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THE LIBRARY
THE INSTITUTE OF MEDIAEVAL STUDIES
TORONTO
PRESENTED BY
Rev . J . P . Morro , C .S .B ......
May 1, 1965
I
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^JUSçSZs
USftAKl
LA
LITTÉRATURE FRANÇAISE
AU MOYEN AGE
OUVRAGES DE M. GASTON PARIS
RIBLIES PAU LA LIBRAIRIE HACHETTE ET C"
La Poésie du Moyen âge. Leçons et Lectures. Deux volumes.
lre série, 6e édition. Un vol. in-16, broché 3 fr. 50
2e série, 3e édition. Un vol. in-16, broché 3 fr. 50
Légendes du Moyen âge, 2e édition. Un vol. In-16, br. . 3 fr. 50
François Villon (Collection des Grands Écrivains français). Un
vol. in-16, broché 2 fr.
Chanson de Roland. Extraits publiés avec une introduction, des
observations grammaticales, an glossaire el des notes, 9e édi-
tion. Un vol. petit in-16, cartonné 1 fr. 50
Chrestomathie du Moyen âge, par MM. Gaston Paris, de l'Acadé-
mie française, et Langlois, professeur à la Faculté des lettres de
Lille, ij édition. Un vol. petit in-16, cartonne 3 fr.
Extraits des Chroniqueurs français (Villehardouin, Joinville,
Froissari, Cojntnines), publiés avec des notices, des notes, un
appendice, un glossaire des termes techniques et une carte, par
MM. Gaston Paris, de l'Académie française, et Jeanroy, profes-
seurs la Faculté des lettres de Toulouse, 0 édition. Un vol.
petit in-16, cartonné 2 fr. 50
Récits extraits des prosateurs et poètes du Moyen âge, mis en
français moderne. Livre de lecture ou d'explication cursive.
publié avec une introduction, des notices et des notes, 5e édi-
tion. Un vol. petit in-16, cartonné 1 fr. 50
B7-09. — Coulommiers. Imp. Paul BRODARD. — P7-00.
GASTON PARIS
LA
LITTÉRATURE FRANÇAISE
AU MOYEN AGE
(xie-xivc siècle)
QUATRIEME EDITION
revue, corrigée et augmentée
PARIS
LIBRAIRIE HACHETTE ET Ci8
79, BOULEVARD SAINT-GERMAIN, 79
19 09
Droits do traduction ot de reprodurUoi. - j&ervéa.
16* W
AVERTISSEMENT
DE LA TROISIÈME EDITION
Cette troisième édition a été préparée d'après un
exemplaire sur lequel G. Paris avait fait de nombreuses
corrections et additions. M. J. Bédier a pris la peine
de transporter les unes et les autres sur l'exemplaire
qui a servi à la réimpression, et a revu soigneuse-
ment, avec moi, les épreuves. Les notes bibliogra-
phiques, qui terminent l'ouvrage, n'avaient reçu de
G. Paris que quelques additions ou retouches. Cette
partie a dû être profondément remaniée, en tenant
compte des éditions et des travaux critiques parus
depuis 1889, date à laquelle s'arrête la bibliographie de
la seconde édition du Manuel. Pour accomplir ce rema-
niement, qui clans bien des cas équivalait à une refonte,
je ne me suis pas astreint au système suivi dans les
deux premières éditions. On sait que G. Paris se bornait,
la plupart du temps, pour chaque auteur ou écrit, à
renvoyer au dernier travail paru, alors même que ce
travail n'était qu'un simple compte rendu, une simple
annonce. Je n'ai pas cru devoir suivre cette méthode,
qui avait été généralement désapprouvée, et à laquelle
a
VI AVERTISSEMENT.
G. Paris avait, dans les derniers temps, l'intention de
renoncer. Là où j'ai eu à modifier les notes, pour les
remettre au courant, j'ai renvoyé à la dernière édition
de chaque ouvrage, y joignant la mention de quelque
compte rendu, lorsque, ce qui est fréquemment le cas,
ce compte rendu renferme des faits nouveaux ou des
rectifications de quelque importance. Il résulte de ces
explications que le texte même est d'un bout à l'autre
celui de G. Paris, mais que je suis, dans une assez
grande mesure, responsable des notes bibliogra-
phiques.
Paul Meyer.
Mai 1905.
AVERTISSEMENT
DE LA QUATRIÈME ÉDITION
Cette quatrième édition est, pour le texte, identique
à la troisième, sauf correction de quelques erreurs typo-
graphiques. Sans doute, depuis 1890, date de la deuxième
édition, d'innombrables publications ont été consacrées
à la littérature française du moyen âge. Certaines des
idées de G. Paris ont été contestées; des œuvres qu'il
n'avait pu connaître ont été mises au jour, et il n'est
pas douteux que, s'il avait vécu, il aurait retouché, pro-
bablement même récrit, plusieurs des paragraphes de
son livre et en eût ajouté de nouveaux, comme il avait
commencé à le faire en vue de la troisième édition,
AVERTISSEMENT VII
publiée deux ans après sa mort. Mais on ne pouvait
songera se substituera lui, et on a laissé subsister son
texte là même où il l'eût assurément modifié.
C'est par le développement de la bibliographie qu'on
s'est efforcé de mettre à jour ce précis de notre ancienne
littérature. Les notes bibliographiques qui, déjà dans
l'édition précédente, avaient été profondément rema-
niées et très augmentées, ont reçu cette fois encore de
nombreuses additions. Les études de quelque impor-
tance sur les œuvres mentionnées par G. Paris, et spé-
cialement les éditions nouvelles, ont été indiquées dans
les notes, et on a continué à y joindre entre parenthèses
le renvoi aux principaux comptes rendus, surtout
lorsque ces comptesrendus avaient pour auteur G. Paris.
C'est le seul moyen de tenir au courant de la science
un livre qui, dès la première édition (1888), a présenté
pour la première fois un résumé exact et bien propor-
tionné des connaissances acquises en une matière
pleine d'obscurité, et qui, sur bien des points, a préparé
les voies à de nouvelles recherches.
Paul Meyer.
Mai 1909.
AVANT-PROPOS
L'esquisse de la littérature française au moyen âge
qui remplit ce petit volume a été tracée, dans ses traits
essentiels, il y a quelques années, pour des leçons faites
à l'Ecole des hautes études (semestre d'hiver 1880-
1881). Revue et retouchée à plusieurs reprises, elle est
imprimée depuis un an, et ce n'est qu'après en avoir
plus d'une fois relu entièrement les épreuves que je
me décide à la livrer au public. Je ne m'en dissimule
pas d'ailleurs les lacunes et les insuffisances, et je ne
me (Jatte pas de n'y avoir point laissé d'erreurs, pro-
venant soit de ma connaissance imparfaite du sujet,
soit de l'attention inégale apportée à chacun des points
traités. Telle qu'elle est, je crois qu'elle peut rendre des
services, et si on veut bien m'aider à la perfectionner
en me signalant ce qu'on y trouvera de défectueux ou
d'inexact, elle finira par n'être pas trop éloignée du but
que je me suis proposé d'atteindre en l'exécutant.
Ce but, c'est de donner à ceux qui veulent aborder
l'étude de l'ancienne littérature française une orienta-
tion générale et une indication de l'état actuel de nos
connaissances. Comme les autres parties, que j'espère
publier bientôt, du Manuel d'ancien français, celle-ci
X AVANT-PROPOS.
est destinée aux commençants, mais aux commençants
qui ont le désir de travailler sérieusement et de se
familiariser avec l'outillage et les procédés de la science.
Je ne m'adresse pas précisément à ce qu'on appelle le
grand public, et je n'ai pas voulu écrire un livre de
lecture courante, quoique je ne me sois pas interdit de
présenter brièvement sur l'art et la société du moyen
âge quelques vues qui peuvent avoir de l'intérêt pour
des lecteurs même non spéciaux. J'ai visé surtout,
il'abord à faire comprendre l'évolution générale de la
littérature du moyen âge dans ses différentes formes,
ensuite à signaler, avec des renseignements de tout
genre, aussi précis et en même temps aussi concis que
possible, toutes les œuvres de cette littérature qui à un
titre quelconque m'ont paru mériter l'attention. Je n'ai
pu éviter, je le sens bien, de tomber souvent dans la
sécheresse qui est inséparable des énumérations, et j'ai
peur qu'en plus d'un endroit la condensation des faits
et le désir que j'ai toujours eu de dire ou de suggérer
beaucoup de choses en peu de mots n'imposent au lec-
teur un effort peut-être excessif et une tension d'esprit
un peu pénible. J'ai du moins cherché à mettre dans
mon exposition, à défaut de la légèreté que le plan ne
comportait pas, toute la clarté désirable, et j'espère que
les lecteurs attentifs ne se trouveront nulle part sérieu-
sement arrêt
Comme le tableau de la langue du moyen âge et les
Morceaux choisis qui formeront, avec le Lexique, les
trois autres parties du Manuel d'ancien français, le
tableau de la littérature s'arrête, à peu près, à l'avène-
ment des Valois (1327), au moment où va s'ouvrir la
AVANT-PROPOS. XI
guerre de Cent Ans. Il se produit en effet, à cette date
approximative, un profond changement dans la litté-
rature : d'une part la poésie narrative en vers tarit
complètement, d'autre part la poésie lyrique revêt
des formes toutes nouvelles; le théâtre prépare sa
grande expansion du xve siècle; un genre d'histoire
inconnu aux temps précédents apparaît avec Jean le
Bel et Froissart. En même temps, la langue, surtout
par la désuétude où tombe la déclinaison à deux cas,
entre dans une nouvelle phase. Le fond ni la forme ne
sont plus les mêmes : une longue période de transition
s'ouvre, qui va du vrai moyen âge à la Renaissance; à
l'histoire de cette littérature, il faudrait une introduc-
tion toute nouvelle. MM. Darmesteter et Hatzfeld nous
ont donné pour le xvie siècle un excellent manuel, auquel
je voudrais que, pour le moyen âge proprement dit, le
mien fût jugé digne de faire pendant. Il serait désirable
qu'on les rejoignît l'un à l'autre 'par un ouvrage ana-
logue consacré à la langue et à la littérature de la
période intermédiaire.
Ce livre est disposé dans un ordre méthodique qui
pourra" prêter à la critique, et dont je connais les points
attaquables : ainsi la littérature profane et la littéra-
ture religieuse ne sont pas nettement séparables; les
divisions des romans qui n'appartiennent pas à l'épopée
nationale, celles de la poésie lyrique sont parfois arbi-
traires ou se contredisent, etc. Mais toutes les classifi-
cations ont des inconvénients de ce genre, et cependant
elles sont tellement utiles que chaque science qui se
fonde commence par s'en donner une. D'ailleurs tout
autre plan aurait eu ses défauts, et aurait prêté plus
XI! AVANT -PROPOS.
que celui que j'ai adopté à la confusion et aux redites.
Seulement le complément naturel et presque indispen-
sable d'une histoire ainsi disposée serait un tableau
chronologique, présentant dans leur ordre de succes-
sion les faits répartis entre les différents chapitres. Ce
tableau, le manque de temps seul et le désir de ne pas
retarder indéfiniment une publication qui a déjà trop
attendu m'ont fait renoncer à le joindre dès mainte-
nant à mon livre; j'espère pouvoir combler cette lacune
dans une édition subséquente.
Les notes bibliographiques ne sont pas ce qui m'a
donné le moins de peine dans ce volume (bien que
M- J. Bédier m'ait apporté pour cette partie du travail
une collaboration fort utile), et cependant plies sont
extrêmement succinctes. Elles sont conçues dans un
système particulier, qui ne se juslilie que par la desti-
nation spéciale du livre, lequel a pour objet moins du
rassembler les faits acquis et de faire connaître des
résultats que d'exciter au travail et d/en donner les
moyens. J'ai trouvé inutile et fastidieux de reproduire
des listes qui existent dans des bibliographies spéciales,
comme celles par exemple de MM. Nyrop, Raynaud et
Petit de Julleville; je me suis borné à indiquer une fois
pour toutes les ouvrages (Je pe genre avec lesquels tout
travailleur doit se rendre familier. Mais là même où il
n'existe pas de travaux aussi commodes à consulter,
j'ai préféré le plus souvent citer, non des titres de
livres qu'y aurait fallu multiplier à l'infini, mais,
autant que pos-ible, le dernier endroit où il a été parlé
de chaque sujet : à cet endroit on trouvera toujours,
sauf erreur de ma part, soit l'indication des travaux
AVANT-PROPOS. Mil
antérieurs, soit un renvoi à cette indication donnée
ailleurs. Ce système pourra quelquefois laisser dans un
embarras momentané ceux qui n'auront pas sous la
main le livre ou le recueil qui est seul cité; mais il a
l'avantage, d'abord d'économiser beaucoup de place,
ensuite de fournir des renseignements d'un genre parti-
culièrement précieux pour les travailleurs1. Il n'a pas été
appliqué avec une rigueur absolue, et on pourra relever
dans mes notes quelques doubles emplois; mais en
général il a été suivi, et il en résulte d'une part que
des éditions de première importance ou uniques, des
ouvrages qu'on peut appeler classiques, des noms de
savants justement estimés ne figurent même pas dans
la bibliographie, tandis que certains recueils, comme
la Romania ou la Zeitschrift fur romanis che Philologie,
y reviennent presque à chaque ligne, et, d'autre part,
que des chapitres entiers, parmi les plus importants,
sont à peu près dépourvus de notes bibliographiques,
tandis que pour certains paragraphes ces notes sont
extrêmement multipliées. Le lecteur éprouvera sans
doute une certaine surprise au premier usage d'une
bibliographie ainsi conçue ; mais je pense qu'une fois
qu'elle lui sera familière, il en appréciera les avantages.
Elle a seulement besoin, je m'en rends bien compte,
d'être complétée en plus d'un point; elle aura surtout
besoin, si le livre doit avoir d'autres éditions, d'être
soigneusement tenue à jour. Sauf de très rares excep-
tions, je n'ai pas renvoyé directement aux sources
manuscrites, ce qui m'aurait fait complètement sortir
1. Ce système, jugé très incommode, a été entièrement modifié
dès la troisième édition. — P. M.
XIV AVANT-PROPOS.
du plan de ce livre; mais j'ai signalé autant que pos-
sible les ouvrages où se trouvent des informations
précises sur les manuscrits.
Quelques amis français et étrangers ont bien voulu
lire ce petit volume en épreuves et me communiquer
leurs observations, dont plusieurs m'ont été fort pro-
fitables. Je ne les nomme pas, pour ne point leur
donner une part de responsabilité dans les fautes que
je suis seul coupable d'avoir laissé subsister. Mais, à
un autre point de vue, je ne puis ne pas nommer
M. Paul Meyer. Depuis bientôt trente ans, dans une
émulation qui n'a jamais été une rivalité, nous culti-
vons ensemble le champ de la philologie romane, dont
il laboure d'ailleurs une plus vaste étendue, et qu'il
creuse en maint endroit plus profondément. Il n'y a
presque pas un paragraphe de ma bibliographie qui ne
se réfère directement ou indirectement à quelqu'un
des travaux par lesquels son zèle infatigable et son
admirable perspicacité ont reconnu, déblayé, fertilisé
le terrain. Sans ces travaux, qu'il met, avec un désin-
téressement sans égal, à la disposition de tous ceux
qui peuvent en avoir besoin, la rédaction de mon petit
livre eût été presque impossible, et si ce résumé marque
en certains points un progrès sur ce qu'on avait essayé
auparavant, c'est surtout lui qu'on en devra remer-
cier. Qu'il me permette donc de placer sous le patro-
nage de sa science et de son amitié un essai auquel,
malgré toutes les imperfections qu'il y discernera sûre-
ment du premier coup d'œil, il ne peut se défendre
d'avoir largement collaboré.
Paris, le 3 mai 1888.
AVANT-PROPOS. XV
La critique et le public ont fait à ce livre un accueil
extrêmement bienveillant : on en a excusé les imper-
fections et les erreurs en considération du service
qu'il rendait. De divers côtés, parfois de personnes
qui m'étaient complètement inconnues, j'ai reçu des
rectifications soit d'inexactitudes, soit de fautes d'im-
pression1. J'ai profité de ces bienveillantes indications
pour faire disparaître du livre un grand nombre de
petites erreurs. De mon côté je n'ai presque pas passé
un jour sans y apporter quelque retouche, m'efforçant
de le faire profiter de mes lectures ou de mes réflexions.
Pour le texte, j'ai pu faire un assez grand nombre de
corrections importantes et surtout d'additions (voir
notamment aux §§ 24, 25, 27, 32, 45, 53, 54, 55, 58,
68, 76, 87, 89, 91, 95, 124, 132, 136, 145, 147, 152,
153). Les Notes bibliographiques ont été mises au cou-
rant des publications les plus récentes. La Table
alphabétique a été revue avec soin et sensiblement
augmentée, notamment pour les noms des lieux dont
les auteurs étaient originaires. Enfin, dans cette nou-
velle édition, paraît le Tableau chronologique que je
n'avais pas pu joindre à la première.
En présentant ce Tableau au public compétent, je
me crois en droit de faire appel à toute son indulgence.
C'est la première fois qu'on essaie de grouper en ordre
chronologique les dates assignées aux productions de
notre ancienne littérature. Celles que l'on trouvera ici
1 Je remercierai particulièrement mon excellent ami Cari Wah-
lund, d'Upsal, qui a revu avec la plus grande attention les Notes
bibliographiques. Une revision partielle, fort soigneuse aussi, m'a
été envoyée de Gôrlitz par M. Pilz, que je n'avais pas le plaisir
de connaître.
XVI AVANT-PROPOS.
paraîtront les unes trop précises, les autres trop
vagues. Je conviens que le temps m'a manqué pour
vérifier aussi minutieusement que je l'aurais voulu
toutes les dates d'années que j'ai inscrites, et j'aurais
probablement dû les accompagner plus souvent de
quelque réserve dubitative. Quant à la catégorie des
dates vagues ou générales, quelques-uns se deman-
deront sans doute s'il était bien utile d'établir ces
listes, dont la longueur ne sert qu'à montrer com-
bien notre connaissance de l'ancienne littérature
française est encore incomplète, et s'il n'aurait pas
mieux valu se borner à enregistrer les dates certaines
ou à peu près certaines que l'on possède. Je répon-
drai qu'il n'est pas sans intérêt de savoir quels genres
étaient en faveur à telle ou telle période, même mal
déterminée, et que j'ai tenu à coque tous les ouvrages
mentionnés dans le texte figurassent à une place
quelconque dan- le Tableau chronologique*. Quant
à l'aveu d'ignorance qu'implique ce long dénombre-
ment d'ouvrages attribués sans plus de détermination
à un siècle, un demi-siècle, un tiers de siècle, je le
fais volontiers, persuadé que tel ou tel de mes con-
frères en philologie sait ce qui, pour le moment,
échappe à ma mémoire ou à mon information, et
qu'ils m aideront à diminuer, au profit de la cbjrono-
1. Bien entendu, il ne faut pas y en chercher d'autres, et repro-
cher au Tableau dos omissions d'ouvrages datés qui ne sont pas
nommés dans le texte (ce cas, d'ailleurs, sera, je l'espère, assez
rare). — On comprendra facilement pourquoi, le livre étant pro-
prement restreint à ta période qui va de 1000 à 1340. on trouve
dans le Tableau quelques dates antérieures ou postérieures : c'est
- dates ont été, pour une raison ou pour une autre, données
dans le texte.
AVANT-PROPOS. \VK
logie positive, l'étendue de ces zones mal délimitéeà.
Mon ébauche, je n'en doute pas, servira surtoul de
(thème à des rectifications où l'on pourra souvent
me prendre on faute; je les accepte d'avance .'ivre
reconnaissance, heureux d'avoir fourni tout au moins
une première base à un ordre de recherches dortl
l'importance, pour l'histoire littéraire, est visiblement
capitale.
On a fait au plan général de cet ouvrage — et par
là même au plan du Manuel dont il forme la première
partie — doux objections de principe. On a contesté
la légitimité de la limite chronologique et do la
limite géographique dans lesquelles il s'est enfermé.
D'après les uns, j'aurais dû pousser mon éxpdsé
jusqu'à la Renaissance; d'après les autres, j'aurais du
y comprendre la littérature méridionale. A la pre-
mière de ces suggestions, j'ai répondu d'avance, aussi
bien que je l'ai pu, dans l'avant propos de la pre-
mière édition. Je ne disconviens pas des avantages
qu'il y aurait pour les étudiants à posséder un manuel
qui comprendrait tout le moyen âge dans le sens
qu'on attache habituellement à ce mot, et je sais par-
faitement qu'il n'y a pas en histoire de limites tran-
chées, et que la société française de 1327 n'a pas
été transformée d'un coup de baguette parce que
les Valois ont succédé aux Capétiens directs. Mais
les raisons que j'ai données me paraissent encore
valables : il serait, je le crois toujours, préférable de
traiter dans un ouvrage à part l'époque littéraire qui
embrasse la seconde moitié du xive siècle, tout le xve
et le commencement du xvie, et qui a produit Frois-
XVIII AVANT-PROPOS.
sart, Eustache Deschamps, Christine de Pisan, Charles
d'Orléans, Martin Le Franc, Villon, Monstrelet, An-
toine de la Sale, Commines, Jean Le Maire, les grands
mystères, les farces et sotties, les romans et contes en
prose, les chansons populaires, tous ces écrivains et
toutes ces œuvres d'un genre inconnu à l'époque pré-
cédente. Cependant, si personne n'entreprend l'œuvre
intermédiaire que je souhaiterais voir se produire entre
la mienne et celle de MM. Darmesteter et Hatzfeld, je
tenterai peut être quelque jour de combler cette lacune.
Mais d'abord il faut que le présent Manuel soit achevé
dans toutes ses parties sur le plan dans lequel il a été
conçu.
Ce que j'ai dit de la littérature des xive et xvc siècles,
je le dirai de la littérature méridionale. Assurément
l'histoire de l'une pourrait, du xie au xrve siècle, courir
parallèlement à celle de l'autre. Toutes deux appar-
tiennent à la Gaule romane, et, au point de vue linguis-
tique, je suis de ceux qui contestent l'existence d'une
ligne de démarcation tranchée entre une prétendue
langue d'oïl et une prétendue langue d'oc. Mais mal-
gré la parenté linguistique, malgré l'ancienne union
gauloise et la moderne union française, les deux littéra-
tures ont été au moyen âge profondément distinctes.
Elles ont agi l'une sur l'autre et se sont fait des em-
prunts, mais dans une mesure qui ne dépasse guère
celle des influences exercées par l'une ou par l'autre
sur des littératures étrangères au domaine gallo-
roman. Leur histoire présente un parallélisme, non un
entrelacement, et les quelques fils qui rejoignent çà
et là les deux lignes de leur évolution ne suffisent pas
AVANT-PROPOS.
XIX
à les relier. Il faudrait, pour exposer l'histoire de ,a
^rature du Midi, une introduetiou spcma.e, et ses
Ï lotions n'entreraient pas dans le, cadres qm ont
LLués pour celles de la littérature du Nord. Dad-
mes études ne m'ont pas porté à approfondi les
'étions très comple.es que soulève cette luston,
' :m renoncé d'autant plus volontiers à 'cerne que le
' b ic français est en droit de l'attendre prochaine-
«enTd'une main beaucoup plus sûre et plus savante
^."toST-coor. préambule en remerciant encore
Tiï ment tous ceux qui, soit dans des comptes rendus
oit dans des correspondances privées, m'on » rh
auelaue erreur ou de quelque omiss.on, et en 1 ur
^dant de continuer leur «-f "^
cette nouvelle édition, qui, grâce a eux, est de,a sens.
blement améliorée.
G. r.
Gorges, 22 septembre 1S89.
, ce que Je me r^*^Z Z^^^t^Z
Uvre, c est la littérature francoMtaienneû q^ g
seulement ont été mentionnées equ^eta je ^
m0ins d'intention), au^ ^^^x quTvoudraient la connaître
tonne de M. Gaspary.
LA
LITTÉRATURE FRANÇAISE
AU MOYEN AGE
INTRODUCTION
1. Nous allons passer rapidement en revue la littéra-
ture composée en français depuis les origines jusqu'au
second tiers environ du xive siècle. Par ce mot fran-
çais nous entendons, sans distinction de dialectes, le
latin vulgaire du nord de la Gaule. Le domaine de la
littérature coïncide à peu près complètement avec
celui de la langue; mais il est un peu plus nettement
limité du côté du sud, parce que les productions lit-
téraires de la zone intermédiaire se sont de bonne
heure orientées soit vers le nord, soit vers le midi. Il
comprend donc les provinces de la Gaule situées au
nord de la Loire, et, au sud, la Saintonge, le Poitou, le
Berri, le Nivernais, plus la Bourgogne et la Franche-
Comté. La Gaule, ainsi diminuée de sa moitié méridio-
nale, n'est pas encore restée intacte. Elle a été forte-
ment entamée à partir du Ve siècle par les invasions
1
2 INTRODUCTION.
allemandes, qui ont germanisé sur la rive gauche du
Rhin une large bande de territoire, comprenant une
partie de la Suisse, l'Alsace, la Lorraine allemande, la
Bavière rhénane, la Prusse rhénane, la partie flamande
de la Belgique et la partie cisrhénane des Pays-Bas. Ces
pays, dont quelques-uns avaient d'ailleurs, lors de la
conquête romaine, une population de race germanique,
avaient été romanisés comme le reste de la Gaule; les
populations romanes qui les habitaient furent, à l'époque»
des invasions, ou exterminées ou assimilées par les
conquérants, et dès lors ils appartinrent au monde
germanique. A l'autre extrémité du domaine, l'ouest de
la péninsule armoricaine fut, à partir du Ve siècle, envahi
par des Bretons insulaires, qui y établirent leur race,
leur civilisation et leur langue (voir ci-dessous, § 53).
2. Dans le domaine ainsi limité, l'unité n'était pas
grande à l'origine (si nous entendons par là, quitte à
revenir sur la période antérieure, les premiers temps
qui suivirent la disparition de l'autorité romaine . Les
rois mérovingiens partageaient leur patrimoine sans
tenir compte des affinités naturelles; mais les plus puis-
sants, le fondateur de leur pouvoir, Chlodovech, plus
tard Chilpéric, Dagobert, mirent déjà à Paris le siège
de la royauté et en firent ainsi le centre des provinces
septentrionales de la Gaule. A partir de la mort de
Dagobert ($3$) sr marque la grande rivalité entre l'Aus-
trasie (pays des Francs restés allemands) et la Neustrie
(pays où les Francs s'étaient romanisés); Paris est la
capitale de la Neustrie. Depuis la victoire du maire
australien Pépin, à Testri ( ( '. s 7 . la suprématie apparl ient
à l'Austrasie; la Neustrie veut reprendre la lutte à la
mort de Pépin, mais elle est définitivement vaincue.
Sous Charles Martel la puissance austrasienne atteint
INTRODUCTION. 3
son apogée; sous Pépin et surtout sous Ch.artemagi ■<■
elle perd son caractère spécial en absorbant à peu prè3
toute la chrétienté latine et en reconstituant l'empire
d^Occident. Mais les anciennes divisions persistent, et
sous Louis, favorisée par les querelles de la famille
impériale, la désagrégation se prépare. Elle éclate dans
les guerres de ses fils, où Charles représente la Ncustrie
eu opposition à l'orient purement germanique. La France
moderne date du traité de Verdun en 843 : elle constitue
le royaume de Charles, et en garde longtemps, pour lis
Allemands, le nom de Karlingen, comme le royaume
de Lother a gardé en partie jusqu'à nos jours celui
de Lothringen. Ce pays est dès lors détaché pour jamais
de l'Allemagne, et il va affirmer encore sa prétention
à l'existence indépendante en l'incarnant dans une
famille toute nationale, qui deviendra la dynastie capé-
tienne. La France du IXe siècle n'a pas encore une cohé-
sion bien nette; mais sa force vive est entre la Loire et
la Meuse. Paris redevient, avec ses comtes, le centre du
royaume et le foyer principal de la vie nationale, et, à
partir de leur avènement au trône, il en est définitive-
ment la capitale, tandis que les derniers Carolingiens
lui avaient préféré Laon, place plus forte et plus voisine
de leurs alliés habituels d'outre-Rhin.
3. Dans ce domaine se parle à l'origine une langue à
pou près identique, le latin vulgaire, qui, même d'un
bout de la Gaule à l'autre, ne présente pendant long-
temps que des nuances insensibles. Peu à peu dans cette
unité se marquent des différenciations locales. Les
Serments échangés à Strasbourg en 842 ont déjà des traits
qui appartiennent au français du nord et qui sont
inconnus à celui du midi; d'autres, qui devront produire
une séparation bien plus grande, n'y apparaissent pas
4 INTRODUCTION.
encore. Entre les divers dialectes du nord les différences,
au ixc siècle, sont déjà sensibles, mais non telles qu'elles
empêchent de se comprendre. Ces différences vont par
la suite en s'accusant de plus en plus; mais ces dia-
lectes ont entre eux tant de traits communs qu'ils
restent toujours assez voisins, et que les œuvres écrites
dans l'un d'entre eux peuvent être lues ou entendues
dans la région où se parle l'autre, et facilement,
quoique souvent très grossièrement, accommodées par
les copistes à leurs parlers respectifs. A partir du
xne siècle la prépondérance littéraire du dialecte « fran-
cien >, ou de ceux qui lui ressemblent le plus, est tout
à fait dessinée, et toutes les œuvres littéraires la subis-
sent plus ou moins.
4. L'unité de sentiments nécessaire pour donner une
base à une littérature nationale, est fournie aux hommes
qui habitent ce domaine d'abord par la langue et le sou-
venir de l'ancienne communauté d'intérêts et d'affec-
tions, puis par le christianisme, auquel les Gallo-Romains
étaient convertis au Ve siècle, et que les Francs adop-
tèrent, comme eux. sous sa forme catholique; — par
l'opposition contre les païens et les hérétiques ; — par la
royauté mérovingienne, dans les moments où elle semble
se constituer fortement et prendre la direction éner-
gique de la nation; — plus tard parles efforts communs
de l'aristocratie, allemande en grande partie d'origine,
mais bientôt romanisée, et souvent liguée avec le clergé
pour lutter contre la royauté; — par l'amour de la
patrie française, qui se développe dans les guerres
contre les Allemands, contre les Aquitains, contre les
Sarrasins, etc. Sous les Austrasiens et sous Charle-
magne ce sentiment gallo-franc s'absorbe plus ou moins
dans un sentiment plus général (impérial) ; il se retrouve
INTROPUCTION. 5
après le partage de l'empire, mais il est compromis
presque en môme temps par le morcellement féodal, qui
cependant ne le supprime pas, et qui, par une heureuse
évolution, trouve à la fois son terme et le commence-
ment de sa destruction au profit de l'idée unitaire dans
l'établissement de la royauté capétienne. Dans certaines
parties du domaine, cependant, le sentiment de l'unité
se perdit d'une façon plus ou moins grande. A l'est les
contrées assignées au royaume de Lother, et dont plu-
sieurs furent plus tard considérées comme appartenant
à l'Empire, n'eurent avec le reste de la France qu'un lien
assez flottant qui fut, suivant les temps, plus lâche ou
plus resserré. Toute une importante fraction de la Neus-
trie fut cédée, au commencement du Xe siècle, à de nou-
veaux envahisseurs germaniques, les Normands; ils se
francisèrent, il est vrai, de bonne heure, mais, depuis que
leurs ducs, en 1066, furent devenus rois d'Angleterre,
le rapport de vassalité qui continuait à les unir à la
royauté française ne fut plus qu'apparent, et il se forma
même entre Normands et Français un violent antago-
nisme, qui disparut d'ailleurs plus promptement qu'on
n'aurait pu le croire quand Philippe II eut annexé la
Normandie. La Bretagne française, l'Anjou, le Maine, la
Touraine furent réunis à la couronne d'Angleterre par
l'avènement à cette couronne du comte Henri Plante-
genêt, ainsi que le Poitou, qu'il avait acquis en épousant
Aliénor quand Louis VII s'était séparé d'elle : toutes
ces provinces furent reprises par Philippe II en même
temps que la Normandie. La Bourgogne, donnée en
apanage au fils de Bobert, mena pendant toute la
période qui nous occupe une existence assez isolée. La
Champagne, soumise à ses comtes, fut en rapports très
étroits, mais parfois hostiles, avec la royauté jusqu'au
mariage de Philippe IV avec l'héritière du dernier comte,
6 INTRODUCTION.
mariage qui réunit cette province à la couronne. L'Ar-
tois, les comtés de Boulogne, de Guines, de Saint-Pol,
furent l'objet de nombreuses contestations. Les puis-
santes villes du nord-est formaient de petits États bour-
geois presque indépendants. Entre l'Artois, la Nor-
mandie, le .Maine, l'Anjou, la Touraine, le Béni, la
Bourgogne et la Cbampagne s'étendaient les domaines
propres du roi, comprenant essentiellement l'Ile-de-
France, le Perche, le Vexin français, une partie de la
Picardie et rOrléanais : c'est là qu'il faut chercher le
vrai foyer de l'unité nationale.
:.. Toutes les provinces n'ont pas pris au moyen Age
une part égale à l'activité littéraire. La première
période, purement épique, appartient surtout au
nord-est, à la France propre et au nord-ouest ; la poésie
plus raffinée qui a sa principale expression dans les
romans de la Table Ronde fleurit particulièrement en
Champagne et en Picardie; ce fut aussi dans ces régions
que fut cultivée presque exclusivement la poésie lyrique
des hautes classes et plus tard de la bourgeoisie. La Nor-
mandie et les provinces qui se rattachaient à elle depuis
l'avènement des Plantegenèt cultivèrent de préférence
la littérature historique et didactique; à cette littérature
normande se rattache, comme un immense provin qu'on
ne peut séparer de sa souche, la littérature anglo-nor-
mande qui pendant deux siècles fut l'organe de la
société française établie en Angleterre à la suite de la
conquête. Les provinces de l'ouest prirent à la littéra-
ture de divers genres une part assez faillie, mais pré-
sentent plus d'une production digne d'intérêt, surtout
au point de vue linguistique. La Bourgogne n'est
presque pas représentée dans les monuments qui nous
restent, quoiqu'elle ait eu au moins une grande produc-
ÏNTHOm'CTION. 7
lion épique, In mouvement âctiFdè traduction, surtout
d'oeuvres religieuses, se manifesté dans l'est et le
bord-est à partir de la Bh du \n" siècle. L'Orléanais
produisit aU \in" siècle les deUK poètes qui devaient
donner à cette époque son empreinte la plus marquée,
(luillaume de Lorris et Jean de .Menu. La Châtnpagriê
fournit au même siècle les plus remarquables de ses
historiens en prose, surtout des auteurs de mémoires,
lundis que la Flandre s'adonna avec ardeur à la rédac-
tion d'histoires générales. Le théâtre, fécond en Angle-
terre dès lfe \n' siècle, lut SuftOtit brillant par la suite
dans les grandes communes picardes. Enfin tous I«s
aspects de la littérature nationale lurent plus ou moins
représentés dans l'Ile-de-France, et. à partir duxmesiècle,
cette littérature, devenant de moins en moins populaire,
trouva son centre à Paris, comme les études latines,
auxquelles elle se rattachait de plus en plus, y avaient
le leur. C'est là qu'on traduisait la Bible, qu'on rédigeait
les chroniques royales, que Henri d'Andeli et Ruste-
beuf prêtaient aux querelles universitaires la forme de
la poésie française, que Jean de Meun écrivait la seconde
partie du Roman de la Rose, et que les hommes de talent,
désireux de se faire connaître, accouraient de toutes
parts. Avec le règne de Charles V, la cour allait devenir
pour un temps le centre de toute littérature sérieuse.
8. Il faut maintenant revenir sur nos pas et reprendre
à l'origine l'examen des éléments intellectuels et moraux
qui devaient entrer dans la littérature française du
moyen âge et dans la nationalité dont elle fut l'expres-
sion. Dans la région que nous avons délimitée, quelles
sont les conditions premières et subséquentes de race,
de milieu, etc.? Le fond de la nation est celtique. Les Celtes,
établis en Gaule dès l'époque préhistorique, parlaient
8 INTRODUCTION.
une langue de la grande famille indo-européenne, voi-
sine notamment, à l'origine, de l'italique et du germa-
nique. Longtemps seuls maîtres de l'Allemagne occiden-
tale et méridionale et du nord de l'Italie, ils le restaient
de la Gaule (dont cependant le sud-ouest était ibérique
et le sud-est, primitivemeut ligure, avait été celtisé) et
des lies Britanniques; le groupe établi en Irlande (et
plus tard en Ecosse) se distinguait par certains carac-
tères linguistiques de celui, beaucoup plus considérable,
qui peuplait la Gaule et la Bretagne. Les Galli (nom donné
parles Romains aux Celtes de Gaule) avaient, au moment
où les Romains s'emparèrent de leur pays, une civilisa-
tion assez avancée. Leur religion, originairement sem-
blable à celle des autres peuples de la famille, avait pris
une forme propre. Ils avaient une caste sacerdotale et
en même temps savante et littéraire, les druides, dont
l'institution paraît leur être venue de Bretagne'; les
druides possédaient une poésie théologique et didac-
tique, mais il était défendu de l'écrire. Les rapports des
Gaulois avec la civilisation gréco-romaine s'étaient faits
surtout par les Gaulois orientaux et par la Grèce : ils
employaient les lettres grecques, ils imitaient les mon-
naies grecques. Dès avant la conquête, ils avaient aussi,
par l'intermédiaire des marchands qui venaient chez
eux en grand nombre, subi l'influence du monde
romain. Leur organisation était aristocratique : les
nobles et les prêtres dominaient un peuple réduit
presque à la servitude. Leurs villes, à peu d'exceptions
près (comme Avaricum), paraissent n'avoir guère été
que des enceintes fortifiées où les populations se réfu-
giaient en cas de guerre; mais les nobles n'avaient pas
de châteaux forts. Les Gaulois étaient bons cultiva-
teurs, quoique la propriété individuelle du sol fût à
peine constituée chez eux, et ils possédaient certaines
TNTHOnrCTION. 9
industries. Une Ibis conquis, ils se romanisèrent très
vite. Les nobles lurent laits citoyens romains et môme,
déjà par César, sénateurs. La population entière apprit
le lai in, dans les hautes classes celui des grammairiens,
dans la masse le latin vivant et familier, et oublia sa
'langue, qui n'a laissé en français à peu près aucun ves-
tige. Au bout de quatre siècles, il n'y avait plus per-
sonne en Gaule qui parlât gaulois. Dans ces conditions,
certains traits du caractère celtique ont pu persister
dans le caractère français; mais les traces celtiques dans
la littérature ne sont pas saisissables. Notre mythologie
populaire, conservée encore dans les croyances et les
usages des campagnes, et parfois exprimée dans des
récits ou des chants, remonte sans doute en partie à
celle des Celtes; mais il n'est que bien rarement pos-
sible d'en retrouver l'empreinte dans les œuvres du
moyen âge. Une grande masse de traditions celtiques,
pour la plupart de formation plus récente, devait péné-
trer au xue siècle dans la littérature française; mais elle
n'y était pas sentie comme élément national : c'était une
importation étrangère venue de PArmorique celtisée
et de la partie de la Grande-Bretagne restée celtique,
par l'intermédiaire des Normands continentaux ou
insulaires.
7. La Gaule fut donc romanisée, et c'est là le fait pri-
mordial et capital de notre histoire littéraire. Les
Romains, peuple de même race que les Celtes, avaient, à
l'époque où ils les soumirent, profondément modifié,
sous l'influence des Grecs, leur individualité intellec-
tuelle. Ils avaient une religion et une littérature offi-
cielles, l'une et l'autre assez étrangères au peuple, tant
à celui du noyau primitif de leur empire qu'à celui
qu'ils avaient déjà assimilé dans l'Italie et ailleurs. La
iO iNthODUCTlON.
vieille religion romaine avâif été Pondue avec la reli-
gion grecque, dont elle âvail adopté les dieux en leur
donnant les noms des siens. Cette religion ainsi rema-
niée était presque réduite à un culte extérieur. Sous
Auguste elle devint une- religion officielle pour toul
l'empiré, ayant pour centre le culte de Home et bientôt
celui d'ÀUgUSte même, el partout elle revêtit du nom
de ses dieux, pour se les assimiler, les dieux indigènes
de- peuplés soumis. Les hautes classes, eu Gaule,
acceptèrent avec enthousiasme Cette religion, qui
consacrait l'Union de leur pays avec l'empire. La
littérature romaine y lleuril bientôt aussi, surtout dans
le midi, mais plus tard à l'est et au nord : ht Gaule fut,
avant l'Afrique, le dernier asile de l'éloquence et de la
poésie latines ; citôhs seulement les Panégyriques gau-
lois, Ausone, Sidoine Apollinaire, et les écoles de
grammaire et de rhétorique dont ils nous attestent
l'existence. Mais toute cette littérature d'écoles, d'aca-
démies et de salons ne pénétrait pas dans le peuple et
ne devait servir en rien à l'avenir isauf bien entendu ce
qui. par l'intermédiaire des savants, rentra plus tard
dans la littérature française). Le peuple parlait un latin
très différent de celui du monde officiel; il ne pouvait
rien comprendre aux productions artificielles des rhé-
teurs et des poètes de la décadence. Quand les Barhares
eurent détruit le monde romain, le latin classique con-
tinua cependant à être la seule langue écrite, la langue de
l'État el de l'Église, et cela par une invincible nécessité :
on ne pouvait le remplacer ni par le latin vulgaire, qui
n'en était aux yeux de toUs qu'un usage vicieux, ni par l'al-
lemand, que la majorité ne comprenait pas. et que les
Fiancs eux-mêmes avaient si peu l'idée d'écrire qu'ils
raisaienl rédiger en latin leur loi nationale. 11 résulta
de là que la classe ecclésiastique ou plutôt cléricale,
INTRODUCTION. 4 1
qui embrassait au moyeu Age, à peu d'exceptions près,
huiles les professions intellectuelles, garda, l'usage du
latin môme quand on eut commencée écrire eu français,
l'entretint dans les écoles, le perpétua pendant tout le
moyen Age connue langue savante et sérieuse. C'est là
un événement de grande importance, un l'ait capital,
qui détruisit toute harmonie dans la production litlé
raire de cette époque : il sépara la nation en deux, et
fut doublement funeste, en soustrayant à la culture de
la littérature nationale les esprits les plus distingués el
les plus instruits, et en les emprisonnant dans une
langue morte, étrangère au génie moderne, où une lit-
térature immense et consacrée leur imposait ses idées
et ses formes, et où il leur était à peu près impossible
de développer quelque originalité. La littérature latine,
pendant toute la période qui fait le sujet de notre étude,
vécut à côté de la littérature en langue vulgaire, et h
vrai dire l'histoire littéraire du moyen Age n'est com-
plète que si on les embrasse l'une et l'autre; mais nous
sommes obligé de laisser complètement de côté, sauf
quelques références indispensables, les ouvrages com-
posés en latin, et même presque toutes les indications
relatives à l'enseignement des écoles, qui, à partir au
moins d'une certaine époque, influença la littérature
vulgaire, mais qui, à tous les degrés sauf le plus
humble (et celui-là môme non pas absolument), se don-
nait uniquement en langue latine.
8. Si la littérature des Romains ne s'est pas continuée
dans la nôtre, la domination romaine a cependant
puissamment agi sur elle. Directement elle l'a déterminée
tout entière, et non pas seulement dans la forme, en
substituant une langue à une autre. Le français n'est
autre chose, en effet, que l'une des formes du latin vul-
12 INTRODUCTION.
gaire ou roman, et les fils des Gaulois parlent depuis
dix-huit siècles une langue formée aux bords du Tibre.
Les conséquences de ce fait sont incalculables : pour un
peuple, changer de langue, c'est presque changer d'àme.
Avec la langue s'introduisit la versification populaire des
Romains; nous ne savons pas quelle était la versification
nationale des Gaulois, mais il ne dut pas s'en conserver
pins que de leur langue et de leur religion : la versifica-
tion populaire française a les mêmes principes que celle
des autres peuples qui parlent des dialectes du latin vul-
gaire; elle s'explique tout entière comme un dévelop-
pement de la versification latine rythmique. Avec la
langue et la versification, un monde d'idées nouvelles
pénétra nécessairement dans l'esprit des populations
celtiques parleur incorporation à l'empire et leur parti-
cipation à la civilisation gréco-romaine. Une analyse de
ce qui, dans notre esprit national aux diverses périodes,
et par conséquent dans notre littérature, remonte à
cette époque si importante de notre histoire ne saurait
être entreprise ici : outre qu'elle demanderait un grand
espace, il lui manquerait, pour être sûre et précis;-,
bien des éléments qu'on ne peut reconstituer. Il est
d'ailleurs presque impossible, et c'est l'écueil des
théories de ce genre, de distinguer dans l'histoire
sociale et intellectuelle d'un peuple ce qui a son origine
dans chacune des diverses phases par lesquelles il a
passé: on a même bien de la peine à déterminer pen-
dant combien de temps l'influence de chacune de ces
phases persiste : l'effet de chacune d'elles sur le peuple
est sans cesse affaibli par les conditions nouvelles où le
pousse l'histoire, à moins qu'une d'entre elles n'ait
réussi, ce qu'on peut difficilement savoir, à marquer un
groupe humain d'une empreinte indélébile qui semblera
désormais faire partie de son essence même.
INTRODUCTION. 1 3
9. Indirectement, la domination romaine eut un effet
non moins important : elle servit à l'introduction et à
l'établissement du christianisme. La religion nouvelle
avait pénétré d'abord dans le midi de la Gaule, où les
groupes de juifs hellénisants étaient nombreux, sous
forme grecque; mais au nord ce fut essentiellement sous
forme romaine qu'elle conquit la population. Les com-
mencements de la christianisation des Gallo-Romains
du nord sont obscurs; elle était loin d'être accomplie à
la fin du IVe siècle, où Martin, évèque de Tours et fon-
dateur des premiers monastères de Gaule (Ligugé et
Marmoutier), lui fit faire d'immenses progrès. Un
siècle après, quand les Francs arrivèrent, le triomphe
de la religion venue de Judée était complet. Dans
les campagnes persistait sans doute encore l'affec-
tion pour les petits dieux locaux et familiers; mais
les autorités ecclésiastiques, fortement constituées et
soutenues depuis Constantin par le pouvoir légal,
exterminaient impitoyablement ces vestiges de poly-
théisme et inculquaient avec énergie aux popula-
tions la foi en un seul Dieu en trois personnes, à l'incar-
nation, à la rédemption et à une autre vie bienheureuse
ou damnée. L'instruction que recevait le peuple devait
d'ailleurs être fort sommaire; le christianisme ainsi
implanté était de sentiment plus que de dogme, et resta
tel pendant longtemps. Il est remarquable que la plu-
part des mots français relatifs aux enseignements de la
religion ont une forme qui n'est pas populaire, c'est-à-
dire qu'ils ne paraissent point avoir, dès l'époque
romaine, passé par la bouche du peuple : tels sont les
représentants des mots latins virgo, spirilus, trinitas,apos-
tolus, epistola, etc. Il n'en est pas de même des mots qui
expriment les pratiques les plus ordinaires du culte,
comme missa, baptismus, jejunare, ou les degrés princi-
j | INTRODUCTION,
paux «le la hiérarchie ecclésiastique, comme p*eâ6yfer,
monachus, abbas, episcopus mais papa et son synonyme
dicus a'onl donné que des mots savants). Ces
simples constatations jettent un jour particulier sur
l'étal des esprits, dans la grande musse, au point de vue
religieux, à l'époque mérovingienne. Une croyance
générale dans la puissance de Dieu ou des saints et celle
du diable, qui se manifestent sans cesse par des
miracles contraires, une foi enfantine aux prodiges, aux
sorts, aux prophéties, la peur des châtiments de l'autre
vie, l'importance extrême attachée aux pratiques, l'hor-
reur du paganisme et de l'hérésie, tels étaient les traits
principaux de la religion des Gallo-Romains, qui, avec
quelques additions (comme la dévotion particulière à la
Vierge , persistèrent pendant le moyen âge et s'expri-
mèrent dans la littérature. L'Église, comme nous l'avons
vu. conserva le latin grammatical pour la langue offi-
cielle, mais, au bout de trois siècles, l'écart entre ce
latin et celui du peuple étant devenu trop grand, elle
fut obligée d'employer ce dernier pour l'instruction
religieuse. Ce besoin coïncidait précisément avec la res-
tauration par les soins de Charlemagne, du latin clas-
sique dans une forme plus correcte, qui éloignait encoro
davantage la langue des clercs de celle des laïques;
aussi, en 812, le concile de Tours, dont les prescriptions
furent répétées par d'autres, ordonna-l-il que les
prêtres missent « en langue romane rustique » les ins-
truetions qu'ils adressaient à leurs ouailles. Ce fut le
commencement de la littérature sérieuse en langue
vulgaire, et ce premier pas, bientôt suivi d'autres,
devait aboutir, mais seulement après bien des siècles,
a la victoire définitive du français comme langue litté-
raire.
INTRODUCTION. 1 S
10. Le christianisme, et plus particulièrement le catho-
licisme (quoique ce mot éveille aujourd'hui plu^ d'une
idée qu'il ne suscitait pas autrefois), donne au moyen
âge toute sa physionomie intellectuelle et une partie de
sa physionomie morale. On peut, en négligeant certains
faits exceptionnels et isolés, dire que la foi fut alors
complète, absolue, sans restriction et sans doute. J.e
monde apparaissait à tous comme divisé en trois étages
superposés : au centre la terre, où se livre le combat
• le la vie, où l'homme, déchu mais racheté, libre de
choisir entre le bien et le mal, est perpétuellement en
butte aux pièges du diable, mais est soutenu, s'il sait
les obtenir, par la grâce de Dieu, la protection de la
Vierge et des saints : de son succès dans cette lutte
dépendra son sort éternel, ou dans le ciel une félicité
parfaite, ou dans l'enfer des supplices inouïs; — en haut,
le ciel avec la Trinité, les anges, la Vierge et les saints,
s intéressant aux épreuves humaines et y intervenant à
chaque instant, mais sans suite et d'une manière fort
arbitraire; — en bas, l'enfer avec les diables ayant la
faculté de venir sur la terre et de tenter les hommes,
qu'ils se réjouissent d'associer à leur damnation et que
leur disputent les pouvoirs d'en haut. Le grand événe-
ment de la vie, dans cette conception, c'est le péché : il
s'agit ou de l'éviter ou de l'expier; une littérature con-
sidérable enseigne surtout à ne pas se désespérer, quel-
ques péchés qu'on ait commis, car non seulement Dieu
pardonne toujours au repentir, mais les plus grands
saints, ceux pour qui ont été faits les miracles les plus
extraordinaires, ont souvent commencé par être les
pécheurs les plus criminels; d'ailleurs il n'est pas de
grâce qu'on n'obtienne si on s'assure la protection des
saints les plus puissants et surtout de « notre dame ».
Le perfectionnement intime étant chose difficile, c'est
It'i INTRODUCTION.
surtout dans les œuvres extérieures et clairement saisis-
sables qu'on cherche les moyens de salut : l'aumône, le
jeûne, l'assiduité aux offices, les pèlerinages, les croi-
sades. On voit dans Raoul de Cambrai le héros brûler, le
vendredi saint, une ville entière et faire périr dans les
flammes tout un couvent de nonnes, mais reculer devant
l'idée de manger de la viande. Les chevaliers, les gens
du monde vont d'habitude à la messe tous les matins,
observent régulièrement les abstinences prescrites, ne
meurent guère sans avoir été pèlerins, et font des legs
aux œuvres pies. Pour beaucoup d'entre eux cela n'em-
pêche assurément ni les dérèglements ni les violences;
cependant l'influence de cette idée de la damnation
rappelée sans cesse par les prêtres ne pouvait être en
général que salutaire : elle fut le seul frein qui, dans
les époques terribles de la féodalité naissante, modéra
jusqu'à un certain point les brutalités féroces ou gros-
sières de gens que ne dominait aucune autorité, que
ne contenait aucune pensée d'intérêt commun. Elle
produisit en outre une masse énorme de fondations
charitables qui aidèrent à soulager les misères occa-
sionnées par un état social défectueux et par des guerres
constantes. Dans les âmes élevées, la religion prit la
forme de l'amour pur de Dieu et enfanta soit des écrits,
soit des actions, de la plus grande beauté. Au point de
vue intellectuel, la soumission aveugle aux enseigne-
ments de la foi officielle amena en général une docilité
exagérée à l'autorité et empêcha tout progrès scienti-
fique : la réflexion philosophique, au lieu de chercher
librement à observer, à classer et à comprendre les
faits, s'épuisa en subtilités sur les conséquences de
données premières acceptées sans discussion, et ne pro-
duisit que la creuse et stérile scolastique. Certains arts,
comme l'architecture, trouvèrent au contraire dans la
INTHODUCTION. 17
religion un stimulant a des œuvres âiiSâl puissantes
qu'originales. ,■{ qui resteront la plus grande gloire du
moyen âge.
11. Le clergé se recrutai! dans toutes les classes, et.
accueillant dfc préfêrehéë les hommes les plus intelli-
gents, formait un heureux contrepoids à l'organisation
aristocratique de la société. Il englobait (c'est un point
capital sur lequel on ne saurait trop insister) un très
grand nombre d'bommes qui étaient tonsurés, mais non
ordonnés prêtres, qui pouvaient être mariés en renon-
çant à un avenir ecclésiastique, et n'en restaient pas
moins clercs, justiciables des tribunaux d'église et plus
ou moins soumis aux évèques. A côté du clergé pro-
prement dit, composé des prêtres séculiers gouvernés
dans chaque diocèse par un évèque assisté de ses archi-
diacres, figurait une nombreuse armée de moines, qui
longtemps appartinrent exclusivement à la règle de
saint Benoit avec les réformes successives qu'y appor-
tèrent les cisterciens, les clunistes, les chartreux, etc.
(c'étaient à l'origine des laïques, liés seulement par des
vœux ; jUSqù'â la fin beaucoup ne recevaient pas la prê-
trise et ne possédaient pas l'instruction qu'elle exigeait).
Tous vivaient en commun, sous la direction d'abbés, et
consacraient ou devaient consacrer leur temps à la
prière, aux exercices pieux et au travail. A beaucoup de
monastères étaient jointes des écoles, et à des moines
appartiennent non seulement un nombre immense des
ouvrages latins du moyen âge, mais beaucoup d'ouvrages
français, surtout du genre historique et didactique.
Avec le xm° siècle apparurent les frères mendiants,
notamment les dominicains, qui, surtout comme prédi-
cateurs et maîtres, prirent une influence considérable et
soulevèrent dans le monde d'alors presque autant d'op-
2
18 INTRODI CTION.
position que d'enthousiasme. Les abbayes de femmes
étaient aussi très nombreuses; dans quelques-unes on
cultivait également les lettres; cependant la plupart des
religieuses ignoraient le latin. Le clergé séculier et
régulier exerçait certainement au moyen âge une grande
influence et avait une puissance énorme; mais il ne faut
pas croire qu'il inspirât un respect et une terreur sans
restrictions et sans bornes. On se faisait de la perfec-
tion ecclésiastique un idéal auquel naturellement la
réalité n'était que rarement conforme; de là contre les
prêtres, les moines, les nonnes, cette masse de satires
souvent extrêmement âpres et mordantes, mais qui ne
sont nullement inspirées par l'irréligion ni même par
une hostilité générale contre le clergé (bien qu'il y ait
ça et là des traces de ce sentiment), qui souvent au con-
traire ont pour auteurs des membres du clergé même,
et les plus ardents à le vouloir puissant et vénéré et
pour cela digne de l'être. En général le monde des clercs
et celui des laïques sont profondément séparés : ils ne
parlent pas la même langue (les clercs appellent le fran-
çais lingua laica, les laïcs appellent le latin clerquols) et
n'ont pas les mêmes aspirations : les clercs méprisent
les laïques, surtout les bourgeois et les vilains; ceux-ci,
de leur côté (notamment par l'organe des jongleurs,
ennemis nés des clercs), ne cessent de se moquer des
prêtres et des moines et de leur demander comment
ils pratiquent ce qu'ils prêchent. Malgré cela, les
clercs sont les dépositaires de tout enseignement
moral, de toute science, de toute pensée réfléchie; il
faudra, pour fonder vraiment, comme nous l'avons déjà
dit, la littérature française sérieuse, que ce soient eux
qui mettent dans la « langue des laïques > ce qu'ils
s'étaient réservé jusque-là.
INTRODUCTION. 19
12. Les Germains pénètrent en Gaule dès le commen-
cement du ve siècle : Vandales et Suèves allant en
Espagne, puis Bourgondions établis à l'est, Visigoths
au sud, Saxons en Normandie, Francs en Belgique. A la
lin de ce siècle Chlodovech détruit les restes de la domi-
nation romaine encore subsistants entre la Somme et la
Seine, et finit par soumettre la plus grande partie de la
Gaule, en plaçant à Paris le centre de son pouvoir. Les
Francs, et en général les Allemands qui s'établirent en
Gaule, étaient assez peu nombreux; déjà familiarisés
avec la civilisation romaine, ils cherchaient à en profiter
et non à la détruire; la plus grande ambition de leurs
chefs était de s'assimiler à cette aristocratie romaine
qu'un si grand prestige entourait encore. Chlodovech
élait plus fier de son titre de « patricien romain » que
de ses conquêtes; son petit-fils, Chilpéric, faisait des
vers et voulait perfectionner l'alphabet; son autre petit-
fils, Charibert, parlait couramment le latin et s'occupait
de littérature; le poète italien Fortunat, qui était venu
chercher sa vie à la cour de ces « Barbares », disait à
Charibert : « Quelle doit être ton éloquence dans ta
langue maternelle, puisque tu nous surpasses, nous
autres Bomains, dans l'usage de la nôtre! » Les Bour-
gondions, ou au moins leurs chefs, avaient plus tôt et
plus complètement encore adopté les coutumes et les
mœurs romaines. Les uns et les autres (les Bourgon-
dions déjà avant d'entrer en Gaule) avaient abandonné,
pour embrasser le christianisme, leur religion natio-
nale. Cette religion, se rattachant par ses origines natu-
ralistes à celles des autres peuples indo-européens, con-
sidérait le monde comme dominé par des dieux, les
Anses, qui se mêlaient souvent aux hommes et étaient
devenus les ancêtres des principales familles royales.
Ces dieux luttaient contre des êtres hostiles, des espèces
20 INTRODUCTION.
de Titans, et un jour le monde serait renouvelé à la suite
d'un combat terrible entre les Anses et les Jotes, où les
premiers succomberaient presque tous. La terre formait
un endroit intermédiaire entre le séjour supérieur des
dieux, où les bons les rejoignent après leur morl. et
celui des Jotes, inférieur et glacé. On voit que ces
croyances, d'ailleurs sans doute assez vagues et flot-
tantes, n'étaient pas sans avoir avec quelques-unes des
données de la conception chrétienne une analogie qui
dût faciliter la conversion; ce qui retint le plus long-
temps Chlodovech, c'est que le Christ qu'on lui deman-
dait d'adorer n'était pas de la race des Anses. Tandis
que les Bourgondions et les Visigoths avaient été con-
vertis par des missionnaires ariens, et étaient à cause
de cela en horreur au clergé catholique des pays qu'ils
avaient occupés, Chlodovech, sous l'influence de sa
femme et de l'évêque Remigius de Reims, embrassa le
christianisme dans sa forme catholique. Ce fut un fait
d'une immense portée, qui facilita beaucoup dès l'abord
au roi franc la conquête des autres parties de la Gaule,
puis qui le mit, ainsi que ses successeurs, dans un rap-
port particulièrement intime avec la papauté, rapport
qui devait aboutir, après trois siècles, au relèvement
de l'empire d'Occident et à la constitution du pouvoir
temporel des papes.
13. .Malgré la rapidité apparente de leurromanisation.
les Francs conservèrent longtemps leur génie particu-
lier, leur façon de vivre, de penser, de sentir. Devenus
maîtres des biens de l'État et des terres dont ils voulu-
rent s'emparer, ils ne s'enfermèrent pas, en général,
dans les cités, mais vécurent isolément, occupant sans
doute les riches villas des grands propriétaires romains,
et se réunissant soit pour les assemblées plénières
INTRODUCTION. 21
tenues parle roi, soit pour les sessions juridiques moins
nombreuses que présidait le grafo on comte, suit pour des
fêtes, soit pour les expéditions militaires. Dans ces occa-
sions ils goûtaient en commun le plaisir de la poésie
épique pi lyrique. Ils avaient sans doute des portes sem-
blables aux seôpas des Anglo-Saxons, qui allaient errant
de petite cour en petite cour, chantant leurs hôtes, et
répandant en tous sens les œuvres écloses en tel ou tel
lieu. « Ainsi, nous dit l'un de ces seôpas dans une pièce
qui nous a été conservée, s'en vont par le pays les
chanteurs des hommes; ils disent, leurs besoins, ils
remercient ceux qui les satisfont; toujours, soit au sud,
soit au nord, ils trouvent quelque ami des chansons,
libéral, et qui, par eux, obtient une gloire immortelle. »
L'instrumept dont ces poètes germaniques s'accompa-
gnaient pour chanter était la harpe, que Fortunat, dans
un distique connu, oppose à la lyre des Romains, à
ï ncli ; iliaque des Grecs, à la rote des Bretons. Mais les
guerriers eux-mêmes savaient composer des poèmes et
les chanter sur la harpe : quand le dernier roi vandale,
Gélimer, se vit perdu, il ne demanda à Bélisaire que de
lui envoyer une harpe pour chanter ses malheurs et la
ruine de son peuple; nous voyons dans le poème de
Hom, qui reproduit de vieux chants anglo-saxons, la
harpe, entre guerriers, passer de main en main. Tacite
nous apprend déjà que les Germains avaient une poésie
épique, à la l'ois mythique et héroïque; les Francs
semblent avoir possédé leur épopée propre. Leur héros
national était Sigofred, peut-être dieu solaire à l'origine,
devenu le sujet de chants narratifs, et qui, plus tard,
mêlé à des traditions bourgondionnes et à des souve-
nirs de l'invasion des Huns, devint le principal person-
nage de l'épopée allemande des Nibelungen. L'épopée
mythique des Francs semble n'avoir pas pénétré elle-
ââ INTRODUCTION.
même dans l'épopée romane qu'elle suscita; on ne
trouve dans celle-ci aucun nom, aucun l'ait qui remonte
à celle-là. Si le merveilleux forgeron Valand est devenu
le Gualant de nos chansons de geste, les récits qui
le concernent leur sont inconnus; sur Auberon,
voir §25. Cependant, l'histoire des amours de Childéric
et de Basine, telle que la rapportent les historiens méro-
vingiens, a tous les caractères d'un vieux poème franc,
et on en retrouve de fort analogues dans plus d'un de
nos poèmes français du moyen âge. Les Francs avaient
aussi des chants lyriques, leud, qu'ils accompagnaient
également de la harpe. L'empereur Julien, qui avait
entendu ces chants sur les bords du Rhin, les compa-
rait aux croassements des corbeaux, et s'étonnait qu'on
pût y prendre plaisir; mais son jugement dédaigneux
ne prouve pas grand'chose. Les Francs aimaient à
égayer par des chansons leurs banquets, qui se prolon-
geaient fort tard, si bien que Childebert fut obligé de
défendre, par un édit, de passer la nuit à chanter en
buvant. La poésie allemande avait pour forme des vers
divisés en deux membres, dans lesquels le nombre des
syllabes variait, mais le nombre des temps forts était
constant, et quelques-uns de ces temps forts devaient
se composer de syllabes toniques commençant par la
même consonne ou par une voyelle (allittération).
14. Directement, la poésie franque n'a eu que peu
d'intluence sur la poésie française. Mais la conquête de
la Gaule par les Francs, qui en fit la France, a été d'une
importance capitale. Les Francs apportèrent, au milieu
de populations accoutumées à la docilité et au manque
d'initiative qu'entraîne l'habitude séculaire d'une admi-
nistration puissante, un individualisme et un esprit d'in-
dépendance qui ouvrirent à la poésie des sources toutes
INTRODUCTION. 23
nouvelles. Leur langue, qu'ils ne tardèrent pourtant pns
à abandonner pour le latin vulgaire, fournit à celui-ci,
en France, une masse bien plus grande de mots, cl de
mots bien plus importants, que ne l'avait faitle celtique:
ce ne furent pas seulement des substantifs, toujours
facilement empruntés avec les objets qu'ils désignent,
mais des adjectifs et des verbes, signes de rapports bien
plus intimes, qui pénétrèrent dans la langue française,
et les idées qu'ils expriment, surtout, font toucher du
doigt le genre d'influence que l'une des races exerça sur
l'autre. Citons-en un petit nombre. Beaucoup, naturel-
lement, se rapportent à la guerre, et d'abord le mot
guerre lui-même, puis guaile (sentinelle) et ses dérivés,
eschiele (bataillon), estour (assaut), herberge (camp), maré-
chal, geude (infanterie); des noms d'armes offensives ou
défensives : brant, épieu, guigre (sorte de dard), fuerre
(fourreau de l'épée), estoc, heut (poignée de l'épée), atgicr
javelot), gamboison, broigne (cuirasse), targe, blason,
haubert, heaume, guige (courroie de l'écu), ou d'objets
d'équipement : éperon, renge (boucle), élrier, gonfanon,
bannière, etc.; au même ordre d'idées appartiennent les
verbes épier, adouber, fourbir, escremir (s exercer au
maniement de l'épée), guenchir (esquiver un coup), blesser
navrer, etc. Les mots relatifs aux institutions politiques,
judiciaires et sociales, soit qu'ils n'aient pas de corres-
pondants en latin ou qu'en romands lésaient remplacés,
nous montrent à quel point l'intervention germanique
avait transformé la société : tels sont maller (citer en
justice), ban et ses nombreux dérivés, faide (guerre
privée), roi (mesure, d'où arroi, conroi, etc.), garantir,
guerpir, arramir (fixer), saisir, gage, nant (d'où nantir),
esclate (race), fief, alleu, lige, gaif (sans maître), haschiere
(amende), sénéchal, échanson, échevin, garçon, bru,mainhour,
(administrateur judiciaire), lagan (droit d'épave). Des
24 INTRODUCTION.
termes cnialuirement. comme robe, bliaul, giron, lieuse,
gant, nosche (collier), hou (braceleh. guimpe, écharpe, aux-
quels ne répond rien en latin classique, nous font voir,
ainsi que de nombreux noms de fourrures, le costume
germanique remplaçant le costume romain; d'autres
rendent le même témoignage pour certains modes d'ha-
bitation, comme Ikiihij déjà introduit au 111e siècle),
lt>ihi>au, borde (masure), ou de construction, comme faite,
iinirhet, bord,lo<jt, uuiwc (chevron), banc (poutre), loc (d'où
loquet); nous retrouvons l'influence allemande dans
l'ameublement avec banc, fauteuil; dans l'outillage fami-
lier, la nourriture et la boisson avec gâteau, rôtir, bière,
miés (hydromel), malle, écran, hanap, madré (bois dont
on faisait des coupes), espoi (broche), tondre (amadou),
canif, haple, seran, alêne, gourle (bourse), banaste (corbeille),
bacon (porc salé). La marine à voile fut complètement
renouvelée par les Germains, comme le montrent les
mots : hune, écoute, mât, lof, cingler, esneque diarque .
rschipre (matelot), esturman (pilote , havre, etc.. et aussi
les noms saxons donnés aux points cardinaux. On ne
rencontre pas de mots se rapportant à la musique ou à
la poésie (sauf harpe, et lai, emprunté bien plus tard à
l'anglo-saxon), mais les termes de danser, espringuer,
estampie, montrent que les divertissements allemands
furent adoptés par les Romans. Dans l'ordre moral on
est frappé de l'introduction de substantifs comme orgueil,
guerrednn (récompense), four {\xo\\pe.),jafeur (commodité),
cslrif (querelle), sm (intelligence, d'où forsenc), dru (ami),
d'adjectifs comme baud (en train), gai, gaillard, jolif,
graiui (triste)] nmrnr, franc, estant orgueilleux'!, hardi,
riche, frais, fcnel (rapide), laid, eschevi (svelte), de verbes
comme choisir, haït, honnir, hùtcr. gehir ^avouer), escharnir
(radier), épargner, s'esmuier (perdre courage, d'où émoi),
effrayr (proprement troubler la paix), tricher, guilcr
LY1H0M CT10N. 25
(tromper), garder, fournir, gagner, garnir, guier (guider ,
jangler (mal parler), runer (parler bas), tehir (pros-
pérer), etc. Mais combien faut-il que les envahisseurs et
Les indigènes aient échangé de pensées familières pour
que ceux-ci aient nommé d'après ceux-là des accidents
de terrain ou de culture, des objets naturels, des groupes
d'arbres ou des plantes de leur territoire : lande, haie,
jardin, gazon, bief, bois, gaut (forêt), jachère, gerbe, épeaulre.
if, houx, framboise, groseillier, hêtre, roseau, laiche, guède,
mousse, tan; des animaux qui l'habitaient : guaraignon
(cheval entier), ran (bélier), frésange, taisson, épervier,
çigace, mésange, épeiche, héron, hétaudcau, uitecoc, mouette,
marsouin, brème, rée (rayon de mieli, esturgeon, écrevisse,
hareng, frelon, man (ver blanc); des parties mêmes de
leur corps : braon Itoute partie charnue), lippe, qucnne
(d'où quenotte), gauche, esclenc (gauchei, nuque, échine, tette,
hanche, rate; pour qu'ils aient reconnu la supériorité de
l'allemand sur le latin dans la désignation des couleurs,
et lui aient emprunté les mots blanc, blênie, bleu, bloi
[nuance de blond), blond, brun, fauve, gris, hâve, sor (blond
vif : pour quïls aient pris à la langue des nouveaux
venus les deux adverbes guères iqui signifie proprement
beaucoup), trop (du mot torp, assemblage), et des suffixes
comme ard (vieillard, etc.), -Qud (sourdaud, etc.), -lenc
{chamberlenc, etc.)! Ainsi une race jeune renouvelait un
monde vieilli, et, en le faisant retomber momentanément
dans la barbarie, l'ignorance et la brutalité, préparait
en même temps une évolution qu'il semblait incapable
d'accomplir. Grâce à l'adoption du catholicisme par les
Francs, il se forma entre eux et les Romans de Gaule
une véritable unité de sentiments, et pour la première
fois, depuis l'éclair passager qu'avait allumé Vercingé-
torix, une conscience nationale s'éveilla dans notre
pays. Au point de vue littéraire, le résultat fut l'épopée.
26 INTRODUCTION.
L'épopée française est le produit de la fusioa de l'esprit
germanique, dans une forme romane, avec la nouvelle
civilisation chrétienne et surtout française.
15. Cette épopée a pour point de départ et eut pour
premier sujet le baptême de Chlodovech. Il suscita un
immense enthousiasme, et se prêta d'autant plus à la
poésie qu'il se rattachait à l'influence d'une femme, à
un mariage dont les circonstances avaient été singu-
lières, et à une de ces tragiques histoires de vengeances
de famille si communes dans l'épopée germanique. Les
récits du mariage de Chlodovech que nous avons sont
visiblement mêlés de traits romanesques; celui de Fré-
dégaire, qui date de cent cinquante ans après l'événe-
ment, doit s'appuyer sur un poème germanique, lequel,
dans la version des Gesta regum Francorum, postérieure
d'un demi-siècle, est fortement christianisé et romanisé
Autour de Chlodovech il se forma, et sans doute de très
bonne heure, tout un cycle épique, dont on peut croire
avec grande vraisemblance que plusieurs épisodes
furent chantés en latin vulgaire, car on en retrouve plus
d'un dans la tradition française postérieure, soit ratta-
ché à son nom même (comme les miracles du baptême),
soit, ce qui en prouve encore mieux la vraie popularité,
attribué plus tard à Charlemagne (comme le cerf qui lui
indique un gué à franchir, les murailles de la ville
assiégée qui s'écroulent devant lui, le péché mystérieux
qui lui est remis par la révélation d'un ange;. Ainsi la
Langue et le rythme populaire des Romans de la Gaule
servaient, pour la première fois, à exprimer un idéal
national et religieux à la fois, suscité, par un homme
supérieur et par de grands événements : le roi des
Francs de France, entouré de ses guerriers et aussi de
ses clercs, apparaissait comme combattant à la fois les
INTRODUCTION. 27
ennemis de l'est, restés païens et barbares, et les héré-
tiques du midi, et comme donnant à la nation, où Francs
et Romans tendaient à se confondre, la puissance et la
gloire. Cet idéal une fois créé ne périt plus : obscurci
dans les luttes intestines des Mérovingiens, il reparut à
plusieurs reprises, et chaque fois, de nouveau, il suscita
de l'épopée. La lutte contre les Saxons le vivifia mainte
fois ; en 620, des envoyés de ces Barbares vinrent à Paris
défier Clotaire II : le roi les aurait tués, sans l'interven-
tion de Faron, évoque de Meaux,le Turpin de ce Charlc-
magne anticipé. Clotaire envoya contre les Saxons son
fils Dagobert; celui-ci, serré de près, demanda des
secours à son père, qui vint le dégager et tira des Saxons
une terrible vengeance. Tout cela devint matière à des
chants épiques; nous les sentons encore vibrer à travers
les récits des historiens, et l'auteur d'une Vie de saint
Chilian (vme siècle) nous dit expressément que sur cette
victoire carmen publicum juxta rusticitatem (c'est-à-dire en
langue romane rustique) per omnium volitabat ora. Ces
chants se conservèrent longtemps, car nous retrouvons
des traits qui leur sont certainement empruntés dans les
chansons, bien postérieures, qui nous sont parvenues
sur les guerres saxonnes de Charlemagne. Ce Dagobert,
que nous voyons apparaître, tout jeune guerrier, dans
ces chants, auprès de son père à barbe blanche, devait
être plus que lui un véritable héros épique. Ses premiers
exploits, ses enfances, comme on disait au XIIe siècle,
étaient chantés dans un poème qui, à travers bien des
remaniements, est arrivé jusqu'à nous : le héros s'ap-
pelle Floovent, et ce mot n'est autre qu'une transforma-
tion de Flodovinc ou Chlodovinc, « le descendant de Chlo-
dovech », épithète donnée au jeune prince et qui a rem-
placé son nom. Le poème du xip siècle fait de ce Floovent
le fils même de Chlodovech, mais c'est là sans doute une
28 INTRODUCTION.
altération postérieure; la preuve que ce poème conserve
cependant quelque chose des vieux récits, c'est qu'il
débute par nous raconter comment le héros fut banni
par son père pour avoir gravement insulté ien lui cou-
.pant la barbe) un de ses plus hauts barons; or cette
histoire se retrouve dans une légende monacale du
commencement du ix° siècle, les Gcsta Dagob&rti, qui
puisait sans doute à la même source épique (disons
cependant qu'on peut croire aussi que le héros primitif
du poème est bien un fds de Chlodovech. et que l'anec-
dote en question a été mise à tort par l'auteur des Gesta
au compte du jeune Dagobert). Devenu roi, Dagobert,
plus qu'aucun de ses prédécesseurs, sembla réaliser ce
que la nation franco-romane attendait de son chef. Il
combattit victorieusement à l'est les Saxons et même
les Slaves nouvellement apparus sur la scène, à l'ouest
les Bretons d'Armorique, au sud les Goths d'Espagne :
plus d'une de ces guerres dut susciter des chants, qui
ont peut-être laissé des traces dans l'épopée carolin-
gienne; ainsi la Chanson de Roland, quoique inspirée par
un événement réel arrivé en 778, a bien pu emprunter
quelques traits à la tragique aventure du duc Haribert,
surpris et tué, cent soixante ans auparavant, avec dix
autres puissants chefs francs, dans une vallée des Pyré-
néen. La mort de Dagobert (639) paraît aussi avoir servi
de thème à des récits d'un caractère, il est vrai, plus
particulièrement clérical, qui se trouvent reproduits à
propos de Charlemagne dans la chronique du prétendu
Turpin. Avec la prépondérance qu'acquirent bientôt les
Austrasiens, c'est à-dire les Francs orientaux non roma-
nisès, la conscience de la nouvelle nation, en train de se
former, dut un instant hésiter; mais elle commença,
sous une forme un peu autre, à se retrouver quand le
premier Charles, par la victoire de Poitiers, montra de
INTRODUCTION. 29
nouveau, avec un éclat incomparable, Jes Francs dans
leur pôle de <hefs et de protecteurs de la chrétienté. La
population romane célébra comme les Austrâsiens le
redoutable « marteau « qui venait d'écraser les plus
dangereux ennemis de la civilisation et de la religion
occidentales; elle ne fit pas moins bon accueil au règne
de Pépin, et celui de son fils Charles fut marqué par
une exaltation de l'activité épique égale à la grandeur
déS événements qu'il vit s'accomplir. Ainsi se compléta,
dans le milieu des guerriers neustriens. germains d'ori-
gine, romans de langue, la genèse de l'épopée nationale
française. *
16. Des quatre éléments que nous avons passés en
revue, le fond obscur celtique, l'assimilation romainr.
le christianisme et le germanisme, sortit, après une éla-
boration de plusieurs siècles, la société française delà
période qui nous occupe (du xie siècle au second tiers
du \ive). Cette société est la société féodale; elle se carac-
térise par la division des hommes en quatre classes bien
distinctes : les nobles, habitant généralement des châ-
teaux isolés, reliés les uns aux autres par une hiérar-
chie de protection et de services; les bourgeois, habi-
tant les villes, munis de certains droits à rencontre des
seigneurs et s'administrant plus ou moins librement: les
vilains, cultivant la terre, le plus souvent sans la pos-
séder, et dans des conditions variées qui vont de l'escla-
vage absolu à la pleine liberté en passant par les degrés
du servage, du colonat, etc. ; enfin les clercs, auxquels
appartiennent non seulement ceux qui remplissent des
fonctions réellement ecclésiastiques, mais tous ceux qui
exercent les arts libéraux, les maîtres de tout genre, les
notaires, les avocats, les employés de chancellerie, les
scribes et copistes, les médecins, etc. En face des trois
30 [NTRODUCTION.
premières catégories, lesclercs forment un monde séparé,
qui a sa langue à lui, qui, voué en grande majorité au
célibat, se recrute dans les autres classes, mais trans-
forme complètement ceux qu'il adopte. Parmi les nobles
et les bourgeois, l'instruction est extrêmement rare;
savoir lire et savoir le latin sont à peu près la même
chose, et Tune et l'autre science sont réservées aux
clercs. Les exceptions ne manquent pas cependant,
notamment dans les hautes classes, où des femmes
même ont souvent un savoir de clercs; les rois sont
généralement quelque peu lettrés. Mais l'habitude de la
lecture est si peu répandue que les œuvres littéraires en
langue vulgaire sont composées pour être ou chantées
ou tout au moins lues à haute voix devant des illettrés;
la lecture solitaire apparaît quelquefois aussi, le plus
souvent pour les femmes. Plus tard tout se modifie : une
littérature sérieuse, par les soins des clercs, se produit
en français, et sa nature même la destine à être goûtée
par les yeux bien mieux que par les oreilles. Mais elle
reste toujours pour les gens véritablement instruits une
chose secondaire, de peu de valeur, destinée à ceux qui
ne peuvent aborder directement les vraies sources. Pen-
dant la longue période dont il s'agit, la physionomie de
la société française ne subit pas de très graves modifi-
cations, bien que cette période voie le commencement
et la fin du grand mouvement des croisades, la lutte
entre l'Empire et la papauté, la conquête de l'Angleterre
et l'annexion à ce royaume, pour un temps, d'une partie
de la France. Du commencement à la fin, la royauté
travaille sans relâche à l'augmentation de son pouvoir
et à la diminution de l'indépendance féodale et munici-
pale; mais il n'y a aucune tentative de révolution d'en
haut ou d'en bas, et les principes sur lesquels repose la
société sont toujours les mêmes. Le nom que nous
INTRODUCTION. 31
avons donné an « moyen âge » indique combien il fut
réellement transitoire, et cependant ce qui le caracté-
rise le plus profondément, c'est son idée de l'immuta-
bilité des choses. L'antiquité, surtout dans les derniers
siècles, est dominée par la croyance à une décadence
continue; les temps modernes, dès leur aurore, sont
animés par la foi en un progrès indéfini; le moyen âge
n'a connu ni ce découragement ni cette espérance. Pour
les hommes de ce temps, le monde avait toujours été
tel qu'ils le voyaient (c'est pour cela que leurs peintures
de l'antiquité nous paraissent grotesques), et le juge-
ment dernier le trouverait tel encore. Cela n'empêche
pas la littérature d'être pleine, sur la marche constante
de toutes choses du mal au pis, de lamentations banales
répétées de celles des anciens; mais il ne s'agit là que
des vertus et des mœurs, non des institutions, que per-
sonne n'a l'idée de croire susceptibles de changement.
Le monde matériel apparaît à l'imagination comme
aussi stable que limité, avec la voûte tournante et cons-
tellée de son ciel, sa terre immobile et son enfer; il en
est de même du monde moral : les rapports des hommes
entre eux sont réglés par des prescriptions fixes sur la
légitimité desquelles on n'a aucun doute, quitte à les
observer plus ou moins exactement. Personne ne songe
à protester contre la société où il est, ou n'en rêve une
mieux construite; mais tous voudraient qu'elle fût plus
complètement ce qu'elle doit être. Ces conditions enlè-
vent à la poésie du moyen âge beaucoup de ce qui fait
le charme et la profondeur de celle d'autres époques :
l'inquiétude de l'homme sur sa destinée, le sondement
douloureux des grands problèmes moraux, le doute sur
les bases mêmes du bonheur et de la vertu, les conflits
tragiques entre l'aspiration individuelle et la règle
sociale. D'autre part, ni la société ni la littérature du
32 INTRODUCTION.
moyen âge ne possèdent l'heureuse harmonie qui
marque de son empreinte les œuvres du génie pire. Le
un unie d'alors est étroit, factice, conventionnel; le sen-
timent de la beauté est à peu près complètement absent
des fîmes et même la connaissance, qui ne fut jamais
abolie, des chefs-d'œuvre classiques latins né suffît pas,
jusqu'à Dante, à le susciter. L'originalité de la littéra-
ture française du moyen âge est, d'une pari, dans l'ex-
pression naïve el souvent puissante, par l'épopée, des
passions ardentes de la société féodale; d'autre part,
dans la peinture des relations nouvelles des deux sexes,
telles qu'elles se formèrent sous la double influence du
christianisme, qui avait relevé la position des femmes,
et de la courtoisie, qui les mit sur un piédestal plus appa-
rent que réel, mais brillant et poétique: elle est encore
dans quelques beUVrea issues d'un milieu plus bourgeois,
où se marquent en traits déjà distincts plusieurs des
qualités les plus frappantes du génie français : le bon
sens, l'esprit, la malice, la bonhomie fine, la grâce
légère et le bonheur de l'expression vive et juste. En
somme, le grand intérêt de cette littérature, ce qui en
rend surtout l'étude attrayante et fructueuse, c'est qu'elle
nous révèle mieux que tous les documents historiques
l'état des mœurs, des idées, des sentiments de nos aïeux
pendant une période qui ne fut ni sans éclat ni sans
profit pour notre pays, et dans laquelle, pour la pre-
mière fois et non pour la dernière, la France eut à
l'égard des nations avoisinantes un rôle partout accepté
d'initiation et de direction intellectuelle, littéraire et
sociale.
17. Toute littérature est narrative, didactique [sàttHque),
lyrique, dramatique. Ces deux derniers genres, au moyen
âge, ne sont cultivés qu'eu vers; pour les deux premiers,
INTRODUCTION. 33
au moins à partir d'une certaine époque, on s'est aussi
servi de la prose, mais les vers ont été employés à une
foule d'usages auxquels on ne les l'ait plus guère servir
aujourd'hui. Nous classerons les œuvres narratives et
didactiques suivant leurs sujets, sans séparer celles qui
sont en vers de celles qui sont en prose. Nous distin-
guerons la littérature religieuse, œuvre exclusive des
clercs, de la littérature profane, à laquelle ils ont pris
une grande part, mais qui, dans ses formes les plus
importantes, ne leur appartient pas. Chacune de ces
deux parties recevra les quatre subdivisions indiquées
ci-dessus.
PREMIERE PARTIE
LITTÉRATURE PROFANE
SECTION I
LITTÉRATURE NARRATIVE
CHAPITRE I
L EPOPEE NATIONALE
18. On prend souvent le mot épopée dans le sens de
« poème épique » ; nous ne lui donnerons que le sens
de « production épique, ensemble de poèmes épiques ».
L'épopée n'appartient pas à toutes les races, ni, dans la
nôtre, à toutes les nations; elle ne se produit qu'à une
certaine époque de leur existence. — Elle est mythique,
c'est-à-dire qu'elle a pour sujet une mythologie, plus ou
moins oubliée comme telle, qu'elle transforme en his-
toire humaine, ou historique, c'est-à-dire qu'elle a pour
base des événements réels plus ou moins altérés par
l'imagination et certaines tendances (l'épopée purement
fictive ne vient que plus tard). — Dans ce dernier cas,
qui est celui de l'épopée française, elle s'appuie, au
moins à l'origine, sur des chants contemporains des
événements : elle peut être définie une histoire poétique
36 LITTERATURE NARRATIVE.
l'ondée sur une poésie nationale antérieure. — L'épopée
a nécessairement un caractère général, c'est-à-dire
qu'elle exprime l'idéal et les sentiments de la nation
tout entière, ou au moins de la classe aristocratique et
guerrière, comme en France. — Elle est ordinairement
belliqueuse, car la guerre contre l'étranger est ce qui
donne aux hommes un enthousiasme commun et le sen-
timent de leur solidarité. — Elle est nationale par là
même; elle l'est encore en ce qu'elle n'emprunte au
dehors ni son sujet ni sa forme; elle est la création la
plus spontanée et la plus directe du génie national.
Aussi l'auteur de l'épopée a-t-il une personnalité fort
peu marquée : il ne commence à être distinct que dans
une période déjà voisine de la décadence. Le style n'a
rien d'individuel : c'est, comme on l'a dit excellemment,
un « style national ».
19. Nous avons vu plus haut comment l'épopée s'était
préparée en France sous les Mérovingiens, dont quel-
ques règnes glorieux, semblant réaliser plus ou moins
l'idéal de la nouvelle nation sortie de la fusion des élé-
ments romain, chrétien et barbare, furent l'objet de
chants nationaux à la fois en allemand et en roman. —
L'épopée s'exalta sous Charles Martel : les chants qu'ins-
pirèrent les aventures de sa jeunesse et plusieurs de ses
exploits se sont perpétués, en se transformant, dans
quelques-uns des poèmes relatifs à son petit-fils. —
Pépin a été aussi le sujet de beaucoup de chants, dont
la plupart sont perdus; mais son souvenir, comme père
de Charlemagne, s'est maintenu dans l'épopée. — Le
règne de Charlemagne, où les aspirations depuis long-
temps éveillées furent enfin presque entièrement, satis-
faites, suscita une production de chants nationaux plus
riche que jamais : ceux qui, à travers de nombreux
l'épopkf. nationale. 37
.remaniements, ont survécu dans l'épopée postérieure
étaient tous sans doute originairement composés en
français. L'existence de ces chants contemporains est
attestée par divers auteurs; la guerre d'Espagne (778),
terminée par un désastre qui fit une profonde impression,
en inspira surtout un grand nombre. — Louis, fils de
Charles, continua quelque temps la splendeur de rem-
plie, et son nom fut d'autant mieux associé à celui de
son père qu'il était déjà mêlé aux guerres contre les
Sarrasins du midi de la France et du nord de l'Espagne,
poursuivies par lui pendant de longues années avant
qu'il fût empereur. — Les Charles et les Louis qui
régnèrent par la suite furent confondus, dans la tradi-
tion épique, avec les premiers Carolingiens qui avaient
porté ces noms; en sorte que l'épopée déroule tous ses
épisodes devant une triade royale composée uniformé-
ment de Pépin, Charles, Louis (Charles Martel étant à
l'écart et sans lien bien net avec les autres, et confondu
d'autre part avec Charles le Chauve). — Quand l'empire
commença à s'écrouler dans les guerres des fils de
Louis Ier contre leur père et entre eux, il y eut, semble-
t-il, un immense désarroi dans l'activité épique : ces
luttes déplorables n'ont pas laissé de traces. Mais à
l'époque immédiatement suivante, quand sur les débris
de la monarchie carolingienne s'élève et s'organise la
féodalité, les chants épiques renaissent, se renouvellent
et expriment l'idéal féodal. — Les derniers événements
dont l'épopée ait conservé le souvenir appartiennent à
la -econde moitié du Xe siècle (voir § 25 et § 39) : avec
l'avènement de la troisième race la période de produc-
tion épique spontanée est close (nous parlerons plus
loin des poèmes inspirés par les premières croisades).
— Ainsi, préparée depuis Chlodovech, commençant
vraiment avec Charles Martel, à son apogée sous Charle-
38 LITTERATURE NARRATIVE.
magne, renouvelée puissamment sous Charles le Chauve
et ses premiers successeurs, la fermentation épique, si
l'on peut ainsi dire, d'où devait sortir l'épopée s'arrête
au moment où la nation est définitivement constituée
et a revêtu pour quelques siècles la forme féodale.
20. D'ailleurs, à côté des chants traditionnels légués
par les générations antérieures, et qui avaient des
sujets généraux, la société féodale, si tumultueusement
individualiste, créait une poésie à son image. Les faits
de guerre donnaient lieu sur le moment même à des
chansons élogieuses ou satiriques sur la conduite de
chacun, qui étaient fort ambitionnées ou redoutées; ces
chansons, d'un caractère surtout lyrique, contenaient
nécessairement un élément épique. Peu à peu, dans les
chansons qui se conservaient au delà de l'événement
même, cet élément épique alla en s'amplifiant et finit
par supprimer l'élément lyrique. La poésie épique allait
ainsi s'accroissant et se renouvelant sans cesse. Elle
naissait et se développait dans la classe guerrière,
comprenant les princes, les seigneurs et tous ceux qui
se rattachaient à eux. Ils jouissaient des chants épiques
de deux manières : 1° en se les faisant chanter pour
charmer leurs loisirs, par exemple à table pendant ou
après le repas, dans les fêtes où ils réunissaient leurs
amis et leurs vassaux, dans les jardins où ils se repo-
saient, pendant leurs longs voyages à cheval; 2° en les
faisant exécuter quand ils marchaient au combat : nous
trouvons encore des exemples de cet usage à la fin du
xie siècle. A l'origine, plus d'un de ces hommes d'armes
composait sans doute lui-même et chantait ces chants
épiques; mais de bonne heure il y eut une classe spé-
ciale de poètes et d'exécutants. Ces hommes, héritiers
en partie des scôpas francs, s'appelèrent en français
l'épopée nationale. 39
fàglers (joculares) ou joglc<lors (joculatores), plus tard jou-
gleors, jongleurs (jongleur est une forme toute moderne),
comme les musiciens ambulants et faiseurs de tours
légués à la société nouvelle par la société gréco-
romaine. Nous ne les trouvons pas expressément men-
tionnés avant le ixc siècle, et ce n'est qu'à cette époque
qu'ils ont pu exister tels que nous les connaissons par
les descriptions postérieures, c'est-à-dire munis du
violon (en anc. fr. vielle), dont ils s'accompagnaient
pour chanter et qu'ils jouaient avec un archet (anc. fr.
arçon) beaucoup plus recourbé que le nôtre : en effet, cet
instrument ne paraît pas avoir été transmis avant cette
époque aux Occidentaux par les Arabes qui le tenaient
eux-mêmes des Persans. Les jongleurs, comme les
anciens poètes barbares, allaient de cour en cour, de
château en château, accompagnaient souvent les expé-
ditions et prenaient part aux combats. Plus tard, quand
les bourgeois des villes s'intéressèrent à leurs chants,
ils baissèrent d'un degré et stationnèrent sur les places
publiques, faisant la quête avant ou après chaque exé-
cution. Plus tard encore la décadence alla plus loin : le
nom des jongleurs reprit et a gardé uniquement le sens
de « faiseurs de tours » qu'il avait eu à l'origine; leurs
chansons, qui ne plaisaient plus qu'au petit peuple, lui
furent chantées par des aveugles, et le nom de vielle, en
se dégradant, passa à l'instrument grossier dont ceux-
ci accompagnaient leur psalmodie (il paraît s'être
appelé à l'origine cifoine, c'est-à-dire symphonia)). —
Les jongleurs ont joué un rôle capital dans la forma-
tion et le développement de l'épopée française. Les
anciens chants sur Charles Martel, Pépin, Charlemagne,
avaient un caractère tout national (déjà cependant pro-
vincial en partie, voir plus bas sur le Roland); mais
l'épopée féodale avait nécessairement un caractère pro-
40 LITTERATURE NARRATIVE.
vincial : ainsi Girard de Roussillon, Raoul de Cambrai,
Guillaume de Montreuil. n'étaient chantés que dans les
pays où ils avaient vécu ou qui leur avaient appartenu.
Les jongleurs colportèrent les chants épiques de lieu
en lieu, se les communiquèrent les uns aux autres, les
rattachèrent par des liens de leur invention, les fondi-
rent et les unifièrent. Ainsi se constitua une immense
matière épique, qui, vers le milieu du xie siècle, com-
mença à se distribuer en longs poèmes et plus tard se
répartit en cycles.
21. Nés des événements, exprimant les sentiments de
ceux qui y prenaient part, les chants épiques préten-
daient être véridiques, et à l'origine, sauf la déforma-
tion inévitable imposée à la réalité par la passion, ils
Tétaient. De là le nom qu'ils prirent sans doute de
bonne heure et qu'ils transmirent aux poèmes posté-
rieurs, le nom de chansons de geste. Le mot latin gesta,
signifiant c actions >, avait été, à la basse époque, le
titre de plusieurs ouvrages historiques, comme les
Francorum ; ce pluriel neutre devint, comme tant
d'autres, un singulier féminin, et le mot geste prit le sens
d' « histoire ». Une chanson de geste est donc proprement
une «hanson qui a pour sujet des faits historiques. On
a dit plus tard, mais assez rarement en français propre,
une geste tout court pour un poème épique, et en Angle-
terre ce mot, en descendant jusqu'au sens actuel de jest,
« plaisanterie, farce », montre la décadence parallèle
des chanteurs de geste. On appela aussi geste un certain
groupe de traditions épiques (à peu près ce que nous
nommons un cycle), et par suite la famille qui fournissait
les héros de ce groupe, la famille épique, comme nous
• lisons aussi. — Les chansons de geste étaient toujours
çn laisses, d'un nombre indéfini de vers sur la même
L EPOPEE NATIONALE. 41
assonance, puis, plus tard, sur la même rime. Jusqu'à la
fin de leur existence, elles furent réellement chantées,
avec accompagnement de vielle, puis de cifoine; mais il
arrivait souvent, quand on n'avait pas de jongleur ni
d'instrument sous la main, qu'on les chantait sans
accompagnement. Ainsi le valet de Guillaume d'Orange,
dans le Montage Guillaume, lui chante une chanson de
geste, dont Guillaume lui-même est le héros, pendant
qu'ils traversent à cheval une forêt; Lambert d'Oridon,
dans Auberi le Bourguignon, chante à son hôte, en lui
versant à boire, des morceaux de Floovent. — La mélodie
qui accompagnait les chansons de geste devait être très
simple : nous ne l'avons conservée pour aucune (sauf pour
un vers d'Audigier, §31). A en juger par celle des parties en
vers d'Aucassin et Nicolette (§ 51), et par celle de quelques
chansons de toile (§ 118), qui sous ce rapport peuvent
s'être comportées de môme,. le premier vers de chaque
laisse avait un air, le second en avait un autre; tous les
vers impairs se chantaient comme le premier, tous les
vers pairs comme le second; le dernier avait une modu-
lation à lui , comme il avait souvent une forme à lui.
Chaque poème paraît avoir eu sa mélodie spéciale :
Jean Bodel dit que ses rivaux ne savent des Saisnes (§ 24)
ne les vers, ne le chant; ailleurs il est parlé de la manière
du vieux Fromont (un des héros des Lorrains, § 25); mais
on ne voit pas ce qui pouvait empêcher un jongleur de
chanter sur le même air diverses chansons versifiées
de même.
22. De la première période épique, qui se termine
environ avec le Xe siècle, nous n'avons aucun monument.
Les trois poèmes auxquels on peut attribuer la plus
haute antiquité (Roland, le Pèlerinage de Charlemagne, le
Roi Louis) sont, dans l'état où ils nous sont parvenus,
42 LITTÉRATURE NARRATIVE.
de la seconde moitié duxie siècle, et on ne peut pas dire
qu*il s'agisse de simples rajeunissements île forme : ils
présentent des traits qui ne peuvent être antérieurs à
cette époque. En dehors de ces trois poèmes, tout ce
que nous avons est postérieur, remanié, altéré de toute
façon. En outre les manuscrits qui nous ont conservé
les poèmes oe sont pas. ils s'en faut, ou les originaux
ou contemporains des originaux : ils leur sont posté-
rieurs d'un siècle ou de deux et ne les reproduisent pas
fidèlement. — Les poèmes de la troisième période vont
du début du xne siècle jusque vers la fin de ce siècle
environ; ils se composent de renouvellements d'anciens
chants dont nous ne connaissons pas directement la
forme, de compléments ajoutés pour raccorder ces
chants entre eux, et déjà, surtout vers la fin, d'inven-
tions pures; car l'épopée, éloignée des événements qui
lui ont donné naissance, réduite à être une récréation
pour les chevaliers, s'accroît naturellement sous les
mains des jongleurs de récits qui d'abord ne s'éloignent
pas des anciens thèmes, mais qui vont s'en écartant de
plus en plus. — La quatrième période s'étend de la fin
du xiic siècle au milieu du XIVe siècle; elle ne comprend
plus que des rifacimenti des poèmes de la période pré-
cédente, des inventions sans valeur ou des adaptations
de sujets originairement étrangers à l'épopée nationale.
C'est la période proprement cyclique, où on rattache
arbitrairement, par des liens généalogiques, tous les
héros et conséquemment tous les poèmes les uns aux
autres. Depuis la fin de la période précédente, les auteurs
des poèmes abandonnent l'assonance pour la rime, ce
qui amène le renouvellement des poèmes antérieurs qui
ont encore du succès: mais on conserve toujours la
forme de la laisse, qui devient de plus en plus longue.
— Passé cette époque (cf. cependant £ 30), on ne com-
L EPOPEE NATIONALE. 43
pose plus de chansons de geste, et, bientôt on ne chante
plus celles qui existent. On les copie encore en vers
jusque vers la fin du xv° siècle; mais avant le milieu de
ce siècle on commence, pour s'accommoder au goût
du jour, à mettre en prose celles dont le sujet inté-
resse encore. Les « romans de chevalerie » qui, sous
cette forme, se trouvèrent en faveur au moment de la
découverte de l'imprimerie furent imprimés alors;
par une série de déchéances successives, ils formèrent
une partie de la « bibliothèque bleue », et ils n'ont
pas encore tout à fait disparu de la littérature popu-
laire.
23. Des trois périodes de notre épopée (1050-1120,
1100-1180, 1150-1360) qui suivirent la première, nous
avons conservé un grand nombre de poèmes (sans
parler de rédactions en prose), dans des manuscrits
qui vont de 1160 (ou 1170) à 1470 environ. La masse
énorme des vers que renferment ces manuscrits n'est
rien en comparaison de celle qui a existé. De ce qui nous
est parvenu, une faible partie seulement est publiée,
mais, sauf exception, ce qui reste inédit n'a pas une
haute valeur. — Dès le moyen âge, on a essayé de
classer ces poèmes en cycles ou gestes (voir § 21). Un
premier travail, dû à quelque jongleur, distingua trois
gestes, rattachées à trois chefs de famille : Pépin (geste
du roi), Garin de Monglane, Doon de Mayence. En dehors
de ces trois gestes restèrent les poèmes consacrés aux
Mérovingiens et ceux qui concernent Charles Martel (con-
fondu avec Charles le Chauve). En gros, la geste du roi
raconte, outre les événements de famille de la race
royale, les guerres générales ; celle de Garin de Monglane
a pour sujet la conquête ou la défense de la Provence,
du Languedoc et de la Catalogne contrôles Musulmans;
44 LITTERATURE .NARRATIVE.
celle de Doon de Mayence est consacrée aux luttes féo-
dales. Mais il y a beaucoup d'exceptions, de croisements
et de poèmes isolés (ainsi, outre ceux que nous avons
indiqués tout à l'heure, Aioul, Êlie de Sainl-Gilles, Raoul
de Cambrai, Bovon de Hanstone, etc.); plus tard on essaya
de tout rattacher à un cycle, surtout à celui de Doon de
Mayence. Le seul cycle qui ait quelque unité réelle est
celui de Garin de Monglane (§ 38 et suiv.); encore a-t-il
englobé, sous le nom de Guillaume d'Orange, des per-
sonnages et des événements qui lui étaient absolument
étrangers. — L'idée d'une geste spéciale pour les
traîtres devait naître de l'inspiration de l'épopée féo-
dale, qui est profondément généalogique; cette geste
ne fut cependant qu*esquissée en France : elle se fondit
dans la grande geste de Doon de Mayence, qui compre-
nait déjà les vassaux rebelles. En Italie, au contraire, où
l'épopée française trouva une seconde patrie voir § 32),
elle se développa pleinement et produisit la criminelle
famille des Maganzesi. Ces divisions factices peuvent
être commodes dans certains cas; nous n'en tiendrons
que peu de compte. — Dans 1 impossibilité où nous
sommes d'analyser ou simplement de mentionner toutes
les chansons de geste qui nous sont parvenues, nous
allons jeter sur l'épopée un coup d'oeil rapide, en grou-
pant les poèmes sous quelques points de vue justifiés
parleur nature et leur origine; puis nous étudierons
avec quelque détail un poème (Roland) et un cycle (celui
de Garin de Monglane).
24. Epopée royale. L'épopée royale ou nationale, à
laquelle on peut rattacher les poèmes relatifs aux Méro-
vingiens, comme Floovcnt (voir § loi. est la plus ancienne :
elle est antérieure à la constitution de la féodalité. Elle
est essentiellement consacrée aux guerres nationales,
L EPOPEE NATIONALE. 45
sous la conduite des rois, contre les ennemis du nord,
de l'est ou du sud. Les principaux poèmes qu'elle com-
prend sont : les Saisnes (nous en possédons un renouvel-
lement (Je la fin du mi0 siècle, par Jean Bodel d'Arias,
et la version norvégienne d'un autre un peu plus ancien ;
le sujet, emprunté aux guerres de Charlemagne contre
les Saxons, se rattache de près, comme nous l'avons vu
§ 15, à d'anciens poèmes mérovingiens); — Aspremont
(textedu \ii° siècle, rimé, sur une expédition fabuleuse
contre les Sarrasins en Italie); — les Enfances Oger le
Danois (sujet analogue : les enfances d'un héros sont ses
premiers exploits ; — Fierabras (épisode détaché et fort
allongé d'un poème plus ancien, perdu, dont la scène
était également en Italie, et qui se termine par la con-
quête et le transport à Saint-Denis des célèbres reliques
de la Passion, exposées à la vénération des fidèles le
jour de Vendit, devenu la fête du Lendit) ; — le Pèleri-
nage de Charlemagne (poème du xie siècle, moitié sérieux,
moitié comique, comprenant une aventure originaire-
ment fort étrangère à Charlemagne, et en outre le récit
de son prétendu pèlerinage à Jérusalem, d'où il aurait
rapporté ces mêmes reliques); — Roncesials ou Roland
(voir § 33) et les autres poèmes consacrés à la guerre
d'Espagne, comme Gui de Bourgogne, qui se place avant
Roncevaux (poème de pure fiction, où les fils des guer-
riers, restés vingt-sept ans en Espagne, vont à la recher-
che de leurs pères, les rejoignent et leur font avoir la
victoire), ou Anseîsde Carthage, qui se place après (Char-
lemagne a laissé un roi en Espagne, qui, en déshono-
rant la fille d'un de ses grands vassaux, pousse celui-ci
à amener en Espagne les Sarrasins d'Afrique : le fond
du récit paraît emprunté à la légende espagnole de
Rodrigue et du comte Julien); — Aiquin (reconquête de
la Bretagne armoricaine sur les Sarrasins qui l'avaient
46 LITTERATURE NARRATIVE.
envahie, souvenir probable des incursions normandes);
— Dcsier (chants perdus sur la guerre de Charlemagne
contre les Longobards, dont quelques fragments se sont
conservés dans Oger le Danois) ; — Jean de Lanson (autre
expédition en Italie, mais contre un vassal rebelle); —
le Roi Louis beau poème du XIe siècle, dont on n'a qu'un
fragment de 000 vers de huit syllabes, plus la version
allemande d'un renouvellement du xine siècle; souvenir
très vivant de la victoire remportée en Vimeu par
Louis III sur les Normands en 881), etc. Nous ne par-
lons pas ici du cycle méridional, qui sera étudié plus
loin. — On peut joindre à ces poèmes ceux qui sont con-
sacrés à des aventures personnelles ou de famille des
rois : Berte (la femme de Pépin, trahie par une serve qui
pendant de longues années se substitue à elle); Mainel
(séjour en Espagne et mariage du jeune Charles, chassé
de France par ses frères bâtards, fils de la fausse Berte,
et caché sous le nom de Mainet; nous n'avons que des
fragments d'une rédaction rimée de ce poème qui a
existé dans de nombreuses versions, dont le fond appar-
tient en partie à l'ancienne épopée allemande, et dont
le héros a d'abord été Charles Martel); — Basin (Char-
lemagne, sur l'ordre d'un ange, s'associe incognito à une
expédition nocturne de Basin, proscrit par luietdevenu
voleur; il s'introduit ainsi dans la chambre d'un traître
qui a conspiré sa mort, et apprend toute la conjuration,
en même temps qu'il reçoit la preuve de la fidélité de
Basin; nous n'avons pour ce poème que des allusions
et des imitations étrangères); — Sébile (la femme de
Charlemagne, injustement bannie, est ramenée par son
père l'empereur de Grèce, et son innocence est recon-
nue; c'est dans ce poème, perdu sauf quelques frag-
ments sous sa forme originale, que se trouve l'épisode
du combat d'un meurtrier contre un chien fidèle, devenu
l'épopée nationale. 47
célèbre* sons le nom du chien de Montargis); — Huon
Çhapet (le dernier roi de France, Louis, fds de Charle-
magne, ne laissant qu'une fille, Huoh Chapet mérite par
ses exploits de l'épouser et de devenir roi de France), etc.
Beaucoup des poèmes de ce genre appartiennent en réalité
à ce que nous appelons l'épopée adventice : les récits
qu'ils contiennent ne sont pas français d'origine et se
trouvent ailleurs rapportés à d'autres qu'à nos rois. —
Certains poèmes présentent le mélange de l'épopée royale
avec l'épopée féodale, comme : Oger le Danois (dont les
Enfances ont été mentionnées plus haut, mais dont la
Chevalerie nous offre un des types les plus marqués de
la lutte entre le roi et ses vassaux, tandis que la fin
nous présente de nouveau la guerre nationale contre les
Sarrasins); — le Roi Louis (qui célèbre, à côté de la vic-
toire royale, les premiers démêlés des barons avec la
couronne d'où sortit la féodalité); — le Couronnement de
Louis (poème qui s'appuie en grande partie sur des faits
historiques, et dont l'inspiration est au fond loyale,
mais qui montre à quel prix la féodalité faisait acheter
à la royauté carolingienne l'appui quelle lui donnait
parfois, soit contre ses vassaux français, soit contre
l'étranger), etc.
2o. Épopée féodale. L'épopée féodale présente deux
groupes principaux. Le premier a pour sujet la lutte de
la féodalité contre la royauté. Tels sont, outre les der-
niers poèmes nommés ci-dessus : Renaud de Montauban
ou les Quatre Fils Aimon (quelques faits paraissent se
rapporter à l'époque de Charles Martel, mais les diverses
rédactions, d'ailleurs assez peu anciennes, qui nous
sont parvenues remontent à un fond tout imprégné de
1 esprit féodal ; le poème de Maugis n'est que le dévelop-
pement des indications du Renaud sur ce personnage
48 LITTÉRATURE NARRATIVE.
étrange, moitié sorcier, moitié lutin, qui remonte à la
mythologie germanique); — Girard de RoussHlon (le
Girard historique avait en Bourgogne le centre de sa
force, et le plus important «les poèmes consacrés à ses
luttes contre Charles le Chauve, changé en Charles
Martel, était dans un dialecte intermédiaire entre ceux
du nord et du midi; transformé en Girard de Fratle, en
Girard de Vienne, il est encore le héros d'autres chan-
sons, où il guerroie Charlemagne, comme il le faisait
d'ailleurs sous son nom ordinaire dans des poèmes
populaires français qui se sont perdus); — Huon de Bor-
deaux (un épisode tout féodal, ayant sans doute pour
fondement un fait réel du règne de Charles le Chauve,
a été agrandi par l'heureuse fantaisie d'un poète, et est
devenu le cadre de merveilleuses aventures placées en
Orient, où intervient le petit « roi de féerie » Auberon,
qui semble avoir été emprunté par le poète, sans doute
de Saint-Omer, à des légendes locales du Hainau tout
voisin, d'origine germanique, sur le roi des nains
Alberich; — Gaidon (poème sans grand intérêt qui
conserve quelque souvenir confus des luttes de l'Anjou
pour son indépendance), etc. — L'autre groupe, laissant
la royauté à peu près de côté, ne la faisant intervenir
que comme un modérateur impuissant ou un arbitre
partial, nous présente les guerre des barons entre eux,
telles qu'elles remplirent le Xe siècle. A cette classe
appartiennent : Raoul de Cambrai (la bataille où périt
Raoul, combattant les fils de Herbert de Vermandois,
est de 942; la chanson qu'inspira cet événement est la
base du poème, mais il s'y est ajouté des éléments plus
modernes); — Aubcri le Bourguignon (les faits conservés
dans ce long poème ne peuvent plus se discerner des
éléments romanesques); — Guillaume Longue Épée ou
plutôt la Vengeance de Ilioul (poème sur le meurtre du
L'ÉPOPÉE NATIONALE. 49
second duc de Normandie par Arnoul de Flandre en
923, que Wace avait entendu chanter, sans doute à
Paris, dans son enfance, c'est-à-dire entre 1110 et 1120;
nous ne le connaissons plus que par le résumé d'un
historien anglais : il était plutôt hostile que favo-
rable à Guillaume et aux Normands); et surtout les
Lorrains, cycle entier comprenant cinq grandes chan-
sons {llervi, Garni, Gilbert, Anseïs, Yon), qui retracent les
divers épisodes de la lutte poursuivie entre plusieurs
générations de Lorrains et de Bordelais : on n'a pas
réussi jusqu'à présent à trouver à cette immense com-
position, la plus historique d'allure de toutes les chan-
sons de geste, le moindre fondement dans l'histoire.
26. A l'époque féodale se rattache ce qu'on peut
appeler l'épopée biographique : ce sont des poèmes
retraçant les aventures d'un héros qui, après mille tra-
verses, arrive au bonheur; l'importance accordée à un
individu sépare ces poèmes de l'épopée nationale, à
laquelle les rattachent souvent les services rendus aux
rois par le héros. Mentionnons : Aioul (fils d'un père
injustement banni par le roi Louis, Aioul le fait réhabi-
liter, reconquiert son héritage, punit les traîtres, et,
après bien des aventures, est réuni à sa femme, qu'il a
conquise sur les païens) ; — Élie de Saint-Gilles (le héros,
enlevé par les Sarrasins, épouse la fille du soudan et
conquiert un royaume); — Orson de Beauvais (le duc
Orson est trahi par son ami et compère, mais vengé par
son fils Milon); — Aie d'Avignon et Gui de Nanteuil (deux
poèmes qui se font suite, relatifs à des aventures de
Famille et à des rivalités féodales); — Huon d'Auvergne
(poème qui n'existe plus qu'en diverses rédactions ita-
liennes, où on voit un baron envoyé par Charles Martel
jusqu'en enfer), etc.
4
bO LITTÉRATURE NARRATIVE.
27. Il faut ajouter à ces deux groupes ce qu'on peut
appeler l'épopée adventice, c'est-à-dire des récits venus
de toutes parts, n'ayant pas leur source dans l'histoire
nationale, mais que les jongleurs ont l'ait entrer dans le
cadre de l'épopée française. Il faut citer (outre Berte,
Sébile, une partie du Pèlerinage et de Huon de Bordeaux) :
Ami et Amile (vieille légende orientale sur un exemple
d'incomparable amitié); — Jourdain de Blaie (la seconde
partie est une imitation, d'ailleurs fort heureusement
transformée, d'un roman grec traduit en latin vers le
IVe siècle et très répandu au moyen âge, Apollonius de
Tyr); — Doon de la Roche (variante du thème, déjà traité
dans Sébile, de la femme innocente et persécutée; ce
thème se retrouve plus ou moins différent dans Florent
et Octavien (on en possède une rédaction du XVe siècle,
et, concurrence fort rare, une autre en vers plats octo-
syllabiques. composée au xme siècle à Paris sous le titre
d'Octavien, dans Florence de Rome (plusieurs rédactions .
dans la Belle Hélène, etc). — Joignons à ce groupe
certains emprunts faits à d'autres épopées encore
vivantes au moment où la nôtre se formait ou se déve-
loppait.
Le Moniage Guillaume repose en partie sur un poème
germanique, sans doute longobard ; Bovon de Hanslone
a également une origine allemande, et un ancien mythe
franc paraît avoir fourni une partie du sujet de Huon de
Bordeaux. Anseis de Cafthage, comme on l'a vu, s'appuie
sur une légende espagnole. — Quelquefois on n'a donné à
ces emprunts que la forme consacrée des chansons de
geste, sans les rattacher à la famille de Charlema-
gne : tel est le cas pour Horn et Aalaf (ce dernier-
perdu), poèmes empruntés à l'anglo-saxon, et pour cer-
taines versions de Bovon de Hanstone; on peut encore
rapprocher de ces poèmes les romans d'Alexandre
L ÉPOPÉE NATIONAL!:. 31
et des Macchabées, qui ont reçu la l'orme épique fran-
çaise.
28. L'histoire de l'épopée se termine par les poèmes
de pure invention, généalogiques ou cycliques : les jon-
gleurs, pour réveiller l'intérêt des auditeurs, pour satis-
faire la curiosité, ont inventé des enfances aux héros les
plus connus, ou ont raconté, en jetant leurs récits dans
le moule devenu banal des chansons biographiques
antérieures, la vie des pères, des grands-pères, des fils,
etc., de ces héros, ou bien ils ont réuni dans de longues
compilations des aventures connues et des aventures
nouvelles. Doon de Mayence, Garin de Monglane, Gaufrei,
Tristan de ISanteuil, Galien, Renier, Valentin et Orson
rentrent à peu près dans cette classe, à laquelle appar-
tiennent aussi les suites ou les introductions faites à
tant d'anciennes chansons. Le Charlemagne de Girard
d'Amiens (fin du xme siècle) est une sorte d'histoire
poétique du grand empereur, composée à l'aide de
nombreux poèmes et aussi des chroniques, et délayée
dans le style le plus platement prolixe. Après une
œuvre pareille, il est clair que l'épopée, dans le sens
propre du mot, a bien achevé de mourir.
29. Nous avons laissé de côté le cycle de la première
croisade, qui s'est formé après la période proprement
épique. Il comprend bien, comme la vraie épopée, des
faits historiques, mais les chants primitifs que ces faits
ont suggérés, et qui sont la base des poèmes posté-
rictus, différaient beaucoup de ceux qui ont donné nais-
sance aux vraies chansons de geste. Ceux-ci ont été
composés, sous l'impression des événements, pour ceux
et par ceux qui y avaient pris part, non pour raconter
les faits, mais pour exprimer les sentiments qu'ils
52 LITTERATURE NARRATIVE.
inspiraient; les autres ont été faits surtout pour ceux
qui n'avaient pas assisté aux événements et dans le
dessein de les leur faire connaître : ils les racontaient
presque exactement: ils n'avaient guère de la poésie
que la forme, au fond ils étaient de l'histoire. Aussi
l'inspiration épique leur fait-elle généralement défaut.
A cet élément historique s'est jointe, dans les poèmes
que nous avons, l'invention pure et simple des jongleurs
français : leur intervention décisive se marque en ce
qu'ils représentent les Sarrasins, d'après la tradition
des chansons de geste antérieures, comme des idolâtres,
des païens : on voit que leurs poèmes ne reposent pas
sur une connaissance directe du monde musulman. La
Chanson de Jérusalem n'en comprend pas moins des
morceaux fort intéressants, comme ceux qui sont con-
sacrés à la prise d'Antioche et à la bataille qui la suivit.
Dans d'autres parties, comme l'épisode des Chétifs, il
n'y a plus que des aventures romanesques sans intérêt,
unies par un lien assez lâche à l'histoire de la guerre
sainte. Dans le Chevalier au Cygne nous avons une vieille
Légende mythologique rattachée aux origines de la
maison de Bouillon; cette légende a plus tard été reliée
à des récits relatifs au saint graal (voir § 60). — Tout le
cycle des croisades fut l'objet au xive siècle d'un vaste
remaniement, et reçut alors l'adjonction d'épisodes tout
nouveaux et purement fabuleux, mais dont quelques-uns,
comme Baudouin de Scbourg, sont pleins de gaieté et
d'heureuse invention.
30. Nous devons mentionner, pour finir, certains essais
curieux qui se produisirent au xiv siècle d'une nouvelle
épopée nationale. Vers 1315, un auteur barrois, peut-
être Simon de Marville. imitait de près les Vœux du Paon
(§ 44) dans un poème curieux sur l'expédition italienne
L EPOPEE .NATIONALE. 53
et la mort de l'empereur Henri VII; ce poème, les
Vœux de VÉpervier, appartient à l'épopée nationale par le
l'ait que le héros principal, après l'empereur, estTibaud
de Bar, évêquede Liège. — La guerre contre les Anglais
passionnait tous les esprits et y produisait des disposi-
tions favorables à l'inspiration épique. Le petit poème
sur le Combat des Trente (1351) est un spécimen intéres-
sant de cette tendance, qui n'aboutit pas, à cause sur-
tout de la banalité des formules consacrées que la déca-
dence de l'épopée antérieure avait léguées au .\ive siècle
et du manque absolu de puissance poétique de cette
époque. Le long poème de Cuvelier sur Bertrand Du
Guesclin, digne d'estime comme effort, montre cette
impuissance avec une évidence entière. Elle éclate
encore plus, s'il est possible, dans la Geste de Liège
(par Jean des Prés ou d'Outremeuse, fin du xive
siècle) et dans la Geste des Bourguignons (commence-
ment du xve siècle) qui clôt la série des poèmes en
laisses monorimes. — L'épopée était morte et ne
pouvait renaître; bientôt les productions qui en subsis-
taient encore allaient commencer à être mises en
prose et sortir pour toujours de la scène des êtres
vivants.
31. Comme l'épopée grecque, l'épopée française a sus-
cité des parodies. Nous en avons conservé une fort
ancienne, l'histoire comique d'Audigier, dont les
exploits grotesques sont racontés avec un incroyable
cynisme d'idées et d'expressions, mais non sans verve
grossière, dans le rythme particulier d'Aioul et de Girard
de Roussillon. Une autre, en jargon mêlé de flamand et
de picard (le Siège de Neuville), raconte un siège prétendu
dans lequel les héros des deux partis sont de bons
bourgeois flamands, qui sont mis en scène comme s'il
54 LITTERATURE NARRATIVE.
s'agissait de Guillaume d'Orange ou de Garin le Lor-
rain. Ces plaisanteries contribuent à attester la popula-
larité des chansons de geste.
32. Avant de périr, l'épopée française avait exercé
sur la poésie des nations voisines une immense
influence. Portée en Angleterre par les vainqueurs de
Hastings, elle y trouva une seconde patrie, et plusieurs
de nos poèmes lurent, assez tardivement et médiocre-
ment d'ailleurs, traduits plus tard en anglais et même
en gallois et en irlandais. — L'Allemagne traduisait le
Roland dès la fin du premier tiers du xne siècle; plus
tard un minnesinger célèbre, Wolfram d'Eschenbach, met-
tait Aleschans en vers allemands; bien d'autres chansons
étaient imitées. — Dans les Pays-Bas, gagnés de bonne
heure à la culture française, la vogue de nos chansons
de geste ne fut pas moins grande, et elle s'est maintenue
en partie jusqu'à nos jours dans le peuple, grâce aux
rédactions en prose qui se réimpriment encore. — Les
Norvégiens, dès le commencement du xme siècle, con-
naissaient nos chansons de geste par l'intermédiaire de
l'Angleterre et les traduisaient fidèlement en prose. —
L'Espagne s'en inspirait dès le milieu du xne siècle pour
chanter leCid, et composait, même sur les sujets caro-
lingiens, des cantares de grsta dont quelques débris se
retrouvent dans les romances du XVe siècle. — Mais
c'est en Italie que l'épopée française devait faire la plus
étonnante fortune. Dans le nord de la Péninsule, où se
parlaient des dialectes plus ou moins voisins du français,
nos poèmes avaient pénétré de très bonne heure; bientôt
ils furent remaniés, puis imités, dans une langue factice,
ayant le français pour base, mais fortement influencée
par le lombard ou le vénitien. Parmi ces imitateurs, qui
devinrent nombreux et rompirent d'assez bonne heure
LEPOPEE NATIONALE. 55
tout lien direct avec la poésie française, il s'en trouva
qui eurent «le l'imagination et un vrai mérite littéraire,
comme le Padouan anonyme qui composa la première
partie d'un vaste poème sur Y Entrée de Spagne (la suite
est de Nicolas de Vérone). Leurs œuvres furent plus
tard, surtout en Toscane, imitées en prose et en rime
italiennes; des poètes d'un talent de plus en plus bril-
lant, Pulci, Bojardo, Arioste, sans parler des autres,
prirent à leur tour ces imitations pour bases de leurs
poèmes célèbres, en les transformant d'ailleurs considé-
rablement, Pulci par l'ironie, Bojardo et l'Arioste par
l'immixtion dans la matière de France de l'esprit des
romans bretons et des formes classiques de l'antiquité.
Ainsi l'épopée carolingienne, morte en France, trouva
en Italie une renaissance imprévue; c'est là qu'elle a reçu
la forme, sinon la mieux appropriée à son génie, au
moins la plus artistique, et, grâce aux rédactions en
prose, c'est là aussi que jusqu'à nos jours elle est restée
le plus populaire.
:}3. Nous allons maintenant parler avec quelque détail
de la Chanson de Roland ou de Roncevaux, la plus intéres-
sante, à tous les points de vue, de nos chansons de
geste. — En 778, le 15 août, l'arrière-garde de l'armée
de Charles, roi des Francs, qui revenait d'une expédition
en somme heureuse dans le nord de l'Espagne, fut sur-
prise dans la vallée de Roncevaux par les Basques habi-
tant les montagnes; les bagages qu'elle protégeait
furent pillés et tous ceux qui la composaient tués, parmi
eux, dit Éginhard, Hrodland, comte de la marche de
Bretagne. Ce désastre fit sur les imaginations une vive
impression, et suscita sans doute des chants nombreux;
un passage d'un historien qui écrivait environ soixante
ans après montre que les noms des morts de Roncevaux
56 LITTERATURE NARRATIVE.
étaient restés populaires. L'expédition d'Espagne tout
entière avait dû. d'ailleurs, donner lieu à des chants
épiques : quelques traits qui se sont conservés dans notre
poème remontent sans doute à ces souvenirs directs des
événements, comme les noms de différentes villes espa-
gnoles Saragosse, Tudèle, Balaguer), la connaissance
des ports d'Aspe et de Cise. etc. Mais ces quelques traits
sont noyés dans les additions et amplifications posté-
rieures. — On commença par substituer aux Basques
(dont le nom est cependant mentionné une fois dans le
poème, mais précisément dans la partie la moins
ancienne) les Sarrasins comme auteurs du désastre, et,
on supposa qu'ils étaient en nombre considérable, vingt
fois, cent fois supérieur à celui des Francs. — On se
rappela toujours que la troupe massacrée était l'arrière-
garde, et que le désastre était arrivé pendant que
l'armée rentrait en France. Il fallait donc que les Sar-
rasins eussent promis la paix et attaqué les Francs par
trahison: un Franc avait dû être complice de cette tra-
hison. De là le personnage de Ganelon (germ. Wenilo\,
présenté d'abord simplement comme acheté par l'or du
roi sarrasin Marsile, puis comme l'ennemi personnel de
Roland (en même temps, au moins dans le poème de
Turold, son pardtre, le second mari de sa mère, sœur de
Charlemagne) : Ganelon fait désigner Roland pour com-
mander rarrière-garde. d'accord avec Marsile, qui espère,
en tuant Roland, priver Charles de son « bras droit ». —
Le trait essentiel de l'événement réel, la gorge étroite
interceptée par les Basques, qui, se plaçant entre Le gros
des Francs et l'arrière-garde, la repoussèrent dans une
vallée où elle se trouva cernée de toutes parts, ce trait
n'est plus bien compris par l'imagination de gens de plat
pays qui gardent seulement le souvenir de hautes mon-
tagnes, de roches sombres, de défilés « merveilleux »
L EPOPEE .NATIONALE. 57
comme cadre du tableau. Ils ne se rappellent pas non
plus que (d'après Éginhard) les Basques avaient un équi-
pement léger, qui, dans ces conditions du terrain, leur
donna l'avantage sur les Francs pesamment armés : les
Français et les Sarrasins sont ici armés de même. Les uns
Bl les autres sont à cheval, tandis qu'il n'en était rien, au
vui' siècle, à coup sûr pour les Basques, ni sans doute
pour les Francs. — Le désastre de Boncevaux ne fût pas
vengé : comment atteindre ces montagnards, qui se dis-
persèrent aussitôt après le coup? 11 était déjà nuit quand
Charles revint sur ses pas :'les ennemis avaient disparu,
et il ne put que reprendre tristement le chemin de la
France. L'épopée ne pouvait longtemps accepter cette
fin : Charles dut ramener son armée à Boncevaux, appelé
trop tard par le cor de Boland; à la faveur d'un miracle
de Dieu, qui lui « allongea le jour », il dut tailler en
pièces les restes de l'armée païenne; plus tard on le fît
pousser jusqu'à Saragosse et s'en emparer, plus tard
encore vaincre, lui chef de toute la chrétienté, le chef de
toute la païennie dans une bataille colossale terminée par
un combat singulier. Le traître Ganelon, jugé sur place,
dut recevoir la peine de son crime. — Éginhard nomme
trois des morts illustres de Boncevaux : Eggihard (dont
l'épitaphe récemment retrouvée nous a fait connaître la
date du 15 août), Anshelm, et Hrodland en troisième
lieu seulement. Les deux premiers n'ont laissé aucune
trace dans l'épopée; d'où vient que le dernier en est
devenu l'incomparable héros? Probablement de ce que
nos poèmes remontent aux chants épiques des compa-
triotes, des compagnons de Boland, aux chants de la
marche de Bretagne (Bretagne française); le poème de
Turold porte encore des traces visibles de son origine
bretonne. Boland devient, d'après ces chants, le person-
nage principal et le centre de l'action : il est le neveu de
58 LITTERATIRE NARRATIVE.
Charles, le premier des « douze pairs » ; c'est par haine
pour lui que Ganelou devient traître; c'est lui que veut
surtout faire périr Marsile; c'est lui qui, en refusant
d'abord de sonner du cor pour appeler Charles à son aide,
cause la perte de l'arrière-garde qu'il commande, et pré-
sente ainsi le caractère profondément tragique de la
desmesure (qui joue dans notre épopée le rôle de Vhybris
dans l'épopée grecque) amenant le désastre, en même
temps que de l'héroïsme pour le supporter et lé rendre
glorieux. A côté de lui, à une époque impossible à déter-
miner, vient se placer Olivier, son compagnon d'armes,
aussi preux, mais plus sage, frère de la belle Aide, que
Roland doit épouser (cet amour lointain jette sur sa mort
un reflet plus touchant et plus poétique), et qui meurt
elle même aux pieds de Charlemagne en apprenant la
mort de son fiancé. — Charles, en 778, avait trente-six ans ;
mais l'épopée avait consacré sa figure, d'après les der-
niers temps de son règne, comme celle d'un vieillard
« la barbe fleurie, majestueux encore plus qu'actif; le
poème de Turold va jusqu'à lui donner deux cents
ans, et ne l'en fait pas moins prendre au dernier combat
une part décisive; il le représente d'ailleurs comme
entouré d'une sorte d'auréole : Dieu fait des miracles à
sa prière et communique sans cesse avec lui par l'inter-
médiaire de l'ange Gabriel. Assis sur son faklestucl d'or,
il préside aux délibérations de la paix; grave et d'ordi-
naire silencieux, caressant sa barbe blanche, qu'il
étalera pour le combat sur sa brogne de mailles, il écoute
les avis opposés, se voit parfois contraint de céder, malgré
lui, aux sentiments de son conseil, mais, une fois la déci-
sion prise, la fait impérieusement exécuter. — Le duc
Naimon de Bavière est le plus vieux et le plus sage de
ses conseillers; après lui Roland, Olivier, l'archevêque
Turpin, Ganelon jusqu'à son crime, Oger de Dane-
L EPOPEE NATIONALE. 59
marche, sont les plus écoutés. — Ces traits appartien-
nent déjà sans doute à une très ancienne forme de la
légende héroïque de Roncevaux; tous ne remontent
cependant pas à l'origine.
34. Cette légende nous est arrivée sous trois formes
principales : les chap. xxi-xxix du . roman latin qui
prétend être l'œuvre de Turpin. composé vers la fin du
premier tiers du xne siècle comme suite à un ouvrage
plus ancien, fait à la gloire de saint Jacques de Compos-
telle, dont on prétendait que Charlemagne avait été le
premier pèlerin; — le Carmen de proditione Guenonis,
poème en distiques latins à peu près de la même
époque; — etla Chanson de Roland, dont la forme la plus
ancienne, en assonances, est encore du XIe siècle. — Le
Carmen et le Roland remontent à une même source, moins
altérée dans le Carmen, considérablement amplifiée et
modifiée dans le poème français; les chapitres de
Turpin représentent un état sensiblement plus ancien.
35. La rédaction en assonances ne peut remonter plus
haut que la seconde moitié du XIe siècle : c'est ce qu'at-
testent, outre des faits linguistiques, des allusions his-
toriques, comme l'introduction dans le récit de person-
nages du xc siècle (Jofrei d'Anjou, gonfalonnier du roi,
Richard de Normandie, etc.), la mention de l'oriflamme,
relie du pillage de Jérusalem par les Turcs, et le cos-
tume général; mais il n'y a aucune raison de la faire
descendre plus bas que la première croisade. On sait
que Taillefer, jongleur et guerrier, chantait à la bataille
de Hastings (1066) un poème sur Roncevaux; ce n'était
pas le nôtre tel quel, mais c'en était sans doute une
rédaction antérieure, car le nôtre a conservé des vers
qui semblent avoir été composés à l'occasion de l'expé-
60 LITTERATTRE NARRATIVE.
dition de Guillaume le Bâtard (Guillaume revendiquait
pour la papauté le tribut que l'Angleterre s'était jadis
engagée à lui payer, et, en attribuant à Charlemagne la
conquête de ce pays, le poème dit : Ad oes saint Piedre
en conquist le cheraqe). — Cette rédaction est conservée
plus ou moins imparfaitement dans les textes suivants :
1" un manuscrit aujourd'hui à Oxford, écrit en Angle-
terre dans la seconde moitié du xir siècle, qui attribue
soit la récitation, soit la composition de l'œuvre à un
certain Turold; 2° un manuscrit de Venise, provenant
des Gonzague de Mantoue, écrit au xive siècle et d'une
langue fortement italianisée; 3° une rédaction en î-imes,
de la seconde moitié du xnc siècle, dont nous reparle-
rons tout à l'heure; 4° une traduction en prose norvé-
gienne du xme siècle; 5° une traduction libre en vers
allemands faite par le clerc Conrad vers 1133; 6° les
fragments d'une traduction en vers néerlandais du
xie siècle; 7° diverses versions italiennes, où sont
mêlées la rédaction rimée, quelques traits de source
particulière et des inventions nouvelles. Le rapport de
ces différents textes entre eux n'est pas encore bien
établi. Ils paraissent cependant dériver tous d'un manu-
scrit, et non de diverses traditions orales qui auraient
été indépendamment confiées à l'écriture; mais les
scribes ont pris avec leur texte des libertés plus grandes
que d'ordinaire, et ils ont sans doute parfois subi l'in-
fluence des versions divergentes des jongleurs.
36. L'auteur ou plutôt l'arrangeur de l'œuvre contenue
dans ce manuscrit perdu était-il un clerc? C'est ce qui
ne parait pas probable. Il mentionne, il est vrai, Virgile
et Homère, il fait des démons de Jupiter et d'Apollon,
il connaît certains épisodes de la Bible: mais rien dans
tout cela ne dépasse les connaissances que pouvait avoir
L EPOPEE NATIONALE. 61
un jongleur qui avait reçu quelque instruction, et, s il ;i
écrit lui-même son œuvre, cette instruction ne lui fai-
sait pas défaut. Il cite comme sources l'ancienne geste, la
geste Francor (Gesta Francorum), une prétendue charte
qu'aurait écrite saint Gilles de Provence (lequel en réa-
lité vivait cent ans avant Charlemagne) ; mais toutes ces
indications sont vagues ou imaginaires. S'il avait été
clerc, il aurait consulté d'autres sources latines, et on en
trouverait la trace dans son œuvre. Mais on peut croire
qu'il connaissait des clercs, qu'il avait peut-être étudié
pour être clerc lui-même et avait ensuite suivi une autre
vocation. — C'était plus qu'un renouveleur ordinaire :
il a transformé l'ancien poème que nous pouvons deviner
par la comparaison du Carmen et de Turpin. Il y a
ajouté toute l'introduction; pour la fin on ne peut rien
affirmer, les termes de comparaison manquant, mais à
tout le moins on peut lui attribuer la translation à Aix
du procès et de l'exécution de Ganelon, l'épisode de la
mort d'Aide, etc. Le grand épisode où Baligant, chef
suprême des païens, intervient pour venger Marsile et
est vaincu à son tour par Charlemagne a très probable-
ment été incorporé plus tard à son œuvre. — Dans son
travail de remaniement, le poète a laissé subsister plus
dune contradiction : Marsile déclare au début qu'il n'a
pas d'armée, et ensuite en déploie une immense; son
oncle Valgalife (le calife) semble d'abord devoir jouer un
grand rôle et paraît à peine par la suite ; on réclame à
Marsile, pour la paix feinte qu'il jure, des otages qu'il
donne et dont il n'est plus parlé; le caractère de Ganelon,
changé comme nous l'avons indiqué plus haut, offre de
frappantes disparates; à l'ancienne géographie de la
légende, lidèle aux souvenirs des faits historiques, ont
été mêlées des notions fantastiques, etc. On peut
presque toujours comprendre ce qui a amené ces
62 LITTERATURE NARRATIVE.
contradictions : c'est le désir de mieux présenter tel
«m tel événement et surtout de rendre tel ou tel détail
plus dramatique; le poète, d'ailleurs habile et puis-
sant, perd de vue, pour l'effet momentané qu'il veut
obtenir, l'ensemble de sa composition. — Cette compo-
sition est cependant, en général, réfléchie et curieuse-
ment symétrique : ainsi les trois batailles successives
que livrent Roland et les siens se décomposent en petits
combats qui se font rigoureusement pendant. La vérité
humaine et vivante et la variété du détail sont constam-
ment sacrifiées ou subordonnées à l'idée générale qui
anime le poème, celle de la lutte des chrétiens, sous
l'hégémonie de la France, contre les Sarrasins. Les
caractères, transmis par la tradition antérieure, sont
accusés de façon à devenir des types. L"art incontestable
qui éclate dans cette œuvre est déjà essentiellement un
art français, qui rappelle en beaucoup de points la con-
ception de nos tragédies classiques. — L'action est
presque toujours non pas racontée, mais mise sous les
yeux de l'auditeur : le poème est une suite de tableaux;
les verbes sont presque tous au présent. — Les laisses
homotélentes sont d'inégale longueur, sans cependant
être trop disproportionnées; elles comprennent en
moyenne une quinzaine de vers. Chacune d'elles est le
plus souvent complète en elle-même, forme un petit
tableau à part, et n'offre que rarement avec la précé-
dente et la suivante ces raccords qui sont habituels
dans les poèmes postérieurs. On peut dire que la
Chanson de Roland (ainsi que toutes nos plus anciennes
chansons de geste) se développe, non pas, comme les
poèmes homériques, par un courant large et ininter-
rompu, non pas. comme le Nibelungenlied, par des bat-
tements d'ailes égaux et lents, mais par une suite d'ex-
plosions successives, toujours arrêtées court et toujours
L EPOPEE NATIONALE. 63
reprenant avec soudaineté. — Il est impossible de dis
cerner, pour la forme, des parties plus anciennes les unes
que les autres ; cependant il faut sans doute regarder le
noyau central, qui comprend le récit môme du combat
de Ronce-vaux, comme plus fidèlement conservé d'un
^oème antérieur et comme plus ancien que tout ce qui
précèdeet suit. — Le style est simple, ferme, efficace, il
ne manque ni de grandeur ni d'émotion, mais il est
sans éclat, sans véritable poésie et sans aucune recherch::
d'effet; on peut dire qu'il est terne, monotone, quelque
peu triste; il n'est nullement imagé : on ne trouve
dans tout le poème qu'une seule comparaison, et elle n'a
rien d'original ni de vu (Si com li cers s'en vait devant les
chiens, Devant Rodlant si s'en fuient paien). Il y a déjà dans
le Roland beaucoup de formules toutes faites, héritage
de l'épopée antérieure, qui facilitent au poète l'expres-
sion de ses idées, mais la rendent fréquemment banale,
et qui l'empêchent trop souvent de voir directement et
avec une émotion personnelle les choses qu'il veut
peindre. — De la poésie plus ancienne vient aussi sans
doute un procédé dont l'auteur fait usage parfois avec
un grand bonheur, et qu'on retrouve dans les chansons
postérieures : la répétition du même récit, du même
tableau, des mêmes paroles sur des assonances diffé-
rentes. C'est ainsi que trois fois Olivier adjure en vain
Roland de sonner du cor, que trois fois Roland, mou-
rant, essaye de briser son épée, etc. Quelques-unes de
ces répétitions, qui ne figurent pas dans tous les textes,
paraissent avoir été ajoutées par un renouveleur ou
provenir de rédactions concurrentes : ainsi Roland,
dans deux laisses successives du manuscrit d'Oxford,
accueille tout différemment la proposition faite par
Ganelon de lui confier le commandement de l'arrière-
garde ; Charlemagne, se représentant la tristesse de sa
64 LITTÉRATTRE NARRATIVE.
vie en France après la mort de son neveu, place la scène
du tableau qu'il se fait une première fois à Laon, une
seconde fois à Aix, et ces deux capitales de la royauté
carolingienne appartiennent à des éporpies toutes diffé-
rentes. — Le Roland soulève encore d'innombrables
questions, que la critique n'arrivera sans doute jamais
à résoudre toutes. La patrie et la date de la rédaction
dont nous avons conservé les textes indiqués plus haul
ne sont pas encore fixées sans contestation. Le plus
probable est qu'elle repose sur un poème originaire-
ment composé dans la Bretagne française, remanié
ensuite en Anjou, et qu'elle a pour auteur un < Français
de France », qui a dû achever son œuvre, à laquelle il
a donné une inspiration plus largement nationale et
royale, sous le règne de Philippe Ier.
37. La rédaction rimée, dont nous avons dit un mot
tout à l'heure, soulève aussi des problèmes fort difficiles.
File existe sous une double forme : l'une est conservée
dans un manuscrit de Venise et un de Châteauroux,
l'autre dans un manuscrit de Paris, un de Lyon, un de
Cambridge, et un fragment lorrain: dans ce dernier
groupe même il y a des divergences notables. Mais les
deux formes ont des passages considérables en commun,
en sorte qu'on peut les regarder comme ayant une
même source, qui doit remonter au commencement du
dernier tiers du xne siècle. Pour la fin du poème, la
rédaction ri niée paraît n'avoir pas eu de modèle dans
un texte composé en assonances, mais avoir été originai-
rement rimée; cette fin ne ressemble, dans aucun des
textes rajeunis, à celle du manuscrit d'Oxford. La rédac-
tion rimée lit oublier l'ancienne version assonante; mais
elle ne devait pas elle-même conserver jusqu'au bout sa
popularité. On la copiait bien encore au XIVe siècle
l'épopée nationale. 65
mis. de Lyon), et au xvc en Angleterre; mais ce ne fut
pas elle qu'on mit en prose pour perpétuer le souvenir
du combat de Roncevaux : ce fut un poème du xme ou
du xivc siècle, le Galien, qui, pour le récit de cet épi-
sode, paraît avoir puisé à une source indépendante du
Roland, et dont la narration, immensément inférieure,
fut derimée au milieu du xv° siècle, imprimée à la fin, et
répétée jusqu'à nos jours dans des livres populaires. —
D'autres livres semblables reproduisent la chronique de
Turpin, jointe par le Vaudois Jean Bagnyon (xvc siècle)
à une mise en prose de Fierabras, et imprimée depuis
lors un nombre incalculable de fois non seulement en
français, mais en anglais, en espagnol, en portugais et
en allemand. — L'ancien poème avait d'ailleurs eu de
bonne heure le plus grand succès à l'étranger, comme
le montrent les versions indiquées plus haut : c'est par
lui surtout que l'épopée française à pénétré dans le*
divers pays de l'Europe chrétienne, où Roland était
aussi populaire qu'en France, et dans plusieurs des-
quels il l'est resté jusqu'à nos jours.
38. Après avoir étudié d'un peu près la plus impor-
tante de nos chansons de geste, nous passons à l'examen
du cycle méridional, ou, pour employer l'expression du
moyen âge, de la geste de Garin de Monglane. Nous
possédons une vingtaine de poèmes qui lui appartien-
nent, composés probablement (en partie d'après des
éléments antérieurs) du commencement du xne siècle à
la fin du xme, les uns en assonances, les autres en
rimes, et conservés dans des manuscrits des xme, xivc et
XVe siècles, et en outre (au moins quelques-uns d'entre
eux) dans des rédactions en prose et des versions étran-
gères. — Ces poèmes chantent les héros de sept ou huit
générations. Ils nous offrent le spécimen le plus corn-
5
CG LITTERATURE NAKKATIV]:.
plet de la formation et de l'évolution, à moitié sponla-
ii«'(S. à moitié factices, d"un grand cycle épique. Les
faits historiques sur lesquels ils s'appuient sont des
genres les plus divers et appartiennent à des époques
et à des contrées différentes. — Le héros central est
Guillaume, appelé Guillaume Fièrebracr. Cuillaume au
Court Nez et Guillaume d'Orange. Nous ne connaissons
aucun Guillaume qui, antérieurement au \\v siècle, ait
possédé la ville d'Orange, dont la conquête sur les Sar-
rasins, déjà dans des poèmes du.\ie siècle, était attribuée
à ce héros. Ouoi qu'il en soit, ce Guillaume épique a de
bonne heure été identifié avec le Guillaume très histo-
rique qui, nommé en 789 comte de Toulouse, livra -iu-
les bords de l'Orbieu en 793 une bataille sanglante et,
tout en étant vaincu, arrêta les Sarrasins qui envahis-
saient la France, qui fut ensuite le chef militaire et civil
ilu gouvernement de Louis, roi d'Aquitaine, conquit la
Catalogne dans une suite d'expéditions heureuses, entra
en *0G dans le cloître de Gellone aujourd'hui Saint
Guilhem du Désert) qu'il avait fondé, et y mourut eu *12
en odeur de sainteté.
Les chansons qui célébraient Guillaume de Toulouse
se mêlèrent tout naturellement à celles qui célébraient
d'autres guerriers, illustrés aussi par la part qu'ils
avaient prise à la conquête de la Catalogne sur les
musulmans; les surnoms qu'ils ont conservés dans les
poemes postérieurs indiquent les pays dont ils s'étaient
rendus maîtres ou dont ils étaient devenus gouverneurs :
ce son! Bernard de Brusbaut ? , père de Bertran le
çalasin, Bovon de Barbastre Barbastro) ou de Comarcis
(la coma-Tca e&t une désignation territoriale fréquente
dans le nord-est de l'Espagne), Ernaud de Gironde
'Gerona1, Garin d'Anseïme peut-être Ensérune près de
Béziers , Guibeit d'Andienas ./? :. Ces cinq personnages
l'épopée nationale. 67
furent d'abord sans doute considérés comme firères, à
cause de la ressemblance de leurs exploits, et nous
trouvons ensemble Bernard, Ernaud et Guibert dans un
texte de la plus grande importance, malheureusement
trop court, le fragment (conservé à La Haie, d'un poème
latin du xc siècle, visiblement fait d'après des chants
épiques romans. Il s'agit là de la pr?sc d'une ville sar-
rasine : c'est Charlemagne lui-même qui dirige Tassant
(bien que la conquête de la Catalogne n'ait pas été faite
personnellement par lui), et au premier rang des guer-
riers français nous voyons figurer Bernard avec son fils
Bertran (appelé palatinus, comme dans les chansons de
geste), Guibert (désigné déjà, comme dans la plupart
des poèmes, par le diminutif Guibelin), et Ernaud, qui
sont certainement trois des héros mentionnés plus haut.
Garin et Bovon devaient se trouver aussi dans ce poème,
et peut-être Aimer le chétif, que nous voyons en général
associé aux autres, et qui tire son surnom de sa longue
captivité chez les Sarrasins. Bernard, Guibert, Ernaud,
Garin, Bovon, Aimer étaient-ils déjà frères dans le
poème suivi par le fragment de la Haie? Nous ne pou-
vons l'affirmer; cependant leur apparition simultanée,
le nom des ennemis qu'ils combattent ensemble et que
nous retrouvons dans nos chansons, la présence de
surnoms caractéristiques comme celui de Bertran, tout
porte à croire que la réunion en une famille de ces six
personnages (et de Bertran) était dès lors un fait
accompli. Quant à Guillaume, il ne figure malheureu-
sement pas dans le fragment, mais il est douteux qu'on
en eût déjà fait un membre de cette même famille : en
effet le Guillaume historique était un Franc du nord,
envoyé par Charlemagne pour gouverner le midi, tandis
que les autres guerriers paraissent avoir été originaires
des provinces méridionales. — Mais les grands exploits
68 LITTERATURE .NARRATIVE.
de Guillaume s'étant accomplis dans le midi, ils durent,
comme ceux des premiers, être d'abord chantés dans la
région qui en avait été le théâtre et dans ce dialecte
méridional qui, avec la conquête chrétienne, pénétrait
et s'implantait en Catalogne. Guillaume vint donc natu-
rellement s'adjoindre aux six autres comme septième
frère, mais il garde toujours, dans les poèmes, une
supériorité sur eux. On leur donna à tous pour père un
personnage qui sans doute à l'origine n'avait rien à faire
avec aucun d'eux, mais dont le nom se rattachait aussi
à un épisode des guerres sarrasines, Aimeri, que des
chants anciens présentaient comme ayant occupé et
défendu contre les Arabes le poste avancé de Narbonne.
C'est ainsi que le Pèlerinage de Charlemagne ( voir
ci-dessus § 24), poème du xic siècle, présente la famille
constituée : il ne mentionne, il est vrai, que Guillaume,
Bernard (avec Bertran , Ernaud et Aimer, comme fils
d'Airneri, mais Bovon, Garin et Guibert devaient déjà
être considérés de même. La présence de cette famille
dans le Pèlerinage (où elle supplante cinq des anciens
pairs) prouve que dès le xie siècle les jongleurs avaient
transporté du midi au nord la geste de Narbonne; ses
membres sont d'ailleurs encore, dans le Pèlerinage, pré-
sentés comme contemporains et compagnons de Char-
lemagne. — Si les hauts faits de Guillaume de Toulouse
dans le midi donnèrent lieu à des chants épiques,
d'autres légendes s'attachèrent à sa fin édifiante. Des
poèmes germaniques avaient été composés sur cette
donnée d'un héros entrant dans un cloître, où ses habi-
tudes quelque peu brutales jetaient la perturbation,
mais qui, au besoin, retrouvait son ancienne vigueur en
y ajoutant la protection toute spéciale de Dieu. Un
récit de ce genre, qui paraît remonter à un poème lon-
gobard et que nous trouvons ailleurs rapporté à Wal-
L ÉPOPÉE .nationale. 69
ther d'Aquitaine, personnage de l'épopée allemande, fut
rattaché au nom de Guillaume dans une chanson dont
nous n'avons malheureusement qu'une version nor-
végienne, et qui conserve d'ailleurs des traits apparte-
nant incontestablement à l'anachorète de Gellone. Dans
cette chanson, c'est encore sous le règne de Charle-
magnc que se passe la vie monastique, le montage de
Guillaume; mais dans une autre sur le même sujet, fort
ancienne d'ailleurs, et dont nous n'avons qu'un frag-
ment, c'est déjà sous un roi Louis que le héros est
censé vivre et mourir.
39. C'est que d'autres Guillaume étaient venus se con-
fondre avec le héros originaire des chansons méridio-
nales. Déjà dans une vie latine de saint Guillaume de
Gellone, composée dans son cloître au commencement
du xne siècle (vie précieuse en ce qu'elle contient des
allusions à des poèmes plus anciens que ceux que nous
avons), nous le voyons devenu Guillaume d'Orange
et mêlé avec Guillaume le Pieux, duc d'Aquitaine, son
arrière-petit-fils. dont les relations avec l'église de
Brioude étaient attribuées par la tradition à son
bisaïeul. — Mais une contamination bien plus impor-
tante devait se produire dans le nord de la France, où
les chansons sur Guillaume d'Orange avaient, comme
on l'a vu, pénétré de bonne heure. Là un autre Guil-
laume était devenu un héros épique, appartenant origi-
nairement, lui aussi, à une province, mais transporté
par les jongleurs dans le grand courant de l'épopée
féodale. Guillaume, comte de Montreuil-sur-Mer à partir
du xe siècle environ, avait soutenu des luttes ardentes
contre les Normands, et semble avoir été un des prin-
cipaux champions des derniers Carolingiens dans leurs
guerres soit contre leurs grands vassaux, soit contre
70 LITTERATURE NARRATIVE.
I Allemagne : on fusionna les poèmes qui le chantaient
avec ceux qui célébraient Guillaume d'Orange. Un troi-
sième personnage, difficile à bien déterminer, fournit
sans doute le nom de Guillaume au court nez (ou peut-être
au courb nez] et l'épisode de l'expédition du héros en
Italie où il défend le pape contre une invasion sarrasine.
Le surnom de Fièrebrace (fera brachia) est tellement fré-
quent qu'on ne peut pas en conclure l'immixtion dans
l'épopée d'un autre Guillaume qui l'aurait porté réelle-
ment; mais il est très possible que d'autres personnages
tle ce nom, objets aussi de chants épiques, aient été
considérés par les jongleurs comme identiques à Guil-
laume d'Orange, qui avait déjà absorbé ceux que nous
avons désignés. Il est probable qu'on substitua même
Guillaume à un personnage d'un autre nom pour lui
faire jouer un rôle dans le couronnement de Louis le
Pieux par son père, à Aix, en 813, solennité qui avait
frappé vivement l'imagination populaire et dont des
chants avaient conservé le souvenir : Guillaume de Tou-
louse, étant mort en 812, n'avait pu y prendre part. —
Les Guillaume épiques du nord vivaient, d'après les
poèmes, sous un roi Louis ; Guillaume d'Orange, quand
on l'identifia avec eux, changea aussi de souverain (ce
qui était peut-être facilité par le fait qu'il avait été le
ministre de Louis en Aquitaine), et ce déplacement
entraîna celui des héros méridionaux qui étaient devenus
ses frères (tandis que, comme on l'a vu, le fragment de
la Haie, le Pèlcr'mage et la chanson du Montage Guillaume
traduite en norvégien les placent encore sous Charle-
magne). — Mais les Guillaume des jongleurs français
vivaient et eombattaicnt dans le nord: pour faire d'eux
tous et du Guillaume du midi un seul et même person-
nage, il fallut raconter comment il avait passé du nord
au midi. C'est cette explication que s'est proposée
l'épopée nationale. 71
laul.Mir du Cli'iri-"i de Nîmes, un des plus beaux de nos
poèmes, qui n'est certainement pas plus nVent que le
premier fier-- du \nf siècle, et qui montre, par consé-
quent, combien est ancien ce travail en partie de rae-
cord, en partie d'invention. Après une scène admirable
où Guillaume, réclamant au roi le prix de ses servie-,
a refusé, par des raisons généreuses, tout ce que Louis
tremblant lui a offert, scène qui porte au plus baut degré
l'empreinte de l'époque féodale, il lui demande de
l'investir du midi de la France, qu'il se charge de déli-
vrer des Sarrasins, et il commence par s'emparer de
Nîmes. — La Prise d'Orange est le sujet d'une autre
chanson : Guillaume ne prend pas seulepient la ville,
mais la belle Orable, femme d'un grand roi sarrasin,
qui devient sa femme sous le nom de Guibourg. — Le
Montage fut complètement renouvelé, et la scène en fut
placée sous Louis. — Mais dans ce travail de contami-
nation il est resté bien des contradictions et des inco-
hérences : ainsi Guillaume est représenté dans h
Charroi comme de « douce France » ; quand il passe la
frontière du pays français, il se retourne pour en recc
voir en pleurant, comme un dernier adieu, la brise dans
son sein, et cependant on le dit fds d'Aimeri de Xar-
bonne et par conséquent Provençal; plus tard, vaincu
par les Sarrasins et rejeté dans Orange, il n'a personne
dans son voisinage qui puisse l'aider, et c'est à Laon,
où il est venu demander secours à Louis, qu'il trouve
son père et ses frères, etc.
40. Un poème ancien, sans doute méridional, racontait
une bataille perdue près d'Arles contre les Sarrasins par
les chrétiens et dans laquelle avait été tué un héros
appelé Vézian ou Vivian : cette tradition se rattachait
aux tombeaux antiques qui couvraient le cimetière
72 LITTERATURE NARRATIVE.
voisin d'Arles, appelé Elysii Campi d'où Aleschans, et dont
la légende voulait que les sarcophages eussent été créés
par miracle pour recevoir les corps des chrétiens
vaincus. — Les chanteurs français firent de Vivian (ils
adoptèrent cette forme et la changèrent plus tard en
Vivien) le neveu de Guillaume (soit par son frère Garin,
soit par une sœur), et attribuèrent à Guillaume une part
considérable dans ce combat. C'était le sujet d'un poème
perdu (dont la Chevalerie ou le Covenant Vivian n'est
qu'une restitution relativement récente d'après les don-
nées des poèmes postérieurs), qui paraît n'avoir pas été
terminé. — Deux suites indépendantes lui furent don-
nées : toutes deux supposent connus les événements
antérieurs, mais l'une (Foucon) paraît avoir trouvé déjà
racontée la mort de Vivian, tandis que l'autre (Aleschans)
la raconte. Ces deux suites ont une grande importance
pour l'histoire du cycle. La première pourrait s'appelei
Rainouart : elle se divise en trois parties, qui sont
réellement inséparables et l'œuvre du même poète,
lequel paraît s'être appelé Jendeu de Brie et avoir écrit
vers 1170 dans la Sicile, alors française. La première
partie, Aleschans, nous montre Guillaume, après sa
défaite, venant à Paris demander des secours, les obte-
nant non sans peine et ramenant dans le midi une nom-
breuse armée; il emmène aussi une sorte de géant,
moitié comique, moitié terrible, Rainouart, qui se
trouve être le frère de sa femme Orable (Guibourg1,
enlevé tout enfant aux Sarrasins. Rainouart est l'objet,
dans les cuisines royales où ou l'a relégué, des raille-
ries de tous, jusqu'au jour où il révèle sa force prodi-
gieuse et son grand cœur. Aidé de ses frères, du roi et
de Rainouart, Guillaume chasse les Sarrasins de France.
Le second poème, Loquifier, raconte les exploits fan-
tastiques de Rainouart en Sicile et son voyage à l'île
L EPOPEE NATIONALE. 73
d'Avalon où il voit Arthur et sa sœur Morgue : cette
introduction de l'élément celtique dans une chanson de
geste atteste le peu d'antiquité de celle-ci. Enfin le
Montage Rainouart, imité du Moniage Guillaume, nous
montre les moines de Brioude aux prises avec leur for-
midable confrère, dont les exploits, ici comme dans
Aleschans, excitent le rire autant que l'étonnement. A
l'œuvre de Jendeu de Brie se rattache, comme suite
sensiblement postérieure, le poème de Renier : Renier
est le petit-fils de Rainouart, il devient roi de Sicile, et
il a pour fils Tancré (Tancrède), le héros de la première
croisade; le même jour que Tancré naissent Godefroi
de Bouillon et les autres chefs de la guerre sainte
ainsi le travail cyclique dépasse les limites non-seule-
ment de la geste méridionale, mais de l'épopée carolin-
gienne, et va rejoindre à celle-ci le cycle de la croisade,
malgré les siècles qui l'en séparent. — L'autre conti-
nuation du poème consacré à Vivian et à Guillaume est
Foucon de Candie, composé vers 1170, en vers très soi-
gneusement rimes, par Herbert le Duc, de Dammartin
en Goële. Ce poème commence, comme Aleschans, par
nous montrer Guillaume revenant, la tète baissée, et
poursuivi par les Sarrasins, du combat où Vivian a
péri. Comme dans Aleschans, Guillaume va en France
demander le secours du roi Louis; mais ici il l'obtient
sans difficulté, et le roi prend une grande part aux
prouesses qui remplissent ce long roman, dans lequel
on voit Guillaume et Louis poursuivre leur victoire
jusqu'à Babylone, vaincre l'« amiral » de tous les païens
au profit de Tibaud, devenu leur allié. Le héros prin-
cipal, au moins dans la première partie, est Foucon,
petit-neveu de Guillaume (par une sœur de Vivien), qui
inspire un vif amour à Anfélise, princesse de Candie
(c'est sans doute Gandia en Espagne), et arrive à l'épou-
74 LITTÉRATURE NARRATIVE.
ser et à posséder son royaume. Ce poème, assez banal
• ■i fastidieux à notre goût, eut aux xnc et xih* siècles un
immense succès, él fut un de ceux qui firent le plus con-
naître en Italie la geste ilt-s « Xarbonnais ».
41. A ces poèmes il faut en joindre d'autres, qui com-
plètent ou amplifient la geste en divers sens. D'abord
les Enfin œt de GmUaume, le Département des infants
d'Aimeri, et 1rs Enfances de Vivien, composés êto dehors
de toute tradition dans le dernier. Vivien est fils de
Garin d'Anseiïne. tandis que la Chevalerie en fait le fils
d'une sœur d<- Guillaume), puis des poèmes sur chacun
des frères de Guillaume : Bovon de Comarcis ou le Siège
de Barbaslre un texte du xn- siècle en assonances a été
renouvelé en rimes par Adenet le Roi à la fin du xmc),
Guibcrt d'Andirua^ etc. : c'est toujours l'histoire de la
prise d'une ville et des heureuses amours du héros avec-
une princesse sarrasine. Enfin la Mort d'Aimeri est le
sujet d'une chanson qui termine une des branches de
cet arbre si largement ramifié. — Mais Aimeri lui-même,
qui était-il? Une ancienne chanson racontait, nous
l'avons dit g 38), qu'il avait vaillamment défendu Xar-
bonne contre les Sarrasins. Plus tard on lui attribua la
part principale dans la prise même de Xarbonne, qui
aurait eu lieu au retour de la grande expédition d'Es-
pagne, et on fit de lui le fils d'un personnage appelé
Ernaud de Beaulande. Bertrand de Bar-sur-Aube, au
commencement du xnr siècle, renouvela ce récit, non
sans talent, dans son Aimeri de Xarbonne, et y joignit
l'histoire du mariage d'Aimeri avec Ermenjard de Pavie,
qui devait être la mère des sept illustres frères. C'est
sans doute ce poète qui est l'auteur d'une nouvelle con-
tamination, inconnue aux chansons dont nous avons
parlé jusqu'ici, et qui relie la geste des Xarbonnais à la
L EPOPEE NATIONALE. 75
geste royale en donnant à Ernaud de Beaulande trois
frères, Renier de Genève, père d'Olivier et d'Aude,
Milon de Pouille (auquel plus tard on attribua un fils,
Simon de Rouille, héros d'un poème sans valeur sur une
expédition en Orient), et Girard de Vienne. Ce Girard
n'est autre qu'un double de Girard de Roussillon, dont
il a été parlé plus haut (§ 25) : un ancien poème, dont
nous avons conservé un résumé norvégien, racontait sa
guerre avec Charlemagne et le siège qu'il soutint dans
Vienne; Bertrand, dans son Girard de Vienne, remania
cette histoire et y introduisit le bel épisode du combat de
Roland et d'Olivier, origine de leur compagnie et des
fiançailles de Roland avec la sœur d'Olivier. — A ces
quatre frères, Ernaud, Renier, Milon, Girard, il fallut
donner un père : ce fut Garin de Monglane (sans doule
originairement père du seul Renier), dont on raconta
d'abord les exploits dans Garin de Monglane (xme siècle),
puis les Enfances (xivc siècle).
42. Ainsi s'achève, par Renier d'une part, par les En-'
fances Garin de l'autre, cette vaste construction dispa-
rate, qui a d'autres aboutissements encore dans la Mort
Aimeri, dans le Moniage Guillaume et dans le Montage
Rainouart. Les parties qui la composent, non seulement
ne sont pas de même date et de même style, mais sou-
vent ne s'agencent pas bien les unes avec les autres,
parce que plusieurs de celles qui nous sont parvenues
ont été construites pour en continuer d'autres que nous
n"avons plus ou qui ont été plus tard refaites autrement.
Il s'en faut que chacun des auteurs qui y travaillèrent
ait connu l'ensemble ou l'ait connu tel que nous le con-
naissons. Ainsi le Couronnement de Louis, la Chevalerie
Vivien, la Prise d'Orange, les Enfances Guillaume, etc., ont
existé sous des formes différentes de celle qui est
arrivée jusqu'à nous, et c'est à ces formes premières
76 littérature: narrative.
que se réfèrent d'autres poèmes. La plupart de nos
manuscrits sont des manuscrits de compilation, où on a
essayé de grouper un plus ou moins grand nombre de
poèmes navbonnais en une sorte d'histoire suivie; on n'a
pas réussi à en faire disparaître les contradictions et
les incohérences, bien qu'on se soit permis non seule-
ment des raccords, mais souvent des modifications
importantes aux textes qu'on voulait réunir.
CHAPITRE II
IMITATION DE LANTIQUITE
43. L'épopée nationale est le produit spontané de la
société nouvelle sortie de la conquête germanique : les
lettrés n'y eurent à l'origine aucune part; ce n'est que
quand elle eut cessé d'être dans sa période de formation
qu'ils y intervinrent, sans toutefois la modifier profon-
dément. Mais le goût répandu dans le public, et que
les clercs partageaient eux-mêmes, pour les merveilleux
récits que l'épopée nationale avait enfantés devait les
engager à mettre en langue vulgaire certains récits de
leurs livres latins qui leur semblaient au moins aussi
bien faits pour exciter la curiosité et plaire à l'imagina-
tion. Les œuvres de la littérature latine antique n'avaient
jamais cessé d'être lues et étudiées dans les écoles; on
n'en comprenait pas, il est vrai, la beauté artistique,
mais on croyait y trouver toujours et une incontestable
vérité historique et un profond enseignement moral (les
récits empruntés à l'antiquité, dit Jean Bodel, sont
sérieux et apprennent la sagesse). Quand elles se trou-
vaient contenir des aventures non moins surprenantes
que celles que chantaient les jongleurs, elles semblaient
78 LITTÉRATURE NARRATIVE.
aux lettrés supérieures, et, à partir du commencement
du XIIe siècle, ils s'efforcèrent de l'aire passer en français
celles qui leur paraissaient pouvoir plaire davantage
aux seigneurs et aux dames qui ignoraient la langue
latine. Par une sympathie naturelle, ils s'adressèrent,
plutôt qu'aux œuvres vraiment classiques, aux produc-
tions de la décadence gréco-romaine, dont l'inspiration
à la fois simple et bizarre, la prétention à une stricte
vérité historique et le contenu romanesque étaient déjà
en bien des points plus conformes à l'esprit du moyen
âge qu'à celui de la vraie antiquité.
44. Ce fut l'histoire fabuleuse d'Alexandre le Grand
qui l'ut la première communiquée aux laïques. Un roman
de tendance tout égyptienne, connu sous le nom du faux
Callisthène, avait été composé sur le héros macédonien,
vers le n° siècle, à Alexandrie; l'auteur y avait accumulé
les merveilles des contes orientaux. Le livre grec l'ut
traduit en latin, avant le milieu du IVe siècle, par un
certain Julius Valerius, et cette traduction fut forlr-
ment abrégée vers le temps de Charlemagne. l.'epitimie
de Julius Valerius servit de base, dans les premières
années du xuc siècle, à un poème en dialecte dauphinois
dont l'auteur s'appelait Albéric de Besançon (ou de
Briançon?), et qui avait la forme des chansons de geste
(laisses monorimes de vers de huit syllabes, comme
ceux du Hoi Louis). De ce poème, qui paraît avoir été
fort remarquable, nous n'avons conservé qu'un court
fragment du début, et nous ne savons pas au juste ce
qu'il contenait; car le clerc Lamprecht, qui en fit peu
de temps après son apparition une imitation allemande,
semble ne lavoir eu pour guide que jusqu'à un moment'
peu avancé de la biographie d'Alexandre. Ce qui carac-
térise Albéric, c'est sa façon de comprendre le sujet,
IMITATION DE % ANTIQUITE. 7fl
exprimée déjà dans les premiers vers : son poème est
deBtiné à illustrer cette pensée de Salomon que tout est
vanité, et de eette vanité il voulait montrer, dans la mort
prématurée d'Alexandre après tant de triomphes et de
prodiges», l'exemple le plus frappant. Ce poème a déjà
un caractère féodal marqué : le moyen âge n'a jamais eu
conscience de ce qui le distinguait si profondément de
l'antiquité: il s'est toujours représenté le monde comme
ayant été de tout temps ce qu'il le voyait être, il se
figurait naïvement Alexandre avec ses capitaines comme
un roi de France ou d'Angleterre entouré de ses barons,
et traduisait milites par chevaliers sans se douter de la
différence qui existait entre ces deux termes. Le stvle
d'Albéric est vif, singulier, poétique; l'empreinte en est
restée dans la copie un peu affaiblie de Lamprecht. —
Son œuvre passa dans le domaine delà langue d'oui, en
Poitou d'abord, semble-t-il, où un certain Simon la mit
en français en allongeant les vers de deux syllabes,
puis dans le nord, où plusieurs poètes, du xne sàèele
encore, parmi lesquels Lambert le Tort de Châteaudun,
Alexandre de Bernai, surnommé de Paris, et Pierre de
Saint-Cloud voir § 83) sont les seuls qui nous aient
Laissé leurs noms, l'amplifièrent considérablement dans
un long poème en vers de douze syllabes (appelés plus
tard, à cause de cela, vers alexandrins), où ils ont d'ail-
leurs utilisé d'autres sources q.u'Albéric ; ils l'ont, connu
lui-même non directement, mais à travers le renouvel-
lement de Simon. Le trait distinctif de ces romans est
d'exalter en Alexandre les vertus chevaleresques les plus
à la mode au xne siècle, et par-dessus tout la largesse,
chère entre toutes aux trouveurs et jongleurs : Alexandre
devint, grâce à eux, le roi « large » par excellence, et
garda cette renommée pendant tout le moyen âge. —
A cet Alexandre, qui eut un très grand succès, deux
80 LITTÉRATURE NARRATIVE.
É
poètes du dernier quart du xue siècle, Jean le Venelais
et Gui de Cambrai, ajoutèrent indépendamment u*ne
Vengeance d'Alexandre. Au xive siècle (1310-1315), un
épisode de pure imagination introduit dans le récit de
la guerre de l'Inde, les Vœux du Paon, par Jacques de
Longuyon, plut extraordinairement, parce qu'il était
inspiré par la galanterie aventurière et le chevaleresque
factice alors à la mode; il fut traduit en néerlandais, et
fut lui-même l'objet de deux suites, le Restor du Paon,
par Jean Brisebarre de Douai, et le Parfait du Paon, par
Jean de le Mote. Une restait plus dans ces inventions la
moindre trace de l'esprit antique ni même de l'inspiration
encore héroïque et sérieuse des premiers poèmes fran-
çais. — Notons que dans les Vœux du Paon apparaissent
pour la première fois les * neuf preux » . cette triple triade
de héros (trois juifs, trois païens, trois chrétiens) qui
devait être si souvent célébrée dans la littérature, l'art
et les fêtes du moyen âge et fournir au xve siècle le sujet
d'un roman spécial.
45. Les poèmes sur Alexandre empruntent leur forme
à l'épopée nationale. Les autres romans de source
antique sont écrits en vers plats de huit syllabes, forme
narrative destinée à la lecture et employée au moins
dès le commencement du xir3 siècle dans des ouvrages
historiques, édifiants ou didactiques. Le roman de Troie
fut écrit vers 1160 par un poète tourangeau, Benoît de
Sainte-More, qui le dédia à la reine d'Angleterre, Alié-
ner de Poitiers. Il ne comprend pas moins de 30 000 vers
écrits d'un style facile où apparaît même, dans plusieurs
morceaux, un vrai talent. Ce n'est pas dans Ylliade,
dont le moyen âge connaissait cependant le sec abrégé
en vers latins composé au ne siècle par Italicus. que
Benoît a pris la matière de son poème. A l'époque de la
IMITATION DE L ANTIQUITÉ. 81
décadence, deux romans, composés sans doute en grec,
puis abrégés en latin, avaient transmis sur la guerre de
Troie «lis renseignements que l'on jugeait bien autre-
ment sûrs que ceux d'Homère : l'un résumait un journal
du siège, tenu par le Phrygien Darès, qui était enfermé
dans la ville, l'autre reproduisait des mémoires sur la
guerre écrits par le Cretois Dictys, un des assiégeants.
Benoît a suivi ces deux guides, Darès surtout, qui était
bien plus sympathique aux gens du moyen âge, parce
(pie les Francs, d'après une invention de clercs de
l'époque mérovingienne, descendaient des Troyens
comme les Romains et aussi comme les Bretons (il (aut
toutefois remarquer que, sauf dans Geffrei Gaimar.
voir§ 9i, les fables troyennes qu'on peut appeler ethno-
géniques ne se mélangent pas aux récits sur la guerre
de Troie). Mais le poète français a beaucoup ajouté à
ces sources (auxquelles il faut joindre une histoire des
Argonautes qui sert d'introduction) : outre qu'il a
naturellement transformé les caractères et les événe-
ments en leur donnant la couleur de son époque, il
paraît bien avoir inventé des épisodes entiers, dont l'un,
le meilleur de tous, consacré aux amours de l'infidèle
Driséida, fille de Calchas, d'abord avec Troïlus, puis
avec Diomède, a fourni le sujet d'un poème à Boccace
et d'une tragédie à Shakspeare. — Le roman de Troie
eut un grand succès en France (où on l'abrégea en
prose dès le xitie siècle) et à l'étranger ; il fut traduit en
allemand au xne siècle et mis en latin à Messine, au
xmp siècle, par Guido délie Colonne, qui ne nomma pas
sa source, et qui a longtemps passé pour auteur, tandis
qu'il n'était que traducteur. Une revanche des Troyens.
sous la direction de Landomata (Laodamas), fils d'Hector,
était l'objet d'un roman peut-être déjà grec, traduit
plus tard en latin (Benoît l'a connu), et dont on a une
6
82 LITTERATURE NARRATIVE.
rédaction en prose du xin° siècle. — Le roman d'Hector
est une œuvre de pure invention, qui raconte la jeu-
nesse du héros, et appartient à la littérature franco-
italienne.
46. On peut regarder comme une suite du roman de
Troie, bien qu'il ait peut-être été composé antérieure--
ment, le roman d'Énéas, où l'Éneïdeest travestie, on peut
le dire, à la mode du moyen âge; car ce qui ne nous
choque pas pour Callisthène ou Darès nous fait un autre
effet appliqué à Virgile. Le poète normand, qui ne
manque pas de talent dans son genre, ne voit dans son
modèle que l'histoire, Y aventure, et il l'orne à sa façon
par des descriptions, par des récits de combats dans le
style du xne siècle, et par le détail moitié naïf, moitié
puéril des amours d'Énée et de Lavine. Son œuvre fut
d'ailleurs fort appréciée, et, traduite en flamand par
Henri de Veldeke, puis mise en dialecte thuringien,
inaugura en Allemagne la poésie courtoise. Benoît, par
l'importance qu'il attache à la courtoisie, par sa façon
déjà conventionnelle et raisonneuse de comprendre
l'amour, par son style soigné, peut aussi être consi-
déré chez nous comme le premier représentant de
cette poésie qui devait s'épanouir si richement
après lui.
47. Il n'est pas certain non plus que Benoît de Sainte-
More soit l'auteur d'un troisième poème, qui, dans
l'ordre du récit, précède les deux premiers, le roman
de Tltèbes, mais cela parait probable. La source est le
poème de Stace, plus ou moins glosé; l'idée d'en tirer
un roman chevaleresque aurait été impraticable si on
l'avait suivie de près; mais l'auteur français s'est donné
de grandes libertés : il a créé des épisodes tout nouveaux,
IMITATION DE L ANTIQUITE. 83
et son œuvre, qui est vraiment remarquable, a réussi,
comme le montrent les remaniements dont elle a été
robjet au xiua siècle, et aussi les noms de quelques-uns
de ses personnages, Parténopeus, Protésilaus, Ilippo-
médon, empruntés à son ouvrage par des poètes pos-
tr rieurs qui en ont l'ait les noms de leurs héros
(§51).
48. Le poème de Jacot de Forest (seconde moitié du
\iiic siècle) sur Jules César provient de la Pharsale de
Lucain; mais il n'en provient pas directement : l'auteur
a simplement mis en vers un César en prose de Jean de
Tuin en Hainau (vers 1240), fait d'après la Pharsale
et aussi d'après d'autres sources, et où Jean avait déjà
introduit certaines additions, comme une histoire
détaillée, et tout à fait dans le goût du temps, des
amours de César et de Cléopâtre. — Mentionnons une
imitation d'une partie de la Pharsale, composée en laisses
monorimes et en franco-italien par Nicolas de Vérone
en 1343.
49. L'un des poètes favoris des écoles du moyen âge
était Ovide. Nous parlerons ailleurs de Y Art d'aimer;
les Métamorphoses n'eurent pas moins de succès. Chré-
tien de Troies (§ 57) nous apprend qu'il avait imité en
vers français les épisodes de Pélops et de Philomèle;
le premier de ces poèmes, dont le sujet n'est d'ailleurs
indiqué que bien sommairement dans les Métamorphoses,
est perdu; le second vient d'être retrouvé (il est incor-
poré dans l'œuvre du xive siècle dont il va être ques-
tion) : il nous fournit un intéressant sujet d'étude en
nous montrant le conteur du xn° siècle aux prises avec
la rhétorique élégante et raffinée du poète latin; natu-
rellement le poète français n'égale pas son modèle,
84 LITTERATURE NARRATIVE.
mais il ajoute çà et là des traits naïfs qui ont leur
valeur. Le xn0 siècle a encore produit une charmante
imitation de l'histoire de Pyrame et Thisbé. Un autre
joli poème raconte, en la transformant beaucoup, l'aven-
ture de Narcisse. Nous savons que d'autres redisaient
en français celles de Phyllis, d'Héro (l'une et l'autre
tirées des Hrroïdes), de Biblis, eto. Un curieux lai (§ 55)
sur Orphée ne nous est connu que par une imitation
anglaise. — Au commencement du xive siècle, un frère
mineur dont on ne sait pas le nom composa, pour
plaire à la reine Jeanne de France, femme de Philippe
le Bel (morte en 1307), un immense poème, comprenant
près de 70000 vers octosyllabiques, et qui contient,
outre une traduction, généralement abrégée mais écrite
avec aisance, de chacune des fables d'Ovide, leur triple
explication historique, morale et théologique (car les
aventures des dieux païens doivent, dans l'idée du
moyen âge, être regardées comme des allégories des
mystères de la religion chrétienne). C'est V Ovide moralise.
Presque en même temps un compilateur érudit, Pierre
Berçuire, entreprenait en latin la même tâche singu-
lière; les deux auteurs s'appuyaient sur des commen-
taires de la décadence et sur des gloses du moyen
âge.
49 bis. On peut encore rapporter à l'imitation de
l'antiquité certains romans historiques, de très pauvre
invention, qui prétendent raconter les origines antiques
des villes de France. Ils sont l'œuvre de clercs. Tel est
le roman de Busialus, originairement écrit en latin,
relatif à Tournai, dont Philippe Mousket a rimé le
contenu (§ 96), et la faible imitation en prose française
qu'on en lit. dans la seconde moitié du xine siècle, en
l'honneur d'Amiens, sous le nom û'Abladane (censé nom
IMITATION DE L'ANTIQUITÉ. 85
ancien de cette ville, qui se serait ensuite appelée
Somme-Noble, et enfin Amiens) : nous n'en avons que
le début; l'auteur prétend s'appuyer sur un écrit latin,
et invoque, évidemment à faux, l'autorité de Richard
de Fournival (§ 100) pour attester sa véracité.
CHAPITRE III
ROMANS GRECS ET BYZANTINS
50. La limite entre ce chapitre et le précédent n'est
pas facile à tracer avec précision, car nous avons vu
que les poèmes sur Alexandre et Troie reposent déjà
sur de vrais romans de la décadence grecque. Le roman
en prose est un genre qui se forma après la conquête
de l'Asie, dans ce milieu qu'on appelle hellénistique, qui
fut le grand foyer où, pour la civilisation, la religion,
l'art, la littérature, se mêlèrent l'Orient et l'Occident.
Ce genre a été certainement très fécond dans son pays
d'origine, et nous n'en avons conservé qu'un petit
nombre de spécimens. Il continua à prospérer dans la
période byzantine. Plusieurs de ses productions furent
traduites plus ou moins anciennement en latin, et
séduisirent les esprits occidentaux par la bizarrerie
même de leurs récits, où l'amour jouait toujours un
grand rôle. A cette époque, l'Italie du sud, encore à
moitié grecque, sert le plus souvent d'intermédiaire. —
De ce nombre sont (outre Callisthène, Dictys, Darès) :
Apollonius de Tyr, imité, comme nous l'avons vu (§ 27),
dans Jourd'iin de Dlaie et ailleurs sous diverses formes,
ROMANS GRECS Et BYZANTINS. iS7
très populaire au moyen âge il serl encore de sujet au
Périclés attribué à Shakspeare); l'original grec est perdu,
mais on en a une version latine très ancienne; — l'his-
toire des Sept Sages, roman indien, où, pour perdre ou
sauver un jeune prince injustement accusé par sa
marâtre, on raconte pendant sept jours des histoires en
sens contraire; traduit en persan, puis en syriaque, en
arabe et en grec, il reçut dans l'empire byzantin une
forme toute nouvelle, qui s'est perdue, mais qui paraît
avoir passé par l'Italie et être la source des diverses
versions occidentales; — la légende du magicien Hélio-
dore, devenue celle de Virgile en arrivant à Naples; —
celle d'Hippocrate, qui ressemble en plus d'un point à
la précédente; — un grand nombre de vies de saints
qui ne sont en réalité que des romans et qui ont passé
aussi d'une forme grecque à une forme latine, le plus
souvent d'origine italienne : telles sont celles de saint
Georges, saint Grégoire, saint Alexis, sainte Catherine,
sainte Marguerite, sainte Marie l'Égyptienne, etc.
(voir plus loin § 147).
5t. Plus tard, à partir des croisades, les rapports des
Francs avec les Grecs devinrent directs, et plusieurs
romans, qui n'existent plus en grec, mais que différents
indices nous permettent de reconnaître comme byzan-
tins, furent mis en français sans passer par le latin, et
sans doute grâce à une transmission simplement orale.
Tels sont Éracle, par Gautier d'Arras (§ 66, vers 1165) :
la seconde partie de ce roman (entrepris pour Tibaud
de Blois et Marie de Champague, terminé pour Bau-
doin IV de Hainau) est empruntée à un ancien conte
oriental ; la première remonte à un roman grec dont on
possède une forme populaire moderne dans le poème de
Ptocholéon; — Flaire et Blanche fleur, qui existe en deux
88 LIfTÉRATORE NARRATIVE.
rédactions du xne siècle et a été traitée, d'après le
français, dans toutes les langues de l'Europe, notam-
ment en italien par Boccace : c'est la gracieuse et tou-
chante histoire de deux enfants qui s'aiment, sont sépa-
rés, se rejoignent malgré bien des difficultés et des
dangers, et finisssent par être heureux; une autre forme
de cette histoire, très altérée par la transmission, est la
délicieuse chantefable d'Aucassin et Nicolette, écrite au
xuc siècle, moitié en prose, moitié en laisses asso-
nantes de sept syllabes (c'est ce mélange qu'exprime le
titre); — Florimont, histoire rattachée par des liens
généalogiques aux poèmes sur Alexandre, et qui a cer-
tainement, au moins en partie, existé en Grèce, bien
qu'on n'y en trouve plus aucune trace; l'auteur, Aimon
de Varenne, qui l'écrivit en 1188 à Chàtillon-sur-
Azergue (Rhône), dit positivement l'avoir recueillie à
Philippopoli, où il avait séjourné, et il môle çà et là
dans ses vers des mots grecs, qui ne prouvent pas d'ail-
leurs qu'il sût réellement le grec. Il est très remar-
quable quAimon. tout Lyonnais qu'il lût, écrit * dans
la langue des Français », et non sans talent (car il veut
leur plaire, et, dit-il, Chançon ne estoire ne plait As Frén-
ceis se il ne l'ont fait); — Athis et Porphirias, par Alexandre
de Bernai (cf. § 4 i-> ; la deuxième partie de ce très long
poème paraît une suite d'aventures de pure invention;
la première est un conte grec dont nous avons diverses
formes (une entre autres dans le Décaméron de Boccace),
et dont un trait se retrouve dans l'histoire bien connue
de Stratonice : — le Comte de Poitiers (xnc siècle) et le
Roman de la Violette (par Gerbert de Mon treuil, dédié vers
1225 à la comtesse Marie de Ponthieu) : deux variantes
de la même histoire, qui se retrouve aussi, mais plus
différente, dans le conte en prose de Ftoire et Jeanne,
dans le poème de Guillaume de Dole (1200) et dans d'au-
ROMANS GRECS ET BYZANTINS. 80
très récits (notamment dans un comte de Boccace et
dans le Cymbeline de Shakspeare) : il s'agit d'une femme
dont la vertu est l'objet d'une gageure et qui, odieuse-
ment calomniée, finit par faire reconnaître son inno-
cence; un chant populaire grec conserve la forme la
plus ancienne de ce thème et indique d'où il provient;
— Constant l'empereur, conte qui, comme tant d'autres
récits orientaux, est consacré à montrer la puissance
fatale de la destinée, et qui est ici rattaché à la fonda-
tion de Constant inople; on en a une version en vers
et une mise en prose (mentionnons ici les contes,
certainement d'origine grecque, sur les infortunes con-
jugales de Constantin i; — la Manekine, poème composé
au xme siècle par le célèbre Philippe de Beaumanoir
(§ 102) : un roi épris de sa propre fille la force à se
mutiler et à s'exiler; devenue la femme d'un autre roi,
elle est sujette à de nouvelles persécutions, finit par en
triompher, et recouvre même miraculeusement l'inté-
grité de ses membres : ce récit semble bien venir de
Byzance; d'autres versions en existent au moyen âge
(entre autre le Comte d'Anjou, par Jean Maillart, 1316).,
celle de notre roman paraît avoir une origine spéciale-
ment anglaise; — Parténopeu de Blois, l'une des œuvres
les plus attrayantes du xnc siècle, tant par l'intérêt de la
composition que par le charme des détails; le sujet, qui
est à peu près celui de Psyché (mais les rôles sont
intervertis), a une couleur grecque, et c'est à Constan-
tinople que se produit le dénouement; — Hippomédon et
ProtesVaMS, par le poète anglo-normand Huon de Bote-
lande (vers 1185); — Cligès par Chrétien de Troies : le
sujet, très altéré, est une ancienne légende orientale
sur la femme de Salomon enlevée à son mari par une
ruse dont elle est complice *cette histoire a eu plusieurs
autres versions); le poète français a changé l'esprit du
90 LITTERATURE NARRATIVE.
récit et l'a bizarrement annexé au cycle breton; mais le
théâtre d'une partie des événements est encore Cons-
tantinople; — Clcomadès, par Adenet le roi : c'est là
qu'on voit le fameux cheval de bois qui traverse les airs,
emprunt fait aux contes indiens par l'intermédiaire des
Arabes (la source directe d'Adenet est peut-être espa-
gnole; le même sujet a été traité par Girard d'Amiens
dans Méliacin); — Floriant et Florette et Guillaume de
Païenne (composé pour la comtesse Ioland de Saint-Pol,
voir § 94), romans qui se passent en Sicile et contiennent
sûrement des éléments grecs; — VEscoufte (milan), dont
une des aventures principales, le rapt d'un anneau par
un oiseau, se retrouve dans d'autres poèmes, dans des
contes orientaux et dans le célèbre roman de Pierre de
Provence, composé au XVe siècle ; — Clarus, qui n'existe
plus que dans une version norvégienne et qui s'appuie
sur un conte oriental transmis sans doute à travers
une forme grecque; — Bérinus, roman en prose du
xiv siècle qui contient des éléments grecs et orientaux,
etc.
52. Tous ces romans ont en général le même style et
le même ton, comme ils ont la même forme, celle des
vers octosyllabiques rimant deux à deux. Leur principal
sujet est toujours l'amour, qui, contrarié pendant le
récit, finit par triompher. Il s'y mêle d'innombrables
aventures de terre et de mer, des enchantements, des
prédictions, des métamorphoses, etc. Les poètes les ont
traités comme ceux dont ils empruntaient le sujet à
l'antiquité, en les revêtant de la couleur de leur temps.
Destinés à la société élégante, ces romans ont d'ordi-
naire cherché une partie de leur succès dans la peinture
de ses mœurs, dans la description exacte et brillante de
sa vie extérieure; ils ont cela de commun avec les
ROMANS GREC» Et BYZANTINS. 9l
romans d'origine celtique, dont nous allons parler, et
avec les romans d'aventure, dont il est, à vrai dire, fort
difficile de les distinguer rigoureusement. Par là, et par
le soin apporté au style, ils ont beaucoup contribué
à préparer la littérature d'imagination des temps
modernes.
CHAPITRE IV
LES ROMANS BRETONS
53. Les Romains, en conquérant une partie de la
Grande-Bretagne, n'avaient pas complètement assimilé
les Celtes qui l'habitaient : après le départ des légions,
l'élément indigène ne tarda pas à reprendre la prépon-
dérance. Mais les Bretons, déjà attaqués par les Pietés
de la Calédonie et les Scots venus d'Irlande, virent
bientôt débarquer, sur leurs côtes de l'est, des envahis-
seurs partis du nord de l'Allemagne, qui prétendaient
s'établir dans leur pays. Une lutte terrible s'engagea,
qui, après soixante ans environ (ioO-510), aboutit à la
prise de possession par les Germains de plus de la
moitié de l'ancienne province romaine. Ce fut la période
héroïque des Bretons insulaires, et il se produisit alors
chez eux une épopée nationale, qui absorba des élé-
ments antérieurs mythologiques et autres, et qui, en se
modifiant et s'altérant sans cesse, se continua des
siècles après. En même temps, une partie de la popula-
tion bretonne, fuyant l'extermination que les Saxons
vainqueurs infligeaient à ceux qu'ils dépossédaient,
traversait la Manche et venait fonder, dans la partie
LES ROMANS BRETONS. 911
occidentale, alors presque dépeuplée, de l'Armorique,
une nouvelle Bretagne, où elle conservait sa langue et
ses mœurs. Après une paix de cinquante ans environ, la
guerre reprenait avec un nouvel acharnement, et se ter-
minait par la fixation de limites qui devaient être long-
temps immuables et qui rejetaient les Bretons, les (lal-
lois, comme les appelaient leurs ennemis germains, à
l'ouest et au sud-ouest de leur île, dans le pays de Galles
(plus étendu à l'est qu'aujourd'hui) et la Cornouaille. —
L'histoire de ces luttes est fort obscure : du côté saxon
elles sont racontées très brièvement; du côté breton
nous n'avons qu'un témoignage, précieux il est vrai,
niais à la fois très sommaire et très confus, l'ouvrage
singulier de Gildas (vers 540), qui ne parle que de la
première période de la lutte. — En 976, suivant toute
probabilité, un Gallois du Sud, appelé Ncnnius, écri-
vait, pour remplacer le livre de Gildas, une courte
Histoire des Bretons, où, au milieu de fables ethnogé-
niques puisées à des sources irlandaises et d'emprunts
faits (avec de grossières erreurs) aux chroniques
d'Eusèbe (saint Jérôme) et de Prosper d'Aquitaine, nous
voyons apparaître certains traits appartenant à l'épopée
nationale, C'est là qu'est pour la première fois nommé
Arthur, qui est non pas un roi, mais un chef militaire,
et qui est vainqueur des Saxons dans douze combats. —
Pendant les siècles qui suivirent, la Bretagne celtique
rentre pour nous dans une obscurité profonde, mais
son activité poétique ne paraît pas s'être endormie. Les
Normands, quand ils firent connaissance avec les
Bretons, furent frappés du nombre et de l'habileté de
leurs chanteurs, de l'excellence de leur musique et de
l'abondance de leurs traditions généalogiques. Déjà chez
les Anglo-Saxons, malgré l'antipathie nationale, les
chanteurs gallois avaient obtenu faveur et avaient
04 LITTERATURE NARRATIVE.
répandu le goût de la musique bretonne et la connais-
sance des sujets favoris de la poésie bretonne (§ 55).
Plusieurs contes gallois, qui nous présentent, avec des
données communes au folk-lore universel, des traits d'un
fantastique très particulier, nous ont été conservés dans
des remaniements en prose du xme siècle, des mabinogion
ou « contes d'enfants », vrais contes d'enfants en effet,
mais d'enfants doués à merveille pour un certain genre
de poésie aventureuse, étrange et vague.
54. La conquête de l'Angleterre par Guillaume de
Normandie devait avoir de grandes conséquences litté-
raires. Les Normands s'intéressèrent à tout le passé de
l'île qu'ils avaient annexée, et en voulurent connaître
l'histoire aussi haut qu'on pouvait remonter. Les Gal-
lois, qui ne sentaient d'ailleurs, à l'origine, aucun éloi-
gnement pour les nouveaux venus qui avaient brisé la
puissance de leurs ennemis séculaires, les servirent à
souhait. Déjà vers 1130, l'historien Guillaume de Malmes-
bury, soit dans ses Gesta regum, soit dans son livre
Le antiquitate Glastoniensis ecclesiae, admettait des sou-
venirs légendaires sur Arthur, Gauvain, Keu. Beduer et
Ider. Gaufrei Arthur, né à Monmouth et mort évêque de
Saint-Asaph en 1154, introduisit dans le monde litté-
raire latin, avec plusieurs traditions nationales bre-
tonnes, une prétendue histoire des Bretons dont il
inventa certainement en grande partie les données. Il
commença par amplifier un conte de Nennius dans
lequel un enfant sans père, nommé Ambroise, faisait au
roi Wortigern (ve siècle) des prédictions relatives à la
lutte des Bretons et des Saxons; il appela cet enfant
Ambroise Merlin, puis Merlin tout court, altérant légè-
rement le nom d'un poète, sorcier et prophète célèbre
chez les Galfois (Myrddhin) et fit prédire par lui tous les
LES ROMANS BRETONS. 95
événements de l'histoire de Bretagne jusqu'à l'année
même où il écrivait (H35j. Peu après, il lançait son
audacieuse mystification, VHistoria regum Britanniae,
qu'il prétendait traduire d'un livre gallois très ancien,
et qui, après une amplification des récits de Nennius sur
L'origine des Bretons, poursuivait, en utilisant quelques
contes populaires gallois, l'histoire des rois de l'île
jusqu'à l'invasion saxonne. Arrivé là, Gaufrei se donnait
carrière : il racontait la naissance extraordinaire du fils
d'Uterpendragon, Arthur, lequel, après avoir complète-
tement débarrassé 1 île des Saxons, conquiert l'Ecosse,
l'Irlande, les Orcades, la Norvège, la Gaule, rassemble
à sa cour les meilleurs chevaliers du monde, remporte
la victoire sur les Romains, et va s'emparer de Rome
même quand il est rappelé en Bretagne par la trahison
de son neveu Modred, qui, laissé là comme régent, s'est
fait proclamer roi et a épousé Guanhumara, la femme
d'Arthur; dans une terrible bataille, Modred est tué,
mais Arthur, mortellement blessé, est transporté dans
l'île d'Avalon (nom, dans les légendes bretonnes, du
pays fortuné où les héros morts jouissent d'un bonheur
constant en compagnie de fées), laissant son royaume à
son neveu Constantin. — Gaufrei n'a pas inventé la
gloire d'Arthur : avant lui déjà il était devenu le centre
des contes et des chants bretons ; avant lui les
Bretons de Galles et d'Armorique persistaient à
espérer son retour victorieux; en H37 un troubadour,
par allusion à la mystérieuse disparition du roi de Bre-
tagne, dit de lui-même qu'il est « perdu comme Arthur ».
Dès les premières années du xne siècle on donne en
Italie aux enfants des noms (comme Gauvain) qui
attestent l'étonnante rapidité de la diffusion des contes
arthuriens. — Il n'est pas vrai non plus que le livre de
Gaufrei soit la source de nos romans; il n'en est que
96 LITT&IATURE NARRATIVE.
très peu. et parmi Jos moins anciens, qui l'aient utilisé :
ils reposent sur les récits des conteurs el des chanteurs
gallois, qui n'ont nullement passé par le latin. — Mais
le -accès de YHistoria regum fut très grand dans le
monde des clercs; on accepta ses fables pour vérité, et,
s'émerveillant de l'exactitude des prophéties de Merlin
jusqu'en i 135. on s'efforça de démêler ce qu'elles annon-
çaient pour les temps subséquents. Gaufrei a ainsi
réussi à faire accepter les contes bretons comme dignes
de l'intérêt général, et a contribué, par sa brillante
peinture de la cour d'Arthur, à leur donner un caractère
chevaleresque et courtois qui leur était à l'origine abso
lument étranger. — On s'empressa de faire passer son
livre en français, et, suivant l'usage, en vers : nous en
connaissons quatre traductions du xnc siècle, celle de
l'Anglo-Normand Geffrei Gaimar (vers 114oj, qui est
perdue, celle de Wacc (§ 93; en lloo appelée Brut à
cause de Brutus, prétendu éponyme des Bretons), une.
en versoctosyllabiques comme les deux premières, dont
on n'a que le début [Brut de Munich , el une en laisses
monorimes, dont nous ne possédons qu'un fragment.
Dans celle de Wace il faut noter des additions emprun-
tées aux traditions bretonnes : c'est ainsi qu'il parle
de la fameuse Table Ronde, à laquelle s'asseyaient
en parfaite égalité les meilleurs chevaliers de la cour
d'Arthur, et « dont les Bretons disent maintes fables ».
mais dont Gaufrei ne paraît rien savoir. Plus tard on
en fit diverses traductions en prose. — Gaufrei, quelques
années après VHv>toriat composa un autre ouvrage, la
Vita Mcrlini, poème assez élégamment écrit, où des tra-
ditions historiques bretonnes se mêlent à des contes
venus d'Orient ou courant dans les écoles, et qui n'a pas
été sans influence sur quelques romans postérieurs.
LES ROMANS MIETONS. 97
55. C'est par les chanteurs et conteurs bretons, avons-
nous dit, que les fictions celtiques, dépouillées en
général du caractère national que la plupart d'entre
elles avaient eu autrefois, pénétrèrent dans le monde
roman. Les musiciens bretons sont très souvent men-
tionnés à cette époque comme parcourant les cours
d'Angleterre et de France; leur instrument ordinaire
était la rote, sorte de petite harpe; mais ils employaient
aussi la harpe, la vielle (§ 20) et même la flûte. Ils accom-
pagnaient sur ces instruments des chants composés en
leur langue, qui se rapportaient, mais, à ce qu'il semble,
sans les raconter précisément, à quelque aventure roma-
nesque, amoureuse ou fantastique. Le chant (mot) et la
musique (note) étaient également désignés en français
par le nom de lais (lais bretons, lais de Bretagne), dont
l'origine est encore obscure. Bientôt les sujets des plus
célèbres furent racontés dans de petits poèmes français
appelés également lais : nous en possédons une vingtaine
en vers de huit syllabes; dans le nombre une douzaine
au moins ont pour auteur une femme, Marie, qui, née
en France, était venue s'établir en Angleterre, et, ayant
appris l'anglais (car ces lais bretons paraissent, comme
nous l'avons dit, avoir été adoptés par les Saxons), mit
en vers aimables et simples, sous le règne de Henri ,
un certain nombre de ces doux récits. Ce sont des
contes d'aventure et d'amour, où figurent souvent des
fées, des merveilles, des transformations; on y parle
plus d'une fois du pays de l'immortalité, où les fées con-
duisent et retiennent les héros; on y mentionne Arthur,
dont la cour est parfois le théâtre du récit, et aussi
Tristan, dont nous allons parler. On peut y reconnaître
les débris d'une ancienne mythologie, d'ordinaire incom-
prise et presque méconnaissable; il y règne en général
un ton tendre et mélancolique en même temps qu'une
7
98 LITTERATURE NARRATIVE.
passion inconnue aux chansons de preste; d'ailleurs les
personnages des contes celtiques sont transformés en
chevaliers et en dames. Les plus célèbres ou les plus
beaux des lais de Marie sont ceux de Lunval (un chevalier
est aimé d'une fée, qui finit par l'emmener avec elle),
d' Yucncc (c'est à peu près le conte de ï Oiseau bleu), de
Frêne (apparenté à l'histoire de Griselidis), de Bisclavret
(histoire de loup-garou), d'Èluluc (double amour d'un
chevalier, résurrection d'une de ses deux amies et rési-
gnation de l'autre), de Milon (combat d'un père contre
son fils), etc. Plusieurs lais ont été attribués à Marie,
mais sans que cette attribution soit bien établie : elle
est surtout probable pour VÉpine (aventure fantastique
d'un médiocre intérêt i, Tidorel (aventures d'une reine
avec un mystérieux chevalier du lac) et Guingamor
(séjour d'un chevalier au pays des fées, où trois cents
ans lui passent comme trois jours); elle ne l'est pas
pour Tiolet (histoire du tueur de monstre auquel un
rival déloyal veut enlever le prix de sa victoire, récit
déjà connu dans l'épopée grecque et qui a été incor-
porée à l'histoire de Tristan). — Parmi les lais qui ne sont
sûrement pas de Marie, mais dont quelques-uns sont
plus anciens qu'elle, nous citerons : Gracient (même
sujet que Lanval), Mèlion (sujet semblable à celui de Bis-
clavret), Guiron (perdu : racontait la cruelle histoire d'un
amant dont un mari jaloux, après l'avoir tué, fait
manger le cœur à sa femme, voir ci-dessous, § 66),
Iynaure (par Renaud, amplification bizarre du même
thème), Doon (même sujet que Milon), le Cor (où ne
peuvent boire que les maris de femmes fidèles, char-
mant petit poème, dans la forme rare de vers de six
syllabes, composé au xnc siècle par l'Anglo-Xormand
Robert Biket; le conte du Manteau mal taillé est une
variation sur le même thème, — le manteau ne sied
LES ROMANS BRETONS. 99
qu'aux femmes fidèles, — rimée plus tard en France), etc.
— Plusieurs des romans bretons et des romans d'aven-
ture postérieurs ne sont que des lais agrandis. — Plus
tard on donna le nom de lais à de petits récils ayant
généralement un caractère sérieux et l'amour pour
thème, mais étrangers au cycle breton et de contenu
antique (lai d'0?'p/ie'e), oriental (lai d'Arislote), ou purement
moderne et courtois (lais de YOnibre, du Conseil ; voir § 08).
5G. Les poèmes sur Tristan sont dans un rapport étroit
avec des lais qui se sont perdus (le lai du Ghèvrefeuille,
de Marie, et deux lais sur la Folie de Tristan sont posté-
rieurs à ces poèmes). Tristan, prince de Léonois, était
un héros de la poésie celtique, originairement tout à
l'ait étranger au cycle d'Arthur et propre à d'autres
tribus. Son histoire a très probablement des origines
mythiques, et rappelle en plus d'un point celle de
Thésée. Il était célèbre comme le premier des guerriers,
des chasseurs et des harpeurs. Blessé d'un fer empoi-
sonné dans un combat contre une sorte de Minotaure
irlandais qui réclamait de la Cornouaille, où Tristan
vivait chez son oncle Marc (marc en celtique veut dire
t cheval », et Marc, nouveau Midas, avait des oreilles de
cheval) un tribut d'enfants, Tristan se fait coucher dans
un bateau sans voiles et sans gouvernail et aborde en
Irlande, où la sœur même de l'ennemi qu'il a tué, la
reine du pays, le guérit sans le connaître. Plus tard,
son oncle l'envoie demander pour lui en mariage Iseut,
la fille de cette reine d'Irlande; il délivre le pays, à son
arrivée, d'un serpent (à propos de quoi il a la même
aventure que Tiolet, voir § 55); reconnu pour le meur-
trier du frère de la reine, il échappe à la mort en expo-
sant le but de son voyage. On lui confie Iseut, et un
breuvage merveilleux qu'elle doit partager avec son
100 LITTERATURE NARRATIVE.
époux, et qui fera naître en eux un amour sans fin et
sans bornes. Par une fatale erreur, c'est avec Tristan
qu'Iseut le partage, à bord du vaisseau qui les emmène
en Cornouaille, et depuis ce temps une passion invin-
cible les enchaîne l'un à l'autre. Après mille incidents
amenés par cette passion (le plus beau est la vie soli-
taire que les amants, chassés par le roi Marc, mènent
dans la forêt), ils se séparent, et Tristan épouse à
Carhaix, en Armorique, une autre Iseut; mais il ne peut
oublier la première. Il reçoit dans un combat une bles-
sure envenimée, et, sachant qu'Iseut de Cornouaille peut
seule le guérir, il lui envoie un messager, auquel il
prescrit de dresser sur son vaisseau, au retour, une
voile blanche s'il la ramène, noire si elle refuse devenir.
Iseut abandonne tout pour aller à lui; mais l'autre Iseut,
qui a surpris le secret de son époux, annonce à Tristan
que le vaisseau revient avec une voile noire. Tristan,
qui « retenait sa vie » jusque-là, expire aussitôt, et Iseut,
le trouvant mort en débarquant, meurt sur son corps.
— Les récits épars relatifs à ces poétiques aventures
furent réunis en un poème suivi par un certain Béroul,
peut-être anglo-normand, peut-être normand, dont
l'œuvre ne nous est parvenue qu'à l'état de fragment
(encore les t 500 derniers paraissent-ils être d'un autre
auteur); nous avons une version allemande complète de
l'histoire de Tristan faite vers 1175 par Eilhart d'Oberg;
elle ressemble en quelques parties de fort près au poème
de Béroul; mais à partir d'un certain endroit les deux
textes divergent, en sorte qu'il semble qu'on ait affaire
à des compilations qui ne coïncident que par parties.
— Chrétien de Troies avait composé un Tristan; mais il
est perdu, ainsi que celui d'un certain La Chèvre, cité
avec éloges. — Vers 1170, un autre poète anglo-normand,
Thomas, doué d'un véritable sentiment poétique, et,
LES ROMANS BRETONS. 101
malgré de la prolixité, de la redondance et parfois de
l'obscurité, d'un incontestable mérite de style, composa,
en s'aidant de diverses sources, un Tristan dont les
récits diffèrent souvent de ceux de Béroul et d'Eilhart;
Thomas déclare s'appuyer surtout sur la version d'un
conteur breton appelé Bréri, célèbre en effet au xnc siècle
chez les Gallois. De ce poème nous n'avons malheureu-
sement que des fragments, mais on peut le reconstituer
pour le fond à l'aide d'une triple version allemande
(par Gotfrid de Strasbourg, incomplète), norvégienne
(en prose, vers 1225, fidèle mais 'abrégée), et anglaise
(xivc siècle, très altérée). — Plus tard les aventures de
Tristan furent l'objet d'un immense roman en prose,
qui a sans doute eu pour fond premier le poème perdu
de Chrétien, mais qui l'a noyé dans une mer d'aventures
étrangères au sujet.
57. Déjà dans Béroul, Tristan est rattaché au cycle
d'Arthur, avec lequel il n'avait originairement rien à
faire; il en est de même, avons-nous vu, de beaucoup
de lais, dont on place la scène à sa cour. Des poèmes
arthuriens en grand nombre, issus des lais et des contes
bretons, surgirent ainsi en Angleterre vers le milieu
du xne siècle. Ces poèmes sont à peu près tous perdus;
on les connaît par des imitations anglaises, galloises et
surtout françaises. Ils passèrent en effetde bonne heure
en France, soit dans les copies, soit par transmission
orale, et souvent sans doute sans garder la forme poé-
tique; car il existait aux cours des rois et des princes
des conteurs qui n'écrivaient pas les récits qu'ils débi-
taient. Les relations entre l'Angleterre et la France
étaient alors très soutenues, d'une part à cause des pos-
sessions de Henri II sur le continent, d'autre part à
cause des liens de parenté qui unissaient les familles
102 LITTÉRATURE NARRATIVE.
princières des deux pays. — Le plus célèbre et le plus
habile de ceux qui, en France, mirent en vers cette
« matière de Bretagne » si nouvelle et, dès son appari-
tion, accueillie avec tant de faveur, fut Chrétien de
Troies. Nous avons parlé de -ses imitations d'Ovide
(§49); il composa vers 1160 son Tristan perdu, puis Érec,
puis Cliijèfi (§51), vers 1170 le Conte de la Charrette ou fàm-
cclot, dont la comtesse Marie de Champagne, fille de
Louis VII et de la reine Aliénor, lui avait fourni le sujet,
qu'elle tenait sans doute d'Angleterre (Chrétien n'a pas
terminé cet ouvrage, et l'a fait finir par Godefroi de
Lagni); un peu après Ivain ou le Chevalier au lion; et, en
dernier lieu, vers 1175, Perceval ou le Conte du graal,
d'après un « livre », sans doute un poème anglo-nor-
mand, que lui avait prêté Philippe d'Alsace, comte de
Flandre. Tous ces romans ont pour source des
contes anglo-normands, oraux ou écrits, en prose
ou en vers. Chrétien a eu souvent de mauvais ori-
ginaux ; il n'a connu les récits que défigurés par des
lacunes, des altérations, des incohérences dont il ne
s'est pas beaucoup soucié ; il semble au contraire
avoir pris un certain plaisir à ces obscurités, qu'il a
parfois même augmentées en s'amusant à cacher pen-
dant longtemps le nom d'un personnage, le motif d'un
acte ou le sens d'un épisode. Son grand mérite est dans
la forme. Il passa sans conteste aux yeux de son époque
et de celle qui suivit pour le meilleur poète français :
« il prenait, dit un auteur du xme siècle, le beau fran-
çais à pleines mains, et n'a laissé après lui qu'à glaner».
Ses œuvres nous offrent en effet le meilleur spécimen
de l'excellente langue du xnc siècle. Quant au style, il a
souvent les défauts habituels au moyen âge, la banalité,
la monotonie, la minutie, l'absence de souffle, d'éclat et
d'ampleur; mais on y trouve une grande délicatesse
LES ROMANS BRETONS. 103
d'expression, une grâce simple el çà et là un véritable
sentiment. C'est Chrétien qui a fait des romans d'ori-
gine bretonne, en continuant la transformation com-
mencée en Angleterre, les représentants par excellence
de l'idéal de la haute société du xnc siècle. Cette ten-
dance, qui s'accuse par l'insistance sur tout ce qui
Umebe le raffinement des manières, par les brillantes
descriptions de palais, de fêtes, de parures, d'armes,
par le respect dont sont entourées les femmes, s'est
complétée dans le Lancelot par la peinture ,de l'amour
« courtois » tel que le rêvait alors un eercle de grandes
(laines à la tête desquelles se trouvait Marie de Cham-
pagne; c'est à elle qu'il devait non seulement le fond,
mais (il nous le dit lui-même) l'esprit de ce roman : la
théorie de la vertu ennoblissante d'un amour qui d'ail-
leurs est considéré comme incompatible avec le
mariage, la constitution d'une science et d'un code de
l'amour, la situation prépondérante donnée à la dame,
paraissent provenir des petites cours du midi de la
France, où on les retrouve dans la poésie lyrique des
troubadours; cette poésie et ces idées se propagèrent
dans le nord, grâce surtout, semble-t-il, à Aliénor de
Poitiers, devenue reine de France, puis d'Angleterre;
Chrétien les introduisit dans les romans bretons, et on
les retrouve dans beaucoup de ceux qui suivent les
siens et qui les prirent pour modèles.
58. Les contes anglo-normands dont il a été parlé ont
pour caractère ordinaire d'être la biographie roma-
nesque d'un des héros de la Table-Ronde : un jeune
chevalier inconnu, le plus souvent même sans parents,
vient d'arriver à la cour d'Arthur, quand une aventure
quelconque, regardée par tous comme impraticable,
sollicite son courage; il quitte la cour, accomplit l'aven-
104 LITTÉRATURE NARRATIVE.
ture et ensuite beaucoup d'autres, et finit par épouser une
jeune fille qui s'y trouve mêlée et qui lui apporte en dot
un royaume. Sur ce type sont construits les romans
suivants : le Chevalier au lion (on en a une version en
gallois, le poème de Chrétien a été traduit en allemand
par Hartmann d'Aue, en norvégien et en anglais); Érec
(version galloise; traduction allemande, par Hartmann,
et norvégienne du poème de Chrétien); Fergus (par
Guillaume; traduction néerlandaise); Ider (très ancien
héros breton, habillé, non sans grâce, à la dernière
mode chevaleresque); Mériadeuc ouïe Chevalier aux deux
epées; Durmart le Gallois; Guinglain, fils de Gauvain (par
Renaud de Beaujeu; poème charmant, provenant d'un
vieux conte féerique très modifié par le poète français,
et dont une forme plus pure s'est conservée en italien :
imitation allemande par Wirnt de Gravenberg) ; Mérau-
gis de Portlesguez (par Raoul de Houdan, que les contem-
porains plaçaient à côté de Chrétien); Torec (n'est con-
servé qu'en néerlandais); Beaudous, par Robert de Blois,
récit à tendance morale, assez peu intéressant par lui-
même, auquel l'auteur a plus tard annexé diverses
compositions didactiques (voir § 103), Escanor, Melia-
dor, et beaucoup d'autres.
59. L'un de ces contes anglo-normands était consacré
à un chevalier de Galles appelé Perceval; nous pouvons
nous en faire une idée assez exacte par un petit poème
anglais du xive siècle sur ce personnage, qui, élevé par
sa mère veuve dans l'ignorance de la chevalerie, l'ap-
prend par hasard, bientôt y excelle, tue le meurtrier de
son père, retrouve, sa mère, et épouse une jeune fille
qu'il avait sauvée de ses ennemis et que diverses aven-
tures avaient séparée de lui. Dans le poème que Chré-
tien consacra à Perceval et qu'il n'a pas terminé, il mêla
LES ROMANS BRETONS. 105
à cette histoire, qu'il ne connaissait que sous une forme
altérée, une aventure dont nous ne comprenons pas
bien le sens et dont nous ne savons pas quelle devait
être l'issue : il s'agit d'une question que Perceval devrait
faire et ne fait pas à propos d'un graal (c'est-à-dire d'un
plat) mystérieux qu'il a vu passer devant lui dans un
château où l'avait mené sa course errante. Ce graal se
retrouve dans la version galloise de l'histoire de Perce-
val (appelé en gallois Peredur), et l'aventure se dénoue,
d'une façon d'ailleurs assez peu claire et probablement
altérée, mais sans rien qui sorte du caractère ordinaire
des contes bretons. — Mais le Perceval de Chrétien étant
resté inachevé, et ayant eu malgré cela un immense
succès, on le continua de diverses façons (l'une des
plus curieuses est le poème allemand de Wolfram d'Es-
chenbach, qui, non content de terminer le poème, lui
lit une longue introduction). — Une première continua-
tion semble faite sur des notes laissées par Chrétien;
elle est anonyme et se présente, au moins en partie,
dans deux versions assez différentes; elle se borne à peu
près (notons l'intéressant épisode des aventures de
Caradoc Bronbras) au récit des aventures de Gauvain,
le neveu d'Arthur, le plus célèbre des chevaliers de la
Table Ronde, le héros spécial de plusieurs poèmes (tels
que le Chevalier à Vépée, la Mule sans frein, le Cimetière (Atre)
périlleux, la Vengeance de Raguidel, etc.), récit au milieu
duquel Chrétien s'était arrêté, et qui n'a rien à faire
avec le reste. — Mais le vrai « conte du graal », l'histoire
de la recherche du graal mystérieux par Perceval,
qui veut, quand il l'aura retrouvé, réparer son erreur
et faire la fameuse question, restait à terminer. Un
auteur appelé Gaucher de Denain, qui ne paraît pas
avoir connu la première continuation, reprit l'histoire
de Perceval et la mena tout près du dénouement;
106 LITTERATURE NARRATIVE.
mais, par une sorte de fatalité qui s'attachait à ce
poème, il ne la finit pas non plus. L'œuvre inachevée
reçut trois terminaisons, l'une de quelques vers seule-
ment, les deux autres fort longues. La plus répandue de
ces deux dernières est celle d'un poète appelé Mennes-
sier, qui écrivait vers 1220 pour Jeanne de Flandre,
petite-nièce du comte Philippe sous les auspices duquel
le poème avait été commencé. L'autre fin est de Gerbert
de Montreuil, à qui nous devons le Roman de la Violette
(§51); elle ne nous est parvenue que dans un manu-
scrit, où, tronquée et sans doute un peu remaniée à la
soudure, elle est bizarrement intercalée entre le dernier
vers de Gaucher et le premier de Mennessier, ce qui
porte l'ensemble du poème à plus de 63 000 vers. Dans
ces amplifications successives, le graal avait pris un
caractère que Chrétien ne connaît pas ou du moins n'in-
dique pas. Un des auteurs ou interpolateurs de la pre-
mière continuation avait donné sur ce qu'était ce graal
des renseignements qui paraissent n'avoir nullement
été dans le plan de Chrétien : le graal aurait, d'après
lui, servi à recueillir, entre les mains de Joseph d'Ari-
mathie, le sang qui coulait des plaies du crucifié, et sa
vertu miraculeuse lui venait de cette sainteté. — Un
poète franc-comtois, Robert de Boron, vers le commen-
cement du xiiic siècle, s'empara de cette idée et entre-
prit de rattacher l'histoire de cette sainte relique au
cycle breton. Il composa à cet effet une sorte de trilogie :
Joseph d'Arimalliic, — Merlin, — Percerai. 11 fit du sorcier
et prophète Merlin, qu'il emprunta à Gauiïei de Moo.
moutli (chez Robert c'est un enfant du diable, engendré
par lui pour combattre le Christ, mais trompant son
attente et servant la bonne cause par sa connaissance
du passé et de l'avenir), le sujet du poème central et le
lieu entre les deux autres poèmes, dont le premier nous
LES ROMANS BRETONS. 107
raconte la première consécration et les premiers prp-
digesduc saint graal », tandis que le troisième nous
montre ce graal finalement conquis par Perceval, puis
transporté au ciel après sa mort, et se termine par le
récit, tiré de Gaufrei, de la dernière bataille livrée par
Arthur, et de l'écroulement de tout le monde poétique
arthurien. Nous ne possédons de l'œuvre de Robert de
Boron, 'dans sa forme originale, que le premier poème
et le commencement du second; mais tous les trois ont
été mis de très bonne heure en prose et nous les avons
sous cette forme.
60. Parallèlement à Robert un autre auteur racontait
aussi, peut-être en vers (mais nous n'avons qu'une rédac-
tion en prose), la « quête du saint graal » à la fois par
Perceval (ou Perlesvaus), Gauvain et Lancelot. Lancelot,
étant connu, par le Conte de la Charrette de Chrétien et le
Lancelot en prose dont nous allons parler, comme l'amant
de Guenièvre, femme d'Arthur, ne pouvait conquérir le
graal, destiné à un chevalier d'une absolue pureté, ce
qui excluait aussi le trop mondain Gauvain. Perceval
était réservé à ce succès : aussi, comme déjà dans le
poème de Robert de Boron, l'amour, qui chez Chrétien
faisait partie de ses aventures, en a-t-il ici disparu. —
C'est avec tous ces matériaux, Chrétien, Robert de Boron,
le Perceval en prose, qu'a été rédigé le roman de la
Qttétc du saint graal, où Perceval a été dépouillé de sa
prérogative en faveur de Galaad, donné pour fils à Lan-
celot. Cette Quête, mise sous le nom de Robert de Boron,
est perdue en français, mais on en possède une traduc-
tion portugaise qui paraît fidèle; elle a été plus tard
remaniée, attribuée à Gautier Map (voir § 62), et sous
cette forme incorporée au Lancelot en prose. A la suite
de la Quête a ét« composé le Saint Graal en prose, renia-
108 LITTÉRATURE NARRATIVE.
niement du Joseph de Robert de Boron, puis le Merlin en
prose, remaniement de son Merlin, auquel on fit aussi
des suites beaucoup plus longues, dont nous connais-
sons deux, tout à fait indépendantes l'une de l'autre (la
seconde à son tour existe dans deux rédactions en partie
absolument différentes).
61. Nous avons vu que le personnage de Lancelot avait
été mêlé à cette histoire. Lancelot du Lac (ainsi sur-
nommé parce qu'il avait été élevé par une fée ou « dame
du lac ») était de bonne heure un des héros connus de
la Table Ronde : ses aventures diverses et son mariage
final avec la belle Iblis étaient le sujet d'un poème bio-
graphique anglo-normand dont nous ne connaissons
qu'une version allemande faite avant 1200 par Ulrich
de Zatzikhoven (l'original avait été porté à Vienne par
un des seigneurs qui servirent d'otages pour Richard
Cœur de Lion). On racontait aussi qu'il avait délivré la
reine Guenièvre, enlevée par < le roi du pays dont nul ne
revient » : c'était une ancienne tradition mythologique,
et ce roi était naturellement, à l'origine, le roi des morts;
mais on ne comprenait plus le sens du vieux récit, et on
savait seulement que Lancelot, pour pénétrer dans le
pays du ravisseur, avait dû franchir un fleuve de feu sur
un pont mince et tranchant comme le fil d'une épée;
il paraît avoir existé sur ce sujet des poèmes anglo-
normands qui ont laissé des traces en allemand et en
anglais. Chrétien, en traitant cet épisode dans le Conte
de la Charrette (ainsi nommé parce que Lancelot, pour
suivre la reine, est obligé, contrairement aux lois che-
valeresques, de monter sur une charrette), y introduisit,
le premier sans doute, une liaison coupable entre Lan-
celot et Guenièvre. Avec ce poème de Chrétien, d'autres
poèmes et le livre de Gaufrei de Monmouth, fut com-
LES ItOMANS URETONS. 109
posé, sans doute au début du xin° siècle, le roman do
Lancclot en prose, qui suit Lancclot depuis sa naissance
jusqu'à sa mort, et môle à son histoire celle de toute la
Table Ronde, ainsi que le dénouement tragique déjà
raconté, d'après le récit de Gaufrei de Monmouth
amplilié, dans le Perceval de Robert de Boron.
62. Le Lancelot en prose primitif se référait, pour ce
qui concerne le graal, au Perlesvaus en prose (§ 60).
Nous n'avons plus le Lancelot sous cette forme; il a été
remanié pour cadrer avec la Quête du saint graal où
Galaad est le héros, qu'on y a même insérée tout entière,
et qu'il n'est plus possible d'en détacher nettement.
Cette seconde rédaction doit être environ de 1220; plus
tard encore, on souda plus intimement au Lancelot ainsi
refait le Saint Graal et le Merlin. — Le Lancelot remanié
est attribué dans plusieurs manuscrits à Gautier Map, qui
fut archidiacre d'Oxford et mourut en 1209 ou 1210;
mais celte attribution est inacceptable, même si on la
restreint, comme on pourrait le faire, à la Quête (Map,
auquel on a aussi attribué, à tort probablement, une
masse de poésies latines rythmiques, a écrit réellement
un curieux livre latin, où il y a beaucoup de contes sin-
guliers, mais aucun qui touche au cycle d'Arthur) : ces
romans ont été bien probablement écrits en France;
d'ailleurs la Quête n'est, comme on l'a vu (§ 60), que le
remaniement d'un texte mis primitivement sous le nom
de Robert de Boron. — Le Saint Graal et le Merlin en
prose prétendent être de Robert de Boron, ce qui n'est
vrai qu'en partie et pour le fond.
63. L'auteur d'une des suites du Merlin, qui se donne
le nom de Robert de Boron, mentionne un conte du brait
(ou bret), c'est-à-dire du dernier i cri » qu'aurait poussé
110 LITTÉRATURE NARRATIVE.
Merlin enfermé vif dans une tombe par la ruse de celle
qu'il aimait, etattribue ce conte (perdu en français, mais
conservé en partie dans une version espagnole) à un
certain Élie. On fit de cet Élie un parent de Robert, on
lappela Élie de Boron, et on le donna pour auteur à
l'immense roman de Palamêde (autrement dit Mêliaàw
pour la première partie, Guiron le Courtois pour la
seconde), qui est censé servir d'introduction à tous les
autres. Dans le prologue de ce Palamêde, il est fait une
allusion assez vague au Bret, prétendue œuvre anté-
rieure de l'auteur; dans un épilogue ajouté au TrUtan
on donne, par une évidente méprise, au Tristan même
le nom de Bret, et on prétend qu'Élie de Boron l'a com-
plété et remanié d'après la première rédaction, dont se
déclare auteur, dans tous les manuscrits, un chevalier du
nom de Luce du Gast, sans doute aussi peu réel que les
autres. Le prétendu Élie de Boron qui mentionne bien
entendu Gautier Map, nomme aussi, comme ayant tra-
vaillé aux divers romans, un certain Gace le Blond, mais
sans dire quelle part il y prit; peut-être s'agit-il simple-
ment de Wace, dont le Brut est cité dans certains pas-
sages des romans en prose.
64. Tous ces livres, qui forment ensemble une collec-
tion vraiment énorme, étaient terminés vers 1250.
Vers 1270, un Italien, Rusticien de Pise (cf. § 91), en fit
un extrait abrégé, d'après un manuscrit appartenant à
Edouard, fils de Henri III d'Angleterre; cette compila-
tion eut beaucoup de succès, et, traduite en italien, elle
devint la source de plusieurs poèmes. Le Lancclot fut mis
en vers néerlandais au XIIIe siècle, plus tard en prose
allemande; d'autres romans furent traduits en italien,
en espagnol, en portugais, en anglais; une compilation
analogue à celle de Rusticien, mais bien plus riche, se
ROMANS BRETONS. Hi
trouve dans V Arthur anglais de sir Thomas Malory,
rédigé à la fin du xve siècle d'après des originaux fran-
çais dont quelques-uns sont perdus. — Le Perceforest
français au xiv9 siècle, VAmadis portugais puis espagnol
aux xve et xvi° siècles, sont des imitations de ces grands
romans en prose. Les originaux étaient universellement
admirés en Europe : Dante, qui en parle à plusieurs
reprises, les considère comme ayant donné à la langue
française le premier rang pour la prose narrative, et
Brunet Latin (§ 101) extrait du Tristan, dans sa Rhétorique,
un portrait de femme comme modèle accompli de des-
cription. — Pour nous, tant comme conception que
comme style, ces romans ont quelque chose de trop fac-
tice et de trop maniéré pour nous plaire ; mais on ne
peut disconvenir qu'ils contiennent de beaux morceaux
(notamment le Tristan), et qu'ils nous montrent une prose
déjà très sûre d'elle-même et s'efforçant de produire des
effets artistiques. Ils ont surtout le mérite de nous repré-
senter l'idéal social, moral et poétique de la haute
société d'alors, idéal qui n'a pas été sans avoir quelque
influence sur la vie réelle et qui en a exercé une consi-
dérable sur la littérature. C'est à ces romans que
remonte surtout la teinte chevaleresque et galante sous
laquelle l'imagination s'est longtemps représenté le
moyen âge : or cette teinte, si elle n'a guère dépassé
l'épaisseur d'un vernis superficiel, a bien été celle que
les hommes d'alors, ceux du moins des hautes classes,
auraient souhaité donner à leur existence, qu'ils ont
recherchée dans les fictions qu'ils aimaient, et qui res-
tera attachée à l'époque où elle a, plus qu'à aucune
autre, coloré ce € rêve d'une vie plus conforme à l'âme »
qu'on appelle la poésie.
CHAPITRE V
ROMANS D'AVENTURE
63. Les auteurs du moyen âge appellent parfois romans
ou contes d'aventure des romans byzantins ou celtiques;
mais nous réservons ce nom à ceux qui ne rentrent pas
bien précisément dans l'une de ces classes. Plusieurs
d'entre eux sont sans doute sortis de l'invention de leurs
auteurs, et sont, par là, les vrais précurseurs des
romans modernes (il y a déjà beaucoup d'invention dans
les chansons de geste et les romans bretons, mais on
n'y ose pas encore quitter franchement les lisières de la
tradition antérieure); beaucoup d'autres reposent ou
sur des traditions nationales, ou sur des lais celtiques
(non rattachés au cycle d'Arthur), ou sur des contes
venus d'Orient. Ces romans sont assez nombreux, et
nous ne pouvons les analyser ni même les nommer
tous. Nous les diviserons en certaines catégories dans
chacune desquelles nous signalerons les principaux;
nous répéterons quelques titres déjà mentionnés à
propos des romans byzantins : il s'agissait alors sur-
tout de faire remarquer l'origine des romans en ques-
tion, au lieu que nous en parlerons maintenant pour en
indiquer quelque autre particularité.
ROMAN- H AVENTURE. 1 13
66. Romaji8 d'origine sans doute bretonne. A ce premier
groupe semblent appartenir : Amadas \nr siècle; nous
> signalerons «les tracée de mythologie, comme le rôle
attribué à trois sœurs fatidiques qui président à la
naissance H à la destinée des hommes, et des lieux
commune comme la folie du héros causée par l'amour :
— llle et Qaleron (par Gautier d'Arras. § 51), vers lITu :
venu d'un lai perdu qui, dans sa plus grande partie,
s'était qu'une variante de celui d'Éliduc du Marie de
Franci le thème essentiel de ces lais se retrouve
dans le roman postérieur de Gilles fie Trasignies, dans la
légende allemande du comte de Gleichen et dans la
légende française de Notre-Dame de Liesse); — Richard
le Beau (xme siècle, deux parties : la légende du Mort
reconnaissant, qui se retrouve dans un grand nombre de
récits du moyen âge et remonte à des contes orientaux,
et celle, du Fils qui recherche son père, le combat sans le
connaître et le réconcilie avec sa mère, sujet, entre
autres, des deux lais de Doon et de Milon ; § 5oj ; — Galeran
de Bretagne (par Renaud, joli poème, qui développe le
sujet du lai de Frêne; § 55) ; — le Châtelain de Couci (par
Jakemon Sakesep, fin du xme siècle; thème du lai de
Quiron, § 55, développé d'abord dans un poème plus
court, perdu, mais imité en allemand par Conrad de
Wurzbourg; il existe aussi de ce récit des versions pro-
vençales et allemandes ; le châtelain de Couci, § 128, est
originairement tout à fait étranger à cette histoire,
dont le poète l'a fait le héros pour avoir l'occasion d'in-
tercaler plusieurs de ses chansons); — le Comte d'Artois
(on n'en a qu'une rédaction en prose du xvc siècle; mais
il a existé un poème plus ancien sur ce sujet, qui se
retrouve dans des contes orientaux et dans une nou-
velle de Hoccace, imitée dans le Tout est Lien qui finit bien
de Shakspeare; — Brun de la Montagne (ce roman, dont
8
H 4 LITTERATURE NARRATIVE.
nous n'avons que le commencement, fait jouer aux fées
un rôle considérable; il a cela de particulier qu'il est
écrit dans la forme des chansons de geste, en laisses
d'alexandrins monorimes), etc.
67. Romans qui paraissent mélangés (Vêlements celtiques et
byzantins. — Blancandin (le héros est le fils du roi de
Frise; tous les noms sont dailleurs imaginaires; il
finit, après des aventures assez banales, par épouser
Orgueilleuse d'Amour); — Guillaume de Palerme (déjà cité
au § 51 ; mais l'histoire de loup-garou qui en forme une
partie importante semble reposer sur des lais bretons
comme ceux de Bisclavret et de Mélion; voir § 55); —
Guillaume de Dole (§ 51 ; ce roman, d'ailleurs un des
meilleurs du genre, est important en ce que l'auteur a
imaginé d'insérer dans le récit des chansons ou frag-
ments de chansons de tout genre, en quoi il a été imité
par les auteurs de la Violette, de la Poire, de la Panthère
d'amours, du Châtelain de Couci, de Méliacin, etc.).
68. Bornons dont la scène est en Occident et qui racontent
des histoires à peu près vraisemblables. — Jean de Dammartin
et Blonde d'Oxford (par Philippe de Beau manoir : un
trait essentiel s'en retrouve au xve siècle dans le char-
mant roman de Jean de Paris; ce même trait est aussi
dans le beau poème de Horn, § 27, et a passé de là dans
le roman postérieur, imité de Horn, dePontus et Sidoine;
citons, à ce propos, les romans anglo-normands de
Waldef, Havelok et Gui de Wancick, qui, comme Horn, ont
des sources anglo-saxonnes, mais ont la forme des
romans d'aventure et non celle de l'épopée); — Joufroi,
roman amusant et libre d'allures où se trouve peut-être
quelque souvenir des aventures chevaleresques et
galantes du célèbre comte de Poitiers Guillaume IX; —
ROMANS D AVENTURE. 115
Pamphile et Galatéc, traduit, vers 122o, par Jean Bra's-
defer, de Dammartin en Goële, d'un poème latin ero-
tique qui paraît remonter au xne siècle; — la Châtelaine
de Vergi (ce joli et touchant petit poème du xme siècle
mérite une mention toute spéciale : il raconte une aven-
ture d'amour dans le grand monde terminée par un
dénouement tragique, sans mélange de rien de merveil-
leux ni de traditionnel; c'est déjà presque le roman
moderne, sauf quelque exagération à la fin, et la finesse
de l'analyse et la délicatesse des sentiments y sont
remarquables); — ce sont aussi de petites aventures
galantes, mais sans aucun caractère dramatique, qui
font le sujet des courts poèmes ou « lais » du Conseil et
de Y Ombre (ce dernier, vrai type de livret « courtois », par
Jean Renart); — André de France (roman qui paraît avoir
eu un grand succès, mais qui, chose singulière, nous
est surtout connu par des allusions provençales); —
Gautier d'Aupais, bizarre petit roman, composé, comme
Brun de la Montagne, dans la forme des chansons de
geste, etc.
09. Romans d'histoire ou de légende nationale (étrangers
à l'épopée proprement , dite). — Mélusine (romans en
prose et en vers, sortis de quelque lai localisé à Lusi-
gnan, et tous du xive siècle); — Robert le Diable (conte
fantastique et dévot, originairement étranger à la Nor-
mandie comme à l'histoire, dont il existe plusieurs
variantes); — Richard sans Peur (il s'agit du troisième
duc de Normandie, resté longtemps très populaire); —
Richard Cœur de Lion (le poème anglo-normand sur ce
prince n'existe plus qu'en anglais, et cette version, faite
sur un manuscrit incomplet, a été plus tard amplifiée
par un remanieur anglais d'une façon extravagante): —
la Comtesse de Pontieu (petit roman en prose, du xme
i l 6 LITTERATURE -NARRATIVE.
siècle, sur une étrange et dramatique aventure, ratta-
chée au cycle des croisades); — Gilles de Chin, par Gau-
tier de Tournai (vers i2;j<)); — Eustache le Moine (odyssée
héroï-comique d'un hardi partisan, brigand et sorcier
autant que chevalier, qui met au désespoir le comte de
Flandre et le roi d'Angleterre; le personnage d'Eus-
tache, surnommé le Moine, est réel, et une partie des
faits ont un fondement historique, mais, l'imagination
populaire les a singulièrement amplifiés); — Foulhc l;itz-
Warin (histoire fort analogue, en prose anglo-nor-
mande, d'un outlaw du temps de Jean sans Terre; il y a
plus d'un récit de ce genre en Angleterre, et le cycle de
Robin Hood se rattache à ces romans); — Sonede Nansai,
fastidieux et énorme roman de pure invention que
l'auteur a vaguement rattaché aux légendes du saint
Graal et du Chevalier au cygne, etc.
70. Romans plaisants. — Dès la première moitié du
xne siècle, il existait une sorte de geste consacrée à
Richeut, le type de la courtisane et, sur ses vieux jouis,
de l'entremetteuse (son nom était devenu, en ce sens,
un nom commun); nous n'en avons conservé qu'une
des dernières branches, écrite en H59 dans une forme
de versification très particulière; ce poème, dont nous
n'avons pas la fin, raconte avec un grand cynisme,
mais dans un style singulièrement vif et avec d'excel-
lents traits de caractère et d'observation, la lutte de
Richeut et de son digne fils Sanson, qui exploite 1rs
femmes comme elle exploite les hommes; il est joué
par elle dans l'aventure qui termine le fragment, mais
peut-être prenait-il sa revanche; ~ Trubcrt, par Douin
de Lavesnes Aisne), xme siècle, incomplet; cest un
recueil de contes et d'aventures comiques, dont le
héros, niais en apparence, dupe toujours tout le monde;
ROMANS D AVENTURE. 117
ces récits, souvent plus que grossiers, sont d'origine
orientale et se retrouvent dans diverses littératures.
71. Romans à tiroirs (contenant plusieurs histoires que
racontent les personnages). — Les Sept Sages de Rome
(on en a un texte en vers du xne siècle, et un texte en
prose du xmc, assez différents, mais remontante une
même source; sur le sujet, voir S 50); à la rédaction en
prose de ce roman on composa des suites successives,
qui contiennent beaucoup moins d'histoires, et dont les
histoires sont moins intéressantes : ce sont Marques de
Rome, Laurin, Cassidorus, Péliarménus , Kanor, tous
rédigés au xme siècle. — Une autre forme, très diffé
rente, du même thème fut mise en latin, à la fin du
xn° siècle, par le moine Jean de Haute-Seille en Lor-
raine, sans doute d'après des récits recueillis oralement,
et, bientôt après, du latin de Jean en vers français par
un poète nommé Herbert; le père du héros s'appelle ici
Dolopathos et a donné son nom au roman.
CHAPITRE VI
FABLE AUX
72. Pour les hommes réunis, se raconter des histoires
a toujours été une manière agréable de passer le temps,
surtout quand on n'a pas de livres ou que la lecture est
peu répandue : le conte est un degré inférieur de la
poésie épique. Les anciens ont connu ce plaisir : les
apologues ésopiques, les fables milésiennes en sont la
preuve. Dans la société issue de la destruction du inonde
romain par les Germains, ce goût était très vif; il fut
satisfait par les joculatores en même temps que le goût
plus élevé pour les chansons de geste ou plus raffiné
ppur les poèmes d'aventure. A la fin du xne siècle,
nous voyons un comte de Guines, Baudouin 11(1169-1 206),
capable d'égaler les jongleurs les plus renommés in
cantilenis gestoriis, sive in evcntitris nobilium, sive in fabellis
ignobilium. Ce sont en effet, comme on le verra, des
bourgeois, des vilains, des clercs inférieurs qui sont les
héros habituels de ces récits. C'était aux repas (l'usage
en est attesté de très bonne heure), aux assemblées,
aux fêtes, que les jongleurs produisaient leur réper-
toire. Comme pour les romans bretons dans la première
FABLEALX. 119
période, beaucoup de ces récits n'avaient pas de forme
écrite et se transmettaient oralement en prose. Ils ne
prenaient réellement une forme littéraire que si on les
mettait en vers, ce que firent de nombreux poètes, au
moins à partir du xne siècle et jusqu'au commencement
du xive- Les récits circulant oralement s'appelaient
conte, aventure (Nés puet on mie toutes dire Ne conter en
romans 7i,escrire, dit un poète en parlant des aventures),
fable; les récits en vers fablel (Des fables fait l'on les
fableaus, dit un autre poète : fablel fait au pluriel
fableaus ou fabliaus ; la forme fableaus, d'où le singulier
fableau, est seule proprement française : cf. tableau);
mais naturellement les mots conte, aventure, fable sont
souvent employés aussi pour désigner les rédactions
écrites et rtmées.
73. D'où venaient ces contes, répandus dans toute
l'Europe, et dont plusieurs sont populaires encore
aujourd'hui? La plupart avaient une origine orientale.
C'ep.t dans l'Inde, en remontant le courant qui nous les
amène, que nous en trouvons la source la plus reculée
(bien que plusieurs d'entre eux, adoptés par la littéra-
ture indienne et transmis par elle, ne lui appartiennent
pas originairement et aient été empruntés à des litté-
ratures plus anciennes); le bouddhisme, ami des
exemples et des paraboles, contribua à faire recueillir
des contes de toutes parts et en fit aussi inventer
d'excellents. Ces contes ont pénétré en Europe par
deux intermédiaires principaux : par Byzance, qui les
tenait de la Syrie ou de la Perse, laquelle les importait
directement de l'Inde (cf. § 50), et par les Arabes. Lim-
portation arabe se fit elle-même en deux endroits très
différents : en Espagne, notamment par l'intermédiaire
des Juifs, et en Syrie, au temps des croisades. En
120 LITTÉRATURE NARRATIVE.
ESpagne la transmission l'ut surtout littéraire : ainsi
un juif converti. Pierre Alphonse, publiait à la (in du
\n siècle un livre Renseignement moral tout rempli de
contes arabes (indiens), qu'il appelait Disciplina clericalis,
et dont nous possédons deux traductions en vers du
\ir ou du xiiie siècle (la Discipline de clcn/ie ou le Chastié-
ment d'un père à son fils). En Orient, au contraire, les
croisés, qui vécurent avec la population musulmane
dans un contact fort intime, recueillirent oralenieul
beaucoup de récits: plusieurs de ces récits, d'origine
bouddhique, avaient un caractère moral et même ascé-
ticpie : ils ont été facilement christianisés ; d'autres,
sous prétexte de moralité finale, racontaient des aven
tUreS assez scabreuses : on garda l'aventure en laissant
là, d'ordinaire, la moralité: d'autres enfin furent retenus
et traduits comme simplement plaisants. Il faut signaler
l'accueil que fit à ces contes, à ces crnnplcs. comme on
les appelait, la prédication chrétienne : on se plut, dès
le xnp siècle, à en insérer dans les sermons, et un grand
nombre nous a été transmis soit dans des sermons
écrits en latin, soit dans des livres d'édification ou des
recueils spéciaux formés pour l'usage des prédicateurs.
— Nous avons déjà parlé plus haut du roman des Sept
Sages (§§50*71), et à l'instant de la Disciplina vIêtifcUlîê. On
peut y joindre Barlaam et Joasaph, roman dont nous
reparlerons (§ 147 , qui contient aussi plusieurs coules.
Mais les tableaux sont, sauf exception, étrangers à ces
grands recueils traduits intégralement d'une lâttgtié
dans une autre: ils proviennent de la transmission
orale et non des livres. — Notons aussi que quelques
fableaux (mais c'est le petit nombre ou sont sortie de
l'invention même des auteurs (tel paraît être le cas pour
Richcut. pour Jes fableaux, d'ailleurs plus satiriques
que narratifs, de Gautier le Long, pour certains récits
FAP.I.K.U \. 121
allégoriques), ou ne font que raconter une aventure
réellement arrivée ainai peut*étre, la Plentét donf la
scène est en Syrie sous le roi Henri de Champagne,
mort en 1197; la Vessie au prêtre, farce qu'un prêtre
mourant joue à la convoitise des moines mendiants; le
Sentier battu, réponse piquante et singulièrement gros-
sièfc d'Un chevalier à une dame qui le ' raillait ; Frère
Denise i histoire scandaleuse d'un cordelier, etc.).
74. Nous ne pouvons donner des (ableaux, dont nous
possédons plus d'une centaine, qu'une idée très som-
maire Leur caractère général est d'être plaisants, et ce'
caractère est indiqué par plusieurs des noms dont les
poètes qualifient leurs récits (une trufe, une bourde, une
risée, un gab); trop souvent l'élément plaisant est
cherché dans l'obscénité, et plusieurs Tableaux attei-
gnent un incroyable cynisme, qui s'allie trop souvent
aussi à une dégoûtante platitude. Beaucoup d'entre eux
sont satiriques, et raillent de préférence certaines
classes. Composés pour les chevaliers et les bourgeois,
ils se moquent habituellement des vilains et surtout
des clercs, qui sont les héros ordinaires, tantôt heu-
reux, tantôt malheureux, des aventures galantes. Ils ne
sont pas écrits pour les femmes, et on les récitait sans
doute en général quand elles s'étaient retirées; aussi y
sont-elles ordinairement présentées, sous un jour fort
défavorable; soit comme dépravées, soit comme aca-
riâtres. Ce sont des récits destinés aux hommes, à qui
les jongleurs les débitaient après le repas, quand on
buvait; beaucoup sont de grossières saletés qui n'ont
d'autre but que de faire rire un instant; plusieurs sont
de petites histoires fort bien contées, parfois très
morales ou très sentimentales. Tous ont le grand
mérite de peindre la vie réelle de leur temps, non de
122 LITTERATURE NARRATIVE.
parti pris, mais sans le vouloir, de nous faire pénétrer
dans les intérieurs nobles, cléricaux, bourgeois ou
ruraux et de nous parler la langue familière et quoti-
dienne des diverses classes de la société.
75. L'époque des fableaux comprend environ un siècle
et demi. La plupart sont de la fin du xne et du com-
mencement du xme siècle ; les plus modernes sont ceux
de Jean de Condé et de Watriquet, au commencement
du xive : la société et la littérature subirent alors un
changement considérable, et ce genre disparut (au
xve siècle nous le trouvons représenté d'une part par la
nouvelle en prose, d'autre part par la farce ; les contes
en vers ne reparaissent que bien plus tard). — Beau-
coup des contes rimes en France aux xir3 et xme siècles
se retrouvent un peu plus tardivement dans les litté-
ratures des autres peuples, notamment en Italie, en
Angleterre et en Allemagne. Il est certain que Boccace
et Chaucer, par exemple, ont parfois imité des fableaux
français, mais il n'est nullement établi que ce soit tou-
jours le cas; ces contes circulaient oralement dans toute
l'Europe (sans parler de leur admission dans les ser-
mons et les livres pieux), et ils ont fort bien pu être
recueillis indépendamment par les poètes ou les nou-
vellistes des différents pays.
76. Les auteurs des fableaux sont assez souvent
nommés. Nous citerons Huon le Roi, de Cambrai,
auteur du Vair palefroi (charmante petite histoire, dont
la plus ancienne forme est dans une fable de Phèdre,
où l'amour honnête l'emporte, par un heureux accident,
sur la richesse qui le combat) et de la Maie Honte (anec-
dote ayant pour tout sel un froid jeu de mots, dont on
a deux autres versions) ; — Jean Bedel ou peut-être
FABLEAUX. 123
Jean Bodel g 127 . «Tuteur de neuf fableaux au moins :
Barat et Haimct (tours mutuels que se jouent des voleurs),
Brunain la vache au prêtre (plaisanterie contre les curés),
le Convoiteux et V Envieux (on promet au second un don
à condition que l'autre aura le double : il demande à se
faire arracher un œil), les Deux Chevaux (aventure peu
intéressante), le Loup et VOie (plutôt fable . le Souhait
insensé (obscénité), le Vilain de Bailleul, Gombert et les
deux Clercs (même sujet que le Berceau de La Fontaine),
le Vilain de Farbu; — Gautier le Long, auteur de la
Veuve et (sans doute) du Valet qui d'aise à malaise se met
(en se mariant), satires vives et fines, d'un style parfois
singulier et difficile, mais très personnel; — Eustache
d'Amiens, auteur du Boucher d'Abbeville (bon tour joué à
un prêtre avare); — Bernier, auteur de la Housse partie
(on a une autre version de ce conte moral); — Jean,
auteur probable dWuberée (fourberie d'une vieille entre-
metteuse, provenant de l'Inde, mais ici supérieurement
racontée); — Jacques de Baisieu, auteur des Trois cheva-
liers au chainse (conte romanesque tout rempli de l'es-
prit des poèmes de la Table Bonde) et de la Vessie au
prêtre (§ 73); — Henri d'Andeli, auteur d'Artsfote (exemple
indien, rapporté ici au sage par excellence, de la puis-
sance de l'amour sur les plus sages); — Rutebeuf
ï 127), auteur de Chariot le Juif (plaisanterie sur un jon-
gleur qui était réellement le contemporain du poète .
de la Dame qui fit trois fois le tour du moutier (rentre dans
la série si nombreuse des ruses de femmes, la plupart
contées jadis en Inde), de l'Ame duvilain (grosse raillerie
contre les vilains), de Frère Denise (§ 73 . du Testament de
Y âne (piquante dérision, originaire de l'Orient, de l'avi-
dité des gens d'Église); — Garin, auteur de divers
contes fort obscènes, des Tresses (spirituelle narration
où triomphe l'astuce féminine, et dont nous avons une
i 24 LITTÉRATURE NARRATIVE.
outre version) et du Curé qui mangea les mitres (petite anec-
dote plaisamment racontée); — Huon Peaucele, auteur
<YE>tormi (faible variante du conte oriental des trois
galants dont on veut cacher les corps, ce qui amène la
mort d'un quatrième personnage, pris pour un revenant)
et de Sire Ilain et Dame Anieuse (tableau de mœurs bour-
geoises poussé à la charge, mais gai); — Jean le Ualois
d'Aubepierrc, auteur de la Bourse pleine de sens à la
lois l'un des plus moraux et l'un des mieux contés de
tous les fableaux); — Jean de Coudé, auteur du Olere
caché (c'est ici la femme qui est jouée) et du Sentier
hatlu, etc.
77. Parmi les fableaux anonymes, les plus remarqua-
bles sont : Courtois d'Arras (curieux arrangement, avec
des noms et des mœurs du XIIIe siècle, de l'histoire de
l'enfant prodigue, à moitié dialogué), la Longue Nuit
(conte dont on a plus d'une version et qui vient
d'Orient), la Bourgeoise d'Orléans (astuce féminine, dont
on a une version anglo-normande et dont une variante
se retrouve dans Boccace, imité par La Fontaine), Cons-
tant du Hamcl (triomphe d'un vilain, cette fois, sur les
vices d'un chevelier, d'un clerc et d'un bourgeois , Yni-
sclet (charmant conte indien transformé de la façon la
plus gracieuse), te Vilain Mite (également d'origine
indienne, dont le thème initial a fourni à Molière la
donnée du Médecin malgré lui), etc.
78. Les fableaux qui touchent à la religion sont parti-
culièrement intéressants, parce qu'ils nous montrent
comment les esprits du moyen Age la comprenaient.
Tels sont : la Cour de Paradis (conte fort singulier, où
l'on voit Dieu, la Vierge et les saints danser aux chan-
sons), le Vilain qui conquit le paradis (en disant de dures
FABLEAUX. 125
vérités aux saints qui voulaient l'en chasser), l'Ame du
vilain |§ 76), Saint Pierre et le Jongleur (un jongleur, qui
après sa mort est allé en enfer, est chargé par le diable
de garder les Ames en son absence; mais il les perd
toutes aux dés contre saint Pierre, qui est venu le pro-
voquer; depuis ce temps le diable ne veut plus rece-
voir de jongleurs), etc. Il faut se garder de confondre
ces fableaux, souvent irrévérencieux, avec les coules
dévots, dont nous parlerons à propos de la littérature
religieuse.
CHAPITRE VII
FABLE ESOPIQUE ET ROMAN DE RENARD
79. La fable ésopique proprement dite (dont l'origine
première est encore obscure, mais qui au moins en par-
tie vint certainement aux Grecs de l'Orient), où les
acteurs sont des animaux et où le récit n'existe qu'en
vue de la moralité à en tirer, n'a pas été inconnue au
moyen âge; si elle y est elle-même, sauf une exception,
restée trop fidèlement attachée aux exemples latins, elle
a, par son union avec des récits d'autre provenance,
développé un rejeton aussi original que fécond. — Deux
recueils de fables latines ont été la base principale des
versions médiévales : celui d'Avianus, comprenant des
fables en distiques, mises plus tard en prose, et à peu
près toutes empruntées aux recueils grecs qui portent
le nom d'Ésope, et surtout celui dans le prologue duquel
un certain Romulus imperator prétend traduire en latin
pour son fils Tibérinus les fables grecques d'Ésope, et
qui n'est en réalité que la collection des fables de
Phèdre mises en prose à l'époque extrême de la déca-
dence. Le Romulus latin fut accru, vers le xic siècle, de
fables d'un tout autre caractère, et portant au plus haut
degré l'empreinte du moyen âge et souvent du christia-
FABLE ESOPIQUE ET ROMAN DE RENARD. 127
nisme (comme celle du loup qui apprend à lire), venant
en bonne part de l'Inde à travers Byzance, mal contées
la plupart du temps, parfois très obscures, mais sou-
vent originales, bien inventées et d'un excellent carac-
tère populaire (comme celle du chat qui a mis une étole
et qui veut baptiser un rat, lequel préfère rester
païen, etc.). Le recueil ainsi augmenté, né sans doute
en Angleterre, fut traduit de bonne heure en anglais et
mis, sans raison, sous le nom du roi Alfred, auquel on
attribuait plus d'un ouvrage qu'il n'avait pas écrit; c'est
d'après l'anglais (perdu) que Marie de France (§ 55) le
mit en vers français, élégants mais un peu secs, en
Angleterre, sous le règne de Henri II. Elle donna à son
œuvre le nom d'hopet, qui fut celui de tous les recueils
de fables du moyen âge, et qui n'est pas autre chose
qu'un diminutif familier du nom d'Ésope, auquel on
attribuait toujours tous les apologues.
80. Vers le milieu du xir3 siècle, un auteur dont le nom
est incertain (peut-être Walter l'Anglais) mit en dis-1
tiques latins les trois premiers livres de Romulus, com-
prenant cinquante-huit fables, auxquelles il ajouta deux
contes, l'un emprunté à Pierre Alphonse (§ 73), l'autre
de source inconnue; il donna à son œuvre, suivant
l'usage, le nom d'Esopus. Son style prétentieux et con-
tourné eut un très grand succès : nous possédons deux
traductions en vers des xme et xiv° siècles, Yhopet de
Lyon et Yhopet I de Paris : ce dernier s'appelle hopet-
Acionnet, parce que la traduction d'Esopus y est suivie de
celle d'Avianus. Une autre rédaction en distiques latins,
d'Alexandre Neckam (xne siècle), a été aussi deux fois
mise en vers, dans VIsopet de Chartres et Yhopet II de
Paris. La plus intéressante de ces traductions, parce
qu'elle est la plus libre, est Yhopet de Lyon; toutes d'ail-
128 LITTÉRATURE NAHHATIVE.
leurs abondent en contre-sens, auxquels prêtait le lan-
gage obscur de leurs modèles, et dont nos rimeurs se
tirent comme ils peuvent.
81. En dehors de ces recueils spéciaux de fables, on
en trouve souvent, et même de meilleures et de plus
originales, soit en latin, soit en français, dans les
oeuvres des moralistes, des prédicateurs (voir ;; 152 ,
voire des historiens (par exemple dans les Récits du
ménestrel de Reims, g 97). Le recueil d'exemples de Nicole
Bozon (§ 152) contient plusieurs fables, contées en
général d'un ton vif et populaire, et qui paraissent,
comme celles dont il a été parlé tout à l'heure, appar-
tenir à un fonds anglais.
•s2. Les fables ésopiques furent transmises au moyen
âge par les clercs; d'autres, qui n'avaient pas été ancien-
nement traduites en latin, vinrent en Occident par
Byzance: mais indépendamment de cette transmission
plus ou moins savante, il circulait et il circule encore
chez la plupart des peuples des « contes d'animaux »,
qui diffèrent de l'apologue en ce qu'ils ne se proposent
aucun but moral, mais, reposant sur une observation
sympathique et gaie des mœurs de certaines bêtes,
leur attribuent, pour exciter le rire, les aventures qui
conviennent à leur caractère supposé et à leurs habi-
tudes connues. Un grand nombre de <es contes ont pour
thème la lutte sourde ou déclarée entre le loup, plus
fort, et le goupil, plus fin. lutte dans laquelle le loup
naïf et féroce finit toujours par avoir le dessous.
Diverses fables ésopiques. issues san6 doute à l'origine
de semblables contes, avaient ;: peu près le même
thème et parlaient notamment des disputes des deux
héros à la cour du lion, roi des animaux dans la tradi-
FABLE ESOI'IQI E ET ROMAN DE RENARD. 129
tion gréco-orientale. Des clercs français réunirent et
rimèrent quelques-uns de ces contes ou de ces fables
(le partage du lion, — le goupil médecin, — le loup et
la jument . en y joignant quelques contes inconnus à
l'antiquité (le goupil voleur d'anguilles, — le loup et
le goupil pochant, — l'outrage infligé à la louve par le
goupil, etc.). Les fables ésopiques furent d'ailleurs
dépouillées de toute moralité et n'eurent plus, comme
les contes, d'autre but que de divertir. — Mais la grande
innovation qui lit de cette compilation une sorte
d' « épopée animale » est d'avoir individualisé les héros
de ces récits et de leur avoir donné des noms propres :
il ne s'agit plus d'un loup, d'un goupil, mais d'Isengrim
et de Raganhard, avec leurs femmes Richild et Hersind
(plus tard Isengrin, Renard, Richeut, Hersent). Autour
de ces personnages tous les épisodes se réunissent en
un seul récit vraiment épique, qui va des premières que-
relles des deux compères (ou de l'oncle et du neveu) à la
mort d'Isengrin ou à la victoire de Renard. A côté des
héros principaux prennent place une foule d'acteurs
secondaires : Noble le lion (dont la présence au milieu
des animaux de nos contrées suffit à montrer l'origine
en partie savante de tout le cycle;, Grimbert le blaireau
(cousin de Renard), Relin le bélier, Chanteclair le coq,
Couard le lièvre, Tibert le chat, Bernard l'âne (présenté
comme « archiprêtre »), qui ont des caractères et des
rôles toujours les mêmes. A quelle époque et dans quel
pays se fit cette ingénieuse transformation de la fable
animale? Dans le nord de la France vers le XIe siècle. La
plus ancienne trace qu'on en ait se trouve dans un récit
latin du meurtre de Gaudri, évêque de Laon, lors des
troubles qui accompagnèrent la fondation de la com-
mune, en 1112 : on y voit figurer un vilain que l'évêque,
à cause de sa nature farouche, avait surnommé Isen-
9
130 LITTERATURE NARRATIVE.
grim : sic enim, dit Le chroniqueur, aliquisolent appellare
hipoêf et plus loin il semble bien que le nom de Renoul
soit employé comme le fui plus tard celui de Renard.
Vient ensuite le poème hitin d'IsengHmus, composé sans
doute à Gand, en 1117, par maître Nivard, œuvre
pénible, quoique intéressante, et où paraissent se pro-
duire, à côté des imitations du français, des inventions
nouvelles assez peu heureuses. — En français nous ne
l'avons plus dans son état primitif; nous possédons,
dans divers manuscrits, un grand nombre de « branches »
composées en vers de huit syllabes par des auteurs du
mi' et du xiii0 siècle, plus ou moins remaniées el artifi-
ciellement groupées, qui traitent des épisodes de la
grande histoire, soit anciens, soit nouveaux, et parfois
de pure invention. C'est l'ensemble de ces œuvres dis-
parates qu'on appelle le Roman de Renard.
83. Le plus ancien morceau paraît être le Pèlerinage
Renard, qui est anonyme et remonte certainement encore
au xii° siècle. — Un auteur appelé Pierre de Saint-Cloud,
qui a écrit en vers une des continuations d'Alexandre
(g 'i i), se rendit célèbre, vers la fin du XIIe siècle, par ses
compositions relatives à Renard, mais il est difficile de
discerner ce qui lui appartient dans la collection qui
nous est parvenue; deux autres auteurs sont désignés
l'un comme un prêtre de la Croix-en-Brie et l'autre
comme un prêtre normand; Pierre de Saint-Cloud lui-
même est peut-être le curé de ce nom qui fut accusé
d'hérésie en 1204 : on voit que le Renard fut toujours
volontiers traité par des clercs. La branche la pins
importante, et celle qui eut le plus de succès, notam-
ment à l'étranger (elle est le point de départ du Reïnaert
de Vos flamand, source à son tour de toutes les imita-
tions postérieures el entre antres (lu poème de Gœthe),
FABLE ÉS0P1QUÈ ET ROMAN DE RENARD 131
est celle du Jugement de Renard, spirituel tablc;m de la
coup du roi Noble, où Renard, accusé de maint méfait.,
comparaît après avoir été vainement sommé à plusieurs
reprises, livre à Isengrin un combat singulier, et, fina-
lement, convaincu de parjure et de félonie, arrive à
échapper au gibel qui l'attend et s'enfuiten déliant tout
ceux qui ont cru en avoir fini avec lui. — Les meilleures
brancheâ de Renard, comme celle-là et quelques-unes
encore plus 411e celle-là, se distinguent par de fort
agréables qualités : le style en est naturel et aisé, les
peintures sont fines et vraies; c'est une parodie aimable
de la société humaine et de l'épopée sérieuse, une
« risée ». comme dit un des auteurs, inoffehsive et char-
mante. Mais tout ne tarde pas à se gâter et à s'alourdir :
la grossièreté des pires fableaux s'introduit dans les
récits, ou bien ils servent de véhicule à une satire âpre
et excessive, ou encore ils prennent un fastidieux carac-
tère allégorique. Dans les branches les plus anciennes
on trouve, dans la façon dont les animaux sont mis en
scène, la fraîcheur et la malice enfantines de l'obser-
vation populaire, encore toute proche de la nature; dans
les suivantes, l'assimilation de la prétendue société ani-
male à la société féodale est discrète et amène la gaieté;
mais [dus tard les personnages ne sont en réalité que
dès hommes-, qui montent à cheval et portent l'armure,
et leur déguisement sous des noms de bêtes et d'oiseaux
n'est plus que ridicule, ou donne lieu aux incohérences
les plus choquantes.
84. La satire seule, sous un voile transparent, a ins-
piré- à la fin du xiii0 siècle les poèmes, curieux à certains
titres, mais sans valeur esthétique, du Couronnement de
Renard (écrit vers 1255 en Flandre) et de Renard le Nou-
veau (ce dernier fait à Lille, en 1 2s8, par Jacquemard
132 LITTERATURE NARRATIVE.
Gelée). — Un clerc de Troies. au xive siècle, écrivit en
deux rédactions, sous le nom de Renard le Contrefait
c'est-à-dire imité de l'ancien), une immense compi-
lation, on il a réuni des morceaux de tout genre com-
posés antérieurement par lui, et où se trouvent quel-
ques histoires de Renard, qui, toutes mal contées
qu'elles sont, ne manquent pus d'intérêt, parce qu'elles
nous donnent parfois la seule forme française conservée
d'épisodes qui ont dû être racontés plus anciennement
et que nous retrouvons dans des rédactions étrangères.
Cette œuvre indigeste (qui comprend entre autres hors-
d'ieuvre une histoire universelle en partie en prose) est
d'ailleurs précieuse pour la connaissance des mœurs et
des idées de l'époque et à cause des matériaux de toute
sorte que l'auteur y a fait entrer; on y trouve l'expres-
sion de la façon de penser de la bourgeoisie éclairée
des grandes villes; et, si on y remarque peu de sym-
pathie pour les vilains, on est surtout frappé de la haine
qui s'y manifeste contre les nobles.
CHAPITRE VIII
l'histoire.
85. L'histoire n'a jamais complètement cessé d'être écrite
en latin, bien qu'à certaines périodes des temps méro-
vingiens elle ait été réduite à presque rien. La renais-
sance des études à partir de Çtiarlemagne lui rendit de
l'activité; elle fut surtout cultivée dans les monastères,
et du ixe au xivc siècle l'historiographie latine a pro-
duit un grand nombre de monuments, dont nous
n*avons pas à nous occuper ici. Pour les laïques, qui
n'entendaient pas le latin, pendant longtemps il n'y eut
pas d'histoire proprement dite : c'étaient les chansons
de geste qui en tenaient lieu; nous avons vu d'ailleurs
qu'elles contenaient, au moins à l'origine, une certaine
part de vérité.
86. L'histoire en langue vulgaire date en réalité des
croisades et ne fut pendant un temps défrayée que par
elles, et le fait s'explique très naturellement. On se
passe fort bien de posséder par écrit la relation des
faits dont on est témoin ou qu'on peut connaître par
le rapport de ceux qui y ont assisté ; mais la prodigieuse
134 LITTERATURE NARRATIVE.
expédition de 1096 transporta tout d*un coup à l'autre
bout du monde connu une grande partie de la société
française : ceux qui restaient voulurent naturellement
savoir ce que devenaient les pèlerins que leur cœur
cherchait à suivre dans leur lointaine aventure: ceux
qui revinrent voulurent raconter ce qu'ils avaient fait.
11 est probable que dès l'origine, à côté des correspon-
dances latines, œuvres des clercs, dont nous avons
quelques trop rares spécimens, des lettres, les premières
sars doute de leur espèce, furent expédiées en français
de Terre Sainte; mais nous n'en avons pas conservé de
relie époque. L'histoire proprement dite de la première
croisade en langue vulgaire eut naturellement d'abord
la forme épique, la seule qu'on connût pour des récits
sérieux- et de longue haleine; nous avons vu que les
poèmes du cycle des croisades, en grande partie fabu-
leux dans les formes où nous les connaissons, reposent
sur des narrations beaucoup plus réellement histori-
ques : les plus véridiques d'entre eux se réfèrent comme
autorité à Richard le Pèlerin, qui était peut-être,
comme son surnom semble l'indiquer, un des compa-
gnons de Godefroi de Bouillon; mais son œuvre, col-
portée avec le plus grand succès par les jongleurs, fut
bien vite altérée par eux, non seulement parce qu'ils la
remplirent de leurs inventions et la rendirent aussi
semblable que possible aux chanson^ il geste, mais
encore, à ce que nous apprend un témoignage formel,
paire qu'ils firent payer aux familles qui voulaient être
nommées dans leurs chants la place d'honneur qu'elles
réclamaient pour leur chef : cela prouve au moins
l'intérêt passionné avec lequel la France écoutait ces
récits. Les Provençaux avaient aussi écrit en vers épi-
ques l'histoire de la pari qu'ils prirent à la guerre
sainte : un chevalier limousin, Grégoire Béchada, avait
l histoire. 13:;
composé un long poème, qui semble avoir été très véir
dique, sur ce sujet; Guillaume IX, comte de Poitiers,
avail fail île sa croisade le sujet de chansons plaisantes;
une relation poétique du siège d'Antioelîe existait en
provençal comme en fraûçais; mais tous ces ouvrages
sont perdus (sauf un fragment du dernier). — Nous ne
mentionnerons que pour mémoire une traduction en
Laisses monorimes de l'histoire de la première croisade
par Baudrj de Bourgueil, laite vers la fin du xiî° siècle.
— Les événements qui suivirent en Orient la fondation
du royaume de Terre Sainte sont racontés à la fois
inexactement et platement dans les suites données à la
chanson de Jérusalem. — A cette période se rapporte
aussi une grande partie, sans doute presque entière-
ment fabuleuse, du poème de Gilles de Chin, consacré,
au xuie siècle, à la gloire d'un héros du Hainaut.
87. La deuxième croisade dut produire en français des
récits déjà plus rigoureusement historiques, mais nous
ne les avons pas; nous trouvons au contraire dans des
textes bien postérieurs (comme la Chronique de Reims,
(voir ci-dessous. § 97; , des contes relatifs au séjour de
Louis VII en Palestine et aux prétendues galanteries de
sa femme Aliénor avec Saladin, qui ne régna que vingt
ans [dus tard (ces contes se retrouvent, fort amplifiés,
dans un roman en prose du xvc siècle, Jean d'Avesnes,
qui pour cette partie repose sur un poème du xiv°;
seulement le roi dont la femme veut se faire enlever par
Saladin est Philippe II).
88. La troisième croisade nous a laissé une œuvre
considérable, qui est (sauf quelques oeuvres anglo-nor-
mandes) le plus ancien écrit historique en français sur
des faits contemporains qui soit arrivé jusqu'à nous :
136 LITTÉRATURE NARRATIVE.
c'est Y Histoire de la guerre sainte, en 12 000 vers octosyi-
labiques, par Ambroise, qui paraît avoir été un jongleur
plutôt qu'un combattant, et qui, né dans une des pos-
sessions continentales des rois d'Angleterre , était
attaché à Richard Cœur de Lion et raconte les événe-
ments en se plaçant toujours à son point de vue. Le
poème d'Ambroise ne témoigne pas d'un véritable talent
littéraire, mais il offre de grandes qualités de sincérité
et de naïveté et est fort précieux pour l'histoire. Il a été
mis en latin presque aussitôt après sa composition,
avec beaucoup de fidélité, par Richard, prieur de la
Sainte-Trinité à Londres. — Un épisode tout à fait fabu-
leux de cette croisade, la défense d'un défilé contre
toute l'armée sarrasine par Richard avec douze cheva-
liers, fait l'objet d'un poème médiocre de la fin du
xme siècle, le Pas de Saladin. Cet épisode était célèbre
avant le poème et le resta longtemps : on le peignait
sur les murs des salles, et on le représenta par person-
nages (muets) en 1389 à Paris, lors de l'entrée solen-
nelle de Charles VI. — Un grand nombre de récits, qu'il
serait trop long d'énumérer, se rapportent à Saladin, à
sa prouesse, à ses vertus, à ses voyages incognito dans
le pays des chrétiens (imités de ceux que les poèmes
sur la première croisade prêtaient au roi de Jérusalem
Cornumarant), à sa tolérance religieuse, et même à sa
conversion finale au christianisme. — On peut rappeler
ici le poème anglais sur le roi Richard dont il a été
parlé (§ 69) et qui, au moins dans sa plus ancienne
partie, contient un noyau historique.
89. La quatrième croisade a inspiré l'œuvre capitale
de l'historiographie française du moyen âge, la Conquête
de Constantinoplc de Jofroi de Villehardouin, maréchal
de Champagne, né vers 1165 à Villehardouin (Aube),
L HISTOIRE. 137
devenu, après la conquête de l'empire grec, seigneur
de Messinople en Thraee (1207), et mort avant 1213-
Vîllehardouin raconte avec ordre et clarté les grands
événements auxquels il prit une part considérable,
depuis la prédication de la croisade, en ll'J8, jusqu'il la
mort de son patron, le marquis Bonil'ace de Montferrat,
en 1207; son œuvre est brusquement interrompue : la
mort sans doute l'empêcha de la continuer. Il est pro-
bable que le maréchal de Champagne n'écrivait pas lui-
même, et qu'il faut prendre au sens propre (ce qui n'est
pas toujours le cas en ancien français) le mot dicter
dont il se sert à deux reprises en parlant de la compo-
sition de son livre. Le livre de Villehardouin est un des
plus anciens monuments de la prose française origi-
nale; il en ouvre la série aussi dignement que fait la
Chanson de Roland pour la poésie, et il garde encore de
l'âge précédent quelque chose du ton épique : il fait
songer au Roland comme Hérodote rappelle Homère. En
le lisant, on croit entendre une voix mâle et naturelle-
ment bien timbrée, qui, sans le secours de l'art, arrive
à l'effet le plus puissant par sa justesse et sa simplicité
même. On n'y sent rien de factice et de recherché : l'au-
teur s'est proposé de dire avec sincérité, bien qu'avec
une tendance apologétique, ce qu'avait été cette grande
expédition, qu'on avait, et non sans raison, fort diver-
sement jugée; engagé lui-même dans le parti qui avait
fait dévier la croisade de sa vraie route et l'avait dirigée
sur l'empire grec, il n'est pas exempt de prévention et
même de malveillance à l'égard de ceux qui pensèrent
ou agirent autrement, et dans plusieurs circonstances
encore son récit a besoin d'être contrôlé par d'autres ;
mais il n'en est que plus précieux en nous montrant
les sentiments qui animèrent, dans cette merveilleuse
aventure, le plus grand nombre des croisés, et par-
138 LlTTISRATlDRE NARRATIVE.
ticulièrement les chefs, les « hauts hommes ». — Un
heureux hasard nous ;i conservé une autre relation,
également en prose, de la quatrième croisade, dont
l'auteur, un simple chevalier picard, appelé Robert de
Clairi, se place à un tout autre point de vue. Il est par-
tisan, comme Villehardouin, de l'expédition, laite au
profit d'Alexis Auge, qui se termina par l'élection d'Un
empereur latin; mais il critique amèrement en mainte
occurrence la conduite des « hauts hommes », et repré-
sente l'opinion des petits, des « pauvres chevaliers »;
il nous intéresse aussi en nous donnant des détails
curieux et tout à l'ait naïfs sur les merveilles de Cons-
tanlinople. Son style est moins plein et moins nerveux
que celui du maréchal de Champagne, mais il est facile,
vivant, et parfois vraiment pittoresque, et son livre lui
fait honneur. Il l'écrivit sans doute en France, où il
paraît être revenu peu après 1210. — La différence est
grande entre le style -impie et la narration véridique de
Villehardouin et de Clairi et la forme tout, à la fois plus
littéraire et plus banale du livre consacré par Henri de
Valenciennes à la gloire de l'empereur Henri (1206-
1218), successeur de Baudouin de Flandre. Nous ne
l'avons que dans «ne rédaction en prose, abrégée el en
outre incomplète, mais il a d'abord été écrit dans la
forme des chansons de geste, dont il a conservé l'allure
et plusieurs des lieux communs habituels.
89 bis. La cinquième croisade (1219-1221), rpii fut
dirigée sur lÉgypte. et. après un beau début et la prise
de Damiette, aboutit, surtout par la faute du légat
Pelage, et malgré les efforts du roi de Jérusalem Jean
de Brienne, à un affreux désastre, lut l'objet de récits
en langue vulgaire, dont le plus ancien et le plus pré-
cieux, qui s'arrête d'ailleurs à la prise de Damiette, ne
l'histoire. 130
nous c^i conservé que dans une version provençale
malheureusement très incomplète du début. - Les évé-
nements d'Egypte firenl en France une grande impres-
sion, et provoquèrent surtout contre la cour do !i' me
une indignation dont la Complainte de Jérusalem, par
Huon de Saint Quentin (§ 134), nous a conservé l'<"
sion aussi injuste qne violente; on trouve à la fois pins
de modération et de sincère enthousiasme dans de
beaux vers du Betant de Dieu (§ l!i4) consacrés à ce dou-
loureux sujet.
89 ter, La sixième croisade, celle de Frédéric II
(1228-1229), n'a pas servi de texte à des récits histori-
ques français en ce qui touche les étranges rapports
de l'empereur avec les musulmans: mais les luttes
dont elle fut le début, et qui se prolongèrent pendant
longtemps entre les barons de Syrie et de Chypre et
les partisans de Frédéric ont fourni le sujet d'une
partie, malheureusement seule conservée, des Mémoires
de Philippe de Novare (mort vers 1265), chevalier lom-
bard venu tout jeune en Orient, attaché par des
liens intimes à la famille d'Ibelin, et qui a raconté,
en fiançais, la lutte de ses patrons contre les Impériaux
avec une vivacité d'allure et un charme tout personnel
qui assignent à son récit une place à part parmi les
documents historiques du moyen âge. Ce fragment a
été inséré au xiv° siècle dans une compilation à laquelle
on a donné le nom de Geste des Chiprois, et où il est suivi
du livre, postérieur de près de trois quarts de siècle,
de Gérard de Montréal (§ 91).
89 quater. Entre la croisade de Frédéric et celle de
saint Louis, qu'on désigne généralement comme la
septième, il faut faire une place à celle que dirigea
140 LITTERATURE NARRATIVE.
Tibaud de Champagne, roi de Navarre (§ 128). Elle eut
encore une triste issue : toute une division, par la folle
témérité de ceux qui la conduisaient, fut taillée en
pièces près de Gaza (13 novembre 1239), et la plupart
des chefs furent emmenés captifs au Caire, d'où ils ne
furent délivrés qu'assez longtemps après; les autres
croisés ne firent rien. Un Champenois anonyme nous a
laissé de cette expédition manquée un récit fidèle et
animé, dans lequel il a eu l'heureuse idée d'intercaler
deux chansons, lune envoyée par Philippe de Nanteuil
(§ 124), prisonnier au Caire, à ses compagnons, l'autre
exprimant les sentiments des « povres vavasseurs »
croisés sur l'inaction des barons en Syrie.
90. La septième croisade, celle de saint Louis (dont
le début a fourni la matière d'une intéressante lettre de
Jean Sarrazin, laquelle est continuée par un récit ano-
nyme qui va jusqu'en 1261), forme au moins une des
parties intégrantes du livre de Jean, seigneur de Join-
ville, sénéchal de Champagne (né en 1224, mort le
11 juillet 1317), livre qui tient de la biographie (ou si
l'on veut de l'hagiographie) et des mémoires person-
nels. Joinville eut toujours le goût d'écrire (on possède
deux spécimens de son écriture), rare assurément chez
les grands seigneurs comme lui à son époque : nous
avons une longue épitaphe de son grand-père, refaite
par lui; en 1250, à vingt-six ans, il occupait les loisirs
de son séjour à Acre en composant un manuel de la
foi chrétienne (le Credo de Joinville), qu'il retouchait
trente-sept ans après; à quatre-vingt-onze ans il écrivait
encore au roi Louis X une lettre qui s'est conservée.
Il est certain que pendant la croisade où il accompagna
Louis IX (1248-1254) il prenait des noies et fixait ses
souvenirs. A l'âge de quatre-vingts ans environ, à la
I. HISTOIRE. i il
prière de Jeanne de Champagne, femme de Philippe
le Bel, il entreprit un livre « dos saintes paroles et des
lions faits o de saint Louis; il ne l'acheva qu'après la
mort de Jeanne, et l'offrit en 1309 à son (ils Louis (plus
tard Louis X . Le bon sénéchal, reprenant ses anciennes
tablettes, a mêlé à des anecdotes sur le saint roi dont il
avait été l'ami (et pour la canonisation duquel, en 1 2s2,
on avait déjà l'ait appel à sa mémoire) des souvenirs
tout personnels qui souvent sont fort peu à leur place
dans un livre de ce genre; il Ta complété assez pénible-
ment à la fin en y insérant textuellement, avec des
extraits des chroniques françaises de Saint-Denis (S 94),
une longue ordonnance du roi et les Enseignements de
sain! Louis à son fils. Toute la fin du livre porte, ainsi
que le début, des traces de sénilité, et on remarque de
l'une de ces parties à l'autre de nombreuses et inutiles
redites: rien n'est plus vif, au contraire, et ne reflète
mieux l'impression toute fraîche des événements que la
partie qui se rapporte à la croisade, d'où il ressort bien
que l'ouvrage est un assemblage de morceaux composés
en différents temps. — Joinville nous offre le type
excellent du chevalier du xme siècle dans ce qu'il avait
de meilleur, et aussi de plus incomplet : il est brave,
loyal, pieux, candide, dévoué à son roi tout en défen-
dant strictement contre lui ses droits féodaux, protec-
teur attentif de ses vassaux, gardien jaloux de toutes
les traditions (un Italien qui visitait la France au com-
mencement du xive siècle le vit à la cour du roi jouant
le rôle d'arbitre dans toutes les questions d'usage et de
courtoisie) ; mais d'autre part son intelligence s'arrête
généralement au détail et ne sait pas embrasser les
causes générales : il raconte des opérations militaires
fort mal conduites sans les critiquer et sans paraître
mè nie bien les comprendre (on a opposé à sa confuse
142 LITTERATURE NARRATIVE.
description de la bataille de la Mansoure le récit si
clair du continuateur de Jean Sarrazin, § 98); mais il faut
remarquer que Joinville se borne à raconter ce qu'il a
vu et ce qu'il a fait lui-même, et. si son récit est parfois
obscur, aurtoul grâce au peu de précision de certaines
données, notamment topographiques, il est en revanche
d'une couleur et d'une vérité de détail incomparables;
il approuve en saint Louis des traits peu louables d'in-
tolérance; il tombe dans de singulières puérilités de
récit; bref, il a le cœur d'un enfant et l'esprit d'un
enfant. On doit cependant remarquer qu'il vit la
déraison de la deuxième croisade de Louis IX et refusa
d'y prendre part, et lui savoir grand gré des observa-
tions qu'il nous a conservées sur l'Egypte et ses habi-
tants. Son Btyle est bien à son image : il est abondanl.
naïf, souvent expressif et toujours pittoresque: il coule
de source, mais il n'a ni l'élégance de celui des bons
prosateurs du moyen âge. ni la vigueur et la solidité de
celui de Villebardouin : c'est le ton d'un causeur aimable
et familier, qui parfois s'égare un peu dans ses souve-
nir--, mais qui nous charme toujours, d'autant plus qu'il
l'ait revivre sous leur meilleur aspect et dans toute leur
intimité l'entourage d'un roi excellent et la figure, si
douce et si ferme en même temps, si noble et si sym-
pathique, de ce roi lui-même. — L'œuvre de Joinville
ne nous est malheureusement arrivée que dans des
manuscrits postérieurs où la langue a été rajeunie, et
où le texte même a souffert d'assez sérieux dommages;
mais par leur étude méthodique et par la comparaison
des chartes authentiques émanées de la chancellerie
de Joinville, la critique est arrivée à restituer avec
une sécurité presque complète et le fond et la forme
de son livre, un îles plus précieux à tous égards
que le moyen âge nous ait laissés. — Des fables
L HISTOIRE. 143
à la l'ois extravagantes el banales sur la septième croi-
sade, el notamment sur les prétendues aventures de
Jean Tristan, fils do Baint Louis, remplissent une partie
du roman de Baudouin de Flandres, abrégé ('ait en prose
au XV0 siècle d'un roman du xiv° en alexandrins rimes.
'.H. Les ouvrages mentionnés jusqu'à présent ont été
écrits par des croisés; les Français établis en Orient
s'attachèrent aussi de lionne heure à retracer l'histoire
de leur difficile existence. Guillaume de Tyr (f 1 184)
avait écrit en latin une Histoire de la terre d'outre mer, qui
l'ut traduite en français, dès le commencement du
XIIIe siècle, par un clerc de la lirie; divers écrits, d'abord
isolés, lurent annexés ensuite à cette version, et for-
mèrent une grande compilation, dont les éléments
varient. Le plus important de ces écrits est dû à Ernoul,
écuyer de Balian d'Ibelin, l'un des plus grands seigneurs
du pays : il raconte la ruine du royaume de Jérusalem
el la prise de la ville sainte (1189). L'une des premières
'formes de la compilation, qui va de 1180 à 1228, est
attribuée plus ou moins légitimement à Bernard, tré-
sorier de l'abbaye de Corpie. D'autres vont plus loin.
— La Syrie et la Palestine une fois évacuées pour tou-
jours, la dominai ion française subsista quelque temps
à Chypre, et ce fut là que Girard de Moniéal, au
commencement du xive siècle, raconta les événements
qui avaient amené le désastre. — Il faut mentionner ici
quelques récits de pèlerinages écrits en prose française
au miic siècle, et la Description de Jérusalem, précieux
morceau, antérieur, dans sa première rédaction, à la
perte de la ville sainte (1187). — La Grèce, conquise
après 1204, fut longtemps un centre de culture française;
la Chronique de Morde (1325) nous en conserve le brillant
tableau. — L'Arménie, bien qu'elle ait eu des rois français,
144 LITTÉRATURE NARRATIVE.
ne fut pas francisée. Si le prince arménien Haiton dicta
en français sa Fleur des histoires d'Orient (1307), c'est qu'il
l'avait appris en Chypre ou en France. Il y donne son avis
sur les moyens propres à reconquérir la Terre Sainte;
c'était une idée qui préoccupait alors plusieurs princes,
notamment Charles de Valois, devenu l'héritier titulaire
de l'empire latin de Constantinople. — A cette littéra-
ture se rattachent encore les curieux Itinéraires en Terre
Sainte, guides destinés aux pèlerins, dont plusieurs
sont originalement français, et aussi des traductions,
comme celle de l'Allemand Burchard et de l'Italien
Odorico de Pordenone, dans la première moitié du
xivc siècle, par le fécond traducteur Jean de Vignai,
religieux hospitalier de l'ordre de saint Jacques du
Haut-Pas. — Joignons à ces livres consacrés aux choses
orientales, bien qu'il soit d'un caractère différent, celui
du Vénitien Marc Pol (f 1323), qui avait, comme on sait,
pénétré jusqu'au cœur de la Tartarie et de la Chine, et
qui dicta une relation de ses voyages, en 1299. à Rusti-
cien de Pise (voir § 64); une autre, en meilleur français,
fut recueillie en 1307 par un chevalier français qui la
rapporta à Charles de Valois, curieux de toutes les
choses d'Orient. — Plus anciennement (vers 1170),
l'Anglo-Normand Roau d'Arundel avait mis en vers la
fameuse lettre du « Prêtre Jean » à l'empereur grec
Manuel, où il décrivait son fabuleux pays, censé situé
à l'est des régions musulmanes, et la splendeur de la
théocratie chrétienne qu'il y exerçait. Plus tard on tra-
duisit en prose, à deux reprises, ce singulier apocryphe,
qui excita longtemps l'imagination et les vaines espé-
rances des chrétiens.
92. Une fois née, l'historiographie en langue vulgaire
ne devait pas se borner aux croisades, qui lui avaient
l'histoire. 145
donné naissance. Ce fut dans les domaines des ducs de
Normandie, devenus roi d'Angleterre, qu'elle se dr\<-
loppa toul d'abord : par la conquête, et à cause de l'exis-
tence parallèle d'une langue regardée comme inférieure,
le français prit de bonne heure dans le nouveau royaume
un rang qu'il n'avait pas en France même : on l'employa
pour des ouvrages sérieux; les seigneurs et notamment
tes dames de l'aristocratie anglo-normande avaient
d'ailleurs pour ce genre d'ouvrages et surtout pour
l'histoire un goût tout particulier. Il n'est guère dou-
teux que dès le commencement du xne siècle il n'existât,
en Angleterre, des œuvres historiques composées en
français, probablement en vers, comme toutes celles qui
suivirent pendant longtemps. Nous savons qu'Aélis de
Louvain, veuve de Henri Ier en 1135, avait l'ait composer
sur la vie de son mari, par un certain David, un poème,
malheureusement perdu, qui avait la forme des chan-
sons de geste et se chantait également. — L'auteur
qui nous donne ce renseignement, et qui dit d'ailleurs
avoir consulté d'autres livres en roman, Geffrei Gaimar,
écrivit entre 1147 et 1151 son Histoire des Anglais pour
dame Constance, femme de Robert Fiz-Gislebert. Là se
montre bien la rapidité avec laquelle les conquérants
français s'étaient assimilés à leur nouvelle patrie, et
l'esprit large dans lequel ils en comprenaient l'histoire :
Gaimar racontait en vers français octosyllabiques toute
l'histoire de l'île, commençant par l'expédition des
Argonautes, prélude de la guerre de Troie (voir § 45),
qui avait été cause de l'arrivée du Troyen Brutus en
Bretagne, traduisant ensuite le livre de Gaufrei de
Monmouth, puis faisant l'histoire des Anglo-Saxons,
passant malheureusement très vite sur les événements
survenus depuis la conquête normande, et s'arrètant à
la mort de Guillaume le Roux. 11 annonce en terminant
10
146 LITTERATURE NARRATIVE.
l'intention d'écrire à son tour une vie de Henri Ier; mais,
soit qu'il n'ait pas exécuté ce dessein, soit que l'ou-
vrage se soit perdu, nous ne l'avons pas. La première
partie de son long poème ne nous est pas non plus
arrivée (voir § 54). Ce qui en reste, comprenant quelques
milliers de vers, est à peu près dénué de valeur litté-
raire, mais n'est pas sans quelque prix pour l'historien;
si nous avions toutefois un ouvrage de lui sur les faits
dont il fut le contemporain, il serait bien autrement
intéressant.
93. Peu de temps après Gaimar, Wace, né à Jersey
vers 1100, écolier à Paris, clerc de Caen, puis chanoine
de Bayeux, mort vers 1175, écrivait ses deux grands
poèmes historiques, en 1155 la Geste des Bretons ou Brut
(voir § 54), traduction de Gaufrei de Monmouth, et de
1160 à H 74 la Geste des Normands ou Roman de Rou : ici
encore la partie qui aurait eu le plus d'intérêt n'a pas
été écrite. Wace s'arrête en 1107, à la bataille de Tin-
chebrai; il devait continuer jusqu'à son temps, mais,
vieux et fatigué, il fut découragé par la nouvelle que
Henri II, qui lui avait confié le soin d'écrire l'histoire
des ducs de Normandie, venait d'en charger aussi
Benoit de Sainte-More. La Geste des Normands se compose
de deux parties, l'une de 4 000 vers alexandrins groupés
en laisses monorimes (comprenant un prologue, séparé
à tort du reste sous le nom de Chronique ascendante),
l'autre de 12 000 vers octosyllabiques rimant deux par
deux. Wace traduit, en les abrégeant, des historiens
latins que nous possédons; mais çà et là il ajoute soit
des contes populaires (par exemple sur Richard Ier, sur
Robert Ier), soit des particularités qu'il savait par tra-
dition (sur ce même Robert le Magnifique, sur l'expédi-
tion de Guillaume, etc.) et qui donnent à son œuvre un
L HISTOIRE. H7
réel intérêt historique. Sa langue est excellente; son
style clair, serré, simple, d'ordinaire assez monotone,
nous plaît par sa saveur archaïque et quelquefois
par une certaine grâce et une certaine malice. — Son
concurrent, Benoît de Sainte-More, que son roman
de Troie, dédié à la reine Aliénor (§ 45), avait recom-
mandé à Henri II, lequel se piquait de bien s'entendre
en beau langage, n'a pas plus que lui achevé son
œuvre, interrompue probablement par les dissen-
sions et les guerres qui troublèrent la fin du règne de
Henri II. Il annonce à plusieurs reprises que la peinture
de ce règne est son objet principal, mais dans ses
43 000 petits vers il n'arrive que jusqu'à la mort du roi
Henri Ier, en sorte qu'il semble qu'une fatalité nous ait
juives de ce qu'ont écrit ou auraient dû écrire tous ces
anciens historiens sur l'époque dont ils étaient contem-
porains. Benoît a les mêmes sources que Wace, et il y
joint Wace lui-même ; mais il n'y fait pas, comme
celui-ci, d'additions intéressantes : il se borne à des
amplifications sur certains points, abrégeant, d'ailleurs,
ses originaux en tout ce qui ne se prête pas aux déve-
loppements qu'il affectionne, et qui. sont dans le même
goût que ceux de son roman antérieur. Son style est
plus travaillé et moins simple que celui de Wace; il a
aussi un caractère plus moderne : il arrive à produire
plus d'effet, mais il n'a pas la fine bonhomie qui égaie
souvent les vers du chanoine de Bayeux, et il manque
parfois de la clarté qui ne fait jamais défaut à celui-ci.
— L'histoire locale de la Normandie est représentée par
la chronique en vers du Mont-Saint-Michel, de Guil-
laume de Saint-Pair (vers 1170), ouvrage plus édifiant
qu'historique, dont l'auteur, dans sa simplicité, ne
manque pas de mérite littéraire, et par une Histoire de
l'abbaye de Fécamp, encore inédite, mise en vers au
148 LITTÉRATURE NARRATIVE.
xinc siècle d'après un texte latin aujourd'hui presque
entièrement perdu. — Le meurtre de Thomas Becket,
en 1170, donna lieu à toute une littérature qu'on peut
appeler historique, mais dont nous parlons à propos de
la littérature religieuse § 145 . — Nous possédons un
poème assez orignal de style, en laisses monorimes,
composé par un clerc anglo-normand, ancien écolier de
l'université de Paris, Jourdain Fantosmc, sur la guerre
soutenue par Henri II contre le roi d'Ecosse en 1173-
1174; c'est enfin un document d'histoire contemporaine,
et qui nous apporte des renseignements intéressants et
vivants sur plus d'un point. — Le poème sur la complète
i\c l'Irlande par le même Henri II. composé sans doute
peu de temps après à l'aide des récits de Morice Rcgan,
interprète du roi irlandais Dermod, a de l'importance
pour l'histoire, mais il est écrit avec une obscurité qui
le rend difficile à comprendre, etle seul manuscrit qu'on1
en possède est, en outre, non seulement défectueux,
mais fort mauvais. — L'historiographie en vers des
pays anglo-normands se termine par le plus remar-
quable de ses monuments, la Vie de Guillaume le Maréchal,
comte de Pembroke, régent d'Angleterre pendant la
minorité de Henri III, composée peu après sa mort
(1219) par un poète qui était natif de quelqu'une des
provinces continentales soumises aux rois d'Angleterre,
et qui, très bien informé par la famille et les amis
intimes de Guillaume des événements dont il voulait
conserver le souvenir, les a racontés avec un talent
supérieur à celui de la plupart de ses contemporains.
Son style souple, aisé, exempt des chevilles qui déparent
tant de vers de cette époque, prend à l'occasion une
vigueur et une animation peu communes. Soit qu'il
peigne des caractères, comme celui du « jeune roi »
Henri ou de son frère Richard, soit qu'il rapporte des
LDISTOIHE. 140
entretiens, soit qu'il conte d'amusantes anecdotes, il
sait toujours prendre le ton qui convient au sujet et
choisir les détails vraiment caractéristiques. Son poème,
(jui vient d'être publié, est assurément un des docu-
ments les plus importants qui nous soient parvenus
min seulement sur l'histoire, mais sur les mœurs,
les habitudes, la vie sociale, les façons de penser, de
sentir et de dire du xue et du xui° siècle. — A partir du
2011e siècle, sauf quelques compilations en prose, et un
petit poème d'un caractère héraldique sur une expédi-
tion d'Edouard I" en Ecosse (1303), l'histoire cesse, en
Angleterre, de s'écrire en français. Pierre de Langtoft,
au commencement du xivc siècle, avec sa longue cli io-
nique rimée, intéressante malgré sa langue barbare, esï
une exception isolée : on n'a plus que quelques chro-
niques en prose, généralement jointes à une traduction
du Brut; quand, au xiv° siècle, les rois, dont le français
est toujours la langue de prédilection, voudront avoir
des historiographes, ils feront venir du continent les
Froissart et les Jean de Wavrin.
94. Dans la France propre, le besoin de traductions
en langue vulgaire d'ouvrages historiques latins pré-
céda celui de la véritable histoire contemporaine. On ne
S'attaqua pas d'abord aux meilleurs originaux : sans
parler du livre de Gaufrei de Monmouth, dont nous
avons indiqué les diverses traductions en vers, ce fut
la prétendue chronique de Turpin que l'on paraît avoir
le plus anciennement mise en français; nous en possé-
dons cinq traductions, dont quatre remontent à la tin
du xii(: ou au commencement du xur3 siècle; la plus
ancienne a été faite par Nicolas de Senlis pour Ioland,
comtesse de Saint-Pol, sœur de Baudouin V de Hainau,
qui lui avait légué un manuscrit du texte latin avant
150 LITTÉRATURE NARRATIVE.
1198. Les prologues de deux de ces versions insistent
sur ce fait, alors nouveau, qu'elles sont en prose et ont
rejeté la rime, « parce que la rime amène l'addition de
mots qui ne sont pa§ dans le latin », et que, regardant
la chronique comme de l'histoire la plus authentique,
on tient à la reproduire fidèlement. Villehardouin, Clairi,
les romans en prose de la Table Ronde, ont suivi de près
les traductions de Turpin et leur ont peut-être dû leur
existence ou au moins leur forme. — La traduction de
Nicolas de Senlis a été étrangement interpolée, vers
1230, par un Saintongeais, lequel a en outre composé,
avec la chronique latine intitulée Gcsta Francorum (éga-
lement interpolée par lui), la plus ancienne chronique
de France en français que nous ayons; malheureusement
elle s'arrête à la deuxième race. — Dès le xne siècle on
avait réuni à Saint-Denis en un corps d'histoire, sous
le nom d'Historia regum Francorum, diverses chroniques
latines embrassant tous les siècles passés et que l'on
continuait au fur et à mesure; vers 1260 un auteur qui
s'intitule ménestrel du comte de Poitiers (Alphonse, frère
de saint Louis) traduisit cette compilation. — Sous une
forme plus ample, elle fut traduite de nouveau du temps
de Philippe III (c'est le roman auquel Joinville a fait des
emprunts; voir § 90), et cette version devint la base des
Chroniques françaises de Saint-Denis, qui ne prennent une
véritable valeur qu'à l'époque, sensiblement postérieure,
où elles furent rédigées dès l'abord en français et non
traduites du latin. — Il faut mentionner à part la tra-
duction, par Jean de Yignai, du moine de Saint-Denis
Primat, sur les règnes de Louis IX et de Philippe III,
parce qu'elle nous remplace seule l'original latin perdu.
— Vers 1227 YHistoire de Philippe 11 de Guillaume le
Breton fut mise en prose française par un anonyme
dont nous n'avons conservé que le prologue versifié;
L'niSTOIRE. 151
elle le fut plus tard par Jean de Prunai. — On doit pro-
bablement attribuer à an môme auteur, qui était Artésien,
peut-être un ménestrel et certainement attacbé à la
famille de Béthune, deux ouvrages bistoriques fort inté-
ressants qui ont entre eux les plus grands rapports. Le
premier, intitulé Des rois d'Angleterre, contient, après un
sec abrégé de la chronique latine de Guillaume de
Jumièges et une brève esquisse du règne de Richard
Cœur de Lion, un récit détaillé, et dû évidemment à
un témoin oculaire, des luttes du roi Jean contre ses
barons et surtout de l'expédition de Louis de France en
Angleterre, à laquelle avait pris part Robert de Béthune.
Le second, resté malheureusement inachevé, est une chro-
nique de France, faite également du point de vue d'un
Artésien et surtout de la maison de Béthune. Elle com-
prend d'abord un extrait de la compilation historique
appelée Historia regum Francorum, puis un récit extrême-
ment précieux, d'un style assez agréable et d'un ton
souvent populaire, du règne de Philippe IL Le premier
de ces ouvrages a été terminé vers 1220. le second parait
avoir été composé vers 1225. Ils nous présentent le plus
ancien spécimen, en dehors des récits relatifs aux croi-
sades, d'histoire contemporaine écrite en prose française,
et nous montrent une nouvelle face de l'activité litté-
raire qui régnait alors dans le nord-est de la France et
particulièrement dans l'Artois. — La Normandie avait
aussi ses chroniques en prose, qui remontaient en
grande partie soit à des textes latins, soit aux anciens
poèmes dont nous avons parlé. Tous ces textes, sauf les
deux ouvrages de l'anonyme de Béthune, n'ont qu'une
très faible valeur littéraire.
95. Les laïques prenaient de l'intérêt, non seulement
pour l'histoire de France, mais pour l'histoire univer-
152 LITTÉRATURE NARRATIVE.
selle. Baudouin VI. comte de Flandreet de Hainau, qui
devait être empereur de Constantinople et disparaître à
la bataille d'Andrinople (1205), le fils de ce Baudouin V
qui possédait un manuscrit de Turpin (§ 94), fit, nous
dit un auteur du \ive siècle, recueillir sous fine forme
abrégée toutes les histoires depuis la création du monde
jusqu'à son temps, spécialement celles qui touchaient
son pays et sa famille, et les fit rédiger en langue fran-
çaise; on les appela d'après lui les Histoires de Baudouin.
Ce grand recueil paraît avoir été continué par Baudouin
d'Avesnes, petit-fils de Baudouin VI (f 1289), ou du
inoins dans une compilation dont ce seigneur possédait
]e manuscrit: la critique a encore beaucoup à s'exercer
sur ce sujet pour discerner les éléments divers des
vastes compilations qui nous sont arrivées sous le nom
de Baudouin d'Avesnes. — L'Histoire des Empereurs
romains, sèchement rimée par le Lorrain Calendre (1213)
d'après un abrégé d'Orose, mérite à peine une mention.
— Vers 1225, sous les auspices du châtelain de Lille
Boger, un clerc entreprit de mettre en prose française,
dans le Livre des Histoires, des récits historiques puisés
aux sources les plus diverses, depuis la création du
monde jusqu'à son temps. Son ouvrage, qui eut d'ail-
leurs beaucoup de succès ef fut traduit en italien, n'a
pas été terminé et s'arrête au temps de César. — Dans
beaucoup de manuscrits, on l'a réuni à un autre ouvrage
écrit vers la même époque à Paris, et qui, sous le nom
de Faits des Romains, devait contenir une histoire des
douzepremiers empereurs romains empruntéeà Salluste,
César, Lucain et Suétone. Ce remarquable travail, dont
l'auteur ne s'est pas borné à une traduction adroitement
abrégée, mais où il a introduit, notamment sur les
Gaules, des renseignements parfois vraiment intéres-
sants, n'a pas été non plus terminé; il s'arrête à la mort
L HISTOIRE. 153
de Jules César. Très souvent copié, traduit en italien,
il a fourni des chapitres entiers, entre autres, à la com-
pilation de Brunet Latin § 101). — Une traduction assez
ûdèle d'Eutrope, faite par Jofroi de Waterford g 104),
aurait pu servir d'introduction à ces deux ouvrages,
auxquels elle esl sans doute un peu postérieure. — Le
même Jofroi traduisit le moins authentique Darès
§ in, qui fut mis aussi en prose, au milieu duxirr siècle,
par Jean de Flixicourt. — Nous retrouvons en français
quelques essais d'histoire universelle, généralement
postérieurs et moins intéressants (comme l'abrégé qui
est inséré dans Renard le Contrefait: voir § 84). Il faut
signaler une chronique universelle rédigée pour Philippe
de Valois, une première fois avant, une deuxième fois
après son avènement au trône. — Enfin Jean de Vignai
cf. >i 102), vers 1330, avait le courage démettre en fran-
çais le vaste Miroir Historial de Vincent de Beauvais. Il
traduisit aussi les Otia imperialia de l'Anglais Gervais
de Tilbury, curieux recueil d'anecdotes de tout genre
empruntées à la cosmographie, à l'histoire naturelle et
à l'histoire (il avait déjà été traduit à Acre, avant 1287,
par Jean de Harenc ou d'Antioche).
96. Mais le plus souvent on s'est borné à essayer
d'écrire une histoire générale de France. Il faut surtout
signaler la chronique rimée de Philippe Mousket, de
Tournai, qui va de la prise de Troie, préface obligée, au
moyen âge, de toute histoire nationale, à 1242. Ce long
ouvrage (plus de 31 000 vers) n'a aucun mérite poétique,
mais il a une véritable valeur historique pour les temps
contemporains de Fauteur, et un grand intérêt littéraire
pour lépoque carolingienne, parce que Mousket a mêlé
à ses emprunts aux chroniques latines de très nom-
breuses analyses de chansons de geste, qui nous font
154 LITTERATURE NARRATIVE.
connaître souvent des poèmes perdus ou d'importantes
variantes à ceux que nous possédons. — Guillaume
Guiart, d'Orléans, dans sa Branche des royaux liynages
(1306), remonte aussi, mais très brièvement, aux ori-
gines; il raconte surtout, dans ses 21 510 vers, la guerre
de Flandre de Philippe IV, à laquelle il avait pris part
comme sergent d'armes (proprement comme arbalé-
trier). Guiart nous représente dans l'histoire un esprit
nouveau, l'esprit bourgeois : il se moque des merveilles
racontées dans les chansons de geste, et prétend ne
rapporter que la vérité. Il s'est donné la peine de
composer son poème entier en rime « léonine », c'est-à-
dire portant sur deux syllabes, ce qui l'a amené à
employer en immense majorité des rimes féminines et
l'a souvent gêné dans son allure. Il écrit d'ailleurs dans
un style très personnel, dont le vocabulaire notamment
est riche en mots rares ; il emploie volontiers des locu-
tions bizarres, souvent triviales et pour nous obscures
Mais ce qu'il voit, il le voit bien et le raconte nettement;
son œuvre a une valeur historique tout à fait mar-
quante.
97. Philippe Mousket et Guiart, le dernier surtout,
bien qu'embrassant toute l'histoire de France, con-
tiennent aussi de l'histoire récente. C'est presque
uniquement à celle-là qu'est consacré l'ouvrage singu-
lier publié sous le nom de Chronique de Reims et de Récits
d'un ménestrel de Reims : il est certain que le ton est bien
celui d'un conteur qui s'adresse à un auditoire ignorant
et curieux. Cette chronique, écrite à Reims en 1260, a
pour point de départ la première croisade; elle s'occupe
d'abord de la Terre Sainte, puis, sans aucun ordre, de
la France, de l'Angleterre, de la Flandre, de Reims, de
Frédéric II, etc. C'est un recueil de traditions semi-
L'HISTOIRE. 155
populaires et de ouï-dire courants, aussi agréable que
fabuleux. Le style vif, dégagé, un peu sautillant, a une
grâce, une naïveté et un charme qu'on ne retrouve au
même degré que dans les parties en prose d'Aucassin et
Nicolette (§ 51). — La chronique de Geoffroi de Paris,
qui va de 1300 à 1316, est consacrée tout spécialement à
l'histoire parisienne de cette période; on y trouve un
mauvais style, mais de l'observation, de l'intelligence, et
on y voit l'opinion de la bourgoisie parisienne; on est
étonné que l'auteur l'ait écrite en vers (8 000), d'ailleurs
généralement fort prosaïques. Au moment même où il
s'arrêtait, un bourgeois anonyme commençait, en prose
celui-là, une Chronique parisienne qui va de 1316 à 1339. —
Le xme siècle et le commencement du xivc ont aussi
produit un certain nombre de petites chroniques en
vers ou en prose, qui n'ont pas grande valeur et ne
demandent pas de mention spéciale. En somme, en
dehors des ouvrages cités, l'historiographie en langue
vulgaire est à peu près stérile jusqu'à Jean le Bel, de
Liège, qui commença sa chronique vers 1350, c'est-à-dire
après l'époque où nous nous arrêtons, et qui fut lui-
même, comme on sait, le précurseur et le modèle de son
compatriote Jean Froissart.
98. Nous avons parlé ci-dessus (§ 90) d'une lettre de
Joinville, et de la lettre de Jean Sarrazin. Il convient
de mentionner un certain nombre de lettres écrites en
français au xm° siècle qui nous sont parvenues. L'usage
général était que les princes et les grands seigneurs
fissent rédiger leurs lettres en latin par leurs clercs ;
quant aux gens de condition inférieure, ils n'écrivaient
ni ne faisaient écrire. Pour une raison ou pour une
autre, nous avons cependant quelques lettres originales
françaises. Plusieurs d'entre elles se réfèrent aux croi-
156 LITTERATURE NARRATIVE.
sades, comme la lettre du chapelain Philippe au comte
Alphonse de Poitiers, qui, à son départ pour l'Orient,
lavait chargé de se- affaires 1 1250 . les lettres des barons
d'Orient au roi de Navarre Tibaud V 1265) ou au roi
d'Angleterre Henri lit ((270-1271 pour exposer leur
triste situation, la lettre de ce même Tibaud sur la
mort de saint Louis à Tunis (1270); on peut y joindre
l'intéressante lettre du templier Ponce d'Aubon au roi
de France sur l'invasion des Mongols en Europe ( !
— Quelques lettres de princesses ou de reines sont
écrites en français et ont une réelle valeur historique :
telles sont celles de Blanche de Champagne, comtesse
de Bretagne (1260), de Marguerite de Provence, reine
de France (1269 el années suivantes), et de sa sœur
AHénor, reine d'Angleterre it270 et années suivantes .
— D'assez nombreuses lettres anglo-normandes sont
conservées dans les archives d'Angleterre.
SECTION II
LITTERATURE DIDACTIQUE
99. Comme l'histoire, comme l'apologue, la littérature
didactique est sortie du monde des clercs pour pénétrer
dans la société laïque. Nous laissons pour le moment
de côté les œuvres d'enseignement religieux, mais elles
sont souvent, comme on le verra, difficiles à distinguer
rigoureusement de certaines autres, la morale ayant
été alors plus qu'en aucun autre temps intimement liée
à la religion. La poésie a servi à l'enseignement long-
temps avant la prose, qu'on n'a appris que plus tard à
manier. Beaucoup de compositions didactiques en vers
ou en prose sont de simples traductions du latin et
n'ont, par conséquent, que peu d'intérêt. Nous exami-
nerons successivement la littérature proprement scienti-
fique, la littérature morale, la littérature satirique, la
littérature purement descriptive et plaisante, et nous ter-
minerons par l'étude du Roman de la Rose, où ces quatre
erenres se trouvent réunis.
CHAPITRE I
LITTERATURE SCIENTIFIQUE
lui). La littérature scientifique débute de fort bonne
heure, par des traductions, dans la Normandie et l'An-
gleterre française : comme pour l'histoire, c'est à des
158 LITTERATURE DIDACTIQUE.
œuvres dépourvues de vérité qu'on se prend d'abord.
Dès le commencement du xne siècle on mit en vers
français le poème de Marbode, évêque de Rennes, sur
les pierres précieuses, où, d'après les superstitions
transmises par les anciens, sont énumérées leurs mer-
veilleuses vertus curatives et talismaniques; le même
ouvrage a été traduit encore plusieurs fois, en vers, au
xmc siècle. A ces Lapidaires est jointe parfois la t mora-
lisation », c'est-à-dire l'interprétation allégorique, dans
un sens religieux, des renseignements donnés sur les
pierres. — Des moralisations de ce genre sont insépa-
rables des Bestiaires, recueils pris à des sources latines,
elles-mêmes de dérivation grecque ou orientale, de
contes sur divers animaux interprétés comme figurant
les enseignements chrétiens; le plus ancien est celui de
Philippe de Thaon, prêtre anglo-normand, dédié à la
reine Aélis de Louvain (§ 9:2); plusieurs autres furent
composés encore, entre autres celui de Guillaume le
Clerc (en 1210 ou 1211) et celui d'un autre Normand,
Gervaise (un peu après). Richard de Fournival (f 1200)
détourna les histoires des bestiaires de leur sens pieux
et les interpréta tout autrement, avec une ingéniosité
subtile, dans son Bestiaire d'amour. — On a encore un
Volucraire, consacré uniquement à trois oiseaux, d'un
certain Osmond. — L'auteur du premier Bestiaire, Phi-
lippe de Thaon, a composé, probablement dès 1119, un
poème en vers de six syllabes rimant deux par deux sur
le Comput ecclésiastique et le calendrier; c'est un sujet
singulier à mettre en vers, mais ce qui est surtout
remarquable, c'est que ce livre, fait uniquement pour
les prêtres, auxquels il est destiné à servir de guide
pour ne pas s'égarer dans le calcul de l'année ecclésias-
tique, soit écrit en français; ce fait jette un jour curieux
sur l'instruction d'une oartie du clergé anglo-normand
LITTÉRATURE SCIENTIFIQUE. 1!',G
fln demi-siècle après la conquête. On a plusieurs autres
traités du Comprit, en prose (dont un d'un moine de
Saint-Riquier appelé Simon de Compiègne) ou en vers.
— Une œuvre plus sérieuse, mais beaucoup plus ré-
cente, est la traduction des Météores d'Aristote par le
Normand Mathieu le Vilain (vers 1290). On a aussi une
traduction anonyme du traité de la Sphère du monde de
Jean de Holywood.
101. Les ouvrages en langue vulgaire sur la science
sont en général dénués de toute valeur et de toute ori-
ginalité : on n'y trouve presque jamais d'observations
directes; on n'y voit que des traductions, souvent fort
défigurées, de livres latins. C'est le cas notamment poul-
ies diverses encyclopédies, méritoires d'ailleurs, dans
lesquelles on a voulu communiquer aux laïques une
partie de la science des clercs : tels sont Y Image du
Monde, de Gautier de Metz (première rédaction en 1240,
deuxième en 1248), dont plusieurs parties, qui contien-
nent des traditions légendaires, offrent de l'intérêt; la
Mappemonde, en vers, d'après Solin (que Simon de Bou-
logne avait traduit dès le xne siècle), par Pierre de
Beauvais (xm° siècle) ; la Lumière des laïques, par l'Anglo-
Normand Pierre de Peckham ; la Petite Philosophie, éga-
lement anglo-normande (d'après Yhnago Mundi d'Hono-
rius d'Autun) ; différents traités sur les Propriétés des
choses, plus ou moins « moralisées », traduits de livres
latins de Vincent de Beauvais, Thomas de Cantimpré,
Barthélemi l'Anglais et autres, etc. Il faut mettre à
part la traduction par le dominicain Jofroi de Watre-
ford (cf. § 95), en collaboration avec Servais Copale, du
Secret des secrets attribué bien à tort à Aristote (nous en
avons d'autres versions en prose et en vers) ; le traduc-
teur a beaucoup interpolé son texte, qu'il dit rédiger
160 LITTERATURE DIDACTIQUE.
d'après l'arabe et le grec, et il y a inséré des renseigne-
ments de première main souvent intéressants. — Le
plus remarquable de ces ouvrages est te Trésor que le
Florentin Urunet Latin, exilé de sa patrie, composa,
vers 12GIJ, en prose française, « parce que le langage
français est plus délectable et plus commun à toutes
gens », non sans qu'on reconnaisse l'étranger à mainte
façon de dire, et où il intercale, au milieu de ses traduc-
tions du latin, quelques réflexions personnelles intéres-
santes, notamment en ce qui concerne la politique et la
littérature. — On peut joindre ici des livres singuliers
dans lesquels un philosophe prétendu, interrogé par un
roi, lui répond sur toutes les choses qu'on peut savoir
et sur beaucoup d'autres : tel est le Livre de Sidrac,
peut-être originairement composé en provençal (à Lyon,
en 1243?), et le Livre de Placides et Timco, qui paraît
remonter à la fin du xiir siècle et qui représente, dans
ses solutions encyclopédiques, un singulier mélange de
puérilité et de hardiesse; cçs rêveries ont probablement
en partie des origines orientales. — Une compilation
plus modeste, d'un caractère populaire et d'une forme
agréable, est celle qu'on désigne sous le nom de Ci nous
dit ixive siècle), parce que chaque paragraphe commence
par cette annonce ; la « moralisation » y domine.
102. Il y a cependant quelques parties de la science
sur lesquelles le moyen âge ne s'est pas borné à répéter
et à compiler. La médecine et la chirurgie ont été l'objet
de plusieurs traductions ou compilations du latin citons
le Régime du corps, qui paraît avoir été écrit en 1250, en
français, par le médecin Alebrand ou Aldcbrand de Flo-
rence ou de Sienne), mais aussi, à la fin du xur siècle
du livre excellent de Henri de Mondeville, original au
moins en partip, et rapportant de nombreux exemples
LITTERATURE SCIENTIFIQUE. 161
tirés de la pratique de ce célèbre chirurgien. La pré-
tendue interprétation des songes, des pronostics, l'énu-
mération des « jours périlleux » ont donné lieu à des
élucubrations en prose et en vers dont la matière ne
remonte pas toujours à l'antiquité, mais qui ne méritent
pas le nom de compositions scientifiques et qui ne font
pas honneur à l'époque qui les a produits. — Les arts,
les métiers, les usages donnèrent lieu à plus d'écrits
originaux, entre tous la chasse, dont le moyen âge ne
pouvait trouver les règles dans les écrits de l'antiquité.
Le petit poème de la Chasse du cerf (xme s.) contient des
observations vraiment pratiques; on en trouve en bien
plus grand nombre dans un gros livre, le Roi Modus et la
Reine Racio (xive s.), dont la seconde partie est une
fiction allégorique ajoutée plus tard et étrangère au
sujet de la première; mais un livre français sur l'élève
et le dressage des oiseaux de chasse, rédigé au
xme siècle, n'est qu'une traduction de l'ouvrage latin de
Frédéric II. — La façon de faire la guerre avait beau dif-
férer absolument de celle des anciens, on s'en aperce-
vait à peine, grâce aux contre-sens constants qu'on fai-
sait en lisant leurs livres. Aussi trouvons-nous, au lieu
de traités fondés sur l'expérience, la traduction en
prose, par Jean de Meun (§ 113), du De re militari de
Végèce, sous le titre de V art de Chevalerie (ce même ouvrage
fut traduit de nouveau, vers 1330, par Jean de Vignai,
qui a aussi traduit le curieux livre écrit en latin par
Théodore Paléologue, marquis de Montferrat de 1305 à
1330, sur l'art de faire la guerre et de gouverner); le plus
singulier, c'est qu'en 1288 Jean Priorat, de Besançon,
mit la prose de Jean de Meun en vers de huit syllabes
pour l'usage d'un grand seigneur, Jean de Chalon, qui
sans doute ne pouvait encore s'habituer à entendre lire
autrement qu'en vers. — Sous une forme historique
11
162 LITTERATUKE DIDACTIQUE.
fictive qui le rattache aux croisades, un petit poème
intéressant duxmc siècle, l'Ordre de chevalerie, nous décrit
les cérémonies de 1' « adoubement » et nous présente
l'image de ce que devait être un parfait chevalier; il en
existe aussi une rédaction en prose. — Un heureux
hasard nous a conservé l'Album annoté d'un grand
architecte au xur siècle, Villard de Honnecourt, infini-
ment précieux pour l'histoire de l'art, et que nous
devons signaler, bien qu'il n'appartienne pas en réalité à
la littérature, non plus que des livres de cuisine ou des
recueils de problèmes d'échecs qui nous sont parvenus
(le livre latin du dominicain italien Jacques de Cessoles,
où le jeu des échecs sert de prétexte à une longue
c moralisation », fut traduit vers 1340 par Jean de Vignai ;
le long poème des Échecs moralises, un peu postérieur,
est une œuvre originale, mais médiocre). — Le droit
féodal et coutumier a donné lieu à des écrits peu
littéraires aussi, mais dont quelques-uns doivent au
moins être mentionnés ici, comme les lois de Guil-
laume le Conquérant, les Assises de Jérusalem rédigées
pour partie vers 1250 à Chypre par Philippe de Novare
(§ 103), l'admirable Coutumier du Beaucaisis de Philippe
de Beaumanoir (voir §§ 51, 68), le texte connu sous le
nom d'Établissements de saint Louis, et qui n'est en
partie qu'une rédaction amplifiée d'une Coutume
d'Anjou, etc. Les nombreuses coutumes, et les chartes
de tout genre, qu'on commence, à partir du second
quart environ du xme siècle, à rédiger souvent en fran-
çais, sortent du cadre de ce livre. Nous devons cepen-
dant mentionner, à cause de son importance exception-
nelle, le plus ancien de ces documents juridiques ou
politiques, la formule conservée par l'historien Nithard,
des serments que les deux fils puinés de Louis Ier et
leurs fidèles échangèrent à Strasbourg en 842. Ce petit
LITTERATURE SCIENTIFIQUE. 463
texte ouvre la série des monuments de la prose fran-
çaise, et il inaugure dignement l'existence officielle
d'une langue qui devait être par excellence la langue
de la politique et de la diplomatie. — Les traductions
de textes de droit romain ont peu d'intérêt : on mit en
bonne prose, au xme siècle, le Code et les Institutes de
Justinien; on traduisit deux fois du provençal une com-
pilation fondée sur la Summa codlcis d'Irnerius et autres
traités, et un Normand, Richard d'Annebaut, eut la sin-
gulière idée, en 1280, de versifier les Institutes; son com-
patriote et contemporain Guillaume Chapu (ainsi appelé
plutôt que Cauph) était un peu mieux inspiré en met-
tant en vers, en 1284, la Coutume de Normandie, traduite
auparavant du latin. Le livre du Conseil de Pierre de
Fontaine, le Livre de Justice et de Plaid, sont également
empruntés en majeure partie au droit romain, mais y
mêlent plus ou moins confusément le droit coutumier
du Vermandois et de l'Orléanais. — Les écoles elles-
mêmes, dont la langue est cependant le latin, commen-
cent, au xnr siècle, à employer l'idiome vulgaire pour
intéresser le grand public à quelques-unes de leurs
querelles (voir ci-dessous §§ 108, 110) ; mais l'enseigne-
ment continue à se donner dans la langue des clercs et
à ne tenir aucun compte de la lingua laicorum. Ce n'est
qu'en Angleterre que nous trouvons des traités en fran-
çais pour apprendre ce qu'on n'apprenait nullement en
France, à savoir le français même. L'un des plus anciens
est celui qu'un chevalier, Gautier de Biblesworth,
composa vers 1300 pour une noble dame, Denise de
Monchensi; il est curieux en ce qu'il nous montre com-
bien la connaissance de la bonne langue française était
alors rare en Angleterre, et aussi par le choix des mots
dont se composent les exercices. D'autres traités,
spécialement sur l'orthographe, furent faits par des
164 LITTÉRATURE DIDACTIQUE.
Anglais. En France nous avons conservé un petit
poème de Huon le Roi, de Cambrai (§ 76) sur la signifi-
cation de l'a 6 c ; c'est une « moralisation » assez
absurde, mais on y trouve des renseignements précieux
sur l'orthographe et la prononciation. — On commenc-
au xme siècle à extraire des grands glossaires où les
mots latins difficiles étaient expliqués en latin des glose
saires latins-français; ces tentatives mal conçues ne
laissent pas d'avoir de l'intérêt pour l'histoire de la
langue et surtout de la langue littéraire et savante qui
se dégage peu à peu. Un rang à part est occupé par les
gloses et glossaires hébraïco-français dus aux juifs, qui
avaient alors en France des communautés nombreuses
et florissantes. Le recueil de gloses du célèbre Raschi
de Troies est surtout précieux par son antiquité (fin du
xie siècle). — En 1282, à Acre, Jean de Harenc ou d'An-
tioche (§ 95) traduisit avec beaucoup de soin la 'Rhéto-
rique de Cicéron, c'est-à-dire le De Inventione et la Rhéto-
rique à Hérennius; déjà Rrunet Latin dans son Trésor
(§ 101) avait traduit une partie du livre I De Inventione,
mais en introduisant des exemples tout nouveaux, tels
que le portrait d'Iseut dans le Tristan en prose, donnô
comme modèle de description.
CHAPITRE II
LITTERATURE MORALE
103. La poésie morale débute aussi par des traduc-
tions du latin, comme celles des Distiques connus au
moyen âge sous le nom de Caton par Élie de Winchester
et Éverard de Kirkham (le premier emploie des vers de
huit syllabes rimant deux à deux, le second des sixains
de vers hexasyllabiques) au xne siècle, par Adam de
Suel au xme, et par d'autres; de la Consolation de philoso-
phie, de Boèce, par l'Anglo-Normand Simon de Fraisne
(xiie s.), par Jean de Meun et autres, soit en prose, soit
en vers, soit, comme l'original, en prose entremêlée de
vers ; de Y Éthique d'Aristote ; des Dits ou Moralités des phi-
losophes, par Alard de Cambrai; du traité de Martin de
Braga, attribué alors à Sénèque, sur les quatre vertus
cardinales (traduction en vers dédiée à Philippe II), etc.
— A la suite de ces traductions se produisent diverses
imitations, qui ne contiennent généralement que les
lieux communs d'une moralité banale, comme le Doctri-
nal Sauvage (du nom de l'auteur), les Enseignements Trebor
(par Robert de Ho, poète anglo-normand), les Droits au
clerc de Vaudoi en Brie (xme siècle), etc. Ces ouvrages
166 LITTLHATURE DIDACTIQUE.
prennent plus d'intérêt quand ils se donnent pour but
principal d'enseigner la courtoisie, les bonnes manières :
on y trouve des renseignements sur les mœurs et les
usages de la société. Tels sont : le Dltié d'Urbain, poème
anglo-normand, attribué, mais sans aucune raison, au
roi d'Angleterre Henri Ier; le Doctrinal de courtoisie; le
Vilainncngouste; le Roman des ailes de prouesse, par Raoul
de Houdan (§ 58), sous forme allégorique; le Chastie-
ment (enseignement) des dames, de Robert de Blois,
inséré plus tard par lui dans son roman de Beaudous
(§ 58) ; l'Ordre de chevalerie, dont il a été parlé ci-dessus
(§ 102), etc. Aux xmc et xive siècles, deux poètes hen-
nuyers, Baudouin et Jean de Condé, père et fils, ont
composé un grand nombre de « dits » moraux, parfois
satiriques, d'un style travaillé (surtout chez le second),
qui sont précieux pour la connaissance de la haute
société, à laquelle ils sont destinés. Du même genre sont
les « dits » du Liégeois Watriquet de Couvin, un peu
postérieur à Jean de Condé. — Le traité en prose des
Quatre Ages de l'homme, par Philippe de Novare, présente
un intérêt tout particulier, en nous donnant le résultat
des expériences et des réflexions d'un homme fort intel-
ligent mêlé toute sa vie aux grandes affaires (§§ 89 ter,
102). — Les proverbes, souvent cités dans toutes les
œuvres littéraires, ont servi de thème à un poème curieux,
les Proverbes au vilain, composé vers 1180 par un pro-
tégé du comte de Flandre Philippe d'Alsace : chaque
strophe, de six vers de dix syllabes, prépare (quelque-
fois fort indirectement) un proverbe qui la termine, et
qui est toujours suivi des mots : ce dit li vilains (c'est
un usage constant au moyen âge d'attribuer les pro-
verbes au vilain, au rusticus dans les textes latins). Le
poème original a été à plusieurs reprises allongé et
remanié au xme siècle. Il a été imité par le comle de
LITTÉRATURE MORALE. 16T
Bretagne (1213-1250), Pierre Mauclerc, dans le petit
poème intitulé les Proverbes au comte de Bretagne, où il y
a d'ailleurs plutôt des sentences que devrais proverbes.
Ces recueils trouvent leur pendant dans la poésie gno-
mique d'origine religieuse. Entre les deux genres on
peut placer les dialogues de Salomon et de Marconi, de
provenance orientale, où un personnage grotesque
oppose à chaque sentence émise par le sage roi une
vérité triviale ou une observation plaisante ou obscène
(on en a diverses rédactions, dont une du même
comte de Bretagne). Rabelais cite encore ces deux types
contradictoires de la sagesse des nations : « Quine s'aven-
ture N'a cheval ni mille, ce dit Salomon. — Qui trop s'aven-
ture Perd cheval et mule, Marcoul lui répond. »
104. A cette classe nous rattachons, bien que la morale
proprement dite en soit souvent plus qu'absente, toute
la série des « Arts d'amour », qui, en enseignant com-
ment on doit s'y prendre pour acquérir et conserver
l'amour, nous donnent en même temps bien des détails
sur les relations des deux sexes entre eux et par consé-
quent sur la vie mondaine. C'est le poème d'Ovide qui
servit de point de départ à toute cette série. Chrétien
de Troies en avait fait une traduction, malheureusement
perdue, et elle ne fut pas la seule; quelques-unes des
imitations que suggéra le poème latin, comme celle de
Jacques d'Amiens (xme siècle) ou la Clef d'amours, s'éloi-
gnent beaucoup de l'original et nous introduisent com-
plètement dans la société du moyen âge. — Le livre
latin d'André le Chapelain, De arte honeste amandi (com-
mencement du xme siècle), qui contient le code le plus
complet de l'amour courtois tel qu'on le voit en action
dans les romans de la Table Ronde, a influé sur plus
d'un de ces ouvrages, et il a été lui-même traduit au
168 LITTERATURE DIDACTIQUE.
xine siècle en prose, et, en vers, par Drouart la Vache. —
Le Conseil d'amour et la Puissance d'Amour, de Richard de
Fournival (§ 100), en prose, continuent des observations
plus personnelles et souvent intéressantes. — Le petit
poème qui a pour titre le Remède d'amour ne se rapporte
pas à celui d'Ovide sur le même sujet, mais exprime une
opposition à la tendance trop libre des Arts d'amour.
— Certains chapitres du code de l'amour sont parfois
exposés sous forme allégorique et narrative, comme
dans les diverses versions (Florence et Blanche/leur, Hueline
et Aiglentine, Melior et Idoine, etc.), du Jugement d'amour
(d'après un poème latin du xie siècle), dans lequel on
donne en amour la préférence aux clercs sur les cheva-
liers (c'est assez dire que l'auteur premier est un clerc),
et le gracieux Fableau du dieu d'amour, en quatrains
monorimes, amplifié dans le poème de Vénus la déesse
d'amour : là est décrit le « Champ Fleuri », jardin ou
t paradis » où règne le dieu d'amour, dont la cour est
composée d'oiseaux : on y trouve un singulier mélange
d'idées chrétiennes et de réminiscences mythologiques.
Le Roman de la Rose, dans sa première partie, est l'épa-
nouissement de toute cette floraison. — Dans le Donoi
des amanz, un poète anglo-normand de la fin du xn° siècle
a inséré, dans l'entretien galant des deux amants qu'il
met en scène, plusieurs préceptes d'amour et d'intéres-
sants « exemples ».
CHAPITRE III
LITTERATURE SATIRIQUE
105. De la morale générale à la satire générale il n'y
a qu'un pas. Ce pas est franchi dans toute une catégorie
de poèmes qu'on peut appeler les États du monde, dans
lesquels on passe en revue toutes les classes de la
société, en signalant leurs vices et leurs défauts et en
les engageant à s'en corriger. Le plus ancien et le plus
intéressant qui nous soit parvenu est le Livre des manières
d'Etienne de Fougères, évêque de Rennes vers 1170,
écrit, dans la forme peu usitée de quatrains octosylla-
biques monorimes, d'un style singulièrement vif et avec
une liberté de langage qui n'excepte rien ni personne de
la censure. Au xne siècle appartient encore un curieux
fragment en sixains décasyllabiques (moins le cinquième
vers qui a quatre syllabes) sur deux rimes, dont on n'a
malheureusement que le début; d'autres compositions
analogues sont du xme siècle; il faut noter celle de
Renaud d'Andon, en quatrains monorimes {le Contenz du
monde), dont la seule copie conservée est malheureuse-
ment incomplète. — On peut y joindre les deux Bibles
de Guiot de Provins et de Hugues de Rerzé (voir § 124,
170 LITTERATURE DIDACTIQUE.
comm. du xmB siècle). Le premier de ces poèmes, dont
le titre signifie qu'ils prétendent ne dire que la vérité,
et qui passent également en revue toute la société con-
temporaine, est de beaucoup le plus long et le plus
important : l'auteur avait vécu dans le monde, où il
paraît avoir été ménestrel, et avait ensuite essayé de
plusieurs ordres religieux avant de se faire bénédictin;
il connaissait bien les deux grandes divisions de la
société contemporaine, et il les peint avec une verve
satirique souvent fort divertissante. Ces poèmes sont
d'ailleurs presque toujours inspirés par l'esprit chrétien
autant que par la morale humaine : c'est ainsi qu'une
satire générale, dont on a diverses formes latines et une
anglo-normande, suppose que le diable a marié ses neuf
filles à neuf ordres ou classes de la société. Nous reje-
tons à la seconde partie ceux où le caractère religieux a
une prédominance marquée. On peut regarder comme
fermant cette série, pour notre période, le roman sati-
rique de Fauvel, œuvre assez lourde de forme, mais
curieuse, du commencement du xiv* siècle. — Une très
amusante facétie en prose, d'un ton tout populaire, la
Riote du monde (on en a une autre version anglo-nor-
mande), fait défiler, sous une pluie de jeux de mots,
tous les ridicules et les travers des hommes, et peut se
joindre à cette série.
106. Aux satires générales joignons celles qui s'atta-
quent à des classes entières, et d'abord la masse consi-
dérable de pièces dirigées contre les femmes, œuvres
d'ordinaire assez banales, souvent grossières et lourde-
ment injurieuses, mais parfois aussi assez piquantes de
forme et de fond, comme V Évangile des femmes, pièce
ancienne mais souvent remaniée et interpolée, où le
poète dans les trois premiers vers de chaque quatrain
LITTERATURE SATIRIQUE. 171
adresse aux femmes de grands éloges, qu'il détruit dans
le quatrième; — le Chastie-musart; — le Dit de Chicheface
(c'est un monstre fabuleux qui ne se nourrit que des
femmes qui obéissent à leurs maris; aussi est-il d'une
maigreur effroyable, tandis que Bigorne, qui mange les
hommes soumis à leurs femmes, est d'un embonpoint
sans pareil); — le Dit des Cornettes (spirituelle raillerie
sur les coiffures en forme de cornes des femmes du
xnr siècle), etc. Une de ces pièces, le Blâme des femmes,
eut un succès extraordinaire, que son mérite ne nous
paraît pas justifier, et suscita plusieurs réponses, dont
la plus remarquable, la Bonté des femmes, est anglo-
normande. — Viennent ensuite les satires dirigées contre
les clercs, leurs vices, leur fainéantise (signalons en ce
genre les mordantes attaques de Rustebeuf, § 127, et de
Huon le Roi, § 76), contre les bourgeois (le Dit du Bour-
jois bourjon raille leur grosse vanité), contre les avocats,
contre les hommes d'argent (la Patenôtre de l'usurier,
Martin Hapart, Dan Denier, etc.), contre les vilains (ces
pièces sont nombreuses et d'ordinaire pleines du mépris
le plus inhumain; l'une d'elles, les Vingt-quatre manières
de vilains, est une très amusante facétie en prose). Dans
une pièce fort curieuse, les jongleurs de vielle, qui chan-
taient les chansons de geste, attaquent vivement les
joueurs de tambourin, qui leur font (au xme siècle) une
redoutable concurrence.
107. Les pièces satiriques d'un caractère général
amènent aux satires personnelles; on en composa de
fort bonne heure; mais les plus anciennes avaient un
caractère lyrique et seront mentionnées ailleurs (§ 120).
Nous en avons quelques-unes du xme siècle, notamment
de Rustebeuf (la Dispute de Chariot et du Barbier Bri-
chemer, etc.).
172 LITTERATURE DIDACTIQUE.
108. Enfin la satire politique ne fut pas inconnue à la
poésie du moyen âge. De bonne heure Anglais et Fran-
çais, qui employaient la même langue, s'attaquèrent par
la plume comme par les armes. Au commencement du
xme siècle, André de Coutances, avant l'annexion qui
devait très rapidement faire des Normands de si bons
Français, nous lançait, dans son Roman des Français en
quatrains monorimes de huit syllabes, de mordantes
railleries, en réponse d'ailleurs à une attaque de notre
part. Les Français, outre qu'ils opposaient (comme
dans la petite et vive Chronique des rois de France, vers
1230) la gloire de nos rois aux tristes exploits des rois
anglais, se moquaient dans des pièces parfois vraiment
comiques, comme la Paix aux Anglais (1264), la Charte
aux Anglais, les Deux Anglais, de leurs voisins d'outre-
Manche et de leur manière d'écorcher notre langue (on
a une risée du même genre contre les Bretons dans le
Privilège aux Bretons, composé pendant la minorité de
saint Louis). Quelques strophes bien tournées (en vers
alternativement latins et français) d'un moine de Silly
(Normandie) contre Edouard Ier, et le Dit de la rébellion
d'Angleterre, au commencement duxive siècle, terminent,
pour notre période, cette guerre de plume. — La cour
de Rome fut dans toute la chrétienté, pour ses envahis-
sements et surtout pour la cupidité qu'on reprochait à
ses représentants, l'objet de virulentes attaques, qui
furent le plus souvent exprimées en vers latins, mais
revêtirent aussi la forme vulgaire. Une accusation qu'on
lui adressait avec une vivacité particulière était de
garder pour elle l'argent qu'elle recueillait pour servir
à la croisade. — Au milieu du xme siècle la poésie en
langue vulgaire prit une part active aux débats de l'uni-
versité de Paris et des Frères mendiants, embrassant
avec chaleur la cause des docteurs séculiers, et bravant
LITTÉRATURE SATIRIQUE. 173
même l'autorité royale pour les défendre et attaquer
leurs adversaires; ce fut surtout Rustebeuf qui se dis-
tingua dans cette polémique, où éclate déjà l'esprit du
pamphlétaire ou du journaliste moderne. — Quelques
petites pièces expriment, pendant le cours du xme siècle,
l'opinion et généralement le mécontentement du public
sur certains actes de la royauté. Signalons le Dit de
Vérité (1295), où se fait jour l'irritation des nobles contre
Philippe le Bel, à cause de la préférence qu'il accordait
dans ses conseils à des gens de petite naissance.
CHAPITRE IV
LITTERATURE PUREMENT DESCRIPTIVE ET PLAISANTE
109. Les vers servaient au moyen âge à toutes sortes
d'usages familiers, auxquels on n'a guère l'idée de les
employer aujourd'hui. Divers petits poèmes, générale-
ment désignés sous le nom de dits., traitent, souvent
avec agrément, des sujets empruntés à la vie quoti.
dienne. Toute une série de petites pièces, qui remontent
à la fin du xmc siècle, nous entretiennent de diverses pro-
fessions, comme celles de forgeron, de boulanger, de
tavernier, de cordonnier, de laboureur; ces pièces
étaient récitées à ceux qu'elles concernaient, et ne man-
quent guère en terminant de faire appel à leur généro-
sité. Un dit fort curieux nous apprend tout ce qu'on
pouvait se procurer au xin° siècle pour une maille, la plus
plus petite des pièces de monnaie; d'autres énumèrent
les choses dont on a besoin dans son ménage; nous
avons encore les dits des rues de Paris, des églises de
Paris, des cris de Paris, du lendit (§ 24), une amusante
facétie sur les enseignes de Paris (le Mariage des quatre
fils Aimon), etc. Le Dit de Cocagne nous représente agréa-
blement ce pays fantastique, déjà rêvé par l'antiquité,
LITTERATURE DESCRIPTIVE ET PLAISANTE. 17b
où les oies se tournent elles-mêmes sur les broches, où
les cochons rôtis se promènent par les rues avec le cou-
teau dans l'épaule pour qu'on en coupe des tranches,
où le vin coule dans les ruisseaux, où la « fontaine de
jouvent » assure une jeunesse toujours renouvelée, où
ceux-là gagnent le plus qui dorment le plus longtemps.
— Nous avons mentionné plus haut les pièces sati-
riques contre les femmes; il en est qui, sans polémiser,
font l'éloge de leurs charmes et de leurs vertus : citons
le Dit des femmes, vraiment gracieux et poétique. Le vin
a fourni matière à plus d'une de ces petites pièces,
comme les Fins de l'année, le Dit du bon Vin (en prose
allilérée), le Martyre de saint Bacchns, par Geoffroi de
Paris (§ 97), spirituelle parodie des légendes de saints,
où l'on raconte tous les tourments que subit la vigne
(on en fit plus tard des imitations, comme le Miracle de
saint Tortu, le Martyre de saint Hareng, la Vie de saint
Oison , etc.). Ces petites compositions, d'une gaieté
généralement innocente, étaient débitées par les jon-
gleurs dans les sociétés bourgeoises concurremment
aux fableaux. Rustebeuf s'amusait à composer, pour le
même but, le Dit de l'herberie, modèle achevé du boniment
extravagant d'un charlatan de foire, partie en prose,
partie en vers. C'est une sorte de monologue, pareil à
ceux que le xve siècle affectionna; celui du Valet à tout
faire, que nous trouvons renouvelé encore au xvie siècle,
paraît bien remonter, sous sa première forme, à l'époque
qui nous occupe. — Nous pouvons encore rapporter ici
des descriptions de tournois, comme celle qu'a faite
Jacques Bretel des Tournois de Chauvenci (128b). Dans son
roman sur le tournoi de Ham (1278), Sarrazin mêle à
ses peintures un élément tout fantastique. Purement
imaginaires, bien entendu, sont les deux Tournoiements
des dames, contés l'un par Huon d'Oisi (§ 127) déjà aux
176 LITTÉRATURE DIDACTIQUE.
environs de 1180, en vers lyriques, l'autre du temps de
saint Louis, en vers octosyllabiques accouplés. Sous
Philippe le Bel, un bourgeois de Paris, Pierre Gentien,
celui-là même peut-être qui périt héroïquement à Mons
en Peule en défendant le roi de France, composa un
Tournoiement des dames de Paris, où il mit en scène de la
même façon les femmes de ses amis et parents. Aucun
de ces auteurs n'a tiré heureusement parti de cette
donnée qui pouvait être piquante.
110. Une forme qu'on choisit souvent, pour ces petits
morceaux d'observation plaisante, fut celle du débat ou
de la dispute : l'usage en remontait à l'antiquité et avait
sans doute été perpétué par les joculatores. C'est géné-
ralement entre des personnifications, qui prennent
tour à tour la parole, que le débat a lieu : on laisse
la décision aux auditeurs, ou on la fait prononcer par
un arbitre. Nous avons ainsi le joli Débat de l'hiver et de
l'été (qui dans ses origines remonte très haut et se rat-
tache aux fêtes des changements de saison), le Débat du
vin et de Veau (qui est resté populaire dans des versions
très remaniées), le Débat du denier et de la brebis (où
chacun d'eux prétend être plus utile que l'autre à
l'humanité), la Dispute des vins blancs (par le spirituel
Henri d'Andeli ; voir § 76). — Aux débats et disputes se
rattachent les batailles, dans lesquelles on feint un
combat entre des personnifications, armées et montées
d'une façon appropriée, genre visiblement imité de la
Psychomachie de Prudence : telles sont (sans parler ici
des œuvres religieuses) la Bataille de Carême et de Char-
nage (c'est-à-dire du temps où l'on peut manger de la
viande, temps qui anciennement ne comprenait ni
l'Avant ni le Carême proprement dit), et surtout la
Bataille des Sept Arts, par Henri d'Andeli (il y met en
LITTERATURE DESCRIPTIVE ET PLAISANTE. 177
action avec beaucoup d'esprit la lutte des études pu ri-
ment littéraires, vers le tiers du xmc siècle, contre
l'envahissement île la dialectique; il est intéressant de
voir un semblable sujet traité en langue vulgaire). —
Le Mariage des Sept Arts peut encore se rattacher à ce
genre; c'est une allégorie assez fade, imitée de Mar-
tianusCapella, donton a deux rédactions qui paraissent
être toutes deux de Jean le Teinturier d'Arras, chan-
sonnier connu. — Ce ne sont pas. des personnifications
qui figurent dans quelques débats, comme celui des
Deux Jongleurs, fort précieux par l'énumération des
talents dont ils se vantent et des poèmes qu'ils disent
savoir par cœur, celui de Chariot le Juif et du Barbier
(également deux jongleurs), par Rustebeuf, et celui du
Croisé et du Non Croisé, par le même, où sont discutées
les raisons de prendre part à la croisade et de s'en
abstenir.
CHAPITRE V
LE ROMAN DE LA ROSE
III. Tous les éléments indiqués dans les précédents
rliapttres se trouvent réunis, comme nous l'avons dit,
dans le Roman de lu Rote. La première partie fut com-
posée vers 1237, par un poète âgé de vingt-cinq ans. qui
avait reçu une instruction assez complète, sans doute
aux écoles d'Orléans, dont il était voisin, et qui étaient
alors le centre de l'étude des classiques latins, Guil-
laume de Lorris. Il mourut sans avoir terminé son
œuvre. — Le poème de Guillaume est un véritable Art
d'Amour, influencé çà et là par Ovide, mais en général
conforme à l'idéal du xmc siècle (différent déjà en plus
d'un point de celui du xn° siècle, que représentent les
romans de la Table Ronde et André le Chapelain). Pour
la forme donnée à cette matière, on peut reconnaître
quatre données principales : le cadre du récit est un
songe, et le poète nous indique dès l'abord, en nous
parlant de Macrobe, que le Songe de Scipion le lui a
fourni; au reste ce cadre commode avait été employé
avant lui au moyen âge, par exemple dans le célèbre
Débat de Vaine et du corps (voir § 155) et dans le Songe
LE ROMAN DE LA ROSE. 179
d'Enfer et le Songe de Paradis (§ 156,; — I;i possession de
la jeune fille aimée est désignée par l'allégorie d'une
rose que l'amant doit cueillir : on trouve déjà cette
allégorie dans un charmant petit poème, le Dit de la
rose, qui a bien pu servir de modèle à Guillaume; — la
scène se passe dans un jardin délicieux, qui est le
paradis d'amour : c'est une idée que nous avons vue
exprimée dans le Dieu d'amour (§ 104); — enfin les acleurs
du drame sont en majeure partie des personnifications :
en cela, comme on l'a vu (§ 110), Guillaume avait plus
d'un prédécesseur, à commencer par Martianus Capella,
Prudence, etc.; il paraît s'être inspiré surtout du Songe
d'enfer et de la Voie de Paradis (§ 156), qui avaient employé
avec grand succès ce moyen de traiter des sujets
moraux; il a connu aussi le Tournoiement d'Antéchrist de
Huon de Méri (§ 155), qui lui-même imitait Raoul : Huon
ayant écrit en 1235, on ne peut faire remonter plus haut
la première partie du Roman de la Rose. Mais en adop-
tant le système des personnifications, Guillaume de
Lorris l'a modifié notablement : dans toutes les œuvres
antérieures, comme dans la Psychomachie, elles sont les
seuls personnages, et l'action qu'on suppose se passer
une fois entre elles n'est que le symbole de leurs rap-
ports constants. Ici au contraire elles ne servent qu'à
amener les péripéties d'un drame tout humain, tout
individuel : elles favorisent ou elles combattent les
efforts de l'Amant pour cueillir la rose, qui sont le vrai
sujet du poème. En outre certaines des personnifica-
tions de Guillaume sont toutes nouvelles : jusqu'à lui
on n'avait personnifié que des qualités générales et
durables; Danger et Bel Accueil sont tout autre chose :
le premier représente le refus, la tendance innée chez
la femme à ne pas céder sans résistance à celui qui la
prie, l'autre, la bonne grâce que la même femme montre
180 LITTÉRATURE DIDACTIQUE.
à d'autres moments; ce sont des manières d'être passa-
gères, des aspects de la personnalité, et, an fond, de
simples procédés d'analyse psychologique. — Tout ce!
art ingénieux et subtil est d'ailleurs faux et dangereux :
il dispense d'observation réelle et de sentiment vrai: on
le voit trop, sinon par Guillaume, au moins par ses
imitateurs, qui. comme toujours, enchérirent sur ses
défauts : en taisant intervenir Amour, Honte et Peur,
Pitié et Franchise, Danger et Bel Accueil, on a cons-
truit, aux xiv" et xv siècles déjà à la fin du xmr. par
exemple dans la Poire, d'un certain TIbaud, la Panthère
d'Amour, de Nicole de Margival, la Cour oVAmûtir et le
Jeti de la Chapette Mnrtinet, de Mahieu le Poriier, etc.),
une masse de pièces insipides, soi-disant consacrées à
l'amour, et qui ne contiennent que de froides combi-
naisons de l'esprit, sans une parcelle de vérité ni de
passion.
112. Le jeune homme, dans sa vingtième année, entre
dans le jardin d'Amour, lieu de délices, entouré de
hautes murailles, sur lesquelles sont peintes par dehors,
comme exclues de ce séjour, toutes les choses laides ou
tristes de la vie. 11 regarde avec plaisir, dans un buisson
de roses, une fleur plus fraîche et plus belle que les
autres, et à ce moment le dieu d'Amour lui perce le
cœur d'une flèche. Pour arriver à cueillir la rose, ce qui
devient dès lors son unique but, il se fait Le vassal
d'Amour et reçoit ses commandements imité d'André
le Chapelain). — En s'approchant de la rose, il ren-
contre Bel Accueil, avec qui il s'enlend fort bien: mais
il à pour ennemis Danger, Maie Bouche (la médisance),
Houle el Peur. Il demande un peu trop vite à appro-
cher la rose de ses lèvres : Danger le (liasse, et il ne
voit plus Bel Accueil. — Raison descend alors de la
u: i ; « » m a \ ni: la rose. i8J
tour où elle habile, et essaye, mais en vain, de le
détourner de suivre sa passion. — 11 s'entretient ensuite
avec Ami. qui le réconforte, puis avec Danger, qui veut
bien lui pardonner, mais d'abord ne s'adoucit nulle-
ment: pourtant Franchise (c'est la générosité, et Pitié
fléchissent Danger, et l'Amant revoit Bel Accueil. —
.Mais bientôt il redevient téméraire; Vénus, en appro-
chant son brandon, décide presque Bel Accueil à céder;
mais .Maie Bouche a prévenu Jalousie, qui accourt, et
envoie Honte et Peur à la rescousse en leur reprochant
leur négligence; celles-ci réveillent Danger, qui s'était
endormi, et qui cette fois devient tout à fait féroce et
chasse l'Amant de nouveau. — Jalousie fait alors cons-
truire une tour pour y enfermer Bel Accueil : elle a
quatre portes, gardées par Danger, Honte, Peur et
Maie Bouche; dans la tour, avec Bel Accueil, est une
vieille qui l'épie sans cesse. L'amant au désespoir
exhale ses plaintes dans un monologue. — C'est au
milieu de ce monologue que Guillaume de Lorris s'est
arrêté. Deux manuscrits donnent en quatre-vingts vers
un dénouement au poème, mais il est sûrement apo-
cryphe. Le roman devait sans doute, dans la pensée de
l'auteur, durer encore assez longtemps : Guillaume nous
dit qu'il voulait le terminer par une explication de tout
ce qui aurait figuré dans le récit, et il nous assure que
« la fin du songe » en était la plus belle partie. Le plan
de Guillaume de Lorris n'a certainement pas été rempli
par son continuateur Jean de Meun, quelque éloge qu'il
fasse de Guillaume par la bouche d'Amour lui-même.
Cet éloge est d'ailleurs mérité : la première partie du
Ixoiima de la Rose est, sauf les critiques qui s'adressent
au genre en lui-même, un des plus agréables ouvrages
du moyen âge. L'auteur, après avoir sagement construit
son plan, l'a exécuté avec discrétion et mesure, et n'a
182 LITTERATURE DIDACTIQUE.
rien admis dans son œuvre qui lui fût étranger : il s'est
proposé de faire ce qu'on peut appeler une épopée psy-
chologique, et tous les traits de son tableau concourent
à l'effet général. Son style est élégant sans être affecté;
quelques-unes de ses pages, notamment dans les des-
criptions, ont été citées depuis longtemps parmi les
meilleurs spécimens de notre ancienne poésie. Écrite
pour les cercles brillants et mondains du temps de la
régence de Blanche de Castille, son œuvre porte tout le
temps le cachet du public auquel elle s'adresse : la
morale en est assurément peu sévère, et on a lieu de
s'étonner, comme à propos de bien d'autres composi-
tions du même genre, que, l'Amant étant épris d'une
jeune fille, l'idée du mariage ne semble pas môme se
présenter à l'esprit de l'auteur. Mais on n'y trouve rien
de grossier, et le poète déclare à plusieurs reprises
qu'en célébrant l'amour il n'entend parler que de l'amour
sincère et profond, et qu'il condamne, avec le dieu
d'Amour, ces « faux amants » qui n'aiment pas de cœur
et qui cherchent à abuser celles auxquelles ils s'adres-
sent. Tout cela devait bien changer dans la seconde
partie qui fut donnée au Roman de la Rose.
113. Jean Clopinel, né à Meun-sur-Loire, sans doute
vers 1250, composa cette seconde partie, étant encore
étudiant aux écoles de Paris, vers 1277. Plus tard il
écrivit d'autres ouvrages, qu'il regardait comme plus
sérieux, et qui ne lui auraient pas donné la réputation
que lui a procurée son œuvre de jeunesse. En 128i- il
traduisit pour Jean de Brienne, comte d'Eu, le De rc
militari de Végèce (§ 102), et ensuite les épîtres d'Héloïse
et Abailard, le livre de Giraud de Barri sur les Merveilles
d'Irlande, celui du moine anglais Aelred sur Y Amitié spi-
rituelle, et la Consolation de philosophie de Boèce ; dans le
LE ROMAN DE LA ROSE. 183
prologue de cette traduction, dédiée à Philippe le Bel,
il énumère ses précédents ouvrages (nous ne connaî-
trions pas sans cela les deux avant-derniers). Plus tard,
après 1291 et sans doute avant 1296, il écrivit en qua-
trains monorimes son Testament, œuvre remarquable,
où, suivant en partie l'ancien cadre des États du monde
(§ 105), il adresse à son siècle des critiques souvent fort
intéressantes (notamment dans les passages qui con-
cernent les femmes et les ordres mendiants), et montre
d'ailleurs, au milieu de ses railleries, une très sincère
piété. Jean de Meun devint riche et considéré, il fut lié
avec les plus grands seigneurs de son temps; il possé-
dait rue Saint-Jacques une belle maison avec un grand
jardin. Un acte relatif à cette maison, qui appartint plus
tard aux dominicains, nous apprend qu'il était mort
avant novembre 1305. — Jean de Meun reprit l'œuvre
de Guillaume de Lorris plus de quarante ans, nous dit-
il lui-même, après la mort de celui-ci. Il semble n'y rien
changer : il poursuit et achève le monologue de l'Amant,
au milieu duquel le poème s'arrêtait; il reprend tous les
mêmes personnages, met en jeu tous les mêmes ressorts
et continue le même récit. Mais déjà la forme extérieure
de l'œuvre est toute différente. La conquête de la rose,
vers laquelle tout tendait, n'est plus qu'un prétexte;
l'Amant, dont Guillaume s'attachait surtout à nous
décrire finement les sentiments intimes, n'est plus qu'un
auditeur complaisant pour les discoureurs infatigables
qui se succèdent auprès de lui; plus d'action, seulement
des paroles. L'esprit qui anime l'ouvrage de Jean diffère
encore plus de celui du premier poème : Guillaume ne
loue et ne peint que l'amour vrai, et réprouve les « faux
amants » ; Jean, faisant parler Raison, trouve qu'ils sont
seuls avisés, et que les autres sont des niais; — Amour
défend, dans Guillaume, d'employer des paroles gros-
184 L1TTEUATURE DIDACTIQUE.
sières; Jean les justifie et met c cyniquement sa théorie
en pratique; — Amour recommande avant tout, dans le
premier poème, de respecter les femmes; elles reçoivent
dans le second les plus sanglantes insultes qui leur aient
jamais été adressées; — l'allégorie même de la rose,
délicate et gracieuse chez Guillaume, devient platement
grossière chez Jean : comme on Ta fort bien exprimé,
« en touchant la rose, il la flétrit ». Guillaume, nous
l'avons vu, a un plan bien conçu et l'exécute avec pro-
portion; pour Jean, ce n'est plus qu'un cadre élastique
à l'infini, où il fait entrer pêle-mêle, sans choix ni
mesure, tout ce qu'il sait et tout ce qu'il pense. La figu-
rine élégante, fine et bien dessinée du premier artiste se
termine sous les mains du second en une espèce de
monstre sans forme précise, mais dans les flancs duquel
sont entassées toutes les idées et toutes les connais-
sances d'une époque. — Ces deux parties si dissem-
blables ont également contribué au succès de l'œuvre
entière : l'aimable et voluptueux Guillaume a séduit les
femmes, les jeunes gens, les esprits doux et tendres;
quant aux clercs et aux bourgeois, l'érudition, l'âpre et
lib.re satire, les hautes discussions et le cynisme môme
de Jean avaient de quoi les enchanter. On lui sut gré
surtout d'avoir mis en langue vulgaire, à la portée de
tous, une masse de notions et de questions réservées
jusque-là à l'enceinte fermée des écoles. Il fut le Voltaire
du moyen âge. avec toutes les restrictions que comporte
ce complément, et il eut, comme Voltaire, des ennemis
aussi passionnés que ses admirateurs.
114. L'Amant continue donc à se désoler de la captivité
de Bel Accueil. Raison juge bon alors de redescendre
de sa tour; mais au lieu de le sermonner en cent vers,
comme la première fois, elle lui en débite trois mille.
LE H0MAN DE LA HOSE. 18!)
IN mi' détourner de l'amour, elle commence par le
définir, puis elle définit les différentes sortes d'affec-
tion, non sans traiter eu passant de la justice, de la
fortune, du bien et du mal, avec force exemples à l'appui :
le miracle est que l'Amant non seulement l'écoute, mais
lui fait des objections et lui demande des éclaircisse-
ments sur des points qui lui semblent obscurs! Au
reste, son discours est incohérent, mais intéressant
pour l'histoire des idées: il faut y remarquer qu'elle ne
dit rien de chrétien, et que tous les auteurs quelle
allègue sont des païens. L'Amant, enfin lassé, la ren-
voie pour toujours à sa tour. — Il va ensuite retrouver
Ami ; celui-ci ne lui donne plus ses avis en cinquante
vers, mais en deux mille huit cents. Son discours est
encore plus décousu que celui de Raison; la carcasse
en est formée par un ensemble de conseils fort peu
honnêtes sur les divers moyens de séduire les femmes,
mais avec des digressions énormes, comme toute la
peinture de l'âge d'or, amenée par des plaintes sur la
nécessité de faire des dons aux femmes, et dans laquelle
est intercalé, le plus bizarrement du monde, un long
épisode qui nous décrit les emportements et les décon-
venues d'un jaloux. — L'Amant essaie de profiter des
instructions d'Ami; mais il n'avance guère. Amour
l'encourage, et convoque tous ses vassaux pour lui
venir en aide. Parmi eux se trouve Faux Semblant, qui
se montre comme un des plus utiles, car il réussit, par
la suite, à se lier avec Maie Bouche, et il l'étrangle en
l'embrassant. L'allégorie est à coup sûr ingénieuse, et
digne de Guillaume; mais l'auteur a profité de l'intro-
duction de ce personnage pour intercaler un épisode
tout à fait hors de ton et de proportion. Amour, ayant
nommé Faux Semblant son « roi des ribauds », lui
demande où on peut le trouver quand on a besoin de
186 LITTERATURE DIDACTIQUE.
lui : il répond qu'il a bien des demeures, mais que là
où il se cache le mieux, et le plus ordinairement, c'esl
sous l'habit religieux, et il se met à parler tout à l'ait
comme un dominicain (vantant par exemple le privi-
lège qu'il a de conférer partout les sacrements, privilège
qui mettait alors les ordres mendiants en lutte avec le
clergé séculier). A ce propos on examine la question de
la mendicité volontaire, et Faux Semblant parle des
principaux ennemis qu'il a, entre autres de ce Guillaume
de Saint-Amour qui avait été le principal champion des
docteurs séculiers de Paris dans leur lutte contre les
Mendiants (§ 108), et qui a expié son audace par l'exil.
Au reste, Faux Semblant est invincible : il trompe tous
les trompeurs; il est fort par les secrets qu'il connaît
grâce à la confession (les dominicains, comme plus tard
les jésuites, s'attachaient à être les confesseurs des
grandsj et par la menace, qu'il lient suspendue sur tous
ceux qui osent le contredire, de la terrible accusation
d'hérésie. Ce morceau si hardi fut pour beaucoup dans
le succès du livre. — Une fois Maie Bouche tué, Cour-
toisie et Largesse pénètrent dans la tour et gagnent la
Vieille aux intérêts de l'Amant; celle-ci alors endoc-
trine Bel Accueil, qui est confié à sa garde. Son long
discours est un code complet de « morale lubrique »,
dirigé surtout contre la prétention des hommes d'appro-
prier une femme à un seul, tandis que les femmes sont
de nature libres comme l'oisillon du vert bocage. Ce type
de la vieille hypocrite, qui feint de surveiller les jeunes
et en réalité les corrompt, vient en droite ligne d'une
élégie d'Ovide, et le poème de Pamphile et Gahtlée (§ 08),
ainsi que plus d'un fableau, l'avait popularisé au moyen
âge; 1' « art d'amour » qu'elle débite est aussi puisé à
des sources plus anciennes, sauf quelques traits vigou-
reux (comme la peinture de la passion qu'elle raconte
LE ROMAN DE LA ROSE. 187
avoir éprouvée dans sa jeunesse pour le ribaud qui la
battait). Cet épisode de la Vieille dépasse tout en cy-
nisme, comme celui de Faux Semblant en hardiesse.
L'auteur a ('prouvé le besoin de présenter pour l'un et
pour l'autre des excuses à moitié naïves, à moitié mali-
cieuses; mais ni les personnes pieuses ni les gens
chastes ne s'y trompèrent et ne lui pardonnèrent. —
Grâce à l'alliance de la Vieille, l'amant retrouve Bel
Accueil. Il redevient téméraire; Danger s'écrie, Honte
et Peur accourent, renferment Bel Accueil et bannissent
encore une l'ois l'Amant. Alors Amour fait commencer
la bataille (nous retrouvons ici l'imitation directe de la
Psychomachie et des poèmes français qui en dérivent) :
Franchise est désarçonnée par Danger et serait tuée
sans l'intervention de Pitié; Bien Celer vient à bout de
Honte; Peur et Hardement (courage) luttent; enfin le
combat devient général. On envoie chercher Vénus, et
toutes les troupes d'Amour donnent à la tour un assaut,
qui est repoussé. — Cependant Nature est occupée à
travailler dans sa forge, pendant qu'Art, à ses pieds,
essaie de surprendre ses secrets : elle fait circuler dans
l'univers la mort et la vie, refaisant sans trêve des
vivants avec les morts et des morts avec les vivants.
Obsédée d'une pensée qui la préoccupe, elle va trouver
son prêtre, Genius (c'est l'esprit qui anime la produc-
tion naturelle), et lui fait sa confession (ici s'intercale
une diatribe fort déplacée de Genius sur le bavardage
des femmes). Cette confession est une espèce d'ency-
clopédie : Nature fait le tableau du monde, où tout est
docile à ses lois, excepté l'homme, qui en trouble toute
l'harmonie; elle agite alors la question de la liberté
humaine et de son accord avec la prescience divine; elle
parle de la destinée, des révélations censées obtenues
en rêve, des visions somnambuliques, de l'astrologie,
188 LITTERATURE DipACTIQUE.
quelle conteste, des comètes, qu'on croit bien à tort
signifier la mort des grands (ici se place une digression
sur la vraie grandeur : ce sont les savants, les clercs qui
la possèdent, et qui sont supérieurs à tous, d'où ou en
vient à l'histoire fabuleuse de Virgile, le plus grand des
clercs;, des éclipses, qui n'ont rien de surnaturel el
qu'elle explique, etc. L'homme seul, reprend-elle, est
ingrat envers Nature et la contriste, notamment en se
refusant trop souvent à exécuter les ordres d'Amour.
En ce moment même on refuse à grand tort à l'Amant
ce qu'il doit légitimement obtenir. Elle envoie Genius
excommunier de sa part tous ceux qui sont rebelles à
ses commandements et accorder aux autres une indul-
gence plénière. Tout cet épisode de Nature dans sa
forge, avec sa confession à Genius et ses plaintes sur
l'homme qui seul lui désobéit, est emprunté à un
poème latin de la fin du xuc siècle, le De Planctu Naturae
d'Alain de Lille; mais Jean de Meuna faitbeaucoupd'addi-
lions, il a exposé sur les questions difficiles qui tou-
chent au libre arbitre et à la destinée humaine des
opinions dont la partie négative au moins est fort judi-
cieuse, et, sans qu'il le dise expressément, il est clair
qu'il a osé, ce que n'avait pas fait Alain de Lille, atta-
quer, par la bouche de Nature, le célibat ecclésiastique
et monacal. Cette partie du poème, la plus remarquable
par la portée, est celle aussi qui est écrite avec le plus
de vigueur et de netteté. — Genius arrive au camp des
assiégeants, et ceux-ci, enflammés par ses exhortations,
donnent l'assaut avec plus de succès. Le brandon de
Vénus, lancé dans la tour, fait fuir Danger, Honte et
Peur (ici est intercalé, assez à contre-temps, le récit de
l'aventure de Pygmalion, puis vient une singulière
comparaison, édifiante au reste d'intention, entre le
paradis d'amour et le vrai paradis chrétien) : l'Amant,
LE ROMAN DE LA KOSE.
cueille la rose. « Ainsi j'eus la rose vermeille; et le jour
vient et je m'éveille. »
115. L'œuvre de Jean de Meun. ajoutée à celle de
Guillaume de Lorris, eut de bonne heure un succès
sans précédent, qu'elle garda aussi plus longtemps
qu'aucune cfeUvre du moyen Age. PréSqUe aussitôt après
son apparition, elle était mise en vers flamands par
Henri Van Aken : Chaucer en avait l'ait en anglais
une traduction qui est perdue, mais on en possède
une autre, incomplète, qui est à peu près de son temps;
une très intéressante reproduction en sonnets italiens.
qui est encore du xiile siècle, a été récemment retrouvée.
Pétrarque, tout en contestant la grande valeur du
Roman de la Rose, le cite comme l'Ouvrage le plus
remarquable de la littérature française. — En France.
l'influencé de ce livre domina toute la période qui suivit.
et on ne peut pas dire quelle ait été heureuse : elle
donna pour longtemps à la littérature une forme allé-
gorique dont nous avons indiqué plus haut les incon-
vénients, et, d'autre part, un caractère prosaïque, positif,
souvent pédant, qui enlève tout charme à la plupart des
poèmes des xiv" et xvc siècles. L'œuvre de Jean de Meun,
longtemps après sa mort, était encore lue avec passion
et devint aussi l'objet de vives attaques. Déjà Guillaume
de Digiilleville (§ 156 l'avait appelée « le roman de
luxure ». et avait en outre accusé Jean de plagiat.
Christine de Pisan, au commencement du xve siècle,
en reprit avec une juste indignation le cynisme et l'im-
moralité; Gerson composa un traité exprès contre le
Roman de la Rose, auquel, emporté par le goût du. temps,
il n'a pu s'empêcher de donner la forme d'un songe
allégorique, et alla jusqu'à dire que la damnation de
l'auteur, s'il avait bien compris le danger de son livre
190 LITTÉUATURE DIDACTIQUE.
était plus sûre que celle de Judas; il reconnaissait d'ail-
leurs que in loqucntia gallica non habet similem. Le pre-
mier en date des humanistes français, Jean de Mon treuil,
et son ami Gontier Col défendirent avec ardeur contre
ces reproches l'auteur qui était l'objet de leur admira-
tion. Le roman était encore très populaire lors de l'in-
vention de l'imprimerie, et on en publia au xv9 siècle des
éditions nombreuses. Au xvie on avait toujours envie de
le lire, mais on avait peine à le comprendre : Marot en
fit un rajeunissement, fort rapidement exécuté, qui se
réimprima pendant près de trois cents ans. A la fin du
XVe siècle Jean Molinet avait eu l'idée extravagante de le
« moraliser », et de l'accompagner d'un commentaire où
il expliquait l'allégorie de la rose et toutes les péripé-
ties de l'action dans un sens chrétien mystique. — On
a donné du Boman de la Rose, au commencement du
xixe siècle, une édition à peu près lisible, et faite sur de
bons manuscrits, qui a été reproduite deux fois depuis;
mais on attend encore une édition critique, qui deman-
dera un très grand travail, vu l'abondance extrême
des manuscrits, qui présentent, il est vrai, un texte
généralement pareil, mais où les petites variantes foison-
nèrent de bonne heure, comme il est arrivé d'ordinaire
pour les ouvrages très lus. — Le Roman de la Rose a
longtemps été regardé comme ouvrant la littérature fran-
çaise; il est plus juste de dire qu'il clôt la littérature du
vrai moyen âge, en y introduisant des éléments nou-
veaux, dont quelques-uns, comme la connaissance de
l'antiquité et la réflexion philosophique, feront partie
intégrante de la littérature moderne.
SECTION III
LITTERATURE LYRIQUE
116. On prend quelquefois le mot de poésie lyrique
dans le sens de poésie subjective, exprimant des senti-
ments tout personnels; dans ce sens il exclut nécessai-
rement la plus grande partie de la poésie populaire.
Mais on en étend volontiers aussi le sens (et c'est ce que
nous ferons) à toute poésie comprenant des pièces brèves
qui expriment des sentiments et qui sont destinées à
être chantées.
117. Les Romains, en dehors de leur poésie officielle
imitée des Grecs, avaient certainement des chansons
populaires, mais elles ne nous sont pas parvenues : nous
ne connaissons que quelques échantillons des vers sati-
riques que les soldats chantaient derrière le char des
triomphateurs, et quelques petits morceaux servant
d'épitaphes ou d'épigraphes, composés le plus sou-
vent dans le même rythme, le septénaire rythmique.
L'église latine dut imiter ces chansons populaires
en composant ses plus anciennes hymnes, écrites le
plus souvent en quatrains de vers octosyllabiques, où
192 LITTERATURE LYRIQUE.
la rime apparaît de bonne heure. Pendant les époques
mérovingienne et carolingienne, le peuple dut conserver
et produire des chants de danse et autres, et certains
témoignages nous permettent d'en attester l'existence.
Cette ancienne poésie lyrique, qui se poursuivit sans
grand changement jusque vers le milieu du xne siècle et
qui, dans le peuple, s'est continuée jusqu'à nos jouis,
élevait être à l'origine composée de strophes à asso-
nances consécutives et sans doute toujours masculines;
elles étaient très souvent accompagnées d'un refrain,
qui fut remplacé parfois par un vers (ou un petit groupe
de vers d'un rythme différent des autres, muni ou non
d'assonance. La strophe avait 3, 4, 5 vers sur la même
assonance: les vers étaient le plus ordinairement de 8
ou de 10 syllabes. Nous renvoyons à la Gràmtiiàire pour
l'histoire et l'explication des formes de versification plus
compliquées qui suivirent; nous dirons un mot plus loin
de celles qu'introduisit l'imitation de l'art provençal. En
effet, comme nous le verrons, l'influence provençale vin!
à un certain moment transformer nos chansons, au
moins dans la partie la plus cultivée de la nation. Il est
parfois difficile de bien tracer la limite entre les deux
genres, parce que plus d'un poète les a cultivés et plus
ou moins mêlés tous les deux. Dans un premier chapitre,
nous essayerons de caractériser la poésie lyrique pure-
ment française; nous parlerons ensuite de celle qui a
subi l'influencé du midi.
CHAPITRE I
POESIE LYRIQUE PUREMENT FRANÇAISE
118. Chansons lyrico-épiques. On appelle au moyen âge
chansons d'histoire, à cause de leur caractère à moitié nar-
ratif, ou chansons de toile, sans doute parce que les
femmes les chantaient en travaillant (et la plupart
d'entre elles nous présentent une femme assise à son
travail), des chansons de peu d'étendue, qui nous
exposent en un petit tableau une aventure ou souvent
une simple situation d'amour. Ces chansons, en vers de
dix ou de huit syllabes assonants, se composent de
quelques strophes de quatre, cinq, six ou huit vers
munies d'un refrain. Nous en avons malheureusement
conservé fort peu eu égard au grand nombre qui en a
certainement existé; mais celles que nous avons, et dont
une ou deux remontent visiblement très haut (Bainaud,
Orior, Belle Idoine, Belle Boette, etc.), appartiennent aux
produits les meilleurs et les plus originaux de notre
vieille poésie. Dans ces petites pièces, que nous possé-
dons sous une forme beaucoup moins altérée et rema-
niée qu ne l'est celle des chansons de geste, nous ne
trouvons pas non plus la prolixité et la banalité d'ex-
13
194 LITTÉRATURE LYRIQUE.
pression qui trop souvent nous lassent dans celles-ci.
Les personnages, généralement au nombre de deux ou
trois au plus, sont rapidement esquissés dans une atti-
tude caractéristique et n'échangent que peu de paroles
toutes pénétrées du sentiment qui les anime. Le lieu de
la scène est indiqué en deux mots, et, dans cette
extrême concision, quelques détails donnés, au con-
traire, avec complaisance prêtent aux figures et au cadre
un relief singulier; on ne peut dépasser la grâce et
l'énergie de plusieurs de ces petites compositions, aux-
quelles leur refrain, vaguement accommodé au sujet et
souvent un peu étrange comme les refrains populaires,
ajoute encore plus de charme poétique. — Ces chansons
ne paraissent pas, dans cette forme, avoir dépassé le
xue siècle; mais au xme un poète d'Arras, Audefroi le
Bâtard, qui a composé aussi des chansons à la proven-
çale, voulut imiter ce genre et lui donner une forme
suivant lui plus élégante. Il substitua naturellement la
rime à l'assonance, varia parfois la rime dans la même
strophe, employa volontiers le vers de douze syllabes,
allongea beaucoup les dimensions, et composa ainsi un
certain nombre de pièces, dont nous avons conservé
cinq, et dont le fond romanesque {Belle Argentine, etc.)
ou sentimental jusqu'à la niaiserie {Belle Isabel, etc.)
n'est point racheté par la valeur de la forme; malgré
cela, la tentative d Audefroi est intéressante et mérite
l'éloge. — On peut en rapprocher une jolie chanson, en
strophes de huit vers octosyllabiques entrelacés, qui
traite à part un épisode du roman de Floire et Blanche-
fleur (§ 51).
U9. Motets. Les motets sont proprement de petites
compositions musicales latines faites pour être chantées
à trois ou quatre voix; mais cette forme devint très
POESIE LYRIQUE PUREMENT FRANÇAISE. 195
populaire, et nous avons conservé un certain nombre de
motets et surtout de fragments de motets du xme siècle.
120. Rotroucnges; serventois; estrambots. On ne sait pas
l'étymologie du mot rotrouenge (en provençal retroencha),
qui désigne une chanson d'ordinaire munie de refrain,
mais n'ayant pas le caractère épique des chansons de
toile. Telle est, par exemple, la célèbre chanson que
Richard Cœur de Lion, du fond de sa prison d'Alle-
magne, envoya aux siens pour se rappeler à eux; elle ne
porte pas le titre de rotrouenges dans les manuscrits,
mais nous l'y trouvons donné à des pièces tout à fait
semblables à celle-là. On peut faire rentrer dans cette
catégorie, bien qu'elles soient souvent appelées chan-
sons, presque toutes les pièces lyriques destinées au
chant qui n'appartiennent pas à l'école provençalisante.
Dans le nombre figurent beaucoup de pièces d'un carac-
tère plaisant, politique ou satirique, composées notam-
ment à Arras, au xme siècle, et qui nous transportent
dans le milieu turbulent et pittoresque de la bour-
geoisie d'une grande commune du Nord. Par leur carac-
tère sérieux, d'autre part, plusieurs de ces pièces
paraissent mériter le nom de serventois, mot qui se pré-
sente indépendamment au sud et au nord, et qui paraît
avoir désigné à l'origine des pfèces de vers composées
par ou pour des servents, des gens au service de grands
seigneurs. Les serventois, dont le type précis n'a pu
être encore défini, ne sont pas astreints, même au
xinc siècle, aux règles rigoureuses de l'art poétique
savant. On a donné plus tard spécialement ce nom à des
pièces composées en l'honneur de la Vierge Marie. —
On trouve aussi fort anciennement la mention (ïestram-
bots ou estrabots, courtes chansons violemment sati-
riques. A cette classe appartenaient sans doute les chan-
196 LITTÉRATURE LYRIQUE.
sons de Luc de la Barre (Eure) contre Henri 1er d'Angle-
terre, dont le succès irrita ce prince au point qu'il
condamna le malheureux chevalier, fait prisonnier, à
avoir les yeux crevés, supplice qu'il évita en se donnant
la mort (H 24).
121. Rondeaux, ballettes, estampiez, virelis. Ce sont de
petites chansons destinées à accompagner la danse.
Uestampie s'appliquait originairement, comme son nom
l'indique, à une danse où on frappait du pied pour mar-
quer le rythme. La ballette, qui traite avec une vivacité et
une mutinerie souvent pleines de grâce un petit sujet
d'amour, est d'ordinaire en rimes consécutives (le mot
balades apparaît dans le Jeu du Pèlerin, § 133, comme titre
de pièces composées par Adam le Bossu, mais nous
n'en trouvons pas dans ses œuvres; ce mot est d'ori-
gine méridionale, bien que ce qu'on a plus tard appelé
ballade ne semble pas importé du Midi). Le rondeau
(roondel ou roondet) n'est pas divisé en strophes : c'est
une courte pièce, dont une partie se répète; plus tard ce
nom a été donné à ce que nous appelons triolet; le
vireli est voisin du rondeau, mais plus long (virelai n'est
qu'une altération de ce mot sous l'influence de lai).
122. Pastourelles. Une catégorie particulière de chan-
sons portait le nom de pastourelles (c'est-à-dire de « ber-
gerettes ») : il s'agit presque toujours de la rencontre du
poète avec une bergère, et des succès divers qu'obtient
la requête d'amour qu'il lui adresse; ces petites pièces
se composent habituellement d'un récit et d'un dia-
logue; elles sont composées en strophes de petits vers,
généralement d'un rythme très vif et très coupé. Le
genre des pastourelles est ancien; mais la plupart de
celles que nous possédons sont très artistement com
POESIE LYRIQUE PUREMENT FRANÇAISE. 197
posées et ont subi l'influence de la lyrique provençali-
sante. Quelques-unes, généralement picardes, présentent
des tableaux vifs et colorés des plaisirs et des * jeux »
des villageois.
123. Lais. A côté des lais narratifs dont nous avons
parlé ailleurs (§ 55), on trouve au moyen âge des lais
purement lyriques; ils ont, comme les autres, une ori-
gine toute musicale, mais ils ont une tout autre forme.
Le lai du Chèvrefeuille (nous avons parlé du lai narratif
de ce nom) est un ancien spécimen de cette forme
lyrique, qui paraît avoir pour caractère distinctif une
certaine dissemblance dans les strophes qui composent
la pièce. Le lai se confondit plus tard avec le descort,
nom (d'origine provençale) d'une pièce qui avait à peu
près la même forme.
124. Chansons de croisade. Les plus anciennes pièces
composées en strophes à rimes enlacées qui nous soient
parvenues sont des chansons de croisade. Déjà lors de
la première croisade nous savons que par toute l'Europe
on chantait une chanson d'origine française, qui, à cause
de son refrain, s'appelait la chanson d'outrée (outrée
resta le cri de marche et de guerre des pèlerins); nous
n'en connaissons pas la forme. Nous possédons en
revanche une chanson à refrain, composée pour la
deuxième croisade, avant 1147; d'autres, plus ou moins
influencées par la poésie savante, se rapportent à la
troisième croisade, comme celles de Conon de Béthune
et du châtelain de Couci (celle d'un certain Renaud pré-
sente encore un refrain), à la quatrième, comme celle
de Hugues de Berzé, seigneur bourguignon (voir § 105),
qui a en outre adressé une exhortation à prendre la croix
au troubadour Folquet de Romans, ou aux suivantes.
198 LITTÉRATURE LYRIQUE.
comme celle de Huon de Saint-Ouentin (voir § 89 bis),
et celles de Philippe de Xanteuil et d'un de ses compa-
gnons, échos des événements de la croisade même
(§ 89 quater); l'une d'elles est visiblement la pnrodie (au
sens grec, voir § 160) d'une chanson d amour, dont elle
emprunte les deux premiers vers (Vous qui amês de vraie
amour, Esveilliësvous, ne dormes mais) . — Une remarquable
pièce, composée à Acre en juin 1250, exprime, presque
dans les mêmes termes que Joinville, le désir qu'avaient
les meilleurs d'entre les croisés de voir Louis IX, après
sa délivrance, rester quelque temps en Syrie. — On
peut rattacher ici les chansons qui contiennent l'expres-
sion des tristesses et des craintes d'une femme dont
l'ami est outre mer (la plus jolie est attribuée à tort à la
dame de Fayel, prétendue amie du châtelain de Couci).
CHAPITRE II
POÉSIE LYRIQUE D'ORIGINE PROVENÇALE
125. Dans Je midi de la France s'était formée de bonne
heure une société brillante, où les femmes tenaient la
première place, qui avait attaché une importance toute
particulière à des règles d'étiquette sociale et de bonnes
manières qu'on désignait sous le nom de courtoisie : on
faisait dans la courtoisie une place fort considérable à
un amour dont on avait essayé de relever le caractère,
en somme assez immoral, en lui attribuant une vertu
ennoblissante et aussi en le soumettant à des règles
fixes et raffinées. Le principal organe de cette société
fut une poésie lyrique dont l'inspiration fut surtout
puisée dans l'amour ainsi conçu, et dont la forme fut de
bonne heure soumise à une loi presque sans exception,
celle de la tripartition. Les chansons des troubadours
provençaux et de leurs imitateurs français (quelques-
unes des règles que nous allons donner ne s'appliquent
même strictement qu'à ceux ci) sont à peu près toujours
composées de 5 (2+2+1), 6 (2+2+2), ou 7 (2+2+3)
strophes, dont la division tripartie est souvent marquée
par la répétition des mêmes rimes dans deux ou trois
200 LITTÉRATURE LYRIQUE.
strophes (bien que souvent aussi les mêmes rimes se
reproduisent dans toute la pièce;. Dans l'intérieur
même de la strophe, les vers se divisent toujours en
trois groupes, dont les deux premiers se font stricte-
ment pendant, tandis que le troisième est asymétrique
(c'est en petit la combinaison grecque de strophe,
antistrophe, épode: nous avons gardé cette construc-
tion dans le sonnet). Les rimes sont toujours enlacées
et offrent des combinaisons variées et savantes; l'alter-
nance des rimes masculines et féminines n'est pas
exigée en elle-même, mais d'après la distribution des
rimes des deux espèces dans la première strophe toutes
les autres doivent se régler (ce qui est indispensable
dans une poésie destinée, comme celle-là, à être
chantée). La forme de chaque strophe est inventée à
nouveau pour chaque pièce par le poète, et constitue
pour celui qui l'a inventée une propriété qu'on ne peut
lui enlever sans plagiat; il n'a même pas le droit de se
répéter lui-même : aussi dans les soixante chansons
environ qui nous sont restées de Tibaud de Champagne,
il n'y en a peut-être pas deux dont les strophes aient
absolument la même forme (car un très léger change-
ment, soit dans la longueur d'un des vers, soit dans
l'ordre de deux rimes, est suffisant). On a cependant
des pièces qui reproduisent la structure et même les
rimes d'autres pièces, mais alors c'est une imitation
voulue et d'ordinaire déclarée; ainsi Jacques de Cam-
brai a fait une chanson ou son (c'est-à-dire sur la
musique et par conséquent dans la forme) de la glaie
meure (c'est-à-dire de la chanson de Raoul de Soissons
qui commence par Quant voi la glaiè meure) et d'autres
ou chant de Tuit mi désir (chanson de Tibaud de Cham-
pagne), ou chant de funicorne (Tibaud, Ainsi coin Vunicorne
sui), ou chant de De bone amour et de loial amie (chanson de
POÉSIE LYRIQUE n'OHIGINE PROVENÇALE. 201
Gace Brûlé); un autre poète nous dit que le châtelain de
Couci a plus souffert d'amour que nul autre et ajoute :
Pour ce ferai ma complainte en son chant (en effet il repro-
duit la forme de la plus célèbre des pièces du châte-
lain : A vous, amant, plus qu'a nule autre gent), etc. — Du
moment que nous retrouvons en France ces traits si
particuliers de la technique provençale, la répétition de
la même rime dans deux ou plusieurs strophes, la tri-
partition de la chanson, la tripartition de la strophe, la
création d'une forme nouvelle de strophe pour chaque
pièce, et en outre, pour le fond, toutes les mêmes
idées exprimées de même, il n'est pas douteux que cette
poésie n'ait été importée du midi de la France, où nous
la voyons florissante dès avant le milieu du xne siècle,
dans le nord, où elle n'apparaît que sensiblement plus
tard. Nous en trouvons d'ailleurs la preuve matérielle
dans le fait que divers manuscrits de chansons françaises
ont accueilli des chansons provençales, dont quelques-
unes ont été plus ou moins francisées, et que les
romans qui ont cherché un élément de succès dans
l'insertion de couplets de chansons (§ 67) en ont admis
de provençales au milieu des françaises (les sons poite-
vins ou provençaux sont d'ailleurs mentionnés dans
divers textes). — Le centre de l'influence provençale
dans la France du Nord paraît avoir été la cour
d'Aliénor de Poitiers, devenue la femme de Henri II
d'Angleterre, et surtout celle de sa fille Marie de Cham-
pagne (voir § 57); c'est là qiron propagea les idées sur
l'amour qui faisaient le fond de la poésie provençale, et
qu'on essaya d'établir, dans de brillantes réunions de
chevaliers et de dames, une sorte de code de l'amour
courtois, dont nous avons une rédaction latine dans le
livre d'André le Chapelain (§ 104), plein des noms
d'Aliénor, de Marie de Champagne, de la reine Aélis de
202 LITTERATURE LYRIQUE.
France, sa belle-sœur, etc. Les troubadours les plus
célèbres, comme Bertran de Born et Bernard de Venta-
dour, se rendaient auprès d'Aliénor, tandis que, sous les
auspices de Marie, Chrétien de Troies introduisait dans
les romans bretons la théorie de l'amour que ces nobles
dames prétendaient mettre à la mode. C'est aussi Chré-
tien qui. l'un des premiers, composa des chansons dans
la forme de celles des troubadours, et la Champagne,
avec la Picardie, la Flandre et l'Artois, resta pendant
le xme siècle le siégea peu près exclusif de cette poésie,
qui fut d'ailleurs uniquement cultivée, au moins dans
les premiers temps, soit par les grands seigneurs eux-
mêmes, soit par les poètes qui vivaient, de leurs bonnes
grâces. — Malgré ce qui a été dit plus haut sur Aliénor
et sa cour, cette poésie n'a été que peu répandue en
Angleterre.
126. La forme principale empruntée par la poésie
lyrique française à l'art provençal est celle de la chanson
proprement dite, dont on vient d'indiquer les règles
essentielles. — Le salut d'amour est une épître, dont la
forme est variable, et qui se présente même souvent en
vers octosyllabiques rimant deux à deux, structure
étrangère à la poésie lyrique véritable. — Une des
inventions les plus originales des troubadours, imités
par les trouveurs du nord, est la tençon, où deux poètes
composent chacun une strophe en soutenant des opi-
nions contradictoires, ou en s'adressant mutuellement
des reproches souvent fort vifs. Quelquefois ces débats
ont lieu non entre deux troubadours, mais entre le
poète et un personnage fictif, d'ordinaire Amour, conçu
comme une divinité (très souvent comme une divinité
féminine, une dame). En France, les pièces de ce genre
sont très rares, mais on y trouve en grande abondance
POÉSIE LYRIQIF D'ORIGINE PROVENÇALE. 203
des jeux partis (en provençal jûcs partitz, plus souvent
partimens), ainsi appelés parce que celui qui ouvre le
débat propose à son confrère une alternative, dont
celui-ci choisit et défend un des termes, le premier sou-
tenant l'opinion contraire; les deux contestants remet-
tent souvent la décision à un ou plusieurs arbitres
nommés dans Yenvoi. C'est à peu près toujours l'amour
qui fournit le thème de ces débats, dont l'ensemble
constitue une sorte de manuel de jurisprudence galante,
et dont les envois, interprétés avec exagération, ont
donné lieu à la légende des « cours d'amour », qui
naturellement n'ont jamais été tenues.
127. Dans cette poésie lyrique savante, l'amour, comme
inspiration, domine plus encore que chez les Proven-.
çaux; à l'origine, Huon d'Oisi, Conon de Béthune,
Richard d'Angleterre, Gautier d'Espinaus, quelques
autres, font des chansons de croisade ou politiques
dans la nouvelle forme, mais bientôt (sauf quelques
traces encore dans Tibaud de Champagne) tout cela
s'efface, et ne laisse de place qu'aux variations infinies,
mais monotones et souvent banales, du thème de
l'amour courtois. — Nous avons déjà parlé du groupe
bourgeois d'Arras. qui doit être mentionné aussi ici,
parce que son dernier et meilleur représentant. Adam
le Bossu (§ 132), a été initié à l'art le plus raffiné de
la poésie courtoise. Là se développa une poésie beau-
coup plus originale. Une forme que paraît avoir inventée
Jean Bodel est celle du Congé : le pauvre poète, atteint
de la lèpre, avant de quitter le monde pour toujours,
fit ses adieux à tous ses amis d'Arras dans une pièce
de quarante-deux strophes; il fut imité d'abord par
Adam le Bossu, qui, en quittant Arras à la suite de
troubles politiques, n'employa la forme du Congé que
204 LITTERATURE LYRIQUE.
pour la faire servir à une vive satire de la ville et de
ses habitants (§ 132 , puis par Baude Fastoul, frappé du
même malheur que Jean Bodel. Non seulement à Arras,
mais dans d'autres villes du nord, le goût de la poésie
lyrique avait gagné les bourgeois; il se forma là des
concours poétiques appelés puis (à l'origine Puis Nostre
Dame, du nom de la ville du Vêlai où des concours de
ce genre, d'abord uniquement en l'honneur delà Vierge,
avaient pris leur origine), dans lesquels on couronnait
les meilleures pièces; ces puis attachaient à la forme
une importance capitale, et leur influence a contribué à
rendre toute cette poésie monotone et rebutante, sur-
tout quand elle eut disparu des sphères aristocratique»,
où elle s'appuyait au moins sur quelque réalité. Les
pais continuèrent leur existence pendant le xivc siècle et
plus tard, et paraissent avoir suscité les imitations
allemandes et néerlandaises des « maîtres chanteurs »
et des « chambres de rhétorique ». Parmi les pièces
qu'ils couronnaient, il faut noter les sottes chansons, sortes
de parodies des chansons sérieuses, pièces burlesques,
souvent grossières, mais qui sont précieuses pour
létude de la langue et des mœurs ^rapprochons-en les
futrasies ou rêveries, qui n'ont pas toujours un caractère
lyrique, et qui représentent le genre absurde et bizarre
que la poésie mondaine du xvme siècle s'amusa à cul-
tiver sous le nom d'amphigouris). — A cette poésie bour-
geoise du nord on peut joindre (quoique, à vrai dire, elle
ne soit lyrique que par exception) la poésie parisienne
de Rustebeuf (mort vers 1280), à moitié populaire de
l'orme, et plus intéressante que toute autre par le sujet
et l'inspiration. Tantôt le poète célèbre les événements
ou les personnages de son temps (il écrit notamment des
regrets d'illustres défunts, parmi lesquels il faut sans
doute compter Louis IX, qui lui avait fait sentir sa
POÉSIE LYRIQUE D'OKIGINE PROVENÇALE. 205
charité, bien que le poète se fût permis sur la piété du
roi des plaisanteries fort irrévencieuscs); tantôt, commit
nous l'avons vu (§ 108), il prend aux luttes qui divi
saient l'Église et l'université de Paris une part pas-
sionnée; le plus souvent il expose, dans des vers d'un
relief parfois admirable et dont les pointes trop prodi-
guées n'empêchent pas toujours de goûter l'esprit réel,
sa misérable situation de clerc déclassé, marié, vivant
de la protection des grands ou des libéralités du public,
vrai bohème comme le fut plus tard Villon, comme le
furent tant d'autres poètes, à toutes les époques, sur le
pavé de Paris. — Mentionnons aussi, dans ce groupe
bourgeois et populaire, Colin Muset, un jongleur qui a
composé des chansons et des pastourelles, mais qui
nous a laissé des pièces moins banales, une entre autres
où il, nous fait le tableau le plus vif des hasards de sa
profession et de l'accueil différent qu'il reçoit de sa
famille suivant qu'il rentre au logis, après avoir « vielle »
au dehors, la valise vide ou gonflée.
128. Mais en général cette poésie de société se meut,
on l'a vu, dans un cercle extrêmement borné, et ne
cherche son succès que dans le talent de dire d'une
façon un peu différente toujours les mêmes choses. Ses
principaux représentants sont, après Chrétien de Troies :
Conon de Béthune (+ 1224; il chantait devant Marie de
Champagne vers 1182); — Gace Brûlé (chevalier champe-
nois, vers 1180 : ses chansons, avec celles de Blondel, du
châtelain de Couci et du roi de Navarre, passaient pour les
meilleures de toutes) ; — Blondel de Nesle (picard ; il a
fourni son nom, mais rien que son nom, à la fameuse
légende de la délivrance de Richard Cœur de Lion); ses
chansons sont élégantes et monotones ; — Gui, châtelain
(c'est-à-dire gouverneur pour le seigneur du château) de
206 LITTERATURE LYRIQUE.
Couci(-{- 1203, auteur de chansons particulièrement ten-
dres et douces et où l'on trouve même une note péné-
trante de mélancolie ; il est devenu le héros d'une légende
romanesque dénuée de tout fondement historique. $ 66 :
— Gautier d'Espinaus (poète aimable et élégant, dont
l'époque et la patrie ne sont pas encore bien établies);
— Gontier de Soignies (en Hainau. fin du xne siècle),
dont les gracieuses chansons ont une allure libre et
vive, parfois presque populaire (elles ont toujours un
refrain, ce que n'ont jamais les chansons provençales);
— Tibaud de Champagne, roi de Navarre (f 1253, célèbre
par son amour plus ou moins authentique pour Blanche
de Castille : ses chansons spirituelles et gracieuses le
mettent au premier rang des poètes de ce genre, où il
montra un peu plus d'originalité que les autres); —
Adam le Bossu (celles de ses pièces qui rentrent dans
cette catégorie ne forment que la plus faible partie de
ses titres à la réputation; plusieurs d'entre elles sont
cependant fort agréables, et elles étaient surtout
admirées pour la musique qu'il leur faisait et qui s'est
en partie conservée : la mélodie de quelques-unes de
ces pièces est d'une grâce encore appréciable aujour-
d'hui); — Guilebert de Berneville (d'Arras, fin du
xme siècle ; l'un des derniers et peut-être le plus achevé
comme forme de nos chansonniers) ; — Charles d'Anjou,
roi de Sicile, etc. Disons aussi que quelques femmes,
une duchesse de Lorraine entre autres, paraissent avoir
cultivé ce genre délicat, qui devait les attirer et leur
convenir.
129. Sortie de l'imitation des Provençaux, la poésie
lyrique française exerça à son tour de l'influence sur
l'Allemagne, où elle fut (ainsi que son initiatrice méri-
dionale; imitée de bonne heure par les minnesingcr, et
POÉSIE LYRIQUE D"ORIGINE PROVENÇALE. 207
sur l'Italie, par l'intermédiaire de la Sicile, soit direc-.
tement, soit indirectement par les poètes allemands de
la cour des princes souabes. Dante, dans son livre sur
l'éloquence en langue vulgaire, cite plusieurs chansons
de Tibaud de Champagne à côté de celles des plus
célèbres troubadours. Toute la première poésie lyrique de
l'Italie dépend de celles de la Provence et de la France,
et leur influence est même encore sensible, bien que le
fond et la forme aient subi de profondes modifications,
dans Guido Guinicelli, Dante et Pétrarque. En Espagne,
en Portugal, la poésie lyrique du nord et du midi de la
France trouvait aussi un grand écho et provoquait de
nombreuses imitations.
130. A partir de la fin du xme siècle, cette production
lyrique, longtemps sj active, semble s'arrêter tout à
coup. La société, comme nous l'avons déjà remarqué,
change alors d'aspect et de mœurs; les grands seigneurs
et les grandes dames ne font plus de chansons et n'en
font plus faire. — Au xive siècle, Guillaume de Machaut
introduit un style lyrique nouveau, accompagné d'in-
novations non moins grandes dans la musique ; cet art,
dont la ballade, le chant royal, le rondeau (triolet), le
lai de douze strophes sont les principaux éléments,
retrouve auprès des grands la faveur dont avait joui
l'art des xne et xmG siècles; il est cultivé par Eustachc
Deschamps, plus tard par Froissart, Christine de Pisan,
Charles d'Orléans, et dure, avec quelques modifications,
jusqu'à la Renaissance.
SECTION IV
LITTERATURE DRAMATIQUE
131. Le théâtre au moyen âge est surtout religieux:
le théâtre profane lui-même est en partie, au moins par
ses origines, dépendant du culte, notamment en ce que
les représentations avaient lieu d'habitude la veille des
fêtes des saints, et qu'elles étaient souvent le fait de
confréries auxquelles ne manquait jamais, au moyen
âge, un lien religieux. Cependant il s'est vite, au moins
dans une certaine région, détaché plus ou moins com-
plètëmënt de tout rapport avec l'Église, et les monu-
ments, malheureusement trop peu nombreux, qui nous
restent du théâtre profane, sont plus intéressants que
tous ceux du théâtre religieux. — D'ailleurs, par les
joculatores, qui débitaient souvent, comme nous l'avons
vu, des débats (§ 110) ou des monologues i§ 109) dans
les réunions, le théâtre a aussi des origines toutes pro-
fanes, et une veine qui ne fut sans doute jamais inter-
rompue, bien qu'elle se montre rarement aux yeux dans
l'obscurité des siècles reculés, va des mimes romains
aux farceurs du xv" siècle.
132. C'est à Arras, où nous avons déjà vu (§ 120) une
poésie lyrique si originale, qu'appartiennent à peu près
14
210 LITTERATURE DRAMATIQUE.
tous ces monuments. Le Jeu de saint Nicolas de Jean
Bodel (voir §167), malgré son caractère en grande partie
profane, ne peut être séparé du théâtre religieux; mais
tout lien avec la religion fait défaut dans les deux autres
pièces artésiennes dont'nous allons parler, et qui sont
de beaucoup ce que le moyen âge nous a laissé de plus
remarquable en fait de poésie dramatique. Elles sont
l'une et l'autre d'Adam appelé le Bossu (sans qu'il le
fût). Né à Arras vers 1235, il se destina à être clerc, fit
des études latines, puis, entraîné par les charmes d'une
jeune fille d'Arras, il l'épousa, et regretta bientôt
d'avoir brisé sa carrière. Il voulut aller à Paris pour
reprendre ses études (c'est dans ces dispositions qu'il
se représente dans le Jeu de la Feuillée). Il renonça pro-
bablement bientôt à son projet et revint à Arras : il fut
mêlé aux troubles qui alors agitaient sans cesse la ville
et, à peu près exilé, se retira à Douai avec son père (c'est
là que Baude Fastoul, vers 1265, lui adresse ses adieux
dans son Congé). Il suivit sans doute Bobert d'Artois
quand il se rendit auprès de Charles d'Anjou, en 1283,
et plut à ce dernier, qui se l'attacha, probablement en
qualité de ménestrel. Charles étant mort peu après (1285),
Adam célébra la gloire de son protecteur dans un poème
en laisses monorimes de vingt vers, où il paraît avoir
simplement renouvelé une œuvre plus ancienne, et dont
il n'a fait ou dont nous n'avons que le début. Dans In
première hypothèse, il faudrait sans doute admettre
que ce fut la mort qui l'arrêta; en tout cas il avait cessé
de vivre en 1288, époque où un sien neveu, Jean Madot,
copiste dont nous avons divers manuscrits, parle de lui
comme d'un défunt. Il fut célèbre de son vivant comme
musicien et comme poète; après sa mort, on montrait
son tombeau à Naples, et on désignait, longtemps après
lui, parle nom de rue maistre Adam, la rue d'Arras où il
LITTERATURE DRAMATIQUE. 211
avait habité. — Sa première production dramatique est
le Jeu de la Feuillée ou le Jeu Adam, qu'il fit représenter
;i Arias vers 12G2. C'est l'œuvre la plus étrange qui se
puisse imaginer : le poète s'y met en scène, ainsi que
son père, qu'il raille de son avarice, sa femme, dont il
parle avec la plus cynique liberté, ses amis et ses voi-
sins, bafouant gaiement les vices, les travers ou les
ridicules de chacun. Le tracas d'une grande foire, le
charlatanisme d'un devin populaire et d'un moine prê-
cheur de reliques sont ensuite exposés sur le théâtre,
puis le fantastique le plus gracieux y apparaît dans la
personne des fées Arsile, Morgue et Gloriande (qui
prédisent qu'Adam n'ira pas à Paris) et dans l'exhibition
de la roue de Fortune, qui tourne, emportant ceux qui
y sont attachés tantôt au faîte, tantôt dans la poussière;
enfin tout se termine par une longue et amusante scène
de taverne, où lé moine, qui a gagné gros avec ses
reliques, est dépouillé par les autres, qui lui font malgré
lui payer leur écot. La pièce se jouait sous la feuillée,
c'est-à-dire sous une de ces tonnelles de verdure qu'on
élevait pour célébrer la fête de mai, la fête du printemps
revenu : c'est à cette fête, où les membres du Pui
d'Arras (§ 127) donnaient de joyeuses représentations,
. que se rattache la pièce elle-même, qui fait involontai-
rement, en gardant bien entendu la distance, songer à
Aristophane par la hardiesse des personnalités et le
mélange des styles et des rythmes, œuvre unique dans
la littérature du moyen âge, pleine de poésie, de gros-
sièreté, de charme, de malice, de satire et de fantaisie.
Une opinion très vraisemblable, et qui jette du jour
sur l'ensemble de l'œuvre en même temps qu'elle en
excuse plus d'un passage, est que c'est une véritable
sotie, analogue à celles qui furent si en vogue deux
sii clés plus tard et qu'elle provient de la fête des fous
212 LITTERATURE DRAMATIQUE.
comme les soties postérifMires. Elle est seule de son
espèce au xnr siècle; il ne faut pas s'en étonner: il es)
surprenant au contraire que cette œuvre si personnelle
et toute de circonstance nous soit parvenue (entière
dans un manuscrit, très incomplète dans deux autres);
il faut l'attribuer sans doute à la grande renommée que
s'acquit plus tard le poète, et il est permis de croire
que nous avons perdu bien des compositions du même
genre, sinon de la môme valeur, que rien ne préservait
de l'oubli auquel les vouait leur caractère éphé-
mère.
133. L'autre pièce d'Adam, plus célèbre que la Feuillée,
est le Jeu de Robin et Marion : elle paraît avoir été
composée par lui pendant son séjour en Italie, et ne
fut représentée pour la première fois à Arras, sansdouto
aussi aux fêtes du printemps, qu'après la mort de
l'auteur. Le hasard nous a conservé un prologue drama-
tique, le Jeu du pèlerin, qui fut composé à cette occasion :
un pèlerin, censé revenu de Calabre et de Pouille,
expose aux spectateurs que maître Adam, grand clerc
arlésien, mort naguère à Naples, a fait l'o'iivre qu'on
va jouer, et les engage à l'entendre avec bienveillance.
Deux ribauds se moquent de lui et veulent le battre, et .
le pèlerin s'enfuit, laissant la scène libre pour la vraie
pièce. Ce prologue, très plat d'ailleurs, mais qui a le
mérite de nous donner quelques renseignements sur
Adam, est assurément curieux comme témoignage de
la vie théâtrale active qui devait exister alors, au moins
à Arras. La pièce elle-même (dont il faut écarter
quelques scènes interpolées, vers la fin, par l'auteur du
Prologue) est un petit chef-d'œuvre, aussi délicat et
gracieux que le Jeu de la Feuillée était fougueux et dis-
parate. Adam en a pris le sujet dans le thème commun
LITïÉliATl lîi: IlliAMATIQUE. 213
des pastourelles (§ 122) : on y voit d'ordinaire un chevalier
s'efforcer d'enlever à un berger l'amour d'une bergère ;
dans maintes chansons alors connues de tout le monde
la bergère s'appelait Marion, le berger s'appelait Robin.
Ce sont eux qu'Adam met en scène, et, à toute occasion,
employant, mais d'une façon plus piquante, le procédé
de Guillaume de Dole et autres romans (§ 67), il leur met
dans la bouche des refrains ou des fragments de chan-
sons qui appartiennent à ce qu'on peut appeler le cycle
de Robin et Marion. Le chevalier est éconduit par la
pastoure, et bien que Robin reçoive à cette occasion
quelques coups, les deux amants sont pleins de conten-
tement et s'apprêtent à célébrer une fête rustique. Leurs
parents, leurs amis, les rejoignent dans le champ où ils
font paître leurs bêtes; on met toutes les provisions en
commun, on joue à des jeux villageois, on chante, on
danse, et finalement on part pour faire célébrer le
mariage de Robin avec Marion. Tout cela est montré
dans des scènes claires, rapides, bien construites, et en
petits vers de huit syllabes fort alertes et agréables.
Aussi le Jeu de Robin, qui était à beaucoup d'endroits
mêlé de chant, et qu'on a appelé non sans raison, tant
pour le sujet même que pour l'exécution, le premier de
nos opéras comiques, eut-il un grand succès et fut-il
sans doute souvent représenté, après l'avoir été à Arras,
dans diverses villes du nord de la France. Cependant
la mention, à la fin du xive siècle, d'une exécution d'un
« jeu de Robin et Marion » ne doit probablement pas
être rapportée à l'œuvre d'Adam, qui avait trop vieilli
comme langue : le cycle auquel cette œuvre se rattache
était resté populaire et pouvait donner matière à des
représentations de divers genres, notamment à des
danses. On se plaisait aussi à peindre sur les murailles
des châteaux, plus tard à figurer en tapisserie, des
214 UTTÉRÀTUBE DRAMATIQUE.
scènes de la vie pastorale, dont Robin et Marion étaient
presque toujours les principaux personnages.
134. Sur un feuillet de garde de manuscrit on a trouvé
une petite farce intitulée : Du garçon et de l'aveugle, qui
fut jouée à Tournai aux environs de 1277. C'est une
bagatelle (un jeune garçon s'offre à mener un aveugle,
le bafoue et le dépouille; il lui donne aussi des coups en
feignant d'être un autre, comme fait Scapin à Géronte
dans Molière), d'ailleurs gaie dans la grossièreté de
plus d'un de ses traits, mais dont le principal intérêt
est son existence même. Nous ne saurions pas sans
elle qu'on jouait des farces au xme siècle (le mot farce
lui-même n'apparaît que plus tard), et elle permet de
conjecturer qu'au moins dans le nord de la France on
en jouait dès lors beaucoup, qui ne nous sont pas
parvenues.
DEUXIÈME PARTIE
LITTERATURE RELIGIEUSE
135. Nous avons rapidement esquissé (ci-dessus §§ 9-12)
la première période de l'établissement du christianisme
en Gaule. A la fin de l'époque mérovingienne, l'Église
était tombée dans une profonde ignorance, comme en
témoignent les manuels que l'on composait pour l'ins-
truction des clercs; elle s'obstinait cependant à ne
parler que le latin, bien qu'elle ne le connût plus que
très imparfaitement. Charlemagne introduisit une
double réforme, qui, en relevant l'instruction du clergé,
rendit possible celle du peuple. D'une part les savants
qu'il appela ou suscita travaillèrent, sous son inspira-
tion, à faire revivre la connaissance du latin et à resti-
tuer ainsi une pureté relative à la langue qui devait
rester celle de l'Église ; d'autre part il fit décider (con-
cile de Tours de 812) que dorénavant les prêtres instrui-
raient le peuple dans sa langue. — C'est de là que date
la littérature religieuse en langue vulgaire. Les clercs
s'appliquèrent dès lors à composer des ouvrages qui
fissent connaître au peuple l'histoire religieuse, le
dogme et la morale, et naturellement cette littérature, à
216 LITTERATURE RELIGIEUSE.
quelques exceptions près, fol durant tout le moyen âge
leur œuvre exclusive. — Elle a moins d'intérêt que la
littérature profane, puisque, pour une bonne partie au
moins, elle se compose de traductions et d'imitations;
mais la religion au moyen âge pénétrait si profondé-
ment la vie publique et privée que la littérature reli-
gieuse se trouve mêlée à toutes les manifestations de
cette vie; d'ailleurs le christianisme, c'est-à-dire la con-
ception religieuse et philosophique élaborée par les rai-
sonneurs grecs sur la base de la prédication évangélique,
prit en Occident, surtout dans le monde à demi savant
auquel cette littérature en langue vulgaire appartient,
un caractère qu'il est intéressant d'étudier; enfin les
légendes, soit venues de loin, soit nées spontanément,
abondent dans cette littérature, et se prêtent aux
recherches les plus fécondes et les plus variées. —
Comme la littérature profane, la littérature religieuse
est narrative, didactique, lyriijuc, ou dramatique; comme la
littérature profane, elle a pris de préférence au moyen
Age la forme poétique, et cette forme est aussi la seule
quelle ait revêtue quand elle étaitlyrique ou dramatique.
SECTION I
LITTÉRATURE NARRATIVE
CHAPITRE I
LES TRADUCTIONS INTÉGRALES DE LA BIBLE
136. On traduisit en français la Bible entière à Paris,
vers 1235, et plus tard VHistoria scholastica de Pierre le
Mangeur (f 1179). qui en abrège d'un bout à l'autre la
partie historique en l'accompagnant d'un commentaire
explicatif et de synchronismes. L'auteur de cette der-
nière traduction, beaucoup plus ample que l'original,
et qui, dans des rédactions postérieures, arriva à com-
prendre la Bible elle-même presque entière (d'après la
traduction parisienne), est Guiart des Moulins, cha-
noine, puis doyen d'Aire en Artois (mort vers 1320), qui
l'écrivit entre 1291 et 1295. Quant à la traduction de la
Bible, elle est due sans doute à la collaboration de
plusieurs membres de l'université de Paris. Il faut
noter que cette version parisienne du xme siècle s'est
maintenue, pour certaines parties, à travers des rema-
niements successifs, jusque dans les Bibles françaises
les plus employées aujourd'hui par les églises protes-
tantes. — Sous le titre inexact de Bible en français, maître
Roger d'Argenteuil, au xnr siècle, écrivit une compila-
218 LITTERATURE NARRATIVE.
lion de récits bibliques, de légendes apocryphes et de
notes diverses, qui suit l'histoire sacrée depuis le com-
mencement du monde jusqu'à la ruine de Jérusalem.
137. En 1190, un chanoine appelé Herman, né à Valen-
ciennes, composa un poème biblique, comprenant l'An-
cien Testament (mais, sauf pour la Genèse, extrême-
ment abrégé) et le Nouveau (avec de nombreuses sup-
pressions et l'addition de légendes apocryphes); Herman
iraite son sujet avec beaucoup de liberté et un véritable
talent poétique; son œuvre nous est parvenue dans des
rédactions assez différentes, qui ne remontent peut-
être pas toutes directement à l'auteur. — Au xme siècle
aussi, Jean Malkaraume traduisit en vers tous les livres
historiques de la Bible (Ancien et Nouveau Testament),
ce que fit de nouveau, au commencement du xive siècle,
Macé, curé de la Charité-sur-Loire, en y joignant plu
sieurs livres bibliques d'autre caractère. — La Bible de<>
sept états du monde, de Geufroi de Paris (1243), est une
compilation qui contient beaucoup de choses qui ne
sont pas dans la Bible, et qui dans ses 22 000 vers est
plus souvent moralisante que narrative (voir § 139).
CHAPITRE II
L HISTOIRE JUIVE
138. L'Ancien Testament offrait à l'imagination plus
d'attrait et de variété que le Nouveau, et permettait en
même temps aux vulgarisateurs plus de liberté dans le
traitement. Aussi en trouve-t-on de bonne heure des
traductions et imitations. Les quatre livres des Rois
furent mis au xne siècle dans une excellente prose fran-
çaise (nous en avons un manuscrit exécuté en Angle-
terre dès le xir siècle, et trois écrits en France au
xme), qui nous offre un des plus précieux spécimens de
l'ancienne langue; la traduction est loin d'être servile,
le style est d'une allure vivante, aisée et naturelle; cer-
tains morceaux, notamment les cantiques intercalés,
sont rendus en prose rythmée et rimée. — On possède
aussi une version en prose des Juges, avec un prologue
en vers, qui nous apprend qu'elle fut exécutée, peut-
être en Terre Sainte, pour des frères du Temple ou de
l'Hôpital. — On a deux traductions en prose des Mac-
chabées; mais ce livre tout guerrier, qui devait plaire au
moyen Tige, fut en outre l'objet d'imitations en vers; on
n'en connaît pas moins de cinq : une en décasyllabes,
220 LITTÉRATURE NARRATIVE.
peut-être d'un certain Roger (v. 176), encore du xnc siècle,
où l'histoire est devenue une véritable chanson de
geste; une autre en alexandrins, connue seulement, ainsi
qu'une en vers de huit syllabes rimant deux à deux,
par une rédaction en prose; une quatrième et une cin-
quième également en petits vers plats, l'une anonyme
(1285), l'autre commencée par Gautier de Belleperche
(près Laon), arbalétrier, et terminée en 1280 par Pierre
du Ries. — On possède un poème assez remarquable,
composé en Angleterre au xmc siècle, sur l' Ancien Testa-
ment; il est écrit partie en forme de chanson de geste,
partie dans la forme, rare au moyen âge, de vers déca-
syllabiques rimant deux à deux. — La Genèse fut mise
en vers de huit syllabes assez médiocres par Éverat
pour la comtesse Marie de Champagne (voir § 57). —
L'épisode de Joseph a été conté, au xn° siècle, à ce qu'il
semble, en vers de six syllabes rimant deux à deux,
dans une version d'un style archaïque, fidèle et assez
élégante. — La même forme rare est employée dans un
abrégé, sec et sans grande valeur, du livre de Job, dont
nous n'avons qu'un fragment; une paraphrase de ce
même livre est en vers de huit syllabes. — Le court
poème de l'Exode n'est qu'une paraphrase moralisante,
que l'auteur n'a pas conduite jusqu'au bout. — Une
imitation agréable du livre de Tobie est due à Guillaume
le Clerc de Normandie, auteur de plusieurs autres
ouvrages (§ 100). — A l'Ancien Testament se rattachent
encore quelques apocryphes, comme l'histoire d'Adam
et Eve (dont on a des versions en prose et en vers), une
ancienne et curieuse légende sur la femme de Salomon
(voir § 51), mentionnée par divers textes (sur Salomon
el Marcoul, voir § 103), d'autres récits relatifs au même
roi, etc. — Malgré cela, cette veine est moins riche qu'on
ne l'aurait supposé.
CHAPITRE III
l'histoire évangélique
139. L'histoire du fondateur et des débuts du chris-
tianisme est contenue dans les évangiles canoniques.
On ne put songer dès les premiers temps à les traduire,
car, sans parler de scrupules qui n'avaient pas encore
eu l'occasion de se produire, l'âge de la prose n'était
pas venu. Mais on eut de bonne heure l'idée de com-
posër en vers, à l'usage des laïques, des résumés de
l'histoire évangélique. Le plus ancien exemple de ce
genre est le poème de la Passion, en vers octosyllabiques
rimant deux à deux et groupés en quatrains, mélangé
de formes françaises et méridionales, qui remonte au
Xe siècle : ce n'est peut-être que la dernière partie, seule
conservée, d'une histoire complète du Christ; on y
remarque déjà quelques traits (comme la descente aux
enfers) ajoutés au récit des évangiles. Toutefois les
ouvrages de ce genre sont beaucoup plus rares qu'on
ne le croirait; nous ne connaissons guère sur l'histoire
évangélique qu'un poème du xmc siècle, assez fidèle; il
faut y joindre un poème sur la Passion, dont de nom-
breux manuscrits attestent le succès, et que Geufroi de
Paris (§ 137) ne s'est pas fait scrupule d'annexer à sa
222 LITTERATURE NARRATIVE.
compilation. Cette pauvreté tient peut-être à ce qu'on
exposait suffisamment cette histoire au peuple dans
l'instruction religieuse donnée à l'église. — On fit aussi
de bonne heure des traductions, en prose et en vers
(notons-en une en vers, avec un très long commentaire,
de l'Anglo-Normand Robert de Gretham au xme siècle;
voir§ 152), des extraits des évangiles qui figurent chaque
dimanche à l'office (Jean de Vignai y joignait celle des
épîtres de chaque dimanche); l'Église approuva ces
traductions, mais il n'en fut pas de même quand on eut
l'idée de traduire intégralement les évangiles eux-mêmes
dans tout leur contenu. On vit un grand danger à laisser
des laïques connaître directement, et sans être guidés
et éclairés par les prêtres, les sources de la foi catho-
lique. Un groupe d'habitants de Metz ayant fait tra-
duire en français, vers la fin du xne siècle, les évangiles
et quelques autres livres, Innocent III, dans un bref de
1199, les condamna, et ordonna la destruction de ces
livres; et de fait la lecture du Nouveau Testament en
langue vulgaire fut dans le midi un des aliments prin-
cipaux, comme un des grands attraits, de l'hérésie vau-
doise et albigeoise. Une version partielle, en dialecte
lorrain, du commentaire de Haimon sur les épîtres et
évangiles du temps pascal peut bien appartenir à cette
série de traductions messines.
140. En revanche les traductions de récits apocryphes
relatifs à l'histoire évangélique sont innombrables. La
plupart de ces récits sont d'origine gréco-asiatique; ils
se sont formés du ne au ve siècle dans les communautés
chrétiennes de l'Orient pour satisfaire la curiosité el
l'imagination que les récits si brefs et si peu circons-
tanciés des évangiles ne contentaient pas, et plus d'un,
sans être expressément approuvé par l'Église, a été
i/llISTOIKE ÉVANGÉLIQUE. 223
tacitement adopté par elle. Dans une Histoire de Marie et
de Jésus composée en laisses monorimes en Angleterre
au xiii0 siècle, beaucoup de ces récits apocryphes sont
mêlés à un abrégé du texte évangélique. Mais ils ont
souvent été traduits à part. Signalons comme ayant été
traduits de bonne heure : V Évangile de l'enfance (histoire
des premières années de Jésus-Christ; on en a plusieurs
versions, dont une par Gautier de Coinci); — ^'Évangile
de Nicodème (c'est là qu'est racontée, avec une véritable
puissance dramatique, la descente victorieuse du Christ
aux enfers; nous en avons trois traductions en vers,
dont une par André de Coutances (voir § 108); — la
Légende de Judas (imitée de celle d'OEdipe : poème fran-
çais du xme siècle) ; — la Légende de Pilate, dont, on ne
sait trop pourquoi, le corps fut censé, après sa mort,
avoir causé d'étranges perturbations partout où on lui
donnait la sépulture; — la Vengeance du Sauveur (curieuse
interprétation chrétienne de la destruction de Jérusalem
par Titus) ; — la Légende delà croix (faite du bois de l'arbre
du bien et du mal; on en a diverses rédactions), etc. Il
faut surtout noter l'influence que l'évangile de Nicodème,
dont la première partie donne un rôle important à Joseph
d'Arimathie, a exercée sur le développement des récits
relatifs au saint graal (voir § 59), et signaler la trans-
formation de la Vengeance du Sauveur en une véritable
chanson de geste, dont nous avons même plusieurs ver-
sions assez différentes. — Dans le cœur même de l'his-
toire évangélique, des traits apocryphes avaient profon-
dément pénétré, et nous les voyons mentionnés dans la
poésie vulgaire plus souvent que les traits authentiques :
telles sont les histoires de sainte Anastase, qui perdit
puis recouvra l'usage de ses mains lors de la délivrance
de la sainte Vierge, — du chapon rôti qui se mit à
revivre et à s'envoler de la table d'Hérode, — de Longin,
224 LITTÉRATURE NARRATIVE.
l'avcugle-né, qui porta un coup de Innce dans le flanc
du Seigneur sur la croix, et, s'étant touché les yeux avec
le sang qui en coulait, vit et crut, etc. On peut encore
rapporter ici la vie, en grande partie légendaire, de
saint, Jean-Baptiste, dont nous possédons, en fragments,
une rédaction du xme siècle, remarquable en ce qu'elle
est écrite en alexandrins rimant deux par deux (voir § 137 ,
et diverses compositions en vers sur les Trois Maries. —
Nous ne connaissons pas de traductions anciennes isolées
des Actes des Apôtres (celle que Lambert de Liège, fon-
dateur des Béguins et Béguines, avait faite vers 1170 est
malheureusement perdue); mais nous signalerons ici, si
c'en est bien le lieu, une version du xme siècle de l'Apo-
calypse en prose (une version en vers fait partie du grand
ouvrage biblique de Macé de la Charité, voir §137). Une
autre version, en prose et abrégée, de la célèbre vision
eut pendant tout le moyen âge et jusqu'au xvie siècle un
immense succès, dû aux images qui accompagnaient
toujours le texte autant qu'au texte lui-même. — Enfin,
on peut mentionner ici le Livre des Sibiles, composé par
un poète anglo-normand en vers de six syllabes rimant
deux à deux pour Maheut, veuve de l'empereur Henri V
et du comte Geoffroi d'Anjou et mère de Henri III,
l'année même de sa mort (1160) : l'auteur énumère les
dix sibylles que mentionnent les Pères de l'Église et
rapporte leurs prétendues prophéties. — Aux prédic-
tions des sibylles se rattache la description des Quinze
signes qui précéderont la fin du monde et le jugement
dernier ; cette description, présentée en abrégé dans des
vers latins imités du grec et insérés par saint Augustin
dans un de ses livres, a fait l'objet d'un petit poème qui
a eu beaucoup de succès. — On peut y joindre un poème
sur l'Antéchrist, imité du livre fameuxd'Adson de Montier*
en-Dcr (\"siècle), qui d'ailleurs a été bien moins répandu.
CHAPITRE IV
LA LEGENDE DE LA VIERGE
141. A l'histoire évangélique se rattachent naturelle-
ment les légendes nombreuses qui concernent la vierge
Marie. Un très ancien apocryphe (qui fut plus tard
réuni à VÈvangile de VEnfance) nous raconte sa naissance
déjà miraculeuse (celle de sa mère Anne, fille du roi
Fanuel, est l'objet d'une légende absolument fantas-
tique), ses premières années et son mariage avec
Joseph; il fut mis en vers par Wace (voir § 93), par
Gautier de Coinci (§ 142), etc. ; la Mort Nostre Dame,
racontant l'assomption de son corps au ciel, a été
mise par Herman de Valenciennes en laisses de déca-
syllabes monorimes et par un autre poète en vers octo-
syllabiques. On a plus d'une fois mis en vers (notam-
ment Henri de Valenciennes) les Sept joies de Notre Dame,
et aussi les Regrets de Notre Dame ou sa douloureuse
plainte au pied de la croix : parmi les poèmes ins-
pirés par ce thème, celui qui a eu le plus de succès est
celui de Huon le Roi, de Cambrai (§ 76), composé dans
la strophe de douze vers rendue populaire par Hélinand.
142. Mais les récits concernant la vie et la mort de la
mère de Jésus-Christ ne sont rien en comparaison de
15
226 LITTERATURE NARRATIVE.
ceux qui sont consacrés aux effets de son intercession
et aux prodiges obtenus par la dévotion qui s'adresse à
elle. Des collections latines de miracles de la Vierge se
forment de plusieurs côtés et s'agglomèrenl pondant les
xie et xne siècles, et donnent bientôt lieu à des traduc-
tions françaises, soit de recueils, soit de récits isolés.
Nous savons qu'un certain Guiot en avait mis en vers
un grand nombre dès le XIIe siècle, avec beaucoup de
succès. C'est peut-être à cet ouvrage qu'appartiennent de
précieux fragments, écrits encore au xir3 siècle, qu'on
a découverts à Orléans. Le recueil français le plus
important à tous égards est celui de Gautier de
Coinci, moine à Saint-Médard de Soissons, puis
prieur de Yic-sur-Aisne, mort à cinquante-neuf ans
en 1236. Ses Miracles de Nostre Dame ne comprennent pas
moins de 30 000 vers: ils sont empruntés à diverses
sources, mais surtout à la compilation latine de Hugues
Farsit (xne s.). C'est le monument le plus curieux et
souvent le plus singulier de la piété enfantine du
moyen âge : la dévotion à Marie y est présentée comme
une sorte de garantie infaillible non seulement contre
toute espèce de maux, mais contre les plus légitimes
conséquences temporelles ou éternelles des péchés ou
même des crimes. Dans ces histoires, qui ont révolté la
piété plus raisonnée aussi bien que la philosophie des
temps modernes, il faut reconnaître cependant un charme
doux et pénétrant, une naïveté, une tendresse et une sim-
plicité de cœur qui touchent en faisant sourire. C'est là
qu'on voit par exemple un moine malade guéri par le lait
que Notre Dame vient elle-même l'inviter à puiser à « sa
douce mamelle »; un voleur qui. ayant l'habitude de se
recommander à la Vierge chaque l'ois qu'il allait embler,
est soutenu par ses blanches mains, pendant trois
jours, au gibet où il est pendu, jusqu'à ce que, le trou-
LA LEGENDE DE LA VIERGE. 227
vant en vie, on le gracie à cause du miracle; un moine
ignorant qui ne sait réciter autre chose q\i'Ave Mario, et
qu'on méprise à cause de cela, mais qui. étant mort,
révèle sa sainteté par cinq roses qui sortent de sa
bouche en l'honneur des cinq lettres du nom de Marie;
une nonne qui, ayant quitté son monastère pour se
livrer au péché, y revient après de longues années, et
trouve que la sainte Vierge, à laquelle malgré tout elle
n'a cessé d'adresser chaque jour une oraison, a rempli
pendant tout ce temps son office de sacristine, de sorte
que personne ne s'est aperçu de son absence, etc., etc.
(lautier écrit dans un style qui n'est rien moins que
simple; il poursuit à tout prix la rime riche, et se plaît
à des jeux de mots et de sons souvent fatigants et ridi-
cules; mais il est tout pénétré de l'esprit de son sujet,
et il nous fait vivre avec lui dans l'étrange atmosphère
intellectuelle et morale où il se sent à l'aise. Malheureu-
sement, à sa tendre piété envers la mère de grâce, à sa
libre censure contre la corruption de l'Église, il joint le
fanatisme le plus intolérant : il se répand notamment
contre les juifs et, à cause d'eux, contre les chrétiens
qui les souffrent parmi eux au lieu de les exterminer,
en invectives odieusement féroces, et qui contribuèrent
peut-être plus d'une fois, vu le succès dont jouirent ses
récits, à ces explosions de fureur populaire dont le
XHI° siècle offre trop d'exemples.
1 i:î. Un autre recueil de Miracles de Notre Dame, spécia-
lement relatif à ceux de Notre Dame de Chartres, a été
composé, ou du moins terminé, en 1262, par un prêtre
de cette ville, Jean le Marchant, devenu chanoine de
Péronne ; il n'a pas la valeur poétique de celui de Gau-
tier de Coinci, auquel l'auteur ne s'est d'ailleurs fait
aucun scrupule de dérober quelques-uns de ses récits,
228 LITTERATURE NARRATIVE.
en plaçant à Chartres la scène qui dans l'original était
à Soissons; les autres sont traduits d'un recueil latin
un peu antérieur. — Sans parler d'autres moins impor-
tants, comme celui d'Everardde Gateley, il faut signaler
un recueil de soixante miracles rimes vers le milieu du
xme siècle dans la région lyonnaise et curieux par la
langue. — Le moine anglo-normand Adgar avait tra-
duit dès le xir siècle, avec simplicité mais sans talent,
un recueil latin dû, pour une bonne partie, à l'historien
anglais Guillaume de Malmesbury; un recueil analogue
a été rimé au xmc siècle par un autre anglo-nor-
mand. — En dehors de ces collections il existe beau-
coup de récits isolés de miracles de la sainte
Vierge ; plusieurs se trouvent dans la Vie des Pères
dont il sera parlé tout à l'heure; un certain nombre
appartenaient originairement à Dieu lui-même ou à
quelque saint et ont été transportés à Marie pour
rehausser sa gloire et plaire davantage. Quelques-uns
de ces récits sont fort intéressants, soit par leur anti-
quité et leur origine, soit par l'esprit qui les anime.
Nous signalerons l'histoire, rédigée d'abord en grec, de
Théophile, clerc d'une église d'Asie, qui, ayant signé
un pacte avec le diable, obtint de la Vierge qu'elle irait
le lui arracher; — deux versions d'une étrange et sombre
histoire, dans la première desquelles c'est encore Vénus
qui figure, tandis que Marie a pris sa place dans la
seconde (comme dans une troisième, insérée par Gau-
tier de Coinci dans son recueil) : un jeune homme, le
jour de son mariage, met son anneau nuptial au doigt
d'une statue, qui le soir vient réclamer les droits
d'épouse qu'il lui a conférés ainsi (c'est de là que
Mérimée a tiré la Vénus dllle); — l'histoire du chevalier
qui, pour obtenir la richesse, avait promis au diable de
lui livrer sa femme : pendant qu'il la conduisait, elle
LA LEGENDE DE LA yiERGE. 229
entra pour un moment dans une chapelle de la Vierge,
et ce fut la Vierge qui en sortit à sa place, et qui, remise
à Satan, le punit sévèrement de son audace; — celle
d'un autre chevalier qui, allant au tournoi, s'oublia dans
une église à prier Notre Dame, laquelle pendant ce
temps combattait sous son armure et gagnait pour lui
le pris: du tournoi; — l'histoire (chef-d'œuvre peut-être
du genre par sa délicieuse et enfantine simplicité) du
Tombcor Nostre Dame, de ce pauvre jongleur qui, devenu
moine, et ne sachant comment servir la Vierge à l'instar
de ses confrères, faisait devant elle, en secret, les cul-
butes qui lui avaient valu le plus de succès ; des témoins
qui, étonnés de ses retraites, s'étaient cachés dans la
chapelle virent, après ses exercices, la mère de Dieu
venir elle-même éponger le front trempé de Sueur de
son « tombeor ». — Nous pourrions en citer bien
d'autres; mais ces exemples suffisent pour donner une
idée de toute cette classe de récits.
143 bis. Ce rôle de protectrice des pécheurs a fait donner
à la Vierge celui d'avocat du genre humain dans une
curieuse composition, due à un juriste italien du xme
ou du xryc siècle, mais non à Bartole, comme on Fa dit
souvent, le Processus Satanae contra Virginem coram Jesu
judice, où elle plaide et gagne la cause de l'humain
lignage dans le procès où Satan prétend le revendiquer.
Cette bizarre fiction, où les deux adversaires invoquent
à l'envi le droit romain et le droit canon, a été mise en
vers français vers 1320 par un clerc de Bayeux. Ce
même auteur, qu'on a voulu sans motifs suffisants
identifier à un personnage connu appelé Jean Justice, a
raconté la terrible façon dont Notre Dame se venge de
ceux qui prétendent usurper son bien (entendez le bieiï
de l'Église) dans le petit poème de la Chapelerie de Baieus,
écrit à propos d'un procès jugé à Paris en 1321.
CHAPITRE V
LES LEGENDES HAGIOGRAPHIQUES
144. L'histoire évangélique a pour suite l'histoire de
l'Église et notamment l'histoire des saints. L'intermé-
diaire est fourni par les Actes des Apôtres, qui, s'ils ne
furent pas traduits anciennement, ont cependant donné
à la poésie française le thème des plus anciennes farci-
tures en langue vulgaire, relatives à la fête de saint
Etienne. Ce premier martyr était le patron des diacres,
et, à cause de cela, le jour de sa fête, une certaine liberté
était donnée, dans l'église même, à la jeunesse cléricale.
Elle en profita de très bonne heure pour intercaler,
entre les phrases du chapitre des Actes dont on donnait
à l'office lecture en latin en guise d'épitre, des strophes
françaises monorimes qui reproduisaient le récit con-
tenu dans ce chapitre; nous avons plusieurs versions de
ces « épîtres farcies », dont une ou deux remontent au
xne siècle (d'autres épîtres farcies se rapportent aux
fêtes de saint Jean l'évangéliste, des saints Innocents
ou de l'Epiphanie, toutes fêtes voisines de celle de saint
Etienne et chères aussi aux écoliers). — Une vie apo-
cryphe et très fabuleuse de saint Jean l'évangéliste fut
LES LÉGENDES HAGIOGRAPHIQUES. 231
rimée vers 1270 par Tierri de Vaucouleurs. — Une
Légende Tort ancienne, la Vision de saint Paul, où on
raconte ce qu'il vit dans une extase, en enfer et au ciel,
lui mise de bonne heure en français. — Les vies de
Marie-Madeleine sont moins nombreuses dans le nord
de la France que dans le sud, où des légendes locales
s'il aient attachées à ce thème; on a cependant une vie
de sainte Madeleine par Guillaume le Clerc (§ 100) et le
fragment dune autre, anglo-normande. — Quant aux
faux Actes des Ajiôtres, attribués à Abdias, qui fournirent
au xvL' siècle le sujet d'un célèbre mystère, ils n'étaient
pas encore très répandus à l'époque qui nous occupe;
on a cependant de plusieurs morceaux d'anciennes ver-
sions en prose.
1 '<■>. La véritable épopée chrétienne, si l'on peut ainsi
dire, commence avec les Vies des Pères du désert, écrites
d'abord en copte ou en grec, puis mises en latin par
saint Jérôme, Rufln et autres : une traduction en prose,
avec un prologue en vers, en fut faite pour Blanche de
Navarre, comtesse de Champagne (1199-1229). Sous le
nom de Vies des Pères, on a en français du xme siècle
un recueil de 42 contes dévots (une suite en comprend
'M de plus), qui ne sont pas tous pris dans le recueil
latin, lequel est d'ailleurs souvent allégué comme
source de légendes qui ne s'y trouvent pas. A ce même
courant d'hagiographie ascétique orientale se ratta-
chent : la Vie de sainte Thaïs, qui de courtisane devint
anachorète (poème du xne siècle, incorporé au beau
Poètne moral mentionné! 153); celle de sainte Eitphrosync
(qui par raffinement d'ascétisme se couvrit de vête-
ments d'homme et vécut dans un couvent de moines,
beau poème du xne siècle en dizains monorimes); —
celle de sainte Marine, qui subit la même épreuve dans
232 LITTÉRATURE NARRATIVE.
des circonstances encore plus méritoires; — la merveil-
leuse légende des Sept Dormants (poème en petits vers
par Chardri, trouveur anglo-normand du commence-
ment du xme siècle). — Un pendant occidental fut
donné, au ve siècle, aux Vies des Pères par Sulpice Sévère
dans sa Vie de saint Martin, qui, avec beaucoup d'addi-
tions parfois puisées dans la tradition orale, fut mise
en rimes léonines au commencement du xme siècle par
le Tourangeau Païen Gastinel. — C'est aussi par ému-
lation pour les beaux récits de la Vie des Pères que le
pape Grégoire Ier composa son célèbre Dialogue, où il
oppose à toutes les merveilles des ermites égyptiens
celles non moins grandes de la vie de saints person-
nages latins. Le Dialogue fut traduit en prose très litté-
ralement dans la région wallonne à la fin du xne siècle;
nous avons en outre deux traductions en vers octosyl-
labiques, l'une faite en Angleterre en 1212 par le frère
Anger, l'autre du xive siècle : les deux traducteurs ont
joint à leur œuvre la Vie du pape Grégoire, dans laquelle
se trouve la légende bien connue qui le représente
délivrant, par ses prières, l'âme de Trajan des peines
de lenfer, à cause de la justice de cet empereur.
146. Les vies des saints de l'époque romaine ou méro-
vingienne, objets dès leur vivant d'une piété populaire
qui se maintint longtemps après leur mort, furent sou-
vent mises en vers français (pour les vies des saints en
général, nous ne nous occuperons que des vies rimées,
les vies en prose, simples traductions, intéressant peu
la littérature). Nous avons ainsi une vie de saint Lau-
rent, qui paraît avoir été écrite en Normandie à la fin
du xiic siècle; une de sainte Geneviève, par Renaud;
une de saint Rémi, par Richer; une de saint Éloi écrite
à Moyon (xin1 siècle), une de saint Gilles (xne siècle), par
LES LEGENDES HAGIOGRAPHIQUES. 233
le chanoine anglais Guillaume de Berneville; une de
saint Bonet, évoque de Clermont (xme siècle), une de
saint Germer et une de saint Joce, par Pierre de Beau-
vais; une du saint breton Magloire, médiocrement
rimée en 1319 par le Parisien Geoffroi des Nés; une
de saint Evroul, composée au xine siècle par un moine
de l'abbaye normande dédiée à ce saint; trois vies de
s;i:,il Quentin en vers, du xmc siècle (dont une de
11 non le Roi, de Cambrai); et le plus ancien poème
français (x° siècle) en vers réguliers qui nous soit
parvenu (strophes de six vers octosyllabiques rimant
deux à deux) est une Vie de saint Léger. — On célébra
aussi des saints d'autres pays : la séquence, d'une forme
rythmique calquée sur une séquence latine conservée
dans le même manuscrit, de Sainte Eulalie est le plus
ancien monument de la poésie française. Au xme siècle
Gautier de Coinci (voir ci-dessus, § 142) mettait en vers
la Vie de sainte Léocadie, vierge de Tolède au vne siècle.
11 rima aussi les vies de plusieurs autres saintes, mais
ces compositions paraissent s'être perdues.
147. Mais les saints occidentaux n'offraient pas assez
de prise à l'imagination avide de merveilleux : avec le
Xe siècle arrive de l'Orient, en passant sans doute la plu-
part du temps par l'Italie, une masse de légendes sur
des saints inconnus jusque-là, beaucoup plus romanes-
ques, souvent entièrement fabuleuses, et ayant les ori-
gines les plus diverses. Voici ceux de ces saints et
saintes dont la vie fut le plus tôt et le plus volontiers
mise en français : saint Alexis (nous avons sur lui un
admirable poème du xie siècle, probablement d'un cha-
noine de Rouen appelé Tibaud de Vernon, en strophes
assonantes de cinq décasyllabes, successivement amplifié
et renouvelé au xue, au xme et au xive siècle, et deux
poèmes indépendants du xin" siècle, l'un en laisses mono-
234 LITTÉRATURE NARRATIVE.
rimes, l'autre en petits vers plats); — saint Nicolas de
Myre, patron des écoliers (sujet du plus ancien poème
de Wace que nous ayons conservé) ; — saint Georges de
Lyssa (un poème de Wace, un de Simon de Fraisne,
voir § 103, un autre anonyme, et un quatrième qui n'est
connu que par une traduction allemande); — saint Gré-
goire, personnage tout imaginaire, auquel sont attri-
bués, en partie, les forfaits involontaires d'OEdipe, qui
les expie par une pénitence extraordinaire et finit par
devenir patriarche ou pape (le poème en vers dé huit
syllabes sur ce sujet, qui remonte à la première moitié du
xn siècle, est un des plus remarquables monuments de
notre ancienne poésie; il a été mis en allemand par
Hartmann d'Aue; on a aussi une très faible version du
xivc siècle en quatrains monorimes); — saint Jean Bouche
d'Or, qui ne doit guère que son nom àChrysostome poème
du xm0 siècle, par Renaud); — saint Jean le Paulu, qui,
ayant commis un crime épouvantable, en fit pénitence
en vivant comme une bète fauve (poème du xme siècle) ; —
saint Christophe, géant, qui passait les gens à un gué,
et qui, portant l'enfant Jésus, sentit à son poids qu'il
portait le monde (poème du xme siècle); — saint Eus-
tache (ou mieux Eustace), dont on a l'ait un Romain du
ue siècle (qui se serait appelé de son premier nom
Placidas), mais dont la légende est originairement
grecque : il se convertit pour avoir vu à la chasse un
cerf portant entre ses cors une croix lumineuse (on n'en
a pas moins de onze versions, dont une par Pierre, §
101); — sainte Marie l'Égyptienne (poème du xne siècle,
traduit fort anciennement en espagnol, et poème de
Rustebeuf); — sainte Marguerite, qui, engloutie par le
diable sous forme de dragon, le transperça et le foula
sous ses pieds (poème par Wace et plusieurs autres
versions, dont deux remarquables et anciennes en
LES LÉGENDES HAGIOGRAPHIQUES. 235
alexandrins monorimes : — sainte Julienne de Nico-
médie (qni traita le diable avec non moins d'ignominie);
— sainte Catherine (vie du xn° siècle, par sœur Clémence
de Barking en Angleterre, renouvelée d'une plus
ancienne, r\ plusieurs autres des sir* et xm siècles), etc.
— Une de ces légendes mérite une mention particu-
lière, c'est celle de Barlaam et Joasaph. Elle fait le
sujet d'un roman composé en grec au vie siècle,
librement arrangé d'après la version syriaque d'un
livre composé dans la langue de la Perse sassanide
(le pehlevi . où un chrétien de la Bactriaue avait accom-
modé à sa religion l'histoire du Bouddha, retenu par le
roi son père dans une prison de délices, apprenant à
connaître, dans des sorties successives, la maladie, la
vieillesse et la mort, en faisant le sujet de ses médita-
tions, et Réchappant de son palais pour mener une
vie ascétique; dans le roman, Joasaph (plus tard
Josaphati est converti au christianisme par le saint
ermite Barlaam; dans sa biographie sont intercalées
en assez grand nombre de fort belles paraboles boud-
dhiques, qui se prêtaient tout naturellement à recevoir
une interprétation chrétienne. Traduit en latin proba-
blement vers la fin du Xe siècle, le roman grec fut la
source, au xme siècle, de trois poèmes français que nous
avons : l'un anonyme, l'autre de l'Anglo-Xormand
Chardri '§ 145), le troisième d'un auteur appelé Gui de
Cambrai (différent de celui qui est mentionné au § 4i
qui l'écrivit vers 1225. 11 faut signaler un fragment d'une
traduction en prose faite directement sur le grec, par
un Français établi en Grèce, au commencement du
xiii'1 siècle.
1 18. La conquête de l'Angleterre par les Normands,
de même qu elle fit pénétrer dans notre littérature le
236 LITTÉRATURE NARIîATIVE.
monde poétique des Gallois, y introduisit les légendes
hagiographiques des Celtes, empreintes d'un mysticisme
aventureux et rêveur qui leur donne un charme parti-
culier. La plus célèbre est celle de saint Brendan, abbé
irlandais, qui, parti sur une barque, dans la direction
de l'ouest, pour y trouver le paradis (remplaçant ici la
Terre de l'étemelle jeunesse, l'île occidentale de la mytho-
logie celtique), erra sur l'océan pendant sept années, y
découvrit mille merveilles, et vit le séjour des damnés
aussi bien que celui des bienheureux. Dès l'an 1121, un
moine nommé Benoît dédiait à la reine Aélis de Louvain
(§ 100) un poème sur ce sujet, en vers octosyllabiques
pleins de grâce archaïque; une autre traduction en vers
est du xnie siècle (sans parler des versions en prose). —
C'est encore au monde mystérieux d'outre-tombé que se
rapporte la vision, irlandaise aussi, du chevalier Owen,
qui, sous le règne du roi Etienne, pénétra dans la
caverne du lac Dearg (Ulster), où se trouve, le purga-
toire de saint Patrice, et raconta les merveilles qu'il y
avait vues; sept poètes au moins, dont quatre anglo-
normands, Marie de France (§55), un nommé Bérol qu'il
ne faut pas confondre avec Béroul (§ 56) et Geoffroi de
Paris (§ 137) mirent le récit en vers français octosylla-
biques (Bérol en quatrains d'alexandrins monorimes).
— On n'a qu'en prose la version de celui de Tungdal,
guerrier irlandais qui, à la même époque à peu près,
ayant été ressuscité après trois jours, rapporta les
choses effrayantes et édifiantes qu'il avait vues dans
l'autre monde. — On peut encore citer la Vie de saint
Alban, premier martyr de l'Angleterre, sujet d'un poème
anglo-normand, en laisses monorimes, du xiue siècle. —
A l'hagiographie des Anglo-Saxons sont empruntées la
Vie de saint Edmond (xie siècle) par Denis Pyramus (fin du
xii° siècle), la Vie de sainte Modicenne (poème remarquable
LES LEGENDES HAGI0GRAPHIQ1 ES. 237
encore du xnc siècle), et la Vie de saint Edouard le confesseur
(XIII0 siècle, tous poèmes naturellement anglo-nor-
mands). — On ne connaît pas la source de la légende
d'un prétendu roi d'Angleterre appelé saint Guillaume,
sujet du poème d'un certain Chrétien, qui dit avoir
recueilli en Angleterre la matière de son' récit; les cri-
tiques ne se sont pas encore mis d'accord sur la ques-
tion de savoir si dans ce poète sans talent il faut recon-
naître Chrétien de Troies.
149. Les saints qui parurent en plein moyen âge
furent l'objet de récits en français qui, parfois, sont de
première main, et constituent des sources historiques
d'une grande valeur. La vie de saint Tibaud de Provins
(xie siècle) sur laquelle nous avons deux poèmes fran-
çais du xiii0 siècle, celles de sainte Elisabeth de Hon-
grie par Rustebeuf (£ 127) et par frère Robert de Cam-
bligneul (Pas-de-Calais), sont simplement traduites du
latin; mais il n'en est pas de même de celles de saint
Thomas Becket. Le meurtre du primat d'Angleterre
(Noël H70), dans la cathédrale même de Canterbury,
par des chevaliers du roi Henri II, fut un événement
qui produisit dans toute l'Europe chrétienne, mais sur-
tout en Angleterre, une impression incomparable. Le roi
lui-même, qui, s'il n'avait pas ordonné le crime, l'avait
provoqué, désavoua ceux qui l'avaient accompli, pro-
clama Thomas Becket martyr, et fit pénitence publique
sur son tombeau. Des récits de la vie et de la mort du
nouveau saint, composés par des clercs, des moines, des
laïques, des femmes même, parurent aussitôt en grand
nombre, en latin et en français. De ces derniers,
trois nous sont parvenus : l'un du moine Benoît
de Saint-Alban, en petites strophes couées, sans
grande valeur ; l'autre anonyme, dont on n'a que
238 LITTÉRAURE NARRATIVE.
des fragments, en vers octosyllabiques rimant deux par
deux fil est (ait sur un texte latin); enfin le troisième,
en strophes de cinq vers alexandrins monorimes, par le
clerc Garnier de Pont-Saihte-Maxence, l'une des œuvres
les j dus remarquables que le moyen âge non- ait lais-
Garnier, qui avait terminé en 1173 la rédaction
définitive de son poème, et qui le récita plus d'une fois,
prés fie la tombe même du martyr, :iux pèlerins
accourus de toutes parts, se vante à bon droit de la
qualité de ses vers et de la pureté de son langage; ii
manie l'admirable français du xilb siècle avec autant de
sûreté que son contemporain Chrétien de Troies. et s'il
ne montre pas, comme il est naturel dans le sujet qu'il
traite, là grâce ei la finesse de celui-ci. il déploie en
revanche une vigtieur et parfois un éclat dans lesquels
il n'a pas été égalé. Il a composé sa biographie sur des
renseignements excellents, recueillis de la bouche des
amis el des parents de saihl Thomas (notamment de sa
sœur), et il s'est attaché autant qu'il l'a pu à dire exac-
tement la vérité; il va jusqu'à insérer dans son poème
des documents législatifs et politiques, qu'il traduit
avec une rare dextérité. L'esprit qui anime son œuvre
esl digne aussi de tout intérêt : passionné jusqu'à l'exclu-
sivisme le plus ardent pour la suprématie de l'Église, il
exige en revanche de ses membres qu'ils se montrent
dignes de la haute mission qui leur est dévolue, et flétrit
la vénalité habituelle de la cour de Rome, la défaillance
ou l'hypocrisie des évêqlies anglais, avec plus d'énergie
enicore que l'orgueil et l'indocilité des pouvoirs laïques.
r.ui-même clerc vagant, comme on disait, et menant,
ainsi qu'on peut en juger par l'épilogue tout personnel
de sou diiv'rage, une vie peu austère, il se fait l'inter-
prète dé l'idéal catholique du moyen Age dans ce qu'il
a de plus haut et aussi de plus étroit; son livre est un
LES LÉGENDES HAGIOGRAPHIQUES. 239
document historique de premier ordre en même temps
qu'un monument de langue et de style. — Peu d'années
après la mort de saint Thomas, un de ces bruits, fré-
quents au moyen âge et même depuis, d'après lequel
des juifs auraient égorgé un enfant chrétien lé jour de
leur l'ùqur, lit naître plusieurs pièces de vers anglo-
normands, que nous signalons ici à cause de leur inté-
ressant caractère populaire, sur « saint Hugues de
Lincoln ». — Nous en profiterons aussi pour citer une
pièce digne de toute attention, dont nous ne saurions
où placer convenablement la mention, une élégie en
quatrains d'alexandrins monorimes, composée par des
juifs français à l'occasion de l'atroce supplice infligé,
pour une cause analogue, à quelques-uns d'entre eux à
Ti'oies en 1288 : cette élégie respire un sentiment pro-
fond, exprimé en maint passage avec la simplicité la
plus touchante; elle est notée, dans le manuscrit qui l'a
conservée, en caractères hébraïques, ce qui a permis de
curieuses constatations sur la prononciation, constata-
tions qui s'ajoutent à celles du même genre que nous
fournissent des gloses hébraïco-françaises du xne et
du xme siècle (§ 102). — On a mis en vers français assez
faibles, vers 1240, la vie latine de saint Dominique. — Le
livre de Joinville sur saint Louis a été apprécié plus
haut (§ 90), et appartient plus en effet à l'histoire qu'à
l'hagiographie; mais nous noterons ici la traduction,
d'ailleurs médiocre, de la vie de saint Louis écrite en
latin (l'origiiîHl est perdu) en 1303 par Guillaume de
Saint-Patus (confesseur de la reine Marguerite de Pro-
vence) d'après l'enquête faite pour la canonisation du
saint (on a traduit aussi, et mieux, les miracles dont le
récit est annexé à cette enquête). — La grande compila-
tion de Jacques de Varaggio, archevêque de Gênes,
intitulée Leyenda aurea, qui embrasse et résume toute
240 LITTÉRATURE NARRATIVE.
l'hagiographie antérieure (surtout la plus merveilleuse
et la moins authentique), fut mise en français, dans la
première moitié du xiv" siècle, par Jean de Vignai, et
cette version eut un succès qui se prolongea pendant
des siècles.
CHAPITRE VI
CONTES DEVOTS
150. Nous réunissons sous ce titre les récits de piété
qui ne rentrent précisément dans aucune des catégories
précédentes, quoique à vrai dire la ligne de démarcation
soit souvent assez difficile à tracer, certaines vies de
saints n'étant que des contes dévots amplifiés, et plus
d'une légende où la Vierge figure n'ayant été, comme
nous l'avons vu, rapportée à elle que subsidiairement. Il
subsiste cependant un certain nombre de récits de peu
d'étendue qui ont dès longtemps été désignés sous le
nom qui figure en tète de ce chapitre. Il sont générale-
ment empruntés à des livres latins, qui eux-mêmes pui-
saient dans des sources grecques ou orientales : tel est
le célèbre recueil d'exemples (voir § 152) de Jacques de Vitri
(évêque d'Acre, puis cardinal, f 1240), qui contient beau-
coup de contes dont la provenance est directement arabe
et indirectement indienne. Ce sont souvent (voir ce qui a
été dit plus haut, .; U7. sur B'arlaam et Joasaph) des para-
boles conçues par les bouddhistes et adoptées par les
c h retiens. — Nous citerons la belle légende de YEmp
orgueilleux (dit du Magnificat de Jean de Condé. au
1G
242 LITTÉRATURE NARRATIVE.
XIVe siècle, et autres versions), qui, s'étantcru au-dessus
de la puissance céleste, vit un ange ou un démon s'em-
parer de son trône, et n'y remonta qu'après une dure
pénitence (les juifs avaient sur Salomon une histoire de
ce genre, à laquelle on trouve un pendant dans l'Inde) ;
— le conte, juif sans doute d'origine, de l'Ange et l'Ermite
rédaction annexée à la Vie des Pères et autres), dont
Voltaire a tiré un des meilleurs épisodes de Zadig, et
qui enseigne aux hommes à respecter les voies mysté-
rieuses de la Providence; — la parabole du Vrai anneau,
rendue célèbre par Boccace et Lessing, inventée par
quelque juif qui voulait éveiller les doutes des chrétiens
sur la légitimité de leurs persécutions, et transformée
plus tard dans un sens chrétien; — le conte du Méchant
Sénéchal, répandu sous les formes les plus diverses, où
on voit un innocent échapper à la mort qu'on lui des-
tine, tandis que celui qui la lui a préparée est victime
de sa propre embûche (source orientale; Schiller en a
fait la ballade de Fridolin); — celui de la Bourgeoise de
Rome, qui, ayant commis les crimes les plus terribles,
que le diable révèle, est délivrée et disculpée grâce à son
repentir (annexé à la Vie des Pères) ; — celui de la Heine
qui tua son Sénéchal (on en a une version en vers dans
les Vies des Pères et une rédaction du xive siècle en forme
de Miracle par personnages), qui, elle aussi, après avoir
commis deux meurtres, échappe par la grâce de Dieu
au châtiment qu'allait lui valoir la dénonciation perfide
de son confesseur (transformation chrétienne d'un conte
oriental); — l'histoire de l'Enfant juif (deux ou trois
versionsen vers), qui, mis dans un four ardent par son
père, furieux de ce qu'il racontait avoir vu dans le sacri-
fice de la messe le pain, entre les mains du prêtre, se
transformer en un enfant radieux, en fut retiré sain et
sauf; — la touchante légende du Chevalier au baril (trois
CONTES DÉVOTS. 243
rédactions en vers du xinc siècle, dont une dans la Vie des
Pères et une du Blésois Jean de la Chapelle), qui, dédai-
gnant la confession, accepte cependant d'un saint
ermite l'absolution de ses énormes péchés à condition
d'accomplir la pénitence bien simple de remplir d'eau le
barillet de l'ermite : vainement il le plonge dans toutes
les fontaines, les rivières et les mers; enfin une larme
devrai repentance, tombée dans le baril, le remplit; —
celle du Chevalier dans la chapelle, qui a reçu pour péni-
tence de passer dans une chapelle une nuit en prières et
que tous les artifices du démon ne peuvent empêcher
de l'accomplir jusqu'à la fin, etc., etc. — Un joli recueil
de contes dévots en vers fut écrit en 1330 par Eustache,
prieur de la chartreuse établie à la Fontaine Notre-Dame
dans l'Artois. C'est le dernier produit de ce genre.
toi. Nous joignons ici, dans l'embarras de le placer
ailleurs, le singulier Roman de Mahomet, par Alexandre
du Pont, qui écrivait à Laon en 1258. Alexandre n'a
guère fait que traduire un poème latin d'un certain
Gautier, qui prétend s'appuyer sur le récit d'un Sarrasin
converti. Dans ce poème, Mahomet est naturellement
un imposteur qui fonde sa religion à l'aide de jongleries
puériles. D'après d'autres légendes répandues au moyen
âge, il fut dévoré par des pourceaux qui l'avaient trouvé
ivre-mort, d'où l'aversion des musulmans pour le vin et
la viande de porc; on racontait que Mahomet était un
cardinal qui était devenu ennemi de l'Église parce qu'on
n'avait pas voulu le faire pape. Quelle que soit l'absur-
dité de ces récits, ils sont moins extravagants que l'opi-
nion, généralement répandue au moyen âge, au moins
parmi le vulgaire, d'après laquelle « Mahom » était,
avec Apollin, Jupiter et l'énigmatique Tervagant, une
des idoles qu'adoraient les Sarrasins.
SECTION II
LITTERATURE DIDACTIQUE
152. L'enseignement religieux appliqué au dogme
devait se donner au moyen âge comme aujourd'hui dans
le catéchisme; mais ces instructions familières ne s'é-
crivaient pas, et il ne nous en est point parvenu. Les
traductions en vers (dont une par le Normand Guilebert
de Cambres, xme siècle) de YElucidarius d'Honorius d'Au-
tun, résumé des articles de la foi chrétienne, n'offrent
pas grand intérêt (le début du même ouvrage a aussi
été traduit très anciennement en prose wallonne); le
Credo de Joinville, que nous avons mentionné ailleurs,
doit celui qu'il a au nom de son auteur et aux éléments
étrangers qu'il a mêlés à son sujet; diverses traductions
du Credo en prose ou en vers n'en ont aucun au moins
pour la littérature. Au xme siècle Robert de Gretham
(§ 139) composait pour un seigneur anglais toute une
somme de théologie à l'usage des laïques, qu'il appelait
le Corset. Plus anciennement un Normand appelé Nicole
avait traduit en vers octosyllabiques, surtout pour l'ins-
truction des religieuses, la Bèole de saint Benoit. — Une
forme plus intéressante de l'enseignement est le sermon
246 LITTERATURE DIDACTIQUE.
ou l'homélie, qui a souvent un caractère plus moral que
dogmatiqne. Les livres didactiques de la Bible fournis-
sent aux prédicateurs une grande partie de leur matière,
et à ce titre nous mentionnerons ici la belle version
anglo-normande rimée des Proverbes de Salomon, accom-
pagnée d'une glose allégorique, par Samson de Nan-
teuil (xne s.). — La prédication chrétienne ne cessa
jamais de se donner, mais en latin elle était devenue
inintelligible au peuple. Comme nous l'avons déjà vu
(§ 135), dès la fin du règne de Charlemagne plusieurs
conciles prescrivirent aux curés « de traduire les homé-
lies en langue romane rustique », ce qui semble indi-
quer qu'ils possédaient des recueils latins de sermons
choisis, qu'on les engageait seulement à mettre en fran-
çais. Mais une fois la voie ouverte à la prédication popu-
laire, il dut arriver de fort bonne heure que les prêtres
composèrent eux-mêmes des homélies en français. Il
nous est parvenu un très curieux fragment, remontant
sans doute au commencement du xc siècle, d'une expli-
cation parénqtique de Jonas qui a tout à fait ce carac-
tère; ce fragment, tracé moitié en caractères ordinaires,
moitié dans cette sténographie des anciens qu'on
appelle notes tironiennes, moitié en français, moitié en
latin, nous représente sans doute une partie des notes
prises par un auditeur qui était plus habitué à écrire le
latin que le français. Mais, à part cette curieuse épave,
de la prédication en langue vulgaire des premiers siè-
cles du moyen âge, il ne nous reste aucun monument.
Quand les prédicateurs écrivaient leurs sermons, ils le
faisaient en latin, quelle que fût la langue où ils devaient
les prononcer, et ils n'attachaient guère d'importance
qu'à ceux qu'ils prononçaient en latin, c'est-à-dire
devant les clercs. Nous possédons deux manuscrits qui
contiennent en français quatre-vingt-quatre sermons de
LITTERATURE DIDACTIQUE. 2VT
saint Bernard (f 1153), mais c'est une traduction, faite à
Metz, qui ne remonte pas au delà de la fin du xne siècle,
et les sermons traduits avaient été faits pour des clercs
et prononcés en latin. Un recueil de sermons rédigés en
latin, mais s'adressant aux laïques et destinés à être
prononcés en français, qui eut un grand succès, fut celui
que publia l'évêque de Paris Morice de Sully (f 1195 :
on en fit de bonne heure une traduction, dont de nom-
breux manuscrits nous sont parvenus. — Même du
xine siècle nous n'avons encore qu'un assez petit nombre
de sermons originairement composés en français; ils se
recommandent en général par le ton familier qui y règne
et les détails qu'ils donnent sur les mœurs contempo-
raines. — Les sermons latins du moyen âge, traduits ou
non en français, ont d'ailleurs pour l'histoire littéraire
un intérêt particulier, dont nous avons dit un mot (§ 73):
c'est qu'il fut longtemps d'usage d'y introduire ce qu'on
appelait des exemples, c'est-à-dire de courts récits, tantôt
édifiants en eux-mêmes, tantôt ayant le caractère de
paraboles ou même de récits plaisants, desquels le pré-
dicateur extrayait ensuite une moralité (voir § 150). Les
fableaux et les contes dévots sont représentés dans cette
littérature homilétique, qu'on ne peut négliger quand
on étudie l'histoire des narrations populaires. Les Para-
bolae de l'Anglais Eudes de Cheriton, qui contiennent
surtout des fables d'animaux, et qui sont le plus ancien
recueil de ce genre l'ait à l'usage des prédicateurs, ont
été mises en prose française au xme siècle, sans doute
en Normandie. Il faut mentionner à part le recueil
d'exemples en français, avec moralisation, à l'usage des
prédicateurs, par le franciscain anglais Nicole Bozon
(commencement du xrve siècle), qui a composé encore
d'autres ouvrages de piété (voir § 81) : ils sont d'un
style naïf qui serait assez agréable si le langage
248 LITTÉRATURE DIDACTIQUE.
anglo-normand n'y montrait pas d'une façon aussi
marquée les caractères qui l'éloignent du bon français
d- France.
I :>:'». Ce que nous possédons, et même plus ancien-
nement que des sermons proprement dits, ce sont des
sermons en vers, destinés à être lus devant un audi-
toire laïque, et consacrés généralement à développer
ce qui fait le fond de l'enseignement chrétien, la vanité
:1e cette vie et l'importance suprême de l'autre, lu
sermon en strophes de six vers de cinq syllabes, com-
mençant par Grrant mal fist Adam, remonte sans doute
aux premières années du xne siècle, et se fait remarquer
par la vigueur de la pensée et la souplesse du style.
Les Vers du Jugement, composition bizarre et d'une piété
toute matérielle, de provenance liégeoise, sont, dans la
l'orme très rare de séries d'alexandrins rimes non
séparés en laisses, un sermon presque aussi ancien. Un
grand seigneur, Guichard de Beaujeu (f 1137), s'étant
retiré dans un cloître, y composa un Sermon, également
en strophes monorimes, qui eut un grand succès et lui
valut, d'après un écrivain postérieur, d'être regardé
comme « l'Homère des laïques ». — On peut considérer
comme des sermons du même genre, seulement plus
longs, d'autres œuvres un peu plus récentes. Tels sont
les célèbres Vers de la Mort d'Hélinand, moine de Froid-
mont (i après 1229), qui eurent un immense succès,
mérité par l'énergie avec laquelle l'auteur présente et
varie un thème monotone mais frappant; on lisait
publiquement ses vers, nous dit Vincent de Beauvais,
avec autant de plaisir que de profit. Le poème d'Héli-
nand a été très remanié et interpolé; il a été aussi
imité : on a sur le même sujet et sous le même titre un
poème artésien, par Robert le Clerc, qui ne contient
LITTEHATI Iti: ÛIDACTIQUE. 249
pas moins de trois cent douze strophes de douze vers
dahs la forme très particulière de celles du moine de
Froidmont (douze vers octosyllabiques disposés sur
deux rimes1. — Cette forme, dont on ne saurait dire
avec certitude qui en fut l'inventeur, est aussi celle des
deux poèmes d'un auteur qui s'appelait sans doute
liait liélemi, et qui se désigne comme étant reclus à
Mollieiis-Vidame 'Somme) : l"un a pour titre Charité, et
l'autre Miserere, à cause du mot latin par lequel il com-
mence. Ce sont des exhortations à fuir le péché et à
mériter le ciel, adressées à toutes les classes de la
société, dans un style très travaillé, avec une profusion
de ligures surprenante, mais où le fond n'a pas une
grande originalité. Ces poèmes furent très admirés,
comme l'atteste le nombre des manuscrits qui nous en
restent; on fit du Miserere une traduction en néerlan-
dais. — On peut encore citer ici les paraphrases du l'aler
noster, dont une en huit cents vers octosyllabiques, com-
posée vers 1 17a par Silvestre pour la comtesse Ide de Bou-
logne. — Beaucoup d'autres compositions, soit dans la
forme adoptée par Hélinand et le Reclus, soit dans une
forme plus simple mais presque toujours à moitié lyrique,
consacrées également à pousser les âmes dans la voie
du salut, ne demandent qu'une simple mention. Tels
sont les Vers du Monde, le Despit du Corps, la Chantepleure,
un Enseignement en sixains octosyllabiques (fin du
XIIIe siècle), les Vers de Cologne, le Roman des Romans (d'un
style assez remarquable, et qui pourrait bien être de
Guillaume le Clerc), un long sermon sur l'amour de
Dieu, anglo-normand, qui a été inséré dans le Manuel de
William de Wadington (§ 15.7). — Une mention parti-
culière est due à un poème moral en quatrains d'alexan-
drins monorinies, écrit sans doute à Liège (qui fut un
centre littéraire), au commencement du xme siècle; on
250 LITTÉRATURE DIDACTIQUE.
y trouve, avec une modération dans l'ascétisme assez
rare, une langue expressive, une peinture vraie des
sentiments, et de précieux détails sur la manière de
vivre et de penser des hommes d'alors (signalons parti-
culièrement ce que l'auteur dit des jongleurs profanes,
objet de toute son animadversion, et ses plaintes indi-
gnées contre les vaines formalités qui encombraient la
procédure et favorisaient les iniquités des juges). —
En quatrains d'alexandrins monorimes également est
écrit le Sermon des plaies (du crucifié), destiné aux reli-
gieux, dont on n'a qu'une copie incomplète, et qui se fait
remarquer par un sentiment sincère. — Signalons enfin,
dans la même forme, le long sermon, assez banal, mais
intéressant par son caractère historique, composé en
1226 et remanié en 1227 par Robert Sainterel en l'hon-
neur de Louis VIII qui venait de mourir.
154. D'autres œuvres se présentent à nous sous la
forme plus strictement didactique de paires de vers de
huit syllabes. Ce sont le plus souvent des compositions
à moitié allégoriques, qui. prenant pour thème une para-
bole évangélique ou autre, la développent et la com-
mentent longuement. Nous rangeons ici le poème du
Besant de Dieu, par Guillaume le Clerc de Normandie (fin
du xne siècle et commencement du XIIIe), où l'auteur, cher-
chant comment chacun exploite le besant ou talent que
Dieu lui a confié, passe en revue, comme tant d'autres,
les diverses classes sociales de son temps, signale
leurs défauts et les engage à s'amender (voir § 105). On
remarque dans cette œuvre des personnifications de
vices et de vertus qui se retrouvent souvent parla suile.
Guillaume a fait plusieurs autres ouvrages de morale
religieuse, sans parler des poèmes que nous avons men-
tionnés ailleurs (§ 100, 144). — A la fin du xinc siècle,
LITTERATURE DIDACTIQUE. 251
un brave chevalier picard, établi dans le royaume de
Chypre, Jean de Journi, a composé, sous le nom de
Dime de pénitence, un poème moral assez analogue au
Besant de Dieu et dont le principal intérêt est précisément
d'être l'œuvre d'un chevalier et non d'un clerc. — Un
certain Simon, au commencement du xnie siècle, a déve-
loppé non sans talent un thème souvent employé dans
la prédication chrétienne, celui des trois ennemis dont
l'homme doit se méfier et se défendre, le monde, la
chair et le diable. — Au même genre appartiennent
diverses petites compositions plus ou moins allégoriques,
enseignant la morale ou le dogme, comme les « dits s
de la Vigne (parabole évangélique), par Jean de Douai,
de la Brebis, de YUnicorne (parabole bouddhique chris-
tianisée, qui se retrouve dans Barlaam et Joasaph et
dont on a diverses rédactions), du Vrai Anneau (voir ci-
dessus, § 150), des Trois morts et des Trois Vifs (rencontre
de trois jeunes gens avec trois cadavres et réflexions
qu'elle leur suggère; on en a plusieurs rédactions, dont
une par Nicole de Margival, § 111, et une par Baudouin
de Condé, § 103), du Larron qui fut racheté, des Quatre
Sœurs (conciliation, dans le mystère de la rédemption, de
la justice et de la vérité avec la paix et la miséricorde;
on en a plusieurs versions, dont deux anglo-normandes,
et une dédiée par Richer à la comtesse Marie de Pon-
thieu vers 1230), des Quinze Signes (peinture, empruntée
à un ancien apocryphe mis sur le compte d'une sibylle,
des signes qui précéderont le jugement dernier), etc. —
On peut également rattacher ici les Bestiaires moralises
et autres productions semblables dont nous avons déjà
parlée 100).
155. Une forme que l'exhortation religieuse affec-
tionna fut celle du débat (voir §110). Le plus ancien et de
252 LITTERATIHK DIDACTIQUE.
beaucoup le plus remarquable est le Débat du corps et
île l'âme, dont nous avons plusieurs rédactions fran-
çaises; l'une, fort belle, en vers de six syllabes rimant
deux à deux, remonte au commencement du xnc siècle.
C'est la mise en scène saisissante et vraiment tragique
du fond même de l'enseignement chrétien : le poète
voit dans un songe une Ame qui se retrouve pour un
instant en présence du corps dont elle a été récemment
séparée, et qui lui adresse des reproches pour avoir
causé sa damnation; le corps lui répond amèrement, et
tous deux, trop tard convaincus de leur aveuglement,
augmentent par leurs récriminations l'horreur du sup-
plice auquel ils sont irréparablement condamnés. Men-
tionnons encore les débats de l'Église et de la Synagogue,
du Juif et du Chrétien (ce qui revient au même), etc.
Toutes ces pièces, œuvres de clercs, ont un point de
vue strictement pieux et souvent même ascétique. Une
seule fait contraste et présente par là un intérêt parti-
culier. Dans le Petit Plaid, le poète anglo-normand
Chardri (§ 145) a osé opposer et même préférer une con-
ception du monde presque épicurienne, ou du moins
tout humaine, aux exhortations dirigées uniquement
vers l'autre vie, de l'un des interlocuteurs. — Les
débats, ici comme ailleurs (§ 110), devaient naturelle-
ment arriver à prendre la forme de batailles, indiquée
par la Psyehomachic. Le poème de Prudence est évidem-
ment le modèle, d'ailleurs fort librement suivi, du Tour-
noiement d'Antéchrist, composé parle chevalier Huon de
Méri en 1235 (il place pendant l'expédition de Louis IX
eu Bretagne, qui eut lieu cette année-là, la vision qu'il
prétend avoir eue), qui est inspiré, pour l'emploi des
personnifications, d'autres oeuvres antérieures comme le
Besantde Dieu de Guillaume le Clerc |§ 154), mais qui traite
le sujet avec esprit et une agréable fertilité d'imagination.
LITTÉRATURE DIDACTIQUE. 233
156. L'emploi des personnifications pour l'enseigne-
ment de la morale chrétienne rattache à ces dernières
œuvres d'autres compositions allégoriques qui n'ont
pas la forme de débats ou de batailles. Tel est le
Sonyc d'Enfer de Raoul de Houdan (§ 103), qu'a imité
Huon de Méri (§ 155). Au Songe d'Enfer de Raoul un con-
temporain a ilonné pour parallèle la Voie de Paradis : ce
n'est autre chose, naturellement, sous la forme symboli-
que d'un voyage, que la pratique de toutes les vertus
dans la vie terrestre, malgré les tentations et les pièges
du diable. Ce cadre tenta d'autres écrivains : Rustebeuf
(§ 127) et Baudouin de Condé (§ 103) ont fait chacun une
Voie de Paradis. Plus anciennement que tous ces écri-
vains, en 1180, un anonyme, sans doute lorrain, avait
composé un petit poème allégorique sur le siège de
Jérusalem par le roi de Babylone, dans lequel se trouve
l'idée que la vie de l'homme sur cette terre est un
pèlerinage vers le ciel. — Cette tendance a trouvé son
apogée dans l'œuvre considérable du moine cistercien
Guillaume de Digulleville (Manche), mort vers 1360, qui,
de 1330 à 1332, après avoir lu le Roman de la Rose
(voir § llo), composa son Pèlerinage de la vie humaine qu'il
remania en y ajoutant le Pèlerinage de rame (1355) et le
Pèlerinage de Jésus Christ (1358). Fort bien accueillie dès
son apparition, imprimée souvent à partir du xve siècle,
l'œuvre de Guillaume de pigulleville, dont Chaucer a
traduit certains morceaux lyriques, paraît bien avoir
inspiré le fameux Voyage du Pèlerin, du puritain John
Bunyan, le plus populaire de tous les livres, après la
Bible, dans les pays de langue anglaise.
157. Une place à part doit être faite aux traités <lc
morale chrétienne ex professo. Le plus remarquable de
beaucoup est l'ouvrage dédié à Philippe le Hardi, en
254 LITTÉRATURE DIDACTIQUE.
1270. par son confesseur, le dominicain frère Lorens
(qui paraît avoir mis à profit un ouvrage plus ancien
appelé le Miroir du Monde), la Somme des vices et des vertus
(désignée souvent sous le nom de Somme le Roi ou
Somme Lorens). Passant en revue, d'après des division-,
un peu trop artificielles et scolastiques, tous les ensei-
gnements moraux de la religion chrétienne, Lorens
donne sur tous les points des conseils aussi empreints
de sagesse et de douceur que de véritable et profonde
piété. Il ne veut pas faire du monde un cloître, comme
plus d'un de ceux qui ont traité, notamment en latin,
les mêmes sujets: il décrit, à un point de vue assuré-
ment très strict, mais cependant accommodé aux néces-
sités «le la vie réelle, les devoirs et les périls de chaque
condition mondaine; son livre, outre quil nous donne
sur l'existence sociale et intime du xiiie siècle plus d'un
renseignement précieux, est empreint d'une onction et
d'une simplicité de cœur qui se reflètent parfaitement
dans son style d'une aimable et élégante naïveté, et qui
auraient dû lui valoir, de nos jours même, parmi les
productions du moyen âge, une réputation supérieure
à celle qu'il a obtenue jusqu'ici. Il fut fort goûté autre-
fois; on le traduisit bientôt en provençal, en italien, en
anglais, en flamand, et il fut un des premiers livres
français imprimés au XVe siècle. — Moins intéressant
que la Somme le Roi, mais précieux encore, notamment
par ses exemples et ses curieux renseignements sur les
mœurs de l'Angleterre au xme siècle, est le Manuel des
péchés de William de Wadington, écrit, vers la fin
du .\iue siècle, dans un langage que les Français de
France auraient eu souvent quelque peine à enten-
dre, en vers rimes deux à deux qui s'efforcent d'être
octosyllabiques: il fut traduit peu de temps après en
anglais par Robert de Brunne. — On a encore quelques
LITTERATUH12 DIDACTIQUE. 255
ouvrages du môme genre, mais de moindre impor-
tance.
158. C'est seulement pour l'histoire de la langue qu'ont
de l'intérêt les traductions faites au xin° siècle, en dia-
lectes wallons ou lorrains, de quelques commentaires
bibliques où le texte ne sert que d'occasion à de longs
développements moraux ou mystiques. Les ouvrages
dans ce genre de saint Grégoire le Grand jouirent d'une
faveur particulière : nous possédons ainsi une version
de son commentaire sur Ézéchiel, et une autre, frag-
mentaire, de ses Moralia in Job. — Le Dialogus animae
conquerentis et ralionis consolantis (ou Homonyma) d'Isidore
de Séville, sorte de jeu de style qui n'aurait guère dû,
semble-t-il, inviter à la traduction dans une langue peu
assouplie à des exercices de ce genre, fut aussi mis dès
le commencement du xnr siècle en un français curieux
par son caractère dialectal (lorrain) très marqué. —
Notons encore la version (perdue) par Jean de Meun du
livre d'Aelred sur V Amitié spirituelle (voir § 113), et les
traductions de divers traités mystiques de saint Bona-
venture.
SECTION III
LITTÉRATURE LYRIQUE
15!). Cette branche de la littérature religieuse est au
moyen âge d'une singulière pauvreté, soit que réelle-
ment l'usage de chanter en français les louanges deDieiv
et les émotions de la piété ait été peu répandu, soit que
les cantiques et les chansons pieuses aient été rarement
conservés. Nous y conprendrons d'abord les diverses
traductions des Psaumes. Les deux plus anciennes
(Psautier d'Oxford ou de Montcbourg et Psautier de
Cambridge), exécutées probablement à Canterbury au
commencement du xu" siècle, sont en prose et extrême-
ment littérales; on a pensé qu'elles provenaient de
gloses intra-linéaires insérées par un seul et même
auteur dans le texte de deux versions latines différentes
des Psaumes; mais cette opinion est contestable.
D'autres versions, également en prose, s'appuient plus
ou moins directement sur la première de ces versions.
Parmi celles qui en sont le moins étroitement dépen-
dantes, nous signalerons un Psautier lorrain du xive siècle,
fort intéressant pour la langue et par la préface du tra-
ducteur; c'est d'ailleurs le remaniement d'un texte plus
17
258 LITTERATURE LYRIQI E.
ancien, qui remontait peut-être au mouvement de tra-
ductions bibliques arrêté par l'Église à .Metz en 1109
(§ 139). — Une traduction des Psaum(S en vers remar-
quables de huit syllabes, qui a été laite en Lorraine au
xiir2 siècle, a aussi pour base essentielle ce texte lorrain
aujourd'hui perdu. — En 1181, un anonyme mettait en
vers, pour la comtesse Marie de Champagne (§ 57), une
longue paraphrase du psaume Eructavit; mais cette
paraphrase, en vers de huit syllabes et d'un caractère
tout' didactique, n'a rien à l'aire avec la poésie lyrique.
— On a encore des traductions poétiques à part des
Psaumes de lu Pénitence. — Le Cantique des Cantiques fut
aussi traduit, malgré les scrupules que plusieurs théo-
logiens avaient à cet égard; à la fin du xn6 siècle Landri
de Waben en fit, pour le comte Baudouin d'Ardres, une
version partielle en vers assez gracieux, accompagnée
d'une longue paraphrase moralisante; d'autres versions,
également commentées, sont insérées dans plusieurs
Bibles en vers. Au commencement du xne siècle une
petite pièce remarquable, dont nous n'avons malheu-
reusement que le début, en présente une imitation qui
parait avoir été faite en vue d'une application à des
événements de l'histoire contemporaine de l'Église. —
On a aussi quelques traductions en vers de chants
crrlésiastiques, notamment du Stabat Mater. On peut
rapprocher de cette célèbre prose une série assez nom-
breuse de Plaintes mises dans la bouche de la Vierge,
soit au pied de la croix, soit après la mort de son fils;
ces pièces sont imitées de pièces latines et ont des
pendants dans d'autres littératures du moyen âge.
160. Le culte de la Vierge et des saints a suscité natu-
rellement des chants, parfois d'un ton presque popu-
laire, destinés à les honorer. Les chansons consacrées
LITTÛiATl/Iii: LYRIQUE. 259
à la Vierge sont assez abondantes; on en a plusieurs de
Gautier de Coinci (§ 142), dans lesquelles il imite et
parodie pieusement des chansons d'amour alors à la
mode. Cette adaptation de formes et de mélodies pro-
fanes à un pieux usage a été très usitée au xiu siècle.
Elle caractérise le serventois (§ 120). Des serventoi$ de ce
genre ont encore été composés au xiv siècle, entre
autres par Jean Brisebarre de Douai (§ il ; ils étaient
surtout destinés aux concours des puis (§ 127). On a
aussi plus d'une pièce à la Vierge en strophes régulières
ou en quatrains monorimes. — D'autres chansons sont
en L'honneur de saint Nicolas, de sainte Catherine, de
sainte Anne, de tous les saints (litanies paraphra-
sées), etc.; beaucoup de ces pièces ont un caractère
narratif autant que lyrique, et nous en avons parlé à
propos de la littérature hagiographique (§ 144). — Il
faut signaler à part une série de pièces, généralement
empreintes d'une véritable poésie mystique, inspirées
au xme siècle par la dévotion au nouveau saint italien
devenu rapidement populaire, François d'Assise.
161. Les fêtes et le culte ont produit fort peu de pièces
lyriques qui nous soient arrivées. Sur trois nocls qu'on
connaît, deux au moins, l'un anglo-normand, l'autre
d'Adam le Bossu (§ 132), ont un caractère plus profane
que religieux, et célèbrent surtout les joyeux repas qui
se donnaient, en Angleterre et en France, à l'occasion
de la grande fête hivernale. Au même genre appartient
une amusante parodie, anslo-nornianle, de la séquence
Laetnbundus, qui se chantait dans la nuit de Noël. — La
Prose de Vâne, dont on a plusieurs versions, est en latin,
et le refrain seulement est français; elle se rattachait à
une cérémonie burlesque, à laquelle la jeunesse cléri-
cale prenait plus de part que les laïques.
200 LITTERATURE LYRIQUE.
102. Les chants pieux exprimant des sentiments per-
sonnels sont rares. L'un des plus remarquables est une
pièce en vers de cinq syllabes, attribuée à divers per-
sonnages célèbres, mais qui paraît être d'un certain
Tibaud d'Amiens (commencement du xm' siècle), et où
sont exprimées avec énergie les angoisses et les espé-
rances du pécheur repentant. Citons aussi la Plainte
d'Amour, pièce d'inspiration mystique, composée en
Angleterre; où un sentiment vraiment profond se l'ait
jour à travers les difficultés de l'allégorie et rembarras
d'une langue incorrecte, et une prière composée, sans
doute au début du xiv siècle, par une « béguine » du
nord de la France (dont on a encore deux autres petits
poèmes religieux) et où s'exprime avec une rare ardeur
l'élan d'une àme de femme vers le Dieu d'amour. La
prière de Théophile repentant (voir § 143) a été mise en
quatrains d'alexandrins monorimes en dehors de la
légende, que tout le monde connaissait.
1(13. Une catégorie à part comprend les chansons de
pèlerinage. Il en a existé certainement beaucoup, vu
l'importance extrême que ces pieuses visites à des
sanctuaires souvent très lointains' avaient au moyen
âge, mais nous en avons très peu conservé, et les plus
intéressantes sont en latin. — On peut rattacher à
cette classe les chansons de croisade, qui cependant,
ayant un caractère moins purement religieux, ont été
mentionnées plus haut dans l'histoire de la poésie
lyrique profane (S 124).
SECTION IV
LITTÉRATURE DRAMATIQUE
164. L'histoire du drame chrétien dans la première
partie du moyen âge appartient à la littérature latine
bien plus qu'à la littérature française. Il naquit de la
liturgie, se produisit d'abord dans la langue des clercs,
dans l'église même, et n'en sortit que peu à peu. — Les
mystères proprement dits, qui mettent en scène les deux
grands épisodes du mystère de la rédemption, à savoir
l'incarnation d'une part et la passion de l'autre, se
divisent par là même en deux cycles, celui de Noël et
celui de Pâques.
165. Le cycle de Noël comprend deux groupes. Le
premier représente la nativité et les diverses scènes qui
la précèdent et la suivent, soit dans les évangiles, soit
dans les textes apocryphes : on n'en a pas de texte fran-
çais qui remonte à l'époque où nous nous renfermons,
sauf un petit drame qui fait partie de la grande collec-
tion des Miracles de la Vierge, composée peut-être encore
à l'extrême limite de cette période (§ 168). — L'autre
groupe, celui des Prophètes du Christ remonte à un sermon
262 LITTÉRATURE DRAMATIQUE.
longtemps attribué à saint Augustin : l'auteur évoque
successivement les divers personnages qui, avant la
venue du Messie, sont censés l'avoir annoncé, et leur
met dans la bouche les paroles qui constituent leur pro-
phétie. On fit de bonne heure, en donnant à l'église
lecture de ce sermon, défiler devant le lecteur et les
fidèles des clercs revêtus de costumes plus ou moins
convenables à chacun des personnages évoques: puis
on mit en vers latins les paroles du lecteur et celles de
chacun des prophètes, et enfin, quand la prophétie se
rattachait à quelque action dramatique, on la représenta
plus ou moins symboliquement, dans le chœur de
l'église. On vit ainsi Balaam sur son ànesse, Daniel dans
la fosse aux lions, etc. Peu à peu ces sortes de tableaux
vivants devinrent de véritables petites scènes, jduées
par les jeunes clercs sous la direction des écolàtres ou
des prêtres, et les strophes latines qu'on mit dans la
bouche des acteurs lurent parfois munies de refrains
français. — A ce cycle se rattache l'œuvre dramatique,
toute française, qu'on désigne généralement sous le
nom d'Adam, et qui comprend en réalité trois parties
distinctes : la chute originelle, terminée par l'espoir pro-
phétique d'Adam; — la mort d'Abel, figure de l'immola-
tion du Rédempteur; — enfin le défilé des prophètes.
C'est une œuvre écrite en Angleterre au xn° siècle et
dont l'auteur possédait un réel talent poétique : la scène
de la séduction d'Eve par le serpent est un des meilleurs
morceaux de la dramaturgie chrétienne; il faut aussi
signaler la variété des rythmes employés, avec une
grande habileté, parle poète, à l'imitation des mystères
latins. Cette oeuvré remarquable paraît avoir été jouée
non plus dans l'église, mais sous le porche : là figure qui
représentait Dieu rentrait dans l'église comme dans le
ciel: on voyait un enfer d'où les diables sortaient pour
LITTÉRATURE ÛRAMATÎQUÊ. É6â
venir sur la terre, et des limbes, où les justes morts
avant le Christ attendaient leur délivrance. Le précieux
manuscrit qui nous a seul conservé l'ouvrage donne,
en latin, les détails les plus circonstanciés de costume
el de mise en scène.
166. Le cycle de Pâques se subdivise? aussi en deux
groupes. L'épisode le plus anciennement représenté est
celui de la résurrection, ou plutôt de la manifestation
de la résurrection; car il faut noter qu'à l'origine les
représentations dramatiques dans les églises avaient
pour but direct de présenter aux yeux les preuves de la
vérité des mystères chrétiens; en outre les personnes
divines et la Vierge-mère elle-même n'y figuraient pas,
ou si, comme dans les représentations des Bergers et
des Mages, la Vierge et l'enfant étaient montres,
c'étaient des personnages muets et sans doute des
statues. La résurrection était très anciennement, dans
les églises de Gaule, le sujet d'une cérémonie presque
déjà dramatique : l'autel figurait le tombeau, que
venaient visiter des clercs représentant les saintes
femmes; d'autres clercs faisaientles anges et annonçaient
aux femmes la résurrection du Seigneur. Ce germe pri-
milif se développa dans plusieurs textes latins, et on fit
précéder cette scène de la représentation du Calvaire
avec Jésus mort sur la croix (c'était sans doule un
simple crucifix). Nous avons en français une forttte assez
développée du mystère ainsi agrandi; elle est anglo-
normande comme Adam, mais moins ancienne, et n'a
pas à beaucoup près la même valeur poétique. Elle est
très curieuse en ce qu'elle est précédée d'un prologue
adressé aux spectateurs par le meneur du jeu, et dans
lequel il leur explique les différents lieux et les diffé-
rents groupes d'acteurs qu'ils ont sous les yeu\. Le
264 LITTÉRATURE DRAMATIQUE.
théâtre du moyen âge, sorti de l'église, où il n'y avait
naturellement ni rideau ni coulisses, a gardé tout le
temps la marque de son origine : la mise en scène y est
non successive, mais simultanée; les différents lieux où
se promènera l'action sont dès l'abord sous les yeux
des spectateurs, garnis des personnages afférents; ils
communiquent entre eux par le devant de la scène. Il
résulte de là de graves inconvénients : par exemple on
ne peut rien supposer comme se passant hors de la vue
du public, et les messagers qui vont d'une des mansions
(comme dit le prologue de notre Résurrection) à l'autre
doivent toujours circuler à la vue de tous, répéter à
l'arrivée ce qu'on leur a dit au départ, et occuper par
des monologues insignifiants le temps de leur voyage
prétendu. Dautre part, cette disposition, née, comme
celle du théâtre grec, de la force des choses et non de
la réflexion, pouvait présenter de sérieux avantages,
donnait aux différents éléments de l'action une unité
visible, et dispensait des perpétuels changements de
scène qui sont si incommodes et si nuisibles à l'effet
artistique dans le théâtre anglais ou espagnol, ainsi que
de l'unité conventionnelle du théâtre français classique.
La Résurrection s'ouvre aussitôt après que Jésus a rendu
le dernier soupir, et introduit d'abord l'aveugle Longin,
personnage de récits apocryphes (§ 140), qui recouvre la
vue en se frottant les yeux du sang qui coule des plaies
du crucifié; on voit ensuite Nicodème obtenir de Pilate
l'autorisation d'ensevelir le corps, le détacher de la
croix et l'enfermer dans le tombeau ; puis le meneur,
qui tout le temps intervient, et relie par ses courts
récits les divers dialogues les uns aux autres, raconte
que le lendemain les trois Maries allèrent porter des par-
fums au sépulcre : on les voit arriver, et les anges, qui
étaient probablement jusque-là cachés derrière le
LITTÉRATURE DRAMATIQUE. 265
monument, se lèvent pour leur annoncer qu'il est vide
et que le Sauveur est ressuscité. Le jeu se termine par
un hymne que chantent les acteurs. — On peut encore
rattacher au cycle de la Résurrection le petit drame de
l'Époux ou des Vicrycs folles, d'abord sans doute pure-
ment latin, puis « farci » de refrains et de strophes en
langue vulgaire (poitevin), dont le manuscrit remonte
au second tiers du xue siècle. Il a dans ses deux parties
un caractère presque purement lyrique. La parabole
évangélique est considérée ici comme symbolisant
l'avènement du Sauveur à la fin des temps. — De l'his-
toire de la Passion proprement dite, nous n'avons pour
cette époque aucune forme française ni même latine;
c'est plus tard seulement qu'on représenta sur le
théâtre la vie et la mort du Christ.
167. A côté des mystères le théâtre chrétien comprend
les miracles, qui en sont fort différents et qui ont une
autre origine. Ils sont sortis des chants en l'honneur
des saints ou des lectures sur leur vie qu'on faisait dans
les églises, et ils étaient représentés, en général aux
veilles de leurs fêtes, par les écoliers et les jeunes clercs.
Aussi sont-ce les saints qui étaient les patrons de la
jeunesse qui ont été l'objet le plus ancien de ces jeux.
Nous en possédons plusieurs en vers latins rythmiques
sur saint Nicolas, dont un par Hilaire, disciple d'Abai-
lard; ce dernier a, comme le Daniel du même auteur,
des refrains en français. A cette classe appartient une
pièce artésienne dont nous avons déjà dit un mot (§ 132),
le Jeu de saint Nicolas de Bodel. Le prologue dit expres-
sément que ce jeu se donnait la veille de la fête du
saint; mais le miracle posthume qu'il célèbre ne sert
que de prétexte à un véritable drame à deux faces, l'une
religieuse et héroïque, l'autre réaliste et populaire : les
266 LIT'l'ÉHATClîE UKAMAÏÏoI h.
acteurs en étaient certainement des bourgeois, ou peut-
être des membres de cette confrérie des ftiëiiestrels qui
Rôtissait à Arras, et qui avait pour palladium le éierge
laineux qui, disait-on, s'était, un jour posé de lui-même,
sur la vielle de l'un d'entre eux pendant qu'il jouait
devant l'autel. Il faut noter la variété des vers employés
dans la pièce de Bodel : le rythme et l'arrangement des
rimes changent constamment. La légende du saint
racontait qu'un « barbare » ayant mis son trésor sous la
protection d'une image de saint Nicolas, et des voleurs
ayant enlevé ce trésor, le saint leur était apparu él les
avait contraints par de terribles menaces à rapporter
leur btitih. Voilà le thème simple que Bodel a développé
avec la plus extrême, et, au moins en partie, la plus
heureuse liberté. Du « barbare » il a l'ait un roi sarrasin,
et il a supposé que l'image de saint Nicolas avait été
trouvée dans le camp des chrétiens après une sanglante
défaite éprouvée par eux : cela lui a donné lieu de mettre
en scène des croisés dans toute l'ardeur de leur enthou-
siasme, et il a su placer de nobles et pathétiques accents
dans leur bouche et dans celle de l'ange qui vient leur
annoncer leur prochain martyre. D'autre part, il a peint
les voleurs comme des ribauds d'Arras, ne craignant
pas de leur prêter, tout païens qu'ils doivent être, les
locutions les plus familières et même les plus chrétiennes
(entendez les plus blasphématoires) de leurs pareils,
contemporains du poète. Les scènes qui nous représen-
tent ces « mauvais garçons » à la taverne, buvant, jouant
aux dés, se querellant et parlant un argot souvent incom-
préhensible pour nous, sont assurément beaucoup trop
longues, et on peut leur reprocher d'être par endroits
lourdes et triviales; mais elles ont un vif intérêt comme
peinture des mœurs aussi pittoresques que peu édi-
fiantes de cette classe (on peut en rapprocher des scènes
LITTERATURE DRAMATIQUE. . 267
semblables, également aftesiend.es, dans le Jfeâ Adain,
g 132, ël dabs Courtois à'Àrruè, jj 77 . La simplicité gros-
sière du miracle est plutôt augmentée qu'atténuée dans
la pièpê dé Bodèl; mais1 êh somme saihj Nicolas apparaît
à peiné, et ce n'est pas son intervention qui, b
pour les spectateurs d'alors, faisait lr principal Intérêt
de l'œuvre. — D'un autre Miracle de saint Sicotas, qui
paraît encore appartenir à notre période, nous ne con-
naissons à peu près que l'ëJïisténfce : il semble se rap-
procher par la forme des Mirtteles de Notre Dawi du
\iv siècle, dont nous allons parler. — Sainte Catherine
aussi (ut de bonne heure l'objet de jeux analogues: un
témoignage précis nous apprend qu'avant 11U) Gaufrei,
plus tard abbé de Saint-Alban. en Angleterre, avait l'ait
jouer à Dtinstable par les jeunes moines ou novices de
son monastère un miracle de cette sainte; mais nous
n'en avons pas conservé le texte, qui était sans doute
latin. — L'Angleterre, pour les miracles comme poul-
ies mystères, se montre particulièrement précoce et
abondante : Wilhani de Wadington § 157; s'indigne
contre la passion que les clercs apportaient à ces repré-
sentations; où souvent il y avait plus de scandale que
d'édification. La plupart de ces pièces anglo-normandes
se sont perdues, mais on en a souvent des imitations
anglaises postérieures.
168. Les confréries ou puis en l'honneur de la Vierge
(§ 127 eurent bientôt l'idée de représenter par person-
nages les miracles de leur patronne, de même que
d'autres confréries représentaient ceux de saiid Nicolas
ou île sainte Catherine. C'est sans doute pour une société
de ce genre que Ruslcbeuf (§ 127 a écrit son Miracle
île Théophile, d'après une légende très répandue (§ 143);
c'est une œuvre assez ordinaire, qui présente cependant
268 LITTÉRATURE DRAMATIQUE.
quelques traits hardis et, dans l'expression du repentir
de Théophile, une certaine émotion. — C'est également
pour un i pui Nostre Dame » et sans doute par des
membres de la confrérie que fut composée, sans doute
à* Paris et peut-être encore dans la première moitié du
xiv° siècle, la grande collection de quarante Miracles de
Notre Dame par personnages qui nous est parvenue. Comme
il est arrivé en dehors du théâtre (§ 143), on attribite ici
à la Vierge l'intervention décisive dans beaucoup d'his-
toires où originairement le dénouement miraculeux était
['œuvre, soit de Dieu lui-même, soit de quelque autre
saint ou sainte. Toutes les pièces qui composent ce
recueil ont entre elles une étonnante ressemblance de
fond, de forme et de manière. La polymétrie, qui règne
dans Adam, dans le Nicolas de Bodel et dans le Jeu de la
Feuillée, a disparu; sauf quelques « rondeaux » mis
dans la bouche des anges qui convoient régulièrement
Notre Dame du ciel à la terre et de la terre au ciel, tout
est en vers de huit syllabes rimant deux à deux; mais
chaque réplique se termine par un vers de quatre syl-
labes rimant avec le premier vers de la réplique suivante
le premier miracle seul conserve au dernier vers des
répliques son nombre régulier de syllabes). Il en résulte
que, à très peu d'exceptions près, toutes les répliques
ont au moins deux vers, ce qui amène des redites et
des banalités insupportables. Ces pièces n'ont d'ailleurs,
sauf quelques endroits assez naïfs et touchants, qu'une
très faible valeur littéraire; elles sont construites avec
une simplicité tellement dénuée d'artifice qu'elles en
deviennent plates et souvent presque grotesques; mais
elles montrent de quel développement était suscep-
tible la forme des miracles, bien supérieure, au point
de vue dramatique, à celle des mystères. Ceux-ci, gênés
par la sainteté même de l'action qu'ils représentaient.
LITTERATURE DRAMATIQUE. 269
ne pouvaient prendre aucune liberté et étaient empri-
sonnés dans des données surnaturelles exclusives de
tout intérêt vraiment humain; dans les miracles, au
contraire, l'action est tout humaine, et le poète est libre
de la traiter comme il l'entend ; la Vierge ou le saint qui,
par un miracle, doit la dénouer n'apparaît qu'à la fin,
vrai deus ex machina, sans peser, pendant la durée du
drame, sur la conduite des personnages. Entre les
mains de poètes quelque peu habiles, le miracle aurait
pu devenir le vrai drame moderne, en éliminant peu à
peu l'intervention surnaturelle qui le terminait. Il n'en
lut rien, grâce à l'absence de talent et surtout d'initia-
tive personnelle chez les auteurs de miracles, et le
théâtre sérieux des temps modernes trouva ses origines
dans l'imitation de l'antique. Il faut louer cependant,
dans la collection des Miracles de Notre Dame, l'extrême
variété des sujets traités et la familiarité avec laquelle
les actions et les paroles des gens de toutes conditions
sont représentées sur la scène : c'est ce qui donne de
l'intérêt à ces pièces, malgré leur faiblesse presque
constante, et les fait encore lire avec plaisir.
TABLEAU CHRONOLOGIQUE1
Ve SIECLE (fin)
Chansons romanes sur le baptême de Ghlodovech.
VIe SIÈCLE
Poème sur un fils de Ghlodovech (Floovent?).
VIIe SIÈCLE
Poèmes sur Dagobert.
VIIIe SIÈCLE
Poèmes sur Charles Martel, Pépin. Charlemagne (Roncevaux).
IXe SIÈCLE
PoÇ-mes, sur Charlemage et ses premiers successeurs. — Épopée
méridionale.
812. Concile de Tours, ordonnant de mettre les homélies « en
langue romane rustique ».
842. Serments de Strashourg.
Vers 881. Séquence de sainte Eulalie.
Xe SIÈCLE
Épopée féodale.
Homélie sur Jonas.
1. Ce tableau no comprend, à un très petit nombre d'exceptions près,
que des dates précises ou approximatives d'ouvrages, et non des dates
biographiques ou historiques. Tous les ouvrages mentionnés se trouvant
à leur rang à la table alphabétique, il a été inutile de renvoyer ici aux
paragraphes du livre. On a pris soin de ne comprendre dans un même
alinéa que des ouvrages mentionnés dans un même chapitre du texte, et
de ranger les alinéas, quand il y en a plusieurs sous la même date, dans
l'ordre des chapitres.
2~r2 TABÏ.EAU CUBONOLOGIQUE.
Deuxième uioilié.
Fragment de La Unir.
Passion; Vie de saint Léger.
XIe SIÈCLE
Deuxième période de l'épopée, dont la production directe es I close
— La geste narhonnaise est transportée au nord par les jon-
gleurs.
Chansons d'amour et de danse (perdues).
Vers 1040. Vie de saint Alexis.
Vers 10G0. Pèlerinage de Charlemagne.
1000. On chante le Roland à Hastings.
Vers 1075. Lois de Guillaume.
Vers 1080. Forme conservée du Roland.
1000. Chanson d'outrée.
1008. Chanson d'Antioche (primitive).
Vers 1100. Gloses de Raschi.
.\lle SIÈCLE
Troisième période de la poésie épique.
Premier tiers.
Forme conservée (fragment) du Roi Louis. — Le Charroi de
Nîmes. — L° Montage Guillaume (première rédaction .
Alexandre d'Alhéric.
Diffusion des récits arthuriens dans l'Angleterre française, en
France et en Italie.
Chansons de toile.
Vie de saint Grégoire.
Sermon envers : Grant mal fist Adam. — Vers du jugement. —
Débat de l'âme et du corps.
Psautiers en prose d'Oxford et de Cambridge.
1112. Première mention des contes de Renard (Laon).
1110. Comput de Philippe de Thaon.
Vers 1120. Chansons de Luc de la Barre.
1121. Vie de saint Brendan, par Benoit.
Vers 1 I2.'j. Traduction en vers du Lapidaire de Marhode.
Imitation du Cantique des cantiques.
Vers 1130. Bestiaire de Philippe de Thaon.
neuvième tiers.
Élie de Winchester et Éverard de Kirkham, traduction en vers de
Ca ton.
TABLEAU CHRONOLOGIQUE. 273
Premiers vers français dans les jeux liturgiques. — Mystère de
['Epoux (Poitou).
Premières épttres farcies.
Pelils poèmes de Wace.
Vers 1135. Sermon de Guicliard de Beaujeu.
Vers 1140. Poème (perdu) de David sur Henri Ier d'Angleterre.
1 146. Chanson pour la deuxième croisade.
Vers 1148. Geffrei Gaimar : Histoire des Anglais.
Vers 1150. La Chevalerie Vivien. — Le Couronnement de Louis
(rédaction définitive). — La Prise d'Orange. — Audigier.
Thèbes.
Béroul : Tristan.
Vie remaniée de saint Alexis.
1155. Wace : La Geste des Bretons {Brut).
Vers 1155. Tristan. — Narcissus. — Les Sept Sages en vers.
1150-1160. Chrétien de Troies. Imitations d'Ovide.
1159. Richeut.
Vers UGO. Le Moniage Guillaume (deuxième rédaction). Les Saisnes
(version traduite en norvégien). — ■ Les Enfances Godefroi
(première rédaction).
Eneas.
Lancelet anglo-normand. — Chrétien de Troies : Érec.
Huon d'Oisi, Chrétien de Troies : chansons.
1160-1174. Wace : La Geste des Normands {Rou).
Vers 1165. Rédaction rimée du Roland.
Benoît de Sainte More : Troie.
1167. Le livre des Sibylles.
1168. Chrétien de Troies : Cligés.
Troisième tiers.
Aioul. — Élie de Sainl-Gilles. — M aine t. — Doon de Nanteuil. —
Les Lorrains. — Divers poèmes de la geste narbonnaise. —
Aie d'Avignon. — Huon de Bordeaux. — Berte (rédaction
perdue). — Oger de Danemarche. — Jean Bodel : Saisnes. —
Aspremont. — Basin. — Ami et Amile. Jourdain de Blaie. —
Girard de Roussillon.
Lambert le Tort et Alexandre de Bernai : Alexandre.
Alexandre de Paris : Athis et Porphirias. — Partenopeu. —
Pyrame et Thisbé.
Aucassin et Nicolette. — Le Comte de Poitiers. — Floire et
Blanche/leur (deux rédactions).
Lais du cor, à'Ignaare, de Graelent, etc.
Le Pèlerinage de Renard.
Salomon et Marconi.
L'Évangile des femmes.
Chansons de Blondel, de Gautier d'Épinal, etc.
18
27 4 TABLEAU CUHONOLOGIQL'E.
Poffmes bibliques anglo-normands.
Traduction des Rois, des Juges, des Macchabées. — Poèmes de
Jub; de Joseph.
Vie de saint Jean-Baptiste.
Yies de saint Alexis, saint Laurent, saint Gilles, saint Hugues
de Lincoln, saint Edmond; de sainte Marie l'Égyptienne,
sa'mlr Thaïs . sainte Euphrosyne, sainte Julienne, sainte
Catherine, sainte Modwenne. — Bérol : Purgatoire de saint
Patrice.
Samson de Nanteuil : les Proverbes de Salomon. — Dit des Quatre
Sœurs. — Les Quinze Signes du Jugement.
Psautier en vers. — Landri de Waben : Cantique des cantiques.
Vers 1168. Gautier d'Arras : Ille et Galeron. — Chrétien de
Troies : C tiges.
Vers 1170. Manuscrit d'Oxford du Roland. — Fierabras. — Rui-
nouart. — Foulque de Candie. — Aiquin.
Thomas : Tristan.
Aaluf. — Horn. — Waldef. — Havelok.
Chrétien de Troies et Godefroi de Lagni : La Charrette.
Benoit de Sainte-More : Histoire des ducs de Normandie. — Guil-
laume de Saint-Pair : Histoire du Mont-Sainl-Michel.
Huon d'Oisi : Tournoiement des dames.
Traduction (perdue) des Actes des Apôtres, par Lambert de
Liège.
Etienne de Fougères : Livre des manières. Poème (fragmen-
taire) sur les Etals du Monde.
Roau d'Arundel : Lettre du Prêtre Jean.
Vers 1172. Chrétien de Troies : Ivain.
1 172-1 1 TU environ. Benoit de Sainte-More : Histoire des ducs de
Normandie.
1173. Garnier de Pont-Sainte-Maxence : Vie de saint Thomas.
1174. Jourdain Fantosme : Histoire de la guerre d'Ecosse.
Vers 1175. Les Enfances Godefroi (deuxième rédaction).
Marie de France : Lais. — Chrétien de Troies : Perceval.
Benêt : Vie de saint Thomas.
1180. Poème allégorique sur le siège de Jérusalem.
Vers 1 180. Marie de France : fables. — Poème allemand sur Renard.
— Jean le Venelaiset Gui de Cambrai : Vengeance d'Alexandre.
Simon de Fraisne : imitation de Boèce. — Les Proverbes au
Vilain.
Chansons du châtelain de Couci, de Conon de Béthune, etc.
Simon de Fraisne : \'ie de saint Georges.
1181. Paraphrase en vers du psaume Eructavit.
Vers 1185. Huon de Botelande : IUppomédon, Prolésilans.
Traduction en vers de Martin de Braga dédiée à Philippe IL
11S8. Aimon deVarenne : Florimonl.
Vers 1188. Hcrman de Valenciennes : Y Assomption.
TAIÏLEAU CHRONOLOGIQUE. 275
1189-91. Chansons de croisade de Renaud, Conoo de Béthune, etc.
Vers 1190. Ernoul : Histoire de la perte de Jérusalem.
Poème sur 1,1 conquête de l'Irlande.
! 190. Hermon de Valenciennes : la Bible en vers.
1191. Huon d'Oisi, chanson contre Conon de Béthune.
1192. Chansons satiriques (perdues) échangées entre Richard d'An-
gleterre et Hugues de Bourgogne.
1191-1200. Éverat : Genèse.
1194. Chanson de prison de Richard d'Angleterre.
1 !!).">. Traduction du commentaire de Ha i mon sur les épîtres et
évangiles.
Vers 1196. Arnhroise : Histoire de la guerre sainte.
1199. Bref d'Innocent III condamnant les traductions des livres
saints en langue vulgaire faites à Metz.
1200. Guillaume de Dole.
Vers 1200. Branches de Renard.
Compilation historique (perdue) faite par Baudouin de Flandre.
André de Coutances : Le Roman des Français.
Jean Bodel : Jeu de Saint Nicolas.
Chardri.
Robert de Ho.
XIIIe SIECLE
Rédactions françaises de Bovon de Hanslone. — Renaud de Mcn-
tauban (formes conservées). — Auberi le Bourguignon. —
Doon de Maience. — Garin de Monglane. — Florent et Octa-
vien. — Anseïs de Cartlwge. — Gui de Nanleuil. — Jean de
Lanson. — Renier. — Simon de Fouille. — Siège de Neuville-
Hector. — Landomata. — Narcisse.
Flaire et Jeanne. — Constant (vers et prose). — Florianl et Flo-
relte.
Manteau mal taillé. — Aire périlleux.
Amadas. —La Poire.
Suites des Se/d Sages.
Fableaux. — Trubert.
Lettres françaises et anglo-normandes.
Lapidaires. — Ordre de chevalerie. — Urbain. — Arts d'amour;
Remède d'amour; Dieu d'Amour; Vénus.
Dits, enseignements, poèmes moraux, débats.
Pièces sur les femmes.
Poésies lyriques. Rondeaux, ballettes, estampies. Motets. Lais.
Bible de Roger d'Argenteuil.
Les Macchabées, en vers.
276 TABLEAU CHRONOLOGIQUE.
Poèmes évangéliques. — Judas.
Vies de saints et saintes.
Contes dévots.
Sermons. — Débals pieux. — Guilebert de Cambres : Lùcidaire.
Psaumes de la pénitence. — Cantique des cantiques. — Prières
et chansons pieuses.
Mystères et miracles. — Jeux.
Premier tiers.
Renouvellement du Roi Louis. — Sébile. — Les Narbonnais. —
Gilles de Chin.
Gui de Warwick; Foulque Filz-Warin.
Mériadec. — hier. — Durmart. — Fergus. — Guinglain.
Principales brandies do Renard.
Versions rimées de Pierre Alphonse.
Chansons d'Audcl'roi le Bâtard. — Chansons de croisade.
Traduction des Dialogues et des Moralités de saint Grégoire, dos
Homonymes d'Isidore, des sermons de Morice de Sulli et de
saint Bernard. — Simon : Les Trois ennemis de l'homme.
Tibaud d'Amiens.
Le Mystère de la Résurrection.
1201. Chansons de croisade de Hugues de Berzé, etc.
1202. Jean Bodel : Congé.
1204. Guiot de Provins", Bible.
1203-1230. Divers écrits de Pierre.
Vers 1205. Guillaume de Païenne.
1200. Traduction de Turpin (par Pierre) pour Renaud de Boulogne.
Vers 1210. VEscoufle.
Perlesvaus (première rédaction).
Dolopathos.
Traduction des Vies des Pères pour Blanche de Champagne. -
Traduction sur le grec de Darlaam et Joasaph.
Poème moral.
1210-1211. Guillaume le Clerc : Bestiaire.
1210-1220. Bertrand de Bar-sur-Aube : Girard de Vienne, Aimcri
de Narbonne.
Raoul de Houdan.
1212. Anger : Dialogue de saint Grégoire.
1213. Calendre : Histoire des empereurs.
Vers 1213. Jofroi de Villehardouin : Conquête de Constanlinople.
1214. Anger : Vie de saint Grégoire.
Vers 1215. Robert de Boron : Joseph, Merlin, Perceval.
Robert de Clairi : Conquête de Constanlinople.
Gervaise : Bestiaire.
André de Coutances : Évangile de Nieodème.
Paien Gastinel : Saint Martin.
TABLEAU CHRONOLOGIQUE. 277
1218-1225. Gautier de Coinci : Miracles de Notre-Dame.
Vers 1220. Quête du sain/ graal, en prose. — Laneelot, en prose
(première rédaction). — Tristan, en prose (première rédac-
tion). — Gerbert de Montreuil : Percevat.
Henri de Valenciennes : Livre de'l'emtiereur Henri. Chronique
des rois d'Angleterre de l'anonyme de Béthune.
Comte de Bretagne : Proverbes. Salomon et Marcoul.
Vie de saint Thomas (fragments).
Hélinand : Vers sur la mort. — Barthélcmi : Charité, Miserere.
1221. Huon de Saint-Quentin, Complainte de Jérusalem.
Vers 1224. Vie de Guillaume le Maréchal.
Guiot de Provins : Bible. — Hugues de Bcrzé : Bible.
Vers 1225. Gerbert de Montreuil : Violette. — Mennessier : Perceval.
— Le Brait Merlin.
Les Sept Sages en prose.
Le Livre des histoires. — Chronique des rois de France de l'ano-
nyme de Béthune.
Gui de Cambrai : Barlaam et Josaphat.
1223-1240. Cliansons de Tibaud de Champagne.
1220-1237. Sermon de Bobert Sainterel sur Louis VIII.
1227. Guillaume le Clerc : llesant de Dieu.
Vers 1227. Histoire en prose (avec prologue en vers) de Philippe II.
1229-1230. Première compilation du Livre de la Terre Sainte.
Vers 1230. Gui de Bourgogne.
Tristan en prose (remaniement). — Continuation du Merlin. —
Laneelot réuni à la Quête (remaniements). — Palamède.
Galeran de Bretagne. — Eustache le Moine. — La Comtesse de
Pontieu.
Interpolation de Turpinet chronique sainlongeaisc-.
Chronique des rois de France (satire politique). — Privilège aux
Bretons.
Richard de Fournival.
Jofroi de Watreford : traductions d'Eutrope, de Darès, du faux
Aristote.
Richer : le Dit des Quatre sœurs.
Deuxième tiers.
Gaidon. — Baoul de Cambrai (rédaction remaniée).
Jacot de Forest : César.
Adam de Suel : Caton. — Alard de Cambrai : Dits des p/iilo-
sophes.
Traduction du Code, des Inslilules. — Traductions de Boèce. —
Dits, enseignements, etc.
Chansons amoureuses, politiques, satiriques.
Bible parisienne.
278 TABLEAU CHRONOLOGIQUE.
Robert de Gretham : Évangiles des dimanches, Corset.
Chansons pieuses. — Poésies franciscaines.
Vers 1235. Huon de Méri : Tournoiement d'Antéchrist.
1230. Lettre de Fonce d'Aubon sur les Mongols.
1237. Henri d'Andeli : Dit du chancelier Philippe.
Vers 1237. Guillaume de Lorris : Romande la Rose.
Vers 1240. Jean de Tuin : César.
Le grand Saint Graal.
Lais de VOmbre, du Conseil.
Les Faits des Romains.
Henri d'Andeli.
Jean le Marchant : Miracles de Notre Dame de Chartres.
lies des Pères.
1243. Philippe Mousket : Ch?'oni</ue.
Sidrac.
Poème biblique de Geffroi de Paris.
Vers 1245. Philippe de Novare : Mémoires.
1245-1275. Baudouin de Condé.
124(i. Rédaction de la Coutume d'Anjou.
124G. Gautier de Metz : L'Image du monde (première rédaction).
124S. L'Image du monde (deuxième rédaction).
1249. Jean Sarrazin : Lettre.
1250. Jean de Joinville : Credo (première rédaction).
Vers 1230. Gautier de Tournai : Gilles de Chin.
1250-1270. Adam de la Halle (ou le Bossu) : chansons.
Vers 1250. Dernières rédactions des romans en prose de la Table
Ronde.
Jean de Flixicourt : traduction de Darès.
Lettre du chapelain Philippe.
Robert de Blois.
Philippe de Novare : Livre de Forme de plaid.
Jean Malkaraume : Bible.
Vies des Pères (2e partie).
Vers 1255. Couronnement de Renard. — Poésies sur Hugues de
Lincoln.
Pierre de Fontaine : Conseil.
1225-1285. Rustebeuf.
1256. Régime du corps d'AIebrand.
1258. Alexandre du Pont: Mahomet.
1200. Le ménestrel d'Alphonse : Chronique de France. — Récits
du ménestrel de Reims. — Lettres de Blanche de Champagne.
Vers 1200. Chroniques de Baudouin d'Avesnes.
livre de Justice et de Plaid. — Villard de Honnecourt : Album.
Philippe de Novare : Les Quatre âges.
1202. Jean le Marchant : Miracles de Notre Dame de Chartres.
Vers 1262. Adam le Bossu : Jeu de la feuïllce. Congé.
1264. La Paix et la Charte aux Anglais.
TABLEAU CHRONOLOGIQUE. 279
120"). Lettre des barons d'Oripnt a Tibaud V.
Vers 1205. Brunet Latin : Trésor.
ISaude Fastoul : Congé'.
Troisième tiers.
Galien. — Florence de Rome.
Abladane.
Richard le Beau. — Le Comte d'Artois. — Sone de Nansni.
Simon de Compiègne : \& Sphère. — Henri do Mondeville : Régime
du corps. — Dits des métiers. — Jean le Teinturier : Mariage
des sept arts.
Mathieu le Poriier : la Cour d'amour, etc.
Enseignement en sixains. — William de Wadington : Manuel des
péchés. — Traduction de traités de saint Bonaventure.
Mystères et miracles.
1267. Pierre de Peckham.
1269 et an nées suivantes. Lettres de lareineMarguerite de Provence.
1270. Lettre de Tibaud V de Champagne sur la mort de saint
Louis.
1270. Bobert le Clerc d'Arras : Vers de la Mort.
Pièces politiques artésiennes. — Congé Adam.
1270-1271. Lettre des barons d'Orient à Henri III d'Angleterre.
1270-1280. Poèmes et poésies de Philippe de Beaumanoir.
Vers 1270. Adenet : Oger, Berte, Bovon de Comarcis.
Poésies de Baudouin de Condé et de Huon le Boi do Cambrai.
— Gautier de Bellepcrche : Judas Machabe'e (inachevé).
1271. Busticien de Pise : Table Ronde.
1273. Bédaction des Établissements de saint Louis.
Vers 1275. Première rédaction française des Chroniques de Saint-
Denis.
Vers 1277. Le Garçon et V Aveugle. — Jean de Meun : Roman de
la Rose.
1278. Sarrazin : Roman de Ham.
1279 et années suivantes. Lettres de la reine d'Angleterre Aliénor
de Provence.
1280. Bichard d'Annebaut : traduction en vers des Institules.
Vers 1280. Adenet : Cléomadès.
Pierre du Biés : fin de Judas Machabée.
La Châtelaine de Vergi.
Adam de la Halle (ou le Bossu) : Robin et Marion.
1283. Philippe de Beaumanoir : Coutumes de Beauvaisis.
1 284. Jean de Meun : Traduction de Végèce. — Guillaume Chapu :
Coutume de Normandie versifiée.
1285. Jacques Bretel : Tournois de Chauvenci.
Traduction en vers des Machabées.
Vers 1285. Girard d'Amiens : Escanur.
280 TABLEAU CHRONOLOGIQUE
Dit du Vrai anneau.
1285-1290. Jean de Meun : écrits divers.
1287. Jean de Joinville : Credo (deuxième rédaction).
Vers 1287. Le confesseur de la reine Marguerite.
1288. Jean Priorat : Végèce versifié.
Jacquemard Gelée : Renard le nouveau.
Élégie juive de Troies.
Jeu du pèlerin.
1290. Drouart la Vache : Traduction d'André le Chapelain.
Vers 1290. Girard d'Amiens : Méliacin.
Placides et Timeo. — Mathieu le Vilain : Traduction des Météores
d'Aristote.
Le moine de Silli.
Jean de Journi : Dime de pénitence.
1291-1295. Guiart des Moulins : Bible historiate.
1295. Dit de Vérité.
Vers 1295. Girard d'Amiens : Charlemagne.
Nicole de Margival : La Panthère d'amour.
Jean de Meun : Testament.
1298. Première rédaction du livre de Marc Pol.
Vers 1300. Ovide moralisé.
Jakemon Saket: le Châtelain de Couci.
Gautier de Bibelesworth.
Macé de la Charité : Bible en vers.
XIVe SIÈCLE
Première moitié.
Florent et Octavien en alexandrins. — Gaufrei. — Tristan de
Nantcuil. — Enfances Garin de Monglane.
La Belle Hélène.
Bérinus.
Gilles de Trasignies.
Ci nous dit.
Godefroi de Paris : divers écrits.
Vie et Dialogue de saint Grégoire. — Vies de saints et contes
dévots en quatrains monorimes.
1303. Poème sur la guerre d'Edouard Ier en Ecosse.
1305. Deuxième rédaction du livre de Marc Pol.
1306. Guillaume Guiart : Branche des royaux lignages.
Vers 1307. Pierre de Langtoft : Chronique.
1309. Jean de Joinville : Vie de saint Louis.
1310. Fauvel (Impartie).
1310-1340. Jean de Condé.
1310. Jacques de Longuyon : Vœux du paon (première rédac-
tion).
TABLEAU CURONOLOGIQUE. 281
1313. Godofroi de Paris : Martyre de saint Bacchus.
1314. Fauvel (2" partie).
1315. Jacques de Longuyon : Vœux du paon (deuxième rédac-
tion).
Simon de Marville : Vœux de l'Épervier.
1316. Jean Maillart : La Comtesse d'Anjou.
1319-1329. Watriquet de Couvin.
1320. Godelroi de Paris : Dit des patenôtres.
Vers 1320. L'advocacie Nosti-e Dame.
1322. La chapelerie de Baieus.
Première rédaction de Renard le contrefait.
132'i. Chronique de Morée.
1326. Traduction des évangiles et épîtres du dimanche par Jean
de Vignai.
1328. Deuxième rédaction de Renard le contre fait.
1330. Eustache, prieur de La Fontaine Notre Dame.
Vers 1330. Hugues Capet.
Jean Brisebarre : Restor du paon.
Perceforest.
Guillaume de Machaut : premières œuvres.
Nicole Bozon : contes en prose et poésies.
1330-1332. Guillaume de Digulleville : Pèlerinage de la vie humaine.
1331-1333. Girard de Roussillon en alexandrins.
1333. Traduction de Burchard par Jean de Vignai.
1310. Jean de le Mote : Parfait du paon.
Vers 1340. Modus et Racio (première partie).
Traduction de Jacques de Cessoles par Jean de Vignai.
Miracles de Notre Dame par personnages. — Miracles de saint
Nicolas.
1343. Nicolas de Vérone : Pharsale.
1355. Guillaume de Digulleville : Pèlerinage de la vie- humaine
(deuxième rédaction) ; Pèlerinage de l'âme.
Vers 1355. Renouvellement et continuations des poèmes de la
croisade.
Jean le Bel : Chronique.
1358. Guillaume de Digulleville : Pèlerinage de Jésus-Christ.
Deuxième moitié.
Combat des Trente. — Cuvelier : Bertrand du Guesclin.
Jean des Prés : Renouvellements de chansons de geste; Geste
de Liège.
XVe SIÈCLE
Mise en prose des chansons de geste.
Geste des Bourguignons.
NOTES BIBLIOGRAPHIQUES
INDICATIONS GENERALES
Nous faisons précéder les notes bibliographiques de la liste
d'un certain nombre d'ouvrages ou recueils souvent cités, dont il
a paru plus coin mode de donner ici une fois pour toutes les titres
et les dates.
AltfranzÔxische Bibliothek, herausgegeben von Dr Wendelin
Fôrster. I-XV. Heilbronn, 1881 et années suivantes.
Ausgaben urtd Abhandlungen aus dem Gehiele der romanischen
Philologie, verôiïentlicht von E. Stengel. I-XCVIII. Marburg,
1882 et années suivantes.
Bartsch, Chrestomathie. — Chrestomathie de l'ancien français
(viue-xv° siècle), accompagnée d'une grammaire et d'un glossaire,
par Karl Bartsch. 9" édition revue et corrigée par L. Wiese.
Leipzig, 1908.
Bartsch, Langue et littérature. — La langue et la littérature
françaises depuis le IXe siècle jusqu'au XIVe siècle. Textes et glos-
saires par Karl Bartsch, précédés d'une grammaire de l'ancien
français, par Adolf Hormng. Paris, 1887.
Bihliotheca Normannica. Denkmaler Normannischer Lileratur
ùnd Sprache, herausgegeben von Hermann Suchier. I-VII. Halle,
1879-1899.
Bibliothèque de VÉcole des Chartes, revue d'érudition consacrée
spécialement à l'étude du moyen âge. Paris, 1839 et années sui-
vantes.
Bibliothèque de VÉcole des Hautes Éludes (Sciences historiques
et philologiques). Paris, 18G8 et années suivantes.
Delisle, Inventaire. — Inventaire général et méthodique des
manuscri/s français de la Bibliothèque nationale, par Léopold
Delisle. Paris, 1, 1876; II, 1S78.
Franzôsische Studien, hrr.iusgegeben von G. Kôrting und
E. Koschwitz. Heilbronn, 18S1 et années suivantes.
Histoire littéraire de la France, par des religieux bénédictins
de la Congrégation de Saint-Maur, continuée par des membres de
l'Institut. I-XXX1IL Paris, 1733-1906. Le tome XXXIV ne tardera
pas à paraître.
284 NOTES BIBLIOGRAPHIQUES.
Historiens de France. — Recueil des historiens des Gaules et
de la France, par dont Bouquet et d'autres bénédictins, continué
par des membres de 1 Institut. I-XXIV. Paris, 1738-1904.
Jahrbuch fur romunische und englische Literalur, herausge-
geben von A. Ebert und L. Lemcke. I-XV. Berlin, puis Leipzig,
1859-76.
Literaturblatt fur germanische und. romanisc/ie Philologie,
herausgegeben von 0. Bf.haghel und Fr. Neumann. Heilbronn,
1880 et années suivantes.
Meyer. Recueil. — Recueil (Fanciens textes bas-latins, pro-
vençaux et français...., publiés par Paul Meyer. Paris, Impartie,
1874; 2e partie, 1877.
Moyen-Âge [Le), bulletin mensuel d'histoire et de philologie
(direction : A. Marionan, M. Prou, M. Wilmotte). Paris, 1888 et
années suivantes.
Notices et extraits des manuscrits de la Bibliothèque du Roi et
autres bibliothèques, publiés par l'Académie des Inscriptions.
1-XXX1X. Paris, 1787 et années suivantes.
Paris, Manuscrits françois. — Les manuscrits françois de la
Bibliothèque du Roi, par M. Paulin Paris. I-VII. Paris, 183G-4S.
Petit, Bibliographie der meddelnederlandsche Taal-en Lelter-
kunde. Leiden, 1888.
Rpvue critique d'histoire et de littérature. Deux volumes par
année. Paris, 1S66 et années suivantes.
Revue des langues romanes, publiée par la Société des langues
romanes. Montpellier et Paris, 1870 et années suivantes.
Romania, recueil trimestriel consacré à l'étude des langues et
des littératures romanes, publié par Paul Meyek et Gaston Paris.
Paris, 1S72 et années suivant''.-.
Romanische Bibliolhek, herausgegeben von \Y. Foerstsu. I-XIX.
Halle, 1888 et années suivantes,
Romanische Forschungen, Orgtm fur romanisclie Sprachen und
Mittellatein, herausgegeben von Karl Vollmoller. Erlangen,
1881 et années suivantes.
Romanische Studien, herausgegeben von Eduard Bôii.mer. I-VI.
Halle, 1871-89.
Société des anciens textes français (Publications de la). Paris,
1875 et années suivantes.
Studj di filologia romanzà, pubblicati da Erneslo Monaci. Borna,
1885 et années suivantes.
Wabd, Catalogue of Romances. — Catalogue of Romances in
the Department of Manuscripts in the British Muséum, by H. L.D.
Ward. 1 et II. London. 1883-1893.
Zeitschrifl fur romanische Philologie, herausgegeben von Gustav
Giiober. Halle, 1677 et années suivantes.
NOTES BIBLIOGRAPHIQUES
(Les chiffres renvoient aux paragraphes.)
5. Sur l'épopée bourguignonne, et sur lout ce qui concerne les
origines germaniques de l'épppée, voir le livre de Pio Rajna : Le
Origini deW epapea ftancese; Firenze, 1884 (cf. Romania, XIII,
598-627).
8. Le mot roman est primitivement un adverbe (romans, du lat.
vulg. romanice qui veut dire « dans la langue des Romains »). Sur
la valeur du mot Homanus à l'époque mérovingienne, voy. Romania,
' I, 1-22 (G. Paris, Mélanges linguistiques, Paris, 1906, p. 1-31);
sur le développement postérieur des sens du mot roman, voir
Romania, XVI, 157.
12. Sur les traces de mythologie germanique dans l'épopée fran-
çaise, voy. des articles de G. Osterhage dans les tomes XI et XII
de la Zeilschrift fur romanische Philologie (l'auteur va d'ailleurs
beaucoup trop loin dans la voie de l'interprétation mythologique;
cf. Romania, XVIL,318; XVIII, 324).
13. Le fragment cité est emprunté au chant du Vidsilh; voy.
A. Ebert, Gesc/iichte der Literatur des Millelalters, Leipzig, 1887,
111, 37.
Sur Valand ou GuaJant, voir une étude intéressante, mais trop
affirmative dans ses conclusions, de M. Golther, Germania,
XXXI II, 449, et A. Thomas, Romania, XXIX, 259.
Sur l'épopée franque de Sigofred, voir Golther, Germania,
XXXIV, 265.
14. Sur les mots allemands en français, voir E. Mackel, Die ger-
maniscken Elemenle in der franz'ôsischen und provenzalischen
Sprache, Heilbronn, 1887 (Franzosischen Studien, VI) ; cf. Romania,
XVII, 289. Il faut d'ailleurs noter que ces mots ne proviennent pas
tius des Francs : plusieurs sont empruntés aux idiomes d'autres
peuples germaniques; quelques-uns ne remontent même qu'aux
Normands.
15. Sur Floovent, cf. Romania, XVIII, 326; XXVI, 112; Petit,
443 ; L. Gautier, Ribliographie des chansons de geste, p. 102.
18 ss. Tous les ouvrages antérieurs sur l'épopée française
sont indiqués et appréciés dans Kr. Nyrop, Storia deW epopea
286 NOTES BIBLIOGRAPHIQUES.
francese nel medio evo, prima traduzione dall' originale danese,
di Egido (ioHHA, Firenze, 1886 (cf. Romania, XIV, 143 ss.).
Sur Basin : Petit, 428; Rom., XXI, 296.
Le ii n » t de « slyle national * est «In .M. L. Gautier, Les Épopées
françaises, I, 2': édit., Paris, 1878-82, p. 392.
19. Sur l'épopée deCharlea Martel, voir Rajna, |>. 199 ss.
Sur l'épopée de Pépin, voir G. Paris, Hist.poèt. de Charlcmagne,
Paris, 1S05. p. 223 ss.; Mélanges Julien llavet, 18U5, p. 003 ss.
Sur l'épopée féodale, voir Journal des Savants, 1887, p. 025.
20. Sur les chansons contemporaines des événements, voir
Roland, v. 1014, 1400, 1474.
Chansons de geste à lahle : voir Bartsch, Langue et litlér.,
col. 133, 393; Jobihal, Contes, dits, fabliaux, Paris, 1839, I, 1S3
(au xiv* s.).
Dans les fêles : voirL. Gautier, La Chevalerie, Paris, 1S84, p. 435.
Dans les jardins : Prise d'Orange, v. 138.
Dans les voyages à cheval : Itaoul de Cambrai, v. 6085 ss. ;
Moniage Guillaume; dans llisl. litt., XXII, 523.
Chansons de geste exécutées en marchant au combat : voir
I'iajxa, p. 365.
Sur les jongleurs : E. Freymond, Jongleurs tend "Ménestrels,
îlalle, 1883; W. Hertz, Spielmannsbuch, Stuttgart, 1880.
Sur le rôle cyclique des jongleurs, voir Romania, I, 177.
21. Sur la façon de chanter les chansons de geste, voir Tiersot,
IUduire de la chanson populaire en France, Paiis, 1889, p. 406, et
II. Suchier, Zeitschrift f. rom. Phil., XIX, 370.
Le vers d'Audif/ier est cité avec la musique dans le Jeu de
Robin et Marion. (voir § 133).
Sur la mélodie A'Aucassin, voir Aucassin et Nicoletle, par
A. Bida et G. Paris, Paris, 1878, p. xv.
Voir la chanson où est citée « la manière du vieil Fromont »,
dans Bartsch, Langue et Liltér., 522-23.
22 ss. Pour la plupart des poèmes cités, il suffit de renvoyer à
la bibliographie qui termine l'ouvrage de Nyrop et à L. Gautier,
Bibliographie des chansons de geste (Paris. 1897), qui s'arrête à
l'année 1890. On ne donnera de références bibliographiques spé-
ciales que pour les éditions ou études parues postérieurement à
cet ouvrage, ou à propos de faits particuliers.
Sur Doon de Maience : L. Gautier, Bibliographie des chanso7is
de geste, p. 88.
23. Sur le caractère italien de la geste des Maganzesi, voir Ro-
mania, II, 302.
NOTES BIBLIOGRAPHIQUES. 287
24. Sur les Saisnes : Petit, 434; Gautier, BibL, p. Ifl9; 0. Koiins-
tbôm, Etude sur. Jean Bodel, Upsala, 1900 (cf. Romania, XXX, 479).
Sur la rédaction franco-ilalienne i'Aspremont, voir \V. Meyer,
Zeitschrifl fur romanische Philologie, X, 22.
Sur Fierabras, voir Romania. XVII, 22; XXIV, 1; XXX, ICI.
Sur Gui de Bourgogne, voir Gautieh, BibL, p. 120.
Sur Anseïs de Cartilage, voir Romania, XXV, 556; XXVII, 245.
Sur Désief, voir G. Pauis, Hist.poét. de Charlemagne, p. 330-330.
Sur le Roi Louis (Isniibarl et Gormont). voir Th. Fluri, hembart
et Gormont, Liàle, 1895; R. Zenker, Das Epos von Isembart und
Gormond, Halle, 1890; Ph. Lauer, Romania, XXVI, 161; F. Lot,
ibid., XXVII, 1. M. Lot(p. 6) conteste le titre de Roi Louis donné au
poème dont un ms, de Bruxelles nous a conservé environ 600 vers,
et préfère conserver le titre généralement adopté : Isembart et
Gormont. — Sur le remaniement de la vieille chanson française que
renferme le poème allemand de Loher und Maller, voir Uist. litt.,
XXVIII, 250 ss. ; Petit, 435.
Sur Berte, voir Romania, XIV, 008; Petit, 461; Gautier, BibL,
p. 66.
Sur Jean de Lanson, voir Romania, XXIV, 317.
Sur Mainet, voir Rajna, p. 202; Gautieh, BibL, p. 145.
Sur Basin, voir Nyrop, 111-112; Petit, 428; Gautier, BibL, p. 62;
Romania, XXI, 296 ; XXIX, 425.
SurSeôiZe: Petit, 442; Gautier, BibL, p. 143.
Sur Oger : Petit, 436; Gautier, BibL, p. 150; Voretzsch, Ueber
die Sage von Ogier dem Ddnen, Halle, 1891 (cf. Romania, XXI,
137); R. Renier, Ricerche sulla Leggenda di Uggeri il Danese in
Jrancia, dans les Mémoires de l'Académie des Sciences de Turin,
2e série, t. XLI (cf. Romania, XXI, 138). Sur une rédaction tar-
dive en alexandrins, voir Ward, Calai, of Romances, I, 004-610.
Le Couronnement de Louis, p. p. E. Langlois. Paris, 1888 (Soc.
des anciens textes français); L. \Villems, L'élément historique
dans le « Coronetnent Loois », Gand, 1890 (cf. Romania, XXIII, 4G5);
Jeanroy, Romania, XXV, 353; M. Roques, Romania, XXX, 176.
25. Sur Renaud de Montauban ou les Quatre fils Aimon : Petit,
438; Gautier, BibL, 158. — Une nouvelle édition des Quatre fils
Aimon, est en cours de publication, par les soins de M. Castets,
dans la Revue des langues romanes, t. XL1X (190G) et suiv. — Sur
quelques-uns des manuscrits de ce poème, voir ibid., LI, 241. —
Sur les versions néerlandaises, voir Romania, XXXV, 400.
Sur Maugis : Petit, 439; Gautier, BibL, p. 146.
Sur la vie latine de Girard de Roussillon -.Romania, VII, 178; XVI,
103. Sur le poème : P. Meyeu, Girart de Roussillon, chanson de
geste, traduite pour la première fois, Paris, 1884; A. Stimming,
Ueber den provenzalischen Girart von Rossillon, Halle, 1888 (cf.
Romania, XVII, 637).
288 NOTES BIBLIOGRAPHIQUES.
Esclarmonde, Clarisse et Florent, Yde et Olive, drei Forselzungen
der chanson von Huon de Bordeaux verôfféqtlicht von Max
Schweigel, Ausg. uiul Abh., LXXXII1 (cf. Romania, XX, 478).
Sut Girard de Vienne : Dattier, Bibl., p. 116; Romania. XXXIV,
444.
Sur Huon de Bordeaux : Petit, 441 ; Gautieb, Bibl., p. 132: Bn-
mania, XXIX, 200: Voretzsch, Die Composition des Huon von Bor-
deaux, Halle, l'JijO: G. Paris, Poèmes et Légendes du moyen âge,
Paris [1900], p. 24-90.
Sur Raoul de Cambrai, voir Journal des Savants, 1887, p. Closs. ;
Romania, XXXVII, 193, 491; XXXVIII, 219.
Sur la Vengeance Rioul, voir Romania, XVII, 276.
Sur Auberi : Petit, 433; Gautier, Bibl., 66.
Sur les Lorrains : voir Petit, 437; Gautier, Bibl., 141 ; sur les
origines, et les personnages, Romania, XXVI, 109, 569; XXVlil,
273: sur les manuscrits, Romania, III, 78, 195; VI, 481; XX XIV,
42'.); Vietor. Die Hdschr. der Geste der Loherains, Halle, 1876.
Hervis von Metz.,, ligg. von E. Stengel, I, Dresde, 1903.
Sur Anseïs, voir Gautier, Bibl., p. 35.
26. Sur Aioul : Journal des Savants, 1886, p. 393.
Sur Étie de Saint-Gilles : Journal des Savants, 1886, p. 409.
Orson de Beauvais, chanson de geste publiée par G. Paris
(Société des anciens textes fiançais, 1899). Cf. Romania, XXXI1,577.
Sur Huon d'Auvergne : Gautier, Bibl., p. 130; Romania, VII,
626; XXXVIII, 349.
27. Sur Ami et Amile et Jourdain de Blaie : Gautier, Bibl.,
p. 52. 138.
Une édition àeDoon de la Roche est sous presse, pour la Société
des anciens textes français.
Sur la Belle Hélène, voir Œuvres poétiques de Beaumanoir,
publiées par Sucrier (ci-dessous, § 51), I, xxvn.
Sur Bovon de Hanstone, voir Gautier, Bibl., p. 69; Stimming, Bas
gegenseitige Verhultniss d. franzosischen gereunten Versionen
d. Sage von B. de Hanstone, dans les Abhandlungen dédiées au
prof. Tobler, Halle, 1895 ; Der Anglo-vormannische Boeve de Haum-
tone hgg. von A. Stimming, Halle, 1899 (t. VII de la Bibliotheca
normannica de M. Sucliier).
Sur Horn (et Aaluf), voir Gautier, Bibl., p. 129, Romania, XV,
575- Schofield, The s ton/ of Horn and Rimenhild, dans Publications
of the modem language Association of America, XVIII (1903), 1.
28. Galiens li restorés... zum erslen Mal verôffentlicht von
E Stengel, Marburg, 1890, Ausg, u. Abh., LXXXIV (cf. Romania,
XIX. 376). Voir Hist. litt. delà Fr.. XXVIII. 221-239.
Sur Doon de Mayence, Petit, 429: Gautier, Bibl., p. 88. Sur
Valentin et Orson : Petit, 402; Gautier, Bibl., p. 204.
NOTES BIBLIOGRAPHIQUES. 289
29. Sur le Chevalier au cygne : Petit, 405; Gautier, Bibl., p. 77
et 90 (Elioxe); Romania, XXI, 02; XXX, 404 : XXXIV, 200.
30. Les Vœux de l'Epervier... hgg. von G. Wolfram und F. Box-
nardot, Metz, 1895 (cf. Romania, XXIV, 626).
LeCombat de trente Bretons contre trente Anglais, publié d'après
le ms. de la Bibliothèque du lloi par G.-A. Crapelet, Paris, 1827
(cf. Romania, VII, 479).
La Chanson de Bertrand du Guesclin, par Cuvelier, publiée
par E. Ciiarrière, Paris, 1839 (collection des Documents inédits
sur l'histoire de France).
La Geste de Liège, publiée en appendice au Myreur des Histoires
de Jean des Prés dit d'Outremeuse, par Ad. Borgset, Bruxelles,
0 vol. (collection des Chroniques belges inédites), 1864-1887.
La Geste des ducs de Bourgogne, publiée par A. Kervyn de
Lettenhove, Bruxelles (collection des Chroniques relatives à l'his-
toire de Belgique sous la domination des ducs de Bourgogne), 1873;
cf. A. Molinier, Les sources de l'Histoire de France, IV, n° 3 937.
31. Audigier, dans Recueil de fabliaux et contes de Barbazan
et Méon, Paris, 1808, t. IV, p. 217-233. Sur lapopularitédece poème,
voir Romania, VII, 450: XIII, 18; E. Langlois, Arts de seconde
rhétorique, Paris, 1902, p. 64.
La prise de Noevile, dans Scheler, Trouvères belges (nouvelle
série), Bruxelles, 1879, p. 170-175.
Voir un autre genre de plaisanteries sur les chansons de geste
dans le dialogue des Deux Jongleurs, Bartsch, Langue et Littér.,
609 ss. (cf. ci-dessous, § 110).
32. Sur les chansons de geste en Angleterre, voir Romania,
XI, 149.
Sur le Roland allemand : W. Golther, Das Rolandslied des
Pfaffen Konrad, Mùnchen, 1886 (cf. Romania, XV, 641).
Sur l'épopée française en Italie : G. Paris, Hist. poét. de Char-
lemagne, p. 159-202, et les notes ajoutées à la réimpression de 1905;
A. Gaspary, Storia délia letteratura italiana, tradotta da N. Zis-
garelli, Roma, 1887, I, 96. Voir aussi Romania, II, 49; IX, 497;
XI, 538.
Sur VEnlrée de Spagne, œuvre d'un padouan anonyme conti-
nuée par Nicolas de Vérone, voir A. Thomas, Nouvelles recher-
ches sur l'Entrée de Spagne, chanson de geste franco-italienne,
1882 (Bibliothèque des Ecoles françaises d'Athènes et de Rome,
fasc. XXV). Une édition de ce poème, par M. A. Thomas, est
actuellement sous presse pour la Société des anciens textes fran-
çais. — Sur la Pharsale de Nicolas de Vérone, voir § 48.
33-37. Seelmanx, Bibliographie des Rolandsliades, Heilbronn,
1889; Gautier, Bibl., 170.'
19
290 NOTES BIBL10GRAPI1IQUES.
33. Sur Le Pseydo-Turpin : Gautier, Bibl., 178; Literaturblatt,
1890, col. 83.
34. Sur la Carmen de proditione Guenouis, voir Romania, XI,
463-518; G. Bruckner, />as Yerhiiltnis des franzôsischen Rolands-
lied zur Turpinschen Chronik u. zum Carmen de prodicione Gue-
is, Rostook, 1905 (cf. Zeitschr. f. rom. PhiL, XXXII, 713.
38. Sur le personnage d'Àimeri de Narbonne, voir l'introduc-
tion de L. Remaison à l'édition citée plus bas (§41).
38-41. Sur le fragment de La Haye, voy. Suciiier, Les Narbon-
nais, II. lxvi-lxxxiv (Soc. des anciens textes français, 1898); cf.
Journ. des Sur., 1901, p. 654.
Sur Le Moniage Guillaume, Aleschans, Girard de Vienne, voir
Petit, 421-132; Gautier, Bibl., p. 49, 116, 147.
Sur Aleschans, voir Aliscans, kritischer Tcxt von E. Wiknbeck,
W. HÀRTNA.CKE, P. ISasim, [t. I . Halle, 1903 (cf. Romania, XXXV,
309; Zeitschr. f. rom. Phit., XXXI. 383; R. Weeks, dans Romania,
XXX. 184; XXXIV, 237; XXXVIII, 1.
Les deux rédactions du Moniage Guillaume ont été publiées
par M. Cloetta pour la 9oeiété dos anciens textes français (t. I,
1000).
lue conception très différente de la formation du Moniage
Guillaume et de son rapport avee la Vie latine de saint Guillaume
de GeJIone (§ 39) a été présentée par M. I'Ii.-Vtig. Bekker, Die
altfranzfisisçhe Wilhelmsage, Halle, 1890. G. Paris ne s'y était
pas rallie (voir Romania, XXV, 348). Des idées analogues à celles
de M. Bèkker ont été développées par .M. J. Bédier dans le t. I"
de ses Légendes épiques, Paris. 1908.
39. Sur Guillaume de Brioude, voir A. Thomas, dans Romania,
XIV, 579.
Sur Guillaume de Montrcuil, voir G. Paris. Romania, I, 177, et,
dans un sens contraire. F. Lot. Romania, XIX, 290.
La supposition que le surnom de Guillaume pourrait être •• au
cdfurb nez » est confirmée par la Chanson de Guillaume récem-
ment découverte, où ce personnage est surnommé al curb nez.
Voir Romania, XXXII, 091. Sur la Prise d'Orange, en sa forme
primitive, voir R. Weeks, dans Publications of the modem lan-
guage Association of America, XVI (1901), 301-374.
40. Sur Vézian ou Vidian, voir A. Thomas, dans les Eludes ro-
manes dédiées à G. Paris, Paris, 1891, p. 121 ss.", et cf. Romania,
XXII. 142; XXXI, 649.
Sur l'auteur du Moniage Rainouart (et de la. Bataille Loquiferf
voir CloettAj dans Rausteine zur romanischen Philologie, Halle,
1903, p. 253.
NOTES BIBLIOnNAPUlQl'ES. 201
Sur le Bnccës 'le Foucon de Candie, voir Romania, VIII, 301;
XVI, 06; Wilmotte, Bulletin de l'Académie de Belgique, XIX, n I.
Sur le Covenant Vivien, voir Gâcher, Bibl., p. 84; li. Wbi -.
Origïn of the Covenant Vil The University of Mi
Sludies, t. I (1902). Le vrai titre de ce poème sérail plutôt La
ne édition critique vient d'en être publiée par
M. A. Terracher (Paris, 1909). — Les questions qui concernent
la composition de ce poème et celle d'Aleschans oui pris un aspect
tout nouveau depuis la découverte de la Chanson de Guillaume,
sur laquelle voir Romania, XXXII, 597 ss. ; XXXIV, 240 ss.;
XXXVIII, 1 ss.
41. Les Enfances Vivien, chanson de geste publiée... par
C. Wahlund et II. von Feilitzen-, Introduction, par A. Nordfi.lt.
l'psala et Paris. 1895.
La mort Aymeri de Narbonne, chanson de geste publiée par
.1. Courate du I'aiu: (Société des anciens textes), Paris, 1884.
Aimeri de Narbonne, chanson de geste publiée par L. Demai-on
(Société des anciens textes), Paris, 1887,2 volumes.
Sur Genève patrie de Renier et d'Olivier, voir Romania, XVII,
335.
Sur Girard de Vienne, voir Gautier, Bibl., p. 116; Romania,
XXXIV, 444. Sur la forme ancienne de ce poème, voir G. Paris,
Uist. poél. de Charlemagne, p. 325.
Sur le poème de Garin de Monglane, voir Gautier, Bibl., p. 108.
44. Alexandre le Grand dans la littérature française du moyen
âge, par Paul Meyer, Pari-. 1886, 2 volumes. On trouvera dans
cet ouvrage toutes les indications sur le cycle d'Alexandre en
Fiance: cf. Romania. XVIII, 183. Voir aussi A. WesselOPSKY et
M. Gastek dans le Journal (russe) du Ministère de l'Instruction
publique, 1887. — A. Scbmidt, Ueberdas Alexanderlied des Alberic
von Besançon und sein Verhûltniss zur antiken Ueberlieferung,
Bonn. 1SS0. — O. Hartwig, Centralblatt fur Bibliolhe/cwesen, III,
164.
Sur Alberto et Lamprecht, voir Literaturblatt., 1887, col. 313.
Sur les manuscrits du poème en alexandrins, voir P. Meyer,
Romania, XI. 213.
Le poème de Jean le Vendais ou le Xevelon (car la forme du
surnom n'est pas certaine) a été publié en 191)2 par M. Schiltz-
Gorra: voir Romania, XXXI I, 150. Ce porte est placé, non pas
à la lin du xn" siècle, mais aux environs de l'année 1300 par
P. Meyer, Alexandre le Grand, II. 264.
Sur Jacques de Longuyon, voir Romania, XXIV, 570: E. Lan-
g-lois. dan- Mélanges Chabaneau, Erlangen, 1907. p. 105.
Sur les poèmes néerlandais relatifs à Alexandre, Petit, 422-23.
292 NOTES BIBLIOGRAPHIQUES.
45. Sur les trois poèmes, voir Rottig, Die Verfasserfrage des
Eneas, und des Roman de Thèbes, Halle, 1892 (cf. Romania, XXII,
333); W. Greif, Die mittelallerlichen Bearbeilungen der Troja-
?iersage, Marburg, 1886 (A usg. u. Abh., LXI). — Sur DictysetDarès,
voir Collilieux, Dictys et Darès, Grenoble, 1886, et, du môme
auteur : Deux éditeurs de Virgile, Grenoble, 1887. — Pour les
rédactions slaves du roman de Troie, voir Romania, XVIII, 302.
— Sur le cycle troven en Italie, E. Gorra, Testi inediti di storia
trnjana, Turin, ISS" (l'inlroducfion s'occupe de l'histoire du
cycle).
Sur le poème de Benoît, voir Romania, XVIII, 70. Une édition
de ce poème, préparée par M. L. Constans pour la Société des
anciens textes français, et qui formera cinq volumes, est en cours
de publication. Les tomes I à IV (1904-1908) ont paru.
Sur Hector, voir W. Meyf.r, Zeitschrift fur rom. Philologie, X,
303-410. — Sur Landomata, Gorra, p. 244; Morf, Romania, XXI, 32.
Sur les versions néerlandaises de l'histoire de Troie, Petit, 421.
Sur les versions italiennes, Romania, XXI, 18, 88.
46. Sur Enéas, voir l'édition de M. Salverda De Grave (1892) et
Romania, XXI, 281; A. Dressler, Der Einfluss des altfranzosi-
schen Eneas-Romanes auf die allfranzôsische Litteratur, Leipzig,
1907 (cf. Romania, XXXVI, 458).
Sur les versions italiennes, voy. E. G. Parodi dans les Studj di
filol romanza, V (1887); cf. Romania, XVIII, 174.
47. Le Roman de Thèbes a été publié pour la Société des anciens
textes français par M. Constans, 1890: sur les sources de ce poème,
voir, outre la préface de l'éditeur, F. M. Warren, dans Public, of
the modem Language Assoc. of America, XVI (1901), 375-387.
48. Sur Jean de Tuin et Jacot de Forest, voir Romania, XII, 380;
XV, 129-130.
Sur la légende de César, voir A. Graf, Roma nella memoria e
nelle immaginazioni ciel medio evo (Roma, 1882-83), I, 248; Parodi,
Le storie di Cesare nella lett. italiana dei primi secoli (Studj di
filol. romanza, XI, 237).
Die Pharsale des Nicolas von Verona, von H. Wahi.e, Marburg,
1S88 (cf. Romania, XVIII, 164).
49. Sur les traductions et imitations d'Ovide, voir Hist. lilt.,
XXIX, 45"j-52o; L. Sudre, Ovidii Nasonis Metamorphoseon libros
quomodo nostrates medii aevi poetae imitati inlerpretalique sint,
Paris, 1893; A. Thomas, Romania, XXII, 177. — Chrétien de
Troyes, Philomena, éd. critique avec introduction par C. De Boer,
Paris, 1909.
49 bis. Sur Bustalus, voir le baron de Reiiïenberg, préface à
NOTES BIBLIOGRAPHIQUES. 293
son édition de Philippe Mousket, I, ccxliv, note 2, et ccxi.vi.
Sur Abladane, voir Romania, XXII, 608.
50. Ouvrages généraux : E. Roiide, Der griechische Roman,
Leipzig, ISTtJ; M. Gaster, Greeko-Slaronic. Llchester lectures on
greeko-slavonic literature and ils relation to the fol/c-lore uf
Europe, London, 1887 (cf. Romani//. XVI, 173).
Sur Apollonius de Tyr, voir Uahen, Der Roman vom Kônig Apol-
lonius in seinen verschiedenen Beavbeitungen, Berlin, 1878; Sittl,
Jahresberichl fur Aller Ihumswissenschaft, 1889, II, 84. Un court
fragment d'un poème français du xnc ou xiii" s. sur Apollonius
a été publié dans la Zeitschrift f. rom. Phil., XXXIII, 226.
Sur la légende de Virgile : D. Comparetti, Virgilio nel medio
evo, Livorno, 1872 (2° édit. 1896); Zeilsclir. f. rom. Phil., I, 165;
Graf, Roma nellamemoria delmedio evo, II, 196.
Sur Hippocrate : E. Hlcher, Le Saint-Graal, III, 779-781;
Romania, VI, 299; XXXII, 84.
51. Eraclius, deutsches Gedicht des XII. Jahrhunderts, hgg.
von Graef. Une nouvelle édition du poème français, d'après les
trois manuscrits, par M. E. Lôseth, a paru en 1890. — Sur Plo-
choléon, voy. A. d'ANCONA, Studj di critica e sloria letteraria,
Bologna, 1880, p. 300; Le Moyen Age, III, 130.
Sur Floire et Blanche fleur, voir, outre l'édition d'E. du Méril,
Paris, 1856 (Biblioth. elzévirienne), H. Herzog, Die beiden Sagen-
kreise von Flore und Blansclieflur, Vienne, 1S84; J. Beinhold,
Floire et Blancheflor, étude de littérature comparée, Paris, 1900;
E. Hausknecht, Floris and Blauncheflur, mittele/iglisches Gedicht,
Berlin, 1885; Crescim, Giornale slorico délia letleratura italiana,
1889; Romania, XXVIII, 348, 444; XXXV, 95, 335; cf. Journ. des
Sav., 1901, p. 707.
Aucassin und Nicolete, neu nach der Handschrift von H. Suchier,
1" éd., Paderborn, 1878; 0e édition (en français), 1900; G. Paris,
Poèmes et légendes du Moyen Age, Paris [1900], p. 97-112.
Sur Florimont : J. Psichari, dans Etudes romanes dédiées à
G. Paris, 1891. p. 507 et suiv. ; A. Risop, dans les Abhandlungen
dédiées à M. ïobler, Berlin. 1895, p. 430 ss.
Sur Athis et Porphirias, voir Romania, XII, 634; E. Langlois,
Notice des manuscrits français de Rome, dans Notices et extraits
des manuscrits, XXXIII, 2e partie, 218; Staël von Holstein, Elude
sur le roman d'Athis et Prophi/ias, Stockholm. 1908.
Roman du comte de Poitiers, publié par Fr. Michel, Paris, 1831.
Sur la sujet de ce roman et de ceux où est traité le même thème,
voir G. Paris, Lecycle de la gageure, dans Romania, XXXII, 4Sl-5ol.
Rotnan de la Violette ou de Gérard de Nevers par Gibert(s/c) de
Montreuil, publié par Fr. Michel, Paris, 1834. — Sur les manus-
crits de ce poème, voir Romania, XXXIV, 90 et 168. — Sur le
204 NOTES BIBLIOGRAPHIQUE?.
sujet du roman, voir Bomania, XXXII, 537 -s. — Sur l'auteur,
voir ci-dessous, § 59.— Sur la Forme, voir ci-dess
Le roi Flore et la belle Jeanne, dans Moland et d'HÉRicAULT,
Nouvelles en prose du XIII' siècle. Paris, 1856. Voir Romania,
XXXII, 532.
Sur Guillaume de Dole, voir l'édition publiée par M. Servois
pour la Société des anciens textes (1893); Gh.-V. Langlois, La
lé française au XIII' siècle, Paris. 1904, p. 57.
Le dit de l'empereur Constant, publié par A. Wessblofskt,
Bomania, VI, 161-198 (cf. Romania, XIV, 141; E. Ki un. dans la
Byzantinische Revue, IV, 241). — Sur Constantin mari trompé,
voir Romania. 11. 142; Graf, Romanella memoria del medio evo,
II. 46.
La Manekine, t. 1 des Œuvres poétiques de Philippe de Rémi,
sire de Beaumanoir, publiées par H. Suchier. Paris, 1884-85
(Société des anciens textes).
Sur le Comte d'Anjou, voir Romania, XIX, 100: flist. lilt.. XXXI.
318; Ch. -Y. Lahglois, La société française au XIIIe siècle, p. 324.
Sur Partenopeus : E. Kôlbing, Beitrûge zur vergleichenden
Geschichte der romantischen Poésie und Prosa des îliltelatters,
Breslau, 1876; Bomania, XXXI. 475. Sur les inanu>crils. Notices et
extraits. XXXIV, 1™ partie. 220; sur la version néerlandaise.
Romania. XXY1, 57 i. cf. Petit, 460. Pour les versions islandaise
et danoise, voir A. Trampe Bôutker, Partenopeus de Rloi<, étude
comparative des versions islandaise et danoise, Christiania, 19u4.
Sur Huon de Rotelande et ses romans, voir Waho, Catalogue of
Romances, I,738ss. — Huede Bolelandes Ipomedon... zum ersten Maie
fierausgegeben von E. Kôlbing und E. Koschswinz, Breslau, 1890.
Christian von Troyes Cliges. Textausgabe mit Einleitung, Anmer-
feungen and Glossar hgg. ron \V. Foersteh, Halle, ISSN: 2 éd.,
1901 [Rom. Bibliothek,!). Cf. Bomania, XIII, 141 ; XVI, 103; XXXi.
420; Jour n. des Sav., 1902.
Li roumansde Cléomadès..., publié par A. Van Hasselt, Bruxelles,
1866, 2 vol. (cf. Borhans, Observations philologiques et critiques
sur le texte île Cléomadès, Liège, 1807 ; Jahrbuch fur ron
engl. Lileratur, VIII, 120).
Sur Méliacin, voir Zeitschrift, X, 460; Hist. litl., XXXI. 171 ss.
Floriant et Florete, edited by Fr. Michel. Edinburgb, I s 7 : ; (cf.
Zeitschrift fur die ôsterreichischen Gymnasïen, XXYI (1875), p. 538);
llist. titt., XXVIII, 139: Bomama,V, 112.
Guillaume de Paterne, publié par H. Michelant, Paris, 1870
(Soc. des anciens textes). Cf. Romania, VII, 47U ; VIII, 027.
L'Escoufle, roman d'aventure, publié par H. Michelant et
P. iMeyf.r. Paris. 1894 (Société des anciens textes). Voir Cii.-V. Lan-
glois, La société française au XIII' siècle, p. 91 ; Romania, XXXVII,
482. — Sur l'épisode du rapt de l'anneau et sur Pierre de Provence,
voir Romania, XVIII, 510.
NOTES Rini.TOr.RAPIlIOUES. 29S
Sur Clams, voir Cederschioeld, Clarus Saga, Clari fabella
islandice et latine, Lund, is79(cf. Romania, VIII. 179 .
Sur Bérinus, voir le journal Orient und Occident, publié par
Bem-f.v, II, Gôttingen, 18G4, 310. Une version en vers anglais,
attribuée jadis à tort a Chaucer, a été imprimée par la Cliaucer
Society de Londres en 1884.
53. Sur l'histoire de la Grande-Bretagne, les origines celtiques el
saxonnes, il suffit de renvoyer aux ouvrages généraux sur ces
sujets publiés dans ces derniers temps en France, en Angleterre
et en Allemagne.
Sur le cycle breton en général, Ward, Catalogue of Romances,
I. 198422.
Sur l'étymologie de walah, d'où gallois {Volca), voir D'Arbois
de Ju bain ville, Introduction à la littérature celtique, Paris, 1883
(cf. Deutsche Literaturzeilung, 1883, p. 1189); Mullenhoff, Deut-
sche Alterlhumskunde, II. Berlin, 1887, p. 279.
Sur Nennius, voir II. Zimmer. Nennius vinclicalus, Berlin, 1893.
Sur les Mabinogion, voir la traduction française de M. J. Loxu.
Paris, 1889, deux vol.
Sur Vllis/oria Britonum et les questions qui s'y rattachent, voir
G. Ueeglr, Die Trojanersage der Britlen, Mùnchen, 1886 (cf.
Romania, XV, 449; XVIII, 281).
54. Sur Gaufrei de Monmouth, voir Ward, Catalogue of Ro-
mances, I, 203-278; R. H. Fletcuer, The Arthurian material in t/te
chronicles, Boston, 1906 (Harvard Studies and notes in Philo'.ogy
und Literature, t. X).
Sur l'ancienneté de la croyance au retour d'Arthur, voir Ward,
Catalogue, I, 217.
Pour le passage allégué de Marcabrun, voir Romania, VI, 55.
Sur l'ancienneté des noms « arthuriens » en Italie, voir Ra.ina,
Romania, XVII, 352; on peut toutefois clouter <]ue le prénom
Artusius, donné dès 1114, soit bien le nom d'Arthur.
Le roman (le Brut, par Wace, publié par Le Roux de Lincy,
Rouen, 1836. 2 vol.
Der Mûnchener Brut... hgg. von K. Hofmann und K. Yoi.i.-
môller, Halle. 1877 {ct.,Zeitschr. f. roman. PhiL, 1,402; Remania,
Vil, 144; X, 320).
Sur une ancienne traduction en prose française de Gaufrei de
Monmouth, voir Bulletin de la Société' des anciens textes fran-
çais, 1895, p. 89.
Sur les chroniques en prose intitulées Rrut, voir Bulletin de la
Société des anciens textes français, 1878, p. 104 ss.
Sur la Vita Merlini, voy. Ward, Catalogue of Romances, I, 27S;
F. Lot, Études sur Merlin, dans les Annales de Bretagne, avril et
juillet 1900 (cl. Romania, XXX, 473).
296 NOTES BIBLIOGRAPHIQUES.
55. Sur l'étymologie de lai, voir Romania, XIV, G06. — Sur le
genre des lais, Romania, VIII, 33. — Les lais bretons sont cités
comme très répandus dans Hicheut (1159).
Die Lais der Marie de France, hgg. von K. Warnke, Halle,
1885; 2« éd., 1900 (cf. Romania, XIV, 598-008). — E. Schiôtt,
L'amour dans les lais de Marie de France, Lund, 1889.
L. Foulet, Marie de France et les lais bretons, dans Zeitschr.
f. roman PhiL, XXIX (1905); 19 (cf. Romania, XXXIV, 479).
Les lais de Tidorel, de Guingamor et de Tiolel, qui sont ici
attribués à Marie de France, ne sont pas compris dans l'édition
de M. Waknke. Ils sont imprimés dans la Romania, VIII, 29 ss.
Sur Tidorel, voir FI. L. Ravenel, dans Publ. of the modem Lan-
guaqe Association of America, XX (1905), 152.
Sur le lai de Guingamor, voir Schofield, dans Cfiild Mémorial
volume, Boston, 1896 (Harvard Studies and notes in Philology and
Literalure, t. V), p. 221 (cf. Romania, XXVII, 323).
Graelent est imprimé dans Roquefort, Les Poésies de Marie de
France, Paris, 1820, I, 487-541. Voir Schofield, The Lais of Grae-
lent and Lanval, dans Publications of the modem Language Asso-
ciation of America, XV, 121-180 (cf. Romania, XXIX, 487; Le
Moyen âge, 1902, p. 44).
Mélion : Zeitschr. f. rom. PhiL, VI, 94.
Le lai du Cor, restitution critique par Fr. Wulff, Lund,
1888 (cf. Romania, XVII, 300; Literalurbl., X, 26). — Le Conte du
Mantel, p. p. Fr. Wulff, Romania, XIV, 343.
Ignaure : Baktsch, Langue et Littér., col. 553.
56. Sur Tristan : Romania, XV, 481-602; XVI, 288 ss.; XVII,
603; XVIII, 322, 510; G. Paris, Poèmes et légendes du moyen âge,
p. 113 et suiv.
Le Tristan de Thomas a été publié par M. J. Bédier pour la
Société des anciens textes, 1902-1905. 2 vol. (cf. Literalurbl., 1907,
col. 60). Le Tristan deBéroul a été publié par M. E. Muret (même
société, 1903).
Sur La Chèvre, voy. Romania, XVI, 362.
56-58. Tous les romans en vers du cycle breton sont analysés,
avec indications bibliographiques, dans le tome XXX de VHistoire
littéraire de la France, Paris, 1888, sauf Reaudous{% 58) et Escanor,
de Girard d'Amiens (publié par Michelant, Stuttgart, 1886), qui
est l'objet d'une notice dans le t. XXXI, et le Méliador de Frois-
sard, qui n'est plus de notre époque.
57. Sur Erec, voir Romania, XIX, 156; cf. E. Muret, Revue cri-
tique, 1S90, art. 66; Romania, XXV, 258-294.
Kristian von Troyes Yvain (der Lôvenritter) hgg. von W. Foers-
ter, 3'édit., Halle 1900 (Romanische Dibliothek, V).
NOTES BIBLIOGRAPHIQUES. 297
Arthur C. L. Browx, Iwain, a Sludy on tlie origins of Arthu-
rian romance, Boston, 19u3 (Harvard Studies and notes in Philo-
logy and littérature, t. VIII).
58. Sur Durmart, voir Romania, XVIII, 345.
Meraugis von Portlesguez... hgg. von M. Frieowagner, Halle,
1897 (et.' Romania, XXVII, 307).
Robert von Mois sàmmtliche Werke, zum ersten Maie lijrg. vun
J. Ulrich. Band I, Beaudous, Berlin, 1889. — Floris et Liriope,
bgg. von W. Zingekle, Leipzig, 1891 (cf. liomania, XXI, 109).
59. Sur le Perceval angluis, voir Hist. litt. de la Fr., XXX, 254.
Une édition très défectueuse du Perceval de Chrétien de Troyes et
de ses continuations a été publiée par M. Potvix, Mons, 1866-1871.
Voir, sur ce poème et sur la légende qu'il met en œuvre, Newell,
The Legend of tlie lloly Graal and l/ie Perceval of Chrestien de
Troyes, Cambridge, Mass., 1902; Jessie L. Weston, The Legend
of Sir Perceval, vol. I, Chrestien de Troyes and Wauchier de
Uenain, Londres, 1906; vol. II, The prose Perceval, Londres, 1909.
— Sur l'épisode de Caradoc, voir G. Paris dans liomania, XXVIII;
214.
Sur Gaucher (Wauchier) de Denain, voir Hist. litt., XXX1I1,
258, 292, 380, 413, 431-434; Romania, XXXII, 583; XXXIII, 333;
XXXIV, 100.
SurGerbertde Montreuil, voir Wilmotte, dans leBull.del'Acad.
roy. de Belgique, 1900 (cf. Romania, XXIX, 481).
Sur Bobert de Boron, voir Merlin, publié par G. Paris et
J. Ulrich, 1, vin ss.; Romania, XXIV, 472; Journ. des Sav., 1901,
pp. 704-5.
Le chevalier à l'épée, an old french poem edited by Edw. Cooke
Armstrong, Baltimore, 1900 (cf. Romania. XXIX, 593).
Sur la Vengeance de Raguidel, dont la seconde partie seule est
de Baoul de Houdan. voir Romania, XXI, 414; XXIX, 117 ; Zexker,
Ueber die Echtheil zveier Raoul von H. zugeschriebener Werke,
Eilangen, 1889.
60. P. Paris, les Romans de la Table Ronde, Paris, 1868-77,
5 vol.
Le Perceval (ou Perlesvaus) en prose dont il s'agit forme la
première partie du Perceval en vers publié par M. Potvix. Voir
W. A. Nitze, The old french Grail romance Perlesvaus, a Sludy
of its principal source, Baltimore, 1902.
Sur la Quête du Saint Graal, et spécialement sur la version
portugaise, voir Romania, XVI, 582; H. O. Sommer, The Queste of
tlie lloly Graal, dans Romania, XXXVI, 369 et 543.
Le Saint Graal publié par Hucher, Le Mans, 1864-6S, 3 vol,
298 NOTES BIBLIOGRAPHIQUES.
— Cf. A. Ni'tt. Studies on the legend of the holy Grail, London,
cf. Mélusine, 1889, 361; Romania, XVIII. 388).
Merlin, publié d'après le ms. Ilutli par G. Paris et J. Ulrich,
Paris, 1880, 2 vol. (Soc. des anciens textes).
57-63. Sur les romans néerlandais du cycle breton [Saint Graal,
Merlin, Laneelot, Gauvain, Perceval, Raguidel, Fergus, Torec),
voir Petit, 447, 149, 150, 453. 454, 457.
61. Sur Laneelot, voir Romania, X. 405: XII, 459; XVI. 100.
Sur la « dame du lac •, voir Lucy Allen Paton, Studies in t/ie
fairy Mythology of Arthur ian Romance, Boston, 1903 (cf. Romania,
XXXIV. 117).
02. Sur Gautier Map, voir Ward, Catalogue, I, 734 ss.
G3. Sur le Brait, Guiron le Courtois, le Tristan en prose, voir
Merlin, publié par G. Paris et J. Ulrich. I, xxvm-xxxvir, et Romania,
XVI. 585. Une analyse critique du Tristan en prose, par .M. E. Lô-
sbth, a été publiée flans la Bibliothèque <le l'Ecole des Hautes
étude.--, fasc. 82, — Sur la date de l'alamède, voir Ward, Cata-
logue, I. 330.
64. Sur Rusticien de Pise, voir Ward, Catalogue, I, 307.
Sur Malory, voir Romania. XVIII. 625.
Sur Perceforest. voir Ward, Catalogue, I, 377; P. Meyfr,
Alexandre, II, 353: Wesselofsky, dans l'article cité au § 44;
Romania. XXIII. 79 et suiv.
65 ss. Pour les romans d'aventure en général, voir Hist. litt.,
XXII. 757-887.
00. Amadas et Idoine, p. p. Hippeau, Paris. 1803. Sur l'origine
anglo-normande de ce poème, voir Romania, XVIII, 620: G. Paris,
dans An englishMisccllany presented to W Furnivall, London, 1901,
p. 380.
Sur le thème d'Eliduc et de Gilles de Trasignies, voir G. Paiiis,
Comptes rendus de l'Académie des inscriptions, 1SS7, p. 578 ss.
Cf. Steenstrup, Viser, 187.
Ricliars li biaus... hgg. von W. Foerster, Vienne, 1874 (cf.
Romania, 111. 3o5: IV, 478; VI, 475: VIII, 027).— Sur le thème du
mort reconnaissant : Romania, XVIII. 197.
Le roman de Calèrent, comte de Bretagne, publie par A. Bou-
cherie, Paris. 1SSS (cf. Romania, XVII, 439); Ch.-V. Langlois,
La société française au XIIIe s. d'après dix roman» d'aventure,
Paris, 1904, p. 1-33.
Sur le Châtelain de Couci, voir Hist. litt., XXVIII, 352; Roma-
nia, XVII, 450; Petit, 444; Ch.-V. Langlois, La soc. franc, au
NOTES niBLTOr.RAPniQl'ES. 299
XIII" s., p. lSfi-221. Le nom de l'auteur es! donné dans un acros-
tiche qu'on iTcsi pas arrivé à lire très sûrement. G. Paris hésitait
entre Sakesep (ci-dessus, p. 113) el Sakel (p. 280); cf. Langlois,
ouvr. cité, p. 221.
Sur le Comte d'Artois, voir Romania, XVI, 98.
Brun de la Montagne, p. i>. I'. Meyeb, Paris, 1875 (Soc. des anc.
textes français .
67. Blancandin... publié par II. Michelant, Paris, l'867 (cf.
Revue critique, istjT, 1,377). — Pour uni- rédaction remaniée, voir
Rpmania, XVIII, 289.
68. Jean de Dammartin et Blonde d'Oxford, tome II des Œuvres
poétiques de Philippe de Rémi, sire de Beaûmanoir, publiées par
II. Suchier, Paris, 1884 (Soc. des anciens textes). — Philippe
de Beaûmanoir a aussi composé un certain nombre de Chansons
• 1 1 1 i n'ont pas été comprises dans l'édition des Œuvres poétiques
due à M. Suchier; voir Jeanroy, Romania, XXVI, 517-536.
Sur Ponthus et Sidoine, voir Romania, XV, 275: XXXIV, 142, noie.
Sur Waldef, voir Romania, XYIil, 510.
Sur llavelok, voir Ivipfersciimiut, Die Haveloksage bei Gaimqr
und ihr Verhhàttniss zum lai d'Ilavelok, dans Romanische Studien.
IV. il 1-430 (cf. Romania, IX, 480); Ward, Calai, of Romances, I,
423-446,
Sur Guy de Warwiek, 0. Winneberger, dans les Frankfurter
neuphilologische Beitrage, 1887, 86-107: Ward, Catalogue of
Romances, I. 471-487; Romania, XXXV, 68.
Sur Pafnphile et Gaîatée, voir Revue critique, 1875, II, 398.
Sur Joufroi, voir Romania, X, 442 ; XI, 448 ; Dingeldey, Ueber die
Sprache und den Dialect des Joufrois, Darmstadt, 1888; Ch.-V.
Langlois, La soc. franc, au XIII" s., p. 34.
La Châtelaine de Vergi, nouvelle édition par G. RatnauD,
Romania, XXI. 145; Ch.-V. Langlois, La soc. franc, au À"///' s.,
p. 222: Petit, 070.
Sur André de France, voir Romania, 105; XVIII, 473.
Sur Gautier d'Aupais : Ilisl. litt., XIX, 767; Ch.-V. Langlois,
La soc. franr. au XIII' s., 283.
Il y aurait lieu de mentionner ici Sone de Nansai, Ion» roman
d'aventures publié en 1809 (cf. Romania, XXXI, 113). Voir
Ch.-V. Langlois, La soc. eu France au XIIIe siècle, p. 271;
NyROP, dans Romania, XXXV, 555.
69. Sur Mélusine, voir L. Desaivre, La légende de Mélusine,
Niort, mo;Lileraturblatt, 1887, col. 346.
Sur Robert le Diable, voir Ron ania, XV. IGO; Le Moyen Age, II,
12(1: Zeitschr. f. Volkerpsycholoc/ie , XIX (1889), 77; Robert le
Diable, roman d'aventures, p. p. E. Loseth, Paris, 1903 (Soc. des
anciens textes).
300 NOTES BIBLIOGRAPHIQUES.
Richard sans peur, Paris, 1S38 (reproduction Silvestre); — Le
Iîorx de Lincv, Nouvelle Bibliothèque bleue, Paris, 1S42.
Sur Richard Cœur de Lion, voir Romania, IX, 542-544.
La Comtesse de Ponthieu, dans Nouvelles en prose du XIII' siècle,
publiées par L. Mola.no et Ch. d'HÉRiCAOXT, Paris, 1836 (cf. le
roman de Jean d'Avesnes, cité au § 87),
Eustache lu Moine... publié... par Francisque Michel, Paris et
Londres, 1834; Romania, XXI, 279; A. Molinier, Les sources de
l'Ilist. de France, III, n° 2219.
Foulkc Fitz-Warin, dans Nouvelles eh prose du XIV° siècle,
publiées par L. Molanu et Ch. d'HÉRiCAULT, Paris, 1858; Ward,
Calai, of Romances, I, 501-508.
Sur Robin Hood, voir Cbild, The English and Scottish popular
Rcdlads, Boston, V (1888), 39 ss.
70. Sur Rieheut, voir J. Bédier, Études romanes dédiées à
G. Paris, p. 23. (cf. Romania, XXII, 130.)
Sur Trubert, voy. Hist. lilt., XIX, 734-747.
71. Sur les Sept Saf/es, voir Deux rédactions des Sept Sages de
Rome, p. p. G. Paris, Paris, 1870 (Soc. des anciens textes);
M. Landau, Die Quellen des Dekameron, 2e éd., Stuttgart, 1884;
Ward, Calai, of Romances, II, 199-2U0.
Sur les suites des Sept Sages, voir P. Paris, Les Manuscrits
françois, I, 100; Description d'anciens manuscrits réunis par
M. Techener, 2e partie, Paris, 1864, p. 84; Le roman de Marques
de Rome, hgg. von J. Alton, Tubingen, 1889 (cf. Romania,
XIX. 493).
Sur le Dolopathos, voy. Romania, II, 481 ; IV, 150, 291.
72. Sur Baudouin de Guines : Lamberti Ardensis historia comitum
Ghisnensium (Monumenta Germaniae historica, XXIV, 598).
Citation sur aventure, voir Mo.ntaiglon-Ratnaud, Recueil des
fabliaux, V, 43; sur fablel, ib., V, 171.
73. Sur l'origine et l'histoire des fableaux : G. Paris, Les Contes
orientaux dans la littérature française au moyen âge, Paris, 1877
(réimprimé dans La Poésie au moyen âge, 2e série, Paris, 1895);
M. Landau, Die Quellen des Dekameron, où sont cités tous k's
recueils orientaux mentionnés plus haut (voir ci-dessus, § 71; cf.
le journal Mélusine, Paris, 1887, passim); J. Bédier, Les Fabliaux.
Études de littérature populaire et d'histoire littéraire du moyen
âge, Paris. 1893, 2e éd., 1894 (cf. Romania, XXIV, 135). — A. Pillet,
Ueber den gegenwiirtigen stand der Fableaux-Forschung, dans
Neuphilolngisches Cenlralblatt, t. VII (1903), p. 98-105.
Sur les traductions de Pierre Alphonse, voir Romania, I, 106;
XXVIII, 161 ; Bull, de la Soc. des anc. textes, 1887, p. 83; G. Paris
NOTES BIBLIOGRAPIIIQUES. 301
et A. lîos, Trois versions rimées de l'Evangile de Nicodème, p. xxi,
xxni: Notices et extraits, XXXIV, 1" partie, 209.
Sur les exemples dans les sermons, voir Romania, XII, 410; ef.
plus loin, § 152.
Tous les Tableaux cïtés se trouvent dans Recueil général et
complet des fabliaux des XIIIe et XIV' siècles, par MM. A. de Mon-
taiglon et G. K.w.NAi i), l'aris, 1872-90, 6 vol. On se borne à y
renvoyer une fois pour toutes. Voir encore Ilisl. litt., XXIII, 69-215.
76. Sur Huon de Cambrai (et Iluon Peaucele), voir Romania,
XXV, 449.
Sur le conte d'Arislote, voir Œuvres de Henri d'Andeli, p. p
A. Héron, Rouen, 1880, p. xxvm; I>a loi d'Aristote, p. p. A. Hé-
ron, Rouen 1901 (cf. Romania, XI, 139; XXI, 139).
Sur la Housse partie, voir Romania, XXXVII, 215.
77. Sur le Courtois d'Arras, voir E. Faral, dans Biblioth. de
la Fac. des lettres de Paris, 1905.
Sur la Bourgeoise d'Orléans et sa variante anglo-normande,
voir Romania, I, 69.
Le lai de V Oiselet, p. p. G. Paris, Paris, 1884 (réimprimé dans
Légendes du moyen âgp, Paris, 1903); Romania, XXXVII, 217.
79. Sur les origines de la fable ésopique, voir O. Keller, Unter-
suchungen ùber die Gesc/iichle der griechischen Vabel, dans les
Jahrbiicher fi'ir classische Philologie, 4 ter, Supplementband Lei-
pzig, 1861-07, 307-418; The fables of JEsop as first printed by
Caxton... now again edited... by Joseph Jacobs, Londres, 1889,
2 vol. (cf. Romania, XX, 289).
Sur la fable latine et son histoire au moyen âge : Les Fabulistes
latins depuis le siècle d'Auguste jusqu'à la fin du moyen âge, par
Léopold Hervieux, t. I-II, Paris, 1884 (2e éd., 1893-1899, cinq
volumes). Il suffit de renvoyer à cet ouvrage pour les indications
bibliographiques (cf. Romania, XV. 626-631; G. Paris, Journ. des
Sav., 1884, 1S95 et 1899; Br. llerlet, Rom. Forsch., III, 219). Voir
encore M. Steinschneider, Ysopet hehrûisch, dans Jahrbuch fur
rom. u. engl. Spracheu.Literalur, XIII, 35I-:JG7.
Sur la date de Marie de France, voir Romania, XV, 630.
Sur les fables, voir Die Fabeln der Marie de France, hgg... von
K. Warnke, Halle, 1898 (t. VI de la Bibliotheca normannica de
Sucbier); Ward, Catal. of Romances, II, 291-306. Sur les sources
des fables : K. Warnke, dans les Forschungen zur romanischen
Philoloqie, Festgabe f. IL Suchier, Halle, 1900, p. 161-284 (cf.
Romania, XXIX, 581).
82. Sur le cycle de Renard : Isengri7nus, herausgegeben und
erldart von Ernest Voigt, Halle, 18S4 (cf. Revue critique, 1884,
II, art. 152); L. Sudre, Les sources du Roman de Retiart, Paris,
1893 (,cf. G. Paris, dans Journ. des Sac, 1894, 1895).
302 NOTES BIBLIOGRAPHIQUES.
Le Roman de Renart, publié par Ernest Martin, Strasbourg et
Paris, 1881-87, 3 vol., auxquels il Faut joindre les Observations sur
le Roman de Renart, Paris, 1887. Voir sur le système de M. Martin
et sur les origines du Roman de Renart les articles de M. L. Si nui:,
Romania, XVII. 1 et 201.
Sur Reinart de Vos, Petit, 470.
83. Sur Pierre de Saint-Cloud, voir P. Meyer, Alexandre, II,
231; Romania, XVII, 299.
84. Le Couronnement Renart, dans le Roman du Renart, publié
par Méon, IV, Paris, 1826, 1-123. — Renart le Nouvel, ibid., 125-
461. Cf. Tobler, Vrai aniel (S 150), p. v.
F. Wm.F, Renart le Contrefait, nacli der Handschrift der h. /:.
Hofljibliolhek, Vienne, 1861; Tarbé, Proverbes champenois avant
le XVIe siècle, Reims, 1851 ; P. Meyer, Alexandre, II, 334; G. Ray-
naud, Romania, XXXVII, 245.
86. Sur les poèmes relatifs aux croisades, voir la bibliographie
dans Nyrop, et dans L. Gautier, Bibliogr., sous AimocuE, Ché-
tits, Jérusalem. Sur le rapport des chroniques latines et des
chansons de geste, voir ffist. occid. des croisades, IV, XXV, et
Deutsche Litteralurzeitnn'j, 1890, col. 509. — Témoignage sur la
vénalité des mentions dans les poèmes sur les croisades, dans la
chronique de Lambert d'Ardres citée plus haut (S 72).
Sur Grégoire Bechada, voir Romania X, 591 ; XXII, 358.
Sur la Chanson d'Antioche provençale, voir Romania, XVII, 513.
Traduction en vers de Baudri de Bourgueil, Romania, V. I ; VI,
489; cf. Archives de l'Orient latin, Il (1884), 471.
Sur Gilles de Chin, voir Hist. litt., XXIII, 395.
87. Histoire de Jean d'Avesnes (p. p. Chabaille), Abheville, ISU).
ss. VEstoire de la guerre sainle par Ambroise, publiée par
G. 'Pai'.is (Documents inédits sur V histoire de France), Paris, 1897.
89. Villehardouin , Conquesle de Çonstantinople, publiée par
N. de Wailly, Paris. 1872 (cf. Romania, VII, 147; XVI, 164).
Sur Robert de Clairi, publié par Cu. Hopf, Chroniques gréco-
romanes, Berlin, 1873, p. 1-85, voir Romania, XXIX, 473.
Henri de Valcnciennos est imprimé à la suite de Villehardouin.
Sur la forme première de son livre, voir Romania, XIX, 03.
89(6ts). La prise de D amie t te en l-Ji'J, relation inédile en pro-
vençal, p. p. P. Meyer, dans Bibl. deVÉcole des Charles, XXXVIII
(|S77i. 497 et suiv. Voir notamment, p. 509, pour l'origine fran-
çaise de ceiic relation.
89 (qualer). Sur la chanson de Philippe de Xanteuil et sur la
NOTES BIBLIOGRAPHIQUES. 303
chronique qui non- l'a conservée, voir llist. litt., XXIII, 669-679.
Le texte des deux chansons dans Eistor. uccid. des croisades, II.
34S-351, et dans J. Bédier, Chansons de croisade, p. 217 et suiv.
90. Joinville, Vie de sain/ Louis, p. p. N. de Waii.ly. Paris,
1881 (cf. Romania, XVI, iU);Hist. litt. de la />., XXXII, 291-459.
Sur la traduction de Guillaume de Tyr, voir Ost, Die altfr.
Uebersetzung der Geschichle der Kreuzziige Wilhelms von Tyrus.
Halle, 1899.
1)1. Sur les versions et continuations de Guillaume de Tyr, voir
L. de Mas Latrie, à la suite de la Chronique d'Emoul, et Ar-
chives de l'Orient latin, I. 247.
Chronique d'Ernoul, publiée par L. de Mas Latrie, Paris, 1S7I
(Soc. de l'IIist. de France).
La Chronique de Philippe de Novafe est dans les Gestes des
Chiprois, publ. par G. Raynaud pour la Société de l'Orient latin,
Paris. ISS7 (cf. Romania, XVIII, 528; Rev. de l'Orient latin. IX.
1G4). Une nouvelle édition, préparée par G. Paris, a paru dans les
Documents arméniens (Historiens des croisades), II, 6 10-672.
La Description de Jérusalem est imprimée dans les Itinéraires
à Jérusalem rédigés en français publiés par H. Michelant et
G. Raynaud, Genève, 1882 (Société de l'Orient latin).
Sur Jean de Vignai et tous ses ouvrages, voir P. Meyer, Ro-
mania. XXV, 401-423.
Sur la Chronique de SI orée, voir John Schmitt, Die Chronik
von Mure/. Munich, 1889 (cf. Romani'/. XVIII, 351); 'ASa(uzvrcovj ta
-/povixà toû Mopéwç, Athènes, 1006.
Sur Haiton. voir L. Panmek. Bibl. de VÉc. des chartes. XXXV,
93: Omont, Notices et extraits. XXXVIII (1903), 237-202, et là
préface des Documents arméniens tllistor. des croisades), II,
lvii ss.
Les voyages de Marco Polo... publiés par G. P.utiiier, Paris,
1865. — Sur la question, non encore parfaitement résolue, des
rédactions diverses par lesquelles a passé le livre de Marc Pol,
voir Romania, XI, 429.
Sur Roau d'Arundel et la lettre du Prêtre Jean, voir Not. et
Kxtr., XXXIV. 1" partie, p. 228. Sur les versions en prose, voir
Bibl.de VEc. des Ch., XXXVIII, 502.
92. Le livre de David est mentionne par Geilfrei Gaimar à la fin
de son poème. L'n David qui a écrit en latin pourrait être le même.
L'Eslorie des Ewjleis. de Geffrei Gaimar. a été publiée en der-
nier lieu dans la collection anglaise du Maître des rôles, 1888,
1889, 2 vol. Sur l'édition, voir Romania, XVIII. 314.
93. Sur Wace, voir Romania, IX, 594: XVI, 232, 604.
304 NOTES BIBLIOGRAPHIQUES.
Sur les sources de la Chronique des ducs de Normandie de
Benoit de Sainte-More, voir Romanische Forschungen, I. 327; II,
477. Sur la langue, Romanische Studien, III, 443. Sur le texte, Zeil-
se'ir. f. rom. Phil., VI, 231, 345.
Ver Roman du Mont Saint-Michel von Guillaume de Saint-Paier.
W't'lprgabe der beiden Handschriflen... von Paul Redlich, Mar-
burg, 1894 (Ausg. u. Abhandl., XCII). Cf. A. Molimer, Les sources
de PHist. de France, II, n° 1243.
Sur l'histoire en vers français de l'abbaye de Fécamp et de
la relique du Saint Sang, voir Bulletin de la Soc. des anc. textes,
IV (1878), 40. L'original latin n'en est pas perdu.
Sur Jourdain Fantosme, voir Mon. Germ., XXVI I, 53; Lieber-
mann, dans The English historical Revieu-, janv. 1893. Sur sa
versification, voir Romania, X, 306.
La Conqué/e d'Irlande, publiée une première fois par Fr. Michel
(voir llist. litt., XXIII, 339), a été rééditée et traduite en anglais
sous ce titre : The Song of Dermot and the Eart... edited by
G. H. Orpen, Oxford, 1892, (cf. Romania, XXI, 444).
L'Histoire de Guillaione le Maréchal, poème français publié
pour la Société de l'Histoire de France, par Paul Meyer, Paris,
1891-1901, trois volumes.
Sur les compilations en prose d'histoire anglaise désignées
d'ordinaire sous le nom de Brut, voir Bulletin de la Société des
anciens textes français, 1879, 104-145; cf. Romania, XVI, 154, et
Hit. litt., XXVIII, 480.
Sur Pierre de Langtoft, voir Hist. litt., XXV, 337; Romania,
XV, 313; XXXVII, 210.
94. Sur les traductions de Turpin, voir G. Paris, De Pseudo-
Turpino, Paris, 1865 cf. Romania, VI, 627; XVI, 174); P. Meyer,
Notices et extraits, XXXIf, 2' partie, 59, et XXXIII, ire partie,
31-33.
Sur le ménestrel du comte Alphonse de Poitiers, voir Hist. litt.,
XXI, 735: A. Molixier, ouvr. cité, III, 100.
Les grandes Chroniques de Saint-Denis, publiées par P. Paris,
Paris, 1836. Cf. Mémoires de l'Académie des Inscriptions, XVII
(1847), 379; A. Molimer, ouvr. cité, III, n° 2530. La traduction de
Primat, par Jean de Vignai est imprimée dans le t. XXIII, 1-106, du
Recueil des Historiens de la France. Voir A. Molimer, Les sources
de PHist. de France, III, n° 2531, et Romania, XXXIII, 102.
Sur l'histoire en prose de Philippe II, voir Romania, VI, 494.
Sur Jean de Prunai, voir Hist. litt., XXI, 674.
Sur YHiitoire des rois d'Angleterre et sur la chronique dite de
l'Anonyme de Bétbune, voir A. Molimer, ouvr. cité, III, n° 2218.
L'Anonyme de Béthune a été publié dans le Recueil des histo-
riens de la France, XXIV. 730-775.
Sur les chroniques normandes, voir Hist. lit!., XXXU, 182 ss.
NOTES BIBLÎOGRÀPÛIQUES. 305
!15. Sur li -s Chroni /lies deBeaudouin d'Avesnes, voir Archives de
V Orient latin, 1 (Paris, 1881), 256; Histoire et Chronique de
Flandres, p. p. Ki.uvyn de Lettenhove, in-4, 2 v., Bruxelles,
1879-80 (collection des Chroniques beiges inédite*); A. Molinibr,
ouvr. cité., III, n" 279-7; A. Bayot, dans Revue des Bibliothèques
et Archives belges, Il (1904), 419.
Sur Calendre et son livre, voir Settegast, Rom.Studien, [11,93.
Sur le Livre des Histoires, voir Romania, XIV, 36; liull.
Soc. des une textes-, 1895. p. 83 ss. Cette coinpilalion parait être
l'œuvre de Gaucher de Denairi (§ 39); voir Romania, XXXII, 585.
Sur les Faits des Romains, voir Romania, XIV. 1 ; Parodi, Le
Sloi-ie di Cesare (cité au .^ 48).
Sur les traductions dé Darés, voir le livre de Greif (§ 15).
Sur la chronique laite pour, Philippe de Valois; voir < '.. ( !0uderc,
Eludes d'hist. dédiées à G. Honod, p. 415 ss.
Sur. Jean de Harenc, ou d'Àntioche, voir HisL litt., XXXIII, 2--.
90. Chronique de Philippe Mouskes, publiée par le baron de
R.EIFFENBERG. Bruxelles, 1840, 2 vol. Extraits revus sur le ms.
dans les Historiens de France, XXII, I, et dans les Monument a
Germaniae historica, XXVI, 718. Voir A. Molinier, Ill.n0 2522.
La Branche des royaux lignages de Guillaume Gtiiart, publiée
dans le> Historiens d s Gaules et de la France, XXII, 171. Voir
llist. litt., XXXI, 104; A. Molinier, III, n° 2848.
. 97. Récits d'un ménestrel de Reims, publiés par N. de Waii.ly,
Paris, 1877. Voir A. Molinier, n° 2528. — Sur un ms. de cette
chronique, voir Romania, VIII, 429.
Geoiïroi de Paris: Historiens de France, XXII, 87: A. Molinier,
III, n" 2853.
Sur les petites chroniques du xnr siècle, voir llist. litt., XXI,
tj.'ili ss.
Chronique parisienne (131G-1339), p. p. Hellot, Mém. de la Soc.
de l'hist. de Paris, XI, 1-207: A. Molinier, III. n" :SU22.
98. Sur des lettres missives en français, concernant les croisades,
vov. llist. litt., XXI, 790 ss.: Bibliothèque de l'École des chartes,
LUIS'l)), 46 ss.
La lettre de Ponce d'Aubon est dans le Recueil des Historiens
des Gaules e! de la France, XXI. 81. Voir Hist. litt.. XXI. 791.
Sur Jean Sarrazin, voir Romania, XIV, 27; A. Molinier, III.
u" 255'.t.
lOo. Les Lapidaires français du moyen âge... publiés par Léo-
pold Pannier, Paris 1882. Cet ouvrage, publié après la mort de
l'auteur, est 1res incomplet. Divers textes importants; que Pannier
n'avait pas connus, ont été mis au jour dans le t. XXXVIII de
la Rum 'nia.
■ÀO
30G HOTES BIBLIOGRAPHIQUES.
Sur les sources du Bestiaire do Philippe de Thaon, voir .Mann.
Forschungen, VI, 39'.): Le Bestiaire de Pli. de Thatin, texte cri-
tique,., par Emm. Walberg. Lund. 1900 (cf. Remania, XXIX, 589).
Sur le Physiologus, source première des Bestiaires, voir F. Lal-
gbekt, Geschichle d. Physiologus, Strasbourg, 1889 (cf. Rev. cri-
tique, 1S89, I, 4G4).
Sur le Bestiaire îe Guillaume, voir Mann, dans Franzosische Stu-
dien, VI, 2" cahier (1888); Reinsch, Das Thierbuch des norm. Dich-
ters Guillaume le Clerc, Leipzig, 1890.
Le Bestiaire de Gervai.se a été publié dans la Romania, I, 420 ss.
Le Bestiaire d'amour, par Richard de Fourni val, publié par
G. Hippeau, Paris. 1860. Sur Richard, voir Hist. HU.. XXIII. Tus.
Sur le Vulucraire d'Osmond, voir Hist. litt.. XXII I, '.',22.
Lt Cumpoz Philippe deThaûn... hgg. von E. Mali., Strasbourg,
1873 (cr. L. Fenge, Ausg. u. Ahhandl., LV).
Sur un autre comput en vers, composé en Angleterre par un
certain Raie i>e Lenham et daté de 1256, voir Romania, XV, 2S5.
Sur Simon de Gompiègne, et sur la Sphère {V Espère) du Monde,
voir Uist. lilt., XXX, 593.
lui. Sur l'Image du Monde, voir Notices et extraits, XXXIV,
1 partie, p. 107, 174; Romania, XXI, 481; XXXVI. 517: pour les
manuscrits, voir Revue des langues rom., 4e série, VII, 1.
Sur la Mappemonde et sur les autres ouvrages de Pierre, voir
Notices et extraits, XXXIII, l'° partie, 9-48.
Sur la traduction (perdue) de Solin par Simon de Roulogne,
voir le passage de Lambert d'Ardres {Mon. Germ., Script., XXIV,
598). précieux pour toute l'histoire des anciennes traductions.
Sur Pierre de Peckham ou d'Abernun et ses ouvrages, voir
Romania, XV, 287.
Sur la Petite Philosophie, voir Romania, XV, 350: XXIX, 72.
Sur les divers ouvrages relatifs aux Propriétés des choses, voir
Hist. litt., XXX. 334-388. — Un poème avec moralisations sur ce
sujet a été imprimé en extraits par G. Rayxaud, Romania, XIV, 442.
Sur Jofroi de Waterford, voir Hist. litl., XXI, 839. — Sur l'his-
toire, contée dans le Secret des secrets, de la jeune fille nourrie
de poison envoyée à Alexandre, voir \V. Hertz, Die Sage der
Giftmûdc/ien, dans Abhandl. der Baier. Akad., XX, 1893, 1" par-
tie, p. 91 (cf. Romania, XXIII, 314). Sur les traductions françaises
du Secretum secretorum, voir Romania. XV, 188.
Sur Brunet Latin, ses œuvres et les sources de son Trésor, voir
Th. Slndry. Délia vita e délie opère di Brunetlo Lalini, mono-
grafia... tradotta... per cura di Rodolfo Renier, Firenze, 1884 (cf.
Romania, XIV. 313); pour certaines sources du Trésor voir
Romania, XIV, 23: XXIII, 02. — Sur la forme du nom patrony-
mique de Brunet, voir Romania, XIV, 313.
Sur le livre de Sidrac, voir Hist. litt., XXXI, 285.
NOTES BIBLIOGRAPHIQUES. 307
Sur Placides et Timeo, voir Wsl. li/L, XXX, 567,
Sur le Ci nous dit, voir Romania, XVI, 507.
102. Sur le Régime du corps, voir Hïst. lit t., XXI, 415-41S. Sur
le médecin Aldebrand ou Aldebrandus de Florence ou de Sienne,
voir A. Thomas, Romania, XXXV, 454.
Sur Henri de Monde vil le, voir Ilist. lilt., XXVII, 325-351; La
( 'h 'u urgie de maître Henri dr Mondeville, traduction contemporaine
xle l'auteur, p. p. le Dr A. Bos, Paris, 1897-8, 2 vol. (Soc. des anc.
textes).
Sur les écrits relatifs aux présages divers, voy. Notices et exlr.,
XXXIV, 1' partie, p. 236.
Une riche bibliographie des écrits en ancien fiançais relatifs
à la chasse a élé donnée par M. Werth, Zeitsc/ir. /'. rom. l'hil.,
XII, 140, 382, XIII, I.
Sur la traduction de Végèce de Jean de Meun et le poème de
Jean Priorat, voir L'Art de chevalerie, traduction du De re militari
de Yégèce, p. p. U. Robert, Paris, 1897, et Li abrejance de Vordre
de chevalerie... p. p. le môme, Paris, 1897 (Soc. des anc. textes).
Sur la traduction du traité de Théodore Paléologue, voir
Romania, XXV, 407.
Surl'O/Y/ene de chevalerie, voir Hist. litt.,X\Ul, 752; Romania,
XV, 34G; XXXVI, 529; Petit, 467.
Sur l'album de Villard de Honnecourt, voir Hist. litt., XXV, 1 ;
le texte, sans les figures, dans Zeitschr. f. rom. Phil., XXV, 45.
In facsimilé réduit du manuscrit original a élé publié par
M. Omont, Paris [1906] (cf. Romania, XXXVI, 151).
Un traité de cuisine de la première moitié du xive siècle a été
imprimé dans la Bibliothèque de l'École des chartes, 5a série, I
(1800), 207. Pour d'autres livrets du même genre, voir Bull.de la
Soc. des anciens textes, 1893, p. 48 ss.
Des recueils de problèmes d'échecs, de « tables » et de marelles
existent en divers manuscrits. L'un d'eux a été publié dans les
Mélanges Chabaneau, Erlangen, 1907, p. 591.
Lois de Guillaume le Conquérant, en français et en latin, texte
et étude critique, p. p. J. E. Maztke, Paris, 1899. Cf. F. Liebekmann,
Uber die Leis Wi/lelme, dans Archiv. f. d. Studium d. neueren
Sprachen, G VI, 113-138.
Assises de Jérusalem... publiées par A. Beugnot, Paris, 1841-
1843 (Recueil des Historiens des croisades). Cf. Hist. lilt., XXI,
433-467; P. Viollet, Précis de l'histoire du droit français, Paris,
1884, p. 142 (2° éd., 1893, p. 169).
Philippe de Beaumanoir, Coutumes de Beauvoisis, texte critique
p. p. A. Salmon, Paris, 1899-1900, 2 vol. — Sur Beaumanoir, voir
ci-dessus, au § 51, et Viollet, p. 157 (2e éd., p. 185).
Les Éjlablissementsde saint Louis, publiés par P. Viollet, Paris,
1881-87, 5 vol. (Soc. de l'Hist. de France).
308 NOTES BIBLIOGRAPHIQUES.
Sur la double version «le In Somme èa provençal, voir SuctiiÉR,
Fûnfneue Handschrifteii des prov. Rechtbuehs • Lo Codi ■•, Halle,
1899 (cf. Romania, XXVIII. 650).
Sur la version des Institutes, voir G. or. la Rue, Essais sur les
bardes, jongleurs el trouvères, III. 180; llist. lût., XXXIII, Hi-2.
Sur Guillaume Gbapu et sa Coutume de Normandie versifiée,
voir ibid., 219; Mst. lui de la Fr., XXX1I1, lll-.'i.
Sur les Serments de 842 voir Koschwitz, Commentai' zu don
Ûltesten franzôsischèn D enkmûlem, Heilbronn, 18S0(cf. Romania,
XV, 444. 454, et XVI. 629).
Le Conseil de Pierre de Fontaine... publié par A. Marmer, Paris,
1846; Viollet, p. 150 (2 éd., p. 180).
Li livres de joslice et dèplet, publié... par Rapetti, Paris. 1850;
Viollet, p. 152 (2 «'dit. . p. 180). — A. SfOLL, L'eber die Sprache
des Livre de jostice et de pie t, Halle, 1889.
Sur Gautier de Bibieswofth (nom actuel Bibbyswdrth), voir
Romania, XV. 262-263, et XXXII, 44.
Sur les différents traités anglo-normands de grammaire fran-
çaise, voir Orthographia gatlicà, bgjg. von J. Stirzinger, Heil-
bronn. ISS4 {Atlfranz. Bibliolhek, VIII); Romania, XXXII. 46,
59, 66; XXXVII, 181.
La Senèfiânee de Va b c, par Huon le Roi, dans Jùbinal, Contes,
dits, fabliaux, Paris, 1841, II, 275-200. Voir Romania, XXV,
451.
Sur les alossaires latins-français et recueils de glosés françaises,
\nv. llist. ''lilt.. XXII. 148; Romania, 11, 273; XXIV, llil: cf. Diez.
(Anciens glossaires romans, trad. par A. Bauer, Paris, 1872
< Bibliothèque de l'École des Hautes Etudes, fasc. V).
Sur les glossaires hébralco-fràneàis, voir Romania, I, 140-176.
394; Glossaire hébreu-français du Xlïl* siècle, recueil de mots
bibliques avec traduction française, p. p. Mayer Lambert el
L. Brandin, Paris, 1905.
103. Sur Everard de Kirkbam et Klie de Winchester, voir Sten-
gel, Ausg. und Abliandl, XLVII (appendice à Klh.ne, ci-dessous,
§ 104).
Sur Adam de Suel. voir Romania^ XVI, 05, 150; XVIII. 577. La
version d'Adam de Suel a été publiée par J. Ulrich, Romanische
Forschungen, XV, 107.
Les œuvres de Simon de Fraisne, le Roman de Philosophie el la
Vie de saint Georges ont été publiées par M. J. E. Matzke pour
la Société des anciens textes français, Paris, 1909.
Sur les traductions de la Consolation de Philosophie, voir un
mémoire de M. L. Delisle, Inventaire des mur. fr. de la Ribl. nat.,
Il (1878), 317: cf. Romania, XX. 329: llist. lilt.. XXV1I1, 408.
Sur les Dits de* philosophes voir ///-/. lilt., XXIII, 243; Bull.
de ta Soc. des anciens textes, 1895, p. 90.
NQTES i:ii;i.lm;i;.\Nllni | 311(1
Irmer, Die a.ltfranzôsische Uearbeitatig der Formula vifae ho-
nestae des Martin von Bragq. Halle, 1890 (cf. Archiv. /'. dos
Slud. (I. neurén Sprac/ien, LXXXVI1I. ioh.
Sur la traduction en vers français <lu livre de Martin de Praga,
voir G. Paris. Saint Alexis, p. 213-0.
Sur le Doctrinal Sau,vage, voir Romqnia, X\'I. 1.0; Notices et
extraits, XXXI11, lr" partie, 15.
Sur Robert de Ho, voir Romania, XXXII, 141.
Sur k- clerc do Vaudoi, voir liomania, I. 208; XIV. 27S.
Sur Urbain le courtois, voir Romania, XV. 204; XXXII, 08.
Sur le Doctrinal de courtoisie, voir llist. lit t., XX1I1, 238.
Sur le Vilainneng ouste, voir G. Paris, Saint Alexis, p. 210.
Le lloman des eles de courtoisie, dans A. Scheler, Trouvères
belges, Louvain, 1879, II. 248-284. — Sur les œuvres de Raoul de
Soudan, voir la dissertation de Ze.nkek citée a la note du § 59.
Sur les « Enseignements » de Robert île Blois, voir Romania,
XVI. 3:]; XVII, 282; XXXVII, 608; Gh.-V. Langlois, La vie en
France au moyen âge, Paris, 1908, p. 153.
Sur Watriquet, voir Dits de Watriquet de Çouvin, p. p. A. Sche-
ler, Bruxelles, 1868: Notices et extraits, XXXIII, 2e partie, 87-9.
Dits et contes de Baudoin et de son fils Jean de Condé, publiés
par A. Scheler, Bruxelles, 1860-7. 3 vol.
Sur Philippe de Xovare et ses œuvres, voir les Quatre Ages de
l'homme, traité moral de Philippe de Xavarre (sic), p. p. M. de
Fréville, Paris, 1888 (Société des anciens textes): G. Paris, Ro-
mania, XIX, 99, et Revue de l'Orient latin, IX, 199; Ch.-V. Lan-
glois, La vie en France au moyen âge, p. 184.
Li Proverbe au vilain, hgg. von A. Tobler, Berlin, 1895.
Sur les proverbes, voir llist. litt., XXIII, 198; Romania, XIII.
532.
Sur les Proverbes au conte de Bretagne, voir Romania, XXII,
175.
Sur Salomon et Marcoul, voir Giornale storico délia lett. ita-
liana, VIII (1886), 275.
lui. Sur les Arts d'amour en général, voir Hist. litt., XXIX.
455-525. La Clef d'amours, texte critique par A. Doutrepont, Halle.
1S90 (Bibl. nor-mannica, t. V).
Sur André le Chapelain, voir liomania, XVIII, 473; R.una, dans
Propugnatore, iV. S., II. 192. Une édition de -un traité de amore,
a été publiée par .M. H. Tuojel, Copenhague, 1892 (cf. liomania,
XXII, 174;. Sur la traduction de son livre par Drouart La Vache,
voir liomania, XIII, 403.
Maistre Elles Ueberarbeitung der àlteslen franzôsischen Ueber-
tragung von Ovid's Ars amatoria, hgg. von H. Kuh.ne und E. Sten-
gel, Marburg, 1880 (Ausg. und Abhandl., XLVll).
Sur les dill'érentes rédactions, latines et françaises, du Jugement
310 NOTES BIBLIOGRAPHIQUES.
d'amour, voir E. Langlois, Origines et sources du Roman de la
Rose, Paris, 1890, p. 0 ss. La geste de Blanche/tour et de Florence,
elMelior et Ydoine, rédactions anglo-normandes, ont été publiées
dans Remania, XXXVII, 221-244.
De Venus la déesse d'amor s, hgg. von W. Foerster, Bonn, 1882.
Le Donoi des amanz, dans Romania, XXV, 497 (cf. XXXVII, 218).
105. Sur les diverses compositions relatives aux <• états du
monde », voir Romania, IV, 385. Le Contenz du Monde de Renaud
d'Andon est dans le mis. B. N. 1593, f. 141 ss.
Eslienne von Fougiere's Livre des Manières... von Joscf Kre.mer,
Marburg, 1887 (Ausg. und Abhandl., XXXIX); Ch.-V. Langlois,
La vie en France au moyen âge, p. 1.
Sur la Bible de Guiot de Provins, voir Romania, XVI, 57 ; Notices
et extraits, XXXIII, lre partie, 33; Ch.-V. Langlois, La vie en
France au mogen âge, p. 30.
Sur la Bible de Hugues de Berzé, voir Romania, VI, 19; XIII,
553; Zeitschr. f. rom. Phil., XVI, 505 (cf. Romania, XXII, 318).
Ch.-V. Langlois, La vie en France au mogen âge, p. 69.
Sur Fauvel, voir Hisl. UU.; XXXII, 108-153 ;Ch.-V. Langlois,
La vie en France au moyen âge, p. 276.
Sur le Mariage des filles du diable, voir Romania, XXIX, 14.
La Riote du monde, dans Zeitschr. f. rom. Phil., VIII, 275-289.
106. Sur les pièces contre et pour les femmes en général, voir
Romania, XV, 315, 339: XVI, 389.
Sur V Évangile des femmes, voir Romania, XXXVI, 1.
Sur le Chastie-musart, voir Romania, XV, 603.
Sur Chicheface, voir Godefroy, Dictionnaire de l'ancienne langue
française, s. v. ; E. Picot, Calai, de la Bibl. Rothschild, I, n° 528.
Sur le Dit des Comètes, voir Ilist. litt., XXIII, 248.
Sur le dit du Bourjois bourjon, voir Ilist. litt., XXIII, 183.
Des Avocas, publié par G. Baynaud, Romania, XII, 214.
Sur la Palenostre à l'Usurier, voir Ilist. litt., XX11I, 493; Ro-
mania, I, 208; XXXIII, 112.
Martin llapart, dans Montaiglon-Baynaud, Fabliaux, II, 171
(cf. Ilist. litt., XXIII, 126).
Sur Dan Denier, voir Hisl. litt., XXIII, 263.
Sur les pièces contre les vilains, voir Hist. litt., XXIII, 194:
Romania, XII, 15; XXIV, 142.
Le Dit des laboureurs, dans Jubinal, Jongleurs et Trouvères,
Paris, 1835.
108. Sur André de Coutances, voir G. Paris et A. Bos, Trois
rédactions en vers de l'évangile de Nicodème, Paris, 1885, p. xvi.
XIV, 279.
Sur la Paix aux Anglais, voir Hist. litt., XXIII, 449.
NOTES BIBLIOGRAPHIQUES. 311
Sur la Charte de la paix aux Anglais, voir Romania, XIV, 270.
Les Deux Anglais, dans Montaiglon-Raynaud, Fabliaux, 11,
17S.
Sur le Privilège aux Bretons, voir llist. litt., XXIII, 423.
Le DU de la rébellion d'Angleterre, dans Jubinal, Contes, dits,
fabliaux, 1, 73.
• Sur le petit poème du moine de Silli, voir Romania, I, 246.
Sur la poésie politique des km" et xiv" siècles, voijr Hist. tilt.,
XX111, 410 ss.
Complainte de Jérusalem, dans E. Stengel, Codex manuscriptus
Dit//))/ 8b', Halle, 1871. Sur l'attribution de la Complainte à lluun
de Saint-Quentin, voir Romania, XIX, 204.
Sur le Dit de vérité, voir Romania, I, 246.
100. Pour tous les petits poèmes énumérés dans les §§ 100 ss.,
voir, sauf additions, Y Hist, litt., t. XXIII.
Le Dit de la maille, dans Jubinal, Jongleurs et Trouvères, p. 101.
Les Églises et Monastères de Paris, pièces en prose et en vers
des ix% xiu* et xive siècles, par H. Bordier, Paris, 1856.
Sur les pièces relatives aux rues de Paris, aux cris de Paris, etc.,
voir Hist. litt., XXVIII, 225-233; A. Franklin, fa Vie privée d'au-
trefois : les Cris de Paris, Paris, 1887.
Le Mariage des quatre fils Aimon, dans Jubinal, Mystè?~es du
xv° siècle, I, 369, et A. Keller, Romvart, Mannheim et Paris,
1844, p. 151 ; imprimé plusieurs fois anciennement.
Sur le Dit de Cocagne, voir Hist. litt., XX1III, 140. Sur la tra-
dition en elle-même, voirE. Schmidt, Dus Schlaraffenland, dans
Cosmopolis, avr. 1807.
Un nouveau dit des femmes, publié pour la première fois [par
G. Raynaud], Paris, 1886 (non mis dans le commerce). Voir aussi
le Dit de la bonté des femmes, dans Romania, XV, 315.
Les Vins d'ouan, dans Montaiglon-Raynaud, Fabliaux, II, 140
(cf. Romania, XI, 572).
Sur le Martyre de saint Bacchus, ses imitations et ses origines,
voir Romania, XV. 363: Hist. litt., XXIII, 496; XXVIII, 187.
Le Dit du bon vin, dans Romania, XI, 572; ibid., remarques
sur l'allitération.
Sur le Dit de l'herberie, le Valet ù tout faire et les imitations,
voir Romania, XVI, 496 ss.
Sur les Tournois de Chauvenci, voir Romania, XVII, 333.
Sur Ham et les Tournoiements des dames, voir Hist. litt., XXIII,
469, 478; Romania, XXVIII, 232.
Sur le Tournoiement des daines de Paris, voir Notices et extraits,
XXXIII, 2' partie, 187.
110. Sur le genre des Débats et Disputes en général, voir Hist.
litt., XXIII, 216: Lileralurblatt, 1887, 76 (cf. ci-dessous, § 126).
3|2 NOTES BIBLIOGRAPHIQUES.
Le Débat de l'hiver cl de Vété, dans Montaiglon et Rothschild,
Anciennes poésies françoises, X. 41.
Sur le Débat du vin et de Pèàu, voir Romania, XVI, 366.
Le Débat du denier et de la brebis, dan> A. .li unai,. Contes, dits,
fabliaux, 11, 264.
Œuvres de Henri (TAndeli, publiées par A. Héron, Rouen, I88Q;
sur la langue, voir Ausg. und Abhançtl., XL1V). .
Le Mariage des Sept Arts, voir Hist. litt., XXI11, LU!): cf. le
Cabinet historique, publié par E. Paris, XIII (1867), '.in.
Les Deux ./ont/leurs, Montaiglon-Raynaud, 11, '6ol (ci-dessus,
§ ^).
111. Surlc Roman delaRose, voir Hist. litt., XXIII, 1-01 ; E. Lan-
glois, Origines et sources du Roman de la Rose, Paris, lN'.lit:
le môme, dans Petit ije Julle ville, Hisl.de la litlér. française,
11, 105 (cf. Romania, XXV, 605).
Le Dit de la Rose, dans Uautsch, Langue et Litlér., col. 603;
Hist. litt., XX III, 284'.
Sur le roman de la Poire, publié par Fr. Sjf.ih.iou. Halle. 1881
voir Litteralurbl., Il, 437 ; Zeitschr. f'.rom. Phil., V. .ri70; le Cabinet
historique, IV (1858), 129.
Le Dit de lu Panthère d'amours. parNîcble de Màrgival, publié
par 11. ToDD, Paris, 1883 (Soc. des anciens textes).
Là ('our d'amour et le Jeu de la chapelle Martinet, par Mathieu
Le Poikiek, Romania, X, 519.
112. Sur Guillaume de Lorris, voir Romania, X, 402: XL 629*. —
Sur le dénouement apocryphe, F. Wolk, Klcinere Schrifl.cn, p. 124.
ÎEJ. Sur Jean .le Menu, voir Hist. litt., XXVIII, 391-439.
114. Anticlaudianus, dans Th. Wright, Satirieal latin poems of
the .V/7"' and XIII{U centuries, London, ISTi', t. II. — Sur la tra-
duction en vers, voir Bull.de la Soc. des une. textes, 1895, p. 103.
F. Becs, Les Épistres sur le Roman de la Rose de Christine de
Pizan, Neuburg, 1888.
115. Sur le roman de la Rose en néerlandais, Petit, 408.
Sur la traduction anglaise du Ho m un de lu H ose, voir Skéat, dans
les Essays ou Chaucer publiés parla Ghaucer Society , V (1884), i-17.
Sur il b'iore, imitation itx Roman de lu Rose en sonnets italiens,
voir D'Ancona, Varietà storichee lelterarie, Il (Milano, 1885), 1-31.
— Sur une autre version italienne, peut-être du même auteur,
Zeitschr. /. rom. Phil. XII, oT.'M- Romania, XVII, 040.
117. E. du MÉRiL, Poésies populaires latines antérieures au
XW siècle, Paris, ES43.
NOTES BIBLIOGRAPHIQUES.. 31 3
118. Sur la poésie lyrique française en général, @J pour tous
les renseignements bibliographiques,, mut a. Jeanroy, Les Origines
de la poésie tyrique en France au moyen âge, Paris, 1889
(2" édit., 1004 .
119. Recueil de motets français des XI f et XIII" siècles publics
par G. Ravn.mi). suivis d'une étude sur la musique au siècle de
saint Louis |,ar II. Lavoix. Paris, 1881-1883, 2 vol. — Cent
motets du XIII siècle publiés d'après le ms. de Bamberg, pat
P. Aulirv. Paris, l'.ios. Cette publication comprend : 1 la repra-
duction phototypique du ms. : 2" la transcription en notes
modernes; 3" le commentaire.
120. Dernière édilion de la rotrouenge de Bichard dans Bartsch.
Langue et LU 1er.. 311. Voir d'autres rotrouenges dans P. Mf.yf.r,
Recueil, 376, 377. et ftomania, XIX, 30, 102. Sur les pièces arté_
siennes, voir Jeanroy, Études romanes, dédiées à i',. Paris, p. S3 •
Chansons et dits artésiens du XIIIe siècle, p. p. Jeanroy et Guy,
Bordeaux. [898 (Riblioth. des Universités du Midi, fasc. II):
Gucsnon, La satire à Arras au XIIIe siècle, dans Le Moyen âye.
1899 et 1900; Nouv. recli. sur les trouvères artésiens, même
recueil, 19112.
Sur le mot serventois, voir Romania, VII, 626: X. 264; XIX, 27.
Sur les chansonniers français, voir Ed. Schwax, Die altfran-
zçsisçhen tifiindschriflen... Berlin, 1886. — Le chansonnier de
Sienne est publié par Steiïens, Archiv. f. dus Studium der neueren
Sprachen. LXXXVIII, 301.
Sur les mots estrambol . estrabot, estribot, voir G. Paris, Les
chants populaires du Piémont, Paris, 1889, p. 9.
Sur Luc de la Barre, voir Orderic Vital. I. XII, eh. xxxix.
121. Sur Yestampie (en provençal estampida), voir P. Meyer,
dans Ribl. del'Êc. des ch.. 6" série, V (1809), 486 ss.
Sur les rondeaux et virelais, voir G. RÀynàud, Œuvres d'Eus-
tache Deschamps, XL 124 ss. Sur la forme des « virelis » au
mv siècle, voir Bulletin de la Soc. des anciens textes, 1886, p. 84;
Romania, XIX, 24-26.
123. Sur les lais lyriques provençaux et français, voy. Romania,
VI. 174; Vil, 403: Lais el descorts français du XIII' siècle, p. p.
A. Jeanroy, L. Brandin et P. Aubry, Paris, 1905.
Le lai du Chèvre feuille, dans Bartsch, Chrestomathie, 9e éd.,
n" 40.
Sur le descorf, voir Zeilschrift. XI, 212.
124. J. Bédikr, Les Chansons de croisade, Paris, 1909. — Sur
la chanson d'outrée, voir Romania, IX, 44; J. Bédier, Les Chan-
sons de croisade, p. xm.
314 NOTES BIBLIOGRAPHIQUES.
Sur Hup-ues do Berzo, ci-dessus, .S 105.
Sur la prétendue chanson de la dame do Fayel. voir Hist.litt.,
XXY1II. 373.
125. Sur l'origine do la poésie provençale et son action sur la
poésie française, voir, outre les histoires générales de la littéra-
ture provençale, P. Meteb, De l'influence des- troubadours sur la
poésie des peuples romans, dans Romania, V, 257-268 : cf. ibid., XII,
521, et XIX, 1 ; A. Jeanroy, De nostratibus medii sévi poelis, qui
primum lyrica Aquitanise carmina imitati sint, Paris, 1889.
F. Ohth. TJeber fteim und Strophenbau der altfranzôsischen
Lyrik, Cassel, 1882.
Sur la poésie lvrique en Angleterre, voir Romania, IV, 375;
XV. 246.
126. Sur les tençons et les jeux partis, voir Journal des Savants,
déccmhre 1888.
P. Meter, Le Salut d'amour dans les littératures provençale et
française (Bibliothèque de l'École des chartes, 6e sér., III, 1867,
12 li: cf. Bull, de la Soc. des une. textes, XIII. 04. Philippe
de Beaumanoir est l'auteur de deux saluts d'amour dont l'un e<t
le plus Ion,!.'- do tous ceux qui nous sont parvenus : Œuvres
poétiques, éd. Suchior. II, 197 et 315.
Sur les cours d'amour, voir G. Parts, Journ. des Savants, octo-
bre et décembre 1888; Pio Rajna, Le corti d'amore, Milan, 1890.
127. Les Congés de Jean Bodel, publiés par G. Raynaud, Ro-
mania, IX, 219-247; Zeitschr. f. rom. PMI., VI, 387; 0. RoHNS-
tro.m. Etude sur Jean Bodel. Upsala, 1900.
Sur les falrasies et rêveries, voir Sucrier, Œuvres poétiques
de Beaumanoir, I, cxxm.
Bustebuefs Gedichle... hgg. von A. Kressneh, Wolfenbiittel,
1885. On peut avec vraisemblance attribuer à Rustebouf les 38
premiers quatrains des Begrels au roi Loeïs (imprimés dans Michel,
Mémoires de Joinville, Paris, 1858, p. 317). Les 17 derniers, qui ont
une autre forme (ils présentent une rime intérieure), sont l'œuvre
d'un moine mendiant.
La chanson de Colin Muset dans Bartsch, L. et Litt., col. 351.
Voir aussi J. Dédier, De Nicolao Muselo franco g allico carminum
scriplore, Paris, 1893.
128. Chansons de Gace Brûlé, p. p. G. Huet, Paris, 1902 (Soc. des
anc. textes).
Sur la personnalité du Châtelain de Couci, voir Bomania, XIII,
485.
131 ss. Toute la bibliographie du théâtre du moyen âge, pour
la période qui nous occupe, se trouve dans les ouvrages suivants :
NOTES BIBLIOGRAPHIQUES. 315
Douhet, Dictionnaire des mystères, Paris, 1854 (Encyclopédie
théol. de Mrgne).
L. Petit 'de Julleville, Les Mystères, Paris, 1880, 2 vol.
L. Petit de Julleville, Répertoire du théâtre comique au
moyen dge, Paris, 1887.
132. Die Adam de la Haie zugeschriebenen Dramen... bgg. von
A. Rambeau, iMarburg, 1886 (Ausg. tend Abhandl.,LNU\)\ H. Guy,
Essai sur la vie et les œuvres littéraires du trouvère Adan de le
Haie, Paris, 1898. — Sur Adam, voir Bédier, Rev. des Veux
Mondes, 1891 ; Sepf.t, dans Études romanes dédiées à G. Paris,
p. 109; Le jeu de Robin et de Marion, par Adam le Rossu, p. p.
E. Langlois, Paris, 1896; le môme, Romania, XXXII, 384 ss.
134. La farce du Garçon et de l'Aveugle a été publié par P. Meyer,
Jahrb f. rom. u. engl. Literatur, VI (1865), 163.
135. Sur les manuels d'enseignement religieux à l'époque méro-
vingienne, voir Romania, I, 483 ss.
136. L'idée que la Bible entière aurait été mise en français à
Paris, sinon exactement « vers 1235 », du moins peu après cette
époque, repose sur une assertion non justifiée de S. Berger, La
Bible française au moyen âge, Paris, 1884, p. 40, 120, 149 (cf. Ro-
mania, XVII, 135-6).
Sur Guiart des Moulins, voir Hist. litt., XXVIII, 440; S. Berger,
ouvr. cité, p. 157 et suiv.
Sur Roger d'Argenteuil, voir Notices et extraits, XXXIII,
lre partie, 71.
Sur une version abrégée de certaines parties de la Bible, non
mentionnée par S. Berger, voir Rullelin de la Soc. des anc. textes
français, 1905, p. 38.
137. Sur Herman de Valenciennes, voir P. Meyer, Romania,
XV, 308, Rull. de la Soc. des anc. textes français, 1889, p. 82;
Notices et extr. des mss., XXXIV, lr° partie, 198-208 ; XXXV, 447-455.
Sur Jean Malkaraume, voir J. Bonnard, Les traductions de la
Bible en vers français, Paris, 1884, p. 55.
Sur Macé de la Charité, voir Hist, litt., XXVIII, 208.
Sur Geufroi de Paris : P. Meyer, Notices et extraits, XXX i
255-322.
138. Sur les Quatre livres des Rois, voir P. Schlôsser, Die
Laulver/iàltnisse der Quatre Livres des Rois, Bonn, 1886. — Sur
les différentes copies de cette version, voir Romania, XVII, 124.
Sur la version des Juges, voir Romania, XVII, 133; XVIII, 523;
Notices et extraits, XXXV, 455-457.
Die beiden Bûcher der Makkabâer.... mit Einleilung, Anmer-
3 i 0 NOTES BIBLIOGRAPHIQUES.
kmii^'ii înid Glossar, herausg. von Dr. Ew. Goekuch, Halle 1889
(Romanische Bibliotkek, II).
Le pftème on décasyllabes sur les Macchabées est public dans la
Mvista dl filologia romanza, II (1S75), 82 ss. ; cf. Romania, IV .
498; sur les autres imitations en vers, voir Romania, XXVII, 176;
Notices et extraits, XXXV, 458-467.
Sur l'Ancien Testament en vers anglo-normands, Notices et
extr., XXXI V, V partie, p. 210.
Sur le poème de la Genèse, par Everat, voir H. d'ÂRBOis de
.1i H.wNviu.E. Hist. des comtes de Champagne, IV, 640; P. Meyer,
Rec. d'anc. textes, p. 338.
Sur les poèmes de Joseph, Job et Tobie, voir Hist. Hit., XXX III,
359 (cf. p. 631), 377.
Sur le cycle de Salomon, voir Vogt, Die deulschen Dichtungen
von Salotnbn und Markolf, I. Halle, 1880.
139. La Passion, dans Fokrster et Koschwitz, AltfranzÇsisches
Uebungsbuch, Bonn, 1885 (2e édition, 1902), avec renvoi à tous les
travaux antérieurs. Voir encore Ebert, Geschichte der Literatur
des Mittelalters, III (Leipzig, 1887), 363.
On composa, dans la première moitié du xme siècle, surl'bistoire
évangélique, et spécialement sur la Passion, plusieurs poèmes,
dont on trouvera l'énumération dans YHist. litt., XXXIII, 355-359,
art. Jésus.
Sur Robert de Gretham et son œuvre, voir Romania, XV, 296 ;
XXXII, 28.
Sur l'interdiction par Innocent III des traductions françaises
faites à Metz, voir Suchier, dans Zeitschr. f. rom. Pliil., VIII,
418 ss.
Sur la traduction de l'ouvrage d'IIaimon, voir ibid., 424 ss.
140. Sur V Histoire de Marie et de Jésus, en laisses monorimes,
voir Romania, XVI, 248-262.
Sur VÉvangile de l'Enfance, voir Hist. litl., XXXIII, 356.
Trois versions en vers de T évangile de Nicodè?ne, publiées par
G. Paris et A. Bos, Paris, 1885 (Soc. des anciens textes). — Sur un
poème composé en partie d'après l'Evangile de Nicodème, voir
Romania, XVI, 51-53, 228; XXV, 552.
Sur la légende de Judas, voy. Grak. Miti del medio evo, 1, 282.
Sur la Vengeance du Sauveur, voir Revue critique, 1SS2, 1. 346;
Romania, XVI, 56; Notices et extraits, XXXIII, lr< partie, 70;
Zeitschrift f. rom. Phi t.. XXIV. 161 ;XXV, 04.
Sur la légende du bois de la croix ou bistoire de Setb, voir
Hist. litt., XXXIII, 375. art. Seth (poème anglo-normand en vers);
Romania, XV, 326 (version en prose); XVI. 227-244 et XXV, 551
(version intercalée dans un poème sur la vie de Jésus). Voir aussi
A. S. Napier, llistory o/'the holy rod-tree, London, 1894 (cf. Romania,
NOTES BIBLIOGRAPHIQUES. [\\-
XXIII, 634), ei la notice précitée (§ 137) sur GeUfroi de Paris.
i ne .ni i ir forme de la légende d'Anastase se trouve eri divers
textes; voir ttomania, XVI, 24i» et la notice sur GeUfroi de Paris.
Fragment de la vie de sàinl .Jean-Baptiste dans G. ParIs et
A, Bos,Ia Vie desaiht Gilles, p. v-.\m.
Sur le poème de Wace relatif aux Trois Maries, voir llisl. lill.,
XXXIII, 304-&; sur les Trois Maries, de Pierre (de lîeauvais), voir
iiist.au.. xxxiu. 367.
VÀpocalyse en français au XIII" siècle (13. N. fr. 403), p. p.
L. Delisle et I'. Mbyer; Paris, 1900 (reproduction pholotypique
du mis.); 1901 (introduction et texte). — Il existe, non pas une
seule version en prose de Y Apocalypse, comme le croyait S. IJerger
mais au inoins huit. Pour deux versions en vers de V Apocalypse
faites a la lin du xni' siècle ou au commencement du xiv", l'une
m Angleterre, l'autre en France, voir Romania, XXV, 174 ss., et
XXXIV, 150.
Le poème des Sibylles a été publié, très imparfaitement, par
TarbÉ; Le tournoiement de /' Antéchrist, Reims, 1851, p. 106. L'asser-
tion qu'il aurait été composé pour Mathilde, veuve de l'empereur
Henri V, remonte à l'abbé de La Rue, et est fort contestable; voir
Th. Wright, Rioqrahhia britannica litteraria, Londres, 1840,
II, 337.
Pour le poème des Quinze signes, voir Romania, VI, 22; VIII,
313; XV, 290; XXXV 1,536.
Sur les poèmes relatifs à l'Antéchrist (on en connaît quatre),
voir Hist. litt., XXXIII, 339.
141. Sur les apocryphes relatifs à la Vierge, voir Romania, XII,
131 ; XVI, 216 ss; Notices et extraits, XXXIII, 2e partie, p. 48.
Le Romanz de saint Fanuel et de sainte Anne, p. p. C. Chaba-
neau, Paris, 1888. Cf. Romania, XVI, 210, 236; XXV, 546 ; Mélusine,
1888, p. 222.
Sur le poème de la Mort Nostre Dame, voir Romania, XVI, 230.
Sur les Sept joies Nostre Dame, voir Romania, XIX, 70.
Li Regrès Nostre Dame, par Huon le Roi de Cambrai, p. p.
A. Lângfors, Paris, 1907.
142. Sur les rédactions latines des miracles de la Vierge, voir
Ad. Mlssafia, Studien zu den mitlelallerlichen Marienlegenden,
Vienne, 1887-1898 (extraits des comptes rendus de l'Académie de
Vienne, t. CX1II, CXV, CXIX, CXXIII, GXX1X); voir aussi 17/u/e.r
miraculorurn R. Y. Marine du P. Poncelet, dans les Analect.a
Bollandiana, t. XXI.
Les fragments de miracles en français trouvés à Orléans ont
été publiés dans les Notices et extraits, XXXI V, 2e partie, 31 ss.
Sur les rédactions en vers français des miracles de la Vierge,
voir ibi'i.y p. 34-5.
318 NOTES lilBLIOGRAPUIQUES.
Miracles de la sainte Vierge par Gautier de Coincy... publiés par
l'abbé Poqubt, Paris, 1857 (cf. Zeitsckr. f. rom. Phit., VI, 325-346;
Archiv fur das Stndium der neueren Sprachen, LXVII, 233-248).
Sur les sources de ce recueil, voir Mossapia, Veber die von G. de
Coincy benûlzten Quelle», Vienne, 1894 (Mém. de l'Acad. do Se.
de Vienne, classe de philosophie et d'histoire, t. XLIVj.
143. Sur Jean le Marchant, voir Romania, VI, 150; Bihl. de
l'École des chartes. XLII. 505, 550; II. Folster, Sprachliche Reim-
unlersûchung der Miracles de .V. D. de Chartres, Marburg, 1880
(Ausg. und Ahhandl., XL111); Dlnker, Zu Jehan Le Marchant,
Erlangen, 1886.
Adgar's Marien-Legenden... hgg. von Cari Neuhaus, Heilbronu,
1880 (Allfranzôsische Bibliothek, IX . Un nouveau ms., pouvant
servir à compléter l'édition, a été étudié dans la Romania, XXXII,
394 ss.
Sur Everard de Gateley, voir Romania, XXIX, 27.
Sur la légende de Théophile, voir Romania, XXIII, 001. — Une
curieuse version de cette légende est dansBartsch. L. elL., 451-490.
Sur la légende du liancé de la statue, voir A. Gkaf, Roma (§ 48),
II, 388.
Sur la légende du chevalier qui vendit sa femme au diable,
voir Biit. l'ut . XX111. 123; sur celle du chevalier dont la Vierge
prit la place au tournoi, ibid., 124; Bartsch, C/irestomalliie, 9e éd.,
n°59.
Del Tomôeor Nostre Dame, Romania, II, 315-327 (cf. IX, 479).
143 6m. Voir VAdvocacie Xoslre-Dame et la chapelerie Nostre-
Dame de Bayeur, poème normand du XIVe siècle (publication pos-
thume d'A. de Montaiglon avec préface de M. G. Raynaud), Paris,
1SG9-189G.
144. Sur les épitres farcies, voir Romania, XVII, 148; Bull, du
Comité, section d'hist. et de philol., 1887, p. 315 ss. ; Notices et
extr., XXXI V, lrt partie, 253.
Sur Thierry de Vaucouleurs, voir Romania, XXII, 335.
On a une autre vie de saint Jean l'évangéliste en quatrains de
vers alexandrins (Romania. XVII, 387).
Sur la vision de saint Paul et ses diverses rédactions en latin
et en français, voir Brandes, Visio sancti Pauli, Halle, 1885;
llist. litt.. XXXIII, 372.
Sur le fragment anglo-normand d'un récit tiré de la Vie de
sainte Marie-.Madeleine, voir Romania, XXII, 205.
Les légendes traduites du Pseudo-Abdias, ont pris place au
commencement de plusieurs de nos anciens légendiers français
en prose.
145. Sur la traduction en prose de la Vie des Pères fait pour
NOTES HIULIOGRAI'HIQUES. 349
Dlanclie de Navarre, et sur d'autres versions en prose de diverses
parties du même recueil, voir Ilisl. lit t., XXXIII, 292-328.
Sur le recueil de contes dévots en vers connu sous le titre assez
impropre de Vie des Pères, voir Ilomruiia, XIII, 233 ss. ; XXXV.
38 ss. ; Notices et extraits, XXXIV, I"' partie, p. 156.
Sur la Vie de sainte Thaïs, voir Uisl. titt., XXXI11, 377.
Sur la Vie de sainte Euphrosyne, voiribid., 348.
Chardry's Josaphaz, Set Dormanz und Petit Plet, hgg. von
J. Kocii (Attfranz. Bibliolhek, II), Hcilbronn, 1880 (cf. Zeitschr.
f. vont. Pliit.. III, 591 ; Literalurbl., II, 459). — Sur la légende,
voir A. d'Ancona, Il Tesoro di Bruneltu Latini versificato, Roma,
1889 (Mémoires de l'Acad. des Lincei), p. 03.
On connaît environ 200 vies de saints, en vers français. La
bibliographie en a été donnée dans VHist. litt. de la /•>., XXXIII,
337-398.
Sur la Belle Hélène, voir Nyrop (§ 18).
Li Dialor/ue Grégoire lo pape... hgg. von \V. Foerster, Halle,
1876, I. Cf. Romania, XXIX, 319.
Sur le frère Anger, voir Romania, Xlî, 143; M. K. Pope, Élude
sur la lanque du frère Anger. Paris, 1903 (cf. Romania, XXXIII,
440).
La Vie de saint Grégoire le Grand, dans Romania, VIII, 509-344
(cf. IX, 176; XVIII, 201).
G. Paris, La légende de Trajan, dans Mélanges de l'école des
hautes études, 1878, 261-298 (cf. Journal des Savants, 1884, 57).
146. Sur les vies de saints mentionnées dans ce § et dans le
suivant, voir la Bibliographie donnée par VHist. lit/., XXXIII.
Saint Léger, Sai?ile Eulalie, dans E. Kosciiwitz, Les plus
anciens monuments de la langue française, 5e éd., Heilbronn,
1897 (cf. Romania, XXVI, 160). — Sur le Sai?il Léger, voir Ebert,
Geschichte der Literatur des Mitlelalters, III, 363; H. Suchier,
dans Feslgabe fiir Ad. Mussafia, Halle, 1905, p. 001.
147. La Vie de saint Alexis, texte critique, par G. Paris, nouvelle
édition, Paris, 1909. — Pour d'autres rédactions, voir Hist. litt.,
XXXIII, 338. — Sur la légende, voir Romania, XVIII, 299, 527.
Sur la légende et les vies de saint Georges, voir Romania,
X, 319; John E. Matzke, dans Publications of the Modem Lan-
guage Association of America, XVII (1902), 464-335 (cf. Romania,
XXXII, 170), et XVIII (1903), 99-171 (cf. Romania, XXXIV, 148);
le même, Œuvres de Simund de Freine, Paris, 1909 (Soc. des anc.
textes français).
Snr la légende de saint Grégoire, voir A. Graf, Miti, I, 290
et la note; Romania, XXXIII, 42-6; sur les mss. du poème fran-
çais, Zeitschr. f. rom. Phil., X, 321.
Sur le rapport du poème espagnol de sainte Marie l'Egyptienne
320 NOTES BIBLIOGRÀPHIQOËS.
au poème français, voir Ad. MussAtiÀ, Ueber die Quellen der ait-
spanischen Vida de Sanla Maria Egipciaca, \ ienne, 1863 (cf. Bibl.
de l'École des fiantes, 1804, p. 374: Giornale <li filoloqia romanza,
III. 8«J).
Sur le romain grec de iiarlaam et Joasaph, voir Bomania, XV,
109; E. Gosquin, Coules populaires lorrains, Paris, ISSO. I. xx:
E. Bralnholtz, Die erste nichtchristliche Parabel des B. kïid !..
Halle, 1884. — Sur la version anonyme etsurcelledeGui de Cambrai,
voir BaHaan\ et Josauhat, publié par P. Meyer et H. Zotenberg,
Stuttgart, 1804 (sur Oui de Cambrai, cf; P. .Meveb. Alexandre le
Gratta, II, 258). — Sur la version de Chardri, voir au g 145. — Sur
une traduction en prose exécutée en Grèce >ur le texte grec,
Bibliothèque de l'École des Charles, 6e série, Il (1800), 313.
148. Sur saint Brendan et les poèmes qui lui sont consacrés,
voir llist. litt., XXXIII, 341. — Pour les rédactions en prose; voir
G. Wahli.nd. Die allfranzôsische Prosaiibersetzung von Brendans
Meerfahrt, Upsala, 1901 (cf. Bomania, XXXIY, 464.
Sur les versions en vers du Purgatoire de saint Patrice, voir
Hist. lîtt., XXXIII. 371. Sur la version en prose, ibid., 391. —
391. — Sur les visions de l'autre monde en général, voir Rom.
ForscMin'gèh, 11. 279; 111, 337.
Mussafia, Sulla visione di Tundalo, Wien, 1871 ; La vision de
Tondale, textes... p. p. Y. -H. Friedel et K. .Meyer, Paris, 1907.
Ce recueil contient une version anglo-normande en vers.
Vie de saint Auban... ediled by 1!. Atkinson. London, 1870
(cf. Bomania, V, 384).
Sur Denis Pvramus et la Vie de saint Edmond, voir llist. litt.,
XXX11I, 346.
Sur la vie de Guillaume d'Angleterre et son attribution à Chré-
tien, voir Bomania, III, 507; VI, 27; VIII, 315; XIII, 442; XXIX,
155; XXXV11, 486.
149. Sur Hugues de Lincoln, voir Hist. litt., XXIII, 436; Child,
The english and scollish popular Ballads, Boston, 1S88, part V,233.
Sur la Vie de saint Dominique, \bit Bomania, XVII. 394:
L'élégie juive de 1288 a été publiée par A. Daumestkter dans
la Bomania, 111, 443, et réimprimée dans la Bévue des Etudes
juives. Paris, Il (1881), 199. Ces deux éditions ont Été repro-
duites dan- les Beliques scientifiques d'A. Dar.mesteter, Paris;
1890, 11, 224 et 282.
Vie de saint Louis, par Guillaume de Saint-Pa'/u/s, confesseur
de la reine Marguerite, p. p. H.-Fr. Delahorde, Paris, 1899 (cf.
Le Moyen âqe, XIII, 65); A. Molinier, Les sources de l'hist. de
France, III, H" 254&
150. Sur Jacques dé Vitri, voit Hist: litt., XV III. 209; Bomania,
NOTES BIBUOGRAPHIQIKS. 321
XVII. 454. Un recueil de contes tires de ses Sermones vulqares a
été publié par Th. Fr. Crâne sous ce titre : The exempta... of
Jacques de Vilry, Londres, 1881 (cf. Revue critique, 1891, 16 fé-
vrier).
Sur l'Empereur orgueilleux, voy. A. Varniiagen, Ein indisches
Mârchen auf seiner Wanderunq, Berlin, 1882: Revue des Eludes
juives, XV11 (1888), 58.
Sur l'Ange el l'ermite, voir G. Paris, La Poésie au moyen dge,
2" éd.. Paris, 1887, p. 151 ; Revue des Éludes juives, VIII (1884),
64; Mélusine, III, 258; P. Meyer, Contes de Bozon, n"31.
Li Diz dou vrai aniel... hgg. von A. Tobi.er, 2" éd., Leipzig,
1884. Cf. Revue des Études juives, XI (1885), 1-17.
Sur le Méchant sénéchal, voir A. d'Ancona, Studj (§ 51), 346.
Sur la Bourgeoise de Rome, voir H ist. litt., XXIII, 121.
Sur la Reine qui tua son sénéchal, voir Remania, XV, 610.
Der .ludenknabe... hgg. von E. Woi.ter, Halle, 1879, tome II, de
la Bihliotheca Normannica (cf. Zeilschr. f. rom. Phil., IX, 412).
Sur le Chevalier au baril, voir Not. et extr., XXXIV, I, 160,
nomama, XXVI II, 644.
Sur le Chevalier dans la chapelle, voir Jahrbuch fiir rom. und
enql. Lileratur, IX, 331; Jubinal, Contes, dits, fabliaux, ï, 352.
Sur Eustache de la Fontaine Notre Dame, voir le Catalogue
qénéral des mss. de France, départements, t. X, in-8, Paris, 1889,
n° 244 d'Avranches.
151. Sur le roman de Mahomet, voir Modem Language Notes,
1889, 89; Literaturbl., X, 22. Sur la légende de Mahomet en Occi-
dent, voir A. d'ANCoNA, // Tesoro di Brunello Latini versificato,
Romn, 1889, p. 70 ss. (Mém. de l'Acad. des Lincei); cf. E. Renan,
journal des Savants, juillet 1889; A. Graf, Giornale storico délia
lett. italiana, XIV, 204.
Sur la Loi au Sarrasin, voir Bisti Litt., XXIX, 99.
152. Sur la version en vers du Lucidaire, par Guilebert, voir
Notices et extrait", XXXII, 2e partie, 72-81. Sur les versions en
prose, Romania, I, 421 ; Notices et extraits, XXXIII, lre partie, 76.
Sur le Credo en vers, voir Romania, XV, 321, 341; Bull, de la
Soc. des anciens textes, 1896, p. 43.
La règle de saint Benoit traduite en vers français par Nicole,
p. p. A. Héron, Rouen, 1895 (cf. Romania, XXV, 321 ss.).
La version des Proverbes par Samson de Nanteuil doit être
publiée par M. H. Sucrier; un fragment est dans Bartsch, Lan-
gue et Litt., col. 149-158.
Sur la prédication au moyen âge, voir Bourgain, La Chaire
française au XIIe siècle, Paris, 1879; A. Lecoy de la Marche, La
Chaire française au moyen âge, spécialement au XIIIe siècle,
2- éd., Paris, 1886; Hist. litt., XXVI, 390 ss.
21
322 NOTES BIBLIOGRAPHIQUES.
Sur le fragment de Jonas, voir Romanict, XV, 447.
Les deux recueils des sermons de saint Bernard ont été publiés;
voir Romanict, XVI, 604; XXV, 343. Un troisième ms. des sermons
de saint Bernard mis en français, qui ne fait pas double emploi
avec les précédents, a été étudié par M. Delislc dans le Journal
des Savants de mars 1000.
Sur les sermons de Morice de Sulli, voir Romania , V, 366.;
XXIII, 178, 499, 506; XXVIII, 243.
Sur la traduction française des fables d'Eudes de Gheriton, voir
Romania, XIV, 388.
Les contes moralises de Nicole Bozon, frère mineur, p. p. L.-T.
Smith et P. Meyer, Paris, 1889 (Société des anciens textes).
153. Le sermon Grant mal fist Adam a été publié par H. Su-
chier. Halle, 1879 (Bibliolheca Normannica, I).
Li Ver ciel juïse... af H. von Feilitzen, Upsala, 1883.
Sur le sermon de Guichard de Beaujeu, voir Romania, I, 248;
Bulletin de la Soc. des anciens textes, 1889, p. 94.
Les Vers de la mort par llélinant, moine de Froidmont, p. p.
Fi». Wulff et Em. Walberg, Paris, 1903 (Soc. des anc. textes),
L'autre poème sur ce sujet a été imprimé par M. Winoahl, : Li
Vers de la mort, poème artésien anonyme du milieu du XIIIe s.,
Lund, 1887 (cf. Lileraturbl., VIII, 130); voir aussi Romania, XX,
137.
Li Romans de Carité et le Miserere du Rendus de Moiliens
publiés par A. G. Van Hamel, Paris, 1883 (Bibl. de V Ecole des
Hautes Etudes, LXI-LX1I) cf. Zeitschr., IX, 413; Gh.-V. Langlois.
La vie en France au moyen âge, p. 113.
Sur Silvestre, voir Van Hamel, Rendus, p. cxc.
Sur les paraphrases du Pater noster, voir Bull, de la Soc. des
anc. textes, 1880, 39; 1889, 104; 1896, 47; Romania, XV, 322;
Notices et extr., XXXIV, lre partie, 251.
Les Vers du Monde, dans Jubinal, Contes, dits, fabliaux, II,
124 (cf. Romania, IX, 232).
Sur le Despit du Cors, voir Ilist. litt., XXIII, 283; Bartsch,
Langue et Litt., col. 547; Romania, XXV, 418.
Sur la Chanlepleure, ou plutôt Pleurechante, voir Romania,
XIII, 510.
Sur les Vers de Cologne, voir G. Paris, Saint Alexis, p. 213.
Sur Y Enseignement moral en sixains, voir Romania, XIV, 128.
Sur le Roman des romans, voir Bull, de la Soc. des anciens
te.rles, VI, 68; Romania, XXXII, 104.
Sur le sermon anglo-normand inséré dans le Manuel des péchés,
voir Romania, XXIX, 5-21 et 83-4.
Poème moral, alti'r. Gedicb.t... hgg. von \V. Cloetta. Erlan-
pèn, 1880 (cf. Romania, XVI, 118; Xt\\, 308). Le ms. d'Oxford,
d'après lequel l'édition a été faite, est incomplet. Un fragment
NOTES BIBLIOGRAPHIQUES. 323
important (plus de 700 vers) de la partie en déficit a été retrouvé
et est publié dans la Zeitschr. f. rom. Phil., XXX11, 50.
Sur Hubert Sainterel (et non Sninceriax), voir Histor. de Fr.,
XXIII, 124; A. Molixier, III, nu 22.77.
154. Sur Guillaume le Clerc et ses ouvrages, voirSFEGER, Veber
dieSprache <l>>s Guillaume le Clerc de Normandie, Halle, 1881.
Le Besant de Dieu, von Guillaume, le clerc de Normandie...
hgg. von E. Martin, Halle, 1869.
La Dîme de pénitence, hgg. von H. Breymanx, Stuttgart, lST'i.
Sur le poème de Simon, Les Trois ennemis de l'homme, voir
Romania, XVI, 1-24.
Sur le dit de la Vigne, voir Hist. litt, XXIII, 252.
Sur le dit de la Brebis, voir Hist. lilt., XXIII, 259.
Sur le dit de YUnicorne, voir Hist. litt., XXIII, 257 : Romania,
VI, 19.
Sur le dit des Trois morts et des trois vifs, voir Todd, La
Pantlière d'amours, p. xvin; Giornale di filologia romanza, I, 243;
Romania, XXV, 416.
Sur le dit du Larron qui fut racheté, voir Hist. litt., XXII,
120.
Sur le thème des Quatre sœurs, voir d'Ancoxa, I, 124. Sur les
différentes versions, voir Bullet. de la Soc. des anciens textes,
1386, p. 57; Romania, XV, 352: XXXVII, 485.
Sur les Quinze signes, voir P. Meyer, Daurel et Béton, Paris,
1880 (Soc. des anc. textes), xclii; Hist. litt., XXIII, 282-283 :XXX1I,
103-105. Notices et extraits, XXXIX, 317.
155. Sur le Débat du corps et de l'âme, voir Romania, XIII, 519;
XX, 1, 513: XXIX, 636.
Sur les Débals de l'Eglise et de la Synagogue, du juif et du
chrétien, voir Hist. litt., XXIII, 216.
Le Tournoiement Antecrit... neu hgg. von G. Wimmer, 1888,
n° LXXVI des Ausg. and Abh. (cf. Literaturbl., 1888, col. 403).
150. Sur le Songe d'Enfer, voir Zixgerle, dans Romanische Fo?'s-
chungen. VI, 293.
Sur l'authenticité du Songe de Paradis, voir Zexker (§ 59).
Le poème allégorique sur Jérusalem et Babylone a été publié
sous le titre inexact que lui donne le manuscrit, De David li Pro-
phecie, dans Zeitschr. f. rom. Phil., XIX, 1S9 ss.
Sur Guillaume de Digulleville, voir P. Paris, Manuscrits franc.,
111, 239: N. Hill, The ancient poe.m of Guillaume de Guilleville
enlilled: Le Pèlerinage de l'homme, compared with tke Pilgrim's
Progress, London, 1858. Les trois Pèlerinages ont été publiés,
pour le Roxburghe Club (Londres, 1893,1895, 1897), par J.-J. Sturt-
zixger (cf. Romania, XXIV. 38".: XXVI, 144: XXVII, 633).
324 • NOTES BIBLIOGRAPHIQUES.
157. Sur la Somme de frère Lorens et ses rapports avec le
Miroir du Monde, voir Hitll. de la Soc. des anc. textes, XVI II
(1892), p.69-84. Sur 1rs versions italienne et sicilienne, voir Lit.
Centrait., 1893, col. 289. Sur la version flamande, Petit, U48.
Sur William de Wadingtoa, voir Hist. litt., XXVIII, 179-207;
Romania, XV, 357; XXIX. 5, 47-53.
158. Allburgundische Uebcrselzung der Predigten Gregor's iiber
Ezec.hicl, liirg-. von K. Hofmann, Munich, 1881: rectifications dans
G. Bertoni. La versione f'rancesc délie prediche di S. Gregorio su
Ezechiele, Modène, 1908.
Les Moralia in Job sont imprimés par M. W. Fokrster à la
suite de son édition des Dialogues de saint Grégoire, Halle, 187G.
Dialogus animae conquereulis et rationis consolantis, traduit
en dialecte lorrain, publié par F. Bonnardot, Romania, V, 269-
332: cf. VI, 141.
159. Sur les traductions des Psaumes et des Cantiques, voir
S. Berger, 1-34: G4-77: 200-209 (cf. Romania, XVII, 122. 129).
Lolkringisckes Psalter hgg. von F. Apfelstedt, lleibronn, 18S1
(Allfranz. Bibliotkelc, IV). Le Psautier de Metz... public par
F. Bonnardot, t. I, Paris, 1885.
Sur le Psautier lorrain en vers, publié par Fr. Miclicl en
appendice au psautier d'Oxford (18G0), voir Blrckardt, Ueôer den
loihr. Reimpsalter, Halle, 1890.
Sur les Psaumes de la pénitence, voir Romania, XV, 305.
Sur le petit poème imité du Cantique des Cantiques, voir Ro-
mania, XV, 448. — On a voulu prouver (Rom. Fôrschungen, VI,
235), que ce petit poème est de 1140; mais voir Romania, XXII,
614.
Sur les Plaintes de la Vierge, voir Bulletin de la Soc. des anc.
textes, 1875, p. 01; 1886, p. 49; P. Meyer, Recueil, p. 374;
Wechssler, Oie romanichen Marienktagen, Halle, 1893 (cf.
Romania, XXIII, 490).
160. Mariengebele franzosisch, portugiesisch, provenzalisch,
hgg. von H. Slchier, Halle. 1877; Romania, I, 207, 247, 409, 410;
VII. 473 : IX. 1112. — P. Meyer, Recueil, p. 354. — Sur les serventois
de Jean Brisebarre, voir Romania, XXVI, 104. — Sur une prière
à la Vierge en décasyllabes accouplés, voir Romania, XXV, 478.
Prières à saint Nicolas, voit Romania, IV, 374: à sainte Catherine,
P. Meyer, Recueil, :i7.'i: à sainte Anne, Romania, XV, 271: à
saint François, ibid. Pour d'autres prières, voir Bull de la Soc.
des anc. textes, 1901, p. 49 ss.
161. Noël anglo-normand, P. Meyer, Recueil, p. 382.
Sur la parodie du Laetabundus, voir Romania, XXI. 280..
Sur la prose de l'Ane, voy. Di" Cange, au mot Feslum (éd.
NOTES BIBLIOGRAPHIQUES. 325
Dtdot, 111, 2")")). Voir aussi II. Villetard, Office de Corbeil (office
de la Circoncision) improprement appelé office des fous, Paris,
Picard, 1907. L'auteur dénie absolument le caractère burlesque
attribue traditionnellement à cet ofûce.
Sur les parodies sacrées en général, F. Novati, Studi crïtici e
lellcrari, Turin, 1889, 177-311).
102. Sur la Prière de Tibaud d'Amiens, voir Romania, XIII,
52X: XVIII. 485; Bull, de la Soc. de* anc. textes, 1902, p, 73, 82.
La Plainte d'amour, poème anglo-normand p. p. J. Vising,
Gôteborg, 1905.
Les poésies de la Béguine anonyme ont été imprimées dans la
Zeilschr. f. rom. l'/iil., XIII, 35.
Sur la Prière de Théophile, voir Romania^ VI, 627: IX, 102;
Zeilschr. f. rom. Phil., XXI, 396-7; Bull, de la Soc. des anc. textes,
1901, p. 77.
163. Sur les chansons de pèlerinage, voir Ilist. litt., XXI, 279.
164-168. Pour tous les renseignements bibliographiques rclalifs
au théâtre religieux, voy. Les Mystères de M. Petit de Jllleville;
M. Séijet, Le drame religieux au moyen âge, Paris, 1903.
166. Sur le mystère de YÉpoux, voir l'édition de M. Cloetta,
Romania, XXII, 177.
167. Miracle inédit de saint Nicolas, dans le Catalogue des
Codici Ashburnhamiani délia R. Biblioteca Medico-Laurenziana
in Firenze, I, Roma, 1887, p. 63. — Sur les « jeux de saint Nicolas »
voir Romania, XVII, 329; Lecoy de la Marche, La Chaire fran-
çaise au XIIIe siècle, 2e édit., p. 466. — Sur Gaufrei de Saint-
Alban, Petit de Julleville, Les Mystères, II, 629.
168. Les Miracles de Nostre Dame par personnages, p. p. G. Paris
et U. Robert, Paris, 1876-1893, 8 vol. (Soc. des anc. textes
français).— II. Schnell, Ueber den Abfassungsqrt cler Miracles de
\ostreDameparperso?inages,Maiïb\irg, lSSd{Ausg. und Abh., LUI).
TABLE ALPHABÉTIQUE
(Les chiffres renvoient aux paragraphes.)
A
Abc (Signifiance de V), 102.
Aaluf, 27.
Abailard. 113, 167.
Abdias, 144.
Abel, 165.
Abladane, 49 bis.
Adam, 138, 165.
Adam (Jeu), 132, 167.
Adam {Mystère d'), 165, 166, 168.
Adam de Suel, 103.
Adam le Bossu, 121, 127, 128, 132,
133, 161.
Adam et Eve (Légende d'), 138.
Adenet le Roi, 41, 51.
Adpar, 143.
AélisdeChampagne, reine de France,
125.
Aélis de Louvain, reine d'Angle-
terre. 02, 100, 148.
Aelrcd. 113, L58.
Ages de l'homme (Les quatre), 103.
Aie d'Avignon, 26.
Aimer, le Chétif, 38.
Aimeri de Narbonne, 38.
Aimeri de Narbonne, 41.
Aimeri de Narbonne (Département
des enfants d'), 41.
Aimeri de Narbonne (Mort d'), 41, 42.
Aimon(Les quatre fils , 25.
Aimon (Le mariage des quatre fils),
109.
Aimon de Varenne, 51.
Aioul, 23, 26, 31.
Aiquin, 24.
Aire, 136.
Alain de Lille, 114.
Alard de Cambrai, 103.
Alban (Vie de saint), 148.
Albéric de Besançon, 44.
Alberich, 13.
Alebrand, 102.
Aleschans, 32, 40.
Alexandre, 27, 44, 50.
Alexandre de Bernai ou de Paris,
44,51.
Alexandre du Pont, 151.
Alexandre Neckham, 80.
Alexis (Vie de saint), 5C, 147.
Alfred le Grand, 79.
Aliénor de Poitiers, reine d'Angle-
terre, 45, 57, 87, 125.
Aliénor de Provence, reine d'An-
gleterre, 98.
Allégorie, 111, 152, 154, 156, 162.
Allemagne (La littérature française .
en), 32, 45, 46, 56, 58, 64, 66, 75,
127, 129, 147.
Allitération, 13, 109.
Alphonse de Poitiers, 94, 98.
Amndas, 66.
Amadis de Gaule, 64.
Ambroise, 88.
.4 me et du corps (Débat de V), 155.
Ame [Pèlerinage de V), 156.
328
TABLE ALPHABETIQUE.
Ami et Amile, 27.
Amiens, 28, 49 bis, 70, 104, 162.
Amitié spirituelle (L'), 113, 158.
Amour {Art d'), 49, 104, 111, 114.
Amours (Clef a"), 104.
Amour (Commandements d'), 112.
Amour (Conseil ci), 104.
Amour (Cour d), 111.
Amour (Cours d.'), 126.
Amour (Flabel du dieu d'), 104, 111.
Amour (Jugement d'), 104.
Amour (Paradis d';, 111, 114.
Amour (Plainte d'), 162.
Amour (Puissance d'), 104.
Amour (Remède d'), 104.
Amour courtois, 57, 104, 125, 126, 127.
Amphigouri, 127.
Anastase (Légende de sainte), 140.
Andeli, 5, 76, 110.
André de Coutances, 108, 140.
André de France, 68.
André le Chapelain, 104, 111, 112, 125.
Ane (Prose de 1"), 161.
Ane (Testament de l'), 76.
Ange et Ermite (L'), 150.
Anger, 145.
Anglais, 79, 108, 156, 157, 167.
Anglais (La Charte aux), 108.
Anglais (La Paix aux), 108.
Anglais (Les deux), 108.
Angleterre (La littérature française
en), 32, 49, 56, 57, 58, 59, 61, 64,
75, 79, 92, 108, 114, 125, 143.
Angleterre (Dit de la rébellion d'),
108.
Anglo-Normand, 5, 51, 54, 56, 57,
59, 61, 68, 76, 91, 93, 101, 102, 105,
106, 108, 137, 139, 140, 143, 144.
145, 146, 147, 148, 149, 152, 154,
157, 161, 162, 165, 167.
Anglo-Saxons, 55, 68.
Animae conquerentis et rationis con-
solantis (Dialogus), 158.
Animaux (Contes d'), 82.
Anjou, 25,
Anjou (La Comtesse oV), 51.
Anjou (Coutume d'), 102.
Anne (Légende de sainte), 140.
Anne (Chants en l'honneur de sainte ),
160.
Anneau (Dit du vrai), 150, 154.
Anseis. 25.
Anseis de Carthage, 24, 27.
Antéchrist (L*), 140.
Antéchrist(Tournoiement a"), 111, 155.
Antioche (Chanson d'), 29.
Antiquité (Influence de 1'), 43.
Apocalypse en prose et en vers, 140.
Apocryphes, 138, 140, 144.
Apollin, 36, 151.
Apollonius de Tyr, 27, 50.
Apôtres (Actes des), 140, 141.
Arabes, 73, 150.
Ardres, 159.
Argenteuil, 136.
Argentine (Belle), 118.
Argot, 167.
Aristophane, 132.
Aristote, 100, loi, 103.
Aristote (Lai d'), 55, 76.
Arménie, 91.
Arras, 51, 118, 120, 127, 128, 132,
133, 153, 167.
Arthur, 53, 54, 55, 56, 57, 58, 59.
Artois, 125, 136, 149, 150.
Artois (Le Comte d'), 66.
Arts (Bataille des sept;, 110.
Arts (Mariage des sept), 110.
Aspremont, 24.
Assises de Jérusalem, 102.
Assomption de la Vierge, 141
Athis et Porphirias, 51.
Aubepierre, 76.
Auberée, 76.
Auberi le Bourguignon, 21, 25.
Auberon, 25.
Aucassin et Nicolette, 21, 51, 97.
Audefroi le Bâtard, 118.
Audigier, 21, 31.
Augustin (Saint), 165.
Avalon, 40, 54, 55.
Aventure (Romans d'), ; , 71.
Avesnes, 95.
Avianus, 79, 80.
Avocats, 106.
Bacchus (Le martyre de saint), 109.
Baisieu, 76.
Balaam, 165.
Baligant, 36.
Ballades, 121, 130.
Ballettes, 121.
I Bar-le-Duc, 30.
I Bar-sur-Aube, 41.
TABLE ALPHABÉTIQUE.
320
ftarat et Haimet, 76.
liarbastre (Le Siège de), 41.
Baril (Le Chevalier au), 150.
Barlaam et Joasaph, 73, 147, 151.
Barthélemi l'Anglais, 101.
Rarthélemi, reclus à Molliens, 153.
Rasin, 24.
Batailles, 110, 155.
Baude Fastoul, 127, 132.
Baudouin (Les histoires), 95.
Baudouin d'Ardres, 159.
Baudouin d'Avesnes, 95.
Baudouin de Condé, 103, 154, 156.
Baudouin de Flandres, 90.
Baudouin de Guines, 72.
Baudouin IV do Hainau, 51.
Baudouin V do Hainau, 94, 95.
Baudouin VI de Hainau, 95.
Baudouin de Sebourg, 29.
Baudri de Bourgueil, 86.
Beaudous, 58, 103.
Beaujeu, 58, 153.
Beauvais, 101, 146, 147.
Beduer, 54.
Beauvaisis (Coutume de), 102.
Béguines, 140, 163.
Béguins, 140.
Bel Accueil, 111.
Belleperche, 138.
Benoît, 148.
Benoît (Règle de saint), 152.
Benoît de Saint-Alban, 149.
Benoît de Sainte-More, 45, 46,
47, 93.
Bergerettes, 122.
Bergers, 166.
Bérinus, 51.
Bernai, 44, 51.
Bernard (Saint), 152.
Bernard de Brusbant, 38.
Bernard de Ventadour, 125.
Bernard, trésorier de Corbie, 91.
Berneville, 128.
Berneville, 156.
Bernier, 76.
Bérol, 148.
Béroul, 56, 57, 148.
Berte, 24, 27.
Bertran de Born, 125.
Bertran le Palatin, 38.
Bertrand de Bar-sur- Aube, 41.
Bertrand du Guesclin, 30.
Berzé, 105, 124.
Besançon, 44, 102.
Besant de Dieu, 80 fris, 154, 15?.
Bestiaire d'Amour, 100.
Bestiaires, 100, 154.
Béthune, 94, 128.
Cible, 136.
Bible nu seigneur de Bersé, 105.
Bible Guiot, 105.
Bibliothèque bleue, 22.
Bibliques (Poèmes), 136.
Biblis, 49.
Bigorne, 106.
Biographique (Épopée), 26.
Biographiques(Romansbretons), 58.
Bisclavret, 55, 67.
Blancandin, 67.
Blanche de Castille, 128.
Blanche de Champagne-Bretagne,
98.
Blanche de Navarre-Champagne,
145.
Blois, 51,58, 103, 150.
Blondel de Nesle, 128.
Boccace, 45, 51, 66, 75, 76.
Boèce, 103, 113.
Bonaventure (Saint), 158.
Bonet (Saint), 146.
Boron, 59.
Bossu (Conte du petit), 77.
Boucher d'Abbeville (Le), 77.
Bouddha, 147.
Bouddhiques (Paraboles), 73, 147,
150, 154.
Boulogne, 101, 153.
Bourgeois, 84, 96, 97, 106, 127, 167.
Bourgeoise de Borne (La), 150,
Bourgeoise d'Orléans (La), 77.
Bourgogne, 5, 105, 120.
Bourse pleine de sens (La), 76.
Bovon de Comarcis, 38, 41.
Bovon de Hanstone, 23, 27.
Brait Merlin (Le), 63.
Brebis (Dit de la), 154.
Brendan (Saint), 148.
Bréri, 56.
Bref ou Brait, 63.
Bretagne armoricaine, 1, 53.
Bretagne française, 33, 36, 103, 108.
Bretagne (Comte de), 103.
Bretonnes (Fictions), 66, 67.
Bretons insulaires, 1, 53.
Bretons (Musiciens), 53, 55.
Bretons (Privilège aux), 108.
330
TABLE ALPHABETIQUE.
Briançon, 44.
Brice (Saint), 145.
Brichemer, 107.
Brie, 40, 83, 103.
Brioude, 39.
Brunain la vache au prêtre, 7o.
Brunet Latin, 64, 95, 101.
Brut, 54, 63, 93.
Brut de Munich, 54.
Brut en laisses monorimes, 54.
Brut en prose, 93.
Brutus, 92.
Bunyan, 156.
Burchard, 91.
Bustalus, 49 bis.
Byzantins, 50, 51 , 52, 65, 67, 73. 19.
C
Calendre, 95.
Callisthène, 44.
Cambligneul, 149.
Cambrai, 44, 76, 102, 103, 125, 147.
Cambres, 152.
Cantique des Cantiques, 159.
Cantique des Cantiques (Poème
imité du), 159.
Carême et de Charnage (Bataille de),
110.
Cassidorus, 71.
Catéchisme, 152.
Catherine (Chansons sur sainte), 160.
Catherine (Jeux de sainte), 167, 168.
Catherine ( Vie de sainte), 50, 147.
Caton, 103.
Célibat des prêtres, 11, 114.
Celtes, 6.
Celtique en Grande-Bretagne, 53.
Celtiques (Saints), 147.
César, 95.
César, 48.
Chainse (Les trois chevaliers au\, 76.
Champ fleuri, 104.
Champagne, 5, 51, 57, 89, 90, 98,
125, 128, 145, 159.
Chansons, 126.
Chansons (Sottes), 127.
Chansons de croisade, 124, 163.
Chansons de geste, 18, 42, 96, 100,
132, 138, 140.
Chansons de pèlerinage, 163.
Chansons de toile, 118.
Chansons insérées dans les poèmes,
67.
Chansons lyrico-épiques, 118.
Chant des poèmes épiques, 21.
Chant royal, 130.
Chantefable, 51.
' hantepleure (La), 153.
Chanteurs bretons, 53, 55.
Chants d'église, 116, 159, 161.
Chants en l'honneur de Marie, 100.
Chants en l'honneur des saints, 100,
167.
Chants épiques, 20, 21.
Chants pieux, 162.
Chapelerie (La) de Baieut, 143 bis.
Chapelle (Le chevalier dans la), 150.
Chapette Martinet (La), 111.
Chapon rôti (Légende du), 140.
Chardri, 145, 147, 155.
Charité, 153.
Charité-sur-Loire (La), 137.
Charlemagne, 15, 19, 135.
Charlemagne, 28.
Charles II le Chauve, 19, 25.
Charles V, 5.
Charles d'Anjou, 128.
Charles d'Anjou (Boman de), 131.
Charles de Valois, 91.
Charles d'Orléans, 130.
Charles Martel, 15, 19, 32.
Chariot le Juif, 70.
Chariot le Juif et du Barbier (Dis-
pute de), 107, 110.
Charrette (La), 57, 61.
Charte aux Anglais, 108»
Chartes, 102.
Chartes de Joinville, 90-
Chartres, 143.
Chasse, 102.
Chasse du cerf (La), 102.
Chastie-rnusart, 106.
Chastiement des dames, 103.
Chastiement d'un père à son fils, 73.
Châteaudun, 44.
Châtelain de Couci (Le), 66, 124, 125.
128.
Châtelain de Couci (Le), 66, 67, 128.
Châtelaine de Yergi (La), 68.
Châtillon-sur-Azergue, 51.
Chaucer, 75, 115, 156.
Chauvenci, 109.
Cheriton, 152.
Chétifs (Les), 29.
Chevalerie (L'Ordre de), 102, 103.
Chevalier à l'épée (Le), 59.
TABLE ALPHABETIQUE.
331
Chevalier au baril (Le), 150.
Chevalier au cygne {Le), 29, 69.
Chevalier au lion (Le), 57, 58.
Chevalier aux deux épces (Le), 58.
Chevalier dans la chapelle (Le), 150.
Chevalier de la charrette (Le), 58, 61.
Chevalier qui vendit sa femme au
diable (Le), 150.
Chevaliers au chaime (Les trois), 76.
Chevaux (Les deux), 76.
Chèvre (La), 56.
Chèvrefeuille (Lai lyrique du), 123.
Chèvrefeuille (Lai narratif du), 56,
123.
Chicheface, 106.
Chien de Montargis (Le), 25.
Chlodovech, 15.
Chrétien, 148.
Chrétien de Troies, 49, 51, 56, 57,
104, 125, 128, 148.
Christianisme, 9, 10, 73, 78, 135.
Christine de Pisan, 115, 130.
Christophe (Saint), 147.
Chronique ascendante, 93.
Chronique de Morée, 91.
Chronique de Reims, 97.
Chronique des rois d'Angleterre, 94.
Chronique des rois de France, 94.
Chronique parisienne, 97.
Chronique saintongeaise, 94.
Chroniques (Petites), 97.
Chroniques de Normandie, 94.
Chroniques de Saint-Denis, 90, 94,
Chronique universelle, 97.
Chypre, 91, 102, 154.
Ci nous dit, 101.
Cid, 32.
Cifoine, 20.
Cimetière périlleux (Le), 59.
Clairi, 89.
Clarus, 51.
Clef d'amours (La), 104.
Clémence do Barking, 147.
Cléomadés, 51.
Clerc caché (Le), 76.
Clerc de Vaudoi (Le), 102.
Clercs, 11, 77, 99, 100, 101, 102, 104,
106, 114, 127, 135, 144, 161.
Clergé, 11.
Clerquois, 11.
Cligès, 51, 57.
Clotaire II, 15.
Code, 102.
Cœur mangé (Légende du), 55, 56.
Coinci, 142.
Colin Muset, 127.
Cologne (Les vers de), 153.
Compiôgne, 100.
Complainte de Jérusalem, 89 bit.
Compta, 100.
Comte de Poitiers (Le), 51.
Comte d'Anjou (Le), 51.
Comtesse de Pontieu (La), 69.
Condé, 103.
Confréries, 168.
Congé, 127.
Congé d'Adam de la Halle ouïe Bossu,
127, 132.
Congé de Baude Fastoul, 127, 132.
Congé do Jean Bodel, 127.
Conon de Béthune, 127, 128.
Conrad de Wurzbourg, 66.
Conseil (Lai du), 55, 68.
Conseil (Le), 102.
Constance, 72.
Constant (L 'empereur), 51.
Constant du Hamel, 77.
Constantin, 51.
Constantinople (Conquête de), 89.
Constantinople (Légende sur la fon-
dation de), 51.
Contens (Le) du monde, 105.
Contes, 72-78.
Contes d'animaux, 82.
Contes dévots, 145, 150-151, 152.
Convoiteux et l'Envieux (Le), 76.
Cor (Lai du), 55.
Corbie, 91.
Cornettes (Dit des), 106.
Corps (Dit du), 153.
Corps et de V Ame (Débat du), 111 , 155.
Corset (Le), 152.
Couci (Le Châtelain de), 66, 124, 125,
128.
Couci (Le Châtelain de), 66, 67.
Cour d'Amour (La), 111.
Couronnement de Louis (Le), voir
Louis.
Couronnement de Renard (Le), 84.
Cours d'amour, 126.
Courtois (Amour), 57, 104, 125, 126,
127.
Courtois d'Arras, 77, 167.
Courtoise (Poésie), 46.
Courtoisie, 103, 125.
Courtoisie (Le» Ailes de), 103.
Coutances, 108.
Coutume de Normandie, 102.
332
TABLE ALPHABETIQUE.
Coutumes, 102.
Couvin, 103.
Credo de Joinville, 90, 152.
Credo traduit. 152.
Cris de Paris, 109.
Croisade (Chansons de), 124. 127.
Croisade (Première), 29, 40, 86, 97,
124.
Croisade (Deuxième), 87, 124.
Croisade (Troisième), 88, 120, 124.
Croisade (Quatrième), 89, 128.
Croisade (Cinquième), 89 bis.
Croisade (Sixième), 89 ter, 90.
Croisade de Tibaud de Navarre,
89 quater.
Croisades, 69, 73, 108, 110, 124, 127.
Croisades (Historiens des), 86-91.
Croisé et du Non Croisé (Débat du),
110.
Croix (Légende de la), 140.
Croix-en-Brie (Le prêtre de la), 83.
Cuisine, 102.
Culte, 161.
Curé qui mangea les mûres [Le), 76.
Cuvelier, 30.
Cycliques (Poèmes), 28.
Cygne {Le Chevalier au), 29.
Cymbeline, 51.
Dagobert, 15.
Dame qui fit trois fois le tour du
moutier (La), 76.
Dames (Le Chastiement des), 103.
Dammartin, 40, 68.
Danger, 111.
Daniel, 165, 167.
Danse, 121, 133.
Dante, 64, 129.
Darès, 45, 95.
David, 92.
David (Li prophétie de), 156.
Débats, 110, 111, 126, 131, 155.
Denier (Dan), 106.
Denier et de la brebis (Débat du), 1 10.
Denis Pyramus, 148.
Denise (Frère), 73, 76.
Denise de Moncliensi, 102.
Descort, 123.
Désier, 24.
Desmesure, 33.
Dialectes français, 3.
Dialogue de saint Grégoire, 14ô
Dicter, 89.
Dictys, 45.
Digulleville, 156.
Dîme de pénitence, 154.
Disciplina clericalis, 73.
Discipline de clergie, 73.
Dits, 103, 109, 154.
Doctrinal Sauvage, 103.
Doette (Belle), 118.
Dolopathos, 71.
Dominicains, 114.
Dominique ( Vie de saint), 149.
Donoi des Amants, 104.
Doon, 55, 66.
Doon de la Roche, 27.
Doon de Mayence (Geste de), 23.
Doon de Mayence, 28.
Dormants (Légende des Sept), 145.
Douai, 44, 154.
Douin de Lavesnes, 70.
Dourdan, 59.
Droit féodal, 102.
Droit romain, 102.
Droits au clerc de Vaudoi (Les), 103.
Drouart La Vache, 104.
Durmart le Gallois, 58.
Échecs, 102.
Échecs (Les) moralises, 102.
Écoles, 11, 102.
Edmond (Vie de saint), 148.
Edouard (Vie de saint), 148.
Edouard I d'Angleterre, 6-1, 193.
Église et de la Synagogue (I> bal
deV), 155.
Église servant de théâtre, 165.
Eilhart d'Oberg, 56.
Éliduc, 55, 66.
Elie, 63.
Élie de Boron, 63.
Élie de Saint-Gilles, 23, 26.
Élie de Winchester, 103.
Elisabeth (Sainte), 119.
Êloi (Vie de saint), 146.
Empereur orgueilleux (Légende do
1'), 150:
Énéas, 46._
Enfance (Évangile de l'), 140.
Enfance de Marie, 141.
Enfances, 24, 28.
TABLE ALPHABETIQUE.
333
Enfances Garin de Monglane, -Il . 12.
Enfance* Guillaume, 41, 1.'.
Enfances Oger le Danois, 34.
Enfances Vivien, 41.
Enfant juif (U), 150.
Enfer (Songe <£'), 111, 155.
Enfer Voie -/'), 111.
Enfer et de Paradis (Débat d'), 155.
Ennemis de l'homme (Les trois), 151.
Enseignement moral, 1",:;.
Enseignement* de saint Louis, 90.
Entrée de Spagne, 32.
Envois, 126.
Épervier ( Vœux de V), 3.
Epiphanie. 1 1 1.
É pitres et Évangiles du dimanche,l3Q.
Épitres farcies, 141.
Épopée, 14, 15, 18, 42.
Épopée adventice, 24, 27.
Epopée animale, 88.
Épopée biographique, 26.
Épopée chrétienne, 145.
Epopée féodale, 25.
Epopée française à l'étranger, 32, 37.
Épopée psychologique, 112.
Epopée royale, 24.
Époux (Mystère de l'), 166.
Eracle, 51.
Érec, 57, 58.
Ernaud de Beaulande, 41.
Eruaud de Gironde, 38.
Ernoul, 91.
Eructaoit (Le psaume), 159.
Escanor, 254.
Escoufle (L'), 51.
Ésope, 79.
Esopus, 80.
Espagne (La littérature française
en), 32, 63, 64, 129, 147.
Espinaus, 123.
Estarapie, 121.
Estormi, 76.
Estrabot, 120.
Estribot, 120.
Établissements de saint Louis, 102.
États du monde (Les), 105, 113, 154.
Etienne (Saint), 144.
Etienne de Fougères, 105.
Eudes de Cherriton, 152.
Euladie (Sainte), 146.
Euphrosyne (Vie de sainte), 145.
Eustac/ie (Vie de saint), 147.
Eustache d'Amiens, 76.
Eustache de la Fontain<- Notre-
Dame. 150.
Eustache Deschamps, 130.
Eustache l/> Moim
Évangile de V enfance, 140.
Evangile des femmes, 106.
Évangiles, 139.
Évangiles du dimanche, 139.
Eve, 165.
Éverard de Gateley, 143.
Éverard de Kirkham, 103.
Éverat, 138.
Evroul (Vie de Saint), 146.
Exemples dans les sermons, 73. 152.
Ezcchiel (Commentaire sur), 158.
Falileaux, 72, 73. 78, 152.
Eablel, 72.
Fables ésopiques, 79, 81, 82.
Faits des Bomains, 95.
Fanuel, 141.
Farces, 75, 134.
Farceurs, 131.
Farcitures, 144.
Faron (Saint), 16.
Fatrasies, 127.
Fauvel, 105.
Faux Semblant, 114.
Fayel La dame de), 124.
Fe'camp (Histoire de l'abbaye de), 93.
Fées, 54, 55, 66, 132.
Femme rendue au Diable (La), 143.
Femmes (Pièces sur les), 71, 106,
109, 113.
Femmes (La Bonté des), 106.
Femmes (Le Blâme des), 106.
Femmes (Le dit des), 109.
Femmes (L'Évangile des), 106.
Femmes auteurs, 115, 128, 130, 147,
148, 149.
Fergus, 58.
Feuillée (Jeu de la), 132.
Fierabras, 24, 37.
Flamand, 78, 83, 115, 157.
Fleur des histoires d'Orient, 91.
Flixicourt, 05.
Floire et Blanche/leur, 51, 118.
Floire et Jeanne, 51.
Floovent, 15, 21, 24.
Florence de Rome, 27.
Florence et Blanchefleur, 104.
334
TABLE ALPHABÉTIQUE.
Florent et Octavien, 27.
Floriant et Florette, 51.
Florimont, 51.
Flûte, 55.
Folquet de Romans, 124.
Fontaine Notre-Dame, 150.
Forest, 48.
Fortune (La roue de), 132.
Fougères, 105.
Foulke Fitz-Warin, 69.
Foulque de Candie, 40.
Français et latin mélangés, 152, 165,
166.
Français (Boman des), 108.
Française (Langue), 1, 3, 4, 8.
Française dans le midi (Langue), 51 .
Française à l'étranger (Langue),
101.
Française en Angleterre (Langue),
92, 102.
Française au moyen âge (Société),
16.
France propre, 2, 5.
Franco-italien, 32, 45, 64.
François d'Assise (Saint), 160.
Francs, 2.
Frêne, 55, 66.
Fridolin, 150.
Froissart, 93, 130.
Gace Brûlé, 125, 128.
Gace le Blond, 63.
Gaidon, 25.
Galaad, 60, 62.
Galeran de Bretagne, 66.
Galien, 28, 37.
Gallois (Musiciens), 53, 55.
Galloises des romans de la Table
Rondo (Versions), 57, 58, 59.
Canclon, 33, 36.
Garçon et l'Aveugle (Le), 134.
Garni, 76.
Garin d'Anseûne, 38.
Garin de Monglane (Geste de), 23,
38.
Garin de Monglane, 28, 41.
Garin de Monglane (Enfances), 41,
42.
Garin le Lorrain, 25.
Garnicr de Pont-Sainte-Maxenee,
149.
Gateley, 143.
Gaucher de Dcnain, 59.
Gaufrei, 28.
Gaufrei de Monmouth, 54, 59, 61, 92
93, 94.
Gaufrei de Saint- Alban, 167.
Gaulois, 6.
Gautier, 151.
Gautier d'Arras. 51, 66.
Gautier d'Aupais, 68.
Gautier de Belleperche, 138.
Gautier de Bibelesworth, 102.
Gautier de Coinci, 140, 141, 142, 143,
146, 160.
Gautier de Metz, 101.
Gautier d'Espinaus, 127, 128.
Gautier de Tournai, 69.
Gautier le Long, 73, 76.
Gautier Map, 60, 62, 63.
Gauvain, 54, 59, 60.
Geifrei Gaimar, 45, 54, 92.
Geffroi de Paris, 137, 139.
Généalogiques (Poèmes), 28.
Genèse, 138.
Genève, 37, 41.
Geoffroi de Paris, 97, 109.
Geoffroi des Nés, 146.
Geneviève (Vie de sainte), 146.
Georges (Vie de saint), 50, 147.
Gerbert de Montreuil, 51, 59.
Germains, 12. 13. 14.
Germer (Vie de saint), 146.
Gervais de Tilbury, 95.
Gcrvaise, 100.
Gesta Francorum, 21.
Gesta regum Francorum, 15.
Geste de Liège, 30.
Geste des Bourguignons, 30.
Geste des Bretons, 89, 93.
Geste des Normands, 93.
Gestes, 21, 23,
Geufroi de Paris, 137, 139, 148.
Gildas, 53.
Gilles (Saint), 36.
Gilles ( Vie de saint), 146.
Gilles de Chin, 69.
Gilles de Trasignies, 66.
Girard d'Amiens, 28, 51, 67.
Girard de Fratte, 25.
Girard de Monréal, 91.
Girard de Boussillon, 20, 25, 31, il.
Girard de Vienne, 25, 41.
Giraud de Barri, 113.
TABLE ALriUBETIQUE.
335
Girberl, 25.
• rJcichen (Légende du comte do), 66.
Gloses hebraïco-françaiscs, 102, 149.
Glossaires, 102.
Godefroi de Bouillon, 40.
Godefroi do Lagni, 57.
Gœthe, 83.
Gombert et les deux clercs, 76.
Gontier Col, 115.
Gontier de Soignies, 128.
Gotfrid de .Strasbourg, 56.
(iraal. 29, 57, 59, 69, 140.
Graal en prose (Saint), 60, 62.
GraeU Quête du saint), 60, 62.
Graelent, 55.
Grand mal fist Adam, 153.
Grec (Roman), 43, 50, 147.
Grégoire (Saint), 50.
Grégoire ( Vie de saint), 147.
Grégoire Bcchada, 86.
Grégoire le Grand, 145.
Grégoire le Grand (Dialogue de).
145.
Grégoire le Grand (Vie de), 145.
Grisélidis, 55.
Guace, 63.
Gualant. 13.
Guenièvre, 54, 60, 62.
Guenonis (Carmen de proditione),
34.
Guerre, 102.
Guerre sainte (Histoire de la), 88.
Gui de Bourgogne, 24.
Gui de Cambrai, 44.
Gui de Cambrai, 147.
Gui de Couci, 128.
Gui de Nanteuil, 26.
Gui de Warwick, 68.
Guiart des Moulins, 136.
Guibelin, 38.
Guibert d'Andrenas, 41.
Guibourg, 39, 40.
Guichard de Beaujeu, 153.
Guido Colonna, 45.
Guido Guinicelli, 119.
Guilebert de Bernevilie, 128.
Guilebert de Cambres, 152.
Guillaume, 58.
Guillaume (Enfances), 41, 42.
Guillaume (Moulage-, 21, 27, 38, 39,
42.
Guillaume au court nez, 38, 39.
Guillaume Chapu, 102.
Guillaume d'Angleterre, 148.
Guillaume do Bernevilie, 146.
Guillaume do Digulleville, 115, 156.
Guillaume de Dole, 51, 67, 133.
Guillaume de Lorris, 5, 111, 112.
Guillaume de Machaut, 130.
Guillaume de Malmesbury, 143.
Guillaume do Montreuil-sur-Mcr,
20, 39.
Guillaume de JNangis, 94.
Guillaume de Palerme, 51, 67.
Guillaume do Poitiers, 86.
Guillaume de Saint-Amour, 114.
Guillaume de Saint-Pair, 93.
Guillaume de Saint-Patus, 149.
Guillaume de Toulouse, 38.
Guillaume de Tyr, 91.
Guillaume d'Orange, 38.
Guillaume Fièrebrace, 38, 39.
Guillaume Guiart, 96.
Guillaume le Breton, 94.
Guillaume le Clerc, 100, 138, 144,
153, 154, 155, 156.
Guillaume le Conquérant (Lois de),
102.
Guillaume le Maréchal (Histoire de).
93.
Guillaume le Pieux, 39.
Guillaume Longue-Épée, 25.
Guines, 72.
Guingamor, 55.
Guinglain, 58.
Guiot, 142.
Guiot de Provins, 105.
Guiron, 55, 66.
Guiron le Courtois, 63.
Haie (Fragment de La), 38, 39.
Haimon (Commentaire de), 139.
Bain et Anieuse, 76.
Hainau, 25, 48, 94, 95, 103, 128.
Haiton, 91.
Ham, 109.
Hareng (Martyre de saint), 109.
Harpe, 13,
Hartmann d'Aue, 58, 146.
Haute-Seille, 71.
Havelok, 68,
Hector, 45.
Hélène (La belle), 27.
Hélinand, 153.
336
TABLE ALPHABETIQUE.
Hcliodore, 50.
Bélotseet Abailard (Lettres <f), 113.
Henri d'Andeli, 5, 76, 110.
Henri I d'Angleterre, 103.
Henri I d'Angleterre (Vie de), 92.
Henri II d'Angleterre. 93, 140.
Henri V d'Allemagne, 140.
Henri VII d'Allemagne, 30.
Henri de Mondeville, 102.
Henri de Valencicnnes, 89, 141.
Henri de Veldeke, 46.
Henri le Glichezare, 82.
Henri van Aken, 115.
Herberie (Dit de F), 109.
Herbert, 71.
Herbert de Dammartin, 40.
Herman de Valenciennos, 137, 141.
Héro, 49.
Hérode, 140.
Héroïdes d'Ovide, 49.
Hersent, 82.
Heni, 25.
Hilaire, 167.
Hippocrate, 50.
Hippomédon, 47, 51.
Histoire de Marie et Jésus, 140.
Histoire sainte, 136.
Histoires (Livre des), 95.
Histoires générales de France, 96.
Histoires universelles, 95.
Historia regum Brilanniae, 54.
Historiographie latine, 85.
Huer et de l'Été (Débat de F), 110.
Homélies, 152.
Homère, 36, 45.
Homère des laïques, 153.
Honnccourt, 102.
Honorius d'Autun, 101, 152.
Hoo, 103.
Horn, 27, 68.
Houdan, 58.
Housse partie (La), 76.
Hueline et Aigtentine, 104.
Hugues de Bourgogne, 120.
Hugues de Lincoln, 149.
Hugues Farsit, 142.
Huon Chapet, 24.
Huon d' Auvergne, 26.
Huon de Berzé, 105, 124.
Huon de Bordeaux, 25, 27.
Huon deMéri, 111, 155, 156.
Huon de Rotelande, 51.
Huon de Saint-Quentin, 89 bit.
Huon d'Oisi, 109, 127.
Huon le Roi de Cambrai, 76, 102,
106, 141, 146.
Huon Peauccle, 76.
Ibelin, 91.
Ide de Boulogne, 153.
lder, 54, 58.
Idoine (Belle), 118.
Ignaure, 55.
Ile de France, 5.
Ille et Galleron, 66.
Image du Monde, 101.
Imago Mundi, 101.
Inde, 73, 76, 77, 79, 147.
Innocent III, 139.
Innocents (Fête des), 144.
Institutes, 102.
Ioland de Saint-Paul, 51, 94.
Irlande (Conquête de V), 93.
'Irlande (Merveilles de f), 113.
Irnerius, 102.
Isabel (Belle), 118.
Isengrimus, 82.
Isengrin, 82.
Isidore de Séville, 158.
Isopet, 79, 80.
Italicus, 45.
Italie (Littérature française en), 23,
32, 40, 51, 63, 64. 75, 95, 102,
115, 129, 146, 147, 157.
Itinéraires de Terre Sainte, 91.
Ivain, 57, 58.
Jacot de Forest, 48.
Jacquemard Gelée, 84.
Jacques (Saint), 34.
Jacques Bretol, 109.
Jacques d'Amiens, 104.
Jacques de Baisieu, 76.
Jacques de Cambrai, 125.
Jacques de Cessolos, 102.
Jacques de Longuyon, 30, 44.
Jacques de Varaggio, 149.
Jacques de Vitri, 150.
Jakemon Saket, 66.
Jean, 76.
Jean Bagnyon, 37.
Jean-Baptiste (Saint), 140.
TABLE ALPHABETIQUE.
337
Jean Bedel, 76.
Jean Bodol, 21, 24, 43, 70, 127, 132,
166, les.
Jeâfl /louche d'Or (Saint), 147.
Jean Brasdcfer, 68.
Jean Brisebarro, 44, 160.
Jean d'Antioche ou do Harenc, 95,
102.
Jean d'Avesnes, 69, 87.
Jean de Brienno, 113.
Jean de Chalon, 102.
Jean do Condé, 75, 76, 103, 150.
Jean de Douai, 154.
Jean de Flixicourt, 95.
Jean de Harenc, 95, 102.
Jean de Haute-Seille, 71.
Jean de Holywood, 100.
Jean de Joinville, 90, 94, i49, 152.
Jean de Journi, 154.
Jean de la Chapelle, 150.
Jean de Lanson, 24.
Jean de le Moto, 44.
Jean de Meun, 5, 102, 103, 112, 113,
158.
Jean de Montreuil, 115.
Jean de Paris, 68.
Jean de Prunai, 94.
Jean des Prés, 30.
Jean de Tuin, 4S.
Jean de Vignai, 91, 94, 95, 101, 103,
139, 149.
Jean de Wavrin, 93.
Jean et Blonde, 68.
Jean Froissart, 93, 97.
Jean Gerson, 115.
Jean Justice, 143 bis.
Jean le Bol, 97.
Jean le Galois d'Aubepierre, 76.
Jean le Marchant, 143.
Jean le Paidu (Saint), 147.
Jean le Teinturier, 110.
Jean l'Évangélisto (Saint), 144.
Jean le Venelais, 44.
Jean Madot, 132.
Jean Maillart, 51.
Jean Malkaraume, 137.
Jean Molinet, 115.
Jean Priorat, 102.
Jean Renart, 68.
Jean Sarrazin, 90, 98.
Jeanne de Flandre, 59.
Jeanne de France, 49.
Jendeu de Brio, 40.
Jérôme (Saint), 145.
Jérusalem (Assises de), 102.
Jérusalem [Chanson de); 29.
Jérusalem (Complainte de), 89 bis*
Jérusalem (Description de), 91.
Jérusalem (Destruction de,), 140.
Jésus-Christ (Histoire de), 139;
Jésus-Christ (Pèlerinage de), 150.
Jérusalem (l'acmé allégorique sur),
156.
Jeunesse (Terre de l'éternelle), 1 18.
Jeux partis, 126.
Job, 138.
Job (Moralités sur), 158.
Joco (Vie de Saint), 146.
Joculatores, 20, 110, 131.
Jofrei d'Anjou, 35.
Jofroi de Villehardouin, 89.
Jofroi de Watrel'ord, 95, 101.
Joies (les Sept) Nostre Dame, 141.
Joinville, 90.
Jonas, 152.
Jongleurs, 20, 72, 73, 78, 86. 88, 96,
106, 109, 110, 127,143, 153, 173, 178
Tongleurs (Les deux), 110.
J'oseph, 138.
Joseph d'Arimathie, 59, 60, 140.
Joufroi, 68.
Jourdain de Blaie, 27, 50.
Jourdain Fantosme, 93.
Journi, 154.
Judas, 140.
Judas Machabée, 138.
Jugement ( Vers du), 153.
Jugement d'amour, 104.
Juges, 153.
Juges (Livre des), 138.
Juif et du Chrétien (Débat du), 155.
Juifs, 142, 149, 150, 155.
Juive (Élégie), 149.
Jules César, 48.
Julienne (Vie de sainte), 147.
Jupiter, 36, 151.
Justice et de Plaid (Livre de), 102.
Kanor, 71.
Karlingen, 2.
Keu, 54.
Lac (Chevalier du), 55.
: Lac (Dame du), 61.
338
TABLE ALPHABETIQUE.
La Fontaine, 76, 77.
Lagni, 57.
Laicorum lingua. 10-2.
Laïques Lumière des), 101.
Lais lyriques. 121,123.
Lai* lyriques lu xiv' siècle, 130.
Lais narratifs. 49, 55, 65, 68.
Lambert de Liège, 140.
Lambert le Tort, -14.
Lamprecht (Le clerc), 44.
Lancelot, 57.
Lancelot, 60, 61 .
Lancelot en prose, 60, 61, 62.
Landornata. 45.
Landri de Waben, 159.
Langue française, 1, 3, 4, 8.
Langue des laïques et des clercs,
102.
Lanval, 55.
Laon,2, 138, 151.
Lapidaire», 100.
Larron qui fut racheté [Le), 154.
Latin, 3, 8, 135.
Latin mêlé au français, 152, 165, 166.
Laurent ou Lorens (Frère), 157.
Laurent iYie de saint), 146.
Laurin, 71.
Lazarille de Tormès, 134.
Léger (Vie de saint), 146.
Lendit. 24, 100.
Léocadie ( Vie de sainte), 146.
Léonois, 56.
Lettres françaises, 86, 98.
Liège, 30, 97, 103, 140, 153.
Liesse, 66.
Lignages (Branche des royaux), 06.
Lille, 84, 114.
Litanies paraphrasées, 160.
Lois de Guillaume, 108,
Longin, 140.
Longobards, 38.
Longuyon, 44.
Loquifier, 40.
Lorens (Frère), 157.
Lorrain, 95, 158, 159.
Lorraine, 3, 4.
Lorraine (Duchesse de), 128.
Lorrains, 21, 25.
Lorris, 111.
Louis (Couronnement de), 24, 42.
Louis (Le Roi . .'•2, 24. 44.
Louis I, 19, 24, 39.
Louis III, 24.
Louis IX (Saint), 90.
Louis ( Vie de saint), 90, 149.
Louis Enseignements de saint), 90.
Louis (Établissements de saint), 102.
Loup et l'oie (Le), 76.
Lonp-garoa, 55, 67.
Lucain, 48, 95.
Luce du Gast, 63.
Lumière des laïques, 101.
Lyon, 101.
Lyrico-épiques (Chants), 118.
Lyrique (Poésie), 116-130.
Lyrique religieuse (Poésie), 159-163.
M
Mabinogion, 53.
Macchabée» (Le*), 27, 138.
Macé de la Charité, 137, 140.
Macrobe, 111.
Maganzesi, 23.
Mages, 166.
Magnificat (Dit du), 150.
Mahieu le Poriier. 111.
Mahieu le Vilain, 100.
Mahom, 151.
Mahomet (Roman de), 151.
Mai Fête de), 132, 133.
Maille (Dit de la), 109.
Mainet, 24.
Manekine (La), 101.
Manières (Livre des), 105.
Mansions, 166.
Manteau mal taillé (Le), 55.
Manuscrits des chansons de geste, 22.
Mappemonde (La), 51.
Marbode, 100.
Marc, 56.
Marc Pol, 91.
Margival. 154.
Marguerite (Vie de tainte), 50, 147.
Marguerite de Provence, 98, 149.
Marie (La Vierge), 120, 127, 141, 150.
Marie (Enfance de la Vierge), 141.
Marie (Miracles de la Vierge), 142,
143.
Marie (Miracles dramatisés de la
Vierge), 165, 167.
Marie Mort de la Vierge), 141.
Marie (Plainte de la Vierge), 159.
Marie (Vie de la Vierge), 141.
Marie de Champagne, 57, 125, 128,
138, 159.
TABLE ALPHABETIQUE.
339
Marie de France, 55, 5G, 60, 79, 1 18.
Marie l'Égyptienne (Vie de suinte),
50, 1-17.
Marie- Madeleine [Vie de sainte), 111.
Marnt, 115.
Man/ues de Borne, 71.
Martianus Capolla, 110, 111.
Martin ( Vie de suint), 1-15.
Martin de Braga, 103.
Martin Hapart, 106.
Médecine, 102.
Meistersssenger, 127.
Méliacin, 51, 67.
Méliadus, 63.
Mélion, 55.
Mélior et Idoine, 104.
Mélusine, 69.
Mendiants (Ordres), 11, 108, 114.
Ménestrel d'Alphonse de Poitiers
(Le), 94.
Ménestrel de Beims (Bécits d'un), 81,
87, 97.
Ménestrels. 132, 167.
Meneur du jeu, 166.
Mennessier, 59.
Meraugi» de Portlesgues, 58.
Mériadeuc, 58.
Méridional (Cycle), 38.
Mérimée, 143.
Merlin, 54.
Merlin, 59, 60, 63.
Merlin en prose, 60, 62, 63.
Merlini ( Vita). 54.
Mérovingienne (Épopée), 15, 23.
Métamorphoses d'Ovide, 49.
Météores, 100.
Métiers (Dits sur les), 109.
Metz, 101, 139.
Meun, 112.
Milon, 55, 66.
Milon de Pouille, 41.
Mimes, 131.
Minnesinger, 129.
Miracles de Notre-Dame, 142, 143.
Miracles dramatisés, 150, 165, 167,
168.
Miroir du Monde, 157.
Miserere du Roclus de Molliens, 153.
Modus et lareine Bacio (Le roi), 102.
Modwenne (Vie de sainte), 148.
\ Moine ignorant (Le), 142.
Moine malade (Le), 142.
Moines, 11.
Molière, 77, 134.
Molinot, 115.
Molliens (Le Reclus de), 153.
Monde ' L'image du i, 101.
La Biote du), 105.
Monde (Les Vers du), 153.
Mongols, 98.
Monologues, 109, 131.
Mont-Saint-Michel (Chronique du),
93.
Montebourg, 159.
Montreuil, 25, 51.
Montreuil-sur-Mer, 20, 39.
Morale chrétienne (Traités de). 157.
Moralisations, 100, 101, 102, 159.
Morée (Chronique de), 91.
Morice de Sulli, 152.
Morice Regan, 93.
Mort (Vers de la), 153.
Mort reconnaissant (Légende du), 66.
Morts et les trois Vifs (Les trois), 154.
Motets, 119.
Mule sans frein (La), 59.
Mystères, 164, 166.
Mystiques (Traités), 158.
N
Naimon de Bavière, 33.
Nanteuil, 124.
Narbonnais (Geste des), 38-42.
Narbonne, 38.
Narcisse, 49.
Nativité, 165.
Néerlande (Littérature française en),
44, 58, 64, 83, 115, 127, 153.
Nennius, 53, 54.
Nesle, 128.
Neustrie, 2.
Neuville (Le Siège de), 31.
Nihelungenlied, 36.
Nicodème (Évangile de), 140.
Nicolas (Saint), 147, 160, 167.
Nicolas (Jeu de saint), 132, 167, 168.
Nicolas (Miracle de saint), 167.
Nicolas de Senlis, 94.
Nicolas do Vérone, 37, 48.
>icole Bozon, 81, 152.
Nicole de Margival, 111, 154.
Nimes (Charroi de), 39.
Nivard, 82.
Nobles, 84, 108.
Noël, 164, 165.
340
TABLE ALPHABETIQUE.
Noëls, 161.
Normandie, 45, 9-2, 100, 102, 103, 140,
152.
Normandie {Coutume de), 102.
Normands, 4.
Norvège (Littérature française en),
32, 56, 58. .
Nouvelle, 75. ,
Novarc, 89 ter, 102, 103.
Noyon, 146.
Nuit (La longue), 77.
Nuits (Les mille et une), 77.
Octavien, 27.
Œdipe, 140, 147.
Oger le Danois, 33.
Oyer le Danois (Chevalerie d'), 24.
Oger le Danois (Enfances d'), 24.
Oiseau bleu (Conte de 1'), 55.
Oiseaux de chasse (Livre sur les;,
102.
Oiselet (L), 77.
Oisi, 127.
Oison ( Vie de saint), 109.
Olivier, 33, 41.
Opéra-comique, 133.
Orange, 39.
Orange (Prise <f), 39, 42.
Ordre de chevalerie (L'), 103.
Orient (Influence de 1'), 65, 66, 70,
71, 73, 76, 101, 140, 145, 147, 150.
Orient (Fleur des histoires d'), 'A.
Oriflamme, 35.
Orior, 118.
Orléanais, 5.
Orose, 95.
Orphée, 49.
Orson de Bcauvais, 26.
Orthographe (Traités sur 1'), 102.
Osmond, 100.
Outrée (Chanson d'), 124.
Outremer (Histoire de la terre d'], SI.
Ovide, 49, 104, 111.
Owen (Le chevalier), 148.
Païen Gastinel, 145.
Pairs, 33, 38.
Paix aux Anglais (La), 108.
Palamède, 63.
Palefroi (Le vair), 76.
Pamphile et Galatée, 68, 114.
Panthère d'amour (La), 67, 111.
Paon (Parfait du), 11.
Paon flestor du), 44.
Paon (Vieux du.. 41.
Parues, 164, 166.
Paraboles évangéliques, 154.
Paraboles d'Eudes de Cherriton, 152.
Paradis (Cour de), 78.
Paradis (Songe de), 111, 156.
Paradis (Voie de), 111, 156.
Paradis d'amour, 111.
Parfait du Paon, 44.
Paris, 2, 5, 27, 33, 38, 97, 109, 117,
136, 137, 139, 152.
Paris (Cris de), 109.
Paris (Églises de), 109.
Paris (Enseignes de;. 109.
Paris (Ordres de), 109.
Paris (Hues de), 109.
Parodies, 31, 127.
Parodies pieuses, 124, 160.
Parténopeu, 47, 51.
Pas de Saladin (Le), 88.
Passion (Poèmes sur la), 139.
Passion dramatisée, 165.
Pastourelles, 122, 127, 133.
Patrice (Purgatoire de saint), 148.
Paul (Vision de saint), 144.
Péchés (ilanuet des), 157.
Pèlerin (Jeu du), 121, 133.
Pèlerinage de Charlemagne, 22, 24,
27,38.
Pèlerinage de Jésus-Christ, 156.
Pèlerinage de l'âme, 156.
Pèlerinage de la vie humaine, 156.
Pèlerinage de Renard, 83.
Pèlerinages, 91, 153.
Pèlerinages (Récits de), 91.
Péliarménus, 71.
Pélops, 49.
Pépin, 15, 19.
Perceforest, 64.
Perceval, 57, 59.
Perceval, 59, 60.
Perceval de Robert de Boron, 59, 60.
Père qui combat son fils, 65, 66.
Peredur, 59.
Pères (Vies des), 143, 145, 150.
Périclès, 50.
Perlescaus, 60, 62.
Personnelle (Satire), 107.
TABLE ALPHABETIQUE.
341
Personnifications, 110, 111, 155, 156.
Pétrarque, 115, 129.
l'harsale, 48.
Phèdre, Î5, 79.
Philippe (Le chapelain), 98.
Philippe II, 103.
Philippe II (Vie de), 94.
Philippo IV, 113, 157.
Philippe d'Alsace, 57.
Philippe do Beaumanoir, 51, 68, 102.
Philippe de Flandre, 59.
Philippe de Nantcuil, 89 qualer, 124.
Philippe de Novare, &9 ter, 102, 103.
Philippe deThan, 100.
Philippe Mousket, 96.
Philippopoli, 83.
Philomèle, 49.
Philosophes (Dits des), 103.
Philosophie (Consolation de), 103, 113.
Philosophie (Petite), 101.
Phyllis, 49.
Picardie, 5, 125.
Pierre 101, 147.
Pierre Alphonse, 73, 80.
Pierre Berçuire, 49.
Pierre d'Abernun, 101.
Pierre de Fontaine, 102.
Pierre de Langtoft, 93.
Pierre de Peckham, 101.
Pierre de Provence, 51.
Pierre de Saint-Cloud, 44, 83.
Pierre du Ries, 138.
Pierre et le Jongleur (Saint), 78.
Pierre Gentien, 109.
Pierre le Mangeur, 136.
Placides et Timeo, 101.
Plaid (Le petit), 155.
Plaintes, 159.
Plenté (La), 73.
Poème moral, 145, 153.
Poire (La), G7.
Poitevins (Sons), 165.
Poitiers, 91.
Poitiers (Le comte de), 51.
Poitou. 44, 125, 165.
Politique (Satire), 108.
Ponce d'Aubon, 98.
Pont des morts, 61.
Pont-Sainte-Maxence, 149.
Pontieu (La comtesse de), 69.
Pontus et Sidoine), 68.
Portugal (Littérature française en),
37, 60, 64, 129.
Prédication, 73, 75, 81, 152.
Prêtre (La Vessie au), 73, 76.
Preux (Les neuf), il.
Prières on vers, 163.
Privilège aux Bretons, 108.
Procédure, 153.
Prophètes du Christ (Les), 165.
Propns tés des choses (Traités dot,),
101.
Prose (Emploi de la), 22, 30, 63, 04,
94, 102.
Protésilaus, 47, 51.
Provençale (Littérature), 57, 66, S6,
117, 120, 121, 122, 125, 127 129,
157.
Proverbes, 103.
Proverbes de Salomon, 152.
Provins, 105, 149.
Prudence, 110, 111, 114, 155.
Psaumes, 159.
Psautier de Cambridge, 159.
Psautier do Montebourg ou d'Oxford,
159.
Psautier en vers, 159.
Psautier lorrain, 159.
Psyché, 51.
Psychomachie, 110, 111, 114, 155.
Ptocholéon, 51.
Pui Notre Dame, 127, 168.
Puis, 127, 168.
Purgatoire de saint Patrice, 148.
Pygmalion, 114.
Pyrame et Thisbé, 49.
Q
Quatre Sœurs (Dit des), 154.
Quête du saint graal, 60, 62.
Rabelais, 103.
Raganhard, 82.
Raguidel (Vengeance de), 59.
Rainaud, 118.
Rainouart, 40.
Rainouart (Moniage), 40, 42.
Raoul de Cambrai, 10, 20, 23, 25.
Raoul de Houdan, 58, 103, 111, 156.
Raoul de Soissons, 125.
Raschi, 102.
Reclus de Molliens (Le), 153.
Refrain, 117, 118.
Régime du corps, 102.
Reims, 97.
342
TABLE ALPHABETIQUE.
Reims (Chronique de), 97.
Reinaert de Vos, 83.
Reine qui tua son sénéchal (La), 150.
Remède d'amour, 104.
Rémi (Vie de saint), 146.
Renard, 82.
Renard (Couronnement de), 84.
Renard (Roman de), 82.
Renard le contrefait, 84, 95.
Renard le nouveau, 84.
Renaud, 66.
Renaud, 124.
Renaud, 46.
Renaud, 147.
Renaud de Beaujeu, 58.
Renaud de Montauban, 25.
Renier, 28, 40, 42.
Renier do Genève, 41.
Rennes, 105.
Répétitions épiques, 36.
Résurrection, 166.
Résurrection (Mystère de la), 166.
Rêveries, 127.
Rhétorique (Chambres de). 127.
Richard Cœur de Lion, 69, 106, 120,
127, 128.
Richard Cœur de Lion, 69, 88.
Richard d'Annebaut, 102.
Richard de Fournival, 100.
Richard de la Sainte-Trinité, 88.
Richard de Normandie, 35.
Richard le beau, 66.
Richard le ( >lerin, 86.
Richard sans peur, 69.
Richer, 146, 154.
Richeut, 82.
Richeut, 73.
Riote du monde, 105.
Rioul ( Vengeance de), 25.
Robert, 103.
Robert, 153.
Robert Biket, 55.
Robert d'Artois, 132.
Robert de Blois, 58, 103.
Robert de Boron, 59, 60, 62.
Robert de Brunne, 157.
Robert de Clairi, 89.
Robert le Clerc, 153.
Robert de Gretham, 139, 152.
Robert le Diable, 69.
Robert le Magnifique, 93.
Robert Sainterel, 153.
Robin et Marion, 133.
Robin Hood, 69.
Roger, châtelain de Lille, 95.
Roger d'Argenteuil, 136.
Roi (Geste du), 23.
Rois (Livres des), 138.
Rois de France (Chronique des), 108.
Roland (Chanson de), 22, 24, 33, 37,
89.
Romains en Gaule, 6, 9.
Romains (Chants populaires des),
117.
Romains (Faits des), 95.
Roman, 8.
Roman des Romans, 153.
Romane rustique (Langue), 9.
Romans de chevalerie, 22.
Romans grecs, 43, 50.
Rome (Satires contre), 108.
Romulus, 79, 80.
Roncevaux, 33, 37, 24.
Rondeaux, 121, 130.
Rose (Dit de la), 111.
Rose (Roman de la), 104, 111, 115,
156.
Rote, 13, 55.
Rotrouenge, 120.
Rou (Roman de), 93.
Rufin, 145.
Rustebeuf, 5, 76, 106, 107, 108, 109,
110, 127, 147, 149, 156, 168.
Rusticien de Pise, 64, 91.
S
Sacristine (La), 142.
Sages (Les Sept), 50, 71, 73.
Saint-Cloud, 44.
Saint-Pair, 93.
Saint-Pol, 51, 94.
Saint-Quentin, 108.
Sainte-More, 45.
Sainte-More près Troies, 49.
Saintes (Vies de), 146.
Saintonge, 94.
Saints (Vies de), 144, 148, 149, 167.
Saints celtiques, 148.
Saisnes (Chanson des), 21, 24.
Saladin, 87, 88, 103.
Salluste, 95.
Salomon, 152.
Salomon (Légendes sur), 51, 138, 150.
Salomon et Marcoul, 103, 138.
Salut d'amour, 126.
Samson de Nanteuil, 152.
TABLE ALPHABÉTIQUE.
343
Sarrazin, 109.
Sauvage, 103.
Sauveur ( Vengeance du), 140.
Saxons, 15.
Schiller, 150.
Scholastica (Historia), 136.
Scipion (Songe de), 111.
Scôpas, 13.
Sébile, 34, 37,
Secret des secrets, 101.
Sénéchal (Le méchant), 150.
Sénèquo, 103.
Senlis, 94.
Sentier battu (Le), 73, "6.
Sept Dormants (Légende des), 145.
Séquences, 146.
Serments de Strasbourg, 3, 102.
Sermons, 73, 75, 81, 152.
Sermons en vers, 153.
Servais Copale, 101.
Serventois, 120.
Shakspeare, 45, 50, 51, 66.
Sicile, 129.
Sidrac, 101.
Signes du jugement (Les quinze), 154.
Silli (Le moine de), 108.
Simon, 44.
Simon, 154.
Simon de Compiègne, 101.
Simon de Fraisne, 103, 147.
Simon de Pouille, 41.
Sœurs (Dit des quatre), 154.
Soignies, 128.
Soissons, 125, 142.
Solin, 101.
Somme le Roi, 157.
Sone de Nansai, 68 (notes).
Songe, 11), 111, 115, 155, 156.
Sonnet, 125.
Souhait insensé (Le), 76.
S pagne (Entrée de), 32.
Sphère (Traité de la), 101.
Stabat Mater, 159.
Stace, 47.
Statue (Le fiancé de la), 143.
Stratonice, 51.
Suétone, 94.
Sulpice Sévère, 145.
Syrie, 91.
J T
Table Ronde, 54, 58.
Table Ronde (Romans de la), 53-64,
104, 111.
Taillefer, 35.
Tambourin, 106.
Tancré, 40.
Tapisseries, 133.
Tençon, 126.
Terre Sainte (Livre de lai, 91
Tervagant, 151.
Testament (Ancien), 138.
Testament (Nouveau), 139, 140.
Testament de Jean de Meun, 113.
Thaïs (Vie de sainte), 145.
Thaon, 100.
Théâtre du moyen âge, 166.
Thèbes, 47.
Théophile (Légende de), 143.
Théophile (Miracle de), 168.
Thomas, 56.
Thomas Becket (Vie de saint), 101,
149.
Thomas de Cantimpré, 101.
Thomas Malory, 64.
Tibaud d'Amiens, 162.
Tibaud de Champagne, 89 quater,
125, 121, 128, 129.
Tibaud V de Navarre, 98.
Tibaud de Provins (Vie de saint),
149.
Tidorel, 55, 66.
Tiolet, 55.
Tironiennes (Notes), 152.
Tobie, 138.
Toile (Chansons de), 118.
Tombeor JVostre Dame (Le), 143.
Torec, 58.
Tortu (Miracles de saint), 109.
Touraine, 45, 145.
Tournai, 96, 134.
Tournoi (Le chevalier que Marie
remplace au), 143.
Tournoiement d'Antéchrist, 111, 155.
Tournoiement des dames, 109.
Tournois, 134.
Tournois de Chauvenci, 109.
Tours, 145.
Traîtres (Geste des), 23.
Trajan (Légende de l'âme de), 145.
Trébor (Enseignements), 103.
Trente (Le Combat des), 30.
Trésor (Livre du), 101.
Tresses (Les), "6.
Triolet, 121, 130.
Tripartition, 125.
Tristan, 55.
344
TABLE ALPHABÉTIQUE.
Tristan, 56, 57.
Tristan (La Folie de), 56.
Tristan en prose, 56, 63, 64.
Tristan de Nanteuil, 28.
Troie (Légende de), 45, 50, 92, 95.
Troie [Roman de), 45.
Troies, 49, 57, 84, 102, 149.
Troies (Élégie juive de), 149.
Troies (Le clerc de), 84.
Troïlus, 45.
Troubadours, 125, 126, 129.
Trouveurs, 126.
Troycnnes des nations européennes
(Origines), 45.
Trubert, 70.
Tuin, 48.
Tungdal, 148.
Turold, 33, 35.
Turpin, 33.
Turpin (Chronique de), 34, 37, 94.
Ulrich de Zatzikhoven, 61.
Unicorne (Dit de l'), 154.
Université de Paris, 108, 127.
Urbain (Ditié d'), 103.
Usurier (Patenôtre à l'), 106.
Usuriers, 106.
Valand, 13.
Valenciennes, 89, 138, 141.
Valentin et Orson, 28.
Valerius (Julius), 44.
Valet à tout faire (Le), 109.
Valet qui d'aise à malaise se met
(Le), 76.
Varcnno, 51.
Vaud, 37.
Vaudoi (Les Droits au clerc de), 103.
Végcce, 102, 113.
Vengeance de Raguidel, 59.
Vengeance de Rioul, 25.
Vengeance du Sauveur, 140.
Vénus, 143.
Vénus (La déesse), 104.
Vénus d'ille (La), 143.
Vergi (La Châtelaine de), 68.
Vérité (Dit de), 108.
Vers (Emploi des), 22, 109.
Versification (Remarques sur la), 8,
21, 22, 31, 36, 37, 44, 45, 52, 82.
96, 105,108, 109,113,117, 118, 123,
133, 137, 138, 139, 140, 142, 145
147, 148, 149, 153, 154, 155, 157,
162, 167, 168.
Vertus cardinales ( Traité des quatre),
103.
Veuve (La), 76.
Vézien, 40.
Vices et des Vertus (Bataille des),
155.
Vie humaine (Pèlerinage de la), 156.
Vieille dans le Roman de la Rose
(La), 114.
Vielle, 20, 106, 166.
Vierges folles (Mystère des), 165.
Vies des Pères, 143, 145, 150.
Vigne (Dit de la), 154.
Vilain (L'âme du), 76, 78.
Vilain de Bailleul (Le), 76.
Vilain de Farbu (Le), 76.
Vilain Mire (Le), 77.
Vilain qui conquit paradis (Le),
78.
Villainnengouste, 103.
Vilains, 74, 77, 78, 106.
Vilains (Les vingt-quatre manière»
de), 106.
Villard de Honnecourt, 102.
Villcbardouin, 89.
Villon, 127.
Vin (Pièces sur le), 109, 110.
Vin (Dit du bon), 109.
Vincent de Beauvais, 101, 153.
Vins (Dispute des), 110.
Vins de l'année (Les), 109.
Violette (La), 51, 59, 67.
Virelai, vireli, 121.
Virgile, 36, 46, 50.
Vitri-sur-Seine, 150.
Vivien, 40, 41.
Vivien (Chevalerie de), 40, 42.
Vivien (Enfances de), 41.
Voleur (Légende du), 142.
Voltaire, 113, 150.
Volucraire, 100.
W
Wace, 54, 63, 93, 141, 147.
AValah, 53.
Waldef, 68.
TABLE ALPHABÉTIQUE.
34c
Wallon, 145, 153, 158.
Watrcford, 95.
Watriquet do Couvin, 75, 103.
William do Wadington, lfvi, 157. 167.
Wirnt de Uravenberg, 58.
Wolfram d'Eschenbach, 59.
Yon, 25.
Ywenec, 55.
Zadig, 150.
TABLE DES MATIÈRES
Avertissement v
Avant-propos vu
Introduction (§§ i-17) 1
PREMIÈRE PARTIE
LITTÉRATURE PROFANE 35
Section I. — Littérature narrative.... 35
Chap. I. — L'Épopée nationale (§§ 18-42) 35
— IL — Imitation de l'Antiquité (§§ 43-49) 77
— III. — Romans grecs et byzantins (ï§ 50-52) 80
— IV. — Romans bretons (g§ 53-04) 92
— V. — Romans d'aventure (§§ 05-71) 112
— VI. — Fableaux (§§ 72-78) 118
— VIL — Fable ésopique et Roman de Renard (§§ 79-84). 120
— VIII. — L'Histoire (§§ 85-98) 133
Section II. — Littérature didactique.... 157
Chap. I. — Littérature scientifique (§§ 100-102) 157
— IL — Littérature morale (§§ 103-104) 105
— III. — Littérature satirique (§§ 105-108) 109
— IV. — Littérature descriptive et plaisante (^ 109-110). 174
— V. — Le Roman de la Rose (§§ 111-115) 178
Section III. — Littérature lyrique 191
Chap. I. — Poésie lyrique purement française (§§ 118-124). 193
— IL — Poésie lyrique d'orgine provençale (§§ 125-130). 199
348 TABLE DES MATIÈRES.
Section IV. — Littérature dramatique
(§§ 131-134) 209
DEUXIÈME PARTIE
LITTÉRATURE RELIGIEUSE 215
Section I. — Littérature narrative.... 217
Chap. I. — Traductions intégrales de la Bible (§§ 13G- 137). 217
— IL — L'histoire juive (§ 138) 219
— III. — L'histoire évangélique (§§ 139-140) 221
— IV. — La légende de la Vierge (S§ 141-143) 225
— V. — Les légendes hagiographiques (§§ 144-i49) 230
— VI. — Contes dévots (§§ 150-151) 241
Section II. — Littérature didactique
(§§ 152-158).'. 245
Section III. — Littérature lyrique
(§§ 159-163) 257
Section IV. — Littérature dramatique
(§§ 164-168) 261
Tableau chronologique 271
Notes bibliographiques 283
Table alphabétique 327
Table des matières 347
W7-09. — Coulommiors. Imp. Paul BIIODAHD. — I'7-iW.
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