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Full text of "Histoire du Bas-Empire"

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UlflVEKSrrY  OF  MICHIGAK^ 

HENRY  VIGNAFD 

UBRART 


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HISTOIRE 

BAS-EMPIRE. 

TOME  XIII. 


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:'iin.()iv.[i: 


DE  L'IMPRIMERIE  DE  ITRMIN  DIDOT FRÈRES, 

IMPRIMIUUS  DU  &OI   BT  DX  I.*IK8TmTT  y  RUB  JÂGOB,   H®  a  4. 


ni/    /il.*  î  l 


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HISTOIRE 

DU 

BAS-EMPIRE, 

PAR  LEBEAU. 

NOUVELLE  ÉDITION, 
&BVUE   ENTIÀ&EMENT,    CO&EIG^E, 

et  augmentée  d'après  les  historiens  orientaux, 
Par  m.  de  SAINT-MARTIN  , 

xjiitBas  M  l'utstitot  (koàjiiuiz  DBS  urscurriOHt  xt  isun-UTrau.) 

TOME  XIII. 


PARIS, 

CHEZ  FIRMIN  DIDOT  FRÈRES,  UBR AIRES, 

RUE  JACOB,  N°  24* 


M.  DCCC.  XXXII. 


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NOTICE  HISTORIQUE 


^ÙR 


M:  A.-J.  SAINT-MARTIN, 

MEMBRE  DE  l' INSTITUT  (ACADEMIE  DES  INSCRIPTIONS  )  CHÉVAHER 
DK  LA  légion-d'honneur  ,  &ÉDACTEUR  DU  JOURNAL  ASIATIQUE; 


1^1  J#yie  des  sages  et  des  honinies  illustrés  appartient  à  l'hi^-* 
toire  contemporaine,  la  postérité  réclame  à  son  tour  leurà 
leçons  et  leurs  vertus ,  pour  en  faire  ses  mbdèlefs  et  son  admi- 
ration. 

D'ailleurs,  quand  ils  jouèrent  uii  rôle  important  dans  l'uni- 
vers ,  les  orages  politiques  qu'ils  bnt  tr?iversés  grondent  encore 
après  eux ,  et  les  passions  de  haine  ou  d'amour,  soulevées  %uc 
leur  passage,  ne  cessent  pas  de  s'agiter  siir  la  poussière  de  leur 
tombe. 

Pour  nous,  destinés  à  leur  survivre,,  c'est  donc  un  devoir, 
à  la  fois  doux  tst  péniBlé,  d'anticiper  envers  eux  lé  juste  tribut 
de  la  reconnaissance  de  ^avenir,  en  nous  hâtant  de  buriner  en 
traîis  fidèks  léui*  brillante  et  ineffaçable  image. 

J*ilmai,je  chériâ,jé  vénérai,  je  regrette  amèrement  chaque 
jour  rhomme  célèbre  dont  je  veux  écrire  la  vie;  mais  je  ne  se- 
rai ni  loiiangeiir  ni  partial:  sa  modestie  m'en  fait  un  devoir^  ei  • 
je  ne  saurais  mentit  devant  sa  haute  supériorité. 

Antoine- Jean  Saint-Martin  naquit  le  17  janvier  1791,  dans 
une  famille  d'honnêtes  é^  honorables  négociants.  Placé  au  voiv 
ftinage  de  l'HôteUde-Ville,  il  lui  fut  donné,  jeune  encore ^  d'as- 
sister comme  témoin  aux  orgies  de  la  terreur,«  d'entendre  les 


♦  ,  427792 


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IJ  NOTICE 

cris  ignobles  de  l'émeute ,  et  de  contempler  l'agonie  des  vic- 
times sur  plus  d'un  char  funèbre. 

Destiné  d'abord  au  commerce,  il  en  suivit  de  bonne  heur  e 
les  opérations  avec  cette  ténacité  que  nous  lui  avons  connue- 
Son  activité,  son  amour  du  travail ,  son  dévouement  suffisaient 
à  tous  les  détails  des  trois  établissements  de  son  père,  dont  il 
était  le  messager,  l'âme ,  \e  factotum.  Frappé  d'un  si  bel  assem- 
blage de  rares  qualités^  un  banquier,  ami  de  la  maison ,  engagea 
le  père  du  Jeune  homme  à  ne  pas  1^  laisser  dégénérer  dans  une 
carrière  inférieure  à  ses  moyens.  Quelle  que  fût  la  prospérité 
de  ses  affaires,  c'était  beaucoup  exiger  qu'un  négociant  se  pri- 
vât d'un  appui  sur  lequel  il  devait  naturellement  compter;  mais 
les  encouragements  du  banquier  ne  furent  pas  perdus  pour  ce 
jeune  homme.  Il  se  chargea,  lui ,  d'allier  le  commerce  à  l'étude, 
les  détails  du  moment  avec  ses  hautes  destinées. 

Il  commença  dès-lors  à  donner  $es  journées  au  travail  de  la 
maison ,  et  une  partie  des  nuits  à  des  recherches  littésaires. 
Doué  d'une  excessive  sobriété ,  qui  l'accompagna  jusqu*au  der- 
nier jour  de  sa  vie,  et  penseur  par  caractère,  les  repas  et  les 
jeux,  ces  grandes  occupations  de  l'enfance ,  ne  lui  enlevaient; 
qu'une  faible  portion  de  son  temps.  Il  put  donc  suivre  des  cours 
d'étude  au  collège  des  Quatre-Nations ,  que  venait  de  rouvrir 
le  gouvernement  consulaire.  Quelle  dut  être  l'application  d'un 
élève,  faisant  dans  ses  loisirs  de  tels  progrès,  qu'il  forçait  son 
maître,  M.  Menlelle,  à  s'écrier:  «  J'apprends  mille  choses  de 
cet  enfant.  » 

M.  Saint-Martin ,  en  effet,  avait  reçu  4e  la  nature  ,  et  déve- 
loppé par  la  méditation ,  une  perspicacité  rare  pour  découvrir 
les  rapports  des  choses.  Il  était  déjà ,  à  ce  qu'il  paraît ,  si  bieu 
habitué  à  s'approprier  par  la  réflexion  les  idées  d 'autrui,. <[ue 
bientôt ,.  comme  s'il  en  eût  été  le  maître ,  il  vous  y  faisait  voir 
ou  des  faibles  inaperçus ,  ou  des  faces  nouvelles. 

A  vingt  ans ,  M.  Saint-Martin  avait  acquis  une  solide  théorie 
et  une  pratique  sûre  de  deux  des  phis  riches  idiomes  de  l'Asie , 
aussi  différents  Tun  de  l'autre  que  les  mœurs  des  peuples  qui 
les  parlent  ont  peu  de  ressemblance,  l'arabe  et  l'arménien.  Que 
dis-je  ?sa  mémoire  docile  s'était  exercée  sur  une  demi-douzaine 


ç      t 


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SDR   M.   SAlUT^MARTm.  IIJ 

d'autres,  dont^  sms  eo  posséder  la  plénitude  pevt>^trey  il  aVàit 
cependant  des  noti<»ns  justes  let  étendues  :  mais,  pour  apprécier 
ses  effQrts,  il  faut  se  reporter  à  une  époque  où  n'avaient  en- 
core paru,  ni  la  grammaire, ni  la  chrestomathie  arabes,  ni  2e 
dictionnaire  arménien  d'Aucher.  U  fallait  donc,  pour  travailler, 
que  M.  Saint- Martin  se  fkd  abord  des  instruments  de  travail. 

Ce  jeune  homme,  fdrb  de  sa  volonté  et  de  sa  tenace  obser^ 
vatîon,  apprit  dcuic  presque,  seul,  et  de  génie,  <€inq  laugue^^ 
l'arabe  9  l'arménien,  le  persan,  lesjriaqne,  le  turk,  dont  une 
seule  suffît  au  traviûl  de  Tàge  viril  4  sans  compter  celles  qu'il  ne 
Et  qu'elHeurer,  comme  le  zend  et  le  géorgien ,  car  tout  cela  se 
retrouve  dans  les  Mémoires  sur  l'Arménie.  Or,  l'auteur  de  ce 
merveilleux  livce  nous  assure  qu'il  était  conçu  et  presque  ré- 
digé en  1812.  Il  fut  achevé  d'imprimer  en  1^19,  dansisa  vitigt^ 
septième  anné^ 

Quand  je  considère  ce  livre,  étonnant  qui  fut  son  début,  «oii 
chef'-d'œtivre ,  toute  ««  gloire ,  toute  Sa  puissance ,  je  ne  m'é^ 
Èçmne  point  de  Tadmiratiôn  que  lui  accordèrent  les  conivài»- 
seurs.  Dans  nos  études,  le  pthilologue  n'est  que  le  min^rqtr) 
extrait  le  minerai  brut,  et  tout  au  plii&ie  dégage  de  sa  gangue} 
au  lieu  que  l'^rudit  est  rkabiki'  metteur  en  œuvre -^  qui  sait  en 
tirer  des  merveilles.  Tel  était  le  but  de  M.  Saint^Martin.  Il 
marcha  dès  l'abord,  sans  ;  hésiter,  vers  ce  but' qu'il  paraît  n'a-^ 
voir  jamais  ignoré,  celui  de  faire  servir  les  langues  à  l'histoire 
et  à  la  géographie  de  l'Asie  occidentale,  et  d'après  un  plani 
conçu  en  gros ,  dès  sa  première  jeunesse,  dont  il  ne  s'éearta  ja^ 
mais.  Il  coffl|iutsa  donc,  et- dépouilla  tout  ce  qu'il  y  a  d'écrit 
sur  cette  partie,  en  arménien ,  arabe  et  turk. 

M.  Saint-Mar^n  avait  degrandes  vnes'sur  l'étude  des'pays  où 
se  concentraient  ses  recherches.  L'a^^ménien  tient  au  persan 
modetne,  et  plus  encore  à  l'ancien.  M.  Saint-Martin  s'était  pro- 
posé, comme  objet  d'examen,  tous  les  dialectes  de  cette  an- 
cienne langue,  si  glorieuse,  si  Téiïérée  dans  la  bouche  dé 
Xerxès,.et  sous  la  plume  de  Zoroastre.  Il  avait  donc  cherché^ 
dans  la  langue  du  zend  et  dans  ses  ramifications ,  les  raisons 
qu'il  ne  pouvait  trouver  dans  son  arménien ,  relativement  trop 
modeiue  pour  lui.  Il  avait  aussi  voulu  rattacher  ses  études  aux 


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lY  irOÎICK 

idioinès  caucasiqaes,  et  dépouillé  ce  q«ie  Ton  en  savait  alors 
pour  la.  laii^ei géorgienne;  Avec  Maggi,  il  s'était  fait  un  vocabu- 
laire de  quelques  centaines  de  mots,  vocabulaire  bien  mauvais 
sans. doute.  De  cette  sorte,  en  prencmt  rArménie  pour  position 
çenti-ale,  il  s'étendait  sur  la  Parlfiie,  la  Médie,  les  montagnes 
des  Gourdes,  l'Assyrie  et  laCbaldée;  et  le  grec  de  TÂnatolie  le 
menait,  par 4a  Lazique ,  à  laColcbide ,  Tlbérie  et  l'Albanie.  Là,  il 
expliquait  l'un  par  l'autre,  les  langues  et  l'histoire,  la  chrono- 
logie et  les  sciences,  et  tous  les  rapports  des  peuples  de  son  do- 
maitie.  Je  dis  son  domaine,  car  il  était  souverain  de  cette  vaste 
portion  de  l'Asie. littéraire. 

S'il  n'eut  fallu  que  traduire,  rien  de  pltis  facile:  comparer 
et  çonclurie  l'est  biea  moins.  Or,  tel  est  le  principal  mérite  du 
premier  volume  de,  ses  Mémoires. 

Vous  y  trouvez  d'abord  un  discours  contenant,  pour  ainsi 
dire,  l'état  de  situation  de  la. Langue  arménienne ,  et  des  consi- 
dérations profondés  et  tout  à  fcvit  neuves  de  philologie  histo- 
rique ;  puis  un  travail  également  neuf  de  géographie  également 
iomàée  sur  l'histoire,  fruit  d'immenses  lectures .^  Viennent  en- 
suite.des  tables  de  l'histoire  civile  et  religieuse i d'Arménie,  dont 
Les  résultats  ne.  sont  pas  toajorurs.  d'accord  avec  d'autres  tra- 
vaux plus  connus;  mais  l'auteur  n'a  pas  cité  ses  autorités. 
.  Quant  au  second  volume ,  à  part  la  dtssértatkin  si  curieuse 
sur  i'état)lissement  des  Mamigoniens  et  des^Orpélians  en  Armé- 
nie «  la  traduction, d'un  texte,  déjà  .assez  bien:épisré  par  les  Ar- 
ménistesde  Madras,  n'offrait; pasde^très-^grandes  difBcu)tés. 
Majs;.que  l'on  prenne  la  peiné. d'examiner  ces  nombreuses  notes 
destinées  à  compléter  un  texte  trop  court,  et  cette  richesse 
d'extraits  de  toutes  langues  dont  elles  sont  pleines ,  on  n'a  pas  ' 
assez  d'éloges  pour  un  pareil  travail. 

M.  Sâint-Martjn  a  laissé  en  manuscrit  une  quantité  considé- 
rable de  traductions/de  l'arméaiçu:  i*^  unAbrqgé  d'Histoire  unL 
verselle  ;  2^  l'Histoire  de  Lazare  de  Parbe  ;  3^  Moyse  de  Rhoren  ; 
4^plusieurs portions  considérables  d'unouvrage  intituléi Histoire 
d'Arménie ,  que  je  n'ai  pu  assez  examiner  pour  en  nommer  l'au- 
teur; 5*»  l'Histoire  des  VardaniesDS,  par  Élise;  6"  l'Histoire  da 
pays  de  Taron  ,  celle  de  Nersès-le-Grand ,  l'ouvrage  jdeNersès 


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SUR    M.    SAINT-MARTIN.  V 

Claïetsi;  le  tout  plus  ou  moins  complet;  7*'  la  vie  de  Thamour, 
par  Thomas  de  Mezsob^  et  enfin  THistoire  d'Arménie  du  pa- 
triarche Jean ,  qui  paraissent  terminées.  Ces  divers  ouvrages , 
très-voluminetx,  m'ont  semblé  se  rapporter  à  im  temps  asse9 
ancien ,  à  cause  de  la  différente  notable  des  écritures. 

Le  Journal  des  Savants  rendit  un  oofnpte  très-favorable  des 
mém<Hres  sur  rArméniey  et  l'Italie  savante  lui  paya *un  juste 
tribut  d'éloges  deuàsisL-Bibliotheca  italùtna ,  des  mois  d'avril  et 
de  mai  1821. 

J'ai  pourtant  entendu*' nier  les  connaissances  de  M.  Saint-^ 
Martin  en  arménien  et  en  arabe,  et  vraiment  on  ne  peut  se 
rendre  compte  .d'une  pareille  agression.  Il  fait  imprimer  un 
livre  considérable,  plein  d'extraits  et  de  traductions:  te  livre 
circule,  et  pas  une  critique  ne  s'élève.  Ou  il  n'y  avait  pas  de 
îûges ,  el  c'cs*t  alors  la  preuve  d'un  mérite  original  ;  ou  il  y  en 
avait,  et,  en  déclinant  leur  compétence,  ils  ont  entendu  ap^ 
proo?er  ce  qu'ils  n'attaquaient  pas.  Pour  ne  rien  dire  de  cetpaà 
n'est  point  dans  mes  attributions ,  je  puis  assurer,  quant  à  l'ar- 
ménien, que  j'ai  attentivement  confronté  avec  les  textes  les 
traductions  d^a'rménien  faites  par  mon  maître ,  et  que  j^y  ai 
trouvé  mieux  qu'une  philologie  minutieuse,  le  sentiment* de Xà 
valeur  des  phrases,  la  précision  rigoiireuse  des  expressioufr 
techniques  ayant  une  portée  plus  qtie  gramraatici|le^  en*un  nàgtf. 
la  parfaite  appréciation  des  choses.  ^ 

Jai  omis,  dan$  la  rapidité  du  récit,  iine-ch*constatiee  qui 
influa  beaucoup,  à  mon- sens,  sur  la  carrière  de  M.  Saini^Mar-«  ' 
tÎD,  ce  sont  $es  haisons  avec  M.  Abel-Rérousat.  Dans  sa  pve^ 
mière  jeunesse,  cet  homme,  depuis  si-  célèbre-,  eut  occasion  de 
hréquentér  les  belles  galeries^de  Fabbé  de  Tersàn.  Tandis  qu'il  yi 
puisait  le. goût  de  la  langue  ahiaoisey  et  y  trouvait  les  moyens 
de  l'étudier,  un  jeune  honimej'desriiié  à>drautres  étades,  venail 
y  chercher' tout  ce  qui  se  fattacbaitâil'Anhéciieet  auxArsa- 
cides.  Après >ramôùr  du  beau  mdrâb^nde  la  même  vertuyiiîn^y 
a  sans  i|oute  que  celui  du  beau  teliectiiél  cpii  puisse»  éftablir 
,  de  vives  sympathies.  DotfX  lâlhies qu'emporte' vers,  ce  nobler but 
leur  excellente  nature,-  se  ^rencontrant  dans- les  ^routes  de  la 
scie^iW,  àe  comprennent v  B^*%ûpefit>;  semblent- se. recevhaitré 


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VJ  WOTICK 

comme  d'aDcieos  citoyens  d*une  patrie  commune.  Voilà  l'ami- 
tié philosophique.  Mais  comment  l'expliquer  entre  deux  êtres 
de  propensions  si  diverses?  C'est  que  la  véritable  amitié  re^ 
suite  d'une  conformité  de  goûts,  alliée  à  quelques  difTérences 
dans  les  opinions  et  les  manières.  (Pour  rhonneur  du  siècle. 
Tua  ^*!d\si  pas  moins  Ipin ,  et  s'éleva  aussi  haut  que  l'autre.) 

Quand  M^  Eémusat  fit  paraître  son  premier  ouvrage ,  l'Essai 
sur  la  langue^  la  littérature  chinoise,  en  i8i  i ,  M.  Saint-Mar- 
tin prit  aussi  la  plume  pour  la  première  fois  que  je  sache, 
pour  annoncer  le  livre  de  son  ami ,  dans  le  Mmgasin  encyciopé- 
fiique  du  mois  de  septembre.  Sans  rien  connaître  lui-même  à 
la  marche  de  cette  langue ,  alors  mystérieuse ,  son  instinct  du 
bon  lui  faisait  deviner  tout  ce  qu'il  y  avait  de  mérite  à  n'avoir 
pas  désespéré  de  soi ,  et  k  soulever  le  voile  tant  épaissi  par  la 
demi-science  de  Fourmont.  M.  Saint -Martin  rendit  compte  du 
livre,  et,  plus  tard,  de  la  grammaire  chinoise,  dans  les  pre- 
nûers  numéros  du  Journal  asiatique,  non  pas  avec  la  verve  de 
l'amitié  indulgente,  mais  par  une  analyse  méthodique  discutée 
avec  sa  conscience. 

A  son  tour,  en  i^iB ,  quand  ,M<  Rémusat  soutint  sa  thèse  de 
dQcteur  eu  médecine ,  sur  les  signes  des  maladies  par  la  langue, 
il  en  dédia  le  premier  exemplaire  à  M.  Saint-Martin ,  avec  cette 
épigraphe  prophétique  :  /.  SainttMaHia^  ttlteri  Httetarum  orien- 
falium  spei.  Jeune  talent ,  qui  ne  voyait  dans  le  monde  que  lui 
etTamitiél  Ceux  qui  pensent  que  l'étude  dessèche  le  ccetir,  igno- 
'  rent  dono  jusqu'à  quel  point  se -développe  dans  le  véritable 
homme  de  lettres  la  sensibilité  morale.  Sans  dout^,  le  désir  de 
la  gloire  est  un  puissant  motif;  mais  rimfii«)rtalité  littéraire  est 
une  promesse  lointaine,  et  notre  ami ^t  là,  à  qui  il  faut  justi-* 
fier  son  estime  pour  nous^  et  prduver  la  nôtre.  Molière  et  Buf- 
lon  voulaient  plaire  à  leurs  valets. 

J'oubliais  aussi  de.  mentionner  deux  petits  écrits  de  M.  Saint- 
Martin,  oa  sepeint  vivemeikt  ki «caractère  sérieux  de  «a  philo-- 
Sophie  et  Vèen^v.^  de  soé  àme^.Es  Ii8>i4>  mourut  le  jeune  et 
estimable  .rédacteur  du  Sfléroure^M  Etfonce,  Bourgeat  de  Gre- 
noble. M.«Siiint<Martin,  covome^son  ami,  l'accompagna  v^rs  sa 
dernière  .demeure^  et^  eonameréoirifiemm^nt  digne  de  Tappré- 


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SUR    M.    SAINT-llIARTlir.  vi] 

cier,il  voulut,  sjir  sa  tombe,  lui  rendre  un  dernier  honmia^re. 
Sa  position  à  cette  époque,  Tincertitude  de  son  sort,  depuis  si 
glorieux^  tout  concourut  à  lui  inspirer  de  touchantes  paroks. 
La  philosophie  dont  elles  sont  empreintes,  révèle  sans  doute 
une  âme  triste  et  affligée ,  mais  j'ai  toujours  vu  M.  Saint-9(ar- 
tin,  au  faîte  même  des  honneurs,  porté  à  s'attendrir  vivement 
sur  l'homme  de  lettres  malheureux. 

Plus  tard ,  Içrsqu'en  1 81 5,  le  gra^d  empereur,  assis  pour  la 
deuxième  fois  sur  son  trône  usurpé ,  proposa  lacté  additionnel 
aux  constitutions  impériales  »  chacun  se  souvient  que  l'adhésion 
des  Français  fut  demandée  aux  uns  sur  le  Champ-de-Mai ,  aux 
autres  par  serment  isolé.  M.  Saint-Martin ,  qu'aucun  lien  n'at- 
tachait alors  au  gouvernement,  osa  émettre  une  opinion  néga- 
tive, il  osa  la  faire  imprimer,  et  la  rendre  publique.  Dans  la 
rédaction  des  Motifs  de  son  vote,  on  reconnaît  cette  décision 
ftèche, nerveuse,  tranchante,  qui  était  dans  le  caractère  de  son 
àme  et  de  ses  écrits.  Cette  audacieuse  publication  ayant  été 
mise  sovis  les  yeux  de  l'empereur,  l'homme  qui  avait  le  plus  de 
sentiment  du  beau  dans  les  mœurs,  il  exprima  sa  stupeur,  di- 
rai-je  sa  satisfaction ,  d'un  dévouement  si  courageux.  Il  de- 
manda H  madame  Duchàtel ,  l'une  des  dames  de  l'impératrice* 
mère ,  de  lui  en  présenter  l'auteur.  Il  eût  été  beau  de  voir  fa 
puissance  lutter  contre  la  raison  :  car  M.  Saint- l^rtin  na  se 
fût  pas  démenti.  La  mort  devant  ses  yeux,  il  aurait  tiré  ses  con- 
clusions «omme  'dans  son  cabiuet.  Parmi  le  tumulte  des  cent 
jours ,  la  présentation  fut  ajournée. 

Au  retour  des  Bourbons ,  les  deux  chaires  de  chinois  et  de 
sanskrit  ayant  été  créées  pour  les  deux  savan,ts  qui  les  avaient 
si  hardiment  conquises,  il  paraît  que  M.  Saint-Martin,  dédira 
obtenir  pour  lui-même  un  pareil  encouragement.  J'ai  pu  voir 
dsms  ses  papiers  la  minute  du  mémoire  composé  par  M.  Rému- 
sat  dans  un  cas  semblable ,  prêtée  sans  doute  à  son  ami  po.ur 
lui  servir  de  modèle.  Moins  heureux ,  M.  Saint -Martin  n'obtint 
|i9i$  c^  qu'il  demandait,  soit  que  sa  pétition,  que  j'ai  vue  égale- 
ment, n'ait  pas  été  remise,  soit  plutôt  qu'il  n'ait  pas  été  placé 
dans  des  circonstances  favorables. 

Ce  doit  être  vers  i3i6  ou  1817,  que  M,  Saint-Majctin  pm- 


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TUJ  NOTICE 

nonça,  à  titre  de  secrétaire,  le  discours  d'instsillatlon  de  la  so- 
ciété des  antiquaires  de  France. 

Veils  1B18 ,  pour  se  conformer  aux  réglesients  intérieurs  de 
l'Institut,  qui  ne  permettent  pas  aux  personnes  étrangères  au 
corps  d*y  lire  en  personne  leurs  ouvrages,  il  fit  lire ,  dans  plu- 
sieurs séances  consécutives,  des  fragments  d'un  mémpire,  ou 
plutôt  d'un  ouvrage  complet  sur  le  royaume  grec  de  la  Messène 
et  de  la  Characène ,  dont  j*avouc  franchement  que  j'ignorais  le 
nom  avant  lui,  et  dont  plusieurs  personnes  ignorent  peut-être 
éomme  moi  le  gisement.  Cet  ouvrage ,  qu'il  n'a  pas  publié,  que 
je  sache,  s'est  retrouvé  manuscrit  dans  ses  papiers.  Soit  qu'il 
fait  jugé  indigne  de  lui,  ou  que  d'autres  travaux  lui  aient  fait 
oublier  celui-là,  il  s'était  contenté  d'en  retranscrire  les  premiers 
cahiers.  Sans  vouloir  caractériser  ce  travail  d'après  mes  idées , 
je  puis  dire  que  des  juges  expérimentés  en  ces  matières  ont  vi- 
vement regretté  qu'il  restât  inédit. 

Au  reste,  M.  Saint  Martin  était  trop  sérieux  pour  se  livrer  aux 
riantes  illusions  de  la  poésie  et  de  l'imagination  oratoire.  Il 
n'approuvait  et  ne  voulait  dans  les  ouvrages  scientifiques  que  la 
science.  Tout  ce  qui  n'était  pas  pensée,  il  l'appelait  phrase,  et 
le  passage  ainsi  qualifié  perdait  pour  lui  tout  son  mérite.  Bien 
différent  en  cela  de  son  ami,  écrivain  non  moins  élégant  que 
phâlosophe* exact,  M.  Saint-Martin  voulait ,  et  le  disait  haute- 
ment, que  la  science  fat  aride,  ennuyeuse,  c'était  son  mot.  Il 
y  revenait  sans  cesse,  et  voulait  le  rendre  d'observance  géné- 
rale dans  toute  sa  sphère  d'influence.  S'il  s'en  exceptait ^  lui, 
c'était,  il  est  vrai,  non  pour  les  formes  de  ses  compositions  lit- 
téraires, mais  pour  le  fond,  qu'il  savait  toujours  rendre  inté- 
resstant  aux  hommes  de  l'art. 

Il  engagea ,  au  commencement  de  1 8^10 ,  une  polémique  lit- 
téraire avec  un  savant  que  venait  de  signaler  la  publication 
des  Annales  des  Lagides ,  ouvrage  de  difficile  composition ,  et 
d  une  érudition  remarquable.  M.  Saint-Martin  crut  devoir  en 
attaquer  la  chronologie,  ou  plutôt  la  base  chronologique.  Il  en 
résulta  un  opuscule  tout  de  chiffres  et  de  calculs,  iutitulé: 
Nouvelles  recherches  sur  la  mort  d*^ Alexandre^  que  l'auteur  an- 
nonce comme  l'extrait  d*un  plus  grand  travail, et  que  je  m'abs- 


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SUR    M.    SAIWT-MARXIN.  It 

tieidrâi  de  juger,  parce  que ,  pour  être  seulement  en  état  de  le 
sojvre ,  il  faut  une  science  peu  ccAmnune. 

Ce  fut  le  a  septenibre  iStào,  à  l'âge  de  29  ans,  que  M.  Saint- 
Martin  fut  élu  membre  de  rAcadémie  des  inscriptions,  en  rem- 
placement de  Tôchon  d'Anneci.  A  Tépoque  de  iSaa  se  rapporte 
la  publication  de  sa  brochure  relative  au  Zodiaquede  Dendérah, 
Aujourd'hui  si  rebattu,  ce  sujet  avait  alors  le  mérite  de  la 
nouveauté:  il  eut  de  plus,  sous  la  plume  de  M.  Saint- Martin , 
celui  de  la  plus  grande  lucidité  dans  Texposition  des  faits,  et 
surtout  oflui  de  fixer  avec  certitude  les  bornes,  déjà  trop  vastes, 
au-delà  desquelles  la  science  ne  pouvait  dater  ce  planisphère. 
C'était  beaucoup  de  rabattre  plus  de  quinze  mille  ans  sur  lel 
calculs  des  Bailli  et  des  Fourrier.  Au  reste,  ne  lui, donnons  pas 
plus  d'importance  que  l'auteur  lui-même  n^  en  attachait, 
comme  Vatteste  sa  lettre  du  19  septembre  i83q,  aux  rédac* 
teurs  du  Tempe,  Les  hésitations  même  de  la  science  sont  utiles 
à  cenx  qui,  plus  tard,  ont  le  bonheur  de  résoudre  les  pro-^ 
b/èmes,  parce  qu'elles  isolent  le  point  du  doute. 

Quand  le  mérite  de  M.  Saint-Martin  eut  reçu  la  sanction  so-^ 
lennelle  de  l'Instiiut,  son  nom,  déjà  connu  de  l'Europe  savante, 
ne  fit  que  grandir  ainsi  que  sa  fortune.  Il  fut  successivement 
appelé  au  ministère  des  Affaires-Étrangères ,  à  titre  de  savant, 
pouvant  être  utile  par  ses  connaissances  ;  nommé  v  ^n  i8a4)  ad- 
ministrateur de  la  bibliothèque  de  l'Arsenad,  pais  chargé  de  la 
direction  des  types  orientaux  à  l'inaprimérie  royale.  Les  ser- 
vices qu'il  rendit  dans  ces  divers  emplois  ont  résolu ,  à  Thon-.- 
neur  de  l'érudition,  la  question  de  son  utilité  positive. 

Es^-il  utile  à  l'homme  de  savoir?  doit-il ,  peut-il  apprendre 
de»  antres  peuples?  L'étude  des  langues  et  des  antiquités  est- 
elle  l'instrument  indispensable  de  la  science  de  leurs  usages? 
Et,  pour  l'Orient,  est-il  possible,  y  a-^t-îl  besoin  de  rien  ap- 
prendre Ae^  peuples  de  l'Asie?  Voilà  tout  le  problème. 

S'il  s'agit  seulement,  comme  disent  les  rieurs,  d'apprendre 
comme  se  dit  chapeau  à  mille  lieues  de  nous,  et  à  cent  lieues  à 
l'entour,  nul  profit  sans  doute  pour  nous  casaniers,  bien  que 
le  v«if  ageur  pense  différemment.  D'ailleurs ,  il  en  est  de  ceei 
comme  du  luxe.  Si  l'homme  allait  tou£nu,  il  aurait  moins  de 


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X  NOTICE 

besoins:  ignorant,  il  saurait  moins,  et  voilà  tout.  Ainsi,  les 
sciences  réunissent  l'utile  à  Tagréable. 

Sans  géographie  ni  chronologie ,  point  d'histoire ,  et  par- 
tant, rien  de  fixe  dans  le  passé f  sans  astronomie,  point  de 
chronologie  ni  de  navigation,  partant,  point  de  commerce,  ni 
d'échange,  ni  de  voyages.  Les  peuples  s'isolent;  i>oint  d'esprit 
d'association  ni  de  gouvernement  possible;  et  cependant  le 
temps  marche,  l'esprit  s'éclaire  de  l'expérience  du  passé.  Il 
force  à  refaire  le  commerce,  la  navigation,  l'astronomie,  la 
chronologie,  l'histoire,  la  géographie,  l'histoire  naturelle  gé- 
nérale ,  les  sciences  positives ,  l'industrie:  c'est  un  cercle  à  n'en 
|Mis  sortir.  La  science  du  philologue,  si  futile  en  apparence,  a 
donc  elle-même  son  utilité,  en  perfectionnant  l'instrument  né- 
cessaire de  toute  communication  entre  les  peuples,  en  épar- 
gnant le  temps  et  la  peine  de  ceux  qui  veulent  l'employer. 

Fières  de  s'être  associées  à  la  renommée  de  «os  armes  eu 
Egypte,  et  à  tous  les  rapports  de  la  diplomatie  avec  le  Levant  » 
les  langues  orientales  avaient  toujours  été  grandissant  d'impor- 
tance depuis  l'ordonnance  de  création  de  TÉcole-Spéciale  ;  les 
langues  arménienne,  chinoise  et  sanskrite,  avaient  tour  à  tour 
reçu  les  encouragements  d'une  administration  éclairée.  De  la- 
borieux élèves  se  lançaient  chaque  année  dans  cette  route,  ou- 
verte à  l'ambition  comme  au  génie  de  la  gloire.  Pour  leur  ser-^ 
vir  de  centre  de  ralliement,  tout  ce  qu'il  y  avait  d'illustres 
professeurs  au  Collège  de  France  et  à  l'École-Spéciale ,  et  d'a- 
mateurs distingués,  convergèrent  autour  d*un  homme  dont  le 
nom  ne  peut  être  ici  prononcé  qu'avec  le  respect  dû  à  Ja  supé* 
riorité  incontestable  du  talent  et  de  la  vertu.  La  Société  Asiatique 
surfit,  en  iS%%y  comme  une  aurore  Ji^riliante ,  et  prit  pour  sa 
devise  un  soleil  levant.  Il  n'est  pas  besoin  de  dire  que  M.  Saint- 
Martin  fut  l'un  des  premiers  coopératenrs  de  cette  noble  pensée. 

Radieuse  dès  son  début,  et  progressive  comme  son  modèle, 
la  Société  Asiatique  dispersa  d'abord  les  faisceaux  de  sa  lumière 
dans  un  journal  plein  de  recherc)ies  neuves  et  intéressantes, 
et  employa  ses  ressources  suivant  la  direction  que  lui  imposait 
son  régljement.  Toutes  les  langues  orientales  cukivées  dans  son 
sein,  le  chinois,  l'arménien,  j'arabe,  le  p^li,  le  sanskrit,  le 


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SUR    M.    SAîNT-MàRTIir.  XJ 

mandchou,  une  autre  littérature  née  au  milieu  d'elle  et  par  son 
inspiration  ,  celle  de  la  Géorgie ,  développèrent  successivement 
Jeurs  laborieuses  rechenehes  à  l'ombre  de  son  noble  patronage. 
Disons4e  avec  orgueM  ;  aucui^'aggrégation,  avec  des  ressources 
aussi  modestes  qtie  celles  de  la  Société  Asiatique  ^  n'aura  fait 
autant  qu'elle  en  dix  ans  d'existence. 

Grâce  à  d'illustres  protections  et  à  l'excellente  impulsion  don- 
née à  ses  travaux,  ainsi  qu'à  l'emploi  de  ses  facultés ,  la  Société 
Asiatique  mérita  et  obtint  bientôt  de  nouvelles  faveurs.  L'impri^ 
merie  royale  lui  fut  ouverte  par  la  munificence  de  nos  rois  ;  son 
journal  augmenta  de  volume,  dés  tnémcnres  plus  considérables 
purent  y  être  insérés,  et  je  puis  le  dire ,  si  la  mort  ne  nous  eût 
ravi  M.  Saint-Martin, il  se  proposait  d'accroître  encore  l'impor** 
tance  et  l'étendue  du  recueil  dont  la  rédaction  lui  était  confiée 
principalemen  t 

Dans  /'heureuse  position  où  se  trouvait  à  cette  époque 
M.  5aint-Martin,  il  n'usa  jamais  de  son  crédit  et  de  son  pouvoir 
gife  pour  rendre  service; et  je  ne  secai  pas  démenti,  quand  je 
dirai  qu'il  ne  nuisit  Jamais  à  personne  en  connaissance  de 
cause.  Éclairé  comme  il  Tétait  sur  toutes  les  grandes  questions 
qui  se  rattachent  à  la  littérature  et  ^  l'histoire  de  l'Orient ,  per- 
sonne n'était  plus  propre  que  lui  à  diriger  des  recherches  en  ce 
sens.  A  la  faveur  de  l'emploi  qui  l'attachait  au  ministère  des 
Affaires-Étrangères, i4  put  seconder  activ^nent,  dans  son  attrac- 
tion vers  l'Asie,  un  savant  d'AUeiDagne,  le  docteur  Schulz.  H 
rédigea  pour  lui  d'une  manière  très-détaillée  le  plan  du  voyage 
qu'il  devait  exécuter ,  lui  traça ,  du  fond  de  son  cabinet ,  la  route 
qu'il  aurait  à  suivre ,  comme  s'il  l'eût  déjà  parcQurue  lui-même 
avec  les  caravanes ,  et  lui  indiqua  jusqvi  a  de  petites  localités  dà^ 
iJ  devait  faire  des  recherches.  Ces  in&^ri^ctiojQs-,  que  j'ai  euea^ 
long-temps  en  mpn  pouvoir  9  sont  un.  ouvrage  complet  sur  l-ar«- 
chéoJe^ie  historique  derançiciimie>fîerSiD;  Ce  voyage  n'eut  maVi 
heureusement  d'autre  résultat  pou]t;>  1^^  s(}iençe  que  l'envoi  ei^ 
France  dé  plusieurs  manuscrits ,  les  uns  déjà  connus^  les  autrea 
tout-à- fait  nouveaux,  et  de  beaucoup  d'inscriptions ,  dont  une 
géorgienuç  trouvée  sur  une  cloche  à  Tçhoullqu^bévi,lieu  doq| 


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Xlj  NOTICE 

j'ignore  la  position.  Mais  ces  faits  se  rapportent  aux  années  1628 
et  suivantes. 

Ce  fut  en  1^4  que  j'eus  moi-même  l'honneur  d'être  pré- 
senté i  cet  hbmme  célèbre  par  celui  qu'il  aimait  le  plus.  Je  le 
connaissais  de  réputation ,  et  l'un  des  amis  de  sa  famtHe,  avec 
qui  ma  profession  me  procurait  des  relations  suivies  >  m'avait 
mis  au  fait.  .C'est  même  de  la  bouche  de  ce  dernier  que  je  tiens 
la  plupart  des  détails  concernant  la  jeunesse  de  M.  Saint-Martin. 

Je  me  rappelle,  non  sans  sourire,  que  j'essayai  de  faire  à 
M.  Saint-Martin  une  sorte  de  harangue  pour  ma  réception ,  et 
que,  intimidé  par  la  haute  idée  de  son  mérite,  je  me  troublai, 
au  point  de  rester  court  :  je  fus  cependant  bien  accueilli.  Ainsi 
commença  pour  moi  ce  bienveillant  patronage,  dont  je  mé  sôu-^ 
viendrai  toute  ma  vie  avec  la  mémoire  du  cœur. 

Depuis  lors,  M.  Saint-Martin  se  présente  à  moi  sous  un  jour 
nouveau,  et  avec  les  saintes  fonctions  de  guide  intellectuël'.Nbn^ 
le  don  de  la  vie  et  les  bienfaits  de  l'existence  n'établissent  point, 
entre  le  père  et  son  fils,  des  liens  plus  forts  ni  plus  sacrés  que 
ceux  qui  unissent  réciproquement  le  maître  et  son  élève.  Heu- 
reux l'homme  qui  rencontre  dans  la  vie  un  maître  éclairé  I  Un 
regard  ,  un  ton  de  voix,  un  geste,  un  mot,  une  phrase,  tombant 
delà  bouche  du  maître  guident,  encour^ent,récomp<*nsent  l'é- 
lève. Ceci  est  bien  !  faites  cela!  vous  êtes  dans  Terreur?  On  aime 
autant  le  blâme  que  la  louange,  parce  que  l'un  et  l'autre  sont 
des  conseils.  Qu'il  y  a  loin  des  avis  du  maître  à  cette  critique 
toujours  hurliwte,  aux  désespérants  conseils,  aux  sarcasmes 
envenimés  qui  entament  ou  exaspèrent  le  génie!  Non,  quand 
je  rappellerais  l'étai  robuste  donné  au  timide  essor  de  la  jeune 
vigne,  la  mère  qui  forme,  les  premiers  pas  de  son  nouveau-né, 
le  pilote  qui,  sur  uâe  mér  dangereuse,  dirige  la  marche  du 
vaisseau  ;  toutes  ces  images  de  la  force ,  de  la  sagesse ,  de  Fa- 
mour,  servant  d'appui  à  Ift  faiblesse^  à  l'inexpérience,  ne  ré- 
pondraient qu^imparfàitèment  à  ces  deux  idées  relatives  de 
maître  et  d'élève. 

Sans  calculer  jamais  les  obstacles,  la  tête  logique  de  M.  Saint- 
Martin  concevait  tout  par  ensemble,  et  ne  savait  borner  la  por- 
tée d'un  principe.  C'était  lui  qui  m'avait  inspiré  les  moyens 


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SUR    M,    SAmT-MARTm.  xiij 

d*«tude>  en  me  communiqaant  tout  ce  qull  possédait  de  livres 
et  de  matériaux, relatifs  à  la  langue  géorgienne;  il  voulut  m'y 
perjfëctionner  inévitablement.  Il  conçut  donc ,  et  digéra  le  plan 
d'un  voyage  littéraire  en  Géorgie;  ce  fut. lui  qui  se  chargea  de 
ie  recommander  aux  puissances  ^  car  il.  n'employa  jamais  son 
crédit  que  pour  l'honneur  des  principes.  Tout  était  prêt  ;  un 
miniistre,  d'un  esprit  non  moins  élevé  que  son  caractère  était 
ferme,  trop  ferme  peut-être  pour  une  époque  de  dbsoludon 
déjà  mûre,  M.,  de  Peyronnet,  avait  accueilli  les  bases  de  l'en- 
treprise. Elle  avait  reçu  l'approbadon  savante  de  l'Institut, 
tout  allait  se  décider;  tout  croula  avec  le  trône  quiportaiti'édifice. 

Dois-je  renouveler  nos  douleurs,  en-  rappelant  quel  chagrin 
nous  saisit  tous,  nous,  les  amis  à  divers  degrés  de  m.  Saint** 
Martin,  quand  iious  le  vîmes,  infidèle  an  coite  des  muses  au- 
teurs de  sa  gloire ,  se  lancer  dans  la  carrière  du  journalisme^ 
Beux, factions,  rivales  en  audace,  s'acharnaient  sur  le  plus  beau 
vaàmimeni  du  premier  règne  de  la  dynastie  restaurée.  C'étaient^ 
d'une  part,  les  rétrogrades  constants  dans  leurs  dédains  pour 
la  pensée  devenue  bourgeoise;  de  l'autre  $  la  haine  de  plus  en 
plus  acérée  du  privilège:  au  milieu,  un  pilote  faible,  obstiné 
comme  l'un  de  ses  frères,  mais  non  clairvoyant  comme  l'autre. 
M.  Saint-^Martin^  monarchique  par  principe,  et  conséquent, 
c'est-à-dire  pour  lui,  extrême,  entrevit  le  péril.  Il  crut  qu'il 
serait  beau  de  soutenir  l'arche  chancelante^  et  dévoua  sa  pltime^ 
son  existence ,  sa  fortune ,  à  cette  noble  entreprise.  N'en  déu--* 
tons  pas  :  c'était  pour  lui  une  affaire  de  raison ,  puis  d'amour^ 
puis  de  reconnaissance.  Il  ne  fallait  pas  moins  de  tant  de  mo^ 
tifs  pour  le  tirer  de  sa  retraite  silencieuse,  lui  si  doux,  si  pai-» 
sib\e,si  ennemi  de  toute  autre, chose  que  du  loisir  des  lettres 
et  des  études.  Triomphant  dans  sa  noble  entreprise,  tous,  ex- 
cepté lui,  s'en  fussent  attribué  le  succès  :  vaincu,  il  devint  le 
bouc  émissaire*  '    • 

Yraimenty  je  frémis  de  courroux  quand  j'entends  y  à  mes 
oreilles ,  le&  Dons  Quichotes  de  l'ancienne  aristocratie  accuser 
M.  Saint-rMartin  de  la.  chute  du  trône,  comme  si,  dans  uni 
temps  oik  iouV  fermente^  un  seul  homme  était  responsable  de 
cette  fermentation.  Quand  l'attaque  est  frénétique,  désespé« 


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XIV  NOTICE 

rée,  faut-^il  que  la  résistancie  soit  molle?  D'aHlesTsM.  Saint- 
Martin  n'aurait  que  répété  logiquement  ce  que  disaient  à  tort 
et  à  travers,  et  sur  tous  les  tons,  les  initiés  des  salons  d*ukra, 
et  les  abonnés  du  club  des  bonnes  leKres,  présidé  souvent  par 
le  chef  du  ministère.  Dans  cette  guerre  à  mort,  où  Ton  ne  rêvait 
que  ciseaux  et  potences,  les  plus  mal  avisés,  mais  non  les  moins 
déterminés,  furent  vaincus: un  croc-en-jambe  en  fit  raffaire. 
•  Je  ne  pense  pas  que  l'homme  de  lettres  soit  propre  aux  dis- 
cussions de  la  politique.  Au  fond  d'un  cA)inet  oii  pénètre  à 
peine  un  demi-jour  mystérieux ,  environné  des  précieuses  re- 
liques diçs  morts ,  Platon  peut  noéditer  sur  les  gratids  principes 
qui  régissent  les  peuples,  en  peser  les  rapports,  lés  envisager 
sous  toutes  leurs  faces,  et  eu  déduire  de  rigides  conséquences. 
Mais  la  société  est  |^iis  qu'une  abstraction.  Sous  la  main  de 
rkomhae  de  lettres,  sa  pensée  revêt  une  forme  fixe  et  impéris> 
sable;  au  lien  qu'il  n'y  a  rien  d'immuable  pour  la  politique^mi 
en  religion ,  ni  en  morale  ,ni  en  administration  ;  son  grand  prin- 
cipe, c'est  qu'il  faut  avant  tout  consulter  les  opinions  et  les  be- 
scMHS  sentis  ou  actuels^des  peuples,  et  tâcher  de  les  gouverner 
eni  ies  prenant  telsi  quels  :.en  se  mettant  en  rapport  de  sym- 
pathie, le  reste  vient  seul  et  au-delà.  Sans  doute  ^Universel 
défendit  bravement  et  logiquement  sa  cause.  Gagnable,  il  Teàt 
gagnée.  Oh  !  si  le  pouvoir  d'alors,  au  lieu  de  proclamations  et 
de  circulaires  menaçantes^  eût  percé  des  routes  du  nord  au 
sud,  ouvert  des  canaux  partout^  laissé  le  droit  d'aînesse  à  no« 
aïeux,  la  pénitence  du  sacrilège  aux  prêtres,  et  des  fusils  à 
ceux  qui  ont  des  marchandises  à  défendre,  la  logique  de  l'Uni" 
i^ersfleAt  été  plus  concluante,  sinon  inutile. 

Mais  passons  sur  ces  tragiques  catastrophes. 

Depuis  que  M^  Saint^Martin  eut  adopté  sa  nouvelle  car- 
rière, plus  d'études ,  plus  de  recherches,  plus  de  compositions 
savantes,  les  ouvrages  commencés  marchèrent  avec  peine;  plus 
de:mémoires,  plus  de  travaux.  La  seule  chose  à  laquelle  if  ne 
renonça  point,  ce  fut  la  direction  du  Journal  asiatique^  et  de 
la  gravure  des  caractères  orientaux.  L'arabe,  l'arménien , .  le 
chinois,  l'avaient  précédemment  occupé  ;  à  cette  époque  9  il  se 
livra  à  la  gravure  d'uu  corps  zend.  . 


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SUR    M.    SAIWT-MARTIN.  XV 

Ici  encore ,  et  j«  ne  serai  point  démenti  par  vous ,  jeune  par- 
yeou  de  la  science  dont  j'ai  vu  les  succès  littéraires  et  la  rapide 
éiévatien  avec  le  loyal  plaisir  de  l'estime  satisfaite ,  ici  encore 
M.  Saint-Martin  se  montra  ce  qu'il  avait  toujours  été,  désinté- 
ressé  dans  ses  nobles  travaux.  On  voit ,  par  beaucoup  de  pas-* 
sages  da%MéfiK>ires  sur  TArménie»  que  M.  Saint-Martin  s'était 
occupé  du  zend,  ei  l'avait  étudié  avec  soin.  Ce  que  je  sais,  et 
ce  que  seul  j'ai  |^u  savoir,  c'est  qu'il  amrait  ramassé  pour  cette 
étude  de  nombreux,  etx^ertesnon  méprisables  matériaux. Mais 
le  désintéressement  littéraire  dont  il  faisait  profession  nel'em- 
pécka  pas  de  prodiguer  ses  conseils,  et  de  communiquer  toutea 
ses  recherches  au  nouvel  investigateur^  et,  malgré  les  difficul- 
tés, un  corps  de  carjictères  zends  fut  gravé  pour  luL  Un  jà«* 
loux,  un  petit  homme  eut  gravement. décidé  la  chose  impos- 
sible^ aurait  enpérché  qu'elle  ne  se  fît,  ou  l'aurait  faite  seul 
sur  \es  dessins  du  postulant  *. 

Quand  arriva  la  révolution  de  j83o,  des  sommités  qu'il  at> 
té^it  d'abord  »  l'orage  descendit  bientôt  vers  la  plaiiie.  Là , 
plus  d'un  lâche  se  cacha,  dans  les  brouillards,  plus  d'un  habile 
du  jour  s'effaça  dans  des  faux^fuyants  de  lui  connus,  à  la  fa** 
veur  de  l'anonyme  ou  d'un  déguisement.  M.  Saint-Martin  ayant 
fait  tête,  fut  rencontré  et  enlevé  par  ce  tourbillon  :  cela  parais- 
sait rationnel.  Il  eut  occasion  d'écrire  «  à  ce  sujet,  aux  rédac- 
teurs du  Temps,  le  19  septembre  i83o,  une  lettre  digne  de  sa 
franchise,  mais  inférieure  peut-être  à  sa  logique;  car,  après  y 
avoir  ^^lé  de  sa  vie  littéraire^  qui  méritait  bien  d'être  expo- 
sée au  grand  jour,  noble  et  pure  comme  elle  l'était,  il  parle  de 
sa  chute  comme  d'une  chose  étonnante,  comme  s'il  y  avait  rien 
d'étonnant  eB  révolution  dans  les  excès  enfantés  par  la  bas- 
sesse ,  la  délation  et  la  peur.  Peu  au  fait  des  machinations  d'in- 
trigue qui  assiègent  les  nûniatres,  je  sais  seulement,  à  ce  Siujet« 
que  l'intention  première  du  gouvernement  avait  été  de  dioBkH 
nuer  ses  traitements,  sans  lui  ravir  toutes  ses  ressources,  mais» 
que  des  menées  étrangères  au  ministre  lui  forcèrent,  pour  ai»$f 
dirCi  la  main.    ^  . 

*  M.  E.  Barnouf. 


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XVJ  MOTIGE 

Au  reste  y  comme  il  y  a  toute  raison  de  croire  que  M.  Saint- 
Martin  n'était  pas  capable  de  déguiser  une  vérité  nuisible  à  ses 
intérêts,  un  pareil  dénoûment  n était  pas  logique.  Puisque 
Mi  Saint-Martin  affirme>dans  la  lettre  citée  plus  haut,  qu'il  de- 
meura complètement  étranger  à  la  rédaction  politique  de  VU- 
nîpersel,  et  qu'une  personne,  mieux  placée  que  qui  qae  ce  fàt 
pour  en  juger^  affirme  n'avoir  jamais  vu  dans  ces  diatribes  une 
seul«  ligne  de  sa  main  ,4a  responsabilité  lui  emfut  donc  impu- 
tée à  tort  :  il  est  bon  d'en  décharger  sa  mémoire. 

Rentré  dès-lors  dans  le  néant  politique,  dont,  pour  son  re^ 
pos,  il  eût  dû  ne  pas  sortir,  M.  Saint- Martin,  après  s'être  un  peu 
remis  de  l'étourdisseroent  de  sa  chute,  reprit  ses  travaux  litté^ 
raires  qu'il  chérissait.  Entre  ses  mains,  le  Journal  asiatique  oM'- 
tinua  de  prospérer,  et  sa  belle  édition  augmentée  de  l' Histoire  du 
Bas^Empire,  commencée  en  1814^  parvint  au  dousièm*  vo~ 
lume. 

La  manière  de  composer  de  M.  Saint-  Martin  n'était  pas  uni- 
forme. Doué,  comme  il  l'était,  d'une  logique  serrée,  et  difficile 
par  conséquent  sur  le  choix  des  idées  et  des  expressions  qui 
les  rendent,  mais  en  même-  temps  dépourvu  de  l'imagination 
qui  crée  les  unes  et.  les  autres,  et  les  met  à  souhait  au  service 
de  l'écrivain,  il  commençait,  par  concevoir  son  plan,  ses  di- 
visions ,  ses  idées  fondamentales ,  la  charpente  de  l'édifice ,  s'il 
s'agissait  d'une  dissertation  ;  puis  il  se  pénétrait  de  la  matière 
par  des  lectures  variées,  arrêtant  dans  son  es|rrit  tout  ce  qui 
devait  concourir  au  sujet;  ensuite  ni  rédigeait,  sai^autre 
livre  que  sa  tête^  sauf  à  ajouter  les  citations  en  relisant,  après 
avoir  transcrit. 

il  avait  traité  de  la  sorte  plusieurs  points  de  l'histoire  an* 
cienne  et  moderne,  et  j'ai  vu  dans  ses  papiers  de  nombreux 
mémoires  relatifs  i^  aux  aniiq^iités  de  l'Egypte^  à  Sanchonia- 
t<m  et  Manéthon  ;  ft"  à  l'époque  de  l'édipse  de  Thaïes,  un 
mémoire  et  son  supplément;  3^  des  fragments  d'une  histoire- 
des  Sassanides,  et  d'autres  moitis  importants;  4^  un  travail 
très-volumineux  sur  la  dynastie  des  Arsacides;  5-^  un  Mémoire 
sur  l'année  de  la  naissance  de  J.-C.  Il  annonçait  souvent 
comme  achevé  un  ouvrage  dont  la  conception  était  seulement 


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StJR    M.    SAUfT^MARTIN.  JlVÎj 

organisée  dans  sa  tôte.  Quand  it  en  tétait  k  la  premièihe  di'j^e^i^m 
do  plan ,  chose  déjà  difficile  par  elle^méiM ,  «omme  si  toirt 
étBit  terminiéi,  il  prenait  en  par y«u)iep  quelque «eîudiièifp  com^ 
plaisant ,  sa  femme ,  sa  fiile ,  lé  pfemiec  ^enn  *  ^ois  ;  ^eôïhinè  un' 
homme  qui  pensejrait  tout  haut;  il. vous  détuîllaitira^plisin  itn-' 
mense  «tses  divisions;  et,  s'exaltant  d^  ses  inspirations  hiénies', 
il  vous  en  vantait  l'importancre ,  l'utilité,  la  prééminence  sut' 
tontes  le^  autres:  et  souvent  il  disait  vrai.  Ah!  cbml^èli'de 
beaux  livres  morts  ainsi  dans  son  cerveau!  "'       '    '  .     -         ; 

Aucune  des  ^andes  questions  de*  la  ]^hi)oIogiè  f  <ke  ll^toiré 
et^e  1a^«tographie  ancieniies,n'étàif  étrangère  à  M.  Saitat-^nTàlKiW.' 
Il  avait  étudié  avec  un  soin  spécial  jief'  les'  migrblibtis  del'Eii- 
rope  vers  l'Asie ,  et  celles  de  TAsle  vers  l'Eiittôpè^tet  l'i4fricfUè: 
Les  établissetAentst  orientaux  dé  la  côté  théridiOi^âle^'dè''}a#é^ 
diterr^ée ,  et,  par  smte>  ceii^des  Boihains  dàtts  les  rtièmeè'Yê^ 
g^ons  y  le  mirent  à  même  d'éclàircir  beàtrcoup  dé  passagles  des 
aneîensy  un,  entre  autres,' de J'histôri)^  «âtflkiste;  des  re- 
cherches scientifiques  acquirent  bfeniàt  une  tn)portaneéSupé^ 
rie«fe  à  ié^lle  qu'il  prétendait  en  tirer  d'abbi^dV  'lôfsqé«  là 
guerre  d'Aiger,  en  i83o,  vint  les  ifUèltre  en  lumière.  Il  eosiposà 
à  1  époque,  de  l'expédition  dlVierS  liiémoitei^  dont  là  lecture 
excita  un  étonnement  général  phfrnti^és  vieux*  guertiei^ que, 
du  foml  ^e  son  cabitrct/il'ÀÂak (guider  sur  ces  plages  loînCaines. 
Si  la  France  possède  Alg€$,  tW  à  lui  qu^elle  le  doit  eb  partie  ; 
si  la  colonie  prospère',  ce  sera  encdrie  par  ses  ditebtioiis^  Ainsi 
ré^Amd  là  science  à  ses 'détraéteursJ'  '  '^   '     •'  '         '! 

Maiidà*il  excellait,  et  cet  qui  sbu^iVlfe  pHyi'ft  soii^lgéWie  ,• 
éTétaient  lesnotias  et  travaux  de  détail:  Ileh  aV^iV  ÀnriMèé  potir  le 
zéné  de  très-groé  paquets  ,  et  d'autres  par  ordte  !itj^l>étiqé^, 
qiie  j'càferté  à^fus  de  dix  mîtlièrsi  relatives  aùk  idiome^',  à 
l*fetof  rè,  Il  ia  géographie ,  à  l'àntiq*i<é  /  à  la  ci'hi^dëde»  ^JèU- 
pies  et  dWlitféraîfures  de  rArftlénie-  de  làf  Pér4/^4'ATabie, 
d^fà^'î%rkië^,  'tliirtes  ceiritës  îirt  prbpisement ,  ettiî'uTïe' écriture 
fine  et  serrée.  Dans  ce  cenre  de  travail,  on  distinguera  le 
voyage  (teHéVêqii'e  aîrménjeh  Martyr,' inséré  a UJôWrnal  AsJa- 
tT<jtie;iK*fés'ânriotâtiôiik  cônisidéràbles  du  Lebèlàu.  C'étaitià  son 
répertoire  pertnaû'ént  dii' faits  curieux,' dé  rj^^proèhcments;. 

Tome  XIII.  b 


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XVllj  NOTICE 

d'explication  de  passages.  di(ficiAeS|  de  restitutions  de  textes, 
de  comparaisons  qui  nourrissaient  ses  improvisatinos  savantes. 
MM.  les  membres  de  ilnstitut»  dont.  j*ai  entendu  plusieurs  ad- 
mirer la  variété  de  ses  à-propos,  et  rimmensité  de  son  érudition, 
et  les  lumières  soudaines  qu'il  jetait  dans  une  question  épi- 
neuse, auront,  dans  ce  que  je  viens  de  dire,  la  solution  du  pro- 
blème qu'ils  ne  savaient  résoudre. 

Autant  il  avait  de  difficulté  à  comppser  des  ouvri^ges  de  lon- 
gue haleine,  autant  il  était  rapide  dans  le  discours.  Sans  doute 
il  n'aurait  pas  £sillu  écrire  ce  qu'il  disait  ;  mais ,  dans  chacuoe 
de  ses  phrases,  il  y  avait  une  portée  que  mesurait  de  suite  sifi 
interlocuteur ,  et  dont  on  pouvait  très-souvent  profiter.  Pei^t- 
être  se  fiaitril  trop  à  sa  facile  et  riche  inémoire  ;  et  il  serait  dif- 
ficile de  dire  ce  que  serait  devenu  so^is  sa  plume  un  ouvrage 
important,  composé,  de  souvenirs  et  sur  épreuve^Il  avait  entrer 
pris  en  1828  l'histoire  dePalmyre  :  iSo  pages  étaient  composées, 
96  en  feuilles ,  et  le  reste  en  placards  .isolés*  Commç  nous  n'A* 
vons,rien  trouvé  de  compacte  sur  ce  sujet  dan^  ses  icartons^  il  y. 
a  lieu  de  eroive  que  le  reste  était  seulement  conçu  ^  organisé 
dans.^a  tète.  Des  notes  assez  considérables  relatives  1^  cet  objet 
pourront  peut-être  mettre  sur  la  voie  vu^  acquéreur  intelligent  ; 
mais  qui  se  chargera  d'un  tel  trav^l  ?  . 

Jusqu'ici  j'ai  parlé  du  savant,  j'ai  pe^nt  ce  que  j^'avais  vu  des 
mcDurs  littéraires  de  M.  Saint-Martin  Hl  me  reste  àpai;l^rde^  qua. 
lités  de  son  cœur,  M.  SaintjMEartin  avait  l'ame^ns^Ue.çt  aifnante. 
Il  avait  épousé  en  1818,  avant  que  sa  réputation  fût  encore 
fixée  parvl'in^^ession  de  ses  mémoires,  la  veuve  du^général 
Gasteix,  qui,eB^s'unissantà  son  sort,  ne  fit  qu'échanger  une 
hf^e  capacjté  mifitaire  contre  le  mérite  non  moins  relevé  d'^ 
Uoratne  de  lettres.  M.  Saint-Martin,  homme  sérieux  et  d'inté- 
rieur,  avait  voué  à  la  compagne  de  sa  vie  un  véritable  culjte* 
dont  ceux  .qui  la  connaissent  savenjt  combien  elle  enéta^t  digne, 
et  se  délassait,  dans  les  plaisirs  de  la  famille,  de  ses  sai^ànies 
fatigues. 

.  L'affection  qu'il  avait  conçue  <dè^  .le  jeune  âge  pour  jl]^.  Abel* 
Rémusat,  ne  fit.^ue  s'accroître  aivec  le  teinps.,  et  se  consolider 
par  u^ne  estime  profonde  et  réciproque.  Il  fut  fidèle  jusqiui  la 


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SUR   M.    SAINT'MARTlir.  xix 

tombe  à  cette  amitié  dont  ii  7  a  lieu  de  croire  qu'il  faisait  une 
bonne  partie  iles  frais.  Lorsqu'une  douloureuse  mallidie  vint  lui 
inspirer  pour  son  ami  des  craintes  sérieuses ,  M.  Saint -Martin 
s'attacha  à  son  chevet  »  et  lui  prodigua  les  soins  les  plus  ten- 
dres. Le  jour  et  la  nuit,  tien  ne  put  Tarvacher  à  cette  douce 
et  pénible  occupation.  Quand  la  mort  eut  frappé  son  dernier 
coup,  ce  fut  encore  M.  Saint-Martin  qui  conduisit  son  ami  à  la 
demeure  qu'il  avait  choisie  et  marquée  lui-même  près  de  sa 
mère,  à  Saint-Fargeau.  Il  sembla  dès-lors  dégoûté  delà  vie. 
Abreuvé  de  dégoûts  et  de  disgrâces,  il  tomba  dans  un  état  de 
démoralisation  vraiment  affligeant.  Ni  les  scènes  tumultueuses 
du  mois  de  juin,  ni  les  soins  de  la  vie ,  rien  ne  put  le  distraire 
de  ses  regrets.  «Il  m^emmènera» ,  disait-il  souvent. 

Tout  concourait  d'ailleurs  à  hâter  le  terme  d'une  vie  si  pré- 
cieuse i  la  science.  Présenté  par  le  collège  de  France,  et  appuyé 
par  l'unanimité  de  l'Institut  pour  une  chaire  d'histoire ,  il  y  eut 
une  persévérance  calculée  à  lui  refuser  une  nomination  solen- 
nelle. M.  Saint-Martin  lui-même  en  aurait  senti  la  justesse  s'il 
n'en  eût  été  la  vioUme.  Qu'aurait-il  en  effet  enseigné  ?  lui  pour 
qui  le  principe  monarchique  était  sans  doute  divin ,  il  aurait 
appelé  révolte  tonte  révolution  venantd'en-bas.  Et  maintenant 
on  ne  veut  des  rois  que  pour  plastrons ,  et  des  places  que 
comme  moyen  de  fortune  ou  d'influence.  On  lui  refusa  plus 
tard  de  remplacer  M.  Abel*Rémusat ,  au  dépôt  des  manuscrits 
de  la  Bibliothèque  royale.  Qu'avait  donc  alors  de  si  redouta- 
ble un  homme  disgracié ,  sans  crédit ,  qui  avait  rompu  avec  la 
politique?  Des  craintes,  fondées  peut-être  en  i83o,  ne  l'é- 
talent  cc^ainement  plus  en  iB32.  Regrettons  qu'il  se  soit  trouvé 
desxârconstances  telles  qu'un  homme  de  talent,  appelé  parl'opi- 
J^n  générale  au  premier  poste  littéraire  de  la  capitale,  n'ait 
Mfm  ^  cause  de  ses  opinioBS  politiques  ,  être  admis  à  le 
remplir. 

Arrivé  à  la  dernière  page  de  cette  tie  si  pure,  si  glorieuse, 
par  ses  succès  et  par  ses  revers,  j'avoue  que  la  reconnaissance 
devient  pour  moi  un  triste  devoir.  Lui  que  j'avais  vu  trois  jours 
avant ,  abattu  par  le  chagrin ,  il  est  vrai,  mais  plein  de  santé  et 
vie,  et  luttant  contre  les  doi^urs  de  l'amitié,  et  les  incertitu- 


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des  de  son  ^rt,  je  ne  devais  plus  le  revoir.  Le  samedi  14  juillet 
iifqt  saisi  d'une  violent^  migraine;  sujet  depuis  sa  jeunesse  aux 
retours  périodiques  de  ce  mal,  il  n'en  conçut  aucune  inquié- 
tude. Alteiqt  de  vomissements  le  dimanche,  à  peine  s'il  daigna 
s'en  inquiéter  encore  ^  parce  que  c'était  chez  lui  la  ^ite  opdi- 
nair48  tfu  premier  mal.  Cependant,  ^  fut  bientôt  impossible  de 
méconnaître  les  plus  violents  symptôme»  du  choléra  asiatique. 
Au  milieu  des  convulsions  de  la  mort^  M,  Saint-Martin  con- 
serva la  sérénité  de  son  ame ,  et  ne  poussa  d'autres  plaintes  que 
celles  arrachées  par  la  force  de  ses  douleurs*  La  crise  passée , 
il  reposait  avec  calme,  témoignant  à  ses  amis  sa  reconnais- 
sance de  leurs  scwns.  Ce  fut  dans  un  de  ces  intervalles  qu'il  se 
souvint  de  l'un  denses  élèves  qu'il  avait  le  plus  affectionnés. 
Mandé  par  ses  çrdres,  M.  Eugène  Burnouf  vint  retirer  d'entre 
ses  mains,  pour  le  présenter  à  1^  commission  tirientale,  un 
manuscrit  que  je  lui  avais  confié  peu  de  jours  avant.  C'était  la 
traduction,  avec  le  texte  critiqué,  du  code  Géorgien,  entc^pri^e 
sous  son  inspiration.  Désirant  autant  que  moi  la  publication 
de  cet  ouvrage ,  il  voulut  qu'à  son  dernier  jour  s'attachât  en- 
core pour  moi  le  souvenir  d'un  service  rendu. 

J'appris  par  les  .Débals  du  ^nardi  17  qu'il  ^vait  cessé  de 
vivre. 

Tout  fut  touchant ,  j'en  atteste  les  souvenirs  de  chacun,  dans 
la  pompe  lugubre  de  ses  funérailles-,  et  le  concours  d!amis  sin- 
cères, à  peine  prévenus  à  domicile,  et  les  larmes,  et  l'affliction 
profonde  de  ceux  que  lui  attachaient ,  la  veille  encore  »  d'aima- 
bles relations ,  et  les  chagrins  paternels  du  Nestor  de  la  littéra- 
ture orientale,  versant  des  regrets  pour  la  troisième  fois  sur  la 
tombe  d'un  élève.  Il  n'y  eut  pas  jusqu'à  la  pompe  militaire 
accompagnant  ce  brave  de  la  loyauté, qui  n'ajoutât  au  solen||^ 
de  ce  spectacle.  Pour  nïoi ,  j'avoue  que ,  voyant  tant  de  g^|P 
et  l'espérance  d'une  longue  vie  ensevelie  dans  la  poussière ,  ma 
raison  s'égara,  et  je  n'entrevis  plus  dans  l'avenir  que  douleurs. 
Les  journaux  du  jour  et  du  lendemain  retentirent  de  ses  éloges. 
Ses  amis  en  insérèrent  un,  entre  autres,  dans  la  Gazette  de 
France  du  19  juillet,  où,  sans  doute  par  de  louables  motifs,  on 
avançait  que  la  mort  levait  surpris  au  sein  de  la  misère,  qu'il 


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sua   M.  flîik^IK'I^^MjilITm.  uj 

aTÛt  maiMiuéjde  Km^  peur  $e^  paiÉsenoMU».  £o  U^ifemeoMm^ 
et  leav  iftte&tÎQti  M  nom  de  b  lîiiQtUe>  joi^m  aùtonsé  à  dé* 
mentir  le  4iikSla  fidèle  épûiueevit  la  oonsdlalioa  de  pouvoir  ne 
lui  refusex»  àuihiBç  dès  pi^scripCkms  des  %rm&  doeteurS;  qui  lui 
prodiguèrentlenvs  sovM. 

M.  SaiBt^Martin  avait  la  taille  haute  et  svelte ,  le  maintien 
grave  et  assuré.  Ceux  qui  ne  le  connaissaient  pas  eussent  pu 
]*accnser  de  pédantisme  :  mais  quand  on  savait  ses  habitudes , 
il  était  impossible  de  s*y  méprendre.  Sa  physionomie  était  pâle 
et  plutôt  maigre  que  pleine  ;  ses  yeux  délicats  mais  flamboyants. 
A  le  regarder  de  près,  on  ne  pouvait  s'empêcher  de  dire  :  Cest  un 
excellent  homme;  tant  ii  y  avait  d'abandon  et  de  douceur  dans 
ses  traits.  Sa  tête  était  chauve  avant  le  temps.  En  un  mot,  toute 
sa  personne  annonçait  l'homme  sérieux ,  mais  bon  et  aimable , 
une  ame  fortlr^yn  tempérament  nerveux.  Bien  différent  de  ces 
hommes  qui  cbetchent  à  c^xagérer  leur  certaine  importance  so- 
ciale^ en  se  rendant  invisibles  et  de  difficile  accès  y  M.  Saint- 
JUartin  laissait  à  toute  heure  sa  porte  ouverte.  Son  livre  était 
sous^es  yeux  y  il  suivait  la  trace  d'une  idée,  n'importe:  vous 
étiez  le  bien  venu.  Il  avait  ses  jours  ;  mais,  pour  rendre  service, 
il  ne  trouvait  pas  mauvais  qu'on  les  oubliât  :  car  tous  les  jours 
le  trouvaient  prêt. 

Maître  vénéré ,  si  votre  mémoire  avait  besoin  d'un  monu- 
ment plus  précieux  que  vos  ouvrages,  ce  monument  est  dans  les 
cœurs  de  vos  amis,  dans  le  cœur  de  celui  qui  s'honorera  toujours 
d'avoir  été  votre  élève.  Oui,  je  serai  fidèle  à  la  religion  du  tom- 
beau ,  et  je  jure  de  déposer  sur  le  vôtre,  puissent  mes  faibles 
écrits  quelque  chose  pour  votre  gloire!  l'ouvrage  même  auquel 
vous  avez  tant  coopéré  par  vos  conseils.  Il  portera  pour  dé- 
dicace :  «Aux  mânes  de  celui  qui  fut  mon  maître  et  mon  ami.» 


AnniTioH  POUR  la  page  yij. 

Il  paraît  cependant  que,  dans  sa  première  jeunesse,  M.  Saint- 
Martin  cultiva  la  poésie.  Nous  tenons  de  sa  sœur  qu'il  composa 
une  tragédie  sur  le  sujet  de  Don  Carlos ,  et  qu'il  en  montra  les 


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t%\]  NOTICE   Sim   M.   SAINT-MAUTIN. 

premicfrs  ftcte&.aù  célèbre  D«lille^  avec  qui  il  était  em  rapport» 
fcéquenU.  Ce  grand  poëte,  toat  en  appréâant  les  'èHatU  d'un 
jeune  homme  plein  de  verve  et  d'enibouMaAme,  l'engagea  à^ne 
point  suivre  cetteroute.  M.  Saint-Martin  iUt  si  docile ,  qu'il  ne 
fi*est  retrouvé  aucune  trace  de  ses  essais  poétiques. 


BROSSET  J*,  son  élève. 


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i%^<%<^i^%'%;^-»'^'%/%^^^'m^/%^/^^^)%/4%.v^^fc.* 


AVIS. 


Il  n'y  avait  il  Paris  qu'une  «ealejpersoime  i^i  pik  enU'ej^i^fl- 
dre  sans  présompliotf  4e  comiDtterv4ig|i«iiusiil.ré<iitîon  4«  Le- 
betft,  eonrâDeDdéé  piir  M.  SAÎDl^MurtiQ,  Mais  .b  Sift.vai^tiéflil^fW 
de  taiit  d'«iiv»geft  relatif»  à  l^iafolre  .grecque  et  à  la  laogt^ 
grecque  moderne,  M.  Hase,  tro^  dccufté  d'aiUeura  de  HvipOkir- 
taate  publicatioivdu  lyétor^BêniijLtmime,  pe  pQuvaat  se)i- 
Trer  attx  soins  que  ëemâtadiik  oelle^i  ^  j'ai  accepté,  par  reStpe^  * 
pour  la  méafoire  ëe  mon  naître*)  Ji9U0  péiôUe  t4c4w.'  Sfil  qe 
dépend  que  dénies  efforts:,  j'^spei»  jiia^er  .la  4ieriftaaçe!  de 
MM,  ^rmin  Didot,  et  le  noble  dévouement  qui  les  a  poussés, 
dans  rintérét  de  la  science ,  à  ne  pas  laisser  entièrement  impar- 
fait le  mottiMoent  restauré  par  M.  SainUMartin.  Notre  but 
sera  de  compléter  Lebeau  par  les  ouvrages  dont  il  n'a  pu  avoir 
coDDaiâsanc?e  '.  Admettant  en  principe  l'exuôtitude  de  la  pre- 
mière compilation ,  du  moins  en  ce  qui  coBceme  les  historiens 
byzantins»  et  en  effet  nous  ne  voyons  pas  que  M.  Saint- 
Martin  y  ait  ajouté  rien  de  trèsr^important.par  une  nouvelle 
lecture  de  ces  auteurs,  nous  ne  recourrons  pas  aux  sources  où 
a  puîaé  l'auteur  primitif.  Mais  Léon-le- Diacre ,  imparfaitement 
connu  avant  les  deux  éditions  publiées  par  M.  Hase;  les 
Histoires  des  croisades,  par  M.  Michaud,  et  de  Veni^,  par 
M.  Daru;  les  extraits  relatifs  aux  croisades,  par  MM.  ^ilken 
et  Eeinaud  ;  le  savant  travail  de  M.  Fatlmerayer,  en  alle- 
mand >  sur  Tréftsonde,  et  la  chronique  du  mém«  empire,  pu- 
bliée par  H-  Tafel;  la  chronique  de  Thessalôi^ique,  publiée 
par  le  même  savant ,  en  un  mot ,  tout  ce  qu'il  y  a  de  neuf  sur  la 
matière,  sera  compulsé  et  dépouillé.  Mais  la  partie  à  laquelle 


I  Nous  n*ajootoii8  ({u*iine  note  au  tome  XTII ,  dont  ïtm  trois  premiers  lÎTrea 
araient  été  préparét''par  M.  SaÎBt-Mftrtki. — B.  .. 


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nos  études  nous  mettront  à  même  de  donner  le  j^lus  de  soin  et 
d'extension ,  ce  seront  le»  renseignements  contenus  da'nsjes  au- 
teurs arméniens,  mannsprits  ou  imprimés ,  et,  parmi  ces  der- 
niers/ dans  Fhistorien  alf  saitrant  et  ^i  consciencieux ,  Tcham^ 
tchian.En  effet,  depuis  la  fin  du  v*  siècle,  rArraénic,  ou  du 
moins  de  vastes  portions  de  ce  royaume  étaient  incorporées , 
comme  provinces,  à  Tempire  grec;  et  la  dynastie  des  Roubé- 
nient  se  foi^a ,  mft  i/  sièclf  ^  êtvm  Remembrement  de  Ja  Citicie. 
Quant  "aux  cartes  promises  par  M.  ftaint^MavCin ,  il  faudsaU 
éH^  lui  ■'pour  les  KéfaiK,  celle  surtout  qu'îl^  lamMNiçait  piMil* 
l^(KXpédition'deJiiUeiienPerse/On  pownra  anjarains  enidonner 
une»  généifale  comprenatit  reQipir^  gp^c,  dans  sa  ploagrande 
extension  j  avec  un  rtiémoire  explicatif -dès  oirceIiscriptioIl&SMe^ 
cessives  d^s  teriitoires.  Dans  ce  eâsy  M,  Jouy  nous  prtoraii  ht 
secours  de  son  burin,  Nif]Édis  queles- iumiérés  des  savants  nous 
mdeniiéfttnons-méiiies<à  suif  re une  màtehe^urè.  '    ,. 

"•  •         »  -'.        .  •  :       .    '  B.  :    • 


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HISTOIRE 

DU 

BAS-EMPIRE. 


LIVRE  LXVIII. 


L.éon  récompense  ses  partisans,  ii.  Crum  devant  Conslaiiti- 
nop\e.  m.  Ravages  des  Bulgares,  iv.  Léon  couronne  son  fils. 
V.  Renouvellement;  du  traité  avec  les  Français,  vi.  Arcadio-* 
polis  prise  par  les  Bulgares,  vu.  Mort  de  Crum.  vni.  Victoire 
de  Lil'on  sur  les  Bulgares,  ix.  Nouvelle  défaite  des  Bulgares. 

X.  Les  iconoclastes  sollicitent  Léon  à  se  déclarer  pour  eux. 

XI.  Nouvelle  imposture,  xii.  Antoine,  évcque  de  Syllèe,  se 
joint  aux  ennemis  des  images,  xiii.  Léon  tente  de  séduire  le 
patriarche,  xiv.  Assemblée  des  évoques  orthodoxes,  xv.  Pre* 
roier  attentat  des  iconoclastes,  xvi.  Déguisement  de  Léon. 
XVII.  Exil  de  Nicéphorc.  xviii.  Théodote  patriarche,  xix. 
Concile  des  iconoclastes,  xx.  Persécution,  xxi.  Gouverne- 
ment de  Léon.  xxit.  Michel-le-Bègue  accusé  et  condamné, 
xxiii.  Il  échappe  an  supplice,  xxiv.  Conspiration  contre 
L.éou.  XXV.  Assassinat  de  Léon.  xxvi.  Michel-le-Bègue  em- 
pereur, xxvii.  Caractère  de  Michel,  xxvm.  Conduite  de  Mi- 
chel à  Végard  des  catholiques,   xxix.  Impiété  de  Michel. 
XXX.  Révolte  de  Thomas,  xxxi.  Alliance  de  Thomas  avec  les 
Sarrasins,  xxxii.  Divers  succès  de  Thomas,  nxxiii.  Il  marche, 
à  Constantinople.  xxxiv.  Son  arrivée,  xxxv.  Attaque  de  la 
ville.  XXXVI.  Seconde  attaque,  xxxvii.  Défaite  de  Grégoire, 
xxxviii.  Thomas  vaincu  par  les  Bulgares,  xxxix.  Il  lève  le 
siège.  XL.  Mort  de  Thomas,  xli.  Punition  des  complices,  xlii^ 
Michel  écrit  à  Louis-le-Débonnaire  et  au  pape,  xliii,  Entre* 

Tome  Xlir,  I 


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a  HtSTOmB    DU   BAS-nSMPIRB. 

prise  des  Sarrasins  sur  Tîle  de  Crète,  xliv.  Ils  s'y  établissent. 
XLV.  Ils  défont  Tarmée  impériale  et  achèvent  la  conquête 
de  rîle.  xLvi.  Fondation  de  Ondie.  xlvii.  Efforts  inutiles 
pour  le  recouvrement  de  Tîle  de  Crète,  xlvui.  Expédition 
d'Oryphas.  xlix.  Second  mariage  de  Michel,  l.  Les  Sarra- 
sins $'emf>arent  de  la  Sicile,  li.  Suite  de  la  conquête,  lu. 
Mort  de  Michel. 


Ajr  8i3. 

X. 

Léon  récom- 


LÉON  \,  dit  l'Arménien,  MICHEL  II ,  dit  le 
Bègue. 

J_j*AMBiTlON,  source  féconde  de  forfaits,  avait  rendu 

Léon  séditieux,  ingrat  et  perfide;  dès  qu'elle  fut  sa- 

pcnse  ses   tisfaltc ,  elle  s'cmpressa  de  récompenser  ceux  qui  Ta- 

Tbeoph.p.  vaient  servie.  Michel-le-Bègue  *  fut  élevé  au  rang  de 

Aut^'inccrt  P^^rice,  ct  rcvêtu  de  la  charge   de  capitaine  de  la 

^^A3i**'A3a  S*"*^'^*  Thomas,  qui ,  dès  son  enfance,  avait  vécu  avec 

433.       Léon,  fut  fait  commandant  des  troupes  confédérées*. 

Léo  gramm.  1  .      r    /  / 

p.  445,  446,  Manuel  avait  été  attache  à  Michel  Rhangabé ,  dont  il 
Cont.  Théo,  était  premier  écuyer^;  cependant  comme  la  valeur  de 
Symeon.p.  cet  officicr  égalait  sa  probité,  Léon  lui  conféra  le 
Georg.*m^.  Commandement  des  troupes  arméniennes,  en  lui  di- 
^  ^53ô/°^*  sant  :  Foyez  comme  je  me  venge  de  vous  :  déifiez- 


X  MixAYiX  6  TpauXo;. — S. -M.  C'est  sans  doute  pour  cela  que  Léon 

>   Tûv    ^ot^epocTCùv    T&up{Jt.àpxa;.  lai   donna  le    commandement    des 

Cent.  Theoph.  p.  XD. —  S.-M.  tronpes  arméniennes.   Le   nom  de 

3  Protostrator.  Cet  officier  était  Mannel    était    comman    parmi   les 

Arménien ,  comipe  on  Tapprend  du  princes  de  U  race  des  Mamigoniens, 

continuateur    de    Théophane  ,    p.  si  célèbre  dans  Thistoire  d'Arménie, 

68.  ÉÇ  Âp(XÊviwv  ^àp  T7;v  'ysveoiv  ^v.  et  à  laquelle  il  appartenait  peut-être* 

Géttëftins  dit  attBsi,  I.  3»  p.  14  :  Ma-  •—  S.-M. 
fê9^  t^v  «ftwci^di  tttv  k^fkiftimt 


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^ÂjiStl^  ùVrife  LxViiî.         tÉon  y.  ^ 

vous  me  préférer  Probopia?  Prince,  lui  léporidlè  ce„„i„.  , 
Manuel  avec  utie  noble  fratibhise,  i,ous  êtes  mainre-   „Î'P  «•  * 
nant  ce  que,  Michel  était  alors  :  He  depions-noûi  '""S- 
pas  lesérvtf?  .  "t'i-part. 

Sit  jours  après  que  Léori  eut  été  coufohné,  Crunif    "ti^' 
ayant  Mt  reposer  ses  troupes,  tet  ne  voyant  pbinl  Cn,»^,»» 
d ennemi  qui  lui  disputât  le  passage,  laissa  son  frëié   •^""T" 
devant  Andrinopie,  pour  l'assiéger  ayfec  une  partie      "^'' 
de  son  armée,  et  s'avança  jusqu'aux  portes  de  Con- 
stantmople.  Là,  ce  prince  idolâtre,  pour  se  rendre  ses 
dieux  favorables,  fit  les  cérémonies  usitées  dans  sa 
religion  batbare.  On  le  vit,  du  haut  des  murailles,  îm- 
inoler  des  hoiilmes  et  des  animaux  %  se  laver  les  bleds 
au  hord  de  là  nier  dont  il  versait  de  l'eaû  sdr  sa  tété 
fet  en  faire  l'aspersion  sur  son  armée  qui  poussait  dès 
cris  d'àlléglesseS.  H  retourna  ensuite  à  sa  tente  entre 
deux  rangs  de  Ses  concubines,  qjji  se  prosternaient 
sur  son  passage,  et  chaHtaient  defe  hymnes  en  son  hoh- 
rteUf*.  Pour  assurer  son  camp  Contre  les  sorties     i! 
et  tirer  un  fossé  depuis  le  gdlfe'  jusqu'à  là  Phjpôn- 
tide,  et  le  borda  d'une  palissade.  Pendaiit  qu'il  tèiiaiè 
ainsi  la  Ville  assiégée,  il  fit  le  dégSt  dans  les  enviions 
et  etivoya  faire  à  I^on  des  propositions  dé  paix,  àved 
toute  la  fierté  d'Un  vainqueur,  et  l'itisolence  d'tiil  bar- 
bàre.  îl  demaridait  un  tribut  annuel  et  Une  grafade 

™..eur.„o„y„ed.Th^oph.p.  43x,      inc.  poil  Tbeoph.  p.  43T_S  -M 
J^u    po«Uv..  n..w««  i  tp.Bn.,«     ,„t.  post  Theopb.  p.  4 jS  !m, 

t.  

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4  HISTOIM:   du    BA.S-EMPmK.  (An  8i3.) 

quantité  d'étoffes;  car  les  Bulgares  «e  savaient  pas 
encore  mettre  en  œuvre  la  laine  ni  la  soie.  Il  exigeait 
de  plus  qu'on  lui. livrât  pour  ses  plaisirs  un  certain 
nombre  de  filles,  à  son  choix,  et  qu'on  lui  permît  de 
venir  à  cheval  enfoncer  sa  lance  dans  la  porte  dorée. 
Léon,  après  avoir  tenu  conseil,  lui  fit  réponse,  que 
pour  enfoncer  sa  lance  dans  une  porte  de  la  ville,  il 
fallait  qu'il  en  fût  maître;  que  les  autres  propositions 
avaient  besoin  d'une  conférence;  qu'elle  pourrait  se 
tenir  au  bord  du  golfe,  où  l'on  enverrait  de  part  et 
d'autre  cinq  ou  six  personnes  sans  armes,  avec  pou* 
voir  de  conclure  le  traité.  La  conférence  acceptée, 
Léon  qui  se  doutait  bien  que  Crum,  peu  délicat  sur 
le  point  d'honneur,  y  viendrait  en  personne,  fit  ca- 
cher la  nuit  suivante ,  dans  une  masure  '  près  de  la 
porte  de  Blaquernes ,  trois  soldats  armés  d'arcs  et  de 
flèches ,  avec  ordre  de  tirer  sur  le  roi  bulgare  au  si- 
gnal qui  leur  serait  donné.  Le  lendemain  Crum,  ac- 
compagné de  six  officiers,  se  rendit  au  lieu  convenu. 
Il  se  présenta  sur  le  golfe  autant  de  Grecs,  qui,  sur 
la  parole  du  roi,  sortirent  de  leur  nacelle  et  s'avan* 
cèrent  sur  le  rivage.  Crum  descendit  de  cheval  et 
s'assit  à  terre.  On  commençait  à  conférer,  lorsque 
Crum  aperçut  un  signal  qu'on  donnait  de  la  ville» 
Frappé  de  dél^ance,  il  saute  sur  son  cheval  et  prend 
la  fuite.  En  ce  moment,  le  peuple  s'écrie  du  haut  de 
la  muraille  :  Victoire  à  la  croix  \  et  les  soldats  de 
l'embuscade  poursuivant  le  roi,  le  blessent  de  plu- 
sieurs coups,   dont  aucun  ne  se  trouva  morlel.  De 

X  Dans  les  maisons  du  domaine      ^epvêbv.    lacert.    poat    Theoph.   p. 
de  Galla.   Év  ^cof^a-rtot^  Turlv   Tâv      43a. —  S.-M. 
ratXXtjç  £Ç«6ev  ttç  «opTïiç  twv  BXa- 


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(JLnSiS.)  LIVRE   LXVIIX.  L^OW   V.  5 

ceux  qui  raccompagnaient  un  fut  tué  %  deux  autres 
pris  et  emmenés  à  Constantinople.  C'était  un  Grec 
nommé  Constantin  ^,  avec  son  fils  :  ce  Grec  avait  passé 
quelques  années  auparavant  chez  les  Bulgares,  et,  s*é- 
tant  avancé  à  la  cour,  il  avait  épousé  la  sœur  de 
Crum,  de  laquelle  était  né  ce  fils.  Théophane ,  qui  finit 
ici  son  histoire,  raconte  cette  perfidie  de  Léon  comme 
une  louable  entreprise;  il  en  attribue  le  mauvais. suc- 
cès aux  péchés  des  Grecs,  qui  furent  cause,  dit-il,  que 
la  Providence  ne  seconda  pas  le  dessein  de  Léon.  Cet 
auteur  moins  judicieux  que  dévot  est  mis  au  nombre 
des  saints;  mais  il  écrivait  sous  le  règne  de  Léon, 
dont  il  dëguise  les  forfaits.  Tant  îl  est  difficile,  même 
à  lïn  saint,  de  se  défendre  de  tout  ménagement  timide 
en  écrivant  l'histoire  de  ses  maîtres. 

Crum,  justement  irrité  de  ce  manque  de  foi,  dé-  m. 
truisit  par  le  feu  tous  les  édifices  d'alentour.  Les  églises ,  Builares.*' 
les  monastères,  les  palais  lurent  la  proie  des  flammes; 
les  Bulgares  brisèrent  les  '  colonnes ,  enlevèrent  le 
plomb  et  les  statues  du  cirque  ^ ,  qui  était  hors  de  la 
ville  près  de  Saint-Mamas  ^,  Ils  massacrèrent  les  pri- 
sonniers ,  égorgèrent  les  troupeaux ,  désolèrent  lès  bords 
du  Bosphore  jusqu'au  Pont-Euxin,  brûlèrent  les  arse- 
naux et  remportèrent  un  butin  immense.  Ils  tournè- 
rent ensuite  vers  la  Chersonèse  de  Thrace.  L'incendie 
dévora  tout  ce  qiji  se  trouvait  entre  Constantinople  et 
Rhège;  le   pont  qui  traversait  l'embouchure  du  fleuve 


«  Cétaît  le  logotbèle  ou  ministre  p.àpot;  mXéxTOt?,  x.  t.  X.  Theoph. 

des  finances  du  roi  bulgare. — S.-M.  p.  427.— S.-M. 

»  Constantin  Patzicès. — S.-M.  ^  èv  tô  à'^itù  Màpkarri.  Theoph. 

3  Tov  x*^^5v  Xiovra  toû  iinrocoO  p.  427. — ^S.-M; 


oùv  T»  ^pfltxovTi  Toiî  ir^ptou,  xxt  [Aap- 


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^  HISTOJl^E   DU   BA^ÇMPIIIE.  (An  Sîî.) 

^t%ras  ' ,  ouvrage  renQfpiBe  pour  sa  beaqté  égale  ^ 
sa  solidité,  fpt  entièrement  détruit,  Selymbrie  ^  et 
Daone  ^  furent  rasée3.  Héraclée  ^  sç  sauva  de  cette 
fqreur  par  la  force  de  ses  murailles ,  mai$  ils  s^çça-^ 
gèrept  les  environs.  Us  ruinèrent  Rhédes|:e  ^  et  pas- 
sèrent lies  habitants  au  fîl  de  i'épée.  Us  trouvèrent 
Panivup  en  état  de  défense,  et,  après  l'avoir  inutijement 
attaqué,  ils  remontèrent  juçqji'à  la  ville  d'Apres,  qu'ils 
détruisirent  ainsi  que  les  autres  de  cette  contrée.  Entre 
Apres  et  Ganos,  siti|ée  au  bord  de  la  Propontide,  s'é- 
levait une  chaîne  de  montagnes  ^ ,  oîi  s'étaient  retirés 
iQWSi  les  peuples  voisins  avec  leurs  troupeaux  :  les  BmI'* 
gares  y  pénétrèrent,  tuèrent  |es  hommes ,  enlevèreat 
les  femmes,  les* enfants  et  le  bétail.  Us  entrèrent  en^^ 
suite  dans  la  Chersonèse  7,  qu'ils  ravagèrent  jusque  vis- 
à-vis  d'Abyde.  Rassasiés  de  carnage  et  de  butin,  ils 
regagnèrent  l'embouchure  de  l'Hèbre,  qu'ils  remon-* 
tèrp^t  jusqu'à  Andrinople ,  8éso|ant  tout  sur  leur  pas- 
§fige#  Crw^  se  joignant  à  son  frère,  qui  tenait  cette  place 
^^siégée,  ne  cessa  pendant  plusieurs  jours  de  faire  agir 
tQUtes  sets  machines.  Enfin  les  habitants  manquant  de 
vivres  et  n'espérant  aucun  secours ,  furent  obligés  de 
se  jendre.  La  ville  fut  pillée,  et  le  peuple  rpduit  e\\ 


X  Petile  rivière  appelée  à  présent  ^  Acmellemieiit  Hoéosto ,  sar  H 

Knri^sou,  qui  ?e  jette  claus  la  Pro-  mer  de  Marmara. — S.-M. 

ponticle,  entre    Constantinople    et  ^  C'est  ce  qu'on  appelait  les  mon- 

Seiyœbrie. — S.-M.  tagnes  de  Ganos,  rà  6^n  To5  Fàvou. 

^   Actuellement  Selivria,   sur  la  Incert.post  Theoph.  p.  433. — S.-M. 

mer  de  Marmara. —  S.-M.  7  Elle  était  séparée  du  reste  de  la 

3  To'Aaovtv  xàçpov.  Incert.  post  Thrace  par  unis^bme  de  six;  milles, 

Theoph.  p.  433.  Ce  fort  était  entre  fermé  par  une  muraille  qu'on  s^p&- 

SelymMe  et  Héraclée  ou  Pévin^he.  lait,  pour  cette  raison  dans  le  grec  , 

—  S.-M.  4e  cette  époque, xo  8jàjAiX^v,-3-§,-M.- 

4Ancieunei|)entPérintlfe. — S.-M,  .     ,    ^."        -^. 


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(ÀaBil)  LIVRE   LXVIJÏ.  JJ&QN   V,  7 

esclavage.  C'était,  après  Constantinople,  h  yil)^  la  plus     > 
grande  et  ia  plus  peuplée  de  Tempire.  Lies  prispnnii3r§  9  • 
au  nombre  de  douze  mille,  sans  compter  les  feninifes, 
furent  transportés  au-delà  du  Danube. 

Léon,  affligé  de  tous  ces  ravages,  que  sa  perfidie  ,  »»• 
avait  attirés ,  n'était  pas  en  état  de  s'y  opposer.  Il  leva&t  ronne  son 
des  troupes  en  Asie  et  les  assemblait  à  Constantinople. 
En  attendant  qu'il  eût  formé  une  nouxi?lle  armée ^  il 
s'occupait  du  soin. d'affermir  sa  puissance  et  de  la  per- 
pétuer dans  sa  postérité.  Il  avait  un  fils  déjà  grand, 
nommé  Symbate  * ,  il  lui  conféra  le  litre  d'Aiigu3te,  et 
le  couronna  aux  fêtes  de  Noël,  changeant  son  nqm  en 
celui  de  Constantin,  pour  imiter  Léon  Tlsaurien,  qui 
avait  donné  le  même  nom  à  son  fils.  C'était,  ce  prii}ce 
qu'il  se  proposait  pour  modèle;  il  n'attendait  que  la  fin 
de  la  guerre  des  Bulgares,  pour  commencer  celle  qu'il 
méditait  contre  l'Église,  et  qui  devait,  selon  la  prédic- 
tion de  ses  devins,  lui  procurer  ung loQgue  pî-o&p/éritp.   . 

Depuis  le  règne  d'Irène,  les  empereurs  grecs  n'^-    *   v. 
vaient  cessé  d^entretenir  correspondance  avec  Charle-     mentdu  " 
magne,  par  des  an^bassacies  mutuelles,  Lorsque  Léon  ^^pranç^L** 
monta  sur  le  trône,  il  trouva   à  la  co»r  Amalharius,  Th^r^de 
archevêque  de  Trêves  ^ ,  et  Pierre,  abbé  de  Nonanlule ,  g®"^ ^"^• 

'  2u|i.6âTiriç.  Il    est  appelé  Saix-  natos ,  et  qnalifié  du  titre  de  cardi- 

Gcivnç  par  ]e  chroniquear  Syméon ,  nal^  daos  une  histoire  maDuscrîte  des 

p.    409-  C'est  le    nom   de   Sembat  évéqnes  de  Trêves,  citée  dans  les 

ou     Sempadj    très  -  commun    chez  actes  des  saints  de  l'ordre  de  Saint- 

les  Arméniens,  et   qui  était   porté  Benoît,  par  Mabillon,  Scec,  3,  p. 

particulièrement  par  les  princes  de  &i^.  On  j  \\X.i  jémularius  Fortuna' 

la  race  des  Bagratides ,  ce  qui  sem-  tus ,  cardinalis  romanus ,  missus  est 

.  ble  indiquer  que  la  famille  de  Léon  a  Carolo  magno    Constantinopolim 

avait  contracté    des  alliances  avec  propter  pacem  cum  imperatore  USt* 

eux. — S.-M.  chaele  firmandam. — S,-M, 
>  l\  est  pommé  Amularias  Fort^- 


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8  HISTOIRE   DU   BAS-EMPIRB.  (An  8i3.) 

chroii.de  S.  quc  rémpcrcuf  français  avait  députés  à  Michel  Rhan- 
Eginb'araai.  g^W  *.  En  les  Congédiant,  Lëon  fit  partir  avec  eux 
^^b!ar?  Christophe,  son  premier  écuyer,  et  le  diacre  Grégoire», 
foœ*Byl*   P^"^  demander  à  Charlemagne  du  secours  contre  /es 
p.i3o.     Bulgares^.  Mais  ce  prince  était  mort  le  a8  janvier. 
Louis -le -Débonnaire  les  reçut  avec  honneur;  il  leur 
donna  libre  accès  auprès  de  sa  personne,  tant  qu'ils 
furent  à  la  «our,  et  leur  fit  à  leur  départ  des  présents 
considérables,  tant  pour  eux  que  pour  leur  maître.  Ils 
furent  conduits  et  défrayés  honorablement  jusqu'à  la 
frontière.  Ils  étaient  accompagnés  de  Norbert,  éveque 
de  Rhège  *,  et  de  Ricoin,  comte  de  Poitiers,  chargés 
de  demander  à  Léon  la  continuation  de  l'ancienne  ami- 
tié ,  et  la  confirmation  des  traités  précédents  ^. 
yi-  Comme  l'hiver  de  cette  année  était  doux  et  serein  , 

lis  prise  par  et  quc  Ics  rivièrcs  n  étaient  pas  grossies  par  les  pluies , 
Cedr.  t.  2,  les  Bulgares  ne  demeurèrent  point  oisifs.  Un  corps  de 
Zon.Li5,ta,  trente  mille  cavaliers^  traversa  la  Thrace,  et  ayant 
Aotôrkcnt.  P^ssé  le  fleuve  Rhigias  7^  nommé  aussi  Bithyas ,  ils  at- 


«  Jmalharutm  Treverensem  epî-  ad  Leonem  imperatorem,  ob  reno- 

tcopnm ,  et  Petrum  abbatcm  mona-  vanâam  seenm  amicitieun,  et  prœdi^ 

steriiNonantu1as,propterpacem  cum  ctum  pactum  confirmandum ,  tnisit, 

3Iichaele    imperatore    confirmant  Éginbard.  /i/i/?.  ann.  814.  Le  même 

danHy  ConstantinopoUm  misit,  jénn,  antenr  parle  sons  Tannée  soÎTante 

Franc,  ann.  8ï3. — S.-M.  de  leur  retour;  il  le  fait  en  ces  ter- 

*  Les  noms  de  ces  denx  ambas-  mes  :  Nordbertus  episcopus  et  Rich^ 

sadeurs  se  trouvent  dans  les  anna-  winus  cornes  de  Constantmopoli  re~ 

les  d'Éginhard,  ann.  8i4' — S.-M.  gressi^  descriptionem  pacti,  quant, 

3  Legad  Gra-contm  auxiîium  pe»  Léo  imperator  eis  .dederab^  detuîe^ 
tebant  contra  Bitlgaros  et  cœteras  rtint, — S.-M. 

barbaras  gentes,  Chron, — S.-M.  6  Tout  couverts  de  fer,  ôXcat^ïj- 

4  Reggîo  auprès  de  Modène.  —  psi.  Inccrt.  post  Theopb.  p.  484,  Il 
S,-M.  paraît  par  cette  indication  que  !e« 

5  Domînus  Ludovicus  legatos  stios.  Bulgares  portaient  â  la  guerre   des 
Nordbertum  Rhegiensem  episcopum,  armures  complètes. — S.-M. 

et  Richwinum  Picturensem  comitem  7  Le  continuateur   anonyme    de 


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(An  8i3.)  LiVrE   LXVIII.  LléoN   V.  .  9 

faquèrent  Arcadîopolis  ',  ville  riche  et  peuplée,  située  postTheopb. 

sur  la  rive  gauche  du  fleuve,  environ  à  trente  lieues  de  CQ»t.^Theo! 

Constantinople.  Ils  la  prirent  et  mirent  aux  fers  tous  ^symeon.  pV 

leà  habitants.  Ils  se  préparaient  h  partir,  lorsqu'une  pluie   ^^^  *'®' 

abondante,  qui  dura  huit  jours,  fit  déborder  le  fleuve,  Gcncnna,  i, 
.^  j         7  f  i,p.  5,7,1a. 

et  leur  ferma  entièrement  le  passage.  Ils  demeurèrent 

quinze  jours  dans  leur  camp,  assiégés  par  les  eaux. 
C'était  pour  Léon  une  occasion  de  profiter  de  leur  em- 
barras, et  de  délivrer  les  prisonniers  qui  l'appelaient  à 
leur  secours.  Mais  ses  troupes  n'étant  pas  encore  ras- 
semblées, il  ne  put  sortir  de  Constantinople. Enfin,  le 
fleuve  étant  rentré  d^ns  son  lit ,  les  prisonniers  furent 
employés  à  couper  le  bois  nécessaire  pour  y  jeter  un 
pont.  Ils  étaient  au  nombre  de  cinquante  mille,  et  furent 
transportés  en  Bulgarie,  avec  leurs  effets  et  leurs  trou- 
peaux. 

Cette  course  n'était  que  le  prélude  d'une  expédition  '^' 

plus  importante.  Crum  ^,  résolu  de  périr  ou  de  prendre  Mort  de 
Constantinople,  et  de  se  venger  sur  l'empereur  même 
de  sa  perfidie,  avait  mis  sous  les  armes  tout  ce  qu'il 
avait  de  sujets  en  état  de  combattre,  Bulgares,  Abares, 
Esclavons  ^.  Il  avait* fait  construire  un  nombre  infini 
de  toutes  les  espèces  de  machines  destinées  à  la  ruine 
des  villes  ^,  et,  pour  les  transporter,  on  avait  préparé 

Théophme,  p.  434,  Tappelle  Rhe-  Syméon  le  logotb.    Chron.  p.  400. 

ginas.  On  lit  Rigias  dans  la  Chro-  — S  .-M. 

nîqne  de  Syméon  le  logothète,  p.  ^  Xcù;  Aoapelçxal'Tpaa«çT0tç2}cXa- 
4og.  Cette  rWière  se  jeflit  dans  la  ^tviaç.  Incert.  post  Theoph.  p.  434. 
Propontide,  à  roccîdent  de  Selym-  — S.- M. 

brie. — S.-M.  4  Le  continnateur  anonyme   de 

'  Dans  Tantiquité  on  la  nommait  Théopliane  donne  à  cette  occasion 

Bergala  ou  Bfrgalium.  Elle  était  sur  une  nomenclature  curieuse  de  toutes 

la  route  de  Périnthe  ou  Héraclée  à  les  machines  de^  guerre  employées 

Andrinople — S.-M.  pour  attaquer  les  villes. — S.-M. 


^  Ô  iT^<»fo6oyX'Y*ptflt«,  ô  Kpomoç. 


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lO  HISTOIRE   DU   BAS-EMPIRE.  (An  814.) 

cinq  mille  chariots  et  rassemblé  dix  mille  bœufs.  A 
la  nouvelle  d'un  si  formidable  appareil ,  Léon  envoya 
des  espions  sur  les  lieux  ;  il  apprit  que  les  efforts  du 
roi  bulgare  étaient  encore  au-dessus  de  ce  que  publiait 
la  renommée,  et  qu'il  avait  dessein  d'attaquer  la  ville 
du  côté  de  Blaquernes ,  parce  que  c'était  le  lieu  où  il 
avait  couru  risque  de  la  vie.  Comme  cet  endroit  était 
le  plus  faible  de  la  ville,  n'étant  défendu  que  d'une 
simple  muraille,  Léon  y  fît  élever  un  second  mur  et 
creuser  un  large  fossé  revêtu  d'une  palissade.  Cet  ou- 
vrage n'était  pas  encore  achevé,  lorsqu'un  accident  im- 
prévu le  rendit  inutile,  et  délivra  de  crainte  l'empereur 
et  sa  capitale.  Crnm,  au  milieu  des  grands  mouvements 
qu'il  se  donnait  pour  cette  entreprise  éclatante,  mou- 
rut le  j3  avril,  rendant  le  sang  par  la  bouche,  par 
les  narines,  et  par  les  oreilles.  Un  événement  si  inté- 
ressant pour  l'empire  méritait  bien  d'être  relevé  par 
quelque  miracle.  Le  bruit  se  répandit  qu'au  moment 
même  que  Crum  expirait,  vers  les  quatre  heures  du 
matin,  plusieurs  navigateurs,  qui  rangeaient  alors  la 
côte  de  Bulgarie  sur  ie  Pont-Euxin ,  avaient  entendu 
une  voix  du  ciel  qui  leur  annonçait  la  mort  de  ce 
prince, 
vm-  L'empereur,  persuadé  que  cet  accident  aurait  décon- 

Victoire  de  '^  .  1  .        1 

Léon  sur    certc  Ics  projcts  des  ennemis ,  leur  envoya  faire  des 

*  propositions  d'accommodement.   Mais  le  nouveau  roi, 

nommé  Deucom  ^ ,  les  rejeta  avec  hauteur  et  déclara 

qu'il  n'était  pas  moins  déterminé  t  venger  son  prédé- 

"  Ou  Doucoin.  Ce  prince  et  son  en  haine  de  la  religion  chrétienne , 

snccessenr  Ditztngns,  TzocuSf  ou  Manuel  archevêque    d'Andrinople 

TroîaSf  ne  sont  connus  que  par  les  qu'il  avait  enlevé    dans  une  de  ses 

légendaires  grecs.  On  préfend   que  courses. — S.-M. 
ce  dernier  mit  craellement  à  mort, 


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(ÀnSiV)  U^f^^  1.XVUI.  LÉOir   Y.  U 

cesseur,  que  Crum  ne  l'avait  été  à  se  venger  lui-même. 
Il  fallut  donc  en  venir  à  une  guerre  qui  devait  être 
sanglante.  Les  deux  princes  marchèrent  avec  toutes 
leurs  forces,  et  se  rencontrèrent  près  de  Mésembrie.  Les 
Bulgares  impatients  de  combattre,  animés  de  la  même 
indignation  que  leur  roi,  livrent  aussitôt  la  bataille. 
Rien  ne  résiste  à  leur  fougue  impétueuse.  Les  Grecs, 
attaqués  par  autant  de  bêtes  féroces,  prennent  l'épou- 
vante et  fuient;  les  Bulgares  les  pressent  l'épée  dans 
les  reins,  et  en  font  un  grand  carnage.  Léon  s'était  posté 
avec  une  réserve  sur  une  éminence  voisine,  doîi  il 
envoyait  ses  ordres.  Dès  qu'il  vit  que  la  poursuite  avait 
mis  l'ennemi  en  désordre,  Camarades^  dit-il  à  ses 
gens,  voici  le  moment  de  la  victoire  ;  arrachons^la 
aux  ennemis  ;  elle  est  à  vous ,  si  vous  ai^ez  le  cou-- 
rage  de  me  suivre.  En  même  temps  il  descend  de 
l'émînence,  avec  la  rapidité  de  la  foudre;  il  charge  eu 
flanc,  et  perce  l'armée  ennemie.  Les  fuyards  tournent 
visage,  et  reviennent  sur  ceux  qui  les  poursuivaient; 
les  Bulgares  ne  peuvent  se  remettre  en  ordre;  ils  tom- 
bent, ils  se  renversent  les  uns  sur  les  autres.  Le  roi, 
abattu  de  cheval,  allait  perdre  la  vie,  s'il  n'eût  été 
remonté  assez  promptement  pour  prendre  la  fuite.  Il 
y  eu  eut  un  grand  nombre  de  tués,  plus  encore  de  faits 
prisonniers*  L'empereur  rentra  en  triomphe  dans  Con- 
stantinopla ,  rapportant  les  dépouilles  des  vaincus. 

L'année  suivante,  les  Bulgares  reprirent  courage,  et    aw  8i5. 
se  mirent  de  nouveau  en  campagne.  Léon  ne  tarda  pas        «. 
à  marcher  à  leur  rencontre.  Lorsqu'il  fut  en  présence  défaite  des 

•  .  /Y»  1  •  Bulgares. 

dçs  ennemis,  atïectant  une  apparence  de  crainte  pour 
augmenter  leur  confiance ,  il  environne  son  camp  d'une 
forte  palissade^  et  reste  plusieurs  jours  comme  enseveli 


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12  HISTOIRE   DU   BAS-EMPIRE.  (An  StS.) 

dans  de  profonds  retranchements.  Il  recevait  des  vivres 
en  liberté  par  ses  derrières,  et  l'abondance  régnait 
dans  son  camp.  Les  Bulgares ,  au  contraire,  campés  sur 
le  terrain  de  Tempire,  ne  trouvaient  de  subsistances 
qu'avec  peine.  Voyant  que  les  Grecs  ne  sortaient  pas 
de  leur  camp,  ils  prennent  le  parti  de  les  attaquer. 
Léon,  bien  servi  par  ses  espions,  ayant  appris  leur  ré- 
solution, prend  avec  lui  un  corps  de  ses  meilleures 
troupes,  et,  sans  communiquer  son  dessein  à  personne 
qu'à  un  officier  de  confiance,  qu'il  laissait  pour  com- 
mander en  son  absence,  il  part  de  nuit,  et  va  se  poster 
derrière  une  hauteur  voisine.  Le  lendemain,  le  bruit  se 
répand  dans  le  camp  que  lempereura  pris  la  fuite,  et 
le  commandant  a  bien  de  la  peine  à  obtenir  des  soldats 
qu'ils  attendent  seulement  un  jour.  Les  transfuges  por- 
tent cette  nouvelle  dans  le  camp  ennemi.  Les  Bulgares 
font  leurs  préparatifs  pour  attaquer  le  lendemain,  et 
se  promettent  une  victoire  assurée.  La  nuit  suivante, 
persuadés  que  l'empereur  était  déjà  bien  loin,  ils  dor- 
maient tranquillement,  lorsque  Léon  ,  descendant  sans 
bruit  dfe  Id^hauteur,  pénètre  dans  leur  camp,  les  sur- 
prend dans  leurs  lits,  fait  venir  le  reste  de  son  ar- 
mée, qui  n'a  que  la  peine  de  massacrer  les  fuyards.  Pas 
un  seul  n'échappa  du  carnage.  Le  nouveau  roi  '  ne 
fut  pas  lui-même  épargné.  Léon  se  jeta  ensuite  dans 
la  Bulgarie,  et  les  Grecs  rendirent  aux  Bulgares  les 
cruautés  qu'ils  en  avaient  éprouvées.  On  passa  au  fil 
de  répée  ceux  qui  étaient  en  âge  de  porter  les  armes j 
les  femmes  furent  traînées  en  esclavage;  et,  par  un 
excès  de  rage,  on  vit  des  soldats  arracher  de  leur  sein 

"  Ô  TÔv  oXttV  àpxYipç.  Ceclr.  t.  2,  p.  487. — S.-M. 

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(An  8i5.)  WVBE   LX\iU.  LiÉON    V.  1 3 

les  enfants  qu'elles  allaitaient,  et  les  écraser  contre  les 
pierres.  Cette  cruelle  expédition  faisait  encore  trem- 
hier  les  Bulgares  cinquante  ans  après;  ils  donnèrent  le 
nom  de  colline  de  Léon  *  à  cette  hauteur  derrière  la- 
quelle l'empereur  s'était,  tenu  caché,  et  c'était  pour 
eux  un  monument  funeste,  à  la  vue  duquel  ils  ne  pou- 
vaiei||  p^ser  sans  frémir^.  Mortagon,  qui  fut  peu  après 
roi.  des  Bulgares^,  convint  avec  Léon  d'une  trêve  de 
trente  ans;  et,  dans  le  serment  par  lequel  les  deux 
princes  confirmèrent  le  traité ,  un  historien  ^  remarque 
de  la  part  de  Léon  une  bizarrerie  qui  n'était  pas  exempte 
d'impiété;  il  jura  par   les   dieux  des  Bulgares,  et  il 
exigea  de  Mortagon  qu'il  prit  à  témoin  de  sa  bonne 
foi  le  dieu  des  chrétiens.  Mais  le  souvenir  d'un  si  fu- 
neste désastre  fit  sur  les  Bulgares  un  effet  plus  durable 
que  tous  les  serments  :  ils  demeurèrent  en  paix  soixante 
et  quatorze  ans. 

De  si  brillants  succès  enflèrent  le  cœur  de  Léon<  Il        x. 
envoya  dans  toutes  les  provinces  de  l'empire  une  lettre  ciaVtes^^MUi- 
pleine  de  vanité ,  dans  laquelle ,  sans  rendre  aucun  à^^aécUr» 
hommage  au  souverain  arbitre  des  victoires,  il  attrî-   p®'»  «««• 
buait  la  sienne  à  la  sagesse  de  sa  conduite  et  à  la  force  487  Wseq.i 
de  son  bras.  Vainqueur  de  ces  formidables  ennemis,  zoii.Li5,t. 

*  ô  PouvbçA^ovTc;.  Cont.  Theopb.  Cruraas,  Mourpa-^wv  i  tou  Kpcù|Ji.cO 
p.  16.  — s. -M.  ^ia<^oxcç.n  est  nommé  Omortas  dans 

*  Oc  àel  ixâas  ^ta€i6a^0f/.îvci  Ta)V  Éginhard  ,  «/./i.   Fianc,  ann.    824. 
BcuX^apcuv,  TTiv  xe^aX-nv  è^TiaeicvTs;  — S.-M. 

^axTuX&^EMTCuat,  yak  XtîÔV.v  Xaa.êa-  4  Cet  historien  est  Génésias,!.  i, 

vcu9t  TÔ>v  Tcre  x.ouccov  cù^aixû;.  Cont.  p*  12,  qui  sVxpiime  cependant  d*une 

Theopb.  p.  16. — S.-M.  manière  assez  vague  ponr  que  Ton 

^  Mcprà'YCdv  ô  T<]î>v  BcuX-rasov  ^a-  pnisuc  regarder  cette  allégation  sans 

oiXeuç.  Cedr.  t.  a,  p.  5o5.  Il  est  ap-  preuve  comme  une  de  ces  imputa, 

pelé     AJoutragon     par    Constantin  lions  calomnieuses  dont  les  auteurs 

Porpbyrogénète ,  i;//.  liasiL,  p.  x36,  grecs  de  cette  époque  accablent  la 

qui  le  donne  pour  le  successeur  de  mémoire  de  cet  empereur. — S.-M. 


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l4  HISTOIRE   BU   ÉAS-EMPIttE.  (  Aii  8t5.j 

a, p.  129 et  auxquels  ses  deux  prédécesseurs  avaient  succombé,  il 

Aati^.po8t  se  crut  assez  puissant  pour  attaquer  l'Eglise,  et  J)our 

435e?*ieq!  anéantir  un  culte  consacré  par  un  usage  immémorial, 

^*u6^*u°  ^'  confirmé  depuis  vingt-huit  ans  par  un  concile  œcu- 

Cont.  Théo,  ménîque.  Il  se  souvint  de  la  prétendue  pythotiisse,  et 

96.       de  cet  anachorète  imposteur  qui  lui  avait  promis  un 

4o2ct8'eq.,  règne  long  et  glorieux,  s'il  détruisait  les  iAa^s.  Il 

Georg.pisox  était  cnvirontié  de  courtisans   ignorants  et  sans  reli- 

ManaS'p.   S^^^f  fl^î  flattaient  son  penchant  à  l'hérésie.  Les  chefs 

Giyc^p  287.  ^^  ^^*^^  troupe  corrompue  étaient  Jean  le  gtammai- 

Joël, p.  178.  rien,  et  Théodote  Cassitéras.  Le  premier',   nommé 

Gènes,  p.  o,  ^'  ^  r  ^ 

7, 8, 12.    aussi  Hylilas  * ,    était   de   la   famille   des  Morochar- 

Vit.  TheO" 

dor.Grapti  zèmcs^,  uuc  des  plus  illustrcs  de  la  ville  de  Gonstan- 

*^'déJ.^     tinople.  Ayant  pris  l'habit  de  moine  dans  sa  première 

^iTsi.^'    jeunesse,  il  devint  abbé  du  monastère  de  Saint-Serge  et 

Jp*'J^°JJ{-   de  Saint-Bacque,  attaché  au  palais ,  et  dont  les  moines^ 

Vit^Ni*  \  ^^^^^^^"^  partie  du  clergé  impérial.  Il  affectait  un  ex- 

I  II  est  coDstamnient  appelé  taf-  grecque  du  nom  annénien  PagraC 

vYÎç ,  lannès,  par  Cédrénus. . —  .-M.  ou  Bagrat.  C*est  le  même  auteur  qai 

>  Hyizilas,  TX^tXàç,  selon  la  chro-  lui  donne  le  surnom  de  tijriiiasf  qui, 

nique  de  Syméon  logotbète,  p.  4o3.  selon  lui,  signifiait  en  hébreu,  pré- 

— S.-M.  curseur  ou  compagnon  du  diable, 

^  Dans  Cédrénus ,  t.  2  ,  p.  536 ,  ffpo<$*pC(AO$  xal  cv^i^^ç  rcù  ^taécXcu . 

elle  est  appelée  Morocbarzanes,  tûv  La  continuation  de  Théopbane,  faite 

MopoxapJ^aviwv.  Je  pense  que  cette  par  r ordre  de  Constantin  Porphy- 

famille   était  d'origine  arménienne,  rogénète,  rapporte  qu'il   s*appelaîc 

car  ce  Jean  ou  lannès  avait  un  frère  .réellement  Jean,  mais  qu'à  cause  de 

nommé  Arsavir,  Âpaa^Yipt  qui  est  le  son  impiété  onTavait  nommé  Tapnès, 

nom  arménien  Arschovir ,  commun  nom  qui  rappelle  un  des  magiciens 

dans  la  branche  des  Arsacides    de  de  Pharaon,  célèbres  dans  l'Écriture* 

Perse,  connus  sous  le  nom  de  famille  Cet  ouvrage  ajoute  qu'il  était  de  la 

de  Kansar.    Selon   le    continuateur  famille  des  Morochar-Zamiens ,  une 

anonyme  de  Théophane,  p.  435,  ce  des  plus  illustres  de  Constanttuople. 

personnage,  qu'il  appelle  Jean  ,  était  Cont.  Theoph.  p.  96.  Dans  la  chro- 

iils  d'un  certain  Pancratius  Sciastès,  nique    de  Syméon  le  logothète ,  p. 

uiôv  na-^paricu  Ttvo;  Sxtaçou,  ce  4 3o,  on  trouve  le  nom  de  M orocar** 

qui  est  encore  un  indice  de  son  ori-  danientf  pour  cette  famille. — ^S.*M* 
§m«;  car  ira^xpecTioc  est  la  forme 


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(An  8i5.) 


LivÉÈ  Lxv.         riow  V.  1$ 


térieur  dëvot  et  contemplatif.  Un  jour  qu'il  assistait  c.  5-i3,  ap. 
à  Toffice  à  côté  de  Fempereui*,  comme  on  lisait  ces  ^**""^*  '^ 


Mart. 

paroles  du  quarantième  chapitre  d'isaïe ,  sous  quelle  ^%tod***^* 
image  figurereZ'Vous  le  Tout-Puissant?  Iji  main  ^%^^''^' 
de  V ouvrier  pourta-t-elle  le  représenter  avec  l'or  ^-^y^v-^^^- 
et  Fargent?  s'approchant  de  l'oreille  du  prince,  il  lui  DuCangc, 

,.  •  Y-r  7  .  «       fam.  Byz.  p. 

dit   en  soupirant  :   Entendez '^ vous ^  seigneur^  les      173. 
pcCtoles  du  prophète?    C'est  un   avis   qu'il  vous  t.Tp*.24i/ 
donne.  Cet  hypocrite ,  pour  se  faire  un  nom  parmi  le  Fietî^?idst. 
peuple  imbécile,   se  donnait  pour  un  devin  du  pre-  **]JîJj;**,\'tt' 
mier  ordre,  et  prétendait  découvrir  les  secrets  du  passé       *"*^* 
et  de  l'avenir  par  le  moyen  d'un  bassin  d'airain  ;  es- 
pèce de  divination  encore  plus  extravagante  que  les 
autres  ;  ce  qui  lui  fît  donner  le  surnom  de  Lécano- 
mante.  Michel-le- Bègue,  le  plus  ignorant  de  tous  les 
hommes,  charmé  de  son  grand  savoir,  l'engagea  à  se 
charger  de  l'éducation  de  son  fils  Théophile,  qui  fut 
depuis  empek'eur,  et  ce  charlatan  corrompu  se  trouva 
bien  plus  capable  de  communiquer  à  son  élève  le  ve- 
nin de  l'hérésie  que  la  connaissance  des  lettres.  Théo- 
dote  Cassitéras  était  de  la  famille  des  Mélissènes,  déjà 
distinguée  sous  Constantin  Copronyme,  qui  la  rendit 
illustre  en  épousant  en  troisièmes  noces  Eudocie,  sœur 
du  patrice  Michel  Mélissène.  Cette  famille  a  survécu 
à  la  ruine  de  Constantinople,  et  subsistait  encore  avec 
éclat  dans  le  dernier  sièclç'.  Théodote,  fils  de  Michel 
et  neveu  d'Eudocie,  était  prêt  à  tout  sacrifier  à  la 
fortune  :  il  se  lia  d'amitié  avec  Jean  Lécanomante  ; 
tous  deux  s'étaient  déjà  vendus  à  Léon  avant  même 


t  On  pent  Voir  ce  que  Bueange  dit  à  ce  sujet  y/am.  Byz,  p.  t73.<«^ 


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l6  HISTOIllE    DU    BA.S-EMPIRÏ:.  (An  8i5.) 

qu'il  fût  empereur.  Dans  les  conversations  que  ce 
prince  avait  avec  eux  ,  ils  lui  répétaient  sans  cesse 
que  les  infidèles  n'avaient  si  souvent  l'avantage  sur  les 
chrétiens  que  par  un  effet  de  la  colère  de  Dieu,  qui 
punissait  les  Grecs  tombés  dans  l'idolâtrie;  qu'il  fal- 
lait proscrire  ce  culte  sacrilège  que  la  superstition  ren- 
dait aux  images.  Il  faisait  un  parallèle  de  Léon  l'Isau- 
rien  et  de  Copronyme  avec  leurs  successeurs  :  Imikiz 
les  premiers^  lui  disaient- ils,  et  Dieu  vous  fera 
régner  long-temps  ai^ec  gloire;  votre  fils  sera  corn- 
blé  de  bénédictions ^  qui  s'étendivnt  sur  vos  des- 
cendants jusqu'à  la  cinquième  génération. 
,    **•  Animé  par  ces  discours  séducteurs,  Léon  reçut  en- 

Impostore  '^  ^  ^  '  ,    .    .         • 

de'rbéodote.  corc  un  coup  d'aiguillon  qui  acheva  de  le  précipiter. 
Voulant  récompenser  ce  faux  anachorète  qui  lui  avait 
prédit  l'empine,  il  lui  envoya  des  présents.  L'ana- 
chorète était  mort,  et  un  autre  imposteur  de  même 
caractère,  nommé  Sabbatius',  s'était  établi  dans  sa 
cellule  pour  jouer  le  même  rôle.  Sabbatius  rebute  avec 
dédain  les  présents  de  Léon  :  Fa  lui  déclarer  de  ma 
part^  dit-il  au  messager,  que  je  ne  reçois  rien  d'un 
idolâtre;  il  mourra  bientôt^  puisqu'il  souffre  qu'on 
adore  les  objets  d'un  culte  superstitieux ^  et  qu'il 
suit  les  traces  de  la  panthère  et  du  fléau  de  tÈ- 
glise.  C'étaient  l'impératrice  Irène  et  le  patriarche  Ta- 
raise  que  ce  méchant  homme  désignait  par  ces  noms 
injurieux.  Léon,  surpris  d'une  si  brusque  réprimande, 
s'en  plaint  à  un  homme  de  néant  nommé  Basile,  qui 
s'était  insinué  dans  sa  faveur  et  qui  s'entendait  avec 

I  SutxêaTtc;,  ce  qaî  est  le  nom  tîdcs.  Cette  circonstance  semble  in- 
arménien Sembatf  si  commun  parmi  dlqaer  qae  cet  imposteur  était  Ar- 
les princes  de  la  famille  des  Bagra-      mcnien.*— S.*M* 


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(An  »I5.)  LIVRE   LXVIII.  LlÉOirV.  'fj 

la  cabale  iconoclaste.  Basile ,  pour  le  calmet,  lai  pro<» 
pose  de  s'adresser  à  im  moine  dont  il  lui  fait  IVIoge 
le  plus  emphatique;  c'était,  disait-il,  un  ange  sous  la 
forme  humaine,  le  confident  du  Très-Haut;  ses  lu* 
mières  étaient  surnaturelle»,  et  ses  prédictions  infail* 
libles.  Il  conseille  à  l'empereur  de  consulter  cet  oracle, 
et  de  se  conforijer  à  ses  décisions.  lorsqu'il  voit  Tem* 
pereur  détermine  à  l'aller  trouver  secrètemeut,  la  nuit 
suivante,  sous  un  habillement  qui  le  rendrait  mécon* 
naissable,  il  prend  les  devants,  court  à  la 'cellule  du 
moine,  l'avertit  de  la  visite  et  du  dégnisemont  de  Fem- 
pereur,  et  lui  fait  la  leçon  sur  ce  qu'il  doit  dire.  Dès 
que  la  nuit  est  venue,  Tempereur  se  dérobe  à  sa  cour, 
et  se  transporte  à  la  demeure  du  moine.  Il  n'était  ac* 
compagne  que  de  Basile,  chargé  de  consulter  en  sa 
présence  le  prétendu  saint  sur  le  culte  des  images.  Ijè 
moine,  au  lieu  de  répondre  au  courtisati ,  >nvisageant 
fixement  l'empereur  :  «  Prince,  lui  dit-il,  vous  faites 
«  un  pcrsonnaige  bien   indigne  de  *votre  majesté ,   de 
a  la  cacher  Sous  cet  habit,  pour  en  imposer  à  un  pauvre 
«  pécheur.  Mais  celui  qui  voit  tout  m'a    ouvert  les  • 
«  yeux  pour  vous  reconnaître.  Ecoulez  ce  qu'if  vous 
«  déclare  par  ma  bouche.    Si  vous  marchez  sur  les 
t(  traces  de  Léon  l'Isaurien ,  vous  régnerez  soixante» 
c  douze  ans ,  avec  la  paix  au-dedans  et  la  victoire  ath 
«  dehors.  Vous  serez  le  treizième  apôtre,  et  votts  ver- 
c  rez  les  enfaiits  de  vos  enfants  assis  h  côté  de  ,votis 
«  sur  le  trône.  Si  vous  vous  écartez  de  l'exemple  de 
«ce  gi'and    prince,   attendez-vous  aux   phis  grands 
«  malheurs  et  à  une  mort  prématurée.  »  Léon ,  frappé 
de  ces  paroles,  et  persuadé  que  cet  homme  divin  n'a- 
vait pu  le  reconnaître  que  par  révélation^  promet  d'o* 

Tome  XIIl  » 


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i9  qisT^as  vv  bas-empia£.  (a^Sis.) 

t)éir  4UX  (M  dres  du  ciel ,  et  s'en  retourne  embrasé  de 

fauâtifme.    . 

^^        ,  ;  Pès  <iu'il  f«t  reutré  dans  le  palais,  il  manda  Jean 

^^l^d^s^u  l^'2VûQniantQ,.et  ^tii  promit  de  le  foire  patriarche  de 

iée,sc  joint  QoQstaatinopte  s'il  le  secondait  avec  zèle.  Jean  ,  muni 

aux  enDemis  •  ,  .    i    .  .  i  -l'r 

des  iaiages.  d  uu  c^d^^  uu  pnpce  qui  lui  ouvrait  toutes  les  bibho* 
thèqu^^,  va  fouiller  avec  une  troupe  d'ignorants  dans 
celles  des  églises  et  des  monastères,  pour  y  chercher 
d^s  au^^orités  contre  les  inc^ges.  Après  avoir  feuilleté 
^n^sucç^  toute  l'antiquité  ecclésiastique ,  ils  tombent 
çjiQn  suF  le3  actes  du  ooncile  tenu  sous  Constantin 
Copronjme;  ils  y  trouveojt  les  endroits  des  Pères  dont 
les.  prélats  dé  ce  conciliabule  avaient  abusé  pour  au- 
toriser l'erreur»  Armés  de  ces  passages ,  ils  se  croient 
fi§sçî&^  forts  pour  combattre  les  orthodoxes.  Ils  brûlent 
l;o|itxe  qwi  lejir  tombe  sous  les  mains  de  livres  con- 
traires à  leur  dessein.  Mais  il  leur  fallait  un  chef  qui 
^qtpjar  sa  digq^é,  ,a.utant  que  par  sa  hardiesse,  en  état 
dp  résister  ^u  ..patriarche*  Ils  jettent  les  yeux  sur  l'é- 
\çq)i|e  4^,%^^^'  C'était  Constantin  Cazamate  %  fils 
d'çapfêtre  gw,  ayant  été  interdit  pour  ses  mauvaises 
poe^rs,  s'était  trouvé  réduit  à  faire  le  jnétier  de  cor- 
dçpiniej.  Cqnstawtijgi,  ué  avec  beaucoup  d'esprit  et  de 
ççAt.  pour. 4^Sy. lettres,  devint  d'abord  professeur  de 
gf  anif^i^e;  et^  s'étaiprt;  ensuite  adonné  à  Tétude  du  droit, 
U  cA  4(;fl^JeÇ9l3^  publiques.  Mais,  aussi  dissolu  que 
|q^.pjèFe,il,  f/at  obligé  de^ se  retirer  dans  un  cloître, 
pour  éyi^^^l^  xîbàtiment  qf^e  méritaient  ses  débauchas. 
Il  prit  le  nom  d'Antoine ,  et,  à. force  d'intrigues,  il  se 
fit  uo^n^i^.  a^hé  d'uu  célèbre  monastère.  U  avait  de 

t'Ôu  CasjmatVf  selon   Te  oontiniratcor  '  anonyme   Ide    ThcophaneSi 


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(ÀB«iS.)  ttVHl!  LKVIiï.  LÉOlf  V.  I9 

merveilleux  talents  pour  réussir  à  la  cour,  et  il  sut  «n 

faire  usage.  Souple,  enjoué,  conteur  agréable,  grand 

joueur,  complaisant,  et  tr "jours  prêt   à   servir  les 

autres  dans  leurs  galanteries.,  il  avait  tout  le  frivole 

du  courtisan;  mais  il  en  avait  aussi  lés  qualités  solides t 

il  savait  mentir  à  propos ,  promettre  sans  dessein  de 

tenir,  supplanter  ses  rivaux;  aiguiser  le  trait  d'ufitf 

calomnie,  changer  de  foi  et  de  croyance  en  un  instant, 

selon  les  conjonctures  ;  orthodoxe  sous  Irène  ^  Nicé- 

phore  et  Michel ,  il  devint  iconoclaste  dès  le  premier 

jour  que  Léon  monta  sur  le  trône.  Comme  ses  vices 

étaient  à  la  mode,  au  lieu  d'être  enfermé  comme  il 

Vaurait  été  en  un  autre  siècle,  il  parvint  à  l'évêché  de 

Syllée.  Jean  Lécanomante  ne  pouvait  mettre  à  la  tête 

de  la  cabale  hérétique  un  chef  plus   capable  de  la 

Aire  triompher,  et  ce  fut  par  son  conseil  que  Léon 

fit  venir  Antoine  à  la  cour.  Antoine,  qui  s'ennuyait  de 

voir  ses  talents  ensevelis  dans  un  diocèse  obscur  et 

éloigné,  accoifrt  avec  empressement  au  centre  de  la 

fortune  ;  il  promet  à  Léon  plus  que  le  prince  ne  lui 

demande,  et  Léon  à  son  tour  lui  fait  espérer  les  plus 

flatteuses  récompenses. 

Quoique  Léon  connût  assez    la   fermeté   du   pa- 
triarche, il  tenta  cependant  de  le  séduire.  L'ayant  Léon  tents 
fait  venir  au  palais,  «  Le  peuple,  lui  dit-il,  est  scsm-  patmrcfae. 
et  dalisé  du  culte  des  images  ;  il  le  taxe  d'idolâtrie,  et  , 
«  se  persuade  que  tant  d'avantages  remportés  sur  nous 
«par  les  Barbares,  sous  les  règnes  précédents^  sont 
«autant  de  châtimehts  du  ciel.  Prêtez-vous  à  cescru-' 
«  pule^  abandonnez  une  pratique  qui  ne  peut  être  es- 
a  sentielle  à  la  religion ,  n'étant  recommandée  en  au- 
«  con  lieu  de  la  sainte  Écriture ,  où  elle  parait  même 

a. 

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aO  HISTOIBE  DU   BAS-EMPIRE.  (An  8i5.) 

«proscrite.  Je  ne  suis  pas  théologien;  mais  je  suis 
«  empereur ,  et  je  dois  travailler  à  réunir  les  esprits , 
«  dont  la  division  peut  jeter  le  trouble  dans  TÉtat  »Le 
patriarche  lui  répondit ,  que  le  culte  des  images  était 
appuyé  sur  la  tradition ,  et  que  la  tradition  était 
aussi  bien  que  r Écriture-sainte  le  fondement  de  là 
doctrine  catholique;  que  la  vénération  de  la  croix 
et  du  livre  des  éi^angiles  n'était  nulle  part  recomman- 
dée  dans  l'Écriture^  et  qu'elle  était  cependant  adop- 
tée par  les  ennemis  mêmes  du  culte  des  images;  quà 
l'égard  des  dogmes^  ce  qui  en  caractérisait  la  vé- 
rite  n'était  pas  qu'ils  fussent  écrits;  que  les  livres 
saints  ne  disaient  pas  tout  y  et  que  la  doctrine  rc' 
eue  généralement  par  l'Église  dans  tous  les  temps 
et  dans  tous  les  lieux  ^  était  inspirée  par  le  Saint" 
Esprit  autant  que  la  sainte  Écriture  elle-mém^-  Nous 
avons  encore'  cettç  conversation  du  patriarche  et  dé 
l'empereur,  dans  laquelle  Nicépfiore  fait  voir  combien 
•  la  doctrine  de  l'Eglise  sur  les  images  c^t  éloignée  de 
Fidblâtrie.  L'empereur  le  congédia  en  lui  proposant  de 
conférer  avec  Jean  et  ses  adhérents ,  qui  avaient  trou- 
vé, disait- il,  dans  les  écrits  des  anciens  des  preuves 
de  leur  opinion  tout-à-fait  incontestables,  et  capables 
de  le  désabuser.  Nicéphore,  qui  ne  savait  pas  encore 
à  quel  point  l'empereur  était  prévenu ,  crut  vaincre 
son  opiniâtreté  en  lui  envoyant  les  plus  éclairés  des 
évêques  et  des  abbés,  pour  lui  exposer  la  doctrine  de 
l'Église.  Léon  les  ayant  écoutés  quelque  temps  avec 
impatience,  les  interrompit  pour  leur  faire  la  même 
proposition  qu'à  Nicéphore  :  c'était  d'entrer  en  confé- 
rence avec  les  iconoclastes.^  Ils  répondirent  que  la 
question  ayant  déjà  été  décidée  par  un  concile  œcuraé- 


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{AiiSi5.)  LIVRE  LXVIIÏ.  LÉOirV.  21 

DÎque,  il  n'était  plus  permis  de  la  mettre  en  dispute. 
Sur  quoi  Léon,  plein  de  dblère,  Sortez  d'ici,  leur 
dil-il,  troupe  indocile  et  aveugle  y  qui  refusez  la 
lumière  qu'on  vous  présente  ;  je  saurai  bien  me  faire 
obéir.  Il  prononça  ces  paroles  menaçantes  d'un  ton  et 
d'un  air  propres  à  jeter  l'effroi  dans  les  cœurs.  Car 
Léon,  quoique  de  petite  taille,  avait  une  voix  de  ton- 
nerre, et  les  traits  de  son  visage,  d'ailleurs  assez  bien 
proportionnés ,  portaient  je  ne  sais  quoi  de  féroce  et  de 
terrible.  Ces  prélats  tremWants ,  sans  être  abattus ,  al- 
lèrent répandre  leurs  craintes  et  leur  douleur  dans  le  sein 
du  patriarche.  Nicéphore  ayant  appris  qu  Antoipe  de 
Syllée  était  à  la  tête  du  parti  iconoclaste,  le  fît  venir 
pour  s'en  assurer.  Antoine,  auissi  fourbe  qu'impie,  nia 
Je  fait  en  présence  de  plusieurs  métropolitains,  donna 
par  écrit  sa  profession  dé  foi  en  faveur  des  images, 
et  prononça  anatbème  aux  iconoclastes.  Comme  l'em- 
pereur ensuite  lui  en  faisait  des  reproches  :  Prince, 
lui  dit-il  en  riant ,  je  n'ai  de  parole  que  pour  mon 
empereur;  le  reste  n'est  qu'un  jeu.  J'ai  dit  à  ces 
gens-là  ce  qu'ils  ont  voulu,  pour  vous  donner  plus 
de  facilité  de  faire  ce  que  vous  voudrez. 

L'empereur,  irrité  de  la  résistance  de  Nicéphore,      xvr, 
résolut  de  le  faire  condamner  dans  un  concile.  Comme  àeT^h^m 
l'Église  paraissait  être  dans  im  état  de  crise,  presque  <**'*^^<"»- 
tous  les  évêqiJfes  d'Oriei^t  et  de  Thrace  s'étaient  rendus 
à  Constantinople,  les  uns  pour  faire  Ifeur  cour  à  l'em- 
pereur en  attaquant  le  culte  des -images,  les  autres 
pour  le  défendre,  au  risque  d'encourir  la  disgrâce  de 
l'empereur.  Jean  Lécanomante,  soit  par  lui-mênw, 
soit  par  ses  émissaires ,  sondait  leurs  dispositions.,  et 
plusieurs,  qui  donnaient  sujet  de  défiance,  furent  en- 


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»a  HI8TOIRB   DU   BAS-EMPIRE.  (An  8i5«> 

fermés  dans  des  cachots,  où  on  leur  fournissait  à  peine 
'  de  quoi  vivre.  11  eu  restait  cependant  encore  un  assea: 
grand  nombre  résolus  de  tout  souffrir  plutôt  que  de 
trahir  leur  conscience.  Ificéphore  les  assembla  dans 
son  palais  avec  les  abbés  orthodoxes;  ils  s'y  trouvèrent 
ail  nombre  dé  deux  cent  soixante-dix.  Après  les  avoir 
exhortés  à  soutenir  avec  constance  l'orage  dont  ils 
étaient  menacés,  le  soir  étant  venu,  il  les  conduisit  à 
Sainte-Sophie,  où  ils  passèrent  la  nuit  en  prière.  On 
croit  que  ce  fut  en  cette  occasion  que  Nicéphore  pro- 
nonça la  sentence  d'excommunication  contre  Antoine 
de  Syllée,  dont  il  avait  reconnu  la  mauvaise  foi.  A 
cette  nouvelle,  l'empereitr  envoie  ordre  au  patriarclie 
de  venir  au  palais  pour  rendre  compte  de  sa  conduite. 
Il  y  vint  au  point  du  jour,  suivi  de  toute  l'assemblée. 
Léon  fait  d'abord  entrer  le  patriarche  seul  ;  il  lui  re- 
proche de  faire  le  rôle  d'un  chef  de  sédition  ;  il  in- 
siste sur  le  scandale  des  images,  et  l'exhorte  encore  à 
une  conférence  avec  ceux  de  l'autre  parti.  Nicéphore 
lui  répond  aVec  une  modeste  fermeté,  il  justifie  Les 
intentions  des  orthodoxes  ;  il  lui  développe  encore  la 
doctrine  de  l'Église;  enfin  il  refuse  d'entrer  en  dispute 
avec  des  hérétiques  convaincus,  et  authentiquement 
condamnés.  Alors  l'empereur  fit  entrer  le  reste  de  l'as- 
semblée, et  en  même  temps  tous  les  iconoclastes  de  la 
cour,  les  grands,  les  sénateurs,  les  officiers  l'épée  nue. 
G'étaîentdeuxarmées  rangées  en  bataille,  entre  lesquelles 
paraissait  l'empereur  environné  de  ses  gardes.  D'un 
côté  brillaient  les  épées  et  toute  la  terreur  de  l'autorité 
aetiVeraine ;  de  l'autre,  nulle  défense  que  dans  des 
armes  invisibles,  mais  plus  fartes  que  toute  la  puis- 
sance temporelle.  Cependant  les  orthodoxes  refusèrent 


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le  combat;  non  pas  qu'ils  se  déïlas^M  de  lettr.j^t^eê, 
«omme  le  leur  reprochait  l'empereur,  mais  parce  tpJte 
Tarbitre  de  la  victoire  étant  ouvertement  déclaré  con- 
tre   eux,  c'était  exposer  l'honneur  de  la  vérité  que 
d'en  entreprendre  la  défense^  Plusieurs  évêqUes  se  si- 
gnalèrent alors  par  la  liberté  avec  laquelle  ils  repro- 
chèrent à  l'empereur  son  injuste  partialité.  Mais  per- 
sonne ne  parla  avec  autant  de  hardiesse  que  Théodore 
Studite.  Seigneur^   dit-il,  ne  troublez  pas  V ordre 
établi  de  Dieu  même;  il  vous  a  confié  le  soin  €h 
F  État  et  des  armées;  il  a  donné' aux  pasteurs  te 
goui^ernement  de  V Église.  V apôtre  saint  Paul  dans 
la  description  de  la  hiérarchie  ecclésiastique  ne 
nomme  pas  les  empjpreurs.  Léon  les  chassa  de  sa  |)r4- 
sence,  avec  défense  de  paraître  jamais  devant  lui;  et 
lorsqu'ils  se  furent  retirés*,  tl  leur  fit  dire  par  le  pré- 
fet de  Gonstantinople  qu'ils  eussent  à  se  tetoir  rçnfer-  -^ 
niés'  chez  eux,  sans  avoir  ensemble  aucun  edlnmercift, 
«t  sans  ouvrir  la  bouche  sur  la  dlspirte  présenta.  Mais 
Théodore  Studite,  d'un  caractère  vtf  et  artlent,  loin 
d'obéir  à  cet  ordi-e,  se  crut  obligé  diÉ 'i^dïfubrer  ses 
instances  pour  affermir  (e  patriai^he  ^t  its  «titrés 
prélats. 

Les  iconoclastes  ne  se  donnaient  }^  n&oins  de  Premier  at- 
naouvements' pour  animer  l'empereur  et  le  porter  aux  i^nôcutte», 
extrémités.  Sur  la  porte  du  palais ,  nommée  k  pcwrte 
d^airain,  s'élevait  une  figure  de  Jésus<>Ciirist,  «vtc 
cette  insoription  :  Léon  dei^na  empereur  a  J/i$it 
abattre  cette  image;  Irène  Va  rétahUe.  Uppc^  troupe 
de  soldats,  excités  secrètement  par  Autome  et  par  l'eau 
Lécanomante,  va  la  couvrir  de  boise  «t  Iln«|^tot*à 
coups  de  pierres^  vonùssaqt  d!hoi1riUÂs  Myphéay. 


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a4  niSToiius  du  ^as-empire.  (Ab  sis.) 

L'empereur,  qui  avait  lui-même  consenti  à  cet  atten-  * 
fat,  se  transporte  sur  le  lieu  comme  s'il  en  eût  été 
irrité,  et  s'adressantau  peuple  qui  frémissait  d'hor- 
reur, Citoyens^  dit-il,  sauvons  cette  image  respecta^ 
ble  de  ceS  outrages  scandaleux.  Antoine  et  Jean  se 
ch,argent  de  la  commission ,  et  l'image  est  enlevée.  A 
ce  premier  signal  de  la  persécution,  les  évêques  et  les 
abbés  s'assemblent  de  nouveau  chez  le  patriarche;  ils 
consultent  tous  les  monuments  de  la  tradition,  ^icé- 
phore  leiir  explique  dans  Ije  sens  catholique  les  pas- 
sages dont  les  hérétiques  abusaient.  Fortifiés  par  les 
discours  du  patriarche,  ils  déclarent  tous  qu'ils  com- 
battront jusqu'à  la  mort  pour  soutenir  la  doctrine  et 
la  pratique  de  l'Église,  et  ils  en  signent  une  protes- 
tation, 
xrr.  La  fête  de  Noël  approchait,  Nicéphore  va  trouver 

épient  d«  l'empereur;  il  tâche  encore  de  l'instruire;  il  le  conjure 
avec  larmes  de  ne  pas  faire  de  vains  efforts  pour  ébran- 
ler l'édifice  de  l'Église  fondé  sur  Jésus-Christ  mêrne^ 
cimenté  par  le  sang  de  tant  de  martyrs,  affermi  par 
une  tradîtioiï  non  interrompue.  Si  ma  personne,  jd]oU' 
ia-Uil,  est  ^f^e  occasion  de  trouble^  je  quitterai  le 
patriarchat  avec  joie.  Puisse  ma  retraite  rétablir  la 
paix!  L'Église  ria^  pas  besoin  de  ISicéphore^  mais 
elle  ne  peut  subsister  sans  la  foi.  L'empereur,  que 
tous  les  écrivains  de  ce  temps-là  nomment  le  Camé- 
léon, change  de  couleur  à  ces  paroles,  il  feint  d'être 
attendri.  Et  qui  oserait,  dit-il,  déposer  lepatriarcJie^ 
notre  pçre?  Qui  oserait  changer  l'état  de  l'Église? 
C'est  le  scrupule  de  quelques  orthodoxes  qui  m'a 
obligé  ttcMtminer  la  question  des  images;  ils  crai- 
gnént  qi^  les  -  hommages  que  nous  leur  rendons 


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(An  8x5.)  LIVRE   LXVÏIf.  LISON   V.  a  S 

rC approchent  de  V idolâtrie.  Cest  par  condescen-' 
dance  que  f  ai  voulu  les  satisfaire.  Pour  moi^  cPuil- 
leurs ^' je  m'accorde  ai^éc^vôus  dans  la  croyance 
comme  dans  la  pratique.  En  même  temps  îK  tira 
de  son  sein  un  reliquaire  qu'il  baisa.  Ce  déguisement 
.de  l'empereur  était  l'effet  de  la  crainte  d'être  exclus 
de  l'église  par  le  patriarche  à  la  fête  de  Noël;  ce  qui 
aurait  causé  un  scandale  dangereux.  C'était  la  fête  de 
l'année  où  le  prince  étalait  le  plus  de  magnificence. 
Au  sortir  de  l'office,  il  donnait  un  splendide  festin  à 
tous  les  seigneurs  de  la  cour,  et  jamais  la  majesté  im- 
périale ne  brillait  avec  plus  d'éclat.  Le  patriarche  et 
•les  évêques,  dupes  de  sa  dissimulation,  ressentirent 
une  extrême  joie  de  ce  changement.  La  fête  fut  célé- 
brée avec  la  pompe  la  plus  solennelle,  Léon,  revêtu 
des  habits  les  plus  précieux^  accompagné  d'un  superbe 
cortège,  vint  à  l'église,  entra  dans  le  sanctuaire  selon 
la  coutume  des  empereurs,  baisa  la  nappe  de  l'autel 
sur  laquelle  était  brodée  l'image  de  la  naissance  de 
Jésùs-Giirist ,  et  combla  de  joie  tous  les  catholiques 
qui  assistaient  à  cette  auguste  cérémonie. 

Cette  hypocrisie  ne  fut  pas  de  longue  durée.  A  la    A»  816. 
fête  de  l'Epiphanie,  Léon  étant  venu  à  l'église,  on  s'a-  Ya^^ll\u 
perçât  par  sa  contenance  et  par  ses  regards  qu'il  n'avait    céphore. 
que  du  mépris  pour  les  images  qui  représentaient  le 
mystère,  i)^  ce  moment  il  leva  le  masque,  et  le  len- 
demain ilfit  publier  un  édit  qui  défendait,  sous  peiné 
d'exil  et  de  châtiments  rigoureux,  de  rendre  aucun 
honneur  à  des  représentations  que  la  loi  de  Dieu  avait 
proscrites.  Il  n'en  fallut  pas  davantage  pour  intimider 
la  plupart  des  prélats  qui  avaient  juré  à  Nicéphore  une 
coùstance  inébranlable.  Léon  se  servit  de  plusieurs 


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a6  HISTCMRE   DU   BAS^EMPIRE.  (An  8t6.) 

d'entre  eux  pour  faire  dire  à  Nicéphore  que,  s'il  n'usait 
de«^ondescendance  aux  volontés  de  l'empereur,  il  ne 
pouvait  rester  sur  le   siégé   patriarcal.  Nicéphore  les 
regardant  avec  indignation,  Allez ^  leur  répondit-il, 
dire  à  celui  dont  vous  craignez  là  colère  plus  que 
celle  de  Dieu  même^  que  je  ne  renoncerai  jamais 
aux  décisions  de  f  Église  pour  me  soumettre  à  celles 
de  Jean  Lécanomante,  Léon  se  disposait  à  lui.  faire 
éprouver  sa  colère;  mais  une  grande  maladie  surve- 
nue au  patriarche  en  suspendit  les  effets.  En  peu  de 
jours,  Nicéphore  fut  désespéré  des  médecins,  et  Léon 
se  flattait  de  lui  donner  biatitot  un  successeur  à  son 
gré.  Il   fut   trompé   dans   son   espérance;  Nicéphon» 
commençait  à  se  rétablir,  et  l'empereur  n'en  fut  pas 
plutôt  averti,  qu'il  chargea  des  officiers  de  confianoe 
d'aller  de  nuit  enlever  secrètement  le  patriarche,  sans 
donner  d'alarme  au  peuple.  L'ordre  fut  mal  exécuté. 
Les  soldats  commandés  enfoncent  à  grand  bruit  les 
portes  du  palais  patriarchal,  en  jurant  et  chargeant  de 
malédictions  Nicéphore  et  ses  prédécesseurs.  Le  peuple 
catholique,   réveillé   p:;r  ce  fracas,  accourt  de  toute 
part  pour  défendre  son  pasteur;  et  Ton  allait  voir  un 
combat  sanglant,  si  le  patrice  Thomas,  qui  avait  la 
charge  de  protecteur  de  Sa  in  te- Sophie,  ne  fût  venu  en 
diligence;  Il  fait  sortir  les  soldats  déjà  dans  la  cour 
du  palais ,  ferme  les  portes,  et  apaise  le  {^uple  en  l'as- 
surant que  l'empereur  n'a  point  ordonné  cette  vio- 
lence. Il  va  aussitôt  trouver  l'empereur  et  l'instruit 
de  ce  tumulte.  Léon,  à  qui  le  mensonge  ne  coûtait 
rien,  paraît  lui-même  étonné;  il  répond  qiî'il  n'a  donné 
aucun  ordre;  que  ce  sont  apparemment  les  ennemis 
de  la  superstition  qui,  rebutés  de  l'obstination  dû  pa- 


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(À»  8ia)  LIVRE  Lxviii.         LÉON  V.  ay 

triarche,  se  sont  portés  d'eux-mêmes  à  cette  entreprise. 
Thomas,  qui  le  connaissait  assez  pour  ne  rien  croire 
de  ce  qu'il  disait,  lui  représente  que ,  s'il  veut  se  dé- 
faire du  patriarche,  il  ne  faut  envoyer  que  deux  hom- 
mes pour  lui  signifier  l'ordre  de  Tempereur  et  pour 
le  soutenir  dans  le  chemin,  parce  qu'il  n'a  pas  encore 
]a  force  de  marcher.  La  chose  fut  ainsi  exécutée  la  nuit 
suivante.  Ceux  qui  l'enlevèrent  avaient  ordre  de  s'ar- 
rêter quelque  temps  dans  la  grande  place,  où  des  sol- 
dats, à  la  faveur  des  ténèbres,  devaient  fondre  sur 
lui  et  le  tuer.  Ils  y  demeurèrent  une  heure;  Tobscu- 
rité  était  profonde ,  et  le  siFetice  régnait  dans  toute 
la  ville.  Voyant  qu'il  ne  se  faisait  aucun  mouvement 
et  que  le  jour  allait  paraître,  ils  le  conduisent  au  bord 
de  la  mer  et  le  font  passer  à  Chrysopolis.  On  l'enferma 
dans  un  monastère  qu'il  avait  lui->même  fait  bâtir  au 
bord  du  Bosphore,  d'où  il  fut  peu  après  transféré 
dans  un  monastère  plus  éloigné,  dont  il  était  aussi 
fondateur.  Il  vécut  treize  ans  dans  cet  exil;  il  avait 
gouverné  son  église  près  de  neuf  ans,  Pendant  vingt- 
sept  ans ,  le  siège  de  Constantinople  fut  successivement 
occupé  par  trois  patriarches  hérétiques. 

L^ lendemain  de  l'enlèvement  de  Nicéphore,  second  xvxn. 
jour  de  février,  le  bruit  s'étant  répandu  dans  la  ville  patriarche. 
que  le  patriarche  ne  paraissait  plus,  l'empereur  as- 
sembla le  peuple  dans  Sainte-Sophie;  et  étant  monté 
dans  la  tribune:  «  Vous  voyez,  mes  frères ,  dit-il  à 
a  haute  voix,  que  le  patriarche  vous  abandonne.  Nous. 
«  lui  avons  représenté  l'abus  des  images,  que  c'était 
a  en  punition  de  cette  idolâtrie  que  Dieu,  qui  veut 
a  être  seul  adoré,  nous  avait  si  souvent  fait  succom- 
«  ber  sous   le  glaive  des  infidèles ^  comme  autrefois 


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aO  HISTOIRE   DU   BAS-EMPIRE.  (An  Sr6.) 

«k  peuple  juif.  Ce  prélat  opiniâtre,  n'ayant  rien  à 
«  nous  répondre,  a  pris  le  parti  de  s'enfuir  et  de  re- 
<x  noncer  à  sa  dignité.  Choisissons  donc  un  autre  pa- 
«  triarche.  »  Son  dessein  était  de  faire  élire  Jean  Lé- 
canomante,  auquel  il  avait  promis  cette  place  émî- 
nente,  et  qui  avait  fait  tout  ce  que  Léon  désirait  pour 
la  mériter.  Mais  les  pàtrices  lui  représentèrent  qu'ils 
ne  pourraient  se  résoudre  à  révérer  un  homme  que 
ni  son  âge  ni  ses  mœurs  ne  rendaient  respectable. 
Léon  n'osa  rejeter  ces  raisons;  il  fit  élire  Théodote 
Cassitéras,  commandant  d'une  des  compagnies  de  la 
garde,  iconoclaste  aussi  décidé,  mais  moins  emporté 
et  moins  violent  que  Jean  Lécanomante.  Il  reçut 
aussitôt  la  tonsure  cléricale,  et  le  jour  de  Pâques, 
qui  tombait  cette  année  au  vingtième  d'avril,  il  fut 
sacre  patriarche.  C'était  un  homme  du  monde,  ac- 
coutumé à  la  vie  militaire,  fort  ignorant,  sans  goût 
pour  les  choses  spirituelles,  qui  n'avait  jamais  lu  l'Écri- 
ture, n'aimant  que  le  plaisir,  le  jeu  et  la  table.  Aussi, 
dès  qu'il  se  vit  à  la  tête  du  clergé  de  Constaiitino^ 
pie,  il  crut  n'avoir  autre  chose  à  faire  qu'à  le  di- 
vertir et  à  lui  faire  bonne  chère.  C'était,  selon  lui, 
le  moyen  le  plus  efficace  de  maintenir  les  uns,  et 
d'engager  les  autres  dans  ses  sentiments.  Il  donnait 
deux  fois  par  jour  des  repas  somptueux,  où  les  piè- 
tres, les  moines,  les  évêques,  nourris  dès  leur  jeu- 
nesse dan*  l'abstinence,  iselon  la  coutume  de  ce  temps- 
là,  se  reinplissaient  de  vin  et  de  viandes,  et  se 
dédommageaient  de  la  vie  austère  qu'ils  avaient  me- 
née jusqu'alors.  La  table  de  ses  prédécesseurs  n'avait 
connu  qu'une  honnête  frugalité;  la  cordialité  frater- 
pellci  les  conversations  édifiantes  en  avaient  fait  le 


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(Aa  %it.)  LIVKE   LXVllI.        ^   LÉOW   V.  29 

principal  assaisonnement.  A  la  sienne  régnaient  l'a- 
bondance, le  luxe,  les  propos  licencieux,  la  gaieté 
iffloiodérée.  Les  amusements  qui  la  suivaient  étaient 
encore  plus  tumultueux;  des  moines  échauffés  par 
le  vin,  une  fois  sortis  des  bornes  d'une  profession  ré- 
gulière et  modeste,  i\p  connaissaient  point  cette  rete-^ 
nue  et  cette  décence  que  1  éducation  apprend  aux 
gens*du  monde  à  conserver  jusque  dans  leurs, plaisirs. 

Après  Pâques,  l'empereur  assembla  un  concile  dans  conSedw 
l'église  de  Sainte-Sophie.  Le  nouveau  patriarche  y  ** 
présidait  avec  Constantin ,  fils  de  Léon ,  qui  n'y  vou- 
lut pas  assister  luirmême,  de  peur  d'anathématiser 
par  sa  souscription  la  foi  qu'il  avait  jurée  à  son  avè- 
nement à  J'empire,  quoiqu'il  ne  craignît  pas  de  se 
parjurer  par  ses  édits;  scrupule  bizarre  que  démen- 
tait sa  conduite.  On  fit  la  lecture  des  actes  du  concile 
teau  sous  Constantin  Copronyme,  qu'on  honora  du 
nom  de  septième  concile  générai.  Nicéphore  et  tous 
les  évêqiles  orthodoxes  furent  frappés  d'anathème. 
On  y  traîna  par  force  plusieurs  prélats  catholiques; 
on  déchira  leurs  habits;  on  les  jeta  par  terre;  on  les 
foula  aux  pieds,  et^  après' toutes  les  insultes  et  les  fu« 
reurs  d'une  troupe  fanatique  et  effrénée,  meurtris  et 
sanglants,  ils  furent  jetés  dans  des  cachots.  On  les  en 
retira  quelques  jours  après,  pour  voir  si  tant  d'indi- 
gnes traitements  auraient  amolli  leur-  courage.  Aussi 
fermes  qu'auparavant,  ils  furent  abandonnés  à  la  sé- 
vérité de  l'empereur,  qui  les  exila.  Mais  peu  satisfait 
d'une  peine  à  son  gré  trop  légère,  il  envoyait  de 
temps  en  temps  des  bourreaux  et  des  juges  non 
moins  crueU,  pour  leur  faire  souffrir  de  rigoureuses 
tortures.  La  troisième  session  termina  le  concile  par 


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3o  HISTOIHE   DU   BAS-EMPIRE.  (An  «i6.) 

la  souscription   des  évêques  iconoclastes  et  du  fils  de 
Fempereur. 
XX.  Armée  de   ce   décret,  la   persécution    devint   plus 

Penécntioii.  yîolente.  On  abattit,  on  brûla  les  imagés  dans  toutes 
les  églises.  On  brisa    les   vases  sacrés   qui    portaient 
quelque  figure;   on   coupait  la  «langue   à    ceux   qui 
osaient   murmurer  contre   l'impiété;  on    déchirait  à 
coups  de  fouet  les  hommes  et  les  femmes  qui  n'ad- 
héraient point  à  l'erreur.  La  confiscation   des  biens 
accompagnait  toujours  le  supplice.  C'était  une  grâce 
que  l'exil;  on  s'étudiait  à  le  ren^i-e  le  plus  incommode 
et  le  plus  douloureux  qu'il  était  possible.  On  choisis- 
sait de  préférence  des  pays  barbares,  où  le  nom  chré- 
tien était  en  horreur.  Mais  nul  orthodoxe  n'était  traité 
plus   rigoureusement  que   les  évêques  et  les  moines. 
Les  uns  expiraient  sous  les  coups  de  fouet,  les   au- 
tres, cousus  dans  des   sacs,  étaient  jetés ^à    la    mer. 
Aucun  asile  ne   les  mettait  à  l'abri  de  la  cruauté  de 
l'empereur,  qui  les  ^ursuivait  jusque  dans  le  creux 
des   montagnes  et   des    rochers.  Constantinople  elle- 
même  était  devenue  un  lieu  sauvage.  Une  inquisition 
barbare  rendait  la  capitale  de  l'empire  un  repaire  de 
bêtes  féroces.  Tout  était  rempli  d'espions:  Les  récom- 
penses promises  aux   délateurs   avaient  brisé  tous  les 
liens  de  la  société  civile,  et  même  de  la  nature.  Les 
esclaves  accusaient  leurs   maîtres;  on  vit  des  enfants 
trahir  ceux  qui  leur  avaient  donné  le  jour.  Avoir  une 
image,  un  livre  qui  en  approuvât  le   culte,  recevoir 
un  exilé,  servir  un  prisonnier,  c'était  un  crime  digne 
de  la  flagellation    et   du  bannissement.   En   vain  la 
mère  de  l'empereur  s'efforçait  d'adoucir  la  barbarie 
de  son  fils;  ses  remontrances,  ses  prières  étaient  re- 


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(An  8id.)  LIYàK  LXYIU.  LiON  V.  3l 

jetées  avec  mépris;  il  Croyait  faire  beaucoup  de  les 
pardonner  à  l'imbécillité  de  la  vieillesse.  Jean  Léea- 
nonasyite  était  seul  écouté  du  prince;  le  patriarche 
netaît  que  son  ministre.  Ce  prélat  ignorant  était 
étonné  du  bruit  que  causait  la  chute  des  images. 
Nourri  dans  les  maxithes  du ^  despotisme  militaire,  il 
peofiait  que  la  religion  devait  obéir  au  signal  de  la 
volonté  du  souverain.  Il  envoya  ses  lettres  synddales 
au  pape  Pascal,  qui  refusa  de  les  recevoir,  et  députa 
des  légats  pour  soutenir  la  cause  des  images.  Leur 
missipn  ne  servit  qu'à  les  rendre  eux-mêmes  témoins 
des  horreurs  qu'ils  voulaient  arrêter.  Le  pape,  ne  pon* 
vant  faire  pesser  la  tempête  élevée  contre  les  ortho*- 
doxes,  fut  réduit  à  leur  procurer  un  asile;  il  fit  bâtir 
h  Borne  le  monastère  de  Sainte*Praxède,  pour  y  reti* 
rer  les  Grecs  fugitifs,  qui  trouvaient  dans  cette  re- 
traite la  subsistance  et  le  repos  qu'on  leur  refusait  dans 
leur  patrie.  Je  laisse  à  l'histoire  ecclésiastique  le  détail 
des  maux  que  souffrirent  jusqu'à  la  fin  du  règne  de  ce 
prince  un  grand  nombre  de  prélats, de  saints  moines  et 
de  laïcs  religieux,  dont  le  courage  invincible  est  gravé 
en  caractères  ineffaçables  dans  les  registres  du  ciel,  et 
dans  les  annales  de  l'Église  qui  en  doivent  être  la  co- 
pie. Mais  je  ne  pourrais,  sans  une  sorte  d'ingratitude, 
passer  sous  silence  l'éloge  que  mérite  Théophane,  dont 
l'ouvrage,  quoique  assez  grossièrement  écrit  «et  peu 
exact,  Surtout  pour  les  affaires  d'Occident,  m'a  ce- 
pendant été  fort  utile.  J'en  ai  déjà  parlé  au  sujet  du 
concile  de  Nicée,  auquel  il  assista.  Il  était  abbé  du 
monastère  de  Sigriane  en  Bithynie,  lorsque  Léon 
ttionta  sur  le  trône.  Le  prince,  persuadé  que  l'exemple 
d'un  homme  de  ce  mérite  produirait^n  grand  ef&t 


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3il  HfSTOlkE   DU   BAS-EMPtâ«.  (An  8i6.) 

en  faveur  de  l'hérésie,  fit  tons  ses  efforts  pour  l'enga- 
ger à  condamner  le  culte  des  images.  Comme  Théo- 
phane  était    sourd  à  toutes   ses   sollicitations,  il«ful: 
chargé  de  chaînes  et  conduit  à  Constantinople,^woi- 
que   malade  au  lit  depuis  un  an.    Constant  dans  ses 
refus,  il  fut  mis  en  prison,  ei^ouffrit  pendant  deux: 
ans    les   traitements    les    plus    durs.   Enfin,    affaibli 
par  f^nt  de   maux  et  respirant  à  peine ^  on- le  trans- 
porta dans  l'île  de  Samothrace,    où  il   ne  vécut  que 
vingt-trois  jours.  Il  est  honoré  du  titre  de  confesseur. 
Son  ouvrage.,  intitulé  Chronographie,  commence  à  la 
première  année  de  Dioclctien,  et  se  termine  à  la  pre-, 
mière  année  du  règne  de  Léon  l'Arménien» 
^  g  Des  tremblements  de  terre,  des  chaleurs  excessives 

8x8,  819.    ç^  jgg  sécheresses,  suivies  de  la  peste  et  de  la  famine. 
Gouverne-  dcs  émcutcs  populaircs  et  des  séditions,  tous  ces.  maux 
Léon,      que  l'on  crut  annoncés  par  une  grande  comète,  phé- 


^4^0* *iV  ^O'^è"®  toujours  effrayant  aux  yeux  du  vulgaire,  fu- 
^^'l'W*^,  rent  regardés  par  les  peuples  comme  autant  de  fléaux 


0,49' 
i.l.i5»t. 

p.  l32.  .../•. 

Cont.Theop.  pour  punir  l'impiété  de  l'empereur.  Léon  méritait  en 


P.l6,   19,31.       .   «.  ,  1      A       •  1*1  •.         -A  /      X 

Symeon,  p.  eitet  le  châtiment  du  ciel  par  son  opiniâtreté  a  soutenir 
Georg.  p.    l'hérésie.  Mais  les  auteurs  catholiques,  qui  le  nom- 
Gen^r^î.  I  ^^^^  l'Amalécite  à  cause  de  la  guerre  qu'il  faisait  aux 
£o''^âmm  <>rthodoxës,  avoucut  eux-mêmes  que,  sans  ce  funeste 
p.  446.     caprice,  c'eût  été  un  prince  digne  d'estime.  Sa  valeur 
n'était  pas  équivoque;,  il  en  avait  donné  des  preuves 
éclatantes  avant  même    que  d'être  parvenu  à  l'em- 
pire. Jamais  prince  ne  fut  plus  attentif  à  maintenir  ou 
à  rétabhr  la  discipline.  Sa  vigilance  s'étendait  à  toutes 
les  parties  de  l'ordre  public.  Avant  lui,  tout  se  vendait 
à  la  cour;  la  faveur  trafiquait  de  toutes  les  places; 
l'argent  faisait  les  magistrats,  les  gouverneurs  de  pro- 


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(In  iig.)  LtVHÊ  LXVIÎI.  LÉON  V.  33 

vinces,  les  officiers  civils  et  militaires,  les  généraux 
d'armée  :  il  abolit  ce  commerce  honteux.  Désintéressé 
lui-même  et  incorruptible,  il  n'avançait  que  le  mérité. 
Actif  et  infatigable,  il  ignorait  les  plaisirs  et  ne  se 
donnait  point  de  repos,  pour  en  procurer  à  ses  peu- 
ples. Toujours  à  cheval,  il  passait  les  hivers  à  exercer 
ses  troupes,  les  étés*  à  parcourir  les  provinces  j  réfor- 
mant les  abus,  punissant  les  vexations  et  les  injustices, 
rétablissant  les  villes  et  les  forteresses  ruinées  par  la 
guerre,  relevant  les  barrières  de  l'empire  forcées  tant 
de  fois  par  les  Bulgares,  en  ïhrace  et  en  Macédoine. 
Instruit  des  lois  A  de    l'ordre  judiciaire,  on  le  vit 
souvent  présider  aux  tribunaux,  juge   redoutable  au 
crime  et  surtout  .à  l'abus  du  pouvoir.  Un  jour  qu'il 
sortait  du  palais,  un  pauvre  citoyen  lui  présenta  une 
requête  dans  laquelle  il  exposait  que  sa  femipe  lui  avait 
été  enlevée  par  un  sénateur,  et  que,  s'en  étant  plaint 
au  préfet  de  la  ville,  il  n'avait  pu  en  obtenir  justice. 
Léon  commande  dé  lui  amener  à  son  retour  l'offensé, 
l'offenseur  et  le  préfet.  Dès   qu'il  est  rentré  dans  le 
palais,  il  écoute  le  détail  de  la  plainte;  et  Taccusé 
étant  convaincu  par  son  propre  aveu,  il  le  livre  à  la 
justice  pour  être  puni  selon  la  rigueur  des  lois.   Se 
tournant  ensuite  vers  le  préfet:  Et  vous ,  dit-W  ^pour* 
quoi  navez'vous  pas  puni  cette  violence?  Le  magis- 
trat s'excusant  sur  la  qualité  du   coupable  :  Fojus  aU 
lez  vous-même  servir  de  preuve,  répliqua  Tempe- 
reur,  que  nulle  dignité  ne  peut  couvrir  le  crime. 
Je  vous  déclare  déchu  de  la  préfecture^  et  incapa» 
ble  de  posséder  jamais  aucune  charge.  Cependant, 
comme  les  vertus  même  s'altèrent  dans  les  âmes  im- 
parfaites, par  le  voisinage  des  vices,  son  caractère  dur 

TowiÉ  XUL  3 


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3^  HISTOIRE   DU    BAS'EMl^iaE.  (An  819.) 

et  cruel  perçait  au  travers  de  ses  actions  de  justice. 
II  était  excessif  dans  les  châtiments;  nulle  proportion 
entre  la  qualité  du  délit  et  la  rigueur  de  la  punition. 
Pour  des  fautes  légères,  il  faisait  abattre  des  membre», 
oui  demeuraient  plusieurs  jours  suspeqdus  dans  les 
places  de  la  ville;  spectacle  affreux,  qui  imprimait  plus 
d'horreur  dé  la  justice  que  du  crime.  Néanmoins  on 
peiit  dire  que ,  Sans  l'excès  de  corruption  et  de  dés- 
ordre qui  régnait  alors,  la  cruauté  même  était  moins 
pernicieuse  que  n'eût  été  l'indolence. 
An  820.        li'auteur  de  sa  mort  fut  celui  qui  l'avait  servi  avec 

MM^îi     ?^  P'"^  ^^  ^^'®  P^"*^   rélever  à  l'empiré.  Michel-le- 
Bèsne  accu- Bègue  était  un  homme  audacieux,  insolent ',  qui  ne 

56  et  COD*  ,  -         ,  ■ 

damoé.     pouvait  retenir  sa  langue,  déchirant  sans  cesse  l'em- 

!i*f'êt  se'^'  pereur  et    l'impératrice ,    quoiqu'il    fût   comblé     de 

Lco  gramm.  bienfaits  et  revêtu  des  premières  dignités  de  la  cour. 

Zoii.i.i5,t.a,  Accusé  de  crime  de  lèse-majesté,   s'en    étant    justi- 

134.     '  fié  avec  beaucoup  de  peine,  il  n'en   devint  pas  plus 

I  Cont.  The-      .  .  .    t  »  *•  1»    •        *.  *  1 

oph.  p.aiet  circonspect.  L  empereur,  qui  i  aimait  encore,  voulaat 

SymSn,  p.  paraître  ignorer  ses  discours ,  le  fit  avertir  par  des 

*°4îf.**^'    gens  de  confiance,  qui  lui  conseillèrent  comme  d'eux- 

&J**'^fJ*    "^^"^®^>  ^^  ménager  l'honneur  d'un  prince  auquel  il 

Nicetvita  devait  sa  fortune,  et  qui  savait  punir.  Comme  il  pos- 

conciLLabii.  sédait  je  détail  de  la  discipline  militaire,  ayant  fait  la 

Giycfp^S:!  guerre  toute  sa  vie ,  Léon,  pour  l'éloigner  de  la  cour, 

Manasi.p.  P^^^*^  ^^  prétexte  de  l'envoyer  en  Orient,  visiter  lès  di- 

Joâ^p^is.  vers  quartiers  des  troupes  qui  campaient  dans  cette 

partie   de   l'empire.   Mais  apprenant  que  Michel  se 

donnait  encore  plus  de  licence,  et  qu'il  était  même  à 


^  ^IPH  P«»f  »op  orfeiw,  €^dtY.  t.  la,  p.  40$,  QQt.  ny  Ur,.  m^w^  S  9. 
•-ySt*M. 


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^Ân  «ao.)  LIVM  LXYIII.  LÉON  X-  '3S 

cr9i'n4re  qu'il  n'excitât  quelcjqe  révolte,  il  le  fit  revi- 
Bir,  et  lui  reprocha  aveô  douleur  sa  noire  ingratitude. 
Comme  Michel  rïi^it  hardinipnt  tout  ce  qu'on  lui  im- 
putait/Léon,  résolu  dç  Ile  plus  ménager  cet  hdtnme 
intr$iitàb!e,  le  ât  épier  dans  toutes  ses  conversation^ , 
qui  lui  étaient  fidèlement  rapportées.  Il  eut  hientQt 
recUeilU  up  grand  nombre  de  faits  déposés  par  des 
témoins  dignes  de  foi,  entre  lesquels  était  cet  Hexa- 
bule,  aussi  fidèle  à  I^on  qu'il  lui  av£(it  été  contraire 
lorsque  son  devoir  l'attachait  à  Michel  Khangabë. 
Iléon,  armé  de  ces  preuves,  fait  le  procès  en  forme  à 
Michel-le-Bègue.  Ce  téméraire,  accusé  juridiquement 
devant  l'empereur,  est  Convaincu,  et  forcé  d'avouer 
lui-même  qu'il  a  eu  dessein  de  se  faire  un  parti  çt 
d'usurper  l'empire.  Il  est  condamné  à  être  brûlé  vif 
dans  la  fournaise  des  bains  du  palais. 

Cétait  Ja  veille  de  Noël.  On  conduisait  déjà  Michel  «xm. 
au  supplice ,  et  l'empereur,  naturellement  crue] ,  suU  aa  tuppiwe 
vait  ce  malheureux  pour  repaître  ses  yeux  de  cette 
horrible  vengeance.  L'impératrice,  avertie  de  ce  qui 
se  passait,  accourt  tout  éperdue;  elle  se  jette  a\|x 
genQUx  de  Léon,  u^rrétez,  prince^  s  ecrie-t-elle;  vous 
recevrez  den\ain  te  corps  et  le  sang  du  Sauveu^; 
vous  y prépare:^'Vb^s  par  un  spectacle  si  inhumain? 
Hespectez  ce  saint  jour;  ne  le  profanez  pas  par  iih 
41  effroyable  supplice.  Si  Michel  est  coupable^  je 
he  demqnde  point  de  grâce;  différez  sa  punition  ^ 
et  que  tes  cris  d*un  misérable  ne  soient  pas T affreux 
préludé  de  nos  cantiques  de  joie.  C'était  en  effet  la 
coutume  des  empereurs  de  communier  aux  féte^  so- 
lennelles, et  c^eût  été  un  grand  scandale  de  s'en  ab»- 
tenir.  'Touché  de  cette  réflexion  et  des  larm^  dé  sa 

3. 


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36  àlStoiRE   DtJ   BAS-£Mλ1RË.  (An  éao.) 

femme,  il  remet  à  quelques  'jours  l'exécution  de  WTî- 
chel;  il  lui  fait  mettre  les  fers  aux  pieds,  et  le  donn^ 
en  garde  au  concierge  du  palais.  Se  tournant  ensuite 
vers  l'impératrice,  Je  Jais^  lui* dit-il,  ce  que  vous 
voulez.  Fous  ne  songez  quau  salut  de  mon  âme  ; 
mais  vous  exposez  ma  vie.  Peut-être  ce  scrupule 
vous  sera-t'il  Jiineste  à  vous  et  à  vos  enfants. 
zzzr.  Léon,  tourmenté  de  noirs  pressentiments,  ne  put 

iion°TOntte  rcposcr  la  nuit  suivante.  Des  prédictions  anciennes, 
"*  des  visions  de  sa  mère,  de  prétendus  oracles,  des  pro- 
nostics bizarres,  viennent  en  foule  lui  troubler  l'esprit 
et  semblent  lui  annoncer  sa  perte  prochaine.  Agité  de 
mortelles  inquiétudes,  il  se  lève  au  milieu  de  la  nuit, 
et  va  seul  à  la  chambre  du  concierge  pour  s'assurer  de 
l'état  de  Michel.  Il  les  trouve  tous  deux  endormis,  le 
concierge  couché  par  terre,  ayant  cédé  son  lit  à  son 
prisonnier.  Ce  qui  l'étonné  encore  davantage,  c'est 
que  s'étant  approché  du  lit,  il  voit  Michel  plongé  dans 
un  sommeil  profond  et  tranquille.  Il  ne  doute  pas  que 
le  concierge  ne  soit  gagne,  et  que  le  coupable  n'ait 
des  motifs  d'assurance.  Il  sort  avec  un  geste  menaçant 
qui  marquait  sa  colère.  Depuis  l'abSication  de  Michel 
Rhangabé,  Théoctiste,  tombé  dan3  la  disgrâce,  s'était  * 
attaché  à  Michel-le-Bègue;  il  ne  l'avait  pas  abandonné 
dans  son  malheur,  et  il  s'était  enfermé  avjeclui.  Couché 
dans  un  coin  de  la  chambre,  et  feignant  de  dormir,  il 
avait  tout  observé.  Il  éveille  le  concierge  et  le  prison- 
nier, leur  raconte  ce  qu'il  vient  de  voir.  Effrayés  éga- 
lement du  danger  qui  leur  devenait  commun,  ils  déli- 
bèrent sur  les  moyens  de  l'éviter.  Le  jçur  commençait 
à  paraître;  Michel  envoie  Théoctiste  à  Léon  pour  le 
prier  de  lui  permettre  de  faire  venir  un  confesseur. 


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xxr. 
Assaaiiaat 


(An  Sac)  UVRE  UVIÎf.       .    ^içN  V,  ;  3^ 

Cette  permission  accordée  ^  Michel  ordonne  à  Théocr 
tifite  d'aller  trouver  ses  amis,  et  de  leur  dire  de  sa  part 
quil  allait  les  déqoncer  eux-mêmes  comme  ses  com- 
plices, s'ils  ne  le  tiraient  au  plus  tôt  du  danger.  Frap-« 
pés  de  cette  terrible  menace,  ils  passent  le  jour  de 
Noël  à  conférer  ensemble.  Voici  le  moyen  qu'ils 
prirent  pour  délivrer  Michel. 

Les  clercs  de  la  chapelle  du  prince  ne  logeaient  pas 
alors  dans  le  palais,  comme  ils  firent  depuis;  ils  se  ^«l^s! 
rendaient  tous  les  jours,  vers  les  quatre  heures  du 
matin,  à  une  des  portes  qu'on  nommait  la  porte  dH-" 
poire ^  et  s'y  étant  assemblés,  ils  entraient  dans  la 
chapelle  et  chantaient  matines.  Les  empereurs,  même 
les  moins  dévots,  se  dispensaient  rarement  d'assister 
à  cet  office,  lorsqu'ils  se  trouvaient  à  Constantinople; 
et  Léon,  qui  se  piquait  d'avoir  une  belle  voix  parce 
qu'il  l'avait  forte,  y  manquait  moins  que  tout  autre* 
Il  prenait  surtopt  plaisir  à  entonner  les  pssiumeset 
les  hymnes,  et  k  régler  le  chant  du  chœu%  C'était 
unjc  petitesse  digne  de  la  grossièreté  de  ces  temps-là, 
niais  excusable  dans  ufi  prince  qui  n'en  avait  .pas 
beaucoup  d'autres.  Les  conjurés  déguises  en  clercs 
viennent,  le  matin  du  lendemain  de  Noël,  se  mêler 
parmi  eux  à  la  faveur  de  l'obscurité,  et  se  glissent 
dans  la  foule  ayant  chacun  un  poignard  sous  leur 
robe.  Us  se  tiennent  cachés  dans  des  coins  obscurs  de 
la  chapelle  en  attendant  le  signal;  c'était  le  prince 
qui  devait  le  donner  lui-même,  en  entonnant , une 
hymne.  Dès  que  sa  voix  se  fait  entendre,  ils  sortent 
de  leur  embuscade  et  fondent  dans  le. chœur.  Comme 
il  faisait  grand  froid,  et  que  tous  les  clercs ,  ainsi  que 
l'empereur,  avaient  la  tête  couverte  d'un  bonnet  fort 


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Se  nïsrbiài  du  fiis^ÊiiriÀi.  (i£  kâofj^ 

éjiàié,  qài  àé  i*àbâttsiit  âut*  lé  visage,  le  dByén  dû  clergé' 
éèt  pris  p5Ur  L^bri  et  reçoit  plUsieiirâ  cobpS.  le  v/èîi- 
ràfd,  qui  sêhtàit  Id  méprisé,  se  fait  èiôtinàftré  énniôtl^ 
frkht  sa  tête  éhàuvè.  dri  le  fài^sfe  pôiir^e  jetef  Sâtit^ 
Petapëi-éuK  il  5*éteit  Sauvé  Sdiiâ  Fàutèir,  èkisl  de  lâi 
tMXj  dotit  il  se  sefvstlt  pour  i^ater  tés  toups.  Oomine 
il  était  fort  'et  robuste,  quoique  blëâsé  eh  plusieurs  én^^ 
drdits,  il  se  défendait  avec  ta  higé  d'ùUé  bête  fêrbce 
attaquée  par  deà  èhassèut*^.  Dé  tbtis  Ses  bfBciei-â,  de 
ttiiis  §ës  doiirtissihs,  ^as  un  de  pHt  ia  déf^nke.  ErtRA 
Vb^aiit  titi  dés  tnètirtrièrs,  d*ilné  tâfllë  gîgâtitësqurf  *j  lë^ 
♦èr  feur  lui  èoti  bilttetetrë ,  il  lé  cdtijiïre^  au  îionl  dtl 
Dieu  adoté  ÈMt  cet  atitel,  dé  Itii  feirë  gràfee  de  là  vîéj 
îtli»  qiioi  ràâsàssiri  répondant,  O?  h*^st pài  fe  nid'- 
niièht  de^  grâces,. t'est  celui  deS  ijéri^ancesi  lul  dé- 
Ëhdrge  tin  coup  terrible,  et  abat  en  niênte  temp$  l'é^ 
pàuie  du  prinde  et  tin  bras  dé  la  crbii.  Ud  autre  lUl 
t^ahbhë  la  tête.  Telle  fut  la  fin  de  Léon ,  àpth  iepk 
diis  eè^emi  de  règne;  priiice  tiiéttiotable  et  digilè  de 
régfiër  plus  loHg-tèmps,  fe*il  fa'eût  été  përséeùtéur  et 
tjfùel  lbrsqg*il  ne  devait  être  <|ué  sévère.  Ce  fiit  lé  jti* 
gethent  qUe  porta  le  patriarche  Ificéjihoré;  âpprëtiâlit 
flaui  son  exil  la  mdrt  de  Léon;  Zà  rêtighn  est  dék- 
vré^  d'un  gtarid  ènfïerhl,  dit-Il  en  soupirant,  fhàis 
fÉtai  pefd  tin  pHncè  utUe. 
3jj^,.  Lëà  âèsaSsins  ie  pârtagèrëlit  î  les  uns  traînent  àh 

^Bègae*^  fcîrque  le   fcorpè  de  Léon  dépouillé  et  sariglaiit,  lès 
•mptreor.   ^jjtreà  Vont  tHercheb  Michel;  et:  hàni  le  dékhst^tet  de 

Cedr.t.a.p.  '       '  ^ 

'  Cet  individa  était,  selon  Cédré-  ne  fait,  an  reste,  qhe  copier  lès  pâ- 

tàMy  t.  i,  p.  49^»  àé  la  fiirtiille  des  rôles  d«  la  ëotititlttitlGii  de  Thé»- 

CriiBbonites.  T^  rcst  K^ajA^covtTÛv  phanei,  faitç  p«r/or4re  de  Gonptaa- 

oStoc  i  ifcwa^a<  âpfAviTO  ^tveo;.  11  tîn  Porphyrogéncte ,  p.  55.-*-iS.-BL 


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{kà  iao:^  tïtÀÉ  Lxviîi.      mcttit  ii.  Sjf 

ses  fers,  ils  le  prèniient  entre  leurs  liras,  le  portehf    4^5,496, 
dans  U  grande  salle  du  palais,  et  le  procladetit  enîpe-  Leo^jpLnm. 
reur.  Tous  les  officiers  du  palais,  étonnés  et  tremblants,  zoS'f^iS^t. 
vieûnent  lui  rendre  leurs  hommages.  On  admire  en    *'^jl^^ 
silence  ce  jeu  dé  la  fortune ,  qui  voulait  montrer  une  ^°*-  t^»- 
fois  des  chaînes  sur  le  troue,  comme  un  symbole  pàl-     etseq^ 
pable  de  la  condition  des  souverains.  Le  briiit  d'une  si       96.     ' 
étrange  révolution  se  répand  en  un  instant  .par  toute  G«nw!*i*a,' 
la  ville;  on  accourt  de  toute  part.  C'était  une  puis-    D„wi^ct' 
sj^nte  recommandation,  aux  yeux  du  peuple  toujours  ^•™-*y»'P- 
zélé  pour  les  malheureux,  que  \eé  fers  de  Michel.  II 
était  déjà  midi,   lorsqu'assis  sur  le  trône  il    les   fit 
rompre  à  coups  de  marteau.  Aussitôt  envirônhé  de^ 
assassins,  qui  lui  tenaient  lieu  de  gardes,  montrant 
une  contenaiice  fière,  comriiè  Vainqueur  de  Léon,  et 
triomphant  de  sa  condamnation  et  de  son  supplice,  il 
marcha  vers  Sainte-Sophie,  bîi  il  fut  couronné  par  le 
patriarche,  11  donna  ordre  de  faire  sortir  du  palaiâ 
Timpératrice  avec  ses  quatre  fils,  Constantin*,  déjà 
honoré  du  titre  d'Auguste,  Basile,  Grégoire  et  Théo- 
dose.  On  les  jeta  tous  dans  une  barque ,  avec  le  ca- 
davre coupé  par  morceaux  et  enfermé  dans  un  sac,  et 
on  les  trfinsporla  dans  Tile  de  Proté.  Les  fils  furent 
faits  eunuques;  Théodose,  le  plus  jeune,  mourut  dans 
cette  cruelle  opération.  Les  autres,  ainsi  que  leur 
mère,  furent  enfermés  dans  un  moiiastère*,  où  leur 
infortune  leur  donna  le  désir  et  le   temps  de  s'in- 
struire, et  de  se  détromper  de  l'erreur  dans  laquelle 
• 

*  Ce  prince,    qui,  avant  d^avoir  *  On  l'appelait  le  monas&rie  des 

porté  le  nom  impérial  de  Gonhtkn-  seigneurs,  ivrf  Xe^ojiivw  toi»  9k9Kt*^ 

tin,  avait  en  celni  de  Semhat  on  t&v  \tAyrfn,  Cedr.  t.  si,  p.  4^7 «i-^. 

SembatèSjCat,  quand  il  ftit  moine,  S.-M. 
celai  de  Basile. — S.-M. 


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4o  HISTOIRC    DU    BiLS-£BiPIRE.  (An  820.> 

\Is  avaient  été  nourris^  Michel ,  en  saisissant  les  biens 
de  Léon,  en  réserva  ce  qui  était  nécessaire  ppur  lejir 
entretien,  et  leur  laissa  quelques  domestiques  pour 
les  servir. 
XnUz.  Le  nouvel  empereur,  sorti  de  la  plus  basse  nais- 
Carac^fede  sance  ' ,  n'avait  jamais  dû  s'attendre  à  cette  élévation, 
Michel  jj^  parmi  les  Athingans  *,  qui  peuplaient  Amorium  sa 
patrie  ^ ,  il  avait  reçu  son  éducation  d'une  femme 
juive*,  et  passé  son  enfance  dans  les  étables  et  dans 
les  haras.  Il  ne  s'était  occupé  dans  ses  premières  afl* 
nées  qu'à  connaître  les  chevaux,  et  c'était  l'unique 
science  dont  il  se  piquait ,  lors  même  qu'il  fut.  empe^ 
reur.  Ignorant  dans  tout  le  reste,  il  n'avait  aucun 
sentiment  de  religion,  et  refusa  toujours  de  s'instruire. 
Lorsqu'il  fut  devenu  grande  il  prit  le  parti  des  armes. 
Simple  soldat ,  le  défaut  de  sa  langue ,  qui  lui  fit  donner 
le  surnom  de  Bègue,  ne  l'empêcha  pas  de  se  faire  ai- 
mer de  son  tribun,  aussi  grossier  que  lui,  mais  fort 
riche.  Ce.  tribun  lui  fit  épouser  sa  fille,  nommée  Thé- 
cla,  et  ce  fut  le  premier  degré  de  sa  fortune.  Il  s'avança 
auprès  de  Bardane,  et  finit  par  le  trahir.  Il  fut  encore 


■  nm^alathirt  faistonen  arabe,  lui  position  de  cette  viHe,qoléuit  dans 

donne  ponr  père  un  certain  Dj'our-'  la  grande  Phrygie ,  n*est  pas  connue 

iijiSp  t.  ly  f  ii6,  v^,  et  i43,  r*^.  —  avec  exactitude.  CVst  là  probable- 

8.-M.  ment  ce  qui  fait  dh*e  que  Michel 

a  Voyez  sur  ces  sectaires ,  t.  la,  était  d*origîne  juive.  Selon  Abou*- 

p.  44a,not.  a  et  3y  liv.  Lxviiy  j  a6,  Ifaradj,  Chron.  syr,,  p.  i5o,  son 

— S.-M.  père  était  un  Juif  converti  et  bap* 

3  Cette  villey  selon  Cédrénns,  t.  tisé. — S.-M. 
3)  p.  496,  n'était  habitée   depuis  4SelonNicétas,danssâyi^ie  de  saint 

trcs-Iong-temps  que  par  des  Jnifs,  Ignace,  <i/».    Conc,   Labb,^  t.  8,  p. 

des  Athingans  et  d*antRs  sectaires  ;i83,  il  était  d'une  secte  qu'il  ap- 

méprises.  Év  ^  Icu^aïuv  xxt  Àdt'yyà-  pelle  des  Sabbatien.s.  MixaxX  Â^&- 

v«>y  xx(  irspcov  àaeSàv  TrXTJOcç  Ix^a*  ptavb;,  xftl  rnv  aipeoty  XaêêxTiavo^ 

Xfl»  TÔv  fj^ww4  i')(XXTOUiil^irxi.  La  m. — S,-M. 


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(Aaati.)  UVKE   LXVI,  WCHELn.  4» 

plus  infidèle  à  Léon ,  qui ,  non  content  de  le  combler 
d'honneurs,  avait  voulu  tenir  sur  les  fonts  du  baptême 
un  de  ses  enfants;  ce  qui  formait  alors  une  sorte  d'al- 
liance beaucoup  plus  étroite  qu'elle  n'est  aujourd'hui. 

Quoique  l'Église  ne  dût  pas  beaucoup  espérer  de  conduîte'de 
Michel,  les  catholiques  exilés,  attentifs  à  profiter  des  Mwhcur*. 

f    /  jx  T  •  .  1 N  gard  d«8 

événements,  sondèrent  ses  dispositions  des  quils  le  Cathoiiq»ei. 

virent  parvenu  à  l'empîre.  Michel,  très-indifférent  sur  ^^'/i^f' 

la  religion  parce  qu'il  n'en  était  nullement  instruit,  se  ^^^"iVVàS! 

piquait  de  philosophie;  il  faisait  aussi  peu  de  cas  des  ^°^*^*?" 

orthodoxes  que  dçs  images;  il  répondit  aux  lettres  de        ^' 

Nicéphore  et  de  Théodore  Studite,  qu'il  n'était  pas      4ia.* 

venu  pour  rien  ianos^er  sur  cet  article;  qu'il  s'en     Tio.^* 

tenait  à  la  croyance  de  son  prédécesseur;  et  qu'a-,  ^^°^'*  ^ 

pr^s  tout  y  chacun  n'aidait  qu'à  sui\>re  tel  parti  qi£il  Sr«imii 

voudrait;  qu'il  défendait , seulement ^  pour  ^^l^^t^  ^^^\\ 

les  troubles  y  de  placer  aucune  imase  dans  la  ville      p»'- 
j    ^  .     '  r    u.  11-1/  Joël.  p.  17». 

de  Constantinopie,  On  rappela  les  exiles,  on  ouvrit  vitaNiceph. 

les  prisons  aux  catholiques.  Mais,  comme  l'indifférence  Boà.i3*iii«rt. 
est  beaucoup,  plus  voisine  de  l'erreur  que  de  la  vérité,  Tîr*pii-«p.' 
Michel  ne  demeura  pas  long-temps  en  cet  état,  Théo-  ^yf^^Ni^* 
dore,  revenud'exil,  l'alla  trouver  avec  plusieurs  évêques,  ^^^'  ^:^^^ 
et ,  après  l'avoir  remercié  de  la  grâce  qu'il  leur  avait      4  f«b. 
accordée,  il  voulut  lui  parler  de  la  doctrine  de  l'Église,  Theodora^a 
Sur  quoi  Michel  l'interrompant  :  C'est  donc  vous^   • 
lui  dit-il,  qui  vous  faites  un  dei^oir  de  résister  aux 
princes  ?  Cette  parole,  accompagnée  d'un  air  de  mé- 
pris, fit  évs^nouir  foute  espérance.  La  persécution  suivit 
bientôt  après.  Il  se  proposa  pour  modèle  Constantin 
Copronyme,  le  héros  des  iconoclastes,  qui  regardaient 
la  longueur  de  son  règUe  comme  uiîe  récompense  de 
son  zèle.  On  ne  parla  plus  que  d'exils,  de  prisons,  de 


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42  HISTOIRE   DU   BÀà-ÉBtPIRÉ.  (An  Sar.^ 

supplice^.  Jean  Lécanottiante  reprit  rkutorîté  tyran- 
nique  dont  il  avait  joui  sous  Léon;  les  moines  sur- 
tout et  les  évêqiies  furent  l'objet  de  sa  haine.  Entre  le 
grand  nombre  dé  ceux  qui  souffrirent  alors ,  je  n'en 
citerai  que  deux.  Théophile,  fils  de  l'èmpéreur,  et  qui 
reçut  cette  ahnée  le  titre'  d'Auguste,  fit  tnourir  sous 
.  les  coups  de  fouet  Euthymîus  ,^  évêquè  dç  Sardes.  Le 
ihoîilè  Métiiodius  soiifFrit  plus  qu'il  ne  fallait  pour 
mourir,  si  la  Providence  ne  l'eut  conservé  pour  répà- 
i^er  ùti  jour  les  maux  de  l'Église.  Il  était  né  à  Syra- 
cuse dfe  parents  distingués  par  leur  noblesse.  Apfëà 
avoir  reçu  une  éducation  convenable  à  sa  fortdiie ,  îl 
tint  à  Constantinopîe  pour  s'avancer  à  la  codr.  tJri 
moine  lui  fit  changer  de  dessein;  il  doniiâ  tous  ses 
biens  aux  pauvres  et  prit  l'habit  monastique.  Les  fu- 
reurs de  Léon  l*Arménien  [e  déterminèrent  à  se  retirer 
à  Rome.  Âpres  la  mort  de  ce  prince ,'  il  revint  à  son 
monastère,  apportant  avec  llii  une  lettré  dogmatique 
du  pape,  qui,  sur  les  premières  nouvelles  du  rappel 
dés  exilés,  s'était  flatté  de  l'espérante  d'un  heureiix 
charigement.  Mais ,  loin  d'avoir  aucun  égard  à  cette 
lettre ,  l'empereur,  traitatit  Mélhodlus  de  séditieux ,  Iiiî 
fit  donner  sept  cent§  coups  de  fouet,  et  l'envoya  dans 
une  île  voisiné  dii  promontoire  Acritas ,  dans  la  Pro- 
pôtitide,  au  midi  de  Chalcédoîne.  Il  y  fut  etifermé  dans 
un  sépulcre  étroit  et  obscur  avec  deux  malfaiteurs.  L'Un 
étàtît  mort  peu  de  temps  après ,  bn  le  laissa  pourrir 
auprès  de  Méthodîùs,  qui  essuya  toutes  les  horreur* 
qu'éprouvé  ith  cadavre  jusqu'à  ce  qu'il  soit  féduit  en 
poùsàièfe.  Un  |)âuvre  pêcheur  du  voisinage  lui  appor- 
tait toutes  les  sémaitiës  la  quantité  d'huile  iiëces$air« 
pour  Venttetien  A*nne  lampe.  Il  deiheùra  dans  cet  a& 


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(an  bai.)  Litii   LxViu.  kiGHÉL  II.  4^ 

fi^ui  cdfclioi  pendant  plusieurs  années,  s'occiipaht  de 
]à  prière,  et  de  la  conversion  cïe  son  caniaràde,  qui, 
touché  de  ses  îttstructîons  et  de  ses  exemples ,  devint 
iiti  aussi  grand  saint  que  Méthodius. 

Aussi  présomptueux  qu*ignorant,  Michel  était  ce  j^SJJ'jL 
qu'oli  appelle  un  esprit  fort.  Il  censurait  l'Évangile  et  Jmd, 
les  prophètes;  il  niait  la  résurrection,  la  vie  future, 
ietistétibë  dés  délnôns.  Il  regardait  la  fornication  comme 
iiiiè  oétivre  naturelle ,  que  nulle  loi  ne  peut  défendre. 
Cëjpèndâfat,  élevé  par  une  femme  juive,  il  mêlait  à  son 
déisme  qtlelqiles  pratiques  de  là  religion  judaïque.  Il 
voulait  'qtl'on  Sanctifiât  le  samedi  ;  il  prétendait  que  la 
pâque  devait  être  célébrée  selon  l'usage  de  la  Syna- 
^bgae;  il  iiiéttàit  Judas  au  nombre  des  saitits.  Plei4 
de  mépris  pour  Pétude  de  l'antiquité,  tant  pro&ne  qu  eo 
tiésiflstiifue,  loin  de  l'encourager,  il  ne  cherchait  qu*à 
m  éteindre  1^  connaissance ,  déjà  devenue  assex  rare 
eâ  ce  temps-là.  Comme  il  ne  savait  pas  même  l'alpha^ 
ibet ,  et  qu^il  pouvait  à  peine  épeler  son  nom ,  il  né 
Youiait  pas  c[u'on  apprit  à  lire  aux  enfants ,  et  il  se 
perdait  en  raisonnements  politiques  pour  appuyer  cette 
opinion  bizarre.  Le  patriarche  Théodore  mourut  cette 
année  ;  11  flit  remplacé  par  un  digne  successeur  :  ce 
fut  Antoine  de  Syllée. 

Michel  persédutait  impunément  les  orthbdoxëS.  Di^*  su. 
posés  à  tout  souffrir  plutôt  que  de  se  défendre,  ils  ne  Tho^t.* 
lui  donnaient  aucun  sujet  de  craitite.  Mais  bientôt  il  J^V '^Ç; 
tit  s'élever  un  orage  qui  fit  long-temps  flotter  sur  s^  ^^  Î^T"' 
tête  là  couronne  qu'il  avait  usurpée.  Thomas,  dont  Zou.u 5,1.2, 
i^ai  delà  parlé  plusieurs  fois,  commandait  en  Orieiit      ««qq* 

*  •'      *  *  ,  '    Cont.  The- 

les  troupes  confédérées.  Après  la  mort  de  Bardane  ^  il  opii.p.32-46. 
i^élàit  atiàëfaé  &  Léon;  et,  jaloux  de  Michel,  qUi  cbtf^  ^^Tix^ 


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Gforg.p. 
5x1,  5x2, 

5i3. 
Manias. 

Clyc.p.288. 

Oeaes.  p. 
x4-»i^ 

]Uii>uhr«,  ^ 
t*  x4,  p.  0î 


44  HISTOIRE   DU   B4S-¥:|lfPIRl^<  (An  8ai.) 

rait  la  même  carrière,  il  le  haïssait  d  autant  plus ,  que^ 
se  croyant  supérieur  en  mérite,  il  le  voyait  avancer 
par  des  progrès  plus  rapides.  L'assassinat  de  Léon  son 
bienfaiteur,  et  plus  encore  l'élévatioa  de  son  rival,  le 
mirent  en  fureur.  Il  leva  l'étendard  de  la  révolte  '  ;  et , 
dès  qu'il  se  fut  déclaré,  toute  la  jeunesse  de  l'Orient 
accourut  au  premier  signal.  L'impiété  de  Michel ,  sa 
cruauté,  la  corruption  de  ses  mœurs,  le  rendaient 
odieux  à  toutes  les  provinces.  Sa  grossièreté,  son  igno- 
rance, son  bégaiement  même  le  faisaient  înépriser; 
Thomas,  au  contraire,  quoique  d'une  naissance  obs^ 
cure  et  demi-barbare^,  se  faisait  aimer  par  sa  douceur 


>  n  est  dit  dans  la  lettre  adressée 
plos  tard  par  Michel-le-Bègue  k 
Louis-le-Débonnaire ,'  qae  Thomas 
s*était  révolté  sons  le  règne  de  Léon. 
Je  dois  remarquer  qae  ce  témoi-: 
gnage,  tont  suspect  qu'il  est, comme 
on  ponrra  le  voir  ci^près  $  4a, 
a^accorde  mieux  avec  les  récits  des 
historiens  orientaux  qu'avec  ceux 
des  écrivains  grecs.  Voyez  aussi  ci- 
après  ,  not.  a  et  S  3  X ,  p.  46.  — 
S,-M. 

*  Tû  icsvoç  BapSàpcùv,  dît  Cédré- 
nns,  t.  a,  p.  499.  Voyez  ce  qui  a  été 
dit  de  la  patrie  de  ce  personnage, 
t.  za  ,  p.  404,  not.  3,  iiv.  lxvii, 
S  a.  Selon  Cédrénus,  qui  rappoite  t. 
^1  P*  499,  un  grand  nombre  d'im- 
putations odieuses  qui  paraissent 
avoir  été  répandaes  contre  Thomas 
par  ses  ennemis,  et  ses  vainqueurs, 
Thomas  aurait  été  contraint  de  cher- 
cher un  asile  chez  les  Arabes  pour 
éviter  le  châtiment  de  ses  crimes.  Il 
aurait  habité  vingt-cinq  ans  parmi 
les  Arabes,  chez  lesquels  il  aurait 
abjuré  la  religion  chrétienne  pour 
embrasser  lé  musalmtniimej  et  il 


aurait  obtenu  ensnfte  nn  comnan- 
dement,  et  il  leur  aurait  promis  de 
faire  son  potisible  pour  les  rendre 
maitres  de  Tenipire.  Il  est  fmÀlt 
de  voir  que  ce  sont  14  des  allé^ 
gâtions  ennemies,  impossibles  â  éta- 
blir et  à  prouvet.  On  les  retrouve 
toutes  dans  une  lettre  de  Afiobel 
adressée  à  Louis-le-Débonnaire  »  à 
qui  il  rend  compte  de  la  révolte 
et  de  la  mort  de  Thomas.  Voyez 
ci-après,  §  4a,  p.  61.  Ces  menson- 
ges ofBciels  ont  été  leprodoits  parles 
historiens.  Léon  le  grammairien  pré- 
tend, p.  443,  ad  cale.  Tbeoph.^ 
qu'il  se  faisait  appeler  Constantin  et 
prétendait  erre  le  fils  de  Timpéra» 
•  trîce  Irène.  KùvçavTTvcv  éaurôv  ^vo- 

Il  ajoute  que  beaucoup  de  Barbares 
crurent  à  cette  fable.  Elle  est  indi- 
quée aussi  dans  Cédrénus,  t.  a,  p. 
499  f  et  dans  Zonare,  1.  i5,  t.  a, 
p.  1 36.  Elle  est  rappelée  également 
dans  la  chronique  syriaque  d*Abon- 
Ifaradj  ou  Bar  Hébrvns  ,  p.  î5o. 
Toyez  t.  xa  ,  p.  419,  not.  7f  1»^' 
Lxvti  »  $  9i  On  y  dît  ^u'il  était  fil» 


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(An^ai.)  LIVRÉ   txVilî.  WtfiHEt   11.  4^ 

et  son  affabilité.  Une  grande  réputation  de  valeur,  une 
éloquence  naturelle,  un  extérieur  plein  de  noblesse, 
tout,  jusqu'à  ses  cheveux  blancs,  car  il  était  déjà 
sivancé  en  âge,  lui  conciliait  le  respect  et  la  confiance. 
Quoiqu'une  blessure  reçue  dons  une  bataille  Teût  rendu 
boiteux ,  il  avait  conservé  tmite  la  vigueur  de  sa  jeu- 
nesse, et  rien  ne  lui  manquait  de  ce  qui  peut  rendre 
un  ennemi  redoutable.  Mais  nous  verrons  bientôt  que  * 
celait  un  de  ces  génies  subalternes,  qui  ne  brillent 
qu'au  second  rang,  et  que  l'on  croit  capables  de  com- 
mander tant  qu'ils  ne  font  qu'obéir.  Il  commença 
par  se  saisir  de  toutes  les  recettes.de  l'Asie,  et  en  em- 
ploya les  deniers  à  payer  ses  troupes,  à  faire  les  pré- 
paratifs d'une  guerre  qui  devait  décider  de  l'empire, 
et  à  gagner  les  peuples  par  ses  largesses.  Il  mit  dans 
son  parti  toutes  les  villes ,  soit  par  persuasion  et  par 
douceur,  soit  par  menaces  et  par  force.  Deux  pro- 
vinces seules  en  Asie  demeurèrent  constamment  atta- 
tachées  à  l'empereur.  C'étaient,  selon  le  langage  du 
temps ,  ce  qu'on  appelait  le  thème  Obsequium  '  et 

.4*nn  ccrtun  MoasmaryBiaîs  qa*il  se  les  empereurf.  TcuTCV  i^^Ba/hX  fY)«i 

donnait  poor  an  fiU  de  Teniperenr  i\  àoiifbcov  rt  '^ovittv  xai  irtvi^f  ûv,  dÛl- 

CoBstantin,  fils  d*Irèoe,  et  que  les  Xfifèi  xat  SxXolSe'YtvûVy  ràv  icoXXa- 

Aiabes  le  reconnarent  en  cette  qua-  xtç  s-jpuoasudATttv  x«Tà  ttiV  À'yaroXwr. 

Uté,  Ils  placent  son  passage  ches  Cet  auteur  rapporte  anssi  toutes  les 

les  Arabes  en  Tan  8o3.  Les  Armé-  allégationscalomnienses réunies  dans 

siens  placent  aussi   sa  révolte  en  Cédrénns  et  dont  j*ai  parlé;  mais  la 

Tan  So4>  Us  disent  qn*en  cette  an-  manière  dont  ils  en  parlent  Tun  et 

née  il  vint  à  Garin,  qui  est  le  nom  Tautre  indique  qu'ils  y  attachaient 

qu'ils  donnent  à  Arxroum.  Voyez  peu  de  confiance.  Selon  Génésius, 

la  chronique  de  Samuel  d'Ani,  tra-  1.  a,  p.  i4>  il  était  Scythe  dVrigine, 

dnite en  latin,  Milan,  i8i8,p.6a.Le  ti  xai  oxuOt^uv  tû  ^tvfi,  ce  qui  ne 

continuateur  de  Thépphane,  p.  3a,  nous  instruit  pas  dairantage  sur  ce* 

dit  qu*on  le  croyait  d* origine  slave ,  £)it. —  S  -M. 

et  descendant   de   ces    Slaves   qui  '  OaOpsicium*  To  6if&«  to5  i^i-' 

avaient  été  transportés  en  Asie  par  xtou.— S.-M. 


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415 


HISTOIRE   DU   BAS-EMPIRE. 


(An  891.) 


celui  d'Arménie'.  Le  premier  renfermait  Tliellespont 
et  la  ^ysie,  depuis  la  Propontide  jusqu^au  goîfe  d'A- 
dramytte;  le  second  cpptenait  l'ancien  i*oyaume  dé 
Pont,  et  s'étendait  en  Paphiagonie  iuscju*au-delà  dé 
Sinope^.  C^tacyl^s'  et  Olbianus,  gouverneurs  de  cqs 
deux  prpvinces ,  les  mauitinrent  dans  Tobéissance  *  : 
elles  furent  récompensées  de  leur. fidélité  par  l'exemp- 
tion d'un  impôt  fort  onéreux  établi  par  Nicéphore.  On 
payait  tous  les  ans  pour  chaque  cheminée  environ 
quarante-cinq  sols  de  notre  monnaie;  et  cet  impôt  se 
nommait  la  taxe  de  lafumée^. 

La  nouvelle  de  ces  troubles'  mit  en  mouvement  les 

Alliance    de  -,  •         -»i  i»  •         /•  11  /  « 

Thomasayec  Sarrasius.  Ils  crureut  1  occasion  favorable  pour  etenqre 
*"***"'  leurs  conquêtes  et  entrèrent  dans  l'Asie-Mineure.  Ce 
contre-temps  embarrassait  Thomas  :  d'un  coté,  lés 
Sarrasins,  par  cette  fâcheuse  diversion,  pouvaient  don- 
ner à  Michel  le  temps  de  se  mettre. en  défense;  de 
l'autre,  Thomas  ne  pouvait  leur  abandonner  l'Asie 
•sans  aliéner  l'esprit  des  peuples,  et  perdrç  toutes  ses 


X  Oa  plutôt  des  Arméniaqaesi  tûv 
Â.f|[i.tviax(Âv,  qo*il  faut  bien  distin- 
yof r  de  Ti^nnéDÎe.  Voyes  ci-dev.  p. 
dSo,  nàt.  ^,  liv.  uviyS  ss.-— S.-M. 

*  On  ▼oit  par  la  lettre  de  Mlc^el- 
k-ftègne ,  déjà  citée ,  ^ne  les  con- 
quêtes de  Thomas  commencèrent 
par  la  partie  de  Tempire  voisine  de 
l'Arménie  et  des  régions  canca- 
liennes.  11  y  est  dit  :  Direptione  sièi 
êubéiéHt  toUtm  Armenidt  àucatum, 
êmul  et  dneatum  Chaltkea,  qnm 
gens  monttm  Caueasum  imeoHt,  née» 
têon  et  dueem  Armenietntm  cum 
manu  inûida  Jevieit,  Epist.  Mich. 
ap.  Raynald,  Jnn,  t.  14,  p.  63ô. 


3  Selon  Génésiosy  1.  a,  p.  16,  ce 
Catacylas  on  Catacolas,  comme  il 
rappelle,  était  «eoiiD,  i^éhkfot^  èe 
Michel.-~S.-M. 

4  Génésins,  1.  a,  «.  «5,  oomose 
nn  antre  chef  qui  «omhattH  a^so  a*- 
denr  pour  le  sernoe  de  ^ohtl.  C^ 
tait  nn  certain  GhristoplM  00  Ckti- 
stophorns,  revéto  dn  titre  d#  me^git' 
ter  ou  magistros,  dont  ks  fib  V»^ 
sacius,  Ba^d&cte<,  et  Nasor  âiMHt 
patriciens. — S.-M. 

^  KaTrvisce'v.  Il  n*était  e<q>etKlMit  ai 
pins  onéreux  ni  pins  bizarre  qiM 
notre  impôt  sur  les  portes  et  teê^ 
très,  proTenant  Aet  Aaglait.  -^ 
8.-M. 


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(A»8ax.)  LIVRE    îiXyit|..  MICHEL   II.  ^7 

ressources.  Il  résolut  de  faire  un  grand  effort  pouf 
terminer  prcMnptemeot  cette  guerre,  et  forcer  les  Sar- 
rasins à  la  paix.  Au  lieu  de  marcher  à  leur  rencontre, 
il  se  jeta  en  Syrie  avec  une  nombreuse  armée.  A  cette 
nouvelle ,  les  Sarrasins  reviennent  sur  leurs  pas  pour 
défendre  leurs  foyers,  et  trouvant  Thomas  en  état  de 
leur  résister  avec  avantage,  ils  écoutent  des  propo- 
sitions de  paix  :  ils  conviennent  de  l'aider  de  leurs 
troupes;  et  de  son  côté  il  promet  de  leur  abandoqner 
les  villes  de  la  frontière  et  de  leur  payer  tribut^.  Ce 
traité  conclu,  il  eut  la  liberté  d'entrer  dans  Antioche, 
où  il  se  fit  couronner  empereur  par  le  patriarche  Job*. 
Les  Sarrasins ,  qu'il  avait  intéressés  à  ses  succès ,  lui 
donnèrent  des  troupes,  et  en  rassemblèrent  en  sa  fa- 
veur de  toutes  les  provinces^,  Son  armée  se  trouva 
bientôt  grossie  d'une  multitude  de  Barbares^.  L'Ér 
gypte,  la  Perse,  les  Indes,  l'Assyrie,  l'Arménie,  la 
Chaldee  ^,  ribérie  ^,  et  tous  les  pays  mahométam,  si^ 


1  iomiaaro  ftmx'^iLvtoç  irpo^ouvat 
TOÔTOtç  rk  ^tofxatwv  8pia,  >cai  rh 
aÙTuv  aÙToTcWcx6Îptov6^er4ai  àçx'W* 
Cedr.  t.  a,  5oi.— S.-M. 

a  A&ToxpâT<i>p  l*  Àvnox«t«  «va^o- 
pturroit  ic«pà  tcû  nfjvixoÛTa  rh  ^xet- 
«t  itoni.ftivcvTo;  ixx).yi<TÎav  î«€.  Cedr. 
t.  a,  p.  5oi.-^S.-M. 

3  Cert  là  ce  qni  a  fait  dire  à  Mi- 
chel dans  Aa  lettre  à  Lonîs-le-Débon- 
^ire  :  Thomas  exiens  de  Perside 
tum  Sarracenis  et  P^rsis,  Hiberis\ 
Armenns  et  Aveugis,  et  reliquis  gen- 
Hbus  alienigenarum^  tempore  pree- 
iicH  Leonis  subito  cum  prœdtcta 
manu  ^valida  perprœHaretur.  Epist. 
MichaelU,  ap.  llaynald.  Annal,  t. 
I4,p.  65.— S.-M. 


vei,  oùptovov  ^i  tôv  wpocrotxwv  iQp.îv, 
àXXà  xat  Tâv  ix  tyiv  wcpaïav,  Ât'vu- 
irrtwv,  tv^wv,  nepcr&v,  Â^oupîttv,  Ap« 
(xsvîcâv,  XoX^aicùv,  fênipttv,  Zixx&v 
xal  Xaêiipov.  Cedr.  t.  2.  p.  5oi.-— 
S.-M. 

^  La  Chaldée  dont  il  est  (|ne8tîoll 
ici  nVst  pas  le  pars  célèbre  dont 
Babylone  était  la  capitale  ,  maïs  une 
contrée  montnense,  située  entre  la 
Tille  de  Trébizonde  et  TArménie.  Oh 
rappelle  actnellement  Tcheldir,  J'en 
ai  déjà  parlé,  t.  5,  p.  366,  not.  3,  lir. 
XVII,  S  9,  et  t.  6,  p.  397,  «o*-  »» 
lîv.  XXXVIII,  S  54. — S.-M. 

6  C*est  lé  pays  qu'on  appelle  à 
présent  la  Géorgie. — S.-M. 


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48  HiSl^OIRE   DU   BAS-£MPIÀË4  (An  gai.) 

tues  sur  les  bords  du  Pont-Euxin  et  de  la  mer  Cas- 
pienne, lui  envoyèrent  leurs  soldats '.  Les  disciples 
de  Manès,  qui  formaient  un  état  sur  les  frontières  de 
TArménie,  se  joignirent  à.lui^.  Tant  de  forces  furent 
l'origine  de  sa  faiblesse;  suivi  de  cette  nuée  de  Bar- 
bares', il  devint  comme  eux  fier,  cruel,  insolent.  U 
se  livra  sans  réserve  aux  plaisirs,  et  cessa  de  mériter 
Tempire  dès  qu'il  eut  pris  le  titre  d'empereur.  Il  n'a- 
vait point  de  fils;  songeant  à  perpétuer  sa  puissance , 
avant  même  que  de  l'avoir  affermie,  il  adopta  un  in- 
connu, aussi  mal  fait  d'esprit  que  de  corps,  dépourvu 


'  On  a  pu  remarquer  ci-dev.  not. 

3,  4,  p.  47)  dans  la  liste  des  Barbares 
qui  fournirent  des  troupes  à  Thomas, 
les  noms  de  deux  nations  qui  ne  re- 
paraissent pas  ici.  Les  uns  sont  les 
Zieches  et  les  antres  les  Cabires.  Les 
premiers  sont  un  peuple  qui  occu- 
pait It  partie  la  plus  occidentale 
du  Caucase,  an  nord-ouest  de  la 
Colchide^  dans  le  voisinage  des  Abas- 
ges  ou  Abkhat*  U  en  est  question 
plusieurs  fois  dans  Procop.  de  BelL 
Pen,  L  a,  c.  a  9,  et  de  Bell.  Gotlu  1. 

4,  c.  4.  Hs  existent  encore  dans  le 
mémt  pays.  Quant  aux  Cabires,  j'i- 
gnore quel  peuple  ce  pouvait  être  ; 
je  pense  qu'il  s'agit  des  hordes 
répandues  alors  dans  l'Asie;  mais 
je  n'en  ai  pas  la  certitude.  Les 
autres  passages  de  la  Byzantine ,  on 
il  est  question  de  cette  nation ,  ne 
peuvent  nous  servir  à  la  faire  mieux 
connaître.  La  plupart  des  peuples 
dont  il  est  question  ici ,  ceux  de  la 
Chaldëe  persique,  de  Tlbérie,  de 
r Arménie,  les  Zieches  ,^ n'étaient  pas 
musulmans ,  comme  on  pourrait  le 
croire  par  la  manière  dont  Lebeau 
reproduit  rénnmération  de  Cédré- 


nus.  A  cette  époque,  il  n'y  avait 
pas  encore  de  rausulmaus  sar  les 
bords  de  la  Mer  Noire. — S.-M. 

*  Le  continuateur  de  Théophane , 
p.  35,  ajoute  à  la  phrase  de  Cédré- 
nus  rapportée  dans  la  not.  4,p.47»  les 
mots,  xai  TcavTtùv  tûv  8t,  Ma^vTO; 
o*jçoixcûvT(dv  <^Cf p.a<it  xac  deoiciop.eL9i. 
C'est  là  ce  qui  a  donné  lien  a  Leb«an 
de  distinguer  les  sectateurs  de  Mâ- 
nes des  autres  auxiliaires  de  Thomas, 
tandis  qne^  par  la  manière  dont 
s'exprime  le  continuateur  de  Théo- 
phane,  on  voit  qu'il  s'est  servi  d'une 
phrase  vague,  dans  laquelle  il  a  l'air 
d'attribuer  la  doctrine  de  Manès  aux 
Persans,  aux  Indiens,  aux  Armé- 
niens et  aux  autres  nations  de  l'O- 
rient qu'il  énumère.— S,-M . 

3  Génésinsy  1.  a,  p.  i5,  ajoute  les 
•Sabires,  peuple  qui  n'existait  plus 
à  cette  époque,  les  Al  vires,  les  La- 
zes,  les  Vandales,  les  Slaves,  les 
Huns  et  les  Goths,  k  la  liste  des 
peuples  qui  marchèrent  sons  les  dra- 
peaux de  Thomas.  L'énnmération 
qu'il  donne  n'est  qu'une  liste  tirée  des 
auteurs  que  j'ai  cités,  amplifiée  et 
sans  autorité.— S.-M. 


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(An  gai.)  LIVRE    LXVIII.  MUCHEL    11.  49 

de  tout  genre  de  mérite,  mais  souple,  conjplaisant  et 
flatteur;  il  lui  donna  le  noni  de  Co*îStance^  • 

A  son  retour  de  Syrie,'  les  peuples  de  l'empire' ne  Aw  82^. 
trouvèrent  plus  en  lui  ce  caractère  de  bonté  et  de  clé-  Di^""^^. 
mence  qui  avait  gagné  leurs  eœurs.  Toutes  les  villes  JS^**^® 
qui  tardaient  à  lui  ouvrir  leurs  portes ,  et  à  le  recon- 
naître pour  empereur,  'étaient  impitoyablement  sacca- 
gées. Cependant ,  Michel  ^  se  persuadant  que  tout  ce 
que  publiait  la  renommée  était  exagéré,  se  contenta 
de  faire  p^teser. quelques  troupes  en  Asie;  c'en  était,  à 
son  avis,  plus  qu'il  ne  fallait  pour ' terrasser  un  re- 
belle qu'il  affectait  de  mépriser.  A  la  première  ren- 
contre, elles  furent  taillées  eh  pièces.  Thomas  fait  eu 
même  temp3  construire  des  barques  légères  pour  le 
passage  de  ses  troupes,  et  d'autres  plus  fortes  pour  le 
transport  des  chevaux  et  des  provisions.  Il  se  saisit 
des  vaisseaux  de  l'empire  qui* se  trouvent  sur  les  cotes 
d'Asie,  et  ordonne  de  le^  rassembler  tous  à  l'île  dû 
Lesbos.  Il  marche  lui-même  ver?  Abyde  à  la  tête  de 
qugitre-vingt  mille  hommes,  à  dessein  de  passer  dans 
la  Cbersonèse  de  Thrace.  Pour  mieux  ressembler  à 
Xerxès^,  auquel  il  prenait  plaisir  d'être  comparé ,  il  dé-  . 
sole  tout  le  pays  qu'il  traverse,  et  réduit  en  cendres 
le»  villages  et  les  villes.  Une  Seule  place,  plus  forte 
que  les  autres,  se  défendait  du  pillage;  il  la  fait  atta- 
quer par  sou  fils  adoptif  à  la  tête  d'un  détachement. 
Ce  jeune  téméraire,  sur  la  foi  de  quelques  imposteurs 


I  Cett<J  circonstance  est  donnée  «tance. — S.-M. 

par  le  contlnuatenr  de«Théophane ,  ^  C'est  tout  simplement  nne  ré- 

p.  33.  Génésias  en  parleaussi,  1.  a,  miniscence  classique  de  Thistorien 

p.  16,  et  îL  appelle  ce  personnage  Génésius^p.  14.  HétùBi^ç^  toIç  é{i.o- 


Pscudo-Constanûus  ou  le  faux  Cpn-  .  wiçoiç  àiro^avmi. — S.-M. 
Tome  XIIL 


4 

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5o  HISTOIRE    DU    BAS-EMPiaK.  (^i^^  g^^ 

qui  se  disaient  prophètes-,  s«talt  vanté  la  veille  que , 
tel  jour^  il  entrerait  triomphant  dans  Constahtinople  ; 
il  marche  à  cette  forteresse  sans  précaution ,  sans  gar- 
der aucun  ordre,  et  tombe  dans  une  embuscade  où 
Olbien  l'attendait.  Il  y  périt  avec  sa  troupe.  On  porte 
sa  tête  à  l'empereur ,  qui  la  renvoie  à  son  père.  Tho- 
mas ,  qui  pouvait  aisément  remplacer  un  fils  de 
cette  espèce,  s'aperçoit  à  peine  de  sa  perte;  il  profite 
d'une  nuit  obscure  et  passe  l'Hellespont  à  Horcosie^. 
xxxrii.         La  défaite  des  troupes  envoyées  en  Asie,  et*la  marche 

'c^nstonti-*  de  Thomas  qui  approchait  de  l'Hellespont ,  avaient 
nopie.  gjjgjj  donné  de  l'inquiétude  à  l'empereur.  Il  était  sorti 
de  Constantinople,  et  avait  parcouru  toute  la  Thrace 
sur  la  route  que  Thomas  devait  tenir,  exhortant  les 
habitants  des  villes  et  des  forteresses  à  lui  être  fidèles, 
et  à  défendre  leur  vie  et  l'honneur  de  leurs  femmes 
et  de  leurs  filles  contre  des  barbares.  Mais  le  tnépris 
qu'on  faisait  de  Michel  rendait  ses  paroles  inutiles;  et 
dès  que  Thomas  parut,  tous  ces  peuples  se  joignirent 
à  lui  pour  aller  assiéger  Constantinople.  Cependant 
Michel ,  aux  approches  du  danger ,  travaillait  à  se 
mettre  en  défense.  Il  fit  venir  Olbien  Qt  Catacylas 
avec  leurs  troupes;  il  rassembla  tput  ce  qu'il  put  de 
vaisseaux,  et  fit  tendre  la  chaîne  qui  fermait  l'entrée 
du  golfe. 
xxxiT.  Dans  Wle  de  Scyros,  une  des  Cyclades,  vivait  alors 

Sonarriyée.  ^^  ^^^^  ^  nommé  Grégoire  Ptéro te  ^.  C'était  un  offi- 
cier  de  marque,  cousin  de  l'empereur  Leon^,  qui  l'a- 

»  npoç  Tw  ©paxYiv  œnb  toû  x(>>piou  Theoph.  p.  37. — S. -M. 
0    xaXoûatv    Ôpxwaiov    «epatoorai.  3  A^tXçi<^cOç   tyi^flcwiov  A^ovtoç 

Cedr.  t.  a,  p.  5ox.La  posîtiori  exacte  to5  PooiXscoç.  Cedr.  t.  a,  p.  5o«. 

de  ce  lieu  est  inconnue.' — S^M.    •  $.»M. 

»    rpyj-YOpwc  ô  irrtpwTOç.    Cont. 


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(An  8aa.)  LITRE   ZXVIU.  MICHEL   II.  5l 

vait  souvent  employé  dans  le  commandement^  Après 
le  massacre  de  Léon,  ne  pouvant  retenir  sa  colère,  il 
avait  osé  faire  ^n  face  au  nouveau  prince  les  reproches 
les  plus  vifs.  A  quoi  Michel  avait  répondu  par  une 
ironie  insultante^  lexhortant  à  prendre  patience  et  à 
se  soumettre  sans  -murmurer  aux  décrets  de  la  Pro- 
vidence. 11  Favait  ensuite  chassé  de  la  cour  et  relégué 
à  Scyros.  Thomas  le  fit  venir,  et  lui  donna  un  corps 
de  douze  mille  hommes  à  commander;  il  mit  un  autre 
officier,  à  là  tête  de  la  flotte ,  et  leur  fit  prendre  les 
devants  peur  bloquer  la  ville  du  côté  de  la*  terre  et 
de  la  Hier.  La  flotte  n'eut  pas  de  peine  à  rompre  la 
dMitne,  et  traversa  le  golfe  dans  sa  longueur  jusqu'à 
)a  pointe  de  Blaquernes,  où  se  rendirent  aussi  les 
douze  mille  hommes  commandés  par  Grégoire.  Mais 
ni  les  uns  ni  les  autres  ne  firent  aucune  entreprise 
contre  |a  wlle.  Cependant  Thomas  feiàait  construire 
des  machines  de  toute  espèce  pour  battre  les  murailles. 
A  la  place  de  ce  fils  adoptif  qu'il  avait  perdu,  il  en 
choisit  un  autre,  auqqel  il  donna  le  nom  d'Anastase. 
C'était  un  moine  apostat  et  libertin ,  qui  ne  s'était  fait 
valoir  auprès  de  lui  que  par  l'audace  et  l'impudence. 
Secondé  de  ce  collègue,  et  comptant  beaucoup  sur  le 
nombre  de  ses  troupes,  il  se  présenta  devant  la  ville, 
se  flattant  qu'à  la  première  vue  on  allait  lui  ouvrir  les 
portes.  Étonné  de  voir  qu'il  ne  se  faisait' aucun  mou- 
vement, et  qu'au  lieu  des  acclamations  qu'il  attendait 
on   l'accablait  de  malédictions  et  d'outrages,  if  alla 
camper  vers  la  pointe  du  golfe  près  de  l'église  de  Saint- 
Corne   et  de  Saint-Damien  ^  De  là  il   détacha  une 

I  En  un  liea  qai  portait   le  nom  de  Paulin ,  tv  roTç  HauXtvcu.   Cedr. 
1. 1,  p.  So^. — S.-M. 


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Sa  HISTOIRE  J>U    BASrEMPmK^  (in  «aa.) 

partie  ^e  son  armée,  pour  brûler  et  détraire  toutes 
les  habitations  le  long  dû  Bosphore,  jusqu'au   Pont- 
Euxin. 
xxxT.  Pendant  qu'il  travaillait  à  se  mettre  hors  d'iasultç 

^tuqiie    de  * 

la  ville,  par  de  bous  retranchements,  il  aperçut  du  haut  d'une 
ëminence  l'empereur  qui  plantait  un  étendard  sur  le 
toit  de  Sainte-Marie-de-Blaquernes,  pour  mettre  la 
ville  sous  sa  protection ,  et  Théophile,  fils  de  l'empe- 
reur, qui,  marchant  à  la  tête  du  clergé,  faisait  sur  les 
murailles  le  tour  de  la  ville,  portant  le  *bois  de  la 
vraie  croix,  et  la  robe- qu'on  croyait  être  ctlle  de  la 
sainte  Vierge.  Le  danger  inspirait  à  ces  princes  cette 
piété  passagère.  Thomas,  qui  n'était,  pas  plus  dévot,  en 
conçut  néanmoins  de  l'inquiétude;  il  craignit  que  le 
ciel  ne  se  déclarât  pour  ses  ennemis.  Toutefois  il  ré- 
solut de  donner  l'assaut.  Dès  le  matin  du  jour  suivant, 
il  partage  en  deux  son  armée;  il  en  donne  l£^  moitié 
à  son  fils  pour  attaquer  le  rempart  depuis  la  porte 
Dorée  jusqu'à  la  Propontide ,  et  se  met  à  la  têtq  de 
l'autre  pour  forcer  la  ville  du  côté  de  Blaauernes.  Deux 
armées  s'avancent  donc  en  ordre  de  bataille,  précédées 
d'un  terrible  appareil  de  machines.  On  plante  au  pied 
des  murs  des  échelles  qui  les  égalent  en  hauteur; 
elles  sont  bientôt  couvertes  d'autant  de  files  de  soldats, 
qui  vont  .porter  ou  cl>ercher  la  mort  au  haut  des  mu- 
railles. Les  béliers,  les  catapultes,  les  balistes,  tout 
est  en  mouvement;  tout  s'anime  à  la  ruine  des  murs, 
ou  à*  la  perle  de  leurs  défeifseurs.  Le  péril  et  la  ter- 
reur ne  sont  pas  moindres  du.  côté  de  la  mer.  La  flotte 
ennemie,  qui  borde  d'un  côté  le  golfe,  de  J'aubre  la 
Propontide,  fait  pleuvoir  dans  la  ville  les  feux,  les 
pierres,  les  javelots.  Les  habitants,  non  moins  ardents 


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(Aa  82a.)  LIVRE   LXVIH.  MICHEL    II.  53 

3i  se  défendre,  mettient  tout  en  œuvre  pour  repousser 
ces  efforts.  On  fait  tomber  du  haut  des  tours  d'énormes 
masses  de  pierres.  Des  flots  de  plomb  fondu,  d'eau 
bouillante,  de  sable  brûlant,  coulent  le  long  des 
échelles ,  embrasent  et  précipitent  les  assaillants. 
L'inexpérience  des  barbares  qui  faisaient  jouer  les  ma- 
chines favorisait  encore  les  assiégés.  Les  catapultes  et 
les  baîistes,  employées  de  trop  loin,  ou  ne  portaient 
pas  jusqu'aux  murs,  ou'n'avaieùt  qu'une  faible  pgrtée; 
tandis  que  celles  des  assiégés,  placées  avantageusement, 
avaient  un  effet  assuré.  Un  contre-temps  encore  plus 
fâcheux  rompit  toutes  les  mesures  de  Thomas.  Pen- 
dant le  fort  de  Tattaque,  il  s'élève  une  violente  tem- 
pête qui  rompt  les  câbles  des  aircres,  disperse  les 
vaisseaux,  et  délivre  la  ville  de  danger  du  coté  de  la 
mer.  Tant  de  mauvais  succès  obligèrent  Thomas  de  se 
retirer;  et  comme  l'hiver  approchait,  et  que  les  fri- 
mas de  la  Thrace  auraient  -été  insupportables  à  ses 
trètipes,  accoutumées  à  des  climats  plus  tempérés,  il 
alla  prendre  ses  quartiers  au  fond' de  la  Chersonèse. 

Aux  premiers  jours  du  printemps,  il  revint  devant    AwSaS. 
Constantinople,  mais  il  trouva  Michel  encore  mieux     ^"J^; 
préparé  à  le  recevoir.  Ce  prince  avait  rassemblé  pen-     attaq»*c. 
dant  l'hiver  un  plus  grand  nombre  de  troupes  et   de 
vaisseaux.  Thomas  s'étant  approché  pour  donner  un 
nouvel  assaut,  Michel  se  montra   sur   le  haut  de  la 
muraille,  et  adressant  la  parole  aux  Grecs  de  l'armée 
ennemie  :  Braises  compatriotes^  s'écria-t-il ,  de  quoi 
me  suis'je  rendu  coupable  à  votre  égard?  Quel 
mal  vous  ont  fait  vos  frères  dont  vous  venez  ré- 
pandre le  sang?  Quittez  ces  armes  parricides^  que 
la  fureur  aveugle  d*un  rebelle  vous  a  mises  entre 


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54  HISTOIRi:    ttU    BAS-lMtfPlIlE.  (Xn  a».) 

ies  mains.  Je  vous  promets  cT oublier  votre  révolte 
et  de  vous  combler  de  biens ,  si  vous  voulez  vous 
souvenir  que  je  suis  votre  empereur^  et  que  cette 
ville  est  votre  patrie.  Ces  paroles,  loin  de  faire  im- 
pression sur  les  cœurs,  n'inspirèrent  que  du  mépris. 
Persuadés  qu'elles  étaient  l'effet  de  la  crainte  et  de  la 
faiblesse,  ils  s'avancent  en  désordre,  comme  étant 
assurés  de  ne  point  trouver  de  résistance.  Michel  pro- 
fite du  moment ,  et  fait  sur  eux  une  furieuse  sortie  avec 
toutes  ses  troupes.  Us  ne  s'attendaient  à  rien  moins, 
et  du  premier  choc  ils  sont  renversée.  Michel  ne  rentre 
dans  la  ville  qu'après  un  grand  carnage.  Pendant  ce 
même  temps ,  la  flotte  de  l'empereur  avait  encore  iin 
succès  plus  étonnant  :  tous  ses  vaisseaux  élant  sortis 
du  port  et  s'ctant  rangés  en  ordre  de  bataille,  la  flotte 
ennemie  qui  semblait  n'attendre  que  le  signal,  et  d'où 
partait  déjà  une  nuée  de  pierres  et  de  javelots,  frappée 
d'une  terreur  panique ,  tourne  tout-à-coup  vers  le  ri- 
vage :  les  soldats  et  les  matelots  vont,  les  uns  se  jeter 
dans  l'armée  de  l'empereur  qui  combattait  encore,  et 
se  rendent  à  lui;  les  autres,  fuyant  sans  être  poursui- 
vis, gagnent  le  camp  de  Thomas. 
^^^jj  Ce  double  échec  détacha  Grégoire  du  parti  des  re- 

Défaitede  bclles.  Il  vovait  quc  Thomas,  touiours  malheureux  et 

Grégoire.  j  k  /  j 

incapable  de  se  relever  de  ses  pertes ,  commençait  à 
tomber  dans  le  mépris,,  et  qu'il  ne  pouvait  éviter 
d'être  bientôt  accablé.  Il  crut  qu'il  était  temps  de 
songer  à  sa  propre  sûreté,  s'il  ne  voulait  pas  être  en- 
veloppé dans  la  même  ruine.  Il  craignait  encore  pour 
sa  femme  et  pour  ses  enfants,  que  Michel  retenait  pri- 
sonniers. Pour  faire  savoir  son  dessein  à  l'empereur, 
il  se  servit  d'un  moine  du  monastère  de  Stude  qu'il 


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(Ab  «a3.)  LIVKE    LXVIII.  MICHEL    II.  55 

avait  avec  lui.  £n  même  temps  il  se  sépare  du  gros 
de  l'armée  avec  une  partie  de  sa  troupe,  qui  voulut 
bien  le  suivre ,  et  alla  camper  sur  les  derrières.  Il  ne 
doutait  pas  que,  sur  son  avis,  l'empereur  ne  fît  une  vi- 
goureuse sortie;  alors  il  devait  charger  en  queue  les 
troupes  de  Thomas,  qui,  se  trouvant  ainsi  enfermées, 
ne  pouvaie&t  imanquep  d'être  taillées  en  pièces.  Mais, 
pour  se  détacher  de  Thomas,  il  aurait  dû  attendre  que 
son  avis  fût  parvenu  à  l'empereur;  sa  précipitation  le 
perdit  :  le  moine  ne   put  pénétrer  dans  Coristanti- 
nople,  dont  les  assiégeants  fermaient  toutes  les  ave- 
nues; et  Thomas  ne  doutant  point  de  la  perfidie  de 
Grégoire,  tomba  sur  lui  avec  un  gros  détachement,  le 
battit,  le  prit  lorsqu'il  fuyait,  et  le  fit  mourir  comme 
traître.  Il  rejoignit  ensuite  sou  armée,  et,  fier  de  cet 
exploit^  qu'il  vantait  comme  une  grande  victoire,  il 
envoya   ordre   à   la  flotte  qu'il  avait  à  Lesbos  de  se 
rendre  à  l'entrée  du  Bosphore.  Elle  était  composée  de 
trois  cent  cinquante  grosses  barques,  partie  armées  en 
guerre ,  pajptie  chargées  de  provisions.  Poussée  par  un 
vent  Êivorable,  elle  aborda  en  peu  de  temps  au  port 
de  Byride  ',  Ueu  inconnu  aujourd'hui,  mais  qui  paraît 
avoir  éta  sur  la  Proponlide.  La  flotte  de  l'empereur 
vint  l'y  attaquer  ;  la  plupart  des  barques  furent  prises , 
ou  consumées  par  le  feu  grégeois;  celles  qui  échap- 
pèrent, eurent  le  bonheur  d'entrer  dans  le  golfe,  et  de 
gagner  le  port  de  Blaquernes ,  où  l'équipage  les  aban- 
donna pour  se  jeter  entre  les  troupes  de  terre.  Tous 
les  jours  il  se  livrait  de  petits  combats  entre  les  assié- 


'  Tô  x<*pi<?  irpcoop[i.KiTai  tûv  B«-     nar.  1.  x5,  t.  a,  p.  x38,  <m  lit  Bopt- 
çi^«v.  Ccdr.  t.  a ,  p.  Soi.  Dan*  Zo-      Saç. — S.-M. 


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xxxviir. 

Thomas 

yamcu 


56  HISTOIRE    DU    BAS-EMPIRE.  (An  Saî.) 

géants  et  les  assiégés.  Michel ,  son  fils  Théophile ,  Ôl- 
bien,  Catacylas,  commandaient  tour-à-tour  les  sorties, 
et  l'avantage  ainsi  que  la  perte  se  partageaient  à  peu 
près  également.  L'empereur  n'osait  livrer  de  bataille 
générale  à  une  armée  beaucoup  plus  nombreuse  que 
la  sienne,  et  plus  forte  en  cavalerie. 

Dans  cet  état  d'incertitude,  il  survint  à  l'empereur 
par  un  secours  imprévu  qui  lui  inspira  d'abord  plus  de 
^es  u  gares,  ^p^^jj^jç,  q^g  jg  confiauce.  Mortagon,  roi  des  Bulgares  ',' 
instruit  du  danger  où  se  trouvait  Constantinople ,  en- 
voya secrètement  dire  à  Michel  qu'il  allait  ^marcher 
contre  Thomas,  et  rendre  à  l'empereur  le  service  d'ua 
alHé  brave  et  fidèle.  Ces  offres  de  bienveillance  firent 
trembler  l'empereur;  il  craignait  que  Mortagon  ne 
voulût  rarracher  des  mains  de  Thomas,  pour  profiter 
lui-même  de  ses  dépouilles.  D'ailleurs  il  senttiit  bien 
qu'il  faudrait  payer  un  tel  secours  :  et  il  était  très-avare. 
Il  remercia  donc  le  roi  bulgare,  et  lui  fit  répondre 
qu'il  espérait  se  défaire  bientôt  de  son  ennemi,  sans 
avoir  besoin  d'aucun  secours.  Mais  Mortagon,  qui  se 
promettait  un  riclie  butin  dans  la  défaite  de  Thomas , 
se  fit  honneur  de  secourir  Michel  malgré  lui;  il  vou- 
lait, disait-il,  s'acquitter  d'un  devoir  indispensable,  que 
lui  imposait  le  traité  d'alliance  fait  avec  Léon  l'Armé- 
nien. Il  marcha  vers  Constantinople  à  la  tête  d'une 
grande  armée ,  et  vint  camper  à  quelque  distance  des 
rebelles  *.  Thomas  se  trouvait  dans  un  grand  embar- 
ras :  s'il  divisait  son  armée,  il  ne  pouvait  ni  laisser 


*  Voyez  cî-dev.  §  9,  p.  i3,  not.  vov,  selon  Cédrénus,  t.  a,  p.  5o5. 

3. —  S.-M.  On  lit  dans  Zonar.  1.    i5,  t.   a,  p. 

»  En  un  lieu   appelé   Cedocttis ,  i38,xaTàTb  Kïj^jwov.  —  S.-M. 
xotTût  Tov  Ktî^ouxtov  Xwf  ov  xaXo6{i.e- 


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I  Elle  se  DommaU  Diabasis.  Cedr.  t.  a,  p.  5o6»— -S.-M. 


xxxrz. 

n  lève  le 


(X*8îi3.)  LIVRE    LXVIII.  MIGHBL    II.  67 

assez  de  troupes  pour  continuer  le  siège  et  résister 
aux  sorties^  ni  en  détacher  assez  pour  être  en  état  de 
combattre  les  Bulgares.  Il  prit  le  parti  d'abandonner 
le  siège  et  de  marcher  à  Mortagon  avec  toutes  ses 
forces.  Dès  que  les  deux  armées  durent  en  présence , 
la  bataille  se  livra  et  fut  très-funeste  à  Thomas.  Il  y 
perdit  ^rand  nombre  de  soldats;  ceux  qui  échappèrent 
au  fer  des  Bulgares  se  sauvèrent  sur  les  montagnes ,  et 
ne  se  rallièient  auprès  de  leur  chef  qu'après  que  Mor- 
tagon ,  fier  de  sa  victoire  et  chargé  de  butin ,  eut  re<« 
pris  la  route  de  son  pays^,  traînant  à  sa  suite  une  nïtil^ 
titude  de  prisonniers. 

Cette  défaite  ruina  entièrement  les  affaires  de  Tho* 
mas.  Ce  qui  lui  restait  de  vaisseauk  se  rendit  à  Fem-  "«îége. 
pereur.  Ayant  lui-même  recueilli  les  débris  lie  son  '; 
armée,  il  n'osa  retourner  devant  Constantinople,  et  se 
tint  campé  à  dixlieues  de' cette  vidle ,  dans  une  plaine 
fertile  et  commode  %  d'où  ses  paitis  ravageaient  toutes 
les  campagnes  d'alentour.  Michel  se  mit  à  la  tête  de 
tout  ce  qu'il  avait  de  troupes ,  et,  soutenu  des  conseils 
et  de  la  valeur  d'Olbien  et  de  Catacylas,  il  alla  cher^ 
cher  Thomas  qui ,  dans  l'état  oii  il  était  réduit ,  n'avait 
plus  sur  lui  aucun  avantage.  Thomas  accote  la  ba-« 
taille,  et  pensant  s'aider  d'un  stratagème,  il  ordonne 
à  ses  soldats  de  p/*endre  d'abord  la  fuite,  pour  attirer 
après  eux  l'armée  de  l'empereur,  et  de  retourner  sur 
elle  avec  vigueur  lorsque  la  poursuite  y  aurait  jeté  le 
désordre.  Il  ignorait  la  disposition  de  ses  troupes  : 
harassées,  épuisées  de  fatigues,  rebutées  d'une  guerre 
de  trois  ans,  qu'elles  avaient  cru  terminer  en  peu  de  mois, 


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58  HISTOmX    DU   BAS*KMPIR£.  (An  8a3. 

elles  ne  désiraient  que  de  revoir  leurs  foyers;  et  ayant 
perdu  toute  espérance^  elles  s'ennuyaient  de  se  voir  les 
victimes  d'une  ambition  téméraire'et  si  mal  conduite. 

\  Elles  furent  donc  très*promptes  à  obéir  au  premier 

ordre,  et  prirent  la  fuite  dès  le  commencement  du 
combat.  Mais,  au  signal  qui  leur  fut  donné  pour  tour- 
ner visage,  elles  continuèrent  de  fuir  encore  plus  fort, 
et,  s'étant  dispersées  de  toute  part,  elles  ne  revinrent 
que  pour  se  donner  à  l'empereur.  On  les  voyait  arriver 
par  bandes  au  camp  de  l'armée  impériale.  Thomas, 
peu  accompagné,  se  sauva  dans  Andrinople,  et  son 
fils  Anastase  dans  Bizye,  à  huit  ou  neuf  lieues  vers  le 
nord  ^,  afin  que  crelui  qui  serait  assiégé  pût  recevoir 
du  secours  de  l'autre. 

xt..  L'emperetir  marcha  aussitôt  vers  Andrinople,  et 

Mort  de  ,  ^  ,  i,        .      .  ,  1         .  • 

Thomas,  sdchaut  que  la  ville  était  mal  pourvue  de  vivres  ^  il 
résolut  de  la  prendre  par  famine.  Thomas  com- 
meniça  par  mettre  dehors  ceux  qui  étaient  hors  d'état 
de  servir  à  la  défense;  et  cet  ordre,  raisonnable  en 
lùii-même,  devint  odieux  par  la  dureté  barbare  des  sub* 
alternes  qui  l'exécutèrent  Comme  la  disette  croissait 
tous  les  jours,  et  que  Thomas  ne  retranchait  rien  de 
sa  dépense ,  rendant  la  famine  même  tributaire  de  son 
luxe  et  de  ses  débauches,  les  habitants,  réduits  au 
désespoir,  ne  songèrent  plus  qu'à  s'affranchir  du  joug 
d'un  maître  qui  faisait  si  peu  de  cas  de  leur  vie.  Les 
uns  s'évadaient  de  la  ville  par  des  poternes  qui  com* 


>  Bii^a   on  Bîzye^  BiÇuv),  étaic  zye  n'était  pas  éloignée  de  cette  mer. 

à  ane  pins  grande  diatance  d*Aii*  Elle  porte  à  présent  le  nom  de^ûa. 

drinople,  dans  la  partie  de  la  Thrace  II  en  est  question  dans  Pline,  dans 

connue  sous  le  nom  d*Aspre,  qui  Ovide  et  dans  d*aatres  auteurs  au- 

s*étendaitleIong  deIamerNoire.Bi-  dens. — S.*Iif. 


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(Aa«a5.)  MVEE   LXVIll.  MICHEL   If.  5g 

muniquaient  au  dehors;  les  autres  se  coulaient  de  nuit 
le  long  des  murailles,  par  des  cordes  attachées  aux 
créneaux.  Ces  fugitifs  allaient  se  jeter  entre  les  bras 
de  Tempereur,  ou  se  raidaient  à  Bizye  auprès  d'Ana-* 
stase,  qui  n'avait  ni  assez  de  forces  ni  assez  de  courage 
pour  courir  au  secours  de  son  père*  Enfin ,  après  cinq 
mois  de  siège,  tout  ce  que  la  rage  de  la  faim  peut 
changer  en  aliments  étant  consommé,  jusqu'aux  cuirs  de 
leur  chaussure ,  quelques  habitants  trouvèrent  moyen 
de  faire  savoir  à  Michel  qu'ils  étaieiH*  préls  à  se 
rendre  s'il  leur  accordait  le  pardon  ;  et ,  l'ayant  obtenu, 
ils  se  saisirent  de  Thomas,  et  le  livrèrent  pieds  "et  mains 
liés  à  l'empereur.  Michel  lui  ût  subir  le  traitement  bar- 
bare dont  le  cruel  Justinien  II  avait  donné  le  premier 
exemple  :  après  lui  avoir  tenu  quelque  temps'  le  pied 
sur  la  gorge ,  il  lui  fit  couper  les  pieds  et  les  mains. 
En  cet  état,  on  |e  promena  $ur  un  âné  par  toutes  les 
rues  qu'il  arrosait  de  son  sang,  en  criant. d'une  voix 
lamentable  :  Si  vous  êies  vraiment  emjperem'f  ayez 
piiié  d*unjuj€t  malheureux.  Comm# .  Michel ,  qui 
accompagnait  en  personne  cette  hotrft^b/isxéculton, 
lui  demandait  $-'il  n'avait  pas  de  K^oml^Aim»  dntne/ses 
courtisans,  Jean  Hexabule  arrêta  cette  curiosité  fu- 
neste en  disant  :  Eh  /  quoi^  prince  ^  vods  en  rappor- 
terez-vous  à  un  ennemi  sur  la  fidélité  de  vos  amis? 
Cette  sage  remontrance  sauva  ceux  que  Michel  livrait 
a  la  merci  de  Thomas.  Cet  infortuné  rebelle,  aban- 
donné comme  une  bête  féroce  à  ses  cruelles  douleurs, 
sans  qu'on  apportât  aucun  remède  à  ses  plaies,  vécut 
encore  quelques  jours ,  et  expira  vers  le  milieu  d'oc- 
tobre. Son  cadavre  fut  attaché  à  un  gibet.  Telle  fut  la 
fin  de  Thomas;  heureux  et  estimé  tant  qu'il  crut  avoir 


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6o  HISTOIRE    DU   BAS-EMPIRE.  (An  8îi3.) 

à  cramdt^,  ses   premiers  succès  furent  ïe  germe   de 
ses  malheurs.  Après  un  léger  avantage,  il  se  crut  in- 
vincible, et. perdit  par- sa  victoire  toutes  les  qualités 
qui  peuvent  la  procurer.  Il  oublia  jusqu'à  son  âge  - 
livré  sous   ses  cheveux  blancs  à  tous  les  excès  d'une 
jeunesse  voluptueuse ,  il  fit  voir  ce  qu'il  aurait  été  sur 
le  trône,  dont  la  vue,  quoique  éloignée,  avait  suffi  pour 
le  corrompre. 
^^  Les  habitants  de  Bizye  suivirent  l'exemple'  de  ceux 

Punition  des  d'Ail dritiopte.    Us  livrèrent  Anastase,  qui   fut    traité 

coupables.  r  '    t 

comme  son  père.  Pâiiium  et  Héraclée  refusaient  encore 
de  se  soumettre  à  Michel;  il  alla  les  attaquer.  Un 
tremblement  de  terre  lui  ouvrit  l'es  murs  de  Panîum; 
Héraclée  fut  prise  du  côté  de  la  mer,  et  Michel  fit 
grâce  aux  habitiants,  Il  rentra  ensuite  en  triomphe 
dans  Constantinople.  A  féga^d  deà^  complit^es  de  Tho- 
mas qui  tottibèrent  entre  ses  mains,  il  se  piqua  de 
clémence.  Il  se  Cïontenta  de  les'  faire  promener  dans  le 
cirque  hs  migkins  liées  derrière  le  dos,  et  d'exiler  les 
plus  coûpiaSileS*^.  Il  restait  en  Asie  deux  places  voisines 
J'ufnè  de  i'stii^V  Cabala  et  Sanian.e  ^,  où  se  mainte- 
naient tleilirôfticieps'de  Thomas,  Ghéreas  et  Gazarène  h 

I  Michel  sein^  avoir  ét«  vf»l«s  .frontière  orientale  de  TempliM  dm 

çrnel  ;  car  il  dit;  lai-méme  dans  la  côté  de  la  Cappadoce  et  de  la  petit.e 

lettre  qu'il  adressât  bientôt  après  à  Arménie.  On  voit  dans  Constantin 

£^,i^t9--le-DéhbQiûiire  I  Sarracer^^  .  I^orpfayrogênète ,    de  Adm.    imp.^ 

quoque  omnes  et  yirmenicQS^at  re-  •  ç.  5o,  qu'on  donnait  le  nom  de  San^ 

Uquos^qui  de prœlio  evaserant^oiri'  niaha  à  une    des   subdivisions    du 

net  viuos  cepîhuis^  et  sèctênduth  Dei  thème  de  Charsiane  pài-tbgée  en  f  rois 

dispositionem  nos  in  eis  uki  sumus.  lientenances ,  %  TOWOTYipflOffîa ,   celle» 

Hist.  Mîch.  ap.  Rayn.  Ann,  t.  14,  de  Myrîocéphale,   de  Sainte-Croix 

p.  64,  —  S.-M.  et  de  Variuonpolis.   Voyez  sur  la 

*  K.aoo(Xa  et  ^aviava.  J'ignore  la  Charsiane  ci-après,  p.  107,  not.  a, 

position  de  ces  deux  places,  je  crois  lîv.  t.xix,  §  i5. —  S. -M. 

cependant    qu'elles    étaient    sur    la  ^  Ô  Xoias'aç  et  raÇapyjvoç.  Ce  der- 


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(An4a3.)  LIVRS   LXYin.  MICHEL   11.  6l 

Ils  faisaient  delà  des, courses  dans  les  environs.  Michel 
leur  envoya  un  de  ses  gardes  pour  les  instruire  de  la 
mort  de  Thomas,  et  leur  offrir  l'impunité  avec  un 
grade  honorable  '  dans  ses  arniées.  Comme  ils  reje- 
taient ces  offres  avec  insolence  ^  l'envoyé  prit  le  temps 
qu'ils  étaient  sortis  de  leurs  places  pour  aller  au  pil" 
lage ,  et  persuada  aux  habitants  de  fermer  leurs  portes 
et  de  leur  refuser  l'entrée  à  lelir  retour  :  ce  qui  fut 
exécute.  Ces  deux  rebelles  prirent  le  parti  de  se  sau- 
ver en  Syrie;  mais  ils  furent  arrêtés  en  chemin  et 
pendus  sur-le-champ.  Un  fait  remarquable,  et  qui 
mootre  quelle  idée  cet  empereur  avait  des  dignités 
ecclésiastiques,  c'est  qu'il  fit  promettre  l'archevêché 
de  Néocésarée  à  un  domestique  de  Gazarène,  s'il  tca-* 
hissait  son  maître;  ce  qu'il  fit:  mais  l'histoire  ne  dit 
pas  si  on  lui  tint  parole.  -      ht 

Michel,  affermi  sur  le  trône  par  la  défaite  et  la  mort  Ah  824 
de  Thomas,  songea  à  renouveler  l'alliance  avec  l'em-  y^^Ji 
pereur  d'Occâdent,  selon  l'usage  de  ses  prédécesseurs.  *Débon*âî^ç 
11  envoya  cinq  ambassadeurs  ^  à*Louis-le-Débounaire  «'  •«  p«p«« 
pour  lui  demander  son  amitié.  Sa  lettre ,  que  nous  î^afFiJc! 
avons  encore,  est  d'un  stylé  dévot,  chargée  de  pas-  gg^^^fjg  ^ 
sages  de  l'Écriture;  mais  elle  est  aussi  remplie  de  M,  p.  6a  et 
déguisement  et  de  mensonges.  Il  attribue  la  mort  de  Ficury,hist. 
Léon  à  une  conjuration  de  quelques  soldats.  Il  rend    art.  a,  4.* 


nier  nom  se  Ut  Zx-yopinvoç  dan»  Zo-  Theoph.  p.  45. — S*-M. 
nare,  liv.  t5,  t.  a,  p.  iSgo.  L«  ^  Le  général  Théodore,  proto* 

continuatear  de  Théophane,  p.  45,  spathaire  on  graqd-écuyer,  Nicétas, 

donne  à  Gazarénas  le  nom  de  Colo-  métropolitain  de  Myra  en  Lyeie ,  1« 

matis  ,  oe  qai  indique  qu'il  était  né  diacre  Théodore  ,  Téconome  de  la 

à  Colonia,  ville  de  la  petite  Armé-  grande  église  de  Constantinople,  et 

nie,  non  loin  de  TEuphrate. — S.-M.  Léon  ,  décoré  du  ti»re  de  Candidat. 

.  '    Lm   titre   de  magisUr.    Cont.  — S.-M. 


xui. 
écrit 


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6a  HISTOIRE   DU   BAS-EMPIRC.  (Ab  834.) 

compté  de  la  révolte  de  Thomas  et  de  sa  victoire  sur 
ce  rebelle,  et  c'est  sur  cette  guerre  qu'il  s'excuse 
d'avoir  taot  différé  à  faire  part  à  Louis  de  son  avéne* 
ment  à  lempire.  Il  fait  de  Thomas  un  portrait  affreux, 
et  je  pense  que  cette  lettre  est  loriginal  de""  ces  aven- 
tures romanesques  recueillies  par  quelques  écrivains 
grecs  sur  le  compte  de  Thomas,  et  qui  ne  peuvent 
s'accorder  avec  la  suite  de  sa  vie  ',  telle  qu'elle  est 
racontée  par  les  auteurs  les  plus  dignes  de  foi  ^.  Je 
n'ai  daigné  en  faire  aucun  usage.  Michel,  bien  informé 
du  zèle  de  Louis  pour  la  religion,  lui  fait  une  profes- 
sion de  foi  trèsK>rthodoxe.  Mais,  sur  le  culte  des 
images,  il  taxe  calomnieusément  les  catholiques  de 
superstitions  ridicules  et  absurdes.  Il  donne  de  grands 
éloges  au  concile  des  Iconoclastes,  et  ne  compte  pas 
le  secdbd  de*Nicée  au  nombre  des  conciles  œcuméni- 
qqes  ^.  La  suscription  de  sa  lettre  est  remarquable  : 
jaloux  du  titre  d'empereur,  mais  n'osant  le  refuser  à 
Louis,  après  l'avoir  qualifié  de  cher  et  honorable 
frère  j  roi  glorieux  des  Français  et  des  Lombards  y 
il  prend  un  tour,  ^igne.de  la  subtilité  grecque,  par 
ces  termes:  «  et  qui  est  appelé  leur  empeneur;  »  et 
vocato  eorum  imperaiori.  Louis  reçut  ces  ambassa- 
deurs à  Rouen ^  [liotomagus]^  où  il  se  trouvait  alors; 

>  Voyez  ce  qne  j*en  ai  dit  châev.  présents  les  envoyés  grecs  donnèrent 
S  3o,  p.  44,  not.  a. — S. -M.  â  iVinperenr  nn  exemplaire  du  livre 

>  JVi  déjà  remarqué  oi-dev.  S  3 o,  attribné  â  Denys  1* Aréopagite ,  '  de 
p.  44,  not.  I,  qn*en  beaaconp  de  la  Hiérarchie  céleste,  qui  jouissait 
circonstances  elle  s*accordait  miens  alors  d'une  haute  estime.^  Lonis  le. 
avec  les  récits  des  historiens  orien-  fit  traduire  en  latin,  et  Tenvoya  à 
tanx  qn'avec  ceux  des  écrlYaina  Paris  le  jour  delà  fête  du  saint ,  et 
grecs. — S.-M.  il  y  fut  reçu  avec  grande  joie.  — 

3  L*auteur  de  la  chronique  saxon-      S^-M. 
ne,  ann.  8a4,  dit  qu'entre  autres  ^  Ils  étaient  accompagnés  de  For- 


I 


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il  renoul^la  le  traité  '  ;  et,  comme  ils  étatent  chargée 
d'une  autre  lettre  pour  le  pape ,  et  de  présents  pour 
réglise  de  Saint-Pierre,  le  roi,-  à  leur  prière,  les  fit 
conduire  à  Rome  et  les  appuya  de  sa  recommanda-» 
tion.  Mtdiel,  en  apparence,  coifôultait  le  pape  sur  le 
culte  des  images,  et  cherchait  en  même  temps  à  le 
tromper  par  un  faux  e|posé.  Il  lui  mandait  <que,  depuis 
sa  victoire,  il  n'y  avait  plus  en  Om0ffL  de  partage  dans 
l'Église  ,  non  plus  que  dans  l'Étjit;  que  tous  ses  sujets 
étaient  réunis  avec  lui  en  Êiit  de  croyance  et  de  pra- 
tiques religieuses.  Cette  députation  au  pape  n'ét^ 
qu'un  jeu  de'cet  empereur;  son  dessein  était  plutôt  de 
sonder  les  dispositions  de  l'église  romaine ,  que  de  se 
conformer  à  sa  doctrine.  Il  continua  d'être. persécu- 
teur ^. 

Tandis  que  l'Asie  et  l'Europe  éprouvaient-  les  hor-      xun. 
reurs  d'une  guerre  civile,  une  autre  guerre  infestait  deswî^D» 
les  îles  situées  entre  ces  deux  contrées.  Les  Sarrai^ils  *"c^ètc/* 
d'Espagne  ^,  profitant  des  troubles  de  l'empire,  armèrent  cedr.  t.  a,  p. 

ttmatnflf  patrîavdie  de  Grodo.  Egîn-  roi  Louis  à  Compiègne  {Compen' 

hardy  Ann,  Franc,  ann.  8a4. —  dium)', —  .-M. 

S.-M.  ^  Oi  Tov  itnrgptov  xoXwov  tt;  têy]- 

»    Leffati  imperatoris   liiteras   et  pictç  otxoSvre;  À-^aptivoî,  ^poç^t^pot  . 

nutnera  déférentes,  paeis  confirmant'  tô  Oxiav^   ovtsç,  ioiravoix  toùtouç* 

dae  causa  se  misses  esse  dicentes.  xaTOVGp.à^ouatv.  Cedr.  t.  a,  p.  5o8. 

Eginhard,  i^nn.  Franc,  ^  «nn.  8 a 4.  Goos,tantinPorphyrogéoète,</tf>^«rm. 

—  S,-M.  «  imp.^  c.  aa,  donne  anx  Arabes  d'Es- 

«  On  apprend  de  Thègan,  c.  4^9  pagn^  le  nom  de  Maviates,  parce 

qne  Lonis-Ie-Débonnaire  envoya  en  qn*ils  obéissaient  aux  Omniades  is- 

ambassade  &  Constantinople  anprès  sus  de  MoaTÎab.  H  dit  qné  c'est  d'enx 

de    Miche],    Halitcon ,    évéqae   de  que  Tenaient  les  Arabes  qni ,  de  son 

Cambrai ,  et  Ansfrie ,  abbé  de  No-  temps ,  étaient  encore  maîtres  de  la 

nantnle,  qui  revinrent  en  Tan  8a8.  Crète.  Ot  ttiv  i9:tavtav  xarotxoSvreç 

lis  avaient  été  bien  traités  par  Mi-  À'fapvivet  Maêiârat  xaTovc^tàÇovrat. 

chel.  En  l'an  837,  des  ambassadeurs  TcuTCdv  airo^evot  Tu^avcumv  ot  rny 

de  Michel  étaient  venus  trouver  le  Kpii-rriV  oixoûvTCc  À'Yapvivot.  —  l^.-M. 

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'5o8  et  seqq. 

Zon.  1. 15,  t. 

a,  p.  iSg, 

x4o. 

Léo  gramm. 

p.  448. 

Coat. 

Theoph.  p. 

46  et  seqq. 

Symeon.  p. 

4i3,  4i4. 

Georg.  p. 

5i3. 

Const. 

Porph.  de 

adm.  imp. 

c.  la 
Gènes.  1.  a, 
p.ai,aa,a3. 
Beguigues, 

hist.  des 

Huns,  t.  z, 

3a8. 


64  HISTOIRE   DU   BAS-EMPIRE.  (An  Ss4.) 

vingt  vaisseaux,   et,  sous  la  conduite  d'Abouhafs  ^^ 

guerrier  ardent  et  hasardeux,  iU  pénétrèrent  dans 
TArchipel  et  ravagèrent  les  Cyclades  *.  Toutes  les  forces 
de  l'empereur  étant  alors  réunies  à  Constantinople  ^ 
ils  ne  trouvèrent  point  de  résistance,  saccagèrent  im- 
punément toutes  ces  îles ,  et  portèrent  le  même  ravage 
dans  nie  de  Crète.  La  beauté  ^  climat  et  la  fertilité 
du  terroir  charni{|||||||i.barbares.  A  la  vue  de  ces  riantes 
campagnes,  enrichies  de  moissons  et  de  vignobles , 
Abouhafs,  sautant  le  premier  sur  le  rivage,  s'écria 
d^ns  .une  sorte  d'enthousiasme  :  La  voilà  celte  terre 
délicieuse j  dont  parle  le  Prophète^  ce  pays  où  coule 
h  lait  et  le  miel;  elle  né  doit  appartenir  qu'aux  Mu'- 
suhnan^.  Il  aurait  désiré  s'y  établir  dès  ce  moment; 
mais„  la  colonie  n'étant  pas  assez  nombreuse,  il  se 
contenta  d'en  piller  les  rivages;  et,  ayant  chargé  ses 
vaisseaux  de  butin ^  il  reprit  la  route  de  l'Espagne^ 


1  Â^oj^atl**  Cédi-énn«,  t.  a, p.  5o8, 
lai  donne  le  titre  à' Amormoumnin 
on  Amir-al'inouminih f  c'est-à-dîre 
chef  des  fidèles.  Zonare,!.  xS,  t.  9, 
p.  i3g,  rappelle  Axa*)'  et  lai  donne 
le  même  titre.  La  même  chose  est 
dans  le  continpatenr  de  Théopbane, 
p.  46.  Il  est  appelé  Àpochat,  Airo- 
^xT,  dans  la  Chroniqae  de  Syuiéon 
le  Logotbète,  p.  41 3.  Le  chroni- 
queur Génésins,  1.  a  ,  p.  aa,  donne 
qiielqnes  détails  snr  les  descendants 
dn  conquérant  de  la  Crète,  qu'il  ap- 
pelle jépochapsis,  kizéyia.^iji.  II  eut, 
Aclon  lui,  un  fils  nommé  Saipèi^  père 
de  Bamdel  (peut-être  Jbou-abd'aU 
fah),  qui,  jeté  par  une  tempête  snr 
la  côte  du  Péloponèse  sons  le  règne  / 
de  Basile-le-Macédonien ,  y  fut  pris 
par  lé  gouverneur  Constantin  Tes- 


«araartopochîs.  Ce  Bamdel  était 
frère  de  Zarcenès,  qni  fut  aussi  chef 
de  la  Crète,  àpy/rifo;  ttî;  KpiQ-nriç  ,  et 
qui  était  père  de  celai  qui  comman- 
dait dans  celte  île  à  Tépoque  où 
Génésius  écrivait.  Deguignea,  Hist. 
des  Huns,  t.  t,  p^  3a8,  nous  ap- 
prend, d'après  lés  auteurs  arabes» 
que  le  conquérant  de  la  Crète  s^ap- 
pelait  Abon-Hafs  Omar,  fils  de 
Schoaïb,  mais  il  ne  donne  ancnn 
antre  'détail  sur  sa  personne. — S. -M. 
s  Cédrénns  et  les  anteurs  byzan- 
tins donnent  pour  cause  de  cette 
émigration  des  Arabes  d*£spagne, 
que  la  population  s'était  considéra- 
blement augmentée  parmi  eux ,  et  le 
peu  de  ressources  de  lenr  pays. — 
S.M. 


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^A»»*4.)  LIVRE   LXYllI.  MICHEL   II.  65 

à  dessein  de  revenir  bientôt  pour  cette  important*^ 
cooqaéte. 

U  partit  en  effet  l'année  suivante  avec  une  flotte  de   ils  >>  éta- 
quarante  vaisseaux   qui  portait  les  plus  braves  de  la    ^*"**"*' 
nation;  et,  sans  s'arrêter  dans  sa  route ,  il  aborda  au 
rivage  de  Crète  '.  X^  facilité  de  la  descente,  sans  au- 
cune opposition  des  habitants ,  qui  fuyaient  de  toutes 
parts,  anima  ses  espérances.  Il  envoya  aussitôt  ses 
soldats  au  pillage,  n'en  réservant  que  vingt  par  chaque 
vaisseau  ;    et   lorsqu'ils  furent   éloignés    de   trois   on 
quatre  lieues  %  il  fit  mettre  le  feu  à  la  flotte.  Un  vent 
violent  l'eut  bientôt  réduite  en  cendres.  A  la  vue  de 
ces  Aammes  les  Sarrasins  dispersés  dans  les  campagnes 
accourent  avec  effroi  :  irrités  de  la  perte  de  leurs  vais- 
seaux, ils  demandent  à  leur  général  la  raison  d'un  ordre 
si  étrange.  De  quoi  açez^vous  à  vous  plaindre?  leur 
répondit-il  avec  assurance  :  fe  n  ai  fait  que  remplir 
vos  intentions.  Ne  m'ai^ez-i^ous  pas  demandé  aç^ec 
ardeur  de  vous  conduire  en  cette  Ue  pour  vous  y 
établir?  Comme  ils  s'écriaient  qu'ils  avaient  des  fem- 
mes et  des  enfants,  et  comment  irâient-ils  les  cher- 
cher? Eh   bien!  dit-il, ye  vous  donne  une  patrie; 
elle  vous  fournira  des  femmes;  c'est  à  vous  à  vous 
donner  des  enfants.  Ces  paroles  les  apaisèrent;  ilà 
campèrent   au  bord   de  la   mer  et  fortifièrent  leur 
camp.  Il  fut  bientôt  rempli  de  toutes  sortes  de  pro- 
visions qu'ils  enlevaient  dans  les  campagnes. 

Cette  nouvelle  affligea  l'empereur.  C'était  un  dés-       »v 
honneur  pour  son  règne  que  la  perte  d'une  île  célèbre,  rarmée  im- 

X  Auprès  d'un  cap  nommé  Cha"      — S. -M. 
JCtur.Tcâ  àxp(<>mpî(ù  to»  Xe']fop.éva>  Xà-  >  A  xo  ou  ii  stades,  dit  Cédré- 

fcUi  îrpoçopjuÇeTat.  Cedr.  t.  a,  p.ôoQ.      nus ,  t.  a,  p*  Sog. — S.-M . 

Tome  JCIII  5 


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66  HISTOÏHE    DU    BAS-KftIPiRE.  (^  a^^.) 

ptriaie  et  peuplée  dfe  vîUes  reoommées  de  toute  antiquité,  et  qui 
*-onq»*ê°e  de  sculc  avait  fait  autrefois  un  royaume  florissant.  U 
^'^-  chargea  àéûekte  expédition  Photth,  commandant  des 
armées  d'Orient  ^  Photin  y  transporta  quelques- trou- 
pes ;  mais ,  après  s'être  instruit  par  lut-méme  des  feree» 
d€>s  Sarrasms,  il  ma»da  qu'il  était  hor»  d'état  de  rien 
entreprendre,  si  on  ne,  lui  envoyait  de  puissants  se* 
ex>urs^  Michel  fit  partir  aussitôt  son  connétable  ?  Dan. 
mien  avec  un  gran4  corps  d'arnyée.  Les.  deux  généraux 
réunis^  allèrent  attaquer  les  barbares  et  furent  battus; 
Damien  fut  tué  dès  le  commencement  du  cocnbat:  s^ 
mort  jeta-  la  terreur  et-  le  désordre  dans  ses^  troupes^ 
qui  forent  taillées  en  pièces.  Photin  se  saûva^  vers  W 
rivage^et  s'étant  jeté  dans  une  chaloupe,  il  gagna 4'!)^ 
de  Dia  ^,  d'où  il  retourna  à  Constantinople,  portant 
Iui*même  la  nouvelle  de  sa  défaite*  L'empereur,  dout 
il  était' aimé,  prit  soin  de  le-  consoler  de  soA  infet^tuoe,^ 
eo  lui  donnant  le  gpuvernement  de' la  Sicile,  plus  ho- 
norable encore  et  plus  important  quecelui  de  l'île  de 
Crète.  Ge  Phoha  fu<;  bisaïeul  de  l'impératrice  Zoé-^, 
qui.  se  rendk  dans^  la  suite-  fameuse  pav^^es-  crimes  et 
par  ses  débauches. 
xLvi.  'Les  Sarrasins  s'étaient  d'abord  campés^sur  le  rivage 

de  Candie,  occidcntal  de  l'île  et  songeaient  à  s'y  établir.  Un  soli- 
taire, habitant  de  ces  montagnes,  vint  les^  avertir  que, 
s^ils  voulaient  bâtir  une-  ville,  il  leur  indiquerait  une 
situation  pins  sâre  et  plus^  commode,  qui  réunis^ailT 

X  U  était  grand-éouyer,  à  npu-  Theoph.  p.  48^  Dia  est  nue  petits 

TO(«raôàpio;,  tûv  àvaroXoccùv  çpa-nj-  île  appelée  à  présent  Studia^  à  nne 

«^oc.  Cedr.  t.  a,  p.  509.  petite  distance  an  nord  de  la  Crète. 

*  Kop.Y}(  ToG  poatXixoû  tincoç'aaîou.  —  S.-M. 

Cedr.  t.  a-,  p.  5 10. —  S.-M.  "  ^  C'est  ce  que  dit  le  continuatenr 

3  AtAa(o2^«Tat  «poç  rtn  Atav.  Cont.  de  Thcophane^  p.  48.  — -S.-M. 


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{Ttà-m.)  riVïtE   LXVni.  MICHEL   II.  67 

totis  WHVàiiïafgës'dé  là  terre  et  de  là  mer.  Us  accep- 
tèrent ëés-  offres  kvec  jbiè^;  et  l'ayant  pris  pour  gùîde, 
iis  arrivèrent*  à  Un  Uîêu  nommé  Candace',  vis-à-vis  de 
fîté:<feDiaf, où  avait  été  aititrefois  la  ville  de  Matium^ 
alors  T^ifHréfe:  Hs^y  jfet^reiit  les  fondemetits  d'une  ville 
^Mls  nfohinièreïrt'Caûdië^;  Ce  futïetnr  place  d*armes*, 
êtoh  ife^é  re^andtférit'dàfts  toute  retendue'  de  l'île  et 
jwsqtre  liaiis  cfellies  d'alentour.  Ils  se  rendirent  maî- 
tres dfe  ^in^-neuf  vilfes  4;  une  seule,  que  l'histoiVe  ne 
nôtntné'pas,  se  defeMït  du  pillage,  et  ne  se  soumît  à 
cux.cjtfa"c<yn\îitîot*' qu'elle  conserverait  ses  usages  et 
Fenercice  de  la  reîîgiôn  chrétienne.  Le  Mahométisme 
ftrt  établi  dans  le  reste  du  pays;  toutes  lies  églises  fii- 
i^eiït  changées  en  mosquées;  là  plupart  des  habitants, 
peuple  ignorant  et  grossier,  embrassèrent  la  religion 
dés  vtnûquetirs,  dèvitiretït  musulmans  comme  ils  avaient 
été  dhrétiéns.  Getrx  qui  avaient  plus  de  lumières  et  de 
courage,  persiilfèi'ent  dans  leur  foi  et  souffrirent  le 
martyre.  Dé  ce  noriibre  fdt  C3^ille,  éveque  de  Gorlyne, 
dtfnt  \&  métiioiré  est  •denaeurée  ent  singulière  vénéra tioû 
pàïnii  les  chrétietis  tïè  cekte  île. 

I  Cefbrent  bien  platôt  ks  Arabes  vh  irpocnj-yopiav  Xocy^a^  évofiatopi- 

qoî'  loi  donnèrent  ce  nom',  comme  vcç.  Le  nom  de  Chandax  est  le  mot 

on  le  verra  ci-drprè^  not.  3-n^S.i-M*  arabe  Kh€Lndak^<\m.  signifie  rempart 

'  Ville  peu  connue  dans  F^nti-    '  a^ec  fassé\  construction  militaire , 

quftë  et  mentionnée  par  Pline ,  IV,  nom  qui  fut  en  effet  donné  à  la  ville 

iJi.^-'S.-M.."-  fondée  par  les  Arabes  i  cette  cpo- 

/^  Us  y  creusèrent,  dît  Cédréqtts,  que.  Le  nom  de  Candie,  que  Ton 

t.  2,  p.  5o9,  un  profond  fos^é  qi^i'ils  donne  à  présent  à  l'île  de  Crète,  en 

défendîrentpar  un  rempart.  Tacppov  est  nue  corruption. — S.-M. 

|»fV  Tryeipav  *pwTOV  ^6&tçcv,  xofsx*-  ^  ^**'  'f^''*   icaoïnç  àxpoiroXiv  vVi- 

pflucaç  év  Taurri  xara'nnnÇavTSç.  C'est      <rcu.  Cedr.  t.  a,  p.  5io S.-M. 

de  là ,  ajonte-t-il ,  que  ce  lien  tire  le  ^  Indication  donnée  par  le  conti- 

aom  qu'il  a  gardé  jusqu'à  présent,  nuateur    de  Théophane-,  p.  48.-^ 

et  qai  est  Chandax  \  Êv6oc  xaX  vSv  S.-M. 
XxCùv  TT.V  ewwvufxtav  o  to'woç*,  acd'Cst 


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68  HISTOIRK   DU   BAS-EMPIRJj:.  (An  Sa5.) 

A»  8a5.        ^  défaite  de  Pholin  ne  fit  pas  perdre  toute  espé- 

?LLvii.  rance  à  l'empereur..  Il  fit  partir  l'année  suivante,  une 
tiiespourie  nouvelle  flotte  sous  le  commandement  de  Cratère/, 
m"nt  dc'râe  duc  de  Cybire,  homme  fier  et  présomptueux ,  qui  pro- 

dc  Crète.  ^^^  ^^  princc  uu  succès  assuré.  Il  n'eut  pas  plus  tôt  dé- 
barqué près  de  Candie,  que  les  Sarrasins  marchèr^ent 
à  lui  et  livrèrent  bataille.  Le  combat  fut  sanglaiM:  et 
opiniâtre.  Depuis  le  point  du  jour  jusqu'à  midi  l'avan- 
tage fut  égal,  et  l'on  fit  de  part  et  d'autre  de. prodi- 
gieuse efforts.  Enfin  les  Sarrasins  plièrent;  un  assez 
grand  nombre  furent  massacrés  dans  la  fuite;, un  plus 
grand  encore  jetèrent  leurs  armes,  et  se  rendirent  pri- 
sonniers. Candie  eût  été  prise  le  même  jour,- si  les 
Grec$  eussent  su  profiter  de  leur  victoire;  mais  la  nujt 
qui  approchait,  et  le  désir  du  repos  sauvèrent  la  ville. 
Les  Grecs,  enivrés  de  leur  succès,  s'assurant  qu'ils  §^ 
rendraient  le  lendemain  sans  peine  maîtres  de  Candie^ 

*  se  livrent  à  la  joie,  et  passent  la  nuit  à  boirç^  sains^ 

prendre  aucune  des  pi^cautions  nécessaires  dans  \e 
voisinage  de  l'ennemi.  Les  Sarrasins,  avertis.de  ce  d^* 
ordre,  fondent  sur  eux  au  milieu  de  la,  nuit ,^.  )es 

^  trouvant  ensevelis  dans  le  vin  et  dans  le  sommeil,  ils 

en  font  un  affreux  carnage.  Il  n'en  échappa,  qu'un 
seul ,  et  c'était  celui  qui  méritait  Je  plu^s  de  >  périr. 
Cratère  gagna  le  bord  de  la  mer,  et  se  jeta  dàiis  une 
barque  de  marchand  qui  se  rencontra  par  hasard.  Le 
général  sarrasin  l'ayant  fiait  chercher  parmi  lés  morts 
et  apprenant  qu'il  s'était, sauvé,  le  fit  poursuivre: par 
deux  vaisseaux  qui  l'atteignirent  à  l'île  de  Cos;  il  fut 

^  Elle  était  composée  de  soixante-      des  iles  de  la  mer  Egée.  Ce4r .  t,%^ 
dix  vaisseaux  de  guerre,  taut  de      p.  Su, — S.-M. 
son  gouvernement  de  Cibyre  que 


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\JLnSrà5.)  LIVRE    tXVIII.  MICHEL    II.  69 

aussitôt  mis  en  croix  sûr  le  rivage.  Tel  fut  Insuccès  des 
efforts  de  Michel  pour  recouvrer  l'île  de  Crète.  Lies"  Sar- 
rasins en  demeurèrent  possesseurs  pendant  cent  trentê- 
crnq  ans,  jusqu'au  règne  de  Romain  Porphyrogénète. 

Dé  là  ils  faisaient  des  courses  continuelles  dans  les  B^f^^i";,^ 
autres  îles,  où  ils  établissaient  des  colonies,  et  ils  se  d'Oryphas. 
reridaient  redoutables  dans  tout  l'Archipel.  Pour  ar- 
rêter leurs  pirateries,  Oryphas  équipa  une  flotte  par 
ordre  de  l'empereur.  Sa  prudence,  son  expérience,  sa 
valeur  lui  avaient  acquis  la  réputation  du  meilleur  ca- 
pitaine d#  l'empire  en  ce  temps-là.  Cependant  les  deux 
défaites  précédentes  avaient  jeté  t£(nt  de  terreur  dans 
lés  esprits,  qu'il  ne  put  faire  des  soldats  qu'à  force 
cTargent;  il  en  coûta  pour  chacun  quarante  pièces  d'ôr, 
qui  font  plus  de  cinq  cents  francs  de  notre  monnaie. 
Une  armée  achetée  si  cher  fut,  pour  cette  raison, 
nommée  V armée  quadragénaire  '.  Ces  troupes  le  ser- 
virent en  effet  avec  zèle  et  avec  courage.  Il  fît  dés 
descentes  dans  les  îles,  en  chassa  les  Sarrasins,  et  vint 
à  bout  de  nettoyer  la  mer  et  de  rendre  la  navigation 
libre.  Mais  il  n'osa  mettre  le  pied  dans  l'île  de  Crète , 
où  les  barbares  lui   parurent  ne  pouvoir  être  forcés,    j^  g^^g 

Michel,  quoique  sans  religion,  voulait  sauver  les      xtix. 
apiparences.  Éperdûment  amoureux  d'Euphrosyne,  fille    Hage  de  " 
dé  Constantin  Porphyrogénète,  il  brûlait  d'envie   de   ^^f^ 
l'épôusçr.  Mais  deux  empêchements,  qui   semblaient  p.5io,5ii. 
être  invincibles,  s'opposaient  à  sa  passion.  Sa  femme  t.  a,  p.  140. 
Thécla,  dont  il  avait  Théophile,  vivait  encore,  et  Eu-  opCp.490 
plirosyne  était  religieuse  depuis  son  enfance  dans  un    ^™|^â/  ^ 
monastère  d'une  des  îles  du  Prince,  où  elle  avait  été  ^*°^'a3!   ' 

'  Ttoaapaxovraptcv.  Cedr.  t.  a,  p.  5ii. —  S.-M. 


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70  HISTOIRE    DU    BAJS-EBfPIRE.  (An  8a6.) 

consacrée  è  Dieu  dans  le  texnp?  de*  la  disgra^^e  de  sou 
p^re.  La  mort  de  Iliécla  leva  jenfin  le  premier  obsta- 
cle j  pour  s'affranchir  du  secppd^  il  u^a.fju  mêipp:  tufi- 
nége  qu'avait  autrefois  empjoyé  rempereur  Cliaude^ 
lorsqu'il  avait  voulu  épouser  sa  nièce  Agrippii^.  Il 
engagea  secrètement  les  principaux  du  sénat  à  lui  de-  " 
mander  publiquement  qji'il  voulût:  bien  prendre  une 
seconde  femme,  et  à  combattre  de  toutes  leurs' forces 
la  répugnance  qu'il  affecterait  de  montrer.  Tout  étapt 
préparé  pour  jouer  cette  comédie,  ceux  qui  devaient 
en  être  les  acteurs,  un  jour  d'assemblée  ^u  sénat, 
se  jettent  à  ses  pieds  et  le  conjurent  avec  instance 
de  consentir  à  un  second  mariage  :  Qu'il  nattait 
qu'un fils^  auquel  ils  Souhaitaient  une  longue  vie; 
mais  que,  pour  ôter  toute  inquiétude  à  ses  sujets^ 
il  était  nécessaire  que  son  trône  fut  appuyé  de  plu' 
sieurs  soutiens.  Ce  motif,  tiré  de  l'intérêt  politique, 
me  paraît  avoir  été  alors  employé,  plutôt  que  la  rai- 
son frivole  et  ridicule  qui  xîst  cependant  la  seule  que 
les  historiens  grecs  mettent  dans  la  ho^çhe  de  ces  sé- 
nateurs: ils  leur  font  dire  Qu'ayant  eux-mêmes  un 
empereur^  il  n'est  pas  juste  q\ie  leurs  femmes  soient 
sans  impérçitrice»,  Michel  feignit,  long-temps  de  résis- 
ter à  ces  sollicitations  ;  il  attendit  même  qu'on  en  vînt 
à  des  murmures  et  à  des  menacjss  simulées.  Enfin  il 
se  laissa  vaincre,  mais,  ce  ne  fpt  qu^à  condition  qu'il 
épouserait  Euphro^yne:  c'était,  disait-il^  la  seule  per- 
sonne qui  pût  lui  faire  changer  la  résolution  qu'il  avait 
prise  de  demeurer  veuf.  De  plus^iLex^gea  des  sénateurs 
une  promesse  signée  de  leur  main^  que,  s'il  mourait 
le  premier,  Euphrosyne  conserverait  le  titre  et  les 
honneurs  d'impératrice,  et  que  les  fils  qui  naîtraient 


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(^iia  8îi6.)  LIVRE    LXVIII.  HIGHEL    II.  ^J 

d'elle  partageraient  le  trône  avec  Théophile  ^  Le  ma- 
riage se  fit  à  ces  conditions.  On  ne  dit  pas  si  Ei^phro- 
syne  s'adressa  au  patriarche  pour  être  relevée  de  ses 
vœux;  mais  cet  article  ne  pouvait  faire  de  difliculté. 
Antoine  était  trop  bon  courtisan  pour  mettre  les  lois 
de  l'Église  au-dessus  de  la  volontç  de  l'empereur.  Il 
parait  qu'Ëuphrosyne  n'eut  point  d'enfants  ;  du  moins 
on  ne  voit  pas  que  les  dispositions  faites  en  leur  fa- 
veur aient  eii  aucune  suite. 

Ce  mariage  incestueux  fut  puni  de  la  perle  de  la    Aw  827. 
Sicile.  Euphémius%  qui  commandait  dans  une  ville  de  Lessârra- 
cette  île  ^,  se  croyant  autorisé  de  l'exemple  du  prince,  ^^q* ^e  k 
enleva  une  religieuse  qu'il  aimait.  Les  frères  de  cette      siciic. 
fille  portèrent  leur  plainte  à  l'empereur,  qui,  regar-      Siâ.**^* 
dant  Fimpunité  des  crimes  comme  un  privilège  de  la  ^a?p.  uo* 
majesté  impériale,  manda  au  gouverneur  de  la  Sicile*  cootf'The- 
de  faire  couper  le  nez  à  Euphémius,  si  le  fait  était  «p*»-  p-  5i, 
véritable  ^.  Le  coupable,  instruit  de  cet  ordre,  prévînt  Symcon.  ^. 


z  Aboa^Ifandj ,  Chron.  Sjrr,,  p.  - 
iS3  ,  rapporte  que  Michel  abdiqua 
la  ooliron&e  lorsqn'U  contracta  ce 
secwid  mariage,  et  qa*il  fit  alors 
cooronner  son  fils  Théophile»  car, 
dit-il ,  chfiz  let  Âoniains,  il  H*eit  pus 
permip^  de  t^ner  à  ceun  qui  ont 
conirmcté  de  secondes  noces.  L*asage 
ne  permettait  pa»»  il  e^t  vrai ,  de 
contracter  de  seconds  mariages, 
nais  on  a  déjà  vu  qa*il  s*y  Élisait . 
de  fréquentes  infrac4ons. — S.-M. 

^Cc  persoonage  est  nommé  Flma 
par  les  auCevrs  arabes,  qui  disent 
qa^en  Tan  noi  de  Thé^.,  817  de 
J.-C.,  il  avait  été  envoyé  faire  la 
guerre  en  Afrique,,  par  Tordre  de 
Constantin  ,  qui  commandait  alors 
dans  nie.  On  vouUtt  ensaite  le  des^ 


titaer  ;  il  se  révolta  alprs.  et  se  ren- 
dit inaitre  de  Syracuse,  çn  il  se 
déclarn  oonverain.  H  fat  alors  trahi 
par  un  personnage  qne  les  Arabes 
appellent  Plotha.  C'est  alors  qn*il 
passa  en  Afrique  ,  pour  demander 
des  secours  à  Ziadet- Allah ,  prince 
des  Agiabites.— S.-M. 

■  3  Ou  plutôt  chef  d*nn  corps  de 
troupes  cantonné  dans  ce'tte  ile, 
jcàTà  StxeXtav  Xaou  Ttvoc  s(«^ou{i.cvoç. 
Cedr.  t.  a,  p.  5ii.— S.-M. 
*  4  n  résulte  d^un  passage  de  PHis- 
itoire  dès  évéqnes  de  Na*ples,  par 
le  diacre  Jean,  ap.  Mura  t. ,  t.  i, 
part,  a ,  p.  3x3,  que  ce  gouverneur 
était  le  patrice  Grégoras. — S.-M. 

.  ^  L*anonyme  de  Salcme,  auteur 
latin  qui  vivait  au  X"  siècle,  Chron. 


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0,0^.  p. 

Sigeb.chron. 
Yita  Niceph. 

e.  14,  ap. 

Boll   i3 

mart. 

De  Guignes^ 

hist.  des 
Uuns,t.  i,p. 

363,364. 


7a  HISTOIRE   DU   BAS-EMPIRE.  (An  g^r-) 

le  châtiment  et  s'enfuit  en  Afrique '.  Ziadet-Âliah  ^ 
le  trdfisième  des  [princes  ^]  Aglabites  régnait  dans 
Caïroan  ^.  Euphémius  ^  lui  promit  de  le  mettre  en 
possession  de  la  Sicile,  s'il  voulait  lui  donner  le  titre 
d'empereur  avec  quelques  troupes.  Le  [prince  arabe  ^ 
équipa  cent  vaisseaux  et  y  fit  embarquer  sept  cents 
cavaliers  et  dix  mille  homipes  d'infanterie  7,  Arrivés 


c.  45,  ap.  Mnrat.  t.  2,  part.  3,  p. 
308 ,  raconte  tout  aatrement  la  cause 
'  de  la  perte  de  la  Sicile.  Il  Tattribae 
aussi  à  une  femme,  mais  d*une  au- 
tre jfàçon.  Selon  lui,  Euphémius 
était  fiancé  à  nne  femme  d'une  rare 
beauté  ,  nommée  Homoniza  ^  qui 
lui  fut  enlevée  par  le  gouverneur  de 
la  SicilC)  Grœculus  qui  Sicilias  prœ- 
eratf  qui,  gagné  par  le  rival  d*£u- 
phémius ,  la  lui  livra.  Ce  fut  pour 
venger  son  injure  qu*£uphéraius 
passa  en  Afrique  et  en  revint  avec 
les  Arabes  qui  conquirent  la  Sicile. 
Le  diacre  Jean ,  dans  son  Histoire 
des  évéques  ae  Naples ,  publiée  par 
Mnratori,  t.  x,  part,  a  ,  p.  3x3, 
donne  à  ce^ersonnage  le  nom  d*£a- 
thymius.  Toyez  ci>apr.  not.  x.  — 
S.-M. 

'  n  paraît  cependant  que  ce  fut 
après  avoir  tué  le  gouverneur  Grégo- 
ras.  Syracusani  Eutkjrmia  facUone 
rebellantes,  Gregoram  patricîum  in-, 
terfecerunt,  Johan.  Diac,  Chron,  ap» 
Murât,  t.  I,  part,  a,  p.  3i3. — S.-M. 

>  Abou  Mohammed  -  Zaïadet -Al- 
lah ,  fils  d'Ibrahim ,  fondateur  de 
cette  dynastie,  succéda  en  Tan  30 1 
de  rhégire,  '816  de  J.-G.,à  son 
frère  Abd-Allah.  Il  mourut  en  Tan 
333  de  rhégii^,  838  de  J.-C.  H  eut 
pour  successeur  son  frère  Aglab. 
Ibn-al-athir,  t.  i,  f*  i3o  r*-i33, 
donne  de  grands  détails  sur  Thistoire 


de  ce  prince. — S.-M. 

3  Au  lieu  de  califes^  que  donnait 
Lebeau.  Les  Aglabites^  qui  posié' 
daient  la  plus  grande  partie  de  l'A- 
frique, d'abord  comme  lieutenants 
des  khalifes  abassîdes,  et  ensnite 
comme  princes  indépendants,  ne 
prirent  jamais  le  titre  de  khalifes  ; 
au  moins  je  ne  connais  aucun  au- 
teur arabe  qui  le  leur  attribue — 
S.-M. 

..  4  Cédrénus  l'appelle  simplement 
îémir,  0  AfAYipSç.  Zonar.  1.  i5,  t.  a, 
p.  141,  l'émir  d'Afrique.  C'est  le 
continuateur  de  Théophan^,  P»  5i, 
qui  lui  donne  le  nom  d'w^m/r-o/- 
moumenitif  qui  correspond  à  celui 
de  khalife.— S..M. 

S  Ibn-al-athîr  donne  plusieurs  fo^ 
le  nom  de  ce  traître,  mais  il  est  tel- 
lement filtéré  et  mal  reproduit  dans 
le  seul  manuscrit  de  cet  auteur  qne 
nous  possédions,  qu'il  est  impossible 
de  l'y  reconnaître.  Cet  auteur  dir 
qu'il  était  le  commandant  de  la  flotte 
chargée  de  défendre  l'ile,  et  qu'il 
avait  fait  plusieurs  descentes  en 
Afrique.— S.-M.  ' 

^  Je  supprime  encore  le  titre  de 
calife  donné  mal  à  propos  par  Le- 
beau au  souverain  dont  il  s'agit.  •— 
S.-M. 

7  Les  Arabes  disent  que  cette 
armée  était  commandée  par  un  cer- 
tain Asad,  fils  de  Farath.  Selon  Ibn- 


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{kti^^,)  LIVRE   LXVriI.  MICHEL   II.  73 

en  Sicile,  ik  battent  les  troupes  de  l'île  près  de  Ma- 
zara,  et  s'emparent  de  plusieurs  villes  '.  Euphémius, 
décoré  du  nom  d'empereur,  courait  de  toute  part  à 
la  tête  d'un  gros  détachement,  pour  soulever  le  pays. 
Étant  à  la  vue  de  Syracuse,  il  fait  faire  halte  à  ses 
troupes  et  s'avance  seul  vers  la  ville  jusqu'à  uhe  por- 
tée d'arc.  De  là,  faisant  entendre  sa  voix,  il  exhorte 
les  habitants  à  préférer  une  douce   liberté  qu'il  leur  , 

apporte  au  joug  tyrannique  qui  les  accable.' A  ces'pa- 
rôles,  deux  frères  sortent  de  la  ville,  et  viennent  à  lui 
dans  une  contenance  respectueuse.  En  l'abordàiit ,  ils 
le  saluent  du  nom  d'empereur.  Euph^mius,  charmé 
de  leur  soumission,  leur  répond  par  des  caresses;  et, 
tandis  cp'il  tient  l'un  des  deux  embrassé ,  celui-ci  le 
saisit  fortement  par  les  cheveux,  l'autre  lui  abat  la 
tête  d'un  coup  de  sabre;  et  tous  deux  se  sauvent  dans 
Syracuse ,  avant  que  l'escorte  ait  eu  le  temps  de  les 
atteindre. 

Les  Sarrasins,  après  avoir  passé  l'hiver  en  Sicile*,    aw.  828. 

al-athir,  f^  laa,  t%  il étiiit  jnge  su-  U  donne,  mss.  arab.  t.   i,  P  laa 

préme  à   Kaïrowan,   capitale   des  t°  -i%$  y^ ,  de  fort  longs  d^taib 

Aglabites.  Le  même  antear  place  la  qu'il  est  difficile  de  concilier  avec 

descente  des  Arabes  au  mois  de  re-  les  historiens  de  Temptre.  Il  y  parle 

by  1"  112,  de  Thég.  (Juin  8» 7).  Le  fort  an  long  des  divisions  survennes 

.  diacre  Jean,  dans  son  Histoire  des  entre  les  officiers  de  Temperear  qnî 

éyéqaes  de  Naples,  ap.  Murât,  t.  i,  favorisèrent  l'entrée  et  les  succès  des 

part.  2  ,p.  3 1 3 .  donne  au  chef  des  Ara-  Arabes. — S.-M . 
bea  le  nom  A^Jrearius  :  Euthymius  >  On  apprend  de  Tanonyme  de 

j4fricam  eum  uxore  etfilio  petens,  Saleme,  Chron.  c.  4^»  ^^p-  Murât. 

ArcariwnducemSarracenorumcum  t.  a,  part.  3,  p.  208,  que  Catane  fut 

magno  navium  apparatu  super  eos-  une  des  premières  villes  qu*ils  pri- 

dem  Gracos  adduadu — S.-M.  rent  en  Sicile.  Selon  une  chronique 

X  Uin-al-athir  j^ce   de  même  arabe,pnbliée  en  latin  dans  Muratori, 

que  les  Grecs  Tinvasion  de  la  Sicile  la  ville  de  Messine ,  défendue  par  le 

par  les  Arabes  d* Afrique  en  Tan  axa  patrice  Théodore,  fut  prise  en  Tan 

de  lliég.  (a  arril  837-19  mars  8a8).  83  x .^S.-M. 


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LI. 

Suite  de  la 
conquête. 


74  HISTOIRE   DU    BAS-EMPmE.  (A*  848.) 

vont  assiéger  Syracu&e.  Quoique  l'empereur  Regardât 
toutes  ces  pertes  avec  assez  d^indifféreace,  cependant 
réveillé  par  les  murmures  de  «es  sujets,  qui  voyaient 
av^  douleur  le  dépérissement  de  Tempire,  il  fit  par- 
tir une  gi'ande  flotte  changée  de  troupes.  [Le  duc  de 
Venise,.  Jpstinieu  Particiacus  ',  reçut  l'ordre  de  join- 
dre sets  vaisseaux  à  )a  <âQt<ie  îiepélriale  '.  Il  obéit  et 
«lit  en  mer  quelqvhes  Mtiments  de  guerre,  qui  ne  pu- 
rf^nt  rencQ^itrer  le»  vaisseaux  des  Grecs,  et  revinrent  à 
Venise  sans  avoir  rien  fait  ^.]  Les  Sarrasins ,  fort  in- 
férieurs en  forces,  levèrent  le  siège  4,  et^  s'étant  sépa- 
rés en  plusieurs  corps,  se  fortifièrent  en  différents 
eindroits  de  Tile  ^.  Toujours  battus,  assiégés  dans  leurs 
retraites,  réduits  à  l'extrémité,  et  obligés  k  manger 
leurs  chevaux,  ils  éutient  sur  le  point  de  périr,  lors- 
qu'ils reçurent  d'Espagne  un  puissant  secours^.  A 


^  Ce  prince,  associé  d*abord  à  son 
père>  Ange  Particiacus,  devint  seul 
dnc  de  Venise  en  Fan  827.  H  gou- 
verna cette  ville  pendant  deux  ans 
4jep1evient.  ^on  irère  Jean  lui  sdc- 
4:^dB(.enranS99.— S.-M.    ' 

»  4éh  imperéUore  re^uisitNs  quas' 
dam  ^eUicom*  nav^  co/fira  SaracC' 
noi,  qui  SiciUam  ittvas^rant,  dttd' 
j|MC|V),  Andc.  Dànd.  Chroii»  \,  8, 
c,  a,Si,— S.-M. 

^  Grœcorum  stolo  ofmuht  suos 
non  invenientes^Venetiam  redierunt. 
Andr.  Dand-  Chroju  1.  8,c,  a,S  i. 
X^'anoce  sai?a9te  «  »  Ja  .  prière  .de 
Veniperenr  Michel,  le  doge  envoya 
une  noDvelk  flotte  dans  la  Siol«, 
<oo  elle  n'ojbti.«t  aacun  4ucc^ ,  aii- 
çuem  trittmpkum  minime  oonsefui 
valu^rat.  Andr.  Dand.  ehrom  i.  ^, 
c.a,S9.— S.-M. 


4  Le  chef  des  Arabes  fiit  tué  pen- 
dant ce  siège.  U  fot  remplacé' par 
Mohammed  ,  fils  d*Aldjoaary.  Ibn- 
Al-athir^  f*  ia3  v**.  Celui-ci  fut  tué 
bientôt  après  en  nne  autre  expédi- 
tion dans rintéritfvc  de  file,  et  rem- 
|>laoé   par  Zohaïr,  fils  de  Oluath. 

B.-M. 

5  IbtiHilTatbîr,  t.  I,  f  ii3  V*, 
dionne  les  noms  de  plasienra  des 
lieux  qai  forent  alors  eonqaU^on 
attaqués  par. Us  Arabes;  inah  ils  sont 
al  mat  écrits ,  qa^ii  est  presque  im- 
possible de  les  reooDiuiitr«,  à  r  ex- 
ception de  Bjaijent  oa  Agrigente. 
— S..M. 

^  DeguigneTf  qni  fournit  cette 
circonstance,* i7ûf.  das  Huns^X.  i, 
p.  364 ,  dit  que  ce  secours  était 
.oofnnandé  p(ir  Asbug,  Sïb  de  Wa- 
kil.  Uin-al*âthir,  Mst  arabes,  t.  i. 


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ClnM.)  LIVRE    LXyiU.        ..MICHEL   IF.  ^5 

l'aide  de  cerçnfort^Us  chass^èareat  les  Grecs,  prii'^tit 'Syra- 
cuse.', et  3e  readir^nt  ç[ïaître3  de  l'île  entiène^.  Xiî^det- 
Allah  eo  donnai  le  gouv|efïiiÇffl^^tà  [sm  neveu  '^]  Mtoham- 
med,  qui  prit  d^ns  la-^ui,te,|e.jt*i'?  4p  W  de  Sicik^^ 
[et  fixa  sa  résidence  à  Palerpïe^,^ui  deyint  alors  |a.€«ipif 


f  «4  1*,  parle  aussi  de  ce  secours. 

*  Il  nVst  pas  bien  constant  q*ie 
les  Arabes  se  soient,  à  cette  époque, 
wenàoa  maîtpes  de  Syracuse.  Je  n'en 
▼ois  la  preuve  wHe  part.  Il  est  bien 
certain  qu*à  une  époque  plus  mo- 
derne,- cette  vîHe  était  encore  an 
ponvoir  de»  Grecs;  elle  ne  fat  même 
conqnise  par.  les.  Musulmans  qu'eu 
Tan  880,  sous  le  règne  de  Basile-le- 
llSaoédoiiien.  Yoy«»  ci  -après ,  Uv. 
1.XXI ,  §  48.  On  voit  du  reste  en  l'an 
«28,  à  répoqne  dont  il  s'agit,  les 
Grecs  de  Syracuse  ^  cacheter  ^ 
pay^t  un  tribut  de  cin^ani 
pièces  d'or;  c'est  ce  que 
posîti  veinant  le  diacre  Jean 
Histoire  des  év^eques  de  Napléf^T*/'. 
Dlor^au,  t.  I,  p*n^  a,'p.  Si3  ;  Grœd 
resUfere  aon  w^léfUfi^,  €tintr^  clafif 
sera  ejusdem.  civifOtis  (SyracusaJ 

miilia  soHdomm  persplverunt  pi  in 
trOfutum,  Ceci  mt  conforme  9a  récit 
d1bn-al-atkir>  «qui.  parle  du  siège, 
mais  qdn  de  la  prise  de  Syracuse. 

^  Toutm  4tf9.astabant  Sfoiiiam, 
Jfii»^,  D^.,  jGJ/3W.  <»/»-  MiiTM.» 
t.  j,  part,  n.'p,  5t3t. — S.-M. 

3  Mohammed  était  fils  d'Abd-AÎ^ 
lah*  prédécesseur  de  7iiad«tr Allah , 
et  pedt-fils  d'Aglab,  foo4«t^ur  dp 
la  dynastie.  Il  mourut,  «çIqu  Abou  Ir 
faradj ,  uémn.  Mml  H.  X9  «  »  «»  ^'^ 
a37  de  lliégire,  85i,  aprèft  atoit 
gouverné  l'île  pendant  dix-neuf  ans. 


-Cependant  le  même  historien  ne  place 
J^.go^vcipnemeot  et  miânie  la  cdnr 
.  quête  de  l'ile  par  M obarame4  qu'en 
l'an  aa8  de  l'hégire,  842- de  J.C, 
cerqni  lif  fait  que  neuf  ans.  La  même 
chose  se  Ht  exactement  d^ns  la  Chro- 
nique manuscrite  d'Ibn-al  athir.  On 
voit  qu'il  y  &  dans  tout^cecî  erreur 
et  confusion.  Je  pe^se  quie  Moham- 
med l'Aglabite  a  effectivement  gou- 
verné la  Sicile  pendant  dix-neuf  ans, 
et  qu'AbouFféda,  ou  plutôt  Ibn- 
al-athir,  qu'il  paraît  avoir  copié,  s'est 
trompé  d'année  en  plaçant  son  ar- 
iQieDaent  eu  l'an  a ^8  de  l'hëigire, 
taodis  qu'il  fallait  az8^  date  qui 
1^^  .que  de  quatre  années  envûroB 
j^ïitérieare  à  Fentrée  des  Arabes  en 
Keiae.— S.-M. 

^  L^B  Arabes  ac  prennent  pas  de 
t^lj»  titras; les  pins  pi^jt^a^ts  tkç^^^rti^ 
r«l^s  musulmans  n'eqf  ei^t  pa^  d'an- 
tres titres  qijie  celui  -d'émir.  Mphamr 
9ied  jest  «eulemexM:  qualifié  par  les 
•  Crabes  seigneur  djç  k  Sicile.  U  eut 
poiur  «acoesseur,  en  85i,  Abbas, 
fils  de  Fadhl,  fils  d'Iakpub,  fils.c|« 
Ifaxaiah ,  euFoyé.  par  AboH'J-iAbba» 
AI objinimed  1  q¥Î  ^MiC  ^ra  j^mffp 
d«ft .  Agl§b|ne»,r^S.  rMt 

5  L^^ntiqpie  Panormus,  Lea  Arabes 
rappelèrent  Piflfitrnf»  dVù  «'«**  ^' 
«lé  soft  nom  moderne.  Jean  le  di^crç 
puriie  de  la  .conquête  de  cet^e  vilk  4 
cette  époque,  <!/?.  M«rat.  t.  ^,  I»rt> 
a,  p.  3i3  :  Àdpostrtmvm  vero  w 
pifuf^s  Pan0rmicarittmi^<nnfifiiiim'r 
cuuctQf  ^^   kabi^atiorts  in  capiivi- 


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76  HISTOIRE   JDU    BAS-EMPIRE.  (An  8a8.) 

taie  de  l'île  '].  Les  iSarrasins  en  demeurèrent  possesseurs 
pendant  plus  de  deux  centà  ans  *.  De  là  ils  étendirent 
leurs  ravages  dans  la  Calabre  et  dans  les  autres  pro- 
vinces de  l'Italie  ^.  Leurs  partis  couraient  jusqu'aux 
environs  de  Rome;  ce  qui  engagea  le  pape  Grégoire  IV 
à  rebâtir  à  l'embouchure  du  Tibre  la  ville  d'Ostie  en- 
tièrement ruinée;  il  la  nomma  Grégoriopolis  ^.  Aucun 
de  ses  prédécesseurs  n'avait  fait  un  si  grand  ouvrage 
pour  l'utilité  publique.  Ce  fut  encore  par  les  soins  de 
ce  généreux  pontife  que  Borne  fut  agrandie  au-delà 
du  Tibre,  autour  de  la  basilique  de  Saint-Pierre.  Ce 
nouveau  quartier,  fortifié  de  murailles  et=  de  tours , 
fut  comme  une  nouvelle  ville  ajoutée  à  l'ancienne. 
Mais  Grégoire  n'eut  le  temps  que  d'en  jeter  ïes  fon- 


tatem  dederunt.  Ils  y  firent  pmon* 
nien  révéqae  Lncas,  le  spathar  Sy- 
méon.  Lucas  ejusdem  op^pidi  eU/Mm 
et  Sjrmeon  spatharius  cum  ptm^ 
suntaxis  deliberati.  Selon  nne  chro- 
ïiiqae  arabe,  dooAée  en  latin  tlans 
le  grand  recueil  de  Mnratori  «Païenne 
fat  conquise  par  les  Arabes  en  Tan 
83 1 ;  Selon  Ibn-al-4ithir,t.  1 ,  f* i a 4  r^, 
Palerme  fut  conquise  en  Fan  216  de 
rhég.  (18  fcvr.  83i— 7  févr.  83a),  ' 
et  peuplée  de  colons  arabes,  tirés 
d'Espagne  et  d*Afriqiie. —  S.-M. 

'  U  semble  résulter  du  récit  bien 
imparfait  des.  auteurs  grecs  ^  que  la 
Sicile  fut  très-rapidement  conquise 
par  les  Arabes,  tandis  qn*il  est  très- 
évident  au  contraire ,  par  les  récits 
de  ces  derniers,  que  la  conquête  fdt 
longuement  disputée.  Après  la  con-* 
quête  de  Syracuse,  les  Grecs  restè- 
rent encore  maîtres  de  beaucoup  de 
places  fortes;  et  ce  ne  fut  que  long- 
temps après  que  les  Arabes  en  res- 


tèrent les  maîtres. — S.-M. 

*  Aes  historiens  grecs  ne  donnent 
pgdBIt— iciin  détail  sur  la  (conquête 
dellpicile  parles  Arabes.  On  doit 
bien  regretter  la  perte  de  rfaistorien 
Théognoste,  qui  vivait  à  eètte  épo- 
que, et  qui,  selon  le  contitinatenr  de 
Théophane,  p.  5a  ,  avait  traité  clai- 
rement et  fort  au  long  de  cet  événe- 
ment important  :  Av)>eot  ^s  taCra  aa- 
ç^ç-arà  xai  «XaTWwttpcv  t^  toti 
^pa;ç6Î<ra  ©eoptâcw,  x.  t.  X. — S.-M. 

3  oî  «J'è  À'yiipyivôi  où  vfi%  SocsXioç 
{1.0VOV  IxTore,  âXXà  xal  KaXauptaç  xxt 
xm  «jrXiiovwv  rîjç  iTaXiaç  é-yevovTO 
i-pcpatelç,  troévra  xararpex®^*^  **^ 
^laTTopOoûvrèç.  Cedr<  t.^,p.  5if. 
—S.-M. 

4  Cette  ville  fut  fondée  en  Tan 
833.  Anastase  le  Bibliothécaire,  De 
vit.  Pont,  Rom,,  jT.  167  et  168, 
donne  d'amples  détails  à  ce  sujet. 
—  S.-M. 


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(An  8a8.>  LIVRE   LXVIII.  AriGH£L   If.  'J'J 

déments:  elle  fut  achevée  par  Léon: IV,  qui  lui  donna 
le  nom  de  ville  Léonine.  Les  Sarrasins  ne  durent  pas 
seulement  à  la  force  de  leurs  armes  les  -conquêtes 
qu'ils  firent  en  Italie;  ils  surent  profiter  des  divisions 
survenues  entre  les  princes.  Vers  Tan  85o ,  Pandone , 
gouverneur  de  Bari  ^  dans  la  Fouille,  les  appela  au 
secours  de  Radelchis,  prince  de  Bénévent,  et  fut  la 
victime. de  son  imprudence  ^.  Ces  barbares,  qu'il  avait   ' 
fait  venir  en  qualité  d'alliés,  le  traitèrent  en  ennemi. 
Campés  près  de  Bari  au  bord  de  la  mer,  ils  y  pénétrèrent 
pendant  la  nuit,  massacrèrent  les  habitants,  jetèrent 
dans  la  mer  Pandone  lui-même,  et  demeurèrent  maî- 
tres de  Bari,  qu'Us  tinrent  pendant  trente  ans^.  Le 
patriarche  Nicéphore  mourut  .jçette  année,  8îf8,  le 
2  juin,  dans  l'exil  où  il  vivait  depuis  treize  ans»  Ce  saint 
prélat  joignait,  aux  ;  v^^tiAs  ks  plus  éminentesr  toutes 
les  côtittaissances  qu'on  pouvait  acquérir  en  ce  temps- 
là.  Nous  avons  de  î^i  une  histoire  abrégée  de  cent 
soixanle-'sept  ans^  depuis  la  mort  de  Maurice  jusqu'au 
mariage  de  Léon  ÏV  et  d'Irène,  une  Chronologie  et 
quelques  ouvrages  contre  les  Iconoclastes. 

li'année  suivante  l'empereur  Michel  mourut  d'une    Ah  Sag. 
colique  néphrétique ,  le  i^'  d'octobre,  après  avoir  ré-    Mortdc 
gné  huit  ans. et  neuf  mois.  Il  fut  enterré  daps  le  mau-  ceJ^'.*^î|a,*p. 
solée  de  Justinien.  L'Empire  perdit  sous  son  règne       ^^^• 


z   On   plntât    Gastald   de  Bari.  courses  et  des  établissements  ûdts 

>  Radelchis  princeps  per  Bamen'  par  les  Avares  en  Italie ,  détail  fort 

sem  Pandontm  gastaldeum  in  auxir  obscur  et  fort  difficile  à  établir,  ap- 

lUtm  sibi  transmarinos  invUahat  Sa*  partient  platàt  k  l'histoire  de  l'Italie 

ractfwj.  Hist.  ign.  mon.  Cassin.  ap,  qn*à  celle  du  Bas-Empire.  Je  n'en 

llnrat;,  t.  2,  part,  i,  p.  a66. — S.-M.  parlerai  qu'anunt  qu'il  se  rattachera 

3  Le  détail  des  expéditions,  des  directement  k  mon  sojet.  — S.-M. 


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7.8.  HISTOIRE    Dli    BAS- EMPIRE.  (An  Ba^.) 

Leogramm.  la  CrètèV  M  Sfcife  et  la  DattTiàtîe  entière' ^  Mai^  ce 

Zon.i.i*5,t.2  mauvais  prirtcé,  uniquement  sensible  à  ses  plaisirs, 

Cont/Thc-  'oij^  d'en  témoigner  aucun' regret,  en  plaisafntàîtmêbie 

Tymeon.p*.'  *^^^  ^es  courlfisans.  A  là  nouvelle  de  la^ferte  Aè  là 

^^^'       Sicile,  cotome  il  disait  à  Irétiéié,  im  de  ses  ihinistf^es  : 

5io,  5i3.   Je  vous  fais  camplimeniy  iDous  i)oilà  débarrassé 

97-       dun  Grand  fardeau.  Prince^  lui  répliqua  Irenéë,  // 
Giyc.p.288.       ^^,       -^         «  j  '  ^' 

Joël,  p.  178.  nt faudrait  que  deux  ou  trois  soutagements  pareils 

a,  p.  23.  '  pour  être  débarrassé  de  tout  rehipire.  Outre  Théo- 

f^.^^Byffp.  phile,  tjui  lui  succéda,  iï'aVaft^è'ù  de  Thécla  une  éfle 

^^^*    .  nommée  Hélène,  que  Théophile  fit  épouser  au  patricè 

Théophôbe,  issu  dii  sang  royal  de' Perse*.  La  suite  de 

l'histoire  fera  connaître 'les  sei'viceis  et  les  itaalheùrô 

de  ceVaiHiàht  g^uérrier.  ^'    .'T 


<  On  peftt  nifi&»r  dd»- tendes '<\&àkS  ^Akà^  ¥  Ti'ji^o.aé/  -  éfm%t>ii^  \^^'^• 
se  sert  Cédréniis,  t.. 9k ,  p.  5i 3 ,  ^ue,.  Q^î  t&,SQKl  aùvoxs^oXouJ/B  cgxi^  ce-* 
cette  province  se  rendit  indépciji-  pendant  qi^e  les  empereurs  y  cou- 
dante-: ÀireçaTYiae  Je  êtt'  aùtou  xàr'''sêrv4rfeht  o\i  'y  1*ëcouvrèrent  une 
T^giadc  :q  AaX|jLaTià^  C'esf  ce  que  dit^j  (  iia><^i:lt^  ii9uûiiA.b.;^o|ff2  t.  ix>f  pi 
an  reste,  lecontianateur  de  Théor  ^  Ja  ,^Uv,  .ij^i,§  19. — S.-M. 


nid» 

.t:  ;": 


Fir^    DÛ    UVRE    ^ôl'XAPlTE-HtlltiKME.  ' 


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UV«£  tJU\.  THéO}>RfEE. 


79 


LIVRE  LXIX. 


Punition  deâ  asisassihs  de  Léon,  ii.'  Fablé  3ur  le  mariage  de 
Tbéopîiîlfe^  m.  ÏTiéodôta  impératrice,  iv..  Zèle  de  Théophile 
pour  la  justioe.  v^  Aiatres  exemples»  de  jiisliee.  vi.  Vive  ré- 
primande ^  V^P^^Atiiqei.  yii.  Succès  de$  Sacra$kis«  viuu^ 
Histoire  de  lliéDphpbe..  ix.  Malheureuse  e^pédij^pn  en> 
AlDasgie.  x.  Mort  du  calife  Al-Mamoun.  xi.  Histoire  du  •phi- 
losophe Léon.  XII.  Théophile  refuse  Léon  aux  sollicitations 
d'AI'Mumouii.  xui.  Léon  fait*évêquër  et  chaise  de  sori  siège.' 
1(1  V.  Théophile  vaincu  par  l^Sarrààitxs.  ibv.  Les  Sarrasins 
vaincus  par  Théophile,  xvi..  Théophile  isAuyé  par.  ManueL 

XVII.  Disgrâce  de  Manuel,  qui, se  retire  chez  les  $Arr£Êin^. 

XVIII.  Exploits  de  Manuel'  chez  les  Sarrasins,  xix.  Manuel  de. 
retour  à  Constantinople,  xxVSÙperstition  de  Théophile,  xxi.' 
Expédition  en  Sicile.'  xxif.  'Histùïre'd'Àlexis  MusèléJ  xxnil' 
Yiotence  de.:  Tbiophilet  i^iv.  Alexis*  së'reiii'e  dan^  âti  md^ 
uastève.  xx¥.  Ambassade  é» ,hssak  ^cémmAnte  à  ^BlagdàdU 
XXVI.  Luxe  de  Théophile,  xxvii.' Théophile  ennemi  d?..la> 
débauche,  xxviii.  Nouvelle  persécution,  xxix.  Traitement 
fait  aux  moines,  xxx.  Souffrances  de  Théodore  et  de  Théo- 
phafne.  xxxt.  Bappel  de  Méthodius.  xxxîi.  'Commencement 
des  Pa^lrinaees^.  x^îiiijr.  Hardiesse  dMn  cduVteui'.  xxliiv. 
Thiéophile  prend  plusieuu9rvâlle6.^  xxxv.  Sédition  des  soldàtsi' 
perses.  XXXVI.  Les  Sarra&ins  vont  assiéger Amorium^  xxxtii. 
Bataille  de  Dazymène.  xxxvni.  Danger  que  court  l'empereur, 
xxxix.  Prise  d'Amorium.  xl.  Le  calife  refuse  le  rachat  des 
prisonniers)  xli.  Traitement  des  prisonniers  chrétiens,  xlu. 
Martyre  dé  quarante-deux  officiers.  [xlAi.  Nouvelles  hostili- 
tés des  Arabes J  xiiiv.  Nouvelle  calomnie  contre  Théophobe. 


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8o  HISTOIRE   DU    BAS-EMPIRE. 

xLv.  Mort  de  Théophobe  et  de  Théophile,  xivi.  Réflexions 
sur  le  caractère  de  Théophile,  xlvii.  Caprices  de  Théophile. 
XLYiii.  Ses  enfants. 


•I 


THEOPHILE. 

Ah  «19.     J^  HJÉOPHiLE  avaît  atteint  Fâge  viril   lorsqu'il  monta 
Punition  des  sur  Ic  trônc.  Né  avec  beaucoup  d'esprit,  il  était  animé 
*'*Léon.  ^^  d'un  grand  zèle  pour  lajustice,  persuadé  qu'elle  s'accorde 
Léo  gramm.  toujours  avcc  Ic  véritable  intérêt  des  princes.  Quoi- 
Ccdr.t.2,p.  qu'il  fût  redevable  du  trône  aux  assassins  de  Léon,  il 
Zon.i.i5,t.a,  résolut  dc  les  punir,  et  ce  fut  la  première  opération  de 
Cont'^The.  son  règne.  Comme  il  ne  connaissait  pas  tous  les  cou- 
**^*''54.^^**  pables,  et  qu'il  n'^n  voulait  laisser  échapper  aucun, 
^^TiT*  ^  ^  ordonna  par  édit  au  sénat  et  à  tous  ceux  qui  avaient 
Georg.  p.    r^fldii  quelque  service  à  son   père  de  se  trouver  au 
[Gencs.  1. 3,  palais.  Les  meurtriers  de  Léon  y  accoururent   tous 
avec  empressement.  Lorsquils  furent  assemblés,  l'em- 
pereur, naturellement  artificieux ,  prenant  un  ton  de 
douceur  et  de  bienveillance  :  «  Fidèles  serviteurs  de 
a  mon  père,  leur,  dit-il,  ne   croyez  pas  qu'en  perdant 
V  celui  que  vous  avez  fait  empereur,  vous  ayez  perdu 
«  votre  récompensé.  Mon  père  avait  dessein  de  cqm- 
«  bler  de  biens  et  d'honneurs  ceux  qui  ont  signalé  leur 
«  zèle  et  leur  courage  en^ôlant  la  vie  à  son  persécu- 
cc  tcur»  Une  mort  prématurée  a  prévenu  les  effets  de 
«  sa  reconnaissance;  mais  son  successeur  est  chargé 
(c  de  sa  dette ,  et  pour  ne  pas  courir  le  hasard  de  l'in- 
«  gratitude,  il  veut  commencer  son  règne  par    s'en 
«  acquitter.  Que  tous  ceux  qui  ont  eu  part  à  la  n^ort 


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\kA  8a^)  tiVAÉ  LXIX.  THÉOPHILE.  8j 

a  de  Léon  se  séparent  des  autres,  et  se  présentent.  » 
Ils  De  tardèrent  pas  à  obéir,  et  chacun  d'eux  se  pré- 
parait  au  remercîmeqt.  Alors  Théophile,  pour  rap- 
peler au  sénat   les  circQnstances  les  plus  atroces  du 
meurtre,  fit  apporter  la   croix  dont   un   bras  avait 
été  abattu  du  même  coup  qui  avait  tranché  la  tête  à 
Léon,  et  la  montrant  aux  sénateurs  \  Que  méritent , 
leur  dit-il  ^  les  coupables  d'un  si  horrible  attentat? 
Tous  s'étant  écriés  :  Ils  méritent  la  mort  !  Tempereur 
se  tournant  vers  le  préfet  :  Faites  votre  charge,  lui 
dit-il ,  et  punissez  selon  les  lois  ceux  qui  se /ont  un  . 
sacrilège  honneur  cTa^oir  porté  leurs  mains  meur- 
trières sur  l'oint  du  Seigneur,  et  sur  le  Seigneur  lui- 
même.  En  vain  imploraient- ils  sa  miséricorde,  en  vain 
s'écriaient-ils  que,^ans  le  secours  quils  a\f aient  prêté 
à  son  père  pour  le  délivrer  d'une,  mort  certaine ,  il 
ne  serait  pas  lui-même  empereur  ;  ils  fureiît  conduits 
au  icirque,  où  ils  eurent  la  tête  tranchée.  Il  semblait 
que  Théophile  eût  entrepris  de  réparer  tous  les  crimes 
de  son  père.  Euphrosyne  comptait  sur  la  promesse  que 
le  sénat  entier  avait  signée,  de  lui  conserver  le  rang 
d'impératrice  après  la  mort  de  son  mari  ;  Théophile  la 
fit  sortir  du  palais,  et  rentrer  dans  son  monastère'  ;  et 
le  sénat ,  qui  avait  été  forcé  d'approuver  ce  mariage 
scandaleux  ,  ne  fit  aucune  démarche  pour  maintenir  la 
garantie  qu'une  complaisance  servile  lui  avait  arra- 
chée. 

Je  me  suis  abstenu,  depuis  le  commencement  de    ^"  **3o.. 
cette  histoire ,  de  recueillir  les  fables  que  les  auteurs  Fabie"sur  le 


'  Selon  la  chronique  de  Léon-le-      ponr  demeare  le  monastère  de  Oas- 
Grammairien ,  p.  449 ,  on  loi  donna      Uia. — S.-M. 

Tome  XllL  6 


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Sa  HISTOÎRB    DU    BAS-EMPia£.  (^^  g^^ 

mariage  de  grecs  ont  seiiiées  daos  leurs  ouvrages  :  j'aurais  cru  man- 

T  eop  le.  ^^^^  ^^  respect  qu-e  je  dois^.à  mes   lecteurs,  si  je  les 

5i5,  545.    eusse  amusés  de  contes  frivoles.  Cependant,  lorsque  c;es 

p.  i4t,  142.  contes  ont  acquis  une  certaine  celebi^te,  comme  laveur 

Léo  gramm.  glcmcut  ct  la  mendicité  de  Bélisaire ,  il  est,  à  mon  avîr^ 

cint^riie.  du  devoir  d'un  historien  de  les  rapporter  pour  les  d^en^ 

Symeon'/p.  ^^^'>  ^^  P^^**  désajjuscr  ccux  qui  n'ont  pas  letempsoules 

^^^^^'       moyens  de  s'aider  du  flambeau  de  la  critique.  Telleesl  la 

5i4.       fable  du  mariage  de  Théophile,  adoptée  par  quelques  mo*- 

97*        dernes ,  qui  ont  été  bien  aises  de  rencontrer  daxis  ces*  siè** 
Giyc.p.288.    ,         '  .  ,     ,  .     1        , 

Georg.  Ha-  clcs  dcmi-barbares  un  trait  de  galanterie  romanesque^ 

Mss!  Voici  le  fait  raconté  par<)inq  historiens,  qui,  s'étantcopiés 
£am?ByV.  1'"^^  l'autre,  uc  Valent CH Semble qu'uQ  seul  ténaoignage* 
p.  i35.  Euphrosyne  ' ,  mère  de  Théophile ,  diseM^its^  voulant 
marier  son  fils ,  envoya  diefns  toutes  les  provinces  de 
l'Empire  ordre  d'amener  à  Coristantinople  toutes  les 
filles  distinguées  par  leur  beauté.^  i)ii  conçoit  assez 
quelle  en  dut  être  la  multitude,  si  Ton  s'en  rapporta 
au  jugement  des  pères  et  des  mères.  Lorsqu'elles  fu- 
rent arrivées,  on  les  assembla  tôute$  dans  Une  salle 
du  palais ,  et  l'impératrice  mit  entre  les  maini^.de  son 
ffls  une  pomme  d'or ,  pour  là  dénher  à  CelU  qu'il»  dioi' 
sirait  pour  épouse.  Arfnétis  de  tous  leurs  appas,  elles 
étaient  rangées  sur  deux  aies  vi^à-vis  l'unie  de  l'autre; 
et  chacune  d'elles,  animët^  d'un  inférât  si  cher  et  si 
sensible,  detâit  sans  doute  porter  dauB  son  cœur  et 
dans  ses  regards  toute  la  jalousie  et  la  haine  de  dèiix 

X  II  serait  possible  cependant  que  '  ligence,  et  qa*elle  entra  librement 

la  veave  de   Michel   ait  continué,  dans  un  monastère;  an  moins  pla- 

après  la  mort  de  son  mari ,  de  por-  sieurs  aateurs  byzantins  le  disent.  H 

ter  on  de  prendre  le  titre  de  mère  serait  donc  bien  possible  qne  Théo- 

de  Tempereur,  son  bean-fils.  Il  pa-  phile  se  fiât  laissé  diriger  par  elle 

rait  qu*ils  vécurent  en  bonne  intel>  dans  le  choix  d'une  époase.-»-S.*M» 


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{kA  83o.)  IIVHE   LXIX.  THÉOPHILE.  83 

armées  ennewiies.  Le  nouveau  Paris,  la  pomme  dW  à 
la  main,  passait  entre  les  deux  rangs,  et,  faisant  la 
revue  de  tous  ces  attraits,  il  s'arrêta  devant  Icasie, 
qui  lui  semblait  ^facer  toutes  les  autres  par  l'éclat  de 
sa  beauté;  alors  lui  présentant  la  pomin^.,  soit  &ute 
d^esprit,  soit  que  l'étonHemept  lui  en  eût  ôté  l'usage, 
il  ne  trouva  rien  de  plus  galant  à  lui  dire  que  ces  mots  : 
£n  vérilé^  les  femmes  ont  causé  bien  des  malheufsl 
A  ce  compliment  Icasie  répondit  :  Elles  ont  aussi 
pmduit  dè^  grande  biens;  réponse  qui  valait  un  peiï 
moins  que  le  silence.  Cependant  Théophile  craignit 
d'épouser  une  fille  qui  montrait  tant  d'esprit ,  et  donna 
la  pommé  à  Théodora.  Ce  conte,  plat  et  ridicule  en 
toutes  ses  parties,  se  réfute  assez  de  lui-même.  J'oberve- 
irai  seulement  qu'il  suppose,  contre  la  vérité,  qu'Euphro- 
syne  était  mère  de  Théophile  :  elle  n'était  qu'une  odieuse 
belle-mère;  et  si  on  ne  l'avait  pas  encore  fait  sortir  d» 
palais^  du  moins  est-il  certain  qu'elle  était  fort  éloignée 
de  prendre  un  intérêt  si  vif  aux  plaisirs  du  jeune  em« 
pereur. 

Il  paraît  cependant  qu'Icasie ,  soit  par  sa  naissance ,  m. 
soit  par  sa  beauté ,  eut  quelque  prétention  au  titre  impéMitrice. 
d'impératrice.  On  convient  qu'étant  déchue  de  c^te 
espérance  par  la  préférence  qui  fut  donnée  à  Théodora, 
elle  bâtit  un  monastère,  où  elle  passa  le  reste  de  ses 
jours  dans  les  exercices  de  la  pénitence  :  elle  y  composa 
plusieurs  ouvrages  de  prose  et  de  vers,  qui  respiraient 
la  piété  et  le  détachement  du  siècle'.  Théodora,  sa 
rivale ,  se  distingua  encore  davantage  par  les  exemples 
de  vertu  qu'elle  donna  sur  le  trône,  et  dont  ni  son  mariai 

*  Voyexà  ce  sujet  Zouare,  1.  i5,  t.  i,  p.  141  et  i4a. — S.-M. 

6. 


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84  HISTOIRE   DU   BAS-EMPIRE.  (An  83o.) 

son  fils  ne  profitèrent.  Son  entrée  à  la  cour  y  procura 
des  établissements  à  sa  nombreuse  famille.  Théodora 
était  née  en  Paphlagonie ,  dans  un  lieu  nommé  Ebissa  '. 
Nièce  de  Manuel  *  ,  estimé  pour  sa  valeur ,  et  qui 
possédait  déjà  les  premières  charges  de  l'empire ,  il  y 
a  apparence  que  ce  fut  par  son  moyen  qu'elle  se  fit 
connaître  à  la  cour.  Marin,  son  père,  sorti  de  la 
première  noblesse  du  pays^,  avait  eu  des,  emplois  ho- 
norables^.  Sa  mère  Théoctiste,  surnommée  Florine, 
n'était  pas  moins  recommandable  par  sa  piété  et  par 
le  soin  qu'elle  prit  d'élever  ses  enfants  dans  les  dogmes 
et  dans  les  pratiques  de  l'Église  catholique.  Outre 
Théodora , elle  avait  deux  fils  et  trois  filles^  ;  les  deux 


X  La  ^taation  de  ce  lieu,  qui  n*eat 
nommé  que  par  le  seul  contiiraatear 
de  Théopbane ,  p.  56  ,  est  incon- 
nue.—  S.-M. 

2  Cette  circonstance  semble  indi- 
quer que  la  famille  de  Théodora  ti- 
rait son  origine  de  l'Arménie,  comme 
la  plupart  des  familles  distinguées 
de  Tempire.  Manuel  était  arménien 
de  naissance ,  et  Bardas ,  frère  de 
Théodora, qui  fut  depuis  César,  por- 
tait un  nom  arménien.  On  voit,  par 
le  témoignage  du  continuateur  de 
Théopbane,  p«  9^9  que  Manuel  était 
Toncle  paternel  de  Timpératrice.  Ôç 
xaiOeîoç  àiro  7raTpoçTÎîç<^e(nroivYiç  utc- 
^PX^^'  ^tte  circonstance  n*a  pas  été 
connue  ou  remarquée  de  Ducange , 
qui  n'eu  fait  aucune  mention  dans 
sa  généalogie  des  familles  byzanti- 
nes. Manuel  était  donc  frère  de  Ma- 
rin ,  père  de  Théodora.  Vartan,  his- 
torien arménien  (ap.  Mich.  Tcham- 
thiam,  Hist.  d^Arm,  t.  a,  p.  437, 
en  arm.) ,  qui  vivait  au  xiii®  siècle, 
assure  qu'il  appartenait  à  la  célèbre 
maison  des  Mamigonieus ,  dont  j*ai 


eu  si  souvent  occasion  de  parler.  Il 
est  certain ,  au  moins ,  que  le  nom 
de  Manuel  était  commun  daùs  cette 
famille.  C'est  d'elle ,  je  crois ,  que  le 
tenaient  les  autres  familles  nobles 
de  l'Arménie  ;  et  c'est ,  je  crois ,  par 
les  Mamigoniens  qu'il  est  passé  dans 
l'Occident. —  S.-M. 

3  TewiiÎTOpa  <^8  MapTvov  oùx  &rm\L6>» 
Tiva  %  i^mvfi'^  rh*  tûx»JV.  Cont. 
Theoph. ,  p.  56.  Cette  famille  de- 
vait être  arménienne  d'origine,  puis- 
que le  célèbre  patrice  Manuel ,  qai 
était  bien  certainement  annénien 
originaire ,  était  l'onde  maternel  de 
l'impératrice  Théodora,  par  consé- 
quent  frère  de  Marin.  Voyez  la  note 
précédente. — S.  -M. 

4  II  avait  rempli  les  fonctions  de 
Drungaire ,  ou  celle  de  tourmarque^ 
ce  qui  équivalait  au  titre  de  tri- 
bun ,  à  une  époque  plus  ancienne  : 
Apou']^']^apiov  <^è,  ^  ToupfAapxYiv  xara 
Tivaç,  dit  le  continuateur  de  Thco- 
pliane,  p.  55. — S.-M. 

^  Sophie,  femme  de  Constantin 
Baboutzic ,  décoré  du  titre  de  iiui- 


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{kn  83o0  LIVRE    LXIX.  THÉOPHILE.  85 

fils  étaient  Bardas ,  quî  s'éleva  dans  la  suite  au  rang 
de  César,  et  Pétronas  ,  qui  fut  patrice,  et  commandant 
de  la  garde  impériale.  Théoctiste  fut  honorée  dû  titre 
de  patrice,  car  cette  dignité  se  communiquait  aux 
femmes.  Ce  qu'il  y  a  de  singulier* et  de  bizarre,  c'est 
que,  pour  lui  donner  une  fonction  à  la  cour,  on  la 
nomma  dame  d'atour  de  sa  fille  ^  Mais  elle  employa 
plus  utilement  ses  soins  à  l'éducation  de  ses  petites- 
filles^,  qu'elle  s'efforça  de  prévenir  contre  l'hérésie  dont 
leur  père  faisait  profession.  Nicétas,qui  souffrit  le  mar- 
tyre dans  la  persécution  dont  nous  parlerons  bientôt, 
était  de  la  même  famille.  Théodora  reçut  du  patriarhe 
Antoine  la  bénédiction  nuptiale  le  jour  de  la  Pentecôte^ 
dans  la  chapelle  du  palais,  et  la  couronne  des  mains 
de  l'empereur.  Il  allèrent  ensuite  en  grand  cortège  à 
Sainte-Sophie,  où  ils  distribuèrent  de  magnifiques 
présents  au  patriarche ,  au  clergé  et  à  tout  le  sénat. 

Léon  l'Arménien  avait  été  sévère  jusqu'à  la  cruauté;        iv. 
Théophile  en  se  rendant  redoutable  au  crime  ,  se  fit   Théophile 
aimer  de  la  vertu  et  de  l'innocence.   Cependant  son  ^^'^tice/T 
zèle  pour  la  justice  excéda  quelquefois  les  bornes  d'une  Cedr.  ta,  p. 
louable  sévérité.  Les  historiens  catholiques ,  très-éloi-       5'i5. 

gisur;  Marie,  femme   du  mttgister  née  du  mariage   de  Théophile  avec 

Arsabir  on  Jlrschavir,  homme  très-  Théodora.   U  serait   bien    possible 

distingné ,  probablement  arménien,  qa*il  se  fut  marié  da  vivant  de  son 

si  on  en  jage  par  son  nom}  et  Irène,  père,  ce  qni  rendrait  pins  vraîsem- 

femme  dn  patrice  Sergins,  frère  da  blable  ce  qne  j*ai  dit  ci-dev.  §  2, 

patriarche  Photins.' — S. -M.  p.  8a  ,  et   ce  qo'on  dit  de  la  part 

«  à  TBtuTyjç  puiimp,  ÔsoxTiÇTQ  ÇwçtÎ  quc  rimpératrîce  Euphrosyne  a  prise 

TE  xai  iraTpixia  TeriptifiTai.  Cedr  t.  2,  au   mariage    de   Théophile.   Voyez 

p.  i»i5.— S.-M.  aussi  ce  que  je  dis  plus  bas,  J  aa  , 

^  Elles  étaient  ta  nombre  de  cinq.  p.  117,  not.  3,  sur  Tépoque  da  ma^ 

Tbécla,  Anne,  Ana'stasie,  Pnichérie  riage  de  Marie,  cinquième  fille  de 

et  Marie. —  S.-M.  Théophile,  avec    le    patrice  Alexîa. 

^Xesaotecrsn'indiopentpasran-  Mousèle. — S.-M.  , 


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86  HISTOIRE    DU    BAS-EMPIRE.  (An  83o.) 

Zon.i.i5,t.a,  gnés  de  le  flatter,  ne  peuvent  s'empêcher  de  faire 
^MaMM.'p.  l'éloge  de  sou  attention  à  réprimer  les  violences  des 
Lco*gr?âm.  hoinmcs  puissants,  à  veiller  à  la  police  de  l'État ,  et  à 
cSnt^The-  procurer  à  ses  sujets  la  sûreté,  le  repos,  et  labon- 
oph.  p  53   dance.  Il  allait  toutes  les  semaines  du  palais  à  l'église 

et  ^8.  .         .  7 

Symeou,  p,  dc  saintc- Marie  de  Blaquernes  :  car,  quoiqu'il  rejetât 
Ceorg.  p.   le  culte  des  images,  il  faisait  profession  d'une  dévotion 
ciyc/p.aSg.  particulière  envers  la  sainte  Vierge.  Traversant  ainsi 
p.'^ss,  36.*  toute  la  ville  à  cheval,  il  donnait  un  libre  accès  à  tous 
T^heodoVr  ceux  qui  avaient  quelque  sujet  de  plainte:  il  recevait 
TEim '  hilt  '^^^'^   requêtes,  et  leur  rendait  justice  sur-le-charap. 
sarac.   p.    En  passaut  par  le  marché,  il  se  faisait  instruire  de 
l'état  des  provisions,  et  descendait  aux  derniers  détails 
de  ce  qui   concernait  la  subsistance  et  l'habillement 
même  de  ses  sujets ,  pour  s'assurer  que  les  officiers  de 
police  s'acquittaient  de.leur  devoir.  Si  le  prix  des  denrées 
lui  paraissait  trop  haut ,  il  mandait  le  préfet  sur  la 
place  même ,  et,  s'il  y  avait  de  sa  faute ,  il  le  destituait 
de  sa  charge;  sinon,  il  lui  donnait  ses  ordres  pour  le 
soulagement   du   peuple.  L'histoire   nous  a  conservé 
quelques  traits  de  sa  justice  inflexible.  Un  jour  une 
pauvre  veuve  se  présenta  sur  son  passage  :  Seigneur^ 
lui  dit-elfe,  y^f  le  malheur  d'avoir  pour  voisin  le 
commandant  de  vos  gardes  ;  il  élèç^e  sa  maison  à 
une  telle  hauteur  quil  aie  le  jour  à  la  mienne^  et  la 
rend  inhabitable.  Cet  homme  injuste  était  Pétronas, 
beau-frèredel'empereur.  Théophile  le  fait  venir,  et  l'in- 
terroge sur  le  fait  dont  se  plaignait  cette  femme.  Pétronas 
ayant  répondu  avec  mépris  qu'elle  ne  savait  ce  qu'elle 
disait:  Prenez  garde ^  dit  l'empereur,  qu'elle  ne  me 
porte  une  seconde  plainte;  vous  vous  en  troubleriez 
mal.  Il  ordonne  à  cette  femme  de  revenir  si  elle  n'ob- 


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(An  83o.)  LIVRE   LXÏX.  THÈOPHILK.  87 

tient  pas  un  dédommagement.  !^ebutée  de  Pétronas, 
elJe  revient  en  effet  à  l'empereur ,  qui  donne  sur-le- 
cbamp  commission,^  plusieurs  sëoataurs  '  de  faire  une 
descente  su^le^  lieux,  et  de  voir  si  le  dommage  est  réel. 
Sur  leur  rapport,  il  se  transporte  à  la  place  publique, 
fait  .amener  Pétronas  ;  et  l'ayant  fait  dépouiller  et 
Jbattre  de  verges,  il  commande  d'abattre  sa  maison ,  et 
en  donne  les  matériaux  et  le  .sol  même  à  la  veuvç.  Ce 
qu'il  y  a  de  plus  remarquable,  et  qui  fait  connaître  à 
quel  point  l'honneur  était  pour  lors  avili  et  les  mœurs 
dégradées,  c'est  que  ce  châtiment  public  n'empêcha 
pas  Pétrqoas  de  vivre  à  la  cour ,  ni  de  parvenir  à  de 
nouv^les  dignités  sous  le  règne  suivant,  et  même  au 
icon^andement  des  armées. 

IjCs  gardes  qui  escortaient  le  prince  avaient  ordre        ^• 
dcj^'écarler  auc^n  de  ceux  qui  demandaient  audience,  exemple»  dt 

justice. 

Un  homme  vint  un  jour  se  jeter  au-devant  de  lui ,  et 
saisissant  la  bride  de,  son  cheval  :  Seigneur,  lui  dit-il, 
le  çheml  que  monte  Votre  Majesté  est  à  moL  Peu 
s'^n  ia^ut  que  l'animal ,  effarouché  de  cette  brusque 
resiCQOtre,  .ne  renversât  l'emperciur,  qui,  s'étant  ras- 
foxkt  .^p^laJe  maître  de  ses  écuries,  qu'on  nonpmait 
le  connétable,  et  lui  demanda  de  qui  il  teçait  ce 
cheval.  Cet  officier  répondit  que  le  .gouverneur  de 
J^'Htellespont  en  avait  faitprésent  à  $a  Majesté.  Gegou- 
yeroeui:se  .trouvant  alors, à,  Constantinople,  l'empereur 
4e  r^our^u  .palais; le  fit  venir  avec  celui  qui  réclamait 
le  <^ftvajj./et„3près  les  avoir  tpjus^eux  interrogés,. la 
y4oi^PQ  4tapï-ftyé}rée  :  Qùlai-je^  b^^om  de  tes  jpféfçjits 


^"Le  questenr  Eastathins,  surnom-      Démétrîus  Emalianas.  Georg. Chron, 
iii«|le)nK?»ie^ill^(Sl^tMtius  et     j>.  5i6.— S.->M. 


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88  HISTOIRE    DU    BAS-EMPIBÎÎ.  (An  83o.) 

criminels  ?  dit-il  au  ravisseur  ;  veux-tu  donc  me  rendre 
complice  de  tes  brigandages  ?  Il  fait  sur-le-champ 
battre  de  verges  te  magistrat  et  rendre  le  cheval  au  lé- 
gitime possesseur ,  qui,  ne  voulant  pas 'le  reprendre, 
fut  forcé  d'accepter  pour  le  prix  deux  livres  pesant 
d*or.  Nulle  dignité  ne  mettait  l'injustice  à  l'abri  du 
châtiment.  Le  préfet  de  Constantinople  était  un  homme 
de  naissance  et  des  premiers  du  sénat  ;  il  était  aimé  de 
l'empereur.  .Fier  de  sa  faveur,  il  se  saisit  d'une  bar- 
que chargée  de  marchandises  pour  le  compte  d'une 
veuve.  Cette  femme,  ne  pouvant  obtenir  de  lui 
aucune  justice,  porta  ses  plaintes  à  l'empereur,  qui,  s*é- 
tant  informé  de  la  vérité,  exhorta  le  préfet  avec  dou- 
ceur à  faire  restitution.  Le  préfet  le  promit,  et  ne 
tint  compte  de  sa  promesse.  Sur  la  plainte  réitérée  de  la 
veuve ,  l'empereur  le  fit  brûler  vif  dans  l'Hippodrome. 
Il  traita  presque  aussi  cruellement  son  questeur,  con- 
vaincu de  plusieurs  injustices.  Après  l'avoir  fait  fouetter 
ignominieusement,  il  lui  fit  brûler  la  tête  et  le  visage 
avec  de  la  poix  ardente,  et  le  condamna  à  un  exil  per- 
pétuel. Deux  officiers  généraux  s'étaient  emparés  d'un 
champ  appartenant  à  de  pauvres  religieuses;  elles 
adressèrent  une  requête  à  l'empereur ,  qui  chargea  un 
capitaine  de  ses  gardes  de  les  amener  le  lendemain 
devant  lui  avec  leurs  adversaires;  il  jura  en  même 
temps  qu'après  avoir  entendu  les  deux  parties ,  si  les 
officiers  se  trouvaient  coupables,  ils  seraient  punis  de 
mort,  et  tous  leurs  biens  consfisqués  au  profit  des  re- 
ligieuses. Cette  menace,  dont  l'effet  était  infaillible, 
effraya  les  officiers  :  ils  traitèrent  aussitôt  avec  leurs 
parties,  et  les  engagèrent  à  se  désister  de  l'accusation, 
en  payant  le  double  de  la  valeur  du  champ.  Le  capi-» 


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(An  83o.)  I.ÎVRE    LXÎX.  THEOPHILE.  89 

taine  se  crut  dispense  d  exécuter  l'ordre  de  reniperenr, 
et  se  contenta  de  lui  rendre  compte  de  cet  accçmmo- 
Jeinent.  Mais  le  prince ,  qui  voulait  être  obéi  à  la  lettre, 
et  qui  craignait  d'être  trompé,  fit  battre  dé  verges  le 
capitaine,  lui  ordonna  d'amener  les  religieuses,  et  ne 
s'apaisa  qu'après  s'être  assuré  par  leur  propre  bouche 
qu'elles  étaient  satisfaites.  Tant  d'exemples  de  sévérité 
firent  enfin  trembler  l'audace  ;  le  simple  projet  d'une 
injustice  était  puni ,  et  la  police  de  l'état  fut  tellement . 
rétablie  que,  pendant  dix-sept  jours,  l'empereur  ayant 
fait  chercher  dans  Constantinople  s'il  y  avait  quel- 
qu'un qui  eût  des  plaintes  à  porter  devant  lui ,  il  ne 
s'y  trouva  personne. 

Théophile  n'épargna  pas  même  l'impératrice  ^  quoi-  vi. 
qu'il  l'aimât  avec  tendresse;  mais  il  lui  préférait  la  ^mandeT' 
justice,  son  honneur,  et  le  bien  de  ses*  sujets.  Ayant  fait  ^'^^f^J^^' 
détruire  une  grande  citerne  au  pied  des  murs  du  pa- 
lais, du  côté  du  Bosphore,  dans  laquelle  un  de  ses  fils, 
encore  enfant ,  s'était  noyé ,  il  fit  construire  en  ce  lieu 
un  belvédère  accompagné  de  jardins  délicieux ,  oîi  il 
se  plaisait  à  passer  les  soirées  de  l'été.  La  situation  en 
était  charmante  ;  la  vue  se  promenait  d'un  côté  sur  le 
Bosphore,  de  l'autre  sur  la  Propontide,  et  s'étendait 
sur  la  côte  de  l'Asie,  bordée  de  palais  et  d'objets  agréa- 
bles. Un  soir  que  le  prince  y  soupait,  il  vit  entrer  dans 
le  port,  à  pleines  voiles,  un  grand  vaisseau  marchand 
tellement  chargé,  qu'il  plongeait  dans  l'eau  jusqu'à  peu 
de  distance  du  bord.  Curieux  de  savoir  qui  en  était  le 
maître,  il  apprit  que  le  navire  et  la  charge  du  navire 
appartenaient  à  Fimpératrice ,  et  que  ces  marchandises 
venaient  de  Syrie.  Il  ne  dit  rien  sur  l'heure  ;  maiis  le 
lendemain ,  comme  il  allait  a  Blaquernes,  selon  sa  cou^ 


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9^  HlSTOIB£  DU    BAS-jyW PIEE.  (An  83o.) 

tume,  il  se  fit  conduire  a.u  pott;  et,  monté  sur  la 
poupe  de  ce  vaisseau,  s'adressant  aux  seigneurs,  de 
son  cortège  :  Qui  de  vous  y  dit-il  à  haute  voix,  a  be^ 
soin  de  marchandise  étrangère?  Comine  on  np  savait 
où  il  en  voulait  venir,  on. demeurait  dans  le  silence. 
Après  qu'il  eut  par  deux  fois  répété  cette  question,  les 
courtisans  étonnés,  ne  devinant  pas  ce  qu'il  voulait 
dire:  Eh  !  quçi!  dit-il,  ne  voyez- vous  pas  que  ^d'em* 
pereur  que  fêtais  par  la  grâce  de^  Di^u^  je 
suis  y  grince  à  ma  femme  ^  devenu  marchand  f^re- 
nant  alors  un  ton  plus  sérieux,  il  ordonna  aux  gens 
de  l'équipage  d'emporter  ce  qui  leur  appartenait  dans 
le  vaisseau,  sans  toucher  à  rien  de.  ce  qui.  était  à  l'im- 
pécatrice,  .Dès  qu'il  furent  sortis^  il  fit  mettre  le^feu  au 
bâtiment,  qui  fut  réduit  en  cendres  avec  toutes  les 
in^rcbandises.  Il  fit  ensuite  à  Théodora  une  vive  répri- 
mande, la  menaçant  de  toute  sa.  colère,  si  elle  s'avisait 
jamais  .de  déshonorer  son  mari,  par  un  indigpe  trafic. 
tje  commerce  y  ajouta-t-il,  est  pour  nos  sujets  un 
fnoyen  de  subsistance;  c'est  leur  tirer,  le  sarfg  des 
veines^  que  de  leur  âter  cette  ressource.  Que  de^^ien- 
dront'iLs  si,  /en  les  chargeant  d'impôts,  mous  leur 
iito^s  le,  moyen  de  les  payer? 
Aw  83r.  ..  Ce  caractère  ne  pouvait  manquer  de  courage.  Il 
Suclès'des  ^^"^  ^^^^  ^^  prince  une  arae  plus  ferme  pour  terrasser 
.Sarrasins.  J'injustice ,  armée  de  toutes  les  forces  que  lui  donnent 
les  dignités,  la  naissance,  la  proximité  du  sang,  les 
services  même,  que  pour  combattre  et  vaincre  les  plus 
puissants  ennemis.  Cependant,  soit  faute  d'habileté 
dans  la,  guerre ,  soit  que  sa  fougueuse  valeur  n'écoutât 
pas  les  conseils  de  la. pru4<çnce,  quoiqu'il  fût  suivi,  de 
nombreuses  armées  et  servi^par  de  bons  généraux,  il 


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(^Kn  9^ù.)  LIVRE  LXiX.  TH^OPHILK  9I 

fut  plus  souvent  vaincu  que  vainqueur;  ce  qui  \\n  fit 
donner  le  surnom  (TlnJoHuné  '.  Dans  les  premières 
années  de  son  règne,  il  eujr  en  «tête  un  redoutable  en^ 
nemi  dans  la  personne  du  khalife  Al-Mamoun  %  fils 
d'Haroun  Rascliid,  digne  héritier  des  grandes  qualités 
de  son  père.  I^es  Sarrasins  s'étaient  rendus  maîtres  de 
Tarse  ^;  les  Grecs  firent  des  courses  de  oe  oôté-là^  et 
taillèrent  en  pièces  un  corps,  de  seite  cents  bammes  ^. 
Pour  se  venger  de  cet  affrdpt,  le  khalife  ^é  initia  la 
tête  d'une  armée  ^,  et  assiégea  le  château  d*Antaûp  ^> 
dont  les  hahitauts  se  rencjliii-eiit.  11  alla  en^aite  mettre 
le  siège  '  devant  Lule  ^^  fort^esse  importante  près.d* 
de  Tarse  9.  Après  l'avoii:*^  tenue  assiégée  pendant  plus 


*  To  ^uçux^«-  Cont.  Theoph.  p. 

'*■  Ce  priace  était  khalife  depuis 
Pan  81 3.  Son  frère  Mohammed,  sor- 
nomraé  Al-Amin,  avec  lequel  il  avait 
presque  toujours  été  en  guerre,  avait 
été  tué  le  35  de  raoharrem  de  ran 
198  deThégire,  le  dimanche  a  5  sep- 
tembre de  Tan  81 3. — S. -M. 

3  On  ignore  à  quelle  époque  cette 
ville  était  tora)*ée  au  pouvoir  des 
Musulmans.  Elle  fut,  dans  ce  siècle 
et  le  soivant ,  là  principale  place  de 
guerre  des  Ara^  contre  le*  Greos. 
— S.-M. 

4  Selon  Elmaoî*,  Hist,  sarac.  p. 
i37,  tovs  habitants  de  Taroe  et  d« 
lAskmwiSà.^  Tâiptique  iMopsueste.  — 
S.>JV|.   ,    . 

5  Abon'lfeda ,  qui  fait  mentioD  de 
cette  ex{>édition,  Ann,  imisl. ,  II , 
1 55, sans  en  &ire  connaître  le  dé- 
tail, la  plate  en  Tan  ai 6  de  Thég. 
(27  février  83i — ^  février  SSa  de 
J.-C.  ).  Msunoma,  Selon  le  même 
Abou^lfeda  y  Ann.  musl, ,  II ,  f  53  » 


ats^t  d^  fait  rannée*  précédente 
une  invasion  sur  le  territoire  de 
rerbf/ire. — S  .-M. 

€  Ijû  nom  de  cette- plac«  «st/écHt 
Anthaon  dans  le  texte  d'Clmacin, 
Sis  t.  sartte,,^,  137,  mais  Je  lé  croî« 
mal  écrit.  Cet  aotenr  dit.jque  «qetc^ 
ville  se  rendit  au  khalife  le  i^  de 
djoumadi,  i*'  de  Tan  aiS  de  l'hé- 
gire, 4  juillet  83 1. — S.-M. 

7  Gbtte  expédition  ept  lien  A^ntiée 
sniviintA,  »i7  de  l.'Wgirq»  EIibaç. 
Hist,  sAmc.;  p*  i38^  Alwdf.  Awt„ 
amsL  n,  i55.  En  l'an  83*  de.  ^.-G^ 
--S.^M-.  •  ■      • 

^  Ce  cbàteflu  catnaainé^l^i/Uu^h 
par  lea  Arabes  et  Us  .j^yrien?.  Jlfl«l 
appelé  Loufoujf  dans  Cédréaus.,.t.  %f 
p.  552.— S.-M. 

9  C'est  Cédrénus  qni  doane^  t..  3^ 
p.  55 1,  cette  indication  sur  sa  posi* 
tion  :  <ï>pcûpiov  w  tJ  Tftç*<T»  à^iôuf»» 

^v^fAA.  Ce  châteauj,  placé. dans  pnr 
sitnalion  qui  doroiqait  tont  W^ays^^ 


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I^a  HISTOIRE    DU    BAS-EMPIRE.  (An  83r.) 

de  trois  mois  *,  comme  elle  ne  pouvait  être  prise  que 
par  famine,  le  calife  se  retira,  laissant  Adjif  ^  pour 
commander  le  blocus.  Les  habitants  surprennent  Adjif^ 
et,  après  l'avoir  gardé  prisonnier  pendant  huit  jours, 
ils  le  renvoient  avec  mépris.  Pour  sauver  une  place 
qui  se  défendait  avec  tant  de  courage,  Théophile  se 
mit  lui-même  en  campagne ,  et  vint  envelopper  Adjif. 
A  cette  nouvelle,  le  khalife  se  retourne  sur  ses  pas, 
et  Théophile ,  craignant  de  se  voir  enfermé  entre  deux 
armées  plus  fortes  que  la  sienne ,  prend  le  parti  de  la  re- 
traite. La  forteresse  se  rend  aussitôt.  Pendant  celemps-là, 
Mutasem ,  frère  d'Al-Mamoun  ^,  et  Jahia  *,  son  général, 
désolaient  une  grande  partie  de  l'Asie  ;  ils  s'emparèrent 
de  trente  forteresses  •^.  La  nouvelle  colonie  de  Sarrasins, 
établie  dans  l'île  de  Crète,  ne  faisait  pas  moins  de 
ravages  sur  la  mer.  Ils  firent  une  descente  en  Thrace , 
sàccagèrerit  toute  la  côte ,  et  enlevèrent  quantité  de 
prisonniers.  -  Un  de  leurs  partis  osa  s'engager  bien 
avant  dans  les  terres ,  traverser  toute  la  Thràce  et  pé- 
nétrer jusqu'au  mont  Latrus  ^,  dans  la  basse  Mésie, 

étttif  en  oommùBÎcàtîon ,  par  des  81-  lencides,  au  mois  de  mai  83a. — 

gnatix,  aveèime  ctiaine  deiiaiiteur»  S. -M. 

qai  «ondnisàieht  jusqu*à  Constanti-  '    '  oq  Odjaif^  et  non  Azif,  comme 

nople,  poor  avertir  tous  les  pays  dansLebeaa. — S. -M. 
intermédiaires  da  moment  précis  où  3  n  avait  été  créé ,  par  son  {rére, 

les  Arabes  faisaient  irrnption  sur  le  en  Pan  2i3  de  Thégire,  8a 8  de  J.-C, 

territoire'  romain.  Cet  nsage  fut  éla-  gouverneur-général  de  l^Bgypte  et 

bli  sous  le  règne  de  Michel ,  fils  de  de  la  Syrie,  Elmac.  Hist.  sarae.,  p. 

Théophile.— S.-M.  i36,  Abu'lféda, ^/i«. otwj/.,  Il,  c5i. 

'•  ''Pendant  cent  jonrs,  selon  El-  — S.-M. 

flifiC,  Hîst.  sàrac,  p.  1 38,  et  Abon*-  4  Yahia ,  fils  d'Actam. — ^S.-M. 

Uedày  ann.rnusi.,  II,   i55,  Abnl-  5  Ces  détails  sont  donnés  par  £1- 

fi^,Ckroh.  arah.i  p.  iSg.  AbouMfa-  macin,  Hist.  sarac,  p.  137. — S.-M. 

râdj ,  dans  sa  chronique  syriaque ,  '  ^  Év  tô  opei ,  5irep  cÔTw  xaXetrat , 

p.' 154,  place  l'époque  de  ce  siège  Aàrpoç.  Cont.  Tbeoph.,  p.  85.  ^- 

an  mois  de  iar  de  l'an  1142  dès  Se-  S.-M. 


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{Ku  83i.)  Ï'IV^?   I-ÎLIX.  THÉOPHILE.  '      qS 

OÙ  Us  pillèrent  un  riche  monastère,  et  Hiassacrèrept 
tous  les  moines.  Mais  Constantin.  Contoniyte^  gp^* 
vemeur  de  la  province,  étant  tombé  sur  eux  ayec  de§ 
forces  supérieures,  les  enveloppa  et  les  tailla  en  pièces. 
Ils  eurent  leur  revanche  sur  la  flotte  impériale,  qiuU 
vainquirent  au  mois .  d'octobre  près  de  l'île  de  Thase , 
et  dont  presque  tous  les  vaisseau^  furent  pris  pu  covàéi^ 
à  fond.  Cette  victoire  les  rendit  maîtres  de  ,1a  mer,  et 
laissa  toutes  les  Cyclades  exposées  à  leurs  pillages.'. 

Tant  que  Théophile  régna ,  il  ne  .  cessa  d'être  e^  vni. 
guerre  avec  le  Sarrasins,  et  sUl  y  ren^porta  quelque  Tbéop^bc. 
avantage,  il  en  fut  principalement  redevable  à  la  con-  Léo  gramm. 
duîte  et  à  la  valeur  de  ses  deux  meilleurs  généraux,  Ccdr.t.2,p. 
Manuel  et  ThfQphQbe..M!anqçl^né  en  Arménie*,  s'étsiit  Zon.i.i5,t.a, 
d'abord  fait  connaître  par  sa  fidélité  constante  envers  coôt/The- 
Michel  Rhanga^^  s^.i  jl  ,^è  .dîstirigu^^  sôus  le  règne  de  ^^Jl  ^' ^' 
Léon  par  des  aqtions  de  coi^çage ,,  qui  lui  firent  une  ®^°f°J'  P- 
haute  réputation  dhéz  les  eûhéniis  mêmes  ^.  Midhei-    ûeorg.  p. 

^      .  .  ^     ■         .  5i5,  5i6. 

le-Bègue  lui  rendit  la  charge  de  premier  écuyer  qu'il  Oenes.  t.  3, 
avait  d'aboi*d  possédée;  et  Théophile  ne  voyait  entre    ^'  ^ 
ses  officiers  que  Tlieophobe.qui4)ût  lui  être  compjsiré. 


'  Ce  détail  cfirieux  ne  se  trouve  qu!  avaient  ahandoimé  leurs  poiae^ 

que  dans  le  seul  continuateur  de  léidns  héréditaires  pour  passer  dans 

Xhéopfaane,  p.  85.-^S.-M.  TOccident,  et  s'attacher  an  a^rvioe 

a  On  plotôt  né  de  parens  armé-^  de  Tempire.  — S.-M. 

mens ,  èc  twv  Àpfitvib>v  xara'yoptevQç,  '  3  Voyci ci-dev.  p.  a,  Kv.  lxvui, 

dit  le  continaatear  de  Théophane,  aj  i. — S.-M. 

p.  9a.   Voyez  ei>dev.  5  3,  p.   84»  'i  Sa^valenr  et  sa  piété  étaient ég»- 

not.  a.  On  a  pu  d^  voir  qo*il  était  lemeiit.  célèbres    dans  i;a.  Syrie  et 

ronde    paternel    de  l'impératrice,  chez  les  Romains,  dit  Génésins,  1, 

femme  de  Théoplûle,  et  qn'il  pas-  3 ,  p.  i4>  OS  xXtoç  t^  àv^pcîaçoui- 

lait  chez  les  Arméniens  pour  appar-  xk  irào«v  2upîav  xat'I^cdifAatxiQv  hn- 

tenir  à  Tillustre  famille  des  Mamigo-  xpaT»tav,«oXXÛ»  ^s  (Att^ov  xal  (6ot- 

niens.  Je  pense  qu'il  était  issn  de  Ctîotç.^- S.-M. 
ces  familles  de  princes  arméniens, 


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9^  fiflSTOIftE   DU    BAS-ÏÏAIPIRE.  (An  dSi.) 

CeThéôphobeftit  un  de  ces  hommes  exlraorcïîtiaîresj  qiïe 
<tescorijonclunes  imprévues  tirent  de  l'obscurité,  pourles 
faire  briller  pendant  quelque  temps,  et  les  précipiter  en- 
suite: Sou  père  était  issu  des  roisâ-e  Perse  ^.  Cette  origine 
le  rendant  suspect  aux  califes,  qui,  depuis  la  conquâle  de 
ce  pays ,  avaient  éprouvé  de  fréquentes  révoltes,  il  prit  la 
fufte  *  et  vint  chercbériin  asile  à  Constanrtinople  sous 
lé  règne  de  Gonstanlm  et  d'Irène.  Pauvl-e  et' inconnu, 
il  s'attacha  au  service  d*ttiïe  femme  qui  tenait  hétel- 
lerie^  il  l'épousa,  et  mourut  après' en  avoir  eu  un  fils. 
Les  Perses,  opprimés  par  les  Sarrasins-,  conservaient 


Cêdr. ,  t.  a,  p.  5a3.  Il  était  *toi  ou 
.^oefic^ntiif  r<Ma>  dit  le  ç Oi^iûçpaf  . 
tear  de  Théophanes ,  p.  69.  Toy  xou-t 

Tou  «arepa    èire  patTiXeûcvraV   **"^* 

vtfav »  U  aérait  possible  que  le  père  de^ 
Hiéôpliobe,  issu  du  sang  des  rois  dé 
9ei«é,  éâï  été-  en  mèrae  tétn^s  ub  de. 
ces  petits  princes  perses  (|ui  s'étaient 
maintenus  et- conservés,  jusque  sous 
I^iMpfrades  Arabes,  àaM  di^étiès 
parties  de  la  Perse  ,  et  particulière- 
ment dans  les  provinces  qui  avoisi* 
•■ettt'  U  axer  Caapiennè.-r-S.-J!ii.  • 
<i:*  Selon  Cédrénos^t;  »,p.'533^ii 
vint  à  Constantinople  comme  ambas^ 
sadcur,  sans  qu'on  indique  de  qnelle 
'part.  Il  eut  dans  cette  ville  un  fils 
d^nne  naissance  illégitime ,'  qui  ff^ 
Tl)edpbobe.  Oùx.^èKV6(i.î(it«u  «uvv^tia;, 
■Ik  'ktJ^  aioiç  èi  xal  }cp\><p{aç' reOtov 
(8t^^céoy)  SiroTê)c«v.  Il  ajoute  queU 
i9ce  T&yale  venant  k  a'étdAdre  en 
Bû-stf,  d'OQ  elle  fut  c|ia«sié»^par  les 
Arabes,  les  Perses  envoyèrent  à  CoB- 
'  stantinople,  pour  y  demander  Théo- 
pbobe;  que   Teropereur,   qui  était, 


a^loh  le  même  historien,  Théophile, 
lènr.refosa  lIEréopbobe ,  le  créa  pa- 
^çe  -9%  If^'  diQiu^a  sa  seeor.  I^  est 
impossible  d'admettreun  récit  aussi 
fhvrAis^bla1blè."La'  racé  des  Sassa- 
nides  im  dép^sédm  dt  la  Perae  çp. 
la^  65 1  I  cqmmç  on  a  pu  le  voie, 
I.  il",  p.  3 17,  liv.  Lix,  S  a5,  deux 
aiécles  «environ  avant  Théophile.  On 
•  ne  YQ^t  pas  q^el  souvï^rain  persan 
aurait  pu  envoyer  nue  ambassade  à 
Gonstantinopléj  ^r  comment  les  Per- 
ses ,  alora  soumis  aux  Arabes ,  au- 
raient pu  envoyer  chercher  un  prince 
de  leur  race  royale  à  Constantino- 
ple.Ort  ne  pent  imaginer  quels  sont 
les  faits  qui  ont  pu  s'altérer  au  point 
de  donner  naissance  ati  récit  évidem- 
ment.fabuleux  de  Cédrénns.Le  même 
récit  abrégé  de  Cédrénas^  se  Ut 
«bns  Zonare,  1.  i5,t.  a,  p.  147. 
Ge  récit j'aa  reste,  a  ét^  tivé  da  con* 
tinnateaf  de  Théopfaane,  p.  6&  et 
69  ,  qui  le  rejette  lui-même,  et-  en 
rapporte  un  atitre  plus  vraisenibla<* 
blc ,  xxXov  ^àp  à^(pcT£pcuç  eîprieOfti, 
celai  même  qui  a  été  adopté  ave« 
raiscm  par  Lebeau.— -S.-M. 


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(^Aji83i.)  livre    LXrX.  THEOPHILE.  g5 

toujours  Fëspérance  dé  se  àéKvrer  d'esclavajge  *  ;  îb 
cbénssaient  les  resteèî  de  la  famille  de  leurs  rois.  De- 
puis la  fuite  dû  père  de  ïhéppliobe,  ils  n'avaient  cessé 
de  faire  dés  recherchés  pour  découvrir  sa  retraité. 
Enfin,  ils  soupçonnèrent  qu*il  pouvait  être  à  Cônstan- 
tinople.  Quelques-uns  d'entré  eux  en  firent  le  voyage  *; 
et,  après  une  longue  perquisition ,  ils  apprirent  enfiii 
qu'il  y  avait  dans  l'île  d'Oxiâ,  presse  Chalcedofne', 
une  femme  veiive  qiiï  se  vantait  d'i^tre  lar  mèrè'd'ûh 
descendant  cfes  rois  d'é  Pë^sè.  Us  Fintén^dgèrfetit;  ell; 
satîs&its  dé  sér  >épfohses ,  ik  ne  dôutèi^^nt  pas  qiîfc  fcet 
enfant  né  ^'16  ïégiUiilè' héritier  du  trôiie^tîe^ 
Sa  phy^diioiitJè,^elî'^iir(oul!  sBri  iiBi^è[trtfii?"*5;a^^éiofti 
firmèren^àâh'^'làlpWiiiéé'qù'il  était  du  iiairg  ffAttAXer^e. 
Il  êiih'iloHàigJi^^A^ië'ûiik^:  lU  irisèrtil^feiit  r«m^ 
pétear  de  •c^éttè••â^eh^e  r  fc'ëlaiit  Lëôn  Milnilïnîgdy 
qui  «e  ehdrgèa  dèf'iàtf  ftlit'e  ypHher  'iiîite'*édÙ6àtiou  cou^ 
^énàblè  4'ssi  rtâissâfarie.  Le' jfeutte  Théôphobe,  ce  ftit 
lé  ilbttit}ii6  lui  donna  Fempfétèur/él^îï'riéaVec'tmis 
les  tàlè'rrt&"flê  4'e$prit:W  toutes  les-gi^ë^  'tle  ffexté- 
rieur  \  Il  répondit  avec  le  plus  grand  succès  aux  soins 

:..•  ..    .  jc-;t.'>     ..;."  ••■.'   '"  .■^■..^       .  ..       hx  .•»...  ;i    "»  r-^n  ,'  :  <    •  ■"•     «•  ••'»-iT 
.î       '    •  .ti"  ,tj  .  ,.>,    j- I.'       • .".:      .»  -    »•-  'Cv  ifvCi'    .^.  •*'-.  .         ..1 

T«ittîii -i^ftÉ^  Gèiâfl  Thiè6^h. ^ :-  Y<3«      t^W*  <*^  Tb(îdpïiatie£-i-S*4dt.  ■■'■^-H 

— S.-M.  -•'.•••        '-^-ÀXXà  oiatî'fcàf&V'  1^  -^^jjj^'wd 

SyméoD  le  iogothète ,  [1.-4 16 v  «^<b  i^^l1>c»to  t6ri  i  H*i' ^^fvta'f  (ÇiTO^ Ccnit; 

étè^etke»''attfittfM"^è^'€¥i'i^ét  k  lfc«€»pb.  pj  €9.— Si.-'Mi'.  '     »  ■ 

OOiUtâilfiÂbp)i;'iiitâ  trrt  dëi^âitt  fi<^^  -  ^  '  Oetie  i)ii><:okltitatio«<  M  tttotfw 

bde,  qid  s'-était  i<éVOUé  •  cott^e^  té  daés-U  ctivîyntiqae  de^  Sytnéôn  !& Iq^ 

%èâlilb,-  et  qlÈH  «hler^ttâità  oetVê  épo^  gothète ,  au  miliea  d'âa  grand  notiÊ» 

qtté  k  •  aeffpiMchît^  les  Pd#Ms  dâ  jOtt^  bve  de  déf atis  -fabèkos  et  oontrbn- 

*es  Arabe».  It  en  sera)>l«ut6c  cjaei^  vés. — S.-M  -  •  .    ■     .  • 

tioD.  n  réAnHe  la  même  t-bose-  doi  ré-  .  ^   Selon  liéoti  4e   grammairien , 

àt  obscur  et  «qnftis  de  Oénésrar,  1.  Tbéopbobe   serait  venu  en  fugitif 

3,  p.  a5-a7,  qoi  semble,  an  reste,  aVec  son  père  auprès  de  Théophile. 


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96  HISTOIRE    I>U    BAS-EMPIRÉ.  ^An  83i.) 

qu'on  prit  àe  l'instruire.  5a  vertu  et  la  noblesse  de  ses 
sentiments  le  .firent  aimer  :du  prince  et  de.  toute  la 
cour.  Théophile,  élevé  avec  lui,  le  chérissait  comixie 
son  frère;  et,  lorsqu'il  fut  empereur ,  il  le  fit  patrice, 
et  lui.dpnna  9a. sœur  Hélène  en  mariage.  Un  Perse, 
nommé  BaJ)^c  %  a'étant  révolté  contre  le  calife,  avait 
soutenu  I4  guerre;  pendant  cinq  ans  ^.Vaincu  enfin, 
et  oblige,  d^  fuir  du  pays,  il  .se  réfugia^ sur  les  terres 
de  l'empirie , .  et  vint  à  Siuope.  ^.  avec  sept  mille  hommes 
qui  lui  restaient  du  débrisdeiso^nannée.Delà  il  écrivit 
à  l'ençipemir  .qu'il . se.  donnait  Vïyi^.ft, flu il  le  priait 
^ajGcçpter.  çjes  services  et  ceux  de  .ses  soldats- 4^  dont 
1^  iraypure.  s'içtait  souvent  éprouyéf .  .cotntre  .leurs,  com- 
muns eon^ipis..  *J'béophi.le;rf^ut,  3Y;€C. joie^jçqtte,  impor- 
tante coloriie;;  il  en  coingos^ii  jwf^  corp;s  ^  qui^  crois- 
sî^nt  de  jour  enjqur  par.)'arriYj4e  d'aujres  Perses,  que 
re:|^mple  dp  Ba^c.attijrajif  .d^ij$j^'empire^  V^^^^  ^P' 
«uile.^aii.napabre.jde  quatorze  milJR^^  et  enfin  jusqu'à 
Irente.  jU^ille,  hommes.  Bahec  étan^  "^^f.îf  Théophobe 
ftjjt.  nais  à  leur  tête.  Il  s'^ttac;Jî^re;it  f  Ifii   comme  à 

Ils  étaient  accompagnés  de  quatorze  xarà  ttoXiv  Sivcoin^  êçyijtrai.  Cont. 
mille  Perses,  npoori^u-yev   ©to^oêoç      Theoph.  p.  70. — S. -M, 

Ilepaûv  .fjX\<i^tùy:i^y.*  Ç^.  xéeXt  f^fi»  ç!ÇycçMinij«^9v  t^ôsomv}  ÇoutTIheoph. 

.Vc«Î86^)>labjl^  es(-4  aillears  en  con-  p*  70. —  S.-M. 

tnuUction'  ibanifestci  av^c  la  narca<^  :  ^  Td^^kO,  niçarucoV.  Cedr.  t.  a ,  p. 

tioD  de9  autreit  fttvtears  4e  «ette  épor  .Sa^.-^S.-M. 

que.  La  même  bjlftoire  et.les  mén60  9-  Léon  le  gramjnaûrien,  p.  ^.So, 

eoreurs  se  tcoavoni  d^ns  la  chroni-  dit;  que.  ces  troupes  furent  envoyées 

qae  de  Sjméon .le  logoibète, p.  ^i6  par  d^ftachements  dans  tous  les  tbé- 

et  416. — S^-M.  mes  on  divisions  militaires,  et  ^e 

.  VÔ  TÛv  UifOfùi  àpX^T^C  Bà^nc,  l^arscantoonemems  portaient  encore 

Cont.  Theoph.  p.  70. — S,-M.  de  ;8on  iemps  le  nçm  de.  tniTnœ  oa 

2  Ô^ti  TTiVTaeTÎav  «xwv  è?  â|Atp-  i)a taillons  perses,  .01  fAftxP'  "^^  wv 
p.voufjLvYj  àffcçâ;. — S.-M.  .Xf-yovTat  ToOpp.ai  nspaûv. — S. -M. 

3  npô;  TTjv  i*(«>|i.alV.yjv  iwwcpaTiiav 


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(ka«3iO  LIVRE   LXIX.  THEOPHILE.  9-7 

rhéritier  de  leurs  anciens  monarques.  Pleins  d'ardeurs 
et  de  confiance  en  ce  capitaine^chéri ,  ils  devinrent  ' 
Ja  terreur  des  Sarrasins,  et  se  signalèrent  par  des  courses 
et  de  fréquents  combats  conti*e  les  usurpateurs  et  les 
tyrans  de  leur  patrie.  L'empereur  ,  en  donnant  sa  sœur 
à  Théophobe  '^  fit  une  loi  par  laquelle  il  accordait  aux 
Perdes  le  droit  de  mariage  *  ;  il  éleva  aux  premiers  em- 
plois les  plus  distingués  d'entre  eux  ^,  et  les  traita  en 
toute  manière  comme  ses  sujets  naturels. 

Bardas,   frère  de   l'impératrice,  commençait  à   se    A»  «Sa. 
faire  connaître.  Dévoré  d'ambition ,  il  avait  tous  les  «  ,**• 
vices  qu'elle  entraîne,  mais  non  tous  les  talents  qu'elle   ««expédi- 


tton  en 


exige.  Fourbe  et  artificieux,  il  était  fait  au  manège  de    Abasgîe. 
la  cour,  et  entendait  assez  la  conduite  des  affaires  ci-  ^^^  Jj»«®- 
viles;  mais  dur  et.  cruel,  avec  peu  de  valeur,  il  n'était  v»»-  ig»»*. 
pas  propre  au  commandement  des  armées.  Sa  sévérité  Labb.  t.  8. 
barbare  effarouchait  les  soldats  :  ils   aimaient  mieux    ^'  "^"' 
être  battus  sous  ses  ordres  que  de  lui  laisser  la  gloire 
de  vaincre.  L'empereur  en  fît  une  triste  épreuve  dans 
une  expédition  contre  les  Sarrasins.  Les  Abasges  *,  ré- 
voltés contre  eux ,  demandèrent  du  secours  à  l'empire  : 
Théophile  fît  partir  Bardas  et  Théophobe  avec  une 
armée.  La  haine   des  soldats  contre  Bardas  fut  plus 


'  Selon  Léon  le  gtammairien,p.45o»  f&aîoic>  Cedr.  t.  a,  p.  5a  4* — S.-M. 
qui  parait  encore  fort  mal  informé,  3  HoXXcù^  ^8  ùc  toutcov  èpLTCpé^ctv 

Théopbobe  aurait  épousé  une  sœur  toTç  ^aatXixoIç  âSutt(Aaoi  miçovnxtùç, 

de  rimpératrice  Théodora.  AÔTOv  ^à  kiù^i^i    çpaTt<i>iixob;    àva^paçsTai. 

Tov  8eo9o6ov  ik  à^sX^ç  Bso^ûpaç  Cedr.  t.  a ,  p.  5a6. — S.-M. 
Âù-youçTrjç   'y3t|A6pàv    8W0iin<TaT0.    On  4  Les  Àbasges  ou  Abkhaz  habi- 

trouve  la  même  erreur  dans  la  chro-  talent  la  partie  du  Caucase  qui  s*é- 

niqne  de  S3rméon  le  logotbète,  p.  tend  au   nord-ouest  de  l'ancienne 

4i5. — S.-M.  Colchide.  J'en  ai  parlé  en  détail,  t. 

>  Êxaço'v  Te  twv  nspawv  vojxo6sT8t  9,  p.  ao5  ,  not.  a,  liv.  xi.vii,  §  69 , 

xar*  iizv^ctitMVt  ouvairrsoôai  toi;  i»cû-  sqq. — S.-M . 

Tome  XTir.  7 


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An  833, 

X. 

Mort  dn 

khalife 

Al-Mamonn. 

Abulfarage , 
chr.  arab. 
p.   i8x  ot 

seq. 

Elmacin. 

M^t.  sarac. 

p.  t3r. 
D'ITerbelot, 
Bibl.  Orient. 


98  HISTOIRE   UU   BAS*£HP1&£.  (Ab  83i.) 

forte  que  l'amour  qu'ils  portaient  à  Théophobe  :  ils  se 
laissèrent  battre  en  toutes  les  rencontres.  Le  fer  en*- 
nemi)  la  4^sette ,  la  désertion,  firent  périr  cette  armée; 
et  les  généraux,  couverts  de  honte,  n'en  ramenèrent 
que  de  malheureux  débris  '. 

Les  Sarrasins  firent  Tannée  suivante  une  perte  plus 
grande  et  plus  irréparable  que  celle  d'une  armée.  Le 
calife  Al-Mamoun,  [qui  avait  entrepris  une  nouvelle 
expédition  contre  l'empire,  mourut  à  Podandus  ^,  place 
voisine  de  Tarse  en  Cilicie  ^,  sur  les  confins  de  la  Gap- 
padoce,  dont  il  se  préparait  à  franchir  les  frontières  ^.J 
Il  avait  régné  vingt  ans  et  demi  et  était  âgé  de  qua- 
rante-neuf ans  ^.  Il  joignait  à  ses  qualités  royafes 
l'amour  des  sciences,  et  se  rendit  lui-même  très-sa- 
vant en  astronomie.  Ce  fut  lui  qui  acheva  de  tirer  les 
Arabes  de  la  profonde  ignorance  oii  ils  avaient  été 
plongés  de  tout  temps,  Almansor,  le  second  des  AJsh 


X  Le  continuateur  de  Théophane, 
p.  85  ,  est  le  seul  auteur  qui  parle 
de  cette  expédition:  il  ne  parle  que 
de  son  mauvais  succès,  sans  rien 
dire  de  ses  causes  et  de  son  objet. 
Je  doute  fort  qu'elle  se  soit  ratta- 
chée en  rien  aux  guerres  contre  les 
Arabes,  qui ,  je  crojs ,  n*ont  jamais 
étendu  leur  domination  jusque  dans 
cette  partie  du  CaucasCé  U  est  bien 
plus  probable  qu'il  s'agit  ici  d'iine 
guerre  contre  les  Abasges  ou  Abkhae 
révoltés.  On  n'est  pas  mieux  Infor- 
mé^de  la  date  et  des  détails  de  eette 
guerre. — S.-M. 

'  Cette  place,  dont  il  est  question 
dans  Gédrénus,  t.  »,  p.  575,  ot  dans 
d'antres  auteurs  byzantins,  est  nom- 
mé par  tons  les  écrivains  orientaux 
Itodundoun,  Badendoun,  On  voit, 


par  oe  qn'Ns  en  disent,  qu'elle  éttît 
voisine  de  ^Tarse.— S.'M. 

3  Mamouu  fut  enterré,  dit  Abon - 
Ifeda,  II,  »Ô5,  à  Tarse,  da««  la 
maison  d*un  certain  Djalân,  qoi 
avait  été  eunuque  d'Haroun-âl-Ra«- 
chîd.— S.-M 

4  Lebeau  s'était  trompé  en  disant 
que  Mamoun  mourut  en  retournant 
de  Tarse  à  Bagdad,  Là  ville  de 
Podbndns ,  on  il  motmit ,  «elon  U 
témoignage  de  tous  le»  éofiwiw* 
orientacrx,  était  an  contraire  ao-dett 
de  Tarse,  sur  les  frontières  de  Te»»- 
pire,  près  du  paesage  des  monta- 
gne* de  Cappadocè»— 8.-M. 

5  Le  khalife  Mamonu  moni*  *» 
jeudi  19  redjeb  de  l'an  a  18  del*h«- 
gîre ,  le  7  aoàt  833.—-  S. -M. 


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{kn  833.)  LÎVRB   LXIX*  THÉOPHILE.  gg 

bassidcs  «t  bisaïeul  d*AI*Mamoun ,  avait  donné  à  ses 
sujets  les  premières  idées  des  hautes  sciences.  Avant 
lui  les  Musulmans  n'étudiaient  que  leur  langue,  leur 
loi ,  et«ne«orte  de  médecine  grossière  et  imparfaite  ;  Al- 
Mamoun  petrlfeètionna  l'ouvrage  que  son  bîsafeul  avait 
héurewsetnent  coiwmetîcé.iltirade  laGrèce  des  copies  de 
tous  les  livres  qui  tl-aitaient  dé  quelque  science  ',  et  les  fit 
traduire  ^n  arabe  p»r  les  plus  haèilefe  interprètes  *.  Il 
excita  ses  suj«;ts  à  les  étudier;  il  faisait  tenir  en  sa  pré- 
sence des  «ion^rences  publiques  sur  les  divers  objct« 
ées  connaissances  humaines,  il  regardait  les  savants, 
dit  Abul4rage,  comme  des  créatures  choisies  de  Dieu 
Tflêtoe  pour  perfectionner  la  raiscm :  c'était,  disait-il, la 
lumière  du  monde ,  jes  maîtres  du  genre  humain ,  sans 
iesquels  la  terre  deviendrait  sauvage.  Il  comparait  aux 
animaux  les  hommes  qui  ne  travaillent  que  pour  le 
corps.  Il  y  eut  sous  son  règne  d'habiles  astronomes , 
entre  autres  Al-Fragan  ^,  dont  les  écrits  subsistent 


«  Ô  ^à  TÔv  t<rffca7)XtT&v  xkTôcpxwv 
Mapuoùv,  «XXiiiç  Te  pi.aÔYÎp.xaiv  éXXtivt- 
xûç  (y}(^oXa2[û)v,  xal  c^ti  xal  -yewjASTpiaç 
^ta(pepovTû>ç  eÇftx^P"^^^  ^*  Cedr.  t. 
Vp.  548.  La  ώaie  chose  se  lit  dans 
le  continuateur  de  Théophane,  p. 
116  et  seq.-^S.-M. 

>  Il  s'agit  iei  des  traductions  des 
livres  d'astronomie,  de  géométrie, 
de  mathématiques,  de  médecine  et  de 
philosophie,  particulièrement  ceux 
d*Â.ristote,  qui  furent  exécutées  par 
des  Syriens  attachés  an  service  des 
khalife».  La  plupart  de  ces  tnidiïc- 
tions  furent  d'ahord  faites  en  syria- 
que, et  c*c8t  sur  ces  versions  qu'on 
fit  passer  en  arabe  les  ouvrages  dont 
il  s'agit.  On  distinguait  parmi  ces 


traducteurs  un  certain  Hossaïn^raii- 
t^ur  de  presque  toutes  les  versions 
arabes  que  nous  possédons  encore. 
Cette  époque  est  une  des  pins  inté- 
ressantes ,  mais  aussi  des  plus  mal 
connues ,  de  l'histoire  littéraire  des 
Arabe9>i  Ce  n'est  pas  dans  une  note 
qu'il  serait  possible ,  même  sommai- 
rement, d'en  donner  une  juste  idée. 
—  S.-M. 

3  Ce  personnage ,  appelé  Ahmed, 
fils  de  Kotsaïr,  était  surnommé  ^l- 
fragany,  d'où,  par  corruptioù,  du 
a  JSiit  Aliragan.  Xi  est  un  des  phis 
illustres  astronomes  arabes.  U  était 
né  à  Farganah  dans  la  Trausoxiane. 
Nouspossédons  une  liaductiou  arabe 
d'un  traité  célèbre  de  su  coiuposi- 


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lOO  HISTOIRE    DU    BAS-EMPIRE.  (An  833.) 

encore.  JJais  les  folies  de  l'astrologie  judiciaire  ve- 
naient se  joindre  à  l'astronomie. 
XI.  Ce  prince  tâchait  de  rassembler  à  sa  cour  tous  les 

^huoloph^c"  savants,  de  quelque  religion  qu'ils  fussent;  et,  leur  lais- 
^^^'      sant  toute  liberté  en  fait  de  croyance  et  de  culte,  il  les 
547''ct  acqq!  combloit  dc  bicus  et  d'honneurs.  Ses  efforts  pour  at- 
^^^^J^Ts,  tirer  Léon  ne  purent  réussir,  mais  firent  la  fortune  de 
g^^^"     ce  philosophe.  Léon,   né  à  Constantinople ,  après  y 
4a4.'     avoir  étudié  les  belles-lettres,  s'était  transporté  dans 
5a3, 5a4.    l'île  d'Andros ,  pour  y  prendre  des  leçons  de  philoso- 
phie et  de  mathématiques  sous  un  maître  très-renom- 
mé. Il  eut  bientôt  épuisé  toute  la  science  de  ce  doc- 
teur ',  qui,  malgré  sa  grande  réputation,  n'allait  guère 
au-delà  des  éléments.  Enflammé  du  désir  d'apprendre, 
il  parcourut  toutes  les  bibliothèques  des  monastères , 
où  les  sciences  étaient  alors  ensevelies,  passant  lés 
jours  et  les  nuits  à  transcrire  les  livres  qui  traitaient 
des  matières  dont  il  voulait  s'instruire.  Muni  de  ce 
trésor,  il  se  retira  dans  des  montagnes  désertes,  où 
une  solitude  profonde,  la  passion  de  l'étude,  une  pé- 
nétration naturelle,  en  firent  bientôt  le  plus  habile 
géomètre  et  astronome  de  l'empire.  Il  revint  à  Con- 
stantinople plus  pauvre  encore  qu'il  n'en  était  parti,  et 
s'établit  dans  une  espèce  de  cabane ,  qui  devint  en  peu 
de  temps  une  école  célèbre,  et  qu'il  fallut  agrandir 
pour  contenir  la  foule  des  jeunes  gens  qui  venaient  y 
prendre  des  leçons.  Un  d'entre  eux  fut  pris  en  guerre 
par  les  Sarrasins,  et  tomba  entre  les  mains  d'un  des 
courtisans  du  calife.  Un  jour  que  le  maître  faisait  un 

tion,  intitulée  Introduction  à  Tastro-      Golias  en  1 669,  i  vol.  in-4°. — S.-M. 
nomie.  On  en  possède  plusienit  édi-  '  Il  se  nommait  Michel  Psellns. 

*       tioBs.  Xa  dernière  a  été  donnée  par      Gedr.  t.  a  ,  p.  55o. — S.-M. 


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(An  833.  LIVRE   LXIX.  THEOPHILE  lOf 

grand  éloge  des  géomètres  de  la  cour,  resclàve  témoi- 
gna qu'il  avait  quelques  principes  de  cette  science ,  el 
qu'il  serait  fort  curieux  d'en  entendre  discourir  par 
des  hommes  si  habiles.  A  la  première  occasion  ce  sei* 
gneur  ne  manqua  pas  de  vanter  au  prince  les  talents 
de  son  esclave.  Le  calife  voulut  le  voir;  et  après  l'avoir 
entretenu,  il  le  jugea  capable  d'écouter  les  maîtres  du 
palais,  qui  à  son  avis  n'avaient  point  de  pareils  dans 
l'univers.  L'esclave  assista  à  leurs  leçons,  et  leur  fit  des 
questions  qu'ils  jugèrent  insolubles  et  qu'il  résolut  lui- 
même  avec  facilité.  Étonnés  de  l'étendue  de  ses  con- 
naissances ,  ils   lui    demandèrent   s'il  se   trouvait   à 
Gonstantinople  d'autres  géomètres  aussi  habiles  que 
Ini;  Il  s'en  troui^e  beaucoup  déplus  habiles^  répon- 
dit-il; pour  moi  Je  ne  suis  qu'un  écolier.  Le  calife, 
qui  assistait  à  cette  conférence ,  lui  ayant  demandé  si 
eelm  dont  il  aVait  pris  les  leçons  vivait  encore;  Oui, 
répondit-il ,  il  vit;  il  est  pauvre   et  inconnu  au 
prince  ;  malgré  son  grand  savoir  :  il  se  nomme 
Léon.'  Aussitôt  Al-Mamoun  écrit  à  Léon  en  ces  ter- 
mes :  à  t)n  juge  d'un  aAre  par  le  fruit  :  votre  disci- 
a  pie  nous  a  fait  connaître  son  maître.  Puisque  votre 
ce  mérite  n'a  pas  dans  votre  patrie  le  crédit  de  vous 
«  tirer  de  l'obscurité,    venez  répandre  vos  lumières 
«c  parmi  nous.  Toute  la  nation  sarrasine  baissera  la  tête 
«  devant  vous',  et  vous  trouverez  dans  notre  bienveil-  . 
«  lance  plus  de  richesses  et  d'honneurs  que  n'en  ont 
(c  jamais  possédé  les  favoris  de.  vos  princes.  »  Il  mit 
cette  lettre  entre  les*  mains  de  l'esclave,  lui  promet- 


Cedr.  t.  a ,  p.  S49. — S.-M. 


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lO%  HiSTOIAB   DU    ÏÎ^.ÇtïMPIRB.  (An  833.) 

tant  la  liberté  et  de  grands  biens  s'il  lui  aineDait  sof> 
maître.  Il  lui  fit  f^ire  sentent  de  revenir  à  ^gdad. 
X^e  jeiine  homme  s'acquitta  de  $a  commission  avec  joie. 
Léon  reçut  la  lettre;  cetoît  de  qt»oî  flatter  sa  vanité, 
passion  que  la  philosophie  sait  bien  eaus^irer,  mais 
qu'elle  ne  sait  pas  éteindre- 
Thfoiiiiie  Cependant  Léon  se  croyant  en  danger  si  l'o»  dé«^ 
refuse  Léon  couvroît  qu'it  cût  Tcç»  <les  léttrcs  du  calife^  et  plus 

aux    soUici-  *  .  . 

tarions d' Al-  encore  su  entreprenait  de  passer  en  pays  ennemi,  va 
trouver  Théoctiste,  directeui*  général  des  postes  %  lui 
rend  compte  de  tout  et  lui  rem^t  la  lettre.  Théoctiste 
cm  instruit  l'empere^r^  qui,  piquéj  de  Tinvit^tion  du 
calife  comme  d'un  reproche  de:  ^om  indifféreipkçe  pour 
les  savants,  fait  venir  Léon,  lui  défend  de  porter  son 
savoir  à  une  nation  infidèle ,  lui  assigi^  une  pension 
honorable,  et  lui  donne  l'iglise  des  Quarante  Ms^rtyrs 
pour  y  faire  des  leçons  pul>Iique4.  AI'^Manioupa,  iippre- 
nant  que  Léon  n'est  pas  disposé  à  quitter  sa  {patrie , 
lui  adresse  des  problên>es  difficiles  à  résoudre;,  vl^éon 
ne  tarde  pas  d'en  renvoyer  la  solulioni;  et  ^ /Course 
faire  admirer  davantage,  il'^y  joint  des  prédications 
fondées  sur  les  principes  de  l'astrologie.  Le  calife,  qui 
avoit  laissé  entrer  ces  chimères  danssa  tête  avec  les 
vérités  solides  de  l'astronomie,  fut  plus  empressé  que 
jamais  de  voir  cet  hjamme  extraordinaire»  II:  ^'adresse 
à  reinpf*reur  même  :.  «  J'ai  été  tenté ,  lui  manda^-t-il , 
ff  d'ajler  moi-même  vous  trouver  comme  un  ami  ou 
<?  plutôt  comme  un  disciple  se  rend  (luprès  de  son  mai- 
«  tre.  Mais  faisant  réflexion  quâ  je  ne  dois  pas  na'éloi- 
«  gner  du  poste  où  la  providence  m'a  placé ,  je  vous 

I  On  logotbète  du  drome,  comme  on  disait  alors. — ^S.-M. 


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(A*S3Î.)  LlVflB  LXIX.  THUéOPHILE.  lo3 

«  prie  de  m'eovoyer  pour  peu  d^  temps  ce  miracle  de 
ce  philosophie  9  qui  fiiit  uû  des  ornements  de  yos  états, 
a  Permette^  à  Ltéon  de  venir  passer  quelques  jours 
a  avec  moi  pour  me  faire  part  de  ces  précieuses  coii- 
«  naissances  qu  il  possède ,  et  dont  je  suis  plus  avide 
«  que  de  toutes  les  richesses  de  la  terre.  Je  oe  pense  pas 
«  que  la  dilSérenoe  de  religion  soit  un  obstacle  à  la 
«c  grâce  que  je  vous  demande.  Je  me  flatte  piùtât  que 
<c  le  rang  que  je  tiens  dans  le  monde  me  rendra  digne 
«  de  l'obtenir.  STous  en  retirerez:  de  l'honneur  en  m'en 
ce  procurant  à  moi-même,  La  science  est  un  bien  de 
«  comàmnication  ;  on  peut ,  comme  la  lumière^  la  part- 
it tager  sans  en  rien  perdre.  Je  veux  même  vous  payer 
«  votre  présent  :  je  vous  promets  deux  mille  livres  pe^ 
tf  saut  d.or,  et»  ce  qui  est  encore  d'un  grand  prix!,  une 
ic  paix  et  umalUancè  éternelle.  »  Théophile,  jalour  du 
trésor  dont  il  était  possesseur,  refusa  constamment  de 
communiquer  aux  Sarrasins  un  avantage  qui  alufâit  f  oUf^ 
jcHurs  distingue  les  Grecs  entre  tous  les  peuples  de  la 
terre.  U  ouvrit  à  Léon  une  écpl^  publique  dansile  pà* 
lais  de  Magnaure ,  le  chargea  de  l'instruction  de  la 
jeune-noblesse,  et  le  combla  d'honnéèirs  et  de  privitéjges. 
l4éon  savait  tout,  hors  ce  q^  il  importe  le  plus  ge 
savoir,  Très*ignol>ant  en  fait  de  religion,  il  s'en-rap-  évéque^êt 
portait  pour  cet  article  à  Jeaii  Lécanomante,  dont  il  ^n^ége! 
était  cousin  germain  '.  1\  devint  donc  iconoclaste  ;  il 
eût  été  fort  à  craindre  qu'il  ne  fût  devenu  mahométan 

<  J^yi'^ù^   ^^  |av\r^  toù  i^arpigcp-  était  réellemem  fiU  du  frère  de  c« 

^pu.  Codr.  t,  9-1  P;  547  4  Voyez  co  patriarche.    Cet    auteur   Veiiprime 

qi4  a  été  dit  du  nom  de  lannh  doa->  aioAÎ  à  ce  spjet  :  Ôç  xfttà  w^'^imevt 

né  à  ce  patriarche  hérétique ,  ci^dev,  ff iy  jçû  sÇ^x^çX^ou  t^  i^r^K^^xf  t^vv^i 

p.  1 4 ,  not.  3.  On  voit»  par  le  contl-  (Àxtuaro. — S,-Bf . 
nuatenf  de  Thépphane,p.  ii5,q<i'il 


XIII. 

Léon    fait 


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lo4  HISTOIRE  DU  BAS-KMPIBE.  (An  83Î.) 

avec  Al-Mamoun.  Jean  s'étâat  ëievé  dains  la  suite  au 
patriarcat  de  Constantinopie ,  récompensa.  Tindiffé- 
reoce  docile  du  géomètre  de  l'archevêché  de  Thessalo* 
nique.  Dans  cette  place,  faute  de  pouvoir  se  faire  es- 
timer par  les  qualités  propres  de  Tépiscopat,  il  se  fit 
admirer  comme  astrologue.  Une  année  stérile  avait 
réduit  ses  diocésains  à  une  ei^trême  misère  :  au  lieu 
d'implorer  le  secours  du  maître  du  ciel ,  il  s'adressa 
aux  planètes;  et,  soit  illusion ,  soit  charlatanerie,  il 
conseilla  de  semer  sous  certains  aspects.  Il  arriva  que, 
l'année  d'après ,  la  moisson  fut  très-abondantC;;  ce  qui, 
dans  l'esprit  du  peuple ,  fit  un  grand  honneur  à  Léon 
et  à  l'astrologie.  Ce  prélat  n'eut  pas  le  temps  de  faire 
une  seconde  épreuve  de  son. infaillibilité  en  ce  genre: 
dès  la  troisième  année,  Théophile  étant  mort  et  la 
secte  des  iconoclastes  abattue,  il  fut  chassé  de  son 
siège,  et  réduit  à  reprendre  sa  première  pi^ofession  de 
maître  de  géométrie. 
^^  [Vers  le  même  temps  '  ] ,  une  armée  de  quatre-vingt- 

Théophiie   ^Î2j  luJHe  Sarraisins  entra  sur  les  terres  de  l'empire  '  sous 

▼aincu  par  *  ^ 

.   ',lieiis^pt paragraphes ^isni veut  toute  nécessité,  cela  étant,  de  re- 

(xrr,  xv^  xvï,  xvii,  xviii,  xix  et  porter  aax  années  833,  834  «t  835, 

xx)  foHnaient  les  paragraphes  1 5-39  .^^^  trois  guerres  contre  les  Arabes 

de  Tanoienne  édition  ;  je  les  ai  tran»*  racontées  dans  ces  paragraphes  que 

portés  ici  parce  qa*il  est  évident  qae  j*ài  transposés.  J*ai ,  en  conséquence» 

Lebeaù  a  boaleversé  les  dates  de  la  supprimé  les  premiers  mots  de  ce 

plus  grande  partie  des  événements  da  paragraphe  a5,  devenu  paragraphe 

règne  de  Théophile.  Il  a  placé  sous  <4»on  il  est  dit:  Pendant  que  Théo- 

les  années  840  et  841  la  prise  de  phiie 'versait  le  sang  de  ses  meilleurs 

Sozopétra,qui  amena  Tannée  suivante  sujets,,..  Ces  mots  se  rapportaient  à 

le  siège  et  la  prise  d*Amorium  parles  la  persécution  de  Théophile  contre 

Arabes,  tandis  qu'il  est  certain,  par  les  orthodoxes,  racontée    dans  les 

le  témoignage  unanime  et  développé  paragraphes  :ix,  aa,  a3  et  24f  ^^ 

des  anteurs  arabes,  que  ces  deux  venus,  par  ce  changement,  28,  29» 

événements  arrivèrent  dans  les  an-  3o  et  3i:  —  S.-M. 
nées  837  et  g3 S  àe  J.-C.  Il  est  de  >  Abou'lfaradj    parle  ,  dans   sa 


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t. 


(An  S33.)  LIVRE   LXIX.  THÉOPHILE.  Io5 

la  conduite  d'Ibrahim  '.  Théophile  se  mit  à  la  léte  de  leiSamsins. 
ses  troupes,  accompagné  de  Manuel  et  de  Théophobe.  Cedr.t.a,p. 
Lorsqu'il  fut  en  présence  de  l'eniiemi,  il  tint  conseil:  Zon.i.  i5,t 
l'avis  de  Manuel  était  que  l'empereur  n'exposât  pas  sa      '  148.  " 
personne,  mais  qu'il  laissât  à  un  de  ses  généraux  le  Theopb"p. 
coiiimandement  de  l'armée.  Théophobe  au  contraire   P-7®»?»- 
voulait  que  l'empereur  animât  ses  troupes  par  sa  pré- 
sence; mats  il  pensait  qu'on  devait  attaquer  les  Sar- 
rasins pendant  lannit,  pour  leur  ôtek^  l'avantage  que 
leur  donnait  la  supériorité  du  nombre  ;  il  offrait  de 
commencer  l'attaque  avec  l'infanterie  perse  qu'il  com- 
mandait, persuadé  qu'après  ce  premier  effort,  la  ca- 
valerie grecque,   fondant  sur   l'ennemi  avec  furie, 
achèverait  aisément  la  défaite,  L'empereur  fut  de  son 
avis  pour  commander   lui-même  ;   mais   il  rejeta  la 
proposition  d'un  combat  nocturiie,  toujours  dangereux, 
et  oit  le.  sentiment  de  la  gloirç,  le  plus  vif  aiguillon 
de  la  valeur,  s'endort  faute  de  témoins.  Ibrahitn ,  sôit 
par  lâcheté,  soit  pour  quelque  raison  inconnue  y  s'é- 
loigna avec  dix  mille  hommes,  et  laissa  le  commande- 
ment à  son  lieutenant  Abuchazar  ^.  Le'  combat  fut 
sanglant  et  opiniâtre.  Enfin,  les  Grecs  cédèrent  aux 
efforts  des  Sarrasins  et  prirent  la  fuite.  Il  ne  resta  au- 
près de  l'empereur  que  sa  garde  ^  et  deux  mille  Perses 

Chronique «yriaqne ,  p.  x56,d*ane  '  fêpaiiipt,.  Cont.  Théoph.,  p.  90. 

invasion  faite  à  cette  époque  dana  Je  pense  qae  «e  perspnotage  est  le 

rAsîe-Minem-e ,    par   Omar,    émir  même  qa'Ibrabim,    fila  du  khalife 

de  Mélttènè ,  mais  il  ne  donne  ancnn  Mahady,  qni  mourut ,  selon  Ahon*- 

détail  snr  cette  invasion ,  qui  parait  Iféda ,  j4nn,  M  ml,  II ,  1 7  3,  an  moia 

être  la  même  que  celle  dont  il  8*agit  de  ramadan  de  Tan  aa4 ,  —  juillet 

ici.  Dans  le  commencement,  dit-il,  SBg  de  J.-C.  —  S. -M. 

les  chrétien»  eurent  FavanUge ,  mais  >  ÀScuxa^ap  •  Ce  personnage  m*est 

à  la  fin  les  Arabe*  eurent  le  dessus,  inconnu  d*aillenrs.  — :  S.-M. 

ils  se  rendirent  même  les  maîtres  des  ^  Merà  rnc  ^aatXtx^  (paXa'^^oc. 

bagages  de  Fempereor.  —  S.-M.  Cent.  Théoph.  p.  71.—  S.-M. 


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Io6  HISTOIRE  DU   BàS-BMPiR^-  (Ao  853.) 

commandés  par  Thëopbobe.  Accompagné  de  ces  braves 
soMats^  U*sç  retira  sur  une  colline  qui  fut  aussitôt 
environnée  de  Sarrasins.  On  y  combattit  jusqu'àla  nuit 
avec  un  acharnement  é^at ,  :d'un  coté  pour  faire  Je 
pripc^  pri^onnijçr,  de  J  autre  pour  le  défendre.  La  nuit 
étant  vemi^t  ThéophobQ  ordonne  à  se^s  soldats  de.pous* 
se?  des  cris  de  joie  r  de  battre  des  mains ,  «t  dé  faire 
un  grand  bruit  de  t;:ompettes  et  de  loua  les  însiiiruments 
de  guerre,  pour  donner  à  croire  à  l'ennemi  qu'il  leur 
arrivait  dii  ^ecours^  Les  Sar^rasins,  trompés  par  cet 
artiftce:,  se  retirèrent,  de  peur  d'être  enveloppées,  et 
allèrent  camper  à  deux  lieues.  L'empereur  profite  du 
m^Riçnt  pgtur  se  SsaMVer,  et  gagne  le  gros  de  son  ar^ 
mée,  qui  s'était  ralliée  k  quelque  distance  Jl  réprimande 
tes  fiiya^d^^  comble  d'éloges  et  de  récompenses  Théo^ 
phpbe  et  lies  Perses,  qui,,  animés  par  le  sentiment  de  la 
gloire  eit  par  la  libéralisé  du  prince ,  demandent  comme 
une  gmoe  d^tre  seuls  chargés  de  faire  la  guerre  aux 
Sarrasins,  Théophile^  a|9irès  las  avoir  remerdéâ  de  leur 
zèle,  ne.jugiia  pas  k  propos  d'exposé. ces  vaillauts 
giierri^s.  U  reprit  1^  chemin  de  Coostàntinople  et  les 
Sarraains  celui  de:  la  Syrie. î. 

.  [Théophile  avait  envoyé  en  cette  annésexme ambas- 
sade avec  de  riches  présents  i  l'empereur  LouisfleJ^é* 
bonnaire.  Ces  députés,  qui  étaient  Marc,  archevêque 
d'Épbèse,  et  des  graods-écuyers  de.  l'empereur ,  arrivè- 
rent en  France  lorsque  Finfortuixé  Ix>uis,  détjrdné  et 
retenu  prisonnier  par  ses  (ils  reheUes ,  4tait  renfermé  à 
Tâbbaye'  de  Saînt-Médard  de  Sbissons.  Les  envoyés 
grecs  ne  purejat  parvenir  jusqu'à  lui.  L'usurpateur 
Lothaîrê  ne  leur  permît  pas  de  voir  son  père,  et  il 
reçut  àCompiègne  {Ckmq^endiwn)^  au  mois  d'octobre. 


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ÀA  S3a.)  LIVHB   LXIX.  THÉOJPHILE.  IO7 

(eurs  lettres  et  leur  présciits ,  puis  il  les  cougédia,  sans 
que  leur  mi$$ioB  ait  eu  4'autrè$  suitos  '].-r-S.-M. 

U^nnée  suivante  il  y  #«t  uoe  seconde  bataille  près    ^"^  ^^^• 
de  Charsiane  ^  en  Ç^ppat^e^  où  Théophile  fut  plus  LeaWi. 
heureux.  II  fit  U0  grand  jC^roage  de  Sarrasins  et  revint  ""*  J*^"^"* 
i  Constautinople  avec  vingt-cinq  mille  prisonniers,  ^iiéophae. 
AfHrè»  une  si  éclatante  victoire,  il  rentra  dans  U  ville     p.  453. 
en  triomphe»  et  fit  céléhrer  l(Bft  jeux  du  cirque,  dans    *  saS.**^ 
lesquels  i)  voulut  disputer  le  prix.  Monté  sur  yn  char  ^^p.^j'/g!'*' 
attelé   de  çhey^ux  hlancs,  m  yéi^  de  la  livrée  de  la  ^^]jj^^' 
&ction  bleue,  il  courut  au  milieu  des  acdatoations,  symeon.p. 
et  ne  manq^n  pas  de  remporter  la  victoire,  toujours  /^®*J8  p- 
assurée  au  princi^  en  ciea  isoÉ'teà  de  coinbats».  Il  n'eut 
p^s  cependant  h  principal  hottoeur  de  cc<îte  fête.  Entre 
j|es'prÎ9pat|ieni  &^  trouxiiil  un*  cavalier  sarrasin  d'une 
taiJJe  avantageuse,  ég^noftni-fidrQit  des  deiix mains, 
et  qui  nEk^niitit  d^u^  UliO^s  à.  la  fois  avec  une  souplesse 
et  une  agilité  extraordinaires.  Sur  le  rapport  du  capi^r 
taine  des  g^^rdes,  qgi  }a  aonmlsaait ,  l'eoiperelur  voulut 
llir^  l'épreuve  d^  son  adréflséij  ii  le  fit. paraître  au  ron 
lieu  d^.cingue^où  le  SarrlaiSo.  «'attira  les  applaudisse*- 
n^entft  dtt  ptinc^  et  deç.$peclfttçuirt  ^excepté  de  Théodore 
Çrat^rj?«.  ^^tgit  un  éuiwiqw^  ^jui ,  méprisant  le  «^rrice 
4u  palais  auquel  son  éldtle  4e4tinait;^  avait  ^nbrassé 

»  C0t  ;iK}|»8aad«  |)ops  est  comme.  *|^re.  Ce  j»y«  e^t  iio9iv4«^^r5|i* 
par  raalenr  anonyme  qui  a  composé  na A  dans  leS  antenrs  arabes.  Le  pays 
ta  YÎe  ^é  Iioûls^lè*I>ébonniiire,'^/r.  de  Cbarsiàne  était  antrerofs  une  di-  > 
iHdof^^^  49.  Son  récita  été  pepri^-  )  paifan  âa  tbéme  des  AnnéniaqiM&  *' 
dait  dans  lès  chroniques  française»  To5p(iia  ^v  to  iraXaiov  ttctûv  App.e- 
de  Saint-Denis. — S.-M.  vtaxA>v  ar^v.Tr.'^i^oç.  Mais  an  temps 
.?  Th  X«pffULv^.  On  donnait  aloM  «^  rcmpereoc  Constantin  Porpby rô- 
le nooi  d«  ChaniaiM  à  nne  geande  génèto^  I>e  ordin,  imp^,  o«  5o,  il  Som* 
povtioB  de  la  Cappadoce ,  qiii  for*  mait  un  gonvenMmt nt  particulier, 
mait  une  division  militaire  pailicu-  "n-^JA, 


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108  HISTOIRE   DU   BÀS-EMPlRE.  (j^n  83t 

la  pr(^ession  des  armes ,  où  il  s'était  avancé  par  ^ 
valeur.  Il  était  alors  dans  le  cirque  à  côté  de  Théo» 
phile;   et  comme  il  regardait  avec  un  air  de  mépri 
cette  parade,  que i'empereur  admirait  :  En  ferais-ti 
bien  autant  que  ce  Sarrasin  ?  lui  dit  Théophile.  PrmcJ 
répondit  Cratère,  ye  ne  me  suis  jamais  exercé  à  cA 
feux  y  qui  ne  sont  d'aucun  usage  dans  la  gnerrA 
mais  je  répondrais  bien  qt£ avec  une  seule  lance  ji 
ferais  perdre  les  arçons  à  ce  barbare  y  en  eût-n 
quatre.  Fais  donc  ^  lui  dit  l'empereur.  Si  tu  ne  tieni 
parole  y  je  te  ferai  couper  la  tête.  Aussitôt  Cratère, 
empoignant  une  lance  sans  fer,  prend  carrière,  et,  dtt, 
premier  coup,  abat  le  Sarrasin.    L'empereur,  quoi- 1 
qu'un  peu  honteux  d'avoir  paru  tant  admirer  un  ma-  ! 
nége  frivole,  ne  put  s'e«ïpécfcer  de  louer  Cratère.  Il; 
le  récompensa  d'une  riche   veste,   sorte  de  présent | 
qu'on  voit  dès  lors  en  usage>«hez  les  princes  orien-! 

AK835.      «»"'^'-     •■■  .'■■•■"■■■    '■'■'■'  .     ■  :     I 

xTx.  Aprèsia  défaite  sànj^laïf te ^ue  les  Sarrasins  avaient 

aauTé'pir   cssuyéc,  îls  se  hâtèrent  d'effaoef  un  affront  auquel  ils 

Maunei.    ji^^taient  pas  accoutumés;- ©es  lé -printembs  ;itiivant,  ils 

Léo  gramm.  *    .  *^  •  •  i 

p.  453.     marchèrent  en  Cappadétt^c'AVeo  une  année  formidable. 
5*26.  *  *  L'empereur,  fier  du  brillaWit  sûcbès  dei41r^Wi»pagne 

Zoo.  1.  i5,  t.    .     /    /  1  ^    ,  •        .  /  "       '    ' 

a,  p.  148,   précédente,  courut,  a  leur  tencônUre ,  et  éprouva  que 

Cont.^Thco.  la  fortune  n'a  rien  d'assuré  '.  Son  armée  fut  battue, 

s*ymeôiZp.  ^*»  comuie  il  s'exposait  lui-même  a^ec  uhe  valeur  iu- 

Geor^       considérée,  il   se  trouva  enveloppé.  Manuel ,.  qui  se 

5^»!       retirait  avec  le  reste  deà  troupes,  s'étant  aperçu  de 

p.29. 

■  Ce  Tétement  d^honnear  est  ap-  très-souTent  et  dans  leqael  il  avait 

^léÂhilaatonkhaiaah. — S.-M.  une  très«-grande  confianee.  Synéon 

>  n  a-vait  avec  lai  le  corps  des  ré-  Logotfa.,  Chron.f  p.  4ïâ.  -—  S.-M. 
làgiés  persans  dont  il  a  déjà  été  parlé 


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(JLnftSS.)  LIVHE   LXIX.  TnioPHILE.  109 

l'absence  de  l'empereur,  rassemble  en  un  instaot  les 
plus  braves  cavaliers,  et  se  mettant  à  leur  tête  :  Allons  y 
dit-iJ,  dégager  V empereur  ou  mourir  avec  lui.  Aussi-i 
tôt,  s'élançant  avec  la  rapidité  de  la  foudre,  il  perce 
jusqu'à  Théophile,  qui,  environné  d'un  gros  d'enne-* 
mis,  portant  et  recevant  des  coups  terribles,  commen- 
tait à  manquer  de  forces^  mais  non  pas  de  courage. 
Suivez^moi^  prince j  lui  dit-il, /eiw^w  vous  ouvrir  un 
large  passage;  ne  laissons  pas  à  ces  infidèles  l'hon- 
neur de  faire  prisonnier  un  empereur.  Ne  leur  lais- 
sons  pas  non  plus  celui  de  voir  fuir  un  empereur 
devant  eux^  répliqua  Théophile  en  continuant  de 
combattre.  Manuel ,  qui  sans  l'entendre  avait  aussitôt 
tourné  bride,  abattant  à  droite  et  à  gauche  les  Sarra- 
sins qui  se  trouvaient  devant  lui ,  s'aperçut  qu'il  n'était 
pas  suivi  de  l'empereur.  Il  retourne  sur  ses  pas  et ,  par 
un  second  effort ,  il  rejoint  Théophile ,  qui  refuse  en- 
core de  le  suivre.  Enfin ,  une  troisième  fois ,  Manuel , 
fondant  en  désespéré  sur  les  ennemis ,  court  à  l'empe- 
reur, saisit  la  bride  de  son  cheval,  et  lui  présentant 
la  pointe.de  son  épée  devant  la  poitrine  :  Suivez-moi  y 
lui  cria-t-il,  ou  si  vous  cherchez  la  mort  y  recevez- 
la  de  cette  épée  y  faite  pour  vous  défendre,  et  rien 
laissez  pas  la  gloire  à  un  Sarrasin.  £n  même  temps 
il  entraîne  l'empereur  couvert  de  sang  et  de  poussière; 
et,  tandis  que  ses  cavaliers  arrêtent,  par  derrière  la 
fougue  des  ennemis ,  il  le  conduit  en  sûreté  au  milieu 
de  son  armée.  £llé  s'était  ralliée  dans  un  poste  avan- 
tageux ,  et  elle  reçut  avec  des  cris  de  joie  son  prince 
qu'elle  croyait  mort  ou  prisonnier.  Les  Grecs,  animés 
par  le  courage  de  Manuel  et  par  le  retour  de  Théophile, 
firent  si  bonne  contenance,  que  les  Sarrasins  se  re- 


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IIO  HISTOIRE   DU    BAS-EMFIRB.  (An  8$S.) 

tirèreul  sans   os«r  hasarda^   une  seconde  bgtBiUB 

XVII,  Manuel,  couvert  de  blessures,  dont  aucune  ne  sê| 

Mafuer^t  trouva   dangereuse,  fut  d'abord  chéri  de  Théophile. 

chezies    ^  princc  lïc  le  nommait  nfue  son   bienfaiteur ,  soû 

Sarrasin»,   sauvcur;  oiaîs  une  faveur  si  bien  méritée  alluma  bieïi<- 

^526,*527r  ^^^  1^  fureur  de  l'envie.  Celui  qui  avait  terrassé  des 

Zon.i. 1 5,1.2,  jjjjjlj^g  de  Sarrasins  se  put  t«nir  contre  les  assaut» 

p.  149,    IDO.  * 

Cont.Tiie-  d'une  Cabale  de  courtisans.  L'empereur  lui-même,  ac- 
74»  75-     câblé  du  poids  de  la  reconnaissance,  crut  se  soulasner 

SymeoD ,   P.  .  .  , 

419»  420-  par  l'ingratitude,  et  Manuel  éprouva  qu'un  service  de 
5r7T^5i8.  de  trop  grand  prix  pour  être  payé,  pix>dait  souvei^t 
3,^p.2get3o!  l'effet  d'une  offense.  L'empereur  se  laissa  persuader 
que  celui  qui  l'avait  sauvé,  cherdiait  à  le  perdre  et 
aspirait  à  l'empire  ^»  Manuel  fut  averti  par  un  écban«-  \ 
son  du  prince,  qui  avait  servi  dans  sa  maison,  que  la 
résolution  était  prise  de  lui  crever  les  yeux.  Sur  cet 
avis,  il  sort  secrètement  de  G^nstantinople  avec  trois 
ou  quatre  domestiques,  prend  les  clïevaux  de  toutes 
les  postes,  auxquels  il  coupe  les  jarrets  en  les  quittant, 
pour  n'être  pas  poursuivi  ;  et,  faisant  une  extrême  di- 
ligence, il  arrive  en  Syrie  ^.  Bien  reçu  par  les  Sarrasins, 
qui  comiaissaient  sa  valeur ,  il  se  transporte  à  Bagdad 
à  la  cour  du  calife,  auquel  il  offre  ses  services,  s'il  lui 


X  On  apprend  dé  Syméon  le  Lo-  tiairé  Léon  cherclia  en  yain  à  le  dé- 

f;othète,  Chron,,  p.   493  ,  et  de  la  fendre  dans  resprît  de  Temperear. 

chronique  de  George,  p.  5a i,  que  Syméon logoth.  Ckron.,  p.  419.  Le 

Théophile  revint  après  cet  échec  à  délateur,  appelé  Basile,    avait  ^Ik 

Ooi^ée  ,.dafis  la  Pbrygie. —  S.-M.  excité  par  Myrott.  Georg»    Okren, 

a  On  se  fondait  sur  une  conversa-  p.  517.  —  S.-M. 
tion  qu*il  avait  eue  avec  Myron  le  ^Ms^pt  TÛvxXsKTOup&vlSupiaç.^y- 
iogotkète  du  drome^on  intendant  «iéonlogoth.,p. ^xg.Onlitknéme 
général  des  postes,  et  beau-père  de  chose  dans  la  chronique  de  Léon  le 
Patronas,  conversation  qui  fut  rap-  grammairien,  p.  452.  —  S.-M. 
portée  a  rempereur.   Le  protoves- 


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(iLnS35.).  LIVRE  LXIX.  tHÉOPHlLfi.  III 

permet  de  Odiiserver  sa  religîcm.  Mutasetn  le  «comble 
d'honneur»:  Tacquisitioii  d'un  guerrier  si  célèbre  lui 
paraît  d'un  plus  grand  prix  que  le  gain  de  plusieurs 
batailles.  Il  lui  donne  bientôt  sa  confiance,  et  sem- 
presse  d^employer  sa  valeur  dans  les  expéditions  les 
plus  importantes. 

Le  Chorasan  s*était  révolté.  Manuel  né  demanda  pour  e^^,^["'  j^ 
le  réduire  que  les  prisonniers  srecs  qu'on  retenait  dans  Manuel  chez 

*         ,       ^  ^    .         ^  les  Sarrasins. 

les  fers ,  et  il  répondit  sur  sa  tête  qu'aucun  d'eux  ne 
prendrait  la  fuite.  Il  tint  parole:  jamais  soldatà  ne  fu- 
rent plus  fidèles  à  leur  général.  Devenus  libres ,  mais 
attachés  à  leur  libérateur  par  des  liens  plus  forts  que 
les  chaînes  dont  il  les  avait  tirés ,  Us  le  servirent  avec 
zèle,  et  n'épargnèrent  pas  leur  vie  pour  lui  procurer 
de  la  gloire.  L'étonnement  des  rebelles  '  contribua 
encore  à  leur  défaite  :  ils  s'attendaient  à  combattre  des 
Sarrasins,  et  voyaient  avec  surprise  des  ennemis  dont 
riiabrilement,  l'armure,  le  langage,  l'arrangement  des 
troupes,  et  la  manière  de  combattre  leur  étaient  in- 
connus. Ces  peuples,  voisins  de  l'Oxus,  avaient  à  peine 
entendu  parler  des  Grecs.  Ils  furent  subjugués  et  ré- 
duits à  l'obéissance  en  peu  de  *  jours  .  Le  vainqueur 
empkrya  le  reste  de  la  campagne  à  une  autre  espèce 
de  guerre.  Une  prodigieuse  multitude  de  bêtes  sau- 
vages^ sorties  des  déserts  du  Maûerennahar,  désolait 
les  contrées  voisines.  Manuel  fit  usage  de  ses  troupes 
• 

X  Le  oomiAiiateiir  de  Théopfaanes»  TigFe  et  de  TEnphnite,  el  d«ni  le» 

p.  73,  dotinc  k  «et  rebelieft  le  nom  régions  de  T Arabie  qui  8*étendent 

âe  CormuUdf^  Kcf fMTOi.  Il  e«t  évi-  sor  les  riyes  du  golfis  petsiqne.  -^ 

dent  que  oe  nom  désigne  les  béré-  Si-AA. 

tîqnee  aonimés  Kanaates,  qni  s'é»  a  Tb  X«p«aàv  Xi'^trax  KfttsuiXMVy 

uient  révoltés  .contre  les  khalifes  xok  TûJLfikepafAyouvYi&froTGi^.  Cont. 

dans  les  pays  Toisîna  des  bouches  dn  Theoph.  p.  74* — S.-M. 


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lia  HISTOIRE   DU    BASrEMPiRE.  (An  835.) 

pour  leur  donner  la  chasse ,  et  il  en  délivra  le  pays. 
XIX.  Tant  de  services  rendaient  Manuel  cher  au  calife  et 

retour  à  à  toutc  sa  cour,  plus  équitable  que  celle  de  Constan- 
^Topîe.*"  tinople.  En  même  temps,  la  réputation  qu'il  acquérait 
en  Perse  le  faisait  regretter  de  l'empereur.  Théophile 
ressentait  vivement  la  perte  d'un  guerrier  auquel  il 
était  redevable  de  la  vie.  Il  résolut  de  le  regagner  et 
d'enlever  à  ses  ennemis  un  si  puissant  secours.  Il 
chargea  de  cette  commission  délicate  [son  ambassadeur, 
Jean  Lécanomante,  qu'il  envoyait  à  la  cour  de  Bagdad  % 
à  qui  il  donna  une  lettre  de  créance  pour  cet  objet 
particulier  ^,  Celui-ci,  pour  ne  pas  éveiller  les  soupçons 
du  calife  ,  employa  pour  cette  négociation  secrète  ^]  un 
moine  adroit  et  rusé,  qui  [le  suivit  sous  prétexte  de  se 
joindre]  à  une  caravane  de  pèlerins  pour  le  voyage  de 
la  Palestiuj^;  [il  passa  ensuite]  de  Jérusalem  à  Bagdad 
déguisé  en  mendiant.  S'étant  introduit  dans  le  palais, 
il  remit  à  Manuel  une  lettre  de  l'empereur ,  avec  une 
croix  que  le  prince  lui  envoyait  pour  sûreté  de  sa  pa- 
role. Toutes  les  faveurs  du  calife  et  les  caresses  d'une 
,  cour  étrangère  ne  pouvaient  effacer  du  cœur  de  Ma- 
nuel l'amour  de  sa  patrie  :  la  vue  d'un  compatriote, 
et  plus  encore  celle  de  ce  gage  précieux  qu'il  recevait 
de  son  maître,  lui  tira  des  larmes.  Embrasé  du  désir 

»Voy.cî-apr.Sa5,p.iat), — S.-M.  74  :il«  prouvent  qae  c'estbien ayant 

>  XpuaoêouXXiov.  On  apprend  de  Tan  8 3 6,  et  non  après,  comme  Tavait 

Léon  le  grammairien ,  p.  45a,  que  faitLebean  ,  qu'il  fànt  placer  la  fuite 

Tobjet  apparent  de  cette  négociation  de  Manuel  ches  les  Masulmans.  C*est^ 

était  le  rachat  des  captifs.  — S  -M.  après  cette  ambassade,  en  Tan  836, 

^•Gesdétails^négligésonmalcom-  que  Jean  Lécanomante  devint  pa- 

pris  par  Lebean ,  sont  fort  impor-  triarche  de  Constantinople  :  c*est  un 

tants  pour  établir  la  chronologie  et  la  point  essentiel  pour  fixer  et  com- 

succession  des  événements  du  règne  prendre  la  chronologie  de  tous  ces 

de  Théophile.  Ils  sont  rapportés  par  événements.  Yoyez  aussi  ct-devant, 

le  continuateur   de  Xhéophane,  p.  §14,  p.  104,  not.  1. —  S,-M, 


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(An  855.)  LIVRE   LXIX.  THEOPHILE.  Il3 

de  retourner  à  Constantinople,  il  profita  de  I^  con^ 
fiance  du  calife  pour  se  tirer  de  ses  mains,  «f  Prince, 
a  lui  dit-il,  vous  savez  que  j'ai  des  ennemis  dans  Tein- 
cf  pire;  leur  malice  m'a  servi  malgré  eux  :  ils  ont  voulu 
a  me  perdre,  et  ils  m'ont  élevé  au  comble  de  la  gloire 
a  en  me  procurant  l'honneurd'approcher  du  plus  gr^d 
a  prince  delà  terre  ;  mais  ils  ne  méritent  pas  moins  toute 
«ma  haine.  Us  habitent  en  Cappadoce;  donnez-moi 
ff  quelques  troupes;  je  vous  vengerai  des  insultes  de  la 
«  nation  en  me  vengeant  moi-même  de  mes  calomnia- 
«  teurs.  »  Pour  mieux  couvrir  son  projet,  il  supplie  le 
calife  '  de  mettre  son  fils  *  Ouatheq  ^  à  la  tête  de  cette 
armée;  il  se  réserve  l'honneur  d'être  lieutenant  du 
jeune  prince,  avec  lequel  il  s'était  lié  d'une  tendre 
amitié.  Mutasem ,  que  les  services  signalés  et  le  ca- 
ractère généreux  de  Manuel  éloignaient  de  tout  soup- 
çon ,  saisit  avec  joie  cette  occasion  de  porter  le  fer  et 
le  '  feu  dans  le  cœur  de  l'empire.  Il  met  Manuel  à  la 
tête  d'une  armée.  Lorsqu'il  fut  sur  la  frontière.  Ma- 
nuel envoie  secrètement  au  gouverneur  de  Cappadoce 
l'avertir  de  son  dessein  ;  il  le  prie  de  poster  quelques 
troupes  dans  un  lieu  où  il  doit  se  rendre  seul  pour 
lui  servir  d'escorte  jusqu'à  ce  qu'il  soit  en  sûreté.- Ar- 


'  Le  contintiatear  deThéophane,  ment  le  fils  dit  khalife  on  de  Yémir 
p.  75,  donne  en  cette  occasion  le  Almoumimn^'ày*  utov  AfAEpou^Av^. — 
nom  d'Ismaël,  é  ia{i.aTiX,  an  khalife.  S.-M.  * 
Ce  nom  n'eat  employé  sans  doate  3  Ce  prince,  qaî  fut  khalife  "^réa 
que  ponr  indiquer  la  nation  à  la-  la  mort  de  son  père,  ne  s*appelaik 
qneHe  appartenait  ce  prince.  C'est  pas  encore  à  cette  époque  Wathek; 
comme  si  on  avait  dit  Tlsmaélite  on  son  nom  était  Haronn ,  et  son  prè- 
le souverain.  —  S.-M.  nom  Abon-djaafiir.  Quand  il  devint 

>  Tèv Too  îajAtt'JiX  utbv ,  le  fils  d'Is-  khalife,  il  prit  le  nom  honorifique 

maël.  Cont.  Theoph.,  p.  75.  Léon  de  Wathek-Billah  ;  c'est  là  c«' <ïui  IV 

le  grammairien ,  p.  45a  ,  dit  simple-  feit  appeler  Wathek.  —  S.^M, 

Tome  Xm. 


8 

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rivé  à  deux  ou  trois  lieujds  de  cet  endroit  ',  il  &it  cam- 
per rarmée,  et,  prenant  avec  lui  le  fils  du  calife,  il 
s'éloigne  du  camp  comme  pour  une  partie  de  chasse* 
Loinqu  il  fut  près  du  lieu  où  il  était  attendu ,  il  em'- 
brasse  Ouateq  y  et  versant  des  larmes  de  tendresse  : 
Partezj  mon  fils  ^  lui  dit-il;  J3/^a  me  garde  de  vous 
trahir  l  retournez  à  votre  père.  Je  ne  vous  quitte 
que  pour  obéir  à  la  voùç  de  ma  patrie,  qui  me 
rappelle  auprès  de  mon  souverain  naturel  En  en- 
trant dai^s  Constantinople ,  il  se  retira  dans  1  église  de 
Blaquernes,  comme   dans  un  asile,  pour  y  attendre 
des  preuves  de.  la  bonne  foi  de  l'empereur.  II  en  fut 
bientôt  assuré  :  il  fut  fait  maître  des  oflÇces  et  capitaine 
des  gardes  du  prince  ^.  Théophile,  qui  n'avait  encore 
que  des  611es,  ayant  eu  un  fils  [plus  tard  ^] ,  voulut 
que  Manuel  en  fut  le  parrain.  Cet  enfant,  nommé 
Micbet,  comme  son  aïeul,  fut  solennellement  cou** 
ronné,  l'année  [qui  suivit  sa  naissance  ^],  da;is  l'église 
de  Sainte-Sophie. 
^    ".  La  naissance  du  jeune  prince  fit  désirer  à  Théophile 

Superstition    ,,         .  '  •         j        i  -i 

de  Théo-   d  avoir  une  longue  suite  de  descendants  assis  sur  le 

phile. 

^  Sar  la  frontière  da  thème  anato-  le  rapport  qae  Lebeau  a  établi  entze 

liqae ,  .di^  ^éon  le  gr^inoiairien ,  p^  ce  fait  et  le  retour  de  Mannel  qui 

459.  nXY)oîov  Tcv  6^(i.aTOC  rnc  Âvaro-  Ta  porté ,  ce  me  semble ,  à  boulever- 

Xiiç.  —  S.-M.  «er  toute  la  chronologieJ|de  cf tte  par- 

>  Ma^Y^^fOC  xal  ^oP'^^txo^  tûv  tie  dé  rbistoire  byzantine.  Voyes  ci- 

QXoXûv.Cont.Tbeopb.p.75. — S.-M.  dev,  §  i3,  p,  io4ynot.  i.  D'aprèa 

•    3  Lebean   disait  cette  année ,  ce  Tâge  que  Michel  II  avait  loraqn*il  fut 

qni^B  rapportait  à  Tannée  dans  la-  déclaré  empereur  »  on  doit  en  con- 

quelle  Jl  plaçait  à  tort  le  retour  de  dure  qu*Jl  était  né  en  Pan  839.  Voy. 

MannelàCon8tantipople;cequin*c?t      p.  xSg,  not.  i^  Ut.  lxx,  §  x. 

fondé  sur  aucune  autorité  ancienne,  S.-M. 

les  écrivains  qui  ont  parlé  de  ce  fait  4  Dans  l'ancienne  édition.  Vannée 

«'étant  contentés  de  dire  que  Ma-  suivante ^  ce  qui  ne  pouvait  rester, 

miel  avait  été  parrain  du  fils  de  Théo*  comme  on  peut  le  voir  par  ce  que  je 

phile,san8  en  indiquer  répoque.C*est  viens  de  dire.  •—  S.-M. 


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(JLaSSS.)  LIVKS   EXIX.         THéOPEIM.  Il5 

trône  de  Tempire.  Ces  siècles  d'ignorance  étaient  fé-   cedr.  t.  a, 
couds  en  devins,  en  astrologues,  en  magiciens;  et  ^con*t  Tbc?' 
Tempereur,  fort  peu  religieux.,  n'était  pas  moins  sa-  °^^*  g*  7^' 
perstitieux  que  le  dernier  de  ses  sujets.  Il  y  avait  alops  Symeon,  p. 
à  Constantinople  une  Sarrasine,  prise  en  guerre,  fa-  Genea.  i.  3, 
meuse  par  ses  prédictions.  L'empereur  la  fit  venir,  et 
lui  demanda  quelle  était  la  famille  qui  fournirait  une 
plus  longue  génération  d'empereurs.  Il  lui  vint  dans 
Tesprit  de  nommer  les  Martinaces  :  c'était  une  race  des 
plus  illustres.  Sur  cette  parole,  Théophile,  regardait 
cette  famille  comme  rivale  de  la  sienne,  obligea  le  * 

père  '  et  les  fils  à  se  faire  moines,  et  changea  leur 
maison  en  monastère.  Dans  l'opinion  du  peuple ,  il  &ut 
toujours  que  ces  prédictions  s'accomplissent  de  quel- 
que manière  que  ce  soit.  On  crut  dans  la  suite  que 
celle-ci  s'était  vérifiée  dans  la  personne  d'Eudocie, 
seconde  femme  de  l'empereur  Basile.  Cette  princesse 
était  de  la  famille  des  Martinaces,  et  d'elle  sortit  une 
succession  de  quatre  empereurs,  qui  occupèrent  le 
trône  pendant  soixante-dix-sept  ans.  Mais  une  autre 
prophétie  donna  encore  plus  d'inquiétude  à  Théophile. 
Cette  femme  lui  prédit  qu'après  sa  mort  le  culte  des 
images  serait  rétabli ,  et  Jean  Lécanomante .  déposé. 
Jean  lui-même ,  toujours  charlatan ,  quoique  patriar- 
che, alarmait  aussi  l'empereur.  Ces  événements  étaient 
faciles  à  deviner,  en  supposant  seulement  que  l*impé- 
ratrice  survivrait  à  son  mari;  on  savait  qu'elle  détes<- 
tait  les  iconoclastes.  Théophile,  pour  détourner  l'effet 
de  ces  tnstes  prédictions,  fit  jurer  à  l'impératrice  et  à 


«  Martinaces.  U  était  parent  de     Théophane ,  p.  ^,  IIpo9«»xit(iD{Aivov 
Vempereor  selon  le  continnatear  de      aÔTÛ  xarà  ou'y'ysveiav.  — •  S.-M. 


8. 

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Expédition 
en   Sicile. 

Cedr.  t.a,p. 

Zon.  I.  i5,t. 

a,p.i47- 

Cont.    The- 

oph.  p.  67. 

Bolland  in 

TUeodora, 

II  feb. 


116  HÏStOIRE  DU   BAS-EMPIRE.  (An  835.) 

Téoctiste,  son  chancelier,  que,  s'ils  lui  survivaient,  ils 
conserveraient  Jean  dans  sa  dignité,  et  qVils  ne  re- 
lèveraient pas  ce  culte  idolâtre  qu'il  avait  pris  soin  de 
de  détruire. 

Les  historiens  de  ce  temps-là  parlent  d'une  des- 
cente des  Grecs  en  I-K)mbardie  et  en  Sicile.  Mais  ces 
auteurs  confus  et  peu  judicieux,  qui  négligent  souvent 
les  événements  les  plus  importants  pour  s'arrêter  à  des 
fables  populaires,  ne  donnent  ici  aucun  détail  ^  On 
peut  conjecturer  que  Théophile  envoya  une  flotte  dans 
le  golfe  Adriatique,  et  qu'elle  fit  quelque  ravage  sur 
les  bords  du  Pô;  qu'elle  aborda  ensuite  en  Sicile,  où 
elle  eut  quelque  avantage  sur  les  Sarrasins,  maîtres 
de  l'île,  et  qu'elle  reprit  même  plusieurs  villes  *.  Il 
faut  que  cette  expédition  ait  été  importante ,  puisqu'elle 
fit  une  grande  réputation  à  Alexis  Musèle,  qui  en  était 
le  chef  ^,  et  qu'elle  lui  attira  des  envieux  ^.  Mais  l'em- 


I  Ils  n'indiquent  pas  même  la  date 
de  cette  expédition.  Cependant ,  on 
doit  croire  qu'elle  est  probal>lement 
vers  répoqne  qui  lui  est  assignée  ici. 
—  S.-M, 

a  n  me  paraît  constant  qne  les 
Arabes  ii*aT«ient  pas  fiiit  la  conquête 
de  toute  la  Sicile.  Voyez  ci-devant, 
p.  76,  not.  1 ,  liv.  uLviii,  S  5o. 
Cette  expédition,  dont  malheureuse' 
ment  nous  ne  connaissons  pas  les 
détails,  avait  sans  doute  pour  objet 
de  défendre  lés  villes  que  les  Ro^ 
mains  possédaient  eiicore  dans  cette 
île  et  d*en  chasser  même  les  Arabes. 
Ibn-al-athir  parle  assers  an  long, 
t.  I ,  f*  ia4  ,  ▼*»  des  guerres  opi- 
niâtres que  les  Arabes  firent  en  Si- 
cile sous  le  commandement  de  l'a- 
glabite  Mohammed ,    fils    d'Abd- 


AUah,  et  de  Fadhl,  fils  d'Iakoob,  en 
Tan  lao  de  l'hégire,  qui  correspond 
exactement  à  Tan  S 3  5.  Les  détails 
qn'il  donne  sont  trop  briefs  et  trop 
confus  pour  qu*îl  soit  possible  dY 
pniser  les  moyens  de  rectifier  et  d'en- 
tendre le  récit  des  autears  grecs.  — 
S.-M. 

3  Le  continuateur  de  Théopbane. 
p.  67,  dit  seulement  qn*il  avait  été  en- 
voyé vers  la  Lombardie  on  l'Italie , 
irpoc  TTiv  AoY^oêap^îav  s(i^7rtfx<|»8v. — 
S.-M. 

4  Ibn-al-athir  parle,  t.  z,  T  xa5y 
r^,  des  batailles  navales  des  Grecs 
contre  les  Arabes,  et  des  guerres 
opiniâtres  qu'ils  se  firent  dans  l'in- 
térieur de  rile,  en  Tan  8ax  de  l'hé- 
gire (5  janvier. — 3 6  décembre  835), 
c'eat-â-dire  précisément  â  l'époque 


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(An  835.)  LiyR£   LXIX.  THEOPHILE.  II7 

pereur,    pour  confondre  Tenvie,   le  fit  patrice,   pro- 
consul et  maître  des  offices  '. 

Dans  un  esprit  vif  et  ardent ,  tel  que  celui  de  Théo- 
phile,  l'amitié  n'a  pas  de  bornes  non  plus  que  la  haine. 
Il  n'avait  point  encore  de  fils  ^  ;  mais  il  venait  de  lui 
liaitre  une  cinquième  fille,  qu'il  nomma  Marie.  Il  con- 
çut le  projet  le  plus  bizarre  et  l'exécuta;  c'était  de 
la  marier  au  berceau^  avec  Alexis  et  de  le  nommer  Cé- 
sar. Dans  un'  procédé  si  peu  raisonnable,  on  ne  sait 
pour  quelle  raison  il  préfera  sa  fille  Marie  à  ses  quatre 
aînées.  Alexis  était  jeune  et  bien  fait.  Arménien  de  nais- 
sance^, il  tirait  son  origine  des  anciens  rois  du  pays  ^. 


XXII. 

Histoire 
d*AlexM 
Masèle. 

Cedr.  t.  a,  p. 

5a9 ,  5a3. 
I160  grftmin. 
p.  45o,  45 1, 

454. 
Zoii.Li5,ti, 

p. 147. 
Cont.Theop. 

p.  6:,  68. 
Symeon,  p. 

418,  419- 
Georg.  p. 
5i6,  517. 
BoUaDd.  in 
Theodora , 
zz  feb. 


dont  il  s*agît.  Les  Arabes  reTÎnrait 
à  Païenne  sans  avoir  obtenu  de 
grands  aaccès.  Ils  prirent  cependant 
le  Ibrt  d*Iantiah  ,  Tantique  Enna, 
Fane  des  plus  fortes  places  de  Tin- 
térienr  de  Tile  qaHIs  tehaient  bloquée 
depoîs  long-temps.  —  S. -M. 

'  Ôv  ICpttTOV  fkkf  VJi  TWV  ICttTpUUMV» 

Mit  Tâv  âvOutraTttv  Ttp.iQ<ra<  àÇia, 
Imtra  9k  xai  (Aoqfiorpov.  Cont. 
llieop.  p.  67.  -^  S.-M. 

*  les  auteurs  originaux  ne  le  di- 
sent pas;  toutefois  il  est  naturel  de 
le  croire,  car,  Michel  II ,  fils  et  suc- 
oesseur  de  Théophile,  n*était  encoro 
qu'un  très-jeune  enfant  quand  il 
remplaça  son  père,  en  fan  84^.  II 
n*était  sans  doute  pas  encore  né  à 
Tépoqne  dont  il  s'agît.  La  date  de  sa 
naissance  ne  peut  certainement  se 
placer  avant  Tan  836,  puisque  Ma* 
noel ,  qui  le  tint  sur  les  fonts  bap- 
tismaux, ne  revint  de  Bagdad  que 
vers  la  fin  de  Fan  835.  Yoyes  ci- 
dcv.  $  19 ,  p.  1 13.  —  S.-M. 

^  Les  auteurs  cités  ne .  le  disent 
pas ,  mais  on  doit  le  croire,  si  Théo- 


phile s*«tait  marié  comme  on  Va  vu 
ci-devant,  §  a  et  3  ,  en  83o;  cepen- 
dant je  pense  qu*il  7  a  réellement 
lien  de  douter  que  cet  empereur  se 
soit  nurié  à  cette  époque.  Si  on  place 
en  un  autre  temps  la  date  de  son 
mariage ,  que  rien  ici  ne  nous  fait 
oonoaitre ,  1*  fille  de  ce  prince  pour 
vait  être  fort  jeune ,  et  non  plus  aa 
berceau,  quand  elle  épousa  Alexis. 
ToycB  ci-devant ,  $  3 ,  p.  89,  not.  3. 
—  S.-M. 

4  On  avait  donné  à  sa  famille  le 
nom  de  Crenite.  ô  è^  dvvip  rnc  tûv 
Kpiivirrûv  xaTii^tTc  'jfsvtâc,  X^P^ 
Tvic  TtÂv  A^i^evîoiv  ,  ÂXé^io;  ToOvop.a , 
MoufftXt  Tvlv  JiroivufAtav  .Cont.Theoph. 
p.,67.  lie  nom  qpe  Ton  avait  donné 
à  la  famille  d* Alexis  ,  venait  de  ce 
qu*il  habitait  k  Constantinople  près 
de  la  citadelle ,  en  un  lieu  appelé  la 
mabon  de  Crenitissa.  Otxûv  xarà  to 
rnc  ducp07;oXfl(i»ç(jL^poc,  xarà  rîiç  cûtm 
xxXoufA^vnC  Tïic  K^TiviTiaoK];  oixioç. 
Cont.  Theoph.  p.  67.  —  S.-M. 

^  Les  auteurs  ne  le  disent  pas  non 
plus.  Je  pense  que  ce  général  pouvait 


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1S8  HISTOIRE   DU   B AS-EMPIRE.  (An  S3S.) 

L'histoire  ne  dit  pas  s'il  était  le  fils  ou  le  proche 
parent  de  cet  autre  Alexis  Muselé,  aussi  Aroné*' 
nien,  qui,  sous  le  règne  de  Constantin  Porphyrogénète, 
avait  tour-à-tour  éprouvé  les  plus  brillantes  faveurs  et 
les  plus  cruelles  rigueurs  de  la  fortune  *.  L'élévation 
d'Alexis  enflamma  la  rage  des  envieux  :  ils  lui  sup- 
posèrent un  dessein  formé  d'usurper  l'empire.  Quoique 
leurs  calomnies  n'eussent  pas  le  crédit  de  persuader 
l'empereur,  elles  en  eurent  assez  pour  lui  inspirer  des 
soupçons.  Il  éloigna  Musèle  sous  prétexte  .de  l'envoyer 
en  Sicile  ^  pour  achever  d'en  chasser  les  Sarrasins,  ' 
ou  du  moins  pour  conserver  ce  qu'il  en  avait  recoD* 
quis.  La  malignité  de  la  cabale  jalouse  le  suivit  daas  ce 
pays^  et  ne  cessa  pendant  cinq  ans  d'inventer  de  nou-» 
velles  calomnies.  On  suborna  des  Siciliens,  qui  vinrent 
à  Constantinople  donner  avis  à  l'empereur  qu'Alexis^ 
tramait  des  intrigues  avec  les  Sarrasins  pour  usurper 
la  souveraineté.  Par  malHeur  pour  l'accusé,  la  jeune 
Marie  mourut  dans  ces  conjonctures,  et  il  naquit  à  l'em- 
pereui*  un  fils  qu'il  nomma  Michel.  Inconsolable  de  la 
perte  de  sa  fille,  Théophile  lui  rendit  des  honneurs 
extraordinaires  :  il  fit  couvrir  son  tombeau  de  lames 
d'argent,  que  l'empereur  Léon  VI  enleva  dans  Isi 
suite;  et  il  déclara  que  son  mausolée  serait  un  lieu 
d'asile  pour  les  criminels.  Les  liens- qui  l'attachaient  à 
Musèle  étant  rompus  par  cet  événement,  il  résolut  de 
s'assurer  de  sa  personne.   Il  lui  envoya  l'archevêque 

étreîiin  de  la  célèbre  famiUe  des  >Toyes  t.  i9,  p.  358,  etp.36«» 

Mamîgoniens,  dont  j'ai  ea  bien  «ou-  lît.  lxti  , §  ag  et  5o. — S.-M. 

Tent  roccasion  de  parler  et  dans  la*  >  H  fat  fait  stratège  et  duo  de  Si- 

qoelle  le  nom  de  Mosèle  on  Mou*  cile.  SrpaTVjfôv  xal  AoÇxtt  SoctXuK 

sèle,  en  Arménien  Mousehegk ,  était  ir^piirti.  Syméon  logoih.  Chron,  p. 

fort  commun. — S.-M.  4 1 S •  —  S.  -M. 


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(an  «35.)  LIVRl!   LXIX.  THléOPHILK.  II9 

Théodore  *  pour  Tengager  à  venir  à  là  cour;  et,  pour 
gage  de  la  parole  qu'il  donnait  à  Musèle  de  •  le  bien 
traiter,  il  lui  fit  mettre  entre  les  mains  une  croix  qu'il 
avait  coutume  de  porter  au  cou.  Mais  dès  qne  Mu- 
selé fut  arrivé ,  H  fut  battu  de  verges  comme  rebelle 
et  jeté  dans  un  cachet.  Tous  ses  biens  fuirent  cofi'* 
fisqués. 

L'archevêque  ayant  oie  lui  reprodhier  feh  face,  et  eil  ?^"'*  , 
présente  du  sénat,  qu'il  avait  violé  la  religion  de  sa.  ThéopMi«. 
promesse,  il  le  fit  arracher  de  l'autel  où  il  s'était  ré- 
fugié, et,  après  l'avoir  fait  déchirer  à  coups  de  fouets, 
il  le  chassa  de  Constàntinople  et  l'exila.  Ce  traitement 
indigne  fait  à  un  archevêque  exeita  l'indignation  pu- 
blique. Jeàn  Lécanomante,  alors  patriarche,  quoique 
flatteur  corrompu,  craignit  de  la  pàrtagter  avec  l'em- 
peneur  :  il  l'arrêta,  comme  il  entrait  danâ  Sainte^So- 
phie,  et,  devenu  comme  par  mtracle  uh  nouvel  Am- 
broise,  il  lui  fi!  fté  vifs  tfeprochesi  Théophile  se  repen- 
tit de  sa  vlolehcé;  il  rappela  Théodore  et  lui  permit^ 
de  retourner  à  son  diocèse.  Mais  ce  prélat  se  regardant 
con^me  indigUôdfe  reprendre  les  fonctions  du  saint 
mini^t'ère,  après  l^afïront  qu'il  avait  reçti,  ée  démit  de 
ïepîscopat.  L'empereur  le  fit  économe  de  Sainte-So- 
phie, dignité  éminente^  et  pour  lors  ëgale  e«i  honneur 
aux  plus  hautes  prélaturés. 

Ce  repentir  de  l'empereur  s'étendit  sur  le  traitement      xxiv. 
qu^i!  avait  fait  à  Musèle.  Théophile^  bouiHaht  et  impe*  retir^dan» 
tueux  dans  les  accès  de  sa  colère,  ne  rougissait  pas  de  ^^^^e^' 
reconnaître  ses  fautes  et  de  les  réparer  lorsqu'elle  était 
refroidie.  Il  tira  MusMé  de  prison  et  lui  rendit  tous 

1  Surnommé  CStritmoè.  é-pbéon  iogodi.  Chron.  p.  iiê.-^St'M. 


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I  aO  HISTOIRE   DV   BAS-JBMPXRE.  (An  83$.) 

ses  biens.  Muselé  ne  les  reçut  que  pour  s'en  défaire. 
Dégoûté  du  inonde  9  élevé  de  ^obscurité  à  la  dignité 
de  César  et  de  gendre  de  l'empereur,  précipité  ensuite 
dans  les  ténèbres  d'un  cachot ,  il  résolut  de  fixer  l'in- 
constanqie  de  ia  fortune  en  se  dépouillant  de  toutes 
ses  faveurs.  Après  avoir  passé  par  toutes  les  condi- 
tions, il  revint  à  celle  où  il  avait  trouvé  plus  de  repos 
et  de  douceur.  Malgré  les  instances  de  l'empereur, 
qui,  pénétré  de  regret,  le  pressait  de  demeurer  à  la 
cour  et  lui  ouvrait  le  trésor  des  grâces ,  il  se  retira  à 
Chrysopolis  ' ,  et  ne  conserva  de  ses  biens- que  ce  qu'il 
en  fallut  pour  bâtir  un  monastère ,  où  il  passa  le  reste 
de  ses  jours  dans  les  exercices  de  la  pénitence.  Son 
frère  Théodore  ^,  honoré  du  titre  de  patrice,  le  suivit 
dans  sa  retraite,  ayant  appris  par  son  exemple  à  fuir 
les  grandeurs, qui,  après  l'expérieuce,  i;ie  leur  parurent 
mériter  que  du  mépris.  .    . 

Jean  Lécanomaote,  ancien  précepteur  de  Théophile, 
Ambassade  fut  plus  heurcux  auorès  de  ce  prince  qu'Alexis  qu'il 

de  Jean  Lé-  .,..  ,  r^/j'i  ^ 

canomante  avâit  choisi  pour  geudrc.  Ce  mecnaol  homme,  ^apres 
Zon.i.r5*t.îi  2IVOÎ**  gâté  l'esprit  de  son  élève  par  son  fanatisme  hé- 
^Cont^Tht^*  ''^^'*®9  continuait  de  le  tenir  enchaîné  par  ses  impos- 

oph.  p.  60,  tures.  Livré  à  toutes  Jes  abominations  de  la  plus  noire 

01.  .      .  '     .  . 

Georg.  p.    magie,  il  gouvernait  absolument  Tempereur,  qui,  dans 

le  dessein  de  le  placer  sur  le  siège  de  Constantinople, 
le  donna  pour  Syncelle  au .  patriarche  Antoine.  Théo- 
phile était  plein.de  caprices: il  saisissait  avec  ch^lcHir  les 


I  Dans  un  monastère  impérial,  et  ri  tcS  xarà  tov  ÉXaCav. -^S.-M. 
^amXucôv  (ikovaoTTiptov,  Cont.Theoph.  ..  *  It^esr  fioœiné  Théodose  p^r  le 
p.  68,  qni  se  trouvait  en  ce  lieu.  On  continuateur  de  Théophane ,  p.  68. 
loi  donna  pour  sa  subsistance  deux  II  en  est  de  même  dans  Cédrénos, 
domaines  appelé»  to  tcu  Bup98(i»(,      t.  2,  p.  5 a 3,  ; — S.-M. 


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(An  835.)  LIVBiB   LXIX^  THEOPHILE.  121 

idées  les  plus  bizarres,  et  rien  ne  l'arrêtait  dans  l'exé- 
cution. Il  lui  vint  en  télé  de  donner  aux  Sarrasins 
une  grande  opinion  de  ses  richesses  et  de  sa  puissance; 
il  choisit  Jean  Lécanomante  pour  l'envoyer  en  ambas- 
sade au  khalife  '  Mutasem  y  frère  et  successeur  d'Aï- 
Manioun.  [L'ot^jet  de  cette  mission  était  aussi  de  traiter 
du  rachat  et  de  l'échange  des  prisonniers  faits  par  les 
deux  partis  d^s  les  guerres  précédentes  ^,  et  de  ra-> 
mener  le  patrice  Manuel,  dont  l'empereur  regrettait 
vivement  la  petite ^.]  Outre  de  riches  présents  pour  Mu- 
tas^ S  [Théophile]  mit  entre  les  mains  de  l'ambassa- 
deur quatre  cents  livres  d'or  pour  les  répandre  en  li- 
béralités dans  la  cour  du  khalife,  avec  deux  grands 
bassins  d'or  enrichis  de  pierreries  ^.  Jean  arrivé  à 
Bagdad  fit  l'entrée  la  plus  nlagi)ifique,  prodiguant  l'or 
à  pleines  mains  à  tous  les  seigneurs  sarrasins  qui  l'ap- 
prochaient. Invité  à  souper  ave^c  le  khalife,  il  fait  ap-^ 
porter  un  des  deux  bassins  pour  se  laver  les  mains, et 
donne  secrètement  ordre  à  sibs  domestiques  4e  le  laisser 
dans  la  salle  comme  par  oubli.  Le  bassin  disparut 
bientôt  sans  rqu^  sût  ce  qu  il  était  devenu.  Comme 
j  le  khalife  et  toute  sa  cour  vêtaient  en  mouvement  pour 
découvrir  l'auteur  d'un  larpin  de  cçtte  conséquence, 
Jean  pria  Mutasem  d'arrêter  ces  perquisitions,  traitant 

»  Le  contûraateor  de  Théopbane,  Almotasem  Billah  jibou-Ishac  Mo* 

p.  60,  rappelle  le  prince  de  Syrie  :'  hammed.  Il  devait  le  trône  à  la  gé- 

n^  T^  -rite  SBfiaC  âfX^vm  •(airs-  néronté  desQO  WYea  Abbas ,  fiU  de 

çcOlsv. S.-M,  Mamonn.  Ce  khalife  fut,  dn  reste,- 

'KaTàT»;<po)fcocàc^*i*>Xa7Îôu)cat  un  prince  pen  digne  de  régner.— 

xpôç  Ta    X^Ul   fAiTôtTo^tïv.    Cont.  S.-M. 
Theoph.  p.  74.  —  S.-M.  5  Qq  les  appelait  en  langne  vul- 

^  Voyez  ci-devant,  §  1 9>  P-  ^  *  ^»  6***"®»  ^  *°'^  ^Xôrra,  chemiboxesta, 

not.  3.  —  S.-M.  X*P^i^^'5*<'T*-  —  S^M. 

^  Son  nom  et  ses  titres  étaient 


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loa  HISTOIRfi  DU   BAft-lUTPÏAI?.  (Aa  M5.) 

ce  vol  de  bagatelle  ^  et  disant  q«ie  soii  maitue  saurait 
bien  le  dédommager  quand  il  aurait  perdu  une  vais* 
selle  entière  de  cette  espèce.  Le  lendemain ,  invité  en- 
core à  souper,   il  fit' apporter  l'autre  bassin  encore 
plus  riche  que  le  premier.  Cette  opulence  causa  le 
plus  grand  étonnement.  Le  khalife,  piqâé  d'honneur, 
lui  offrit  des  bijoux  d'un  prix  inestinab)e^  qu'il  s'e^-»- 
cusa  d'accepter  sur  la  défense  qu'il  en  avait  reçue  de 
son  maître.  Du  moins  ne  refuserez-Vùûs  pas  ce  que 
je  vois  vous  présenter^  lui  dit  le  khalife.  En  même 
temps   parurent  cent  prisonniers  grecs  superbement 
vêtus;  Je  vous  les  rfonwe,  dit  MutaséJUf  conduisez^ 
les  a  votre  maître^  et  qi^  il  juge  si  les  Musulmans 
méritent  son  amitié.  Prince^  répondit  l'ambassadetir, 
ce  présent  est  vraiment  digne  4e  vous,  eiswptks^se^ 
en  valeur  tout  ce  que  vos  trésors  renferment  de  plus 
précieux.  Mais  permettez-moi  de  ne  le  pas  accepter 
que  fe  ne  vous  aie  remis  un  nombre  égatAe  pri^ 
spnniers.  -Èà  gretce  ^jue  je  vous  demande ,  c*est  de 
•   tes  laisser  ^  liberté  jusqu'au  Monïent  de  rechange. 
Aussitôt  il  fit  partir  un  courrier' pour  l'etoiflèréur,  <nïi 
lui  envoya  cent  Sarrasins.  Il  furent  remis  au  MaKfe 
aussi  richement  vêtus  que  les  prisonniers 'grecs.  Muta* 
sem  et  toute  sa  cour  ne  dessaieht  d'admtfer  Topodeoce 
de  l'empereur.  Jean  fut  de  tous  les  repas   et  de  tous 
les  divertissements  du  khalife,  qui  prit  plâîsïr  à  lui  mon- 
trer ses  trésors  et  à  le  promener  dans  tqius  àfM^  palais.  Il 
le  combla  d^honneurs  et  le  fit  conduire  jusau'aux  fron- 
tières de  ses  états  par  un  brillant  cortège.  Ce  fut  à  ce 
prix  que  Théophile  acheta  le  frivole  plaisir  d'étonner 
les  Sarrasins. 
LuxJ  de        Ces  richesses  auraient  été  plus  utilement  employées 


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(An    «35.)  LIVRE   liXIX.  THÉOPHlLEé  ia3 

au  soulagement  de  ses  sujets.  Jean  Lécanomante  à  son  Théophile. 
retour  accrut  sans  doute  leur  misère ,  en  faisant  naître  ^^  gramm. 

p.  45o. 

au  prince  de  nouveaux  projets  de  dépenses.  Il  appor-  Cedr.t.2,p. 
tait  le  plan  d'un  superbe  palais  que  les  khalifes  avaient  Manass.p. 
fait  construire  à  Bagdad.  Sur-le-champ  Théophile  en  GW^p'aSg. 
fit  bâtir  un  sur  le  même  modèle  '  ;  il  l'accompagna  op^^p^^Sg, 
de  jardins  et  de  cinq  églises ,  dont  l'une  fut  une  des  ^^^  ^^  ®* 
plus  magnifiques  de  Gonstantinople.  Elle  était  sur-  Symeon^^p. 
montée  de  trois  coupoles  ;  fa  voûte,  entièrement  dorée^  4^>  4^7- 

,      .  Gcorg.  p. 

portait  sur  plusieurs  colonnes  de  marbre  d'Italie;  les   5i6,5ig, 
murs  étaient  incrostés  de  marbres   de  diverses-  cou^  Genesius,  i. 
leurs.  Vis-à*vis  s'élevait  un  portique  nommé  le  Sigma  cod.^rig.*p. 
à  cause  de  sa  forme;  il  était  soutenu  de  quinze  coloti^»-       ^^' 
nés  de  marbre  de  Phrygie.  Ces  'deux  édifices  avaient 
des  souterrains  de  même  forme  que  la   partie  supé- 
rieure. La  place  devant  le  Sigma  étoit  ornée  d'une  foïi- 
taiiie,  dont  le  vaste  bassin  était  revêtu  de  lames  d^ar* 
gedt  sur  les  bords.  Dans  la  nouveauté  de  chaque  espèce 
de  fruits,  le  bassin,  au  lieu  d'eau,  se  remplissait  dô 
firuits  de  la  saison,  qu'on  abandonnait  au  pillage  du' 
peuple,  pour  le  divertissement  du  prince.  Il  prenait  le 
plÀisir  de  ce  spetttade  sur  un  trône  brillant  d'or  et  de 
pierreries,  élevé  sur  une  terrasse  où  l'on  montait  par  un 
grand  nombre  de  degrés  de  marbre.  Au-dessous  de  son 
trône  étaient  assis  les  offîckers  de  sa  garde,  les  magis*» 
trats,  les  chefs  des  factions  du  cirque.  Le  reste  des  de* 
grés  servait  de  siège  au  peuple,  La  place  au-*déssou$ 
était  couverte  de  danseurs,  de  pantomimes,  de.bala*- 
dins  de. toute  espèce.  Cette  place  était  environnée  de 

*  npo<  titt  tôv  lapfltXYivôt  xaT«*  édifice  s'appelait  Patrice ,  et  était 
«MiwoOilvtti  â^^(tt<nv.  Cont.  Theoph.  décoré  de  la  dignité  du.  tnétne  nom. 
p.  64.  L*ardiLtecte  Ange  de  cet     •-•-S.-M. 


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ï  a4  HISTOIRE   DU   BAS-EMPIRE.  (An  835.) 

plusieurs  salons.  Dans  l'un  on  rendait  la  justice ,  et 
l'empereur  y  présidait  pour  l'ordinaire;  un  autre  était 
l'arsenal.  Il  y  en  avait  un  qu'on  appelait  le  salon  de 
la  pourpre,  parce  qu'au  commencement  de  l'hiver 
l'impératrice  y  assemblait  les  dames  de  sa  cour,  aux- 
quelles elle  distribuait  des  robes  de  pourpre  et  d'écar- 
late.  Il  serait  trop  long  de  décrire  tous  les  palais  que 
fit  élever  Théophile  :  il  y  en  avait  pour  toutes  les 
saisons,  où  les  plus  beaux  Marbres,  le  porphyre,  les 
peintures,  les  ouvrages  de  marqueterie,  l'or,  l'argent, 
les.  pieiTeries  étaient  prodigués.  Passionné  pour  les 
bijoux,  il  faisait  faire  quantité  d'ouvrages  de  ce  genre, 
aussi  pré<;ieux  par  le  travail  que  par  la  matière.  Les 
écrivains  de  ce  temps-là  ',  aussi  frivoles  que  leur 
prince,  vantent  beaucoup  un  arbre  d'or,  sur  lequel 
des  oiseaux  dé  même  métal  faisaient  entendre  un  ra- 
mage, artificiel ,  et  deux  lions  d'or  de  grandeur  natu- 
relle, dont  les  rugissements  imitaient  celui  des  vérita- 
bles lions. 
xxTii.  Je  passe  sous  silence  la  plus  grande  partie  de  ces 
ennemi  de  u  rèchcrches  somptucuscs  que  la  postérité  adinire  lors- 
débauche,  qu'elle  n'cntcud  plus  les  gémissements  des  sujets  qu'elles 
ont  appauvris.  Mais  une  dépense  qu'on  né  peut  repro; 
cher  à  Théophile,  c'est  celle  qu'il  fit  pour  exhausser 
les  murs  de  la  ville,  trop  faciles  à  escalader,  «t  pour 
réparer  du  côté  de  la  mer  les  dommages  causés  par 
les  glaces,  qui,  s'étant  rompues  après  un  hiver  rigou- 
reux, avaient  ébranlé  et  emporté  en  plusieurs  endroits 


<  C*est  le  continoateur  de  Théo-  les  ordres  de  Théophile  :  ces  dé- 
phane,  p.  86-91,  qui  donoe  le  plus  tails  sont  curieux  pour  rbictoire  de 
de  détails  sur  les  édifices  élevés  par      Fart.  —  S.-M. 


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(An  835.)  LIVRE   LXIX.  THEOPHILE.  laS 

une  partie  des  murs  et  des  tours.  Il  fit  aussi  construire 
un  grand  hôpital  en  faveur  des  étrangers.  L  emplace- 
ment de  cet  hôpital  était  auparavant  un  lieu  de  pro- 
stitution; la  débauche  y  habitait  des  loges  séparées. 
Théophile  détruisit  ce  scandale  public,  qui  n  était 
nullement  conforme  à  ses  mœurs  :  il  ne  mérita  qu'un 
seul  reproche  en  ce  genre.  Il  se  laissa  surprendre  par 
les  attraits  d'une  des  filles  du  palais  ;  mais,  touché  de 
la  douleur  qu'en  conçut  l'impératrice,  il  rompit  aussi- 
tôt ce  commerce,  fit  excuse  à  Théodora,  et  fut  dans  la 
suite  hors  d'atteinte  à  la  séduction. 

Le   patriarche   Antoine  mourut  après  quinze  ans    a»  ^^ 
d'épîscopat.  Pour  parvenir  à   cette  dignité,  il  s'était    N^Veïe 
mis  à  la  tête  du  parti  iconoclaste  ;  mais,  après  l'avoir  P«"*cution. 
obtenue,  l'ardeur  de  son  zèle  s'était  refroidie.  Livré  à  p^îsS^îS?! 
ses  plaisirs,  indifférent  sur  tout  le  reste,  il  ne  maltrai-   cedr.tf^i 
tait  les  orthodoxes  que  par  ses  mépris.  Son  succès-      '**^'*- 
seur,  Jean  Lécanomante,  ayant  enfin  reçu  la  récom-  Zon.i.il,t.a, 
pense  de   ses  fureurs ,  voulut  montrer  qu  il   en  était  Manaas.  p. 
digne,  et  la  persécution  se  ralluma  avec  plus  de  vio-       loi. 
lence  que  jamais.  Il  ne  lui  fut  pas  difficile  d'embraser     ^a^. 
Théophile,  naturellement  ardent,  et  auquel  il  avait,  Snt^iil-* 
dès  l'enfance,  soufflé  le  poison  de  l'hérésie.  On  vit^'^^'^^y^ 
bientôt  paraître  un  édit  qui  ordonnait  de  briser,  d'ef-  ?J°*^°'  P* 
lacer,  de  brûler,  de  détruire   en  toute  manière  les   j^®"*-  p- 
images  qu'on  avait  rétablies  en  quelques  églises,  et  qui   Sao.  5a4, 
défendait  sous  les  peines  les  plus  sévères  de  leur  rendre      Said. 
aucun  culte,  soit  en  pubHc  soit  en  particulier.  A  ce  c^ulsk^/i 
signal,  les  prisons  s'ouvrirent  pour  se  peupler  d'ortho-  ^J^jj,^^'  ^' 
doxes:  les  fcuets,  les  chevalets,  les  feux,  tous  les  in-  La»«>.  a3 
struments  de  supplice  se  préparèrent  dans  tout,  l'em-  vîta  Thcod. 
pire.  Constàntinople  surtout  était  remplie  d'espions,  Sar.  aôdéc. 


ViU  Joanni- 


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126  HI6TOIRK   I>U  BAft-EXPlUK.  (An  s^,y 

cu,ap.  Sar.  de  délateuTs,  qui,  pénétrant  dans  rintérieor  des  fa* 
Fiet^Tiist.  milles,  ne  cherchaient  qu'à  surprendre  la  piété  des 
^art^Si'tl'  ^^^^^^'  Théoctiste,   belle -mère  de  l'empereur,  osait 
44,  45.     seule  lui  reprocher  sa  fureur  impie  et  l'avertir  de  la 
haine   qu'il  s'attirait.  Il  méprisait  ses  remontrances; 
mais  la  vénération  publique,  qu'elle  avait  méritée  par 
sa  vertu,  la  mettait  à  couvert  des  emportements  de  son 
.gendre.  Il  se  contenta  de  lui  enlever  d'entre  les  mains 
ses  filles,  qu'elle  élevait  dans  les  pratiques  de  l'église, 
et  de  défendre  qu'on  les  menât  chez  elle.  Il  ménagea 
moins  l'impératrice:  ayant  appris  qu'elle  honorait  les 
imagés  en  secret,  il  entra  furieux  dans  son  a^parte- 
tement,  la  traita  d'idolâtre,  l'accabla  d'injures,  et  se 
serait  porté  contre  elle  aux  derniers  excès  si  elle,  n'eût 
eu  recours  au  mensonge  pour   l'apaiser.  Tant  qu'il 
vécut ,  cette  princesse  prit  le  plus  grand  soin  de  cacher 
son  respect  pour  les  images. 
Tr^tement       ^^^  prisons  furcnt  bientôt  remplies   de  fidèles  de 
fait  aux     toutc  Condition  :  elles  devinrent  le  séjour  ordinaire  des 
évêques,  des  prêtres  et  surtout  des  moines.  Comme 
c'étaient  les  plus  zélés  défenseurs  de  la  foi  de  l'église, 
c'étaient  aussi  ceux  que  Théophile  poursuivait  avec  le 
plus  d'acharnement.  Us  furent  chassés  des  villes  avec 
défense  d'y  rentrer,  et  les  monastères,  réduits  en  so^ 
litudes,. furent  abandonnés  aux  séculiers.  Ils  n'étaient 
pas  même  en  sûreté  dans  les  campagnes.  Poursuivis 
partout,  ils  ne  trouvaient  de  retraite  que  dans  les  lieux 
inaccessibles,  entre  les  rochers,  dans  les  cavernes,  au 
fond  des  précipices,  où  ils  mouraient  de  faim  et  de 
misère.  Qaelquei-uns  quittèrent  leur  habit  pour  être 
méconnus  ;  mais ,  privés  de  pieuses  instructions  et  de 
bons  exemples,  ils  passèrent  des  austérités  du  cloître 


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moines. 


(An  836.)  JJ^M  l»X..  TSBéOP«IUI.  I27 

au  relâchement  et  wûn  à  la  débauche.  U  y  en  eut 
d'assez  hardis  pour  s'adresser  à  l'empereur  même  pour 
lui  Élire  l'apologie  de  la  vie.moiiastique,  en  lui  repré- 
sentant la  sainteté  de  cette  institution^  née  dans  la 
ferveur  des  premiers  siècles,  féconde  en  vertus  et  en 
doctrine ,  illustrée  par  tant  de  saints ,  et  d'autant  plus 
parfaite  qu'elle  s'impose  pour  loi  les  conseils  mêmes 
de  l'évangile.-  Théophile  s'ëtant  plusieurs  fois  repenti 
d'avoir  eu  l'imprudence  d'entrer  en  dispute  avec  eux  » 
sur  la  question  des  images,  prit  ensuite  le  parti  de  les 
renvoyer  à  Jean  Lécanomante.  Mais  celui-ci ,  confondu 
lui-même,  malgré  les  subtilités  de  sa  dialectique,  don- 
nait toujours  en  dernière  réponse  l'ordre  de  conduire 
au  cachot.  Le  monastère  entier  des  abrahamites  étant 
venu  faire  au  prince  de  sages  remontrances,  il  les 
chassa  de  la  vdle,  et  les  fit  conduire  au  bord  du  Pont- 
Euxin,  où  il  furent  assommés  à  coups  de  bâton.  Dans 
ce  siècle  d'ignorance,  ainsi  que  dans  les  suivants,  les 
doitres  conservaient  quelques  étincelles  des  arts,  des 
lettres  et  des  sciences,  presque  entièrement  éteintes 
partout  ailleurs.  Un  moine,  nommé  Lazare,  peintre 
estimé  en  ce  temps-là ,  fui  accusé  de  ne  s'occuper  qul^ 
peindre  des  images.  Théophile  le  fit  déchirer  à  coups 
de  fouet;  et,  pour  le  mettre  hors  d'état  d'exercer  son 
talent,  il  lui  fit  brûler  le  dedans  des  mains  avec  des 
lames  de  fer  rouge  :  ce  qui  n'empêcha  pas  que  Lazare, 
étant  guéri,  ne  continuât  de  peindre,  autant  qu'il  en 
^vait  la  liberté.  Après  la  mort  de  Théophile,  il  entra 
en  faveur  auprès  de  Théodora,  et  ce  fut  par  ses  mains 
que  Michel  IIJ  fit  porter  à  Rome  les  présents  qu'il 
faisait  à  saint  Pierre. 
Entre  les  moines  défenseurs  des  images,  les  plus  ce-  soi^fraoce» 


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1(26  HISTOTRB   OU  BA.S-3EMPIAE.  (An  836.) 

deThéodorfr  lèbrcs  étaient  deux  frères,'  Théodore  et  Théophane. 

Tkéopkine.  Hs  étaient  venus  de  Jérusalem  exprès  pour  soutenir 
le  dogme  orthodoxe.  L'empereur  les  fit  amener  devant 
lui,  et  voulut  d'abord  les  intimider  par  un  ton  me- 
naçant;  mais  les  voyant  intrépides,  il  feignit  de  s'a- 
paiser, et  leur  commanda  avec  douceur  de  lui  citer 
les  preuves  sur  lesquelles  ils  fondaient  le  culte  des 
images.  Comme  ils  s'appuyaient  sur  des  passages  de 
l'écriture  qui  ne  se  trouvaient  pas  dans  le  texte  que 
leur  présentait  l'empereur,  ils  envoyèrent  chercher  le 
manuscrit  de  la  bibliothèque  patriarcale,  et  firent  voir 
sensiblement  à  Théophile  que  le  sien  avait  été  falsifié 
par  les  iconoclastes.  L'évidence  de  la  conviction ,  au 
lieu  d'ouvrir  les  yeux  au  prince  obstiné,  le  mit  en  fu- 
reur ;  il  les  fit  en  sa  présence  accabler  de  coups  de 
bâton;  on  leur  imprima  sur  le  front,  en  caractères 
ineffaçables,  de  méchants  vers,  dont  le  sens  était  que 
ces  scélérats,  chassés  de  Jérusalem  pour  leurs  crimes, 
s'étant  réfugiés  à  Constantinople ,  en  avaient  été  ban- 
nis pour  de  nouveaux  forfaits.  A  cet  ordre  cruel, 
Théophane  se  tournant  vers  l'empereur  :  Prince^  lui 
dit-il,  vous  avez  raison  de  vouloir  que  V impression 

%  en  soit  durable  ;  vous  serez  un  jour  obligé  de  les 

lire  deifunt  le  tribunal  du  soui^erain  juge.  On  les 
relégua  dans  la  ville  d'Apamée  en  Bithynie ,  où  ils  fu- 
rent renfermés  dans  une  prison.  Théodore  y  mourujt 
des  traitements  barbares  qu»'on  ne  cessa  de  leur  faire 
éprouver:  mais  Théophane  survécut  à  Théophile;  et, 
la  paix  étant  rendue  à  l'église,  ce  titre  calomnieux 
qu'il  portait  sur  son  front  devint  un  éloge  respectable: 
il  fut  fait  archevêqne  de  Nicée. 

XXXI.  ,  '■ 

,    Rappel  de       Méthodius,  enfermé  pendant  sept  i^ns  dans  un  sé- 


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(An  836.)  LlVltf   LXIX.  THEOPHILE.  lag 

pulcre,  en  avait  déjà  été  délivré  par  un  caprice  singu- 
lier de  Théophile.  Ce  prince,  plein  de  feu  et  de  viva- 
cité,  était  curieux ,  de  cette  sorte  de  curiosité  vagge 
qui  dévore  tout  sans  rien  digérer.  Il  lisait  des  livres  de 
toute  espèce.  Il  lui  en  tomba  un  entre  les  mains  rem- 
pli de  questions  difficiles,  on  ne  dit  pas  sur  quelle 
matière.  Jean  Lécanomante  et  le  philfsophe  Léx)n, 
qu'il  consulta,  ne  purent  lui  fournir  d'éclaircissement. 
Un  de  ses  chambellans,  qui  aimait  Méthodius,  prit 
cette  occasion  de  le  faire  connaître  au  prince.  Il  lui  fit 
réloge  de  sa  sagesse  et  de  Fétendue  de  ses  connais- 
sances. Théophile  fit  porter  à  Méthodius  les  questions 
qui  l'embarrassaient ,  et  il  en  reçut  une  solution  sa- 
tisfaisante. Charmé   d'avoir   découvert   un   si.  habile 
homme,  il  donne  orjre  de  le  tirer  de  son  sépulcre  et 
d(e  l'amener  au  palais  ;  il  lui  assigne  un  logement  avec^ 
une  pension  honorable.  On  rapporte  que  le  criminel 
enfermé  avec  lui  depuis  tant  d'années  refusa  de  sortir 
en  même  temps  de  cet  horrible  séjour,  où  il  avait  été 
converti  par  les  discours  et  par  les  exemples  de  Mé- 
thodius, et  que,  par  esprit  de  pénitence,  il  se  condamna 
lui-même  à  y  passer  le  reste  de  ses  jours.  Méthodius 
ne  fut  pas  long-temps  sans  tomber  dans  une  nouvelle 
disgrâce.  On  avertit  l'empereur  qu'il  dogmatisait  en 
faveur  des  images,  et  qu'il  avait  déjà  inspiré  ses  sen- 
timents à  plusieurs  officiers  de  la  cour.  Outre.de  colère, 
après  l'avoir  accablé  de  reproches,  il  le  fit  fouetter 
avec  violence  et  descendre  dans  une  cave  du  palais^ 
pour  y  être  enfermé  comme  dans  le  tombeau  qui  lui 
I  avait  si  long-temps  servi  de  demeure.  Quelques  amis 
I  l'ayant  retiré  pendant  là  nuit,  et  transporté  chez  eux, 
l'empereur  confisqua   la  maison;  Cependant  quelque 

Tome  Xm.  9 


I 


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l3d  HfSTOIRH.DU  BA'S-EMLPIBC:.  (An  836.) 

tempe  après,  le  besoin  qu'il  croyait  avoir  des  lumières 
de  Méthodius,  l'adoucit  à  son  égard.  Il  le  fit  revenir. 
Uvprenait  même  plaisir  à  l'entendre  expliquer  les  pas- 
sages de  l'écriture  que  les  iconoclastes  citaient  en 
leur  faveur.  Il  se  faisait  accompagner  de  Méthodius 
dans  ses  expéditions;  en  sorte  que,  sans  abjurer  l'hé- 
résie ,  il  deviill:  beaucoup  moins  ardent  à  la  soutenir 
et  à  persécuter  les  orthodoxes. 
Aii853.  Après  la  retraite  de  Manuel ,  l'armée  sarrasine ,  dont 
xxxn.     il  avait  eu  le  commandement,  demeura  campée    en 

Commence- 

ment  des    Cappadocc,  cu  attendant  denouveaùx  ordres  du  khalife. 

Patz^aces.    ^  .  ••/«         .,,.        ,  -,  « 

Cedr,t.2,p.  ^®  pnnce,  irrïte  d  avoir  été  joué  par  Manuel,  envoya 

Cont^  The-  ^^  uouvcau  général  pour  achever  la  campagne.  L*em- 

opb.  p.  76,  pereur,-  de  son  côté,  opposa  aux  Sarrasins  les  troupes 

Const.     qu'il  avait  en  Asie.  Mais  les  deux^armées ,  après  divers 

Porph.de     ^  .       .  ,       ,  «  .  . 

adm.  imp.  mouvemcnts ,  craignant  également  d  en  venir  aux  mains, 
De  oJiliies,  ^e  retirèrent  sans  combattre  '.  Dans  ce  même  temps, 

H^ns,t*â,  '^  ^^"^  ^®*  Khazars  [et  un  autre  chef  de  cette  nation, 
ni  riJe'in  ^^^^^  ^^  ti^^®  ^^  P^<^h  *],  alliés  de  l'empire ,  en voyè- 

Y  tes  détails  donti^  ci-dey.  §  14,  peck,  qne  pteiiait  an  anlre  piiiiee 

p*  lo^y  not.  a,  fit  ceux  qa*on  lira  Uiazar,   ce   doit  être  sans  auem 

^                   ci*9près,  S  34,  p.  i35,  not.  i,  font  doute  le  titre  de  ieà  on  hegk  ,   en 

voir  qu'il  faut  réformer  la  date  don-  usage  encore  à  présent  chez  les  Tares, 

née  jusqn'à  i^ieot  aux  .évéliemènfs  oh  il  signifie  seigneur ,  prinee  ,  «i 

racpiités  dans  ce  présent  paragraphe,  qui  s'est  changé  en  ifey  dans  la  pro*» 

n  £iut  donc  mettre  en  l'an  836  la  nonciation   vulgaire.     lies    auteurs 

fondation  de  la  tille  de  Sarcel ,  pla*  arabes  nous  apprennent  aussi  qo»  les 

cée  jusqu'à  présent  en  Tan  83$.  — '  Khazar^obéisaaientégalementàdeox 

— S.-M.  princes,  le  khakan, -dont  raatorltë 

"'   >  Xa'Yflévoç  Xa|[apiac  xai  6  Héx-  n'était  que  nominale ,  et  an  régent 

Cent.  Theopb.  p.  76.  J*ai  expliqué  ou  lieutenant  du  k];ialcan,  qualifié 

ailleurs,  t.  9,  p.  3  5  9,  not.  3,  liv.  par  les  Khazars  du  titre  de  àhoAan- 

X1.1X,  S  36,  l'origine  du   titre   de  5tf A;  c'est  là,  je  n'en  doute  pas,  le     ' 

^fiaàan  ,  porté  par  les  princes  des  peeh  des  écrÎTaiiis  byzantins»  Yoyés 

Khazars  et    de   toutes  les  nations  Mouradja   d'Ohsson,   Voyage  d'A<^ 

d'origine  turqne.  Pour  le  titre  de  bourkassim,  p.  34  et  35.  C'était  lui 


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(An  ^6.)  LnM:  IiXÏXi  TWiOPniLE.  ïâï 

neaat  une  ambassade  à  GonslaiitïAoplêf.  tls  Vddki^ôi  adnotin 
«ngager  l'erapereur  à  se  joindre  à  eux  pour  écattet  les  Geo^*  ad 
FataÂnaceSc  Cette  nation  barbare ,  inconnue  jusqu'alors^  ^**''*** 
habitait  entre  le  Volga  et  le  Jaïck  '.  S'étant  multipliécî  ^ 
elle  cemmènçait  à  se  moîttrer  sur  lès  bords  du  Tai^is, 
et  fitisait  craindre  utfe  invasion  sélttbïabïe  à  celte  dés 
Khaears  eux-inénies  et  de  tant  de  peuples  septeiitrio'- 
ttaust*  qui,  des  bords  de  la  mer  Caspienne,  s'étaient 
a^tanôés?^  en  diffétients  temps,  josqtite  sur  le  Danube^: 
Le  âosphéré  Cimmérien,  exposé  à  cette  incursiotï, 
était  alors  posséda  par  les  Kbatars  4;  mais  Fenipfrfe 
y  cotfset^it  la  vîHeide  Gherson,  placfe  impeniante 
vers  Téntréé  de  la  presqu'île;  et^  par  cette  raison,  il 
vivait  un  in'té^èl  commun  avec  lies  Kbassars.  L'empe* 
r^Cttr  y  [envoya  son  premier  écuyer  [ou  spatharocandH 
datte  ^],  Mmme  [Pétronas}  Camatère  ^^  qui  can- 
liiMiWfigt  le  pays  -j  i*  lui  donna  tin  [détachement  de  là] 
flotte  [îinpérialé  7]  avec  quelques  troupes  [conduites  par 
kl  eàto^^iànàsitit  de  la  Paphlagouie  ^],  pour  aider  les 

qnî  avait  tout  le  pouvoir.  îl  a  déjà  pois  le  Danube  jusqu'au  Tanaïs.  Us 

étéijnttrtioà  ûeté  aétoéà  piiftiée  dM  étaient  alors  une  nafion  redoutable 

KhaiiM^,  iUrâéti  t.  ii,p.  ïij  ,  not.  .©t  utile  àdx  empereurâ  dé  Coiistan- 

6i  m.'t^tt ,  S  1 8i  ^  SF.-SI.       *  tmople.  —  l^M. 
'•  »  Oî  1ia^i^oix{rxi  tcij^  Apx^ç  4  Le*  KMiârs  placèrent  des  gdu- 

tfe  «rWttOTfliiAè^»  kt^  ^  ftÔTÔV  ixoi  vemeurs  dans  Cheràon  et  les  autre» 

itàttàiXtW  aptovcftç  9kr%àk  êCç  tfev  ^-  viflès  grecque*  du  ^ont-Euidn  et  des 

»rtk(tô¥  tefii.CùùÉt:  Pofph.  Z)»  ôrdin.  Paltfs  i^édtides.  Voyeàs  cî-dev.  1. 1  i 

i»iJ^/6.  Sfif.  -^  8..M.  p.  -14,  ilôt,  i,  Kv.  Lxîi ,  ^  46.  '^ 

'^  Onie^pfùs  eii  détaril  ce  qài  S.-M. 

éèitcenië  r^rigine  et  leà  étatlîssc-  ^  ^g^j^Ç^j^p^^^^^j^^^ç»^   g  j^^  • 

■écrits  dé   Oette  nation,   ci -«près,  <>  nstpwvâv    toû   8irovofi!,fltÇou.Évou 

fit.  lùtadtt,S  lî.*— S.-M.  Ka|ioîTepôS.  Cont.  Theoph.  p.   76. 

'  A«  tetop»  de  Constantin  Po*  — S.-M. 
pfif^togéiiète,  c'est-ik^are  un  éîècle  ^^  Merà  xeXav<^îwv  PaatXutorXwf- 

aprèè  Pépoipie  dont  il  a'ftgit  Ici,  leA  ^n.  Ck>nt.  Theopb.  p.  76.  —  S.-M. 
Paceintfces  étendirent ledr  pnissarirê  *  KotirsTavw     tïjç    na^Xavovio;. 

sur  les  denx  rives  du  Borystène,  de-  Coùt.  Theopb.  p.  76.  — S.-M. 

9- 

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l3a  HISTOIRE   DU   BA:S*mPfRfi.  (Ab  836.) 

Khaïars  à  fermer  lé  passage  aux  Patzinaces.  Gama- 
tère ,  arrive  à  Cherson ,  y  laissa  les  vaisseaux  de 
guerre  '  et  fit  passer  ses  troupes  dans  des  bateaux 
plats  ^,  qui  seuls  pouvaient  naviguer  sur  les  Palus 
Méotides  et  entrer  dans  le  Tanaîs.  Ayant  remonté  le 
fleuve  jusqu'à  quelque  distance  de  son  embouchure  ^^ 
il  travailla ,  de  coiicert  avec  les  Khazars ,  à  constraire 
un  fort  capable  de  tenir  en  respect  les  barbares  de  ces 
contrées  et  de  défendre  le  passage.  Comme  les  environs 
ne  fournissaient  aucuns  matériaux,  on  fit  de  la  chaux 
a^ec  le  gravier 'du  fleuve  et  des  briques  avec  la  terre 
du  lieu  même,  ce  qui  rendit  le  travail  plus  long;  mais 
l'ouvrage  n'en  fut  pas  moins  solide.  Ce  fort  se  nomma 
Sarcel,  ce  qui  en  langue  khazare,  signifiait  Maison- 
Blanche  *.  M.  de  Tlsle,  célèbre  géographe,  prétend 
que  Sarcel  fut  bâtie,  non  pas  sur  le  grand  Tanaîs, 
qu'on  nomme  aujourd'hui  le  Doii ,  mais  sur  le  Donez, 
que  les  anciens  nommaient  aussi  Tanais,  et  que  c'est 
la  ville  de  Russie  nommée  maintenant  Biélogorod ,  ce 


'  Tàç  (Aoucpàç  rfiti^tles  -vaisseaux  De  adm,  întp,  c.  4^.  On  verra  dans 

Ib/t^^.Cont.  Tfaeoph.  p.  76. — S.-M.  la   note  suivante    que  les    anciens 

>  Êv  ar^offiXaLiç  vauat,  dans  des  Russes  ont  rendu  ce  mot  par  Biela 

vaisseaux  ronds.   Cont.   Theoph.  peja ,  qui  a  le  même  sens  en  leur 

p.  76.  —  S.-M.  langue.  M.    Klaproth  a    lait    voir 

3  Selon  Constantin  Porpfayrogé-  qu^ll  en  pouvait  être  de  n^éme  dans 
nète,  De  adm,  imp,  c.  4a,  il  y  avait  la  langue  khazare,  et  que  ce  nom 
soixante  journées  de  chemin  depuis  s*expliquait  fort  bien  par  les  idiomes 
le  Danube  jusqu'à  Sarcel. — S.>M.  finnois  auxquels   devait]  se    ratta- 

4  To  xacrrpov  ^ep  out»  SapxeX  xx-  cher  la  langue  des  kjbazars.  Sar  en 
TOvo{xoSIeTai ,  ^€p  lp|4.iiveu6Tai  |4.àv  vogoul  et  chouro  en  tchnvach  ai- 
Aeux^vcixviuLX.  Cont.  Theoph.  p.  76,  gnifient  bianc^  et  ieli,  Jkol  en  vo- 
Ce  nom  est  écrit  par  erreur  Mar-  goul ,  et  âU  en  tchuvach  signifient 
eei  dans  le  texte  et  dans  la  tradnc-  maison.  Anci^  Journal  asiatiqne , 
tion  latine  de  Cédrénus  ,  t.  a  ,  p.  t.  3,  p.  139,  et  Ifout^eau  Journal 
5«8.  ÉpaDveûtTat  ^è  irapà  aùroîç  rà  asiatique  ^  t.  i,  p.  418. —  S.-M. 


SttpxsX  AoTrpovôtnTirtov.Cont.  Porph. 


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(Au  8S6.)  LiVRB  LXI^L.  THÉOPHILE.  l33 

qui  signifie  stuslsi  Maison  Blanche  ;  mais  cette  opinion 
me  paraît  moins  vraisemblable^'  que  celle  que  j*ai 
suivie  ^.  11  y  avait  toujours  une  garnison  de  trois  cents- 
Khazars  ^.  Camatère,  de  retour  à  Chersou,  fit  sa- 
voir à  l'empereur  que ,  pour  s'assurer  de  la  conserva- 
tion de  cette  place  importante  4^  il  fallait  y  envoyer 
un  gouverneur,  et  qu'il  était  dangereux  de  la  laisser 
à  la  disposition  des  habitants,  comme  on  avait  fait 
jusqu'alors  ^.  L'empereur  approuva  cet  avis,  et  nomma. 


^  La  ville  de  Biélogorod  est  située 
près  des  sources  du  DoDez,  à  une 
très-grande  distance  de  Feinhouchare 
du  Don ,  dans  une  position  qni  ne 
peut  s^accorder  en  rien  avec  ce  qui 
est  dit  dans  le  texte  dn  oontinnateur 
de  lliéophane,  qui  Indique  Lien 
clairement  que  Sarcel  n*étaît  pas 
âofgnée  de  Tembonchure  duTanaïs, 
dans  les  Pains  Méotides.  —  S.-M. 

3  L'opinion  adoptée  par  Lebeau 
est  maintenant  établie  d'une  manière 
incontestable.  M.  Lebrbèrga  prouvé, 
dans  un  mémoire  spécial  sur  la  si- 
tuation de  cette  forteresse,  inséré 
dans  un  recueil  intitulé  en  allemand  : 
-Untermchungcn  zur  Erîœuterung 
der  œlteren  Geschichte  Russlands, 
PéteraboUrg,  in- 4°,  1816,  que  cette 
TÎlle  était  réellement  située  sur  les 
bords  dn  Don.  Il  fait  voir  que  celte 
forteresse  fut  nommée  en  russe  Bie- 
lavejay  ce  qui  signifie  Habitation 
èlanehe.  Cette  ville ,  selon  les  an- 
nales  rnsses,fnt  conquise  en  Tan  90 5, 
par  le  grand  duc  Svietoslaw,  fils  d'I- 
gor, qni  battit  le  kbakan  de»  K.ha- 
asars.  Un  voyageur  russe,  qni  se  ren- 
dait de  Moscou  à  Constantinople  en 
descendant  le  Don ,  passa  devant  ses 
ruines  en  Tan  1389.  ^^^  ^'^^^  ^^^ 
la  rive  droite  dn  Don^en  un  lien  nom- 


mé Bielaveja  ou  Trakh-Ostrovions- 
kaga,'à  une  petite  distance  de  Tan- 
cienne  ville  de  Tcberkask,  cbef-Ueu 
des  Cosaques  du  Don.  Voyez ,  an 
sujet  de  cette  ville,  un  mémoire  de 
M.  Klaproth,  inséré  dans  VAncien 
Journal  asiatique ,  t.  3  ,  p.  1 59 ,  et 
l|n  autre  mémoire  dans  le  Nouveau 
Journal  asiatique ,  t.  I,  p.  4*3-— 
418.— -S.-M. 

3  Êvôa  xxl  Xaîjapwv  TaÇtôrav  xa-^ 
ÔElJovTat  rpiaxccioi  xarà  xpo'vov  IvaX- 
Xaqacfi.evQt.  '  Cont.  Theoph.  p.  76. 
—  S.-M. 

4  Le  continuateur  de  Xhéopbane , 
p.  76,  dit  qu'elle  était  sur  la  fron- 
tière qui  séparait  les  Khazars  des 
Patzinaces  :  Êori  Bï  xai  xaràTOvTà- 
vaïv  -ïTCTapt.ov,  oç  tow;  ts  narÇivoucC- 
Ta;  ftvTsOôev ,  xai  oùtoùç  ^1619*)^^  toÙç 
Xaîîàpou;  exetôev.  —  S.-M. 

^  Jusqu'à  cette  époque,  la  ville  de 
Cherson,  plus  ou  moins  dépendante 
des  anciens  rois  dn  Bosphore ,  des 
Gothsy  des  Huns,  des  Khazars  et  de 
tons  les  barbares  qui  s'étaient  sue- 
cédé  dans  la  possession  des  plaines 
de  la  Tanride  ,  avait  conservé  Itk 
formes  antiques  de  son  gouverne- 
ment répubUcain,qu'elle  tenait  de  ses 
fondateurs  grecs.  KUe  avait  un  pre- 
mier magi8trat,appclépiimaton|irû- 


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l34  mSTOmiK   I^U   B^r£jtfPItt«t  (Aa8a&) 

CafîïAtère  lui-même  %  avec  ardre  a«x  Cbersc^ites  de 
Iqi  obéir.  Ce  fut  la  première  fois  qu'ils  reçurent  u» 
gouverneur  ',  et  Ton  co&ttima  dans  la  3uîte  de  leur  ^i^ 
envoyer  de  Constantinople.  « 

xxxiii.        Jj^  auteurs  de  ee  temps-là  rapportent  un  fait  pei> 

Hardiesse     .  xi/./«  •  i 

d'uQ      important,  a  la  vente,  mais  qui  peut  trouver  quelque» 
^arreur.    pj^^^  j^^^  l'h)§toipe  de3  ftrts.  Dans  la  place  nojaxoé^ 
p.  456.     l'Augustéon  était  une  statue  équestre  de  Jus|:inien  ^ 
427*     *  pi^çee  sur  une  colonne  fort  haute.  Le  cimier  du  casque, 
52.5.       qui  était  de  bronze  doré  ainsi  que  la  statue ,  fut  abattu 
par  le  vent.  Comme  on  préparait  un  grand  échafau- 
dage pour  atteindre  à  cette  hauteur,  un  couvreur  pro- 
posa d'épargner  cette  peine  et  cette  dépense,  et  dit 
qu'il  n'avait  besoin  que  d'une  corde  et  d'un  javelot. 
Étant  monté  sur  le  toit  de  Sainte-Sophie,  qui  ri^eu 
était  pas  éloignée, .il  attacha  la  corde  au  javelo,t,  et, 
le  faisant  partir  d'une  machine  avec  roideur,  il  l'en- 
fonça dans  la  statue.  S'étant  ensuite  coulé  le  long  de 
la  corde,  il  replaça  le  cimier  du  casque.  L'empereur 
récompensa  de  cent  pièces  d'or  son  industrie  et  sa  har- 
diesse. 
An  837.         Les  Sarrasins,  en  perdant  Manuel ,  semblaient  avoii* 
'rLéophiie  perdu  leur  courage  :  il  se  tenaient  renfermés  dans  leurs 
^tu7i*vai«"  l™**^-  Théophile,  profitant  de  leur  inaction,  se  met 
Cedr.t.2,p.  à  la  tête  de  cent  mille  hommes  et  va  fondre  dans  la 

5a8,  529. 

M0teiir,engrcG6>j'YO(AevoçnfiaTeu«»y,  de  cette  république;  t.  i ,  p.  3a€i» 

igni  administrait  les aflfaireft  de  coii<-  aot.   i ,  Uv,  y,   §   17,   et  t.    zi, 

oert  avec  les  principaux  de  k- ville ,  p.  74 ,  not.  i ,  liv.  i*n,  S  40.  — 

(scrà  Tttv  irars^uv  rvic  nokitùç  t«  S.-M. 

^étvoL  iJrv  ^lOUGÛv*  Cont.  Theoph.  p.  '  L^eppereur  7  ajouta  le  titre  4c 

^.  Il  est  souvent  question ,   dans  protospalbaire ,     on  grand-écuyer.  . 

Constantin    Porphyrogénète  ^    Dp  — S. -M» 

iMtfjjR.  inip,  c.  53,  de  ces  pcemiers  ^  STpariK^o;..*-*-  S.-M. 

wagistrau  de«  Chersonites.  J*ai  parlé 


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(An  837.)  LIYBE   LXIX.  THEOPQILE.  l35 

Syrie^.  Il  porte  partout  le  ravage,  pénètre  jusqu'à 
TEuphrate,  prend  et  pille  Samosate,  assiège  Sozo- 
petra  ^j  autre  ville  de  la  Coraagène ,  où  était  né  le 
khalife  ^.  Mutasem,  alaqmé  du  péril  de  sa  patrie,  se 
voyant  pris  au  dépourvu ,  sans  avoir  eu  le  temps  de 
rassembler  ses  troupes ,  écrit  à  Théophile ,  le  priant 
avec  instance  d'épargner  cette  ville  qui  lui  était  chère  : 
Cest  mon  berceau ,  lui  disait-il  ;  je  vous  abfxndon- 
neraU  plutôt  une  pronnce  entière;  songez  qîie^  si 
je  suis  surpris  aujourd'hui  ^  je  serai  demain  en  étcU 
de  me  venger.  L'intérêt  que  le  khalife  prenait  à  cette 
ville  ne  fit  qu'animer  davantage  l'emperepr  à  la  dé- 
truire :  il  la  prend  de  force,  la  saccage  et  la  ruine. 
Les  hommes  sont  passés  au  fil  de  l'épée  ^  ;  les  femmes 


Zoii.l.i5,t.9, 

p.  i5o,  i5i . 

Léo  ^Hmin . 

p.  453. 

Cont. 

Theoph. 

p.  77.  7«- 

Sjmeon ,   p. 

431,  4a2. 

Georg.  p. 

519,   5a2. 

Genesios , 

1.  3,  p.  «7, 

3o. 

Abulfarage , 

chron.  arab. 

p.  i65. 

Elmacin, 

bist.  Sar.  p. 

14a. 


'  JElmacm  ,  Hist,  tarae,  p.  x4a  1  et 

Aboa'lfaradj  dans  «a  Chronique  arabe 
p.  16S,  s'accordent  à  placer  en^%% 
de  rb^re  (f  4  d^embre  836 ,  —  3 
décembre  837  ^^  J.-G.)  cette  expé- 
dition de  Temperear Théophile.  Lenr 
témoignage  est  cenÔnDé  par  Aboa'- 
Ueda  i  Jnn»  musL  II ,  1 7 1 ,  qui  pbice 
en  Van  aa3  (3  décembre  837,  -^ 
novembre  838)  la  prise  d'Amoriam, 
qui  fat  conquise  par  les  Arabes  Tan- 
née suivante.  U  est  appnyé  encore 
parle  récit  d*AboaUfaradj ,  qui ,  dans 
sa  Chronique  syriaque^  p.  i58 , 
place  également  la  prise  de  Zobath- 
rab  en  l'an  1x48  de  Tère  des  Sélen- 
ddes,  836  et  837  de  J.-C.,  et  la  con- 
quête d'Amorinm ,  en  Tan  11 49  ^^ 
Sélencides,  837  et  838  de  J.-C.  — 
—  S. -M. 

>  2<i>^oir^Tpoiç,dans  le  continuateur 
de  Théophane,  p.  77;  Cédrénus, 
t.  a,  p.  528,  et  Zonare,  1.  i5,t.  2, 
p.   x5o.  Elle  est  nommée  Za^er^cv 


par  Syméon  logotbète ,  Chron.  p. 
4 ai,  et  dans  Léon  le  Grammairien, 
p.  443  ;  elle  est  appelée  par  erreur 

•  ôj[oircTpa  dans  Génésius,  jl.  3,p.  3o. 
Les  Arabes  rappellent  Zobathrah» 
Oi^e  connaît  pas  la  situation  exacte 
de  cette  ville  qni  n^existe  pins.  — 

3  Ttjv  StûîJowiTpav  ixiroXio^îciiaoïç 
iraTpi^a  -ru^^avouaav  to3  Afxspa- 
potmic.  Cont.  Tbeopb.  p.  77.  Les 
auteurs  orientaux  ne  disAt  lien  de 
pareil.  H  se  peut  que  le  khalife  Mu* 
tasem  soit  né  effectivement  dans 
cette  ville  I  on  dans  la  partie  de  la 
Syrie  on  elle  se  trouvait.  Selon  eux, 
la  ruine  d'Amorinm ,  Tannée  sui- 
vante, ne  fut  causée  que  par  I0I 
cruautés  inouies  commises  par  les 
Grecs  dans  toutes  les  villes  qa*i]s 
avaient  conc[uîse8.  —  S.-M. 

4  Selon  Abou  Ifaradj ,  Chron,  sjrr. 
p.  i58,  les  musulmans ,  les  chré- 
tiens et  les  juifs  y  furent  traités  avee 

•  nne  égale  cruauté.  —  S.-M. 


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SéititioQ  des 


l36  HISTOIRE   DU   BAS-EMPIRE.  (An    83^.)  | 

et  les  eufaQts  traînés  en  esclavage.  De  là  Tannée  marche  ^ 
à  Malatia ,  qui  ëtait  l'ancienne  Melitine.  On  y  fait  un 
grand  carnage  '  :  mille  musulmanes  sont  emmenées 
captives.  Théophile  retourne  à  Constantinople ,  fier 
d'avoir  causé  au  monarque  sarrasin  un  chagrin  si  sen- 
sible ^. 

Sa  joie  fut  bientôt  troublée  par  un  événement  qui 
soldats  pouvait  avoir  dies  suites  fiihestes.  Il  avait  laissé  Théo- 
phpbe  à  la  tête  des  Perses,  pour  les  conduire  à  Sinope 
en  Paphlagonie,  où  ils  devaient  passer  le  quartier 
d'hiver.  Ce  corps  s'étant  accru  successivement  par  les 
fugitifs  de  Perse,  montait  alors  à  trente  mille  hommes  ^. 
Arrivés  à  Sinope,  mécontents  de  ce  qu'on  différait  leur 
paie,  ils  se  mutinent  et  proclament  Théophobe  em- 
pereur ^.  Ce  fidèle  officier  rejette  cet  honneur  crimi- 
nel ,  il  refuse  constamment  de  se  rendre  complice  de 
leur  révolte;  il  les  menace  des  châtiments  sévères  que 
.  méritent  des  rebelles;  rienrne  peut  les  calmer;  ik  len- 
vironnent ,  ils  s'écrient^:  Cest  à  vous  à  nous  mettre 
à  couvert;  nous  n'aidons  point  de  grâce  à  espérer  de 
V empereur.  Une  révolte^  dès  qu'elle  est  déclarée  y 
ne  peut  échapper  à  la  punition  que  par  le  succès. 
ThéopRobe  instruit  secrètement  l'empereur  de  ce  qui 
se  passait  à  Sinope;  il  lui  jure  qu'il  souffrira  plutôt 
mille  morts  que  de  lui  manquer  de  foi.  Théophile  lui 

^     »  Selon  Abon'lfaradj,  Chron.syr.  ^  Etç  Tpeîç  {wpia^ac  iXtiXcoUv*»- 

p.  i58,  les  Arabes  perdirent  quatre  Cent,  Xheophi  p.  77.  Voy.  ci-dev. 

mille  bomines  dans  ce  combat. -S.-M.  S  ^  »  P*  93.  —  S.-M. 

>  La  plus  grande  partie  de  ces  4  Selon  Génésîus ,  1.  3 ,  p.  97'  '^ 

détails  militaires  sont  tirés  de  Tliis-  le  procbmêrent  roi  ponr  lenoafe- 

torien  arabe   Elmacin,  Ufsi,  sarac.  1er  la  monarchie  persane.  BfltOiXtft 

p.  14a.  Voyes  aossi  la  Chronique  xvipûrrcuatv*  Âc  jx toutou xai TaUip- 

sfriafU0  d*Ab«a*liara4j  »  p.  x58.  -^  owv  xa(vi^o6ou  fOipia.  •—  S.-M. 
S.-M.                                           ^      '        . 


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(An  837.)  LIVRE   LXÎlX.  THÉOPHILE.  I  Sy 

répond  qu'il  est  content  de  sa  fidélité,  mais  qu'ildoit 
au  plus  tôt  se  tirer  *des  mains  des  rebelles  et  revenir  à 
Ja  cour/Théophobe  s'échappe  et  se  rrtid  auprès  du 
prince ,  qui  le  reçoit  avec  toutes  les  marques  de  bien- 
veillance '.  II  veut  même  en  sa  considération  pardon- 
ner aux  Perses ,  et  les  fait  assurer  d'une  pleine  et  en- 
tière amnistie  ;  mais  il  leur  ordonne  de  sortir  de  Sinope 
[et  d'Amastrie  ^,  qu'ils  ocOTpaient],  Déconcertés  par 
la  fuite  de  Théophobe ,  ils  obéissent  ;  on  les  disperse 
en  différentes  provinces,  deux  mille  dans  chacune, 
sous  des  officiers  grecs ,  qui  éclairaient  leurs  démarches 
et  rompaient  leur  concert.  On  les  incorpora  même  à 
d'autres  troupes,  ensorte  qu'en  peu  de  temps  ils  se 
naturalisèrent  et  oublièrent  jusqu'à  leur  origine.  Malgré 
le  bon  accueil  que  l'empereur  avait  fait  à  Théophobe, 
il  lui  resta  au  fond  du  cœur  un  aiguillon  de  jalousie 
qui  se  manifesta  au  moment  de  sa  mort ,  ainsi  que  nous 
le  verrons  dans  la  suite. 

La  destruction  de  Sozopétra  mit  le  khalife  en  fureur  :  ah  838. 
il  résolut  de  s'en  venger  sur  la  pairie  de  Théophile.  1^,8™;^^, 
C'était  Amorium,  où  était  né  Michêl-le-Bègue ,  ville  '^^'^^^i^J** 
alors  la  plus  grande ,  la  plus  peuplée  et  la  plus  riche  l«h>  gramm. 
de  l'Asie-Mineure^.  Il  fit  venir  des  troupes  dé  toutes  cedr.t^a,'p. 
les  provinces  de  son  empire  et  du  fond  rilême  de  l'A-  ^l^l **^^- 
fipîque  *.  Les  khalifes  n'avaient  assemblé  depuis  long-  '''^^^^^'^' 

»  Selon  la  chroBÎqiie  de  Syinéoo  1.  3 ,  p.  27.  —  S.-M. 
le  logothète,  p.   4aa,   ThéoplMle  ^  Selon  Ahon*l£indj ,  Chron ,  syr. 

ferait  yena  laî-méme  en  Paphlago-  p.  iSg,  elle  avait  remplacé  la  ville 

nie ,  ponr  arrêter  les  progrès  de  cette  d*Ancyre  dans  la  qualité  de  métro- 

r&elïîon  et  pour  empêcher  les  Perses  pôle  de  la  Galatie.  —  S.-M. 
de  se  f oindre  aux  Arabes.  On  voit  4  Êx  re  BaêuXwvia^  xal  4>civîxv)ç , 

la  même    chose  dans  la  chronique  xai  KciXriÇ   Supiaç,  naXaiortvTiç  re, 

de  George ,  p.  5aa.  —  S.-M.  xal  vnç  xare»  At€6v);.  Cont.  Theoph. 

>  On  apprend  ceci  de  Génésins ,  p.  78.  La  force  de  cette  armée,  selon 


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l38  HISTOIKB   DU   BAS'lMPlWB.  (An  83g.) 

Theoph.p.  temps  une  si  nombreuse  armée  '.  Pour  annoncer  sa 

78  et  seq. 

Symeon,  p.  résolution ,  il  fit  écrire  au  milieu  du  bouclier  de  chaque 
Georg.  p.   soldat  le  nom  d'Amorium^  L'année,  divisée  en  plu- 
Gene^  1.  3,  ^îcurs  corps  ^  pénétra  dans  le  pays  par  différents  défilés 
^'seqq.  ^^   ^Htre  Ics  moutagnes ,  et  prit  en  chemin  plusieurs  villes. 
cb-on^'afaV  ^  rcndcz-vous  général  était  à  Tarse.  Pour  arrêter  ce 
p-  ï^-     torrent,  Théophile  s'avança  jusqu'à  Dorylée,  à  trois 
hUt.  sar.'p.  journées  d'Amorium  *.  On  lui  conseillait  d'éviter  une 
Oratio'  in   action  avcc  Ics  Sarrasins ,  beaucoup  plus  forts  en  nom- 
«itotioni»  bre ,  d'évacuer  Amorium,  et  d'en  transporter  ailleurs 
A™af  c"^-  ï®s  habitants.  Il  rejeta  ce  conseil  comme  une  lâcheté 
BoUanïlicta  honteusc.  La  ville  était  bien  fortifiée  ;  il  dotma  ordre 
4a  martyr,  6  Jg  préparer  tout  ce  qui  était  nécessaire  pour  une  vi- 
goureuse [défense.  Il  y  envoya  de  bonnes  troupes  sous 
le  commandement  du  patrice  Aétius  ^,  auquel  il  joignit 
les  plus  braves  officiers  de  son  armée  ^.  Le  khalife,  ar- 
rivé à  Tarse,  résolut  de  combattre  Théophile  avant 
que  de  commencer  le  siège.  Il  détacha  cinquante  mille 
hommes,  entre  lesquels  étaient  dix  mille  Turcs  ^,  et 
mit  à  leur  tête  son  fils  Ouatlieq^  avec  [l'émir  de  Méli- 
tène,  à  cette  époque   le  plus  brave  et  le  plus  célèbre 


AbouUfaradj ,  dans  sa  (^ironique  sy»  4  Théodore  Cratère  dont  il  a  été 

riaque,  p.  iSg,  était  de  deox  cent  question  cî-dev.,  g  i5,  p.  ^07,  un 

vingt  mille  hommes.  —  S.-M.  nommé  Théophile  et  Baboatak.-— 

ï  Selon  Abon'lféda  II,   171,  il  se  S.-M. 
mit  en  marche  pour  cette  expédition  ^  Ces  Turcs,  dit  Génésius,  1.  3, 

le  a8  de  djonmady  i^**,  de  l'anaaS  p*  32,  étaient  venns  des  contrées 

deThégire,  le  27  $ivril  838. — S.-M.  les  plus  éloignées  vers  Torîent.  2ùv 

»  Tpiûv  iQ{Ai^pO{Aiûy  i70^^(i>  ITOU  ToTç  àvaToXixoTaTOtc  Twv   àv^pcxôv 

Toû     Afi^opiou      ^(xxEtp.tvov.     Cont.  Toupxcâv.  —  S.-M. 
Theoph,  p.  78.  —  S.-M.  6  Ou    plutôt  Haronn,    qui   fut 

3  II  était  commandant  du  thème  nommé   plus  tard  Wathek.  Voyex 

anatolique.  Çont.  Theoph.  p.  78.  ci-devant,  §  19,  p.  ix3,  liot.  3. — 

—S.-M.  S.-M. 


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(An  B3«.)  WVM   hXlX,  T0ÉOPHIZ.E.  iSq 

des  guerrier^  arabes  S  suivi  de  toute  Farinée  d'Ar-r 
méaie'',  conduite  par  Je  prince  des  prince»^,  qui  était 
alors  Seiiîtbal*,  le  chef  de  la  race  des  Bagratides^  et 
lesjtroupes  du  chef  arménieivdu  Yaspourakan  ^.  Cette 
puissance  r^onnaissait  pour  chef  réel  le  Turc  Aph^ 
sehia,  le  plus  illustre  et  le  plus  habile  des  généraux 
HUisulmans  7,  qui  avait  rendu  le  plus  signalé  des  ser«>- 
ifices  a^u  khalife,  par  l'entière  destruction  de  Valsek  et 
des  Perses  rebelles  qui  avaient  si  long-temps  menacé 


1  Ap.cp  Tnvixxûra  McXiTivriv  ^tt- 
wovxoç.  Gen«8. 1.  3,  p.  3a.  L*ëiDir  de 
MâUène ,  dont  il  «  déja^é  question 
ci-devant,  §  x4»  ?•  104,  not.  a^  se 
nommait  Omar.  On  apprend  d*El- 
maoin,  Hist,  sar,  p.  1 5i,  qu*il  s'ap- 
pelait Omar,  ^Is  d'Obaïd.  Je  crois 
qu'il  se  trompe.  Aboalïéda ,  yénn. 
musl.  U,  aog,  di^  qu'il  était  fils 
d'Abd-AU^h,  il  lui  donne  le  sur** 
nom  d^Jktaa ,  que  Ton  troare  aussi 
dans  Slmacin. —  S.-M. 

»   M«T«    WOÎonÇ    TJiç    il    JLpfMVlttV 

CTpaTtoç.  Cont.  Theoph.  p.  78.  — 
S..M. 

3  Tov  àpxovra  tûv  àp^ov^**^*  C'est 
ainsi  que  les  Grecs  appelaient  à 
cette  époque  le  c^ef  suprême  de 
r Arménie,  qui  reconnaissait  la  su- 
prématie du  kl^lif^.  On  rappelait , 
en  arménien,  Ischkhanats-Uchkhan, 
ce  qni  .sî|mfie  prince  des  princes, 
titre  qni  fut  chapgé  ensnite  en  celui 
è^ Ârkhaïts-arl^hiiîï  ^  qui  signifie  roi 
des  rois  y  et  que  les  Grecs  conti- 
nuèrent d'ezprifi^er  par  celqi  d*â[p- 
Xwv  T$>v  dpxoVr(i>v.  —  S.-M, 

4  Sembath,  surnommé  Kkosdo- 
vançgh  011  leCor^esseur,  était,  depuis 
Van  890,  chef  de  la  race  des  Pagra- 
tides  et  de^  pfwces  de  TArménie. 
On  lui  donnait,  selon  Tosage  des 


Arabes  dont  il  était  allié ,  le  surnom 
à*j4bou*labas,  c'est-à-dire /?ère  d'Â- 
bas,  surnom  d'nn  de  ses  fils. 

5  Toû  BioitrapaxaviTou.  C'est  ainsi 
que  le  désigne  Génésius,  1.  3,  p.  3a. 
—  S.-M. 

^  Le  prince  arménien  qui  com- 
mandait à  cette  époque  dans  le  Vait- 
pourakan ,  était  Aschot,  chef  de  cette 
>  race  des  Ardaronniens»  issue  de  Tan- 
cien  roi  d'Assyrie  Sennachérîb ,  fa- 
mille dont  j*ai  en  bien  souvent  l'oc- 
casion de  parler  dans  ces  notea.  — 
S.-M. 

7  Syméon  le  logothète,  Chron. 
p:  4a3,  dit  que  le  khalife  donna  le 
commandement  de  cette  armée  à 
Goundeï,  général  illustre  chea  les 
Arabes.  Ae(^oxtûç  aùrctç  xat  tov  Tow- 
^vn  ôipxow*  ôvojAacTWTftTov  5vt«  iv 
ToT(  À'^apiivclc.  Ce  général  est  appelé 
Soudai X  Sou^ocn ,  dans  la  chronique 
de  George,  p.  5a3.  On  lit  Soudem, 
Zou^à(i.,  dans  la  chronique  de  Léon 
le  grammairien,  p.  454*  C'est  ce  gé- 
néral que  les  historiens  arabes  ap- 
pellent Afrchin.  Son  nom ,  comme 
ou  le  Toit ,  nous  a  été  tranawif  bien 
diversement  par  les  Grecs  qui  Font 
tous  altéré.  J'ai  fait  disparaître  ce 
nom  corrompu  du  texte  de  Lehean 
qpi  le  nomme  »  je  ne  aaia  pourquoi , 


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l4o  HISTOIRE   DO   BAS-iraiPIftE.  (An  S38.) 

Fexistence  de  l'empire  arabe  '.  Cette  armée  fermait  la 
droite  de  l'armée  musulmane.  Aschnas,  autre  général 
habile,  aussi  de  race  turque  ^  ,  commandait  la  gauche. 
Le  khalife  s'était  réservé  le  tentre,  qui  marchait  à  quel- 
que distance  ^  ].  Ouatheq  [et  Aphschin]  allèrent  cam- 
per à  Dazymène  ^,  à  l'entrée  de  la  Phrygie,[ après 
avoir  conquis  Nyssa  dans  la  Cappadoce  et  Ancyre  en 
Galatie,  ville  qui  était  alors  en  état  de  décadence  ^]. 
B^r"d  L'empereur  se  mit  aussi  en  marche  avec  son  armée, 
Dâzymène.  composéc  en  grande  partie  dès  soldats  perses  ^  qu'il 
avait  raissemblés  7.  A  la  vue  du  camp  ennemi,  il  monte 
sur  une  éminence  avec  ses  principaux  officiers  ;  il  voit 
que  les  Sarrasins  sont  supérieurs  en  nombre  ;  il  tient 
conseil  sur  le  parti  qu'il  doit  prendre.  Manuel  et  Théo* 
phobe  sont  d'avis  d'attaquer  pendant  la  nuf t  ;  ils  sont 
contredits  par  les  autres  officiers  et  par  l'empereur 
même,  qui  n'approuvait  ^as  les  combats  nocturnes. 
Le  lendemain,  dès  le  point  du  jour,  les  deux  armées  se 
rangent  en  bataille.  On  combattit  d'abord  avec  une 
ardeur  égale.  Enfin ,  les  troupes  de  la  maison  de  l'em- 


Soudès\  et  le  qualifie  émir  de  la  pe-  par  Aboa'lféda  |  II ,  171.  —  S.-M. 

tite  Arménie,  ce  qai  èst.sans  fonde-  4  KaTa  tôv  Aa(^v)(i.ova  irpooiêoXev. 

ment.  —  S.-M.  .  Cont.  Theoph.  p.  78.  On  lit  AaÇ6|iii- 

'  A&chin  on  Aphschin,    fils  de  vov   dans  Gédrénus ,   t.  a ,  p.  53o. 

Kavas,  samonimé  Haïder,  c'est-à-  — S.-M. 

dire /eiS/o/i.Il  était  issn  de  la  race  des  &  Ceci  est  tiré  de  la    chronique 

princes  tnrcs  de  la  Trans-Oziane.  syriaque    d*Abou*Ifanidj ,    p.    iSg. 

Voyez  cî-dev.  p;  iSg,  not.  7,  —  — S. -M 

S.-M.  ^  Ëm  ts  ntpo&v  )cal  rtbv  auroedy, 

•  Ce  général  était   un  afifranchî  xal  tûv  irpôc  t6v  wnWfjsira.  ^Xiov  ouv- 

du  khalife  qui  le  créa  en  Tan  aa6  de  iffrajxsvcdv.  Theoph.  p.  79.  —  S.-M. 

l'hégire,  84o  de  J.-C,  gonvemenr  7  Théophile   éuit  campé  en  un 

de  rÉgypte.  Il  mourut  en  280(844  lien   nommé  y^/i<en.  Rarà  tov  Iv- 

de  J,-C.)  —  S.-M.-  Çtiv  out©  x**po^  xaXo6|4,8vov.   Cont. 

^  €e  4étail  intéressant  est  donné  Theoph.  p.  79.  —  S.-M. 


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(A»83S.)  LIVRE  LXIX.  THEOPHILE.  l4l 

pereur  ehargèreot  avec  tant  de  vigueui;  que  les  Sarra- 
sins plièrent  et  tournèrent  le  dos  '.  Les  dix  mille  Turcs 
postés  sur  les  ailes  laisseàt  les  vainqueurs  s'acharner 
à  la  poursuite  du  centre ,  et  lorsqu'ils  les  voient  en- 
engagés  au  milieu  d'eux ,  ils  font  tomber  sur  eux  une 
grêle  de  flèches  qui  abattent  hommes  et  chevaux.  Cette 
nation  robuste,  et  très-adroite  à  tirer  de  l'arc,  faisait 
usage  de  flèches  presque  aussi  fortes  que  des  javelots  ; 
et ,  tirant  alors  sur  des  escadrons  serrés  qui  sa  pressaient 
à  la  poursuite,  aucun  coup  ne  portait  à  faux.  Les  Grecs, 
accablés  deces  décharges  meurtrières,  prennent  la  fuite 
à  leur  tour,  et  abandonnent  l'empereur,  qui,  emporté 
par  sa  valeur  naturelle,  s  était  lui-même  engagé  au 
nùUeu  des  onnemis.  Il  ne  resta  autour  de  sa  personne 
que  les  officiers  de  ses  gardes,  et  les  Perses  qui  combat- 
taient avec  courage  pour  le  défendre.  Us  auraient 
enfin  succombé  ^  si  la  nuit  ne  fût  survenue,  avec  une 
pluie  qui  mit  les  arcs  des  Turcs  hors  d'état  de  servir. 
A  la  &veur  de  la  nuit,  ils  sauvèrent  l'empereur  et  se 
i«ljirèrei|it/dans  le  camp,  qu!ils  trouvèrent  abandonné. 
Tjbépphilej  courut  un  nouveau  danger.  Ces  Pertes^ 
qui. venaient  de  défendre  si  vaillamment  l'empereur,  ,,  ^"^t 

\  lempercnr. 

£>nn^r|Hit  le  complot  de  le  livrer  aux  Sarrasins,  et 
d'acheter  à  ce  prix  la  liberté  de  retourner  dans  leur 
patrie.  Manuel ,  fai^nt  la  ronde  des  sentinelles  au  mir 
liepidi?  la  nuit,  les  entendit  conférer,  avec  l'ennemi  :  il 
court  avertir  l'empereur ,  et  l'exhorte  à  fuir  sans  dif- 
férer. Théophile  faisait  moins  de  tas  de  sa  propre  vie 
que  de  celle  de  ses  oflSciers  et  derses  soldats  :  Et  que 

I  Les  mosnltniais perdirent  en  cette      Aboalféda ,  Chronique  syr,  p.  1 59 . 
ocoition  trois  mille  hommes ,  selon      — S. -M. 


zxxrnz. 
Danger  que 


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14^  HlSTOmB   DU   BAS*SMI<IAfe^  (An  839.)  ' 

deviendront^  dit-îl,  ces  braves  gens  qui  m'ont  dé* 
fendu  avec  tant  de  courage  ?  Pensez  à  vous  ^  pHiîc^^ 
répartit  JVf anuel  ;  Dieu  et  leur  valeur  les  tnettronl 
en  sûretés  En  même  temps  il  eattaîne  Tétop^frciur  et 
le  sauTe  pour  ia  seconde  fois.  Théophile  arrive  à  toute 
bride  à  Chiltococotiie  %  où  s'étaient  rendus  ceux  qui 
avaient  fax  de  la  bataille.  A  la  vue  de  l'empereur,  ils 
vont  au-devant  de  lui ,  et ,  s'écriant  qu'ils  ne  méritent 
pas  de  vivre  après  avoir  eu  la  lâehété  d'abandonner 
leur  princey  ils  tirent  leurs  épées,  et  en  appuyant  la 
pointe  contre  kur  poitrine  ils  attendent  d'un  coup- 
d'oeil  de  l'empereur  l'ordre  de  se  percer  eot-nïêtaes. 
Théophile^  touché  jusqu'aux  larmes  :  ^/r^fejs ,' leur  dit- 
il  )  Dieu  m'a  sauvé t^  il  *mut  aussi  que  Jë^^ôus  sûtU^. 
Cette  trahison  des  Perses  doitif^a'^»U7t  ennemis  de-Thé^^ 
phobe  une  nouvelle  occasioii  de  le  calomnier,  il^iai 
imputèrent  faussement  d'être  t^aiiteùr  ^èf et  de  !éur 
perfidie*  '  i;        .. 

XXXIX.  Le  khal^,  apràsr  là  victoire  de.  son  fits,  liÀarcha 
d'j^rium.  ^w  Amoriute',  et  tous  deqx  ébsémbfe  ierrivèéëiitMlë'^ 
vaat  la -place  au  comméttcemiéDt  dû  niéiis  '^^il^fii^  ^ 
Apre»  s^être  l^etrafichés/ils  efûvironnèrent  te  Vlîte  d^ttw 
fossé  profond  et  formèrent  les  attaque^;  Les  ^Miëà^txi. 
raient*  sans*  oirsfife  pour  abattre  deux  qui  se  mèMraiént 
èm  la  muraille,  et  les  Sâfrilasins  élisaient  'jdûer  toutes 
leurs  m«ohines;  La -garnison  dé  son  coté  se 'déÂhtfilU 
grec  acdeWy  foudroyait  ou  brûlait  les  baftcfi^ies  'dès 
assiégeants^  Cependant  Théophile,  qui  avait  ^egagfté 

X  Ilpbç   T^   XL\tox(»c(ù[x.cv.    Cont.       273,  que  le  siège  commença  le  6  de 
Theoph.  p.  80.  —  S.-M.  ramadan  223,  00  le  i**  aooi  83S. 

*  On  apprend  d'AbouIféda,  II,      — S.-M. 


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(A»  838.)  LI^&S   tXi^^  «TââdPliltÈ.  143: 

Dorylée  ',  €6saya  de  ftanyer  la  ville  par  nûe  négodiH 
tîoa.  Il  envoi^a  au  khalife  des  députés  chargés  de  pré* 
sents  et  de  promesses  pour  l'engager  à  lever  le  siégé. 
Le  khalife,  que  la  ruine  de  sa  patrie  rendait  impla- 
cable ,  reçoit  ces  députés  avec  un  mépris  insultant;  il 
traite  l'empereur  de  poltron  et  de  perfide;  il  les  .fait 
mettre  dans  les  fers  pour  y  attendre  la  destruction  de 
leur  Yflle,  et  pres^  le  siége.avec  plus  de  chaleur  qu'au- 
paravant. Il  partage  so^  armée  en  plusieurs  corps,  qui, 
se  relevant  les  utts  les  autres,  devaient  épuiser  les 
forces  des  assiégés  par  la  continuité  des  attaques.  Les 
assiégea  soutenaient  avec  courage  toutes  ces  fatigues  ; 
et  les  âuTàsins^  qui  perdaient  grand  nombre  d^  sol- 
dats, se  seraient  lassés  les  prenii^s^  si  une  trahison  né 
fut  venue  à  leur  secours.  Un  habitait ,  nommé  Badicès  '; 
ayaBt  eu  querelle  avec  le  commandant,  avertit  les 
San^^iiift,  par  une  lettre  attachée  à  une  flèche,  qu'ils 
pfendraieitt  aiiémeut  la  ville  s'ils  plantaient  fesôaiade 
à  l'endrmt  ^u'il  leur  indiquait  :  ce  qui  fut  exécuté  là 
uuk  suivante.  Ainsi  Amorium,  bien  fortifiée^  dé£èiï'> 
âtiepar  utiegamiaôn  nombreuse  et  pleine  de  courage, 
ne  tint  que  treize  jours  ^.  Les  Sarrasins  dans  tetft 
première  fureur,  firent  un  horrible  carnage;  la  plus 
j^ude  partie  des  habitants  étaient  éé^k  massacrés, 

t  Selon  SéiMa» ,  1.  3 ,  p.  33 ,  Il  était  aa  hottioXIla  lio  dii  TpèUfie  , 

s*é^it  retiré  es^re  Dorylée  et  Ny-  ce  qui  n'est  guère  TraMèmbUble.  Se^ 

cee.  —  S.-M.  Ion   Aboa*Uaradj,   Chronl  syr.   p. 

«  BoîdàMèê  âàtw  le  oontiniiatevr  i6a,  qui  l'appelle  Boudin ,  c'était 

de  Thé«phane,  p.  8i«  Syméon  le  atf  contniire  un  des  prinoîpaiiz  de 

logdtbète,  Chron,^  p.  493,  nomme  la  ville.  — S.-M. 

aussi    on     «ertain     Mamcophanès  3  Selon  AbWl£éda ,  H,  173^,  le 

comme  ayant    contribné   à    livrer  siège  dura  cinquante-cinq  jours.  < — 

Amocium  aux  Arabes.  Selon  le  con-  S.-M. 
tinuatenr  de  Tbéophane,  Boïditzès, 


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l44  HISTOIRE  DU   BAS-KMPIRE.  (An  gSft.) 

lorsque  Mutasem  ordonna  d'épargner  les  autres  et  de 
les  mettre  aux  fers.  Pour  consommer  sa  vengeajace,  il 
fit  mettre  le  feu  aux  édifices  et  ne  laissa  qu'un  mon- 
ceau de  cendres  et  de  ruines  à  la  place  de  la  ville  alors 
la  plus  florissante  de  l'Orient.  Les  ambassadeurs  de 
Théophile  avaient  été  jusqu'alors  retenus  dans  les  fers; 
il  les  fit  conduire  par  toute  la  ville  pour  les  rendre 
spectateurs  du  carnage  et  jde  l'incendie  ;  et  les  ayant 
ensuite  fait  venir  devant  lui  :  Jlllez  dire  à  votre 
maître f  leur  dit-il,  que  je  le  tiens  quitte  de  ce  quil 
me  deifait  pour  Sozopétra. 
Aw  839.  Il  reprit  ensuite  la  route  de  Bagdad,  traînant,  à  sa 
LeSiiife  suite  trente  mille  prisonniers ,  entre  lesquels  étaient 
rachaTdes  quarante  officiers  de  la  garnison,  avec  le  commandant 
pmonniers.  j^^tius  ct  SOU  licuteuant  Théodorc  Cratère.  Us  çs- 
fuyaient  déjà  les  traitements  les  plus  durs,  et  s'atten- 
daient à  des  cruautés  encore  plus  barbares.  Mais ,  avant 
même  que  d'arriver  à  Bagdad,  il  firent  seatir  ^  leurs 
vainqueurs  que  la  captivité  n'avait  pas  éteint  leur  cou- 
lage, L'armée  musulmane  mourant  de  spif  au  passage 
d'une. vallée,  les  prisonniers,,  qui  ne  sentaient. que.  la 
perte  de  leur  liberté ,  profitant  du  découragement  d^ 
ennemis,  rompent  leurs  fers,  arrachent  les  armés  des 
mains  des  Sarrasins,  qui  les  soutenaiontà  peine,  en 
tuent  un  g^d  nombre,  et  se  seraient  échappés ,  si 
Mutasem  ne^s  eût  Êiit  promptement  envelopper.  Ils 
furent  désarmés  et  remis  dans  les  fers;  on  en  choisit 
six  mille  auxquels  on  trancha  la  tête.  Mutasem  reçut 
bientôt  une  nouvelle  ambassade  de  Théophile.  [Le  pa- 
trice  Basile,  gouverneur  du  thème  de  Qharsiane  %  qui  en 


*  Voyez  ci-dev.  §  i5,p.  107,  not.  ». —  S.-M. 


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(hn  839.)  Ul^RE   LXIX;  THIOPBCLE.  1^5 

était  le  chef,  était  diargé  de  lui  demander  la  ^ivrance 
du  pa  trice  Âétius  ^  et  de  lui  offrir  deux  mille  quatre  cents 
livres  d'or  pour  le  rachat  des  prisonniers,  entre  lesquels 
se  trouvaient  plusieurs  parentsde  l'empereur.  [: Il  offiât 
aqssi  de  rendre  les  prisonniers  arabes].  Le  khalife  traita 
ces  députés  avec  le  mépris  le  plus  outrageant  :  ils  sei- 
vir^it  de  risée  à  toute  sa  cour.  [Mutasem  demandait, 
outre  la' liberté  de  tous  les  captifs,  qu'on  lui  remît ^e 
cœur  de  Nazar,  partisan  de  Babek,  qui  s'était  réfugié 
auprès  de  l'empereur  *.  Pour  comble  d'insulte,  il  vou- 
lait  qu'on    lui   livrât* le  général  Manuel, /à   qui.il 
n'avait  pu  pardonner  sa  fuite ^.]  Enfin,  chargés . d'in- 
sultes et  d'opprobres,  il  les  congédia  en  leur  disant  : 
«  Votre  maître  m'offre  beaucoup  moins  qu'il  ne  m'en 
ce  a  coûté  pour  rabattre  son  orgueil.  J'admire  sa  folie: 
.  «f  il  a  prodigué  cent,  mille  livres  d'or  par  unte  vanité 
a  puérile,  dans  cette  ridicule  ambassade  qui  semait  l'or 
«  comme  la  poussière  ;  et  il  n'estime  que  deux  mille  li- 
<c  vres  un  si  grand  nombre  de  ses  plus  braves  sujets, 
<K  et  même  de  ses  proches.  »  Il  parlait  de  l'ambassade 
fastueuse  de  Jean  Lécanomante.  «  Qu'il  sache,  ajouta- 
a.t-il,  qu'ils  ne  sortiront  pas  de  mes  mains,  quand, il 
a  me  donnerait  pour  chacun  d'eux  ce  qu'il  m'offre  pour 
ce  tous.  »  Le  rapport  de  ces  députés  pénétra  Théophile 
de  la  plus  vive  douleur  :.il  passa  plusieurs  jours  dans 
la  sohtude  et  presque  sans  nourriture  ;  sentant  ses  en- 
trailles embrasées  d'une  excessive  chaleur,  il  ne  voulait 

^  \ojez  ci-dey.  §36,    p.   i38,  ses  compagnons,  et  qa'«Qs*aitacliMit 

ooi.  3. —  S.-M.  aa  service  de  Tempire  il  avait  en»- 

*   On    apprend    d*Aboa*lfatadj ,  brassé  la.religion  clirétienne. — S.-M^ 
Chron.  syr,  p.  i58,  qne  ce  chef  s'c-  3  Voyes  ci-devant,  S  ao,  p.  i|!2. 

tait  réfogié  auprès  de   Théophile ,  —  S.-M.  .     i    -     l 

en  836  ,  avec  un  grand  nombre  de 

Tome  XIII.  lO 

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l46  mSTOIRB   DU   BAS-^MVmZ.  (As  gag.) 

pour  boiss^m  que  de  l'eau  de  neige,  qui  loi  causa  une 
dyssenterie  dont  il  mouFut  quelques  mois  après.  Mais 
les  douleurs  qu'il  souffrait  le  tourmentaient  moins  en- 
core que  le  regret  de  la  perte  d'Amorium.  Plus  occupé 
de  sa  vengeance  que  de  sa  santé^  il  env^a  au  roi  de 
France  [  Louis4e<Débonnaire  '  ]  le  patrîee  Théodose  ^ 
[et  le  grand-éeuyer  Théophaniusf],rpour  lui  demander 
yn  secours  de  troupes.  Il  ne  comptait  plus  sur  la  fidé- 
lité de  ses  sujets,  persuadé  que  tous  les  malheurs  qu'il 
avait  essuyés  dans  la. guevre  étaient  plutôt ll'efiet  de  la 
trahison  que 'de  la  ^faiblesse. 'M  priait  > aussi  le  roi  de 
favoriser  ses  efïbrts  en  Asie  par  une  ^puissante  .diirer- 
sion  en  Afrique.  :  Les  ambassadeurs  furent  bien  reças 
à  ta  coût  de  France.  [Ik  présentèrent  leurs  lettres.à 
Lûuis^le-Débonnaite'le  iQ^maide  l'an  639*^,«daiis  son 
palais  d'Ingelheim  près  déMayence.^]  Le^roi  paraissait 
disposé  à  secourir  Théophile  ;  mais  la  mort  de  Théodosej 
et  peu*  de  temps '9près>  celle  de'l'empereur  ^/firent  avx>r- 


Iltcopfa.  p.  S3.  Oa  doit'  reman]oer 
que  les  auteors  grecs  afFectent  de 
donner  à  reinperear'Loaîs-le-SinipIe, 
le  titre  de  roi ,  en  employant ,  même 
eo  grec,  le  terme  latin  rex,  o  ^liÇ. 

—  S.-M. 

>  Théodose  Bhboat^c^  o-Baêou- 
tÇuco^.  Cont.  Theoph.^p.  83.  Les 
Annales  de  Saint  -  Bertin  ^  j4nn, 
83l9,  qui  parlent  de'  cet  ambassa'- 
deur,  lui  donnent  mal  à  propos  le 
titre  d'évéque  de  Cba^cédoine,  Ckiil- 
<edonen$is  metropoikanusfpisnopus. 

—  S.-M. 

?  Spathtrias  Tbeophtnicw.  urinai. 
Bertin,  ann.  839.  — S.-M. 

4  Cette  date ,  donnée  par  les  An- 


nales de  Saint-Bèrtfn ,  ^tifn.'SSg, 
•iait  bien  voir  lat  jtutessa  des  ndsoBs 
qni  ni*ont  fait  réformer-tonte  la  chro- 
nologie de  cette  partie  de  l'histoire 
de-Théophfle.  Lebeau^  oontrèi  toute 
raison,  place  en  Tan  84l>  cette  am- 
bassade qu'il  est  impossible  de  mettre 
à  une  antre  époque  qu*en  Tan  SS9. 
Comme,  de  Taveu.  des  auteors  grcos, 
elle  fut  envoyée  après  la  priaé  d*A* 
'morinm,  il  fiiùt  'donc  ,*  comme  ^ 
Arabes,  mettre  en  Tan  838  la  con- 
qaéte  de  cette  ville.  -^S<(M. 

^'  Ingelheim  était  un  palais  swr  le 
fleuve,  «ntre  Bingen  et  Mayence.  — 
S..M. 

^  L'equpertur  Loaii  nowrat  1«JK> 
juin  840.  -^-rS^'M. 


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ter  tooâices.prpjeljs^  [Théophile, voulut  rj^fî^aerjCesnér 
jgoQÎ^iqns^ayec  spn  <6Is  I^pth^ire ,  à  %v(\  jl  qflfrit  une 
de  ^^es  ,fille;s  jppur  ^le  roi  jLou^s  ,sqji  .^Is  ' .  L?t  ,Biçin.^e 
]fh4ophile,rpinpit.çes.p9pYç}|fi55.f)i^ve^  fl^i  forç/jt 

ç^prÂ5^ pl^s^tard ^saps.pjup^xje.^pcçès  ?.] 
^qt^sjçpji  ^yajt,fpit,^aû^  a»  840. 

Siyt%i^*^?^^l^ifr°^^9^^♦n^F^.1  ç^  ^:f^tti?  qu:ii.^t  ^^^^^e..^^^ 

J^;ii|gpor|^r  li*  |J.^a^APtÇ-dçu^x.  qfïîqiçgcs  *.  II  ,)jç^  ançajt    chrétiens. 

.|^i)s,  .-çt^ppur  Jjçs.eipplpyer  en^suite  dans , ses  jEirinié^.  ^'*53;*'P 
Les  deux  p][jjs  çonsidérafWçs  étaiçpt le. pa triée  ^étius     Contin. 
Çt  ^^je^T^ji^dpre  Cratère ^gjUis^v^j  Cir-  8i,sv«. 

que  le  Sarrasin  fanfaron  dont  nous  avons  parlé.  On    421,424!*' 
les.  enferma  tous  ensemrbie ,  les  fers  aux  pieds,  dans  un     ^5^3.  ^' 
<^cJiot^né^eul.  Là  /privés, <^e^^^       conso^tipn ,  sans  ^^J^^^,' 
lumière ,  sans  lit  f  $AAS.iuitne  nourriture  .que  du  pain  et  ^"^^^Jj  """^ 
dei'eau,  ils  ne  voyaient  que  leurs, geôliers  etjeqrs  Fieury.hist. 

'  .•'*    .  ^  1     '    o  •      \     '        cccle».  1. 48, 

rjg^"?^?-    QP   PWfi?e|:t;4#t .  sei^ljenxént  queJquiîfojis  .a  .un  wt.  aS,  a6 
d'^entre  ^ux  li'aller  mendier  du  pain  dansla  ville,  en- 
^çhaîné,jet^efcpr]té  die,?p)jdats.',Qn  Içs  tçn^^  par.tQAïte 
«sorte  de.v<»i6s:âl  résistèrent  aux  menaces,  aux  pro- 
messes, aâfc  séducûoiis^es.dpçteijrs  jnuçulnîiaqs.  Bgj- 


f     5?^3?%jP-»Wi?9- —  SfL^v.  i,ftTOà^«Je.pÇRt''e.4M,goîiygrii«»fiat 

I      flçi,.  ï.^-7-j  ^iiJil.-     .    •..  .  i^flQrff^l^iMitffpcAfttip^.et.'Çj^ço- 

10. 


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l48  HISTOIRE   DIT   BAS-EMPIRE.  (An  840.) 

dîzès,  qui  s'était  fait  maliométan,  fut  employé  pour  les 
gagner  et  rejeté  avec  horreur.  On  espéra  que  la  lon- 
gueur de  leurs  souffrances  abattrait  enfin  leur  courage  ; 
on  les  tint  sept  anâ  enfermés  dans  cet  horrible  cachot , 
où  la  main  de  Dieu  les  conserva  tous  au  milieu  dès 
incommodités  les  plus  capables  non-seulement  d'af- 
faibHr,  mais  même  de  détruire  la  nature.  Mutàsetn 
mourût  dès  le  mois  de  janvier  [de  l'an  84^  '  ];  son  fils 
Ouatheq  *  ne  régna  pas  six  ans  entiers  ^;  ainsi  ces  gé- 
néreux athlètes  ne  furent  tirés  de  leur  prisoà,  pour  subir 
le  dernier  supplice,  qu'au  commencement  du  règne  de 
Motaouâkkel  *,  frère  et  successeur  d'Ouatheq. 
îï'Sffidws!      Eûfin,  l'an  848 ,  le  5  [mars  ^] ,  veille  du  jour  mar- 


X  Lebeaa  dÎMit  suivant^  parce 
qd*n  plaçait  la  date  de  la  prise  d*A- 
moriâm  en  Tan  S41 ,  en  quoi  il  m 
trcttnpait  de  tcpis  années  ,  comme  je 
Tai  fait  yoir  ci-dev.  §  14,  p.  104, 
net.  i«  Les  autears  ^àbes  nons  ap- 
prennent, qne  le  Uialife  Mntastom 
mourut  un  jeudi  18  de  réby  i^**,  de 
ï*an  «ag  del%égire,  qui  répond  an 
5  janvier  84a.  —  S.-M. 

*  Abon-Djaafar  Haroun  surnom- 
mé Watbek-billah.   Voyez    ci-dev.  ' 
S  19,  p.  II 3,  noi.  3. — S.-M. 

3  Son  règne  fut  de  cinq  ans  neut 
mois  et  un  jour ,  selon  le  calcul  des 
Arabes.  II  mourut  le  14  de  disonr*- 
Ibidjah ,  de  l'an  ^4a  'àe  l'hégire ,  et 
non  241,  comme  on  lit  par  erreur 
àxDs'&mdtcin^Bisè, sarac,  p.  146  et 
147.  Ce  jour  correspond  au'ti  août 
847,  de  J.-C.  Il  n*étaîlli^àgé  que  de 
trente-deux  ans.  —  S.-M.  -  ' 

4  Aboulfadhl  Djaafar,  surnom- 
mé  Mùtawûkkel-^lu-aUah  xm  Jfe- 

'•tawakkiUBîUah,  c'esb«-dfi«  qui'  se 


confie  en  Dieu.  Il  était  âgé  de  vingt- 
six  ans  lorsqu*on  le  proclama  khalife. 
—  S.-M.  ». 

^  Et  non  jMAi'y  éomne  on  liMÛt 
dans  Lebeau.  Cest  bien  le  cinq  mars 

'  qu'on  lit  dans  le  texte  original  ;  rh 
iré(i.imiv  Tovi  Ma^T^ou  fi.v)voc.  Cent. 
Theoph.  p.  8a.  D'ailleurs ,  c*est  bien 
le  6  mars  que  l'Église  célèbre  U' mé- 
moire de  ces  .maxtyrs.  Je  n&'  Ixois 
pas  qu'il  faille  placw  ce  martyre  ot 
Tan  848 ,  sous  le  règne  de  Motawak- 
kel  ;  an  moins  rien  ne  lUndiqne  dans 
les  sources  originales.  Je  croîs  que 
c'est  plutôt  en  l'an  845,  ^ons  MTa- 
thek,  comme  le  marque  Fleory  dans 
son  Histoire  eeclésiasdqite ,  c' 489 
S  a6  ,  ouvrage  qui  a  été  consulté  et 
^uivi  par  Lebéau ,  qui  parait  pour 
cet  objet  privé  l'avoir  lu  très-rapi- 
dement. Les  martyrs  ;  interrogés  le 
jour  de  leur  exécution  sur  ia  dorée 
de  leur  captivité ,  répondirent  qu'elle 
durait  depuis  sept  années,   tef  Tt 

"fTOç'âicoxptO'cVt;,  &c  l6^o(iLov,  Cônt. 


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(AnS4o.)  UVRB   LXIX*  THÉOPHILE.  l49 

que  pour  réexécution,  Badizès  viat  les  avertir,  qu'ils 
mourraient  le  lendemain  s'ils  ne.  se  rendaient  au  désir 
du  khalife;  il  s'avisa  même  de  les  exhorter  à  suivre  son 
exemple  :  Quil  n  était  question  que  de  se  laisser 
circoncire,  cérémonie  par  eUe-inême  indifférente , 
et  dflUerà  la  mosquée,  où  ils  pourraient  sans  scru- 
p^le  jinir  leurs  prières  h  celles  des  Musulmans ,  qui 
adoraient  comme  eux  le  vrai  Dieu\  en  sorte  que 
soufi  un  extérieur  mahométan  ils  consers^eraient  une 
dme„chrétienne.  Ils  renvoyèrent  avec  indignation  ce 
misérable  suborneur;  et,  rendant  grâces  à  Dieu  de 
leur  prochaine  délivrance,  ils  passèrent  la  nuit  à  chan-* 
ter  des  hymnes.  Le  matin ,  un,  magistrat  musulman 
vint  à  la  prison  et  les  fit  sortir  pour  les  conduire  au 
bopd  du  fleuve.  Il  tenta  encore  de  pervertir  Cratère , 
pemiadé  que  son  exemple  entraînerait  les  autres;  mais 
il  sentit  qu'il  n'avait  rien  à  espérer  de  cette  ame  in-* 
yincibie.  Les  Musulmans,  accourus  en  gn^nd  nombre 
à. ce  spectacle,  coi^templaient  avec  étonnement  la  con- 
ten^pce  tranquille  et  assurée  de  ces  guerriers ,  qui  al- 
lq|i^t  .à  la  mort  comme  à  un  triomphe»  Sur  leur 
^^\  brillait  déjà  un  rayon  de  la  gloire  céleste;  la 
j^çi^  ^t  l'effroi  avaient  passé  sur  le  visage  des  s.pec- 
tat)^ui;s^,Pçqdant  que  les  bourreaux  éthiopiens  prépa- 
r^eat  leurs  épées.  Cratère,  queja  Providence  semblait 
avoir  donné  pour  chef  à  ses  compagnons  dans  cette 
gj|<](riwse  journée ,  craignant  que  le  patrice  Aétius  ne 
^'«tt^drit  en  voyant  couler  le  sang  de  ses  amis,  &'ap- 

Ibeopb.  p.  8s,  ce  qui,  en  partant  aéqnence  de  la  fausse  date  qn'il  • 

de  W  prise  d^Amorium,  ,en  838,  adoptée  pour  Tcpoqae  de  la  prisé 

DéiM   eôiiddit  k  Vàn  8^51  La  date  d'Amortnin.  Voyez  ci-devant,  §  1 4, 

%kPt  ^OJOfk^P  ÇW  Lebeag,est  une  con-  p.  1 04,  not.  i . — ^S.-M . 


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phïélie  âè  h&i  :^eigh'ei£r  ;  ttkî  ditH',  vôUs  a^é£  tâû- 
fours  rhdifthé  àiiotfétëié^  votre  tcthg  eiiMïh  i)èHït 
vous  appellent  le  prèniier  à  ùu'eWf  Ut  palmé  au 
màrtyté:  Non^  hiî  ^épondKt  Aétïù^,  ai  foi  d^t  dé 
vous  càtnthànder  ènù6/e ,  marèfiêi  et  dorifièz^fiâÛ^ 
rêxerriplè:  Ctatèfé,  s'éfeirit  fecotnitfàn<ïë' ^  DléÙ,V6* 
f^edik  an  coup  môttef,  et  fe  ré^ut'^  â^'ec  joie.  If  Aiir^ 
strîVi  (FAiétiû^  e^  de  totfté;  là  trôtipe  y  ^î ,  s'âVàtt^ti^ 
^r  miré  file  atr-déVa'tit  Irfâiôrt,  cHacoil  seloà  T&rSS^ 
c(vlS  ôccupaSt  daiis  le  servteé  tàîIïtaWe ,  Ôt  tfènAfèr'jJkV 
sa  coriskdcé  rtfà-ëpide  ÎW  niàgi^râï  ^  pWsîcfa{#  f 
rèiéciitiônv  Lërfrs'  coi^pfe  ftiréii^  fétéaf  da*A^  ïé  tfèu^^ 
Gèst  événement  à  jaîtiais  métrlàtàhtè^  et  ôohsa^ci'ë' daii'^ 
rég  fôstés'dè  rÈgïîsé,  fdi!  smVî  dTuiii  dutre  atï^iferàrf 
ne  ^attendatt  pWs  eli  qtrf  né  Mrite'  pas  lïfôîjii  d^èirt' 
féèii'âriq'ué.  Au  réfcît  d'dïié  ttiori  sï  ^ériéi^ô'ùsë ,  lé  kMïfi^*,; 
fdi'cé  d'admirer  ces'  fcrâves  gùferi^îèrâ,  ^èWît  vA  vtf 
fe^ël  de  n'èîvoir  piaf  épargné  Ifettr  Vie;  et  ^oyâ'ùt  de- 
va4ft  ïdi  fe  reiïégât  Sadizè^  :  Ce  trHttf'é,  dît4t,'  sAhi 
àdûik  aussi  fhamais  nitiSùMàh  i^ûil  à  été  mdÛ0âié 
chrétien  ;  n'est  pài  digne  dé  hUr  sith'Qivrè:  Au^èîtôt 
i!  lé  fait  saisir ,  conduire  et  décap'itëf^  au  itifihfe  llëtf. 
Le  corps  est  jeté  àtnxsÈ  lé  Tigré  entrè  ceux  des  mârtyrifw 
Cbmriiént  la  tràhîstih  orsé-t-6He  ë'Wco'ré  se  prbtltihfe 
après  làTit  d'eieirlpfeè  dé  fraîtrès  ptliris  f/àr  cém:  tàèUttè 
qu'ils  brit  serais  ?  ' 

AK  841.        j^  eëpéndant  la  gtiferi-e  aVâtt  cbntitiué  ëhtrt  Mtrttsétai 
[No"vdLic«  et  ThéopMlé.  Le  kdfife  âvSit  drdbfcftjfé  à  detii  fié  iérf 
^Arabes.]    gcuéraux ,  Abbu-Saïd  et  Baschir,  et  aux  habitants  de 
[Abu'ifaradj.  Mopsùëslé,  vîlfë  de  M  Gîliciè ,  àjfiiiëléé  par  tès^WibëS 
p.  i6a  et    Masisah ,  de  faire  une  irruption  sur  le  territoire  de  l'em-^ 
pire  dansIaCappadoce.  BaSchirrevenaitvainqueiti*  qtfand 


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\L  fut  attaqué  à  rîinprovi3te'  par  le  transAige  Hazar  ' 
et  ses  €]i0de&,  qui  Ièbattiren%lui  revivent  ses.  captifs, 
et  le  £reDt  bsL-mémts  prisonDteir.  Abou^Saïd  ne  tairda 
pas  à  lis  venger  :  il  se.  jeta  à  som  tour  sur  les.  Cucd^, 
tua  leur  chef,  ne  qai  remplit  de  jpie  h  khalife  quand 
il  fut  iostruit  de  celte  victoice  décisiiie.  Basdiir  reviat 
trîomphm*  a  Mopsucsttt.  Les  Qrecs  emeot  leur  revan* 
dfee  l'amnee  suivante^  ^  :  kur  flotte  débacqua  sur  là  eote. 
de  Syrie  ^  ils  piltènen-t  ]«  port  d'Antioche  ^  Cantique  Sà^\ 
Icttcie  de  rOconle  ;  ils  emmenèreiit  ks  raarchasds  pri- 
scnmîenL  Vers  le  même  temps:  ils  prireot  AbounSaïd, 
q«i  avait  &it  une  iiouvelte  inruptioii  dans  rAsîe-A|L*- 
ueuce^  et.  ils  dàvastèrent  les  terintaires  de  Marasch, 
Tantique  Germaittcès,et.de  Mélitène.  Ces  ho^itéi  fan 
rent  suivies  d'une  trêve  et  d'^un  échange  deprisûanieDa. 
-^  M.  ] 

Coostantinopley  aifligée  dé  la  perte  d'Amorium  e4r  dé     xuy. 
ses  plus  braves  oéficiers  [  et  fatiguée  4^  tpus  les  elforts    ca^omuie 
qu'il  fallait  faire  pour  soutenir  tant  de  guerres,  mal*^  Tb^phobe. 
beurauses],  se  voyait  à  la  veille  de  perdre  l'ewpersttr  cedr.  t.  2,  p. 
flamme  ;  ea  prince,,  consumé  de  chagrin  et  de  maladie,  Zon.ilisVa, 
dépérissait  de  jour  en  jow.  lia  profonde  mélancolie  où  Lo  ^^amm. 
le  plongeait  l'aspect  d'une  mort  prochaine,  le  rendait    ^i^^^' 
plus  susceptible  que  jamais  des  plus  noirs  soupçoas^  eôTe^^sL' 
Lsf  ennemis  de  Théopbobe  profitèrent  de  sa  faiblesse    s^*  ^6. 

....  .  »..  ,.     Symcon ,  p. 

pour  Im  msmuer  que  oe  guerrier  ambitieux  attendait      4^8. 

,  j      ,,  .  Ceorg.  p. 

sa.  mort  avec  impatience  pour  s  emparer  de  1  empire  5i5,  5a6. 
au  préjudice  de  l'héritier  légitime.  Théopbobe,  averti  ag^^g/!* 
du  danger  qui  la  menaçait  de  la  part  d'un  prince  trop  ^'*^\^^^'^^' 


*  VoyM  cî«âevant,  J  40,  p.  i45,  >  Eu  l'aii  841.  — S.-M. 

not.  a»  —  S.^M. 


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l5l  HISTOJJRE   DU    BAS-EltfPIRE.  (^n  84  r. 

Oratio  in  facile  à  écouter  la  calomnie,  prit  le  parti  de  s'enfuir 
tutio^s^ma-  de  la  cour  avec  sa  f<en>q|e,  ses  enfants  et  quelques 
^Combefis".^  auiis ,  et  de  se  retirer  à  Amastris  en  Paphlagonié.  Ses 

Ducange,    enuèmis  surent  donner  à  cette  retraite  injiocente  l'air 

tara.  byz.  p. 

i33,  134.   d'une  révolte.  On  équipe  une  flotte,  on  la  chareé  de 
mismata  in  troupcs ,  on  va  chercfaer  Tneophobe  avec  un  appareil 
formidable ,  comme  s'il  eût  été  tin  ennemi  déclaré.  Ory- 
phas  ^  y  commandant  de  cette  expédition  ,    porte  au 
prétendu  rebelle  un  ordi^e  de  revenir  à  la  cour ,   avec 
promesse  de  la  part  du  prince  qu'il  y  sera  en  sûreté  «t 
en  honneur.   Il   n'était  besoin   que  d'une  lettre  pour 
rappeler  Théophobe.  Étonné  de  cet  armement ,  il  re- 
vient sur  la  parole  de  l'empereur  ;  à  son  arrivée ,  au 
lieii  du  bon  traitement  qu'on  lui  a  promis,  il  est  en- 
I  fenmé  dans  la  prison  du  palais. 

Aw  84?.         Cependant  Théophile,  se  sentant  près  de  sa  fin,  se 
MorTde    ^  portcr  en  litière  au  palais  de  Magnaure.  Le  sénat 
^'^Ke^^  et 'lés  principaux  habitants  s'y  étaient  assemblés  par 
TUéophiie.   g^n  ordre.  Lorsqu'il  fut  au  milieu  d'eux  il  se  fit  sou- 
IcTêfT  sur  son  lit ,  et ,  reciieillant  ce  qui  lui  restait  de 
forces,  il  parla  en  ces  termes  :  a  Tourmenté  par  de 
«  cruelles  douleqrs  qui  m'arrachent  la  couronne  et  la 
a  vie,  ce  n'est  pas  cette  perte  qui  cause  mes  regrets J 
«  La  couronne  n'a  eu  pour  moi  que  des  épines ,  et  j'ai 
cclroiivé  dans  la  vie  plus  de  maux  que  de  biens  ;  mais 
a  je  plains  une  épouse  chérie  et  un  fils  encore  enfant, 
a  que.  je  laisse  sans  défense,  s'ils  ne  trouvent  en  vous 
(c  la  fidélité  avec  laquelle  vous  m'avez  servi.  C'est  un 
a  dépôt  sacré  que  je  vous  confie,  j'igaôré  le  sort  que 

»  ToC  (TToXoo  àpx^o«  0  TÎ??  Pît^Xyiç  ^pou-y^apioç  àpuçaç  Xepfi,6vcç.  Cont. 
Theoph.  p.  84.— S.-M. 


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(An  84a.)  UVAE   LXIX.  THBOPHIUS.  1 53 

«  DieU'  me  prépare  pour  l'autre  vie  ;  je  le  prie  ée  me 
((  faire  miséricorde  :  mais  je  ne  le  conjure  pas  avec 
or  moins  d'instance  de  vous  inspirer,  pour  ma  femme 
ce  et  pour  mon  fils,  ces  sentiments  de  tendresse  que 
a  vous  avez  éprouvés  de  ma  part  ;  c'est  un  retour  de 
ce  justice  que  vous  demande  cette  voix,  mourante  ».  Ce 
discours,  plusieurs  fois  interrompu  parla  faiblesse, 
excita  les  larmes  et  les  sanglots  de  tous  les  assistants* 
Dès  que  le  prince  fut  retombé  sur  son  lit,  leur  douleur 
éclata  par  d^s  cris,  par  des  vœux  potir  la  guérison.dei 
r«mpereur,  par  des  protestations  de  servir  fidèlement 
l'impératrice  et, son  fils,  de  leui* conserver  Tempire,  et 
de  sacrifier  pour  eux,  s'il  en  était  besoin,  leur  propl*e 
vie.  Théophile  se  fit.  ra|)porter  au  palais  qu'il  habitait  ; 
et  toujours  persuadé  des  inauvais  desseins  d6  Théophobe, 
il  l'envoya  égorgei:  pendant  la  nuit,  se  fit  apporter  sa. 
tête;  et,  comme  sa  vue  était  déjà  presque  éteinte,  por- 
tant sur 'cette  tête  ses  mains  tremblantes  et  lui  tâtant 
le  visage  j  Tu  n'es  donc  plus  Théophobe ,  dîl-  il  ;  m 
moi  Théophile  y  ajouta-l-il  en  soupirant.  Quelques  au- 
teurs disent  que  Théophobe  ne  fut  pas  ramené  à  Con- 
stantinople,  et  qu'Oryphas  le  fil:  mourir  secrètement, 
pendant  la  nuit ,  .sur  le-  vaisseau  même.  :  Quoi:  qu'il  en 
soit,  sa  mort  fut  si  secrète  que  les  Perses ,  toujours  at- 
tachés à  sa  personne  et  pleins  de  vénérgt.tion  ^ov^v  sa 
vertu ,  crurent  long*temps  qu'il  n'était  pas  awoW; ,  mfiis 
qu'il  avait  ;été  enlevé  au  ciel  comme  le  prophète  ÉJie. 
Après  ce  dernier  acte  de  cruapté,, Théophile  entra  dans 
un  d^re- causé  par  la  persécution  qu'il  avait  exercée. 
Il  criait  jle  toutes  ses  forces  '.Malheureux  que  je  suis! 
on  me  'déchire  à  coups  de  fouets.  11  passa  toute  la 
nuit  à  répéter. ces  cris  affreux,  tandis  que  l'iuipératricc, 


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^Slf  msTCfom  m  bas-bhpirb.  (AnH-^). 

fbiidaiÉt  en^  lahrraesy.  unphHiait  bb  misépicorde  divine. 
ThéoctîMiB;  son  chancelier,  vrai  catholique ,  perlait  à^ 
so»  cou  une-t^ image  dn  Sauveur  qu'il  caiehait ai^eesoîa. 
ThÀ)phile  ayant  aperçu  cette  'mrn^y  l'inivitatt  pan  signes^ 
à-  s'approchttr  à»  hic;:  inaisi  Tfattoetisie,.  qui  ecaîguoit 
<pie  cette?  vue  n'iriritafc.  IfempiBnnMr,  s-éloignail  de  phisi 
eH^phisi^  Èn&i  ^  arré^ par lesi officiers  du  prince,  il  fwÊ 
conduit  tout  Cremhlsuit  à  sois  ht^  Léâ  signes,  équivoques 
qœ  fkigiaift  l'empearenr  fireM  croire  à  ses  ofiisiers  qu  iti 
demaffirdait  à  lui  arracbor  lie»  cheveux  ;  îb  afilpnidbèrelift. 
sa  tête  ieè  mains  4m  prinoe,  et  Théoctîste  jne  douteit. 
pas  qtr'ilne  fi&l  au  mohient  de  perdre  .hi  iii&,  lorsque 
Théophile  se^  saisit  d&  L'im»ge  et  l'appliquai  smr  ses  1^ 
Vrësi  II  parut  aoissitôt  que  ses  douleurs  se  calnièrenl.^ 
ses  ei^is  cessèrent  ^  et  y  kirsqu'il  était  prêt  à  rendbr.les 
dernier»  |»;mpirs  ^  Tkëodoita  lui  fit  baisçi"  une  image  de 
Jésu$-Chti^t  et  de^  In^ainte-Viergc.  lï  mourut  le  taô' 
JKtlvier  84^  S  ^pt^èé  d<iuzeians  et  troi^>mqis  de  règiae;. 
Avec  Itlj  expîra  Fhérés^ie  des^  reouockstesv  qui ,  depuis 
ceut  vingt^dtiq  ans  ^  tmublait  TEglise  et  TEtat.  IT  avait 
déelaré  l^împératrice  régente  de  l'emparé  pendant  l'ea* 
fàticèdé  son  fils. 
^^^^  Ain^t  moui'u t  Théophile ,  que  Thistoire  aurait  nsoms; 

Réflcùons  maltraité  s'il  n'eût  été  iconoclaste,  ou  si  des  icono- 

sur  le  carac-  ^ 

tère  de    elaste&  avaient  écrit  sa  vie^  Son  zèle  poirr  la  iustice  fe- 

Théophile.   .  .  r    .   / .  1 

ran  seul  tm  grand  prince,»  et  sa  valeur  mtrépide  un 
hérds.  Il  est  vrai  que  sa  justice  allait  jusqu'à  la  cruauté,  ' 
êt4{txé  àà  valeur  n'était  pas  guidée  par  la  prudence; 
mais,  dam  des  siècles  infortunés,  où  l'joa  peut  dire 


'  On  a  TU  cî-dev.  §  4a,  p,  14S,      adversaire,    était    mort  seulemeat 
HOt.  X,  qae  le  khalife  Matasem,  son      quinze  jours  avant  loi. 


I 


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(5iû'il  y  à  dînette  de  vertu,  éri  ctel  t'fop  heUt*eux  de' trou- 
ver danisf  Féâ  princes  lés  grandes  quàlilés  de  leui*  état, 
^uô*cpiié  altérées  par  qûefque  alliage  d'ittiperfecfiôn.  Lés» 
àfetorîens  dfece  temps-lâ!,  tous  catholiqueis ,  tous  zeléà'. 
pour  le  cuké?  âéé  î'mages  qu'îF  proscrivait  dveô  fûréui*V 
Bièluîéhf'i^as'i^endu  justice;  ils  ne  voient  jam'aîs  eh  lui 
q!ie  YéitiiëM  de  l'Église ,  et  son  notii  dans  leurs  &ï*itJ^ 
est  toujours  flëtrt  piat  quelque  iStre  înjurieuîi.  C^eit 
êàni  iôiite  tiri^  j^i^ànd  riiialfteur  ]f)ouV  ce'  prîiitfe  d'âVbiV 
ékè  hét'éSqfùe',-  ttït  ^ri^  ^^aitid  eticbi*è  d'avoir  ëtëpets^- 
eùteur;  «ttîs  tee  Vifcè,  qiii  dfevatnt  Dieu  a  effacé  tôullè's 
ées  Verttis^,^edcrif  ^slësnoircrf  axxt  yeui  des  feôiii- 
Mes.  Cèrn-éSé  jî)as  slu^  lé  jugement  dé  ses  historîeti^ 
<îû*»:fitt«  régîW  fé  hotrèf;  c'est  suï"  fe  i^éJt  qtl'ils  (oiit 
Àix-!hêWës'^f  sé^  a'ëïîôlns  qù^tl  faut  rédréssef  letii'  jtT- 
gèîiiéilP^'Bi*;  eu  Aéttrè-ieïhps  qu'ils'  Facékbïôitit  dé  ré- 
^rtcBes,  ij^  èWÏ  là'  hoUiië  foi  dé  rycontet  des  fâhà  qui 
pi^duvénfe  qdf*lf  était  régtrHèfi^  dafns  ses  inoeurà,  juste', 
vigîlairt  ;  laborieux ,  iWtrépidè  èsirii  lés  plus  grands  pé- 
nis. Sa 'fiIdîHté*  à  se  lars^er  séduire  a  causé  tous  lés 
ifftàiêfc  de^  Joii  règine.  Jeaii  iécaflbmafrite  U  flt^ôrkédù- 
téiii-,  iet  îâ^caflÀiiluiefe  riehdït  ift^vst  énVet-s  tous  CéUJt 
qui  avaient  mérité  ses  faveurs  ;  niais  ce  (Jui  matqtië  Sôii 
équité  ïHtttrëlle,  <?est  qtfî(  reconnaissait  seis  fautes,  les  ., 
âvodâit ,  tâiîhàît  éèlèi  ré^rér.^ll  aurait  satiè  douté 
pleuré  la  tttirl  de  ïheoplhobe  ;  é'ïl  liii  àvah  sufvéàtf; 
c'est  là  ié  tolùS'grarid  dé  sëfe  ctiméfe  :  maisiés  èoûrtlsàrià*, 
\àlàûx  et  èàidriiuîàteurs ,  ti^ett  futent-ils  pa^  encôi'e'pîtià 
coiipàMe^  itfue  le  prittee  mbtitatit  et  âïFaitili  pât*  éés 
maux?  Le  luxe  des  bâtiments,  les  curiosités  recher-^ 
chées,  l'ambassade  de  Jean  Léoanom^ante ,  ausai  frivole 
que  magnifique,  ont  été  Sans  doute  fdrt  à  chïirge  à^es 


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1-56  HISTOIRE   DU   BAS-EMPIRE.  (^^q  84^.) 

sujets;  cepen.dant,  on  voit.  par.  plusieurs  ^traits  de  sa 
vie  qu'il  aimait  son  peuple,  et  qu'il  s'exposait  même 
pour  ses  soldats.  Son  fils  fut  très-catholique  ;  je  doute 
néanmoins  si  les  sujets  de  Michel  III  n'aura.ient  pas 
préféré  de  vivre  sous  l'hérétique  Théophile. 
Caprices*  de      ^^^^  lettré  quc  la  plupart  des  prélats  de  son  empire , 
ThéophUe.  ^  aimait  la  poésie  et  la  mi|sique.  Il  fît  des  hymnes  pour 
l'office  de  l'église,  et  en  composa  lui^^nfêiim  le  chant- 
Il  fonda. des   maîtres  de   nati.sique  pour  le  clergé  de 
Sainte-Sophie,  et  dans  ïes  grandes  solennités  il  se  plaiî- 
sait, à, battre  lui-mêm^^ la  mesure  dans  le  chœur.  Une; 
autre  petitesse,,  moins  pardonnable  :$ans.,dputç,  c'est 
qu'étant;  chauve ,  il  ordqnpa.par  édit.à  to^s  ses  sujets 
de  se  faire  couper  les  cheveux,. dé^i^a^t^sçgsfipjeine 
du  fouet  de  les  laisser  pendre. plus. bas  qt^e;Jp.cpi|.:.il 
voulait,  di^a^it-il,  r^ppel^r  la  vertueuses  sinipliqité  des 
anciens  Romains.  II.  y  eiit  sous  son;  pçgn^ej  un  grand 
dérangement  dans  kssaisofns  ;  des  hivers  figpureux , 
de$  chaleurs.  (»xtreme^,;  d^s  pluies  continmçlle^,  cau- 
sèrent plusieurs  fois.la  disette  :  les  trembl^ents  ;  de 
terre  furent  fréquents  ;  et  les  auteurs,  mettant  tous  ces 
accidents,  sur  Je  compte  du  prince ,  dont  le  c^el  ^  disent- 
i)^,  punissait  l'impiété,  .  ;  ,  :i . 

xi^Yxii.     ,  'Il  laissa  un  ^Is,  nommé  Michel ,  xiui.  lui  succéda ,  et 

Ses  enfants.   '  -     -  '  ■  7   ...  ..v    .    .  ..  .        *  .7  ^   , .     .  >  ^?  ^ 

quatre  fijle^ ,  Thècle ,  Anfie ,  Anastas^e  et  Pulcherie. 
I|iècle,,l!aînée:de  tous  ses  enfants ^; fut jda^ns  la  suite 
prQmise  à  l'empereur  Louis  II ,'  fils^  de  Lolhaire  '  ; 
mai^.ççtte  promesse  fut  sans  effet,  etThècie  passa  sa 

y iç  i^yçc  ;  >  ^es  sœurs  dans .  un  i^o^astèrie..  Une  médaille 

I  .     '     .  .     .  '  ,  •         • 

l'Les  Annales  die  Saint-Bertin ,  le  refus  de  Taccomplir  eâosa  ^une 
tfiM.  as 3 ,'  plâéekit  cette  promesse  de  '  guerre  entre  lés  Francs  et  les' Grecs, 
mariage  en  Tan  8  53 ,  et  ^ selon  elles,      •<— S.-M. 


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(Am  84â.)  LrVRB    LXIX.  THÉOPHILE.  l57 

donne  à  Théophile  un  second  fils,  qu'elle  nomme  Con- 
stantin; mais  ce  prince  est  tout-a-fait  inconnu  à  l'his- 
toire ,  et  cette  médaille  a  déjà  fourni  aux  antiquaires 
la  matière  d'une  discussion  qui  serait,  déplacée  dans 
cet  ouvrage.  Serait-ce  ce  fils  qui ,  étant  encore  enfant , 
se  noya  dans  une  citerne,  ainsi  que  je  l'ai  rapporté? 


Fm    DU   LIVRE   SOIXAWTE-IfEUVlèME. 


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\^è  .HISTOtl»?  OV  BAS-JE*«?I|IB.  ,C4*;^) 


«u-v^yw%. ■>/»■» m^%/^%/%f^^f^\f^^^/t^*>9}^*'*^*^^  9^^mm/'^i*^^*^^^m^^^^^*^^^i^%^m^i^ ^*%/^yfy^ 


LIYRE  LXX. 


Générosité  de  Manuel,  ii.  Théodora  entreprend  de  rétablir 
le  culte  des  images,  m.  Jean  Lécanomante  chassé,  iv.  Fin  de 
l'hérésie  des  iconoclastes,  v.  Théophile  absous  après  sa 
mort.  VI.  Solennité  pour  le  rétablissement  du  culte  des  ima- 
ges. VII.  Méthodius  calomnié  et  justifié,  viii.  Vaine  entre- 
prise des  Sarrasins,  ix.  Malheureuse  expédition  en  Abasgie. 
X.  En  Crète,  xï.  En  Asie.  xii.  Échange  des  prisonniers,  xiii. 
Les  Ësclavons  subjugués  en  Grèce,  xiv.  Ignace  succède  à 
Méthodius.  xv.  Conversion  des  Khazars.  xvi.  Ravages  des 
Pauliciens.  xyii^Cpmm^cem^iats  ^e^SdsiJbe^xvtM.  Les  Macé- 
doniens retournent  dans  leur  pav6.  xix.  Basile  à  Constanti- 
nople.  XX.  Il  devient  riche,  xxi.  Premier  écuyer  de  l'empe- 
reur, xxiï.  Expédition  «n  Egypte,  xxiii.  Conversion  du  roi 
des  Bulgares,  xxiv.  Et  de  la  nation,  xxv.  Mariage  de  Michel. 
XXVI.  Troubles  dans  le  palais,  xxvii.  Assassinat  de  Théocliste. 
xxviii.  Théodora  quitte  le  gouvernement,  xxix.  Basile  grand 
chambellan,  xxx.  Débauches  de  Michel,  xxxi.  Courses  de 
cirque,  xxxu.  Dissipation  des  finances,  xxxiii.  Ordres 
cruels  donnés  dans  la  débauche,  xxxiv.  Bardas  César,  xxxv. 
Théodora  renfermée  a4k  ses  filles,  xxxvi.  Gouvernement  de 
Bardas,  xxxvii.  Bardas  irrité  contre  Ignace,  xxxviii.  Phôtins 
patriarche,  xxxix.  Ignace  persécuté,  xl.  Phq|ius  veut  trom-  * 
per  le  pape.  xli.  Prudente  conduite  du  pape.  xlii.  Concile 
où  Ignace  est  déposé,  xuii.  Traitements  cruels  faits  à  Ignace 
pour  le  faire  renoncer  à  son  siège,  xliv.  Zèle  du  pape  pour 
Ignace,  xlv.  Fourberie  de  Photius.  xlvi.  Concile  et  lettres  du 
pape  contre  Photius.  XLVii.Guerre  contre  les  Sarrasins,  xbviii. 
Autre  défait^  de  Michel,  xlix.  Bavages  d'Omar,  l.  Défaite 
d'Omar,  li.  Bâtimens  de  Michel,  lu.  Irruption  des  Russes. 


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rBxu.  lies  0$  de  Copronynae  '.et  de  J^aU'l^caQQmaQaiç  Jbriilés. 
xjv,  Michel  fait  épouser  à  Easile  sa^  çQôcubine.  l,y.  Cpipplpt 
formé  contre  Bardas,  lti.  Assassinat  de  Bardas,  i^vii.  Suites 
de  ce  meurtre,  lviii.  Conduite  de  Photias.  lix.  Les  légats  du 
Tape  ne  sont  pas  reçib  à  Constantinople.  liX.'Photius  pro- 
Bonee  contre  le  pape  une  sentence  de  déposition.  Lxi.:BaAi|e 
;ass0cié.à  y«inpii:e..iâ^ii.tCooipli(%t  et  punition  de  S]ÇQib£K»ç. 
hx.ni.  Michel  veut  faire  périr  Basile,  lxiy*  Jl  fait  un.uQuv^l 
empereur,  lxv.  Mort  de  Michel,  lxvi.  .Fin  trajgique  des 
meurtriers  de. Michd. 


•      MIGHEL  III,  dit  lIvrogne. 


Jamais  Théophile,  n'avait  mieux  servi  Tempire  qu'en     ^^^  ^.^ 
.choisissant  Théodora  , pour  le  gouverner  pendant, la        i. 
•  minorité  de  son  fils,   âgé  de  trois  ans  *.  Il  lui  avait  de  îSmueL 
donné, pour  conseil  le  patrice  Théoctiste  *,  avec  Ma-  ^^t\V^^' 
nuel  et  Bardas;  l'un  oncle  ?,  l'autre  frère  de  l'impe-  Zon.i.i6,t.a, 
ratrice  ^,  et  lés  avait  nommes  tuteurs  au  J^une  princç.  Manass.  p. 
Manuel  était  sans   contredit  le  premier   homme   de     contin. 
l'empire,  tant  par  sa  vertu  que  p«ir  sa  v^éur;  et  il  '^®^p^- P- 
parut  bien  en  cette  occasion  qu'il  n'aurait  tenu  qu'à  ^®p**'3^'/' 
lui  de  se 'mettre  à  la  place  de  son  pupille.  Dès  que  [Sym-Chron. 

I    TptTOv    Itoç^  «îittvuwv.    Cont.  ii4,  oQt.  a>lîv.T.^3tx,S  19. — S,<4^. 

^Tfaeoph.  p.  9a .  On  lit  la  même  chose  *  U  éniit  logothète  '  du  '  drome  on 

ildBB&  Aboii*lfipa(44i ,  <  Chwon,  syr,  '<p.  Jntepd^pt..  gfiiéral  d«S;p09|f9»  f t{f u« 

»  164.  Ce   «ont  le»  seuls  textes  qui  Buque.  —  S.-M. 

paissent  indiquer  d'une  manière  ap-  ^  Siio^'àith  tou  'Kon^hç  tHç  ^eOTtdt- 

'  ptôxinifttîye  Tâge  d»  Tempereor  Mi-  •  WQÇi.  Cent.  ThiH>ph  .p.  9a  >  Yoj9Z  «î- 

chel  II.  Ce  prince  naquit,  à  ce, qu'il  deyant,  p.  $8  ,  UQt..  a,  liv.  uux , 

paraît,  en  Tan  889,  il  fut  couronné  §  3  et  4.  — S.-M. 

Tannée   suivante    dans    Téglise   de  4  Voyez    ci-deyant,   p.  fi,  lir. 

Saiatc>-Spplûie;  Voyez  €Î-deF«p^  ,;,p.  i<3(ix^,S  3.^  S.-M. 


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l6o  HISTOIRB   DU   BAS-BMPIRE.  (i^^  84,.) 

Théophile  eut  expiré,  il  fit  assembler  dans  le  cirque 
les  soldats  et  le  peuple;  et  leur  demanda,  selon  la 
coutume,  le  sermeht  de  fidélité.  On  crut*  qu'il 
le  demandait  pour  lui-même,  ^  l'on  s'écria  de  toute 
part:  Fwe  Manuel!  longues  années  à  Manuel]  Mais 
ce  grand  homme,  plus  offensé  qu'honoré  de  ces  ac- 
clamations, Arrêtez  j  dit-il,  vous  a^ez  un  empereur; 
mon  devoir  et  mon  plus  grand  honneur  est  de  dé- 
^  Jendre  son  enfance^  et  de  lui  conserver^  au  prix  de 
mon  sang,  l%éritage  de  son  père.  En  même  temps  il 
cria  le  livemier,  f^iveJl^ichel  et  Théodora!  Après  quel- 
ques moments  de  silence,  il  s'éleva  quelques  ^voix  qui 
répétèrent  les  mêmes  paroles.  Enfin  toute  l'assemblée, 
plutôt  pour  obéir  à  Manuel  que  par  aucun  autre  mo- 
tif, prêta  le  serment  ordinaire,  et  se  sépara  remplie 
d'admiration  pour  cette  ame  généreuse ,  qui  refusait 
un  honneur  tant  de  fois  arraché  par  la  violeqce  et' 
acheté  par  les  crimes  ïes  plus  noirs.  [Des  ambassadeurs 
furent  envoyés  vers  la  même  époque  auprès  des  princes 
français,  fils  de  Louis -le-Débonnaîre,  pour  les  in- 
struire (ïe  la  mort  de  Théophile  '  et  de  l'élévation  de 
son  fils.  L'empereur  Lothaire  les  reçut  à  Turin  [Au- 
gusta  Taxirinoruni)^  au  mois  de  septembre  de  cette 
année  '.] 
I,.  Quoique  Théophile,  au  lit  de  la  mort ,  eût  fait  jurer 

elterarend  Théodora  et  Théoctlste  qu'ils  ne  permettraient  jamais 
derétaWir^  Ic  cultc  dcs  imagcs,  ils  ne  se  croyaient  pas  obligés  à 
images,  garder  un  serraient  téméraire.  Mais  la  difficulté  était 
^.^™"'  d'obtenir  le  ccmsentement  de  Manuel ,  qui ,  d*ailleurs 
c^dr.t.2,p.  assez  indifférent  sur  ces  questions  théologiques,  pen- 

I  Voyez  les  annales  da  monastère  de  Saint-Bertîn ,  ann,  842.  —  S.-BC. 


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(Âii%4î.)  LIVRE    LXX.      ^       MICHBL   lii.  jféî 

sait  qvte\  ponr  éviter  de  nouveaux  troubles,  il  fallait  Zoii.i.iJ6,t.a 
laisser  les  choses  dans  l'état  où  les  avait  mises  le  dé-  ^*  \55/ 
funt  empereur.  Une  maladie,  qui  le  conduisit  en  peu    «^"ôî*, 
de  jours  aux  portes  de  la  mort,  fit  plus  sur  son  .esprit.  joèi,'p!**i7Q. 
que  n'auraient  pu  faire  les  plus  fortes  remontrances;-  Yh^^'b 
Les  moines  dé  Stude,  en  qui  il  avait  une  confiance  9»  «*  ^^% 

.^  .      ,      \  ...  Sym.  p.  4a8 

particulière,  lui  insinuèrent  qu'un  moyen  infaillible  de    et  seqq. 

I  ^    /     •      1  \    -«-v         1         /  Geoipg.  p. 

recouvrer  la  santé  était  de  promettre  a  Dieu  la  repa-    5^6,  Sa:, 
ration  dfe  l'injure  feite  aux  saintes  images.  Il  suivit   cenes.  p. 
leur  conseil,  et,  dès  qu'il  eut  pris  ses  forces,  il  se  mon-  orat^nlSÏ 
tra  disposé  à  l'exécution  de  sa  promesse.  Rien  n'ar- [^ '®*^p°*^ 
irêtait  plus  l'impératrice  que  la  crainte  d'exciter  dans  j^^^j^J^^'^ 
Fétat  une  commotion  dangereuse  au  commencement   TheodOTt. 
d'une  minorité.  Elle  voyait  la  plus  grande  partie  du  Fieary,hi»t. 
^nat,  presque  tous  les  seigneurs  de  la  cour,  la  pm«     trt.6. 
part  des  métropolitains  attachés  à  l'hérésie.  Elle  ire- 
douiait  sUt^out  l'esprit  hardi  et  turbulent  du  patriar- 
ïrhe  Jean  Léeanon)ante ,  dont  la  fureur  avait  allumé  le 
feu   de  la  persécution.    Résolue    d'éeartfer  ce  violent 
iconoclaste ,  elle  convoqua  chez  Théoctiste  les  prélats, 
ies  abbés ,  les  sénateurs  orthodoxes  ;  elle  y  fit  appeler 
aussi  ceux  du  parti  hérétique,  qu'elle  savait  êtl^e  de 
bonne  foi  dans  l'erreur  et  ne  pécher  que  par  igno- 
rance. Dans  cette  nombreuse  assemblée ,  qui  se  tenait 
sans  la  participation  du  patriarche,  la  question  des 
images  fut  débattue  avec  une  pleine  liberté;  on  pro- 
duisit les  témoignages  de  l'Écriture  et  des  Pères  ;  les 
objections  des  iconoclastes  furent  réfutées.  L'hérésie 
étant  confondue  et  réduite  au  silence,  s(ès  partisans  se 
rendirent  à  la  lumière  de  la  vérité,  et  tous  unanime- 
ment souscrivirent  tin  décret  pour  le  rétablissement 
de  l'ancien  culte; 


Tome  XITl  i  * 


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J^m  Lcoa. 
nonsnte 


l6ï^  HJSTOimB   oc    BAS-EMPIRE.  (An  «4).} 

AfiB  d'achever  ce  grand  ouvrage,  on  convint  quil 
fallait  éloigner  le  patriarche,  principal  auteur  de  tout 
le  désordre.  L'impératrice  lui  fit  dire  que  les  princi- 
paux personnages  de  TÉglise  et  du  sénat  s'accordaient 
à  demander  le  rétablissement  des    images;  que,  s'il 
y  consentait,  l'Église  jouirait  d'une  paix  solide  et  re- 
prendrait son  ancienne  splendeur;  que ,  s'il  persistait 
dans  son  sentiment,  il  eût  à  sortir  sur-le-champ  de 
Constantinople  et   à  se  retirer  dans  sa   maison  de 
campagne,  où  les  prélats  orthodoxes  iraient  conférer 
avec  lui  pour  l'instruire  ou  le  convaincre.  Théodora, 
qui  connaissait  l'opiniâtreté  de  Jean,  était  persuadée 
qu'il  renoncerait  plutôt  à  l'épiscopat  qu'à  l'hérésie;  et 
c'était  à  cette   extrémité  qu'elle  voulait  le  réduire, 
Mais  pouvait-elle  prévoir  l'artifice  qu'il  mit  en  œuvre 
à  dessein  de  soulever  le  peuple?  Il  demanda  du  temps 
pour  délibérer,  et',  dès  que  l'envoyé  de  l'impératrice 
fut  parti,  il  s'ouvrit  les  veines  du  ventre,  mais  avec 
précaution,  et  laissa  couler  le  sang;  en  même  temps 
il  appelle  du  secours  e(  s'écrie  qu'on  est  vexiu  Tassas? 
siner  par  ordre  de  l'impératrice.  Bientôt  toute  la  ville 
est   alarmée;  l'envoyé  n'était  pas  encore  de  retour, 
que  l'impératrice  apprend  cette  nouvelle  par  les  cris 
séditieux  qui  se  font  entendre  de  toute  part*  Sur-le- 
çham|>  elle  envoie  Bardas  pour  s'instruire  de  la  cause 
de  ce  tumulte:  il  arrive  au  palais  patriarcal  au  mi" 
lieu  d'une  foule  de  peuple ,  et  fait  visiter  les  blessures 
du  patriarche  en  présence  de  tout  le  monde.  On  dé- 
couvre  l'imposture;  ses  domestiques  mêmes  le  décè- 
lent, et  montrent  l'instrument  dont  sa  malice  avait 
fait  usage.  L'indignation  publique  se  tourne  contre 
lui-même;   on  l'abandonne;  l'impératrice  lui  ^àv(m 


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(A»  84»)         LivM  juxx.         MicHîijL  m.  |63 

ordre  de  sortir  de  la  ville;  il  est  contraint  d'obéir« 

Délivrée  de  cet  indigne  prélat,  qui  déshonorait  de-  ir. 
puis  six  ans  la  chaire  patriarcale,  Théodora  rappelle  nX7sit*des 
îes  exilés,  ouvre  les  priions  aux  confesseurs,  et  fait  **^**'*®*'^"**'' 
assembler  un  .concile.  La  liberté  étant  rétabhe,  le  parti 
orthodoxe  se  trouva  le  plus  nombreux.  On  prononça 
la  déposition  d$  Jean  Lécanomante;  Méthodius  fut 
élu  à  sa  placer  c'était  la  juste  récompense  de  tant  de 
maux  qu  il  avait  soufferts.  On  déclara  par  un  décret 
solennel  que  les  images  de  Jésus-Christ  et  des  saints 
seraient  remises  en  honneur  ;  que  les  prélats  chassés 
de  leur  siége^  pour  avoir  soutenu  la  saine  doctrine , 
rentreraient  en  possession  de  leur  dignité;  que  ceux» 
au  contraire,  qui  demeureraient  obstinés  dans  l'erreur  y 
seraient  dépouillés  de  l'épiscopat.  Ainsi  cette  hérésie 
meurtrière,  qui,  depuis  près  de  six-vingts  ans, n'avait 
cessé  que  dans  de  courts  intervalles  de  désoler  l'Église 
et  l'état,  rassassiée  de  supplice  et  abreuvée  de  sangi 
ftit  enfin  ensevelie.  * 

Théodora  prenait  une  part  sensible  au  triomphe  de        y. 
l'Église,  que  ses  soins  avaient  préparé.  Mais  la  joie  se  ^^tTapr*. 
mêlait  dans   son  cœur  au  sentiment  d'une  douleur    ^  ™^^' 
amère^  Elle  avait  tendrement  aîmé  Théophile.  Voyant 
détruire  ce  qu'il  avait  établi,  chaque  décret  du  concile 
lui  semblait  être  pour  son  mari  un  arrêt  de  condam-* 
nation.  Pour  effacer  ces  taches  imprimées  à  sa  mé^ 
moire ^  elle  s'avisa  d'un  expédient  tout-à^fait  nouveau, 
et  qui  montrait  en  elle  moins  de  lumières  que  d'amour 
conjugal  £Ile  supplia  les  Pères  du  concile  d'accorder 
à  son  mari  une  indulgence  générale  de  tout  le  mal 
qu'il  avait  commis  dans  la  cause  des  images,  et  d'ar- 
rêter par  leurs  prières  les  effets  de  la  justice  divine. 

II. 


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1 64  HISTOIRE   DU   BA^S-EMPIRH.  (Ab  «4») 

Elle  leur  demandait  cette  grâce  au  nom  des  saintes 
images,  comme  une  récompense  de  son  îzèle  à  les  réta- 
blir. Une  demande  si  peu  attendue  étonna  les  évêques; 
ils  demeuraient  dans  le  silence.  Enfin  Méthodius  pre- 
nant la  parole  :   «  Princesse ,  dit-il ,  le  désir  que  vous 
«  témoignez  du  salut  de  votre  époux  est  légititiie.  Une 
«  tendre  piété  vous  l'inspire,  et  la  religion  ne  le  dés- 
ce  approuve  pas.  Mais  cette  même  religion  nous  ap- 
«  prend  qu'il  n'est   pas  en  notre  pouvoir  de  le  satis- 
(c  faire.  Les  clefs  du  ciel  ne  nous  ont  été  confiées  que 
a  pour  l'ouvrir  à  ceux  qui,  pendant  leur  vie,  font  effort 
«  pour  y  entrer.  Nous  pouvons,  il  est  vrai,  par  nos 
a  prières  soulager  les  âmes  <Je  ceux  qui  sont  sortis  de 
ce  ce  monde  avec  des  fautes  légères  ,  et  dans  des  senti- 
ce  ments  de  pénitence  ;  mais  pour  ceux  qui  meurent  hors 
<c  du  sein  de  l'Église ,  ou  chargés  de  crimes  qu'ils  n  ont 
«  pas  même  commencé  d'expier  par  une  vraie  dou-» 
<c  leur,  ils  reçoivent  dans  l'autre  monde  l'arrêt  irrévo* 
ce  cable  d'une  ^condamnation  éternelle.  Nos  prières  ne 
et  peuvent  diminuer  leurs  peines.  »  <r  Eh  bien  !  répliqua 
ce  l'impératrice,  puisqu'un  regret  sincère  est  un  comi- 
ce mencement  de  pénitence,  je  ne  suis  pas  sarts  espoir 
«c  pour  le  salut  de  Théophile.  J'étais  à  côté  de  son  lit^ 
ce  prête  à  recevoir  ses  derniers  soupirs.;  quoique  abîmée 
«r  dans  la  douleur ,  je  trouvais  encore  assez  de  force 
ce  pour  l'exhorter  à  reconnaître  son  erreur;  je  luire» 
a  présentais  les  suites  funestes  de  son  trépas ,  les  sup- 
ce  plices  de  l'autre  vie,  l'exclusion   des  grâces  et  des 
ce  prières  de  l'Église ,  les  malédictions ,  l'horreur  publi" 
et  que  dont  sa  mémoire  serait  flétrie.  Dieu  toucha  son 
ce  cœur  en  même  temps  que  ma  voix  tremblante  frap^ 
(c  pait  ses  oreilles;  il  soupira ,  il  implora  la  miséricorde 


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i 


(An  642.)  LÎVAE   LXX.  MICUCL    lil.  l65 

«divine;  il  me  demanda  quelques  images,  baisa  avec 
«  ferveur  celles  que  je  lui  présentai,  et  expira  dans 
«  les  transports  de  la  plus  vive  componction.  »  Après 
avoir  ainsi  parlé  elle  se  retira  pour  laisser  aux  évêques 
la  liberté  de  délibérer.  Quoique  plusieurs  d'entre  eux 
doutassent  de  la  fidélité  de  ce  récit,  cependant  tous 
s'accordèrent  à  dire  que ,  supposé  le  repentir  de  Théo- 
phile au  moment  de  la  mort ,  ils  le  déclaraient  absous 
de  l'excommunication   qu'il  avait  encourue.  Tout  le 
clergé  de  Constantinople,  à  la  suite  de  l'impératrice,  fit 
pour  lui  une  neuvaine  dans  l'église  de^Sainte-Sophie; 
et  ce  fut  alors  une  opinion  commune  que  l'empereur, 
ayapt  mérité  l'enfer,  avait  été  délivré  des  peines  éter- 
nelles après  sa  mort,  par  l'absolution  des  évêques  et 
par  les  prières  des  fidèles. .  , 

La  paix  de  l'Eglise  étant  solidement  affermie,  l'im-       n. 
pératrice  voulut  célébrer  cet  heureux  événement  par  pour  le  ré- 
une  fête  qu'elle  indiqua  pour  le  premier  dimanche  de  du  cuîtTdei 
carême.  Les  habitants  des  provinces  voisines  accouru-     *"■«*•• 
rent  à  cette  solennité.    Les  moines  descendirent  en 
foule  du  mont  Olympe,  du  mont  Ida,  du  mont  Athos, 
la  plupart  portant  sur  leurs  corps  les  preuves  hono- 
rables de  leur  constance  dans  les  tourments  de  la  per- 
sécution. On  passa  la  nuit  en  prière  dans  l'église  de 
Sainte-Marie  de  Blaquernes,  et  le  lendemain   toute 
l'assemblée  se  rendit  en  procession  à  Sainte-Sophie. 
L'éghse   était  magnifiquement  ornée  ;  et ,  pour  solen- 
niser  le  triomphe  des  images,    l'impératrice  y  avait 
rassemblé  toutes  celles  qui  avaient  échappé  aux  icono- 
clastes. .  Après   la   célébration  de  l'office   divin,   elle 
donna  un  grand  festin  aux  évêques  et  aux  grands  de 
état.  Pendant r  le  repas,  comme  elle  fixait  spuvent  les 


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l66  HISTOIRE   DU   BAS-EMPÎHE.  (An  84s.) 

yeux  sur  le  célèbre  confesseur  Théophane,  qui  venait 
d'être  fait  archevêque  de  Nicée ,  il  lui  en  demanda  la 
cause,  r admire^  dit-elle,  votre  patience  et  je  dé» 
teste  la  cruauté  de  ceux  qui  ont  chargé  votre  froni 
des  caractères  quejy  vois  imprimés.  Détestez  donc 
V empereur  Théophile,  détestez  votre  mari,  répliqua 
Thëophanerye  lui  ai  promis  de  lui  faire  lire  ces 
caractères,  et  je  lui  tiendrai  parole  ^  devant  ce  juge 
aussi  incorruptible  que  sévère ,  aux  yeux  duquel  la 
pourpre  des  empereurs  n'a  pas  plus  d'éclat  que  le 
sac  qui  couvre  le  pauvre.  A  ces  mots  Théodora, 
pénétrée  d'une  vive  douleur  :  Est-ce  donc  là ,  s'écria- 
t-elle ,  l'effet  de  vos  paroles?  Ne  niavez-vous  pas 
tous  promis  de  vous  intéresser  pour  le  salut  du 
malheureux  Théophile?  Et  vous  vous  préparez  à 
V accuser  devant  le  tribunal  de  Dieu!  Comme  elle 
fondait  en  larmes,  Méthodius,  élevant  sa  voix,  répri*^ 
manda  l'impitoyable  Thëophane  et  consola  l'impéra- 
trice, en  lui  protestant  qu'ils  tiendraient  leur  promesse; 
et  que  Théophane  lui-même,  à  l'exemple  du  divin 
médiateur,  serait  le  premier  à  demander  grâce  pour 
ses  persécuteurs.  Ce  jour  est  encore  célébré  dans 
l'église  grecque;  on  le  nomme  la  fête  de  l'ortho- 
doxie. 
Txi.  Jean  Lécanomante,  enfermé  dans  un  monastère,  se 

caîomnié"êt  consumait  de  rage  et  de  dépit.  L'impératrice  ayant  ap- 
justifié.  ppjg  qy'jj  s'emportait  à  la  vue  des  saintes  images  jusqu'à 
leur  crever  les  yeux,  voulut  d'abord  lui  faire  le  même 
traitement;  mais  s'étant  laissé  fléchir,  elle  se  contenta 
de  lui  faire  donner  deux  cents  coups  de  fouet.  Ce  mé* 
chant  homme,  loin  de  se  corriger  par  le  châtiment,, 
résolut  de  perdre  Méthodius.  De  concert  avec  ses  pai^ 


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(Ad  «43.)  LIVRE   LIELX.  MlCHISt   III.  167 

tisans,  il  suborna  contré  lui  une  reure  :  c'était  h  mère 
de  Mëtrophatie,  dont  la  i^ainteté  fit  oublier  dans  la 
suite  l'infamie  de  celle  qui  lui  avait  donné  le  jour.  Il 
fut  évêque  de  Smyrne ,  et  signala  son  zèle  en  faveur 
dlgnace  contre  Photius.  Cette  femme  s'étant  laissé 
corrompre  par  l'argent  des  iconoclastes,  accusa  le  saint 
prélat  de  lui  avoir  fait  violence.  Une  accusation  si  grave 
mit  en  mouvement  toute  la  ville  de  Constantinople  : 
les  orthodoxe^  d'un  côté,  les  iconoclastes  de  l'autre, 
s'intéressaient  avec  une  égale  ardeur  dans  une  cause 
où  l'hérésie  devait  tirer  un  extrême  avantage  de  la 
condamnation  de  son  plus  grand  ennemi.  Le  tribunal 
fut  composé  de  prélats  et  de  magistrats  séculiers.  On 
fit  comparaître  la  femme ,  qui  exposa  effrontément  le 
prétendu  crime  de  Méthodius  :  celui-ci  demeurait  dans 
le  silence ,  et  ses  adversaires  triomphaient  déjà ,  lors- 
que Manuel ,  persuadé  de  son  innocence ,  fit  étaler  aux 
yeux  de  l'accusatrice  les  instruments  de  la  question  la 
plus  rigoureuse,  et  lui  déclara  qu'on  ne  pouvait  la  croire, 
sur  sa  parole,  dans  une  accusation  de  cette  importance, 
et  que,  pour  preuve  de  la  vérité,  il  lui  fallait  endurer  la 
torture.  Effrayée  de  cette  menace ,  qu'on  se  préparait 
à  exécuter ,  elle  avoua  qu'elle  avait  été  séduite  ;  elle 
nomma  les  suborneurs,  et  spécifia  la  somme  d'argent 
qu'elle  avait  reçue ,  ainsi  que  le  lieu  de  sa  maison  dans 
lequel  on  la  trouverait.  On  la  trouva  en  effet,  et  la 
conviction  d'une  si  noire  calomnie  porta  le  dernier 
coup  au  parti  des  iconoclastes.  Les  calomniateurs  al- 
laient subir  la  peine  qu'ils  avaient  méritée,  si  Métho- 
dius n'eût  pas  encore  donné  une  preuve  de  sa  douceur, 
en  demandant  grâce  pour  ces  scélérats  :  la  seule  ven- 
geance qu'il  exigea  d'eux  fut  que,  toi|S  les  ans, dans 


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l68  HISTOIRE   BU    B^S-ElfPIRE.  (An  842.) 

'la  procession  solenuelle  qui  se  ferait;  à  Sàinte-Sopbie 
en  mémoire  du  rétabtissèmeat  des  images,  ils  marc^e^ 
raient  à  là  tète,  une  torche  à  lu  main,  et  qu'ils  se- 
raient témoins  de  raoathême  qu'on  prononcerait  contre 
l'hérésie  :  c'était  une  sorte  d'amende  honorable  à  la- 
iquelle  ils  furent  assùjétis  tant  qu'ils  vécurent. 
Tiii.  La  mort  de  Théophile  parut  aux  Sarrasins  une  oc«- 

pri^^^deg®"  casion  favorable   pour   attaquer  Constantinople.    Us 
Sarrasins,   j^ircut  cn  met  une  flotte  de  quatre  cents  voiles ,  coni- 
5a8.      mandée  par  Apodinar  '  ;  mais  une  violente  tempête  fit 
échouer  ce  projet.  Les  vaisseaux  furent  brisés  et  sub- 
mergés sur  la  cote  de  Lycie,  près  du  cap  Chélidor 
nien  ^  ;  il  n'en  retourna  que  sept  en  Syrie. 
A»  843.    '     ïhéoctiste  était  le  plus  puissant  des  tuteurs  du  jeuqç 
IX.       empereur.  Prudent,  et  expérimenté  dans  les  affaires  du 
expéditioa  gouvernement,  admis  à  tous  les  conseils,  il  tenait  le 
***  Cont^*^  premier  rang  après  l'impératrice;  mais,  non  content 
heoph,  p.  des  talents  qu'il  possédait ,  il  voulait  briller  par  ceux 
qu'il  n'avait  pas.  Il  crut  qu'il  manquerait  quelque  chose 
à  sa  gloire  s'il  n'y  ajoutait  pas  cçlle  que  donnent  les 
armes.   Il  fit  la  guerre  et  fut  toujours  battu.   Dès  le 
commencement  du  nouveau  règne  il  s^  chargea  d'une 
expédition  en  Abasgiç  ^:,  et  se  mit  en  mer  avec  une 


X  Sans  donte  Ahou-dinar.  Alto-  peut-être  pour  bot  de  rétablir  li^av- 

^etvap  6 2xpaxv}y&v çuXapxoç* Oeorg.  torité    impériale  dans,  les  ' régions 

p.  5  a8.  Ce  chef  arabe  m'est  inconnu.  caucasiennes,  où  elle  s'était,     à  ce 

— S.-M.  qu'il  parait,  singulièrement  affaiblie. 

«  Ce  cap  était  dans  le  thème  des  C'était  peut-être  aussi  là  le  motif 

Cibyrrhéotes.  Év  t«  obcpor/ipico  tôv  d'une    autre  expédition  entreprise , 

Kiêuf  pEWTwvjTO  Xi-^ô'^tid^i  XeXt^ovîa.  dans  la  même  année, par  lliéophobe, 

—  S.-M.  8OUS  le  règne  de  Théophile ,  et  qui 

.    5  Les  auteurs  ne  nous  font  pas  n'eqt  pas  un  meilleur  succès.  Voyes 

connaître  les  motifs  et  les  oircon-  p.  97  ,  liv.  lxix  ,  §  9.  —  S.-M. 
stances  de  cette  guerre,   qui  avait 


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(An  843.)  LIVKE   X.XK.  MICHEL  JIU  .169 

flotte  nombreuse.  Une  partie  de  ses  vaisseaux  fut  abî**- 
mée  par  une  tempête  ;  ceux  qui  gagnèrent  le  rivage 
ne  furent  pas  plus  heureux ,  ils  devinrent  la  proie  des 
[Barbares  '],  qui  égorgèrent  tous  les  soldats.  Théoc*^ 
tîste,  échappé  du  massacre,  revint  à  Constantinople. 
Ce  mauvais  succès  lui  attira  lès  railleries  publiques , 
mais  ne  le  corrigea  pas;  il  n'en. fut  que  plus  ardent  à 
chercher  de  nouvelles  occasions  de  réparer  un  échec 
qu'il  n'imputait  qu'à  la  fortune.  « 

Une  seconde  défaite  causée  par  son  imprudence,  un    As  844. 
an  après,  lui  fournit  encore  des  raisons  d'apologie.    «.    *•, 
Théodora  entreprit  d'illustrer  sa  régence  par  le  recou-  Léo.  p.  457. 
vrement  de  l'île  de.Crète  :  elle  équipa  une  grande  flotte  Theoph.  p. 
qui  fut  chargée  de  troupes  ;  ce  formidable  appareil  sur-  Sym*p%33. 
prit  les  Çarrasins ,  qui ,  n'étant  pas  préparés  à  soutenir   ^«°'6-  p- 
un  si  puissant  effort,  eurent  recours  à  la  ruse  :  ils  firent 
courir  Je  bruit  que,  depuis  le  départ  de  la  flotte,  l'im- 
pératrice avait  ôté  la  couronne  à  son  fils^  pour  faire  un 
nouvel  empereur  qu'elle  avait  choisi  pour  éponx.  Ils 
avaient  gagné  par  argent  quelques  officiers, pour  don- 
ner crédit  à  cette  nouvelle.  Théoctiste ,  assez^  fier  et 
assez  puissant  pour  disputer  la  couronne  à  tout  autre 
qu'à  son  maître  légitime ,  part  aussitôt  pour  Constan- 
tinople, abandonnant  son  armée  à  la  merci  des  Sarra- 
sins, qui  en  firent  un  grand  carnage.  ^ 

De  si  fâcheux  revers  n'itaient  pas  encore  d'assez    an  845. 
fortes  leçons  pour  cet  homme  vain   et  présomptueux,    e^^j^'^j 
lies  Sarrasins  lui  en  donnèrent,  l'année  suivante,  une 


^  "Dapa  Lehesaf  des  Sarrasins,  "Le  n'avaient  aucun  établissement  sus 

text«  dacontinnateardeXhéophane,  les  côtes  du  Pont-Euxia.  II  est  biei\ 

p.  126,  ne  dit  rien  de  pareil.  D'ail-  probable  qu'il  s'agit  ici  des  Abasgç^ 

leurs,  à  celle  époque, les  Musulmans  oaAbkas.  —  S,-M. 


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I7Ô  MiSTOItlE   DV    BAS-lMPfht;.  (Ab  845.) 

troisième  plus  terrible  que  les  autres,  et  qui  acheva  de 
convaincre  tout  l'empire ,  excepté  lui  seul,  qu'il  n'était 
pas  né  pour  la  guerre.  Omar-Emir  de  Mélitine  '  étant 
entré  dans  l'Asie,  Théodora ,  toujours  prévenue  en  fa^ 
veur  de  Théoctiste  parce  qu'il  lui  était  fidèlement  at« 
taché  y  le  chargea  de  cette  expédition.  Il  partit  avec 
une  armée  plus  nombreuse  que  celles  qu'il  avait  per*- 
dues  y  mais  ce  ne  fut  que  pour  essuyer  une  plus  san«^ 
glante défaite.  Il  fut  battu  près  du  mont  Taurus,  [en 
un  lieu  nommé  Mauropotame^]  y  et  prit  la  fuite ,  lais- 
sant sur  la  place  quarante  mille  hommes  de  ses  troupes. 
La  plus  grande  partie  de  ceux  qui  restaient ,  redoutant 
son  caractère  dur  et  implacable ,  se  donnèrent  auxSar* 
rasins,  embrassèrent  le  mahométisme,  et  s'enrôlèrent 
dans  leur  armée  :  de  ce  nombre  étorit  Théophane  le 
Pharganite  ^,  renommé  pour  sa  force  et  pour  sa  va- 
leur ,  qui  dans  la  suite  ayant  obtenu  secrètement  son 
pardon  de  l'empereiH* ,  s'échappa  des  mains  des  Samii* 
sîns,  rentra  au  service  de  l'empire,  et  fut  fait  grand- 
maître  de  la  garde  -  robe.  lie  vaincu  trouva  encore 
moyen  de  se  disculper  auprès  de  l'impératrice  ;  elle  lui 
sacrifia  même  son  propre  frère,  qu'elle  n'aimait  paa« 

X  Le  cliroiiiqtteor George,  p.  ^39,         ^  Oto^mnc  h  Ix  ^a^ocvov.  Georg. 

rappelle  simplement  VÉmir^b  i.(A8p.  Chron.  p.  Sag.  Ce  personnage  éuit 

Il  en  est  fie  même  dans  la  chronique  sans  dente  Turc  de  naissance  »  et  n^ 

de  Syméon  le  logothète,  p.  4^3.  Ha  k  Farganah^  qui  ét«it,i  celte  époque, 

déjà  été  question  de  ce  personnage,  une  grande  et  puissante  ville  du  Tor- 

ci-dev.  p.   xSg,  not.  x,  lîv.  1.XIX9  kestan.  On  apprend  de  rempemi^ 

$  56.  —  S.-M.  ConsUntin  Porphyrogénète,  DeCof» 

*  Eî(  rèv  Xc^oftcvov  Moupoiroraf&ov.  rim,  auL  B/t,  que  les  empereurs  ea-* 

Georg.  Chron,  p.  5 a 9.  La  position  tretenaient  un  corps  de  troupes  ap— 

de  ce  Keu  esc  inconnue.  l\  est  ap«  pelées  Farganiotcs ,  à  prree  qa*ilsti* 

pelé  Maurotûpus  dans  la  chronique  raient  leur  origine  du  aséne  Jj^J^^ 

de  SynéoB  le  logothète ,  p.  433 ,  /«  —  S.-M. 
LitunoirpojsrhFteuv^noir* — S.iM. 


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(AaS45.)  LIVRB   ZXX,  MICHEL   III.  ^     I7.I 

Théoctiste,  on  ne  sait  par  quelle  raison,  rejeta  sur  lui 
h  cause  de  ^sa  défaite,  et  Bardas  eut  ordre  de  s'éloir 
giier  de  la  cour.  Au  contraire,  le  favori,  malgré  ses 
infortunes ,  demeura  en  possession  de  tout  le  crédit  0t 
de  tout  l'éclat  qui  pourrait  suivre  les  plus  brillantes 
victoires.  Il  fit  bâtir  un  superbe  palais ,  des  bains  ma- 
gnifiques, et  planter  des  jardins  délicieux.  Comme  il  se 
sentait  d'autant  plus  chargé  de  la  haine  publique ,  qu'il 
était  dans  une  plus  haute  faveur  à  la  cour,  il  se  fit 
donner  un  appartement  dans  le  palais  de  l'empereur,  le 
ferma  d'une  porte  de  fer ,  et  obtint  une  garde  pour  la 
sûreté  de  sa  personne,  précautions  sinistres,  qui  furent 
toujours  des  pronostics  plutôt  que  des  préservatifs  d'une 
fin  funeste. 

Ces  défaites  i^éitérées  avaient  fait  perdre  à  l'empire       xxi, 
beaucoup  de  soldats ,   dont  un  assez  grand  nombre  ^,riwnni«ê* 
étaient  prisonniers  chez  les  Sarrasins.    L'impératrice  Aimifarage. 
proposa  donc  un  échange,  et  le  calife  l'accepta.  Il  res-  p/167,  168.' 
tait  à  Constantinople  des  Sarrasins  pris  dans  les  guerres     p.'^x'64r' 
deThéophile.  Les  commissaires  des  deuxnations  se  rendi- 
rent avec  leurs  prisonniers  au  bord  du  fleuve  Lamèse', 
à  une  journée  de  Tarse.  Ils  étaient  séparés  par  un  pont. 
[L'eunuque  Rhakan  fut  chargé  de  cette  opération  de 
la  part  du  khalife  ^.  ]  On  y  faisait  passer  en  même 
temps  un  Grec  et  un  Sarrasin.  Le  khalife  [  Wathek  ^  ], 

•  • 

*  On  troarsit  dans  l'aDtiqnit^ ,  change  commença  le  lo  de  mohar- 
dans  la  partie  occidentale  de  la  Ce-  rem,  par  conséquent,  le  i5  aeptem- 
linie,  une  rivière  et' une  ville  Lames,      bre  S45.  *-^  S.-M. 

dans   un   canton  nommé  Lamotès,  3  Dans  Lebean  il/n/ai^m.  C'est  une 

CTest  Celui  dont  il  8*agit.  —  S.-M.  erreur.  On  a  vu  qu*à  cette  époqae 

>  Cet  échange  se  fit ,  selon  Abou'-  ce  khalife  était  mort.  Son  fila  W«« 

Ifiinidj,   Chron,  arab,  p.   167,  en  thek  régnait  en  Tan  8 4S.  Yoyee  ci« 

ran  aSi   de  l*hégire  (6  septembre  devant,  p.  148  ,  not.  4,  Ht.  ijhx» 

S45,--  37  aoàt  846  d«  J.-C.)*  Vé-  $  4i*  — ^..M, 


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*7^    #•  HISTOIRE  DU    BÀS^EBIPIRE.  (An  845.) 

zélé  pour  une  secte  de  mahométans  qui  traitait  d'hé- 
rétiques les  musulmans  de  différente  doctrine,    avait 
ordonné  de  ne  délivrer  que  ceux  qui  déclareraient  qu'ils 
croyaient  l'Alcoran  créé, et  que,  dans  l'autre  vie,  on  ne 
Verrait  pas  Dieu  face  à  face.  A  chaque  prisonnier  que 
les  Sarrasins  recevaient,  ils  s'écriaiçnt  Dieu  est  grand.; 
c'était  le  cri  ordinaire  de  leur  nation.   Les  Grecs ,  à 
l'arrivée  d'un  des  leurs ,  chantaient  Kyrie  eleison.  On 
n'en  déUvra  de  chaque  côté  que  cinq  mille  trois  cent 
soixante.  Après  cet  échange ,  les  Sarrasins  entrèrent 
en  armes  sur  les  terres  de  l'empire  pendant  l'hiver; 
mais  cette  incursion    leur  devint   funeste  :  plusieurs 
moururent  de  froid,  d'autres  furent  pris;  le  plus  grand 
nombre  se  noya  au  passage  d'une  rivière  '. 
Aw  846         ■"'  y  avait  plus  de  soixante  ans  que  Stauraee ,  sôus 
qcni.       le  règne  de  Constantin ,  fils  d'Irène,  avait  chassé  de  la 
Tons  subjû-  Grèce  les  Esclavons  ^;  mais,  pendant  que  les  princes 
^rècc"     iconoclastes  s'occupaient  à  faire. la  guerre  aux  images, 
deadm!imp;  ^®^*®  natîon  remuante  était  rentrée  dans  le  pays,  qu'elle 
c.5o.      ravageait  impunément  :  beaucoup  d'entre  eux  s'étaient 
étabhs  dans  le  Péloponnèse  ^.  Théodora  ne  crut  pas 
devoir  abandonner  aux  Barbares  cette  belle  contrée  : 
elle  fiit  lever  des  troupes  dans  la  Thrace,la  Macédoine, 
et  la  partie  de  l'illyrie  qui  appartenait  encore  à  l'em- 
pire, et  mit  à  leur  tête  Théoctiste  [Bryenne^],  son 

• 

^  La  rivière  de    Bodandun  '  oa  2xXa€oi.  Coost.Porph.i)ér  adm,  bnp, 

Podatidus,  Voy,  ci-dev.  p.  98,  not.  c.  5o.  — S.-M. 
4 ,  liv.  T,xix  ,  §  10. — S.-M.  4- Ô  08OXTiaT«;,  cô  to  èirtxXiiv  ô 

*  Voyez  ci-devant,  t.  lap.  339,  "^^"^  Bpoieviwv,  ffrpaTD'yb;  èv  tû  d«- 

tiot.  5 ,  liv.  Lxvi ,  S  7.  Voyez  aussi  [xotTi  neXoircwiiocu.  Const.  Porph.Oc 

lee  qae  j*ai   dit  des  peuples  slaves ,  adm.  imp,  c.  5o.  Ce  personnage  n*est 

t.  5  ,p.  a63  ,  not.  x  ,  liv.  xxxvii,  pas  mentionné  dans  la  généalogie  des 

£■47.  —  S.-M.  Bryennes,   donnée  par  Da  Gange, 

?  Pt   Toû  OsfAXTOç    n«XG9;cvyi(ioGU  i^<jm.-^x^,  p.  Î76-177, . —  S.-M, 


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(An  8A6.)  LIVRE    LXX.  MICHEL   ÏIÏ.  ifi 

premier  écuyer,  moins  élevé  en  honneur,  mais  plus 
habile  dans  la  guerre  que  Théoctiste  le  tuteur.  Ce 
général,  entré  en  Thessalie  ',  battit  les  Esclavons  au- 
tant de  fois  qu'ils  osèrent  en  venir  aux  mains ,  et  les 
chassa  devant  lui  jusqu'au  fond  du  Péloponnèse^.  Deux 
peuplades  d'Esclavons,  nommés  Ézéri tes  et  Milinges^, 
cantonnés  dans  les  défilés  du  mont  Taygète,  qu'on 
nommait  alors  Pentadactyle  ^^  depuis  Sparte  jusqu'à  ta 
mer  [  auprès  de  l'antique  Hélos  ^  ] ,  ne  purent  y  Être 
forcés ,  et  Théoctiste  se  contenta  de  leur  imposer  un 
tribut.  Les  Ézérites  établis  à  l'orient  de  la  montagne 
consentirenfà  payer  tous  les  ans  trois  cents  pièces  d'or, 
qui  ne  font  guère  que  quatre  mille  livres  de  notre  mon- 
naie ;  les  Milinges ,  à  l'oCcident ,  n'en  payaient  que 
soixante  :  c'était  tout  ce  qu'on  pouvait  tirer  d'un  peu- 
ple pauvre,  dépourvu  des  ressources  du  commerce  ^. 
Théoctiste  demeura  dans  le  pays  en  qualité  de  pré- 
teur; et  ces  peuples  restèrent  en  paix  sous  des  gou- 
verneurs grecs,  jusqu'au  règne  de  Constantin  Porphy- 
rogénète. 
L'impératrice  avait  rappelé  les  confesseurs   exilés. 


X  GetW  circonstance  ne  se  trouve  3  Qi  ÈÇgptTOt  et  oi  MiXti-y^oC.  — 

pas  dans   Constantin   Porphyrogé-  S.-M. 

nète  ,  le  senl  autenr  qui  ait  jamais  ^  6po;  s(rriv  Ixelos  p.s'^fa  xai  6(|nf)- 

parlé  de  cette  guerre^  —  S.-M.  Xorarov ,  xotXoûfASvov  HsvTai^axTuXoi».  - 

3  Le  texte  de  Constantin  Porphy-  Const.  Porph.  l)e  adm,  imp.  c.  5i. 

rogénète,  De  adm,  imp.  c.  5o,  où  — S.-M. 

il  est  question  de  dette  gaerre ,  rie  5  two  vit»  Aoxe^aipioviav  xal  rb 

parle  que  des  Slaves  du  Péloponnèse^  ËXo;.  Const.  Porph.  De  adm.  imp, 

et  il  semble  indiquer  qu'il  y  avait  c.  5o.  —  S.-M. 
dans  ce  pays  d'antres  peuples  révol-  ^  C'est  dans  le  même  pays  qae 

tés  conti'e  l'autorité  impériale.  Uav-  les   Maïnotes ,   dont  on  verra   Po- 

T«ç  jAfiv  Tobç  2xXà€ou?,,  xai  Xoiwoùç  rigine  ci-après,  t.   i3,  liv.  uxiii, 

dwuiroTaxTOu;  toO  6g(i.aTo;  neXowown-  §   44  >    ont  conservé   jusqu'à  no* 

«o«  uiTBTaÇt  x*l  ijtiùfùQO.'ïtt,  —  S.-M.  jours  leur  indépendance*  —  S.-M. 


Ignace 


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174  niSTOIRX   DU   BàS'^EMPtRË.  (An  84a) 

socoède  à  Pour  efiacer  toutes  les  traces  de  la  peFsécution ,  elle 
*  ^  °'*  fit  rapporter  à  Constantinople  les  corps  de  peux  qui 
Cout.      étaient  morts  en  exil  :  c'était  Métbodius  qui  lui  avait 

Theoph.  p.    .         ,    /  .  ,        T  1*1     -^T*    / 

lao.      inspire  cette  pieuse   pensée.  La  translation  de  Nice-- 

^4?5.    '  phore  fut  célébrée  avec  la  pompe  la  plus  solennelle  ; 

^3!.  ^   ce  saint  patriarche,  mort  depuis  di'^-huit  ans,  avait 

oricw.ch?.  ^^^  iohumé  dans  un  monastère  au-delà  du  Bosphore. 

*  \^5^^^'  Méthodius  se    transporta  lui-même  à   son  tombeau^ 

Mich.  Mo-  L'eihpereur,  le  «énat,  une  foule  d'habitants,  un  cierge 

ap.  Sarium.  à  la  maîu ,  allèrent  au-devant  jusque  sur  la  Bosphore; 

Theodora.  Le  corps  fut  porte  d  abord  à  Samte-Sçphie ,  et  ensuite 

riJury*hi»t.  à  l'église   aies  apôtres,   où  il  lut  enterré  le  i3   mars 

**^art'  aâf *'  ^4^.   Àprès   avoir  rendu   cet  honneur  à  If icéphore  ^ 

Méthodius  alla    rejoindre  dans   le  ciel  ce  généreux 

athlète,  dont  il  avait  partagé  les  combats.  Il  mourut  le 

a 4  juin,  et  eut  pour  successeur  Ignace,   auparavant 

connu  sous  le  nom  de  Nicétas.  C'était  le  tinbisièmc  fils 

de   Michel    Rhangabé.    Léon  l'Arménien  l'avait  fait 

eunuque  pour   lui  ôter  l'espérance  de  monter  sur  le 

trône  de  son  père.* Il  s'était  attaché  aux  célèbres  con** 

fesseurs  Joannice  et  Théophane ,  qui  l'avaient  instruit 

et  formé  à  la  vertu.'  Ayant  embrassé  la  vie* monastique, 

il  prit  le  nom  d'Ignace,  et  fo;fida  lui-même  plusieurs 

monastères  '.  Il  était  dans  sa  quarante-huitième  année, 

lorsque  son  éminente  sainteté ,  plus  encore  que   son 

illustre  naissance,  Téleva  sur  le  siège  de  Constantinople. 

Ah  847.        P^"  de  temps  après  l'élection  d'Ignace,  les  Khazars 

XV.       firent  savoir  à  Theodora  qu'ils  désiraient  embrasser  le 

Conversion      -,     ,     .       .  ^  ,  .^  ,•  ,, 

des       christianisme ,  et  la  prièrent  d  envoyer  quelqu  un  pour 

«  LorsqaMI  fut  iUrè  «n  patriaf*      ^«Tu^att.  ConU  Tk^Opk.  p.  i>On  -*^ 
cat,  il  était  aupéfficiir  du  monaatèr^      S«>M. 
de  Satynis.  «)pû(av6c  -r%  fuvvic  mô 


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(Aa  $47)  LIVRE   WtX.  HICHBL   UI.  1^5 

les    instruire.  Leur  religion   u'avait  été  jusqu'alors    chi»»^. 
qu'uu  mélange  du  judaïsme  et  de  mahométisme  '.  Ils  Boiundin 
promettaient  en  reconnaissance  d'être  désormais  con-    Methodi^ 
stamncient  attachés  à  l'empire ,  et  commencèrent  par  ****"■  °**'^' 
renvoyer  tout  ce  qu'ils  avaient  de  prisonniers.  Constan- 
tin, surnommé  h  philosophe,  [né à  Thessalonique et} 
qui  prit  alors  le  nom  de  Cyrille,  fut  choisi  pour  cette 
mission.   Arrivé  [à   Cherson,  dans   la  Tauride  *,]  il 
s'occupa  de  l'étude  de  la  langue  ^  que  parlaient  les  ]U)a^ 


1  Adjîcientes  inter  cetera ,  quo^ 
mam  nnne  Judtri  ad  fidem.  suam , 
m9dm  Saraceni*ad  j«<ifii  n0s  corner^ 
tere  «  contrario  moUuntur,  Vîta 
S.  Cyril,  ap.  Bolland.  Mart.  t.  d, 
|s  19.  l^ea  antcfirs  arabes  noa»  doo* 
nent  de  cnrieux  renseignements  sar 
les  ef/oris  que  les  masnlmans  avaient 
fûts  ponr  répandre  leor  religion  cb^as 
les  Kbazjirs,  et  sar  la  cooversîoq  d« 
G^tte  nation  et  de  son  sonverain^à  la 
rçllgiop  joive.  Ç*est  on  fait  éton« 
nant  et  important  dont  il  n'es^  pi^s 
pensais  de  douter.  Il  confinnent  tout 
ce  qne  les  rabbins  juifs  ont  dit  de  la 
eontersipo  4*on  grand  peaple  nom- 
mé Çjf^vu  et  de  son  roi  à  la  religion 
jaive^n  existe nn  livre,  célèbre  au- 
trefois che«  les  hébraïsants ,  connu 
sous  le  nom  de  lâber  eotri ,  qui  con- 
tient une  longue  et  intéressante  dis? 
coasioB  tbéologique,  qu'on  croit 
«Toîr  ei^  lieu  entre  le  docteur  juif 
Xsaac  Samgor  et  le  roi  de  Cosar.  Ce 
livre  a  été  publié  avec  une  version 
latine  9  par  Buxtorf  le  fils ,  à  Baie , 
1640 , 1  vol.  in- 4**.  Ce  n^est  que  bien 
loxig-temps  après  cette  époqne,  et 
depuis  assez  peu  d*années»qoe  Ton  a 
troi^vé  lea  indications  des  auteurs 
arabes  qui  confirment  les  traditions 
rabbiniqnes  9     regardées    autrefois 


comme  toutes  fabuleuses.  Les  écri- 
vains que  je  viens  de  citer  rapportent 
qn*au  dixième  siècle ,  les  cbefs  des 
KhazarSjÇt  la  plus  grande  partie'  de  la 
nation  professaient  la  religion  juive , 
qu^ils  avaient  embrassée  du  tempfdn 
kbalife  Haroun-al-rascbid  (78-80). 
yoyez  les  deuils  recueillis  à  ce  su- 
jet par  M.  Mouradja-d*Obsson,  date 
son  livre  intitulé  f^oya^e  d^Jbovl' 
Kassin,  p.  34  et  35. 

>  Ou  plutôt  à  Cherson ,  ville  puis- 
sante à  cette  époque,  doQt  j*ai  parlé, 
t.  I ,  p.  325  ,  not.  3  ,  liy.  v,-  S  16  , 
et  t.  i3 ,  p.  x33  ,  not.  v,  lîv.  i.xix  , 
S  3a  .L*bistorîen  de  saint  Cyrille  dit  : 
lier  arripiens  venu  Chersonam , 
quat  nimirum  terra:  vîcina  Gazaro- 
rum  et  contigua  esty il,  S.  Cyril,  ap, 
BoUand.  Mart.  t.  a,  p>  ao»  --  S.-M« 

3  Lebeau  ajoute  siavonne.  C'est 
une  erreur,  comme  on  a  pu  le  voir 
par  ce  que  j*ai  dit  de  leur  origîoe , 
t.  II,  p.  37,  not.  7,  liv.  Lxvi: 
j  ao  :  ils  n'appartenaient  pas  à  la 
race  des  Slaves,  ils  étaient  de  la 
famille  des  nations  finnoises  et 
bnnniqoes,  qui  formaient  la  pins 
grande  partie  des  nations  qui  habi- 
taient primitivement  les  provinces 
de  Fempite  de  Russie.  < —  S.-M. 


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1^6  HISTOIRE   Dt    BUS-ÉAfPlRE.     '  (An  047.) 

zars.  [Pendant  son  séjour  dans  celte  ville,  il  y  fit  la 
découverte  des  reliques  du  pape  Saint-Clément*;  il  se  ren- 
dit ensuite  chez  les  Khazars.]  Ses  travaux  furent  cou- 
ronnés du  succès  :  [il  confondit  les  sectateurs  de  la  re-" 
ligion  juive  ainsi  que  les  musulmans  %  et]  toute  la 
nation  devint  chrétienne  :  il  y  laissa  des  prêtres  ^. 
[Constantin  revint  ensuite  à  Constantinople.  Bientôt 
après  il]  passa  [dans  le  pays  des  Slaves,]  chez  les  Mo- 
raves^,[dont  le  prince  Rastilas^]  désirait  suivre  l'exem- 
ple des  Khazars.  [En  passant  par  la  Bulgarie,  Con- 
stantin y  jeta  quelques  semences  de  la  foi  chrétienne, 
qui  ne  tardèrent  pas  à  fructifier;]  il  demeura  [dans  la 
Moravie  durant  ^]  quatre  ans  et  demi  avec  son  frère 
Méthodius  7^   et  ces  deux  ministres  de  l'Évangile  en 


«  t^*datear  de  la  vie  de  Saînt-Cy- 
rîlle ,  publiée  par  les  BolIandlAtes , 
donne  les  détails  de  cette  décoa- 
verte  et  des  cérémonies  auxquelles 
elle  donna  lien.  —  S.-M. 

»  Convertit  omnes  illos  ah  errori- 
bus  f  quos  tant  de  Saracehontm  quin 
de  Judceorum  perfidîa  retinebat.YiU 
S.  Cyril,  ap.  Boll.  Mart.  t.  a,  p.  ao. 
n  paraît  cependant  que  la  reli- 
gion chrétienne  n'y  jeta  pas  de  bien 
profondés  racîneà,  car  les  auteurs 
arabes  font  voir  qu'environ  un  siècle 
après  cette  époque ,  il  y  avait  beau- 
coup de  juifs  encot-e  àsunà  ce  pays. 
Voyez  ci-devant,  not.     .  —  S.-M. 

3  n  est  probable  que  Constantin 
donna  un  alphabet  aux  Khazars 
comme  il  en  donna  un  bientôt  après 
aux  Moraves  et  aux  Slaves.  Voyez  i 
te  sujet,  M.  Klaproth  ,  ancien  Jour- 
nal asiatique,  t.  a,  p.  la.  — -S.-M. 

4  Les  Grecs  rappelaient  la'Grande- 
Moravie,  ^  ^è'^dkm  Mcpaêia,  ou 
le  pays  de  Sphendoplok,  i^  x^^P^  '^^V 


2çEv(^6TCXo}cbî>.  Dominique  vivait 
vers  Tépoque  dont  il  s'agit  ici. 
Voyez  ci-après.  La  Moravie  for- 
mait alors  nn  royaume  slave, très- 
puissant,  qui  comprenait  le  pays 
qui  a  conservé  ce  nom ,  une  grande^ 
partie  de  Tarchi-dnché  d'Autriche^ 
avec  la  partie  septentrionale  de  U 
Hongrie.  Us  eurent  souvent  â  soute- 
nir des  guerres  contre  les  etopereuri 
de  la  race  de  Charlemagnè.  —  fi.-M, 

5  Audiens  JUastile^s  princeps  Mo^ 
raviœ ,  quodfactum  fuerat  a  philo» 
sopho  in  provincia  Cazarorum ,  ad 
impcraiores  nuntio*  misit.  Vit.  S. 
Cyril,  ap,  Boll.  Mart.  t.  a^ ,  p.  ao. 
—  S.-M. 

^  La  conversion  de  la  Moravie  doit 
se  placer  en  Fan  86 1  on  86a.  -> 
S.-M. 

7  In  terrant  SclaUorum  simul 
cum^Methodio  germano  suo  trani- 
misit.  Vit.  S.  Cyril,  dp,  Boll.  Mart 
t.  a,  p.  ûo.  —  S.-M; 


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(Am  847.)  LIVRE   LXX.  MIGHKL   111.  J'Jf 

établirent  la  croyance  dans  cette  contrée.  [Constantin] 
inventa  [alors  ']  i'alphabet  slavon,  ces  peuples  n'ayant 
point  encore  d'écriture  alphabétique^,  et  traduisit 
l'Évangile  ^  et  les  parties  de  l'Écriture-Saînte  qu'il  crut 
les  plus  utiles  à  leur  instruction  ^.  Ils  viilrent  à  Rome, 
[où  ils  furent  appelés  par  le  pape  Nicolas  II  ^,  et  y 
arrivèrent  ]  sous  Ib  pontifical  d'Adrien  II,  et  furent 
£iits  évéques.  Méthodius  >  après  la  mort  de .  son 
frère  ^,  fut  employé  avec  le  méine  succès  à  la  Conver- 
sion de  la  Bohême  7. 

Ces  peuples  s'étaient  portés  d'eux-mêmes  à  embrasa    Ak  ^4». 
ser  le  christianisme:  Théodora  voulût  contraindre  les       ^^^-  , 

...  -  ^   -  Ravages  aes 

Pauliciens  de  renoncer  4  leurs  erreurs.  Cette  secte  im*    Paaiidens. 


I  Tons  les  détails  relatifs  àTinven- 
t!on  de  Talphabet  slavqn  et  à  ]k  thi- 
dilctioii  dël'Écritnré,  avaient  été  pla- 
cés par  Lebe^n  k  la  'suite  des  détails 
sar  la  conversion  des  KHaisars ,  c^la 
«ontre  le  témeignage  formel  de  l'an* 
cien  biogrjil)[>be  de  saint  Cyrille  et  de 
sain^  Métbôdias.  J'ai  rétabli  le  texte 
k  sa  vraie  place.  —  S.-M. 

a  Parvulos  eoru'm  Utteras  cdo- 
eere.  Vît.  S.  Cyril,  ap,  BdU.  Mart. 
t.  a,  p.  90.  Le  ^pe  Jean  VIII,  dans 
Qtie  lettre  à  Sratoplok,  roi  de  Mo-* 
ravie,  s'exprime  ainsi  à  ce  si^et  : 
Utteras  sclàvtmieOs  a  Constantino 
quodam  philosophé  repertàs,  qaibus 
Deo  lavdes  débita  résonant ,  jure 
laudamus.  Cette  lettre  est  de  Tan 
S  7  9.  Les  lettres  données  anx  Slaves 
par  saint  Cyrille  et  son  frère ,  sont 
leâ  anciennes  lettres  slaves  qui  por- 
tent encore  actaéllenicnt  le  nom  de 
lettre  cyrilliques ,  desquelles  dérive 
Talphabet  russe.  Ces  lettres  sont  en- 
core 'en  usage  cheE  les  Dalmates, 

Tom^  XII!. 


les  illyriensy  et  presque  tons  lés 
Slaves  voisins  de  F  Adriatique.  Voyek 
Tintrodoction  que  DobtoWsky  a 
placée  en  tête  de  son  savant  ouvrage 
intitulé  Insïitàtiohes  Knguas  stayicœ 
dialecti  veteris.  Vienne ,  iS%%  ,  i 
vol.  in-8°.  —  S.M. 

3  Evangeliùm  in  eofàm  îinguam 
a  phUosopho  prœdicto  translatum. 
Vit.  S.  Cf  ril.  ap,  Bolland.  Mart.  t.  2, 
p.  ao.  —  S.>M. 

4  Scripta  ibi  reliquerunt  omnia  , 
quœ  ad  ecclesiœ  ministerium  vide- 
b€Mtur  esse  necessariaiTit,  S.  Cyril. 
ap,  BolL  Mart.  t;  a,  p.  ai.  —  S.-M. 

5  Ce  pape  mourut. le  i3  novem- 
bre 867  i  ce  qui  indique  à-peu-près 
la  date  du  voysge  de  Cyrillft  et  de 
Méthodius.  —  S.-M. 

6  II  mourut  le  14  février  868. 
—  S.-M. 

7  Le  duc  de  Borziwoy  et  sa  femme 
LudmiUa  furent  baptisés  par  saint 
Méthodius.  —  S;-M. 

Ta 


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178  niSTOIRS   DU    BA^S-EMPiRlt.  (An  «^S.) 

l>etrus  Si-   pie^  animée  par  les  rigueurs  qu'on  eœplojrftît  pour  la 

ced^.t!  a,  dëiniine,  se  multipliait  de  jour  en  jour  et  se  vengeait 

Lfi'îeft^ai  par  des  assassinats  ^  Jls  avaient  massacré  Thoîmas^ 

^Coff'     évéque  de  lïéoeésarée  ^  et  Paraoondace^  gouverneur  de 

Theoph.  p.  iji  province  *•  Tbéodora  résolut  de  les  convertir  ou  de 

coDst.Porp.  leg  exterminer*  Elle  envoya  dans  ce  dessein  Léùn  fils 

c.  10.   *  d'Argyre,  Andronic  fils  de  Duoas  ^,«t  Sgdalis,  qui  por- 

tiot.  L\lb.  tèrent  chez  ce  malheureux  peuple  les  supplices  et  la 

CoM^ifpo'^.  ittort.  Ils  en  firent,  dit-^on,  périr  cent  mille ^  dont  lea 

wciéZ'Msi  biens  furent  confisqués.  Le  reste ,  fugitif  et  caché  dans 

"*'*  ^^*     les  bois,  menait  une  vie  sauvage.  Le  Pont^  la  Cappa- 

doce^  la  petite  Arménie  étaient  infestéis  de  leurs  brî^ 

gandages.  Ils  étaient  sans  chef  ^  Sergius  qui  1^  avait 

commandés  ayant  été  tué  à  coups  de  hache  dans  une 

forêt ^.  Un  aventurier ,  d'une  audace  déterminée,  vint 

se  mettre  à  leur  tête.  Cétait  le  manichéen  Carbéas, 

attaché  au  service  *  de  Théodote  Mélis^ne^  préfet 

d^Orieut  7.  Ayant  appris  que  son  père  avait  été  exécuté 

à  mort,  il  s'enfuit  de  chez  son  mâittre,  rassembla  cinq 

mille  Pauliciens^et  se  réfugia  auprès  de  Ternir  de  Mé- 

litine,  qui  l'envoya  au  khalife  ^.  Ce  prince ,  charmé 

1  Voyes    ci-devant  »  ton.    la ,  Th^pkftl« ,  il  fat  taé  par  wi  certaîa 

p,  45s ,  Kt.  iJCTit ,  S^  39.*-  S.-M.  XaâniMi  de  Tbéopolî».  Sergios  avak 

*  Ce   fait    BOtis  est   connu  par  été  chef  de»  manichéens  pendant  tout 

l^îerre*  le  «Sicilien  dans  aon   petit  ce  tenpa.  —  S.-M. 
ttaité  aur  iea  Panlidena,  pi^ié  à  ^  U  reapUssait  auprès  de  loi  in 

Ingolstadt,  en   1604.   Cet  atiitear  cbai^e  de  pratomtui^iator  :  vkt  "rc^ 

▼ivait  jpen  après  cette  époqaé ,  sons  orf  «>T0(i4iv^àT«>p^    itXDpcM    À^y^» 

le  rè^    dfe  ]laaik4e>Macédioaieik.  Cont.  Theopk  p.  Jo3.  —  S.nM. 
—  S.-M.  fi  BMqtqç  &  XAtk  rvt  iiiX{(ngycv^ 

3  Le  cctttiniiatear  de  Tbéopbane,  €ont.  Theoph.  p»  loS.  --^  S.-M. 

p.  io3,  dit,  le  fils  d*Argyre  et  celai  ^  Oaplatétcomniatidantdiithéase 

de  Dmeas,  é  roS  Àç^oû  nal  6  tou  des  Anatûliqnea.  Cont^  Theoph.  p» 

àcuRoK.  C*ett  GédtféDos»  t.  a,  fp^  Si  i ,  k»3%  •-  S.-M. 
fjai  donne  leurs  nottisw  — ^  S.-M*  ^  Ufhç  Tf v  t^  MiXiTtvvic  ni^tiB(3T« 

4  En  l'an  835,  sons  le  régne  de  N«T«^)c«VTa  JLfJM^  '^«vtCAi,  n^tMw 


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{lta«4$-)  tiyafe  LXX.  MICHKL    lit.       •  \^ 

de  susciter  à  rEmpire  un  implacable  ennemi  «^  l'asmita 
de  M  protection  et  lui  doooa  pour  habitation  le  mont 
Argée  en  Cappadoce  '.  Bientôt  les  Pauliciens  dispersés 
se  rendirent  «luprès  de  lui ,  ensorte  que  Ib  terraio  du 
mont  Aligée  se  trouvant  trop  étroit  pour  les  oootenir, 
Ga^rb^  leur  fil  bâtir  4ine  nouvelle  ville  sur  les  cou* 
fins  du  thème  de  Colonée^,  dans  rArméaie-Mineure. 
Cette  viUe,  ^u'tl  BOttima  Téphrique  ou  Tibrique^,  de- 
vis! un  re|»ire  de  brigands  et  de  scélérats.  Cétait 
l'asile  de  tous  les  Pauliciens^  auxquels  on  donnait  la 
chaise  dans  le  reste  de  l'Empire.  Les  libertins^  t«s 
banqueroutiers,  les  meurtriers ,,  les  f^ens  poursuiv» 
pour  crime  s'y  réfugiaient  pour  j  jouir,  de  l'impunité 
ei  de  la  liberté..  Ik  se  joignirent  avec  Omar  ^,  émir 
de  Mélitiiie  ^,  et  Alim,  émir  de  Tarse  \  pour  rava^r 


Cont.  Theoph.  p.  io3.  —  S.-M. 

«  1)1  on  ««nten  -que  ie  cimthKNi- 
tenr  de  Thëophane,  p.  io3  ,  appelle 
Jmttrm  (peM-^e  Aèara  (M  .<tf««- 
f«}w  Ob  «âhiit  romar^tièr  que  oet  mi- 
taor  |Nirie  de  «es  deux  «ndreitt 
conne  M  dmx  TÎUes  fondées  |»«r 
Wft  PMilfoîMtt.  no)jiK  n  xvfi^tv  ifrtf 

À^aoSv,  MCI  T^-ifbttfft».  21  seMÎt 
doMG  possiUe  de  distinguer  la  ¥iUt 
d^^/yioûMa^nDeationiiée  pcr.le  eas- 
tÎBiiateor  de  ThéophaBe,,  da  atout 
Ai^  98Î>était  ea  Cap^doce.  Dans 
le  doute,  }'«i  laôsé  le  texte  de  Le- 
lieaa  dttns  Tétat  où  il  se,  trouvait»  On 
lit  de  KiéBie  dans  GédcéoBSi,  t.  a» 

p.541.  — SwOi.  • 

s  ILoXuysio.  C*emt  le  nom  latin  de 
Colaaia.  On  'croit  qae  cette  ville 
avait  été  &ndée  jpar  Pbmj^  après 
la  défiftte  de AlitfarîHate.  JVn  ai  parié 


dans:mes  Mémoire  hùt^rifnes  «r 
igèographiques  sur  V Arménie  y  t.  t , 
p.  i*8"9  et  190.  On  voit  parConstan" 
tin  Porphyrogénète,  De  themaC. ,  1.  i , 
c.  14» ,  qnVUe  étast  voisine  de  Néo^ 
césasée  dans  la  Gappadoee.-^S.<M. 

3  f  e^puc^  Celte  ville ^  nemniée 
tfdaeBeinent  Di¥nghx^  est  le  chef- 
lien  dV»  Smdjakat  dépendant  de 
Sébastc %-U. 

4  Le  ODOtinnateur  d«  Théofdianc^ 
p.  io3,  l'appelle  ÂmbnuevL  Amron, 
Affcgfsv  ixaXtoiey  oi  «eXXot.  Cet  émir 
est  appelé  Moneehtrnrès ,  Jiervsg^o*- 
pdpiQ(,  |yar  Pierre*le*Sioilien,  dans 
son  petit  traité  histoiiqae  anr  les 
Paolieiess^  p.  90.  On  a  vn  oî-dev. 
p.  104  ,  n«kt.  %  ,  liv«v.xiK,  S  x4f 
qu*il  s'appelait  réellement  OMac;  ~- 
S.-M. 

^T^MiXtTivvicIiMip.GcinU'nieflfià. 
p.  io3«  —  Sw-M. 

6  Ou  plntAt  Ail.  Ô  TViç  TKpaov  iX- 

la. 


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Air  85i. 

XTXX. 

Commence- 
ments   de 
Basile. 

Léo  p.  458, 
459,  4O0. 

Cedr.  t.  a,  p. 
557  et  seq. 

Zon.  1.  x6,  t. 

a,  p.  i63, 

1^,  x65, 

X73. 


18.  p. 

xo5>  xoo, 

107. 

Glyc.  p.a94, 

a97- 


180  HISTOIRE   DU   BAS-IMPIBE.  (An  84^.) 

les  terres^dé  l'Empire.  Alim  setant  séparé  dés  deux 
autres,  périt  en  Arménie  avec  toute  son  armée  '.  Omar 
demeura  uni  avec  Carbéas,  et  saccagea  les  provinces 
d'alentour.  Pétronas ,  frère  de  Timpératricte  *^  fut  en- 
voyé pour  réprimer  leurs  incursions.  Il  parait. (|u'aa 
lieu  de  les  attaquer  il  se  tint  sur  la  défensive,  et  qu'il 
se  conteata  de  ne  se  pas  laisser  battre. 

Les  conseils  secrets  de  la  providence  élevaient  albrs 
par  degrés,  dans  la  cour  de  Constantinople,  un  ma- 
cédonien ^  nommé  Basile,  qu'elle  avait  tiré  de  la  poas^ 
sière ,  pour  le  placer  un  jour  sur  le  trône.  Il  était  né 
sous  le  règne  de  Michel  Rhangiabé  j  de  parents  pau- 
vres^ qui  gagnaient  leur  vie  du  travail  de  leurs  mains 
dans  utie  bourgade  voisine  d'Andrinoplë#  Cette  con- 
trée de  la  Thface  faisait  alors  partie  du  gouverne- 
ment de  Macédoine.  Lorsque  Basile  fut  empereur,  on 
lui  forgea  une  généalogie  qui  faisait  descendre  son 
père   des  Arsacides  ^,  et  sa   mère    dé  Constantin-le- 


X^  (leg.  ÂXîk)»  Goat.  Theopfa.  p.  io3. 
C'est  dans  Cédrénns ,  t.  3 ,  p.  54a , 
qu'on  lit  ÂXiip..  —  S. -M. 

X  n  panit  qu'il  avait  été  envoyé 
en  Arméirie  poar  y  commander.  O 

{Aiv  ÂX^C  Iv    TlVl  TÔV   Àp{AtVt«>V  /«SpOe 

â^X^v*  àirorraXeiç.  Cont.  Theoph. 
p.io3.-*-S.-M. 

*  Il  était  revéta  de  la  dignité  de 
grand  domestiqne  :  rnv  toS  ^o|Aia7t- 
xou  à^yi^  ^loufiâv.  Gont.  Theoph. 
p.  104.  — S.-M. 

^  ^{&«T0  fxèv  U  rnc  Msxe^oWv 
pk*  Con8t.Porph.  Fît.  Bas.^.  x33. 
—  S..M. 

4  On  disait  qn*il  était  arménien  , 
de  la  race  des  Arsacides:  t6  ^c  fsvoç 
tiXxiv  i\  Àpfx£vi«>v  sOvouç  Àpaoxtttv. 
Contt.  Porph.    Vii,  Bas,  p^  x33. 


Génésias,  1.  4>  p.  5i»  le  fait  des- 
cendre de  Tiridate,  roi  d'Arménie: 
KiK6e$v)c  iï  xal  Tn^^éroi}  to5  fkun- 
XiiùÇf  -niç  aûrviç  attpôc  é|if)pfLlvoo. 
Constantin  Pocphyrogénèta  ajoute 
qn'Artaban  et  Cliénus,  privés  de 
leurs  possessions  en  Arménie,  et  cra»> 
gnant  pour  leur  vie ,  s'enfuirent  a 
Gonstantinople ,  sous  le  règne  de 
Léon-le-Grand,  beau-père  de  Zédon 
(46-48),qui  les  reçut  avec  distinction. 
Le  roi  qui  gouvernait  la  Perae  à  cette 
époque,  ^  t«  t^  Ut^otxvtç  ^tricwv 
àpX'W  >  -Const.  Porph.  Fie,  Bas,  p. 
i34,  essaya  de  les  faire  revenir  en 
Arménie  ;  il  n'y  «put  parvenir.  On 
conçut  cependant  des  soupçons 
contre  tax.  L'empereur  leur  donna 
alors  des  biens  à  Nice  en  Macédoine. 


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{AnBSi,)  LIVRE  t%X.  MICHEL   IIL  l8l 

Grand  '.  On  voulut  même  lui  faire  accroire  que  sa 
famille^  tant. du  côté  paterpel  que  du  côté  maternel, 
remontait  au  grand  Alexandre  ^.  Ces  fables,  adoptées 
par  plusieurs  historiens ,  accréditées  surtout  par  son 
petit-fils  Constantin  Porphyrogenète,  était  de  l'inven- 
tion de  Photius  ^,  qui  regagna  par  ses  mensonges 
flatteurs  les  bonnes  grâces  du  prince ,  qu'il  avait  mé- 


JùëL  p.'i7t. 

Contt,  Porp. 

Vit  BatiL 

p.  i33  et 

«eqq.    . 

Syiii.p.433. 

434. 

G«org.  p. 

5^9  et  seqq. 

Geneft.  1.  4, 

p.  Si,  5a, 

53. 
Du  Cangf , 


Ils  passèrent  plus  tard  à  Philippes, 
d*oà  enfin  ils  allèrent  À  Andrinople. 
Pendant  tput  ce  temps  ils  conser- 
Tèrent  la  pureté  de  leur  race  en  ne 
•  se  mêlant  avec  aacane  antre  famille  : 
Tvtv  iraTç^tov  i^miav  ^locaedCovrc^ , 

ttç.  Const.  Porph.  Fita  Bas,  p.  i34. 
Sons  le  règne  de  Constantin  et  d*I- 
rêne,  nn  homme  de  cette  famille  ap* 
pelé  lUaïctes  (pent-étre  le  nom  ar- 
^Qoénien  Umaîéa) ,  vint  à  Constant!- 
nople;  il  y  reiiço.ntra  nn  bomme  de 
sa  nation  nommé  Léon ,  issu  de. noble 
race.  Il  contracta  alliance  avec  lai 
^t  épousa  sa  fille.  C^est  de  cette 
£uDille  que  naquit  le  père  de  Basile- 
le-Macédonien.  Celui-ci  épousa  la 
fille  d*ane  Teuve  noble  et  vertueuse 
^Andrinople ,  qui  passait  pour  des- 
cendre de  Constantin.  Cest  de  cette 
union  que  naquît  Basile.  Tels  sont, 
en  abrégé,  les  détails  que  Tempereur 
Constantin  Porphyrogénète  donne 
sur  Vorigine  de  sa  famille.  —  S.-M. 

*  :s.aTpoôev  ptèv  iXxwv  tw  -IÇ  Àp- 
aocxou  ou'Y'yévsiav  "h  <^è  /xiÎTYip-  riî  t« 
Tou  fite-YOcXQU  KwvffravTÎvou  ou-y^eveia 
ixoXXcdirO^STO.  Const.  Porph.  Vit, 
Bas.  p.  i35.  —  S.-M. 

>  Airb  ôaT^pcu  fispouç ,  tt;v  ÂXsÇav- 

Vit,  Bas.  p.  ^5.  —  S.-M. 

3  Cette  imputation,  qui  se  trouve 
dans  tous  les  livres  modernes^  qù 


il  est  question  de  Torigine  de  Basile, 
ne  me  parait  nullement  fbndée.  On 
a  déjà  pu  remarquer  que  presque 
toutes  les  familles  qui  tenaient  la 
premier  rang  à  cette  époque  à  Con- 
stantinople  étaient  arméniennes ,  et 
qu'elles-  étaient  des  branches  des  fa- 
milles les  plus  illustres  de  T  Arménie. 
Je  ne  comprends  pas  comment  il 
n'eif  aurait  pas  pu  être  de  même  de  la 
race  de  Basile ,  dont  plusieurs  des- 
cendants portèrent  des  noms  armé- 
niens, en  mémoire,  sans  doute,  de 
leur  origine.  On  a  pu  remarquer  que 
plus  d'un  des  rejetons  de  la  race 
des  Arsacides  s*étaient  attachés  au 
service  particulièrement  sous  le  règne 
de  Justinien.  Il  serait  possible  ,  en 
effet ,  que  Basile  fût  un  descendant 
d*Artaban  oU  de  ses  parents ,  qui  se 
distinguèrent  du  temps  de  Justinien, 
dans  les  guerres  d'Afrique  et  d'Ita- 
lie, et  dont  il  a  été  très-souvent 
question.  Tous  les  auteurs  s'accor- 
dent à  dire  que  la  famille  de  Basile 
tenait  un  rang  très-distingué.  Je  ne 
vois  donc  aucune  raison  de  rejeter 
ce  que  l'empereur  Constantin  Por- 
phyrogénète dit  lui-même  de  l'ori- 
gine de  ses  aïeux.  George-le-Moine, 
Chron,  p.  64a  ,  nous  fait  connaître 
qu'il  avait  un  frère  nommé  Symba- 
tius  ou  Sambat,  ce  qui  est  encore 
un  indice  de  son  origine  arménienne* 


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l8a  HISTOIRB    BU    BÂS*£MP1HK.  ^An  Wr.) 

fca.  8ys.  i^.  rite  de  perdœ.  Je  vais  rap^porter  ks  principaux  évé- 
Oogi^^   ncffl^i^ts  de  la  vie  de  Basite,jus(|u'au  temps  où  II  pttr-- 
H^M^rp.  "^'"^  ^  '^  charge  de  premier  écuyer.  Il  était  encore  au 
Sio»  Si»,  borceau  lorsque  Crum  prit  Andrinopte  ^,  où  se  trot»-^ 
vaut  alors  sa  famille,  et  il  fut  transporté  en  Bulgarie 
avec  les  autres  liabitants.  Ces  malheureux  exilés  con- 
servèrent leur  religion  ;  ils  la  firent  même  connaître 
aux  Bulgares,  dont  plusieurs  l'embrassèrent  dès-lor&. 
Zocus^  successeur  de  Crum  après  Deueom  *,  ^^^  n'a- 
vait régné  que  peu  de  temps,   prince  féroce  et  inhu* 
main,  irrité  des  progrès  du  christianisme,  fît  mourir 
Manuel  ^,  archevêque  d'Andrinople,  avec  un  grand 
nombre  d'autres,  parmi  lesquels  plusieurs  parents  de 
Basile  reçurent  la*  couronne  du  martyre. 
^^^jj  Cruellement  traités  par  Mortagon  ^,  successeur  de 

^do^en»     Zocus,  et  dcpuis  par  Baldimer,  petit-fils  de  Crum  ^, 
reiourDCDt  les  chrétteus  résolurent  de  se  tirer  des  mains  de  ces 

daii3   leur     -.      »  •  — 

pays.      Barbares.  Entre  ceux  quon  avait  conduits  en  Bulgarie 
se  trouvait  un  guerrier  nommé  Cordyle  *  Il  se  déroba 

•  Voyez  ci-dev.  p.  6,  liv.  lxviii  ,  hc.  cit.  11  est  appelé    par  erreur, 

53.  —  S.-M .  Crj-ta^ofi,  Xpura-y  wv,  dans  CédréDos , 

a   Voyez  et  qne'  j*al  dît  de  ces  t.  a,  p.   538,  qui  copie  d*ailleur& 

princes,  ci-dev.  p.   to  ,  aot.  i,  îîv.  Constantin Porphyrogéncte. — S.-M. 

Livrii,   S  8. — S.-M.  *  ^  kçx^'t  BoiikioL^ioLi  6  TiaX^iiLipy 

'  Selon  Constantin  Porphyrogé-  ly^ivoç  Kpo6[it.ou.  Georg.  Chron.  p. 

nète,  Fit,  Bas.  p.   i36,  ce   ne  fut  53o.  Ce  nom  de  Baldimer  on  Val- 

pas  Deueom ,  mais  Mortagon  qni  fit  dimer^   est  le  même  qne   ceini  de 

monrir  Mannel.  Toyez  ci-devant,  Wolodimer     on    Vladimir,    porté 

p.  x3,   not.  3  ,  ]!▼.  UEviii,  §  9.  par   beaucoup  de  pninces    rosses, 

—  S.-M.  c*est    le  Valdemar   des  Danois.  — 

4   Moutragon    dans    Constantin  S.-M. 

Porphyrogénète ,  Fit^  Bas.  p.  i36.  ^  Il  était,  selon  le  moine  George, 

Toyez    ci-devant  ,  loc.  cit.   Selon  Chron.   p.  53o,  stratélate  on  coro- 

cet   antenr,  le    successeur  de  Cm-  mandant  militaire  délia  Macédoine, 

mus  :  M!>vTp«Y«>v,  ô  too    Kpoupiou  crTpaTDXanoç  iv  Maîft^ovia  ;  il  avait 

^^à^oxoç.  Voyez  encore  ci- devant,  un  fils  nommé  Bardas.  Ce  dernier» 

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(As  aSi.)  LIVftK-LXX.  MICHBL    lll«  l82 

du  psjn  et  alla  demander  à  Teiopereur  des  vaisseaux 
pour  transporter  ses  compatriotes  à  Goostantinople. 
Théophile,  alors  empereur,  envoya  un  nombre  suffi» 
sant  de  barques,  qui  se  tinrent  à  l'aucre  au  bord  du 
Pont-EuitiK  Corâyle  Tajant  fait  saroir  aux  Macedo^ 
niens,  ils  commencèrent  à  marcher  vers  la  mer  avec 
leurs  familles  et  leurs  effets.  I^s  Bulgares  les  poursuis 
virmt,  et  il  y  eut  un  grand  combat  oii  les  MaoMoniens, 
animés  par  Cordyle  ^  et  par  leur  désespoir,  iléfirent 
entièrement  les  Bulgares.  Ils  approchaient  du  rivage 
où  les  barques  les  attendaient,  lorsqu'ils  virent  accourir 
derrière  eut  uH  nombre  innombrable  de  Hongrois  \ 
Ce  nouveau  peuple  ^  était  un  mélange  de  Turcs,  de 
Kbazars  et  d'Igours,qui,  d'abord  établis  au  nord  des 
Palus^Méotides,  chassés  ensuite  par  les  Patzinaces  \ 
vinrent  se  jeter  dans  la  grande  Moravie ,  où  ils  furent 


selon  le  même  aateor,  était  chef 
d*Diie  colonie  de  MacédoDÎens ,  éta- 
bUe  aa^elà  dq  I>an«W.  T«^v  Mwfftr 

Âflivou€iou.  — S.-M. 

1  George -le- Moine  ,  Chron.  p. 
53 1,  dit  qails  avaient  poar  che& 
Cordylis  «t  Tiantsiê,  dont  il  lera 
question  cl»aprè«.  —  S.->Af . 

*  Georgeo-Ie-Môincy  Chrou.  p. 
S2i ,  préieote  ee  iaitaxitTenieot  :  m- 
loaltti,  les  fngitifs  n*a^nt  pa  tra» 
verser  la  Balgarie,  [tài  ^iiw)dmt« 
«rtp«<wi  BeuX<Y«piav,  forent  obligés 
de  se  tourner  vers  les  HoDgroi8,irpo<* 
I^p6vi9av  TOiç  OUff^otç.  U  est  fort 
éifficile  de  compr^dre  ce  récit,  à 
moins  qu*on  ne  suppose  qnc  les 
Hongrois ,  qui  n*étaient  pas  encore 
établis  dans  le  pays  qni  port»  lenr 
DOW,  se  tronvaient  alors  sur  les 
bords  de  la  Mer-Noire,  près  des 


bouches  du  Danube,  ce  qui  parait 
fort  vraisemblable ,  puisque  le  même 
chroniqueur  dit  qn*on  v>it  arriver 
presque  aussitôt  la  flotte  impériale 
qni  devait  transporter  les  fugitifs  à 
Gonstantinople.  —  S.-M. 

3  Le  moine  George,  Chron.  p, 
5 Si,  le  seul  aoteorqn»  nous  ait  fait 
oonnaitre  oe  point  de  rhistoire  des 
Hongrois,  les  appelle ,  dans  lemAne 
récit ,  Hongrois,  Huns  et  Tnrcs.  H 
a  été  copié  par  Léon-le-Gmmmniricn, 
CkroH,  p.  469.  On  a  déjà  p«  voir 
ailleors  que  les  noms  de  Huns,  d*Ou- 
goors  et  de  Turcs ,  pouvaient  con- 
venir à  b  mène  nation,  et  qa*ils  ont 
été  donnés  au  peuple  mahrc  de  la 
Hongrie.  —  S.-M.  *    . 

4  Voyez  ci-devant, p.  i3o,  not.  i , 
I.  txix,  S  3a,  et  ci-après,  1.  i.xxiu, 
811.— S..M. 


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l84  HISTOIRE    DU   BAS-EMPIRE.  (An  85i.) 

connus  sou8  le  nom  àfi  Hongrois  ^  Ce  nom  venait  de 
celui  d'Onogours,  donné  par  corruption  aux  hordes 
dlgours^,  qui,  ayant  passé  le  Volga,  se  joignirent 
aux  Turcs  originaires  du  même  pays.  Ils  se  nom- 
maient aussi  Madgiares,  du  nom  d'une  horde  de  Kha- 
zars  qui  se  mêla  avec  eux  ^.  A  leur  vue ,  les  Macédo- 
niens se  crurent  perdus  :  ils  se  préparèrent  cependant 
à  combattre.  Ijcs  Hongrois  leur  firent  dire  qu'ils  ne 
s'opposeraient  pas  à  leur  embarquement  pouryû  qu'ils 
leur  abandonnassent  tout  leur  bagage.  Sur  le  refus 
de  se  laisser  dépouiller,  il  fallut  en  venir  aux  mains, 
et  deux  jours  de  suite  les  Macédoniens  mirent  en 
fuite  les'  Hongrois  K  Délivrés  enfin  de  ces  ennemis , 
ils  s'embarquèrent ,  et  arrivèrent  à  Cojpstantinople ,  où 
l'empereur  les  reçut  avec  joie,  et  lés  renvoya  dans  leur 
patrie. 
XIX.  Basile  avait  alors  vingt-cinq  ans.  Son  père  étant 

çonstonti.   ^^^^  ^  'J  ^®  ™^^  ^^  service  de  JSanzès  %  gouverneur 
"?P^-     de  Macédoine.   Mais  ne  trouvant   pas  dans  cet  état 
de  qUoi  fabe  subsister  sa  mère  eï  ses  frères  encore  en 


X  n  sera  qiiestioii  pins  en  détail  mais  non  la  pins  nombreuse ,  dans 

de  cette  nation,  <ii-après,liv. ucxix.  la  Hongrie  actuelle.  — S.-M. 
—  S.-M.  4  Selon  le uioioe  Georges,  CÀToii. 

>  J*ai  parlé  fort  au  long  de  ce  qaî  p.  53  x  ,  le  pins  jeune  des  Macédo- 

concerne  les  Igours ,  Ooigours  ou  niens ,  Léon ,  de  ia  famille  des  Go- 

Ougonrs,  de  leaa  identité  avec  les  n^ostes,  ixt'yévouç  rûv  Fcof^oeTây,  fit 

Turcs  et  de  leur  confusion  avec  les  des  prodiges  de  valeur  et  contribua 

Huns  et  lesMadjars,  ci-devant,  t.  4,  Ipplns  à.  la  défaite  des  ennemis.  H 

p.  76,  npL  a,  liv.  XIX,  §  434  t.  6 y  devint,  dans  la  suite,  hétériarqne  on 

p.  4^5;   t.  4,  liv.  XXXIV,  $.  ^S;  commandant  des  troupes  étrangères. 

*•  9j  P-  39a ,  not.  4,liv.  xLix ,  S  3^»  —  S»-M. 
—   S.-M.  ^Ilse  nommait  Bodas.  Dncange, 

^  Ces  peuples  sont,  les  ancêtres  Mam,  Bxz.p.  i38.  —  S.-M.  . 
des  Madjars,  peuple  de  race  finnoise^  ^  On  plutôt  Tzantzes.   Syméon 

c|ui  sont  encore  la  race  dominante ,  lelogothète,  Chron*}*,  434. — S. -M. 


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(An   S5i.)  LIVRE   LXX.  3fIGH£L    III.  l85 

bas  âge ,  il  résolut  d'aller  à  Coustantinople.  Jamais 
les' fortunes  ne  sont  plus  rapides  que  dans  un  état  qui 
se  forme  ou  qui  se  détruit.  Basile  était  bien  fait,  et 
d'une  taille'  avantageuse  ;  les  grâces  de  son  extérieur 
étaient  accompagnées  d'une  force  de  corps,  extraordi^ 
nâire.  Il  quitta  sa  mère  et  sa  famillp  qui  fondait  en 
Jarraes,  leur  promettant  avec  conliance  uK^  état  plu3 
heureux.  Son  dessein  était  de  s'attacher  à  quelque 
gfanc^de  l'Empire  et  de  s'avancer  à  son  service.  Ar* 
rivé  sur  le  soir  à  Coustantinople,  où  il  ne  portait  que 
les  livrées  de  la  misère,  comme  il  n'y  connaissait  per- 
sonne, fatigué  du  chemin,  il  se  reposa  sur  les  degrés 
de  l'église  de  Saint-Diomède,  voisine  de  la  porte  de  la 
ville,  et  s'y  endormit.  Tout  est  miracle  aux  yeux  du 
vulgaire  dans  les  commencements  de  la  fortune  d'un 
homme  qui,  du  dernier  rang,  s'élève  aux  |)remières 
dignités  de  la  terre.  Les  historiens  de  ces  temps  là, 
soit  par  crédulité^  soit  par  flatterie,  sèment  les'^pro- 
digés  &ur  tous  les  pas  de  Basile;  on  me  permettra  de 
n''en  pas  rapporter  un  seul  ^  L«  gardien  de  rÉgliâe  y 
rentrant,  la  nuit  déjà  fermée,  aperçoit  ce  jeune 
homme,  il  en  a  compassion,  lui  donne  l'hospitalité; 
et  satisfait  de  ses  réponses  il  le  met. en  état  d'entrer 
au  service  de  quelque  personne  considérable.  Un  cou- 
sin de  l'empereur  ^,  nommé  le  petit  Théophile  ^  à 
cause  de  sa  taille ,  fréquentait  ce  monastère  :  il  se  pi- 
quait d'avoir  à  sa  suite  les 'domestiques  les  plus,  grands. 

I  L'empereur  Constantin  Porphy-  Porphyr.  Fit,  Bas,  p.  140. — S.-Af.^ 
togénète,  Fit.  Bas,p,  i36-i46,ra-  ^  On  Theophilitzès ,   sarnommé. 

conte  avec  complaÎMnce  toutes  ces  Pœdenomenus ,  6  nai^8vop.evcc ,  01:^ 

bistoriettes.  — S.-M.  Théopkilisus ,  selon  Génésins,!.  4,^ 

'  Ô  Toû  BaotXtttc  MixÀiiX  xat  Bap'  p.  5,a.  r— .  S*'M.^ 
^ATOÛ   KaCaftfiic    ouyyeviiç.   Const« 


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l86  HI8TOI1LE   OU   BÀS-EMPI&S.  (An  85i.) 

et  les  raîéux  faits;   il  pread  Basile  à  sou  service ,  el 
après  avoir  éprouvé  son  iateUigenee»  sa  vigueur  et  soii 
zèle,  il  le  fait  son  écuyer  %el  lui  donne  le  nom  de 
Cépkalas  ^,  parce  qu'il  avait  la  tète  fort  grosse, 
^^  Céphalas  suivit  Théophile  dans  le  Pélopomièse^eîi 

'^fche*"*  l'impératrice  l'epvoyait.  Il  s'acquit  dans  cette  proviite^ 
plus  dé  considération  que  son  midire;  et  lorsque  Théo* 
phile  partit  pour  Gonstantinople,  après  s'être  acquitté 
de  la  commission  dont  il  avait  été  chargé  »  Basile  ^qu^il 
laissa  malade  à  Patras,trouva  lès  plus  grands  secours 
dans  la  générosité  d'une  veuve  extrêmement  riche, 
nommée  Daniâis.  Non  contente  de  lui  avoir  procuré 
la  santé,  elle  le  combla  de  richesses,  lui  donoa  trente 
esclaves,  lui  forma  un  équipage  et  un  train  honnête, 
persuadée  qu'iin  homme  de  ce  mérite  ne  pouvait  mau* 
quer  de  parvenir.  Elle  ne  lui  demanda  pour  toute  re* 
connaissance  que  d'adopter  pour  son  frère  un  fHs  uni<< 
que  qu'elle  avait,  et  de  contrihuer  à  son  avancement, 
Basile,  devenu  presque  aussi  opulent  que  son  maître^ 
continua  de  le  servir  avec  le  même  zèle  qu'auparavant. 
Il  acheta  de  grandes  terres  en  Macédoine,  et  boras 
toute  sa  vanité  à  enrichir  sa  mère  et  sa  Êimillet 
XXI.  Quelque  temps  après  son  r^our,  Atitigone,  fils  à» 

sruy^^de  Bardas  ^  et  neveu  de  l'impératrice,  fit  un  grand  fcstia 
Veropcrçur,  ^^^  priucipaux  seigucurs  de  la  cour.  Il  invita  les  dé- 
putés-des  Bulgares  qui  se  trouvaient  pour  lors  à  Coib 
stantin6pIe,ou  le  roi  des  Bulgares  avait  toujours  des 
résidents  en  temps  de  paix.  Ces  barbares  vantaient  la 
force  d'un   de  leurs   domestiques,   qui,  disaient -ikj 

»  npwTOffrpaTop. —  S.-M.  3  pgtrice  et   graird  donw*^»*!'^  ' 

*  Voyez  Syméon  le  logothète»      ^«rpixic;  ^o^asotmoc    t&v    «X*^***' 
Ckron.  p.  434.  —  S.  M.  —S.-M, 


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(Att  &5i.)  UVRK  LXX.  MtCHBL   IH.  187 

n'avail  pas  encore  trouvé  scni  puretl  à  1«  lutte,  Tkëo- 
phihy  qui  citait  du  ftstrn^  crut  8e  laire  honneur  eu 
gageant  contre  eux  que  œ  lutteur  invinciUe  ne  tien- 
drait'pas  contre  un  de  ses  gens.  On  fiiit  venir  dan$  la 
salle  Basile  et  le  Bulgare.  Basife  l'eut  à  pcÂne  saisi,  quHl 
le  terrassa  aji;'  grand  étonnement  de»jco«Tives.  Cet  eiç- 
ploît  valut  à  Basile  une  grande  victoire  dai>&  Tesprît 
du  peuple.  On  ne  parlait  à  Constantinople  que  de  sa 
force  extraordinaire.  L'empereur  en  voulut  faire  usage 
pour  lui-même.  Il  avait  acheté  un  cheval  parfaitement 
beau,  maia  iQdomptable;aueun  de  ses  éeuyers  n'osait 
le  monter,  et  l'empereur,  dans  son  impatience ,  com- 
manda de  lui  couper  les  jarrets.  Basile,  qui  se  trouvait 
présent  à  la  suite  de  son  maître,  s'dffirit  à  le  monter 
et  à  lô  réduire.* On  la  prit  au  mot,  et  il  tint  parole. 
L'empereur,  charmé  de  sa  vigueur  et  de  son  adresse,  le 
demajoda  surJe-champ  à  Théophile;  il  lui  donna  place 
entre  ses  éouyera»  et  bientôt,  ayant  tait  l'épreuve  delà 
supériorité  de  ses  talents,  il  le  mit  à  leur  tête. 

Les  Sarrasins  continuaient  de  fournir  des  secours    ^*  *^- 
aux  Paulidens ,  qui  ravageaient  le  Pont  et  la  Cappa-  ExpédiOon 
doce»  Tbéodora,  dout  les  troupes  avaient  si  mal  réussi  ^if^î|^\ 
en  Asie  aoqs  la  conduite  de  Théocliste,  espéra  plus  de  Çi»rQii.w»i). 
succès  dans  une  province  plus  éloignée,  où  les  Sarra- 
sins ne  s'attendaient  pas  à  être  attaqués»  Une  flotte  de 
trois  cents  vaisseaux  alla  sous  trois  commandants  ahor- 
der  à  la  cote  d'Egypte  \  Un  des  généraux,  suivi  de 
cent  voiles,  força  l'entrée  du  port  de  Damiette.  Entre 
le   port  rt  la  ville  était  une  passe  ou  barre ,  où  l'on 

X  iJboDlfftndî  y  Ckron.  arab.,  p.  (aa  jaio  85a— 1 1  juin  853).  J«  iTai 
1 70 ,  plaoe  cette  descente  des  Grecs  ancaa  détail  sur  eette  gacf  re«  — r. 
«9  Egypte  en  Tas  a3S  de  l*bcgire      S.-M. 


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i88  HISTOIRE   DU   BAS-EMPIRE,  (An  9$^.) 

n'avait  de  Teau  que  jusqu'à  la  ceinture.  Lef  Grecs  s^ 

jetèrent  et  trouvèrent  la  ville  déserte.  Ils  la  pillèrent  et 

y  mirent  le  feu.  Les  habitants  se  sauvaient  à  Mesra , 

capitale  du  pays  K  Ils  l'abandonnèrent  encore  à  l'ap* 

proche  des  Grecs,  qui,  les  ayant  poursuivis  jusque-là, 

pillèrent  aussi  c#tte  grande  ville.  Ils  en;unenèrent  siiL 

cents  femmes.  Une  infinité  d'autres  avaient  péri  daos 

la  fuite  avec  leucs  en&nts. 

jLs  S53.        La  conversion  des  Bulgares  est  l'événement  le  plua 

xxin.      mémorable  de  ce  règne  ;  voici  quelle  en  fut  l'œcasion. 

du  roi  des   Lcur  roî  Bogoris  ^,  persuadé  que  le  temps  était  venu 

CedF.t.  a,p.  de  venger  les  Bulgares,  tandis  que  l'Empire  était  gou- 

^^^if^'    verné  par  une  femme,  envoya  lui  déclarer  la  guerre^. 

^'462*^'  Théodora  répondit  avec  courage  que,  s'il  entrait  sur 

^°*^'*«**  les  terres  de  l'Empire ,  elle  irait  au-devant  de  lui,  et 

i56.       qu'elle  espérait  le  vaincre  ;  mais  que ,  si  elle  était  vain- 

ificoiao.    eue,  il  aurait  encore   à  rougir  de  n'avoir  combattu 

Theoph.  p.  qu'une  femme.  Le  roi  barbare,  étonné  d'une  réponse  si 

'^VoS.^**   fière,  conçut  de  l'estime  pour  cette  princesse  et  re- 

*^9,^44of'  ïiouvela  le  traité  de  paix.  Dans  le*  cours  de  la  négo-? 

^"^^534*    ciation ,  l'impératrice   offrit   à  Bogoris  telle    somme 

Gène».  1.  4,  d'argent  qu'il  voudrait ,  pour   la  rançon  d'un  moine 

Amiai.'Mi-  nommé  Théodore  Cupharas*,  depuis  long-temps  pri- 

Annai.  Ber-  sonuier  cu  Bulgarie,  dont  elle  respectait  la  sainteté. 

Sigeb"  chr.  Bogoris  couvint  d'en  faire  un  échange  avec  sa  sœur; 

Boiu^d.  ^  in  ®W®  ^vait  été  prise  trente-huit  ans  auparavant,  sous  le 

'^'^'^fcb!^^'"  règne  de  Léon  l'Arménien,  et  était  retenue  dans  la 

X  J*aî  parlé  de  cette  ▼Die,  t.  il,  gothète,  Chron.  p.  435.  —  S.-M. 
p.  377  ,  no  t.  I  ,  liv.  Lviii  )  S  66.  ^  Il  paraît  même,  par  ce  qae  dit 

. — S.9M .  Syméon-le-Logothète,  Chron.  p.  43  5, 

?  Àpx<^^  BouXf  aptoç  Btt^optc.  Il  est  qa'ii  commit  quelques  hostilités  dans 

popimé  Bogarù ,  par  Syméoq  le  lo-  la  Tbnc«  et  la  Mucédoine,  —  S.-M. 

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(An  S53.)  WVRK  IXX.  MIGHKI.  III.  l8gi 

cour  deG>nstantinople,  sans  que  Mortagon  ni  son  suc-   Dncinge, 
cesseur*se  fussent  mis  en  peine  de  la  délivrer.  Cette  p*"*!©"!"'. 
princesse,  au  berceau  lorsqu'elle  fut  prise,  avait  été  ?"^°in^[ 
baptisée  et  élevée  dans  la  religion  chrétienne,  dont  elle  •<»*e»-^^^«- 
était  très-instruite.  De  retour  auprès  de  son  frère,, elle  rienfy.Hwt 

'^  '  ecclés.  l.dOy 

ne  cessait  de.  lui  en  faire  l'éloge  et  de  l'exhorter  à  «rt.  49  •» 
l'etnbrasser,  et  à  renoncer  aux  illusions  de  l'idolâ- 
trie. Le  moine  Théodore  avait  déjà  jeté  dans  l'esprit 
de  Bogoris  quelques,  semences  du  t^hristianisme;  sa 
sœur  acheva  de  l'ébranler,  et  le  Ael  semblait  agir  de 
concert  avec  la  princesse.  Une  maladie  contagieuse 
s'étant  répandue  dans  la  Bulgarie,  Bogoris  eut  re- 
cours au  dieu  de  sa  sœur,  et  ce  fléau  cessa  presque 
aussitôt.  Il  était  convaincu;  mais  la  crainte  de  sou- 
lever ses  sujets,  «ntêtés  de  leurs  superstitions,  le  re^* 
tenait  :  il  fallut  l'effrayer  pour  le  faire  plier  sous  le 
joug  de  l'Evangile.  Il  faisait  peindre  une  galerie  dans 
son  palais^  par  le  moine  Méthodius  ',  qui  passait 
pour  le  meilleur  peintre  de  ce  temps-là.  Ce  prince, 
naturellement  dur  et  féroce ,  lui  recommanda  de 
faire  choix  d'un  sujet  terrible.  Méthodius  représenta 
le  jugement  dernier^  et  les  supplices  des  réprouvés, 
avec  les  circonstances*  les  plus  capables  d'inspirer  la 
frayeur.  L'explication  de  ce  tableau  glaça  d'effroi  Bo- 
goris lui-même;  il  commença  à  craindre  Dieu  plus 
qeu  ses  sujets.  Il  fît  savoir  à  Théodora  qu'il  n'atten- 
dait qu'un  ministre  de  la  religion  chrétienne  pour  re- 
cevoir le  baptême;  elle  lui  envoya  un  archevêque,  qui 


•  z  Beaaconp  d'aateurs  modernes      Cyrille,  dont  il  a  été  question  ci-det^ 
ont  oiii  que  ce  personnage  était  le      §  i5. — ^S.-M.  * 

que  Méthodius  ,frère  de  saint 


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XXIV. 

BtdeU 
nation. 


190  fitôTOl&e    INJ    BAS'EMPiat.  (An  «5).) 

\e  bapttôk  pendant  k  aiiit,  et  lui  donm  le  tMm  de 
Michel'. 

Malgré  les  précatitiotisdeBogaris  poar  tenir kchose 
secrète ,  le  bruit  s  en  .répaadit  bientôt  dafts  tout  le 
pays.  Les  Bulgares  se  révoltât;  pour  conserva  leuxs 
'dieux,  ils  veukait  se  défaire  de  leur  roi.  Un  nombre 
innombrable,  de  'séditieux  vient  attaquer  son  palais  : 
plein  de  courage  ^  et  fortifié  par  le  secours  du  ciel,^ 
portant  une  croix- sur  sa  poitrine  «  il  aort  à  lu  tête  de 
quarante-huit  de  ses  €omestiques ,  fond  sur  les  rebelies, 
et  ^oite  Feflroi  sur  cette  multitude  tumultueuse;  îb 
prennent  la  fuite,  et.,  revenus  de  leur  épouvante,  ils 
se  rendent  à  la  reiî^(Hi  victorieuse»  LHmpératriee  iour 
envoie  Cyrille,  qui  devient  l'apôtre  des  Bulgares  comne 
il  l'avait  été  des  Khasars  et  [comnie  il  le  fut  plus 
t{|rd  ^  ]  des  Moraves.  (  La  conversion  des  Bulgares  iut 
suivie  d'un  nouveau  traité  d'allianœ  avec  cette  nation» 
Tbéodora ,  pour  le  rendre  plus  durable^  y  joignit  la 
cession  d'im  territoiire  de  peu  d'étendue,  mais  désert^ 
qui  était  voisin  de  là  Bulgarie;  ce  «anton  ^'étendait  de« 
puis  un  lieu  nommé  Sidéras  jusqu'à  Develtus  1  c'est 
le  territoire  qui  s'étend  au  noAl  du  golfe  de  Bovrrgaz 
jusqu'à  Yama,  et  qui  ccmserve  le  nom  de  Zogom^  que 
les  Bulgares  lui  ont  donné  ^.]  Lés  Annales  françaises 

X  j4  émise  du  nom  de  Tempefeur,  des  mùsidkmfeîres  clies  les  Bnlgaics» 

dit  le  continuateur  de  Théophane,  —  S.>M. 

p»  toa.  Kjcrà  rè  Uvfut.  «0  BaoïX^Mt^ .  ^  Trjv  àito  xtr  St#up«ç ,  taïuTTic  H 

—  S.-M.    ^  ton  éptov  TU7x<KYou««c  i»«»pwtt*v  x% 

«  La  conversion  des  Kbazars  est  xal  aùràv  o^pi  rô;   AsSeXtcù,  TÎnç 

placée  ordinairement  en  Tan  847  et  outw  xa>.eTTat  iir^tù^a.  wap' aùroîç. 

celle  des  Moraves  en  Tan  861 .  Voyez  Cont.  Theoph.  p.  i  oi.Yoy.ao^si  la 

ci-devaat,  $  x5,  p.  176,  not.  4.  chroiBiiae  de  ^«néon^e-Logothèt^ 

Cest  vers  la  même  ép«qae  qw  les  p.  44o«  et  Gédrcmis,  t.  »^  p.  S^i.  !• 

rois  francs  envoyèrent  de  lenrcèté  eto\AqBM\%mom4mZ<ikgùraÙAèaam 


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(An  «53.)  UVRE    LXX.  MiCHKL   III.  igi 

rapportant  que  Louisi^  roi  dû  Germanie ,  Youlut  aiussl 
contribuer  à  la  conversion  des  Bulgafbs*  Il  était  Ué 
d amitié  a?ec  Bogoris  %  et,  sur  sa  demande,  il  lui 
envoya  des  éveques  *  et  des  prélats;  mais  ces  ministres 
trouvant  dans  le  pays  d'autres  missionnaires  déjà  en- 
voyés, par  le  pape,  ne  voulurent  pas  entrer  en  concur- 
rence a^ec  eux,* et  retouriiàrent  en  Germanie*  Dans 
la  6uile»  cette  conquête  Spirituelle  causa  beaucoup  de 
jalousie,  et  de  vives  contestations  entre  Rome  et  Con* 
stantii*ple^ 

Michel  n'avait  eacore  que  quinze  ans,  mais  il  Aait    A»  «54. 
prématuré  pour  la  débauche.  Emporté  par  un  tempé<-  Maril^*  de 
raïamit  fougueux ,  il  n'était  re||enu  ai  par  la  religion ,  j^*^^^ 
ni  par  l'autorité  de  sa  inère  et  de  ses  tuteurs,  bt  par      ^^u/ 
la  ciainte  de  h  honte  publique  attachée  aux  désordres   Georg.  p.' 
des  princes.  Il  devint  éperdûment  amoureux  d'Ëudocie^         ^ 
fille  d'Inger,  grand  trésorier,  qui  était  de  l'illustre  fa* 
mille  des  I^artinaces  ^.  La  beauté  de  cette  fille  embrasa 
le  jeune  prince ,  et  ses  artifices  séducteurs  le  tinrent 
enchaîné»  Ge  fut.en  viûn  que,  pour  4e  retirer  de  cette 
habitude  criminelle^  sa  mère  lui  fit  épouser  une  autn 
£udocie^  fille  de  Déçapolite^  auqu^el  les  historiens  ne 
donnent  aucub  titre,  mais,  qui  doit  cependant  avoir 

à  cette  contrée  à  cause  des  montagne»  bonne  (Radespona),  pour  lai  de«> 

^»'ytronTent.C»ftelflrt.le»Bn8xl*  ntoiàet  des  prédicateurs  chrétiens. 

ce  nom  en  laogue  shivé.   • —  S.-M.  ^  |^^ 

1  Les  historiens  de  France  don-  ,  g^j^^  ,^^  ^^^^1^^  ^^  p^j^^   ^^. 

V^  J^ ,     *^     .1     1        .1  ooo ,  1  evéque    Ermannc  avec  des 

des  Baléares  ;  il  placent  U  conver-  '         / 

*ion  dcM^alloti  en  86t.  Le  toi.  pt^s^t  des  diwres.^S.-UÎ. 

|k>g«cis  envoya  à  Rome,  au  «iÂs  ^  Voyez  ci-après,  Uv.  lxxi,  $  14.^ 

d  août  866 ,  son  fils  et  plusieurs  des  —  S.-M.                             ^ 

principaux  seigneurs  de  sa  mniûii.  4  Toyiïs ,  ati  sujcft  de  «ette  l&mifhv 

l^roi  des  Bulgares  avait  envoyé  une  d-devanl,  p»-i  li ^  not.  i,  Itr,  fcxtx» 

amliassade  au  roi  Louis^   à  B.atis«      g  ^o. S.-M. 


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XXTI. 

Troubles 


19a  HISTOIRE    DU    BAS-EMPÏRK.  (An  $54.) 

été  d'un  rang  supérieur  à  Ingep  Michel  accepta  cette 
Ëudocie  pbui'  femme,  et  garda  poilr  maîtresse  Tâiitre 
Ëudocie ,  qu'dn  distingue  par  le  surnom  d'Ingéi-irtè. 
Le  libertinage  du  prinice  troubla  la  trancJuiUité  de 
dan»  ic     la  Gour;  elle  devint  orageuse ,  pleine  d'intrigues  et  de 
Léo.  p.  460^  noirs  forfaits.  liCS  gens  de  bien  les  plus  afféctiohtiés 
c^!tfa,jp.  *^  souverain  furent  les  victimes  des  îiiiibitieux  et  des 
^^44       fourbes,  les  vrais  ennemis* de  leur  maître  qu'ifs  tra- 
2ton.i.  i6,t.  hissaient' en  àervant  ses  passions.  Damien  ,    premier 
i57,  i58.   chambellan  du  prince ,  et  bien  avant  dans  sa  coffiance, 
Uànkss.  p.  se  laissa  gagner  par  Bardas ,  depuis  huit  ans  éloigné 
^  Cont.      de  la  cour ,  et  qui 'devait  bientôt  le  détruire  lui-même. 
iS*S*sêqi  II  obtint  son  retour  d'abord  à  Consfantinoplé ,  ènsttite 
^^org.^P    ^"  palais,  où^Bardas  se  fit,  par  ses  libéralités^  autant 
G«ies  ^i^^4  ^®  créatures  qu'il  y  avait  d'of&diers.  Il  rt'aâpirait  à  rien 
p.4i,4a,43.  moins  qu'à  l'empire,. et,  pour  y  parvenii',  il  ne  fallait 
qu'écaçter  d'auprès  de  l'empereur  ceûx4]ui  avaient  as- 
sez de  génie  pour  pénétrer  ses  mauvais  desgeins,  et 
assez  de  zèle  pour  s'y  opposer.  Michel ,  demeuré  seul , 
devait  être  aisément  renversé.  Bardas  profita  d'abord 
d'une  brouillerie  survemie  entre  Théoctîste  et  IVIanuel  ; 
il  se  joignit  à  Tliéootiste  pour  rendre  suspect  au  prince 
le  plus  fidèle  de  ses  tuteurs.  Manuel ,  faussement  ac- 
cusé, prévint  avec  sagesse  les  suites  funestes  de  la  ca- 
lomnie; il  se  retira  de  la  cour,  pour  vivre  en  simple 
particulier  dans  sa  maison ,  séquestré  de  toUte  afiFaire , 
et  n'allant  au  palais  quejors  qu'il  y  était  mandé  pour 
quelque  délibération  imposante.   Il  changea  dans  Ja 
suite  cette  maison  en  monastère,  et  y  mourut  dans  la 
pratiqile.des  vertus  chrétiennes, 
xxvn.  Après  s'être  servi  de  Théoctistè  pour  éloignef  Ma- 

Th^ctbte.^  nuel,  Bardas  entreprit  de  se  défaire  de  Théoctistè  même. 


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(lin  854)  LIVRE   LXX.  MICHKL   ïlt.  IC)3 

Il  engagea  Damien  dans  ce  complot ,  en  lui  représen- 
tant que,  l'empereur  était   en  âge  de  régner  par   lui- 
même;,  qu'il  était  temps  de  le  tirer  de  resclavage  où 
le  retenait  sa  mère,  gouvernée  par  ce  tuteur  impérieux; 
Damieu ,  homme  de  peu  d'esprit ,  <jui  n'avait  d'autre 
sentiment  que  celui  d'une  aveugle  tendresse  pour  son* 
prince,  se. laissa. facilement  persuader.  Un  coup  d'au- 
torité que  Théodora  venait  de  faire  indisposa  le  jeûne 
prince  contre  elle.   Son  gouverneur  était  un  homme 
sans  mérite,  placé  par  l'intrigue  dans  ce  pos)e  impor- 
tant :  il  n'avait  réussi   qu'à  corrompre  son  élève  par 
l'exemple  de  sa  vie  déréglée,  et  par.  la  bassesse  de  ses 
inclinations. .  L'impératrice ,  long -temps  dupe  de  son 
hypocrisie,  et  prévenue  par  des  témoignages  infidèles^' 
jusqu'à,  lui  confier  l'éducation  de  son  fils,  n'avait  pu 
s'en  défaire  lorsqu'elle  eut  reconnu  son  mauvais  choix. 
Il  s'était  attaché  les  plus  puissants  de  l^  cour ,  et  sur- 
tout son  élève  par  les  plus  criminelles  complaisances. 
Michel  qui  sortait  de  ses  mains,  trop  content  de  ses 
services,  voulait  l'élever  aux  premières  dignités;  mais 
l'impératrice  s'arma  cette  fois  de  fermeté  pour  s*y  op- 
poser.  C'était,  disait-elle,  avilir  le  prince  et  V empire 
que  (T abandonner  à  des  mains  indignes  les  grands 
emplois,  qui  ne  se  soutiennent  dans  leur  éclat  que 
par  le  mérite  de  ceux  quiles  exercent.  Bardas  profita 
decetterésistance  pour  animer  l'empereur  contre Théo- 
ctiste;  détait  lui,  disait^il,  qui  faisait  agir  et  parler 
V impératrice*  A  leurs  y^ux,  Michel  était  et  serait, 
toujours  un  enfant;  Une  manquait  à  Théoctiste  que 
le  nom  d'empereur,  qu'il  était  sur  le  point  de  pren- 
dre ;  le  complot  était  formé ,  Théoctiste  allait  épou- 
ser Théodora,  ou  l'une  de  ses  filles;  on  devait  cre- 

Tome  XI II,  l3 


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194  HISTOIRE    DU    BAS-EMPIRE.  (An  854.) 

ver  les  yeux  à  Michel ,  eile  tenir  renfermé  dans  un 
monastère^  si  Von  jugeait  à  propos   de  le  laisser 
vivre.  Il  n'en  fallait  pas  tant  pour  allumer  la  colère 
du  jeune  empereur.  La  mort  de  Théoctiste  est  arrêtée  ; 
Bardas  presse  l'exécution.  On  convient  de  le  tuer  lors- 
qu'il viendrait  à  l'appartement  de  l'impératrice  :  l'em- 
pereur voulut  être   lui-même  témoin   du  meurtre  et 
donner  le  signal.  Lorsqu'il  sut  que  Théoctiste  appro- 
chait, il  s'avança  au  milieu  de  ses  gardes,  suivi  de  Da- 
mien  et  de  Théophane  le  Pharganite  ^  ^  et  se  mettant 
au-devant  de  Théoctiste,  qui  tenait  en  ses  mains  des 
papiers  qu'il  allait,  selon  sa  coutume,  communiquera 
Théodora  :  ji  qui  vas-tu,  lui  dit-il ,  rendre  compte  de 
mes  affaires?  C'est  à  moi  qu'il  appartient  de  les 
entendre.  Lis-moi  ces  papiers,  Théoctiste  tout  trem- 
blant, en  ayant  fait  la  lecture ,  reçoit  ordre  de  retour- 
ner chez  lui.  A  peine  a-t-il  fait  quelques  pas,  qu'il  en- 
tend le  signal  de  sa  mort  ;  tuez ,  tuez ,  criait  Michel  : 
parole  horrible  et  inouie  dans  la  bouche  d'un  prince. 
Théoctiste,  qui  n'était  pas  accompagné,  double  le  pas, 
et    fuît  vers  le  cirque.  Bardas  le  devance,  et  le  pre- 
nant par  les  cheveux,  lui  frappe  le  visage  à  coups  de 
poing.  Maniacès,  commandant  des  gardes  de  nuit  *, 
étonné  de  voir  traiter  si  outrageusement  le  grand  lo- 
gothète,  veut  le  défendre.  Bardas  écarte  cet  officier, 
en  lui  disant  que  c'est  un  ordre  de  l'empereur;  et,  comme 
le  peuple  accourait  en  tumulte,  il  tire  son  épée,  me- 
nace de  tuer  le  premier  qui  osera  prendre  le  parti  an 
coupable,  ordonne  à  ses  satellites  de  le  mettre  eu  pièces. 

«  Il  a  été  déjà  question  de  cette  >  Ô  ^pou'y^apioc  t^  pt'yX'^  *  ^' 

ville,  ci-devant,  p.  99,  not.  3,liv.      viaxijç.  Georg.   Ckron,  p.  533.  — 
i.itix,  §  To.  —  S.-M.  S.-M. 


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(Aa  854.)  LITRE   LTLX.  MICHCL   111.  IqS 

L'empereur  arrive  à  l'instant  et  réitère  le  même  ordre  • 
mais  aucun  n'osant  mettre  la  main  sur  un  personnage 
si  respectable,  on  le  conduisit  en  prison,  sous  prétexte 
de  prendre  du  temps  pour  le  juger  selon  les  formes. 
Dès  que  l'empereur  §at  de  retour  au  palais,  comme  on 
craignait  que  Fimpératrice  ne  fît  élargir  le  prisonnier 
au  moment  qu'elle  apprendrait  sa  détention ,  on  envoya 
un  assassin  qui  le  massacra  dans  la  prison.  Manuel 
apprenant  ce  meurtre,  et  s'attendant  à  ui^  pareil  traite- 
ment, loin  de  prendre  de  l'efiproi,  alla  lui-même  au- 
devant  de  la  mort  qu'il  avait  tant  de  fois  affrontée  dans 
les  batailles;  et  ayant  rencontré  Bardas  :  Courage,  lui 
dît -il,  ne  remets  Vépée  dans  le  fourreau  qu  après 
avoir  sacrifié  toutes  tes  victimes.  Cette  hardiesse  im- 
posa au  lâche  Bardas:  il  n'osa  pas  attaquer  un  homme 
qui  méprisait  ses  attaques. 

Théodora  détestait  son  frère,  dont  elle  connaissait    ,"^i"- 

'  ^  Theodorft 

la  noirceur.  Manuel  et  Théoctiste  avaient  toute  sa  con-    q«»"«  *« 

11        1  1  •!  1  1  gouverne- 

fiancé.  A  la  nouvelle  de  cet  horrible  assassinat,  elle       ment- 

accourt  tout  éplorée  à  l'appartement  de  son  (ils,  elle 
l'accable  des  plus  sanglants  reproches,  et  voyant  Bar-  . 
das  paraître  à  ses  yeux  :  Monstre  dUngratitude  et  de 
perfidie^  s'écrie-t-elle ,  tu  méritais  la  mort  ;  je  ne  fai 
donc  épargné  que  pour  la  perte  de  celui  dont  les 
conseils  m'ont  engagée  à  te  laisser  la  vie?  Mon 
gouvernement  était  sans  tache;  c'est  toi  qui  fas 
souillé  de  sang^  ëest  toi  qui  mets  le  poignard  aux 
mains  de  mon  fils.  Tremble,  malheureux;  V exem- 
ple que  tu  viens  de  donner  tournera  contre  toi- 
même.  Puisse  le  ciel  te  punir  seul  y  et  ne  pas  confon* 
dre  ta  tête  avec  celle  de  mon  fils  que  tu  instruis 
aux  assassincOs!  Elle  sort  en  le   chargeant  des  plus 

i3. 


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Ï96  HISTOIRE   DU   BIS-EMPIRE/  (j^^  554) 

terribles  imprécations;  ensuite,  revenue  à  elle-même-, 
elle  fait  réflexion  qu'après  une  si  violente  invective , 
il  ne  lui  reste  d'autre  parti  que  la  retraite.  En  effet , 
dans  ce  moment- là  même  on  prenait  dans  le  conseil 
du  prince  des  mesures  pour  la  dépouiller  du  gouver- 
nement. Mais  cette  fière  princesse  prévint  Bardas;  elle 
fait  assembler  les  sénateurs,  et  leur  dit  :  «  Avant  que 
a  de  me  décharger  du  soin  des  affaires,  j'ai  voulu  vous 
«  instruire,  de  l'état  où  elles  se  trouvent  aujourd'hui^ 
<c  Je  laisse  dans  le  trésor  cent  quatre-vingt-dix  mille 
«  livres  pesant  d'or,  et  trois    cent  mille  livres  d'ar- 
ec gent  :  ce  sont  les  épargnes  de  mon  mari  et  les  mien- 
«  nés.  Je  ne  compte  pas  le  mobilier ,  qui  est  immense. 
«  J'ai  voulu  vous  en  instruire  pour  prévenir  les  dis- 
<c  cours  de  ceux  qui  pourraient,  après  ma   retraite, 
«  m'iniputer    d'avoir  laissé   l'Etat  épuisé  ».   Elle  fait 
alors  entrer  les  receveurs  du  trésor,  qui  attestent  la 
vérité  de  ses  paroles,  et  les  confirment  par  leurs  re** 
gîstres.  Après  cette  vérification,  elle  remercie  les  sé- 
nateurs des  conseils  dont  ils  l'ont  aidée  pendant  son 
administration,  envoie  à  l'empereur  tout  ce  qui  con- 
cerne  le  gouvernement ,   et  sort  du   palais.   Aussitôt 
Michel,  qui  ne  cherchait  plus  qu'à  la  mortifier,  lui 
renvoie  les  princesses  ses  filles,  ïhècle,  Anne  et  Ana* 
stasie;  et,  pour  la  priver  de  celle. qu'elle  chérissait  avec 
prédilection ,  il  fait  enfermer  Pulchérie  dans  un  mo- 
nastère. 
x3Lir.  Bardas,  revêtu  de  la  dignité  de  logothète  à  la  place 

chimbdhm!  ^^  Théoctistc^,  ne  voyait  plus  auprès  de  l'empereur 
que  Damien  qui  pût  lui  faire  ombrage.  Dès  qu'il  n'eut 
plus  besoin  de  lui  pour  ruiner  les  autres,  il  ne  le  re- 
garda plus  que  comme  un  rival  incommode,   et  sut 


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(An  854.)  LIVRB   LXX.  MIGUEL   IJI.  tgj 

apprêter  la  calomnie  avec:  tant  d'habileté  qu'il  parvint 
à  le  rendre  odieux  au  prince.  Damien  perdit  sa  charge, 
qui  demeura  quelque  temps  vacante.  Un  poste  si  im- 
portant fut  l'objet  de  toutes  les  intrigues;  Bardas  s'ef- 
forçait d'y  placer  une  de  ses  créatures  ;  chaque  cour- 
tisan sollicitait  pour*  celui  dont  il  espérait  davantage. 
L'empereur  les  trompa  tous,  il  préféra  Basile,  déjà 
grand-écuyer ;  et  Bardas,  mécontent  de  ce  choix,  ne 
put  s'empêcher  de  dire  à  ses  partisans  :  JVous  auons 
écarté  le  renard  pour/aire  place  au  lion  qui  nous 
dévorera  tous. 

On  ne  fut  pas  long -temps  à  s'apercevoir  que  l'im-    AwSSS. 
pératrice  ne  se  trompait  pas  sur  le  compte  de  son  fils.   D^^f^^, 
Tant  de  trésors  furent  bientôt  dissipés.  Jamais  la  puis-  ^«  Miciiei. 
sance  souveraine  n'avait  été  plus  horriblement  avilie.    544 ,  545!*' 
Un  empereur  de  seize  ans,  né  avec  les  inclinations  les       55^  ^' 
plus  basses,  élevé  par  un  homme  qui  ne  lui  avait  ap-  p°"5''^,6** 
pris  que  le  mal ,  devenu  son  maître  au  moment  où  ses  ^3^^^^ 
passions  se  déchaînaient  avec  violence ,  se   livra-  sans  ^ '«a,  io3. 
reserve  aux  excès  de  la  dissolution  la  plus  outrée.  Aux       ^9^. 
premiers  signes  qu  u  donna  de  son  caractère ,  tous  les  Cout.  The- 
libertins   de  l'Empire  accoururent  autour  de  lui  et  ?o8,^iiaet* 
firent  du  palais  un  lieu  de  débauche.  Les  repas  pro-  synî^oD, 
longés  jusqu'à  l'ivresse,  les  intrigues  scandaleuses,  les  c^^^p^?^* 
entretient   licencieux  ,  les  courses  de  cirque ,   telles   p-  »5i  et 
étaient  les  occupations  les  plus  sérieuses  de  l'empe-  G«nes.  1.  4>. 
reur.  Ses  jeux  étaient  des  farces  impies,  dans  lesquelles 
une   bouffonnerie   sacrilège  Contrefaisait  nos  saintes 
cérémonies  et  même  nos  plus  augustes  mystères.  Cha- 
cun de  ses  courtisans  portait  le  titre  d'un  métroDo- 
litain;  il  prenait  lui-même  le  nom  d'archevêque  de 
Colonée.  Le  patriarche  était  un  certain  Théophile, 


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198  HISTOIRE    DV   BAS'EMPIHE.  (lu  855.} 

effronté  blasphémateur,  que  l'empereur  avait  nommé 
Minière^  c'est-à-dire  aimable  et  charmant j,  et  que 
toute  la  ville  nommait  le  Parc  y  à  cause  de  sa  physiono- 
mie et  de  ses  mœurs.  Cette  troupe  exécrahie  se  faisait 
un  divertissement  d'outrager  Dieu  même  dans  la  per- 
sonne du  saint  patriarche  Ignace.  Lorsque  ce  prélat, 
à  ta  tête  de  son  clergé,  fais£^t  des  processions  dans  la 
ville,  ces  misérables,  ayant  l'empereur  au  milieu 
d'eux,  allaient  à  sa  rencontre  montés  sur  des  ânes, 
comme  un  chœur  de  satyres,  jouant  des  instruments, 
chantant  des  chansons  infâmes  sur  le  ton  des  psau- 
mes ,  et  insultant  à.  la  piété'  des  fidèles  par  des  gestes 
obscènes.  Michel  n'épargnait  pas  même  sa.  mère. 
I^  décence  de  l'histoire  ne  me  permet  pas  de  raconter 
en  détail  l'insolence  pleine  de  bassesse  avec  laquelle 
il  la  traita  un  jour,  l'ayant  mandée  au  palais  pour 
recevoir,  disait-il,  la  bénédiction  du  patriarche.  Il 
suffit  de  dire  que  ce  patriarche  était  l'impudent  Théo* 
phile,  revêtu  des  habits  pontificaux  et  assis  à  côté  de 
l'empereur.  L'impératrice,  qui,  le  prenant  pour  Ignace, 
s'était  prosternée  à  ses  pieds,  l'ayant  reconnu  à  la 
grossièreté  brutale  avec  laquelle  il  l'insulta,  s'enfuit 
en  frémissant  d'horreur,  au  milieu  des  éclats  de  rire  de 
son  fils  et  de  ses  courtisans;  alors,  se  retournant  vers 
Michel  :  Tremble ,  dit-elle  ,yî&  impie  et  dénaturé! 
Dieu  ia  livré  à  ton  sens  réprouvé;  il  étendra  un 
jour  son  bras  pour  te  punir. 
^s^*'  j|„  L'occupation  la  moins  criminelle  du  jeune  empe- 
eirque.  rcur  était  les  courses  du  cirque.  Ck>nfondu  avec  les 
cochers,  et  portant  la  livrée  de  la  faction  bleue,  il  dis- 
putait d'égal  à  égal  une  indécente  victoire.  Il  était  si 
passionné  pour  ce  divertissement  qu'il  en  faisait  l'af- 


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(An  855.)  LIYRB   LXX.  •  MICHEL   lif.  I99 

faire  la  plus  importante  de  son  empire.  Un  jour  qu'il 
se  préparait  à  courir,  il  aperçut  des  flambeaux,  allu- 
mes sur  la  colline  de  Saint-Auxence',  au-delà  du  Bos- 
phore. C'était  un  signal  qui  annonçait  une  incursion 
de  Sarrasins.  L'empereur  alarmé,  non  pas  de  l'appro- 
che das  ennemis,  mais  de  la  crainte  que  les  spectateurs, 
distraits  par  ce  signal  menaçant,  ne  donnassent  pas  au 
spectacle  toute  l'attention  dont  il  était  jaloux ,  se  mit 
en  course;  et,  sitôt  quelles  jeux  furent  achevés,  il  or* 
donna  de  supprimer  à  l'avenir  tous  ces  signaux  im« 
portuns.  C'était  un  établissement  salutaire.  Dès  que  les 
Sarrasins  paraissaient  en  Asie,  la  nouvelle  en  était 
répandue  en  peu  de  temps  au  moyen  des  flambeaux 
placés  sur  des  lieux  élevés ,  dont  la  lumière  se  commu- 
niquait de  proche  en  proche  depuis  le  châtetiu  de 
Luie  ',  près  de  Tarse ,  jusqu'à  Constantinople  ^.  Sur 
cet  avis  les  habitants  des  campagnes  se  retiraient  dans 
les  places  de  sûreté.  Michel  aima  mieux  exposer  l'Asie 
entière  à  un  pillage  imprévu,  qiie  de  manquer  d'ap- 
plaudissements lorsqu'il  se  donnait  en  spectacle.  Une 
autre  fois,  comme  il  était  déjà  sur  un  char,  attendant 
le. signal  pour  partir  de  la  barrière,  un  courrier,  enr 
voyé  par  le  gouverneur  cfe  Bithynie,  vint  annoncer  au 
premier  secrétaire-d'état  que  l'émir  de  Mélitine^,  à  la 

*  Ô  Too  à'Yiou  AùÇtvTiou  poovo'ç.  ces  signaux  :  de  tonle  près  de  Torle, 
Cont.  theo^fa.  p4  143.  -^  S.-M.  au  mont  Argseiu,  xarà  tw  Àp^ixlov 

*  Épup.à  Tft  xai  ©poupiov  Tj  xarà  Pouvov ,  près  de  Césarée  en  Cappa- 
KcXixtav  Tapa»  wXnoMtiov  )tat  -yeiTO-  doce;  de  là  à  Isamar,  puis  à  iEgi- 
vcuv ,  oijTtù  xoiXcufxsvov  AouXov  îortv.  lût  9  ptûa  à  la  colline  de  Saint-Ma- 
Cont.  Theoph.  p.  laa.  Voye»  ce  mas ,  xarà  tov  Maf^avra  pouvov ,  puis 
que  j*aî  dit  de  ce  château,  ci-dev.  àCyrîzus,  ensuite  à  Mocilas,  puis  k 
p.  91,  net.  d,  lîv.  uux,  S  7. —  Saint-Anxcncè ,  au-delA  du  Bosphore 
S.-M.  en  Asie. — S.-M. 

3  Le  continuateur  de  Théophane,  4  On  rappelait  TÉmir  par  exccl- 

p.  laa  et  ia3,  trace  ainsi  la  ligne  de      leoce,  ô  A{&«p.  — S.-M". 


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aOO  HISTOIRE    DU    BAS-EMPIRE.  (An  855.) 

tête  d'une  armée,  avait  traversé  l'Asie  ',  et  qu'il  était 
à  Malagiiies.  Le  ministre  ayant  aussitôt  conduit  le 
courrier  à  l'empereur,  fut  terrasse  par  un  coup-d*œil 
terrible  :  De  quoi  £avises^tu ,  misérables,  lui  dit  Mi- 
chel, de  venir  rrCinterrompre  dans  un  moment  si 
critique?  Ne  vois-tu  pas  qU'il  s'agit  actuellement 
jfHHir  moi  de  prendre  la  droite  sur  ce  cocher,  et 
que  c'est  de  là  que  dépend  le  succès  de  ma  course? 
Son  impiété  bizarre  et  peu  Raccord  avec  elle-même 
mêlait  la  religion  à  ses  jeux  ;  il  allait  recevoir  le  prix^ 
dans  l'église  de  Blaquemes,  où  la  statue  de  la  Sainte- 
Vierge,  magnifiquement  parée,  lui  mettait  une  cou- 
ronne sur  la  tête.  Non  content  de  se  déshonorer  lui- 
même  ,  il  forçait  les  premiers  officiers  de  l'Empire  de 
prendre  les  livrées  du  cirque,  et  de  courir  avec  lui. 
Un  jour,  tombé  de  son  char,  il  pensa  périr  au  milieu 
du  cirque.  Quelquefois,  traversant  les  rues  de  Con- 
•stantinople  à  cheval,  avec  son  infâme  cortège  de  liber- 
tins, il  descendait  dans  la  cabane  d'une  pauvre  femme 
ou  d'un  artisan ,  prenait  tout  ce  qui  s'y  trouvait  de  vin 
et  de  viande,  apprêtait  lui-même  le  repas,  dressait 
la  table,  et  prenant  place  avec  la  famille,  buvait -et 
mangeait  avec  excès;  puis  il  s'en  retournait  ivre,  blâ- 
mant et  plaignant  beaucoup  ses  prédécesseurs  qu'un 
faste  orgueilleux  avait  privés,  disait- il,  des  plaisirs 
simples  et  populaires.  Ces  parties  de  débauché  lui  fi- 
rent donner  le  surnom  S  Ivrogne^  qui  le  distingue  entre 
les  empereurs  de  son  nom. 
^^^„  Rien  n'était  capable  de  le  réveiller  de  cette  honteuse 

Tlt^^"""^  léthargie.  Les  fléaux  dont  son  règne  fut  affligé  ne  pu- 


4  Le  thème  des  Thracésiens,  ro  Opoxmiov.  >—  S.*M. 


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(An  855.)  LIVRE  hXX.  MICHEL   III.  SOI 

rent  suspendre  un  moment  le  cours  de  ses  indignes 
plaisirs.  Outre  les  dépenses  énormes  qu'il  faisait  en 
clievaux,  l'argent  du  trésor  se  versait  à  grands  flots 
sur  les  cochers  du  cirque,  sur  des  femmes  perdues,  sur 
des  hommes  encore  plus  infâmes,  ministres  ou  com- 
pagnons de  ses  désordres.  Il  voulait  être  parrain  de  tous 
les  enfants  de  ses  cochers,  et  le  moindre  présent  qu'il 
leur  faisait  à  cette  occasion  était  de  cinquante  livres 
d'or;  souvent  il  en  donnait  quatre  fois  autant.  Une  bru- 
talité de  Théophile  fut  récompensée  dA^ent  livres  d'or. 
Pour  fournir  à  ces  folles  largesses,  il  fouilla  dans  le 
trésor  des  églises.  Il  pilla  les  autels,  fondit  les  statues 
tl'or  et  d'argent,  et  même  les  vases  sacrés.  Toutes  ces 
richesses  étant  bientôt  épuisées,  il  ne  lui  restait  de 
ressources  que  dans  ces  ouvrages  d'or  si  renommés, 
précieux  monuments  de  la  magnificence  de  son  père. 
Il  s'en  trouva  le  poids  de  vingt  mille  livres.  Peu  de 
temps  avant  sa  mort ,  il  ordonna  de  les  convertir  en 
espèces,  et  de  fondre  tout  l'or  et  tout  l'argent  de  la 
garde-robe  impériale.  Lorsqu'il  mourut,  il  en  avait 
dissipé  la  plus  grande  partie,  et  quelque^  jours  de  plus 
auraient  consumé  le  reste. 

Pour  comble  de  malheur,  sans  être  naturellement    Jln  856. 
cruel ,  il  le  devenait  dans  l'ivresse.  Ses  repas  finissaient     ^^^"^' 

,    .  .  Ordres 

le  plus  souvent  par  quelque  sanfiflante  tragédie.  Plein  cruHs  don- 
de  vin,  mais  altéré  de  sang,  passant  tout-a-coup  d  une  débauche. 
joie  tumultueuse  aux  accès  d'une  sombre  fureur,  sans 
aucune  raison,  même  sans  aucun  prétexte,  il  ordon- 
nait de  trancher  la  tête,  de  crever  les  yeux ,  de  cou- 
per les  pieds  et  les  mains,  de  brûler  vif.  Le  plus  sou- 
vent, on  se  dispensait  d'obéir;  autrement  mil  de  ses 
officiers  n'aurait  échappé  à  la  mort.  Mais  malheur  à 


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HOa  HISTOIRE  IKJ   BAS-KMPIRE.  (Ab  856.) 

ceux  qui  avaient  des  ennemis  à  la  cour;  l'ordre  était 
sur-le-champ  exécuté.  L'empereur^  revenant  de  son 
ivresse,  apprenant  le  lendemain  ce  qu'il  avait  coin- 
mandé  la  veille,  savait  bon  gré  à  ses  officiers  de  n'a- 
voir pas  obéi,  ou  s'affligeait  lorsqu'on  avait  suivi  ses 
ordres.  Mais  ce  regret  ne  l'empêchait  pas  de  se  mettre 
dès  le  même  jour  dans  le  même  état,  et  de  s'abandon- 
ner encore  à  une  ivresse  furieuse  et  sanguinaire. 
Bardas  était  le  plus  odieux  des  courtisans.  Il  décou- 
I  Barda»,    yrit  uuc  coujuAtion  tramée  contre  sa  personne  par  le 
i.eo     461  grand-écuyer.  On  devait  massacrer  Bardas  à  son  re- 
46a,  468,   tour  d'une  maison  de  campagne  qu'il  avait  près  de 
545.      Constantinople.  Les  conjurés  eurent  la  tête  tranchée 
p.i58.     dans  le  cirque.  Ce  fut  a  cette  occasion  que  Basile  rut 
Cont '^e^  revêtu  de  la  charge  de  grand<-écuyer,  et  Bardas  fait 
^^  109/**  '  curopalate  ;  le  crédit   de  celui-ci  croissant  toujours 
^4357436.^'  avec  son  zèle  perfide  à  servir  les  débauches  de  Tem- 
^3^63?    P^''®"'*r  ^^  ^®  ^^^  bientôt  après  élevé  au  rang  de  César. 
Nicet.vita  H  signala  sa  nouvelle  dignité  par  de  grandes  largesses, 
«onciixabb.  à  l'exemple  des  anciens  consuls.  Il  se  fit  promener  par 
Boiiand!m  la  villc  sur  un  char  brillant,  jetant  quantité  d'argent 

Theodora,  1 

II  fcb.     au  peuple. 

xxxT.  Theodora  fut  soupçonnée  d'avoir  foi^mé  le  complot 

renfermée  coutre  Bardas  ^  et  ce  frère  inhumain  lui  eût  volontiers 
*  ^ÊUes?*  ôté  la  vie;  elle  n'aurait  pas  trouvé  de  défense  dans  la 
tendresse -de  son  fils,  en  qui  l'abrutissement  de  la  dé- 
bauche étouffait  tous  les  Sentiments  de  la  nature.  Mais 
la  cirainte  de  l'indignation  publique  retint  Bardas  :  il 
se  contenta  d'enfermer  sa  sœur  et  ses  nièces.  Comme 
elle  revenait  avec  ses  filles  de  l'église  de  Sainte-Marie 
de  Blaquemes,  où  la  piété  là  conduisait  tous  les 
jours,  son  autre  frère  Pétronas  les  enleva  et  les  trans- 


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(An  856.)  LITRS  LXX.  MICBBL   III.  ao3 

porta  au  palais  de  Carien.  L'empereur  voulut  en  vain 
engager  le  patriarche  à  leur  donner  le  voile;  il  ré* 
pondit  quen  entrant  dans  le  patriarcat,  il  avait  fait 
serment  de  ne  rien  entreprendre  contre  le  service  ou 
la  gloire  du  prince,  et  que  cette  violence  déshonore- 
tait  l'empereur.  On  les  dépouilla  de  tout  1  éclat  qui 
convenait  à  leur  naissance;  on  les  réduisît  à  l'état  de 
simples  particulières.  Théodora  vécut  ainsi  jusqu'à  la 
preniière  année  du  règne  de  Basile;  elle  est  révérée 
comme  sainte  dans  l'église  grecque.  Son  fils  et  ses  deux 
frères  causèrent  tous  ses  malheurs.  £lle  fut  plus  heu* 
reuse  de  la  part  de  ses  filles,  qui  suivirent  fidèlement 
ses  exemples.  De  ses  trois  sœurs,  Calomarie,  Sophie 
et  Irène,  dont  la  vertu  égalait  la  beauté,  Calomarie' 
épousa  le  patrice  Ârsaber  ",  maître  de  la  milice  ;  So- 
phie, Constantin  Babuzique  ^,  qui  fut  revêtu  de  la 
même  dignité;  Irène,  la  plus  jeune  et  la  plus  ver- 
tueuse, fiit  mariée  à  Serge  ^j  frère  de  Photius,  dont 
elle  eut  deux  fils ,  Etienne  et  Bardas  ^,  qui  furent  tous 
deux  maîtres  de  la  milice.  Irène  resta  veuve  de  bonne 
heure,  et  passa  le  reste  de  ses  jours  dans  les  exercices 


I  OnltBeUe  Marie. — S«-Bft.  r«ne,  mère  dn  patriarche  PhotttK. 

>  Â^çoa^Tip.  Ce  nom  est  arménien;  Tu»  El^rfrnç,  t9k  {adt^^^  tou  <l>«»rtouy 

on  le  prononce  en  cette  langue  Ar-  oiÀiXtfîù,  Ce  qni  fait  bien  voir  qu'il 

chavir,  Voyex  ci -devant,  p.   z4»  en  est  réellement  ainsi ,  c'est  qne  leâ 

not.  3,  lir.  zjtviii,  $10.  On  ap-  denx  fils  d'Irène  et  de  Hiotins  étaient 

prend  d*Anastase>le*Bibliothécaire ,  aussi  é^a^eX^ot.  C'est  dans  Cédrénua, 

dans  la  vie  dn  pape  Nicolas  It ,  De  t.  a,  "p.  S^5  ,  qn*i]  est  dit  que  le  mari 

vit.  pont,  Boin.  p.  a  10,  214,  qu'il  d'|rène  était  frère  de  Photioê.  -^ 

fut  envoyé  en  ambassade  à  Kome,  S.-M. 

par  Michel.  —  S.-M.  ^  Le  continuateur  de  Théophane , 

3  Voyea  ci-devant,  p.  8,  oot.  3,  p.  109,  dit  que  Bardas  était  parent 
liv.  uLJXy  5  5.  — S.-M.  du  patrice  Constantin  Contomytès^ 

4  Le  continuateur  de  Théophane ,  gouverneur  de  Sicile^  et  aussi  parent 
p.  109  y  dit  que  ce  fut  le  frère  dl-  de  Photius.  — S.-M; 


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XXXYI. 

Gouveme- 


204  HISTOIRE   DU   BÂfr-EMPlKB.  (An  856.) 

d'une  piété  exemplaire^  au  milieu  d'une  cour  corrom- 
pue. Son  occupation  fut  de  visiter  les  prisons,  d'aller 
y  secourir  les  malheureux  et  de  sollicita  leur  prompte 
délivrance  lorsqu'elle  les  croyait  innocents. 

Bardas  César  n'avait  plus  qu'un  pas  à  faire  pour 
meonr  nionter  au   trône,   où  son   ambition  aspirait.  Aussi* 
Bardas,     yoyait-il  avcc  plaisir  l'empereur  se  plonger  de  plus  en' 
547,  55o.   plus  dans  la  débauche:  et,  tandis  que  le  jeune  prince 
p.  x6o,  161.  passait  les  jours  dans  le  cirque  et  les  nuits  a  tanle,. 
oph!^p.  iS,  Bardas  disposait  des  charges  et  des  emplois,  rendait 
Sy^éoÛrp.  Injustice,  réformait  les  tribunaux,  ranimait  l'étude  des 
Gco^       lois  presque  oubliées  et  les  faisait  exécuter.  L'igno- 
534.       rance  et  la  barbarie  des  empereurs  précédents  avaient 
p.  46,  47-   flétri  et  desséché  jusque  dans  la  racine  le  germe  des 
•  sciences  et. des  lettres.  Bardas,  fort  instruit  lui-même, 
persuadé  qu'elles  font  l'ornement  d'un  empire,  prit 
soin  de  les  faire  revivre.  Il  employa  pour  cet  effet  le 
philosophe  Léon ,  qui,  depuis  le  règne  de  Théophile, 
était  retombé  dans  sa  première  obscurité  '.  Il  le  mit 
à  la  tête  de  cette  noble  entreprise,  et  tira  de  son  école 
des  maîtres  habiles  en  philosophie,  en  géométrie,  en 
astronomie,  en  grammaire^.  Il  leur  assigna  des  pen- 
sions pour  les  mettre  en  état  d'enseigner  gratuitement, 
et  les  logea  dans  le  palais  de  Magnaure,  qui  devint  une 
acadéii)ié.  Pour  animer  les  études  renaissantes ,  il  as- 
sistait souvent  lui-même  aux  leçons,  il  excitait  l'ému- 
lation de  la  jeunesse  par  des  louanges  et  des  récom- 
penses.  Il  vint  à  bout  en  peu  de  temps  de  réveiller 


'  Voyez  ce  qui  a  été  dit  de  ce  poor  la  géométrie ,  Théodosim  poor 

personnage  ,  ci-devant ,     p.    xoo ,  Tastronomie ,  Cométas  pour  la  gmn- 

liv.  1.XIX  ,511.—  S.-M.  maire.  —  S.-M. 

»  On  cite  parmi  eux  Théodore 


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(Aa  ^56,)  LIVRE   LXX.  MIGHIÇL   111;  ao5 

dans  le  co&ur  des  hommes  cette  curiosité  naturelle  qui 
s'éteint  faute  d'aliment ,  mais  que  le  souffle  bienfaisant 
d  un  prince  peut  aisément  rallumer.  Ces  soins  généreux 
de  Bardas  ne  mériteraient  que  des  éloges  si  le  motif 
ea  eût  été  pur  et  <)ésintéressé.  Mais  il  ne  travaillait  à 
rhonneur  de  l'Empire  que  pour  s'en  rendre  maître  : 
c'était  un  palais  qu'il  faisait  rétablir  et  décorer  pour  s'y 
loger  ensuite;  et,  tandis  qu'il  corrigeait  les  abus  de 
l'État,  il  s'abandonnait  lui-même  aux  plus  grands  dés- 
ordres. Il  avait  deux  fils,  l'un^  nommé  Antigone,^ 
c(»mmandait  les  troupes  de  la  garde,  l'autre,  dont  ou 
ignore  le  nom ,  était  général  4es  troupes  d'Occident  '; 
il  mourut  jeune  ;  mais  avant  que  de  mourir  il  «ut  la 
honte  et  la  douleur  de  se  voir  déshonoré  par  son  pro- 
pre père.  Bardas,  au  mépris  des  lois  divines  et  hu- 
maines ,  s'étant  séparé  de  sa  femme  sans  cause  légitime, 
entretenait  avec  sa  bru,  publiquement ,  un  commerce 
scandaleux. 

Les  remontrances  réitérées  du  patriarche  Ignace  ne    j^^  g^ 
servirent  qu'à  l'irriter.  Enfin,  comme  il  eut  l'audace  de     xxxvu. 
sepréstenter  dans  l'église,  à   la  fête  de  l'Epiphanie,  ^^^^^^f" 
pour  participer  aux  saints  m ystèresj  Ignace  lui  refusa     's"**'*'- 

1  •  Ti  y        r\\\  T>      j  .'j     Léo  p.  403. 

la  communion.  Peu  s  en  taliut  que  Bardas,  outre  de  cedr.t.a,p. 
cet  affront,  ne  le  tuât  sur-le-champ:  rien  ne  l'arrêta  zouA^ie^t. 
que   l'intrépidité  du  patriarche,   qui,  présentant  sa   *' ^êJ^'' 
poitrine,  le  menaçait  de  la  colère  de  Dieu.  Il  sortit  de  ^?^l'J^' 
l'église  plein  de  fureur,  et,  de  ce  moment,  il  résolut  de   oiy<»».  p- 
perdre  Ignace.  Il  n'eut  pas  de  peine  à  faire  entrer  Joéi^.  17g. 
l'empereur  dans  ses  sentiments  de  vengeance.  Lé  refus  Theoph.  p. 
de  donner  le  voile  à  Théodora  et  à  ses  deux  filles  avait   "^^^aa"'" 

»  McvoarpàTiryoç  twv  ^tum»v.  Syméon  logoth.  Chron.  p.  439» — S.-M. 


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ao6  HÏSTOrtlE    BU    BAS-EMPIRE.  (An  857.) 

Sym.  p. 438  irrité  le  prince;  Bardas  sut  empoisonner  ce  refus:  il 

G*eorg^^p.    fit  encore  usage  d'un  événement  qui  faisait  alor's  g^rand 

Gencîf.^i.  4,  ^ruit  à  Constaotinople.  Un  inconnu  nommé  Gébon , 

^knàsf'ïn   ^^^^^^  depuis  peu  de  Dyrrachium,  en  habit  ecclésias- 

Beoedicto   tique ,  publiait  qu'il  était  fils  de  Théodora ,  né  de  cette 

lao  I.      princesse  avant  son  maria£[e  avec  Théophile.  Quoique 

Epist.  Nie.    ^  n  ,  1       /»A       1/        /       1  11 

papae.  cctte  table  lut  dénuée  de  vraisemblance,  et  que  cet 
ign.  ap.     imposteur  donnât  des  marques  de  foKes,   il  trouvait 

TS^.  1194-  néanmoins  dans  un  grand  peuple  des  esprits  toujours 
Boikud.  in  disposés  à  croire  sans  examen  tout  ce  qui  se  débite  au 

iTieodora  et  Jésavantaffc  des  princes.  Michel  l'avait  fait  enfermer 

inLazaro,  or 

a3febr.     et  ffardcr  étroitement  dans  l'île  d*Oxra:  mais  aussi  cré- 

Vlta  Nicol.  ^ 

stud. c.  8  et  dule  que  le  peuple ,  il  se  persuada,  sur  le  rapport  de 

^  4^feb°     Bardas ,  qu'Ignace  était  l'auteur  de  cette  imposture.  II 

ap^Sur"**  résolut  donc  de  le  chasser  de  son  siège,  et  de  lui  sub- 

OricriB     stituer  un  autre  patriarche.  Bardas  jeta  les  yeux  sur 

'^"/^  *•][;.  Photius. 
p.  245, 240, 

*47-  Personne  n'était  plus  propre  à  seconder  ses  vues. 

ecciés.  1.  5o,  Il  ne  manquait  à  Photius  que  la  probité  pour  être  le 

plus  grand  personnage  de  soà  siècle.  Né  dans  une  fa- 

XXXTIII, 


patriarche. 


pSotias  mille  illustre  %  beau-frère  d'Irène,  sœur  de  l'impératrice 
Théodora,  il  avait  reçu  l'éducation  la  plus  brillante. 
Riche,  en  état  de  se  procurer  un  grand  nombre  de  li- 
vres, avide  de  connaissances  et  de  gloire,  son  génie 
fecile,  pénétrant,  laborieux,  avait  embrassé  toutes  les 
sciences  divines  et  humaines.  Les  deux  ouvrages  qui 
nous  restent  de  lui  donnent  la  plus  haute  idée  de  Té- 
tendue  de  son  savoir.  Celui  qui  porte  le  nom  de  Bi- 
bliothèque  suppose  une  lecture  immense^  et  montre  un 


t  Photius  était  fils  de  Spatharè      un  autre  fils  nommé  Léon.  Syméon 
SergiiM,  fils  de  Zacbarie,  ^î  avait      logoth.  Ckron.  p.  44a.  —  S. -M. 


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(Ao  8S7.)  LIVRE   LXX.  MICHEL   ÎIL  fXO'J 

jugement  exquis.  Le  Nomocanon^  qui  est  une  concor- 
dance  du  droit  canonique  et  du  droit  civil,  prouve 
qu'il  était  parfaitement  instruit  des  lois  de  l'Église  et 
de  celles  de  l'État.  Successeur  de  Basile  dans  la  charge 
de  grand-écuyer,  il  remplissait  en  même  temps  celle 
de  premier  secrétaire  de  l'empereur.  Mais  la  dignité  de 
patriarche ,  plus  flatteuse  encore  pour  son  ambition , 
le  fit  se  prêter  av0c  empressement  aux  desseins  (k  Mi* 
chel  et  de  Bardas.  Ignace  était  aimé  de  son  peuple; 
on  se  servit  de  Grégoire  A  sbestas,  évêque  de  Syracuse, 
pour  le  rendre  odieux.  Ce  prélat,  intrigant  et  vendu  à 
l'iniquité,  excommunié  par  Méthodius ,  et  déposé  par 
Ignace,  était  animé  par  la  vengeance.  Il  s'insinuait 
dans*  les  familles ,  semant  la  calomnie  contre  Ignace  et 
relevant  Photius  par  des  éloges  pompeux.  On  s'efforça 
d'engager  Ignace  à  quitter  volontairement  son  église; 
sur  son  refus.  Bardas  le  fit  chasser  du  palais  patriar- 
cal, le  a  3  Bovembre,  et  reléguer  dans  l'île  de  Téré- 
binthe.  Le  même  jour  qu'il  fut  exilé,  Gébon  fut  mis 
à  mort  ;  on  lui  coupa  les  bras  et  les  jambes ,  on  lui 
arracha  les  yeux  :  Bardas  voulait  persuader  au  peuple 
qu'ils  étaient  coupables  du  même  crime;  mais  cette 
imposture  trouva  peu  de  crédit.  En  vain  empIoya*t-on 
des  évêques  et  des  patrices  pour  engager  Ignace  à 
donner  sa  démission  ;  il  demeura  inébranlable.  Celte 
violence  révoltait  tous  les  esprits  :  plusieurs  prélats 
murmuraient  hautement  contre  l'injustice,  et  décla- 
raient qu'ils  ne  reconnaîtraient  point  pour  patriarche 
celui  qu'on  prétendait  lui  substituer.  Bardas,  pour  éviter 
un  schisme,  usa  d'un  stratagème  digne  d'une  ame  cor'- 
rompue  qui  eîitreprend  de  corrompre  les  autres.  Il  s'a- 
dressa en  particulier  à  chacun  des  évêques,  et  leur  pro- 


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ÏXXIX. 


ao8  HISTOIRE   DU   BÀS*-£MPIR£.  (An  857.) 

posa  d'abandonner  Ignace,  à  condition  de  lui  succéder. 
Pas  un  seul  ne  refusa  son  consentement  à  ce  prix. 
V empereur^  ajoutait-il,  vous  tiendra  parole;  mais^ 
pour  mériter  son .  estime  et  pour  éviter  en  même 
temps  tout  soupçon  y  il  faut,  lorsqu'il  vous  offrira 
le  patriarcat ,  faire  d'abord  semblant  de  le  refuser 
par  modestie.  Ils  approuvèrent  et  suivirent  ce  con- 
seil; mais  ils  en  furent  la  dupe,  comme  ils  le  méri- 
taient. On  les  prit  au  mot,  et  Pbotius,  laïc  choisi 
par  l'empereur,  passa  dans  l'espace  de  six  jours  à 
l'épiscopat;  il  fut  sacré  le  jour  de  Noël,  par  Grégoire 
de  Syracuse. 

Pbotius,  patriarcbe,  crut  n'avoir  d'autre  devoir  à 
peMécuté.  l'CWïplîr  q'ie  celui  de  la  reconnaissance;  il  la  témoignait 
à  l'empereur  par  ses  complaisances.  Ignace  n'était  à 
son  avis  qu'un  censeur  intraitable,  qui  faisait  gloire 
d'une  austérité  faroucbe.  Pour  lui,  souple  courtisan, 
il  se  pliait  de  bonne  grâce  à  toutes  les  in^inations  du 
prince.  Il  ne  faisait  que  rire  de  ses  farces  sacrilèges; 
il  était  de  tous  ses  festins  ,^  et  l'on  rapporte  que,  dans 
un  défi  d'ivrognerie,  Micbel  ayant  bu  cinquante  verres 
de  vin,  Pbotius  le  surpassa  de  dix  sans  s'enivrer.  Ce 
talent  et  d'autres  pareils  lui  donnaient  une  graiide 
considération  auprès  de  l'empereur.  Cependant  Ignace 
manquait  du  nécessaire  dans  l'île  de  Térébinthe.  Les 
ecclésiastiques  qui  lui  demeuraient  attachés  étaient 
déplacés,  enfermés,  déchirés  de  coups.  Bardas  fit  en- 
tendre à  l'empereur  qu'Ignace,  criminel  de  lèse-ma- 
jesté ,  était  traité  avec  trop  d'indulgence.  On  envoya 
donc  informer  contre  lui ,  et,  quoiqu'on  ne  trouvât  au- 
cune apparence  de  preuve,  on  le  transporta  au  pro- 
montoire d'Hérée,  où  il  fut  enfermé  dans  une  étable 


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(An  857.)  LIVHE   LXX.  MICHEL    III.  2O9 

de  chèvres.  On  l'en  tira  pour  le  tramer  dans  un  bourg 
voisin    de    Gonstantinople,   où   le  barbare  Lalacon, 
capitaine  de  la  garde ,  après  l'avoir  cruellement  fouet- 
té, l'enferma  nu,  chargé  de  chaînes  et  déjà  malade, 
dans  un  cachot  glacé.  Il  y  demeura  <juinze  jours  pres- 
que sans  nourriture.  Ces  cruautés  exercées  sur  ce  saint 
prélat,  pour  le  forcer  à  donner  sa  démission,  soule- 
vèrent tous  les  évèques  suffragants  de  Constantinople  ; 
ils  s'assemblèrent,  ils  prononcèrent  anathême  contre 
Photius,  et  contre  eux-mêmes,  s'ils  avaient  jamais  la 
lâcheté  de  le  reconnaître  pour  patriarche.  Photius,  de 
son  côté,  oppose  à  ces  évêques  un  autre  synode  qu'il 
assemble  dans  l'église  de  Blaquernes,  composé  de  pré- 
lats vendus  à  la  cour.  Non  content  de  déposer  Ignace, 
il  prononce  la  même  sentence  contre  leâ  évêques  fidèles 
à  leur  patriarche.  Ils  furent  enfermés  plusieurs  jours 
dans  une  prison  infecte.  Ignace  y  fut  transféré  lui- 
même  ;  et  comme  sa  présence  les  fortifiait ,  on  l'envoya 
en  exil  à  Mitylène.  Les  autres,  après  d'indignes  trai- 
tements, furent  bannis  de  la  capitale.  On  coupa  la 
langue  au  garde  des  archives,  parce  qu'il  s'en  servait 
pour  confondre  Bardas  et  Photius.  Nicolas,  abbé  du 
monastère  de  Stude,  pour  n'être  pas  témoin  de  tant 
d'injustices,  s'était  retiré  à  Prénète,  port  de  Bithynie, 
vis-à-vis  de  Nicomédie.  Bardas  sachant  combien  cette 
retraite  pouvait   lui  nuire  dans  l'esprit  du  peuple, 
rempli  de  la  plus  grande  vénération  pour  Nicolas,  en- 
gagea l'empereur  à  passer  avec  lui  en  Bithynie.  Ils 
allèrent  à  Prénète,  et  employèrent  d'abord  les  plus 
vives  sollicitations  pour  obtenir  de  Nicolas  qu'il  revînt 
à  Constantinople.  L'abbé  ne  leur  répondit  que  par  des 
reproches  et   des  menaces  de   la   vengeance  divine. 

Tome  XIIL  ^4 


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XL. 

Photins  vent 
tromper  le 


21 0  HISTOIRE   DU    BÀSrEMPIRE.  (An  857.) 

L'empereur  irrité  fit  nommer  un  àutrà  abbé  de  Stude, 
et  ne  ceasa^.  tant  qu'il  vécut,  de  persécuter  Nicolas. 
Pour  ne  point  interrompre  ce  récit ,  je  vais  rendre  un 
com[)te  succinct  des  artifices  et  de  la  tyrannie  dePbolius 
jusqu'à  la  mort  de  Bardas.  * 

C'eût  été  pour  Photius  un  grand  avantage  d'être 
appuyé  de  l'approbation  du  pape;  aussi  fit-il  tous  ses 
p^p^-  efforts  pour  l'attirer  dans  son  parti.  Il  lui  députa  deux 
évéques,  et  lui  manda  qu'Ignace,  accablé  de  vieillesse 
et  d'infirmités,  avait .  renoncé  à  l'épiscopat  et  s'était 
retiré  dans  un  monastère,  o^  il  était  traité'  avec  toute 
sorte  de  respects.. Cet  usurpatenr  hypocrite  prenait  le 
ton  de  l'humilité  apostolique  :  il  gémissait  du  fardeau 
terrible  qu'on  lui  avait  imposé;  le  clergé^  les  métro- 
politains, l'empereur,  ce  prince  si  doux  et  si  humain 
envers  tous  lès  autres,  mais  cruel  envers  lui  seul,  di- 
sait-il ,  lui  avaient  fait  violence  pour  le  charger  dé 
l'épiscopat,  malgré  ses  larmes  et  son  désespoir.  11  se 
prosternait  devant  Sa  Sainteté  pour  lui  demander  ses 
prières;  il  lui  envoyait  une  profession  :de  foi  entière- 
ment catholique.  L'empereur  appuyait  ces  mensonges 
d'une  lettre  très-respectueuse;  il  faisait  valoir  son  zèle 
à  réparer  l'injure  faite  aux  saintes  images  sous  les  rè- 
gnes précédents;  il  priait  le  pape  d'envoyer  des  légats 
pour  confirmer  dans  un  concile  la  condamnation»  des 
iconoclastes.  Cette  ambassade  était  la  plus  honorable; 
le  patrice  Arsaber  ',  oncle  de  l'empereur,  était  accom- 
pagné de  quatre  évêques,  dont  deux  avaient  été  dé- 
posés par  Ignace;  et,  pour  donner  plus  de  force  à 
leurs  discours,  ils  portaient  de  riches  présents. 

1  Voyec  ei-dcTant ,  $  35,  p.  ae3,  not.  s.  —  S.-M. 


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(Xa  857)  LIVRE   LXX.  MICHEL    Jl£.  211 

11  était  difficile  d'en  imposer  à  Nicolas,  assSs  alors      xli. 
sur  la  chaire  de  saint  Pierre.  Ce  pape,  dont  la  fermeté  Jn'du^rdu 
fit  le  caractère,  ne  voulut  rien  décider  sur  lafFaire  de      p*p*' 
Photius  sans  un  mûr  examen.  Il  .envoya ^deux  légats, 
auxquels  il  ne  dontia.  d'autre  pouvoir  que  d'îirforiner. 
Ils  avaient  ordre  de  se  teiiir  séparés  de  la  communion 
de  Photius  jusqu'à  leur  retour.  Il  écrivait  à  l'empereur, 
pour  se  plaindre  qu'on  eûli  déposé  Ignace  sans  con- 
sulter le  saint  siège ,  et  qu'on  eût  ordonné  un  laïc  potir  - 
remplir  sa  place.  Il  requérait  qu'Ignace  fût  interrogé, 
et  l'affaire  discutée  dans  un; concile,  en  présence  de  ses. 
légats,  sur  le  rapport  desquels  il  formerait  s^  déci- 
sion. Il  n'oubliait  pas  non  plus  les  intérêts  dé  l'Église 
de  Rome  :  il  demandait  la  restitution  des  patrimoines 
de  saint  Pierre  en  Calabre  et  en  Sicile,  et  le  rétablis* 
sèment  de  la  jurisdiction  sur  l'illyrie  et  les  provinces 
voisines,  transférée  par  les  empereurs  grecs  aux  pa-' 
triarches  de  Constantinoplé.  Il  approuvait  la  confession 
de  foi  de  Photius  ;  mais  il  lui  déclarait  qu'il  ne  pou- 
vait consentir  à  son  élection  qu'après  avoir  reconnu 
qu  elle  était  conforme  aux  canons  de  l'Eglise. 

Les  légats  chargés  de  ces  lettres  reçurent  eh  che-       xliu. 
min  des  présenta  de  l'empereur,  et  de  Photius,  qui  cher--   Ignace  elt 
chaient  d'avance  à  les  séduire.   Arrivés  à   Constanti-     ^®p***®- 
nople,  ils  furent  gardés  à  vue  et  séparés  de  toute  com- 
munication ,  afin  qu'ils  ne  pussent  être  instruits  de  la 
violence  faite  à  Ignace.  On  les  menaçait  <les  dernières' 
rigueurs  s'ils  ne  se  prêtaient  aux  volontés  du  prince. 
Us  se  rendirent  enfin,  après  avoir    tenu  huit  mois 
contre  les  sollicitations,  les  promesses  et  les  menaces. 
Cependant  Photius  préparait  le  succès  du  concile  qui 
devait  lui  assurer  son  usurpation.  On  fit  revenir  Ignace 

i4. 


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a  I  %  HISTOIRE    DU    BAS-EMPIRE.  (An  857.) 

de  Mitylène  :  on  le  transféra  dans  l'île  de  Térébinthe, 
oîi  le  commandant  de  la  flotte  impériale,  nommé  Ni- 
cétas,  le  traitait  inhumainement  pour  faire  sa  cour  au 
prince  et  au  nouveau  patriarche.  Le  concile  s'assem- 
bla dans  l'église  des  Apôtres ,  et  fut  composé  de  trois 
cent  dix-huit  évêques ,  comme  le  premier  concile  de 
Nicée  ;  mais  ce  fut  la  seule  ressemblance  qui  se  trouva 
entre  ces  deux  conciles.  Celui-ci  ne  fut  qu'un  brigan- 
dage. L'empereur  y  assistait,  à  la  tête  de  tous  les 
magistrats,  dans  l'appareil  le  plus  formidable.  Ignace 
y  fut  amené  plutôt  comme  un  criminel  que  comme 
un  évêque,  et,  dès  qu'il  parut,  il  fut  chargé  d!injures 
par  l'empereur.  Les  légats  mêmes  se  déclarèrent  contre 
lui.  Plusieurs  métropolitains  osèrent  élever  la  voix 
pour  le  défendre;  mais  on  n'eut  égard  ni  à  leurs  justes 
demandes,  ni  à  l'appel  qu'Ignace  interjetait  au  saint 
siège.  Bardas  s'emporta  jusqu'à  frapper  à  coups  d'épée 
l'archevêque  d'Ancyre ,  qui  faisait  des  remontrances  à 
Tempereur.  On  prétendit  qu'Ignace  était  un  intrus, 
ordonné  sans  décret  d'élection.  Soixante -douze  té- 
moins subornés  confirmoient  par  serment  ce  mem- 
songe  manifeste,  qu'une  possession  paisible  de  onze 
ans  réfutait  assez.  Enfin,  tous  les  efforts  des  partisans 
de  Photius  pour  arracher  à  Ignace  un  acte  de  renon- 
ciation étant  inutiles;  le  concile  prononça  la  sentence 
de  déposition,  et  les  légats  y  souscrivirent.  On  ne 
traita  l'affaire  des  iconoclastes  que  pour  la  forme; 
cette  hérésie,  presque  entièrement  éteinte,  n'était 
qu'im  prétexte  dont  s'était,  servi  l'empereur  pour  en- 
gager le  pape  à  envoyer  des  légats,  comme  s'il  eût 
été  question  de  la  foi.  On  fit  lecture  de  la  lettre  du 
pape  à  l'empereur ,  mais  falsifiée  par  Photius  :  il  avait 


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(Att  857.)  LlVRJfi    LXX.  MICHEL    111.  ai  3 

eu  soin  d'en  retrancher  tout  ce  qui  lui  était  contraire 
et  favorable  au  saint  patriarche* 

Le  concile  s'était  terminé  à  la  satisfaction  de  Pho-  xliu. 
tius;  mais,  pour  lui  assurer  une  possesssion  tranquille,  cr^èhMtal 
il  fallait  obtenir  la  démission  d'Ignace.  Afin  de  l'y  îfforcen 
contraindre ,  on  tenta  de  lasser  sa  patience  par  les  trai-  '^°**°J^?''/ 
tements  les  plus  inhumains.  Tourmenté  d'une  cruelle 
dyssenterie ,  il  fut  pendant  quinze  jours  enfermé  dans 
le  sépulcre  de  Constantin  Gopronyme,  livré  à  trois 
hommes  barbares  qui,  après  l'avoir  meurtri  de  coups, 
tantôt  rétendaient  en  croix  sur  le  marbre,  nu  en 
chemise^  par  un  froid  rigoureux;  tantôt  le  tenaient 
des  nuits  entières  assis  sur  le  tombeau,  dont  le  haut 
était  en  arête,  comme  sur  un  chevalet,  avec  des  poids 
énormes  attachés  à  ses  pieds.  Il  demeura  sept  jours 
entiers  sans  autre  nourriture  qu'autant  qu'il  en  fallait 
pour  l'empêcher  de  mourir,  tandis  que  les  bourreaux 
se  faisaient  un  divertissement  cruel  d'inventer  de  nou- 
veaux tourments.  Enfin ,  lorsque  la  douleur  et  la  fai- 
blesse lui  eurent  ôté  l'usage  de  ses  membres,  uu  de 
ces  scélérats  ayant  saisi  une  de  ses  maios  lui  fit  tra- 
cer une  croix  sur  un  papier ,  que  Photius  remplit  en- 
suite d'une  acte  par  lequel  Ignace  se  reconnaissait  in- 
digne du  siège  de  Constantinople,  qu'il  avait  usurpé 
contre  les  canons,  et  déshonoré  par  une  conduite  ty- 
rannique.  Après  cette  abdication  prétendue,  Ignace 
fut  élargi.  Le  saint  prélat  fit  usagé  de  sa  liberté  pour 
envoyer  au  pape  une  requête,  dans  laquelle  il  lui 
rendait  compte  de  la  persécution  qu'il  avait  soufferte , 
et  le  priait  de  prendre  en  main  sa  défense.  Elle  était 
signée  de  dix  métropolitains,  de  quinze  évêques,  et 
d'un  grand  nombre  de  prêtres  et  de  moines.  I/abbé 


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ai4  HISTOIRE   DU    BAS-£MPIE£.  (£n  %$>].) 

Théogposte,  qui  Tavait  C(»nposëe,la  porta  lui-même 
à  Rome  en  habit  déguisé,  et  instruisit  le  pape  de  tout 
le  détail  de  cette  criminelle  eatreprise.  Cependant  Pho- 
tius ,  pour  achever  son  triomphe ,  engagea  Fempereur 
à  un  dernier  acte  de  violence  contre  Ignace  :  on  de- 
vait, le  jour  de  la  Pentecôte,  le  transporter  k  Féglise 
des  Apôtres,  où,  monté  sur  le  juhé,  on  le  forcerait  de 
lire  l'acte  de  sa  déposition,  et  de  prononcer  anathéme 
contré  lui-même,  après  quoi  on  lui  crèverait  les  yeux: 
et.  on  lui  couperait  la  main  droite.  Tout  était  prêt 
pour  l'exécution  de  cet  horrible  projet^  lorsque  la  nuit 
précédente,  Ignace,  averti  que  sa  maison  était  envi- 
ronnée de  soldats,  se  charge  d'un  fardeau  et  passe 
en  habit  d'esclave  au  milieu  des  gardes,  sans  être  re- 
connu. Il  gagne  le  bord  de  la  mer  et  se  sauve  dans 
les  îles  de  la  Propontide.  Là,  passant  souvent  d'une 
il^  à  l'autre,  caché  dans  les  cavernes,  dans  les  forêts, 
sur  les  montagnes ,  ne  vivant  que  d'aumônes,  patriar- 
che et  fils  d'empereur,  il  lui  fallait  éviter  sans  cesse 
les  émissaires  de  Photius,  qui  le  cherchaient  pour  lui 
ôter  la  vie.  Enfin  un  tremblement  de  terre,  qui  se 
fit  sentir  par  diverses  secousses  pendant  quarante 
jours,  parut  être  un  effet  terrible  de  la  colère  da 
ciel.  Oh  criait  de  toute  part  que  Dieu  soulevait  la 
nature  contre  les  persécuteurs  d'Ignace.  Michel  et 
Bardas,  effrayés  eux-mêmes,  jurèrent  publiquement 
qu'il  ne  lui  serait  fait  aucun  mal.  Sur  cette  assurance, 
il  revint  dans  son  monastère. 

Les  deux  légats  du  pape,  de  retour  à  Rome,  se  coo- 

tentèrent  de  lui  rendre  compte  du  résultat  du  concile; 

Ignace,    sjjg  eurent  soin  de  lui  cacher  toutes  les  violences  et  les 

intrigues  auxquelles  ils  avaient  eux-mêmes  participé  ; 


XHT. 

Zèle  du 
pape  pour 


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(An  »57.)  LIVJIE    LXX.  HICHEL    IH.  Îll5 

mais  le  pape  en  apprrt  bien  davantage  par  les  actes 
que  Léon,  secrétaire  de  l-emperetir,  lui  apporta  deux 
jours  après,  avec  une  lettre  de  Michel  et  une  autre  de 
PhoCius.  Michel  demandait  au  pape  la  cônfiriûation  des 
décrets  du  concile.  La  lettre  de  Photius  était  un  dis- 
cours artificieux  dicté  par  Thypocrisie;  il  déplorait  son 
sort  d'avoir  été  foit^ë  d'acoeptec  le  patriarcat;  il  re- 
grettait la  vie  douce  et  tranquille  d'où  on  l'avait  arra- 
ché pour  le  jeter  au  mili^i  des  orages  d'un  ilninistère 
laborieux,  où. il  avait  sans  cesse  à  combattre  les  désor- 
dres, lé  schisme,  l'hérésie.  On  lui  reprochait  d'avoir 
passé  de  l'état  de  laïc  à  l'épiscopat;  il  s'en  justifiait  par 
l'exemple  de  Nectaire ,  de  saint  Ambroise,  de  saint  Gré- 
goire Thaumaturge,  et  de  plusieurs  autres  saints  pré- 
lats, et  il  faisait  en  même  temps  l'apologie  de  Nice- 
phore  et  de  Taraise ,  ées  prédécesseurs.  Quant  à  la  ju- 
risdiction  d'Ulyrie ,  que  le  pape  revendiquait ,  il  protes- 
tait que,  loin  de  s'obstiner  à  la  retenir,  il  regarderait 
comme  une  grâce  d'être  déchargé  d'une  partie  de  son 
fardeau  ;  naÀs ,  comme  il  s'agissait  de  territoire  et  de 
limites  de  provinces,  c'était,  disait-il,  nne  affaire  d'é- 
tat qui  dépendait  du  conseil  de  l'empereur.  Il  faisait 
un  grand  éloge  des  légats ,  et  tâchait  de  prévenir  le 
pape  au  désavantage  de  ceux  qui  allaient  à  Rome  im- 
plorer sa  protection  en  faveur  d'Ignace.  Ces  lettres ,  et 
plus  encore  les  actes  du  concile ,  firent  connaîtra  au 
pape  la  prévarication  de  ses  légats.  Il  assembla  son 
clergé,  et,  en  présence  de  Léon,  il  déclara  que  ses 
légats  avaient  contrevenu  à  ses  ordres  ;  qu'il  n'avait 
point  consenti  à  la  déposition  d'Ignace ,  ni  à  l'ordina- 
tion de  Photius,  et  qu'il  n'y  consentirait  jamais ,  à  moins 
que  les  crimes  imputés  à  Ignace  ne  fussent  prouvés 


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2l6  HISTOIRE    DU   BAS-EMPIRE.  (An  857.) 

juridiquement.  Il  renvoya  Léon  avec  cette  déclaration , 
et  lui  mit  entre  les  mains  deux  lettres  pour  Pho ti  us 
et  pour  l'empereur,  dans  lesquelles  iL réfutait  celles 
qu'il  en  avait  reçues.  Il  écrivit  en  même  temps,  maïs 
par  une  autre  voie,  une  lettre  circulaire  à  toute  VÉ- 
glise  d'orient  :  il  y  déclarait  qu«  ses  légats  avaient  agi 
contre  ses  ordres,  en  souscrivant  ù  la  déposition  dl- 
gnace  et  à  l'élection  de  Photius.  Il  traitait  Ignace  de 
saint ,  et  Photius  de  scélérat  ;  il  voulait  que  tous  les 
évêques  rendissent  cette  lettre  publique. 
LY.  Photius  supprima  la  lettre  qui  lui  était  adressée,  et 

botius.  contrefit  deux  autres  lettres,  l'une  d'Ignace  au  pape, 
l'autre  du  pape  à  lui-même.  Dans  la  première ,  Ignace 
invectivait  vivement  contre  l'empereur  ;  dans  l'autre  , 
le  pape  s'excusait  à  Photius  de  lui  avoir  d'abord  été 
contraire  ;  il  lui  mandait  qu'il  avait  enfin  découvert  la 
vérité ,  qu'il  lui  renvoyait  la  lettre  d'Ignace  sans  avoir 
même  voulu  l'ouvrir;  il  lui  promettait  une  amitié  con- 
stante à  l'avenir.  Il  se  fit  présenter  ces  lettres  en  pleine 
audience,  dans  le  palais  patriarcal,  par  un  fourbe  dé- 
guisé en  moine.  Il  les  porte  aussitôt  à  l'empereur  et 
à  Bardas;  il  leur  représente  Ignace  comme  un  sujet 
perfide,  qui,  par  ses  calomnies,  s'efforce  de  rendre  le 
prince  odieux  aux  étrangers ,  crime  qui  seul  méritait 
la  mort.  On  donne  des  gardes  à  Ignace ,  on  met  ses 
domestiques  à  la  question  ;  on  interroge  le  porteur  des 
lettres,  qui  est  enfin  convaincu  d'avoir  joué  cette  co- 
médie de  concert  avec  Photius.  Bardas  le  fait  fouetter; 
mais  Photius  le  dédommage  en  lui  procurant  un  em- 
ploi assorti  à  sa  condition.  Cette  imposture  découverte 
fît  grand  éclat,  sans  diminuer  cependant  le  crédit  de 
Photius  auprès  de  Michel  et  de  Bardas,  qui  croyaient 


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(An  857.)  LIVRE   LXX.  MICHEL    III.  aiy 

tout  permis  pour  perdre  Ignace.  Ils  donnèrent  peu  après 
une  nouvelle  preuve  de  4eur  haine*  :  les  Russes ,  dont 
je  parlerai  dans  la  suite ,  ayant  fait  une  irruption  dans 
Tîle  où  était  le  monastère  d'Ignace ,  y  renversèrent  un 
autel  que  le  saint  prélat  consacra  de  nouveau  après 
leur  retraite.  Photius  fit  grand  bruit  de  ce  qu'Ignace 
déposé  usurpait  encore  les  fonctions  de  l'épiscopat;  et, 
pour  réparer  cette  prétendue  profanation ,  l'empereur 
envoya  deux  archevêques  et  un  sénateur,   qui  firent 
porter  l'autel  au  bord  de  la  mer,  l'y  plongèrent  qua- 
rante fois  pour  le  purifier,  et  le  replacèrent  ensuite. 
Toutes  les  grâces  étaient  pour  Photius;  les  partisans 
d'Ignace,  au  contraire,  n'éprouvaient  que  des  rigueurs. 
Eli  864,   le  jour  de  l'Ascension,  un  tremblement  de 
terre  alarma  toute  la  ville:  pendant  vingt-quatre  heures, 
la  terre  fit  entendre  dans  ses  entrailles  d'horribles  mu- 
gissements; quantité  d'édifices  furent  renversés;  toutes 
les  sources  tarirent.  Les  habitants  étaient  en  prières. 
Basile,  archevêque  de  Thessalonique ,  crut  l'occasion 
favorable  pour  faire  rentrer  Michel  en  lui-même;  il 
lui  représenta  qtf  il  attirait  la  colère  de  Dieu  en  con- 
trefaisant, par  des  jeux  sacrilèges,  les  plus  saintes  cé- 
rémonies de  la  religion.  Cette  remontrance  fut  payée 
d'un  châtiment  cruel  ;  l'empereur  lui  fit  rompre  les 
dents  et  déchirer  le  corps  à  coups  de  fouet.  Il  plaisan- 
tait lui-même  sur  le  patriarcat  de  Photius  :  Himere , 
disait-il,  est  mon  patriarche;  Photius  est  celui  de 
Bardas;  Ignace^  celui  des  chrétiens;  et  Photius  était 
content  de  ce  partage ,  aussi  honteux  pour  lui  que  pour 
ce  prince 'insensé. 

Le  pape  recevait  tous  les  jours  de  nouvelles  plaintes      xlvx. 
de  la  conduite  que  ses  légats  avaient  tenue  à  Constan-    lettre  du 


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ai8  HISTOIRE    DU    BAS-KMMRE.  (Xn  S5j,) 

pape  contre  tînoplc.  Pour  puilir  UDC  prévarication  qui  déshonorait 
Piotius.    j>£g[;gg  romaine,  il  convoqua  un  concile  de  plusieurs 
provinces.  L'évêque  Zacharie ,  un  des  légats ,  convaincu 
par  plusieurs  témoins  et  par  sa  propre  confession,  fut 
déposé  et  excommunié.  L'autre  légat ,  nommé  Rodoalde, 
pour  lors  absent,  fut  dans  la  suite  puni  avec  la  même 
sévérité  dans  un  autre  concile.  Le  pape  prononça  la 
Sentence  d'interdiction  contre  Photius ,  sous  peine  d'a- 
nathéme  jusqu'à  la  mort,  s'il  s'ingérait  à  faire  aucune 
fonction  épiscopale.  Grégoire  de  Syracuse,  et  tous  ceux 
que  Photius  avait  ordonnés,  furent  frappés  de  la  même 
censure.  Ignace  fut  reconnu  seul  patriarche  légitime, 
les  anathêmes  lancés  contre  lui ,  déclarés  nuls.  On  ex- 
communia quiconque  oserait  s'opposer  k  son  rétablis- 
sement, ou  le  troubler  daiis  ses  fonctions,  lui  et  les 
autres  évêqûes  chassés  par  Photius.  Comme  l'empereur 
avait  mandé  au  pape  que  les  évêques  d'occident  ap- 
prouvaient sa  conduite ,  le  pape  leur  écrivit  pour  les 
instruire  de  cette  calomnie,  à  laquelle  il  protestait 
qu'il  n'ajoutait   aucune  foi.  La  lettre  de  Michel  était 
remplie  d'injures  contre  le  pape  etTÉglise  romaine. 
Nicolas  lui  répondit  avec  douceur ,  mais  avec  supério- 
rité ;  il  le  comparait  à  Goliath ,  et  se  comparait  lui-même 
à  David.  Il  répétait  ce  qu'il  avait  dit  dans  les  lettres 
précédentes  sur  Photius  ;  il  demandait  dé  l'empereur 
qu'il  fît  brûler  publiquement  un  exemplaire  de  la  lettre 
injurieuse  qu'il  lui  avait  envoyée ,  sinon  il  le  menaçait 
d'excommunier  et  les  auteurs  de  la  lettre  et  les  secré- 
taires, et  de  la  faire  brûler  au  milieu  de  Borne,  à  la 
face  de  toutes  les  nations  qui  venaient  sans  cesse  visi- 
ter le  tombeau  de  saint  Pierre.  Il  exigeait  qu'Ignace  et 
^  Photius  se  rendissent  tous  deux  à  Rome  pour  plaider 


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(Att  857)  LIVRE   LXX.  MICHEL   III.  219 

leur  cause  devant  lui.  Les  trois  légats  chargés  de  cette 
lettre  en  reçurent  aussi  plusieurs  autres  adressées  aux 
évequfis  ^  au  clergé  de  Constantinople ,  à  Photius ,  à 
Bardas,  à  Igiraçe,  à  la  femme  et  à  la  mère  de  Tempe- 
reur,  à  plusieurs  membres  du  sénat.  Le  pape  instruisait 
les  cyêcpes  et  le  clergé  de  Constantinople  de  ce  qui 
s'était  passé  à  Rome;  il  se  plaignait  de  la  lettre  outra- 
geante de  l'empereur;  il  reprochait  à  Photiùs  tous  ses 
crimes  ;  il  exhortait  Bardas  à  réparer  le  mal  qu'il  avait 
fiait,  à  prendre  1^  défende  d'Ignace  auprès  de  l'empe- 
reur, et  à  £3ivoriser  ses  légats.  Il  informait  Ignace  du 
zèle  avec  lequel  il  avait  pris  et  prenait  encore  sa  dé- 
fense; il  en  donnait  avis  à  Théodora,  qu'il  exhortait  à 
la  patience.  Il  priait  l'impératrice  Eudocie  de  faire  usage 
de  son  crédit  en  faveur  d'Ignace*  Enfin ,  il  adressait 
une  lettre  commune  à  plusieurs  sénateurs  de  Constan- 
tinople, pour  les  engager  à  s'employer  pour  Ignace,  et 
à  se  séparer  de  la  communion  de  Photius.  Nous  ver- 
rons dans  la  suite  le  peu  d'effet  que  produisirent  ces 
lettres  sur  l'esprit  de  Photius ,  de  Bardas  et  de  l'em- 
p^eur. 

Pendant  les  troubles  de  l'Église  et  de  la  cour  de    a»  858. 
Constantinople ,  la  guerre  contre  lès  Sarrasins  durait     q^I^ 
toujours  ;  il  se  donna  plusieurs  combats  dont  les  succès    g^°J.^®jJ^®' 
furent  difïerents.  Léon,  général  des  troupes  impériales,   Eimacin, 
plus  habile  ou  plus  heureux  que  Thëoctiste ,  remporta    *^;  J"*^' 
de  grands  avantages  :  il  prit  de  force  une  place  qu'El-  cedr.^;  l*p. 
macin  nomme  Aïncarja  ^ ,  la  détruisit  et  emmena  tous  ^^45.^  546.^ 
les  habitants  en  esclavage.  Il  passa  l'Euphrate,  porta   2,  p.  iSS. 


»  Cet  aatear  place  cette  conquête  «n  Tan  141  dt  l'hégire  (a a  mai  855 
—  10  mai  850  de  J.-C.)  -—  S.-M. 


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aaO  HISTOIAE  DU    BAS*£MPIR£.  (An  »58) 

GoDt.      le  ravage  jusqu'aux  portes  d'Amide  ' ,  prit  et  pilla  plu- 
io9?^iio.    sieurs  châteaux  au-delà  du  Tigre  *.  D'un  autre  coté, 
sym«>n.p.  p^^j^.  j^  Mélitinc  \  Omar,  à  la  tête  d'un  camp  vo- 
^*534.  ^    '^°^'  désola  tout  le  pays  jusqu'à  Sinope,  et  fit  retraite 
Gcnes.  I.  4,  avaut  qu'ou  eût  pu  l'atteindre.  Le  jeune   empereur , 
enivré  des  flatteries  de  ses  compagnons  de  débauche, 
crut  qu'il  ne  manquait  que  sa  présence  pour  terrasser 
ces  opiniâtres  ennemis  :  accompagné  de  Bardas ,  il  va 
mettre  le  siège  devant  Samosate ,   que  les  Sarrasins 
avaient  reprise  et  réparée  depuis  l'expédition  de  Théo- 
phile *.  L'armée  arriva  le  jeudi-saint ,  et  campa  devant 
la  ville.  Les  Sarrasins  enfermés  dans  la  place ,  affec- 
tant une  extrême  terreur,  laissèrent  faire  sans  opposi- 
tion tous  les  préparatifs  du  siège;  mais  le  jour  de 
Pâques,  tandis  que  l'armée  grecque,  dans  une  pleine 
sécurité,  ne  s'occupait  que  de  la  solennité  de  la  fêle, 
et  que,  sans  avoir  pris  aucune  précaution,  elle  assis- 
tait au  saint  sacrifice ,  les  assiégés  ouvrent  les  portes, 
sortent  en  poussant  de  grands  cris ,  courent  avec  furie 
au  camp  des  Grecs.  Tout  fuit,  ou  tqpibe  sans  résis- 
tance sous  le  fer  des  Sarrasins.  Michel  fuyant  le  pre- 
mier ,  ne  dut  son  salut  qu'à  la  vitesse  de  son  cheval. 
Les  bagages,  les  tenrtes,  les  riches  équipages  de  1  em- 
pereur sont  la  proie  des  ennemis.  Les  pauliciens,  joints 
aux  musulmans,  étaient  les  plus  acharnés  au  carnage. 
Carbéas,  leur  chef,  signala  son  courage  et  sa  fureur, 

«   En   34a  de  Thégire  (lo    mai  le  Tigre  et  VEn^hnlej  Aroiàe  et  Si- 

856  —  3o  ayril  857),   selon  Elma-  mosate.  — S  .-M. 
cin,  Hise.sarac, p.  i5o.  —  S.-M.  3  Jp^jp  ,  l'Émîr.  Vojet  ^ 

>  Dans  le  pays  nommé  par  les  S  3i,  p.  199,  not.  4»  — S--^' 
Arabes    Tsoghr-Djezenak  ,  cV8t4-  ^Citait,  dit  le  co'»*^"f!^' 

dire  la  frontière  militaire  de  Méso-  Théophane,p.  109,  une^i^ 

potamie.  Cétait  le  pays  montaeux,  etpeoplée.  —  S.-M. 
difficile  et  fortifié  qai  s'étend  entre 


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(An  858.)  LIVRE    LXX.  MICHEL    IIÏ.  22tl 

il  tua  de  sa  main  grand  nombre  de  Grecs ,  et  n'épargna 
que  ceux  dont  il  espérait  une  grosse  rançon.  Cent  of- 
ficiers des  plus  distingués,  entre  lesquels  était  le  gé- 
néral Léon  ' ,  furent  ses  prisonniers  * ,  et  se  rachetèrent 
ensuite;  mais  il  ne  voulut  jamais  relâcher  Léon ,  quel- 
que somme  qu'on  lui  offrît ,  et  il  le  laissa  mourir  dans 
les  fers. 

Deux  ans  après ,  Omar  rentra  dans   la  Cappadoce    a»  sso. 
avec  trente  mille  hommes^;  l'empereur  en  assembla    .^^^"i; 

quarante-cinq  mille  ^ ,  la  plupart  Thraces  et  Macédo-     faite  de 
.  5/1  .11  11,.  .        Micïiei- 

mens  ;  c  étaient  les  meilleures  troupes  de  1  empire ,  mais  cedr.  t.  a,  p. 

sa  plus  grande  ressource  fut  dans  la  personner  de  Ma-  zoJi^ie,  t. 

nuel.  Ce  guerrier,  qui  avait  conservé  le  titre  de  com-    *»  p-  ^^^• 

mandant  des  troupes  de  la  garde ,  vivait  depuis  plu-  Theoph.  p. 

/  1  .         ,  .11        "*o  et  m.] 

sieurs  années  dans  une  retraite  douce  et  tranquille^  Gènes,  i.  4, 
spectateur  éloigné  des  orages  d'une  cour  toujours  agitée  ^* 
pai'  les  plus  noires  intrigues  :  Michel  l'obligea  de  le 
suivre  dans  cette  expédition,  quoiqu'il  fût  fort  avancé 
en  âge.  Les  deux  armées  se  rencontrèrent  près  d'Ama- 
sie,  sur  les  bords  de  llris,  et  en  vinrent  aussitôt  aux 
mains  ^.  Le  jeune  empereur,  qui  voulait  commander 


'  n  est  nommé  Séon  dans  Gédré-  ^ix,eL^wnç  ^^iXia^oç.  On  voit  la  même 
nns,  t.  a,  p.  546.  Voyez  la  note  chose  dans  le  continoatenr  de  Théo- 
suivante.  —  S.-M.  phane,  p.  xio. 

a  Le  contimiatear  de  Théophane,  ^  Selon  Génésins ,  1.  4,  p.  44 ,  rar- 

p.  ixo,  nomme  parmi  enxAhsalon,  mée  impériale  était  dans  le  canton 

décoré  dn  titre  de  tzangotnbe ,  dont  de  Doxyme ,  x^P°^  Ao^up.oy ,  dans 

j^ignore  les  fonctions,  tov  TÎJa'yyo-  une  prairie  appelée,  Cellarium,  Xi- 

TGuêov  TOV  kêgaaXàiL,  et  le  palatin  êà^tov  xaTâ>vcp.a(rfi.évcv  KeXXaptov.Les 

Scon,  Sriùv  tov  itoXativov.  —  S.-M.  Arabes,  qui,  selon  le  même  anteur, 

^  XfAsp  auv  {lupiaai  Tpioi.  Gènes,  s'avançaient  par  la  route  de  Zelisa, 

1.  4  9  p.  44.  —  S.-M.  qui  est  peut-être   Tantique   Zélée, 

4  Génésius,  1.  4,  p.  44,  ne  fait  vinrent  camper  en  nn  lien  appelé 

monter  son  armée  que  jusqu'à  qua-  Chonarium,  —  S.-M. 
rante  mille  hommes,  piixpi  xtr^d^oç 


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îîaa  HISTOIRE   DU    BAS-EMPIRE.  (^  gg^,.) 

sans  avoir  aucune  connaissance  de  la  guerre ,  se  vit 
bientôt  enfoncé  de  toute  part.  Aussi  prompt  à  fuir 
qu'à  livrer  bataille,  il  fut  suivi  d'une  grande  partie  de 
ses  troupes.  La  chaleur  était  excessive ,  et  les  chevaux: 
ainsi  que  les  hommes  se  trouvant  excédés  de  fatigue 
au  bout  de  deux  lieues,  on  gagna  le  haut  d'une  mon- 
tagne escarpée  " ,  et  de  difficile  accès,,  comme  poste  de 
sûreté.  Un  moment  après  ils  se  virent  enveloppés  de 
l'armée  ennemie,  qui,  montant  à  eux  avec  cette  vivacité 
que  donne  la  victoire,  les  aurait  bientôt  atteints,  si 
Manuel,  à  la  tête  des  troupes  de  la  garde,  n'eût  re- 
poussé leurs  assauts  continuels.  Il  fallait  songer  à  la 
retraite,  ou  périr.  Manuel ,  dont  c'était  la  destinée  de 
sauver  ses  maîtres  (  il  avait  deux  fois  sauvé  Théophile  ), 
fait  changer  d'habits  à  l'empereur  pour  empêcher  qu'il 
ne  soit  reconnu,  et ,  s'étant  mis  à  la  tête  de  cinq  cents 
hommes  d'élite,  il  fait  porter  devant  lui  l'éten^dard  de 
la  croix,  perce  les  bataillons  des  Sarrasins,  et  se  trouve 
en  un  moment  à  la  queue  de  leur  armée.  S'apercevant 
alors  qu'il  n'est  pas  suivi  de  l'empereur,  que  la  crainte 
avait  arrêté,  il  retourne  avec  la  même  vitesse,  et  re* 
gagne  le  poste  où  se  tenait  l'empereur.  Comme  il  ne 
peut  déterminer  à  un  effort  si  hasardeux  ce  prince, 
qui  n'était  brave  que  loin  du  danger,  Manuel,  tou- 
jours à  la  tête  de  ce  corps  invincible  qu'il  avait  choisi , 
tombe  sans  cesse  en  tant  d'endroits  sur  les  assaillants , 
les  écrase  et  les  foudroie  avec  tant  de  vigueur,  qu'O- 
mar, épouvanté  de  cette  tempête,  manquant  d'ailleurs 
d'eau  et  de  fourrage,  prit  le  parti  de  se  retirer  à  quel- 
que distance  ^  ;  et,  tandis  que  les  Sarrasins,  harassés  et 

I  Nommée  jénzès ,  selon  Gêné*  '  En  un  Hea  nommé  Dom ,  sdoii 

sias ,  1.  4,  p.  44.  —  S.-M.  Génésios,  1.  4,  p.  45.  — S.-M. 


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(A»  «6o.)  LIVRE    LXX.  KIGHEZi    IIL  aa3 

couverts  de  biessuces,  se  reposent  des  !travaut  d'une 
si  rude  journée ,  les  Grecs  non  moins  fatigués,  mais 
animés  par  la  nécessité  de  fuir  ou  de  périr  ^  gagnent  là 
plaine ,  et  se  trouvent  au  point  du  jour  hors  d'atteinte 
à  la  poursuite  des  vainqueurs. 

Omar  était  pour  l'Empire  un  voisin  très-incommodé.    Aw  86a. 
Vaillant,  infatigable,  secondé  des  pauliciens  implaca-     ^J^^^- 
blés  ennemis,  il  Élisait  un  désert  de  la  Gappadoce,  du     d'Omar. 
Pont ,  de  la  Cilicie.  Tandis  que  les  Grecs  travaillaient  p^546, 547. 
à  réparer  leurs  pertes ,  il  continuait  de  désoler  l'Asie-  ^^'**  *•  '?i  *• 
Mineure,  d'où  il  emmena  soixante- dix  mille  prison-       ^^9- 
niers.   Deux  autres  générauxj[Fadhl,  fils  de  Kâren  *,      Cont. 
et  Aly,  fils  de  Yahia^],  Sarrasins ,  attaquèrent  en  même  m  etsêqq. 
temps  cette  malheureuse  contrée  :  l'un,  avec  une  flotte   oTô^g.  p^' 
de  vingt  vaisseaux,  vint  emporter  Antioche  de  Cilicie^;  Geuès.^l\, 
l'autre,  ayant  franchi  les  défilés  du  mont  Amanus,  prit    EWi^f" 
une  place  qu'Elmacin  nomme  Arsia  *,  d'oîi  il  enleva  ^»*-Sarac. 
cinq  mille  hommes  et  dix  mille  têtes  de  bétail.  L'année 
suivante,  862,  Omar  se  remit  en  campagne,  suivi  de 
quarante  tnille  hommes;  il  pénétra  dans  le  Pont  ^  jus- 
qu'au port  d'Amise ,  qu'il  prit  et  pilla.  Trouvant  cette 
contrée  sans  défense,  il  y  fit  un  riche  butin ,  enlevant 
hommes  et  troupeaux.  On  dit  que  cet  émir,  aussi  fou* 
gueux,  aussi  extravagant  que  Xerxès,  arrivé  au  bord 
de  la  mer,  qui  s'opposait  à  ses  pillages,  la  fit  battre  de 

z    Ce  pertoiinftgey  persan  d^ori-  nue  par  Elmacin  y  Hist,  sarac,  ^, 

^me,  issu  des  rois  du  Masandérao ,  z5i. — ^S.-M 

était  goovemear  d'Émesse,  en  Syrie  ^  Elmacin  dit  seulement ,  p.  i5i, 

Il  fat  tué  en  l'an  a5o  de  l'hégire  (i»  Antiocfae. — S.-M. 
février  864,-1"  février  8  6  5)  par  les  4  Ou  plulAt  ^rx^.— S.-M. 

babîtants  d'Émesse  révoltés.  A  bon'-  ^  Nommé  alors  1«  thème  armé- 

Iféda  ,  ///!«.  musl.  H,  ai 3.  —  S.-M.  niaque. — S.-M. 
2  Cette  expédition  nons  est  con-  • 


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224  HISTOIRE    DU    BAS-EMPIRE.  (^  ge^.) 

verges  '.  Ces  nouvelles  excitaient  les  murmures  de  la 
ville  de  Constantinople  ;  on  gémissait  de  voir  qu'un 
Barbare  insultât  impunément  l'Empire ,  sans  que  ni 
l'empereur  ni  le  césar ,  endormis  dans  la  crapule ,  s'é- 
veillassent au  bruit  de  tant  de  ravages.  Mais  Michel , 
abruti  par  ses  excès ,  ne  cherchait  de  gloire  que  dans 
les  exploits  de  la  débauche  ;  et  Bardas  n'osait  s'éloigner 
de  la  personne  du  prince ,  qui  ne  pouvait  vivre  long- 
temps, et  dont  il  méditait  dès -lors  d'abréger  la  vie 
pour  prendre  sa  place»  £n  attendant,  il  ne  voulait  con- 
fier qu'à  sa  famille  le  commandement  des  armées.  II 
jeta  les  yeux  sur  son  frère  Pétronas,  qui  résidait  pour 
lors  à  Éphèse  en  qualité  de  gouverneur  d'Ionie  et  de 
Lydie*;  il  lui  envoya  ordre  de  rassembler  au  plus  tôt 
toutes  les  troupes  des  provinces  voisines,  et  de  mar- 
cher contre  les  Sarrasins.  Il  fit  partir  les  compagnies 
de  la  garde ,  avec  les  troupes  de  Thrace  et  de  Macé- 
doine, pour  aller  le  joindre  à  Éphèse. 
!..  Pétronas  n'était  pas  guerrier,  mais  il  ne  manquait 

d^omr.  P*^  ^^  prudence.  Il  prit  pour  conseil  Nazar^,  gouver- 
neur de  Galatie^,  plus  habile  que  lui  dans  les  opéra- 
tions de  la  guerre,  et  lui  fit  part  du  commandement. 
Ce  fut  sans  doute  par  son  avis  qu'il  préféra  une  bonne 
armée  à  une  armée  nombreuse ,  et  qu'il  ne  se  fil  suivre 
que  de  soldats .  choisis  et  bien  disciplinés.  Encouragé 

'  Cette  extravagance  n'a  pas  d'au-  san  Babèk ,  et  qui  était  venn  cher- 

tre  garantie  que  le  continoateor  de  cher  nn  asile  auprès  de  Temperear 

Théophane ,  p.  z  1 1,  et  ses  copistes.  Théophile  après  la  dé£ûte  et  la  mort 

— S.-M.  de  Babek.  Voy,  ce,  que  j'en  ai  dit 

2  Nommée    à    cette    époque   le  ci-dev. ,  p.  z45,  not.  a^lir.  ucis, 
thème  des  Tbracésiens. — S.-M.  §  40. — S.M. 

3  Je  pense  que  ce  personnage  était  4  Nommée  alors  le  théoïe  des  Bac* 
fils  de  ce  rjTazar,  persan  de  naissan-      cellarîens. — »S.-M. 

ce ,  attaché  au  parti  du  rebelle  Per- 


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{Ku  «6a.)  LIVRB   LXX.  MlèHEL    III.  aaS 

par  les  discours  d'un  saint  personnage  que  le  peuplé 
regardait  comme  un  prophète,  il  partit,  et  trouva  Omar 
campé  près  d'Amasie  ',  dans  un  vallon  environné  dé 
roches  escarpées*.  [Les  Arabes  lui  doiinent  lej|om  cje 
Mardj-Aloskoufy  c'est-à^ire  plaine  de  VK^ê^e  ^] .  Le 
choix  de  ce  campement  prouve  que  ce  fameux  Sarrasin 
était. plus  redoutable  par  sa  bravoure  impétueuse  que 
par  sa  science  militaire.  On  ne  pouvait  sortir  de  ce 
vallon-que  par  trois  gorges  que  ferma  Pétronas,  ayant 
divisé  son  armée,  en  trois  corps  4.  Omar  ne  s'aperçut 
de  sa  faute  que  lorsqu'il  ne  fut  plus  temps  d'y  remé- 
dier :  toutefois  il  ne  perdit  pas  courage ,  et,  relevant 
celui  4^  ses  soldats  par  le  souvenir  de  leurs  exploits  et 
par  le  mépris  qu'ils  devaient  faire  d'un  ennemi  tant 
de  fois  vaincu ,  il  leur  ordonna  de  se  préparer  à  com- 
battre le  lendemain,  et  de  rendre  luisantes  leurs  lances 


z  Selon  Génésîas,  1.  4,  p.  46, 
cet  endroit  était  à  5oo  qiilles,  fAinXia 
9*  d'Amilhas,  sur  les  confins  du. 
thème  de  Paphlagonie  et  de  celai 
des  Arméniaques. — S.-M. . 

3  Ce  lien  est  appelé  Poson  par  le 
continuateur  de  Théopfaane,  p.  i  la, 
xaTc£  Tiva  Wffov  oÔtw  Xe^o(i.evov  Ho- 
«orra.  Ce  lien,  selon  le  même  au- 
teuFy  était  traversé  du, nord  an  sud, 

par  une  rivière  appelée  Lalacaon^ 
AaXoxacav.  IJj^ns  les  environs  se 
troavait  nue  vallée  qn*on  nommait 
Tnlgairement  Gjrris,  Xtêît^icv  irapoé- 
xcifat  rûpiv  à^pcucocf  ^vv)  xfliXo6{j.e- 
vov.^-'S.'M. 

^  C'est  ce  que  nods  apprend  Abon*- 
Iféda,  Ann,  musL,ïlf  309,  qui  place 
cette  bauille  en  Tan  3  49  de  Thégire 
(a  3  février  863 — 13  février  864  de 

Tome  XIIL 


J.'C.);ce  qui  semble  indiquer  que 
cette  bataille SFiit  IlVree  en  TÎn  863, 
une  année  après  Tépoqne  donnée 
par  Lebeau.  AbouMfaradj  place  aussi 
cette  guen'e ,  dans  sa  Chronique  sy- 
riaque, p.  .171,  en  Fan  349  derhé» 
gîre.  Selon  lui,  le  lieu  où  Omar  fut 
vaincu  était  dans  le  territoire  de 
Mélitène.— S.-M. 

4  Les  çomnutndants  des  thèmes 
arménîaque,  des  Boncella riens ,  de 
Colonia  et  de  Paphlagonie,  occu- 
paient le  côté  du  nord,  les  comman- 
dants àes  thèmes  anatolique  ,  opsi- 
cien  et  de  Cappadpce,  et  les  cli- 
sonrarques  de  Sélencie  et  de  la 
Charsiane,  étaient  postés  au  midi. 
Le  général  tenait  le  côté  occidental , 
avec  les  troupes  du  thème  des  Thra- 
•césîens,  les  soldats  de  Thrace  et  de 
la  Macédoine. — S.-M. 

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aa6  HISTOIRE    ou    BAS-JëMPIRE.  (An  S6a.) 

et  leurs  épées  pour  les  teindre  du  sang  des  Grecs.  Dès 
le  point  du  jour,  il  leur  fait  prendre  les.armes,  et  mar- 
che à  leur  tête  pour  forcer  un  des  passages.  La  difH- 
culte  du  lieu ,  la  vive  résistance  qu'il  y  rencontra,  ren- 
dirent^s  efforts  inutiles.  Il  retourne  en  arrière  pour 
attaquer  le  passage  opposé  ;  il  le  trouve  encore  impé- 
nétrable. Enfia,  réunissant  toutes  ses  forces,  il  les  porte 
sur  le  poste  oiil^tronas,  qu'il  méprisait,  commandait 
en  personne;  mais  c'était  aussi  l'e^ndroit  le  mieux  dé- 
fendu» par  l'élite  de  l'armée.  Après  plusieurs  charges 
réitérées,  toujours  animées  par  la  fureur^  et  repoussées 
avec  la  même  violence,  Omar  écumant  de  ragç  s'élance 
sur  le  fer  des  ennemis,  et  tombe  percé  de  couns.  £n 
même  temps  les  Grecs  se  jettent  dans  l'enceinte ,  et  les 
Sarrasins  enveloppés  sont  taillés  en  pièces  sans  qu'il 
en  échappe  un  seul.  Le  fils  d!Omar  avait  déjà  passé 
l'Halys  pour  ravager  le  pays,  lorsqu'il  apprit  la  défaite 
et  la  mort  de  son  père  ;  il  fut  pris  avec  tout  son  déta- 
chement ^  comme  il  fuyait  vers  Mélitine.  [Les  Grecs 
vainqueurs,  étendirent  leurs  courses  jusqu'aux  frontières 
de  Mésopotamie  *.  Ali,  fils  d'Yahia  ^,  voulut  venger  la 
mort  d'Omar;  il  rassemble  une  forte  armée  composée 
des  troupes  de  l'Arménie  et  des  pays  de  Miaparikin  4. 
Il  fut  vaincu ,  et  périt  comme  celui  qu'il  avait  prétendu 
venger^].  Pétronas  porta  la  tête  d'Omar  à  CTonstanti- 

<  Par  le  clisourarque  de  la  .Char-  ci-dev.  p.  aaS. — S.-]\^« 
siane.  Cont.  Tbeoph.  p.  114.  Celui  ^  Cette  yille,  nommée  MaifarkeU 

qmleprity  selon  Génésina,  1.  4,  p«  par  les  Syriens,  elJVapboÂad  par 

46,  se  nommait  Monarchès  Mâché*  les  Arméniens,  est  la  ville  dont  il 

ras,  ô  Maxai^o^. — S.-M.  a  été  si  sonvent  question  dans  cette 

2  Le   Tsogkr'Pfezeriah,    Yoj€n  histoire  sons  le  riom  de  Martjropo- 

ci-dev.  §  47,  p.  aao,  lïot.  a. — S.-M.  Us. — S.-M. 

^  II  a  été  question  de  ce  général,  ^  Ces    détails   sont    donnés    par 


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{A4i«63.)  LIVRE   LXX.  MICHEL' III.  337 

nople,  et  triompha  dans  le  cirque.  Il  mourut  peu  de 
temps  après. 

Théophile  avait  foulé  ses  peuples  par  le   luxe  des    a»  863. 
bâtiments  ;  Michel  les  éppisa  par  ses  folles  libéralités  et       i^i- 

1/1  I  ?'•  1  1         1*  -1  BAtiment  de 

par  ses    débauches  :  c  étaient  les  seuls  objets  de   ses     Michel. 
énormes  dépenses.  Passionné  pour  les  courses  dû  cir-  sym.^p.440 
que,  il  fit  construire  pour  ses  chevaux,  qu'il  estimait   q^J^^' 
plus  qu'aucun  de  ses  sujets,  une  écurie  aussi  magnifique  ^  J^^- . 
qu'un  palais.  Les  murs  étaient  incrustés  de  marbre  et     p*  33a. 
de  porphyre;  des  sources,  pures  y  promenaient  leurs 
eaux,  et  se  rjsposaient  de  distance  en  distance  dans  des 
bassins  qui  servaient  d  abreuvoirs.  Rien  ne  le  flattait 
plus  agréablement  que  la  beauté  de  cette  superbe  écurie. 
Un  jour  qu'il  la  faisait  voir  à  un  citoyen  de  Constan- 
tinople,  bomnie  simple  et  peu  courtisan,  comme  il  se 
vantait  que  cet  édifice  rendrait    son   nom  immortel  : 
Seigneur,  lui  dit  le  citoyen ,  Justinien  a  bâti  Sainte- 
Sophie  y  il  Va  enrichie  de  tous  les  ornements  d'aune 
pieuse  magnificence ,  cependant  on  ne  parle  plus  de 
lui;   et  vous  espérez  gu'un  dépôt  de  fumier  fera 
wi^re  à  jamais  voire  mémoire?  Blessé  au  vif  de  cette 
répartie ,  il  fit  chasser  le  philosophe  a  coups  de  fouet 
par  les  valets  de  l'écùrie.  Deux  inscriptions,  qui  se  li- 
sent encore  sur  les  murs  d'Andrinople  et  de  Sélymbrie, 
nous  apprennent  cependant' qu'il  en  répara  l'enceinte 
détruite  par  les  Bulgares.  Quoiqu'impie  jusqu'au  sacri- 
lège ,  il  fit  bâtir  quelques  églises  ;  il  enrichit  celle   de 
Sainte-Sophie  d'ornements  très -précieux,  entr'autres, 
d'un  chandelier  d'or  du  poids  de  soixante  livres. 

Michel-,  jal#ux  de  la  victoire  de  Pétronas  qu'il  n'ai-     j^^  g^^ 

Aboa'lfaradi,  dan»  sa  Chronique  syriaque,  p.  171. — S.-M. 

i5. 


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228  HISTOIRE    VV    BAS-EM^IRJK.  (An  864.) 

^„.  m^it  points  voulût  marcher  lui-même  contre  les  Sar- 
^II'"rus°cs.  rasins.  Il  laissa  Oryphas  '  pour  gouverner  Constanti- 
Ccdr.t.2,p.  Dople;  il  était  encoife  en  marche,  lorsqu'il  re<jut  la 
zon.i.i6,t.2,  nouvelle  de  l'irruption  d'un  peuple  féroce ,  inconnu 
Cont/ The- jusqu'alors.  Oryphas  lui  mandait*  que  les  Russes^, 
**^**'ia2"^'  sortis  des  glaces  de*  la  Scythie^ ,  traversaient  le  Pont-, 
Syni.p.445.  Euxin  sur  deux,  cents  barques  ^.  Ils  étaient  déia  vers 

Georg.  p.-  . 

535,  536.    les  embouchures  du. Danube;  et  bientôt  entrés  dans  le 
ap.  conc.    Bosphore ,  ils  parurent  a  la  vue  de  Constantinople.  La 

Labb.t;j,p.    '      '^      ,     ,  ,       ,  .        .  1         -Il        1  1 

iao3.  ejru.aùte  de  ces  barbares  jetait,  toute  la  ville  dans  de 
mortelles  alarmes  :  sans  cesse  ils  faisaient  des  descentes, 
et  iQs^sacraient  impitoyablement  ce  qu'ils  rencontraient. 
Aucune  des  îles  voisines  ne  fut:  à  l'abid  de  leurs  rava- 
ges.; ils  égorgeaient  les  habitants,  enlevaient  Toi:  et 
l'argeQjtîdes  églises,  pillaient  les  monastères.  Us  sac- 
cagèrent eelui  dans  lequel  était  retiré  le  patriarche 
Ignace ,.  et  .coupèrent  la  tête  à  vingt-deux  moines.  Sur 
l'avis  d'Qiyphas^  l'empereur  revint  aussitôt,  et  passa 


'  I  II  est  probable  qjde  ce  person-  sage  qni  n*a  pas  encore  fixé  Fattea- 

nage  était  dejla  même  JàmîUeqae  .  tîon  des.  savants ,  et  qui  semblew' 

les  deux  officiers  du  même  nom  dont  -  faire  remonter  de  plus  d'an  siècle 

il  a  été  question  cî-dev.'p.  i5a^  not.  Tantiquitë   du   nom   des!  Rosses.  A 

i,liv.  XXIX,  S  45.— S.rM.      .    .     -  répoqae  dont  il  s'agit  îcijl'eiDpîw 

»  L'empereur  se  trouvait  alors  an  de  Russie  ne  faisait  que  de  naître, 

camp  de  Mauropotamos,  to  Mttupo-  Un  Raurik   commençait  de  régner 

woTajxov.  Syméon  logoth.  Chron.  p.  à  Novogorod. — S.-M. 

445.  Voyez  ci-dev.  p.  170,  not.  a,  4  Tôv  2)cu$ôv  lOvo«,  01  X8ifp|Uvot 

liv.  LXix,S  II.— S.-M.  f»caç.  Nîcet.  Fita Iffnat.  ap,  Conc. 

3  j^fi>C Idvoç  SxuOueov.    Cont.  Labb.  t.  ^,.p.  iao3. — S.-M. 

Theopb.  p.  1  ai.  Cest  à  proprement  ^  Les   historiens   de  Venise  qoi 

parler  la  première  fois  qu'il  est  qnes-  parlent  dp  cette  attaque  des  Rum<* 

tion  des  Russes  dans  les  annales  de  leur  donnent  le  nom  de  Nonntou** 

r£mpire.Jerapellerai  cependant  que  Normannorum  §pntes  aggressîs"^ 

j'ai  fait  remarquer,   ci-dev.  p.  i33,  Const4UitinopoUm.     Andr.    Dsnd.» 

not.  i  ,   liv.  Lxix,  S  3a  ,  un  pas-  Giron,  L  8,  c.  4t  S  4'* — ^•"^* 


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(An  864.)  LIVllB    LXX.  MICHEL    III.  Hlig 

le  canal  avec  beaucoup  de  danger  :  il  se  livra  aux  mou- 
vements de  cette  pieté  passagère  qui  commeneç  et  finit 
avec  le  péril.  Accompagné  de  Photius  et  de  tout  le 
peuple,  il  se  rendit  ei# procession  à  l'église  de  Bla- 
quemes,  pour  implorer  le  secours  de  la  mère  de  Dieu, 
protectrice  de  la  ville:  On  porta  la  robe  de  la  sainte 
Vierge  au  bord  de  la  mer;  on  l'y  plongea,  comme  pour 
rendre  cet  élément  favorable.  Si  l'on  en  croit  les  au- 
teurs contemporains,  <îette  dévotion  fut  suivie  d'un 
prompt  effet  :  la  mer,  auparavant  calme  et  tranquille, 
s'agita  tout -à -coup;  les  flots  soulevés  -avec  violence 
brisèrent  et  fracassèrent  les  barques  des  Russes  ;  il  n'en 
échappa  qu'un  très-petit  nombre,  qui,  s'étant  sauvés  à 
terre,  effrayés  de  ce  désastre  imprévu,  dont  ils  appri* 
rentla  cause  avec  étonnement,  vinrent  se  faire  baptiser 
à.Constantinople,  et  s'en  retournèrent  dans  leur  pays 
avec  un  évêque  pour  instruire  leurs  compatriotes.  Dans 
le  même  temps  une  flotte  '  de  vingt- sept  ^  vaisseaux 
Cretois  ravageait  les  Cyclades,  et  pénétra  jusqu'à  l'île 
de  Pi*oconnèse,  dans  la  Propontide  ^,  faisant  le  dégât 
sui-  toutes  les  côtes. 

Depuis  l'extinction  de  l'hérésie  des  iconoclastes,  la  a»  865. 
nié  moire  de  Constantin  Copronyme  était  devenue  aussi  ""• , 
odieuse  qu'elle  avait  été  révérée;  mais  on  ne  put  voir  Copronym«y 
sans  horreur  la  barbarie  qu'exerça  Michel  sur  le  cada-  Lécano- 
vrede  ce  malheureux  prince,  et  sur  celui  de  Jean  Lé-  Ses. 
canomante ,  le  patriarche  de  Théophile.  Les  ayant  fait  i^»  p-  464,. 
tirer  de  leurs  tombeaux,  où  l'on  dit  que  le  corps  de  Zon.  1.16, u 

.'    ô  TÂc    XpVmK   ÇoXoc.    Cont.  siears  autres  bâtimeiits  nommés  sa- 

Theopb.  p.  laa.  tourat,  aaTCUpat. — S.-M. 

*  Vingt  yaUseanx  appelés  eoum-  3  Auprès  de  Cyziqne.  — S.-M. 

banuf  sept  galères,  'ydtXsat,  et  plu- 


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23o  UISTOIRK   DU   BAS-EMPIRE.  (Ad  865.) 

a.  p.  i65,   Copronyme  fut  trouvé  sain  et  entier,  il  les  fit  apporter 
Sjm'  p. 446,  dans  le  cirque  :  là,  exposé  aux  yeux  de  tout  le  peuple 
Geotg.  p.   assemblé. pour  les  jeux,  ils  furent  battus  de  verges,  et 
^]^^J**-    ensuite  jetés  au   feu.  Après  «et  affreux  spectacle,  on 
^97-       scia  le  tombeau  de  Constantin ,  qui  était  du  plus  beau 
marbre  vert,  et^Tonen  forma  le  balustre  d'une  église 
que  l'empereur  faisait  bâtir. 
1^1^  Rien  ne  prouve  mieux  la  dépravation  d'un  siècle  que 

*él^ulcr*^à'  le  renversement  général  des  idées  sur  le  vice  et  sur  la 
Basile  sa    ycrtu.  Ouc  peuscr d'uuc  nation,  lorsqu'on  voit  les  his- 

concttbiue.  .  ;  . 

toriens,  qui  «ont  d'ordinaire  l'écho  du  public,  s'accor- 
der à  combler  d'éloges  des  hommes  «ans  honneur^  qui 
ne  s'élèvent  à  une  haute  fortune  que  par  le  succès 
de  leurs  crimes?  Tel  fut  ce  Basile,  que  les  écrivains  de 
ce  temps -là  nous  représentent  comme  un  héros  de 
sagesse,  dont  ils  louent  la  piété,  qu'ils  feraient  même 
passer  pour  un  saint,  s'ils  n'avaient  la  bonne  foi  de  ra- 
conter les  bassesses  et  les  forfaits  qui  lui  ouvrirent  le 
chemin  du  trone/Nous  verrons  que  pour  y  parvenir  il 
n'épargna  ni  les  parjures  ni  les  meurtres.  Son  crédit  crois- 
sait dé  jour  en  jour.  Â  la  vérité,  s'il  eût  eu  le  cœur  du 
prince  entre  ses  mains,  il  aurait,  ce  semble,  mieux  aimé 
le  porter  au  bien  que  de  le  plonger  dans  le  crime  ;  mais  son 
ambitionlui  fit  trahir  le  parti  de  la  vertu,  el,  decrainte 
de  hasarder  sa  fortune,  il  eut  la  coupable  complaisance 
de  se  prêter  aux  désordres  de  son  maître.  Michel  s'en- 
nuyait du  commercé  qu'il  entretenait  depuis  long-temps 
avec  Ingérine.  Basile^  peu  délicat  sur  l'article  de  l'hon- 
neur, consentit  à  l'épouser,  et  livra  en  échange  sa  sœur 
Thècle,  aussi  ambitieuse  et  plus  dissolue  que  son  frère. 
Pour  consommer  ce  trafic  scandaleux,  il  lui  fallut  ré- 
pudier sa  femme  Marie  ^  dont  il  avait  un  fils  nommé 


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(An  866.)  LIVRE    LXX.  MICHEL    Ifl.  ^3  ff 

Constantin.  Elle  fut  renvoyée  en  Macédoine  chez  ses 
parents,  avec  de  grandes*  richesses,  pour  k  consoler 
de  ce  divorce.  ïje  mariage  de  Basile  et  d'Ingérine  s'é- 
tant^fait  à  la  fin  de  décembre  865,  elle  accoucha  le 
1*^^  septembre  suivant  d'un  fils,  qui  fut  nommé  Léon, 
et  que  bien  des  gens  crurent  être  le  fils  de  Michel. 

A  force  d'infamie ,  Basile  vint  enfin  à  Bout  de  fran-    Ak  866. 
chîr  l'intervalle  qui  le  séparait  de  Bardas.  Égaux  en  formécontre 
crédit ,  ils  ne  s'occupèrent  plus  l'un  et  l'autre  que  des     Ba«"d««. 
moyens  de  se  supplanter.  Bardas  était  soutenu  par  sa  Léo,  p.  464, 
qualité  d'oncle  de  l'empereur ,  par  l'attachement  des  ctdr!  ui%. 
officiers  et  desxlomestiques  de  la  cour  qu'il  avait  pla-  zff.^i.f6,ta, 
ces  pour  la  plupart,  et  par  sa  hardiesse  à  eomnfettre     p-  ^^^^' 
des  crimes.  Basile  avait  en  sa  faveur  les  liens  de  la  de-       ^o5. 

Glyc.  p.  493. 

bauclie,  plus  Forts  que  ceux  delà  nature  ^ans  un  prince  Com.  Tbe- 
corrompu ,  le  crédit  de  sa  sœur  auprès  de  son  nouvel   ^  laS. 
amaut,  et  celui  qu'une  ancienne  habitude  conservait  à  Porph?'vit. 
Ingérine.  On  ne  cessait  de  représenter  à  l'empereur  que  ^^'ijg.^*'  ' 
son  oncle  abusait  de  son  nom  pour  commettre  des  in-  ^J™-  p*  f|f' 
justices;  et  Bardas  ne  donnait  que  trop  d'occasion»  de   Çj^^^'g-  P- 
l'en  accuser.  Ces  remontrances  furent  si  souvent  repe-       539. 
tées,  que  Michel  se  réveillant  enfin,  i*éforma  plusieurs     50, 5x.  ^' 
ordonnances  de  Bardas,  qui  reçut  avec  un  déplaisir 
sensible  ce  coup  mortel  porté  à    son  autorité.   Basile 
eut  encore  l'adresse  de  détacher  de  Bardas  le  patrice 
Symbace  son  gepdre  ',  homme  ambitieux  et  violent, 
intendant  des  postes  de  l'Empire.  Comptez,  lui  disait 
Basile ,  sur  tout  ce  que  fai  de  crédit;  je  ne  cesse  de 

«  SutiSoÎTio;,  Itzk  ôu-yaTpi  aùroû  était  probablement  issu  de  la  race 
^apX*^y  '^vj^i^i^.  Cont.  Tlieopb.  <ks  Bagratides ,  oti  d*ane  fanille  al« 
p.  137.  Ce  nom  fait  croire  que  Sym-  liée  à  cette  race.  Georç.-le-Moine , 
b^ius,  ou  plutôt  Sembat^  éuit  ar-  Chron,  p.  640,  dit  qu'il  était  Ar- 
ménien de  naissance  ou  dr*origînc.  l\  ménîen, — S.-M. 


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a32  HISTOIRE    DU    B^S-EMPIRE.  (A„  gge.) 

VOUS  recommander  à  Vempereur;  il  vous  aime,  il 
voudrait  vous  approcher  le  plus  près  de  sa  personne^ 
et  vous  créer  césar,  flotte  beau-père  est, le  seul  ob-^ 
stade.  Ces  paroles,  appuyées  de  serments,  allumèrent 
dans  le  cœur  de  Symbace'iun  violent  désir  d'écarter 
Bardas;  et,  comme isa. charge  lui  donnait  un  libre  ac- 
cè3  auprès  de  l'empçreur,  il  lui. insinua  que  Bardas 
attentait  à  sa  vie,  et  que  le.  zèle  pour  son, prince  l'o- 
bligeait à  révéler  les  pernicieux  desseins  de  son  beau- 
père.  Il  lui  fit  ensuite  le  détail  d'une  conjuration  sup- 
posée. Cette  calomnie ,  confirmée  par  le  témoignage 
de  Basile,  fut  aussitôt  crue  que  débitée.  L'empereur 
nte  songea  plus  qu'à  prévenir  Bardas.  '  Basile  faisant 
réflexion  qu^on  risquerait  trop  si  l'on. osait  l'attaquer 
à  Constantinople ,  oii  il  avait  grand  nombre  de  parti- 
sans ,  engagea  le  prince  à  passer  en  Asie  avec  son  ar- 
mée, sous  prétexte  d'aller  reconquérir  l'île  de  Crète; 
Bardas  ne  pouvant  se  dispenser  de  l'accompagner,  il 
serait  facile  de  s'en  défaire  dans  le  voyage.  Cependant 
ïe  philosophe  Léon  %  créature  de  Bardas,  ayant  eu 
quelque  soupçon  de  ce  complot,  l'exhortait  à  ne  pas 
quitter  le  palais  ;  que  c'était  sÈ  mettre  à  la  merci  de 
ses  ennemis  y  et  que  ^  s'il  sortait  de  Constantinople^  il 
n'y  reviendrait  jamais.  Bardas ,  touché  de  ces  avis , 
semblait  résolu  de  les  suivre  ;  ce  ne  fut  que  par  un 
parjure  exécrable  qu'on  parvint  à  calmer  ses  alarmes. 
Le  jour  de  l'Annonciation^  Bardas  assistant  àlamesse^ 
Photius  le  prit  par  la  main  après  la  lecture  de  Tévan- 
gile,  et  le  conduisit  à  la  galerie  des  Catéchumènes,  où 
se  rendirent  en  même  temps  Michel  et  Basile.  Là ,  le 

'  Voyez  ci-dev.  p.  loo,  §  1 1 ,  llv.  lxix. — S.-M. 


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(An  866.)  LIVRE    LXX.  MICHEL    Ilf.  a33 

patriarche,  en  présence  de  la  Croix,  tenant  en  main 
les  redoutables  mystères,  trempa  unie  plume  dans  le 
sang  de  Jésus  -  Christ ,  et  fît  signer  à  l'empereur  et  à 
Basile  qu'ils  n'avaient  aucun  mauvais  dessein  contre 
Bardas  ,  et  qu'il,  pouvait  en  sûreté  partir  avec  eux  : 
toutefois  une  protestation  si  sjicrée  ne  rassura  pas  en- 
tièrement Bardas.  La  veille  du  départ,  après  avoir  été 
à  Péglise  dj^Notre-Dame  de$  Vbyageilrs  *  implorer  la 
protectiqn^fe  la  sainte  Vierge  (  car  ces  malheureux 
siècles  alliaient  la  noirceur  des  crimes  avec  lès  pratiques 
de  dévotion  ),  il  invita  ses  amis  à  souper;  et,  comme 
s'il  eût  prévu  qu'il  ne  les . revérrait  pluis,  il  leur  dis- 
tribua des  présents  en  les  priant  de  se  souvenir  de  lui. 

L'armée  partit  le  jour  de  Pâques ,  qui  tombait  cette  lvi. 
année  au  7  avril.  Tandis  que  la  flotte  faisait  route  vers  de  Bardas. 
l'île  de  Crète  en  côtoyant  le  rivage,  l'armée  de  terre, 
après  quatorze  jours  démarche^,  vint  camper  au  bord 
de-  la  mer  ^.  Depuis  qu'on  s'était  élpigné  de  Constan- 
tinople,  Basile  ne  cessait  de  presser  secrètement  l'em- 
pereur d'exécuter  sa  résolution  ;  mais  ce  prince  timide,, 
considérant  le  grand  pouvoir  du  césar,  dont  le  fils 
Ântigone  commandait  les  troupes  de  la  garde,  n'osait 
risquer  un  coup  si  hardi.  Enfin ,  les  conjurés  ^  trou- 


I  IIpoç  rèv  TÎiç  ôirepà-^fliç  ^««TTOÎvTfjç  phyrogéncte,    Fit.   Bas.,   p.    147» 

T^v  OeoTo'xou  vaov,  3ç  o3tw  ^ri  è^Ti-^oç  ajoute  qu'il  était  près  du  Méandre  , 

xaTOvcp-àî^eTai.    Cont.   Theoph.   p.  xaTa  rh*  irpbç  Maiàv^pcp  ©paxYXFMûv 

ia7.— S.-'M.  wapctXiov.-:— S.-M. 

^  A  travers  le  thème  des  Thracé-  *     4  Ces  coiijtu>é8  sont  nominés  dans 

siens,  la  Mysie  et  la  Lydie  des  an-  la  Chronique  de  Syméon-le-Logo- 

ciens. — S.-M.  thète.  Ckron.,  p.  448.  Ce  sont  Ba- 

^  En  un  lieu  nommé  Ce/>i,  c*e8t-à-  sile,  bientôt  empereur,  Marianus, 

dire  /^  Jardins^  xarà  Xwrovç  towov  son  frère,  Symbatins,  gendre  de  Bar- 

Tivà   oîÎTw   )caTOvop.a^O[i.8vov.    Cont.  das,  Bardas,  frère  de  Symbatins, 

Theoph.   p.   127.    Constantin  Por-  Pierre-le-Bulgare,  et  Léon-l'Assy- 


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a34  HISTOIRE   1>U   BAS-EMPIRE.  (An  866.) 

vèrent  une  occasion  de  persuader  à  l'empereur  qu'il 
était  perdu  lui-même,  s'il  ne  se  hâtait  de  prévenir  une 
rébellion  près  d'éclater.  La  tente  de  l'empereur  était 
dans  la  plaine;  Bardas,  soit  par  vanité,  soit  par  dé^ 
fiance,  soit  sans  dessein,  avait  placé  la  sienne  sur  une 
hauteur  voisine.  On  fit  entendre  à  l'empereur  que  le 
césar  avait  choisi  ce  poste  supérieur,  pour  tomber  sur 
lui  avec  les  troupes  qiii  Jui  étaient  dé voi^p,-  et  Mi- 
chel effrayé  commanda  de  lui  ôter  la  vie  i^qu'il  viea* 
drait  le  lendemain  matin  lut  demander  l'ordre,  selon  la 
coutume.  Ce  secret,  communiqué  à  toute  la  faction  de 
Basile,  transpira  dans  le  moment.  Bardas  fut  averti  à 
l'entrée  de  la  nuit  que  la  résolution  était  prise  de  le 
massacrer  le  lendemain  ;  mais,  par  un  effetde cet  aveu- 
glement qui  précipite  les  hommes  à  leur  perte,  lorsqu'elle 
est  arrêtée  dans  les  çonsjeils  du  maître  souverain,  il 
méprisa  cet  avis;  cependant  il  passa  la  nuit  dans  des 
transes  continuelles,  et  dès  avant  le  jour  il  consulta 
ses  amis  sur  le  parti  qu'il  devait  prendre.  Philothée, 
son  premier  écuyer  et  le  plus  zélé  de  ses  partisans,. lui 
conseilla  de  faire  bonne  contenance,  et  d'aller  dès  le 
matin  avec  sa  garde  se  présenter  au  prince  dans  l'é- 
quipage le  plus  magnifique.  Soyez  sûr^  lui  dit-il,  que 
votre  intrépidité,  jointe  à  V éclat  de  votre  rang  au- 
gust€y  glacera  de  crainte  vos  lâches  ennemis.  Bardas 
survit  ce  mauvais  conseil.  A  l'entrée  de  la  tente  de 
l'empereur  il  fut  reçu  avec  respect  par  Basile,  qui,  en 
qualité  de  premieb  chambellan ,  le  prit  par  la  main  et 

rien,  d  Àoupioç,  son  cousin,  Jead-le-  rien,    p.    405.   La   Chroniqae    du 

Ghaldéen,  d  XoéX^v)c,  et  Constantin  moine  George,  p.    53 S,  y*^joate 

Toxaras.  Ils  sont  nommés  anssî  dans  Asylaeon  ,    consin    de    Symbatins , 

la  Chronique  de  Léon-le-Grammai'  ÀauXai(i)v  5  eÇa^cXçoç  oûrcû. — S.-M. 


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(An  866.)  LIVRE    LXX.  MICHEL   III.  235 

le  conduisit  au  prince.  Tout  était  prêt  pour  l'exécution. 
Les  conjurés,  à  la  porte  de  la  tente,  attendaient  le  signal 
que  vint  leur  donner  Symbace;  c'était  le  signe  de  la 
croix.  Us  entrèrent  sur-le-champ,' mais  la  vue  des  gar- 
des du  césar,  qui  était  venu  bien  accompagné,  les  te- 
nait en  alarmes,  et  leurs  bras  semblaient  engourdis  de 
crainte.  Bardas  allait  échapper,  lorsque 'Michel  ayant 
fait  approcher  Basile,  lui  dit  à  l'oreille  :  Veux-tu  dont 
que  je  périsse  ?  Choisis  de  la.  mort  de  Bardas  ou  de 
la  mienne.  Basile  tire  aussitôt  son  épée,  en  criant  :  ^i 
moi,  braises  gens,  sautiez  l'empereur!  A  ce  cri.  Bar- 
das se  jette  aux  pieds  du  prince  pour  demander  grâce. 
Basile  lui  porte  le  premier  coup,  tous  les  conjurés  fon- 
dent sur  lui,  et  le  mettent  en  pièces  '. 

Les  gardes  de  Bardas,  entendant  les  cris  de  leuf  maître,  i.vir. 
se  jetaient  en  foule  dans  la  tente  pour  le  défendre,  et  ^meurfre.*'* 
l'empereur  courait  le  plus  grand  péril ,  si  Constantin , 
grand-prévôt  de  l'armée*,  ne  les  eût  enveloppés  sur-le- 
champ  avec  sa  troupe  qu'il  tenait  toute  prête;  il  les 
harangua  avec  véhémence,  les  menaçant  de  la  puni- 
tion la  plus  sévère's'ils  faisaient  aucun  mouvement,  et 
leur  promettant  récompense  s'ils  se  tenaient  dans  le 
devoir.  Il  les  renvoya  donc  à  leur  quartier,  les  escor- 
tant au  travers  de  l'armée,  qui  apprit  avec  effroi  cette 
terrible  catastrophe.  La  vue  des  membres  du  ihalheu- 
reureux  prince,  que  les  conjurés  portaient  au  bout  de 
leurs  piques ,  redoubla  la  terreur.  Michel ,  qui  ne  s'é- 
tait pas  proposé  d'autre  exploit,   s'eihbarqua  dès  le 


1  Géaéàxu ,  1.  4 ,  p.  5 x ,  parle  d^nn      défendant  Bardas. — S. -M. 
Ghaldéen  (de  la  Chaldée  persiqae,  >  ô  ri^  Pv^Xv^  ^pou'Y7«piO(.  GonU 


je  pense  près  de  Trébizonde),  nom-      Tbeoph.  p.  laS. — 'S.-M. 
mé  Tziphlnaritès ,  qoi  se  fit  taer  en 


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a36  HISTOIRE   DU   BAS*EMPIRE.  (An  866.) 

même  joiir,  et  partit  pour  Constantinople.  C'était  le  2 1 
avril;  Tannée  le  suivit  à  petites  journées.  Comme  il 
abordait  au  port  d'Acritas,  près  de  Chalcédoine,  tout 
le  Bosphore-  et  tout  le  rivage  étant  couvert  d'une  mul- 
titude infinie  de  peuple  qui  était  venu  à* sa  rencontre, 
il  aperçut  sur  le  haut  d'un  rocher  un  moine  qui  lui 
criait  de  toutes  ses  forces  :  Triomphez^  prince  y  vous 
ai^ez  versé  le  sang  de  votre  oncle  y  de,  votre  second 
père.  Malheur  à  vous^  malheur  à  vous!  ce  sang 
retombera  sur  votre  tête.  Michel  et  Basile  donnèrent 
ordre  à  un  soldat  d'aller  couper  la  tête  à  ce  moine 
insolent  ;  mais  le  peuple  étant  accouru ,  larracha  des 
mains  de  l'exécuteur,  en  criant ^£^6  c^ était  un. insensé 
possédé  dudémony  qui  le  faisait  parler  malgré  Ud. 
Lym.  Bardas  n'avait  cessé  de  persécuter  Ignace.  Avant. son 

Phorius.     départ  de  Constantinople,  troublé  sans  doute  par  ses 
Anast.  in   rcmords ,  il  avait  vu  en  song:e  ce  saint  prélat  l'accuser 

Nicolao.  '       .  .        ^  ^   ,        \ 

Nicet.  in    devant  le  tribunal  de  Dieu,  et  demander  justice.  Irrité 
Conc.  Labb.  de  ccttc  visiou ,  il  avait  donné  ordre  de  le  resserrer  plus 
Fiewy,"ut!  étroitement,  et  de  le  traiter  avec  plus  de  rigueur.  Après 
*arMa!  40*  ^^  mort  de  Bardas,  Photius,  assez  pénétrant  pour  voir 
et  SUIT,     qyg  Basile  n'avait  fait  périr  le  césar  que  pour  prendre 
s^  place,  et  qu'il  n'épargnerait  pas  l'empereur  même, 
prit  conseil  des  conjonctures  jpour  régler  sa  conduite. 
11  avait  fait  sa  cour  à  Bardas,  auquel  il  devait  sa  for- 
tune; dès  qu'il  fut  mort,  il  se  déclara  contre  lui,  et, 
comme  il  ignorait  encore  quel  serait  le  succès  du  com- 
bat que  l'ainbition  de  Basile  allait  livrer  à  l'empereur, 
il  s'efforça   de  les  ménager  tous  deux.  Mais  pendant 
que  la  cour ,  occupée  d'intrigues  et  de  cabales ,  perdait 
entièrement  de  vue  lés  affaires  de  la  religion ,  il  exer- 
çait impunément  sa  tyrannie  sur  ceux  qui ,  demeurant 


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^An  S66.)  LIVRE    LicX.  MICHEL    llf.  a3j 

fidèles  à  leur  légitime  patriarche,  s'étaient  sçparé^de 
sa  communion*  Les  magistrats,  qu'il  gagnait  par  ses 
libéralités  et  par  son  adresse,  servaient  sa  vengeance. 
Pour  grossir  son  parti,  il  se  fit  établir  par  l'empereur 
dépositaire  et  distributeur  de  tous  les  legs  pieux,  moyen 
sûr  d'acheter  par  ses  largesses  gv^nd  nombre  de  par- 
tisans ,  sans  q.u'il  lui  ep  coûtât  rien.  De  plus ,  comme  il 
était  très-savant,  et  qu'il  rassemblait  dans  son  palais 
une  foule  de  disciples  et  de  gens  d'esprit  des  premières 
familles ,  qui  venaient  prendre  ses  leçons ,  il  n'en  ad- 
Toettait  aucun  qui  n'eût  protesté  par  écrit  que,  sur  les 
affaires  de  l'ÉgUse,  il  lui  demeurerait  inviolablement 
attaché. 

Le  pape,  de  sbn  coté,  n'oubliait  rien  pour  décrédi-       lu. 
ter  Pholius.  Bogoris  %  roi  des  Bulgares,  ayant  envoyé  du^pap^ne 
à  Rome  des  ambassadeurs  ^  pour  consulter  le  pape  sur  çufTco'^-  ^^ 

plusieurs  articles  concernant  la  religion ,  et  pour  lui .  «'«'^tioopie.  .;j^ 

demander  de»  évêques  et  des  prêtres  ,  le  pape  répondit  * 

à  ces  questions  par  une   grande  lettre  qui  fait  un  des  ^ 

plus  beaux  monuments  de  l'histoire  ecclésiastique.  Cette 
occasion  lui  parut  favorable  pour  faire  passer  à  Con-  y 

stantinople  les  lettres  qu'il  adressait  à  l'empereur ,  à  /  * 

Photius,  aux  évêques,  et  à  tous  les  autres  dont  nous 
avons  déjà  parlé.  La  route  de  Bulgarie  était  plus  sûre 
que  celle  de  la  mer,  dont  les  Grecs  étaient  les  maîtres* 
Il  ût  donc  accompagner  les  deux  évêques  ^  qu'il  en- 


1    Anastase-le-Bibliothécafre  j  De  le  x  4  août  866.  Anast.  De  tfit.  pont, 

viV.  pont.9om.i  p.  aao,  et  plusienn  rom.,  p.  a  19.  Selon  les  annales  de  j 

historiens  grecs,  Ini  donnent  le  nom  Saint-Bertin ,  ann.  866,  le  fîls  même  *i: 

de  Hiichel,  %ii  est  celui  qu'il  avait  du  roi  des  Bulgares  était  dans  cette                              >  ^  -.^ 

pris  aa  baptême.  Voyez  ci-dev.  p.  ambassade. — S.*M.  -^ 

190. — S.-M.  3  Pan]  ^  ^véqae  de  Popnlonie ,  et  [^ 

a  Ces  ambassadeurs  y  arrivèrent  Formoso,  évéque  de  Porto. — S.-M.  ;,f>- 


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a38  HISTOIRE    DU    BAS-KMPIRE.  (Au  8GC.) 

voytiit  aux  Bulgares,  de  trois  légats  '  qui,  étant  arrivés 
en  Bulgarie,  prirent  le  chemin  de  Constantinople  ;  mais 
ils  furent  arrêtés  sur  la  frontière  par  le  commandant  ^ 
qui,  les  traitant  avec  insulte,  les  obligea  de  retourner 
sur  leurs  pas  :  Fempereur  lui-même  dit  aux  résideats 
des  Bulgares  que ,  saas  la  considération  qu'il  avait  pour 
leur  roi,  qui  protégeait  ces  émi^aires  du  pape,  il  les 
aurait  mis  hors  d'état  de  reyoir  jamais  l'Italie  ^. 
I.X.  Photius,  plus  ardent  encore  que  l'empereur,  ayant 

^^noncr^  ^PP"*  4"®  ^  légats,  en  Bulgarie,  le  faisaient  passer 
»°*"un*'   pour  un  usurpateur,  résolut  de  pousser  à  bout  le  pape 

sentence  de  Nîcolas ,  ct  dc  sc  vengcr  de  l'excommunication,  en  le 

déposition.        ^  ^  ^  rr  i         • 

déposant  lui-même  ;  pour  cet  effet,  il  mit  en  œuvre 
une  impudente  fourberie,  dont  on  n'a  jamais  vu  d'autre 
exemple.  Comme  il  était  parfaitem^t  instruit  des 
canons  et  de  la  discipline  de  TÉglise ,  il  supposa  un 
'Concile  œcuménique,  dont  il  fabriqua  les  actes  avec  tant 
de  soin,  que  jamais  une  pareille  assemblée  ne  paraissait 
avoir  été  plus  régulière.  On  y  voyait  des  accusateurs 
qui  demandaient  justice,  des  témoins  qui  déposaient 
contre  le  pape  Nicolas.  Photius  prenait  d'abord  le  parti 
du  pape  :  il  ne  voulait  pas  qu'on  le  condamnât  en  son 
absence.  Les  Pères  du  concile  décidaient  au  contraire, 
et  Photius,  se  rendant  enfin  à  leur  autorité,  prononçait, 
selon  l'avis  unanime,  la  déposition  de  Nicolas:  il  décla- 
rait exconmmnié quiconque  communiquerait  avec  lui.  H 
trouva  vingt-et-unévêques  assez  corrompus  pour  sou- 

X   Donat,  évéqae  d'Ostîe,  avec  ^  Imper ator  legatis  régis  Bulgét- 

Léon  et  Marin,  prêtre  de  TÉgUse  ro-  ïvrum  ita  Jertur  dixisse,  niti  ptr 

maine.  Anast.  De  vie,  pont,  rom»,  Bulgariammissisedis  apbstoiicag've» 

p.  a 20. — S. -M.  nissentf  nec/aciem  meam,  née  Ro- 

'    n   se  nommait   Théodore. —  mamdieSusvitœ  suât  vidèrent.  Auva, 

S.-M.                               .  De  vif.  pont,  rom.,  p.  aao.  — S.-M. 


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(An  866.)  LIVRE    LXX.  MICHEL  ^III.  239 

scrire  ces  actes,  et  il  y  ajouta  lui-même  plus  de  mille 
souscriptions.  On  y  voyait  les  noms  de  Tempereur,  de 
Basile,  des  légats,  des  trois  patriarches  d'orient,  des 
abbës,  du  clerjgé,  de  tous  les  sénateurs.  Photius  avait 
fait  signer  l'empereur  pendant  qu  il  était  ivre;  les  au* 
très  seings  étaient  supposés.  Pour  engaget*  Louis,  em- 
pereur d'occident,  à  chasser  Nicolas  du  saint  siège, 
et  pour  mettre  dans  ses  intérêts  Ingelberge,  femme 
de  ce  prince,  il  portait  l'audace  jusqu'à  supposer  des 
acclamations  dans  lesquelles  le  concile  donnait  à  Louis 
le  titre  d'empereur,  que  les  Grecs  lui  refusaient, et  à  $a 
sa  femme  celui  d'Auguste  et  de  nouvelle  Pulchérie.  Il 
envoya  ce  roman  si  bien  contrefais  à  Louis  et  à. Ingel- 
berge par  deux  évêques,  avec  des  présents  et  des  let- 
tres rempUes  de  flatteries.  Il  composa  ensuite  une  lettre 
circulaire  qu'il  répandit  dans  tout  l'orient;  il  y  repré- 
sentait comme  autant  d'erreurs  capitales  les  usages  de 
i'JÉglise  latine,  qui  ne  s'accordaient*  pas  avec  les  prati- 
ques de  l'Églisfî  grecque;  il  accusait  surtout  les  Latins 
d'une  impiété  horrible,  poiîr  avoir  inséré  dans  le  sym- 
bole le  mot  Filioqiie;  dire  que  le  Saint-Esprit  pro- 
cède du  Fils. ainsi  que  du  Père,  c'était,  selon  lui^  ad-^ 
mettre  deux  principes  dans  la  Trinité,  c'était  se  rendre 
indigne  du  nom  de  chrétien  ;  et  ce  reproche^  inventé 
par  Photius,  fait  encore  aujourd'hui  un  des  prétextes 
cLu  schisme  des  Grecs.  Cependant  cette  addition,  assez 
ancienne  clans, l'Église  latine,  n'était  devenue  une  hé- 
résie aux  yeux  de  Photius  que  depuis  qu'il  avait  été 
condamné  par  le  pape;  la  profession  de  foi  qu'il  avait 
envoyée  à  Rome,  avec  sa  lettre  synodique ,  huit  ans 
auparavant,  était  conforme  dans  tous  les  points  à  la 
croyance  de  l'Église  romaine.    Il  envoya  au   roi  des 


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a4o  HtSTOligE    DU    BAS-EMPIRE.  (^u  866.) 

Bulgares  une  lettre  pareille,  avec  la  souscription,  sans 
doute  supposée,  de  Michel  et  de  Basile.  Les  deux  em- 
pereurs (car  Basile  était  alors  associé  à  l'empire)  de- 
mandaient à  ce  prince  d'obliger  les  légats  du  pape 
à  abjurer  ces  erreurs,  et  à  reconnaître  Photius  pour 
patriarche  œcuménique. 
I.XI.  Toutes  ces  faussetés  de  Photius  n'étaient  aperçues 

**"cié  à**^'  ni  àe  Michel,  toujours  enseveli  dans  la  débauche,  ni 
rempire^  de  Basilc,  uniquement  occupé  des  projets  de  son  am- 
Cedr.t.a,p.  bitiou.  Bardas  avait  été  chargé  du  poids  de  toutes  les 
Zon.  1. 16,  t.  affaires,  qui,  depuis  sa  mort,  retombait  sur  l'empereur, 
Mlmâs8.p.   incapable  de  le  soutenir  :  ii  le  reconnaissait  lui-même 
oiyc-P^agS.  sans  en  avoir  de  hotite.  Jamais  ce  prince  n'avait  connu 
^**h*p  ^as"  d'autre  usage  de  la  puissance  souveraine  qu'une  oisi- 
lag.       y^té  licencieuse ,  ni  d'autt'e  privilège   que  l'impunité. 
Porph.  Vit.  D'ailleurs,  il  se  voyait  sans  enfants,  et,  quoiqu'il  n'eût 

Bas.  p.  148,  '    '       .  ^     ^  .  au-     JX 

149-  encore  que  vmgt-sept  ans,  sa  jeunesse,  netne  dans  sa 
449.  '  fleur,  ne  lui  laissait  aupune  espérance  de  postérité.  Il 
^539.  ^  jeta  donc  les  yeux  sur  Basile  pour  l'associer  à  l'empire. 
L'histoire  nous  a  conservé  le  détail  de  cette  inaugura-  i 
tion.  Le  soir  de  la  veille  de  la  Pentecôte  ' ,  l'empereur 
envoya  secrètement  ordre  à  Photius  de  faire  les  dispo- 
sitions nécessaires  pour  couronner  Basile  le  lendemain. 
Dès  le  matin,  le  peuple  assemblé  dans  la  chapelle  du 
palais,  vit  avec  surprise  placer  deux  sièges  sur  l'estrade  * 
destinée  à  l'empereur.  Bientôt  après,  l'empereur  sortit 
de  son  appartement  dans  le  plus  pompeux  appareil. 
Basile  marchait  derrière  lui,  revêtu  de  son  manteau  de 
cérémonie,  et  portant  l'épée  du  prince,  en  qualité  de 
premier  chambellan.  Arrivé  à  la  porte  de  la  chapelle , 

'  Le  96  mai  866.— S.-M. 


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(kt  see.)         LIVRE  Lxx.         }»ricHFX  III.  241 

l'emperetir,  sans  déposer  sa  couronne  comme  c'était  la 
coutume,  s'avança  jusqu'à  l'entrée  du  sanctuaire,  et 
monta  sur  son  trône.  Basile  s'assit  sur  le  plus  haut  de- 
gré de  l'estrade;  au-dessous  de  lui,  le  grand  logothète 
Léon  tenant  en  main  un  cahier  ;  sur  le  plus  bas  degré , 
les  officiers  de  la  chambre  de  l'empereur.  Lorsqu'ils 
eurent  pris  leurs  places,  le  logothète  se  levant  lut  à 
haute  voix  ces  paroles  :  Le  césar  Bardas  avait  attenté 
à  ma  vie^  et  son  dessein  criminel  aurait  réussi  sans 
la  vigilance  de  Basile  et  de  Symbace.  H  a  porté  la 
peine  que  méritait  sa  perfidie.  Connaissant  la  fidé» 
Uté  de  Basile^  le  zèle  dont  il  a  été  animé  pour  la 
consertfation  de  mes  jours,  et  la  tendre  affection  qu'il 
me  porte  y  fe  lui-  confie  le  soin  de  mon  empire;  je 
partage  avec  lui  mon  autorité^  et  je  veux  que  tous 
mes  sujets  le  reconnaissent  pour  empereur.  Basile 
fondait  en  larmes.  L'empereur  prit  sa  couronne,  et  la 
mit  entre  les  mains  dePhotius,  qui  la  porta  sur  l'autel 
et  prononça  sur  Basile  une  formule  de  prières.  Ensuite 
les-  officiers  de  la  chambre  ôtèrent  à  Basile  le  manteau 
de  chambellan,  et  le  revêtirent  des  ornements  impériaux. 
Basile  se  prosterna  aux  pieds  de  l'empereur,  et  Photius, 
ayant  repris  la  couronne  sur  l'autel ,  la  posa  sur  la  tête 
de  Basile.  En  ce  moment  toute  rassemblée  s'écria  :  Lon- 
gues années  à  Michel  et  à  Basile!  et  l'on  célébra  le 
saint  sacrifice. 

L'ambition  fit  tous  les  crimes  de  Basile^  Dans  une  txii. 
cour  où  la  vertu  est  en  honneur,  on  s'effi^rce  de  pa-  punition  de 
raître  vertueux  pour  avancer  sa  fortune;  le  malheur  ^J^p^^'^. 
des  conjonctures  avait  exigé  de  Basile  un  effort  tout  %l\^^^' 
contraire  :  pour  s'élever,  il  lui  avait  fallu  se  prêter  à  des  y^^^^;^  ^ 
désordres  dont  il  était  éloigné  par  caractère.  Dès  qu'il    a,  p.  167- 

16 


Tome  XIIL 


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a4a  HISTOIRE    DU    BA.S*£MP/AE.  (Ao  866.) 

const.  n'eut  plus  rien  à  désirer,  ii  i^ntrs^  dans  son  naturel: 
Bas?*p.  149!  sage,  bien&isant,  sobre,  modéré  dans  .toute  sa  con- 
'^%4.^^'  duite,  il  gagna  bientôt  tous  les  cœurs,  et  l'Empire  re- 
^G™ôr  '  ^^^  connut  que  le  seul  bon.  usage  que  Michel  eût  fait  de 
539,540.  sa  puissance  était  de  la  partager.  Mais  Symbace,  qui 
n'avait  contribué  à  la  chute  de  Bardas  qua  dans  Tes- 
pérance  démontera  sa  place,  vit  avec- dépit  qu'il  avait 
été  joué  par  Basile.  Dévoré  de  jalousie,  il  se  ligue  avec 
George  Pégane,  gouverneur  d'Hellespont  ' ,  qui  lui 
fournit  des  troupes.  Us  se  mettent  en  campagne,  et  pu- 
blient  un  manifeste  rempli  de  protestations  d'un  atta- 
chement inviolable  à  Michel,  leur  légitime  empereur, 
et  d'invectives  contre  Basile,  fourbe,  artificieux,  qui, 
né  dans  la  poussière,  nourri  dans  la  mendicité,  après 
avoir  traîné  sa  Jeunesse  dans  les  plus  vils  emplois, 
avait,  par  ses  basses  flatteries ,  réussi  à  séduire  le  prince, 
et  s'était  enfln  assis  à  côté  de  lui  pour  le  précipiter  lui- 
même.  A  les  entendre,  loin  d'être  rebelles,  ils  étaient 
les  sujets  les  plus  zélés  et  les  plus  fidèles  ;  c'était  pour 
l'honneur  et  le  salut  du  prince  qu'ils  prenaient  les 
armes;  et,  sous  ce* prétexte  ordinaire  aux  révoltés, ik 
ravagent  le  pays,  pillent  les  villes  et  les  campagnes, 
brûlent  les  maisons ,  et  couvrent  les  bords  de  la  PrO" 
pontide  et  du  Bosphore  de  sang  et  de  carnage  ;  i" 
courent  toute  la  côte,  et  mettent  le  feu  aux  vaisseaux 
destinés  pour  Constantinople.  Basile  fait  maroher  des 
troupes,  dont  il  donne  le  commandement  à  Nicéphore 
[Maleïnus*],  homme  sage  et  prudent,  qui,  pour  ne  pas 

X  Commandant  du  thème  à^Ops>  je  croîs,  nn  des  seigneurs  anD«w«n> 

cium,  xarà  to  Ô^J/otiov  •tqv.xo  çpa-  de  la  frontière  orientale  de  1'^' 

Ttr{i^(*(i,  Const.  Porph.  Fit.  Bas,  p.  pire,  de  la  famille  qui  a  produit  lc« 

149.— S. -M.^  empereurs  Nicéphore,  Phocas,  et 

^ÔMo^'cvoç.  Ce  personnage  «tait,  Jean  Tsimiscès,    qni  vécnr»*  •** 


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(An  866.)  LIVRE  LXX.  MICHEL   III.  ^43 

opiniâtrer  les  esprits  et  faire  de  cette  rébellion  nais- 
sante une  guerre  civile ,  ne  se  pressa  point  de  com- 
battre. Il  fit  courir  dans  l'armée  rebelle  des  billets 
d'amnistie  pour  ceux  qui  se  détacheraieht  des  chefs  de 
la  révolte ,  avec  promesse  de  récompense  à  quiconque 
les  livrerait.  Cet  expédient  lui  réussit.  L'hiver  étant 
venu,  les  séditieux  se  séparèrent,  et  les  deux  chefs,  ré- 
duits à  se  cacher  ' ,  furent  bientôt  trahis  par  leurs  pro- 
près  partisans.  Pégane  fut  p^is  le  premier,  et  conduit 
à  Constantinople.  Après  qu'on  lui  eut  crevé  les  yeux 
et  coupé  le  nez,  On  le  fit  demeurer  pendant  trois  jours 
assis  sur  une  pierre  près  de  la  colonne  milliaire,  dans  la 
grande  place,  tenant  à  la  main  une  tasse  oîi  les  pas- 
sants jetaient  quelque  aumône.  Trente  jours  après, 
Symbace  fut  surpris  dans  une  hôtellerie.  On  le  con- 
duisit à  l'empereur,  qui,  pour  se  divertir  aux  dépens 
de  ces  malheureux ,  voulut  que  Pégane  allât  au-devant 
de  lui,  marchant  à  reculons,  et  lui  portant  sous  les 
narines  la  fumée  de  l'encens  qu'il  tenait  dans  un  tesson 
de  terre.  On  traita  Symbace*  comme  on  avait  traité 
Pégane,  et,  de  plus,  on  lui  coupa  la  main  droite.  En- 
suite on  les  renvoya  dans  leurs  maisons,  avec  défense 
d'en  jamais  sortir  sous  peine  de  la  vie.  Si  l'on  en  croit 


mlliea  dn  siècle  suivant.— S.-M.  Turai  ^h  xaX  6  Suft^oértoc,  irapà  rou 

z  Selon  Constantin  Porphyrogé-  MaXftivou    ilç    XeXT^tviiv.    Le    pays 

nète,  Fie.  Bas,,  p.  iSo,  Symbatius  qu'on   appelait    à   cette  époque  la 

on  Sembat  se  retira  dans  nn  fort  Celtzène ,  était  celui  qui ,  dans  i*an- 

qu'il  appelle  le  large  rocher ^  tl^  t6  tiquité ,  avait  été  nommé  Acilisène. 

TYÎç  nXaTêiaç  XE-ifc^i-evin;  DsTpa;  ^pou-  —  S. -M. 

ûtov,  et  Pégane  à  Cotyîenm.  Selon  *  Syméon-le-Logothète ,  Ckron.f 

George-le-LogotbèteyCAro/i.,p.  449#  p.  449»«t  George-le-Moîne,  Chron., 

Symbatios  fat  pris  dans  la  Geluène,  p.  530»  disent  qa*on  leur  creva  seu- 

pays  de  T Arménie  romaine,  par  an  ment  an  œil.-*S.-M. 


personnage  nommé  Maléïnns,  Kpx- 


ï6. 

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a44  HISTOIRE   DU    BAS-EMPIRE.  (An  867.) 

Constantin  Porphyrogënète,  petit- fils  de  Basile,  ce 

prince 9  après  la  mort  de  Michel,  non-seulement  leur 

pardonna ,  mais  s'efforça  même  de  les  consoler,  en  les 

Xv  867.    comblant  de  bienfaits,  et  les  faisant  souvent  manger  à 


"'"•      sa  table. 


Michel  veut 

^*Basiie"'^  Depuis  quc  Basile  partageait  avec  Michel  la  dignité 
Léo. p.  457,  impériale,  les  désordres  de  ce  prince  lui  étaient  deve- 
ctdr!t*a?p.  nus  plus  insupportables  :  il  en  croyait  aussi  partager 

^^567.^^*  la  honte,  et  ne  cessait  de  l'exhorter  à  changer  de  vie. 
p**^66'^'67!  ^^^  fréquentes  remontrances  le  rendirent  odieux.  Mi- 

Mana»8.  p.  ç,]jq\  écouta  plus  volontiers  ses  compagnons  de  débau- 
Giyc.p.  agt  chc,  qui  lui  Conseillaient  de  se  défaire  de  ce  censeur 

et  seqq 

Joéi.  p.  179.  incommode  :  l'un  d'entr'eux  s'offrit  à  l'exécution ,  et 
oph.  p.  129,  ayant  accompagné  Basile  à  la  chasse ,  il  lui  lança  un 
*Con?t!  trait  comme  pour  frapper  la  bête;  mais  il  manqua  son 
Bal^p.  Jst,  coup.  A  l'instant  le  cheval  de  l'assassin  s'étant  eflfarou- 
s^m^^^Hs  ^'^^  emporta  sou  maître  au  travers  de  la  forêt,  dans 
45o  et  seqq.  les  rochers ,  dans  les  précipices.  Ce  malheureux ,  près 

Georg.p,  .     '  .1  , 

5a6,  542,   de  mourir,  avoua  son  crime,  exhortant  ses  camarades 

543.  .  . 

Nicef.inign.  à  rcspcctcr  Ics  jours  de  Basile,  dont  Dieu  se  déclarait 

ap.  coocil.     1  .      . 

Labb.t.  8,    le  protecteur. 

Oeàel^^i\,      Michel  persista  dans  le  dessein  de  le  faire  périr. 

DuMu  e     ^P^^^  "^^  course  de  chars,  où,  selon  la  coutume,  ii 

fam. Byz. p.  avait  remporté  la  victoire,  il  donna  un  grand  souper 

•     aux  seigneurs  qui  avaient  couru  avec  lui  ;  l'impératrice 

n  fait  un    et  Basile  y  assistaient.  Au  milieu  de  là  joie  du,  festin, 

empereur,    uu  ramour  de  la  trirème  impériale,  nommé  Basilicin  % 

favori  du  prince  à  cause  de  sa  bonne  mine  et  de  ses  ta- 


«Constantin Porphyrogënète, ^if.  fois  préfet  de  Constantinople.  Sy- 

Bas,,  p.  i56,  dit  que  ce  personnage  méon-ie  Logotlicte,  Chron,,  p.  4^0, 

était  de  Nicomédie,  et  frère  de  Con^  le  nomne  BasUisciahqs. — S.-M. 
•tantîn    Cabalinos ,  qui    fat   deux 


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(An  867.)  LIVRE   LXX.  MICHEL   in.  a^S 

lents  en  fait  de  débauche,  prit  ia  liberté  de  se  mêler  dans 
la  conversation ,  et  de  faire  un  pompeux  éloge  de  Tad- 
inirable  dextérité  de  l'empereur.»' Michel ,  dont  he  vin 
avait  déjà  troublé  la  raison,   ctiivré  encore   par  des 
flatteries  dont  il  était  idolâtre,  fit  apporter  de  sa  garde- 
robe  les.habits  impériaux,  et  en  revêtit  Basilicin  en  lui 
donnant  le  titre  d'emper^^ur.  Le  matelot  interdit,  ayant 
honte  d^accepter  ces  ornements,  jetait  les  yeux  sur  Ba- 
sile; mais  Tempereur  se  mit  en  colère,  et  Basile  lui  fit 
signe  d'obéir.  Michel  alors  se  tournant  vers  Basile: 
Vois-tu  y  dit-il,  que  la  pourpre  lui  sied  mieux  qu'à 
toi?  Je  f  ai /ait  empereur;  ne  suis^je  pas  le  maître 
d*  en  faire  un  autre?  Il  impose  silence  à  l'impératrice, 
qui ,  ne  pouvant  retenir  ses  larmes,  tâchait  de  lui  faire 
«otendre  qu'une  pareille  extravagance  anéantissait  la 
majesté  impériale.  Pour  lui,  il  s'applaudissait  tellement 
de  ce  caprice  insensé,  que,  dès  le  lendemain  matin,  il 
conduisit  au  sénat  Basilicin  revêtu^  de  toutes  les  mar- 
ques de  sa  nouvelle  dignité;  il  le  présenta  aux  séna- 
teurs ,  leur  déclarant  qu'il  l'avait  associé*  à  sa  puis.- 
sance,  et  Ves  prenant  eux-mêmes  à  témoin  qu'il  avait 
'  fait  un  meilleur  choix  que  .dans  k  personne  de  Basile. 
Tous  les  sénateurs ,  étonnés  de  cette  incroyable  folie, 
demeurèrent  dans  le  silence,  se  regardant  les  uns  les 
autres  sans  oser  lever  les  yeux  sur  l'empereur,  qu'ils 
jugeaient  entièrement  dépourvjn  de  raison. 

Cependant  Basile,  recevant  de  toute  part  avis  que 
sa  perte  était  résolue,  se  détermina  enfin  à  prévenir 
Teropereur.  Théodora ,  mère  de  Michel,  enfermée  dans 
un  monastère,  avait  conservé  un  appartement  voisin 
de  celui  de  son  fils,  dans  le  palais  de  Saint-Manias, 
hors  de  la  ville,  où  elle  avait  la  liberté  d'aller  quelque- 


txv. 
Mort  d« 
Micbel. 


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a46  HISTOIRE    DU    BAS-EMPIRE.  (Ab  86j.) 

fois  prendre  Tair  avec  ses  filles.  Elle  voulut  y  donner 
à  souper  à  son  fils  et  à  toute  sa  cour.  Elle  invita  fia* 
sile  et  Ingériiie;  Basîlicin  même  ne  fut  pas  oublié.  Ce 
fut  cette  occasion  que  choisit  Basile  pour  se  défaire  de 
ses  ennemis  ;  et  il  est  remarquable  que  des  conjurations 
rapportées  dans  Thistoire  un  grand  nombre  s'est  exé- 
cuté dans  la  sécurité  de  la  table,  soit  parle  poison ,  soit 
par  le  fer.  fiasile  communiqua  son  dessein  à  plusieurs 
seigneurs ,  disposés  à  tout  entreprendre  pour  se  déli- 
vrer d'un  prince  extravagant  qui  déshonorait  Fempire. 
C'était  le  ^4  septembre.  On  se  mit  à  table  à  l'entrée  de 
la  nuit,  et  avant  neuf  heures  du  soir  Michel  était  ivre. 
Basile  s'en  étant  aperçu  se  leva  de  table,  et ,  laissant  sa 
femme  Ingérine  amuser  de  ses  plaisanteries  son  ancien 
amant,  il  eut  soin  d'embarrasser  la  serrure  de  l'appar- 
tement de  l'empereui:  afin  qu'on  ne  pût  le  fermer.  Il 
revint  aussitôt,  et,  un  moment  après,  l'empereur,  plongé 
dans  le  sommeil,  se  fit  conduire  à  son  lit  par  Basile , 
qui  le  quitta  après  lui  avoir  baisé  la  main.  Basilicin , 
dans  le  même  état  que  Michel ,  se  jeta  sur  un  autre  lit; 
tous  deux  s'endormirent  aussitôt.  Un  moment  après , 
le  chambellan  Ignace,  se  tenant  debout  à  l'entrée  de  la 
chambre,  qu'il  ne  put  fermer,  vit  arriver  Basile  avec 
une  troupe  armée.  Tandis  qu^il  s*opposait  à  leur  pas^ 
sage,  etqu'onle  poussait  avec  violence  jusqu'au  lit  du 
prince,  l'empereur  s'éveilla  au  bruit  du  tumulte;  et^ 
comme  il  levait  les  deux  mains  en  jetant  de  grands  cris, 
un  des  conjurés,  nommé  Jean  Chaldée  %  les  lui  trancha 
de  deux  coups  de  sabfe,  et  l'acheva  de  plusieurs  coups. 


*  îttàvvTi;  ô  XaX<^yj;.  Céfalt  nu      ci-dev.   §  56  y  p.  233,  not.  4*  — 
des  assassins  du  César  Bardas.  Yoy.      S.-M. 


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(An  867.)  LIVRE  LXX.  MICHEL   III.  !l47 

D'autres  '  massacraient  Basilicin.  Pendant  ce  temps-là, 
Marien,  frère  de  Basile,  bien  accompagné,  défendait 
l'entrée  contre  les'  domestiques  de  Tempereur.  Après 
€ette  exécution,  Basile  avec  sa  troupe  '  courut  au  grand 
palais,  dont  il  força  les  portes.  Il  y  fit  venir  Ingérine 
en  magnifique  équipage,  et  renvoya  l'impératrice  Eu- 
dociechez  ses  parents.  II  donna  ordre  à  Paul,  son  cham- 
bellan, de  pourvoir  à  la  sépulture  de  Michel.  Paul  s'é- 
lant  transporté  au  lieu  de  l'assassinat ,  trouva  ce  mal- 
heureux prince  couché  par  terre,  les  entrailles  hors  du 
corps;  autour  de  lui^  sa  mère  et  ses  sœurs  fondaient 
en  larmes,  et  jetaient  des  cris  lamentables.  L'ayant  en- 
i^loppé  dans  la  housse  de  son  cheval ,  il  le  fit  jeter 
dans  une  barque  et  porter  à  Chrysopolis,  oîi  il  fut 
enterré  sans  pompe  dans  un  monastère.  Michel  avait 
régné  vingt-cinq  ans  et  huit  mois  ;  il  mourut  dans  sa 
vingt-neuvième  année. 

Les  historiens  observent  que  les  assassins  de  Michel  ^.  ^^v'; 

>■         ^  Fin  tragique 

firent  une  fin  tragique;  ce  qu'ils  ne  manquent  pas  dcsasMssini 
d'attribuer  à  la  vengeance  divine.  Mais  la  prospérité 
du  règne  de  Basile,  auteur  du  meurtre,  prouve  que 
la  justice  de  Dieu  ne  punit  pas  toujours  en  cette  vie 
les  plus  grands  '  criminels.  Jacobize ,  qui  avait  tué 
Basilicin,  étant  à  la  chasse  avec  l'empereur,  laissa 
tomber  son  épée,  et  tandis  qu'il  descendait  de  cheval 
pour  la  ramasser ,  son  pied  s'étant  embarrassé  dans 
Tëtrier ,  le  cheval  prit  l'épouvante,  emporta  son  maître 

»  Apclatès  et  lacobîtzè». — S.-M.  p.  54^,  fait  connaître  encore  Pîerre- 

*  Son  coDsin  Asylaeon ,  AcwXaîwv,  le-Bulgare ,  dont  il  a  été  question , 

le  Perse  Enlogius,  et  Ardabasde,  Ap-  §  ^6  ,  p.  a33 ,  not.  4,  Bardas,  père 

^o$aa^oç ,  commandant  de»  tronpes  de  Basile  Kector,  Symbatins  on  Semr 

étrangères ,  irt^paixcç,  et  d'antres,  bat ,  frero  de  Basile.— -S.-M. 
La  Chronique  de  George>le*Moine,. 


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q48  UISTOIBE   DU   BA.S-EMI4&E.  (An  ^7.) 

au  travers  des  vallons  et  des  précipices ,  et  le  mit  eu 
pièces.  Jean  Chaldée  était  à  la  tête  d'une  armée  ';  ac- 
cusé d  avoir  tramé  un  complot  contre  Tempereur,  il 
fut  mis  en  croix  ^.  Asyléon,  cousin  de  Basile  ^,  avait 
étc  relégué  dans  une  de  ses  maisons  de  campagne,  au 
voisinage  de  Constantinople,  en  punition  des  cruautés 
barbares  qu'il  exerçait  sur  ses  domestiques.  Une  nuit 
ils  l'assassinèrent,  et  furent  brûlés  vifs,  après  qu'oa  leur 
eut  coupé  les  mains  et  les  pieds.  Le  Perse  Apélatès  et 
Constantin  Toxaras,  qui  avaient  eu  part  au  meurtre 
de  Michel,  périrent  aussi  d'une  mort  funeste  :  l'un  fut 
rongé  des  vers,  l'autre  fut  massacré  dans  le  pays  de 
Cibyre  où  il  commandait.  Enfin  Marien ,  frère  de  Ba<* 
silé,  s'étant  rompu  le  pied  en  tombant  de  clieval,  mou-> 
rut  de  sa  blessure.  La  nièce  de  Basile ,  qui  fut  mariée 
à  Participace^,  doge  de  Venise,  devait  être  fille  de  cq 
Marien ,  ou  de  quelqu'une  de  ses  soeurs. 

«  Oa  platât  commandant  de  la  Sasile. — S.M. 
Cbaldée  pontîqae,  ?pAryr]fOc  XoX-  4  Jean  Pardcipacîo.  Cette  alliance 

^aiotç.  Ce  pays  était  sa  patrie.Voyez  de  la  race  de  Basile  avec  les  primres 

ci-dey.   §^    65,    p.a47,     not.    a.  de  Venise,  B*est fondée  qae  sur  an« 

*  Par  ordre  d'André ,  maître  de  indication  tirée  par  Dncange  de  San- 

la  milice    ou  stratâate ,  selon  Sy-  sorino,  dans  son  histoire  de  Venise, 

méon-le-Lo^othète,  CAroo.,  p.454*  l.  11,  p.  179.  Je  ne  la  croîs  pas 

—  S.-M.  exacte  ;  il  est  an  moins  certain  qne  la 

3  Selon    Syméon-le-Logothète,  chroniqne  d'André  Dandolo,  antenr 

Chron,,  p.  454  »  Aaylaeon  était  frère  plos  ancien  et  bien  informé,  et  quî 

de  Basile ,  0  ^k  à^eX^o;  toO  ^aoiXéu;  parle  assez  en  détail  de  ce  doge ,  ne 

AouXaicAv.    Dans    la    chronique    de  dit  rien  de  cette  alliance,  et  cepeo- 

George-le-Moine ,  il  est  api>elé  ild-  dant  il  pade  assea  en  détail  de  la  £1- 

<ftk(fùç ,  c'est-à-dire  fils  dn  frère  de  mille  de  ce  souverain.— S.-M. 


FIN    DU    UVRE    SOIXANTE-DIXIÈME. 


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LIVRS   UXI.  «àSILE.  ^49 


LIVRE  LXXI. 


Basile  seul  empereur,  ii.  Il  rétablît  les  finances,  m.  Ré- 
forme de  la  judicature.  iv.  Tranquillité  publique  rétablie. 
\.  Photius  chassé  fait  place  à  Ignace,  vi.  Reconnaissance  de 
Basile,  vu.  Règlements  de  Basile  sur  la  milice,  viii.  Les  Sar- 
rasins* lèvent  le  siège  de  Raguse.  ix.  Les  barbares  de  la 
Dalmatie  rentrent  dans  Tobéissance.  x.  Continuation  de 
Taffaire  de  Photius.  xi.  Préparatifs  du  huitième  concile  gé- 
néral. XII.  Concile,  xiii- Suite  du  concile,  xiv.  Les  Bulgares 
se  soumettent  à  l'Eglise  de  Constantinople.  xv.  Événements 
divers,  xvi.  Guerres  des  Sarrasins  en  Italie,  xvii.  Prise  de 
Bari  sur  les  Sarrasins,  xviii.  La  religion  chrétienne  s'étend 
en  Russie.  XIX,  Incursions  des  pauliciens.  xx.  L'empereur 
marche  contre  eux  en  personne,  xxi.  Basile  prend  plusieurs 
villes  aux  Sarrasins,  xxii.  Il  passe  l'Euphrate.  xxui.  £xpé^ 
dition  de  Malatia.  xxiv.  ïïouvelle  expédition  contre  Chry- 
sochir.  xxv.  Défaite  des  pauliciens.  xxvi.  Destruction  de 
Téphrique  et  des  pauliciens.  xxvii.  Débauches  de  la  sœur 
et  de  la  femme  de  Basile,  xxviii.  Conversion  des  Juifs. 
XXIX.  Basile  piqué  par  un  serpent,  xxx.  Guerre  contre  les 
Sarrasins,  xxxi.  Caractère  des  Sarrasins  de  ce  temps-là. 
xxxii.  Succès  de  Basile  eu  Cilicie.  xxxiii.  Sou  retour,  xxxi v. 
Victoire  d'Andrérle-Scythe.  xxxv.  Stypiote  battu  par  lés  Sar- 
rasins, xxxvi.  État  de  r£mpire  en  Italie,  x^xvii.  Contestation 
entre  Rome  et  Constantinople  au  sujet  des  Bulgares,  xxxviii. 
Sainteté  de  Bogoris.  xxxix.  Photius  succède  à  Ignace,  xl. 
Conduite  de  Photius  rétabli,  xli.  Le  pape  reconnaît  Photius 
pour  patriarche,  xlii.  Concile  de  Constantinople  en  fa- 
veur de  Photius,  xliii.  Suite  des  événements  qui  concernent 


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25o  HISVOJRE  DU  BAS-EMP1R£.  rAn  867.) 

Photius.  XLiy.  Mort  de  Constantin,  xlv.  Ménagement  de 
Basile  à  Tégard  de  ses  sujets,  xlvi.  Conjuration  découverte. 
XLvii.  Mouvements  des  Sarrasins  en  orient,  xlviii.  Syracuse 
prise  par  les  Sarrasins,  xlix.  Punition  d'Adrien,  l.  A.ttaque 
de  Chalcis.  li.  Les  Sarrasins  de  Crète  battus  sur  mer.  lu. 
Autre  défaite  des  Cretois,  liu:  Artifice  de  Basile  pour  sauver 
hi  vie  à  des  •'déserteurs.  Liv.  X.es  Sarrasins  battus  sur  mer. 
liV.  Expédition  en  Sicile  et  en  Italie,  lvi.  Trahison  de  Léon. 
Lvii.  Il  est  puni,  lviii.  Nouvelle  expédition  en  Italie.  i.ix. 
Santabaren  veut  faire  périr  Léon,  fils  aîné  de  Tempereur. 
Lx.  Délivrance  de  Léon.  lxi.  Mort  de  Basile,  lxii.  Conclu- 
sion du  règne  de  Basile. 


BASILE  surnommé  le  MACÉDOiriEir. 


^'         Dès  que  Basile  se  fat  jnis  en  possession  du  palais^ 

Basile  seul  il  se  fit  cooduire  en  pompe  à  Sainte-Sophie,  pour  y  re- 

cedr.  p.    cevoiria  couronne  des  mains  du  patriarche.   Il  était 

^^56q       accompagné  de  sa  femme  Eudocie  Ingérîne,  et  de  ses 

Zoii.i.i6,t.a,  (Jeux  fils  Constantin  et  Léon.  Arrivé  au  pied  de  l'autel, 

Lco,  p.470  se  prosternant  devant  l'imaffe  de  Jésus-Christ,  il  élève 

Manass.p.  "^    .  1/      .  r>    .  7  i 

107,  108.   sa  VOIX  et  s  ecrie  :  Seigneur,  vous  me  donnez  la  cou- 

Glyc.p.  ao4,  .     _  ,  ,     , 

295.  ronne;  je  la  mets  a  vos  pieds  y  et  je  me  consacre  tout 
Theoph°p.  entier  à  votre  service.  Ces  paroles  excitent  dans  Fas- 

CoMt.      semblée  une  sorte  d'enthousiasme;  le  clergé,  les  séna- 

^isti^n    ^c"^s,  les  officiers  du  palais  applaudissent  par  des  ac* 

^  et  ^^vi^^  clamations  réitérées  ;  le  peuple  surtout  et  les  soldats 

453,  454.   versent  de3  larmes  de  joie,  ils  se  félicitent  d'avoir  un 

Georg.  p.  , 

543,  544.    empereur  qui,  ayant  passé  par  tous  les  degrés  de  l'in- 
6x.  %     fortune,  avait  appris  à  compatir  aux  malheurs  des 


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(An  867.)  tITRÏ  LXXI.  BASILE.  IDI 

hommes.  Ils  ne  furent  pas  trompés  dans  leur  espérance. 
Pour  parvenir  à  la  couronne ,  Basile  avait  joint  au  mé- 
rite personnel  les  ressources  de  Vintrigue  et  Faudace 
des  forfaits  :  dès  qu'il  ne  lui  en  coûta  plus  rien  pour 
être  vertueux,  il  ne  conserva  que  ses  bonnes  qualités. 
Son  règne  ferma  poui^  quelque  temps  les  plaies  que  tant 
de  mauvais  princes  avaient  faites  à  TEmpire;  ce  iîit  un 
de  ces  remèdes  puissants  qui  raniment  la  vieillesse,  et 
la  soutiennent  sur  le  penchant  de  la  caducité. 

Il  donna  ses  premiers  soins  au  rétablissement  des  ». 
finances.  Les  largesses  qu'il  avait  faites,  selon  l'usage,  les  finaoces. 
dans  la  cérémonie  de  son  couronnement,  avaient  été 
tirées  de  ses  propres  fonds.  Dès  qu'il  fut  couronné,  il 
se  fit  ouvrir  le  trésor  impérial,  en  présence  des  princi- 
paux du  sénat  et  des  officiers  du  premier  ordre.  Il 
ne  s'y  trouva  que  trois  cents  Kvres  pesant  d'or,  et 
quelques  sacs  d'argent.  Il  se  fit  apporter  les  registres 
de  l'emploi^  et,  après  avoir  examiné  les  divers  articles 
des  énormes  profusions  de  son  prédécesseur,  il  déli- 
béra sur  le  parti  qu'il  devait  prendre  pour  réparer  tant 
de  pertes.  Le  conseil  était  unanimement  d'avis  de  faire 
rapporter  toutes  ces  sommes  par  ceux  qui  les  avaient 
reçues:  l'empereur,  usant  d'indulgence, même  pour  des 
gens  qui  n'en  méritaient  pas,  n'exigea  que  la  moitié 
de  là  restitution  ;  et  cette  moitié,  diminuée  encore  par 
les  fraudes  et  les  subterfuges,  ne  produisit  au  trésor 
que  trente  mille  livres  pesant  d'or,  somme'  bien  mo- 
dique, pour  fournir  aux  besoins  d'un  grand  empire, 
mais  qui ,  jointe  au  retranchement  de  toute  dépense 
supeiihie,  se  trouva  suffisante  pour  soutenir  les  frais 
de  plusieurs  guerres,  non-seulement  sans  surcharger 
les  sujets ,  mais  même  en  diminuant  les  impôts.  Il  sem-     - 


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^Sa  HIST01R1   BU   BAS-EMPfRE-.  (Ao  867.) 

bla^  disent  les  bistoriens9<{ue  Dieu  voulût  récompen- 
ser Basile  de  ses  libéralités  et  de  ses  aumônes ,  par  la 
découverte  de  plusieurs  trésors  enfouis  daos  la  terre^ 
que  ToD  vit  sans  murmure  adjugés  au  fisc,  devenu  le 
trésor  de  TÉiat. 
in.  Tout  était  corrompu;  les  cbarges  étaient  purement 

de^uT*  vénales  :.  on  n'avait  besoin  ni  de  probité,  ni  de  science, 
jadicatare.  ^^  j^  mœurs ,  pour  décider  du  sort  des  autres  hommes. 
Basile  employa  toute  son  attention  à  choisir  des  juges 
éclairés  et  vertueux,  supérieurs  à  l'argent,  à  la  faveur , 
9  la  crainte ,  uniquement  favorables  au  bon  droit  ^t  à 
l'innocence.  Pour  bannir  absolument  l'intérêt  de  tous 
les  tribunaux,  il  fit  publier  dans  tout  l'Empire  des  ëdits 
qui  défendaient  aux  juges  de  rien  recevoir  des  parties, 
sous  quelque  prétexte  que  ce  fût;  et,  se  chargeant  lui- 
même  de  récompenser  leurs  travaux,  il  leur  assigna 
des  honoraires  suffisants  pour  vivre  sans  luxe,  et  pro* 
portionnés  à  leur  dignité,,  mais  à  condition  qu'ils  rem* 
pliraient exactement  leurs  fonctions.  11  fit  plus,  et  c'est 
ce  qu'il  n'imita  d'aucun  prince,  et  ce  qu'aucun  prince 
n'a  jamais  imité  de  lui  :  il  avait  observé  qu'un  homme 
riche,  mais  injuste^  prend  souvent  avantage  de  son 
opulence  pour  susciter  des  chicanes  à  un  homme  sans 
fortune,  qui,  ruiné  par  les  délais  et  par  les  frais  des 
procédures,  avant  que  d'avoir  obtenu  justice, est  forcé 
d'abandonner  son  droit.  Pour  tenir  la  balance  égale 
entre  le  pauvre  et  le  riche,  il  se  mit  du  côté  du  pauvre, 
et  assigna  des  fonds  pour  faire  subsister  les  plaideurs 
indigents  jusqu'à  la  décision  de  leur  procès.  C'est  sur- 
tout dans  les  campagnes,  dans  les  provinces,  et  loin  des 
yeux  du  prince,  que  la  tyrannie  des  hommes  puissants 
écrase  leurs  inférieurs  :  Basile,  ennemi  de  l'oppression, 


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(An  867.)  LIVRE   LXXf.  BASILE.  a53 

voulait  être  informé  de  toutes  les  vexations;  et,  si  la 
magistrature  étaittrop  faible  pour  les  arrêter,  il  l'ap- 
puyait de  toute  la  force  de  lautorité  souveraine,  La 
grande  salle  nommée  Chalcé ,  qui  servait  de  vestibule 
au  palais,  et  dans  laquelle  se  rendaiJt  la  justice,  mena- 
çait ruine;  il  la  répara  et  l'embellit  ;  il  établit  encore 
deux  autres  tribunaux,  l'un  dans  le  palais  de  Ma- 
gnaure,  l'autre  <îans  le  cirque.  Il  assistait  lui-même  aux 
jugements,  lorsque  les  autres  affaires  lui  en  laissaient  le 
loisir  ;  sa  présence  procurait  un  double  avantage ,  elle 
contenait  les  juges  dans  les  bornes  d'une  exacte  justice, 
et  leur  conciliait  le  respect  des  peuples.  Mais  il  n'y  avait 
aucun  tribunal  qu'il  fréquentât  pli^s  assidûment  que  la 
Chambre  du  trésor;  c'était-là  qtie  se  décidaient  les  af- 
faires qui  concernaient  le  recouvrement  des  impôts, 
source  féconde  d'injustices.  Plus  sévère  à  l'égard  des 
financiers  qui  exigeaient  ce  qui  n'était  pas  dû ,  qu'à  l'é- 
gard des  sujets  qui  ne  payaient  pas  ce  qu'ils  devaient, 
i\  aimait  mieux  souffrir  la  perte  de  ses  droits,  que  de 
prêter  son  nom  à  des  injustices  criantes.  Les  rôles 
'  des  receveurs  étaient  écrits  en  notes  inintelligibles  au 
peuple  )  ce  qui  donnait  lieu  à  def  exactions  arbitraires; 
il  ordonna  qu'ils  seraient  écrits  en  lettres  communes 
et  sans  abréviations,  afin  que  chacun  pût  vérifier  à 
quelle  somme  il  était  taxé.  Les  dépenses  des  bureaux 
avaient  été  jusqu'alors  sur  le  compte  des  peuples;  c'é- 
tait un  accroissement  à  la  contribution  :  fiasiJe  le  re- 
trancha ,  et  prit  sur  son  compte  les  frais  des  Registres 
et  des  commis.  Il  tentreprit  encore  un  plus  grand  ou- 
vrage^ ce  fut  la  réforme  des  lois.  Le  corps  du  droit 
civil  était  un  amas  confus  de  lois  surannées  et  abolies 
par  Tusage,  mêlées  avec  celles  qui  étaient  en  vigueur; 


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a54  HISTOIRE   DU   BAS-EMPIRE.  (An  8J&7.) 

il  s'agissait  de  suppriiner  les  premièpes ,  d'ëclaircir  et 
d'abréger  les  antres  y  et  de  les  réduire  dans  un  ordre 
méthodique  et  facile  à  retenir.  Basile  commença  par 
faire  traduire  en  grec  celles  qui  n'étaient  qu  en  latin. 
Mais  son  projet  ne  fut  exécuté  en  entier  que  par  son 
fils  Léon  ;  c'est  ce  qu'on  appelle  le  recueil  des  Basili- 
ques. J'en  parlerai  plus  en  détail  sous  le  règne  del^éon. 
IV.  La  vigilance  de  l'empereur,  qui,  non  content  de 

p^Uqoê  ^  couper  toutes  les  branches  de  l'injustice,  en  arrachait 
*'    jusqu'à  la  racine,  fit  circuler  dans  toutes  les  veines  de 
l'État  la  paix,  la  sûreté,  l'abondance.  L'Empire  semblait 
renaître  sous  un  ciel  pur  et  serein  ;  la  violence  et  la 
fraude  enchaînées  laissaient  respirer  la  faibl^se  et  Fin- 
nocence.  Chacun  labourait  sa  terre  et  taillait  sa  vigne, 
sans  craindre  que  des  mains  avides  vinssent  lui  enlever 
le  fruit  de  ses  travaux.  La  fortune  des  pères  était  assu- 
rée aux  enfants,  dont  le  nombre  n'était  plus  uniléau 
.pour  les  familles.  Au  bout  de  quelque  temps,  les  mur- 
mures et  les  plaintes,  devenus  depuis  long- temps  le 
langage  commun  de  l'Empire,  cessèrent  si  absolument, 
qu'un  jour  l'empereur  s'étant  transporté ,  selon  sa  cou- 
tume, à  la  chambre  (fci  trésor,  il  ne  s'y  trouva  point 
de  requête  contre  les  exacteurs.  Etonné  de  ce  silence, 
il  se  persuada  qu'on  écartait  les  personne^  lésées,  et 
que  la  finance,  toujours  aussi  entreprenante  et  aussi 
adroite  qu'avide,  empêchait  les  plaintes  de  parvenir 
jusqu'à  lui.  Danrs  cette  pensée,  il  envoya  de  toute  part 
des  hommes  de  confiance  pour  s'informer  pareux-m^fl^es 
de  l'état  de  ses  sujets.  Après  d'exactes  p^quisitions, 
on  Ivii  rapporta  qu'en  effet  personne  n'a(vait  à  sepla*"** 
dre.  Cette  nouvelle,  presque  incroyable,  lui  tira  des 
larmes  de  joie;  il  remercia  Dieu  d'un  changement  q«* 


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(An  367.  UVRE   LXXI.  BASILE.  255 

n'avait  pu  être  opéré  que  par  sa  main  toute^pi|is$ante. 
Quel  prince  serait  comparable  à  Basile,  Vil  était  jamais 
permis  d'acheter  par  un  parricide  le  pouvoir  de  sau- 
ver les  Etats? 

Le  soin  des  affaires  civiles  ne  lui  faisait  pas  perdre        ▼*. 
de  vue  celles  Ae  l'Église.  Dès  les  premiers  jours  de  son  chassé  fait 
règoe,  il  assembla  dans  son  palais  les  évéques  qui  se     igiTace. 
trouvaient  à  Constantin ople,  et  qui  n'étaient  pas  créa-  îïw«^nign. 
tures  de  Pbotius.  Après  avoir  pris  leur  avis  sur  la       S6^ 
conduite  qu  il  devait  tenir  avec  cet  usurpateur,  u  le     Const. 
chassa  du  siège,  et  l'enferma  dans  un  monastère.  Ce     ^lei.^' 
fut  en  cette  occasion  que  l'on  surprit  les  faux  actes  ^o^rg.^p^ 
du  prétendu  concile  supposé  par  Pbotius,  dont  j'ai   xnfst'in 
patlé  sous  le  règne  précédent.  L'exemplaire  en  fut  j^il*'^*^**^^ 
porté  au  sénat  et  exposé  aux  yeux  du  peuple ,  qui  fut  Theodora. 
frappé  d'bprreur  à  la  vue  d'une  si  étrange  imposture,  ecclés/i.  5i, 
Ces  actes  furent  représentés  à  Pbotius  dans  le  hui*      '  s.  ' 
tième  concile,  et  condamnés  au  feu.  ^ussitôt  après  la     chHst! 
déposition  du  faux  patriarche  ,^Élie,  commandant  de  **  '^48.**'' 
la  flotte,  fut  envoyé,  avec  le  vaisseau  impérial,  pour 
ramener  le  patriarche  légitime.  Jgnace  rentra  soleiv 
nellement  dans  son  église  le  dimancbe^a3  novembre, 
le  même  jo»r  auquel  il  avait  été  dhassé  de  la  ville ,  dix 
ans  auparavant.  Tous  les  prélats,  tous  les  abbés  et 
les  moines,  qui  avaient^ partagé  sa  disgrâce,  furent 
rappelés.  Dès  qu'il  fut  rétabli,  il  frappa  d'interdictiop 
Pbotius  et  tpus  ceux  qu'il  avait  ordonnés,  ou   qui 
avaient  communiqué  avec  lui.  Pour  réparer  tant  de 
scandales,   i\  obtint  du  prince   la  convocation  d'un 
concile  général.  Basile  députa  au  pape  Nicolas  son 
écuyer  Euthymius,  pour  le  prier  d'y  envoyer  ses  lé- 
gats; il  écrivit  en  même  temps  aux  trois  pati;iarcbes 


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^^6  HISTOIBB   DU   BAS-iSMPmE.  (Ah  067.) 

d'orient,  et  à  tous  fes  évéqùes  de  rEmpîre,  pour  les 
appeler  au  concile.  Mais  le  pape  Nicolas  était  mort 
le  1 3  novembre,  et  le   député  de  l'empereur  trouva 
sur  le  saint-siége  Adrien  IL  Si  l'on  en  croyait  quel-» 
ques    auteurs,   la    disgrâce    de  Photius    n'aurait  été 
qu'un  effet  de   vengeance  delà  part  de  l'empereuf. 
Ce  prince,  disent-^ils,  s'étant  présenté  un  jour  de  fête 
à  la  sainte  table ,  Photius  lui  refusa  la  communion,  le 
traitant  d'homicide  et  de  meurtrier  de  son   prince. 
Mais,   outre  qu'un   trait  si  remarquable  n'aurait  pas 
échappé  aux  plus  graves  historiens,  il  ne  s'accorde 
nullement  avec  le  caractère  souple  et  flatteur  de  Pho- 
tius, qui  ne  sacrifiait  qu'à  sa  fortune.  De  plus,  sa  dé'^ 
position  fut  une  des  premières  actions  de  Basile,  plu- 
sieurs même  la  placent  au  lendemain  de  son  couron-^ 
nement;  ce  qui  me  paraît  trop  précipité.  Basile  avait 
des  sûretés  à  prendre  pour  s'affermir  lui-même,  avant 
que  de  s'occupei^  du  rétablissement  d'Ignace. 
Àx  868.         Après  avoir  mis  ordre  aux  affaires  de  l'État ,  il  jeta 
les  yeux  sur  ceux  qui  l'avaient  servi  dans  son  indi- 
gence. Le  gardien  de  l'église  de  Saint-Diomède  fut  élevé 
à  la  dignité  d'économe  de  Sainte-Sophie,  et  de  syncelle 
586,587*.    du  patriarche.  Il  avait  trois  frères,  gens^de  mérite: 
P^*l73^    l'un  fut  fait  commandant  de  la  garde  de  nuit;  un  autre, 
^***47a.*^''  préfet  de  la  chapelle  du  grince;  le  troisième,  grand- 
p^^'**      trésorier  de  l'Empire.  Le  fils  de  Daniélis,  que  Basile 
J94etseqq.  gy^ît  adopté  pour  frèrc ,  fiit  revêtu  de  la  charge  de 
Georg  p.    grand-écuyer.  Daniélis  elle-même  vint  à  Constantino- 
ple,  pour  rendre  ses  hommages  au  prince  dont  elle 
avait  commencé  la  fortune.  Jamais  princesse  étrangère 
n'avait  paru  dans  un  si  brillant  équipage;  jamais  le 
plus  puissant  prince  n'avait  fait  à  l'empereur  de  si  ri- 


EeconnaU- 

MDce  dé 

Basile. 


545. 


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(>n  86».)  tlVm  Liritf.  BASrtÊ.  fkS'l 

ches  ]>résenls.  Basile  k  reçut  dvec  téus  les  hontieurs 
qu'il  Â^ait  rendus  à  sa  propre  tAere^l  Fhonora  mêm^ 
de  ce  titre  attgûste.  Elle  possiédait  dans  te  Pélopon- 
nèse une  vaste  étendue  de  terres;  elle  en  fit  unef  do- 
nation h  l'ertipcreup.  Après  avoir  séjourné  à  Constan- 
tîjtfopte  autant  qu'elle  voulut,  eomblée  d'honneurs,  elle 
retourna  dans  sa  patrie,  et  laissa  encore  à  son  départ 
«me  itiarqu^  de  sa  magnificence  :  l'empereur  faisait 
bâtir  une  église  dédiée  au  Sauveur,  dont  le  pavé  était 
de  la  plus  belle  mosaïque  ;  elle  donna  de  ^perbes  tapis 
pour  le  couvrir  tout  entier.  Tous  les  ans  elle  envoyait 
à  l'etopereur  des  présents  de  grand  prix*  Quoique  fort 
avtancée  en  âge,  elle  lui  survécut,  et  vin*  une  seconde 
fois  à  CônstantinopJe  t^nd^Mî' visite  à  l'empereur  Léonf, 
fifo  ef  sudoesisetfr  de  Basile^  Sa  libéralité  inépnisabte  se 
signala  encore  en  faveur  èe  ce  pi^ince:  elle'  PmsUitua 
même  son  héritier,  à  la  place*  de  son  fils  qii-ellè  venait 
de  perdre;  et  pria  l'empereur  d'envoyer  un  de  ses  of- 
ficiers pour  faire  l'inventaire  de  ses  biens.  L'6fBcîer 
qtïi  la  suivit  de'  près^  la  trouva  morte  :  il  eitécuta  fidè- 
lement toulles-'  les  dispositions  marqttées  dans  te  testai 
iMnil.  Outre  k  grande  étendue  des*  domaines,  darty 
lesquels  on- comptait  quatre-vingts  métairies,  le  mo^ 
bilier  était  immense',  tant  en  dr  et  en  argent  monnoyé, 
qu*en  meubles  et  en  vases  précieux,  en  bestiaux,  en 
chevaux:,  en  esckves.  L'empereur  en  affranchit  trois 
mille,  qu^il-  envoya  en  Italie  sur  les  terres  dévastées 
par  \éh  courses  des  Sarrasins.  Quoique  l'empereur  fiit 
légataire  utiiVersel,  elte  avait  laissé  à  un  petitvfils  qui 
Inï  restait,  une  fortunie  égale  à  celle  des  plus  richeS' 
parlteulierô'.  L'histoire  rte  dk  pas  par  quels  moyens 
Dantélis  était  parvenue  à  cette  opulence  ;  elle  n'en  aun 

T4»ne  XUL  ^7 


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nSS  HISTÔIRK   DV   BAS-EMPIRE.  (i,(  g^.^ 

rait  pas  même  parlé,  sans  sa  générosité  à  la  répandre. 
On  né  sait  pas  )|||nom  de  son  mari^  et  en  effet,  s'il 
n'était  distingué  que  par  sa  fortune,  il  ne  mérite  pa^ 
d'être  connu. 
^11.  Michel  avait  laiissé  les  frontières  exposée»  aux  Sar- 

^eilliiesul  ^^^^^^  ^"  Ç^^^  d®  l'occident i  aux  pauliciens  du  côté- 
la  milice,    jg  lorlent,  et  fiasiie  se  préparait  à  les  défendre.  Mais 
569,  5^0.    il  fallait  mettre  sur  pied  de  nouvelles  armées.  Faute 
POTph!*  p.    ^^  P^^^  ^"  ^^  subsistance ,  presque  tout  avait  déserté  ; 
164,  i65.   ji  ne  restait  que  de  nouvelles  milices  sans  habits,  sans 
armes,  sans  courage.  Basile  rappela  au  drapeau  les  an- 
ciens soldats,  qu'il  attira  par  ses  largesses;  il  incorpora 
dans  les  vieilles  cohortes  les  nouvelles  levées,  qu'il  fit 
dresser  aux  exercices.  L'exemple  des  vieux  soldats,  les 
travaux  assidus,  l'exactitude  de  la.  discipline,  les  ré* 
compenses  et  les  châtiments  distribués  avec  justice, 
eurent  bientôt  formé  de  bonnes  troupes,  et  lui  rendi- 
rent des  forces  suffisantes  pour  rétablir  l'honneur  de 
l'Empire. 
VIII.  Les  Croates ,  les  Serves ,  et  toutes  ces  nations  escla- 

sins  lèvent  vouucs  qui  habitaient  la  côte  de  la  Dalmatie,  avaient 
Vi^te.*  secoué  le  joug  de  l'Empire,  et  ne  reconnaissaient  pour 
Cedr.  p.    maîtres  que  leurs  propres  seigneurs.  I^a  plupart  même 
677       avaient  abjuré  le  christianisme.  Les  Sarrasins  de  Car- 

•Zon.t.  a,  p.  n   \  ^  «i         • 

167,  169,   thage  proiiterent  de  ces  mouvements;  ils  vinrent  avec 
Co'nrt.      une  flotte  de  trente- six  voiles  débarquer  en  Dalmatie, 
16^  178^    ^^"^  '^  conduite  de  trois  chefs  hardis  et  expérimentés. 
îd?m  De    Apï^è*  s'être  rendus  maîtres  de> plusieurs  villes,  ils  al- 
'^*  ^"o  *^*  'èrent  mettre  le  siège  devant  Raguse ,  capitale  du  pays, 
Léo.  Tact,   et  la  tinrent  long-temps  assiégée.  I^s  habitants  se  dé- 
fendirent avec  grand  courage;  mais,  se  voyant  enfia 
réduits  à  Textrémité,  ils  envoyèrjent  demander  du  se- 


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(An  866.)  riVRE   LXXI.  BASILE.  ^Sg 

cours  à  Michel  qui  viyait  encore.  Que  devaient-ils  at- 
tendre d'un  prince  toujours  plongé  dans  l'ivresse,  et 
qui  aurait  abandonné  une  province  plutôt  qu'une  par- 
tie de  débauche  ?  Par  bonheur  pour  eux ,  Michel  était 
mort  avant  que  leurs  députés  arrivassent  à  Constan- 
tÎDople,  et  Basile,  qui  ressentait  vivement  tous.  les. 
maux  de  l'Empire,  se  hâta  de  les  secourir.  Il  équipa 
une  flotte  de  cent  vaisseaux,  la  chargea  de- troupes, 
et  mit  à  la  tête  de  cette  expédition  le  patrice  Oryphas, 
grand-amiral,  dont  l'expérience  égalait  la  valeur.  Les 
Sarrasins  ne  l'attendirent  pas:  dès  qu'ils  apprirent  qu'il 
était  en  mçr,  ils  levèrent  le  siège,  qui  durait  depuis 
quinze  mois,  et  gagnèrent  les  cotes  de  l'Italie. 

Cette  activité  de  Basile  6t  sentir  aux  Esclavons  que        „, 
TEmpire  avait  un  maître  capable  de  les  contraindre  à  je'f  Daiml* 
l'obéissance.  Comme  ils  entendaient  en  même  temps  **®  reutrcot 
louer  sa  douceur  et  sa  justice,  ils  lui  députèrent  pqur  i'obéis»aiic«, 
lui  offrir  leurs  hommages,  et  pour  le  prier  de  les  rece- 
voir au  nombre  de  ses  sujets.  Basile  leur  pardonna  leur 
révolte,  fit  partir  avec  leurs  députés  des  officiers  pour 
rétablir  le  bon  ordre,  avec  des  prêtres  pour  les  in- 
struire et  les  ramener  au  sein  de  l'Église.  Dès  qu'on  sut 
à  la  cour  que  ces  peuples  rentraient  dans  la  soumission, 
toutes  les  cabales  se  mirent  en  mouvement,  toutes  les 
intrigues  s'animèrent  pour   faire  nommer   tel  ou  tel 
gouverneur.  C'était  l'usage  du  règne  précédent.  Michel 
avait  vendu  toutes  les  places  importantes,  ou  les  avait 
laissé  vendre  par  ses  favoris.  Basile  repoussa  toutes 
ces  mains  avides,  qui   offraient  de    grandes   sommes 
pour  les  regagner,  avec  usure  par  le  pillage  de  la  pro- 
vince ;  et ,  de  peur  que  ces  nations  n'eussent  à  se  re- 
pentir de  leur  retour  à  l'obéissance,  il  leur  permit  de 

17- 


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a6o  HISTOIRS   DU   BAS-EMVIRK.  (Aai  86S.) 

choisir  elles^métnes  leurs  préfets  et  leurs  magistrats* 
Il  taxa  seulement  les  redevances  que  chaque  ville  paie- 
rait à  TEmpire.  Cette  forme  d'administration,  o^uii  ap- 
prochait du  gouvernement  paternel,  rendit  ces  peuples 
plus  heureux  et  plus  tranquilles  qu'ils  ne  l'avaient  été 
dans  une  tumultueuse  liberté  ;  et  la  nation.  escIavoDne^ 
la  plus  étendue  de  toutes  les  nations  de  l'Europe*,  et 
qui,  s  étant  établie  dans  ce  qu'on  nomme  aujourd'hui 
l'Esclavonie ,  s'était  répandue  dans  la  Bohème,  la  Mo- 
ravie, la  Silésie,  la  E^Dlogne,  et  dans  une  partie  de  la 
Russie ,  devint  auxiliaire  de  l'Empire  dont  elle  avait 
ravagé  les  frontières.  Basile,  pour  assurer  sji  puissance 
et  prévenir  les  projets  qu'on  pourrait  former  sur  sa 
succession,  nomma  empereur  Constantin,  son  fils  aine, 
qu'il  avait  eu  de  Marie  sa  première  femme. 

La  plus  importante  affaire  dont  Basile  fut  alors  oc^ 

Comiona-   cupé,  était  de  donner  une  forme  régulière  à  la  dépo- 
Taffaire  de  sition  de  Photius.  Ce  prélat,  armé  de  toutes  les  forces 

PUotius.  ^^  p^^^  fournir  le  génie,  animé  par  l'ambition,  par 
la  jalousie,  et  par  le  dépit,  remuait  tout  l'Empire  du 
fond  de  sa  retraite.  Pendant  les  dix  années  qu'il  avait 
gouverné  l'Eglise  de  ConstantinopLe,  il  avait  rempli 
le  plus  grand  nombre  des  sièges  de  l'orient.  Trois  cent» 
évêques,  la  plupart  ses  créatures,  soutenaient  avec  cha- 
leur ses  intérêts,  et  refusaient  de  reconnaître  Ignace. 
Aussitôt  après  l'expulsion  -de  Photius,  Basile  en  avait 
écrit  au  pape-,  il  le  consultait  sur  la  conduite  qu'il  de- 
vait tenir  à  l'égard  de  ceux  qui  avaient  été  ordonnés 
par  le  fhux  patriarche,  ou  qui  communiquaient  avec 
lui.  Hadrien,  dans  sa  réponse,  félicitait  Basile  de  Injus- 
tice qu'il  avait  rendue  à  Ignace,  et  déclarait  qu'il  sou- 
tiendrait ce  prélat  avec  le  même  zèle  que  Nicolas  son 


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(Àa  8€a.)  UVRV   LXXI.  BlSICiS.  »6l 

prédécesseur.  Il  écrivait  aussi  a  Ignace ,  et  lui  témoi- 
gnait sa  surprise  de  te  qu'il  ne  l'avait  pas  informé  de 
son  rétablissement;  il  lui  promettait  l'appui  du  saint- 
siége.  Ignace  remercia  le  pape  et  le  consulta,  comme 
avait  fait  l'empereup^  stxr  la  manière,  dont  devaient  êtr« 
traités  les  partisans  de  Photius.  Il  le  priait  d'envoyer 
ses  légats  à  ce  sujet  pour  assister  au  concile  général. 
Hadrien,  instruit  de  tout  ce  qui  s'était  passé,  tint  un 
synode  dans  lequel  Photius  fut  frappé  d'anathême: 
les  actes  du  conciliabule  qu'il  avait  tenu  à  Gon^tan- 
tinople  furent  foulés  aux  pieds,  et  brûlés;  on  ajouta 
cependant  que ,  s'il  se  soumettait  à  les  condamner  lui- 
mêroe,  on  ne  lui  refuserait  pas  la  communion  laïque; 
et  que  ses  adhérents,  s'ils  reconnaissaient  leur  faute, 
seraient  traités  avec  indulgence.  On  prononça  la  sen- 
tence d'excotbmiinication  et  de  déposition  contre  tous 
ceux  qui^  après  avoir  eu  connaissance  de  ce  décret, 
retiendraient  des  exemplaires  du  conciliabule.  Quant 
àfiasile,  quoique  sou  nom  parut  dans  la  souscription  de 
ces  actes,  ainsi  que  celui  dlgnace  même,  on  déclara 
iju'il  y  avait  été  faussement  inséré ,  et  qu'on  le  recon- 
naissait pour  entpereur  très^oatholique. 

Les  actes  de  ce  synode  furent  portés  à  Constânti-    ^  869. 
nople  pal»  trois  légats,  qui  devaient  assister  au  concile  préparatifs 
général  convoqué  par  Basile.  Us  étaient  chargés  de  ^%*^;|Jî^* 
deux  lettres  du  pape  ^  l'une  à  l'empereur ,  l'autre  au     générai. 
patriarche.  Il  mandait  qu'il  fallait  examiner  dans  le    cpi»toi». 
concile  la  cause  des  clercs  qui  avaient  communiqué  ^^iudmus* 
avec  Photius,  déposer  de  tout  ordre  ceux  que  ce  feux  *°  ««^na^o 
patriarche  avait  ordonnés,  recevoir  les  autres  qui  sou-   S"^^*î*  ^'^ 
soriraient  à  la  formule  que  leur  présenteraient  les  lé-  Fienry,Hi8t. 
gats,  brûler  les  exemplaires  du  conciliabule,  et  faire  art.3,  a6, 


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xn. 
Concile. 


26a  HISTOIRE  DU    BÂS-EMPIRE.  (An  869.) 

et  «uiT.  souscrire  à  tous  les  évêques  les  décrets  du  synode  de 
ciuCrV  ^ome.  L'empereur,  averti  que  les  légats  étaient  ea 
^^^'  chemin,  envoya  au-devant  d'eux  uii  de  ses  écuyers  jus- 
qu'à Thessalonique  ;  ils  furent  traités  avec  de  grands 
honneurs  dans  tout  le  voyage  ;  leur  entrée  à  Constau* 
tinôple  le  2  5  septembre  fut  accompagnée  de  la  pompe 
la  plus  solennelle;  et  ces  légats  dans  toute  leur  con- 
duite soutinrent  avec  dignité  la  primauté  du  saint- 
siège. 

L'ouverture  du  concile  se  fit  le  5*^  d'octobre  S69, 
dans  l'église  de  Sainte-Sophie.  Les  légats  du  pape  y 
tenaient  la  première  place.  A  près  eux,  siégeaient  le  pa- 
triarche Ignace  et  les  légats  des  trois-  autres  patriar- 
ches d'orient.  Les  Sarrasins,  gagnés  par  les  présents 
plutôt  que  par  les  prières  de  l'empereur,  leur  avaient 
accordé  la  liberté  d'aller  à  Constantinople,  sous  pré- 
texte de  travailler  au  rachat  des  prisonniers  qui  se 
trouvaient  entre  les  mains  des,  Grecs.  Onze  des  prin- 
cipaux officiers  de  la  cour  assistèrent  à  toutes  les  ses- 
sions, pour  y  maintenir  le  bon  ordre.  Il  y  eut  dix  ses- 
sions, et  la  dernière  ne  fut  tenue  que  le  28*  et  dernier 
jour  de  février  de  l'année  suivante.  L'empereur  n'as- 
sista pas  aux  premières  ;  mais  on  lut  d'abord  une  lettre 
par  laquelle  il  exhortait  les  évéques  à  la  douceur  et  à 
la  concorde.  Oh  obligea  les  légats  du  pape  à  faire 
exhibition  de  leurs  pouvoirs;  ce  qu'ils  firent  avec  quel- 
que répugnance,  prétendant  que  jamais  ,  dans  aucun 
concile,  on  n'avait  usé  de  cette  formalité  à  l'égard  des 
légats  de  TÉglise  romaine.  Ils  apportaient  de  Rome  un 
formulaire  de  réunion,  qui  fut  accepté  de  tout  le  con- 
cile. Cette  pièce  contenait  d'abord  une  reconnaissance 
implicite  de  la  primauté  de  l'Église  de  Home;  ensuite 


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(An    Mg.)  LIVRE   LXXI.  BASILE.  aGS 

ranathême  contre  toutes  les  hérésies,  contre  Photius 
en  particulier ,  et  contre  tous  ceux  qui  demeureraient 
Attachés  à  sa  communion  ;  une  acceptation  des  con- 
ciles tenus  à   Rome  par  les  deux   papes  Nicolas  et 
Hadrien ,  en  faveur  d'Ignace,  et  la  condamnation  des 
conciles  tenus  par  Photius  pendant  son  usurpation. 
On  reçut  à  la  pénitence,  on  admit  même  au  coocile 
ïes  évêqués  consacrés  par  Méthodius  et  par  Ignace, 
mais  que  la  violence  ou  la  crainte  avait  jetés  dans  te 
parti  de  Photius,  et  qui  demandaient  humblement  par- 
don de  leur  faiblesse.  On  fit  la  même  grâce  aux  prê- 
tres et  aux  autres  clercs.  PhotJus  fut  cité  à  compa- 
raître; mais  il  fallut  l'amener  malgré  lui.  Cet  homme, 
aussi  artificieux  qu'intrépide,  affectant  tous  les  dehors 
de  l'innocence,  s'efforça  de  rendre  odieuse  cette  sainte 
assembléç ,  en  se  comportant   devant  elle  comme  le 
Sauveur  avait  fait  devant  les  tribunaux  au  temps  de 
sa  passion.  A  la  plupart  des  questions  qu'on  lui  fit, 
il  garda  un  profond  silence  ;  lorsqu*il  fut  forcé  de  par- 
ler, il  emprunta  dans  ses  réponses  les  paroles  mêmes 
de  Jésus-Christ.  On  le  renvoya  avec  indignation.  L'em- 
pereur assista  en- personne  aux  sixième,  septième,  et 
huitième  sessions.  Sa  présence  ramena  plusieurs  pré- 
lats schismatiques  ;  mais  les  autres  résistèrent  en  face 
à  l'empereur,  qui,  fort  instruit  lui-même  de  l'histoire 
et  des  lois  de  l'Église,  entreprit  de  les  confondre.  Eu* 
thymius,  évêque  de  Césarée  en  Cappadoce,  Zacharie 
de  Chalcédoin(j,  Eulampius  d'Apamée,  se  signalèrent 
entre  les  autres  par  leur  audace.  Ce  fut  en  vain  que  le 
prince  fit  prononcer  par  son  secrétaire  Constantin  un 
discours  qu'il  avait  lui-même  composé,  et  qui  ne  res- 
pirait que  douceur  et  charité  :  ils  demeurèrent  sourds 


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a64  HI$TOmE   DU   BAS-EMMIiE.  (in  SO».) 

|i  aes  remontrance»  paternelle»*  Pholîuft  €t  m  adhéf 
rents  comparurent  devant  lui  ;  mais  toujours  opiniâ* 
tre^,  ils  furent  anathématisés.  L'imposture  du  hux 
concise  supposé  par  Photius ,  fut  mîfie  aju  grand  ioui* 
par  des  dépositions  authentiques.  Il  restait  encore  l 
Constantittople  quelques  iconoclastes,  dont  le  ch^ 
était  un  certain  Théodore  Crithin  ;  Tempereur  les  fil 
amener  au  concile;  ils  abjurèrent  leur  erreur,  à  Tev 
çeptioo  de  Théodore,  qui  fut  aussi  frappé  d'aoaihême. 
Ah  8;o.  Après  unc  interruption  de  trois  mois,  la  neuvième 
SuUe'du  session  se  tipt  le  i  a  février  870.  On  y  fit  comparaître 
eonciu.  jgg  tén^oins  qui  avaient  déposé  contre  Ignace  dans  k 
conciliabule  de  Pli^tius»  lU  avouèrent  qu'on  leur  avait 
arraché  un  faux  témoignage  par  violence  et  par  me»» 
naces;  ils  demandèrent  pardon  de  leur  cr»«ie ,  et  an*-» 
thématisèrent  Photius.  On  leur  imposa  une  péniteuce. 
Il  en  f^t  de  même  des  faux  légats  qup  Photius  ava» 
envoyés  à  Rome  pour  y  porter  les  actçs  de  ^^  conc^-» 
liabule.  J^a  dernière  sessioi>  fut  la  plus  nombreuse? 
l'empereur  y  assista  avec  ses  fils  Constantin  .et  Léon, 
vingt  patrices,  et  trois  ambassadeurs  de  ji'emp^reur 
Louis,  il  les  avait  envoyés  pour  ilemander  du  secours 
à  Basile  contre  les  Sarrasins  qui  ravageaient  nta'i^> 
et  popr  traiter  d'un  mariage  entre  le  fils  de  Basile  et 
la  fille  de  Louis.  On  y  voyait  aussi  des  députés  de  Bo- 
gpris,  roi  des  Bulgares.  Il  s'y  trouva  cent-deux  évêques, 
pu  confirma  les  décrets  des  p^pes  Nicolas  et  HadrieP 
pour  Ignace  et  contre  Photius;  on  déclara  que  Pl^^^ 
tius  n'avait  jamais  été  éyêque;  que  ses  ordinations^ 
ses  consécrations  étaient  nulles.  On  le  chargea  d'ana^ 
thèmes  ainsi  que  ses  adhérents.  Entre  les  canons  (fXi 
furent  prononcés  en  présence  de  l'empereur,  il  y  en  » 


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(Aa  S90.)  UYMM  Lsxi,     .   bash^b.  a65 

deux  qui  font  connaître  que  cette  présenoe  ne  .gênait 
nullement  la  libertédu  ooncile:  on  déCendit,  sous  peine 
de  déi^osition,  d  avoir  égard  à  l'autorité  et  au  comman- 
dem^nJ:  du  prince  pour  lordination  des  évêques ;  on 
taxa  d'ignoranice  le  sentiment  de  ceux  qui  préten* 
daient  que  la  présence  du  prince  était  nécessaire  pour 
la  validité  d'un  concile*  On  condamna  avec  horreur 
cette  impiété  sacrilège  qqi  s'était  fait  un  jeu  de  eon» 
trefaire  les  cér^onies  de  la  religion  ;  on  soumît  à  la 
pénitence  publique  ceux  qui  avaient  concouru  à  ces 
profanations,  et  les  éveques  ifténies  qui  les  avjiient  to- 
lérées; ce  qui.  tombait  sur  Pbotius.  La  définition  du 
concile  contenait  la  profession  de  foi,  Tanatliéme contre 
les  hérétiques  9  nommément  contre  les  monothélites  et 
les  iconoclastes,  et  la  condamnation  de  Photius.  On 
lut  ensuite  un  discours  de  1  empereur,  qui,  après  avoir 
remercié  les  évêques,  déclarait  quç,  si  quelqu'un  avait 
à  se  plaindre  de  quelque  décision  du  concile,  il  eût  à 
produire  actuellement  ses  raisons,  parce  qu'après  la 
séparation  de  l'assemblée  pw*sonne  ne  serait  dispensé 
d'obéir,  sous  peine  d'encourir  sou  indignation.  Il  ex- 
horta les  évêques  à  instruire  par  eux-mêmes  leur  trou- 
peau, du  moias  dans  les  jours  particulièrement  consa- 
crés au  Seigneur,  et  à  maintenir  Tunion  dans  l'Église; 
les  laies,  à  respecter  leurs  pasteurs,  quand  même  ils 
n'auraient  d'autre  mérite  que  celui  de  leur  enseigner,  la 
vérité ,  et  »  s'en  rapporter  à  eux  pour  la  décision  ûes 
questions  théologiques,  sans  s'embarrasser  des  dis- 
putes qui  ne  sont  pas  de  leur  ressort.  Pour  la  sou- 
scription des  actes,  l'empereur  aurait  voulu  souscrire 
le  dernier,  comme  se  reconnaissant  inférieur  à  tous 
les  évêques  en  matière  de  foi  ;  du  moins  il  ne  souscrivît 


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^66  HTSTOIRS   DU    BAS-EMPIBS.  (An  870.) 

qa'à  la  suite  des  légats  ;  après  lui  ses  deux  fils ,  ensuite 
tous    les  évêques.  Us  n'étaient  qu'au  nombre  de  cent 
deux,  parce  que  Pbotius  avait  déposé  la  plupart  de 
ceux  qui  avaient  été  ordonnés  par  ses  prédécesseurs, 
et  qu'aucun  de   ceux  qu'il  avait  ordonnés  n'était  re- 
connu par  le  concile.  Un  auteur  contemporain  rap- 
porte que  les   souscriptions  furent  écrites  avec  une 
plume  trempée  dans   le  sang  de  Jésus-Christ,  usage 
terrible  du  plus  redoutable  mystère,  dont  nous  avons 
déjà  vu  dans  ces  deux  siècles  des  exemples,  sans  doute 
abusifs,  ^s  légats  du  pape  s'iTperçurent  que  dans  une 
lettre  d'Hadrien,  insérée  aux  actes,  on  avait  retranche 
les  éloges  que  le  pape  donnait  à  l'empereur  Louis;  ils 
s'en  plaignirent,  et  les  Grecs  répondirent  que  dans  un 
concile  on  ne  devait  louer  que  Dieu  seul.  Cependant 
les  actes  étaient  remplis  de  louanges  de  Basile;  ce  qui 
fait  sentir  que  dans  ce  scrupule  il  entrait  beaucoup  de 
jalousie . nationale.    Un  autre  sujet  de  contestation, 
dans  lequel   les  Grecs  semblaient  être  mieux  fondés, 
c'est  que  les  légats  insérèrent  dans  leur  souscription 
cette  clause  insolite,  jusqu'à   la  révision  du  pape; 
ce  qui  signifiait  qu'ils  n'approuvaient  le  concile  qu'au- 
tant que  le  pape  voudrait  lui-même  l'approuver.  Mal- 
gré la  réclamation  des  Grecs ,   ils  persistèrent ,  et  il 
fallut  y  consentir.  On  composa  deux  lettres  circulaires, 
l'une  adressée  à  tous  les  fidèles ,  l'autre  au  pape  Ha- 
drien et  aux  trois  patriarches  d'orient  :  on  exhortait 
le  pape  à  confirmer  le  concile,  et  à  le  faire  recevoir 
par  toutes  les  Églises  d^occident.  Basile  envoya  aussi 
une  lettre  circulaire^  en  son  nom  et  en  celui  de  ses  deux 
fils,  à  tous  les  évêques,  pour  leur  faire  part  de  la  con- 
clusion du  concile.   La  condamnation  de  Photîus  ne 


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(An  87«.)  LIYRS   LXXI.  lUASILB.  267 

rhumilia  pas  :  il  fit  le  personnape  d'un  juste  opprimé  ; 
mais  au  travers  do  s^  feinte  patience  échappaient  sans 
cesse  des  traits  satiriques  contre  Ignace  et  contre  les 
autres  prélats  ;  il  épargnait  toutefois  la  personne  du 
prince,  qu'il  âe  promettait  bien  de  séduire.  On  voit 
par  l'histoire  de  ce  concile  que  la  jalousie  et  la  défiance 
de  l'Église  de  Constantinople  croissait  à  proportion  des 
démarches  que  faisait  l'Église  de  Rome  pour  faire  va- 
loir ses  prétentions. 

Cette  semence  de  discordes  prit  de  nouvelles  forces  m^- 
dans  l'affaire  des  Bulgares.  Les  députés  de  Bogoris,  après  se  soumet- 
avoir  assisté  au  concile ,  demandèrent  une  conférence  se  de  Coas- 
particulière  pour  régler  l'état  de  leur  Église.  C'était  *^**"°P*- 
Cyrille,' envoyé  par  l'impératrice  Théodora,  qui  avait 
converti  le  roi  des  Bulgares.  Ce  prince,  après  sa  conver- 
sion, avait  envoyé,  comme  je  l'ai  déjà  dit,  son  fils  et 
plusieurs  seigneurs  avec  des  présents  au  pape  Nicolas, 
pour. le  consulter  sur  plusieurs  questions,  et  pour  lui 
demander  des  éyêques  et  des  prêtres.  Paul,  évêque  de 
Populonie,  et  Formose,  évêque  de  Porto  ^  s'étant  ren- 
dus en  Bulgarie  par  ordre  du  pape,  avaient  prêché 
l'évangile  avec  tant  de  succès ,  que  Bogoris  fit  sortir 
de  ses  états  tous  les  autres  missionnaires,  et  ne  voulut 
conserver  que  les  Romains.  Il  pria  de  nouveau  le  pape 
d^  lui  envoyer  un  archevêque.  Nicîolas  étant  mort  dans 
ce  temps-là.,  et  son  successeur  Hadrien  ne  se  pressant 
pas  de  satisfaire  le  roi  bulgare,  ce  prince^  ennuyé  de 
ces  délais,  eut  recours  à  Constantinople  pour  savoir 
à  quel  siège  patriarcal  FÉglise  des  Bulgares  devait 
être  soumise.  Ce  fut  le  sujet  de  la  conférence  qui  sui- 
vit le  concile.  L'empereur  y  assista  avec  les  légats  du 
pape,  ceux  des  trois  patriarches,  et  Ignace  qui,  mal- 

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b68  .  HIft101A£   DU    Bâfi-«EXPnul.  (Aa  97*,) 

gré  l'obligation  récente  qu'il  avait  à  l'Église  romaine  ^ 
ue  crut  pas  devoir  abandonner  les  droîtsde  son  siège 
Jjts  ambassadeurs  des  Bulgares  proposèrent  la  ques- 
tion qu'ils  étaient  chargés  d'éclaircir  :  ce  (fui  faisait  la 
difficulté  9   c'est   qu'avant   l'invasion  des  Bulgares    le 
pays  avait  fait  partie  de  l'empire  grec ,  et  que  cepen" 
dant  ce  pays,  alors  chrétien,  avait  été   soumis  à    la 
juridiction  de  l'Église  de  Rome,  qui  le  gouvernait  par 
son  vicaire,  l'archevêque  deThessalonique.  Les  Grecs 
prétendaient  que  l'Église  devait  suivre  le  sort  de  l'Em- 
pire,, et  que  les  Romains,  en  se  détachant  des  empe- 
reurs pour  se  donner  aux  rois  français,  n'avaient  pu 
entraîner  avec  cuk  la  Bulgarie;  que  ce  pays  rentrant 
dans  le  sein  de  l'Église,  et  n'étant  qu'un  démembrement 
de  l'empire  de  Constantinople,  devait  aussi  s'attacher  au 
fiége  de  Constantinople.  Les  légats  niaient  le  principe 
avancé  par  les  Grecs,  <jue  le  gouvernement  de  TÉglise 
dût  suivre  le  partage  du  gouvernement  temporel  ;  ils 
soutenaient  qu'il  suffisait  que  la  Bulgarie,  avant  que 
de  devenir  païenne ,   eût  dépendu   immédiatement  du 
pape,  pour  en  dépendre  encore  lorsqu'elle  redevenait 
chrétienne;  quel-Église  romaine  avait  même  acquis  un 
nouveau  droit  sur  ce  pays  par  la  soumission  volontaire 
du  roi  des  Bulgares,  et  par  la  possession  que  le  pape 
lïicolas.en  avait  prise,  en  y  envoyant  des  évêques  et 
des  prêtres,  que  la  nation  avait  reçus,  et  qu'elle  gardait 
encore  avec  respect;  qu'ainsi  la  question  était  décidée, 
et  qu'il  ne  s'agisssait  plus  d'examiner  à  quelle  Église 
devait  appartenir  la  Bulgarie,  mais  si  on  l'arracherait 
à  l'Église  romaine,  à  laquelle  elle  appartenait  de  droit 
et  de  fait.  Malgré  la  force  de  ces  raisons,  les  Grecs 
décidèrent  en  leur  propre  faveur.  La  sentence  qui  fut 


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(Aa  S70.)  UyRB  ULXU  BASILK.  269 

mise  entre  les  mains  des  ambassad^irs  portait  <fae  les 
légats  (forient,   comme  arbitres  eotre  tes  légats  du 
pape  et  le  patriarche  Igtiace,  avaient  jugé  que  la  Bul- 
garie devait  être  soumise  h  la  juridiction  du  siège  de 
Constantifiople.  La  hauteur  avec  laquelle  les  légats  du 
pape  avaient  soutenu  dans  le  concile  la  prééminence^ 
du  siège  de  Rome,  avait  déjà  indisposé  Basile;  leur 
réclamation  contre  ce  jugement,  et  le  mépris  qu'ils 
témoignèrent  de  la  décision  des  Grecs ,  prétendant  que 
le  pape  seul  avait  droit  déjuger  toute  l'Église^  le  cho- 
qua encore  davantage.    Il  dissimula  cependant ,   les 
traita  avec  honneur,  et  les  fit  accompagner  par  un  de 
ses  écuyers  jusqu'à  Dyrrachium;  mais  il  pourvut  si 
niai  à  leur  sûreté  pour  le  reste  du  vroyage,  que,  s'étant 
embarqués  sur  te  golfe  Adriatique,  ils  furent  pris,  dé- 
pouillés et  retenus  par  des  pirates  esclavons.   Basile  • 
!  s'intéressa  ensuite,  ainsi   que  le  pape,  pour  leur  li- 
berté, et  ils  retournèrent  à  Rome  vers  la  fin  de  cette 
année.  Le  pape,  mécontent  de  ce  qui  avait  été  décidé 
au  sujet  des  Bulgares ,  fit  des  reproches  à  l'empereur 
du  peu  de  soin  qu'il  avait  pris^de  ses  légats  ;  il  menaça 
Ignace  de  le  punir  canoniquement  s'il  osait  disposer 
de  la  Buljgarie  ^  et  prononça  d'avance  excommunica^ 
tioo  contre  ceux  qui,  sur  la  mission  du  patriarche  d# 
Constantinople ,  s'ingéreraient  à   faire   dans  ce  paya 
aucune  fonction  sacerdotale;  mais  ces  menaces  n'em- 
péclièrent  pas  les  Bulgares  de  se  conformer  à  hi:  déci- 
sion des  Grecs ,  et  de  renvoyer  l'évâque  qui  leur  avait 
été  donné  par  le  pape. 

Je  vais  rappeler  quelques  événements  dont)  j'ai  dif-       xr. 
féré  de  parler  pour  ne  pas  interrompre  ce  que  j'avais  à    V/c^r*** 
dire  sur  le  huitième  concile  généraK  Le  9  jamrîier  869,    Cedr.  p. 


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270  HISTOIRE   DU   BAS-EMPIRE.  (Ab  870.} 

Zon.  t.  a,  p.  jour  auquel  les  Grecs  célébraient  la  fête  de  Saiot-Po- 
WiceViaign.  lyeucte ,  uii  tremblement  déterre  renversa  plusieurs 
^^P^f^***  églises   à  Constantinople  ;  celle  de  la   sainte- Vierg-e , 
^^I^^À  ^    ^*"*  '^  place  du  Sigma,  s'écroula  tout-à-coup  pendant 
5ym. p.454,  l'office  et  écrasa  tous  les  assistants,  à  lexceptiou  de 
Georg.  p.   douze,  entre  lesquels  était  le  philosophe  Léon.   Lies 
<;enes.p  54.  sccousscs  dout  la  terre  fut  violemment  agitée  se  firent 
Tam!hjz.   sentir,  à  diverses  reprises,  l'espace  de  quarante  jours. 
B«nd!împ.  Au  Commencement  d'octobre  870,  une  horrible  tem- 
*5i*et  i£    P^*®  détruisit  encore  plusieurs  palais  ;  le  vent  roula 
^^'       comme  un  parchemin  le  plomb  qui  couvrait  la  maisoD 
patriarcale,  et  le  jeta  par  terre.  Basile  avait  déjà,  deux 
fils,  Constantin,  qu'il  avait  associé  à  l'empire,  et  Léon, 
auquel  il  fit  le  même  honneur  le  jour  de  l'Epiphanie , 
en  870.  Il  lui  naquit,  le  23  novembre  869,  un  troi- 
sième fils ,  auquel  il  donna  le  nom  d'Alexandre,  et  qu'il 
honora  encore  de  la  couronne  impériale  l'année  sui- 
vante. En  870  il  eut  un  quatrième  fils,  qui  fut  baptisé 
sous  le  nom  d'Etienne  le  jour  de  Noël.  Il  le  consacra 
dès  la  naissance  au  service  de  l'Église ,  et  il  lui  destinait 
le  siège  de  Constantinople,  qu'Etienne  occupa  en  effet 
dès  l'âge  de  seize  ans,  sous  le  règne  de-  son  frère  Léon, 
après   la  seconde  déposition  de  Photius.   Basile  eut 
aussi  quatre  filles,  qui  toutes  vécurent  dans  la  retraite 
d'un  monastère. 
^  g  ^         Depuis  que  les  Sarrasins  étaient  dans  Bari  ils  ne 
cessaient  de  ravager  toute  la  partie  méridionale  de 


xn. 


S^^mVa  l'Italie.  A  la  faveur  des  divisions  qui  causaient  des 
Italie,      guerres  continuelles  entre  les  divers  princes  de  cette 

577  et  seqq.  coutréc,  les  Sarrasius  de  Sicile  passèrent  en  Calabre,  et 
17^  171.  s'emparèrent  de  plusieurs  places.  Appelés  au  secours, 
^^9^^^'   tantôt  par  les  princes  de  Bënévent,  tantôt  par  ceux 


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(An  fi7«0  LIVRF  LXXI.  BA-SILE.  !àjl 

de   Saleme  ou  par  les  comtes  de  Capoue,  ils  les  rui-*     Const   ' 
naient  les  uns  par  les  autres,  et  profitaient  de  leurs  isrèt^q. 
dépouilles.  Maîtres  de  Tarente,  ils  mettaient  à  contri-  '*^™^5**^  ' 
butioti  toute  l'Apulie.   Il  leur  arrivait  de  fréquents  pJ^^'J^r* 
renforts,  soit  de  la  Sicile,  soit  de  T Afrique,  pour  ré-  ^.  ^*®- . 

'  ...  1       '   r  Giann.  Hist 

parer  le3  pertes  qu'ils  faisaient  dans  leurs  courses;  ils   Wap.  i.  8. 
osèrent   même  pénétrer  jusqu'à  Rome,  pillèrent  les  l'hist.  d'iui. 
basiliques  de  Saint-Pierre  et  de  Saint-Paul,  ravagèrent     et  sûiv. 
tous  les  environs ,  détruisirent  Fondi ,  assiégèrent  Gaete,  nitnt.TrBne\ 
et  ruinèrent  l'armée  de  Louis,  roi  d'Italie,  qui  venait  ^"504,  ses, 
pour,  les  combattre.  Quoique  vaincus  en  bataille  par   ^'®»  ^7'* 
Césaire,  duc  de  Naples,  ils  continuèrent  le  siège  de 
Gaète  jusqu'à  ce  qu'une  violente  tempête  eût  fait  périr 
presquetous  leurs  vaisseaux.  Louis  revient  à  Bénévent 
avec  une  armée,  il  chasse  les  Sarrasins  de  ce  territoire. 
Mais  leur  flotte  désole  les  cotes  de  la  Méditerranée; 
ils  font  des  courses  en  Toscane,    ruinent  de  fond  en 
comble  la  ville  de  Luni ,  et  se  présentent  à  l'embou- 
chure du  Tibre,  d'où  une  nouvelle  tempête  les  écarte 
et  brise    leurs  vaisseaux.    I^uis,    devenu   empereur^ 
forme  le  siège  de  Bari  pour  en  déloger  les  Sarrasins; 
mais  au  bout  de  quelques  mois  il  est  obligé ,  par  leur 
courageuse  résistance,  de  regagner  la  Lombardie.  Les 
princes  de  Salerne  et  de  Bénévent  n'ont  pas  un  meil- 
leur succès  ;  ils   sont  battus ,  et  leur  défaite  ouvre  le 
passage  aux  Sarrasins,  pour  aller  ravager  le  territoire 
de  Naples,   qui  appartenait   encore  à  l'Empire  grec 
Bari  était  la  place  d'armes  des  Sarrasins;   c'était -là 
qu'ils  réunissaient  leurs  forces,  et  d'où  ils  se  répan- 
daient danç  tout  le  continent  de  l'Italie.  Adalgise  II, 
duc  de  Bénévent,  fut  réduit  à  leur  payer  un  subside 
annuel  pour  se  mettre  à  couvert  de  leurs  ravage$. 


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a7î»  HISTOIHB'  du   BÀA-EM^fRS.  (x^  g^T.) 

Toute»  ces  conventions  étaieut  en  pure  perte  ;  ces 
Barbares  recevaient  l'argent,  et   côntinnaiet»!  *  leurs 
courses.  Une  bataille  gagnée  sur  les  troupes  italiennes 
les  mit  en  possession  d'une  grande  partie  du  duché  de 
fiénétent ,  dont  ils  minèrent  les  églises^  et  les  monas- 
tères, et   détruisirent   plusieurs  villes   considérables. 
L'empereur  Louis,  mal  servi  par  les  princes  italiens, 
échoue  encore  dans   une  seconde  entreprise  formée 
pour  reprendre  Bari  ;  il  est  battu ,  et  le  secours  de  son 
frère  Lothaire,  roi  de  Lorraine,  ne  lui  procure  que 
des  succès  peu  importants/Enfin,  en  868,  après  avoir 
pris  scir  les  Sarrasins  Matera ,  Venuse  et  Canuse ,  il 
recommence  avec  toutes  ses  forces  le  siège  de  Biari, 
Ponr  l'.ittaquer  du  côté  de  la  mer,  il  a  recours  à  Ba- 
sile :  il  fait  avec  lui  un  traité  d'alliance,  par  lequel  il 
promet  sa   fille  Hermengarde  en  mariage  au  jeune 
Constantin.  Les  historiens  grecs  font  honneur  à  Basile 
de  la  prisede  Bari;  ils  disent  que  ce  prince,  ne  jugeant 
pas  la  flotte  d'Oryphas  assez  forte  pour  réussir   dans 
cette  expédition,   obtint  des  troupes   de  Louis  pour 
faire  le  siège  par  terre ,  tandis  qu'Oryphas  attaquerait 
la  place  du  côté  de  la  mer;  que  l'amiral  grec  joignit 
à  ses  vaisseaux  ceux  de  Raguse  et  de  toute  la  côte  de 
Dalmatie,  et  qu^avec  ces  secours  les  Grecs  reprirent 
k  ville,  se  rendirent  maîtres  de  tout  le  pays  d'alen- 
tour, chassèrent  les  Sarrasins,  et   rapportèrent  leun 
dépouilles  à  Constantinople;  qu'ils  laissèrent  à  Louis 
les  prisonniers  sarrasins  avec  leur  Soudan,   dont  ces 
historiens  racontent  beaucoup  de  fables. 

Les  écrivains  occidentaux,  que  je  crois  mieux  instruits 

Prise  de  Bari  de  CCS  événements,  attribuent  à  l'empereur  Louis  la 

Samsbs.   gloire  de  cette  cbnquétt.  La  flotte  grecque,  disent-ils, 


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i 


(An  871.)  tïVRÈ    LXXf.  BASÏtÊ.  H-jS 

composée  de  deux  oents  toiles,  iaprès  avoir  tenu  là 
ville  assiégée  |>endant  quelque  temps,  se  retira  dans 
le  port  de  Corinthe,  et  laissa  Louis  devant  Bari.  Le 
prince  français  remporta  plusieurs  avantages  sur  dif- 
férents partis  de  Sarrasins,  qui  venaient  au  secours 
de  la  vHle.  Enfin,  après  un  siège  de  quatre  ans,  il 
entra  dans  Bari  par  assaut,  le  i3  février  871,  et  passa 
tout  au  fil  de  l'épée.  Comme  toutes  ces  places  avaient 
appartenu  aux  empereurs  grecs,  il  n'était  pas  possible 
que  Bassile  ne  conçût  quelque  jalousie  contre  le  prince 
français,  qui  n'en  faisait  pas  la  conquête  pour  les 
rendre  à'ieurs  anciens  maîtres.  D'ailleurs  Louis  pa- 
raissait avoir  des  desseitis  sur  Naples  et  sur  Amalfi, 
villes  encore  sujettes  à  l'empire  grec;  il  entrait  dans 
leurs  querelles,  il  protégeait  tantôt  les  uns,  tantôt 
les  autres,  selon  leurs  besoins,  et  plus  enclore  selon  ses 
vues  ambitieuses.  Ainsi ,  au  lieu  de  féliciter  Louis  de 
ses  succès^  Basile  lui  fit  des  plaintes  de  ce  qu'il  pre- 
nait le  titre  d'empereur  des  Romains,  prétendant 
qu'il  devait  se  contenter  d^  celui  d'empereur  des 
Français;  il  ajoutait  qu'il  était  redevable  aux  Grecs 
de  la  prise  de  Bari;  que  c'étaient  leurs  efforts  qui 
avaient  réduit  cette  ville  à  l'extrémité,  tandis  que  les 
Français,  renfermés  dans  leur  camp,  ne  s'occupaient 
que  de  leurs  plaisirs;  et  qu'ainsi  le  véritable  empe- 
reur romain  avait  sur  cette  ville  un  double  titre,  ce- 
lui de  l'ancienne  possession  et  celui  de  la  nouvelle 
conquête.  Louis  répondit  fièrement  que  le  titre  d'em- 
pereur des  Romains  lui  appartenait  légitimement;  que 
ses  pères  le  tenaient  de  Dieu  et  des  Romains  mêmes  ; 
il  se  plaignait  à  son  tour  de  la  mauvaise  foi  des  Grecs, 
les  IN^apolitains  leurs  sujets  donnant  asile  et  fournis- 

Tome  Xni,  I  8 

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2174  HISTOIRE   DU    BAS-EMPIUE.  (An  871) 

sant  naêine  secrètement  des  secours  aux  infidèles* 
Quelle  party  disait-û^  les  Grecs  peuvent-ils  préle/uire 
à  la  prise  de  Bari?  Après  as^oirfait  une  vaine  pa- 
rade  de  courage  dans  un  ou  deux  assauts  y  n  ont- 
ils  pas  abandonné  le  siège  y  dont  ils  ont  laissé  tous 
les  traifaux  ei  les  dangers  aux  Francais'i  Leur 
commandant  Orypkas^  au  lieu  d'écarter  les  vais^ 
seaux  sarrasins  qui  venaient  secourir  la  ville  as- 
siégée^ na  employé  sa  flotte  qu'à  ravager  les  côtes 
de  V Esclavonie française.  Il  menaçait  l'empereur  grec 
d'user  de  représailles,  s'il  ne  dédommageait  ses  sujets 
des  torts  qu'ils  avaient  reçus.  11  l'invitait  à  envoyer 
une  flotte  capable  de  fermer  aux  Sarrasins  l'entrée 
du  golfe  Adriatique,  tandis  qu'il  travaillerait  lui- 
même  à  les  chasser  de  la  Calabre,  pour  all^  ensuite 
délivrer  la  Sicile  du  joug  de  ces  barbares.  Si  l'on  e» 
croit  les  écrivains  d'Occident ,  Basile  craignait  le  ca- 
ractère entreprenant  de  ce  prince  et  de  la  nation  fran- 
çaise; il  aimait  mieux  avoir  pour  voisins  les  Sarrasin» 
que  les  Français.  Aussi-  entra-t-il  dans  les  complots 
qu'Adalgise,  duc  de  Bénévent,  formait  contre  Louis, 
dont  la  hauteiir  et  la  dureté  lui  étaient  devenues  in- 
supportables. Plusieurs  villes  de  la  Campanie,  du 
Samnium,  de  la  Lucanie,  se  révoltèrent  et  reçareat 
,  des  troupes  grecques.  Louis  fut  lui-même  arrêté  dans 
Bénéveut.  Mais,  étant  sorti  de  prison  au  bout  de  qua- 
rante jours,  il  reprit  toutes  ces  places,  dissipa  tes 
complots  secrets  des  Grecs,  et  ne.  leur  laissa  qae  la 
honte  d'avoir  traversé  par  de  sourdes  manœuvres  k 
délivrance  de  l'Italie, 
xviir.  Les   progrès    du   christianisme  en   Russie,    et  la 

cbr7tiSl»e  destruction    totale    des   Pauliciens    consolèrent   Ba- 


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(An  871.)  LIVRl    LXXI.  BASILE.  275 

sile   du  peu  de  succès    de    ses  intrigues  en  Occident,   s'étend  en 
liCs  courses  des  Russes,  sous  Je  règne  précédent,  leur    ^^*"®* 
avaient  déia  fait  connaître  la  religion  chrétienne.  Ba-   589,  590. 

.,_•'-  ^  _  Zou.  t.  2,  p. 

sue  profita  de  cette  ouverture  pour  conclure  avec  eux    173,  174. 
un  traité  de  paix  ;  et ,  après  avoir  adouci  par  des  pré-     ^const.^ 
sents  leur  fé^pté  naturelle,  il  leur  fît  accepter  un    a^if  âia! 
archevêque  ordonné  par  Ignace.  Les  instructions  d^ 
ce  prélat,  que  Dieu  voulut  bien  rendre  fécondes  par 
sa  grâce,  firent  dans  ce  pays  beaucoup  de  chrétiens, 
qui  reconnurent  pout*  leur  mère  l'église  grecque.  Mais 
le  prince  et  le  gros  de  la  nation  demeurèrent  encore 
long-temps  attachés  à  Tidolâtrie. 

Les  Paulieîens,  établis  dans  Téphrique    et  ligués       i«. 

-  .  1       »ir   1      •  •  1     *  Incursions 

avec  les  Sarrasins  de  Malatia,  ne  cessaient  de  rava-        des 
ger  l'Asie-Mineure.  Us  poussèrent  leurs  courses  d'un  petras*sicu- 
côté  jusqu'à  Nicée  et  à  Nicomédie,  de  l'autre  jusqu'à       ^"»- 
Éphèse,  où   ils  pillèrent   et  profanèrent    l'édise   de57oetscqq. 

.  1»'  /!•  1  /  M  .  Zon.  t.  a,  p. 

Samt-Jean-I  Evangehste.  Carbeas  étant  mort,  ils  avaient    167,  168. 
à  Jèur  tête   son  fils   Chrysochir,  aussi   prudent   que    ^\^i  ^^' 
brave,  mais    fier   et   mortel  '^ennemi  de  l'empire.  Ba-    Por^h!*V- 
sile,   naturellement  pacifique,  lui   envoya  Pierre  de  sym.^p.*455| 
Sicile  pour  traiter  du  rachat  des  prisonniers,  et  pour   ^^l^' 
l'engager,  s'il  était  possible,  à  vivre  en  paix  et  à  épar-    ^44,  546. 
gner  le  sang   des   chrétiens.  11   lui  offrait  beaucoup  57etseqq. 
d'or,  d'argent  et  d'étoffes,  dont  les  Pauliciens  avaient 
besoin  pour  s'habiller,  ignorant  tout  art  de  manufac-^ 
tures.  Pierre  demeura  neuf  mois  à  Téphrique  ;  il  réus- 
sit à  racheter  les  prisonniers;  mais  il  trouva  un  ob- 
stacle  invincible  à  la  paix  dans  la  haine  opiniâtre  et 
dans  la  fierté  indomptable  de  Chrysochir,  qui  répon- 
dit insolemment  à  l'empereur  que,  s'il  voulait  la  paix, 
il  eût  à  renoncer  à  l'empire  d'Orient,  et  à  se  contenter 

i8. 


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a^Ô  HISTOIRE    DU   BilS-EMPIRE.  (An  871.) 

de  ce  qu'il  possédait  au-delà  du  Bosphore;  qu'autre- 
ment il  saurait  bien  ly  forcer  par  les  armes.  En  même 
temps,  pour  appuyer  ces  bravades  par  des  effets,  il 
marcha  vers  Ancyre,  dont  il  ravagea  le  territoire 
ainsi  que  celui  de  Comane  dans  le  Pont ,  et  s'en  re- 
tourna avec  un  butin  immense  et  g^^pi  nombre  de 
prisonniers. 
2x.  Piqué  vivement  d'une  insulte  si  marquée,  Tempe- 

^m'arohc'*'^  rcur  Icva  une  armée,  et  voulut  la- commander  eu  per- 
contre  eux  jonne.  Il   disait  souvent  qu'un  prince  se  doit  à  ses 

«n  personne.  *■  *^ 

peuples,  et  que,  pour  assurer  leur  tranquillité,  il  doit 
renoncer  à  la  sienne.  Des  sentiments  si  généreux  le  ren- 
daient digne  des  plus  grands  succès.  Néanmoins  ies 
commencements  de  cette  campagne  ne  furent  pas 
heureux.  Soit  défaut  d'expérience,  soit  qu'il  se  laissât 
emporter  par  une  trop  bouillante  valeur,  il  fut  battu 
plusieurs  fois,  et  même  il  aurait  été  pris  dans  uu 
combat,  sans  le  secours  d'un  soldat  arménien  qui  le 
sauva  des  mains  des  ennemis.  Ces  échecs  réitérés 
n'abattirent  pas  son  courage;  il  s'instruisît  par  ses 
propres  défaites;  et,  devenu  supérieur  à  lui-même,  il 
lutta  constamment  contre  la  fortune,  et  vint  à  bout 
de  la  surmonter.  Chrysochir,  vaincu  à  son  tour,  se 
retira  dans  Téphrique,  et  laissa  les  Grecs  maîtres  de 
la  campagne,  sur  laquelle  Basile  se  vengea  du  pillage 
de  l'Asie.  Après  avoir  désolé  tous,  les  environs,  il 
tenta  de  prendre  la  ville  d'assaut;  mais,  la  trouvant 
aussi  forte  par  ses  remparts  que  par  le  nombre  de 
ses  défenseurs,  et  bien  pourvue  de  vivres,  d'ailleurs 
ne  pouvant  faire  subsister  son  armée  dans  un  pays 
qu'il  avait  ruiné,  il  l'abandonna,  et  se  contenta  de 
détruire  les  châteaux   d'alentour.  Ayant  ainsi  rétabli 


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(An  871.)  LIVRE    LXXf.  BASILE.  Q77 

son  honneur  et  réparé  ses  pertes,  il  revint  à  Conslan- 
finople,  chargé  de  dépouilles  et  traînant  après  lui  un 
nombre  infini  de  prisonniers.  Son  premier  soin,  à 
son  retour,  fut  de  récompenser  le  soldat  auquel  il  de- 
vait Thonneur  et  la  vie.  Ce  bt'ave  homme  était  de- 
meuré inconnu,  sans  se  vanter  de  son  service,  et  sans 
se  présenter  à  l'empereur.  Basile  le  fit  chercher;  on 
eut  de  la  peine  à  le  démêler  entre  une  foule  d'autres 
qui  tous  accouraient  avec  avidité  à  la  récompense, 
comme  libérateurs  du  prince.  Enfin,  reconnu  par  l'em- 
pereur, il  avoua  modestement  que  c'était  lui  qui  avait 
eu  le  bonheur  de  tirer  son  prince  du  péril  oîi  l'avait 
précipité  un  excès  de  Courage.  Il  se  nommait  Théo- 
phylacle.  Comme  Basile  voulait  le  combler  de  biens 
et  d'honneurs:  «  Seigneur,  lui  dit  le  soldat,  je  suis  né 
«  pauvre,  et  je  remercie  la  Providence;  elle  m'a  pro- 
«  curé  un  honneur  plus  précieux  que  toutes  les  ri- 
te chesses.  Les  dignités  ne  me  flattent  pas;  je  ne  suis 
«pas  né  pour  elles.  Ma  vie  est  à  Votre  Majesté  :  en 
«  l'exposant  pour  vous,  je  ne  faisais  que  vous  rendre 
«  un  bien  qui  vous  appartient.  Mais  si  vous  êtes  as- 
«  sez  généreux  pour  vouloir  payer  un  sacrifice  que  je 
«  vous  devais,  je  ne  vous  demande  qu'un  peu  de  terre 
«c  pour  faire  subsister  ma  famille.  »  Basile,  étonné  d'un 
désintéressement  si  rare,  lui  donna  une  des  terres  du 
domaine  impérial;  et  ce  Théophylacte  fut  père  de 
Romain  Lécapène,  qui  parvint  dans  la  suite  à  l'em- 
pire. 

Dans   le  voisinage  de  Téphrique  étaient  plusieurs    A»  872. 
placés  peuplées  de  Sarrasins,  dépendantes  du   g^u-       J^"-^^^^ 
vernement   de  Malatia,  mais  alliées  des  Pauliciens.    plusieurs 

.       1      «  .  villes  aux 

Intimidés  par  les  ravages  que  Basile  venait  de  faire ,    sarrasms. 


\ 


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a']8  UISTOIRfi    DU   BAS-EMPIRE.  (An  87a.) 

ces  peuples  envoyèrent  demander  la  paix  et  1  alliance 
de  l'empereur.  La  ville  de  Taras  fut  la  première  à  se 
détacher  des  états  du  khalife.  Un  prince  arménien, 
nommé  Curticius ,  maître  du  château  de  Locane ,  et 
d'un  assez  grand  territoire,  d'où  il  faisait  fréquem- 
ment des  courses  sur  les  terres  de  l'empire,  se  soumit 
avec  tout  son  peuple.  La  réputation  de  justice  et  de 
clémence  que  Basile  s'était  acquise  depuis  le  com- 
mencement de  son  règne,  venait  de  recevoir  un  nou- 
veau lustre  de  son  éclatante  valeur.  L'année  suivante, 
il  se  chargea  encore  des  fonctions  de  général,  et,  pour 
ôter  aux  Pauliciens  le  secours  des  Sarrasins,  qui 
faisaient  leur  principale  force  ^  il  marcha  vers  Malatia. 
Cette  ville  avait  été  ruinée  par  Théophile,  aussi  bien 
que  Samosate  et  Sozopetra.  Mais  comme  l'empire 
n'avait  plus  assez  de  forces  pour  conserver  les  con- 
quêtes trop  éloignées  du  centre,  les  Sarrasins  avaient 
relevé  toutes  ces  places.  Basile  détacha  une  partie  de 
ses  troupes  pour  aller  attaquer  Sozopetra,  sous  la 
conduite  d'un  de  ses  parents  nommé  Christophe,'  guer- 
rier expérimenté.  Cette  ville  était  située  dans  une 
gorge  entre  le  mont  Amanus  et  une  branche  du  mont 
Taurus.  Christophe  la  surprit  par  sa  diUgence  :  il  y 
entra  d'assaut,  passa  les  habitants  au  fil  de  l'épée^  fit 
un  riche  butin,  et  délivra  grand  nombre  de  prison- 
niers grecs,  qu'on  y  gardait  comme  dans  une  prison 
assurée.  De  là,  pillant  et  brûlant  tout  le  pays, il  cou- 
rut à  Samosate,  qui  ne  lui  fit  pas  plus  de  résistance; 
et,  chargé  de  dépouilles ,  suivi  d'une  foule  de  Grecs 
délivrés  et  de  Sarrasins  captifs ,  il  alla  rejoindre  Tcm- 
pereur. 

Ce  prince,  arrivé  au  bord  de  l'Euphrate,  crut  qu'il 


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(An  87a)  LIVRB   LXXI.  BASfLE.  tï'jg 

lui  serait  glorieux:  de  passer  ce  fleuve,  et  de  montrer  ^^^u. 
les  aimes  romaines  dans  un  pays  où  elles  Avaient  tant  rÊu^^e. 
de  fois  triomphé,  mais  où  elles  étaient  depuis  long- 
temps inconnues.  Quoiqu'on  fut  au  milieu  de  Tété, 
VEuphrate  était  alors  grossi  par  une  crue  d'eau  con- 
sid^able,  et  l'inondation  en  rendait  le  passage  très- 
difficile.  Basile  se  fit  un  point  d'honneur  de  forcer  cet 
obstacle;  et,  sans  attendre  que  le  Seuye  fut  rentré 
dans  son  lit,  il  y  jeta  un  pont  de  bateaux.  Il  avait  un 
moyeti  sûr  de  rendre  ses  soldats  infatigables  :  c'était 
de  partager  leurs  fetigues.  On  voyait  l'empereur,  la 
hache  à  la  main,  couper  des  arbres  ;  on  le  voyait  scier 
des  planches,  porter  sur  ses  épaules  des  fardeaux  que 
les  plus  robustes  auraient  refusés.  Cet  exemple  du 
prince  lendit  facile  un  ouvrage  qui  semblait  d'abord 
impossible.  Il  passa  l'Ëuphrate ,  emporta  d'assaut  le 
château  de  Rhapsaque,  prit  et  pilla  plusieurs  places 
le  long  du  fleuve ,  dépeupla  tout  le  pays  entre  l'Ëu- 
phrate et  TArsanias,  et,  après  avoir  renouvelé  dans  la  , 
Sopfaène,  et  dans  les  contrées  septentrionales  de  la 
Mésopotamie,  la  terreur  du  nom  romain,  il  repassa 
du  eoté  de  Malatia. 

Les  Sarrasins  avaient  rassemblé  toutes  leurs  forces  xxin. 
dans  cette  ville.  A  l'approche  de  l'empereur ,  ils  sor-  de^'^MaUtia. 
tirent  en  ordre  de  bataillife  en  poussant  de  grands  cris. 
Basile,  à  la  tété  dia  ses  escadrons,  fond  sur  eux  le  sa- 
bre à  te  main,  et ,  payant  de  sa  personne  avec  une 
hardiesse  intrépide,  il  se  jette  au  plus  fort  de  la  mê- 
lée, et  fait  des  pr6diges  de  valeur.  A  la  vue  des  périls 
auxquels  il  s^expoSe ,  ses  soldats  n'en  connaissent  plus 
pour  eux-mêmes  :  ils  enfoncent,  ils  renversent,  ils  fou- 
lent  AUX  pieds  tout  ce    qui  se  présente  devant  eux. 


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a8o  HISTOIRE    DU    BAS-EMPIRE.  (An  êy^4 

Les  Sarrasins  fuyent  et  se  précipitent  dans  la  viJJe  : 
on  les  poursuit  Tépée  dans  les  reins;  ceuK  qui  ne 
rendent  pas  les  armes,  spnt  massacrés;  tout  Tespace^ 
depuis  le  champ  de  bataille  jusqu'aux  portes  de  Mala- 
tia,  est  jonché  de  morts.  L'empeteur  fait  aussitôt 
avancer  |^s  machines,  et  se  prépare  à  donner  Tassaut. 
Mais  lorsque  l'ardeur  du  combat  fut  un  peu  refroi- 
die, apprenant  des  transfuges  que  la  ville,  entourée 
d'épaisses  murailles,  défendue  par  une  garnison  très- 
nombreuse,  abondamment  pourvue  de  toutes*  les  muni- 
tions de  guerre  et  de  bouche,  était  en  état  de  résister 
long-temps ,  il  prit  le  parti  de  se  retirer ,  et  marcha 
du  côté  de  Téphrique.  Comme  la  saison  était  trop 
avancée  pour  entreprendre  un  siège  difficile ,  il  se 
contenta  de  faire  le  dégât,  et,  après  avoir  libéralement 
récompensé  tous  ceux  qui  s'étaient  signalés  dans  cette 
campagne,  il  revint  à  Constantinople,  où  il  rentra  en 
triomphe.  Tout  le  peuple  le  re^ut  avec  des  acclama- 
tions de  joie,  et  le  conduisit  à  Sainte-^Sophie.  Après 
avoir  rendu  grâces  à  Dieu  de  ses  succès,  il  reçut  du 
patriarche  Ignace,  au  pied  de  l'autel,  une  couronne 
de  victoire,  et  rentra  dans  son  palais,  où  il  ne  se  dé- 
lassa des  fatigues  de  la  guerre ,  qu'en,  travaillant  aux 
affaires  du  gouvernement. 
Ak  S73.  11  était  facile  à  Chrysochir  de  réparer  ses  pertes  : 
Nouvelle    tous  les  Paulicicns  étaient  soldats;  il  eut  bientôt  formé 

expédition  ,         ,  -  11        j  /  / 

contre  unc  armcc  plus  nombreuse  que  celles  des  années  pre- 
rysoc  .  g^jeuj^egj  (j|.^  s'étant  mis  le  premier  en  campagne,  il 
marcha  en  Cappadoce, portant  partout  le  ravage.  L'em- 
pereur se  préparait  à  partir  encore  à  la  tête  de  ses 
troupes  :  on  lui  représenta  que  Chrysochir  n'était  pas 
un  ennemi  digne  de  lui  ;  qu'il  ne  convenait  pas  à  la 


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{AdBv^')  livre   LXXI.       .      BASILE.  28 1 

majesté  impériale  de  courir  sans  cesse  à  la  poursuite 
d'ua  brigand,  qui  n'avait  de  force  que  dans  son  au- 
dace. Il  se  contenta  donc  d'implorer  le  secours  de  Dieu 
par  des  prières,  et  donna  le  commandement  de  son 
armée  à  Christophe,  qu'il  avait  fait  capitaine  de  sa 
garde.  Basile  était  un  grand  homme  pouv  son  siècle; 
mais  c'était  un  siècle  d'abâtardissement  et  d'ignorance; 
et  il  est  difficile  que  les  âmes  les  plus  élevées  ne  se 
ressentent  pas  de  la  faiblesse  qui  les  environne.  Il  de» 
manda  publiquement  à  Dieu ,  par  l'intercession  de  saint 
Michel  et  du  prophète  Élie ,  de  ne  pas  le  retirer  du 
monde,  qu'il  n'eût  vu  périr  Chrysochir,  et  qu'il  ne 
lui  eût  enfoncé  trois  flèches  dans  la  tête;  prière  bar- 
bare, et  plus  di'gne  des  Troyennes  de  l'Iliade  que  d'un 
prince  chrétien.  Christophe  trouva  Chrysochir  campé 
près  d'Agranes  en  Cappadoce  ;  il  campa  lui-même  près 
de  la  ville  de  Sibore;  et  comme  son  armée  était  de 
beaucpup  la  moins  forte,  il  évita  d'en  venir  aux  mains, 
content  de  resserrer  l'ennemi  et  de  l'empêcher  de  faire 
des  courses.  L'été  se  passa  en.  chicanes  et  en  escar- 
mouches, où  l'avantage  se  parjtageait,  sans  aucune  ac- 
tion décisive.  A  l'approche  de  l'hiver,  Chrysochir,  voyant 
qu'il  ne  pouvait  engager  une  bataille,  et  que  ses  forces 
se  consumaient  inutilement,  reprit  le  chemin  de  Té-^ 
phrique  avec  un  grand  butin.  Le  général  grec  le  fit 
suivre  de  loin  par  deux  cohortes,  l'une  de  Gappado- 
ciens ,  l'autre  d'Arméniens,  avec  ordre  d'éclairer  sa  mar- 
che ;  s'ils  voyaient  l'ennemi  se  détourner  de  sa  route 
pour  rentrer  sur  les  terres  de  l'empire,  ils  devaient 
aussitôt  en  donner  avis;  mais,  s'il  continuait  de  faire 
retraite,  ils  avaient  ordre  de  revenir  au  camp,  lors* 
qu'il  aurait  passé  la  frontière. 


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XXV. 

Défaite    des 


a8a  HISTOIRE    du    BAS^JBMPIRE.  (An    873.) 

Dans  cette  marche,  larmée  paulicienne étant  arrivée 

ireiaiie    aes   1.  11-19  i«i'*  -i 

Pauiiciens.  J^  soir  au  bord  d  une  profonde  ravine,  campa  au  pied 
d'une  montagne  couverte  de  bois.  Les  deux  cohortes 
qui  les  suivaient,  sans  être  aperçues^  gagnèrent  par 
l'autre  côté  le  sommet  de  la  montagne;  et  voyant  au- 
dessous  d'elles  l'ennemi  qui  reposait  sans  défiance, 
elles  brûlaient  d'impatience  de  l'attaquer,  se  promet- 
tant malgré  leur  petit  nombre  une  victoire  assurée.  Il 
y  avait  depuis  long-temps  une  jalousie  de  valeur  entre 
les  Gappadociens  et  les  Arméniens.  La  proximité  des 
ennemis  l'ayant  encore  allumée  plus  vivement  en  cette 
occasion  :  Qu^esl-il  besoin  de  paroles ,  s^écria  un  sol- 
dat arménien ,  lorsqu'il  nous  est  si  aisé  de  décider 
par  des  effets  cette  querelle  d'honrieurP  Tombons 
sur  l'ennemi  qui  s'offre  à  Vépreui^e  de  notre  cou- 
rage. Il  jugera  lui-même  de  quel  côté  doit  être  le 
prix.  Les  officiers  voyant  ce  qu'ils  pouvaient  attendre 
de  cette  ardeur  secondée  de  l'avantage  du  poste,  cra- 
rent  devoir  hasarder  l'attaque.  Ils  choisissent  dans  les 
deux  cohortes  six  cents  hommes,  qu^ils  font  couler  à 
la  faveur  de  la  nuit  dans  le  bois  le  long  de  la  monta- 
gne, juÀqu^à  deux  ou  trois  portées  de  trait  du  camp 
ennemi  ;  ils  laissent  sur  le  sommet  le  rèstë  des  deux 
cohortes,  et  leur  ordonnent  de  pousser  de  grands  cris 
dès  qu'ils  en  recevront  le  signal ,  et  dé  sonner  de  tous 
les  instruments  de  guerre.  Un  peu  avant  le  lever  du 
soleil,  dans  le  temps  que  le  sommeil  est  plus  profond 
et  plus  tranquille,  les  soldats  de  l'eiiibuscàde ,  criant 
de  toutes  leurs  forcer ,  victoire  à  la  ci^ix\  fondent  sur 
le  camp  ;  en  même  tempà  leurs  camarades  font  enten- 
dre du  haut  de  Isl  ihontagne  un  brait  terrible ,  que 
redoublent  les  échos  d'alentour.  Lés  Paulicitos  se  ré- 


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(An  873.)  LIVBE    LXXl.  BASILE.  î83 

veillant  avec  effroi  ne  savent  ni  se  mettre  en  ordre  ni 
se  défendre  :  accablés  de  traits  ^  percés  de  lances  avant 
que  d'avoir  reconnu  à  qui  ils  ont  affaire,  jugeant  au 
bruit  qu'ils  entendent  que  toute  l'armée  vient  fondre 
sur  leurs  têtes,  ils  ne  songent  qu'à  fuir  sans  regarder  *  • 
derrière  eux.  On  les  poursuit  l'espace  de  dix  lieues,  et 
tout  ce  chemin  est  couvert  de  leurs  morts  et  de  leurs 
blessés. 

Chrysochir,  après  avoir  fait  d'inutiles  efforts  pour  xxti. 
les  retenir,  obligé  de  fuir  lui-même,  se  vit  poursuivi  dciîéphri" 
par  un  cavalier  nommé  Pulade,  qu'il  avait  autrefois  iSJ^dem. 
tenu  prisonnier.  C'était,  de  tous  les  ennemis,  celui  dont 
il  devait  espérer  plus  de  grâce  :  il  l'avait  traité  avec  hu- 
manité, et  l'avait  renvoyé  sans  rançon.  Étonné  de  l'a* 
percevoir  derrière  lui,  la  javeline  à  la  main  et  la  fureur 
dans  les  yeux  :  Ingrat  Pulade^  lui  dit-il ,  que  €ai*je 
fait  pour  te  voir  ainsi  acharné  à  m' arracher  la  vie? 
u4s'tu  donc  oublié  avec  quelle  bonté  f  ai  ménagé  la 
tienne?  iVo/z,  répond  le  barbare,  et  je  t'apporte  le 
prix  de  tes  bons  traitements.  Comme  ces  paroles  étaient 
prononcées  d'un  ton  qui  annonçait  la  mort,  Chryso- 
chir, saisi  de  frayeur  et  continuant  de  fuir,  fut  emporté 
au  bord  de  la  ravine ,  que  son  cheval  n'osait  franchir. 
Dans  ce  moment  Pulade  l'atteint  de  sa  javeline  et  le 
renverse.  Diaconize,  son  écuyer,  le  seul  qui  ne  l'eût  pas 
abandonné,  saute  à  terre,  et  le  voyant  près  d'expirer, 
il  lui  soulève  la  tête,  et  la  tient  appuyée  sur  ses  genoux 
en  pleurant.  Il  respirait  encore,  lorsque  d'autres  cava- 
liers arrivent,  lui  coupent  la  tête,  et  enchaînent  Dia- 
conize avec  les  autres  prisonniers.  On  envoie  cette  t^e 
à  l'empereur ,  qui ,  se  persuadant  que  Dieu  avait  agréé 
sa  prière ,  la  foit  suspendre  à  un  arbi^  et  la  perce  de 


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284  HISTOIAB   DO   BA.S-EMPIRE.  (Aa  875.) 

trois  coups  de  flèches.  Cependant  Christophe,  averti  du 
succès  inattendu  de  son  détachement ,  va  le  joindre  en 
diligence.  On  marche  à  Téphrique,  dont  les  habitants 
glacés  d'effroi  ne  firent  aucune  résistance.  Un  trem- 
blement de  terre  qui  se  fit  sentir  au  même  moment , 
semblait  leur  annoncer  que  le  ciel  agissait  de  concert 
avec  l'ennemi.  Sans  attendre  le  siège,  ils  abandonnent 
la  ville  :  les  uns  viennent  se  jeter  entre  les  bras  de 
Christophe,  les  autres  vont  chercher  un  asile  chez  les 
Sarrasins.  On  trouva  la  place  déserte;  elle  fut  détruite. 
Ce  repaire  de  brigands  et  de  scélérats  ne  fut  plus 
qu'un  monceau  de  ruines;  et  la  puissance  des  Pauli- 
ciens,  qui,  depuis  vingt-cinq  ans,  faisait  trembler  FAsie 
jusqu'au  Bosphore,  s'éteignit  comme  la  foudre  après 
un  embrasement  de  courte  durée.  Leur  secte  ne  périt 
pas  avec  eux.  Zélés  pour  la  propagation  de  Terreur, 
ils  avaient  envoyé  leurs  missionnaires  jusqu'en  Bulga- 
rie, d'où  le  manichéisme  avec  toutes  ses  horreurs  se 
répandit  dans  l'Europe.  Quoique  Chrysochir  eût  été 
détesté  de  tout  l'empire,  l'ingrat  Pulade,  meurtrier  de 
son  bienfaiteur,  le  fut  encore  davantage.  Au  contraire, 
la  fidélité  de  Diaconize  fut  récompensée  de  l'estime 
publique  :  l'empereur  lui  rendit  la  liberté,  et  Léon,  suc- 
cesseur de  Basile ,  lui  donna  des  emplois  honorables 
dans  ses  armées. 

La  joie  que  ces  succès  donnaient  à  l'empereur,  était 
delà  sœur  et  contrebalancée  par  les  chagrins  amers  que  lui  cau- 

de  la  femme        .'ii//i  -,  -i/»  «1 

de  Basile,    saicnt  Ics  dérèglements  de  sa,  sœur  et  de  sa  femme.  Il 

^*5g*  P*     ne  devait  pas  attendre  de  leur  part  une  conduite  plus 

Zon.^t^2,  p.  régulière  :  il  avait. lui-même  favorisé  le  commerce  scan- 

Leo,p.  47Ï-  daleux  de.Thécla,  sa  sœur«  avec  son  prédécesseur  Mi- 

CoDSt.  ^  * 

Pori,h.  p.    cheU  et  sa  femme  Ëudoéie  avait  été  lo^-temps  con- 


XXTII. 

Débauches 


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(An  873.) 


LIVRE  LXXÎ.         BASILE.  a85 


cubine  de  ce  prioce.  Cependant  il  s'était  flatté  que  ie     syœ. 


■m.  p. 

changement  d'état  opérerait  dans  ces  princesses  la  même   Gwrg^^p! 
réforme  qu'il  avait  opérée  en  lui^  II  se  trompa,  et  s'a-    ^^^*  ^^^ 
perçut  bientôt  que  sa  sœur  en  perdant  Michel ,  n'avait 
pas  perdu  l'habitude  de  la  débauche.  Un  de  ses  offi*- 
cier,  homme  corrompu  et  sans  autres  principes  que 
ceux  de  la  cour,  s'entreteuant  un  jour  avec  lui ,  parla 
comme  d'une  chose  indifférente  du  commerce  de  Thé- 
cla  avec  un  seigneur  nommé  Néatocomite.  Basile,  hon^ 
teux  de  voir  que  la  dépravation  des  mœurs  fût  deve- 
nue tellement  à  la  mode,  qu'elle  ne  causât  plus  de 
scandale,  se  fît  amener  Néatocomite,  et  après  l'avoir 
fait  fustiger,  il  lui  fit  prendre  l'habit  de  moine.  Il  con- 
fisqua les  biens  de  sa  sœur,  et  l'enferma  dans  un  mo- 
nastère. Ayant  découvert  une  semblable  intrigue  entre 
l'impératrice  et  Nicétas,  son  maître-d'hâtel ,  il  ne  s'en 
prit  qu'à  lui-même  du  déshonneur  qu'il  recevait  de  sa 
femme;  et,  quoique  cette  injure  lui  fût  personnelle,  il 
ne  punit  pas  Nicétas  plus  sévèrement  que  Néatoco- 
mite. Cet  officier  s'étant  sincèrement  converti,  fut, 
sous  le  règne  de  Léon,  honoré  de  la  dignité  d'économe 
de  Sainte-Sophie,  et  bâtit  un  monastère,  où  il  passa 
le  reste  de  sa  vie  dans  les  austérités  de  la  pénitence. 

Zélé  pour  le  salut  de  ses  sujets ,  Basile  s'attacha  sur-  ^^^^^ 
tout  à  la  conversion  des  Juifs.  Il  établit  des  contro-  ^"^jj^f^" 
verses,  et  leur  présenta  l'appât  des  récompenses.  11  leur 
promit  des  pensions,  des  honneurs,  l'exemption  de 
tout  impôt.  Un  grand  nombre  d'entre  eux  reçut  le 
baptême;  mais  ce  fut  plutôt  par  intérêt  que  par  con- 
viction. Après  sa  mort,  la  plupart  retournèrent  à  leur 
premier  égarement. 

Pour  orner  une  nouvelle  église  qu'il  faisait  bâtir,  il      xxix. 

Basile  piqne 


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a86  nisïojRjî  du  BàS-EMPins.  ^J^  g^j.^ 

par  an     fit  foudre  quantité  de  vases  d'airaia  de  son  palais.  Ou 
serpent     ^  transporta  par  son  ordre  beaucoup  de  marbres^  de 
colonnes ,.  de  mojsaïques ,  de  statues.  Entre  celles  -  ci 
était  une  statue  de  bronze,  représentant  un  évêque,  dont 
le  bâton  pastoral  était  entouré  d'un  serpent  Un  jour  que 
l'empereur  venait  visiter  les  ouvrages,  s'étant  avisé  de 
mettre  le  doigt  dans  la  gueule  du  serpent  de  bronze, 
il,  fut  mordu  par  un  véritable  serpent  qui  s'y  était  ni- 
ché. On  eut.  bi^aucoup  de  peine  à  le  guérir  de  cette 
bljBSSure,  C'était  dès  lors  la  coutume  d'enfouir  dans  les 
fondements  des  grands  édifices  quelque  mémorial  du 
prince  qui  les  faisait  bâtir.  On  posa  dans  ceuiL  de  cette 
église  upe  statue  de  Salomon,  sur  laquelle  était  gravé 
le  nom  de  Basile. 
Azr  875.        Les  Sarrasins  de  Tarse  possédaient  le  château  de 
Gucwes    L"l®»  place  très-forte,  d'où  ils  ne  cessaient  de  faire 
contre  les   jgg  courscs  dans  les  provinces  d'alentour.  Basile  le 
Cedr.p.     fit  attaquer,  et  le  reprit  moitié  de  force,  moitié  par  in- 
^'575.^^'   telligences.  Une  autre  forteresse,  nommée  Mélus,  se  ren- 
^ô8*i6q  ^*^»  ^*  ^^  même  corps  de  troupes  prit  et  détruisit  la 
oiyc.p.295,  vide  de  Castabale,  dont  les  Pauliciens  étaient  demeu* 

agis.  /  A  .  / 

Léo,  p.  47^*  rés  les  maîtres  après  la  ruine  de  Téphrique.  Ces  suc- 

Purph.  p.    ces  donnaient  de  la  joie  à  Basile,  mais  il  se  reprochait 

Symrp.'4l2.  de  ne  les  avoir  pas  achetés  de  ses  propres  travaux.  Il 

^"sîl.^    marcha  donc  en  Cappadoce  avec  son  fils  Constantin, 

^r'T^c?'  ?"'*'  ^<^**l2iit  accoutumer   aux   fatigues ,  et  instruire 

^9*  iS-    dans  les  opérations  de  la  guerre.  Arrivé  à  Césarëe, 

après  avoir  passé  quelques  jours  à  exercer  ses  soldats, 

il  fit  prendre  les  devants  à  des  troupes  légères,  et  les 

suivit  de  près  avec  le  reste  de  l'armée.  Tout  fuyait  de- 

vaut  lui,  les  Sarrasins  étaient  forcés  dans   toutes  les 

places,  ou  les  abandonnaient  à  son  approche.  L'émir 


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(^Aii  875.)  tIVRE   LXXI.  BASILE.  sS^ 

d'Anazarbe,  Apabdèle,  la  terreur  de  tous  Içs  paya  voi- 
sinSf  n'attendit  pas  l'empereur,  et  s'enfuit  à  Malatia* 
Semas ,,  autre  Sarrasin ,  cantonné  dans  les  gorges  du 
mont  Taurus,  désolait  par  des  courses  continuelles  les 
frontières  de  rempire;  il  vint  15e  rendre  à  Basile. 

Le  lecteur  a  pu  s'apercevoir  que  les  Sarrasins ,  ea     *^*'- 

1  ,  .  .  ,  /     1  ;  Caractère 

étendant  leur  puissance,  avaient  change  de  caractère.  desSarra- 
On  ne  retrouve. plus  chez  eux  cette  fougueuse  valeur^  temps-ià. 
enflaniniée.par  le  fanatisme,  qui  ne  connaissait  point 
d'obstacle,  et  qui  courait  à  la  mort,  comme  à  la  vie*- 
toire.  Depuis  un  siècle  on  les  voit  aussi  souvent  vain- 
cus que  vainqueurs.  Maîtres  du  plus  grand  empire  qui 
fût  alors  sur  la  terre ,  soutenus  de  toutes  les  forces  de 
l'Orient,  ils  font  moins  de  progrès  avec  des  armées 
nombreuses  et  opulentes ,  qu'ils  n'en  faisaient  avec  une 
poignée  de  soldats  pauvres  et  presque  nus,  sous  les 
prenvers  successeurs  de  Mahomet.  Les  richesses  avaient 
porté  chez  eux  leur  poison  destructeur;  de  cette  trempe 
forte  et  vigoureuse ,  qui  rendait  leur  ame  aussi  ferme 
que  l'acier  de  leurs  épées ,  il  ne  leur  restait  que  la  fierté. 
Tandis  que  les  délices  de  Bagdad  amollissaient  leurs 
khalifes ,  ils  s'affaiblissaient  eux-mêmes  par  l'usage  des 
plaisirs,  et,  toujours  turbulents,  ils  conservaient  l'avi- 
,  dite  des  conquêtes,  en  perdant  les  moyens  de  conquérir. 
(Léon;,  fik  de  Basile,  a  dépeint  dans  son  ouvrage  de 
Tactique^  la  manière  dont  les  Sarrasins  faisaient  la 
guerre  de  son  temps.  Cette  nation  méprisant  les  tra-. 
vaux  de  l'agriculture,  n'avait  de  ressource  que  dan» 
les  armes  ;  elle  ne  vivait  que  de  pillage;  c'était  la  né- 
cessité qui  les  conduisait  à  la  guerre  ;  aussi  leurs  ar*« 
mées  étaient-elles  grossies  d'une  foule  de  misérables  ^ 
qui  n'étaient  attirés  que  par  l'intérêt  de  la  subsistance. 


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a88  HISTOIRE  DU   BAS-£MI»ltl|f:.  (An  g^S.) 

Lorsqu'il  s'agissait  d'une  course  ou  d'une  guerre,  on 
ne  levait  point  de  soldats;  porter  les  armes,  n'était- pas 
une  profession  particulière;  on  publiait  le  jour  du  dé- 
part ;  les  riches  accouraient  par  amour  pour  la  patrie  , 
les  pauvres  par  l'espérance  du  butin.  Ainsi  l'armée  n'é- 
tait composée  que  de  volontaires.  Les  fexùmeSj  et  ceux 
que  leur  faiblesse  retenait  chez  eux,  fournissaient  les 
armes  et  participaient  ainsi  à  l'expédition.  La  plus 
grande  partie  de  leurs  troupes  consistait  en  cavalerie; 
leurs  fantassins  mêmes  étaient  à  cheval  dans  les  mar- 
ches; ou,  s'ils  n'allaient  pas  loin,  ils  montaient  en 
croupe  derrière  les  cavaliers.  L'armée  était  précédée 
d'une  troupe  d'Éthiopiens  à  pied  et  presque  nus,  qui 
n'avaient  pour  armes  que  l'arc  et  les  flèches.  Les  cava- 
liers étaient  armés  de  toutes  pièces  ;  leurs  baudriers, 
leurs  épées ,  la  bride  de  leurs  chevaux ,  garnis  d'argent. 
Us  faisaient  grand  cas  de  leurs  chevaux,  qu'ils  épar- 
gnaient aux  dépens  de  leur  propre  vie  ;  aussi  ne  s'en 
servaient-ils  pas  pour  porter  les  bagages  ;  leurs  bêtes 
de  charge  étaient  les  chameaux,  les  ânes,  les  mulets. 
Us  craignaient  surtout  les  combats  nocturnes;  et,  s'ils 
n'arrivaient  pas  le  soir  à  quelque  place  forte  oîi  ils 
pussent  passer  la  nuit,  ils  se  retranchaient  avec  soin 
pour  se  mettre  hors  d'insulte.  Leur  ordre  de  bataille 
et  de  marche  était  toujours  un  carré  long;  d'ailleurs 
ils  avaient  emprunté  des  Romains  les  évolutions  ainsi 
que  les  armes.  Ils  plaçaient  souvent  leurs  chameaux  au 
centre  de  l'armée.  Les  drapeaux  qu'ils  élevaient  sur  les 
bêtes  de  somme  faisaient  paraître  les  escadrons  'plus 
*  nombreux.  Dans  les  combats,  le  bruit  des  tambours  et 
des  cymbales  auquel  leurs  chevaux  étaient  accoutumés, 
achevait  de  mettre  en  désordre  ceux  de  l'ennemi,  déjà 


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(An  875.)  LIVRK  LXXI.  BASILE.  289 

.  effarouchés  par  la  vue  des  chameaux.  Ils  attendaient 
l'ennemi  de  pied  ferme,  sans  précipitation ,  sans  impa* 
iience  :  hardis  lorsqu'ils  espéraient  la  victoire ,  timides 
dans  le  désespoir,  plus  fermes  dans  la  résistance  qu'ar- 
dents à  l'attaque,  ils  ne  s'animaient  que  lorsqu'ils 
voyaient  l'ennemi  se  ralentir.  Les  rangs  serrés ,  bou- 
cliers contre  boucliers,  ils  essuyaient  les  premières  dé- 
charges, et  ne  s'ébranlaient  que  quand  l'ennemi  avait 
épuisé  ses  armes  de  jet.  Ils  ne  rompaient  leur  ordon- 
nance ni  lorsqu'ils  poursuivaient ,  ni  lorsqu'ils  étaient 
poursuivis;  mais,  si  elle  venait  une  fois  à  se  rompre,  ils 
étaient  incapables  de  se  rallier,  ni  de  se  remettre  en 
ordre.  Persuadés  que  tout  malheur  vient  de  Dieu ,  ils 
ne  s'opiniâ traient  pas  à  combattre  l'adversité,  et  s'a- 
bandonnaient aveuglément  à  la  mauvaise  fortune.  Ac- 
coutumés à  des  climats  brûlants,  ils  résistaient  aux 
plus  grandes  chaleurs ,  mais  ils  ne  supportaient  pas  le 
froid,  et  les  pluies  faisaient  sur  leurs  corps  le  même 
effet  que  sur  les  arcs ,  dont  elles  relâchent  les  cordes. 
Aussi  choisissaient-ils  l'été  pour  faire  la  guerre  ;  dans 
les  autres  saisons  ils  ne  faisaient  que  des  courses;  et 
c'est  surtout  en  hiver  que  les  Grecs  les  ont  vaincus^ 
en  les  surprenant  dans  des  embuscades ,  dans  des  dé- 
filés dont  on  leur  fermait  l'issue  par  des  abatis  d'ar- 
bres, dans  les  gorges  du  mont  Taurus ,  du  haut  duquel 
on  les  accablait  de  flèches  ou  de  grosses  pierres ,  qu'on 
roulait  sur  eux ,  lorsque  j  chargés  de  butin  ils  traver- 
saient ces  montagnes  pour  repasser  en  Syrie.  Quoiqu'ils 
eussent  alors  dégénéré  de  leur  première  valeur ,  Léon 
leur  rend  ce  témoignage  que ,  de  tous  les  ennemis  de 
l'Empire,  c'étaient  ceux  qui  entendaient  le  mieux  la 
guerre. 

Tome  Xm.  I9 


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ago  HISTOIRE   DU    BAS-EMPIRE.  (An  875.) 

L'activité  de  Basile  leur  enleva  cette  année  une  par- 
Succès  de  tie  de  leurs  conquêtes  de  Cilicie.  Ayant  passé  leSanis, 
ciiicie.  îl  niarcha  vers  Gueuse ,  près  de  laquelle  les  Sarrasins 
étaient  cantonnés  dans  d'épaisses  forêts.  L'empereur 
les  chassa  de  ce  poste  ^  en  détruisant  ce  bois  par  le  fer 
et  par  le  feu.  Arrivé  à  Calti polis  et  à  Padasieau  pied 
du  mont  Taurus ,  et  voyant  ses  soldats  rebutés  de  la 
difficulté  des  chemins,  il  descendit  de  cheval,  et,  mar- 
chaut  à  leur  tête  au  travers  des  rochers,  des  ravines^ 
et  des  terrains  les  plus  impraticables,  il  leur  rendit  le 
courage.  Son  exemple  semblait  leur  donner  des  ailes. 
Il  poussa  jusqu'à  Gerraânicie  les  différents  corps  de 
Sarrasins  qu'il  trouva  sur  son  passage,  et  les  obligea 
de  se  renfermer  dans  la  ville.  Pour  y  arriver,  il  fallait 
passer  une  rivière  assez  large  nommée  Paradisus;dle 
était  guéable;  mais  le  fond  en  était  glissant  et  plein  de 
vase.  Basile  la  fit  passer  pendant  la  nuit ,  et  y  étant  en- 
tré le  premier,  il  s'arrêta  au  milieu,  faisant  éclairer  le 
gué  par  un  grand  nombre  de  flambeaux.  Il  courait  lui- 
même  à  ceuK  qu'il  voyait  chanceler,  leur  donnait  la 
main,  relevait  ceux  qui  tombaient,  et  il  en  sauva  plu- 
sieurs qui  se  seraient  noyés  sans  son  secours.  Après 
avoix*  ruiné  tous  les  environs  de  Germanicie ,  trouvant 
'  la  place  trop  forte  et  trop  bien  pourvue ,  il  repassa 
l'Amanus  et  vint  assiéger  Adanes  sur  le  Sarus.  Les  ha* 
bttants,  résolus  dé  soutenir  te  siège ,  laissèrent  l'enipe* 
reur  brûler  et  détruire  tout  le  pays  d'alentour,  d'où 
ils  avaient  retiré  les  hommes ,  les  grains  et  les  trou- 
peaux, Basile  prit  Géron,  petite  ville  du  voisinage,  et 
il  en  abandonna  le  pillage  à  ses  soldats.  Les  ayant  ani- 
més par  cette  récompense,  il  espérait  s'emparer  bien- 
tôt d'Adanes,  et  fit  avancer  ses  machines.  Mais  w 


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(An  875.)  LIVRE    LXXI.  BASJLK.  2C)l 

gloire  en  était  réservée  à  son  petit-fils  Constantin  Por- 
phyrogénète.  La  vigoureuse  résistance  des  assiégés,  et 
plus  encore  les  froids  de  Tarrière-saison,  qui  incom- 
modaient ses  soldats,  campés  sur  un  terrain  humide  et 
exposé  aux  vents  glacés  de  l'Arménie,  le  firent  songer 
à  la  retraite. 

Comme  son  armée  chargée  de  butin  traînait  après     xxxin. 

11  1        >     1   •        1       1  •  •  «1  S^Q    retour. 

elle  une  grande  multitude  de  prisonniers,  qui  embar- 
rassaient la  marche  dans  des  chemins  rudes  et  roon- 
tueux ,  il  prit  un  parti  si  cruel ,  que ,  si  l'on  veut  ex- 
cuser ce  prince  sur  la  nécessité  de  la  guerre,  il  faut 
convenir  que  la  guerre  est  un  état  de  barbarie,  qui 
peut  changer  en  bêtes  féroces  les  naturels  les  plus  hu- 
mains. Il  fit  égorger  tous  les  prisonniers.  Prévoyant 
que  les  ennemis  se  posteraient  aux  détours  et  aux  dé- 
filés des  montagnes,  il  les  fit  prévenir  par  des  troupes 
légères,  qui,  se  plaçant  en  embuscade,  se  saisirent  de 
ceux  qui  venaient  pour  les  surprendre.  Le  Sarrasin 
Abdélomel ,  émir  de  ce  pays ,  qui  s'attendait  à  le  har- 
celer dans  ces  passages,  voyant  que  les  sages  précau- 
tions de  l'empereur  le  mettaient  hors  d'insulte,  lui  dé- 
puta pour  demander  la  paix,  et  pour  lui  offrir  le 
domaine  de  la  contrée  dont  il  était  maître.  L'empe^ 
reur  accepta  ses  offres,  et  tira  de  lui  de  bons  services 
CCHitre  les  autres  Sarrasins.  Après  avoir  traversé  le 
mont  Argée,  il  reçut  à  Césarée  d'heureuses  nouvelles 
de  son  autre  armée,  qui  lui  envoyait  quantité  de  dé- 
pouilles, et  grand  aombre  de  prisonniers  curdes.  Cette 
nation  barbare ,  qui  liabite  aujourd'hui  au-delà  du  Ti- 
gre, se  répandait  alors  en-deçà  de  l'Euphrate,  jusque 
dans  les. montagnes  de  Cilicie*  La  plupart  étaient  ma- 
nichéens et  alli^  des  pauli^iem.  Bmle  les  fit  encore 

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agîi  HISTOIRE   DU    BAS-EMPIRE.  (An  875.) 

massacrer.  Il  s'arrêta  quelques  jours  à  Midée  en  Phry- 
gie,  où,  après  avoir  distribué  des  récompenses  à  ceux 
qui  s'étaient  distingués  dans  le  cours  de  cette  campa- 
gne ,  il  sépara  ses  troupes  et  les  envoya  en  quartier 
d'hiver.  Il  revint  etisuite  à  Constantinople ,  où  il  fat 
reçu  avec  la  même  pompe  et  les  mêmes  honneurs  que 
,  trois  ans  auparavant. 
Ah  876.  Depuis  que  les  Sarrasins  étaient  maîtres  de  Tarse, 
l'Asie-Mineure  ne  pouvait  jouir  de  repos.  La  perte  du 


XXXIT. 

Victoire 


d'André-ie-  châtcau  de  Lule  et  de  tant  d'autres  places,  la  déser^- 
^^  **  lion  de  deux  émirs ,  le  ravage  de  toute  la  contrée  les 
mirent  en  fureur.  Dès  les  premiers  jours  du  printemps, 
joints  à  ceux  de  Malatia ,  dont  ils  n'étaient  sépares  que 
par  le  mont  Taurus,  ils  se  mettent  en  campagne,  et 
portent  le  fer  et  le  feu  jusqu'en  Bithynie.  André,  g^ou- 
verneur  de  l'Hellespont ,  ayant  rassemblé  les  troupes 
de  sa  province,  tombe  sur  eux  en  divers  endroits,  les 
taille  en  pièces  partout  où  il  les  rencontre,  et  les  pour- 
suit jusqu'à  Tarse.  Ce  guerrier  long-temps  inconnu  , 
parce  qu'il  n'avait  d'autre  recommandation  que  son 
mérite,  était  Scythe  de  naissance^  Basile  l'avait  enfin 
distingué;  et,  pour  récompense  de  se^  services,  H  lui 
avait  conféré  le  titre  de  patrice,  avec  le  commande- 
ment des  troupes  de  sa  garde  et  le  gouvernement  de 
l'Hellespont.  André  n'était  pas  loin  de  Tarse ,  lorsqu'il 
reçut  de  l'émir  de  cette  ville  une  lettre  conçue  en  ces 
termes  :  Je  pars  pour  vous  aller  joindre ,  et  pour 
voir  quel  secours  vous  pourrez  tirer  de  Marie  et  de 
son  fils  y  contre  une  armée  protégée  par  le  bras  de 
son  prophète.  Cette  bravade  impie  fit  frémir  d'hor- 
reur le  général  grec,  aussi  pieux  que  vaillant;  tenant 
la  lettre  à  la  main  et  levant  les  yeux  au  ciel,  il  s'écrie: 


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(An  &76.)  LIVRE    LXXI.  BASILE*  SIQ^ 

Fils  éternel  de  Dieu,  et  vous  mère  d*un  Dieu  fait 
hommey  vous  entendez  les  blasphèmes  de  ce  nou- 
veau  Sennachérih  ;  défendez  votre  peuple^  et  faites 
connaître  aux  nations  ce  que  peuvent  contre  vous 
les  plus  nombreuses  armées.  Il  encourage  ses  trou- 
pes,  et  y  plein  de  confiance  en  la  protection  du  ciel,  il 
approche  de  Tarse  ^  et  rencontre  les  Sarrasins  réunis 
près  du  fleuve  Podande.  Le  nombre  supérieur  des  en- 
nemis n'efiraie  point  ses  soldats:  ils  tombent  sur  eu^ 
avec  tant  d'ardeur,  qu'en  un  moment  cette  grande  ar- 
mée est  dissipée;  l'émir  est  tué;  le  reste  est  taillé  ea 
pièces;  l'arrière-garde  seule,  plus  proche  de  la  ville  » 
eut  le  temps  de  s'y  sauver.  André  perdit  peu  de  sol- 
dats. Après  leur  avoir  donné  la  sépulture,  il  fit  met- 
tre en  un  monceau  les  cadavres  des  ennemis ,  dont  les 
osseixients  accumulés  furent  long^temps  pour  les  Sar- 
rasins de  Tarse  un  triste  monument  de  leur  défaite. 
IjC  vainqueur  qui  n'attribuait  ce  succès  qu'à  Dieu  seul , 
aussi  modeste  après  la  victoire  qu'avant  la  bataille , 
ne  se  crut  pas  assez  fort  pour  attaquer  la  ville  de  Tarse  ; 
et,  dans  la  crainte  de  déshonorer  les  armes  de  l'em- 
pereur par  une  entreprise  téméraire,  il  reprît  le  che* 
min  de  sa  province  avec  un  grand  butin. 

Un  homme  élevé  par  son  mérite  ne  pouvait  raan-    ^  '"7* 


XXXV. 


quer  d'envieux.  On  fit  entendre  à  l'empereur  qu'André     stypiôte 

1  •        •     i»T-i         •  VI       »         •  >\    1     •  V  battu  parle* 

trahissait  I  Empire  ;  qu  il  n  avait  tenu  qu  a  luLde  pren-  sarrasins. 

dre  Tarse,  s'il  eût  voulu  profiter  de  l'ardeur  de  ses  Cedr.  p. 

troupes  et  de  l'effroi  des  ennemis.  Quelque  éclairé  que  Zon.  1. 1, 
fût  Basile,  il  n'était  pas  à  l'abrî  des  surprises  :  il  se  Leoip.474. 

laissa  tromper  par  les  fanfaronnades  d'un  courtisan  Porph!  p. 

nommé  Stypiôte,  qui,  soutenu  par  une  puissante  ca-  Georg.'pl 

baie,  se  vantait  de  le  rendre  en  peu  de  jours  maître  ^**" 


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294  UISTOinji    1)0    BAS-EMPIRE.  (An  877.) 

de  Tarse,  et  de  chasser  les  Sarfasins  de  rAsîe-Mîueure. 
Ébloui  de  ces  brillantes  promesses,  Tempereur  le  mît 
à  la  tête  de  ses  troupes.  Mais  Stypîote  justifia  bientôt 
la  sage  circonspection  d'André.  Enflé  de  toute  la  pré- 
somption  que   donne  l'ignorance,   il  s'approche  de 
Tarse,  et  campe  dans  une  plaii^  ouverte,  sans  prendre 
aucune   des   précautions    qui   sont    d'usage   dans  la 
guerre.  Les  Barbares,  profitant  de  son  imprudence, 
tombent  pendant  la  nuit  sur  son  camp  par  plusieurs 
endroits,  en  faisant  un  grand  bruit  de  cymbales  et  de 
trompettes.  Les  Grecs  se  réveillant  avec  effroi ,  sans 
armes,  à  demi-nus,  ne  songent  qu'à  se  sauver;  ils  se 
pressent,  ils  s'écrasent  les  uns  les  autres.  Les  Sarra- 
sins n'ont  que  la  peine  de  les  massacrer.  Stypiote  est 
le  premier  à  fuir;   et,  abandonnant   son  année  a  la 
merci  des  ennemis,  il  ne  rapporte  à  ses  partisans  que 
la  honte  de  l'avoir  vanté,  et  à  Fempereur  celle  de  les 
avoir  écoutés. 
XXX  1.  Les  intrigues  des  Grecs  avec  Adalgise,  duc  de  Béné- 

TEmpire.  en  vcnt,  avaient  empêché  l'empereur  Louis  de  chasser  les 
E  istlt-B    Sarrasins  d'Italie.  Dès  que  ce  prince  eut  quitté  le  pays, 

joaiinisvm.  les  Sarrasins  sortirent  de  Tarente,  et  ravag^èrent  le  ter- 

Erchempert,     ,      ^  ,  . 

art.  38.     ritoirc  de  Bari.  Une  autre   troupe  venue  d'Afrique  et 

Giaon.   hiat.    *-..,/  ^  .  9\    t»  1 

Nap.i.7,c.i.  de  Sicile  étendit  ses  courses  jusqua  Rome;  et  le  pape 
tiq.  Ben""  Jean  VIII  fut  obligé  de  traiter  avec  ces  infidèles ,  et 

^^'"aia!''^  de  leur  payer  par  an  vingt-cinq  mille  marcs  d'argent. 
Comme  il  ne  recevait  aucun  secours  des  princes  fran- 
çais, il  eut  recours  aux  Grecs.  Grégoire,  envoyé  par 
Basile  avec  une  flotte,  pour  conserver  ce  qui  restait 
à  l'Empire  en  Italie ,  faisait  sa  résidence  à  Otrante.  Le 
pape  le  pria  d'envoyer  dix  vaisseaux  pour  défendre  les 
terres  de  Saint-Pierre.  On  voit ,  par  une  lettre  du  pape 


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(An  877.)  LIVRE    LXXl.  BASILE.  ^qS 

à  Basile,  que  l'empereur  avait  satisfait  à  cette  de-^ 
mande.  Cependant ,  Grégoire  employait  ses  forces  au 
recouvrement  de  la  Calabfe,  Les  habitants  de  Bari  » 
se  voyant  abandonnés  des  Français  et  des  Bénéventins, 
se  donnèrent  à  lui,  et  cette  ville,  alors  considérable, 
revint  ainsi  à  r£mpiffe  grée.  Il  y  avait,  daps  Bari,  uoç 
&ction  attachée  aux  Français  ;  Grégoire  avait  promis 
par  serment  de  ne  faire  aucun  mal  à  ceu^  qui  en 
étaient  les  chefs;  il  ne  tint  pas  sa  parole;  il  fit  empri-^ 
sonner  les  premiers  de  la  ville,  dont  il  envoya  quelques^ 
uns  à  Constantinople.  JLe  trouble  régnait  dan$  cette 
malheureuse  contrée  ;  amis,  ennemis,  tout  était  con* 
fondu;  on  était  forcé  d'attaquer  ceux,  qu'on  aurait 
voulu  défendre.  Les  habitants  de  Naples  ,  d'Amalfi, 
de  Saleme,  qui  dépendaient  de  l'Empire  grec,  n'étant 
pas  en  état  de  résister  aux  Sarrasins ,  furent  contraints 
de  joindra  leurs  armes  à  oes  Barbares,  pour  ravager 
le  territoire  de  Rome.  Jean  marcha  contre  Naples 
avec  des  troupes ,  ^  ce  fut  la  première  fois  qu'on  \}t 
un  pape  à  la  tête  d'une  armée.  Il  (Jétacha  de  la  ligue  le 
prince  de  Salerne  ,  qui  attaqua  les  troupes  de  Naples, 
et  fît  prisonniers  vingt-deux  Napolitains  ,  auxquels  Je 
pape  fit  trancher  la  tête.  Athanase,  évêque  de  Naples, 
frère  du  duc  Sergius,  voulant  gagner  les  bonnes  grâ- 
ces du  pape,  se  saisit  de  son  frère;  après  lui  avoir 
crevé  les  yeux,  il  le  mit  entre  les  mains  du  pape,  et 
se  fit  duc,  sans  cesser  d'être  évêque.  Mais  bientôt  ce 
prélat,  sans  foi  comme  sans  religion,  se  ligua  lui- 
même  avec  les  Sarrasins ,  et  devint  le  fléau  de  toutes 
ces  provinces  ainsi  que  de  la  ville  de  B.ome,  dont  il 
pilla  le  territoire  de  concert  avec  les  infidèles.  Le  pape, 
trop  faible  pour  le  combattre ,  eut  recours  aux  armes 


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1196  HISTOIRE   DU    BilS-£MPIRH.  (An  877.) 

naturelles  du  saint-slëge  ;  il  excommunia  Athanase  et 
les  Napolitains  ;  et  ce  fut  encore  la  première  fois  que 
les  papes  lancèrent  lanathéme contre  les  peuples,  pour 
punir  les  crimes  de  leurs  princes.  On  voit ,  par  ces 
événements 9  que  les  ducs  de  cette  contrée,  quoique 
sujets  de  l'Empire  grec,  se  comportaient  en  souve- 
rains; qu'ils  n'attendaient  ni  la  domination  ni  même 
l'agrément  de  l'empereur  pour  prendre  le  titre  de 
ducs;  qu'ils  ne  consultaient  que  leur  volonté  pour 
faire  la  paix  et  la  guerre  ;  et  que ,  selon  leur  caprice  ou 
leurs  intérêts,  ils  ne  faisaient  pas  difficulté  de  contrac- 
ter des  alliances  avec  les  ennemis  de  l'Empire.  Leur 
éloignement  et  la  faiblesse  des  empereurs  grecs  les 
mettaient  k  couvert  du  châtiment.  La  principauté  de 
Bénévent  était,  dans  ce  même  temps,  le  théâtre  de 
plusieurs  révolutions  funestes.  Gaïder  usa  du  secours 
des  Sarrasins  pour  s'en  rendre  maître.  Il  tua  son  on- 
cle Adalgise,  chassa  les  premiers  de  la  ville,  et  fut 
chassé  lui-même  trois  ans  après.  On  le  livra  aux  Fran- 
çais, qui  le  mirent  en  prison.  Il  s'échappa,  et  s'enfuit  à 
Bari,  occupée  alors  par  les  Grecs,  qui  l'envoyèrent  à 
Constantinople.  Basile  le  traita  honorablement  ,  le 
combla  de  biens,  et  lui  donna  la  ville  d'Oria  en  Cala- 
bre,  d'où  il  ne  cessa  d'inquiéter  les  Bénëventins.  Ra- 
delchis,  fils  d' Adalgise,  qui  avait  chassé  Gsuder,  ne 
conserva  la  principauté  que  quatre  ans.  Les  Bénéven- 
tins  l'en  dépouillèrent  pour  en  revêtir  spn  frère  Aïon, 
dont  nous  parlerons  sous  le  règne  suivant. 

Jamais  pape  n'avait  fait  un  aussi  fréquent  usage  de 
eXe^Rome  l'excommunication  que  Jean  YIII.  Toujours  armé  dece 

etConstanti-  /»       1  «i  1      /•  •      •..  j  'm.  1 

nopieau    foudre,  il  Ic  taisait  gronder  sans  cesse,  soit  pour  les 
Bulgare*,    aff^î^es  spirituclles,  soit  même  pour  les  intérêts  tem- 


XXXVXI. 

Con  lesta  tion 


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(An  877.)  LIVRE   LXXf.  BASILE.  297 

porels  de  TÉglise  romaine,  et ,  à  force  de  la  lancer,  il  EpîstJoann. 
en  emoussa  la  pointe.  La  sainteté  d'Ignace  n'empêcha  ccdr "'isg. 
pas    qu'il   n'en  fût  souvent  menacé.  Ce  pape  n'avait  p^**^** 
point  d'égard  à  la  décision  de  la  conférence  qui  avait       *'<>»     ' 
suivi  le  huitième  concile,  par  laquelle  la  juridiction  «d  an.  868. 
sur  1  église  de  Bulgarie  avait  ete  attribuée  au  patnar-^      865. 
cfae  de  Constantinople.  Comme  le  parti  de  Photius ,  fam! B^g^p. 
toujours  très-puissant ,  excitait  de   grands  troubles,  Fieur"*hMt. 
l'empereur  pria  le  pape  d'envoyer  des  légats  pour  ré-  J^t-^^ï-lJa', 
tablir  la  paix.  Paul,  évêque  d'Ancône,  et  Eugène,  évè-      ■'^'•^• 
que  d'Ostie ,  partirent  de  Rome  avec  des  lettres  dans 
lesquelles  le  pape  se  plaignait  beaucoup  d'Ignace,  et 
le  menaçait  d'excommunication,  s'il  ne  retirait  les  évê- 
ques  et  les  clercs  qu'il  avait  envoyés  en  Bulgarie,  et 
que  le  pape  déclarait  excommuniés.  Il  demandait  du 
secours  à  Basile  contre  Lambert,  duc  de  Spolète, 
qui  s'était  emparé   de  Rome.  Mais   Basile,   occupé 
d'autres  affaires ,  n'entra  point  dans  cette  querelle;  ce 
qui  obligea  le  pape  d'aller  en  France,   implore^  la 
protection  de  Louis-le-Bègqe  et  des   autres  princes 
française  Je  vais  rassembler  ici  les  suites  de  cette  con- 
testation entre  le  siège  de  Rome  et  celui  de  Constan- 
tinople, au  sujet  des  Bulgares.  Le  pape,  ne  recevant 
aucune  satisfaction  ni  de  Basile  ni  de  Photius,  qui  ve- 
nait de  succéder  à  Ignace,  comme  je  le  dirai  bientôt , 
écrivit  à  Bogoris ,  roi  des  Bulgares ,  pour  l'engager  à 
se  soumettre   immédiatement  au  siège  de  Rome.  Afin 
de  le  détourner  de  l'obédience  des  Grecs,  il  les  repré- 
sentait comme  sujets  à  se  livrer  tous  les  jours  à  de 
nouvelles  erreurs;  il  le  rappelait  au  sein  de  TÉglise 
romaine,  la  mère  de  tous  les  fidèles;  et,  dans  l'ardeur 
de  son  zèle,  il  protestait  qu'il  chérissait  les  Bulgares, 


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^9^  fllSTOIBE   DU    BAS-EMPIRE.  (As  S77.] 

jusqu'à  se  sacrifier  lui-même  pour  leur  saluL  II  semble 
que  ses  légats  avaient  choqué  les  Bulgares  en  quelque 
chose ,  puisqu'il  promettait  de  corriger  leur  bute.  Il 
sollicitait  les  seigneurs  bulgares  de  s'employer  auprès 
de  leur  roi,  et  leur  voulait  persuader  que  leur  Uauoa 
avec  les  Grecs  était  pernicieuse  à  leur  âme.  Les 
Dalmates  ayant  aussi  pris  le  parti  de  s'attacher  à  \% 
glise  de  Constantinople,  il  les  exhorta,  par  une  lettre, 
à  revenir  à  l'Église  de  Rome^  et  à  lui  envoyer  Farche- 
vêque  qu'ils  auraient  élu  canoniquement,  pour  rece- 
voir de  lui  le  pallùim  ;  il  leur  promettait  toute  sorte 
de  biens  en  cette  vie  comme  e8  l'autre,  s'ils  lui  obéis- 
saient; autrement,  il  les  déclarait  excommuniés.  Après 
le  rétablissement  de  Photius  sur  le  siège  de  CoDstanti- 
nople,  on  voit,  par  les  lettres  du  pape,  qu'une  des 
conditions  qu'il  exige  avec  le  plus  d'ardeur  pour  y 
donner  son  cons^itement^  c'est  que  Photius  renonce 
à  toute  juridiction  sur  la  Bulgarie  ;  il  veut  que  les 
évêques  et  les  autres  ecclésiastiques  ordonnés  par  le 
patriarche  de  ConstanttnopFe,  sortent  du  pays;  il  me- 
nace Photius  de  l'excommunication  s'il  leur  donne  le 
pallium ,  s'il  y  fart  quelque  ordination  ,  s'il  commufli- 
que  avec  eux  avant  qu'ils  obéissent.  Il  parait  qu'en 
cette  occasion ,  l'empereur,  étonné  du  grand  bruit  que 
faisait  le  saint-père,  usa  de  quelque  condescendance. 
Dans  une  lettre  datée  du  i3  août  880,  le  pape  remer- 
cie Basile  d'avoir  rendu  justice  à  l'Église  romaine,  au 
sujet  de  la  Bulgarie.  Cependant,  il  parait  aussi  que  les 
Bulgares  demeurèrent  attachés  à  l'Église  de  Constanli- 
nople  :  car,  dans  une  lettre  postérieure ,  Jean  rep 


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(Aa  877.)  tIVRE    LXXr.  BASILE.  ^99 

encore  à  Bogoris  d'avoir  abanddtiné  Rome ,  il  l'exhorte 
à  revenir  au  bercail,  et  le  menace  encore  d'excom- 
munication. 

Ce  prince,  que  le  pape  ti*aitait  avec  si  peu  de  me-  s][?^^^"^ 
nagement,  était  cependant  un  modèle  de  sainteté.  Il  Bogoris. 
menait ,  depuis  son  baptême ,  la  vie  la  plus  austère. 
Revêtu  pendant  le  jour  de  ses  ornements  royaux,  il 
se  couvrait  d'un  sac  pendant  la  nuit;  et,  se  rendant 
secrètement  à  Téglise,  il  passait  des  heures  en  prières, 
prosterné  sur  un  cilice.  Long-temps  avant  sa  mort,  il 
remit  sa  couronne  à  son  fils  aine,  et  se  retira  dans  un  , 

monastère,  ne  s'occupant  que  d'aumônes  et  de  prières. 
Mais  apprenant  que  son  fils  se  livrait  à  la  débauche, 
qu'il  accablait  d'impôts  ses  sujets,  et  qu'il  voulait 
même  les  rappeler  à  l'idolâtrie,  il  quitta  Fhabit  reli- 
gieux ,  reprit  le  casque  et  la  cuirasse  avec  les  marques 
de  la  royauté,  rassembla  ceux  de  ses  sujets  qui  crai- 
gnaient Dieu,  et  se  mit  à  la  poursuite  de  son  fils  qui 
avait  pris  la  fuite.  Il  le  prit,  lui  fit  crever  les  yeux ,  et 
le  condamna  à  une  prison  perpétuelle.  Ensuite ,  dans 
une  assemblée  générale  de  la  nation ,  il  déclara  roi 
son  second  fils,  le  menaçant  de  le  traiter  comme  son 
frère,  s'il  tenait  la  même  conduite.  Alors,  ce  héros 
chrétien,  comblé  des  vœux,  honoré  des  regrets  de  tous 
ses  sujets  ,  se  renferma  dans  le  monastère,  où  il  acheva 
saintement  ses  jours  en  896.  , 

Constantinople  vit  alors  une  révolution,  qui   fait     xxxrx. 

A  X  1  •         1  •  i>    -11  11  Photins 

connaître  a  quel  pomt  les  pnnces,  d  ailleurs  les  plus    succède  à 
sages,  sont  capables  de  se  laisser  séduire  par  des  cour-      s^*^** 
tisans  attentifs  à  étudier  leurs  faiblesses.  Icniace  mou-      viii. 

s       -r^t  o  •  I  Nicet.  in 

rut,  et,  trois  jours  après,  Photius  fut  mis  en  sa  place       ign. 
par  le  même  empereur  qui,  convaincu  de  ses  fourbe-  zon.'r«vV 


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] 


300  HISTOIRJ2   OU    BAS-EMPIR£.  (An  877.) 

168.      ries,  l'avait  honteusement  fait  descendre  du  siège  pa- 
Manaastp?  trîarcal  dix  ans  auparavant.  Tja  retraite  du  monastère 
ciyc!^i97,  n'avait  pas  éteint  lambition de  Photius.  Celte  passiou  , 
ïo€i*^**i      V^^  ^*^  ^^°®  '®  cloître ,  et  qui  se  nourrit  même  de 
p^^A  *'     j^ncs  et  d'abstinences,  lui  tenait  les  yeux  ouverts  sur 
271-       la  conduite  d'Ignace.  Comme  ce  saint  prélat  ne  don- 
457.     '  naît  point  de  prise  à  sa  malignité,  il  prit  le  parti  d'une 
^46.  ^    soumission  apparente ,  et  tâcha  d'engager  Ignace  à  le 
Scré7i.*53i  reconnaître  pour  évoque.  Mais  il  ne  put  l'obtenir.  Il 
■"^Qrieng*^*  se  tourna  donc  du  côté  de  la  cour,  et  gagna  par  ses 
^^248  aA*'  souplesses    les  ministres  et  les  seigneurs.  Le  cham* 
bellan  Nicétas  vantait  sa  vertu ,  et  le  bibliothécaire 
Théophane  son  grand  savoir.  Il  connaissait  le  faible  du 
prince.  Basile,  qui  avait  Tâme  assez  vigoureuse  pour 
avoir  pris  un  grand  essor,  ne  l'avait  pas  asse;  ferme 
ni  assez  philosophe  pour  regarder  sans  honte  et  sans 
trouble  la  bassesse  d'où  il  s'était  élevé.  Il  ne  rougissait 
pas  de  sa  première  pauvreté,  il  s'en   faisait   même 
honneur;  mais  il  aurait  bien  souhaité  trouver  à  sa  fa- 
mille une  origine  illustre.  Photius  le  sentit,  et  ce  fut 
alors  qu'il  composa  cette  généalogie,  qui  faisait  de  la 
famille  de  Basile  un  rejeton  des  Arsacides.  L'empereur, 
sans  doute  le  seul  de  l'Empire  qui  fût  la  dupe  de  cette 
grossière  imposture,  lui  sut  gré  d'une  si  flatteuse  dé- 
couverte; il  oublia  tous  les   crimes  de.  Photius,   lui 
donna  un  asile  dans  le  palais  de  Magnaure,  l'admit 
dans  ses 'conseils,  lui  confia  l'éducation  de  ses  fils,  et 
lui  laissa  reprendre  les  fonctions  épiscopales  en  dépit 
des  canons  et  d'Ignace ,  qu'on  n'écoutait  plus.    . 
Ah  878.         Ce  prélat ,  qui  est  honoré  comme  saint  dans  toute 
Con  îuite    l'Église,  mourut  le  a3  octobre  877,  et  le  26  du  même 
^*ré:rbîi"*  "*^*^  Photius  remonta  sur  le  siège  de  Constantinople. 

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(An  878.)  LIVRE    LXXI,  BASILE.  3oi 

Il  mit  en  oeuvre  et  la  séduction  et  la  terreur  pour  sur- 
monter tous  les  obstacles.  CalonAies ,  dépositions, 
tourments,  la  mort  même,  rien  ne  fut  épargné  pour 
ramener  à  lui  les  évéques  opposants.  Léon  Catocèle^ 
son  beau-frère,  qu'il  avait  fait  par  son  crédit  capi- 
taine de  la  garde  impériale,  homme  cruel,  le  servait 
dans  ses  fureurs.  Au  contraire,  les  présents^  les  pro- 
motions, les  translations  avantageuses  d'un  évéché  à 
un  autre,  attiraient  à  lui  les  âmes  intéressées.  Son 
dessein  était  de  casser  tout  ce  qu'avait  fait  Ignace,  de 
rétablir  ceux  qu'il  avait  déposés,  de  déposer  ceux  qu'il 
avait  ordonnés;  et,  si  Tempereur  n'eût  mis  uii  frein  à 
son  audace,  il  allait  changer  la  face  de  toute  l'Église 
d'Orient.  Il  était  secondé  dans  ses  intrigues  par  un 
moine  aussi  fourbe  que  hardi  et  déterminé,  nommé 
Théodore  Santabaren.  C'était  un  scélérat  qui  avait 
mérité  la  mort  dès  sa  première  jeunesse,  et  que  le  cé- 
sar Bardas  avait  sauvé  du  supplice,  et  renfermé  dans  le 
monastère  de  Stude.  Hypocrite  accompli,  il  en  était 
devenu  abbé  par  la  faveur  de  Photius ,  dont  il  était 
si  zélé  partisan,  qu'il  avait  obligé  les  moines  de  dé- 
serter le  monastère.  Après  la  déposition  de  son  patriar- 
che, il  fut  chassé  lui-même.  Mais  Photius  rentré  en 
grâce  le  remit  en  place,  et  le  vanta  à  l'empereur  comme 
un  saint,  un  prodige  de  savoir,  un  thaumaturge  et 
même  un  prophète.  Basile,  trompé  par  ces  éloges,  le  fit 
venir  à  la  cour,  et  l'honora  de  sa  confiance.  Dès  le  vivant 
d'Ignace,  Photius  l'avait  ordonné  métropolitain  de  Pa- 
-tras;  mais  comme  cette  ville  avait  un  évêque  légitime, 
cette  prétendue  ordination  n'était  qu'un  sujet  de.raille- 
rie;  on  appelait  Santabaren  l'évêque  H^ Aphantopolis  y 
cest-k-àiredelavilleinmible.  Photius,  de  nouveau  pa- 


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3oa  IIISTOIRK   DIT   BAS-EMPIRE.  (An  878.) 

triarche,  l'envoya  au  pape  Jean  en  qualité  de  son  apo- 
crisiaire,  lui  demAder  sa  communion.  Il  prenait  dans 
sa  lettre  le  ton  de  la  plus  profonde  humilité,  gémissant 
de  la  violence  qu'on  lui  avait  faite  pour  le  rétablir  sur 
le  siège  de  Constant inople.  Cette  lettre  était  signée  de 
plusieurs  métropolitains  ^  dont  il  avait  surpris  les  û- 
gnatures.  Basile  appuya  cette  démarche  par  une  am- 
bassade. Les  deux  légats  que  le  pape  avait  envoyés 
pour  l'af&ire  de  Bulgarie,  et  qui  n'étaient  arrivés  à 
Constantinople  qu'après  la  mort  d'Ignace  ,  d'abord  op- 
posés à  Photius ,  mais  gagnés  ensuite  par  ses  présents 
et  intimidés  par  les  menaces  de  l'empereur, se  livrèrent 
sans  réserve  au  patriarche.  Ils  contribuèrent  même  à 
séduire  plusieurs  évêques,  en  leur  faisant  entendre  que 
le  pape  les  avait  envoyés  pour  déposer  Ignace^  et  ré* 
tablir  Photius. 
Av  879.  Le  pape,  pressé  alors  par  les  Sarrasins,  n'avait  rien 
Le^pipe  P^"^  ^  cœur  que  d'obtenir  quelque  secours  de  Basile. 
reconnaît   jj  Qg  ^  rendit  douc  pas  difiScile  aux  instances  ùui 

Photiaspoar  •^  ^  * 

patriarche,  lui  étaient  fai^  en  faveur  de  Photius  ;  et ,  malgré  les 
exemples  de  Nicolas  et  d'Hadrien  ses  prédécesseurs,  il 
le  reconnut  pour  patriarche  légitime,  leva  les  censures 
fulminées  contre  lui  et  contre  ses  adhérents,  et  dé- 
clara excommuniés  tous  ceux  qui,  après  trois  mouitions, 
refuseraient  de  communiquer  avec  lui.  Mais  il  accor- 
dait cette  faveur  comme  une  grâce  et  une  indulgence, 
et  il  exigeait  qu'à  l'avenir  on  n'élût  plus  de  laïc  pour 
remplir  la  place  de  patriarche,  que  Photius  ne  dispu- 
tât point  au  siège  de  Rome  la  juridiction  sur  la  Bul- 
garie,  et  qu'il  demandât  pardon  dans  un  concik^ 
A  ces  conditions,  il  déclarait  nulle  la  sentence  portée 
contre  Photius  dans  les  deux  conciles  tenus  à  Rome 


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(An  879.)  LîVftE   LXXI.  BASILE.  3o3 

et  à  Constantinople^  SOUS  le  pape  Hadrien.  Pierre, 
prêtre  cardinal ,  fut  chargé  des  lettre^  pour  Basile  et 
pour  Photius;  il  eut  ordre  d'assister  avec  les  deux  au- 
tres légats  au  concile  qui  serait  tenu  pour  la  réunion. 

L'arrivée  du  nouveau  légat  combla  les  vœux  du  pa*      ^cui. 

1  .  •       1  •  i»/i     1  Concile  de 

triarciie,  qui  se  promettait  bien  d  éluder  par  son  Constanti- 
adresse  les  conditions  exigées  par  le  pontife  romain,  farear  ^de 
En  effet  le  concile,  composé  de  trois  cent  quatre-  ^^^^^* 
Yingt<*trois  évéques,  se  gouverna  entièrement  au  gré  de 
Photius.  Les  légats  ne  lui  donnèrent  que  des  éloges. 
Ils  firent  lire  une  lettre  du  pape  que  Photius  avait 
traduite  en  grec ,  et  dont  il  avait  eu  soin  de  retrancher 
l'ordre  de  demander  pardon  devant  le  concile,  et  l'ab- 
solution que  le  pape  lui  donnait,  et  qui  supposait  qu'il 
avait  été  excommunié.  A  la  place  de  ces  articles,  trop 
humiliants  pour  son  orgueil,  il  avait  inséré  des  louan- 
ges de  sa  personne  ;  et  les  légats ,  apparemment  corrom- 
pus, entendirent  cette  lecture  sans  réclamation.  Tout 
fut  approuvé ,  excepté  la  défense  de  nommer  des  laïcs 
au  patriarcat ,  et  la  demande  du  pape  sur  la  Bulga- 
rie. Pour  le  premier  point,  on  le  combattit  par  des 
raisons  et  des  exemples  ;  pour  le  second ,  on  en  renvoya 
la  décision  à  l'empereur,  dont  les  droits  étaient  indé- 
pendants du  pape  et  du  concile.  Photius  fit  à  son  gré 
l'histoire  de  sa  première  élection,  de  sa  déposition 
injuste,  de  la  persécution  qu'il  avait  essuyée,  de  sa 
modération  à  refuser  son  rétablissement  tant  qîi'IgM(!^ 
avait  vécu,  de  sa  prétendue  réconciliation  avec  lui, 
enfin  de  la  répugnance  qu'il  avait  témoignée  à  remon- 
ter sur  le  siège  de  Constantinople,  vacant  par  la  mort 
de  ce  prélat,  et  toute  rassemblée  applaudit  à  cette 
^té  de  mensonges.  Métrophane,  évéquede  Smyrne, 


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3o4  HISTOIRE   DU   BAS-EMWRE.  (An  879.) 

qui  refusait  de  se  trouver  au  concile,  fut  séparé  de 
la  communion  ecclésiastique.  On  déclara  aussi  excom- 
muniés tous  ceux  qui  ne  se  réunissaient  pas  à  Photius. 
L'empereur  assista  à  la  sixième  session ,  dans  laquelle 
on  ^adopta  la  profession  de  foi  de  Nicée,  avec  ana- 
théme  contre  ceux  qui  oseraient  y  rien  ajouter  ou  en 
rien  soustraire;  ce  qui  tombait  sur  les  Églises  d'Occi- 
dent, où  Ion  admettait  l'addition  Filioque.  L'empe- 
reur souscrivit  les  actes  avec  ses  trois  fils  Léon, 
Alexandre  et  Etienne  ;  car  Constantin,  l'aîné,  était  déjà 
mort.  Le  concile,  commencé  au  mois  de  novembre  879, 
tint  sa  septième  et  dernière  session  le  i3  mars  880;  et, 
dans  les  acclamations  qui  le  terminèrent ,  Photius  (iit 
nommé  avant  le  pape.  Les  actes  sont  suivis  d'uue  let- 
tre du  pape  à  Photius  ;  il  y  rejette  l'addition  Filioque; 
proteste  qu'elle  n'a  pas  été  reçue  par  l'Église  de  Rome, 
et  condamne  en  termes  très-durs  les  premiers  qui  l'ont 
introduite;  mais  il  veut  cependant  qu'on  use  de  ména- 
gement avec  les  Églises  qui  l'ont  admise,  et  qu'on  tâ- 
che de  les  ramener  par  la  douceur.  C'est  ce  concile 
que  les  Grecs  schismatiques  honorent  du  nom  dç  hui- 
tième concile  général,  ne  reconnaissant  point  pour  ca- 
nonique celui  qui  avait  condamné  Photius  en  869.  11 
y  a  eu  lieu  de  soupçonner  que  les  actes,  qui  sont  de- 
meurés dans  l'obscurité  jusqu'au  commencement  de  ce 
siècle ,  ont  été  altérés  par  Photius ,  le  plus  hardi  comme 
Ife^fij^^jaabile  faussaire  qui  fût  jamais. 
xi.ni.  Je  vai^bindre  ici  ce  qui  reste  à  dire  de  Photius 

évë"nemen*ts  jusqu'à  la  f^j  du  règuc  de  Basile.  Le  pa^pe  écrivit  à 
qui  concer-  gg^^jj^  p^^^j,  j^  louer  dc  SOU  zèlc ,  ct  à  Photius  pour  le 
féliciter.  Mai^  en  même  temps  il  se  plaignit  avec  dou- 
ceur que  le  patriarche  se  fut  dispensé  de  la  condition 


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nent 
Photius. 


(An  »79.)  LIVRE   LXXI.  BASILE^  3o5 

qui  lui  était  iùiposee  de.  demander  pardon  en  présence 
du  concile.  Se  défiant  apparemment  de  ses  légats ,  il 
ajoutait  que,  s'ils  avaient  en  quelque  point  contrevenu 
à  ses  ordt^,  il  n'y  donnait  point  son  consentement. 
L'évêque  Marin,  porteur  de  ces  lettres,  et  qui  succéda 
bientôt  après  au  pape  Jflan,  n'ayant  pas  voulu  consen- 
tir à  l'abrogation  du  huitième  concile  œcuménique,  en- 
courut l'indignation  de  Basile  anime  par  Photius,  et 
fut  un  mois  en  prison.  Selon  quelques  auteurs,  les  lé-* 
gats  furent  désavoués  à  leur  retour, et  soumis  à  la  cen- 
sure. C'est  un  point  que  je  laisse  à  discuter  aux  histo- 
riens de  l'Église.  Jean  étant  mort  en  88t2 ,  Marin  et 
Hadrien  III,  qui  lui  succédèrent,  ne  tinrent  le  saint- 
siége  l'un  que  quatorze,  l'autre  que  seize  mois.  L'un 
et  l'autre,  ne  regardant  pas  leur  prédécesseur  comme 
infaillible,  condamnèrent  Photius.  Basile  irrité  écrivit 
au  pape  Hadrien  une  lettre  injurieuse ,  qui  ne  fut  ren^ 
due  qu'à  son  successeur  Etienne  Y.  Le  nouveau  pape 
y  répondit  avec  vigueur,  mais  sans  perdre  le  respect 
dû  à  la  puissance  temporelle,  dont  il  traçait  les  borg- 
nes, si  étroites  et  si  faciles  à  confondre,  qui  la  sépa*- 
rent  de  la  juridiction  spirituelle.  Il  condamnait  de 
nouveau  Photius,  et  le  menaçait  d'anathème.  Toujours 
ex.posé  aux  courses  des  Sarrasins ,  il  demandait  du  se- 
cours. Mais  cette  lettre  d'Etienne  ne  parvint  à  Con- 
stantinople  qu'après  la  mort  de  Basile.  Photius,  sâtis- 
j&it  des  services  de  Santabaren  dans  sa  négociation 
auprès  du  pape  Jean,  qu'il  avait  trompé,  chassa  Tévê* 
que  d'Euchaïtes  en  Cappadoce ,  pour  y  placer  cet  im- 
posteur. Il  le  déclara  protothrone ,  c'est-à-dire  premier 
évêque  entre  les  suftragants  de  Constantinople ,  et  le 

Tome  XilL  20 


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3o6  HISTOIRE   DU  BAS-£imAE.  (ju  $^) 

mit  en  possession  de  plusieurs  sièges  épiscopaux,  d'où 
il  chassa  lés  titulaires. 
U.IT.  Quelque  temps  avant  le  concile^  Basile  rmi  perdu 

c^MtoatiL.  «ott  fik  aîné  Constantin.  Ce  jeune  princ^nnait  de 
Nicet.  in    graockes  espérances.  C'était  celui  qui  ressemblait  le 
Ced^'p.     plus  à  son  père  par  ses  belles  qualités,  et  qui  en  était 
zon-^r»,  p.  ^®  P'"*  chéri.  Il  l'avait  accompagné  dans  ses  expedi- 
Giclî        tiens.  Hermengarde,  fille  de  l'empereur  Louis,  loi 
396-       avait  été  promise  ;  mais  ce  projet  de  mariage  n'eut 
Porph.  p.   point  d'exécution  :  cette  princesse  épousa  le  comte  Bo- 
Sym.p.457.  son,  qui  devint  roi  de  Provence.  La  mort  d'un  fils  si 
54^'.  ^'   cher  affligea  sensiblement  l'empereur.  Photius,  toujours 
iTmoi^iTs;  flatteur,  mit  le  jeune  prince  au  nombre  des  saints, 
D^camie,   'Comme  si  le  ciel  lui  eût  donné  parole  de  se  prêtera 
fam.  byz.  p.  ^^  complaisauccs.  Son  ami  Santaharen ,  homme  à  mi- 
.  radies,  en  fit  un  pour  sa  part,  qui  fut  joué  avec  beau- 
coup d'adresse.  Il  promit  à  l'empereur  de  lui  faire  voir 
son  fils.  Pendant  que  Basile  était  à  la  chasse,  il  vit 
.sortir  de  l'épaisseur  du  bois  un  cavalier,  vêtu  d^uae 
étoffe  d'or,  qui  vint  à  toute  bride  l'embrasser,  et  dis- 
parut. Il  avait  tous  les  traits  du  prince  défunt  Latefr 
dresse  est  crédule  ;  l'empereur  ne  douta  pas  que  ce  se 
fut  son  fils;  il  en  eut  une  CKtrême  joie;  et,  plein d'aJ* 
miration  pour  Santaharen ,  qui  avait  tant  de  crédit  dans 
l'autre  monde  9  il  en  fit  son  confident  le  plus  intima 
C'était  son  oracle  dans  toutes  ses  entreprises.  Peisuade 
de  la  sainteté  de  son  fils ,  il  fit  bâtir  au  lieu  même  de 
l'apparition  un  monastère  sous  le  nom  de  Saint-CoQ- 
stantin. 
xLv.  Mais  la  passion  dominante  de  Basile ,  celle  qui  cou- 

^ntf  de   vre  toutes  ses  fautes,  et  qui  mérite  qu'on  lui  pardonne 
i'égârd  de   toutes  ses  faiblesses,  c'est  l'amour  qu'il  avait. pour  ses 


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(An  879.)  LIVRE   LXXÏ.  BASILE.  3o7 

sujets.  Jamais  il  n'écouta  les  avis  qui  pouvaient  trou-  m»  sojet». 
hier  le  repos  de  ses  peuples;  jamais  il  ne  consentit  à  59^/591. 
prendre  sur  les  besoins  des  familles  de  quoi  remplir  p^pu*'p 
ceux  de  son  trésor.  Un  jour  qu'il  paraissait  embar*  ^^VaiT 
rassé  à  trouver  de  quoi  fournir  à  des  dépenses  néces- 
saires, le  trésorier  général  lui  conseilla  de  faire  une 
nouvelle  imposition  de  tailles:  Il  y  avait,  disait-il, 
quantité  de  gens  qui  ne  payaient  pas  à  proportion  de 
leurs  biens  :  en  augmentant  la  contribution  des  riches, 
sans  diminuer  celle  des  autres,  qui  n'étaient  pas  foulés 
au-delà  de  leurs  forces ,  il  verrait  Croître  ses  revenus 
sans  iujustice.  Il  feignit  d'approuver  cet  avis,  et  or- 
donna au  trésorier  de  choisir  des  personnes  capables 
d'une  opération  aussi  difficile  que  celle  d'évaluer  au 
juste  les  fortunes  de  ses  sujets,  et  de  fixer  avec  une 
équité  irréprochable  la  quotité  de  leur  contribution. 
li  demandait  en  eux  la  probité  la  plus  désintéressée, 
la  connaissance  la  plus  étendue,  l'activité  la  plus  in- 
fatigable. Quand  vous  aurez  trouvé,  lui  dit-il,  des 
hommes  de  ce  caractère ,  vous  me  les  ferez  cou" 
naître.  Le  trésorier,  accoutumé  à  manier  la  matière 
délicate  des  finances  un  peu  plus  brusquement  que  le 
prince,  lui  eut  bientôt  fourni  une  liste  de  commis- 
saires. Basile  ayant  lu  leurs  noms,  lui  fit  des  reproches 
d'un  choix  si  peu  judicieux;  et  comme  le  trésorier  lui 
répondait  qu'il  n'en  connaissait  pas  de  plus  capables: 
«  Cette  affaire  est  si  importante,  lui  repartit  Tempe- 
«  reur,  que  s'il  était  possible,  je  voudrais  m'en  charger 
«  moi-même.  C'est  au  père  de  familJe  de  régler  la  for- 
te tune  de  ses  enfants  :  mais,  comme  ce  travail  ne  peut 
«se  concilier  avec  tant  de  devoirs  indispensables,  je. 
a  suis  contraint  de  le  confier  à  d'autres  mains.  Je  ne 


20. 


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1 


3o8  HISTOIRE   DU   BAS-EMPIRE.  (An  879.) 

a  connais  dans  tout  l'Empire  que  deux  hommes  qui 
«  puissent  me  remplacer  pour  cet  objet.  C'est  J'assu-^ 
«  rance  que^  me  donnent  leur  âge,  leur  expérieiu:;e ^ 
a  lenr  exacte  intégrité,  qui  ne  s'est  jamais  démentie 
«  dans  le  cours  d'une  longue  vie  et  d'un  grand  nombre 
«  d'emplois.  Ailez  les  trouver  de  ma  part,  et  instrui- 
te sez-les  de  mes  intentions.  ^  L'histoire  ne  nomme  pas 
ces  deux  hommes,  qui  mériteraient  mieux  d'être  con- 
nus que  la  plupart  des  souverains.  Flattés  du  choix  de 
l'empereur,  mais  trop  judicieux  pour  se  charger  d'an 
emploi  au-dessus  de  leurs  forces,  ils  remercièrent  le 
prince  de  la  confiance  dont  il  les  honorait  ;  et^,  en  même 
temps,  ils  le  supplièrent  de  ne  pas  accabler  leur  vieil- 
lesse d'un  fardeau  qu'elle  n'était  plus  en  état  de  sou^ 
tenir.  Basile  reçut  leur  excuse,  et  ne  voulut  plus  en- 
tendre parler  de  cette  reforme.  Aimant  mieux,  disait-il, 
perdre  une  partie  de  ce  qui  lui  était  dû,  que  de  s'en 
rapporter  à  des  âmes  intéressées,  qui,  sous  prétexte  de 
remédier  à  des  injustices,  en  commettraient  de  plus 
grandes.  Pendant  tout  le  temps  de  son  règne  il  n'a*^ 
jouta  rien  aux  impôts,  et  la  douceur  de  la  perception 
valait  presque  une  exemption  entière.  Au  lieu  de  faire 
mourir  de  faim  ses  sujets,  il  diminua  la  dépense  de  sa 
table.  Les  frais  s'en  devaient  prendre  sur  le  produit  des 
terres  annexées  à  deux  palais  qu'il  fit  bâtir;  il  ne  per- 
mit pas  d'y  appliquer  aucune  autre  somme,  et  il  en  fit 
une  loi  perpétuelle  pour  ses  successeurs. 
xLvi.  Sa  vigilance  à  réprimer  l'avidité  de  ses  officiers  le 

dëciaverte?  rendait  clicr  à  ses  peuples.  Mais  ces  hommes  injustes», 
Cedr.p.573.  qu'il  contenait,  regardaient  comme  un  vol  fait  à  leur 
^\és^^'  avarice  tout  ce  qu'il  les  empêchait  de  ravir.  Ils  con- 
^^const^^'  jurèrent  contre  sa  vie.  A  leur  tête  était  le  capitaine 


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(An  S79.)  LIVRE   LXXI.    '         BASILE.*  SoQ 

des  IcanateSy  nommé  Curcuas,  homme  très-riche ,  mais   Porph.  p. 
très  mécontent  de  n'avoir  pas  la  liherté  de  le  devenir  sym!p*46o, 
davantage.  Un  misérable  reclus,  qui  se  donnait  pour    Getrg'p. 
prophète,  lui  promettait  Fempire.  Il  engagea  dans  ce       ^^** 
complot  jusqu'à   soixante-six   tant  sénateurs  qu'offi- 
ciers de  l'armée  et  du  palais.  L'empereur,  averti  de 
cette  trame  criminelle  par  un  des  conjurés  qui  n'a- 
vait pu  vaincre  ses  remords ,  les  fil  arrêter-et  les  ju- 
gea  lui-même   au  milieu  du  cirque,  en  présence  du 
peuple  assemblé.  Sa  clémence  naturelle  leur  épargna 
le  supplice,  auquel  l'indignation  publique  les  condam- 
nait. Il  se  contenta  de  faire  crever  les  yeux  à  Cur- 
cuas,  et  fouetter  les  autres.  Le  jour  de  l'Annoncia- 
tion ,  qu'ils  avaient  marqué  pour  l'exécution  de  leur 
forfait,  il  assista  lui-même  à  une  procession  solen- 
nelle, où  ils  marchaient  nus  et  chargés  de  chaînes. 
Lorsqu'ils  furent  arrivés  à  la  grande  place,  avant  que 
d'entrer  dans  l'église  de  Sainte-Sophie,  il  fit  lire  leur 
sentence,  par  laquelle  ils  étaient  bannis  à  perpétuité, 
avec  confiscation  de  leurs  biens. 

Cependant  les  Sarrasins  de  Syrie  voyant  Basile  oc-    Ah  880. 
cupé  de  conciles  et  d'affaires  civiles,  crurent  l'occasion  jjJJ^^^^'^^^ 
favorable  pour  étendre  leurs  conquêtes  dans  l'Asie,   de»Sarra- 
mineure.  Ils  rassemblèrent  tout  ce  qu'ils  avaient  de     orient, 
vaisseaux  en  Egypte  et  en  Phénicie.;  mais  avant  que  ^^""^^^^^ 
de  se  mettre  en  mer,  ils  envoyèrent  un  espion  à  Con-  z<>n-  »•  «.  p- 
stantinople,  pour  s'instruire  de  l'état  des  forces  de^eo,  p.  47a. 
lEmpire.  Basile,  que  les  soms  deimterieur  nempe-    Porph.  p. 
chaient  pas  d'avoir  l'œil  sur  ce  qui  se  passait  au-de-  sîm.'p!456. 
hors,  informé  de  leurs  premiers  mouvements,  avait  de   ^^^i^' 
son  coté  équipé  une  grande  flotte,  et,  pour  prévenir  ^«i^a^g^ 
les  désordres  que  les  soldats  et  les  matelots  pouvaient 


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3lO  lilSTOIRE   DU    BAS-EMPIRE.  (Àa  880) 

causer,  s'ils  demeuraient  dans  l'inaction,  il  les  occu- 
pait aux  ouvrages  qui  restaient  à  faire  pour  achever 
cette  magnifique  église  dont  j'ai  parlé,  et  dont  Pho- 
tius  fit  la  dédicace  le  i^''  de  mai  de  cette  année  880. 
Tout  était  prêt  pour  le  départ.  A  cette  nouvelle,  le» 
Sarrasins  se  tinrent  dans  leurs  ports.  Le  calife  MoU- 
med  se  contenta  de  faire  partir  Abdalla  avec  quatre 
mille  cavaliers,  pour  pilier  la  Cilicie  et  la  Cappadoce. 
Pendant  que  ce  général  faisait  le  ravage ,  les  garnisons 
des  deux  provinces  s'étant  réunies,  marchent  contre 
lui  et  l'enveloppent.  Les  Musulmans ,  surpris  dans  un 
terrain  creux,  entre  des  rochers  inaccessibles,  voyant 
toutes  les  issues  fermées,  se  déterminent  à  périr, plu- 
tôt que  de  se  rendre.  Us  mettent  pied  à  terre  et  cou- 
pent les  jarrets  de  leurs  chevaux ,  pour  en  ôter  Tusage 
aux  ennemis.  Cependant  cinq  cents  d'entre  eux,  plus 
hardis  que  les  autres ,  forment  un  peloton^  et  le  sabre 
à  la  main  s'ouvrent  un  passage  au  travers  de  TariDée 
grecque.  Le  reste  fut  taillé  en  pièces.  Le  général  fat 
pris  et  conduit  à  l'empereur, 
s^^^ii  ^^  Sarrasins  étaient  depuis  cinquante  ans  maîtres 
piveparies  <Je  la  Slcilc.  Mais  Syracuse  avait  été  renrise  par  b 
Cedr. p. 585,  Gérées,  pcut-êtrc  dans  l'expédition  d'Alexandre  Muselé. 
Zoii.^tfi,p.  ^^  ^^'^'  y  a  de  certain,  c'est  qu'elle  appartenait  aux 
^    ï7»-       Grecs  sous  le  rèffne  de  Basile.  Les  mouvements  des 

Léo,  p.  47a.  ^  ."      .       ^  ,  1    r« 

CoMt.     Sarrasins  de  Syrie  piquèrent  d'émulation  ceux  de  Car- 

190,  X9X,    thage.  Ils  vinrent  avec  un  grand  nombre  de  vaisseaux 

S3rm^p.456.  assiéger  Syracuse.  Dès  que  l'empereur  en  eut  recula 

Xi.  ^'    nouvelle,  il  fit  partir  Hadrien ,  grand-amiral  de  !'&»• 

^55^56^    P*^  >  *^^^  1^  flotte  qui  avait  été  préparée  contre  te 

not°ln°f^n  Sarrasins  de  Syrie.  Les  vents  étant  contraires,  Hadrien 

p,87ct5eqq.  eut  bcaucoup  de  peine  à  gagner  les  côtes  du  Pélo(K>* 


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(Au  SSo.)  LIVRE   LXXI.  B4S1LE.  3ri 

nèse;  et  son  indolence  naturelle,  que  le  mauvais  temps 

semblait  excuser,  le  tint  pendiant  près  de  deux  mois 

dans  le  port  de  Monexnbasie;  c'était  l'anGi^nne  Ëpt^ 

daure,  surnommée  limera,  en  Laconie.  Cependant  les 

Sarrasins  pressaient   vivement  le  siège  de  Syraou«e, 

ponr  s^en  emparer  avant  l'arrivée  du  secours.  Cette 

ville  était  mal  pourvue  de  vivres,  et^  sans  le  courage  de 

Jean  Patrice,  qui  en  était  gouverneur,  elle  n'eût  pu 

faire  une  longue  résistance.  Ce  guerrier  intrépide  fit 

plusieurs  sorties  trèsMfneurtrières;  il  attaqua  même  plu* 

sieurs  fois  la  flotte  des  Sairasins,  et  leur  brûla  queU 

ques  vaisseaux.  Les  Sarrasins,  de  leur  côté,  firent  usage 

de  toutes  les  machines  k^ventées  pour  la  destruction 

de&  villes^  La  famine  se  fit  bientôt  sentir  aux  assiégés 

avec  toutes  ses  horreurs.  Deux  onees  de  pain  valaient 

une  pièce  d'or  (treize  à  quatorze  francs  de  notre  mon-r 

naie  y  Les  Sarrasins  étant  maîtres  des  deux  ports,  la 

pèche  ne  pouvait  plus  suppléer  à  la  disette.  Après  avoir 

consommé  tout  ce  que  la  i*9ge  de  la  faim  peut  changer 

en  nourriture,  après  avoir  broyé  les  os  des  animaux,  dont 

ils  pétrissaient  une  sorte  de  pain  qui  donuait  la  mort,  on 

vit  des  mères  déyorer  leurs  propres  enfants.  La  peste,^ 

les  pjbs  affreuses  maladies,  et  enfin  une  mort  cruelle  em^ 

porflRent  tous  les  jours  une  partie  de  ces  malheureux 

habitants.  Les  catapultes  abattirent  une  tour  et  un  large 

pan  de  muraille.  Mais  le«  assiégés,  presque  sans  force,^ 

en  trouvèrent  assez  dans  leur  courage  pour  défendre 

la  brèche,  pendant  vingt  jours  et  autant  de  nuits,  contre 

des  assauts  continuels.  Il  n'y  avait  point  d'habitant 

qui  n'eût  perdu  quelqu'un  de  ses  membres;  et  c'était 

un  spectacle  déplorable ,  de  voir  ces  cadavres  presque 

san&  vie  tramer  sur  la  brèche  les  x^^\^  de  leurs  corps^ 


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3l2  HISTOIRE   DU    BAS'EMPIRE.  (in  S8o.) 

pour  servir.de  muraille  à  leur  patrie.  Enfin,  le  ai  mai, 
la  ville  fut  forcée,  et  ceux  qui  avaient  survécu  à  tant 
de  maux  éprouvèrent  toute  la  rage  des  Sarrasins.  Jean 
Patrice  eut  la  tête  tranchée,  et,  aussi  intrépide  au  mi^ 
lima  du  supplice  qu'il  l'avait  été  dans  les  combats,  il 
sei  fit  '  admirer  des  ennemis  mêmes.  Soixante**dix  des 
principaux  dé  Syracuse  furent  attroupés  ensemble,  et 
tués  à  coups  de  pierjes  et  de  bâtons.  Nicolas  de  Tarse , 
vaillant  guerrier  qui,  pendant  le  siège,  avait  insulté 
Mahomet,  fut  écorché  vif;  les  Sarrasins  furieux  lui 
mangèrent  le  cœur.  Ils  détruisirent  les  fortifications^ 
et  brûlèrent  la  ville. 
PaSiôn  Hadrien  se  préparait  enfin  à  sortir  du  port  de  Mo- 
d^Hadrien.  ncmbasic,  lorsqu'il  apprit  que  les  Sarrasins  étaient  dan» 
Syracuse^  Il  a  presque  toujous  fallu  du  miracle  pour 
illustrer  les  grands  événements.  Cette  nouvelle  n'eut 
besoin  que  d'une  nuit  pour  traverser  cent  cinquante 
lieues  de  mer.  Hadrien,  disent  les  auteurs  de  ce  temps- 
là,  esa  fut  informé  dès  le  lendemain  par  un  berger,  et 
ce  berger  l'avait  appris  dans  une  assemblée  de  démons , 
qui  «'en  réjouissaient  dans  la  forêt  d'Hélos,  à  quelques 
lieues  de  Monembasie.  Le  général  voulut  s'en  assurer 
par  lui-même,  et,  s'étant  transporté  sur  le  lieu  ^  en 
entendit  le  rapport  de  ses  propres  oreilles.  Mal^^  un 
si  grave  témoignage,  il  n'en  demeura  persuadé  que  dix 
jours  après ,  sur  le  récit  de  quelques  soldats  échappés 
du  carnage.  Cette  fable,  débitée  partons  les  historiens 
contemporains ,  ne  prouve  que  la  sotte  crédulité  de  ce 
siècle  d'ignorance.  Hadrien, aussi  prompt  à  retournera 
Constantinople  qu'il  avait  été  lent  à  s'en  éloigner,  ap- 
prit en  arrivant'que  l'empereur  était  dans  une  grande 
colère,  et  qu'il  attribuait  à  sa  négligence  un  événen>ent 


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(An  88a)  LIVRE   tXXI.  BASILE.  3l3 

si  funeste.  Saisi  de  crainte ,  il  se  réfugia  dans  Téglise 
de  Sainte-Sophie.  Basile,  sans  égard  au  privilège  du 
lien  ni  aux  instances  du  patriarche ,  le  fit  tirer  de  cet 
asile.  Mais,  écoutant  enfin  sa  clémence  naturelle,  il  se 
contenta  de  dépouiller  Hadrien  de  toutes  ses  charges,  et 
de  le  condamner  au  bannissement. 

La  prise  d'une  ville  si  renommée  excita  Témulatîon    An  sSi. 
de  toutes  les  dynasties  de  Sarrasins.  C'était  à  qui  pren-  j^^^^\^^ 
drait  la  cognée  pour  abattre  quelqu'une  des  principales     chaici». 
branches  de  l'Empire.  Esman,  émir  de  Tarse,  partit  ^^%i't^^ 
avec  trente  gros  navires,  et  alla  mettre  le  siège  devant  ^®°*  *',]*' ^ 
Chalcis  sur  l'Ëuripe.  Les  plus   gros   vaisseaux  de  ce    p^^^** 
temps-là  ne  contenaient  que  deux  cent  soixante  hom-       1B4. 
Yiies.  OËniate,  gouverneur  de  Grèce  ^  rassembla  par 
ordre  de  l'empereur  toutes  les  troupes  de  la  province , 
et  mit  la  place  en  état  de  défense.  La  résistance  fut 
aussi  vive  que  l'attaque.  Les  Barbares  faisaient  pleuvoir 
sur  les  murailles  une  grêle  perpétuelle  de  flèches  et 
de  pierres.  Les  habitants  mêlés  avec  les  soldats ,  dont 
ils  ne  se  distinguaient  que  par  une  audace  plus  déter- 
minée, accablaient  les  assiégeants,  et  repoussaient  tous 
leurs  assauts.  Ils  osaient  même  sortir  du  port ,  et ,  à  la 
faveur  du  vent,  ils  brûlèrent  une  grande  partie  de  la 
flotte  sarrasine  par  le  moyen  du  feu  grégeois.  Les  en- 
nemis perdaient  courage ,  lorsque  l'émir,  persuadé  que 
l'argent  et  la  volupté  sont  les  deux  plus  puissants  res" 
sorts  pour  remuer  les  âmes  communes ,  fit  placer  à  la 
tête  du  camp  un  bouclier  rempli  d'or,  et  crier  par  un 
héraut  :  Ceci  est  la  récompense  de  celui  qui  montera 
le  premier  sur  le  mur;  il  aura  de  plus  cent  jeunes 
captives  à  son  choix.  Les  assiégés  qui,  du  haut  de  leurs 
murailles,  voyaient  briller  cet  or,  en  devinèrent  IHisage^ 


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1 


3l4  HISTOIBB   DU    BA.S-EMPIRS.  (An  «»i.) 

et  s'encourageant  mutuellement^  ils  ouvrent  leurs  por* 

tes',  et  fondent  comme  un  torrent  sur  les  Barbares.  Ils 

enfoncent,  renversent ,  massacrent  tout  ce  qui  résiste; 

lemir  est  tué,  les  autres  fuient  vers  leurs  navires,  quik 

ne  regagnent  qu'après  un  grand  carnage.  Us  lèvent 

l'ancre  aussitôt,  et  ne  reportent  à  Tarse  que  de  k  honte 

et  des  blessures* 

Aw.  8Sa.        Les  Sarrasins  de  Crète  firent  d'abord  pkis  de  mal; 

Les&lrra-  mais  l'issue  dc  leur  expédition  ne  fut  pas  plus  heu* 

*b^ttu»  s'i^'**  reuse,  Saël,  leur  émir,  fit  partir  un  capitaine  vaillant 

ced^  58i  ^^  expérimenté,  nommé  Phot,  avec  vingt -sept  vais- 

58a.     *  seaux ,  et  un  plus  grand  nombre  de  brisantins  et  de  ga- 

Zo».  t.  a,  p.    IX  X        .  '^  ^  r,  1 

X7I,  leres  a  emquante  rames.  Cette  flotte  ravagea  toutes  les 
Poi^h!  p.  îles  de  l'Archipel ,  traversa  lUellespont  et  pénétra  jus- 
i85,  i86.  q^».^  j»j|^  ^^  Proconèse  dans  la  Propontide.  Elle  me- 
naçait Constantinople,  Nicétas,  amiral  de  l'Empire^ 
alla  au-devant  avec  toute  la  flotte  impériale,  et  les  attei- 
gnit sur  la  cote  de  ta  Propontide  vis*à-vis  de  Cardie. 
Il  leur  livra  aussitôt  bataille;  la  défaite  des  Sarrasins, 
fut  complète;  le  feu  grégeois  leur  brûla  vingt  vaisseaux, 
dont  tout  l'équipage  périt  par  le  feu ,  par  le  fer,  ou  dans 
les  eaux.  Le  reste  prit  la  fuite  et  regagna  l'île  de  Crète. 

^^^  *         Ce  mauvais  succès  ne  découragea  pas  les  vaincos. 

Autre      Phot  se  remît  en  mer  avec  une  nouvelle  flotte;  mais 

défaite  des 

Cretois,  au  lieu  de  ^'approcher  de  Constautinople ,  il  se  tint  sur 
les  cotes  du  Péloponèse,  pillant  et  ravageant  le  con- 
tinent et  les  îles.  Nicétas  alla  de  nouveau  le  cher- 
cher, et  aborda  en  peu  de  jours  au  port  de  Cenchree. 
Il  apprit  que  la  flotte  Cretoise  était  de  l'autre  côté 
du  Péloponèse,  et  qu'elle  désolait  la  cote  àeJdéthone^ 
de  Patras  et  de  Corinthe.  Il  lui  aurait  fellu  plusieurs 
jours  pour  doubler  le  cap  de  Malée  et  atteindre  la  flotte 


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(An  883)  LIVA£   LXXI*  BÀ$ILC.  3j5 

ennemie,  qui  aurait  eu  le  temps  de  le  prévenir  et  de 
se  retirer  dans  ses  ports.  Il  prit  sur-le-c})amp  un  parti 
plus  faardi,  mais  plus  court;  ce  fut  de  faire  transporta 
ses  vaisseaux  d'^ne  mer  à  l'autre,  au  travers  de  l'isthme^ 
large  de  près  de  deux  lieues;  ce  qui  n'était  pas  sans 
exemple'.  Cette  entreprise,  poussée  avec  autant  d'ar* 
deur  que  d'industrie ,  fut  achevée  dans  l'espace  d'une 
nuit, et,  le  lendemain  matiti ,  les  vaisseaux  crétois  ré-« 
pandu$  sur  le  golfe  de  Corinthe  virent  avec  étonne- 
meot  la  flotte  grecque  courir  sur  eux  à  pleines  voiles. 
Saisis  d'effroi  et  vaincus  d'avance ,  ils  n'ont  pas  même 
assez  de  force  pour  prendre  la  fuite.  Dispersés  çà  et  là, 
sans  faire  de  résistance,  ils  sont  les  uns  brûlés,  les  au* 
très  coulés  à  fond.  Quelques  soldats  et  matelots  gagnent 
les  rivages, mais  ils  sont  bientôt  enveloppés;  et,  plus 
malheureux  que  leurs  camarades  qui  avaient  péri  dans 
les  feux  ou  'dans  les  eaux ,  ils  ne  sont  épargnés  que 
pour  subir  une  mort  plus  cruelle.  L'impitoyable  Nice- 
tas ,  plus  féroce  que  les  Sarrasins ,  se  faisait  un  jeu  des 
plus  affreux  supplices.  Il  exerçait  principalement  sa 
barbarie  sur  les  chrétiens  renégats  :  aux  uns,  il  faisait 
détacher  des  lanières  de  leur  peau  depuis  la  tête  jus- 
qu'aux talons  ;  il  en  faisait  entièrement  écorcher  d'autres, 
•disant  par  une  horrible  plaisanterie,  qu'il  ne  leur  en- 
levait que  leur  baptême,  auquel  ils  avaient  renoncé;  et 
ce  tigre,  indigne  lui-même  du  nom  de  chrétien,  en  fai« 
sait  élever  d'autres  fort  haut  avec  des  poulies,  pour  les 
précipiter  ensuite  dans  des  chaudières  de  poix  bouil- 
lante, sorte  de  baptême,  disait-il  en  riant,  seul  con- 
venable à  ces  apostats.  C'était  le  moyen  de  rendre  sa 
victoire  détestable  à  ceux  mêmes  qui  l'avaient  aidé  k 
vaincre. 


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3l6  HfSTOfR      DD    BAS-EMPIRE.  (An  88^.) 

Ah  884.         Il  parait  que  Basile  n'approuva  pas  ces  cruautés. 

Artifice  de  ^^^^  "^  succès  de  Nicétas,  il  ne  l'employa  plus,  et 

Basile  pour  ^  Taqnée  suivante  on  voit  Nasar  commander  la  flotte 

sauver  la 

rie  à  des    dc  l'Empire.  Les  Sarrasins  d'Afrique  avaient  mis  en 

déserteurs.  .  .  /t  1»       . 

Cedrp58a  ™®''  soixautc  grands  vaisseaux,  et  cette  flotte  formi- 
583,  584.    dable,  après  avoir  ravagé  les  îles  qui  se^  trouvaient  sur 
17a-       son  passafi[e,  vint  attaouer  celles  de  Zante  et  de  Gépha- 
papae.      lonic.  JNasar,  avec  un  bon  nombre  de  vaisseaux  de  toute 
CiînsJ  *  grandeur,  fit  diligence  pour  les  aller  combattre,  et,  se- 
ise'Tt^ieqq.  coudé  d'uD  vent  favorable,  il  se  rendit  en  peu  de  jours 
5i^'^54^*   au  port  de  Méthone ,  aujourd'hui  Modoiv,  en  Morée.  Un 
^v*'i  P-   contre-temps  fâcheux  l'empêcha  de  les  attaquer  sur- 
le-champ.  Un  grand  nombre  de  ses  rameurs  avaient  dé> 
serté  dans  ^e  voyage ,  et ,  s'étant  cachés  dans  les  îles  où 
l'on  abordait,  ils  étaient  retournés  à  Constantinople, 
en  sorte  que  la  flotte  restait  dégarnie.  Il  en  informa 
l'empereur.  Basile  les  fit  chercher  et  enfermer  dans  les 
prisons,  oîi  ils  n'attendaient  que  le  châtiment  de  leur 
lâcheté  criminelle.  Mais  ce  bon  prince,  avare  du  sang 
de  ses  sujets,  voulut  épargner  leur  vie,  sans  perdre 
le  fruit  d'un  exemple  nécessaire.  Le  préfet  de  Constan- 
tinople, seul  confident  du  secret  de  sa  cléii\ence,  choi- 
sit dans  les  prisons   trente  malfaiteurs  condamnés  a 
mort ,  qu'il  fit  tellement  défigurer ,  qu'ils  étaient  mé- 
connaissables :  on  les  conduisit  à  l'hippodrome,  comme 
déserteurs  de  la  flotte,  avec  défense  d'approcher  d'eux 
ni  de  leur  parler  sous  peine  de  la  vie;  et,  après  les 
avoir  flagellés,  on  les  embarqua  pour  les  conduire  a 
Méthone,  où  ils  furent  pendus  à  la  vue  de  toute  Tar- 
mée,  sans   être  reconnus   de   personne.   Cette 
punition  contint  le  reste  de   la  flotte.  Tous,  so 
et  matelots,  apprirent  à  craindre  leurs  commandants 


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LIV. 

Les  Sarra** 


<AjiM4.)  LIVKE   IrXXI.  BASILE.  Sl^ 

plus  que  les  ennemis,  et  ils  demandèrent  à  combattre. 

Cependant  les  Sarrasins,  voyant  l'inaction  de  la  flotte 
impériale,  se  persuadaient  que  c'était  par  lâcheté  ^nsblttus 
qu  elle  n'osait  sortir  du  port.  Ils  n'étaient  donc  nulle-  ^"  ^^^' 
ment  sur  leurs  gardes,  et  ne  songeaient  qu'à  piller  les 
îles  voisines.  Jean,  gouverneur  du  Péloponèse,  avait 
déjà  remplacé  les  déserteurs,  surtout  par  des  Mardajites, 
issus  de  ceux  qu'on  avait  transportés  hors  de  leur*pays 
cent  ans  auparavant.  Nasar  profite  de  la  sécurité  des 
Sarrasins  ;  il  va  de  nuit  attaquer  leurs  vaisseaux  dis- 
persés, les  coule  à  fond,  ou  les  brûle  les  uns  après  If  s 
autres.  Il  en  enlève  une  partie,  qu'il  amène  à  Méthone, 
et  dont  il  fait  offrande  à  l'église  de  cette  ville.  Il  aban- 
donne à  ses  soldats  et  les  prisonniers  et  la  charge  des 
vaisseaux.  Il  informe  l'empereur  de  ce  qu'il  a  fait,  et 
lui  demande  en  même  temps  ce  qu'il  doit  foire.  L'em- 
pereur le  loue  de  sa  conduite ,  et  lui  ordonne  d'aller 
attaquer  le.s  Sarrasins  en  Sicile  et  en  Italie. 

Un  si  glorieux  succès  redoublait  le  courage  de  ses  tv. 
troupes.  Il  débarque  à  Panorme,  ravage  les  campagnes,  en  siciu  et 
force  et  pille  les  villes  soumises  aux  Sarrasins ,  enlève 
grand  nombre  de  navires  chargés  de  riches  marchan- 
dises. Il  passe  de  là  en  Italie,  où  l'empereur  avait  une 
armée  de  terre  commandée  par  Procope ,  grand-maître 
de  la  garde-robe  impériale.  Ce  général,  accompagné 
de  Léon  surnommé  Apostype,  qui  commandait  un 
corps  de  Thraces  et  de  Macédoniens ,  avait  déjà  rem- 
porté sur  les  Sarrasins  plusieurs  avantages.  Nasar  s'é- 
tant  approché  de  la  Calabre  pour  le  seconder  dans  ses 
opérations,  rencontra  au  cap  des  Colonnes,  près  de 
Crotone,  une  nouvelle  flofle  de  Sarrasins  qui  arrivait 
d'Afrique.  Il  l'attaqua  et  la  détruisit.  Ayant  ensuite  fait 


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3l8  HlStOIRB   DU   BâS-EMPinjB.  (An  884^ 

une  descente  sur  la  côte ,  il  joignit  ses  troupes  à  celles 
deProcope,  chassa  les  Sarrasins  de  presque  toutes  les 
places  de  la  Calabre  et  de  TApulie,  où  il  mit  garnison. 
Il  se  retnbarqua  ensuite  couver!  de  gloire ,  et  sa  flotte, 
chargée  de  dépouilles  et  de  prisonniers ,  fut  reçue  à 
Coustantinople  avec  les  acclamations  que  méritait  une 
campagne  si  brillante.  , 
LTi.  Procope  qui  était  resté  en  Italie  avec  les  troupes  de 

'^^n.  *  terre,  eut  d'abord  d'heureux  succès.  Les  Sarrasins 
fuyaient  de  toutes  parts,  et  lltalie,  depuis  long-temps 
la  proie  de  ces  infidèles,  se  flattait  d'en  être  bientôt 
délivrée.  Ija  perfidie  de  Léoù,  jaloux  de  la  gloire  de 
Procope,  ruina  ces  espérances.  Les  Sarrasins  ayant 
fait  un  dernier  effort,  présentèrent  la  bataille,  et  Pro- 
cope ne  la  refusa  pas.  Il  partagea  son  armée  en  deux 
corps  ;  il  se  mit  à  la  tête  de  laile  gauche ,  composée 
des  Esclavons  auxiliaires  et  des  autres  troupes  levées 
en  Occident  ;  JLéon  commandait  les  Thraces  et  les  Ma- 
cédoniens ,  qui  formaient  l'aile  droite.  Lorsqu'on  en 
fut  venu  aux  mains ,  Léon  chargea  les  escadrons  en* 
nemis  avec  tant  de  furie ,  que  la  victoire  ne  balança 
pas  de  son  côté.  Procope  avait  avec  lui  la  plus  faible 
partie  de  l'armée,  qu'il  espérait  encourager  par  sa  pré- 
sence et  par  son  exemple  :  mais,  malgré  sa  valeur,  il 
fallut  céder  aux  Sarrasins.  Léon,  déjà  vainqueur  de 
ceux  qu'il  avait  en  têt€,  le  laissa  battre  sans  lui  don- 
ner aucun  secours  ;  en  sorte  que  ce  brave  capitaine, 
entraîné  par  les  fuyards ,  tomba  de  cheval ,  et  fut  tue 
dans  la  déroute.  Les  deux  armées  s'étant  ainsi  sépa- 
rées,  Léon,  pour  couvrir  sa  trahison  par  quelque  ope- 
ration  brillante,  recueille  ce  qui  restait  des  troupes  de 
Procope,  et,  les  ayant  jointes  aux  siennes,  il  attaqua 


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(inSSi.)  LIVRÉ  IXXU  BASILE.  SlQ 

Tairente,  la  prend  d'assaut,  l'abandonne  au  pillage,  et 
met  tous  les  habitants  dans  les  fers.  Glorieux  d'une  si 
importante  conquête,  il  retourne  à  Gonstantinople, 
rapportant  à  l'empereur  de  riches  dépouilles.  Basile  ne 
se  laissa  pas  éblouir;  sur  le  soupçon  qu'il  conçut  de  la 
conduite  de  Léon ,  il  lui  ôta  le  commandement ,  et  lui 
donna  ordre  de  se  retirer  à  Cotyée ,  sa  patrie. 

Ce  traître  fut  trahi  lui-même  par  deux  de  ses  con-  lvu. 
fidents^  qui  révélèrent  à  l'empereur  tout  le  secret  de  **  '^"°*' 
sa  perfidie,  et  l'instruisirent  encore  de  plusieurs  autres 
crimes  de  ce  méchant  homme.  Il  avait  deux  fils  aussi 
méchants  que  lui  :  ayant  appris  le  mauvais  service 
rendu  à  leur  père,  ils  assassinèrent  un  des  deux  dé- 
nonciateurs^ et  le  coupèrent  en  morceaux.  Ils  s'en- 
fuirent ensuite  à  Cotyée,  où  s'étant  joints  à  leur  père, 
ils  prirent  ensemble  le  chemin  de  la  Syrie ,  à  dessein 
de  se  jeter  entre  les  bras  des  Sarrasins.  Ils  étaient  déjà 
en  Cappadoce,  lorsqu'ils  furent  atteints  par  ceux  que 
l'empereur  avait  dépêchés  à  leur  poursuite.  Ils  se  dé- 
fendirent en  désespérés;  les  deux  fils  furent  tués;  le 
père  pris  et  chargé  de  chaînes  fut  conduit  à  l'empe- 
reur, qui  lui  fit  faire  son  procès.  Basile  ne  lui  fit  grâce 
que  de  la  vie  :  on  lui  creva  un  œil ,  on  lui  coupa  la 
main  droite,  et  il  fut  relégué  à  Mésembrie ,  où  il  passa 
une  assez  longue  vieillesse  dans  l'opprobre, et  dans  la 
misère  qu'il  n'avait  que  trop  méritée. 

Les  succès  de  Léon  en  Italie  n'avaient  pas  réparé    iw  885. 
le  dommage  que  la  défaite  de  Procope  avait  causée  à    Nouvelle 
Fera  pire.  Les  Sarrasins  reprenaient  l'avantage,  et  ren-   ''^^^^^^^ 
traient  dans  les  places  qu'ils  avaient  perdues.  L'em-  cedr.p.586, 
pereur  y  envoya  Etienne  Màxence,  Cappadocien,  avec  z;on.^.\p, 
les  troupes  de  Thrace,  de  Macédoine,  et  de  Cappa-       ^^^' 


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3aO  HISTOIllS   DU    BAS-EMPIRE.  (a,i  »85.) 

t^nst.  doce.  C'étaient  les  meilleurs  soldats  de  lempire ;  mais 
193^  19?.  ils  étaient  conduits  par  le  plus  mauvais  général.  Étîea ne, 
sans  activité,  sans  aucun  sentiment  d'honneur,  en- 
dormi dans  la  débauche,  ne  connaissait  d'affaires  sé- 
rieuses que  celles  de  ses  plaisirs.  Il  ne  fit  d'autre  ex- 
ploit que  d'assiéger  Amantia  en  Calabre,  et  d'en  lever 
le  siège  presque  aussitôt.  Dès  que  Basile  en  fut  ins- 
struit,  il  se  hâta  de  corriger  ce  mauvais  choix,  et  lui 
donna  pour  successeur  un  guerrier  d'un  caractère  tout 
contraire,  laborieux,  habile,  vigilant,  et  qui  n'avait 
de  passion  que  la  gloire  de  son  maître  et  la  sienne. 
C'était  Nicéphore  Phocas,  aïeul  de  celui  qui  fut  de- 
puis empereur.  Nicéphore  conduisit  en  Italie  de  nou- 
velles troupes  tirées  des  provinces  d'Orient ,  entre  au- 
tres un  corps  de  Pauliciens,  qui,  après  la  ruine  de  [eut 
état,  s'étaient  attachés  au  service  de  l'Empire,  et  qui, 
en  abjurant  leurs  erreurs,  n'avaient  rien  perdu  de  leur 
ancienne  bravoure.  Ils  étaient  commandés  par  ce  Dia* 
conize ,  recommandable  par  sa  fidélité  à  l'égard  d'un 
maître  malheureux.  Avec  ses  forces  jointes  à  l'armée 
que  laissait  Etienne,  Nicéphore  défit  partout  les  Sar- 
rasins;  il  prit  Amantia,  Tropea,  et  Sainte-Séverine, 
enrichit  ses  soldats ,  et  rendit  à  l'Empire  toute  la  Ca- 
labre, que  les  Sarrasins  abandonnèrent  pour  se  retirer 
en  Sicile.  La  conduite  de  Nicéphore  dans  cette  expé- 
dition est  proposée  pour  modèle  par  l'empereur  Léon, 
dans  son  Traité  de  Tactique;  car  je  pense  que  c'est 
ce  pays  qu'il  désigne  par  le  nom  de  Lombardie.  Ni- 
céphore ne  sut  pas  seulement  vaincre  ces  peuples;  il 
sut ,  et  c'est  encore  une  victoire  plus  utile  et  même 
plus  glorieuse,  les  attacher  à  l'Empire,  en  les  traitant 
avec  équité ,  avec  douceur,  en  les  exemptant  d'impôts, 


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(An  885.)  tIVRK   LXXI.       '     BASILE.  3^1 

OU  ne  leur  laissant  aucune  marque  de  servitude,  et  en 
leur  faisant  regretter  de  n'avoir  pas  toujours  appar- 
tenu à  leurs  nouveaux  maîtres.  En  quittant  l'Italie, 
il  y  laissa  une  marque  sensible  de  sa  bonté  pour  les 
vaincus.  Ses  soldats  avaient  fait  prisonniers  un  grand 
nombre  d'I talons ,  et  ils  les  traînaient  avec  eux  pour 
en  faire  des  esclaves.  Nicéphore,  sans  faire  semblant 
de  s'en  apercevoir,  conduisit  l'armée  à  Brindes,  où 
elle  devait  se  rembarquer;  et,  dès  que  la  flotte  fut  ap- 
pareillée et  prête  à  faire  voile,  il  y  fît  monter  les  sol- 
dats Tua  après  l'autre.  Les  prisonniers,  chargés  de 
fers,  demeuraient  rangés  sur  le  rivage;  ils  s'atten- 
daient à  remplir  les  derniers  vaisseaux.  Dès  que  tous 
les  soldats  furent  embarqués,  Nicëphoi*e  fit  lever  les 
aoct*es,  laissant  à  l'Italie  ses  enfants,  qui  ne  versaient 
plus  que  des  larmes  de  joie  et  de  tendresse  pour  leur 
généreux  libérateur.  L'enthousiasme  de  leur  recon- 
naissance se  porta  jusqu'à  une  sorte  d'idolâtrie.  Ils 
firent  bâtir  une  église  à  laquelle  ils  donnèrent  le  nom 
de  Nicéphore.  Telle  fut  la  dernière  expédition  du  règne 
de  Basile. 

Léon ,  devenu  héritier  présomptif  de  l'empire ,  et  déjà       '•ï?^- 
revêtu  du  titré  d'empereur,  avait  épousé,  en  880^   veut  faire 
Théophano,  fille  de  Constantin  Martinace.  Pa^rveiiu  à  fiis  aine  de 

sa  dix-neuvième  année,  il  était  chéri  de  tout  l'empiré;    ®°*p*'^^'^- 

.  /  Cedr.p.591, 

et  n'avait  d'ennemis  que  Santabaren ,  dont  il  avait  dé-       ^a- 

mêle  les  impostures.  Il  ne  pouvait  souitrir  que  son    174,  175. 

père  fût  la  dupe  d'un  fourbe,  et  ne  cachait  pas  assez       4^4.  ^  ' 

la  haine  et  le  mépris  qu'il  lui  gardait  dans  le  cœur.  Ce  ^o^îi^; 

scélérat  le  pénétra,  et  sentit  bien  quel  risque  il  cou-    ^'^^^;^* 

rait,  s'il  attendait  la  mort  de  Basile.  Il  résolut  donc   p^"^^ 

de  perdre  Léon  du  vivant  de  son  père.  Dans  ce  des-   î»»4»  ai5. 

Tome  XIU.  21 


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3a2  HISTOIRB   DU  3AS-EMPI1I1S.  (An  881] 

SjaKp.459,  seioy  il  s'attacha  pendant  quelque  teni[>s  à  kii  faire  la 
Georg.  p.  cour  ;  et,  plus  adroit  que  le  jeune  prînee,  à  force  cï'as* 
547.  548.  gjjyjté^^  ^g  complaisances,  et  de  démonstrations  de 
zèie,  il  vint  à  bout  de  dissiper  les  soupçons,  et  de  ga- 
gner la  con/iance  de  Léon,  qui  joignait  à  un  esprit 
assez  faible  toute  l'imprudence  de  la  jeunesse.  Lors* 
qu'il  se  vit  écouté,  il  donna  au  prince  un  conseil  qui 
devait  le  conduire  à  saperte«  C'était  la  coutume  que, 
dans  les  chasses  de  Tempareur,  ïm\  de  ceux  qui  Vbo 
compagnaient  ne  portât  aucune  arme,  excepté  les  of- 
ficiers de  la  vénerie:  ses  courtisans^  ses  enfant»  mêmes 
n'étaient  que  de  simples  spectateui^.  Santabaren  se 
voyant  un  jour  seul  avec  Léon,  a  Ne  tremblez- vous^  pas, 
«  lui  dit-il,  toutes  les  fois  que  l'empereur  part  pour  la 
c  chasse  ?  Les  forêts  ont  été  complices  de  grand  nom- 
ci  bre  d'assassinats  :  combien  de  scélérats  sont  plus  à 
ce  craindre  que  les  bêtes  les  plus  féroces?  Souvenez 
<c  vous  de  Curcuas.  Et  si  votre  père  était  attaqué ,  à  qui 
a%ppartiendrait-il  de  le  défendre?  Mettez-vous  en  état 
a  de  combattre  les  attentats;  ne  le  suivez  jamais  dans 
«  ce  divertissement  dangereux,  sans  avoir  ifpe  aroM 
<c  cachée,  toute  prête  à  le  secourir,  d  Léom,  charmé  du 
vif  intérêt  que  Santabaren  prenait  à  k  conservatimi 
de  spn  père,  promit  de  suivre  son  avis.  En  effet,  à  là 
première  partie  de  chasse ,  il  se  munit  d'un  poignard 
qu'il  cacha  dans  une  de  ses  bottes.  Dès  qu'on  fut  dans 
la  forêt ,  Santabaren  court  à  l'empereur  avec  un  air 
d'alarme:  Prince j  lui  dit-il  à  l'oreille,  sauvez  voire 
vie;  voire ^Is  est  armé  ;  il  s* ennuie  de  ne  pas  ri* 
gner.  Basile  fait  aussitôt  arrêter  Léon  :  on  le  dépouille; 
on  trouve  le  poignard,  et  sm*-le«K:hamp  on  retourne  au 
palais.  Basile,  outré  de  colère,  sans  vouloir  entendre 


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(Aa  885.)  LITRE   LKXl.  HASILE.  3si3 

son  fils,  lui  faitoter  les  ornémeots  impériaiuiy  et  Pett* 
ferme  daàs  one  étroite  prison.  Il  voulait  à  i'beu/re  mém^ 
lui  faire  crever  les  yeux,  et  Santabaren  l'y  excitait^ 
Mais  plusieurs  sénateurs  s'étaut  jetés  à  ses  pieds^  ob" 
tînrent  qu'il  différât  le idiàtimentv  jusqu'à  ce  qu'il  fût 
assuré  du  crime.  On^  mit  à  la  qîiestioa  tous  )e&<)fH«' 
ciers,  tous  \çs  courtisaàs  du  4}rLtee  ;  Nvcétàs^  son  ?cûb*> 
fidait  ie  plçis  (ntÎBie,  fut  déchire' à  coups  de  vetrgesf 
an  ne  tira  de  leur  boUehe  que  des  lériioignages  de  son 
attachement  à'son  père.  Ândré^  e^pitaine  id^s  gardés^ 
fameux  par  les  succès  qu'il  avait  eus  à  la  guerre,  mais 
odieux  à  Santabaren  à  cair»Q  de  sa  probité  inoorrup 
tibie,  fut  enveloppé  dans  la  disgrâce,  et  privé  de  sef 
charges,  comme  complice  du  prince,  auq»el  il  était  tén*- 
dr^nent  attaché. 

Léon ,  désespéré  de  voir  son  amour  pour  son  père 
devenu  un  crim«  atroce ,  s'abandonnait  à  la  plus  vit4  ]>éHYrance 
douleur.  Il  ne  cessait  d'écrire  à  son  père  des  lettres 
justificatives ,  que  Basile  refusait  de  lire.  Tout  le  pii# 
lais  était  arrosé  de  larmes.  La  mère ,  les  sœurs ,  les 
deux  frèrejs,  tous  les  officiers  du  prince,  persuadés  de 
son  innocence,  ne  fabaient  entendre  que  des  gémîs^ 
semeats.  Basile  seul,  toujours  obsédé  par  Santabaren , 
était  insensible.  Un  jour  qu'il  donnait  un  |[raf)d  sùw- 
per  à  tous  les  seigneurs  de  sa  cour,  dans  le  temps  que 
la  bonne  chère  et  la  donce  familiarité  de  l'empereur 
Êûsaieut  oublier  i'iufortuoe  de  Léon,  un  perroquiet^ 
enfermé  dans  une  cage  attachée  au  jimr  de  la  saliii^^ 
se  mit  à  crier  :  Hélas  !  halos}  seigneur  Léon.  C'étaient 
des  paroles  qu'il  entendait  depuis  tuois  mois  retentir 
sans  cesse  à  ses  oreilles.  Ce  cri  glaça  les  eoljivivie»; 
devenus  iuimobtlés^  la  téta  baissiée,  ils  n'ouvraient  lu 


Z.Z. 


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3a4  HISTOIRE   DU   BA.S-E1CPIRE.  (Ak  gftS.) 

bouche  que  pour  faire  place  à  leurs  soupirs:  l'em- 
pereur lui-même  les  regardait  en  silence,  lorsqu'un 
d'entre  eux  élevant  sa  voix  entrecoupée  de  sanglots  : 
«  Seigneur,  dit-il,  cet  animal  nous  condamne.  Nous 
a  est-il  permis  de  lious  Uvrer  à  la  joie,  tandis  que  voire 
«'fils,  que  l'héritier  de  votre  couronne  gémit  dans  les 
«(  horreurs  d'un  cachot  ?  S'il  est  coupable ,  il  n'est  au- 
«  cun  de  nous  qui  ne  soit  armé  pour  le  punir  :  mais 
«  s'il  est  innocent,  nous  sommes  tous  coupables.  Écou- 
te tez^le,  jugez-le;  qu'il  cesse  enfin  de  vivre  criminel, 
«  ou  de  mourir  tous  les  jours  victime  d'une  noire  ca- 
«c  lomnie.  »  Ces  paroles  pénétrèrent  le  cœur  de  l'em- 
pereur, et  réveillèrent  en  lui  la  tendresse  paternelle. 
Il  fit  venir  son  fils,  il  écouta  ses  défenses;  et,  ayant 
enfin  reconnu  la  perfidie  de  Santabaren,  il  embrassa 
Léon  et  lui  rendit  tous  ses  honneurs.  André  fut  ré- 
tabli dans  ses  dignités.  Lé.  juste  courroux  de  Basile 
aumit  éclaté  sur  le  traître,  s'il  ne  se  fût  dérobé  au 
châtiment.  Photius  eut  l'adresse  d'en  imposer  encore 
à  l'empereur  en  feveur  de  ce  scélérat.  Santabaren  se 
retira  dans  son  diocèse  d'Ëucfaaïtes.  On  dit  que,  le  len- 
demain de  la  délivrance  de  Léon ,  jour  de  la  fête  .du 
patriarche  Élie,  pour  leqi^l  l'empereur  avait. une  dé- 
votion, particulière,,  comme  Basile  marchait  en  pro- 
cession ,  tout  le  peuple  qui  le  suivait  s'écriaut ,  Gloire 
à  Dieu  qui  nous  a  rendu  notre  jeune  prince!  il  se 
retourna  et  dit  à  haute  voix  :  Enfants^  vous  poussez 
desïoris.  de  joie  pour  remercier  Dieu  de  vous  avoir 
rendu  Léon;  demandez-lui  plutôt  que  son  règne  ne 
vous  fasse  pas  un  jour  pousser  des  cris  de  dou'- 
leur.  Quoique  Basile  aimât  son  fils,  il  croyait  voir  en 
lui  des  inclinations  qui  ne  promettaient  pas  un  règne 
heureux. 


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(An  88d.)  LIVRE   l^XXI.  BASILE.  3^5 

L'empereur  ne  survécut  pas   long^temps  à  la  ré-    aw  sss. 
conciliation  avec  son  fils.  Au  mois  de  février  suivant ,       i^xi. . 
comme  il  était  à  la  chasse,  un  cerf  très-grand  et  très-     BaaU«. 
forts'élançant  sur  lui,  l'enleva  par  laceinture  de  des-  So!'^;J^?; 
sus  son  cheval.  Il  allait  périr,  si  un  de  ses  veneurs  ^^y*^^v^^9'J^ 
n'eût  coupé  la  ceinture  d'un  coup  de  sabre.  Cet  ac-  Jo*J;  p-  179- 
cid^nt. lui   avait  tellement  troublé   l'esprit,  qu'il  fit    Porp.p. 
sur*le-champ  trancher  la  tête  à  celui  qui  venait  de  Sjm.^.\6t. 
lui  sauver  la  vie,  pour  avoir,  disait-il ,  tiré  l'épée  sur    548,'^549^' 
son  prince.  Une  secousse  si  violente  lui  dérangea  les   ^°|J;  ^' 
entrailles;  il  fut  saisi  d'une  fièvre  ardiente  qui  le  oon-  ^Çi"°-^Jj* 
duisit  au  tombeau  en  peu  de  jours.  On  dit  qu'étant     p-  ^^4* 
près  de  mourir,  agité  par  les  remords  du  crime  par 
lequel  il  s'était  élevé  à   l'empire,   il  s'imagina  voir 
l'empereur  Michel   couvert  de  sang,  qui .  lui  disait 
d'une  voix   terrible ,  en  lui  montrant  ses  blessures  : 
Que  t'ai'je/aii,  Basile,  pour  me  massacrer.si  cruel- 
lement? Il   mourut   le  i*''  mars    886,    après  avoid 
régné  quatorze  mois  avec  Michel,  et  seul,  dix-huit 
ans  cinq  mois  et  sept  jours.  II  fit  approcher  de  son 
lit  son  fils  Léon,  etStylien,  gouverneur  de  ses  enfants, 
et  il  expira,  en  leur  disant  :  Défiez^vous  de  Photius, 
et  de  sa  créature  Santdbaren;  ils  m* ont  entraîné 
dans  le  précipice  par  leurs  impostures. 

Ce  fut  un  malheur  pour  ce  prince  d'être  né  dans  -,  '•^'•. 

r  r  Conclusion 

ces  temps  d'atrocité  et  de  barbarie.  Ses  grandes  qua-  ^u  règne  de 
Htés,  propres  à  faire  un  héros,  furent  altérées  par  la  cedr.p.587, 
rouille  de  son  siècle.  On  peut  cependant  conjecturer   ^*^f*^' 
que,   s'il  eût  eu  des  successeurs  semblables  à  lui,  Zon.  t. a.p. 
l'empire  eût  réparé  ses  pertes.  11  n'eut  que  la  gloire       »o6. 
d'en  avoir  retardé  la  chute.  Aussi  laborieux  que  vigi-      cônst. 
lant,  il  fut  toujours  à  la  tête  du  gouvernement  ou  de  i^Tt  ^*q. 


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3a6  HISTOIRE   DU   BAS«*EHPIK£.  (An  886.) 

Genêt. p. 61.  ses  armées.  Il  aimait  la  vërité,  et,  n'espérant  guère 
homtio'  âd  la  trouver  dans  la  bouche  de  ses  courtisans,  il  la 
^^^  cherchait  dans  Thistoire»  Il  prenait  conseil  des  exem* 
ple&  qu'elle  lui  présentait.  A  ses  yeux,  la  plus  haute 
Tertu  tenait  lieu  de  la  plus  éminente  dignité;  il  Vaàr 
mettait  dans  sa  Êimilîarité ,  il  oubliait  même  la  ma^ 
jette  impériale  pour  aller  visiter  ceux  qui  portaient 
06  noble  caractère.  Plein  de  tendresse  pour  ses  sujets, 
il  apportait  la  plus  grande  précaution  à  ne  leur  don- 
ner que  des  gouverneurs  et  des  magistrats  qui  fussent 
les  défenseurs  de  ceux  dont  il  était  le  père.  Un  jour 
de  Pâque ,  comme  il  st^sistait  à  Toffice  dans  l'église 
des  Sain  tsi- Apôtres,  il  remarqua  que  les  principauxha- 
bitants,  au  lieu  de  porter  des  habits  de  fête,  portaient 
dans  leur  extérieur  et  dans  leur  con  tenance  les  mar- 
ques d'une  profonde  tristesse.  Il  en  fut  étonné,  et 
comme  il  leur  en  demandait  la  cause  :  Hélasl  seigneur^ 
lui  répondit  un  d'entre  eux;  la  joie  et  les  riches  vé' 
tements  conviennent  à  votre  majesté  et  à  votre  cour; 
il  n'est  point  pour  vous  de  calamité  :  mais  ces  or* 
nements  ne  sont  pas  faits  pour  des  misérables^ 
qui  sont  à  la  veille  dépérir.  Fous  ignorez  apparem- 
ment que  le  prix  du  blé  est  augmenté  du  double^ 
et  que  votre  peuple  meurt  de  faim.  Ces  paroles  per- 
cèrent le  cœur  du  prince;  il  les  consola  en  versant  des 
larmes  et  leur  promit  un  prompt  secours.  Dès  qu'il  fut 
de  retour  au  palais ,  il  manda  ses  ministres ,  et  leur 
fit  les  plus  vifs  reproches  de  ne  l'avoir  pas  averti  de 
la  cherté  des  vivres.  Aussitôt  11  fit  ouvrir  tousses 
greniers,  et  vendre  son  blé  douze  fois  au-dessous  ^ 
prix  ordinaire.  La  moisson  suivante  fut  plus  abon- 
dante que  jamais,  comme  si  la  Providence  eût  voulu 


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(Att  8M.)  LIVRS  LXXl.  BASILE.  Ssy 

récomp^isar  sa  générosité  paternelle.  Libérai  sans 
prodigalité,  il  était  persuadé  que  le  prinoe,  dans  ses 
profusions,  verse  le  sang  de  ses  peuples.  C'était  une 
de  ses  maximes,  et  il  la  recommandait  à  son  fils,  que 
les  trésors  acquis  par  des  exactions  se  dissipent  promp*- 
tement,  et  qu'ils  entraînent  même  avec  eux  les  riches* 
ses  légitimes  :  C'est ^  disait-il ,  une  paille  que  le  feu 
consume  en  un  moment  ^ei  cToù  il  se  communique  à 
t édifice.  Ennemi  du  luxe,  il  ne  donnait  à  la  splendeur 
du  trône  que  ce  qu'il  n'en  pouvait  retrancher  sans 
l'avilir;  il  croyait  que  la  majesté  souveraine  tire  bien 
bien  plus  d'éclat  du  caractère  du  prince ,  que  du  faste 
qui  l'environne,  comme  un  excellent  tableau  est  bien 
plus  admirable  par  la  perfection  de  l'art  que  par  la 
richesse  de  la  bordure.  Son  économie  lui  ménagea 
des  fonds  pour  exécuter  de  grands  ouvrages.  Il  bâtit 
ou  répara  plus  de  cent  églises,  hôpitaux,  monastères, 
citernes  publiques,  tant  dans  Constantinople  qu'aux 
environs.  On  peut  dire  que  cette  ville,  dont  les  plus 
beaux  édifices  commençaient  à  dépérir,  prit,  pendant 
les  dix -huit  années  de  son  règne,  une  face  nouvelle. 
Il  mettait  le  grand  Constantin  au  nombre  des  saints, 
et  fit  consacrer,  sous  son  nom ,  un  oratoire  dans  son 
palais.  Pour  expier  le  meurtre  de  son  prédécesseur, 
qu'il  se  reprocha  touC^  sa  vie ,  et  qu'il  pleurait  «icore 
à  l'article  de  la  mort ,  il  fit  dédier  un  grand  nombre 
d'églises  sous  l'invocation  de  Saint- Michel.  Il  en  fit 
aussi  construire  plusieurs  sous  le  nom  du  prophète 
Élie,  et  Zonaras  donne  une  raison  ridicule  de  cette 
dévotion  ;  U  espérait ,  dit-il ,  que  ce  prophète  l'enlè- 
verait un  jour  au  ciel,  comme  il  y  avait  été  enlevé 
lui^-même.  Il  ne  serait  pas  incroyable  qi^'un  prince, 


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3a8  HISTOIRE   DU   BAS-EMPIRE.  {An  m.) 

irès-sagé  d'ailleurs ,  eût  été  frappé  d'une  imagination 
même  extravagante.  Il  voulut  perpétuer  la  mémoire 
de  son  premier  état  dans  un  salon  magnifique  qu'il 
fit  ajouter  à  son  palais;  il  y  avait  fait  peindre  sur  la 
voûte  ses  combats  et  ses  victoires;  mais  en  même 
temps,  comme  pour  remède  à  la  vanité ,  ou  peut-être 
par  un  effet  de  vanité  plus  raffinée ,  il  s'était  fait  re- 
présenter avec  sa  femme  et  ses  enfants,  qui,  levant 
les  mains  au  ciel,  remerciaient  Dieu  d'avoir  retiré  leur 
père  de  la  pauvreté,  comme  David,  pour  le  placer  sur 
le  trône.  Cette  action  de  grâces  était  écrite  en  lettres 
d'or  d'un  très  -  gros  caractère.  Basile  ,  élevé  dans  la 
misère  et  la  servitude ,  n'avait  d'abord  aucune  con- 
naissance des  lettres,  et,  ce  qui  est  l'effet  de  l'igno- 
rance, il  les  méprisait.  Plus  éclairé  dans  la  suite ,  ii 
en  reconnut  l'utilité,  et  il  y  fît  instruire  non  seule- 
ment ses  fils ,  mais  même  ses  filles.  Il  s'exerçait  lui- 
même  à  écrire,  et  nous  avons  de  lui  un  petit  ouvrage 
intitulé  :  u^m  de  Fempereur  Basile  à  Léon  son 
cher  fils  et  son  collègue.  Il  consiste  en  soixante -six 
articles  fort  courts,  mais  fort  substantiels,  dont  cha- 
cun commence  par  une  des  lettres  du  titre.  Il  feut 
attribuer  à  son  siècle  le  mauvais  goût  de  ces  acrosti- 
ches. D'ailleurs  cet  ouvrage ,  égal  à  celui  d'Épictete 
par  la  pureté  du  style,  mais  autant  supérieur  par  la 
solidité  et  par  l'élévation  des  pensées,  que  la  mome 
chrétienne  est  au  -  dessus  de  celle  de  Platon ,  mérite- 
rait d'être  le  manuel  des  princes.  Je  n'ai  pu  p'^^^** 
dans  les  annales  de  ce  règne  le  recouvrement  de  u'^ 
de  Cypre,  dont  aucun  historien  ne  fait  mention. 
Constantin  Porphyrogenète  est  le  seul  auteur  qui 
rapporte  que  sous  l'empire  de  Basile ,  cette  île  W' 


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'(An  886.)  LIVRE   LXXI.  BASILE.  SlQ 

meuse  fut  reprise  sur  les  Sarrasins  par  le  général 
Alexis ,  arménien  célèbre ,  dit-il ,  par  sa  valeur  j  et  que 
ce  guerrier  la  gouverna  pendant  sept  ans  ,  après  les- 
quels elle  retomba  sous  la  domination  des  Sarrasins , 
qui  en  étaient  maîtres  de  sou  temps. 


Flir   DU   LIVRE   SOIXAlfTE-ONZlÈME. 


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33o  HISTOIRE  DU   BAS^KBfPIRK.  (laStt) 


%<^^%»^/^^^/^%/^^^^^^%<^^/m/l^%/%<^»%/^%»^»<^^^^^»»<%^K%«^/m»»<i%/%i»^K%»%i^^^<%^»*^^^%lV%^'»%l%'%%<*^ 


LIVRE  LXXII. 


I.  Commencements  de  Léon.  ii.  Seconde  déposition  de  Photios. 
m.  Punition  de  Santabaren.  iv.  Etienne  succède  àPhodns. 
V.  Translation  du  corps  de  Michel  à  Constantinople.  vi.  In- 
cursions des  Sarrasins,  vn.  Affaires  d'Italie,  viii.  Bari  perdu 
et  repris  par  les  Grecs,  ix.  Flotte  des  Grecs  battue  par  1© 
Sarrasins,  x.  Zoé  conc  ubine  de  Léon.  xi.  Guerre  des  Bulga- 
res, xii.  Commencements  des  Hongrois,  xiii.  Mœurs  des  Hon- 
grois, xiv.  Leur  manière  de  faire  la  guerre,  xv.  Léon  se  sert 
des  Hongrois  contre  les  Bulgares,  xvi.  Générosité  de  Nice- 
phore  Phocas.  xvii.  État  des  Grecs  en  Italie,  xviii.  Les  Grecs 
défaits  par  les  Bulgares,  xix.  Conjuration  découverte  par 
Zoé.  XX.  Mort  de  Théophano.  xxi.  Léon  épouse  Zoé.»tti. 
Mort  du  patriarche  Etienne,  xxiii.  Collection  des  Basilique. 
XXIV.  Disgrâce  et  mort  de  Stylien.  xxv.  Nouvelle  conjoia- 
tion.  XXVI.  Fortune  de  Samonas.  xxvii.  Nicolas-le-Mystiqo« 
patriarche,  xxviu.  Troisième  mariage  de  Léon,  xxix-  No»»- 
velle  passion  de  Léon.  xxx.  Léon  blessé  par  un  assassin. 
XXXI.  Courses  des  Sarrasins,  xxxii.  Expédition  des  Sarrasins. 
xxxiii.  Préparatifs  des  Thessaloniciens.  xxxiv.  État  déplo- 
rable des  Thessaloniciens.  xxxv.  Arrivée  de  là  flotte  sarit- 
sine.  XXXVI.  Suite  de  l'attaque,  xxxvii.  Prise  de  la  vi 
xxxviii.  Les  bâtiments  de  la  ville  rachetés  à  prix  d'arge» 
XXXIX.  Départ  des  Sarrasins,  xl.  Histoire  d'Eustethe  Argyi** 
XLi.  Fuite  et  retour  de  Samonas.  xlii.  Naissance  de  Cons 
tin.  xLiii.  Troubles  au  sujet  des  quatrièmes  noces  de  i^  ' 
XLiv.  Opposition  du  patriarche,  xlv.  Euthymius  ^^ 
place  de  Nicolas,  xlvi.  Violent  orage,  xlvii.  Fuite  °^  . 
nie  chez  les  Sarrasins,  xlviii.  Retour  de  Constantin, 


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(lusse.)  LivHK  Lxxn.        vàoK  vî.  33 1 

d'Andronic^XLix.  Les  Sarrasins  chassés  du  Garillan.  l.  État 
des  frontières  du  côté  de  Torient.  li.  Le  père  de  Samonas 
à  Constantinople.  lu.  Disgrâce  de  Samonas.  lui.  Occasion 
de  la  fondation  du  monastère  des  Nosies.  liv.  Flotte  grec- 
que battue  par  les  Sarrasins,  ly.  Mort  de  Léon. 


LEON  VI ,  dit  LE  SiGE  ou  le  Philosophe. 

jLjiov  et  son  frère  Alexandre  âTâitnt  été ,  dès  leur    aw  886. 
en&nce  ,  associés  au  titre  d'empereur.  La  mort  de  leur  ^    <• 

^  .  *^  Commence- 

pere  les  mit  en  possession  de  l'empire.  Mais  Alexan-   ments  a© 
dre  ne  prit  de  la  puissance  souveraine  que  la  liberté  j^^^^  ^^ 
de  se  livrer  impunément  à  tous  les  plaisirs,  et  Thon-  JJ^aies! 
neur  muet  et  stérile  de  voir  son  nom  à  côté  de  celui    pu<»ng«» 

lam.  Byz. 

de  son  frère  à  la  tête  des  lois,  sur  les  inscriptions  p.  i4o>  ui. 
publiques ,  et  sur  les  monnaies.  Léon  régna  seul ,  et  la 
flatterie,  toujours  prête  à  prodiguer  des  éloges  aux 
princes  sur  les  plus  légères  apparences  de  vertu,  l'ho* 
nora  des  titres  de  sage  et  de  philosophe  y  qu'il  ne  mé- 
rita guère  que  par  un  goût  médiocre  pour  l'étude 
des  lettres  et  d'une  philosophie  grossière,  mais  admi- 
rée de  ce  siècle  ignorant. 

Dès  qu'il  se  vit  sur  le  trône ,  il  n'eut  rien  de  plus  seconde 
pressé  qi»  de  se  venger  de  la  perfidie  de  Santabarcn.  de^^PhotT^s. 
Mais^pour  y  réussir  plus  facilement ,  il  fallait  lui  en-  Cedr.p.5q3^ 
lever  l'appui  de  Photius,  son  protecteur  déclaré.  Le©, p. 475- 
capable  de  le  mettre  k  couvert,  s'il  se  soutenait  lui-  175,  1*76?' 
même.  L'empereur  était  d'autant  plus  irrité  contre  le  ^to^noat.*^p°* 
patriarche,  qu'il  entendait  dire  que  ces  deux  fourbes   *'^a  "**^ 


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33a  HISTOIRE   DU   BAS-EMPIRC.  (Aa  SU) 

Srm.p.i6x,  avaient  de  concert  travaillé  à  le  perdre ,  pour  mettre 
Ge^rg.'  p.   sur  le  trône  un  parent  de  Photius.  Le  général  André 
Giyc!p^a98.  ^^^^^  partagé  la  disgrâce  du  prince;  il  s'offrit  à  ser- 
îSiriîdKS!  ^'^^  ^^  ressentiment.  Jean  Hagiopolite,  intendant  des 
^^i^\^3  postes  de  l'empire,  se  joignit  à  lui ,  et  ils  allèrent  en- 
art.  5x,  5a,  semble  à  la  grande  église.  Là ,  en  présence  du  peuple 
i4,  lé.  '  qui  était  accouru  en  foule,  ils  montèrent  dans  la  tri- 
Chris.t.1,   bune,  firent  la  lecture  d'un  écrit  contenant  tous  les 
P-  **9-     crimes  de  Photius ,  le  déclarèrent  déchu  d'une  dignité 
qu'il  n'avait  jamais  légitimement  possédée,  et  le  firent 
conduire  dans  un  monastère  de  Constantinoplc.  En 
même  temps,  il  assemblèrent  les  évêques  et  le  clergé, 
et  firent  nommer  à  sa  place  Etienne ,  frère  de  l'empe- 
reur. 
lit.  Photius  étant  écarté ,  on  alla  chercher  Santabarm, 

Panition  do         -i*  «ii  «i 

SantdMiren.  qui,  ocpuis  sa  retraite  de  la  cour ,  se  tenait  dans  so& 
diocèse  d'Euchaïtes.  Il  fut  amené  à  Constantinople  et 
renfermé  dans  une  prison ,  sans  aucune  communica- 
tion avec  Photius.  Cinq  patrtces,  dont  André  était  le 
président,  nommés  pour  juger  l'un  et  l'autre,  firent 
amener  devant  eux  Photius  ;  ils  le  placèrent  par  hon- 
neur au  milieu  d'eux.  Alors,  André  lui  adressant  b 
parole  :  Connaissez^vous ,  lui  dit-il ,  le  moine  Théo- 
dore  ?  Ten  connais  plusieurs  de  ce  /2£7/i2,  répondit 
Photius;  duquel  voulez-vous  parler?  C'esU  dit  An- 
dré, de  celui  qui  a  le  surnom  de  Santabaren.  Oui, 
dit  Photius,  y<g  connais  rarchevêque  d'£!uchaiees.  En 
ce  moment ,  on  amène  Santabaren  :  oii  sont,  lui  dit 
André,  les  trésors  du  défunt  empereur?  Ils  sont,  ré- 
pondit-il,  entre  les  mains  de  ceux  auxquels  il  les  a 
confiés  :  cestà  son  successeur  à  les  chercher;  il  en 
est  le  maître.  Il  parait  qu'on  soupçonnait  Santabaren 


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(An  886.)  LIVRE   LXXII.  LÉON   VI:  333 

d'avoir  détourné  une  partie  des  trésors  du  prince,  ou 
quou  voulait   l'en  rendre  suspect.  Meus  ,  continua 
André ,  quel  est  celui  que  vous  vouliez  faire  empe^ 
reur,  lorsque  vous  conseillâtes  à  Basile  de  faire  cre- 
ver  les  jreux  à  son  fils   qui  règne   aujourd'hui? 
Était-ce  un  de  vos  parents,  ou  un  parent  du  pa- 
triarche ?  Sdintshdiven  prostestant  avec  sernkent, qu'il 
n'avait  nulle  connaissance  du  crime  qu'on  lui  impu-» 
tait,  Pourquoi  donc^  fourbe  insigne ,  lui  dit  un  des 
juges,  as'tu  toi-même  révélé  ce  complot. çlP empe- 
reur, lui  promettant  den  conuaincre  le  patriarche? 
A  ces  mots,  Santabaren  se  jetant  aux  genoux,  de  Pho- 
tius,  et  les  serrant  entre  ses  \xt2i%\  Seigneur,  lui  dit«*il, 
je  9)ous  conjure  au  nom  de  Dieu  de  me  dépouiller 
du^ sacré  caractère  dont  vous  m*évez  honoré^  afin 
qv!on  me  punisse  si  l'on  veut  me  tromper  coupable. 
Je  ne  le  suis  point;  il  est  faux  que  j'aie  rien  dé- 
claré à  l'empereur.  Le  patriarche  le  relevant  :  Par 
le  salut  de  mon  ame,  lui  dit-il ,  seigneur  Théodore  ^ 
je  ne  vous  ôterai point  votre  dignité.  Fous  vi^^rez  et 
^nourrez  archevêque.  André  protestait  que  Santaba- 
ren lui  avait  fait  la  même  confidence ,  et  comme  l'ac* 
cusé  se  tenait  ferme  sur  la  négative,  les  juges,  déses- 
pérant de  le  convaincre ,  allèrent  faire  leur  rapport  à 
l'empereur.  Ce  prince  ,  plein  de  dépit  de  ne  pouvoir 
rendre  Photius  aussi  coupable  qu'il  le  désirait,  fit 
fauetter  Santabaren,  et  le  relégua  d'abord  à  Athènes. 
On  lui  creva  les  yeux  dans  cette  ville,  et,  peu  de  temps 
après ,  il  fut  transporté  en.  Orient  aux  extrémités  de 
l'empire.  Quelque  punition  qu'eussent    méritée   ces 
deux  méchants  prélats,  une  procédure  si   informe  ne 
fit  .pas  honneur  à  Léon.  L'irrégularité  du  jugmpeqt 


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334  HiSTQlRB  DU    BA»-EMP1AS.  (Ao  886.) 

tourne  toujoars  à  la  décharge  de  ceux  cjai  sont  con- 
damna. Ija.  passion  du  prince  justifia  Santabaren  aux 
yeux  du  peuple;  on  le  plaignit,  et  il  paraît  même  que 
Léon  se  repentit  de  sa  rigueur.  Quelques  anniées 
apràs,  il  le  rappela,  et  lui  assigna  sa  subsistance  sur 
les  reTenus  d'une  église  de  Con^tantinopte.  Santaba- 
ren ne  «nourut  que  sous  te.  règne  de  Constantin. 
Photiiis  vécut  encore  cinq  ans  dans  le  monastère  où 
il  était  enfermé.  li  a^ait  été  aaathématisé  par  neuf 
papes  depuis  Lécm  lY  jusqu'à  Formose.  Telle  fat  la 
fin  de  ce  schisme  qui  durait  depuis  trente  ans. 
IV.  Etienne,  successeur  de  Photius,  avait  reçu  ses  ins- 

svcc^^k  tructions,  qui  valaient  mieux  que  ses  exemples,  et  il 
Photius.  ^jj  g^giî^  profité.  Ce  jeune  prince,  consacré  à  Dieu 
dès  son  enfance,  était  un  modèle  de  vertu.  Il  fut  sjn- 
celle  de  Photius,  et,  dans  son  élection ,  il  n'y  eut  de 
répréhensible  que  son  âge.  Il  n'avait  que  seize  ans, 
et  Ton  remarque  que  l'église  grecque  avait  toujours 
été  mcMus  exacte  à  l'observation  des  canons  sur  cet 
article.  Comme  il  avait  été  fait  diacre  par  Photius, 
et  que  le  huitième  concile  déclarait  nulles  toutes  les 
ordinations  de  ce  prétendu  patriarche,  l'empereur 
engagea  les  évêques  et  les  abbés  qui  étaient  à  Con- 
stantinople,  à  se  joindre  à  lui  pour  demander  au 
pape  Ëtienne^spense  et  absolution  en  faveur  de 
ceux  que  Photius  avait  ordonnés.  Ils  ne  reçurent  i^ 
pause  que  du  pape  Formose ,  successeur  d^ienne, 
qui  n'accorda  aux  ecclésiastiques  ordonnés  par  Pho- 
tius que  la  communion  laïque.  Cependant  Etienne 
demeura  patriarche;  comme  le  siège  d'Hé/aclée  était 
alors  vacant,  il  fttt  sacré  par  l'ai^chevêque  de  Césarée, 
l{ui  avait,  le  titre  de  prototrone  de  Constantinople.  Il 


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(An  8t6.)  IiIVRÏ   EXXII.  X.1ÊON   VI.  3!!J5 

ne  vëcot  que  six  ans  et  demi  dans  le  patriarcat,  dont 
il  remplit  les  fonctions  avec  autant  de  sagesse  que  de 
dignité.  Il  moumt  en  réputation  de  sainteté  Tan  893. 

Basile,  au  lit  de  la  mort,  avait  téntoigné  un  regret        ^• 
amer  de  Tâssa^sinat  de  son  prédécesseur.  Léon  fit  ce  d»  corps  de 
qui  était  en  lui  pour  réparer  l'horreur  de  ce  forfait  par   Cobstanti- 
les  honneurs  de  la  sépulture.  Il  envoya  chercher  à  çei^LsoS. 
Gfarysôpolis  le^ot-ps  de  Michel.  On  le  mit  dans  un  ^^'P-  ^^s. 
cercueil  de  cyprès,  que  l'on  couvrit  de  tous  les  orne^       ^76- 
ments  impériaux  ;  il  fut  transporte  avec  la  pompe  la   t«»»at.  p. 
plus  solennelle  à  Téglise  des  Saints-*Apôtres,  où  il  fut  Sym.p^ei. 
déposé  dans  un  tombeau  de  marbre.  Alexandre  et     ^54^'.^' 
Etienne,  frères  de  l'empereur,  mentaient  le  deuil.  Tout 
le  sénat  et  le  clergé  suivaient  «n  chantant  les  prières 
de  l'église. 

Depuis  la  défeite  d'AbdalIa  en  iR8a,  l'histoire  ne       yt.    . 
parle  d'aucune  incursion  des  Sarrasins  dans  l'Asie-    ■*^"®"' 
Mineure.  Mais  cette  année ,  on  les  voit  sous  la  con^    s«rra»nf. 
duit«  d'Apolpher,  un  de  leurs  émirs,   recommencer  Léo]' p.  i'jS. 
leurs  ravages.  Ils  s'emparèrent,  par  trahison,  de  la    tin*îîi*t.*'p?" 
ville  d'Hypsèle  dans  la  Charsiane,  qui  faisait  partie  de  sym^p^Vsi. 
la  Ga'ppadoce,  et  réduisirent  tous  les  habita  nts  en  escla-   ^^f^'  ^' 
vage.  Nicéphore  Phocas,  qui  s'était  déjà  distingué  par   ^*^°  ***'*• 
sa  conduite  et  par  sa  valeur  contre  les  Sarrasins  d'Italie,     8»,  83. 
marcha  contre  ceux  d'Asie.  Plus  faible  que  les  enne- 
mis, mais  prudent,  et  instruit  de  la  situation  dès 
lieux,  il  évitait  leur  rencontre;  et,  tandis  qu'ils  dést>- 
]aient  la  Cappadoce,  il  leur  rendait  la  pareille  en  CS- 
Jicie,  ravageant  tout  jusqu'aux  portes  de  Tarse.  It  y 
eut,  cette  année,  un  grand  incendie  à  Constantinople; 
régiise  de  Saint-Thomas  fut  brûlée,  l'empereur  la 'fit 
ensuite  rebâtir  avec  magnificence. 


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336  HISTOIRE   DU  BASrEMPIRE.  {knî^) 

Air  887.         La  retraite  de  Nicéphore  avait  rendu  le  cœur  aux 

Affabes    Sarrasins  en  Italie.  Le  détroit  de  Messine  était  cou- 

d'itaUe.     vert  de  leurs  vaisseaux,  et  la  Calabre  était  redevenuc 

Lefj^P^  476^  '^  théâtre  de  leurs  ravages.  Les  princes  du  pays,  qui 

Gi  «u*      Auraient  dû  se  réunir  pour  exterminer  ces  Barbares , 

398.       étaient  divisés  par  leurs  jalousies  mutuelles:  et,  plus 

Incert.  con-  .11  1  •         •! 

tmuat.  p.   ennemis  1^  uns  des  autres  que  des  Sarrasins ,  ils  se 

Syii^p. 46a.  servaient  d'eux  pour   s'entre- détruire.  Les  Grecs, 

55^*.  ^'   maîtres  alors  de  Bari  et  de  presque  toute  TApulie, 

mst^Lâi^.  entraient  dans  toutes  ces  querelles  :  emportés  par  l'in- 

1^'i^A^'  térêt  du  moment,  ils  secouraient  tantôt  les  uns,  tau- 
67,77,80,     ^  »  '  ^ 

,    *'•       tôt  les  autres.  On  les  voit  unis  avec  Athanase,  evêque 

Incert.  aat  ^ 

uut.  Lang.  et  duc  de  Naples,  contre  Guy  duc  de  Spolète,  coatre 

apudMurat.     .  .  ^  ,    ^/     /  ,  .  .    ..       f 

t.  a,  p.  379.  Aion  duc  de  Benevent;  on  les  voit  aussi  ligues  avec 
De^vfu  an^  Guaimar,  prince  de  Salerne,  contre  Athanase;  quel- 
t^a,  p^alTs,  ^"^f''^**  même,  joints  dans  les   mêmes  armées  avec 
927,  a*8.   jgg  Sarrasins  auxiliaires.  Le  prince  de  Salerne,  trop 
iiiist  ditai.  faible  pour  résister  au   turbulent   Athanase  et  aux 
eîô,     'Sarrasins,   fit  le  voyage  de  Constantinople,  pour  y 
solliciter  du  secours.  Il  prêta  foi  et  hommage  à  Tem- 
pereur  qui ,  l'ayant  décoré  du  titre  de  patrice,  ne 
tarda  pas  à  le  renvoyer  avec  quelque  argent  et  beau* 
coup  de  promesses.  Mais,  pendant    qu'il  recevait  à 
Constantinople  des   honneurs   distingués,  les  Grecs 
d'Italie,  joints  aux  habitants  de  Naples  et  de  Capoue, 
que   conduisait   Athanase,  ravageaient  son  pays  et 
prenaient  ses  places;  tant  était  grande  la  confusion 
qui  régnait  dans  ces  contrées.  Théophylacte  avait  suc- 
cédé à  Grégoire  dans  le  gouvernement  de  TApulie. 
Étant  sorti  de  Bari  pendant  l'hiver  pour  aller  atta- 
qujer  les  Sarrasins ,  maîtres  de  Téano,  il  échoua  da^^ 
son  entreprise.   Mais ,   pour  se  dédommager  de  ce 


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{kn  887.)  LIVRE    LXXIf.  LÉON   VI.  33  7 

mauvais  succès,  il  s'empara  sur  sa  route  de  plusieurs 
places  qui  appartenaient  au  duc  de  Bénévent,  alors 
ami  des  Grecs.  Ces  invasions  causèrent  une  rupture 
ouverte. 

Aïon,  duc  de  Bénévent,  résolut  de  se  venger.  Il  fit  ^"••^• 
révolter  les  habitants  de  Bari  qui,  ayant  égorgé  Théo-  Ban  perdu 
pbylacte  et  la  garnison ,  lui  envoyèrent  les  clefs  de  "leTowa!' 
leur  ville.  A  cette  nouvelle ,  Léon ,  craignant  de  per- 
dre dès  le  commencement  de  son  règne  tout  ce  qui 
lui  restait  en  Italie^  fit  partir  le  patrice  Constantin 
avec  une  flotte  chargée  de  soldats  et  de  munitions. 
Arrivé  en  peu  de  jours  sur  les  côtes  d'Apulie ,  Con- 
stantin assiège  Bari.  Aïon,  à  la  tête  de  toutes  ses 
troupes  et  d'un  grand  corps  de  Sarrasins ,  vole  au 
secours  de  la  place;  on  livre  bataille:  Constantin,  en- 
tièrement défait,  se  sauve  à  peine,  et  tout  paraît  déses- 
péré. Toutefois ,  ayant  rallié  les  fuyards  ,  et  reçu  un 
renfort  de  trois  mille  cavaliers,  il  retourne  sur  les  Bé- 
néventins  qui  ne  songeaient  qu'à  jouir  de  leur  victoire, 
et  les  taille  en  pièces  à  son  tour.  Aïon,  qui  venait  de 
faire  lever  le  siège  de  Bari,  est  assiégé  lui-même  dans 
cette  ville.  Il  s'y  défendit  pendant  plus  d'un  an.  En- 
fin, abandonné  par  Atenulf,  comte  de  Capoue,  son  allié, 
qui  traita  séparément  avec  Constantin,  après  avoir 
vainement  imploré  le  secours  des  Français,  du  duc 
de  Spolète  ,  des  Sarrasins  même ,  il  fut  réduit  à  ca- 
pituler; et  tout  ce  qu'il  put  obtenir,  fut  la  liberté  de 
retourner  à  Bénévent,  avec  ce  qui  lui  restait  de  ses 
troupes. 

La  joie  de  ce  succès  fut  bientôt  troublée.  La  flotte       ^^ 
grecque,  après  avoir  repris  Bari,  avait  formé  une  en-  ^^X!!^9 
treprise  sur  la  Sicile.  Au  mois  d'octobre ,  elle  s'était    g^'?* 

Tome  JIIL  ^^ 


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338  HIST(»1IX   DU   BAS^EMPIRS.  (An  gg|.] 

rendue  dans  le  port  de  Rhège,  lorsqu'une  flotte  de 
Sarrasins  vint  lui  fermer  le  passage  entre  Rhège  et 
Messine.  Les  Grecs  s'avancèrent,  mais  leurs  vaiâseaax 
furent  tous  oupris  ou  coulés  à  fond.  Ce  malheur  causa 
tant  d'alarme,  que  tous  les  Grecs,  habitants  des  Villes 
voisines  de  la  côte,  les  abandonnèrent  et  s'enfuirent 
dans  l'intérieur  du  pays,  avec  leurs  femmes  et  leurs  en- 
fants. Un  auteur  contemporain  attribue  ce  désastre  a 
la  vengeance  divine,  armée  contre  les  Grecs.  Plus  bar- 
bares, dit-il,  que  les  Sarrasins,  n'ayant  de  chrétien  que 
le  nom,  d'humain  même  que  la  figure,  ils  se  rendaient 
odieux  par  leurs  brigandages.  Ils  achetaient  des  Sar- 
rasins les  prisonniers  chrétiens  pour  en  faire  leun 
propres  esclaves,  ou  pour  les  aller  vendre  en  Afrique. 
Les  Sarrasins  d'Asie  descendirent  dans  l'île  de  Samos, 
et  firent  prisonnier  Constantin  Paspalas,  qui  en  était 
gouverneur.  On  rapporte  qu'il  y  eut  cette  année  de 
violents  orages,  et,  que  sept  personnes  furent  tuces 
d'un  même  coup  de  tohnerre  à  Constantinople,  (hos 
la  place  de  Constantin, 
z-  Ce   qui    affligea    sans   doute   davantag^e  les  gens 

Zoé    conçu-  *  .111  ,  .  ,1  H 

bine  de     d  honncur ,  jaloux  de  la  réputation  de  leur  maure, 

Ccdr.p  5û3,  P^'^c^  qu'ils  lui  sont  plus  véritablement  attachés  q« 

595.       la  plupart  de  ses  courtisans ,  c'est  que  Léon  ne  tarda 

477-       pas  à  découvrir  aux  yeux  de  tout  l'empire  son  pen- 

176.  '     chant  à  la  débauche.  Aussitôt  après  la  mort  de  son  pèi^ 

^  p°63r^  il  manifesta  sa  passion  pour  Zoé,  la  plus  belle,  mais  h 

Î^Mt/pT  plus  méchante  femme  de  la  cour.  Mariée  d'abord  au 

Sym^V^ei.  patrice  Théodore  Guniazize,  elle  s'en  était  défaite  p» 

54**'^^55i    ^  poison,  afin  de  ne  laisser  aucun  obstacle  à  rinclifla' 

tion  que  l'empereur  témoignait  pour  elle.  Dèsqo" 

fut  empereur,  il  la  prit  publiquement  pour  ccxicubio^l 


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(An  880.)  UVRE   LXXir.  LjJoiT   VI.  SSg 

et  Thëophano,  sa  légitime  épouse,  princesse  sage  et 
vertueuse,  supporta  ce  honteux  commerce  avec  pa- 
tience, sans  donner  jamais  le  plus  léger  soupçon  de 
jalousie.  Stylien ,  père  de  Zoé,  qui  s'était  prêté  en 
homme  de  cour  à  la  passion  du  prince,  fat  ample- 
ment récompensé  de  sa  complaisance.  Il  n'était  d'abord 
qu'huissier  du  palais ,  ce  que  les  Grecs  d'alors  nom- 
maient zaoutzas.  C'était  un  oflice  qui  avait,  depuis 
peu,  passé  de  la  cour  des  Turcs  dans  celle  de  Constan- 
tinople,  et  c'est  le  même  qui  est  encore  désigné  chez 
cette  nation  par  le  nom  de  chiaous.  Car  il  est  à  re- 
marquer que,  dans  la  décadence  de  l'empire,  ofi 
voyait  souvent  naître  des  titres  inusités,  comme  si  les 
faibles  princes  qui  restaient  alors ,  avaient  prétendu 
réparer  leurs  pertes  réelles  par  des  noms  frivoles  d^of- 
fices  nouveaux.  Stylien  fut  élevé  à  la  dignité  de  maî- 
tre du  palais,  qui  le  mettait  déjà  au-dessus  des  patri- 
ces.  Ensuite  il  fut  nommé  grand-trésorier;  et  cette 
place  ne  paraissant  pas  encore  assez  éminente ,  Léoti 
inventa  pour  Stylien  un  titre  monstrueusement  pom- 
peux, celui  de  basiléopator ^  c'est-à-dire,  père  de 
l'empereur.  Ce  qui  était  plus  ridicule  encore,  et  qui 
caractérise  une  stupide  bizarret'ie,  c'est  que  ce  Stylien 
qui  savait  si  bien  metti'e  à  profit  les  crimes  de  sa  fille, 
croyait  être  dévot:  il  s'occupait  de  fondations  pieuses, 
il  fit  bâtir  à  Constantinople  un  monastère  auquel  il 
donna  son  nom. 

Stylien,  favori  de  l'empereur,  avait  lui-même  des  fa-     ^  gg^^ 
voris,  qui  avaient  eux-mêmes  leurs  créatures.  Dans  coeJ^'êdcs 
cette  longue  suites  de  protégés  qui  tiennent  les  uns    ®"'g«res. 
aux  autres,  le  dernier  anneau  entraîne  souvent  toute  Léo,/.  4^.' 
la  chaîne,  ébranle  le  trône,  et  met  en  péril  tout  un  ^V?^'^' 


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34o  HISTOIRE  DU   BAS-EMPIRE.  (An  gg^ ,) 

iBcwt.  oen-  empire.  Un  esclave  nommé  Mousic  gouvernait  Sly- 
.*^Mo/'    l*«n,  comme  Stylien  gouvernait  Léon;  cet  esclave 
^^%sl'   protégeait  deux  marchands  grecs,  qui  avaient  soin  de 
Docange,    l'intéresser  dans  leurs  monopoles.  Ils  obtinrent,  par 
p.3ii.  '    le  moyen  de  Mousic,  un   privilège   exclusif  pour  le 
commerce  avec  les  Bulgares;  et  ce  commerce, établi 
depuis  long-temps  à  Constantinople ,  fut,  pour  leur 
plus  grande  commodité,  transféré  à  Thessalonique. 
Loin  des  yeux  du  prince  ,  appuyés  de  toute  l'autorité 
du  ministre ,  ils  firent  ce  qu'ils  voulurent,  et  traitè- 
rent si  mal  les  marchands  bulgares,  que  le  roi  Syméon 
s'en  plaignit  à  l'empereur.  Le  crédit  de  Stylien ,  ren- 
dant ses  plaintes  inutiles,  il  résolut  de  se  faire  raison 
par  les  armes.  C'était  un  prince  vaillant,  qui  avait 
reçu  les  leçons  de   l'adversité.  Son  père  Baldimir, 
l'ayant  laissé  en  bas  âge,  et  Bogoris  s'étant  empare 
de  la  couronne,  le  jeune  Syméon,  réfugié  à.Constan- 
tinople,  s'était  instruit  dans  les  lettres  grecques,  et 
s'y  était  rendu  très-habile,  trouvant  dans  l'étude  la 
plus  douce  consolation  de  ses  infortunes.  Pour  y  va- 
quer plus  libi;ement,  il  se  retira  dans  jun  monastère. 
Après  la  mort  de  Bogoris  et  de  ses  deux  successeurs, 
dont  le  règne  fut  court ,  il  profita  des  conjonctures 
qui  se  trouvèrent  favorables.  Les  vœux  de  la  nation 
l'appelaient  au  trône  :  il  quitta  l'habit  de  moine,  pour 
prendre  la  pourpre,  et  rentra  en  possession  du  do- 
maine de  ses  pères.  Indigné  du  mépris  que  l'empe- 
reur semblait  faire  des  Bulgares,  qui,  depuis  soixante- 
quatorze  ans,  n'avaient  rien  entrepris  contre  l'empiï*» 
il  se  mit  en  campagne  à  la  tête  d'une  belle  an»*- 
Léon,  de  son  côté,  fait  marcher  ses  troupes  sous  la 
conduite  de  Procope, surnommé Crinitès  ;  il  lui  donne  , 


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(An  889)  LIVRE   LXXII.  LEOW   VI.  34 ^ 

pour  lieutenant-général  l'arménien  Curtice,  renommé 
pour  sa  valeur.  Grand  nombre  de  seigneursr  et  d'offi- 
ciers de  la  cour  veulent  être  de  cette  expédition.  La 
bataille  se  livre  en  Macédoine,  les  Grecs  sont  taillés  en 
pièces;  Procope  etCurtice  y  perdent  la  vie  ,  Syméon 
fait  couper  le  nez  aux  prisonniers,  et  les  renvoie  à 
Constantinople. 

A  la  vue  de  ces  misérables,  Léon ,  vivement  piqué       zii. 
d'un  si  cruel  affront,  fait  partir  le   patrice  Nicétas  mra^^des" 

Sclerus.  avec  ordre  d'aller  au-delà  du  Danube  sollici-  ^^^"^^"1 
.  .    ,  ^  Cedr.p.596. 

ter  les  Hons[rois,  nouvellement  arrivés  en  ce  pays,  à   Léo. Tact. 

1/1  X  .  1  1      «    1         .  J,/  '     c.i8,art.46 

passer  le  neuve  et  a  se  jeter  dans  la  Bulgarie.    C  était     etseqq. 
sans  doute  une  conduite  imprudente;  et  l'exemple  de  Porph.  de 
tant  d'autres  Barbares ,   qui  avaient  chèrement    fait  ^^V^^'s?* 
payer  à    l'empire  lessecours  qu'ils  lui  avaient  prêtés ^"'p^' ^î|* 
quelquefois ,  devait  avertir  Léon  de  ce  qu'il    avait  à  j^/î^^'  ^^ 
craindre  d'une  alliance  si  formidable.  Cette  nation  est  Annal.  Met. 
encore  aujourdhui  assez  célèbre  pour  mériter  quon  DeOnignea, 
en  recherche  l'origine.  Mais  il  est  difficile  d'en  suî-  Huns,t.a, 
vre  la  trace;  et  les  auteurs  qui  en  ont  parlé  ne  s'ac-    ^'sniv.** 
cordent  pas.  Je  suivrai  l'opinion  qui  me  parait  la  plus  Mém.*°I^^d! 
vraisemblable.  Le  nom  de  Hongrois ,  que  nous  leur  *•  ^J^'^Jj^**^ 
donnerons   pour  nous  conformer  à.  l'usage,  ^^^^^^^  y^^^'Jf  i 
qu'une  dénomination  générale,  qui  marquait  leur  des-  t.  a, p.  656* 
cendance   des    Huns.   Ce  sont   les  mêmes  que    l'on 
trouve  désignés  dans  l'histoire  des  siècles  précédents 
par  le  nom  d'Hunnogures.  Ils  sont  souvent  appelés 
Turcs  par  les  #iteurs  grecs,  nom  que  les  Orientaux 
donnaient  à  tous  les  peuples  nomades.  Leur  nom  pro- 
pre était  celui  de  Magiars;  c'est  ainsi  qu'ils  se  nom- 
maient eux-mêmes.  Vénus  autrefois  avecles  autres  Hùns 
des  extrémités  de  l'Orient,  il  s'établirent  vers  les  souf- 


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34a  HIS'^OIRE  DU  BAS-EMPIRE.  (An  «89.) 

ces  du  Jaïck,  soit  qu'ils  fussent  demeurés  en  ce  pays- 
là,  lorsque  leurs  compatriotes  passèrent  le  Yolga;  sok 
qu'ils  y  fussent  retournes  après  la  mort  d'Attila^  dans 
cette  horrible  confusion  qui  détacha  et  détruisît  tou- 
tes les  parties  de  son  vaste  empire.  Chassés  ensuite 
par  les  Patzinaces,  leurs  voisins,  les  uns  reculèrent 
vers  rOrient,  ou  pénétrèrent  dans  les  contrées  méri- 
dionales vers  Derbend  et  la  Circassie  ;  les  autres  s'a- 
vançant  vers  l'Occident ,  s'arrêtèrent  quelque  temps 
vers  les  sources  du  Tanaïs;  mais,  toujours  poursuivis 
par  les  Patzinaces ,  ils  passèrent  le  Borysthène^  t^ave^ 
sèrent  la  Moldavie,  où  ils  s'établirent  ensuite,  et  en- 
trèrent dans  le  pays  d'Erdel;  c'était,  selon  une  conjec- 
ture très-vraisemblable,ceque  nous  nommons  la  Traa- 
sylvanie.  Elle  faisait  partie  de  la  grande  Moravie,  qui 
comprenait  alors  toute  la  Hongrie  d'aujourd'hui,  a 
laquelle  les  Hougrois  donnèrent  leur  nom, après  l'avoir 
conquise.  Selon  Liutprand,  ce  fut  Arnoul,  roi  de  Ge^ 
manie,  qui  appela  les  Hongrois  à  son  secours  contre 
Zuentiboid,  vassal  révolté.  Ces  diverses  émigrations  ont 
fait  donner  à  ces  hordes  de  Huns  le  nom  deTurcs,  d'Aba* 
res,  de  Pannoniens,  parce  qu'ils  ont  occupé  sur  le  Da- 
nube le  même  pays  qu'avaient  possédé  les  Abares. 
Lorsqu'ils  arrivèrent  en  ce  pays,  ils  étaient  au  noœ- 
MoBurs  des  brc  de  dcux  cent  seize  mille  hommes,  divisés  en  cent 

Hongrois.  -,- 

huit  tribus,  chacune  de  deux  mille  hommes,  sans 
compter  les  femmes  et  les  ^fants.  Au  rapport  a«8 
historiens,  nulle  nation  ne  fut  jamais  fftus  féroce.  Sans 
foi,  sans  religion,  parfaitement  semblables  aux  Huns  9 
leurs  ancêtres,  ils  n'avaient  d'autres  demeures  que 
leurs  chariots ,  errant  sans  cesse  et  ne  vivant  4^^  « 
de  leur  chasse,  de  leur  pêche,  ou  de  miel,  de  cw^ 


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(ÀMêS^)  LIVRE   LXXII.  LÉON   VI.  343 

crue,  et  du  lait  de  leurs  troupeaux.  Ils  n'étaient  vêtus 
que  de  peaux  de  bétes,  à  demi-^nus,  quoique  sous  un 
climat  rigoureux.  Robustes,  infatigables,  inhumains, 
ils  égorgeaient  les  prisonniers,  buvaient  leur  sang,  et 
leur  mangeaient  le  cœur,  qu'ils  regardaient  comme  un 
remède  à  plusieurs  maladies.  La  tête  toujours  rasée , 
pour  ne  point  donner  prise  à  leurs  ennemis,  ils  passaient 
leur  vie  à  cheval.  Ils  étaient  fiers,  séditieux,  remuants, 
impétueux,  mais  sombres  et  taciturnes ,  plus  prompts 
à  frapper  qu'à  parler.  Les  femmes,  aussi  féroces  que 
leurs  maris,  tailladaient  elles-mêmes  le  visage  de  leurs 
enfants  dès  qu'ils  naissaient,  avant  que  de  les  allaiter, 
pour  les  accoutumer  à  supporter  les  blessures.  On 
ne  leur  apprenait  qu'à  manier  les  chevaux  et  à  tirer 
de  l'arc  ;  ils  y  devenaient  fort  adroits ,  et  se  servaient 
rarement  de  l'épée. 

Ils  «ne  campaient  point  dans  des  retranchements  ;  xit. 
mais,  jusqu'au  jour  du  combat,  ils  étaient  séparés  par  nière  de 
tribus  et  par  familles.  Ils  distribuaient  autour  d'eux  ^^^  ^ 
des  postes  avancés,  fort  près  les  uns  des  autres,  de 
crainte  de  surprise.  Dans  les  batailles,  ils  ne  se  divi- 
saient pas  en  trois  corps  comme  les  Grecs  ;  ils  ne  for- 
maient qu'une  seule  masse,  séparée  par  de  petits  in* 
tervalles,  avec  une  réserve.  Ils  donnaient  beaucoup  de 
profondeur  à  leurs  files,  et  plaçaient  derrière  eux  les 
chevaux  qu'ils  avaient  de  reste  ;  car  ils  en  nourris- 
saient un  très-grand  nombre.  Ils  les  attachaient  les 
uns  aux  autres,  pour  leur  servir  de  barrière.  Us  ai- 
maient à  combattre  de  loin,  et  savaient  employer 
toutes  les  ruses  de  la  guerre,  embuscades,  fuites  si- 
mulées, retours  imprévus.  Opiniâtres  dans  la  pour- 
suite, ib  ne  se  contentaient  pas  du  butin;  ils  s'acfaar^ 


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344  HISTOIRC   DU  BÂS-EMPl&E.  (Aa  8S9.) 

naient  à  détruire  jusqu'au  dernier  de  leurs  ennemis. 
Ils  craignaient  rinfanterie,et  ne  savaient  pas  combattre 
à  pied.  Pleins  d'estime  pour  leur  nation  et  de  mépris 
pour  toutes  les  autres,  ils  ne  pardonnaient  jamais  aux 
déserteurs,  et  leur  cruauté  naturelle  les  rendait  même 
impitoyables  pour  les  Êiutes  les  plus  légères.  Cest 
ainsi  qu'on  nous  dépeint  cette  nation ,  qui  fit  alors  trem- 
bler l'Empire ,  qui  s'empara  de  la  grande  Moravie  et 
d'une  partie  de  la  Pannonie,  et  qui  fut,  pendant  un 
siècle,  le  plus  terrible  fléau  de  l'Italie  septentrionale. 
ÂM  890.  ^^  peuple,  qui  ne  connaissait  encore  ni  For  ni  l'ar- 
XV.       gent,  ébloui  des  présents  que  lui  apportait  Nicétas, 

Uou  M  sert  •  •■      1  1  •    j>  •.      j 

desHoDgrois  ct  uou  moius  avide  de  sang  et  de  carnage,  promit  daU  l 
Bulgares!   taqucr  Ics  Bulgares,  et  donna  des  otages  de  sa  parole. 
Cedr.p. 596,  L'empereur,   assuré   de  cette  diversion,  prépare  un 
Léo,  p.  477.  grand  armement  de  terre  et  de  mer  ;  il  donne  au  pa- 
17^/177»   ^i*ice  Eustathe  le  commandement  de  la  flotte,  et  celui 
CoJis't.     des  troupes  de  terre  à  Nicéphore  Phocas ,  qu'il  avait 
adi?i^p/c.  fai^  général  de  ses  armées  après  la  mort  d'André.  Ce- 
incert-^con-  Pendant,  voulant  amuser  le  roi  bulgare  par  une  fausse 
^r©' M?'   négociation,  tâmdis  que  ses  troupes  marchaient  vers  la 
ô7«n.p.4Sx  Bulgarie,  il  fait  prendre  les  devants  à  son  questeur 
ssn,  s  A.   Constantinace ,  pour  proposer  un  accommodement  à 
Syméon.  Ce  prince,  étonné  qu'on  vînt  lui  parler  de 
paix ,  dans  le  temps  même  qu'on  portait  la  guerre  dans 
ses  états,  et  soupçonnant  quelque  artifice,  fait  arrêter 
et  mettre  en  prison  le  questeur.  Il  se  met  lui-même 
en  campagne.  A  peine  est-il  en  marche ,  qu'il  apprend 
que  les  Hongrois  ont  passé  le  Danube,  et  qu'ils  rava- 
gent son  pays.  Il  retourne  sur  eux  aussitôt.  Ils  avaient       j 
déjà  repassé  le  fleuve  avec  leur  butin. Mais,  dès  quik       , 
apprennent  l'approche  de  Syméon,  brûlant  d'ardeur 


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(An  890.)  LIVRE   LXXtI.  LléOIT   VI.  345 

de  le  combattre,  ils  reviennent  vers  le  Danube  pour 
le  traverser  de  nouveau.  Syméon,  rangé  en  bataille , 
les  attendait  sur  l'autre  rive.Eustathe,  ayant  remonté 
le  fleuve,  les  prit  sur  ses  vaisseaux.  Mais  l'abordage  de- 
venait presque  impraticable,  par  la  précaution  qu'avait 
prise  Syméon  de  fermer,  avec  de  fortes  chaînes  de  fer, 
l'unique  endroit  où  ils  pouvaient  descendre.  La  har- 
diesse d'un  seul  homme  les  tira  de  cet  embarras  :  Mi- 
chel Barcalas,  premier  pilote  de  la  flotte ,  se  jette  dans 
une  barque,  suivi  seulement  de  deux  matelots;  et, 
malgré  une  grêle  de  traits  qui  pleuvaient  sur  lui  de 
dessus  la  rive ,  il  va  couper  la  chaîne  à  grands  coups 
de  hache ,  et  ouvre  le  passage.  Les  Hongrois  sautent 
aussitôt  sur  le  bord ,  tombent  sur  les  Bulgares  avec 
fureur,  et  les  taillent  en  pièces.  Syméon,  échappé  du 
carnage,  s'enfuit  à  Dristra  ;  c'est  ainsi  qu'on  nommait 
dès-lors  l'ancienne  Dorostole.  Les  Hongrois  vainqueurs 
envoient  demander  à  l'empereur  de  l'argent,  au  lieu 
des  prisonniers  bulgares  qu'ils  offrent  de  lui  remettre. 
Léon  y  consent  et  les  achète.  Syméon,  quoique  abattu 
par  cette  défaite,  ne  perd  pas  courage;  mais,  afin  d'a- 
voir le  temps  de  réparer  sa  perte ,  il  fait  à  son  tour 
des  propositions  de  paix,  et  travaille  en  diligence  à  ré- 
parer ses  forces.  X'empereur  donne  dans  le  piège:  il 
envoie  pour  traiter  avec  lui  Léon  Cbérosphacte,  et  rap- 
pelle imprudemment  son  armée  et  sa  flotte.  I>orsque 
le  député  grec  arriva ,  Syméon  était  déjà  en  état  de 
prendre  sa  revanche.  Il  fait  mettre  aux  fers  le  député, 
sans  vouloir  même  l'entendre,  passe  le  Danube,  et  va 
chercher  les  Hongrois  dans  leur  pays.  Ceux-ci  ne  s'at- 
tendaient à  rien  mQins  qu'à  une  pareille  irruption  :  ils 
sont  battus;  leur  pays  est  mis  à  feu  et  à  sang  ;  et  le  roi 


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346  HISTOIRE  DU   hàS-lEMVfBLE.  (àm^) 

bulgare,  glorieux  de  sa  victoire,  maode  fièremeat  à 
l'empereur  qu'il  n'a  de  paix  à  espérer  quaprès  lui 
avoir  rendu  ses  sujets  prisonniers.  L'empereur  quiavait 
désarmé,  intimidé  par  la  défaite  des  Hongrois,  ac- 
cepte cette  honteuse  condition.  Il  remet  les  prisonaiers 
entre  les  mains  d'un  seigneur  bulgare ,  qui  ramenait 
Chérosphacte  à  Constautinople.  Léon  ne  gagna  dans 
cette  expédition  que  l'affront  d'avoir  payé  aux  Hon- 
grois la  rançon  des  Bulgares,  et  de  les  avoir  r«idus 
à  Syméon  sans  rançon. 
Ah  891.  Nicéphore  Phocas  jouissait  de  toute  la  faveur  dfl 
»▼!•      prince.  Stylien,  qui  avait  augmenté  la  fortune  de  ce 

Générosité    *^  .  -^  .       1.  1  i_  Vr.« 

de  Nice-    courtisan,  crut  pouvoir  disposer  de  son  honneur,  vou- 
PhôTal     lant  jeter  un  voile  sur  le  concubinage  de  sa  fille,  ^ 
J^Tar^aS  donner  aux  enfants  qui  en  pourraient  naître  un  père 
'a6.     '  apparent,  il  fît  à  Nicéphore  la  proposition  d'épouser 
incert.  con-  Zoé.  Léou  saus  doutc  entrait  sourdement  dans  cette 
"aîi*  ^'   sombre  intrigue,  et  Nicépbore  ne  devait  être  mari  de 
famTuig.   Zoé  que  de  nom.  Mais,  incapable  de  se  prêter  à  ces 
p.  149      jnfames  complaisances,  il  s'y  refusa  sans  balancer;  cl 
Stylien  irrité  s'en  vengea  par  la  calomnie.  Il  lui  fitoter 
tous  ses  emplois.  Cependant  les  incursions  des  Sar- 
rasins obligèrent  bientôt  le.  prince  d'avoir  recours  a  ce 
guerrier  expérimenté.  Nicéphore  fut  fait  gouverneur 
de  Lydie ,  et  eut  ordre  de  marcher  vers  la  Syrie.  1» 
ravagea  tout  le  pays  des  Sarrasins,  et, se  voyant  enyï- 
ronné  d'une  armée  plus  forte  que  la  sienne,  il  &^^^' 
lumer  dans  son  camp  grand  nombre  de  feux»  ^^ 
campa  pendant  la  nuit,  emportant  tout  son  butin,»** 
en  donner  aucun  soupçon  aux  ennemis.  Ce  g^^^^^ 
servit  encore  de  barrière  à  l'Empire  du  côté  de  laSyr*  ? 
pendant  quelques  années.  Il  battit  plusieurs  fois  ici 


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(An  «91.)  LIVRE   LXXII.  LÉOIT  TI.  847 

Sarrasins.  C'est  à  lui  que  Léon ,  dans  son  ouvrage  ée 
Tactique,  attribue  l'invention  d'une  sorte  de  chausse* 
trappe,  propre  à  mettre  un  camp  en  sûreté  contre  une 
troupe  de  cavalerie,  lorsqu'on  n'a  pas  le  temps  de  se 
retrancher,  ou  qu'un  terrain  trop  pierreux  ne  permet 
pas  de  creuser  un  fossé.  Il  mourut  avant  Léon ,  em- 
portant avec  lui  l'estime  des  honnêtes  gens  de  la  cour, 
et  les  regrets  des  peuples.  Il  laissa  trois  fils,  Bardas  et 
Léon,  dont  il  sera  parlé  dans  la  suite ,  et  Michel,  qui 
avait  embrassé  l'état  monastique. 

L'Italie  n'était  pas  encore   perdue  pour  l'Empire.     ,<▼"• 
Aîon,  prince  de  Bénévent,  étant  mort,  et  ne  laissant    Grecs  en 
pour  successeur  qu'un  enfant  de  sept  ans,  Symbatice,   ^^^^  ^^^ 
général  des  troupes  grecques  en  Apulie,  vint,  le  1 3  juil-      ^«niit. 
let,  mettre  le  siège  devant  cette  ville;  et,  malgré  la  tosp.etibî 
résistance  des  assiégés,  qui  ne  furent  pas  secourus,  il  incert  aût. 
les  força  de  se  rendre,  et  y  entra  le  18  octobre.  La  bL*rd.  tpSd 
prise  de  la  capitale  le  rendit  maître  de  toute  la  prin-  ^^^^  a'g^. 
cipauté.  H  la  gouverna  pendant  deux  ans.  La  plus  ^|^°"^-  ^*- 
grande  partie  de  l'Italie  méridionale  étant  ainsi  re-  7»  «•  34- 1.8, 
venue  sous  la  domination  des   Grecs,  Léon  soumit  Mnrat.  ann. 
les  églises  de  l'Âpulie  et  de  la  Calabre  au  patriarche    p.  198  et  ' 
de  Constantinople.  Les  états  voisins,  tels  que  les  du-  De  viu  an- 
ches de  Gaête,  de  Salerne,  et  celui  d'Amalfi,  nouvel-  ^'^'  ^^^^' 
lement  démembré   du  duché  de  Naples,  reconnais* 
saient  encore  la  souveraineté  de  l'empereur  grec.  Mais 
ces  succès  ne  furent  pas  de  longue  durée:  George, 
successeur  de  Symbatice,  plus  entreprenant  encore, 
mais  moins  habile  ou  moins  heureux,  échoua  devant 
Capoue  et  devant  Salerne,  dont  il  voulait  s'emparer; 
et,  au  lieu  d'acquérir  à  l'Empire  le  domaine  absolu  sur 
ces  villes,  il  fit  perdre  même  le  domaine  honoraire 


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348  HISTOIRE   DU   BAS-EMPIKE.  (Aa  891.) 

qu'elles  avaient  jusqu'alors  conservé  à  l'empereur.  Son 
mauvais  gouvernement,  qui  fut  de  près  de  deux  ans^ 
produisit  encore  un  plus  grand  mal  ;  il  aliéna  le  cœur 
des  peuples.  Les  Grecs  traitaient  les  Bénéventins  en 
esclaves,  pillaient  leurs  biens,  abusaient  de  leurs  fem- 
mes et  de  leurs  filles.  Demander  justice,  c'était  s  ex- 
poser à  de  nouveaux  outrages.  Le  bruit  se  répandit 
même  qu'ils  avaient  dessein  de  mettre  à  la  chaîne  tous 
les  habitants  de  la  ville,  et  de  les  transporter  ailleurs. 
Des  traitements  si  atroces  soulevèrent  tout  le  pays. 
Les  Bénéventins  communiquèrent  secrètement  à  Guai- 
mar,  prince  de  Salerne,  le  désir  qu'ils  avaient  de  se- 
couer le  joug  des  Grecs;  et  Guaimar  invita  Gui,  duc 
de  Spolèt^,  à  se  joindre  à  lui  pour  délivrer  Bénévent 
Théodore,  qui  venait  de  succéder  à  George,  sans  être 
moins  cruel,  était  encore  plus  dissolu.  Se  voyant  as- 
siégé, il  exhorta  les  habitants  à  se  bien  défendre.  £0 
effet  ils  prirent  les  armes ,  et  sortirent  de  la  ville  avec 
les  Grecs  pour  attaquer  les  assiégeants.  Mais,  suivant 
un  accord  secret  qu'ils  avaient  fait  avec  les  deux  prin- 
ces, à  peine  en  furent-ils  venus  aux  mains,  qu'ils  pri- 
rent la  fuite, et  entraînèrent  après  eux  dans  la  ville  les 
soldats  de  Gui  et  de  Guaimar.  Théodore  fut  pris,  et 
racheta  sa  liberté  par  une  rançon  de  cinq  mille  sols 
d'or,  qui  font  près  de  quatre-vingt  mille  livres  de  notre 
monnaie.  Gui  resta  maître  de  Bénévent,  et  les  habitants 
l'élurent  pour  leur  prince.  Ainsi  les  Grecs,  que  leur 
orgueil  joint  à  la  corruption  de  leurs  mœurs  rendait 
insupportables  à  toute  la  terre,  ne  purent  conserver 
que  quatt*e  ans  une  si  importante  conquête. 
Ah  89%         Le  roi  bulgare  ne  cherchait  qu'un  prétexte  pour  re- 
commencer la  guerre.  Il  prétendit  que  l'empereur  aval 


XTin. 
Les  Grecs 


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J 


(AnSga.)  LIVRE   LXXII.  L^ON   VI.  349 

retenu  une  partie  des  prisonniers  ^  et,  rompant  toute  défaits  par 
négociation,  il  mit  sur  pied  une  nombreuse  armée.  J*^""**] 
Léon,  déterminé  à  faire  un  grand  effort  pour  réduire  ^  l'^'^^' 
ce  prince  intraitable,  joignit  ses  troupes  d'Asie  à  celles        i77* 
d'Europe;  il  mit  à  leur  tête  Léon  Catacale,  qui  avait   Porph.  de 
succédé  à  Nicéphore ,  et  Théodose,  grand-maître  de  la  incert.  con- 
garde*robe ,  dont  il  estimait  la  prudence  et  le  courage.      ^Ma.^* 
Les  deux  armées  se  rencontrent  sur  la  frontière,  et  se   ceorg'.V 


choquent  avec  fureur.  Le  combat  fut  opiniâtre  et  le  Abnifedk, 


carnage  horrible.  Presque  toute  l'armée  grecque  y  pë-      ***• 


p- 
»p- 

Abalfang. 

rit  avec  Théodose,  qui  fut  pleuré  de  l'empereur.  An-  Chron.tr.p. 
gurinès.  Arménien  d'une  taille  gigantesque^  et  re- 
nommé pour  sa  force  et  sa  valeur,  fut  tué  à  la  tête 
des  gardes  qu'il  commandait.  Son  valet  nommé  Mélias, 
homme  intrépide  et  d'un  génie  au-dessus  de  sa  condi- 
tion, s'étant  retiré  dans  l'Arménie-Mineure,  releva  la 
ville  de  Lycande,  alors  déserte  et  ruinée;  il  en  fit  une 
forteresse ,  d'où  il  courait  sans  cesse  sur  les  Sarrasins. 
Elle  fut  bientôt  peuplée  d'Arméniens.  Le  territoire,  au- 
paravant inculte  et  sauvage,  fut  cultivé  et  devint  riche 
en  troupeaux.L'empereur  en  iBt  une  province,  qui  fut 
nommée  le  Thème  de  Lycande  :  elle  s'étendait  en  lon- 
gueur entre  le  mont  Amanus  et  l'Euphrate  dans  l'an- 
cienne Comagène.  Léon,  pour  fortifier  son  armée,  avait 
donné  des  armes  aux  Musulmans  qu'il  tenait  prison- 
niers; ils  montrèrent  tant  de  bravoure  au  milieu  même 
de  cette  sanglante  défaite ,  qu'à  leur  retour  ce  prince 
ingrat  et  timide,  au  lieu  de  les  récompenser,  les  dé- 
sarma par  crainte,  et  les  dispersa  dans  les  provinces. 
Cette  triste  nouvelle  fut  suivie  de  deux  autres.  Les 
Chersonites  avaient  assassiné  Syméon,  leur  gouver-  ' 
neur ,  et  le  Sarrasin  Thagagi,  étant  sorti  de  Tarse,  ra- 


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350  HISTOIRE   DU   BAS-EMPIRE.  (la  89».) 

vageait  la  Cappadoce,  et  s'était  emparé  de  plusieurs 
places ,  entre  lesquelles  était  une  importante  forteresse, 
nommée  le  château  de  Coron.  Léon ,  hors  d'état  de 
combattre  ces  ennemis,  demanda  et  obtint,  sans  doute 
à  force  d'argent ,  une  suspension  d'armes  et  un  échange 
de  prisonniers.  Il  rendit  deux  mille  cinquante^quatre 
Sarrasins ,  et  reçut  un  pareil  nombre  de  ses  sujets. 

^  ™- .         Léon  pouvait  bien  éviter  les  dang^ers  de  la  ffuerre; 

dëcourerte  mais  Ic  déré£[lement  de  sa  vie  et  les  intrigues  de  sa 

ptr  Zoé.  r  .  1  1    .  1  11.         H 

Cedr.p.  597,  cour  faisaient  de  son  palais  un   champ  de  bataille. 
Leofpf478,  Stylien,abusant  de  son  pouvoir,  lui  donnait  de  la  ja- 
ZonV^â,      lousie;  la  défiance  mutuelle  commençait  à  diviser  le 
incerL^con-  P''i"ce  ct  le  ministre,  et  il  y  a  grande  apparence  qt» 
tinuat,  p.    Stylien  eut  quelque  part  à  une  conjuration  qui  setra- 
Sym.  p.  46a.  mait  alors  contre  Léon.  L'empereur  était  allé  passer 
553,  554.   quelques  jours  dans  un  lieu  enchanté  à  la  pointe  du 
golfe.  Stylien  était  du  voyage,  et  sa  fille  en  faisait  1« 
principal  amusement.  Mais  on  laissait  à  G)nstantiuo- 
ple  l'impératrice  passer  une  partie  des  jours  et  des 
nuits  en  prière  dans  l'église  de  Blaquernes.  Plusieurs 
officiers  du  palais ,  dont  la  plupart  étaient  parents  ofl 
alliés  de  Stylien,  et  avec  eux  son  fils  même,  formè- 
rent le  complot  d'assassiner  l'empereur  pendant  la  nuit 
Zoé,cwichée  avec  le  prince,  entendant  du  bruit  dans 
une  cour  voisine,  se  lève  aussitôt,  et,  regardant  ptf 
une  fenêtre ,  elle  aperçoit  des  mouvements  qui  '"^ 
donnent  des  alarmes. Elle  éveille  l'empereur,  qui >  ^^ 
tant  à  demi-nu  dans  une  barque,  regagne  promp»^ 
ment  Constantinople,  et  rentre  au  point  du  jourdao» 
son  palais.  Soit  que  Zoé  n'eût  reconnu  personne  ans 
l'obscurité ,  soit  qu'elle  ne  voulût  pas  déceler  son  frère» 
on  s'en  tint  au  simple  soupçon,  sans  faire  aucune 


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(An  8g».)  LIVRE   IXXll.  LÉON   Vï.  35 1 

cherche.  L'empereur  se  contenta  de  casser  le  com- 
mandant de  sa  garde  de  nuit,  et  de  donner  son  of- 
fice à  Parde,  fils  de  Nicolas,  capitaine  des  gardes 
étrangères.  Nicolas  était  gendre  de  Stylien  ,  ayant 
épousé  la  sœur  de  Zoé  ;  mais ,  jaloux  du  crédit  de  son 
beau-père 9  il  épiait  toutes  ses  démarches,  et  en  ren- 
dait compte  à  l'empereur,  dont  il  était  devenu  le  con- 
fident intime.  Stylien,  pour  le  moins  aussi  fier  que  le 
prince,  rompit  tout  commerce  avec  lui,  et  cette  brouil- 
lerie  dura  quelques  jours  :  mais  Léon  Théodotace, 
maître  du  palais,  entreprit,  en  vue  de  ses  propres 
intérêts,  de  les  réconcilier,  et  y  réussit. 

Sur  la  fin  de  cette  année  mourut  l'impératrice  Théo-    j^"'^^ 
phano.  Elle  n'avait ^eu  de  Léon  qu'une  fille,  qui  était  Théopbano. 
morte  en  naissant.  Cette  princesse  pieuse,  au  milieu  ^^^5^^^' 
d'une  cour  dissolue,  humble  au  faîte  de  la  grandeur,  Léo,  p.^479r 
ne  s'occupa  que  de  prières  et  d'aumônes.  Les  Grecs  la  Zon.t.  a,p. 
mirent  au  nombre ^ des  saintes,  et  ils  font  encore  sa   Giycas,p. 
fête  le  16  décembre.  Ils  lui  attribuèrent  des  miracles  Joël,  p.  179. 
après  sa  mort.  Elle  en  avait  fait  un  perpétuel  pen-    tmaat.  p. 
dant  les  douze  années  de  son  mariage  :  ce  fut  de  souf-  sjm!^^.\es. 
frir  sans  jalousie  et  sans  impatience  les  infidélités  de   ^^^^%5l[ 
son  mari  et  les  mépris  de  Zoé.  Aussi  Léon,  qui  l'avait   ^!^^^^^l 
ai  peu  ménagée  pendant  sa  vie,  respecta-t-il  sa  mé-     p-  »*ï- 
moire;  et, quoique  toujours  esclave  de  nouvelles  pas- 
sions, il  fit  bâtir  sous  son  nom  unp  magnifique  église, 
où  son  corps  fut  déposé.  Ces  pieux  hommages  étaient 
plus  faciles  à  rendre,  et  sans  doute  moins  agréables  à 
cette  sainte  princesse,  que  de  se  corriger  lui-même. 

Peu  de  jours  après  la  mort  de  Théopbano,  Léon    a»  893. 
épousa  Zoé.  Ce  mariage  avec  une  femme  qui  avait    ,  ^^• 

*  ^  .  .       -,  Léon  epoiue 

empoisonne  son  premier  mari,  fut  un  nouveau  scan-       zoé. 


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35a  HISTOIRE  DU   BAS-EMPIRE.  (A.n  89I) 

dale.  Il  paraît  que  l'empereur  n'osa  même  s^adresser 
au  patriarche  son  frère  pour  en  recevoir  la  bénédic- 
tion nuptiale.  Il  employa  un  clerc  du  palais,  nommé 
Sicape ,  que  le  synode  patriarcal  eut  le  courage  d'in- 
terdire, pour  s'être  prêté  à  ce  ministère. Zoé,  devenue 
Auguste, ne  jouit  pas  long-temps  du  rang  qu'elle  avait 
acheté  par  tant  de  crimes  :  elle  mourut  au  bout  de 
vingt  mois;  et ,  tandis  qu'on  faisait  les  préparatifs  de 
ses  funérailles ,  il  y  eut  quelqu'un  assez  hardi  pour 
graver  ces  mots  au-dedans  du  cercueil,  malheureuse 
fille  de  Babylone.  Un  auteur  qui  écrivait  cinquante 
ans  après ,  rapporte  un  fait  qui  ne  serait  pas  exempt 
d'impiété  ni  de  folie  :  Ijéon,  dit-il,  fit  construire  une 
église  sous  le  nom  de  Sainte-Zoé,  qu'on  croit  avoir 
répandu  son  sang  pour  la  foi  dans  la  persécution  de 
Dioclétien ,  et  il  y  transféra  la  corps  de  la  nouvelle^ 
Zoé.  Était-ce  pour  abuser  de  l'équivoque,  et  Ëiire  par- 
tager à  sa  concubine  les  hommages  que  l'église  rendait 
à  une  sainte  martyre? 
xxn.  L^  patriarche  Etienne  finit  aussi  ses  jours  cette  an- 

iî!tîurch«   ^é®  j  ™2i^s  avec  moins  de  remords.  Un  auteur  contem- 
Cedr^pIsoS.  P^^^'"^    rapporte  que    ce    prélat   vertueux ,  voulant 
Léo,  p.  477-  calmer  les  ardeurs  importunes  de  la  jeunesse,  se  ré- 
176-       froidit  tellement  Testomac  par  des  remèdes,  qu'il  en 

Joèl.  p.  179.  *^  '   / 

Greg.  vita   mourut.  Il  cut  pour  successeur  Antoine  Cauléas,  de  , 
incert!  con-  famille  noble,  et  abbé  d'un  monastère.  Antoine  ne  sié- 

^"'mo/'  gca  qu<î  deux  ans.  Il  fut,  ainsi  que  son  prédécesseur, 
^Sôrg.^P^  ™**  ^"  nombre  des  saints.  Le  schisme  de  Photius  était 
Pi  ^fdW  entièrement  éteint  :  cependant  l'empereur  voulut  d- 
ï^Y'^iH"'  menter  la  réconciliation  de  l'Église  grecque  avec  l'É- 

art  16.     glise  romaine  par  un  concile ,  auquel  Antoine  présida, 

Oriens  i  1  i 

Christ.  1 1,  et  dont  les  actes  sont  perdus. 

p.  a5o. 


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XA««93»)  LivRn  hxmu        Lie»  vi.  353 

Quoique  Etienne  n6  témoi^âjk  nulle  complaisance      xxui. 
pour  le».dé$ardres  de  l'eraperciur  son  frère,  Léon  lui   ^*'^Jj®^*'^**''° 
adressa  sw  nouvçlks  lois  concernant  les  matières  ec-^  Basiliques, 
clésiastiques.  Ce  prince)  acheva  le  grand  recueil  des  de  jure  dv! 
Basiliques ,  entrîepris  et  commencé  par  son  père.  De-  '°"'  5.  ''  ''* 
puis  Justiniçn  jusqujà  Phoça^,  le  droit  de  Justinien  ^cié7'i!"54i 
avait  été  en  vigueur  à  Cou^tj^ntinopleyet  la  justice  se  ç,.^^^-  '^-. 
rendait  ,en  langue  latine*  Depuis  Phocas,  elle  se  rendit  ^'p-  ^-  7>  «• 
en  langMe  grecque;  mais  les  lois  de  Justinien  élaient 
encore  en  usage»  Elles  avaient  été  traduites  en  grec  du 
temps  même  de  >ce|;  empereur,  ou  peu  de  temps  après 
lui.  On  y  joignit  les  constitutions  des  princes  posté- 
rieurs. La  jurisprudence  romaine  s'affaiblit  dé  plus  en 
plus  jusqu'à  Basile.  Ce  prince,  jaloux  peutrétre  de  la 
gloire  de  Justinien,  voulut  être  l'auteur  d'un  nouveau 
corps  de  droit.  Il  fit  compiler  un  abrégé  des  sources 
principales  de  la  jurisprudence  :  cet  ouvrage,  nommé 
par  les  Grecs  Procheiron,  c'est-à-dire  Manuel  fêlait 
divisé  en  quai^nte. titres.  Léon  le  retoucha  et  le  ré- 
digea en  une  meilleure  forme.  Il  publia  de  plus  cent 
treize,  nouvelles,,  et  des  épitpmes  ou  abrégés  d*un  â$-» 
se2  bon  style.  Mais  l'œuvre  à  laquelle  il  donna  le  plus 
de  soin^  fut  la  compilation  des  Basiliques,  divisées 
en  soixante  livres*  Il  s'aida  dans  ce  t||vàil  des  eon-» 
seils  de  ce  même  Symbaticé  qui  prit  Bénévent.  Les 
livres  de  Justinien /lui  fourniront  le 'fond  et  lamé-' 
ihode;  il  y  ajouta  lés  constitutions  des  empereurs  sui- 
vants, retranchant  ce  qui  était  superflu,  oDQtradic- 
toîi'e ,  où  abrogé  par  Viisage.   Ces  Basiliques  furent 
j^ommées.  Premières  y  parce  qu'il  en  parut  d'autres  en- 
suite.' Gonstantiti  Pôrphyi^ogénète ,  fils  de'Léon ,  les  re*  , 
Vit.et  les  corrigea  ;  cette  seconde  édition  prit  le  noni  de 

Tome  XIIl,  ^^ 


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354  HISTOÎRB  DU   BAS-KBIPIRB.  (Aa  893.) 

BasHiques  pesiérieures.  Ces  sofi^nté  livres  furent  ap- 
pelés Basiiiqzies ,  soit  parce  que  Basile  en  fut  le  pre- 
mier auteur,  soit  plutôt  encore  parce  qu'ils  renfer- 
maient les  lois  des  empereurs,  nommés  en  grec  BasUeis. 
On  oublia  le  recueil  de  Justinien.  Basile,  Léon,  Con- 
stantin, traitèrent  l'ouvrage  de  ce  prince,  comme  il 
avait  traité  les  écrits  des  anciens  jurisconsaltes,  dont 
il  avait  composé  les  Pandectes.  Le  nouveau  corps  de 
droit  fut  la  loi  des  tribunaux  jusqu'à  la  fia  de  l'em- 
pire; et,  tandis  que  dans  ^Occident  la  jurisprudence 
était  ensevelie  dans  les  ténèbres  de  la  barbarie ,  die 
se  conservait  en  Orient  avec  les  débris  de  l'ancienne 
littérature;  en  sorte  que  personne  ne  pouvait  acqué- 
rir le  titre  de.Mvant,  qu'il  n'eût  étudié  à  Constan- 
tinople  *.       • 


^  ÏA$  BcBiUqaes  Mfot  asats  coiauu» 

par  la  bdle  édition  do  Fabrotte,  où 
le  texte  grec  est  accompagné  d'une 
traduction  kitiné.  Qtiant  anx  é^to- 
mes  de  Léon-lc-Sage  »  Lenuclaiien  en 
a  publié  un  en  entier  dans  son  Jus 
graeco^romantun ,  t.  H,  p«  78  sqq., 
et  des  extraits  d*an  autre  yibid.,  p«' 
x3x-£34.  Plusieurs  manuscrits  de 
la  Bibliothèque  dn  Roi ,  entre  au- 
iras  ks ,tt<^  z34plry94»  1730, con- 
tiennent des  X  copies  du  même  ou- 
vrage. Mais ,  quelque  diligence  que 
ploftipnvf.  jofisoQnadltes'  céièbces»  . 
M.  Pardessus^  membre  de  1* Acadé- 
mie des  Inscriptions ,  et  M.  Biener, 
de  Bét\3Èii*iÊAeiikt  pa  fifÎM,  nous  n*<a^ 
▼ons  encotç.  pu  rptr«u?er  TongioM 
d'un  épitome  du  même  empereur,' 
dont  il  existe  une  tltidnction  en 
géorgien,  faite  à  la  fin  du  xvn*  aiècle 
ou  au  commencement  du  xviii*,  par 
leroi  Vakhtang  V.  Cet  ouvrage  en 


41 S  pangraptiea,  on  l'on  ae  remar' 
que  aucune  division  en  titres,  ^mme 
dans  les  épi  tomes  ci-dessns  roention- 
né»,  foriuë  Ib  secoifde-ptfrtie  àa  code 
géorgief),  ^pus  If  nom  de  SamarthaU 
Herdzoulit  lois  grecques.  Il  est  ex- 
jt^ît  en  Rentier  des  Instltntés,  du 
Cçde»  des  P^pdectes,  des  Baailiqnes 
et  des  Conciles.  On  peut,  d*après 
l*brdre  des  matièreffi  y  établir  les 
43  lité^s  wivanu  :  I,  i*a,*4e  la 
justice  et  des  juges.  II,  3 ,  des  béré- 
tîquei.  &I,  4*6,  des  ventes  et  acbats* 
£t,  74i5,  lob  nAêÉnê^  aux  prmpéà^ 
tés.  V,  x6-a8,  de  la  prescription. 
Vï,  29-41,  des  transfuges  et  eap- 
tî^w  VII,  4i«5s,  du  vot ,  dn  rapt, 
de  la  4o4omle,  VXJI,  53-63,  des  rois 
et  de  leurs  privilèges.  IX,  64-69, 
d«8  |)leflsnreé  faîtes-  par  l%omnie  on 
par,  lea  a^imanx.  X»  7  0^7  a ,  des  tron- 
vailles.  XI,  73-77,  dn  mariage  ;  id. 
avec  de«  iiérétiqaes.  XII,  7S-83, 


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(An  894.)  lîVre  lxx:ii.         hiov  VI.  35S 

Stylien  ne  survécut  pas  long-teaips  à  sa  fille.  Son    an  894. 
crédit,  n^ayant  pas  d'autre  appui,  tomba  par  la  mott      ^cxiv. 

,      r:.     '     ,  /  '  rr       7  r  ^     Disgrâce    et 

de  Zœ.  L  empereur  écouta  les  murmures  qu  excitait    mort  de 
la  corruption  de  son  riiiniritre;  On  l'accusait  de  ven-  Leo'^^T 
dre  là  justice,  les  emplois,  la  faveur  du  prince ,  et  ï«»>'«'"'-  co°- 
de  ne  donner  aecès  auprès  de  lui  qu'à  ceux  qui  l'ai-       aaS. 
chetaient  de  Mousic  et  d  un  certain  Stauraee,  ses  vm^i       554. 
lets,  plqs  avides  encore  que  leur  maître.  Léon  voulut 
s'assure]^  par  Im-nmême  de  la  vérité  de  ces  plaintes! 
il  se  transporte  cliez  Stylien^  et  rencontre  dans  le  ves-* 
tibule  Staurace  chargé  de  quantité  de  mémoires  et  de 
requêtes  qu'il  allait  présenter.  Il  s'en  saisit,  et  y  voit 
des  preuves  de  l'indigne  trafic  qu'on  faisait  d&  «es 


époax  captifii.  XIIJ,  t4-97f  iB<i«ps-' 
cités  des  femmes.  XIV,  98-99,  do 
Boicide.  XV,  100-106,  dettes  et 
gagea.  XVI,  xo7-x»7,  te»tanentf. 
XV [1, 118-139,  du  roi  et  des  juge8> 
XVIII,  1  ^OM  56,pri vîléges  dû  clergé, 
ténoios.  XIX,  i57,  de  la  sapréma^ 
tie  de  Rome.  XX,  iSS-i^ô,  règle- 
ments poa^  les  esclaves  affranchis. 
XXI,  1 77-1 85, des <loiiatiomk  XXII'^  • 
1 86-199,  àeBJngn  et  des  jogements. 
XXIII,  aoo-aoï,  des  gens  d*égltse. 
XXTV,  ao3-ao8,  eautîons.XXV, 
^09-2x6,    rcigUmeot^  jadiciaires. 

XXVI,  317-228,  des  biens  d'église» 

XXVII ,  3^9,  habits  des  clercs. 
XXyiII,  ft3o-a4i,  égUaes,  aaylqi« 

XXIX,  a4i-25o,  biileu,  serments. 

XXX,  a5i-255,  tuteurs.  XXXI, 
«56^78»  .4p  'foJ.  loiswr  U  pro- 
priété. XXXII,  379-290,  succes- 
sions. XXXIII,  391-306,  exbéré- 
dHk>n.  XXXIV,  3o7-3a3,  dépôts, 
XXXV,  3a4-3a7,  des  sociétés  de 
commerce.  XXXVI,  3  a  8-3  3o,  meur- 
trca.  XXXVII,  )3i-34o,  dénoneia* 


Aîon^téiiioinl.XXXVnX,  341-345^ 
loyers ,  salaires.  XXXIX ,  346-36 1, 
sorciers ,    ero{ioisonnements.     XL , 
36sit376.,  principes  de  droit.  XLI^ 
377-389,  fausse  monnaie,  prisons^ 
XLII,     390-397  ,    des    fiançailles^ 
XLÎIJ ,  398-4  i S ,  règlements  divem 
sur  Vég1ise,ie  serment  et  la  propriété, 
Feà  M.  le  baron  de  Rosenkatopf  ^ 
consèSlIef'<d*étataoi|idirStiînt-P«terft^ 
bonr^,  qm  s^intéressaitii  ce^  rech^r 
ches ,  a  publié  à  Moscou  ,  1829 ,  \e§ 
tîtMs'd*tm  Mamiel  &n  mémeLéon<« 
le^Sage ,  qui  n*ont  également  ascoa 
rapport  k  celtii-ci.   Si  Porigioal  dç 
cette  pièce  ne  se  retrouve  paSj'Ù 
cepie/  pdurra  en  teqiilicq.  La  sejj'* 
tième  partie  da  même  code  géor- 
gien ,  contenant  la  législation  nâtiô" 
;  nsàc  dû  la  Géorgie  en  2^7  urtiëleAV 
•sera  imprimée  cette  atméc',.  par  9u« 
torisation  ^  à   Timprimerie  royale  ^  • 
la  traduction  iraoçaitle  par  Taotear 
de  cette   note ,  eo'  regai-d  du  ua.tfi^ 

B&OSSKT. 

a'3. 


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356  HISTaiREDU   BASrSMPl&S.  (An  894.) 

grâces.  11  fait  aussit^k  traîner  Staurace  hors  de  la 
maison 9  et  ordonne  de  l'enfermer  dans  unmonastère. 
Il  entre  plus  avant,  et  trouve  Mousie  dans  le  même 
état  que  Staurace  :  il  lui  fait  le  même  traitement^  et 
retourne  au  palais,  sans  daigner  voir  Stylien,  qui  sen- 
tît vivement  cette  disgrâce,  et  mourut  de  chagrin  quel- 
ques jours  après. 
XXV.  Tant  que  Stylien  avait  vécu,  Nicolas,  qui  ser- 

conJTwtio*!!.  vait  auprès  de  lui  despion  à  l'empereur,  avait  été  en 
Cedr.  p.    crédit.  Mais,  après  la  mort  du  beau^père,  la  perfidie 
Léo,  p.  479,  du  gendre  étant  devenue  inutile  à  Tempereur,  il  avait 
Zon.^.*a,  p.  beaucoup  perdu  de  sa  faveur.  Basile,  un  de  ses  fils, 
incert!^con-  ^ussi  ambitieux  qu'imprudent  et  étourdi ,  sft  mit  en 
^™^P-    tête  de  se  faire  empereur.  Il  était  lié  d'intrigue  avec 
Sym.p.  463.  y^  hommc  hardi  et  capiable  de   tout  entreprendre, 
554,  555,   nommé  Samonas.  C'était  un  Sarrasin  qui,  ayant  aban- 
donné son  pays  et  sa  loi,  s'était  avancé  par' sa  sou- 
plesse à  la  couf  de  Constantinople.  Basile ,  après  lui 
avoir  fait  promettre  le  secret,  lui  canfia  son  dessein. 
Le  prince^  lui  dit-il,  ne  pouvant  $e  passer  de  femmes 
ne  tardera  pas  à  remplacer  Zoé.  Toujours  esclaffa 
dé  ses  amours^  il  nous  ôtéra  nos  emplois  pour  en 
gratifier  les  créatures  de  la  noui^elle  maîtresse^  qu'il 
fera  sans  doute  impératrice^  et  nous  serons  anéan- 
tis. k^ThscM^oMV^vtut^^'iX  Ipi  développe  tout  le  plan 
de  la  conjuration,  l'exhortant  à  y  prendre  part,'  s'il 
veut  s'élever  aux  plus  hautes  dignités.  Samonas  prt>- 
met  tout,  et,  pour  avancer  sa  fortuné  par  une  voie 
plus  sure  et  plus  courte,  il  va  aussitôt  trouver  rempe- 
reur  :  Prince^  lui  dit-il,  y^  suis  dépositaire  d'unse* 
cret qu il  m'importe  autant  de  cacher,  quà  vous 
de  le  connaître.  Je  périrai  y  si  je  parle;  mais  vous 


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(An.894.)  UVllE   LSatfï.  LÉOTT   VI.  357 

mourrez^  si  je  me  tais.  Le  choix  n^ est  pas  diffidie 
à  un  siget  fidèle.  ^Tk  même  temps  il  lui  découvre  tout 
le  complot;  Gomme  Tempeireur  semblait  se  défier  de 
kl  vérité  de  son  rapport ,  Votre  Majesté  peut  s'en 
assurer  y  lui  dit  Ssimonaê,  Dormez-moi  deux  hommes 
de  confiance;  je  lés  placerai  dans  un  lieu  d'oii, 
jam  être  aperçus^  ils > entendront  tout  de  la  bouche 
mémede  Basile.  Léon  lui  doima  Christophe,  grande 
maître  de  la  garde-robe,  et  Calocyr, chambellan.  8a^ 
monas  les  cache  dans  un  coin  de  la  chambre.  Basile 
i^yvenA  bientôt ;€t  Samonas,  par  ses  questions,  lui 
fait  déduire  le  détail  de  l'entreprise.  Les  espions  ,  de 
retour  au  palais ,  communiquent  à  l'empereur  toute 
la  conversation ,  qu'ils  avaient  mise  par  écrit.  Léon . 
fait  aussitôt  arrêter  les  conjurés;  mais,  naturellement, 
porté  à  la  douceur,  il  se  contenta  de  confisquer  leur» 
biens  et  de  renfernier  dans  des  monastères  ou  d'exiler 
Nicolas,  seÀ  enfants  et  toute  la  famille  de  Stylien.  Sa 
clémemce  épargna  même  la  vie  à  l'auteur  du  complot 
Basile  fut  fouetté,  on  lui  brûla  pudiquement r la. barbe 
et  les  cheveux;  et,  après  avoir  été  promené  ignortiî- 
meudement  par  toute  la  ville,  il  fut  relevé  en  Grèce; 
oii  il  mourut  misérablement. 

Samdnas  fut  magnifiqueitaent  récompensé.  L'empe-    a»  895. 
reur  le  prit  pour  chambellan ,  le  nomma  patricc  et  le  ^^^'  ^^ 
combla  de  richesses.  La  Vie  déréglée  dfe^  <»  nouvea»    ««»onw. 
lavoritet   son  aiçetfémîtié   jetètent  Uti -soupçon  fâ-^   bmI^uu. 
dtïèut  sur  i'èmpereuK  Toûje  la  cour  pliait  devantlui  ; 
il  ne  se  trouva  qu'un  homme  que  son  arrogance  ne 
put  intimider.  C^etait  un  pauvre  anachorète ,  nommé 
Basile.  Des  officiers  qui  traversaient  les  défilés  d^ 
niont  Tanrus,  l'ayant  irenc6n»ré  couvert  de  hafMlons,  ,. 


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358  HISTOIRE   DO   BAS*ZMPIRE»  (Aa  89$.) 

et  daxi^un  extérieur  sauvage,  le  prirent  pour  unes- 
pion  des  Sarrasins;  il  ramenèrent  à  Gonstantinople , 
attaché  à  la  queue  de  leurs  chevaux  ^  et  le  présentè- 
rent à  l'empereur,  qui  le  mit  entre  tes  maiiifi  de  Sa- 
lAQUi^s  pour  l'interroger^  Sa^nonas ,  assis  sûr  un  trib» 
i}9\y  environoé  de  gardes,  et  de  t6ut  le  fiaistede  sa  di- 
gnité, le  fit  venir  en  sa  présence.  On  ne  put  engager 
Basile  à  fléchir  le  genou  devant  son  juge,  oomme 
c'était  la  coutume;  et  Sainonaa  lui  demandant  d'un 
ton  impérieux  qui  il  était  v  quel  était  son  pays  et  son 
nom,  Basile,  sans  perdre  contenance:  Eu  ioi,  lui  dit-il, 
fUies^u  ?  Dans  quel  pays  es^tu  né  ?  Il  savait  que 
Samonas  était  Sarrasjn  de  naissance.  Tu  parles  à  un 
pcUrke^  reprit  Samonas  ^  et  à  un  chambellan  de  Vemr 
pereur.  Eh  bien  1  dit  Basile,  ce&zj:  ^i^/  te  répond  est 
ainsi  que  Ud  un  des  habitants  ik  la  /tfr/«*  Gomme  Sa- 
mohaé  le  traitait  de  scélérat,  et  que  Basile  répliquait  que 
ce  nom  ne  pouvait  convenir  qu'à  ceux  qui  font  des  ac- 
tions criminelles,  Satnonas,  craignant  qu'il  n'en  dit  da- 
vantage,  le  fit  prdmptement  chasser  de  sa  présence, 
et  alla  rapporter  à  l'empereur,  que  c'était  un  malheu- 
reux vagabond  qui  ne  méritait  que  la  misère  »  à  la- 
quelle il  s'était  condamné  lui-même. 
Ak  896.        Aptoine  Cafuléas  étant  mort  après  deux  ans  d'épis- 
Ki"il"ie-  ^^P^*''  ^"^  P^^^  succetoeur  Nicplas-le-Mystique,  ces*' 
My»u<|Be    àrrdire  assess0ur  'S0cfet  du    conseil  de  l'empereur. 
Cedr,  p.    C'était  unhommer  déî  .ifnoeii^s  irréprochables,  mais 
Lco^^*48o  ^^^^  sévérité  inflexible*.,  qui  lui  attira  des  persécu- 
hit'    *  tions  et  des.  disgrâces,  pour  ^Voir  voulu  assujettir  les 
177-178.    passÂoii)^  da    prince,  auxi^règlea  établies  dans  J'égl^e 

Joèl,  p.  179.  XI*» 

incert.  con-  gafccque  v  comme  nous  le  verrons  dans  la  suite, 
sjiii.'^p.  463.      C'éSait  la  coutume  que  T^Apereur,  en  certains  J»*"^ 


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(Aa  8q6.)  LIVAR  LXXII.         IJÉOVf    VI.  35^ 

de  l'année,  fît  un  festin  solennel,  auquel  étaient  ad-   Georg.  p. 
rois  les  seigneurs  et  les  principaux  officiers  de  la  cour;  PagiadBar. 
et,  tandis  qu'il  traitait  les  hommes,  sa  femme,  sa  fille  cJu^T  i, 
ou  sa  sœur,  mais  toujours  une  personne  revêtue  du     p*  *^*^- 
titre   d'Auguste ,  faisait  les  honneurs  de  la  table  des     ".™- 

,  Troisièiiîc 

femmes  :  le  faible  prince,  esclave  de  l'étiquette,  n^eut  mariage  de 
point  d'autre  raison  pour  couronner  Anne^  fille  de 
Zoé,  qui  ne  pouvait  avoir  au  plus  que  trois  ans.  Mais, 
incapable  de  supporter  un  long  veuvage ,  accoutumé 
à  être  gouverné  par  des  femme»,  il  se  donna  bientôt 
à  lui-même  et  à  l'empire  ujie  souveraine.  Il  épousa 
une  jeune  phrygienne  parfaitement  belle,  et  la  fit 
aussitôt  couronner ,  en  lui  donnant  le  nom  d'Eudo* 
cie.  U  la  perdit  encore  avant  Tannée  révolue.  Elle 
mourut  en  accouchant  de  son  premier  enfant,  qui  ne 
survécut  pas  à  sa  mère. 

Les  cinq  années  suivantes  ne  fournissent  aucun    ^  ^^' 
.         événement  :  il  paraît  que  Léon ,  enchaîné  par   une    Nouvelle 

s  11  .  *  1  passion  de 

j         nouvelle  passion,  ne  s  occupa  que  de  ses  amours,      Léou. 

js'abandonnant  à  cette  molle  indolence  qu'inspire  la  ^it^/^^'^^] 

volupté.  U  se  laissa  prendre  aux  charmes  d'une  se-  ^^n.  *.  a,  p. 

...  177-178. 

cqnde  Zoé,  surnommée  Carbonopsine,  petite-nièce  du  G^iyc  p.a99* 

isaint  abbé  Théophane-le-Chronologue,qui  était  mort  porph.  d« 

4Ïans  la  persécution  de  Léon-l'Arménien.  Si  Ton  en   "  c.  a™^ 

veut  croire  les  auteurs  grecs,  trop  prévenus  en  faveur  ffiïÏÏ.T,^i. 

de  ce  prince ,  ce  nouvel  engagement  ne  fut  qu'un  j^^^^-  ^^^^ 

«ffet  du  désir  d'avoir  un  fils,  ce  que  ses  trois  femmes  ^*î°  p  *f ^; 

,  .  ,  Sym.  p.  474* 

ne  lui. avaient  pas  donné.  U  était,  disent-ils,   trèfr*   Oeorg.  p. 

557. 
savant  dans  tous  les  mystères  de  la  divination.  L'as-    Dacange, 

trologie,  qu'il  regardait  comme  un  art  infaillible,  lui    *™*,4Z** 

promettait  un  héritier  de  sfi  couronne.  Ce  fut  donc  ecdS^'i.  sji 

pour  remplir  sa  destinée  qu'il  jeta  les  yeux  sur  Zoé.     ■'*•  **** 


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36o  HISTOIRK    DU   BAS-EMPIRE.  (An  gw.) 

Il  entretint   commerce  avec  elle  :   mais    il  attendit 

pour  1  épouser  qu'elle  eût  donné   des   preuves  de  sa 

fécondité.  Le  succès  ne  répondit  pas  si  tôt  à  sonimpa* 

tience,  et  le  scandale  précéda  de   plusieurs  anné» 

l'unioii  légitime. 

xxT.  Avant  de  s'être  donné  un  suo^essenr,   il  courut 

*p^rua***  grand  risque  de  périr.  L'an  903 j  entre  Pâque  et  la 

assassin,    pentg^ôte,  commc  il   entrait  dans  Téglise  de  Saint- 

Ccdr.  p.  ^ 

599,  600.   Moce  à  la  suite  d'une  procession,  un  homme  sautant 
48a.       en  bas  du  jubé,  lui  déchargea  sur  la  tête  un  coup  de 
anass.  p.  jr^^^^^  ^j  violcnt,  quc ,   saus   un  chandelier  à  branche 
^°*i78*'^*  qui  reçut  le  fort  du  coup,  c'en  était  fait  de  sa  vie. 
lolen.'^l'  ^  **"g  qui  sortait  abondamment  de  sa   blessure  cf- 
s*°'  ^*  ^64  ^''^y^ tellement ceuxqui l'accompagnaient,  qu'ils s'enfiii- 
?/« '^^Z'   ï'enten  s'écrasant  les  uns  les  autres,  Alexandre,  frère  de 
l'empereur,  n'assistait  point  à  cette  cérémonie,  sou» 
prétexte  d'une  indisposition  ,  ce  qui  donna  oceaisian 
de  le  soupçonner.  On  cherchait  Samanas ,  favori  dfl 
prince,  et  on  s'étonnait  qu'il  ne  s'empressât  pas  à  le 
secourir.  Mais, tandis  que  Léon  était  en  dévotion,  sa 
maîtresse,  par  son  ordre,  avait  pris  ce  moment  pour 
s'établir  dans  le,  palais  ,  et  Samonas ,  confident  des 
plaisirs  de  son  maître,  donnait  ses  soins  à  loger  cette 
nouvelle  hôtesse.  L'assassin  fut  pris ,  et ,  après  avoir 
souffert  pendant  plusieurs  jours  les  plus  rigoureuses 
tortures,  sans  déclarer  aucun  complice,  il  fut  conduit 
au  cirque  et  brûlé  vif,   après  qu'on  lui  eut  coupé  les 
pieds  et  les  mains.  L'horreur  d'un  pareil  attentat  nt 
abolir  cette  procession  annuelle. 
XXXI.  L'^inaction  de  Léon  mettait  en  mouvement  tous  l^ 

Swarios.   Barbares    voisins   de  l'empire.  Les   Bulgares   recom- 
mençaient  leurs  courses  ;  les    Sarrasins  attaquaiefl 


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(An  9<«.)  LIVBB   UXXiU  LitÔTT   Vf.  36 1 

toutes  les  places  où  les  attirait  le  désir  du  pillage.  Cedr.p 
Peodant  que  T^on  occupait  ses  soldats   à  bâtir  des    *%8r.* 
églises,  les  Sarrasins  d'Afrique  fireèt  une  descente  éh   ^^  ^J*"** 
Sicile,  et  prirent  Taormine  •   où  ils  firent  un  grand  Jo«»°-  Ca^ 

^  *  ^  O  jnen.  de  cx- 

csLvnsLse,  On  attribua  la  perte  d'une  vilfe  si  forte  à  la  ^^^<^  The»- 

•    1  .         1  /  1  **'•  *^*-  H- 

trahison  du  gouverneur,  nomme  Caramale,  et,  de  re^^  Zon.  t.  a, p. 

tour  à  Constantinople,  il  fut  'condamné  à  mort.  A  la  incert.  êon- 

sollicitation    du  patriarche  Nicolas,  on  lui  fit  grâce  sym.^p.463! 

de  la  vie;  il  fut  fouetté,  dépouillé  de  ses  biens,  et  en-    ssel^fs^.' 

fermé  dans  un  monastère.  Les  Barbares  étant  ensuite    ^^**^>"* 

passés  en  Italie ,  ils  se  rendirent  maîtres  de  Bhège  et 

assiégèrent  Cosence.  La  mort  de  leur  roi  Ibrahim,  qui 

fat  tué  d'un  coup  de  foudre ,  leur  fit  lever  le  siège. 

Les  Sa'rrasins  de  Gilicie  firent  encore  de  plus  grands 

ravages.   Comme  ils  n'étaient  pas    cultivateurs,    ils 

n'avaient  de  ressources  pour^  vivre  que   dans   leurs 

épées.  Ils  portaient  également  la  guerre  sur  terre  et 

sur  mer.  Lorsqu'ils  ne  faisaient  pas  de  courses  sur 

terre ,  ils  montaient  leurs  navires,  et  venaient  infester 

toutes  les   côtes,  jusqu'en  Grèce   et    en   Macédoine. 

Conduits  par  un  renégat  nommé  Bamien  ,  célèbre  par 

sa  valeur,  ils  prirent  Séleucie  sur  la  mer  de  Cilicie , 

s'emparèrent  de  l'île  de  Lemilos ,  et  vinrent  attaquer 

Démétriade  en  ïhessalie.  C'^t^it  une  ville  ancienne, 

bâtie  par  Démétrius-Poliorcète y  riche,  peuplée,  et 

dont  le  port  était  très-fréquènté;  lis  la  prirent ,  pas-i; 

sèrent  tout  au  fil  de  répée;«et,  comme  si  le  ciel  eut 

agi  de  concert  avec  les  Sarrasins  pour  affliger  ce  pays^ 

vers  ce  même  temps  Bérée,  eh  Macédoine,  fut  renî^ 

versée  par  un   tremblement  de   terre  qui    fit   périr 

presque  tous  lés  habitants. 

Les  SaYraiins 'méditaient  une  efrtreprise  beaucoup    A^goi. 


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Gôogre 


36a  UiSTOiHl  DU  B48«EMP1RB.  (ABgo4.] 

zxxa.     plus  importante  sur  Thessalonique.   Cette  ville  était 

desSarrasîns  alofs.  la  première  de  Tempire  après  Constantinople. 

l'A^^ei.  Située  au  fond  du  golfe  qui  partait  son  nom,   la 

joann.  Ca-  beauté  et  la  commodité  de  son  port  y  attiraient  les 

cidiô  Thés-  richesses  de  l'Asie  ,  de  la  Grèce  et  dés  îles  de  rArclû- 

Cedr!^!«oo,  pcl.  Le  flcuve  Axius,  le  plus  grand  t  de  la  Macédoioe, 

Léo,  p.'  48a.  et    dont    rembonchurc    était   voisine  ,    j  apportait 

'5d!p^  aX  *^^^^  '^s  marchandises  de  ce  vaste  pays.  Elle  jouis- 

s^^'  ^U'a  ^^^^  ^^  *®"^  ^^  avantages  d'un  territoire  fertile  et 

465,  4fi6.   d*un  commerce  florissant»  Cette  opulence  fut  un  al- 

557,  558.   trait   pour  les  Sarrasins.  Ils  équipèrent  une  flotte  de 

'  cinquante-quatre  gros  navires  ,  ddnt  ils  donnèrent  le 

commandement    au  plus   fameux   de   leurs  pirates. 

C'était  un  renégat  nommé  Léonine  dans  la  ville d'At- 

talée  en  Pamphylie,  qui,  s'étant  fait  mahométan,  était 

venu  s'établir  à  Tripoli  de   Syrie,  d'où  il  fut  sur* 

nommé  le  Tripolite,  et,  sous  ce  nom ,  il  s'était  rendu  la 

terreur  de  toutes  les  cotes  de  la  Méditerranée  et  de 

l'Ardiipel.  Il  haïssait  mortellement  les  chrétiens,  qQu 

avait  trahis,  et  leur  faisait  tous  les  niau&  dont  il  ^ 

capable.  Pour  cacher  son  dessein  sur  Thcssaloniqo^j 

il  fit  mine  d'«o  vouloir  à  la  capitale  de  l'empire,  ^ 

vogua  vers  l'Heltespont;  Sui*  k  nouvelle  qu'en  reçut 

l'empereur,  il  fit  partir  sa  ffotte;^comtî)andée  par  £««" 

tathe  Argyre,  qui,  étant  allé  au-dennant  des  SarrafflW 

jusque  dans  l'Archipel^  et  se  voyant  très-inférieur  en 

forces,  prit  le  partie  de  se  retirer,  et  de  reprendre  w 

route  de  Constantii^ple.    Le  Tripolite  le  poursuiw^ 

jusqu'à  Parium   à  l'entrée  de. la  Propontide.  Lewp^ 

rieur  se  persuadant  qu'Eustathe  «'avait  manqua  1**' 

de  courage,  envoya,  pour  eommander  à  sa  p»^' 

Himère ,  son  premier  secnkairû^  qui  avait 


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(Aa  9«4.)  lAVWR   LXXII.  LÉOIT   VI.  363 

expérie&ce  dans  la  marine.  Le  Sarrasin,  faisant  sem* 
blant  de  fuir  devant  lui,  repassa  l'Hellespontv  tourna 
ensuite  iur  la  droite  entre  Imbros  et  Samothrace ,  et 
gagna  File  de  Thase ,  où  il  se  mit  en  bataille.  A  la 
vue  d'un  front  redoutable  de  plus  de  cinquante  vais- 
seaux de  haut  bord ,  garnis  de  toutes  1^  machines  en 
usage  dand  les  combats  de  mer,  et  montés  d'une  jeu^ 
nesse  nombreuse  et  pleine  d'ardeur,  Himère  n'osa 
risquer  une  action:  il  regagna  l'Hellespont,  et  fit  con* 
naître  à  l'empereur  qu'il  n'était  pas  eh  état  de  tenir 
la  mer  contre  des  forces  si  supérieures.  Le  Tripolite , 
qui  ne  cherclmit  qu'à  donner  le  change,  au  lieu  de 
le  poursuivre ,  rabattit  sur  la  droite,  et,  côtoyant  le 
mont  Athos,  prit  la  route  de  Thessalonique« 

Avant  même  le  retour  d'Himère ,  l'empereur  avait    xxxin. 

•  *       .  .  Préparatifs 

appris  de  quelques  déserteurs  sarrasins  qui  avaient  des  ThesM* 
gagné  le  rivage,  le  dessein  des  Musulmans.  Il  avait 
aussitôt  dépêché  à  Thessalonique  un  de  ses  écuyers, 
nommé  Pétronas,  pour  avertir  les  habitants  de^se  pré- 
parer à  la  défense.  Cet  avis  jeta  l'alarme  dans  la  ville. 
Tranquille  au  fond  de  son  golfe,  endormie  dans  le  luxe^ 
et  dans  les  plaisirs  que  nourrit  l'abondance ,  elle  n'é« 
tait  point  réveillée  par  le  bruit  des  orages  qui  gron** 
daient  au  loin  sur  les  frontières  de  l'Empire.  A  la  non* 
velle  d'une  attaque  prochaine,  les  habitants  sans  ar« 
mçs,san(fr  aucun  usage  de  la  guerre,  trouvaient  à 
peine  assez  de  courage  pour  songer  à  leur  sûreté.  Du 
côté  du  continent,  une  situation  avantageuse,  une 
épaisse  muraille  qu'on  disait  lavoir  été  bâtie  du  temps 
de  Xerxès,  lie  fortes  tours  peu  éloignées  les  unes  des 
autres,  mettaient  la  ville  en  état  de  soutenir  un  siège; 
mais  elle  était  .ouverte  du  côté  de  la  mer.  Son  port, 


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364  HISTOIRE   DU .  BAS-EMPIllC.  (Ai  9o4-) 

vaste  et  commode  pour  le  commerce ,  était  aussi  acces- 
sible aux  flottes  ennemies  qu'aux  vaisseaux  marchands; 
et  la  muraille  qui  bordarit  la  mer,  étant  à  demi  ruinée, 
s'élevait  à  peine  au-dessus  de  -la  poupe  des  grands 
vaisseaux.  Pétronas  avait  ordre  de  rester  dans  la  ville 
jusqu'à  l'arrivée  d'un  commandant  que  l'empereur  de- 
vait incessamment  envoyer,  et  d'aider  les  habitants  à 
faire  les  préparatifs  nécessaires.  C'était  un  homme  in- 
telligent et  de  beaucoup  d'expérience.  Il  commença 
par  fermer  le  port  d'une  chaîne ,  et  il  en  rendit  ren- 
trée impraticable  par  des  navires  coulés  à  fond.  Les 
habitants  voulaient  exhausser  leur  muraille  du  côté 
de  la  mer ,  il  vit  que  le  temps  était  trop  court  poor 
achever  assez  tôt  cet  ouvrage,  dans  une  si  ^ande  éten- 
due. Il  imagina  un  moyen  d'en  défendre  lapproche. 
Il  y  avait  aux  environs  de  la  ville  un  nombre  infini  de 
tombeaux  d'une  seule  pierre  ;  il  les  fit  jeter  dans  la 
mer,  et  en  forma  une  digue  qui  devait  s'élever  jus- 
qu'à flçjLir  d'eau,  tout  le  long  de  la  muraille,  à  la  dis- 
tance d'une  portée  de  trait.  Cette  entreprise  utile  «t 
bien  entendue  fut  interrompue  à  l'arrivée  du  com- 
mandant Léon,  qui,  se  croyant  beaucoup  plus  sage  que 
Pétronas ,  fit  abandonner  la  digue,  et  élever  la  mu- 
raille. Ce  nouveau  travail,  qui  fatiguait  toute  la  ville, 
était  à  peine  commencé,'  qu'on  vint  ^iré  que  rennerm 
approchait  avec  une  flotte  chargée  de  Syrieiis,  d'Ara- 
bes, d'Éthiopiens,  d'Africains,  plus  féroces  que  te 
lions  et  les  tigres  de  leurs  déserts.  I^s  habitants  des 
îles  de  l'Archipel ,  que  les  Sârpteins^  ravageaient  sur 
leur  passage ,  échappés  au  for  de  ces  Barbares,  arri- 
vaient à  tous  moments  dans  dès  bar^wes,  pour  cher- 
cher asile  à  Thessalonique,)itandis  ^e  les  Thessal*' 


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(An  904.)  LIVRB    LXXII.  LÉON   VK  365 

nîciens^  saisis. d'effroi,  abandonnaient  leurs  maisons, et 
se  disper^ient  dans  les  campagnes,  tramant  leurs 
femmes  et  leurs  enfants,  et  cherchant  une  retraite  au 
fond  des  forêts,  sur  les  montagnes ,  dans  le  creux  des 
rochers. 

On  vit  alors  arriver  un  second  commandant  nommé   .  «"»▼• 

.  .  Etatdéplo- 

Nicétas.  Il  venait  par  ordre  de  Tempereur  pour  se^  rabie  des 
conder  liëon  son  ami,  mais  il  fut  obligé  de  prendre  ciens. 
sa  place.  Léon,  courant  à  sa  rencontre  pour  le  rece- 
voir, tomba  de  cheval  et  se  rompît  la  cuisse*  Nicétasy 
chargé  seul  de  tout  le  détail  de  la  défense,  fit  avancer 
des  tours  de  bois  le  long  du  mur,  qu'on  n'avait  pas  eu 
le  temps  de  relever.  C'était  une  faible  réssoui»ce.  Il  en- 
voya demander  du  secours  aux  gouverneurs  des  pro- 
vinces voisines  ;  mais,  en  cette  occasion,  l'empereur  fut 
puni  du  mauvais  choix  qu'il  faisait  de  ses  officiers.  Ces 
âmes  vénales,  qui  ne  briguaient  les  gouvernements 
que  pour  s'enrichir,  occupés  à  piiler  leurs  provinces, 
où  ils  faisaiei^t  eux-mêmes  ce  qu'auraient  fait  les  Sar- 
rasins, s^embarrassèrent  peu  du  përil  de  leurs  voisins, 
et  da  déshonneur  de  l'empire:  ils  n'envoyèrent  aucuti 
secours,  ou  ce  ne  fut  qu'une  poignée  de  misérables 
sans  «œur  et  «ans  armes,  à  charge  aux  assiégés.  Abaur 
donnés  de  toutes  parts,  les  7:hessaloniciens,devenâs  re- 
ligieux par  la  crainte, «couraient  en  foule  à  l'église  du 
saint  martyr  Démétrius ,  patron  de  leur  ville  ^  et  la  fai* 
saient  jour  et  nuit  retentir  de  leurs  gémissements  et 
de  Ipurs  prières. 

Enfin  le  dimanche  !;»9  juillet,  au  point  du  jour,  Ik      xxxv. 
flotte  cinglant  à  pleines  voiles  se  montra  da«s  la  rade,     iTflotte* 
et,  poussée  par  un  vent  favorable,  elle  vint  jeter  l'an-^    «rrasmc. 
cre  à  peu  de  distance  des  murailles,  alvec  des  cris 


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366  HISTOIBI   DU   BAS«BMPiR£4  (Ab  904.) 

d'allëgrèsse.  Tandî»  que  les  habitants  regarwent  avec 
effroi  ce  nombreiu  e^saîtn  de  Barbares  ^  qui  leur  pa- 
raissaient autant  de  betes  féroces,  et  cette  forêt  de 
mâts  et  de  cordages^  qui  semblaient  être  une  \iUe&>t* 
tante,  les  Sarrasins  n'étaient  pas  moins  étonnés,  con- 
sidérant la  vaste  étendue  de  cette  ville,  à  laquelle  ne 
ressemblait  aucune  de  celles  qu'ils  avaient  vues,, et  le 
peuple  immense  qui  bordait  le  h^ut  des  murs.  Car^ 
malgré  la  fuite  d'une  partie  des  habitants,  il  en  res- 
tait encore  un  très  grand  nombre ,  et  la  présaice  do 
péril  qu'ils  avaient  tant  redouté  leur  avait  rendu  le 
courage.  Résolus  de  périr  avec  leur  patrie,  ils  s'ani- 
maient mutuellement,  et,  marchant  à  la  mort  d'un  air 
intrépide,  armés  de  ce  qu'ils  avaient  pu  trouver,  ils 
suivaient  Nicétas,qui  les  distribuait  dans  les  différents 
postes.  Pendant  que  les  Sarrasins  se  préparaient  li 
l'attaque,  le  Tripoli  te,  dans  un  de  ses  vaisseaux,  visi- 
tait la  muraille,  pour  en  observer  les  endroits  1^  plu* 
faibles  et  les  plus  accessibles.  Il  dioisit  le  lieu  oiiel)e 
n'était  pas  encore  ejdiaussée  ni  bordée  de  la  dig^e,  ^ 
donna  le  signal.  Les  Sarrasins  s'avancent  à  force  de 
rames,  poussant  des  hurlements  affreux,  et  faisant uo 
grand  bruit  de  timbales  et  de  tous  leurs  instrumenU 
de  guerre.  Les  habitants  y  répondent  avec  tant  de  force^ 
invoquant  à  leur  secours  la  croix  du  Sauveur,  que  le» 
Barbares,  prêts  à  décocha:. leurs  flèchei ,  frappés  des 
eris  d'une  si  prodigieuse  multitude,,  frissonnent  d*rf- 
froi,  et  demeurent  quelques  moments  les  bras  suspen- 
dus sur  leurs  arcs.  Enfin  oii  voit  partir  en  même  teœp*i 
des  vaisseaux  et  des  mur»,  une  grile  do  trait»,  p'»"* 
meurtrière  de  la  part  des  assiégés:  grand  nowbrtià'^ 
çlavons,  mêlés  avec  eux,  ti^s-adroits  à  mani^^'*'* 


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(Aa^.)  Liy»K    LXXH.  LÉCOT   VI.  36^ 

et  la  ffnode,  maoquaîeiit  rarement  leur  coup.  Alors 
une* troupe  de  Sarrasins,  brûlant  d'impatteace,  et  vour 
lant  stgifaler  leur  audace,  sauvent  dans  la  mer,  et^  se 
couvrapt  la  tète  de  leurs  boucliers,  poussant  devant 
euK  des  échelles,  ils  gagnent  à  la  nage  le  pied  des  murs^ 
au  travers  des  traits  qui  pleuvaient  sur  eux.  Ils  plan- 
tent Tesodiade,  et  montjent  avec  intrépidité.Un  torrent 
de  pierres  les  précipite  dans  la  mer,  où  ils  demeurent 
ensevelis.  Ce  mauvais  succès  arrête  la  fougue  diesau** 
très  qui  se  dispo$aient  à  les  suivre.  Ils  font  reculei^ 
leurs  vaisseau»,  pour  être  moins  à  portée  des  arcs  et 
des  frondes;  mais  les  catapultes  et  les  balistes  dont  le 
mur  est  armé  leur  envoient,  à  cette  liistanoe,  les  bles^ 
sures  et  la  mort.  Nîcëtas  se  trouvait  partout,  encou-* 
rageant  les  habitants.  Léon  lui'^même  se  Bsiisait  poiter 
en  litière^  pour  visiter  les  postes  et  animer  par  sa 
constance  celle  du  peuple.  Les  Barbares,  repousses  par 
mer,  abordent  au  rivage  oriental  et  attaquent  la  ville 
du  côté  de  la  t^rre.  La  muraille  étant  plus  haute  et 
plus  forte  tn  cet  endroit,  ils  trouvent  encore  plus  de 
résistance.  Après  de  vblents  combats  renouvelés  à 
plusieurs  reprises,  et  qui  ne  finirent  qu'avec  le  jour, 
ils  s6  rembarquent,  pour  se  délasser  des  fatigues  d'une 
si  rude  journée.  Mais  les  assiégés  n'osent  prendre  au» 
3Un  repos;  ils  passent  la  nuit  chacun  dans  leur  posie 
Je  crainte  des  surprises. 

Au  point  du  jour,les  Sarrasins  redescendent  à  terre, 
Is  se  répandent:  par  pelotods  autour  de  l'enœinte,  et  l'auaqoe. 
lirigent  leurs  plus  grands  efforts  vers  les  portes.  Ils 
bnt  pléUvoirsur  le  mur  les  flèches  et  les  pierres,  doiil 
es  plus  grosses  partaient  des  balistes  qui  bordaient 
e  front  de  l'&ittaque.  A  la  faveur  de  cette  nuée  meur-^ 


XXXTI. 

Suite  de 


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368  HfSTOlllF.   DU  BAS-EMPXRF.  (Jb  904.) 

trière,  ils  montent  aux  échelles;  ils  étaieat  pcès  d'at- 
teiadre  }e  haut  du  fnur,  lorsque/les  plus  vigoureux  et 
les  plus  déteroiinés  des  habitants^  hra^atit  la  mort  qui 
volait  autour  d'eux,  se  peiicheut  de  tout  le iCocps, sai- 
sissent le  haut  des  échelles,  et,  redoublaot  leui^  ef- 
forts, les  renversent  avec  tous  lesSarrasins  dont  elles 
étaient  chargées,  qui  tombent  les  uns. sur  les  autres, 
percés  de  letirs  propres  traits,  brisés  et  fracassés  par 
la  chute,  par  les  échelles,  par  le»  pierries  énormes 
dont  on  les  accablait  en  même  temps.  Ce  désastre  ef- 
fraya le  reste  des .  Sarrasins  :  écUmaats  .de  rage,  ils  re- 
culent à  la  portée  de  leurs  machines^  s'élançant par 
pelotons,  pour  fiiire  usage  de  leurs  arcs  et  de  leurs 
frondes.  Leur  fureur. était  si  opiniatre,que,  malgré  les 
ardeurs  d'ua  soleil  brûlant,  ils  passèrent  tout  le  jour 
sous  les  arm^S'^  sans  songer  même  apprendre  de  nour- 
riture. Tous  Içurs  efforts  n'ayant  eu  jusqu'alors  au- 
cun, succès,  ils  s'avisèrent  d'un  nouveau,  moyen  pour 
s'ouvrir  l'entrée  de  la  ville  ;  ce  fut  d'en  brûler  les  po^ 
tes.  Elles  étaient  revêtues  de  fer,  et  à  l'épreuve  des  plus 
fortes  machines  par  leur  épaisseur.  Ils  chargent  de  boû 
çec^  enduit,  de  poix  et  de  soufre,  deux  chariots  q^'"^ 
traînent  aux  deux  plus  grandes  portes,. et,  après  y 
avoir  mis  le  feu,  ils  s'éloiguent  à  quelque  distance  ti- 
cant  sans. cesse  sur  les  murs.  La  flamme  des  chariots 
fit  enfin  tomber  les  portes  réduites  en  charbons:  i»a»* 
les  habitants  avaient  eu  le  temps  de  former  l'ou- 
yerture  par  dedans,  avec  de, grosses  pierrps  quifo''' 
iQaieut  un  nouveau  mUr.  Instruits '{xar  cette  exp^ 
mnce,  ils  placèrent  gur;. les; muraiitleft^aUrdessusd^ 
autres  portes,  de  gratids; vases  r^iplis-  d'eau,  f^ 
éteindre   l'incendie.,  e»  qats  d'une,  pareille.  tentoUv«' 


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(Aa^)  tlVR^   laXXlï.  UÉON   VI.  SÔC) 

Le  resie  du  jour  se  passa  en  décharges  continuelles* 

Pendant  la  nuit,  les  Barbares  mirent  eh  œuvre  une     uxtu. 
invention  nouvelle,  qui  les  élevait  au-dessus  du  mur     ^lu. 
du  côté  de  la  mer,  et  leur  donnait  le  moyen  de  sauter 
dans  la  ville.   Ils  joignirent  leurs  vaisseaux  deux  à 
deux,' les  attachant  ensen^ble  avec  des  diaines  et  de 
gros  câbles  ;  et  établissant  au-dessus  un  plancher  de 
mâts  et  de  poutres,  ils  y  élevèrent  des  tours  de  bois, 
qu'ils  remplirent  des  soldats  les  plus  robustes  et  les 
plus  hardis ,  avec  ordre  de  lancer  dans  la  ville  des  ja- 
vdots,  des  pierres,  des  feux  préparés,  et  de  sauter 
ensuite  sur  la  muraille.  Conrané  ils  travaillaient  à  la 
lueur  des  flambeaux,  la plup^a-t  des  habitants,  témoins 
de  ce  formidable  appareil,  désespérant  d'y  résister, 
abandonnèrent  la  muraille;  et  se  disant  le  dernier 
adieu ,  embrassant  pour  la  dernière  fois  leurs  en&nts 
et  leurs  femmes,  ils  erraient  çà  et  là  dans  un  morne 
sileûce,  attendant  Tennemi  et  la  mort.  Quelque8-*uns 
phis  courageux  amassaient  &ur  le  mur  deïa  poix,  de  la 
résine  et  d'autres  matières  inflammables  ^  pour  mettre 
le  feu  aux  tours  et  aux  vaisseaux.  Dèsque  le  jour  pa-» 
rut,  on  vit  avancer  ces  énormes  bâtiments,  qui,  joi- 
gnant bientôt  la  muraille  dans  l'endroit  où  la  mer 
était  le  plus  profonde,  mirent  les  assiégeants  au  ni- 
veeiu  des  assiégés,  en  sorte,  qu'on  se  battit  quelque 
temps  comme  de  plain-pied,  avec  le  plus  grand  achar- 
nement. Les  feux,  les  pierres,  les  coups  de  main ,  les 
eris  affreux,  et  la  rage  des  deux  partis,  rassemblaient 
toutes   les  horreurs  d'une  bataille  furieuse*  Mais  le 
nombre  des  ennemis  qui  abordaient  successivement, 
grossissant  toujours ,  et  celui  des  habitants  diminuant 
par  le  carnage,  il  fallut  céder:  les  Sarrasins  se  répaq-, 

Totne  XllL  a4  -    !  ' 


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370  HiSTOimc  DU  BAa^£MPnie.         (Ai  904.) 

dirent  comme  un  torrent  sur  la  muraille,  ettuant,  pré- 
cipitant les  défenseurs,  sautèrent  dans  la  ville.  Qu'oq 
se  représente  tous  les  désastres  d'une  place  prise  d'as- 
saut par  un  ennemi  barbare  ^  que  la  résistance  a  rendu 
plus  féroce:  Tliessalonique  les  éprouva.  Le  Sarrasin, 
aussi  dissolu  que  cruel,  n'épargna  ni  Tâge  ni  le  seie. 
Les  vierges  consacrées  à  Dieu  furent  la  victime  de  la 
brutalité,  avant  que  de  Têtre  de  la  rage.  La  plupart 
des  habitants,  enchaînés  par  la  terreur,  se  laissèrent 
égorger  sans  faire  aucun  mouvemcmt;  d'autres  oa- 
vrant  les  portes,  et  ne  pouvant  sortir,  tant  ils  se  presr 
sàient  les  uns  les  autres,  trouvaient  devant  eux  des 
Sarrasins  qui  tranchaient  à  grands  coups  de  cimeterre 
cette  foule  serrée,  comme  si  elle  n'eût  fait  qu'un  seul 
corps.  Quelques-uns,  en  petit  nombre,  se  sauvèrent  eo 
sautant  du  haut  des  murs.  Trois  cents  habitants  sé- 
taieiftt  retirés  dans  l'église  d'un  monastère:  un  officier 
Sarrasin  étant  arrivé  en  ce  lieu  avec  sa  troupe,  et 
ayant  forcé  les  portes,  saute  sur  l'autel,  où  il  s'assit 
les  jambes  croisées  à  la  manière  des  Orientaux,  et  de 
là,  comme  de  dessus  un  tribunal,  il  prononce  la  sea- 
tence  de  mort  contre  tous  ces  misérables ,  et  les  fai^ 
égorger  à  ses  yeux.  Cependant  on  laissa  la  vie  à  eeai 
qui  furent  en  état  de  la  racheter,  en  livrant  les  trésors 
qu'ils  avaient  cachés  durant  le  siège.  De  ce  nombre 
furent  le  gouverneur  Léon  et  son  collègue  Nicétas. 
Mais  les  Barbares  ne  faisaient  cas  que  de  l'or,  de  ^a^ 
gent,  des  pierreries  et  de  la  soie,  toute  autre  matière 
n'était  pas  acceptée;  ils  la  jetaient  dans  la  mer,  et  mas- 
sacraient ceux  qui  n'avaient  rien  autre  chose  à  door 
ner,  à  moins  que  ce  né  fussent  de  jeunes  garçons  ou 
dfB  jeunes  filles,  qu'ils  destinaient  à  des  horreurs  fîtes 
que  la  mort. 


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(Angol)  tIVRE   LXXIT.  LléoïT   VI,  3^1 

Entre  les  prisonniers  était  un  chambellan  de  f  etn-    xxxvm. 
pcreur, nommé  Rhodophyle.  Il  avait  été  envoyé  pour  meuts'^deia 
porter  cent  livres   d'or   aux   troupes  d'Italie.  Étant  ""f®  T"*^!'^" 
tombé  malade  dans  la  navigation ,  il  s'était  arrêté  à    ^  "6«ot- 
The86alonique,et  s'y  trouvait  lorsque  les  Sarrasins  vin- 
rent l'attaquer.  A  la  première  nouvelle  de  leur  approj 
cbe,  il  avait  pris  la  précaution  d'envoyer  secrètement 
cette  sommeà  Syméon^  qui  commandait  dans  une  pro- 
vince voisine,  qu'on  nommait  alors  le  Thème  de  Stry- 
mon,  à  cause  du  fleuve  qui  la  traversait.  Le  Tripolite, 
ayant  appris  que  Rhodophyle  avait  apporté  un  trésor, 
le  fit  venir  devant  lui  et  lui  demanda  ce  que  cet  or 
était  devenu.  Rhodophyle  avoua  qu'it  lavait  fait  trans- 
porter ailleurs ,  en  sorte  qu'il  n'en  était  plus  le  maître; 
mais  il  promettait  d©  donner  en  dédommagement  beau- 
coup de  richesses,  si  l'on  voulait  lui  hisser  la  vie.  Sur 
ces  paroles ,  Léon  étincelant  de  colère  y  Scélérat  j  lui 
dit-il,  cet  or  m^ appartenait.  Tu  mourras , pour  ap- 
prendre à  tes  pareils  à  ne  pas  voler  leurs  maîtres. 
En  même  temps  il  le  fait  assommer  devant  lui  à  coups 
de  bâton.  Il  ordonne  ensuite  à  ses  gens  de  se  prépa- 
rer au  départ;  il  fait  distribuer  les  prisonniers  dans 
les  vaisseaux ,  avec  ordre  de  séparer  ceux  qui  étaient 
parents.  Ce  n'étaient  que  gémissements  et  que  larmes  : 
enchaînés  par  les  pieds,  on  les  entassait  pêle-mêle  dans 
les  navires ,  et  à  peine  leu^  làissait-on  la  place  de  leurs 
corps.  Oa  ne  peut  peindre  avec  d'assez  vives  couleurs 
ce  que,  dans  le  transport,  ils  souffrirent  de  la  faim,  de 
la  soif,  de  l'infection,  et  de  la  cruauté  des  Barbares.  Il 
suffît  de  dire  que  tous. ces  maux  rassemblés  en  firent 
périr  un  grand  iiombre.  Les  navires  sarrasins  ne  suf- 
fisant pas  pour  contenir  le  butin  de  cette  ville  opu- 

24. 


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^ja  HISTOIRE   UU   BAâ*£MPIRE.  (Aa^) 

lente,  le  Tripolite  y  employa  encore  tous  les  vaisseaux 
qui  se  trouvaient  dans  le  port ,  et  fit  retirer  à  force 
de  machines  ceux  qu'on  y  avait  enfoncés  pour  en  bou- 
cher l'entrée.  Il  déclara  ensuite  qu'il  allait  eonduire 
les  prisonniers  à  Tarse, et  que,  si  l'empereur  consen- 
tait à  renvoyer  un  même  nombre  de  Sarrasins,  il  ac- 
cepterait l'échange  ;  sinon  ,  qu'il  userait  à  leur  égard 
du  droit  que  lui  donnait  la  victoire ,  et  qu'il  les  ferait 
tous  égorger.  Alors  Syméon ,  le  dépositaire  de  l'argent 
de  Rhodophyle ,  qui  était  venu  à  Thessaloniqué  pour 
racheter  ceux  qu'il  pourrait,  s'étant  hardiment  pré- 
senté à  lui  :  Seigneur j  lui  dit-il, yîe  me  charge  de  cette 
négociation  auprès  de  Venjtpereur.  Je  sais  qu'il  aime 
ses  sujets,  et  quil  ne  balancera  pas  de  vous  rendre 
autant  de  Sarrasins  y  tels  que  vous  les  voudrez  M- 
sir.  Je  les  amènerai  moi-même  à  Tarse ^et  je  vous 
en  donne  ina  parole.  Permettez^nous  seulement 
d*enterrer  les   morts ,  dont  les   cadavres  couvrent 
toutes  les  rues  de  la  ville ,  et  de  leur  rendre  les  der- 
niers devoirs  à  la  manière  des  chrétiens,  lue  pirate 
l'accorda ,  et  exigea  de  Syméon  qu'il   s'obligeât  par 
écrit  et  par  serment.  Tout  étant  prêt  pour  le  départ, 
il  donna  ordre  de  mettre  le  feu  à  la  ville;  mais  Syméon 
la  sauva.  Il  alla  trouver  le  Tripolite  :  Je  sais,  lui  dit-il» 
entre  les  mains  de  qui  sont  les  cent  livres  dor  çue 
Rhodophyle  devait  porter  çn  Italie.  Je  promets  de 
vous  les  faire  tenir  ici  y  si  vous  voulez  éparff^ 
les  bâtiments  de  Thessalonique.  N'espérez  pas  ine 
les  arracher  par  des  supplices.  Il  n'est  pas  en  votre 
pouvoir  de  vous  en  saisir.  Si  vous  me  faites  mour^f 
vous  ne  les  trouverez  pas  dans  les  cendres  de  cett^ 
cité  malheureuse.  Léon  jura  qu'il  laisserait  ia  v"*^ 


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<Aii  904.)  LIVHE    LXXlf.  LÉON    VI.  37*3 

sur  pied  à  cette  condition ,  et  Syméon  tînt  parole  ainsi 
que  le  Barbare.  L'empereur  sut  si  bon  gré  à  Syméon 
du  double  service  qu'il  avait  rendu ,  qu'à  son  retour 
à  Constantinople  il  lui  conféra  la  charge  de  premier 
secrétaire. 

Enfin  le  dixième  jour  après  la  prise  de  la  ville,  les  jj""^* 
Sarrasins  levèrent  l'ancre  au  son  de  leurs  cymbales,  Sarr«ttn«. 
mêlé  aux  cris  et  aux  lamentations  des  prisonniers ,  dé- 
solés de  se  voir  arrachés  du  sein  de  leur  patrie.  Après 
une  assez  longue  navigation,  ils  arrivèrent  en  Crète; 
où,  ayant  fait  le  dénombrement  des  prisonniers,  ils.  en 
trouvèrent  vingt -deux  mille.  Pendant  douze  jours 
qu'ils  restèrent  en  ce  li^u ,  ils  en  vendirent  une  partie 
aux  Cretois,  qui  devaient  y  faire  un  grand  profit;  la 
coutume  de  ce  peuple  dans  les  échanges  avec  les  Grecs, 
«tant  d'exiger  homme  pour  homme,  et  par-dessus  en- 
core la  rançon  du  prisonnier  qu'ils  rendaient.  Les  Sar- 
rasins, battus  de  la  tempête  entre  l'île  de  Crète  et  celle 
de  Cypre,  furent  sur  le  point  de  jeter  grand  nombre 
de  chrétiens  dans  la  mer,  pour  faire  place  à  l'équi- 
page d'un  de  leurs  vaisseaux  prêt  à  périr  ;  et  ils  l'au- 
raient fait,  si  le  bâtiment  qui  portait  les  chrétiens 
n'eût  été  emporté  loin  d'eux  par  les  vents  et  par  les 
vagues.  Ils  arrivèrent  en  cinq  jours  à  Paphos  en  Cy- 
pre, et  de  là, en  deux  fois  vingt-quatre  heures,  à  Tri- 
poli de  Syrie.  On  y  débarqua  tout  le  butin ,  que  les 
magasins  de  la  ville  pouvaient  à  peine  contenir,  et 
peu  de  jours  après  on  fit  rembarquer  les  chrétiens, 
pour  les  conduire  à  Tarse ,  où  ils  devaient  être  rache- 
tés par  l'empereur, ou  massacrés.  Bientôt  Syméon  vint, 
selon  sa  promesse,  les  délivrer,  par  un  échange,  des 
maux  incroyables  que  leur  avait  fait  souffrir  le  cruel 


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XI.. 


374  HISTOIRE   DU   BASHEafPHUî.  (Aagoi.) 

Tripoitte.  L'empereur,  mortellement  affligé  du  désas- 
tre d'une  ville  si  florissante ,  ne  tarda  pas  à  la  réparer. 
Sa  situation,  son  commerce,  les  exemptions  qu'il  ac- 
corda, lui  rendirent  bientôt  son  ancien  lustre;  elVes- 
pace  de  peu  d'années  fit  disparaître  les  traces  tfuQ  à 
horrible  saccagement. 

Pour  ne  pas  interrompre  le  récit  de  l'expédition  des 
d'Euîuîhc   Sarrasins,  je  ne  me  suis  pas  arrêté  à  faire  connaître 
^*^^**     les  deux  généraux  que  l'empereur  envoya- d'abord  pour 
de  ad.  imp.  les  Combattre.  Il  sera  parlé  d'Himère  dans  la  suite. 
Cedr.  p.     Mais  comme  les  écrivains  de  ce  temps-là  ne  mettent 
incerl^on-  aucuu  ordrc  daus  ce  qu'ils  racontent  d'Eustathe ,  je 
**"iori3Îr  vais  le  rassembler  en  ce  lieu,  p  était  petit-fils  de  ce 
tfZi^î'l.  Léon  Argyre,  que  Michel  III  avait  inutilement  em- 
'^*-       ployé  pour  réduire  les  Pauliciens  de  Téphrique,etil 
fut  J'aïeul  de  l'empereur  Romain  Argyre,  ce  qui  le  rend 
plus  digne  d'attention.  Il  paraît  que  cette  famille  était 
originaire  de  la  Charsiane,  contrée  de  la  Cappadoce, 
oïl  Léon,  le  premier  dont  l'histoire  fasse  mention, 
fonda  un  célèbre  monastère.  Quant  au  surnom  d> 
gyre,  les  écrivains  débitent  de  si  frivoles  conjectures, 
qu'il  est  plus  sûr  de  dire  qu'on  en  ignore  la  raison. 
Eustathe  s'était  avancé  à  la  cour  de  l'empereur  par  ses 
talents  et  par  le  crédit  d'Himère,  patrice  et  surinten- 
dant des  postes  de  l'empire,  d'abord  son  ami  intime, 
et  qui  devint  dans  la  suite  son  ennemi.  H  fut  «nvoye 
à  Gibyre  en  Pamphylie,  pour  arrêter  les  courses  acs 
Sarrasins  de  Tarse ,  et  il  se  fit  beaucoup  de  repu 
tion  par  les  avantages  qu'il  remporta  sur  terre  et  s 
mer.  Il  est  remarquable  qu'on  lui  donna  pour  n^ 
nant  Andronic  Ducas,  dont  le  père  avait  été  joiD 
Léon,  son  aïeul,  dans  l'expédition  contre  les  Paulin* 


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(Aado^O  UVRB   LXXII«  LÉOST   Vf*  37$ 

Mais  il  avait  un  ennemi  plus  incommode  que  les  Sai> 
rasîns  :  c-était  Staurace  Platys,  chef  des  Mardaites 
d'Attalée,  et  receveur  des  impots  de  ces  provinces, 
homme  injuste  et  avide,  d'autant  plus  hardi  dans  ses 
exactions,  qu'il  se  sentait  appuyé  à  la  cour  par  Hi« 
mère^  son  protecteur.  Cependant  Himère  l'abandonna 
en  faveur  de  son  ami,  et  Staurace  fut  rappelé.  L'his* 
toire  &it  entendre  qu'Ëustathe  n'avait  pas  autant  de 
probité  que  de  valeur,  et  que,  pour  détruire  ce  concus- 
sionnaire, il  mit  en  œuvre  jusqu'à  la  calomnie.  Peut- 
être  que^  dans  une  cour  corrompue,  la  vérité  n'aurait 
pas  suffi  seule  pour  mettre  en  disgrâce  un  méchant 
homme.Les  succès  d'£ustathe  contre  les  Sarrasins,  sur 
la  mer  de  Pamphylie,  déterminèrent  l'empereur  à  le 
faire  venir  à  Constantinople,  pour  lui  donner  le  com- 
mandement de  la  flotte  impériale.  Mais  après  qu'il  se 
fut  r^iré  de  devant  )e  Tripolite,  Léon  lui  ayant  sub- 
stitué Himère,  les  deux  amis  devinrent  rivaux  et  en- 
nemis mortels.  Leur  jalousie,  nourrie  de  médisances 
et  de  £icheux  rapports,  s'accrut  à  un  tel  point  qu'ils 
résolurent  l'un  et  l'autre  de  se  détruire.  Le  crédit  d'Hi- 
mère  l'emporta,  et  Ëustatl;^  fut  banni  de  la  cour,  dé- 
pouillé de  toutes  ses  charges,  et  relégué  sur  ses  terres 
en  Charsiane.  Sa  disgrâce  causa  les  regrets  et  les  mur^ 
mures  des  armées  de  terre  et  de  mer,  dont  il  avait 
l'estime.  Mais  ce  courtisan,  gâté  par  l'air  de  la  tour,  et 
incapable  de  sentir  l'avantagée  d'en  être  éloigné^  se 
porta  à  un  tel  désespoir,  qu'il  s'empoisonna  en  che^ 
xnin.  Il  fut  enterré  dans  le  monastère  qu'avait  fondé 
son,  aïeul. 
.  Samonas  était  le  moteur  secret  de  toutes  les  i&tr|-      xlx. 

11  ^         •  II  FuiUtt 

gués  de  Jà  .cour.  Esprit  remuant  et  cUf^prfeux,  u«^  rttour  4» 


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376  HISTOIRE   DU   BâS-BBfPIRE.  (A>  904.) 

Samoiuft.  prétait  avec  complaisance  à  tous  les  caprices  du  prince^ 
Lro'^'^îga  ^^  abusait  de  sa  faveur,  pour  détruire  ces  âmes  roides 
483.  et  généreases,  qui  ne  savent  pas  ramper  aux  pieds 
inccrt.  con-  d'uu  favori.  Hvpocrite  achevé,  quoique  toujours  Sar- 
aaS.  '  rasin  dans  le  cœur,  il  affectait  un  grand  zèle  pour  la 
religion  ;  il  faisait  des  crimes ,  et  bâtissait  des  monas- 
tères :  c'était  alors  la  dévotion  à  la  mode.  Comblé  de 
bienfaits,  enrichi  des  dépouilles  de  ceux  qu'il  avait  rui- 
nés, il  fut  tenté  de  retourner  dans  sa  patrie,  et  d'y 
transporter  le  fruit  de  ses  impostures.  Peut-être  y  fut- 
il  déterminé  par  quelque  dégoût  dont  on  ignore  la 
cause.  Il  feignit  d'aller  visiter  un  monastère  qu'il  fai- 
sait bâtir  à  Damatrys  sur  le  chemin  de  Nicomédie;  et 
emportant  toutes  ses  richesses,  il  prit  la  route  de  Me- 
litine,  coupant  les  jarrets  à  tous  les  chevaux  des  postes 
par  où  il  passait.  Léon ,  averti  de  sa  fuite,  envoie  cou- 
rir après  lui.  On  l'atteint,  on  l'arrête  au  passage  de 
lllalys,  et  malgré  ses  prières,  malgré  l'argent  qu'il  of- 
fre, quoiqu'il  proteste  que  la  dévotion  seule  le  conduit 
en  Cappadoce  à  une  station  célèbre,  on  le  garde  en 
prison  jusqu'à  l'arrivée  de  Constantin  Ducas,qui  le  ra- 
mène à  Constantinople.  Il  méritait  la  peine  des  déser- 
teurs. L'empereur  le  fait  enfermer  dans  un  palais.  Mais 
comme  il  l'aimait  et  qu'il  voulait  le  sauver,  en  conser- 
vant une  apparence  de  justice ,  il  ordonne  à  Constantin 
de  le  décharger  par  son  témoignage,  lorsqu'il  serait 
juridiquement  interrogé,  et  de  dire  qu'en  effet  Sanio- 
nas  n'avait  dessein  que  d'aller  accomplir  un  voeu  ^ 
Cappadoce.  Constantin  le  promit.  Le  lendemain,!^ 
fait  comparaître  Samonas  devant  le  sénat, et,  sp^ 
avoir  fait  jurer  Constantin  par  le  nom  de  Dieu  et  P*^ 
le  salut  du  pfrince,  qu'il  allait  dife  la  vérité;  il^"'  ^^ 


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(AII9O40  LIVRE   LXXII.  LÉOBT   VI.  877 

mande  quel  était  le  dessein  de  Sanronas.  Constantin, 
préparé  à  un  mensonge,  ne  Tétait  pas  à  un  parjure  : 
effrayé  du  serment  qu'il  venait  de  faire,  il  répond 
selon  la  vérité ,  que  Samonas  s'enfuyait  à  Mélitine.  Le 
prince  déconcerté  chasse  Constantin  de  sa  présence, 
et  fait  à  regret  renfermer  Samonas,  bien  résolu  de 
rapprocher  au  plus  tôt  de  sa  personne  un  courtisan 
qui  le  flattait  dans  ses  désordres. 

Au  bout  de  quatre  mois,  la  naissance^  d'un  fils  lui    AK905. 
en  fournit  le  prétexte.   C'était  l'occasion   d'accorder  Naissance  de 
des  grâces.  Zoé  qui, depuis  quatre  ans,  vivait  avec  lui     ^  ^^^ 
comme  sa  femme ,  accoucha  d'un  enfant  qui  fut  nommé       602. 

^  Léo,  p.  483, 

Constantin ,  et  auquel  on  donna  dans  la  suite  le  sur-      484. 
nom  de  Porphyrogénète.  Il  fut  baptisé  daps  Sainte-    1^,  *iio. 
Sophie, le  jour  des  Rois,  par  le  patriarche  Nicolas,  as-  ^°°'i^/^  ' 
sisté  de  tous  les  prélats  qui  se  trouvaient  à  Constan-   ^^^^^\^' 
tinople ,  et  eut  pour  parrains  son  oncle  Alexandre  avec  ^^^^^  «cil- 
les premiers  du  sénat  et  le  patrice  Samonas,  à  qui       2^9. 

«  ri.  .         j  '        ^        Sym.  p.  466, 

1  empereur  tut  bien  aise  de  procurer  cet  tionneur,  467. 
pour  l'assurer  qu'il  n'avait  rien  perdu  de  son  crédit,  '^ssg. 
Tous  les  historiens  rapportent  que,  dans  le  temps  de  epist.^asiîli, 
la  naissance  de  Constantin,  parut  une  comète  très-lu-  "^^mur 
mineuse  dont  les  rayons  se  dirigeaient  vers  l'Orient,  pf^/^  JjJÎ' 
et  qui  se  fit  voir  pendant  quarante  nuits.  Ce  n'était  «cci*«- 1-  ^4, 
pas  assurément  un  pronostic  de  la  gloire  que  cet  en-      Onens 

*,  j         .  .         ^  ,    .  ^  ^  Christ,  t.  u 

tant  devait  un  jour  acquérir.  .p.  a5o,  a5i. 

Trois  jours  après  le  baptême  du  jeune  prince ,  Léon    ^jet  des** 
épousa  Zoé  et  la  nomma  Auguste ,  ce  qui  causa  de  *^^^g ^r 
grands  troubles  dans  l'église  de  .Constantinople.  Qiioi-      ^°'*' 
que  l'ÉgKse  grecque  fut  si  indulgente  à  l'égard  des 
mariages ,  qu'elle  permettait  aux  prêtres  de  vivre  avec 
le»  femmes  qu'ils  avaient  épousées  avant  leur  ordina- 


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378  HISTOIRE  DU   BAS-EUPIRE.  (Am  90&.) 

tion ,  comme  il  avait  été  décidé  par  le  concile  in  TruUoy 
cependant  elle  fut  toujours  très*sévère  par  rapport  aui 
mariages  réitérés.  On  voit  par  la  lettre  canonique  de 
saint  Basile  à  Amphilochius ,  que  les  secondes  noces 
excluaient  de  l'Église  pendant  un  an,  les  troisièmes 
pendant  trois  et  quatre  ans.  La  trigamie  même  ne 
s'appelait  plus  un  mariage,  mais  une  polygamie,  une 
fornication  mitigée.  A  la  vérité  on  ne  rompait  pas  ces 
mariages,  mais  on  les  punissait.  Léon  lui-même  avait 
publié  une  constitution  par  laquelle  il  condamnait  les 
troisièmes  noces,  et  déclarait  ceux  qui  les  contractaiort 
exempts  de  peine  quant  à  la  loi  civile,  mais  soumis 
aux  censures  et  à  la  pénitence  canonique.  Pour  les 
quatrièmes ,  elles  étaient  absolument  défendues.  Nico- 
las, dans  sa  lettre  au  pape,  avance  que  jusqu'alors  au- 
cun particulier,  ni  même  aucune  personne  élevée  en 
dignité  n'avait  osé  contracter  un  pareil  mariage.  Les 
prélats  d'Orient  n'avaient  consenti  à  célébrer  le  bap- 
tême du  fils  de  Zoé  avec  la  pompe  impériale,  qu^^i 
faisant  promettre  avec  serment  à  l'empereur  qu'il  se 
séparerait  de  Zoé.  Cependant,  trois  jours  après ,  il  ^^ 
clara  au  patriarche  qu'il  voulait  consacrer  son  union 
avec  elle  par  l'autorité  de  l'Église.  Nicolas,  prosterne 
à  ses  pieds,  le  suppliait  de  se  respecter  lui-n^"'^» 
lui  représentant  que  la  majesté  impériale^  élevée  a^ 
yeux  de  tous  les  peuples^  ne  peut  cacfier  tes  tacties 
de  ses  vices  ;  que  les  princes  ont  au-dessus  d'eux  ^ 
maître  plus  puissant  qui  les  châtie  ;  qu'ils  ne  sot» 
pas  exempts  des  lois  pour  n'en  point  àcoirf  f^ 
pour  être  eux-mêmes  leur  loi;  qu'ils  sontsounàs^ 
tribunal  de  leur  conscience.  Il  le  conjurait  de  se  sé- 
parer de  cette  femme,  du  moins  jusqu'à  l'arrivée 


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(An  905.)  LIYRB    LXXII.  LEOIT   VI.  379 

légats  de  Rome  et  des  autres  sièges  patriarcaux ,  avec 
lesquels  on  délibérerait  sur  le  parti  qu'on  devait  pren- 
dre. Mais  un  coup  d'œil  de  Zoé  avait  plus  de  force 
sur  le  cœur  du  prince,  que  les  remontrances  de  tous 
les  patriarches  ensemble.  Ce  prince  impétueux  dans 
ses  désirs,  voulut  absolument  être  marié,  et  au  refus 
de  Nicolas,  il  se  fit  donner  solennellement  la  bénédic- 
tion nuptiale  par  un  clerc  du  palais  nommé  Thomas, 
et  mit  sur  la  tête  de  Zoé  la  couronne  d'impératrice. 

Nicolas  était  d'un  caractère  dur  et  opiniâtre,  inca-  opposition 
pable  d'aucun  ménagement.  Ni  le  respect  de  la  per-  ?"  . 
sonne  de  l'empereur,  ni  l'intérêt  de  l'empire,  qui  de- 
mandait qu'on  ne  laissât  aucune  tache  sur  la  naissance 
du  successeur,  ne  purent  rien  gagner  sur  son  esprit. 
Aussi  inflexible  après  la  cérémonie,  qu'il  l'avait  été 
auparavant,  il  excommunia  le  clerc  qui  avait  prêté 
son  ministère,  et  interdit  à  l'empereur  l'entrée  de  l'é- 
glise. Le  prince  y  venait  cependant,  mais  par  une 
porte  dérobée.  D'abord  tous  les  évêques  se  joignirent 
au  patriarche;  bientôt  l'empereur, à  force  de  présents^ 
en  détacha  une  grande  partie,  qui  prétendirent  que 
cette  exclusion  ne  devait  durer  que  peu  de  temps,  et 
qu'il  fallait  se  rendre  aux  vives  instances  de  l'empe- 
reur. Le  prélat,  presque  abandonné,  ne  perdit  rien  de 
sa  fermeté.  Léon  eut  recours  au  pape  Sergius,  ainsi 
qu'aux  trois  patriarches  de  l'Orient;  ils  envoyèrent  des 
légats  à  Constantinople.  Nicolas,  persuadé  qu'ils  ne  ve- 
naient que  pour  confirmer  la  validité  de  ce  mariage, 
s'abstint  de  les  voir  en  public,  et  proposa  d'avoir 
avec  eux  une  conférence  particulière  dans  le  pa- 
lais; ce  que  l'empereur  refusa.  L'année  entière  se 
passa   en    sollicitations    pressantes   de   la    part   de 


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An  906. 

XLV. 


38o  HISTOIRE   DU    BAS-EMPIRE,  ^      (An  906.) 

l'empereur  et  des  légats.  Ils  ne  purent  rien  obtenir. 
Enfin  Samonas,  dévoué  sans  réserve  au  service  de 
Zoé,  par  le  crédit  de  laquelle  il  gouvernait  Tempe- 
roi/àTa'"  reur  même ,  ayant  en  vain  employé  toute  son  adresse 
n\*coU.!  pour  fléchir  le  prélat,  conseilla  au  prince  de  se  dé- 
faire de  ce  censeut  intraitable.  L'empereur  faisait  tous 
les  ans,  au  premier  de  février,  un  festin  à  toute  sa  cour. 
Il  y  invita  Nicolas;  et  tous  les  courtisans , de  concert 
avec  le  prince,  s'étant  réunis  pour  le  presser  de  lever 
l'interdiction  et  d'approuver  le  mariage,  comme  il  per- 
sistait à  refuser,  on  l'enleva  de  la  table  même,  et  on 
le  transporta  au  -  delà  du  Bosphore ,  où  il  fut  laisse 
seul  sur  le  rivage ,  sans  domestique ,  sans  aucun  se- 
cours, au  milieu  d'une  nuit  obscure,  dans  un  froid 
très-rigoureux.  Il  lui  fallut  gagner  à  pied  au  travers 
des  neiges  le  bourg  de  Galacrènes ,  où  il  avait  bâli 
un  monastère.  Cette  retraite  devint  pour  lui  une  pn- 
son;  il  y  fut  gardé  étroitement.  On  ne  traita  pas  avec 
plus  de  douceur  les  évêques  qui  lui  étaient  demeures 
attachés.  Les  prélats  courtisans  s'étant  ensuite  assem- 
blés ,  les  légats  à  leur  tête ,  autorisèrent  par  dispense 
le  mariage  de  l'empereur,  prononcèrent  la  déposition 
de  Nicolas,  et  mirent  à  sa  place  Euthymius.  C'eta^^ 
un  moine  du  mont  Olympe,  syncelle  du  patriarche, 
et  fort  estimé  pour  sa  vertu.  Il  n'accepta  celte  place 
que  pour  prévenir  les  tristes  effets  de  la  colère  du 
prince,  qui  menaçait  de  faire  une  loi  pour  permettre 
d'avoir  à  la  fois  trois  ou  quatre  femmes;  et  les  histo- 
riens ajoutent  qu'il  trouvait  des  gens  habiles, tout  pre^ 
à  justifier  cette  loi  anti-chrétienne  :  ce  qui  n'est  jao'*'* 
impossible  à  un  monarque. 

Au  mois  de  juin  suivant,  il  s'éleva  un  si  fu***® 


XLTI. 

Violent 


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(An  906.)  LIVRE    LXXIf.  LÉON    VI.  38 1 

orage,  qu'on  n'en  avait  jamais  vu  de  semblable.  Pen-      orage. 

dant  trois   iours.un  vent  de  sud-ouest  souffla  $ans  ?®^'••P•?^*• 
.   ,  .        ,       .  I^eo,  p.  484. 
cesse  avec  tant  de  violence ,  qu'il  déracina  presque  tous  incert.  con- 

les  arbres,  enleva  les  moissons  et  les  fruits,  détruisit  Sym.p. 467. 
les  maisons  et  les  églises.  Constantinople  fut  remplie     ^559.^' 
de  ruines  et  resta  plusieurs  jours  déserte,  les  habitants 
s'étant  enfuis  dans  les  campagnes.  Une  pluie  abon- 
dante abattit  enfin  ce  vent  impétueux. 

Samonas,  malfaisant  par  nature,  aigri  encore  par     ^^^"' 
ie  poison  de  la  vengeance,  usait  de  tous  ses  artifices  Tronic  chez 

1  >•!    1     -        •  1  •  5  /     •        lesSarrasins. 

pour  perdre  ceux  quil  haïssait,  et  le  prmce  n était,  cedr.p.6011, 
sans  le  savoir,  que  le  ministre  de  ses  ressentiments.  Il  Leo^^^'484 
en  voulait  surtout  à  Androuic  Ducas ,  dont  le  fîls  ,    48^« 

,    ^         ♦  .  ,      Incert.  con- 

Constantin  rayait;  ramené  à  Constantinople.  Andronic  ^n.  p.  229, 
était  estimé  du  prince  pour  sa  valeur  et  ses  talents  Sym. p.^ô;. 
militaires.  Les  Sarrasins  ayant  mis  une  flotte  en  mer,  seoTl'eii 
Léon  choisit  Himère  pour  commander  celle  de  l'Em^ 
pire,  et  lui  donna  pour  adjoint  ce  brave  guerrier.  Ce 
fut  pour  Samonas  une  occasion  de  le  conduire  à  sa 
perte.  Il  sul^orna  un  de  ces  faux  amis,  qiie  l'intérêt 
•change  en  dangereux  ennemis,  pour  avertir  Andronic 
qu'il  se  donnât  bien  de  garde  de  partir  avec  Himère; 
que  l'honneur  qu'on  semblait  lui  faire  était  un  piège 
de  Samonas,  et  que  le  général  avait  ordre  de  lui  cre* 
ver  les  yeux  dès  qu'il  serait  éloigné  de  Constantinople. 
Andronic  était  disposé  à  tout  croire  de  la  méchanceté 
de  Samonas  :  il  refusa  d'accompagner  Himère ,  qui, 
étant  parti  seul,  remporta  une  grande  victoire  sur  les 
Sarrasins.  Andronic,  désespéré  de  n'en  avoir  pas  par- 
tagé la  gloire,  troublé  d'ailleurs  par  les  craintes  que 
lui  inspirait  un  si. puissant  ennemi,  s'enfuit  de  la  cour, 
et, suivi  de  son  fils  et  de  quelques  amis,  il  se  retira  dans 


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38a  HISTOIRE   DU   BAS-EMPIRE.  (As  906.) 

un  château  nommé  Cabala  près  d'Icône  en  Lycaonie. 
Samonas,  toujours  ardent  à  suivre  sa  proie,  persuade  à 
l'empereur  que  cette  retraite  est  une  révolte; que,  par 
trop  de  patience,  il  a  laissé  échapper  un  traître  qu'il 
devait  prévenir;  il  l'excite  à  ne  pas  perdre  de  temps 
pour  écraser  ce  rebelle ,  avant  qu'il  ait  pu  se  rendre 
redoutable.  Léon,  alarmé  par  ce  discours,  fait  partir  un 
grand  corps  de  troupes ,  et  met  à  leur  tête  Grégoras 
Ibérize ,  commandant  de  la  garde ,  allié  d'Andronic, 
dont  le  fils  avait  épousé  la  fille  de  Grégoras.  Mais  les 
intérêts  politiques  divisent  les  familles^  et  sont  capa- 
bles de  rompre  les  liens  les  plus  étroits.  Andronic^hors 
d'état  de  tenir  contre  de  si  grandes  forces,  sortit  de 
Cabala  et  s'enfuit  chez  les  Sarrasins ,  où  il  trouva  au- 
près du  khalife  un  asile  honorable.  L'empereur  était 
aussi  bon  que  Samonas  était  méchant;  il  savait  d'ail- 
leurs qu'un  prince  se  fait  honneur  de  revenir  sur  ses 
pas,  quand  la  passion  ou  la  malice  d'autrui  Ta  coO' 
duit  trop  loin,  et  que  cette  sorte  d'inconstance, qui  k 
ramène  à  la  raison  et  à  la  justice ,  est  un  conseil  de  » 
vertu.  Il  ne  fut  pas  long-temps  sans  se  repentir  d'avoir 
perdu  un  si  habile  capitaine,  et  de  l'avoir  donné  à  ses 
ennemis.  Il  résolut  de  le  rappeler.  Pour  cet  effet  il  ta 
écrivit  de  sa  propre  main,  l'assurant  qu'il  lui  pardon- 
nait le  passé ,  qu'il  lui  rendait  ses  bonnes  grâces,  rf 
qu'à  son  retour  il  le  comblerait  encore  de  nouveaux 
bienfaits.  Cette  lettre  fut  enfermée  dans  une  chanaellc 
de  cire,  et  confiée  à  un  prisonnier  sarrasin,  qui,  ^ 
la  promesse  d'une  grande  récompense,  se  chargea u^ 
la  porter  à  Andronic.  Samonas,  qui  n'avait  pu  einp^' 
cher  l'empereur  de  faire  cette  lettre,  s'en  servit  po^^ 
perdre  celui  que  Léon  voulait  sauver.  Il  alla  trou^c^ 


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<Aii90«.)  LIVHB   LXXtl,  UkOV  TI.  383 

le  messager  au  moment  du  départ.  Savezrvoûsj  tui 
dit-il^  ce  que  contient  la  lettre  dont  vous  êtes  le 
porteur?  C'est  la  perte  des  Musulmans.  Si  vous  ai- 
mez encore  votre  patrie  et  votre  religion ,  dont  mon 
cœur  ne  se  détachera  jamais ,  mettez  la  lettre  entre 
les  mains  du  visir.  Fotre  fidélité  sera  mieux  payée^ 
que  votre  perfidie  ne  le  serait  de  Vempereur.  Le 
Sarrasia  suivit  ce  conseil,  et  le  visîr  ayant  mis  la  let- 
tre soas  les  yeux  du  khalife,  Andronic  fut  arrêté  avec 
son  fils  et  tous  ceux  qui  Tavaieilt  suivi.  Plusieurs  d'en- 
tre eux  succombèrent  aux  traitements  cruels  qu'on 
leur  fit  souffrir,  et  rachetèrent,  leur  liberté  en  se  fai- 
sant mahométans.  Selon  quelques  auteurs,  Andronic  eut 
la  même  faiblesse;  selon  d'autres,  il  mourut  de  misère 
dans  la  prison. 

Sou  fils  Constantin  fut  plus  heureux.  De  l'avis  de     xlviu. 
son  père  qui  vivait  encore,  mais  qui  était  plus  étroite-  COT^traS, 
ment  gardé,  il  concerta  avec  les  autres  prisonniers  ^ a^^^,  j 
les  moyens  de  s'enfuir;  et  s'étant  coulés  le  long  d'une 
corde,  après  avoir  rompu  leurs  fers,  ils  trouvèrent  des 
chevaux  sur  lesquels  ils  prirent  la  fuite.  Poursuivis 
par  une  troupe  de  cavaliers,  tantôt  se  retournant  pour 
les  combattre,  tantôt  leur  jetant  l'argent  qu'ils  avaient     . 
sur  eux, pour  retarder  ta  poursuite,   ils  gagnèrent 
enfin  la  frontière  avec  perte  de  quelques-uns  des  leurs. 
L'empereur  fot  ravi  de  joie  de  les  revoir;  il  les  combla 
de  présents^  les  fit  manger  avec  lui  dans  la  plus  belle 
salle  du  palais, et,  après  le  repas, prenant  par  la  main 
Constantin,  dont  il  connaissait  le  caractère  hardi  et 
entreprenant,  il  le  conduisit  devant  une  image  de  Jé- 
sus-Christ :  ^/ni^  lui  dit~il,  comptez  sur  ma  bien- 
veillance ;  personne  ne  pourra  plus  vous  nuire  au^ 


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384  HISTOIRE  DU   BAS-£MPIR£.  (An  goA.) 

près  *de  moi  :  mais  jurez^moi  devant  cette  sainte 
image  que  vous  me  demeurerez  fidèle ,  et  à  mon 
fils  après  moi.  Fous  portez  le  même  nom  que  lui; 
mais  songez  que  ^  si  jamais  t ambition  vous  égarait 
jusqu*à  le  troubler  dans  la  possession  de  son  héri- 
tage ,  votre  perte  est  infaillible ,  et  qiion  rappor- 
terait votre  tête  sanglante  dans  ce  palais  où  je  vous 
reçois  aujourd'hui  auec  tant  d'honneur.  L'événe- 
ment donna  dans  la  suite  à  ces  paroles  de  Léon  la  force 
^    d'une  prophétie.  Il  mit  Constantin  à  la  tête  d  une  des 
compagnies  de  ses  gardes,  et  l'envoya  commander  ea 
Asie,  oïl  il  se. signala  par  les  avantages  qu'il  remporta 
sur  les  Sarrasins. 
An  909.        Il  y  avait  déjà  plusieurs  années  que  vingt  Sarrasins 
xMx.      d'Espagne,  emportés  par  la  tempête  dans  une  petite 
sios  cLassés  barque,  avaient  échoué  sur  la  côte  de  Provence  entre 
Uo^ostA.  Nice  et  Fréjus,près  d'un  village  nommé  Frainet.  Ils 
Uutrlnà.  ^°  avaient  égorgé  les  habitants,  et  s'étaient  fait  un  rem- 
Hi«t.  1.  a,  c.  part  d'une  haie  d'épines  sur  une  montagne  voisine. 
Murât,  ann.  Us.  furçut  assez  hardis  pour  commencer  dès-lors  a 
p.  a58/268,  piJIpr  Içs  enyiro>is,  firent  venir  d'Espagne  etd'Afriqi» 
un  plus  grand  nombre  de  leurs  camarades,  etpe^a 
peu  se  rendirent  formidables  à  tous  les  habitants  d*' 
ïentour.  Ce  qui  augmenta  leur  insolence,  c'est  que  les 
peuples  de  la  Provence  se  faisant  alors  la  guerre  te 
uns  aux  autres,  les  appelaient  à  leur  secours;  et  ces 
infidèles  les  détruisirent  tous  également.  Ils  infestaient 
les  passages  des  Alpes ,  osaient  même  ravager  la  France 
et  l'Italie,  et  pqussaient  leurs  courses,  d'un  coté  jusque 
daps  1^  Dauphiné,  de  l'autre  jusqu'aux  portes  de  Tui^"' 
Tout  ce  pays  fut  pendant  un  siècle  exposé  aux  ravage» 
de  ces  brigands.  Mais  une  autre  colonie  de  Sarras/ns; 


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(Ah  go^.)  LIVRE   tXXll.  tÉÔlfî   VI.  385 

établie  depuis  vingt  ans  sur  les  bords  et  à  l'embou- 
chure du  Garillan^  itiquiétaît  bien  davantage  Tltalie. 
Ces  barbares  voisins,  de  Gaëte,de  Capoue,  de  Naples, 
de  Benévent^  de  Salerne,  désolaient  par  leurs  courses 
tout  ce  beau  pays^  et  poussaient  leurs  ravages  jus- 
qu'aux environs  de  Rome.  Ils  recevaient  sans  cesse 
par  la   mer  de  nouveaux  renforts.  Athenuif,  prince 
de  Bénévent  et  de  Capoue,  eut  recours  à  Léon.  H  lui 
députa  Landulf ,  son  (ils  aîné  et  son  collègue.  Léon 
reçut  bien  le  jeune  primée,  se  flattant  d'avoir  trouvé 
l'occasion  de  relever  l'ancienne  souveraineté  de  l'Em- 
pire sur  Bénévent.  11  lui  promit  toute  assistance,  et 
fit  équiper  une  flotte.  Ijandulf ,  apprenant  la  mort  de 
son  père,  /etouma  en  Italie  avec  le  titre  de  patrice; 
et  peu  de  temps  après,  Léon  fit  partir  le  patrice  Nico-*- 
las,  surnommé  Picigli,  avec  une  bonne  armée,  lui  or- 
donnant de  faire  tous  ses  efforts  pour  déloger  les  Sar^ 
rasins.  Ce  patrice,  brave  et  prudent,  commença  par 
détacher  d'eux  Grégoire,  duc  de  Naples,  et  Jean,  duc 
deGaëte,  leur  conférant  le  patriciat  de  la  part  de  l'em- 
pereur. Ensuite,  se  joignant  aux  princes  de  Capoue  et 
de  Salerne,  il  se  fortifia  encore  de  toutes  les  troupes 
d'Apulie  et  de  Calabre,  et  alla  camper  au-dessus  des 
Sarrasins,  sur  la  gauche  du  Garillan.  Le  pape  Jean  X, 
qui  croyait  faire  un  sacrifice  agréable  à  Dieu  en  mas- 
sacrant des  infidèles,  vint  lui-même  à  la  tête  d'une 
armée,  avec  le  marquis  Albéric,  duc  de  Spolète,  se 
poster  de  l'autre  côté,  en  sorte  que  les  Sarrasins  en- 
veloppés furent,  au  bout  de  trois  mois, réduits  à  l'ex- 
trémité. Mourant  de  faim,  et  ne  pouvant  échapper^ 
ils  suivent  le  conseil  que  leur  donnaient  secrètement 
le  duc  Grégoire  et  le  duc  Jean,  qui  entretenaient  tou- 

Tomê  XIIL  a5 

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586  I^ISTOUIB    DU    BAS-E3VIPUIE.  (An  909.) 

jours  iutelligeuca  a^ec  eux.;  Us  mettent  le  feu  à  leurs 
.  baraques,  et,^e  faisant  jour  le  safcre  à  la  main  au  tra- 
vers de  Tarmée  chrétienne,  ils  se  dispcarseat  sur  les 
jpont^gw^  et  dans  les  forêts  voisines.  On  les  poursuit 
sans  ,relâche;  on. les  détruit  les  uns  après  les  autres, 
et  bien  peu  échappèrent  au  fer,  ennemi.  C'est  ainsi  que 
les  Sarrasins  furent  disses  du  Garillan  ;  c'était  leur 
place  d'armes,  le  dépôt  de  leur  butin  et  de  leurs  pri- 
sonniers. Tous  les  étrangers,  que  leur  dévotion  con- 
duisait à  Rome,  tombaient  cxttre  leurs  mains  et  leur 
paj^rient  une  grosse  rançonv  Quoique  l'Italie  eût  beau- 
çpup  à  souffrir  des  Hongrois  et  des  Sarrasins  du  Frai- 
net,,  elle,  souffrait  encore  davantage  de  ces  vautours    j 
qui  iui, déchiraient  lea  enti^illes.  Cette îg^erre,  com-    | 
mencée.  vers  la  fin  du  règme  dcLécm,  nefut  termince    j 
que. cinq  ans  après  sa  mort, ;en '916.  Une  expédition 
si  bien  sputenue  pendant  sept  ans;  fit  honnleur  aux 
armçs.des  Grççs ,  et  montra  qu'il ûe  fallait  qu'un  brave    , 
et  habile  général  pour  réveiller  daî»  le  cœur  do  la  na- 
tion son  ancien  courage. 
^  L'honneur  de  l'Empire  ne  se  ;souteuait  pas  du  cote 

Etat  des     de  l'orient.  La  frontière  se  dépeuplait.,  et  quelques 
du  côté  de  accroissenvents  arrivés  sous  le. règne  de  Léon,  ««i^"* 
Const.      de  l'Euphrate,  furent  depeu'  de  conséquence,  i^oi 
tZT'lV  frères  qui  possédaient  des  terres  au-delà  de  ce  fleuve, 
Idem  de     au-dcssous  de  Mélitine,  se  donnèrent  à  l'empereur,  qu»t 

aam.  imp.  c.  '  *      .  .  - 

43,45.     pour  illustrer  cette  acquisition, 'fit  de  ce  petat  caflt 
une  province ,  sous  4e  nom  imposant  de  'Hiêoîe  w 
Mésopotamie.  La  grande  At'niéûiè  était  partagée  *û 
plusieurs  petits , princes, îquititâdialent  de  se  mainte''      | 
entre  la  puissance  des  Gréés  et  celle  des  Sarrasins, 
servant  sourdemept  cey^.donls  ils  paraissaient  ou 


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(Angog.)  LiVRfi   LXXII.  LÉON   Vl.  ÎS^ 

tement  ennemis.  Tels  étaient  Cricorice,  prince  de  Taro, 
pays  situé  entre  l'Euphrate  et  le  mont  Taurus  à  l'oc- 
cident du  lac  de  Van;  Adranasar  en  Ibérie,  qui  por- 
tait le  titre  de  curopalate,  et  Symbatice,  qui  paraît 
avoir  été  le  plus  puissaiit  de  ces  petits  souverains» 
Aussi  prenait-il  le  titre  pompeux  de  Prince  des  prin- 
ces. Ses  états  s'étendaient  du  midi  au  septentrion,  de- 
puis la  ville  de  Kars  jusqu'au  lac  de  Van,  qui  y  était 
renfermé  ;  et  cette  contrée  était  dès  lors  appelée  Baas- 
paracan.  Les  empereurs  recevaient  quelques  présents 
de  ces  princes ,  et  leur  payaient  des  pensions  ;  ils  fai- 
saient avec  eux  des  échanges  de  territoire,  s'intéres- 
saient dans  leurs  démêlés  et  dans  leurs  jalousies  mu- 
tuelles, les  attiraient  de  temps  en  temps  auprès  d'eux, 
leur  procuraient  des  mariages  avec  des  filles  d'un  rang 
distingué  dans  l'Empire,  leur  donnaient  même  à  Con- 
stantinople  des  établissements  utiles;  et,  avec  toutes 
ces  complaisances, ils  n'en  tiraient  pas  grand  secours. 
Ce  fut  pour  l'intérêt  de  ces  seigneurs  que  Léon  entre- 
prit une  expédition  dans  la  Phasiane,  contrée  située 
vers  la  source  de  l'Araxe,  qui  porte  quelquefois  dans 
Tantiquité  le  nom  de  Phase ,  ainsi  que  le  fleuve  de  la 
Colchide.  Les  Sarrasins  s'étaient  emparés  de  ce  pays. 
Léon  y  envoya  lés  troupes  des  provinces  voisines,  com- 
mandées par  Lalacon  ,  qui  y  fit  de  grands  ravages. 
Catacale,  qui  lui  succéda,  prit  Théodosiopolis,  place 
très-forte,  aujourd'hui  Hassan-Cala  près  d'Arz-Roum, 
saccagea  la  Phasiane,  et  affaiblit  en  ces  contrées  la 
puissance  des  Sarrasins. 

Ceux  de  Tarse  et  de  Mélitine  envoyèrent  dans  ce  lc  père  de 
même  temps  à  Constaiîtinople,  pour  traiter  de  l'échange  co^^tonti- 
des  prisonniers.  Entre  ces  envoyés  était  le  père  de  Sa-      *•****• 

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388  HISTOIRE   DU   BAS*£MPIRE.  (A9909,] 

monas.  L'empereur,  en  considération  de  son  Ëivori,  les 
traita  splendidement  dans  le  palais  de  Magnaure;  il 
s'empressa  d'étaler  à  leurs  yeux  toutes  les  richesses  de 
l'Empire,  et  les  fit  entrer  dans  l'église  de  Sainte-Sophie, 
qu'il  avait  fait  parer  de  ses  plus  beaux  ornemenls.  Od 
trouva  fort  mauvais,  on  regarda  même  comme  une 
profanation,  qu'il  eût  mis  les  vases  sacrés  sous  les  yeux 
de  ces  musulmans.  Le  père  de  Samonas,  ébloui  de  tant 
de  magnificence,  charmé  du  grand  pouvoir,  deshoo- 
neurs  et  de  l'opulence  de  son  fils,  voulait  se  faire  chré 
tien,  et  demeurer  à  Constantinople,  pour  partager  cette 
brillante  prospérité.  Samonas,  aussi  mauvais  chréties 
que  doit  l'être  un  adorateur  de  la  fortune,  Ten  dé- 
tourna, lui  conseillant  de  rester  dans  sa  religion  et  daos 
son  pays,  où  il  lui  promettait  d'aller  le  rejoindre, dès 
qu'il  pourrait  commodément  y  transporter  tous  ses 
biens. 

Ah  910.         U  n'eut  pas  le  temps  d'exécuter  ce  mauvais  desseJD. 

.   "I-  ,   Sa  méchanceté  lui  fit  perdre  ce  qu'elle  lui  avait  f^ 

Disgrâce  de  ^  ,  1  a  t  '      fi» 

Samonas.    curc.  Le  jour  de  la  Pentecôte  de  l'an  910,  LeonW 

Cedr.p.6o5,  courouner  solennellement  son  fils  Constantin  parles 

606.  .  .  .  .      ■ 

Léo,  p.  475,  mains  du  patriarche  Ëuthymius.  Dans  le  festm  qui 

Zon.  p.  xsô,  suivit  cette  auguste  cérémonie,  Zoé  fut  si  charméede 

Giycasi  p.  l'intelligencc  et  de  la  bonne  mine  du  maître-d'hôtel  de 

Joli%.^i8Ô.  Samonas,  qu'elle  le  demanda  pour  l'employer  à  son 

incert  «>n-  servicc,  ct  Ic  courtisau  se  fit  un  mérite  de  le  céder 

tin.  p.  a3i.  '  .1 

c    *^**  ^«  aussitôt.   Ce  domestique  se   nommait  Constantin,  i» 

Sym.  p.  468,      ....  '■  r        Hf 

469»  470.   s'insinua  si  bien,  en  peu  de  temps,  dans  la  confianccac 

56i,  562!    l'empereur  et  de  l'impératrice,  que  Samonas  en  devifll 

jaloux;  il  résolut  de  le  perdre.  La  calomnie  ne  lui^"' 

tait  rien,  il  avertit  l'empereur  que  l'impératrice s«f*|^ 

prise  d'amour  pour  Constantin ,  et  qu'elle  entretenait 


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(A«  910.)  LIVRE    LXXIf.  LÉO»    VI.  SSg 

avec  lui  un  secret  commerce.  Léon,  qui  avait  de  bonnes 
raisons  de  douter  de  la  vertu  de  sa  femme,  voulant 
cependant  éviter  Téclat,  se  contenta  de  faire  tondre 
Constantin ,  et  de  l'enfermer  dans  un  monastère  éloi- 
gné. Peu  de  jours  après,  sa  colère  étant  calmée,  Tiu- 
clination  qu'il  avait  pour  ce  serviteur  agréable  reprit 
le  dessus,  il  le  fit  rapprocher  de  Constantinople,  et 
transférer  dans  le  monastère  que  Samonas  avait  lui*- 
même  fondé  près  de  Damatrys.  C'était  un  séjour  dé- 
licieux, où  l'empereur  allait  souvent  se  reposer.  Il  y  vit 
Constantin ,  et  sur-le-champ  Samonas  eut  ordre  de  lui 
rendre  l'habit  séculier,  et  de  l'amener  aussitôt  pour 
servir  à  table.  Après  le  repas,  l'empereur  lui  ordonna 
de  le  suivre  à  Constantinople,  et  le  reprit  à  son  ser- 
vice. Samonas,  désespéré  du  retour  de  son  rival ,  tourna 
toute  sa  colère  contre  Léon;  de. concert  avec  d'autres 
mécontents,  il  compose   un  libelle   satirique  oii  le 
prince  était  horriblement   déchiré,  et  le  je^te  sur  le 
passage  de  l'empereur.  Ce  fut  la  première  chose. que 
Léon  rencontra,  en  entrant  dans  la  sacristie  de  Sainte- 
Sophie.  Il  en  fut  vivement  piqué,  et  fit  les  informa-^ 
tions  les  plus  exactes  pour  en  découvrir  l'auteur.  Lès 
devins  ne  furent  pas  oubliés  ;  mais  toutes  ces  recher- 
ches auraient  été  inutiles,  si  un  des  complices  n'eût 
révélé  le  secret  à  l'empereur.  Léon,  qui  ne  fut  jamais 
sanguinaire,  ne  punit  Samonas  que  par  la  confisca- 
tion de  ses  biens  et  par  une  prison  perpétuelle ,  dfgne 
réeotii  pense  de  ses  criminelles  complaisances,  et  deses 
intrigues  pernicieuses.  Il  revêtit  Constantin  de  tout^^ 
ses  charges,  et,  pour  l'égaler  en  tout  à  S^wortasiMi 
voiilut  qu'il  eût  aus^i  l'honneur  de  fonder  un  mMasi- 
tare, ^doi>t  Ic^  |)atrïàrche  Ëuthymiu^  fit.ia  dédifacé^ 


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390  HISTOIRE   DJJ    BAS'EMPIRE.  (An  910.) 

pour  honorer  la  cérémonie,  l'empereur  y  assista  avec 
toute  la  cour, 
LUX.  Ce  mouastère  fut  bâti  ds^ns  un  lieu  nommé  les  No- 

la  fondation  sics,  Voicî  €6  qui  détermina  Coastantin  à  choisir  cet 
tè™*de8*"  emplacement.  Il  avait  un  père  plein  de  probité  et  de 
Nosies.  j^ijgiQii  ^  qui  cultivait  en  cet  «ndroit  un  petit  jardin 
sans  autre  ornement  qu'une  belle  source  d'eau  pure, 
recueillie  dans  un  bassin,  où  les  passants  s'arrêtaient 
volontiers  pour  se  rafraîchir.  Un  soldat  vint  s'y  repo- 
ser, et,  tandis  que  son  cheval  s'abreuvait, il  s'amusa  à 
jQompter  l'argent  qu'il  rapportait  à  Constantinople; 
•c'étaient'  trois  livres  d'or.  En  remontant  à  cheval,  il 
oublia  sa  bourse,  qu'il  laissa  au  bord  de  la  fontaine. 
Le  vieillard  la  trouva;  et,  non  moinà  affligé  de  cette 
perte  que  le  cavalier  mênïé,  il  la  mit  à  part,  priant 
Dieu  de  lui  en  ramener  Je  maître.Troîsans  après,  lesol- 
dat  repassa  par  les  Nôsies;  Après  s'être  désaltéré,  et 
«Voir  abreuvé  son .èheVal,  il  s'assit  près  de  la  fontaine^ 
et  la  pe^rdant  en  soupirant;:  Hélas!  dit-il,  cest  sur 
tes  isards  que  fui  perdu  toute  mcufortumi  tout  le 
fruit  déjnes  travaux,  le  maître  du  jardin  l'entendit, 
et  Jui  dt^andà  le;  sujiet  de  sa  douleun  Le  soldat  lui 
raconta  son  Mav(enture^  sans  «oublier  la  forme  de  h 
bours«^  le.nombrç  et:ia:y£(leUr:des  pièces  qu'elle con- 
46iiait.  Sar  des  in^î/cés  si  bien  circpustanciés,  le  vieil- 
lavd  cottrtsà  sa  cabane,  et  lui  remettant  sa  bourse,  7^' 
W^\  lui'ditMl,ye  neVaipasouvfHe.  LesoWat,  après 
Avoir  eopipté  l'argent,  diarmé  d«  sa  ibonne  foi?  '^ 
pressait  de  prendre  ce  qu'il  jugei?art  à  propos ,  «t  pe 
pHt  lieagager  à  rien  acioept^r.  Il  i  s'en,  alla  Mo^ 
JQ^^el  comblant  de  bénédinitSQiisircet  boïDme  digû^ 
^ssivpi-ëmicrs   âges   du   monder  Ce:  fut  cette  cabafl^ 


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(Angio.)  LIVRE    LXXII.  LÉON    Vf.  Sgi 

que  Constantin  changea  en  un  superbe   monastère. 

Les  Sarrasins  avaient  sur  le  cœur  l'affront  qu'ils     Awijir. 
avaient  reçu  d'Himère  par  la  défaite  de  leur  flotte.  Ré-  Fiotte^OTec 
soluMle  prendre  leur  revanche^  ils  mirent  en  mer  trois  ^"*r^",""® 
cents  vaisseaux,  dont  ils. donnèrent  le  commandement    Sarrasins. 
à  ces  deux  renégats  dont  nous  avons  déjà  parlé,  Da- 
mien^  émir  de  Tyr,  et  Léon,  de  Tripoli.  Hi mère  alla 
ao-devant  d'eux,  et  les  rencontra  près,  de  Samos^  où 
commandait  alors  Romain  Lécapène,  qui  fut  depuis 
empereur.  Il  se  livra  un  sanglant  combat,  dans  lequel 
Himère  fut  vaincu,  sa  fiotte  coulée  à  fond  ou  dispersée, 
li  courut  lui-même  les  plus  grands  risques,  et  vive- 
ment poursuivi ,  il  gagna  enfin  le  port  de  Mytilène. 

Léon  était  depuis  assez  long-temps  tourmenté  d'une       x^v. 

dyssenterie ,  mal  funeste  à  un  grand  nombre  d'empe-      Léon. 

reurs,et  qui  fut  sans  doute, dans  la  plupart,  reffôtdé   fl^^v- 
.  006,  607. 

l'intempérance.  C'était  l'usage ,  qu'au  commencement  Léo,  p.  /,86, 

du  catéme,  les  empereurs  fissent  une  exhortation  chré-  zon.  p.'  181, 

tietltte  au  sénat  et  à  leur  cour  assemblée;  ces  princes-,  oiyc^^/ags, 

quoique  déréglés  dans  leur  conduite,  étaient  grands  ^***^'igo/^^ 

prédicateurs.  Cette  année  911 ,  Léon,  atténué  par  sa   Manass.p. 

maladie,  n*eut  de  force  que  pour  dire  pes  paroles:  i^o»**^'.  «• 

ic  Vous  voyez  Tél^at  d'anéantissement  auquel  je   ine     Const. 

«  trouve  réduit.  Je  ne  puis,  me  flatter  de  vivre  encore   adm.  imp. 

,  .  .    .  c.  a6. 

(t^fong^temps  avec  vous,  et  peut-être  ne  v^rrairje  .pas  Cod.orig.p. 
ii  le  jdiir  de  la-  i^surrèetîoa  du  Seigneur..  Yoici.  Je  dciv.  incert.  con- 
«  ni€rii9erviC6'qtte''je  tous  demande;  sûuvenea-'Vous  ^°', ^2**'* 
«d'Un»  pritice' qui  vou«  a  gouvernés  avec  doticeuc,  et^^^-P^^^'* 
<c  témoigriez-èn  votre'riecotmaissancetà  mouL  fils  et  kma  ^^^^^' 
ce  femme.)»  Ce  triste  >dis<5ours<  fiit  suivi  des- sentisse-  Liutpr.  Hîat. 

'  ,  ^  .      1.  3,  c.  6, 7. 

metits  de  toutes  i'ass^blée;  ile;praitiestèi^eni>d,'uae:ivoix.  Dncange, 
unarlime  qu'ils  serviraienti^fidèlements  au  péril  mâme.  ui,  i4k^* 


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■  1 


39^  HISTOIRE   DU   B/iS«£]IIPlRE.  (An  911.) 

Baroniui.  de  IcuF  propre  vie, l'impératrice  et  son  fils;  et,  après 
Fieury, Hast,  avoir  salué  le  prince,  ils  se  retirèrent  fondant  en  lar- 
*^«rL  47.  '  ™^s.  Avant  que  de  mourir,  il  eut  encore  le  chagrin 
d'être  témoin  d'un  grand  incendie,  qui  consuma  les 
archives  de  la  grande  église.  Sa  vie  languissante  se 
prolongea  plus  qu'il  n'avait  espéré  ;  et  le  1 1  de  mai, 
se  voyant  près  de  mourir,  il  fit  venir  son  frère  Alexan- 
dre, et  le  désigna  pour  son  successeur  avec  son  fils  ea- 
core  enfant,  lui  recommandant  avec  instance  ce  jeune 
prince,  et  le  conjurant  de  le  faire  son  héritier.  On  dit 
même  qu'en  expirant  il  prédit  à  son  frère  qu'il  n'avait 
plus  que  treize  mois  à  vivre.  Les  Grecs  de  ce  temps- 
là  paraissent  fort  prévenus  en  faveur  du  talent  pro- 
phétique de  Léon  ;  à  les  entendre,  il  avait  prédit  pres- 
que tous  les  événements  de  son  règne,  et  même  ceux 
des  temps  postérieurs  ;  et  c'est  peut-être  principale- 
ment pour  cette  raison  qu'ils  lui  ont  donné  le  nom  de 
Sage  et  dePhilosophe^qu'on  peut  d'ailleurs  lui  refuser 
avec  justice.  On  nous  a  conservé,  je  ne  sais  pourquoi, 
seize  oracles  de  sa  façon,  qui  ne  sont  qu'un  babil 
inintelligible,  et  qu'on  a  prétendu  expliquer  après  les 
événements  ;  mais  l'explication  n'est  pas  moins  ridi- 
cule que  le  texte.  Il  a  cependant  laissé  un  ouvrage  es- 
timable, c'est  sa  Tactique,  dans  laquelle  il  donne  de 
bons  préceptes  sur  l'art  militaire,  tel  qu'il  était  de 
son  temps.  M.  de  Maizeroy,  officier  distingué  par  son 
mérite,  vient  d'en  donner  une  traduction  française, 
qu'il  a  enrichie  de  remarques  savantes  et  judicieuses» 
Ce  traité  nous  apprend  plusieurs  usages  qu'on  ne  trou- 
verait pas  ailleurs.  On  y  voit  que  tous  les  jours,  &^ 
et  matin,  on  faisait  dans  le  camp  une  prière  coior* 
mune,  où  toute  Tannée  diaiitait  le  Trisagion;  etqu^t 


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(An  911.)  LIY&£    LXXII.  LÉON    VI.  SgS 

la  veille  d'une  bataille,  un  prêtre  faisait  sur  toutes  les 
troupes  une  aspersion  d'eau  bénite.  On  y  voit  aussi 
que  l'usage  des  flèches  empoisonnées  était  ordinaire  en 
ce  temps-^à,  et  Léon  ne  le  blâme  pas;  c'est  une  preuve 
de  la  bassesse  de  cœur  devenue  alors  générale.  On  cite 
encore  de  ce  prince  plusieurs  autres  ouvrages  mili- 
taires, qui  se  conservent  en  manuscrit  dans  la  biblio- 
thèque du  Vatican  et  dans  celle  de  Florence ,  avec  un 
grand  nombre  de  discours  sur  les  dogmes  de  la  reli- 
gion et  sur  la  morale,  entre  lesquels  est  une  lettre 
d'un  style  épiscopal,  adressée  à  tous  ses  sujet&  pour 
les  exhorter  à  vivre  chrétiennement.  On  y  reconnaît 
partout  un  prince  très-orthodoxe,  au  zèle  duquel  il  ne 
manquait  que  son  propre  exemple.  Entre  plusieurs 
monastères,  il  en  fît  bâtir  un  sous  le  nom  de  Saint-La- 
zare, dans  lequel  on  ne  recevait  pour  moines  que  des 
eunuques.  Il  avait  eu  de  Zoé  Carbonopsine  une  fille 
qui  fut  nommée  Eudocie,  et  dont  on  ne  connaît  que 
la  naissance. Il  avait  régné  â5  ans,  2  mois  et  1 1  jours, 
et  mourut  dans  sa  4^*  année. 


FIN   DU    LFVR^    SOIXAITTE- DOUZIEME, 


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394  HISTOIRE    DU   BAS-EMPIKE.  (An  911.) 


LIVRE  LXXIII. 


I.  Gouvernement  d'Alexandre.  11.  Rétablissement  du  palriarclie 
Nicolas.  III.  Mort  d'Alexandre,  iv.  Entreprise  de  Constan- 
tin Ducas.  V.  Proclamé  empereur,  il  assiège  le  palais,  vi. 
Mauvais  succès  de  l'entreprise,  vii.  Syméqn  vient  assiéger 
Coustantinople,  et  se  retire,  vui.  Le  fils  du  doge  de  VeDise  à 
Constantinople.  ix.  Zoé  rentre  dans  le  palais,  x.  Andrinopic 
perdue  et  recouvrée,  xi.  Alliance  avec  les  Patzinaces.  m 
Courses  des  Grecs  et  des  Sarrasins,  xiii.  Pait  avec  les  Sar- 
rasins. XIV.  Les  Grecs  iiiarchent  contre  les  Bulgares,  xv.  Ba- 
taille d'Achélotts.  XVI.  Romain  Lécapèàe.  accusé  de  trahi- 
son, xvii.  Syméon  repoussé  devant  Constantinople.  xvni. 
Léon  Phocas  et  Romain  Lécapène  aspirent  tous  deoi  a 
l'Empire,  xix.  Romain  se  saisit  du  chambellan  ConstanliD. 
XX.  Trouble  dans  le  palais,  xxi.  Romain  vient  au  palaK. 
XXII.  Léon  prend  les  armes,  xxiii.  Romain  dissipe  la  rébel- 
lion de  Léon.  xxiv.  Diverses  conjurations  contre  Romaui. 

H  XXV.  Romain  couronné,  xxvi.  Romain  élève  sa  famille  aux 
honneurs  du  trône,  xxvii.  Fin  du  schisme  de  l'Église  « 
Constantinople.  xxviii.  Conjurations,  xxix.  Méchanceté (l« 
Rhentace.  xxx.  Guerre  des  Bulgares,  xxxi.  Mort  de  Théo- 
dora,  femme  de  Romain,  xxxii.  Le  roi  d'Ibérie  à  ConsiaB- 
tinople.  xxxiii.  Nouvelle  irruption  des  Bulgares,  xx»^' 
Urne  des  cendres  de  Maurice,  xxxv.  Révolte  de  Boïlas.xxxvi. 
Nouvelle  guerre  à  Andrinople.  xxxvii.  Mort  du  patriarche 
Nicolas.  XXXVIII.  Léon-le-Tripolite  battu  à  Lemnos.  i^' 
Enlrevue  de  Romain  et  de  Syméon.  xl.  Élévation  desfils°^ 
Romain,  xli.  Entreprise  sur  l'Egypte,  xlii.  Rivalité  deRo" 
main  et  de  Syméon  par  rapport  à  la  Servie,  xliii.  Troubles 


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(An  gii.)  LIVRK    LXXIII.  ALEXANDRE.  SgO 

dans  le  Péloponnèse,  xliv.  Origine  des  Maïnotes.  xlv.  Con- 
juration de  Jean-le>Mystique.  xlvi.  Mort  de  Syniéon.  xlvu. 
Mariage  du  roi  des  Bulgares  avec  la  petite-fille  de  Romain. 
xLViii.  Malatia  prise  par  les  Grecs,  xlix.  Affaires  d'Italie.  « 
li.  Mort  du  patriarche  Etienne,  li.  Guerre  en  Arménie,  lu. 
Conjuration  contre  Pierre,  roi  des  Bulgare,  lut.  Mort  de 
Christophe,  liv.  Théophylacte  patriarche,  lv.  Charité  de 
Romain,  lvi.  Incursion  des  Hongrois.  lVii.  Mariage  des  fils 
de  Romain,  lviii.  Événements  divers,  lix.  Incursion  des 
Russes.  LX.  Exploits  et  disgrâce  de  Jean  Curcuas  et  de  son 
frère  Théophile,  lxi.  Le  voile  d'Édesse  transporté  à  Con- 
stantinople.  lxii.  Romain  envoie  des  secours  à  Hugues,  roi 
d'Italie,  contre  les  Sarrasins,  lxiii.  Trêve  avec  les  Hongrois. 
rxiv.  Mariage  de  Romain,  fils  de  Constantin  Porphyrogé- 
nète.  Lxv.  Changement  de  vie  de  Romain,  lxvi.  Intrigue  de 
Constantin  Porphyrogénète  pour  détrôner  Romain,  lxvii, 
Romain  détrôné,  lxviii.  Enfants  de  Romain. 


ALEXANDRE.  CONSTANTIN  VU,  dit  Porphyro- 
G^irÈTE,  second  de  ce  surnom.  ROMAIN  LÉCA- 

PÈNE. 


Bi^DANT  le  règne,  de  Léon ,  son   frère  Alexandre    aw 


9". 


d*Alexandre^ 
Cedr.  p.  607,^ 


n'avait  ^u  que   le  nom  d'empereur.  Après  sa  mort  ^        i. 

.,  ,      '         ,  .  ^  .  Gouverne- 

il  j3n  eut. seul  tout  le  pouvoir,  son  neveu  Constantin^       ment 

qui  partageait  ce   titre  avec  lui ,  n  étant  âge  que  de 

aix^^ns*.  Il  était  dans  sa   quarante-deuxième   année:    6o8,'6ii 

,  Léo,  'p\  487, 

mais  sa  vie  y  passée  tout  entière  dans  la  débauche:,    .  A^-.. 
ne  lui  avait:  laissé  acquérir  nulle  expérience,  liibérttn^  '    iVo. 
ivrogne^ignorant^  ne  connaissant  d'occupation  sérieuse    iSa,  tts?^ 
que.la.iciiàssQ^  il  avait   autant  que  son  neveu  besoin  'crej!  vit^ 


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396  HISTOIRE   DU    BAS-EMPIRE.  ^An  911.) 

Basiiiijan.   de  gouvemeur.  Il  en  prit  de  conformes  à  son   carac- 
tiD^p*33,'  tère;  c*étaîent  les  compagnons  et  les  ministres  de  ses 
Sym?pt*47i,  plaîsirs.  Il  mit  à  la  tête  du  clergé  du  palais  ua  clerc 
Geirep.   ^®  mœurs  dépravées ,  nommé  Jean  Lazare,  qui  mou- 
^^56^^^'   ''"^  P^^  ^^  tempa  après  lui,  en  jouant  à  la  paume  dans 
Baroniu».    l'Hebdome.  Il  prodigua   les  trésors  de  l'État  à   deux 
Dttcange,   scélérats ,  Gahriélopule  et  Basilize,  et  les  fit  patrices. 
*"  14Î!  ^  Il  fut  même  tenté  de  nommer  Basilize  son  successeur, 
chrilt.*"  I,  ^^  ^^  rendre  son  neveu  incapable  de  régner,  en  le  fai- 
p.  aSx,  a5a.  ^^^^^  eunuquc.  Lcs  serviteurs  fidèles  du  jeune  prince 
ne  le  détournèrent  de  cet  infâme  dessein   qu'en  lui 
faisant  espérer  que  cet  enfant  ne  vivrait  pas.  Son  con- 
seil   n'était  composé  que  de  charlatans  et  d'astrolo- 
gues.   Ils  lui   persuadèrent  qu'une  vieille  figure    de 
sanglier  ,  qui  se  voyait  dans  un  coin  du  cirque,   était 
son  talisman  ;  que  sa  fortune  y  était  attachée ,  et  que 
la    vertu  secrète   de    cet   animal  mystérieux    l'avait 
défendu  contre  les   mauvais  desseins   de    son   frère 
Léon.   Capable  de  tout  croire,  il  adopta  cette   idée 
extravagante ,  fit  réparer  la  figure  à  demi-mutilée,  et 
voulut  l'honorer  d'une  dédicace  solennelle.  Il   la  fit 
placer  au  milieu  du  cirque,  qu'il  orna  des  plus  riches 
tapisseries,  des  lampes  et  des  chandeliers  de  Sainte- 
Sophie;  et,  au  milieu  de  ce  magnifique  appareil,  il  fit 
célébrer  des  jeux  équestres.   Cette  profanation  des 
ornements  d'une  église  ajouta  le  scandale  au  ridicule 
^  de  cette  cérémonie. 
^  .  Dès  les  premiers  jours  de  son  règne  ,  il  chassa  Zoé 

*ment*dr  ^^^  P^'^'^'  Himèrc  ne  fut  pas  plus  tôt  de  retour  avec 
patriarche  lej  déhris  de  la  flotte ,  qu'il  le  relégua  dans  un  moDas- 
tère,  le   menaçant  de  le  :  traiter  eniennen^i^  pour  le 
punir,  dissut-il,  des  mauvais  sérviceb  qu'il  itii  isivait 


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(An  911.)  LIVRE    LXXlIt.  ALKXAITDRE.  897 

rendus  auprès  de  son  frère  Léon.  Himère,  effrayé  de 
ces  menaces^  tomba  dans  une  langueur  qui  le  condui- 
sit au  tombeau.  Le  seul  événement  mémorable  de  ce 
méprisable  règne*,  serait  le  rétablissement  du  patriar- 
che Nicolas,  si  Euthymius  n'eût  pas  été  traité  en  même 
temps  de  la  manière  la  plus  indigne.  Léon,  dans  sa 
dernière  maladie,  avait  rappelé  Nicolas  ;  c'était  même 
entre  ses  mains  qu'il  avait  reconnu  ses   désordres;  il 
s'était,  en  mourant,  recommandé  à  ses  prières;  il  lui 
avait   rendu  le  gouvernement  de  son  église.  Euthy- 
mius, qui  n'avait  accepté  qu'à  regret  le  patriarcat, 
était  disposé  à  le  quitter  avec  joie.  Mais  Alexandre  ne 
savait  rien  faire  avec  modération  et  avec  douceur.  Il 
assembla  le  clergé  et  le  sénat  dans  le  palais  de  Ma- 
gnaure,  et  ayant  fait  asseoir  Nicolas  auprès  de  lui ,  il 
fît  amener  Euthymius*  Dès  qu'il  parut,  des  clercs  in- 
solents ,  excités  sans  doute  par  le  prince ,  l'accablèrent 
d'outrages,  et  lui  sautant  au  visage,  le  frappant  indi- 
gnement, lui  arrachant  la  barbe,  ils  le  chassèrent  de 
l'assemblée,  le  traitant   d'usurpateur,  d'adultère  in- 
fâme, qui  avait  enlevé  une  épouse  à  son  époux  légi- 
time. Euthymius,  supportant  patiemment  ces  insultes, 
fut   relégué  dans   un  monastère,  où  il  mourut  peu 
après.  C'est  un  grand  crime  à  Nicolas  que  de  ne  s'être 
pas  opposé  à  ces  indignités. 

Syméon,  roi  des  Bulgares,  vivait  en  paix  depuis  dix     jljx  91a. 
ans.  Dès  qu'il  sut  qu'Alexandre  succédait  à  son  frère,       ^^^^ 
il  lui  envoya  demander  si  c'était  son  intention  d'entre-  d'Alexandre, 
tenir  la  bonne  intelligence ,  lui  offrant  son  amitié. 
Alexandre ,  aussi  fier  qu'incapable  de  soutenir  par  des 
effets  ce  ton  de  hauteur ,  reçut  les  ambassadeurs  avec 
arrogance  et  mépris,  ne  répondant  que  par  des  me- 


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398  HISTOIRB    DU    BAS*CMPIR£.  (An  91».) 

naces.  Le  roi  bulgare  irrité  se  préparait  à  la  guerre, 
lorsqu'il  apprit  ila  mort  d'Alexandre.  Le  6  juin,   ce 
prince  s^étant  levé  de   table,  ivre  à  son  ordinaire,' 
après  avoir  pris  quelque  sommeil ,  s'en  alla  jouer  à  la 
paume 9  et,  saisi  tout-rà*coup  d'une  extrême  douleur 
d'entrailles,  il  se. fit  rapporter  au  palais,  où  il  expira 
le  lendemain,  rendant  le  sang  par  le  nez  et  par  l'urètre.  ' 
Il  avait  régné  un  an  et  vingt-sept  jours.  Les  auteurs 
ne  disent  pas  qu'il  ait  jamais  été  marié.  Il  nomma , 
en  mourant,  sept  tuteurs  à  son  neveu,  la  plupart  in- 
dignes de  cet  important  ministère  v  c'étaient  le  patriar- 
dae  Nicolas  ,  Etienne  et  Jean  Éladas,  l'un  maître  du  * 
palais ,  l'autre  des  offiisés,  Jean  Lassare,  dont  j'ai  parlé,  * 
un  certain  Eutbymiiis,  différent  du  patriarche  déposé, 
Basilize  et  Gabriélopule.  On  rapporte  que,  sous  le  rè- 
gne de  ce  prince,  parut  à  l*occident,  pendant  quinze 
jours^une  de  ces  comètes  qu'on  nomme  Xiphias,  parce 
qu'elles  ont  la  fbpme  d'une  épée. 
i^.  La  nouvelle  des  préparatifs  extraordinaires  que  Éai- 

de^ConiuS-  sait  le  roi  des  Bulgares  jetait  Talarniedans  Constan-  " 

tinDucas.    tiooble ,  ct  le  mauvais  choix  des  tuteurs  du    ieune 
Cedr.p.609,      .  ^       j     1.,  .  ,  .  .    ,   ,  ^ 

610,  611.   pnnce  redoublait  les  oramtes,  et  excitait  les  murmures. 

Léo,  p.  488,   ^x       ,,  .  .  , , . 

489,  490.    Quelle  ressource  contre  un  ennemi  puissant  et  déjà 

BM^-jun.   tant  de  fois  vainqueur  ^  dans  des  hommes  sans 

***^";  P*3  expérience^  peu  d'accord  ensemble^  et  qui ,  dès  les 

^iS3*i84^  P^^^i'^^^  j^^^^  àe  leur  gous^rnement  y  donnaient  a 

incert.  con-  chaque  instunt  des  prem^ss   de  leur  incapacité? 

W8«qq.     Qu'on  devait  chercher  ailleurs  le  salut  de  l'État^ 

Sym.  p.472,  -,  !.. 

473,  474.  et  en  remettre  lesforces  entre  des  mains  qui  sussent 

5657^66.'  en  faire  usage;  que^  depuis  trois  ans,  Constantin 

îam*!*ByV.  I^^ti<^ y  employé  en  Asie   contre   les  Sarrasins^ et 

p-  '4«.  exercé  aux  combats,  soutenait  par  son   courage 


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(A.n  912.)       LIVRE    LXXIII.  CONSTANTIN    VU.  899 

Vhonneur  de  V Empire;  qu^ étant  seul  en  état  de 
conserver  au  jeune  prince  les  droits  de  sa  naissance^ 
il  méritait  de  les  partager;  qu  il  fallait  l^  faire 
"venir^  V associer  à  la  souveraineté^  et  V opposer  aux 
Bulgares.  Le 'patriarche  Nicolas  tenait  par  sa  dignité 
le  p^çmieiv  rang  entre  les  tutei^rs  ;  in&^ruit  des  di^ppr 
sitions  du  pçuple  ,  il  avertit  ses;  collègues  du  danjgetr 
où  ils  étaient;;  il  leur  conseilla  de  prévenir  Forage , 
et  d'offrir  eux-mêmes  à  Ducas  Içs  rênes  du  gouver- 
nement^ avant  qu'il  eût  assez  de  forces  pour  s'en  sai- 
sir et  les  retehir,  malgré  eux;  qu' ils  trouveraient  plus 
facilement  les  moyens  de  lui  éter  ce  qu'ils  auraient 
donné  ^usa^mémt^.*  Cet  a  vi^  fut  approuvé.  Ou  ecrità 
Ducas,  QU  l'invité  à  venir  sQUtepir  la  couronne  en  la 
parta^ant  avec  le  jeune  empereur.  Quelque  ambitieux 
que  fût  Ducas  ),  il  respectait  les  lois^  il  aimait  son 
prince  et  ses  compatriotes,  et  avait  horreur  d'une 
guerre  civile»  D'aille^irs ,  plus  cette  invitation  était 
extraordinaire,  plusr  il  s'en  défiait  comme  d'un  piëge. 
Il  répondit  qu'il  ne  se  sentait  pas  capable  de  porter 
un  si  grand  fardeau,  et  que  de  plus  il  n'était  pas  d'hu- 
meur d'abuser  de  la  jeunesse  de  son  maître,  pour  le 
dépouiller  d'uue  portion  de  ses  droits.  Les  tuteurs 
sentirent  que  le  soupçon  avait  plus  de  part  à  ce  refiis, 
que  le  devoir  et  la  modestie.  Ils  le  pressèrent  de  nou* 
veau^et,  pour  lui  prouver  leur  sincérité, ils  envoyèrent 
leur  serment,  et,  selon  la  coutume  d'alors ,  la  croix  que 
chacun  d'eux  portait  au  cou.  C'était  le  gage  le  plus 
inviolable  de  la  foi  donnée.  Sur  cette  assurance,  Ducas 
prend  la  route  de  Constantinople  avec  un  détachement 
de  cavalerie. 

Il  arrive  pendant  la  nuit  et   entre  par  une  porte    Prodam^ 


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400  HIStOIRS   DU   BiLS-EMPlUlî.  (aa  ^tt) 

emperear,  il  d^robëc ,  qu'on  lui  tenait  ouverte  au  pied  du  rempart. 

"*JJ2^  '*  Il  passe  le  reste  de  la  nuit  dans  la  maison  de  Grégo- 
ras,  son  beau-père.  Plusieurs  seigneurs  viennent  lui  of- 
firir  leurs  services.  Il  s'étonne  de  ne  voir  paraître  au- 
cun des  tuteurs,  et  commence  à  se  douter  de  leur 
perfidie.  Mais  ne  perdant  pas  courage,  il  se  détermine 
à  les  forcer  de  tenir  leur  parole.  Avant  le  jour,  le 
bruit  de  son  arrivée  s'étant  répandu  dans  la  ville ,  une 
foule  de  peuple  et  grand  nombre  de  sénateurs  accou- 
rent à  la  maison  de  Grégoras.  On  salue  Ducas  empe- 
reur, on  le  conduit  au  cirque  à  la  lueur  des  flambeaux. 
Les  portes  du  cirque  étaient  fermées,  et  l'écuyer  de 
Ducas  étant  descendu  de  cheval  pour  les  enfoncer^  est 
renversé  par  terre  d'un  coup  de  lance  par  un  de$ 
gardes  de  l'intérieur.  Affligé  de  cette  mort  comme 
d'un  mauvais  augure  de  son  entreprise,  Ducas  aban- 
donne le  cirque  ,  et  marche  au  palais,  où  les  tuteurs 
s'étaient  renfermés.  Il  devait  bloquer  le  palais^  et  tenir 
le  passage  des  vivres  assez  long-temps  fermé  pour  for- 
cer les  tuteurs  à  lut  ouvrir  les  portes.  Son  impatience 
le  perdit.  Mais  sa  bonté  naturelle,  et  Thorreur  qu'il 
avait  du  carnage ,  lui  fit  ménager  le  sang  de  ses  con- 
citoyens; il  fit  jurer  à  ceux  qui  le  suivaient,  qu'ils  ne 
feraient  usage  de  leurs  armes  que  pour  se  défendre. 
Aussitôt  il  fait  abattre  à  coups  de  hache  la  porte  de 
Chalcé,et  pénètre  dans  la  première  cour.  Une  seconde 
muraille  environnait  ce  vaste  édifice.  Cependant  Jean 
Eladas,  un  des  tuteurs,  avait  rassemblé  tout  ce  qu'il 
pouvait  de  soldats  et  de  matelots  ;  car  le  palais  don- 
nait sur  le  port;  et  les  ayant  armés  de  tout  ce  qui  pou- 
vait servir  d'armes  offensives,  il  fit  avec  eux  une  vigou- 
reuse sortie. 


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(An  9**)     MVM   t'^XIII»  COMTAWTiir   VII.  4^1 

Le  combat  fut  sanglant;  plusieurs  seigneurs  y  pë-  ti. 
rireât  du  côté  de  Duea»'^  et  entre  autres,  son  fils  s^'èJ^de 
Grégtwpas.  Le  mur  était  bordé  de  soldats  qui  ne  ces-  ^'«'**"P"*«- 
saient  de  tirer  des  flèches*  Dans  les  mouvements  que 
Ducas  se  donnait  pour  encourager  les  combattants, 
son  cheval  s'abattit,  ^et  dans  ce  moment  une  flèche  vint 
lui  percer  les  flancs.  A  peine  eut«il  le  temps  de  s'é- 
crier; Malheureus ,  que  sms-je  venu  chercher  ici? 
qu'aussitôt,  tous  ses  gens  ayant  pris  la  fuite,  un  sol- 
dat ennemi  lui  coupa  la  tête  et  l'emporta  dans  le  pa- 
lais. C^était  ce  que  Léon  lui  avait  prédit.  En  même 
temps  toutes  les  troupes  sortent  du  ps^lais,  tombent 
sur  les  fuyards  et  les  taillent  en  pièces.  On  fait  fermer 
toutes  les  portes  de  la  ville,  afin  qu'aucun  d'eux  n'é- 
chappe.  On  poursuit ,  on  massacre  par  toutes  les  rues. 
On  eût  dit  que  la  ville  ëtait  prise  d'assaut.  Il  y  périt 
plus  de  trois  mille  hommes.  Grégoras,  beau-père  de 
Ducas ,  et  le  pâtrice  Léon  Chérosphàcte ,  se  réfugiè- 
rent dans  Sainte-Sophie  ;  on  les  en  tira  par  force  ;  mais 
les  tuteurs  se  contentèrent  de  les  raser  et  de  les  ren- 
fermer dans  le  monastère  de  Stude.  On  fit  le  même 
traitement  au  patrice  Éladique,  après  l'avoir  promené 
par  toute  la  ville  en  le  frappant  de  nerfs  de  bœuf.  On 
creva  les  yeux  à  d'autres  patrices.  Quelques-uns  eu- 
rent la  tête  tranchée  au  milieu  du  cirque.  Celle  de 
Ducas  fut  portée  au  bout  d'une  pique  dans  toutes  les 
rues»  On  chercha  en  vain  Nicétas  et  Constantin  sur-  ' 
nommé  l'Africain  ;  ils  eurent  le  bonheur  de  se  sau- 
ver. On  borda  de  potences  le  rivage  de  la  mer,  dans 
une  grande  étendue,  près  de  Chrysopolis  ;  on  y  pendit 
le  patrice  Égidas ,  renommé  pour  sa  valeur ,  et  avec 
lui  un  grand  nombre  de  sénateur»  et  d'officiers  dis- 

Tome  XIIL  ^6 


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4oa  HISTOIRE   DU   BAS-rS»f)PIRE.  (Aa  9».) 

tingués.  On  fit  jeter  les  cadavres  dans  la  mer  y  sans 
avoir  égard  aux  lamias  et  aux. prières  des  familles,  qui 
demandaient  la  permission  de  rendre  les  derniers  de- 
voirs à  leurs  parents.  Les  tuteurs  n'étaient  pas  encore 
rassasiés  de  sang  et  de  supplices,  et  ils  auraient  poussé 
*  plus  loin  la  cruauté,  si  un  d'entre  eux  ne  leur  eût  re- 
présenté qu'il  n'était  pas  trop  sûr  pour  eux  d'abuser, 
aux  dépens  de  tant  de  familles ,  d'un  pouvoir  passa- 
ger,  qui  ne  devait  durer  qu'autant  que  l'enfance  dii 
prince,  et  qu'ils  pourraient  bien  un  jour  se  repentir 
de  tant  d'exécutions.  Cette  remontrance  ne  partait 
.  pas  du  patriarche.  C'était  à  lui  plutôt  qu'à  tout  autre 
d'arrêter  tant  de  bras  meurtriers ,  et  d'inspirer  à  ses 
collègues  des  sentiments  de  douceur  et  de  clémence. 
Mais  sa  dureté  naturelle  alla  dans  cette  occasion  jus- 
qu'à la  férocité,  et  il  ne  se  distingua  que  par  une  ri- 
gueur plus  impitoyable.  Qn  fit  raser  la  femme  de  Du- 
cas,  ce  qui  était  alors  une  punition  honteuse  ;  on  la 
relégua  sur  ses  terres  en  PaphUagonie,  et  on  rendit 
eunuque  Etienne  son  fils» 
y„.  Le  sang  coulait  encore  dans  Constantinople,  lors- 

Tieîrt^ié-  ^"^  Syméon  se  montra  aux  portes ,  à  la  tête  d'une 
gerCoDstan-  grande  armée.  A  la  faveur  de  tant  de  troubles  ,  il  e»> 

tinople  et  se  *^  ,      .  *  1     1         mi  1  1 

retire,     peroit  sc  rendre  maître  de  la  ville  sans  beaucoup  de 

J^â^'v'too.  P®'ï^'  Mais  à  la  vue  dé  ses  fortes,  murailles,  de  k 

^\bl^'  P'  multitude  de  soldats  dont  elles  étaient  bordées ,  et  da 

incert.  con-  nombre  prodigieux  de  machines  de  toute  espèce  dis- 

Sym. p.474,  posées  en  batteri»,  il  perdit  toute  espérance,  et  se* 

Georg.'p.   tant  retiré  à  l'Het^dome,  il  envoya  un  de  ses  ofBcien 

Pagi  a<f  ]bL.  demander  un  accommodement.  Cette  proposition  fut 

favorablement  écoutée  ;  et  les  tuteurs  s'étant  rendus 

au  palais  de  Blaquernes  ^  y  reçurent  les  deux  fils  de 


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(Am9<!».)      l'I^RK  LXXin.        .     OONSTAKTIJT   VII.  4^3 

Syméofi,  qui  seupèrent.  avec  ie  jeune  empereitr.  Le 
lendemaiiï  [Nicolas  alla  trouver  Syméon  dans  son 
camp  ;  et  ce  prince  pieux  ^quoique  guerrier,  &'ëtanl 
incliné  devant  lui^  reçut  sur  sa  tête  l'étole  du  pa>* 
triarcfaei^  qui  pvonoDça  des  prières^  Cependant  on  ne 
put  convenir  des  conditions  de  paix,  et  Syméon ,  sans 
avoir  rieti  condu,  reprit  le  chemin  de  Bulgarie  avec  des 
présents  considérables  pour  lui  et  pour  ses  deux  fils. 

Quoique  Venise  fût  entièrement  libre,  elle  entre-*      vm. 

.  .      ^       .  i>  •  ^  Le  fils  du 

tenait  toujours  avec  1  empire  grec  une  respectueuse  doge  deVe- 
correspondance.  Le.  nouveau  doge  faisait  part  à  Tcni- ""antinopic! 
pereur  de  son  élection,  et  l'empereur  ne  manquait  pas  Murât,  an- 
de  décorer  le  doge  même  ou  son  fils  du  titre  de  quel-  t.5/p.  270, 
que  charge  de  la  cour^  qui  flattait  ces  princes,  mais       ^^'' 
qui  retraçait  néanmoins  Fancienne  dépendance.  Pierre« 
fils'dePartioipace  VII,  élu  d«ige  cettfg  année,  revenait 
de  Coastantinople,  fort  content  des  présents  qu'il  avait 
reçus  et  du  titre  de  Protospathaire ,  lorsqu'il  fut  arrêté 
sur  la  frontière  de  Croatie  par  Michel,  duc  d'Escla- 
vonie ,  qui  le  dépouilla  et  le  mit  entre  les  mains  du 
roi  des  Bulgares.  L'empereur  grec  ne  pouvait  lui  être 
d'aucun  secours  auprès  de  Syméon,  et  ce  ne  fut  qu'à 
force  d'argeftt  que  Participace  put  retirer  son  fils. 

Le  jeune  empereur  ne  pouvait  se  consoler  de  l'éloir    Aw  914. 
gnement  de  sa  mère,  qu'Alexandre  avait  fait  sortir  du  ^oérentre 
palais.  Il  la  redemandait  sans  cesse;  on  ne  put  l'a-     dans  itr 

.  ^  Il  palais. 

paiser. qu'eu  la  fai^nt  revenir.  Mais  à  son  retour  elle  se  cedr.p.ôn. 
rendit  ipaîtresse  des  affaires ,  et  fit  bientôt  repentir  les  ^    ^"• 
favoris  d'Alexandre  de  la  disgrâce  qu'ils  lui  avaient  '^^^-  *•  «»  p- 
attirée*  Elle  changea  entièrement  la  face  de  la  cour,  incert.  cou- 
Le  patriarche  eut  ordre  de  ne  se  mêler  que  du  gou-       aSg. 
vemement  de  son  église.  Des  autres  tuteurs ,  elle  ne   oTô^.  p. 

a6.  *'• 


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4o4  HISTOIRK  DU  HAS-ElfPlRE*  {j^  g^^^ 

conserva  que  Jean  Éladas,  qui  lui  conseillait  d'écarter 
ses  collègues:  mais  il  ne  jouit  pas  long-temps  de  sa 
faveur,  il  mourut  de  maladie  peu  de  jours  après.  Zoé 
donna  la  charge  de  gr^nd-chambellan  à  un  de  ses  fi- 
dèles serviteurs  nommé  Constantin  ;  elle  honora  des 
premières  charges  du  palais  un  autre  Constantin  et 
son  frère  Anastase,  tous  deux  surnommés  Gongyle. 
Dominique  fut  commandant  de  la  garde  étrangère; 
c'était  lui  qui  avait  fait  éloigner  le  patriarche  ;  il  eut 
bientôt  le  même  sort.  Il  avait  été  nommé  patrîce,  et 
était  déjà  en  chemin  pour  aller  à  l'église  recevoir  la 
bénédiction  du  patriarche,  selon  la  coutume  de  ceux 
qu'on  élevait  à  cette  dignité;  il  eut  ordre  de  retourner 
chez  lui  :  le  grand -chambellan  l'accusait  auprès  de 
l'impératrice  de  prendre  des  mesures  pour  faire  cou- 
ronner son  frère.  Sa  place  fut  donnée  à  Jean  Garidas. 
L'eunuque  Damien  eut  le  commandement  des  gardes 
de  nuit. 
X.  Depuis  que   Syméon  s'était  éloigné  de  Constan- 

Ândrinople     .  i         .1  <  •      \       1  11 

perdue  et   tmoplc ,  il   se  préparait  a  de  nouvelles  entreprises. 
cX'^fi*    Voyant  l'empire  gouverné  par  une  femme,  il  se  crut 
Léo, p.  491,  plus  assuré  du  succès.  Après  avoir  ravagé  une  grande 
ZoQ.  t.  a,  p.  partie  de  la  Thrace,  il  se  présenta  devant  Andrinople 
incert.  oon-  au  mois  de  septembre.  La  ville,  située  au  confluent  de 
Syai.^p.*^5.  troîs  rivièrcs,  et  bien  fortifiée ,  l'aurait  long-temps  ar- 
^S'.^*    rêté,  s'il  n'eût  employé  un  moyen  plus  fort  et  plus 
prompt  que  fEHites  les  machines  de  guerre.  Il  corrom- 
pit par  argent  l'Arménien  Pancratucas  qui  comman- 
dait la  garnison.  Zoé  fit  usage  du  même  expédient 
pour  retirer  cette  place  des  mains  de  Syméon  même  ; 
il  la  rendit  pour  une  plus  grande  somme  d'argent. 
Léon  s'était  servi  des  Hongrois  contre  les  Bulgares  ; 


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(An  ^14.)    LivRj  Lxxin.         coNSTAiirTm  vji.         4o5 
Zoé  eut  recours  à  un  peuple  barbare  plus  puissant  et       xu 
vainqueur  des  Hongrois  mêmes.  C'étaient  les  Patzi-     aveclea 
naces,  dont  j'ai  parlé  dans  les  livres  précédents,  et  que  ^■^*°"*^••• 
j'ai  conduits  des  bords  du  Jaïk  à  ceux  du  Tanaïs.  La   Porph  de 
forteresse  de  Sarcel,  bâtie  pour  défendre  le  passage  du  *i  et  wqâ!^ 
fleuve,  ne  les  arrêta  pas  long-temps.  Poussant  tou-  iJegmgoes', 
jours  les  Hongrois  devant  eux,  ils  s'emparèrent  d'une  Hiîî!î*'^t!*a, 
vaste  contrée  tant  au-*delà  qu'en  deçà  du  Borysthène.    ^^^^'^ 
Ils  étaient  divisés  en  treize  tribus  qui  occupaient  huit  Mcm.  «cad. 

*■  *  t.  3o,  p.  249. 

provinces,  quatre  à  l'orient,  quatre  à  l'occident  de  ce 
grand  fleuve.  Du  côté  de  l'orient,  ils  confinaient  aux 
Khazars,  aux  Russes,  aux  Chersonites,  et  à  tous  les 
peuples  qui  bordaient  le  Pont-Euxin  sur  la  côte  sep- 
tentrionale. Du  côté  de  l'occident,  ils  s'étendaient  de- 
puis les  Porouïs  ou  Sauts  du  Borysthène  jusqu'au  voi- 
sinage des  Hongrois  :  ce  qui  comprend  aujourd'hui  la 
Drik-Polie,  la  nouvelle  Servie,  la  Podolie,  et  la  Bessa- 
rabie jusqu'aux  embouchures  du  Danube.  Cette  nation, 
aussi  féroce  que  nombreuse,  quoiqu'elle  eût  été  obli- 
gée de  céder  aux  Uzes  joints  aux  Khazars,  qui  lui 
avaient  fait  abandonner  ses  premières  demeures,  fai- 
sait trembler  tous  les  Barbares  de  son  voisinage,  et 
nulle  autre  «peuplade  scythique  n'était  en  état  de  lui  ré- 
sister. Les  Hongrois,  qu'ils  avaient  souvent  défaits,  se  , 
reconnaissaient  tellement  inférieurs,  qu'ils  refusèrent 
du  secours  aux  Grecs  toutes  les  fois  qu'ils  leur  en  de- 
mandèrent contre  les  Patzinaces.  Les  BiM  gares  ne  pou- 
vaient nuire  à  l'Empire,  qu'ils  ne  fussent  en  paix  avec 
eux.  Les  Russes  ménageaient  leur  amitié ,  parée  que 
la  Russie  n'ayant  alors  ni  chevaux  m  moutons ,  ils  en 
tiraient  des  Patzinaces ,  et  qu'ils  ne  pouvaient  se  met- 
tre en  campagne  pour  aller  attaquer  l'Empire,  sans 


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4o6  HISTOIRE    DU  BA.S-XMPIRE.  (An  914.) 

kiisBO*  leur  pays  exposé  aux  iacursions  de  ces  redou- 
tables voisins.  De  plus,  obligés  de  suivre  le  cours  du 
Borysthène,  il  fallait  porter  leui-s  bateaux  sur  leurs 
épaules  lorsqu'ils  arrivaient  aux  Porouls;  ce  qui  les 
mettait  alors  à  la  merci  des  Patzinaces.  L'Empire  n'a- 
vait donc  rien  à  craindre  ni  des  Hongrois,  ni  des  Rus- 
ses, ni  des  Bulgares,  lorsqu'il  était  assuré  de  cette  na- 
tion. Mais  elle  vendait  chèrement  son  secours.  Avides 
et  insatiables  de  présents ,  il  fallait  en  faire  pour  leurs 
femmes,  pour  leurs  parents,  pour  leurs  chevaux.  Aussi 
hardis  à  demander,  que  les  Grecs  étaient  timides  à 
refuser,  on  éludait  leurs  demandes  par  de  faux,  pré- 
textes. Dans  les  avis  que  Constantin  Porphyrogénète 
donne  à  son  fils  Romain ,  une  des  dioses  qu'il  lui  re- 
commande le  plus,  c'est  que,  si  les  Hongrois  ou  les  Pat- 
zinaces envoient  demander  quelques-uns  des  habits 
impériaux  ou  quelque  couronne,  ^i  récompense  de 
leurs  services,  Romain  leur  réponde,  qu'il  n'est  pas 
permis  à  l'empereur,  sous  peine  de  malédiction ,  de 
leur  abandonner  aucun  de  ces  ornements,  qui  ont  été 
apportés  du  ciel  par  un  ange  au  grand  Constantin;  il 
en  dit  autant  du  feu  grégeois.  Si  quelqu'un  de  leurs 
princes  demande  en  mariage  k  fille  de  l'empereur,  oa 
lui  offre  la  sienne,  Constantin  veut  aussi  qu'on  lui  ré- 
poode ,  que  ces  alliances  ont  été  prohibées  par  le  grand 
Constantin  sous  peine  d'anathême  :  mensonges  pué- 
rils, qui  monirent  autant  la  faiblesse  du  prince  qui  les 
emploie,  que  la  stupidité  des  Barbares  capables  d'en 
être  la  dupe.  Rien  ne  prouve  mieux  la  bizarrerie  des 
coutumes  des  diverses  nations,  que  la  loi  établie  chez 
les  Patzinaces  pour  la  succession  à  la  couronne.  Elle 
était  héréditaire;  mais  au  lieiu  de  passer  aux  fils  ou  aux 


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(An  ei4.)       LIVRJB   LX^ÎII.  GONSTANTm   VII.  4^7 

frères,  elle  passait  aux  cousins,  afin,  disaient-ils,  qne 
l'autorité ,  sans  sortir  de  la  même  famille,  pût  se  com- 
muniquer à  toutes  les  branches.  Tels  étaient  les  Pat^i- 
naces,  dent  l'impératrice  voirlttt  se  faire  un  rempart 
contre  les  «Bulgares.  Ce  fut  un  conseil  de  Jean  Bogas, 
qui  promit  d'engager  cette  nation  à  défendre  l'empire  ; 
il  ne  demandait,  pour  récompense  d'un  service  si  im- 
portant, que  l'honneur  de  patrice.  Zoé  reçut  cette  pro- 
position avec  joie  ;  elle  lui  mit  entre  les  mains  des 
sommes  coasidérables  pour  acheter  l'alliance  de  ce 
peuple  avide.  Il  réussit  dans  sa  négociation,  fit  un  traité 
avec  eux,  et  en  reçut  des  otages  qu'il  conduisit  à  Con* 
stantîiiople.  Les  Patzinaces  s'engageaient  à  passer  le 
Danube,  et  à  tomber  sur  les  Bulgares  au  premier  mou- 
vement qu'ils  feraient  contre  l'Empire.  L'Arménien 
Âspt,  fils  du  prince  de  Vaspouracan,  vint  de  lapart  de 
son  père  faire  les  mêmes  offres  contre  les  Sarrasins. 
Zoé  lui  fit  un  accueil  honorable,  et  le  renvoya  chargé 
de  présents. 

Il  paraît  que  ce  prince  n'attendit  pas  long-temps  à    ah  915. 
donner  des  preuves  de  son  attachement  à  l'Ënmire.       »i. 

.  •      1    •  •!  Course»  des 

Je  crois  du.  moins  pouvoir  lui  attribuer  qe  que  rap-  Grecs  et  des 
porte  Abulfeda,  que  l'année  suivante  les  Grecs  firent  ^^  ^^^ 
des  courses  sur  les  frontières  de  la  Mésopotamie.  L'au*  p»»  p-  4&ï. 

*  Incert.  con- 

teur arabe  aura  confondu  les  Grecs  avec  leurs  alliés,  tin.  p.  240. 

1/.       /»  .  Syin.  p.475. 

Mais  Damien,  émir ^  de  Tyr,  qui  avait  déjà  fait  tant  Gcorg  p. 
d«  mal  à  l'Empire^  se  préparait  à  lui  enlever  les  Jles  Abôifeda. 
de  rAi-éhipel.  Dès  que  la  mer  fut  navigable,  on  le  vit 
à  la  t^te  dVine  grande  flotte  sur  les  côtes  de  l'ancienne 
Carie.  Il  attaqua  Strobèie  sur  le  bord  du  golfe  *Gçra« 
miqué;  et  cette  ville  aurait  bientôt  succombé  à  se9 
«fFortsr,  s'il  ne  fat  mort  de  maladie.  Ce  icontrq-ti^p^ 


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4oS  HISTOIRE   DU   BAS-BMFIRB*  (la  915.) 

déconcerta  tous  les  projets  des  Sarrasins ,  qui  se  reti- 
rèrent en  Syrie.  Le  reste  de  cette  année  ne  présente 
qu'un  événement,  qui  peut  apprendre  aux  officiers  des 
princes  à  ne  pas  trop  compter  sur  la  patience  des 
peuples  qu'ils  ne  craignent  pas  d'irriter  par  leurs  vexa- 
tions. Chasès,  gouverneur  de  l'Achaïe,  plongé  dans  la 
débauche,  soutenait  un  luxe  énorme  aux  dépens  delà 
province,  qu'il  traitait  en  pays  de  conquête.  Un  jour 
qu'il  assistait  à  l'ofEce-  dans  une  église  d'Athènes,  le 
peuple  de  cette  ville,  quoique  naturellement  doux  et 
patient,  ayant  formé  contre  lui  un  complot  secret, 
l'assomma  de  pierres  au  pied  même  de  l'autel  :  yen- 
geance  atroce  et  criminelle  par  elle-même,  et  dans  ses 
circonstances.,  mais  bien  méritée  par  celui  qui  en  6it 
la  victime. 
XIII.  Les  Sarrasins  établis  en  Sicile  ne  donnaient  pas 

's^M^lr  moins  d'inquiétude  que  ceux  de  Syrie.  Tandis  queceux- 
Ccdr.p.6ia,  Ci  attaquaient  le  cœur  de  l'Empire,  les  autres  travail- 
Leo,  p. '491.  laient  à  en  détacher  les  extrémités,  et  à  s'emparer  de 
p.  i85.  ce  qui  restait  aux  Grecs  en  Italie.  Ben-Kliorab ,  révolte 
STÎÎ:  X  «>»*f®  1«  «alife  d'Afrique,  s'était  rendu  maître  de  Rlc 
*^rg.^pf*  Résolu  d'illustrer  son  usurpation  par  la  conquête  de  la 
Ahiu^M.  Calabre,  il  se  mit  à  la  tête  d'une  flotte;  mais  ellefot 
Abuifarage.  battuc  de  la  tempête  et  entièrement  détruite  dans  le 

Murât,  an-  .  .       1 

Haï.  d'iui.t.  détroit  de  Messme.  Peu  de  temps  après,  Ben-KJioraD 
Abr.  de'   fiit  pris  par  les  troupes  que  le  calife  envoya  contre 

t.  a?p.  666.  '  lui  ;  on  le  transporta  en  Afrique ,  où  il  eut  la  tête  traB- 
cbée.  Mais  l'ennemi  le  plus. incommode  et  le  plus  dan* 
gereux,  parce  qu'il  était  le  plus  vmsin  de  la  capiw^j 
était  le  roi  bulgare.  Pour  pouvoir  réunir  contre  .iJ" 
toutes  les  forces  de  l'Empire,  Zoé  résolut  de  se  dâ^^' 
rasser  des  autres  guerres  en  faisant  la  paix  arec  1^ 


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(AngiW       MVHg^LXXIII.  COHSTAirTm   Vil.  4o9 

Sarrasins*  Ëustathe,  gouverneur  de  Caiabre,  fit  avec 
les  Sarrasins  de  Sicile  un  traité^  par  lequel  l'Empire 
s'engageait  à  payer  tous  les  ans  au  calife  d'Afrique  un 
tribut  de  vingt"deux  mille  pièces  d'or,  c'est-à-<lire,  près 
de  cent  mille  écus  de  notre  monnoie.  Il  fallait  s'assurer 
du  calife  de  Bagdad.  Zoé  envoya  deux  ambassadeurs, 
Bodia  et  Toxaras,  pour  traiter  avec  lui.  La  relation 
que  les  auteurs  arabes  nous  ont  laissée  de  leur  récep- 
tion, donne  une  grande  idée  de  la  magnificence  de 
cette  cour.  Toute  l'armée,  composée  de  cent  soixante 
mille  hommes,  tant  cavaliers  que  fantassins,  était  sous 
les  armes.  On  rencontrait  ensuite  la  maison  du  ca« 
life  rangée  en  haie,  et  superbement  vêtue  :  on  y  voyait 
sept  mille  eunuques,  quatre  mille  blancs,  trois  mille 
noirs,  sept  cents  portiers.  Sur  le  Tigre  flottait  un 
nombre  infini  de  barques  richement  équipées.  Le  pa- 
lais était  orné  de  trente-huit  mille  pièces  de  tapisserie, 
où  brillaient  l'or  et  la  soie,  et  de  quarante  mille  tapis. 
De  distance  en  distance  de  grands  lions,  jusqu'au 
nombre  dç  cent,  symboles  du  prince  et  de  ses  mi- 
nistres^ donnaient  à  toute  cette  pompe ,  par  leurs  ru- 
gissements, un  air  effrayant  et  sauvage.  Au  milieu  d'une 
salle  immense, un  grand  arbre,  partie  d't>r, partie  d'ar- 
gent, se  divisait  en  dix-huit  grosses  branches,  sans 
compter  les  petites,  couvertes  de  feuilles  et  chargées 
d'oiseaux  de  l'un  et  de  l'autre  métal  ;  les  branches  s'a- 
gitaient par  des  ressorts  ;  les  oiseaux  rendaient  un  ra- 
mage. Les  deux  ambassadeurs  furent  introduits  par  le 
visir,  qui  leur  servit  d'interprète.  On  convint  de  la  paix 
et  de  l'échange  des  prisonniers.  Il  s'en  trouva  entre  les 
mains  des  Grecs  un  nombre  si  supérieur ,  qu'après  avoir 
rendu  homme  pour  homme,  il  en  coûta  encore  au  ca-* 


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4lO  HISTOIRB   BU   BAS*EMPIR6^  (An  917.) 

.  life  cent  vingt  raille  pièces  d'or,  qui  valaient  environ 

quinze  cent  mille  livres  de  notre  monnoie. 
ÀH  917.        L'impératrice  n'ayant  plus  rien  à  craindre  du  coté 
Les^crêcs  de  l'Orient,  fit  passer  en  Europe  toutes  les  troupes 
marchent    d'Asic.  On  n'avait  vu  depuis  longr-temps  une  si  belle 

contre  les  ,  .  *  /  r* 

Bulgares,    armec,  et  Ion  ne  doutait  pas  que  cette  année  ne  lut 
^ôU'i^éf  "*  '*  dernière  pour  le  royaume  de  Bulgarie.  Pour  encou- 
Lao,p.  991,  rager  tant  de  soldats,  Zoé  leur  fit  d'avance  distribuer 
^85*"  li%  '^  P^'®  ^®  toute  la  campagne,  et  y  ajouta  de  nouvelles 
incert.'oon-  libéralités.  Elle  mit  à  leur  tête  Léon  Phocas,  fils  de  ce 
341.       vaillant  Nicéphore,  qui  s'était  signalé  sous  les  deux 
^477.  '  *  règnes  précédents.  Comme  le  nouveau  général,  déjà 
seC^s^l  connu  par  sa  valeur,  n'avait  pas  encore  l'expérience 
^'*^*       du  commandement,  on  lui  donna  pour  conseil  Con- 
stantin l'Africain ,  qui ,  ayant  édiappé  cinq  ans  aupa- 
ravant à  la  punition  des  autres  complices  de  Ducas, 
avait  reparu  après  la  disgrâce  des  tuteurs,  et  s'étak 
concilié  la  faveur  de  Zoé.  Tous  les  officiers  distingue* 
par  leur  rang  et  par  leur  mérite  voulurent  avoif  ptft 
à  la  gloire  de  cette  campagne.  Entre  les  autres  moios 
connus  dans  l'histoire,  on  remarque  Bardas  Pkocas, 
frère  du  général ,  Romain  et  Léon ,  fils  d'Ëustatfae  Ar- 
çyre,  et  Nicolas,  fils  de  Ducas,  qui  n'avait  pas  été  en- 
veloppé dans  le  malheur  de  son  père.  «Ce  brave  Mélias, 
atitrefois  esclave  d'Angurinès,  devenu  gouverneur  d'une 
province  qu'il  avait  formée,  vint  avec  une  troupe  d  A^ 
méniens  de  sa  dépendance.  Avant  le  départ  on  assem- 
bla l'armée  dans  une  plaine  aux  portes  de  Constâflti- 
nople^  et  l'archiprêtredo  palais,  portant  en  ses  va^^ 
le  bois  de  k  vraie  croix,  fit  «nettre  à  gaioiÉs  toii«  k* 
soldats,  et  leur  fit  jurer  qu'ils  vnîiBicraieiit ' oh  q»* 
mourraient  ensemble,  sans  se  séparer  par  la  Jii^- 


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(AA9I7-        l'IVBIl  LXXIII.  OOirSTANTIK  VII.  ^i  ï 

Après  ce  serment  téméraire,  on  marcha  en  Bulgarie.  xy.  , 
Le  sixième  jour  d'août  on  rencontra  les  Bulgares  près  d'Achâoûs. 
d'un  château  nommé  Achéloûs,  sur  les  bords  du  Da* 
aube;  on  les  chargea  sur-le-champ,  et  l'armée  grec- 
que, très-supérieure  en  forces,  les  mit  en  déroute  dès 
le  premier  choc.  Dans  l'ardeur  de  la  poursuite,  le  gé- 
néral ,  mourant  de  soif,  descendit  de  cheval  près  d'une 
fontaine;  et  tandis  qu'il  se  désaltérait^  son  cheval ,  ayant 
rompu  son  licou ,  s'enfuit  au  travers  des  troupes  grec- 
ques. On  le  reconnut,  on  crut  Léon  mort;  la  conster- 
nation se  répand  par  toute  l'armée  ;  on  cesse  la  pour- 
suite; quelques  escadrons  tournent  bride  pour  faire 
retraite.  Syipéon  qui  se  retirait  en  bon  ordre,  aper- 
cevant du  haut  d'une  éminence  ce  qui  se  passait  dans 
l'armée  ennemie,  profite  du  moment;  il  retourne  sur 
les  Grecs,  et  les  trouvant  abattus  de  tristesse  et  à  demi 
^aiacus^  il  les  met  aisément  en  fuite.  Les  Grecs,  au- 
paravant vainqueurs,  ne  songent  pas  même  à  se  dé- 
fendre. Saisis  d'une  épouvante  soudaine ,  ils  se  préci- 
pitent, ils  se  renversent  hommes  et  chevaux;  on  en 
fait  un  horrible  carnage.  Le  général  Léon  gagna  Mé- 
sembrie.  Constantin  l'Africain  périt  dans  cette  fu- 
neste journée  avec  grand  nombre  des  meilleurs  offi- 
ciers. Quelques  auteurs  donnent  une  autre  cause  à  ce 
triste  événement  :  ils  disent  que  Léon  Phocas ,  pour- 
suivant les  ennemis,  apprit  que  Romain  Lécapène, 
commandant  de  la  flotte  qui  était  entrée  dans  le  Da- 
nube ,  au  lieu  de  le  seconder ,  comme  il  en  avait  or- 
Jre ,  se  retirait ,  et  Élisait  voile  vers  Constantinople ,  à 
dessein  de  se  faire  empereur  ;  qu'étant  lui-même  pos- 
sédé de  la  même  ambition.,  il  quitta  aussitôt  son  ar^ 
mée,  et  courut  à  toute  bride  vers  le  Danube,  pour 


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a 


4l2  HISTOIRE   DU    BAS-EBIPIRE.  (An 917.] 

s'assurer  de  la  vérité  de  ce  rapport  ;  et  que  ses  soldats 
s'imaginant  qu'il  fuyait,  se  débandèrent  et  prirent  la 
fuite  ;  ce  qui  donna  la  victoire  à  Syméon.  Tous  con- 
viennent que,  depuis  long-temps,  l'Empire  n'avait  es- 
suyé une  si  sanglante  défaite. 
R^m'ia  ^^  devait  d'autant  moins  s'y  attendre,  qu'outre  la 
Lécapène    supériorité  dcs  forces,  les  Patzinaces  étaient  prêts  à 

accusé  de  \    ,  ^  ,  ,      .  ^  /     •     ♦ 

trahison,  sc  joindre  à  1  armée  grecque,  amsi  quils  en  étaient 
convenus.  Jean  Bogas  les  avait  amenés  au  bord  du  Da- 
nube, et  Romain  Lécapène,  grand-amiral,  était  entre 
dans  le  fleuve  avec  sa  flotte,  pour  leur  procurer  le  pas- 
sage. Mais  une  contestation  survenue  entre  Bogas  et 
Romain  rompit  ces  mesures.  Les  Patzinaces,  lasses 
d'attendre  la  fin  de  cette  querelle ,  abandonnèrent  avec 
mépris  des  gens  qui  s'entendaient  si  mal ,  et  reprirent 
le  chemin  de  leur  pays.  Bogas ,  de  retour  à  Constan- 
tinople,  accusa  Romain  devant  le  sénat  d'avoir  été  la 
principale  cause  de  la  défaite,  en  refusant  de  passer 
les  Patzinaces ,  et  en  laissant  l'armée  exposée  à  la  fu- 
reur des  ennemis,  sans  donner  retraite  aux  fuyards. 
Romain  fut  jugé  coupable  de  trahison  et  condamne  à 
l'aveuglement  ;  ce  qui  aurait  été  exécuté,  sans  la  pro- 
tection pubsante  de  l'impératrice ,  qui  ne  voulait  pas 
perdre  un  courtisan  de  très-bonne  mine ,  qu'elle  ho- 
norait de  ses  faveurs, 
xvn.  Symëon,  fier  de  sa  victoire,  marcha  droit  à  Con- 

Jrstrde  stantinople.  Léon  Phocas  s'y  était  rendu  avec  les  dé- 


rti 

devant  Con< 


.S^tinopu"  ^"S  ^®  s^»  a™««-  Résolu  de  périr,  ou  d'effacer  par» 
valeur  la  honte  de  sa  défaite ,  il  sort  de  la  ville  a  » 
tête  de  ce  qu'il  peut  rassembler  de  soldats ,  accompa- 
gné de  Nicolas,  fils  de  Duças,  qui  s'était  signalé  da^^ 
la  malheureuse  bataille  contre  les  Bulgares.  Aqu^^ 


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(Ab  917.)      LIVKB  LXXIII.  GONSTAITTIN   VII.  4^3 

distance  de  Constantinople^ils  rencontrent  un  grand 
corps  d'ennemis  qui  s'étaient  avances  pour  piller  les 
campagnes  ;  ils  le  chargent  et  le  mettent  en  fuite.  L'a- 
vant* garde,  qui  accourait  pour  le  soutenir,  fut  repous- 
sëe  avec  vigueur  ;  enfin  toute  l'armée  réunie  ne  put 
résister  à  leur  fougue  impétueuse,  et  les  Grecs,  combat- 
tant en  désespérés ,  allaient  rendre  la  pareille  aux  Bul- 
gares ,  lorsque  Syméon ,  pour  ne  pas  perdre  entière* 
ment  l'honneur  de  sa  victoire,  fit  sonner  la  retraite;  et 
marchant  en  bon  ordre,  toujours  sur  la  défensive,  s'é- 
loigna de  Constantinople.  Nicolas  fut  tué  dans  cette 
rencontre,  en  donnant  des  marques  d'une  héroïque  va- 
leur; 

Une  couronne  mal  assurée  sur  b  tête  d'un  jeune    an  919. 
prince  qui  n'avait  rien  de  grand  dans  le  caractère ,  Lëon™ic«8 
mal  appuyée  par  une  mère  plus  occupée  de  ses  plai-   ?/®T^ 
sirs  secrets  que  des  affaires  publiques,  semblait  devoir  ««pJrenttoM 
être  le  prix  du  plus  hardi  usurpateur.  Un  Macédo-    l'empire. 
nien ,  nommé  Basile ,  essaya  de  l'enlever  par  Timpos*  ^^^'  p-  ^'^ 
ture;  il  prétendit  être  Constantin  Ducas,  auquel,  di-  Léo  .'•p.  49a 
sait-il ,  on  s'imaginait  faussement  avoir  ôté  la  vie.  11  Manass.  p. 
fit  même  un  parti,  mais  il  fut  bientôt  pris  et  brûlé  vif.     'iïs"^' 
Entre  les  principaux  seigneurs ,  qui  tous  se  croyaient  p.  ^i^^/iV;, 
dignes  de  l'empire,  les   deux  plus  puissants   étaient  Giyc.*p.'3oo» 
Léon  Phocas  et  Romain  Lécapène  :  l'empereur  Léon ,  l'^^'  ^***' 
en  mourant,  avait  nommé   l'un   général  de  ses  ar*  tii^-p-Hi 
mées,  l'autre  grand -amiral.  Leur  ambition  fit  taire  Sym.  p.  477 
celle  des  autres ,  qui ,  n  osant  entrer  efi  concurrence   Georg.  p. 
avec  eux ,  demeurèrent  spectateurs  4u  combat.  Léon  Liutjr.  hS! 
Phocas  est  déjà  connu.  Romain  Lécapène  était  fils  de  sÙh.'Jh^oL 
ce  soldat  arménien  nommé  Théophylacte,  qui,  dans  ^^*^*°8®» 
une  bataille,  avait  sauvé  la  vie  à  l'empereur  Basile.      }^^' 


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4' 4  BI8TO1RB  DC  BAS-EVmiRE.  (An  919.) 

Giann.  hist.  D'obord  Simple  soldat  de  marine ,  il  s'étaît  «f  ancé  par 
Mm-ft7.'ant*  ^^  scrviccs,  ct  daos  une  guerre  contre  les  Sarrasins,  il 
^'pt^ass/'  s'était  fait  une  grande  réputation  de  force  et  de  cou- 
rage,  en  tuant  un  lion  prêt  à  dévorer  un  de  ses  gens. 
La  valeur  et  la  hardiesse  étaient  égales  dans  ces  deux  ri- 
vaux ;  mais  Romain  savait  y  joindœ  la  ruse  et  la  sou^ 
plesse.  Léon,  au  contraire,  comme  sil  eût  été  sur  da 
succès,  ne  se  donnait  pas  même  la  peine  de  cacher  ses 
desseins  ambitieux.  Il  comptait  sur  sa  noblesse,  sur 
son  crédit,  sur  le  grand  pouvoir  du  chambeUaQ  Coa- 
stan tin,  dont  il  avait  épousé  la  sœur.  Constantin  était 
le  chef  des  eunuques ,  ministres  assidus  des  voluptés 
de  l'impératrice ,  et  par  ce  mérite  arbitres  de  la  cour. 
Mais  Lécapène  avait  encore  en  ce  point  un  grand  avan- 
tage ;  il  disposait  de  Timpératrice  mâme,  dont  il  s'était 
fait  aimer.  Habile  dans  l'art  de  dissimuler,  il  affectait 
pour  le  prince  un  attachement  sans  réserve,  en  sorte 
que  Théodore,  gouverneur  du  jeune  empereur,  crai- 
gnant pour  son  élève  les  effets  de  l'audace  de  Léon, 
*  lui  conseilla  de  se  jeter  entre  les  bras  de  Romain, 
comme  du  plu»  zélé  de  ses  serviteurs.  Théodore  écrivit 
donc  à  Romain ,  que  sa  fidélité  exigeait  de  lui  qu'il 
protégeât  la  jeunesse  du  prince  contre  les  traîtres  qui 
en  voulaient  à  sa  couronne,  et  peut-être  à  sa  vie.  Mais 
Rjomain ,  appréhendant  que  ce  ne  fût  un  piège ,  ré- 
pondit avec  une  fausse  modestie ,  qu'il  était  prêt  à  verser 
jusqu'à  la  dernière  goutte  de  son  sang  pour  le  service 
de  son  msdtre ,  mais  qu'il  se  reconnaissait  infiniment 
au-dessous  de  la  qualité  de  son  protecteur;  qu'il  se 
tenait  assez  honoré  d'obéir  à  ses  ordres  et  à  ceux  de  sa 
mère.  Plusieurs  lettres  de  Théodore  ne  purent  tirer  de 
lui  d'autre  réponse.  Enfin  l'empereur  lui-même  lui 


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(An  919»)      *'I'VRE   LXXIII.  CO^rSTAlTTIir    VII.  4*5 

ayant  éerit  de  sa  main ,  il  promit  de  s'opposer  de  toutes 
ses  forces  au  chambellan  Constantin,  et  à  ceux  dont  il 
Ëivôrisait  les  pratiques  criminelles. 

Cetite  iiitrk'ue  ne  put  demeurer  secrète.  Bientôt  on      ^^x?* 

*  Romain  se 

ne  parlait  à  Comtantinople  que  de  la  rivalité  de  Lëon  «aisit  du 
et  de  Romain,  et,  comme  s'il  se  fut  agi  du  combat  de  Constantin. 
deux  fameux  athlètes,  chacun  se  déclarait  pour  l'un  ou 
pour  l'autre.  Le  cliambellan  présomptueux  se  persua?^ 
dait  que  soii  parti  ne  pouvait  succomber.  Il  résolut 
d'éloigner  Romaini;  et  comme  celui*ci  refusait  de  mettre 
à  la  voile ,  qn^.  ses  troupes  et  àés  équipages  ne  iuss^t 
payés,  Constantin  se  transporta  au  bord  de  la  mer 
pour  distribuer  la  paye.»  Romain  vint  au-devant  de 
lui  daàd  une  chaloupe ,  et  l'abordant  avec  les  démons*^ 
tralions  du  plus  profond  respect,  il  lentretint  long- 
temps de  son. dévouement,  du  désir  ardent  qu'il  avait 
de  mérita  ^s  bonnes  gra(0s ,  de  1  état  de  la  flotte ,  et 
des  projets  qu'il  formait?  pour  l'honneur  de  r£mpire. 
Il  avait  eu  soin,  de  fournir  sa  chaloupe  des  plus  vigou* 
reux  matelots  ;  et  dans  le  moment  que  Constantin,  sa«- 
tisÊiit  de  ses  humbles  protestations  de  respect  et  d'o- 
béissance, lui  donnait  ordre  de  lever  l'ancré  sur-k"^ 
champ,  Romain  ayant  dit  à  ses  ^eas^  Saisissez'-vous 
de  cet  homme ^  la.  chose  fut.  aussitôt  exécutée,  sans 
que  personne  de  la  suite  du  chambellan  osât  le  dé* 
fendre.  Le  superbe  ministre  se  trouva  en  un  instant 
transporté  sur  la  flotte,  et  prisonnier  de  l'amiral.  La 
nouvelle  de  cet  enlèvement  fit  grand  bruit  à  Con^ 
stantinople  ;  on  le  regardait  comme  le  signal  d'unf 
guerre  civile.  Zoé,  qui  n'avait  pas  été  prévenue,  en* 
voya  le  patriarche  et  les  principaux  sénateurs  demander 
à  Romain  la  raison  d'une  action  si  hardie  ;  ils  fureat 


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xz. 


4l6  HISTOIRB   DU   BAS*EKPIRE*         »      (Atf^ioO 

reçus  à  coaps  de  pierres  ;  on  ne  les  laissa  pas  même 
approcher. 

Le  lendemain ,  au  point  du  jour,  Zoé  ayant  fiiit  venir 
!  dwfîe  8on  fils  et  toute  sa  maison,  leur  demande  la  cause  de 
P*^-  ces  mouvements.  Tous  les  autres  gardant  le  silence, 
Théodore  prend  la  parole  :  Princesse^  dit-il,  iiccusez- 
en  Léon  Phocaset  Constantin  même;  Vun  a  mis  le 
désordre  dans  les  troupes ,  l'autre  dans  le  palais. 
En  même  temps  l'empereur  déclare  qu'il  veut  gou- 
verner par  lui-même,  et  il  fait  revenir  auprès  de  lui  le 
patriarche  Nicolas  et  lé  tuteur  Etienne.  L'impératrice 
les  avait  bannis  de  la  cour  ;  ils  s'en  vengent  dès  le  jour 
suivant ,  en  lui  faisant  signifier  qu'elle  ait  à  sortir  du 
palais.  Désespérée  d'un  affront  si  outrageant,  Zoé  court 
à  l'appartement  de  son  fils  ;  elle  se  jette  à  son  cou  et 
ranime  sa  tendresse  ;  il  verse  lui-même  des  larmes ,  et 
commande  qu'on  lui  laiss^a'mère.  Craignant  tout  de 
Léon  Phocas,  il  lui  dte  sa  charge  de  capitaine  de  la 
garde ,  et  la  donne  à  Jean  Garidas.  Léon  obtient  ce- 
pendant que  celle  de  commandant  de  la  garde  étran- 
gère soit  donnée  à  son  fils  Syméon  et  à  Théodore ,  son 
beau-frère^  et,  après  avoir  juré  à  l'empereur  une  fidé- 
lité inviolable,  il  se  retire  dans  sa  maison.  A-peine  est- 
il  sorti  du  palais,  qu'on  en  bannit  et  son  fils  et  son 
beau-frère.  Effrayé  de  ce  nouveau  coup  de*  foudre,  il 
croit  n'avoir  d'autre  ressource  que  de  se  liguer  avec 
Romain  même  pour  se  défendre  contre  ses  autres  en- 
nemis. Il  monte  à  cheval  et  se  rend  à  la  flotte.  Il  ex- 
pose à  Romain  les  affronts  qu'il  vient  de  recevoir,  et 
lui  veut  persuader  qu'il  doit  s'attendre  aux  mêmes  trai- 
tements de  la  part  des  ministres  d'un  jeûne  prince, 
âmes  basses  et  jalouses  de  tout  mérite  qui  les  effisice. 


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TXt. 

Komain 


palaù. 


(An  ffig.)        UVRE   LXXIII.         CORSTAirTm   VU.  417 

Il  lui  propose  de  s'unir  ensemble  pour  résister  à  leurs 
attaques.  Romain,  plus  rusé  que  lui,  feint  d'embrasser 
ce  parti  avec  joie;  ils  cimentent  leur  nouvelle  alliance 
par  des  serments  réciproques,  qui  ne  coûtent  rien  à 
des  âmes  corrompues.  Ils  conviennent  même  de  marier 
ensemble  leurs  enfants,  et  se  promettent  le  secret.  Léon 
se  retire  sur  ses  terres  en  Cappadoce. 

Romain,  qui  ne  tenait  compte  des  serments  qu'il  ve- 
nait de  faire  à  I^on,  envoie  au  palais  pour  se  justifier;     "°"«!»» 
toujours  prêt  à  jurer  pour  appuyer  un  mensonge,  il 
proteste  par  ce  qu'il  y  a  de  plus  sacré,  qu'il  n'a  rien 
fait  pour  sa  propre  élévation  ;  que  son  unique  vue  a 
été  de  mettre  l'empereur  à  couvert  des  attentats  de 
Léon.  Comme  le  patriarche,  qui  gouvernait  alors  le 
prince,  plein  d'une  juste  défiance,  n'admettait  point 
ses  excuses,  son  ami  Théodore  lui  mande  qu'il  est  temps 
de  lever  le  masque;  il  lui  conseille  de  se  présentera  la 
tête  de  la  flotte  dans  le  port  voisin  du  palais.  Romain, 
étonné  lui-même  de  la  hardiesse  de  l'entreprise,  après 
avoir  long-temps  balancé,  pressé  enfin  par  lel  vives 
sollicitations  de  ses  amis ,  entre  dans  le  port  de  Buco- 
léon,  le  a5  mars,  avec  toute  sa  flotte  armée  en  guerre. 
A  la  vue  d'un  appareil  si  formidable,  Etienne  quitte  le 
palais,  et  le  patrice  Nicétas,  ami  de  Romain,  en  fait 
sortir  le  patriarche.  On  permet  à  Romain  d'y  entrer; 
mais  on  ne  le  reçoit  qu'après  lui  avoir  fait  jurpr  sur 
la  vraie  croix  que  jamais  il  ne  formera  aucun  dessein 
9U  désavantage  du  prince.  Le  jeune  empereur  le  con- 
duit à  la  chapelle  du  palais,  et,  après  qu'ils  se  sont 
engagés  l'un  à  l'autre  par  des  serments  mutuels,  Ro- 
main est  revêtu  de  la  charge  de  commandant  de  la 
garde  étrangère;  De  peur  que  la  jalousie  ne  fasse  pren- 

Tome  XIII.  2» 


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4l8  HISTOIRE    JDU    BAS-EMPIRE.  (An  g  19.) 

dre  les  armes  à  Léon  Phocas,  on  force  le  chambellan 
Constantin,  son  ami,  de  lui  écrire  qu'il  ait  patience; 
qu'on  lui  prépare  un  sort  encore  plus  honorable;  que, 
s'il  demeure  fidèle  au  prince ,  il  ne  sera  pas  long-temps 
sans  se  voir  au-dessus  de  tous  ses  rivaux.  Léon,  trompé 
par  ces  belles  promesses ,  en  attend  tranquillement  les 
effets. 
XXII.  Cependant  Romain,  profitant   habilement   de  ses 

le^^aiSeî!  avantages,  fait  tous  les  jours  quelques  pas  vers  le  trône. 
11  rend  le  jeune  prince  amoureux  de  sa  fille  Hélène, 
qui  joignait  beaucoup  d'esprit  anx  grâces  de  la  beauté, 
et  le  mariage  se  fait  la  seconde  fête  de  Pâques.  Ro- 
main reçoit  en  même  temps  le  titre  de  Père  de  Fem- 
pereur,  dignité  supérieure  à  toutes  les  autres,  ima- 
ginée sous  le  règne  précédent  en  faveur  de  Stylien.  Sa 
charge  de  commandant  de  la  garde  étrangère  passe 
à  son  fils  Christophe.  I^a  nouvelle  de  tant  d'honneurs 
prodigués  à  Romain  et  à  sa  famille ,  alla  bientôt  ré- 
veiller la  jalousie  de  Léon  Phocas.  Le  chambellan  Cod-  ^ 
stantin  va  le  trouver  en  Cappadoce ,  avec  trois  autres 
des  principaux  seigneurs  de  la  cour  ;  ils  aigrissent  en- 
core son  ressentiment.  Par  leur  conseil, Léon  assemble 
une  armée  nombreuse;  toutes  les  troupes  d'Asie,  dont 
il  était  général ,  se  rendent  sous  ses  enseignes  et  mar- 
chent à  sa  suite  vers  Constantinople.  Il  ne  prenait 
les  armes,  disait-il, que  pour  tirer  l'empereur  des  mains 
de  ceux  qui  le  tenaient  en  esclavage, 
xxni.  Pour  dissiper  cet  orage,  Romain  n'eut  besoin  que 

d?g^ê"îa   du  nom  de  l'empereur.  Il  composa  des  lettres  par  les- 
'^'^Léon*  ^*  quelles  le  prince  ordonnait  à  tous  ceux  qui  suivaient 
Phocas,  de  l'abandonner ,  promettant  des  récompenses 
à  ceux  qui  feraient  le  devoir  de  fidèles  sujets,  comntf 


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(An  qïQ)     I'IVRE    LX3UII.  CONSTAHTI»    Vil .  4'9 

il  menaçait  de  châtiment  les  complice^  de  la  révolte. 
Il  scella  ces  lettres  du  sceau  de  Tempereur,  et  les  mit 
entre  les  mains  d'un  clerc  nommé  Michel^  et  d'une 
femme  nommée  Ânne,y  que  la  cour  employait  volon- 
tiers dans  toutes  les  intrigues; ,  parce  que ,  pour  la  ser- 
vir, elle  n'épargnait  pas  même  son  honneur.  Plus  adroite 
que  Michel,  et  plus  exercée  à  ce  manège,  elle  s'acquitta 
de  sa  commission  avec  succès.  Mais  Michel  fut  décou-* 
vert,  et  Phocas  lui  fît  couper  le  nez  et  les  oreilles^  Ces 
lettres  ne  furent  pas  sans  effet  ;  elles  détachèrent  de 
Phocas  plusieurs  des  principaux  officiers,  ce  qui  pib 
l'empêcha  pas  de  continuer  sa  marche.  Il  arriva  vis- 
à-vis  de  ^Constantinople ,  et  borda  de  soldats  tout  le 
rivage  du  Bosphore,  depuis  ChrysopoHs  jusqu'à  Chai' 
cédoine.  Il  espérait  réduire  ses  ennemis,  par  la  seuli» 
terreur  de  ses  armes  ^  à  lui  proposer  des  conditions 
avantageuses.  Mais,  malgré  l'épouvante  qui  s'était  ré- 
pandue dans  la  ville,  le  secirétaire  Syméon  fut  assez 
hardi  pour  traverser  le  détroit  dans   une  chaloupe, 
portant  à  l'armée  de  Phocas  une  déclaration  écrite  de 
la  iftain  de  l'empereur,  et  conçue  en  ces  termes  :  «  Ayant 
«  reconnu  par  expérience  la  vigilance  et  la  fidélité  de 
a  Romain,  je  l'ai  choisi  pour  le  gardien  et  le  défenseur 
a  de  ma  personne,  après  Dieu,  et^  convaincu  de  son 
«  affection  paternelle ,  je  déclare  qu'il  me  tient  lieu  de 
a  père.  Quant  à  Léon,  qui  n'a  cessé  de  troubler  notre 
«  règne  par  de  sourdes  intrigues,  et  qui  nous  fait  au- 
«  jourd'hui  une  guerre  ouverte ,  je  le  déclare  déchu  de 
a  toutes  ses  dignités,  aoupable  de  haute  trahison,  et 
tf  digne,  par^ses  attentats,  de  toute  ma  colère.  Vous 
^  donc  qu'il  a  séduits  par  ses  mensonges,  reconnaissez 
<c  la  vérité ,  séparez-vous  d'un  rebelle  odieux ,  ^t  ren- 

27. 


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4aO  HtSTOIKB  JDU  BAS-EirPIftl»  (in  919.) 

tf  trez  sous  Tobéissance  de  votre  légitime  empereur.» 
A  l'arrivée  de  Syméon ,  toute  rarmée,  que  Léon  ne  put 
retenir,  s'assemble  autour  de  lui.  La  lecture  des  let* 
très-patentes  fait  une  forte  impression  sur  les  troupes. 
Trompées  par  les  discours  de  leur  général,  elles  avaient 
cru  jusqu'alors,  qu'elles  servaient  l'empereur,  et  que 
Phocas  agissait  d'intelligence  avec  lui  pour  le  délivrer 
de  la  tyrannie  de  Romain.  Dès  qu'elles  furent  désa- 
busées, elles  se  débandèrent;  et  Léon  abandonné, 
suivi  seulement  de  ses  plus  fidèles  serviteurs,  après 
s'être  en  vain  présenté  devant  plusieurs  forteresses  qui 
lui  fermèrent  leurs  portes,  fut  pris  par  un  détachement 
envoyé  pour  le  poursuivre.  Ceux  qm  le  ramenaient  à 
Constantinople  lui  crevèrent  les  yeux  en  chemin,  sans 
doute  par  un  ordre  secret  de  Romain ,  qui  les  désa- 
voua, affectant  même  d'en  paraître  affligé.  Tel  fut  le 
succès  des  projets  ambitieux  de  Léon  Phocas. 
XXIV.  Tant  que  la  victoire  avait  paru  incertaine  entre  les 

conjwations  dcux  rivaux,  ils  avaient  également  partagé  la  haine  pu- 
blique. Dès  que  la  querelle  fut  décidée  au  désavantage 
de  Léon,  la  compassion  lui  fit  un  mérite  d'avoir  «ic- 
combé,  et  le  succès  de  Romain  le  fit  paraître  criminel 
même  à  plusieurs  de  ses  partisans.  Trois  des  premiers 
officiers  du  palais  gagnèrent  des  assassins  pour  le  tuer 
à  la  chasse.  Le  complot  fut  découvert  ;  on  creva  les 
yeux  aux  coupables,  leurs  biens  furent  confisqués; et, 
après  les  avoir  battus  de  verges,  on  les  promena  sur 
des  mules,  dans  la  grande  place,  pour  les  donner  ea 
spectacle  au  peuple.  Romain ,  par  une  basse  vengeance, 
fit  conduire  au  milieu  d'eux  l'infortuné  Léon  Phocas. 
Le  commerce  secret  établi  depuis  long-temps  entre Zoe 
et  Romain  n'était  pas  l'effet  de  l'amour:  la  débauche 


contre 
Romain. 


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(An  9»^)       LIVRE  LXXIII.  CONSTiLWTlN   VII.  4^* 

(l'uQ  côté,  lambition  de  l'autre  étaient  les  seuls  Ikns 
qui  les  unissaient.  Dès  que  Romain  sentit  qu'il  pouvait 
voler  de  ses  propres  ailes ,  il  négligea  Zoé.  La  prin- 
cesse, piquée  au  vif  de  se  voir  méprisée  par  un  homme 
qui  lui  devait  sa  fortune,  résolut  de  s'en,  venger  par 
le  poison.  Elle  fut  trahie,  et  Romain  la  fit  raser  et  ren- 
fermer daBs  un  cloître.  Il  n'était  personne  à  qui  Ro- 
main eût  de  plus  grandes  obligations  qu'à  Théodore, 
gouverneur  du  prince  ;  c'était  Théodore  qui  avait  mis  en 
mouvement  son  ambition,  qui  lui  avait  ouvert  l'entrée 
du  port  et  les  portes  du  palais ^  qui  l'avait,  pour  ain^ 
dire,  pris  entre  ses  bras  pour  le  placer  à  coté  du  prince. 
Mais  Théodore  commençait  à  s'apercevoir  que  Ro- 
main ne  se  contentait  pas  d'un  rôle  subalterne,  et  il 
était  trop  attaché  à  son  élève  pour  consentir  à  l'usur- 
pation. IjCS  mesures  qu'il  prit  pour  l'empêcher  le  ren- 
dirent suspect  ;  on  oublia  tous  «es  services  ;  et  un  jour 
qu'il  était  à  table  avec  son  fils  Syméon,  chez  le  con- 
nétable Théophylacte ,  Jean  Curcuas,  alors  comman- 
dant du  guet,  suivi  d'une  troupe  d'archers,  les  enleva 
tous  les  trois,  et  les  transporta  sur  leurs  terres  au-delà 
de  l'Hellespont  avec  défense  d'en  sortir. 

Romain  agissait  déjà  en  souverain  ;  il  ne  lui  en  man- 
quait que  le  titre.  Constantin,  âgé  seulement  de  quinze  couronné 
ans ,  prince  sans  expérience ,  qu'une  longue  vie  ne  lui 
dotina  même  jamais,  tendit  la  main  à  cet  ambitieux 
pour  l'aider  à  monter  sur  le  trône.  Il  le  nomma  César 
le  a 4  septembre,  et  le  17  décembre  de  cette  même 
année, .0(<9,  il  lui  permit  de  prendre  le. diadème,  dont 
le  patriarche  Nicolas  le  couronna  solennellement.  Ro- 
main, devenu  empereur,  prit  sur  lui  tous  les  soins 
comme  toute  l'autorité  du  gouvernement ,  et  laissa  son 


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Romain 


4ua  HISTOIRE    OU    BAS-EltfPlRE.  (An  919.} 

collègue,  d'un  caractère  doux  et  paisible,  passer  obs- 
curémeat  ses  jours  dans  des  études  qui  honorent  un 
particulier  y  mais  qui  ne  doivent  occuper  que  le  loisir 
d*un  prince ,  auquel  il  n'en  reste  guère  quand  il  est 
digne  de  régner.  Pendant  ces  grands  mouvements, 
dont  la  cour  de  Constantinople  était  agitée ,  tout  était 
tranquille  au  dehors.  Du  moins  l'histoire  de  cette  an- 
née ne  fait  mention  d'aucune  guerre,  sinon  de  quel- 
ques combats  de  peu  d'importance  entre  les  Grecs,  tou- 
jours maîtres  de  l'ApuIie,  et  les  princes  de  Bénévent 
«t  de  Capoue,  tantôt  amis,  tantôt  ennemis,  qui  rem- 
portèrent alors  quelque  avantage. 
An  940.  Le  nouvel  empereur,  pour  assurer  sa  puissance,  se 
«VI-      hâta  d'en  répandre  l'éclat  sur  sa  famille.  Le  6  janvier 

Romain  , 

éièresa  de  Tannée  suivante,  il  donna  le  titre  d'Auguste  à  sa 
honneurs  du  femme  Théodora  ;  et,  le  jour  de  la  Pentecôte,  il  fit 
CtA  °*6  couronner  son  fils  aîné  Christophe.  Constantin  lui- 
Leo,  p. 496-  même  présidait  à  cette  cérémonie,  qui  lui  causait  un 

Zou.  t.  2,  p.  11/1..  .1  .  1»    1  1-  -Il        1. 

188.       mortel  déplaisir;  mais  la  crainte  1  obligeait  de  le  dis- 

incert.  con-  simulcr.  Agathe,  fille  àe  Romain,  épousa  Léon  Argyre. 

Sym.^p.48ï!  C'était,  au  rapport  des  historiens,  le  plus  accompli  de 

^*574.  ^    ^^^^  ^^  seigneurs  de  la  cour.  La  valeur,  la  prudence, 

sife)».€hr.  j^  simplicité  antique,  une  libéralité  inépuisable  envers 

les  malheureux,  se  trouvaient  réunies  dans  sa  personne 

à  l'extérieur  le  plus  avantageux. 

xxYiK  Depuis  la  déposition  du  patriarche  Ëuthymius ,  l'É- 

hi"  ^"d    ^'*^  ^  Coostantinople  était  divisée,  une  partie  des 

régiise  de  ecclésiastiques  s'ëtant  séparés  de  ceux  qui  avaient  ap- 

Constanti-  ^   ^  .^  ^  ^         ^  ^ 

nopie.  prouve  les  quatrièmes  noces  de  Léon.  Nicolas,  vou- 
iltl'xl'llt'  '®^*'  ^^^^^'  ^^  esprits,  s'adressa  au  pape,  et  Jean  X 
^"^  no"î  ^^  ®^voya  des  légats  qui  rétablirent  la  concorde.  La  dis- 
incert.  con-  ctpline  au  sujct  des  mariages  fut  i^églée  par  un  édit 

tin.  p.  a46.  *'  o  ir 


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(An  920.)  LIVAE   LXXllI.  ROMAIK.  4^3 

de  l'empereur  Constantin ,  dont  on  faisait  tous  les  ans  sym.  p.  481. 
une  lecture  publique  dans  le  jubé  de  Sainte-Sophie.  ^^^If]^' 
Cet  édit  portait,  qu'à  commencer  de  la  présente  an-  p3*[°ad'jj*.^ 
née  920,  les  quatrièmes  noces  ne  seraient  plus  permi-  ^?**™"°"î* 
ses,  sous  peine  d'exclusion  de  l'entrée  de  l'église,  tant  adAmpiû- 
qu'elles  subsisteraient.  Les  troisièmes  noces  ne  se  per-  Fieiipy,Hi«t. 

.    •  A  5  •  •      •  Tk    I  ecclés.  1.  54, 

mettaient  même  qu  avec  certaines  restrictions.  Balsa-  art.  ss. 
mon,  qui  vivait  à  la  fin  du  douzième  siècle  et  au  com- 
mencement du  treizième,  observe  que,  malgré  cette 
constitution,  l'Église  grecque,  jusqu'à  son  temps,  ne 
permettait  pas  les  troisièmes  noces.  Dans  un  synode 
composé  des  prélats  qui  se  trouvaient  à  Constanti- 
nople,  et  dans  lequel  les  autres  ecclésiastiques  furent 
admis,  on  décida  que  le  quatrième  mariage  de  Léon, 
qui  avait  excité  tant  de  dissensions  et  de  scandale, 
n'avait  été  toléré  que  par  ménagement  pour  la  per- 
sonne du  prince,  afin  de  ne  pas  aigrir  un  esprit  qui  se 
serait  porté  à  des  excès  encore  plus  condamnables. 
C'était  justifier  la  conduite  d'Euthymius.  Aussi  sa  mé- 
moire fut-elle  rétablie  en  honneur.  Son  corps  fut  trans- 
féré en  grande  pompe  à  Constantinople.  Mais  son  nom, 
que  Nicolas  avait  rayé  des  diptyques,  n'y  fut  remis  que 
long-temps  après,  par  le  patriarche  Polyeucte.  On  parle 
sur  cette  année  d'une  incursion  de  Sarrasins,  qui  obli- 
gea de  transporter  à  Naples  le  corps  de  saint  Se  vérin, 
déposé  auparavant  dans  un  lieu  nommé  le  château  de 
Lucullus,  entre  Naples  et  Pouzzoles. 

L'ascendant  que  Romain  prenait  sur  le  jeune  prince,     ^'^  9^** 
révoltait  les  anciens  serviteurs  de  la  famille  impériale.    Conjura- 
Ils  gémissaient  de  voir  leur  maître  naturel  réduit  à  ccdr.p.êio 
une  sorte  d'esclavage.  Ce  mécontentement  fit  éçlore  j^^^^*^* 
grand  mombre  de  complots  contre  Romain,  et  dès  la  ^oëi.  p.  iko. 


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4^4  HISTOIRE   DU   BAS-EMHRB.  (111911.) 

viu Basil,   seconde  année  de  son  règne,  il  se  vit  environné  de 

juu.  .  .  f 

Tncert.  con-  conjurations,  qu'il  eut  le  bonheur  d'étoufFer  dans  leur 
*°47%48.'  naissance.  Etienne,  maître  du  palais ,  Théophane,  ré- 
^GrTorg.^pl*  parateur  des  murs,  Paul,  intendant  de  l'hôpital  des 
^'5-6'^'  orphelins,  ligués  ensemble  pour  le  détrôner,  furent 
^zSnVlT"'"  ^^^^"v^rts  ;  ils  en  furent  quittes  pour  être  revêtus  de 
18S.  Thabit  de  moine  ,  et  relégués  dans  Tîle  d'Antigonie 
(c'était  une  île  du  Bosphore).  A  peine  Romain  était-il 
sorti  de  ce  danger  qu'il  tomba  dans  un  autre.  Comme 
il  faisait  la  revue  de  la  maison  impériale  avec  Con- 
stantin ,  un  domestique  du  patrice  Arsène  vint  l'avertir 
que  son  maître,  de  concert  avec  Paul,  capitaine  des 
manglabites  (c'était  un  corps  de  la  garde,  armé  de  mas- 
sues), était  prêt  à  se  saisir  de  sa  personne.  Sur  cet 
avis,  il  retourna  au  palais  à  toute  bride  avec  Constan- 
tin. Les  deux  coupables  furent  fouettés,  aveuglés,  et 
exilés  avec  confiscation  de  leurs  biens.  Le  mauvais 
succès  de  ce  complot  n'intimida  pas  le  trésorier  Anas- 
tase.  Il  engagea  dans  son  dessein  les  secrétaires  Théo- 
clète  et  Démétrius,  le  chambellan  Théodoret,  Nicolas 
Cubaze,  et  Théodote,  pilote  de  la  galère  du  prince. 
Surpris  et  convaincus,  ils  furent  fustigés  dans  les  car- 
refours de  la  ville,  rasés,  et  envoyés  en  exil.  On  épar- 
gna au  chambellan  l'ignominie  publique  ;  il  fut  fouette 
dans  le  palais.  Tant  de  conjurations  en  faveur  de  Con- 
stantin auraient  pu  engager  l'usurpateur  à  en  couper 
la  racine,  en  faisant  périr  ce  prince  ;  ce  qui  lui  eût  ete 
facile.  Mais  Romain,  plus  ambitieux  que  méchant,  se 
contenta  de  le  rendre  méprisable,  en  prenant  le  pas 

au-dessus  de  lui  dans  toutes  les  cérémonies,  et  dans  les 

*  «1 

inscriptions  des  actes  publics.  Quelque  temps  après,» 
donna  la  même  prérogative  à  son  fils  Christophe,  q^u 


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(An  941.)  LIVRB   LXXIII.  ROMAm.  4^^ 

avait  nommé  Auguste,  en  sorte  que  Constantin ,  seul 
empereur  légitime,  n'était  plus  que  le  troisième  dans 
la  maison  impériale ,  et  rien  dans  l'Empire.  C'était  une 
contravention  formelle  au  serment  que  Romain  avait 
fait  de  ne  rien  attenter  contre  l'honneur  de  ce  prince: 
mais  quel  ambitieux  tint  jamais  compte  de  ses  serments? 

A  ne  considérer  que  le  genre  de  peines  dont  on  châ-      xxix. 

..,  ,  ,       ^  ,.  ^  ,1      Méchanceté 

tiait  alors  les  plus  grands  crimes,  on  serait  tente  de  deRhentace. 
croire  que  les  Grecs  de  ce  temps-là  étaient  plus  hu- 
mains que  n'avaient  été  les  Romains  mêmes.  Rarement 
on  condamnait  au  dernier  supplice  ;  les  forfaits  les  plus 
criminels  n'étaient  ordinairement  punis  que  de  l'exil, 
de  la  confiscation  des  biens,  de  la  perte  des  yeux.  On 
faisait  moines  des  gens  qui  méritaient  la  mort.  Mais 
ce  n'était  pas  un  effet  de  l'adoucissement  des  mœurs. 
Dans  les  états  qui  dégénèrent,  toutes  les  idées  s'affai- 
blissent; les  vertus  perdent  leur  énergie,  et  les  crimes 
leur  atrocité  :  il  reste  toujours  assez  de  vigueur  pour 
en  commettre,  mais  trop  peu  pour  les  punir.  Un  Athé- 
nien, nommé  Rhentace,  parent  du  patrice  Nicétas, 
perdu  de  débauche  et  accablé  de  dettes,  s'ennuya  de 
voir  son  père  vivre  trop  long-temps  ;  il  résolut  de  s'en 
défaire.  Le  vieillard  averti  prend  la  fuite ,  et  fait  voile 
vers  Constantinople,  pour  se  mettre  à  l'abri  du  trône. 
Il  est  pris  par  des  pirates  et  emmené  en  Crète.  Le  fils, 
devenu  maître  des  biens  paternels,  les  vend  et  passe 
à  Constantinople,  où,  s'étant  réfugié  dans  l'enceinte  de 
Sainte-Sophie,  parce  que  son  dessein  parricide  avait 
éclaté,  il  continue  de  se  livrer  au  plaisir.  Bomain,  in- 
formé de  l'abus  que  ce  scélérat  faisait  de  cet  asile,  or- 
donne de  l'en  tirer  et  de  lui  faire  son  procès.  Rhen- 
tace, instruit  de  cet  ordre,  prend  le  parti  de  se  sauver 


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4a6  HiSTorRE  du  bas-empicie:.  (ab  9^1.) 

chez  les  Bulgares,  et,  pour  y  être  mieux  reçu,  il  con- 
trefait des  lettres  de  Romain  à  Syméon,  On  l'arrête, 
on  le  trouve  saisi  de  ces  lettres ,  et ,  pour  ce  double 
crime,  on  se  contente  de  lui  crever  les  yeux  et  de  le 
dépouiller  de  ses  biens. 

Syméon  s'ennuyait  du  repos.  Il  prit  le  chemin  de 
Bulgares.    Constantinopic  avec  quelques  troupes  légères.  Potbus 
Cedr.  p.    Argyre  eut  ordre  de  marcher  à  sa  rencontre;  il  s'a- 
Leo,  p.  497.  vança  jusqu'à  Thermopolis  ;  d'où  il  envoya  Michel,  un 
Zon.  t.  i,  p.  de  ses  officiers,  avec  un  détachement  pour  reconnaître  , 
luccrt.  con-  l'ennemi.  Michel ,   surpris  dans  une   embuscade ,   et 
**24g^24g7*  enveloppé  de  toutes  parts,  se  défendit  courageusement. 
^^"isîi.^^''  Abattant  sous  ses  coups  tout  ce  qu'il  trouvait  devant 
^^^%  6    ^^*  '  ^'  s'ouvrit  un  passage  et  regagna  le  gros  de  l'ar- 
Liutpr.  in    jnée  ;  mais  il  mourut  bientôt  après  d'une  blessure  dont 
Lup.  Pro-   sa  valeur  n'avait  pu  le  garantir.  Syméon ,  qui  ne  son- 
Perêgrin.    gcait  d'abord  qu'à  faire  une  course  dans  le  pays  en- 
nemi, retourna  sur  ses  pas  pour  assembler  son  armée, 
dont  il  donna  le  commandement  à  deux  habiles  capi- 
taines. Après  sa  retraite,  les  Grecs,  croyant  la  cam- 
pagne terminée,  s'étaient  aussi  retirés  à  Constanti- 
nople.  Mais  Romain ,  apprenant  que  les  Bulgares  rete- 
naient avec  de  plus  grandes  forces,  joignit  aux  troupes 
qu'il  avait  d'abord  employées,  toutes  celles  de  la  mai* 
son  impériale ,  et  les  fit  partir  sous  le  commandement 
de  trois  généraux,  Jean,  surnommé  le  Recteur,  Léon 
et  Pothus.  Léon  était  son  gendre,  dont  j'ai  déjà  parlé; 
Pothus  était  frère  de  Léon.  Pour  soutenir  cette  ar- 
mée, Alexis  Mosèle,  grand-amiral,  borda  de  vaisseaux 
le  golfe  de  Géras.  Les  Grecs,  ayant  ordre  de  ne  pas  s'é- 
loigner de  Gonstantinople ,  campèrent  dans  une  plaine 
basse  au  bord  du  golfe  ;  et  lorsqu'ils  croyaient  les  fiul- 


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(An  9»i.)  LrVRE    LXXIII.  ROMAITT.  4^7 

gares  encore  fort  éloignés,  ils  les  virent  paraître  sur 
les  éminences,  et  fondre  tout-à-coup  sur  eux  avec  de 
grands  cris.  Le  général  Jean  est  le  premier  à  prendre 
la  fuite;  le  patrice  Photin  le  voyant  poursuivi,  s'ef- 
force avec  sa  troupe  d'arrêter  les  ennemis;  il  lui  donne 
le  temps  de  gagner  une  chaloupe;  mais  il  lui  en  coûte 
la  vie ,  ainsi  qu'à  sa  troupe ,  qui  est  taillée  en  pièces. 
L'amiral,  qui  était  descendu  à  terre  pour  combattre, 
voulant  remonter  dans  un  vaisseau,  tombe  chargé  du 
poids  de  ses  armes,  et  est  englouti  dans  les  eaux.  Léon 
et  Pothus  se  sauvent  dans  un  château  voisin.  Le  reste 
de  l'armée  fuyant  vers  le  rivage  pour  gagner  la  flotte, 
est  massacré,  pris,  ou  noyé.  Les  Bulgares  vainqueurs 
mettent  le  feu  au  palais  des  Fontaines  ;  c'était  une  su- 
perbe maison  de  plaisance,  où  les  empereurs  allaient 
souvent  prendre  le  frais.  Ils  pillent,  brûlent,  détruisent 
tout  sur  les  bords  du  golfe,  jusqu'aux  portes  de  la 
ville,  et  se  retirent  chargés  de  butin.  Dans  le  même 
temps,  l'Empire  recevait  un  autre  échec  en  Italie.  Lan- 
dulf,  prince  de  Bénévent  et  de  Capoue^  ayant  pris  les 
armes ,  attaqua  les  Grecs  près  d'Ascoli  et  les  défit.  Ur- 
sileûs,  qui  les  commandait,  fut  tué  dans  le  combat, 
et  presque  toute  l'Apulie  se  rendit  au  vainqueur.  Un 
autre  événement  fit  perdre  la  Calabre.  Jean  Muzalon, 
gouverneur  de  cette  province ,  s'était  rendu  odieux  aux 
peuples  par  sa  dureté  insupportable.  Ils  se  soulevè- 
rent, le  tuèrent,  et  se  donnèrent  à  Landulf.  Pour  re- 
couvrer cette  partie  de  l'Italie,  Romain  résolut  de 
mettre  une  flotte  en  mer.  Mais  auparavant  il  tenta  la 
voie  de  la  négociation.  Il  en  chargea  le  patrice  Côme, 
ami  de  Landulf.  Côme ,  moitié  par  adresse  et  par  in- 
sinuation ,  moitié  par  menaces  en  faisant  entendre  au 


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4li8  HISTOinR   J>V  BiS-EMPlBE.  (An  gax.) 

prince  qu'il  allait  s'attirer  sur  les  bras  toutes  les  forces 

de  l'Empire,  l'engagea  enfin  à  conclure  un  traité.  Non 

seulement  Landulf  abandonna  la  Calabre ,  il  travailla 

même  de  concert  avec  Corne  à  ramener  les  Apuliens 

et  les  Calabrois  à  l'obéissance,  et  la  paix  fut  rétabUe 

en  Italie. 

Aw  gaa.         Le  20  février  de  l'année  suivante  922 ,  mourut  Théo- 

Mort'de    dora,  femme  de/ Romain.  Ce  prince,  voulant  honorer 

^me^de   ^a  mémoire  par  un  monument  singulier ,  changea  en 

Romain,     monastère  le  palais  où  elle  avait  fini  ses  jours.  Pour 

Ccdr.p  6ai.  i-     i         i  ,,.  ,  .  -i  r»  ^        i  • 

Léo,  p.  494,  remplir  la  place  d  impératrice,  il  fit  couronner  Sophie, 

Zon.  t.  a, p.  femme  de  son  fils  Christophe,  déjà  empereur.  Elle  était 

Tacert.  con-  ^''^  du  patricc  Nicétas,  maître  du  palais,  qui  avait 

Sym.^p.48a.  ^*^^  Romain  à  parvenir  à  l'Empire. 

5^6^%  P-        Les  rois  d'Ibérie  étaient  alliés  de  l'Empire ,  et  ces 

^h°T      princes,  moins  fiers  que  leurs  ancêtres,  s'en  étaient  ren- 

them.6.  '  dus  Ics  vassaux  en  acceptant  le  titre  d^  curopalates, 

devenu  chez  eux  héréditaire.  Celui  qui  régnait   alors 

Leroid'ibé-  vint  à  Coustautinoplc ,  et  Romain  s'empressa  de  le  re- 
né à  Con-  .  ,  i9f      1        \  1 

atantinopie.  ccvoir  avcc  honncur,  et  détaler  a  ses  yeux  toute  la 
pompe  impériale.  On  avait  superbement  décoré  la 
grande  place  par  où  on  le  fit  passer  à  son  arrivée.  De 
là  on  le  conduisit  à  Sainte-Sophie,  dont  l'intérieur 
était  orné  de  riches  tapisseries,  des  plus  belles  pein- 
tures, et  de  tout  ce  que  le  trésor  de  cette  église  opu- 
lente pouvait  fournir  d'or  et  de  pierreries.  Le  prince 
barbare,  ébloui  de  cette  magnificence,  qui  relevait  en- 
core la  beauté  et  la  majestueuse  grandeur  de  cet  ad- 
mirable édifice,  s'écria  que  c'était  là  véritablement  la 
maison  de  l'Etre-Suprême  ;  et  comparant  ce  luxe  bril- 


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(Aa    939.)  LIYRB    LlXni.  ROMAm.  4^9 

lant  avec  la  pauvreté  de  son  pays  il  remporta  une 
merveilleuse  idée  de  la  puissance  de  l'Empire ,  dont  il 
ne  <XKnnut  pas  la  faiblesse. 

Après  un  an  d'inaction ,  les  Bulgares  revinrent  au    ^^  9^3. 
voisinage  de  Constantinople.  L'opulence  de  cette  grande    N™ene 
ville  avait  bientôt  répare  les  dommages  causés  par  les  '"^BTigaws.** 
incursions  des  ennemis  ;  et  c'était  pour  eux  un  nouvel    Cedr.  p. 
attrait.  Ils  avancèrent  jusqu'au  palais  de  l'impératrice  Leo/p.  498, 
Théodora,  femme  de  Théophile,  situé  hors  de  la  ville;  incett.^con- 
et,  n'y  trouvant  aucune  défense,  ils  le  pillèrent  et  y  ^^' ^^^^^^^ 
mirent  le  feu.  Les  habitants  étaient  consternés.  Ro-  Sy^-p-48a. 

Georg.  p. 

main,  voulant  ranimer  les  courages,  invita  les  officiers    577,578. 

...  Ducange. 

de  guerre  à  un  splendide  festin.  L'insolence  des  Bul-  Con8t.ebri8t.. 
gares  fit  le  sujet  de  l'entretien  des  convives,  et  l'em- 
pereur n'oubliait  rien  de  ce  qui  pouvait  échauffer  les 
cœurs.  Ses  discours  pathétiques,  aidés  de  l'ardeur  que 
le  vin  inspire,  ayant  exalté  les  esprits ,  tous  devinrent 
autant  de  héros,  tous  promettaient  à  l'envi  de  se  sa- 
crifier pour  l'honneur  de  l'Empire.  Sactice,  comman- 
dant de  la  garde  de  nuit,  se  signala  entre  tous  par  ses 
bravades;  et  dès  le  lendemain,  au*point  du  jour,  en- 
core embrasé  de  cette  chaleur  téméraire,  suivi  seule- 
ment de  la  compagnie  qu'il  commandait ,  il  vole  au 
camp  ennemi,  il  le  trouve  presque  abandonné.  Les 
Bulgares  étaient  déjà  dispersés  dans  les  campagnes  pour 
butiner.  Il  massacre  ceux  qui  étaient  restés  à  la  garde 
du  camp  :  mais  quelques-uns,  échappés  du  carnage, 
ayant  averti  leurs  camarades,  Sactice  se  voit  bientôt 
enveloppé  d'une  armée  nombreuse,  qui  fond  sur  lui  de 
toutes  parts.  Il  combat  long-temps  avec  une  valeur 
désespérée;  obligé  de  «éder  au  nombre,  il  bat  en 
retraite.  Son  cheval  s'étant  embourbé  au  passage  d'un 


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43o  HISTOIRE   DU   BAS-BMPIRS.  (An  goS.) 

ruisseau,  ii  reçoit  une  blessure  mortelle.  Dégagé  enfin 
par  ses  efforts  et  par  le  secours  de  ses  gens,  qui,  tou- 
jours poursuivis ,  s'arrêtaient  de  temps  en  temps  pour 
faire  face  aux  ennemis,  il  arrive  aux  faubourgs  de 
Blaquernes  ;  et  ayant  perdu  ses  forces  avec  son  sang , 
il  se  fait  porter  dans  l'église  du  Saint-Sépulcre,  où  il 
expire  la  nuit  suivante,  au  grand  regret  de  l'empe- 
reur et  des  soldats,  qui  donnaient  à  une  fougue  in- 
sensée l'admiration  due  à  une  sage  valeur.  Les  Bul- 
gares, après  leur  ravage,  reprirent  le  chemin  de  leur 
pays.  Syméon ,  mécontent  de  tirer  si  peu  de  fruit  de 
tant  d'expéditions ,  résolut  de  faire  un  dernier  effort 
pour  se  rendre  maître  de  l'Empire.  Il  conclut  un 
traité  de  ligue  avec  le  calife  d'Afrique.  Les  conditions 
étaient  que  le  roi  bulgare  viendrait  par  la  Thrace,  avec 
toutes  ses  forces,  attaquer  Constantinople  ;  que  les  Sar- 
rasins l'assiégeraient  par  mer;  qu'après  la  prise ,  les 
deux  nations  partageraient  le  pillage ,  et  que  Syméon 
demeurerait  en  possession  de  la  ville.  Les  députés  du 
calife  accompagnèrent  ceux  du  roi ,  pour  obtenir  de 
lui  la  ratification  dji  traité.  Ils  furent  arrêtés  en  Ca- 
labre  et  envoyés  à  Constantinople.  Romain,  qui  sen- 
tait combien  cette  ligue  était  dangereuse  pour  l'Em- 
pire ,  profita  de  cette  occasion  pour  la  rompre  et 
pour  détacher  le  calife  des  intérêts  de  Syméon.  Il  fit 
mettre  en  prison  les  députés  bulgares ,  traita  au  con* 
traire  les  Sarrasins  avec  honneur,  les  chargea  de 
présents  pour  eux-mêmes  et  pour  leur  prince,  leur 
recommandant  de  lui  dire  ^ue  c  était  ainsi  que  les 
Romains  se  vengeaient  des  ennemis  quils  esii^ 
maient.  Il  s'excusait  en  mén(|p  temps  sur  les  troubles 
d'Italie,  de  n'avoir  pas  encore  payé  le  tribut  annud 


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(An9a3)  LIVRE   LXXIII.  ROMA.IN.  43 î 

des  vingt-deux  mille  pièces  d*or,  et  promettait  une 
prompte  satisfaction.  Les  députés,  de  retour  en  Afri- 
que, inspirèrent  au  calife  tant  d'amitié  pour  Romain, 
et  par  les  éloges  qu'ils  firent  de  sa  générosité,  et  par 
les  présents  qu'ils  lui  mirent  entre  les  mains,  que  ce 
prince  non  seulement  renonça  à  l'alliance  des  Bulga- 
res, mais  remit  même  à  l'empereur  la  moitié  du  tribut 
qu'il  était  en  droit  d'en  exiger. 

On  déterra  vers  ce  temps-là  dans  le  monastère  de     «**^r 

*-^  ^  Urne    des 

Saint-Mamas,  hors  de  la  ville,  trois  urnes  de  bronze,  cendres  de 
remplies  de  cendres;  l'une  plus  grande  et  ornée  de 
bas-reliefs;  les  deux  autres  plus  petites  et  tout  unies. 
On  se  persuada  que  ces  cendres  étaient  celles  de  Mau- 
rice et  de  ses  enfants ,  quoique  cette  opinion  ne  s'ac- 
cordât guère  avec  ce  que  les  historiens  rapportent  des 
suites  de  la  mort  de  ce  prince.  Romain  les  fît  apporter 
dans  la  ville  par  le  patrice  Pétronace ,  et  déposer  dans 
le  monastère  de  Myrelée ,  qu'il  avait  fait  bâtir. 

Curcuas,  chargé  de  la  défense  de  l'Empire  du  côté    a»  qh 
de  l'Euplirate  et  de  la  Syrie,  réprimait  depuis  quatre  RéîoitJde 
ans  toutes  les  entreprises  des  Sarrasins.  Mais,  en  924,      ^***^** 
il  s'éleva  des  troubles  sur  la  frontière  de  l'Arménie  et  Lco/p.'499! 
du  Pont.  Le  patrice  Bardas  Boïlas  commandait  en  tin^p.aSor 
cette  contrée.  Voulant  apparemment  se  fairfe  une  prin-  ^^^^fe,^'*' 
cipauté,  sans  courir,  lui-même  aucun  risque,  il  excita   ^^°^?^  ^' 
deux  seigneurs  puissants,  Adrien  et  Tazate ,  à  prendre   ^"p-  p"^*** 
les  armes.  Ils  levèrent  l'étendard  de  la  révolte,  en  s'em-  chron.  Ba- 
parant  d'une  place  forte  nommée  Païpert.  Curcuas,  qui  Mnrat.  ann. 

ii^/zj^  j  d'Ital.  t.   5, 

se  trouvait  alors  à  Cesaree  de  Cappadoce,  accourut  au     p.  Soi. 
bruit  de  ces  mouvements  ;  il  livra  bataille  aux  rebelles, 
les  défit,  prit  Adrien  avec   les   principaux  officiers, 
auxquels  il  fit  crever  les  yeux.  Il  renvoya  les  simple» 


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/i3a  HISTOIRE  DU   BAS-EMPIRE.  (An  924.) 

soldats  sans  leur  faire  aucun  mal.  Quant  à  Tàzate^ 
s'étant  réfugié  d'abord  dans  une  forteresse ,  il  se  rendit 
ensuite  à  Constantinople  sur  la  parole  qu'on  lui  donna 
de  l'impunité^  et  fut  reçu  entre  les  gardes  de  l'empe- 
reur, nommés  les  Manglabites.  Peu  de  temps  après , 
comme  on  eut  découvert  qu'il  songeait  à  s'enfuir  pour 
exciter  de  nouveaux  troubles,  on  le  punit  d'aveugle- 
ment. Boïlas,  auteur  de  cette  rébellion,  aurait  mérité 
un  châtiment  encore  plus  rigoureux.  IMbis  Romain , 
dont  il  était  l'ami,  quoique  informé  de  sa  perfidie,  se 
contenta  de  le  faire  moine.  Dans  ce  même  temps,  les 
Sarrasins  d'Italie  prirent  Oria  entre  Brindes  et  Tarenle, 
tuèrent  toutes  les  femmes ,  et  allèrent  vendre  les  hom- 
mes en  Afrique.  Ils  s'emparèrent  aussi  dans  ce  même 
pays  de  la  rocque  de  sainte  Agathe. 
Ak  925.         Le  palrice  Léon  commandait  dans  Andrinople.  C'é- 
XXXVI.     tait  un  guerrier  aussi  remuant  que  Syméon  même.  Il 
guerre  à    ne  ccssait  dc  lairc  des  courses  dans  le  pays  des  Bul- 
Cedr'"  6a«  g^rcs,  et  ne  leur  donnait  point  de  repos.  Syméon  ré- 
Leo,  p.  499.  solut  de  se  délivrer  d'un  voisin  si  incommode.  Il  vint 

Zon.  t.  a,  p. 

i«8.       assiéger  Andrinople,  et  mit  tout  ten  œuvre  pour  la 
tin.  p.  a5o,  prendre  de  force.  L'infatigable  Léon  repoussait  tous 
Sym. p.483.  ses  assauts,  réparait  les  brèches,  et  par  de  fréquentes 
^578.^'   sorties,  animant  sa  garnison  par  son  exemple,  il  dé- 
montait les  machines  des  assiégeants,  les  taillait  en 
pièces,  et  ne  rentrait  jamais  dans  la  place  sans  être 
couvert  du  sang  des  Bulgares.  La  trahison  seule  put 
faire  succomber  cet  indomptable  guerrier.  Les  habi- 
tants, pressés  par  la  famine,  livrèrent  à  Syméon  la  ville 
et  le  gouverneur.  Le  roi  se  vengea  lâchement  sur  lui 
des  maux  que   le  droit  de  la  guerre  lui  avait  permis 
de  faire  aux  Bulgares.  Il  ne  le  mit  à  mort  qu'après  lui 


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{Aii9a5.)  -    LIVRE   LXXIII.  ROMAIN.  4^3 

avoir  fait  endurer  les  supplices  les  plus  cruels.  Con- 
tent d'avoir  satisfait  sa  colère,  il  se  retira, laissant  une 
garnison  dans  la  ville.  Mais  l'armée  grecque,  qui  n'avait 
pu  être  assez  tôt  préparée  pour  faire  le  siège,  étant 
arrivée  quelques  jours  après  la  retraite  de  Syméon,  la 
garnison  prit  la  fuite,  et  laissa  la  place  au  pouvoir  de 
ses  anciens  maîtres.- 

Nicolas  qui  remplissait  le  siège  de  Constantinople    xxxvti. 
depuis  quatorze  ans,  qu'il  avait  été  rétabli,  mourut     ^^^^^ 
le  i5  mai  de  cette  année  9215.  Quoiqu'il  ait  paru  trop     Nicoiu. 
occupé  des  affaires  séculières,, pour  être  irréprochable  ^  f'^^^' 
dans  un  siècle  plein  de  noires  intrigues ,  et  qu'il  soit  j^^^'f *" 
difficile  de  justifier  un  assez,  grand  nombre  de  ses  ac-  t>°-  p-  «54. 
tiona,  cependant  les  Grecs ,  jaloux  apparemment  de       486. 
l'honneur  de  leur  capitale,  l'ont  inséré  dans  leur  ca-       58^'.^' 
lendrier  au  nombre  des  saints.  Au  mois  d'août  suivant^   ChJsTt, 
on  lui  donna  pour  successeur  Etienne,  déjà  archevêque  p^^:  a*/5âp. 
d'Amasée,  qui  était  eunuque.  ecde7*i*5Î 

L'année  suivante,  les  Grecs  se  vengèrent  des  cruau-  ■'*•  *^ 
tés  queLéon-le-Tripolite  avait  exercées  vingt^deux  ans  ^^  9«6. 
auparavant  sur  Thessalonique.  Ce  pirate ,  à  la  tête  LeWiI-Tri- 
d'une  nombreuse  flotte,  après  avoir  désolé  sur^  son  ^à^Lemno"" 
passage  les  îles  de  l'Archipel,  était  à  l'ancre  dans  le  Cedr.p.6aa, 
port  de  Lemûos.  Le  patrice  Jean  Radin  alla  l'attaquer,  zon.'  t.'a,^.' 
le  défit  y  prît ,  brûla  ou  coula  à  fond  tous  ses  vaisseaux.  incert.*con- 
II  n'en  échappa  qu'un  seul;  c'était  celui  de  Léon,  qui  s^^'.^p.'fg.". 
se  sauva  plein  de  désespoir  et  couvert  de  honte.  ^^^^g  ^* 

Au  mois  de  septembre,  Syméon  mit  toutes  ses  tpou-     xxxix. 
pcs  en  campagne,  et  marcha  vers  Constantinople,  ra-  ^omlînet" 
vageant  la  Macédoine  et  la  Thrace,  sans  laisser  même  ^®  Syméon. 
sur  pied  aucun  arbre.  S'étant  avancé  jusqu'à  la  porte   6a3*,^6a4* 
de  Blaquemes,  il  demanda  une  conférence,  Ipourt rai-  ^5^,^*50??' 

Tome  JClJi.  a8 


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434  HlSTOIRi:  DU    BAS-EMPIUE.  (An  ga6.) 

ZoB.  t.  3,  p.  ter  d'accommoilrmeilt.  Romain  lui  envoya  le  patriar- 
*aîyc.V*3«>,  che  Etienne,  le  patrice  Michel  Stypîote,  et  Jean,  de- 

tin^î^p!  X'  ^^°**  ministre  d'état ,  à  la  place  d'un  autre  du  m(^me 

s*m  '  *A83  "ïo™?^*  •iirnoimné  le  Recteur,  qui  ,.se  voyant  calomnié 
484. 485,    auprès  du  prince,  avait  renoncé  aux  «ffaires  pour  se 

578  et  seqq.  renfermer  dans  un  monastère  qu^il  avait  fondé.  Sy- 
méon,  après  s'être  entretenu  avec  eux,  les  renvoya, 
demandant  à  conférer  avec  l'empereur  même ,  dont  il 
connaissait,  disait*il,  l'équité  et  la  prudence.  Romain 
fut  flatté  de  cette  marqua  d'estime.  Il  -désirait  ardem- 
ment la  paix,  et  était  viv^nent  affligé  ide  voir  répan- 
dre tant  de  sang.  Il  fit  aplanir  le  rivage  à  la  pointe  du 
golfe,  pour  y  donner  à  s%  galère  un  accèsr  facile  et  com- 
mode. On  forma  ensuite  une  enceinte  eniaorée  d'une 
forte  palissade ,  où  dévaieat  se  rendre  les  deux  prin- 
ces. Pendant  qu'on .  travaillait  à  cet  ouvrage,  Syméon 
donnait  une  nouvelle  preuve  de'  son  éloignement  de  la 
paix,  en  brûlant  une  célèbre  église  de  la  sainte  Vierge, 
«t  ravageant  tout  le  territoire  voisin.  L'empereur,  au 
eootraire  y  sJoccupait  die  dévotion  ;  prosterné  dans  l'é- 
glise de  Notr^rDamé  deBlaiquernes,  il  arrosait  la  terre 
de  '.  se»  larmes ,  priant  Dieu  d-àknbllir  le  cœur  de  Sy- 
nlécm  .et  de  lui  inspirer  des  :pensées  de  paix.  On  gar- 
dait daijts  cette  église  un.  manteau  qu'oii  disait  avœr 
appartenu  à  la.  sainte  Yterge;  il  s'en  revêtit  par-dessus 
^SvbabiiLë  impmaux,  comme  d'une  cuirasse  impéné- 
trable,, ety  suivi  d'une  par-tie  de  sa  garde  bien  armée,  il 
maAta.daas  son  navire  pour  se  rendre  au  lieu  de  la 
Qonféreiicé.  C'était  le  9  novembre.  Syméon  y  vint  de 
ft^.o  oèté  au  milieu,  d'une  troupe  nombreuse  de  Bulga- 
.  ces,  dôut  les  armes  brillaient  d'or  et  d'argent  Ils  cé- 
lébraienL.les  louanges  de  leur  tw  par  des  chaqsons  et 


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(An  916.)  lilVHB   LXXin.  ROMAlIf.  435 

des  acclamations,  affectant  de  lui  donner  en  langue 
grecque  tous  les  titres  dont  on  avait  coutume  de  dé- 
corer les  empereurs.  Les  murs  de  Constantinople  étaient 
bordés  d'une  foule  de  peuple ,  qui  considérait  avide- 
ment ce  brillant  spectacle.  L'empereur,  s'avançant  d'un 
air  intrépide  à  la  vue  de  tant  d'ennemis ,  entra  le  pre- 
mier dans  l'enceinte ,  où  il  attendit  Syméon.  Après  les 
otages  donnés  de  part  et  d'autre,  Syméon  ayant  fait 
visiter  le  li«u,  de  crainte  de  quelque  surprise,  descen- 
dit de  cheval  et  s'approcha  de  l'empereur.  Les  deux 
princes  s'étant  salués  et  embrassés ,  l'empereur  parla 
ea  ces  termes  :  «  Prince,  j'entends  dire  que  vous  êtes 
«  vraiment  chrétien ,  attaché  d'esprit  et  de  cœur  à  no- 
ce tre  sainte  religion  :  je  vois  cependant  que  vos  actions 
«ne  s'accordent  guère  avec  votre  croyance.  Un  vrai 
ce  chrétien  cherche  la  paix  ;  il  chérit  les  autres  hom- 
«  mes  comme  ses  frères.  Notre  Dieu  est  un  Dieu  de 
(c  paix  ;  il  n'appartient  qu'aux  infidèles ,  comme  aux 
«  animaux  féroces,  de  se  repaître  de  carnage.  Si  donc 
4c  vous  voulez  mériter  le  titre  qui  nous  est  commun , 
(K  et  dont  vous  vous  faites  honneur ,  mettez  6n  à  tant 
<c  de  funestes  guerres;  purifiez  vos  mains  sanglantes, 
a  pour  ne  les  plus  tremper  dans  le  sang  de  mes  sujets; 
«c  épargnez  celui  des  vôtres,  et  faisons  une  paix  dura- 
«  ble.  Vous  êtes  homme,  et  vous  attendez  comme  nous 
«  une  autre  vie  ;  peut-être  notre  corps  ne  sera-t-il  de- 
«t  main  qu'une  vile  poussière,  mais  qui  se  ranimera  un 
ce  jour  pour  subir  le  sort  qu'aura  mérité  notre  ame  îm- 
«  mortelle.  Une  fièvre  peut  nous  faire  tomber  le  scep- 
«  tre  des  mains.  Placez-vous  devant  le  tribunal  du  sou- 
«  veraisr  juge  :  couvert  du  sang  de  tatit  de  peuples ,  de 
«  quel  œil  l'envisagerez-vous  ?  Comment  vous  justiBerex-' 

a8. 


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436  UlSTOmE    DU   BAS-EMPUIE.  (Aa  gafi.) 

«r  VOUS  d'avoir  ôlbè  la  vie  k  tant  de  ses  créatures?  Si 
«  c'est  l'amour  des  trésors  qui  vous  rend  inhumain, 
«  retenez  votre  bras ,  je  satisferai  vos  désirs.  Je  ne  croi- 
«  rai  jamais  payer  trop  cher  une  paix  qui  sauvera  les 
«  peuples,  qui  conservera  les  enfants  aux  pères,  aux 
(c  femmes  leurs  époux,  à  vous-même  vos  sujets,  la 
Cl  tranquillité  de  la  vie  et  le  calme  de  la  conscience.» 
Syméon,  touché  de  ces  paroles,  consentit  à  la  paix.  Il 
n'était  plus  question  que  d'en  dresser  les  articles.  Cette 
négopiation  fut,  remise  à  la  prudence  d€» .  plénipoten- 
tiaires qui  seraient  nommés  par  les  deux  princes.  Ils 
s'embrassèrent  avec  tendresse,  et  dans  leurs  adieux  mu- 
tuels, Tempereur  combla  Syméon  de  magnifiques  pré- 
sents. Le  roi  bulgare, de  retour  dans  son  camp,  assem- 
bla son  conseil ,  et  fit  l'éloge  de  La  sagesse  et  de  la 
modération  de  l'empereur.  Peu  de  jours  après,  il  re» 
prit  la  route  de  ses  états. 

Constantin  Porphyrogénète,  seul  empereur  légitime^ 
desfiude  voyait  déjà  au-dessus  de  lui  Romaiu  et  son  fils  aîné 
c^r"*6a4  Christophe.  Son  caractère  doux  et  timide  souffrait  avec 
^^*£  ^®'»  patience  cet  indigne  abaissefment.  Quelques  auteurs  di- 
Zon.  t.  a,  p.  sent  même  que  le  mépris  de  Romain  allait  jusqu'à  lut 
Manaâ.p.  refuscc  Ic  traitement  nécessaire ,  et  que  ce  prince,  ba- 
vitoBMii.  bile  dans  les  arts  et  surtout  dans  la  peinture,  était 
ïiicert°*con.  quclqucfois  réduit  à  vendre  les  amusements  de  son  loi- 
**"•  ^^5  *^^*  sir  pour  subvenir  à  ses  besoins.  L'ambition  de  Romain 
Sym.  p.  485.  ne  Se  trouva  pas  encore  satisfaite.  Il  donna  dans  la 

Georg.  p«  . 

58i.       suite  la  qualité  d'Augustes  à  ses  deux  autres  fils,  Etienne 

Sigeb-Chr.  ^  .  .,    ,  -file 

Ducange,    ct  Constautin, .et  il  leur  associa  encore  Romam,  «'* 
^"'ûr'  ^'  aîné  de  Christophe,  Tous  ces  nouveaux  Augustes  pri- 
rent le  pas  sur  Porphyrogénète,  Romain. avait  un  <{^' 
trième  fils,  nommé  Théophylacte  :  comme  il  le  à&ti- 


XL. 

Elévation 


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(An  gtô.)  LIVRE  LXXIIf.  ROMAIN.  4^7 

nait  à  remplir  le  $iége  de  Constantinople ,  il  Tavait  fait 
tonsurer  dès  rênfence  par  le  patriarche  Nicolas,  qui; 
peu  aprèsylui  donna  le  sous-diaconat  et  le  fît  son  syn- 
celle. 

Les  auteurs  arabes  parlent  d'une    entreprise  que  „  w^-. 

*  ,  *■  *         Entreprise 

Romain  fit  vers  ce  temps-là  sur  l'Egypte,  et  dont  la  »urrÉgypto. 
certitude  n'est  appuyée  que  sur  leur  témoignage  :  les  ^^•<^»"- 
historiens  grecs  n'en  font  aucune  mention.  Elmacin 
raconte  que  les  gardes  des  embouchures  du  Nil  prirent 
une  frégate  légère,  où  se  trouva  un  homme  magnifi- 
quement vêtu.  On  l'interrogea,  il  avoua  qu'il  était  es- 
pion ,  et  que  l'empereur  devait  envoyer  en  Egypte  miHe 
barques  armées  en  guerre.  Sur  ce  rapport,  l'émir  d'E- 
gypte se  hâta  de  se  mettre  en  défense.  Il  garnit'  de 
vaisseaux  toute  la  cote-  entre.  Alexandrie  et  Damîette: 
il  fit  dresser  dés  tours  mobiles  sur  des  roues  de  fer. 
Pendant  qu'on  travaillait  à  cet  ouvrage,  la  tempête 
jeta  sur  les  côtes  un  vaisseau  grec,  d'où  sortirent  deux 
hommes,  qui  déclarèrent  qu'un  an  auparavant  l'empe- 
reur avait  envoyé  en  Egypte  un  de  ses  parents ,  pour 
reconnaître  l'état  du  pays.  On  ne  douta  pas  que  ce  rie 
fût  celui  qu'on  avait  trouvé  dans  la  ftégate.  Le  bruit 
courut  que  la  flotte  grecque,  étant  en  mer,  avait  été  at- 
taquée d'une  violente  tempête;  que  trois  cents  barques 
avaient  péri  avec  tout  leur  équipage,  et  que  les  autres 
étaient  retournées  à  Gonstantinople.  Les  Musulmans 
continuaient -leurs  préparatifs  ;•  mais  un  vent  impé- 
tueux ayant  tout  détruit ,  ils  reçurent  de  k  Syrie  d'as- 
sez puissants  secours  pour  ôter  aux  Grecs  toute  espé- 
rance de  faire  aucun  progrès  eif. Egypte.  '        ■ 

Ce  fut  aussi  dans  ce  temps-»là  ^ue  Zacharie",  prince      xlu. 
des  Serves,  protégé  par  Tempereur,  fit  la  guerre  aux  Romain  et 


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438  HISTOUIB  DU    BAS-EMPIEK.  {U9Â) 

éê  Synéon  Bulgarcs.  Voicî  quelle  en  fiit  roocasîon.  Sous  le  règne 

Tu'sSîî!  de  Léon ,  Pierre,  roi  de  Servie,  allié  de  Syméon,  fui 
Cmut     soupçonné  d'entretenir  des  intelligences  secrètes  avec 

adm^mp.  c.  les  Grecs.  Le  roi  bulgare  envoya  une  armée  dans  ses 
D«f»^6,   états.  Pierre  fut  pris  et  conduit  eu  Bulgarie ,  où  il  mou- 

^,J^*;  rut  en  prison.  Paul  lui  ayant  succédé  par  la  faveur  de 
Syméon,  Romain  lui  suscita  un  rival.  C'était  Zacharie, 
qui  avait  sur  la  couronne  des  droîu  légitimes^  étant 
issu  de  la  brauche  aînée  des  rois  de  Servie.  Ce  prince, 
chassé  de  son  pays ,  avait  trouvé  asile  auprès  de  Ro- 
main, qui  lui  fournit  des  troupes  pour  se  rétablir.  Mais 
Paul  le  défit,  et  l'envoya  prisonnier  en  Bulgarie.  Trois 
ans  après  les  intérêts  changèrent.  La  guerre  s'étant 
élevée  eatre  Paul  et  Syméon,  Zacharie,  soutenu  par 
^  les  Bulgares  aussi  bien  que  par  les  Grecs ,  monta  sur 
le  trône ,  et  dans  la  guerre  qui  survint  ensuite  entre 
Romain  et  Syméon,  il  se  déclara  pour  Tempereur, at- 
taqua les  Bulgares  y  les  défit,  et  fit  porter  à  Romain  b 
tête  de  leurs  généraux.  Syméon  irrité  lève  une  grani 
armée,  et  marche  coutre  Zacharie,  qui,  effrayé  d«fl 
si  puissant  armement,  ahacdonne  ses  états  et  s'enfot 
en  Croatie.  Les  Bulgares  font  élire  à  sa  place  Zees- 
thlavc;,  réfugié  chez  eux,  jeuue  prince  de  la  race  royale. 
Mais  ce  n'était  qu'une  feinte  de  leur  part;  leur  dessein 
était  de  s'emparer  du  pays.  En  effet,  ayant  conduit 
Zeesîhlave  sur  la  £rontÂère,  où  se  retidi^nt  en  mêin« 
temps  les  seigneurs  serves  pour  recevqiçileur  roi,  ils  se 
saisirent  et  du  roi  et  des  seigneurs  ;  les  chargèrent* 
chaînes,  et  les  eznmenèrent  en  Bulgarie.  Ils  entrèrent 
ensuite  dans  le  pays,qfi'ils  saccagèrent,  et  dépeuplèf*''^ 
entièrement,  transportant  che?  eux  toUs.les  habilû^*^» 
de  quelque  condition  qu'ils  fussent.  Ils  passèrent  de  w 


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(Au  9^60  LIVR^:  1.3^X111.  ROMAIIT.  439 

en  Croatie ,  pour  y  porter  la  même  désolation.  Mais  ils 
y  furent  eux-mêmes  taillés  en  pièces.  Sept  ans  après, 
Zeesthlave  s'étant  échappé  des  mains  des  Bulgares,  re- 
vint en  Servie,  où  il  ne  trouva  dans  tout  le  pays  que 
cinquante  misérables ,  devenus  presque  sauvages  et  ne . 
vivant  que  de  leur  chasse.  Il  eut  recours  à  l'empereur 
grec,  dont  il  promit  de  se  rendre  vassal,  comme  la- 
vaient été  lés  premiers  cois  de  Servie.  Romain  lui  ac- 
corda du  secours}  il  lui  renvoya  tous  les  Serve3  qui 
s'étaient  réfugiés  en  grand  nombre  dans  l'Empire.  Ceux 
qui  s'étaient  dispersés  dans  les  contrées  voisines,  re- 
vinrent aussi  de  toutes  parts  ;  bientôt  la  Servie  recou- 
vra son  ancienne  population.  Elle  se  maintint  à  l'om- 
bre de  l'Empire,  auquel  elle  demeura  soumise  tant  que 
Romain  régna.  Afais  e^^uite  les  Serves,  ennuyés  de  cette 
dépendance,  se  mirent  en, pleine  liberté. 

Les   Esclavons    cantonnés    dans   le    Péloponnèse      xlhi. 

X   i,T^         .  1  .  .  1  «i  Trouble» 

payaient  a  1  Empire,  depuis  quatre-vingts  ims,  le  triput  dans  le  Pé- 
léger  qui  leur  avait  été  imposé  sous  le  règne  de  Mi-    °p**°°^®«- 
chel  III.  Ils  tentèrent  de  secouer  le  joug,  et  |*efusèrent  Porph.  et 
de  reconnaître  le  gouverneur,  de  fournir^des  troupe^,  *  "'so!^  *"* 
et  de  payer  aucune  redevance,  Crinitès  Ârotras,  en- 
voyé depuis  peu  dans  ce  pays,  eut  ordre  d'employer  la 
force  .pour  les  dompter,  ou  de  les  exterminer.  Il  les  at- 
taqua, brûla  leurs  campagnes,  et  les  poursuivit  sans 
relâche  dans  leurs  retraites,  où  ils  se  défendirent  pen- 
dant huit  mois.  Enfin,  réduits  à  l'extrémité,  ilt^.  se  Sou- 
mirent et  demandèrent  grâce.  On  leur  pardonna,  leur 
révolte  ;  mais  on  augmenta  les  impots  dont  ils  étaient 
chargé^.  Ce  peuple  misérable ,  hors  d'état  de  payer  ce 
qu'on  exigeait,  implora  la  clémence  de  l'empereur, 
qui  voulut  bien  remettre  ce  qui  avait  été  imposé  dé 
nouveau. 


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44o  HISTOIRE   DU   BAS-EMHRE.  (Aa  916.) 

xuT.  Ceux  qu'on  nomme  aujourd'hui  Malnotes,  et  qui 

i^^tet.  habitent  ce  même  pays,  ne  descendent  point  de  ces  £5* 
clayons,  qui  étaient  distingués  en  Milinges  et  Ézérites, 
comme  je  Tai  dit  ailleurs.  Selon  Constantin  Porphy- 
•rogénète,  les  MaînQtes  sont  un  reste  des  anciens  Grecs, 
qui  ne  se  sont  jamais  mêlés  avec  les  nouvelles  peu- 
plades. Opiniâtrement  attachés  à  l'idolâtrie,  ils  s'étaient 
cantonnés  avec  leurs  idoles  dans  les  défilés  du  mont 
Taygète,  et  n'ont  reçu  le  baptême  que  sous  le  règne 
de  Basile-le-Macédonien.  Leur  pays  est  sans  eau,  inac- 
cessible, fertile  seulement  en  oliviers.  Ils  tirenjt  leur 
nom  de  la  ville  de  Maîoa,  et  c'est  la  plus  ancienne 
mention  que  je  trouve  de  cette  ville  sous  ce  nom.  Elle 
se  nommait  auparavant  Messa,  entre  le  mont  Taygète 
et  le  golfe  de  Coron ,  vers  la  "pointe  du  cap  de  Té- 
nare.  Soumis  à  l'Empire,  ils  recevaient  du  coniman- 
dant  de  la  province  un  gouverneur  particulier,  el 
payaient  un  tribut  anûuel  de  quatre  cents  pièces  d'or. 
Ce  peuple,  autrefois  séparé  de  ses  voisins,  l'est  encore 
aujourd'hui.  Environné  de  la  puissance  ottomane,  mak 
défendu  par  Tâpreté  de  ses  montagnes,  et  par  la  féro- 
cité de  son  caractère,  il  forme  une  république  indé- 
pendante. 
3t^^.  Romain  se  croyait  affermi  sur  le  trône ,  depuis  qu'il 

^TJeIS*ir  y  ^^^^^  placé  sa  famille.  Environné  de  trois  empereurs, 
ministre.    \\  semblait  être  hors  d'atteinte.  Cependant  peu  de  jours 
*  625.     '  après,  dans  le  même  mois  d'octobre,  il  courut  risque 
î^cCTt.' f^;  d'être  renversé  par  une  conjuration.  Jean,  ministre 
Syin.^  486!  ^'^^^*  >  avait  épousé  la  fille  du  patrice  Come ,  inten- 
58**^^8^    dant  des  postes  de  l'Empire.  Corne,  désirant  ardem- 
ment de  voir  sa  fille  impératrice ,  aiguillonna  l'ambi- 
tion de  son  g'endre.  Constantin,  grand  maître-d'hôtel. 


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(Angae.)  LIVRE   LXXlIf.  ROMÀm.  44  ^ 

entra  dans  ce  complot.  Mais  leurs  démarches,  quelque 
secrètes  qu'elles  fussent,  donnèrent  du  soupçon  à  des 
courtisans ,  jaloux  peut-être  de  n'avoir  pas  été  admis 
dans  cette  intrigue.  Ils  accusèrent  le  ministre,  qui  eut 
ordre  de  sortir  du  palais,  mais  avec  permission  d'y 
entrer,  et  d'approchei*  du  prince,  pour  lui  faire  part  de 
ses  conseils  dans  les  affaires  du  gouvernement.  Rdmain 
étak  attaché  à  ce  ministre  complaisant  et  flatteur  ;  il 
ne  pduvait  se  persuader  qu'il  fût  coupaSle. Mais  enfin, 
pressé  par  les  accusateurs,  qui  n'oublièrent  rien  pour 
constater  le  crime,  il  fit  de  sérieuses  recherches,  et 
reconnut  que  le  fait  n'était  que  trop  véritable.  Il  or- 
donna d'arrêter  Jean  et  de  lui  faire  son  procès.  Jean 
prévint  l'exécution  de  cet  ordre  en  se  sauvant  dans  un 
monastère,  où  il  prit  l'habit  de  moine.  C'était, suivant 
l'usage  de  ce  temps -'là,  une  sauvegarde  inviolable. 
Constantin  se  mit  à  couvert  par  le  même  moyen.  Le 
ehâtiment  ne  tomba  que  sur  Côme,  qui  fut  traité  avec 
plus  de  douceur  qu'il  ne  méritait.  Il  fut  dépouillé  de 
sa  charge  et  battu  de  verges.  Il  arriva  dans  le  même 
temps,  en  Lydie,  un  furieux  tremblement  de  terre  qui 
fit  ouvrir  un  large  abîme,  où  furent  engloutis  des  églises 
et  des  villages  entiers  avec  leurs  habitants. 

La  défaite  de  Syméon  en  Croatie  lui  causa  un  môrtei  Ah  937. 
chagrin,  qui  le  conduisit  au  tombeau  le  1*7  mai  de  l'an-  ^^^^^ 
née  suivante  027.  Il  eut  pour  successeur  Pierre,  un  de    Syméon. 

iîl      T  *>  •       J     c        '  •.  '  Cedr.p.6a5. 

ses  fais.  Le  caractère  guerrier  de  Symeon  avait  procure  Léo,  p.  5oa. 
beaucoup  de  gloire  aux  Bulgares;  mais  leurs  succès  ^^^^ig^*' ^* 
leur  avaient  coûté  des  fleuves  de  sang;  et  l'on  peut  dire  ^^^*3^i*.^***** 
que  la  Bulgarie  était  ruinée  à  force  de  victoires.  La  J^"*^'**  ^^^ 
'mort  de  Syméon  mit  en  mouvement  les  Croates,  les  Sym.p.486» 
Hongrois,  et  tous  les  Barbares  du  voisinage;  Tous  se   Oçorg.  p. 


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44^  UISTOIHB   DV  BÀ3-BftIPXR£.  (Aa  pi) 

litttpr.  hitt.  préparaient  à  écraser  un  jeune  prince  qui,  outre  la&i- 
idL'^V  blesse  de  son  âge  et  répui^ement  de  ses  forces,  voyait 
Pagi^âdBar.  cncorc  SCS  Élats  désolés  par  la  famine ,  et  ravagés  par 
des  nuées  de  sauterelles  qui  dévoraient  l'espérance  des 
moissons.  De  tant  d'ennemis  prêts  à  fondre  sur  la  Bul- 
garie, les  Grecs  ^ient  les  plus  redoutés,  La  mort  du 
défunt  roi  avait  rompu  la  négociation  entamée  pour 
la  paix ,  et  Ion  savait  que  Romain  se  disposait  à  se 
venger  sur  le  fils  des  maux  que  le  père  avait  £iits  à 
l'Empire. 
xLvn.  Le  conseil  des  Bulgares  fut  d'avis  de  se  montrer 

*^ro?*^des^"  prêt  à  faire  la  guerre,  pour*trouver  les  Grecs  plus  dis- 
«TO  u"^  P®*^^  ^  '^^^^  '*  P^*'^*  Piterre  fit  marcher  une  armée  eo 
tiie-fiUede  Macédoiue,  et  envoya  en  même  temps  à  Constanti- 
nople  deux  seigneurs, avec  un  pioine  arménien  noiDfflfi 
Calocyr,  adroit  négociateur  ;  le  roi  bulgare  déclarait 
à  l'empereur  ^'il  était  en  état  de  soutenir  laguerrCj 
mais  qu'il  ne  tiendrait  qu'à  Bomain  que  les  deux 
nations  véciment  en  paix;  que  pour  la  rendre  mêi» 
plus  assurée,  il  était  disposé  à  s'unir  à  F  Empire  fOf 
un  mariage  y  si  Von  ne  dédaignait  pas  son  alUanct' 
L'empereur,  qui  avait  alors  besoin  de  toutes  ses  force» 
contre  les  Sarrasin^ ^'écouta  c/atte,  proposition.  U  ^^ 
voya  sur-le-champ  à  Mésembrie  le  moine  Tbéodose 
Abucès,  et  Constantin,  clerc  du  palais. i  pour  entrer 
en  négociation.  Comme  de  part  et  d'autre  on  désirai 
sincèrement  la  paix,  elle  ne  fut  pas  longrtemps  a  ^' 
dure.  Les  envoyés  grecs  furçnt  accompagnés  a  1^ 
retour  de  neuf  seigi>eurs  bulgares.  Les  articks  »^' 
tés  dans  la  conférence  furent  acceptés  de  remp^***""' 
et  les  députés,  cherchant  dans  la  femille  impéria'^  "/** 
alliance  pour,  leur  roi ,  fixèrent  leur  choix  sur  Mari , 


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(An  1^7.)  LIVRE    LXXIII.  ROMAIIT.      *  44^ 

fille  de  Christophe  et  petite-fille  de  Romain.  La  beauté 
de  cette  princesse  leur  répondait  du  consentement  de 
laur  prince  ;  ils  le  prièrent  de  se  rendre  en  personne 
à  Constantinople.  L'empereur  envoya  au-devant  de  lui 
Nicét^s  son  parent,  maître  du  palais,  pour  Tamener 
avec  honneur  à  la  cour.  Il  alla  lui-même  le  recevoir 
à  la  porte  de  Blaquernes,  et  lembrassa  tendrement  à 
soa  an-ivée.  Après  un  moment  d'entretien,  on  pré- 
senta la  princesse  à  son  futur  époux;  Théophane, 
grand-maître  de  la  garde-robe ,  dressa  les  articles ,  et 
le  traité  de  paix  fut  signé  en  même  temps  que  le  con- 
trat do  mariage ,  le  8  octobre.  Le  patriarche  Etienne 
donna  aux  deux  époux  la  bénédiction  nuptiale  dans 
l'église  de  Sainte-Marie  de  la  Fontaine.  On  les  con- 
duisit ensuite  dans  la  ville,  où  les  noces  furent  célé- 
brées avec  magnificence.  Trois  jours  après  la  prin-^ 
cesse,  partant  avec  son  mari ,  fut  conduite  par  son 
père,  sa  mère,  et  toute  la  cour,  jusqu'à  lllebdome; 
les  adieux  furent,  de  part  et  d'autre,  touchants  et  pleins 
de  tendresse.  Marie  prit  le  nom  d'Irène.  Plusieurs  au- 
teurs rapportent  que  ce  fut  à  l'occasion  de  ce  mariage 
que  Christophe  et  ses  fils  prirent  le  pas  sur  Constan- 
tin. Le&  Bulgares,  disent-ils,  le  demandèrent  ainsi 
pour  faire  honneur  à  leur  reine,  et  Romain,  peàt-être 
auteur  secret  dé  cette  demandé^  ne  se  fit  pas  long-temps 
prier  pour  l'accorder. 

La  révolte  de  Boïlas  avait  été  un  signal  de  guerre     xlvui. 
pour  les  Sarrasins  de  Malatia.   Ils  recommencèretit  prise* pa/iea 
leurs  ravages  sur  les  frontières  de  l'Empire.  Mais  ils      ^'^*®** 
trouvèrent  dans  Curcuas ,  qui  commandait  en  Orienft  j    eaVêa?. 
un  ennemi  invincible.  Ce  général  vaillant,  habile,  in-  incert.  con- 
fàtigable,  les  battit  en  toute  occasion.  Toujours  les  ^'  ^is,   ^' 


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444  *       HISTOIRE   DU   BA.S-EBCPIRE.  (An  997.; 

Sym.p.487.  annes  à  la  main,  U  portait  le  fer  et  le  feu  jusqn'aui 
m7ssï^   bords  de  l'Euphrate,  ruinait  les  campagnes,  détruisail 
Sttifedli.   '®*  villages  et  les  villes ,  massacrait  ou  faisait  «sclaveî 
Pagi  ad  Bar.  hommes ,  fnnmes ,  enfants.  Après  avoir  &it  un  déserl 
de  toute  la  contrée,  il  mit  le  siège  devant  Malatia,  la 
capitale  du  pays  et  la  plus  forte  place  des  Sarrasins. 
Ses  attaques,  poussées  avec  vigueur,  réduisirent  bien- 
tôt  les  assiégés  à  l'extrémité.  Ils  demandèrent  à  capitu- 
ler. L'émir  Abou-hafs,  et  Abou-salath,  le  plus  distingué 
des  habitants,  vinrent  se  jeter  à  ses  pieds.  Ils  allèrent 
par  son  ordre  à  Constantinople, implorer  la  clémence 
de  l'empereur;  ils  en  obtinrent  un  traité  de  paie, par 
lequel  ils  s'obligeaient  à  se.  détacher  du  calife,  et  a 
servir  l'Empire  contre  les  Sarrasins  mêmes.  Ils  tinrent 
fidèlement  parole;  ils  secondèrent  Curcuas  dans  toutes 
ses  entreprises;  et  c'était  pour  les  Grecs  un  spectacle 
aussi  étonnant  que  flatteur,  de  voir  deux  Sarrasins 
entrer  dans  Constantinople ,  à  la  tête  d'une  troupe  de 
leurs  compatriotes  qu'il  amenaient  ppisonniers,  comme 
on  se  sert  de  certains  animaux  apprivoisés  pour  pren- 
dre et  dompter  ceux  de  leur  espèce.  Mais  les  deox 
Sarrasins  étant  morts  en  984  9  Malatia  secoua  le  joug 
des  Grecs  et  se  rendit  à  ses  anciens  maîtres.  Curcu^ 
aidé  de  Mélias ,  ce  préfet  de  Lycande  dont  j'ai  par'^» 
assiégea  de  nouveau  la  ville,  la  prit  de  force,  et  la  rasa. 
Il  ne  traita  pas  avec  moins  de  rigueur  les  autres  places 
de  cette  contrée.  Toute  la  petite  Arménie  fut  réduite 
en  province.  Ce  pays  fertile  et  abondant,  joint  a  » 
préfecture  de  Lycande,  fut  pour  le  trésor  de  l'emp^ 
reur  une  nouvelle  source  de  ricliesses;  et  ÏEnphr»^^^ 
qui  depuis  long-temps  ne  voyait  que  des  Musuto*"*^ 
sur  ses  bords,  recommença  de  couler  sous  les  lois 


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(An  937)  BIYRE  LXXIÎX.  ROMAIN.  44 ^ 

r£mpire  ^  dans  une  partie  considérable  de  son  cours. 

Ce  n'était  pas  sans  peine  que  les  Grecs  conservaient     .^î-?- 
ce  qu'ils  possédaient  encore  en  Italie.  Attaqués  par  les     d'itaUc. 
princes  lombards,  ils  avaient,  sans  cesse  les  armes  à  la  Lup!"chroi! 
main  pour  se  maintenir  en  Apulie,  où  ils  étaient  maî-  ^\°y*^'  5"** 
1res  de  Bari,  capitale  du  pays.  Hugues,  qui  de  marquis  P«gi«d  Bar. 
de  Provence  était  devenu  roi  d'Italie,  cherchait  à  s'ap-   nai.  d'iui. 
puyer  de  l'alliance  des  puissances  voisines.  Il  députa 
vers  l'empereur  grec  le  père  de  Liutprand ,  ce  célèbre 
évéque  de  Crémone,  qui  fut  lui-même  envoyé  dans  la 
suite.  Entre  d'autres  présents  plus  considérables,  l'am- 
bassadeur amenait  deux  beaux  chiens  de  chasse,  qui, 
effarouchés  de  l'habillement  bizarre  du  prince  grec,  le 
prirent  pour  un  animal  sauvage;  et  aboyant,  grinçant 
Jes  dents,  ils  allaient  sauter  sur  lui  et  le  mettre  en  piè- 
ces ,  s'ils  n'eussent  été  retenus  par  un  grand  nombre 
}e  personnes.  Malgré  cet  incident  ridicule,  Romain  fit 
un  accueil  honorable  à  l'envoyé;  il  lui  sut  gré  surtout 
le  lui  avoir  mis  entre  les  mains  plusieurs  prisonniers; 
^'étaient  des  chefs  d'Esclavons  qui  pillaient  le  terri- 
oire  de  Thessalonique.  Ils  avaient  attaqué  l'ambassa- 
leur  sur  son  passage ,  et  avaient  été  vaincus  et  pris 
ïux-mêmes  par  son  escorte. 

Le  patriarche  Etienne,  après  trois  ans  de  pontificat,    a»  gaS. 
nourut  le  j  8  juillet  928.  Théophy lacté,  destiné  depuis    ^J^^  ^^ 
;on  enfance  à  cette  dignité,  n'étan  t  encore  âgé  que  d'onze  patriarche 
i  douze  ans,  Romain  son  père,  fort  peu  instruit  des  cedr.p.6a7, 
ois  ecclésiastiques,  et  aussi  peu  scrupuleux  sur  leur  j^^^»  ^|9- 
)bservation ,  n'osa  cependant  user  de  sa  puissance  en  fa-  ^«»«  «•  »,  p. 
/eur  d'un  enfant  si  éloigné  de  l'âge  canonique.  Il  sem-   Giyca8,p. 
Die  néanmoins  qu'il  fut  tenté  de  le  faire,  et  qu'il  ba-  incert.  cou- 
ança  long-temps.  Ce  fut  apparemment  la  raison  qui     '  ^éi^   * 


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446  HISTOIRE   DU   BÀS*eBIPIRE.  (An  ^] 

sym.p  487,  retarda  l'élection  du  successeur.  Enfin  le  moine  Tr;-» 
George  p.  phon,  persoDuage  d'une  vertu  recoimue,  fut  ordonné 
^^Onens'  patriarchc  le  i4  décembre.  Tous  les  historiens  grecs 
^a5a  a53'  s'accordeot  à  dire  que  Tryphon  ne  fut  nommé  que  par 
Pagiad  Bar.  intérim ,  jusqu'à  ce  que  le  jeune  prince  fut  plus  avancé 
«celés.  1.55,  en  âge;  ce  qui  supposerait,  dans  ce  prélat  confiden- 
tiaire  et  dans  les  Grecs  qui  l'ont  mis  au  nombre  des 
saints,  un  grand  mépris  ou  une  grande  ignorance  des 
lois  de  l'Église.  Je  croirais  plutôt  que  Tryphon  entra 
de  bonne  foi  dans  le  patriarcat;  mais  que  le  dessein  de 
l'empereur  et  des  prélats  vendus  à  la  cour  qui  le  nom- 
mèrent ^  était,  sans  qu'il  le  sût,  de  le  destituer,  dès 
qu'ils  pourraient  mettre  en  place  Théophylacte  ;  et  cette 
conjecture  s'accorde  avec  l'événement.  Tryphon  goo-i 
vernait  depuis  trois  ans  l'église  de  Constantinople/ 
lorsque  l'empereur,  craignant  apparemment  de  ne  poa- 
voir  aisément  le  faire  sortir  de  place  ,*s'il  l'y  laissait 
plus  long-temps,  eut  recours  à  une  ruse  également  in- 
digne du  prince  qui  l'employa  et  des  prélats  qui  s'y 
prêtèrent.  Théophane,  métropolitain  de  Césarée,  sur- 
nommé le  Porc  à  eause  de  ses  mœurs,  afTectant  de 
prendre  un  vif  intérêt  à  l'honneur  de  Tryphon  ,  l'aver- 
tit qu^on  cherchait  tous  les  moyens  de  le  destituer; 
mais  que,  la  sainteté  de  sa  vie  le  mettant  hors  ^at- 
teinte y  V empereur^  faute  d'autre  prétexte  ^  préten-- 
dait  qu'il  était  ignorant  jusqu'à  ne  savoir  pas  écrire; 
qu*il  lui  était  facile  de  confondre  une  pareille  im^ 
putatiôn^  en  signant  seulement  son  nom  :  ce  que 
Tryphon  fit  sans  difficulté,  au  bas  d'un  papier  que 
Théophane  lui  présenta.  Cette  signature^  ayant  été  por- 
tée à  l'empereur,  il  fit  écrire  au-dessus  un  acte  de  dé-  | 
mission  volontaire,  par  lequel  Tryphon  renonçait  à 


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(An  918.)  LIVRE   LXXni.  ROMAm.  44? 

répiscc^at,  dont  il  se  reconnaissait  indigne.  Cet  acte  si 
facile  à  démentir,  servit  de  fondement  à  un  synode 
composé  d'évêques  de  cour,  pour  prononcer  la  dépo- 
sition de.Tpyphon,  qui  retourna  dans  son  monastère, 
où  il  mourut  peu  après.  Cependant  on  n'osa  encore 
nommer  Théophylacte,  et  le  siège  de  Constantinople 
demeura  vacant  jusqu'au  mois  de  février  gSS. 

Quoique  les  rois  d'Ibérie  fussent  alliés  et  comme       li. 
vassaux  de  l'Empire,  ils  disputaient  néanmoins  aux    Arménie. 
Grecs  la  possession  des  pays  limitrophes.  Sous  le  rè-    p^°h*'ke 
gne  de  Léon,Catacalè  s'était  rendu  maître  de  Théodo-  •^-  »">?•«. 
siopolis  et  de  la  Phasiane,  d'où  il  avait  presque  entiè-    Abuifid*. 
rement  chassé  les  Sarrasins.  Après  le  départ  de  ce 
général,  le  roi  d'Ibérie  s'était  emparé  de  toutes  ces 
places,  et  prétendafit  s'y  maintenir.  Pour  éviter  une 
guerre  avec  ce  prince,  on  convint  que  l'Araxe  ferait 
la  borne  des  deux  états ,  et  on  abandonna  aux  Ibérîens 
tout  le  pays  situé  au  septentrion  de  ce  fleuve.  Les  Sar- 
rasins possédaient  encore  une  partie  du  Vaspouracan, 
aux  environs  du  lac  de  Van  dans  l'ancienne  Arménie. 
Curcuas  y  conduisit  une  grande  armée,  mit  le  siège 
devant  Aklath ,  situé  à  la  pointe  occidentale  du  lac,  et 
força  les  habitants  à  demander  la  paix.  Il  ne  l'accorda 
qu'à  condition  qu'ils  planteraient  la  croix  au  milieu  de 
leur  mosquée  ;  à  quoi  ils  consentirent.  Il  alla  ensuite 
attaquer  Bidlis,  qui  n'en  était  pas  éloignée;  il  y  eut  le 
même  succès  et  en  exigea  la  même  condition. 

L'alliance  contractée  entre  la  famille  impériale  et    ^^  ^^ 
Pierre,  roi  des  Bulgares,  n'avait  pas  étouffe  les  défian-  conj'mtion 
ces  mutuelles;  et  trois  ans  après  le  mariage  de  Marie,   pie^'**^! 
Romain  fit  assez  connaître  ses  mauvaises  intentions,  desBuigare». 
par  la  protection  qu'il  s'empressa  d'accorder  à  un  re-  ^%\S5*'* 


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448  HISTOIRE    DU    BAS-EMPIRE.  (An  ^,) 

Léo, p.  5o5.  belle.  Jean,  frère  de  Pierre,  conspira  contre  ce  prince 
tkTp*  a6o"  avec  plusieurs  seigneurs.  Le  complot  ne  put  demeurer 
^^48*  ^**'  caché.  Jean  fut  fouetté,  renfermé  dans  un  cloître  et 
Georg.  p.  revêtu  de  l'habit  de  moine.  Les  autres  conjurés  mou- 
rurent  dans  les  supplices.  Romain,  pour  s  appuyer  con- 
tre Pierre  du  crédit  d'un  prince  remuant ,  qui  avait 
encore  beaucoup  de  partisans,  envoya  un  moine  à  la 
cour  de  Bulgarie,  sous  prétexte  de  racheter  quelques 
prisonniers,  mais  avec  des  ordres  secrets  d'enlever 
Jean ,  et  de  l'amener  à  Constantinople.  Le  moine  eut 
l'adresse  de  réussir,  Jean  fut  reçil  avec  honneur;  on  lui 
fit  quitter  l'habit  monastique,  qu'il  portait  à  regret; 
on  lui  assigna  de  grands  revenus  en  terres;  l'empereur 
le  maria  avantageusement;  et  Christophe  ne  refusa  pas 
de  faire  les  honneurs  de  la  noce ,  quoique  l'époux  fût 
l'ennemi  de  son  gendre ,  les  intérêts  politiques  ayant 
de  tout  temps  fait  taire  la  voix  de  la  nature.  Il  n'en 
aurait  pas  tant  fallu  pour  faire  venir  Syméon  aux  por- 
tes de  Constantinople.  Mais  son  fils,  d'un  caractère 
doux  et  pacifique,  ne  témoigna  aucun  ressentiment 
Peu  de  temps  après ,  Michel ,  autre  frère  de  Pierre,  pré- 
férant la  pourpre  à  l'habit  de  moine  que  son  père  Sy- 
méon lui  avait  fait  prendre,  se  révolta  contre  son  frère, 
s'empara  d'une  forteresse ,  et  attira  sous  ses  étendards 
un  parti  nombreux.  Mais  il  n'eut  pas  le  temps  d'en 
faire  usage,  étant  mort  au  milieu  de  ses  premiers  mou- 
vements. Les  Bulgares  qui  s'étaient  attachés  à  lui  for- 
mèrent une  assez  grande  armée;  et, n'osant  demeurer 
dans  le  pays ,  ils  se  jetèrent  sur  les  terres  de  l'Empire. 
Ils  traversèrent  la  Macédoine ,  et  pénétrèrent  en  Épire, 
où  ils  s'empfirèrent  de  Nicopolis,  aujourd'hui  PreVèsc- 
la-Yieille.  Ils  s^y  maintinrent  long-temps  contre  les  for- 


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'Z, 


(Aii93(h)  L1VA£   tXKUf.  ROMAIIT.  449 

ces  àa  gouverneur^  de  la  Grèce;  mais  enfin  iU  furent 
réduits  à  se  soumettre. 

Nidétas^  m^tre  du  palais,  avait  rendu  leis  plus  im-    aw  9)1. 
portants  services  à  Romain  pour  l'élever  à  l'Empire,  et    Mort  de 
il  en  était  récompensé.  Sa  fille  Sophie  avait  épousé  Gcdr!p.6a7 
Christophe^  fils  aîné  de  Romain ,  et  déjà  revêtu  de  la  i^^^'f^^ 
qualité  d'empereur;  elle  avait  elle-même  le  titre  d' Au-  ^\^^^' 
guste.  Mais  cet  ambitieux  s'eanuya  de  ne  voir  son  gen-*^  ^d»- 
dre  et  sa  fille  qu'au  second  rang,  et^  pour  les  faire  ré-*  vitaBasU. 
gner,  il  résolut  dé  détrôner  le  père.  Le  secret  fut  trahi  locert/  co». 
par  uo  des  complices,  comme  il  arrive  presque  tou«  ^tMqq.^ 
jours;  Kicétas  fut  rasé, banni  et  enfermé  dans  un  mo-  ^^"^j^'**^ 
nastàre*  On  ne  dit  pas  que  Christophe  eût  aucune  ^'%^' 
part  à  ^  complot,  ni  même  qu'il  en  eût  connaissance;   ^^^^' 
et  la  douleur  extrême  que  témoigna  Romain  peu  de   fâm.  sy: 
temps  a{Hrè^  lorsque  la  mort  lui  enleva  ce  fils,  sem-* 
ble  justifier  pleinement  Christophe ,  à  moins  que  ces 
larmes  ne  fussent,  comme  il  n'est  par  rare  à  la  cpur, 
des  larmes  de  théâtre.  Sophie  perdit ,  avec  son  mari, 
toirte  la  considération  qu'eltè  avait  eue,  et  fut  même 
obligée  dé  sortir  du  palais.  Christophe  avait  eu.  deux 
fik  et  une  fille  :  Rornais ,  qui  avait  aussi  reçu  le  titre 
d'Auguste,  et  qui  mourut  avant  lui  ;  et  Michel  qui, 
sans  être  honoré  du  même  titre,  avait  le  privilège  de 
porter  la  robe  impériale  et  la  chaussure  de  pourpre.  Il 
fui  HM»  au  nombre  des  clercs  après  la  disgrâce  de  se^ 
ondesw  La  fille,  Marie,  nommée  aussi  Itène,  avait 
èpsknm  Pierre ,  roi  des  Bulgases,  et,  pour  empêcher  la 
rupture  entre  les  deux  princes,  elle  faisait  de  fréquents 
Yoyages  à  Constahtinople.  Après  la  mort  de  son  père 
Christophe ,  elle  vint  rendre  visite  à  Bomain  son  grand- 
père  ,  et  lui  amena  ses  trois  enfants.  Elle  fut  reçue 

Tonu!  XIIL  ^9 


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Flei 
cc<:l 


45Ô  HISTOIRE    DU   BAS^KMMKE.  (An  gS^) 

avec  tendresse,  et  s'en  retourtia  chargée  de  présents. 
Ah  933.         Romain  se  consola  de  la  mort  de  son  fils  par  Téclat 
ThéopW-   ^*^^^  brillante  céréitionie.  Il  éts^it  ^  contraire  à  la  dis- 
teiiJcE^    cipline  de  l'Église  dé  charger  du  n^inîslère  épiscopal 
Cedr.p.d36i  un  jeune  homme  de  seize  ans,  que  l'empereur, pour 
Léo,  p.^5o6.  autoriser  une  nouTcauté  si  rëvoUante,  voulut,  nàalgré 
*"'i94**  ^  ïà  jalousie  ordinaire  de  l'église  de  Coustantînople,  s'ap- 
'<ay^»,'p?**P^y^'*  ^^  suffrage  dii  pape.  Albéric>  alors  maître  de 
inci^'con-  ^^™^  y  obligea  le  pape  Jedn  XI  sôri  frère ,  qu'il  tenait 
tm.  p.  961,  en  prison  ^  de  satisfaire  l'empereur.  Jean  envc^à  donc 
S7tt.p.4S9,  à  Gôiistantinpple  des  légats,  qui  ngn^seulement  ap*- 
Geo^.' p.   poHèreut  Tapprobatiot]^  du  pape,  mais  qui  placèreal 
Lin^r.iegat.  eux-mêmes  le  jeune  prélat  4ans  )a  dbaipe  patriarcale^ 
"^ntSige?  I«  ^  février  933.  Son  père,  qui  lui  confî^iit  le  gouver- 
**>'"',4'^    nemént  d'un  grand  diocèse»  ne  jugeft  pas  cep^idant 
•"T'**j»'-  à  propos  de  l'abandonner  lui-mémç  à  sa  propre  con- 
art.  5i.     duite;  et  c'était  une  chose  bien  étrange,  dp  voir  tm  pa- 
chmt.  1. 1,  triaréhe  de  Gônstantîneple  sous  la  diret^ion  d^ua  gou<* 
P-  *    '  ^  *•  verneur.  On  eut  à  se  cepentir  de  ne  Favbir-pas  laissé 
en  cet  état  toute  sa  vie.  Tant  qu'il  fut  guidé  par  une 
main  étrangère,  il  ne  s'écarta  piMS  de  là  modestie  con* 
vénable  à  sa  dignité.  Mais. dès  qu'il  fut  niaîtne  de  ses 
démarches,  il  ne  justifia  que  *tmp  la  sagesse  des  Lois 
canoniques,  qui  <»nt  fité  Fâge  auquel  il  est.pennis  de 
monter  aut  divers  degr^és  de  la  hiérarchie;!  Il  ne.  con» 
nut  plus  de  règle,  et  sf»  liviu'sand> piideisr à > toutes  ses 
passions.  It^méprisait  les  fonctions  de  sdh  minietère. 
Maître  des  dispet)ses^  il  <sf^'^bufvoir  -se  dispenser  kn* 
même  des  Ibis  de  l'Évangile  et  de  toiite4éoénce«  L'his- 
toire avertit  qu'elle  reugî^it'i^  raoMÉter  ee  qu'il  ne 
rougissait  pas  de  faire.  Il  fournissait  aux  dépeoses  de 
ses  débauches  par  )è  trafic  des  évéchés-  et  des  autres 


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(Aa^0330  LIVRE   LXXIU«  ROMAm.  45 J 

places  ecclésiastiques^  qu'il  veadàit  au  plus  offmnt.  Il 
porta  jusque  dans  le  sanctuaire  le  goût  de  la  dissipa^^ 
tion  et  du  plaisir;  et  .pour  égayer  la  serieme  dignité 
des  cérémonies  de  TÉgiise,  il  introduisit  dans  les  of«- 
fices  publics  les. plus  solennels,  des  danses,  des  diVer* 
tissements,  des  clameurs  iû sensées,  des  chansons  pro- 
&nes  et  même  déshonnetes  ^  qui.,  thêlées  au  châtit  des 
hymnes^  altiaient  le  cùke'dti  diable  airee  ceiiri  dé  fo 
ilnajesté  divine.  Un  aaite^r  qui  vivait  cent;  eityquatite 
ahs  après  observe  que  cet  usage  ntotistrubux  m'était  pat 
encore  aboli' dé  sdn  temps%  On  peut  croire  que  c'est  dd 
là  qu'41  ^est  répandu  jusquW  Oocident^  eèi  une  igno»* 
rance  lilcencieùâe;a  in£^rntemi  dans  quelques  diocèses^ 
pendant  des  siècles  entiers ,  un  abus  aussi  soandaieuk 
qkie  ridicule,  nal^fé  toutes  le»  censures  eodlésiaitiqtiei. 
Les  chèvdux  étaient  k  parision  dominamted^'ïtUéopiiy'^ 
laotcr  On  lui  en  èotnpt^it  plus  de  deux  mille  i  «es  éeu«> 
ries  einportaitat  tous-jnes  feoins;  c'était  poùn  l^i  la^pçr^ 
tîonia  plus  chérie  de  son  diocèse.. Insensible  auX'mi^ 
sères  des  pauvres^  il  nourrissait  ses  chëvaux.à  grands 
frais  des  fruits  les  piu«  exquis^  et  n'épnrgnaît  pour 
MK  ni  les  liqueura  les  pkis  recherchées,  ni  les  parfums 
les  plus  précieux.  On  rapporta  qu'un  jour  de  Jeudis- 
Saint,  tandis  qu'il  célébrait  la  messe,  on  vint  lui  an^ 
aoncei*  que  sa  phis  belle  jument  ^  qu'on  lui  norpma> 
venait  de  mettre  bas.  L'impatience  que  lui  causa  une 
Uouvelle  si  intéi^esaante  lui  fit  achever  Je  saint  sacri* 
fice  avec  une:  indécente  précipitation  ;  il  jette  aussitôt 
ses  habits  pontificaux  ^.  court  à  son  édurie.pbur  voir  le 
poulain;  et  iqb  ne  fut  opi'afïràs  rajYoip'eoiiteit}plé  àison 
eHè^  qu'il  revint  à  Saint^Sophie  ad^ever  Tèffiee.  Noufc 
vercons^dans  la  suiteque  c^e  fcénésaelui  causa  la  mort. 

^9- 


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45a  HISTOIIIK    DU    BAS*EMPIR£.  (An  g33.) 

L'empereur  son  père ,  taut  vicieux  qu'il  était ,  eût 
^RomAin.    ^é  un  meilleur  évéque.  Dévoré  d'ambition  et  passionné 
Cedr.p.6a7,  pour  les  femmes  ^  du  moins  rougissait-il  de  ses  vices. 
Léo,  p.  5o4,  Il  aimait  Fargent ,  mais  la  compassion  pour  les  misé- 
Zon.V  a,  p.  râbles  était  plus  fprte  en  lui  que  l'avarice.  A.u  jour  de 
Giyc! i^3oi.  Noël  gSa  commença  un  hiver  si   rigoureux ,  que  la 
^ti^t'l'.  aS'  *®^^*  ^"^  couverte  de  neige  et  de  glace  pendant  quatre 
s  m  **??8«.  ™^**  entiei^s.  La  peste,  la  famine,  deux  fléaux  qui  se 
489*      succédait  presque  toujours  quand  ils  ne  vont  pas  en- 
585  et  ^q.  semble  »  firent  encore  un  ravage  affreux;  et  afin  de 
compléter  le  nombre  des  maux  que  le  ciel  envoie  dans 
sa  colère,  un  incendie  consuma  une  partie  de  Constan- 
tinople ,  et  une  pierre  énorme ,  détachée  de  la  voûte 
d'un  des  marchés  de  la  ville ,  écrasa  soixante  personnes. 
Tant  de  calamités  accumulées  remplirent  la  ville  àe 
j|  misérables,  et  firent  connaître  la  charité  de  Tempe* 

reur.  Les  hôpitaux  étant  remplis,  il  fit  fermer  les  por- 
tiques de  cloisons,  pour  y  loger  les  malades.  De  dis* 
tance  en  dislance,  en  dehors,  on  posa  des  boîtes  fermées, 
mais  percées  d'une  ouverture  pour  recevoir  les  aumô- 
nes, et  c'est  le  premier  ex^nplë  que  je  trouve  des 
troncs,  qui  ne  furent  connus  en  France  et  placés  daift 
nos  églises  que  trois  cents  ans  après,  sous  le  pontificat 
d'Innocent  III.  Il  tirait  de  son  trésor  les  charités  les 
plus  abondantes  :  il  lui  en  coûtait  tous  les  mois  cin- 
quante mille  écus  de  notre  monnaie,  pour  secourir  tant 
les  malades  que  les  autres  pauvres  de  sa  capitale.  Il 
faisait  tous  les  jours  manger  à  sa  table  trois  pauvres, 
auxquels  il  distribuait  encore  une  aumône  ;  le  mercredi 
et  le  vendredi  c'étaient  trois  moines.  On  faisait  une 
lecture  édifiante  pendant  le  repas.  Après  ce  temps  d'in- 
fortune, dont  ses  libéralités  adoucirent  la  rigueur,  il 


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(An  933.)  LiVHE    LXXIII.  liOMAllf.  4^3 

ne  cessa  le  reste  de  sa  vie  d'einpl#yer  une  partie  de 
ses  trésors  aU  soulagement  des  malheureux,  à  la  dé- 
coration des  églises ,  et  à  l'entretien  des  monastères.  Il 
respectait  les  moines  dont  il  connaissait  la  vertu,  et 
loin  de  s'offenser  de  leur  liberté  à  le  reprendre  de  ses 
desordres,  il  écoutait  leurs  remontrances  avec  douceur, 
avouait  ses  fautes  et  versait  des  larmes,  mais  sans  se 
corriger.  Le  moine  Basile  lui  ayant  un  jour  reproché 
en  face  qu'il  se  déshonorait  lui-^même,  et  qu'il  attirait 
sur  lui  et  sur  ses  états  la  colère  de  Dieu ,  en  corrom- 
pant les  filles  de  ses  sujets  .^  il  reçut  cette  correction 
avec  une  humble  confusion,  et  voulut  même  la  payei* 
d'une  somme  d'or  que  le  saint  refusa.  La  misère  des 
temps  avait  ruiné  quantité  de  familles,  et  la  somme 
de  l'argent  emprunté  par  des  débiteurs  insolvables 
dans  la  ville  de  Constantinople ,  montait  à  trois  mil- 
lions de  nos  livres.  Il  s'en  chargea,  et  après  avoir  sa- 
tisfait les  créanciers ,  il  fit  brûler  au  miUeu  d'une  place 
toutes  les  obligations.  Il  paya  de  plus  le  loyer  dû  pour 
les  habitations.  Il  fit  rebâtir  ou  réparer  plusieurs  villes 
de  Thrace  et  de^Macédoine  ruinées  par  les  Barbares. 
Constantinople  vit  par  ses  ordres  élever  plusieurs  pa-* 
lais,  planter  des  jardins  déKcieux  :  mais  elle  lui  sut 
encore  plus  de  gré  d'ouvrir  des  asiles  à  la  misère,  à 
la  vieillesse  et  aux.  maladies.  Compatissant  aux  mal- 
heurs des  exilés ,  il  ne  les  perdait  pas  de  vue  ;  il  était 
attentif  à  s'informer  de  leur  état,  à  les  secourir  dans 
Ifeur  indigence,  aussi  empressé  à  les  rappeler,  qu'eux* 
mêmes  à  revoir  leur  patrie;  et  lorsqu'il' fut  détrôné,  il 
n'y  avait  personne  en  exil.  Quoique  ce  prmce  eût 
usurpé  l'Empire,  et  qu'il  fut  libéral  d'un  bien  qui  ne 
lui  appartenait  pas  légitimement,  ii  a  cependant  1q 


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4^4  Hl$TOIRK   DV   JBAS^EMPIBX.  {in^ 

mérite  de  n'avoir  pas  déyorë  jsmû  tmit  le  fimit  de  cet 

illustre  brigandage;  et  l'on  doit  tm  inoins  lui  savoir 

siutant  de  gré  qu'à  ces  voleurs  publics ,  qui  restitueot 

en  aumônes  une  partie  de  œ  qu'ils  ont  enlevé  par  dea 

rapines  et  des  injustices. 

An  934.        Depuis ,  que  les  Hongrois  s'étaient  établis  sur  les 

in^wioii   ^^^^  ^**  Danube,  ils  avaient  tourné- leurs  armes  cour 

des       trc  la  Germanie  et  l'Italie.  Us  avliient  même  porté  le 

cedr.p.ôao.  ravag^  jusque  dans  les  provinces  méridionales»» 

wrt^'^i  France.  I^'année  9^4,  au  mois  d'avril,  ils  se  jetèrent 

s***  ^'.488'  ^^  ThracQ  pour  la  première  fols ,  et  saccageaat  tout 

490.      sur  leur  passage ,  ils  s'avancèrent  jusqu'aux  eavirons 

588.       de  Coastaptiqople.  Pour  se  délivrer  de  ces  nouveaux 

ennemis,  l'cimpereui!  ne  crut  fm  devoir  employer  la 

force  des  armes^  il  jugeait  bien  que,  vainqueur  ou 

vaincii ,  il  les  attirerait  de  nouveau ,  :  soit  pour  .veuger 

leur. hont^,. soit  pour  premier  <î^  leur  succès.  Il  crut 

4onç  qu'il  é^<;,plus  sage  de  traiter  avec  eux,  et  leur 

epvoy4  Tbéophane,  gnand- maître  de  la  garde^fobe. 

Théppbane  se  fi^t  beauiDoup:d'hoQDwr  par  sadextéri» 

4ans  cette  négociaMv^H*  ïl  sUt  leur  inspirer  des  senti- 

ip^uts  :dç  paix,  4^'epipareur  de  son  coté  n'épargns  P^^ 

l'argent  pour  adoucir  ces  cœur^  féroci^,  etponr  ureî 

de  leurs  n\a|ii\s  ^es  sujets  prispntliers. 

Lvu.       .  ^op^j^ioic^^nait  perpétuer  sa  race  sur  le  trône?  ?^ 

^Tâ^de^**  \}ù  avjait.pQÛtéi  tant  de  travau^t  ^  d'artifices,  Depuis  1> 

,,'';°"ï*    mort,de  Cjiristapte,  Etienne  4lait  l'aîné  de  sei  fils-B 

Léo,  p.  5o6.  Ji^.^t  /époqs/çr  Ajinf\,fii\e  ,du  ps^trici^  Gamalâs,  a» 

°n.%"  X.  |(iue))^^;U.:dçffpj|  en  ^même  leaj^ps.  le:  titre  d'Àug»^ 

^G^or*'g.^p!**<5qn#l;^fin,^9n.^ec^^  le  i/ij^^^^^^;^ 

Dacange,   «Hélène 3,  fiUc  dq  patricc  Adrien;  mais^  dès  le  a  te^ 

'*Mïffftntftelje  fitiplace  par  sa^nort  à  une  nouvelle  éfo^' 


Fam.  By/.. 


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lyénements 


ce  fut  Théopluuao  sortie  d'iine  d«  c^s  familles  dpiit  l'o- 
rigine se  p«r4  dans  l'antîqwté. 

Le^  isÎK  iiiBn.éea  suivantes  ne  fournissent  que  des  ^^} 
guerres'  peu  importap^s  contre  les  princes  d'Italie,  ^i^f^g-^^ 
Les-ducs  de  Naples  reconnaissaient  encore  la  souve^    1.4,0.4. 
rainete  des  empereurs; mais  4es  autres  pruices  a  Italie,      et  ibi 
plus  remuants  et  plus  ambitieux  que  puissants,  se  dé*  GianofHist. 
chiraient  mutueltemait  par  d^s  jalousiies , .des  querelles,     ^j^'  ^  ^' 
des  invasions  et  des  chicanes  saiiglantes.  Tiintot  amis,  vh^^'^i^^i 
ils  s'unissaient  ensemble  pour  dépo^éder  les  Qr^cs  dç  ^'^'^'^^^ 
ce  qiû  leur  restait  dans  l'Aptilie  «t  la  Galahre;  taiitoit    Abaifeda. 
ennemis,  ils  employaient  le  secours  des  Gre4S;Conit;re 
leurs  Yoisinis.  Lsiudi^if,  priupe.de  Bénévent,  attaqué 
par  les  Grecs,  eut  recours  à  Thibaut,  duc  de  $polète, 
qui, étant  venu  le  jmndre  avc^  de  grandes  forces, battit 
les  troupes  de  l'Empire.  Hors  d'état  de  ^nir  la  cam- 
pagne, elles  se  cantonnèrent  dans  des  châteaux ,  où 
Thibaut  alla^  les  forcer.  Il  fit  grand  nombre  de  pviaon- 
iiiers,  qu^il  renvoyait  après  les  avoir  faits  eunuqi^; 
c  était,  leur  disait -il  par  une  raillerie  cruelle,  poar 
avancer  leur  fortune,  les  homines  de  cette  espèce  étanjt 
en  grand  honpeur  à  la  cour  de  Constantinople.  Après 
uqe  paix  de  peu  de  durée,  la  gi^rr^  recommença  entre 
les.  Italiens  et  les  Grecs.  On  combattit  avec  différents 
succès.  Il  y  eut  une  rude  rencontre  près  de  Maté^ii 
dans  la  Basilicate,  où  le^  Grecs  fMrent  vaincue,  et  pour- 
wivis  jusqu'au  bord  de  la  m^er.  Leur  général  Jmoga- 
lapte  se  noya  en  voulant  gagner  une  barque  près  du 
rivage.  Les  Sarrasins  d'Orient  né  doupaient  nulle  in- 
quiétude :  le  brave  Gurcuas  servait  .d&  barrière  à  l'Em- 
pire. Ce  fut  en  ce  temps-là  que  les  califes  de  fii^gdad 
perdirent  toute  autorité ,  et  furent  réduits  à  n'être  plus 


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456  HISTOIRE    DU   BAS-EMIHLRX.  (Aa  934.) 

que  des  fantômes  de  souteraîns,  auxquels  on  ne  lai^a 
que  l'honneur  stérile  d'être  regardés  comme  chefs  de 
la  religion.  Al-Rhadi,  fils  de  Moctader,  qui  mourut  en 
g4o,  fut  le  dernier  calife  qui  régna  avec  splendeur. 
Ses  successeurs,  dépouillés  de  tout  pouvoir  sur  leurs 
provinces,  où  un  grand  nombre  d'usurpateurs  se  ren- 
dirent souverains,  tombèrent  dans  le  mépris;  et  peu* 
dant  trois  cents  ans  que  leur  nom  subsista  encore,  ces 
puissants  maîtres  de  l'Orient  ne  furent  plus  que  de  vils 
esclaves.  Mais  la  dynastie  des  califes  Fatimiles  qui  s'é- 
tait établie  eu  Afrique  depuis  trente  ans,  étendait  de 
plus  en  plus  sa  puissance.  Quoique  les  Sarrasins  fussent 
depuis  long-temps  maîtres  de  la  Sicile,  les  habitants 
ne  leur  obéissaient  que  par  contrainte;  ils  se  regar- 
daient toujours  comme  sujets  de  l'Empire.  Ceux  d'A- 
grigente  se  révoltèrent  contre  Salem,  leur  gouverneur, 
dont  la  cruauté  leur  était  insupportable.  Le  calife 
Aboul-Casem  fit  partir  une  flotte  pour  faire  le  siège 
d'Agrigente,  et  les  habitants  implorèrent  l'assistance 
de  Romain ,  qui ,  malgré  le  traité  fait  avec  le  calife, 
leur  envoya  des  troupes.  Avec  ce  secours  ils  tinrent 
pendant  quatre  ans,  et  battirent  plusieurs  fois  les  Sar- 
rasins ,  qui  furent  même  obligés  de  lever  le  siège.  Mais 
les  infidèles  étant  revenus  avec  des  forces  supérieures, 
il  fallut  céder.  Une  partie  des  Agrigentins  s'enfuit  de 
la  ville;  le  reste  se  rendit, sous  la  condition  d'avoir  la 
vie  sauve.  Le  commandant  de  la  flotte  fit  embarquer 
les  chefs  de  la  révolte ,  comme  pour  les  transporter  en 
Afrique.  Mais  il  avait  donné  un  ordre  secret  de  percer 
le  vaisseau  en  pleine  mer;  ce  qui  fut  eftécuté,  et  tous 
les  dirétiens  furent  submergés.  Depuis  vingt  ans  de 
mariage,  Constantin  Porphyrogénète ,  qui  n'était  cm- 


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(Au  934.)  LITRE  LXXIII.  HOMAIIT.  4^7 

pereur  que  de-  nom ,  n'avait  point  encore  iPënAints. 
£n  939,  sa  femme  Hélène  mil  au  monde  un  fils  qui  fut 
nommé  Romain  comme  son  aïeul  maternel ,  et  qui  ré- 
gna dans  la  stiite. 

Depuis  la  première  irruption  des  Busses,  quatre-    ^^  9*'- 
vingts  ans  auparavant ,  sous  le  règne  de  Michel  III  ^    incursion 
'il  s'était  établi  un  commerce  entre  la  Russie  et  Con-  J^,    "!***' 
stantinople.  Le  prince  des  Russes  résidait  à  Novoffo-   ^^o,  636, 

Ji  j.  1  ^®Leo,  p.5o6, 

rod.  Au  commencement  du  printemps,  leurs  barques      507. 
se  rendaient  par  diverses  rivières  dans  le  Borysthène,    i^,  191,  ' 
et  descendaient  à  Kiovie.  C'étaient  des  canots  d'une     c<^t. 
seule  pièce.  Rassemblés  au  mois  de  juin,  ils  partaient  .am?*^^*. 
ensemble  et  suivaient  le  cours  du  fleuve  jusqu'aux  Po-  j^^^^  ^^^ 
rouis.  Ils  traînaient  alors  leurs  canots  le  long  du  bord,  *"»-,?•  ;^*» 
ou  les  portaient  sur  leurs  épaules.  Se  rembarquant  Sym.  p.  490» 
ensuite,  et  entrant  avec  le  fleuVe  dans  le  Pont-Euxin,  Georg.'  p. 
il  descendaient  aux  embouchures  du  Danube.  Là,  ven*  Lint^r.  Hut 
dant  eii  Bulgarie  une  partie  de  leurs  marchandises,  sigéb^chnm. 
ils  portaient  le  reste  à  Constantin^le.  Au  mois  de  p^^,*^,. 
tiovembre,  ils  retournaient  à  Kiovie,  d'où  ils  se  dis- 
persaient dans  leur  pays,  pour  revenir  au  mois  d'avril. 
Ils  ne  craignaient  dans  leur  voyage  que  les  Patzina- 
ces ,  leurs  éternels  ennemis,  qui  les  côtoyaient,  et  avec 
lesquels  il   fallait  souvent  combattre.  Ennuyés  enfin 
d'un  profit  médiocre  qui  leur  coûtait  tant  de  peines, 
ils  résolurent  d'emporter  en  une  fois  le  gain  de  plu- 
sieurs années  ,  et  d'épuiser  la  source  de  tant  de  riches- 
ses. Au  printemps  de  l'an  94 1 9  le  Pont-Euxin  se  cou- 
vrit de  dix  mille  canots,  et  cette  flotte,  sous  les  or- 
dres d'Inger,  prince  des  Russes  ,  se  montra  le  11  juin 
à  l'entrée  du  Bosphore.^N 'osant  encore  s'engager  dans 
le  détroit,  ils  débarquèrent  d'un  côté  en  Thrace,  de 


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458  BI&XO^E  DU   B46»£MP^£.  (Auà  941) 

TaulTO  tn  Bi%nî«,  ^  port^r^t  4|e  toutes  parUllior- 
ribl6  férocké  4'une  natiaa  J^arbare,  altérée  de  sang  et 
avide  de  pillage*  I^oia  contents  de  mettre  le  feu  aux 
métairies,  aux  villages,  aux  églises,  ils  se  Élisaient  un 
jeu  des  suppliées  les  plus  inhumains*  Ils  oiettaieDi  les 
habitants  en  croix,  perçaient  liss  autres  de  javelots 
et  les  lai$sftieiit  cloués  à  la  terre;  d'autres  lies,  à  des 
pçteaux  ^iervaient  de  but  à  leurs  flèches.  Leur  cruauté 
distinguait  les  prêtres  et  les  clercs;  après  leur  avoir 
attaché  les  mains  derrière  le  dos,  ils  se  divertissaient 
à  leur  enfoncer  des  clous  dans  le  crâne.  L'absence  de 
la  flotte  de  l'Empire  leur  donnait  le  temps  d'exercer 
ces  fureurs^  Tous  les  vaisseaux  étant  employés  à  garder 
les  côtes  d'Asie  ou  les  île»  de  l'Archipel,  contre  les 
entreprises  des  Sarmsins,  il  ne  restait  dans  les  ports 
de  Constantinople  que  quinze  brigantins,  qu'on  y 
avait  lais^  à  cause  du  mauvais  état  où  ils  se  trouvaient. 
Romain  les  fit  radouber  en  diligence,  et  après  un 
jeûne  de  plusiem^  jpiirs,  il  y  fît  montfsr  ses  meilleurs 
officiers,  de  marine,  avec  ce  qu'ils  pouvaient  contenir 
de  soldats.  Il  en  donqa  le  commandement  au  patrice 
Théophane,  avec  ordre  d'aller  attaquer  les  Russes.  Ils 
étaient  remontés  dans  leurs  canots  et  s'étaient  rassem- 
blés  près  du  Phare  ^  à  l'entrée  du  Poiit-Ëuxin.  Inger, 
voyant  les  Grecs  venir  en  si  petit  nombre,  l^  méprise , 
et  ordonne  à  $es  gens  de  les  envelopper  et  de  les  pren- 
dre $an9  les  tuer*  La  mer  devient  calme  en  ce  moment, 
ce  qui  était  très^fovorable  pour  Ifncer  )e  feu  grégepis. 
Théopbane  se  jette  au  milieu  de  la   flotte  russe;   il 
rompt  en  cent  endroits  l'ordonnance  de  ces  faibles  ca- 
nots, les  disperse,  les  coule  à  fond  :  les  vaisseaux 
vomissent  des  feux  de  toutes  parts.  Les  Russes  efitayés 


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(An  941*)  LVfSLM   LXXIU.  AQMUH.  4^9 

sautent  dan^  la  mer  poyir  éviter  tes  ûàsman^i  iU  péris- 
sent par  les'feun  ou  dam  les  eauiu  D'autres  soat  pris^ 
ou  assommés  à  coups  de  rames.  Comme  leurs  canots   . 
tiraient  peu  d'eaia^  quelques-uns  ^  à  )a  suite  d'Inger, 
abordèrent,  ^u  rivage  ,  où  les  Vaisseaux  grecs   ne 
pouvaient  les   poursuivre.  On  conduisit  à  Constam- 
tinople    grand    nombre    de    prisonniers ,  aiuuiueU 
Romain  6t  suiT-^le-champ  trancher  la  tête.  Ceut  qui 
s'étaient  échappés  ^  étaqt  descendus  suv  la  cote  de  Bi- 
thynie  pour  se  pourvoir  des  choses  nécessaires  dont 
i    ils  manquaient,  fur^t  rencontrés  par  un  grand  corps 
I    de  cavalerie  et  d'infanterie,  que  comaiandait  Bardas 
I    Phoças;  il  tomba  sur  &x^  et  les  taiflla  en  pièces.  Jean 
(     Curcuas^  qui  était  accouru  avec  toutes  le$  troupes 
I    d'Asie,  au  premier  bruit  de  l'arrivée  des  B.U8ses,  sur- 
;    vint  en  ce  moment  et  acheva  la  défaite.  Ceux  qui  pu- 
1    ren(  se  sauver  regagnèrent  leuiv  canots ,  et  voguèrent 
^     vers  les  côtes  de  la  Thrace,  où  ils  espéraient  trouver 
une  retraite.  Mais  Xhëophane,  qui  n!avait  cessé  de  les 
faire  observer,  leur  coupe  le  chemin;  il  fallut  com* 
battre  une  seconde  fois,  et  le  reste  de  leur  flotte  fut 
presque  entièrement  détruit.  Il  n'y  en  eut  qu'un  très- 
petit  no^re  qiii  gagnèrent»  à  force  de  rames,  lés  cô- 
tes voisiiies  du  mont  .Hémus,  et  qui  profilèrent  de  la 
puit  pour  remonter  vers  l'emboitçhure  du  Borystbène, 
d'où  ils  retournèrent  dans  leur  pays,  trois  mois  après 
leur  départ.  Iqger  étant  mort,  EJga,  sa  femme,  vint  en 
94s  à  Coqstantinople,  demander  le  baptême;  elle 
prit  le  nom  d'Hélène^  et  reçut  de  grands  honneurs. 
,Ëlle  fut  la  première  de  la  famille  des  princes  de  Bus^ 
3ie,  qui  embrassa  la  religion  chrétienne.  Mais  elle  ne 
put  y  engager  son  fils  Vinceslas,  que  les  historiens 


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46o  UISTOIAE   nu    BAS-EMPIRE.  (An  941.) 

grecs  nomment  Sphendosiklabus.  Celui-ci ,  plus  guer- 
rier encore  que  son  père,  fut  ennemi  de  rËmpire, 
•    comme  je  le  dirai  dan«  la  suite. 
Ex  lohs  et       '^"^  Curcuas,  qui  s'était  signalé  dans  cette  occasion, 
disgrâce  de  fiit  le  héros  dc  l'empire.  Romain,  qui  connaissait  son 
et  de  son   mente,  en  avait  foit  usage  aussitôt  quu  était  monte 
Th^phiie.  sur  le  trône;  il  l'avait  mis  à  la  tête  des  armées  d*0- 
^<''«p-63i.  rient;  et  ce  brave  guerrier,  non  content  de  conserver 
Zoii'  t.  a.  p!  les  provinces  qui  restaient  à  l'Empire,  recouvrait  cel- 
ineert.  con-  ics  qu'il  avait  pcf  ducs.  Un  homiiie  de  ce  caractère  mé- 
^6sT^^.  '  <^^e  mieux  que  les  empereurs  mêmes  d'être  connu  de 
^*^"/'    '»  postérité.  Aussi  un  historien  nommé  Manuel  avait- 
il  écrit  sa  vie  en  huit  livres»  I^a  perte  de  cet  ouvrage 
ne  noirs  laisse  que  le  peu  de  lumières  qu'on  peut  tirer 
des  histoires  générales,  qui  renvoyent  le  lecteur  à  cet 
écrit  de  Manuel  pour  le  détail   d€^s  exploits  de  Cur- 
cuas. Voici  ce  qu'on  sait  de  ce  grand  homme.  Il  était 
né  dans  la  petite  Arménie ,  fils  de  ce  Curcuas,  capitaine 
des  Icanates,  qui  conspira  contre  Basile  en  879.  Il 
fut  élevé  par  son  parent  Christophe ,  archevêque  de 
Gangres,  qui  prit  soin  de  l'instruire  dans  la  religion, 
et  de  cultiver  par  l'étude  dés  lettres  son  heureux  na- 
turel. Toujours  fidèle  à  Romain ,  nous  l'avons  vu  ré- 
primer la  rébellion  de  Boïlas,  prendre  deux   fois  et 
ruiner  Malatia.  Les  Sarrasins  empiétant  toujours  sur 
-F£mpire,en  avaient  reculé  les  bornes  jusqu'au  fleuve 
Halys;il  l'étendit  jusqu'au-delà  de  l'Ëuphrate^  rendît 
tributaire  une    grande   partie   de   la  Mésopotamie, 
pe«issa  ses  conquêtes  jusqu'aux  bords  du  Tigre,  prit 
aux  Sarrasin^  plus  de  mille  places ,  et  envoya  plusieurs 
fois  à  Constantinople  des  peuplades  entières  de  Mu- 
sulmans prisonniers.  Hardi  à  s'exposer  au  danger  des 


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(AII9M)  LIVRE   LXXIII.  ROMAIJf.  4^1 

batailles,  prudent  au  milieu  tlu  danger,  il  joignait  à 
'    Texemple  d'une  valeur  héroïque  eette  éloquence  miii* 

faire,  étincelante  de  courage v  si  capable  d'embra^r  le 
'  cœur  des  soldats.  Les  Grecs  le  nommaient  le  nouveau 
1  Belisaire;  ils  le  mettaient  même  au-dessus;  et  depuis 
^  que  ces  contrées  avaient  commencé  à  connaître  les 
t  aigles  romaines,  elles  ne  trouvaient  que  Trajan  qui 
\  pût  lui  être  comparé»  Son  fils  Romain  apprit  sous  Jui 
{  Fart  de  la  guwre,  et  s'y  distingua  sous  le  règne  de 
I  Nicéphore  Phocas.  Mais  le  guerrier  le  plus  semblable 
(^  à  Curcttas,  futson  frère  Théophile,  qui  partagea  ses 

I  dangers  et  sa  renommée.  Patrice  et  duc  de  Ghaldie , 
t  loin  de  s'abandonner  à  la  mollesse  et  à  la  débauche, 

II  comme  tous  les  gouverneurs  de  provinces  de  ce  temps- 
i  là ,  toujours  à  cheval ,  toujours  la  cuirasse  sur  le 
:  corps ,  il  ne  s'occupa  qu'à  seconder  son  frère  dans  ses 
i  glorieux  travaux  :  sans  cesse  aux  prises  avec  les  Sar- 
;    raeins,  il   ravageait  leurs  campagnes,  ruinait  leurs 

villes,,  ne  leur  donnait  point  de  repos.  Il  réduisit  la 
forte  place  de  Théedosiopolis  et  tous  les  châteaux  d'a- 
lentour. Il  se  signala  par  ses  exptoits  en  Mésopotamie. 
On  le  nommait  le  Salomon  de  l'Orient  i»  par  aliusioa 
à  ce  brave  lieutenant  de  Bel  isaire.  Il  fut  l'aïeul  de  ieam 
Zimiscès ,  qui  régna  dans  la  suite.  L'envie  ajouta  le 
dernier   trait  au  «tableau  de    Curonas.  Tandis  qu'à 
exposait  sa  vie  sur  la  frontière  pour  rétablir  l!hoi9ir 
neur  et  k  pnissance  de  l'Empire,  des  courtisans  oi^ife 
travaillaient  sourdement  à  le  perdre.  On  l'accusa  on 
son  absence  d'aspirer  à  la  couronne,  de  n'entretenir 
une  armée  qu'à  dessein  de  l'employer  contre  ses  naaî*- 
tres,  et  de  s'être  mis  en  possession  de  plusîeors  gran- 
des terres,  les  unes  enlevées  aux  sujets  du  prince,  les 


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469  mâïOI&S   DU   SASi^BMPIRE.  (Ab  ^i. 

autres  conquises  sur  les  ennemis.  Romain  écouta  ces 
calomnies  ;  mais  pour  «clairoir  la  vérité ,  il  envoya  snr 
les  lieux  des  commissaires.  Ces  magistrats  s  étant 
trouvés,  par  bonbeur^  tncomiptibles,  certifièrent  Tin- 
nocence  de  Curcuas.  L'empereur,  pour  le  dédomma- 
ger de  cette  injuste  persécution,  conçut  le  dessein  de 
l'honorer  de  son  alliance.  Il  voulut  marier  Euphro- 
sjpe,  fille  de  Cunnias^i  Romain,  fils  de-  Constantin,  son 
second  fils.  La  bienveillance  du  prince  réveilla  la 
liireur  de  l'eùvié.  On  souleva  contre  Curcuas  toute  ta 
fiimille  impériale.  Il  fallut  céder  à  l'orage, . renoncer  à 
tous  ses  emplois,  et  abandonner  le  service  de  la  patrie 
Tdle  fut  la  récon^)ensé  de  tant  de  sang  répaadu  poor 
eHe,etde  vingt^déur  ans  de  conlinuelles' fatigues.  On 
«bit  à  sa  place  Panthérius,  dont  le  s«ul  mérile  était 
d'-eljre  parent  de  Tempereur.  "•    * 

Ah 64a.         Avant  que  Curcuas  fut  rappelé,  iV  oontonaa  ses 
!•».      exploits  par  une  eoropagae  très^funesle  «ux  Sanrasii» 

I/O  TOllC 

dÉdesse    II  mit  à  feu  et  à  san^  tout  le  Diarbek,  prit  Arsao, 

^runti-*^  Dara,  Rusalsân,  dèkit- tous  lés  habitants  fiirent  pas- 

nopie.     ^  ^^  ^1  ^  ,,^  ^^^^  ^^  portes  d'Bdesse,  il  1* 

Joël.  p.  180.        .        ^     ,  -  I  • 

Zon.  t.  a,  p.  ^aça  de  la  trailer>  avec  la  même  rigueur,  si  on  ne  w 

Léo,  p.  5o8.  mettait'  entre  léb  inains  ce  voile  famevx  que  Ton  p^ 

tin?p.'  aaa!  dah  dains'oette  "^1116,61  sur  lequel  o|t  croyait  voir  h 

&g.*p'  *»<*  de  «sus4airist^  imprimée,  disait-on,  par  Jw- 

^2t!'  i**tlie,  et  envoyée; au  rcA  Abgare.  Curcuas off»>t  de 

^"^Jdf'  ï^^^re  à  oe  priic  tous  IfS'  prisMmiers.  Le  -eafife  AJ- 

Mottakicousulta  les  gens  de  loi  9  qui  se  trouvèrei^ 

partagés  de  sentiment)  les  %ind  disanff-qu  il  )i^  ^^^ 

îiOiiteux  d'accorder  par  crainte  aux  ehrétpens  ce  (p^'^ 

-M  leur  demandaient  «paie  pour  insulter  à  leur  faiblesse; 

ies  autres.,  que  ceserak  racheter  à -bmi  marché  tant  rf^ 


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'  f  An  94«.)  LtVH*   LXXIIE.  ROMAlir.  46!î 

Musulmans.  Ce  dernier  avis  prévalut  Le  voile  fut 
porté  à  Conitantia<^le.  Le  patrtàrc^,  suivi  tiu  clergé 
et  d'une  foule  de  peuple,  alla  ^u-devant  jusqu'au  bord 
du  Sagaris  ea  Bithyhie&  Cette  relique  célèbre  entra 
dans  la  ville  le  i5  août,  et  fut  d'abord  portée  à  l'é* 
glise  de  Blaquemea^  où  l'empereur  la  reçut  avec 
grande  vénération.  Le  lendemain,  toute  la  famille 
impériale  fett  joignit  au  clergé  et  mi  sénat  y  pbur  Tac- 
coKipagnertà  Stetiote^'Sophie ,:  où  «lie.  reçut  les  hon^*: 
muges  de  toutéla  ville.£llq  fiit^^delà,  transportée  dans  . 
le- palais.    .  .'.,;.■,  ,         .   . 

Les  Sfirrannsdu  Fi'aînet  iflbultaîeni  la  Prolv|Biicë  stt     >*"'• 
lltalie  par  des  ravages  continuels.  Hugues,  roi  d'Ito«  e^^^'^„ 
lie,  voulant,  déloger  ces  brigands^  et  manquant  de  ^^^^^J"'^ . 
marine,  s^adresaa  aux.cmpereilrs  de  Ckinstantinapk  V    '<i^aUe, 

.  ,  *  *  contre  les 

il  les  pria  de  lui'envo^  u^e  £btte  avec  le  feu  gré-»'  Sarrasins. 
geois, -pour  brûler   les  yaia^eaui  sarrasins^  et.leur  i^'J'p^';^^ 
couper  les  secours  d'Ëspagve,  tandis. qu'i|   irait,  par  p^*^®^^^^I°°* 
terre  les  forcer  dans  leur  retraite^  de  projet- fut  exe-  ^^^rau  «na! 
cuté ;  et  c'en  était  fait  ^cette  ooilonié  insupportable  p.  349, 3&»! 
à  tous  les  pay^  v0Îsin6,'Bi  Hu^ies,.  par  ùne<na«vaîse  rhist.'d'Uai. 
politique,  ne  leseât  sanvés  lui-même.  Craignant  que  *'  %Si7**'' 
Bérenger,  tnàrquis  d'Yvrée ,  son  ennemi ,  qui  s'était  re- 
tiré en  Allemagne,  ne  i^^viiit  l'attaquer  en  Italie,  il 
résoltfl  de  se  servir  de' ees  fiMrb^res  pour  lui  femlêr 
left  pasfeges.  Il  f  raica  dqnc  avMéui^,  eè  leu?  ppradh  de 
s'établir  fiorlfes  tii^otâ^Mes  qoii  «épatofit  L'^Ailleiéa^ni^ 
dé  rkalie.  iHvt  reî^tnFeisfeprafàipeu  àdquv  piasnfiàre  éetf 
meure,  et  continuèrent  leur  brîgatitfage  juâqu'én  ^7!^' 
qûlts»  AiilÉ!tit>  >elx|iè#Mièdt  ^Mtêit^mii  par  iQùiUauitie, 
comte  de  Provence/    >•  «•  •   j  i  :< 

11^  y  avait  heiif  ans  ^que  Théopliane  avait!  pvéservé    . 


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464  UISTOIRC    DV   B4S-FjrPtRE.  (Aa  943.) 

Ah  943.  la  Thrace  de  la  fureur  des  Hongrois.  Il  en  avait  été 
Tr^^Tec  ^^^^^P^'^  P<^r  1^  chaire  de  grand^chambelbn.  Il 
letHongrois.  fut  eiicore  emplojé  en  g^'i  à  une  même  négociation, 
Lco^p.  507!  ^^  il  eut  le  même  succès.  Les  Hongrois  étant  venus 
tTn.*^*  S7'  *"  ™^**  d'avril  se  jeter  sur  les^  terres  de  l'Empire» 
*c^*.*^'*  f"^"*t  arrêtés  dans  leur  'course,  donnèrent  des  otages, 
^'      et  firent  une  trêve  de  cinq  ans. 

A«  944.  Dans  le  temps  que  Hugu^  avait  emprunté  de  Ro- 
iiariage'  de  main  le  secouTs  d'une  flotte  contre  les  Sarrasins, Vem- 
de  l^sun-  peoeur  avait  demandé  ii  ce*  prince  une  de  ses  filles,  Il 

tm  Poi 


TogénétJ'  ^^^^^  dessein  de  la  marier  à  Romain ,  fils  de  Constan- 

Cedr.p.d3i,  tin  Porphjrôgénète  et  de  sa  fille  Hélène^  quoiqu'il 

Léo,  p.  507.  n'eût  encore  que  cinq  ans.  Hugues,  à  qui  la  débauche 

Porph!*de   2i^*ît  donné  beaucoup  d'enfants ,  n'ayant  pas  de  fille 

.diiLm.p.c.  j^gi|:inje,  lui  offrit  une  de  ses  bâtardes  nommée  Ber- 

tiuT'.  X"  ^**®'  parfaitement  belle,  qu'il  amit  eue  de  Besola,  sa 

Sgnp-49ï-  concubine.  Gxistantin,  quoiqu'empereur,  ne  disposait 

590.      pas  de:ses  propres  enfants;  Romain,  aussi  peu  délicat 

"Te.  5!  *  que  Hugues  sur  cet  article  ^  accepta  la  pitopositioa 

£•«"'8^1%.  sans  balancer.  Pascal,  écuyer  de  l'empereur  et  duc  de 

'^^'      Lombardie,  fut  député   pour  recevoir   Berihe  des 

mains.de  son  père,  et  Sigefroî,  évêque  de  P4rine,la 

conduisit  à  Constantinople  avec  un  train  magnifiqtt^ 

et  de  ricbes  présents.  1^  cérémonie  du  mariage  tut 

faite  au  mois  4e  septiembre  §44*  Le  nom  d0  Bç^"* 

fiit  duing^  en  éeUxl d^yEftrfooie^qu'ajvaient  porté  h  W^ 

etla  bnidetile  paternelles  de  «on  mtKri.  £Ue  ne  vécut 

que  cinq- ans.  depuis  :sop  mariaige,   èt.iiKHiK'tt^  ^^ 

qu'il  pût  être  condlbmmé.*  •.    /  i 

ciui"Iment     I^^main  Lécapèae  ^  pai!venu  à  «a  âge  ,a«e»  à^^' 

de  yie  de  commençait,  quoiqu'un  peu  tard,  .à  se  Fccoan*'    • 

Romain.  i     n        t  .  T  i  %         .1  j      li'h^rtl' 

Cedr.p.ssa,  Livressedc  I  ambition,  les  aeoes  violents  du  au^ 


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(An  944.)  LlYRE  tXXIII.  ROMAIN.  4^5 

nage,  n'avaient  point  ëtoufFé  dans  son  cœur  les  senti»   633,  634. 
ments  de  religion.  Il  avait  eu  autant  de  remords  que  ^^-^p-  ^®** 
de  faiblesses.  Ce  qui  contribua  le  plus  à  le  ramener  Mana»8.  p. 
des  égarements  de  sa  vie ,  ce  fut  le  respect  qu'il  avait  Zon.  t.  a,  p. 
toujours  conservé  pour  les  personnes   consacrées  à   Giycas,  p. 
Dieu.  Entre  les  moines  vertueux  auxquels  il  donnait  incert  oon- 
un  libre  accès ,  il  chérissait  Sergius,  neveu  du  patriar-  *"'  ^jo^ 
che  Photius,  mais  qui  joignait  au  savoir  dé  son  on-  ^J^*  J*^^^' 
cle  des. vertus  que  son  oncle  n'avait  pas.  Romain. fit   5|^'*^* 
bâtir  pour  lui  un  monastère  ^  où  Sercius  rassembla  ^^*  p-  '?<>• 

,      .       '^  .  1.      .    1.  1»  liutpr.Hbt. 

huit  cents  moines  sous  sa  discipline ,  et  1  empereur  1.  s,  c  9. 
fournissait  à  leurs' besoins.  Ce  saint  abbé  travailla  ef« 
ficacement  à  la  conversion  du  prince  ;  mais  il  ne  put 
corriger  la  faible  complaisance  qui  Taveuglait  à  l'égard 
de  ses  fils.  Il  lui  représentait  sans  cesse ,  mais  in- 
utilement, qu'il  devait  craindre  d'être  puni  lui- 
même,  comme  autrefois  le  patriarche  Héli,  des  dés- 
ordres qu'il  n'avait  pas  le  courage  d'arrêter  dans  sa 
famille. 

Cette  menace  n'eut  que  trop  d'effet.  Constantin  Por-      lxvi. 
phyrogénète,  s'ennuyant  enfin  de  n'être  assis  qu'au  'c^nîuntb* 
dernier  rang  sur  un  trdne  qui  lui  appartenait  tout  en-  ''^^j'^J^ 
tier  par  le  droit  de  la  naissance,  forma  le  desseiù  d'en    ^^"^^ 
faire  descendre  l'usurpateur,  et  crut  n'y  pouvoir  réussir 
qu'en  excitant  contre  le  père  l'ambition  de  ses  fils. 
Etienne  et  Constantin ,  fils  de  Romain ,  étaient  égale- 
ment déréglés  dans  leurs  mœurs  ;  mais  le  second  avait 
plus  de  retenue  et  de  respect  pour  son  père;  l'autre, 
plus  vain ,  plus  emporté ,  parut  plus  facile  à  séduire. 
Porphyrogénète  mit  en  œuvre  pour  ce  manège  un  cer- 
tain Basile,  qu'on  surnommait  l'Oiseau  ,  attaché  de- 
puis l'enfance  à  son  service.  C'était  un  homme  souple. 

Tome  XHI'  3o 


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466  HISTOtKE    DU    BAS-EMPiRE.  (In  944) 

adroit  9  ifêcond  enriisès  et  ;propré  à  prendre  toutes 
sortes  de  formes,  en  un  mot,  un  de. ces  fourbes  subal- 
ternes que  les  princes  savent  employer  aux  bassesses 
'  et  aux  mensonges  dont  ils  croient  avoir  besoin,  quand 
ils  ne  jugent  pas  à  propos  de  les  faire  eux*m$ines. 
Basile  ^sùt  bientôt  s'insinuer  dans  la  plus  intime  fami- 
liarité ;d- Etienne  ;  et  quand  il  se  vit  maître  desoQ  es- 
prit ,  aprèsi  lui  avoir  démandé  pardon  de  sa  Vtbert^^^ 
qui  n'iétait  qu7un  effet  de  son  zèle  y  il  lui .  repwsenta 
.  qu'ét&ntdéju  empereur,  dans  toute  là  force  de  son 
âge,  twec  Une  prudence  supérieure  ^  et  touéeVexpé- 
rience  que  donne  aux  ùMres  la  "véeillesse^  on  était 
étonné  qu'il laissét  le  destindeV Empire  si  long-temps 
suspendu  à  un  fil  usé  et  prêt  à  se  rompra  ;  qu'on 
disait  de  toute  part  qu'il  depait  se  produire^  se  mettre 
aw-dèi^ant  d'un  vieillard  qui  laissait  tout  languir 
ai^ec  lùi^  et  prendre  en  main  les  rênes  de  Fétat; 
qu'on  lui  connaissait  d'assez  grandes  qualités  pùur 
régir  la  terre  entière  ;  qu'il  était  redevable  à.  la  pa- 
trie  de  cette  wguèur  de  corps  et  d'esprit  que  le  cid 
iui  aidait  donnée  pour  la  goêwerner^  que  dès  qu'il 
•se  montrerait  à  la  tête  des  aj^res,  on  verrait  ra- 
jeunir l'Empire ,  les  Btdgares  et  les,  Sarrasin^  trem- 
bler dans  leurs  limites ,  et .  toutes  les  prm^n€$es  re- 
fieurir  sous  son  heureuse  influence,;  qu'il^pouyait 
être  assuré  détre  secondé  dans  ce  noble  projet  par 
Constantin,  son  beau^frere y  qui  ne  souhaitait  rien 
tant  que  de  se  voir  t^franchi  de  la  dureté  bizarre 
d'un  beau-père  iritrctitable.  . 
LXTn.  Il  n'était  pas  difficile  d'étoufifer  dans  un  cœur  cor- 

d^frônr    ^^^P"  '^^  sentiments  de  la  nature.  Etienne,  animé  par 
Basile,  va  tenter  la  fidélité  dé  son  frère  Constantin;  il 


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(An  9U.)  UVliB    LXXM|.  aOMAIlSr*  4^7 

le  trouve  si  contraire  à  son  dessein  qu'il  n'ose  m^me 
lui  en  £aiîre€onfî<knce;  il  se  charge  seul  de  l'exécutiony 
d'autant  plus  facile  que  Romain ^  alors  malade,  était 
incapable  d'aucune  résistance*  L<e  palais  de  Const^n- 
tinople  était  par  lui*même  une  place  forte  ^  toujours 
défendue  par  une  garde  npmbreu^e.  Jl  était  ouvert  à 
tout  le  mwde  ^  depuis  l'aurore  jusqu'à-  la  troisième 
heure  du  jour.  Alors  on  faisait  sortir  tous  :ceux  qui 
n'étaient  pas  nécessaires  au  service ,  et  la  porte  de~ 
meurait  fermée  jusqu'à  la  neuvièqie  heure.  Basile  avait 
fait  entrer  dans  le  complot  plusieurs  officiers  cqn^idé* 
râbles;  les  pliis  distingués  étaiéat  Manuel  Cuttice,  et 
Marîen  Argyre,  fiU  de  ce X-éon  Argyre  qui  avait  épouse 
Agathe ,  fille  die  Romain  Lécapène  ;  il  était  par  con* 
séquent  petit-fils  de  l'empereur  même  qu'on  allait  dé* 
trôner.  Mais  comme  il  portait  à  r;egret  l'habit. de  moine, 
il  embrassa  volontiers  cette  occ^sipa  <jle  s'ep  dépouiller. 
L'histoire  nomme  encore  Cladon,  Philippe,  et  le  gé- 
néral Diogène,  qui  furent  ^econdé^  de  leurs  amis.  Le 
jour  qu'Etienne  avait  pris  pour  e|céeuter  son  dessein, 
il  choisit  l'heure  où  tout  le  monde  était  sorti  à  l'or- 
dinaire. Il  entre  avec  ses  conjurés  dans  l'appartement 
de  son  père,  le  saisit  dans  son  lit ,  le  menace  d'un  plus 
mauvais  traitement  s'il  jette  le  moindre  cri,  l'enve^r 
loppe  d'un. voile,  et  le  transporte  saps  t)puit  hors.du 
palais,  et  de  là  dans  l'île  de  Proté,  ,à  l'entrée  de  la 
Propontide.  On  l'enferma  dans  Un  uionastère,  ;OÙ  s^ur- 
le-champ  on  Itii  coupe  \e^  cheveux,  et  on  lui;f^ït  pren7 
dre  l'habit  de  moine.  Constantin^  frère  4'Étienne,  qui 
n'avait  pas  voulu  prendre  de  part  à  l'attentat,  voyant 
le  succès ,  voulut  en  profiter.  Jl  se  joint  à  son  frère. 
Jje  bruit  de  cet  enlèvement  se  répand  bientôt  dans  la 

3o. 


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468  HISTOIRX   DU   B/LS-EMPIHIS.  (Ai  944.) 

ville  ;  on  disait  même  que  Porphyrogéoète  avait  été 
'     assassiné.  Le  peuple  accourt  au  palais;  on  demande 
à  grands  cris  à  voir  Porphyrogénète  ;  il  se  montre  aux 
fenêtres,  et  la  sédition  cesse.  Les  deux  fils  de  Romam, 
désespérés  de  voir  que  le  peuple  n'a  des  yeux  que  pour 
ce  rival,  se  tiennent  renfermés.  Cette  révolution  arriva 
le  ao  décembre  944-  Romain  avait  régné  i5  ans  et 
4  jours.  Sergius  l'accompagna  dans  cet  exil,  et  se  joi- 
gnit à  Polyeucte,  abbé  du  monastère,  pour  consoler 
ce  père  infoituné.  Il  profita  de  leurs  avis  salutaires, 
et,  délivré  de  la  séduction  du  pouvoir  souverain,  il 
trouva  dans  la  retraite  le  repos  et  le  vrai  bonheur,  qu'il 
avait  en  vain  cherché  sur  le  trône.  Porphyrogénète  eut 
trop  tard  connaissance  du  testament  de  Romain,  par 
lequel  ce  prince  rétablissait  l'ordre  qu'il  avait  troublé 
lui-même  :  il  donnait  le  premier  rang  dans  l'Empire  a 
Ck>nstantin  Porphyrogénète;  il  ne  nommait  ses  deui 
fils  qu'au  second  rang,  et  les  déclarait  déchus  de  tous 
leurs  droits,  s'ils  formaient  aucun  attentat  contre  le 
premier  empereur.  Liutprand  prétend  que  Porphyro- 
génète n'eut  aucune  part  à  la  déposition  de  Romain, 
et  que  tout  se  passa  à  son  insçu.  J'ai  mieux  aimé  suivre 
les  historiens  grecs,  qui  doivent  avoir  été  mieux  in- 
struits. 
Lxvm.         Outre  les  enfants  de  Romain  Lécapène ,  que  nous 
^RornSn  '   avons  déjà  fait  connaître ,  il  eut  une  fille  qui  épousa 
c«dr.p.644,  Romain  Saronite^  maître  du  palais.  Celui-ci,  devenu 
jun"'  *   veuf,  voulant  se  soustraire  aux  orages  de  la  cour,  dis- 
fain.Byzfp.  tribua  ses  biens  à  ses  enfants,  et  embrassa  la  vie  mo- 
^***       nastique  sous  le  règne  de  Romain-le-Jeune.  C  est  ce 
que  rapportent  les  historiens  de  l'Empire.  Cependant 
un  auteur  contemporain  dit  qu'il  mourût  de  ma 


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(A»  944.)  LIVRE   LXXIIl.  ROM/LIN.  4^9 

lorsqu'il  songeait  à  se  faire  empereur.  Romain  avait 
encore  eu  d'une  esclave  bulgare  un  bâtard  nommé 
Basile,  qui  joua  dans  la  suite  un  grand  rôle,  et  dont 
nous  aurons  plusieurs  fois  occasion  de  parler. 


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fIN    DU   LIVRE   SOIXANTE-TRBrZli:ME   ET   DU   TOME 
TREIZIÈME. 


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I 


TABLE  DES  MATIÈRES 


COHTSIIUES 


DANS  LE  TOME  TREIZIÈME 


DE  L'HISTOIRE  DU  BAS-EMPIRE. 


LIVRE  SOIXANTE-HUITIÈME. 


Léon  récompeiue  ses  partisans. 
XX.  Cmm  devant  Gonstantinople. 

XII.  Ravages  des  Bulgares,  xv. 
Léon  couronne  son  fils.  v.  Renou- 
vellement du  traité  avec  les  Fran- 
çais. VI.  Arcadiopolis  prise  par 
les  Bulgares,  vu.  Mort  de  Cmm. 
VIII.  Victoire  de  Léon  snr  les  Bul- 
gares. IX.  Nouvelle  défaite  des 
Bulgares,  x.  Les  iconoclastes  sol* 
licitent  Léon  à  se  déclarer  ponr 
enx.  XX.  Nouvelle  imposture,  xii. 
Antoine,  évéc|ne  de  SyDée,  se 
joint  aux   ennemis  des  images. 

XIII.  Léon  tente  de  séduire  le  pa- 
triarche. XXV.  Assemblée  des  évé- 
ques  orthodoxes,  xv.  Premier  at- 
tentat des  iconoclastes,  xvx.  Dé- 
guisement de  Léon.  xvii.  Exil  de 
Nicéphore.  xvxii.  Théodote  pa- 
triarche. Kii.  Ckmcile  des  ioono- 
clastesb  zx.  Persécntion.  xxi. 
Gonvemement  de  Léon.  xxii. 
Michel -le -Bègue  acensé  et  con- 


damné, xxixi.  |1  échappe  au  sup- 
plice. XXIV.  Conspiration  contre 
Léon.  XXV.  Assassinat  de  Léon. 
XXVI.  Mîchel-le-Bègue  empereur. 
xxvii.Caractère  de  Miohel.xxviii. 
Conduite  de  Michel  k  Tégard  des 
catholiques,  xxix.  Impiété  de  Mi- 
chel. XXX.  Révolté  de  lliomas. 
xxxx.  Alliance  de  Thomas  avec 
les  Sarrasins,  xxxii.  Divers  succès 
de  Thomas,  xxxixi.  Il  marche  à 
Gonstantinople.  xxxiv.  Son  arri- 
vée, xzxv.  Attaque  de  la  ville, 
xxxvi.  Seconde  attaque,  xxxvii. 
Défaite  de  Grégoire.xxxviii  .Tho- 
mas vaincu  par  les  Bulgares.xxxix. 
Il  lève  le  siège,  xx..  Mort  de  Tho- 
mas. XLi.  Punition  des  complices. 
XLii.  Michel  écrit  k  Louis-le-Dé- 
honnaire  et  au  pape.  xx.iix.  Entre- 
prise des  Sarrasins  sur  Tilc  de 
Crète,  xx.iv.  Ils  s'y  établissent. 
XLV.  Ils  défont  l'année  impériale, 
et  achèvent  la  conquête  de  File. 


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472 


TABLE    DES   MATIERES. 


XLvi.  Fondation  de  Candie,  xlvix. 
EfîbrU  inotiles  poar  le  recoavre- 
ment  de  Tile  de  Crète,  x^rui. 
Expédition  d'Orypluis.  xux.  Se- 


cond mariage  de  Michel,  l.  Les 
Sarrasins  s'emparent  de  U  Sicile. 
u.  Suite  de  la  eoDqnéte.  ^I. 
Mort  de  Michel.  Fige  i 


LIVRE  SOIXANTE-NEUVIEME. 


I.  Punition  des  Minsains  de  Léon. 
II.  Fable  sur  le  mariage  de  Théo- 
phile. III.  Théodora  impératrice, 
ly.  Zèle  de  Théophile  pom*  la  jns- 
tice.  V.  Antres  exemples  de  justice. 
VI»  Yive  réprimande  à  Timpéra- 
trice.  VII.  Succès  des  Sarrasins, 
viix.  Histoire  de  Théophobe.  ix. 
Malheureuse  expédition  en  Abas- 
gie.  X.  Mort  du  calife  Al-Mamonn. 
XI.  Histoire  du  philosophe  Léon, 
xii.  Théophile  refuse  Léon  aux 
sollicitations  d*Al-Mamoun.  xxii. 
Léon  fait  évéqne  et  chassé  de  son 
siège.  XIV.  Théophile  vaincu  par 
les  Sarrasins,  xv.  Les  Sarrasins 
vaincus  par  Théophile.xvi.Théo* 
pbile  sauvé   par    Manuel,  xvii. 
Disgrâce  de  Manuel»  qui  se  retire 
chez  les  Sarrasins,  xviii.  Exploits 
de  Manuel  chez  les  Sarrasins  .xix. 
Manuel  de  retour  à  Constantino- 
pie.  XX.   Superstition  de  Théo- 
phile. XXI.  Expédition  en  Sicile. 
XXII.  Histoire  d'Alexis  Musèle. 
XXII  i.   Violence    de    Théophile. 
XXIV.  Alexis  se  retire  dans  un 
monastère,  xxv.  Ambassade   de 


Jean  Lécanomante  à  fiagdsd.  xxn. 
Luxe  de  Théophile,  xxni.  Théo- 
phile ennemi  de  la  débauche. 
xxvizr.     Nouvelle    pereécutioB. 

XXIX.  Traitement  fait  aux  moines. 

XXX.  Souffrances  de  Théodoft  et 
de  Théophane.  xxxi.  Rappel  de 
Méthodius.  xxxn.  Comlneoc^ 
ment  des  Patzinaces.  xxxin.  Hm- 
diesae  d'un  couvreur.  »«▼• 
Théophile  prend  plmicow  ville». 

XXXV.  Sédition  des  soldat*  pew»- 

XXXVI.  Les  Sarrasins  vont  assiéger 
Amorium.  xxxvii.  BataiUe  deDi- 
zymène.  xxxviii.  Danger  qœ 
court  l'empereur,  xxxa.  Pr»« 
d'Amorium.  xl.  Le  calife  refo* 
le  rachat  des  prisonniers.  xi.|. 
Traitement  des  prisonniers  chre- 
tiens.  xLii.  Martyre  de  qnarante- 
deux  officiers,  [tluu  NouveUe» 
hostUités  des  Arabes].  XLiv.  Nou- 
velle calomnie  contre  Théophobe. 
XLV.  Mort  de  Théophobe  et  et 
ThéophUe.  XLVi.  Réflexions  sor 
le  caractère  de  ThéophUe.  xt»" 
Caprices  de  Théophile.  xlviU.  Se» 
enfants.  ^«6^79 


LIVRE  SOIXANTE-DIXIÈME. 


I.  Générosité  de  Manuel,  ii.  Théo- 
dora entreprend  de  rétablir  le 
culte  des  images,  m.  Jean  Léca- 
nomante chassé.  IV.  Fin  de  l'hé- 


réne  des  iconoclastes, 
phile  absous  après 
Solennité  pour  le  réi 
du  culte  des  image»- 


Théo- 


mort  ' 


,tablis»o«** 


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TABLE    DES   MATIÈRES. 


473 


dins  calomnié  et  jostîfié.  viix. 
Taine  entreprise  des  Sarrasins. 
IX.  Malheureuse  expédition  en 
Abasgie.  x.  En  Crète,  xi.  En  Asie. 
XII.  Échange  des  prisonniers,  xni. 
Les  Esclavons  snbjagnés  en  Grèce. 

XIV.  Ignace  succède  à  Méthodius. 

XV.  Conversion  des  Khazars.  xvi. 
Ravages  desPauliciens.xvii.Coni« 
mencements  de  Basile,  xviii.  Les 
Macédoniens  retournent  dans  leur 
pays.  XIX.  Basile  à  Constantino* 
pie.  XX.  Il   devient  riche,  xxi. 
Premier  écuyer    de    l'empereur. 
XXII.  Expédition  en  Egypte,  xxiii. 
Converaton  du  roi  des  Bulgares, 
xxrv.  Et  de  la  nation,  xxv.  Ma- 
riage de  Michel,  xxvi.  Troubles 
dans  le  palais,  xxv  11.  Assassinat 
de  Théoctiste.  xxviii.  Théodora 
quitte  le  gonvemement.  xxix.  Ba- 
sile grand-chambellan,  xxx.  Dé- 
bauches de  Michel,  xxxi.  Courses 
de  cirque,  xxxxi.  Dissipation  des 
finances,  xxxiii.  Ordres    cruels 
donnés  dans  la  débauche,  xxxiv. 
Bardas   césar,    xxxv.   Théodora 
renfermée  avec  ses  filles,  xxxvi. 
Gouvernement  de  Bardas,  xxxvii. 
Bardas     irrité     contre     Ignace. 
XXXVIII.      Photîus      patriarche, 
xzxix.  Ignace  persécuté,  xl.  Pho- 


tius  vent  tromper  le, pape.  xlt. 
Prudente  conduite  du  pape.  xlii. 
Concile  où  Ignace  est  déposé.XLiii. 
Traitements  cruels  £siits  à  Ignace 
pour  le  faire  renoncer  à  son  siège. 
XLiv.  Zèle  du  pape  pour  Ignace. 
XLV.  Fourberie  de  Photius.  xlvi. 
Concile  et  lettres  du  pape  contre 
Photius.  XLvii.  Guerre  contre  les 
Sarrasins,  xlviii.  Autre   défaite 
de  MicheL  xlix.  Ravages  d*Omar. 
L.  Défaite  d*Omar.  li.  Bâtiments 
de    Michel,   lu.    Irruption    des 
Russes.  1.111.  Les   os  de  Copro- 
nyme   et  de  Jean  Lécanomante 
brûlés.  Liv.  Michel  fait  épouser  à 
Basile  sa  concubine,  lv.  Complot 
formé  contre  Bardas,  lvi.  Assassi- 
nat de  Bardas,  lvii.  Suites  de  ce 
meurtre,  lviii.  Conduite  de  Pho- 
tius. i.ix.  Les  légats. du  pape  ne 
sont  pas  reçus  à  Constantinople. 
I.X.  Photius  prononce  contre  le 
pape  one  sentence  de  déposition. 
Lxx.  Basile  associé  à  l'empire.  iJi:ii. 
Complot  et  punition  de  Symbace. 
Lxiii.  Michel  veut  faire  périr  Ba- 
sile, lxiv.  Il  fait  un  nouvel  empe- 
reur. I.XV.  Mort  de  Michel.  i.xvi. 
Fin  tragique   des    meurtriers  de 
Michd.  Page  1 58 


LIVRE  SOIXANTE-ONZIEME. 


Basile  seul  empereur.  11.  Il  réta- 
blit les  finances,  m.  Réforme  de 
la  judicatnre.  iv.  Tranquillité  pu- 
blique rétablie,  v.  Photius  chassé 
fait  place  à  Ignace,  vi.  Reconnais- 
sance de  Basile,  vu.  Règlements 
de  Basile  sur  la  milice,  viii.  Les 
Sarrasins  lèvent  le  siège  de  Ra- 


guse.  IX.  Les  Barbares  de  la  Dal- 
matie  rentrent  dans  robéissance. 
X.  Continuation  de  l'affaire  de 
Photius.  XI.  Préparatifs  du  hui- 
tième concile  général,  xii.  Con- 
cile. XIII.  Suites  du  concile,  xiv. 
Les  Bulgares  se  soumettent  à  TÉ- 
glise  de  Constantinople.  xv.  Kvé- 


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474 


TABLK   0£S   MATIBRES. 


nenicBtft  divers,  xn.  Gnerre  des 
Ssrrasins  en  Italie,  xvii.  Prise  de 
Bari  sar  les  Sarrasins,  xviii.  La 
religion  chrétienne  s*étend  en 
Kossie.  XIX.  Incursions  des  pan- 
liciens.  xx.  L'empereur  marche 
contre  eux  en  personne,  xxi.  Ba- 
sile prend  plusieurs  villes  aux 
Sarrasins,  xzix.  Il  passe  TEu- 
phrate.  xxiii.  Expédition  de  Ma- 
latia.  xxiY.  Nouvelle  expédition 
contre  Cbrysochir.  xxv.  Défaite 
des  panliciens.  xxvi.  Destruction 
de  Téphrique  et  des  pauHciens. 
XXVI  c.  Débauches  de  la  sœor  et  de 
la  femme  de  Basile,  xxvxii.  Con- 
version des  Juifs.  XXIX.  Basile 
piqué  par  tin  serpent,  zxx. 
Gnerre  contre  les  Sarrasins,  xxxi. 
Caractère  des  Sarrasins  de  ce 
temps-U.  zxxii.  Succès  de  Basile 
en  Cilicie.  xxxiii.  Son  retonr. 
XXXIV.  Yictoire  d'André4e-Scy- 
the.  xzxv.  Stypiote  battu  par  les 
Sarrasins,  xxxvx.  État  de  Tempire 
en  Italie,  xxxvii.  Contestation 
entre  Rome  et  Constantinople'  au 
sujet  des  Bulgares,  xxxvxii.  Sain- 


teté de  Bogoris.  xxtit.  Pfaotrns 
succède  k  Ignace,  xl.  Condalte  de 
Pfaottus  rétabli,  xu.  Le  pape  re- 
connaît Photins  poar  patriarche. 
xi.li.  Concile  de  Constantinople 
en  fkvenr  de  Photins.  xuiL  Suites 
des  événements  qui  concemeot 
Photins.  xi.iv.  Mort  èe  Coniton- 
tin.  xxv.  Ménagement  deSasileà 
regard  de  ses  snjetfcXtw.Conja- 
ration  découTcrte.  xltii.  MouFfr 
ments  des  Sarrasins  en  Went. 
xi.viix.  Syracuse  prise  par  le»  Sar- 
rasins. xLix.  Punitien  «Tidrifl»- 
î..  Atuquc  de  ChaleU.  u.  ^ 
Sarrasins  de  Crète  batte»  «or  mer. 
Ml.  Autre  défaite  de*  Crétoii. 
MM.  Artifice  de  Baiile  ponr  m- 
ver  la  vie  à  des  dé8ertenn.Lrr.I/* 
Samsins  battus  sor  mer.  tv.  Ex- 
pédition en  Sicile  et  en  Italie,  itl 
Trahison  de  Léon.  iw.  H  «t 
pani.  Lvnî.  NonveUe  eipédition 
en  Italie.  i.ix.  Sanubsren  wat 
laîre  périr  Léon,  fil»  «î»«*'^'*' 
perènr.  ix.  Déli^noce  del^ 
1.XI.  Mortde Basile.  ixiiXoD* 
aioiidarègBedeB«ile.P«P«*9 


LIVRE  SOIXANTE-DOUZIÈME. 


I.  Commencements  de  Léon.  xi.  Se- 
coude  déposition  de  Photins.  m. 
Punition  de  Sàotabarèn.i v.Étienne 
succède  k  Photins.  v.  Translation 
dn  corps  de  Michel  à  Constanti- 
nople. VI.  Incursions  des  Sarra- 
sins. VII.  AITaires  d'Italie,  viii. 
Bari  perdu  et  repris  par  les  Grecs. 
IX.  Flotte  des  Grecs  battue  par  les 
Sarrasins,  x.  Zoé  concubine  de 
Léon.  XI.  Guerre  des  Bulgares. 
XII.  Commencements  des  Hon- 
grois, xiti.  Mœurs  des  Hongrois. 


XIV.   Leur  manière  de  feu» 
guerre.xv.Léon8e8ertde»Ho»- 

grois  contre    les  Bn\g»rt».^^' 
Générosité  de  NicéphorePhoo»- 

XVII.  État  des  Grecs  en  Ita^ 

XVIII.  Les  Grecs  défiiît»  ptf  ' 

Bulgares,  xix.  Conjunirionjl^ 
«„i  •x  Mort* 
converte  par  Zoe.  xx-  '» 

Théophano.    xxi.  I^«  ?^ 
Zoé.  xxir.  Mort  do  patJ^'J 
Etienne,  xxiii.  Collection  j^J^ 
sîliqnes.  XXIV.  ^«grace  ft 
deStylien.xxv.NonveïI.eoni« 


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TABLE    DES    MA.T1ERKS. 


475 


> 


.fi? 


ration,  xxvi,  Fortaue  de  Samonas. 
xxvu.  Nicolas -le -Mystique  pa- 
triarche. XXVIII.  Troisième  ma- 
riage de  Léoo.  xxix.  Noovelle 
passion  de  Léon.  xxx.  Léon  blessé 
par  nn  assassin,  xxxi.  Coniaes 
des  Sarrasins,  xxxii.  Expédition 
des  Sarrasins,  xxxiii.  Préparatifs 
des  Thessalouieiéns.  xxxiv.  État 
déplorable  des  Tbessalonicîcns. 
XXXV, Arrivée  delà  flotte  sarrasine. 
XXXVI.  Suite  de  Tattaque.  xxxvii. 
Prise  de  la  ville,  xzxviu.  Les  bâ- 
tîmeots  de  la: ville  racbetés àprix 
d^argent.  xxxii.  Départ  des  Sar- 
rasins. XI..  Histoire  d*£nstathc  Ar* 
gyre.  xli.  Fnîte  et  retour  de* 
Samonas.  xlii.  Naissance  de  Gon- 


atantin.  xuu.  Troubles  au  sujet 
des  quatrièmes  noces  de  Léon. 
xXiiv.  Opposition  du  patriarche. 
XI.V.  Eathymius  mis  à  la  place  de 
Nicolas.  XLvx.  Yiolent  orage. 
XI.VXX.  Fuite  d'Andronic  chez  les 
Sarrasins,  xlviii.  Retour  de  Con- 
stantin, fils  d*Andronic.  xjcix.  Les 
Sarrasins  chassés  du  Garîllan.  l. 
État  des  frontières  du  côté  de 
rOrient.  1.1.  Le  père  de  Samonas 
À  Constantinoplexii.  Disgrâce  de 
Samonas.Lxxx.  Occasion  de  la  fon- 
dation du  monastère  des  Nosies. 
uv.  Flotte  grecque  battue  par  les 
Sarrasins,  lv.  Mort  de  Léon. 

Page  33o. 


LIVRE  SOIXANTE-TREIZIEME. 


,  Gouvernement  d'Alexandre.  11. 
Rétablissement  du  patriarche  Ni- 
colas, ixx.  Mort  d'Alexandre,  iv. 
Entreprise  de  Constantin  Dncas. 
▼.  Proclamé  empereur,  il  assiège 
le  palais,  vi.  Mauvais  succès  de 
Tentreprise.  vu.  Syn^éon  vient  as- 
siéger Constanlinople,  et  se  retire. 
Tiii.  Le  fils  du  doge  de  Yenise  â 
Constantinople.  ix.  Zoé  rentre 
dans  le  palais,  x.  Andrinople  per- 
due et  recouvrée.xi.  Alliance  avec 
les  Patzinapès.  xxi.  Courses  des 
Grecs  et  des  Sarrasins,  xiu.  Paix 
avec  les  Sarrasins,  xxv.  Les  Grecs 
marchent  contre  les  Bulgares,  xv. 
Bataille  d'Achéloiis.  xvx.  Romain 
Lécapène  accusé  de  trabison.xvii. 
Syméon  repoussé  devant  Con- 
stantinople. XVIII.  I/on  Phocas 
et  Romain  Lécapène  aspirent  tous 
deux  à  TEmpîre.  xix.  Romain  se 
saisit  du  chambellan  Constantin. 


XX.  Trouble  dans  le  palais,  xxi. 
Romain  vient  au  palais.  xxii.Léon 
prend  les  armes,  xxiii.  Romain 
dissipe  la  rébellion  de  Léon.  xxiv. 
Diverses  conjurations  contre  Ro- 
main, xxv.  Romain  couronné. 
XXVI.  Romain  élève  sa  famille  aux 
honneura  du  tràne.  xxvii.  Fin  du 
schisme  de  FÉglise  de  Constanti- 
nople. XXVI u.  Conjurations,  xxiv. 
Méchanceté  de  Rhentace.  xxx. 
Guerre  des  Bulgares,  xxxi.  Mort 
de  Théodora ,  femme  de  Romain, 
xxxii.  Le  roi  d'Ibérie  à  Constan- 
tinople.xxxui.Nouvelle  irruption 
des  Bulgares,  xxxiv.  Urne  des 
cendres  de  Manrice.  zxxv.  Ré- 
volte de  Boïlas.  xxxvi.  Nouvelle 
guerre  à  Andrinople.  xxxvu  Mort 
du  patriarche  Nicolas,  xxxviu. 
Léon-le-TripoIite  battu  à  Lemnos. 
xxxix.  Entrevue  de  Romain  et  de 
Syméon.  xl.  Élévation  des  fils  de 


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476 


T/LBLB   DES    MATIERES. 


Romain,  xu.  ÉntreprÎM  snr  TÉ- 
gypM.  ZLU.  Rivalité  de  Romain 
et  de  Syméon  par  rapport  &  la 
Servie,  xliii.  Troubles  datiâ  le 
Pëloponnèse.  xliv.  Origine  des 
Maïnotes.  tlw.  Conjuration  de 
Jean  le  Ministre,  xlvi.  Mort  de 
Syméon.  xi.tu.  Mariage  du  roi 
des  Bulgares  avec  la  petite-fille  de 
Romain,  xlvui.  Malatia  prise  par 
les  Grecs.  xi.ix.  Affaires  d*ItaUe. 
X..  Mort  du  patriarche  Etienne.  x.i. 
Cnerre  en  Arménie,  lu.  Conjura, 
tion  contre  Pierre,  roi  des  Bul- 
gares, un.  Mort  de  Christophe, 
uv.  Théopbylacte  patriarche,  lt. 
Charité  de  Romain.  i.ti.  Incursion 
des  Hongrois,  lvii.  Mariages  des 


fils  de  RÔmtio.  vrit.  Ét< 
divers,  lix.  Incanion  des  Rafi^ 
liX.  Exploits  et  disgrttt  de  km 
Curcuas  et  de  son  rrèn  IbéspUk 
txi.  Le  Toile  d*ÉdeMe  ti 
i  Constantinople.  lui. 
envoie  des  secoors  i  Iiii|Qei|ra 
d'Italie,  contre  lesSamsiau» 
Trêve  avec  les  H oqgrotf.  uir. 
Mariage  de  Romain, lik de Gdo- 
atantin  Porphyrogéncie.  w. 
Changement  de  vie  de  RiHJn* 
X.XVI.  Intrigne  de  Coll8ttDtisÎ0^ 
phyrogénète  ponr  détrôner  I» 
main,  lxvii.  RooiaiD  déttw 
Lxviii.  Enfants  de  Ronain. 


tïHf  DE  LA  TABtE  DU  TOME  TREIZ^ME. 


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HISTOIRE 


DU 


BAS-EMPIRE, 

Par  LEBEAU. 

NOUVELLE  ÉDITION, 
aBy»b   Bntièrement,  corrigée  et  augmentée  d'après 

LES   HISTORIENS    «IIENTATIX, 

Par  m.  de  SAINT- MARTIN, 

HCM0RS   DB    u'mtniTVJ  (académie   des   nfHCRIPTIOITJ   ET   BELLES- I.ETTRSS); 

continuée 
Par  m.  BROSSET  jeune, 

MEMBRE    OtJ    COirSBIL  DE    LA    SOCIÉTÉ    ASIATIQUE. 


PARIS, 


MÇRIMERIE  DE  FIRMIN  DIDOT  FRERES, 

'\\i''        IWKIMBUBS    DE    l'iNSTITUT,    »UE  JACOB,    V"   llf. 

M  DCCC  XXXVI. 


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