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Full text of "Histoire de la cavalerie française"

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HISTOIRE 



DE LA 



CAVALERIE FRANÇAISE 



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DU MEME AUTEUR. 



l'artillerie avant et depuis la guerre 



Brochure in-i8. — Prix, 5o cent. 



IMPRIMERIE EUGENE HEUTTE ET C > «, A S AIN T-G E RM AI N 



HISTOIRE 

ry^H DK LA 



CAVALERIE 



FRANÇAISE 



Le Général SUSANE 



TOME PREMIER. 




PARIS 

LIBRAIRIE J, HETZEL ET C 

îBi.'RirE/jAcob, ■ 1 8- 

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i Tous droits de repï-odutCioiretdctiaduction réservés. 



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THE NEW YO.'^.À " 

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ASTOR. LENOX AND 

riLDEN FOU N DATIONS 

R 192g t 






PREFACE 



) 



Je reviens, après une interruption de vingt ans, 
aux études délaissées en face des devoirs qui m^é- 
taient imposés. 

Les longues et difficiles recherches auxquelles 
j'ai donné une bonne partie de ma vie, pour arriver 
à débrouiller les origines , la filiation et Thistoirc 
des troupes françaises , me sont aujourd'hui dou- 
blement chères. 

L'histoire des troupes à pied a sérieusement oc- 
cupé les loisirs de ma jeunesse : celle des troupes 
à cheval me console en ce moment et m'aide à 
oublier. 

Après les développements que j'ai donnés à 
rhistoire de l'ancienne infanterie, je serai plus bref 
pour la cavalerie. 

Envisageant l'infanterie comme le tiers état de 

l'armée, j'ai fait ressortir la constance et la pro- 
I. I 



i 



2 Préface, 

gression du rôle qu'elle a joué. Je Tai prise avilie 
au X® siècle sous la prépondérance de la caste féo- 
dale; se réveillant au xii® siècle avec le tiers état 
par Talliance conclue entre le roi et les communes ; 
grandissant sous Louis XI de tout ce que perdait 
la chevalerie ; se faisant une large place dans le 
mouvement rénovateur du xvi'' siècFe; établie enfin 
à son rang par Richelieu et Louis XIV. 

L'histoire de l'infanterie ainsi entendue est celle 
de l'armée elle-même. 

Pour répondre à toutes les curiosités, il restait 
à entrer dans le détail des diverses organisations 
qui se sont succédé, et à écrire les monographies de 
chaque corps particulier. C'est ce que j'ai déjà fait 
pour les deux armes de l'infanterie et de l'artillerie 
qui étaient autrefois bizarrement confondues l'une 
dans l'autre. C'est ce qui me reste à faire pour les 
armes de la cavalerie et des dragons qui étaient 
non moins bizarrement séparées. 

On s'étonnera peut-être de quelques-unes de 
mes appréciations sur les causes qui ont retardé 
si longtemps l'organisation régulière de la cava- 
lerie. Ces causes étaient purement sociales; elles 
tenaient à des prétentions, des coutumes et des 
préjugés, dont très-peu d'hommes, au temps où 



Préface. 3 

ils agissaient, pouvaient ou voulaient mesurer* les 
fâcheuses conséquenœs. On est aujourd'hui désin- 
téressé dans ces questions et Ton y voit plus clair. 
L'on m'a déjà reproché , et l'on pourra me re- 
procher encore, de m'être arrêté pour l'histoire 
des troupes au moment de la chute de la mo- 
narchie, et de m'être borné, pour les temps qui 
ont suivi, à fournir les indications qui permettent 
de rattacher les régiments actuels aux régiments 
d'autrefois. J'ai eu, pour en agir ainsi, beaucoup 
de motifs sérieux. Je puis me contenter d'en si- 
gnaler un seul. C'est que l'objet que je m'étais 
proposé était exclusivement, comme l'indique le 
titre de mon premier ouvrage, de donner l'his- 
toire des troupes de l'ancienne armée, c'est-à-dire 
la partie de notre histoire militaire pour laquelle 
les documents formels font défaut et qu'il n'était 
possible d'écrire qu'après avoir trouvé , analysé , 
rapproché et comparé, par les procédés de la cri- 
tique, les renseignements épars dans une multitude 
de livres qui n'ont rien de spécial et dans lesquels 
ces renseignements se rencontrent par hasard , 
comme l'on rencontre dans certaines roches les 
moules des êtres organisa des vieilles époques 
géologiques. Ce travail était déjà bien lourd, et 



4 Préface. 

seul il était d^une utilité réelle , nos archives , à 
peu près complètes depuis la guerre de Sept ans , 
permettant de faire, sans préparation et avec tous 
les détails désirables, non-seulement l'histoire d'un 
corps moderne, mais celle de tout officier, et même 
souvent celle d'un simple soldat. 

Un reproche mieux fondé me sera adressé, celui 
de ne pas traiter les notices des corps de la cava- 
lerie avec l'ampleur que j'ai donnée aux notices 
des corps de l'infanterie. Je ne fais aucune diffi- 
culté d'en convenir et d'avouer les motifs de cette 
différence. Je ne suis plus dans l'âge où le temps 
n'est rien, où l'on entreprend un voyage autour 
du monde avec l'espoir de l'achever. J'ai préféré 
me restreindre, courir le risque de paraître incom- 
plet, aride, mais assurer — c'est là toute mon am- 
bition — la conservation des matériaux que j'ai 
réunis et qui pourront servir à d'autres. Cette 
ambition n'est pas sans mérite dans un temps où 
Ton brûle les bibliothèques, et où il s'en est fallu 
d'une demi-heure que les cendres des archives de 
la Guerre allassent se confondre dans un même 
nuage avec celles des archives de la Légion d'hon- 
neur et de la cour des Comptes. 

Les notices, telles que je les donne, sont de 



Préface. 5 

simples esquisses, où les masses sont disposées à 
leur place, où les "traits essentiels sont accusés, où 
il ne reste plus qu'à rapporter les détails. J'espère 
qu'elles seront utiles à de jeunes camarades pos- 
sédant ce que je n'ai plus , l'ardeur des belles 
années. 

Le ministre, mes chers amis , vous invite avec 
raison à écrire l'histoire détaillée de vos régiments. 
Lisez : lisez beaucoup de vieux livres : ce sont les 
meilleurs ; et quand vous rencontrerez un fait in- 
téressant le corps auquel vous appartenez, rap- 
portez-le sur le canevas que je vous fournis, et 
vous arriverez facilement au but de votre entre- 
prise. 

23 Décembre 1872. 

Gén'. SUSXNE. 



HISTOIRE 



DE LA 



CAVALERIE 



FRANÇAISE 



PREMIERE PARTIE 



CHAPITRE I. 

LES COMPAGNIES d'oRDONNANCE. 

On sait comment, à la suite de la révolution 
féodale, les hommes pourvus d'un fief s'étaient 
emparés du métier des armes, comment ils étaient 
arrivés, par Tadoption de pesantes armures défen- 
sives, à ne plus marcher en guerre qu'à cheval, 
comment enfin cette organisation du service mili- 
taire, si différente du modèle laissé par la civilisa- 
tion romaine, avait été consacrée par les ordon- 
nances des rois, et notamment par Tédit de Charles 
le Chauve, promulgué en 864, qui, en fixant les 
contingents à fournir par les fiefs, ne faisait men- 
tion que d'hommes à cheval, cabailarii. 



/ 



8 Histoire de la Cavalerie, 

Vers 960, à Tépoque des sous-inféodations, tout 
homme libre, qui possède une masure au soleil, 
devient seigneur de sa masure et vassal d'un voisin 
plus puissant que lui. II se donne pour sa propre 
défense et pour le service de son suzerain, une 
lance ou une masse d'armes, une cotte de mailles 
et un cheval, et le voilà chevalier. Si la fortune 
Ta fait ass^z riche, assez influent pour avoir à sa 
dévotion quelques compagnons , milites minores, 
hommes d'armes, chevaliers comme lui, il est che- 
valier à pefinon. Si son autorité s'étend à la fois 
sur de simples chevaliers et sur des chevaliers à 
pennon , il est chevalier à bannière ou ban?teret, 
et il ne reconnaît plus au-dessus de lui que le roi 
ou les grands feudataires de la couronne. 

C'est par le jeu de cette hiérarchie graduée et 
solidaire que la chevalerie finit par composer une 
association politique puissante, et par former dans 
l'État un corps redoutable pour la royauté elle- 
même, qui ne pouvait compter sur ses services 
qu'en raison de la bonne volonté des grands vas- 
saux, et qui l'avait contre elle lorsque ces grands 
vassaux lui étaient hostiles, ce qui arrivait souvent. 

Cette première chevalerie, que nous ne consi- 
dérons ici que comme élément de la force militaire, 
en laissant de côté les traditions romanesques dont 
son souvenir est enveloppé, la chevalerie fieffée^ 
ainsi qu'on l'appelait, existant en vertu d'un droit 
héréditaire, était montée, équipée, armée à ses 






Les Compagnies d'ordonnance. 



frais, et faisait la guerre à ses dépens. C'était la 
compensation des privilèges exclusifs, excessifs, 
dont elle jouissait par droit de conquête ou qu'elle 
avait arrachés à la faiblesse des rois. La féodalité 
avait voulu que toute la force du pays fût dans ses 
mains ; elle devait faire les frais de cette force. 
Chaque membre, depuis l'âge de vingt et un ans, 
était tenu de posséder une cotte de mailles et devait 
monter à cheval à la première sommation du suze- 
rain. L'entreprise terminée, chacun rentrait dans 
son manoir. 

Les fiefs étaient taxés en raison de leur impor- 
tance. La force des contingents appelés par le ban 
variait avec les besoins. Quand il s'agissait d'une 
guerre sérieuse, on appelait tout le monde sous les 
armes, on levait le ban et Varrière-ban. Le ban, 
ou appel, fut donc sous la féodalité pure, le service 
des iSefs dû personnellement par les propriétaires 
du sol. Il y eut par conséquent des fiefs à ban- 
nière, des fiefs àpennon, et des fiefs d'une lance, de 
deux, de trois lances... 

Les vieux chevaliers, les infirmes, les mineurs, et 
aussi les fiefs féminins et ecclésiastiques, n'étaient 
point exemptés et se faisaient représenter, par des 
cavaliers avoués, portant haubert, c'est-à-dire 
nobles. 

Ce rôle d*avoué était surtout celui des barons 
dont la terre, en vertu d'immunités d'origine di- 
verse, était franche du service de guerre. Ils s'en- 



lo Histoire de la Cavalerie. 

relaient volontairement comme avoués d'aune 
dame, d'un abbé, ou sous toute autre bannière, 
moyennant une solde convenue. Ainsi, par actes 
des 8 août et 9 octobre i338, Guy de Surgères, 
seigneur de Bourgueraignes en Aunis, reconnah 
« avoir reçu de noble et puissant homme, mon- 
seigneur Savary de Vivonne, conseiller du Roy 
et capitaine souverain en Xaintonge et Poictou, la 
somme de 3o livres tournois, pour servir en sa 
compaignie avec un chevalier armé de toutes 
pièces et cinq écuyers » . Mais les terres de franc- 
alleu, si nombreuses aux premiers temps de la 
féodalité, devenaient chaque jour de plus en plus 
rares et cette faculté de vendre et d'acheter le ser- 
vice de guerre va conduire à un abus qui sera la 
première atteinte portée à la chevalerie par la che- 
valerie elle-même. Des gentilshommes ruinés, des 
vavasseurs sans sol ni maille, des cadets de famille, 
des bâtards, réduits à chercher fortune en courant 
les aventures, profiteront des exigences de Tétat de 
guerre pour s'introduire sous les titres de bas-che- 
valiers ou bacheliers, d* écuyers, de gens d'armes, 
dans les rangs des possesseurs de fiefs, pour se 
faire nourrir et même acheter par des person- 
nages puissants qui se les attacheront par foi et 
hommage, et surtout par l'intérêt, et ils substi- 
tueront peu à peu à la chevalerie fieffée la che- 
valerie volontaire et enfin la chevalerie soldée. 
Les romans nous dépeignent les chevaliers 



Les Compagnies d ordonnance. 1 1 



errants^ types de la chevalerie volontaire, comme 
des demi-dieux affranchis des besoins prosaïques de 
rhumanitéet bien supérieurs aux héros d'Homère. 
En réalité, les chevaliers volontaires vécurent en 
parasites dans les cours des seigneurs qui se les 
attachaient, et leur vrai caractère est compris entre 
les vertus surhumaines de don Quichotte et les 
appétits terrestres de son écuyer Sancho. Le roman 
de Cervantes et le poëme de TArioste sont des 
œuvres sérieuses. Après les avoir lus une fois pour 
son amusement, il faut les relire une seconde fois 
pour son instruction et en sugcer la mouëlle. . 

La solde était préférable pour les hommes de 
guerre à cet état de domesticité déguisée. Elle devait 
prévaloir. 

Les croisades eurent une influence décisive sur 
cette transformation, et peut-être n'est-il pas trop 
hardi de croire qu'un peu de politique s'est mêlée 
à la pieuse pensée qui poussait nos rois dans ces 
lointaines et hasardeuses entreprises. Éloignés de 
hurs domaines et jetés en dehors des conditions 
habituelles de leur existence, les chevaliers com- 
mencèrent en Terre sainte à servir avec un carac- 
tère nouveau. Ces expéditions extraordinaires, qui 
m pouvaient plus s'accomplir en quelques jours 
ou quelques semaines, et qui exigeaient des dé- 
penses hors de proportion avec la fortune de la 
plupart des hommes d'armes, donnèrent lieu à des 
contrats et. à. des compensations, c'est-à-dire à 



12 Histoire.de la Cavalerie. 

rintroduction de l'engagement et de la solde. 

Cette solde, pendant les croisades, a beaucoup 
varié. Sa fixation dépendait évidemment de plu- 
sieurs circonstances accessoires qu'il est difficile 
d'apprécier, comme la durée de l'engagement, la 
participation au butin, le taux des rançons des 
prisonniers, les promesses d'établissements fon- 
ciers en Orient. On peut l'évaluer en moyenne à 
lo sols tournois par jour pour un simple chevalier, 
à 20 sols pour un chevalier à pennon, et au double 
pour un banneret. 

Le simple chevalier était accompagné de deux 
hommes d'armes au moins et d'un nombre illimité 
de serviteurs à cheval et à pied. La réunion du che- 
valier et de sa suite formait une lance fournie^ 
dont l'effectif a varié de 3 à 14 hommes à cheval. 
Le chevalier, monté sur un destrier bardé, armé 
lui-même de pied en cap, avec la lance et Tépée, 
souvent accompagnées de la masse ou de la hache 
d'armes suspendue à l'arçon de la selle, combattait 
en première ligne. Les hommes d'armes, pesam- 
•ment armés aussi, soutenaient leur chef sur les 
flancs. Les serviteurs à cheval, ou satellites, parmi 
lesquels les archers avaient un rang d'honneur, 
représentaient la cavalerie légère chargée d'engager 
et d'achever le combat. Les éciiyers, guisarmiers, 
coutilliers, et pages ou varlets, aspiraient à de- 
venir archers, comme les archers à passer à la 
position d'hommes d'armes et de chevaliers. 



Les Compagnies d'ordonnance, i3 



Les chevaliers à pennon, distingués par une 
pièce d'étoffe triangulaire, ou flamme, clouée sur 
la hampe de leurs lances, réunissaient autour d'eux 
plusieurs lances fournies et se ralliaient eux-mêmes 
à la bannière carrée d'un feudataire d'un ordre 
plus élevé. Le commandement d'un bannerct 
s'étendait ainsi sur un corps de 2 5 à 80 lances 
fournies, présentant un effectif de i5o à 6co 
hommes à cheval. Enfin toutes les bannières se 
groupaient et s'inclinaient autour de la bannière 
du chef suprême de l'armée, habituellement autour 
de la cornette blanche du connétable, autour de 
la bannière d'azur aux fleurs de lis d'or si le roi 
commandait en personne, autour de l'oriflamme 
de l'abbaye de Saint-Denis s'il s^agissait d'une 
guerre nationale. 

Il n'y avait pas à proprement parler de grades 
militaires. La hiérarchie était uniquement basée 
sur la fortune personnelle et foncière. Un noble 
montait en grade ou descendait, non pas en raison 
de ses mérites et de ses services, mais suivant les 
acquêts et les pertes qui modifiaient sa situation 
de propriétaire. La forfaiture pouvait sans doute 
conduire à la dégradation, toujours suivie d'ail- 
leurs de confiscation, mais, dans le cas le plus 
général, un noble cessait d'être banneret parce 
qu'il était ruiné et qu'il avait vendu ses biens. Nou> 
pensons que dans ce dernier cas il suffisait à un 
banneret de mettre au grenier sa bannière, mais 
I. 2 



ijj. Histoire de la Cavalerie. 



pour devenir chevalier à bannière, il fallait passer 
par une formalité dont nous trouvons une naïve 
psinture dans Olivier de La Marche. 

C'était en i45o, après un combat livré sous 
Ruppel monde. 

« Là vei-je Messire Louis de La Viéville, Sei- 
<( gneur de Sains, relever bannière, et le présenta 
« le Roy d'armes de la Toison d'Or, et ledit Mes- 
« sire Louys tenoit en une lance le pennon de ses 
<( pleines armes, et dict ledict Toison : — Mon 
« très redouté et Souverain Seigneur, voicy votre 
« humble subject, Messire Louys de La Viéville, 
« issu d'ancienne bannière à vous subjette, et est 
« la Seigneurie de leur bannière entre les mains 
« de son aisné : et ne peut, ou doit, sans méprendre, 
(( porter bannière quant à la cause de La Viéville 
« dont il est issu : mais il a par partage la Sei- 
« gneurie de Sains, anciennement terre de ban- 
« nière. Parquoi il vous supplie (considérée la 
« noblesse de sa nativité et les services faits par ses 
« prédécesseurs) qu'il vous plaise de le faire ban- 
<( neret et le relever en bannière : et il vous présente 
« son pennon armoyé, suffisamment accompagné 
« de 25 hommes d'armes pour le moins, comme 
« est et doist être l'ancienne coutume. — Le duc 
« lui respondit que bien fust-il venu, et que voulon- 
« tiers le feroit. — Si bailla le Roy d'armes un 
« couteau au Duc et prist le pennon en ses mains : 
n et le bon Duc, sans oster le gantelet de la main 



Les Compagnies d'ordonnance. i5 

« sénestre, fit un tour autour de sa main de la 
« queue du pennon, et demeura quarré, et la ban- 
« nière faicte, le Roy d'armes bailla la bannière 
« audit Messire Louys, et lui dia : — Noble che- 
« valier, recevez Thonneur que voUs faict aujour- 
« d'huy vostre Seigneur et Prince, et soyez aujour- 
« d'huy bon chevalier, et conduisez vostre bannière 
« à rhonneur de vostre lignage... » 

Dans de semblables agrégations, pennon ou 
bannière, le'premier rang se composait des hommes 
d'armes. Derrière ce rang de lances, il y avait 
d'ordinaire un deuxième et un troisième rangs, Pun 
composé d'archers et l'autre de coutilliers, se tenant 
à des distances assez considérables l'un de l'autre. 
Cette formation, dite coup de lance, des chevaliers 
sur un seul rang était la seule usitée, la seule pos- 
sible,car nul d'entre eux n'eût souffertd'êtremasqué, 
couvert par un autre chevalier. L'ordre en haie, 
conséquence de cet excessif amour-propre, laissait 
le FÔle important des réserves aux cavaliers de 
qualité inférieure. Ainsi la troupe la moins solide . 
était chargée du rôle décisif, tactique d'autant plus 
dangereuse que l'infanterie, qui eût pu servir , 
d'appui final, était souvent absente et dans tous les 
cas méprisée. Quand la haie des chevaliers faisait 
lances basses pour donner sur l'ennemi, les archers, 
après avoir escarmouche sur les ailes en lançant 
flèches et viretons, venaient se grouper en arrière. 
Les chevaliers renversés au choc étaient perdus 



i 



i6 Histoire de la Cavalerie. 

s'îh n'étaient promptement secourus. Pendant que 
les hommes d'armes restés à cheval poussaient 
leur pointe, les coutillieis et les valets se précipi- 
taient sur l'adversaire désarçonné ; ils se mettaient 
quatre contre un, brisaient son armure à coups de 
haches et de masses et regorgeaient, à moins que 
Tappât d'une rançon n'arrêtât leurs bras, ce qui, 
à vrai dire, arrivait le plus souvent. 

Toute la tactique de la chevalerie se réduisait à 
ce qui vient d'être dit. A peine .pourrait-on citer 
quelques occasions où elle ait consenti à s'en dé- 
partir et à manœuvrer, même en présence d'une 
infanterie solide. On la vit très-rarement se placer 
sur plusieurs haies disposées pour se soutenir mu- 
tuellement et fournir des charges successives. A 
Bouvines, les chevaliers fatigués de combattre vin- 
rent reprendre haleine au milieu des rangs des 
communes et, reposés, recommencèrent leur Jeu. 

Dans les sièges, les hommes d'armes mettaient 
pied à terre pour prendre part aux assauts, mais 
. sans vouloir se débarrasser d'un armement pro- 
tecteur dont le poids paralysait leur bonne volonté 
et leurs efforts. 

Il faut ajouter que la chevalerie dédaignait de 
se garder et qu'elle ne reconnaissait d'autres ordres 
que ceux qui lui étaient donnés directement par le 
connétable. On voit qu'elle portait dans son. sein 
tous les germes de la décadence. Sa ruine, comme 
ordre militaire, était inévitable. 



Les Compagnies d ordonnance, 17 

Au fond, ce n'' était pas la guerre qu'on faisait en 
ce temps-là. La guerre, cette science de toutes la 
plus complexe, n'est pas à la portée de tout le 
inonde. C'est à peine si, de siècle en siècle, il se 
rencontre un génie capable d'en, embrasser l'éten- 
due, et :ce n'est -quiaux époques de grande civili- 
sation que l'on rencontre des hommes suffisam- 
ment instruits pour avoir conscience de ses 
difficultés. Au moyen âge on ne se doutait pas 
plus qu'il y eût une science de ia guerre qu'on ne 
soHg^it à toute autre^cience. On se sentait brave, 
fort^' hardi -, on avait une exubérance d'activité 
qu'on ne parvenait pas à user dans la monotone 
vie du manoir ; on se battait pour se battre, pour 
accomplir des exploits et pour s'entretenir la' main. 
La noblesse, élevée dans le culte de la force phy- 
sique, dressée dès l'enfance au msftliement du 
cheval, de l'épée et de la lance, enivrée pendant 
la jeunesse par les succès des passes d'armes et 
par les applaudissements des châtelaines, ne voyait 
rien au delà de l'art d'assommer un homme. Les 
tournois ne suffisaient pas à satisfaire cette passion 
exagérée de l'escrime et des prouesses ; les tournois, 
malgré quelques maladresses qui les ensanglan- 
taient parfois,, n'étaient que l'image des combats ; 
il fallait la réalité, l'émotion, la saveur du péril ; il 
fallait se battre tout de bon. Or, les occasions de 
querelles ne manquaient pas. 

Si Ton çxamine de près ce que Ton appelait des 
I. 2. 



4 



i8 Histoire de la Cavalerie. 

batailles au moyen âge, et même au xvi® siècle, on 
reconnaît que, sauf en des circonstances assez 
rares qui ne se sont présentées que dans des guerres 
soutenues par de grandes passions politiques ou 
religieuses, comme les croisades et les guerres défen- 
sives contre l'Anglais, ou bien dans le cas de haines 
personnelles, les hommes d'armes évitaient de 
s'aborder, ou ne le faisaient que mollement, avec 
des précautions et des formalités tacitement impo- 
sées par les règles de la courtoisie. Sous leurs impé- 
nétrables armures, invulnérables comme Achille 
partout ailleurs qu'au talon, ils mettaient le su- 
prême déshonneur à tourner le dos, même pour un 
instant, ou à attaquer l'ennemi par derrière- De 
chaque côté, on tombait de préférence et sans scru- 
pule sur les hommes de pied, et on les massacrait 
jusqu'à celjue les bras fatigués ne pussent' plus 
soulever l'épée. A vrai dire, c'était pour la plèbe 
seulement que la guerre était meurtrière. 

£ forse emulazion tra lor nascea 
Per quella gente misera, non buona, 
Nella oui carne, e sangue, e nervi ed o§sa 
Fan prova chi di lora abbia più possa... 

E chi non ha destrier, quivi s'avvede 
Quanto il mestier deir arme è triste à piede... 

Orlando furioso, cant, xxiii. 

Les rares occasions où la chevalerie ait éprouvé 



Les Compagnies d'ordonnance. i 9 

de sérieux revers furent celles où, manquant de 
discernement, elle s'attaqua étourdiment aux fan- 
tassins des communes de Flandre, aux archers du 
Prince Noir, à certaines vieilles compagnies aguer- 
ries de la jacquerie, aux piquiers suisses et aux 
arquebusiers espagnols. Il ne faut pas oublier, si 
Ton veut avoir une idée juste des résultats ordi- 
naires de la rencontre des hommes d'armes entré 
eux, l'aveu naïf arraché au maréchal de Tavannes 
par l'indignation que lui causait l'introduction des 
armes à feu. 

« Les bardes d'acier, caparaçons flanquars de 
a beufle, de maille, servoient aux batailles an- 
« ciennes qui se desmêloient avec l'espée et la 
« lance ; le peu de périls rendoit les combats 
« longs... Tel a été fait en Italie, les hommes et 
« les chevaux si bien couverts que, de deux cents 
« meslez, ne s'en tuoit quatre en deux heures. 
« Les grands pistolets rendent ces bardes inutiles 
« et la meslée si périlleuse qu'ww chacun en veut 
« sortir. . . Si les armes offensives continuent d'aug- 
« menter ainsi qu'elles font, par les longs pistolets, 
« virolets, mousquets, pouldres et balles artifî- 
« cielles, il sera nécessaire d'inventer des dé- 
« fenses... Ceux qui ne veulent rien commettre 
« à fortune ont renforcé leurs cuirasses, fabriqué 
« des plastrons doublés de lames, leurs casques à 
« Tespreuve du mousquet-, se rendant incapables 
« de servir dans les combats ; estans enchainez et 



20 , Histoire de la Cavalerie. 

I 



I 



« liez de la pesanteur de leurs armes, ils deviennent 
« enclumes immobiles, chargeant tellement les 
« chevaux qu'au moindre accident ils succombent 
« dessous : leurs courages, leurs entendements, tra- 
« vaillez, demi-vaincus, n'hazardent, n'agissent, 
« ni ne font rien qui vaille. Ceux qui s'arment sans 
« espreuves ne veulent venir aux mains, ou en 
« sortir bientôt. . . » • 

Tavannes aurait pu dire plus brièvement: — 
Le temps des prouesses et du baume de Fier-à-bras 
est passé ; il n'y a plus de plaisir à guerroyer. — 
Ces réflexions d'un des plus rudes batailleurs du 
XVI® siècle méritent d'ailleurs d'être sérieusement 
méditées. Elles constatent pour l'époque où il a 
vécu l'existence de cette maladie périodique à la- 
quelle les armées sont fatalement vouées toutes les 
fois qu'un grand progrès s'accomplit dans l'arme- 
ment. Elle a eu beau s'indigner et contester, beau 
renforcer ses cuirasses jusqu'à ne plus pouvoir les 
porter, beau rappeler ses anciens servites et sa 
splendeur passée et essayer de jouer des rôles qui 
n'étaient pas les siens, la chevalerie est morte de 
l'invention des armes à feu ; elle a dû disparaître 
devant les pistolets et les mousquets, céder la 
première place à l'infanterie et se transformer en 
cavalerie légère qui, à partir de ce moment, n'a 
plus joué, sans vouloir en convenir cependant, 
d'autre rôle que celui d'auxiliaire de l'infanterie. 
Nous sommes aujourd'hui atteints du même mal. 



Les Compagnies d ordonnance. 21 



On cuirassera les remparts des places et les flancs 
de5 vaisseaux, mais le grand rôle des villes fortifiées 
et des flottes de bataille est terminé. 

Nos aïeux ont laissé cent cinquante ans s'écouler 
avant d'apercevoir la réalité des choses et avant de 
se résigner à brûler ce qu'ils avaient adoré. Nous 
irons certainement plus vite qu'eux en besogne, 
mais ce ne sera pas sans peine. 

Le roi Jean, pour qui le souvenir des désastres 
de Courtrai et de Crécy devait être vivant, pensa 
le premier à mettre de l'ordre parmi les hommes 
d'armes, ainsi que le montre son ordonnance du 
3o avril i35i, qui tendait à régulariser la hié- 
rarchie et à établir la formation par compagnies. 
Mais, dans ce temps-là, il était difficile à un roi de 
se faire obéir par la noblesse qui, lorsqu'elle avait 
répondu à l'appel du souverain et qu'elle s'était 
montrée brave, croyait avoir rempli son devoir et 
voulait demeurer indépendante sur tout le reste. 
L'institution du roi Jean ne semble pas s'être 
étendue au delà d'une ou de deux compagnies 
chargées de la garde personnelle du monarque. 

Quoi qu'il en soit, le roi Jean et ses gentilshommes 
furent encore victimes de leurs préjugés et méthodes 
chevaleresques à Poitiers, le 19 septembre i356. 
Cette dure leçon ne suffit point — les désastres ne 
corrigent pas les Français dont la candide vanité 
se résigne difficilement à reconnaître les vraies 
causes de leurs défaites, — et le 2 avril i362, la 



22 Histoire de la Cavalerie, 

chevalerie fut encore mise dans la plus horrible 
déroute à la bataille de Brignais. 

Charles V, en iSyS, fait une nouvelle tentative, 
inutile comme la première, pour introduite des 
réformes parmi les hommes d'armes. Son ordon- 
nance, donnée au bois de Vincennes le i3 jan- 
vier 1 372 (vieux style), règle les revues des troupes, 
la composition des rowfe^ et com/^aigTiiV^, la nomi- 
nation des capitaines, la responsabilité des officiers 
et la solde. Tout cela était bien en théorie, mais le 
roi n'avait ni argent pour payer, ni force pour se 
faire obéir, et, en pratique, cela n'aboutit qu'à 
augmenter la confusion par l'antagonisme de l'an- 
cienne et de la nouvelle institution, par la rivalité 
des bannerets et des capitaines. 

Ce ne fut que soixante-six ans plus tard, lorsque 
Charles VII fut redevenu maître de son royaume, 
que l'idée fut reprise, et cette fois elle aboutit à un 
résultat. 

Ainsi qu'on l'a vu plus haut, la constitution de la 
chevalerie des fiefs s'était profondément altérée 
sous l'influence des abus du droit de représentation 
et sous celle des croisades et des guerres intestines. 
Elle avait admis dans ses rangs une multitude 
d'affiliés, gentilshommes sans domaines, aven- 
turiers de race noble, gens d'armes de profession, 
et rien de plus. Cette fraction nombreuse de la che- 
Valérie était prête à se mettre dans la main du roi^ 
si celui-ci la payait et assurait son état. 



Les Compagnies d ordonnance. 23 

Il y avait là de bons et de mauvais éléments; 
il s'agissait de les séparer et de maintenir cette 
séparation. 

Voici, d'après Olivier de La Marche, quelle 
était la physionomie de la France militaire en 
1438, après la paix d'Arias : 

« Tout le toumoyement du royaume de France 
« estoit plein de places et de forteresses, dont les 
« gardes vivaient de rapine et de proye ; et par le 
« milieu du Royaume et des pays voisins s'assem- 
<( blèrent toutes manières de gens de compaignies 
« (que Ton nommoit Escorcheurs), et chevau- 
<( choient et alloient de pays en pays, et de marche 
« en marche, quérans victuailles et aventures pour 
« vivre et pour gaigner, sans regarder, ni espar- 
« gner les pays du Roy de France, du Duc de 
« Bourgogne, ne d'autres Princes du Royaume; 
(« mais leur estoit la prise et le butin tout un... 
« et furent les capitaines principaux le bastard de 
<t Bourbon, . Brussac, Geoffroy de Saint-Belin, 
« Lestrac, le bastard d'Armagnac, Rodrigue de 
« Villandras, Antoine de Ghabannes, comte de 
« Dammartin... » 

Il était urgent de prendre un parti, sauf à aviser 
ensuite aux moyens de faire exécuter les volontés 

du roi. 

Les états du royaume furent réunis pour cet 
objet à Orléans en 1439, et la création des com- 
pagnies de cavalerie, dites Compagnies des Or- 



i 



24 Histoire de la Cavalerie. 

donnances du Roy, c^est-à-dire le passage du 
service féodal et conditionnel au service soldé et 
régulier, point de départ d^un nouveau système de 
levée et de la permanence de l'armée, y fut décidée 
et réglée par édit ou pragmatique-sanction du 
2 octobre sûr Vestablissement d'une force mili- 
taire permanente à cheval et la répression des 
vexations des gens de guerre. 

Voici les dispositions essentielles de cet édit : 

« Désormais, les capitaines des gens d'armes 
« et de traict seront esleus par le Roy, et à chacun 
« capitaine seront baillez certain nombre de gens 
« qui par luy seront esleus de faict et d'office... »» 

« Défense à tout aultre de lever, conduire 
« mener compaignie de gens d'armes ou de traict, 
(( sinon que ce soit du congé et licence du Roy. » 

« Défense à tout capitaine de recevoir aucun 
(( homme d'armes ou de traict en outre le nombre 
u qui leur sera ordonné... » 

Un impôt spécial, dit Ordinaire des guerres^ 
fut accordé par les États réunis à Orléans pour 
l'entretien des futures compagnies. 

Ainsi une assemblée de mandataires de la 
France venait en 1439 de découvrir pour la pre- 
mière fois , et ce ne sera pas la dernière , qu'il 
n'est rien de plus coûteux que de n'avoir pas d'ar- 
mée régulière, de n'avoir pas une armée pro- 
portionnée aux dangers du dedans et du dehors. 
L'armée permanante a été créée par Charles VII 



Les Compagnies cT ordonnance. 25 

et les Etats d'Orléans surtout pour sauver le pays 
d'une ruine complète à laquelle travaillaient avec 
ardeur et ensemble les soldats volontaires. Dans 
ce temps Ton usait peu de Peuphémisme et Ton 
nommait ces volontaires écorcheurs. 

Cette institution , qui préoccupa beaucoup les 
esprits en France et dans le duché de Bourgogne, 
fût peut-être restée longtemps lettre morte sans 
, rénergie du connétable de Richemont qui , dans 
cette occasion comme en bien d'autres, agit en roi 
au lieu et place de l'insouciant Charles VIL 

Tout ce qui est propre à fixer les idées sur les 
origines de l'armée nous paraît d'un si grand in- 
térêt, que nous croyons devoir mettre sous les yeux 
du lecteur quelques passages des chroniques con- 
temporaines qui se rapportent à notre sujet, et 
dont la réunion éclaire en plein la question. 

Voici ce qu'on lit dans l'histoire de Charles VII 
de Mathieu de Coucy : 

« Le Koy de France... fit plusieurs fois assem- 
M bler les gens de son Conseil... pour avoir advis 
« et délibération spécialement touchant le faict de 
« la guerre et de ses gens d'armes. Il désiroit de 
« tout son cœur qu'une bonne manière fut trou- 
« vée, par laquelle les gens de guerre qui estoient 
« à luy fussent payez et souldoyez, et mis es for- 
M teresses de son Royaume ; que tous les pillards 
« et coureurs fussent chaesez ou se remissent à 
« labourer et faire un mestier... Si se trouvoient 

I. ' 3 



i 



26 Histoire de la Cavalerie. 



« fort souvent avec le Roy auxdits Conseils son 
<t fils le Dauphin , le Roy de Sicile, le duc de Ca- 
<( labre son fils, Messire Charles d'Anjou, le comte 
« de Richemont, connestable de France, les comtes 
<( de Clermont, de Foix, de Saint-Paul , de Tan- 
<( carville, de Danois, et avec eux grand nombre 
« de Conseillers , tant ecclésiastiques que sécu- 
« liers... Alors il fut ordonné, tant par le Roy 
<( comme par les dessus-dits du Conseil , quMl y 
« auroit quinze capitaines, lesquels auroient chas- 
<( cun sous eux cent lances, et que chascune lance 
<^ seroit comptée à gages pour six personnes, dont 
<( les trois seroient archers, le quatrième coustillier, 
« avec l'homme d'armes et son page...; qu'ils se- 
« roient mis et distribués par les bonnes villes;... 
<( Si sauroit chascun des capitaines son lieu et sa 
<( retraite... Il fut ordonné qu'ils seroient payez 
« de leurs gages tant sur les bonnes villes comme 
« sur le plat pays,... et furent establis des Com- 
« missaires des guerres. » 

« Quand les capitaines se furent fournis de ce 
« qu'il leur falloit de gens, il fut ordonné que les 
« autres se retirassent sans piller le peuple, sinon 
« on y pourvoiroit par justice... alors commen- 
« cèrent les marchands de divers lieux à faire 
<( leur négoce, les laboureurs à labourer... Bien 
« des villes et des pays, qui longtemps aupa- 
« ravant avoient été comme non habitez, furent 
« remis sus et repeuplez assez abondamment; et 



Les Compagnies d* ordonnance. 27 

« nonobstant qu'iceux eussent grande peine et 
« endurassent beaucoup de travail en ce faisant^ 
« si se tenoient-ils pour bien heureux quand Dieu 
« leur faisoit cette grâce qu'ils demeuroient pai- 
« sibles en leurs lieux, ce que faire n'avoient pu la 
w plus grande partie de leur vie... » 

Olivier de La Marche nous dit sous la date 

de 1444: 

« Fût en ce temps que les chevaux de parage 
« se vendirent si cher en France, et ne parloit- 
« on de vendre un cheval de nom que de cinq 
« cents, de mille, ou douze cents Réaux, et la 
« cause de cette cherté fut que Ton parloit de 
« faire ordonnance sur les Gens d'armes de France 
tt et de les départir sous chefs, et par compaignies, 
« et de les choisir et eslire par nom et surnom, 
tt et sembloit bien à chascun Gentil- homme que 
« s'il se monstroit sur un bon cheval, il en seroit 
« mieux cognu, quéru et recueilly... et cuidoit 
« chascun bonne aventure.... » 

« En ce temps, le Roy Charles assembla sorj 
K Conseil, pour regarder, et avoir avys sur les 
« Gens d'armes qui destruysoient son Royaume 
« de toutes parts, et pour mettre lesdits Gens 
« d'armes en reigle et en ordre, et les entretenir 
« sans les perdre et esloigner de luy, et fut advisé 
« qu'il mettroit sus quinze cents lances, choisis et 
« esleus, et les diviseroit à certains capitaines, 
« pour les conduire et gouverner, et que chascune 



28 



Histoire de la Cavalerie, 



lance auroit deux archers et un coustillier armé, 
et qu'une taillé se leveroit au Royaume de 
France, par quoy cette compaignie seroit payée, 
et seroit vray-semblable que le peuple aimeroit 
mieux payer icelle taille par an (qui toutefois 
estoit grande et de pesant faix et charge) que 
ce qu'ils fussent journellement mangez et pillez 
comme ils estoient : et eust été celle ordonnance 
mise sus à cette fois (1444), si n'eust été le 
Dauphin, fils du Roy, qui esleva une grosse 
compaignie de plus gens de bien, et des meil- 
leurs Gens d'armes, et les mena contre Basle 
et es Allemaignes, et passèrent partie de 
Bourgongne, faisant moult de maux... Si peut- 
on légèrement croire que les François firent 
moult de maux par les Allemaignes, et finale- 
ment se mirent toutes les Communes sus... et 
lesdicts Alemans portèrent et firent tant de 
maux et de dommaige aux gens du Dauphin 
par surprise et par compaignies que force leur 
fust de revenir, et s'en revint ledict Dauphin 
assez confusément de son emprise, et, luy re- 
venu, l'Ordonnance, commencée par le Roy 
Charles son père, fut mise sus et moult bien 
ordonnée, et disoit-on que messire Jehan de 
Brezé, seigneur de La Varenne, avoit esté cause 
de ladicte Ordonnance, qui fust moult belle et 
profitable chose pour le Royaume : et par ce 
moyen cessèrent les Escorcheurs et les gens 



Les Compagnies d'ordonnance, 29 



« de Gompaîgnies, leurs courses et leurs pillerics, 
« et faisoit-on de grandes chères et festes de 
« toutes parts... » 

Après ce récit du chroniqueur bourguignon, 
introduisons la version de Guillaume Gruel, Fau- 
teur des Mémoires du connétable de Richemont. 
Elle serre le sujet de.plus près encore. 

« En ce temps (Juillet 1445), le Connestable 
« fit passer les Gens d'armes par la Bourgongne, 
« malgré que le mareschal de Bourgongne en 
« eust ; c'étoit pour aller requérir les Gens du 
« Roy qui estoient à Mont-Béliard ; quant ils 
« furent venus, mondit Seigneur fit les monstres, 
« et cassa ceux qui estoient à casser et mist les 
« gens de bien en Ordonnance, et les meschans, 
« et tout le bagage, furent renvoyez, et eurent 
« lettres de passage de mondit Seigneur: et fut 
« ainsi trouvée à cette heure TOrdonnance de 
« vivre aui Gens d'armes de France. Ce qui fust, 
u me semble, grande grâce de Dieu, car oncques 
« homme de ceux qui furent cassez ne lui dist 
« que ce fut mal fait. Et furent ordonnez les capi- 
« taines : ce qui toujours a duré depuis : et ainsi 
a fut ostée la pillerie de dessus le peuple, laquelle 
« longtemps avoit duré, dont mondit Seigneur fust 
« bien joyeux; car c'étoit Tune des choses que 
a plus il désiroit, et que toujours il avoit tasché de 
« faire ; mais le Roy n'y avoit voulu entendre 
« jusques à cette heure. » 

3. 



3o Histoire de la Cavalerie. 

De ces trois récits contemporains on doit con- 
clure que la pragmatique sanction de 1439 était 
restée sans exécution. On avait cherché pendant 
plusieurs années, au milieu des embarras d'argent 
et des désordres des gens de guerre, une solution 
pratique de l'institution édictée à Orléans. Un 
projet présenté en 1444 par Jean de Brezé fut 
adopté au conseil, et paraît avoir excité le zèle et 
Tambition en France et en Bourgogne, puisque le 
prix des chevaux de guerre y subit une hausse 
marquée. La réalisation immédiate de ce projet 
fot empêchée par Texpédition du Dauphin contre 
le canton de Baie. Peut-être cette aventure ne filt- 
re qu'un prétexte inventé pour se débarrasser 
d'un seul coup du Dauphin et dés gens de guerre^ 
pour les conduire au loin et loin du roi qui se fut 
laissé aller à écouter les doléances et réclamations 
des chefs de routiers, qui étaient, comme on Ta 
vu, des personnages d'importance. Peut-être a- 
t-on cherché une occasion de faire exterminer le 
plus grand nombre possible des terribles compa- 
gnons qui infestaient la France pour venir ensuite 
plus facilement à bout du reste. C'est le rude 
connétable breton qui se charge de la besogne. 
Accompagné de soldats dévoués à sa personne, il 
traverse d'autorité les États du duc de Bourgogne, 
arrive à Montbéliard où s'étaient groupés les dé- 
bris de l'armée du Dauphin échappés aux coups des 
Suisses et aux vengeances des paysans francs- 



Les Compagnies d'ordonnance. 3i 

comtois, et opère sans* lésistancé le triage, dont 
parle son secrétaire Guillaume Gruel, pour com- 
poser les quinze compagnies des .ordonnances 
dont la formation avait été décidée en conseil 
du roi. 

Tels furent les raisons, les incidents et la 
forme du premier essai d'organisation régulière 
et permanente de la cavalerie et de Parmée. La 
création des francs-archers, point de départ de 
l'infanterie, n'eut lieu que trois a«s plus tard, 
en 1448, et cette création, qui ne comportait pas 
encore la permanence des corps de troupes à pied, 
ne peut être comparée avec exactitude qu'à l'ins- 
titution des gardes mobiles de nos jours. 

Chacune des nouvelles compagnies des ordon- 
nances était commandée en chef par un capitaine 
remplissant le rôle de l'ancien chevalier banneret, 
ayant sous lui un lieutenant, un enseigne, un 
guidon et un maréchal des logis, officiers auxi- 
liaires dont les titres avaient tous alors leur véri- 
table signification, et qui se trouvaient substitués 
aux anciens chevaliers à pepnon. La compagnie 
comprenait 100 lances, c'est-à-dire 100 hommes 
d'armes ou maîtres, armés de pied en cap. Chaque 
lance était accompagnée de 3 archers, i coutillier 
et I page, armés et montés à la légère. Une com- 
pagnie de 1 00 lances présentait donc un effectif 
de 600 hommes à cheval, l'équivalent d'un régi- 
ment de cavalerie moderne marchant avec 4 esca- 



32 Histoire de la Cavalerie, 



drons de guerre. La présence dans la compagnie 
de 2 officiers porte-étendards, renseigne et le 
guidon, montre que Ton ne confondait pas les 
hommes d'armes et leurs auxiliaires, et que chacun 
de ces deux groupes pouvait combattre à part. Il 
est probable que dans ce cas le capitaine et l'en- 
seigne restaient avec les hommes d'armes, pendant 
que le lieutenant et le guidon dirigeaient les archers 
et coutilliers. Cependant cela ne devait arriver que 
dans l'occasion d'une séparation complète des 
hommes d'armes et des suivants. Quand ce n'était 
qu'un détachement partiel et momentané d'archers 
ou de coutilliers, ce détachement était commandé 
par un homme d'armes. Il ne faut pas oublier 
que l'homme d'armes était un maître, et que cha- 
cun d'eux avait rang et qualité pour jouer dans la 
compagnie le rôle de nos sous-officiers et même 
celui des officiers de peloton. 

Les officiers se distinguaient par le port de 
l'écharpe personnelle. Dans chaque compagnie les 
hommes étaient pourvus d'une robe de gala, 
appelée depuis hoqueton et casaque, aux couleurs 
de la livrée du capitaine. C'est là le premier indice 
de l'introduction du costume uniforme, et il est 
hors de doute que cette uniformité fut établie, 
après les déplorables désordres que l'institution 
avait surtout pour objet de supprimer, en vue de 
rendre tous les hommes solidaires et responsables 
de l'honneur du corps. 



Les Compagnies d'ordonnance. 33 

Au moyen de cette force de 9,000 cavaliers com- 
plètement à sa dévotion, le roi comptait pouvoir 
se passer habituellement des services de la cheva- 
lerie féodale. Les choses cependant ne marchèrent 
pas. aussi bien et aussi vite que Pavaient espéré les 
fondateurs des compagnies d'ordonnance. Les 
institutions ne valent que par les mœurs, et 
lorsque elles ont contre elles, non-seulement les 
mœurs, les préjugés et les intérêts d'une classe, 
mais encore TinsujEsance des ressources pour les 
faire vivre, elles sont contestées et languissent 
longtemps. 

Sans insister sur les causes trop faciles à saisir^ 
qui entravèrent pendant deux siècles les progrès 
de la cavalerie royale, nous constaterons le grand 
pas qui venait d'être fait. 

Aux bandes de vassaux, très-inégales d'effectif, 
d'armement et d'aptitude, entraînées à la suite de 
leurs seigneurs, et soumises à toutes les inspira- 
tions comme à tous les caprices de ceux-ci, plus 
ou moins satisfaites d'abandonner leurs foyers et 
leurs affaires pour aller en guerre, succédaient des 
corps uniformément composés et armés et ne ren- 
fermant que des soldats de profession, résignés à 
l'obéissance, rompus aux exercices, n'ayant d'autres 
intérêts que ceux du service. 

Le roi, au moment de s'engager dans une guerre, 
n'était pas obligé d'attendre que les contingents 
des fiefs, éparpillés sur tous les points de la 



34 Histoire de la Cavalerie. 

France, fussent en état de se mettre en selle, de 
rallier la bannière et d'arriver à rassemblée de 
Tarauée. Les compagnies d'ordonnances étaient tou- 
jours prêtes : elles ne connaissaient point de con- 
ditions ; elles ne demandaient point de congé au 
bout de six semaines ou de trois mois pour aller 
récolter le blé ou ensemencer les champs; elles 
étaient au commandement du roi pendant toute 
Tannée, l'hiver comme l'été ; elles exécutaient tous 
les ordres qui leur étaient donnés, et ne pillaient 
que lorsqu'elles n'étaient pas payées. C'était quel- 
que chose. 

Les premières compagnies des ordonnances, 
données aux plus signalés des hommes de guerre 
de l'époque, s'étaient aisément formées avec les 
hommes d'armes de la milice féodale déjà admis 
aux gages de la couronne, et que la paix laissait 
sans ressources. Dans la suite, les compagnies se 
recrutèrent par enrôlements volontaires. Les grades 
cessèrent d'y être un droit attaché à la haute nais- 
sance et à la position politique. Toutefois les capi- 
taines titulaires furent presque toujours de grands 
seigneurs, des prmces même, et jusqu'au règne de 
François P% qui vit les gentilshommes se jeter 
dans la cavalerie légère et dans les bandes d'in- 
fanterie, les simples gens d'armes devaient faire 
preuve de noblesse. 

Pour subvenir aux dépenses des compagnies 
d'ordonnance, Charles VII, ainsi qu'on Ta vu. 



^^ 



Les Compagnies d ordonnance. 35 

créa, en même temps qu'elles, une taille spéciale^ 
dite ordinaire des guerres, dont le produit était 
partagé chaque année dans quatre montres ou 
revues générales d^effeaif. Dans deux de ces 
montres, auxquelles assistait un maréchal de 
France, les hommes d'armes devaient paraître à 
cheval et armés de pied en cap. Dans les deux 
autres, dites montres en robes, ils étaient en 
casaques de livrée et sans armes, et n'avaient 
affaire qu'aux fonctionnaires du Trésor appelés 
commissaires des guerres. Les capitaines rece- 
vaient dans chacune des quatres montres, environ 
3,000 francs de notre monnaie; l'homme d'armes 
touchait 5oo francs, les archers et coutilliers en 
proportion. 

Quant à la tactique, il ne fut rien innové. On 
continua de se former et de se battre à la che- 
valière, avec plus d'ordre et de solidarité. 

Le nombre des compagnies d'ordonnance, fixé 
à i5 au moment de la création en 1445, s'éleva 
rapidement. Quatre ans plus tard, en 1449, quand 
Charles VII entreprit la soumission de la Nor- 
mandie, il y en avait déjà 17. Louis XI, à son 
avènement à la couronne en 1461, cassa des 
compagnies appartenant à des amis trop zélés de 
son père et en créa d'autres pour ses partisans. 
Il avait 2,200 lances françaises à son service 
pendant la guerre dite du Bien public. La réu- 
nion à la France d'une partie des États de 



1 



36 Histoire de la Cavalerie. 

Charles le Téméraire amena certainement, en 
1477, une nouvelle augmentation du chiffre des 
compagnies. Lorsque le roi se décida en 1479 ^ 
créer une infanterie permanente, il cassa i o com- 
pagnies d'ordonnance pour appliquer les finances 
de leurs gages à Fentretien des nouvelles bandes 
françaises. Après cette réduction il y avait encore 
Tannée suivante i,5oo lances au camp du Pont- 
de-P Arche, et toutes les compagnies d'ordonnance 
ne se trouvaient pas sans doute à ce camp, car 
Louis XI vivait mal avec ses voisins et il avait 
dû laisser des garnisons dans les nombreuses 
places de ses frontières récemment élargies. 

Ce roi, du reste, s'appliqua à perfectionner l'or- 
ganisation des compagnies et promulgua de nom- 
breux édits pour cet objet, notamment celui donné 
à Montils-lès-Tours en avril 1467, qui réglemente 
minutieusement toutes les parties de leur service. 

Il serait inutile de. rechercher toutes les com- 
pagnies qui ont pu- être mises sur pied à cette 
époque de notre histoire et même plus tard. 
L'existence de la plupart a été éphémère. Il suf- 
fira, pour, fixer les idées, de constater de loin en 
loin, et jusqu'à la formation des régiments, la 
situation de la cavalerie. 

Voici la liste des 1 5 premières compagnies des 
ordonnances créées en 1445, Cette liste présente 
un intérêt particulier comme point de départ de 
Tarmée française, par l'éclat des noms des capi- 



Les Compagnies d'ordonnance, 87 

taines, les plus illustres parmi les compagnons 
de Charles VII et de Jeanne Darc, et par la 
vigueur que ces compagnies ont mise à achever 
l'expulsion des Anglais. 

Deux de ces compagnies, entièrement com- 
posées d'Écossais, étaient déjà sur pied depuis 
quelques années et faisaient probablement partie 
de Tescorte fidèle qui accompagna le connétable 
de Richemont à Montbéliard, et qui Tappuya 
dans Texécution qu'il fit des débris des bandes 
de l'armée du Dauphin. 

C'était d'abord la compagnie de Jean Stuart, 
seigneur d'Aubigny, compagnie connue plus tard 
et jusqu'en 1788 sous le titre de Gendarmes 
écossais, et qui paraît avoir été amenée en 
Frstnce en 1422. 

La seconde avait été formée en 1440 par le 
dédoublement de la précédente et sous le com- 
mandement de Robert Patilloch. Elle est devenue 
la première compagnie des gardes du corps, dite 
compagnie écossaise. 

Ces 2 compagnies, contemporaines de l'ins- 
titution, sont les seules qui aient survécu aux 
guerres civiles du xvi® siècle. 

Les 1 3 autres compagnies eurent pour chefs : 

Charles d'Anjou , comte de Mortain , grand sénéchal de 

France ; 
Jean, bâtard d'Orléans, comte de Dunois ; 



i 



38 Histoire de la Cavalerie. 

Artus de Bretagne, comte de Richemont, connétable de 

France; 
Philippe de Culant , maréchal de Jaloignes ; 
Jean Poton , maréchal de Xaintrailles ; 
Joachim Rouhault, maréchal de Gamaches; 
André de Laval , maréchal de Lohéac ; 
Jean de Brosses, maréchal de Boussac ; 
Prégent de Coëtivy, amiral du Ponent ; 
Pierre de Brezé, sénéchal de Poitou ; 
Jean de Bueil , comte de Sancerre ; 
Antoine de Chabannes, comte de Dammartin ; 
Florent d'IUiers. 



k 



Les Compagnies de cavalerie légère. 39 



CHAPITRE IL 

LES COMPAGNIES DE CAVALERIE LÉGÈRE. 

La fin du xv* siècle vit naître les guerres d'Italie 
qui occupèrent les deux premiers tiers du siècle 
suivant, et qui mirent successivement nos troupes^ 
en dehors et en dedans de nos frontières, en 
contact avec toutes les nations de l'Europe occi- 
dentale. Les nécessités d'une longue suite de 
campagnes et le besoin d'imiter les troupes étran- 
gères dans ce que celles-ci semblaient avoir de 
bon, devaient amener de profondes modifications 
dans la constitution générale de l'armée et dans 
l'organisalion particulière de la cavalerie. 

La prenûère conséquence de l'état de guerre 
fut une nouvelle augmentation du nombre des 
compagnies d'ordonnance. Ce nombre s'accrut 
d'abord par le zèle de beaucoup de seigneurs 
riches et puissants qui furent autorisés à leva: de 
nouvelles compagnies, puis par le dédoublement 
des compagnies. Voici pourquoi et comment eut 
lieu ce dédoublement. Nous avons dit que la 
plupart des capitaines titulaires étaient des hommes 



40 Histoire de la Cavalerie. 

de haute naissance, occupant dans Tarmée ou à 
la cour des positions supérieures à celle de capi- 
taines de cavalerie. Détournés du commandement 
direct de leurs compagnies par les devoirs des 
charges dont ils étaient revêtus, ils se faisaient 
remplacer par leurs lieutenants ou par des c^i- 
taines4ieutenants, gentilshommes braves, expé- 
rimentés, ayant passé par tous les grades de la 
hiérarchie, depuis le noviciat du page et de 
Tarcher jusqu'aux emplois d'homme d'armes, 
d'enseigne et de lieutenant. Cet usage s'était 
introduit dès les premiers jours. On voit en 1446 
la compagnie du grand sénéchal conduite à la 
prise du Mans par le lieutenant Renaud de 
Denesay, qui la conimandait encore en 1460 à 
la bataille de Formigny. La compagnie du con- 
nétable de Richemont marchait dans le même 
temps- sous les ordres de Jacques de Saint-Paul. 
Cet usage ne pouvait que se généraliser, et, à 
répoque où nous .sommes arrivés, Bayard est le 
typé de cette catégorie d'ofiBciers exerçant la 
fonction réelle au lieu et place du titulaire. A la 
mort de celui-ci, sa compagnie de 100 lances était 
souvent partagée. Une fraction était laissée à 
l'héritier de nom, quelquefois par suite à un 
enfant-, l'autre fraction était donnée au capitaine- 
lieutenant ou à quelque gentilhomme de mérite, 
qui recevait ainsi une" juste récompense de ses 
services. De cette façon on entretenait à la fois 



Les Compagnies de cavalerie légère. 41 

rémulation chez les hommes de naissance et chez 
les hommes de valeur, et c'est par ce chemin 
que sont arrivés tant de soldats de fortune au 
XVI® siècle. 

Par l'effet de ces dislocations, on vit des com- 
pagnies de 80, de 60, de 5o, et même de 20 
lances. On trouva un nouveau mobile d'encou- 
ragement dans cette inégalité des effectifs, qui se 
traduisait par une inégalité correspondante dans 
le traitement des capitaines, toujours propor- 
tionnel au nombre d'hommes placés sous leurs 
ordres. Une augmentation de 5 lances, de 10 
lances, était un véritable avancement, et tout 
capitaine, en se montrant brave et habile, pouvait 
espérer voir sa compagnie monter au complet de 
100 lances. C'est précisément ce qui advint à 
Bayard après sa magnifique défense de Mézières. 
François P' le fit capitaine de 1 00 hommes 
d'armes, et cette récompense fut considérée comme 
la plus haute expression de l'estime et de la recon- 
naissance royales. Quand le chevalier mourut, sa 
compagnie fut partagée entre Montluc et Sansac, 
deux illustres soldats. 

Ce système du morcellement s'appliqua aussi 
aux compagnies de cavalerie légère que la guerre 
fit naître en grand nombre, de sorte qu'il n'y a 
pas d'homme un peu connu du xvi® siècle qui 
n'ait eu sa compagnie. Beaucoup même en eurent 
deux : une compagnie de gens d'armes et une 
I. 4. 



42 Histoire de la Cavalerie, 

compagnie de chevau-légers. Quelques grands 
personnages en eurent même davantage. 

Dès les premières campagnes d'Italie, les ar- 
chers s'étaient séparés des hommes d'armes et 
avaient formé des compagnies particulières, qui 
furent bientôt désignées collectivement par le 
nom nouveau de cavalerie légère et qui ccanr- 
mencprent à combattre à part sous leurs guidons 
et leurs cornettes propres. C'était une imitation 
de la constitution des troupes à cheval véni- 
tiennes, partagées en cavallarmati et copolje^ 
gieri. On' opposait les archers à cheval aux 
estradiotSy à la cavalerie albanaise. Louis XII 
voulut même avoir des Albanais à sa solde : une 
lettre de ce monarque, datée de Beauvais, 3o juil- 
let 1499, ii^forme qui de droit qu'il a nommé le 
sieur de Fontrailles capitaine général de tous les 
Albanais et chevau-légers à son service et à sa 
solde. En i5o7, au siège de Gênes, il avait 
2,000 estradiots commandés par le capitaine 
Mercurio. Deux ans après, Georges Castriotto 
lui amenait 400 lances moresques, qui depuis, 
recrutées par des Français jusqu'au nombre de 
1,000, furent appelées compagnies nouvelles de 
cavalerie légère. François P' suivit les mêmes 
errements et étendit le rôle et l'effectif de la cava- 
lerie légère nationale pour tenir tête aux géne^ 
taires espagnols. 

Cette modification dans l'organisation et dans 



Les Compagnies de cavalerie légère. 43 

le so^ke des troupes à cheval, qui se fit dans les 
premières années du règne de Louis XII, eut pour 
résultat d'établir peu à peu une ligne de démar- 
cation tranchée entre les compagnies d^hommes 
d'armes ou de gens d'armes, qui continuèrent les 
traditions de la cavalerie noble et restèrent troupes 
de réserve et privilégiées sous le nom de gendar^ 
merie, et la cavalerie légère qui ouvrit largement 
ses rangs aux aventuriers de toutes les classes et 
par conséquent à la roture. Avec le temps, le 
résultat de la lutte n'était pas douteux : la cavalerie 
légère devait Tonporter. Tout considéré, l'homme 
noble devait préférer la position d'officier dans la 
cavalerie légère à celle de soldat dans la gendar- 
merie, qui finit par être surtout une école pratique 
où la jeune noblesse apprenait son métier. 

Tel fijt le point de départ de cette singulière 
constitution des' troupes à cheval de l'ancienne 
monarchie, qui, jusqu'aux derniers jours, comp* 
tait d'une part la maison du roi et la gendar-' 
merie de France, dont les compagnies pouvaient 
ou prétendaient faire remonter leur origine aux 
ccanpagnies des ordonnances de Charles VII, et 
de l'autre la cavalerie légère formée en régiments 
de toute nature ccanprenant indistinctement les 
cuirassiers et les hussards, à l'exclusion des 
dragons qui formaient un corps à part, inter- 
médiaire entre l'infanterie et la cavalerie, une 
infuiterie à cheval. 



44 Histoire de la Cavalerie. 



A mesure qu'on avance dans le xvi® siècle, on 
voit la gendarmerie noble fondre à vue d'œil en 
même temps que Pesprit féodal tend à disparaître 
dans le tourbillon des idées nouvelles qui vont 
former Tesprit moderne. Tout porte coup à la 
chevalerie et profite à la cavalerie légère et à 
Tinfanterie. On lit Polybe et César: la guerre 
redevient une science, et Timportance commence 
à passer de la force, de l'adresse et de la valeur 
individuelles aux masses organisées, instruites et 
obéissantes. 

L'emploi de plus en plus répandu des armes 
à feu conduit d'abord, par une erreur très -na- 
turelle, les hommes d'armes à épaissir le métal 
de leurs bardes et à s'alourdir au point que le 
maniement du cheval et de la lance leur devient 
impossible, et ce ne fut que plus tard, au milieu 
d'une guerre civile sans merci ni trêve, qu'ils 
s'aperçurent que devant le mousquet et le canon, 
la mobilité et la liberté des mouvements sont plus 
sûrs que les meilleures cuirasses et qu'ils commen- 
cèrent à remplacer celles-ci par le buffle, qui 
devait lui-même, plus tard encore, être rejeté 
comme inutile. 

La lance, cette arme caractéristique de la 
chevalerie, son emblème et son palladium, 
échappç aux bras paralysés des gentilshommes 
et tombe aux mains des fantassins lestes et au- 
dacieux des bandes, qui ne se souviennent que 



Les Compagnies de cavalerie légère. 45 

trop qu'ils sont les héritiers des francs -ar- 
chers, et qui retournent avec bonheur les pointes 
de ces lances, devenues piques et hallebardes, 
contre les représentants des anciens oppresseurs 
de leur race. A la fin du xvi® siècle, il n'y avait 
plus de lances dans la cavalerie, qui ne se fiait 
désormais que dans Tefifet soudain et protecteur 
du pistolet. L'homme d'armes, par la force des 
choses, s'était transformé en chevau-léger. La 
lance ne devait plus reparaître que de loin en loin 
dans l'armée française, et chaque fois sa réappa- 
rition fut la conséquence d'un engouement pas- 
sager pour la chevaleresque Pologne. 

Cet abaissement du rôle et du prestige de la 
chevalerie eut donc les effets immédiats qu'il devait 
avoir. François P% qui voyait bien où était la cause 
du mal, eut beau, pour l'enrayer, réglementer à 
nouveau l'organisation des compagnies d'hommes 
d'armes par son ordonnance du 20 janvier i5i4 
(vieux style) donnée à la Ferté-sous-Jouarre, or- 
donnance qui portait la lance fournie à 8 hommes, 
2 hommes d'armes solidaires l'un de l'autre, ayant 
chacun son archer, son coutillier et son page; il 
eut beau recommander à tous de s'exercer au tir 
de l'arc et de l'arbalète ; prescrire à tous capitaines 
d'avoir en leurs compagnies bon nombre d'archers 
tirant bien de l'arc et des arbalétriers qui soient 
bons pour tirer soit à cheval, soit à pied, établir 
dans onze grandes villes un artilleur, exempt de 



46 Histoire de la Cavalerie. 

tailles, pour fourrlir de bonnes armes les archers 
des ordonnances en les payant, les archers, cou- 
tilliers et pages continuèrent à abandonner la 
lance fournie pour devenir maîtres dans les com- 
pagnies de cavalerie légère. 

Beaucoup d'hommes d'armes même, qui, 
tous nobles qu'ils étaient, n'avaient pas la pré- 
tention de devenir officiers dans les compagnies 
d'ordonnance, ambitionnèrent des grades dans 
les compagnies légères et laissèrent dans les rangs 
de la gendarmerie des vides qui ne purent plus 
être comblés que par l'admission de soldats rotu- 
riers. Toutefois, pour sauver les principes, ces 
chevaliers d'aventure étaient faits nobles. La ques- 
tion était renversée. Autrefois il fallait être noble 
pour être soldat; maintenant la profession con- 
férait la noblesse. « Sire, disait Bayard à Fran- 
« cois !•% je n'ai autres en ma compaignie que 
<( soldats intrépides, et entre autres un fier homme, 
« le fils d'un de mes tambours, qui me montre 
« le chemin de partout. C'est un démon d'esca- 
<( lades et de courage. Certes, Votre Majesté 
<( feroit un grand coup de me le faire officier: 
<( son père n'a jamais pu le devenir à cause, a- 
« t-on dit, de sa caisse et de sa casaque, et ce- 
« pendant c'est un rude et maître compagnon... 
<( — Bayard mon ami, dit le Roy, caisses et 
<( casaques sont honorables à mon service. Fai- 
<( sons officiers, tout dans ce moment, le père et 



Les Compagnies de cavalerie légère. 47 

« k fils ensemble, et toute la race encore, puis- 
« qu'elle est si loyale. » 

Les grades de Tinfanterie, comme ceux de la 
cavalerie légère, excitant désormais l'ambition 
des cavaliers noble?, il devint tellement d'usage 
qu'un gendarme démonté, ou hors d'état de con- 
tinuer à entretenir son équipage, trouvât place 
dans les rangs des bandes d'infanterie, qu'on 
créa pour lui une position d'attente et intermé- 
diaire entre le simple homme de pied et le ca- 
poral : c'était la position de lanspessade ou ans- 
pessade, grade sans analogie aujourd'hui, à moins 
que l'on ne veuille le comparer à l'état des arti- 
fciers des batteries d'artillerie et des maîtres des 
compagnies de pontonniers et d'ouvriers. On 
sait que cette dénomination de lanspessade dé- 
rive des mots italiens lania spenata, lance 
rompue, par opposition à lania fornita, lance 
fournie. 

Le développement le plus complet du système 
d'organisation de la cavalerie que nous venons 
d'essayer de faire connaître, correspond à l'avé- 
nement à la couronne de Henri II et à l'ocoh- 
pation de Metz. La cavalerie de l'armée qiri fat 
rassemblée à Joinville pour cette mémorable ex- 
péditi(Mi, au mois de mars i552, comptait d'après 
les Mémoires du maréchal de Vieilleville 6,000 
hommes d'armes, 6,000 chevau-légers, 6,000 ar- 
quebusiers à cheval, 6,000 {Âstoliersr aUemands 



48 Histoire de la Cavalerie. 

et 8,000 chevaux de l'arrière-ban, en tout 3 2, 000 
cavaliers. C'était le quart de la totalité de l'armée, 
et l'effectif de la cavalerie légère française était 
déjà le double de celui des hommes d'armes. 

Voici quelques détails propres à faire connaître 
l'état et la physionomie de la cavalerie vers le 
milieu du xvi® siècle. D'après un mémoire de 
i547 « l'homme d'armes doit être monté de 
« 2 bons chevaux de service et armé d'un corps 
« de cuirasse, armet ou bourguignote, grands 
« garde-bras, espaulettes, avec une bonne et forte 
« lance..., les archers montés d'un bon cheval, 
« armés de corselet, brassards ou manches de 
« maille et d'un morion, et, au lieu de lance, un 
« fort et roide épieu, avec la pistole à l'arçon de 
« la selle, au lieu d'arc et de flèches qu'ils por- 
« talent anciennement, avant que cette diablerie 
« de pistoles fût inventée. » 

Une ordonnance royale du 1 2 novembre 1 649 
fixa à nouveau les gages de la gendarmerie. 

Le capitaine eut 800 livres, outre les 400 livres 
qui lui revenaient pour son état d'homme d'armes 
et non compris, bien entendu, la somme qui lui 
était allouée pour l'entretien de sa compagnie, 
somme qui était proportionnelle à l'ejBFectif. 

Le supplément fut de 400 livres pour le lieute- 
nant, de 200 livres pour l'enseigne ou le guidon et 
de 1 00 livres pour le maréchal des logis, qui rece- 
vaient d'ailleurs 400 livres comme homme d'armes. 



Les Compagnies de cavalerie légère. 49 

L'homme d'armes touchait, comme il vient 
d'être dit, 400 livres, et Tarcher 200. 

Les compagnies de cavalerie légère étaient assi- 
milées pour la solde aux archers des compagnies 
d'ordonnance, c'est-à-dire que le simple cavalier 
touchait 200 livres, et que les officiers recevaient 
200 livres de moins que ceux des gendarmes. 

Le ban et l'arrière-ban de la noblesse, quand 
on les appelait, formaient des compagnies orga- 
nisées, armées et payées comme celles de la cava- 
lerie légère. 

En même temps qu'il réglait le service des 
troupes à cheval, Henri II, respectant l'indépen- 
dance des capitaines des compagnies d'ordon- 
nance, plaçait le 20 décembre 1649 la cavalerie 
légère sous l'autorité et la direction d'un colonel 
général, comme cela avait été fait deux ans aupa- 
ravant par son père pour l'infanterie. 

Les gendarmes demeurèrent sous le comman- 
dement immédiat du roi, représenté par le conné- 
table, et ils sont toujours restés dans cette situa- 
tion, puisque celles de leurs compagnies qui ont 
survécu sont devenues ce que l'on a appelé plus 
tard la maison du roi et des princes. 

Le ban' et l'arrière-ban de la noblesse, au con- 
traire, assimilés à la cavalerie légère, obéirent au 
colonel général et subordonnèrent sans difficulté 
leurs bannières à la bannière entièrement blanche, 
sans armoiries, du colonel général, qui héritait 
i. 5 



5o Histoire de la Cavalerie. 

» 

ainsi par anticipation d'une partie des attributions 
et prérogatives du connétable, dont la charge 
ne fut supprimée qu'en février 1627, à la mort 
de Lesdiguières. 

La charge de colonel général de la cavalerie 
légère a existé sans interruption jusqu'au 1 7 mars 
1 788, C'est pour cela que les chefs des régiments de 
la cavalerie, contrairement à ce qui s'est vu pour 
l'infanterie, n'ont jamais porté jusqu'à cette date 
le titre de colonel, mais exclusivement celui de 
mestre de camp. 

C'est pour cela aussi, et parce que la perma- 
nence des régiments de cavalerie n'a réellement 
commencé qu'en 1671, à une époque où beau- 
coup de choses d'autrefois avaient perdu de leur 
signification et de leur valeur, que les régiments 
de cette arme n'ont jamais eu d'étendards colonels 
blancs. On a vu, à l'histoire de l'infanterie, que 
l'octroi du drapeau blanc à un régiment équi- 
valait jusqu'au règne de Louis XIII à l'inscription 
permanente du corps sur le registre de l'ordinaire 
des guerres. C'était dans ce temps une haute 
faveur et la reconnaissance de services signalés. 
Les premiers régiments de cavalerie formés sous 
Louis XIII n'étant que des agrégations tempo- 
raires pour la durée d'une guerre et même d'une 
campagne, il n'y avait pas lieu de leur donner 
rétendard blanc, et plus tard, quand la perma- 
nence fut appliquée à tous les corps de Tannée, 



Les Compagnies de cavalerie légère. 5i 

les charges de colonel général avaient perdu toute 
leur importance, n'étaient plus que des charges 
de cour, et le roi ne se souciait plus d'augmenter 
la puissance d'un colonel général de la cavalerie 
légère en lui laissant le droit d'avoir dans chaque 
régiment de cavalerie une compagnie entièrement 
à sa dévotion. Il avait tourné cette difficulté pour 
l'infanterie en supprimant le colonel général et 
en se substituant à lui. Voilà pourquoi la cornette 
blanche, signe de l'autorité du colonel général de 
la cavalerie légère, sa bannière personnelle, est le 
seul étendard blanc qui ait jamais flotté sur la 
tête de nos escadrons de cavalerie légère, et 
pourquoi cette cornette blanche était arborée par 
la première compagnie du régiment appartenant 
en propre au colonel général. C'était sa com- 
pagnie, sa propriété, commandée par son lieute- 
nant-colonel, et l'on verra que le roi Louis XVIII, 
dont on ne contestera pas la science en pareille 
matière, entendait encore ainsi en 1814 le rôle 
et la signification de l'enseigne blanche et de la 
compagnie colonnelle. 

Nous devons ajouter, pour ne rien omettre, 
que la charge de porte-cornette blanche de France 
a survécu à la suppression de la charge du con- 
nétable. On voit figurer dans un état militaire 
de 1 788, au titre de l'état-major général de la 
cavalerie légère, le marquis de la Chenaye comme 
porte-cornette blanche de France, à côté du mar- 



52 Histoire de la Cavalerie. 

quis de Rochefort, porte-cornette blanche du co- 
lonel général. Quel pouvait être le rôle militaire du 
porte-cornette blanche de France sous Louis XV ? 
Nous pensons qu'il représentait toujours rarrière- 
ban de la noblesse, qu'on n'appelait plus, mais 
qui existait toujours en principe. 

La liste suivante donne les noms des person- 
nages qui ont possédé la charge de colonel général 
de la cavalerie légère française, jusqu'à l'époque 
où la cavalerie a été enrégimentée d'une manière 
permanente, c'est-à-dire jusqu'en 1671. A la lec- 
ture de ces noms, on comprendra pourquoi nos 
rois, à partir de Henri IV, ont tendu à réduire 
peu à peu la charge à un simple titre d'honneur. 

20 décembre 1549. Claude de Lorraine, duc d'Aumale. 

24 novembre i558. Jacques de Savoie, duc de Nemours. 
6 mai 1589. Charles de Valois, duc d'Angoulême. 

1er janvier 1624. Louis-Emmanuel de Valois, comte 

d'Alais, fils du précédent. 

20 juillet i653. Louis de Lorraine -Guise, duc de 

Joyeuse, gendre du précédent. 

24 avril 1657. Henri de La Tour d'Auvergne, vi- 

comte de Turenne. 

A partir de l'année i552, le colonel général 
eut quelquefois pour auxiliaire un mestre de camp 
général, ou premier chef d'état-major. La charge 
de mestre de camp général est devenue perma- 
nente le 6 septembre 1 578. Les personnages qui 



Les Compagnies de cavalerie légère. 53 

en ont été pourvus depuis cette date jusqu'à 
Tannée 1671 sont: 

6 septembre iSjS. Bernard de Nogaret, marquis de La 

Valette. 

27 septembre 1589. Anne d'Anglure, baron de Givry. 

1594. Louis de L'Hôpital, marquis de 
Vitry. 

28 juillet 1595. François de La Grange d'Arquien 

de Montigny. 
3o décembre 161 1. N., comte de Saint-Aignan. 
i«r septembre 1620. Gilbert Filhet de La Curée. 

juillet 1628. François, duc de LaTrémouille. 

8 avril i633. Charles d'Escoubleau, marquis de 

Sourdis. 

5 juillet 1637. Roger de Choiseul, marquis de 

Praslin. 
II décembre 1641. Jean, comte de Gassion. 
3o mai 1646. Philippe de Clérambaut, baron de 

Palluau. 
3i août i653. Roger, comte de Bussy-Rabutin. 

6 décembre 166 5. Armand du Cambout, marquis de 

Coislin. 

Les attributions ordinaires du mestre de camp 
général, avant que cette charge fût devenue 
une sinécure, s^étendaient à tout ce qui est relatif 
à la discipline, à Pinstruction et aux marches des 
troupes à cheval. Quand il y avait deux armées 
sur pied, le mestre de camp général commandait 
la cavalerie de celle où n'était pas le colonel 
général. 

I. 5. 



54 Histoire de la Cavalerie, 



Le cas de trois armées en campagne s'étant 
présenté, le colonel général eut dès. Torigine un 
deuxième adjoint ayant qualité pour le remplacer 
comme magister équitum, G'^st Pintendanl gé- 
néral, ou commissaire général de la cavalerie 
légère, titre qui implique des attributions de 
surveillance administrative. Le premier officier 
qui fut pourvu de cette charge fut certainement 
Horace Farnèse, puisqu'il existe un ordre royal 
daté de Cognac le 24 janvier i554, et donnant 
à Louis Pic de La Mirandole commission de 
colonel et intendant général des chevau-légers 
françois en Italie, en V absence du duc d'Aumale, 
colonel général, et en remplacement d'Horace 
Farnèse, duc de Castro, décédé. 

La charge du commissaire général n'est de- 
venue permanente que le i5 octobre 1654, et 
elle a existé, comme celles du colonel général et 
du mestre de camp général jusqu'au 17 mars 1 788. 
Un seul commissaire général a exercé en titre 
d'office, avant la permanence des régiments. C'est 
Timoléon de Séricourt, marquis d'Esclainvilliers, 
nommé le i5 octobre 1654. 

Nous avons vu qu'en i552, au moment de 
l'occupation de Metz, la cavalerie légère fitmçaise 
figurait dans l'armée pour un chiffire double de 
l'effectif des compagnies d'ordonnance.' Il nous 
a été impossible de trouver ou de composer un 
état complet des troupes de tous noms et de tous 



Les Compagnies de cavalerie légère. 55 



genres, françaises ou étrangères, archers, argou- 
lets, albanais, pistoliers, arquebusiers, que le roi 
Henri II pouvait avoir à son service dans les 
dernières années de son règne. Après la paix du 
Câteau-Cambrésis qui amena la cessation de la 
guerre extérieure et Pévacuation de P Italie, il y 
eut de nombreuses réformes ; les troupes étran- 
gères furent congédiées -, la plupart des compa- 
gnies de cavalerie légère françaises furent réfor- 
mées, et celles qui furent conservées à cause du 
nom et des services de leurs capitaines, furent 
tranformées en compagnies de gendarmes, qui 
seules pouvaient jouir du privilège de la perma- 
nence, c'est-à-dire d'être payées sur l'ordinaire 
des guerres. 

On se fera une idée des forces de cavalerie 
alors maintenues sur pied par le mandement 
du roi François II, donné à Saint - Germain , 
le I®' février i56o, au moment où allait éclater 
la conjuration d'Amboise « pour le département 
<i des compagnies des ordonnances que ledict sei- 
<( gneur veult et entend faire marcher en armes 
« et grands chevaux. » C'est, croyons-nous, une 
liste très-complète des compagnies de cavalerie 
entretenues à ce moment. 

« Département des compagnies de gens d'armes 
ordonnés marcher et estre le 25 de ce pré- 
sent mois es lieux cy-après déclare^ : 



56 Histoire de la Cavalerie, 


En Savoie, Dauphiné et Bresse. 

M. le prince de Salerne", 3o lances. 
M. de La Mothe-Gondrin, 3o — 
M. de Savoie, loo — 


En Languedoc. 
M. le comte de Villars, 
M. de Clermont, 


3o 
3o 




Roy de Navarre 


En Guyenne, 


lOO 


a 


M. de Burie, 


A Bordeaux, 


3o 




M. de Jarnac, 


A La Rochelle. 


3o 


.^ 


M. d'Ossun, 
M. le comte de 1 


En Piedmont. 
Beyne, 


3o 
20 


— 


lo compagnies. 


43o lances. 



« Aultres compaignies qui demeureront à la 
suite de M, le maréchal de Termes, pour le 
pays de Poictou : 



Maréchal de Termes, à Loches, 


5o lances. 


M. de Sansac, 


3o — 


M. du Lude, 


3o - 


M. de La Vauguyon, 


3o — 


M. de Randan, 


3o - 


Prince de Navarre, 


40 — 


Comte de La Rochefoucaud, 


3o - 


Comte de Charny, 


3o — 



8 compagnies. 



270 lances. 



Les Compagnies de cavalerie légère. bj 

En Bretaigne. 
M. d'Estampes, 3o lances. 

« En Touraine et Anjou, avec M. le duc de 
Montpensier , nommé au gouvernement de 
Tours : 

M. de Montpensier, 3o lances. 

Comte d'Horon, gendarmes écossois, 60 — 

M. de Gonnor, 3o — 

M. de Vassay, 3o — 



4 compagnies. 1 5o lances. 

A Sedan, Champaigne. 
Duc de Bouillon, 3o lances. 

« Aultres étant sous M. le maréchal de Sainte 
André, es pays de Lyonnois, Auvergne et 
Bourbonnois. 

Maréchal de Saint-André, à Moulins, 80 lances. 

M. de Bourdillon, 3o — 

M. de Damville, 3o — 

M. de Lafayette, 3o — 

M. de Montluc, 3o — 



5 compagnies. 200 lances. 

« Aultres qui demeureront en Basse Normandie, 
sous M. de Villebon, es environs de Caen : 

Marquis d'Elbœuf, 40 lances. 

M. de Villebon, 3o — 

M. d'Annebaut, 3o — 

M. de La Mailleraye, 3o — 

4 compagnies. 1 3o lances. 



58 Histoire de la Cavalerie. 



« Aultres qui demeureront à Rouen et environs 



M. Tadmiral de Châtillon, 


6o lances. 


M. d'Estrées, 


3o 


2 compagnies. 


90 lances. 


A Met^, 




M. de Vieilleville, 


3o lances. 


A Orléans. 


« 


Le prince de La Roche-sur- Yon, 


3o lances. 


Le duc d'Orléans, 


40 — 


M. de La Trémouille, 


40 


M. le Vidame, 


3o — 


4 compagnies, 


140 lances. 



<( Aultres que le Roy veult faire venir es enyi^ 
rons d'Orléans, et y estre le 20^ de ce présent 
mois : 

M. d'Angoulesmes, 3o lances. 

M. de Nevers, 80 — 

M. d'Aumale, 80 — 

M. de Nemours, 3o — 

M. de Tavannes, 3o — 

M. de Terride, 3o — 

Francisque d'Esté, 3o — 

Comte d'Eu, 3o — 

La Roche du Maine, 3o — 

Le prince de Gondé, 3o — 

M. de Beau vais, 3o — 

Le duc de Lorraine, 60 — 



A reporter, 12 compagnies. 490» lances. 



Les Compagnies de cavalerie légère. Sg 



Report. 12 compagnies. 


490 lances. 


M. le Connestable, 


100 — 


M. le maréchal de Montmorency, 


5o — 


M. le maréchal de Brissac, 


80 


M. de Chaulnes, 


3o - 


M. de Genlis, 


3o - 


M. de Guise, 


100 — 


M. de Longueville, 


3o ~ 


Le prince de Mantoue, 


3o 


M. de La Brosse, 


3o 


M. de Crussol, 


3o - 


22 compagnies. 


1000 lances. 


En Picardie, à Rue. 




M. de Sénarpont, 


3o lances. 


A Montreuil. 




M. de Morvilliers, 


3o - 


A Péronne. 




M. d'Humières, 


3o - 


3 compagnies. 


90 lances. 



D'après cet état, il existait en i56o, au mo- 
ment où commençaient les guerres civiles, 65 com- 
pagnies de gendarmes des ordonnances, montant 
à 2^590 lances. 

Il n'y avait plus que 4 compagnies à 100 lances, 
celles du connétable et du duc de Guise, du roi 
de Navarre et du duc de Savoie. La majeure 
partie était à 3o lances. 

La pièce suivante est intéressante en ce qu'elle 
nous montre, trois ans plus tard, après la pre- 



6o Histoire de la Cavalerie, 

mière guerre civile, raccroissement du nombre et 
de reffectif des compagnies et leur distribution 
dans les provinces à cette époque. 

C'est un ordre pour une montre générale, ou 
revue administrative, qui dut avoir lieu le 
10 juin i563. 

Compaignîes près la personne du roy, 

« Monsieur, 70 lances ; Longueville, 60 ; Gonnor, 40 ; 
Martigues, 40; comte de Charny, 40; du Péron, 40; 
de Rostaing, 40. — 7 compagnies et 33o lances. 

Isle de France, 

« Connétable, 100 lances ; maréchal de Montmorency, 
80 ; TAdmiral, 60 ; de Méru, 3o; de Thoré, So; de Genlis, 
3o; deTorcy, 3o; d'Estrées, 3o; La Chapelle aux Ursins, 
3o ; de Rambouillet, 3o. — 10 compagnies et 45o lances. 

Picardie. 

« Prince de Condé, 80 lances ; Sénarpont, 3o ; Chaul- 
nés, 3o; Mailly, 3o; Morvilliers, 3o; Piennes, 3o; Crève- 
cœur, 3o ; Rubempré, 3o. — 8 compagnies et 290 lances. 

Brie, Champagne, Met![, Toul et Verdun, 

a Duc de Lorraine, 80 lances ; Henri de Guise, 70 ; 
Elbœuf, 5o; Charles de Guise, 3o; duc de Ne vers, 70; 
Vieilleville, 60; EsclavoUes, 3o; Beauvais, 3o; Crussol, 3o; 
d'Oysel, 40 ; duc d'Attri, 3o ; Clermont d'Am boise, 3o : 
vicomte d'Auchy, 5o ; Brienne, 3o ; comte Rheingrave, 
40; La Valette, 3o; Barbezieux, 3o; Vaudémont, 5o; 
Bouillon, 3o; de Brosse, 3o. — 20 compagnies et 840 
lances. 

Bourgogne, 

« Duc d'Aumale, 80 lances ; maréchal de Bourdillon, 



Les Compagnies de cavalerie légère, 6i 

60 ; Tavannes, 5o ; Sennectère, 3o. — 4 compagnies et 

220 lances. 

* 
Lyonnais, Fore!jf, Bourbonnais, Beaujolais, Auvergne, 

La Marche. 

« Duc de Savoie, 100 lances ; duc de Nemours, 60 ; 
comte de Beyne, 20 ; Lafayette, 3o ; Biron, 40. — 5 com- 
pagnies et 25o lances.. 

Dauphiné. 

« Comte de Suze, 3o lances ; Maugiron, 3o ; Clermont, 
3o. — 3 compagnies et 90 lances. 

Provence. 

« Comte de Tende, 3o lances ; prince de Salerne, 3o. 
— 2 compagnies et 60 lances. 

Languedoc. 

a Damville, 60 lances ; Joyeuse, 3o ; comte de Rous- 
sillon, 3o; baron de Terride, 40; Francisque d'Esté, 5o; 
prince de Mantoue, 5o ; de Montsalèz, 40. — 7 compa- 
gnies et 3 00 lances. 

Guyenne. 

« Prince de Navarre, 80 lances ; de Burie, 3o ; Mont- 
luc, 40 ; d'Escars, 3o ; La Rochefoucaud, 40 ; Jarnac, 3o ; 
Montpezat, 3o. — 7 compagnies et 280 lances. 

Limosin. 

a Du Lude, 3o lances ; Sansac, 40 ; La Vauguyon, 3o ; 
Ventadour, 3o ; de Losse, 40 ; La Trémouille, 3o ; de 
Mézidres, 3o. — 7 compagnies et2 3o lances. 

Touraine, Anjou, Maine. 

« M. d'Anjou, 5o lances; Montpensier, 60; le comte 
Dauphin, 3o ; comte de Villars, 40 ; Chavigny, 40 ; Gué- 
menée, 3o ; duc de Somma, 3o. — 7 compagnies et 280 
lances. 

I. 6 



62 Histoire de la Cavalerie. 

Orléanais et Berry. 

« La Roche-sur- Yon, 60 lances; d'Andelot, 3o; Si- 
pierre, 3o; Malicorne, 3o; d'Esguilly, 3o. — 5 compa- 
gnies et 180 lances. 

Bretagne, 

a Estampes, 60 lances ; de Vassé, 3o ; Chantemesle, 3o. 
— 3 compagnies et 1 20 lances. 

Normandie. 

« Maréchal de Brissac, 80 Lances ; comte de Brissac, 3o ; 
La Mailleraye, 3o ; Matignon, 3o ; La Carouge, 3o ; Ville- 
bon, 3o ; Rochefort, 3o ; Alègre, 3o. — 8 compagnies et 
290 lances. * 

C'était, au total, io3 compagnies et 4,210 
lances, chiffre énorme, au-dessus des ressources 
ordinaires du pays, et les noms de beaucoup de 
capitaines devaient inspirer des craintes à la cour 
dans la situation profondément troublée où s'agi- 
tait la France. Il est probable que cette revue 
générale des gendarmes passée le 10 juin i563^ 
pendant une u-êve, avait pour objet de se rendre 
compte de la situation, car elle fiit suivie d'un 
édit donné à la date du 20 septembre à Meulan^ 
« portant que les compaignies qui viendroient 
« cy après à vaquer par mort ou forfaiture, 
« seront et demeureront éteintes et supprimées^ 
« sans que, pour quelque cause que ce soit, il 
« puisse y être poufveu d'une manière quel- 
« conque. » 

Dix mois plus tard, suivant un état de revue du 



Les Compagnies de cavalerie légère. 63 

7 avril 1 564, le nombre et TefFectif de ces com- 
pagnies était déjà sensiblement diminué. Il n'y 
avait plus que 91 compagnies et 3,170 lances. 

D'après un autre état du i5 mars i567, il 
ne restait à cette date que 69 compagnies et 
2,3oo lances. 

Nous transcrivons ces deux états qui nous pa- 
raissent curieux par Tindication qu'ils donnent 
des stations habituelles des gendarmes et par leur 
correspondance avec deux de ces trêves inquiètes, 
pendant lesquelles Charles IX et Catherine de 
Mëdicis épiaient les mouvements d'une partie de 
la noblesse cherchant toujours l'occasion d'une 
reprise d'armes. 



uepartemem aes 
au 7 avril 


compagnies ae gens a a 
1564; après Pasques. 

PICARDIE. 


Ttnes, 

Lances. 


Prince de Condé, 


Abbeville, 


5o 


Marquis de Conti, 


Dou liens. 


20 


Genlis, 


Péronne, 


3o 


Du Péron, 


Corbie, 


3o 


Charles de. Guise, 


Guise, 


3o 


Sénarpont, 


Saint- Valéry, 


3o 


Chaulnes, 


Saint-Quentin, 


3o 


Crèvecœur, 


Vervins, 


3o 


Piennes, 


Nesle et Roye, 


3o 


Morvilliers, 


Boulogne, 


3o 


Estrées, 


Calais, 


3o 


Mailly, 


Montreuil, 


3o 


Rubempré, 


Ardres, 


3o 



64 Histoire de la Cavalerie. 


ISLE 


* 

DE FRANCE. 






Lances. 


Mal de Montmorency, 


Chambly et Pantoise, 


5o 


Thoré, 


Nqyon, 


3o 


Rambouillet, 


Houdan et Dreux, 


3o 


Connétable, 


Sentis et Beauvais, 


100 


Torcy, 


Dourdan, 


3o 


L'Admirai, 


Ferrières, Moret et La 






Ferté'Aleps, 


5o 


Méru, 


Magny et Chaumont, 


3o 


La Chapelle des Ursins, 


Crépx, 


3o 


CHAMPAGNE. 




Monsieur, 


Mouron, 


5o 


Lorraine, 


Meaux, 


5o 


Rheingrave, 


Vitry, 


3o 


Elbœuf, 


Méifières et Donchery, 


3o 


Henri de Guise, 


Chaumont, 


40 


Bouillon, 


Sedan, 


3o 


Brosse, 


Mouron, 


3o 


Beau vais. 


Sésfanne, 


3o 


Rostaing, 


Pont'Sur-Seine, 


3o 


Crussol, 


Méf(ières, 


3o 


Oysel, 


Montereau, 


3o 


Barbezieux, 


Saint-Florentin, 


3o 


Vicomte d*Auchy, 


Rosay, 


3o 


é 


VÊCHÉS. 




Vieilleville, 


Met!f, 


5o 


Clermont d'Amboise, 


Tout, 


3o 


BOURGOGNE. 




Tavannes, 


Nuits, 


3o 


Charny, 


Montcenis, 


3o 


Vaudémont, 


Auxerre, 


40 


Aumale, 


Chdlon, 


5o 



Les Compagnies de cavalerie légère. 


65 


ORLÉANAIS ET BERRY. 






Lances. 


D'Andelot, 


Montargis, 


3o 


D'Esguilly, 


Chartres, 


3o 


Sipierre, 


Dun-le-Roi, 


40 


Longueville, 


La Châtre, 


40 


Gonnor, 


Lorris, 

TOURAINE. 


3o 


Comte de Villa rs, 


Bellesme, 


3o 


Prince Dauphin, 


Loudun, 


3o 


Chavigny, 


Le Mans, 


3o 


Montpensier, 


Loches, 

NORMANDIE. 


5o 


Carrouges, 


Evreux, 


3o 


Matignon, 


Caen et Bayeux, 


3o 


Maréchal de Brissac, 


Gisors, 


5o 


Comte de Brissac, 


Les Andelys, 


3o 


Villebon, 


Louviers, 


3o 


La Mailleraye, 


Arques, 

BRETAGNE. 


3o 


Vassé, 


Vitré, 


3o 


Martigues, 


Dinan, 


3o 


Malicorne, 


Fougères, 


3o 


Estampes, 


Ancenis, 

GUYENNE. 


40 


Ventadour, . 


Limoges, 


3o 


Sansac, 


Angoulême, 


3o 


Montluc, 


Condom, 


3o 


Gramont, 


Saint-Maixent, 


3o 


Burie, 


Saint-Jean-d' Angély, 


3o 


Jarnac, 


La Rochelle, 


3o, 


Biron, 


Libourne et St-Émilion, 


3o 


l. 


(5. 





66 Histoire de la Cavalerie. 

Lances. 

La Vauguyon, Confolens, 3o 

Montpezat, Châtellerault, 3o 
Prince de Navarre, Tonneins, Villeneuve- 

d'Agen, 5o 

La Rochefoucaud, Verteuil, 3o 

Comte du Lude, Poitiers, 3o 

BOURBONNAIS. 

Duc d'Anjou, Moulins, 5o 

Lafayette, Haute Auvergne, 3o 
Comte de Beyne, LArbresle et Saint-Sym- 

phorien, 20 

Savoie, Montbrison, 5o 

Alôgre, ...... ' 20 

Nemours, Villefranche, 5o 

NIVERNAIS. ' 

Nevers, Don:^y, 60 

Bourdillon, Mornat, 5o 

LANGUEDOC. 

Damville, 5o 

La Valette, 3o 

Joyeuse, 3o 

Montsallez. 3o 

Terride, Grenade, 3o 

Prince de Mantoue, .• 3o 

Comte de Roussilion, 3o 

Francisque d'Esté, 20 

DAUPHINÉ. * 

Maugiron, 3o 

La Roche-sur-Yon, 5o 

De Suze^ 3o 

PROVENCE. 

Comte de Tende, 3o 



Les Compagnies de cavalerie légère. 67 



Département des compagnies de gens d'armes 

au iS mars iS6j. 







Lances. 


Prince de Condé, 


Péronne, 


5o 


Chaulnes, 


Saint-Quentin, 


3o 


Marquis du Maine, 


Guise, 


3o 


Conti, 


Doullens, 


20 


Estrées, 


Corbie, 


20 


Comte de Retz, 


Gournay, 


3o 


Piennes, 


Roye, 


3o 


Crèvecœur, 


AbbevUle, 


3o 


Sénarpont, 


Saint- Valéry, 


3o 


MaiUy, 


Montreuil, 


3o 


Morvilliers, 


Boulogne, 


3o 


Rubempré, 


Fromery, 


20 


Connétable, 


Senlis, 


100 


Mal de Montmorency, 


Pontoise, 


5o 


Comte de Brissac, 


Gisors, 


3o 


Méru, 


Magny, 


3o 


Torcy, 


Dourdan, 


3o 


Rambouillet, 


Dreux, 


3o 


Thoré, 


Noyon, 


3o 


Genlis, 


Chauny, 


3o 


La Chapelle des Ursins, 


La Ferté-Milon, 


3o 


L'Admirai, 


Courtenay, 


5o 


Gonnor, 


Étampes, 


40 


EsguiUy, 


Chartres, 


3o 


Duc d'Anjou, 


Villeneuve-le-Roi, 


5o 


Charny, 


Auxerre, 


3o 


Auchy, 


Rosay, 


3o 


Rostaing, 


Villenoxr, 


3o 


Picquigny, 


Sé^anne, 


20 


Vaudémont, 


Châtillon-sur 'Seine, 


40 


Lorraine, 


Attigny, 


60 



68 Histoire de la Cavalerie. 






Lances. 


Brosse, 


Mouron, 


3o 


Bouillon, 


Sedan, 


3o 


Crussol, 


Tonnerre, 


3o 


Comte de Brienne, 


Essoix, 


20 


Barbezieux, 


Troyes, 


3o 


Guise, 


Chaumont, 


40 


Escla voiles, 


Sainte-Ménéhould, 


20 


Vieilleville, 


Verneuil, 


5o 


Matignon, 


Alençon, 


3o 


Longueville, 


Caen, 


40 


Carrouges, 


Lisieux, 


3o 


La Mailleraye,' 


Auffey, 


3o 


Sansac, 


Angoulême, 


3o 


î-a Vauguyon, 


Confolens, 


20 


Jarnac, 


Surgères, 


3o 


La Rochefoucaud, 


Civray, 


3o 


Comte du Lude, 


Poitiers, 


3o 


Montpezat, 


Chauvigny, 


3o 


Au maie. 


Beaune, 


5o 


Tavannes, 


Dijon, 


3o 


Bourdillon, 


Mormans, 


5o 


Tournon, 


Chantelle, 


3o 


Nemours, 


Ville/ranche, 


5o 


. Savoie, 


Tour nus. 


5o 


Beyne, 


Charlieu, 


20 


Ventadour, 


Ussé, 


3o 


Escars, 


Saint' Yrieix, 


3o 


T .afayette. 


Clermont-Ferrand, 


3o 


Alègre, 


Brioude, 


20 


Maugiron, 


Vienne, 


3o 


Suze. 


Su^e, 


3o 


Gordes, 


Grenoble, 


20 


Tende, 


Aubagne, 


3o 


Louis de Birague, 


Saluées, 


2a 



Les Compagnies 


de cavalerie légère. 


69 






Lances. 


Prince de Savoie, 


En Piedmont, 


3o 


Martigues, 


Ancenis, 


5o 


Vassé, 


Vitré, 


3o 


Malicorne, 


Fougères, 


3o 



Il n'est pas besoin de dire qu'au mois de sep- 
tembre suivant, quand le prince de Condé voulut 
enlever le roi sur le chemin de Meaux à Paris et 
commença la seconde guerre civile, une partie de 
ces compagnies ne suivit pas Tétendard du roi, 
et que parmi les capitaines qui ne se mirent pas 
en révolte ouverte, plusieurs encore, plus poli- 
tiques que loyaux, ne songèrent qu'à s'asseoir et 
à se maintenir solidement dans les quartiers con- 
fiés à leur garde. 

La cour, méfiante à juste raison, répéta alors 
pour la cavalerie ce qu'elle venait de faire pour 
l'infanterie : elle appela des troupes étrangères. 
Aux 6,000 fantassins suisses de Louis Pfiffer, qui 
venaient de sauver le roi sur la route de Meaux, 
on joignit, en i568, 6,5oo reîtres ou cavaliers 
allemands, des Italiens et des Espagnols, et l'on 
profita de leur arrivée pour casser, par édit du 
6 février 1 56g, un certain nombre de compagnies 
françaises dont la fidélité semblait douteuse. 

On peut juger de l'importance que prit subi- 
tement l'élément étranger dans l'armée royale par 
le relevé des troupes de cavalerie qui prirent part, 
le 3 octobre iSôg, à la bataille de Moncontour. 



70 



Histoire de la Cavalerie. 



Il y avait, dans cette journée, à l'avant-garde 
du duc d'Anjou les 5 compagnies des ordon- 
nances françaises du Dauphin, de Guise, de Mar- 
tigues, de Chauvigny et de La Valette, comptant 
ensemble 2,600 chevaux; 2,000 Allemands sous 
les ordres du comte 'de Westembourg, du Rhdn- 
grave et de M. de Bassompierre, et 2,000 Italiens 
commandés par le comte de Santa-Fiore, Paul 
Sforza, le comte d'Esté et Santelli. 

Au corps de bataille, il y avait les 16 com- 
pagnies françaises d'Aumale, de Longueville, de 
Cossé, Tavannes, marquis de Villars, Lafayette, 
Méru, Thoré, Carnavalet, La Vauguyon, Ville- 
quier, Vastan, Vésigny, Mailly, Gréau et Sansac, 
pouvant compter pour 8,000 chevaux, 5 cornettes 
de 1,000 chevaux allemands chacune, conduites 
par le comte de Mansfeld, 1,200 cavaliers en- 
voyés par le roi d'Espagne et 1,000 fournis par 
le marquis de Bade. 

Dix-huit ans plus tard, à la journée de Coutras 
qui fut surtout un combat de cavalerie, l'armée 
royale commandée par le duc de Joyeuse comç- 
tait 2,100 lances enrégimentées en 3 corps, et 
un nombre au moins double de chevau-légers, 
d'argoulets et d'Albanais. La pratique delà guerre 
ramenait toujours le même effet, la tendance à 
substituer la cavalerie légère à la gendarmerie. 

Le roi de Navarre n'avait à Coutras que 2 , 5oo che- 
vaux en tout, parmi lesquels on comptait 4 esca- 



Les Compagnies de cavalerie légère. 71 

drons de gendarmes conduits par le vicomte de 
Turenne, Pardaillan, Fontrailles et Chouppes. 
Le reste était cavalerie légère formée en escadrons 
nienés par le prince de Gondé, Louis de Saint- 
Gelais, Desagneaux, Montataire, Gon4rin, Vi- 
dame de Chartres, La Trémouille, Vi^axis, Ha- 
rambures et Vignoles. 

Notons en passant qu'il y avait dans Tune et 
l'autre armée une cornette blanche. Celle de Tar- 
mée royale était portée par Maillé-Brezé ; Foix- 
Candale portait celle du roi de Navarre. 

Quelques années plus tard encore, et proba- 
blement d'après l'exemple et les idées person- 
nelles de Henri IV, qui avait remplacé la com- 
pagnie de gendarmes qu'il possédait lorsqu'il était 
prince de Navarre par une compagnie de chevau- 
légers demeurée célèbre, par suite. aussi peut- 
être du haut prix des grands chevaux de guerre 
dont la race avait à peu près disparu au milieu 
des désordres de la guerre civile, toutes les com- 
pagnies de gendarmes se débarrassèrent de leurs 
lourdes armures de pied en cap et de leurs lances. 
Celles-ci avaient complètement disparu en 1594, 
et il ne restait plus de différence entre les gen- 
darmes et les chevau-légers que le nom et des 
privilèges d'honneur, de préséance et de solde, 
respectables puisqu'ils rappelaient pour la gen- 
darmerie un long et glorieux passé. 

Depuis sa formation à part jusqu'au moment 



y2 Histoire de la Cavalerie. 



où elle fut constituée en régiments, la cavalerie 
légère offrit certainement le spectacle d'une grande 
confusion. Elle était livrée aux entraînements de 
la fantaisie et des imitations. On y voyait deç 
archers, des argoulets, des genétaires, des pis- 
toliers, des chevau-légers, des arquebusiers, des 
dragons et des carabins, auxquels il faut joindre 
des troupes étrangères, telles que les Albanais et 
les reîtres. Nous ne nous étendrons pas sur les 
caractères particuliers qui différenciaient ces sous- 
armes. Ils sont aussi difficiles à saisir que ceux 
qui séparent aujourd'hui les chasseurs des hussards. 

Les archers, quand ils commencèrent à quitter 
les gens d'armes sous Louis XII, avaient la plu- 
part pour . armes Tare ou l'arbalète, qu'ils ne 
tardèrent pas à remplacer par un long pistolet, 
ou pétrinal^ dont la crosse s'appuyait sur la 
poitrine, et par l'arquebuse dont les Italiens et 
les Allemands faisaient déjà un grand usage. Ils 
ne continuèrent pas moins de s'appeler pendant 
longtemps encore archers par la même raison 
qui a fait, de nos jours, conserver l'appellation de 
carabiniers à un corps de grosse cavalerie qui 
depuis plus de soixante ans ne portait plus la 
carabine. 

Les argoulets, dans lesquels quelques historiens 
classiques ont voulu voir des cavaliers de TAr- 
golide, n'étaient probablement dans l'origine que 
des archers italiens, arcoleti. En 1499, la France 



Les Compagnies de cavalerie légère. 73 

en avait pris à son service 2,000, chiffre bien 
élevé pour avoir pu être fourni par Tancien royaume 
d'Agamemnon. Ces argoulets avaient quelques 
bizarreries d'accoutrement et de manières. Il n'est 
donc pas étonnant qu'ils aient été imités chez 
L. JUS et que notre cavalerie ait compté des argou- 
lets dans ses rangs jusqu'au règne de. Henri III. 
A cette époque, la mode en était passée ; quelques 
mésaventures les avaient décriés, et les argoulets 
devinrent des carabins. 

Les chevau-légers et les genétaires furent encore 
des imitations de l'étranger, du moins quant aux 
noms. Les Italiens, qui appelaient leurs hommes 
d'armes cavallarmati, désignaient par opposition 
les suivants des hommes d'armes par la dénomi- 
nation de cavallegieri. Une partie de nos archers 
prit donc ce titre dès l'année 1498. D'autres, 
après la bataille de Ravenne en i5i2, s'appro- 
prièrent le nom et peut-être les petits chevaux de 
la cavalerie d'Espagne, et devinrent genétaires. 
Ginesta en espagnol équivaut à cheval léger. Ce 
mot a passé dans la langue française sous la 
forme genêt. La vogue des genétaires fut courte. 
Dès le temps de Henri II, ils avaient disparu. 

Pendant les dernières années de l'occupation 
du Piémont, de i55o à i56o, le maréchal de 
Brissac, qui sut ^i bien, avec une poignée de fan- 
tassins d'élite, faire respecter les positions qu'il 
occupait au delà des Alpes, et qui donna souvent 
I. 7 



74 Histoire de la Cavalerie, 

de rudes leçons à ceux qui voulaient Tinquiéter, 
créa ou laissa introduire le service des dragons. 
Il commandait à de vieux soldats déterminés, 
enrichis par une longue suite d'expéditions heu- 
reuses et possédant, la plupart, des chevaux con- 
quis sur Tennemi. Ces soldats prirent Thabitude, 
pour l'exécution rapide de leurs hardis coups de 
main, de monter à cheval .et de chercher par la 
célérité de leur course à surprendre Tennemi. 
Arrivés sur le terrain, ils mettaient pied à terre^ 
faisaient garder leurs chevaux par des goujats, 
et jouaient de la pique et de Tarquebuse. Ces 
fantassins à cheval se donnèrent eux-mêmes le 
nom de dragons, peut-être en raison de la terreur 
qu'ils inspiraient. Cet usage se conserva dans une 
partie de Tinfanterie pendant toute la durée des 
guerres de religion, ce qui contribua encore à 
augmenter la confusion dans laquelle se débattait 
la cavalerie. Quand le nombre des chevaux n'était 
pas suffisant, ceux qui en possédaient prenaient 
leurs camarades en croupe. On vit enfin se for- 
mer, en dehors des régiments d'infanterie, quel- 
ques compagnies d'arquebusiers à cheval, et plus 
tard le^ dragons devinrent une arme mixte nou- 
velle, indépendante de l'infanterie et^de la ca- 
valerie. 

Quant aux Albanais, ou estradioîs, du grec 
stratiotès, soldat, dont la vogue fut assez longue, 
et aux reitres, de l'allemand reiter, cavalier. 



Les Compagnies de cavalerie légère, 7 5 



c'étaient des troupes étrangères armées et mon- 
tées comme notre cavalerie légère, qui vinrent 
grossir nos rangs dans un temps où les ressources 
de Penrôlement étaient au-dessous des besoins de 
la guerre, et qui, grâce à leur origine et à Tétran* 
geté de leur tenue et de leurs façons, jouirent 
d'une réputation supérieure à leurs mérites. Les 
reîtres cependant se firent un nom pendant les 
guerres civiles, et nous pensons que Testime dans 
laquelle on les tenait avait surtout pour cause leur 
formation en gros corps, ou régiments, agissant 
sous l'impulsion d'un seul chef, et par conséquent 
avec plus d'ordre et d'ensemble que les com- 
pagnies françaises. Nous avons vu, par l'exemple 
cité de la bataille de Coutras, que cette formation 
commençait à être pratiquée dans la cavalerie 

française. 

> 

Vers la fin du xvi® siècle, la force des com- 
pagnies était extrêmement variable. En principe, 
et en moyenne, cette force était de 80 chevaux 
qui se mettaient en bataille sur trois rangs au 
moins, et plus souvent sur cinq et sur six rangs. 
Dans le combat, la cavalerie était généralement 
réunie sur les ailes, prête à prendre en flanc et à 
inquiéter par des décharges de pistolets et d'ar- 
qtiebuses tout ennemi se disposant à attaquer 
l'infanterie. Des compagnies isolées étaient sou- 
vent placées dans les intervalles des bataillons 
d'infanterie pour protéger ceux-ci de plus près* 



76 Histoire de la Cavalerie. 

Dans Tun et Pautre cas, la manœuvre usitée était 
la caracole. Elle consistait à rompre successi- 
vement dans chaque rang en colonne par un, au 
t:ot ou au galop, pour venir raser le flanc de 
r.ennemi. Chaque cavalier faisait feu en passant 
et venait reprendre sa place par deux demi-voltes 
à la queue de la colonne, ou au gros de sa com- 
pagnie. Cela ressemblait beaucoup à l'exercice 
actuel de la course des têtes. 

La cavalerie chargeait rarement Tinfanterie, qui 
la tenait à distance par la longueur et Tinflexi- 
bilité de ses redoutables piques, par la profondeur 
de ses rangs et par les effets denses grandes arque- 
buses qui atteignaient plus loin et plus juste que 
les pistolets et escopettes. La cavalerie légère por- 
tait d'ailleurs à cette époque des corselets, des 
tassettes et des morions de fer, dont le poids ne 
lui permettait pas de fournir une carrière longue, 
rapide et impétueuse. Cette cavalerie légère, il ne 
faut pas perdre ceci de vue, n'* était légère que par 
opposition aux hommes et aux chevaux bardés de 
fer des compagnies d'ordonnance. En réalité elle 
était plus lourde que ne le sont nos cuirassiers. 
Elle se contentait donc de caracoler devant Tinfan- 
terie, comme les Mameluks aux Pyramides. 

Dans les rencontres de cavalerie contre cava- 
lerie, les deux partis se prolongeaient côte à côte 
le pistolet au poing, en courant en sens inverse 
Tun de l'autre, ou bien on se chargeait en haie 



Les Compagnies de cavalerie légère, 77' 

suivant la vieille mode de la chevalerie. Après 
avoir fait le coup de pistolet, on finissait par se 
mêler Tépée à la main et par combattre corps à 
corps. 

C^étaient là des manœuvres primitives, mais, 
pour être complètement juste, il faut dire que la 
cavalerie, habituée pendant longtemps à se con- 
sidérer comme l'armée elle-même, était alors 
pleinement déconcertée par les rapides progrès 
qui venaient de s'accomplir dans les armes et les 
moyens d'action de l'infanterie et de l'artillerie, 
et qu'elle n'avait pas eu le temps de trouver et 
d'étudier le nouveau rôle qui lui convenait. Ses 
chevaux, formés, dressés pour les allures de la 
haute école qui était alors dans toute sa splendeur, 
pouvaient être bons pour agir contre une infan- 
terie sans consistance et sans ordre, mais contre 
les carrés pleins, compactes, faisant face partout, 
des piquiers des bandes, il fallait de plus l'impé- 
tuosité et la solidarité. Or, on ne modifie pas en 
un jour les races de chevaux et les idées des 
maîtres en fait d'équitation. On n'y songea même 
pas. La cavalerie, croyant voir la cause de l'avan- 
tage que l'infanterie prenait sur elle dans l'emploi 
des armes à feu, se donna le pistolet et l'arque- 
jpuse, et resta deux cents ans, dans toute l'Eu- 
rope, jusqu'au moment où Frédéric et Seydlitz 
vinrent bouleverser les vieilles idées et appuyer 
leurs principes nouveaux par d'éclatants faits 
I. 7. 



' 78 Histoire de la Cavalerie. 

d'armes, sans rien concevoir de niieux que les 
manœuvres décrites plus haut. 

Du reste, lors même qu'un homme de génie 
eût trouvé plus tôt les moyens de rendre à la cava- 
lerie une partie de la puissance qu'elle avait 
perdue, ces moyens fussent restés inefficaces au 
XVI® siècle. Il eût, en effet, fallu avant tout que 
les cavaliers, nobles ou réputés tels, renonçassent 
à des habitudes et à des douceurs qui leur étaient 
chères. Il eût fallu qu'ils renonçassent à tous les 
embarras qu'ils traînaient après eux, valets, che- 
vaux de main, bagages, et le reste. 

Quand le duc d'Albe passa d'Italie en Flandre 
en 1567, sa cavalerie se composait de 14 com- 
pagnies de gens d'armes et de 4 compagnies 
d'arquebusiers, « et de plus il y avait 400 cour- 
« tisanes à cheval, belles et braves comme prin- 
« cesses, » dit Brantôme. Et il s'agit ici, non pas 
de Français, mais d'Espagnols, gens graves, fer- 
vents catholiques et collets montés. 

Henri IV, qui était bon juge en ces matières, 
cassa à la*paix de Vervins, en 1 698, presque toutes 
les compagnies de cavalerie, réduisit à un effectif 
insignifiant le petit nombre de celles qu'il conserva 
et les dispersa dans les places frontières, et cepen- 
dant, malgré sa ferme volonté de faire des éco-r 
nomies, il maintenait sur pied 4 gros régiments 
d'infanterie, sans compter les gardes françaises. 

L'édit, que le roi donna en 1600, fait entrevoir 



Les Compagnies de cavalerie légère. 79 

les vrais motifs de la sévérité avec laquelle il 
traita la cavalerie. 

Cet édit, portant règlement sur le fait des tailles, 
déclarait que la profession des armes n'anoblirait 
plus celui qui l'exercerait, et même qu'elle ne 
serait pas censée avoir anobli parfaitement la 
personne de ceux qui ne l'avaient exercée que 
depuis Pan i563, c'est-à-dire depuis l'origine des 
guerres civiles. « Cet article demande à être 
« éclairci, ajoute le président Hénault à qui nous 
« empruntons cette citation; tous les hommes 
« d'armes étaient gentilshommes du temps de 
« Louis XII, c'est-à-dire tous ceux qui compo- 
« saient les compagnies d'ordonnance; mais il 
« ne faut pas entendre, par les gentilshomme 
« d'alors, les gentilshommes issus de race noble ; 
« il suffisait, pour être réputé tel, qu'un homme 
<( né dans le tiers état fît uniquement profession 
« des armes, sans exercer aucun autre emploi: 
« il suffisait, à plus forte raison, que cet homme 
« né dans le tiers état eût acquis un fief noble 
« quil desservait par devoir compétent, c'est- 
« à-dire qu'il suivît son seigneur en guerre, pour 
« être réputé gentilhomme; ainsi donc alors on 
« s'anoblissait soi-même, et on n'avait besoin ni 
« de lettres du prince, ni de posséder des offices 

« pour obtenir la noblesse Cette noblesse 

« ainsi entendue subsista en France jusqu'^au 
« règne de Henri III. L'article i58 de l'ordon- 



8o Histoire de la Cavalerie. 

« nance de Blois de i Syg supprima la noblesse 
« acquise par les fiefs, et Tédit de Henri IV sup- 
« prima celle acquise par les armes. Depuis ce 
« temps, le gentilhomme n'est plus celui qui a 
« servi à la guerre, ni qui a acquis des seigneuries 
« ou fiefs . nobles, mais celui qui est extrait de 
« race noble, ou qui a eu des lettres d'anoblis- 
« sèment, ou enfin qui possède un office auquel la 
« noblesse soit attachée. » 

La maladie de s'anoblir est une maladie natu- 
relle aux Français : elle est endémique en France. 
Aujourd'hui cette maladie est sans danger : il n'en 
était pas de même au temps de Henri IV, où la 
noblesse dispensait de payer l'impôt. Le sceptique 
Béarnais attachait, je crois, peu d'importance à 
ce que ses sujets fussent ou ne fussent pas gen- 
tilshommes, mais il avait besoin d'argent et il 
n'entendait pas, après quarante ans de guerre 
civile, pendant lesquelles tout le monde avait^, 
peu ou prou, porté les armes, qu'il suffit à un 
homme d'avoir enfourché un cheval pendant une 
campagne pour être exempté de rendre ses devoirs 
au receveur des tailles. 

Les gendarmes et chevau-légers durent être fort 
mécontents d'un édit, dont les effets remontaient 
par rétroactivité jusqu'à l'année 1 563 : c'est pour 
cela, pour se débarrasser de leurs doléances et 
de leurs rancunes, que Henri IV les renvoya dans 
leurs foyers. 



Les Régiments temporaires. 8i 



CHAPITRE III. 

LES RÉGIMENTS TEMPORAIRES. 

Nous avons essayé de faire entendre les causes 
très-diverses qui s'opposaient, à la fin du xvi® siècle, 
à un établissement régulier du service des troupes 
à cheval. Ce qui avait été relativement simple et 
facile pour Pinfanterie présentait pour la cava- 
lerie des difficultés énormes, dont le temps et les 
progrès de la puissance royale pouvaient seuls 
venir à bout. On connaissait dès Tépoque des 
guerres civiles la valeur des masses de cavalerie ; 
on avait l'exemple des régiments de cavalerie 
allemande et italienne ; on avait même réussi 
plusieurs fois à grouper, à idÀT^ escadronner en- 
semble un jour de bataille plusieurs compagnies 
de cavalerie française, mais aussitôt après il fallait 
tenir compte des exigences des capitaines, de 
leurs rivalités, de leurs méfiances à l'égard de 
tout ce qui pouvait porter atteinte à leur indépen- 
dance et à leurs intérêts. Richelieu, l'inflexible 
Richelieu se brisa, c'est tout dire, contre de 
pareilles difficultés, et il ne fallut rien moins que 



82 Histoire de la Cavalerie. 

Tabsolutisme de Louis XIV, arrivé au faîte de 
sa gloire et de sa puissance, pour éteindre les tra- 
ditions de la chevalerie, triompher des prétentions 
de la noblesse et réduire la cavalerie à la subor- 
dination. Encore n'est-il pas certain que Louis XIV 
ait pleinement réussi, et qu'il ne soit pas resté, 
après tant de révolutions et d'instructives leçons, 
dans l'esprit du cavalier que l'homme à cheval 
est quelque chose de plus que l'homme a pied. 

A la paix de Vervins, Henri IV n'avait con- 
servé que la cavalerie de sa garde, composée des 
4 compagnies des gardes du corps, de ses fameux 
chevau-légers et de loo arquebusiers et carabins, 
et 19 compagnies ordinaires réduites à 25 ou 3o 
maîtres. Le tout présentant un effectif total de 
i,5oo chevaux. 

Pendant les dix années relativement tranquilles 
de son règne, de 1600 à 16 10, il n'ajouta rien 
à sa cavalerie. S'il augmenta sa garde, le 14 dé- 
cembre 1602, d'une compagnie de gendarmes 
destinée au service du Dauphin, ce fut aux dépens 
des compagnies ordinaires, et tout porte à croire 
que ce fut la compagnie du maréchal de Biron, 
décapité le 3i juillet précédent, qui fournit les 
éléments de celle du Dauphin. 

Lorsque la régence de Marie de Médicis et le 
règne des favoris firent renaître les guerres civiles^ 
la division par compagnies franches s'accommo- 
dait trop bien avec les passions et les intérêts des 



Les Régiments temporaires, 83 



capitaines pour qu'il fût facile d'amener ceux-ci 
à renoncer à leur indépendance. Dans un temps 
où chacun était jaloux de jouer un rôle, et où la 
pénurie du Trésor n'assurait à personne le paye- 
ment d'une solde régulière, tout gentilhomme qui 
pouvait entretenir 25 hommes à cheval, faire 
flotter sur ce maigre peloton une cornette à ses 
couleurs et se donner le titre de capitaine, tirait 
de sa compagnie le meilleur parti possible, et 
s'attachait, celui-ci au roi, celui-là à la reine mère, 
un autre au favori quel que fût son nom, Concini 
ou Luynes, un autre enfin aux seigneurs et princes 
mécontents. Puis vinrent l'insurrection des pro- 
testants de La Rochelle et du Midi, les sourdes 
mésintelligences de Richelieu et de Louis XIII, 
et plus tard les intrigues de la régence d'Anne 
d'Autriche et de la Fronde, qui perpétuèrent le 
désordre. 

Voilà pourquoi l'organisation des troupes à 
cheval a été de cent ans en retard sur celle des 
troupes à pied. 

Sully s'était proposé, lorsque les plaies de la 
France seraient cicatrisées, de constituer les forces 
noçmales de l'armée, entretenue sur le pied de 
5o,ooo fantassins et de 8,000 cavaliers. On re- 
marquera que ces chiffres sont dans la proportion 
admise encore aujourd'hui. Dans les préparatifs 
faits par Henri IV, en 16 10, en vue d'une lutte 
avec la, maison d'Autriche, le chiffre de la cava- 



84 Histoire de la Cavalerie. 

lerie devait être porté à 8,600 chevaux, parmi 
lesquels aurait figuré un régiment lorrain com- 
posé de 6 compagnies de 100 chevaux chacune 
et commandé par le comte de Vaubécourt. C'est 
à très-peu près le régiment de cavalerie moderne. 
Peut-être le roi eût-il organisé sa cavalerie na- 
tionale sur ce modèle. Son assassinat, accompli 
au milieu des préparatifs de la guerre, laisse ce 
point à rétat de question. 

Le premier fait important concernant les troupes 
à cheval, que Ton rencontre sous le règne de 
Louis XIII, c'est Torganisation systématique du 
service des carabins, remplacés plus tard par les 
dragons, qui jusque-là n'avait eu d'autre règle 
que la fantaisie des capitaines, sinon celle des 
soldats. La cavalerie légère, depuis longtemps 
déjà, avait adopté les armes à feu, mais ces armes 
étaient médiocres, de modèles divers suivant le 
caprice de chacun, et les cavaliers ne savaient 
pas s'en servir. En 161 5, il fut ordonné à chaque 
compagnie de chevau-légers de s'adjoindre une 
bande de carabins commandée par un lieutenant. 
Ces carabins devaient être par conséquent des 
tireurs experts. La mesure palliative qui fut prise 
en 161 5 a été répétée bien des fois depuis. Nous 
avons vu de nos jours un escadron de tirailleurs 
dans les régiments de lanciers, et par réciprocité 
un escadron de lanciers dans les régiments de 
chasseurs à cheval. 



Les Régiments temporaires. 85 

L'innovation de i6i5 eut les conséquences 
qu'elle pouvait avoir : seulement ces consé- 
quences mirent un long temps à se développer. 
Les chevau-légers , froissés de cette adjonction 
des carabins, attribuaient naturellement et exclu- 
sivement la réputation de supériorité dont ceux-ci 
jouissaient à la supériorité de leur armement, et 
ils abandonnèrent leurs arquebuses pour se don- 
ner le mousqueton. Les carabins dès lors n'a- 
vaient évidemment plus rien à faire dans les com- 
pagnies de cavalerie. Aussi les réunit-on devant 
La Rochelle en 1621, pour en former un corps 
séparé de la cavalerie, sous le commandement 
d'Isaac Arnauld de Corbeville, qui fut investi le 
jer avril 1622 du titre et de la charge de mestre 
de camp général des carabins, subordonné au 
colonel général de la cavalerie légère. Le corps 
des carabins, composé d'un ou de plusieurs régi- 
ments, a existé, sans interruption depuis cette 
époque, jusqu'à l'année 1661. Arnauld de Corbe- 
ville eut pour successeurs dans la charge de mestre 
de camp général des carabins : 

24 octobre 1654. Claude- Absalon-Jean-Baptisted'Aspre- 

mont , marquis de Vandy ; 

18 avril i658. Nicolas de Béautru, marquis de Vau- 

brun ; 
janvier 1660. Louis, comte de Quincy. 

Les carabins furent réformés en 1 66 1 , mais 

I. 8 



86 Histoire de la Cavalerie. 

Quincy conserva la charge à titre honorifique avec 
les appointements qui y étaient attachés, et la 
vendit en décembre 1684 au comte de Tessé, 
mestre de camp général des dragons. Voici com- 
ment Taigre duc de Saint-Simon raconte cette 
affaire : « Il (Tessé) s'étoit fait un protecteur décteré 
« de M. de Louvois par ses bassesses, son dévoue* 
« ment et son attention à lui rendre compte de 
« tout, ce qui ne servit pas à sa réputation, mais à 
*« un avancement rapide... D'une charge c^onne 
« de général des carabins qui n'existoient pluï, 
« il s'en fit une réelle de mestre de camp général 
« des dragons, qui le porta à celle de colonel gé- 
« néral. » 

Nous donnons ailleurs la liste des colonels 
généraux et mestres de camp généraux du corps 
des dragons. 

Il n'y eut jamais de commissaire général pour 
cette arme. Le grade de brigadier, antérieur à la 
création définitive des dragons, rendait cène 
charge inutile, comme il sera expliqué plus loin. 

Pendant le long blocus de La Rochelle, qui fol, 
comme on sait, une école de guerre, le cardinal 
de Richelieu obtint un point réellement impor- 
tant. On n'était plus au temps des compagnies 
de 1 00 hommes d'armes : les compagnies de ca- 
valerie étaient nombreuses, mais d'une force très- 
variable, quelques-unes très-faibles. Tirant habi- 
lement parti de la responsabilité et des dangers 



Les Régiments temporaires. 87 

que pouvait, faire courir le service de piquet et de 
grand'garde, il amena les capitaines des compa- 
gnies les moins fortes à se réunir par 2, par 3 et 
par 4 pour former des escadrons de 100 chevaux 
^u moins.Dans ce iliode de réunion, le comman- 
doaaent revenait alternativement -et par jour à 
chacun des capitaines dont les compagnies esca- 
dronnaient ensemble. Par la suite, Tescadron 
devint Tunité tactique des troupes à cheval, 
comme le bataillon fut Punité tactique des troupes 
à pied, et Tescadron se composa de 2, 3 ou 4 
compagnies distinctes, ayant chacune leur éten- 
dard qui marquait leur droit à Tindépendance, 
mais qui par le fait s'accoutumèrent à obéir au 
capitaine le plus ancien. 

Cet usage de faire escadronner ensemble plu- 
siwjTs compagnies s'est maintenu dans la maison 
du roi et dans la gendarmerie de France, restées, 
jusqu'en 1788 formées en compagnies indépen- 
dantes. 

Une ordonnance royale du 29 septembre i633 
prescrivit que les compagnies de cavalerie, qui se 
distinguaient en vieilles et nouvelles compa- 
gnies, ne fissent plus à l'avenir qu'un seul corps, 
et que les capitaines qui achèteraient des compa- 
gnies vieilles prendraient la queue de toutes celles 
qui étaient sur pied le jour de l'achat ou de la 
commission. 

Cette ordonnance a plus de portée qu'on ne 



88 Histoire de la Cavalerie. 

serait tenté de Tadmettre aujourd'hui. C'était un 
coup très-rude porté à la propriété et aux préteit- 
tions de la noblesse. Il n'est pas besoin de dire 
ce qu'étaient les compagnies nouvelles. Quant aux 
compagnies anciennes, c'étaient celles qui avaient 
survécu aux réformes de Henri IV, ou bien des 
compagnies rétablies depuis 1610 par des capi- 
taines ou des familles qui avaient autrefois pos- 
sédé des compagnies d'ordonnance, et qui enten- 
daient ainsi relever bannière, reprendre leurs 
anciens rangs et privilèges, et tout au moins main- 
tenir le haut prix des compagnies vieilles qui se 
vendaient beaucoup plus cher que les nouvelles. 
Cette ordonnance paraît, du reste, avoir été mo- 
tivée sur ce fait que le roi, à l'insu du cardinal, 
venait d'accorder à M. des Roches-Baritaut une 
compagnie qu'avait autrefois possédée son père, et 
d'autoriser M. de la Clavière à acheter la compa- 
gnie de M. de Montgon. Cela ne faisait pas le 
compte de Richelieu qui cherchait alors les moyens 
de détruire les privilèges, de réduire les capi- 
taines de cavalerie à l'obéissance et de réunir les 
compagnies en régiments. 

Sa première tentative ouverte dans cette voie 
fut le règlement donné le 3 octobre* 1634, à Saint- 
Germain en Laye, qui eut pour objet de donner 
une forme définitive et régulière aux essais tentés 
devant La Rochelle et de former la cavalerie en 
esquadt^es de 100 chevaux environ. 



Les Régiments temporaires. 



89 



£)'après ce règlement, les troupes à cheval fran- 
çaises devaient se trouver constituées en 91 es- 
quadres de cavalerie et 7 esquadres de carabins, 
savoir : 

CAVALERIE LÉGÈRE. 



M. le cardinal. 

M. le prince. 

Cardinal de La Valette. 

Colonel général. 

Mestre de camp général. 

Bligny. 

Laurière. 

Massabeau. 

Viantes. 

Des Roches Saint-Quentin 

Canillac. 

Hocquincourt. 

Boissac. 

Corvou. 

Beauregard. 

Au baye. 

Moulmet. 

Chamberet. 

La Chapelle- Balou. 

La Ferté-Sennectère. 

Villeneuve. 

La Luzerne. 

Lignon. 

Vatimont. 

Le Terrail. 

Raslain. 

Lénoncourt. 

Brouilly. 

I. 



Francières. 
La Courbe. 
Beauvau. 
La Force. 
BrézoUes. 
^Feuquières. 
I^a Valette. 
Duhams. 
Saint-Simon. 
Guiche. 
Fourilles. 
Gesvres. 
Chappes. 
Du Tour. 
Pont-Courlay. 
Tivolières. 
Saint-Chamond. 
Cluys. 
Bonneterre. 
Assérac. 
Saint-Aignan. 
Du Jour. 

Des Roches-Baritaut. 
La Clavière. 
Scoti. 
La Noue. 
Ayen. 
Saint-André. 

8. 



i 



90 Histoire de la Cw^alerie. 


Aiuon ville. 


CUnviile. 


Beaupré. 


Boury. 


ProÊsy. 


Disimieux. 


Chémerault. 


Berneuil. 


Estoges. 


Vit taux. 


La Trousse. 


Villequier. 


Montbas. 


Boufïlers. 


Marolles. 


Lignières, 


Poyanne. 


Romény. 


Rochefort. 


Contreville. 


Harambures. 


HeiUy. 


Saint-Mégrin. 


Linars. 


Roquelaure. 


Plissonnières. 


Chfabot. 


Esquancourt. 


Requiem. 


Rou ville. 


Saint-Martin. 


La Meilleraye. 


Vitanval. 


Orgeru. 


Tourville. 






CARABINS. 


Arnauld. 


Harancourt. 


Maubuisson. 


Villas. 


Du Pré. 


Courval. 


Bideran. 





En 1 635, au moment où il prenait parti dans 
la guerre de Trente ans, le cardinal de Richelieu 
se décide à frapper le grand coup. Laissant de 
côté les compagnies appartenant aux personna- 
ges trop puissants, il fait signer le i6 mai à 
Louis XIII une ordonnance qui prescrit la for- 
mation de 12 régiments de cavalerie légère, 
avec 84 compagnies qu'il croyait tenir sous sa 



Les Régiments temporaires, 91 

, U _ _ _ I L ■ _l _ _ _ _ ■ - - ' ^ 

main. Voici ces régiments désignés par les noms 
de leurs mestres de camp : 

Cardinal- Duc. Sauvebœut. 

Enghien. Canillac. 

Sourdis. Le Ferron. 

La Meilleraye. Nanteuil. 

Matignon. Chaulnes. «. 

Guîche. Treillis. 

m 

Le même jour, il fait admettre à la solde de 
France deux régiments levés précédemment, l'un 
par le commandeur de Souvré en Piémont, et 
l'autre par M. de Castellan en France, pour le 
service du duc de Savoie, et un régiment allemand 
qui avait été donné par Gustave-Adolphe à Fil- 
lustre Gassion. 

Le même jour encore, il réunit toutes les com- 
pagnies de carabins français en un seul régiment 
placé naturellement sous les ordres d'Arnauld de 
Corbeville, qui avait depuis 1622 le titre de mes- 
tre de camp général des carabins, et fondit les 
compagnies étrangères au nombre de 9 dans un 
deuxième régiment, qui fut donné à Saint-Simon, 
le favori du jour du roi Louis XIIL 

Le 27 du même mois de mai, on prescrivit la 
formation de 6 régiments de dragons : 

Cardinal. Bernieulles. 

Alègre. Mahé. 

Brûlon. Saint-Rémy. 



92 Histoire de la Cavalerie. 

Ce dernier était composé d^étrangers. 

Une instruction, adressée au mois de juin par 
le cardinal au maréchal de La Force, qui com- 
mandait en Lorraine, disait : « Le Roy trouve 
« bon que M. de La Force mette la cavalerie 
« légère qui est de là en esquadres de 4 compa- 
« gnie§ chacune, et les joigne selon qu'il estimera 
« qu'il y ait plus d'amitié et d'intelligence. Il ré- 
« duira aussi en esquadres la nouvelle cavalerie 
« que lui mène Bellefonds. S'il y a quelque dif- 
« férent dans l'armée à régler, le Roy permet audit 
« sieur maréchal de les juger en conseil de guerre, 
« avec l'advis des maréchaux de camp, ainsi qu'ail 
« l'estimera à propos. » 

Le maréchal de La Force forma ainsi le 8 juil- 
let un régiment français dont il se fit mestre de 
camp, parce que sa compagnie personnelle, qui 
devait être ancienne, entra dans la composition 
de ce corps, 2 régiments lorrains, Haucourt et La 
Moussaye, et 3 régiments hongrois, La Melle- 
raye, Espenan et Sirot. 

Le cardinal de La Valette et quelques autres 
commandants d'armées formèrent aussi des régi- 
ments nouveaux. 

On remarquera que, dans la lettre citée, Ri- 
chelieu emploie le mot esquadre, et non pas celui 
de régiment qui fut dès le premier moment Tap- 
pellation usuelle. Peut-être pourrait-on expliquer 
cette négligence du mot propre, négligence cer- 



Les Régiments temporaires, 93 



tainement intentionnelle, par la crainte que le 
colonel général de la cavalerie ne réclamât les 
droits et privilèges exorbitants , dont jouissait le 
colonel général de Tinfanterie, qu'il ne voulût, 
par exemple , avoir dans chaque régiment de ca- 
valerie une compagnie personnelle et un lieute- 
nant-colonel , ce qui eût ajouté un motif de plus 
aux répugnances des capitaines et augmenté les 
embarras. Richelieu, comme Louis XIV plus tard, 
devait d'ailleurs être offusqué de l'importance que 
la famille d'Épernon tirait de la possession de la 
charge de colonel général de l'infanterie, et n'était 
pas homme à fournir de lui-même à la famille de 
Valois d'Angoulême les moyens de prendre une 
importance égale. 

Le i®*" août i635 venait une déclaration por- 
tant décharge du service du ban et de l'arrière- 
ban aux gentilshommes et autres sujets,., servant 
dans les troupes de cavalerie. 

Le I®' septembre, le roi approuvait la capi- 
tulation de 3 régiments de cavalerie liégeoise, 
MouUard , La Bloquerie et Léchelle , composés 
de 5 cornettes de 100 maîtres chacun, capitu- 
lation traitée par l'entremise de messire René- 
Louis de Fiquelmont , abbé de Mouzon , avec 
noble homme Ditrich MouUard, seigneur de Can- 
ferbeck. 

Le 1 5, on réformait les compagnies françaises 
dont l'effectif était au-dessous de 25 hommes. 



/ 



94 Histoire de la Cavalerie. 

Enfin, le 26 octobre , 16 vieux régiments alle- 
mands , qui appartenaient au duc Bernard de 
Saxe-Weymar, et qui sont restés célèbres dans 
rhistoire sous le nom de wejrmariens, passèrent 
à la solde de Louis XIII. A la mort du duc de 
Weymar, en lôSg, ces régiments entrèrent dé* 
finitivement au service de France en vertu d'un 
traité conclu avec leur général-major d^Erlach. 

Voici les noms que portaient en i635 ces wey- 
mariens : 



Streeff. 


Nassau. 


Eggenfeld. 


Muller. 


Batilly. 


Schack. 


Humes. 


Vaubécourt. 


Lée. 


Tupalden. 


Zillard. 


Rosen. 


Bouillon. 


Forbus. 


Watronville. 


Trefski. 



On peut juger, d'après les noms de ces chefs 
de corps, qu'il y avait de tout parmi ces wey- • 
mariens , des Lorrains, des Ecossais, des Suisses, 
des Polonais et des soldats venant des Pavs-Bas 
aussi bien que de TAUemagne. Jean de Streeff, 
et après lui, en i638, le baron d'Eggenfeld fu- 
rent colonels généraux de cette cavalerie aile* 
mande. 

C'était donc, à la fin de la campagne de i635, 
un total d'une cinquantaine de régiments de troupes 
à cheval, dont 28 étaient étrangers. Une lettre du 



Les Régiments temporaires. 95 

8 décembre, adressée par le cardinal de Richelieu au 
cardinal de La Valette qui commandait sur le Rhin, 
nous apprend que ^organisation des régiments 
français eut lieu pendant ce mois. Richelieu in- 
forme La Valette que « pour la cavalerie le Roy 
« réduit toute la française en régiments et esca- 
« drons sous le nom des personnes qu'elle estime 
« avoir la volonté et le pouvoir de les faire sub- 
« sister. » Il y a, ce semble, dans ces lignes du 
puissant ministre, un air de doute et de décou- 
ragement. 

Les régiments français furent composés de 2 esca- 
drons et chaque escadron de 2 compagnies, i com- 
pagnie ancienne, dite chef d'escadron, et i compa- 
gnie nouvelle subordonnée à la première dans les 
manœuvres seulement. Les régiments furent donnés 
à des mestres de camp choisis parmi les officiers 
déjà pourvus d'une compagnie ancienne, et cette 
compagnie personnelle, propriété du chef du régi- 
ment et appelée la mestre de camp, fut placée à 
la tête du i*' escadron. Le chef du régiment était 
donc en même temps chef du i " escadron et di- 
rigeait celui-ci par lui-même ou par un capitaine- 
lieutenant-, le 2® escadron était commandé par le 
plus ancien capitaine du régiment aprè^ le mestre 
de camp, et ce capitaine prit le nom de major. 

Toute cette cavalerie de i635, qui montait à 
22,329 chevaux, y compris les compagnies sépa- 
rées appartenant au roi , aux princes ou grands 



96 Histoire de la Cavalerie. 

personnages, fut partagée comme il suit entre les 
différentes armées pendant le quartier d'hiver. 

Le cardinal de La Valette sur le Rhin eut 
1 ,700 chevaux ; le duc de Weymar en Souabe, 
5,000 -, le maréchal de La Force en Lorraine, 
3,800 ; le comte de Soissons sur la Meuse, 2,829; 
le marquis de La Meilleraye en Picardie, 900 ; 
le duc de Rohan en Valteline, 5oo ; le maréchal 
de Créqui en Italie, 2,5oo; le maréchal de Châ- 
tillon en Flandre, 3,6oo. Le roi garda près de lui 
600 chevaux, et on en laissa 3oo en Provence, 
3oo en Languedoc et 3 00 dans les autres gar- 
nisons. 

Richelieu, en introduisant dans la cavalerie un 
nombre de corps étrangers aussi considérable, cé- 
dait sans doute à la nécessité : il était au début 
d'une guerre d'un haut intérêt politique, et les 
troupes de France se trouvaient en présence de 
celles de l'empire d'Allemagne, dont la cavalerie 
était déjà justement célèbre. Peut-être espérait-il, 
en multipliant les contacts et les exemples, faire 
passer avec moins de difficulté l'organisation régi- 
mentaire ? Il se trompa. Soit par l'effet de sourdes 
résistances, soit que l'harmonie n'ait pas pu s^'é- 
tablir tout à coup entre les éléments des nouveaux 
régiments, soit que le défaut d'instruction et d'en- 
semble n'ait pas permis à ces corps de soutenir 
' la comparaison avec les étrangers et surtout avec 
les weymariens, vieilles troupes rompues à l'école 



Les Régiments temporaires, 97 

de Gustave-Adolphe , le succès ne répondit pas à 
Fattente de Richelieu, qui fut obligé de renoncer 
à son organisation. Les régiments de cavalerie 
française furent cassés le 3o juillet i636, après 
un essai qui n'avait duré que 7 mois, et remis en 
escadrons comme en 1634. 

Les motifs de cette mesure nous paraissent suffi- 
samment exprimés par ce passage d'une lettre 
écrite le 26 juillet i636 au cardinal de La Valette 
par Desnoyers , secrétaire d'État de la guerre : 
« Le Roy met la cavallerie en escadrons au lieu 
« de régiments. Son Éminence n'a point de satis- 
« faction de son régiment, ni du vôtre. » C'est 
net, et Ton n'écrit plus comme cela de nos jours. 
Le 3o juillet, le même Desnoyers écrivait au 
comte de Soissons : « Le Roy vous envoie un ordre 
« pour distribuer la cavallerie par escadrons de 
«f 3 compagnies chacun , selon le rang de leur 
« ancienneté, n'ayant pas trouvé celui de ses régi- , 
« ments bien convenable à F honneur françois. w 
Enfin, un mémoire de Montbrun Saint-André, 
Tun des hommes de guerre les plus distingués du 
temps, dit que « les compagnies ayant été enré- 
gimentées dans l'hiver de i635 à i636... il y 1 
« eut quelques difficultés pour le commandement . 
« et la discipline qui les firent remettre en com- 
« pagnies... » 

Une ordonnance du 3i juillet, c'est-à-dire pos- 
térieure d'un jour à celle qui réformait les régi- 

I. q 



98 Histoire de la Cavalerie. 

ments, met, pensons-nous, le doigt sur la plaie; 
elle supprime le recrutement de la cavalerie par 
rélément noble et désobéissant ; elle convertit 
« r arrière-ban en cavalerie soldoyée par les gcn- 
« tilshommes qui doivent marcher. » Ccst la taîUc 
appliquée à la noblesse ; c'est le service personnel 
remplacé par l'impôt en argent; c'est le maître 
remplacé en principe par le soldat. 

Le cardinal patienta 1 8 mois , laissa discuter la 
question, s'assura le concours d'un certain nombre 
de capitaines, et, le 24 janvier i638, délivra des 
commissions pour la formation de 36 régiments 
de cavalerie légère française. Ces nouveaux régi- 
ments de cavalerie furent uniformément composés 
de 8 compagnies de cavalerie légère et d'une com- 
pagnie de mousquetaires. 

Voici les noms de ces 36 régiments, dont la 
formation fut réalisée au mois d'avril. 

Castelan. La Valette. 

Cardinal-duc. Au mont. 

Enghien. Montbrun-Saint-André. 

La Meilleraye. Mérinville. 

Guiche. Saint- Aignan. 

Canillac. Du Roure. 

Treillis. Saint-Preuil. 

Saint-Simon. Gesvres. 

Fusiliers à cheval du car- Du Terrail. 

dinal. Boissac. 

Alais, colonel généraL Lénoncourt. 

Praslin , mestre de camp Lignon. 

général. • Des Roches-Baritaut. 



Les Régiments temporaires. 99 

Harambures. La Chapelle- Balou. 

Crussol. Linars. 

Vatimont. La Ferté-Sennectère. 

Coislin. Aubais. 

La Ferté-ïmbaut. Villeneuve. 

La Luzerne. Beauregard. 

Avec 25 régiments étrangers qui restaient de 
la levée de i635, c'était 61 régiments, dont le 
nombre fut porté cette année même à 70 par de 
nouvelles créations. 

Un règlement signé par le roi à Compiègne, 
le i5 mai i638, pour établir le bon ordre et la 
discipline dans toute sa cavalerie, renfermait les 
prescriptions suivantes : « Chaque régiment mar- 
« chera selon l'ancienneté de son mestre de camp 
« depuis qu'il est capitaine, excepté ceux du co- 
« lonel général et du mestre de camp général. 

« Sa Majesté ayant voulu que la compagnie de 
« la Reine, celle de Monsieur, de M. le Prince, 
« et quelques autres , demeurassent franches , 
« sans être incorporées dans aucun régiment, Sa 
« Majesté entend qu'elles ne rouleront point et 
« resteront auprès du général de l'armée, ou au- 
« près de sa personne, à l'instar de la compagnie 
« de la garde de Sa Majesté. » 

« Les carabins prendront l'ordre du colonel et 
« du mestre de camp général de la cavalerie. » 

Le 2 septembre i638, le roi Louis XIII rendit 
une ordonnance, qu'il dut réitérer le 27 mars lôSg, 

87653A 



loo Histoire de la Cavalerie. 

« pour obliger, le croirait-on, les chefs , officiers 
« et soldats de ses troupes de cavalerie à être 
« armés dans leurs marches, gardes, factions et 
« occasions de guerre, sur peine à^être punis de 
« mort, et aux chefs et officiers d'être cassés et 
« dégradés... » L'ordonnance débute par cette 
mercuriale adressée à la cavalerie : « Le mépris 
« qu'elle fait à présent de porter ses armes... » 
Il fallait toujours, paraît-il, des valets à ces 
maîtres. 

Le i6 octobre i638, le conseil d'Etat rend un 
arrêt contre les officiers du régiment de Chan- 
ceaux, qui a été cassé à la tête de V armée pour 
avoir commis des voleries et pilleries. 

Une foule de mesures contemporaines prouvent 
que le désordre le plus grave régnait dans la ca- 
valerie; c'était probablement une conséquence de 
l'irritation causée par la nouvelle organisation : 
les officiers déblatéraient, et les soldats vivaient 
à leur guise. 

Le 29 octobre i638, le roi écrit au marquis de 
Praslin , mestre de camp général, « pour lui dé- 
« fendre de venir à la cour et lui ordonner de se 
« retirer chez lui à la campagne, à cause du mé- 
« contentement qu'a Sa Majesté du mauvais 
« ordre qu'il a laissé introduire dans la cavale- 
« rie de l'armée de Champagne. » 

On trouvera peut-être minutieux les détails dans 
lesquels nous entrons, et quelques personnes 



Les Régiments temporaires, loi 

pourront Juger inopportunes les réflexions que 
nous suggèrent les obstacles que l'opinion du 
temps opposait à la réalisation des meilleures 
mesures. Nous ne sommes point de cet avis. On 
s'est habitué chez nous à se contenter d'histoires 
de fantaisie, qui suppriment tout ce qui pourrait 
blesser notre amour-propre ou certaines opinions, 
et nous laissent en proie aux illusions. Il est bon 
que l'on sache à quelles difficultés se sont heurtés 
les anciens gouvernements, même les plus vigou- 
reux, et combien les préjugés, les intérêts parti- 
culiers, les passions de quelques-uns, l'ignorance 
et la vaniteuse sottise de la foule, et par-dessus 
tout cette maladie française, ce besoin de braver 
l'autorité, ont de tout temps fait perdre de vue 
les intérêts généraux du pays et causé de maux 
à la France. Sans remonter jusqu'au moyen âge, 
rappelons-nous la guerre effrontément appelée 
du Bien public, déclarée par la haute noblesse à 
Louis XI, le plus utile, sinon le plus aimable des 
rois de France, le roi qui a fait rentrer dans la 
patrie française les apanages des ducs de Bour- 
gogne, le Roussillon, l'Anjou et le Maine; rap- 
pelons-nous la révolte du connétable de Bourbon, 
sollicitant ou acceptant le commandement des 
armées de Charles -Quint pour se venger d'une 
blessure faite à son amour-propre ; rappelons- 
nous la rébellion d'une partie de la noblesse au 
XVI* siècle, se couvrant du prétexte de la liberté 

I. Q. 



à 



102 Histoire de la Cavalerie. 



de conscience, mais au fond exclusivement préoc- 
cupée de sauver ses privilèges féodaux menacés 
- par la prépondérance croissante de l'autorité 
royale, et Pautre partie de la même noblesse, 
la partie catholique, formant une ligue et se jetant 
dans les bras de Philippe II d'Espagne, non point 
tant par amour du catholicisme que pour barrer 
le chemin du trône à l'héritier légitime, à Henri IV 
qu'appuyaient nécessairement les protestants ; 
rappelons enfin les intrigues de toutes natures 
ourdies contre Richelieu, au moment où ce grand 
ministre, ce prince de l'Église, prenait en main les 
intérêts des petits États protestants de l'Allema- 
gne contre le saint-empire romain , et assurait à 
la France la possession de l'Alsace et de la Lor- 
raine. 

Si de cet examen du caractère général de la 
nation, on vient à rechercher l'influence que ce 
caractère frondeur et vaniteux exerce sur l'armée^ 
nous sommes amenés à dire, sans grand espoir 
de convertir personne, que l'éducation militaire 
de notre pays est faite avec des récits de victoires 
et conquêtes. On se garde bien d'enseigner que 
lorsque ces victoires et conquêtes n'ont pas été le 
résultat 4'une politique habile, elles ont toujours 
tenu à l'existence d'un grand homme de guerre, 
ayant le génie des opérations et de l'administra- 
tion des armées en campagne, ou, tout au moins, 
d'un homme comme Turenne, modéré dans ses 



Les Régiments temporaires. io3 

conceptions, prudent à Texécution, et possédant la 
science, l'esprit de suite et la volonté de se faire 
obéir. On exalte beaucoup trop l'importance du 
rôle joué par la bravoure du soldat et par l'esprit 
d'aventure de l'officier. On entretient ainsi chez les 
Français la croyance à une certaine supériorité 
naturelle qui doit leur tenir lieu de tout et les 
porte à mépriser l'adversaire, quel qu'il soit. 
Certes il est bon de rehausser la confiance des 
soldats dans leur valeur, et celle des officiers, en 
mettant sous leurs yeux les grandes choses qu'ils 
ont faites ou qu'on faites leurs devanciers ; mais on 
a tort de ne pas assez appeler leur attention sur 
les causes vraies du succès ; on a plus grand tort 
encore de passer légèrement sur les défaites : 
elles sont aussi instructives que les triomphes. Il 
est bon que tout le monde, nation et armée, soit 
bien convaincu qu'un glorieux passé n'est pas un 
lit sur lequel on s'endort, qu'il faut se tenir tou- 
jours éveillé, toujours prêt, proportionner ses 
moyens d'action aux forces de l'ennemi probable, 
savoir pour cela s'imposer des sacrifices d'argent 
et de liberté, et ne jamais rien entreprendre d'en- 
thousiasme. Il faut que la nation sache que son 
armée ne sera vraiment solide que lorsque les 
soldats seront honorés comme doivent l'être des 
fils destinés et résolus à mourir pour elle, lors- 
qu'elle saura s'imposer à elle-même une certaine 
contrainte, lorsqu'elle comprendra qu'un Fran- 



i 



104 Histoire de la Cavalerie. 

çais a d^éminentes qualités naturelles pour faire 
un soldat, mais qu'il ne naît pas soldat, bien loin 
de là, hélas ! que les hommes des autres pays ont 
aussi des qualités naturelles précieuses, entre au- 
tres Tobéissance, l'exactitude, la fermeté, qui 
valent bien les nôtres dans ce temps-ci ; que si la 
France, cette grande et puissante nation, a de 
glorieuses pages dans l'histoire, les autres nations 
de l'Europe en ont de non moins brillantes à 
citer, et que les plus petits pays, la Hollande avec 
Maurice de Nassau, la Suède avec Gustave- 
Adolphe, la petite Prusse du xviii* siècle avec 
Frédéric II,. en ont eu d'aussi belles et de plus 
étonnantes. 11 faut enfin que la France se sou- 
vienne toujours qu'il n'y a pas loin de Marignan 
à Pavie. 

Richelieu connaissait son pays mieux que per- 
sonne. Il faisait peu de cas des généraux qui 
ouvraient la tranchée devant une place au son 
des violons, et des officiers qui, pour un pari de 
20 pistoles, allaient en plein jour danser dans 
un ravelin miné. Engagé dans une guerre ter- 
rible sur toutes les frontières à la fois, il voulait 
des victoires, et il savait que le premier élément 
de la victoire, c'est l'esprit de conduite, c'est la 
subordination à tous les degrés de la hiérarchie. 
Il tint bon, et avant la fin de l'année i638, il y 
avait sur pied 70 régiments de cavalerie orga- 
nisés et instruits, et les déroutes de Thionville 



Les Régiments temporaires, io5 

et de la Marfée étaient bientôt vengées à Rocroi. 
Un dernier coup très- significatif, et qui devait 
toucher juste, fut frappé par lui le 14 mai iGSg. 
L'ordonnance du 3i juillet i636 avait relevé le 
gentilhomme de Parrière-ban du devoir de servir 
en personne, et Pavait autorisé à se faire rem- 
placer à Parmée par un cavalier entretenu à ses 
frais. Il est probable que beaucoup de gentils- 
honmies ne voulurent pas profiter de cette faveur, ' 
soit pour maintenir dans son intégrité le droit en 
vertu duquel ils possédaient un fief, soit parce 
quUls trouvaient plus économique et plus con- 
forme à leur humeur d'aller à Parmée au lieu 
de payer un remplaçant. La nouvelle ordon- 
nance de 1639 convertit le service de Parrière- 
ban en infanterie. « Le gentilhomme, au lieu 
de fournir i homme à cheval, fournira 2 hommes 
à pied. » On ne pouvait pas lui interdire plus 
spirituellement le service personnel. 

Les choses marchèrent ainsi jusqu'à la paix 
des Pyrénées en 1659. Dans cette période, le 
nombre des régiments de cavalerie a flotté entre 
60 et 170. Il faut attribuer Pénorme dévelop- 
pement de la cavalerie à cette époque, et peut- 
être même en partie l'indiscipline et les excès 
qu'on lui reprochait, à la manière dont vivaient 
les armées dans un temps où toute l'Europe 
occidentale était en feu. Pendant ces longues et 
terribles guerres, les armées, mal payées, ne 



à 



ïo6 Histoire de la Cavalerie. 

vécurent que de pillage, au moyen de ces sortes 
d'^expédîtions journalières qu'on appelle des four- 
rages, La cavalerie seule était propre au métier 
de fourrageurs. Elle fourrageait pour son propre 
compte et pour l'infanterie. Turenne, l'un des 
premiers hommes qui aient compris l'art de la 
guerre dans les temps modernes, et peut-être le 
seul général de l'ancien régime qui ait eu une 
'idée bien nette du rôle de la cavalerie, ne voulut 
jamais avoir à commander que des années très- 
peu nombreuses, 20 à 3o,ooo hommes au plus, 
composées pour moitié de cavalerie, et il justi- 
fiait sa manière en disant qu'il était impossible 
de nourrir plus de monde ; qu'un cavalier ne 
trouvait dans un jour à manger que pour lui et 
pour un autre, et que par suite si le chiffre des 
cavaliers n'était pas au moins la moitié du total, 
l'armée mourrait de faim. Ces fourrages, exé- 
cutés nécessairement sur un rayon étendu, étaient 
aussi pour lui un moyen d'éclairer à fond l'ar- 
mée, ce qui est et doit être le rôle journalier, 
essentiel de la cavalerie. 

Il était réservé à Turenne de mettre la der- 
nière main à l'œuvre ébauchée par Richelieu. 

Turenne avait hérité dès l'année lôSg du ré- 
giment de cavalerie du cardinal de La Valette, 
avec lequel il servit en Italie, et en 1 646, il avait 
obtenu un vieux régiment weymarien, illustre 
aux armées d'Allemagne et qui avait appartenu 



n 



Les Régiments temporaires. 107 

au colonel Kanofski, dont on voit le tcnnbeau 
dans le temple de Saint-Thomas à Strasix>urg. 
C'est à la tête de ce régiment, qui complaît 
« 900 chevaux, dont le moindre valait 200 écus, » 
qu'il combattit pendant trois ans en Allemagne 
et en Flandre. Ce corps, q'ui avait suivi Turenne 
dans sa courte révolte, fut entièrement détruit a 
Réthel, où il avait fait des prodiges de valeur. 
Turenne, rentré dans le devoir, obtint un autre 
régiment weymarien, connu |>récédemment àous 
les noms de Trefski, Flechstein et Nimitz, et 
devint colonel général de la cavalerie légère le 
24 avril 1657. Il avait tous les titres pour bien 
remplir cette charge, qu'il n'exerça toutefois que 
d'une manière latente jusqu'au jour où il cessa 
d'être protestant. 

Avant de parler des actes de Turenne, comme 
colonel général, constatons d'abord quel était 
l'état de la cavalerie au moment où il arriva à 
cette charge suprême. 

Une ordonnance du 24 février 1647 avait in- 
corporé dans l'armée française les régiments 
étrangers qui combattaient avec nous depuis 
i635, et avait décidé que les corps étrangers 
prendraient rang avec les régiments et com- 
pagnies français du jour de la date de la com- 
mission que Sa Majesté a donnée aux ccrfcmels 
et capitaines» La cavalerie se trouva, par Miite^ 
ainsi composée: 



io8 Histoire de la Cavalerie, 

La garde du roi comprenant 4 compagnies des 
gardes du corps, i compagnie de gendarmes et 
I compagnie de chevau-légers. 

Les compagnies de gendarmes, »de chevau- 
légers, ou de mousquetaires appartenant à la 
reine mère, au duc d'Anjou, au duc d'Orléans, 
au prince de Condé, au cardinal Mazarin et aux 
17 maréchaux vivants, Estrées, La Meillera3''e, 
Gramont, La Mothe-Houdancourt, L'Hospital, 
Turenne, Plessis-Praslin, Villeroy, Aumont, La 
Ferté-Imbaut, Hocquincourt, La Ferté-Sennec- 
tère, Grancey, La Force, du Daugnon, Albret 
et Glérambaut, en tout 22 compagnies qui, 
comme celles de la garde du roi, étaient en 
dehors de Pautorité du colonel général, à Tex- 
ception bien entendu de celle qui appartenait au 
maréchal de Turenne lui-même. 

La cavalerie légère proprement dite se com- 
posait de 3oo cornettes en 68 régiments, dont 1 2 
étaient d'origine étrangère. 

Il existait enfin dans les armées un nombre à 
peu près égal, 62, de régiments italiens, catalans, 
anglais, allemands, lorrains et wallons, qui y 
servaient à titre auxiliaire sous les ordres de co- 
lonels particuliers. 

Une ordonnance du 3o mars 1654 avait fixé 
la force des compagnies à 46 maîtres et par con- 
séquent les escadrons étaient de 92 hommes pou- 
vant former avec le cadre 3 rangs et 3o à 32 files. 



Les Régiments temporaires. 109 

Cette même année 1654, et par Tinfluence de 
Turenne qui trouvait avec raison que ce n^était 
pas assez de 2 généraux de cavalerie dans une 
guerre qui exigeait 5 ou 6 armées différentes, fut 
créée à titre permanent la charge de commissaire 
général de la cavalerie. Nous donnons ici le récit 
de Bussy-Rabutin, qui, pour venir d^un homme 
difficile à vivre et très-intéressé dans Taflaire 
comme mestre de camp général, n'en fournit pas 
moins des détails curieux. 

« Au commencement de 1654,' dit-il, le ma- 
« réchal de Turenne voulant reconnaître le dé- 
« vouement d'Esclainvilliers et peut-être diminuer 
« la considération de ma charge, avoit proposé 
« en sa faveur à la cour, comme un grand avan- 
u tage au service, de faire un commissaire général 
M dans la cavalerie, ainsi que cela se pratiquoit 
« dans les armées d'Allemagne. Ce maréchal, 
« qui commandoit Tune des armées du Roi en 
« Flandres et qui prévoyoit que son emploi ne 
« finiroit pas sitôt, étoit bien aise d'avoir une 
« créature aussi considérable que le commissaire 
« général dans le corps de la cavalerie, et auquel 
H il prétendoit faire commander d'ordinaire celle 
« de son armée. »> 

« D'abord Louis 'de Lorraine, duc de Joyeuse, 

« colonel de la cavalerie par la mort du duc d'An- 

« goulêmes son beau-père à la fin de i653, 

« donna la main aux desseins d'Esclainvilliers. 

\. 10 



iio Histoire de la Cavalerie.. 

« Pour moi, que la chose intéressoit davantage, 
« je m'y opposai. Je craignois que cette charge 
« (dont la fonction parmi les Étrangers étoit de 
« commander non-seulement la cavalerie, mais 
(( encore d'en faire les revues et de donner les 
« quartiers d'hyver) eût plus de considération 
<( que la mienne, quoiqu'elle lui fut subalterne. 
« Mon opposition empêchoit Testablissement d'Es- 
« clainvilliers ; il me vint faire tant de prières de 
(( ne pas ruiner sa fortune, m'assura tant de sa 
« reconnaissance et même de son attachement, 
« en me disant qu'il m'apporteroit le projet de sa 
« commission pour y changer ce qui me cho- 

« queroit, que je consentis à ce qu'il voulut 

« Il m'apporta deux jours après un projet de sa 
« commission dans laquelle j'ajoutai quelques 
« mots qui étoient qu'il n'auroit point en mon 
^( absence d'autres fonctions que la mienne. » 

Ce qu'on vient de lire montre une fois de plus 
de quel poids pesaient alors les prétentions per- 
sonnelles. Ajoutons que Bussy, qui eut proba- 
blement la main forcée, ne céda pas sans obtenir 
une compensation. Il avait déjà assez mauvaise 
réputation, et n'avait pas pu obtenir l'année pré- 
cédente une faveur dont avaient joui ses prédé- 
cesseurs, c'est-à-dire que le régiment dont il était 
propriétaire prît le titre de Mestre de camp gé- 
néral. Il l'obtint cette fois et même avec une aug- 
mentation de plusieurs compagnies. 



Les Régiments temporaires, 1 1 1 

Nous avons vu que Turenne, qui agissait déjà 
presque en colonel général et qui probablement 
avait la promesse de le devenir, fut nommé à 
cette charge le, 24 avril 1657. Dès le 8 juin, il 
fit créer des charges de brigadiers de cavalerie. 
C'était une mesure d'une importance que Ton va 
comprendre et qui était le développement du sys- 
tème qui avait poussé Turenne à la création du 
commissaire général. Il n'y avait par le fait dans 
l'armée que 3 hommes ayant qualité pour com- 
mander la cavalerie. Quand il y avait plus de 
3 armées, et que les 3 officiers généraux de Pétat- 
major de la cavalerie s'étaient distribué les com- 
mandements dans 3 armées à leur convenance, 
il ne restait personne pour commander la cava- 
lerie dans les autres. Cette absence d'une autorité 
supérieure y livrait les mestres de camp à toutes 
les conséquences de leurs rivalités. Dans les ar- 
mées où se trouvait un officier général, celui-ci 
était trop haut placé pour s'occuper lui-même 
d'une foule de détails et veiller à l'exécution de 
ses ordres. Il pouvait arriver enfin que le com- 
mandant en chef d'une armée n'eût pas de sym- 
pathie et de confiance pour l'officier général dé- 
signé pour commander sa cavalerie, et c'était 
précisément le cas qui s'était présenté en 1654 
pour Turenne, qui n'aimait pas Bussy-Rabutin, 
et qui avait motivé la création de la charge per- 
manente dont fut pourvu d'Esclainvilliers. Ce qui 



1 1 2 Histoire de la Cavalerie, 

manquait encore à la cavalerie c^était une hié- 
rarchie graduée, qui lui était aussi nécessaire qu'à 
rinfanterie. Celle-ci, partagée dans chaque armée 
en aile droite, aile gauche et centre, avait pour 
diriger ses mouvements les lieutenants généraux, 
les maréchaux de camp de jour, avec de nom- 
breux états-majors -, la cavalerie ne reconnaissait 
que les commandants en chef des armées et se> 
3 généraux spéciaux. La création des brigadiers., 
c'est-à-dire cette autorité donnée à certains mestres 
de camp pour commander plusieurs régiments 
de cavalerie, fut donc une idée féconde, qui con- 
tribua beaucoup à établir Tordre dans le service 
des troupes à cheval en campagne, et qui fut 
appliquée dix ans plus tard à Tinfanterie. C'e^t 
la seule fois que la cavalerie, en fait d'organi- 
sation rationnelle, ait précédé Tinfanterie. 

Les brigadiers étaient officiers généraux, sans 
cesser d'être mestres de camp et de commander 
leurs régiments. En campagne seulement ils pre- 
naient le commandement d'une brigade. Ils diffé- 
raient en cela des généraux de brigade d'aujour- 
d'hui, dont les fonctions n'ont aucune analogie 
avec celles des maréchaux de camp d'autrefois 
qui étaient des chefs d'état-major, propres à tout, 
comme le sont, ou le doivent être, tous les officiers 
d'état-major. On pourrait se demander encore 
maintenant si l'ancien système n'était pas préfé- 
rable au nouveau, aussi bien au point de vue 



Les Régiments temporaires. ii3 

économique qu'à celui de la conduite immédiate 
des troupes et de la direction des opérations d'en- 
semble. Quoi qu'il en soit, les généraux de brigade 
peuvent faire remonter à Turenne l'obligation du 
grade dont ils jouissent. 

Il est bon de conserver les noms des 1 3 mestres 
de camp de cavalerie qui, sur l'indication de Tu- 
renne, furent faits brigadiers dans cette première 
fournée de lôSy, et par conséquent jugés les 
plus dignes de commander des masses de cava- 
lerie et les plus capables de se faire obéir par les 
autres mestres de camp. Ce furent : MM. de Saint- 
Lieu, de La Roque-Saint-Chamarand, Des Four- 
neaux, d'Espense, de Podewilz, de Rochepère, 
de La Villette, de Gassion, de Rouvray, de 
Genlis, de La Guillotière, de Richelieu et de 
Montclar. 

En 1659, la dernière année de la guerre, il y 
avait dans les armées françaises 700 cornettes ou 
compagnies de cavalerie, nationale ou auxiliaire, 
et 1 1 2 régiments constitués, dont voici la liste 
par ordre d'ancienneté de création, sauf erreur: 

La Villette. La Marcousse. 

Duc d'Anjou. Royal. 

Carabins. Gramont. 

La Meilleraye. Canillac. 

Marsillv. Saint-Simon. 

Créqui étranger. Le Roi. 

I^ Châtre. Plessis-Prasiin. 

Colonel général. Nanteuil. 

I. 10. 



à 



114 



Histoire de la Cavalerie. 



Aumont. 

Montbrun Saint-André. 
Gesvres. 
Genlis. 
La Ferté. 
Des Fourneaux. 
Roquelaure. 
Créqui italien. 
Harcourt. 
Espense. 
Saint- Lieu. 
Rouvray. 
Cardinal Mazarin. 
La Reine mère. 
Altesse royale. 
Piennes. 

Apchon Saint-Germain. 
Prince Alméric. 
Cœuvres. 
Carignan. 

Commissaire général. 
Son Éminence. 
Lillebonne. 
Clérambaut. 
Coudray-M ontpensi er. 
Bourlemont. 
nies. 

Montcavrel. 
Joveuse. 
Bissy. 
Mercœur. 
Hocquincourt. 
• Épernon. 
Richelieu. 
Roquépine. 



Chevalier d'Aubeterre. 

Podewilz. 

La Guillotière. 

Saint-Abre. 

Humières. 

Dragons de La Ferté. 

Brinon. 

La Roque Saint -Chama- 

rand. 
Créqui français. 
Marins. 
Ville. 

Montauban. 

Mestre de camp général. 
Cuirassiers du roi. 
Soissons. 
Brégy. 
Broglio. 
Resnel. 
La Valette. 
Fabert. 
Montdéjeu. 
Esquancourt. 
La Rablière. 
Montgobert. 
Digby anglais. 
Grandpré. 
Caudale. 
Montclar. 
Conti étranger. 
Gontérv. 
Vivonne, 
Givry. 
Gassion. 
La Luzerne. 



Les Régiments temporaires. 1 1 5 



Choiseul. Duras. 

Massannes. Lorges. 

Maacini. Roye. 

Nogent. Prince de Hesse. 

Guise. Prince de Salm. 

Conti. Maussay. 

Calvo. Chazeron. 

La Feuillée. Penthièvre. 

Fourilles. La llhicrc. 

Chevalier de Rohan. M cl in. 

Rochepère. Comte Frédéric. 

La Fare. Roval étranger. 

Dragons du roi, Renti. 
Coislin. 



Le 7 septembre 1659, ^^^^ attendre la signa- 
ture de la paix des Pyrénées, le roi prononça la 
réforme de tous les régiments de cavalerie, dont 
il ne voulut conserver qu'une ou deux compa- 
gnies, celles du mestre de camp et du major ré- 
duites à 5o maîtres. Le même jour toutes les 
compagnies d'ordonnance ou franches furent sup- 
primées, excepté celles de la maison du roi et 
dc> princes du sang. Ces mesures ne furent pas 
toutefois exécutées dans leur teneur. Les régi- 
ments ne furent licenciés que successivement le 
20 juillet 1660 et les 12 et 18 avril 1661. L'on 
conserva ' même 4 régiments complets sur pied^ 
le régiment Royal , le régiment du Roi, les cara- 
bins du Roi et Royal étranger. Les compagnies 
de.^ prince 5 furent, au contraire, réduites à celles 



i 



1 1 6 Histoire de la Cavalerie, 



de la feine, de la reine mère Anne d^ Autriche, 
de Monsieur et du duc d^Yorck. 

L'état de la cavalerie resta donc composé en 
1662 : des 4 compagnies des gardes du corps 
créées en 1440, 1475, 1479 ^^ i5i4, des gen- 
darmes de la garde et des chevau-légers de la 
garde dont Tadmission dans la maison du roi 
remontait respectivement à 1602 et 1692, d'aune 
compagnie de mousquetaires dont la dernière 
formation ne remontait pas au delà de 1657; des 
gendarmes écossais qui dataient de 1422; des 
gendarmes et des chevau-légers de la reine con- 
temporains du mariage du roi Louis XIV en 1 660^ 
des gendarmes et des chevau-légers de la reine 
mère mis sur pied en i638 et 1643, et des gen- 
darmes de Monsieur qui dataient de 1647; d'une 
soixantaine de compagnies franches appartenant à 
d'anciens mestres de camp ou majors, et de 4 ré- 
giments organisés. 

Dans les expéditions qui eurent lieu les années 
suivantes , on se trouva fort à court de cavalerie. 
En i663, rinsulte faite à Rome à Tambassadeur 
de France exigea Tenvoi en Italie de 26 compa- 
gnies de cavalerie légère. Ces compagnies, après 
avoir hiverné dans les duchés de Modène et de 
Parme, partirent de là pour se rendre en Hongrie 
au secours de T Empereur menacé par les Turcs. 
Elles y furent ralliées en 1 664 par 1 4 autres com- 
pagnies parties directement de France. C'était à 



Les Régiments temporaires, 117 



peu près tout ce qu'il y avait de disponible, car en 
novembre 166 5, Louis XIV, envoyant un corps 
de troupes contre Tévêque de Munster, dut faire 
partir avec ce corps un détachement des gardes 
du corps, ses 2 compagnies de mousquetaires et 
les chevau-légers du Dauphin créés le 28 jan- 
vier i663. 

Que devenaient cependant les nombreux offi- 
ciers et cavaliers des régiments licenciés, qui, 
pendant cette longue suite de quarante-cinq années 
de guerres commençant avec la régence de Marie 
de Médicis pour se terminer avec celle d'Anne 
d'Autriche, avaient vécu dans les camps et y 
avaient contracté des habitudes et des mœurs que 
la vie du château et du village ne pouvait plus 
satisfaire? Les uns allèrent peupler le Canada et 
les Antilles; d'autres entrèrent dans la compo- 
sition de régiments levés pour le service étranger, 
comme Briquemaut formé en 1664 pour suivre 
en Portugal le comte de Schomberg, comme les 
cuirassiers de Richelieu levés la même année 
pour l'Empereur et qui sous la conduite du fa- 
meux Latréaumont allèrent se faire exterminer en 
Hongrie. Les plus sages réfléchissaient et, n'at- 
tendant plus rien que du roi, étaient prêts à 
rentrer à son service en se soumettant à ce qu'il 
exigerait d'eux. 

Leur attente ne fut pas trop longue. La guerre 
recommença. Des commissions furent délivrées les 



1 1 8 Histoire de la Cavalerie, 

2, 5 et 7 décembre i665 pour la formation de 
37 régiments, ce qui portait le nombre de ces 
corps à 41. Les régiments nouveaux furent tous 
donnés à d'anciens mestres de camp réformés, ce 
qui permet de rattacher ces régiments de i665 à 
ceux qui les avaient précédés. 

Le roi venait de disgracier le mestre de camp 
général Bussy-Rabutin et de lui donner un suc- 
cesseur, ce qui mit Turenne fort à Taise pour 
régler la composition de ces corps, pour les former 
et pour les instruire au camp de Gompiègne, où 
la plupart d'entre eux furent réunis. 

Quelques autres régiments furent formés de la 
même manière les années suivantes, de sorte 
qu'au mois d'avril 1667 « le Roy a sur pied 
« 2o5 compagnies de cavalerie légère qui com- 
« posent 45 régiments, savoir : 9 régiments de 
« 6 compagnies ; 32 à 4 compagnies, 3 à 3 corn- 
ac pagnies et le régiment des carabins de Sa Ma- 
« jesté de 14. Il y avait en outre 12 compagnies 
« franches. Les compagnies des 9 premiers régi- 
« ments sont à 60 maîtres, toutes les autres à 
« 5o, si bien que le Roy a 10,890 maîtres, avec 
« 820 officiers », chiffre auquel il convient d'ajou- 
ter la maison du roi et des princes, qui venait 
aussi d'être réorganisée et augmentée, et qui se 
composait ainsi : 

Gardes du corps, 4 compagnies, 800 hommes. 
Gendarmes du roi, i compagnie, 200 hommes. 



Les Régiments temporaires. 119 

Chevau-légers du roi, i compagnie, 200 hommes. 
Mousquetaires, 2 compagnies, 600 hommes. 
Gendarmes écossais, i compagnie, 200 hommes. 
Gendarmes et chevau-légers de la reine, 2 compagnies, 

200 hommes. 
Gendarmes et chevau-légers du Dauphin, 2 compagnies, 

400 hommes. 
Gendarmes et chevau-légers de Monsieur, 2 compagnies, 

200 hommes. 

en tout 2,800 hommes. 

En 1668, le nombre des régiments de cava- 
lerie légère était monté à 95. Les dragons, défi- 
nitivement constitués à part le 28 janvier de cette 
année, comptaient 2 régiments, Royal et Colonel 
général. Ces deux corps furent formés chacun de 
la moitié des carabins ou dragons du roi qui 
comptaient alors 22 compagnies. 

Le 14 mai 1668, après la signature de la paix 
d'Aix-la-Chapelle, Louis XIV, qui n'avait pas 
été complètement satisfait de ses régiments, for- 
més à la vérité à la hâte au moment de la guerre 
et qui avaient eu à peine quelques mois d'ins- 
truction au camp de Compiègne, les réduisit 
encore une fois tous en compagnies franches. Il 
maintint ainsi sur pied 10,000 chevaux, y com- 
pris sa maison et celle des princes. Les compa- 
gnies de cavalerie légère conservées furent celles 
qui appartenaient aux mestres de camp réformés. 
Ces compagnies furent toutes complétées à 100 
maîtres, et Turentie chargea le marquis de Fou- 



à 



I20 



Histoire de la Cavalerie. 



rilles de les organiser uniformément et de les 
instruire, Fintention du roi étant de les recons- 
tituer en régiments aussitôt que cette éducation 
serait faite. 

Le i®'' février 1670, ces compagnies de 100 
maîtres furent partagées en deux, et donnèrent 
65 escadrons de 2 compagnies de 5o maîtres 
chacune. 

Ces 66 escadrons de cavalerie légère étaient: 



Colonel général. 

Mestre de camp général. 

Royal. 

Le Roi. 

Royal étranger. 

Cuirassiers du roi. 

Cravates. 

Royal- Roussillon . 

La Reine. 

Le Dauphin. 

Orléans. 

Enghien. 

Condé. 

Beauvisé. 

Bissy. 

Calvo. 

Des Fourneaux. 

Foucauld. 

Gassion. 

Joyeuse. 

Larboust. 

La Feuillée. 

Lorges. 



Pilloy. 

Rouvray. 

Resnel. 

Au mont. 

Verdelin. 

TiUadet. 

Saint-Loup. 

Beaufort. 

Carcado. 

Humières. 

Gournay. 

Doucet. 

Vachot. 

La Plante. * 

Trécourt. 

Mézières. 

Wolf. 

Estrades. 

Catheux. 

Prouville. 

Lambert. 

La Rablière. 

Chevrier. 



Les Régiments temporaires, 121 



Coulanges. 
Montaigle. 
Lescar. 


Sourdis. 

Lépine. 

nies. 


Du Vernay. 
Beaupré. 
Don Luc. 


Bligny. 

D'Auger. 

Plessis-Prasiin 


Coste. 

Des Lombards. 


Nogent. 
Choiseul. 


Melin. 
Lachaux. 


Sommyèvre. 
San-Esteban. 



On remarquera dans cette liste la proportion 
considérable des noms qui n'appartiennent pas à 
la grande noblesse de la cour. Turenne avait 
probablement préféré aux noms sonores les noms 
plus modestes des bons officiers de cavalerie, 
dont il avait pu constater le mérite dans se^ 
longues et difficiles campagnes. Il n'est pas im- 
possible que ce soit pour arriver à ce résultat 
que le méthodique maréchal, qui aimait mieux 
tourner les difficultés que les aborder de front, 
avait engagé Louis XIV à casser les régiments 
en 1668, et avait mis trois ans à les rétablir peu 
à peu, ne les rétablissant même au bout de ce 
temps que sur le pied de 2 compagnies et avec 
le titre d'escadron, qui ne tentait pas les person- 
nages qu'il voulait écarter pour le moment. 

Quoi qu'il en soit, le i®' juillet 1 671, les com- 
pagnies furent reportées à 100 maîtres, et la 
même année on tira de chacune d'elles 3o ca- 
valiers pour en composer une troisième com- 



1 1 



i 



122 Histoire de la Cavalerie. 

pagnie. L'escadron se trouva alors de 3 compa- 
gnies de 60 à 70 maîtres. Enfin, le 4 février 1672, 
au moment où Louis XIV allait déclarer la 
guerre à la Hollande, ce qui devait entraîner 
une guerre générale, ces 66 escadrons, mis pour 
la plupart à 6 compagnies et déclarés régiments, 
commencèrent pour la cavalerie la période de la 
permanence, dont les vieux corps de Tinfanterie 
étaient déjà en possession depuis plus de cent 
ans. 



Les Régiments permanents, i23 



CHAPITRE IV. 

LES RÉGIMENTS PERMANENTS. 

L'on est disposé à croire que la constitution 
moderne des troupes présente de grandes diffé- 
rences avec la constitution ancienne, différences 
qui seraient toutes à Tavantage de notre temps. 
Il n'en est rien. On a beaucoup modifié, innové, 
depuis Louis XIV, dans les choses de détail, 
d'importance secondaire : les grandes lignes sont 
restées les mêmes. On sait que Finfanterie 
en 1 789 se composait de 2 régiments de la garde 
forts ensemble de 10 bataillons, de 104 régi- 
ments de ligne à 2 bataillons de 9 compagnies 
dont I de grenadiers, de 12 bataillons de chas- 
seurs à pied, et de 7 régiments appartenant à la 
marine. On jugera, d'après ce que nous allons 
dire de la cavalerie, que son organisation est 
restée, elle aussi, à peu de chose près, telle 
qu'elle est sortie des mains de Louis XIV et de 
Turenne. 

A la fin de cette guerre générale, commencée 
en 1672 par l'invasion de la Hollande et qui 



124 Histoire de la Cavalerie. 

se termina en 1678 par la paix de Nitnègue, 
dont le roi de France dicta les conditions, la ca- 
valerie se composait de 4 groupes : 

La maison du roi. 

La gendarmerie. 

Les régiments de cavalerie légère. 

Les régiments de dragons. 

La maison du roi formait 2 divisions de ré- 
serve. Les 4 compagnies des gardes du corps, 
dont Peffectif était d'environ i ,400 combattants, 
formaient une première division de réserve, dont 
le commandement appartenait de droit au capi- 
taine de la compagnie dite écossaise, qui com- 
prenait à cet effet un état-major complet. 

La compagnie des gendarmes de la garde, 
celle des chevau-légers de la garde, les 2 com- 
pagnies de mousquetaires, et à partir de 1(576 
la compagnie des grenadiers de la garde, for- 
maient par leur réunion une deuxième division 
de réserve de i ,200- hommes environ, que Ton 
prit l'habitude de désigner sous le nom de mai- 
son rouge^ à cause de la couleur des habits des 
gendarmes, chevau-légers et mousquetaires. 

Les mousquetaires représentaient dans la garde 
le corps des dragons, et les grenadiers le corps 
des carabiniers. Cette compagnie de grenadiers, 
bien que récemment créée, prenait en campagne 
la tête de la garde proprement dite, après les 
gardes du corps et avant la maison rouge. 



Les Régiments permanents, 1 2 5 

La gendarmerie, souvenir des compagnies des 
ordonnances, formait une troisième division de 
réserve de 1,200 à 1,600 hommes. Elle com- 
prenait, en 1678, 12 compagnies de 100 hommes: 
les gendarmes écossais, la plus vieille troupe de 
France, les gendarmes anglais, les gendarmes 
bourguignons et les gendarmes de Flandre, qui 
appartenaient au roi ; les gendarmes et chevau- 
légers de la Reine, les gendarmes et chevau- 
légers du Dauphin, les gendarmes et chevau- 
légers d'Anjou, les gendarmes et chevau-légers 
d'Orléans. A ces 12 compagnies vinrent s'en 
joindre 4 autres créées en 1690 pour deux des 
petits-fils de Louis XIV, les gendarmes et che- 
vau-légers de Bourgogne, les gendarmes et chevau- 
légers de Berry. • 

C'était 3 divisions de cavalerie de réserve, 
dont les fractions ne présentaient entre elles 
d'autres différences que celles des noms et des 
uniformes; montées sur de grands chevaux, elles 
constituaient la grosse cavalerie. 

La cavalerie légère comptait, en janvier 1678, 
99 régiments de 8, de 6, de 4 et de 3 compagnies, 
suivant leur ancienneté ou le crédit de leurs chefs. 
Enfin le corps des dragons avait 14 régiments, 
organisés de la même manière. 

Au total, la France avait, à l'heure où se si- 
gnait la paix de Nimègue, 279,000 hommes sur 
pied, i63,ooo en campagne et 116,000 en gar- 



II 



126 Histoire de la Cavalerie. 



nison. Dans ce chiffre les troupes à cheval figu- 
raient pour 6o,36o hommes^ 3,420 hommes de 
la maison du roi et de la gendarmerie, 47,100 
cavaliers et 9,840 dragons. 60,000 hommes <fe 
cavalerie, c'est encore le chiffre que la France 
veut pouvoir mettre en campagne. La différence 
avec les besoins de notre temps est tout entière 
dans rinfériorité numérique relative de l'infan- 
terie, qui n'avait pas encore pris toute l'impor- 
tance qu'elle a acquise depuis et dans l'absence 
de l'artillerie qui ne faisait que de naître comme 
corps militaire, et qui abritait son enfance sous 
l'aile de l'infanterie dans laquelle elle était con- 
fondue. 

Voici le listes des régiments de cavalerie et 
de «dragons sur pied en 1678 : 



CAVALERIE LEGERE. 



Colonel général. 


Condé. 


Mestre de camp généraL 


Enghien. 


Commissaire général. 


Varennes. 


Royal. 


Rouvray. 


Le Roi. 


Villeroy. 


Royal étranger. 


Quinson. 


Cuirassiers du roi. 


Livry. 


Royal-Cravates. 


Léry-Girardin 


Royal- Roussillon . 


La Valette. 


Royal- Piémont. 


La Rablière. 


La Reine. 


Biran. 


Le Dauphin. 


Bartillat. 


Orléans. 


Oljicr. 



Les Régiments permanents. 



127 



Calvo. 

La Mothe-Houdancourt. 

Servon. 

Cayeux. 

D'Auge r. 

Villars. 

Du Bordage. 

Florensac. 

Saint-Valery. 

Bulonde. 

Saint-Germain. 

Ruvigny. 

Sourdis. 

Bissy. 

Choiseul- Beaupré . 

Tilladet. 

Bligny. 

Charlus. 

Amolfini. 

Rosen. 

La Luzerne. 

Montgommery. 

Locmaria. 

l-a Roquevieille. 

Langailerie. 

Vivans. 

Magnac. 

Rassent. 

Saint-Aignan. 

Lauzier. 

Saussay. 

Châtillon. 

Konigsmark. 

Schomberg. 



Grignan. 

Estrades. 

L'Hommeau. 

Bezons. 

Puységur. 

Imécourt. 

Romainville. 

Grillon. 

Rivarole. 

Royal anglais. 

nies. 

Montbas. 

Saint-Simon. 

Pracomtal. 

Le Bret. 

Druy. 

Montai. 

Courtebonne. 

Alsace. 

Lé vis. 

Chevalier Duc. 

Gassion. 

Albret. 

Heudicourt. 

Saint- Sylvestre. 

Mélac. 

Dauphin étranger. 

Pelleport. 

Pontségut. 

Chevreau. 

Noailles. 

Quincy. 

Marivaux. 

Montauger. 



i 



128 


Histoire de la Cavalerie. 


Du Rozel. 




Boham hongrois. 


Villeneuve. 




Villepion. 


Lombres. 




DRAGONS. 


Royal. 




Du Fay. 


Colonel général. 


La Bretesche. 


Enonville. 




Longueval. 


Tessé. 




Bursard. 


Listenois. 




Asfeld. 


Fimarcon. 




Barbezières. 


Saint-Sandoux. 


Gahges. 



Par une bizarrerie, dont Texplication nou=i 
échappe, Louis XIV, qui avait donné le pas sur 
.les siens aux régiments des officiers généraux de 
rétat-major de la cavalerie, ne fît pas le même 
honneur au colonel général des dragons, et régla 
le rang de la manière inverse. Cette anomalie 
ne s^est pas maintenue au delà du règne de 
Louis XIV. 

Ainsi qu'on en peut juger, les premiers régi- 
ments de la cavalerie et des dragons avaient un 
rang fixe, invariable, et formaient par conséquent 
toujours en campagne têtes de brigade; c'étaient 
les régiments des officiers généraux pourvus des 
grandes charges, ceux dont le roi était colonel 
titulaire et ceux qui étaient la propriété de la 
reine et des princes de la famille royale. Plus 
tard, cette fixité du rang fut acquise aux corps 
qui furent mis sous des titres de provinces. Les 



Les Régiments permanents. 129 

autres, dits régiments de gentilshommes^ parce 
qu'ils portaient le nom de leur mestre de camp, 
ou régiments gris de la couleur de leur habit, 
n'avaient pas de rang fixe; ils suivaient Tan- 
cienneté de leurs chefs. 

Cette diversité dans les effectifs des régiments, 
et par conséquent dans leur valeur vénale, et 
dans les prérogatives et privilèges attachés à leurs 
noms et à leurs rangs, était un puissant motif 
d'émulation, et cette diversité donnait même le 
moyen de satisfaire tous les goûts. Le duc de 
Saint-Simon était très-fier de posséder un régiment 
gris, qui lui permettait de faire sonner son nom 
et de faire porter sa livrée à ses trompettes. Beau- 
coup d'autres, moins spirituels et plus sages, 
trouvaient plus profitable, après avoir débuté 
par un petit régiment gris de 3 compagnies, de 
mériter par leurs services que le roi les récom- 
pensât d'abord par l'augmentation du nombre 
des compagnies entretenues jusqu'au jour où 
ils pourraient prétendre à la charge de mestre de 
camp-lieutenant dans un dçs grands régiments 
royaux ou princiers, ce qui devait les conduire 
avec certitude au grade de brigadier. 

Entrons plus avant dans le mécanisme de cette 
organisation, où sous bien des rapports il y 
aurait des leçons à puiser. 

Il n'y avait point d'écoles spéciales en ce 
temps-là. La maison du roi et la gendarmerie en 



i3o Histoire de la Cavalerie, 

• 
tenaient lieu. Les compagnies de mousquetaires 

surtout étaient la pépinière d'où sont sortis pen- 
dant plus de cent ans les intrépides et fidèles 
officiers de Louis XIV, de Louis XV et de 
Louis XVI, qui, de Sénef à Fontenoy, de l'Es- 
caut au Mincio, des bords du Danube aux rives 
de l'Hudson, ont assez versé de leur sang pour 
faire largement oublier les désordres de leurs 
non moins braves mais trop turbulents ancêtres. 
Les 2 compagnies de mousquetaires, organisées 
pour combattre à pied et à cheval, seules de 
toutes les troupes de cavalerie de la maison du 
roi casernées à Paris, étaient installées dans deux 
hôtels construits pour elles, Tun au faubourg 
Saint-Antoine, et Tautre au faubourg Saint- 
Germain, et fournissaient à Tinfanterie et à la ca- 
valerie la presque totalité de leurs officiers. La 
jeune noblesse, qui passait alors plus qu'aujour- 
d1iui les années de l'enfance dans la fortifiante 
vie de la campagne, arrivait aux mousquetaires 
à quinze ans, y était soumise à une discipline 
sévère, rompue aux exercices et manœuvres de 
rinfanterie et de la cavalerie, instruite dans toutes 
le? sciences qui se rapportent à la guerre, et 
elle avait souvent la chance de faire, sans quitter 
récole, la meilleure application de Téducation 
qu'on lui donnait en marchant à l'ennemi et en 
combattant sous l'œil de ses maîtres et pro- 
fesseurs, avec toute l'émulation, tout l'entrain, de 



w 

Les Régiments permanents. 1 3 1 



son âge, heureuse tf enlever ainsi à la pointe de 
répée une cornette ou une sous-lieutenance. • 

Le recrutement des corps se faisant en temps 
ordinaire par des volontaires, les rangs étaient 
peuplés de vieux soldats qui fournissaient d^ex- 
cellents sous-ofBciers, sous-officiers d'autant meil- 
leurs qu'on leur laissait à peu près complètement 
les soins de tous les détails du service intérieur et 
de rinstruction des cavaliers, système 'qui avait 
le double avantage de rehausser le sous-officier à 
ses propres yeux et aux yeux des soldats et d'em- 
pêcher l'officier de tomber dans le caporalisme 
et dans tous les inconvénients de cette vie entre- 
coupée, dont les heures se passent sur le chemin 
qui conduit du logis à la caserne et inversement, 
avec stations dans des lieux intermédiaires dont 
les porter sont toujours ouvertes. 

L'effectif de la compagnie de cavalerie ou de 
dragons variait en temps ordinaire de 20 à 60 
honmies suivant l'état du Trésor. Chacune avait 
son capitaine, un lieutenant, un cornette ou un 
guidon, quelquefois un sous-lieutenant, enfin un 
maréchal des logis, qui remplissait à peu près et 
simultanément les fonctions de notre adjudant et 
de notre maréchal . des logis chef. Il y avait en 
outre des brigadiers, à raison d'un brigadier 
pour 12 à 16 maîtres. Ce brigadier avait plus 
d'importance que n'en a celui de nos jours. C'était 
un véritable sous-officier. 



i32 Histoire de la Cavalerie. 



Aussi longtemps qu'elle demeura la propriété 
du capitaine, ^la compagnie s'administra séparé- 
ment et posséda son enseigne particulière. Cette 
enseigne s'appelait étendard dans la cavalerie; 
il était carré comme l'ancienne bannière. Dans 
les dragons l'enseigne s'appelait guidon; il était 
rectangulaire, un des petits côtés appliqué à la 
hampe; le bord opposé flottant était découpé 
en deux demi-cercles. La question de l'enseigne, 
reste des prérogatives du banneret, touchait si 
fort au cœur des capitaines et des mestres de 
camp qu'un étendard arboré ne se désarborait 
plus. Un régiment qui avait été porté à 12 com- 
pagnies au moment d'une guerre, entendait con- 
server ses 1 2 étendards ou guidons alors même 
que les réformes l'avaient réduit à 4 compagnies. 

En temps de paix, la compagnie se maintenait 
à l'effectif déterminé par des enrôlements volon- 
taires et par les soins du capitaine. Les officiers, 
qui aimaient comme aujourd'hui les congés de 
semestre, n'obtenaient dans certains cas leur congé 
qu'à la condition de ramener un ou deux hommes 
de recrue. En temps de guerre; le roi complétait 
l'effectif par les hommes que devaient fournir les 
fiefs, ou avec ceux de la milice levés par un pro^ 
cédé qui a servi de modèle à la conscription. 

D'après ce que nous venons d'expliquer, on 
voit qu'en temps de paix la compagnie ne repré- 
sentait guère comme élément de manœuvre que 



Les Régiments permanents. i33 

réquivalent d^un peloton, tout au plus d'un tiers 
ou d'une moitié d'escadron. L'effectif d'une com- 
pagnie a quelquefois dépassé loo maîtres, ipais 
cela n'a jamais eu lieu que d'une manière tran- 
sitoire, à la fin d'une guerre, par suite de la 
réforme d'une partie des régiments et du ver- 
sement de leurs hommes dans les régiments con- 
servés sur pied. 

C'est, en effet, le rôle de fraction d'escadron 
que la compagnie a joué jusqu'à la Restauration, 
jusqu'à l'ordonnance du 25 août i8i5, qui a 
créé l'escadron-compagnie. Jusque-là, l'escadron 
n'existait que comme formation de manœuvres et 
de combat. 

Au moment de l'institution définitive des régi- 
ments, en 1671, l'escadron comprenait 3 com- 
pagnies. Cela demeura ainsi jusqu'en 1733. Cette 
année il fut porté à 4 compagnies de 40 hommes, 
ce qui donnait à l'escadron 160 maîtres. Après 
la guerre de Sept ans, en 1762, l'escadron n'eut 
plus que 2 compagnies, mais l'effectif de ces com- 
pagnies fut doublé. Après quelques oscillations 
dans le nombre et dans l'effectif des compagnies 
en 1772, 1779 et 1784,1e système de 1762 pré- 
valut enfin en 1 788, et le grade de chef d'escadron 
fut créé. Jusqu'à ce moment, les compagnies de 
l'escadron, qui se rangeaient de la droite à la 
gauche dans l'ordre d'ancienneté des capitaines, 
étaient sous le commandement supérieur du capi- 
I. 12 



i34 Histoire de la Cavalerie, 



taine le plus ancien, dont la compagnie person- 
nelle, dirigée par le lieutenant, prenait' le nom de 
compagnie chef d^escadron. 

Le régiment n^avait qu'un officier supérieur, le 
mestre de camp, et ce mestre de camp était lui- 
même capitaine titulaire d'une compagnie qu'il 
faisait commander par un capitaine dont le titre 
était lieutenant de la mestre de camp. Quant au 
lieutenant-colonel et au major, dont les emplois 
dans les troupes à cheval n'ont été établis et 
réglés que le i®"^ novembre i685 pour le major 
et le i**" mars 1686 pour le lieutenant-colonel, ils 
n'étaient que capitaines, ce qui n'empêchait pas 
le lieutenant-colonel de pouvoir être nommé bri- 
gadier, c'est-à-dire officier général dans son arme, 
sans avoir possédé un régiment, mais la force des 
choses avait conduit à donner aux plus anciens 
capitaines du corps les fonctions de véritables 
officiers supérieurs. Ce sont ces fonctions qui 
furent systématiquement déterminées par les or- 
donnances de 168 5 et 1686. Le lieutenant-colonel 
et le major n'eurent point de compagnies, excepté 
pourtant les lieutenants-colonels des régiments co- 
lonels généraux de la cavalerie légère et des dra- 
gons. Le lieutenant-colonel fut le premier capitaine 
du régiment •, il commandait en l'absence du 
mestre de camp et jouissait d'une autorité d^au- 
tant mieux justifiée que la plupart des mestres de 
camp étaient des princes ou de jeunes seigneurs 



Les Régiments permanents. i35 

peu expérimentés et plus assidus à la cour qu^à 
leur poste militaire. Dans Tordre de bataille, et 
le mestre de camp présent, le lieutenant-colonel 
commandait le deuxième escadron. Quant au 
major, qui, avant 1686, avait Joué à peu près le 
rôle qui venait d'être dévolu au lieutenant-colonel, 
il descendit d'un rang, et il eut au corps des attri- 
butions d'ordre et de police qui se trouvent par- 
tagées aujourd'hui entre le major et les adjudants- 
majors. C'était un adjoint du chef de corps, 
chargé des détails, et qui, quelle que fût son an- 
cienneté, ne prenait jamais le commandement 
d'une compagnie ou d'un escadron. 

Le régiment, nous l'avons dit, a beaucoup varié 
pour le nombre des compagnies et des escadrons. 
Cette diversité, combinée avec les prérogatives du 
rang d'ancienneté et certains privilèges spéciaux, 
comme la possession de la prévôté ou le droit 
de faire juger les crimes et délits par un conseil 
de guerre du régiment, comme celui de Viistenh 
sile^ c'est-à-dire les voitures d'équipage, objets de 
campements et autres, fourni par le roi, comme 
la distinction du timbalier, étaient des moyens de 
récompenser les services rendus, d'en perpétuer 
le souvenir, et d'encourager les corps, qui ne 
les possédaient pas, à les mériter. Cela demeura 
ainsi jusqu'à 1779. A cette date les régiments 
de gentilshommes avaient à peu près disparu. 
Tous les corps furent égaux et uniformément 



i36 Histoire de la Cavalerie. 

composés de 5 escadrons de 2 compagnies, 4 es- 
cadrons de guerre et i escadron auxiliaire ou de 
dépôt. 

Dans les camps de manœuvres et en temps 
de guerre, 2, 3 ou 4 régiments étaient réunis 
sous les ordres d'un brigadier, et dans les grandes 
armées, l'ensemble de la cavalerie était com- 
mandé par le colonel général, le mestre de camp 
général, ou le commissaire général. 

Sauf la taille des chevaux , la couleur et la 
richesse des uniformes, les compagnies de la 
maison du roi et de la gendarmerie et les régi- 
ments de cavalerie légère et de dragons, présen- 
taient entre eux fort peu de différences essentielles. 
L'armement était partout le même, Tépée longue 
remplacée par le sabre le 22 février 1679, le pis- 
tolet et le mousqueton. Les mousquetaires et les 
dragons portaient le fusil plus petit que celui de 
rinfanterie. Les carabiniers, et plus tard les chas- 
seurs à cheval, se servaient de la carabine. Tous 
faisaient usage de la selle française, avec housse 
ou tapis, fontes et couvre-fontes, excepté les hus- 
sards qui avaient apporté de Hongrie leur selle 
nationale et la schabraque. 

Il n'y avait de cuirassé que le régiment des 
Cuirassiers du roi appartenant à la cavalerie lé- 
gère. Cependant tous les officiers durent long- 
temps encore porter la cuirasse. Louis XIV signa, 
le 5 mars 1676, une ordonnance pour obliger 



Les Régiments permanents, 1 37 

les officiers de cavalerie à porter des cuirasses 
sous peine d^interdiction de leurs charges. Vou- 
lait-il donner par là plus de sécurité aux officiers 
qui, alors* comme aujourd'hui, devaient dans une 
charge fournir le premier rang de Tescadron ? 
Voulait- il simplement les forcer à porter une 
marque qui les distinguât nettement de la troupe ? 
Nous penchons volontiers pour cette dernière 
interprétation, car l'ordonnance de Louis XIV 
a laissé dans notre armée une trace visible. La 
cuirasse, réduite dans ses proportions, existe en- 
core, comme marque de service, dans le hausse- 
col des officiers d'infanterie. 

La cavalerie ne fut systématiquement habillée 
d'une manière uniforme qu'en 1690. Jusque-là, 
la tenue, du moins dans les régiments de gen- 
tilshommes qui étaient de beaucoup les plus nom- 
breux, était restée arbitraire, à la fantaisie des 
mestres de camp. 

Nous donnons ici l'analyse d'une curieuse 
pièce, trouvée dans les tiroirs du roi Louis XIV, 
l'original et l'ébauche probablement du preniier 
règlement fait sur cette matière. Cette pièce offre 
un double intérêt, celui de faire connaître la liste 
des corps à cheval entretenus en 1690 et en 
même temps le premier uniforme qui leur fut offi- 
ciellement imposé. 

Les gardes du corps durent porter l'habit bleu 
turquin à revers rouges et les compagnies se dis- 



12. 



j 



i38 Histoire de la Cavalerie, 

îinguer entre elles par la couleur de la bandoulià^ 
supportant Tépée. 

Les mousquetaires, les gendarmes et chevau- 
légers furent complètement habillés de rouge. La 
compagnie des grenadiers à cheval de la garde, 
dont il n'est pas fait mention, portait, probable- 
ment depuis sa création en 1676, Thabit bleu de 
roi, doublé de rouge et agrémenté de blanc qu^elle 
a toujours eu depuis. 

Sur 1 16 régiments de cavalerie légère, 87 sont 
dé^gnés pour porter Phabit gris à revers rouge. 
C'étaient : Colonel général, Mestre de camp gé- 
néral. Commissaire général, la Reine, Orléans, 
Chartres, Condé, Enghien, Tilladet, Amolfini, 
Bartillat, La Valette, Grignan, Quinson, Saint- 
Aignan, Du Gas, Grillon, Servon, Schomberg, 
Florensac, Varennes, chevalier Duc, Saint-Syl- 
vestre , Heudicourt , Villeneuve , Saint-Valer}' , 
Gournay, Locmaria, Esclainvilliers, Villars, du 
Bordage, Melac, Villeroy, Lumbres, Tallard 
Villacerf, Pelleport, Montgommery, Saint-Mau- 
ris, Girardin, Vivans, Souvré, prince Camille, 
Forsat, Bercourt, Larrard, Villequier, Souter- 
non, Cayeux, Marivault, Villepion, La Bessièrc, 
Brionne, Bourbon, Lestoile, Maure, Praslin, 
du Rozel, Langallerie, Courtebonne, Massot, 
Bissy, Pracomtal, Saint-Simon, Romainville 
Mérinville, Imécourt, Magnac, Coislin, Besons, 
Suilly, Montrevel, Montpeyroux, Châlon, Cour- 



Les Régiments permanents, 139 

celles, Glissy, Vaillac, Boufflers, Narbonne, Ci- 
boure, Pontségut, Doria, Quadt, Puyguyon^ 
Gouriandon, Langallerie 2«. 

Un seul, Aubusson La Feuillade, porte Thabit 
gris blanc avec le revers rouge; 4, Souastre, 
Ghâtelet, comte de Bîssy, Chastelet 2^, ont Thabit 
gris à revers bku; 14 appartenant au roi ou aux 
princes de son sang ont Thabit bleu, Royal, le 
Roi, Royal étranger. Cuirassiers, Cravates, 
Royal-Piémont, Dauphin, Dauphin étranger, 
Bourgogne, Royal allemand, Berry, Grands- 
Royaux, Anjou, avec le revers rouge; un seul 
avec le revers bleu, Royal-Roussillon. Le régi- 
ment de Noailles se distinguait de tous les autres 
par rhabit et le revers rouge. Enfin aucun uni- 
forme n'est indiqué pour 2 régiments français, 
Rassent et Fiennes, ainsi que pour 7 régiments 
étrangers, qui ne servaient sans doute qu'à titre 
auxiliaire, Royal allemand 2®, Quadt 2®, Rot- 
tembourg, Legall, Manderscheid, Furstemberg 
et Geoffreville. 

Sur 3 1 régiments de dragons que nomme la liste 
du roi, 1 5 n'ont pas d'uniforme arrêté, ce sont : 
Barbezières, Pinsonnel, Chevilly, Lalande, Tessé, 
Catinat, Artois, Cilly, Valençay, Gévaudan, An- 
voile, Avaray, Verrue, Breteuil et Gobert. Parmi 
les 16 autres, 2, le Roi et le Dauphin, ont Thabit 
bleu, le premier avec revers rouge, le second 
avec revers bleu ; 1 1 revêtent Thabit rouge. Go- 



140 Histoire de la Cavalerie. 

lonel généjral et Mestre de camp général, avec le 
revers bleu; la Reine, Sailly, Languedoc i®% 
Languedoc 2°, avec le revers rouge; marquis de 
Gramont et Asfeld étranger, avec le revers vert ; 
Fontbeausard et Wartigny, avec le revers jaune ; 
Royal-Gramont, avec le revers Isabelle ; 3 enfin 
ont rhabit vert, Asfeld avec le revers rouge, 
Fimarcon et Boufflers avec le. revert vert. 

On voit que les premiers uniformes de la cava- 
lerie roulaient presque exclusivement sur Temploi 
des 3 couleurs royales, le bleu, le rouge et le 
gris remplaçant le blanc trop difficile à entretenir 
propre. Le bleu était particulièrement affecté 
comme couleur de fond aux régiments royaux 
et le rouge aux dragons. Le vert, qui n'était 
pas une couleur française, apparaît dès cette 
époque chez les dragons. Les différences d'un 
régiment à l'autre s'accusaient surtout par le mé- 
tal des boutons et par la forme et la direction 
des poches. 

Nous n'avons rien trouvé qui permette d'affir- 
mer qu'il y ait eu, sous Louis XIV, un règle- 
ment déterminant la forme et la couleur des 
équipages des chevaux. Tout porte à croire que 
c'était surtout dans cette partie de la tenue gé- 
nérale que la fantaisie du mestre de camp trouvait 
le moyen de se satisfaire, et nous verrons plus 
loin que même au moment de la Révolution, ces 
équipages étaient encore à la livrée du mestre de 



Les Régiments permanents, 141 

camp : mais il y avait déjà, sous Louis XIV, une 
distinction affectée comme un privilège à 4 com- 
pagnies de cavalerie, et cette distinction s'est 
maintenue jusqu'au bout. Les compagnies per- 
sonnelles des colonels généraux de la cavalerie 
et des dragons étaient seules montées sur des 
chevaux gris. On sait d'ailleurs que la dénomi- 
nation des mousquetaires gris et des mousque- 
taires noirs était basée sur la couleur de la robe 
de leurs chevaux. 

Le Toi donnait quelquefois directement un ré- 
giment, soit en commissionnant un officier pour 
lever un corps nouveau, soit en mettant un 
mestre de camp à la tête d'un des régiments 
royaux avec le titre de mestre de camp-lieutenant, 
soit en désintéressant le propriétaire d'un régi- 
ment gris. Mais le plus souvent, les régiments, 
ainsi que les grandes charges, s'achetaient avec 
l'autorisation du roi, et s'achetaient souvent très- 
cher. Pour ne pas insister sur cette matière déli- 
cate, nous nous bornerons à dire qije le comte de 
Tessé acheta, en 1692, 400,000 livres au duc 
de Boufflers la charge de colonel général des 
dragons, et que le comte de Mailly lui paya 
200,000 livres celle de mestre de camp général. 
Ces sommes représenteraient certainement au- 
jourd'hui une valeur double, et il est permis de 
penser que les personnes qui faisaient ces mar- 
chés, outre la distinction et l'autorité .qu'elles ti- 



i 



142 Histoire de la Cavalerie, 

raient de leurs emplois, ne plaçaient pas trop 
mal leur argent. 

Louis XIV essaya plusieurs fois d'imposer une 
limite à cette vénalité des offices militaires, dont 
il sentait tous les inconvénients, mais que Tes- 
prit du temps et la législation ne lui permet- 
taient pas de supprimer. Il taxa en 1689 les 
régiments de gentilshommes à 22,5oo livres et 
les compagnies à 12,000 livres. Il dut encore 
revenir sur ce point en 1698. 

Suivons maintenant dans Tordre chronologique 
les modifications que le temps apporta à Torga- 
nisation que nous venons d'étudier. Le nombre 
des régiments a varié \ on a introduit dans la ca- 
valerie des carabiniers, des hussards, des chas- 
seurs à cheval; on a revu des régiments de che- 
vau-légers ; des régiments àt cavalerie ont été 
transformés en dragons et en cuirassiers ; mais 
tous ces changements, dans ce temps comme 
aujourd'hui, n'ayaient qu'une valeur de circons- 
tance. Le fond est resté le même, parce qu'il n^v 
a, en réalité, que deux espèces de cavalerie pos- 
sible, la cavalerie de ligne et la cavalerie légère, 
et que la force et la proportion de ces deux 
groupes sont déterminées par des conditions qui 
n'ont rien à démêler avec la fantaisie, d'une part 
la valeur et l'iitilité stratégiques que la science 
assigne à chaque époque aux troupes à chevaK 
d'autre part la possibilité de trouver et d'entre- 



Les Régiments permanents. 143 

tenir un nombre déterminé de chevaux de masse 
pour les actions courtes et énergiques et de che- 
vaux d'haleine pour les actions rapides et pro- 
longées. 

Entre autres erreurs, volontaires ou non, il 
en règne une très-enracinée sur la richesse en 
chevaux de la France ancienne. Nous avons 
déjà vu que la simple annonce de la création 
des compagnies d'ordonnance en 1444, avait fait 
hausser le prix des chevaux non-seulement dans 
le royaume, mais aussi dans les Etats du duc 
de Bourgogne. Il ne s'agissait pourtant que de 
9,000 cavaliers, et, en comptant les chevaux de 
main et de bât, que de 12,000 chevaux de toutes 
races ; c'est la pénurie des grands chevaux qyi, à 
la fin du xvi® siècle, a porté le dernier coup aux 
hommes d'armes; c'est la rareté des chevaux de 
service qui a conduit Colbert, quand la cavalerie 
est devenue permanente, à mettre la remonte à 
la charge de l'État; enfin voici qui est explicite: 
c'est un extrait d'un mémoire inséré dans la cor- 
respondance des maréchaux de Broglie et de 
Bellisle. C'est écrit en 1742, après la retraite de 
Prague. « Je ne balance pas à oser avancer que 
« tout ce qui était de ce service (cavalerie et 
« artillerie) peut être regardé comme réduit à 
« une perte de plus de deux tieçs, et qu'ainsi 
« cette dépense devient d'autant plus considé- 
« rable qu'elle tombe presque toute en pure perte 



j 



144 Histoire de la Cavalerie. 



« pour la France, qui ne fournissant pas, pour 
« ainsi dire, de chevaux che^ elle, se trouve 
« obligée d'aller répandre son argent dans le 
« pays étranger, pour remonter sa cavalerie et 
« ses dragons, et remettre Tartillerie et les vivres 
« en état d'entrer en campagne. » 

L'on doit tenir à savoir comment s'est terminé 
le rôle du ban et de Tarrière-ban de la noblesse, 
et nous tenons de notre côté à abriter la respon- 
sabilité qu'une opinion paradoxale pourrait nous 
faire encourir, derrière des autorités que personne 
ne songera à contester, Turenne, Louvois et 
Louis XIV. La noblesse casanière des provinces 
n'avait plus rien à faire dans une armée régu- 
lière. Grands chasseurs, grands mangeurs, maî- 
tres toujours obéis dans leurs familles et par 
leurs vassaux, habitués à être écoutés sans obser- 
vations, très-ménagés par les autorités adminis- 
tratives locales, les gentilshommes campagnards 
étaient peu préparés à la discipline, à l'obéis- 
sance passive, cette grande et essentielle vertu 
du soldat. Les corps formés par leur réunion 
avaient tous les défauts qu'on a depuis justement 
reprochés aux volontaires, celui, entre autres, 
de prendre le titre de volontaires au pied de la 
lettre. 

Le 12 septembre 1674, après la défection de 
l'électeur palatin et de l'électeur de Brandebourg, 
Louvois convoqua le ban et l'arrière-ban. II en 



Les Régiments permanents. 145 

tira 5 à 6,000 cavaliers tels quels et les envoya 
à rarmée de Turenne, alors colonel général — 
il ne faut pas oublier ce fait — et qui tenait tête 
à-Tennemi en Alsace avec 12,000 hommes. Le 
maréchal les fit rétrograder en Lorraine dès le 
mois d'octobre. Ils y commirent maints désordres 
et ils furent renvoyés chez eux en novembre. Le 
2 janvier 1675, on eut encore recours à eux, 
mais cette fois, au lieu du service personnel, la 
noblesse dut payer une imposition, dont le pro- 
duit « fat employé en primes pour la levée de 
« compagnies de cavalerie, à raison de 7,600 li- 
« vres par compagnie de 5o maîtres, soit à 
« 1 5o livres par cavalier équipé et monté. » 

Nous remarquerons que ce système avait été 
déjà mis en pratique sous Louis XI IL 

Le i^"^ octobre 1676, quelques régiments fu- 
rent supprimés. Le roi en fit distribuer les com- 
pagnies dans d'autres corps qu'il avait résolu de 
mettre à 8 compagnies. Il fit aussi à même fin 
passer des compagnies d'un régiment à un autre. 
On sentait l'inconvénient que présentent des corps 
inégaux et des corps trop faibles, dans un temps 
où chaque mestre de camp réclamait son tour de 
marche et prétendait marcher quelle que fût sa 
force et quelque fût le service à faire. 

Un grand nombre de régiments fut réformé 
par ordre du 10 août 1678. Cette réforme diffère 
des précédentes en ce que des mestres de camp 

I. i3 



146 Histoire de la Cavalerie. 

furent incorporés avec leurs compagnies dans 
les régiments conservés, en sorte qu'il y avait à 
ce moment- des corps où il se trouvait 2, 3 et 
même 4 compagnies mestres de camp. • 

Le 24 décembre de la même année, les com- 
pagnies de cavalerie sont réduites à 40 mitres 
et celles de dragons à 48. 

Une ordonnance du 26 décembre 1679 porte 
qu'il y aura désormais 2 carabiniers dans chaque 
compagnie de cavalerie, à Tinstar de ce qui avait 
été fait, dans les dernières guerres, dans les com- 
pagnies des gardes du corps. Ces carabiniers, 
adroits à tirer ^ touchaient i3 livres de solde 
par mois, tandis que les cavaliers ordinaires ne 
recevaient que 12 livres. C'est là l'origine du 
corps des carabiniers. Répétition évidente des 
anciens carabins, les carabiniers ont commencé 
SOU3 Louis XIV, comme les grenadiers de l'in- 
fanterie, par être dispersés dans les compagnies^ 
pour être réunis plus tard en compagnies spé- 
ciales, et enfin en corps. 

Le 24 janvier 1680, le roi accorda un hautbois 
à chaque compagnie de dragons qui n'avait eu 
jusque-là qu'un tambour, rappelant à l'arme des 
dragons qu'elle sortait de l'infanterie. 

Le i®** avril de cette même année 1680 apporta 
aux trompettes et tambours une forte surprise: 
« Défenses faites aux tambours et trompettes 
« d'exiger à l'avenir les 5 sols qu'ils prétendaient 



Les Régiments permanents. 147 

<( leur être dus par les moulins près desquels ils 
« passaient. » On se perd à chercher Torigine 
et la raison de ce singulier impôt frappé sur les 
moulins de la pleine autorité des meneurs de 
bruit de nos anciens régiments. 

A la fin de 1681, le roi avait sur pied 
18,000 chevaux, 38o compagnies de cavalerie 
à 3o maîtres et 126 compagnies de dragons 
à 36. Le 8 mars 1682, la cavalerie est aug- 
mentée de 160 compagnies formées en régiments 
nouveaux. Le 7 mai, nouvelle augmentation de 
25o compagnies; celles de dragons sont portées 
à 40 honunes. Le 27 septembre 168 3, les com* 
pagnies de cavalerie sont également mises à 
40 hommes: on lève 2o5 compagnies nouvelles, 
dont 25 compagnies franches de dragons pour le 
service des côtes. Les compagnies de cavalerie 
composent i5 régiments nouveaux de 12 com- 
pagnies chacun. Ces régiments organisés le 
20 octobre eurent pour noyaux les anciennes 
compagnies réformées, qui furent retirées des 
régiments où elles avaient été mises à la suite. 

Le grade de cornette fut aboli le 26 sep- 
t^nbre 1684, et <:et officier inférieur fut désor- 
mais appelé sous-lieutenant. 

Quelques réformes suivirent la trêve de Ratis- 
bonne. Les compagnies de cavalerie et de dra- 
gons furent réduites à 35 hommes. 

La guerre, commencée en 1688, donna lieu 



148 Histoire de la Cavalerie. 

à la création d'un grand nombre de régiments. 
Une lettre écrite le 14 octobre par Louvois à 
rintendant Titon nous apprend que le roi a 
donné la carabine rayée aux gardes du corps. 
Nous ne croyons pas que cette tentative ait été 
suivie de succès, mais il est bon de la constater. 
Depuis rordonnance du 25 juillet i665, les 
régiments de dragons roulaient avec ceux de 
l'infanterie. Sur la demande des dragons, le roi 
décida, le i®' décembre 1689, que ceux-ci « rou- 
a leraient à l'avenir avec la cavalerie et que les 
« régiments de cavalerie auraient la droite sur 
« les régiments de dragons, quelle que soit Tan- 
« cienneté des uns et des autres, sauf dans les 
« sièges. Dans ce cas, les dragons continueront 
« de rouler avec l'infanterie et prendront sa 
« gauche. » 

Le 3o août 1690, la maison des princes s'aug- 
menta des gendarmes et chevau-légers de Bour- 
gogne, puis le I®'' octobre des gendarmes et 
chevau-légers d'Anjou et des gendarmes et che- 
vau-légers de Berry, créés ou réorganisés pour 
les trois petits-fils de Louis XIV. Disons ici, 
pour n'y plus revenir, que le nombre des com- 
pagnies de la gendarmerie a, jusqu'à la suppres- 
sion de celle-ci, toujours correspondu au nombre 
des princes vivants. 

Le 29 octobre, les carabiniers sont retirés des 
compagnies et forment une compagnie spéciale 



Les Régiments permanents. 149 

attachée à chaque régiment de Panne de la cava- 
lerie. Cette année 1690 fut surtout féconde pour 
les dragons qui atteignirent le sommet de leur 
vogue. Une nouvelle levée de 8 régiments porta 
le nombre de ces corps à 43. 

L'année lôgS vit paraître deux sous-armes 
nouvelles, les carabiniers et les hussards, qui 
devaient fournir une longue carrière. 

Les compagnies de carabiniers attachées aux 
régiments de cavalerie s'étaient fort distinguées à 
la bataille de Neerwinden. Louis XIV, pour leur 
témoigner sa satisfaction, ordonna le i**' no- 
vembre que ces compagnies fussent réunies en un 
seul corps sous le nom de Royal-carabiniers. Il 
en donna le commandement supérieur à son fils 
de prédilection, le duc du Maine, le plaça dans 
la série des régiments de cavalerie après le régi- 
ment de Berry, qui appartenait au plus jeune 
de ses petits-fils légitimes et avant celui de son 
neveu le duc d'Orléans, et l'organisa sur un 
pied si colossal que ce régiment, avec ses 5 bri- 
gades, ses 5o escadrons et ses 100 compagnies 
de cavalerie d'élite, ne pourrait être comparé 
qu'à une de nos divisions de cavalerie de réserve. 
Voici, paraît-il, pourquoi Louis XIV se laissa 
aller à cette création singulière qui constituait 
dans le système de cavalerie qu'il venait d'éta- 
' blir une anomalie aussi étrange que le fut le régi- 
ment Royal- Artillerie au milieu des régiments de 

I. i3. 



j 



i5o Histoire de la Cavalerie, 

rinfanterie. Le roi, poussé par M"*® de Mon- 
tespan, voulait faire au duc du Maine une grande 
situation, et il avait pour cela porté ses vues sur 
la charge de colonel général de la cavalerie légère 
qui, depuis la mort de Turenne, était passée 
comme un héritage à son neveu le comtes d^ Au- 
vergne. Celui-ci fit la sourde oreille à toutes les 
propositions du roi et s'obstina à rester colonel 
général. Le duc du Maine fut dédommagé par 
la création des carabiniers et Tannée suivante 
il devint par surcroît grand maître de rartillerie. 

On a vu qu'il y avait eu dès Tannée i635 des 
régiments de cavalerie hongroise dans Tannée 
française. Le premier régiment qui ait été entre- 
tenu sous le nom de hussards, fut organisé en 
1693 et entra en solde le 19 novembre. Il était 
commandé par Jacques-André Mortany. 

La fin de 1694 vit créer des directeurs généraux 
et des inspecteurs généraux des troupes, ne re« 
levant que du ministre et pourvus d'une autorité 
fort étendue sur tous les détails du service, dans 
des circonscriptions déterminées. Cette création, 
qui réduisit à peu près les charges des colonels 
généraux à de simples titres d'honneur, était sans 
doute nécessaire, mais elle est trop rapprochée du 
refus du comte d'Auvergne pour qu'on n'y voie 
pas aussi l'effet d'une rancune persistante. 

Après la paix de Ryswick, en 1699, il ne resta 
sur pied que 60 régiments de cavalerie et 1 5 de 



Les Régiments permanents. i5i 

dragons. La guerre de la succession d'Espagne 
deux ans après fit renaître tous les régiments dis- 
parus et d'autres encore. L'augmentation de la 
cavalerie légère et des dragons fut de 20,000 ca- 
valiers dans la seule année 1701. Le nombre 
des régiments des deux armes dans ce triste temps 
dépassa le chiffre i35, et l'on s'étonne que la 
France ait pu soutenir pendant quatorze ans un 
pareil armement. De là date, du reste, la ruine 
de ses finances, ruine qui devait plus tard se 
traduire par une révolution. 

En 171 5, après la paix d'Utrecht, on conserva 
58 régiments de cavalerie et i5 régiments de 
dragons. Voici leurs noms : 

CAVALERIE LÉGÈRE. 

Colonel général. Berry. 

Mestre de camp général. Royal-carabiniers. 

Commissaire général. Orléans. 

Royal. ConJé. 

Le Roi. Bourbon. 

Royal étranger. Chartres. 

Cuirassiers du roi. Maine. 

Royal-Cravate. Toulouse. 

Royal-Roussillon. Villeroy. 

Royal-Piémont. Du Tronc. 

Royal-Allemand. Lambesc. 

La Reine. Flesché. 

Le Dauphin. Saint-Aignan. 

Le Dauphin étranger. Gesvres. 

Bretagne. La Tour. 

Anjou» Heudicourt. 



l52 



Histoire de la Cavalerie. 



Aubusson. 


Lénoncourt. 


Tarente. 


Chépy. 


Béringhen. 


Bouzols. 


Vaudray. 


Novion. 


La Rocheguyon. 


Brissac. 


Saint-Germain. 


Barentin. 


Marsillac. 


Marteville. 


Esclainvillers. . 


Rottembourg. 


Villequier. 


Noailles. 


Saint-Pouanges. 


Courcillon. 


Livry. 


Nugent. 


La Ferronais. 


Vaudémont. 


Germinon. 


Rattsky hussards 


* 

DRAGONS. 


Colonel général. 


Caylus. 


Mestre de camp général. 


Lautrec. 


Royal. 


Belabre. 


La Reine. 


Gôesbriand. 


Le Dauphin. 


Saumery. 


Beauff remont. 


T^ Baume. 


Bonnelles. 


Orléans. 


Espinay. 





Tous ces régiments, dont les plus anciens 
avaient eu 12 compagnies pendant la guerre, 
furent ramenés à 8 compagnies de 2 5 hommes 
par un ordre du 28 avril 1 7 1 6. 

L'organisation des troupes à cheval est restée 
sensiblement la même de 17 16 à 1740. Le 
nombre des régiments de cavalerie fut seulement 
augmenté de 2 régiments de hussards par la 
levée de Bercheny en 1720 et d'Estcrhazy en 



Les Régiments permanents. i53 



1734. Tous les régiments furent mis le i*' fé- 
vrier 1727 sur le pied uniforme de 3 escadrons 
de 3 compagnies. Pendant la guerre de 1733, 
Tescadron fut porté à 160 maîtres en 4 com- 
pagnies. 

C'est le moment de donner quelques détails 
sur cette cavalerie qui avait encore la physio- 
nomie que lui avait imprimée Louis XIV, avant 
qu'elle ait subi le contact et Tinfluence des 
Allemands. 

Les régiments étaient tous formés de 8 com- 
pagnies en 4 escadrons. Il y avait autant d'éten- 
dards que de compagnies. Celles-ci étaient fortes 
de 25 hommes au pied de paix et de 40 au pied 
de guerre, ce qui mettait l'escadron à 5o maîtres 
dans le premier cas et à 80 dans le second. La 
formation en bataille était sur 3 rangs, et l'on 
rompait en colonne pai* 3, par demi-compagnie, 
par compagnie et par escadron. 

Chaque compagnie de cavalerie avait 2 trom- 
pettes; la compagnie de dragons i tambour et 
I hautbois. Presque tous les régiments possé- 
daient en outre i timbalier. 

L'armement se composait d'un sabre, d'un 
mousqueton et d'une paire de pistolets dans la 
cavalerie légère ; sauf les carabiniers qui avaient 
une arme un peu plus longue, la carabine. Les 
dragons se servaient d'un fusil plus petit que 
celui de l'infanterie. 



i 



i54 Histoire de la Cavalerie. 

Un seul régiment était cuirassé ; tous les autres^ 
excepté les hussards, portaient le buffle remplacé 
bientôt par une veste de chamois. Les officiers 
ne se conformaient plus à l'ordonnance de 
Louis XIV sur le port de la cuirasse qui n'était 
en usage que parmi les officiers généraux. Les 
officiers portaient le buffle et avaient pour arme- 
ment répée et le pistolet. 

Deux ordonnances royales de 1737 avaient 
réglé la question des étendards. Chaque régiment 
avait autant d'étendards que de compagnies, 
tous semblables dans le même corps, excepté 
dans les régiments des colonels généraux, dont 
la compagnie colonelle portait un étendard ou 
un guidon blanc. Quelques corps, par suite de 
traditions ou de quelque privilège particulier, 
avaient des étendards dont les deux faces n'^é- 
taient pas de la même couleur : l'étendard de 
Gondé, par exemple, était d'un côté bleu, couleur 
royale, et de l'autre ventre de biche, couleur du 
prince propriétaire. Ce qui distinguait essentiel- 
lement les enseignes des troupes à cheval de 
celles des troupes à pied, indépendamment des 
dimensions et de la forme de la pièce d'étoffe, 
c'est que les étendards et guidons ne portaient 
pas la croix et plusieurs couleurs sur la même 
face : ils étaient pleins , d'une seule couleur, le 
plus souvent bleue ou rouge ; jonquille, verte, 
cramoisie, noire, pour quelques-uns ; frangés d'or 



Les Régiments permanents, i55 

ou d^argent et rehaussés par le soleil et la devise 
de Louis XIV, necpluribus impar. 

Les étendards des régiments de hussards 
avaient la forme allongée et étaient fendus en 
pointes. . 

Les guidons des dragons, nous l'avons dit^ 
plus petits que les étendards de la cavalerie, 
étaient ^rectangulaires et le bord flottant était dé- 
coupé en deux demi-cercles. Les régiments de 
dragons avaient, comme ceux de la cavalerie, un 
guidon par compagnie. 

La tenue des cavaliers se composait du grand 
habit à la française, gris, bleu ou rouge, avec 
revers, parements, doublure de couleurs variées, 
manteau, culotte de peau, bottes molles, ban- 
doulière et ceinturon de cuir blanchi et piqué, 
quelquefois des aiguillettes, chapeau noir bordé 
d'or ou d'argent avec cocarde noire. Par exception, 
le colonel général avait la cocarde mi-partie noir 
et blanc. Quelques corps portaient une coiffure 
rappelant leur origine : Royal-Allemand avait le 
bonnet à la polonaise : les hussards portaient le 
schako sans visière et entouré d'une banderolle 
flottante. 

L'équipage du cheval se composait d'une housse 
ou tapis et de couvre-fontes de couleur rouge ou 
bleue et bordées d'un galon de tapisserie de laine 
à la livrée des mestres de camp et tout à fait 
semblable au galon qui orne les voitures de gala. .. 



i56 Histoire de la Cavalerie, 

Ce même galon reparaissait sur Thabit des trom- 
pettes, tambours et hautbois. 

Les dragons étaient, en général, habillés de 
rouge, et se distinguaient par un bonnet d'une 
forme particulière, qui a été Torigine du bonnet 
de police. Les revers ou turbans de ces bonnets 
étaient de la couleur du parement. 

La guerre de la succession d'Autriche, qui 
conduisit notre armée au fond de TAllemagne, 
et dont le début en Bohême fut si nialheureux, 
nous Jeta, comme cela devait être, dans l'engoue- 
ment des choses tudesques. 

La cavalerie reçut une augmentation de 7 ré- 
giments, qui porta presque exclusivement sur 
les hussards. La liste des dragons ne s'augmenta 
que d'un régiment, celui du Roi. 

C'est alors que l'on vit reparaître les légions 
mixtes déjà connues au temps de Louis XIV, 
mais qui cette fois furent copiées sur les pan- 
dours de l'Autriche. On sentait le besoin d'al- 
léger les troupes, de rendre leurs mouvements 
plus rapides. Tout le travail dont la cavalerie va 
être l'objet, à partir de ce moment, tendra vers 
ce but. Les régiments de cavalerie légère, qui 
n'étaient cavalerie légère que de nom, vont pres- 
que tous disparaître comme avait disparu la gen- 
darmerie, et être remplacés par des dragons, des 
hussards et des chasseurs. 

Nous ne reviendrons pas ici sur les légions 



Les Régiments permanents. 



i57 



mixtes ; nous en avons suffisamment parlé dans 
l'histoire de Tinfanterie. Nous rappellerons seu- 
lement que ces corps, composés d'infanterie et 
de cavalerie, exercèrent, par les services qu^ils 
eurent l'occasion de rendre, une influence consi- 
dérable sur la marche des idées. 

Au début de la guerre de Sept ans, en 17 56, 
la j Maison du roi et celle des princes étaient 
encore sur le pied que leur avait donné Louis XIV 
en 1690. La cavalerie comptait 64 régiments et 
le corps des dragons 17. C'était : 

CAVALERIE LÉGÈRE. 



Colonel général. 
Mestre de camp général. 
Commissaire général. 
Royal. 
Le Roi. 

Cuirassiers du roi. 
.Royal-cravate. 
Royal-Roussillon . 
Royal-Piémont. 
Royal- Allemand. 
Royal-carabiniers . 
Royal-Pologne. 
La Reine. 
Le Dauphin. 
Le Dauphin étranger. 
Bretagne. 
Aquitaine. 
Berry. 
Orléans. 



Condé. 

Bourbon. 

Clermont. 

Conti. 

Archiac. 

Penthièvre. 

Poly. 

Lusignem. 

Marcieu. 

Des Salles. 

Talleyrand. 

Clermont-Tonnerre. 

Chabrillant« 

Egmont. 

Beauvilliers. 

Gramont. 

Bourbon-Busset. 

La Vieuville. 

Maugiron. 

14 



à 



i58 



Histoire de la Cavalerie. 



Saint- J al. 

Futnel. 

La Rochefoucauld. 

Vienne. 

Lameth. 

Crussol. 

Fleury. 

Lénoncourt. 

Bellefonds. 

Dampierre. 

Henrichemont. 

Du Moustiers. 

Saluces. 



Wurtemberg. 

Ayen. 

Beuvron. 

Fitz- James. 

Aspremont hussards. 

Escars. 

Bercheny hussards. 

Turpin hussards. 

Polleretzky hussards. 

Beausobre hussards. 

Raugrave hussards. 

Nassau hussards. 

Montcalm. 



Le régiment des carabiniers équivalait avec ses 
25 compagnies à 5 régiments ordinaires. Il éxalt 
partagé en 5 brigades commandées cbacime par 
un mestre de camp. 



DRAGONS. 



Colonel général. 

Mestre de camp général. 

Royal. 

Le Roi. 

La Reine. 

Le Dauphin. 

Orléans. 

Beauffremont. 

Aubigné. 



Caraman. 

La Ferronays. 

Beuvron. 

Apchon. 

Thianges. 

Marbeuf. 

Languedoc. 

Schomberg. 



Tous ces régiments étaient à 4 escadrons de 
1 60 hommes, et donnaient un total de 54,000 ca- 
valiers environ. Avec les troupes de la Mrâon 



Les Régiments permanents. iSg 

du roi et de la Gendarmerie, et en comptant la 
cavalerie des légions mixtes, on atteignait le 
chiffre de 60,000 hommes. 

Après cette fatale guerre de Sept ans, dont les 
résultats ébranlèrent si fortement la confiance 
qu'on avait placée dans les institutions militaires 
de Louis XIV, Topinion s'en prit surtout à la 
cavalerie. Celle-ci subit une réduction considé- 
rable et fut soumise pendant trente ans à une 
série d'essais et à un travail de réorganisation 
pénible, mais qui aboutit à une forme qui devait 
répondre aussi bien que possible aux besoins et à 
l'esprit du temps, puisque la cavalerie qui est 
sortie de ce travail est celle-là même qui s'est 
illustrée dans les guerres de la République et de 
l'Empire. 

Par ordonnante du i *' décembre 1 76 1 , 3 1 ré- 
giments de cavalerie disparurent et furent incor- 
porés dans les survivants, dont les compagnies 
furent doublées d'effectif. 

La cavalerie légère, qui comptait au début de 
la guerre 64 régiments, n'en compta plus que 3 1 , 
y compris les carabiniers et non compris les hus- 
sards. Tous, les régiments de gentilshommes dis- 
parurent, excepté celui de Noailles, et prirent des 
titres de princes ou devinrent royaux avec des 
noms de provinces. Voici les noms et le rang de 
ces corps tels qu'ils forent réglés. 



i6o Histoire de la Cavalerie, 



1. Colonel général. 17. Royal-Normandie. 

2. Mestre de camp général. 18. La Reine. 

3. Commissaire général. 19. Le Dauphin. 

4. Royal. 20. Bourgogne. 

5. Le Roi. 21. Berry. 

6. Royal étranger. 22. Carabiniers de Monsieur. 

7. Cuirassiers du roi. 2>. Artois., 

8. Royal-Cravate. 24. Orléans. 

9. Royal- Roussillon. 25. Chartres. 

10. Royal-Piémont. 26. Condé. 

11. Royal- Allemand. 27. Bourbon. 

12. Royal-Pologne. 28. Clermont. 
i3. Royal- Lorraine. 29. Conti. 

14. Royal-Picardie. 3o. Penthièvre. 

i5. Royal-Champagne. 3i. Noailles. 
16. Royal- Navarre. 

On conserva 3 régiments de hussards : Bcr- 
cheny, Chamborant et Nassau. 

Il ne fut pas touché aux dragons qui restaient 
formés en 17 régiments, la plupart portant des 
noms de gentilshommes, et à la constitution des 
troupes légères mixtes. 

Le I®' mars 1763, la Gendarmerie est dimi- 
nuée de 6 compagnies par Tincorporation des 
compagnies de chevau-légers des princes dans 
les compagnies de gendarmes de même nom. La 
(iendarmerie reste alors composée des 4 onn- 
pagnies appartenant au roi : gendarmes écossais^ 
anglais, bourguignons et de Flandre formant la 
grande gendarmerie, ayant ses quartiers près de 
Versailles, à portée de la personne du roi, et de 



Les Régiments permanents. i6i 

6 compagnies appartenant aux princes : gen- 
darmes de la Reine, du Dauphin, de Berry, de 
Provence, d'Artois et d'Orléans, désignées col- 
lectivement sous le nom de petite gendarmerie, 
ou de gendarmerie de Lunéville, parce que le 
roi leur avait assigné cette garnison, où elle 
faisait le service d'honneur près du roi Stanislas 
son beau-père. 

A la même date du i"" mars 1763, le nombre 
et la composition des corps mixtes d'infanterie 
et de cavalerie légère sont fixés à 6 légions uni- 
formément organisées en 17 compagnies dont 
8 de dragons. C'était les légions de Gonflans, 
Royale, de Flandre, de Hainaut, de Clermont- 
Prince et de Soubise. 

Un règlement de 1762, mis à exécution en 
1763, et qui était la conséquence de la sup- 
pression presque complète des régiments de gen- 
tilshommes, simplifia et fixa l'uniforme de la 
cavalerie et des dragons. Tous les régiments de 
la cavalerie proprement dite eurent l'habit bleu, 
orné de parements, revers, collet, et d'aune seule 
épaulette de laine à la couleur distinctive attribuée 
aux corps ; le manteau gris blanc doublé comme 
l'habit, avec trois brandebourgs de chaque côté 
des faces. Les trompettes des régiments de la 
Reine, des Princes du sang et de Noailles por- 
tent seuls les livrées des propriétaires. Dans tous 
les autres régiments les trompettes portent l'habit 
I. ' 14. 



i62 Histoire de la Cavalerie. 

uniforme avec un petit bordé de galon de soie. 
La coiffure est le chapeau bordé d'un galon 
blanc ou aurore avec la cocarde noire. Le buffle, 
devenu gilet, et la culotte en peau de chamois, 
les bottes molles à Técuyère et l'équipage du che- 
val en drap bleu bordé d'un galon de livrée, 
complètent cette tenue. Les insignes des grades 
sont les mêmes que dans l'infanterie. 

Les hussards conservèrent le dolman à la hon- 
groise, avec trois rangs de bouton, ceux du 
milieu plus gros, boutonnières en cordonnet en 
forme de trèfle, petits parements en équerre, les 
poches et les coutures de la culotte garnies de 
cordonnet. L'aile du schako est de i8 pouces 
dont la moitié repliée ^ fleur de lys sur le devant 
du schako , écharpe - ceinture en laine rouge ; 
manteau vert avec trois agréments de couleur. 
Les officiers ont les galons et le cordonnet 
d'argent. 

Les dragons prennent l'habit vert et le casque 
de cuivre, l'aiguillette de la couleur distinctive 
sur l'épaule droite et une patte sur l'épaule 
gauche. Le manteau est gris blanc avec trois bran- 
debourgs. Les tambours des régiments royaux 
portent la petite livrée du roi ; ceux des autres 
régiments portent celle du mestre de camp. 

Les officiers portent l'aiguillette à droite, et à 
gauche une épaulette entièrement en or ou argent 
pour les capitaines et officiers supérieurs. L'qïau* 



Les Régiments permanents, î63 

lette de lieutenant contient un tier3 de soie aurore 
ou blanche ; celle \le sous-lieutenant , deux tiers ; 
les maréchaux des logis portent Tépaulette entiè- 
rement en soie. 

En 1769, après la pacification de la Corse, on 
organisa une septième légion mixte qui prit le 
nom de légion corse. 

^ordonnance du 17 avril 1772, qui eut sans 
doute sa raison d'être dans le peu d'habileté 
acquise par les cavaliers dans le maniement des 
armes à feu, jfut une nouvelle édition des ordon- 
nances de 161 5 et de 1679; elle réintroduisit 
des soldats bons tireurs dans les compagnies, 
dont la composition fut ainsi arrêtée pour le pied 
de paix : i capitaine, i lijeutenant et i sous-lieu- 
tenant; I fourrier, 2 maréchaux des logis, 4 bri- 
gadiers, 4 carabiniers, 24 cavaliers et i trom- 
pette. Le régiment compta 3 escadrons de 
4 compagnies. Son effectif fut donc de 432 sol- 
dats. 

En 1771 et 1773, le roi Louis XV fit la gra- 
cieuseté à ses deux petits-fils, les comtes de 
Provence et d'Artois, de leur donner à chacun 
2 compagnies des gardes du corps. 

En compensation de ces créations, la com- 
pagnie des grenadiers de la garde, les 2 compa- 
gnies de mousquetaires, les gendarmes de Berry 
et dX)rléans furent licenciés par ordre du 1 5 dé- 
cembre 1775. 



164 Histoire de la Cavalerie. 

Le 25 mars 1776, la composition du r^iment 
des carabiniers fut fixée à 8 escadrons partagés en 
2 brigades. Tous les autres régiments de cavalerie 
furent mis à 6 escadrons , dont 4 de cavalerie, 
I de chevau-légers et i auxiliaire ou de dépôt. 

A la même date, les régiments de dragons, 
dont le nombre fut. porté à 24, sont organisés 
de la même façon, Tescadron de chevau-légers 
est représenté par i escadron de chasseurs à 
cheval. 

Ce furent les régiments de cavalerie et les lé- 
gions mixtes qui firent les frais de cette réor- 
ganisation. 

Sept régiments de cavalerie furent transformés 
en dragons. C'était: Gondé, Bourbon, Clermont 
depuis Conti, Conti depuis Boufflers, Penthièvre, 
Chartres et Noailles. 

Le régiment des hussards de Nassau est sup- 
primé. 

Les 7 légions légères sont également suppri- 
mées. La cavalerie de Tune d'elles forma le ri- 
ment de hussards de Conflans. Les 4^ compagnies 
provenant des 6 autres légions formèrent 24 esca- 
drons de chasseurs à cheval qui devinrent les 
cinquièmes escadrons des 24 régiments de dra- 
gons. Pour obtenir les escadrons de chevau- 
légers attachés aux régiments de cavalerie, on 
n'eut qu'à réunir les carabiniers placés en 1 772 
dans les compagnies. 



Les Régiments permanents. i65 

Un nouveau pas fut fait en même temps dans 
le sens de la simplification de Tuniforme. 

Tous les régiments de cavalerie ont Thabit 
bleu de roi, avec des revers garnis de portes et 
agrafés au lieu d'être boutonnés ; l'équipage du 
cheval est également bleu ; le manteau est gris 
blanc piqué de bleu; le gilet et la culotte blancs, 
les boutons blancs sauf quelques exceptions ; cha- 
peau noir bordé de noir avec cocarde blanche 
semblable à celui de Pinfanterie. 

Les dragons ne diffèrent des cavaliers que par, 
la couleur du fond qui est le vert au lieu du 
bleu, et par la coiffure : ils portent le casque de* 
cuivre à crinière au lieu du chapeau. 

Les régiments sont partagés en séries de trois. 
Chaque série a les revers et les parements d'une 
couleur particulière, et les régiments d'une même 
série se distinguent entre eux par la couleur du 
collet et le métal des boutons, comme il suit : 

Colonel général, le Roi et la Reine : parements 
et revers écarlate ; le premier a le collet écarlate 
et les boutons jaunes, le second a le collet blanc 
et le troisième le collet jonquille. 

Mestre de camp général, Bourgogne et Artois 
portent cramoisi : le premier a le collet cramoisi 
et les boutons jaunes, le deuxième le collet blanc 
et le troisième le collet cramoisi. 

Commissaire général, Royal-Normandie et Or- 
léans sont distingués par la couleur rose; Com- 



i66 Histoire de la Cavale rie. 

missaire général a le collet rose et les boutons 

jaunes ; Royal-Normandie a le collet blanc ; 

Orléans le collet jonquille et les boutons jaunes. 

Royal, Royal-Allemand et Dauphin ont le 
rouge piqué de blanc ; le premier a le collet de la 
même nuance ; le deuxième a le collet blanc et 
porte par exception le bonnet à poil; le troi- 
sième a le collet jonquille. 

Royal étranger, Royal-Navarre et Berry ont 
le blanc pour couleur distinctive. Le premier 
porte le collet blanc, le second écarlate et le troi- 
sième jonquille. 

Les cuirassiers, Royal- Roussillon et Royal- 
Piémont ont les parements et les revers jonquille ; 
le premier a le collet de même, le second le collet 
rose et le troisième le collet blanc. 

Royal-Cravate, Royal- Pologne et Royal-Pi- 
cardie ont la couleur gris argentin -, le premier a 
le collet pareil, le second le collet blanc et le troi- 
sième le collet écarlate. 

Royal-Lorraine, Royal-Champagne et les cara- 
biniers ont les parements- et les revers aurore; 
le premier porte le collet aurore, le second jon- 
quille et le troisième blanc. 

Les dragons sont aussi partagés en séries d'un 
nombre variable de régiments. 

Colonel général, Mestre de camp général, 
Royal et Monsieur ont les revers et les pare- 
ments de couleur écarlate ; les deux premiers 



Les Régiments permanents, lèy 



ont les boutons jaunes; le premier a le collet 
écarlate, le second vert, le troisième blanc et le 
quatrième jonquille. 

Le Roi, Orléans et la Rochefoucauld portent 
le rose ; le premier a le collet pareil, le second 
le collet blanc, le troisième le collet et les re- 
troussis vert. 

La Reine et le Dauphin ont la couleur cramoi- 
sie ; le premier le collet cramoisi, le deuxième le 
collet jonquille. 

Artois, Chartres et Lorraine ont le rouge piqué 
de blanc -, le premier porte le collet pareil, le 
deuxième le collet blanc, le troisième le collet 
jonquille. 

Gondé et Bourbon ont pour couleur de dis- 
tinction le chamois Condé ; le premier a le collet 
de même, Tautre a le collet rouge. 

Conti et BoufBers portent le chamois Conti; 
le premier a le collet rose et le second le collet 
chamois Conti. 

Penthièvre et Custine se distinguent par la 
couleur jonquille ; Penthièvre a le collet jonquille, 
Custine le porte écarlate. 

Jarnac, Belzunce et Noailles sont distingués par 
le blanc ; Jarnac a le collet blanc, Belzunce écar- 
late et NoaiUes rose. 

Lanan, Languedoc et Schomberg portent au- 
rore ; Lanan avec le collet aurore, Languedoc vert 
et Schomberg jonquille. 



i68 Histoire de la Cavalerie. 



Le> régiments de hussards, dont la tenue 
comme ensemble a très-peu varié jusqu'à ces 
derniers temps, eurent des couleurs de fond 
et de distinction particulières à chaque régiment. 

Bercheny portait la pelisse, le dolman et la 
culotte bleu de ciel foncé, les parements et les 
retroussis garance, les boutons et les passemen- 
teries blancs, le schako noir, bordé de noir et 
doublé de rouge. 

Ghamborant différait de Bercheny par la cou- 
leur du fond, qui était le marron au lieu du bleu 
de ciel. 

Estherazy était gris argentin. Gonflans était 
habillé de vert ; ses boutons étaient de métal 
jaune, et le schako était doublé de vert. 

L'organisation de 1776 ne fut qu'une tran- 
sition. Une ordonnance du 29 janvier 1779 
remanie encore une fois toutes les troupes à 
cheval. Les escadrons de chevau-légers sont re- 
. tirés des régiments de cavalerie et forment 6 nou- 
veaux régiments, dénommés régiments de chevau- 
légers, et numérotés de la droite à la gauche sans 
titres particuliers. Les escadrons de chasseurs à 
cheval sont pareillement enlevés aux régiments 
de dragons pour être organisés en 6 régiments 
de chasseurs à cheval numérotés de i à 6, sans 
titres spéciaux. 

Les régiments de chevau-légers prennent rang 
à la suite des régiments de cavalerie dont ils 



Les Régiments permanents. 169 

« 

sortent, avant les hussards. Les régiments de 
chasseurs prennent par la même raison la gauche 
des régiments de dragons. 

Les régiments de hussards, dont le nombre 
est porté à 5, forment une arme à part, dont le 
duc d'Orléans devient colonel général. 

L'ensemble des troupes à cheval, en 1779, 
comptait donc : 



MAISON DU ROI. 



4 compagnies des gardes du corps. 
Compagnie des gendarmes de la garde. 
— des chevau-légers de la garde. 



MAISON DES PRINCES. 



2 compagnies des gardes du corps de Monsieur. 

— — du comte d'Artois 



GRANDE GENDARMERIE. 



Compagnie des gendarmes écossais. 

— — anglais. 

— — bourguignons. 

— — de Flandre. 



PETITE GENDARMERIE. 



Compagnie des gendarmes de la Reine. 

— — du Dauphin. 

— — de Monsieur. 

— — d'Artois. 



i5 



i 



170 Histoire de la Cavalerie, 

K^GIMENTS DE CAVALERIE. 
Cavalerie proprement dite. 

1. Colonel général. i3. Royal-Lorraine. 

2. Mestre de camp général. 14. Royal-Picardie. 

3. Commissaire général. i5. Royal-Champagne. 

4. Royal 16. Royal-Navarre. 

5. Le Roi. 17. Royal-Normandie. 

6. Royal étranger. 18. La Reine. 

7. Cuirassiers du roi. 19. Le Dauphin. 

8. Royal-Cravate. 20. Bourgogne. 

9. Royal- Roussillon. 21. Berry. 

10. Royal-Piémont. 22. CarabiniersdeMonsieur. 

11. Royal- Allemand. 23. Artois. 

12. Royal-Pologne. 24. Orléans. 

Chevau-légers, 6 régiments numérotés de i à 6. 

HUSSARDS. 

i . Colonel général. 4. Esterhazy. • 

2. Bercheny. 5. Conflans. 

3. Chamborant. 

Le colonel général des hussards ne îiit réelle- 
ment formé qu'en 1783. Il est probable que ce 
retard fut causé par des difficultés soulevées pour 
le rang. 

DRAGONS. 

1 . Colonel général. 7. Monsieur. 

2. Mestre de camp général. 4^8. Artois. 

3. Royal. 9. Orléans. 

4. Le Roi. 10. Chartres, ex-cavalerie. 

5. La Reine. 11. Condé, — 

6. Le Dauphin 12. Bourbon, — 



Les Régiments permanents. 171 

i3. Conti, ex-cavalerie. 1 9. Chabot. 
14. Penthièvre, — 20. Lanan. 

i5. Boufflers, — 21. Belzunce. 

16. Lorraine. 22. Languedoc. 

17. Custine. 23. Noailles. 

18. La Rochefoucauld. 24. Schomberg. 

Chasseurs à cheval, 6 régiments numérotés de i à 6. 

La tenue des corps est nnodifiée en même temps 
que Torganisation. 

La cavalerie et les dragons prennent Thabit à 
la française, bleu pour la cavalerie, vert pour les 
dragons^ la veste de drap, la culotte de peau, 
de nuance naturelle, le manteau gris blanc piqué 
de bleu. 

La cavalerie porte toujours le chapeau, excepté 
Royal- Allemand ; les dragons le casque, et les 
hussards le schako. Les chevau-légers ont Phabit 
bleu et le chapeau comme la cavalerie ; les chas- 
seurs à cheval qui sortent des dragons ont Phabit 
vert et un casque plus petit qpe celui des dra- 
gons, sans crinière flottante, mais avec une 
aigrette noire suivant le contour du cimier. 

Tous les régiments de cavalerie ont les poches 
en travers comme celles de la gendarmerie ac- 
tuelle, la veste chamois, et sont divisés en huit 
classes ayant chacune leur couleur de distinc- 
tion. La première classe a seule les boutons 
jaunes ; toutes les autres portent les boutons 
blancs. Le premier régiment de chaque classe a 



172 Histoire de la Cavalerie. 



les revers et les parements de la couleur dis- 
tinctive, le second les revers seulement et le troi- 
sième les parements. Royal-Allemand seul a le 
collet de la couleur de la classe à laquelle il 
appartient. La division par classes est ainsi 
établie. 

Écarlate. — Colonel général, Mestre de camp général. 
Commissaire général. 

Écarlate. — Royal, le Roi, Royal étranger. 

Jonquille. — Cuirassiers du roi, Royal-Cravates, Royal- 
Roussillon. 

Cramoisi. — Royal -Piémont, Royal -Allemand, Royal- 
Pologne. * 

i4 wrore. — Royal- Lorraine, Royal-Picardie, Royal-Cham- 
pagne. 

Rose. — Royal-Navarre, Royal-Normandie, la Reine. 

Gris argentin. — Le Dauphin, Bourgogne, Berry. 

Bleu de ciel. — Carabiniers de Monsieur, Artois, Or- 
léans. 

Les chevau-légers avaient la patte de poches 
en long, les boutons blancs, les revers et pare- 
ments des couleurs suivantes: 

I®' régiment, écarlate-, 2®, cramoisi; 3*, bleu 
de ciel; 4®, chamois-, 5*, aurore, et 6*, blanc. 

Point de changements essentiels dans la tenue 
des dragons. 

Les chasseurs à cheval n'avaient pas de poches 
marquées : leurs boutons étaient blancs, et ils se 
distinguaient entre eux de la manière suivante : 
le premier régiment avait les revers et les parc- 



Les Régiments permanents, ij3 



ments de couleur écarlate ; le deuxième, cramoisi ; 
le troisième, jaune citron ; le quatrième, cha- 
mois -, le cinquième, aurore, et le sixième, blanc. 

Dans les régiments de hussards, Bercheny 
continuait à porter la tenue réglée en 1776; la 
bordure du schako était devenue blanche. Cham- 
borant ne subissait aucun changement. Esterhazy, 
toujours habillé de gris argentin, avait les re- 
troussis garance *, son schako était bordé et dou- 
blé de blanc ^ ses boutons étaient jaunes. Conflans 
était pareil à Estherazy, à la couleur du fond 
près, qui était verte. Colonel général prit la 
pelisse écarlate, le dolman et la culotte bleu de 
roi, les parenients et retroussis écarlate, les bou- 
tons et les. passementeries jaunes-, le schako noir, 
doublé d'écarlate et bordé de noir. 

Ce règlement de I77j9 sur Thabillement des 
troupes a été refondu en 1 786, dans un nouveau 
règlement portant la date du i" octobre. Nous 
tiendrons compte, aux notices particulières des 
corps, des changements qu'il a consacrés et de 
certains détails relatifs à l'équipage des chevaux; 
nous n'en extrairons pour le moment que le 
point suivant. Il se rattache à une question, dont 
on saisit difficilement le sens aujourd'hui, et qu'il 
importe d'éclairer. 

« Les mestres de camp commandants des ré- 
« giments auxquels le Roi fournit les étendards, 
« les guidons et les banderolles de trompettes, 

I. i5. 



174 Histoire de la Cavalerie. 

« sont tenus de la dépense des lances et de 
« faire les frais de la monture, de la fourniture 
«. et de Pentretien des cravates de taffetas. » 

Il y avait donc, en 1786, des régiments aux- 
quels le roi fournissait les étendards et d'autres 
régiments auxquels il ne les fournissait pas, dans 
lesquels les mestres de camp devaient pourvoir à 
toutes les dépenses des enseignes. Quels étaient 
les régiments favorisés ? Evidemment les régi- 
ments royaux, ceux dont le roi lui-même était 
colonel propriétaire. La règle était donc que les 
étendards fussent fournis par les propriétaires, 
roi, princes du sang ou simples gentilshommes. 
Cette règle était exclusive de Puriiformité des 
drapeaux dans Parmée, et par le fait chaque 
régiment avait le sien. Il y avait des types gé- 
néraux pour les drapeaux de Tinfanterie, pour 
les étendards et guidons de la cavalerie et des 
dragons, mais ces types n'imposaient que la 
forme et les dimensions ; les couleurs étaient va- 
riables et arbitraires. 

Nous donnons ici une pièce, qui se rapporte à 
cette question , et qui confirme l'explication que 
nous avons admise. Elle est curieuse à plus d'un 
titre. C'est une requête adressée au roi, le 23 mai 
1758, par le duc d'Orléans, grand-père du roi 
Louis-Philippe. 

« Le Roy a la bonté de faire fournir au régi- 



Les Régiments permanents. , lyS 

« ment de dragons d'Orléans les étendarts comme 
« à tous les régiments royaux. » 

Il est à noter que ce régiment avait été créé par 
le régent au moment où il faisait fonction de roi. 

« Monseigneur le duc d'Orléans sçait bien que 
« cet usage ne s'observe point pour les autres 
« régiments de princes ; mais cette distinction flat- 
« teuse pour la maison d'Orléans et pour ses 
« régiments, à qui cela rappelle qu'ils ont eu 
« rhonneur d'appartenir au frère unique du Roy, 
« est trop précieuse pour que Monseigneur le duc 
« d'Orléans ne désire pas avec le plus grand em- 
« pressement de le conserver. Le Prince demande 
« qu'il soit établi d'une manière stable que son 
« régiment de cavalerie d'Orléans soit traité 
<( comme celui de dragons d'Orléans à qui les éten- 
« darts sont fournis par le Roy. Il espère aussi 
« que Sa Majesté voudra bien qu'il en soit usé 
« de même pour le régiment de cavalerie qu'elle 
« vient d'accorder à M. le duc de Chartres. 

« On observe, quant à l'objet de la dépense, 
« que monseigneur le duc d'Orléans en fait déjà 
« beaucoup pour ses régiments, à qui il accorde 
« des pensions dont l'objet est considérable. 

« Sigjié: L.-Phil. d'Orléans. » 

On lit en marge, de la main de Louis XV : Bon. 
En 1784, on était encore revenu aux corps 



i 



176 Histoire de la Cavalerie. 

mixtes. Les bataillons de chasseurs à pied et les 
régiments de chasseurs à cheval étaient mariés et 
formaient par leur réunion deux à deux, 6 légions 
qui avaient reçu les noms de Chasseurs des 
Alpes, des Pyrénées, des Vosges, des Cévennes, 
du Gévaudan et des Ardennes. Enfin le 1 7 mars 
1788, on renonça à ces agrégations et les 6 ré- 
giments de chasseurs reconstitués comme ils 
Pavaient été en 1 779, prirent les noms de Chas- 
seurs à cheval de Picardie, Guyenne, Lorraine, 
Bretagne, Normandie et Champagne. Le nombre 
de ces régiments fut porté à 12, par la transfor- 
mation des 6 régiments de dragons de Boufflers^ 
Montmorency, Deux-Ponts, Durfort, Ségur et 
Languedoc, qui prirent respectivement les noms 
de Chasseurs d'Alsace, des Évêchés, de Flandre^ 
de Franche-Comté, du Hainaut et ^u Languedoc^ 
et en même temps la tête de Parme en raison de 
leur ancienneté. 

Les 6 régiments de chevau-légers qui avaient 
pris rang en 1784 dans la cavalerie proprement 
dite sous les titres d'Orléanais, des Évêchés, de 
Franche-Comté, de Septimanie, de Quercy et de 
La Marche, sont licenciés en 1788, excepté 
Orléanais qui devient Royal-Guyenne-cavalerie. 

Dans cette organisation du 17 mars 1788, qui 
fut une refonte générale des troupes à cheval, le 
régiment des carabiniers qui, tout en comptant 
à son rang de création parmi les régiments de 



Les Régiments permanents. 177 

cavalerie légère avait toujours eu un effectif 
élevé et une organisation spéciale, est partagé. en 
2 régiments, formant une brigade. Ces régiments 
de carabiniers devaient trois ans plus tard prendre 
la tête des troupes à cheval, comme grenadiers 
de la cavalerie. 

Tout ce qui restait encore de Pancienne Gen- 
darmerie, gendarmes et. chevau- légers de la 
garde, grande et petite Gendarmerie, disparut le 
ler avril 1788, en suite d'une ordonnance du 
3o septembre 1787. Le roi ne conserva de toute 
la splendide Maison formée par ses prédéces- 
seurs que les 4 compagnies des Gardes du corps 
qui devaient, elles aussi, bientôt disparaître. 

Le nom illustre de la Gendarmerie fut pour- 
tant maintenu par la République. Ce nom passa 
à la Maréchaussée, qui prit un grand développe- 
ment, un développement proportionné aux libertés 
que les citoyens se donnaient. Dès cette époque, 
d'ailleurs, le nom de Maréchaussée n'avait plus 
de sens clair ; cette troupe n'était plus seulement 
l'exécutrice des arrêts du tribunal des maréchaux 
de France •, elle servait à la police générale du 
royaume. 

Comme couronnement enfin aux réformes opé- 
rées par Louis XVI en 1788, il ne faut pas 
oublier la suppression des colonels généraux, des 
mestres de camp généraux et du commissaire 
général de la cavalerie. En conséquence de cette 



I 

i 



178 Histoire de la Cavalerie. 

suppression, les chefs des régiments prirent pour 
la première fois, en 1788, le titre de colonel. 

De ce qui précède, il résulte que la monarchie 
avait sur pied à ce moment' extrême, outre les 
Gardes du corps qui furent licenciés en 1791, 
26 régiments de cavalerie, dont 2 de carabiniersy 
18 régiments de dragons, 6 régiments de hus- 
sards et 12 régiments de chasseurs à cheval, en 
tout 62 régiments de 4 escadrons chacun, dont 
voici les noms et le rang: 



CAVALERIE. 


I. Colonel général. 


i5. Royal- Champagne. 


2. Mestre de camp générai. 


16. Royal- Navarre. 


3. Commissaire général. 


17. Royal-Normandie. 


4. Royal. 


18. La Reine. 


5. Le Roi. 


19. Le Dauphin. 


6. Royal étranger. 


20. Royal-Bourgogne. 


7. Cuirassiers du roi. 


21. Berry. 


8. Royal-Cravate. 


22. ler Carabiniers de Mon- 


9. Royal- Roussillon. 


sieur. 


10. Royal-Piémont. 


22 bis, 20 Carabiniers. 


II. Royal-Allemand. 


23. Artois. 


12. Royal- Pologne. 


24. Orléans. 


f3. Royal- Lorraine. 


25. Royal-Guyenne. 


14. Royal- Picardie. 




HUSSARDS. 


I. Colonel général. 


4. Salm. 


2. Bercheny. 


5. Saxe. 


3. Chamborant. 


6. Lauzun. 



Les Régiments permanents, 179 

■ » 

DRAGONS. 

1. Colonel général. 10. Chartres. 

2. Mestre de camp général. 11. Condé. 

3. Royal. 12. Bourbon. 

4. Le Roi. i3. Conti. 

5. La Reine. 14. Penthièvre. 

6. Le Dauphin. i5. Lorraine. 

7. Monsieur. 16. Angoulême. , 

8. Artois. 17. Noailles. 

9. Orléans. i8. Schomberg. 

CHASSEURS. 

1. Alsace. 7. Picardie. 

2. Évêchés. 8. Guyenne. 

3. Flandre. 9. Lorraine. 

4. Franche-Comté. 10. Bretagne. 

5. Hainaut. 11. Normandie. 

6. Languedoc. 12. Champagne. 

C'est cette cavalerie, comptant 62 régiments, 
248 escadrons, et encadrant 40,000 hommes, 
que Tancienne monarchie a léguée à la République 
et à r Empire. La Convention qui eut la faiblesse 
insigne de bouleverser Pinfanterie pour plaire 
aux sans-culottes, et qui paya cette folie par les 
désastres de la campagne de 1793, et par les 
honteuses et constantes déroutes de Parmée révo- 
lutionnaire devant les paysans de la Vendée, 
n'osa pas pousser l'insanité jusqu'à toucher aux 
troupes à cheval. C'est cette cavalerie, dont quel- 
ques escadrons suffisaient pour fixer le résultat 



i8o Histoire de la Cavalerie. 

d'une journée, qui, menée par des hommes 
comme Kellermann, Murât, Bessières, La Salle, 
Montbrun, et tant d'autres chefs illustres, a joué 
le plus beau rôle qu'il ait jamais été donné aux 
troupes à cheval de jouer dans les batailles. 



Transformations postérieures à ij8g, i8i 



CHAPITRE V. 

TRANSFORMATIONS POSTÉRIEURES A IjHc). 

La loi du i®"" janvier 1791, qui régla à nouveau 
la composition de Parmée, fit perdre, du moins 
officiellement, aux régiments les noms et les titres 
SOUS lesquels ils avaient combattu jusque-là.- Le 
rang et le numéro. de beaucoup d'entre eux furent 
même changés, dans le but de faire disparaître 
toutes les traces.de Pancienne étiquette militaire 
et de placer les corps dans Tordre de leur véri- 
table ancierineté. LMntention des législateurs était 
bonne, mais ils * n^avaient, pour établir ce nou- 
veau numérotage, que des traditions vagues sur 
Torigine de ' la plupart des corps, quand cette 
origine remontait au delà du xviii^ siècle. Alors 
comme aujourd'hui, et probablement plusqu'âu- 
jourd'hui, les archives du département de la 
guerre ne renfermaient que peu de pièces, relatives 
à Torganisation des troupes pour les temps antc-. 
rieurs à Louis XV, et ces pièces' elles-mêmes ne 
fournissent le plus souvent que des motifs d'in- 
duction, des éléments de critique historique, ra- 
1. 10 



i82 Histoire de la Cavalerie. 

renient des réponses directes. Aussi les auteurs 
de la loi de 1 79 1 ont-ils été quelquefois à côté de 
la vérité, et ont-ils soulevé des réclamations, qui 
se. sont, à la vérité, perdues dans la débâcle gé- 
nérale du pays. 

Quoi qu'il en soit, voici le classement tel qu'il 
fut arrêté en 1 79 1 : 

lerde carabiniers ) provenant du dédoublement des ca- 

20 de carabiniers ) rabiniers de Monsieur. 

!•<• de cavalerie ex-Colonel général. 

2« — ex-Royal. 

30 — ex-Commissaire général. 

4« — ex-régiment de la Reine. 

5« — ex- Royal- Pologne. 

60 — ex-régiment du Roi. 

7« — • ex- Royal-étranger. 

8« — ex-cuirassiers du Roi. 

9» — ex-Artois, 

lo® — ex- Royal-Cravates. 

11'= — ex-Royal-Roussillon. 

i2« — ex-régiment du Dauphin. 

i3o — ex-Orléans. 

i4« — ex- Royal-Piémont. 

1 5» — ex-Royal-allemand. 

16" — ex- Royal- Lorraine. 

17e — ex- Royal-Bourgogne. 

i8e — ex-Berry. 

198 — ex- Royal-Normandie. 

20® — ex- Royal-Champagne. 

210 — ex- Royal- Picardie. 

22e — ex-Royal-Navarre. 

23 « -— ex- Royal-Guyenne. 

240 — ex-Mestre de camp général. 



Transformations postérieures à l'jSg, t83 

Ce dernier régiment, dont on faisait remonter à 
tort la création à i652, aurait ' du occuper le 
sixième rang, après Royal-Pologne ; mais il ve- 
nait d'être cassé à la fin de 1790, après les 
troubles de Nancy, et rétabli quelques jours plus 
tard en prenant la queue de tous les autres. 

Cette série des régiments de cavalerie fut al- 
térée dès le printemps de 1792 par Témigration 
de Royal-allemaijd qui portait le numéro i5. 
Comme conséquence, les régiments qui avaient 
reçu les numéros 16 et suivants, avancèrent tous 
d'un rang. 

Le numéro 24, resté vacant, fut repris en 1 798 
par un des deux régiments nouveaux qui venaient 
d'être formés à l'Ecole militaire, par ordre du 
4 février, sous les numéros 25 et 26, pour débar- 
rasser Paris d'une bande de soldats déserteurs. 
Le vingt-cinquième prit le numéro 24, et le vingt- 
sixième devint le 2 5". 

La liste des régiments de dragons fut formée 
de la manière suivante : 

ler de dragons, ex- Royal-dragons. 

2« — ex-Condé-cavalerie. 

3® — ex-Bourbon-cavalerie. 

4® — ex-Conti-cavalerie. 

5*^ — ex-Golonel général-dragons. 

G» — ex- La Reine-dragons. 

7*' — ex-Le Dauphin-dragons. 

8*" — ex-Penthièvre-cavalerie. 

O** — ex- Lorraine-dragons. 



184 


Histoire de la Cavalerie, 


loe de dragons ex-Mestre de camp général-dragons. 


ne _ 


ex-Angoulêuie-dragons. 


120 — 


ex-Artois-dragons. 


i3e 


ex-Monsieur-dragons. 


14e — 


ex-Chartres-cavalerie. 


i5e _ 


ex-Noailles-cavalerie. 


ihe 


• ex-Orléans-dragons. 


17e - 


ex-Schomberg-dragons. 


l8e — 


• ex-régiment du Roi-dragons. 



Trois nouveaux régiments de dragons furent 
formés en 1793 et prirent rang à la suite des 
anciens. Le 19® fut composé des volontaires 
d'Angers et de cavaliers des légions du Nord et 
des Francs ; le 20^ avec les dragons volontaires, 
dits de Jemmapes, et le 21® des dragons de la 
Manche et de la cavalerie de la légion de police, 
qui provenait en partie des gardes-françaises. 

Le nombre des régiments de chasseurs à 
cheval s'élevail à 12 en 1791. Ces régiments 
étant de formation récente, il ne fut rien changé 
au classement qui leur avait été assigné eh 1788. 

I er de chasseurs à cheval, ancien Alsace , ex - dragons de 

Boufflers. 
2e — — ancien Évêchés, ex-dragons de 

Montmorency. 
30 — ^ — ancien Flandre, ex-dragons de 

Deux-Ponts. 
4^ — — ancien Franche -Comté, ex- 

dragons de Durfort. 
b'^ — — ancien Hainault. cx-Jragons Je 

Ségur. 



Transformations postérieures à ij^'f/, i85 



ôo de chasseurs à cheval, ancien Languedoc, ex-dragons 

de Languedoc. 

7e — — ancien Picardie. 

8e — — — Guvenne. 

0" — ' — -^ Lorraine. 

10© — • — — Bretagne, 

ne — — — Normandie. 

12e — — — - Champagne. 

Nous devons noter ici qu'un décret du 24 sep- 
tembre 1791, qui ne semble pas avoir reçu sa 
pleine exécution, revenant encore à Tidée des lé- 
gions mixtes, prescrivit l'organisation de 6 corps 
de ce genre, comprenant chacun 2 bataillons 
de chasseurs à pied et i régiment de chasseurs 
à cheval. Ces légions furent ou devaient être com- 
posées comme il suit avec les 12 bataillons de 
chasseurs à pied existant et G des régiments de 
chasseurs à cheval : i ""^ légion : 5*^ et i o^ batail- 
lons de chasseurs à pied et i ®^ régiment de chas- 
seurs à cheval; 2^ légion: 3^ et" 8° bataillons, 
4^ régiment'; 3® légion : i*''* et 6® bataillons, 6® ré- 
giment ; 4P légion : 4^ et 7^ bataillons, 9° régi- 
giment ; 5^ légion : 2^ et 7^ bataillons, 10^ ré- 
giment ; 6® légion : 6® et 1 2® bataillons, 1 2^ 
régiment. 

De 1793 à 1795, i3 régiments de chasseurs 
à cheval furent formés et prirent rang à la suite 
des 12 premiers, c'étaient: 

i3o de chasseurs à cheval, ex -cavalerie de la légion 
américaine. 

1. 16. 



i86 Histoire de la Cavalerie. 

i4« de chasseurs à cheval, ex-hussards de l'Égalité, de la 

Mort, etc. 
i5e — — ex-chasseurs bretons et bour- 

guignons. 
i6e — — ex-chasseurs de La Bretesche. 

17e — — ex-chevau-légers belges. 

188 — — ex -chasseurs et dragons de 

Bruxelles. 
19e — — ex-légion de Rosenthal. 

2oe — — ex-cavalerie de la légion de la 

Moselle. 
2i<> — — ex-hussards braconniers. 

328 — — ex-cavalerie de la légion des 

Pyrénées orientales. 
2 3« — . — ex-hussards de la légion des 

Ardennes. 
24® — — ex -chasseurs volontaires de 

Rayonne. 
25® — — ex-chasseurs de la Montagne. 

Nous négligeons de mentionner d'autres corps 
aussi bizarres de noms que de composition, qui 
n'ont pas survécu aux réformes de 1795. Il suffit 
de constater que la Convention avait senti la né- 
cessité de mettre un frein aux excès de zèle des 
patriotes, de régulariser les éléments utiles et de 
casser le reste. 

Les anciens régiments de hussards furent clas- 
sés en 1791 dans Tordre suivant, et à la queue 
de la cavalerie. 

ler de hussards, ancien Bercheny. 
2e — — Chamborant, 



Transformations postérieures à lySg, 187 

3^ de hussards, ancien Esterhazy. 
4e — — Saxe. 

5» — — Colonel général. 

6« — — Lauzun. 

Le régiment de Saxe émîgra en 1792, ce qui 
fit monter les deux derniers d'un rang. A ces 
5 régiments anciens vinrent s'en ajouter 8 autres 
de 1792 à 1794. 

6« de hussards, créé 7® en 1792, ex-troupes légères à 

cheval de Boyer. 
7e — ex-hussards de Lamothe. 

7» bis de hussards, ex-ier corps des hussards de la Li- 
berté. 
8» — ex-éclaireurs à cheval de Fabrefonds. 

9« — ex-2'' corps des hussards de la Liberté, 

loe — ex-hussards de Jemmapes. 

II» — ex-cavalerie des légions germanique et 

révolutionnaire. 
12e — ex- volontaires des Pyrénées occiden- 

tales. 

En résumé, la cavalerie régulière des armées 
de la Convention se composait de : 

2 régiments de carabiniers. 



25 




de cavalerie. 


21 




de dragons. 


25 


— 


de chasseurs à cheval. 


i3 




de hussards. 



Total 86 régiments. 

Le Directoire eut un instant la velléité de 
réduire ces chiffres; Un arrêté du 8 janvier 1796 



i8S Histoire de la Cavalerie, 

fixait la composition de la cavalerie à 5i régi- 
ments, 20 de cavalerie de ligne, 12 de dragons, 
1 1 de chasseurs et 8 de hussards ; mais un autre 
arrêté du 17 janvier annula le premier : tout se 
borna à la suppression en 1795, des 17' et 18^ de 
chasseurs d'origine belge, dont les numéros res- 
tèrent vacants et à celle du 21'' de dragons qui 
n'eut lieu qu'à la fin de 1798. Les choses demeu- 
rèrent ainsi jusqu'au Consulat. 

Le 26 août 1801, le i*"" régiment de dragons 
piémontais fut incorporé dans l'armée française 
et y devint le 21'' de dragons. Un autre régiment 
de dragons piémontais fut transformé le même 
jour en 26® de chasseurs à cheval. 

Le 23 décembre 1802, les 5°, 6® et 7° régi- 
ments de cavalerie, sont cuirassés comme Tétait 
déjà le 8«. 

L'arrêté consulaire du i®'" vendémiaire an XII 
(24 septembre i8o3), apporta de profondes mo- 
difications dans l'organisation de la cavalerie. 
Celle-ci devait comprendre 80 régiments, savoir : 

2 régiments de carabiniers. 
12 — de cuirassiers. 
3o — de dragons. 
26 — de chasseurs à cheval. 

10 — de hussards. 

\o\z\ comment on arriva à cette nouvelle ré- 
partition de.> sous-armes. 

Les [2 premiers régiments de cavalerie furent 



Transformations postérieures à ijSg, 189 



cuirassés. On ^ vu que les 5^, 6®, y*' et 8®, 
Tétaient déjà depuis un an. Ils prirent le nom 
de cuirassiers. 

Les régiments de cavalerie, portant les numé- 
ros de i3 à 18, passèrent dragons et prirent dans 
cette arme les numéros 22, 23, 24, 25, 26 et 27. 

Les régiments de cavalerie, portant les numéros 
de 19 à 25, furent licenciés et leurs éléments 
versés dans d'autres corps. 

Le 7^ bis de hussards, le 11^ et le 12*^ de 
hussards sont devenus les 28®, 29^ et 30*^ de 
dragons. 

Les numéros 17 et 18 demeurèrent provisoi- 
rement vacants dans Tarme des chasseurs à 
cheval, qui ne compta en réalité que 24 ré- 
giments. 

A ce moment, voici ce qu'étaient devenus les 
survivants des régiments de cavalerie légués par 
la monarchie à la république. 

Dénominations anciennes. Dénominations nouvelles. 



lordecarabinicrs j j^j^^^^j^^^^ 


ler 

26 


de carabiniers. 


Colonel général-cavalerie, 


ler 


de 


cuirassiers. 


Royal, 


20 






Commissaire général, 


30 






I^ Reine, 


4^ 






Royal -Pologne, 


50 




— 


Le Roi,, 


(')e 






Royal-étranger, 


i 




- 



igo Histoire de la Cavalerie, 

Cuirassiers du roi, 8® de cuirassiers. 

Artois, 9» — 

Royal-Cravates, loc — 

Royal-Roussillon, ne — 

Le Dauphin, i2« — 

Royal-dragons, i» de dragons. 

Condé, ex-cavalerie, 2® — 

Bourbon, ex-cavalerie, 3® — 

Conti, ex-cavalerie, 40 — 

Colonel général-dragons, 5^ — 

La Reine, 6» — 

Le Dauphin, 7e — 

Penthièvre, ex-cavalerie, 8® — 

Lorraine, 9e — 

M estre de camp général, loe — 

Angoulême, ii» — 

Artois, 12e — 

Monsieur, i Se — 

Chartres, ex- cavalerie, 14e — * 

Noailles, ex-cavalerie, 1 5e — 

Orléans, 168 — 

Schomberg, 17e — 

Le Roi, i8e — 

Orléans-cavalerie, 22e — 

Royal-Piémont-cavalerie, 23e _ 

Rôyal-Lorraine-cavalerie, 24e — 

Royal- Bourgogne-cavalerie, 2 5e — 

Berry-cavalerie, 26e — 

Royal-Normandie-cavalerie, 27e — 

Rien n'était changé dans la situation des an- 
ciens régiments de chasseurs à cheval et de hus- 
sards. 

Le 3o septembre 1806, les chevau-léger?i belges 



Transformations postérieures à 178p. 191 



du duc d'Aremberg devinrent le 27^ de chasseurs 
à cheval. 

Le 29 mai 1808, le 28* de chasseurs à cheval 
fut formé avec un corps de dragons toscans 
organisé le 7 janvier précédent. 

Le 10 mars 1808, des régiments provisoires 
de grosse cavalerie, de dragons et de cavalerie 
légère sont formés pour Tarmée d'Espagne avec 
des compagnies détachées et l'un de ces régi- 
ments, le 3* de cavalerie légère, devient le 22 août 
suivant le 29*^ de chasseurs à cheval. 

Le 24 décembre 1809, on forma 2 nouveaux 
régiments de cuirassiers, le i3® avec les i**' et 2® 
régiments provisoires de grosse cavalerie formés 
Tannée précédente pour l'Espagne, et le 14® avec 
le 2* régiment de cuirassiers hollandais; le i®' de 
ces régiments hollandais était entré dans la 
garde. 

Le 25 décembre 18 10, le 3o® de chasseurs à 
cheval est organisé à Hambourg, et le 2® de hus- 
sards hollandais prend le numéro 1 1 dans l'arme 
des hussards français. 

Le 18 juin 181 1, k renommée que s'était 
acquise un corps de lanciers polonais, levé en 
1807 à Varsovie et incorporé la même année 
dans la garde, porta l'empereur à décréter la 
création de 9 régiments de chevau-légers-lanciers. 
Il désigna pour cette arme nouvelle, les i^''^ 
3«, 8®, 9°, 10° et 29® dragons, les i®*" et 2^ régi- 



192 Histoire de la Cavalerie. 

ments de lanciers polonais de la ligne, et le 
3o^ de chasseurs à cheval. 

Le 7 septembre de la même année, les 17* 
et 18^ régiments de chasseurs à cheval, dont les 
numéros étaient restés vacants depuis 1795, 
furent remplacés par 2 nouveaux régiments for- 
més avec des détachements : le 1 7^ : à 'Lille et 
le 18° à Metz; et Ton forma un 3i® régiment 
par la fusion des i®"^ et 2® régiments provisoires 
de cavalerie . légère employés à Tarmée d'Es- 
pagne. 

Le 10 janvier 181 2, un 9^ régiment bis de 
hussards est formé en Espagne ; il devient le 
12® de hussards le 17 février î8i3. 

Enfin le i*^' janvier 18 14, les hussards de 
Jérôme Napoléon, roi de Westphalie, deviennent 
le i3^ hussards, et le 28 du même mois le 14° de 
hussards est formé par la fusion d'un i3® bis, 
dont le général Miollis à Rome et la grande 
duchesse de Toscane à Florence organisaient les 
escadrons, et d'un 14^ que le prince Cannille 
Borghèse formait à Turin. 

Il existait donc à la fin de T Empire, en tenant 
compte des 6 numéros vacants dans les dragons 
et les chasseurs, 93 régiments de cavalerie de la 
ligne. Savoir : 

2 régiments de carabiniers. 
14 — de cuirassiers. 

24 — de dragons. 



Transformations postérieures à //tV/y. 193 
« ' ' ~ 

9 régiments de chevau-légers-lanciers. 

3o -^ de chasseurs à cheval. 

14 — de hussards. 

Uordonnance royale du 12 mai 18 14, ne 
conserva que 57 de ces régiments : 2 régiments 
de carabiniers formant brigade, sous Tancien 
nom de carabiniers de Monsieur, 12 régiments 
de cuirassiers, 1 5 de dragons, 6 de lanciers, 1 5 de 
chasseurs et 7 de hussards. Dans chaque sous- 
arme ce furent les plus anciens numéros qui sur- 
vécurent, et un certain nombre d'entre eux reçut 
des dénominations particulières en rapport avec les 
idées de la Restauration. 

Par suite de cet arrangement, .tous ceux des 
anciens régiments qui avaient échappé aux orga- 
nisations de la République et de TEmpire, se trou- 
vaient conservés. Sur 57 régiments, 5 seulement, 
les i3®, 14^ et 1 5° 'régiments de chasseurs à che- 
val, et les 6^ et 7^ régiments de hussards, étaient 
d'une création postérieure à 1789. 

Il est profondément regrettable, que ce respect 
des choses anciennes et des saines traditions n'ait 
pas été continué. 

Certes on s'explique les sentiments d'irritation 
et de méfiance que firent naître dans le cœur du 
roi les événements qui se déroulèrent avec un si 
rapide entraînement après le débarquement de 
l'empereur à Cannes, mais un roi est tenu de 
diriger sa conduite avec prudence et de mesurer 

I. 17 



i 



194 Histoire de la Cavalerie. 



ses actes à une autre échelle que celle des sen- 
timents qu'il éprouve. Qu'on y regarde de près, 
Ton reconnaîtra que le libéralisme qui a tué la 
Restauration, n'a été au fond qu'une protestation 
contre les mesures qui avaient frappé l'armée et 
avec elle la gloire française. Les fautes se payent 
tôt ou tard. 

Napoléon était entré le i'^'' mars i8i5 dans le 
golfe Juan avec une flottille qui portait 900 hom- 
mes, ses fidèles de l'île d'Elbe. Le roi se retirait 
à Lille, et datait de cette ville le 23 mars une 
ordonnance portant licenciement de l'armée et 
qui débutait par ces mots: « La trahison de 
« presque tous les corps de l'armée destinés à 
« défendre la patrie, rendant indispensable de 
« prendre des piesures, etc. » 

Il y a là, dans les termes de cette ordonnance, 
dans l'âpreté des mesures prises ou annoncées, 
pour tout homme qui a vécu dans les rangs de 
l'armée française et qui s'est imprégné de son 
esprit, de ses idées et de ses sentiments, un acte 
de dépit d'un inconcevable imprudence, car cet 
acte allait détruire le dernier scrupule dans les 
cœurs encore hésitants et jeter la vieille armée 
tout entière à la suite du chef qui avait porté si 
haut son renom et sa gloire. Cet acte était d'ail- 
leurs absolument inutile, puisqu'il fallait une 
armée et qu'on ne pouvait en composer une 
nouvelle qu'avec les débris de l'ancienne. Cet 



Transformations postérieures à ijSij, 195 



acte enSn était un mauvais exemple, donné par 
ceux de qui on devait le moins l'attendre, jus- 
tifiant jusqu'à un certain point les atteintes por- 
tées par la Révolution aux traditions et à la di- 
gnité de Tarmée. 

C'est aussi de ce mouvement de colère royale 
qu'est sortie l'idée du drapeau blanc, comme 
enseigne caractéristique d'une armée fidèle et 
d'une nation rompant avec son passé. 

Louis XVIII, réfiigié à Gand, signa dans cette 
ville, le 17 juin 181 5, la veille de Waterloo, une 
. ordonnance relative à la formation d'un régiment 
d'infanterie légère sous la dénomination de Ré- 
giment de La Couronne, Le paragraphe 6 de 
cette ordonnance est ainsi conçu : 

« 6. Ce régiment aura un drapeau dont le 
« fond sera blanc^ portant l'écusson de France 
« et la désignation du régiment. » 

L'intention du roi à ce moment était évidem- 
ment de donner à tous les régiments qu'il y 
aurait possibilité de former dans les circonstances 
où il se trouvait, le même drapeau, ne différant 
d'un régiment à l'autre que par la désignation 
du corps. 

Mais Louis XVIII était un roi instruit, scru- 
puleux observateur des formes et coutumes an- 
tiques qu'il s'attacha à restaurer. Rentré en 
possession du trône, il confirma son ordonnance 
du 23 mars licenciant l'armée par de nouvelles 



196 Histoire de la Cavalerie, 

ordonnances du 16 juillet .et du 10 août -i8i5 
qui réglaient la formatioii d^une autre armée, et 
parmi ces ordonnances, il en est une qui semble 
avoir peu fixé l'attention jusqu'ici et qui est 
cependant une preuve irréfutable que le roi com- 
prenait toujours le sens et le rôle de renseigne 
blanche comme le comte de Provence les avait 
compris dans sa jeunesse. 

Les personnages passionnés, qui. avaient tant 
contribué en 1 8 1 5 à pousser le roi à des mesures 
violentes, si contraires à la modération et à la 
sagesse ordinaires de son caractère,' ont repris 
leur œuvre plus tard -, ils ont ressuscité le drapeau 
de Charette, qui étsiit blafîc dentelé de noir au 
bord, portant un écusson fleurdelysé et couronné 
d'or, avec cette légende : Pro Deo et rege. 

Voici cette ordonnance : 

Ordonnance du i^oi sur le i^établissement des 
enseig7îes ou cornettes blanches, dans les ré- 
giments colonels généraux. 

Au château des Tuileries, le 16 juillet 181 5. 

De par le Roi : 

« Sa Majesté, s'étant fait rendre compte des 
« ordonnance.^ rendues par Mes rois ses prédé- 
« ccsseurs, de glorieuse mémoire, sur Tétablissc- 
(i ment et les prérogatives de.s enseignes et cor- 



r 



Transformations postérieures à i'j8(), 197 



« nettes attachées aux compagnies générales dans 
« les régiments d'infanterie ou de cavalerie qui 
« portaient la dénomination de Régiment dû 
« Colonel général ; 

« Voulant faire jouir les princes de sa famille 
« et ceux de son sang, qui ont été pourvus des 
« charges de colonels généraux, de tous ceux 
« des droits et prérogatives attribués précédem- 
« ment aux dites charges, qui sont compatibles 
« avec Torganisation actuelle de .Parmée, et don- 
« ner, par cette distinction honorable, à tous les 
« corps qui la composent de nouvelles preuves de 
« sa bienveillance; 

« Sur le rapport du Ministre Secrétaire d'État 
« de la guerre, elle a ordonné et ordonne ce qui 
« suit : 

« Art. I®^ Chacun des princes de la famille 
« royale ou des prince^> du sang, qui ont été 
« pourvus de Tune des charges de colonels gé- 
« néraux, aura, dans Tune des armes dont il est 
« colonel général, un régiment qui prendra la 
« dénomination de Régiment du Colonel gé- 
« néral : 

« En conséquence, le 1 0° régiment d'infanterie 
« de ligne, qui a déjà le titre de Régiment du 
« Colonel général, en vertu de l'ordonnance 
« du 10 mai 18 14, conservera ce titre pour l'in- 
« fanterie de ligne ; 

« Le 7*^ régiment d'infanterie légère prendra la 
I. 17. 



à 



198 Histoire de la Cavalerie. 



« dénomination de Régiment du Colonel gêné- 
« ralf pour cette arme ; 

« Le 6« régiment de cuirassiers prendra la dé- 
« nomination de Régiment du Colonel général, 
« pour les cuirassiers et les dragons ; 

« Le 9® régiment de chasseurs à cheval prendra 
« la même dénomination pour les chasseurs et 
« les lanciers ; 

« Enfin le 7® régiment de hussards, qui porte 
« déjà le titre de Régiment d'Orléans, y ajou- 
« tera la dénomination de Colonel général ; 

« Art. 2. La i""® compagnie de fusiliers du 
« 1®"^ bataillon, dans les régiments d'infanterie 
« colonels généraux, sera chargé de la garde de 
« renseigne du Colonel général', 

« Dans les régiments de troupes à cheval 
« des Colonels généraux, la cornette blanche du 
« Colonel général sera confiée au i*^"^ escadron 
« du régiment ; 

« Art. 3. Chacune de ces compagnie ou es- 
« cadrons, aura, en sus de son organisation, un 
« officier qui, dans Tinfanterie, aura le titre àCEn- 
« seigne de la compagnie géfiérale, et, dans la 
« cavalerie, celui de Corfiette blanc: cet officier 
« sera pris parmi les lieutenants, et il aura les 
« appointements de i"^® classe de son grade; 
« mais il roulera pour son rangjavec les capi- 
« taines, et il sera susceptible de prendre le com- 
« mandement d'une compagnie ; 



Transformations postérieures à l'jSg, 199 

« Art. 4. L'enseigne de Tinfanterie sera blanche 
« parsemée de fleurs de lys, et portera la devise 
« suivante : Prœteriti exemplum,Jidesquefutiiri, 

« La cornette de la cavalerie sera également 
« blanche, ayant au milieu un soleil en broderie 
« d'or, avec la devise : Nec pluribus impar, 

« Art. 5. L'enseigne du Colonel général de 
« rinfanterie, ou la cornette blanche dans la 
« cavalerie, ne saluera que le Roi, les princes 
« de la famille et du sang royal, et les maré- 
« chaux de France, et elle recevra le salut des 
« drapeaux ou étendards et des armes de tous 
« les autres corps, lorsqu'elle paraîtra ; 

« Art. 6. Le Ministre Secrétaire d'État de la 
« guerre est chargé de l'exécution de la présente 
« ordonnance. » 

Nous n'insisterons pas. La lecture de ce docu- 
ment, après tant d'autres preuves déjà données, 
suffit pour établir ce qu'était l'enseigne blanche 
aux yeux de Louis XVIII, et aux yeux du duc 
de Feltre son ministre. Nous disons avec in- 
tention le duc de Feltre, quoique nous sachions 
bien que Clarke a cessé un instant d'être mi- 
nistre du 9 juillet 181 5 au 24 septembre; mais 
si Gouvion de Saint-Cyr a remplacé Clarke 
pendant deux mois et demi, ce n'était certaine- 
ment pas lui qui avait préparé l'ordonnance 
du 16 juillet, signée sept jours après son entrée 
au ministère. 



200 Histoire de la Cavalerie. 

\'oici du reste quel est le motif qui nous fait 
attacher un certain prix à Tintervention de Glarke 
dans cette affaire des drapeaux blancs. C'est que 
Clarke, depuis duc de Feltre et- maréchal de 
France, était entré en 1783 dans la formation 
du régiment Colonel général des hussards, et 
qu'il y avait obtenu, le 5 septembre 1784, rem- 
ploi de Cornette blanc, A ce titre, il devait savoir 
aussi bien que personne qu'elle était la signi- 
fication de renseigne qu'il a\'ait portée. II avait, 
d'ailleurs, suivi Louis XVIII à Gand, et devait 
être au courant de toutes les pensées du roi au 
sujet de Tarmée. 

Si, plus tard, il s'est trouvé des personnes plu> 
habiles et mieux informées que Louis XVIII et 
le duc de Feltre au sujet du drapeau blanc, qui 
en ont transporté l'usage des régiments colonels 
généraux que désigne l'ordonnance précitée, à 
tous les régiments de l'armée, en détruisant par 
conséquent sans bruit l'esprit et la lettre de cette 
ordonnance, et qui sont parvenus ainsi à faire 
croire à l'antiquité du drapeau blanc comme 
symbole politique, c'est un fait contre lequel nou> 
ne voulons point nous insurger. Il est de trop 
mince valeur pratique au milieu des périls où 
notre pays s'agite. Nous n'avons voulu qu'établir 
la vérité historique. 

Les ordonnances royales de 181 5 prescrivaient 
le licenciement absolu des anciens régiments, le 



Transformations postérieures à ijSg. 201 



renvoi des hommes dans leurs foyers, la remise 
aux préfets des rriagasins et des chevaux, et char- 
geaient des commissions spéciales d'examiner la 
conduite et la valeur des officiers et de les classer 
en catégories. 'Ces ordonnances préparaient enfin 
la formation de nouveaux corps. La cavalerie de 
la ligne ne dut plus compter que 47 régiments : 
I régiment de carabiniers, 6 de cuirassiers, i o de 
dragons, 24 de chasseurs à cheval et 6 de hussards. 
Il est heureusement des choses, en apparence 
bien faibles, qui ■ sont plus fortes que toutes les 
volontés. On peut casser un régiment et en dis- 
perser les hommes : on ne disperse pas les comp- 
tables. Autour de ces comptables se groupent un 
certain nombre de sous-officiers et de soldats qui 
leur sont nécessaires pour les aider dans les opé- 
rations de liquidation de l'administration et des 
magasins. Puis viennent les blessés, les vieux 
soldats n'ayant pas d'autre famille que le corps, 
les enfants de troupe, ce que l'on appelle enfin 
le fonds d'un régiment, le dépôt. Ces dépôts, en 
y comprenant ceux ' des régiments supprimés 
en 18 14 et qui n'étaient pas dissous, ont servi de 
noyaux aux régiments nouveaux, et c'est par ce 
lien qu'on peut à la rigueur rattacher une partie 
des régiments actuels à leurs aînés. 

Le désir de rompre les traditions et de tout 
confondre fut si intense en ce moment, qu'il nous 
a été impossible, malgré les plus persév^érantes 



i 



202 Histoire de la Cavalerie, 

recherches, de déterminer d'une manière com- 
plète ce que sont devenus dans la nouvelle orga- 
nisation les dépôts des anciens corps. Il n'existe 
au ministère de la guerre, à notre connaissance, 
aucun document indiquant les procédés suivis pour 
la composition des nouveaux régiments de cava- 
lerie. Les matricules d'officiers mentionnent pour 
quelques-uns de ces régiments seulement les dépôts 
qui leur ont servi de noyaux. Ce n'est que dans les 
archives particulières et dans les souvenirs de 
ces corps qu'il serait possible de compléter ces 
renseignements. 

Les 47 régiments, créés par les ordonnances 
des i6 juillet et lo août i8i5, ont été organisés 
au commencement de 1816, avec des volontaires 
et à l'aide des débris des cadres de l'ancienne 
cavalerie. Voici les noms de ces régiments et 
quelle a été leur destinée depuis leur formation. 

Régiment des carabiniers de Monsieur. 
I er régiment de cuirassiers, de la Reine. 
2 G — du Dauphin. 

30 — d'Angoulême. 

40 — de Berry. 

5e — d'Orléans. 

6e — de Condé. 

ler régiment de dragons, du Calvados. 
20 — du Doubs. 

3e — de la Garonne. 

40 — de la Gironde. 

5e -~ de l'Hérault. 



Transformations postérieures à i/Sy. 20 3 

6« régiment de dragons, de la Loire. 

7e — de la Manche. 

8« — «du Rhône. 

9e — de la Saône. 

loe — de la Seine. 

1er régiment de chasseurs, de TAUier. 

2» — des Alpes. 

3e — des Ardennes. 

4e — de TAriége. 

5e • — du Cantal. 

6e — de la Charente. 

7e — de la Corrèze. 

8e — de la Côte-d'Or. 

9e — de la Dordogne. 

10e — du Gard, 

lie — de l'Isère. 

12e — de la Marne. 

i3e — de la Meuse. 

14e — du Morbihan. 

1 5e — de rOise. 

i6e — de l'Orne. 

17e — des Pyrénées. 

i8e — de la Sarthe. 

190 — de la Somme. 

20e — du Var. 

2ie — de Vaucluse. 

22e — de la Vendée. 

23e — de la Vienne. 

24e — des Vosges. 

1er régiment de hussards, du Jura. 

ae — de la Meurthev 

3e — de la Moselle» 

4e — du Nord. 

5e — du Bas-Rhin. 

6c — du Haut-Rhiui 



204 Histoire de la Cavalerie, 



Le 27 février 1825, le 2^ régiment de cara- 
biniers fut reconstitué par le dédoublement des 
carabiniers de Monsieur: 'les 4 derniers régiments 
de dragons, Manche, Rhône, Saône et Seine, 
furent transformés en cuirassiers et prirent les 
numéros 7, 8, 9 et 10 de cette arme, sans titres 
particuliers. 

En vertu de la même ordonnance les 6 der- 
niers régiments de chasseurs, Somme, Var, Vau- 
cluse, Vendée, Vienne et Vosges, devinrent régi- 
ments de dragons avec les numéros 7, 8, 9, 10, 
1 1 et 12, et sans titres particuliers. 

Le 3® régiment de cuirassiers, qui portait le 
nom d'Angoulême, avait pris celui du duc de 
Bordeaux à la mort de Louis XVIII, 21 sep- 
tembre 1824, qui donnait occasion de relever le 
titre de Dauphin pour le fils de Charles X. Le 
même jour, le i^"" régiment de hussards avait été 
donné au duc de Chartres. Le i*''' régiment de 
chasseurs fut accordé le 17 novembre 182G, au 
duc de Nemours. 

La révolution de i83o devait nécessairement 
mettre sa marque sur l'armée. Elle fit natu- 
rellement disparaître les titres attribués par la 
Restauration aux corps de cavalerie et rétablit 
l'arme des lanciers. L'opinion publique, qui 
se crée facilement des légendes, surtout lors- 
qu'elle estime que ces légendes sont désa- 
gréables à l'autorité, croyait fermement à cette 



Transformations postérieures à ijSf). 20 5 



époque que la Sainte- Alliance avait interdit au 
gouvernement de la Restauration d'avoir au delà 
d'un régiment de lanciers. Il en existait un, en 
effet, parmi les corps de cavalerie de la garde 
royale. Le nouveau gouvernement, pour plaire à 
l'opinion publique , s'.empressa donc , dès le 
14 août, de remplacer le régiment des lanciers 
de la garde par un régiment des lanciers de la 
ligne, et le 19 février i83i, il porta le nombre 
des régiments de lanciers à 6, par la transfor- 
mation des 5 premiers régiments de chasseurs. 
Ceux-ci devinrent les 5 premiers régiments de 
lanciers et le régiment des lanciers d'Orléans, 
formé six mois auparavant avec les débris des 
lanciers de la garde prit le numéro 6. 

Comme conséquence, les i3 régiments con- 
servés de l'arme des chasseurs à cheval, avan- 
cèrent tous de 5 rangs ; le 6® devint le i®' et 
le 1 8Me i Z\ 

Un 14® régiment de chasseurs fut en même 
temps formé avec des détachements pris dans les 
autres corps de la même arme. 

Le 27 novembre i836, l'arme des lanciers 
fut portée à 8 régiments. Ce furent les i3^ et 14'-' 
chasseurs qui devinrent les 7^ et 8^ lanciers. 

Nous ne parlerons pas de la création des 
chasseurs d'Afrique,^ des spahis, des nouveaux 
régiments de chasseurs et de hussards mis sur pied 
en 1 840 et des modifications apportées depuis 1 840 

I. iS 



2o6 Histoire de la Cavalerie, 

à la constitution de la cavalerie. Nous n'avons 
pas l'intention d'apprendre à nos contemporains 
ce qui s'est passé sous leurs yeux, et d'ailleurs 
ces nouveaux corps n'ont aucune relation, pro- 
chaine ou lointaine, avec les vieux régiments. 



FIN DE LA PREMIERE PARTIE. 






DEUXIÈME PARTIE 



CHAPITRE I. 



MAISON DU ROI. 



Nous suivrons, pour la cavalerie, le plan que 
nous nous sommes tracé pour Tinfanterie. 

Chacun des régiments qui étaient sur pied en 
1 790 sera l'objet d'une notice assez complète pour 
le faire bien connaître par son origine, ses trans- 
formations successives et par les titres ou noms 
qu'il a portés. 

Nous traiterons de la même manière les troupes 
de la Maison du roi et de la Gendarmerie de 
France, bien que la plupart d'entre elles- aient 
disparu avant 1790. Nous nous bornerons cepen- 
dant pour ces troupes à ce que nous appellerons, 
si l'on veut, l'état signalétique, »ne voulant pas re- 
faire l'histoire de la Maison militaire du roi, pu- 
bliée vers la fin du règne de Louis XV, parTabbé 
Lepipre de la Neufville, et à laquelle il y aurait 
peu de choses à ajouter. 



2o8 Histoire de la Cavalerie. 



Nous terminerons enfin cet ouvrage par une 
liste chronologique de tous les régiments de troupes 
à cheval dont nous avons pu relever Texistence, 
liste qui sera accompagnée d'un répertoire alpha- 
bétique pour les recherches à faire. 

On comprenait sous le titre de Maison du roi, 
les quatre compagnies des gardes du corps ordi- 
naires* du roi, qui, avec les . Cent-Suisses, aussi 
gardes du corps ordinaires, les gardes de la porte 
ordinaires et les gardes de la pré voté de T Hôtel 
du roi, ou hocquetons ordinaires de Sa Majesté, for- 
maient la garde du dedans du Louvre, chargée du 
service dans les appartements, et d'autre part, la 
compagnie des gendarmes de la garde, la compa- 
gnie des chevau-légers de la garde, les deux com- 
pagnies de mousquetaires, et la compagnie des 
grenadiers à cheval de la garde, qui, avec les 
régiments des gardes françaises et des gardes 
suisses, composaient la garde du dehors du 
Louvre, fournissant le service extérieur. 



Gardes du Corps. 209 



Gardes du corps du Roi. 

Parmi les quatre compagnies des gardes du 
corps, il y en avait une qui était privilégiée. C'é- 
tait la compagnie écossaise. Elle avait le pas sur 
l'es trois autres, en raison de son ancienneté et les 
commandait en toutes occasions. Elle comprenait 
à cet effet un état-major général, et c'était son ca- 
pitaine qui marchait à la tête des quatre compa- 
gnies dans toutes les réunions, soit en temps de 
paix, soit en temps de guerre. 

Les trois compagnies françaises roulaient entre 
elles suivant Tancienneté de leurs capitaines : 
elles étaient cependant numérotées, i •"% 2° et ^ 
compagnies françaises, et la i^^ avait le titre de 
première et ancienne compagnie française, mais 
sans conséquence. 

L'effectif des compagnies des gardes du corps a 
été à l'origine de cent hommes d'arixies comme 
celui des compagnies des ordonnances, et il avarié 
comme dans ces compagnies. LouisXIV, en 1676, 
fixa cet effectif à 400 hommes, ce qui donnait 
i,Goo combattants pour le corps entier. L'ordon- 
nance du 8 janvier lySy, qui fut observée jusqu'à 
la fin, composa chaque compagnie de six brigades 
à dnquante-cinq gardes chacune, se formant en 
deux escadrons de cent soixante-cinq gardes, de 
I. 18. 



à 



2 10 Histoire de la Cavalerie. 

sorte que Teffectif total de la compagnie montait 
à trois cent trente gardes , y compris douze briga- 
diers, douze sous-brigadiers, six porte-étendards, 
six trompettes et un timbalier. L'ensemble des 
quatre compagnies donnait donc une force de 
1,3 20 cavaliers. 

Pour être admis aux gardes du corps, il fallait 
avoir cinq pieds quatre pouces au moins, être bien 
fait, bien face y d'un âge mûr, de famille noble, 
ou du moins hors du commun, et de religion ca- 
tholique, apostolique et romaine. 

L'armement comportait Tépée, le pistolet et le 
mousqueton. L'uniforme était bleu turquin galon- 
né d'argent, la doublure, la veste, les parements, 
la culotte et les bas rouges, le chapeau bordé d'ar- 
gent. Les officiers étaient distingués par un galon- 
nage plus ou moins compliqué et par le port d'une 
canne d'ébène garnie d'ivoire à chaque extrémité. 
L'habillement des trompettes et timbaliers était 
de velours bleu, chamarré d'argent en plein. 

Les compagnies se distinguaient entre elles par 
une couleur particulière qui paraissait dans les 
étendards, bandoulières, housses et chaperons 
des chevaux, banderolles des trompettes et des 
timbales. 

Il n'y avait pas de robe obligatoire pour les 
chevaux, mais tous les officiers devaient être mon- 
tés en chevaux gris. lien était de même pour toutes 
les troupes de la Maison du roi. 



Gardes du Corps. 2 1 1 



Les gardes du corps, élite des compagnies des 
ordonnances , ont de magnifiques services de 
guerre au temps des rois soldats. Leurs faits 
d'armes sont ceux de Louis XI à Montlhéry et à 
Liège, de Charles VIII à Fornoue et à Novarre, 
de Louis XII à Agnadel, de François P' à Mari- 
gnanetàPavie, d'Henri IV à IvryetdeLouisXIII 
au Pas de Suse. Ils accompagnèrent Louis XIV 
dans les campagnes qu'il fit en Flandre et en 
Franche-Comté, et servirent encore sous les ordres 
des deux dauphins, fils et petit-fils de ce roi. 
Louis XV ne se mit que trois fois à la tête de son 
armée, en 1 744, 1 745 et 1 747, et le dernier champ 
de bataille sur lequel aient paru les gardes du 
corps est celui de Lawfeld. 

I" COMPAGNIE DES GARDES DU CORPS, 

» 

Ecossaise. 

Capitaines. 

1. Patilloch (Robert), 1440. 

2. Sire de Rugny (Mathieu d'Harcourt), 1449. 

3. De Châteauneuf (Claude), 1455. 

4. Seigneur de La Force (Michel de Bauvilliers), 1456. 

5. Stuyers (William), 1462. 

6. Stuyers (Thomas), 1466. 

7. Coowran (GefFrey), 147 1. 

8. Coningham (Robert), 1473. 

9. Coningham (Jean), ijfio^ 

10. Sire d'Aubigny (Bérold Stuart), 1493. 

11. Stuart (Jean), 14 août i5o8. 



212 Histoire de la Cavalerie. 

12. Sire d'Aubigny (Robert Stuart), 4 décembre i5i2 ; 

maréchal de France en i5i5. 
i3. Stuart (Jean), i5i4. 
14. Seigneur de Lorges (Jacques de Montgommery), 

mars 1544. 
i5. Comte de Montgommery (Gabriel), iSSj. 

16. Comte de Montgommery (Jacques), i" janvier iSSg. 

17. Seigneur de Maillebois (Jean d'O), juillet i562. 

18. De Losse (Jean de Beaulieu), 10 décembre i563. 

19. De Châteauvieux (Joachim-Armand), juillet 1569. 

20. De Lussan (Jean- Paul d'Esparbès), 2 mars 1599. 

21. Marquis de Montespan (Antoine- Arnaud de Par- 

daillan-Gondrin), 27 mars i6o5. 

22. Marquis de Nérestang (Philibert), 21 février 161 1. 

23. Seigneur de Blainville (Charles d'Estourmel), 21 juil- 

let 1G12. 

24. Marquis de La Vieuville (Charles), 3omars i6iô. 

25. Marquis de Cordes (Guillaume de Simiane), 26 mai 

1623. 

26. Marquis de Cordes (François de Simiane), septem- 

bre 1642. 

27. Marquis de Chandenier (François de Rochechouart', 

octobre 1642. 

28. Comte de Noailles (Anne), 10 janvier i65i. 

29. Duc de Noailles (Anne-Jules), 5 février 1678 : maré- 

chal de France en 1693. 

30. Duc de Noailles (Adrien-Maurice), 17 février 1707 ; 

maréchal de France en 1734. 
3i. Duc d'Ayen (Louis de Noailles), 23 décembre 173: ; 

maréchal de France en 1775. 
32. Duc d'Aven (Jean-Louis-François-Paul de Noailles , 

23 décembre 1758. 
33 Duc d'Ayen (Jean -Paul- François de Noailles \ 

3o mars i77r). 



Gardes du Corps. 21 3 

On a vu que cette compagnie avait été formée 
en 1440 du dédoublement d'un corps écossais 
amené en France en 1422 par Jean Stuart, comte 
de Boucan, connétable en 1423. Ce capitaine con- 
serva une partie de sa troupe à titre de com- 
pagnie des ordonnances, et cette compagnie est de- 
venue la compagnie des gendarmes écossais. Celle 
qui nous occupe fut réunie dès sa création à la 
garde de Charles VII, qui voulut ainsi reconnaître 
les bons services que lui avait rendus la nation 
écossaise et montrer la confiance qu'il mettait 
dans la fidélité de ces étrangers. Louis XI, qui 
avait ses raisons pour cela, mit un grand soin à 
la recruter avec des Écossais , et Ton peut juger, 
d'après les noms des capitaines, que cet usage 
s'est maintenu pendant une partie du xvi® siècle. 
Le déplorable accident du tournois de la rue Saint- 
Antoine, où le capitaine Gabriel de Montgom- 
mery blessa à mort le roi Henri II, et te départ 
de Marie Stuart, veuve de François II, refroi- 
dirent les sentiments qui unissaient depuis long- 
temps l'Ecosse et la France, et la compagnie, 
tout en conservant le nom d'écossaise, devint exclu- 
sivement française comme les autres. Les gardes 
de la i'*^ compagnie ont religieusement observé 
Jusqu'au dernier jour la consigne de répondre 
hainir à l'appel de leurs noms. Il paraît que ce 
vocable des Highlanders équivaut à : Me voici. 

Parmi les privilèges dont jouissait cette com- 



\^ 



/■ 



214 Histoire de la Cavalerie. 

pagnie, il faut noter celui de fournir la garde la 
plus intime du roi. Ses officiers avaient toujours 
place à la cour, même quand ils n'étaient point 
en quartier, et les 24 gardes de la manche étaient 
tirés des Écossais. Cette escouade de gardes de la 
manche avait à sa tête un officier qui portait le 
titre dcpreftiier homme d'armes de France.^ 

La robe que le roi portait à son sacre appar- 
tenait de droit au capitaine des Ecossais. En 
voyage, ce même officier recevait et gardait les 
clés des villes, remises au roi par les magistrats. 

A réglise, quand le roi assistait aux offices, les 
Écossais entouraient le chœur. 

La compagnie écossaise fournissait le premier 
quartier de Tannée à la cour, c'est-à-dire qu'elle 
faisait le service du i^^ janvier au i^"* avril. Quand 
elle n'était pas à Versailles, son quartier habituel 
était à Beau vais. 

Elle avait le blanc pour couleur distinctive. 
C'était la marque de l'autorité supérieure exercée 
par son capitaine sur les autre? compagnies. Les 
étendards, bandoulières, banderolles de trom- 
pettes et de timbales étaient, en effet, blancs re- 
haussés d'argent, mais l'équipage du cheval, par 
une exception qui se comprend, était rouge bordé 
d'argent. 

• Nous n'avons relevé qu'un seul de ses capitaines 
tué en combattant à sa tète , c'est Jean Coning- 
ham, mortellement blessé à Novarre, en 1495. 



Xp- 



Gardes du Corps, 21 5 

' Cette compagnie, ainsi que les trois autres, a 
été licenciée par décret de l'Assemblée nationale 
du 25 Juin 1791, mis à exécution le 12 septembre 
suivant. 

2« COMPAGNIE DES GARDES DU CORPS. 

j^® compagnie française. 

Capitaines. 

î. Du Plessis-Pâté (Jean Blosset), 10 juillet 1475. 

2. De Chalnay (Hervé), 18 janvier 1477. 

3. De Silly (Jacques), 1482. 

4. D'Uzès (Jacques de Crussol), 1491. 

5. De Ghevrier (Louis Mitte de Miolans), 1524. 

6. Du Puy-Calvary (Antoine Raffin), i53o. 

7. De Chalmazel (Louis de Talaru), 1 55 1 . 

8. D'Azay-le- Rideau (François Raffin), i558. 

9. Vicomte d'Auchy (Eustache de Conflans), 27 dé- 

cembre 1570. 

10. Vidame du Mans (Nicolas d'Angennes), septembre 

1 574. 

11. De Manou (Jean d'O), i58o. 

12. Marquis deVitry (Louisde L'Hôpital), 28 juillet i595. 
i3. Marquis de Vitry (Nicolas de L'Hôpital), 11 jan- 
vier i6u ; maréchal de France en 161 7. 

14. Marquis du Hallier (François de L'Hôpital), 26 avril 

1617; maréchal de France en 1643. 

1 5. Comte de Charlus (Charles de Lévis), 2 octobre it)3i . 

16. Comte de Charost (Louis de Béthune), 1^^ juin 1634. 

17. Marquis de Jarzé (François-René du Plessis), 17 août 

1648. 

18. Comte de Charost (Louis de Béthune), 9 novembre 

1649. 

19. Due de Charost (Armand de Béthune), 166 3. 



2i6 Histoire de la Cavalerie, 



20. Marquis de Duras (Jacques- Henri de Durfort), 

I" avril 1672; maréchal de France en 1675. 

2 1 . Duc de Boufflers (Louis- François), i o décembre 1 704; 

maréchal de France en 1695. 

22. Duc de Charost (Armand de Béthune), 21 octobre 

1711. 

23. Duc de Béthune (Paul-François), 23 octobre 1747. 

24. Duc de Mirepoix (Gaston- Jacques- Pierre de Lévis), 

I" mai 1756; maréchal de France en 1757. 
2 5. Prince de Beauvau-Craon ( Charles- Just), 11 no- 
vembre 1757 ; maréchal de France en 1783. 
26. Prince de Poix (Louis-Philippe-Marc-Antoine de 
Noailles), 22 févrrer 1784. 

Louis XI, par édit du 4 septembre 1474, avait 
institué pour la garde de son corps (c'est Louis XI 
qui a inventé cette dénomination singulière) une 
compagnie de 100 hommes d'armes français, 
sous le commandement d'Hector de Golart. Cette 
troupe a été longtemps connue sous le sobriquet 
de gentilshommes ait bec de corbin, parce qu'ils 
portaient, dans le service, une hache équilibrée 
sur son manche par une pointe recourbée. Cha- 
cun de ces gentilshommes devait entretenir à ses 
frais deux archers. En vertu de lettres-patentes 
données à Rouen le 10 juin 1476, le roi dispensa 
ces gentilshommes de l'entretien des archers; il 
prit ceux-ci à sa solde et en forma une compagnie 
particulière dont il confia le commandement à 
Jean Blosset, seigneur du Plessis-Pâté. 
Cette compagnie de 200 archers s'appelait la 



Gardes du Corps. 217 



petite garde du roi^ pour la distinguer de la pré- 
cédente que Ton désignait officiellement sous le 
titre de Cent lances des gentilshommes de V hôtel 
du roj, ordonnés pour la grande garde de son 
corps, c'est-à-dire pour son escorte. La petite 
garde servait aussi bien à pied qu'à cheval, c'est- 
à-dire dans les appartements et dans l'intimité du 
roi. On reconnaît bieil là Louis XI; c'est toujours 
le même besoin de s'entourer de petites gens, plus 
faciles à satisfaire et à tenir en bride que les 
grands. 

C'est cette petite garde, transformée par Fran- 
çois P' en compagnie de 100 hommes d'armes, 
qui est devenue, en i5i5, la première compagnie 
française des gardes du corps. 

Les documents ne sont pas d'accord au sujet 
du rang des compagnies françaises qui avaient 
longtemps roulé entre elles suivant l'ancienneté 
de leurs capitaines. Nous les avons placées sui- 
vant la date de leur création. 

Celle-ci s'est distinguée des autres, à partir de 
Louis XIV, par la couleur bleue de ses étendards, 
bandoulières^ banderoles et équipages. 

Elle avait ses quartiers ordinaires à Coulom- 
miers et servait à Versailles le quartier d'avril. 



10 



2i8 Histoire de la Cavalerie. 



X 3® COMPAGNIE DES GARDES DU CORPS. 

2« compagnie française. 

Capitaines. 

1. De La Châtre (Cla"ude), 1479. 

2. De La Châtre (Abel), 1490. 

3. De La Châtre (Gabriel), 1499. 

4. De La Châtre (Joachim), 1529. 

5. De La Fer té d'Usseau (François), 1549. 

6. De La Châtre (Gaspard), 1579. 

7. D'Entragues (Charles de Balzac), i58o. 

8. Marquis de Richelieu (François du Plessis), 1590. 

9. Marquis de Praslin (François de Choiseul), 20 mars 

1592. 

10. Duc de Tresmes (René Potier), janvier 161 1. 

11. Marquis de Gesvres (François-Louis Potier), 12 dé- 

cembre i635. 

12. MarquisdeGandelus (François Potier), 10 août 1643. 
i3. Duc de Gesvres (Léon Potier), 1646. 

14. Duc de Lauzun (Antoine Norapar de Caumont), 
28 juillet 1669. 

i5. Duc de Luxembourg (François- H enq de Montmo- 
rency), II février 1673 ; maréchal de France en 
1675. 

16. Duc de Villeroy (François de Neufville), i" février 

1695 ; maréchal de France en 1693. 

17. Duc de Villeroy (Louis-Nicolas de Neufville), 22 avril 

1734. 

18. Duc de Villeroy (Gabriel- Louis-François de Neuf- 

ville), 29 juin 1758. 

Louis XI, satisfait des services de sa petite 
garde, créa en 1479 ^^^ seconde compagnie sem- 
blable, et en donna le commandement à Claude 



Gardes du Corps. 219 

de La Châtre. Elle devint, comme la précédente, 
compagnie des gardes du corps au commence- 
ment du règne de François P^ 

Elle se distinguait par la couleur verte, avait ses 
quartiers ordinaires à Pontoise, et servait à Ver- 
sailles le trimestre de juillet. 

Lauzun, qui perdit en 1669 la charge de 
colonel général des dragons, avait obtenu celle 
de capitaine de cette compagnie, grâce à la pas- 
sion extravagante de M"® de Montpensier qui, 
non-seulement obtint Tagrément du roi, mais paya 
cette charge 760,000 livres au duc de Gesvres. 

4® COMPAGNIE DES GARDES DU CORPS. 

3^ compagnie française. 

Capitaines. 

1. De Chavigny (Louis Le Roy), i5i6. 

2. D'Estrées (Jean), ib^5. 

3. De Verneuil (Philippe de Maillé), i55o. 

4. De Comté (Louis d'Humières), i553. 

5. De Brézé (Arthur de Maillé), 1557. 

6. De Larchant (Nicolas de Grémonville), iSjS. 

7. Marquis de La Force (Jacques Nompar de Caumont), 

20 mars 1592; maréchal de France en 1622. 

8. Duc de La Force (Armand Nompar de Caumont), 

26 décembre 16 10. 

9. Marquis de Mauny (Louis de LaMark), 2oavr-il 1621. 

10. Marquis de Brezé (Urbain de Maillé), 20 septembre 

1627 ; maréchal de France en i632. 

11. Ducd'Aumont (Antoine), 23 novembre i632; maré- 

chal de France en i65 1 . 



220 Histoire de la Cavalerie. 

12. Marquis de Villequien ( Louis-Marie- Victor d'Au- 

mont), 3 juin i65i. 
i3. Marquis de Rochefort (Henri- Louis d'Aloigny), 

lortiars 1669; maréchal de France en 1675. 
14. Comte de Lorges (Guy-Aldonse de Durfort), 12 juin 

1676; maréchal de France en 1675. 
i5. Duc d'Harcourt (Henri), 26 février 1703^; maréchal 

de France en 1703. 

16. Duc d'Harcourt (François), 2 3 octobre 1747 ; maré- 

chal de France en 1746. 

17. Duc de Luxembourg-Piney (Charles-François-Fré- 

déric de Montmorency), 19 juillet 1750; maréchal 
de France en 1757. 

18. Prince de Tingry (Charles-François-Christian de 

Montmorency), 2 3 mai 1764. 

19. Prince de Luxembourg (Jean-Paul-Emmanuel-Si- 

gismond de Montmorency), 4 mars 1784. 

20. Comte de Luxembourg (Anne-Christian), 1790. 

A son avènement à la couronne, François P** 
possédait une compagnie des ordonnances qui était 
commandée par un capitaine-lieutenant, Raoul de 
Vernon, seigneur de Montreuil-Bouyn. Il avait 
aussi une garde personnelle commandée par Louis 
Le Roy de Chavigny. Il aimait le faste; il voulut 
avoir 5 compagnies des gardes du corps, toutes 
organisées sur le pied de la compagnie écossaise. 
Il transforma donc en i5i5, comme on Ta dit, 
les deux compagnies d'archers de la petite garde de 
Louis XI, et en ajouta deux autres formées avec ses 
gardes personnelles et avec des détachements des 
compagnies d'archers de Crussol et de La Châtre. 



Gardes du Corps. 221 

En 1645, il remania Torganisation des gardes 
du corps, et il n'en conserva, que 4 compagnies. 

La 4® compagnie avait ses étendards, bandou- 
lières et équipages de couleur jaune. Elle faisait le 
service à la cour du i®*" octobre au 3i décembre, 
et était habituellement casernée à Dreux. 

La Restauration a rétabli des compagnies des 
gardes du corps, par ordonnances des 1 5 juin 18 14 
et i®*" septembre 181 5. Celles-ci ont été licenciées 
le 1 1 août i83o. 

Nous ne mentionnons que pour mémoire les 
4 compagnies des gardes du corps de Monsieur 
le comte de Provence et du comte d'Artois, 
créées les 2 premières en 1771 et les 2 autres 
en 1773, et qui ont été supprimées le 17 mars 
1788, sans laisser d'autres traces dans l'histoire 
que les noms de leurs capitaines et la description 
de leurs uniformes. 

Les compagnies de Monsieur avaient l'habit 
entièrement bleu, et. la culotte et les bas rouges. 
La i*"® se distinguait par la bandoulière et l'équi- 
page aurores, et fut successivement commandée 
par deux Lé vis. La 2® eut la bandoulière et 
l'équipage en violet et avait pour capitaine le 
comte de Chabrillant. 

Les compagnies du comte d'Artois portaient 
l'habit vert-saxe, avec le collet, les parements, 
la doublure, la culotte et les bas cramoisis. La 
I. 19. 



222 Histoire de la Cavalerie. 

i'% commandée par le prince d^Hénin, avait la 
bandoulière et Féquipage bleu céleste. La 2®, 
commandée par le chevalier de Crussol, les avait 
de couleur rose. 

L'esprit des deux frères est peint par le choix 
de ces couleurs. 

Les 2 compagnies du comte d'Artois ont re- 
paru pendant le règne de Louis XVI IL 

GENDARMES DE LA GARDE. 

Capitaines-lieutenants. 

1. Marquis de Courtenvaux (Gilles de Souvré), 14 dé- 

cembre 1602. 

2. Comte de Saint-Géran (Jea^-François de La Guiche), 

i3 mars 161 5. 

3. Marquis du Rallier (François de LHôpital), 4^ dé- 

cembre i632; maréchal de France en 1643. 

4. Comte de Saligny (Gaspard de Coligny), 21 février 

1647. 

5. Comte de Miossens (César- Phébus d'Albret), 10 mars 

i65i ; maréchal de France en 1654. 
G. Marquis de La Salle (Louis Caillebot), 1 5 janvier 1666. 

7. Prince de Soubise (François de Rohan), 24 septem- 

bre 1673. 

8. Prince de Soubise (Hercule-Mériadec de Rohan), 

I" décembre 1703. 

9. Prince de Soubise (Charles de Rohan), juillet 1734 ; 

maréchal de France en 1758. 

On sait à quelles poursuites et à quelles récri- 
minations Henri IV fut en butte, après la paci- 
fication du royaume, lorsque, songeant à refaire 



Gendarmes de la Garde. 228 

par réconomie les finances ruinées par un siècle 
entier de guerres extérieures et civiles, il licencia 
les troupes que la Ligue, la Réforme et la poli- 
tique avaient mises sur pied. C'est pour donner 
une satisfaction à quelques-uns de ses anciens 
serviteurs qu'il créa, à l'occasion de la naissance 
du Dauphin et pour servir à la garde de ce 
prince, une compagnie de 200 gendarmes. Cette 
création est du 14 décembre 1602, et le premier 
capitaine de la compagnie fut Gilles de Souvré, 
gouverneur du Dauphin. 

Quand Louis XIII parvint à la couronne, il 
mit ces gendarmes dans la garde, par ordonnance 
du 29 avril 161 1, et cette corçpagnie eut dès ce 
jour le pas sur la compagnie des chevau-légers, 
quçique celle-ci fût plus ancienne. 

L'organisation de cette compagnie a très-peu 
varié. Voici comment elle était réglée sous 
Louis XV : i capitaine-lieutenant, 2 capitaines 
sous-lieutenants, 3 enseignes, 3 guidons, 10 ma- 
réchaux des logis, dont 2 aides-majors, et 210 gen- 
darmes, y compris 8 brigadiers, 8 sous-briga- 
diers, 4 porte-étendards, 4 aides-majors de brigade, 
4 trompettes et i timbalier. La compagnie for- 
mait I escadron décomposé en 4 brigades. 

Les gendarmes étaient au choix du capitaine- 
lieutenant. Il n'y avait point de conditions de 
taille pour être admis à la compagnie, mais il 
fallait être d'une famille hors du commun, et 



224 Histoire de la Cavalerie, 

avoir Tâge, la tournure et les manières conve- 
nables à un corps dont les membres étaient com- 
mensaux du roi, et surtout avoir un revenu suffi- 
sant pour vivre honorablement sans le secours 
de la solde, à peine suffisante pour les menus 
frais. 

Les 4 étendards des gendarmes de la garde 
étaient blancs, brodés et frangés d'or et d'argent, 
avec des foudres tombant du ciel, et cette devise : 
Quo jubet iratus Jupiter. 

La tenue se composait d'un habit écarlate, 
avec doublure rouge, parements coupés de ve- 
lours noir -, poches en travers, galons et brande- 
bourgs d'or en plein sur toutes les coutures; 
boutons d'or; boutonnières et ceinturon galonnés 
d'or ; veste de couleur chamois galonnée et bor- 
dée d'or, culotte et bas rouges ; chapeau bordé 
d'or avec cocarde noire et plumet blanc; l'équi- 
page du cheval était rouge galonné d'or. Le 
timbalier et les trompettes étaient vêtus de velours 
, bleu galonné d'or en plein. 

Cette tenue fut modifiée en 1 762 par l'addition 
d'un collet, de revers et de retroussis de velours 
noir, et par une housse et des chaperons égale- 
ment de velours noir. C'est, sans contredit, le 
plus riche uniforme qui ait jamais été porté, et le 
prince de Soubise devait en être satisfait. 

Les gendarmes de la garde étaient casernes à 
l'hôtel de la compagnie, à' Versailles. 



ChevaU' légers de la Garde, 22 5 

Ils ont été licenciés par ordonnance du 3o sep- 
tembre 1787. 

Une nouvelle compagnie a vécu pendant les 
quelques mois qu'a duré la première restaura- 
tion. 

CHEVAU-LÉGERS DE LA GARDE. 
Capitaines-lieutenants. 

1. De La Curée (Gilbert Filhet), i" avril 1592. 

2. De Brantes (Léon d'Albert), 29 avril 16 19. 

3. Duc d'Halluyn (Charles de Schomberg), 24 janvier 

i63i ; maréchal de France en 1637. 

4. Marquis de Saint-Mégrin (Jacques Stuert de Caus- 

sade), 20 mars i652. 

5. Comte de La Vauguyon (N. de Quélen), juillet i652. 

6. Marquis de Navailles (Philippe de Montaut-Besnac), 

3o mai i653 ; maréchal de France en 1675. « 

7. Duc de Chaulnes (Charles d'Albert d'Ailly ), 3o juil- 

let 1664. 

8. Duc de Chevreuse (N. d'Albert d'Ailly), août 1670. 

9. Duc de Montfort (N. d'Albert d'Ailly), 1704. 

10. Duc de Chaulnes (Louis-Auguste d'Albert d'Ailly), 

2 novembre 1704; maréchal de France en 1741. 

11. Duc de Picquigny (N. d'Albert d'Ailly), 8 janvier 

1729. 

12. Duc de Chaulnes ( Louis- Auguste d'Albert d'Ailly), 

22 juillet 1731. 

1 3. Duc de Chaulnes (Michel-Ferdinand d'Albert d'Ailly), 

25 février 1735. 

14. Duc d'Aiguillon (Armand de Vignerod du Plessis- 

Richelieu), 1769. 

Cette compagnie, la plus ancienne de la maison 
rouge, paraît être identique avec une compagnie 



226 Histoire de la Cavalerie. 



de chevau-légers levée en 1670 par le roi de 
Navarre, et qui, sous la conduite de Vignolles 
d'abord et ensuite de La Curée, se signala par- 
tout aux côtés du Béarnais. 

Elle fit d'abord corps avec la cavalerie légère, 
et dut par conséquent prendre Tordre du colonel 
général, ce qui déplut à La Curée. En 1593, 
une querelle s'éleva entre le capitaine et du 
Terrail, lieutenant-colonel de la cavalerie, pour 
le commandement. La Curée alléguait qu'il était 
le lieutenant du roi, tandis que du Terrail n'était 
que le lieutenant du duc d'Angoulême, et du 
Terrail maintenait que la véritable compagnie 
du roi était celle du colonel général, la com- 
pagnie de la cornette blanche. Le roi, qui avait 
bien d'autres embarras sur les bras, termina 
cette affaire en retirant ses chevau-légers du 
corps de la cavalerie. Les lettres patentes du 
privilège des 60 chevau4égers pensionnaires 
du Roy sont datées de Tours, i5 décembre iSgS. 
Cette affaire ne fut d'ailleurs complètement ré- 
glée qu'à la paix de Vervins. 

Henri IV, qui n'aimait pas à payer deux fois, 
et qui tenait à cette compagnie composée de la 
noblesse la plus distinguée , la substitua aux 
deux très-anciennes compagnies desgentilshommes 
à bec de corbin, qui ne furent pas supprimées, 
mais qui ne furent plus convoquées que pour figu- 
rer dans les grandes cérémonies. 



ChevaU'légers de la Garde. 227 

Cependant cette compagnie était toujours une 
charge pour la bourse du roi. En 1609, Sully 
voulut la transformer en compagnie de gen- 
darmes, ce qui Tinscrivait de droit au registre 
de l'ordinaire des guerres. La Curée résista et 
gagna son procès. 

Il s'éleva des contestations assez graves quel- 
ques années plus tard, lorsque Louis XIII fit 
passer, en 161 1, dans la garde les gendarmes 
qu'il avait eus comme Dauphin. Dans ce temps, 
le titre de gendarme était supérieur à celui de 
chevau-léger, et les gendarmes arguaient de ce 
titre pour avoir le pas suf les ehevau-légers. Ceux- 
ci faisaient valoir leur ancienneté et leurs services ; 
ce qui était bien quelque chose. Le roi leur offrit 
encore le titre de gendarmes, ce qui les eût main- 
tenus d'emblée au premier rang, mais ils tenaient 
au nom sous lequel ils s'étaient illustrés. Louis XIII 
ne se tira de ce conflit qu'en cassant un jour les 
ehevau-légers et en les rétablissant le lendemain. 

A cela près, ces deux troupes furent constituées 
sur un pied complet d'égalité, et servirent tou- 
jours ensemble. On ne saurait signaler entre elles 
d'autres différences que la couleur des boutons 
que les ehevau-légers portaient d'argent , et 
certaine proportion de galons d'argent mêlés 
aux galons d'or qui ornaient l'habit et l'équipage. 
Ainsi les boutonnières, le petit galon intérieur du 
chapeau et la bordure de la housse étaient d'argent. 



22& Histoire de la Cavalerie. 

Les étendards des chevau-légers, blancs comme 
ceux des gendarmes, portaient en tableau des 
géants écrasés par la foudre, et cette devise : Sen- 
sere gigantes^ les géants Vont senti^ bien supé- 
rieure à celle des gendarmes, qui peut se traduire 
ainsi : Sur qui le courroux de Jupiter nous 
ordonne-t-il de tomber? Cette dernière devise 
prouve incontestablement la bonne volonté des 
gendarmes, mais elle ne dit pas qu'ils eussent 
déjà, comme les chevau-légers, fait leurs preuves. 
Ces devises remontent sans doute à Tépoque des 
contestations des deux compagnies pour le rang, 
et sont certainement Tœuvre d'un homme d'esprit. 

Les chevau-légers, comme les gendarmes, 
avaient leur- hôtel à Versailles. Ils ont été licen- 
ciés en même temps qu'eux, en 1787 et en 181 5. 

Le quatrième capitaine-lieutenant des chevau- 
légers de la garde, marquis de Saint-Mégrin, a été 
tué en i652 à la bataille du faubourg Saint-An- 
toine. 

I*"® COMPAGNIE DES MOUSQUETAIRES. 
Capitaines-lieutenants. 

1. Duc de Nevers (Philippe Mancini), 10 janvier 1657. 

2. Comte d'Artaignan (Charles de Bats-Castelmor), 

i5 janvier 1667. 

3. De Forbin (Louis), 3 juillet 1673. 

4. De Maupertuis (Louis de Melun)^ 3 mai 1684. 

5. Comte d'Artagnan (Louis de Montesquiou), 18 fé- 

vrier 1716. 



Mousquetaires. 229 



6. Comte d'Avejan (T^.)? janvier 172g. 

7. Marquis de Jumilhac (Pierre- Joseph de Chapelle), 

21 mai 1738. 

8. Comte de La Chèze (N. Portalès), 1767. 

On a fait à tort remonter Tancienneté de cette 
compagnie à Tannée 1622. On a confondu en- 
semble deux corps absolument distincts. Une 
première compagnie de mousquetaires avait été 
formée par Louis XIII en 1622, sur le chemin 
de Montpellier à Avignon, avec la bande de cara- 
bins attachée en 1 6 1 5 à la compagnie des chevau- 
légers de la garde. On se souvient que cet essai 
de mélange des chevau-légers et des carabins ne 
dura guère, et que ce fut en 1621 que les cara- 
bins furent séparés de la cavalerie légère et orga- 
nisés en corps. Louis XIII, dans cette occasion, 
ne fit donc qu'appliquer à sa garde la mesure gé- 
nérale qu'il venait d'ordonner, et comme l'usage 
de ses prédécesseurs avait toujours été de mettre 
dans la garde un détachement représentant toute 
troupe qui figurait dans l'armée, il créa cette com- 
pagnie de mousquetaires qui représenta le corps 
des carabins. Mais cette première compagnie, qui 
fut successivement commandée, en 1622, en 1626 
et en 1628, par trois capitaines du nom de Mon- 
talard, puis, le 3 octobre i634, par Armand-Jean 
de Peyre, comte de Tréville, ayant été cassée et 
licenciée le 3o janvier 1646, par suite du dépit 
que causa au cardinal Mazarin le refus de Tré- 
I. 20 



23o Histoire de la Cavalerie. 

ville de se démettre de sa charge, dont le ministre 
voulait gratifier le duc de Nevers, il n'y a pas de 
motif sérieux pour la confondre avec celle qui 
nous occupe, d'autant que celle-ci fut mise sur 
pied onze ans plus tard par le même cardinal, 
qui en donna le commandement au même du 
Nevers, mari de sa nièce. 

La i^® compagnie des mousquetaires, des mous- 
quetaires gris^ comme Tusage s'établit de les 
appeler, a été créée le lo janvier lôSy, et précisé- 
ment par la même raison qui avait fait former 
celle de 1622, en même temps que le corps des 
carabins. Il y avait eu déjà des régiments por- 
tant le nom d'arquebusiers à cheval ou de dra- 
gons ; mais cette arme n'avait jamais pris droit 
de cité dans l'armée. Le comte César Degli Oddi 
amena d'Allemagne, par ordre du 14 juin i656, 
un régiment de dragons. Ce régiment arriva au 
mois de septembre à La Fère, où se trouvait h 
roi, et celui-ci en fut si satisfait qu'il le mit sur-le- 
champ sous le titre de Dragons-étrangèri du roi. 
L'arme des dragons était créée, et la formation 
d'une compagnie de mousquetaires ajoutée à la 
garde fut la conséquence de cette création. 
• La compagnie des mousquetaires gris avait son 
quartier à Paris, au faubourg Saint-Germain, rue 
du Bac, hôtel et marché de Boulainvilliers. 

Institués pour combattre à pied et à cheval, les 
mousquetaires eurent d'abord des tambours et 



Mousquetaires. 2 3 1 



des fifres pour le bruit de guen^e en servant à 
pied, et des trompettes pour le service à cheval. 
En i663, Louis XIV leur ôta les trompettes et 
les fifres, et il remplaça les fifres par des haut- 
bois, de sorte, dit La Chesnaye des Bois, que Ton 
vit pour la première fois des tambours battre à 
cheval, ce qui parut fort extraordinaire. 

Après quelques fluctuations, la composition de 
la compagnie fut ainsi fixée : i capitaine-lieute- 
nant, 2 sous-lieutenants, 2 enseignes et 2 cor- 
nettes, 10 maréchaux des logis, dont 2 aides- 
majors en chef, et 198 mousquetaires, y compris 
4 brigadiers, 18 sous-brigadiers, dont 2 sous- 
aides-majors de brigade, I porte-étendard, i porte- 
drapeau, un fourrier, 6 tambours et 4 hautbois : 
tous montés sur des chevaux gris. La compagnie 
se formait en i escadron de 4 brigades. Chaque 
brigade avait un étendard pour le cas du service 
à cheval. Dans le cas où la compagnie marchait 
à pied, les étendards étaient serrés, et Ton dé- 
ployait le drapeau. 

Étendards et drapeau étaient pareils, aux di- 
mensions près. Ils consistaient essentiellement 
pour les mousquetaires gris en un tableau, brodé 
et frangé d'or, représentant une bombe traversant 
le ciel et tombant sur une ville, avec ces mots 
pour, devise : Qiio ruit et lethiim. Quant à la 
couleur du fond de Tétendard, elle reste incer- 
taine. Un document ancien indique le bleu de 



2 32 Histoire de la Cavalerie. 

ciel; d'après un état militaire de lySS, Tétendard 
était blanc; La Chesnaye des Bois prétend, sous 
la date de 1763, qu'il était aux couleurs de la 
livrée du roi. Il n'est pas impossible que cette 
couleur du fond dç l'étendard ait varié, mais ce 
qui paraît le plus probable, c'est que l'étoffe du 
fond était blanche, que le fond du tableau qui 
figurait au centre de chaque face était bleu de ciel, 
et que la flamme de la bombe était rouge; et 
chacun y a vu ce qu'il voulait y voir, comme les 
oiseaux de Florian. 

L'uniforme se composait d'habit, doublure, 
parement et veste écarlate; bordé, boutons et 
boutonnières d'or ; doubles poches en . long ; 
manches en botte ; culotte et bas rouges (en i yCSo 
les bas étaient blancs); chapeau bordé d'or et 
plumet blanc ; l'équipage du cheval écarlate bordé 
d'or. 

Une singularité de tenue tout à fait particulière 
aux mousquetaires, c'était la subreveste. Quand 
les mousquetaires reçurent leur uniforme en 1673, 
ils furent pourvus d'une casaque ou manteau, telle 
que l'usage était alors d'en porter à cheval. Le roi 
s'étant aperçu de la gêne que cet ample pardessus 
avait causé aux mousquetaires servant à pied au 
siège de Courtrai, en i683, ordonna qu'à l'avenir 
ils porteraient un surtout sans manches, ouvert 
sur les côtés, et rappelant la forme des anciennes 
cottes des chevaliers ou des chasubles ecclésias- 



Mousquetaires. 233 



tiques. Ce vêtement très-orné devint l'habit de céré- 
monie des mousquetaires. La subreveste des mous- 
quetaires gris était bleue doublée de rouge et ga- 
lonnée d'argent, plus ou moins, suivant le grade. 
Sur le milieu des pièces de poitrine et de dos, il 
y avait une croix blanche, accompagnée de 
flammes rouges dans les angles rentrants et de 
quatre fleurs de lis d'argent aux sommets. 

Les compagnies de mousquetaires ont pris part 
à tous les actions de guerre de la Maison rouge 
sous Louis XIV et sous Louis XV. Le deuxième 
capitaine des mousquetaires gris, tué en 1673 
devant Maëstricht, est le héros d'un célèbre ro- 
man d'Alexandre Dumas, plein de couleur histo- 
rique, sinon de vérités historiques. C'est ce même 
d'Artaignan, alors sous-lieutenant dans la com- 
pagnie, qui avait été chargé d'arrêter le surinten- 
dant Fouquet, et qui s'était acquitté de cette mis- 
sion à Nantes, le 5 septembre 1 66 1 . 

Les mousquetaires, reformés par ordre du i5 
décembre 177 5, ont été licenciés le 23 décembre 
suivant. La Restauration les a un instant ré- 
tablis. 

2« COMPAGNIE DE MOUSQUETAIRES. 
Capitaines-lieutenants. 

1. De Maulevrier {'Edouard-François Colbert), 9 jan- 

vier i665. 

2. Comte de Tourvoye (François de Montbaron), 

20 avril 1672. 

I. 20. 



i 



234 Histoire de la Cavalerie, 

3. Marquis de Jauvelles (Henri de Hautfaye),' i8 mai 

1674. 

4. Marquis de Vins (Jean de Garde d'Agoult), i«' juin 

1692. 

5. Marquis de Canillac (Jean de Montboissier-Beaufort), 

3o juin '17 16. 

6. Marquis de Montboissier-Beaufort (Philippe-Claude), 

II avril 1729. 

7. Marquis de La Rivière (Charles -Yves -Thibaut), 

ler avril 1754. 

8. Vicomte de Montboissier (Charles-Philippe-Simon), 

J766. 

Cette compagnie, dite des mousquetaires noirs, 
a été quelque peu vieillie comme la précédente. 
Le cardinal Mazarin s'était donné pour garde, 
probablement à son retour d'exil, en i65i, une 
compagnie de" mousquetaires à pied que com- 
mandait M. de Marsac. Il la transmit en héritage 
à Louis XIV en 1661. En i663, le roi, à court 
de cavalerie, monta cette compagnie pour l'en- 
voyer au siège de Marsal. Elle fut licenciée après 
cette expédition, et ses débris entrèrent peut-être 
dans la composition de la compagnie des mous- 
quetaires noirs, créée par ordonnance du 9 jan- 
vier i665 et organisée sur le même pied que les 
mousquetaires gris. Il n'y eut entre elles que les 
différences que nous consignons ci-après : 

Les mousquetaires noirs logeaient dans un 
hôtel de la rue de Charenton, au faubourg Saint- 
Antoine. 



Grenadiers à cheval. 235 



Leurs drapeau et étendards portaient au centre, 
au lieu d'une bombe, un trousseau de flèches avec 
ces mots pour devise : Jovis altéra tela. Le 
galonnage d'or était remplacé par le galon- 
nage d'argent dans toutes les parties de leur te- 
nue ; les flammes qui cantonnaient les croix de la 
subrevestè étaient jaunes au lieu d'être rouges. 
Les chevaux étaient de robe noire. 

GRENADIERS A CHEVAL DE LA GARDE. 
Capitaines-lieutenants. 

1. Marquis de Riotor (N. deVillemeur), décembre 1676. 

2. Marquis de Villemeur (François), 16 novembre 1691. 

3. Marquis de Creil (Jean- François de Nancré), 18 sep- 

tembre 1730. 

4. Bailli de Grille (Gaspard-Joachim de Robiac), 8 mars 

1744; 

5. Marquis de Lugeac (Charles-Antoine Guérin), i®"" avril 

1759. 

La compagnie des grenadiers à cheval de la 
garde a été organisée à la fin de la campagne de 
1676, et le roi s'en fit le capitaine. Elle était des- 
tinée à marcher et à combattre à la tête des 
troupes à cheval de la Maison, à faire les chemins 
et ouvrir les passages pour ce corps. Dans les 
sièges les grenadiers servaient à pied et précé- 
daient les mousquetaires dans les attaques et les 
assauts. 

C'était une troupe d'élite dans la vraie accep- 
tion du mot. Voici les termes de la lettre que le 



236 Histoire de la Cavalerie. 

capitaine écrivait au colonel du régiment d'infan- 
terie dont le tour était venu de fournir un grena- 
dier de recrue : « Le Roy ayant besoin d'un gre- 
« fiadier de votre régiment pour mettre dans sa 
M compagnie des grenadiers à cheval^ Sa Ma- 
« jesté m'a commandé de vous écrire d'en choisir 
« et d'en faire partir un incessamment, qui soit 
« grand, fort brave, et portant moustache. » 

Les grenadiers, avant d'être incorporés, étaient 
présentés au roi, qui les examinait lui-même atten- 
tivement, et le colonel, qui n'avait pas fait un choix 
heureux, recevait, outre une réprimande, l'ordre 
de faire partir un autre grenadier à ses dépens. 

La compagnie comptait i capitaine-lieutenant 
commandant, 3 lieutenants, 3 sous-lieutenants, 
3 maréchaux des logis et i3o hommes de troupe, 
y compris 6 sergents, 3 brigadiers, 6 sous-briga- 
diers, I porte-étendard, 2 fourriers, 6 appointés 
et 4 tambours. Elle était armée et manœuvrait 
comme l'infanterie, quoique à cheval. 

Les grenadiers avaient conquis leur étendard 
au combat de Leuze en 1690. Ce jour-là ils 
avaient pris 5 drapeaux à l'ennemi. Pour per- 
pétuer le souvenir de cette action d'éclat dans la- 
quelle le capitaine de Riotor avait perdu la Nie, 
le roi leur donna un étendard de soie blanche, 
brodé et frangé d'or, orné sur chaque face d'une 
carcasse d'artifices qui crève en l'air, avec cette 
devise : Undiquè terror, iindiqtiè lethum. 



Grenadiers à cheval, 23 j 



Le roi reconnut aussi les services du capitaine 
de Riotor en le remplaçant par son frère à la tête 
de sa compagnie. 

L'uniforme donné par Louis XIV aux grena- 
diers à cheval était : habit bleu, doublure, veste 
et parements rouges ; bordé, agréments, boutons 
et boutonnières d'argent; manches en botte et 
poches en travers ; bandoulière de buffle galonnée 
d'argent, ceinturon bordé d'argent; bonnet de 
drap rouge garni de peau d'ourson noir et bordé 
d'argent ; culotte et bas rouges ; équipage du cheval 
de drap bleu, bordé d'argent. 

Le costume réglé en 1762 différait très-peu du 
premier. La coupe en était plus moderne ; l'habit 
avait des revers et un collet rouges comme la dou- 
blure. Il y avait six brandebourgs sur chaque re- 
vers, deux autres au-dessous, et encore deux autres 
à la taille derrière; les parements toujours re- 
troussés en botte étaient ornés d'un double galon 
d'argent : l'habit était retroussé avec un bordé 
d'argent sur la doublure; la veste écarlate était 
également galonnée d'argent; les buffleteries 
étaient blanches; trois grenades d'argent or- 
naient la giberne noire ; le bonnet d'ourson por- 
tait sur le devant une plaque d'argent. 

La compagnie des grenadiers à cheval a été 
licenciée en 1776, en vertu des dispositions de 
l'ordonnance du i5 décembre 1775. Elle a reparu 
un Instant sous la première restauration. 



238 Histoire de la Cavalerie. 



CHAPITRE II. 

GENDARMERIE DE FRANCE. 

Ce corps, dernier débris des compagnies des or- 
* donnances, était le premier de la cavalerie après 
la Maison du roi. Il comprenait encore, sous 
Louis XIV et Louis XV, 1 6 compagnies formant 
8 escadrons. Chaque compagnie entretenait au 
pied de paix 40 hommes,* et le double au pied de 
guerre, ce qui donnait 1,280 Cavaliers; une forte 
brigade de cavalerie de réserve. Cette troupe d'élite 
s'est toujours montrée digne du long passé de 
gloire qu'elle représentait, et jalouse de justifier 
en toute occasion ce que François P"" avait dit 
d'elle à Charles-Quint lui demandant, en i552, de 
lui prêter une somme d'argent et sa gendarmerie 
pour l'aider à combattre les Turcs : « Pour le 
« premier point, je ne suis pas banquier; pour 
« l'autre, comme ma gendarmerie est le bras qiiî 
« porte mon sceptre, je ne l'expose jamais au 
« péril, sans aller chercher la gloire avec elle. » 

Nous avons dit les causes de la disparition 
presque complète de la vieille gendarmerie, et 



Gendarmerie de France, 23 g 

comment, après la paix des Pyrénées, Louis XIV 
n'en conserva que quatre compagnies, dont il se 
fit capitaine, et quelques autres qui appartenaient 
à des princes du sang. Ce corps a longtemps été 
composé de i6 compagnies, avec un état-major 
général qui rendait à Châlons-sur-Marne. 

Les quatre premières compagnies, qui s'appe- 
laient compagnies du roi, ou d'ordonnance, ou 
grande gendarmerie, avaient i capitaine-lieute- 
nant, I sous-lieutenant, i enseigne, i guidon, 
4 maréchaux des logis, 2 brigadiers , 2 sous- 
brigadiers, I timbalier , 2 trompettes et un 
nombre variable de gendarmes, 80 en temps 
de paix, 160 en temps de guerre; elles étaient 
chefs d'escadrons, et • escadronnaient : les gen- 
darmes écossais avec les gendarmes de Bre- 
tagne; les gendarmes anglais avec les chevau- 
légers de Bretagne; les gendarmes bourgui- 
gnons avec les gendarmes . d'Aquitaine, et les 
gendarmes de Flandre avec les chevau-légers 
d'Aquitaine. 

Les compagnies des princes, gendarmes ou 
chevau-légers, avaient la même composition que 
les compagnies du roi. Dans les compagnies de 
chevau-légers, l'enseigne et le guidon étaient rem- 
placés par deux cornettes. Deux compagnies de 
chevau-légers, celles de la Reine et du Dauphin, 
étaient chefs d'escadrons. Le groupement des 
compagnies des princes par escadrons était ainsi 



240 Histoire de la Cavalerie, 

réglé après les quatre premiers escadrons] dont 
les quatre compagnies du roi étaient chefs : le 
cinquième escadron se composait des gendarmes 
de la Reine et des gendarmes de Berry; le sixième, 
des chevau-légers de la Reine et des chevau-légers 
de Berry -, le septième, des gendarmes du Dauphin 
et des gendarmes d'Orléans; le huitième, des 
chevau-légers du Dauphin et des chevau-légers 
d'Orléans. Ces huit escadrons avaient leurs quar- 
tiers habituels autour de leur état-major établi à 
Châlons, dans les villes de Saint-Dizier, Sainte- 
Ménehould, Bar-sur-Aube, Sézanne, Rethel, Vi- 
try, Joinville et Chaumont. 

Un singulier exemple du respect des traditions, 
c'est que les compagnies de gendarmes ne rele- 
vaient que du roi, tandis que les compagnies de 
chevau-légers recevaient l'ordre des officiers géné- 
raux de rétat-major de la cavalerie légère. Le roi 
nommait les officiers des gendarmes, le colonel 
général nommait ceux des chevau-légers. 

L'armement et l'habillement des gendarmes et 
des chevau-légers étaient identiques. Les uns et 
les autres portaient une carabine rayée, deux pis- 
tolets et un sabre à poignée argentée ; un habit 
complètement rouge galonné d'argent, une veste 
en demi-buffle, la bandoulière en buffle bordée 
d'argent : à partir de l'année i ySo, cette bandou- 
lière se distingua, dans chaque compagnie, par 
une couleur particulière qui se reproduisait dans 



Gendarmerie de France, 241 

le cordon du sabre ou de Tépée, dans les ban- 
deroles des trompettes et le tablier du timba- 
lier. Les manches de Phabit étaient retroussées 
en bottes et les poches étaient coupées en travers. 
La culotte et les bas étaient rouges; le cha- 
peau bordé d'argent était orné d'une cocarde 
noire. L'équipage du cheval était rouge avec. le 
chiffre du roi ou du prince propriétaire brodé en 
argent. 

Les étendards des compagnies étaient différents 
les uns des autres par la couleur et par les orne- 
ments et devises. Sur seize types d'étendard, cinq 
avaient le fond blanc, six bleu, cinq rouge, et un 
jaune. 

Les compagnies chefs d'escadrons avaient 2 éten- 
dards, I timbalier et 4 trompettes; les autre» 
n'avaient qu'un étendard et ne possédaient que 
2 trompettes, sans timbalier. 
. Les tabliers de timbalier et les banderoles de 
trompettes reproduisaient les tableaux et devises 
des étendards aussi bien que leur couleur. 

On remarquera que les compagnies qui esca- 
dronnaient ensemble avaient la même couleur 
distinctive. Seulement la couleur des compagnies 
chefs d'escadrons étaient d'un ton plus foncé que 
la couleur de la compagnie commandée. 

On remarquera encore, en parcourant les listes 
des officiers qui ont commandé ces compagnies, 
qu'un grand nombre d'entre eux, surtout au 
I, 21 



242 Histoire de la Cavalerie. 

xviii^ siècle, ont monté des compagnies les plus 
jeunes ou les moins favorisées aux compagnies les 
plus anciennes, même à celles appartenant au 
roi. La gendarmerie était le refuge de cette partie 
très-nombreuse de la noblesse qui n'avait pas 
. assez de fortune pour acheter ou entretenir un 
régiment. C'était un moyen de les récompenser. 

Dans les derniers temps, la gendarmerie se 
recrutait parmi les bourgeois vivant noblement et 
possédant au moins 400 livres de revenu, 
i Le rôle militaire de la gendarmerie a été ma- 
gnifique sous le règne de Louis XIV. Elle a 
combattu en première ligne dans toutes les actions 
considérables des armées de Flandre, d'Alle- 
magne et dltalie. Ce rôle s'est un peu effacé au 
xvin® siècle. Cependant la gendarmerie s'est en- 
core montrée avec un grand éclat à Fontenoi, où 
quatre de ses escadrons firent un trou dans la 
fameuse colonne du duc de Cumberland ; à Rau- 
coux et à Lawfeld, où le corps entier fournit des 
charges furieuses. La gendarmerie , comme les 
autres corps de l'armée, ne fut pas heureuse pen- * 
dant les campagnes de la guerre de Sept-Ans. Sa 
dernière bataille fut celle de Minden, où elle fut 
maltraitée, et où le partisan Freytag lui enleva 
tous ses équipages. 

Voici le résumé des campagnes et stations de 
la gendarmerie depuis la reconstitution du corps 
par Louis XIV. 



Gendarmerie de France. 248 

Guerre de 1672 à 1678, en Flandre. 

Guerre de 1688, en Flandre, sur le Rhin, et 
campagne de 1693 en Italie, avec Catinat. Se 
distingue à Leuze et à la Marsaglia. 

Armée d'Italie, en 1701 et 1702 ; bataille de 
Luzzara. 

Armée d'Allemagne , en 1 703 ; bataille de 
Spire ; elle est écrasée en 1 704, à Hochstedt : de 
1706 à 171 3, en Flandre et sur le Rhin; ba- 
tailles d'Audenarde et de Malplaquet. 

A Paris, en i7i5 ; à Metz et Thionville, en 
1 7 1 9 ; en Franche-Comté, en 1 72 1 . 

Armée du Rhin, en 1733. 

Armée de Westphalie, en 1 742 . 

En Alsace, en 1743. 

En Flandre, de 1745 à 1748. 

A Pont-à-Mousson , en r 748 ; à Arras , en 
1760; à Nevers, Moulins et Riom, en 1751 ; à 
Nancy, en 1756. 

Armée d'Allemagne, de 1767 à 1762. Quitte 
Liège à la paix pour se rendre à Lunéville. 

Nous avons déjà dit que la gendarmerie fut ré- 
duite à 10 compagnies le i®*' mars 1763 par la 
suppression des chevau-légers et leur incorpora- 
tion dans les compagnies de gendarmes de même 
titre. Les 4 compagnies appartenant au roi, ou 
grande gendarmerie^ furent alors établies aux 
alentours de Versailles. Les 6 autres compagnies, 
ou petite gendarmerie^ furent données comme 



244 Histoire de la Cavalerie. 

gardes d'honneur au roi Stanislas; de là, naquit 
l'usage de désigner ces compagnies sous le nom 
de gendarmerie de Lunéville, 

Les réformes de 1776 firent disparaître encore 
2 compagnies. Les 8 dernières ont été licenciées 
le i®"" avril 1788, conformément aux dispositions 
d'une ordonnance du 2 mars. 

Voici le préambule de cette ordonnance, qui 
mit fin à une carrière qui avait commencé sous 
Charles VII, et qui supprima un corps de 
1,200 hommes, dont les simples soldats avaient 
le rang de sous-lieutenants : 

« Sa Majesté voulant suivre avec constance et 
avec fermeté les vues d'économie qu'Elle a 
adoptées, et s'étant déterminée en conséquence 
à ordonner dans les gardes du corps une ré- 
forme qui diminue de plus de sept cent mille 
livres les dépenses de ce corps. Elle n'a pu se 
dissimuler que la suppression de la gendar- 
merie produiroit, soit au présent, soit éven- 
tuellement, une économie plus considérable. 
Les considérations militaires et le bien du ser- 
\'ice réclamant aussi depuis longtemps contre 
les inconvénients des corps privilégiés, il n'a 
p:\s fallu moins que le concours impérieux de 
CCS motifs pour décider Sa Majesté à la sup- 
pression entière d'un corps qui a toujours servi 
avec éclat, dont Tinstruction et la tenue sont 
portées si loin par les soins des chefs de corps 



Gendarmerie de France, 245 

« distingués qui le commandent; mais, en pre- 
« nant cette résolution, Sa Majesté est dans l'in- 
« tention de donner aux officiers et à tous les 
« individus qui le composent des marques de la 
« satisfaction qu^Elle a de leurs services, et Elle 
« veut que ses regrets, témoignés d'une manière 
« aussi authentique, en soient le premier gage. » 

L'article i ^"^ de cette ordonnance décide que la 
gendarmerie sera réformée .en entier à dater du 
jer avril. 

Par l'article 11, « Sa Majesté entend que les 
« gendarmes réformés conservent pendant 10 ans 
« le rang et les prérogatives de sous-lieutenants 
« dont ils jouissent, pour donner aux anciens le 
« temps nécessaire pour obtenir la croix de 
« Saint-Louis. » 

L'article 12 arrête que « Sa Majesté, voulant 
« favoriser le zèle de ceux de ses gendarmes qui, 
« ne pouvant obtenir immédiatement des places 
« d'officiers dans ses troupes, voudront continuer 
« leurs services. Elle autorise les commandants 
« de ses régiments à les recevoir comme bas-offi- 
« ciers, et Elle veut que le temps de service qu'ils 
« y rempliront dans ledit grade leur soit compté 
« pour la croix de Saint-Louis, comme s'ils y 
« avoient servi en qualité d'officiers. » 

Voilà un roi qui obéissait à une cruelle néces- 
sité, à qui incombait le devoir de réparer des 
fautes dont il n'était pas coupable, et qui, en 
I. * 21. 



246 Histoire de la Cavalerie. 

obéissant à cette nécessité, parlait à Tannée 
comme celle-ci mérite qu^on lui parle. 

Si Ton a bien compris ce qu'étaient dans Tan- 
cienne armée les corps qui composaient la maison 
du roi et la gendarmerie : gardes françaises et 
sdisses, gardes du cprps, gendarmes, chevau- 
légers et grenadiers à cheval, mousquetaires, 
gendarmes des ordonnances, on reconnaîtra que 
la monarchie a fait un magnifique cadeau aux 
armées de la , république. Tous ces corps, qui 
disparurent les uns après les autres, pour des 
causes diverses, dans les quinze dernières années 
delà monarchie, ont laissé disponibles 10,000 offi- 
ciers inférieurs ou bas-officiers et soldats capables 
de faire des officiers instruits, rompus à la disci- 
pline, résignés jusque-là à borner leur ambition 
au grade de lieutenant ou de capitaine, mais 
tout prêts à gravir les échelons supérieurs de la 
hiérarchie, abandonnés'par la noblesse. La Con- 
vention, assourdie par les clameurs de Pépoque, 
eut le tort de ne pas voir ou de n'avoir pas osé 
mesurer le parti qu'elle pouvait tirer de cette ri- 
chesse inespérée ; mais il faut lui rendre cette 
justice : après les turpitudes de la campagne de 
1793, elle avait jugé les généraux et les officiers 
improvisés, pris dans les carrefours et les clubs. 
Après la déroute de Neerwinden et les insanités 
des chefs révolutionnaires dans la Vendée , elle fit 
aux sans-culottes une guerre qui, pour être sourde, 



Gendarmerie de France, 247 

n'en fut pas moins implacable. Si Tan I de la 
République se fait remarquer par la destitution ou 
renvoi au tribunal révolutionnaire des chefs de 
brigade ci-devant nobles^ Tan II se distingue par 
la destitution ou la rétrogradation des officiers 
incapables, et c'est là le grand honneur de Car- 
not, qui n'a jamais organisé quatorze armées, 
suivant un cliché célèbre, mais qui a réellement 
organisé la victoire en chassant les idiots et les 
indignes et en les remplaçant par les hommes de 
l'ancienne armée. Quoi qu'en disent certains écri- 
vains ou orateurs de parti, tous les chefs qui se 
sont fait un nom illustre dans les guerres de la 
Révolution sont sortis des rangs de l'ancienne 
armée, un seul excepté, c'est Moreau ! 

GENDARMES ÉCOSSAIS. 
.Capitaines-lieuteniints. 

1 D'Aubigny (Jean Stuart), comte de Boucan, 1422. 

2. D'Aubigny (Jean Stuart), 1429. 

3. D'Aubigny (Robert Stuart), 1455 ; maréchal de 

France en i5i5. 

4. Comte d'Aran (Jacques Hamilton), 1495. 

5. Comte d'Aubigny (Jean Stuart), 4 décembre i5i2. 

6. Comte d'Aubigny (Robert Stuart), mars i544', ma- 

réchal de France en 1 5 1 5. 

7. Comte d'Aubigny (Jean Stuart), 1567. 

8. Prince d'Ecosse (Henri Stuart), 1601. 

9. Prince d'Ecosse (Charles Stuart), 1620; Charles I", 

roi d'Angleterre. 
10. Marquis de Huntley (Georges Gordon), lôiS. 



248 Histoire de la Cavalerie, 

11. Duc dTork (Jacques Stuart), 1648; Jacques II, roi 

d'Angleterre. 

12. Bailli d'Hautefeuille (Etienne Texier), 16 décembre 

i665.' 
i3. Marquis de Liyourne (Charles-Emmanuel-Philibert 

de Simiane-Piannezzi), 20 janvier 1676. 
14. Marquis de Mouy (N. de Vaudray), août 1682. 
i5. Comte de Roucy (François de La Rochefoucauld), 

18 mai 1692. 

16. Marquis de Nesle (Louis de.Mailly, prince d'Orange), 

avril 1707. 

17. Comte de Mailly (N.), 1714. 

18. Comte de Rubempré (Louis de Mailly), 23 juillet 

1733. 

19. Comte de Mailly-Haucourt (Joseph-Augustin), 1 1 jan- 

vier 1742; maréchal de France en 1783. 

20. Marquis de Mailly (Louis-Marie), 175... 

21. Marquis de Castries (Charles-Eugène-Gabriel de La 

Croix), 1770; maréchal de France en 1783. 

Voici incontestablement un exemple unique dans 
rhistoire militaire de tous les peuples de T Eu- 
rope : une compagnie qui a vécu 366 ans sans 
interruption, sans transformation sensible, ni dans 
son organisation , ni dans ses attributions et son 
service. On pourrait sous ce titre : Les Gen- 
darmes écossais^ écrire Thistoire des guerres sou- 
tenues par la France depuis les temps de Jeanne 
d'Arc jusqu'à la Révolution. Son premier capi- 
taine, Jean Stuart, a été tué en février 1429, à 
la bataille de Rouvray, connue dans Thistoire 
sous le nom de Journée des Harengs, en combat- 



Gendarmerie de France. 249 

tant sir FalstafF, qui défendait énergiquement les 
vivres des Anglais. 

D'abord attachée à la garde personnelle du 
roi, sous le titre de Cent lances écossaises, elle 
prit en 1446 la tête des i5 compagnies d'hommes 
d'armes des ordonnances créées cette année, et 
Ta toujours gardée. * 

Demeurée écossaise et la propriété des Stuarts 
pendant 243 ans, elle a compté parmi ses chefs 
deux rois d'Angleterre, Charles P^ et Jacques IL 
Ce dernier, étant encore duc d'York, s'en démit 
en i665 aux mains de Louis XIV. Depuis cette 
époque elle se recruta en France, tout en conser- 
vant le nom d'écossaise. 

L'étendard des gendarmes écossais était de 
soie blanche, brodé et frangé d'or. Sur l'une des 
faces on voyait trois arbres et un lévrier courant 
dans la plaine, avec cette devise : In omni modo 
fidelis. Sur l'autre face, il y avait une fleur de lys 
d'or couronnée. 

Leurs bandoulière, épaulette, ceinturon, cor- 
don de sabre, banderoles de trompettes et tablier 
de timbalier étaient de soie jaune agrémentés 
d'argent. 

En 1770, l'habit avait un collet et des revers 
de la couleur du fond; la cocarde du chapeau 
était blanche, et la cravate de cou était noire. 
Ceci s'applique à toutes les compagnies de la gen- 
darmerie. 



25o Histoire de la Cavalerie. 

» ^___^^ 

GENDARMES ANGLAIS. 
Capitaines-lieutenants. 

1. Comte d'Albercorne (Georges Hamilton), 27 no- 

vembre 1667. 

2. Comte de La Guette (N.), 1675. 

3. Chevalier de Crosly (N.), 1689. 

4. Chevalier de Béthomas (N.), 1692. 

5. Marquis fie Mézières (Eugène-Marie de Béthizy), 

I" novembre 1693. 

6. Chevalier de Janson (N. de Forbin), février 1706. 

7. Marquis de Verderonne (N.), 1715. 

8. Marquis de Pontchartrain (Paul -Jérôme Phélip- 

peaux), 12 septembre 1726. 

9. Comte de Blet (Alexandre de Saint-Quintin), 21 fé- 

vrier 1740. 

10. Marquis de Colbert de Lignières (Louis), 1 1 juin 1745. 

11. Marquis d'Auvet (Louis-Nicolas), i*^ janvier 1748. 

12. Vicomte de Courtaumer (N.), décembre 1748. 
i3. Comte de Lannoy (N.), 1755. 

14. Comte de Custine (Marc-Antoine), 1761. 

1 5. Marquis de Castellane (N.), 1762. 

if). Marquis d'Autichamp (Jean-Thérèse-Louis de Beau- 
mont), 3 janvier 1770. 

Le premier, et le cinquième capitaines des gen- 
darmes anglais ont été tués à Tennemi : Georges 
Hamilton, près de Saverne, en 1676, et le mar- 
quis de Mézières, à la bataille de la Marsaglia, 
en 1693. 

Le Parlement d'Angleterre ayant obligé le roi 
Charles II à se défaire des officiers et gardes 
de sa Maison qui étaient catholiques, le comte 



Gendarmerie de France. 25 1 



Georges Hamilton d'Albercorne en engagea une 
partie qu'il amena en France en 1667, et dont 
Louis XIV fit une compagnie de 200 gendarmes, 
dont il se déclara capitaine le 27 novembre de la 
même année. 

En agissant ainsi le roi avait, croyons-nous, la 
pensée de rappeler la suzeraineté de la France sur 
l'Angleterre, et ce serait dans la même intention 
qu'il aurait imposé aux deux compagnies sui- 
vantes les titres de gendarmes bourguignons et 
de gendarmes flamands, qui rappelaient le retour 
à la couronne d'anciens apanages qui en avaient 
été détachés. 

Les gendarmes anglais avaient le violet pour 
couleur distinctive. 

Leur étendard de soie blanche, brodé et frangé 
d'or, représentait un soleil avec sept aiglons vo- 
lant vers lui, avec cette devise : Tuus ad te nos 
vocat ardor. Pourquoi sept aiglons plutôt qu'un 
autre nombre? C'est un problème que nous li- 
vrons à la sagacité des chercheurs. Ce tableau 
était reproduit sur les banderoles des trompettes, 
le tablier de timbalier et les bourses ou chape- 
rons des fontes de pistolet. Les coins des housses 
du cheval portaient, comme chez les Écossais, un 
L et un G d'argent, couronnés de France, et 
signifiant sans doute Louis le Grand? 



2 52 Histoire de la Cavalerie. 



GENDARMES BOURGUIGNONS. 
Capitaines-lieutenants. 

1. Chevalier de Fourilles (N. de Chaumejean), i'^ avril 

1668. 

2. Comte de Broglio (Victor- Maurice), 24 avril 1670: 

maréchal de France en 1724. 

3. Marquis de Flamanville (Jean-René Bazan), i3 jan- 

vier i683. 

4. Comte de Linières (N. des Essarts), 29 janvier 1702. 

5. Marquis de Renty (N.), 1707. 

6. Marquis de Castelmoron (Charles -Gabriel de Bel- 

zunce), 10 juin 171 3. 

7. Comte de Castelmoron (N. de Belzunce), 1*' jan- 

vier 1735. 

8. Marquis de Courtebonne (Louis-Jacques de Calonne'i, 

3o septembre 1741. 

9. Comte de Selles (N. Le Bret), 2 mai 1744. 

10. Comte d'Houdetot (Claude-Constant-César>, 22 juil- 

let 1758. 

11. Comte de Lyons (N.), novembre 1761. 

12. De Fougières (N.), 1764. 

i3. Marquis de Lambertye (N.), 1767. 

14. Comte de Chabanais (François-Gilbert Colbert Je 

Saint- Pouanges), 3 janvier 1770. 
i5. Marquis de Mirville (N.), 1773. 

16. Comte de Rastignac (Louis-Jacques de Chapt\ i77<"». 

17. Marquis de Verteillac (N. de La Brousse;, 1780. 

18. Marquis de Minille (N.), 1783. 

19. Comte d'HercuIais (N.), 1784. 

Cette compagnie a été formée le i*' a\TiI 1668, 
après la première conquête de la Franche-Comté 
et pour en perpétuer le souvenir, sous le titre de 



Gendarmerie de France. 253 



chevau-Iégers de Bourgogne. Après la deuxième 
conquête, qui fut définitive, le roi la transforma 
en compagnie de gendarmes, au mois d'août 1674. 

Sa couleur était le vert foncé. Les coins des 
housses étaient ornés de croix de Bourgogne en 
argent. 

L'étendard était blanc, brodé et frangé d'or, 
sans inscription, avec cinq croix de Bourgogne 
rouges sur une face, une grande au milieu et une 
plus petite à chacun des quatre angles. L'autre 
face de l'étendard portait le chiffre de la compa- 
gnie en or; c'était sans doute encore une croix 
oblique de Bourgogne. 

GENDARMES DE FLANDRE. 
Capitaines-lieutenants. 

î. Comte de Marchin (Ferdinand), 12 avril 1673 ; maré- 
chal de France en 1703. 

2. Chevalier de Roye (Barthélémy de La Rochefou- 

cauld), i5 mars 1698. 

3. Comte de Ta vannes (Henri -Charles de Saulx), 

12 septembre 17 16. 

4. Comte de Chatellux ( Guillaume- Antoine de Beau- 

voir), 14 juin 1723. 

5. Chevalier d'Aguesseau (Henri-Louis), 25 novembre 

1734. 

6. De Montchal (N. Barentin), 2 mai 1744. 

7. Marquis de Lespéroux (Charles), 20" janvier 1747. 

8. Comte de Lordat (Joseph- Marie), 10 février 1759. 

9. Marquis de Tracy (Claude-Charles-Louis Destutt), 

22 mai 1750. 
10. Comte d'Aigreville (N.), 23 juillet 1762. 

I. 22 



2 54 Histoire de la Cavalerie. 

' » — ■^~~~~~ 

11. Comte de Rouhault (N.), 1765. 

12. Vicomte de La Rivière (N.), 1770. 
i3. Marquis de Mornay (N.), 1771- 
14. Marquis de Mirville (N.), 1780. 
i5. Comte d'Herculais (N.), 1783. 
16. Comte de Lambertye (N.), 1784. 

Cette compagnie, qu'on appelait aussi quelque- 
fois les gendarmes flamands, fut créée le 12 
avril 1673, après la conquête des Pays-Bas, et 
son premier capitaine fut un belge, dont le nom 
a été francisé, et qui fut connu dans la suite sous 
le nom de maréchal de Marsin. 

La couleur des gendarmes de Flandre était 
feuille-morte. Les coins des housses étaient or- . 
nés de deux L d'argent entrelacées. L'étendard 
était bleu avec un soleil éclairant le monde et ces 
mots pour devise : Nec pluribus impar. Par 
exception, les banderoles de trompettes et le 
tablier du timbalier n'étaient pas de la couleur 
distinctive. Ils étaient bleus comme l'étendard. 

GENDARMES DE LA REINE. 
Capitaines-lieutenants. 

1. Marquis de Garo (N.), i3 mai 1661. 

2. Marquis de Lannion (Pierre), 21 mai 1677. 

3. Marquis de Lanmary (N.), 3o mars 1693. 

4. Marquis de Vertilly (René de Charlus), 8 novembre 

1702. 

5. Marquis de Tournemine (N.), mars 1705. 

6. Marquis de Mérinville (François- Louis de Mons- 
^ tiers), 26 septembre 1709. 



Gendarmerie de France. 255 



7. Marquis de Mérinville (François-Louis-Martial de 

M onstiers) , 6 mars 1 7 1 9 . 

8. Marquis de Choiseul-Beaupré (Charles-Marie), 21 fé- 

vrier 1741. 

9. Baron de Montmorency (Léon- Anne), 14 décembre 

1744. 

10. Marquis de Fosseuse (Anne- Louis de Montmorency), 

I" juin 1748. 

11. Comte de Saint-Chamans (N.), 25 juillet 1762. 

12. Marquis d*Houdetot (N.), 1770. 
i3. Marquis d' A verne (N.), 1780. 
14. Comte de Harville (N.), 1784. 

Il ne faut pas confondre cette compagnie avec 
une autre portant le même titre et qui avait 
appartenu à Anne d'Autriche. Cette première 
compagnie de la Reine avait probablement été 
levée en i638, quand la grossesse d'Anne d'Au- 
triche eut rétabli le crédit de cette reine auprès 
du Toi Louis XIII. Elle eut pour premier capi- 
taine-lieutenant le comte d'Inteville, remplacé le 
4 avril 1 642 par Jean- Antoine, marquis de Fran- 
quetot, qui se démit en juillet 1649 et eut pour 
successeur Edme-Claude de Simiane, comte de 
Monchat. Les gendarmes de la reine Anne d'Au- 
triche, qui avaient pris le titre de gendarmes 
de la Reine-mère au moment du mariage de 
Louis XIV, furent licenciés en 1666, à la mort 
d'Anne d'Autriche. 

La compagnie, dont il s'agit ici, et qui a succes- 
sivement, comme la suivante, appartenu à Marie- 



256 Histoire de la Cavalerie. 

Thérèse d'Autriche, à la duchesse de Bourgogne, 
à Marie Leckzinska et à Marie-Antoinette, a été 
form-ée en vertu d'une déclaration donnée à Fon- 
tainebleau le i3 mai 1661, sur le pied de 200 
hommes d'armes, avec les privilèges dont jouis- 
saient les compagnies de gendarmes du roi, et son 
premier capitaine, le marquis de Garo, peut-être 
faut-il lire de Haro, semble porteur d'un nom 
espagnol. Ce serait alors une galanterie de 
Louis XIV, faite à la fois à la jeune reine, au 
premier ministre d'Espagne, Louis de Haro, et à 
la nation espagnole. Quoi qu'il en soit, Dangeau 
nous apprend que ce Garo était un fou, qui 
mangea 5o,ooo livres de rente et qui finit par 
être cassé pour ne s'être pas trouvé avec sa com- 
pagnie à la bataille de Cassel. 

Le cinquième capitaine, marquis de Tourne- 
mine, a été tué à la bataille de Malplaquet. 

La couleur distinctive des gendarmes de la 
Reine était le rouge ponceau. Les housses étaient 
ornées du chiffre de la reine régnante couronné 
de France. 

Les étendards étaient également de soie rouge 
ponceau, brodés et franges d'or. Une face mon- 
trait les armes de la reine, couronnées de France, 
accolées de palmes ; elle était semée de fleurs de 
lys, et portait cette devise: Seii pacem^ seti bella 
gevo. On voyait au revers le chiffre de la compagnie. 



Gendarmerie de France. 267 

CHEVAU-LÉGERS DE LA REINE. 
Capitaines-lieutenants. 

1. Marquis de Villiers (N.), i3 juin 1661. 

2. Marquis de Fervaques (N.), 1671. 

3. Marquis de Sebbeville (Bernardin Cadot), 7 avril 

1676. 

4. Marquis d'Ancezune de Caderousse*(N.), juin 1692. 

5. Comte de Sebbeville (Charles-Louis Cadot), 20 avril 

1699. 

6. Marquis d'Estréhan (N. d'Héricy), avril 1707. 

7. Marquis de Buzenval (N.), 1709. 

8. Comte du Fargis (N.), 17 16. 

9. Marquis de Surgères (Alexandre -Nicolas de La 

Rochefoucauld), 25 mars 1734. 

10. Marquis d'Ossun (Pierre-Paul), le' décembre 1745. 

11. Marquis de Sommyèvre (Gaspard), 20 février 1761. 

La reine Anne d'Autriche, devenue régente, 
avait ajouté à ses gendarmes, le 18 juin 1643, une 
compagnie de chevau-légers qui fut commandée 
par Jacques Stuart de Saint-Mégrin, et après lui, 
le 4 mai i653, par Barthélémy de Quélen, vi- 
comte de Broutay. 

Ces chevau-légers de la Reine-mère disparurent ' 
en même temps que les gendarmes, en 1666. 

La compagnie de chevau-légers de Marie-Thé- 
rèse d'Autriche a été créée le i3 juin 1661, un 
mois après celle des gendarmes de la Reine, avec 
le même effectif et les mêmes privilèges. Elle 
fut incorporée dans celle-ci par ordonnance du 
i®' mars 1763, portant suppression des com- 
I. 22. 



258 Histoire de la Cavalerie. 



pagnies de chevau-légers attachées à la gendar- 
merie. 

Il n'y avait aucune différence dans la tenue et 
dans les étendards des deux compagnies de la 
Reine. Le rouge de la distinction était cerise, 
tandis que les gendarmes avaient le ponceau. 
Elles n'escadronnaient pas ensemble. 

GENDARMES DU DAUPHIN. 
Capitaines4ieuteDa]its. 

1. Marquis de Rochefort. (Henri -Louis d'Aloigny), 

i3 décembre i665; maréchal de France en 1675. 

2. Marquis de La Trousse (Philippe-Auguste Le Hardy), 

4 septembre 1669. 

3. Chevalier de Soyecourt (N.), mai 1690. 

4. Comte d'Estaing (François de Saillant), 16 août 1^90. 

5. Comte de Jonzac (N.), 18 avril 171 3. 

6. Marquis de Tillières (Jacques Tanneguy Le Veneur). 

16 avril 1738. 

7. Marquis de Drosménii (Charles-François-Gabrid de 

Hallancourt), 14 décembre 1744. 

8. Marquis du Coudray (Hilaire Rouillé )f î^^ janvier 

1748. 

9. Baron de Choiseul-Busâière (N,>, 20 février 1761. 

10. Marquis de Mirville (N.), 1776. 

11. Comte d'Herculais (N.), 1780. 

12. Comte de Lambertye (N.), i;€3. 
i3. Comte d'Argcnteuil (N.), 1784. 

14. Comte de M oyria-Châtillon (Ferdinand , 17SÔ. 

On se rappelle que les gendarmes de h garde 
avaient déjà porté le titre de gendanoes do Dau* 
phin de 1602 à i6i5. 



Gendarmerie de France. 259 

Cette compagnie, que Ton appelait habituelle- 
ment gendarmes-dauphins^ suivant un mode de 
contraction en usage à la cour, a été créée le 
i3 décembre i665 pour le grand Dauphin, fils 
de Louis XIV, et sur le pied de 3oo hommes. 

Le second capitaine, marquis de La Trousse, 
était le cousin germain de M™* de Sévigné et les 
lecteurs des lettres de la spirituelle marquise trou- 
veront là quelques détails intéressants sur les pre- 
mières années de la compagnie, dans laquelle le 
fils de M™* de Sévigné fit ses premières armes. Le 
chevalier de Soyecourt, successeur de La Trousse, 
a été tué à la bataille de Fleurus], le 1®' juillet 
1690, un mois après son arrivée à la compagnie. 

Les gendarmes-dauphins se distinguaient par 
la couleur bleu turquin. Les coins des housses 
de réquipage étaient ornés de deux dauphins sur- 
montés de la couronne royale, le tout brodé en 
aident. Les étendards avaient le fond blanc et re- 
présentaient une mer agitée et un navire, autour 
duquel jouaient trois dauphins, avec cette devise : 
Sunt pericula Indus. Au revers le chiffre de la 
compagnie, k tout brodé et frangé d'or. 

CHEVAU-LÉGERS DU DAUPHIN. 
Capitaines-lieutenants. 

I. Marquis de La Vallière (N. de La Baume Le Blanc), 

28 janvier i663. 
1. Comte 4e Ménnvilie(N. de Monstiers), 1670. 



26.0 Histoire de la Cavalerie. 

« ï 

3. Comte de Villarceau (N. de Mornay), 1674. 

4. Marquis de Villarceau (N. de Mornay), 1677. 

5. Marquis de Toiras (N. du Caylar de Saint-Bonnet), 

1690. 

6. Marquis d'Urfé (N.), 1691 . 

7. Marquis de Drosménil (N. de Hallancourt), lôgS. 

8. Marquis d'Auvet (N.), 1703. 

9. Marquis d'Argouges (Henri-Louis de Fleury), 2 avril 

.1727. 

10. Marquis du Muy (Louis-Nicolas- Victor de Félix 

d'Ollières), 16 avril 1738; maréchal de France en 
1775. 

1 1 . Comte de Jonzac (Pierre-Charles- François d'Espar- 

bès de Lussan d'Aubeterre), 14 décembre 1744. 

12. Comte de Thiard (Henri-Charles), 17 mai 1749. 

i3. Comte de Flavigny ( Louis- Agathon), .19 avril 1760. 
14. Marquis de Torcy (Claude-Antoine-Félix Colbert), 
II janvier 1762. 

Les chevau-légers du Dauphin sont plus anciens 
que les gendarmes du même titre. Ils ont été 
formés par ordre du 28 .janvier i663 avec 3oo 
officiers réformés, un peu plus d'un an après la 
naissance du Dauphin, dont la date est le i*' no- 
vembre 1661. 

On remarquera le nom, jusque-là très-obscur, 
du premier capitaine. C'est celui de cette belle et 
touchante fille d'honneur d'Henriette d'Angleterre, 
" que cette princesse mit sur le chemin du roi. 
On sait que la résistance fut longue et que la 
liaison demeura longtemps secrète. Par quel raf- 
finement de galanterie Louis XIV fiit-il amené à 



Gendarmerie de France. 



261 



gratifier le frère de sa belle maîtresse précisément 
de la compagnie quMl venait de créer pour le pre- 
mîer*né de la reine ? C'est là un de ces mystères 
de passion royale auxquels il nous est ' difficile 
d'apprivoiser notre pensée. 

Le troisième capitaine, cdmte de Mornay-Vil- 
larceau, a été tué à Fleurus, mais il ne comman- 
dait plus la compagnie. Le cinquième, marquis 
de Toiras, fut tué au combat de Leuze. 

Les chevau-légers-dauphins se distinguaient 
des gendarmes par une couleur bleue d'un ton 
plus clair. Tous les autres détails de la tenue 
étaient identiques. 

# 

GENDARMES DE BERRY. 



Capitaines-lieutenants. 

j Marquis de Virieu (N.), 3o août 1690. 

2. Comte de Mortagne (N. Collin), i6gS 

3. Marquis de Gassion (N.), 1701. 

4. Marquis de Castelmoron (Charles -Gabriel de Bel- 

zunce), 1704. 

5. Marquis de Trudaine (N.), 17 12. 

6. Marquis de Lanmary (Marc-Antoine Front Beaupoil 

de Sainte-Aulaire), 12 octobre 1780. 

7. Marquis de Marivault (N.), 16 avril 1738. 

8. Marquis de Chabanais (François-Gilbert Colbert de 

Saint-Pouanges), 22 avril 1744. 

9. Comte de Lutzelbourg (M a rie- Joseph-François Wal- 

ter), 1" décembre 1745. 
10. Comte d'Argouges (Michel -Pierre -François de 
Fleury), i" février 1749. 



202 Histoire de la Cavalerie, 

11. Marquis de Castellane (N.), 1761. 

12. Marquis de Roquefort (N. de Montesquieu), 1762. 
i3. Marquis d'Ayerne (N.), 1771. 

Cette compagnie, ainsi que la suivante, a été 
créée le 3o août 1690 pour le duc de Bourgogne, 
petit-fils de Louis XIV. Elle a porté jusqu^à la 
mort de ce prince le titre de gendarmes de Bour- 
gogne, et, le 8 juin 171 1, elle prit celui de 
gendarmes de Bretagne, en devenant la pro- 
priété du jeune duc de Bretagne, mort lui-même 
le 1 8 mars 1 7 1 2 . Elle conserva néanmoins ce nom 
jusqu'au i5 septembre 1751. Elle fiit alors don- 
née au duc de Bourgogne, frère aîné de Louis XVI, 
et reprit son premier titre. Ce prince étant mort 
en 1 761 , elle passa le 23 mars 1 762 à Louis XVI, 
qui lui-même s'appelait alors duc de Berry, tx 
elle demeura sous le titre de gendarmes de Berry 
jusqu'à sa suppression, en 1776. 

Le marquis de Gassion, son troisième capi- 
taine, a été tué en 1704, à la bataille d'Hochs- 
tedt. 

Les gendarmes de Bourgogne, de Bretagne ou 
de Berry avaient pour couleur distinctive le jaune 
jonquille. Les étendards étaient bleus et portaient 
un grand arbre en plaine, avec un plus petit à 
côté, et ces mots : Triumphali è stipite surgit. 
Sur le revers de l'étendard et dans les coins des 
housses le chiffre du prince couronné de prince 
du sang. 



Gendarmerie de France. 263 

Cette compagnie faisait partie de l'escadron 
des gendarmes écossais. 

CHEVAU-LÉGBRS DE BERRY. 
Capitaioes-lieatenants. 

1. Chevalier de Saint-Saëns (N.), 3o août 1690. 

2. Marquis de Mézières ( Eugène - Marie de Béthizy)^ 

24 janvier 1692. 

3. Chevalier de Plancy (Emmanuel Guénégaud), i«' no- 

' vembre 1693. 

4. Comte de Beauvau (Pierre-Magdeleine), 7 janvier 

1706. 

5. Marquis de Flamarens (N. de Grossoles), décembre 

1710. 

6. Marquis de Breteuil-Chanteclerc (N.), 1 716. 

7. Marquis de Tillières (Jacques Tanneguy Le Veneur), 

25 mars 1734. 

8 . Comte de Choiseul-Chevigny (César-Gabriel), 1 6 avril 

1738. 

9. Marquis de Choiseul - Beaupré ( Charles -^Marie), 

i«' juin 1739. 

10. Marquis de Colbert de Lignières (Louis), i^^mai 

1742. 

1 1 . Marquis de Lespéroux (Charles), 1 1 juin 1745. 

12. Chevalier de Bissy (Henri -Charles de Thiard), 

20 janvier 1747. 

i3. Comte d'Herbouville (N.), 1748. 

14. Marquis de Torcy (Charles- Antoine- Félix Colbert), 

21 août 1759. 

i5. Comte de Saint- Chamans (N.), ïi janvier 1762. 

Cette compagnie, créée le même jour que les 
gendarmes de Bourgogne, a subi les mêmes chan- 



264 Histoire de la Cavalerie, 

gements de titre, et a été incorporée avec les 
gendarmes le i^^ niars 1763. 

Sa couleur distinctive était le violet clair. Ses 
étendards bleus portaient un oiseau volant et un 
autre à terre les ailes étendues, prêt à s''enlever, 
avec cette devise : Votis sectatiir euntem. 

Les chevau-légers de Berry escadronnaient 
avec les gendarnies anglais. 

GENDARMES DE MONSIEUR. 
Capitaines-lieutenanti. 

1. Marquis de Genlis (René Bruslard), 19 décenobrc 

1669. 

2. Comte de Beaujeu (N.), 21 décembre 1696. 

3. Marquis de La Tour (N. de Monstiers), lyoS. 

4. Marquis de Saint-Pierre (N.), 1715. 

5. Marquis de Saulx-Tavannes (N.), 1725. 

ô. Baron de Montmorency (Léon-Anne), 26 février 
1735. 

7. Marquis du Coudray (Hilaire Rouillé), i" décembre 

1745. 

8. Comte de Flavigny (Louis-Agathon), i" janvier 174^^. 

9. Marquis de Lyons (N.), 19 avril 1760. 

10. Marquis d'Houdetot (N.), 1762. 

11. Marquis de Verteillac (N. de La Brousse), 1770. 

12. Comte d'Auger (N .) , 1780. 

Cette compagnie a été formée, le 19 décem- 
bre 1669, pour le premier duc d'Anjou, deuxième 
fils légitime de Louis XIV, avec les dibris de 
deux anciennes compagnies de cavalerie appar- 
tenant au marquis de Genlis et au comtî de 



Gendarmerie de France, 265 

Lannion. En 1690, elle fut reconstituée et donnée 
au duc d^ Anjou, depuis roi d'Espagne. Le 10 sep- 
tembre 1753, elle prit le nom d'Aquitaine, que 
portait un petit-fils de Louis XV mort en bas âge 
et qui la transmit, 23 mars 1762, à son frère le 
comte de Provence, depuis Louis XVIII, qui prit 
le titre de Monsieur à Tavénement de Louis XVI 
à la couronne. Elle a donc successivement porté 
les noms d'Anjou, d'Aquitaine, de Provence et 
de Monsieur, et elle a été licenciée en 1788. 

Elle se distinguait par la couleur vert d'eau. 
Ses étendards étaient bleus avec deux arbres dans 
une plaine. Sur le sommet du plus grand, il y 
avaif une étoile dardant ses rayons sur le plus 
petit, et cette devise au-dessous : Virtute ancto- 
. rem refert. 

Cette compagnie escadronnait avec les gen- 
darmes bourguignons. 

CHEVAU-LÉGERS DE MONSIEUR. 
Capitaines-lieutenants. 

1. Comte de Rosamel (N.), i" octobre 1690. 

2. Marquis de Ségur (N.), 1693. 

3. Marquis de Linièrcs (N. des Essarts), 1701. 

4. Marquis de Soudé (N.), I702. 

5. Comte de Tavannes (Henri-Charles de Saulx), 18 jan- 

vier 171 1. 

6. Comte de Ciines (N.), 12 septembre 1716. 

7. Comte de Matharel (N.), 1716. 

8. Marquis de Menou (N.), 1720. 

I. 23 



266 Histoire de la Cavalerie. 

' 1 

9. Marquis de Céreste (N. de Brancas), 1729. 

10. Chevalier d'Aguesseau (Henri-Louis), 25 mars 1734. 

11. Comte de Blet (Alexandre de Saint-Quintin), 25 no- 

vembre 1734. 

12. Marquis de Droménil (Charles-François-Gabriel de 

Halkncourt), 21 février 1740. 
i3. Comte d'Entragues (Nicolas-Hyacinthe de Montva- 

lat), 14 décembre 1744. 
14. Comte de Clermont-Montoison (N.)i janvier 1749. 
i5. Marquis de Canisy (N.), 1760. 
16. Comte d'Aigreville (N.), 1762. 

Cette compagnie, créée le i®' octobre i6go 
pour le duc d'Anjou, a suivi toutes les vicissitudes 
des gendarmes de même nom. Elle a été incorpo- 
rée dans cette compagnie de gendarmes en 1 762 . 

Pour le service, elle escadronnait avec les gen- 
darmes de Flandre. La couleur aurore lui était 
affectée. Ses étendards étaient pareils à ceux des 
gendarmes de Monsieur. 

GENDARMES d'aRTOIS. 

Capitaines-lieutenants. 

1. Marquis de Virville (N. Groslée), i" octobre 1690. 

2. Marquis de Champron (N .), 1701. 

3. Marquis de Bruslard (N.), 1702. 

4. Marquis de La Messeliè^re (Bonaventure Frottier), 

16 décembre 1703. 

5. Marquis de Roquelaure (N.), juillet 1706. 

6. Marquis de Ryans (N.), 1708. 
7 Marquis de Crécy (N.), 1712. 
8. Marquis de Pelle vé (N.), 1718. 



Gendarmerie de France. 267 

■ ■■■■■■-^ — ■— I I ■,,, — .y ■■■■■■■ —^^ . 

9. Marquis du Muy (Jean-Gabriel-Tancrède de Félix), 
3 août 1733. 

10. Comte de Mailly-Haucourt (Joseph -Augustin), 

16 avril 1738. 

11. Marquis de La Chèze ( Louis - Hercule Portalès), 

II janvier 1742, 

12. Comte d'Houdetot (Claude-Constant-César), i" jan- 

vier 1748. 
i3. Marquis de Sommyèvre (Gaspard), 22 juillet 1758. 
14. Comte d'Esclignac (Charles-Mâgdeleine de Preissac), 

20 février 1761. 
i5. Comte d*Auvet (N.), 1763. 

16. Vicomte de Jumilhac (N.), 1774. 

17. Marquis d'Averne (N.), 1776. 

18. Marquis de Savines (N.), 1780. 

19. Baron de Nédonçhel (N.), 1783. 

Cette compagnie a été créée le i*' octobre 1690 
pour le duc de Berry, le troisième des petits-fils 
de Louis XIV. Elle a porté le titre de Berry jus- 
qu^à Tannée lyôS, où elle est devenue la propriété 
du comte d^ Artois. 

Deux de ses capitaines ont été tués à Pennemi : 
le marquis de Bruslard en 1 703 à la bataille de 
Spire, et le marquis de Roquelaure en 1 706 à la 
bataille d'Audenarde. 

Elle escadronnait avec les gendarmes de la 
Reine. 

Sa couleur distinctive était le rouge cramoisi. 

Ses étendards étaient bleus, avec un lion, en 
posture arrêtée, montrant sa face en plein, et la 
devise : Vestigia magna sequeiur. 



268 Histoire de la Cavalerie, 

CHEVAU-LÉGERS d'aRTOIS. 
Capitaines-lieutenants. 

1. Marquis de Kérouartz (N.), i^^ octobre 1690. 

2. Marquis d'Illiers (Jacques de Balzac), 12. juin 1703. 

3. Comte de Chatellux (Guillaume-Antoine de Beau- 

voir), 3 o mars 171 5. 

4. Marquis d'Argouges (Henri- Louis de Fleury), 14 juin 

1723, 

5. Comte de Cernay (Charles- Joseph Le Danois), 2 avril 

1727. 

6. Comte de Chaumont (Louis -Antoine de Bernage), 

2 5 mars 1734. 

7. Marquis d'Ossun (Pierre- Paul), 14 décembre 174-I. 

8. Vicomte de Courtaumer (N.), i" décembre 1745. 

9. Marquis de Crussol d'Amboise (Anne -Emmanuel- 

François-George), i«' février 1749. 

10. Marquis de Raffetot (N.), 10 février 1759. 

1 1. Comte de Custine (Marc- Antoine) , 1760. 

12. Comte d'Auvet (N.), 1761. 

L'occasion de la formation de cette compagnie 
et ses changements de titre sont les mêmes que 
pour les gendarmes qui la précèdent. Elle a été 
incorporée en 1 762 dans cette compagnie de gen- 
darmes. 

Elle escadronnait avec les chevau-légers de la 
Reine. 

Sa couleur distinctive était le rose. Ses éten- 
dards étaient bleus avec une aigle au vol et cène 
devise : Qub fton feret incita virtus. 



Gendarmerie de France. 269 

GENDARMES d'ORLÉANS. 
Capitaines-lieutenants. 

1. Comte de Montignac (N.), 1647. 

2. Marquis de La Roque (N.), 1647. 

3. Comte de Beauvau (N.), 1667. 

4. Marquis de Beauvau (N.), 1677. 

5. Baron de Salhart (N.), 1684. 

6. Comte de Sassenage (N.), 1690. 

7. Comte de Saint-Christophe (N.), 1694. 

8. Marquis de Mauny d'Estampes (N.), 1705. 

9. Marquis d'Oyse ( Marie- Joseph de Brancas), 6 août 

1715. 

10. Marquis d'Estréhan (Jacques-Robert d'Héricy), 25 no- 

vembre 1734. 

11. Comte de Saint- André (René-Ismidor-Nicolas Pru- 

nier), 3o mal 1742. 

12. Marquis d'Auvet (Louis-Nicolas), 14 décembre 1744. 
i3. Marquis d'Oisy (N,), i" janvier 1748. 

14; Comte de Lordat (Joseph-Marie), 20.septembre 1738. 
i5^. Marquis de Boisse (Ambroise- Joseph-François Dul- 
cenc), 21 août 1759. 

16. Comte de Jaucourt (Louis- Pierre -Antoine d'Es- 

peuilles), 20 février 1761. 

17. Marquis de Fougières (N.), niai 1763. 

18. Marquis de la Tournelle (N.), 1764. 

19. Marquis de Sabran (N.), 1769. 

20. Comte de Rastignac (N. de Chapt), 1771. 

» 

Cette compagnie a été formée en 1647, sous le 
nom d'Anjou, pour le frère de Louis XIV, et elle 
prit avec ce prince le nom d'Orléans en 1 660, à 
la mort de Gaston, frère de Louis XI IL Elle est 

I. 23. 



270 Histoire de la Cavalerie. 

restée longtemps au service du prince. Ce fut 
après la bataille de Cassel, où le duc d'Orléans 
battit le prince d'Orange, le 11 avril 1677, et où 
le capitaine comte de Beauvau fut tué, que le 
roi admit les compagnies de son frère à prendre 
rang dans la gendarmerie. 

Un autre capitaine de cette compagnie a été 
tué à Fleurus, c'est le baron de Salhart. 

Les gendarmes d'Orléans portaient la couleur 
bleu clair. Les étendards étaient rouges, avec une 
bombe qui crève en l'air et jette le feu par quatre 
côtés, et pour devise : Aller post fulmina terror. 

Ils escadronnaient avec les gendarmes dau- 
phins. 

Il y avait eu une autre compagnie de gen- 
darmes d'Orléans levée en 1643 par Gaston, et 
qui avait été commandée, d'abord par le mar- 
quis de Mauny, remplacé le 10 avril 1645 par 
Florimond Bruslard, marquis de Genlis, qui s'en 
était démis en septembre i658 en faveur de son 
fils. Cette compagnie disparut comme gendarmes 
d'Orléans* à la mort de Gaston. Elle resta proba- 
blement, comme compagnie franche de cavalerie, 
la propriété de son capitaine René* Bruslart, mar- 
quis de Genlis, et c'est elle qui est entrée en 1 669 
dans la formation des gendarmes d'Anjou, de- 
venus gendarmes de Monsieur. 



Gendarmerie de France, 271 

^^^^^^^^^^"■^ ■ ■" ™^« H^HB V ^^^^B«_ ■■■■■>■_ I >■■■■■■■ ■ ■■ ■ ■ — ■ 

CHEVAU-LÉGERS d'oRLÉANS. 
Capitaines-lieutenants. 

1. Marquis de Valsemé (Ferry Mallet de Graville), 

14 juin i655. 

2. Marquis de Valsemé (Louis Ferry Mallet de Graville), 

29 septembre 1688. 

3. Chevalier de Mon tmain (Simon- Antoine de Ténarre), 

3 mars 1706. 

4. Comte de Mainville (Antoine-Hyacinthe de Mont- 

morel), i5 octobre 1725. 

5. Marquis de Reffuges (Henri de Pomponne), 2 5 mars 

1734. 

6. Marquis de Moussy (N.), 16 avril 1738. 

7. Marquis de Poulpry (Louis-Marie), 11 avril 1743. 

8. Comte de Lannoy (N.), 1746. 

9. Marquis de Tracy (N. Destutt), 12 septembre 1754. 
10. Comte de Fougières (N.), 22 mai 1759. 

Cette compagnie, créée le 14 juin i655, et 
comme la précédente pour Philippe d'Anjou, a ' 
suivi le sort des gendarmés du même nom, dans 
laquelle elle a fini par être incorporée en 1762. 

Sa couleur était le bleu très-clair, ou gris ar- 
gentin. Ses étendards étaient pareils à ceux des 
gendarmes. 

Elle escadronnah avec les chevau-légers-dau- 
phins. 



272 Histoire de la Cavalerie. 



CHAPITRE III. 

RÉGIMENTS DE CAVALERIE. 

Nous rappelons qu'à Torigine la dénomination 
de cavalerie légère s'appliquait à toutes celles 
des troupes à cheval qui n'appartenaient pas au 
corps de la gendarmerie. 

Cette dénomination s'est maintenue jusqu'en 
1779, pour désigner un certain nombre de ré- 
giments qui étaient demeurés tels qu'ils étaient 
à leur création, après qu'on eut détaché de l'en- 
semble les dragons d'abord, et ensuite les hus- 
sards pour en former des armes spéciales, indé- 
pendantes de la cavalerie légère et dirigées par 
des colonels généraux indépendants. 

Il est donc entendu qu'à partir de 1779, le 
mot cavalerie doit être compris dans le sens de 
grosse cavalerie ou de cavalerie de ligne. 

Le nombre des régiments de cette espèce était 

réduit, au moment de la Révolution, à 26, en 

y comprenant les deux régiments de carabiniers, 

. et cette arme avait, en raison de son ancienneté, 

le pas sur les hussards qui sortaient de son sein, 



Régiments de cavalerie, 278 



sur les dragons qui en sortaient également, mais 
qui avaient depuis longtemps déjà une vie propre, 
et sur les chasseurs qui étaient les fils des dra- 
gons. 

On a vu que la cavalerie légère possédait un 
état-major, et à la tête de cet état-major, 3 
officiers généraux : le colonel général, le mestre 
de camp général et le commissaire gçnéral. La 
création de ces 3 grandes charges est antérieure 
à l'organisation permanente de la cavalerie lé- 
gère. 

Avant rétablissement définitif des dragons en 
arme séparée, le colonel général de la cavalerie 
légère avait eu pendant quelque temps un troi- 
sième adjoint, c'était le mestre de camp général 
des carabins. Nous avons déjà donné la liste des 
officiers généraux de la cavalerie, qui ont exercé 
leurs charges avant rétablissement permanent 
des régiments. Nous placerons à la tête des 
notices des 3 régiments de Fétat-major, les noms 
des colonels généraux, mestres de camp généraux 
et commissaires généraux, qui ont exercé depuis 
cette époque, ainsi que les noms des mestres de 
camp commandants qui les ont remplacés dans 
l'exercice réel du commandement de ces corps. 

Voici deux ordonnances royales relatives à des 
régiments de cavalerie, qui exprimeront mieux 
que nous ne saurions le faire par des explications, 
à quoi se réduisaient, au xvni® siècle, les attri- 



274 , Histoire de la Cavalerie. 

butions administratives des officiers généraux de 
Tarme, ce que Ton appelait l'attache du colonel 
général. 

La première de ces ordonnances montre, en 
outre, comment un régiment de cavalerie perdait 
son rang suivant la qualité de son chef, et la 
seconde comment s'établissait un changement de 
titre. 

« ORDONNANCE DU ROY 

« Pour remettre à soji rang le régimejit de 
cavalerie 'vacant par le deceds de Mons^ le 
prince de Contj, en le mettant sous le nom 
du S^ marquis du Chayla, mestre de camp, 
auquel Sa Majesté en a donné le commande- 
ment. 

« Du i^^ juin 172J. 

« De par le Roy : 

« Sa Majesté ayant donné au S"^ marquis du 
Chayla, Mestre de Camp-lieutenant du Régiment 
de cavalerie de Conty, la charge de Mestre de 
camp dudit Régiment,^vacante par la mort de 
Mons' le Prince de Conty ; Elle a jugé à propos 
de remettre ledit Régiment au Rang qui luy avoii 
esté réglé par l'Ordonnance du premier May 1690, 
et à laquelle Elle n'avoit depuis dérogé par celle 
du 20 Mars 17 18, qu'en considération du Rang 
de ce Prince : Et en conséquence Elle a ordonné 



Régiments de cavalerie. 275 

et ordonne que ledit Régiment reprendra le même 
Rang qu'il avoit avant ladite Ordonnance du 
20 mars 17 18 entre les autres Régiments de sa 
cavalerie ; que pour cet effet il marchera immé- 
diatement après le Régiment de Toulouse, et 
avant celuy de Villars, et qu'il servira dores- 
navant sous le nom du &" marquis du Chayla. 
Mande et Ordonne Sa Majesté à Mons^ le Comte 
d'Evreux Colonel général de Sa Cavalerie, et au 
&■ de Chastillon Mestre de camp général de la- 
dite Cavalerie, de tenir la main à l'exécution de 
la présente. Fait à Versailles le premier Juin 
mil sept cent vingt-sept. Signé Louis. Et plus 
bas. Le Blanc. » 

« Louis de la Tour d'Auvergjie, comte d'É- 
preux, colonel général de la cavalerie légère, 
Françoise et Estrangère, 

« Vu l'Ordonnance du Roy du i®^ Juin 1727, 
pour fixer le rang du Régiment de Cavalerie 
de Gonty, à présent du Chayla, immédiatement 
après celuy de Toulouse et avant celuy de 
ViUars, ainsi qu'il est plus au long contenu dans 
ladite ordonnance, par laquelle Sa Majesté Nous 
mande et ordonne de tenir la main à ce qu'elle 
soit exactement observée. Nous, en vertu du 
pouvoir à nous donné par Sa Majesté, à cause 
de nôtre charge de Colonel général de ladite 



276 Histoire de la C cavalerie. 

Cavalerie; Ordonnons à tous Mestres de Camp 
de Cavalerie, de reconnoître le rang dudit Ré- 
giment de du Chayla, conformément à ladite Or- 
donnance, sans y contrevenir, à peine de pu- 
nition ; laquelle dite Ordonnance de Sa Majesté, 
et la présente, seront publiées à la teste de 
chacun desdits Régimens de Cavalerie, par les 
Commissaires des Guerres qui en ont la con- 
duite et police, afin que personne n'en ignore. 
Fait à Paris le dix-neuf Aoust mil sept cens 
vingt-sept. Signé : Louis de La Tour d'Auvergne 
Comte d'Evreux. Et plus'bas, par Monseigneur, 
Mitouflet. » 

(^ ORDONNANCE DU ROY 

« Pour faire prendre an régî7?îent de cavalerie 
d'Anjou le nom d Aquitaine. 

« Du 1 septembre i jSJ. 

« De par le Roy : 

« Sa Majesté voulant que le Régiment de 
Cavalerie d'Anjou prenne le nom à^ Aquitaine, 
Elle a ordonné et ordonnons que ledit Régiment 
de Cavalerie d'Anjou sera à l'avenir sous le titre 
de Monsieur le Duc d'Aquitaine, et en portera 
le nom : l'intention de Sa Majesté n'étant pas, 
au surplus, de rien changer à la composition 
dudit Régiment, ni au rang qu'il tient actuelle- 



Régiments de cavalerie, 277 



ment dans ses troupes de Cavalerie. Mande Sa 
Majesté à Mons. le Prince de Turenne, Cçlonel 
général de ladite Cavalerie, et au sieuj: Marquis 
de Béthune, Mestre de Camp général de ladite 
Cavalerie, de tenir la main à Texécution de la 
présente Ordonnance. Mande et ordonne Sa Ma- 
jesté aux Gouverneurs et ses Lieutenants gé- 
néraux en ses provinces, aux Gouverneurs ou 
Commandans de ses villes et places, aux In- 
tendans sur ses dites provinces et sur ses fron- 
tières, aux Directeurs et Inspecteurs généraux de 
sa Cavalerie, et à tous autres ses officiers qu'il 
appartiendra, de tenir la main à l'exécution de 
la présente, laquelle sera lue et publiée à la tête 
dudit Régiment, par le Commissaire des Guerres 
qui en a la conduite et police, afin qu'aucun n'en 
puisse prétendre cause d'ignorance. Fait à Ver- 
sailles, le dix septembre mil sept cent cinquante- 
trois. Signé Louis. Et plus bas, M. P. de Voyer 
d'Argenson. » 

« Godefrqy Charles-Henri de la Tour d'Au- 
vergjie, prince de Turenne, grand chambel- 
lan de France en survivance, colonel général 
de la cavalerie légère, françoise et étrangère. 

« Vu l'Ordonnance du Roy du i o Septembre 
1753, pour faire prendre au Régiment de Ca- 
valerie d'Anjou le nom dC Aquitaine^ sans rien 
I. 24 



278 Histoire de la Cavalerie. 



changer à la composition dudit Régiment, ni au 
rang qu'il tient actuellement dans ses troupes de 
Cavalerie, à nous adressée : Avec ordre de tenir 
la main à son exécution : Mandons à Monsieur le 
Marquis de Béthune, Mestre de camp général 
de ladite Cavalerie, de tenir la main à ce qu'elle 
soit exactement observée. Ordonnons à tous Bri- 
gadiers, Mestres de Camp, Commandans de la- 
dite cavalerie, et autres qu'il appartiendra, de 
s'y conformer, et de la faire exécuter selon sa 
forme et teneur. Fait à Paris, le dix Septembre 
mil sept cent cinquante-trois. Signé le Prince 
de Turenne. Et plus bas, par Monseigneur. 
Signé Gauthier, secrétaire général de la cava- 
lerie. » 

Le récit des vicissitudes par lesquelles Tan- 
cienne cavalerie a dû passer pour arriver à l'état 
où la Révolution l'a trouvée, resterait incomplet 
si l'on ne mettait pas sous les yeux du lecteur 
une image aussi exacte que possible de ces soldats, 
qui ont combattu à Steenkerque , à Denain et à 
Fontenoy, et qui ont promené le dernier uni- 
forme que leur a donné la monarchie d'Am- 
sterdam au Caire, de Lisbonne à Moscou. 

On a vu par la citation d'une pièce écrite de 
la main de Louis XIV , quelle fut la première 
tenue portée par les régiments de la cavalerie 
française. A défaut de détails plus précis on peut 
.avoir recours aux tableaux de Vandermeulen , 



Régiments de cavalerie. 279 

/ '. —- 

qui rendent au moins palpable la physionomie 
générale des soldats à cette époque. 

Cette physionomie a peu varié jusqu'en 1740. 
A partir de cette date elle se modifie au contact 
des Allemands pour aboutir au règlement de 
1763, sur rhabillement et l'équipement unifor- 
mes, suivi de ceux de 1776, 1779 et 1786, qui 
sont le développement du premier. 

Il y a donc eu pour les costumes des troupes 
à cheval deux époques bien caractérisées, Fune 
qui commence en 1690 et qui s'étend jusqu'à la 
guerre de la succession d'Autriche ; l'autre qui 
part de la guerre de Sept ans, et qui se main- 
tient sans altérations sensibles jusqu'à la fin de 
l'Empire. 

Nous renvoyons aux notices les particularités 
de la tenue de chaque corps, nous contentant ici 
d'exposer l'ensemble de cette tenue aux époques 
indiquées plus haut. 

Il existait, en 1740, 67 régiments de cavaleriç 
proprement dite. 

Les régiments appartenant au roi et aux prin- 
ces de la famille royale, au nombre de 1 5 , por- 
taient l'habit et le manteau bleus avec la couleur 
distinctive rouge écarlate, combinée de diverses 
manières dans la doublure, les revers, les pare- 
ments. Royal, le Roi et le Dauphin avaient les 
boutons de cuivre et le galon du chapeau en or-, 
tous les autres portaient les boutons d'étain et le 



28o Histoire de la Cavalerie. 

galon d'argent. Tous aussi avaient des housses et 
des chaperons d'équipage bleus , et le galon bor- 
dant les diverses parties de l'équipage était de 
, couleur aurore, excepté dans le régiment du Roi, 
où ce galon était celui de la livrée, et chez les ca- 
rabiniers dont le galon aurore était traversé par 
une raie blanche. 

Royal étranger a toujours eu un costume de 
forme particulière, à la polonaise. 

Colonel général, la Reine, Noailles, Pons 
et Fitz -James portaient l'habit et le manteau 
rouges; le premier avec des revers et des pare- 
ments noirs, les quatre derniers avec des distinc- 
tions bleues ou rouges. Colonel général, la Reine 
et Noailles avaient les boutons et le galon de- 
chapeau en métal jaune, les deux autres en métal 
blanc. Pons, seul, avait l'équipage bleu; cet 
équipage était rouge chez les quatre autres. Le 
galon d'équipage était noir et blanc dans Colonel 
général. Chez les autres il suivait la livrée des 
chefs de corps. 

Les 37 régiments de cavalerie qui font la dif- 
férence étaient vêtus de drap gris blanc, sauf 
Mestre de camp général qui se distinguait par 
l'habit gris de fer et le manteau rouge, Commis- 
saire général qui avait l'habit gris blanc, mais 
le manteau rouge, et Conti qui avait les deux 
vêtements gris cendré. Tous avaient les, distinc- 
tions rouges, excepté les deux derniers régiments 



Régiments de cavalerie, 281 



de l'état-major qui portaient les revers et les pa- 
rements de panne noire, comme Colonel géné- 
ral. Les boutons et les galons de chapeau étaient, 
pour quelques-uns, de métal blanc ou jaune, et 
pour le plus grand nombre les boutons étaient 
en drap gris blanc, le galon de chapeau restant 
métallique. Uéquipage du cheval était uniformé- 
ment rouge avec galonnage varié, généralement 
à la livrée des mestres de camp. 

La tenue des cavaliers était complétée par la 
culotte de peau, des bottes molles, et par le port 
de la cocarde noire qui tranchait sur les galons 
métalliques des chapeaux. Tous, à Texception 
des cuirassiers, portaient le buffle ou veste de 
peau jaune à boutons de cuivre et des buffleteries 
blanches piquées. A la fin de la guerre de la suc- 
cession d'Autriche, ils prirent des buffleteries de 
cuir jaune. Les régiments se distinguaient encore 
entre eux par la forme et la direction des poches, 
le nombre et la disposition des boutons. 

Ce qui ressort de ce système de costumes, c'est 
qu'il roulait sur l'emploi exclusif des trois cou- 
leurs : bleue, rouge et blanche. Il n'y a d'excep- 
tion que pour les 3 régiments de l'état-major. 

On remarquera que les régiments appartenant 
au roi et aux princes de son sang avaient seuls le 
privilège de porter l'habit bleu, bleu de roi. 
L'habit rouge était une distinction accordée au 
régiment du Colonel général, à celui de la Reine 
I. 24. 



282 Histoire de la Cavalerie. 



et à celui de la puissante famille de Noailles. 
Pons et Fitz-James, qui portaient aussi Thabît 
rouge, étaient des corps d'origine étrangère. 

Louis XIV et après lui Louis XV avaient sans 
doute leurs raisons pour aimer le bleu, le rouge et 
le blanc, et pour avoir réglé et maintenu Temploi 
et la signification de chacune de ces couleurs. 

Après la guerre de Sept ans, les costumes des 
régiments de cavalerie conservés furent réglés 
comme il suit : le règlement, mis en vigueur 
en 1763, donna Thabit bleu à tous les régiments 
de cavalerie. et leur affecta des couleurs distinc- 
tives qui ressortaient, sauf quelques exceptions, 
dans la doublure, le collet renversé, les revers et 
les parements. L'habit était garni d'une épaulette 
de laine de la couleur de distinction, portée à droite 
et destinée à maintenir la courroie porte-giberne. 
Les poches sont coupées en travers et garnies de 
3 boutons, comme Tétaient naguère celles de la 
gendarmerie. Tous , excepté les cuirassiers , 
avaient le buffle ou veste de peau de chamois et 
tous portaient la culotte de chamois et les bottes 
molles. Tous portaient le chapeau galonné de 
blanc avec la cocarde noire. Les trois régiments 
de rétat-major avaient seuls le galon jaune, rem- 
placé en 1768 par le galon aurore. Lés boutons 
suivaient la couleur du galon et étaient timbrés, 
pour la première fois, du numéro d'ordre du régi- 
ment. 



Régiments de cavalerie, 283 

Pour tous, le manteau était de drap gris blanc, 
doublé comme Thabit, avec trois brandebourgs 
de la couleur de distinction. 

Les trompettes des régiments de la Reine, des 
princes du sang et de Noailles portent la livrée 
spéciale du chef de corps. Tous les autres ont 
rhabit uniforme avec un petit bordé de galon de 
soie aurore ou blanc suivant le bouton. 

L'équipage du cheval est généralement bleu. 
Son galonnage autour de la housse et du chaperon 
de fonte est variable d'un régiment à l'autre, mais 
il paraît désormais fixé. 

C'est à partir de ce moment que ressort nette- 
ment l'intention de faire porter aux officiers 
Tuniforme de la troupe, tout en les distinguant : ce 
que la troupe porte en aurore ou en blanc dans 
les accessoires de la tenue, est remplacé, pour les 
officiers, par l'or et l'argent. 

Tout en faisant disparaître beaucoup de dé- 
tails de tenue par desquels les chefs de corps 
cherchaient à se singulariser, le règlement de 
1763, pour remplacer ces détails souvent étran- 
ges , admet de nouvelles couleurs distinctives 
qui apparaissent dans les doublures , les revers , 
les parements et le collet. 

Le cramoisi devient la couleur de privilège de 
Colonel général, tandis que les deux autres ré- 
giments de l'état-major conservent le noir. Les 
couleurs jaune, aurore, rose, blanche, ventre de 



284 Histoire de la Cavalerie, 

biche sont adoptées pour caractériser quelques- 
uns des régiments de gentilshommes, devenus 
régiments royaux ou régiments de princes. 

Nous avons dit ailleurs comment les règle- 
ments de 1776 et 1779 partageaient les régi- 
ments de cavalerie en séries ayant chacune sa 
couleur de distinction. 

Le règlement du 3o octobre 1786, type et 
modèle de précision et de clarté, sans donner 
encore le coup de grâce à la vieille fantaisie, 
acheva pourtant d'imprimer aux troupes l'exacte 
uniformité militaire, que les corps ont conservé à 
très-peu près pendant la période républicaine et 
impériale. Nous ferons à ce règlement des em- 
prunts assez étendus pour, bien fixer les idées sur 
la forme matérielle dçs corps aux dernières an- 
nées de la monarchie. 

« L'habillement uniforme des bas officiers et 
« cavaliers sera composé d'un habit doublé de 
« serge aux couleurs de. distinction qui seront 
« réglées pour chaque régiment, d'une veste de 
« drap doublée de serge ou cadis blanc et d'une 
« culotte de peau de daim. L'habit et la veste 
« seront absolument semblables, quant à la forme 
« et à la quantité et position des boutons, à ceux 
« de l'infanterie, excepté que la veste n'aura point 
« de parements,, ni de collet de la couleur des 
« distinctions. 

« Il sera donné, en outre, à chacun des bas-offi- 



Régiments de cavalerie, 285 

« cîers et cavaliers un surtout de drap bleu, fait 
« en frac et garni de huit gros boutons uniformes, 
« dont six à la taille, posés, un en haut, deux au 
« milieu, trois en bas.et deux aux hanches ; Tépau- 
« lette et la contre-épaulette seront attachées au 
« surtout avec un petit bouton. 

« Le manteau sera de drap gris blanc, piqué de 
« bleu; il sera garni de trois brandebourgs de 
« chaque côté, faits avec * s g alons affectés à la 
« distinction de l'équipage du cheval de chaque 
« régiment, et parementé sur le devant de serge 
« * de la couleur des distinctions. 

« La cavalerie portera un chapeau conforme à 
« x:elui de V infanterie. \\ sera garni en temps de 
« guerre d'une calotte de fer évidée : la cocarde 
« sera blanche. » 

Remarquons ici que la charge de colonel général 
de rinfanterie venait d'être rétablie en 1780 en fa- 
veur du prince de Condé. C'est à cette occasion que 
les troupes d'infanterie prirent la cocarde blanche 
« Chaque compagnie de cavalerie sera distin- 
« guée par une houppe de laine de forme ronde 
« et aplatie, qui sera portée au-dessus de la co- 
« carde. Celle de la i^® compagnie sera écarlate; 
« celle de la 2® bleu céleste, celle de la 3® rose et 
« celle de la 4® souci. Les deux adjudants, le 
« maître maréchal, le maître sellier et l'armurier 
« porteront la houppe en laine blanche, comme 
« étant attachés à Vétat^major, 



286 • Histoire de la Cavalerie. 

« Les bas -officiers et cavaliers porteront un 
« bonnet de police, façonné à la dragonne, du 
« même drap que Phabit. Le haut du bonnet sera 
« garni d'une frange de drap, moitié de la couleur 
« du fond et moitié de la couleur de distinction. 

« Les adjudants porteront Tépaulette à fond de 
« soie couleur de feu ; elle sera traversée dans 
« le milieu de sa longueur de deux cordons de 
« tresses d'or ou d'argent, suivant la couleur du 
« bouton. 

« Les maréchaux des logis en chef porteront 
« sur le côté extérieur de Tavant-bras deux galons 
« d'argent fin placés obliquement. 

« Les fourriers porteront deux bandes de gâ- 
te Ions d'argent fin cousus en travers sur le dehors 
« de la manche, au-dessus du pli du bras. 

« Les rnaréchaux des logis porteront un seul 
« galon d'argent fin, placé comme celui d'en bas 
« des deux qui sont la distinction des maréchaux 
« des logis en chef 

« Les brigadiers porteront sur le côté extérieur 
« de l'avant-bras deux galons de fil blanc placés 
« comme ceux des maréchaux des logis en chef. 

« Les appointés porteront un seul galon de til 
« blanc, placé comme celui d'en bas des brîga- 
« diers. 

« Les cavaliers qui seront gentilshommes por- 
« teront pour distinction l'épaulette sans frange 
« en galon d'or ou d'argent, vivant la couleur 



Régiments de cavalerie, 287 

« du bouton, laquelle épaulette sera doublée et 
« lisérée du drap de la couleur distinctive. 

« Les maréchaux ferrants porteront sur le de- 
« hors de chaque manche, au-dessus du pli du 
« bras, la figure d^unfer en galon de fil blanc. 

« Les hommes rengagés continueront de porter 
« le chevron ou le double chevron en galon de fil 
« blanc, 

« Les maréchaux des logis en chef, fourriers et 
« maréchaux des logis des régiments de Tétat- 
« major de la cavalerie, porteront les distinctions 
« réglées ci-dessus en galon d^or fin, et les briga- 
« diers, appointés et maréchaux ferrants, ainsi 
« que les hommes rengagés, en galons de laine 
« jaune. 

« Les trompettes porteront Fhabit de drap 
« bleu, affecté à la livrée du roi, avec les revers, 
« parements, vestes, culottes et doublures des 
« couleurs déterminées, coupe de poches et pla- 
« cément des boutons réglés pour chaque régi- 
« ment, à Texception de ceux des régiments de 
« rétat-major, de la reine et des princes du sang, 
« qui continueront de porter les habits de la livrée 
« des mestres de camp titulaires, en se confor- 
« mant toutefois aux distinctions de l'uniforme de 
« chaque corps ; de sorte que les revers et pare- 
« ments qui se trouveront, dans Funiforme des 
« cavaliers, de même couleur que le fond de leur 
« habit, soient de même drap pour les trompettes 



288 Histoire de la Cavalerie. 

« que celui de leur habit. Ils porteront, au sur- 
« plus, la culotte et la veste déterminée pour la 
« cavalerie. 

« L^habillement des officiers sera de même 
« cotaleur que celui des cavaliers, tant pour le fond 
« que pour les distinctions. Il ne différera que 
« par la qualité du drap et par celle des boutons, 
« qui seront dorés ou argentés. 

« Les officiers seront coiffés avec des chapeaux 
« bordés d'un galon de soie noire et garnis d'une 
« cocarde de basin blanc, au-dessus de laquelle 
« sera mise la houppe en poil de chèvre de la cou- 
« leur affectée à leur compagnie. Celle des offi- 
ce ciers de Tétat-major sera blanche. Aucun officier 
« ne pourra porter de plumes ni plumets avec son 
« habit uniforme. » 

Il faut être équitable toujours et rendre à chacun 
ce qui lui appartient. C'est la République, ou plu- 
tôt le volontaire de la République, qui a, sinon 
inventé, mais développé avec entrain Tusage des 
plumets, et du premier coup il s'en est donné de 
monstrueux de hauteur et de grosseur. On a déjà 
bien des fois, depuis soixante ans, essayé de ra- 
mener les panaches à des proportions modestes, 
et même de supprimer ce gênant et coûteux orne- 
ment. Il suffit d'un orage pour lui rendre de la 
sève, et c'est toujours à recommencer. 

Reprenons le règlement de 1 786. 

« Les manteaux des officiers de cavalerie seront 



Régiments de cavalerie. 289 



« de drap bleu. Le collet sera bordé d'un galon 
« d'or ou d'argent de la largeur d'un pouce, sui- 
« vant la couleur du bouton, et ils seront pare- 
il mentes en serge de la couleur distinctive du 
« régiment. 

« Le mestre de camp commandant portera, de 
« chaque côté, une épaulette de tresse ou galon 
« plein en or ou en argent, selon la couleur du 
« bouton ; elle sera ornée d'une frange à graines 
« d'épinard et cordes à puits. Toute espèce de 
« broderie ou paillette est et demeure défendue. 
« Le lieutenant-colonel portera à gauche une 
« seule épaulette garnie de franges et agréments 
« pareils à l'épauleçte du mestre de camp. 

« Ceux des officiers qui auront le grade de 
c( brigadier des armées porteront pour distinc- 
« tion, sur l'épaulette, une étoile brodée d'or ou 
« d'argent, en opposition à la couleur de l'épau- 
« lette. 

« Le major portera, de chaque côté, une épau- 
« lette en or ou en argent, ornée de franges à 
« graines d'épinard seulement. » 

Quand on créa le grade de chef d'escadron en 
1788, cet officier porta l'épaulette à gauche, et le 
major passa la sienne à droite. 

« Les capitaines commandants porteront sur 
« l'épaule gauche une épaulette pareille à celle du 
« major. 

« Les capitaines en second porteront la même 

• I. 25 



290 Histoire de la Cavalerie. 

« épaulette, coupée dans le milieu de sa longueur 
« par un cordon de soie tressée couleur de feu. 

« Les lieutenants en premier ne pourront por- 
« ter l'épaulette pleine en or ou en argent : elle 
« sera losangée de carreaux de soie couleur de 
« feu, sur un fond de tresse en galon d'or ou 
« d'argent... la frange qui la terminera sera de 
« filet d'or ou d'argent et de soie, en proportion 
«• du mélange — un tiers de soie — qui sera dan§ 
« le tissu de l'épaulette. 

« Les lieutenants en second porteront la même 
« épaulette que les lieutenants en premier, à la 
« seule différence qu'elle sera traversée dans le 
«' milieu de sa longueur par un cordon de soie 
K couleur de feu. 

« Les . sous-lieutenants porteront l'épaulette à 
« fond de soie couleur de feu^ avec des carreaux 
«« tressés d'or ou d'argent... et les franges seront 
tt- mêlées de soie et de filets d'or ou d'argent en 
H proportion du mélange de l'épaulette — deux 
«' tiers de soie. 

• Le quartier-maître trésorier portera la même 
•• épaulette que les lieutenants... suivant le rang 
H auquel il sera parvenu dans le régiment* 

« Les porte- étendards porteront l'épaulette à 
M fond de soie couleur de feu, lisérée d'or ou 
« d'argent... elle sera garnie de franges assor- 
« lies. 

« Les cabres des bas-officiers et cavaliers se- 



Régiments de cavalerie. 29 c 

ront en cuivre. » — Il s'agit évidemment des 
garnitures et du fourreau. 

« Le cordon de sabre sera de cuir noirci, large 
M de 8 'lignes et long de 2 pieds 4 pouces, garni à 
(« Textrémité d'un bouton avec une houppette de 
« cuir découpé, et d'un autre bouton coulant du 
« même cuir. 

« Le ceinturon des cavaliers sera de' buiBe 
« blanc sans piqûres. Il n'aura qu'un seul pen- 
« dant destiné à porter le sabre en ligne perpen- 
« diculaire, un peu incliné : il sera garni d'une 
« plaque de cuivre cambrée, garnie de deux ar- 
« dirions pour la fixer sur le devant du ceinturon, 
« et d'un crochet qui s'adaptera à un anneau 
« coulant de forme aplatie, également fixé par 
« deux ardillons à l'extrémité gauche du cein- 
te turon. 

« Les gibernes sont noires et les courroies 
« porte-gibernes blanches. Les bretelles de mous- 
« quêtons sont de cuir de Russie. 

« Les bottes de cavalier seront demi-fortes, 
« garnies d'éperons d'une seule pièce... de cinq 
« poîicesr de longueur. 

« Le porte-manteau sera de tricot, de la cou- 
« leur affectée à l'équipage de chaque régiment; 
« il sera long de 25 pouces... les extrémités seront 
« en carré long de 9 pouces 1/2 sur 3 pouces 1/2, 
« bordées autour d'un galon de 9 lignes de la 
« livrée de l'équipage. L'ouverture du porte- 



292 Histoire de la Cavalerie. 

« manteau sera fermée par trois contre-sanglons 
« et trois boucles enchapées. 

« La besace sera de treillis; — mêmes dimen- 
« sions que le porte-manteau; — les extrémités 
« seront recouvertes de tricot et bordées autour 
« d'un galon de 9 lignes... 

« Le sabre des officiers sera de cuivre doré. 

« La dragonne ou cordon sera formée de filets 
« d'or et de soie couleur de feu, dans la forme et 
« la proportion déterminées pour le mélange des 
« épaulettes; le gland sera garni d'une frange con- 
« forme à celle réglée pour Tépaulette de chaque 
« grade. 

« Lesdits officiers porteront, hors de service. 
« répée du modèle dit à la mousquetaire. 

« Le ceinturon sera de buffle blanc, et il sera 
« porté sur la veste. 

« Les éperons des officiers seront de fer bronzé. 

« La housse, pour les cavaliers, sera faite en 
« drap, bordée de galon de livrée de 18 lignes de 
« large, des couleurs réglées pour la distinction 
« de chaque régiment. 

« Les chaperons seront faits du même drap 
« que la housse et bordés d'un semblable galon ; 
« il seront façonnés en forme de demi-ovale ré- 
« gulier, de la hauteur de 7 pouces 3 lignes, et de 
« I o pouces de largeur. 

« La selle des chevaux d'officier sera du drap 
« de couleur de la housse; les mords de bride 



Régiments de cavalerie. 293 



« seront garnis de bossettes jaunes, timbrées 
« comme le bouton de Thabit. 

« Les housses et chaperons pour officiers... 
« seront bordés de galons d'or et d'argent, sui- 
« vant le métal du bouton de Thabit, et des lar- 
« geurs ci-après : 

« 3o lignes pour les officiers supérieurs-, 
« 24 lignes pour les capitaines; 
« 20 lignes pour les lieutenants ; 
« 1 5 lignes pour les sous-lieutenants et autres 
« officiers attachés à Tétat-major. 

« Les adjudants, maréchaux des logis, fourriers 
« et trompettes seront armés de deux pistolets, 
« indépendamment du sabre. 

« Les brigadiers, appointés et cavaliers auront 
« un> sabre, un mousqueton et deux pistolets. 

« Ils porteront le plastron de cuirasse en fer, 
« même en temps de paix, aux revues de parades 
« générales et particulières, et lorsque la cavalerie 
« sera de service à cheval. » — Nous n'avons 
trouvé aucune preuve que ce cuirassement géné- 
ral de la cavalerie ait reçu son exécution dans les 
années tourmentées qui ont suivi ; mais cette pres- 
cription du règlement de 1 786 a été réalisée sous 
le Consulat, après la paix d'Amiens. 

« Les fourriers continueront de porter, pour 
« les campements, une fiche longue de 6 pieds, 
« garnie d une bandelette de drap de la couleur 
« distinctive du régiment, et sur laquelle le nu- 

;i5. 



294 Histowe de la Cavalerie. 



« méro sera mis d'une manière très-apparente en 
« couleur opposée ; ils porteront à cheval le talon 
« de cette fiche dans une botte à peu près sem- 
« blable à celle destinée à porter le mousqueton, 
« le bout supérieur en arrière. 

« Indépenda.mment du sabre uniforme, chaque 
« officier devra être pourvu de deux pistolets. 

« Tous les officiels porteront le ceinturon sur 
« la veste et néanmoins auront une contre-épau- 
« lette comme celle de Tinfantgrie. 

« Les cheveux des cavaliers seront liés en 
« queue couverte de ruban npir. » 

Disons de suite, pour faire saisir la portée de ce 
détail, que les cheveux des dragons étaient liés en 
cadogan avec un ruban noir noué en rosette. Les 
uns et les autres durent avoir les cheveux de face 
coupés de la manière dite à lavant-garde, 

« Tous les régiments de cavalerie porteront 
« rhabit bleu de roi, avec poches en travers, 
« la veste en drap blanc, et la culotte de peau 
« blanche. 

« Les surtouts et les gilets seront de drap bleu. 

« Lesdits régiments seront (à l'exception de 
w ceux de Royal allemand, de Berry, des cara- 
« biniers, d'Artois, d'Orléans et de Nassau-Saar- 
« brûck, qui conservent leurs uniformes tels qu'ails 
« seront ci-après désignés) divisés, 'suivant leur 
« ancienneté, en neuf classes, à chacune desquelles 
« sera affectée une couleur distinctive, de laquelle 



Réffiments de cavalerie. 



295 



« couleur le premier régiment portera les revers 
« et parements, le second les revers, et le troisième 
« les parements seulement, le tout dans Tordre ci- 



« après : 

BOUTONS ET NUMÉROS. HÉGIMENTS. 



DISTINCTIONS. COULEURS. 



Jaunes. 
Blancs. 

Blancs. 

Blancs. 
Blancs. 

Blancs. 
Blancs. 
Blancs. 

Blancs. 

Blancs en olive. 
Blancs. 



M6 
i 20 

Us 



\ 



29 



> 3o 

'31 
II 



Colonel général, 
Mestre de camp gi, 
Commissaire géni, 
Royal, 
Du Roi, 
Royal étranger. 

Cuirassiers, 
Rbyal-Cravates, 
Royal- Roussillon, 

Royal-Piémont, 
Royal-Pologne, 
Royal-Lorraine, 
Royal-Picardie, 
Royal-Champagn e, 
Royal -Navarre, 
Royal-Normandie, 
La Reine, 

Le Dauphin, 

Bourgogne, 

Orléanais, 

Evêchés, 

Franche-Comté, 

Septimanie, 

Queray, 

La Marche, 

Royal allemand. 



revers et parem. 
revers 
{parements 
revers et parem. \ 



écarlate. 



écarlate. 



jonquille. 



cramoisi. 



aurore. 



rosei 



21 Berry, 



Blancs, \ 
timbrés d'une ' 22 Carabiniers, 
fleur de lys. ) 

^'f "'. • ] 23 ArtoiB. 
armes du prince. ) 



revers 
parements 
revers etparemo. 
revers 
parements 
revers et parem. \ 
parements j 

revers et parem. \ 
revers ; 

parements ; 

revers et parem. \ 
revers ' 

parements ; 

revers et parem. ) 
revers ! «"" "«""'• 

revers et parem. ^ 
revers J 

paremen ts / 

revers et parem . \ 
revers ; 

parements , 

parem. et collet cramoisis, 
revers et -parements blancs 
collet et doublure écarlate. 

revers et parements écarlate. 



r revers et parements bleu cé- 
( leste, collet écarlate. 



souci. 



blanc. 



296 Histoire de la Cavalerie. 

BOUTOXS ET NUMÉROS. REGIMENTS. DISTINCTIONS. COULXURS. 

. . ! 24 Orléans, revers bleu céleste, 

armes au pnnce. * 

. paremeots et collet orange, le 

Blancs en olive. 35 Xassau-Saarbrûck,^ surplus pareil i Royal alle- 

V mand. 

« Le régiment Colonel général portera un bordé 
« de laine jaune, de 6 lignes de large, sur les pa- 
« rements et les revers, ainsi que des bouton- 
« nières d^un galon semblable. Les deux autres 
« régiments de Tétat-major ne porteront que des 
« boutonnières. 

« Le Royal allemand aura Thabit à la polo- 
« naise, garni de chaque côté de lo brandebourgs 
« en lîl blanc, de 4 pouces 3 lignes de longueur 
« sur I pK)uce 5 lignes de largeur; les parements 
« retroussés en patte à la polonaise, sans bran- 
di debourgs, bordés d'un galon de fil blanc de 
« (5 lignes; Thabit garni sur chaque hanche de 
« 3 brandebourgs en patte d'oie. Veste courte de 
« peau de mouton blanchie, bordée d'un galon 
« de fil blanc de 1 2 lignes, et fermée avec 16 agra- 
« fes. Bonnet de peau d'ours, sans écusson, le 
• fond en drap cramoisi; garni d'un cordon 
« blanc à la grenadière; panache en plumes 
« blanches. 

« Les carabiniers auront le collet droit en 
« drap bleu, bordé d'un galon d'argent de 6 li- 
« gnes de largeur, 7 petits boutons et même 



Régiments de cavalerie. 297 

« nombre d^agréments ou boutonnières en galon 
« d'argent de 8 lignes à chaque revers ; le pare- 
nt ment bordé d'un galon d'argent de 1 2 lignes ; 
« 3 gros boutons à chaque poche et point de 
« boutonnières en argent sur la patte ; le derrière 
n de rhabit orné d'un fer à cheval en galon d'ar- 
« gent; épaulettes en drap écarlate, bordées d'un 
« galon d'argent de 4 lignes, chapeau bordé 
« d'argent. 

« Les housses et chaperons des chevaux des 
« régiments de l'état-major seront en drap et 
» galon de laine, aux livrées du Colonel général, 
« du Mestre de camp général et du Commissaire 
« général. 

« Indépendamment du galon dont les housses 
« et chaperons des régiments de l'état-major se- 
« ront bordés, les mestres de camp titulaires y 
« feront ajouter ces trophées, comme attribut 
« de leurs charges^ savoir : 

« Le Colonel général, 5 étendards en faisceau : 
M 2 bleus, 2 rouges et i blanc. 

« Le Mestre de camp général, 3 étendards : 
« I bleu, I rouge et i blanc. 

« Et le Commissaire général, 2 étendards dont 
« I blanc et i bleu. 

« Ces trophées seront façonnés en serge dé- 
»< coupée et entourés de cordonnet de laine : 
« chacun sera d'environ 5 pouces de longueur. 

« Aucun autre régiment ne pourra porter de 



298 Histoire de la Cavalerie. 

« trophées, ni écusson sur les housses et chape- 
<( rons qui seront, pour le surplus de la cava- 
« lerie, en drap bleu, bordé de galon de laine des 
« couleurs et dessins ci-après : 

Royal : aurore à cinq bandes, dont trois à 

point de chaînette et deux à fond 

luisant. 
Du Roi : à la livrée du roi — bleu, rouge et 

blanc. 
Royal étranger : en fil blanc. 
Cuirassiers du roi : fond blanc velouté , à deux lézardes 

rouges. 
Royal-Cravattes : fond aurore velouté, moucheté de 

bleu, rouge et blanc. 
Royal- Roussillon : fond aurore velouté, à deux lézardes 

bleues. 
Royal- Piémont : fond aurore velouté, à trois rangs de 

carreaux, celui du milieu rouge et 

blanc, les deux autres bleus. 
Royal allemand : fond blanc velouté, une lézarde rouge 

au milieu. 
Royal-Pologne : fond aurore velouté, à grains* d'orge 

bleus renfermant des carreaux 

blancs. 
Royal -Lorraine : fond uni à tablettes blanches et bleues. 
Royal- Picardie : chaînettes jaunes sur un fond rouge 

plein. 
Royal-Champagne : chaînettes noires sur un fond Isabelle 

plein. 
Royal-Navarre : chaînettes rouges sur un fond blanc 

plein. 
Royal-Normandie : tablettes rouges et blanches sur un 

fond uni. 



Régiments de cavalerie. 



299 



La Reine : 
Le Dauphin 

Bourgogne : 



Berry : 

Carabiniers 
Artois : 

Orléans : 



Orléanais : 

Évêchés : 

Franche-Comté 
Septimanie : 

Quercy ; 

La Marche : 



A la livrée de la reine. 

fond aurore velouté, moucheté de 

bleu. \ 

fond blanc velouté, liséré de cramoisi, 

et mosaïque bleue renfermant des 

grains d'orge cramoisis, 
bleu, rouge et blanc, en échelle, sur 

fond aurore velouté, 
en fil blanc, posé à la Bourgogne, 
à la livrée du comte d'Artois, sur fond 

velouté, 
à la livrée d'Orléans, rayé dans le 

milieu de deux raies blanche et 

bleue, 
jaune, à carrés mi-partie diagonale- 

ment de noir et de rouge, 
jaune, à carrés écartelés rouges et 

bleus, une croix blanche brochant 

sur chacun, 
jaune, à carreaux alternativement 

blancs et cramoisis, 
blanc, à cinq raies alternativement 

cramoisies et bleues, liées en fais- 
ceau par un ruban jaune, 
blanc, à colonne bleue, autour de 

laquelle règne un ruban cramoisi, 

sur un fond jaune bordé de noir, 
blanc, à carreaux alternativement 

jaunes et rouges. » 



La République a très-peu modifié la tenue ré- 
glée en 1786. Elle a, bien entendu, fait disparaître 
le galonnage de livrée des équipages et Ta rem- 
placé par un galon uniformément blanc, mais 



3oo Histoire de la Cavalerie. 

elle a couservé aux tambours et trompettes le 
galon à la livrée du roi, qui existe encore aujour- 
d'hui, et Ton peut dire de ce galon tricolore, qu'il 
est le lien qui rattache l'ancienne armée à la 
nouvelle. Le numérotage des régiments ayant 
été modifié, il fallut adopter de nouvelles séries 
de couleurs distinctives. Les 2 régiments de ca- 
rabiniers et les 6 premiers régiments de cavalerie 
eurent Técarlate, les 6 régiments de cavalerie sui- 
vants prirent le jonquille, les numéros de i3 à 18 
le cramoisi et les derniers le rose. 

L'examen attentif du règlement de 1 786 donne 
lieu à plusieurs remarques intéressantes et ins- 
tructives et ramène à un point délicat. Nous 
avons déjà cité ce fait, singulier quand on l'envi- 
sage au point de vue des idées aujourd'hui cou- 
rantes, que le roi ne faisait les frais des enseignes 
que pour les régiments dont il était le chef, 
disposition entraînant une certaine indépendance 
pour les princes et gentilshommes qui possédaient 
les autres régiments. Or, cette indépendance est 
manifeste par l'examen des étendards des 60 régi- 
ments de cavalerie qui existaient sous Louis X\' 
avant les réformes qui suivirent la guerre de Sept 
ans. Tous les régiments royaux ou appartenant 
à des princes du sang, sans exception, avaient des 
étendards bleus, de la couleur de Técusson royal. 
Ces régiments étaient alors au nombre de 1 7, et 
tous ceux qui ont été admis depuis au même hon- 



Régiments de cai>alerie, 3oi 

neur ont pris le même étendard. Sur les 40 régi- 
ments qui appartenaient aux princes parents du 
roi ou à des gentilshommes, 22 avaient des éten- 
dards rouges ou cramoisis, 6 jaunes, 5 aurores, 
3 verts, i feuille-morte et i isabelle. 2 étaient 
mi-partie ; c^était Condé : bleu au droit et ventre 
de biche au revers -, et Rohan : blanc au droit 
et rouge au revers. 

Tous ces étendards de cavalerie, dont nous 
donnerons la description aux notices des régi- 
ments, étaient sans cravates. Un seul faisait 
exception, c'était Tétendard du régiment de gen- 
tilshommes, devenu plus tard Royal-Lorraine, 
qui était orné de ce que Ton appelait des bourses, 
et ces bourses étaient blanches. 

Quant aux régiments de Tétat-major, et c'est 
sur ce fait que nous appelons spécialement l'at- 
tention, dans le Colonel général, l'étendard de la 
compagnie colonelle était blanc, ceux des 7 autres 
compagnies étaient noirs -, chez Mestre de camp- 
général, tous les étendards étaient rouges-, chez 
Commissaire général, tous les étendards étaient 
bleus. On doit en conclure que, de même ^ue le 
blanc était Temblème personnel du colonel géné- 
ral, c'est-à-dire de l'autorité supérieure, le rouge 
caractérisait le commandement de second ordre et 
le bleu Fautorité du troisième degré hiérarchique. 

Si ce fait était isolé, il pourrait sembler peu 
probant, mais il ne Tétait pas. 

I. 26 



3o2 Histoire de la Cavalerie. 



Le règlement de 1786 nous apprend que les 
équipages des chevaux se distinguaient dans, les 
régiments de l'état-major général par des fais- 
ceaux de trophées d^étendards fixés dans les 
coins des housses, et sur les chaperons des fontes 
de pistolet. 

Dans le régiment du colonel général, ce trophée 
se composait de 6 étendards, i blanc au centre, 
puis 2 rouges au-dessous, et 2 bleus au bas. 

Mestre de camp générai n'avait que 3 éten- 
dards dans son trophée : i blanc, i rouge et 
I bleu. 

Commissaire général ^ 2 seulement : r blanc 
et I bleu croisés. 

C'est toujours le même symbole : le blanc 
exprimait T autorité militaire supérieure ; le rouge 
caractérisait l'autorité secondaire et le bleu l'au- 
torité la moins élevée. 

Ces trois couleurs : le blanc, le rouge et le bleu 
signifiaient donc alors, aux temps de Louis XIV, 
de Louis XV et de Louis XVI, ce qu'elles signifient 
encore aujourd'hui dans l'armée. C'est peut-être 
d'une manière inconsciente qu'on attribue dans 
J'armée moderne la couleur blanche aux maii*- 
chaux de France et généraux en chef, le rouge 
aux généraux de division et le bleu aux généraux 
de brigade ; mais, à coup sûr, ce n'est point par 
l'effet du hasard. On s'est souvenu ; on a con- 
tinué de faire sous la République ce qui se faisait 



Régiments de cavalerie. 3o3 



au temps de la monarchie, et sans y mettre de ma- 
lice. Ce n'est pas tout. Cette affectation des trois 
couleurs aux trois degrés de la hiérarchie militaire 
n'était pas spéciale aux officiers généraux de Tétat- 
major de la cavalerie. On la retrouvait identique 
dans la marine, qui possédait, comme la cavale- 
rie, un état-major particulier. Autrefois,^ cela re- 
monte bien haut, quand la marine était partagée 
en marine du Ponant ou des vaisseaux de TOcéan 
et en marine du Levant ou des galères de la 
Méditerranée, les vaisseaux portaient le pavillon 
bleu et les galères le pavillon rouge. Le pavillon 
blanc était réservé au grand amiral de France, 
surintendant général de la navigation. Sous 
Louis XIV, les flottes de copibat se partageaient 
en corps de bataille commandés directement par 
Tamiral, en avant-garde dirigée par le vice-ami- 
ral, et en arrière-garde conduite par le contre- 
amiral. Le pavillon amiral était blanc, le pavillon 
vice-amiral était rouge et celui du contre-amiral 
était bleu. C'était exactement la même chose dans 
la flotte anglaise, et probablement dans celles de 
plusieurs autres pays d'Europe. 

Jusqu'à ces dernières années, l'amirauté an- 
glaise admettait la division de la flotte britan- 
nique en escadre blanche, escadre rouge et escadre 
bleue. Il en était probablement de même en Hol- 
lande, et peut-être ne s'aventure-t-on pas beaucoup 
en pensant que l'exemple des Provinces-Unies, 



3o4 Histoire de la Cavalerie. 



qui avaient fait avant nous leur révolution, et 
qui avant nous avaient adopté le pavillon tri- 
colore, a été pour quelque chose dans les déter- 
minations prises en France en 1790. 

De ce qui précède, on peut conclure que le 
blanc, sous Pancienne monarchie, avait dans les 
armées la même valeur qu'il possède encore au- 
jourd'hui, qull était ce que sont encore sous nos 
yeux la plume blanche du général en chef et Tai- 
grette blanche du chef de corps. 

Il serait difficile de démontrer l'existence en 
France, avant la Révolution, d'un drapeau natio- 
nal, comportant l'idée politique, dominante et ex- 
clusive qu'on attribue aujourd'hui à cet emblème. 
Nous avons parcouru beaucoup de livres et de mé- 
moires anciens, et nous n'avons rien trouvé qui 
autorise à désigner une enseigne quelconque 
comme ayant symbolisé exclusivement notre na- 
tion. Il y a eu des bannières royales, féodales, 
ecclésiastiques, communales, des enseignes adop- 
tées par le commerce et la navigation, ou par des 
partis politiques ; il n'y a pas eu de bannières 
nationales. La féodalité s'était constituée sur un 
principe qui était précisément l'opposé du prin- 
cipe de l'union civile et politique des provinces, 
et, bien que la féodalité ait fini par remettre, de 
gré ou de force, tout l'utile de sa puissance dans 
les mains du roi, elle en avait conservé la forme 
extérieure ou symbolique, et notamment celle 



Régiments de cavalerie. 3o5 

qui s'exprimait par les armoiries et les livrées. 
Les troupes du moyen âge avaient marché sous 
des enseignes de toutes couleurs et de toutes for- 
mes, c'est-à-dire sous les bannières de leurs ban- 
nerets ou capitaines. Les régiments du xvii® siècle 
marchèrent sous les couleurs de leurs mestres de 
camp et changèrent de drapeaux autant de fois 
que de chefs. Ce fut Louis XIII, qui commença 
à mettre dans cette anarchie un certain ordre 
devenu nécessaire, en donnant comme récom- 
pense aux régiments d'infanterie dont il était 
satisfait un titre de province, en se faisant le 
colonel permanent de quelques autres corps. Ses 
successeurs suivirent cette voie avec persévérance, 
supprimant un à un les régiments de gentils- 
hommes, et fixant la couleur et la forme de l'en- 
seigne de chaque régiment, en même temps qu'il 
lui imposait un titre invariable. 

Cependant, quelles que fussent les exigences et 
les susceptibilités de l'esprit féodal, on avait tou- 
jours senti la nécessité de grouper les bannières 
particulières sous d'autres bannières générales, 
neutres, exprimant seulement le commandement 
supérieur central. La première de ces enseignes,' 
exclusivement militaires, fut celle du connétable, 
et cette enseigne fut blanche, comme tous lés 
signes de commandement supérieur usités depuis 
l'antiquité. Cette enseigne, la cornette blanche, a 
passé des mains du connétable dans celles des 
I. 26. 



3o6 Histoire de la Cavalerie. 

colonels généraux de Pinfanterie et de la cavalerie 
légère. 

L'éiat-major de la cavalerie légère s^étant par 
la suite augmente d'un mestre (fc can^ général 
et d'un commissaire général, chacun de ces oflS- 
ciers nouveaux p^^it ou reçut un .s}'^mbole particu- 
lier, et ces symboles furent un étendard rouge 
pour le premier ^ bleu pour le second. Pourquoi 
ces deux couleurs? Nul^ne saurait le dire, mais 
cela est ainsi. Le hasard seul^ peut-être, a voulu 
que ces .couleurs xappelassem Toriflammc de 
Saint-Denis et la bannière d'azur des rois capé- 
tiens. 

Dans tous les cas, l'emploi -simultané des trois 
couleurs blanche, rouge et bleue est aussi vieux 
que la France, et l'usage exclusif de l'une d'elles^ 
en dehors de sa signification militarne et hiérar- 
chique, n'a jamais pu représenter qu'une faction^ 
et ce qu'il y a de singulier, c'est que les ^andes 
factions qui ont divisé notre pays ne soient jamais 
sorties du cercle de ces couleurs. On a vu succes- 
sivement les Armagnacs^ les huguenots et les 
insurgés de l'Ouest pnendre l'écharpe ou -l'en- 
seigne blanche comme signe de ralliement de 
leur parti -, les Bourguignons, les ligueurs et les 
démagogues adopter le rouge. Il ne paraît pas 
que le bleu, la vraie couleur du roi, ait jamais 
tenté personne. Si les paysans de l'Ouest ont 
donné aux volontaires républicains le sobriquet 



Régiments de cavnlerie. 3 07 



de bleus^ ce ne fut pas à caruse de la couleur de 
leurs drapeaux, mais bien â x:ause de celle de 
leurs habits, et Bs eurent de sérieux motifs pour 
ne pas confondre oes volàntaires que comman- 
daient les Ronsrn et les iRossignol, avec les 
troupes de lignç qui ptassèrent dans F Ouest en 
1 793^ avec Kléber, Marceau et Dubayet, après la 
reddition de Mayence, et qui portaient encore à 
ce moment Thabit fclanc 4e la vieille infanterie. 
Ils n^appelaient ces soldats, qui leur fir>ent une 
guerre terrible, mais courageuse et loyale, ni les 
bleus^ ni les blancs; ils les ^pelaient les moyen- 
çais-. 

Quant à la bannière de Jeanne d'Arc et au 
panache d'Henri IV, il faut, pour être vrai et en 
même temps réellement respectueux à Fégard de 
ces deux grandes figufes françaises, leur faire 
r honneur de n'y pas attacher une idée de parti. 
Jeanne d'Arc commandait l'armée royale et por- 
tait par ce seul fait une cornette blanche. Le 
panache blanc d'Ivry était également k signe ap- 
parent du commandant d'armée. Rappelons qu'à 
Goutras, trois ans avant Ivry et du vivant du roi 
légitime Henri III, le roi de Navarre et le roi de 
France avaient l'un et l'autre une cornette blanche 
dans leurs armées, et que ces deux cornettes en- 
nemies ne pouvaient avoir dans ce cas d'autre 
signification que celle du commandement mili- 
taire. 



3o8 Histoire de la Cavalerie. 

L'adoption d'un drapeau national, possédant 
un sens plus étendu que celui d'une enseigne mili- 
taire, était une conséquence forcée de la suppres- 
sion de tous les droits et privilèges particuliers, 
et de la constitution du pays sur les principes de 
l'unité et de l'égalité des provinces. Pourquoi 
l'Assemblée nationale de 1 790, en face de cette 
nécessité, a-t-elle adopté les trois vieilles couleurs 
des armées françaises, qui étaient en même temps 
celles de la livrée royale ? — Ce n'était certaine- 
ment pas à ce moment dans un but d'hostilité à 
la royauté dont on prenait les couleurs, ni en 
vue d'une république à laquelle on ne songeait 
guère. — Il n'y a qu une réponse possible à cette 
question : l'Assemblée a fait ce choix d'urgence, 
sous l'impression causée par le récit des désor-. 
dres de la flotte de Brest, sous l'empire de la force 
des choses, par la vertu des faits acquis, peut- 
être avec le désir de plaire au roi et sans se dou- 
ter, quand elle faisait ce choix, des discussions 
et interprétations surprenantes que les passions 
des générations futures entasseraient autour de 
ce simple fait. Il s'agissait de la flotte : elle a pris 
les trois couleurs de l'amiral, du vice-amiral et 
du contre-amiral; elle en a composé, un yacht 
analogue à ceux de l'Angleterre et des États-Unis, 
et elle a placé ce yacht au ^ coin supérieur du pa- 
villon amiral. Gela suffit pour calmer les têtes à 
Brest, et cela fut trouvé très-bon à Paris, où la 



Régiments de cavalerie. 309 

garde nationale était en train, depuis un an, de 
s'^habiller à la mode des gardes françaises, dont le 
costume était une combinaison des trois couleurs 
de la livrée royale. 

L'usage du yacht de la marine a été introduit 
dans les enseignes de Tarmée de terre par décret 
du 3o juin 1791, et tout ce que l'on pourrait rai- 
sonnablement reprocher au drapeau tricolore, 
c'est que le petit yacht a depuis considérablement 
grandi, et qu'il a fini par remplir le tableau. 

Les drapeaux et étendards furent, du reste, très- 
loin d'être identiques jusqu'à l'Empire. Pendant 
les campagnes de la République, l'usage s'était 
continué de distinguer chaque bataillon, chaque 
demi-brigade, chaque régiment de cavalerie, par 
un drapeau ou un étendard particulier, portant 
^des emblèmes et des devises. On voyait des en- 
seignes dont le fond était blanc, le fameux dra- 
peau d'Arcole était bjanc ; mais toutes étaient 
marquées par une combinaison géométrique, plus 
ou moins apparente, des trois coulçurs. 

Le drapeau blanc, avec la signification qu'on 
veut lui attribuer aujourd'hui, est né en 1793, 
après la mort de Louis XVL C'est le drapeau de 
la Bretagne en deuil. Il a reparu lors de la 
Restauration sans la bordure dentelée de noir 
qui l'avait d'abord entouré, et a été imposé à 
Louis XVIII, qui, on l'a vu, regardait toujours 
le drapeau blanc comme le signe de l'autorité des 



3io Histoire de la Cayalerie. 

colonels généraux, et qui avait donné aux légions 
départementales de 1816 des drapeaux de cou- 
leurs variées qui ornent aujourd'hui les salles du 
Musée d'artillerie. 

Le drapeau blanc est devenu dominant vers 
1820, quand rinfanterie fut réorganisée en régi- 
ments, à la faveur d'un sentimentalisme politique 
qui, peu soucieux des réalités, s'était épris de la 
pureté et de la blancheur des lys, lys qui étaient 
d'or, c'est-à-dire Jaunes dans la bannière et dans 
l'écusson de nos. anciens rois. 

Il a, pendant quelque temps, régné comme le 
symbole politique de la France. Comme enseigne 
nationale et historique, on l'a fait dater d'Alger, 
et nous pensons que l'on n'a pas eu tort de lui as- 
signer une ancienneté aussi modeste. Peut-être 
eût-il été plus juste et plus sincère de l'appeler le 
drapeau du Trocadéro. 

L'explication exacte de la valeur des signes mi- 
litaires est une partie importante de l'histoire des 
troupes. Nous avions déjà dit, il y a 25 ans, 
ce qui était venu à notre connaissance sur les 
drapeaux de l'infanterie, arme pour laquelle 
Louis XIV et Louis XV ont exercé en personne 
les fonctions de colonel général depuis la mort 
du duc d'Épernon, circonstanœ qui prêtait à la 
confusion entre les attributs du roi et ceux du 
colonel général. 
. La cavalerie, demeurée jusqu'au bout impré- 



Régiments de cavalerie. 3 1 1 

gnée de Tesprit féodal, pourvue d^un état-major 
particulier possédant les honneurs et les privilèges 
d'autrefois, permettait de serrer la question de 
plus près. Nous avons dû ne pas négliger de le 
faire. 

La vérité, en histoire, est toujours bonne à 
dire, et il n'est pas bon que T armée puisse douter 
de la légitimité et de Thonneur de son drapeau, ou 
croire qu'il en existe d'autres plus dignes de son 
respect. 



FIN DU PREMIER VOLUME. 



À 



TABLE 



DU PREMIER VOLUME 



Préface : 

PREMIÈRE PARTIE. 

Chapitre I. — Les compagnies d'ordonnances. ... 7 

Chapitre II. — Les compagnies de cavalerie légère. . 3 y 

Chapitre III. — Les régiments temporaires 81 

Chapitre IV. — Les régiments permanents 123 

Chapitre V. — Transformations postérieures à 1789. 181 

DEUXIÈME PARTIE. 

Chapitre I. — Maison du roi 207 

Chapitre II. — Gendarmerie de France 2 38 

Chapitre II f.. — Régiments de cavalerie 272 



IMPRIMERIE EUGENE HEUTTEETC>«, A S A I N T-G E R M A I «T. 



à 



MAR e 19Ç2