théorie de
l'indigo qui est aujourd'hui la plus vraisemblable, ce que
MM. Gay-Lussac et Thenard avoicnt fait pour l'acide muria-
tique oxigéné avant le travail de M. H. Davy.
J'ai reconnu, il y a long-temps, que l'indigo hydrogéné
étoit précipité, à l'éiat d'une matière floconneuse d'un blanc
r
jaunâtre, de ses solutions alcalines, lorsqu'on neutralisoit
celles-ci par un acide. En outre j'ai observé l'indigo hydro-
géné cristallisé en 1807. Voici les circonstances où je fis cette
observation. Après avoir épuisé le pastel du commerce de
tout ce qu'il contient de soluble dans l'eau bouillante, je
l'avois traité à plusieurs reprises par l'alcool bouillant. Les
seconds lavages que j'obtins, ayant été concentrés dans une
cornue, déposèrent de l'indigo en petites paillettes pourpres.
La liqueur filtrée, concentrée de nouveau dans une cornue,
puis refroidie lentement, avoit déposé, an bout de huit
heures, de petits grains qui paroissoient blancs, et qui,
ayant été exposés à l'air , acquirent le pourpre métallique
de l'indigo sublimé.
Le deutoxide de cuivre, mis en contact avec l'indigo hy-
drogéné, en sépare sur-le-champ l'hydrogène. J'ignore si le
cuivre est complètement désoxidé , où s'il est seulement
ramené à l'état de protoxide.
L'indigo, dissous dans l'acide sulfurique, est décoloré, sui-
vant l'observation de M. Vauquelin , quand on sature sa
dissolution, étendue d'eau, d'acide hydro-sulfurique; il suffit
d'exposer la liqueur à l'oxigène pour faire reparoitre la cou-
leur bleue.
Elat de l'indigo dans les ve'ge'taux ; extraction et
purijication de l'indigo du commerce.
D'après des expériences que j'ai faites en 1807 et en 1811,
je me suis assuré que l'indigo existoit tout formé dans les
végétaux, et qu'il n'étoit pas, comme on l'avoit généralement
pensé jusqu'alors , le produit d'une fermentation de la plante.
Je retirai l'indigo de Visatis tinctoria et de Vindigofera anil,
cultivés à Paris, sans que ces plantes eussent éprouvé la
plus légère fermentation. Voici l'expérience qu'on peut faire
pour s'assurer que l'indigo est à l'état incolore dans les feuilles
de pastel. On remplit un ballon d'eau; on fait bouillir celle-
ci pendant quelque temps; ensuite on renverse le vase qui
la contient sur le mercure, et on la fait passer dans une
cloche pleine de ce métal. Quand la température de l'eau
est à 35''centig. , on introduit dans la cloche des feuilles de
pastel déchirées. On maintient la température du liquide à
IND " 395
35° pendant deux ou trois heures: l'eau devient jaune rou-
geàlre; elie dissout de Tindigo , des principes colorans jaune
et rouge , etc. On la fait passer dans une cloche remplie de
mercure ; on y mêle de l'eau de chaux qui a bouilli , et
qu'on a laissée refroidir sur le mercure : la couleur devient
orangée; il se dépose peu à peu des flocons blancs qui tirent
très-légèrement au verdàtre '. On agite la liqueur, on en fait
passer la moitié dans une cloche contenant, du gaz oxigène ,
et aussitôt il se manifeste une couleur bleue foncée, qui
finit par se déposer en flocons, tandis que la liqueur qui
n'a pas eu le contact de l'oxigène, ne se colore pas. 11 ne
faut que peu d'oxigène pour rendre l'in'digo bleu ; car, si
l'on verse de l'eau de chaux non bouillie dans la liqueur
jaune , on obtient un précipité qui parolt vert tant qu'il
est suspendu dans la liqueur jaune où il s'est formé , mais
qui est bleu quand il est déposé : il est certain que dans
ce cas c'est l'oxigène atmosphérique contenu dans l'eau de
chaux qui fait passer l'indigo au bleu. S'il en étoit autre-
ment, pourquoi l'eau qui a digéré sur les feuilles de pastel,
ne seroit-elle pas bleue ouverte, et pourquoi l'indigo qu'elle
contient se décomposeroit-il avec tant de rapidité? car on
ne retrouve plus d'indigo dans cette liqueur abandonnée à
elle-même pendant vingt-quatre heures.
On peut voir, tome XVI, page 88 , le résultat de l'analyse
que j'ai faite, en 1811 , des feuilles de pastel. J'exposerai
maintenant celui de l'analyse de plusieurs indigos du com-
merce.
Analyse d'un indigo de commerce.
Exlrait aqueux.
1. De l'indigo réduit en poudre fine a été traité par l'eau
distillée à une température de 60 à 80 degrés centigrades j
1 Ce précipité est principalement formé de matières terreuses :
lorsqu'on a opéré sur une infusion riche eu indigo, et lorsqu'on n'y a
versé que très-peu d'eau de chaux, il peut contenir de l'indigo hydro-
géné; mais, dans le cas où la chaux a été employée en excès, il n'en
contient pas ou presque pas; la totalité ou la presque- totalité de ce
principe reste eu dissolution.
^94 ' IND
lorsque l'eau ne s'est plus colorée, on a fait concentrer les
lavages qui contenoient de Tindigo en suspension, et on les
a filtrés dans un papier double. L'eau filtrée étoit d'un jaune
rougeàtre : le produit qu'elle a donné à la distillation étoit
trcs-ammoniacal et aromatique; il ne paroissoit pas contenir
de soufre , car il étoit sans action sur les papiers imprégnés
de dissolutions métalliques. La liqueur concentrée par la
distillation a déposé , lorsqu'on l'a fait évaporer dans une
capsule, de l'indigo d'un beau bleu et des flocons verts, qui
éloient formés d'une combinaison de matière animale, de
principe colorant jaune et d'indigo. On a séparé ces flocons
par le filtre ; on a fait concentrer la liqueur , puis on l'a
mêlée à l'alcool ; on a renouvelé celui-ci jusqu'à ce quil ait
cessé d"avoir de l'action sur le résidu.
A. Résidu insoluble dans l'alcool.
2. Il étoit jaunâtre, mais en se desséchant il est devenu
brun; on l'a traité par l'eau : tout a été dissous , à l'excep-
tion de quelques flocons bruns, qui ont pris une couleur grise
rougeàtre par la dessiccation. Ces flocons contenoient un
peu de la combinaison de matière animale et de principe colo-
rant jaune , beaucoup ôe phosphate de chaux et de pliosphate
de magnésie , et un peu cVoxidt de fer. Ils ont donné du car-
bonate d'ammoniaque à la distillation , et un charbon très-
abondant, dont la cendre ne faisoit qu'une très-légère effer-
vescence avec l'acide hydrochlorique.
3. L'eau qui avoit été en contact avec le résidu insoluble
dans l'alcool (2), a été concentrée; elle étoit d'un jaune-brun
rougeàtre. Elle contenoit, ].° une combinaison de principe co-
lorant jaune de matière animale et d'un acide végétal dont je
n'ai pu déterminer précisément la nature ; cette combinaison
donnoit à la distillation de l'acétate d'ammoniaque très-acide:
2." du sulfate de potasse : 3." du phosphate de magnésie : 4." du
phosphate de chaux. Ce qu'il y a de remarquable, c'est que
l'ammoniaque versée dans la liqueur n'en précipitoit que du
phosphate ammoniaco - magnésien ; le phosphate de chaux
restoit en dissolution, et pour le découvrir il falloit faire
évaporer la liqueur et en incinérer le résidu.
IND '^ 395
B. Matières solullcs dans l'alcool de V extrait aqueux (1).
4. La solution alcoolique (i) a été évaporée; quand tout
l'alcool a été chassé , il s'est fait un dépôt de matière d'un
rouge brun; celle-ci a été traitée par l'alcool, et le lavage a
été réuni au liquide d'où elle s'étoit séparée: après ce traite-
ment , elle s"est comportée comme une combinaison de ma-
tière animale de principes colorans jaune et rouge, et d'un acide
végétal. Elle a donné à la distillation du carbonate d'ammo-
niaque et un produit dont l'odeur approchoit de l'indigo
qui brûle.
5. La partie soluble dans l'alcool (4) a été évaporée jusqu'à
siccité ; le résidu, mêlé à l'alcool, a laissé déposer une com-
binaison analogue à la précédente, si ce n'est qu'elle conte-
noit moins de matière animale. Lorsqu'elle eut perdu l'al-
cool qui la pénétroit, elle ressembloit à une résine; mais
elle en différoit par sa solubilité dans l'eau.
6. La solution alcoolique (5), concentrée et mêlée à l'eau,
a précipité une matière qui étoit redissoute quand on chauf-
foit le liquide, et qui ne différoit de celle du n.° 5 que parce
qu'elle contenoit plus de principes colorans : la liqueur fil-
trée précipitoit la gélatine à la manière d'un tannin ; les
acides y faisoient des précipités de combinaison de matière
animale, de principe colorant et d'acide; l'acide sulfurique
en dégageoit en même temps de l'acide acétique. Outre ces
matières, la liqueur contenoit encore de la potasse et de
l'ammoniaque unies à de l'acide acétique , du chlorure de po-
tassium , des atonies de phosphate de magnésie et de sulfate
de potasse.
6lis. L'alcool avoit donc enlevé à l'extrait aqueux, outre
un peu de chlorure de potassium , de sulfate, d'' acétate dépotasse,
d'aoétaie d'ammoniaque et de phosphate de magnésie, une com-
binaison de matière animale , de principes colorans et d'un
acide végétal, laquelle, traitée successivement par l'eau et
l'alcool, s'est réduite en deux combinaisons, dont l'une étoit
avec excès de matière animale , et l'autre avec excès de
principes colorans et d'acide : celle-ci avoit la propriété
astringente.
39S » I^D
Extrait alcooIi(jfiie.
7. On a fait digérer de l'alcool sur rindigo qui avoit été
traité par Teau ; on a réuni les sept premiers lavages et on
les a distillés : l'alcool qui a passé d'abord , ne contenoit
pas de quantité notable de principes étrangers ; mais celui
qui a passé ensuite, avoit une odeur un peu sulfurée. Ce-
pendant, l'ayant mêlé à du chlore et à du chlorure de ba-
rium , il n'a point donné de sulfate de baryte. Le résidu de
la distillation , qui étoit encore très-alcoolique, a été mêlé à
de l'eau , puis chauffé : quand tout l'alcool a été évaporé,
on a filtré ; une matière rouge, qu'on a appelée résine, est
restée sur le papier. La liqueur filtrée étoit d'un jaune rou-
geàtre; elle a donné à la distillation un produit très-odorant,
qui tenoit de Tammoniaque en dissolution et un peu de ma-
tière colorée en suspension.
8. Le produit odorant a donné à la distillation un liquide
limpide et incolore qui avoit l'odeur de l'indigo, c'est-à-dire,
celle dont sont imprégnées les étoffes qui ont été teintes en
bleu de cuve et qui n'ont pas été suffisamment lavées. Le
résidu de la distillation étoit odorant: il ne contenoit pas
sensiblement de matière huileuse; car, l'ayant fait évaporer
doucement et ayant repris le résidu par l'alcool, celui-ci
ne s'est pas troublé lorsqu'on l'a mêlé à l'eau : cependant
l'alcool contenoit une quantité sensible de principe odorant.
Quoi qu'il en soit, cette expérience ne prouve pas absolu-
ment que le principe odorant ne soit pas d'une nature hui-
leuse , parce qu'il est possible que la petite quantité de
matière mise en expérience n'ait pas permis d'apercevoir le
trouble qui auroit pu avoir lieu avec une solution plus
chargée.
9. Le liquide jaune , qui avoit donné du principe odorant
(8), a été évaporé dans une capsule, et a déposé une matière
à demi fondue, un peu rougeàtre , et des flocons d'un jaune
brun ; il est resté une liqueur d'un beau rouge orangé.
10. Matière demi-fondue. Elle étoit formée de matière ani-
male, colorée par du principe jaune et un peu de principe
rouge. Elle rougissoit le papier de tournesol. Les flocons
d'un jaune brun n'en différoient que par la proportion de
ees principes.
• IND . 597
11. Liqueur d'un leau rouge orangé. Elle avoît une saveur
assez amère et un peu astringente; cependant elle ne préci-
piloitpas par la gélatine : elle déposoit, après avoir été con-
centrée , une matière jaunâtre qui devenoit rouge en se
desséchant, et qui ressembloit alors à un extrait. Cette ma-
tière étoit acide ; elle donnoit à la distillation beaucoup de
carbonate d'ammoniaque et d'huile : elle contenoit donc de
la matière animale. Le produit avoit l'odeur qu"exhale l'in-
digo du commerce qu'on projette sur un charbon , de sorte
que je ne doute pas que la matière jaunâtre ne contribue à
lui donner cette propriété. La matière jaunâtre étoit ana-
logue à la matière demi-fondue (10); elle paroissoit seule-
ment contenir une moindre quantité de matière animale. La
liqueur d'où elle s'étoit déposée, étoit d'un rouge jaunâtre;
elle devoit cette couleur à un mélange de principe colorant
jaune, et de pi'incipe colorant rouge, que je crois analogue
à la résine. Lorsque cette liqueur a été étendue d'eau , puis
évaporée, elle a déposé une poudre d'un très-beau rouge,
qui étoit peu soluble dans l'alcool et insoluble dans l'eau.
La liqueur, mêlée à l'acide sulfurique, laissoit précipiter
un dépôt semblable à la matière jaune qui étoit formée de
matière animale, d'acide et de principes colorans : il se dé-
gageoit en même temps de l'acide acétique. La liqueur,
d'un beau rouge orangé, étoit donc principalement formée
de matière animale, de principes colorans et d'acide acétique.
On y reconnut de plus des acétates de chaux et de magnésie.
Examen de la résine rouge (7).
12. On l'a purifiée par l'eau bouillante : ce liquide a dis-
sous du principe colorant jaune, de la matière animale, du
principe odorant , et, ce qu'il y a de remarquable, un peu
de résine : ce résultat peut faire croire que la liqueur rou-
geâtre du premier lavage aqueux de Tindigo peut être due,
au moins en partie, à cette résine. La résine a été dissoute
par l'alcool , puis précipitée par l'eau; enfin, traitée parce
liquide bouillant, jusqu'à ce qu'elle ne lui ait plus rien
cédé. La résine, lavée et séchée, a été mise en digestion avec
différentes quantités d'alcool, à la température de jo degics:
le premier alcool avoit une couleur rouge, mêlée d'un peu
598 , INI)
de jaune ; les autres lavages tiroient de plus en plus sur le
violet, parce qu'ils avoient dissous avec la résine une cer-
taine quantité d'indigo; enfin, le résidu étoit formé dïn-
digo retenant un peu de matière animale et de résine rouge.
La meilleure manière de séparer la résine de l'indigo qui
s'est dissous avec elle, est de faire évaporer la solution à
siccité, et de traiter le résidu par l'éther hydratique froid.
L'indigo est séparé, et, en faisant évaporer l'éther, on obtient
une résine rouge qui n'exhale pas de vapeur pourpre quand
on l'expose à l'action de la chaleur.
i3. La résine rouge est insoluble dans l'eau; elle est plus
soluble dans l'éther que dans l'alcool. Ces dissolutions sont d'un
très-beau rouge tirant très-légèrement sur Je pourpre; quand
elles ont une teinte écarlate , elles contiennent un principe
colorant jaune. La solution alcoolique est troublée par l'eau;
plusieurs acides en précipitent des flocons rouges. La résine
ne paroît pas se dissoudre dans les alcalis ; ces corps n'en
changent pas la couleur.
14. L'indigo qui avoit subi sept lavages alcooliques, fut
traité par l'alcool bouillant jusqu'à ce qu'il colorât ce liquide
en bleu. Ces lavages contenoient proportionnellement plus
de résine et d'indigo que les premiers, et cela devoit être,
d'après les faits qui sont exposés (n.° 12).
Indigo et acide hydrochlorique.
i5. L'indigo a été soumis à l'action de l'acide hydrochlo-
rique. Celui-ci a dissous de Voxiàe de fer , de Valuminc, des
phosphates de chaux, de magnésie, et des carbonates de ces
hases.
16. Enfin, on a achevé de purifier l'indigo en le traitant
par l'alcool bouillant, jusqu'à ce que le liquide se teignit
d'un bleu franc.
Tous les indigos du commerce ne se comportent pas abso-
lument de la même manière que celui dont nous venons de
parler. Par exemple , les indigos de Java , de Guatimala et
de Chine donnent à l'eau une matière que j'ai appelée verte ,
et qui a quelques propriétés remarquables : on l'obtient en
traitant par l'alcool froid et concentré l'extrait des lavages
aqueux. La solution alcoolique est d'un beau rouge; elle est
• IND • 399
iégèrement acide; elle ne se trouble pas quand ou la mêle avec
l'eau. La solution aqueuse de cette matière devient verte par
les acides : si ces corps sont concentrés, ils forment des flocons
verts qui sont une combinaison dacidc et de principe colo-
rant. La combinaison d'acide sulfurique et de principe co-
lorant se dissout dans l'alcool. La solution, vue en masse,
est rouge , tandis que la surface est verte. Quand on la
mêle à feau , elle ne précipite pas, mais elle devient verte.
Il paroit que , dans le cas où la combinaison est dissoute par
l'alcool , ce liquide affoiblit l'action de Facii'e sur la couleur,
et que , quand o'i ajoute de l'eau , celle-ci diminue i'aflinité
de l'alcool, et permet à l'acide de réagir avec sa première
énergie sur le principe colorant.
Quelques indigos m'ont présenté dans leurs lavages alcoo-
liques une matière bleue qui n'étoit pas de findigo , et qui
m'a paru susceptible de passer au rouge dans plusieurs cir-
constances.
Les indigos du commerce perdent dans la purification de
55 à 65 pour cent de matières étrangères à l'indigo.
L'indigo est une des substances organiques les plus pré-
cieuses pour la teinture. Il n'en est aucune qui lui soit com-
parable sous le rapport de la solidité, lorsque l'indigo a été
appliqué sur les étoffes à l'état d'indigo hydrogéné; car les
étoffes teintes avec la dissolution sulfurique en bleu dit de
Saxe, sont loin d'avoir une couleur aussi solide que celles
qui l'ont été avec l'indigo hydrogéné.
Nous allons indiquer très -brièvement les procédés au
moyen desquels on applique l'indigo sur les étoffes de laine,
de soie, de coton et de lil.
Etoj^es de laine.
On fait usage , i." de la cuve de pastel; 2." de la cuve d'Inde;
5.° de la cuve à V urine.
Cuve de pastel.
On la prépare en jetant sur du pastel que l'on a disposé
au fond d'une cuve de bois, une décoction de gaude , de ga-
rance et de son (la partie indissoute de la garance et du son
4oo , ÎND
se trouvent en suspension dans la décoction). On couvre la
cuve; on la laisse en repos pendant six heures: ensuite on
la pallie ])endant une demi-heure. On l'abandonne pendant
trois heures; on la pallie ensuite, et cela jusqu'à ce qu'il se
manifeste à la surface du liquide des veines bleues : alors
on y introduit de la chaux vive et de l'indigo moulu avec
de l'eau.
La cuve est en état de teindre , lorsqu'elle est recouverte
d'une belle pellicule cuivrée.
Je vais exposer quelques propriétés que j'ai reconnues ,
en 1814, à une cuve de pastel qu'un des teinturiers de
Reims les plus distingués, M. Oudin , me permit d'examiner
dans ses ateliers.
La liqueur de cette cuve étoit d'un beau jaune : elle exha-
loit une odeur d'ammoniaque et d'hydrosulfale de cette base;
exposée au contact de l'air, elle se couvroit d'une pellicule
bleue-violette.
Un courant de gaz acide carbonique qu'on y fit passer, en
précipita de la chaux à l'état de carbonate et de l'indigo ; il
se maidfesta une odeur de bouillon, que j'attribue à un
principe volatil que j'ai rencontré dans les feuilles de pastel ,
et que j'ai comparé à l'osmazome ; enfin il se dégagea de
l'acide hydrosulfurique.
La liqueur donna à la distillation, 1." de l'ammoniaque pure
(l'acide hydrosulfurique fut retenu par la chaux); ■j."\eprin-
cipe aromatique de l'indigo. Enfin, la liqueur distillée avec
l'acide sulfurique donna del'ûciiie hydrosulfurique et àeVacide
acétique en quantité notable.
Je suis porté à croire que dans cette cuve l'indigo étoit
dissous et par la chaux et par l'ammoniaque, et que celle-ci
s'y trouvoit à l'état caustique : l'excès d'eau de chaux s'op-
posoit à ce qu'il y eût de l'acide carbonique dans la liqueur.
Cuve d'Inde.
On la prépare en faisant bouillir du son et de la garance
dans une lessive de cendres gravelées , puis ajoutant à ces
matières de l'indigo broyé à Feau.
Celte cuve ne présente pas autant de diflicultés dans sod
usage que la cuve de pastel; elle est plus riche en couleur,
• IND . 401
maïs elle est moins économique. Les draps qu'on y passe
sont plus doux que ceux qui sont teints dans l'autre cuve.
Cuve à Vurine.
On la prépare avec de Turine, de l'indigo, de la garance
et une substance acide qui est ou du vinaigre ou un mélange
de tartre et d'alun. Dans cette cuve l'indigo hydrogéné est
uni à l'ammoniaque.
Eloffes de soie.
On les teint dans la cuve d'Inde ; mais celle-ci doit con-
tenir une proportion d'indigo plus forte que celle qu'on
emploie pour les étoffes de laine.
La soie a moins de tendance que la laine à prendre l'in-
digo : c'est pour cette raison que, dans la préparation des
bleus foncés, tels que le lieu de roi et surtout le hleu turc ,
on plonge la soie dans un bain d'orseille , avant de la plonger
dans le bain d'indigo.
Etapes de coton et de lin.
On les teint dans des cuves où l'indigo hydrogéné est uni
à la potasse ou à la chaux. Dans ce cas on ajoute à la matière
alcaline du sulfate de protoxide de fer : il se produit alors
du sulfate de potasse ou de chaux. Le protoxide qui est mis
à nu, se combine avec l'oxigéne de l'eau , tandis que l'hy-
drogène de ce même liquide forme avec l'indigo et l'alcali
libre un composé soluble.
On peut encore teindre le coton et le fil dans une cuve
où l'indigo, dissous par la potasse, s'est uni à l'hydrogène
par l'intermède de l'orpiment ou sulfure d'arsenic.
Le hleu d'application, dont on fait un si grand usage pour
les toiles peintes, ne difiere de la cuve précédente que par
une proportion plus forte d'orpiment et d'indigo.
Bleu de Saxe.
Le lieu de Saxe ne peut servir à la teinture du fil et des
étoffes de coton. Appliqué sur la soie , il la teint en bleu :
la couleur résiste à l'eau ; mais elle est enlevée par l'eau de
savon. La laine , préparée avec l'alun et le tartre , se teint
mieux que la soie, surtout si on ajoute au bleu de Saxe une
23. «6
4o2 , IND
petite quantité rie potasse ; mais cette teinture n'est jamais
très-solide : l'eau de savon Taltère sensiblement: elle en
affoiblit la nuance, en même temps qu'elle la fait tourner
au Jaune. (Ch.)
INDIGO BATARD DE CAYENNE. (Bot.) C'est, suivant
M. Richard , le cassia occidentalis. On donne aussi le même
nom et celui de faux indigo à Vamorplia. ( J.)
INDIGO DE LA GUADELOUPE. {Bot.) Dans les colonies
on désigne par ce nom le crotolaria incana. Voyez Crotolaire
blanchâtre , à l'arlicle Crotolaire. (Lem.)
INDIGOLITHE. (Mm.) Voyez Indicolithe. (Lem.)
INDIGOTIER, Indigofera. {Bot.) Genre de plantes à fleurs
complètes, papillonacées , de la famille des légumineuses,
de la diadelphie décandrie àe Linnaeus; offrant pour caractère
essentiel : Un calice à cinq dents; une corolle papillonacée;
la carène munie de chaque côté d'un éperon subulé, étalé;
un ovaire supérieur, surmonté d'un style court, ascendant,
et d'un stigmate obtus. Le fruit est une gousse oblongue ,
linéaire, un peu cylindrique, droite ou courbée, renfer-
mant plusieurs semences.
Ce genre est intéressant par les espèces qu'il renferme en
très-grand nombre, parmi lesquelles plusieurs fournissent ce
bel indigo si répandu dans le commerce. 11 se rapproche beau-
coup des galégas, distingué par ses gousses menues, rarement
comprimées. U comprend des herbes ou arbustes à feuilles
ternées, rarement simples, plus souvent ailées avec une im-
paire; quelquefois les folioles sont articulées et comme aris-
tées à leur base; les fleurs petites, ordinairement disposées
en grappes axillaires.
'* Indigotiers a feuilles ailées.
Indigotier franc : Indigofera anil , Linn. ; Lamk. , III. gen,,
lab. 626, fig. 2; Rumph., Amb. , 5, tab. 80. Cette espèce,
une des plus intéressantes de ce genre, est un petit arbuste
de deux ou trois pieds de haut, dont la tige est droite , cy-
lindrique, rameuse, blanchâtre, chargée de poils courts et
couchés. Les feuilles sont alternes, pétiol'^es , ailées avec une
impaire, composét^s de neuf à onze f(dioles ovales -obtuses,
entières, un peu blanchâtres en -dessous, à peine longues
• IND • 4o3
d'un pouce; des stipules petites, subulêes. Les fleurs sont
petites, d'un vert rougeàtre ou pourpré, disposées en grappes
fort courtes, simples, coniques, moins longues que les feuil-
les ; les calices couverts de petits poils couchés et blanchâtres;
les bractées sétacécs. Les fruits sont des gousses grêles ,
longues de huit à dix lignes , courbées en faucille , presque
glabres, bordées par la saillie latérale de leurs sutures, ren-
fermant cinq à six semences quadrangulaires. Cette p'ante
croit dans les Indes orientales. On la cultive dans les Antilles
et dans plusieurs autres contrées de l'Amérique méridionale,
pour eu obtenir cette belle couleur bleue connue sous le
nom d'indigo.
L'indigo est une fécule précipitée, desséchée et réduite en
masses solides , légères, cassantes , d'un bleu dazur très-foncé.
Les teinturiers l'emploient, avec le pastel, pour teindre en
bleu les étoffes de soie et de laine; les peintres s'en servent,
en le mêlant avec d'autres couleurs , dans la peinture en
détrempe; les blanchisseuses l'emploient pour donner une
teinte bleuâtre à leur linge.
L'indigo est d'un usage si répandu, d'un prix si excessif
lorsque les relations commerciales sont interrompues, qu'on
s'est proposé , il y a quelques années, d'en essayer la culture
en France, surtout dans les départemens méridionaux : on a
trouvé peu de localités qui lui soient favorables, excepté
quelques endroits aux environs de Toulon, deNarbonne, etc.
Mais, la valeur territoriale de ces terrains étant fort élevée,
on n'auroit pu mettre l'indigo qu'ils auroient produit en
concurrence pour le prix avec celui des colonies; ce qui a
déterminé à se rejeter sur le pastel, et à en perfectionner la
culture, pour en obtenir une couleur bleue d'une belle qua-
lité.
Dans les colonies américaines, la culture de l'indigo riva-
lise presque avec celle du sucre et du café , quoiqu'elle soit
moins productive; mais aussi elle n'exige pas d'aussi grandes
avances, et les résultats en sont plus prompts. Les terrains
nouvellement défrichés sont ceux où l'indigo réussit le mieux,
parce qu'ils conservent la portion d'humidité nécessaire à sa
croissance. Des abris naturels ou artificiels contre les grands
vents sont très-avantageux pour sa végétation : on doit en
404 , IND
conséquence préférer de le semer sur le bord des bois, dans
les vallons, et, lorsqu'on ne le peut pas, l'entourer d'une
lisière de roseau ou autres grandes plantes d'une rapide crois-
sance.
Quoique l'indigo soit un arbuste , on est dans l'usage de
le semer tous les ans, parce qu'on a remarqué que les jeunes
pieds fournissent des feuilles plus grandes et plus nombreuses.
On le sème à Saint-Domingue depuis Novembre jusqu'en Mai ,
immédiatement après les pluies; dans la parue septentrionale,
on choisit Novembre ou Décembre, époque où il tombe des
pluies amenées du nord; dans la partie sud, il faut attendre
les pluies d'orage en Mars et Avril. Lorsqu'on peut faire des
irrigations , on doit toujours semer de bonne heure.
Quoique les graines de deux ou trois ans lèvent assez bien,
il faut toujours préférer les plus nouvelles; elles lèvent au
bout de trois ou quatre jours : il faut peu après faire un
sarclage, le répéter tous les quinze jours , jusqu'à ce que les
pieds d'indigo soient assez forts pour empêcher les mauvaises
herbes de repousser. Cette plante craint la sécheresse , les
vents brûlans et impétueux , les pluies trop fortes ou trop
prolongées, les chenilles et quelques autres insectes. On s'op-
pose à la sécheresse par des irrigations , aux vents par des
abris; difficilement aux longues pluies, qui font prospérer
la plante , mais empêchent la fécule de se former. Le moment
où l'indigo doit être coupé, est celui où commencent à pa-
roitre ses premières fleurs, ce qui a lieu dans le cours du
troisième mois après les semailles. La première coupe de
l'indigo est suivie d'une seconde, six ou sept semaines après ;
d'une troisième et plus , selon la nature du terrain. En
Egypte, la culture de l'indigo est moins sujette aux accidens
qu'à Saint-Domingue, et semble mieux entendue. On choisit
pour la faire des terrains élevés, et l'on a soin de les en-
tourer d'une chaussée, pour empêcher l'inondation du Nil
d'y pénétrer, parce qu'on ne renouvelle la plante que tous
les trois ou quatre ans. Chaque année on fait quatre coupes,
deux avant et deux après la crue du Nil.
Il y a quelques variétés dans les procédés employés pour
retirer des feuilles et des tiges la fécule de l'indigo. A Saint-
Domingue, un établissement destiné à la fabrication de l'indigo
IND • 4o5
est composé de trois cuves d'une moyenne capacité, et d'un
petit vase : elles sont , au moyen d'une bâtisse en pierres ,
élevées les unes au-dessus des autres, de manière que l'eau
contenue dans la plus haute, qu'on nomme le trempiir , puisse
se vider dans la seconde, qui s'appelle la batterie, et celle-ci
dans la troisième , qu'on désigne sous le nom de reposnir. Le
petit vase, nommé le bassinot ou le diablotin, est placé entre
la seconde et la troisième cuve : il est destiné à recevoir la
fécule qui en sort, et est terminé en cul-de-lampe, pour fa-
ciliter l'enlèvement de cette fécule. Quatre poteaux soné
fixés aux coins du trempoir, et servent à maintenir les plan-
ches qu'on place sur l'indigo , pour l'empêcher d'être rejeté
dehors par l'effet delà fermentation. On emploie, pour battre
l'indigo , un instrument que l'on nomme baquet , qu'un nègre
fait mouvoir en tout sens, afin d'introduire dans l'eau la plus
grande quantité d'air possible. On emploie aussi, pour battre
l'indigo, des machines mues par des hommes, par des che-
vaux ou par un courant d'eau : le mouvement est excité par
des patelles fixées à un arbre horizontal. Toutes les eaux ne
sont pas indifférentes à la préparation de l'indigo : celles qui
sont crues, qui tiennent en dissolution de la craie ou de la
sélénite , comme celles de la plupart des puits , ne valent
rien.
On place dans le trempoir les tiges et les feuilles de l'in-
digo de manière à ce qu'elles ne soient ni trop ni trop peu
pressées; on les recouvre de trois ou quatre pouces d'eau,
et on fixe les planches qui doivent les empêcher de déborder.
La fermentation s'établit dans la masse plus ou moins rapi-
dement, selon la chaleur de l'atmosphère. On juge qu'il est
temps de l'arrêter, en mettant un peu d'eau prise dans la
cuve à diverses profondeurs , dans une tasse d'argent : si la
fermentation est parvenue au degré convenable à la prépa-
ration de la fécule , celle-ci se précipite au fond de la tasse
en grains bien caractérisés. Alors on fait écouler toute l'eau
du trempoir dans la batterie, et on l'agite en tout sens avec
les baquets. Il suffit de deux ou trois heures à une cuve
convenablement battue pour que toute la fécule qu'elle con-
tient soit précipitée; alors l'eau est très-claire , d'une belle
couleur ambrée. On ouvre d'abord le premier robinet, afin
4o6 . IND
de faire écouler, sans troubler le fond de la cuve , l'eau qui
lui est supérieure: ensuite on en fait autant au second; le
troisième est drsfiné à faire écouler dans le diablotin l'indigo,
qui resseuible alors à une vase noire liquide.
La fécule retirée du diablotin est d'abord mise dans des
sacs suspendus, afin de faire écouler l'eau surabondante; en-
suite dans des caisses plates, qu'on expose en plein air sous
des hangars, oii elle prend encore plus de consistance : enfin,
on divise la fécule en petits parallélogrammes, qu'on expose
au soleil jusqu'à ce qu'ils soient secs , du moins en apparence ;
placé ensuite en cet état dans une barrique., il y éprouve
une nouvelle fermentation , s'échauffe , rend de grosses gout-
tes d'eau , exhale une odeur désagréable , et se couvre d'une
poussière fine et blanchâtre. Au bout d'un mois, on l'ôte de
cette barrique, et on le fait sécher de nouveau; ce qui ne
deu)ande pas plus de cinq à six jours. En cet état il peut entrer
dans le commerce , quoiqu'il faille encore six mois avant
qu'il soit arrivé à son dernier point de perfection : alors il
n'est plus dans le cas de subir de déchet ni d'altération, s'il
est tenu dans un lieu bien sec.
On distingue dans le commerce plusieurs sortes d'indigo ,
qui offrent des caractères fort différens, et qui paroisscnt ce-
pendant provenir tous de la même plante. Celui de Guatimala
passe pour le meilleur, ensuite celui de Saint-Domingue.
Dans plusieurs contrées de l'Inde on sépare les feuilles
des tiges, et l'on ne met dans le trempoir que les premières.
On prétend que par cette méthode on obtient une plus
belle fécule : mais elle occasionne une grande perte de temps
et de main-d'œuvre ; elle fait perdre une grande portion de
fécule, étant certain que Técorce des tiges en contient comme
les feuilles. Les Chinois font entrer de la chaux dans le trem-
poir, comme nos teinturiers dans leur cuve ; mais il est tou-
jours possible de s'en dispenser, lorsqu'on sait conduire con-
venablement la fermentation et l'arrêter à propos. Sur la
côte occidentale d'Afrique , on fabrique l'indigo comme
nous fabriquons le pastel en France : on pile les feuilles et
les tiges, et on en form(^ des boules, qu'on fait dessécher à
l'ombre.
En Egypte on emploie pour la fabrication de l'indigo une
IND • /,o7
méthode peu connue, qui n'en est pas moins la plus simple,
la plus sûre et la plus économique , à laquelle les (;himisles
françois ont donné leur approbation , en proposant de l'ap-
pliquer au pastel. Les Égyptiens ne coupent de chaque tige
d'indigo que ce que peuvent en employer quatre ou cinq
hommes. On jette ces tiges avec les feuilles dans de grandes
chaudières remplies d'eau, qu'on fait bouillir pendant trois
heures; après quoi, l'eau chargée de fécule est conduite dans
d'autres vaisseaux , où on la bat avec de larges pelles , jus-
qu'à ce que la fécule se soit précipitée; puis on décante l'eau,
et on fait sécher la pâte. L'ébullition fait ici en peu d'heures
le même effet que la fermentation, c'est-à-dire qu'elle désor-
ganise le parenchyme des feuilles et de l'écorce , et facilite
la séparation de la fécule. Par ce moyen , on ne perd jamais
le produit de la récolte, comme il arrive assez souvent en
Amérique, quand l'opération delà fermentation estm.anquée,
qu'elle n'est point conduite au point convenable.
IiNDiGOTiER DES It^DEs : Indigofcra indica, La.mk. ; IncUsofera
tincloria, Linn. ; Moris. , §. 2, tab. 22 ; Pluken., tab. i65, fig.
5. Cette plante, très-rapprochée de la précédente , en diffère
par ses fruits, qui ne sont point courbés en faucille , qui sont
plus cylindriques, et ont leurs sutures moins saillantes : sa
tige est glabre dans toute sa longueur; les folioles ovales-
cunéiformes, verdàtres à leurs deux faces, chargées, dans
leur jeunesse , de poils rares et couchés; les gousses glabres,
menues, d'un rouge brun , pendantes, longues de quinze à
dix-huit lignes, mucronécs obliquement. Cette plante croît
dans les Indes, à l'Isle-de-France , à Madagascar. Elle est,
ainsi que la précédente, employée , dans les Indes et en Amé-
rique, à faire de l'indigo; cependant, comme ses tiges sont
plus ligneuses et ses feuilles moins succulentes , on lui préfère
la première.
Indigotier glauque : Indigofera glauca , Lamk. , Encycl. ;
Zanon., Hist., tab. 12; Indigofera argentea, Linn., l'Hérit. ,
Slirp. nov,, tab. 79; Indigofera articulata , Goum. , lll, , 4g;
Indigofera tinctoria , Forsk. , Agypl., pag. i58. Cette espèce
est très-remarquable par sa belle (ouleur glauque, argentée.
Ses tiges sont herbacées, couvertes d'un duvet court, très-
blanc ; les feuilles inférieures souvent tern-ées , les supérieures
4o8 ♦ IND
ailées, à cinq ou sept folioles ovales- obtuses , chargées en
leurs deux faces d'un duvet très -court; les fleurs petites ,
purpurines, disposées en grappes lâches et courtes; le calice
cotonneux. Cette espèce croît en Egypte, dans l'Arabie, en
Barbarie : on la cultive dans les environs de Tunis pour la
fabrication de l'indigo.
Indigotier velu : Indigofera liirsuta jhinn. ; Lamk. , III. gen. ^
tab. 626 , fig. 3 ; Beauv. , FI. d'Oware , tab. 1 1 9 ; Kattu-tagera ,
Rheed. , Malab. , 9, tab. 3o ; Burm. , Zeyl. , tab. 14. Cette
plante est velue sur presque toutes ses parties. Ses tiges sont
herbacées, anguleuses, velues; les feuilles ailées, composées
de cinq à sept folioles et plus, ovales - obtuses , velues à leurs
deux faces; les stipules sétacées ; les fleurs roussàtres , très-
velues, disposées en épis axillaires ; les divisions du calice
sétacées, très - barbues; la corolle pourprée, à peine plus
longue que le calice; les gousses droites, tétragones, lai-
neuses, toutes pendantes, longues d'environ neuf lignes.
Cette plante croit aux lieux sablonneux , dans les Indes orien-
tales et sur la côte du Malabar.
Indigotier a onze folioles : Indigofera endecaphylla , "Willd.;
Jacq. , Jcon. rar. , 5 , tab. 669 ; Beauv. , FI. d'Oware, tab. 84.
Cette espèce a des racines fusiformes , épaisses et charnues;
des tiges couchées, herbacées, longues d'environ deux pieds.
Ses feuilles sont ailées , composées d'environ onze folioles
presque sessiles, glabres, oblongues , obtuses, très-entières,
un peu rétrécies à leur base; les fleurs presque sessiles, d'un
beau rouge , disposées en grappes axillaires, plus courtes que
les feuilles; les gousses tétragones, brunes, réfléchies, un
peu velues, longues d'un pouce, légèrement mucronées à
leur sommet. Cette plante croît en Guinée et dans les royau-
mes d'Oware et de Bénin. M. de Beauvois pense que les
nègres se servent de la partie colorante de cette plante pour
teindre en bleu le coton avec lequel ils font leurs pagnes.
Indigotier a feuilles menues : Indigofera tenuifolia , Lamk. ,
Encyclop. Espèce très-remarquable par la ténuité de ses fo-
lioles, par les longs pédoncules de ses épis. Ses tiges sont
grêles, longues de six à sept pouces, un peu rameuses; ses
feuilles ailées, composées de onze à treize folioles très-étroi-
tes , presque filiformes; les pédoncules axillaires, beaucoup
IND • 409
plus longs que les feuilles, soutenant un épi de douze à
quinze petites fleurs rougeàtres, un peu pédicellées; les ca-
lices noirâtres , à cinq dents aiguës , chargés de poils cou-
chés et blanchâtres. Cette plante croît au cap de Bonne-
Espérance.
** Indigotiers à feuilles digitées ^ ou ternées ^ ou
géminées.
Indigotier épineux ; Indigofera spinosa , Forsk. , ^gjpt- ,
pag. iSy. Arbrisseau à tige ligneuse, diffuse, garnie d'épines
de la grosseur d'un fil. Les feuilles sont ternées; les stipules
droites, petites ; les fleurs rouges; leur calice ouvert; les
gousses scabres , cylindriques , géminées , situées dans les
aisselles des feuilles. Cette plante a été déeouverte par Forskal
dans l'Arabie.
Indigotier couché ; Indigofera procumbens , Linn. , Manf,
Plante à tige couchée, herbacée, longue d'un pied , un peu
anguleuse, à peine pileuse, garnie de feuilles ternées, à
folioles ovoïdes, égales, un peu mucronées à leur sommet,
légèrement pubescentcs en -dessus, pileuses en-dessous; les
stipules subulées ; les fleurs d'un pourpre noirâtre , dépour-
vues de bractées, réunies en un épi latéral, axillaire , pé-
doncule : le pédoncule plus long que les feuilles. Cette plante
croît sur les montagnes, au cap de Bonne-Espérance.
Indigotier psoraloïde : Indigofera psoraloides , Linn.; Pluk. ,
tab. 320, fig. 3; Rîvini, Tetr., 71, fig. i55; Indigofera
racemosa, Linn. , Aman. , 6 , pag. 55. Ses tiges sont grisâtres,
un peu ligneuses, anguleuses; les feuilles ternées; les folioles
linéaires-lancéolées, pileuses à leurs deux faces; les stipules
linéaires-subulées; les pédoncules anguleux, plus longs que
les feuilles, portant à leur sommet une vingtaine de fleurs
petites, rougeàtres, disposées en épis; les calices pileux,
leurs dents subulées. Cette plante croit au cap de Bonne-
Espérance.
Indigotier digité : Indigofera digitata , Linn. fils, Sup., 535.
Sa tige est grêle , cylindrique et rameuse , velue vers son
sommet; les feuilles assez semblables à celles du lotus dorjch-
nium , presque sessiles, digitées , composées de cinq folioles
oblongues, presque linéaires, chargées de petits poils cou-
4>o ' Ï]SJ}
chés et blanchâtres; les pédoncules plus longs que les feuilles,
filiformes , chargés de petites fleurs en épi: les calices blan-
châtres et velus, à cinq dents sétacées. Cette espèce croit au
cap de Bonne-Espérance.
Indigotier a deux folioi.es; Indigofera diphylla, Venten.,
Choix de pi., tab. 3o. Cette plante a des tiges cylindriques,
pubesccntes, renversées, rameuses, d'un blanc cendré; les
feuilles alternes, pétiolées , à deux folioles, une latérale,
l'autre terminale , disj)osition qui feroit soupçonner Tavor-
tenient d"unc troisième foliole : elles sont ovales, pileuses,
d'un vert cendré; la terminale longue d'environ un pouce,
l'inférieure deux fois plus pelile , pédicelléc : les stipules lan-
céolées , pubescentes, roussàtres, aiguës, persistantes; les
grappes touffues, axillaires, de la longueur des feuilles; les
ileurs petites, couleur de rose; les gousses ovales, arquées,
comprimées, velues, renfermant deux ou trois semences
brunes. Cette plante croit au Sénégal.
* •'•' * Indigotiers a feuilles simples.
Indigotier a feuilles simples; Indigofera simplicifoUa, Lamk.,
Encycl. Ses tiges sont grêles, simples, un peu ligneuses ; ses
feuilles alternes, très-simples, étroites, linéaires, presque
sessiles , longues d'un pouce et demi, sur à peine deux lignes
de largeur; les pédoncules axillaires, beaucoup plus courts
que les feuilles , chargés de trois ou quatre petites fleurs
alternes, légèrement pédicellées ; les gousses linéaires, cy-
lindriques, droites , mucronées, presque glabres, longues
d'environ un pouce. Cette plante croit en Afrique, dans les
environs de Sierra-Léone.
Indigotier a longues feuilles : Indigofera oblongifolia , Forsk.,
jEgypt. , pag. 157; Vahl, Symb. , 1 , pag. 55. Plante de l'A-
rabie heureuse, dont les tiges sont ligneuses, divisées en ra-
meaux tomenteux et soyeux, garais de feuilles simples,
presque sessiles, alternes, distantes, alongées , couvertes d'un
duvet soyeux, longues de deux lignes; les stipules petites,
sétacées : les grappes axillaires , beaucoup plus longues que
les feuilles; les fleurs nombreuses; le calice soyeux et pu-
bescent; l'étendard delà corolle médiocrement velu.
UIndigofera sumatrana, Lamk., Ut. gen. , tab. 626, fig. 1 ,
IND • 4M
n'est connu que par ses fruits, figures par Gasrtner, fab. iZ|8.
Ce sont des gousses pendantes, pédicellées , légèrement té-
tragones, un peu courbées en faucille , renfermant une dou-
zaine de semences réniformes. (Pom.)
IjNDIOT [Ornith.) , nom catalan du dindon, meleagris gallo-
pavo , Linn., qu'on appelle en Pologne indijlc. (Ch. D.)
INDIVIA. {Bot.) Nom latin de l'endive, espèce de chi-
corée. (Lem.)
INDIVIDU. {Bot.) Une giroflée, un abricotier, un chên-e,
une mousse, qui sont provenus de graine, ou de bouture,
ou de marcotte , et dont l'existence est indépendante de
celle des végétaux qui les ont engendrés, sont autant d'in-
dividus du règne végétal. Voyez Théorie élémentaire. (Mass.)
INDIYCK (Ornith.), v. Indiot. (Ch. D.)
INDOU. {Bot.) Dans un herbier de Coromandel on trouve
sous ce nom V acacia pennata. (J.)
IJNDRI. {Matnm.) Nom d'une espèce de quadrumane.
Voyez Maki. (F. C. )
INDURU. {Bot.) A Ceilan on nomme ainsi l'o/âx, suivant
Gacrtner. (J.)
INDUSIE. {Bol.) Dans la plupart des fougères la fructifi-
cation est placée sur la face inférieure des feuilles, sous la
forme de taches (sores) plus ou moins grandes, dont la dis-
tribution, la forme et la couleur varient suivant les espèces.
Ces taches sont de petites masses de conccptacles dans les-
quels sont contenus les corps réproducteurs. Elles commen-
cent à se développer sous l'épiderme , qu'elles soulèvent et
déchirent en grossissant. La partie de l'épiderme qui re-
couvre chaque groupe de conccptacles , est ce qu'on nomme
indusie. (Mass.)
INDUSIE. {Foss.) On trouve auprès de Clermont en Au-
vergne, au sommet du Puy-de-Jussat , et dans d'autres en-
droits aux environs , un dépôt calcaire considérable qui n'offre
aucune trace de corps marins : il est formé d'une très-grande
quantité de tubes d'environ un pouce de longueur sur quatre
à cinq lignes de diamètre. Ceux de ces tubes que nous avons
pu voir, sont composés de petites paludines réunies par une
incrustation calcaire ; mais il paroît qu'on en trouve aussi
qui sont composés de petits grains de sable de diverse nature.
412 • IPyD
Ils sont ouverts à l'un des bouts, et l'autre est terminé par
une calotte hémisphérique. Ils sont souvent agglutinés paral-
lèlement les uns aux autres : quelqjiefois ils se croisent dans
tous hs sens; d'autres fois ils sont divergens, et forment des
espèces de bassins circulaires d'un pied et demi à deux pieds
de diamètre.
M. Bosc, qui a le premier fait connoître ce singulier fos-
sile, Ta trouvé à Saint-Gérar.l-le-Puy , près de Moulins. Il
croit que ces tubes ont servi d'enveloppe à des animaux , tels
que des larves de friganes, et il l'a nommé indusia tubulata.
M. Ramond admet aussi cette origine , et il en a fait mention
dans une Notice sur la constitution minéralogique des prin-
cipaux peints de l'Auvergne.
Dans un Mémoire sur les terrains qui paroissent avoir été
formés sous leau douce , inséré dans le lô." vol. des Ann.
du Mus. d'hist. nat. , et dont nous empruntons une partie des
renseignemens sur ce fossile , M. Brongniart croit qu'une
infiltration calcaire, postérieure à la formation de ces tubes,
les a réunis dans beaucoup d'endroits plus solidement qu'ils
ne l'eussent été sans cette circonstance , et a tapissé leurs
parois , tant extérieures qu'intérieures , de manière à les défor-
mer. Quelques personnes, au nombre desquelles nous nous
sommes trouvés, avoicnt pensé que ces tubes n'avoient pu
avoir été des demeures d'insectes, et ont cru qu'une con-
crétion calcaire dans laquelle se trouvoient de petites palu-
dines, auroit enveloppé une multitude de brins de végétaux
détruits par lasuiie. Mais le savant auteur du Mémoire n'ad-
met point cette conjecture, et trouve qu'il y a une très-
grande ressemblance entre certains de ces tubes et ceux que
forment les larves de quelques espèces de friganes.
Le peu de longueur de ces tubes, l'uniformité de cette
longueur et de leur diamètre, et surtout celle de leur ex-
trémité qui se trouve bouchée, nous empêchent de croire que
des roseaux auroient servi de moule à ces tubes, comme on
le voit souvent dans des incrustations de ces derniers; mais
il est difficile d'expliquer leur véritable origine. (D. F.)
INDUVIE. (But.) On donne ce nom aux parties de la fleur
qui persistent et recouvrent le fruit à sa maturité. Dans la
baselle, le salsola Iragus, etc., par exemple, c'est le përian-
• INE • 4i5
the simple de la fleur qui forme l'induvie ; dans la rose, lea
labiées, le frifoliuw. repens ^ etc., c'est le calice; dans Je riz,
ce sont les gluu>ellt'S : de là fruit induvié, calice induvial, etc.
( Mass. )
INEKOU. {Bot.) Nom carinbe, cité par Barrère, d'un,
hignonia grimpant, de la Guiane, que l'on ne peut rap-
porter, d'après son indication incomplète, à aucune espèce ■
connue. Barrère ajoute seulement que la ràpure de son bois,
mêlée dans Teau , enivre le poisson. Un autre inecou, cité
dans l'herbier de Vaillant, est le bois d'acouma, homalium
racemosuin. (J.)
INEMBKYONNÉS. (^of.) Ce nom convient bien aux plantes
cryptogames, puisque leur mode de germination nous est
inconnu, et qu'elles ne nous montrent pas de véritable em-
tryon. Cette expression a été créée par M. Richard, que les
sciences viennent de perdre. (Lem.)
INEPTf. {Ornitli.) llliger applique ce nom à une famille
d'oiseaux qui paroit avoir été entièrement détruite, et qui
ne renferuioit que le dronte , didtis ineptus , Linn. Voyez
Lmertes. (Ch. D.)
INÉQUITELES. {Entom.) M. Latreille a désigné sous ce
nom les araignées tilandières ou fileuses. (C. D.)
INERME. {Bot.) Lorsque les végétaux sont munis de pi-
quans , tels qu'épines , aiguillons , etc. , on dit qu'ils sont
armés; par opposition on les dit inermes (sans armes), lors-
qu'ils sont dépourvus de piquans. (Mass.)
INERTES. {Ornith.) M. Temminck. , dans l'Analyse du sys-
tème général d'ornithologie qui précède la 2.'" édition de
son Manuel , substitue ce terme à celui d'inepli , et donne
pour caractère à son 16.* ordre un bec de forme diverse; le
corps probablement trapu, couvert de duvet et de plumes
à barbes distinctes; les pieds retirés dans l'abdomen ; le tarse
court; trois doigts dirigés en avant, entièrement divisés jus-
qu'à la base; le doigt postérieur court, articulé intérieure-
ment; les ongles gros et acérés; les ailes impropres au vol.
Le naturaliste hoUandois dit que , sans égard à leurs doigts
divisés, il n'a pas trouvé à placer plus convenablement que
dans cet ordre, voisin des sphénisques et des apténodytes,
les genres Dronte et Apterix : il faut avouer, toutefois, que
4i4 • INF
c'est là un assez grand écart aux règles ordinaires. Quoi qu'il
en soit, Shavv a établi, sur un individu qui seul existe dans
les collections et qu'il nomme apterix australis , les caractères
du dernier de ces genres, qui sont d'avoir un bec très-long,
droit, subulé , mou, sillonné dans toute sa longueur, fléchi
et renflé à la pointe; la mandibule inférieure droite, évasée
latéralement, subulée à l'extrémité; de très- longues soies à
la base du bec, jusqu'au bout duquel la fosse nasale est pro-
longée ; des narines paroissant s'ouvrir à la pointe de la
mandibule en deux petits trous, dont les tubes sont cachés
dans la masse du bec: des pieds courts, emplumés jusqu'aux
genoux; les trois doigts de devant entièrement divisés ; celui
du milieu de la longueur du tarse, et le postérieur court
et garni d'un ongle gros et droit ; les ailes impropres au vol
et terminées par une sorte d'ongle courbé; la queue nulle.
A l'égard du dronte, dont les caractères génériques ont déjà
été exposés dans ce Dictionnaire, tom. i5, pag. 522, ses
principales différences consistent dans les sillons transversaux
de la mandibule supérieure , le redressement de l'inférieure
à sa pointe , et le placement des narines au milieu du bec.
(Ch. D.)
INFACTI ( Bot. ) , nom arabe du sureau , selon Daléchamps.
(J.) ^
INFÈRE [Ovaire]. (Bot.) On nomme ainsi l'ovaire, lors-
qu'il est adhérent au tube du calice et couronné par son
limbe, de manière qu'il paroît inférieur à toutes les autres
parties de la fleur : tel il est, par exemple, dans le poirier.
(Mass.)
INFÉROBRANCHES, Inferohranchia. (Malacoz.) Dénomi-
nation employée pour la première fois par M. G. Cuvier ,
pour désigner une famille de mollusques gastéropodes, dont
les branchies sont situées au-dessous du rebord libre du man-
teau : il y rangeoit d'abord les phyllidies , les patelles et les
genres qu'on a démembrés du genre Patella de Linnœus , ainsi
que les oscabrions.
Dans notre système de classification des mollusques, nous
avions déjà retiré de ce groupe des inférobranches , dont
nous formons un ordre, les différens genres démembrés des
patelles de Linneeus, et dont les branchies sont sous le cou
• INF, % 4i5
et véritablement pectiiiées, et surtout les oscabrions, quoi-
que leurs branchies soient un peu comme dans les phyllidies ,
parce que nous les regardons comme des animaux subarticulés.
Dans son Ilégne animal, M.Cuvier ne conserve non plus dans
ses inféi'obranches que les phyllidies et un nouveau genre
qu'il nomme Diphyllidie. JNous y avons aussi établi un genre
nouveau sous le nom de Linguelle. Voyez ce mot et Mala-
cozoAiREs. (De B. )
INFLAMMATION. (Chim.) Voyez Ignition. (Ch.)
INFLAMMATION DES HUILES. {Cliim.} Voyez Huiles
VÉGKTALES FIXES. tOUlC XXI , p. 5 1 8. (Ch. )
INFLAMMATION SPONTANÉE. [Chim.) C'est l'inflamma-
tion que présentent des substances qui ont été abandonnées
à elles-mêmes à la température ordinaire : par ex., le foin
humide entassé dans un grenier ; le coton filé , imprégné d'huile
siccative. (Ch.)
INFLÉCHI. (Bot.) Fléchi ou courbé en dedans. On appli-
que cette épithète aux aiguillons, par exemple, lorsqu'étant
courbés ils dirigent leur pointe vers la partie supérieure de
la tige ou de la branche (rosa muscosa, etc.); aux feuilles
dans le bouton, lorsqu'elles sont pliées de haut en bas [cj-
clamen , aconit, tulipier, etc.); à la lèvre supérieure d'une
corolle, lorsqu'elle se renverse sur la lèvre inférieure (bru-
nelle, etc.), et à la lèvre inférieure, lorsqu'elle se recourbe
vers l'orifice du tube (chelone barhata , etc.); aux pétales,
aux étamines, au style, lorsqu'ils se courbent vers le centre
de la fleur : tels sont les pétales de Vastrantia major, les éta-
mines de la fraxinelle , le style de ^e^^'U)n tetraspcrmum.
(Mass.)
INFLORESCENCE. (Bot.) La manière dont les fleurs sont
disposées sur le végétal, est ce qu'on appelle inflorescence.
Les fleurs sont pl.icées , ou sur la racine (colchique , pissenlit,
etc.), ou sur la ti<^e (carica papaya , cactus peruvianus), ou
sur les rameaux (poirier, etc.), ou sur les feuilles (xjlo-
phjlla falcata , etc.), ou sur les pétioles (hibiscus moschatus,
etc.); dans l'aisselle des feuilles (pervenche), ou hors des ais-
selles des feuilles (s.Aanum nigrum , vigne, etc.). Elles nais-
sent une à une (azaruni, etc.), ou deux à deux [linnœa
borealis , vicia saliva, etc.) , ou trois à trois (teucrium chamce-
A^G , INF
dris, etc.), ou en plus grand nombre ; et alors elles sont réu*
nies en groupes, qui ont chacun un nom particulier : tels
sont le Chaton, TÉpi , la Grapie, la Panicule , le Thyrse, le
CoRYMBÈ , la Cime, le Faisceau, I'Ombelle , le Verticille, le
Capitule, la Calathide. Voyez ces mots. (Mass.)
INFUNDIBULIFORME [Corolle]. (Bot.) On nomme ainsi
celle dont le limbe , plan comme une soucoupe très-évasée ,
est terminé inférieurement par un tube droit. On en a des
exemples dans la pulmonaire, le laurier-rose, etc. Le style
du hura crepitans , le stigmate du kœmpferia longa , sont aussi
infundibuliformes. ( Mass. )
INFUNDIBULUM (Conaiiyl.) , nom latin du genre Enton-
noir, établi par M. Dcnys de Montfort. (De B.)
INFUSION. (Chim.) Opération par laquelle on met une
substance organique, composée de plusieurs principes immé-
diats, dans un liquide que l'on expose ensuite à une chaleur
insuflisante pour le faire bouillir. Cette opération a pour
objet de séparer les principes qui sont solubles , de ceux qui
ne le sont pas. On peut faire Finfusion avec de l'eau , de
l'alcool, des huiles, etc.
Le mot infusion s'applique aussi au résultat de Fopération.
(Ch.)
INFUSOIRES, Infusoria. (Zoolog.). C'est à Otton-Fréderir.
Muller que la zoologie doit l'introduction de cette dénomi-
nation, pour désigner une classe d'animaux qui se développent
dans les infusions végétales ou animales , et qu"à cause de
leur extrême petitesse on a quelquefois aussi nommés ani-
maux microscopiques, parce qu'on ne peut que rarement
les apercevoir sans microscope. Tous les auteurs systémati-
ques , depuis Gmelin , qui l'a fait le premier , ont adopté cette
coupe classique et ce nom, quoique quelques-uns, et entre
autres M.dc Lamarck , en aient un peu restreint l'application,
ou ne l'aient admise qu'en faisant l'observation qu'elle étoit
fort mal circonscrite. Le fait est que Muller n'a été guidé
dans l'établissement de cette classe par aucun principe, et
que par conséquent il est probable qu'elle contient un as-
semblage informe d'animaux de degrés d'organisation ou
de types très-différens, à des degrés de développement sans
doute également différens, qui n'ontpour caractères communs,
• INF • 417
51 l'on peut appeler cela des caractères, que d'être d'une
petitesse et d'une transparence extrêmes, et par conséquent
de n'être appréciables qu'au microscope; de vivre toujours et
forcément dans un fluide, ce qui est une suite de leur peti-
tesse, et de ne se développer pour la plupart que dans des
infusions de plantes ou d'animaux, ce qui est encore assez
douteux. Lelir forme générale et particulière , la seule chose
qu'il soit permis à l'observateur de saisir, confirme les diffé-
rences d'organisation : en effet, il y en a qui ont une forme
bien paire, bien symétrique, non-seulement dans leur
corps, mais aussi dans les appendices plus ou moins nom-
breux qui s'y joignent, et qui en outre sont revêtus d'une vé-
ritable enveloppe cornée, comme les brachions; quelques-
uns ont le corps alongé, vermiforme ou déprimé, symétrique,
sans trace d'appendices, comme les vibrions, les paramé-
cies, etc.; d'autres ont, au contraire, une forme évidem-
ment radiaire, avec une bouche ou cavité apparente, comme
la plupart des vorticelles ; enfin , il en est dont le corps est
amorphe ou sans forme déterminée susceptible de défini-
tion , sans ouverture buccale et sans trace d'appendice,
comme les protées, les volvoces et les monades. Que ceux
de la première sorte soient de véritables animaux et même
fort élevés dans l'échelle , cela est évident , puisqu'on
leur trouve des appendices locomoteurs , bien distincts ,
qu'on a désignés sous le nom de roues , de filamens , etc. ;
une queue composée de plusieurs articles, et terminée sou-
vent par des appendices variables en forme et en nombre;
un véritable bouclier céphalothoracique, recouvrant un tronc
plus ou moins distinct : on y a même remarqué un cœur,
des yeux, des ovaires, et par conséquent on ne peut douter
que ces animaux ne soient pourvus d'un canal intestinal com-
plet, et n'aient beaucoup de rapports avec plusieurs des ani-
maux que Muller lui-même a nouimés des enlomostracés. Il
se pourroit même que quelques-uns des infusoires de cette
première section ne fussent que des degrés de développe-
ment d'espèces d'entomostracés bien connues à l'état adulte,
ces animaux étant susceptibles de métamorphoses très -dis-
tinctes, comme M. de Jurinel'a fait voir pour lesnauplies et les
amynomes. Quant à la seconde forme que l'on trouve parmi
23. uj
4i8 e INF
les infusoires, celle qui se voit clans les vibrions, on peut
concevoir qu'elle doit appartenir à des animaux de la classe
des apodes, puisque le corps est alongc, symétrique, sans
articulations visibles et certainement sans appendices; mais
c'est ce qu'il seroit trop hardi d'assurer, puisque les obser-
vateurs ne parlent pas de canal intestinal, ni par conséquent
de bouche et d'anus. Cependant les mouvemens nombreux
de ces corps organisés, et cela dans des sens que l'on regarde
comme déterminés, ne permettent guères de douter de leur
animalité. Il en est de même de la troisième forme que l'on
trouve dans les animaux infusoires, c'est-à-dire, des vérita-
bles vorticelles : quoiqu'on n'ait pu y apercevoir qu'une sorte
de cavité buccale, entourée de cils ou de tentacules courts
à son entrée, il est encore indubitable que ce sont de véri-
tables animaux ayant beaucoup d'analogie avec les hydres
ou les polypes. Il reste donc les protées , les volvoces, que
nous ne pouvons rapporter à aucun type connu; et, en
effet, ce sont des corps organisés, sans forme déterminée,
sans aucun organe, et qui ne sont autre chose qu'une petite
masse de tissu cellulaire, dans les mailles duquel sont conte-
nus des fluides , et qui est à peine condensé à la circonfé-
rence , pour former une enveloppe, en sorte que toutes les
fonctions sont réduites dans ces corps à l'absorption immédiate
de molécules toutes préparées d'avance et contenues dans le
fluide ambiant, et à l'exhalation. C'est, pour ainsi dire, le
terme ou la fin d'un animal très -élevé, le point où l'on ne
peut plus distinguer dans le tissu de ses parties d'autres or-
ganes que du tissu cellulaire, ou les premiers momens de son
origine. Aussi ne trouve-t-on plus dans ces êtres d'autres fonc-
tions que celles qui existent à ce terme. Mais sont- ce réel-
lement des animaux, c'est-à-dire, une certaine combinaison
d'organes affectant une forme déterminée et agissant d'une
manière également déterminée sur les corps extérieurs P
C'est ce qui me paroît plus douteux. En effet, ils n'offrent
aucune des trois conditions qui me semblent devoir entrer
dans la définition d'un animal : on ne peut pas dire qu'ils
soient une combinaison d'organes , ni à priori , ni à posteriori,
s'ils n'ont pas de forme déterminée ; et ils sont tellement dé-
pendans des circonstances extérieures , qu'il paroit qu'ils ne
• INF • 4-.9
peuvent absolument en modifier aucune. D'après cela, ne
pourroif-on pas les considérer comnie des molécules élémen-
taires des animaux, et peut-être même des végétaux?
Quoi qu'il en soit, car ce n'est pas le lieu de développer
et de soutenir cette idée, il résulle de ce que je viens de
dire dans cet article, que la classe des infiisoires ne peut
être en aucune manière admise , parce qu'elle contient des
animaux de types très-différeiis : ce que l'on ne pouvoit, il
est vrai, reconnoitre avant l'établissement du principe, que
la forme générale du corps emporte un degré déterminé
d'organisation ; car, dans de si petits animaux, ce n'est guère
que la forme que l'on peut apercevoir. Aussi pensons-nous
que les genres Brachion , Urcéolaire, Cercaire, Furculaii-e,
Kérone, Trichocerque et Himantope appartiennent au type
des entomozoaires ou aux animaux articulés, et spéciale-
ment à la classe des hétéropodes, ordre des entomostracés.
Plusieurs espèces de Vibrions me paroissent pouvoir être
regardées comme des apodes, ainsi que les genres Paramé-
cie, Kolpode; le reste des Vibrions , les Cyclidcs, et peut-
être les r.eucophes, doivent être très-probablement rangés
près des planaires. Dans ce genre même il y a une espèce
qui me paroit n'être autre chose qu'une ascidie. Les véri-
tables Vorticelles sont des polypiaires. Enfin , les genres Go-
nium, Protée, Volvoce et Monade, si on peut les regarder
bien certainement comme des animaux, me semblent devoir
former un t3^pc distinct, que j'ai désigné sous les dénomi-
nations d'amorphes et d'agastraires, tirées de ce qu'ils n'ont
pas de forme déterminée , et que l'enveloppe extérieure ne
rentre pas pour former un estomac, comme il y en a dans
tous les véritables animaux.
Les auteurs qui se sont le plus occupés des animaux dits
infusoires, sont Leuwenhocck , Hill, Baker, Joblot, Leder-
muller, Pallas, R;vsel , et surtout Spallanzani ei O. F. Muller,
et, en général, les personnes qui ont fait des observations
microscopiques. L'ouvrage de Muller a été presque entière-
nient traduit et ses figures ont été copiées dans l'Encyclopédie
méthodique. Ce seroit une chose importante que ce travail fut
repris avec des idées plus justes, et dans le but de s'ass(M\r
si la plupart de ces animaux sont véritablement adultes et
(
/,2o ' ma
s'ils jouissent réellement des singulières facultés qu'on leur
attribue. On trouveroit sans doute beaucoup de choses à
rectifier, et cela seroit non -seulement important pour la
zoologie proprement dite, car je ne doute pas qu'il n'y ait
beaucoup d'innovations à faire, mais encore pour la physio-
logie générale: en effet, beaucoup d'auteurs, admettant d'une
manière trop étendue que ces animaux naissent pour ainsi
dire dans les infusions végétales ou animales , se sont servis
de cette observation pour soutenir la génération spontanée ,
et beaucoup d'autres idées plus ou moins erronées ; mais le
fait est que ce ne peut être pour tous les animaux rangés
parmi les infusoires que cela peut se supposer, mais seule-
ment pour ceux que nous plaçons parmi les amorphes, et
alors il s'agiroit auparavant de déterminer si ce sont de vé-
ritables animaux, ce qui n'est pas aussi aisé qu'il le paroît
au premier coup d'œil. C'est aussi d'après ce qu'on a cru
remarquer sur les dernières espèces d'infusoires , qu'on a
admis une génération par scissure spontanée intérieure, ou
par déchirement de la mère, dans le corps de laquelle se se-
roieiit formées des espèces de gemmules. Quoique l'on puisse
réellement concevoir la chose à priori jusqu'à un certain
point, ilseroit cependant important de voir si elle a certaine-
ment lieu. C'est au contraire l'étude d'une des espèces les
plus élevées qui a fait constater qu'un animal étoit pour
ainsi dire une sorte de combinaison définie, au moins pijur
l'eau , en sorte qu'en lui rendant l'eau qui lui avoit été re-
tirée par la dessiccation , l'animal , qui sembloit mort , reprend
ses mouvemens habituels : c'est ce qui a été constaté pour
le rotifère de Spallanzani [vorticella convallaria de Muller).
Mais , dans la série d'observations qui restent à faire sur
ces animaux, il faudroit surtout avoir le plus grand soin
d'éviter les erreurs provenant de l'instrument qu'on est forcé
d'employer; ce qui paroît être diflicile , à moins que l'obser-
vateur ne réunit la connoissance des principes de la science
des animaux à celle du microscope , ce qui , jusqu'ici , ne s'est
peut-être pas encore rencontré. (Dk B.)
INGA. [Bot.) Ce nom brésilien, cité primitivement par
Marcgrave pour un arbrisseau de la famille des légumi-
neuses, avoit été adopté par Plumier pour ce même végétal,
• * ma ^ 431
, dont il faisoit un genre, réuni ensuite au mimosa par Lin-
naeus. Willdenow a rétabli le genre Inga, en lui réunissant
plusieurs espèces. Aublet cite pour son genre Gnlipea le même
nom donné par les sauvages de la Guiane. (J.)
INGA. (Bot.) Genre de plantes dicotylédones, à fleurs
incomplètes, polygames, de la famille des légumineust^s, de
la polygamie monoécie de Linnaeus , offrant pour caractère
essentiel : Dans les fleurs hermaphrodites, un calice à cinq
dents; une corolle tubuleuse , à cinq dents; des étamines
nombreuses, monadelphes; un ovaire supérieur; un style.
Le fruit est une gousse à une seule loge ; les semences en-
tourées de pulpe ou d'un arille. Le pistil manque dans les
fleurs mâles.
Ce genre a d'abord fait partie des mimosa de Linnaeus. Le
très-grand nombre d'espèces qu'il renfermoit, et qui aujour-
d'hui monte à plus de deux cents; la différence qui, d'ail-
leurs, existoit entre les fleurs de beaucoup d'espèces, dans
la forme de leur corolle, dans le nombre des étamines, dans
la caractère des fruits et des semences, ont fourni le moyen
de séparer en plusieurs autres genres celui des Mimosa:
genre remarquable par ses formes élégantes et variées, très-
curieux par les phénomènes singuliers qu'il présente et par
les résines et les gommes que fournissent au commerce plu-
sieurs de ses espèces ; par les bois de construction qu'elles
produisent en abondance (voy. Acacie, tom. i.*', et Supplé-
ment , idem) ; enfin , par la pulpe succulente , sucrée et mus-
quée , contenue dans les gousses de beaucoup d'inga.
* Feuilles deux fois géminées.
Inga a bois rouge : ïnga higemina, Willd.; Mimosa hige-
mina, Linn., Spec; Katou-conna, Rheed. , Malah., 6, tab. 12.
Grand et bel arbre des Indes orientales, dont le tronc est
d'une telle grosseur qu'à peine deux hommes peuvent l'em-
brasser. Son bois est rouge, d'une odeur assez agréable; ses
feuilles sont composées de deux paires de folioles ovales-lan-
céolées, acuniinées, un peu rudes, d'un vertbrun, luisantes
en-dessus. Les fleurs sont blanches , réunies par bouquets sur
un pédoncule commun, ramifié en panicule; les gousses sont
h^-'^ , ING
contournées en spirale, médiocremenf comprimëes , renflées
aux endroits 'les semences, et se oispent eu s'ouvrant.
Inga lancéolé ; IngcL lanccolala , ^A'illrl. , Spec. Grand
arbre de l'Amérique méridionale, qui s'élève à la hau-
teur de quarante à cinquante pieds, et dont les rameaux
sont glabres, flexueux , cylindriques, bruns, piquetés de
blanc . armés d'épines droites, subulées, stipulaircs , très-
fortes; les feuilles deux fois géminées, coriaces, luisantes;
les folioles lancéolées, obtuses, longues d'un pouce et demi,
calleuses et glanduleuses à leur base ; les pétioles munis d'une
glande dans leur bifurcation ; les fleurs alternes, terminales,
réunies en grappes paniculées ; les gousses contournées en
spirale.
Inga a PETILLES DE TROENE; Juga ligustrîna , Willd. , Spec;
Jacq. , Fragm. , tab. 02 , fig. 5. Arbrisseau d'environ quinze
pieds, dont les rameaux sont cylindriques; les plus vieux
armés de deux é|»ines courtes, subulées; les feuilles deux
fois géminées ; les folioles glabres, oblongues, obtuses à leurs
deux extrémités, longues de deux pouces et plus; les pétioles
pubescens , glanduleux à leur base; les fleurs disposées en
grappes axillciires , alternes, simples ou composées; les gousses
oblongues, noueuses; les seuiences noirâtres, à moitié recou-
vertes par une pulpe fongueuse. Cette plante croît dans l'A-
mérique méridionale, aux lieux sablonneux.
** Feuilles trois fois géminées.
Inga trigÉiMINé : Inga tergemina , "\'\ illd. , Spec. ; Jacq. ,
Amer., tab*. 1 77, fig. 81 ; Acacia purpurea , Lamk., Encyc. Arbris-
seau dont l'écorce est de couleur grisâtre. Les feuilles sont
alternes; les pétioles divisés a leur sommet en deux branches
soutenant chacune six folioles, glabres, ovales- oblongues ,
obtuses, longues d'environ un pouce ; les fleurs rouges , dis-
posées en bouquets courts sur des pédoncules longs d'environ
un pouce : elles produisent des gousses longues de cinq à six
poucLS , étroites , comprimées, uu peu courbées en sabre vers
leur sommet. Cette plante croit dans l'Amérique méridionale.
Inga des Caripes ; Inga caripensis , W'illd., Spec. , /^ . P^g-
1009. Arbrisseau de la Nouvelle-Andalousie, qui a de grands
rapports avec l'espèce précédente, mais dont les folioles sonl
• ^ ING « 423
plus grandes, aiguës à leurs deux extrëmités, veinées, réti-
culées; les rameaux cendrés, ponctués, verruqueux; les pé-
doncules solitaires, axillaires, supportant un paqu'et de dix
à douze fleurs sessiles ; les pétioles , dépourvus de glandes, de
la longueur des feuilles.
Inga a feuilles coriaces : Inga coriacea , 'VN'illd., Spec, l. c.
Ses tiges se divisent en rameaux bruns, cylindriques, garnis
de feuilles alternes, trois fois géminées, dépourvues de glan-
des à leur pétiole ; à folioles roides, oblongues, lancéolées,
coriaces ; deux ou (rois pédoncules réunis dans l'aisselle des
feuilles, soutenant environ douze fleurs sessiles, fasciculées ,
auxquelles succèdent des gousses planes, droites, linéaires,
longues de trois pouces. Celte espèce croit dans l'Amérique
méridionale.
*** Feuilles ailées; pétiole commun membraneux
ou nu.
A. Pétiole ailé ou membraneux.
Inga a fruits sucrés : Inga vera , AVilld. : Mimosa inga,
Linn. ; Sloane , Jam. hist. , i , tab. i83, fig. i. Grand arbre
assez commun dans l'Amérique méridionale, dont le bois est
dur et blanc, et Técorce grisâtre. Ses feuilles sont simplement
ailées, composées de trois fà cinq paires de folioles fort grandes,
qui ont quelquefois plus de six pouces de long, sur trois de
large, lisses, ovales-lancéolées, un peu velues en-dessous, à
pétiole commun , ailé et articulé ; les fleurs sont grandes , blan-
châtres, disposées en bouquets, munies d'un calice pileux,
tubulé, et d'une corolle velue, tubulée , a. cinq dents; les
gousses, pubescentes, renferment une matière spongieuse,
blanchâtre et sucrée, d"un goût assez agréable, d'où vient
que les créoles ont donné à ces fruits le nom de pois sucrins.
Les semences sont noires , de forme irrégulière, au nombre
de dix à quinze, placées dans autant de loges.
Inga fastueux: Ingafastuosa, "VN'iUd.; Jacq., Fragm. bot.,
tab. jo. Ses tiges se divisent en branches très-étalées; les ra-
meaux sont velus, couleur de rouille ; les feuilles ailées, com-
posées de quatre ou cinq paires de folioles ovales-oblongues,
luisantes en-dessus , chargées , principalement sur les nervu-
res, de poils épars, couchés, hérissés eu -dessous de poils
424 r ING
nombreux, couleur de rouille ; le pétiole est ailé, quelquefois
muni de deux glandes pédicellées entre les folioles; les fleurs
sont disposées en épis axiilaires, portées sur un pédoncule
velu, à la corolle velue succède une gousse linéaire, élargie,
comprimée , tortueuse. Cette plante croît dans les environs
de Caracas, dans l'Amérique méridionale.
Inga a feuilles de hêtre : Inga fagifolia , Willd., Spec. ,
l. c. ; Mimosa fagifolia , Linn. , Spec; Pluk. , Almag.^ tab. 141 ,
fig. 2 ; vulgairement le Pois doux d'Amérique. Arbre d'un port
agréable, qui s'élève à la hauteur de trente pieds, et supporte
une cime ample, assez régulière; son écorce est blanchâtre et
unie ; ses feuilles , simplement ailées , sont munies de deux ou
trois paires de folioles ovales , glabres , entières ; le pétiole
commun est légèrement ailé; les fleurs sont petites, blanchâ-
tres , disposées en épis linéaires, un peu moins longs que les
feuilles; les gousses oblongues, d'un blanc jaunâtre, coriaces,
légèrement comprimées, renfermant une pulpe douce, que
les habitans du pays où se trouvent ces arbres aiment à sucer.
Cette espèce croît aux Antilles et à Cayenne.
B. Pétiole nu.
Inga noueux: Inga nodosa , Willd., Spec, L c. ; Mimosa
nodosa , Linn., Spec; Pluk., tab. 211 , lig. 5. Arbre de File
de Cayenne , dont les feuilles sont ailées, composées de deux
paires de folioles au sommet d'un pétiole nu , très-menu ;
les folioles inférieures munies, dans leur aisselle, d'une petite
glande. Le fruit est une gousse longue de trois ou quatre
pouces, un peu contournée et aplatie, d'un brun rougeàtre,
noueuse aux endroits des semences. Cette plante croît éga-
lement dans les deux Indes.
Inga élégant : Inga spectahilis ,yVilld. ; Mimosa spectabilis,
"Vahl , Act. soc hist. nal. Hafn. , 2, tab. 10. Plante des con-
trées méridionales de l'Amérique , cultivée à l'île Sainte-
Marthe, Ses rameaux sont glabres , légèrement flexueux ,
rendus anguleux par trois lignes saillantes partant de la
base des pétioles, revêtus d'une écorce grisâtre , ferrugineuse
et ponctuée. Les feuilles sont distantes, composées de deux
paires de folioles opposées, presque sessiles, ovales - élargies ,
membraneuses, glabres, luisantes; les supérieures longues
• ING •> 425
de sept pouces ; les inférieures une fois plus petites ; les
fleurs disposées en épis terminaux; les corolles velues.
Inga a baguettes : Inga virgultosa , Poir. , Encycl. , Suppl. ;
Mimosa virguUosa , Vahl , Egl. dec. , 2, tab. 20. Ses rameaux
sont grêles, cylindriques, alongés , pubescens , divisés en
d'autres très-courts, sans épines, garnis de feuilles composées
de trois à cinq paires de folioles glabres , sessiies , coriaces ,
luisantes, ovales, longues de cinq à six lignes; les pétioles
sont articulés, presque nus; les fleurs disposées en ombelle
simple, à peine plus longues que les feuilles; les pédoncules
filiformes; les calices petits, à cinq dents à peine sensibles;
les corolles tubulées, à cinq dents droites, aiguës; lesfilamens
nombreux, réunis en un tube grêle, saillant, terminé par
une troupe de filets capillaires. Celle plante croît à Tile de
Cayenne.
* * * * Feuilles conjuguées - a ilées,
Inga a larges feuilles : Tiiga lalifolia, Willd. ; Mimosa la-
tifolia , Linn. , Spcc; Flum. , Icon. , tab. 9. Ses rameaux sont
sans épines, garnis de feuilles en aile conjuguée; les pinnules
partielles composées de cinq folioles glabres, ovales, lui-
santes, pédicellées , longues d'environ deux pouces et demi ,
alternes; les deux terminales opposées; les fleurs purpurines,
latérales, placées sur les vieux bois, presque sessiies , réunies
par peiiis paquets presque en ombelle. Cette espèce croît
dan' l'Amérique méridionale.
Inga a fleurs purpurines: Inga purpurea, "Willd.; Mimosa
purpurea y Linn.; Plum., Icon., tab. 10, fig. i. Arbrisseau non
épineux, dont l'écorce est grisâtre, garni de feuilles dont
les pétioles se divisent en deux à leur sommet, et portent sur
chaque bifurcation trois à quatre folioles glabres, ovales-
oblongues, obtuses, longues d'environ un pouce : les deux
dernières opposées et plus grandes. Les fleurs sont rouges, dis-
posées en bouquets pédoncules. Les gousses étroites, compri-
mées, longues d'un demi- pied , un peu courbées vers leur
sommet. Cette plante croît dans l'Amérique méridionale.
**••'** Feuilles deux fois ailées.
Inga saman : Inga saman , Willd.; Mimosa saman, Jacq. ,
Fragm, bot. , 5 , tab. g. Grand arbre des environs de Caracas
426 , IIS-G '
dans l'Amérique méridionale. Son tronc est épais et très-fort;
ses feuilles sont deux fois ailées, composées de six paires de
pinnulcs i les supérieures composées de sept à huit paires de
folioles; les inférieures de deux ou trois : toutes les folioles
glabres, ovales-obiongues , obtuses; les supérieures longues
de trois pouces; les inférieures d'un demi-pouce : une glande
comprimée en godet est entre toutes les folioles : les Heurs,
réunies quatre à six en une petite tête globuleuse , pédon-
culée , produisent une gousse plane , linéaire, longue de sept
à huit pouces, canaliculée sur ses deux sutures,
Inga a fruits ronds : Inga cjclucarpa, Willd. ; Mimosa
cyclocarpa, Jacq. , Fragm.bot., 3o , tab. 34, fig. i. Grand
arbre de l'Amérique méridionale , des environs de Caracas.
Son tronc est revêtu d'une écorce crevassée; les branches et
les rameaux sont très-étalés: les feuilles deux fois ailées, for-
mées de quatre à neuf paires de pinnules, composées chacune
de vingt à trente paires de folioles tronquées à leur base , acu-
minées à leur sommet; les Heurs disposées en épis axillaires,
pédoncules, rapprochés en tèie ; les corolles blanches; les
gousses planes, orbiculaircs, noueuses et sinuées cà leur bord
extérieur. Les semences sont enveloppées d'une pulpe grasse,
visqueuse , savonneuse. Les naturels du pays s'en servent
comme de savon. (Poir.)
INGHURU {Bot.), nom du gingembre , à Ceilan, suivant
Hermann. ( J. )
INGNAMOS. {Bot.) Voyez Inhame. (J.)
INGRAIN {Bot.), nom de Tépeautre dans quelques par-
ties de la France. ( Lem. )
INGUINALIS {Bot.), ancien nom du buphthalmum spino-
sum , cité dans la table d'Adanson. (H. Cass.)
Dioscoride donne ce nom à Vaster atticus , qu'il dit à fleurs
rougrs ou jaunes. Celui qui les a rouges parott être Vaster
omellus. Les fleurs jaunes semblent désigner un buphthalmum
ou un inula. ( J. )
INGUINARIA. {Bot.) Pline donne ce nom, au rapport
de C. Bauhin , et celui d'alysson, suivant Césalpin , à la croi-
sette velue, valantia cruciata. (J.)
INHAME. {Bot.) Nom donné en divers lieux à plusieurs
espèces de dioscorea, au nombre desquelles est l'igname cul-
• * INO • 427
tivë, qui donne son nom au genre, et dont on mange la ra-
cine sous la forme d'un pain nommé cassave , après lui avoir
fitil subir diverses préparations, Barrère, dans sa France
équiiioxiale , la nomme inhyama. Ailleurs ou la retrouve
sous les dénoiiiinations de iniamos . ingnamos, ignamus. (J.)
INHAMKHAVELLA. {Bot.) Voyez Hamehavella. (J.)
IlSHAZARAS. (Mamm.) Nom que Purchass donne a une
espèce de fourmilier de la côte de Zanguebar , qu'il ne
décrit qu'iuiparfaiîement , et qu'il n'est pas possible de re-
connoitre a ce qu'il en rapporte. (F. C. )
INHYAMA. 5o^j Vovez Inhame. (J.)
INÎA^!OS. (Bot.) Voyez I^HAME. (J.)
INIMA. (iV/n.) Valmont de Bomare a introduit ce mot
dans son Diciionnaire, et c'est le seul motif qui nous engage
à en parler d'après lui. C'est, dit-on, le nom persan d'une
ocre roi;ge. Voyez Imma. (B.)
INIMHIA {Bot.), nom brésilien du bonduc, guilandina
honduc, cité par Pison : Marcgrave le nomme inimboy. (J.)
INIPH.AGALAN. {Ornith.) Nom koriaque d'un oiseau de
mer, qui est le stariki des Russes, alca cristateUa , Gmel. et
Lath. (Ch. D.)
INIQUIMI, TOULICHITl {Bot.)-, noms caraïbes, cités dans
l'herbier de Surian , pour une plante que Plumier prenoit
pour un haricot, et qui paroit être le gljcine phaseoloides
de Suartz. ( J.)
INLANKEN. {Ichthjol.) Voyez Illanken. (H. C.)
INNIL. (Bot.) Nom péruvien d'une espèce d'onagre , dé-
crite et citée par l'euillée, mais non nientionnée par les
auteurs niodernes. Elle a de l'affinité avec ïunothera pro'
strata de la Flore du Pérou. J.)
INNUMMA {Bot.}, uoui sous lequel le coton est connu à
Sierra-Leone en Afrique, suivant l'auteur du Recueil des
voyages. (J.)
INNUUS {Mamm.) , nom latin donné par Linnœus au
magot. ( F. C. )
INO {Entom.), nom d'un papillon. (CD.)
INOCARPE, Inocarpus. (Bot.) Genre de plantes dicotylé-
dones, à fleurs coniplètes, monopétalées, de la fauiille des
sapotées, delà décandrie monogjnie de Linnaeusj oflTrant pour
428 , ITyo • f
caractère essentiel : Un calice bifide ; une corolle infundi-
bulifornie, à cinq découpures linéaires; dix étamines non
saillantes, insérées sur le tube de la corolle en deux rangées;
les filamens très-courts ; un ovaire supérieur, dépourvu de
style; un stigmate concave. Le fruit consiste en un drupe
renfermant un noyau réticulé monosperme.
Inocarpe comestible : Inocarpus edulis , Forsf . , A'oi' gen. ,
tab. 55 : Lamk., lll. gen., tab. 562 ; Gœrtn., F. CaipoL, tab.
199 et 200. Arbre découvert par Forster , dans les iles de la
mer du Sud , aux nouvelles Hébrides, à l'île d'Otahiti. Ses
rameaux sont garnis de feuilles alternes, oblongues , un peu
en cœur, très-entières, glabres et veinées, longues d'environ
neuf pouces , portées sur des pétioles très -courts. Les fleurs
sont petites, alternes, accompagnées de petites bractées,
disposées en épis solitaires, petits, velus, axillaires. Leur
calice est petit, partagé en deux découpures égales, oblon-
gues, obtuses; le tube de la corolle cylindrique plus long
que le calice; le limbe divisé en cinq découpures linéaires,
plus longues que le tube ; les étamines ont leurs filamens
très-courts , disposés en deux rangées sur le tube de la corolle ,
soutenant des anthères ovales. L'ovaire est oblong , velu ,
déjiOurvu de style, à stigmate concave. Le fruit est un drupe
grand, ovale, comprimé, un peu courbé au sommet, ren-
fermant un noyau fibreux, réticulé et monosperme. Il pa-
roît qu'il est bon à manger. (Poir.)
INOCERAMUS. (Foss. ) On trouve dans les couches de
craie , tant en France qu'en Angleterre , des débris de grandes
coquilles bivalves dont la contexture , analogue à celle des
pinnes marines , avoit fait croire à quelques naturalistes
qu'elles dépendoient de ce genre ; mais, ces débris ayant été
mieux observés, il a été reconnu que, comme beaucoup de
coquilles bivalves très- épaisses, elles n'avoient d'autres rap-
ports avec les pinnes que leur contexture.
On trouve des morceaux cylindriques des charnières de
ces coquilles qui sont de la grosseur et de la longueur du
pouce. Ils portent un profond sillon garni au fond de cré-
nelures serrées et diminuant de grandeur par l'un des bouts
de ces morceaux. Quelques-uns, qui sont plats et qui ont
plus de six lignes d'épaisseur , portent dans leur intérieur des
• INO • 429
traces d'une très-grande impression musculaire. Les coquilles
dont ils dépendent ont été brisées avant ou pendant le dépôt
de la craie , car ils sont presque tous isolés et ils s'en trou-
vent entourés. Des personnes dignes de foi assurent qu'elles
ont vu dans les falaises crayeuses de Dieppe de ces coquilles
brisées qui pouvoient avoir quatre à cinq pieds de longueur.
M. Sowerby a rangé ces coquilles dans un genre auquel il
a donné le nom d'Inoceramus ; mais M. Brongniart (Géogr.
min. des env. de Paris), n'ayant pas trouvé qu'elles eussent
assez de rapports avec les autres coquilles de ce genre, en a
formé pour elles un particulier auquel il a donné le nom
de Calillus. Les caractères de ces deux genres ne sont pas
encore publiés , ou au moins ne nous sont point encore
connus au moment où nous écrivons cet article , et quoique
nous ayons une assez grande quantité de ces débris sous les
ytux , nous ne pouvons saisir la véritable forme de ces
grandes co(}uilles ; mais leur charnière linéaire, marginale
et crénelée, paroît devoir les rapprocher des pernes et sur-
tout des crénatules. Des débris de ces grandes coquilles,
portant des stries circulaires régulières, prouveroient qu'elles
présentoient des variétés ou des espèces particulières.
Je possède des coquilles de plusieurs espèces, trouvées dans
des marnes crayeuses à Folkstone et àHamscy en Angleterre,
qui paroissent dépendre du genre Inoceramus; elles ont deux
à trois pouces de longueur, et sont couvertes de fines stries
circulaires : l'une d'elles porte sous les crochets une char-
nière linéaire et crénelée; mais du reste son mauvais état de
conservation ne permet pas d'en saisir tous les caractères.
On trouve dans le mont Salève près de Genève, et dans les
couches du calcaire compacte des environs de Caen et de Ca-
rentan, des débris de coquilles bivalves qui ont quelquefois plus
d'un pouce d'épaisseur, et dont la contexture ressemble à
celle des inoceramus et des pinnes marines. Jusqu'à présent
nous n'avons pu nous procurer des portions assez considéra-
bles de ces coquilles powr en connoître tous les caractères;
mais nous en avons vu assez pour croire qu'elles ne dépen-
dent pas de ces deux genres. (D. F.)
INODERMA. (Bot.) Sous-genre établi dans le genre Ver-
rucaria par Acharius. Il comprend des lichens à expansion
r
43o ' INO '
arachnoïde et mince, ou presque spongieuse et molle comme
de l'étoupe. Voyez Verricaria. (Lem.)
INO-KADSITZ ou INO-KUSITZ, ou GOOSITZ (But.):
noms japonois du celosia argentea , suivant M. Thunberg.
Vino-matla est une espèce de lichen, cladonia subulala de
Hoffmann, hœomyces 5uiu/a/a d'Acharius. (J. )
INOLITHE. {Min.) Ferber dit que les Italiens nomment
ainsi le gypse strié. Gallitzin applique ce nom à une variété
de chaux carbonatée, concrétionnée , à structure fibreuse. '^B.)
INONDE. (Ornith.) L'oiseau dont Sonnini a traduit le nom
parl'inon,de, estV anegadizos de M.d'Azara, Apuntamientos, etc.,
tom. 2, n." 233. espèce du genre des Queues - aiguës , qui a
six pouces de longueur , dont les parties supérieures sont
roussàtres, la gorge d'un jaune clair, et le dessous blancliàlre.
Cet oiseau est remarquable par la circonstance qu'aux six
intérieures des douze pennes caudales les barbes finissent
tout à coup, comme si on les avoit coupées à deux lignes du
bout; que les deux du milieu ont dix-huit lignes de plus
que l'extérieure, laquelle en a six de moins que la suivante :
les autres sont étagées. Leur habitude est de sautiller sur les
buissons et les plantes aquatiques, où ils se tiennent toujours
cachés. (Ch. D.)
INOPHYLLUM. (BoL) Burmann avoit donné ce nom à
une espèce de calaba , calophyllum. (J.)
INOPSIS. {Bot.) Genre de plantes monocot^lédones , à
fleurs incomplètes, de la famille des orchidées, de la gynan-
drie monogynie de LinnEeus; offrant pour caractère csseritiel :
Une corolle à six pétales, dont cinq presque égaux, étalés;
les deux extérieurs latéraux soudés à leur base , ayant la
forme d'un éperon; le sixième pétale plan, très-grand , libre,
non éperonné, tubercule à sa base; la colonne des organes
sexuels ailée à son sommet; une anthère operculée, termi-
nale; le pollen réuni en deux paquets.
Ce genre se rapproche beaucoup des oncidium ; il en diffère
pi'incipalement par la forme des deux pétales extérieurs la-
téraux, soudés à leur base, ayant la forme d'un é])eron. Son
nom est composé de deux mots grecs, qui annoncent que ses
fleurs ressemblent à celles de la violette par leur forme et
leur couleur, tcv {viola), cÇicriç {faciès).
• INS • 43i
Inopsis élégante; Inopsis pitlchella , Kunth in Huinb. et
Bonpl., Nov. gen., i , png. 5/|8 , lab. 83. Plante parasite de
la Nouvelle-Grenade , qui croît sur le tronc du psidium po-
miferum et du crescenlia cujetes. Ses racines sont blanches ,
filiformes; ses feuilles planes, glabres, linéaires-lancéolées,
longues de deux ou trois pouces; les hampes droites, cylin-
driques, simples, quelquefois munies d'un ou de deux ra-
meaux, terminées par un épi de fleurs pédicellées, accompa-
gnées de petites bractées linéaires. La corolle est violette;
les trois pétales extérieurs lancéolés, les latéraux plus étroits
que le supérieur; les deux intérieurs une fois plus grands
que les extérieurs ; la lèvre ou le sixième pétale grand, à
trois lobes; le lobe du milieu plus grand , échancré en cœur;
les latéraux très-petits; la colonne terminée par un bec court;
l'oviiire glabre. (Poir.)
INOTA-INODIEN (Bot.), espèce de coqueret ou alke-
kenge du Malabar, plijsalis pubescens. (J.)
INOUART, INQUARTATION. {Chim.) Opération par la-
quelle on ajoute à de For allié de cuivre, qu'on veut passer
à la coupelle, une quantité d'argent, qui doit être environ
trois fois plus grande que la quantité d'or pur contenue dans
l'alliage. V^oyez tome XV, p. 56o et 36 1. (Ch.)
INSALA. (Bot.) Burmann, dans son Thés. Zejl., cite sous
ce nom une plante de Ceilan , qui est la même que le kurha
desMalabares : c'est une cataire existant aussi à Madagascar,
et que M. de Lamarck nomme nepeta madagascariensis. (J.)
INSCHl (Bot.), nom du gingembre chez les Malabares,
suivant Rhéede. (J.)
INSECTA VAGINI PENNIA. {Foss.) Bromel a désigné
ainsi les trilobites, auxquels on a donné depuis le nom de
calymènes. Voyez Trilobites. (D. F.)
INSECTES, Insecta. [Enfom.) Ce nom exprime la confor-
mation la plus générale des animaux auxquels on l'applique;
car leur corps est composé de petites portions distinctes, qui
forment autant d'anneaux ou de segmens, articulés les uns
sur les autres de manière à présenter autant d'intersections.
Il est évident que le mot insecte, en latin insectum , vient
d'intersectum , entrecoupé, nom qui lui-même est la traduc-
tion littérale du mot grec «vto/xoj', exprimant la même idée.
432 < ms
Dans l'état actuel des connoissances acquises en histoire
naturelle, voici la définition la plus exacte que Ion puisse
donner d'un insccfeparfait, c'est-à-dire soussa dernière forme.
Animal sans ver'.èhres; à tronc , ou partie moyenne du corps,
articulé en dehors; muni de membres articulés; el respirant par
des stigmates , qui sont les orifices des tracliées intérieures.
Tous ces caractères, comme nous allons i'indi((uer, distin-
guent la classe des insectes de celles auxquelles on doit rap-
porter les autres espèces d'animaux.
Le défaut d'os intérieurs ou de vertèbres est un caractère
essentiel, qui se joint cependant à un très-grand nombre
d'autres qu'on pourroit également nommer négatifs, parce
qu'on ne les retrouve pas dans les insectes : tels sont l'absence
d'un cœur et de vaisseaux propres à la circulation; d'organes
distincts, isolés, pour la respiration, comme les poumons et
les branchies, etc.; et ces caractères sulîiscnt pour faire dis-
tinguer cette classe delà zoologie d'avec les quatre premières
classes, auxquelles on rapporte les Mammifères, les Oiseaux,
les Reptiles et les Poissons.
Les articulations qu'offre la partie moyenne du corps ou
le tronc, éloignent les insectes des Mollusques et de la plu-
part des ZooFHVTEs. Les membres articulés, situés sur les
parties latérales et le plus ordinairement au nombre de six,
peuvent servir à les faire distinguer des Vers ou des Anne-
lires, comme la présence des stigmates, qui sont les orifices
des trachées, les fait reconnoître d'avec les Crustacés, qui
respirent par des branchies, et qui ont par conséquent des
vaisseaux, tandis que les insectes en sont constamment privés.
(Voyez l'article Entomologie, où nous avons cru devoir in-
sister sur ces caractères et sur le rang que les insectes pa-
roissent devoir occuper dans l'échelle des êtres. )
Nous nous proposons, dans cet article, de présenter d'a-
bord des idées générales sur la structure des insctes . de
faire ensuite connoître les fonctions pr-ncipales et l'organi-
sation de ces animaux; après quoi nous exposerons la classi-
fication ou la méthode que nous avons employée pour con-
duire facilement à la connoissance des insectes; enfin, nous
présenterons une histoire abrégée des auteurs qui ont traité
des insectes en général , en indiquant principalement les
systèmes, ou les méthodes, qu'ils ont successivement proposés.
♦ • INS • 453
§. i." Idées générales sur la conformation et sur
la structure des insectes.
La plupart des insectes ont six pattes et sont dits , pour cela
même, hexapodes. Beaucoup ont des ailes. Leur corps est le
plus souvent formé de seize pièces ou articulations distinctes,
que l'on considère comme formant trois régions principales:
la tète, le corselet ou thorax^ et Vabdomen ou le ventre.^
La tête s'articule constamment avec le corselet ou thorax;
mais ce mode d'articulation varie suivant les ordres, les fa-
milles et les genres. 11 n'y a que les araignées, les scorpions,
les faucheurs et les autres insectes sans ailes de la famille
des acères, dont la tête n'est pas articulée et mobile sur le
tronc et ne porte pas d'antennes.
On distingue dans la tête des insectes la houche , dont les
parties diffèrent beaucoup, non -seulement dans tous les
ordres, mais même par de petites modifications dans tous les
genres et très -probablement aussi dans toutes les espèces.
Ces modifications des parties de la bouche ont été étudiées
avec beaucoup de détails i)ar quelques entomologistes, qui
ont établi, d'après cette considération, non-seulement des
ordres qu'ils ont appelés à tort des classes parmi les insectes,
mais qui même en ont tiré tous les caractères des genres.
Nous ne nous étendrons pas beaucoup ici sur ce sujet,
l'ayant exposé à l'article Bouche. Il suffira cle rappeler que,
sous ce point de vue, tous les insectes peuvent être rap-
portés à deux grandes divisions : les espèces à mandibules
et à mâchoires libres, disposées par paires mobiles isolément;
ce sont les insectes màcheurs ou broyeurs: tels sont les quatre
premiers ordres, les coléoptères, orthoptères, névroptères et
hyménoptères , et la plupart des familles des insectes parmi les
aptères. j\Tais, déjà dans l'ordre des insérâtes hyménoptères, et
en particulier dans les familles des melliles, des ptérodiples
et des chrysides, les mâchoires s'alongent, s'aplatissent et
1 Pour éviter les répétitions, nous prévenons le lecteur qu'il trouvera
dans ce Dictionnaire , et dans l'ordre alphabétique , des détails beaucoup
plus circonstanciés sur chacune de ces parties dont les noms sont ipi-
priuiés en caractères italiques.
23. 38
454 ' INS <
forment, à l'aide de la lèvre inférieure, une sorte de tube
et de langue qui donne à ces insectes la double faculté de
broyer les alimens et de les pomper par une sorte de succion.
Dans les insectes suceurs proprement dits, les alimens ne
peuvent être avalés qu'autant qu'ils sont liquides ; mais
les organes qui serA^ent à produire cette succion , sont très-
diversifiés dans les différens ordres. Ainsi chez les hémiptères
c'est un hec articulé, sorte de tube composé de plusieurs
pièces qui vont, en diminuant de grosseur, de la base à la
pointe , et dans l'intérieur desquelles sont contenues des soies
fines et aiguës, espèces de lancettes, ordinairement au nom-
bre de trois.
Chez d'autres, comme dans les lépidoptères, la bouche
consiste en un instrument particulier, roulé ordinairement
en spirale sur lui-même, auquel on donne le nom de langue.
Cette langue forme un canal composé de deux demi-gaines
qui correspondent aux mâchoires des autres insectes, mais
excessivem.ent alongées, à la base desquelles on retrouve les
palpes souvent très -velus, et tous les rudimens des autres
parties de la bouche.
Enfin, dans les diptères, la bouche forme tantôt une trompe
charnue , terminée par deux lèvres qui font f office d'une
ventouse , au centre de laquelle se trouve l'orifice du canal
de la digestion ; et les genres dans lesquels on observe cette
sorte d'instrument, sont forcés de prendre leur nourriture
telle qu'elle se trouve à la surface des corps, ou de la dis-
soudre en la liquéfiant, afin de pouvoir ensuite l'avaler.
Dans d'autres il y a ce que les entomologistes sont convenus
d'appeler un suçoir: c'est une sorte de trompe non évasée à
son extrémité libre et dans laquelle se retrouvent des soies,
instrumens vulnérans dont l'insecte se sert pour percer la
peau des êtres organisés, des humeurs desquels il doit se
nourrir.
Après la bouche, les parties les plus constantes de la tète
sont les antennes , sortes de cornes de formes très- variables , ar-
ticulées , et au nombre de deux dans tous les Insectes , excepté
dans la famille des araignées. On ignore encore complètement
l'i'sage des antennes, et il est probable qu'elles sont destinées
à faire percevoir divers modes de sensation. Il est évident
0 INS • 435
en particulier que beaucoup d'espèces s'en servent comme
de tentacules pour explorer les circonstances dans lesquelles
ils se trouvent ; mais il est notoire aussi que leur existence
ef en même temps leur excessive brièveté dans quelques
espèces, en particulier dans la plupart des diptères et dans
quelques hémiptères et névroptères, ne peut pas s'accorder
avec cet usage. Au reste , nous reviendrons par la suite à
l'étude des modes de sensation dans les insectes.
Les ^eux sont encore des organes dont la présence est
constante à la tête des insectes. Ils sont aussi le plus souvent
au nombre de deux, situés sur les parties latérales. Ils ne
sont pas couverts par des paupières; leur surfiice est taillée
à facettes, dont le nombre varie excessivement. On les dis-
tingue très-bien sur les yeux des demoiselles, des papillons,
de certaines mouches. Leur couleur varie. Dans les diptères,
les mâles se distinguent souvent par la grosseur des yeux, qui
occupent toute la tête.
Outre ces yeux à facettes ou composés , qui sont constans
dans tous les insectes sous l'état parfait, on en observe dans
plusieurs ordres d'autres, petits, le plus souvent au nombre
de trois, situés non sur les côtés de la tête, mais dans la ligne
moyenne du front, au-dessus de la bouche et entre les an-
tennes. Ces petits jeux ne sont pas taillés à facettes : aussi,
les nomme- 1- on lisses, ou en un seul mot, qui convient,
mieux, les stemmates. On ignore leur usage. On croit cepen-
dant qu'ils servent également à la vision , parce que les yeux
des araignées ont à peu près la même forme , et que ces der-
niers insectes n'en ont pas d'autres. Il est vrai que la plupart
en ont huit , de la forme de ceux qu'on"nomme stemmates.
On distingue encore sur la tète des insectes diverses ré-
gions, dont le développement, les couleurs ou les enfonce-
mens, et d'autres particularités ont offert quelques caractères
que nous croyons en conséquence devoir faire connoître.
Tel est Vocciput, qui sert à l'articulation avec le corselet,
tantôt par un seul condjle, tantôt par deux. Il est quelque-
fois tronqué, arrondi, aplati, déprimé, prolongé en une
sorte de col, etc.; le vertex ou le sommet de la tête; le front,
le chaperon, qui supportent immédiatement la bouche ou la
lèvre supérijeure: les joues, entre les yeux et la bouche; la
436 ' INS '
ganache ou le menton, sur lequel s'articule la lèvre inférieure.
Telles sont les diverses régions de la tête des insectes.
Le corselet ou le thorax est la partie du tronc qui est pla-
cée entre la tète et le ventre ou l'abdomen : elle supporte
constamment les membres , tels que les pattes et les ailes.
Voilà la définition la plus générale que l'on puisse donner de
cette région du corps; car elle se compose de plusieurs autres
parties, que quelques auteurs avoient déjà distinguées, mais
sur lesquelles M. Audouin vient de présenter (Mai 1820) un
Mémoire très-curieux, dont nous allons extraire les faits qui
suivent , d'après le rapport que M. Cuvier en a fait à l'Institut.
M. Audouin distingue dans le thorax trois anneaux ou
segmens du corps, dont chacun porte une paire de pattes,
et que, d'après leur position de la tête à l'anus, l'auteur
nomme prothorax , mésothorax et métathorax. Chacun de ces
trois segmens présente quatre faces : une supérieure, que
nous décrirons par la suite, et qui correspond au dos, en
latin tergum; deux latérales et une inférieure, constituant, à
elles trois, la région de la poitrine. La portion ou face infé-
rieure forme le sternum , et les latérales portent le nom géné-
ral de flancs. On y distingue trois pièces principales: la plus
voisine de la ligne moyenne ou inférieure , et qui s'appelle épi-
sternum ; l'autre, placée plus en arrière, quireçoit la première
articulation de la patte, se nomme épimcre; et la troisième,
enfin, porte le nom d'hjpoptère. C'est par cette troisième
pièce du flanc que les ailes sont supportées dans les segmens
appelés moyen et postérieur, ou méso- etméta-thorax : de plus,
il y a quelquefois une petite pièce autour du stigmate, que
l'on nomme péritrènie.
Le dos ou le tergum se compose de quatre régions dans
chaque segment; l'auteur les nomme de devant en arrière.-
prœscutum^ scutum , scutellum et postscutellum. Les deux ex-
trêmes sont souvent cachées dans l'intérieur.
D'après cette étude extérieure du thorax, on conçoit qu'il
doit y avoir de très- grandes différences pour la forme et
rétendue de ces diverses parties dans les différens ordres.
Ainsi le mé-othorax est peu développé dans les coléoptères
et les orthoptères , qui ont des élytres de peu d'usage «Jans
l'action de voler. Dans les cigales 5 c'est l'épimère qui se pro-
o INS • 437
longe sous le premier anneau de l'abdomen , pour former
la grande plaque concave qui recouvre l'instrument du chant
chez ces insectes. Les quatre régions du dos sont plus sensi-
bles et mieux divisées sur le mésothorax, dans les ordres des
lépidoptères, des hyménoptères et des diptères. Dans leslibeK
Iules ou demoiselles, c'est lépislernum qui a pris le plus grand,
développement. Dans les coléoptères, c'est le métathorax
qui offre la même augmentation d'étendue, en raison de
l'usage auquel il est destiné , puisqu'il reçoit les véritables
organes du mouvement , les ailes membraneuses.
Vabdomen ou le ventre est la troisième région du tronc
dans les insectes; il ne porte pas de pattes articulées. (Nous
l'avons fait connoitre avec détails, tome ï", page 6.) Le
nombre des anneaux qui composent cette région, varie d'un
à quatorze ou quinze. La plupart portent un trou ou un pore
qui se nomme stigmate , et qui est l'orifice d'une trachée.
L'abdomen est articulé avec le métathorax dans la région
postérieure , tantôt par une large surface ; il est alors dit
sessile , comme dans les coléoptères, les orthoplères, etc.:
tantôt, au contraire, l'articulation offre un rétrécissement
marqué, qu'on nomme pétiole ou pédicule, comme dans le»
guêpes, les sphéges.
L'extrémité libre de l'abdomen est le plus souvent percée
jtar Vanus. Le dernier anneau varie beaucoup pour la forme.-
car souvent il est disposé de manière à favoriser le rappro-
chement des sexes, ou à faciliter la ponte ou l'introduction
des œufs dans les matières qui doivent les recevoir; souvent
encore il est organisé de manière à devenir une arme d'of-
fense ou de défense. Les crochets, les tarières, les aiguil-
lons, les pinces, les lames, les scies, les queues, les filières
et les autres instrumens font souvent partie de cette région
du tronc.
On distingue également dans chacun des anneaux du ventre
les régions inférieure, supérieure et latérales, pour en in-
diquer la forme, la structure, les taches, les mouvemens, qui
fournissent de très-bons caractères , non-seulement pour les
genres, mais même pour les espèces et les différences de sexe.
(Voyez Abdome>'.)
Les ailes sont de véritables membres, à l'aide desquels les
^^58 . INS ^
insectes s'appuient sur l'air et se transportent dans l'atmos-
phère (voyez Vol). Elles consistent en pièces articulées sur
le méso- et sur le méta-thorax , dans l'intérieur desquels sont
placés des muscles très-puissans, qui les meuvent, les étendent,
les plissent et les déplissent, les élèvent, les abaissent alter-
nativement, et les portent en dehors et en dedans; enfin,
ce sont de véritables rames légères, mais solides, constituées
par des membranes, soutenues par des rayons ou touches,
diversement disposés pour leur donner la souplesse, la résis-
tance et la mobilité dont elles ont besoin.
Aucun insecte ne naît véritablement ailé, et quelques-
uns, qu'on dit Aptères, ne prennent jamais d'ailes; tantôt
les insectes n'en ont que deux , on les nomme alors Diptères,
ou ils en ont quatre, et on les dits alors Tétraptères. Quand
il y a quatre ailes, on nomme supérieures celles qui sont
insérées plus près de la tête ou sur le mésothorax ; on ap-
pelle inférieures, celles que supporte le métathorax.
Dans les insectes à quatre ailes , lorsque les supérieures
sont plus épaisses , lorsqu'elles ont une autre consistance que
les inférieures et qu'elles servent comme de gaines ou d'é-
tuis aux véritables ailes membraneuses , on les nomme des
élytres ou des demi-éljytres : tels sont les Coléoptères, les Or-
liHOPTEREs en général et les Hémiptères.
Chez les autres insectes , qui ont quatre ailes à peu près
d'égale consistance et qui servent également à l'action du
vol , on distingue celles qui sont comme couvertes d'une
poussière écailleuse, et celles qui sont à peu près nues. Les
premières sont celles des Lépidoptères, et les autres s'obser-
vent dans les Gymnoptères. Ces dernières se distinguent en
ailes à nervures disposées principalement dans la longueur,
comme chez les Hyménoptères, et en celles dont les nervures
transversales sont nombreuses, comme en réseau : telles sont
celles des Névroptères.
C'est d'après la présence, le nombre et la forme des ailes,
qu'où a classé ou plutôt formé les huit ordres dans la classe
des insectes, comme on le voit par le tableau que nous
présenterons dans la suite de cet article. 11 y a en outre
beaucoup de modifications dans la forme des ailes, dans leur
structure, et même dans quelques appendices, qui tantôt
'> * INS •> 439
lient les ailes entre elles, comme les anneaux, les boucles,
les crochets, les ardillons, les balanciers, les caillerons ou
ailerons, etc. Tous ces détails seront présentés à l'article Vol
dans les insectes, où ils peuvent être beaucoup mieux exposés.
Les pattes ou les pieds des insectes sont , comme nous
l'avons déjà dit, le plus souvent au nombre de six dans les
véritables insectes .- elles sont disposées par paires , reçues
chacune dans une des pièces du thontx. On distingue en
général dans les pattes des insectes quatre régions, savoir, la
hanche, la cuisse , la jambe et le tarse.
La hanche [coxa) est une pièce courte, le plus souvent en-
châssée , mais mobile, dans le prothorax pour la première
paire de pattes, dans le mésothorax pour la paire moyenne,
et dans le métathorax pour la paire postérieure. La forme
de cette hanche et son mode d'articulation varient le plus
souvent; il est le même pour les postérieures, mais tout-à-
fait différent pour la paire de pattes qui se porte en avant,
tandis que les deux autres sont dirigées en arrière. Tantôt
cette pièce de la hanche est globuleuse et ressemble à une
sphère reçue dans une cavité arrondie, comme le genou des
mécaniciens ; tantôt elle est aplatie , ovale , alongée , linéaire ,
et tellement engagée dans la pièce correspondante du tronc
qu'elle semble en faire partie et s'y confondre ; voilà pour-
quoi la plupart des auteurs n'en font pas mention. Cependant
on l'a observée dans quelques dytiques, où elle forme une
sorte d'oreille, ce qui leur a fait donner le nom de cnémi-
dotes. On l'a aussi remarquée dans les blattes, les forbicines.
La ouiise ou le fémur est la seconde articulation de la patte;
sa forme varie beaucoup , ainsi que ses proportions. Quel-
quefois elle porte à sa base une sorte d'appendice mobile
qu'on nomme trochantei , et dont on ignore encore l'usage :
il a été observé en particulier dans les coléoptères créophages.
Cette cuisse est remarquable , tantôt par sa grosseur, comme
dans les alurnes, les altises, les donacies, les œdémères, quel-
ques syrphes , les hirtées ; tantôt par sa longueur, comme
dans les sauterelles, les criquets, les truxales, les puces, les
chalcides : on y observe aussi les pointes, les épines, les
membranes, les rainures , les arêtes et plusieurs autres par-
ticularités.
44o f LNS *^ '
La jambe ou le lihia est la troisième portion ou articula-
tion de la patte , placée entre le tarse et la cuisse. Elle pré-
sente autant de variétés que le fémur par sa conformation:
elle en a ordinairement la longueur. Sa forme varie suivant
les usages : son bord est dentelé et sa surface aplatie dans les
insectes fouisseurs. Ce tibia est cilié dans les insectes nageurs;
garni de brosses ou de poils roides dans quelques abeilles,
comme celle dite à manchettes; garni d"épines mobiles dans
beaucoup de lépidoptères, dans les hydrophiles, etc.
Le tarse ou le doigt est ordinairement composé de plusieurs
articulations ou phalanges qui terminent la patte. Ces articles
varient, pour le nombre, depuis un jusqu'à dix ou douze,
selon les ordres. Il est à peu près constant dans certains
prdres ; quelques aptères en ont seuls plr.s de cinq. Ce
nombre est le plus considérable qui ait été observé dans les
autres ordres. Ordinairement les pattes moyennes ont le
même nombre d'articles aux tarses que les antérieures ; mais
celles qu'on nomme postérieures ont souvent moins d'ar-
ticles que les autres. On a étudié avec soin , depuis Geolîroy ,
ce nombre des articles aux tarses; il a même fourni de bons
caractères pour établir des sous-ordres parmi les coléoptères.
Ainsi , on a nommé dimérés , ceux qui n'ont que deux articles
aux tarses; triméres , ceux qui en ont trois; létramérés , ceux
qui en ont quatre; pentan.érés, ceux qui en ont cinq; enfin,
on a désigné sous le nom de coléoptères hétéromérés , les es-
pèces qui n'ont que quatre articles aux pattes de derrière,
tandis qu'on leur en compte cinq aux deux autres paires.
L'avanl-dernier article des tarses, ou le pénultième, présente
quelques variétés pour la conformation et les usages auxquels
il est destiné dans les insectes. 11 en est de même du dernier,
qui supporte un, deux, trois ou qiiatre crochets ou ongles,
dont la forme présente également beaucoup de modifications;
quelijuefois il est tellement réduit qu'il semble manquer
tout-à-fait. Dans quelques espèces il n'offre qu'une seule
pièce, et les màles ont souvent les tarses antérieurs disposés
de manière à pouvoir adhérer sur le corps des femelles, qui
sont, à cet égard, autrement conformées : tels sont quel-
ques hydrophiles , quelques dytiques, quelques crabrons ,
quelques asiles. Chez d'autres , cette dilatation des tarses a
« INS '' 4/.1
des usages diffërens, comme dans les abeilles. Chez quelques-
uns tous les articles des tarses sont velus en-dessous, comme
dans quelques donacies, dans quelques charansons ; parfois,
quelques articles seulement, comme le pénultième ou le der-
nier, offrent cette conformation, ou une sorte de pelote, de
houppe, de ventouse, de disque ou de demi-disque épaté,
comme dans les capricornes, les asiles, les mouches.
Les crochets ou les ongles sont aussi différemment orga-
nisés ; car ils forment la pince, la griffe, la serre, le tire-
bourre. (Voyez Tarses dans les insectes.)
Telles sont à peu près les formes extérieures des insectes.
Notre intention ne peut être d'exposer toute l'organisation
de ces animaux, ce qui exigeroit des détails qui ne sont i;as
de la nature de cet ouvrage. Nous croyons cependant devoir
indiquer avec plus de détails les modifications que les fonctions
principales paroissent avoir éprouvées, dans les insectes, sous
le rapport des mouvemens , des sensations, de la nutrition
et de la reproduction.
§. 2. Fonctions des insectes.
Nous avons déjà insisté, à l'article Entomologie, sur le
rang élevé que paroit devoir occuper la classe des insectes
dans l'échelle des êtres : qu'il nous suffise de rappeler ici
que, sous le rapport de l'animalité, ou pour ce qui constitue
essentiellement l'être vivant et animé, les insectes viennent
immédiatement après les animaux vertébrés, puisqu'ils ont
un tronc articulé, supporté par des mem.bres articulés, et
qu'ils jouissent de toutes les espèces de mouvement; que, rela-
tivement à leur masse, ils le manifestent à un degré tel que
plusieurs se transportent sur la terre, dans l'air, dans l'eau
et à sa surface, avec la plus grande rapidité; qu'ils sont doués
également de la faculté de percevoir vivement et à distance ,
au moyen des organes des sens, la plupart des qualités des
corps, et peut-être plus et mieux que nous ne pouvons les
apprécier nous-mêmes ; que , chez eux , les organes de la res-
piration , répandus par tout le corps , sont mis en contact avec
les humeurs, pour les rendre propres à l'excitation de la vie,
ce qui compense et peut-être dépasse en énergie le défaut
de la circulation : de sorte que les organes de la nutrition et
442 ' IIVS '
leur complément, ceux de La génëralion , ne sont pas moins
énergiques ni moins parfaits que ceux des crustacés, des
annelides, des mollusques et des zoophytes.
Les Movp^EMENs dans les insectes, quoique très-A'ariés, ont
exigé peu de complication : comme les parties de leur corps
sont, en général, très-symétriques, on retrouve à gauche ce
qui s'observe de l'autre côté , de sorte que , sous ce rapport,
l'étude de la moitié de leur corps donne l'idée de la partie
correspondante. Ensuite, quant au tronc, la tête et ses an-
nexes, comme les parties de la bouche et les antennes, sont
seules très- mobiles. Les trois régions du thorax sont mues
en totalité par les membres, et elles servent plutôt de point
d'appui qu'elles ne déterminent le transport. Enfin , les an-
neaux de l'abdomen sont en général articulés les uns sur les
autres de la même manière , de sorte que les muscles de l'un
des segmens se retrouvent à peu près les mêmes sur les seg-
mens qui précèdent et sur ceux qui les suivent.
La plupart des articulations s'opérant en ginglyme ou en
charnière, deux muscles ont suffi pour les produire : un ex-
tenseur, en général plus petit, et un fléchisseur ou adducteur,
beaucoup plus volumineux. Ces muscles sont toujours placés
à l'intérieur ou dans la cavité des articulations, de sorte que
les pièces cornées des membres, par exemple, sont des étuis
pour les muscles : absolument comme on le voit dans les
pinces des homards et des écrcvisses, qui sont très-propres
à servir de démonstration dans ce cas.
Les muscles des insectes offrent cette difficulté dans leur
étude, qu'ils ne sont réellement circonscrits et distincts que
par leur insertion ou par la terminaison de leurs fibres sur
un tendon solide ou prolongement articulé de la pièce qu'elles
doivent mouvoir. Comme il n'y a point de vaisseaux ni de
tissu tonienteux cellulaire dans les insectes, ces fibres ne sont
pas liées entre elles , et quand elles sont séparées de leur
insertion ou de leur attache fixe , elles restent flottantes
comme des houppes, ce qui rend leur étude fort difiicile.
Dans les insectes mous, comme dans les orthoptères, tels
que les sauterelles; dans les diptères, mais surtout dans les
larves et les chenilles, cette étude est beaucoup plus facile.
Lyonnet, dans son beau Traité sur l'anatomie de la chenille
'• INS * 445
du cossus, a donné d'excellentes figures de ces organes du
mouvement; on retrouve également des descriptions et des
dessins exacts des muscles , dans la Bible de la nature de
Swammerdam. Nous-mêmes nous nous sommes livrés à cette
étude, et nous avons consigné, dans le premier volume de
TAnatomie comparée de M. Cuvier, les recherches que nous
avons jointes à celles de ce savant, lorsqu'il a bien voulu nous
associer à ses travaux et à la publication de cet ouvrage, au-
quel nous croyons devoir renvoyer le lecteur pour de plus
amples détails.
Sensibilité. Les insectessont évidemment doués d'un système
nerveux, et ce système est absolument le même que celui
qu'on retrouve dans les crustacés et les annelides. Il consiste
dans une moelle nerveuse assez homogène, composée le plus
souvent de douze ganglions ou renflemens successifs , placés
à la file les uns des autres, dans toute la longueur du corps,
depuis la tête jusqu'à l'extrémité opposée du tronc. De ces
renflemens partent constamment deux nerfs qui vont se
joindre au renflement suivant, et de plus d'autres nerfs, en
nombre variable , qui partent en irradiant pour se rendre
dans tous les organes circonvoisins , et qui sont d'autant plus
gros ou plus alongés que ces organes sont eux-mêmes plus
développés ou plus éloignés du ganglion. Ces renflemens
principaux sont généralement disposés ainsi : le premier,
qui a été regardé comme un cerveau, est situé dans la tète,
au-dessus de la bouche et de l'origine du conduit des alimens ;
outre les filets qu'il fournit aux diverses parties de la bouche ,
qu'il est inutile d'examiner ici , il en envoie de plus gros aux
yeux , aux antennes , et deux en arrière , qui lient le premier
ganglion au suivant. Ces deux filets embrassent consiamment
l'œsophage , et lui forment ainsi une sorte de collier que les
alimens doivent traverser. La série des autres ganglions reste
alors sous les intestins et dans la partie inférieure du corps,
îl y en a trois dans la poitrine : un pour le prothorax, qui
donne les nerfs des pattes de devant ; un pour le mésothorax,
qui fournit les nerfs des ailes supérieures ou des élyfres, et
ceux des pattes moyennes; enfin, dans le métathorax , le
ganglion correspondant, qui est le quatrième de la série,
fournit les nerfs des ailgs inférieures et des pattes postérieures.
444 ' INS '
Chacun (Feux donne les deux filets qui établissent la série
des renflcmens : arrivés dans l'ahdoinen , cette série offre
autant de rentlemens qu'il y a d'anneaux, et ces ganglions
fournissent les nerfs des muscles, ceux qui accompagnent les
vaisseaux à air, les viscères génitaux, digestifs et sécréteurs.
On conçoit que les larves ont les nerfs autrement disposés;
cependant ce sont absolument les mêmes que ceux qui se
manifesteront dans l'insecte parfait, avec cette différence, par
exemple , que les renflemens ou les ganglions s'éloignent les uns
des autres ou se rapprochent, suivant que la larve, de courte
qu'elle étoit, comme celle du fourmilion, donne un insecte
alongé. ou bien que d'une larve alongée , comme de celle
du scarabée ou du hanneton, il en provient un insecte beau-
coup plus court.
Il n'y a pas le moindre doute que les parties dont nous
venons de parler, ne soient les instrumens par lesquels l'in-
secte perçoit ses sensations, et que ces filets nerveux ne
transmettent dans les organes la sensibilité dont ils sont
doués, en liant entre elles toutes les parties du corps. Des
expériences positives l'auroient démontré, lors même que
l'analogie n'eût pas été évidente. Mais il s'agit d'examiner
maintenant comment les insectes perçoivent les sensations :
nous allons successivement exposer les notions acquises sur
les organes des sens dans les insectes.
Vue. Les yeux existent évidemment dans tous les insectes
parfaits, et même dans les larves qui sont obligées d'aller cher-
cher elles-mêmes leur nourriture. Quant à celles qui se déve-
loppent au milieu de leurs alimens , si elles y ont été dépo-
sées par leur mère, et quant aux espèces qui sont condam-
nées à vivre dans une obscurité profonde où l'on ne peut
supposer que la lumière arrive jamais, on n'observe pas chez
elles les instrumens de la vision.
Nous avons déjà dit que beaucoup d'insectes avoient deux
sortes d'yeux : i.° ceux qu'on nomme lisses ou stemmates,
dont le nombre varie et dont les usages réels ne sont pas
encore bien connus, quoique, par analogie , on les croie
propres à la vision, puisque les araignées, les scorpions, les
faucheurs n'en ont pas d'autres; 2.° les véritables yeux, dont
la surface est à facettes ou à réseau, ce qui leur donne une
a- INS . 445
organisation très-compliquée. Quand on examine, en effet,
la superficie de ces yeux à la loupe, et quelquefois à la vue
simple, comme dans les papillons, les demoiselles, les mou-
ches, les taons, on voit qu'ils sont taillés de manière à pré-
senter beaucoup de petits tubercules ou de plans diversement
combinés, qui paroissent former autant de cornées ou de
petits o])jectifs, c'est-à-dire, de premières lames, que doivent
traverser les rayons lumineux émanés de la surface des objets.
Chacun de ces petits plans est distingué de ceux qui l'avoi-
sinent par des lignes ou des sillons , sur lesquels ii n'est pas
rare d'observer des poils.
Quand on enlève ainsi l'ensemble de cette cornée géné-
rale, et qu'on l'applique à l'objectif d'un microscope, après
l'avoir nettoyé ou débarrassé de la matière colorante qui
semble foriiier autant d'iris et de trous pupillaires qu'il y a
de plans divers, les objets vus à travers se répètent autant de
fois qu'il y a de facettes. On présume que les apparences des
corps se peignent ainsi dans les yeux des insectes, qui sont
toujours immobiles ou adhérens à la partie solide de la tête.
On voit se rendre de très-gros nerfs optiques dans ces
yeux. Leur teinte varie beaucoup : car il en est de noirs,
de blancs, de jaunes, de verts, de bleus, de rouges; enfin,
de toutes les teintes et de toutes les nuances, souvent même
avec l'éclat métallique de l'argent , de l'or et du cuivre.
Cette matière colorante est une sorte de membrane cho-
roïde, dans laquelle on distingue autant de cellules qu'il
y a de facettes, et dans chacune de ces cellules, ainsi que
Swammerdam l'a décrit dans sa Bible de la nature et
représenté à la planche XX de cet immortel ouvi-age, on
voit parvenir un filet nerveux de la masse optique. Il est
évident, d'après les expériences de Delahire , insérées dans
les Mémoires de l'Académie des sciences de Paris, tome X,
page 609 et suiv. , et d'après les recherches de Stancari, de
Bologne , que les yeux sont, chez les insectes, organisés de ma-
nière à leur faire percevoir l'image des corps; car, quand les
yeux sont couverts d'un enduit opaque, quand leur surface
est altérée par quelque caustique ou par un instrument tran-
chant , et lors même qu'elle n'est couverte que d'une poussière
très-fine , l'insecte est aveuglé et va se heurter contre tous
446 r I]VS f
les corps, sïl ne s'élève pas verticalement dans l'atmosphère ,
comme cela arrive aux oiseaux sur lesquels on fait la cruelle
expérience de les aveugler ou de leur obscurcir les yeux
subitement. Leuwenhœck. a reconnu 3,i8i facettes dans l'œil
d'un scarabée, 8000 sur celui d'une mouche. Dupuget , dans
ses Observations sur la structure des yeux des divers in-
sectes, imprimées à Lyon en 1706, a compté sur l'œil d'un
papillon 17,025 facettes.
Ouie. Tous les naturalistes sont persuadés que les insectes sont
doués de la faculté de percevoir les sons ou les ébranlemens
de l'air, puisque plusieurs en produisent dans les circons-
tances de la vie où il leur devient important de se manifester
réciproquement leur existence. Le chant de la cigale , le
bruissement des sauterelles et la stridulation des criquets, le
grognement des courtilières , le bourdonnement des abeilles,
le tintement des cousins, le piaulement des syrphes, le tic
et tac des psoques, le tapotement des vrillettes, et tous ces
bruits, ces strideurs, ces frémissemens , ces oscillations, ces
murmures des criocères, desleptures, des capricornes, des
donacies, des ateuches, des blaps, des sphinx, sont certai-
nement destinés à être perçus par un organe spécial; mais
on en ignore le siège dans les insectes : c'est peut-être parce
qu'on a voulu par analogie en rechercher l'existence vers la
tête. Jusqu'ici on n'a établi que des conjectures a cet égard.
Il faut avouer que tout porte à croire que les insectes per-
çoivent les sons; mais on ne sait pas encore où réside chez
eux l'organe destiné à en transuiettre l'idée ou l'image.
Odorat. Quant à l'organe de l'odorat, quand on réfléchit à
la nature même de cette perception , on est étonné que les
physiologistes aient voulu, par une analogie peu réfléchie,
trouver vers la tête des insectes l'instrument destiné à arrêter
les odeurs et à en apprécier les qualités. Que les mammifères,
les oiseaux, les reptiles soient organisés comme l'homme,
sous le rapport de l'olfaction, cela devoit être, puisque tous
respirent par des poumons, et que l'air qui pénètre dans
leur corps pour cet usage n'y peut parvenir que par une
seule route , qui est la double entrée des narines : c'est sur
ce passage forcé, et à l'orifice même, que l'essai de la nature
de cet air doit être fait, pour que l'animal soit averti du
danger de l'admettre ou de la nécessité de le repousser.
i> " INS • 447
Les odeurs ont en effet la plus grande analogie avec les
saveurs. Elles consistent matériellement dans les particules
des corps tenus en suspension , les unes dans les gaz , les autres
dans les liquides. Les fluides élastiques dissolvent continuel-
lement les corps à leur surface ; ils se chargent par cela
même de quelques atomes de leurs parties constituantes, et
ils les retiennent ainsi suspendues dans une sorte de dissolu-
tion, disposés à les abandonner lorsqu'elles auront plus de
tendance à s'unir à d'autres substances. Dans quelques cir-
constances les corps très-volatiles, et souvent par cela même
trés-odorans , prennent momentanément la forme de vapeurs
ou de gaz non permanens, qui jouissent de la plupart des
propriétés de l'air ou des fluides élastiques avec lesquels ils
se mêlent. C'est donc sous ce point de vue, et comme des
corpuscules gazéifiés ou des fluides aériformes, que Ton doit
étudier la manière d'agir des oder.rs.
Transmises nécessairement par l'air, qui est leur seul véhi-
cule, les odeurs tendent à pénétrer avec lui dans le corps
de l'animal ; arrêtées , sur leur passage , dans une sorte de
bureau de douane où elles doivent être promptement visitées
et analysées, elles sont mises là en contact avec une surface
humide , avec laquelle elles ont quelque aflînifé : elles s'y
combinent aussitôt; mais en même temps elles touchent et
avertissent de leur présence des nerfs distribués sur ces
mêmes parties, qui reportent au cerveau, dont ils sont le
prolongement, l'action chimique ou physique, en un mot,
la sorte de sensation qu'ils dénotent ou que peut-être ils ont
éprouvée.
Les odeurs sont donc , comme toutes les autres sensations
physiques, une sorte de toucher, dans lequel le corps, quelle
que soit sa nature, vient au-devant de l'organe et se trans-
porte sur la seule partie de l'animal où son action puisse
manifester toutes ses propriétés. En dernière analyse, toutes
nos sensations se réduisent ainsi, ou à une taction passive,
c'est-à-dire à l'action d'être touché ; ou à un tact actif, qui
nous donne la faculté de porter notre corps , ou quelques
parties de notre corps, sur la surface des objets, pour en
apprécier quelques qualités.
Par cette admirable disposition nous éprouvons l'action de
448 . l]yS
la plupart des corps. C'est ainsi que la lumière, fluide impon-
dérable, qui se modifie si diversement à la surface des objets ,
en transmet l'image dans l'œil , en s'appliquant exactement
sur le nerf de la rétine; que la matière de la chaleur ou le
calorique se met en équilibre avec notre corps, s'y applique
ou s'en échappe, en manifestant ainsi sa présence ou son dé-
faut ; que les vibrations communiquées aux corps se trans-
mettent, soit directement par le contact, soit par l'intermède
de l'air ou des gaz, à une petite quantité d'air renfermée dans
l'un de nos organes, avec laquelle elles se mettent en harmonie
parfaite, pour faire apprécier les sons et produire Taudition;
que les matières, enfin , qui sont susceptibles de se dissoudre
dans les liquides , viennent manifester leurs qualités sur la
région de l'animal oii elles avoient le plus grand besoin
d'être appréciées avant de parvenir dans l'intérieur de son
économie, puisque la saveur est une des qualités de l'ali-
ment.
En dernière analyse , tous les organes des sens sont constitués
par des appareils chimiques ou physiques, véritables éprou-
vettes où des nerfs aboutissent, pour faire naître à l'instant
même l'idée complète de la perception et de la sensation
réelle.
Nous avions besoin d'entrer dans ces détails physiologiques
pour exposer nettement comment on conçoit que se fait
dans les insectes ia sensation des odeurs.
Il est bon de rapporter d'abord des faits qui prouvent que
les insectes jouissent de cette sensation.
II semble que la nature , en douant de l'existence cette
innombrable quantité d'êtres destructeurs, ait eu pour but
de les employer à faire disparoîtie les tristes restes des êtres
organisés privés de la vie, afin de rendre plus tôt à la masse
générale les élémens qui les composent, pour en former
promptement de nouveaux par un cercle continu de créa-
tions et de destructions.
Pour parvenir à ce but, elle a, pour ainsi dire, intéressé à
ses travaux tous les êtres qu'elle destinoit à cet emploi im-
portant, en leur donnant des goûts et une manière de vivre
analogues aux fonctions qu'ils étoient appelés à remplir; et,
afin de porter ici, comme dans toutes ses œuvres, la perfec-
c, • INS • 449
tion à son plus haut degré, elle a doué ces animaux d'une
sensation toute particulière et propre à leur genre de vie.
C'est par le milieu même dans lequel ils habitent, que les
insectes sont avertis de la présence des corps qui peuvent
servir à leur nourriture : l'air, en se chargeant des émana-
tions odorantes qui s'en dégagent continuellement, va porter
dans l'organe respiratoire toutes les molécules qu'il tient en
suspension ; il devient ainsi le guide invisible de l'animal
qui cherche à subvenir à ses besoins.
Les premiers observateurs de la nature n'avoient point
suivi avec l'attention convenable le mode de décompositioa
des êtres organisés. Voyant paroître presque subitement des
insectes destructeurs, des larves, ou, comme ils le disoient,
des vers, dans les cadavres, ils les regardoient comme le
produit de la corruption. Il n'y a pas deux siècles que Rédi
prouva , par des expériences concluantes , que les vers y
étoient déposés par des mouches et d'autres insectes ailés, et
que ceux-ci avoient été attirés par ce qu'on nommoit Vins-
tinct sur les corps qui se décomposoient : c'est ce qu'on
observe maintenant tous les jours.
C'est ainsi qu'on voit arriver de toutes parts des insectes
sur le résidu des alimens qui ont été soumis à l'action diges-
tive. Tels sont particulièrement les bousiers, les sphéridies ,
les escarbots , les stpphylins, les mouches, qui soulèvent
ces matières, les perforent, leur font présenter plus de sur-
face à l'humidité, au dessèchement, à la dissolution, en les
dispersant ou en les étendant sur un plus grand espace. Tels
sont encore les nécrophores, les boucliers, les dermestes,
les anthrènes , les ptines, qui paroissent principalement
attaquer et appelés à détruire les matières organiques ani-
males privées de la vie.
On refusoit à ces insectes l'organe de l'odorat; mais on les
supposoit doués d'une vue si perçante qu'elle suppléoit à ce
défaut. Quelques expériences cependant peuvent combattre
cette opinion et en faire adopter une tout-à-fait opposée.
Certaines fleurs prennent une odeur fétide et cadavéreuse
tellement prononcée , qu'on y voit arriver, lors de leur plus
grand épanouissement, un très-grand nombre d'insectes qui
vivent ordinairement dans les matières animales soumises à
23. 25
45o , IJXS '
la décomposition putride. C'est ainsi que les spathes de la ser-
pentaire [arum dracunculiis) , les corolles de la stapelia variée,
se trouvent souvent couvertes ou remplies de sylphes, d'escar-
bofs, delà mouche delà viande et autres insectes, qui vien-
nent non-seulement dans l'espoir d'y trouver leur nourriture,
mais même pour y déposer leur prog^éniture. Peut-on se re-
fuser ici à l'évidence , et ne pas reconnoître , d'abord , que ces
insectes ont été trompés par leurs organes de la vision; qu'en-
suite ceux de Todoration ont produit non-seulement le mou-
vement volontaire ou le transport de l'insecte vers le lieu
où se volatilisoient les molécules odorantes, mais que, de
plus, trompé par cette sensation illusoire, l'insecte a été
jusqu'à déposer ses œufs sur une matière que son odorat seul
lui avoit indiquée comme propre à recevoir ces dépôts pré-
cieux ?
Ne voit -on pas les abeilles, les guêpes, les sphinx, les
papillons et tous les insectes qui se nourrissent du suc des
végétaux ou du nectar des fleurs, arriver en grand nombre
vers la plante qui le produit, aussitôt qu'il en découle ou que
les pétales sont ouverts?
C'est encore en vain qu'on chercheroit à expliquer ici cette
attraction , ce mouvement, par la sensation visuelle de l'in-
secte : car, malgré le soin des fleuristes, qui enveloppent leurs
tulipes dans des châssis de toile; malgré ceux de l'épicier,
dont le miel est caché par les douves du baril qui le ren-
ferme, l'insecte arrive, averti par l'odeur, et fait toutes les
tentatives possibles pour parvenir vers le lieu d'où elle émane
directement.
Les insectes jouissent donc du sens de l'odorat. Mais dans
quelle partie de leur corps réside l'organe propre à cette
perception P II est probable que cette sensation s'opère chez
eux , comme dans tous les autres animaux , par l'organe res-
piratoire. Mais, dans les insectes, comme nous allons bientôt
l'exposer, la respiration a lieu par des orifices nombreux
qui correspondent à la plupart des anneaux du corps, excepté
à la tête. On nomme stigmates, ces ouvertures, qui toutes
aboutissent aux trachées ou aux vaisseaux à parois élastiques,
toujours remplis de l'air ambiant, qui y arrive sans doute
chargé de tous les corpuscules odorans, comme chez les autres
INS • ^s^
animaux. Maïs ce gaz pénètre-t-il ainsi dans le lacis des vais-
seaux aériens ? ou bien dépose-t-il ces molécules à l'entrée
même des stigmates ? C'esl^^ce qu'il est difficile de décider,
quand on n'éprouve pas soi-même cette sorte de sensation ;
car certainement nous n'aurions aucune idée de la fonction
admirable de la membrane pituitaire des animaux, si nous
n'éprouvions pas évidemment la sensation des odeurs, et si,
dans certaines circonstances appréciables, nous n'étions pas
privés de l'olfaction^'
Goût. On conçoit aisément que les insectes ont la faculté
de distinguer les saveurs. On a cru long-temps qu'elle rési-
doit dans les palpes , parce que ces parties de la bouche sont
continuellement en mouvement et appliquées sur tous les
points de l'aliment, à mesure qu'il est divisé et broyé par les
mandibules et les mâchoires. On étoit porté à cette idée,
parce que, dans un très-grand nombre d'espèces, l'extrémité
des palpes se renfle , se ramollit et devient comme vésicu-
leuse; c'est encore à cause de cette particularité que quel"
ques physiologistes ont émis l'opinion que l'organe de l'odo-
ration pouvoit siéger dans cette partie. Cependant les palpes
n'existent pas dans un très-grand nombre d'insectes, ou bien
ils sont très-courts et ne peuvent en aucune manière servir à
cet usage. Il vaut mieux présumer que les saveurs se mani-
festent chez les insectes, comme dans la plupart des animaux,
dans l'intérieur même du canal digestif, et principalement à
son origine ou dans la bouche. Chez tous, en effet, les ali-
mens pénètrent, ou sous la forme liquide, comme dans les
insectes suceurs, les diptères, les hémiptères, les lépidop-
tères, beaucoup d'hyménoptères, ou ils sont liquéfiés par la
salive que l'animal unit aux particules qu'il détache et qu'il
broie avec les mâchoires pour les porter sur le prolongement
de la lèvre inférieure , qui porte à l'intérieur le nom de langue
ou de languette [ligula] , parce qu'elle en remplit les fonc-
tions. Il se rend, en eff'et , vers cette partie, des rerfs très-
distincts. Lyonnet les a représentés parfaitement dans son
i Nous avons extrait ces détails, relatifs à l'organe de l'odorat, duti
Mémoire que nous avons publié sur cet objet en l'an V (1796)^ Magasi»
«ncjclopéUi'jue, tome II, p. ^35 et suiv.
452 * INS
Histoire analomique de la chenille des cossus. Ainsi, c'est
dans la bouche que Ton doit supposer le siège de l'organe du
goût, dont les insectes sont certeinement doués, puisqu'ils
recherchent ou abandonnent certaines sortes d'alimens après
en avoir opéré la dégustation.
Le toucher, dans les insectes, paroît être l'un des sens les
moins développés. Ce n'est pas que ces animaux soient privés
de parties propres à être mises en contact avec les différens
points de la surface des corps; mais ces parties sont générale-
ment couvertes d'une peau dure, souvent cornée, et qui se
refuse par conséquent à une application immédiate, comme
l'exige l'appréciation des qualités tangibles descorps. D'ailleurs,
l'idée de la température plus ou moins élevée , de la mollesse ou
de la solidité, delà masse ou de l'étendue en longueur, largeur
et épaisseur, ne peut pas être facilement acquise par l'insecte
au moyen du toucher. Les organes que l'on suppose destinés
à cet usage dans les insectes, sont d'abord les antennes. Il est
vrai que ces sortes de cornes , surtout lorsqu'elles sont alon-
gées et formées d'un grand nombre d'articulations, semblent
être des sortes de tentacules que l'insecte met continuelle-
ment en mouvement pour explorer sa route et pour con-
noître les obstacles : c'est ce que l'on voit dans les sphèges,
les ichneumons , les chrysides, qui ont les antennes, comme
on le dit, très-vibratiles ; c'est ce qu'on observe encore dans
les capricornes et la plupart des xyiophages, dans les créo-
phages , comme les carabes, les cicindèles : mais dans d'au-
tres insectes les antennes sont formées par un simple poil
ou par quelques anneaux très-courts. A quoi servii'oient ces
antennes dans les mouches , les cigales, les demoiselles? Se-
condement, on a cru pouvoir attribuer aux palpes cette
même faculté du toucher ; mais ces palpes , à la vérité très-
mobiles dans les insectes màcheurs, sont à peine en rudiment
ou tout-à-fait nuls dans les insectes suceurs , comme les hé-
miptères, et leur forme est tout-à-fait changée.
Enfin, les tarses sont certainement les parties les plus pro-
pres à donner à l'insecte l'idée de la nature des corps sur
lesquels ils s'appliquent. Ils offrent, en effet, chez la plupart
une assez large surface spongieuse qui, dans les mouches,
les chrysomèies ; les capricornes, peut facilement s'adapter
INS • 455
à la superficie du corps. Chez d'autres, comme dans les hé-
miptères, les hyménoptères , ces tarses sont en général alon-
gés , composés d'articulations très-mobiles. Enfin, dans les
araignées, les faucheurs et beaucoup d'autres aptères, ces
tarses sont évidemment des instrumens qu'ils emploient pour
explorer la solidité et la nature des corps sur lesquels ils vont
se transporter,
KuTRiTioN. Tels sont les organes des sensations dans les in-
sectes : étudions maintenant, chez ces animaux, la fonction
nutritive.
Nous avons déjà vu que quelques insectes se nourrissent
de matières liquides, et qu'ils sont dits suceurs; tandis que
d'autres, attaquant les substances solides, sont obligés de les
diviser, de les humecter, de les broyer, et qu'à cet effet
ces insectes sont munis de mandibules et de mâchoires à
l'aide desquelles ils écrasent et réduisent en pulpe leurs ali-
mens , et qu'on les nomme , dans ce cas , mâcheurs. Les
insectes, comme tous les êtres animés, tirent les élémens de
leur nutrition des corps organisés ou des matières qui ont
été déjà empruntées par d'autres êtres vivans à la nature
brute ou inorganique ; mais les modes de l'alimentation sont
extrêmement variés, comme nous allons brièvement l'expo-
ser ici , nous proposant de développer ce sujet, avec tous les
détails qu'il eomporte , à Tarticle Nutrition dans les insectes.
Il faut d'abord savoir que très-souvent le genre de nourri-
ture varie extrêmement, dans une seule et même espèce d'in-
secte, aux diverses époques de sa vie. Telle espèce est car-
nassière ou se nourrit du suc des animaux, dans son premier
âge, qui devient ensuite herbivore; telle autre, au con-
traire , est forcée de se nourrir d'abord de débris de végé-
taux, qui, par la suite, ne pourra se sustenter qu'avec les
humeurs ou les parties solides des animaux. Quelques-uns
également pourront, pendant un temps de leur existence,
absorber ou sucer leur nourriture sous forme liquide, et, par
conséquent, sans la mâcher; tandis que, dans d'autres cir-
constances, les parties de la bouche ayant changé de forme,
ils n'attaqueront que les solides. Il seroit nécessaire d'apporter
ici un si grand nombre d'exemples de ces modifications, que
nous nous contacterons d'en citer quelques-uns des plus re-
marquables.
4^4 r INS '
L,es hydrophiles, qui dans leur premier âge sont ce qu'on
appelle des vers assassins , qui attaquent et sucent les têtards
des reptiles, les petits poissons, les mollusques, les insectes
mous, et qui, sous leur dernière forme, ne recherchent
plus que les plantes aquatiques et les feuilles à demi décom-
posées des A'égétaux qui tombent dans leau , nous présentent
un cas évident d'un zoophage qui devient phytophage : il en
est de même des anthrènes , des téléphores, etc. Dun autre
côté, les larves des fourmilions sucent leur proie sans la mâ-
cher , et l'insecte parfait a la bouche parfaitement organisée
pour broyer les alimens. En sens inverse, ne voyons -nous
pas les chenilles des lépidoptères, comme le ver à soie , ronger
et mâcher les feuilles; tandis que les papillons, les bombyces
ne peuvent que sucer le nectar des fleurs avec leur langue
ou trompe , qui se roule en spirale? Ces différences de mœurs
et de conformation dans les parties de la bouche sont tou-
jours liées avec d'importantes modifications dans les autres
organes digestifs.
Tous les insectes sont doués d'une sorte d'instinct qui les
porte à déposer leurs œufs , ou les germes de leur progéni-
ture, dans le lieu qui leur présentera une nourriture plus
facile , ou bien les parens pourvoient d'avance aux besoins
de la famille qui doit leur succéder. Quelques-uns, comme
les abeilles, les fourmis, les termites, travaillent en commun
à la nourriture des petits, et leur préparent une pâtée dont
les molécules ont été soumises à une sorte de préparation
digestive, comme le font les oiseaux et surtout les pigeons.
Toutes les familles des plantes, et leurs parties diverses, de-
viennent l'aliment de certaines espèces d'insectes, qui sucent
ou dévorent les racines, les tiges, les feuilles, les fleurs, les
différentes parties des fruits; d'autres recherchent les ani-
maux, vivent à leur surface, dans leur intérieur : chaque
espèce semble être attachée à telle ou telle race , ou attaquer
quelques animaux pendant leur vie ou après leur mort. Ci-
tons, par exemple, les œstres, les hippobosques, les mélo-
bosques, les tiques, les puces, les poux , les ricins, les cou-
sins, les taons, les stomoxes , les asiles, les araignées, les
demoiselles, les carabes, les cicindèles, les staphylins , les
téléphores, les coccinelles, les mantes, les gpunaises , les ré-
INS •> 455
duves, les notonectes , les naucores, etc. , qui sucent ou ron-
gent les animaux pendant qu'ils vivent encore ; tandis que
d'autres les détruisent après leur mort, ou s'attachent a leurs
dépouilles dans toutes les circonstances possibles, dans l'eau,
dans la terre ou dans l'air : tels sont, entre autres, les der-
mestes, les boucliers, les nécrophores , les nitidules, les an-
thrénes, les ptines , les nécrobies , les blattes, les teignes,
etc. Quelques-uns se développent dans l'intérieur même des
animaux vivans, comme les larves d'œstres , d'échinomyes ,
de mouches, de conops , d'ichneumons, de chalcides, de
sphèges, etc.
Quant aux organes de la nutrition, ils varient non-seule-
ment dans les dilFérens ordres, mais même sous les formes
diverses que les insectes prennent lorsqu'ils subissent leurs
métamorphoses.
On distingue parmi les organes digestifs, la bouche , l'œso-
phage ou le conduit qui s'étend de la bouche à l'estomac ,
l'estomac même, le tube digestif ou canal intestinal et ses
annexes, tels que les canaux salivaircs, pancréatiques, biliai-
res, qui ne forment pas chez les insectes de véritables glandes
sécrétoires.
Nous avons déjà étudié les parties de la bouche, d'abord
au commencement de cet article Insectes et à celui de
Bouche. Nous ne reviendrons pas sur ce sujet, la conforma-
tion des organes destinés à saisir et à absorber les alimens ,
ou , comme on l'a dit, la disposition des instrumens cibaires
variant excessivement et ayant fourni non-seulement les ca-
ractères des ordres, mais même ceux des genres.
L'œsophage vient immédiatement après l'arrière-bouche.
C'est un canal plus ou moins alongé et étroit, suivant que
l'insecte a le corselet, ou les trois pièces qui forment cette
région du corps, plus étendu de devant en arrière. 11 est
constamment embrassé à son origine par deux cordons ner-
veux, qui proviennent du premier renflement de la moelle
épinière contenue dans le crâne, et que l'on regarde comme
le cerveau. C'est au-dessous de lui , et ensuite dans toute sa
longueur, que l'on distingue les trois ganglions suivans de la
série des nerfs noueux, qui se trouvent ainsi au-dessous des
intestins, tandis que, dans tous les animaux à vertèbres, la
'456 f INS
moelle de l'épîne est située au-dessus ou en arrière dans la
cavité vertébrale : l'œsophage est musculeux, et les fibres con-
tractiles qu'on y observe , sont principalement disposées en
longueur. 11 est vrai qu'étant sujet à se dilater partiellement ,
pour laisser passer le bol alimentaire, pour ainsi dire calibré
par la cavité du pharynx , il doit offrir des rides quand il n'est
pas rempli. Au surplus, d'après la remarque de M. Marcel
de Serres, qui a donné un très-bon Mémoire sur le tube
intestinal dans les insectes (mémoire qui a été imprimé dans
les Annales du Muséum en i8i3), les fibres circulaires de
l'œsophage sont beaucoup moins visibles que dans cette partie
du canal qu'on regarde comme le duodénum.
I.'estomac, dans les insectes, varie beaucoup, et par sa
forme, et surtout parle nombre des poches ou des renflemens
qu'il présente. Ainsi, il y a un véritable gésier ou une poche
musculaire et fibreuse dans les insectes qui avalent goulûment :
leurs alimens sont pour ainsi dire broyés à l'intérieur, après
avoir été ramollis soit par la bouche , soit par leur séjour
dans l'œsophage, qui constitue alors une sorte de jabot.
Quelquefois ce gésier est garni à l'intérieur d'écaillés ou
de lames de corne tranchantes ou dentelées, et on l'observe
ainsi dans les espèces carnassières , comme dans les herbi-
vores ; cependant ce gésier n'existe que chez les insectes
mâcheurs.
L'estomac est tantôt simple, ou n'offre qu'une légère dila-
tation de l'œsophage, dont il est à peine distinct; chez d'au-
tres insectes il est membraneux et très -dilaté : tels sont en
particulier ceux qui, sous leur dernier état, ne font que
pomper le nectar des fleurs , comme les abeilles , les papillons.
Chez d'autres suceurs , mais qui ne pompent que les humeurs
animales, comme les zoadelges parmi les hémiptères, on
trouve un estomac simple encore, mais à parois musculeuses.
Le tube intestinal est d'autant plus étendu , et surtout
plus long , que l'insecte dans lequel on l'observe est moins
carnassier. C'est une observation qui est commune au sur-
plus à tous les animaux. Les espèces qui se nourrissent de
matières végétales , sont obligées d'en ingérer une grande
quantité pour en obtenir une alimentation égale; car, sur
tin poids donné, il y a infiniment plus de matière alibile ou
INS '^ /.57
nourrissante clans une substance animale, que dans celles que
contiennent les plantes : aussi les lapins, les ruminans, tels
que la vache, le mouton, par exemple, ont-ils le ventre plus
volumineux et les intestins plus longs que le loup , les be-
lettes, les lions, etc. Au reste, ce cas général est démontré
par quelques circonstances propres à la vie des insectes :
ainsi les larves du grand hydrophile noir sont carnassières,
et leur tube intestinal n'a guères que la longueur totale du
corps. L'insecte parfait est herbivore : ses intestins, roulés
en spirale, offrent plus de quatre fois la longueur de la larve.
Les têtards des grenouilles nous offrent un exemple, en sens
inverse, d'un animal herbivore qui devient zoophage.
On distingue dans les intestins la portion qui vient immé-
diatement après l'estomac, ou les estomacs (car souvent il
se compose de plusieurs poches), et la portion qui avoisine
l'anus. La première est regardée comme un duodénum, et
l'autre comme le rectum. Quelquefois, près de l'origine du
duodénum , il y a des sortes d'appendices ou de prolongemens,
en forme de cul -de-sac, qu'on nomme alors des cœcums,
dans lesquels on trouve souvent une humeur qu'on a regardée
comme une sorte de bile ou de suc pancréatique, parce qu'il
y aboutit en effet des filamens qui paroissent appelés à opérer
une sécrétion d'une humeur propre à la digestion.
La bile proprement dite paroît être fournie par un appa-
reil de filamens beaucoup plus longs et plus grêles, qui cons-
tituent une sorte de houppe, qui aboutissent quelquefois à un
canal cholédoque commun , ou qui se rendent chacun isolé-
ment au canal digestif, qu'ils perforent en s'y terminant.
Le rectum, ou la dernière portion du tube intestinal,
aboutit à l'anus, ou plutôt à l'orifice commun , qu'on peut
appeler le cloaque : on y remarque des fibres circulaires qui
y forment une sorte de sphincter. On y observe en outre
des lignes saillantes, qui y forment des côtes variables qui
probablement déterminent la forme que prennent les ma-
tières excrémentitielles lorsqu'elles sortent du corps de l'in-
secte. Cette diversité de forme est surtout notable dans cer-
taines larves ou chenilles, comme dans celles des sphinx,
des bombyces, qui dénotent ainsi leur présence sous les
branches des arbres ou des arbrisseaux qu'elles dévorent.
458 ' IT^S
Consultez principalement sur cet objet le Mémoire de M.
Marcel de Serres, déjà cité, et qui a été publié dans le ving-
tième volume des Annales du Muséum, et l'article 111 de
l'Anatomie comparée de M. Cuvier, tome IV, pages 1 1 2 et
suivantes.
Quant à la nutrition en elle-même, il n'y a pas le moindre
doute qu'elle ne s'opère au moyen des alimens qui doivent
fournir aux organes non-seulement les moyens de se réparer,
mais surtout de s'accroître et de remplir leurs fonctions.
Mais comment s'opère cette absorption ? C'est une question
qui n'est pas encore complètement résolue. M. Cuvier a ex-
posé les raisons qui font croire que cetle absorption, dans
les insectes, s'opère par une sorte d"imbibition , parce qu'ils
sont privés d'organes circulatoires, ou de vaisseaux lympha-
tiques , artériels et veineux. Il est vrai qu'il arrive à cette
opinion par des indications négatives, mais il y est tellement
conduit par l'analogie , que ses raisonnemens deviennent
une sorte de preuve concluante. Nous allons présenter ici
un extrait de son travail à ce sujet, tel qu'il est consigné
dans les Mémoires de la société d'histoire naturelle de Paris,
tome I.*"^, page 5/j.
Il est de fait qu'on n'observe aucun vaisseau sanguin dans
les insectes: on n'en connoit qu'un, qui est une sorte de
canal régnant le long de la partie moyenne du dos dans
toutes les régions. On le voit très -bien dans les chenilles,
surtout chez celles qui ont le corps ras, comme le ver à
soie , le cossus : on y dislingue une sorte de mouvement
alternatif de systole et de diastole, ou de dilatation et de
contraction, qui semble passer de la tcte à la queue; mais
on n'a jamais pu y observer des branches ou des racines qui
y apportent un fluide liquide ou qui en sortent.
D'un autre côté, quand on sait de quelle manière s'opère,
dans les insectes, la respiration , on ne voit pas une aussi
grande nécessité, que chez les autres animaux, delà présence
d'un agent central de la circulation, ni de canaux propres
à porter les humeurs vers le lieu où l'air vient se mettre
spécialement en contact avec les humeurs nutritives. C'est
ce que nous chercherons à développer par la suite. Enfin ,
par cela même qu"il y a dans les animaux doués de la cir-
" INS " 459
culatîon , des vaisseaux artériels et veineux, ou qui viennent
du cœur et qui s'y rendent, on conçoit qu'il existe chez eux
des glandes conglomérées, destinées à opérer les sécrétions:
ainsi le foie, le pancréas; les glandes parotides, salivaires ;
les testicules, etc. Mais cela devoit être autremwif dans les
espèces privées de la circulation; aussi n'y a-t-il pas de
glandes destinées à ces fonctions. Ces organes sécréteurs sont
formés de filamens nombreux et distincts, qui plongent au
milieu même du fluide nourricier dont ils doivent emprunter
les matériaux , pour les travailler chacun suivant son mode
et opérer ainsi les sécrétions.
Voilà comment il faut, dans l'état actuel de la science
anatomique et physiologique, croire que la nutrition s'opère
chez les insectes. C'est par la porosité du tube intestinal que
les matériaux les plus propres à l'alimentation se séparent
delà masse ingérée; leur division est telle, qu'ils forment
alors une sorte de vapeur dont les molécules, peut-être en-
core plus fluides que les liquides, sont absorbées vraisembla-
blement sous la forme de gaz, que conliendroient alors les
nombreuses trachées dont le tube intestinal est couvert.
Cependant d'autres sécrétions s'opèrent encore dans les
insectes; mais le mode de cette séparation des humeurs nous
est à peu près inconnu. Nous savons, par exemple, que
l'acide produit par les fourmis , et qui est analogue à celui du
vinaigre, est dégorgé par l'insecte; que plusieurs autres ani-
maux de la même classe vomissent ainsi à volonté ou dégor-
gent quelques matières, soit fétides, soit nuisibles, au mo-
ment 011 elles se croient en danger. C'est ainsi que les bou-
cliers, les carabes, les larves et les chenilles, rendent, par
la bouche, une humeur dégoûtante ; que d'autres , comme
les cétoines, les blaps, laissent sortir du cloaque quelque
liqueur fétide; que les méloës, les chrysomèles font suinter
de leurs articulations une sorte d'huile d'une odeur désa-
gréable ; que les coccinelles font exhaler, du bord de leur
corselet, une humeur jaunâtre d'une grande volatilité et
dune saveur amère; que plusieurs larves, comme celles de
la chrysomèle du peuplier, les chenilles des papillons po-
dalire et machaon , celle du bombyce vinule ou queue-four-
chue font sortir des tubercules, des tentacules, de la surface
46o ' I]y§ •
desquels s'exhale une humeur particulière ; que les staphylîns
font également saillir de l'anus deux vésicules qui transsudent
une liqueur acide et très -odorante ; que chez les brachins
qu'on nomme fumant et fêtard , il s'échappe de l'anus , à la
volonté de l'animal, un gaz acide, produit par une liqueur
contenue dans deux vésicules; que d'autres portent des odeurs
plus ou moins fortes : ainsi l'hémérobe aux yeux d'or , au
moment du danger, exhale une odeur d'excrémens humains;
lespentatomcsetles punaises, des émanations toutes désagréa-
bles; tandis que les capricornes, lescicindèles , les fourmilions
et plusieurs autres insectes des sables, portent une sorte d'o-
deur suave d'ambre ou de rose. C'est<lans cette catégorie des
sécrétions qu'il faut également ranger les fils déliés que pro-
duisent les hydrophiles, quelques ichneumons qu'on nomme
à coton, la plupart des chenilles des bombyces, et en parti-
culier celle du mûrier, qui donne la soie. Les sécrétions de
la laque, de la cire ; l'humeur de l'aiguillon de la guêpe et
des abeilles ; celle de la trompe des réduves, des naucores;
la liqueur phosphorique des scolopendres , de la fulgore
porte-lanterne, des taupins phosphorescens et noctiluque ,
des lampyres vers- luisans; la graisse qui se sécrète dans le
corps des larves pour l'époque où aura lieu la métamorphose
sous létat de nymphe , offrent encore un autre mode desécré-
tions. On conçoit qu'il nous est impossible d'entrer ici dans
ces détails , que nous avons dû cependant indiquer.
Passons maintenant à l'étude de la Respiration chez les
insectes. Nous avons déjà eu occasion de parler des orifices
par lesquels Tair pénètre dans le corps des insectes. Nous
savons que ces ouvertures , qu'on nomme les stigmates ou
les spiracules,sont à peu près au nombre de seize à dix-huit,
correspondant chacun à l'un des côtés des segmens du cor-
selet et des anneaux de l'abdomen. Ces stigmates sont l'ori-
gine des trachées ou des vaisseaux aériens, dont la structure
est l'une des plus singulières. 1-a plupart sont formés d'une lame
mince, élastique, contournée en spirale sur elle-même, de
manière à former un tube continu: et, pour en donner une
idée fort exacte, qu'on se figure l'un de ces fils d'or, d'ar-
gent ou de cuivre, tirés à la filière, et aplatis ensuite comme
ceux dont on se sert pour en former les galons. On sait que
» INS - 46i
ces fils métalliques ne font que recouvrir un autre fil de soie
ou de matière végétale , de manière à le masquer complè-
tement. Si l'on soumet un fil de galon ainsi disposé à l'action
du feu, la matière végétale ou animale se brûle, se réduit
en cendre, et cette cendre peut sortir par les deux extré-
mités du tube, qui reste abrs creux et formé d'une lame
spirale , dont les tranches sont parfaitement en rapport les
unes avec les autres : telles sont les trachées chez la plupart
des insectes. En effet, si l'on en tire une à l'aide d'une
petite pince, on la voit se détordre ou se défiler^ et, aban-
donnée à elle-même, elle tend à reprendre sa disposition en
spirale. C'est à cette propriété qu'est due leur aptitude à
former des tuyaux élastiques, se soutenant par eux-mêmes,
et restant toujours propres à recevoir l'air, qui y pénètre,
à ce qu'il paroît, par sa propre pesanteur et par sa fluidité
extrême.
Ces canaux aériens sont en général cylindriques dans une
certaine étendue de leur longueur; cependant il en est qui
sont comme étranglés d'espace en espace , et qui forment
alors comme des vésicules plus ou moins renflées, arrondies,
ovales ou sphériques. Les larves ont des trachées, comme les
insectes parfaits; mais il s'opère dans ces organes, à l'époque
de la transmutation ou de la métamorphose , un changement
presque aussi remarquable que celui qui a lieu dans le reste
du corps. Quelques insectes aquatiques, en particulier, ont
une manière de respirer tout-à-fait différente sous les trois
états de larves, de nymphes et d'insectes parfaits.
On voit dans un grand nombre de diptères, lorsqu'ils sont
encore sous l'état de larves, les orifices des trachées groupés
diversement vers les derniers anneaux du corps. Chez les
larves des mouches armées ou stratiomys , par exemple, on
remarque une sorte d'aigrette formée de poils barbus, comme
ceux qui couronnent les semences des pissenlits, des scorzo-
nères et autres plantes composées : c'est au centre de cette
aigrette, comme huilée, que s'observe l'orifice respiratoire.
Dans les larves et les nymphes des libellules ou demoiselles,
le mode de respiration est surtout singulier. L'eau pénètre
dans leur rectum par une sorte d'inspiration : il est probable
qu'elle abandonne là le gaz oxigène qui s'y trouve combiné.
^•.C2 r INS - •
On voit, en effet, dans l'épaisseur des parois de cet intestin
un grand nombre de trachées, qui représentent cinq grandes
feuilles ou nervures de feuilles composées de petites trachées
qui se rendent dans quatre troncs principaux, dont deux,
plus gros encore, se subdivisent dans toutes les parties du
corps. On rend sensible à l'œil ce mode de respiration des
larves dont nous parlons, en les laissant séjourner pendant
quelques minutes dans une eau colorée, puis en les transpor-
tant dans une autre eau très-limpide : à chaque mouvement
d'expiration l'eau sort colorée de l'anus, après avoir lavé les
tuniques de l'intestin. D'ailleurs , l'animal emploie ce mode
de respiration pour faciliter son transport ou son mouvement
dans l'eau, en profitant de la résistance que le jet sortant de
l'anus éprouve sur la masse du liquide; le corps de l'insecte ,
s'appuyant ainsi en arrière, avance du côté opposé, où est
la tête. Dans les larves des éphémères, dans celles des phry-
ganesj des cousins, des tourniquets, il faut avouer qu'il
semble exister de véritables branchies, toujours en mouve-
ment quand l'animal respire. C'est une sorte d'anomalie
parmi les insectes, qui mérite une attention toute particu-
lière , surtout dans les éphémères , si , comme Swammerdam
l'a pensé , ces insectes ont en outre la faculté de féconder
les œufs après qu'ils sont séparés du corps de leur mère; ce
qui est une analogie marquée avec les poissons et quelques
reptiles batraciens.
Il résulte des recherches anatomiques, que, comme les
insectes n'ont ni cœur ni vaisseaux , ce n'est pas le sang qui
va chercher l'air, mais l'air qui se porte partout oii se trou-
vent les humeurs; de ';orte que, par le fait, le résultat est
le même, puisque les deux fonctions s'exécutent réellement
comme deux nombres qui sont multipliés indifféremment
l'un par l'autre et qui donnent le même quotient.
D'après les expériences de M. Vauquelin, insérées dans
les Annales de chimie, tome XII, page 273 , il a été constaté
que l'oxigène est nécessaire à la respiration des insectes; que
ce gaz est absorbé; que l'acide carbonique est dégagé, et que
la matière de la chaleur se développe dans cette opération
animale.
Quoique la température des insectes soit à peu près la
.5 • INS • 465
même que celle de l'atmosphère, il faut avouer qu'on ne la
connoit pas positivement : d'une part, parce qu'il est très-
difficile de l'observer et de l'estimer, et que, de l'autre, le
corps de l'insecte est bientôt mis en équilibre avec les ma-
tières qui l'environnent. Cependant on a observé que les in-
sectes qui vivent en société, et surtout, dans nos climats,
les fourmis et les abeilles, lorsqu'elles sont réunies, déve-
loppent une température presque égale à celle de l'homme,
si elle ne la dépasse pas. Un thermomètre, placé pendant
l'hiver au centre d'une ruche, y reste constamment élevé à
28 à 5o° Rcaumur; et quand on excite ces insectes, leur
respiration devient plus active, et ils développent alors pres-
que subitement une température qui monte à deux ou trois
degrés au-dessus de celle qu'ils inarquoient d'abord.
Nous allons parler ici de la voix des insectes, quoique
réellement les sons produits par ces animaux ne puissent pas
toujours être attribués à l'air qui sort de leur corps. En trai-
tant du bourdonnement dans les abeilles , nous avons exposé
quelques faits qui semblent porter à croire que peut-être la
vibration communiquée à l'atmosphère est due à l'ébranle-
ment de l'air qui sort des stigmates du corselet; et en par-
lant, au commencement de cet article, de la faculté audi-
tive , nous avons exposé quelques faits entomologiques re-
latifs aux différens bruits que les insectes produisent. La
plupart sont dus à des frottemens ou des vibrations rapides,
communiqués soit aux corps voisins, soit à certaines parties
conformées de manière à représenter des cordes ou des mem-
branes ; aussi a-t-on dit, en parlant des insectes : Aninialia
muta, nisi alio proprio instrumenta sonora. Les uns font mou-
voir la tête sur le corselet, ou celui-ci sur les élytres, comme
les capricornes , les criocères : d'autres font vibrer les anneaux
de l'abdomen contre l'extrémité libre de ces mêmes élytres;
tels sont les trox , les ateuches. Chez quelques-uns c'est un
bouquet de poils roides, comme une brosse qui frotte contre
un corps solide; c'est ce qui a lieu dans les blaps : d'autres
frappent fortement le bois qu'ils rongent, avec quelques
parties de la tête, comme les taupins, les vrillettes; chez les
cigales mâles , c'est une sorte de tambour ou d'écaillé con-
cave , sous laquelle roule un cylindre garni de cordes sail-
464 ( ÎNS
lantes: ceux-ci , comme les mâles des sauterelles, des criquets,
font résonner quelques parties de leurs élytres en les croisant
rapidement, ou en les agitant avec les jambes, comme les
cordes de certains instrumens résonnent sous l'archet qui les
frotte, etc. (Voyez Sons produits par les insectes.)
Génération. Après avoir étudié dans les insectes les or-
ganes du mouvement et des sensations qui établissent la vie
de rapport ou de relation dans ces animaux, nous avons fait
connoître , d'une manière générale , les parties qui servent
à la nutrition ou à l'augmentation de volume du corps de
l'insecte, et à la réparation des matériaux qu'il emploie pour
exécuter ses fonctions; nous avons traité en particulier des
organes de la digestion , de la respiration , de la voix et des
sécrétions. 11 nous reste à parler de celle de ces sécrétions
qui est la plus importante , puisqu'elle donne aux êtres vivans
la faculté de reproduire d'autres individus en tout semblables
à eux-mêmes ou destinés à le devenir : nous allons donc faire
connoître les organes de la génération dans les insectes.
Nous prions le lecteur de vouloir bien consulter sur ce
sujet les trois articles que nous allons lui indiquer, afin
d'éviter ici les répétitions. Nous avons présenté au mot Accou-
plement dans les insectes , toutes les particularités les plus
curieuses sur le rapprochement des sexes. Aux mots Repro-
duction et Ponte, nous nous proposons de donner le com-
plément de cette fonction.
Tous les insectes proviennent d'autres individus absolu-
ment semblables à eux, et dont ils se sont séparés d'abord
sous forme d'cfu/s, c'est-à-dire que ce germe a été déposé,
avec une certaine quantité de nourriture appropriée à son
premier âge, dans une coque membraneuse plus ou moins
solide. La configuration de ces œufs, et la manière dont ils
sont pondus et disposés, chacun selon les besoins futurs, sont
des plus admirables. Il en est de mous, et d'autres dont la
coque acquiert quelquefois une très-grande solidité. Les uns
sont agglomérés, collés les uns aux autres, réunis par des
pédicules communs ou distincts; il en est de sphériques ,
d'ovales, de cylindriques, de plats, de déprimés, de com-
primés, de prismatiques, d'anguleux, etc. ; quelques-uns sont
enveloppés de matières protectrices propres à en éloigner les
» INS . 465
animaux qui en seroient avides : ce sont tantôt des odeurs,
des pointes acérées, des liqueurs corrosives , des enveloppes
serrées et impénétrables, ou d'autres moyens astucieux et
trompeurs que la femelle a mis en usage pour garantir sa
progéniture, jusqu'à les couvrir de son propre corps, qui se
dessèche et les protège comme un bouclier, ainsi qu'on le
voit dans les cochenilles. On conçoit aussi que la couleur de
ces œufs varie beaucoup selon les espèces et Tépoque depuis
laquelle ils ont été pondus, parce qu'alors le germe déve-
loppé communique ses teintes aux membranes qui les recè-
lent. Quelques-uns de ces œufs éclosent dans l'intérieur du
corps de leur mère : c'est ce qui arrive à ceux des pucerons
dans certaines époques de l'année , k, ceux de la mouche
bleue de la viande , des hippobosques ; enfin , chez tous les
insectes dits, pour cela même , ovovivipares.
Le plus souvent les sexes sont distincts et séparés, ou sur
des individus différens ; les uns sont mâles et les autres fe-
melles. Le nombre des individus de l'un et de l'autre sexe
est en général à peu près le même; cependant il en est quel-
ques-uns qui sont condamnés dès l'enfance à n'avoir jamais
les organes sexuels complètement développés. Quand cette
anomalie existe, ce sont les femelles qui sont ainsi privées
des organes sexuels , au moins apparens , et on les dit alors
neutres ou mulets : c'est ce qu'on observe dans quelques genres
d'hyménoptères, principalement dans les fourmis, les guêpes,
les abeilles, et dans quelques névroptères ou hémiptères,
comme les termites, les pucerons. 11 est cependant rare que
les insectes d'une même espèce vivent par paires ou en
monogamie. Le seul besoin de la fécondation les rapproche
pour un temps très-court ; le mâle périt peu de temps après
l'accouplement, tandis que la femelle survit jusqu'après la
ponte. Nous avons déjà dit qu'il sembloit qu'il n'y avoit que
les sucs élaborés dans le jeune âge de l'insecte qui pussent
servir à l'-œuvre de la génération; car, aussitôt que ces ani-
maux ont pris leur dernière forme, et qu'ils ont acquis le
pouvoir de donner ou de recevoir le fluide qui transmet la
vie, ils s'accouplent, pondent et meurent. Les mâles sont en
général plus petits que les femelles : ils sont plus sveltes, plus
brillans et mieux colorés; la forme des antennes, des ailes,
23. 3o
466 , I>^S (
et surtout l'extrémité de rabdomeu ou résident les organes
sexuels et les instrumens destinés à placer les œufs dans les
circonstances les plus favorables à leur développement, offrent
souvent de notables différences.
Ainsi les màlcs des fourmis , des cochenilles , des puce-
rons , de (juelques coléoptères herbivores , sont excessivement
petits de taille, si on les compare avec leurs femelles. Les
antennes des bombyces, celles des rhipiphores, des taupins,
sont beaucoup plus développées dans les mâles; les ailes du
bombyce disparate, du tau, de l'étoilée, n'ont presque pas
de rapports avec celles des femelles; quelques-unes des fe-
melles sont même tout-à-fait sans ailes , comme dans notre
espèce de lampyre dite à cause de cela ver luisant.
Chez la plupart des insectes les organes sexuels sont y)lacés
à l'extrémité de l'abdomen; elles font le plus souvent saillie
au dehors dans les mâles, quebjuefois aussi chez les femelles.
Dans quelques espèces, cependant, comme dans les demoi-
selles et les araignées , les parties sexuelles femelles sont
autrement disposées que celles des mâles.
Nous avons fait connoitre , à l'article Accouplement, toutes
les particularités les plus remarquables que développent les
insectes à l'époque où les deux sexes sentent la nécessité de
se manifester réciproquement, ou de se faire connoître le
besoin impérieux de la reproduction et de la conservation
de l'espèce , en s'adressant h tous les sens : les uns en produi-
sant des bruits particuliers ; d'autres, en développant des effets
de lumière pendant l'obscurité des nuits; plusieurs en exhalant
des odeurs qui manifestent au loin leur présence , et qui at-
tirent ainsi les deux sexes l'un vers l'autre par une sorte de
véhicule ou de guide invisible.
L'acte de la reproduction s'opère dans les insectes par le
rapprochement des sexes et par le contact plus ou moins
prolongé des organes , qui se pénètrent de Uianière que la
liqueur prolifique ou séminale peut aller vivifier les œufs,
dont les rudimens préexistent dans les ovaires; le plus sou-
vent ce sont des organes mâles, solides et cornés, qui sont
introduits dans le cloaque de la femelle. Ces organes mâles
consistent ordinairement dans des pièces qui se présentent
d'abord avec peu de volume, mais quij s'écartant bientôt,
• INS • 467
permettent aux parties molles de se porter plus avant, et
qui, en outre, se renversent ou s'accrochent de manière que
la séparation des deux individus ainsi accouplés ne peut plus
s'opérer, à moins que les parties ne soient restituées dans
leur situation primitive, ce qui n'arrive que lorsque la fé-
condation est complète.
La configuration des organes mâles et femelles varie trop ,
non-seulement dans les ordres, mais même dans les genres
et les espèces, pour que nous essayions d'en présentrr une
idée générale. Nous dirons seulement que chez les mâles on.
trouve des vaisseaux spermatiques très- nombreux et fort
gonflés avant l'accouplement; que ces vaisseaux, qui ont
douze ou quinze fois la longueur du corps , sont plies et
repliés sur eux-mêmes, de manière à occuper une grande
partie de la cavité de l'abdomen : ils aboutissent quelquefois,
à un réservoir commun , à des vésicules séminales qu'on a
comparées à des prostates, à des épidydimes , à des canaux
déférens, qui se rendent plus ou moins médiatement à une
sorte de pénis ayant pour fourreau les écailles cornées
qui font l'office de gorgeret dilatateur.
Dans les femelles, outre l'orifice destiné à recevoir les
organes du mâle , il existe souvent des instrumens qui faci-
litent la ponte, ou la manière diverse dont les œufs doivent
être déposés. La vulve s'ouvre dans le cloaque; c'est là qu'a-
boutissent les oviductes : ce sont des canaux très-prolongés ,
comme les vaisseaux spermatiques, mais beaucoup plus gros.
On y distingue les œufs , qui sont d'autant plus développés,
qu'ils sont plus près du canal commun qui les mène dans le
cloaque : c'est le plus souvent dans ce canal commun qu'ils
reçoivent la glu ou l'humeur visqueuse qui sert à les fixer
ou à les suspendre par des pédicules quelquefois très-alongés,
comme on l'observe dans les œMifs des hémérobes. Il est des
insecies qui pondent tous les œufs à la fois, comme deux
grappes, c'est ce qui arrive aux éphémères; mais le plus
souvent ces œufs passent successivement , un à un , par
l'orifice du cloaque. Les pondoirs ont tantùt la forme de
couteaux, de sabres , de scies, de gouches , de vrilles, de
perçoirs, desondes : c'est ce qu'on observe dans les saute-
relles, les grillons, les mouches à scie, les ichneumons , les
468 ' IJSS
chalcides, les évanies, les leucopsides, les nèpes , les panor-
pes, quelques trichies, lespriones, hes cossus, etc.
Le mode même du rapprochement des sexes est déterminé
par la configuration générale du corps, ou par la position
des organes sexuels. Le mâle est ordinairement placé au-
dessus de la femelle, qui est plus grosse. La puce, les éphé-
mères, dit-on, et quelques autres, font seuls exception. Quel-
quefois les mâles ont les pattes de devant plus alongées ,
comme on l'observe dans les clytres , quelques scarabées : ou
leurs tarses sont très- dilatés en devant, et garnis de houp-
pes, de lames ou d'écaillés pour adhérer sur le corps de la
femelle, qui est trop lisse , comme on l'observe dans les mâles
des hydrophiles, des dytiques, des crabrons ; et c'est alors
aussi qu'on remarque quelquefois une différence notable
dans les élytresdes femelles, qui sont sillonnés en long ou en
travers, tandis que ceux du mâle ne le sont pas. La position
des organes sexuels a aussi déterminé de singuliers modes
d'accouplement. Dans les libellules, par exemple, le mâle
saisit la femelle par le cou , ou dans l'intervalle de la poi-
trine avec la tête, au moyen de deux crochets qui font
l'office de tenailles et qui sont placés à l'extrémité de sa
queue : il s'envole ainsi avec elle, et la force de venir appli-
quer son ventre contre sa poitrine , ou à la base de son
abdomen , qui loge là les organes sexuels. Dans les araignées
le mode de fécondation est encore plus singulier, les organes
du mâle étant situés dans les palpes, et ceux de la femelle
à la base de l'abdomen, au-dessous des pattes. Dans l'acte
de l'accouplement le plus souvent les insectes restent tran-
quilles et immobiles; d'autres continuent de marcher ou de
voler : quelques-uns, comme les hannetons, prennent une
position singulière , le mâle restant presque renversé sur le
dos : dans les bombyces, comme dans les vers à soie, les têtes
du mâle et de la femelle sont en sens opposés, et ce rappro-
chement dure plus ou moins de temps; il exige des journées
entières, ou il s'accomplit en moins d'une seconde. Nous
croyons même que les éphémères n'ont pas de véritable accou-
plement, mais que les mâles fécondent les œufs dans l'eau,
après la ponte.
L'histoire des changemens qui surviennent chez les ijisec-
INS • 4^9
tes, depuis l'instant où ils sortent de l'œuf jusqu'à celui où
ils sont aptes à reproduire leur espèce ou à propager leur
race , doit trouver ici sa place. Chez la plupart des insectes
ces changemens sont de trois sortes ; on les nomme , dans
leur ensemble, la transmutation ou la métamorphose. Le pre-
mier état de l'insecte , lorsqu'il sort de l'œuf, est celui de
lari'e ou de chenille ; le second est celui de chrysalide , de
nymphe, de pupe ou d'aurélie; enfin, sous le dernier état,
l'insecte est accompli : il est, comme on le dit, parfait ou
déclaré; c'est ce qu'on a nommé aussi Vimage, ou l'insecte
reproduit (imago revelata).
Les métamorphoses des insectes ont été connues imparfai-
tement par les anciens. On voit dans beaucoup de passages
d'Aristote, qu'il savoit que plusieurs insectes, et il nomme
Cn particulier les papillons, les abeilles, provenoient de
chenilles , de vers ; mais ce n'est guères que depuis les re-
cherches de Swammerdam , de Kédi et de Goedaert, que ces
transformations ont été bien connues, et que la reproduction
des insectes a été expliquée comme elle devoit l'être.
Outre les mutations notables dans la forme que subissent
les insectes dans les trois états qui suivent leur sortie de l'œuf,
ils changent souvent de peau ou d'épiderme, et souvent cet
épiderme est d'une tout autre apparence que celui qui lui
succède, ce qui donne encore à l'insecte un autre aspect;
c'est ce qui arrive à la chenille du mûrier, dite ver à soie:
lorsqu'elle sort de l'œuf, cette chenille est velue-, dans les
mues suivantes, elle a le corps ras ou sans poils j mais sa
teinte varie beaucoup. Il en est de même dans un grand
nombre d'autres larves.
Fabricius , dans sa Philosophie entomologique , a consacré
une section entière à l'exposition des modifications de la
métamorphose dans les insectes. Depuis cet auteur la science
a fait de grands progrès, et M. Latreille en particulier a
publié sur ce sujet des observations très- judicieuses , dont
nous donnerons une analyse après avoir présenté celle du
travail de Fabricius, qui met parfaitement sur la voie.
Ainsilalarve, qu'on nomme quelquefois chenille ou ver, est
l'enfance de l'insecte dès le moment où il sort de l'œuf. Cette
larve , toujours stérile, est molle , très-vorace ; elle se dépouille
■47e • INS
à mesure que sa peau ne peut plus suivre le développe-
ment de SCS organes. A sa dernière mue, la larve prend le
nom de pupe , de nymphe, de chrysalide ou d'aurélie ; c'est,
dit Fabricius. l'adolescence de Tiiisecte : il ne croit plus; il
se durcit; quelquefois, ou dans quelques cas, cette nymphe
est immobile, et, pendant ce repos, elle acquiert plus de
consistance.
Fabricius distingue cinq ordres de métamorpJioses, d'après
les modifications de formes et de mouvemens de la larve et
de la nymphe.
Dai's ta première métamorphose, qu'il nomme complète,
à laquelle il rapporte les araignées, les scorpions, les pinces,
les cirons, etc., il n'y a pas de différence entre les larves,
les nymphes et les insectes parfaits.
Il rapporte au second ordre de métamorphose , qu'il
nomme demi-complète , les demoiselles, les punaises, dont les
larves ont six pattes et sont agiles, ainsi que les nymphes,
qui ont de plus des rudimens d'ailes.
Au troisième ordre , qu'il appelle métamorphose incom-
plète, il rapporte les coléoptères, les hyménoptères, qui pro-
viennent de larves motiles, et qui produisent une chrysalide
à pattes distinctes , mais repliées et immobiles.
Les lépidoptères , qui ont des larves ou chenilles avec
des pattes, et agiles, dont la chrysalide est couverte d'une
enveloppe commune qui prive les pattes du mouvement,
mais sur laquelle on distingue cejiendant la forme de la
tête, du corselet et du ventre, sont rapportés au quatrième
ordre de métamorphose, qu'il nomme ohtectée.
Entin, les diptères forment un cinquième ordre de trans-
mutation, qu'il appelle coarctee, parce que la larve apode,
annelée et mobile , se change en une nymphe qui paroît apode
et qui est toujours immobile , et parce qu'il se forme en dehors
ane enveloppe qui ne permet de distinguer aucune partie
du corps.
M. Latreille distingue trois sortes de métamorphoses : 1.°
celle qu'il nomme ébauchée, 2.° la demi-métamorphose, et
3.° la métamorphose complète.
Dans les deux premiers modes, l'insecte n'éprouve de
transmutation que dans les organes du mouvement, dans les
INS • 47i
ailes Ou les pattes ; la larve , la nymphe , sont toujours actives ,
et l'insecte parfait conserve les mêmes habitudes.
C'est le troisième mode de métamorphose qui offre le plus
d'intérêt; car Finsecte parfait et sa larve n'ont réellement
aucun rapport de formes : la nymphe ne se nourrit plus et
reste immobile, soit qu'elle ait les membres libres et dis-
tincts, soit qu'elle reste, comme on le dit, emmaillottée ; et
cette sorte de maillot prend la forme d'une momie , lors-
qu'on aperçoit les linéamens des pattes, des antennes, des
yeux , etc. ; ou bien elle est en forme d'œufs , et alors on ne
voit qu'une sorte de peau ou de coque arrondie.
Ce sont ces formes qu'il est curieux de connoître : nous
les indiquerons avec plus de détails à l'article Thansforma-
TioN ou Métamorphose.
§. 3. De la méthode employée dans cet ouvrage pour
conduire a la connoissance des insectes et a leur
classijîcation.
Quoique la classe des insectes comprenne à elle seule un
plus grand nombre d'espèces bien connues que les autres
sections du règne animal , et même que toutes celles aux-
quelles on rapporte les animaux sans vertèbres , considérés
dans leur totalité , nous pouvons assurer qu'aucune n'est plus
facile à étudier. Nous avons déjà exposé, au commencement
de cet article et dans celui qui est inséré sous le titre d'ENxo-
MOLOGiE, que les insectes diffèrent de tous les autres animaux
par le défaut de vertèbres . par la disposition des organes du
mouvement , qui offrent des articulations nombreuses dans la
partie moyenne du corps et dans les appendices articulés
qui constituent leurs membres; en même temps que tous
respirent par des trous ou des orifices extérieurs nombreux ,
nommés stigmates, qui correspondent à des canaux aériens
élastiques ou à des frachées.
Les insectes ont été divisés en huit ordres, qui ont tiré
leur dénomination des modifications des organes du vol ou
des ailes, suivant qu'on en aperçoit, ce qui arrive au plus
grand nombre, ou qu'il n'en existe pas. Ce défaut des ailes
réunit, comme nous le verrons, des insectes fort différens
les uns des autres ; cependant c'est un moyen comaiode et
r
47^ ' INS
artificiel de distinguer certains groupes ou familles , qu'on
a réunis sous un nom commun , qui indique principale-
ment cette absence constante des ailes à toutes les époques
de la vie dans certaines espèces, qui forment ainsi Tordre
des Aptères, ou le huitième de la classe. Tous les autres
insectes ont des ailes, mais leur nombre varie : un ordre
réunit les espèces qui n'en ont que deux ; c'est le septième
de la classe , celui des Diptères, chez lesquels on trouve
beaucoup d'autres caractères bien plus importans que ce
nombre des ailes.
On observe quatre ailes chez tous les autres insectes, qu'on
pourroit appeler , à cause de cela, les tétraptères; mais ce
grand ordre se subdivise en six autres bien distincts : d'abord
par la nature des alimens que ces animaux sont forcés de
rechercher, les uns ne pouvant se nourrir que de liquides,
de sucs ou d'humeurs qu'ils pompent ou absorbent à la sur-
face ou dans l'intérieur des corps organisés; ceux-ci forment
deux ordres.
Dans les uns, la bouche consiste en un bec articulé, formé
de pièces coudées ou courbées , qui peuvent rentrer les unes
dans les autres, et on observe, le plus souvent, dans leurs
ailes, une différence notable entre les supérieures, qui sont
à demi coriaces, ou qui ressemblent à des demi-étuis, ce qui
les a fait nommer Hémiptères.
Chez les autres insectes à quatre ailes et sans mâchoires ,
la bouche consiste en une sorte de langue ou de trompe
roulée en spirale sur elle-même, ce qui a fait donner à
l'ordre auquel on les rapporte, le nom de Gi.ossates ; mais,
comme en général , dans ces insectes , les quatres ailes sou-
tiennent de petites écailles ou lamelles colorées diversement
et placées souvent les unes au-dessus des autres à la manière
des écailles des poissons , on les a désignés sous le nom de
LépinoPïÈREs, ou à ailes écailleuses.
Tous les autres insectes à quatre ailes ont la bouche com-
posée de mâchoires et de mandibules propres à diviser les
matières solides dont ils font leur nourriture. Ils ont été
rapportés à quatre ordres, dont les noms sont tirés de la
forme, de la consistance et de la disposition des ailes.
Ainsi , les uns ont les ailes supérieures plus épaisses que les
• ÏNS • ^73
inférieures, auxquelles elles servent comme de gaîne ou de
fourreau , et alors les inférieures sont membraneuses, et tantôt
pliées en travers seulement ; c'est ce qui arrive dans les
Coléoptères, qui composent le premier ordre : ou bien les
ailes inférieures membraneuses sont surtout plissées dans leur
longueur, et le plus souvent non pliées sous des élytres ou
sous les gaines que leur forment les ailes supérieures, qu'elles
dépassent ; tels sont les Orthoptères.
Chez les autres insectes à quatre ailes ou tétraptères , et chez
lesquels les supérieures et les inférieures sont à peu près de
semblable consistance , on distingue la structure de ces ailes,
pour en faire le caractère des deux ordres qui ont emprunté
leur nom de cette disposition : ainsi, chez les Névroptèhes ,
les ailes sont comme formées de mailles par de» nervures
en réseau , tandis que dans les Hyménoptères on distingue
principalement des lignes ou côtes saillantes sur les ailes, qui
sont en général plus étroites et plus consistantes.
Le tableau suivant donne une idée synoptique de cette
classification des insectes, d'après les ailes et les parties de
la bouche.
Tableau analytique de la classification des insectes en huit
ordres, d'après les ailes.
Ideconsistance in- f travers... i. Coléoptères.
égale : les infé- 1 , _
,.,....... Heures pliées en ('«"g .. Okthopx.k.s.
ailes Isemblables, à ner- 1 réticulées. 3. Névroptères.
[ vures (veinées... 4. Hvméwoptères.
sans mâchoires, 1 un bec non roulé. . 5. Hémiptères.
formant j une langue roulée. 6. Lépidoptères.
deux : jamais de mâchoires 7. Diptères.
^nulles 8- Aptères.
Cet arrangement systématique des insectes, qui est à peu
près celui qui a été proposé par Linnaeus , se trouve cependant
établi ici d'après d'autres caractères que ceux tirés uniquement
des ailes, comme les noms des ordres sembleroient l'indiquer.
Il faut avouer, comme nous l'avons déjà fait connoitre au
mot Aptère, qu'un assez grand nombre d'insectes, même sous
l'état parfait, se soustrait à cette classification par les ailes,
c
474 ^ INS '
puisqu'on retrouve dans presque tous les ordres quelques
individus , soit des deux sexes, soit de l'un des sexes en
particulier, qui, quoique analogues par la conformation
générale, par les moeurs, les habitudes, et surtout par la
manière de vivre forcée ou déterminée d'après la structure
des parties de la bouche, devroient être rapportés à l'ordre
des aptères, si l'on ne considéroit que la seule privation
des ailes.
Nous ferons connoître ces espèces qui restent toujours pri-
vées d'ailes , dans chacun des articles qui seront consacrés soit
aux ordres, soit aux genres; niais nous croyons devoir indi-
quer ici un moyen accessoire de les distinguer d'abord. La
structure des parties de la bouche devient très-utile à étudier
pour celte classification des insectes qui, quoique privés
d'ailes, n'appartiennent pas à l'ordre des aptères.
Ainsi le défaut des mâchoires , ce qui est très-rare dans
les aptères, excepté dans les pous, les tiques et les puces,
distingue très-bien quelques hémiptères, comme les punaises
des lits, quelques réduves, cochenilles, pucerons, etc.,
qui ont tous un bec articulé; quelques diptères, comme des
hippobosques, mélobosques, qui ont un suçoir corné; enfin,
quelques lépidoptères qui, comme les femelles de quelques
bombyces , de quelques teignes, ont une langue roulée en
spirale.
Tous les autres insectes faussement ou seulement en appa-
rence privés d'ailes, ont des mâchoires, et ont alors leur
ventre immédiatement accolé au corselet, et ils n'ont que
six pattes; ce qui les distingue des vrais aptères, qui ont le
ventre réuni au tronc : tels sont, parmi les coléoptères,
les femelles du lampyre ver-luisant, et beaucoup d'espèces
qui ont des élytres soudés , ou sous lesquels il n'y a pas
d'ailes membraneuses. Tels sont encore parmi les orthop-
tères quelques sauterelles, gryllons, blattes, mantes; mais
ces derniers ont tous les mâchoires garnies d'un appendice
particulier propre à cet ordre. Enfin , parmi les faux ap-
tères à ventre pédicule et qui n'ont que six pattes, et non
huit comme les acères, on distingue assez facilement les four-
mis, lesmutilles, les ichneumons et les autres hyménoptères,
par la forme de leur bouche et les cinq articles de leurs
• INS " 47?
tarses; tandis q'ue quelques névroptères, comme les psoques,
les termites, n'ont que deux ou trois articles aux tarses.
Nous avons indiqué, sous les noms de chacun des ordres,
l'histoire générale des insectes qu'ils comprennent; de même
que dans les articles consacrés à l'examen de chaque famille,
nous avons fait connoitre les détails relatifs aux genres ef
aux mœurs des espèces qu'on y rapporte. Nous ne présente-
rons donc ici qu'une sorte de résumé propre à donner l'idée
de l'ensemble de la classe des insectes.
I. L'ordre des COLÉOPTÈRES comprend les insectes à
quatre ailes, dont les supérieures forment des étuis ou des
gaines pour les inférieures , qui sont membraneuses et le
plus ordinairement pliées en travers. Ces dernières portent
seules le nom d'ailes , parce qu'elles servent au vol; les
autres sont appelées des élytres ; de là le nom d'élytroptères
qu'on a proposé de donner à cet ordre.
Quand on commençoit à étudier les insectes, on désignoit
ceux dont nous parlons sous le nom très-vague de scarabées.
Ils forment en effet un ordre très-naturel, et qui comprend
des insectes qui ont entre eux la plus grande analogie sous
le rapport des métamorphoses et de la structure.
Les coléoptères naissent tous sous la forme d'un œuf qui
donne une larve à six pattes , le plus souvent fort agile, à
tête mobile, distincte , garnie de mâchoires , et qui garde cette
forme plus ou moins de temps, en changeant de peau cinq
ou six fois. Ces larves, lorsqu'elles ont acquis tout leur dé-
veloppement, subissent une métamorphose complète, c'est-
à-dire qu'elles se changent en nymphes , dont toutes les parties
sont distinctes et semblables à celles de l'insecte parfait ;
mais elles sont immobiles et elles ne prennent plus alors de
nourriture.
Les coléoptères, sous l'état parfait, ont la bouche munie
de mandibules et de mâchoires ; ils peuvent se nourrir de
matières solides, animales et végétales. Leurs sexes sont dis-
tincts ; il n'y a pas chez eux de mulets. En général, les fe-
melles sont plus grosses que les mâles : ceux-ci ont les cou-
leurs plus vives et les antennes plus développées.
L'ordre des coléoptères est le plus nombreux de la classe ;
il comprend à lui seul près de deux cents genres d'insectes :
A76 ' INS •
aussi a-t-on été forcé de le subdiviser en sous-ordres ou sec-
tions. Geoffroy , l'historien des insectes des enA'irons de Paris ,
a trouvé une méthode facile, et qui paroît très-propre à
rapprocher entre elles les espèces qui semblent avoir le plus
d'analogie dans la structure et les habitudes : c'est le nombre
des articulations que présentent leurs tarses. Ces articles des
tarses sont analogues, jusqu'à un certain point, aux pha-
langes qui composent chacun de nos doigts. Ils se terminent
par des grappins de forme variable , qui servent à l'insecte
pour s'accrocher sur les corps.
On a lait la remarque que les pattes intermédiaires , dans
tous les coléoptères, ont toujours le même nombre d'articles
aux tarses que les antérieures, de sorte qu'on n'a recours
à l'examen de ce nombre qu'autant que les tarses antérieurs
auroient été mutilés dans les individus chez lesquels on
étudie les pattes.
Pour déterminer le nombre des articles aux tarses dans un
coléoptère, le naturaliste commence à constater celui des
pattes postérieures ; car, s'il en observe cinq ou trois, il
peut être assuré, d'après l'état actuel de la science, que ce
même nombre de cinq ou de trois se retrouvera aux pattes
moyennes ou antérieures. Mais, s'il y a quatre articles aux
tarses de derrière , il faut absolument observer ceux des
deux autres paires, car les uns en ont cinq et les autres
quatre également.
On distingue ainsi quatre sous-ordres et même cinq parmi
les coléoptères, et le nombre des articles aux tarses a fourni
les dénominations sous lesquelles on les désigne , comme il
suit :
I.*"^ Sous-ordre : Coi.éoptères pentamérés ou à cinq articles
à tous les tarses , ce qui souvent se dénote comme il suit :
6, 5, 5.
IL* Sous-ordre , Coléoptères hétéromérés ou à cinq articles
aux pattes antérieures et moyennes, et quatre seulement
aux tarses postérieurs; ou 5, 5, 4.
III. '^ Sous- ordre, Coléoptères tétramérés, c'est-à-dire, à
quatre articles à tous les tarses; ou 4, 4, 4.
IV.*" Sous-ordre , Coléoptères trimérés , ou ceux qui n'ont
que trois articles à tous les tarses ; ou 5 , 3 , 3.
• INS . 477
V.' Sous-ordre, Coléoptères dimér^s, ou ceux quin'auroient
que deux articles seulement aux tarses ; ou 2 , 2 , 2.
Le premier sons-ordre des coléoptères, celui des penta-
mérés, comprend des insectes nombreux , et qui présentent
de très-grandes différences dans les mœurs et dans les habi-
tudes. On a trouvé des moyens commodes de les distribuer
en familles ou petits groupes naturels, d'après la considéra-
tion de quelques parties extérieures, comme la longueur ou
la brièveté des élytres, leur plus ou moins grande consis-
tance, la forme des antennes ou des autres régions du corps.
Dix familles ont été rapportées à ce premier sous-ordre
des coléoptères pentamérés. Nous allons présenter ici, d'abord
sous forme d'un tableau analytique, les indications princi-
pales , que nous exposerons ensuite avec plus de détails.
' très- courts , ne couvrant pas le ventre; an-
tennes grenues S.Brachéljtres.
, . (nondenléesjfsimples. . . i. Créophases.
ensoie aplati;) l '^ _ ^ »
M ( tarses {natatoires.. 2. Nectopodes.
nii en fil lanlennesl , , ^
uuciiui,( (dentées; sternum pointu. 8. Sternoxes.
■i \^ I corps
arrondi, alongé, convexe 9. Térédjle
■W J \ _^\ .feuilletée. .1 ^'"" *^"' *="'^--- * ' ^- P'^ochr^^-
en j (à rextrémité 4. Pétaloceres.
masse j non ( ronde, solide 7. Stéréoceres.
\ laniellce . ( longue, perfoliée. . 6. Héloceres.
mous; corselet plat; antennes filiformes variables. . 10. ^fjulytres.
Les coléoptères Créophages ou carnassiers composent une
famille très-nombreuse du sous-ordre des coléoptères penta-
mérés. En général , leurs élytres sont durs et recouvrent le
ventre, et quelquefois il n'}'^ a pas en-dessous d'ailes mem-
braneuses; leurs pattes sont très- propres à marcher, n'étant
pas comprimées et présentant des crochets bien distincts;
leurs antennes sont en général en fil ou en soie.
Les uns ont le corselet plus étroit que la tête : tels sont
les cicindèles , les élaphres, les manticores. Les autres,
comme les carabes, les cychres, les scariles , etc., ont géné-
ralement la tête plus étroite que les élytres.
Les Nectopodes ou rémitarses, comme les tourniquets, les
'■n'^ ♦ INS • •
ilytiqucs , ne diffèrent des coléoptères de la famille qui
précède, que par la forme générale de leur corps et par la
forme des tarses, qui sont aplatis en manière de nageoires;
par leurs mœurs et le mode du développement des larves.
Les Brachélytres ou brévipennes , ainsi nommés à cause
de la forme et de la brièveté de leurs élytres comparés à
l'alongement extraordinaire de l'abdomen, ont les antennes
composées de petites articulations grenues , arrondies en
forme de grains de chapelet, lisse nourrissent encore, comme
les précédens, de matière animale; mais la plupart ne re-
cherchent que les cadavres. Quelques auteurs en ont fait un
ordre particulier, sous le nom de microptères : c'est à cette
famille qu'on rapporte les staphylins, les pœdères, les
oxypores.
Les Pétalocères ou lamellicornes correspondent au genre
Scarabée de Linnœus ; leurs antennes en masse feuilletée à
l'extrémité, et le nombre des articles aux tarses, les caracté-
risent suffisamment. D'ailleurs tous les genres rapportés à
cette famille ont les mêmes mœurs. Ils ne se nourrissent, sous
l'état parfait, que de végétaux , de leurs débris, après même
qu'ils ont passé dans le corps des animaux. La plupart ne
volent que le soir ; leurs larves se développent à l'abri de la
lumière. La plupart sont étiolées , courbées en arc , ce qui gêne
beaucoup leurs mouvemens. Les hannetons, les cétoines, les
bousiers, les scarabées, ont été rangés dans cette famille.
Les PRiociiREs ou serricornes ont aussi les antennes feuille-
tées, mais d'un seul côté, ce qui leur donne souvent la forme
d'une scie dentée. La plupart vivent dans l'intérieur du bois,
et ils ont avec les genres de la famille qui précède une
grande analogie dans les mœurs et dans la structure. Les
mâles diffèrent souvent beaucoup des femelles pour la taille
et le développement de certaines parties. I,es cerfs- volans
ou lucanes, les passales et les synodendres, sont des coléop-
tères priocères.
La famille des Hélocères ou des clavicornes est aussi carac-
térisée, comme leur nom l'indique, par la forme des an-
tennes constituant une masse alongée, composée de feuil-
lets ou de lames qui semblent perforées, perfoliées ou trans-
percées par la tige centrale. La plupart recherchent les ma-
. » INS • 479
tiéres animales ou végétales qui commencent à se décom-
poser : tels sont les hydrophiles, les dermestes, les boucliers,
les nécrophores, les nitidules, etc.
Les Stkréocères ou solidicornes composent une très-petite
famille de coléoptères à élytres durs, dont les antennes for-
ment une masse arrondie, qui paroît solide, tant les articu-
lations qui la composent sont rapprochées les unts des autres :
les escarbots, les anthrènes, les lèthres appartiennent à ce
groupe.
C'est dans le bois, et quelquefois dans le tronc même des
arbres vivans, que se développent les insectes de la famille
des Sternoxes ou thoraciques. Leur corps est alongé, étroit,
quelquefois aplati; leurs antennes en fil , souvent dentelées;
leur corselet se termine suit en pointe en arrière , soit en-
dessous sous la forme d'un sternum pointu , qui souvent
même fait l'office d'un ressort : tels sont les buprestes, les
taupins, les cébrions , etc.
Les Tbbédyles ou perce-bois ont les mêmes mœurs et à peu
près les mêmes formes que les sternoxes ; mais leur corselet
n'est point prolongé en pointe ; au contraire, il se trouve
arrondi en cylindre, et les élytres sont à peu près conformés
de même : tels sont les vrillettes, les panaches, les ruinebois
ou lymexylons, les mélasis, les ptines, etc.
Enfin, la dernière famille des coléoptères pentamérés est
celle des Apalytres ou mollipennes, dont le nom a été em-
prunté de la mollesse des élytres; ils ont en outre le curselet
aplati elles antennes en fil. La plupnrtsont carnassiers dans
leur dernier état. Le mode de leur développement est encore
peu connu. Tels sont les téléphores, les malachies, les oma-
lises, les vers luisans ou lampyres, les driles , leslyques, etc.
Il n'y a que six familles dans le sous-ordre des coléoptères
dont les tarses postérieurs n'ont pas le même nombre d'ar-
ticles que ceux de devant ou du milieu. En général ce sont
des insectes nocturnes ; au moins le plus grand nombre
fuient la lumière trop vive , et recherchent les lieux obscurs.
La plupart préfèrent pour leur nourriture les matières végé-
tales. Voici le tableau des familles qui forment le groupe
des Hétéromérks.
A élytres c
j durs;
! antennes
480 , INS
fmous, flexibles; à antennes très-variables, w. Epispastiquei.
filiformes, souvent (larges.... i3. Ornéphiles.
dentées; élj'tres (rétrécis... 12. Sténoptères.
( "°" '""'^^^ ' ) longue. . 14. LrgopMles.
grenupsjl anlenues en! ^
élytres) masse ) ronde... 16. Mfcéiobies.
(soudés, pas d'ailes i5. Photophyges.
Les Epispastiques ou vésicans ont tiré leur nom de la pro-
priété qu'a le corps du plus grand nombre, lorsqu'il est mis
en contact prolongé avec la peau , d"y produire une sorte de
cloche, de vessie ou de brûlure. C'est à cette famille qu'on
rapporte les cantharides, les mylabres, les méloës ou pro-
scarabées, les lagries, les notoxes , etc. Leurs caractères sont
très-distincts.
Dans les Sténoptères ou angustipennes , comme les nécy-
dales, lesœdéméres, les mordelles, les anaspes, etc., le ré-
trécissement bizarre et presque monstrueux des élytres à leur
extrémité libre les fait distinguer au premier aperçu. Quoique
cette famille soit assez naturelle , il paroît que les mœurs
sont très - différentes selon les genres, si l'on en juge du
moins d'après celles des sitarides , qui semblent vivre en
parasites dans les nids des abeilles maçonnes , tandis que les
mordelles se développent dans le bois.
Les Ornéphiles ou sylvicoles vivent aussi, à ce qu'il paroît,
aux dépens de la partie ligneuse des végétaux ; leurs élytres
durs, larges, leurs antennes filiformes, les distinguent au
reste de tous les autres coléoptères hétéromérés. Tels sont
les cistèles, les pyrochres, les serropalpes, les hélops , les
calopes, etc.
Quant aux Lygophiles ou ténébricoles , leurs antennes gre-
nues en masse alongée , leurs élytres durs , non soudés , et
les ailes membraneuses qu'ils recouvrent , ainsi que leurs
habitudes exprimées par le nom qui sert à les désigner , tout
porte à les considérer comme formant une famille fort na-
turelle ; et c'est là qu'on range les ténébrions, les opatres,
les pédines, les sarrotries, qui mènent insensiblement à la
famille suivante.
C'est celle des Photophyges ou lucifuges , qui fuient la
lumière, qui ne peuvent voler, parce qu'ils n'ont pas d'ailes,
^ » INS • 481
■et que leurs élytres durs sont soudés par la suture et ne
sont aptes qu'à protéger l'abdomen qu'ils ret'ouvrent. Tels
sont les blaps , les pimélies , les eurychores, les sépidies , les
érodies , lesscaures, etc.: famille nombreuse d'insectes , la
plupart des pays chauds et arides.
Les foiigivoresou Mycétobies constituent la dernière famille
du sous-ordre des coléojjtères hétéroiuérés. Ils se nourrissent^,
comme leur nom l'indique, de moisissures, de ch.Tuipignons:
leurs élytres sont durs, non soudés; leurs antennes grenues,
en masse arrondie. C'est à cette famille qu'on rapporte les
bolétophases, les diapères , les tétratomes, les agafhidies ,
les hypophlées, les cossyphes , etc.
Le troisième groupe ou sous-ordre des coléoptères, celui
des Tétr-Amérks, qui réunit tontes les espèces dont les tarses
de devant et ceux de derrière n'ont que quatre articles, com-
prend seulement des insectes dont les matières végétales font
la nourriture principale. Ils correspondent en majeure par-
tie aux trois grands genres que Linnœus désiguoit sous les
noms de Chrysomèle , Charanson et Capricorne, dont les
premiers s'alimentent principalement avec les feuilles, les
seconds avec les semences, et les troisièmes avec les matières
ligneuses. Quelques genres anomaux viennent se place? ici
d'après le nombre des articles aux tarses, quoique sous cer-
tains rapports ils semblent se rapprocher d'autres familles.
Voici l'indication des familles de ce sous-ordre.
portées sur un bec ou prolongement du front. 17. Hhinocer es.
masse : corps j arrondi.. 18. Cjllndroïcles.
[ap!r.ti... ig. Onialoïdes.
Antennes / """ ""'' ) , soie 30. Xrlophagcs.
1 un bec, •. non en l , ^ < c?
„, 1 ) [aplati Genre Spontlyle
et I masse, ,' l ' r j
''' j rond: \.xxToniyi. . 2\. Phjthophages.
\ corps (plat .... Genre Cucuje.
La famille desRniNOCÈi\ES ou roslricornes correspond, comme
nous venons de le dire , au genre Charanson ou Curculio de
Linnaeus : leur tête se prolonge eu une sorte de bec ou de
trompe qui supporte les antennes. C'est un groupe très-
nombreux , qui a été subdivisé en beaucoup de genres. Ils
proviennent d'une larve molle qui vit à l'abri, soit dans l'in-
23. 01
482 , INS
térieur des tiges, soit dans les fruits et les semences les plus
dures. Quelques-uns, sous l'état parfait, se nourrissent de
feuilles. Les uns ont les antennes en masse droites ou brisées,
c'est-à-dire, coudées dans le milieu. Les attélabes, les anthri-
bes, les oxystomes, les brachycères, appartiennent au pre-
mier groupe; les charansons , les rhynchénes, les ramphes
sont rangés dans le second. Parmi les rhinocères dont les
antennes ne forment pas une masse on place les brentes,
les bruches et les becmares.
LesCvuNDROÏDEs ou cylindriformes, ainsi rapprochés par la
forme de leur corps qui est arrondi , ont en outre les antennes
en masse, non portées sur un prolongement de leur front; ils
ressemblent beaucoup aux térédyles , dont ils s'éloignent par
le nombre des articles de leurs tarses. Tels sont les apates ,
les bostryches, les scolytes , les corynètes et les clairons.
C^s deux derniers genres ne sont placés ici que par l'arran-
gement du système que nous adoptons, leurs mœurs étant
tout-à-fait différentes.
C'est encore par la conformation de leur corps que les
insectes coléoptères, désignés sous le nom d'OMALOïnEs ou
planiformes , sont ainsi rapprochés. Leur corps est très-dé-
priujé; leurs antennes sont en masse; leur tête n'est pas pro-
longée en une sorte de trompe ou de bec : ils se nourrissent
de matières végétales. Tels sont les ips, hétérocères, mycé-
tophages, cucujes ou uléiotes, trogosites ou ronge-blés, lyctes,
colydies , etc.
Les Xylophages ou lignivores composent une famille des
plus naturelles. Ils correspondent au grand genre des ceram-
hyxAe Linnœus : tous, et sans exception, sous l'état de larves,
ils se développent dans le tronc des arbres; ils ont les mêmes
mœurs sous l'état parfait, et une ressemblance frappante dans
le port et dans la forme des membres. La plupart sont ornés
de couleurs vives et brillantes; ils ont de longues antenne*
en soie, quelquefois plus étendues que le corps; leurs arti-
culations sont nombreuses, et ils peuvent les diriger en arrière.
Les femelles sont plus grosses et moins vives que les mâles :
les larves sont des espèces de vers ou de chenilles molles , plus
ou moins étiolées, alongées, aplaties ou quadrangulaires , à
six pattes courtes, garnies de mamelons ou de tubercules,
, • INS • 485
ijfui servent à leur progression dans les galeries qu'elles se
creusent au milieu du bois, quelquefois en pleine \égéta-
tion. C'est à la famille des xylophagcs qu'il faut rapporter
les genres Rhagie , Lepture , Molorque, Callidie , Saperde ,
Capricorne, Lamie , Prione et un grand nombre d'autres
subdivisions.
La dernière famille des coléoptères tétramérés, qui com-
prend les herbivores ou Phytophages, est dans le même cas
que la précédente. Linnaeus avoit rangé toutes les espèces
qui composent aujourd'hui ce groupe, dans le grand genre
Chrjsornela. Ils ont, en effet, les mêmes mœurs et beaucoup
d'analogie dans l'organisation et dans quelques parties du
corps, en particulier dans les antennes, quoique leur forme
générale présente de grandes modifications, qui ont principa-
lement servi à les distribuer en genres naturels. Tous pro-
viennent de larves qui vivent ordinairement en sociétés sur
les feuilles des plantes. Leur corps est souvesit coloré, trapu,
ridé en travers. Quelques-unes laissent exsuder de leur sur-
face ou de leurs articulations des humeurs colorées ou odo-
rantes ; leurs pattes sont alongées , et elles marchent avec
facilité. Toutes ont des moyens de se soustraire à leurs nom-
breux ennemis, qui sont les oiseaux. Sous l'état parfait, les
coléoptères phytophages ont généralement le corps bombé,
les antennes en forme de fil à articles arrondis, et l'avant-
dernière pièce de leurs tarses est comme partagée en deux
lobes : ils adhèrent , par ce moyen , avec beaucoup de force^
aux surfaces des feuilles même les plus lisses.
Les uns ont les antennes à peu près de même grosseur dans
toute leur étendue, comme les lupères, les altises , les galé-
ruques; d'autres ont le corselet très-convexe, comme les
clytres, les gribouris : les hispes, les criocères, les donacies ,
les alurnes n'ont pas le corselet rebordé ; les chryscmèles^
les hélodes , les cassides offrent un léger renflement à l'ex-
trémité libre de leurs antennes, qui est encore plus sensible
et aplati dans les érotyles.
Les coléoptères, qui n'ont que trois articles aux tarses, ne
composent qu'une seule famille, qui est la vingt-deuxième,
et qui a été nommée celle des Trimékés ou tridactyles ; elle
forme en même temps le quatrième sous-ordre. .Réunis par ce
484 < INS ' r
caractère artificiel, les genres qu'on y rapporte n'offrent pas
entre eux une très- grande analogie. Jusqu'ici on n'a pas
encore observé beaucoup d'insectes ainsi conformes, excepté
le genre des coccinelles, qui est fort nombreux eu espèces,
et qui constitue, à lui seul, une sorte de famille naturelle,
comprenant des insectes carnassiers sous les deux états de
larve et d'insecte parfait. Les scymnes ne diffèrent guèrcs
des coccinelles que par la disposition du corselet relative-
ment aux élytres ; les genres Eumorphe , Endomyque et
Dasycère soi^t plus voisins des Mycélobies.
Quant au cinquième sous-ordre des coléoptères, celui des
DiJiÉr.És, qui seroit une vingt-troisième famille, à laquelle
on auroit rapporté les psélaphes , les chennies et les clavi-
gères, lUiger et Reichenbach ont reconnu que cette division
n'éloit qu'apparente dans ces insectes, d'ailleurs très-petits,
l'article près du tibia ou de la jambe étant très- grêle, de
sorte que ce sous-ordre ne peut encore être établi, et que
nous ne l'indiquons ici que pour mémoire.
Le second ordre de la classe des insectes , celui des
ORTHOPTÈRES, que Degéer nommoit dermaptères, et Fa-
bricius ulonates , comprend bien moins d'espèces que la
plupart des autres ordres, quoique le nom indique par son
étymologie la disposition particulière des ailes inférieures,
qui sont plissées en longueur et non en travers, le seul genre
des perce-oreilles ou forficules excepté : ce n"est pas ce qui
a autorisé la formation de cet ordre, qui est fort naturel;
mais bien le mode de transformation ou l'analogie dans les
métamorphoses. En elfet, les larves des orthoptères sont
agiles, les nymphes le sont également, et sous les trois états
le genre de nourriture reste le même. En général leurs ély-
tres sont flexibles et non réunis par une suture moyenne.
La plupart ont des stemniates entre les antennes, et ils offrent,
à leur mâchoire, un appendice particulier qu'on a appelé
une galète. Quatre familles seulement composent cet ordre,
et deux de ces familles ne comprennent encore qu'un seul
genre. Voici l'indication de ces familles : i.° d'après l'obser-
vation de la longueur respective des pattes postérieures; 2."
d'après le nombre des articles aux tarses; 3.'\ enfin . d'après
la forme du corselet.
INS 485
^ Leaucoup plus grosses, plus longurs,
propres au ^luit 27. Gryîloîdes.
!l plus Ions que laiec-. . zQt. ^nomides.
cinq ■■, y , , ^ ' ^
( très - larce , couvrant
corselet] , "
( la tête v.5. BluUes.
trois : alidomcn toriiune en
pince ?:f. Lahidourcs.
Les Laeidoures ou forficules appartiennent réellement à
une famille distincte , dont les mœurs et l'organisation sont
fort remarquables ; les perce -oreilles forment ce groupe,
différent de tous les autres par les élytres , qui sont semblables
à ceux des staphylins, puisqu'ils ont une véritable suture
moyenne; les ailes, quoique plissées sur leur longueur, n'en
sont pas moins pliécs trois fois en travers, et peuvent, par
un mécanisme admirable , se ployer et se déployer comme
par ressort.
Les Blattes forment également un genre anomal ou une
véritable famille bien distincte. Ce sont des insectes très-
plats, à antennes très-longues, en soie; à pattes grêles, très-
aplaties et semblables cà celles des forbiciues, avec lesquelles
elles ont les plus grands rapports. Leur corselet, large, en
bouclier, couvre la tèie et les élytres. Leur abdomen se ter-
mine, comme dans plusieurs genres de grylloïdes, par deux
organes coniques, qui servent à une sécrétion de matière
fétide dans quelques espèces. Beaucoup restent aptères.
Les Ano.mides ou orthoptères difformes ont reçu cette dé-
nomination à cause du mode singulier de l'articulation et de
la foi'me du corselet , susceptible de faire un angle avec le
ventre. Leur tête est dégagée; leurs pattes de derrière ne
servent pas au saut : les uns , comme les phasmes ou les
spectres, ressemblent à des bâtons alongés ; d'autres, comme
les phyllies, à des feuilles vertes réunies en paquet trois à
trois; enfin, les mantes ont les pattes de devant armées d'un
crochet mobile , dont elles se servent comme de mains , qu'elles
portent à la bouche. Leurs antennes varient beaucoup.
La quatrième et dernière famille de l'ordre des orthop-
tères , celle des Grylloïdes ou grylliformes , comprend beau-
coup de genres qui ont entre eux la plus grande analogie ;
leur corps est alongé; leur tête le plus souvent dans une
^86 ' INS
position verticale, à mandibules saillantes ; leurs ailes infé-
rieures dépassent le plus souA'ent les élytres ; leurs cuisses
postérieures sont renflées, très-musculeuses ; les jambes sont
aussi longues que les cuisses, ce qui donne à ces insectes la
faculté de s'élancer dans l'air pour s'envoler. Les antennes
varient beaucoup , ce qui a permis d'en former plusieurs
genres : ainsi, elles sont en prisme ou en fuseau aplati
dans les truxales ; en fil ou légèrement renflées, dans les sau-
terelles , les criquets, les tridact}les; enfin, en soie ou beau-
coup plus grêles à l'extrémité libre, dans les locustes, les
courtiliéres et les gryllons.
Les NE\'ROPTERES ou les insectes à mâchoires, à quatre
ailes nues, de semblable consistance entre elles, et à nervures
en réseau ou anastomosées, forment le troisième ordre de la
classe et composent trois familles bien distinctes , comme
nous allons d'abord l'indiquer.
!, . ., , (couverte par les lèvre';.... 3o. Odonates.
' j nue 28. Stégopi'eres.
à peine distincte, les palpes exceptés. . . 29. ^gnathes.
Cet ordre , quoique fondé sur la forme des ailes et sur
l'existence des parties de la bouche disposées de manière à
couper les matières solides, n'est cependant pas très-naturel,
parce que les mœurs et les métamorphoses offrent souvent ,
dans une même famille , de fort grandes dissemblances.
hes Stkgoftères ou tectipennes , par exemple, dont la
bouche est toujours formée de parties très-distinctes , et qui
portent les ailes en toit, comme leur nom l'indique, pro-
viennent pour la plupart de larves carnassières qui souvent
tendent des pièges aux insectes dont elles se nourrissent, ou
qui attaquent ceux qui vivent en familles et dont la marche
est lente : elles se filent un cocon , et leur nymphe est immo-
bile comme celle des coléoptères. D'autres larves se déve-
loppent sous les écorces et dans le bois; quelques-unes vivent
en grandes familles, et on observe dans ces sortes de sociétés
gynocratiques, comme chez les abeilles, un grand nombre
de femelles neutres, une seule femelle féconde, et un grand
nombre de mâles, qui ne viAcnt que le temps nécessaire à
leur développement et à la fécondation. Enfin, il en est
• • INS • 487
quelques-unes qui paroissent se développer sous Tcau. La
plupart, sous l'état parfait, ne vivent que quelques jours-,
tels sont les fourmilions , qui ont les antennes en fuseau ; les
ascalaphes, qui les ont terminées par une petite masse, comme
les papillons; les hémérobes, qui les ont en soie, et les pa-
norpes et les semblides , qui les ont en forme de fil. Tous
ces genres ont cinq articles aux tarses, tandis qu'il n'y en a
que quatre dans les rapliidies, deux dans les psoques, et trois
dans les perles et les termites.
Les Agnathes ou buccellés, c'est-à-dire, abouche très-
petite, distincte seulement par les palpes, n'ayant pas d'or-
ganes propres à saisir la nourriture solide ni à sucer les
liquides, ne vivent que très-peu de temps sous l'état parfait :
leurs larves se développent dans l'eau ; elles ont des branchies
qui servent à la respiration aquatique; leurs nymphes, quoi-
que immobiles au moment où elles viennent de prendre cette
forme, en quittant celle de larves, acquièrent ensuite plus
de solidité et deviennent agiles. Telles sont les éphéirières ,
qui ont les antennes plus courtes que la tête; dont les ailes
supérieures , dans l'état de repos , se relèvent verticalement
sur le dos , et dont les inférieures sont généralement très-
peu développées; leur ventre est terminé par deux ou trois
soies très-longues. Les phryganes , ainsi nommées de l'habi-
tude qu'ont leurs larves de couvrir de petits morceaux de bois,
ou de substances étrangères , les fourreaux qu'elles se filent
à la manière des teignes, ont les antennes très-longues.
Tous ces agnathes ne volent guères que le soir : ils ne vivent
que quelques momens , et tous les individus d'une même
espèce éclosent à la fois dans le même pays.
La troisième famille des névroptères, celle des Odonates
ou libelles, se distingue par la forme de la bouche, qui est
très - développée , mais recouverte par la lèvre inférieure.
C'est un groupe des plus naturels : toutes proviennent de
larves aquatiques, qui nagent, en introduisant dans leurs
intestins une certaine quantité d'eau, qu'elles expulsent tout
à coup comme avec une seringue; l'eau environnante résiste
à ce jet et éloigne l'insecte dans le sens opposé. Leur nymphe
est agile , et ne diffère de la larve que par des moignons
d'ailes. Les organes de la génération présentent une dispo-
488 • l^S '
sition des plus bizarres, qui influe sur leur mode d'accou-
plement. Les libellules et les agrions composent cette famille.
Le quatrième ordre de la classe des insectes est, comme
nous l'avons dit, celui des HYMENOPTERES : il comprend
encore des insectes màchcurs, ou dont la bouche est confor-
mée de manière à diviser les matières solides, mais cepen-
dant à pomper en même temps les liquides. Leurs quatre
ailes sont nues, membraneuses, avec des nervures principales
.sur la longueur ; les inférieures, plus minces et plus étroites ,
s'accrochent, par leur bord externe , au bord interne des su-
périeures, au moyen de petites pointes courbées, pour ne
former avec elles qu'un seul plan, lorsqu'elles sont écartées
du corps. La plupart ont cinq articles aux tarses. Les femelles
ont le plus souvent une tarière ou un aiguillon.
Neuf familles composent cet ordre des hyménoptères. Voici
le tableau analytique qui les indique :
'sessile : nne tar'ère d?as les femelles; à antennes non brisées 30. Vropristes.
(plus longue que les man-'ibiiles : ventre ;i pédicule liés-couit. 'il M.llites.
concave en-diessous , se roulant en boule, corps
métallique 33. Chijsides.
(doublées sur la longueur: antennes brisées. 3z. Pterodiples,
fbrisées ou filiformes; ventre
.,■-■( conique 36. Mjrmeses
à ailes su- non d— '
périeures / blées , i i . i ■ o .. , , -,
y I "■!" '(..., lau plus; nique... 34. AiUhophiles .
anleunes )ni brisées ,1 '.^'1 ' ^„ ,. ,
en fil;( ^^^"-^ (compriiiié. 38. ISeottociyptes.
[icles: i ,^1^, ji^. à 17. 3?. Oryclères.
Ide treize. 1 1-7 à 3o. 35. Emoinotilles.
La seule famille indiquée sous le n." Sg comprend des
insectes dont la larve ressemble tout- à -fait à une chenille
munie de pattes, et qui se nourrit comme toutes les che-
nilles; tandis que les larves de toutes les autres familles ont
la forme de vers mous sans pattes, près desquelles les pa-
rcns déposent une certaine quantité d'alimens , ou qu'ils se
chargent de nourrir.
Les Apîaires ou mellites , dont le ventre est attaché au
métaïhorax par un petit pédicule court , et dont la lèvre
inférieure est pins longue que les mandibules, ont toutes
des antennes brisées ou coudées. Sous l'état parfait, ces in-
sectes sucent le nectar des fleurs, et ils nourrissent leurs
larves du pollen àes, végétaux. Il j a souvent, parmi les es-
pédiculé :
à lèvre '
inférieure 1
• INS • ^«9
pèces qui Aivent en société, des femelles condamnées dès
l'enfance à une stérilité absolue, mais que le sentiment de
l'amour maternel porte à se charger de l'éducation des petits
qui proviennent d'une ou de plusieurs femelles fécondes.
C'est à cette famille qu'il faut rapporter les abeilles , les
xylocopes, les bourdons, ainsi que les andrènes, les bylées,
les nomades : enfin, le genre des bembèces, dont la lèvre
supérieure forme une sorte de bec qui couvre les parties de
la bouche.
Les Ptérodivles ou duplicipennes, comme les guêpes et les
masares , forment la famille suivante, dont les mœurs sont
analogues à celles des abeilles, mais dont les mâchoires sont
moins alongées, et qui sont surtout remarquables par le pli
longitudinal qui se forme dans les ailes supérieures lorsque
l'insecte est dans le repos , ce qui les rétrécit beaucoup.
Leurs antennes sont aussi brisées; mais elles forment une
masse ou un fuseau vers les articles libres.
Les Chrysides et les parnopès, qui composent à elles seules'
une petite famille , sont surtout remarquables par la forme
des anneaux de l'abdomen, qui sont concaves en-dessous et
qui peuvent se rouler en boule comme les armadilles.
Les Anthophiles ou florilèges se trouvent sur les fleurs
dans l'état parfait : ils se nourrissent du pollen, mais ils ne
le recueillent pas comme les apiaires. Ils nourrissent , au
contraire, leurs larves avec d'autres insectes, qu'ils saisissent
et qu'ils paralysent en les piquant de leur aiguillon, ou qu'ils
mutilent, afin qu'ils n'off'rent aucune résistance à ces sortes
de vers qui , le plus ordinairement , sont déposés dans des
nids construits avec artifice. Les uns ont les antennes ren-
flées, comme les philanthes et les scolies; d'autres les ont à
peu près de même grosseur dans toute leur étendue : tels sont
les mellines et les crabrons.
La famille des Entomotilies ou insectirodes, c'est-à-dire
rongeurs dinsectes, provient de larves qui, pour la plupart,
se développent dans 1 intérieur du corps des autres insectes,
dont elles absorbent fous les sucs, en ménageant les organes
de kl digestion jusqu'à l'époque où elles sont prêtes à se mé-
tamorphoser. Ce sont des insectes parasites, dont les mœurs
sont extrêmement curieuses à étudier. On rapporte à ce
490 ' INS ^ '
groupe les genres Ichneumon ', Ophion , Banche , Foene ,
Evanie.
Les Myrmiîges ou formicaires, c'est-à-dire A^oisins des four-
mis , comprennent en effet ce genre et ceux des niulilles et des
dor^'les. II y a parmi eux des individus condamnés , comme
chez les abeilles, à une stérilité complète. La plupart vivent
en sociétés nombreuses. Les neutres seuls travaillent. Les
inàles périssent peu de temps après qu'ils ont rempli leurs
fonctions, ou queTépoque de la fécondation est passée. Leurs
mœurs présentent aussi le plus grand intérêt. Les insectes
parfaits sucent les pucerons , semblent les élever en domes-
ticité; ils se livrent des. guerres , font de leurs prisonniers
des sortes d'esclaves qu'ils chargent des soins domestiques in-
térieurs. (Voyez en particulier l'article Fourmi.)
Les Oryctères ou fouisseurs ont des mœurs analogues à celles
des anthophiles, quoique leurs caractères, ou la disposition
de leurs parties extérieures, soient fort différens : tels sont
les pompilcs, les larres, les sphèges et les tiphies.
La famille des abditolarves ou Néottocrvptf.s , noms qui
indiquent que les larves de ces insectes sont soigneusement
cachées, comprend des espèces qui ont beaucoup de rapports
de ma'urs avec les enfomotilles; mais leurs formes sont aussi
très -différentes. La plupart déposent leurs œufs sous l'épi-
derme ou dans le tissu même des végétaux; les plaies qu'ils
produisent, appellent en cet endroit les sucs qui s'extravasent,
produisent des tumeurs ou des gales, dans l'intérieur des-
quelles les larves se développent et se nourrissent parfaite-
ment à Fabri : telles sont les mœurs des diplolèpes, des cynips,
des eulophes, des diapries. D'autres, comme les leucopsides,
les chalcides, se nourrissent dans le corps des insectes, à peu
près comme les ichneumons.
Enfin , la dernière famille des hyménoptères réunit des
insectes tellement différens des autres, sous le rapport des
métamorphoses, qu'on seroit tenté d'en former un ordre
particulier. C'est celle des Urofristes ou serricaudes, ainsi
nommée à cause de la tarière en scie que les femelles por-
tent à l'extrémité du ventre , et qui sert à faire des entailles
aux écorces des plantes sous lesquelles l'insecte veut déposer
ses œufs. Dans toutes les espèces mâles et femelles l'abdomen
• INS 491
est absolument scssile ou appliqué immédiatement au corse-
let : foutes proviennent de chenilles à tête écailleuse , qui se
nourrissent de matières solides végétales, feuilles et écorces.
Elles ont plus de dix-huit pattes, et quelquefois, quoique
rarement, au-delà de vingt-deux. A l'époque de leur trans-
mutation, elles se filent un double cocon, quelquefois très-
solide , où la nymphe reste immobile , quoique ses parties
soient distinctes, enveloppées cependant dans un épiderme
qui reste dans la coque, que l'insecte déchire ou coupe très-
régulièrement en travers , lorsqu'il prend sa dernière forme
et qu'il sort, comme ressuscité, de cette sorte de tombeau.
Deux groupes partagent cette famille : dans l'un, auquel on
rapporte les cimbèces et les sirèces, les antennes ne sont ni
en fil ni en soie, comme dans les tenthrèdes ou mouches
à scie, les urocères et les orysses.
Cette famille des uropristes est un chaînon qui lie l'ordre
des hyménoptères à celui des lépidoptères par la forme et
les moeurs des larves.
Les HEMIPTERES forment le cinquième ordre de la classe.
Ce nom, qui signifie moitié d'ailes ou demi-ailes, et auquel
on a proposé de substituer ceux d'hémélytres et d'hémimé-
roptères, ne convient pas à toutes les espèces.
Quoique ces insectes aient le plus souvent quatre ailes,
dont la base ou la moitié de la longueur qui y correspond
reste plus opaque; il en est quelques-uns, comme les cigales
et les pucerons, par exemple , dont les ailes supérieures sont
semblables aux inférieures. Leur véritable caractère consiste
dans la forme de leur bouche , qui a déterminé la nature
de leurs alimens , et par conséquent leurs mœurs. Ainsi ,
quoique le nom donné à cet ordre soit mauvais , les in-
sectes qu'il réunit n'en ont pas moins les plus grands rap-
ports par la métamorphose, qui est incomplète, c'est-à-dire
que l'insecte, sous les trois états, est semblable à lui-même,
les ailes ou les rudimens d'ailes exceptés , comme chez les
orthoptères, et surtout par la présence d'un lec , ou d'une
bouche consistant en une sorte de tube formé de plusieurs
pièces qui contiennent des soies fines et aiguës. L'animal se
sert de cet instrument pour piquer les corps organisés dont
il suce ou pompe les humeurs pour se nourrir.
coriaces, \ anleinies
roisées
f
492 ' I.NS '
Six familles fort nahirelles composent cet orJrc : voici le
tableau analytique qui les indique, d'après l'examen des par-
ties extérieures.
' I .„ . ( longiiP?, 1'°'^ ^'- '^'^"'^'"'«Ç'"-
^.'"^ "^ I ea (fil ou en masse. 40. Fihinostomes.
lrès-court:s , en soie . . . 42. Iljdrocorées.
très-étroites , linéaires : tarses vé-
siculcux ; . 45. Physafwdes.
non croisées; (trois 43. yiuchénorinques.
des tarses (deux au plus. 44. Pk^tadelges.
Les insectes de la famille des hémiptères Rhinostomes ou
frontirostrcs a, comme leur nom l'indique , un bec qui paroît
naître du front; leurs antennes ne sont pas en soie, e( leurs
tarses ne sont pas propres à nager , mais bien à s'accrocher sur
les corps solides. Ils paroissent tous sucer de préférence les vé-
gétaux , dont ils absorbent la sève sous les trois états de larves,
de nymphes agiles et d'insectes parfaits. Les uns ont les an-
tennes en masse , ce sont les podicères et les corées; d'autres
les ont en fil ; mais parmi ceux-là il en est qui ont cinq
articles aux tarses, comme les pentatomes et les scutellaires ,
tandis que d'autres n'en ont que trois, comme les acanthies,
les gerres et les lygées.
Les Z0ADELGE3 ou sanguisuges sucent les humeurs des ani-
maux ; leur bec paroît aussi être un prolongement arqué du
front , mais leurs antennes longues se terminent par un article
trèï-grêle ou en soie : tels sont les punaises des lits, les mi-
rides, les réduves, les ployères et les hydrom.ètrcs.
Les HvDRocoKÉEs, ou les punaises qui vivent dans l'eau ,
qu'on peut encore appeler rémitarses, parce que leurs pattes
postérieures sont propres à nager, à raison de l'aplatisse-
meiit de leurs tarses qui souvent sont ciliés sur la tranche
et composés de deux articles, sont surtout remarquables par
l'extrême brièveté de leurs antennes, qui ressemblent à un
petit poil ou à une soie. C'est dans cette famille qu'on range
les genres dent les espèces portent des tilets au ventre, comme
les scorpions aquatiques ou les nèpes et les ranatres; ainsi
que celles qui n'ont pas ces sortes de filets, comme les sigares,
les naucores et les notonectes.
Les cigales et les autres genres voisins, dont le bec, dans
, • INS • 493
rëtat (le repos, reste couché sous le ventre entre les pattes ,
et dont la base paroit naître du cou , portent , à raison de
cette conformation , le nom de coUirostres ou d'AucHÉNORiN-
(^)i'K.s. Leurs ailes supérieures, qui ne sont pas croisées, sont
cà peu près de sen.blable consistance dans touie leur lon-
gueur ; ils n'ont pour la plupart que trois articles aux tarses.
On rapporte à cette famille, comme nous venons de le dire,
les cigales, cicadellcs, membraccs , cercopes , fiâtes, ful-
gorcs , etc.
Les Phytadelges ou plantisuges ont aussi les ailes non
croisées et semblables entre elles, souvent étendues et trans-
parentes; leur bec paroit encore prendre son origine à la base
de la tête en-dessous, au devant du corselet, ou vers le cou.
Leurs tarses sont en général très-mal organisés pour la mar-
che; ils n'ont que deux articles. Aussi la plupart des espèces
sont-elles très-lentes et restent-elles fixées sur les végétaux, au
lieu même où leurs mères ont déposé leurs œufs. Il en est
beaucoup qui n'ont pas d'ailes, et dont les pattes, très courtes,
ne peuvent servir qu'à retenir ces insectes sur les feuilles ou
les écorces: tels sont les gallin-fctes, les cochenilles femelles,
les chermès , les psylles. D'autres, comme les pucerons, les
aleyrodes, peuvent se transporter d'un lieu à un autre à l'aide
des ailes. Le mode de génération de ces insectes est des plus
curieux à connoitre. ( Voyez les articles Phytadelges et Pu-
cerons.)
Enfin, le seul genre anomal des thrips constitue la famille
des Thysapodes ou vésitarses , noms qui indiquent la confor-
mation singulière des tarses, lesquels sont garnis de petites
vessies qui font, à ce qu'il paroit , l'oflice de petites ventouses
pour faire adhérer l'inseeie sur les surfaces les plus lisses.
Ce sont de très-petites espèces, dont le bec est, l'ar consé-
quent, très-court. Ils ont à peu près le port des staphylins;
mais leurs tr:.nsrorniations sont bien celles des hémiptères,
puisqu'on a observé leurs larves et leurs nymphes. Cependant
ils diffèrent réellement de tous les insectes de cet ordre.
Les plus grandes espèces atteignent a peine une ligne de
longueur.
Après les insectes à quatre ailes qui ont un bec, viennent
ceux qui ne p«uvent aussi se nourrir que de liquides , mais
494 • INS *
à l'aide d'une langue roulée en spirale. Ils forment le sixième
ordre, celui des LEPIDOPTERES. Leur corps est toujours
velu et leurs ailes couvertes de petites écailles colorées, pla-
cées en recouvrement les unes sur les autres, ce qui leur a
valu le nom qui les désigne d'une manière générale. Jamais
Ils n'ont de stemmates ou d'yeux lisses, et leurs antennes sont
toujours alongées.
Les lépidoptères proviennent de larves agiles, alongées,
qui ont d'abord , du côté de la tête , six pattes articulées , et
ensuite plusieurs autres fausses -pattes, disposées par paires
sur les anneaux du corps, dont le nombre n'excède pas seize.
On les nomme chenilles; leur tête est formée d'une sorte de
grande écaille qui la recouvre entièrement, et dont les
formes varient; leur bouche est munie de mâchoires. Elles
se nourrissent de feuilles, de fruits, d'écorccs , de bois;
quelques-unes de substances animales; la plupart peuvent
filer. Outre les mues ou les changemens de peau qui sou-
vent changent l'aspect de ces chenilles, elles subissent, quand
elles ont acquis tout leur développement, une véritable mé-
tamorphose complète. Elles se changent en une chrysalide
immobile, plus grosse du côté de la tête, et sur laquelle on
distingue des traits qui dessinent la position de toutes les
parties de Pinsecte parfait qu'elles renferment. Plusieurs
s'accrochent par la queue, et subissent leur transformation
à l'air libre; d'autres, qui se sont construit un étui ou un
fourreau ouvert du côté de la tête, le ferment à cette époque.
Enfin , le plus grand nombre se tissent, avec une soie plus ou
moins grossière, un follicule ou un cocon, dans lequel elles
restent long-temps , souvent six mois, dans une sorte de som-
meil léthargique et sans prendre de nourriture. La forme
des antennes a permis de diviser cet ordre en quatre familles,
comme il suit :
i , ( bout 46. Ronaloceres.
en masse, ou renflées au S
„_ (milieu ^T.Closteroceres.
] non renflées, et en.. . j ^^ "" «"^ peigne.. 48. Nématoccres.
[ I soie /,9. Chétoches.
Les RoPALocÈREs ou globulicornes correspondent au genre
Papillon dé Linnasus. Ils ne se filent pas de coque. La plu-
part s'accrochent par la queue : les uns restent suspendus
^ » INS • 495
verticalement; d'autres, avant de se changer en chrysalide ,
ont eu la précaution de passer quelques fils qui les entourent
en dehors, comme une sorte de sangle transversale, pour se
maintenir rapprochés des corps sur lesquels ils se sont fixés.
Toutes les espèces volent pendant le jour, et non le soir ; tek
sont les papillons, les hespéries , les hétéropfères.
Les Clostérocères ou fusicornes ont les antennes en fuseau
ou en prisme , plus gros au milieu. Leur corselet est en
général plus gros que dans les papillons .- leurs ailes inférieures
s'accrochent aux supérieures par un poil roide, qui est reçu
dans une sorte d'anneau du bord interne près de la base. Ces
ailes ne peuvent pas s'éiever verticalement. La plupart ne
volent qu'au crépuscule, principalement le soir. On rapporte
à cette famille les sphinx, les sésie*, les Z3'gènes.
Les Nématoceres ou filicornes offrent, comme leur nom
l'indique, des antennes à peu près en fil, dentelées, ou en
peigne .- leurs ailes sont en toit, le plus souvent arrondies;
elles sont aussi accrochées par un fil roicie. La plupart des
chenilles se filent un cocon. Les bombyces, les cossus, les
hépiales composent cette famille.
Enfin, la dernière famille, celle des Chétocères ou fili~
cornes, comprend tousles lépidoptères dont les antennes sont
plus grêles à leur extrémité libre ou en forme de soie. C'est
le groupe le plus nombreux. Il comprend des espèces qui
n'ont entre elles d'autre analogie que dans la forme des an-
tennes; car, sous l'état parfait, elles ont un port très-varié,
principalement par la forme des ailes : ensuite les chenilles
diffèrent beaucoup encore pour la conformation, les mœurs
et les habitudes. Parmi les espèces de cette famille , les
unes, comme celles des genres Phalène et Ptérophore ,
ont les ailes étendues, même dans l'état de repos ou d'inac-
tion ; les autres , lorsque l'insecte ne vole pas , ont des ailes dis-
posées de manière à former une sorte de fourreau ou de gaine
au corps, comme les lithosies et les teignes; enfin, chez, un
plus grand nombre, comme dans les pyrales , les alucites,
les cranibes et les noctuelles , les ailes i'orment , dans l'état
de repos, une sorte de toit sur le corps.
Le septième ordre de la clause comprend tous les insectes
qui, sous leur dernier état, n'ont que deux ailes meœbra.-.
496 < INS «
neuscs , et qui sont privés de mâchoires distinctes : ce sont
les DIPTÈRES. Ces insectes ont , pour bouche, un instrument
propre à la succion des liquides , qui offre trois principales
modifications dans sa structure. Quelquefois c'est une avance
cornée, qui fait toujours saillie au dehors, et qui sert de
gaine à des soies roides, mobiles les unes sur les autres. C'est
une sorte de pipette ou de chalumeau garni de petites lan-
cettes ; c'est un suçoir qu'on nomme en latin haustellum.
Quelquefois ce tuyau est charnu , protractile, rétractile , pou-
vant être alongé et rentrer dans une cavité particulière de la
tête . terminé le plus ordinairement par une partie plus large,
divisée en deux lèvres, et au centre de laquelle est un pore
absorbant, forrnant ainsi une sorte de petite ventouse; c'est
ce qu'on nomme une trompe , en latin proboscis. Enfin , cette
bouche offre une troisième modification : elle représente
une sorte de museau aplati, garni d'une trompe très-courte,
et peut-être d'un petit suçoir, avec des palpes ou des barbil-
lons articulés fort distincts.
Les métamorphoses varient un peu dans les difflérentes fa-
milles , et même dans quelques genres : la plupart pon-
dent des œufs. Les larves qui en proviennent, quoique de
formes et de mœurs très-variées , sont le plus souvent privées
de pattes et d'yeux, et celles-là se développent au milieu de
leur nourriture ou dans l'eau. Elles se meuvent souvent à la
manière des sangsues , c'est-à-dire , en s'accrochant avec la
bouche. La plupart des nymphes, à l'exception de celles des
cousins et de quelques tipules, sont toujours immobiles, el
leurs parties sont tantôt recouvertes par la peau de la larve
qui se dessèche, tantôt par une sorte de coque membraneuse,
arrondie, lisse, à la surface de laquelle on ne distingue au-
cune partie de l'insecte , comme dans les œufs des oiseaux.
Cette coque s'ouvre le plus souvent en travers, sans que les
deux parties de l'enveloppe se séparent entièrement, en lais-
sant un pont qui fait Toffice d'une charnière élastique.
Les deux ailes membraneuses des diptères offrent le plus
souvent en-dessous deux rudimens d'ailes inférieures recour-
bées sur elles-mêmes, en forme d'écaillés doubles ou simples,
qu'on nomme des cuillerons ; et en-dessous se voit presque
toujours un petit appendice plus ou moins alongé, et terminé
• ' INS • 497
à son extrémité libre par un petit bouton renflé : c'est ce
qu'on nomme les balanciers. Leur usage est encore ignoré.
Ils n'existent pas dans les cousins.
L'ordre des diptères ne comprend pas, comme le nom
pourroit porter à le croire , tous les insectes qui n'ont que
deux ailes ; il en réunit plusieurs qui , par leur organisa-
tion, leurs mœurs et leur analogie avec quelques espèces du
même ordre , doivent y être rapportés , quoiqu'ils n'aient
pas d'ailes du tout : tels sont les mélobosques et peut-être
quelques espèces du genre de la puce. Les insectes à deux
ailes seulement et qui ne sont cependant pas des diptères,
sont quelques coléoptères à élytres sans ailes membraneuses ;
et d'autres chez lesquels les élytres sont tellement courts
par rapport aux ailes toujours étendues, que les ailes supé-
rieures semblent leur manquer : tel est le molorque; tels sont
aussi quelques ripiphores. Plusieurs éphémères n'ont aussi
que deux ailes , quoique la plupart en aient quatre réticulées.
Quelques pucerons, les mâles des psylles, des kermès, des
cochenilles , qui sont , par la structure de leur bec , de vérita-
bles hémiptères, n'ont cependant réellement que deux ailes.
Nous avons donné, à l'article Diptères, de plus grands dé-
tails sur cet ordre; nous croyons devoir y renvoyer le lec-
teur, en lui présentant seulement ici l'analyse qui mène à la
distinction des cinq familles qui le composent.
! cornée, saillante j suçoir rond. . 5o. Sclérostomes.
en (museau plat. 54. Hydromjes.
charnue,enfon- J à poil latéral. 52. Chéioloxes.
cée ; antennes j sans poil isolé. 5 1. Aplochres.
luUe, remplacée par trois pores 53. Astomes.
A bouche
La famille des ScLÉaosTOMEs ou haustellés est caractérisée
par la présence du suçoir saillant, souvent coudé, qui est évi-
dent, même dans l'état de repos. Les espèces réunies par ce
caractère sucent presque toutes les animaux , sous l'état parfait;
mais leurs larves ont des manières de vivre lout-a-fait diffé-
rentes, et par conséquent ces larves et souvent leurs nym-
phes n'ont aucune analogie avec les insectes qu'ils produisent.
Les cousins, par exemple, ressemblent aux tipules de la
famille des hydromyes par leur forme générale et par celle des
23. 32
498 I INS
antennes ; mais ils diffèrent de tous les autres diptères par
la forme et par la mobilité dont est douée leur nymphe ,
qui a , sous ce rapport , plus d'analogie avec celle des phry-
ganes parmi les névroptères.
Les stomoxes , qui ont les habitudes des cousins , ressem-
blent beaucoup plus a des mouches.
Les mœurs des larves varient beaucoup. On en trouve dans
le sable, où elles dressent des embûches aux autres insectes;
dans la terre, dans le fumier, dans l'eau ; dans l'intérieur
des animaux, des végétaux.
Les moyens que Ton emploie pour diviser en genres les in-
sectes à deux ailes, sont tout-à-fait systématiques. 11 faut avouer
qu'on connoît encore très-peu ces insectes, et que leurs méta-
morphoses sont à peu près ignorées. Les uns, comme les hip-
pobosques, lesmélobosques, lesornithomyzes, ont les antennes
terminées par un poil isolé; leur tête est à peine distincte du
corselet; les crochets de leurs tarses sont souvent contournés
en tire-bourre, pour adhérer sur la peau des animaux. Leurs
larves, à ce qu'il paroît, se développent et subissent leurs mé-
tamorphoses dans le corps de lumière; d'autres, comme les
myopes , les rhingics , les stomoxes , portent sur l'un des côtés
de l'antenne qn poil roide isolé, qu'on ne retrouve pas dans
les autres genres, qui tantôt, comme les conops , ont les an-
tennes en fuseau, et tantôt en fer d'alêne, comme les bom-
byles, les taons, les chrysopsides , les empis.
La famille des Aplocères ou simplicicornes, c'est-à-dire
celle qui renferme les espèces à trompe charnue, rétractile,
et dont les antennes n'ont pas, comme celles du groupe sui-
vant, un poil isolé latéral , renferme des genres dont l'histoire
est encore peu connue. Elle réunit ceux que nous allons énu-
mérer , en renvoyant pour d'autres détails aux articles qui les
concernent, et principalement au mot Aplocères. Ce sont,
parmi ceux qui offrent un poil terminal aux antennes, les
rhagions, les bibions, les anthrax, les cyrtes et les hypoléous ;
et parmi les autres les stratyomes ou mouches armées, les
siques , les némotèles , qui ont l'abdomen ovale, aplati, et
les mydas et les céries, qui l'ont arrondi et alongé.
Les Chetoloxes oh latéralisètes , dont les mouches com-
munes pourroient être considérées comme les prototypes.
• • INS • 499
ont, comme le nom de la famille l'indique, un poil isolé sur
les antennes; ce poil est tantôt simple, tantôt comme plu-
meux ou barbu : les genres Cénogastre et Mouche sont dans
ce dernier cas. Les échinomyes et les tétanoccres ont l'article
intermédiaire des antennes plus long que les autres. Viennent
ensuite se ranger dans le même groupe les ceyx , qui ont
les pattes très - longues , le corps linéaire, la tête comme
portée sur un cou ; les dolychopes et les cosijiies , qui ont le
ventre courbé en-dessous; les mulions, qui ont les antennes
en fuseau , tandis qu'elles se terminent par une sorte de
palette dans les syrphes , les thérèves et les sarges.
La petite famille des Astomes ne comprend que le genre
des oestres, chez lesquels la bouche paroît être remplacée
par trois tubercules. L'insecte ne prend cette forme ailée
que j)our vaquer à l'œuvre de la génération, ou pour trans-
mettre sa race dans les lieux singuliers que la nature a des-
tinés à son développement, tels que les sinus frontaux des
ruminans , les intestins , les furoncles ou les ulcères sous-
cutanés que leurs larves déterminent dans les animaux.
Enfin, sous le nom d'HyoROMYEs ou de bec-mouches sont
réunies toutes les espèces dont le front se prolonge en une
sorte de bec ou de museau , sur lequel on distingue seulement
des bai'billons ou des palpes articulés. Leurs antennes, sou-
vent très-longues et en peigne , ont toujours un grand nombre
d'articles. La plupart proviennent de larves de formes parti-
culières, bien différentes de celles des autres diptères; car
les nymphes surtout laissent apercevoir au dehors les mem-
bres de l'insecte parfait, comme dans les lépidoptères : telles
sont les tipules, les cératoplates , les hirtées, et quelques
autres , comme les psychodes et les scathopses. Cette famille
semble former un ordre distinct parmi les insectes; mais on
n'en connoit encore les mœurs que très-imparfaitement.
Le huitième et dernier ordre de la classe des insectes a,
comme nous l'avons déjà annoncé , bien moins de caractères
positifs que ceux que nous avons étudiés jusqu'ici.
C'est une division tout -à- fait arbitraire et systématique,
comprenant plusieurs groupes d'insectes qui n'ont entre eux
aucun rapport d'organisation ni de mœurs; ils sont privés
d'ailes, et cependant, sous cette forme, ils peuvent repro-
6oo ' INS ' '
duire leur race. Voilà le seul caractère, qui est, comme on
pourroit le dire, négatif, puisqu'il consiste en un défaut ou
une privation de parties : on les désigne sous le nom d' AP-
TÈRES. Dans le second volume de ce Dictionnaire nous
avons fait connoître quels sont les insectes des différens ordres
qui, quoique privés d'ailes, ne sont pas rangés parmi les
aptères : il a fallu, pour cela, comparer ces insectes, et em-
ployer ce qu'on peut appeler la méthode d'exclusion, n'ayant
pas d'autres moyens d'exprimer les caractères des ordres.
Nous renvoyons à cet article, qu'il faudroit reproduire ici
en entier. Nous en empruntons cependant le tableau suivant,
qui indique les six familles naturelles de cet ordre.
i,. . , j tous les anneaux. . 5q. Myriapodes.
peu distinct : pattes a < /. „ , ,
( quelques anneaux. 60. Polygnathes.
,. . ( nulles: 8 pattes 58. Aceres.
très -distinct;» ,. . , .,
{ distinctes; Ipoilu 57. I\ematouies.
antennes , 'T . / .
\ a anus [sans poils.... .>d. hicins.
Pas de niâclioircs: un bec ou un suçoir 55. Rhinapleres.
Parmi les Rhinaptères ou parasites on range les aptères qui
n'ont pas de mâchoires, mais un suçoir; leur tête est mobile
ou distincte du reste du corps: tels sont les poux, les cirons
et les puces.
La petite famille suivante comprend seulement les ricins
ou les poux des oiseaux , qui ont de petites mandibules pour
s'accrocher aux plumes : on les a appelés Avislges ou Orni-
THOMYZONS.
Les Nématoures ou séticaudes comprennent trois petits
genres qui ont beaucoup d'analogie avec les blattes, insectes
orthoptères, et avec quelques névroptères , par la forme
des antennes, de la bouche, des pattes et par les tuyaux qui
souvent terminent l'abdomen : tels sont les genres Forbicine,
Lépisme et Podure , qui sont nocturnes et se nourrissent de
débris de végétaux.
Les Aranéides ou les acères sont tellement différens des
autres insectes, que quelques auteurs, dans ces derniers
temps, en ont fait une classe à part. Ils diffèrent, en effet,
des insectes , d'abord , parce qu'ils n'ont pas de tête distincte
et surtout pas d'antennes , parce que le corselet et la tête
sont réunis , parce que la plupart ont huit pattes ; ils n'ont pas
• INS • Soi
d'yeux à réseaux simples , mais comme huit yeux lisses ou
stemmates : il y aune sorte de sac pulmonaire distinct, avec
très- peu de stigmates ou d'orifices extérieurs. Ils pondent
plusieurs fois pendant leur vie. Tous se nourrissent d'ani-
maux qu'ils blessent h mort et qu'ils sucent ou dévorent
ensuite. C'est une famille très- nombreuse , q»ii se subdivise
en genres et sous -genres, d'abord d'après la forme des
mandibules , qui se terminent tantôt par un simple crochet
acéré , mobile , comme les araignées , les mygales , les trom-
bidies; ensuite, en espèces dont les mandibules forment la
pince, et dont l'abdomen est accolé au corselet sans pédicule
distinct: tels sont les scorpions, caractérisés en outre par les
anneaux postérieurs de l'abdomen , qui sont articulés en forme
de queue terminée par un aiguillon ou crochet venimeux ;
tels sont encore les phrynes, les galéodes et les faucheurs.
Les Myriapodes ou millepieds ont des paires de pattes à
presque tous les anneaux : ils ont quelques analogies d'une
part avec les crustacés, et de l'autre avec les annelides; ils
n'ont pas de corselet distinct, et leur tête ne porte que deux
antennes. Les scolopendres et les scutigères n'ont qu'une
seule paire de pattes à chaque segment de leur tronc , tandis
que les jules, les polyxènes , les glomérides et les polydesraes
en ont deux à chaque anneau.
Enfin, les Polygnathes ou quadricornes , comme les clo-
portes, les armadilles et les physodes, qui ont quatre an-
tennes, semblent faire le passage évident à la classe des
crustacés; car la plupart portent les œufs sous les derniers
anneaux du corps : ces œufs y éclosent, et les petits y restent
quelque temps vivans. Ils respirent par des trachées. Voilà en
quoi ils diffèrent de certains crustacés, comme les crevettes.
Nous venons d'exposer la méthode de classification que
nous avons adoptée pour ce Dictionnaire. Nous croyons de-
voir répéter que nous n'avons pu qu'énoncer les faits, qu'on
trouvera développés avec beaucoup plus de détails sous cha-
cun des noms principaux. Nous allons seulement ajouter ici
la liste des familles dans l'ordre que nous avons suivi, afin
d'en présenter l'ensemble , et pour qu'elle puisse servir de
guide dans l'arrangement méihodique des planches qui repré-
sentent tous les genres d'insectes dans l'Atlas. Nous indique-
6o2
INS
rons aussi celles des livraisons qui ont paru jusques et com-
pris la vingt-troisième. Par la suite, quand nous aurons oc-
casion de citer une planche , nous l'indiquerons sous le
numéro qui sera gravé au bas.
I." Ordre. COLÉOPTÈRES.
Premier Sous-ordre. PENTAMÉR ES.
i.''^ Famille. Créophages ; 3.* livraison, deux planches,
n."' 12 et i3.
2.^ — Nectopodes ; 4.* livraison, n." 11.
3." — Brachélytres ; idem, id.
4.* — Pétalocères ; 4." livraison , n.° 10.
5.* — Priocères; 8." livraison, n.°' 9 et 10,
6.* — Hblocéres ; idem , idem.
7.® — Stéréockres; iG.*" livraison, n." 10.
8." — Sternoxes; 1 1 .*" livraison , n.° 10.
g.^ — Térédyles; idem, id.
10.* — Apalytres; 1 .'"livraison , n," 9.
Second Sous-ordre. HÉTÉROMÉRÉS.
11.* Famille. Épispastiques ; 8.*^ livraison, n.° 12.
12." — Sténoftères ; 1 5.^ livraison , n.° i3.
i3.* — Ornéphiles ; idem, i).° 11.
14.^ — Lygophiles, idem, n." 10.
i5.* — PhoïOphyges, idem, n.° 12.
16." — Mycétobies; 18.* livraison, n." 11.
Troisième Sous- ordre. TÉTRAMÉR ES.
17.* Famille. Rhinocères; 16.* livraison, n.° 9.
18.* — Cylindroïdes ; 1 1 ."^ livraison , n.° 9.
19." — Omaloïdes; 16.* livraison, n.° 10.
20.* — Xylophages ; 8." livraison , n.° 11.
21.* — Phytophages; 17.*^ livraison , n.°' 9 et 10.
Les genres anomaux Spondyle et Cucuje,
11.^ livraison, n.° 9.
Quatrième Sous-ordre. TRIMÉRÉS.
22.' et 23." Familles. Tridactyles et Dxmbrés.
INS • 5o5
IL* Ordre. O
RTHOPTÈRES.
24/
Famille.
Labidoures
; 1." livraison, n." 12.
25."
—
Blattes ;
idem , id.
26/
—
AnOiMIPES ;
idem , id.
27.^
—
Grylloïdes ;
i3.* livraison, n."' i3 et 14.
III." Ordre. NÉVROPTÈRES.
28.* Famille. Stégoftères ; i5." livraison, n." 12 , et 14.'
livraison , n." 11.
29.^ — Odonates ; iJ^ livraison, n." 11.
00. ° — Agnathes; idem, id.
IV." Ordre. HYMÉNOPTÈRES.
3 1 ." Famille. Mellites.
32." — Ptérodiples ; 1.'" livraison, n." 10.
53." — Chrysides ; idem, id.
34.* — Anthophiles; idem, id.
35." — Entomotilles ; 9." livraison , n." 9.
36." — Myrméges; idem, id.
37." — Oryctères.
38." — Néottocryptes.
39." — Uropristes.
V." Ordre. HÉMIPTÈRES.
40." Famille. Rhinostomes ; 1 1." livraison, n.° 1 1.
41." — Zoadelges ; 11." livraison , n.° 12.
42." — Hydrocorées; • idem, id.
43." — AucHÉNORiNQUEs ; 1 .'" livpaison , n.° 9.
44." — Phytadelges.
45." ■ — Physapodes ; 1 1." livraison , n." 1 1.
VI." Ordre. LÉPIDOPTÈRES.
46." Famille. Ropalocères; 9." livraison, n.° 10.
47." — Clostérocères ; 8." livraison , n.° i 3.
48." — Nbmatocères; 6." livraison , n.°* 10 et 11.
49." — Chétocères ; 8." livraison, n.° i3, el 9." li-
vraison, n.° 1 1.
INS
VII." Ordre. DIPTÈRES.
50."
Famille.
SCLÉROSTOMES.
.51."
—
Aploceres; 2." livraison, n.° 8.
52.'-
—
CnÉToroxEs.
55.'
—
ASTOMES.
54.-=
—
Hydromyes.
VIII.*=
ET DERNIER OrDRE. APTÈRES.
55."
Famille.
Rhinaptères ; 18." livraison, n.° 10.
56."
—
Ornithomyzons.
67."
—
Nématoures.
58."
—
Aceres; 2." livraison, n.°' 10 et 11.
69."
—
Myriapodes; 22." livraison, n.°' 9 et
60."
—
Polygnathes ; idem, n.° 10.
Après avoir fait connoître successivement, dans les pages
qui précèdent, 1.° la conformation des insectes, en donnant
une description générale des parties dont leur corps se com-
pose ; 2.° l'organisation intérieure, ou l'exposé des fonctions
que ces animaux remplissent; 5.° l'arrangement méthodique
ou la classification particulière que nous avons employée pour
les faire connoître, il nous reste à traiter, comme nous
l'avons indiqué au commencement de cet article, de l'his-
toire de la science eutomologique , en indiquant les auteurs
principaux qui ont écrit sur les insectes ; mais, en donnant
les titres de leurs ouvrages, nous en présenterons une courte
analyse.
Ce sujet a été l'objet de plusieurs traités particuliers, dont
nous profiterons. Cependant il sera facile de voir que nous
sommes loin de les avoir copiés. Les principaux sont Brunnich
(1764); Fabricius, dans le premier livre de sa Philosophie
eutomologique (1778), intitulé Bibliothèque; les auteurs
de l'Encyclopédie méthodique (1789); une dissertation inau-
gurale de M. Gravenhorst (]8oi ) , publiée en latin, à Helm-
sta^dt, dans laquelle l'auteur a voulu donner principalement
un abrégé des systèmes d'entomologie ; enfin, un opuscule
de M, Charles Nodier, qui a pour titre Bibliographie euto-
mologique , ou Catalogue raisonné des ouvrages relatifs aux
insectes (an IX).
• INS • 5o5
Voici d'abord la liste chronologique de cinquante -six des
auteurs principaux : c'est dans cet ordre que nous allons
successivement les faire connoître.
1. Gesner , i54i.
2. Aldrovande , 160;
3. Hoefnagel, i65o.
4. Mouffet, 1654.
5. Rédi, 1646.
6. Goedaert, 1662.
7. Malpighi , 1669.
8. Swammerdani ,
g. làster, 1678.
10. Mérian, 167g.
11. Leuvvenhœck,
1675.
695.
1700.
12. Vallisnieri
i5. Rai, 1708.
14. Albin , 1751.
i5. Réaumur, 1734.
16. Seba, 1754.
xj. Linnaeus, i735.
18. Frisch, 1758.
ig. Edwards, 1743.
20. Rœsel , 1744.
Bonnet, 1745.
L'Admirai, 1746.
Degéer, 1752.
Clerk, 1767.
Lyonnet, 1760.
26. Scopoli , 1763.
27. Geoffroy, 1762.
28. Schaeffer, 1764.
2g. Bruniiich , 1764.
3o. Pallas, 17G6.
3i. Schluga , 1767,
32. Drury , 1768.
33. Ernst , 176g.
34. Cramer, 1775.
35. Fabricius, 1775.
36. Esper, 1777.
37. Stoll, 1780.
38. Schrank, 1781.
3g. Laicharting, 1781.
40. Thunberg, 1784*
41. Olivier, 178g.
42. Latreille, i7g6.
43. Panzer, 1796.
44. Clairville, i7g8.
45. Cuvier, 1798.
46. Herbst , i7g9.
47. llliger, 1801.
48. Duméril, 1801.
4g. Faykull , 1800 et 1811.
50. Meigen , 1804.
51. Kirby, 1802.
52. Jurine , 1807.
53. Huber, 1808.
64. Schœnherr, 1806, 1808
et 1817.
55. Gyllenthal, 1808, 1810
et i8i3.
56. Duftschmid, i8o5, 1812.
Voici une autre liste des auteurs, que nous avons disposée
de manière à donner une idée générale de la nature de leurs
ouvrages.
Ceux qu'il est utile d'étudier comme observateurs des mœurs
et de l'histoire des insectes en général , sont les suivans :
Sw^ammerdam , Goedaert, Réaumur, Rœsel, Degéer,
Bonnet, Huber.
6o6 ' INS '
Parmi les anafomisies , nous citerons Leuwenhœck , Swam-
mcrdam, Vallisnicri, Lyonnet, Cuvier, Marcel de Serres.
Les auteurs que nous considérerons comme systématiques
et descripteurs, sont:
Linnœus, Degéer, Fabricius, Latreille.
Puis ceux qui n'ont décrit que les insectes d'un pays, ou
topographes : comme
Geoffroy, Fourcroy et Walckenaer , ceux des enviro de
Paris.
Frisch et Panzer, ceux de rAUemagne.
Thunberg, Paykull et Gyllenthal , ceux de la Suéde.
llliger et Kugelan , ceux de la Prusse.
Schranck, ceux des environs de Vienne en Autriche.
Scopoli , ceux de la Carniole.
Laicharting, ceux du Tyrol.
Rossi , ceux de l'Etrurie.
Spinola, ceux de la Ligurie.
Cyrillo, ceux de Naples.
Voët, ceux de la Belgique.
Nous citerons ensuite ceux des auteurs qui ont décrit, soit
les insectes d'un ordre entier, soit seulement les espèces d'un
seul genre , ou les mono graphes.
Ainsi, pour les coléoptères-. Olivier, llliger, Herbst.
Pour les escarbots , Paykull ; les charansons , Clairville ; les
niéloës, Leach ; les staphylins, Gravenhorst.
Pour les orthoptères, Stoll.
Pour les hémiptères: Fallen , Schellenberg ; Stol , pour
les cigales ; Wolff , pour les punaises.
Pour les hyménoptères, Jurine ; pour les abeilles , Kirby ;
pour les guêpes, Réaumur ; pour les uropristes , Klug ;
pour les fourmis , Huber, Latreille.
Pour les névroptères , Swammerdam ; Degéer, sur les
éphémères; Smeathan, sur les termites.
Pour les lépidoptères ; Esper , Cramer, Hubner , Ernst ,
Sepp , Hoefnagel.
Pour les diptères : Meigen, Schellenberg, Fallen.
Pour les aptères : Clerck , Walckenaër.
• INS • 5o7
1. CoKRAB Cesser , Jont les ouvrages nombreux sont consacres à
l'histoire générale des animaux , navoit pas publié lui-même ses obser-
valious, ni surtout ses recherches historiques sur les insectes , puisqu'il
est mort en i558, et que le livre 5 , où il est question <lu scorpion
et de quelques autres insectes , n'a été publié par Wolpf que de i5oo
à \[^(i-j. MoufTet avoue cependant qu'il a eu connoissance des manuscrits
de Gesner, qui avoient été achetés par Canierarius , puis envoyés à
Thomas Penn, à Londres, lequel les communiqua à Thomas Mouffel.
C'est sous le rapport de l'érudition que l'ouvr.ige de Gesner mérite
l'attention des naturalistes.
2. Ulysse Aldrovaindi n'est aussi qu'un érudit et un compilateur
instruit. Son traité des insectes^ de animalibus inseclis lihri sepleiii ,
a eu deux éditions in-folio : la première , avec des gravures en bois ,
à Bologne, 1602; et la seconde, à Francfort, 1618, avec des gra-
vures sur cuivre. On 3' trouve un premier arrangement systématique.
Les insectes y sont divisés en deux classes, les terrestres et les aqua-
tiques, avec des ordres tirés de la présence , du nombre et de la dis-
position des pattes et des ailes ; mais ces ordres sont si arbitraires,
que dans le premier, par exemple, il range les insectes qui font des
rayons d'alvéoles et du miel (favijîca) , et dans un autre tous ceux qui
n'en font pas.
3. J. HoEFNAGEL éloil Un peintre observateur, qui a laissé des figures
très-exactes d'un grand nombre d'insectes : elles ont été gravées à An-
vers, en i63o et 1646, sous le titre suivant: Diversœ inseciorum vola-
t'tUum icônes ad vivum depictœ. C'est son ouvrage principal , et il
n'offre d'intérêt que par les figures.
4. Thomas Mot;FFET a publié l'un des premiers ouvrages consacrés
spécialement à l'histoire des insectes; il a pour titre : Inseciorum sive
minimorum animalium theatrum , etc. Il a élé publié à Londres, en
i63.j , en petit in-folio de 326 pages, avec des figures en bois. C'est
encore un ouvrage érudit, dans le genre de ceux de Gesner, dont il
a beaucoup profité, puisqu'il paroit avoir eu connoissance des manus-
crits laissés par ce savant, que Boerhaave appeloit un prodige d'érudi-
tion (monstrum eruditionis).
5. Francesco RÉd! , savant observateur ; qui a surtout éclairé l'histoire
de la génération des insectes, qu'on regardoit comme le produit de
la corruption. Il a publié ses observations d'abord, en italien, à Flo-
rence , en 1668; mais il en a paru une traduction eu latin à Amsterdam ,
en 1671 : Expérimenta circa generationem inseciorum, sous format
în-12^ avec quelques planches en cuivre.
6. Jean Goedaert avoit publié d'abord en hollandois un ouvrage
sur la métamorphose des insectes, qui a été ensuite traduit en latin
et publié sous ce titre : Metamorphosis et historia naturalis inseciorum ,
cum commentariis et appendicihus Joli, de M:'y et F Ferzaerdt , 3 vol.
in-8.°, depuis 1662 jusqu'en 1667, avec figures. Cet ouvrage a été traduit
en françois, et Lister, comme nous le verrons sous le nom de cet au-
teur, en a publié une édition latine d'après une méthode particulière.
Il y a beaucoup de faits dans l'ouvrage de Goedaert. Malheureusement
on croyoit alors à la naissance spontanée. Cependant quelques obser-
vations sont bien faites, et les figures assez exactes pour que beaucoup
d'iusectes y soient reconnus.
5o8 ♦ IjyS ♦
7. Marcellus Malpighi a donné un des meilleurs traités d'anatomie
sur les insectes, à l'occasion de ses recherches sur la structure du ver
à soie, d'nbord dans une lettre laline, Dissertatio de bombjce, impri-
mée à Londres, en 1669. C'est un petit volume de 100 pages in - ^.^
avec douze planches ; mais celle dissertation a été réimprimée dans
les OEuvres complètes de l'auteur, en 1686.
8. Jean Swammerdatvi a publié en hollandois, d'abord en }Ci6o, une
histoire générale des insectes , qui a été traduite successivement en
françois et en latin : ce sont de petits volumes in-4.", avec i3 planches
qui sont les mêmes dans les trois éditions, dont la dernière, de Lryde,
est de i685. Mais le grand ouvrage de cet auteur est sa Bible de la
nature, en deux volumes in-folio, avec 53 planches supérieurement
gravées sur cuivre, publiée en 17S7 et 17.Î8, à Leyde, sous ce titre:
Biblia naliirœ , seu historia insectormn , helgice , cum versione latina H-
D. Gauhii , et vita auctoris per Herin. Boerhaave. Les travaux de
Swammerdam ont été une époque reniarqu;ible pour la science. Cet
auteur a découvert les principaux modes de la transformation ou de la
métamorphose, et par conséquent il a donné la base de la meilleure
classification pour les ordres. Parmi les insectes sans métamorphose et
qui ne changent que de peau , en conservant pendant toute leur vie la
forme qu'ils avoient en sortant de l'œuf, il raAge les araignées, la
tique, le pou, le cloporte, le scolopendre, etc.; il donne en particu-
lier l'histoire très -détaillée de la structure et de l'organisation des
pous. Au second ordre, qui comprend les insectes agiles, sous les trois
états de larve, de nymphe et de perfection, mais qui, sous le second,
ont des rudimens d'ailes, il rapporte ceux qu'on a nommés depuis
iiévroptères, orthoptères et hémiptères ; c'est là que se trouvent décrites
rhistoire de la demoiselle, celle de la nèpe ou scorpion aquatique,
de l'éphémère. Au troisième ordre, dans lequel les nymphes, quoique
munies de parties distinctes, ne sont plus susceptibles de mouvement
prononcé, Swammerdam rapporte d'abord les insectes nommés depuis
hyménoptères et coléoptères ; il donne pour exemple l'organisation et
l'histoire de la fourmi, de l'abeille et du scarabée nasicorne , et même
celle du cousin ( quoique cet insecte forme , pour ainsi dire , un ordre
à part, puisque sa nymphe est agile). C'est à ce même ordre troisième
que l'auteur rapporte encore les insectes à chrysalide emmaiilottée ; il
décrit très en détail, à cette occasion, l'organisation et içs métamor-
phoses des papillons dits la petite tortue, et de celui du chou. Enfin,
dans son quatrième ordre sont rangés les insectes à chrysalide obtectée
ou semblable à un œuf; il y rapporte les diptères : il y donne l'histoire
d'un stratyome ou de la mouche armée de GcolVroy, celle de la mouche
du fromage. L'ouvrage dont nous venons de présenter une bien courte
analyse, est un des plus importans pour l'étude de l'organisation des
insectes; il contient en outre beaucoup de faits curieux pour l'histoire
naturelle en général et pour l'anatomic des animaux.
9. Martin Lister. Cet Anglois, eu donnant une édition de Gocdaert,
en i685 , a présenté une sorte de méthode de classification, qu'il a
perfectionnée ensuite dans l'ouvrage de John Kai, qu'il a publié eu
1710. Ses divisions sont tirées de la forme des œufs et de la méta-
morphose; ensuite de la présence ou du défaut des pattes, des élytres
et des ailes. Mais cette méthode, comme on va le voir, est l'enfance
de l'art. Les insectes sont ou sans métamorphoses, intransmutahilia , ou
• • INS • 5o9
ils subissent des transformations , transmutahilia. Ceus-cî se subdivisent
en vaginipennia (les coléoptères), papiliones (les lépidoptères), quadri-
pennia f hyménoptères et névroptères ) et hipennia (les diptères) : vien-
nent ensuite d'autres subdivisions, d'après les Inrves, la forme, la cou-
leur, les proportions des parties du corps, ou d'autres particularités de
conformation.
10. Méri AN (Mademoiselle Marie-Sibylle de) a composé plusieurs ou-
vrages en hollandois sur l'bistoire des insectes. Ses œuvres ont ensuite
été traduites en latin et en françois, le plus souvent avec les mêmes
planches, de 1679 à 1730. L'histoire des insectes d'Europe, publiée in-
folio, à Amsterdam, se compose de 184 planches enluminées. La dis-
sertation ayant pour titre , Erucarum oitus , alimentum et paradera me-
tamorphosis , publiée à Amsterdam, en 1718, comprend 5o planches. Il
y a encore plusieurs autres ouvrages, entre autres celui qui a pour titre,
Metamorphosis insectorum Surînamensium , qui a paru en 1705. Tous
ces ouvrages sont principalement recherchés des amateurs ou des biblio-
mi'nes pour la beauté des planches, et surtout pour leur rareté, ayant
été tirés à un très -petit nombre d'exemplaires.
11. Aktoike de LErwEsnoECK a principalement étudié les insectes ou
leurs parties à l'aide du microscope. L'ouvrage dans lequel il a con-
signé ses observations, formant cinq petits volumes in-4.", est intitulé:
Ricana natunv , ope micioscopiorum détecta; Delphis , itigS à 1721.
Les trois derniers sont imprimés à Amsterdam. Toutes les observations
sont sous forme de lettres écrites de manière à inspirer beaucoup
d'intérêt, quoique un peu longues, comme cela arrive à toutes les per-
sonnes qui font des observations minutieuses, et qui croient devoir
en publier les procès- verbaux. Cet ouvrage est cependant plein de
faits sur les larves des tenthrèdes, sur les galles des végétaux produits
par diverses espèces d'insectes très-bien décrites; sur les fourmis, les
abeilles, les cousins. On y trouve une description du pou, très-curieuse,
même après celle de Swammerdam; l'histoire de la mouche commune,
de la puce, etc. Mais les objets sont décrits presque au hasard, suivant
les occasions qui se sont ofl'ertes. Il n'y a pas d'ordre dans l'ouvrage,
ce qui en rend la lecture fort pénible.
12. Aktokio Valliskieri a écrit tous ses ouvrages en italien. Le pre-
mier , qui a pour titre , Dialoghi sopià la curiosa origine , sviluppi
e coslumi di varii insetti, a été publié à Venise en 1700; mais toutes
ses recherches sont recueillies dans ses OEuvres, qui forment trois
volumes petit in-folio , avec beaucoup de planches fort bien gravées.
Les insectes les plus curieux, ou ceux qui y sont le mieux décrits et
pour la première fois, sont les suivans : le fourmilion, l'ichneumon,
la guêpe menuisière ou xylocope, l'œstre hémorrhoïdal , le nasal, le
criocère louge du lis, la mouche à scie ouhylotome du rosier, la puce,
le kermès, le charanson du blé ou la calandre. En général, cet ou-
vrage joint à beaucoup d'érudition un art admirable dans la manière
d'observer.
i3. John Rai n'a pas publié lui-même ses ouvrages, étant mort trois
ans avant que Lister en eût donné une édition, en 1710, sous le titre
d'Hisioria insectorum , in-4.° Cependant il avoit publié, en 1706, une
petite feuille in-8.°, qui a été réimprimée comme le prolégomène de
l'ouvrage ci - dessus mis au jour par Lister. Cette brochure in-ô." avoit
pour titre, Methodus imeçtorum, seu inseeta in methodum aliijualem
digesla. C'est le premier ouvrage mélhodic^e sur l'entomologie, comnu
pour tou"; les animaux dits vertébrés. Nous l'avcas fait connoître à
l'article de Lister.
14. Eléazar Albiji-, peintre anglois, a publié son ouvrage sous le
titre d'Histoire naturelle des insectes d'Angleterre, A nalut al Historv
of english insects , with notes and observations hy JT. Derham. Cet
ouvrage n'est estimé que pour les figures coloriées, qui sont au nombre
de 100 planches, et fort exactes.
i5. RÉAUMUR (René-Antoine Feicbault de) a écrit l'un des ouvrages
les plus importans pour les observateurs de la nature; il est composé
de six volumes in-^.", qui ont paru de 1734 à 1740, sous le titre de
Mémoires pour servir à 1 histoire des insectes. L'auteur s'y est acquis
tine gloire immortelle pour l'art et la patience avec lesquels il a scruté
les mœurs de ces animaux, afan de les dévoiler à ses lecteurs. Des
planches fort exactes accompagnent ses descriptions. Il est à regretter
que la méthode n'ait pas présidé à l'arrangement des faits et des détails,
<[u'il est fort pénible de chercher dans un ouv: agc d'aussi longue haleine.
11 paroît que son travail devoit être continué. On assure même que
le manuscrit du septième volume, prêt à être livré à la presse, ne l'a
jamais été. Il nous est impossible de présenter une analyse de cet ou-
vrage immense, qui comprend 3672 pages, et qui est orné de 267
planches in-^." doublées. Nous en avons profité dans la plupart des ai-li-
clcs de ce Dictionnaire, et nous le citons fort souvent.
16. Albert Seba, apothicaire à Amslerdanï, avoit recueilli beaucoup
d'insectes , qu'il avoit achetés pour en orner son cabinet, dont il a donné
la description en quatre volumes in-folio, avec figures. La plupart des
espèces figurées sont étrangères; mais il y en a beaucoup qui sont citées
par les auteurs comme prototypes, quoiqu'en général les dessins soient
grossiers, et les couleurs presque constamment fausses et mal distri-
buées, même d'après la description qui accompagne les planches. Les
quatre-vingt-dix-neuf planehes du tome troisième, en particulier, sont
entièrement consacrées à la représentation des insectes, la plupart
d'Amérique, de Surinam et de Ceilan.
17. Charles LmuiECS, Suédois, professeur à Ups l , fondateur des
méthodes et de la nomenclature dans toutes les parties de l histoire
naturelle, principalement en botanique et en zoologie. Ce n'est pas à
nous déjuger ici cet homme célèbre, dont le nom se rattache d'une
manière si éclatante à toutes les branches de la science; nous indique-
rons seulement le mérite principal deLinnaeus, qui est dans la méthode,
les considérations générales , et dans le mode uniforme du développe-
ment des caractères et de la description. Ses ouvrages, qui ont paru de
17.^:'; à 1770, ont subi dans chaque édition de grands ch>:ugemens, et
par conséquent ils ont offert des améliorations et des perfeutiounouens
successifs. Ainsi, dans les premières éditions du Systema naturœ , dont
Lyonnet a fait une critique judicieuse dans les notes qu'il a ajoutées
1 la Théologie des insectes de Lesser ( livre i.^"^, chapitre 3), on voit
que Linnœus divisoit les insectes en sept classes générales: 1.° les
espèces à élytres ou ailes couvertes, comme les scarabées ; 2." celles qui
ont les ailes découvertes, comme les papillons, les demoiselles, les
guêpes, les mouches; 3.° celles qu'il nommoit demi -ailées, qui n'ont
pas toutes des ailes, ou qui les portent sans étuis, comme les saute-
, • INS • 5ii
relies^ les fourmis, les punaises, le scorpion aquatique} 4." les non-
ailées, comme le cloporte, les millepieds, le pou, la puce, etc. Les
trois .iutres classes couiprenoient tous les autres animaux sans vertèbres,
que Fauteur regardait alors comme des insectes; savoir: la 5/, les
vers de terre lombrics, les tœiiias , les sangsues ; la 6.", les animaux
mollusques à coquilles terres'res et aquatiques; la 7.", enfn, les zoo-
phytes , corn i.e les oursins, les astéries, orties de mer ou méduses,
etc. Mais par la suite , et surtout dans la t 2.' édition , qu'il publia lui-
même, en 17S8, il réfiirma ce -premier arrangement, et nous retrou-
vons sa classidcation en sept ordres, d'après les ailes, et sous les déno-
minations que niius employons encore , en y intercalant un second
ordre, celui des orthoptères. Charles de Villers a publié à Lyon, ea
4 volumes in-Ô." et en latin, une entomologie d'Europe, d'après la mé-
thode Lintiéeiine.
18. Jeam - LÉONARD Frisch a publié, de 1730 a 1766, une descriptioa
des insectes d'Alltniagne, qui forme treize cahiers iii-4.", avec trente-
huit planches, souvent citée-^ par les auteurs. Le texte est allemand :
Beschreihung von allerlej Insekten in Deutschland.
19. George Edwards, peintre anglois , a donné de très-bonnes
figures en couleur de beaucoup d insectes étrangers et européens,
dans les sept volumes in--,." qu'il a j-ubliés, soit avec ses Oiseaux rares,
soit dans ses Glanures d histoire naturelle.
20. AuGtJsTE - Jean Roesel de Rosenhof, observateur exact et peintre
habile, de Nuremberg, qui, outre son admirable ouvrage sur les rep-
tiles baraciens, en a publié un en quatre volumes in-4.'', dont le texte
est allemand (Die monatlich herausgegebene Insecten - Delitstigung) :
Auiusemens sur les insectes, de 17.^6 à i7r>i. Les planches sont au
nombre de plus de cent dans chaque volume, parfaitement exécutées et
coloriées. L'auteur entre dans beaucoup de détails sur les métamorphoses,
les mœurs, la structure. Cet ouvrage a été continué par Klecnian ,
gendre de Rœsel. On ne connoi't pas encore complètement en France
les faits que les planches indiquent, parce que ce livre n'a pas étu
traduit.
21. Chaules Bowsit, Genevois. A vingt ans, en 17.-10, il piil)lia son
beau Mémoire sur les pucerons, et beaucoup d'autres observations sur
les insectes, qui sont en grande partie réunies dans son Traité d'insec-
tologie ; Paris, 2 vol. in-12, avec 3 planches. Toutes ses recherches
sont en outre consignées dans ses Œuvres, 9 vol. in-4.", avec lig.,1779.
C'est un des meilleurs observateurs.
22. Jacob L'Admiral a publié, en 1740, un ouvrage, en hollandois ,
sur les papillons, sous format in-folio. Il y a vingt-cinq planches co-
loriées qui sont fort estimées.
2^. Le Baron Charles De Géer, Suédois, peut être considéré comme
l'un des principaux entomologistes. Ses ouvrages sont en même temps
très - méthodiques et reiuilis d'observations. Quoique imprimés à
Stockholm, ils sont écrits en françois et forment huit volumes in-4.°,
avec 226 planches. Ils portent le titre de Mémoires pour servir à.
i'htStoire des insectes. Ils ont paru de 17^2 à 1778. Le second volume
n'a été publié qu'en 1771 : c'est une particularité remarquable par le
fait que voici. L'auteur, n'ayant pas placé , comme il l'espéroit , le
premier volume^ prit le parti U eavoyer eu présent tous les volumes
5i2 ' ,INS
suivans à ceux qui avoienl fait acheter le premier, et il ne fit tirer
les sept derniers volumes qu'à un très -petit nombre d'exemplaires.
Les mémoires de De},«éer ont beaucoup d analogie avec ceux de Rcau-
mur; mais ils sont rédigés avec beaucoup plus de méthode, surtout les
cinq derniers volumes. On trouve dans le premier seize mémoires sur
les chenilles, et un dix -septième sur les ennemis des chenilles et
en particulier sur les ichneumons , dont il présente une très-bonne
di ision. Le second volume, divisé en deux parties, est consacré d'abord
à l'histoire des insectes à quatre ailes nues : il est précédé de plusieurs
discours généraux sur la demeure, la nourriture, la i;éncration , la
transformation des insectes; la classe des iiisectes à ailes farineuses ;
celle des insectes à ailes membraneuses , à bouche sans dents ni trompe,
qu'il distingue de ceux qui, ayant aussi des ailes membraneuses, ont
des dents avec ou sans aiguillon ou tarière. Dans le tome III se
trouvent l'histoire et la description des insectes à quatre ailes, tantôt
tout-à-fait membraneuses, tantôt à demi coriacées, et à bec ou à suçoir;
enfin, celle des insectes qui correspondent aux orthoptères. Les tomes
IV et V comprennent l'histoire des coléoptères rangés suivant le
nombre des articles aux tarses. 11 faut reconnoitre ici que ces volumes
ont paru en 1774 et 1 775 , c'est-à-dire , douze ans après l'ouvrage de
Geoffroy, auquel on doit l'observation de l'excellent caractère tiré du
nombre des articles aux tarses. Le tome Vl est consacré à l'histoire
des diptères et des kermès, qui forment la 9.' et la 10.^ classe. Enfin,
dans le VU." volume se trouve l'histoire des aptères. Degéer a donné
les meilleures bases de la classification des insectes. Il les a prises
dans toutes les parties apparentes des insectes. Nous allons en présenter
ici un court aperçu, que nous emprunterons à l'extrait qu'en a donné
Retzius en un petit volume in-8.", Leipsic, 1783, sous le titre de
Gênera et species insectorum.
Degéer a rapporté les 1446 insectes qu'il connoissoit, à 100 genres,
qui correspondent à quatorze sous-ordres et à deux sous -classes princi-
pales , les insectes ailés et les aptères.
Les insectes ailés ont ou quatre ailes nues ( Gymkoptera) , ou deux
ailes sous des étuis (Vaginat* ) , ou deux ailes seulement ( Diptera).
Les Gymkoptères forment cinq sous-ordres: Les lépidoptères , qui
ont quatre ailes farineuses et une langue en spirale; ce sont les genres
Papillon, Sphinx , Adscite, Plérophore, 1 haléne. hesaglosses {elmguia),
qui ont quatre ailes nues, ni bec, ni dents; telles que les pl.rvganes,
les éphémères. Les névropteres , qui ont quatre ailes nues, égales entre
elles, en réseau, la bouche dentée : comme les libelles, hémérobes,
fourmilions, perles, panorpes , raphidies. Les hyménoptères qui ont
quatre ailes nues, inégales, avec des nervures longitudinales, la bouche
dentée ; l'anus le plus souvent aiguillonné : comme les abeilles, les no-
mades,'guêpes , sphèges , chrysides, sirèces, ichneumons, cynips, ten-
thrèdes et fourmis. Enfin les siphonés, qui ont quatre ailes membra-
neuses et un bec plié sous le corselet, comme les thrips, les pucerons,
les cochenilles , les cigales.
Les insectes à étuis, Vaginés, se rapportent à trois sous-ordres, les
hémiptères, les dermaptères et les coléoptères.
Les hémiptères ont deux gaines ou étuis à demi coriaces ou denn-
membraneux, croisés; deux ailes membraneuses et un bec sous la
poitrine: tels sont les punaises, les nêpes.
Les dermaptères portent deux gaines coriaces en forme d'ailes; deux
^ • INS , 5,3
ailes membraneuses , et leur bouche est garnie de mâchoires : on y
rapporte les mantes ^ sauterelles, criquets, gryllons, blattes, perce-
oreilles.
Les coléoptères ont deux étuis durs , couvrant doux ailes membra-
neuses , et la bouclie dentée. C'est la division la plus nombreuse.
Presque tous les genres de GeoCfroy s'y trouvent rangés aussi par le
nombre des articles aux tarses : il en a trente-trois, qu'il est inutile
de répéter ici.
Les insectes \ deux ailes constituent deux sous-ordres :
1.° Ceux qui ont des balanciers, hallerates; la bouche sans dents,
niais avec une trompe : tels sont les genres Mouche, Stratyonie, Némo-
tèle. Taon, Asile, Eiupis , Conops , Bombyle , Ilippobosque , OEstre,
Cousin , Tipule.
■2. Les proboscidés diffèrent suivant les sexes : les mâles ont deux
ailes sans balancier, sans dents, ni trompe j les femelles n'ont pas
d'ailes, mais une trompe sous le corselet.
La seconde sous -classe des insectes, celle des Aptères, se divise en
deux grandes sections : l'une qui comprend la puce uniquement, qui
subit des mélanjorphoscs , sauteurs et suceurs; l'autre comprend les
aptères, marcheurs (gressoria) , et se subdivise en trois ordres ; savoir:
1.° Ceux qui ont un cou ( auchenates) , qui ont la tête distincte du
corselet, et six pattes au plus; tels que les forbicines , podures, ter-
mites, pous , ricins.
2.° Ceux qui n'ont pas de cou (alrachélies) , qui ont la tête con-
fondue avec le corselet, et six pattes au plus. Ils forment huit genres:
Mitte, Faucheur, Araignée , Scorpion , Chélifcre, Écrevisse, Crabe et
Monocle.
3." Enfin, les crustacés , qui ont quatorze pattes ou plus, et la tète
distincte du corselet, comme les squilles, cloportes, scolopendres et
iules.
24. Charles Clerck a publié en suédois et en latin, à Stockholm,
en 1757, un petit volume sur les araignées de la Suède, avec sis plan-
ches coloriées, et un autre ouvrage qui représente beaucoup d'insectes
rares. L'ouvrage sur les araignées est estimé. L'auteur a bien observé
et bien décrit les mœurs de ces animaux.
25. Pierre Lyonket avoit donné, dès 1742 , la traduction de laThéo-
logie des insectes de Lesser, et il y avoit joint des notes très-savantes,
en même temps que des dessins originaux. 11 avoit réuni à cette époque
les insectes des environs de la Haye, et il se proposoit de les décrire
et de. les représenter ; mais il ne publia son admirable Traité de la,
chenille tjui ronge le bois de saule qu'en 1760. C'est un ouvrage in-4.'*,
de 6i5 pages, avec iK planches en cuivre, gravées par l'auteur même.
Ce chef-d'œuvre d'eyécution , de patience et d'adresse, a placé Lyonnet
à la tête dos graveurs 1 des anatomistes. C'étoit un génie rare. 11 parloit
neuf langues, et possédoit beaucoup d'arts d'agrément. 11 fut secrétaire
des Etats de Hollande. On rCj^rette que la seconde partie de l'Aiiatomie
du cossus, qui avoit été décrite, dessinée et gravée par lui, n'ait pas
été publiée : c'est une grande perte pour la science.
26. jEiPi -AisToiNE Scopon, professeur à Pavie, critique de Linnaeus ,
avoit publié, en 17^3, son Eiuomoloj'ie de la Carniole en latin. Il
paroit quH avoit fait graver une quarantaime de planches pour y être
23. 53
5i4 ' INS *
jointes; mais elles sont très -rares , et la plupart des exemplaires qui
nous sont tnniLcs entre les mains, en sont privés. C'est dans l'ouvrage
intitule . Introdiictio adhistoriarn iiaf liraient , Piagœ , i 777, que se trouve
exposé le système dr l'auteur. En voici l'abrégé. Il rapporte les insectes à
cinq des tribus dans lesquelles il range les animaux. La 4.% les Li'Ci-
ri;.;E'! deS\.animerdaiM,qu il divise en deux na lions (^'f-n/e.?): lescrusfarés,
parmi lesquels r.n vrit les araignées, les scolojiendres, les cloportes,
les forbicines ; les pi'diculiiires , comme les cirons, les pous , les puces.
La .'"«.^ tribu est celle des Gymnoi-i kies de Geoffroy, qu'il divise en
dj.. tores et en tétraptères, qu'il subdivise en aiguillonnés, et ceux qui
ont une queue et une chrysalide agile. La 6.' tribu comprend les
Li.MooPTÈiifcs de Rœsel . elle comprend trois nations: les sphinx, les
phalènes, les papillons. Lu 7.*" tribu, les PaoBosciDÉs de Réaumur,
correspond aux hémiptères, et comprend deux nations, les terrestres
et les aquati jius. Enfin, la 8." et dernière tribu des insectes comprend
les Coi.F-OPTtHEs de Frisrh (à la page 372) ou de Falricius (peut-être
par erreur typographique, à la page 438), divisés d'abord en aqua-
tiques et en terrestres , ceux-ci d'après la forme des antennes.
Quoique la méthode ou plutôt l'arrangement de Scopoli soit très-
mauvais, surtout pour Tépoque oii il a été proposé, on ne peut dis-
convenir que les genres sont assez bien rapprochés entre eux, et que
plusieurs ne soient établis sur Je très-bons caractères: aussi ont-ils
été conservés, ou proposés et adoptés depuis, sous d'autres noms.
27. Geoffroy, médecin de Paris, a publié, en 1762, un ouvrage en
deux volumes in-4.'', sous le titre d'Histoire abrégée des insectes des
environs de Paris, avec 22 planches en cuivre représentant les prin-
cipaux genres. C'est un ouvrage très- méthodique et très -commode.
Malheureusement l'auteur n'y a décrit que les espèces qui se rencon-
trent aux environs de la capitale. Les divisions sont à peu près celles
de Linnœus, d'après les ailes. Cejiendant les tétraptères à ailes nues,
hyménoptères et névroptères, sont compris dans un même ordre. Les
orthoptères forment une section seulement dans l'ordre des coléoptères.
Le nombre des articles aux tarse.î, la forme des antennes et celle de
toutes les autres parties du corps, ont été employés comme caractères
dans l'établissement des genres, qui ont tous été adoptés, au moin-;
quant à la réunion des espèces ; car les noms en ont été changés quel-
quefois. L'ouvrage que nous faisons connoître ici, est indispensable
pour l'étude des insectes. Fourcroy, en 1785, en a publié un petit abrégé
en latin, en deux volumes in-i8 ou petit in-12 , sous le titre d'Entomu-
logia parisiensis , siçe calalogus inscctoruni , etc. , et il y a intercalé
quelques espèces. Il a paru aussi une seconde édition de l'ouvrage in-4.°,
qui n'en est qu'une réimpression, avec les courtes additions de Fourcroy.
28. Jeak- Christian ScayTiFrER est auteur de plusieurs ouvrages sur les
insectes. Ijc premier, écrit en latin, n'est qu'un Catalogue des figures
des insectes qui se trouvent aux environs de P.atisbonne. Il se conipos.e
de 280 planches, qui îr.rment trois volumes, publiés en 1769. La mé-
thode employée, ou plutôt la dénomination, est celle de Linna.nis. Les
planches sont belles et exactes : elles ^ilirent surtout des développemeni
de caractères qui sniit d'une grande utilité. Il a aussi publié à part, sous
format in-.,.', des Elémens d entomologie , en latin et en allemand,
avec i3r> planches, et un Supplément de texte et de cinq planches, qui
ont paru en 1777. Quoique les noms des classes soie»t changés , elle*
sout à peu près les mêmes que celles de Geoll'roy.
* INS , • 5i5
2p. Martin- Thrane Brunnich n'a publié qu'un très-petit ouvrage sur
.les iiisccles, en danois et en latin; il a pour titre : Eiitomotngia ,
sislens inseclorum tabulas sj st email cas , Hafniœ , 1764, avec une planche
en cuivre qui représente, au simple trait, les parties caractéristiques
des insectes. Dans une courte introduction l'auteur fait connaître la
conforination et l'organisation des insectes. 11 présente aussi une clas-
sification des entomologistes, iwjeci/if te , qu'il divise ainsi:
I. Entomologues. A. Collecteurs : 1.° anciens (jjatres), comme Aris-
tote, Pline, Dioscoride; 2." commentateui s , les mêmes; 3.° ich-
niographes ou (iguristes, tels que Goedaert, Hoefuagel , Mérian,
Valisnieri , Albin , Frisch ; 4.° niétamorpliosistes , Svvammerdam 5
5.° descripteurs , Rai, Linnœus ; 6." nionograplics. Lister, SclisefTer
Clerck ; 7." curieux, Catesb y,Mérian , Strom, Poritoppidan; 8.° niu-
séograpbes, Linnaeus , Poda ; 9.° topographes, Mérian, Albin,
Frisch; io.° voyageurs, Marcgrave, Bumphius, Sloane , Hassel-
quist. Osbeck. — B. Les Méthodistes, qu'il divise, i." en philo-
sophes, Swaninierdam , Réaumur, Degéer, Linnaîus; 2." systéma-
tiques, les mêmes ; 3.° nomenclateurs.
IL Entomophiles : 1.° anatomistes, Malpighi , Swammerdam , Leu-
wenhreck , Lyonnet, etc.; 2.° médecins, Dioscoride, Galien, Al-
drovandi, l>Talhioli, Glauber, Dale, etc.; 3.° mélangistes {mis-
cellanei) , Bochart, Lesser , Derhan, etc.
Tiennent ensuite les tables systématiques et analytiques, qui mènent
à la détermination des genres et sous-genres par la considération suc-
cessive et comparée des diverses parties du corps des insectes.
3o. PiERRE-SiMOW Pallas. Nous nc citons ce célèbre naturaliste que
pour le petit ouvrage in-4.° publié à Erlangen, en 1781 , sous ce titre :
Icônes inseclorum, prœsertim llossia Sibiriœcjue pcculiarium.
3i. Jean -Baptiste Schluga a donné des Élémen's d'entomologie, à.
Vienne, en 1766. C'est un petit volume en latin, où l'on remarque
beaucoup d'ordre et de précision. Il y a deux planches en cuivre
pour représenter les caractères. L'auteur a proposé quelques dénomi-
nations qui ont été approuvées par Fabricius ; telles sont en particu-
lier les synonymes latins des noms de classes de Linnseus : vnginantia,
semi-vaginantia , furinacea, reticulata , venosa, lialata, nuda.
3?.. Dru Drury a publié, avec un te^te anglois et françois formant
trois volumes in-4.", ornés de 168 planches en couleur, un très-bel
ouvrage qui a pour titre : Illustrations of natural history , wherin are
exhihiled Jigures of exotic insects. La plupart de ces insectes sont des
papillons et des coléoptères.
33. Erkst et Engramelle. Le père Engramelle, moine augustin, a
décrit, et Ernst a peint d'après nature, un bel ouvrage qui a paru à
Paris, sous format in-4.'', d<^ '779 ^ '790/ sous le titre d* Papillons
d'Europe, en sept volumes, avec environ 000 planches. En général
les planches représentent l'insecte sous les trois états. Le texte est
peu estimé.
04. Pierre Cramer, d'Amsterdam _, a publié en hollr.ndois et en,
françois 400 planches de papillons exotiques des trois parties du
monde. C'est un ouvrage magnifique pour la netteté et l'élégance des
figures. 11 est très-r^gheich(^ des aiwaieurs d'hist9ire naturçUe.
5ic ' INS •
35. Jeak-Chbisttah Fabricils, professeur à Kiel, en Danemarck, morf
en 1807, à 1 âge de 65 ans, a publié un très-grand nombre d'ouvrages
sur ks insectes. A l'exception de quelques dissertations , ses écrits
sont on latin. Il a surtout excellé dans l'art de décrire. IMalbeureuse-
inenl il n'a point dessiné ni donné de figures des espèces qu'il décrivoit
pour la première fois, de sorte qu'il s'est glissé beaucoup d'erreurs et
de doubles emplois dans le nombre de celles qu'il a fait connoître. Ses
genres ont été établis d'après un sjstènic particulier, qui s'est perfec-
tionné successivement, il est vrai, mais qui est devenu beaucoup plus
minutieux et dilncilc, à mesure qu'il s'appliquoit à un plus grand
nombre d'espèces. Les seules parties de la bouche lui ont présente , dans
les moditJcations, non- seulement les caractères des ordres, mais même
ceux des genres. La difficulté qu'il y avoit à distinguer les espèces par
leur seul secours, a fait que l'auteur lui-même s'en est tenu le plus
souvent à la description d'une seule espèce, qu'il a regardée comme
le prototype d'un groupe qu'il a eu l'art, nous dirions presque l'ins-
tinct admirable, de former par une réunion très- naturelle.
Voulant faire adopter son système ingénieux, l'auteur a employé la
foible ressource d'exprimer ou de peindre des formes analogues jet
mènje semblables par des termes diilérens, et d'éloigner, autant que
possible, le; genres les plus voisins, afin de faire trancher en appa-
rence les caractères, comme nous l'avons prouvé par des exemples dans
la préface de notre Zoologie analytique. Au reste, Fabricius, disciple
célèbre de Linnseus, n'a adopté la classification arliiicielle des insectes
que parce qu'il a voulu appliquer à l'entomologie le principe de son
maître, de tirer les caractères d'une seule et même paitie, comme la
botanique l'avoit permis pour le système sexuel, fondé uniquement sur
la considération des Heurs. Fabricius ne concevoit pas qu''il put être
fondé un autre système meilleur; aussi dit-il : Çuafe tjua:so SYsteina ,
si inox a radice , vtox a. caiile aut a foliis , inox a Jlorihiis caractères
desumerenttir ? La méthode naturelle, presque généralement adoptée
aujourd'hui , répond d'une manière pércmptoire à cette question.
Les ouvrages de Fabricius n'en ont pas moins rendu le plus grand
service à la science. Nous allons indiquer les principaux.
Son Système d'après ses parties de la bouche, ou les instruinens ci-
taires , comme il les appelle, a paru, en 1775, sous ce litre : Sjstema
cntomologiœ , shtens insectorum classes, ovdines , gênera, species , en
un gros volume de 832 pages. IS'ous n'en présenterons pas ici l'analyse,
parce qu'il a été beaucoup motlilié par l'auteur dans ses publications
subséquentes.
En i77t>, Fabricius publia un volume de Sic pages, tout-à-fait systé-
iiiaii que, sous le titre de Gênera insectormn.
En 177^*, il donna un très-petit volume de 178 pages, qui est un
de ses plus beaux titres dans la science, quoiqu'il soit à peu près
calqué sur le plan d'un semblable ouvrage de Linnaeus relatif à la bola-
îiique : c'est sa Philosophia entotno/ogica. M. Saint - Ajuand , d'Agen,
en a donné une sorte de traduction françoise, ce qui nous a empêché
de pubii.r celle que nous en avions faiie nous -même, il y a plus
de trente ans, et pour laquelle iM. Fabricius avoit eu la complaisance
de nous remettre un grand nombre de notes et de corrections , que
nous conservons préci(>usoment.
En 1781 parut le Species insectorum, en 2 vol. in-8.", qui renferme
la descrjptioa des espèces; l'auteur, en 1787, y a ajouté deux autre*
• INS • 5i7
volumes, sons le titre de Mantissa insecloriim, sistens eonim species
nuper détectas. Ces quatre volumes forment ensenihle 1800 pages.
De 1792 à i79*> i' publia le même ouvrage, refondu sous ce titre:
Entomologia sfstematica et aucta , 4 vol. in-8."; plus, en 179a, un autre
>oluin»' de Supplément.
De 1801 jusqu'en 1806 il publia successivement ce qu'il a appelé
ses systèmes : Eleutheratorum , 1 vol.; Hhjngotoriim , 1 vol.; Piezato-
rum , i vol. ; yintllatoruni , \ vol. Il n'a paru qu un premier volume
des Glossatorum , et il est encore rare en France.
Voici en abrégé la disposition ■îj'stémalique des insectes , d'après
Fabricius. Les uns ont d.-s mâchoires : les autres n en ont pas. Ces
derniers sont les glossates , comme l>s lépidoptères, qui ontune langue
en spirale; l-s rhjngotes , coinnie les hémiptères, qui ont un liée arti-
culé; les antliiites , comme les diptères, qui ont une trompe ou un
suçoir.
Les insectis qui ont des mâchoires, ou n'en ont que deux, ou en ont
1111 plus grand uombr- ; ils forment deux grandes sections.
A la première sont rapportés :
1." La éleuthèrates , qui ont les mâchoires nues, composées, pal-
pigèri-s ; tels sont les coléoptères.
2." Les ulonates , qui ont les mâchoires simples, découvertes , palpi-
gères, surmontées d'une galète ; ce sont les dermaptères ou orthoptères.
3." Les synista/es , qui ont, comme les eleuthérates , les mâchoires
découvertes, juais réunies, à la base, à une lèvre palpigère : ce sont la
plupart des névroptèrcs.
4.° Les odonates , qui ont les mâchoires cachées, simples; les lèvres
sans palpes : telles sent L s libelles.
5."^ Les piézates, dont les mâchoires, comprimées, alongées, engai-
nent une lèvre palpigère : ce sonl les hyménoptères.
6.° Les mitosates , qui ontdeux mandibules composées, deuxmàchoires
et deux palpes distinctes , ou soudées et réunies avec la lèvre : ce sont
les myriapodes ou millepieds.
7.° Les unogates , qui ont deux mandibules en pinces sans lèvre
sxipéricure : tels sont les aranéides ou acèrts.
Trois ordres offrent l'existence de plusieurs mâchoires : ce sont les
poljgnathes , les exochnntes et les kleislagnathes. Le premier seul com-
prend les cloportes et autres genres voisins. 11 réunit aussi les mono-
cles, qui sont de véritables crustacés, ainsi que les crabes et les écre-
visses, que Fabricius a décrits comme des insectes.
36. Eugène- Jean- Christophe Esper a publié, de 1777 à 1786, à Er-
langen, quatre volumes iu-4.° sur les lépidoptères d'Europe, Èuropuische
S'chmetCerlinge. C'est un ouvrage très-estiiué et fort recherché pour les
ligures coloriées, qui sont très-exactes et parfaitement exécutées.
37. C.4SPARD Stoli, , d'origine hollandoise, a donné la description en
cette langue et eu françois , en même tensps que les figures, des lépi-
doptères, des orthoptères et surtout des hémiptères. Les deux derniers
ouvrages sont très-précieux comme monographie, ou plutôt comme une
collection de très-bonnes figures; car il y a peu d'observations, et
surtout un défaut de synonymie qui ne peut être rétabli que par des
entomologistes déjà instiuits.
38. François-de- Paule SchPvAkck a publié, sous le titre modeste de
Catalogue des insectes d'Autriche, Enumeiatio insectorum .Justriœ indi'
5iS ^ ITVS
genarum , vienne , 1781 , în-S.", un très-fort volume avec quatre plancTiej
en cuivre «ni représenteni , pour la plupart, des insectes il-? la famille
des cirons et des ricins. L'auleur a suivi à peu près la classification Lin-
néenne , en omettant exprès l'ordre des lépidoptères, dont son compa-
triote SchiffermiiUer venoit de faire l'histoire. Cet ouvrage est princi-
palement estimé à cause des soins que l'auteur a mis à la synonymie
et à la description exacte des espèces, dont, à l'exemple de CeofirO)^
il a conslaninient indiqué les dimensions d'après une échelle qui se
trouve à la fin de l'ouvrage.
39. Jeak-NÉpomucène de LàiciiARTiKG a décrit en allemand les in-
sectes du T\rol, en :> vol. in-8.", imprimés à Zurich. 11 paroit qu il n'a
publié que les coléoptères 11 est souvent cité par les auteurs alle-
mands. Heiibst a continué ce travail en 10 volumes in-S.", avec un atlas
de planches coloriées.
40. Charles-Pi ERBE Thukberc, professeur à Upsal , après avoir vojagé
au Cap et au Japon, a fait puijlier, dans des dissertations soutenues
par de ieunes docteurs à l'Académie d'Upsal , la description de beau-
coup d insectes de Suède. 11 y en a une, entre autres, qui a pour titre:
Ca^ acteres generum insectorum , qui fait partie du 7." volume des Actes
de l'Académie, et qui a été réimprimée à Ga'tlingue, en 1791, avec des
annotations de Meyer. On y trouve de fès-bons caractères tirés de la
conformation générale, et l'établissement de plusieurs genres nouveaux,
entre autres de ceux de la manticore, du coUiure, etc.
4r. Aktoiive-Cuii.laume Olivier a publié deux ouvrages principaux :
l'un est la partie des insectes dans l'Encyclopédie méthodique , 4 vol.
în-4." ; l'autre est son Histoire naturelle des coléoptères , sous le titre
^'Entomologie , en 4 gros vol. gr. in-4.", avec des planches enluminées,
publiée d'abord en 1790 et années suivantes, interrompue ensuite, et
continuée en 1808, époque à laquelle a paru le quatrième volume, par-
tage en deux parties. Ce dernier ouvrage est parfaitement exécuté.
Toutes les espèces de coléoptères connues sont décrites et figurées, surtout
dans les trois premiers volumes. Dans le quatrième, le nombre de celles
qui ont été rapportées aux genres étant devenu trop considérable,
l'auteur n'a pu suivre son premier plan, en particulier pour la famille
des chrvsomèles et celle des charansons. Quoi qu'il en soit, l'Entomo-
logie d'Olivier est le principal ouvrage sur l'ordre des coléoptères. Les
planch>'s sont disposées de manière que chacune d'elles correspond à
tin genre dont elle porte le numéro, et il y a autant de planches sous
le même numéro que le nombre des espèces l'a exigé. L'auteur avoit
eu en vue d'ajouter par la suite des planches à l'ouvrage , quand il
auroit réuni assez d espèces pour les remplir. Dans l'Encyclopédie
Olivier a suivi la classification de Linnœus , par les ailes, en adop-
tant cependant l'ordre des dermaptères de Degéer , qu'il a désigné
sous le nom d'orthoptères , adopté depuis par les François. On sait
que la disposition de l'ouvrage est dans l'ordre alphabétique. Plusieurs
auteurs ont contribué à la rédaction des derniers volumes : MM. Al.
Brongniart, Latreille, Desniarets , Godard, etc.
42. Pierre -André Latreille a publié un grand nombre d'ouvrageà
sur l'entomologie , et il les a successivement perfectionnés par l'occasion
très-heureuse qu'il a eue d'observer la belle et nombreuse collection
du Musée royal de Paris, qui a été confiée à ses soins éclairés. Les
titres de ces ouvrages sont:
• * INS • 519
î." Précis des caractères génériques des insectes disposés dans un
ordre naturel; in-8.°, 201 pages; Brive, an V ( i ygrt ).
2." Histoire générale et particulière des crustacés et des insectes,
faisant suite à l'édition de BulTon , par Sonninj; 14 vol. in-8.''j avec
ligures; Piiris, an X ( 1 802 — iSo'i).
3.° Gênera cruslaceorum et insectorum ; 4 vol. in-8."; Pariç^ 1806
et 1807.
4." Considérations générales sur l'ordre naturel des animaux compo-
sant les classes des crustacés, des arachnides et des insectes, avec un
tableau méthodique de leurs genres distribués en familles ; in-8.°, 1810,
Paris, 1 vol.
5.° Le troisième volume de l'ouvrage de M. Cuvier, intitulé le Règne
animal; 1817.
En outre, la plupart des articles d'entomologie dans la i.''" et la 2."
édition du Dictionnaire d'histoii'e naturelle de Déterville ; plusieurs
mémoires imprimés à part, ou publiés dans les Annales du Muséum :
l'Histoire des Jourmis ; sur la Géographie des insectes, ou les climats
qu'ils habitent; Sur les insectes vivant en société, rtc.
L'auteur a, le premier, eu l'idée de ranger les insectes par familles,
auxquelles il n'avoit pas donné de noms , et qu'il avoit presque toutes
formées de la réunion des genres correspondant à celui de Linnseus,
dont ils étoient un démembrement; puis il donna à ces familles des
noms analogues à leur origine : acaridies, acrydiens, andrénètes, aphi-
diens, arachnides, asellotes, asiliques, bembicites, bomhyliers , bombj-
cines, bostrichines, etc , etC;, l'auteur voulant, dit-il, s'assurer par ces
dénominations la propriété exclusive de l'établissement des principales
familles.
M. Latreille ayant successivement corrigé ses ouvrages, voici l'extrait
de son dernier travail, inséré, en 1819, à l'article Entomologie , dans
le Dictionnaire de Déterville.
Il partage en trois classes les animaux articulés et pourvus de pieds
articulés, qu'il nomme ENTOMES j ce sont: 1.° les Crustacés; 2° les
Arachhides; 3.° les Iksectzs. Nous ne parlerons ici que des deux der-
nières classes.
Les AnAciiPfiDES se divisent en deux ordres:
i." Les pulmonaires , qui forment trois familles: les aranéides, les
pédipalpes et les scorpionides.
z.° Les trachéennes, qui composent également trois familles, savoir:
les faux - scorpions , les pygnogonidcs et les holètres.
La classe des insectes forme douze ordres , dont voici les noms :
myriapodes, thysanoures , parasites, suceurs, coléoptères, orthoptères,
hémiptères, névroptères , hyménoptères, lépidoptères, rhipiptères et
diptères.
Les quatre premiers ordres ne comprennent qu'un très-petit nombre
de familles et de genres.
Ordre I. Les myriapodes se partagent en deux familles, les chilo-
gnathes et les chilopodes.
II. Les thysanoures , en deux familles également, les lépismènes et
les podurelles.
III. Les parasites, de même , en mandibules et en édentulés.
IV. Los suceurs ne comprennent que la puce.
"V. Les coléoptères forment quatre sections, d'après le nombre des
articles aux tarses , et M. Latreille adopte nos noms autrement accentués.
520 * INS '
§. 1. Pentamères ; six familles : carnassiers , bracTiclytres^ serricorncSj
clavicoriics, lalpicornes, lamellicornes , qii, cliaci ne , se subilivisent
en tribns, puis en sections ; ainsi les lamellicornes forment deux tribus,
les scarab 'iiles et les lucanides ; et en sii. .".eciions naturelles, que l'au-
teur nomme les c< prophiiges, les j^éotrupins, les xjlophiles, les pbjl-
lopluigfs, les antliobies , les mélitopbiles
§. 2. Hétéromèics; quatre familles: mélasomes, taxicornes , sténc-
lytres, trachélides.
§ 3. Tétramtres ; six familles : rbincopbores , x^lopbages, platjso-
mes, longi- ornes, eupodes , cycliques, clavipalpes.
§. 4. Tiimèresj deux lamilles : aphidipbages , fongicoles.
Vî. Les orthoptères comprennent deux familles : les coureurs et les
sauteurs.
Yll. Les liémiptéres sont partagés en deux sections.
§. 1. Héicroplères; deux familles : géocorises , h^drocorises.
§. 2. Homopteres ; trois familles ; cicadaires , h^ménélytres, gallin-
sectes.
VIII. Les névroptèresj en trois familles : les subulicornes , les planl-
pennes , les plicipennes.
IX. Les hyménoptères composent deux sections.
§. 1. Térébraus • deux familles : porte-scies, pupivores.
§. 2. Porte- iiiguillon ; quatre familles: hétérogynes, fouisseurs, di-
ploptères et mcUifères.
X. Les léj idoptères; troi<! familles: diurnes, crépusculaires, nocturnes.
XL Les rhipij'tères ; genre unique et anomal : xénos.
XII et dernier. Les t'iptf'rcs forment deux sections.
§. I. Proboscidés ; quatre familles : némocères, tanyslomes , nola-
cantbes, athéricères.
§. 2. Eproboscidés ; une seule famille, les pupipares.
En tout cinquante-six familles, dont cinquante pour les insectes, et
six pour les arachnides.
43. George- AVoLFGAKG -François Pakzer, de Nuremberg, a composé
plusieurs ouvrages sur les insectes, et le premier en date est le princi-
pal : c'est une collection de petits cahiers de feuilles détachées, dont
chacune représente un insecte gravé et enluminé, avec la de.cription en
regard, de manière que chacune des ligures et des descriptions peut
être rangée dans les ordres, en suivant les sj'stèmes divers et les mé-
thide* adoptées. Les premiers cahiers de cet ouvrage, dont cliacun se
com)o>e de vingt-quatre insectes décrits et figurés, ont paru en 1793;
ils ont cominué de paroître jusqu'en 1814 : il y en avoit alors cent
douze, ce qui porte le nombre total des insectes figurés à 2688. L'ou-
vrage a pour tiire Deittsrhlands Insekten , ou Faunte insectorum germa-
nicœ initia. La svnonymie en est soignée, et les planches très-exactes.
C'est un livre très - précieux pour la science. Les autres ouvrages de
Panzcr ont paru plus tard et sont moins importaus. L'un concerne les
coléoptcies d'Allemagne; c'est un vol. in-12 de Syo pages , avec douze
planciies. Un autre concerne les hyménoptères. En général, l'auteur ne
s'est attaché qu'aux descriptions, et non à l'observation des mœurs et
de l'organisation.
44- Ci.iiKViLLE, Anglois, mais habitant la Suisse, est auteur, avec le
peintre et graveur ScHELLEKBERG, de deux minces volumes gr. in-8.°,
avec ligures, qui ont pour titre, en allemand et en françois, ffntomo-
INS 5.1
logie hehitîejue. Ils ont paru en 1798 et 1806. L'auteur n'y décrit que
quelques gcures. Le preniin- voluine en particulier ne comprend que
les insectes coléoptères de la famille des rhinocères ou charansons. Il
y a seize planches, qui repiésentcnt onze genres seulement. C'est un
travail minutieux, parfaitement exécuté, imprimé avec beaucoup de
luxe et en morne temps avec grand nombre de fautes typographiques.
L'au'eur a présenté, à la page 44, un tableau analytique que nous
allons copier ici , pour donner une idée des noms qu'il a proposé de
substituer aux ordres de Linuteus, et qui pour la plupart ne sont pas
heureusement choisis.
Sections.
[ . ÉlylToplèies : ailes crustacées.
Pférophores ;
à ailes :
Insectes.
mandibules ;
avec mâchoires.
haustellés ;
avec suçoir.
;:. Déiatoptères
3. Diclyoptères
4. Pblébopteres
5. Haltéri|)tères
lanciers.
6. Lépidoptères
lentes.
ailes coriacées.
ailes réticulées,
ailes veinées,
ailes avec ba-
ailes pulvéru-
Aptères ;
Hémiméroptères : ailes mixtes.
i haustellés 8. Ropliotères : suceurs en pi-
quant,
mandibules 9. Pododtinères : coureurs.
45. GEOBGE-LÉOPOLU-CHRISTlAN-FRÉDERiC-DAGOnERT CuVIER a donué
en France la plus grande impulsion à la méthode naturelle. Il a, le
premier, indiqué un grand nombre de familles, en considérant les
genres de Linnœus comme types primitifs, et eu ayant le plus grand
égard aux métamorphoses, d'après Swammerdaui, et aux organes delà
mastication ou de la déglutition, d'après Fabricius.
Dans son premier ouvrage, publié en l'an VI (1798), les crustacés
sont encore placés avec les insectes dans le premier ordre des insectes
pourvus de mâchoires et sans ailes. Les familles naturelles qu'il in-
dique, sont: 1.° les Crustacés, les monocles, les écrevisses , les clo-
portes; 2.° les MiLLEpiEDs, tels que les Jules, les scolopendres ; 3." les
Aracnéides, comme les scorpions, les araignées, les faucheurs, les
hydrachués; 4.° les Phtyréides, auxquels sont rapportés les podures,
les forhicines, les ricins.
Le second ordre est celui des névroptcres, partagé en trois familles:
1." les Libelles; 2° les Perles, comme les termites, les hémérobes ,
les panorpes, les raphidies ; 3.° les Agnathes , tels que les friganes ,
les éphémères.
Les hyménoptères forment le troisième ordre. M. Cuvier le divisé
en genres: les abeilles, les guêpes, les sphex, les chrysides, les
mouches à scie, les ichneumons , les urocères, les cynips, les fourmis,
les mutilles. Chacun de ces grands genres est ensuite subdivisé en
sous -genres, la plupart iiidiijués par Fabricius.
Vient ensuite le quatrième ordre, c< lui des coléoptères, subdivisés
par la forme des antennes et le nombre des articles aux tarses, en
trente-un grands genres : les lucanes, les scarabées, les charansons, les
bruches, les coccinelles, les silphes, les hydrophiles, les sphéridies ,
les escarbots , les birrhes, les dermestes, les bostriches, les ptines,
les taupins , les richards, les lampyres, les c;intharides, les meloés ,
522 I]^^rg
les ténébrions, les morclellcs, !es cas^idcs, les cKrr<loiMè1<'s, les lilspes,
les capricornes, les leptures, les néodales, les dytiques, lesgyrins,
les carabes, les cicindelles et les staphylins; et tous ces grands genres
sont subdivisés en sous -genres.
Les orthoptères sont rapportés à quatre genres ou tvpes : les perce-
oreille», les blattes , les niantes et les sauterelles.
Les hémiptères comprennent les punaises, les nèpes, les notonectes,
les cigales, les thrips et les pucerons.
Les lépidoptères sont de même rapnortésaux grands genres : papillons,
sphinx, phalènes.
Les diptères sont subdivisés en tipules, cousins, mouches, taons,
cmpis, bombyces , conops, asiles, hippobosques et œstres.
Enfin, dans un dernier ordre sont rangés les aptères sans mâchoires,
tels que les puces, les poux et les mittes.
Deux ans après, M. Cuvier ayant bien voulu associer à ses travaux
r'auleur de cet article, qui publioit les premiers volumes de son
Anatomie comparée, la division précédemment adoptée fut corrigée,
et des familles naturelles, au nombre de quarante-huit, furent pro-
posées avec des dénominations particulières qui, pour la plupart, ont
été conservées dans la Zoologie analytique. Ce travail, pour la clas-
sification des insectes, forme le huitième tableau synoptique.
Enfin, en 1817, lorsqu'il publia l'ouvrage qui a pour titre le Règne
tinimal distribué d'après sou organisation , M. Cuvier confia la rédaction
au 3." volume, comprenant les insectes en particulier, à M. Latreili>e,
qui, en conservant quelques-unes des divisions premières, a introduit
presque dans tous les ordres ses divisions, subdivisions, et sa nomencla-
ture, à peu près telle que nous en avons ci-dessus donné l'analyse.
46. Jean -FfiÉDERTC- Guillaume Herbst , de Berlin, a donné plusieurs
ouvrages au public : la plupart sont ornés de planches enluminées très-
exactes ; mais ils sont écrits en allemand. Il y a des monographies
des genres Araignée, Faucheur, Scorpion , Papillon, et un grand ou-
vrage sur les coléoptères, de format in -4.°, et sur les lépidoptères
(avec Jablonski), dans lequel il y après de trois cents planches.
47. Jea^-Charles-Guillaume Illtger a publié d'abord , en 1798
.sous son nom et celui de Tviigellan, en tin volume in-8.", en allemand
un ouvrage important, sous le titre modeste de Catalogue ( f^erzeich
niss), contenant la description des coléoptères de la Prusse. Les deS'
criptions y sont faites avec le plus grand soin, et la synon^mie très
scrupuleusement vérifiée. Il a publié en outre plusieurs ouvrages, un
sur les lépidoptères des environs de Vienne, en 1801, et un dernier
sous ce titre Magazin fur Insekteukunde , 7 vol. in-8.°
48. André -Makie - CoTiSTAPiT Diiméril. J'ai inséré dans le premier
volume de l'Anatoniie comparée de M. Cuvier, en 1798, les premières
tentatives que j'ai faites de la classification , par familles naturelles,
des genres d'insectes. Dans les deux années suivantes, j'ai continue ce
travail, que jai présenté, le 3 Brumaire an IX, à la Société philoma-
tique. J'en ai publié un extrait la même année, dans le Journal de
physique et dans le Magasin encyclopédique, an VI, tome I, p. 289.
On me pardonnera ces petits détails, parce qu'il=: constatent les époques
principales de mes études. En i8o-f parut la première édition de mon
Traité élémeiUaire d'histoire naturelle , dans lequel j'ai exposé avec
plus d'étendue le plan que je suivois depuis près de quatre aas dans
• INS • 525
mes cours d'histoire naturelle aux écoles centrales. Cependant ce n'est
réellement qu'en l'année lôofi que mon travail sur les insectes parut
en entier dans la. Zoologie analytique, eu soixante -douze tableaux sy-
noptiques, avec des détails explicatifs. C'est d'après cfittc mJtliode que
les insectes ont été exposés dans la 2.* édition du Traité élémentaire
qui a paru en 1807, et dans les divers volumes de ce Dictionnaire,
d'après le plan adopté et annoncé en 1804, que j'ai constamment suivi
et exposé avec détails dans la section précédente de cet article Irsectes.
(Voyez pages 471 et suivantes.)
49. Gustave de PAYKrM, a mis au jour, en 1800, à Upsal , troi*
volumes in-S." sur les insectes de Suède , Fauna Suecica. Il n'y a décrit
que les coléoptères; mais ce travail est complet. Les descriptions sont
faites d'après nature, et très-soignées : c'est un modèle dans ce genre.
Le même auteur a donné d'excellentes monographies de plusieurs
genres: en 1789, celle des carabes et celle des staphjlins; en 1792,
celle des charansons, et en 1811 celle des escarbots. •
50. Jeapî- Guillaume Meigek s'est principalement occupé de l'ordre
des diptères. Avant qu'il ait, en 1804, publié son ouvrage in -4.°, avec
figures, en allemand, sous le titre de Classification et description des
insectes diptères de l'Europe v Beschieibung der Europœischen zweyfiii-
gcligen Insrkten), M. haumhauer avoit donné à Paris, en Tan VIII
( i8ooJ, un evtrait de ce travail en François. Quoique les caractères ne
soient pas tirés spécialement de la disposition et du nombre des ner-
vures des ailes, l'auteur s'en est cependant beaucoup occupé, et il
avoue que cette considération lui a fourni la base de sou travail.
5i. William Kirby , auteur anglois , a publié en anglois , avec
des descriptions en latin, la monographie dus abeilles d'Angleterre,
2 vol. in-8.°, 1802: c'est un très-bon ouvrage. Il a aussi donné, avec le
docteur Sphvce, des Elémens d'entomologie , dont le premier volume a
paru à Londres, en i8i5.
52. Louis Jurine, très-habile professeur de chirurgie à Genève,
s'est beaucoup occupé de l'histoire naturelle des oiseaux, des crustacés
et surtout des insectes de ce pajs. Il a publié, en 1807, en un volume
in-4.°, un très-bel ouvrage , orné de gravures en couleurs, qui représen-
tent une espèce de chacun des genres de l'ordre des hyménoptères,
sous le titre de Nouvelle méthode de classer ces insectes. L'auteur a
pris pour base de sa méthode la disposition des nervures des ailes.
53. Frakçois et Pierre Huher , père et fils, de Genève. Le premier
a publié d'excellentes Observations sur les abeilles, et le second sur
les Mœurs des fourmis indigènes. Nous en avons fait des analyses détail-
lées dans les articles qui concernent ces insectes, et là aussi nous en
avons fait un éloge bien mérité.
54. Charles- Jean Schoenherr a donné en trois volumes in -8.°, nu-
bliés à Stockholm , en 1806 — i8o8 et 1817, une synonymie complète
et très-soignée des insectes coléoptères, d'après l'ordre du S/stema
eleutheratorum de Fabricius, jusqucs et compris le 147." genre , Molor-
chus : il porte pour titre Sy'nony?nia insectorum. Il a fallu une patience
infinie pour exécuter un travail aussi pénible, mais qui devient indis-
pensable à tout entomologiste descripteur par les grandes recherches
qu'il peijt éviter pour remonter aux sources.
524 INS •
55. LÉoSTARD Gyixïkthai. a aussi décrit, en trois volumes, les coléop-
tères, en se bornant à ceux de la Suède, à peu près d'après le système
de iNT. r.atreille : il manque rncore à ce travail les genres voisins de.s
ceranihfx et ceux du gfnre Coccinelle , dont Fauteur s'occupe actuel-
lement. I.es descriptions ont l'inconvénient d'être trop longues, et de
répéter des détails communs à toutes les espèces du genre. Les volumes
écrits en latin ont paru en 1808 - 1810 et i8i.3.
56. Gaspard Duftsch>ud a publié, en langue allemande, en 180.^ —
l3i2, la description d'un grand nombre de coléoptères par familles
naturelles, les scarabées, les clavicornes, les créophages, les rénii-
tarses, etc. L'ouvrage, qui a pour titre Fauna Austriœ, ne se com-
pose que de deux volumes. Ils sont très - estimés. Il paroît que l'au-
teur a cessé de s'occuper de la science. ( C. D.)
INSECTES* (Fo55.) Les insectes fossiles auxquels on a
donné le nom d'entomolithes , se présentent dans le succin
ou dans des pierres fissiles. Les premiers sont parfaitement
conservés dans toutes leurs parties , et on pourroit même
reconnoître les espèces. On a trouvé dans cette substance des
mouches, des tipules , des ichneumons , des fourmis, etc.
J'en possède un morceau aplati et de la grosseur du pouce,
dans lequel on voit distinctement dix-huit insectes, tels que
des fourmis, des tipules, de petits coléoptères, et un cha-
rançon , que M. le baron Dejean , qui a rassemblé une si grande
collection de coléoptères , n"a point reconnu pour être un
insecte vivant actuellement en Europe.
Après les tempêtes on trouve le succin et les insectes qu'il
renferme sur les côtes de la mer Baltique , principalement
sur celles de la Poméranie et de la Prusse , sur quelques-unes
de la Méditerranée , telles que celles de la Marche d'Ancône ,
de Gênes et de la Sicile.
On découvre aussi cette résine fossile dans l'intérieur de
la terre, en Lithuanie , en Pologne , en Italie et en Provence
près de Sisteron. Elle est ordinairement dans des sables noirâ-
tres , parmi des bois fossiles, pyriteux ou bitumineux.
Les insectes que l'on rencontre dans les pierres , y sont dans
un état de conservation bien moins parfait que dans le succin;
on aperçoit pourtant distinctement la tête, le corselet, et
le corps souvent divisé par anneaux : mais il est ditiicile d'être
assuré si ce sont des insectes parfaits ou seulement des larves
ou des chrysalides de ntvroptères qui vivent dans les eaux
douces jusqu'à leur entier développement.
• •"* INS • 525
Quelques-uns de ces fossiles se trouvent accompagnés de
débris de petites coquilles , et il y a lieu de croire que la
catastrophe qui les a saisis s'est opérée dans des eaux qui
avoient été tranquilles , et où pouvoient vivre ces larves ou ces
chrysalides.
On voit des figures de ces insectes fossiles dans l'ouvrage
de Knorr sur les Pétrifications, part, i/*, tab. XXXITI, fig.
2-6, et dans celui de Scheuchzer, Herb. diluv., tab. V, fig.
1 et 2. Ce dernier auteur a annoncé qu'on avoit trouvé une
libellule avec s<^s ailes au mont Bolca dans le Véronnois,
un grand scarabée dans une pierre d'Œningen et une scolo-
pendre dans une pierre grise de Lubeck.
Aldrovande cite un insecte de ce dernier genre et des
pucerons pétrifiés sur une pierre noire du canton de Glaris.
Vallerius dit que, dans les pierres d'Œningen, on a trouvé
des insectes volans , tels que les scarabées, auxquels on a
donné le nom de cerf-volant, des mouches, des libellules
et des papillons.
Bromel annonce qu'on trouve des vestiges d'insectes , des
ailes de papillons et de scarabées sur des ardoises alumineuses
des carrières d'Andrn-Rumen dans la province de Scanie eu
Suède [Acta litt. Sueciœ , tom. 3, pag. 446). Il cite aussi des
ailes de mouches dans des pierres de Frankenberg, et de gros
insectes avec des pyrites brillantes dans celles de VVurtzburg.
On a trouvé dans les carrières de Vestena nova, avec des
squelettes de poissons, un insecte marin qu'on a rapporté au
genre Pygnogonum de Fabricius. On voit une figure de cet
insecte dans les Annales du Musée, tom. 3, pi. I.'*, fig. 3.
Différens auteurs, tels que Buttner, Richter, Vogel, Lan-
gius , Lippi et Bruckmann, ont annoncé que dans les schistes
d'Œningen on a trouvé des mouches ichneumones , des hé-
mérobes , des insectes diptères , des enveloppes de larves d'in-
sectes , des nymphes, et qu'en Ethiopie on a vu à l'état fos-
sile des cellules d'abeilles et des œufs d"insecfes.
Une observation peu approfondie a pu faire voira certains
auteurs autre chose que ce qui étoit. Il est difficile de croire,
par exemple , que des pucerons aient pu passer à l'état fossile ,
et il est extrêmement probable qu'on a pris des oolites pour
des œufs d'insectes. On s'est trompé en prenant pour des
526 '^ IIVS •
ruches crabeilles des astrces fossiles, dont les lames qui rem-
plissoient chaque cellule ont été détruites , comme cela arrive
souvent. L'on peut croire que des scarabées soient devenus
fossiles ; mais il y a lieu de penser que souvent l'on a pu
prendre pour eux des paradoxites pjriteux et de leurs débris,
comme j'en possède, et qui se trouvent dans des roches ani-
phiboliques noires.
On voit sur des schistes de Solenhofen , de Pappenheim
et d'Eichstaedt , des empreintes que Ion a prises pour des vers
de terre , et auxquelles on a donné le nom d'helmintolithes ;
mais, d'après les figures qu^on en trouve dans l'ouvrage de
Knorr ci-dessus cité , part, i .'*, tab. XII , fig. 2-10, il est pro-
bable que ces pétrifications ont une tout autre origine, au
moins pour quelques-unes, qui paroissent avoir quatre à cinq
fois plus de longueur que n'en ont les vers de terre que nous
connoissons aujourd'hui à l'état vivant.
Le corps représenté fig. i."^" de la même planche, se rap-
porteroit assez à un ou à plusieurs dragonneaux de sources
qui auroient été saisis par la pétrification.
Je possède une pierre de Solenhofen qui contient de pe-
tites astéries, et sur laquelle on voit une sorte de tube que
l'on pourroit prendre pour une portion de ver fossile, mais
auquel paroissent être attachées à plusieurs places des co-
quilles bivalves avec leurs deux valves striées circulairement
et ouvertes. Tout porte a croire que ce corps, ainsi que la
plupart de ceux dont il est question ci-dessus, ne sont point
des restes de vers de terre. (D. F.)
INSECTES HONTEUX. [Mamm.) Le Père Tachard nomme
ainsi, dans son Voyage àSiam, une espèce de pangolins,
sans doute à cause de la faculté qu'ont ces animaux de se
rouler en boule, lorsqu'ils éprouvent quelque crainte. (F. C.)
INSECTIRODES ou ENTOMOTILLES. (Ertfom.) Noms sous
lesquels est désignée une famille naturelle d'insectes hymé-
noptères, dont les larves se développent dans l'intérieur des
autres insectes, qu'elles rongent ; c'est de cette particularité
qu'est emprunté le nom tiré des deux mots litins , insecta
rodo : tels sont les ichneumons , les fanes, les ophions , les
hanches, les évanies , etc. Voyez Entomotilles. (C. D.)
INSECTIVORES. {Omith.) On appelle ainsi les oiseaux ou
. ^ INS ' 527
autres animaux qui se nourrissent principalement d'insectes.
(Ch. D.)
INSENS. {Bol. ) C'est un des noms vulgaires de l'absinthe ,
artemisia'-absintliium. (H. Cass.)
INSERTION DES ÉTAMINES. (Bot.) C'est leur position
dans la fleur, leur point d'attache dans les fleurs hermaphro-
dites. L'insertion des étamines a lieu, tantôt au niveau de la
base du pistil (blé, saururus , kalreute.ria) ; tantôt au-dessous
de la base du pistil [cleome pcntapliylla, helicteres , sterculia);
tantôt sur le pistil, au sommet de l'ovaire (ombellifères), ou
à la base du style (balisier), ou au sommet du style (limcdo-
rum, serapias),, ou sous le stigmate (aristoloche); tantôt sur
le périauthe simple (aletris), sur le calice (rose), sur la
corolle . labiées).
Ou nomme insertion absolue , celle où on ne considère que
le point où elle a lieu, abstraction faite du pistil, et inser-
tion relative celle où Ton considère le point où elle a lieu
par rapport au pistil.
L'insertion relative est dite hypogyne, lorsqu'elle a lieu au-
dessous de la base du pistil, ou au niveau de la base du pistil
(graminées, renoncules): elle estpérigyne, lorsqu'elle a lieu
autour du pistil . sur la paroi du calice ou du périanthe simple
( thymelées, rosacées) ; épigyne, lorsqu'elle a lieu sur le pistil
même (orchidées, ombellifères).
L'insertion est immédiate ou médiate. Elle est immédiate
lorsque les étamines sont attachées, sans intermédiaire, sous
le pistil, sur le calice ou sur le pistil. Elle est médiate , lors-
qu'elles sont attachées à la corolle. Dans ce cas, l'insertion
se fait par l'intermédiaire de cette enveloppe florale, qui,
comme les étamines, se trouvant attachée sous le pistil,
sur le calice ou sur le pistil , prend , comme elles , sui-
vant ces positions, la dénomination de corolle h3^pogyne ,
corolle périgyne et corolle épigyne. Les étamines et la co-
rolle sont censées avoir la même insertion. En général, l'in-
sertion est semblable dans les plantes d'une même famille et
dans les plantes de familles voisines. (Mass.)
INSERTIONS MÉDULLAIRES. (Bot.) Voyez Ratons mé-
dullaires. (Mass.)
INSIDIATOK. {Ichlhj'ol.) Les auteurs ont désigné par ce
528 . INS i
nom latin le poisson que d'autres ont appelé imposteur en
françois. '^''oyez Filou. (H. C.)
IISSIRE. [Mamm.) Nom que l'on trouve employé au Congo ,
comme étant celui d'un animal carnassier qui a quelque
rapport avec les martes. (F. C.)
INSOLATION. {Cliim.) C'est l'exposition aux rayons du
soleil de matières quelconques. On fait cette opération, i.°
quand on veut séparer d'une substance fixe un liquide qu'elle
contient et qui est susceptible de s'évaporer; 2° pour sou-
mettre à l'action de la lumière des corps qui en éprouvent
quelque changement, soit dans leur composition, soit sim-
plement dans l'état d'agrégation de leurs particules. (Ch.)
INSOLUBILITÉ. [Chim.) Propriété qu'a un solide de ne
pas se dissoudre dans un liquide ; un liquide, v'j ne pas se
dissoudre dans un autre liquide; un gaz, de ne pas se dis-
soudre dans un liquide. (Ch.)
INSTINCT. L'idée qu'on a généralement de l'instinct, est
celle d'une force, d'une faculté particulière, cause immé-
diate des actions' auxquelles les animaux sont aveuglément
et nécessairement portés.*
Ce n'est cependant point une de ces idées claires que l'on
peut circonscrire d'une manière précise : en effet, on a
beaucoup varié et on est loin d'être d'accord sur les actions
instinctives. Les uns en ont étendu le nombre, et les autres
l'ont restreint, suivant qu'il convenoit à leurs systèmes de
refuser ou d'accorder de l'intelligence aux animaux , de faire
dépendre ces actions d'une influence mécanique des organes
ou d'une détermination plus ou moins libre de l'esprit. Pour
1 Par une action, un acte, j'entends simplement un fait, un phe'-
nomène, sans y ajouter nécessairement l'idée d'activité.
2 Quelques auteurs ont mis au nombre des instincts les penchans ,
les dispositions, et même les appétits, les besoins naturels. Ces ptiéno-
mènes nous paroissent être d'un tout autre ortlre ; nous n'en parlerons
pas. En effet, les dispositions et les besoins ne conduisent pas néces-
sairement à des actions aveugles : les premières sont au contraire des
aptitudes à être frappées de telles ou telles modifications, plutôt que
de telle ou telle autre, ce qui suppose l'expérience; et si les seconds
poussent irrésistiblement à certaines actions, ils doivent plutôt être
considérés comme occasion , que comme causes de ces actions.
• ' INS 629
assurer h cette idée toute la netteté dont elle a besoin, il
auroit fallu , comme dans toutes les sciences d'observation ,
où l'on ne peut remonter aux causes que par les faits , il
auroit fallu, dis-je, établir d'abord ceux-ci, c'est-à-dire,
distinguer, par des caractères fixes, les actions aveugles eÉ
nécessaires, de celles qui sont électives et contingentes, de
celles qui , en un mot , sont le résultat de l'expérience ; et c'est
ce qu'on est loin d'avoir fait : il n'est pas même possible d'ar-
river sur ce sujet à toute la précision que l'on doit désirer,
parce que la science de l'intelligence des brutes n'est encore
qu'à son enfance, et que les principes dont pourroit s'aider
celui qui voudroit s'y livrer, n'existent point. Si je m'en
occupe ici, c'est donc bien moins dans l'intention de donner
la solution de ce problème , que pour faire envisager les faits
qui s'y rapportent sous le point de vue que je crois le plus
propre à conduire à ce but important : aussi ne traiterai-je
cette question que d'une manière sommaire, et en me bor-
nant à citer les faits qui me paroîtront indispensables.
Mais, avant que d'entrer en matière, il est nécessaire que
je fasse remarquer que nous ne pouvons étudier le principe
des actions des animaux que dans nos propres actions , et que
les bornes de notre intelligence sont pour nous les bornes du
monde intellectuel. Nous ne devons qu'aux lumières que nous
puisons en nous-mêmes le pouvoir d'éclairer les actions des
brutes, pour en distinguer les différens caractères et en ap-
précier la nature. La comparaison de nos actions avec les leurs
est ici notre unique guide ; et ce que nous reconnoitrons être
la cause des unes, sera la cause des autres. Si la toute-puis-
sance eût créé, pour les actions des animaux, une faculté diffé-
rente de celle qui détermine les nôtres, ce seroit en vain que
nous nous efforcerions de la découvrir; elle résisteroità toutes
nos tentatives, et resteroit éternellement cachée à nos yeux.
Lorsque nous considérons d'une manière générale les ac-
tions des animaux', nous remarquons qu'elles sont simples
» loute aclion consiste dans un ou plusieurs actes intellectuels, qui
sont causes, et dans un ou plusieurs actes corporels, qui sont effets^
C'est là le sens que, dans cer article, nous donnons aux mots acte et
action, sans rien préjuger sur les actions instinctives, dont nous no
sommes point encore censés connoître les élémen'î.
23,, 54
55o ' INS
ou complexes, c'est-à-dire que les unes ne paroîssent ûc^
mander ou ne demanderoient de notre part, pour être pro-
duites, qu'un très-petit nombre de laits, d'actes intellectuels,
comme une perception , un jugement, parexemple, tandis que
les autres semblent nécessiter le concours d'un nombre plus
grand de ces actes, et même rendre indispensables des com-
binaisons de l'ordre le plus élevé-, nous voyons en outre que
les plus simples, comme les plus compliquées, se manifestent,
ou avant qu'aucune expérience ait pu avoir lieu , ou après
l'emploi et par coi>iséquent le développement des facultés
qui, dans l'état ordinaire des choses, doivent agir pour
qu'une action contingente se produise.
Il n'y a jamais eu de contestation fondée sur les actions
antérieures à toute expérience: simples ou complexes, elles
Ont toujours été considérées par les naturalistes comme ins-
tinctives ; et, en effet, il faut bien qu'une force aveugle et
nécessaire les ait fait naître, puisqu'aucune expérience n'avoit
encore pu mettre en jeu les facultés de l'être qui les luani-
festoit.
Les cris de l'enfant qui souffre et qui a besoin de secours;
la recherche de la mamelle par le petit qui vient de naître,
et l'action de téter; la fuite, déterminée parla crainte, d'un
Jeune animal qui n'a point encore appris à connoitre le
danger; la défense qu'il oppose à qui veut le saisir; l'obéis-
sance du nouveau -né accourant à la voix de sa mère, etc..
sont des actions de cette nature.
Celles qui se sont produites après que des influences exté-
rieures ont pu agir sur l'intelligence, ont seules inspiré des
doutes, quant aux principes sur lesquels elles reposent y
faute de moyens pour distinguer les contingentes des néces-
saires, ainsi que nous l'avons dit plus haut. En effet, d'une
part elles avoient été mal observées , et de l'autre on man-
quoit de règles pour les juger et pour déterminer leurs vé-
ritables caractères : deux conditions qui se lient si inti-
mement dans toutes les sciences d'observation , qii'on peut
affirmer que l'observation de tout phénomène est incomplète,
si Ton ne peut pas en même tempsTattacher ce phénomène,
par des vues générales, à ceux qui sont du même ordre
que lui.
INS 53i
I,a première marque, le premier signe d'une action élec-
tive, c'est de pouvoir être modifiée par l'expérience , de la
même manière qu'elle a été produite, et, l'expérience ne
pouvant agir que sur Tesprit, c'est dire, en d'autres termes,
que le premiersigne d'une faculté contingente est de dépendre
de rintclligence et de toujours pouvoii' agir conformément
aux circonstances variables dont elle est de nature à éprouver
l'influence. Ainsi, ce que par la suite nous dirons d'une
action , nous entendrons le dire d'une faculté, et récipro-
quement.
Les exemples de ce genre d'action sont communs : le chien
qui obéit , au lieu de fuir, à la vue d'un fouet dès qu'il le voit
en main ; qui va chercher l'objet qu'on lui désigne , au lieu de
rester indifférent à l'ordre qu'il reçoit; qui s'agite et déchire
les barreaux de sa cage, s'ils sont de bois, et qui se résigne
à son esclavage, si ces barreaux sont de fer, fait donc des
actions contingentes ; et la faculté qui en est le principe , est
une faculté modifiable, puisqu'elle reçoit l'influence des diffé-
rentes circonstances pourlesquelles ces actions se produisent.
Ce sont encore des actions du même genre que celles que
nous voyons faire au cheval qui, ayant à choisir entre deux
chemins dont un lui est connu , prend constamment ce der-
nier, quelque éloigné que soit le temps où il l'a pris pour la
dernière fois : lorsque le chien court au devant de son
maître et le couvre de ses caresses, s'il le voit se disposer à
sortir et qu'il ait envie de l'accompagner ; lorsqu'il con-
tient le troupeau dont la garde lui est confiée, dans les li-
mites précises que son maître lui a tracées : lorsque le loup
attaque sa proie à force ouverte dans la solitude des bois,
ou s'en empare par surprise dans le voisinage des habita-
tions, etc. Ces actions , comme les précédentes, n'ont rien
de nécessaire et pouvoient ne point avoir lieu. La moindre
circonstance suffisoit pour déterminer le cheval" à prendre le
chemin qu'il n'avoit point encore parcouru: si le chien, par
sa propre désobéissance, avoit mécontenté son maître, bien
loin d'accourir à lui avec joie, il ne s'en seroit approché
qu'en tremblant, et l'on sait que cet animal n'acquiert que
par l'éducation le talent admirable que nous lui connoissons
pourla earde des troupeaux, etc.
532 INS
Par-contre le caractère des actions instinctives sera d'être
lixes et de se reproduire constamment les mêmes dans toutes
les situations. En conséquence nous rangeons parmi ces
actions celles que nous présentent le chien , lorsqu'il va en-
fouir dans la terre les restes de son repas : le cheval et le renne ,
lorsqu'ils enlèvent la neige qui recouvre la terre, pour dé-
couvrir la nourriture dont ils ont besoin; les vaches, lorsque,
menacées par la présence d'un loup , elles placent leurs
petits au milieu d'un cercle dont leurs tttes et leurs cornes
forment la circonférence; les castors, lorsqu'ils élèvent leurs
huttes et leurs digues, lorsqu'ils Aont couper le bois néces-
saire à leurs constructions, lorsqu'ils réparent les ravages
que leurs ennemis ou le temps peuvent avoir faits à leur
habitation ; le lapin, lorsqu'il se creuse un terrier; l'oiseau,
lorsqu'il se construit un nid, etc. En effet, toutes ces actions
se présentent constamment à nous comme invariables dans
ce qu'elles ont d'essentiel. Le chien cache ses alimens super-
flus, quand même il n"a jamais eu besoin d'y avoir recours;
le cheval qui enlève avec ses pieds la neige sous laquelle
l'herbe ou la mousse sont cachées, le fait même quand il voit
la neige pour la première fois, et quand il est repu , comme
quand il a faim. Le castor construit dans toutes les situations,
dans Tesclavage le plus étroit , comme au sein de la plus
grande liberté; quand les abris lui sont les plus inutiles,
comme lorsqu'ils lui sont le plus nécessaires. Ces vaches, si
ingénieuses pour défendre leurs petits quand elles sont en
troupe, ne changeroient rien à leurs moyens de défense,
quand elles seroient réduites au plus petit nombre , et que
ces moyens deviendroient insuffisans ; ce lapin, si soigneux
à se creuser une retraite , ne sait ni la cacher ni la construire
suivant les lieux , la nature de ses ennemis ou celle des saisons,
etc.; et les dernières classes du règne animal nous offriroi^nt
des exemples encore plus frappans , plus extraordinaires.
Cette distinction étant bien établie empiriquement entre les
actions contingentes et les actions instinctives, si nous nous
arrêtons à considérer ces dernières , nous trouvons qu'elles
sont de nature très- différente , qu'elles s'exercent constam-
ment ou ne se manifestent qu'à certaines époques ; qu'elles
sont toujours en petit nombre,: mais qu'elles vont en gugmen-
mS , • 533
tant et de nombre et d'importance, à mesure que les ani-
maux, sous le rapport de l'organisation, s'éloignent davantage
de l'espèce humaine.
Pour établir ces propositions , il nous suffira de quelques
exemples : les animaux dont nous A'^enons de parler, nous les
fourniront eux-mêmes. IN'y a-t-ilpas, en effet, une différence
immense entre les actions involontaires et toujours très-
simples qui sont occasionées par la peur, la colère, l'amour,
la faim , etc. , et celles que nous venons de citer, toutes re-
marquables par leur complication? Les unes semblent pure-
ment organiques, tandis que pour les autres Tintelligence
paroit indispensable. De plus, ce n'est qu'à certaines époques
et durant un temps limité que beaucoup d'animaux vont à
la recherche de leurs femelles, qu'ils se préparent des gîtes,
qu'ils construisent leurs nids. Enfin le chien, le cheval,
le bœuf, nous présentent peu d'actions que Ton puisse attri-
buer à l'instinct; et cependant leur vie est assez active, c'est-
à-dire que leurs actions contingentes la remplissent presque
tout entière et suffisent à la plupart des situations assez
nombreuses dans lesquelles ils sont à portée de se trouver. Ils
nous présentent de même cette espèce de dégradation de
l'intelligence qui se manifeste par la diminution des actions
électives, comparativement aux actions instinctives et né-
cessaires. Le chien nous fait voir un très-grand nombre des
premières, et un très-petit nombre des secondes; le bœuf,
au contraire, passe sa vie active dans d'assez étroites limites,
et si ses actions instinctives ne sont pas très- nombreuses,
elles le deviennent par comparaison avec le nombre de ses
actions contingentes.
Mais ces vérités acquerroient beaucoup plus d'évidence, si
nous parcourions le règne animal dans son entier : nous
verrions que les quadrumanes et les carnassiers, qui se trou-
vent placés au haut de l'éclielle des êtres intelligeiis, sont en
quelque sorte des animaux libres, en comparaison des insectes,
par exemple, dont toute l'existence semble dominée par
une force uniforme et constante , qu'on pourroit comparer
à celles qui mettent en mouvement les machines que nous
construisons , si nous étions fondés à trouver une véritable
analogie entre les puissances de l'intelligence et celles du
534 ' IN$
monde matériel. Enfin, l'action instinctive du chien la pins
compliquée, celle qui exigeroit de notre part le concours
du plus grand nombre d'actes intellectuels , n'est absolument
rien en comparaison des actions de cette nature que nous ob-
servons chez les animaux invertébrés, et principalement chez
les insectes. Quelques actes isolés de prévoyance sont en
effet ce qu'en ce genre le chien et les mammifères voisins
Tious offrent de plus remarquable : chez les insectes, au con-
traire, toute l'existence, quelque variée qu'elle paroisse,
ne semble se composer que d'une seule action nécessaire ,
mais compliquée à l'infini , de laquelle rien d'extérieur ne
peut les détourner et vers laquelle ils tendent invincible-
ment. Pour ne citer qu'une des espèces les plus connues ,
l'abeille, qu'y a-t-il dans les actions d'aucun mammifère
qui approche de la sagacité, de la prévoyance, de la force
de combinaison que fait supposer l'industrie de cet animal ?
Rien , après l'intelligence de l'homme , ne paroît plus
propre à exciter notre étonnement et notre admiration que
cette puissance qui porte invariablement un vtre k suivre
nn plan compliqué d'actions qui se lient intimement en une
seule, dont la durée peut être de plusieurs jours, de plu-
sieurs mois, at qui n'ont toiitcs qu'tin même but. C'est que
ce ne sont point les actions qui paroissent naître de combi-
naisons profondes, de calculs compliqués, de vues ingé-
nieuses qui distinguent véritablement l'homme des autres
êtres intelligens: nous trouvons, comme nous venons de le
voir, des preuves de l'existence de ces actions chez les
animaux les plus imparfaits, et à un degré que nous ne
pouvons peut-être pas dépasser de beaucoup ■ c'est la liberté
seule, la faculté de connoître , qui fait la véritable supé-
riorité de l'intelligence humaine.
Le caractère de variabilité qui est donné aux actions con-
tingentes, et celui d'invariabilité qui est attribué aux actions
nécessaires, ne doivent cependant pas être pris dans un sens
tout-à-fait absolu. L'animal conserve toujours l'exercice de
ses sens et le degré d'intelligence qui lui est propre, et il
les emploie l'un et l'autre de la manière la plus favorable
a l'action nécessaire à laquelle il est porté. L'exercice de
ces facultés est même toujours proportionné au degré de né-
INS 535'
ccssité des actions; plus le besoin, le sentiment qui entraî-
nent l'animal à agir, sont impérieux, plus aussi ses facultés
sont captives : c'est pourquoi l'instinct nous paroit beau-
coup plus fort chez les uns que chez les autres. 11 n'y a
aucune comparaison à faire à cet égard entre le hamster qui
se forme des magasins pour Thiver et le chien qui cache sa
nourriture surabondante : rien ne peut détourner le premier
de son action, et, au contraire, la moindre circonstance
peut distraire le second de la sienne. Mais il y a plus : de
nombreuses observations font penser qu'une longue habitude
transforme en quelque sorte les actions contingentes en ac-
tions nécessaires, et que celles-ci ne sont pas soustraites sans
réserve à une action long-temps continuée des circonstances
extérieures et accidentelles, et qu'elles prennent quelque
ehose des actions électives. Plusieurs animaux, en effet, nous
en donnent la preuve : les chiens de chasse proprement dits
n'ont besoin d'aucune éducation pour se livrer à cet exercice
et poursuivre les bêtes fauves, tandis que les barbets, les dogues,
par exemple, n'y sont point naturellement portés. D'un autre
côté, on assure que les lapins, tenus pendant plusieurs géné-
rations dans des lieux oîi ils ne peuvent fouir, donnent nais-
sance à des races qui ne sont plus portées à se creuser des
terriers; et Leroi dit positivement que les jeunes renards
qui se trouvent près des lieux habités, montrent par leurs
actions, même avant d'avoir quitté le nid, beaucoup plus
de prudence et de ruse que ceux qui vivent dans les con-
trées sauvages où ils ont peu d'ennemis à craindre et à fuir.
C'est qu'il n'est pas plus ici qu'ailleurs de lois absolues. La na-
ture est un ensemble harmonieux dont toutes les parties sont
liées, où toutes les transitions sont adoucies, et qui présente
avec d'autant plus de force ce caractère d'unité qu'elle a dû
recevoir de son auteur, que l'intelligence qui la contemple
a su se placer dans un point plus élevé et enibrasser une plus
grande étendue de phénomènes; mais cet ordre suppose des
rapports différens , permet des rapprochemens et des distinc-
tions, et ce sont eux que nous avons dû d'abord chercher à
faire connoître.
Après avoir considéré les actions des animaux en elles-
«itmes, et avoir essayé de distinguer, par leurs propres ca-
556 INS
ractéres, celles qui sont électives et contingentes de celles
qui paroissent nécessaires, nous devrions montrer à quels
actes intellectuels ou plutôt à quelle cause les unes et les
autres sont dues; par là nous établirions le point de sépara-
lion présumable entre l'intelligence de l'espèce humaine et
rintelligcnce des animaux, séparation qui doit être le but
principal de toutes les recherches de la nature de celles qui
font l'objet de cet article.
Malheureusement l'entière solution de ce problème ne nous
paroît point encore possible. Pour le résoudre, il faudroit
que l'on possédât, ce qu'on n'a pu encore obtenir, une clas-
sitication méthodique et complète des modifications que
notre esprit peut éprouver , c'est-à-dire, des opérations dont
il est susceptible ou des idées qu'il peut acquérir. En effet,
comme nous l'avons dit, nous ne pouvons avoir que la con-
science de nos propres actes intellectuels; ceux des animaux
seront éternellement cachés à notre perception. Nous ne
parvenons à les concevoir que par induction , qu'au travers
de leurs actions, qu'au milieu des mouvemens de leurs or-
ganes ; et l'on sait combien de causes différentes peuvent
produire des mouvemens semblables.
Nous voyons cependant que les animaux , ceux des pre-
mières classes surtout, sont susceptibles d'attention; qu'ils
reçoivent par leurs sens des impressions analogues à celles
que nous recevons par les nôtres ; que ces impressions lais-
sent des traces qui se conservent et qui les rappellent ; qu'elles
forment les unes avec les autres des associations nombreuses
et variées; qu'il s'en déduit plusieurs jugemens, plusieurs
rapports, etc. C'est là que se bornent les facultés dont nous
pouvons apercevoir en eux des traces avec une certaine
apparence de fondement ; mais les modes, les formes, aux
quels leurs perceptions sont soumises, nous les ignorons; et
nous ne pouvons établir quelles sont les espèces de rapports
qu'ils ne saisissent pas, et qui formeroient conséquemment
l'apanage exclusif de l'homme. Au reste, si nous ne trou-
vons pas réunies dans une seule espèce d'animal toutes les
facultés de cette nature que nous rencontrons en nous, il
çeroit possible qu'un examen attentif en fît reconnoître un
grand nombre dans l'ensemble des espèces qui constituent
• ms 557
îe règne animal, ef de telle sorte que ces facultés pussent
elles-mêmes, comme les qualités physiques, servir à faire
distinguer ces espèces l'une de l'autre. Mais, ce qui nous
paroit hors de doute , c'est que tous les animaux sans excep-
tion sont dépourvus du sens intime de la perception du moi
et de la faculté de réfléchir; c'est-à-dire, de considérer intel-
lectuellement, par un retour sur eux-mêmes, leurs propres
modifications : ils ignorent qu'ils reçoivent l'impression des
corps extérieurs, qu'ils pensent, qu'ils agissent ; les actes de
leur esprit, comme les mouvemens de leur corps, n'ont que
des causes extérieures. Dépourvus ainsi de toute connois-
sance, ils le sont de toute liberté; car c'est par l'acte seyl
qui nous apprend à nous counoitre , que nous apprenons à
vouloir librement.
C'est principalement à la privation du sens intime de cette
qualité précieuse qu'il faut attribuer l'infériorité des animaux
à l'égard de l'homme; car, leur accordàt-on toutes les autres
facultés que nous reconnoissons en nous, ils seroient encore
loin de nous égaler. Tout chez eux, dans ce cas -là même,
n'auroit lieu que fortuitement; les phénomènes ne se présen-
teroient encore à eux qu'au hasard : ils ne pourroient ni en
faire un choix, ni les réunir, ni les accumuler, ni les classer
de manière que leurs facultés pussent en tirer ces rapports
nombreux et variés que nous parvenons à en obtenir ; et
il résulteroit encore de là cet autre caractère, propre à
distinguer les actions instinctives de toutes les autres, que
toutes celles qui supposeroient la réflexion seroient des
actions de ce genre.
Je sais que plusieurs auteurs, et principalement Condillac,
ont pensé que les animairx réfléchissent ; mais ils n'ont pu faire
reposer cette opinion que sur leurs actions invariables, que
nous avons dû regarder comme instinctives. Et comment la
faculté la plus indépendante , celle d'où toute liberté découle ,
seroit-elle exclusivement enchaînée dans des actions néces-
saires? 11 seroit contradictoire de l'admettre. Si les provi-
sions que nous voyons faire au chien étoient l'effet d'une
véritable connoissance , c'est-à-dire, si la réflexion lui avoit
appris tout ce qu'il auroit fallu qu'il sût , et ce qu'il ne pou-
voit e"Videmment savoir sans elle , pour prévoir et pour agir en
538 IIS^S
conséquence , îl ne se serolt pas borné à faire des provisions de
bouche, il en auroit fait pour s'abriter, pour se coucher,
en un mot, pour tous ses besoins; et nous pouvons appliquer
ce raisonnement à tous les animaux pourvus d'instinct, et
formés de manière à produire ces actions isolées dont l'exis-
tence ne peut être conçue par nous qu'autant que nous con-
sidérons la perception du moi et la réflexion comme en étant
les causes.
D'autres psychologlstes , ayant remarqué que la force de
réflexion étoit ordinairement proportionnée à l'intensité des
idées, et que celles-ci avoient d'autant plus d'empire, sur
l'esprit que nous avons plus de disposition à les acquérir, en
avoient conclu que cette faculté étoit constamment dépen-
dante de chaque dispositioh , de chaque penchant, et que,
si les animaux ne la manifestent que dans quelques cas seule-
ment, c'est que leurs penchans sont en petit nombre. Mais
cette explication ne concorde pas plus que la précédente avec
les faits, et surtout avec ce caractère de liberté qui distingue
le sens intime de toutes nos autres facultés. En effet, son pre-
mier acte nous apprend notre puissance sur nous-mêmes, et
c'est dans cette puissance seule que nous trouvons un témoi-
gnage de notre liberté. Lorsque nous avons besoin d'une image,
d'un souvenir, d'un jugement, ils se présentent, ou non, sui-
vant la disposition de nos organes, et s'ils naissent, c'est,
comme on sait, toujours spontanément et d'eux-mêmes, dans
le cas où nous les appelons' avec le plus d'ardeur, comme
dans celui où ils se présentent sans que nous les sollicitions.
La réflexion . au contraire, lorsqu'elle s'est une fois manifestée,
qu'elle nous a une fois révélés à nous-mêmes, reparoit dès que
nous réclamons son secours, dès que nous voulons qu'elle de-
vienne active ; nous ne pouvons pas nous séparer de notre moi,
et vouloir la réflexion, c'est réfléchir. Il suit de là que les ani-
maux exerceroient cette faculté, s'ils la possédoient, dans leurs
penchans les plus foibîes , comme dans leurs besoins les plus
pressans, dès qu'elle pourroit les servir; et les faits nous
prouvent qu'ils n'en agissent point ainsi. Il est bien certain
i Je n'emploie pas le mot de volonté, parce qu'il est inséparable
de l'idée de liberté pour la plupart des esprits. .
» INS • 55o
que, pour fous les animaux iiidistincfcir.enf , le besoin de
nourriture est le plus puissant sur les individus, et qu'il est
bien plus important pour leur existence, pour leur moi, de
le satisfaire, que de satisfaire le besoin de s'abriter; et nous
voyons cependant beaucoup d'animaux se creuser des ter-
riers, c'est-à-dire, paroître prévoir la nécessité d'un abri, et
ne pas prévoir, lorsqu'elle devra se faire le plus vivement
sentir, la nécessité d'une provision d'alimens.
Toutes les autres tentatives qui ont eu pour objet d'expli-
quer d'une manière générale, et sans admettre de faculté
particulière, les actions des animaux, n'ont pas été plus
heureuses; et on pourroit en dire autant des explications
qui ont été données des actions instinctives en particulier.
Pour éviter les contradictions que nous venons de faire
remarquer, des philosophes ont pensé que les actions de ce
dernier genre dcpendoient d'une forme particulière du cer-
veau, et n'étoient en quelque sorte qne des actions méca-
niques. Renfern;f!c dans ces simples termes , cette théorie
scroit plus difficile à admettre encore que les précédentes,
et ne tireroit d'un embarras que pour plonger dans un autre:
car qr'est-ce que cette forme, et sur quelle analogie porte-
t-clle ? Elle suppose un genre de preuves qu'on n'a point
encore données. Sans doute on trouvera dans la struc-
ture du cerveau des animaux des formes qui se lieront avec
leurs facultés intellectuelles ; mais, si cette idée repose sur
des vraisemblances très-fortes, aucune expérience ne la dé-
montre encore ; et l'extrême difficulté d"un tel travail le
rendra peut-être long-temps encore impossible. Si quelques-
unes de nos idées qui paroissent ùtre complexes n'ont point
encore été analysées , si on n'en a point encore démontré
l'origine et séparé les élémens, on n'a pas démontré non
plus l'impossibilité de cette analyse ; et on ne peut faire
reposer une théorie de la nature de celle qui nous occupe,
sur des analogies négatives, sur des suppositions que, d'un
moment à l'autre, on peut voir détruire.
Il est un ordre de phénomènes différens des précédens,
dans lequel on pourroit, avec plus de fondement et en
s'appuyant sur des analogies plus sûres, trouver une expli-
cation aux actions instinctives : ce sont les phénomènes de
540 IiyS
l'habitude. Nous en avons dit un mot au commencement de
cet article , et auparavant nous en avions parlé d'une manière
plus spéciale dans le tome XI des Annales du Muséum d'histoire
naturelle, en donnant la description du chien des habitans
de la Nouvelle-Hollande. L'habitude d'une action consiste en
ce que l'acte corporel se reproduit sans qu'il y ait effort et
qu'on ait conscience de l'acte intellectuel qui en a été la
cause primitive. Il semble qu'il s'établisse alors entre les or-
ganes et les besoins naturels, les appétits, lespenchans, les
idées, etc. (qui, dans l'origine, avoient mis l'intelligence en
mouvement pour qu'à son tour elle fit agir les membres),
une dépendance immédiate telle que l'intermédiaire de
l'esprit n'est plus nécessaire pour que les actions se pro-
duisent. Dans ce cas ces actions ne paroissent plus se com-
poser d'actes intellectuels et d'actes corporels, mais seule-
ment de ces derniers, et des différentes modifications de
nous-mêmes qui sont de nature à mettre en activité notre
intelligence ' et par suite nos organes. Px'esque toutes nos
actions peuvent prendre ce caractère de l'habitude , et le
plus simple examen de nous-mêmes suffit poumons en donner
une foule de preuves. Or, si cette espèce de dépendance
pouvoit exister naturellement entre les besoins et les organes,
les phénomènes de l'instinct trouvcroient une explication
facile : la nature auroit primitivement établi cette relation
entre eux; et, en effet, nous la découvrons en nous-mêmes,
pour les actions compliquées comme pour les actions simples.
Nous n'avons pas plus besoin du secours de la pensée que
les animaux pour nous arrêter, reculer ou fuir à la vue d'un
objet nouveau qui nous effraie. I,e sentiment de la peur
suspend dans ce cas le mouvement des muscles ou les excite,
sans que l'intelligence paroisse y prendre la moindre part.
Et tout ne semble-t-il pas être organique dans l'exercice de
la lecture, dans celui des armes, dans le mouvement des
doigts sur un instrument de musique ? Nous reconnoissons
les caractères et articulons les sons qu'ils représentent ,
1 Je n'ai pas besoin de faire remarquer que je n'envisage ici que la
succession naturelle des faits, et que je ne m'occupe ni de leur cause ni
du principe général de l'activité.
* INS 541
quoique notre esprit soit entièrement préoccupé par le sens
de ce que nous lisons : le maître d'armes suit de son fleuret
le fleuret de son adversaire , sans qu'aucune pensée vienne
contribuer à ses rapides mouvemens : le pianiste parcourt
des deux mains son clavier dans tous les sens et suivant
toutes les combinaisons que les dix doigts peuvent former,
malgré l'attention exclusive qu'il donne aux notes placées
sous ses yeux et qu'il fait rendre à son instrument. Tous
ces exercices, comme toutes les pratiques de l'industrie,
sont même d'autant plus parfaits que la pensée leur est
devenue plus étrangère ; tant qu'elle leur est encore né-
cessaire , on les possède mal , et en ce point c'est vérita-
Llement en se rapprochant des animaux qu'on se perfec-
tionne. Il n'y a rien d'absolument diff'érent dans ce que pro-
duit l'instinct, et la comparaison du tisserand et de l'araignée
est bien plus exacte et plus juste qu'on ne l'a pu penser. Ces
deux ordres de phénomènes pourroient même tellement se
confondre, qu'on feroit en quelque sorte de l'instinct avec
de l'habitude, si ce n'est de l'habitude avec de l'instinct:
une personne qui seroit exercée , dès son enfance, à ramasser
et à cacher tout ce qui lui reste de ses repas, finiroit par le
faire aussi machinalement et aussi inutilement que le chien
domestique.
Les principes de psychologie qui sont professés dans nos
écoles, ne sont point contraires aux idées que nous venons
d'exposer. On a toujours distingué en philosophie deux or-
dres de phénomènes , ceux de l'intelligence et ceux de l'ac-
tivité; d'où l'on admettoit implicitement deux systèmes d'or-
ganes, sièges de ces phénomènes. L'intelligence, c'est-à-dire,
les perceptions et les idées de toute nature, agissant d'une
manière quelconque sur l'activité , déterminoient la volonté,
et les actions se produisoient. Malheureusement on a obscurci
cette idée, d'ailJeurs très- claire, en séparant des puissances
propres à agir à la manière des pensées, pour les réunir au
système de l'activité: puissances d'un ordre très- particu-
lier, il est vrai , mais qui ne sont pas moins que les premières
des causes d'actions. Je veux parler des sentimens, des be-
soins, des passions, dont le siège doit être aussi distinct de
celui j^es pensées que ce dernier l'est du siège de la volonté.
542 INS "
D'après ce que nous avons dit, ce seroit sinon dans îe prin-
cipe, du moins dans les organes de l'activité, que résideroient
les facultés instinctives; et les phénomènes de Ihabitude,
considérés sous ce point de vue, s'expliquant très-naturelie-
ment, présenteroient un nouveau genre de preuves aux idées
que nous avons émises dans cet article. En effet, on conçoit
que l'impression fréquente de l'intelligence ou de toute autre
cause sur l'activité, ou plutôt sur l'organe qui en est le siège ,
doit s'approfondir par l'influence répétée de Tune et par
l'exercice de l'autre, et finir par devenir ainsi une forme
nécessaire d'action, comme les actions instinctives sont le
résultat d'une forme nécessaire, mais d'une forme qui, au
lieu d'être acquise, est primitive et essentielle à la nature
des êtres qui présentent ces actions. En rapportant un exemple
à l'appui de cette explication, nous la rendrons encore plus
sensible. Lorsqu'un homme , après avoir bien conçu et bien
gravé dans sa mémoire les principes de l'équitation, essaie
pour la première fois d'exercer cet art, aucun de ses mou-
vemens, arcjnc de ses attitudes, malgré sa science, ne
sont ce qu'ils doivent être -. son corps se porte en avant ou en
arrière, tandis qu'il devroit rester dans une situation verti-
cale ; ses jambes se remuent quand elles devroient être im-
mobiles ; les mcuvemens de sa main ne sont point en accord
avec ceux de ses pieds ; en un mot, aucune harmonie n'existe
entre lui et son cheval. D'abord , ce n'est que par une grande
contention d'esprit qu'il parvient à faire un des mouvemens
prescrits dans un cas donné , puis un autî"e qui soit en
accord avec le premier, et enfin à exécuter tous ceux que
l'art commande ; et ce que je dis pour ce cas particulier, ]e
pourrois le dire pour tous les autres. Petit à petit le même
effort d'esprit devient de moins en moins nécessaire ; les
mouvemens qui se fuisoient avec le plus de difficultés et le
plus lentement, se font avec aisance et promptitude, et cela
dès que l'esprit le juge nécessaire; enfin, après un exercice
plus ou moins long, l'intelligence ne prend plus aucune
part à la pratique de cet art : tout ce qu'il exige, se fait en
quelque sorte de soi-même. Si le cheval fait un mouvement
contraire à celui dont on lui avoit donné le signe, c'est ce
xaouveiiient seul . ou plutôt celui qu'il communique à sof«
• • INS • 543
cavalier , qui appelle de la part de celui-ci le mouvement
qui le redressera, et cela instantanément, avec la prompti-
tude de la paupière qui se ferme pour garantir l'œil , ou de
la tète qui se détourne pour éviter un coup : dès-lors tous
ces principes raisonnes par lesquels nous avons vu commencer
l'exemple que nous venons de détailler, sont transformés en
desimpies associations de mouvemeus, en un pur mécanisme.
Presque toutes nos actions peuvent prendre ce caractère;
aussi rencontrons-nous tous les degrés par lesquels l'hommepeut
passer en ce genre de moditicalion , lorsque nous parcourons
les différentes classes dont se compose une nation et l'ensemble
ou la succession des divers peuples, comme nous trouvons tous
les degrés de l'instinct , lorsque nous parcourons l'ensemble
des animaux. Il n''y auroit même rien de trop fort à supposer
des hommes réduits à un tel état d'abrutissement, qu'ils
fussent incapables d'exercer aucune des facultés libres de leur
intelligence; et je ne serois point étonné qu'on en eût trouvé
de semblables autrefois chez les Egyptiens, et qu'aujourd'hui
il ne s'en rencontrât encore de tels chez les Chinois et chez les
Indiens. Cependant la différence entre ces hommes dégradés
et les animaux seroit encore immense. Ceux-ci sont condaznnés
à rester éternellement soumis à l'influence fortuite des cir-
constances; nous, au contraire, qui sommes susceptibles d'ap-
précier et de connoitre ces circonstances, nous pouvons exer-
cer sur elles une autorité puissante : d'où il suit que l'homiue
seul est susceptible d'une éducation véritable.
L'exercice peut développer les facultés des animaux; en.
peut leur faire contracter des habitudes profondes, et, par
le secours de l'homme, renforcer ou affoiblir les penchant
qui lui seroient utiles ou nuisibles.
L'espèce humaine, exclusivement à toute autre, a la fa-
cullé d'être éclairée , d'acquérir des idées pures , de s'en faire
le type du juste , du beau , du vrai , et de travailler à son
perfectionnement : c'est là son véritable apanage , et c'est à la
faculté de se connoître et à la réflexion qu'elle en est redevable.
C'est donc cette faculté qui doit faire le principal objet de
nos soins e! le but de nos efforts dans la culture de I0U3
les autres. C'est par la réilexion, en effet, que celles-ci se
fortifient , s'élèvent , s'agrandissent , quoiqu'elles scient le
544 ' INT ''
partage des animaux, comme le nôtre. Ainsi, l'instrument le
plus méprisable s'ennoblit suivant la main qui le dirige, et la
fin pour laquelle on l'emploie. (F. C. )
INTELLIGENCE. Voyez Instinct.
INTERMÈDE. [Chim.) Un intermède étoit , pour les an-
ciens chimistes, i." un corps au moyen duquel on pouvoit
séparer un autre corps d'un troisième auquel il étoit uni;
tel étoit l'acide sulfurique , au moyen duquel on sépare
l'acide nitrique du nitrate de potasse ; 2.° un corps qui ser-
voit à opérer la combinaison d'un second corps avec un
troisième, auquel ce second corps, à l'état de liberté , ne se
seroit pas uni. Ainsi la potasse étoit un intermède par le-
quel l'huile, qui, à l'état de pureté, est insoluble dans l'eau,
devient susceptible de s'y dissoudre lorsqu'elle est unie à cet
alcali. ( Ch.)
INTERMÉDIAIRES [Stipules], {Bot.)-, naissant sur la tige
entre des feuilles opposées. On en a des exemples dans le
café, le gardénia, etc. Ces stipules, dans les rubiacées, for-
ment verticille avec les feuilles, et semblent n'être que des
feuilles avortées. (Mass.)
INTERNE [Bouton, Gemma]. {Bot.) Au lieu de faire saillie
à l'extérieur dès qu'il commence à se former, il reste caché
sous Técorce jusqu'à l'époque du bourgeonnement : tels sont
ceux de l'acacia, du sumac, etc. (Mass.)
INTERPOSITIVES [Cloisons]. {Bot.) M. Mirbel nomme
ainsi les cloisons placentériennes qui , partant, en divergeant,
de l'axe central d'un péricarpe multivalve, vont chacune
s'unir à Tune des sutures, en sorte qu'elles alternent avec
les valves : on en a des exemples dans le convoL'ulus , le do-
donœa, etc. Au contraire, les cloisons placentéi-iennes sont
dites oppositives (î^aZv/s contraria) , lorsqu'elles rencontrent,
par leur bord , le milieu des valves .- on en a un exemple
dans le paullinia pinnata. (Mass.)
INTERPRÈTE. {Omith.) L'oiseau auquel Linnseus a donné
cette épithète , est le tourne-pierre ou coulon chaud , tringa
interpres. (Ch. D.)
INTERROMPU [Épi], {Bot.), composé de ileurs disposées
sur Taxe en groupes qui ne se touchent point : tel est l'épi
de la lavande, du bananier, etc. (Mass.)
» • INT • 64S
INTERRUPTÉ- PENNÉE [Feuille], (Bot,)-, pennée avec
interruption, c'est-à-dire, pennée avec des folioles alterna-
tivement grandes et petites ; telles sont les feuilles de là
pomme de terre, de l'aigremoine, de la reine des prés, etc.
(Mass.)
INTESTINAUX. (Entomoz.) Dénomination que l'on em-
ploie quelquefois seule pour désigner les animaux qui vivent
dans l'intérieur des autres, que M. Rudolphi a appelés erz-fo-
zoaires, et dont nous donnerons l'histoire générale à l'article
Vers intestinaux. Voyez ce mot. (De B. )
INTESTINS. (Anat.) Voyez Tube intestinal- (F. C.)
INTORSION. {Bot.) Beaucoup de plantes grimpantes n'ont
ni vrilles , ni griffes; mais elles roulent leurs tiges flexibles
autour des végétaux voisins , et s'élèvent en les serrant étroi-
tement. Linnaeus a donné à ce phénomène le nom d'intor-
sion. Dans certaines espèces ( haricot , liseron), les circonvo-
lutions de la tige vont toujours de droite à gauche : dans
d'autres (houblon, chèvre -feuille), elles vont toujours de
gauche à droite. Si on roule ces plantes dans la directioa
qui ne leur est pas naturelle, elles languissent comme des
animaux contrariés dans leurs habitudes; aussitôt qu'on leur
rend la liberté, elles rebroussent chemin pour reprendre la
direction qui leur est propre. (Mass.)
INTOUM. (Bot.) Plante corymbifère des Antilles, rangée
avec doute par Jacquin dans le genre Bellis, et nommée avec
raison par Linnaeus edrpta punctata. Jacquin ditqu'on peuten
extraire un suc vert qui noircit à l'air, et qu'on pourroit,
en fixant cette couleur par quelque moyen, remployer pour
les teintures noires et pour faire de l'encre. II ajoute qu'un
esclave , originaire de la Guinée , lui avoit assuré que , dans
son pays, où cette plante étoit nommée intoum , on l'em-
ployoit à Fextérieur pour augmenter la couleur noire de la
peau. (J.)
INTRAFOLIÉE [Hampe]. {Bot.) Il y a des hampes qui nais-
sent d'un autre point que les feuilles {convallavia majaUs ,
etc.); mais ordinairement elles naissent entre les feuilles
radicales ( pissenlit , bellis perennis , etc. ). ( Mass. )
INTRANSMUTABLES. {Entom.) Ce nom, qui est tiré du
latin , signifie qui ne subissent pa$ de transformation ou de mé-
ili • 35
546 ' îNt
tamorpliose, et il a été donné par John Rai aux insectes qui
ne changent pas de formes, comme les araignées, les pous,
les cloportes, par opposition à la plupart des insectes ailés,
qui étoient appelés transmûtables. ( C. D.)
INTRICARIE. (Foss.) M. de Gerville , auquel on doit déjà
la connoissance d'une très -grande quantité de corps organisés
fossiles des départemens de la Manche et du Calvados, a
trouvé à Saint-lloxcl près de Bayeux un polypier fragile,
dégagé de toute gangue et d'un genre nouveau. Ce corps j
dont la grandeur est inconnue, étoit déposé à quatre pieds au^
dessous de la surface du sol, dans une cavité qui contenoit
tine sorte d'ocre ferrugineuse en poussière. Les couches des
environs étant du calcaire à oolites, et celles qui se trouvent
à quelques pieds au-dessous du lieli oii étoit ce polypier
étant une argile ancienne , grise et dure , dans laquelle oii
trouve de grandes coquilles bivalves, auxquelles M. Sowerby
a donné le nom de plagiostoma gigantea, il y a tout lieu de
croire que ce polypier dépend d'une couche plus ancienne
que la craie : tous les corps que l'on trouve fossiles aux en-
virons étant entourés de gangue dure, il est très- étonnant
que ce polypier se soit trouvé libre et dégagé de toute
pétrification.
Je propose d'en former, sous le nom d'Intricarie , un genre!
nouveau dont voici les caractères : Polypier pierreux, solide
intérieurement, à expansions composées de rameaux cylindriques
aimstomosés en filets; cellules des polypes hexagones, alongéesi
à bords relevés et couvrant toute la surface des rameaux.
Les débris de la seule espèce que je connoisse , à laquelle!
J'ai donné le nom d'intricaire de Bayeux , mfrfcarm bajocensiSf
ont plus d'un pouce de longueur, sur neuf lignes de diamè-
tre , et sont composés de rameaux anastomosés en dillérens
sens et imitant des mailles irrégulières d'un filet qui ont
d'une à cinq lignes d'ouverture. Ces rameaux ont environ
une demi -ligne de diaujétre et sont couverts de cellules
qui sont moitié plus longues que larges. Leurs bords relevés
forment une sorte d'écorce raboteuse qui les recouvre.
On voit la figure de ce polypier dans l'atlas de ce Diction-
naire. (D. F.)
IISTRIT. {Min.) M. Pinkerton a donné ce nom aux roches
mr * 547,
mélangées dans lesquelles une espèce minérale est cimentée
avec d'autres par une pâte. (B,)
INTSI. ( Bot. ) Genre indiqué par M. du Petit -ThouarSr
{Geti. noi'. Madag., pag, 22 ) pour une plante de l'ile de
Madagascar , de la famille des légumineuses , die Vennéandrie
monogjnie de Linnœus , qui se rapproche des guilandina par
son fruit; des amorpha, par sa corolle; des tamarindus, par
ses étamines.
C'est un grand arbre, dont les feuilles sont ailées , com-
posées de cinq folioles; les fleurs disposées en corymbe. Leur
calice est campanule à sa base, partagé en quatre lobes à
son limbe; la corolle composée d'un seul pétale onguiculé,
opposé à l'ovaire; les étamines au nombre de neuf; les fila-
mens inégaux, dont trois sont seuls fertiles, inclinés et pluâ
longs; l'ovaire supérieur, surmonté d'un style et d'un stigmate-
Le fruit consiste en une gousse oblongue, comprimée, renfer-
mant trois à quatre semences aloagées, dont l'intervalle est
rempli de moelle.
Cette plante se rapproche beaucoup du cain heàsi, seu me-
trosideros amboinensis, Rumph , Amh., 3, pag. 21 , tab. 10,
(PoiR.)
INTSIA. {Bot.) Nom malabare, cité par Rhéede, d'ua
acacie, acacia intsîa, rangé dans la section des espèces épi-
neuses à feuilles bipennées. Il ne faut pas le confondre avec
Vintsi de Madagascar, genre nouveau de légumineuses , établt
par M. du Petit-Thouars sous le même nom intsia. Voyez ci-
dessus. (J.)
INTSJIN [Bot.), nom japonoîs, cité par Kœmpfcr, d'une
aurone, qui est Yartemisia capiUaris de M. Thunberg. (J.)
IN-ïSTA. {Bot.) Kœmpfer cite ce nom japonois pour une
plante laiteuse, rampante, à feuilles de nummulaire, tapis'^
sant les rochers; et qu'il prend pour un lierre. M. Thunberg
croit que c'est plutôt un figuier , ce qui est probable, si elle
a des stipules, comme il le dit ; et alors on peut la rapprocher
Au ficus scandens de M. de Lamarck, qui est vivant au jardin
du Roi. (J.)
IînTURIS {Bot.), nom substitué par Gaza au nom grec
capparis, suivant C. Bauhin, pour désigner le câprier. (J.)
INTYÇELLIE, IntjbeUia. {Bot.) [Chicoracées , /uss. ~ Sjn^
54S ' INT '
^énésie polygamie égale , Linn.] Ce genre de phintes, que nous
avons proposé dans le Bulletin des sciences de 1821, p. 124,
appartient à l'ordre des synanthérécs , et à la tribu naturelle
des laclucées, dans laquelle nous le plaçons immédiatement
auprès de notre genre Pterotheca. Voici ses caractères.
Calathide incouronnée, radiatiforme, multiflore, fissiflore,
androgyniflore. Péricline subcampanulé , très- inférieur aux
Heurs extérieures; iformé de squames égales, unisériées , ap-
pliquées, oblongues, coriaces -foliacées , membraneuses sur
les bords, accompagnées à la base de squamules surnuméraires
nombreuses, très - inégales , irrégulièrement imbriquées, ap-
pliquées. Clinanthe plan, garni de fimbrilles très-longues,
inégales, laminées inférieurement, filiformes supérieurement.
ÎFruits oblongs, cylindracés, striés, glabres; aigrette blanche,
composée de squamellules nombreuses, inégales, filiformes,
capillaires, à peine barbellulées. Corolles pourvues de poils
longs, fins, flexueux , comme frisés, occupant la partie su-
périeure du tube et la partie inférieure du limbe.
Intybeluerose; latyhellia rosea, H. Cass., Bull, des se. 1821 ,
p. 124* C'est une plante herbacée, dont les tiges sont scapi-
Formes ^ hautes d'environ un pied et demi , dressées oblique-
ment ou inclinées, cylindriques, àpeine pubescentes, un peu
ramifiées , pourvues d'une feuille courte à la base du rameau
ïe plus inférieur, et d'une bractée squamiforme à la base de
chacun des autres rameaux. Les feuilles radicales sont nom-
breuses, étalées, longues de six pouces, larges d'un pouce et
demi, un peu charnues, d'un vert glauque ou cendré, cou-'
"vertes dans leur jeunesse d'un duvet blanchâtre de poils frisés,
glabriuscules dans l'âge adulte ; leur partie inférieure est pétio-
liforme; la supérieure est oblongue, comme lyrée , divisée
profondément sur les deux côtés en lobes, dont les supérieurs
surtout sont divariqués, ondulés, sinués, inégalement et irré-
gulièrement découpés en dents aiguës. Les calathides, larges
d'environ un pouce et composées de fleurs roses, sont soli-
taires au sommet de la lige et de ses rameaux nus et pédon-
culiformes • leur péricline est pubescent.
Nous avons observé les caractères génériques et spécifiques
qu'ion Aàent de lire, sur quelques individus vivans, cultivés
au Jardin du Roi , oii ils ileurissoient au mois d'Août. JNoii«
àguorons leur originct
mu • 549
On pourroit décrire assez exactement cette plante , en di-.
sant qu'elle a la tige du leonlodon autumnale , les feuilles de
Vhjoseris radiata, le péricline, le fruit et l'aigrette des crépis,
le clinanthe des andrjala, les corolles du barkhausia ruhra.
Mais ses rapports naturels et essentiels la rapprochent da-
vantage des crépis, et surtout du crépis nemausensis de Gouan,
dont nous avons fait, en 1816, un genre distinct, sous le
nom de pterotlieca.
Le genre Inijbellia diffère du genre Pterotlieca , en ce que
tous les fruits de la calathide sont uniformes, aigrettes, non
ailés et incollifères. Dans le pLerotheca , les fruits marginaux
sont inaigrettés et munis sur leur face intérieure de trois
à cinq ailes longitudinales très- saillantes , tandis que les au-
tres fruits sont cylindriques et un peu amincis supérieure-?
ment en un col court, portant une aigrette.
Vintjbellia n'a point d'affinité naturelle avec les andrjala,
dont elle diffère beaucoup par le port; elle en diffère aussi
par plusieurs caractères du péricline, du fruit, de l'aigrette
et de la corolle. En eS'et, dans les andrjala, le péricline est
très-simple, le fruit est muni de dix grosses côtes formant
au sommet de petites cornes saillantes ; l'aigrette est trè?-
barbellulée ; la corolle est pourvue de longs poils charnus,
(H. Cass.)
INTYBUM, INTYBUS [Bot,) ■ anciens noms des cichorium
endivia et intjbus, et de Yliieraciurn prœmorsum. Voyez Endivia.
(H. Cass.)
INU. {Bot.) Prénom adjectif, dans la langue japonoise,
signifiant que le nom auquel il est joint n'est pas celui de
l'espèce préférée. Ainsi Yinu-mald ou mahi-spuria, selon
K^œmpfer, est une espèce d'if à petites feuilles, dilTércnle
de l'if à grandes feuilles, qui est le fon-mald ou ma/et /egi-
tima. Vinu-itabu est un figuier sauvage , ^îcus pumj/a , suivant
M. Thunberg. L'inu-tade est une persicaire , variété du poly--
gonum barbattim. Vinn-fugi est Vhedjysaruni tomentosum de Ivl.'
Thunberg. Uinu-ganeb est Vhedj/saruni microphj'llum du même.
Il nomme viiis heterophjlla , une vigne sauvage qui çst Vinu-,
ganabtt , différent du ganabu ou vitis labrusca. lJinu-\impoga
ou inu-tegaras est le géranium palustre de Linnœus, Le draba,
muralis et le turritis hirsuta sont également nommés inu-nas^.
65ft < INU * (
suna, Uinii-sansjo est un fagaricr , fagara piperita. TJinu-seri
est le pigamon des prés, thalictrum Jlavum. (J.)
INULE, Initia. (Bot.) [Corymbifcres , Juss. = Sjngénésie
j)olrgamie superflue, Linn»] Ce genre de plantes appartient à
Tordre des synanthérées , à notre tribu naturelle desinulées,
et à la section des inulées-prototypes , dans laquelle nous le
plaçons immédiatement auprès du genre Conjza. Voici les
caractères génériques, tels qu'ils résultent de nos observa-
tions faites comparativement sur des individus vivans de neuf
espèces véritables d'inula, et sur beaucoup d'autres espèces
faussement attribuées à ce genre.
Calathlde radiée : disque muUiflorc, régulariflore , andro-
gyniflore ; couronne subunisériée , multiflore, liguliflore , fé-
miniflore. Péricline égal ou supérieur aux fleurs du disque,
formé de squames imbriquées, pxtradilatées , appliquées:
les extérieures plus larges , coriaces, surmontées d'un appen-
dice étalé, foliacé; les intérieures étroites, linéaires, inap
pendiculées, submembraneuses. Clinanthe plan , ou convexe
inappendiculé. Ovaires oblongs, cylindracés; aigrette simple
formée de squamellules subunisériées, inégales, filiformes
iarbellulées , souvent entregreffées à la base. Anthères mu
jîies de longs appendices basilaires plumeux. Corolles de la
couronne à languette ordinairement longue, étroite, linéaire,
tridentée au sommet.
Jncle hélénion : Inula lielenium , Linn.: Corvisartia helenium ,
IVIérat. C'est une plante herbacée , à racine vivace , produi-
sant des tiges hautes d'environ quatre pieds, dressées, rameuses,
cylindriques , épaisses , pubescentes. Les feuilles radicales sont
longues de deux pieds et demi, y compris le pétiole, qui est
long, presque cylindrique, bordé supérieurement parla dé-
currence du limbe: celui-ci, large de six à sept pouces, est
feruie , lancéolé , aigu aux deux bouts , à bords inégalement
dentés , à face supérieure scabre , à face inférieure subtomen-
teuse , blanchâtre, munie de nervures réticulées , Irès-saiilan-
tes. Les feuilles çaulinaires sont alternes, graduellement plus
courtes de la base au sommet de la tige; les inférieures ob-
longues-lancéolées, à base élargie, subcordiforme, amplexi-
caule , à partie inférieure étrécie , subpétioliforme ; les supé-
» mu . 55i
lécs, un peu cordiformes à la base. Les calaûiides, larges de
trois pouces et composées de fleurs jaunes, sont solitaires
au sommet dés tiges et des rameaux. Leur péricline est su-
périeur aux fleurs du disque, formé de squames imbriquées,,
appliquées, dont les extérieures sont larges, coriaces, sur-
montées d"un appendice étalé , foliacé , élargi à sa base , ovale-
lancéolé, et les intérieures étroites, linéaires, coriaces-mem-
braneuses , inappendiculées; le clinanthe est large, plan,
fovéolé, à réseau finement papillulé ; les ovaires sont striés,
glabres; leur aigrette est composée de squameilules nombreu-
ses, entregreffées à la base; les anthères sont pourvues de
longs appendices basilaires plumeux. L'inule hcicnion, plus
connue sous les noms d'aulnée ou à'enula canipana , se trouve
aux environs de Paris, dans les prés et les bois humides;
elle fleurit en Juillet et Août : sa racine, amère et aromati-
que, est employée en médecine.
Inule britannique: Inulahritaiiica , Decand. , FI. fr. , tom.45
p. 149; Inula britannica, Linn. , Mérat. Sa racine est vivace;
ses tiges, hautes de trois pieds, sont dressées, rameuses su-
périeurement, cylindriques, hérissées de longs poils mous;
les feuilles sont alternes, çessiles, étalées, semi-amplexi-
caules, oblongues-lancéolées, cordiformes à la base, entières ^
ou légèrement denticulées sur les bords de leur partie infé-
rieure, garnies sur les deux faces de longs poils mous; leg
feuilles inférieures longues de six pouces, larges de quinze
lignes, les supérieures plus petites. Les calathides, larges
d'un pouce et demi, et composées de fleurs jaunes, sont dis-
posées en panicule corymbiforme au sommet des tiges. Leur
péricline , supérieur aux fleurs du disque , est formé de
squames irrégulièrement imbriquées, linéaires, à partie in-
férieure coriace, appliquée, la supérieure appendiciforiue,
étalée , foliacée , quelquefois élargie et foliiforme sur les
squames extérieures, qui se trouvent alors très-manifeste-
ment appendiculées, comme dans les autres espèces du genre ;
les ovaires sont hispides, et ne nous ont jamais offert le ca-
ractère essentiel des pi/ i/c aria, que M. Mérat prétend cepen-
dant y trouver, et qu'il décrit, dans la seconde édition de
sa Flore parisienne (tom. 2 , pag. 260), comme un très-petit
appendice terminal denticulé. Cette plante est commune
S5a .- INU
aux environs de Paris, sur les bords de la Seine et de la
Marne , où elle fleurit en Juillet et Août. M. De Candolle
remarque qu'elle ne croît point dans les îles britanniques ,
et que les anciens l'ont nommée hritanica , et non point hri-
tannica.
Inui.e a feuilles de sai le ; Jnula salicina , Linn. , Mérat.
Racine A ivace; tiges hautes de deux pieds, dressées, cylin-
driques, glabres, simples inférieurement , rameuses supé-
rieurenîcnt; garnies de feuilles alternes, sessiles, demi-am-
plexicaules, étalées, longues d'environ deux pouces , larges
d'environ sept lignes, oblongues, arrondies à la base, aiguës
au sommet, glabres, garnies sur les bords de poils roides
imitant des dentelures en scie; calathides solitaires au som-
met de la lige et des rameaux, larges de quinze lignes, et
composées de fleurs jaunes. Le péricline campaniforme, égal
aux fleurs du disque, est formé de squames imbriquées, ap-,
pliquées, glabres; les extérieures plus larges, coriaces, mu-
nies d'une petite bordure noirâtre, scarieuse , ciliée, et d'un
appendice terminal étalé, foliacé, lancéolé, cilié; les inté-
ïieures très - étroites , linéaires , inappendiculées , appliquées ,
presque entièrement coriaces-scarieuses. Les ovaires sont
glabriusculcs. Cette espèce habite plusieurs parties de la
France , et se trouve aux environs de Paris, dans les prairies
îiumides : elle fleurit en Juin et Juillet.
ÏNULE EN glaive ; Inula ensifolia, Linn. Racine vivace ; tiges
hautes d'un pied et demi, dressées, simples inférieurement,
rameuses supérieurement, cylindriques, parsemées de longs
poils blancs, mous, fugaces; garnies de feuilles alternes, ses-
siles, semi-amplexicaules, étalées, longues de deux pouces
et demi, larges de quatre lignes, étroites- lancéolées, roides,
lin peu glauques, ponctuées sur les deux faces, bordées de
longs poils blancs et mous, dont la base est roide et cartilagi-
neuse ; calathides solitaires au sommet de la tige et des ra-
meaux, qui forment ensemble une sorte de corymbe ; cha-
cune d'elles large d'un pouce et demi , et composée de fleurs
jaunes. Le péricline subcampanulé, égal aux fleurs du disque
et hérissé de longs poils blancs, est formé de squames nom-
breuses, régulièrement imbriquées , appliquées; les extérieu-
ïes plus larges, coriiices, surmontées d'un long appendice
INU 553
tUaîé, recourbé, foliacé, lancéolé; les inférieures étroites,
linéaires, inappendiculées, comme scarieuses au sommet.
Les ovaires sont glabriuscules. Cette espèce habite l'Alle-
magne et ritalie.
Inule puante : Iniila graveolens , Desf. , Tabl. de l'éc. de bot. ,
2." édit. , pag. 121 ; Solidago graveolens, Lam. , Decand. , Mé-
rat ; Erigeron graveolens , Linn., Pers. , Loisel. Plante herba-
cée , annuelle, pubescente , un peu visqueuse , douée d'une
odeur forte et désagréable. Sa tige, haute de deux à trois
pieds, est dressée, cylindrique, très-rameuse, garnie de
feuilles alternes : les inférieures longues de trois à quatre
pouces, larges d'environ dix lignes, oblongues-lancéolées,
à peine dentées, ayant leur partie inférieure étrécie, pétio-
liforme; les supérieures graduellement plus petites, sessiles,
très -entières. Les calathides , hautes et larges de trois lignes,
et composées de fleurs jaunes, sont très -nombreuses , pédon-
culées, dressées, disposées eu panicules pyramidales autour
de la tige et de ses branches. Elles sont très-courtement ra-
diées ; leur disque est multiflore ; leur couronne est unisériée ;
le péricline, supérieur aux fleurs du disque, est formé de squa-
mes imbriquées, oblongues-lancéolées ; les extérieures ont
leur partie inférieure appliquée , et la supérieure étalée ,
foliacée, appendiciforme ; les intérieures sont entièrement
appliquées, et membraneuses sur les bords; le clinanthe est
plan, profondément alvéolé, à cloisons charnues, dentées;
les fruits sont oblongs, presque obovoïdes, un peu compri-
més, hérissés de longs poils, pourvus d'un bourrelet basilaire
glabre, annulaire, et d'un col épais, très-court, glabre,
mais entouré de poils capités, implantés sur le sommet du
fruit; l'aigrette est simple , formée de squamellulcs nombreu-
ses , inégales, unisériées, filiformes, très-barbellulées , entre-
greffées à la base et formant par leur réunion une sorte de
cupule ; les anthères sont munies de longs appendices basi-
laires ; les corolles de la couronne ont leur languette tridentée
au sommet ; les styles sont conformes à ceux des inulées-pro-
totypes.
Cette plante , qui fleurit en Août et Septembre, habite les
départemens méridionaux de la France , et même les environs
àe Paris, où on la trouve dans les champs. Les botanistes ont
554 ^ INU •
commis une grave erreur en attribuant cette espèce aux
genres Erigcron ou Solidago , qui ne sont pas de la même
tribu naturelle. M. Desfontaines est le seul qui Tait rapportée
à son véritable genre. Cependant ses caractères génériques
offrent quelques particularités qu'on aura sans doute remar-
quées en lisant la description ci-dessus ; et nous étions tenté
de fonder là- dessus un genre distinct, lorsque nous avons
été arrêté par la crainte de nous exposer trop souvent au
reproche de multiplier les genres sans nécessité. En effet ,
malgré les différences dont il s'agit, la plante en question
peut très -bien rester dans le genre Inula.
Inule blanche : Inula candida , H. Cass. j Conyza candida ,
Linn. Cette espèce remarquable, qui habite l'ile de Candie ,
a une souche ligneuse , rameuse, épaisse , raboteuse, divisée
au sommet en plusieurs branches courtes, terminées chacune
par un asseniblage de feuilles rapprochées en rosette, tomen-:
teuses , blanchâtres , épaisses ; leur pétiole est long d'un pouce
et demi , semi-amplexicaule , demi-cylindrique; leur limbe
est lonp; de deux pouces et demi, large de quinze lignes,
elliptique, à peine crénelé sur les bords, à nervures réticu-
lées, saillantes en-dessous. Les tiges naissant de l'aisselle des
feuilles susdites, sont herbacées, étalées, flexueuses, foibles,
grêles, simples, cylindriques, tomenleuses , blanches, gar-
nies de feuilks alternes, petites, courtement pétiolées, lan-
céolées. Les calathides sont jaunes, radiées, larges de sept à
huit lignes, et au nombre de trois environ, l'une terminale,
les deux autres presque sessiles dans l'aisselle des feuilles su-
périeures, près du sommet de la tige. La calathide est cour-
tement radiée : composée d'un disque multîflore , régulari-
flore , androgyniflore ; et d'une couronne unisériée , multi-
flore,liguliflore, féminiflore. Lepéricline, tomenteux, blanc,
campanule, à peu près égal aux fleurs du disque, est formé
de squames nombreuses, imbriquées, appliquées; les exté-
rieures courtes, larges, oblongues, ou ovales, coriaces, sur-
montées d'un appendice variable, étalé, foliacé, oblong , ou
subspatulé, d'autant plus long que la squame dont il dépend
est plus extérieure ; les squames intérieures sont longues ,
étroites, linéaires-subulées , presque mçmbraneuses , inap-
pendiculées. Le clinanthe est large, un peu convexe, nu.
i • INU • 655
ppnctué. Les ovaires sont longs, grêles, cylindriques, striés,
hispides ; leur aigrette est composée de trois à dix squamellulcs
longues, un peu inégales , unisériées , distancées, filiformes,
peu barbellulées. Les anthères sont pourvues d'appendices
^asilaires longs , linéaires , barbus ou pîuineux. Les corolles
de la couronne ont le tube long et la languette courte, li-
néaire , tridentée au sommet, plus ou moins chargée de
glandes en-dessous. Les fleurs du disque et de la couronne
sont jaunes. Nous avons observé des calathides dont les lan-
guettes étoient très-courtes , et des calathides dont les lan-
gufttes étoient Irès-loiigues.
Les six descriptions spécifiques qu'on vient de lire ont élé
faites par nous sur des individus vivans , cultivés au Jardin
du Roi.
Tournefort confondoit les inula dans le genre Aster , et cette
grave erreur de classification a été reproduite avec beaucoup
de confiance par quelques botanistes modernes , tels que
Haller, Allioni, Mœnch. Vaillant est le premier auteur du
genre Inula , qu'il nommoit lielenium : mais il le caractérisa
fort mal ; car il ne le distingua du genre Aster que par la cour
leur des Heurs, et du genre Solidago , par la disposition des
calathides. Linné, en adoptant le genre de Vaillant, substitua
mal à propos le nom d'muZa à celui dUielenium : mais il le
caractérisa parfaitement bien , et il insista surtout avec rai-
son sur le caractère fourni par les appendices basilaires d.e&
anthères. Cependant , depuis Linné, Gaertner et d'autres bo-
tanistes ont rejeté ce caractère aussi constant qu'important,
et ils ont fondé, comme Vaillant, la distinction générique
des aster et des inula seulement sur la couleur des Heurs.
Adanson a voulu rétablir l'ancien nom d^helenium , et il a
séparé de ce genre l'inula crithmoides , qui en diffère par la
structure du péricline. Nous adoptons ce genr;^ d'Adanson,
nommé Liinbarda. Gaertner a séparé des inula quelques espèces
qu'on y avoit confondues , et qui en diflerent esscatiellenienf;
par la structure de l'aigrette. Nous adoptons ce geiire de
Gaertner, nommé pi//icaria , et qui est peut-être le même que
le doria , proposé plus anciennement par Adanson : mais
Gœrtner a mal à propos attribué à son palicaria Vasfer an-
nuui , Linn. , qui n'est pas de la même tribu naturelle , et
556 INU
qui appartient à notre genre Diplopappus. Necker nomme
enula le genre Inula , et il propose, sous le nom de lioydia,
un nouveau genre , comprenant , suivant lui , quelque espèce
rapportée par Linné à Vinula, et qui en diffère par le péri-
cline formé de dix squames unisériées et par l'aigrette pres-
que plumeuse. Nous avons fait de vains efforts pour deviner
l'espèce que Necker attribue à son lioydia , et les affinités
naturelles de ce genre, que l'auteur dit être voisin des tiissilago
et pétasites : c'est un problème qui nous paroît insoluble, et
nous osons à peine soupçonner que le liojdia pourroit être
xine mutisiée. M. Mérat , dans la première édition de sa
Flore parisienne (page 528), a cru pouvoir séparer Tnit/Za.
heleniiim des autres espèces d'inula, pour en faire un genre
nommé Corvisarlia , qu'il distingue par le péricline, dont les
squames extérieures sont larges, ovales- trapézoïdes , velues,
et les intérieures linéaires, nombreuses, colorées, glabres.
L'auteur attribue en outre à son corvisartia des anthères dé-
pourvues d'appendices basilaires , et un stigmate entier dans
les fleurs femelles delà couronne. Enfin, il déclare que cette
plante , encore peu étudiée, étoit confondue dans un genre dont
elle est aussi distincte par ses caractères botaniques que par
son port.
Nous observons, i." que Linné, Adanson , Jussieu , Smith
et presque tous les botanistes ont mentionné ce qu'il y a d'es-
sentiel et de vrai dans la structure décrite par M. Mérat, et
qui se réduit à ce que les squames extérieures du péricline
sont étalées et plus larges que les intérieures; 2." que le stig-
mate n'est jamais entier, c'est-à-dire indivis, dans Vinula he-
lenium, non plus que dans les autres inula; o." que Vinula he-
leniuma, comme les autres inula, les anthères pourvues de
longs appendices basilaires plumeux ; 4.° que les caractères
essentiels du péricline sont absolument les mêmes dans Vinula
lielenium et dans les autres véritables espèces d^inula, notam-
ment dans Vinula salicina, laissée par M. Mérat dans le genre
Inula ■■ c'est ce dont on peut se convaincre en lisant les six
descriptions spécifiques que nous avons présentées; ô.^que,
si Vinula lielenium différoit génériquement des autres espèces,
il faudroit encore, dans cette fausse hypothèse, conserver
pour cette espèce primitive et principale l'ancien nom
^ • INU • 557
à:inuia , et donner le nouveau nom générique aux espèces
qui en seroient séparées. Dans notre article Corvisartia (torn.
X, pag. 672), nous avions déj<à remarqué que toutes les espè-
ces (Vlnula qui ont les squames extérieures du péricline ter-
minées par un appendice étalé, foliacé, étoient congénères
de l'inula lieleniuin; c'est pourquoi nous avions niodilié et rec-
tifié, d'après nos propres observations, les caractères attri-
bués par M. Mérat à son genre. Mais, en adoptant le nom
générique de corvisartia , nous ne songions pas que presque
tous les inula deviendroient des corvisartia , et que le genre
Inula se trouveroit réduit au limh arda d^Adanson, ce qui n'est
pas admissible.
Il résulte des remarques précédentes, que le genre Inula
de Linné doit être divisé en (rois genres, nommés Inula, Lim-
larda , Pulicaria. Vinula est caractérisé par l'aigrette simple ,
et par le péricline dont les squames extérieures sont surmon-
tées d'un appendice étalé, foliacé. Le liniharda est caractérisé
par l'aigrette simple , et par le péricline formé de squames
absolument inappendiculées et par conséquent entièrement
appliquées. Le pulicaria est caractérisé par l'aigrette double,
et par le péricline appendiculé. Nous ne répéterons point
ici ce que nous avons déjà dit, dans notre article Eurybie
(tom. XVI, pag. 4G), sur la valeur du caractère résultant de
l'appendiculation des squames du péricline; et nous ne pen-
sons pas que l'importance du caractère résultant delà dupli-
cité de l'aigrette ait besoin d'être Justifiée.
Indépendamment des espèces appartenant au limharda et
au pulicaria, quelques autres synanthérées, mal à propos at-
tribuées à Vinula, passent dans d'autres genres. Vinula gossy^
pina de Michaux est un diplopappus , que nous avons décrit
dans ce Dictionnaire (tom. Xlll , pag. 3og) sous le nom de
diplopappus lanatus. Vinula saxalilis de Lamarck , ou erigeron
glutinosum de Linné, appartient à notre genre Mjyriadenus,
Vinula subaxillaris de Lamarck est notre lieterotheca, Vinula
crispa de Persoon est notre duchesnia, Vinula serrata de Per-
soon est le grindelia. Vinula glutinosa de Persoon fait partie
de notre genre Aurélia. Quoique nous n'ayons point vu Vinula
cœruleade Linné, que Vaillant attribuoit à son genre ^5iero-
^terus j caractérisé par l'aigrette plumeuse , nous sommes très-
553 * ÎIXU f
convaincu que cette espèce ne peut pas appartenir au genre
Inula. Seroit-ce le liqydia de Necker?
Si l'on adopte les caractères proposés dans cet article pour
le genre Inula , et ceux que nous avons assignés au genre
Comza ( tom. X, pag. 3o5), on reconnoîtra , en comparant
nos deux descriptions génériques, que les genres Inula et
Conjza se touchent immédiatement dans la série naturelle ,
qu'ils diflrèrent très -peu , et même qu'ils peuvent se confon-
dre en certains cas. En effet, le seul caractère qui les dis-
tingue consiste en ce que la couronne de la calathide est
liguliflore et radiante dans Vinula, tandis qu'elle est tubuli-
flore et non radiante dans le conjza; et ce caractère distinctif ,
qui résulte uniquement de l'alongement ou de raccourcisse-
ment du limbe des fleurs femelles, peut disparoitre acciden-
tellement. C'est ce qui a lieu dans Vinula candida, qui appar-
tient tantôt au genre Inula et tantôt au genre Conjza^ selon
que le limbe des fleurs femelles est alongé ou accourci. Il
en est de même de beaucoup de genres de synanthérées, qui
ne diffèrent que par la radiation de la calathide, et qui se
confondent entièrement par l'effet de la variation acciden-
telle dont il s'agit. Faut- il en conclure que les espèces qui
ne diffèrent que par la radiation ou la non-radiation de leurs
calalhides, doivent être réunies dans le même genre P Nous
ne le pensons pas. S'il falloit exclure des caractères généri-
ques tous ceux qui sont susceptibles de varier, il en resteroit
bien peu, et la science retoml)erolt dans une grande confu-
sion, produite par le mélange de presque tous les genres;
Nous avons souvent observé àes synanthérées dont le rlinan-
the, habituellement nu, portoit acci>1entelîeuient des squa-
melles très-manifestes. D'autres synanthérées, à ovaires habi-
tuellement aigrettes , offrent accidentellement des ovaires
nus par avortement de l'aigrette; et réciproquement, des
ovaires habituellement nus sont accidentelkment aigrettes.
Conservons tous ces caractères génériques, en faisaîit remar-
quer qu'aucun d'eux n'est infaillible ; et, dans les cas douteux ,
ayons recours à l'état le plus habituel des parties variables
et à l'observalion des autres parties. Ainsi, pour décider si
Vinula candida doit être attribuée au genre Jnw/a. plutôt qu'au
genre Conjza , il faut observer si sa calathide est plus habi-
, • ÎNU • 55ç,
tueilement radiée que discoïde, et si les aufres caractères
de cette plante la rapprochent davantage des inula que des
conj'za.
U n'est peut-être pas inutile d'avertir que l'afllnité établie
par nous entre les genres Inula et Conjza, suppose nécessai-
rement que ces deux genres sont restreints dans les limites
que nous leur avons assignées. Le genre Conjza des autres
botanistes est un chaos sur lequel il est impossible de fonder
aucun rapport naturel. M. Robert Brown est jusqu'à présent
le seul qui s'accorde avec nous sur la limitation du genre
Confza et sur ses rapports avec V Inula' : mais, en énonçant
son opinion sur ce point, il auroit peut-être dû nous citer
comme ayant établi long- temps avant lui les véritables fon-
demens de cette opinion , en démontrant que les vraies
c»njza font partie de la tribu des inulées, tandis que les bac-
charis appartiennent à celle des astérées. (H. Cass. )
INULÉES, Inuleœ. {Bot.) C'est la douzième des vingt tribus
naturelles dont se compose l'ordre des synanthérées, suivant
notre méthode de classification. La tribu des inulées est in-
termédiaire entre celle des anthémidées, qui la précède, et
celle des astérées qui la suit. Elle comprend un plus grand
nombre de genres qu'aucune autre tribu, si l'on excepte
celle des hélianthées , qui est encore plus nombreuse.
Nous avons établi la tribu des inulées^, dans notre pre-
mier Mémoire sur les synanthérées , lu à la première classe
de l'Institut, le 6 Avril 1812, publié par extrait dans le
Bulletin des sciences de Décembre 1812 , en totalité dans le
Journal de physique de Février, Mars, Avril 181 3, et en
abrégé dans le Journal de botanique d'Avril i8i5. Les carac-
tères de cette tribu , qui se trouvoient disséminés dans nos
premier, deuxième, troisième et quatrième Mémoires, ont
1 Observations on the iiatural familj of plants called compositœ; hy
Robert Brown, pag. 114. Journal de physique, de Juillet 1818, pag.
10 et 25.
2 Le lecteur voudra bien me pardonner les détails que je suis trop
souvent forcé de rappeler pour soutenir mes droits, depuis que cer*
tains botanistes ont élevé des prétentions tendant à m'enlever. I& fruit
iie douze années de travaux. (Voyez le Journal de physique de M^%
j8i8 et de Juillet i8ig.)
56o . INU
été réunis et présentés, sous la forme d'une description conï*
plète , dans le sixième Mémoire publié dans le Journal de
physique de Février et Mars 181 g; et cette description est
reproduite dans le Dictionnaire, tom. XX, pag. 574. Nous
avons indiqué la division de la tribu des inulées en trois
sections naturelles dans plusieurs de nos Mémoires et de nos
articles, notamment dans Tarlicle Gnaphaliées , tom. XIX,
pag. 122. La désignation des genres composant la tribu dont
il s'agit se trouve déjcà en très-grande partie , soit dans nos
articles de ce Dictionnaire , soit dans nos Mémoires publiés
dans le Journal de phjsique ou dans le Bulletin des sciences.
Mais il est nécessaire d'exposer méthodiquement la série de
tous ces genres : c'est l'objet du présent article.
XII.'TaiBU. Les INULÉES {Inukœ).
(Voyez les caractères de cette tribu , tome XX, pag. r,74.)
PREMIÈRE SECTION.
Inulées- Gnaphaliées { Inuleœ- Gnaphalieœ).
Caractères ordinaires. Péricline scarieux. Stigmatophores tron-
qués au sommet. Article anthérifère long; appendice api-
cilaire de l'anthère, obtus; appendices basilaires longs,
non polUnifères.
I. Aigrette stéphanoïde, paléacée , ou mixte.
1.* Relhania. = ?? Bellidiastrum. Y aili. (1720). — Atliana-
éiœ , Leyserœ, Zoegeœ sp. Lin. — Lin. fil. — Relhania; sp. L'Hér.
( 1788). — Lejsera et Eclopes. Gœrtn. (1791). — Michauxia.
Neck. (1791). — Relhania. Pers.
2. t ?? RosENiA. = Rosenia. Thunb. ( 1800).
3. t?? Lapeirousia. = Osmitis sp. Lin. fil. — Rethaniœ sp.
L'Hér. — Lapeirousia. Thunb. (i8oo)<
4.* Leysera. = Asteris sp. Tourn. — Asteropterus. Vaill.
( 1720). — Adans. — Gaertn. ( 1791 ). — Lejyserœ sp. Lin. — *
Callicornia. Burm. — Leysera. Neck. { 1791).
6. * Leptofhytus. = Gnaphalium lejseroides. Desf. — Lepto-
phytus. H. Cass. Bull. janv. 1817. p; 11.
6.t hQ^(ic:^.\^\^,:=ihongchavn2iO'% TV^Jd. JVIag. der nat. fjr.
(1811).
, • INU • 56i
IL Corolles très-grêles.
7.* Chevreulia. ^= Chaptaliœ s^. Pers. — ■ Xeranthemi sp,
Petit-Th. — Cheyreulia. H. Cass. Bull, mai 1817. p. 69. Dict.
V. 8. p. 5i6.
8.* Lu ciLi A. = Serratula acutifolia, Poir. — Lucilia. H. Cass.
Bull. févr. 1817. p. 52.
g. '•' Facelis. =: Gnaphalium retusum. Lam. — Facelis. H. Cass.
Bull, juin 1819. p. 94. Dicf. v. 16. p. 104.
ïo.'^ FoDOTHECA. = Podosperma. Labill. (1806). — Podotheca»
H. Cass. Dict.
m. Péricline à peine scarieux.
11.'''! SyKCAVxVii\. = Stœhelinœ sp. Lin. — ? Roccardia. Neck.
(1791). — Lejserœsp. Thunb. — WiHd. — Serratulœ sp. Poir.
— Sjncarpha. Decand. (1 8 1 o).
12.^' Faustula. — Chrj'socoma reliculata. Labill. — Faustula,
H. Cass. Bull. sept. 1818. p. 140. Dict. v. 16. p. 2S1.
IV. Péricline peu coloré.
iS.^*"! Phagnalon. = Elichrysi sp. ïourn. — Conyzce et Gna-
phalii sp. Lin. — Conjzce sp. Lag. — Phagnalon. H. Cass. Bull,
nov. 1819. p. 173. Dict. V. 19. p. 118. 11g.
14.''' Gnaphaliom. = Elichrysi sp. Tourn. — Adans. — Heli-
clirjsi sp. Vaill. — Gnaphalii sp. {Fiiaginoidea) Lin. — Filaginis
sp. Gaertn. — Archyrocomœ sp. Pers. — Gnaphalium. R. Br.
Obs. comp. p. 122 (1817). Journ. de phys. v. 87. p, i5. —
H. Cass. Dict. v. 19. p. 1 15. — P Gjnemœ sp. Rafin. — H. Cass.
Dict. V. 20. p, 167.
iS.''' Lasiopogon. = Gnaphalium muscoides. Desf. — Lasio-
pogon. H. Cass. Bull, mai 1818. p. 76.
V. Clinanthe squamellifère.
16.* Ifloga. = Gnaphalium caulijlorum. Desf. — Ijloga. H.
Cass. Bull. sept. 1819. p. 142. Dict.
17. t PiPTOCARPHA. = Piptocarpha. R. Br. Obs. comp. p. 121
(1817). Journ. de phys. v. 87. p. 22.
18.*! Cassinia. = Caleœ sp. Labill. — H. Cass. Dict. v. 6.
suppl. p. 32. — Cassinia. R. Br. Observ. compos. p. 126.
(1817). Journ. de phys. v. 87. p. 17. (Non Cassinia. Hort,
kew.)
23, 56
5G2 ' INU "^ f
icj.'^' IxoDiA.= Irodia. R. Br. Hort. kew. éd. 2. v. 4. p. 5 17.
(1812) — Sinis. Bot. mag. — H. Cass. Dict.
VI. Péricline pétaloïdc.
20.'"'^ Lepkcline. =^ Gnaphalium cymosum. Lin. — Lepiscline.
H. Cass. Bull. févr. 1818. p. 3).
2i.t Anaxeton. = Gnaphalii sp. Berg. — Aniixelon. Gairtn.
(1791) — ? Arg^yranfhiis. Neck. (lygi).
2J.''' Edmondia. = Eiiclnysi sp. Tourn. — Xeranthemum
sesamoides. làn. — ? Argjranthi sp. Neck. — Edmondia. H.
Cass. Bull, mai 1818. p. 75. Dict. v. 14. p. 262.
23. '•■ ArsGYRocoME. = EUclirjsi sp. Tourn. — Helichrjsi sp.
Vaill. — Xeranlhemoides. Dill. — Xeranthenii et Gnaphalii sp.
Lin. ■ — Argyrocome. Gasrtn. ( 1791 ). — Xeranlhenniin. Neck.
(1791). — Helichrysum. Pers. (1807).
24.''' Helichryshm. = Elichrj'si sp. Tourn. — Adans. —
Helichrjsi sp. Vaill. — Gnaphalii sp. Lin. — Juss. — Willd. —
Pers. — Elichrysum. Gsertn. (1791). — Trichandrum. Neck.
(1791). — Helichrysum. H. Cass. Dict. v. 20. p. 449.
26. ''^ PoDOLEPis. == Podolepis. Labill. (1806).
26. * Antennaria. = Elichrjsi sp. Tourn. — Gnaphalii sp.
Lin. — Anlennariœ sp. Gœrtn. ( 1791 ). — Antennaria. R. Br.
(1817). Obs. comp. p. 122. Journ. de phys. v. 87. p. i5. 23.
— Disj'nanthus. Rafin.
27.1 OzoTHAMNUs. = Caleœ sp. Forst. — Willd. — Ozo-
thamni sp. R. Br. Obs. comp. p. 126. (1817). Journ. de phys.
V. 87. p. 14." — Ozothamnus. H. Cass. Journ. de phys. v. 87. p. 29.
28.'"^ Petalolepis. = Eupatorii sp, Labill. — Qzolhamni sp.
R. Br. (1817). — Petalolepis. H. Cass. Bull. sept. 1817. p. i38.
Journ. de phys. v. 87. p. 29.
29. ^'^ Metalasia. = Gnaphalii sp. Lin. — Antennarlœ sp.
Gaertn. — Metalasia. R. Br. Obs. comp. p. 124 (1817). Journ.
de phys. v. 87. p. iG.
, VII. Calathides rassemblées en capitule.
§. Tige ligneuse.
3o.* Endoleuca. — Gnaphalii muricati var. Lin. — Gnapha-
lium capilatum. Lam. — ? Anlennariœ sp. Ga?rtn. — pMetalasiœ
5p. R. Br. — Endoleuca. Il, Cass. Bull, mars 2819. p. 47. Dict.
V. 14. p. 474.
» • INU • 563
5] . t ? Shawia. ~ Shawia. Forst. (1776). — Scopol. — Juss.
■ — Schreb.
0:2. ^' Perotriche. = Seriphii sp. Lin. — Juss. — Perotriche.
H. Cass. Bull, mai 1818. p. 76.
33. ''' Seriphivm. = Ahsinthii sp. Tourn. — Helichrjsoidis sp.
Vaill. (171g). — Seriphium. Lin. — Juss. — Gœrtn. — Filaginis
sp. Adans. — Seriphii sp. Pers.
34.* StvEBe. := Ahsinthii sp. Tourn. — Helichrysoidis sp.
Vain. (1719"). — Stcebes sp. Lin. — Juss. — Stœbe. Gaertn. —
Keck. — Filaginis sp. Adans. — Seriphii sp. Pers.
55.t DisFARAGo. = Stœbes sp. Berg. — Lin. — Disparago.
Gaertn. (1791). — IVigandia. Neck. (1791).
36.*! Œdeka. — Biiphthalmi sp. Lin. (1764). — Œdera, Lin.
(1771 ). — Gaertn. ~ H. Cass. BuU. févr. 1820. p. 26. —
Œderœ sp. Lin. fih — Thunb. — Jacq. — Willd. — Pers.
37.''' Elytropappus. ■=? Gnaphalium hispidum, Wilid. —
Eljtropappus. H. Cass, BulL déc. 1816. p. jqg. Dict. v. 14.
p. 376.
§§. Tige herbacée.
38.''' SiLoxERUs. = Siloxerus. LabilL (1S06).
39."'' HiRNELLiA. = Hirnellia. H. Cass. BulL avr. 1820. p. 67.
Dict. V. 21. p. 199.
40.''' Gnephosis. — Gnepliosis. H. Cass. Bull, mars 1820. p.
43. Dict. V. 19. p. 1 27.
41.1 Angianthus. = Angianthus. WendL ColL pL v. 2. p.
32. t. 48. (1809). — R. Br. Obs. comp. p. io3. Journ. de
phys. V. 86. p. 406. — ■ Cassinia. R. Br. (i8i3). Hort. kew.
éd. 2. V. 5. (Non Cassinia. Obs. comp.)
42. t Calocephalus. = Calocephalus. R. Br. Obs. comp. p.
106 (1817). Journ. de phys. v. 86. p. 409.
43.* Leucophyta. = Leucophj'ta. R. Br. Obs. comp. p. 106
(1817). Journ. de phys. v. 86. p. 409.
44.''' RiCHEA. = Cartodium. Soland. ined. — Slœhelinœ sp.
Forst. ined. — Craspedia. Forst. (1786. malè.). — H. Cass. Dict.
V. 11. p. 355. — Rie fica. LabilL (1800).
45. *"■ Leontonyx. = Gnaphalium squarrosum. Lin. — Leon-
tonyx. H. Cass. Dict.
46.* Leontopodium. = Fi/agmis sp. Tourn. — Lin. — Juss. — ■
Gnaphalii sp. Lam. — V/iHd. — Jacq. — Decand. — Anten-
564 IfSU '
narice sp. Gsertn. — Leontopodium. Pers. (1807). — R. Br.
Obs. comp. p. 123. (1817). Journ. de phys. v. 87. p. i5. —
H. Cass. Bull. sept. 1819. p. 144.
SECONDE SECTION.
Inulées- PROTOTYPES ( Inuleœ - Arche^jpœ) .
Caractères ordinaires. Péricline non scaricux. Stigmatophores
arrondis au sommet. Article anthérifère long; appendice
apicilaire de l'anthère, obtus ; appendices basildires longs,
non pollinifères.
I. Cliuanlhe ordinairement nu sur une partie et squamellé
sur Pautre.
47.''' FiLAGO. = Filaginis sp. Tourn. — Lin. — Gnaphalium.
Vaill. (1719). — Gnaphulii sp. Lam. — E^'ax. Gaertn.(] 791). —
Micropi sp. Desf. — Decand. — Filago. Willd. — H. Cass.
Bull. sept. 1819. p. 141. Dict. v. 17. p. 2.
48. 'î' GiFOLA. = Filaginis sp. Tourn. — Vaill. — Lin. —
Adans. — Juss. — Gaertn. — Gnaplialii sp. Lam. — "\Villd. —
Smith. — Decand. — Gifola. H. Cass. Bull. sept. 1819. p.
342. Dict. V. 18. p. 53i.
49.* LoGKiA. = Filaginis sp. Tourn. — Vaill. — Lin. —
Adans. — Juss. — Ga*rtn. — Gnaplialii sp. Lam. — Willd. —
Smith. — Decand. — Log^î^. H. Cass. Bull. sept. 1819. p. 140.
5o. * MiCROPUs. = Gnaphalodrs. Tourn. — Adans. — Fila-
ginis sp. Vaill. — Micropus. Lin. — Gasrtn. — Micropi sp.
Desf. — Decand.
61.* Oglifa. = Filaginis sp. Tourn. — Vaill. — Lin. —
Gnaphalii sp. Lam. — Decand. — Oglifa. H. Cass. Bull. sept.
181g. p. 143.
II. Clinanthe nu.
62. 'î' CoNVZA. = Conj'zœ sp. Tourn. — Vaill. — Lin. —
(3œteri omnesbotanici , excepto R. Brown. Obs. comp. p. 114.
Journ. de phys. v. 87. p. 10. 2 5. 26. — Conjza. H. Cass.
Dict. V. 10. p. oo5 (1818).
53.''' Inula. = Asteris sp. Tourn. — Haller. — Alli. —
Mœnch. — Helenii sp. Vaill. (1720). — Inulœ sp. Lin. — He-
leniinn. Adans. (1763). — Inula. Gaertn. — H. Cass. Dict. —
Enula. JSeck. — Corvisartia et inulœ sp. Mérat. — Coryisarlia.
H. Cass. Dict. V. 10. p. 572.
, • INU • 565
54.* LiMBARDA. = Asterîs sp. Tourn. — Inula crithmoides.
Lin. — Limbarda. Adans. (1763).
65.* DucHESNiA. = Aster crispus. Forsk. — Inulœ sp. Vent.
— Pers. — Desf. — Duchesnia. H. Cass. Bull. oct. 1817.
p. i53. Dict. V. i3. p. 545.
56.^' PtJLicARiA. = ^sfen's 5p. Tourn. — Alli. — Helenii sp.
Vaill. — Inulœ sp. Lin. — ???Doria. Adans. — Pulicariœ sp.
Gaertn. (1791).
67.* TuBiLiUM. =: Erigeron inuloides ^ Poir. — Tubilium. H.
Cass. Bull. oct. 1817. p. i55.
58.''' Jasonia. = Erigeron tuberosum. Lin. — Inula tuherosa.
Lam. — Jasonia. H. Cass. Bull. oct. i8i5. p. 176. Journ. de
phys. V. 82. p. 144. 145. Dict.
6g. * Myriadenl's. = Erigeron glutinosum. Lin. — Inula saxa-
lilis. Lam. — Mjriadenus. H. Cass. Bull. sept. 1817. p. i38.
60.* Carpesium. = Conjzuides. Tourn. (1706). — Balsamitas
sp. Vaill. — Carpesium. Lin. (1741). — Adans.
6].t? Denekia. = Denekia. Thunb. (1800).
62. t ? Columellea. = Columellea. Jacq. (1798).
63. * Pentanema. = Pentanema. H. Cass. Bull, mai 1 8 1 8. p. 74.
64.* Î¥Hioî^A. = Chrjsocomœ sp. Forsk. — Conyza pungens.
Lam. — StœlieHnœ sp. Vahl. — Iphiona. H. Cass. Bull. oct.
1817. p. i53. Dict.
III. Clinanthe squamellé.
65. ''■ Rhanterium. = Rhanterium. Desf. (1799).
66. *! Cylindrocline. =?? Conyza hirsuta. Lin. — Cylin-
drocline. H. Cass. Bull. janv. 1817. p. 11. Dict. v. 12. p. 3 18.
67.* MoLPADiA. = BupJitlialmum cordifolium. "Waldst. —
Molpadia. H. Cass. Bull. nov. :8i8. p. j66.
68. '•■ ! ? ? Neurol.ena. = Conjzœ sp. Lin. — Caleœ sp.
Swartz. — Gaertn. — "Willd. — JSeurolœna. K. Br. Obs. comp.
p. 120 (1817). Journ. de phys. v. 87. p. 14.
TROISIÈME SECTION.
Inulbes-Buphïhalmées ( Inulece - Buphthalmeœ).
Caractères ordinaires. Péricline non scarieux. Stigmalophores
arrondis au sommet. Article anthérifère court; appendice
apicilaire de l'anlhère , aigu; appendices basilaires courts,
poUinifères.
- » '
566 / INU ♦ ,
I. Clinanthe squamelHfére.
69.* BiJPHTHALMUM. = Astcvoidis sp. Toum. — Biiphlhalwi
sp. Lin. — Gaertn. — Mœnch. — Bustia. Adans. (i763). —
? Buphthalmum.'ÎStck.-'- Buphthalinum. H. Cass. Bull. r.ov. J&i8é
P-
166.
70. ''' Paixe^jis. = Asterisci sp. Tourn. — Vaill. — Buphthal-
mi sp. Lin. — Obeliscolhecœ sp. Adans. — ? ? Athalmum. Neck-
(1791). — Pallenis. H. Cass. Bull. nov. 1818. p. 1G6.
71.* Nauplius. = Asterisci sp. Tourn. — Vaill. — Buph-
thalmi sp. Lin. — Gœrtn. — ISauplius. H. Cass. Bull. nov.
î8i8. p. 166.
72.* Ceruana. = Ceruana. Forsk. (1775). — Juss. — H.
Cass. Dict. V. 8. p. 12. ■ — Buphilialmi 5p. Vahl.
IL Clinanthe inappendiculé.
yS. * Egletes. = Malricaria prostrala. Swarlz. — Pyrethri
sp. Willd. — Chrjsanthemi sp. Pers. — Egletes. H. Cass. Bull,
oct. 1817. p. i53. Dict. V. 14. p. 265. V. 19. p. 006.
74.* Changea. = Artemisiœ sp. Lin. — Grangea. Adans.
(1760). — H. Cass. Dict. v. ig. p. 5o4. — Grangeœ sp. Juss.
— Desf. — Lam. — Poir. — Cotulœ sp. "WiHd. — Centipedce
Sp. Pers.
76.''' Centipeda. = Artemisiœ sp. Lin. — Sphœranthi sp.
Burm. — Grangeœ sp. Juss. — Desf, — Lam. — Poir. —
Centipeda. Leur. (1790). — H. Cass. Dict. v. 19. p. 3o5. —
Cotulœ sp. Willd. — Ccntipcdœ sp. Pers.
IIL Calathides rassemblées en capitule.
']G.'^' ? ? Sph.eranthus. ^^ Sphœranthos. Vaill. (1719). —
Sphœranthiis. Ijn. — Polj'cephalos. Forsk. — Scop. — (Non
Sphœranthus. Scop. Intr. ad hist. nat. )
77.* P ? ? GvMNARRHENA. = Gj miiarrh en a . Desf. Mém. du
mus. d'hist. nat. v. 4. {1818). — H. Cass. Dict. v. 20. p. 111.
Remaj^ques sur le tableau précédent.
I. L'astérisque placé à la suite du numéro d'ordre indi-
que qu'une ou plusieurs espèces du genre ont été soigneu-
sement et complètement étudiées par nous- même sur des
individus vivans ou secs. La croix indique , au contraire ,
que nous n'avons pu , jusqu'à présent, étudier le genre dont
• • INU • 567
il s'agit que sur les descriptions ou les figures publiées par
d'autres botanistes. Le point d'exclamation simple , double
ou triple , placé à la suite de Tastérisque ou de la croix ,
signifie que le genre offre une ou plusieurs anomalies graves,
c'est-à-dire, des caractères insolites remarquables et qui font
une exception notable au signalement du groupe général ou
partiel dans lequel ce genre est placé. Le point d'interro-
gation simple, double ou triple, placé immédiatement avant
le titre du genre , signifie que nous avons plus ou moins de
doute sur la classification de ce genre. Le même signe, placé
immédiatement avant un synonyme, témoigne nos doutes sur
cette partie de la synonymie. Les chifTres compris entre deux
parenthèses à la suite du nom d'un auteur ou de la citation
de son ouvrage , ont pour objet de faire connoître la date
précise de rétablissement du genre, et de fixer ainsi le droit
légitime de l'inventeur. Cette indication , omise jusqu'à pré-
sent dans toutes les synonymies , auroit incontestablement
plusieurs avantages notables ; et elle n'est qu'imparfaitement
suppléée par l'ordre suivant lequel on dispose les synonymes.
Il seroit encore à désirer, pour perfectionner la synonymie
et augmenter son utilité, que l'on indiquât par les adverbes
henè et malè , ou par quelques signes équivalens, le mérite
de la chose que l'on cite. Nous n'avons point osé exécuter
une innovation aussi délicate ; mais nous la recommandons
aux botanistes qui ont plus de crédit et d'autorité que nous.
Au moyen des deux perfectionncmens que nous proposons ,
et qui out pour objet l'indication des dates et l'appréciation
des choses , la synonymie devicndroit ce qu'elle doit être ,
c'est-à-dire, un tableau historique, très-abrégé , mais instruc-
tif, des travaux des botanistes sur chaque classe , chaque
ordre, chaque genre et chaque espèce, en sorte que toute
l'histoire de la botanique descriptive se trouveroit dans les
synonymies. Rédigée suivant ce système, la synonymie pour-
roit n'être pas trop prolixe, parce qu'on eu exclueroit sévè-
rement toute citation d'auteurs qui n'ont fait que copier
leurs devanciers. Il faudroit bien pourtant citer ceux dont
tout le travail se réduit à un changement de nom ; mais l'ad-
verbe yr«s/rà, un zéro ou quelque autre signe de même valeur,
feroit aussitôt apprécier le mérite de la chose citée avec
cette indication.
668 ' INU r
Dans la crainte de donner trop d'étendue à notre tableau ,
nous MOUS sommes borné à indiquer les noms des auteurs,
sans citer leurs ouvrages. Nous avons dû toutefois faire excep-
tion à cette règle en faveur des genres les moins connus,
tels que sont tous ceux dont nous sommes Tauteur, et qui
se trouvent disséminés soit dans ce Dictionnaire , soit dans
le Bulletin des sciences. Dans le tableau ci-dessus, Bull, dé-»
signe le Bulle'indes sciences par la société phiîomatiqtte de Paris,
et Dict. désigne le Dictionnaire des sciences naturelles. Lorsque
notre nom se trouve cité dans la synonymie d'un genre qui
ne nous appartient pas, c'est que nous avons réformé, d"a
près nos propre* observations, les caractères du genre ou sa
composition.
II. Pour mériter d'être considéré comme le véritable au-
teur d'un genre, il ne suOit pas, suivant nous, d'avoir le
premier donné à ce genre un nom rendu public par la voie
de l'impression : il faut encore l'avoir décrit, caractérisé ou
désigné avec une exactitude au moins suffisante pour qu'il
puisse être reconnu par les botanistes. La loi contraire,
quoique généralement admise , nous paroit aussi déraisonnable
qu'injuste, et nous n'hésitons pas à l'enfreindre. C'est pour-
quoi, malgré l'autorité imposante de M. R. Brown , nous
avons rejeté le nom générique de craspedia , jadis inventé
par Forster , et nqus avons donné la préférence au nom de
ric/iea, beaucoup plus nouvellement attribué au même genre
par M. Labillardière. Notre règle s'applique à la plupart des
genres de Neckcr, à beaucoup de genres d'Adanson , et à ceux
de quelques autres botanistes. Les genres de Necker, surtout,
sont des espèces d'énigmes fort difficiles à deviner, et nous
avons eu beaucoup de peine à établir leur synonymie, qui
le plus souvent est restée douteuse , malgré nos efforts pour
l'éclaircir. Cependant nous avons reconnu, parmi les genres
de ce botaniste, un grand nombre de ceux qui ont été pro-
posés après lui comme nouveaux : mais nous ne pensons pas
que les noms génériques de Necker méritent la préférence ,
parce qu'ils sont plus anciens; ils doivent perdre ce privi-
lège par l'inexactitude des descriptions, et par le défaut
d'indication des espèces.
Le genre Podospermum de M. De, Candolle et le genre
• * INU • 569
/
Podosperma de M. Labillardiére sont très- différens l'un de
l'autre, et doivent subsister tous les deux : mais, comme ils
se confondoient par leurs noms , nous avons dû nécessaire-
ment changer le nom de podosperma, qui est le moins an-
cien; car le podospernmm a été publié en i8o5 , et le podo-
sperma en f8o6.
III. Les deux genres Liovdia de Necker et Lachnospermum
de Willdcnow ne sont point compris dans notre tableau ,
quoiqu'ils appartiennent peut-être a la tribu des inulées.
Il nous paroit impossible de déterminer avec certitude la
plante que Necker a voulu désigner par le nom de liojdia.
C'est, suivant lui, une espèce linnéenne cVinula, qui diffère
des vraies inula par l'aigrette presque plumeuse , et le péri-
clinede dix squames unisériées, enfregreffces inférieurement.
Nous serions très-disposé à croire que c'est Vinula cœriilea de
Linnœus, dont le péricline auroit été fort mal décrit par
Necker ; mais cette conjecture ne s'accorde guères avec une
remarque de ce botaniste, qui dit que les genres Tussitago
et Petasites ont de l'affinité avec son liojdia. Au reste, Vinula
cœrulea ou cernua nous semble, d'après la description de Ber-
gius, devoir être rapporté à la tribu des aslérées plutôt qu'à
celle des inulées.
Le lachnosperm.um de Willdenow appartient sans doute à
la tribu des inulées ou à celle des carlinées. Ces deux tribus
ont beaucoup d'aflinité ; mais elles diffèrent essentiellement
par la structure du style , que Willdenow a malheureusement
négligé de décrire. Cependant, comme ce botaniste attribue
au lachnospermum un clinanthe garni de très -longues fim-
brilles , s'il n'a pas pris pour des fimbrilles les poils dont les
fruits sont hérissés, il est infiniment probable que ce genre
est une carlinée. Dans le cas contraire, ce seroit vine inulée-
gnaphaliée, qu'il faudroit placer entre les deux genres Sjn-
carpha et Faustula.
IV. Le tableau desinulées comprend soixante-dix-septgenres,
dont trente-un ont été fabriqués par nous. On ne manquera
pas de se récrier contre une telle multiplicité de genres,
car ces sortes de critiques sont très à la mode aujourd'hui. Il
nous sera facile de démontrer que ce dont on se plaint comme
d'un abus intolérable, e;t une suite nécessaire du perfection-
570 ♦ mv <
nement de ]a science. Quel est le but de la botanique des-
criptive, et quels sont ses moyens? Son but est de connoître
les véi^étaux par leurs ressenibliinces et leurs différences : ses
moyens sont de réunir ceux qui se ressemblent et de séparer
ceux qui diffèrent. Plus les observations deviendront exactes,
plus on découvrira de resseniblances et de différences entre
les êtres que Ton comparera. Si, pour exprimer ces ressem-
blances et ces différences, on se bornoit , comme le veulent
nos adversaires, à les exposer par des descriptions, on peut
assurer que l'esprit saisiroit mal les rapports et que la mé-
moire ne les retiendroit point. L'expérience prouve que le
seul moyen de fixer l'attention et d'aider la mémoire, c'est
d'attacher un nom propre aux choses que l'on décrit. Pour
nous faire mieux comprendre , examinons en quoi consiste
le travail d'un botaniste qui divise un ancien genre en plu-
sieurs genres nouveaux, et tâchons de juger, sans partialité,
ce qu'il peut y avoir, dans cette opération, d'utile ou de
nuisible aux progrès de la science.
L'opération dont il s'agit suppose nécessairement que
l'on a découvert ou remarqué, entre les espèces de l'ancien
genre , de nouveaux rapports résultant de ressemblances et
de différences inaperçues ou négligées précédemment. En
effet, chacun des nouveaux groupes doit être distinct des
autres par quelques différences, et il doit comprendre des
espèces qui se ressemblent plus entre elles qu'elles ne res-
semblent aux espèces des autres groupes. Jusque-là il est
incontestable que le botaniste novateur a fait un travail
utile, et qu'il ne peut mériter aucun blâme. Mais il ne se
borne pas à diviser l'ancien genre en plusieurs groupes, et à
les caractériser ; il veut encore désigner chacun d'eux par un
nom propre, et c'est là ce qui lui attire les reproches de nos
adversaires. Nous leur répondons d'abord qu'ils peuvent d'un
trait do plume effacer ces noms génériques qui leur déplai-
sent tant , et que l'utilité du travail n'en subsiste pas moins.
Mais nous allons plus loin, et nous soutenons que ces noms
eux-mêmes sont très-utiles et presque indispensables, surtout
lorsque les caractères des groupes sont compliqués; car, ainsi
que nous l'avons dit , il n'y a que les noms propres qui puis-
sent fixer l'attention et aider la môipnoWe.
^ * INU • 571
La seule objection sérieuse qu'on pourroit nous faire est
précisément celle à laquelle on ne songe pas. La voici dans
toute sa force. L'histoire naturelle n'est pas seulement la
science des différences qui existent entre les êtres; elle est
aussi celle de leui^s ressemblances. En divisant un grand genre
en plusieurs petits genres, on perfectionne en effet la science
des différences ; mais il semble qu'on détériore en même
proportion Ja science des ressemblances. Oui, sans doute, si
l'on néglige de subordonner les groupes selon leurs divers
degrés d'importance. Mais, si l'on a soin d'établir convena-
blement cette subordination , on perfectionne tout à la fois
la science des ressemblances et celle des différences. Citons
un exciiiple. Les cinq genres Fi7ago , Gifola, Logjia , Micro-
pus , OgUfa, peuvent être considérés comme ne formant qu'un
seul genre aux yeux de ceux qui n"aiment point la multi-
plicité de ces sortes de groupes. En les distinguant, nous
croyons avoir perfectionné la connoissance des différences
qiii existent entre ces plantes. Mais, en les réunissant en un
groupe d'ordre supérieur, dans notre tableau des inulées-
prototypes, dont ce groupe fait partie, nous avens conservé
et peut-être même perfectionné la connoissance de leurs
ressemblances. Au lieu de nous borner à caractériser ce
groupe, nous aurions pu et peut-être dû lui donner un nom,
tel que celui de Filago , si nous voulions le considérer comme
un genre primaire ou proprement dit, comprenant cinq
genres secondaires ou sous -genres; ou bien celui de Filu-
ginées ou de Gnaphaloïdées , si nous voulions le considérer
comme une petite section naturelle comprenant cinq genres
proprement dits.
Ainsi , pour perfectionner tout à la fois la science des
différences et celle des ressemblances , il faut multiplier beau-
coup les divisions, et ne point les ranger sur la même ligne,
mais établir entre elles une subordination proportionnée à
leurs différens degrés d'importance. C'est pourquoi nous pen-
sons que désormais les progrés de la botanique descriptive
exigent absolument la distinction des genres primaires et des
genres secondaires, et celle des espèces primaires et des es-
pèces secondaires. Chaque genre primaire ou secondaire doit
porter un nom substantM' : chaque espèce primaire ou secon-
672 ' lîSU • c
daire doit être distinguée par un adjectif. Plusieurs botanistes
admettent, comme nous, les deux sortes de genres, et les
subordonnent convenablement: mais il nous semble qu'ils ré-
duisent à peu de chose l'utilité des genres secondaires ou sous-
genre/., en attachant les noms spécifiques au nom du genre
primsiire, au lieu de les attacher au nom du genre secon-
daire. Ceti'e méthode est évidemment contraire à l'ordre
naturel des idées.
Pour achever l'apologie de la multiplicité des genres, nous
devons encore faire observer que les caractères d'un genre
sont d'autant plus instructifs qu'ils sont plus nombreux,
parce qu'alors ils donnent une connoissance plus complète
de la structure propre au genre qu'ils caractérisent. Or, il
est certain que des caractères génériques nombreux ne peu-
vent presque jamais convenir tous exactement à beaucoup
d'espèces différentes. Pour restreindre le nombre des genres,
il faut donc nécessairement de deux choses l'une : ou leur
attribuer des caractères fautifs et trompeurs, qui ne s'appli-
quent exactement qu'à une ou quelques-unes des espèces de
chaque genre; ou bien réduire les caractères génériques à
un signalement très-vague et très-succinct, qui ne fait pres-
que point connoîlre le genre ainsi caractérisé. Cependant le
but de la science est de parvenir, autant qu'il est possible,
à la connoissance la plus exacte et la plus complète des choses
qu'elle étudie.
Au reste, nous sommes loin de prétendre que la multipli-
cité des genres soit exempte d'inconvéniens, et nous avouons
qu'elle peut dégénérer en abus ; mais nous soutenons que
l'abus du S3stènie inverse est beaucoup plus contraire aux
progrès de la science, que ce système a bien plus d'incon-
véniens que l'autre, et que la confusion des genres mal à
propos distingués est une opération beaucoup plus facile que
la distinction des genres mal à propos confondus.
Disons aussi un mot sur les noms génériques. Dans le but
de rendre ces noms significatifs et caractéristiques, on a cou-
tume de les composer de l'assemblage de plusieurs mots grecs.
Cette méthode produit le plus souvent des noms prolixes,
des noms désagréables à l'oreille , des noms qui se ressemblent
en partie et peuvent facilement se confondre. Loin d'aider
» INU * 575
notre mémoire et de guider notre esprit, ces noms ne sont
bons qu'à nous égarer, parce que le caractère exprimé par
chacun d'eux est tantôt commun à beaucoup de genres diffé-
rens, et tantôt particulier à une seule espèce du genre. Con-
vaincu qu'un nom générique est d'autant meilleur qu'il est
plus insignifiant et moins désagréable à l'oreille , nous avons
donné à la plupart de nos genres des noms tout-à-fait con-
traires aux lois arbitrairement établies, ce qui procurera
sans doute à quelques botanistes le moyen facile de s'appro-
prier nos genres en changeant leurs noms.
Il est digne de remarque que les deux ordres de plantes
qui renferment le plus de genres, c'est-à-dire, l'ordre des
synanthérées et celui des graminées, sont précisément ceux
où la fleur proprement dite offre le moins de variations dans
sa structure, en sorte que chacun de ces deux ordres pour-
roit être considéré, par un botaniste systématique, comme
ne formant qu'un seul genre, puisque, dans les autres ordres
de végétaux , les genres sont fondés sur les différences qui
existent dans la structure des fleurs. Les synanthérées et les
graminées ont encore ceci de commun, que les fleurs sont
petites, d'une structure très-simple, presque toujours grou-
pées plusieurs ensemble , et toujours accompagnées de bractées
qui leur servent d'enveloppe. Les modifications de l'inflores-
cence et les parties accessoires étrangères à la fleur propre-
ment dite acquièrent , dans ces deux ordres , une prépon-
dérance qu'ils n'ont point ailleurs, et deviennent la source
féconde et presque unique où les botanistes puisent la plu-
part des différences génériques. Cette remarque est une nou-
velle preuve d'un principe sur lequel nous allons bientôt
insister : ce principe, reconnu par quelques botanistes , mais
dont en général on n'apprécie pas assez l'importcince , est que
les mêmes parties ou les mêmes caractères n'ont pas la même
valeur dans les différens groupes de végétaux. Nous croyons
avoir indiqué la vraie cause de cette variation de valeur dans
notre premier Mémoire sur la Graminoîogie : voyez le Journal
de -phjsique de Décembre 1820, pag. z,58.
V. En divisant naturellement l'ordre des synanthérées en
tribus, les tribus en sections, et les sections en sous-sections
composées de plusieurs Q^uves , nous avons dû nous efforcer
574 INU €
de caractériser tous ces groupes ; car, en nous bornant à les
désigner par des noms, comme a faitM.Kunth, nous eussions
rendu notre travail très-facile sans doute, mais aussi complè-
tement inutile. Les résultats de nos recherches ont été peu
satisfaisans ; et cependant nous avons persévéré dans notre
entreprise, parce que nous pensons que Timpossibilité d'at-
teindre la perfection, el même d'en approcher, ne doit jamais
empêcher de se diriger vers elle jusqu'au point où il est per-
mis de parvenir.
Nous avons reconnu qu'aucune partie de l'organisation des
synanthérées ne pouvoit être employée seule pour caractériser
un groupe naturel, et à plus forte raison pour caractériser
tous les groupes de même importance. Les caractères de cha-
que groupe doivent donc être fournis par le concours de
plusieurs parties : d'où il suit que l'exposition de ces carac-
tères esi nécessairement très-longue, très-compliquée et très-
minutieuse. Remarquez que la même partie n'a pas la même
valeur dans les diflférens groupes de même importance. Par
exemple, la structure du style, qui caractérise en général
assez bien la plupart des tribus , caractérise mal celle des
inulées ; et les étamines obtiennent, dans la tribu des inulées,
une prééminence qu'elles n'ont point dans la plupart des
autres tribus. De même, la corolle caractérise fort bien quel-
ques tribus et fort mal plusieurs autres, et l'on peut en dire
autant de toutes les parties dés synanthérées.
Les cai'aclères d'un groupe naturel de synanthérées sont
tous, ou presque tous, sujets à des modifications ou varia-
tions qui les rendent très-souvent inexacts; mais, comme ils
sont nombreux et fournis par diverses parties , ils se suppléent
mutuellement, cest-à-dire que, l'un ou quelques-uns d'eux se
trouvant en défaut, les autres suffisent presque toujours pour
déterminer la classification avec assez de certitude.
Ces considérations, et plusieurs autres que nous avons ex-
posées ailleurs , prouvent qu'il est impossible de faire pour
les synanthérées une méthode de classification naturelle, et
qui soit en même temps simple, claire, facile, commode,
exacte, infaillible, régulièie et symétrique. Ceux qui ne
croient pas ces divers genres de perfection incompatibles, et
qui nous reprochent de n'avoir pasïu les concilier dans notre
. ' INU • 575
méthode, n'ont sans doute étudié que bien superficiellement
l'orclre des synanthérées.
Noire tableau de la tribu des iuulées oOre trois sections
très-naturelles, mais distinguées par des caractères assez com-
pliqués, minutieux , équivoques, qui se réduisent à des nuan-
ces souvent fort légères, et sont sujets à beaucoup d'exceo-
tions.
La première section, celle des gnaphaliées , est la plus
nombreuse. Nous avons d"abord essayé de la diviser en plu-
sieurs groupes caractérisés par la structure de l'aigrelte; puis
nous avons tenté d'établir cette division sur la composition
de lacalathide; un troisième essai a été fait sur leclinanthe,
et un quatrième sur le péricline. Il n'est pas inutile de pré-
senter ici ces quatre essais, en omettant, pour abréger, la
liste des genres.
Distribution des gnaphaliées, fondée sur Vaigrette. 1." Ai-
grette nulle. 2.° Aigrette stéphanoide. 5." Aigrette mixte :
en partie sféphanoïde, laminée ou paléiforme ; en partie
filiforme, péniciUée ou plumeuse. 4.° Aigrette de squamel-
lules filiformes, non manifestement plumeuses , mais souvent
épaissies supérieurement. 5.° Aigrette manifestement plu-
meuse.
Distribution des gnaphaliées , fondée sur la composition
delà calathide. 1." Ca.athide radiée. 2." Calathide semi-radiéc.
5.^ Calathide discoïde. 4.° Calathide incouronnée , pluriflore.
5." Calathide incouronnée, souvent uniflore ou biflore.
Distribution des gnaphaliées, fondée sur le clinanlhe, 1.»
Clmanthe nu. 2." Clinanthe pourvu d'appendices irréguliers.
.'.° Clinanthe pourvu de vraies squamelles.
Distribution des gnaphaliées, fondée sur le péricline. 1.°
Squames inappendiculées, entièrement appliquées. 2." Squa-
mes pourvues d'un appendice inappliqué, mais non pétaloïde,
3.° Squames pourvues d'un appendice pétaloïde , c'est-à-dire,
étalé, radiant et d'une couleur éclatante. 4.° Squames pour-
vues d'un appendice rélléchi , coriace, roide , de coule"ur
brune.
Aucune de ces tentatives n'ayant produit une distribution
naturelle des genres, nous avons dû abandonner cette mé-
thode artificielle et systématique , et recourir a la combi-
576 . INU
naison des affinités. Cette combinaison a eu pour résultat la
di\ision des gna;)haliées en sept groupes, dont le dernier,
plus nombreux, est subdivisé en deux parties. Tous ces groupes
sont plus ou moins naturels, et plusieurs pourroient être
considérés comme des genres composés de sous-geiires. Leurs
caractères distinctifs, fournis tantAt par telle partie de la
structure, tantôt par telle autre, n'offrent point la symétrie,
la corrélation , l'opposition , que l'on admire dans les classifi-
cations artificielles , et ils ne sont pas toujours d'une rigou-
reuse exactitude. S'ils paroissent être plus simples que ceux
des sections et des tribus, c'est que, pour abréger, nous avons
omis, peut-être à tort, d'exposer l'ensemble des caractères
de ces petits groupes, pour nous borner à présenter le signa-
lement qui nous a paru le plus notable.
La plupart de ces remarques sont également applicables
aux groupes formés dans les deux autres sections. En général,
et sauf exceptions, on peut observer que ces petits groupes
sont d'autant plus difficiles à caractériser exactement qu'ils
sont plus naturels. C'est ainsi que, dans la section des inu-
lées- prototypes, le premier groupe, qui est le plus naturel,
ne pourroit être bien caractérisé que par une assez longue
description.
Les difficultés que nous avons éprouvées pour établir, dans
l'ordre des synanthérées, des tribus, des sections et dessous-
sections, résultent principalement d'une chose que les bota-
nistes semblent méconnoitre, et que nous ne saurions trop
répéter: c'est que la valeur d'un même organe ou d'un même
caractère n'est pas égale dans les différeus groupes de même
importance. L'évaluation ou la subordination régulière et
graduelle des organes vu des caractères est donc impossible
à établir d'une manière générale , et il faut chercher péni-
blement celle qui est propre à chaque groupe, à chaque
genre, sans quoi l'on retombe aussitôt dans l'arbitraire, et
Ion n'obtient qu'une classification très-peu concordante avec
l'ensemble des affinités.
VL Nous avons éprouvé aussi de très- grandes difficultés
pour coordonner convenabkment les soixante-dix-sept genres
de la tribu des inulées suivant une série linéaire, simple et
droite. En effet , cette disposition exprime seulement les
, • INU ' 677
affinités de chaque genre avec celui qui le précède et avec
celui qui le suit; mais elle ne peut indiquer ses affinités avec
plusieurs autres genres du même groupe. Rebuté d'abord
par ces difficultés, et séduit par des apparences trompeuses,
nous avons essayé de disposer les genres suivant un autre
mode, prôné depuis long-temps par quelques botanistes spécu-
latifs, comme le vrai moyen d'élever la classification natu-
relle au plus haut degré de perfection. Cette métiiode con-
siste à disposer les genres sur un plan , à peu près comme
les différentes parties d'une région de. la terre sont disposées
sur une carte géographique représentant cette région* Nous
avons multiplié nos tentatives avec beaucoup de persévé-
rance, en les combinant et les variant de toutes sortes de
manières, et le dernier résultat de ce travail pénible a été
de nous convaincre 1." que l'exécution parfaite de cette
méthode est absolument impossible; 2.° que son exécution
imparfaite et praticable produit une disposition beaucoup
moins bonne que la série linéaire, simple et droite; 3." que
cette méthode est contraire à la nature de notre entende-
ment; 4." que la série linéaire, simple et droite, est et sera
toujours, malgré ses imperfections, la meilleure de toutes
les dispositions et la plus naturelle , ou , pour mieux dire
la seule bonne et la seule naturelle; 5.° qu'il y a des moyens
fort simples pour remédier aux défauts de la série linéaire.
Le but de la njéthode géographique, appliquée à la dispo-
sition des genres, est d'exprimer 1.° toutes les affinités de
ces genres; 2.° les différens degrés de leurs affinités; 3." les
différentes sortes d'affinités. JNous avons appris par notre
propre expérience que , môme en se bornant à un groupe
de genres peu nombreux, une simple surface ne suffi't pas
pour la disposition convenable des signes qui doivent indi-
quer, qualifier et mesurer toutes les affinités. 11 faudroit,
pour approcher du but qu'on se propose, construire Un ré-
seau dont une partie s'étendroit sur cette surface, tandis
qu'une autre s'éieveroit au-dessus, et qu'une autre encore
s'abaisseroit au-dessous d'elle. Remarquez bien qu'en suppo-
sant possible la construction de ce réseau à trois dimensions,'
on n'atteindroit pas encore au but; car, pour offrir le tableau
complet des affinités d'un genre avec les autres genres dii
23.» 37
57» ' INU
même groupe, il faut placer au centre ïe genre dontîl s'agît^
et disposer autour de lui tous les autres genres , à des dis-
tances plus ou moins grandes selon les degrés d'à flfini tés. Mais,
comme il est impossible que tous les genres se trouvent en
même temps au centre et à la circonférence , il est clair qu'on
ne peut pas exprimer, par un seul et même réseau, les alB-
nités respectives de tous les genres d'im groupe.
La représentation exacte et complète des divers degrés
d'affinités est tout aussi impraticable que la simple indication
de ces affinités. Telle plante ressemble beaucoup à telle autre
par une partie de sa structure, et en diffère beaucoup par
une antre partie. La méthode seroit très-imparfaite et man-
queroitson but, si elle n'exprimoit pas ces divers rapports;
et cependant il est impossible d'établir une disposition telle
que deux plantes se trouvent à la fois rapprochées et éloignées
Tune de l'autre.
Les obstacles que nous avons signalés, et plusieurs autres
également insurmontables, prouvent qu'il faut renoncer pour
toujours à l'exécution parfaite de la méthode géographique
ou réticulaire. Mais nous convenons qu'il est possible et même
très-facile de tracer, sur une feuille de papier, un tableau
représentant, non pas toutes, mais quelques-unes des affini-
tés; non pas les mesures exactes de ces affinités, mais des
mesures très-peu approximatives; non pas., enfin, les diffé-
rentes sortes, mais une seule sorte d'affinité. -De petits cercles,
contenant chacun un nom générique, indiqueront les genres;
des lignes droites rayonnant de chaque cercle vers plusieurs
autres exprimeront les affinités des genres Joints parées lignes;
les différetiles longueurs de ces rayons mesureront les affi-
nités, et des noms d'organes écrits parallèlement aux lignes
de ce réseau feront connoîfre quelle sorte d'afïïnité se trouve
indiquée et mesurée. Maintenant il faut juger si un tableau
aussi incomplet et aussi imparfait seroit préférable à une
série linéaire bien ordonnée. Nous n'hésitons pas à préférer
la série linéaire, pour deux principaux motifs. i.° Elle n'est
point trompeuse : chacun sait qu'elle n'exprime que les affi-
nités de chaque genre avec celui qui le précède et ct'lui qui
le suit, tandis que le réseau annonce la prétention illusoire
et mensongère d'exprimer toutesjles affinités. 2.° La série
« ' INU • 579
iînéaire est infiniment moins arbitraire que le réseau, parce
que celui qui dispose une série est lirtiité dans ses choix
d'affinités par des bornes trés-étroites, tandis que le cons-
tructeur du réseau, beaucoup moins restreint dans ses choix,
se perd dans le vague des combinaisons et ne sait à quoi se
fixer. On peut affirmer que plusieurs botanistes d'égale force ,
travaillant séparément sur un même groupe de genres, se
trouveront à peu près d'accord dans la disposition d'une
série linéaire , tandis que les différens réseaux tracés par eux
n'auront entre eux aucune ressemblance.
L'idée d'une disposition géographique ou réticulaire, qui
semble, au premier aperçu, très-philosophique, est repous-
sée par la vraie philosophie. li'erreur capitale des partisans
de cette méthode est de ne considérer dans la science que
les choses quelle étudie : ils oublient tout -à -fait que nous
ne pouvons étudier ces choses qu'à l'aide de nos facultés in-
tellectuelles, et qu'ainsi la science doit nécessairement se
conformer à la nature de notre entendement et se propor-
tionner à sa foiblesse. La nature de notre entendement est
telle que nous ne pouvons comparer que deux objets à la
fois : d'où il suit que les vrais rapports des choses, quoique
réellement simultanés , ne peuvent être envisagés par nous
que dans un ordre successif. C'est pour cela que le langage,
qui est une image fidèle des opérations de notre entende-
ment , se présente sous la forme d'une série linéaire , simple
et droite. Vainement on nous objectera l'exemple des cartes
géographiques. Une mappemonde est un portrait de la terre
en miniature, mais n'est point une géographie; de même que
la figure dune plante n'est point sa description ni son his-
toire. Le géographe, qui fait un traité sur la science dont il
s'occupe, est obligé de décrire successivement les différentes
régions , et de les présenter ainsi a ses lecteurs dans un ordre
linéaire. L'historien n'a-t-il pas aussi à retracer des événe-
mens multipliés qui ont eu lieu simultanément P Cependant
il faut bien qu'il les dispose dans un ordre linéaire et successif.
Le philosophe lui-même aperçoit plusieurs rapports qui se
pressent tous à la fois autour du point qu'il discute , et il ne
peut les développer que l'un après l'autre.
Il n'y a rien de plus f^x que la comparaison qu'on veut
58o INU
établir entre une carte géographique et un réseau expri-
mant les affinités des êtres. Nous le répétons, la carte géo-
graphique n'est rien autre chose qu'un portrait parfaitement
ressenjblant : le réseau est une analyse , une combinaison
d'abstmctions, une conception plus ou moins ingénieuse de
notre esprit, et dont le type ne se trouve nulle part dans
la nature. Il est vrai que l'exécution complète et parfaite de
la méthode réticulairc, si elle étoit possible, produiroit aussi
une sorte de portrait fait avec des signes de pure convention ,
ou plutôt une description écrite en caractères hiéroglyphi-
ques; mais, dans ce cas, le réseau seroit si compliqué qu'il
seroit inintelligible, et les rapports indiqués seroient si mul-
tipliés qu'on n'en remarqueroit aucun. D'ailleurs, présenter
l'image ou le portrait d'un objet matériel, c'est le faire con-
noître à nos yeux, mais non point à notre entendement.
L'analyse opérée par le langage est le meilleur moyen de'
convertir cette connoissance empirique ou visuelle en une
connoissance intellectuelle et scientifique. Le réseau est aussi,
comme le langage, une méthode d'analyse; mais une mauvaise
méthode, parce qu'elle n'est point en harmonie avec l'ordre
de nos idées et les formes de notre intelligence. Un aiitre
défaut de cette méthode d'analyse, c'est qu'elle a besoin elle-
même d'être analysée; ce qui la rend à peu près inutile. En
effet , le réseau sera d'autant plus compliqué qu'il sera plus
parfait , c'est-à-dire qu'il exprimera un plus grand nombre
de rapports; mais, pour comprendre ce réseau si compliqué
et se rendre propres les notions qu'il exprime , il faudra
l'expliquer, le développer, l'analyser, le décomposer, par
un discours, ou tout au moins par une suite d'opérations
mentales : et ne voyez-vous pas que cette nouvelle analyse
indispensable n'est autre chose que la substitution de la mé-
thode linéaire à la méthode réticulaire ? Enfin, et sous un
autre rapport bien évident, le réseau le plus parfait ne pour-
roit jamais dispenser de recourir à la série linéaire ; car, pour
écrire dans un livre l'histoire ou la description des êtres, il
faut bien nécessairement les présenter dans un ordre successif.
Ainsi, la disposition réticulaire ne peut se passer du secours
de Id disposition linéaire , tandis que la disposition linéaire
peut se passer du secours de la disprîsition réticulaire , comme
nous allons bientôt le démontrer.
» » mu • ss,
i\ous pourrions approfondir davantage ce sujet important;
car les argumens se présentent en foule pour réfuter le sys-
tème dont il s'agit, et nous ne sommes embai'rassé que du
choix; mais nous en avons assez et peut-être trop dit pour
établir que la série linéaire , simple et droite , est la meilleure
et la plus naturelle de toutes les dispositions imaginables.
Nous disons la plus naturelle , parce que , si elle n'est pas
entièrement conforme à la nature des objets extérieurs que
nous étudions, elle est au moins parfaitement conforme à
la nature de notre propre entendement qui ks éîudic.
Pour terminer cette discussion , démontrons que les défauts
de la série linéaire peuvent être corrigés ou atténués par
deux moyens, qu'il faut employer concurremment. Le pre-
mier consiste à faire un choix judicieux entre les affinités
des genres dont on combine la disposition. Chaque genre a
de l'affinité avec plusieurs autres ; mais ces affinités sont
presque toujours inégales , et il est bien rare qu'on n'en
trouve pas deux assez prépondérantes pour fixer la place du
genre dont il s'agit entre celui qui doit le précéder et celui
qui doit le suivre. Il est vrai que ces combinaisons partielles,
faites d'abord séparément pour chaque genre, sont souvent
inconciliables avec la disposition générale à laquelle il faut
définitivement parvenir : c'est alors que le classificateur doit
faire preuve de talent et de connoissances , en opérant,
avec ménagement et sagacité , des concessions réciproques
entre les combinaisons partielles et la combinaison géné-
rale, de manière à sacrifier le moins possible les premières
à la seconde, et la seconde aux premières. Le second moyen
est plus facile : il remédie à l'imperfection du premier, et il
procure tout ce qu'on pourroit obtenir par la disposition
réticulaire la plus parfaite. Ce moyen est d'énoncer, sous
le titre de chaque genre, avant ou après sa description,
toutes les affinités qui n'ont pas pu être exprimées par la
position de ce genre dans la série, ainsi que les degrés de
ces affinités, et la nature particulière de chacune d'elles.
VII. On jugera sans doute que toutes les considérations
théoriques que nous venons d'exposer, sont déplacées dans
un article de Dictionnaire destiné à offrir la liste nominale
des genres de la tribu de|.inulées. Les considérations dont il.
58o ' lîVV * f
s'agit sont extraites d'un discours servant d'introduction à
notre tableau général, inédit, de la classification naturelle des
gienres de l'ordre des synanthcrées. Ce tableau, très-étendu ,
doit trouver place dans le Dictionnaire; mais quelques mo-
tifs nous engagent à le diviser en plusieurs articles, sous
diflérens titres. Kos considérations préiiuiinaires dévoient
être admises de préférence dans le premier de ces articles.
(H. Cass.)
INVERSE [Anthère]. [Bot.) En général, l'anthère est atta-
chée de manière que la suture de ses valves regarde le cen-
tre de la fleur : on la dit adverse. Mais quelquefois la suture
des valves est tournée vers la circonférence de la fleur (iri-.
dées , cucumis, etc.) : alors l'anthère est inverse.
La radicule est inverse, lorsqu'au lieu de se tourner du
côté du hyle, elle se dirige du côté diamétralement opposé;
on en a un exemple dans l'acanthe.
Les stigmates sont inverses, lorsqu'étant plusieurs dans une
fleur, chacun d'eux regarde le centre de la fleur, au lieu
d'être tourné du côté des étamines ( renonculacées , saxi-
frages, etc.). (Mass.)
INVISIBLE [Radicule]. {Bot.) Dans certaines espèces,
dans la fève, par exemple , la radicule, la plumule et même
la tigelle , sont visibles avant la germination de la graine ;
dans d'autres (oignon , pin, commeline, etc.), elles sont invi-
sibles avant la germination. (Mass.)
INVOLUCRE, INVOLUCELLE. {Bot.) Dans une ombelle
composée , les bractées qui forment une collerette à la base
de l'ombelle générale, portent le nom d'involucre, et celles
qui se trouvent à la base des ombelles partielles ou ombel-
lules . portent le nom d'involucelles : l'ombelle de la carotte ,
par exemple, a un involucre et des involucelles. (Mass.)
INVOLUTÉE [Feuille]. (Bot.) La feuille , considérée dans le
bouton , est dite involutée , lorsque ses deux bords sont roulés
en dedans: on en a des exemples dans le chèvre-feuille, la
violette, le poirier, le peuplier, etc. (Mass.)
lO. [Entom.) C'est le nom latin du papillon appelé le
paon de jour. ( C. D. )
JODATES. {Chim.) Combinaisons salines de l'acide iodique
atcc les bases salifiubles. .^
^ » lOD • 585
Composition.
loo parties d'acide iodique , conlenant 24,1201 parties
d'oxigéne, neutralisent une quantité d'oxide métallique qui
contient /|,84 parties d'oxigéne. Donc roxigène de l'acide est à
celui de la base :: 5 : 1.
Propriétés génériques.
L'eau dissout les iodates de potasse, de soude et d'ammo-
niaque , et l'iodate de zinc en très-petite quantité.
Les iodates sont insolubles dans l'alcool d'une densité de
0,82.
Le chlore ne les altère pas.
Les acides sulfurique , nitrique et phospliorique , n'ont
d'action sur eux qu'autant qu'ils s'emparent d'une portion
de leur base.
A la chaleur d'un rouge obscur tous les iodates sont dé-
composés. Le plus grand nombre des iodates métalliques
donnent de l'oxide et de l'iode : quelques-uns^ de l'oxigène
et un iodure.
Plusieurs iodates fusent sur les charbons ardens ; celui
d'ammoniaque est fulminant.
Ils sont décomposés par l'acide hydrochlorique, et il y a
dégagement de chlore, formation d'eau et d'acide chlorio-
dique ioduré.
L'acide sulfureux , en s'emparant de l'oxigène de l'acide
iodique , met l'iode à nu.
L'acide hydrosulfurique en sépare l'iode.
Préparation,
On prépare l'iodate d'ammoniaque directement en neu-
tralisant l'acide iodique par l'ammoniaque.
Les iodates de potasse, de soude, de baryte, de stron-
tiane et de chaux, s'obtiennent par le procédé décrit au mot
Hydriodates. Nous ajouterons ici que M. Gay-Lussac pense
que les sels se forment au moment même où l'iode est dis-
sous par ces alcalis. Il fonde son opinion sur ce qu'un excès
de potasse, mis avec une solution mixte d'iodate et d'hydrio-
date de potasse neutres, produit une liqueur semblable à
celle qu'on obtient en mettant de l'iode dans l'eau de potasse.
Les autres iodates s'obtiennent en mêlant la solution des
584 f lOD « (
iodates de potasse , de soude ou d'ammoniaque , avec la solu-
tion d'un sel contenant la base que l'on veut unir à l'acide
iodiquc.
C'est à M. Gay-Lussac que nous devons tout ce que l'on
sait sur ce genre de sels.
i." Section. Iodates solubles.
lodate d'ammoniaque.
Il cristallise en petits grains.
Il détone par la chaleur, en répandant une foible lumière
violette.
Lorsqu'on le décompose par la chaleur, on obtient de
l'eau, et des volumes égaux d'oxigène et d'azote; ce qui doit
être, puisqu'il est formé,
. j ( acide , loo
en poids.. . l
[ ammoniaque 10j94
Ioxigène ....... 2,5
iode 1
( azote 1
ammoniaque... 2...^
l hydrogène 5
lodate de potasse.
Il est en petits cristaux qui se groupent sous la forme
cubique.
H est inaltérable à l'air.
loo parties d'eau , à 14/- degrés, dissolvent 7,45 parties
d'iodate de potasse.
Projcié sur les charbons ardens , il fuse.
Il détone légèrement par la percussion , quand il est mêlé
au soufre.
A une chaleur rouge il se réduit en oxigène , et en un
iodure de potassium qui, avec l'eau, donne une dissolution
d'hydriodate de potasse neutre.
Il est formé, suivant M. Gay
Acide 7757H • ♦
Potasse 22,1^46 ..
100 partiçs d'iodate de potasse chauffées donnent donc
' iode , 58,907
^7,410 iodure de potassium.
Lussac, de
. . . . 100
.... 28,6]
[potassium 18,473
12,59 oxigène, dont.
lOD • 585
( 18,817 proviennent de l'acide,
( 3,775 proviennent de la potasse.
Une conséquence de cette composition de l'iodate de po-
tasse , c'est que , quand on dissout l'iode dans la potasse , il se
forme, pour 100 parties d"iodate, 407,381 d'hydriodate, qui
contiennent 086,067 d'iodure de potassium, cest-à-dire ,
cinq fois plus que n'en donnent les 100 parties d'iodate dis-
tillées.
L'iodate de potasse ne pourroit pas remplacer avec avan-
tage le nitre dans la fabrication de la poudre à canon , car
la quantité de gaz qu'il donne est à celle du nitre :: 1 : 2,5.
L'iodate de potasse est susceptible de former un sous-
iodate cristallisable.
On sait que l'acide iodique décompose l'acide hydriodique.
Lorsque ces deux acides sont unis à la potasse, ils ne se dé-
composent plus , parce que l'affinité de la base pour les
acides surmonte celle de l'oxigène pour l'hydrogène ; mais
elle ne les surmonte que foiblement : car, en faisant passer
un courant d'acide carbonique dans la solution mixte de
l'hydriodate et de liodate de potasse, on obtient un préci-
pité d'iode , parce que l'affinité des acides est assez affoiblie
pour qu'ils se décomposent mutuellement; et cependant,
lorsque les sels sont isolés , l'acide carbonique ne les altère pas.
lodate de soude.
11 cristallise en petits grains qui paroissent cubiques, ou
en petits prismes qui sont ordinairement réunis en houppe.
II fuse sur les charbons comme le nitre.
100 parties d'eau , à 14'/. degrés, en dissolvent 7,3.
]1 ne contient pas d'eau de cristallisation.
Le mélange de ce sel et de soufre détone légèrement par
la percussion.
11 contient,
Oxigène 24,432
lodure de sodium 73,568.
A la distillation il laisse dégager avec son oxigène une
petite quantité d'iode : c'est pourquoi le résidu forme avec
l'eau un hydriodate légèrement alcalin.
Il existe un sous-ioda^ de soude qui cristallise en petites
586 r jQj) e ^
aiguilles soyeuses réunies en houppe , lorsqu'on le prépare
avec de riodate neutre et de la soude.
2.* Section. lodales insolubles ou peu soluhlcs.
lodale de harjle.
II est pulvérulent, incolore et pesant,
loo parties d'eau en ont dissous o,iG à loo'^
— — — — o,oo à 18.
II ne fuse pas sur les charbons ardens, ce qui tient à deux
causes : 1.° à ce qu'il ne donne pas autant d'oxigène par la
chaleur que l'iodate de potasse; 2.° et surtout à ce que, le sel
ne se fondant pas, le contact du charbon avec l'oxigène qui
se dégaj^e est très-limité.
Lors même qu'il a été séché a 100 , il donne de l'eau a
la distillation, ce qui prouve qu'il contient de l'eau de cris-
tallisation; après ce produit on obtient de l'oxigène, de l'iode
et de la baryte sensiblement pure ou simplement hydratée.
Acide 100
Baryte 46,34. ( Gay-Lussac.)
Jodate de strontiane.
11 paroit cristalliser en octaèdres. 11 laisse dégager de l'eau
de cristallisation avant de se décomposer par le feu. II se
comporte d'ailleurs comme le précédent,
100 parties d'eau en dissolvent 0,70 à 100
— — — —r 0,34 à l5.
lodate de chaux.
11 est pulvérulent ; il cristallise en prismes quadrangulaires,
en se déposant d'une solution d'hydriodate ou d'hydrochlo-
rate de chaux.
100 parties d'eau en dissolvent 0,98 à 100
Il paroît contenir o,o3 d'eau de cristallisation; il se com-j
porte au feu comme les deux derniers.
lodate de zinc.
Il est très -peu soluble dans l'eau; il fuse légèrement sur
les charbons.
loddte d'argent.
Il est blanc, insoluble dans l'eai^, très-soluble dans l'am-
, » lOD • 587
moniaque; en quoi il diffère de Thydriodate, qui ne s'y dis-
sout pas.
L'acide sulfureux , versé dans la solution ammoniacale, en
précipite de l'iodure d'argent.
lodatcs de plomb , de protoxide de mercure , de pcroxide de fer ,
de bismuth, de deu'oxide ds cuivre.
Ils sont Lianes, et solubles dans les acides.
L'iodate de potasse ne précipite ni les sels de peroxide
de mercure, ni ceux de manganèse.
Il n'existe pas d'iodates iodurés. (Cii.)
IODE. {Chim.) Nom donné par M. Gay-Lussac à un corps
simple, qui est éleclro-négatif dans la plupart de ses combi-
naisons, et qui se réduit en une vapeur d'une belle couleur
violette. C'est cette propriété qui lui a fait donner le nom
d'iode; iode dérive de luS^nç -, violet.
Prop/'ic/es physiques.
L'iode, à la température ordinaire, est solide, d'un gris
noir ; à 17 degrés sa densité est de 4,348.
11 se liquéfie à 107 degrés, et entre en ébullition de 176 à
180. Sa vapeur est violette, ainsi que nous l'avons dit; la
densité de cette vapeur, calculée, est de 8,6t)5.
L'iode , mis sur la peau , y fait une tache Jaune-brune très-
foncée, qui finit par se dissiper à l'air. 11 a une saveur très-
àcre , et une odeur qui a beaucoup d'analogie avec celle du
chlore étendu d'eau.
11 ne paroît pas conducteur de l'électricité; car, M. Gay-
Lussac en ayant mis un très- petit morceau dans une chaîne
galvanique, la décomposition de l'eau, qui se faisoit aupara-
vant, cessa tout à coup.
11 se présente sous des formes variées : tantôt il est en
masses lamelleuses, ayant un aspect gras dans les parties
qu'on vient de mettre à découvert ; tantôt il est en paillettes
micacées; enfin, il cristallise en lames rhomboidales, très-
brillantes et très-larges, puis en octaèdres alongcs.
Propriétés chimiques.
Iode et corps simple.
Il n'éprouve aucune^action de la part de l'oxigène avec
588 ^ lOD ' f
lequel on le met en contact, soit qu'on le chauffe, soit
qu'on ne le chauffe pas; mais, s'il rencontre l'oxigène, au
inonienl oii celui-ci cesse de faire partie de quelques com-
binaisons, il pourra s'y unir en une proportion définie, et
donner naissance à Vacide iodique (voyez Iodkjif. . aeide).
Le chlore s'unit à l'iode avec une grande facilité : il pro-
duit Vacide chloriodique , qui peut, en se combinant avec de
l'iode, former l'acide chloriodique ioduré (voyez tom. IX , p. 5o).
L'iode ne s'unit pas à l'azote libre ; mais il est susceptible
de s'y combiner, quand celui-ci est à l'état naissant.
L'iode peut se dissoudre dyns le phosphore en un grand
nombre de proportions : pendant que la combinaison s'o-
père, il se dégage delà chaleur qui n'est point accompagnée
de lumière.
L'iode s'unit au soufre directement.
Il ne se combine ni au bore ni au carbone.
Il s'unit à l'hydrogène, lorsque les deux corps sont exposés
à une chaleur rouge: il en résulte l'acide hydriodiquc (voyez
HvDRioDiQUE (acide).
L'iode que l'on fait passer sur le potassium chauffé dans
un tube de verre, s'y combine, en dégageant une lumière
qui paroît violette au travers de la vapeur de l'iode qui n'est
pas absorbé par le métal.
L'iode se combine également au sodium.
Il se combine, aune température peu élevée, avec le zinc,
le fer, l'étain, l'antimoine, le cuivre, le plomb, le bismuth,
le mercure, l'argent, etc. ; avec le mercure il forme deux
combinaisons définies.
Les combinaisons de l'iode avec les métaux se font, en gé-
néral, facilement à une température peu élevée : il se dé-
gage de la chaleur et très-rarement de la lumière.
.action de lioJe sur les corps oxigénés , Veau exceptée.
L'iode n'a pas d'action sur les acides nitrique, sulfurique,
phosphorique, carbonique, borique, ni sur la silice; il n'en
a pas sur les acides sulfureux, nitreux secs.
Au rouge obscur il décompose les oxides de potassium,
de sodium , de plomb et de bismuth. L'oxigène se dégage,,
et l'iode se combine au métal réduitr
^ • lOD • 589
A cette température l'iode décompose les sous-carbonates
de potasse et de soude ; il se dégage i volume d'oxigèiie
con(re 2 d'acide carbonique , et le métal complètement ré-
duit forme un iodure.
L'iode exerce une action moins forte sur les protoxides
d'étain et de cuivre. Quand ces corps sont en contact à
chaud , il ne se dégage pas d'oxigène , par la raison que
celui-ci se concentre sur la moitié du métal pour former un
peroxide, tandis que l'autre moitié forme un iodure.
L'iode que Ton fait passer sur de la chaux, de la stron-
tiane et de la baryte , s'y combine sans dégager d'oxigéne.
Il forme avec ces bases des sous-iodures d'oxides. Ces iodures
d'oxides sont les seuls qui puissent subsister à une tempéra-
ture rouge.
action de Viode sur les corps hjdrogénés non organiques.
L'eau dissout 0,007 ^^ ^O" poids d'iode ; la solution est
jaune. Si on la chauffe jusqu'à la faire bouillir, elle se dé-
colore ; on trouve alors dans Teau des acides hydriodique
et iodique: la présence du premier est indiquée par le pré-
cipité d'iode , qui se fait lorsqu'on y mêle du chlore; la pré-
sence du second , par le précipité d'iode qu'on obtient lors-
que, après l'avoir neutralisé par l'ammoniaque et l'avoir con-
centré , on y mêle de l'acide sulfureux.
M. Gay-Lussac pense qu'il est probable que l'iode ne se
dissout daiîs l'eau que par l'intermède de l'acide hydrio-
dique, qui se forme en même temps que la dissolution a
lieu , et que, si l'on peut décolorer cette dissolution, en en
chassant l'iode qui n'est pas acidifié, soit en l'exposant à la
lumière du soleil , soit en l'exposant à la chaleur, tandis qu'on
ne peut pas décolorer Tacide hydriodique iodure , cela tient à
ce que, dans le premier liquide , l'aftinité de l'acide hydrio-
dique pour l'iode est diminuée par la présence de l'acide
iodique qui s'est formé en même temps que le premier
acide. La décomposition de l'eau par l'iode doit toujours
être peu considérable, eu égard au poids du liquide, parla
raison que , quand les acides hydriodique et iodique sont
concentrés, ils se réduisent en eau et en iode.
L'iode paroit susceptible de s'unir avec l'hydrogène per-
590 ' lOD
carburé, lorsqu'on fait passer Téther hytiriodique dans un
tube de verre rouge de feu. (^'oyez tome XV, p. 470.)
M. Thomson prétend que l'iode décompose Thydrogène
perphosphuré , en s'emparant de son phosphore , et en met-
tant l'hydrogène en liberté.
L'iode décompose le gaz hydrosulfurique : il se produit
de l'acide hydriodique. La décomposition a lieu lorsque
l'acide hydrosulfurique est dissous dans l'eau.
L'iode absorbe le gax ammoniaque: il en résulte un liquide
d'abord visqueux, très-éclatant et d'un brun noir, qui perd
ensuite de son éclat et de sa viscosité en absorbant de nou-
veaux gaz. 11 ne se dégage rien pendant la formation de ce
composé, qui est un véritable iodure d'ammoniaque. Lors-
qu'on le met dans l'eau, une portion d'ammoniaque est
décomposée : ses élément s'unissent à l'iode ; ils forment de
l'acide hydriodique qui reste dans la liqueur combiné à
l'ammoniaque indécomposée, et de l'iodure d'azote qui se
dépose sous la forme d'une poudre noire. (Voyez tome III,
Suppl., p. iSli')
Si nous admettons qu'il y ait 1 volume d'ammoniaque
décomposé, on aura 1 '/, volume d'hydrogène qui, en s'unis-
sant à 1 y, volume d'iode, produiront 3 volumes de gaz hy-
driodique, qui satureront 3 volumes de gaz ammoniaque;
en second lieu , '/j, volume d'azote qui s'unira à 1 'l. d'iode :
d'où il suit que, sur la quantité d'ammoniaque qui prend
part à l'action de l'iode, il y en a '/^ qui est décomposé.
action de Viode sur les corps oxigénës humides.
A une température basse , l'iode mis dans de l'eau con-
tenant de l'acide sulfureux détermine une décomposition
d'eau : il en résulte de l'acide sulfurique et de l'acide hydrio-
dique. Si l'on exposoit les corps à l'action de la chaleur, il
arriveroit un moment où l'acide sulfurique réduiroit l'acide
hydriodique en eau et en iode, en cédant le tiers de son
oxigènc.
L'acide arsénieux , l'hydrochlorate de protoxide d'élain,
les sulfites, les hyposulfites, mis en contact avec de l'eau
et de l'iode, s'oxigènent aux dépens de l'eau, tandis que
l'iode passe à l'état d'acide hydriodi«?ue.
y • lOD • 591
Lorsqu'on verse de l'eau de potasse concentrée sur l'iode,
c^-lui-ci est dissous avec rapidité. La liqueur dépose une
matière blanche, grenue, qui est de Fiodate de potasse, et
retient de Thydriodate de potasse ou de l'iodure de potassium,
suivant qu'on admet que Toxigénation de l'iode s'est faite aux
dépens de l'eau , ou bien aux dépens d'une portion de la po-
tasse. Nous adopterons la première opinion. Suivant que c'est
l'alcali qui domine ou l'iode , la couleur de la liqueur est le
jaune-orangé ou le rouge-brun très-foncé. Dans ce dernier
cas c'est l'hydriodate qui tient de liode en dissolution, et
malgré cela il y a un excès sensible d'alcali. 11 paroit' que,
quand la liqueur est saturée d'iode, et qu'elle est assez éten-
due pour ve pas laisser précipiter d'iodate , elle contient
une quantité d'iode à l'état de dissolution égale à celle qui
a été acidifiée par les deux élémens de l'eau.
L'eau de soude se conduit comme celle de potasse.
Il en est de u.ême des eaux de chaux, de strontiane et
de baryte. La seule différ. iice qu'on observe, c'est que leurs
iodates, éta.it très-peu soiubles , se précipitent : c'est pour-
quoi on peut obtenir par ce moyen les iodates de ces bases
à l'état de pureté.
Lorsque la magnésie est mise avec de l'eau et de l'iode,
il y a pareillement formation d'un hydriodate et d'un iodate.
Les oxides qui, comme ceux de zinc et de fer, tiennent
beaucoup à l'oxigène , sans posséder une aussi grande alca-
linité que les bases précédentes, ne déterminent pas la dé-
composition de l'eau par l'iode.
Les oxides qui tiennent peu à l'oxigène , tels que les
peroxides de mercure et d'or, ne déterminent pas la décom-
position de l'eau , mais sont eux-mêmes en partie décomposés
par l'iode. Aussi , en exposant le peroxide de mercure ,
comme l'a fait M. Colin , à une température de 60 à i 00 de-
grés , dans de l'eau où il y a de l'iode, une portion d'oxide
cède son oxigène à une portion d'iode : il en résulte du
suriodate de mercure qui reste en dissolution , et du sous-
iodate insoluble; en même temps le mercure réduit forme
un iodure rouge avec la portion d'iode qui ne s'est pas aci-
difiée. L'oxide d'or produit, dans les mêmes circonstances,
du suriodate d'or solutj^e; mais l'or qui a été réduit ne forme
pas d'foîlure.
59-^ lOD
Aclioji de Viode sur les matières organiaues en général.
MM. Colin et H. Gaultier de Claubry sont les seuls chimistes
qui aient examiné d'une manière générale l'action de l'iode
sur les matières végétales et animales. Ils sont arrivés aux
résultats suivans.
y." Iode, et substances organiques formées de carbone, d'h^'dro-
gène et d'une portion d'oxigène plus grande que celle nécessaire
pour coni>ertir l'iiydrogène en eau,
A froid il n'y a pas d'action. A une température suffisante
pour décomposer la matière organique, il se produit de l'a-
cide hydriodique.
Si l'on fait bouillir le mélange des corps dans l'eau, il se
dégage de la vapeur d'iode, et si la matière organique est
soluble, elle est dissoute sans éprouver d'altération.
2.° Iode, et suJistances organiques formées de carbone, d'oxigène
et d'une quantité d'hjdrogène plus grande que celle nécessaire
pour convertir l'oxigène en eau.
A la température ordinaire, ainsi qu'à loo degrés, il se
forme de l'acide hydriodique, qu'on sépare au moyen de
l'eau. Tel est le résultat qu'on obtient en traitant par l'iode
le camphre , les huiles fixes et volatiles, l'alcool, l'éthcr et
les graisses animales.
3." Iode, et substances végétales formées de carbone , plus d'oxigène
et d'iiydrogcne dans la proportion qui constitue l'eau.
A froid , il y a formation de composés plus ou moins colorés,
dont l'eau bouillante ne dégage pas d'iode ou n'en dégage
qu'une portion; à loo degrés il ne se produit pas d'acide
hydriodique , mais il se forme à la température où la subs-
tance organique peut se décomposer.
L'iode s'unit à l'amidon en deux proportions. La combi-
naison neutre est bleue; celle avec excès d'amidon est blanche:
on peut la considérer comme un sous-iodure. Nous allons
exposer ses propriétés, par la raison que nous ne l'avons pas
fait en traitant de l'amidon.
On obtient Viodure d'amidon en triturant de l'amidon sec
» lOD 5,j1
provenant du blé avec un excès d'iode également sec. Lé
mélange devient noir : on le dissout dans la potasse ; on sa-
ture l'alcali par un acide végétal : l'iodure se précipite. Le
salep , l'empois, le mucilage de racine de guimauve , l'ami-
don de pommes de terre , se comportent comme l'amidon
du blé.
L'iodure d'amidon est soluble dans l'eau froide : la disso-
lution est violette ; elle passe au bleu quand on y met de
l'iode. Si on la fait bouillir, tout l'iode qui est en excès à
la composition du sous-iodure se dégage : il reste du sous-
iodure blanc dans la liqueur. Si on fait évaporer cette der-
nière, on obtient un résidu un peu jaunâtre, qui devient
bleu par l'addition de l'iode.
L'acide nitrique étendu , l'acide sulfurique très-concentré,
l'acide hydrochlorique , le chlore, versés dans la solution de
sous-iodure d'amidon, font passer la couleur du liquide au
bleu, parce qu'ils mettent à nu de l'iodure neutre, en se
combinant avec l'excès d'amidon, ou bien en l'altérant.
L'acide nitrique concentré décompose l'iodure d'amidon
en altérant ce dernier.
L'acide sulfureux liquide ea précipite l'amidon, et il y
a en même temps de l'eau décomposée ; son oxigène convertit
l'acide sulfureux en acide sulfurique , et son hydrogène con-
vertit l'iode en acide hydriodique.
L'acide hydrosulfurique le décompose ; l'amidon et le
soufre sont précipités, tandis que l'hydi^ogène de l'acide s'unit
à l'iode.
La potasse, la soude dissolvent l'iodure d'amidon. MM.
Colin et Gaultier considèrent cette dissolution comme un
composé de sous-iodure d'amidon , d'iode et de potasse.
A froid , l'alcool convertit l'iodure en sous-iodure. A quel-
ques degrés au-dessous de celui oîi il entre en ébuUition, il
sépare tout l'iode de l'amidon, en le convertissant en acide
hydriodique. Un corps huileux ajouté à Talcool accélère la
décomposition du sous-iodure.
A ces faits nous ajouterons que l'iode agit sur les réactifs
colorés, humides, de nature végétale , à la manière du
chlore; il en détruit la couleur, parce que sans doute il y a
une décomposition d'eai» ; l'oxigène de celle-ci se porte sur 1#
2*. 58
594 ' lOD ^
carbone et l'hydrogène de la matière organique . tandis que-
son hydrogène s'unit à l'iode.
Etat naturel de l'iode.
Ce corps existe dans un grand nombre de fucus. Suivant
M. Gaultier de Claubry, il y est à l'état d'acide hydrio-
dique, uni à la potasse et à la soude. M. Fife l'a trouvé dans
les éponges.
Préparation.
Après avoir incinr'ré des espèces ào. fucus qui contiennent
Je l'iode, on lessive la cendre; en fait concentrer le lavage,
et, en l'abandonnant à lui-même, on l'épuisé de tout ce qu'il
contient de matières cristallisables : Feau-mère ainsi obtenue
renferme des hydriodates de potasse et de soude. On la met
dans une cornue tubulée à laquelle on a adapté une alonge
et un récipient tubulés. On verse peu à peu dans la cornue
de l'acide sulfurique concenti'é et en excès: une portion de
cet acide s'unit à la potasse et à la soude, tandis que celle
qui ne s'y combine point, passe en partie à Fétat d'acide
sulfureux., parce qu'elle cède de l'oxigène à Fhydrogène de
Facide hydriodique. De cette réaction résulte de Fiode qui
passe dans le récipient avec de la vapeur d'eau, lorsqu'on
vient à porter à Fébullition le liquide contenu dans la coiv
nue. Il se volatilise, outre l'iode" et Fcau , de Facide sulfu-
reux et de Facide hydrochlorique : ce dernier provient des
chlorures qui n'ont pas été séparés par les cristallisations aux-
quelles on a soumis les lavages des cendres de fucus. On lave
l'iode, puis on le distille avec de Feau de potasse foible.
Par ce moyen on l'obtient sous la forme de lames brillantes
comme le carbure de fer. 11 ne s'agit plus que de le sécher;
on y parvient en le pressant entre des papiers Joseph , jusqu'à
ce qu'il cesse de les mouiller.- on l'introduit ensuite dans une
cloche de verre fermée par un bout, où on le foule avec
un tube de verre, puis on le chauffe jusqu'à ce qu'il soifc
fondu.
M. Wollaston a proposé d'ajouter du peroxide de manga-
nèse, après qu'on a saturé les bases des hydriodates par Fa-
cide sulfurique, L'oxid^-, en cédant une portion de son oxigène
à l'acide hydriodique devenu libre , ^^orme de Feau. et met
» lOD SgS
ainsi l'iode à nu. ^cxiJe de manganèse, qui a perdu de l'oxi-
gène , s'unit à l'acide sulfurique qui est en excès.
Les eaux-mères des lessives de cendres de fucus que l'on
trouve à Paris, dans le commerce, sous le nom d^eaux-mères
de soude de vareck , contiennent ordinairement du nitrate de
potasse et une quantité très-notable de chlorures. C'est pour
cette raison que, quand on y verse de l'acide sulfurique con-
centré, il y a une vive effervescence, occasionée surtout par
du chlore et de l'acide nitreux.
Histoire.
C'est en France que l'iode a été trouvé dans Xdi^soude ds
vareck. M. Courtois, auteur de cette découverte, après
l'avoir tenue secrète pendant plusieurs années, la commu-
niqua, au commencement de 1812, à MM. Clément et
Désormes, qui l'annoncèrent publiquement à l'Institut, le
:2g Novembre i8i5, dans une note composée de leurs pro-
pres observations et de celles de M. Courtois. Dans la séance
du 6 Décembre, M. Gay-Lussac, qui avoit reçu quelques
jours auparavant de M. Clément une certaine quantité
d'iode, avec l'invitation de l'examiner d'une manière spé-
ciale , lut un mémoire dans lequel il établissoit les rap-
ports qu'il avoit avec le chlore , et proposoit de lui donner
le nom qu'il porte depuis cette époque. Les rapprochemens
que M. Gay-Lussac avoit faits, furent pleinement confirmés
par M. H. Davy, qui se trouvoit alors à Paris, et qui con-
signa ses observations dans une lettre datée du 1 1 Décembre,
qui fut lue à l'Institut le i5 du même mois. Enfin, dans le
mois d'Août 1814, M. Gay-Lussac lut un mémoire à l'Insti-
tut, où il assigna définitivement le rang que l'iode doit
occuper dans le système chimique des corps simples. Il fit
voir que ses propriétés le rangeoient entre le chlore et le
soufre; que l'azote devoit être placé à la suite de ce dernier,
à cause de la ressemblance qui existe entre l'acide nitrique et
les acides iodique et chlorique , soit par la facilité avec la-
quelle ces trois acides cèdent leur oxigène , soit par leur
composition, qui est telle que, pour 1 volume de chlore.
d'iode et d'azote, il y a 2 '/^ volumes d'oxigène. 11 fit voir en-
core que, si quelques iodQîes se rapprochent entièrement des
59^ lOD
chlorates , la plupart ont plus d'analogie avec les sulfates,
et que les sulfures , les iodures et les chlorures se compor-
tent de la même manière avec l'eau ; enfin, que l'action du
soufre et du chlore sur les ox/dcs, avec ou sans le concours
de l'eau, est semblable à celle que l'iode exerce sur les
mêmes composés.
C'est du travail de M. Gay-Lussac que nous avons em-
prunté presque toute la matière de cet article. (Ch.)
lO-DIEB. {Ornith.) L'oiseau que David Crantz désigne
sous ce nom dans son histoire du Groenland, publiée en.alle-
mand , et qui est nommé io-fugl par Pontoppidan, tom. 2,
pag. ii3 , est le labbe à longue queue, larus stercorarius , Linn.
(Ch. D.)
lODIQUE. [Cliim.) Combinaison acide de l'iode avec
l'oxigène.
Composition.
Poids. Volume.
O'^^S^"^ ^''9^7 ^l j Gay-Lussac.
Iode 100 1 )
La quantité d'oxigène est le multiple par 5 de la première
quantité qui peut s'unir à l'iode.
Propinélés.
Il est solide quand il est anhydre, incolore et demi -trans-
parent. Sa densité est supérieure à celle de l'acide sulfurique
hydraté.
Il est inodore ; sa saveur est très-aigre et astringente.
Il rougit la teinture de tournesol, et finit par la détruire.
Il est légèrement déliquescent dans un air humide. Sa so-
lution dans l'eau est susceptible d'être concentrée en sirop,
et dans cet état elle peut être réduite en une matière pâteuse ,
qui paroît être un hydrate : cette matière, chauffée davan-
tage, perd la totalité de son eau, sans que l'acide soit altéré.
U forme des sels dont la plupart sont insolubles à l'état
neutre.
L'acide iodique précipite les nitrates, de plomb et de
mercure.
Les acides sulfurique, phosphorique, nitrique, forment
avec lui des composés cristallisabies. Si, dans une, solution
» lOD ^ 597
d'acide iodique concentrée et chaude, on verse goutte à
goutte de l'acide sulfurique , les deux acides s'unissent, et
leur combinaison se précipite. Ce précipité, fondu avec
précaution, est susceptible de cristalliser, par le refroidis-
sement, en cristaux rhomboïdaux d'une couleur jaune-pàle,
qui peuvent être volatilisés sans altération, lorsqu'on ne les
chauffe pas brusquement. Dans le cas où la chaleur est trop
forte, une partie se^ sublime , et une autre est réduite en
acide sulfurique , en iode et en oxigène.
L'acide iodique forme avec l'acide phosphorique hydraté
un composé solide, jaune, incristallisable. On peut encore
obtenir un composé, en mettant l'acide iodique dans l'acide
phosphoreux, et faisant chauffer : alors une portion du pre-
mier acide cède son oxigène à l'acide phosphoreux, et le
convertit en acide phosphorique ; l'iode désoxigéné se vola-
tilise, et la partie d'acide iodique non décomposée s'unit à
l'acide phosphoriqtie.
L'acide iodique et l'acide nitrique forment un composé
qui cristallise en rhomboïdes aplatis. Ces rhomboïdes secs ,
exposés à une chaleur de beaucoup inférieure à celle qui
volatilise le composé sulfurique , se réduisent en deux por-
tions : l'une se décompose en oxigène, en iode et en acide
nitrique ; l'autre se sublime sans altération.
L'acide iodique , exposé à une température inférieure de
quelques degrés à celle qu'il faut pour porter l'huile d'olive
à l'ébullition , se fond et se réduit en iode et en oxigène.
Cette action explique comment il forme, avec le soufre,
le charbon, le sucre, les résines, les métaux combustibles
divisés , des mélanges qui détonent quand on en élève la
température.
La solution d'acide iodique corrode presque tous les mé-
taux, même l'or et le platine (l'or surtout).
L'acide iodique et l'acide hydriodique liquide qui n'est
pas très-étendu d'eau, se décomposeot mutuellement en eau
et en iode.
L'acide iodique et l'acide bydrochlorique liquide se ré-
duisent en eau et en acide chloriodique ;
L'acide iodique et l'acide hydrosuif urique liquide se rédui-
sent en eau , en soufre et en iode.
o
598 , lOD < ,
L'acide sulfureux liquide, en lui enlevant son oxigène , se
transforme en acide sulfurique, et met Tiode en liberté.
Histoire et préparation.
Nous sommes redevables à M. Gay-Lussac de la décou-
verte de Tacide iodique. 11 en détermina la composition et
les propriétés principales dans le mémoire qu'il présenta à
l'Institut en Août 1814. Il le retira de l'iodatc de baryte
au moyen de l'acide sulfurique; mais l'acide iodique, pré-
paré par ce procédé, est en dissolution dans l'eau , et il
retient toujours une petite quantité de l'acide qui a servi à
son extraction. En 181 5, M. H. Davy obtint l'acide iodique
parfaitement pur, en faisant réagir, à la température ordi-
naire, l'oxide de chlore sur l'iode. Voici son procédé:
On introduit dans un tube fermé par un bout 2'/, parties
de chlorate de potasse et lo d"acide hydrochlorique , d'une
densité de i,io5: après avoir placé le tube verticalement, on
y adapte un tube horizontal rempli de chlorure de calcium ; ce
tube, au moyen d'un tube coudé, plus étroit , communique
avec un récipient de verre mince à long col, dans lequel
on a mis j partie d'iode. On chauflTe avec précaution l'extré-
mité du tube de verre où est le mélange de chlorate et
d'acide, a6n d'éviter l'explosion que détermineroit infail-
liblement une chaleur trop forte. Il se dégage de l'oxide de
chlore, qui arrive à l'état sec dans le récipient : là l'iode se
combine aux deux élémens de l'oxide gazeux; il en résulte
de l'acide chloriodique ioduré et de l'acide iodique. Quand
l'opération est terminée, on chauRTe doucement le récipient;
l'acide chloriodique ioduré se volatilise, et l'acide iodique
reste à l'état solide.
C'est M. H. Davy qui a fait connoître la combinaison de
l'acide iodique avec les acides qui ne sont pas susceptibles
de le décomposer. (Cpk)
lODURES. (Chim.) Combinaisons non acides, que l'iode
forme avec les bases salifiables , et avec les corps simples qui
sont électro-positifs par rapport à lui.
aj Les iodiires de corps simples non métalliques sont ceux de
phosphore, de soufre et d'azote.
h) Les iodures de corps simples métalliaues , connus, sont ceux
» ' lOL ♦ 5og
^c potassium, de sodium, de fer, de zinc, d'étaîn, d'anti-
moine, de cuivre, de plomb, de bismuth, de mercure (il
y en a deux), d'argent et d'or.
Tous les iodures métalliques sont décomposés par les acides
nitrique et sulfurique concentrés: le métal est oxidé, et l'iode
est mis en liberté.
A l'exception des iodures de potassium, de sodium, de
plomb et de bismuth, tous les autres sont décomposés, lors-
qu'après les avoir portés au rouge dans un tube on y fait
passer un courant d'oxigènc.
J.e chlore les décompose tous.
Enfin les iodures de potassium, de sodium, de fer, de
zinc, sont dissous par l'eau, vraisemblablement en donnant
lieu à des hydriodates.
Les iodures d'étain et d'antimoine sont réduits par l'eau
en acide hydriodique et en oxides, qui se déposent pour la
plus grande partie lorsqu'il y a assez d'eau.
Les iodures de cuivre, de plomb, de bismuth, de mer-
cure et d'argent, sont insolubles dans l'eau.
La composition des iodures métalliques est facile à déter-
miner, d'après celle de l'iodure de zinc, par la raison que
les quantités d'iode qui se combinent à un métal sont pro-
portionnelles à la quantité d'oxigène que celui-ci absorbe.
Ainsi loo d'iode se combinent à 26,226 de zinc, qui absor-
])ent 6,402 d'oxigène. Qu'on cherche maintenant la quantité
d'un métal quelconque à laquelle cette quantité d'oxigène
peut s'unir, et l'on aura la quantité de ce métal qui s'unit à
300 d'iode, en supposant toutefois que le métal en question
soit susceptible de former un iodure.
#
c) Iodures de bases salifiables.
On ne connoît guère parmi les bases salifiables que l'am-
moniaque qui soit susceptible de former un iodure. Voyez
Iode. ( Ch. )
lOLITHE. {Min.) Nom donné par les, minéralogistes de
l'école de Freyberg à l'espèce minérale que M. Cordier a
décrite sous celui de DichroÏte. Voyez ce mot. (Bb.)
lOLITHUS ou JOLITHUS.(Bo^), c'est-à-dire , pierre t^io-
ktte, en grec. Schvvc^ckfeld , dans son. Catalogue des végé-
Cc.o , 10 L « ,
taux ef des fossiles de la Silésie , nomme iolilhus ou lapis
violaceus , une pierre qui répand l'odeur de la violette.
ÎVIicheli pense qu'il s'agit d'une petite plante, et ne balance
pas à la donner pour Yherbula muscosa , d'Agricola , qui ex-
hale l'odeur de violette, et pour la pierre d'Aldenberg, à
odeur de violette, de Besler {Mus. rar. , tab. 29); enfin,
pour son bjssus germanica {Nov. gen. , tab. 89, fig. 3), que
Linnasus rapporte à son Ijssus ioliihus , qui , s'il n'a pas
toujours l'odeur de la violette , en a au moins souvent la
couleur. Cette odeur se fait sentir surfout lorsque ce byssus ,
après avoir été desséché, vient à être humecté. Il forme sur
les pierresde grandes plaques pourpres, ouviolcftes, ou oran-
gées. Agardh et Lyngbye le considèreiif comme une espèce de
conferve terrestre , formée de petits filamens droit* , excessive-
ment courts, dichotomes , articulés , et à articulations une fois
et demie plus longues que larges.
11 y a aussi des pierres qui sentent la violette , mais qui
doivent leur odeur à une autre cause, comme nous l'avons
dit ailleurs. (Lem.)
lOLO-SUCHIL. (Bot.) Ce nom indien , signifiant /Zeur
cordiale, est donné, au rapport d'Acosta , cité par C. Bauhin,
à une fleur qui a la forme et le volume d'un cœur. Elle est
mentionnée dans l'article où il est question des oeillets d'Inde,
tagetes. (J. )
JON (Bot.), nom grec de la violette. (J.)
lOJSESIE, lonesia. {Bol.) Genre de plantes dicotylédones,
à fleurs complètes, monopétaîées , de la famille des légumi-
neuses , appartenant à ïheptandrie monogynie de Linnseus,
offrant pour caractère essentiel : Un calice à deux folioles ;
une corolle infitndibuliforme ; le tube charnu et fermé; le
limbe à quatre lobes; un appendice en forme d'anneau, in-
séré à l'orifice du tube de la corolle , supportant sept éta-
mines ; un ovaire pédicellé , auquel succède une gousse en
forme de sabre, contenant quatre à huit semences.
Ce genre, établi par Roxburg pour un arbre des Indes
orientales, paroît avoir des rapports avec les palovea et les
lauhinia, et devoir être rangé parmi les légumineuses. Il ne
renferme qu'une seule espèce.
loNÉsiE AILÉE : lonesia pinnala ^ Roxb^, Asiat. researcli. , 4 ,
, ♦ ION • Soi
pag. 355 ; Willd., Spec, 2 , pag. 287 ; Asjogâm , Rh€eà.,Hort.
Malab. , 5, pag. 117, tab. 5g. Arbre des Indes orientales,
d'une médiocre grandeur, dont les rameaux sont garnis de
feuilles alternes, pétiolées , ailées avec une impaire, compo-
sées de quatre à six paires de foiioles glabres, fermes, ob-
longucs , lancéolées, luisantes les fleurs sont disposées en
cime, médiocrement pédonculées, terminales et axillaires :
la corolle en forme d'entonnoir, d'un jaune orangé; les gousses
courbées en sabre. ( Poir. )
lONlA ( Bot. ) , nom athénien de l'yvetf e , chamœpjtis , sui-
vant Ruellius. (J. )
lONIDIUM. {Bot.) Genre de plantes dicotylédones, à fleurs
complètes, polypétalées, irrégulières, de la famille des vio-
lacées, de la pentandrie monogjnie de Linnagus, offrant pour
caractère essentiel : Un calice à cinq folioles, sans prolon-
gement à sa base ; une coiollc irrégulière , à cinq pétales , sans
éperon, presque à deux lèvres : la supérieure à deux pétales;
trois pétales à l'inférieure; celui du milieu plus large et plus
long: cinq étamines, les anthères non réunies; un ovaire su-
périeur, surmonté d'un seul style et d'un stigmate. Le fruit
est une capsule entourée par le calice, à une seule loge, à
trois valves ; graines attachées au milieu des valves.
Ce genre renferme des espèces herbacées ou des sous-ar-
hrisseaux, que Linnacus avoit d'abord réunis aux violettes,
que Ventenat en a exclus pour en former un genre particu-
lier sous le nom d^ionidium. On n'en cultive aucune espèce
en Europe, une ou deux exceptées, l'ionidium polj'galœfoliuni
et Vionidium suherosum. Elles exigent une bonne terre, l'oran-
gerie en hiver et de la chaleur en été : on les multiplie de
boutures.
loNiDiUM iTOtBou : lonidium itouhoa ^ Vent.; Viola itouhoa ,
Aubl. , Guian., tab. 3 1 8 ; Viola calceolaria, Linn. Ses racines
sont blanches, rameuses, cylindriques et traçantes; ses tiges
droites, rameuses, herbacées, tomenteuses; les feuilles pétio-
lées, ovales, dentées en scie, tomenteuses à leurs deux faces;
les fleurs blanches, très-grandes, axillaires; leur calice velu,
à cinq folioles inégales; quatre pétales onguiculés, roulés à
leurs bords, un cinquième beaucoup plus grand; l'ovaire
yelu ; le stigmate urcéolé ; la capsule arrondie , à trois faces.
Co2 * ION • f
s'ouvrant en trois valves ; les semences ovales , petites e(
blanches. Celte plante croit à Tile de Cayenne et dans les
contrées méridionales de l'Amérique. Ses racines, d'après
Aublet, ont les propriétés de l'ipécacuanha blanc, prises en
petite dose; en poudre, elles sont purgatives : elles devien-
nent émétiques, lorsqu'on augmente la dose, qui est ordinai-
rement d'un gros.
loNiDiUM ÉMKTiQUE : lonidium ïpecacuanlia , Vent., /. c; Viola
ipecacuanlia, Linn. ; Pomhalia ipecacuanha, Vandell. , Fasc,
pag. 7, tab. i. Cette plante a des racines blanches, fibreuses
et ramifiées; elles produisent des tiges droites, rameuses,
hautes de deux pieds : les feuilles sont ovales, elliptiques,
vertes, glabres ou un peu pileuses en-dessous, dentées en
scie; les pétioles courts; les fleurs blanches, solitaires, axil-
laires, inclinées sur leur pédoncule, accompagnées de deux
bractées très-courtes, pileuses au sommet; les pétales ongui-
culés , deux plus longs, rabattus; trois inférieurs, dont un
très-grand , pubescent en-dessous. Cette espèce croît au Brésil.
On soupçonne fortement que ce sont ses racines qui four-
nissent l'ipécacuanha blanc ; au reste, il est reconnu aujour-
d'hui que cet émétique provient de plusieurs plantes diffé-
rentes, non-seulement parmi les violettes, mais d'espèces qui
appartiennent à d'autres genres. (Voyez Ipecacuanha.)
loNiDiUM Hi^,TÉROPHVLLE : Jonidium heteroplijllum ,Vent. , /. c;
T'iolaheterophjdla , Poir. , Encycl. ; Viola surrecta, etc., Pluken.,
tab. 120, fig. 8. Espèce remarquable par ses feuilles de deux
sortes. Ses racines sont grêles, longues, tortueuses et blan-
châtres; les tiges dures; les rameaux glabres, presque fili-
formes: les feuilles presque sessiles; les inférieures petites,
ovales; les supérieures linéaires-lancéolées: les fleurs petites,
axillaires; les pédoncules capillaires, plus courts que les
feuilles. Cette plante croit à la Chine.
loNiDiUM A PETITES KLEURS : lonidiuni parvijlorum , Vent. , /. c;
Viola parviflora, Linn. fils, Sup.; Cavan. , Icon. rar. , var. C,
pag. 21. Plante herbacée de l'Amérique méridionale, qui a
le port du veronica serpiUifolia , et dont les tiges filiformes,
presque grimpantes, sont garnies de feuilles nombreuses,
pétiolécs , glabres, ovales, munies de cinq dents à chaque
bord. Les fleurs sont droites, axillates, fort petites ; la co-
, > ION * Co5
roîie ù'un blanc de lait; les quatre pc'lales supérieurs à peine
plus lor,"S que le calice : le cinquième pendant, une fois
plus long; le stigmate en entonnoir; la capsule petite, à
trois loges.
loNiDiUM GLUTiNEux : Jonidium glutinosum , Vent., Malm.,
]iag. 27. Ses tiges sont herbacées, un peu pileuses vers leur
sommet : les feuilles alternes, ovales-elliptiques, glabres , den-
tées; les pédoncules pileux, filiformes; les fleurs blanches,
petites ; leur calice pubcscent. Commerson a découvert cette
plante à Buenos -Ayres. Dans l'ionidium Unifolium (Poir. ,
Encycl. , suh viola), autre espèce recueillie par Commerson
à Madagascar, les feuilles sont éparses , fort petites, étroites,
linéaires; les fleurs solitaires, petites, blanchiUrcs; les cap-
sules glabres.
lONIDIUM A FEUILLES DE POLYGALA : Jonidium polygcdcrfoUuin y
Vent. , Le, tab. 27 ; Viola verticillata , Ort. , Dec. 4 , pag. 5o ;
Cavan., Lee. lot., 2, pag. 075. Espèce originaire de la Nou-
velle-Espagne, dont les tiges sont dures, touffues, presque
ligneuses, à peine rameuses; les feuilles opposées, presque
sessiles, lancéolées, rudes à leurs bords; les fleurs d'un vert
jaunâtre, petites, inclinées, puis redressées. Dans Vionidiiim
linartœfolium (Poir., Encycl., suh viola), les feuilles sont
linéaires, très -étroites; les stipules sétacés ; les fleurs bleuâ-
tres, petites; la corolle à peine de la longueur du calice.
Dans l'ionidium strictum, Vent., l. c. , les tiges sont ligneuses,
élancées; les feuilles opposées, lancéolées, très- entières ,
glabres, longues d'un pouce; les stipules très-courtes, subu-
lées; les fleurs petites; la corolle blanchâtre; les capsules
courtes, à trois petites valves concaves, renfermant des se-
mences blanchâtres. Cette espèce a été découverte à l'île de
Saint-Thomas par M. Ledru , et à Saint-Domingue par M.
Poiteau.
loNiDiuM giumpant: lonîdiii'm hjhantlius, Vent,: Viola hj'han-
tlius, Linn. ; Aubl. , Guian.,'2, tab. Si^; Bjhanthus , Jacq. ,
y1/?ier.,lab. 176, fig. 24, 26. Arbrisseau de Caycnne, que les
Galipons nomment pira-aia. Ses liges se divisent en rameaux
grêles, roulés les uns sur les autres ou autour des arbres qui
les avoisinent ; garnis de feuilles alternes, lisses, ovales,
longues d'environ six pc^îces. Les fleurs sont ou solitaires ou
^o4 f ION *
réunies plusieurs ensemble sur un pëtioncule commun , axil-
laires, soutenues par des pédicelles courts, articulés; la co-
rolle fort grande, jaunâtre; le pétale supérieur concave,
éperonné à sa base; les deux latéraux arrondis, onguiculés;
les deux inférieurs fort petits ; les étamines appliquées contre
l'ovaire, surmontées d'un corps membraneux, portant à sa
face intérieure une anthère qui s'ouvre en deux valves.
loNiDiUM A LONGUES FEUILLES : lonidium longifoUum , Poir. ,
Encycl. , sub viola. Plante découverte à Cayenne , remarqua-
ble par la grandeur et la longueur de ses feuilles, par ses
petites fleurs à longs éperons, par ses tiges ligneuses, garnies
de rameaux roides, tortueux. Les feuilles sont alternes, pé-
tiolées , oblongues-lancéolées , longues de quatre à cinq pouces ;
les fleurs solitaires, ou réunies sur un pédoncule simple, pres-
que capillaire; le calice fort petit; la corolle blanchâtre;
l'éperon étroit, subulé.
loNiDiUM A FEUILLES DE THESiVM : lonidlum tliesUfoUum , To'ir. ,
Encycl., sub viola. Adanson a découvert, au Sénégal, cette
plante à tige herbacée, presque simple, glabre, striée,
garnie de feuilles alternes, sessiles, très-étroites, longues de
deux ou trois pouces, glabres, très-entières; les stipules su-
bulées; les fleurs fort petites, solitaires, axillaires, presque
sessiles ; les folioles du calice étroites , aiguës ; la corolle
blanche, à peine plus longue que le calice; la capsule ovale,
obtuse, un peu arrondie.
Parmi les autres espèces de ce genre placées d'abord
parmi les violettes, on peut distinguer le riola buxifolia ,
(Poir., Encycl.), à feuilles alternes, en ovale renversé, en-
tières, roulées à leurs bords, de l'île de Madagascar: le viola
capensis , Thunb. , dont les tiges sont droites, ligneuses; les
feuilles en ovale renversé , dentées en scie : le viola cnneasperma ,
Linn.; nelam-parenda , Rheed. , Hort. Malab., 9, tab. 60; très-
rameuse dès la base de la tige , à feuilles alternes , linéaires-
lancéolées, distantes, entières, dépourvues de stipules; elle
croît dans les Indes orientales. (Poir.)
lONISCUS. {Ichthjol,) Au rapport d'Athénée, les anciens
Ephésiens nommoient luvivitoç, la daurade , aurata vulgaris.
Voyez Daurade. (H. C)
lONITES. (Bot.) Ruellius cite ce nom comme un de ceux
donnés anciennement au câprier. (J.) l
» IPE 6o5
lONTITIS (Bof.), nom grec, suivant Mentzel , de l'aris-
toloche clématite. (J.)
lONUS. {Ichthyol.) On trouve désigné, sous le nom grec
à'idivoç, par Hesychius et Varinus, un poisson qui nous est
totalement inconnu. (H. C)
lONYGRON. (Bot.) Nom grec de la grassette , pmguicw/a,
qui étoit un sanicula montana de C. Bauhin , la viola hurnida
de quelques autres, et le dodecatheon de Pline. (J. )
lOPS. {Ichthj'ol.) Par le nom d'jW?ç, les anciens Athé-
niens paroissent avoir désigné l'anchois. Voyez Engraule.
(H. C.)
IOTA. (Entom.) Nom d'une noctuelle qui porte sur les
ailes supérieures deux traits longitudinaux de couleur noire,
que l'on a compares à la lettre majuscule grecque, I. La che-
nille se nourrit des feuilles de plusieurs espèces d'armoise ,
telles que l'absinthe, l'aurone , la citronelle , la santoline,
etc. (CD.)
lOUAITOBOU. {Bot.) Nom caraïbe, suivant Surian , d'une
plante caryophyllée des Antilles, qui étoit un alsine de Plu-
mier, et que Swartz nomme plia rnaceum spatulalum. (J. )
lOUANTAN. {Bot.) Aublet dit que les Noiragues, habi-
fans d'une partie de la Guiane , nomment ainsi son genre
Vantanea, que l'on n'a pas encore rapporté à une famille
connue. (J. )
lOUTAY. {Bot.) Les Garipons de la Guiane nomment ainsi
Voutea d'Aublet, genre de plante légumineuse. (J.)
lOUÏZIOU. {Ichthjrol.) Voyez Jousion. (H. C.)
lOWAIOU. {Ornith.) Nom koriaque d'une espèce de ga-
gari, colymhus maximus , Stell. , et colymbus immer , Linn.
(Ch. D.)
IPATKA. {Ornith.) L'oiseau qui porte ce nom au Kamts-
chatka , est Vanas arctica de Clusius , de Willughby, etc.,
Valea arctica de Linnaeus , le puffin de la zoologie arctique
dePennant, le macareux de BufFon, pi. enl. 275. (Ch.D.)
IPÉCACUANHA. {Bot.) La plante connue au Brésil sous
ce nom, décrite et figurée par Marcgrave et Pison , est le
véritable ipécacuanha du commerce. Les auteurs qui se sont
succédé, ont émis diverses opinions sur l'origine de cette ra-
cine.employée en méJècine , qu'ils attribuoient à différentes
6o€ « IPE ' ,
plantes. On avoît cru que c'étoit un paris ou une pjTola ,
ou un chèvrefeuille ou un euphorbe. Vandclli croyoit que
(•"étoit son pombalia, genre voisin de la violette , réuni'pos-
térieureinent à Vionidium de \^entenat , dans la même l'a-
mille. Cette racine ressembloit encore à celle d'une violette
du Pérou, existante dans nos herbiers et reportée aussi a
Vionidium- mais Técorce de celle-ci est beaucoup moins
épaisse , ce qui aide à la distinguer facilement. M. Mutis,
célèbre botaniste, résidant àSanta-Fé, en Amérique, a, le
premier, fait connoitre un psjchotria, appartenant à la fa-
mille des rubiacées, que Linnœus fils a nommé psjchotria
emetica, en le regardant comme le véritable ipécacuanha ,
et citant comme synonyme la figure de Marcgrave , sans
faire attention que dans celle-ci la disposition des fleurs en
tête est bien diiférente. Postérieurement, M. Brotero , bota-
niste portugais, a mieux connu la plante du Brésil, dont il
a donné une bonne figure et une description exacte, qui
prouvent que cette plante, quoique également rubiacée,
appartient à un genre différent, qu'il nomme callicocca, en
ajoutant le nom spécifique ipécacuanha. Ce genre doit se
confondre avec celui du cephaelis , publié auparavant par
Swartz.
Comme on distingue dans les pharmacies deux ipécacuanha,
à raison de la couleur grise ou- brune de leurs racines, quel-
ques auteurs, les regardant comme différens, ont cru que
Fipécacuanha gris étoit fourni parle callicocca ou cephaelis,
et le brun par le psjchotria. Cette erreur a subsisté tant
qu'on n'a pas possédé ici les deux plantes en herbier avec
leurs racines. M. Richard , fils , ayant eu occasion de les
observer dans Pherbler de son père, en a fait Fobjet d'un
mémoire présenté à la société de médecine, et consigné dans
le n." 4 des Bulletins de cette société, année 1818. Il a ob-
servé que la racine de cephaelis, absolument semblable à celle
du commerce , variant du gris au brun , avoit la partie li-
gneuse amincie comme un fil, et l'écorce épaisse, raboteuse
à l'extérieur, marquée de plusieurs fentes circulaires très-
rapprochées, et présentant ainsi la forme d'anneaux très-
courts. Au contraire, la racine du psjchotria , plus volumi-
neuse, a une écorce lisse, plus miucecjue la partie 3igue;ise^
IPE * 607
offrant à l'extérieur des espèces d'éiranglemens ou sillons
circulaires, assez éloignés les uns des autres. Il propose en
conséquence, pour les bien distinguer, de nommer ipéca-
cuanhu annelé la racine du eephaelis, et ipécacuanha non
annelé celle du psjcliolria. Cette dernière est plus rare dans
les pharmacies et dans les collections de matière médicale.
La première, au contraire, est très-usitée, et l'on emploie
indifféremment les deux variétés, grise ou brune. Cette
identité, indiquée par M. Richard, est combattue par M. Virey,
qui a publié récemment l'extrait d'une dissertation plus an-
cienne de M. Gomez , botaniste américain , tendant à prouver
que l'ipéoacuanha gris, le même qiie Vipécacuanha blanc de
Pison , diffère du brun , et provient d'un richardia , autre
rubiacée , qu'il nomme richardia brasiliensis , et dont il a
communiqué des échantillons à M. Virey. Sa racine, de
même forme que celle du brun , est également annelée , à
anneaux un peu moins courts, à écorce pareillement épaisse,
blanchâtre , un peu plus molle, entourant une partie ligneuse
filiforme, et ayant la même saveur acre, ainsi que l'odeur
nauséeuse. L'auteur détaille ensuite les autres caractères qui
rattachent cette plante au genre Richardia, dédié ancienne-
ment par Linnœus k Richardson, botaniste anglois. Cette
indication d'un observateur qui a vu et décrit les plantes
vivantes, semble prouver que les ipécacuanha bruns et gris
proviennent de deux plantes différentes.
La propriété soit antidyssentérique , soit émétique, est à
peu près la même dans ces deux racines; elle est moindre
dans celles du psychotria et des deux ionidium cités plus haut.
On supprime ici les détails relatifs à leur emploi , qui
sont du ressort de la matière médicale et de la médecine ^
nous rappellerons seulement que l'ipéeacuanha a été connu ,
vers 1649, par l'éloge que faisoit Pison de son utilité dans
la dyssenterie. Sa réputation s'établit lentement. Un médecin
nommé Legros en avoit apporté, en 1672, une provision,
qui fut mise en vente dans une pharmacie célèbre de Paris j-
mais y resta presque dans Poubli. Un marchand plus adroit,
nommé Grenier, qui en avoit apporté i5o livres en ]68S,
associa à sa vente et mit dans son secret le médecin Helvetius
le père. Celui-ci obtint^e Louis XIV qu'on en feroit Teisai
«
6o8 ' ÎPE '
dans les hôpitaux, et en cas de succès il devoit avoir, avec
une récompense, le privilège exclusif de la vente. L'un et
l'autre furent accordés àHelvetius. Le marchajid, qui voulut
entrer en partage, lui intenta un procès; mais Helvetius fut
maintenu dans la jouissance du privilège, à la charge de
l'indemniser. Grenier, mécontent, vendit de l'ipécacuanha
à beaucoup de personnes, et le secret fut bientôt divulgué.
Ce remède ne tarda pas à trouver des preneurs très-zélés.
D'abord on ne connoissoit que sa propriété antidyssentérique;
ensuite on a découvert son action émétique, qui Ta fait
placer au premier rang parmi les médicamens végétaux de
cette classe.
Dans les environs de Rio-Janéiro, suivant M. Gomez, le
nom de poaia est donné en général aux divers ipécacuanha.
Le cephaelis est nommé poaia do malo ou cipo ; le richardia
est le poaia do campo ou des champs ; et M. Gomez parle
aussi d'un poaia grossa, qu'il ne put examiner que superH-
ciellement, et dont les rugosités transversales lui parurent
jjIus écartées que dans les espèces ordinaires. Chomel, dans
ses Plantes usuelles, dit aussi que les Portugais donnent à
l'ipécacuanha les noms de hexuquillo , cagosanga, et beloculo.
Plusieurs plantes employées en divers pays comme émcti-
ques y portent, pour cette raison, le nom d'ipécacuanhd.
Telles sont d'abord, à Cayenne et à Saint-Domingue, quel-
ques violettes autres que celles citées précédemment. Le
cjnanchum vomitorium, de la famille des apocinées, est l'ipé-
cacuanha blanc de l'île de France. Ç)uelques autres apoci-
nées sont employées dans l'Inde sous le même nom comme
émétiques. Le hoerhaavia diandra est nommé de même à
Cayenne. On trouve dans quelques livres le trientalis sous
le nom de ipécacuanha europœa. Un rueltia de Saint-Domingue,
nommé coccis , est cité comme ipécacuanha faux par Nicolson.
Voyez Emétiine. (J.)
IPECA-GUACU. {Ornith.) L'oiseau que Pison , Hist. nat. ,
pag. 85, désigne sous ce nom, est le canard musqué, anas
moschata, Linn. (Ch. D.)
IPECATI-APOA. (Ornith.) Cet oiseau, dont Marcgrave a
donné la description et la figure, pag. 218 de son Histoire
naturelle du Brésil, et auquel cff'TCspond Vopeca oiwa Cic
, ' IPH * Ço^
Eai 5 Synops. 148, est rapporté à l'oie bronzée, anas mêla--
notos, Gmel. et Lath. (Ch. D.)
IPECU. {Ornith.) L'oiseau que les Brésiliens nomment ainsi,
et qui est figuré dans Marcgrave , pag, 207, est l'ouantou ou
pic noir huppé de Cayenne , picus linealus , Lirin. (Cu. D.)
IPECUTIRI. {Ornith.) he canard auquel on dohne ce nom
au Paraguay, à causé de Son cri tiri ou cutiri, et qui est dé-
crit par M. d'Azara sous le n.° 437 , a le front d'un brun rous-
sâtré, les cètés de la tête, la gorge et le devant du cou blan-
châtres, le derrière de la tête et la nuque noirs; le dessous
du corps d'un brun roussàtre , avec quelques taches noires
sur les flancs; les parties supérieures du corps d'un noir chan-
geant, le bec d'un rouge obscur. (Cit. D.)
IPÉRUCUIBA (IchthjoL), nom brésilien du rémora. Voyez:
ECHÉNÉÏDE. (H. C. )
IPHIONE, Iphiona. (Bot.) [Corfmhiferes, Juss. = Sfngéné-
sie poij'gamie égale, Linn.] Ce genre de plantes, que nous
avons proposé dans le Bulletin des sciences d'Octobre 1817,
appartient à Tordre des synanthérées , à notre tribu natu-
relle des iniJlées, et à la section des inulées-prototypes, dans
laquelle nous l'avons placé entre les deux genres Pentanema
et Rhanterium. Il présente les caractères suivâns :
Calathide incouronnée, équaliflore , pluriflore, régulari-
flore, androgyniflore. Péricline formé de squ'ammes imbri-
quées. Clinanthe inappendiculé , planiuscule. Fruits cylin-
dracés, hispides ; aigrette composée de squammellules inégales,
filiformes , barbéllulées. Anthères munies d'appendices basi-
Jaires.
Iphione ponctuée; Iphiona punctata, H. CasS. , Bulletin des
sciences d'Octobre 1817. C'est une plante herbacée, dont la
tige est simple, grêle, cylindrique, striée, à peine pubes-
cénte; ses feuilles sont alternes, sessiles , oblongùes, sagittées
à la base, dentées en scie, ou presque entières, glabrius-
culès, parsemées en-dessous de points glanduleux; les cala-
thides , composées de fleurs jaunes, sont tantôt disposées ea
panicule corymbée, tantôt peu nombreuses et disposées en
un petit corymbe terminal. Elles sont multiflores ; leur péri-
cline est égal aux fleurs, subcylindracé , formé de squammei
irrégulièrement imbrio^uées , foliacées , linéaires , aiguès ,
6io , IPH
ùninervëes, parsemées de glandes; le cHnanthe est planius-
cule ; les fruits sont cylindriques, hispides , munis d'un bour-
relet basilaire ; leur aigrette est composée de squammellulcs
peu nombreuses, unisériées, inégales, filiformes, barbellulées j
les anthères sont pourvues d'appendices basilaires sétiformes;
les corolles ont leurs divisions garnies de glandes. Nous avons
bbscrvé cette plante dans un herbier de M. de Jussieu j qui
a été fait à Galam en Afrique.
IpHior^E A FEUILLES DE GENÉVRIER : Ipliiona juniperlfoUa , H.
Cass., Dictionnaire; Iphioria diihia , H. Cass. , Bulletin des
sciences d'Octobre 1817 ; Conj'za pungens , Lamk. ; Chrjsocoma
mucronata, Forsk. ; Stœlielina spinosa, Vahl. Cette plante her-
bacée , ou peut-être ligneuse , est entièrement glabre , et haute
de six pouces dans l'échantillon incomplet que nous décri-
vons ; sa tige est dure, roide, cannelée, anguleuse, très-ra-
meuse, à rameaux paniculés, divariqués, roides et droits;
les feuilles sont peu nombreuses, éparses, alternes, sessiles,
longues de cinq lignes, subulées , roides, épaisses, coriaces,
spinescEntes au sommet, portant, sur chacun des deux côtés
de leur partie basilaire , une lanière courte, subulée , roide,
spinescente ; les calathides , hautes de quatre lignes et com-
posées de fleurs jaunes, sont solitaires au sommet de la tige
et des rameaux. Elles sont pluriflores ; leur péricline , infé-
rieur aux fleurs, est formé de squammes imbriquées, appli-
quées, ovales, glabres, coriaces, membraneuses sur les bords;
le fclinanthe est petit. Les fruits sont cylindracés , profondé-
ment cannelés , hispidesj leur aigrette , égale à la corolle , est
composée de squammellulcs filiformes , épaisses, très-barbellu-
lëes , nombreuses , plurisériées , et d'autant plus petites qu'elles
sont plus extérieures; les anthères ont l'appendice apicilaire
long, et les appendices basilaires courts; les corolles sont cy-
lindriques, à tube nul, ou presque nul, ou confondu avec
le limbe; les styles sont conformes à ceux des inulécs. Cette
plante a été découverte par Lippi , en Egypte , aux environs
du Caire, sur les montagnes. Nous avons étudié ses caractères
génériques et spécifiques sur un échantillon de l'herbier de
M. Desfontaines , qui ne nous a point offert une particu-
larité décrite par M. de Lamarck en ces termes : « A la base
« de la plupart des feuilles, on trouve , entre lesdeux piquans
, » IPO • Gii
« latéraux, deux très-petites oreillettes qui se courbent poui*
^< eihbrasser la tige.»
Les deux espèces cViphionâ diffèrent beaucoup l'une dû
l'autre, non-seulement par le port, mais aussi par quelques
caractères génériques , ainsi qu'on peut le remarquer en
comparant leurs descriptions : cependant, pour ne pas trop
multiplier les genres, nous avons dû associer ces deux plantesi
La première a beaucoup d'affinité avec notre genre Penta-^
nema, et la seconde avec le genre Rhanterium; mais les carac-^
tères des trois genres sont bien distincts. Viphiona janiperi-
folia avoit été attribuée par M. de Lamarck au genre Confza^
par Forskal au genre Chrysocoma , et par Vahl au genre
Stœhelina : mais la calathide des coriyza çst pourvue d'une cou-
ronne féminiflore ; les chrysocoma sont de la tribu des asté*
rées; les stœhelina sont des carlinées, et elles diffèrent d'ail-
leurs des iphiona par le clinanthe fimbrillifère et l'aigrette
raïneusci (H. Cass.)
IPHISE. {Erpétol.) Feu Daudin a donné ce nom à une
espèce de couleuvre, coluber iphisa, qtii est encore fort peu
connue. Décrite d'abord parMerrem, qui l'a reçue de l'Inde,
cette espèce a été nommée par lui Hjgiem natter. Seba pa-
roît l'avoir figurée aussi sous la dénomination de serpens sia-'
mensis {Thés. Il, tab. 04, fig. Ô). (H. C.)
IPHYON. {Bot.) Anguillara, cité pai» Ci Bauhin j, croit que
ce nom est donné par Théophraste 4 l'asphodèle jaune. (J.)
IPICAY. {Bot.) La plante du Brésil citée sous ce nom pat*
Mentzel, est le Jupicai, Voyez ce mot. (J.)
IPO. {Bot.) Voyez Antiare et Hvpo. (J.)
IPOMEA, Ipomœa^ {Bot.) Genre de plantes dicotylédones^
à fleurs complètes, monopétalées, régulières, très-voisin des
liserons, de la famille des convolvulacées, de la pentandrie
monogjnie de Linnœus ; offrant pour caractère essentiel : Un.
calice à cinq découpures; une corolle infundibuliforme ou
en cloche; cinq étamines attachées à la base de la corolle,-
un ovaire supérieur ; un stigmate en tête ; une capsule à trois
loges polyspermes.
Ce genre n'est que médiocrement séparé des liserons. Les
caractères qui l'en distinguent, ne se trouventpas toujours réu-
nis dans les nombreuse^espèces qui le composent; mais il ca
Cid ' ÏPO ^ .
existe au moins un ou deux sufiisans pour les fcnîr' séparées
des liserons. Le plus saillant scroit la forme de la corolle^
^i elle ctoit constamment en entonnoir, c'est-à-dire, à tube
alongé et rétréci , comme dans le quamoclit ; mais souvent
elle est presque campanulée : il faut alors avoir recours au
Stigmate en tête ou à deux lobes très-courfs, tandis qu'il est
bifide dans les liserons. Le nombre des loges et des semences
n'est pas non plus constant : d'où il résulte qu'il y a , parmi
les auteurs, peu d'uniformité dans les espèces, placées tantôt
dans l'uo , tantôt dans l'autre de ces deux genres.
Les ipbméa se composent d'une suite nombreuse de très-
belles espèces, dont plusieurs sont cultivées dans nos jardins
comme pbintes d'ornement , propres , par leur tige grimpante ,
à couvrir les berceaux ou à palissader les murs. On sème leurs
graines sur couche , dès que les gelées ne sont plus à craindre ,
dans des pots de terre de bruyère mêlée avec moitié de terre
franche : on repique ensuite les jeunes plantes, seule à seule,
dans des pots qu'on enterre au pied d'un mur exposé au midi.
Les espèces les plus remarquables de ce genre sont:
Ipoméa quamoclit : Ipomœa quamoclit, Linn. ; Lamk. , III,
getu, tab. 104, fig. 1 ; F/05 cardinalis, Rumph., Amb,, 5, tab.
i55, fig. 2; Tsiuria-cranti, Rheed., Malab. ii , tab. Go. La
délicatesse de son feuillage et l'éclat de ses fleurs rendent
fcetté belle espèce très-remarquable. Ses tiges sont grêles et
s'élèvent, en grimpant, à la hauteur de sept à huit pieds ;
les feuilles d'un bea* vert, pectinées, élégamment pinnati-
fides; les pinnules linéaires, presque filiformes. Les fleurs
sont axillaires, solitaires, quelquefois deux sur un très-long
pédoncule; la corolle en entonnoir, de couleur écarlate très-
Vive, longue de plus d'un pouce. Cette plante est originaire
des Indes orientales. Rhéede dit que son suc est sternu-
tatoire et employé comme tel avec succès dans quelques
înaux de tête.
Ifoméa tObéredx : Ipomœa tulerosa , Linn.; Sloan., Juin,
hist., 1, tab. 96, fig. 2; Pluken., Almag. , tab. 276, fig, 6;
vulgairement Ltane a tonnelles. Cette espèce est , par ses
longs rameaux plians, la plus propre à couvrir les berceaux
les plus étendus , à les décorer par ses belles fleurs odorantes j
d'un jaune clair ou blanchâtre; maicril lui faut, pour proa»
, » IPO • Bi'é
jiérer en pleine terre, un climat tempéré, tel que celui des
contrées méridionales de l'Europe. Ses feuilles sont vertes,
un peu pubescentes en-dessous , divisées en sept digitations
inégales, très-profondes ; ses fleurs grandes, latérales, axil-
Liires, un peu purpurines à leur base, en forme d'enton-
noir, réunies deux ou trois sur un pédoncule commun. Elle
croît dans les îles et les contrées méridionales de l'Amérique.
IroMÉA PIED-DE-TIGRE : Ipomcpa pes tigridis, Linn.; Herm. ,
Lugdb., tab. 187 ; Pulli-Schonadi , Rheed., Malal., 11 , tab. ôg.
Ses tiges sont rudes, grimpantes; ses feuilles palmées, divi-
sées en cinq ou sept digitations, couvertes à leurs deux faces
de poils fins et couchés. Leç pédoncules sont ::xillaires, ter-
minés par une tête de fleurs serrées, touffues, très-velues;
la corolle infundibuliforme^ les capsules à trois loges; les se-
mences un peu velues. Cette plante croit dansles Indes et à Java.
Vipomœa papirii , Flor. Per. , 2 , tab. 120 , fig. ^ , a de grosses
racines tubéreuses , employées en infusion par les Péruviens
dans les diarrhées et les djssenteries. Les feuilles sont pal-
mées, en cœur, à cinq digitations; les fleurs axillaires , soli-
taires, amples, purpurines, en entonnoir.
Ipoméa purgatif : Ipomœa cailiartica , Poir., Encycî. ,Suppl,;
Convolvtilus africanus, Niçois., Hist. de Saint-Domingue , pag.
260; vulgairement Lïane purgative, P-ue purgative, Liane
A Bauduit, Arepéea. Plante recueillije à l'ile de Saint-Do-
mingue par M. Poiteau. Ses tiges sont glabres, herbacées,
grimpantes; ses feuilles en cœur, glabres, à trois lobes acu-
minés , inégaux ; les pédoncules axillaires , uniflores ; les fleurs
grandes; la corolle d'un rouge vif, infundibuliforme; le tube
renflé, long d'un pouce; le limbe ample, à cinq lobes, mar-
qué en-dessous d'une étoile 4 cinq rayons. Au rapport de
I^icolson, on en tirp un suc résineux qui se coagule et dont
on se sert pour purger. Un habitant de Saint-Domingue,
nommé Bauduit, en faisqit un sirop purgatif qui porte son
liom. Quoiqu'il soit fort en usage parmi les habitans du pays,
il ne laisse pas d'être dangereux, en ce qu'il occasionne quel-
quefois des superpurgations.
Ipoméa écarlate : Ipomœa coccinea , Linn. ; Commel. , Rar. ,
t^ib. 21; Plum., Amer., 8g, tab. io3 ; Curtis , Bot. Magaz.^
.t;ab. 221. Cettp espèce est cultivée dans les jardins comme
6i4 ' IPO ^ f
plante d'ornement : elle y produit un cfiFet très-agreable par
ses belles fleurs, d'un rouge écarlate, ou d'un jaune orangé-
Ses feuilles sont simples, en cœur; un pédoncule commun
et axillaire supporte, vers son sommet, cinq à six fleurs
pédicrllées; les divisions du calice se terminent par un filet
sétacé ,• les capsules sont globuleuses. Cette plante croît à l'île
de Saint-Dominguf, Vipomœa angulata, Lamk. , ILL, i , pag.
464, diffère de l'espèce précédente par ses feuilles angu-
leuses, presque à trois lobes, par ses pédoncules beaucoup
plus longs que les feuilles. La corolle est d'un rouge écarlate.
Gommerson a découvert cettp plante à TIsle-de-France.
Ifoméa épineux : Ipomœa bona nox , Linn. ; Curtis , Bot.
Magaz., tab, 762 ; Jacq. , Hort. Schanbr. , 1 , tab. 56 et 96.
Plante originaire de la Floride et de la Jamaïque, cultivée
au Jardin du Roi , facile à reconnoitre par sa belle et très-
grande corolle blanchâtre, verte à sa base, marquée égale-
ment de zones verdàtres à son limbe : le tube est très-long,
cylindrique ; les feuilles simples, avales, en cœur à leur base ,
quelquefois un peu sinuées à leur bord; les supérieures plus
étroites, lancéolées, auriculées.
Ipomiîa BicotORE : Ifomœa bicolor , Lamk. , JIL, 1 , pag. ^65 ;
ConvoLyulus Nil, Linn.; Dillen., EUh. , tab. 80, fig. yo, 92.
Espèce des Antilles, dont la corolle est grande, très-belle,
çampanulée , blanche vers sa base , d'un bleu céleste à sou
]imbe. Ses tiges sont rudes, grimpantes; les feuilles ovales,
en cœur, acuminées, un peu velues, les unes entières,
d'autres à trois lobes aigus; les pédoncules courts, à une ou
deux fleurs; les découpures du calice très-longues, linéaires.
On cultive cette plante au Jardin du Roi. Vipomœa hederacea,
Jacq., Icon. rar. , 1 , tab. 3G , est très-rapproclié de l'espèce
précédente : mais ses tiges sont couvertes de poils fins et mous ;
ses feuilles trilobées, velues à leurs deux faces ; les décou-
pureç du calice courbées en corne, garnies à leur base d'une
touffe de poils longs et très-fins ; la corolle grande , campa-
aulée , puj'purine.
Ipo.méa a stipules palmées : Ipomœa stipulaccea , Jacq. , Hort.
Schanbr.y 2, tab. 199; Corn'olvulus tuberculosus , Linn. Plante
originaire de l'Isle-de-France , cultivée au Jardin du Roi. Ses
xiges s'élèvent, en grimpant, à la haut,^ur de douze pieds et
• • IPO • 6i5
plus, garnies de feuilles à cinq lobes glabres, lancéolés,
aigus; accompagnées de deux stipules palmées, à trois ou
cinq lobes courts , étroits : la corolle est purpurine, campa-
nulée , longue de trois pouces, à dix crénelures ; les pédon-
cules de la longueur des pétioles, soutenant trois fleurs pédi-
cellées. Dans VIpomœa mauritiana , Jacq. , Hort. Sclianhr. , 2,
tab. 200 , les feuilles sont découpées en sept lobes; les pédon-
cules soutiennent un corymbe de grandes et belles fleurs d'un
pourpre clair, campanulées.
Ipoméa pourpre : Ipom/ra purpurea , Lamk. , III. , 1 , pag. 466 ;
Convolvulus purpureus , Linn. ; DiUe n. , Elth. , tab. 82 , fig. 945
Cavan. , Icon. , 2, tab. 107. Cette belle espèce est une des
plus généralement cultivées : elle fait l'ornement de tous les
jardins, parmi les plantes grimpantes, propres à décorer les
berceaux, les treillages, etc. Ses tiges sont herbacées, un
peu velues; ses feuilles simples, molles, ovales en cœur,
presque glabres ; les pédoncules axillaires , de la longueur:
des feuilles , chargées die plusieurs fleurs purpurines ou d'un
beau violet, grandes, blanches à leur base, quelquefois cou-
pées de bandes blanches, assez semblables à celles du grand
liseron: le calice est hispide. Cette plante est originaire dç
l'Amérique piéridionalc.
Ipojiéa sAGiTTÉ : Ipomœu sagittata, Poir,, Voyage en Barb.,
2 , pag. 122 ; Desf. , FI. atl., 1 , pag. 177 ; Lamk., ILL, tab.
104, fig. 1; Convolvulus IVheleri, Vahl, Sjmb., 2, pag. 36.
Cette jolie plante, que M. Desfontaines et moi avons décou-
verte sur les côtes de Barbarie, que depuis Cavanilles a éga-
lement trouvée en Espagne, seroit propre à figurer avec la
précédente par ses grandes corolles campanulées d'un rose
pourpre; ses tiges sont glabres, grimpantes; ses feuilles lan-
céolées, sagittées à leur base par deux oreillettes aiguës j
les pédoncules axillaires, à une ou deux fleurs, les filamens
velus à leur base. (Poir.)
IPOMOPSIS. {Bol.) Spus ce nom générique, Michaux,
dans sa Flore de l'Amérique septentrionale, désigne VIpomœa
rubra de Linnaeus, que nous avions antérieurement réuni au
çantua, dans les polémoniacées , et qui paroît n'en devoir
pas être séparé. Voyez Cantu. (J. )
IPpTARAGUAPIN»(Bof.) Arbrisseau de l'Amérique me'ri-
f^i6 ^ IPO ^ f
dionale, cité par I.œfling , qui n'eu a pas vu la fleui*, et qui
£n décrit seulement Je fruit, lequel est un brou un peu alongé,
recouvrant une noix ^e même forme, à deux loges monq-
spcrmes, dpnt une est plus centrale. Cet arbrisseau a des
feuilles opposées, des épines également opposées et axillaires ,
des stipules intermédiairjes et planes ; les fruits sont, portés
également sur des pédoncules axillaires. Cette description,
quoique incomplète, peift faire supposer que cet arbrisseau
est une rubiacée qui se rapproclie du canthium, (J.)
Il'OTlS. (Bot.) Voyez Hippotis. (Poiiy.)
IPPOCAMPOS. (Ichthj'ol.) Les Grecs ont désigné le cheval
marin par le nom de i7r7roKa.fJL7roç. Voyez Hippocampe. (H. C.)
IPPOKA. (Bot.) Barrère, dans sa France équinoxiale, cite
ce nom dp pays pour le cassia bijlora. (J.)
IPPOUROS. {Ichtlij'ol.) Aristote a désigné la dorade par
le nom grec d'iTTTrov^oç. Voyez Coryfhène. (H. C.)
iPRÉAU. {Bot.) Nom vulgaire d'une espèce de peuplier.
(L. D.)
IP3. (Ëiitom.) Nom sous lequel on désigne un genre d'ir^-
pecles coléoptères tétramérés ou à quatre articles à tous les
tarses, à antennes en masse non portées sur un bec ou pro-
longement du front , et à corps déprimé, de la famille des
pmaloïdes, c'est-à-dire, planiformes.
Ce nom d'ips est tout-à-fait grec; on le trouve dans Théq-
phraste et dans l'Odyssée d'Homère : /4 est dérivé lui-même de
i-^a , noceo , jp nuis; /-v)., Irroi; , vermis cornu corrodens , ver qui
j-onge la corne. 11 est probable qu'Ald^ovande, et par suite
Degéer, en epiployant ce nom pour l'appliquer à quelques
espèces de dermestes , avoient beaucoup plus de raison que
Fabricius, qui s'en est servi pour indiquer des insectes très-
petits, plats, linéaires, vivant sous les écorces et dans l'in-
férieur du bois, qu'ils ropgent sous les deux états de larve
et d'insecte parfait.
Aucun genre de coléoptères ne présente plus de variations
et de difficultés pour la nomenclature. Nous venons déjà de
dire que Degéer avoit donné ce noni d'ips à des espèces de
dermestes de Linn^us, que Geoffroy avoit en effet cru devoif
en séparer sous le nom de scolytes. Lorsque Fabricius publia ses
jPI-emiers ouvrages descriptifs, il comprit, sous le nom d'/ps..
, ' IPS ^ 617
(des nitidules, des tritomes , des mycétophages. Olivier, dans
son grand ouvrage sur les coléoptères, réunit dans ce genre
fps , sous le n." 18, vingt-quatre espèces d'insectes fort diffé-
rens les uns des autres, dont on a fait depuis un très-grand
jiomhre de genres. Nous nous contenterons d'indiquer ici les
noms des principaux : colydie , boros , méline , triplace , hyture ,
cerque, colobfque, tliymale, catérètes , micropèple, dacne , engis,
cryptophage , sphérite. Nous étions d'abord dans l'intention de
«Jonner un précis des considérations d'après lesquelles ces
divers genres avoient été établis; mais, en voyant les varia-
tions nombreuses des parties d'après lesquelles les genres
avoient été formés, nous avons reconnu que c'étoit un dé-
dale dont il nous seyoit fort difficile de tirer le lecteur: car
tantôt les genres ont été établis d'après la disposition des
tarses, tantôt d'après la forme du corselet; ici d'après la dis-
position des mandibules, là d'après le nombre des articles et
la forme de la masse des antennes,
M. Latreille , qui est beaucoup plus versé dans ces sorte?
de détails, n'a pu lui-même trouver le fil de ce labyrinthe,
comme on peut le voir dans l'article Nitidule du Règne
animal, 5/ volume j page 260, et dans le Nouveau Diction-
naire de Déterville.
Nous nous contenterons, comme lui , de décrire une espèce
du genre Jps; c'est celle dont nous avons donné la figure dans
l'atlas de ce Dictionnaire, planches XVI et XIX de la livr.
n.° 6 des Omaloïdes. (Voyez ce mot.)
C'est rips CELLpHiEPi ou DES CELfiERs , Ips ccllaris , figuré aussi
sous ce nom par Olivier, planche 1 , fig. 5, a, b. C'est un
dermeste deScopoli, et de Fuesly, qui l'a également fait con-
noître dans ses Archives : il est ovale, noirâtre; les bords du
corselet sont crénelés légèrement; les éiytres et le corselet
sont finement pointillés et pubcscens.
Il est commun à Paris ; mais on ne connoît ni sa larve
ni ses mœurs. ( C. D.)
IPSIDES. [Eiitom.) M. Latreille a nommé ainsi la petite
famille qu'il a établie pour y ranger les genres Dacné et Ips.
C'est une division des clavicornes. (CD.)
IPSUS (Bot.), un des noms grecs du liège, suivant Mev,-
W- (J.) ,
5iS ^ IQU"
IQUETAYA. (Bot.) Plante dont l'espèce n'est pas encore
déterminée par les botanistes, et qu'au Brésil on mélange
à égale dose avec le séné pour lui enlever son goût désagréable
et sans nuire à ses qualités. (Lem.)
IR. {Bot.) Les Nègres du Sénégal nomment ainsi un arbre
dont le bois, étant sec, leur sert à faire du feu, en tour-
nant avec force un morceau pointu dans le creux d'un autre
morceau préparé à cet effet. ( Lem.)
IR. (Ornith.) Nom polonois du (riquet , fringilla montana,
Linn. (Ch. D.)
IRA. [Bot.) Nom malabare , cité par Rhéede , d'une espèce
de souchet , cyperus ligularis , selon Rottboll. Willdenow a
retranché ce synonyme à cette espèce sans l'appliquer à une
autre. On ne confondra pas Vira avec l'iRrA. Voyez ce mot. (J.)
IRABUBO. [Mamm.) Un des noms américains du cabiaï ;
il est rapporté par Gumila. (F. C)
IRAGNO. (Entom.) Nom patois des araignées dans le Midi.
(C. D.)
IRAIBA. (Bot.) Pison parle d'un palmier de ce nom, au
Brésil, qui contient, dit-il, à l'extrémité de sa tige, une
moelle très-blanche , que l'on mange crue ou cuite avec de
l'huile, et qui est un bon aliment. La partie plus ferme,
également blanche et semblable à de la farine, sert à faire
de la bouillie ou une espèce de pain. On mange aussi le fruit,
qui a une saveur désagréable. (J. )
IRAITUCH et AIAWE. [Bot.) Clusius, dans ses Exotica ,
dit qu'un suc ainsi nommé est envoyé de l'Amérique, enve-
loppé dans des feuilles de bananier. (J.)
IRAMBÈRE. [Bot.) Dans un herbier ancien de Coroman-
del, on trouve sous ce nom le ferreola buxifolia de Roxburg,
qui paroit devoir être réuni au maba de Forster dans les
ébénacées. (J. )
IRAMUSU. (Bot,) On donne, suivant Hermann , ce nom,
dans l'ile de Ceilan, à une plante dont la racine, nommée
par les Portugais ras de amor , racine d'amour, est employée
pour rétablir les forces et pour combattre les affections
goutteuses et les douleurs d'entrailles. Linnaeus ne la rap-
porte à aucun genre connu. (J. )
IRANDJA. {Bot.) On donne ce ^.om , aux environs de
, ^ IRE • 619
Montpellier, à deux exciellentes espèces de champignons:
ïune est l'oronge vraie, et l'autre l'agaric engainë de Bulliard ,
qui appartiennent tous deux aux mêmes genres, I'Ammanitp
( voyez ce mot) et Oronge. (|-.em.)
IRANE. {Bot.) Chez les anciens Grecs, irane étoit syno-
nyme de hallaris et de hryon thalassion, qui répondent au
muscus mariniis des Latins, et à mousse de mer. 11 pi^roit que
plusieurs espèces furent confondues sous ces dénominations;
ce qui le prouve, c'est la grande différence qui existe entre
Ja description de la mousse de mer donnée par Pline , et
celle de Dioscoride. Il se peut que ce dernier naturaliste
ait voulu désigner la coralline officinale, comme le croient
la plupart de ses commentateurs. Ce polypier a été, en effet,
connu des anciens; il doit son nom de coralli^ie, qui depuis
est devenu celui du genre dont il fait partie, à sa petite
taille , à sa consistance solide et à sa manière de vivre fré-
quemment aux pieds du corail. Il n'est guère probable que
V irane soit une espèce de conferve , comme le pense Adan-
son ; mais il est impossible de dire si c'est un animal plutôt
qu'un végétal. (Lem.)
IRASSE. {Bot.) Nom d'un palmier, probablement du
genre Martinezia, qui croît dans l'Amérique méridionale. (Lem.)
IRE. (Bot.) Ce nom est cité, dans la table d'Adanson ,
comme synonyme du gnaphalium de ïournefort , qui est le
(liotis de M. Desfontaines. (H. Cass.)
IREMEMINAY. {Bot.) Nom donné sur la côte de Coror
mandel , suivant un herbier de ce pays , au premna serrati-
folia, genre de la famille des verbenacées. ( J. )
IREON. {Bot.) Nom sous lequel P. Browne désigne le
genre Sauvagesia, dans son Histoire de la Jamaïque. Bur-
mann, fils, dans son Flora Capensis , a fait un autre ireon,
qui est, selon lui, le roridula dentata de Linnaeus , et, selon
Scopoli, le lobelia parvijlora de Bergius : ce genre de Bur-
mann et de Scopoli n'a pas été adopté. (J.)
IRÉOS. {Bot.) L'iris de Florence, iris florentina, a reçu
ce nom anciennement, comme le témoignent les écrits de
Dodonée et de Mentzel. (Lem. )
IRÉSINE, Iresine. {Bot.) Genre de plantes dicotylédones,
k fleurs dioiques , de la ^mille des amaranthacés^ , de la dioécie
6:^0 . IRE • ,
pentandrie de Linnœus , dont le caractère essentiel consiste
dans des fleurs dioïques , offrant un calice à cinq petites
folioles, accompagné à sa base de deux petites écailles exté-
rieures : dans les fleurs mâles, cinq étamines libres, séparées
par cinq écailles internes; dans les fleurs femelles, un ovaire
supérieur, dépourvu de style, surmonté de deux stigmates.
Le fruit consiste dans une capsule uniloculaire , renfermant
plusieurs semences enveloppées d'un duvet très-fin, lanugi-
neux.
Parmi les espèces qui composent ce genre, et qui ont peu
d'éclat, une seule est cultivée dans les jardins de botanique.
C'est une plante peu délicate sur la nature du terrain: cepen-
dant elle exige au moins la serre tempérée dans la mauvaise
saison , et des arrosemens fréquens en été. Comme ses graines
ne parviennent jamais à maturité , on la multiplie de boutures
faites au printemps par déchirement des vieux pieds.
Irbsine faux-celosia : Iresine celosioides , Linn. ; Pluk. ,
Almag., tab. 261 , fig, 1 ? Sloan., Hist. , 1 , tab. 90, fig. 2.
Cette plante s'élève à la hauteur de deux ou trois pieds, sur
une tige glabre, cannelée, rameuse, un peu renflée à ses
nœuds, garnie de feuilles ovales - lancéolées , un peu rudes
et jjonctuées en-dessus; les inférieures oblongues, acuminées.
Les fleurs sont très-petites, disposées en une panicule rameuse
et serrée. Cette plante croit dans la Floride et la Virginie.
VIresine diffusa, "VViUd. , diffère peu de cette espèce; elle
en a le port, l'inflorescence : mais ses feuilles sont parfaite-
ment glabres, cuspidées ; la panicule plus étalée. Elle croît
dans l'Amérique méridionale.
Irésine a fleurs velues : Ires/rtc eriauf?;o5, Poir. , Encycl.,
Suppl. ; Lamk. , IlL, tab. 2i3, fig. 1. Espèce découverte au
Brésil par Commerson, dont les tiges sont glabres, presque
ligneuses, un peu striées, rameuses; les feuilles opposées,
pétiolées , glabres, ovales - lancéolées ; la panicule ample,
étalée ; les ramifications inférieures géminées , toutes oppo-
sées, roides, velues; les fleurs petites, lanugineuses et blan-
châtres.
Irésine a grappes : Iresine mcemosa, Poir. , Encycl., Suppl. ;
Lamk., ///., tab. 2i3, fig. 2. Cette plante est remarquiible
par la dispositiqn de ses fleurs en grappes alternes, très-
% • IRI • c.i
simples , formant par leur ensemble une longue panicule
terminale; les pédicelles accompagnés chacun d'une petite
bractée. Les rameaux sont glabres, Cylindriques; les feuilles
alternes, pétiolées, glabres, étroites, lancéolées, très-entières^
Cette espèce croit à la Martinique. Dans VIresine paniculata ,
Poir. , Encycl. , les ramifications de la panicule sont rameuse^
et non en grappes simples; les feuilles presque opposées, à
peine pétiolées , étroites, lancéolées, aiguës; les tiges glabres,
cylindriques et rameuses. Elle croît dans l'Amérique méri-
dionale.
MM. Humboldt et Bonpland ont découvert, dans l'Amé-
rique méridionale, plusieurs autres espèces d'irésine, décrite*
par M. Kunth dans le Nova gênera, etc. : telles que Viresine
parvifolia, à petites feuilles ovales- aiguës , pubescentes en-
dessous et à leurs bords; la panicule simple, étalée, composée
d'épis oblongs, sessiles , cylindriques. Viresine Hamnensis en
est très- voisine : mais ses tiges sont rampantes; ses feuilles
glabres, ciliées; la panicule rameuse. Dans Viresine Mutisii ,
les tiges ont leurs rameaux tétragones; les feuilles glabres,
ovales-oblongues; la panicule très-rameuse, etc. (Poir.)
IRGENDIR. {Mamm.) C'est le nom que les Tunguses don-
nent, dit-on, à la loutre commune. (F. C.)
IRI. [Bot.) Racine que les naturels du Brésil emploient
à fabriquer des arcs : la plante qui la fournit nous est in-
connue. (Lem.)
IRIA ou BALARI. ( Bot. ) Noms malabarCs d'un souchef
de l'Inde, nommé pour cette raison cjperus iria par Linnœus.
MM. Richard et Persoon nomment aussi iria le cjperus mono"
stachjos , dont la spicule est solitaire, terminale, et les fleurs
munies seulement de trois étamines : ce genre peut être
réuni à Vahilgardia. (J.)
IRIARTEA. {Bot.) Voyez Ceroxylon. (Poir.)
IRIBIN. (Ornith.) M. Vieillot a donné pour caractères à
ce genre d'oiseaux de la famille des vautours, daptrius , la
mandibule inférieure du bec anguleuse en-dessous , échancrée
vers le bout, obtuse; le jabot et la gorge glabres chez les
adultes; la cire velue; les tarses grêles. Le même auteur a
fait du rancanca un genre particulier sous le nom d^Ibycter,
en le caractérisant p%r sa mandibule inférieure entière et
622 » IRI • ,
un peu pointue, la cïre et les joues nues. Son genre Csl^
racara, polyhorus, a le bec rétréci en -dessous, la cire large
et velue, le jabot laineux, avec l'ongle postérieur le plus
fort de tous.
On a dit, dans ce Dictionnaire , toin. 7 , pag. 10, qu'il y
avoit au Muséum d'histoire naturelle trois oiseaux de plus
petite taille que le caracara proprement dit et sous la même
dénomination générique , en ajoutant que le premier indi-
vidu , le caracara noir, y portoit^ pour synonymie, le nom
de dtiptrius ater; le second, c'est-à-dire le caracara à queue
rayée , celui de daptrius striatus , Vieil. ; et que le troisième,
dont M. Vieillot a fait son genre Rancatica, Ihjcter , y étoit
nommé caracara rancanca. M. Vieillot, qui ne reconnoît dans
les deux îribins du Muséum que des variétés d*àge ou de
sexe de son daptrius ater, se plaint, p. 187 du i6.* vol. de la
2." édition du Dictionnaire dont il est un des collaborateurs
les plus distingués, de ce qu'on a donné dans celui des Sciences
naturelles la dénomination fautive de daptrius striatus, Vieil.,
au second individu; mais il auroit pu remarquer que Fauteur
de l'article Caracara s'est borné à exposer que l'étiquette de
l'individu dont il s'agit présentoit cette synonymie. (Ch* D.)
IRIBU. {Ornith.) Ce nom est employé d'une manière gé-
nérique, au Paraguay, pour désigner les vautours, dont M.
d'Azara décrit trois espèces. La première , n.° 1 j est Viribu
rubicha, chef ou roi des iribus, qui se rapporte au roi des
vautours, vultur papa, Linn. et Lath., zopilote, gfpagus, de
M. Vieillot. Le second estl'iribu proprement dit des Guarinis,
n," 2 , et le troisième est Viribu-acabiray , n." 5 , ou simplement
Yacabiray , mot qui signifie tête chauve. Sonnini rapporte
celui-là à l'urubu de BuflFon, et celui-ci à l'aura 5 mais l'aura
et l'urubu ont été confondus, tant par le naturaliste françois
que par Gmetin et Latham , sous le nom de vultur aura, et
c'est M. Vieillot qui, en établissant le genre Gallinaze, Catha-
rista, a désigné avec précision les deux espèces sOus les noms
de catharista aura et catharista urubu* Ces espèces, dont la
couleur est à peu près la même, se distinguent en ce que la
première a la peau de la tête et du cou ridée et la queue
arrondie , et que chez la seconde la tête et le cou sont garnis
jde mamelons, et les pennes caudales çgales. (Ch. D«)
, IRI • 625
JRIDAPS. ( Bol. ) Coramerson nommoit ainsi le rima ou
aï"bre du fruit à pain, artocarpus. (J.)
IRIDEA. (Bot.) Stackhouse pense qu'on peut établir sous
ce nom un genre dans la famille des algues , auquel il rapporte
son fucus Jluitans , qui se fait remarquer par sa fronde carti-
lagineuse , cylindrique, très - rameuse , à rameaux opposés,
plusieurs fois découpés et à divisions capillaires. Sa fructifi-
cation est inconnue.
Ce fucus est figuré planche 17 de la deuxième édition de
la Néréide britannique.
Viridea est placé par Stackhouse entre ses genres Hippurina
et Herbacea, qui représentent le Delesseria de Lamouroux.
(Lem.)
IRIDÉES. (Bot.) Famille de plantes de la classe des mono-
périgynes ou monocotylédones, apétales, à étamines insérées
au calice. Elles ont un calice toujours supére, c'est-à-dire,
adhérent inférieurement à l'ovaire , qu'il ne déborde que
par son limbe divisé , plus ou moins profondément , en six
lobes égaux ou inégaux ; d'où résultent des fleurs régulières
ou irrégulières. Les étamines, au nombre de trois, sont in-
sérées au bas des trois divisions plus intérieures du calice.
Leurs anthères sont alongées et appliquées contre la surface
extérieure de l'extrémité supérieure des filets, qui sont tan-
tôt distincts, tantôt réunis en un tube traversé par le style.
L'ovaire, toujours infère, faisant corps avec le calice, est
surmonté d'un style plus ou moins long, terminé par trois
stigmates. Il devient une capsule à trois loges polyspermes ,
s'ouvrant dans sa longueur en trois valves, dont chacune,
en s'écartant à l'époque de la maturité, emporte avec elle
une cloison qui lui adhère et la partage dans son milieu.
Les graines, attachées à l'angle intérieur des loges, au point
de leur réunion , sont souvent disposées sur deux rangs.
Elles sont remplies par un périsperme de substance solide
et comme cornée, creusé, vers le hile ou point d'attache,
d'une petite cavité dans laquelle est niché un embryon mo-
nocotylédone très-petit. Les tiges de ces plantes sont herba-
cées, ou quelquefois ligneuses, ou rarement presque nulles.
Les feuilles, toujours alternes, sont engainées à leur base,
souvent distiques et conformées en lames aplaties d'épée.
624 ' IRI
Les fleurs sont terminales, accompagnées de spathes uni- ou
multiflores, qui sont ordinairement bivalves.
On peut établir dans cette famille deux sections carac-
lérisées par la réunion ou la séparation des filets d'étauiines.
Dans crlle des lilets réunis sont rapportés les genres Ga-
laxia, Sisjrinchium, Tigridia, Ferraria , Vieusseiiria et Pater-
sonia de M. Brown , dont on regarde le genosiris de M. La-
Lillardière comme congénère.
Là section plus nonibreuse des filets non réunis renferme
d'abord les genres anciens, Iris, Mcrœa , dont le Bobarlia dé
Linnaeus et le Diplarrena de M. Labillardlère sont congénères;
Ixia, auquel on rapporte le Tapeinia, Cipura , Walsonia,
Gladiolus, Antholyza, IVilsenia, Crocus: ensuite les genres
plusrécéns, Parianthus , Bahiana, Sparaxis, Hesperantha , Geis-
iorhiza, Tritonià , Anomatheca , Triclionema de M. Gawlèr j
Aristea de M. Aiton , Diasia de M. De Candolle : les uns
et les autres disposés ensemble suivant un ordre qui n'est
j)as définitivement arrêté.
Les Dilalris , le J'Vachendorfia et le Xipliidium , laissés aupa-
ravant à la suite des iridé^es , comme ayant avec elles de
l'affinité , devront former la nouvelle famille des dilatridées.
Elle sera caractérisée principalement par une capsule à trois
loges et trois valves libres, munie d'un réceptacle central
triangulaire , portant sur ses trois faces une ou plusieurs
<'raines, et Sur les angles duquel s'insèrent les bords des
valves, formant ainsi chacune leur loge entière, comme dans
les convolvulacées. Le Conostj'lis paroît appartenir à cette
série, et le port y ramène aussi les genres v^rgo/asja, Anigo-
santJios, Lophiola, Heritiera de Michaux , Hœmodorum ; mais
il faudroit vérifier s"ils ont ce réceptacle central qui doit
distinguer les dilatridées de toutes les autres familles mono-
périgynes, ou si, ayant le fruit des iridéeâ, ils doÏLvent for-
mer une famille distincte. ( J. )
IRIDIUM. [Chim.) Corps simple appartenant à la 5." sec-
tion des métaux. (Voyez Corps.)
Il est solide, d'un blanc d'argent.
D'après l'observation de M. Vauqueïin , il jouiroit d'une
légère ductilité.
Il est infusible au feu de nos fovT-neaux ; cependant M.
• • IRI • 6^5
Children est parvenu à le fondre en globule au moyen de
son appareil voltaïque. La densité de ce globule étuit de
18.68; mais, comme il étoit poreux, cette densité est trop
foible.
L'iridium nous paroît être essentiellement électro-négatif ,
parce que les combinaisons qu'il forme avec Toxigène et
avec le chlore sont évidemment plutôt électro-négativ- ou
acides, qu'électro - positives ou alcalines, et en outre ces
combinaisons ne se font que dans très-peu de circonstances.
Action de Voxigène et des corps cjui peui-'cnt agir par
leur o xi gène.
L'iridium, exposé à l'air et même à l'oxigéne pur, à
toutes les* températures connues, n'éprouve aucune alté-
ration.
Tous les acides oxigénés sont sans action sur lui ; car
Peau régale, le seul liquide acide qui puisse l'attaquer, ne
le fait, suivant nous, que par le chlore, et non par l'oxi-
géne. On doit attribuer ce manque d'action autant au peu
d'affinité du métal pour Foxigène , qu'cà la foible affinité de
l'oxide d'iridium pour les acides : ce qui le prouve, c'est,
qu'en le faisant rougir dans un creuset d'argent avec la po-
tasse, ou, ce qui revient au même, avec le nitrate de cette
base, on l'oxide très-bien, parce qu'alors l'oxide s'unit à
l'alcali.
Action des hjdracides ^ du chlore et de ses composés.
Aucun hydracide pur n'attaque l'iridium.
Il en est de même du chlore. Mais, quand on met l'iridium
dans de l'eau régale très- concentrée , le chlore à l'état nais-
sant, qui vient de céder son hydrogène à une portion de
l'acide nitrique qui se trouve convertie en acide nitreux, se
porte sur le métal, et une petite quantité de ce dernier est
dissoute : la dissolution est rouge.
Action des corps simples.
Le soufre est susceptible de s'unir à l'iridium, quand il le
rencontre dans un degré extrême de division.
Au rouge blanc l'iridium se combine à l'étain, au cuivre,
au plomb et à l'argen^
^5. 40
620 IRl
Exiraclioii et hisluirt:
Nous ne parlerons de l'extraction de l'iridium qu'au mot
Platine.
lia été découvert par Descotils, en i8o3, et examiné peu
de temps après par M. Vauquclin et par Tcnnant.
Des coinh maisons de l'iridium.
Alliage cVune parlie d'iridium et de 4 parties d'étain. Il est
d'un blanc mat, dur et malléable. ( Vauquelin.)
Alliage d'une parlie d'iridium et de 4 parties de cuivre. Rouge
pâle ; il paroit blanc quand il a été limé. Il est ductile et
beaucoup plus dur que le cuivre. ( ^^^uquelin. )
Alliage d'une parlie d'iridium et de 8 parties de plomi. Blanc
et dur (Vauquelin). Tennant dit que , par la coupellation ,
on en sépare le plomb : l'iridium reste dans la coupelle.
Une partie d'iridium et 2 parties d'argent étant exposées au
feu, il se produit un alliage; mais il y a une portion d'iri-
dium qui ne se combine pas (\^auquelin). L'alliage est ductile-
suivant Tennant.
Iridium et or. Suivant Tennant, l'iridium s'allie à l'or
sans en changer la couleur. Cet alliage est malléable. II ne
peut être décomposé par la coupellation, lors même qu'on y
a ajouté de l'argent. L'eau régale foible sépare bien l'or de
l'iridium, mais ne le dissout pas.
Sulfure d''iridutm.
M. "Vauquelin l'a obtenu en exposant au feu , dans un
creuset fermé, un mélange de 100 parties de soufre et de
îoo parties de sel animoniaco - d'iridium , qui représentent
45 parties de métal. Le sulfure produit pcsoit 60 parties :
d'où il suit que 100 parties d'iridium avoient absorbé 53,54
parties de soufre.
Ce sulfure ne se fond pas au fourneau de réverbère :
quand il est calciné à l'air, le soufre se réduit en acide sul-
fureux, et le métal reste à l'état de pureté.
Oxides et sels d'iridium.
Jusqu'ici on n'a point obtenu les oxides d'iridium à l'état
de pureté. On croit qu'il y en a au moins deux. L'oxide,
qui passe pour être au minimum, a «-ne couleur bleue. Le
• IRI G.;
composé d'iridium, qu'on a regardé comme Toxide au maxi-
mum, est d'un rouge jaunâtre.
Quand on lient au rouge, dans un creuset d'argent^
pendant une heure environ, un mélange d'iridium et de
potasse pure ou de nilre , le métal s'oxide et s'unit ù l'alcali.
L'eau, appliquée au résidu, le sépare en deux composés;
l'un soluble, avec excès d'alcali ; l'autre insoluble, avec excèsi
d'oxide d'iridium.
Composé soluble. Il est bleu.
Composé insoluble. Il paroit noir ; mais , si on le traite par
l'acide hydrochlorique , il s'y dissout au moins en partie ;
la dissolution est bleue.
Propriétés de la dissohilioii hjdrochloricjue lieue,
diaprés M. Faucjuelin.
Celle dissolution, qu'on a appelée muriate ou hjdroclilorate dé
protoxide d'iridium, ne précipite par aucun alcali. Si elle con-
tenoit du fer ou du titane, on auroit un précipité vert : si
elle contenoit de la silice ou de l'alumine , le précipité seroit
bleu. M. Vauquelin, d'après la forte affinité de l'oxide d'iri-
dium pour l'alumine, et la couleur de cette combinaison,
pense que l'iridium pourroit bien être le principe colorant
du saphir.
Les corps désoxigénans, comme l'acide hydrosulfurique ,
le fer, son sulfate de protoxide, le zinc et l'étain, décolorent
celle dissolution; et ce qui est remarquable , c'est que l'addi-
lion du chlore rétablit la couleur bleue , et que , si on en met
un excès, la couleur passe au pourpre; mais il paroit que
dans ce dernier cas l'oxidation n'est pas changée, parce qu'en
exposant la liqueur à l'air elle repasse au bleu.
Lorsqu'on la fait bouillir avec le contact de l'air, elle
passe au vert, au violet, au pourpre et au rouge jaunâtre.
Y a-t-il absorption d'oxigèné ? Cela est probable.
Propriétés de la dissolution d'' iridium dans Veau régale y
anand on en a chassé Vexcès diacide.
Cette dissolution, qu'on a appelée muriate ou hjdrochlorafe.
de peroxide d'iridium, est rouge. Elle a une saveur acide et
irès-a^ringente: elle précipite la gélatine,
02 8 IRf
Elle est décolorée par le sulfate de piotoxide de fer, et
re qu'il y a de très-remarquable, c'est que, si l'on verse du
chlore dans la liqueur décolorée , la couleur passe immédia-
lement au rouge , et ne change pas lorsque l'excès de chlore
qu'on peut y avoir mis est dissipé : c'est le contraire de ce
qui arrive à la dissolution bleue précédente , qui a été décolorée
d'abord , et qu'on a fait passer ensuite au pourpre avec un
excès de chlore.
La dissolution rouge d'iridium ne passe au bleu dans aucune
circonstance.
Lorsqu'elle est concentrée , si on y aj oute de l'ammoniaque ,
on obtient un composé qu'on a appelé muriate ammoniaco-
d'iridium. Il est d'une couleur pourpre si foncée qu'il paroit
noir comme du charbon. Lorsqu'il est sec , il donne , à la dis-
tillation , de l'azote, de l'acide hydrochlorique, de Thydro-
chlorate d'ammoniaque, et 45 pour loo d'iridium métal-
lique. Ce composé exige 20 parties d'eau froide pour se dis-
soudre : la liqueur est rouge-orangé; 1 partie de ce composé
colore 40000 parties d'eau. L'ammoniaque, l'acide hydro-
sulfurique, le fer, le zinc et l'étain, décolorent la liqueur :
le chlore fait reparoître la couleur.
"La dissolution rouge d'iridium, mêlée au chlorure de potassium ,
forme un composé qu'on a appelé muriate de potasse et d'iridium.
En masse ce composé est noir; mais, divisé, il est pourpre:
a 00 parties cristallisées, chauffées fortement, se réduisent à
i)o parties, dont 07 sont de l'iridium et i5 du chlorure de
potassium. (Ch.)
IRIDORKIS. (Bot.) Genre de la famille des orchidées , éta-
bli par M. Aubert du Petit-Thouars, pour placer Vangrœcuw,
distichnm, Lamk. , caractéi'isé par sa fleur renversée, dont le
labelle est plan , élargi et denté au sommet. Il n'a pas été
admis par les botanistes. (Lem.)
IRIDROGALVIA. {Bot.) Voyez Narthèce. (Poir.)
IRIGENIUM. {Bot.) Synonyme de Hierobotane (voyez ce
mot) chez les anciens. (Lem.)
IRINGIO. {Bot.) Voyez Irungus. (J.)
IRIO, IRION. {Bot.) Les Latins, suivant Dioscoride et
son commentateur Ruellius, nommoient ainsi le velar, erj-
simon des Grecs. Fuchs appliquoit tte nom à la sanve ou
^ • IRI • 629
moularde sauvage, sinapis aiwensis ; Daléchamps et Columna ,
à deux sisymbres, sisymbrium irio et polyceration ; plus récem-
raeut Burmann le donnoit au rori^ula. (J.)
IRIPA. [Bot.) Nom malabare , suivant Rhéede, d'un arbre
de l'Inde, qui est le cjnomorium sylvestre de Rumph, le cy~
noinetra ramijlora de Linnacus. (J.)
IRIS; Jm , Lin n. (Bot.) Genre de plantes monocotylé-
dones, type de la famille naturelle des iridées , et de la trian-
drie monogynie du système sexuel, dont les principaux carac-
tères sont les suivans : Spathe de plusieurs folioles membra-
neuses, enveloppant une ou plusieurs fleurs; calice nul ; co-
rolle monopétale , irrégulière , tubulée inférieurement, ayant
son limbe partagé très-profondément en six découpures on-
guiculées , inégales, alternativement redressées et étalées, ou
réfléchies en dehors ; trois étamines à filamens plus courts
que les divisions de la corolle, insérés dans le haut du tube
devant les découpures réfléchies, et portant à leur extrémité
des anthères oblongues; un ovaire inférieur, ovoïde ou ob-
long, surmonté d'un style court, adhérent avec le tube de
la corolle, et terminé par trois grands stigmates pétaloïdes,
bifid'es à leur extrémité, recouvrant les étamines ; capsule
oblongue , à trois valves et à trois loges , contenant chacune
plusieurs graines assez grosses et communément arrondies.
Les iris sont des plantes herbacées, à racines tubéreuses
ou bulbeuses : leurs feuilles sont ordinairement alongées ,
planes, aiguës, tranchantes sur les bords, ayant la forme
d'une lame d'épée ou de sabre , et s'engainant par leur
côté interne et inférieur; dans quelques espèces, les feuilles
sont linéaires, canaliculécs ou anguleuses : leurs fleurs sont
en général grandes, belles, A'ariéçs de différentes couleurs,
iijiifant en quelque sorte celles de l'arc-en-ciel , et c'est de
là que ces plantes ont reçu le nom qu'elles portent, l'arc-
en-cicl étant, selon les poètes anciens, rcmblème d'Iris, mes-
sagère des dieux et principalement de Junon.
On connoît aujourd'hui au-delà de quatre-vingts espèces
d'iris, dont un assez grand nombre croît naturellement en
Europe; les autres se trouvent dans l'Orient et en Asie, au
cap de Bonne-Espérance , quelques-unes en Amérique.
Si nous voulions considérer ces plantes sous le rapport de
53a IRI
la beauté de leurs fletirs , presque toutes mêrileroient de
Kous occuper; mais, comme cela donneroit trop d'étendue
à cet article, nous nous bqrnerons à parler ici des espèces
les plus remarquables sous le rapport de leurs proprié(és ,
ou de celles qu'on emploie le plus communément à la décora-
tion des jardins.
* Dàisions extcrieurcs de la corolle chargées d'une
raie barbue i feuilles ensiformes.
Iris de Suse ; vulgairement Iris deuil, Iris tigrée : Jr'is Su-
siana, Linn. , Spec. , 55; Redout. , Lil., i , t. 18. Sa racine
est tubéreuse, horizontale; elle produit une tige cylindrique,
haute d'un pied et demi à deux pieds, terminée par une ou
deux fleurs plus grandes que dans aucune autre espèce , d'une
couleur brunâtre claire , panachée de veines et de lignes d'un
violet pourpre. Les trois divisions réfléchies de la corolle
sont plus larges que les autres, d'une couleur brune plus
foncée, avec une tache noirâtre. Les feuilles sont ensiformes,
droites, glabres, d'un vert glauque, plus courtes que la tige.
Cette belle espèce croit naturellement aux environs de Suse
dans le Levant, et, selon Linnœus , elle a été envoyée, en
3570, de Constantinople dans les Pays-Bas, d'o-ù elle s'est
répandue en Europe dans les jardins de botanique et des ama-
teurs.
L'iris de Suse demande plus de précautions pour être cul-
tivée avec succès que la plupart des espèces dont nous par-
lerons ci-après : elle craint la gelée, et il faut l'en garantir
en la plantant dans un pot un peu grand, ou mieux en la
plaçant en pleine terre au pied d'un mur, oîi elle fleurit
plus sûrement; dans ce dernier cas, il faut avoir soin de la
jiiettre à l'abri des grands froids, en la couvrant avec delà
litière ou de la paille toutes les fois que la rigueur de la
saison l'exige. Il lui faut une terre légère , sèche et l'expo-
sition au soleil. Ses fleurs paroissent en Mai dans les jardins
du Nord , et en Avril dans ceux du Midi. Elle perd ses feuilles
tous les ans, après avoir fleuri, et les nouvelles commencent
à pousser en automne. Le moment favorable pour la trans-
planter est celui où sa végétation est suspendue , depuis la
dessiccation des anciennes feuilles jusqu'à ce que les nouvelles
comîTiencent à paroifre.
• • ÎRI • 65i
Tris de Florence : Irisflorencina, Linn. , .Sjiec. 55 ; Redouté,
Liliac. , 1, tab. 23. Sa racine est tubéreuse, noueuse, odo-
rante; elle produit une tige haute d'un pied ou environ, mu-
nie de quelques feuilles à sa base, et chargée dans sa partie
supérieure de deux à trois fleurs blanches, grandes, d'une
odeur douce et agréable; leur tube est toujours plus long que
l'ovaire. Les feuilles sont plus courtes que la tige, droites,
planes, en forme de lame d'épce , glabres et d'un vert
glauque. Cette iris croît naturellement dans les parties méri-
dionales de l'Europe ; on la trouve en Provence , et elle
fleurit à la fin d'Avril ou au commencement de Mai.
Sa racine récente est émétique et purgative ; on peut en
donner le suc à la dose d'une à deux onces dans quatre fois
autant de vin blanc : ce remède convient principalement dans
les hydropisies. Mais aujourd'hui cette racine n'est guère em-
ployée qu'à son état de dessiccation et en poudre. De cette
dernière manière les pharmaciens l'emploient comme ac-
cessoire pour rouler des pilules ou leur donner de la con-
sistance. Autrefois cette poudre entroit dans la composition
de plusieurs préparations pharmaceutiques maintenant tom-
bées en désuétude. Mais un usage auquel cette racine sert
communément aujourd'hui, c'est à faire, lorsqu'elle est en
morceaux parfaitement desséchés, ces petites boules nom-
mées po/s d'iris , et qu'on emploie pour entretenir la suppu-
ration des cautères. Les parfumeurs se servent aussi de la
racine d'iris de Florence, à cause deson odeur, qui ressemble
à celle de la violette.
Iris germanioue : Iris germanica , Linn. , Spcc, 55; Bull.,
Herb., t. 141. Sa racine est tubéreuse, charnue, noueuse,
horizontale, et elle donne naissance à une tige haute d'un
pied et demi à deux pieds , un peu rameuse. Ses feuilles sont
planes, en forme de lame d'épée ou de sabre, distiques,
moins longues que la tige. Les fleurs, d'un bleu violet foncé,
sont disposées, au nombre de trois à quatre, dans la partie
supérieure de la tige ; le tube de leur corolle est à peine
aussi long que l'ovaire. Cette plante croît en France, en Ita-
lie, en Allemagne, en Suisse, etc. , dans les lieux secs et
arides, sur les vieux murs. On la plante dans les grands par-
terres; ses fleurs, aya%t beaucoup d'éclat, sont très-propres à
les orner au printemps.
632 . II\I ' ,
Le suc exprimé de la racine récente de Tiris germanique,
plus vulgairement flambe, est fortement émétique et même
purgatif. On le conseille dans l'hydropisie, à la dose de quatre
gros à deux onces : mais, comme il a beaucoup d'àcreté, il
doit être mêlé à quelque véhicule qui tempère et diminue
son action irritante; car, employé seul, il peut exciter une
sensation brûlante dans la gorge et par suite de cruelles tran-
chées. On peut aussi donner Tinfusion vineuse de cette ra-
cine coupée en morceaux. Quand elle est sèche, elle perd
aine grande partie de ses propriétés : on peut alors, après
l'avoir réduite en poudre, la substituer dans quelques usages
pharmaceutiques a celle de l'iris de Florence,
On prépare, en faisant macérer avec de la chaux les co-
rolles de riris germanique, une couleur d'un beau vert,
connue sous le nom de vert d'iris , dont les peintres font usage,
principalement pour la miniature. En faisant infuser ces fleurs
dans du vitriol de Mars , on en retire une couleur noire.
Iris a fleors pales; Iris pallida , Lamk., Dict. encyclop.,
îom. 3, pag. 294- Cette espèce diffère de la précédente par
sa tige plus élevée, par ses feuiUes plus larges, plus glauques,
par ses fleurs d'un bleu pâle , et surtout par ses spathes mem-
braneuses, très-blanches, même avant l'épanouissement des
fleurs; tandis que dans liris germanique elles sont d"abord
•vertes, ensuite teintes de pourpre ou de violet sur les bords,
et qu'elles prennent, en se desséchant, une couleur sale,
•un peu roussâtre. M. de Lamarck croit cette plante origi-
naire du Levant : on la cultive en pleine terre dans les jar-
dins; elle fleurit en Mai.
Iris a odeur de sureau : Iris samhucina, Linn., Spec. , 55 ;
Bot.Magaz,, n." et t. 187; Iris major lalifolia, Vlll , Glus.,
Hist. , 1, pag. 219. Cette espèce ressemble beaucoup à l'iris
germanique; mais ses feuilles sont beaucoup plus vertes, ses
fleurs plus pâles, et les divisions redressées de la corolle sont
échancrées. Elle croit dans le Midi de l'Europe; on la cultive
au Jardin du Roi.
Iris jaune-sale : Iris squalens , Linn.,5p;c. , 56; Jacq., FI,
Aust., 1 , p. 7, t. 5. Sa racine est tubéreuse et horizontale,
comme dans les espèces précédentes; elle produit une tige
cylindrique, une fois plus longue qu^ les feuilles et hautç
^ • IRI • 63?
d'environ deux pieds, portant, dans sa partie supérieure,
trois à quatre fleurs assez grandes, dont l'inférieure est pé-
donculée et placée dans l'aisselle d'une feuille. Les feuilles
sont ensiformes, glabres, vertes, un peu rougeàtres à leur
base. Les corolles , enveloppées a^ant leur épanouissement
dans des spathcs vertes, ont leurs trois pétales réfléchis d'un
pourpre livide , et veinés vers leur base qui est jaunâtre ;
les trois pétales , redressés, sont échancrés à leur sommet
et d'un jaune sale. Cette espèce croît dans le Midi de l'Eu-
rope , et on la cultive dans les jardins du Nord , où elle
fleurit en Mai.
Iris panachée : Iris variegala , Liqn., Spec, 56; Jacq. , FI.
Aust., t. 5. Sa racine est de même forme que celle des espèces
précédentes. Ses feuilles, d'une forme aussi à peu près sem-
blable, sont longues d'environ un pied et un peu plus courtes
que la tige, qui porte dans sa partie supérieure trois à cinq
fleurs jaunes, mais dont les trois divisions rélléchies de la co-
rolle sont élégamment veinées ou rayées de pourpre brun.
Cette plante croît naturellement en Autriche; on la cultive
dans les jardins : elle fleurit à Paris à la fin de Mai ou au
commencement de Juin.
Iris naine : Iris pumila, Linn. , Spec, 56; Jacq., FI. Aust.,
t. 1. Sa tige n'est haute que de deux à trois pouces et de la
longueur des feuilles, qui sont ensiformes. La fleur est soli-
taire, terminale, à tube grêle, saillant hors de la spathe,
et au moiiîs de la longueur des divisions de la corolle; sa
couleur est le plus souvent violette, quelquefois purpurine,
bleuâtre ou même blanchâtre. Cette espèce croit naturelle-
ment dans les lieux secs et pierreux; on la trouve fréquem-
ment sur les murs et les toits rustiques : elle fleurit de bonne
heure, à la lin de Mars ou au commencement d'Avril. Ses
fleurs, qui sont grandes comparativement à l'élévation de la
plante, font un joli effet et sont très-propres à la décoration
des grottes et djgs rocailles que l'on place dans les jardins
paysagers.
Iris jaunatiu'. ; Iris lufescens , Lamk. , Dict. encycl. , tom.
5, pag. 297. Cette espèce difl'ère de la précédente parla,
couleur de sa fleur, qui est constamment jaune; par ses feuilles
moins longues que la^ige, et par le tube de sa corolle plus
634 ' IRI ' ,
court, renfermé dans la spathe. Elle croit dans les lieux
pierreux et montagneux en France, en Allemagne, etc. : elle
fleurit en Avril et Mai.
Iris frangée; Iris fimhriata , Vent.. Horl. Ccls., pag. et tab.
g. Sa racine est tubéreuse ; ses feuilles sont alongées , larges
d'un pouce, très -aiguës, planes, un peu recourbées en
fornie de sabre; ses tiges sont droites, comprimées, à peine
plus longues que les feuilles, hautes de six à dix pouces, un
peu rameuses dans leur partie supérieure , qui porte deux
à trois fleurs d'un bleu pâle , à divisions ondulées et créne-
lées en leurs bords : les trois extérieures presque cunéiformes,
parsemées de taches jaunâtres; les intérieures plus étroites,
sans aucune tache : les stigmates sont déchiquetés et frangés
en leurs bords. Cette plante est originaire de la Chine ; on
la cultive au Jardin du Roi à Paris, et on la rentre dans
l'orangerie pendant l'hiver.
** Divisions extérieures de la corolle sans raie
barbue ; feuilles planes et ensif ormes.
Iris des marais, vulgairement Glaveul des marais : Iris
pseudo-acorus . Linn. , Spec, 56; Bull., Herh., tab. iSy. Sa
racine est tubéreuse, oblonguc , horizontale; elle produit
une tige droite, haute de deux à trois pieds, un peu moins
élevée que les feuilles, qui sont ensiformes , droites, d'un
vert gai. Les fleurs sont jaunes, au nombre de trois à quatre :
les unes axillaires , longuement pédonculées; les autres ter-
minales : leurs pétales intérieurs sont plus courts et plus étroits
que les stigmates. Cette espèce est commune en Europe ,
dans les marais, sur les bords des rivières et des étangs.-
elle fleurit en Juin et Juillet.
La racine de l'iris des marais n'a point d'odeur : elle a
beaucoup d'àcreté lorsqu'elle est fraîche , et en cet état elle
est fortement purgative; mais les médecins n'en font guère
usage : les gens de la campagne l'emploient empiriquement
dans les hydropisies. Sèche et réduite en poudre , elle pro-
voque la sécrétion muqueuse du nez, quand on la met en
contact avec cette partie, et la salivation, si c'est dans la
bouche qu'on la place. Quelques auteurs ont prétendu que ,
parla dessiccation, cette racine dev(.noit astringente, et^
, • IRl » 655
comme telle , ils Vont conseillée dans la diarrhée et dans la
dyssenterie; mais l'irritation qu'elle produit quand on l'ap-
plique à l'intérieur du nez, prouve assez qu'elle ne doit [as
avoir perdu toutes les propriétés qu'elle avoit étant récente.
En Ecosse, les habilans des montagnes se servent de la
décoction de cette racine mêlée à des préparations de fer ,
pour en faire de l'encre ; et dans quelques parties de ce même
pays on l'emploie pour teindre les<li'aps en noir. H y a quel-
ques années, lorsque les denrées coloniales étoient à un prix
très-élevé , on a proposé les graines de l'iris des marais, tor-
réfiées, pour remplacer le café; mais l'usage de ces graines
ne s'est nullement répandu sous ce rapport.
Iris fétide ; vulgairement Iris gigot , Glayeul puant ou spa-
tule : Iris fcclidissima , Linn. , Spec, 67; Iris sjlvestris , spa-
liilata, fatida, Blackw. , Heri. , tab. i58. Sa racine, qui est
tubéreuse , comme dans l'espèce précédente , produit des
feuilles ensiformes, un peu étroites, d'un vert foncé, ren-
dant, quand on les froisse entre les doigts, une odeur désa-
gréable qui peut être comparée à celle de l'ail. Sa tige est
haute d'un pied et demi à deux pieds, imparfaitement cylin-
drique, anguleuse d'un seul côté; elle porte dans sa partie
supérieure trois à quatre fleurs d'un violet obscur , tirant sur
le pourpre, dont les divisions intérieures sont un peu plus
longues que les stigmates. Cette plante croit en France , en
Angleterre, en Allemagne, en Italie , etc. , dans les bois mon-
tagneux , les lieux humides et ombragés : elle fleurit en Mai
et Juin.
Les racines et les graines de cette iris ont, selon quelques
auteurs, une propriété anti-hystérique et fondante : elles ont
aussi passé pour hydragogues : mais aujourd'hui on ne les
emploie plus sous aucun rapport.
Iris de Sibérie, A'ulgairement Iris des fkés : Iris sibirica,
Linn., Spec, 67; Jacq. , Flor. Aust. , tab. 3. Ses racines sont
fibreuses et noirâtres; elles produisent des feuilles ensiformes ,
étroites, droites, d'un vert un peu foncé, plus courtes que
les tiges , qui sont hautes de deux pieds ou plus , nues ou peu
feuillées dans leur partie supérieure, qui porte deux à quatre
fleurs inégalement pédonculées, d'un beau bleu, panachées de
blanc et d'un peu de gtune à leur base; les divisions exté-
636 » IRI ■ ^
ricurcs Je la corolle sont ovales. Cette espèce croît naturelle-
ment dans les prés et les bois en France, en Allemagne, en
Suisse, en Autriche, en Hongrie, etc. : elle fleurit en Mai
et en Juin.
Iris variée: Iris versicolor , Linn. , Spec, 67 ; Bot. Magaz.,
n." et t. 2 1 ; Iris aw.ericana versicolor , stylo non crenato , Dill.,
Hor't. Elth., 187, tab. ]55, fig. 187. Ses feuilles sont ensi-
formes, un peu étroites , «vertes , recourbées au sommet, à
peine moins longues que la tige, qui est cylindrique, haute
d'un pied à un pied et demi , terminée par deux à trois fleurs ,
dont les divisions extérieures sont grandes, ovales, bleues,
mais panachées vers leur base de blanc, de jaune et de vei-
nes violettes, et dont les divisions redressées sont plus petites,
lancéolées, d'un pourpre violet ou bleuâtre. Cette espèce est
originaire de l'Amérique septentrionale ; on la cultive au
Jardin du Roi.
Iris bâtarde : Iris spuria, Linn. , Spec, 58 ; Jacq. , Flor. Aust,
fab. 4. Sa tige est haute d'un pied et demi à deux pieds,
droite, feuillée et un peu comprimée inférieurement. Ses
feuilles sont ensiformes, étroites, droites, presque aussi lon-
gues que les tiges. Ses fleurs sont terminales , ordinairement
au nombre de deux, l'une au-dessous de l'autre , ayant leurs
divisions extérieures en forme de spatule , leurs ovaires à
six angles, et leurs spathes vertes : ces fleurs sont veinées de
bleu. ou de violet sur un fond blanc jaunâtre, et elles parois-
sent en Mai et Juin. Cette plante croît en Allemagne , en
Autriche, dans le Midi de la France et de FEurope.
Iris jaune : Iris ochroleuca, Linn. , Mant. , 1 76. ; Bot. Magaz. ,
n." et tab. 61. Cette espèce a quelques rapports avec la pré-
cédente ; mais elle en diffère par ses racines tubéreuses , ho-
rizontales, qui poussent çà et là leurs tiges, au lieu que dans
l'iris bâtarde les tiges et les feuilles naissent rapprochées en
toufi'e , de même que dans Firis de Sibérie. Elle se distingue
aussi par la couleur, constamment jaunâtre ou d'un jaune
blanchâtre, de ses fleurs. L'iris jaune croît dans la Sibérie et
le Levant; on la cultive au Jardin du Roi.
&u\u> p'eiiiiif;^^; linéaires^ canaliculées ou jonv if ormes,
Ifiià GRAMiNÉE : Iris gramïnea; Linn., Spec. 58; Jacq., Flor.
» IRI 637
Auslr., tab. 2. Ses racines sont fibreuses, et elles produisent
des tiges et des feuilles réunies en touffe. Ces dernières sont
linéaires, étroites, presque semblables à celles des graminées,
une fois plus longues que les tiges, qui sont comprimées,
Jiautesde troisàsix pouces, terminées par une ou deux fleurs,
don*t l'ovaire est à six angles, et la spathe de deux pièces
lorsqu'il n'y a qu'une fleur, de trois lorsqu'il y en a deux.
Ces fleurs sont d'un pourpre violet, avec des lignes plus fon-
cées : elles paroissent en Juin et Juillet. Cette espèce croît
naturellement sur les collines et au bord des bois, en Alsace,
dans les Vosges, en Autriche , en Hongrie.
Iris œil-de-faon ; Iris pavonia , Thunb., Diss. de ir. , n."35,
tab. 3 1 . Sa racine est bulbeuse ; elle produit une tige simple ,
cylindrique, haute d'un pied, velue, garnie inférieurement
de quelques feuilles linéaires , striées, velues, de la longueur
de la tige elle-même, qui porte à son sommet une ou deux
fleurs d'une belle couleur orangée , dont les trois divisions
extérieures sont plus grandes que les autres , ovales , entières ,
marquées de points noirs à leur base, avec une tache bleue,
en cœur, noire et veloutée en sa partie inférieure, et dont
les trois divisions intérieures sont une fois plus courtes, plus
étroites, et presque lancéolées. Ces fleurs ne durent qu'un
jour. La plante est originaire du cap de Bonne-Espérance ; on
la plante en pot et on la rentre dans l'orangerie ou la serre
tempérée.
Iris BULBEUSE : Iris xiphium , Linn., Spec. 58; Lois., Herh.
amat.,v.°et tab. 1 10. Sa racine est une bulbe ovale, pointue; elle
produit une tige'droite, haute d'un pied et demi ou environ,
garnie à sa base de feuilles linéaires-subulécs , creusées en
gouttière, striées, glabres, un peu moins longues que la
tige. Ses fleurs sont terminales , agréablement odorantes , or-
dinairement au nombre de deux, dans des spathes vertes et
pointues; leur couleur est communément bleue, avec une
tache jaune à la base des divisions étalées , qui ne sont pas
plus larges que les stigmates : mais il y a plusieurs variétés
dans lesquelles les différentes divisions de la corolle sont ou
blanches, ou Jaunes, bleues foncées ou claires , et ménie ver-
dàtres, comme bronzées. Cette espèce croît naturellement
en Esgagne et en rorti%al ; on la cultive pour l'ornement des
658 IRI
jardins. Ses difTérentes variétés, plantées en mélange dans
une plate-bande, y forment, quand elles sont en fleurs, à
la fin de Mai ou au commencement de Juin, un charmant
coup d'oeil, mais qui ne dure que quatre à cinq jours : on
peut prolonger sa jouissance le double de ce temps, en garan-
tissant les fleurs du soleil au moyen d'une grande toile étendue
au-dessus. Les oignons peuvent être retirés de (erre tous les
ans , après que les tiges et les feuilles sont sèches, et on les
replante au mois d'Octobre ou au commencement de No-
vembre. Ils ne craignent que les très-fortes gelées, et surtout
lorsque la terre n'est pas couverte de neige, comme cela
arriva en Janvier 1820. Lorsqu'on laisse les oignons plusieurs
années de suite sans les remuer, ils fournissent une grande
quantité de caïeux. Une terre franche, légère, est celle qui
leur convient le mieux.
Iris xirnioÏDE : Iris xipliioides , Willd., Spec, 1 , pag. 201 :
Red., Lil. , t. •212; Lois., Herb. amat., n." et tab. 166- Cette
espèce a beaucoup de rapports avec la précédente; mais elle
en diffère par ses feuilles plus larges, plus longues que la
tige , et par les divisions étalées de sa corolle , qui sont beau-
coup plus larges que les stigmates. Ses fleurs sont inodores,
larges de trois à quatre pouces, d'un beau bleu clair dans
l'état sauvage; blanches, pourpres ou violettes, dans les va-
riétés cultivées. Cette plante croît naturellement dans les
montagnes en Espagne et dans les Pyrénées. Nous l'avons vue
très -commune dans les prairies un peu élevées de ces der-
nières montagnes, à Luz , àCauterets, au Tourmalet , etc.;
elle y fleurit en Juin et Juillet. Dans les jardins de Paris elle
est en fleur dès le mois de Mai. Quoiqu'elle se trouve très-
fréquemment dans les Pyrénées, comme nous venons de le
dire , les botanistes ont long- temps ignoré qu'elle fiU indigène
en France, et M. de Lamarck n'en avoit point fait mention
dans la première édition de sa Flore françoise. Depuis, M.
de Lapeyrouse et M. Ramond ont revendiqué l'honneur de
lavoir découverte en France ; mais il paroît que Tourncfort
l'avoit vue dans les Pyrénées avant eux ; et , en effet , il seroit
difficile d'herboriser pendant quelques jours dans ces mon-
tagnes, à Fépoque où elle fleurit, sans la rencontrer, et iî
j/cst paç possihlr que la beauté de seV fleurs, dans ces lieux
^ • IRI ' 639
agrestes, ne frappe non -seulement un botamistc, mais la
première personne à la vue de laKjuelle elles s'offrent.
Quoi qu'il en soit, il y a long- temps que les HoUandois ont
tiré cette plante de l'Espagne et l'ont cultivée chez eux, où
ils en ont obtenu un grand nombre de variétés, dont par
suite les jardins françois se sont enrichis. La culture de l'iris
xiphioide est la même que celle de l'espèce précédente. Ses
bulbes sont, dit-on, fortement éméîiques, quand elles sont
fraîches.
Iris de Perse: Iris persica , Linn. , Spec, 5g; Herb.de l'amat. ,
n." et tab. 48. Sa racine est une bulbe alongée . pyramidale,
de la grosseur du pouce; elle pousse cinq à six feuilles linéai-
res-subulées, canaliculées, d'un vert un peu glauque , longues
d'environ trois pouces, du milieu desquelles s'élève, à la hau-
teur de trois à quatre pouces, une fleur assez grande, d'une
odeur suave, enveloppée avant son épanouissement dans une
spathe bivalve. La corolle de cette fleur, à laquelle une
seconde succède quelquefois, est partagée profondément en
six divisions, dont les trois intérieures sont très-petites,
étroites, horizontales ou un peu pendantes, tout-à-fait blan-
ches; les trois extérieures sont grandes, redressées ou demi-
ouvertes, blanches, marquées d'une raie jaune dans leur
milieu et à leur sommet d'une large tache veloutée et vio-
lette. Les trois stigmates sont grands, pétaliformes , blancs,
avec uae raie d'un bleu pâle dans leur milieu. Cette plante
est originaire de la Perse; on la cultive en Europe depuis
près de deux cents ans. Elle craint la gelée et l'humidité.
Quand on la plante en pleine terre , il faut la placer à une
exposition chaude et avoir soin de la couvrir de litière pen-
dant les froids. On en jouit davantage en la plantant dans
des pots remplis d'une terre légère et sablonneuse , et en pla-
çant ces pots dans les appartemens , lorsque la plante est en
fleur; ce qui arrive dès le mois de Février pour les oignons qui
ont été tenus à une douce chaleur pendant tout l'hiver : en
pleine terre ils ne fleurissent qu'à la fin de Mars. On peut
aussi mettre les oignons dans des carafes remplies d'eau,
comme on fait pour les narcisses et les jacinthes.
Iris sisvrinchion , vulgairement Iris double- bulbe : Iris
sisjrincliium , Linn. , Sfec. , 6g; Si^yrincliium mai us et minus ^
640 IRI
Clus. , Hist., 216. La tige de cette espèce est haute de trois
à six pouces, et elle porte une à trois fleurs. Ses feuilles sont
subulées, canaliculées , plus longues que la tige. Ses fleurs
sont bleues, marquées de taches jaunes à leur base; elles
paroissent en Avril et Mai. Cette plante croit naturellement
en Espagne , en Portugal , sur les côtes de Barbarie , et en
Provence, dans les environs de Toulon. Clusius dit qu'en
Portugal les enfans mangent ses bulbes comme des noisettes.
La bulbe de cette espèce n"est point double, mais simple.
Ce qui en a imposé à ceux qui ont cru voir la racine formée
de deux bulbes , c'est que chaque année il se forme une
nouvelle bulbe, non latéralement, comme dans les orchis,
les tulipes, les aux, etc.; mais naissant immédiatement au-
dessus de l'ancienne, comme dani les safrans et les glaïeuls.
Dans ces derniers et dans l'espèce dont il est ici question,
l'ancienne bulbe est desséchée et ne forme qu'une sorte de
plateau au-dessous de la jeune bulbe, lorsqu'on n'arrache la
plante qu'au terme de la végétation ; mais, si on la retire de
terre pendant la floraison, on trouve deux bulbes, l'une qui
n'a pas encore acquis toute la grosseur à laquelle elle doit
parvenir, et l'autre n'ayant pas encore perdu sa forme.
Iris tubéreuse , vulgairement Faux-hermodacte; Ii-is tuberosa,
Linn. , Spec, 58; Dod.. Pempt., 249 ; Herb. de l'amat. , n." et
lab. 53. La racine de cette iris est formée d'un à quatre tu-
bercules alongés, à peu près de la grosseur du petit doigt;
elle produit une tige de six pouces à un pied , terminée par
une seule fleur, d'un vert brun , avec une teinte d'un violet
obscur. Les feuilles sont linéaires, étroites, quadrangulai.res ,
plus longues que les tiges. Cette plante croît dans le Midi
de l'Europe ; elle a été trouvée depuis quelques années en
Provence , en Languedoc et dans le Poitou. Dans les pays
méridionaux elle fleurit en lévrier, et à Paris à la fin de
Mars ou au commencement d'Avril. Elle vient bien en pleine
terre.
Linnaeus, dans sa Matière médicale, regarde les racines de
celte iris comme fournissant les hermodattes, dont l'usage
étoit autrefois beaucoup plus répandu en médecine qu'il ne
lest aujourd'hui ; car il est presque entièrement tombé en dé-
suétude: mais Linnasus paroît avoirrété dans Terreur; c'est
, » IRI • 641
à une autre plante que sont dues les Hermodattes, et l'opi-
nion la plus probable à cet égard est celle de Miller, de
Forskal et de Spielman , qui pensent qu'elles sont formées
avec les bulbes d'une liliacée figurée dans Matthiole, p. 1108,
sous le nom de colchicum orientale, mais qui appartient réel-
lement à une espèce de fritillaire. (L. D.)
IRIS. (Enlom.) C'est ainsi qu'on désigne en latin le papillon
qu'on appelle en France le grand Mars changeant. (C. D.)
IRIS. {Ichthjol.) M. de Lacépède a donné ce nom à un
poisson des eaux douces de la Caroline , où il a été décou-
vert par M. Bosc. qui l'avoit appelé perça iridea. M. de La-
cépède en a fait le labrus irideus. Voyez Labre. (H. C.)
IRIS. (Min.) Pline, liv. XXXVII, chap. g, dit que l'iris
est un vrai cristal ayant six angles comme lui, et que, placé
au soleil dans une chambre , il renvoie sur les murailles ,
d'une manière admirable, les couleurs de l'arc-en-ciel ; que
ces couleurs ne lui sont pas propres, etc.
Derosnel (Merc. ind. , part. 2, pag. 26) donne ce nom
à une pierre qui est d'un gris de lin tirant sur le rougeàtre,
réfléchissant un peu les couleurs de l'arc-en-ciel; mais qui,
étant laiteuse et n'ayant pas la vivacité de l'opale, est
peu estimée. Cette description convient assez bien à la variété
grisâtre du quarz chatoyant, qu'on nomme vulgairement
icil de chat.
La circonstance des six angles attribués par Pline à l'iris,
a fait présumer à M. Hauy que ce nom pouvoit également
s'appliquer «aux cristaux de quarz limpides, durs, polis,
« assez égaux pour que deux de leurs plans inclinés entre
« eux fassent l'oQlce de l'angle réfringeant du prisme trian-
« gulaire, en sorte qu'étant exposés au soleil, ils projettent
« l'image colorée de cet astre sur une muraille située à une
« distance convenable.^ Wallerius, tom. 1, pag. 227, dit
à peu près la même chose en parlant de cette variété de
quarz.
Une troisième sorte de phénomène, résultant de l'action
du quarz sur la lumière , a fait donner aussi le nom d'iris
aux variétés qui le présentent : ce sont des quarz hyalins par-
faitement limpides , renfermant dans leur intérieur des fissures
extrêmement minces, ^ui ont la propriété de donner les
2». 41
643 IRI • ,
couleurs de Tiris ou de l'arc-en-ciel avec la plus grande viva-
cité. Ces quarz sont fendillés ainsi naturellement, et alors
leurs fissures moins nombreuses et leur limpidité plus com-
plète rendent ces couleurs plus belles et plus durables, ou
ils le- sont artificiellement, soit par la percussion, soit par
leur immersion dans l'eau en état d'incandescence.
Ainsi il y auroit trois sortes d'iris :
1." Le gris de lin de Derosnel, qui seroit un quarz cha-
toyant ;
2." Le cristallisé ou le quarz poli sous un certain angle,
qui est probablement l'iris connu des physiciens modernes ,
et peut-être aussi celui de Pline ;
3.° Le quarz hyalin, limpide, fendillé, qui, étant cristal-
lisé , peut fort bien convenir à l'iris indiqué par Pline comme
hexagonal. Cette dernière pierre d'iris est la plus connue ,
la plus recherchée, et les plus belles viennent du Mexique
et du Brésil. (B.)
IRIS. {Ornith.) On appelle ainsi le prolongement de la
membrane choroïde autour de la pupille ; sa couleur varie
suivant les difierentes espèces d'oiseaux. L'iris est blanc
dans la grue couronnée ou oiseau royal , dans la cigogne
maguari , dans le petit tétras à queue fourchue; blanchâtre
dans le choucas; noir dans beaucoup de passereaux; d"un noir
bleuâtre dans la fresaie ; bleu dans le geai; brun dans un
grand nombre d'oiseaux ; d'un jaune brun dans le cravant;
jaune dans le faisan doré, l'éperonnier, le goéland à man-
teau gris; d'un jaune brillant dans le héron commun, le bu-
tor, le grand et le moyen ducs, le cariama, le garrot, i'hui-
trier; orangé dans plusieurs coucous; rouge dans le jaseur
de Bohème, le coq de Bantam , le canard huppé de la Loui-
siane, le geai blanc , le pinson noir; d'un rouge vif dans le
guêpier; d'un rouge de feu dans le courlis brun ; d'un rouge
aurore dans les tourterelles blanches, dans quelques variétés
de pigeons, dans les coqs, les poules; de couleur noisette
dans le casse -noix, le coucou ordinaire, etc.
La connoissance de ces variations, très-utile pour le choix
des yeux d'émail dans là préparation des oiseaux empaillés,
fournit aussi quelquefois des caractères pour la désignation
des espèces. Wolf observe , dans sop Histoire naturelle des
, » IRR ^ 645
oiseaux de Franconie, que l'iris change de couleur avec l'âge;
mais il est probable que ce changement ne devient sensible
que chez des individus très- vieux. (Ch. D.)
IRIS MARINA. (Ichthjol.) Quelques anciens naturalistes,
Aldrovandi entre autres, ont ainsi appelé une espèce de
ruban ou de flamme de mer, qui me paroît être la cépole
serpentiforme en particulier. Voyez Cépole. (H. C.)
IRISCH. (Ornith.) On appelle ainsi, en Norwége, la li-
notte, fringilla linaria, Linn. (Ch. D.)
IRIWYA (Bot.), nom donné, suivant Hermann , à une
espèce de haricot non déterminée. (J. )
IRLIN (Ornith.), un des noms allemands , suivantSchwenck-
feld , de la bergeronnette du printemps, motacïila Jlava,
Linn. (Ch. D.)
IRON ( Bot. ) , nom vulgaire de l'absinthe dans la Hongrie ,
«uivant Clusius. (J.)
IROUCANA. {Bot.) Ce genre de plante, observé dans la
Guiane par Aublet, nommé moellaria par Scopoli et Necker,
athenœa par Schreber , a été supprimé par nous et réuni au
genre ^n.at'fn.go. d'Adanson et deLamarck, que quelques au-
teurs préfèrent de nommer Casearia, avec Jacquin. (J. )
IROUDA (OrniUi.) , nom vulgaire de Thirondelle en Lan-
guedoc, où le petit s'appelle iroundou. (Ch. D.)
IRRÉGULIER (Bot.), dont les parties correspondantes
diffèrent entre elles, soit par la forme, soit par la grandeur.
On a des exemples de calice irrégulier, de corolle irrégu-
lière, etc., dans la sauge, le pied-d'alouette, la capucine,
le robinia pseudo- acacia , etc. L'irrégularité du calice et de
la corolle est ordinairement indiquée par la déviation des
étamines vers un même côté de la fleur. Les parties peuvent
ne pas être toutes semblables et former cependant un tout
régulier, si la dissemblance suit un ordre symétrique : tel
est, par exemple, le calice de la potentille, du fraisier,
etc. (Mass.)
IRRITABILITÉ et CONTRACTILITÉ. Voyez Moelle éfi-
NiÈRE pour le premier, et Motilité, Muscles, pour le second.
(F.)
IRRITABLE {Bot.) , se contractant et exécutant divers
mouvemens par suit^de l'acte même de la végétation , ou
G44 1RS
par le contact de certains stimulans. Ces effets se manifestent
d'une manière plus ou moins sensible dans diverses parties
des plantes, principalement dans les feuilles, les étamines ,
les vaisseaux du tissu interne. Ils sont très-marqués dans les
feuilles de la sensitive, du sainfoin du ganp;e (voyez au mot
Feuilles), ainsi que dans les étamines des berberis , du ruLa
graveolens , du parnassia , etc. M. Desfontaines a fait voir que
presque toutes les étamines exécutent spontanément des mou-
vemens particuliers au mnment de la fécondation. Les expé-
riences de MM. Brugmann . Coulon , Th. de Saussure, démon-
trent que les vaisseaux des plantes sont susceptibles de con-
traction , et qu'on peut anéantir leur irritabilité par plusieurs
des agens physiques ou chimiques qui anéantissent lïrrita-
hilité chez les animaux.
I.a force par laquelle les fruits de la balsamine éclatent ,
ou les étamines de la pariétaire, du kalmia , etc., se déban-
dent, n'est pas l'irritabilité. Ces phénomènes sont dus à l'é-
lasticité; ils ne se répètent point. Ceux qui sont l'effet de
l'irritabilité peuvent se répéter. (Mass.)
IRSIOLA. {Bot.) Les plantes de la famille des vinifères, que
P. Browne nommoit ainsi dans son Histoire de la Jamaïque ,
sont le cissus sycioides et le cissus acida de Linneeus. (J. )
IRSKER. (Ornith.) Eggède se borne à désigner cet oiseau
du Groenland comme un petit moineau chanteur. (Ch. D. )
IRUNGUS. {Bot.) Dodoens dit que dans les pharmacies
on nommoit ainsi le panicaut, qui est Viringio des Italiens,
Verjngium des Latins et des botanistes. (J. )
IRUPERO. {Ornith.) On applique, au Paraguay, le nom de
pepoaza , qui signifie aile traversée, aux oiseaux dont les ailes
sont traversées par une bande d'une autre couleur que le
fond. M. d'Azara en a formé une petite famille, qui a de l'a-
nalogie avec les moucherolles et les tyrans, et dont une
espèce, par lui décrite sous le n." 204, porte dans le pays
la dénomination particulière d'iri/pero. Cet oiseau, long de
sept pouces et demi, est tout blanc , à l'exception du bout
de la queue , des couvertures supérieures des ailes , de ses
quatre premières pennes, de l'extrémité des quatre suivantes,
de l'iris, du bec et du tarse, qui sont noirs. (Ch. D.)
IRUS. {Conchyl.) C'est le nom sors lequel M. Ocken a
^ • IRY ' 6/.5
formé une petite coupe générique avec les espèces de coquilles
bivalves dont M. de Lamarck a fait ses genres Pandore,
Petricole, Rupellaire et Saxicave. Le caractère qu'il assigne
à ce genre , est d'avoir le manteau terminé par deux tubes
courts, et d'avoir le pied également très-court. Il y range
la tellina inœquivalvis , Linn. , Gmel. , le type du genre Pan-
dore de M. de Lamarck; le mjtilus rugosus deL. , Gmelin ,
et le Donax Irus du genre Pétricole de M. de Lamarck. Ce
genre Irus de M. Ocken correspond à celui que Poli avoit
nommé depuis long-temps Hjpogœa. (De B.)
IRUSCULE. (Bot.) Dans les Pyrénées orientales on donne
ce nom cà Veuphorhia characias, Linn. (L. D.)
IRYA , IRYAGHAS (Bot.) : noms d'une noix muscade de
Ceilan, qui est petite, inodore et conséquemment négligée.
(J.)
IRYAGHEDHI. {Bot.) Noix muscade sauvage de Ceilan,
suivant Hermann. La plante est citée et figurée dans le Thés.
Zeyl. de Biirmann , t. yq. C'est un arbre à feuilles opposées,
différant en ce point des autres muscadiers. Comme on ne
connoît point sa fructification, il est difficile de déterminer
son vrai genre. ( J. )
FIN nu VINGT-TROISIÈME VOLUME.
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