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MEMOIRES
P OUR SERVIR A
L'H I S T O I R E
XVIII SIECLE,
.
CONTENANT
LES NEGOCIATIONS, TRAITEZ, RESOLUTIONS,
ET AUTRES DOCUMENS AUTHENTIQUES
CONCERNANT
LES AFFAIRES D'ETAT-
9
Liez par une Narration Hiftorique des principaux Evenemens dont ils ont été
précédez ou fuivis , & particulièrement de ce qui s'eft paflTé à la Haïe, quia
toujours été comme le centre de toutes ces Négociations.
Par Mr. de LAM.BERTY.
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A LA II A Y E9
Chez H E N R I S C H E U R L E E R,
M D C C X X I V.
vf 'aoams;oo.i
AUX TRES-ILLUSTRES
TRES-EXCELLENS ET HAVTS SOVVERAINS,
MESSEIGNEURS
LES AVOYERS,
PETIT ET GRAND CONSEIL
DE LA REPUBLIQUE ET CANTON DE BERNE,
MM ESSEIGNEURS,
Hi>-.
Mon âge avancé m'a fait refondre à fbuhaiter du re-
pos. Pour pouvoir en jouir , il a falu ie déterminer à
renoncer à mes longues Occupations politiques. Elles é-
toient fi fréquentes & continuelles dans lePaïs où j'étois,
que pour m'en débararfer, il n'y avoit qu'une Retraite
éloignée. J'ai chofi pour cela les Terres de Vos Ex-
cellences, par deux raifons. L'une eft la bonté fa-
lutaire de l'air. L'autre, qui eft la plus atraiante, eft le
* z doux
DEDICACE.
doux & incomparable Gouvernement de Vos Excel-
lences. J'ai été 8c féjourné en divers Roïaumes &
Etats de l'Europe. J'y ai remarqué avec foin diverfes for-
mes de Gouvernement. Celle de Vôtre République m'a
paru la plus conforme à la douceur de la Vie Civi-
le. C'eft d'autant qu'elle eft fondée fur la juftice & la
debonnaireté. Ce font les deux pivots , fur lefquels je
vois rouler le Gouvernement de Vos Excellences.
Leur Sageffe en l'adminiitrant fait l'admiration des gens.
Elle a brillé en toutes les occafions les plus délicates 8c
les plus difficiles. Elle a fû conferver en leur entier les
intérêts de leur Etat. C'eft dans les Négociations , qui
pouvoient y influer quelque dérangement. Entre tant
d'autres j'en raporte dans mon Ouvrage quelques-unes
de celles de 1704. qui font de plus fraiche date. Car
ce feroit s'expofèr dans une vafte Mer , fi l'on vouloit
entreprendre d'en toucher d'autres portions.
Si la Sageffe de Vos Excellences fait un de leurs
plus éclatans ornemens , leur Valeur en fait un autre qui
ne l'eft pas moins. C'eft la bravoure , & l'intrépidité
de Vôtre Nation, que diverfes Puiffances ont envifagé,
lors qu'Elles Vous ont demandé des Troupes. Toutes
les occafions tant anciennes que modernes , où celles-ci
fè font trouvées , leur ont été autant d'Epoques de Gloi-
re. C'eft celle-ci principalement, joint à la vue de fe
former de bons Officiers pour la defenfe de leur Patrie ,
qui leur a été un aiguillon à fe diftinguer dans le Service
étranger. C'eft aulfi la même, que Vos Troupes, fous
le fage Commandement de Vos Chefs , ont remporté
de fi éclatantes 8c decifives Victoires en 171 2. Celles-
ci, Messeigneurs, vous ont confervé la belle répu-
tation ,
DEDICACE.
tation , infeparable de vôtre admirable conduite , de
garder faintement la bonne foi , & d'avoir en horreur fa
violation. Ce qui a porté vôtre République au plus
haut de l'Admiration , eft vôtre modération. L'on a
vu que l'Ambition & le defïr d'étendre vôtre Puiifance
n'étoient pas vôtre palîion dominante. Après avoir châ-
tié l'infidélité de vos Ennemis , qui meritoient de leur
aveu les plus extrêmes coups d'une férule vangereffe ,
vous avez fuivi une belle maxime. Elle confifte en ce
qu'il y a plus de grandeur d'ame , & que la gloire eft plus
relevée, en pardonnant & confervant un Ennemi vaincu
& abattu. Par-là vôtre renommée panera avec le plus
diftingué éclat à la pofterité la plus éloignée. Vous a-
vez aufli par-là établi une folide tranquilité dans vos E-
tats. Ceft à l'abri d'e ce charmant calme que j'ai eu le
loifir de m'apliquer à cet Ouvrage. Ceft à l'inftance de
plufieurs des principales Cours , & Miniftres d'Etat de
l'Europe, dont j'ai l'honneur d'être connu. J'en ai mê-
me reçu plufieurs Lettres. L'on a la bonté de m'y mar-
quer de l'impatience de le voir. Quelque bonne opinion
qu'ils en aient , je prétends d'y donner du relief. Ceft
en prenant la très-humble liberté d'y mettre à la tête le
nom de Vos Excellences. Celui-ci feul fèrvira ,
non feulement pour ce premier Volume, mais aufli pour
tous les autres de fuite , quelque nombreux , plus cu-
rieux , & plus intereifans qu'ils puiftent être. Je pro-
tefte que ce n'eft pas dans la bafte vue que je détefte,
& que quelques-uns pourraient avoir, en faifant de pa-
reiles démarches au commencement de leurs Ouvrages.
Mon feul & unique but eft de témoigner avec une fince-
rité de cœur, à Vos Excellences, l'admiration
* 3 que
D E D I C A C E.
que j'ai pour leur fage & excellent Gouvernement. Le
comble de fatisfaction fur mes vieux jours dépend de leur
gracieux agréement fur ce pied-là. D'ailleurs, que fui-
vant leur grande générofité Elles veuillent ne pas dé-
daigner de m'accorder la très-précieufe permiflion de
pouvoir me qualifier avec le plus fournis reipecl: de
MESSEIGNEURS,
DE VOS EXCELLENCES,
Très -humble, très-obéiflant , & très-
dévoué Serviteur,
G. de LAMBERT Y.
A Nion le 20. O&ob. 1723.
A U
AU LECTEUR.
j
l'Ai eu pendant une longue fuite d'années Voccafwn d'être occupé aux Af-
\ faires Politiques. J'en ai confervé quelques Mémoires , depuis le
S commencement de ce dixhuitieme. Siècle , qui a été fi fertile en Evene-
W&QMïM mens extraordinaires. J'ai même eu le foin d'avoir les Documens Au-
thentiques qui y avaient du raport. Ce font les uns & les autres que fai rcfolu
de donner au public. Il y aura quantité d'Anecdotes. En les lifant , Von fera
convaincu qu'ils ne peuvent avoir été puifez que de Jource. Ils pourront fer-
vir à éclaircir fcf à remplir certains vuides de tout ce qu'on en a déjà écrit.
D'ailleurs , ils pourront faciliter la compofition à ceux qui entreprendront de faire
une Hijloire en forme.
Mon premier but étoit d'y inférer toutes les Pièces , tant publiques que fecre-
tes. La grande quantité que j'en ai , auroit rendu l'Ouvrage trop étendu. * T
diant fait reflexion, je me fuis borné à n'y mettre que les plus intereffantes &
les fecretes. Il y aura quelques fois de celles qu'on apelle volantes ou fugiti'
ves. On les a mifes , tant à caufe de leur rareté , que par leur contenu affez
important. Les Pièces en Latin £5? en Italien ont été mifes en quelque petit
nombre fans Tradublion , parce que ces deux Langues font ajfez connues 6? fami-
lières. On a cependant traduit celles qui et oient en Allemand , en Anglais , 13
en Flamand. Il y a des Pièces, comme par exemple des Mémoires de quelques
Miniftres , qui par leur ftile aur oient eu befoin , fi non d'une refonte entière ,
du moins d'être retouchées. L'on a trouvé à propos de ne pas s'émanciper à les al-
térer de kurs Originaux.
Pour abréger autant qu'il a été poffible , on raporte les Sièges, les Batailles,
13 les Evenemens publics en peu de mots. Il n'en efl pas de même des Négocia-
tions , auxquelles l'on s' efl fur tout apliqué. Elles veulent un peu plus d'étendue.
C'efl pour en tracer les vues &f les r effort s.
On a eu le foin de raporter en beaucoup d'endroits des cir confiance s. La raifon
en eft, parce qu'elles fervent de guide à acheminer à droiture à lajufle intelligence
des Affaires. Sans elles on pourvoit fouvent s'égarer du véritable but. On trou-
vera en peu de lieux, certains termes nouveaux, (3 par confequent inufltez. Com-
me les Arts en ont, qui leur font propres , les Pui fiance s, les Mini flr es , & les Né-
gociateurs ont apliqué à quelques Affaires d'Etat certains mots, qu'ils ont jugé ex-
prefftfs pour leurs vîtes éf dont on s'efl fervi.
Quoique le travail f oit grand, je ne l'ai point entrepris comme Mercenaire. Je
n'en tire point de profit. Je n'en ai que le plaifir de faire quelque chofe j;i£tan-
tiâ.ad Poiteros, fuivant que dit 'Tacite. J' aur ois pu apliquer , à plufieurs en-
droits, des pajfages de ce grand Maître de la Politique. Je m'en fuis abflenu,
de
AU LECTEUR.
de crainte d'encourir le blâme d'Oftentation. D'ailleurs la matière même peut af-
fez fournir des réflexions à ceux qui aiment en faire , £5? fervir d'exemple.
Un Ecrivain contemporain peut mieux raporter les chofes , que celui qui en écrit
dans des tems éloignez ou fur des Mémoires furannez. En ce dernier cas F on ne
fait pas bien démêler la vérité d'avec la faufjèté , la flatterie &? la paffion. Cet-
te vérité efl pourtant effencielle pour l'éclair ci (fement des Affaires. Aufji pour la
fuivre de près me fuis- je mis dans l indépendance. C'cfl en renonçant à des pen-
fons,même confiderables , que j'avois de plufieurs de principales Cours de l'Europe.
Par-là le foupçon de flatterie , ou d'animofité , ne pourra pas avoir lieu , parce que
les caufes m'en font éloignées.
Pour rendre la letlure de l'Ouvrage plus aifée , je raporte dans chaque année
les Evenemens &? les Affaires de chaque Pais à part &? de fuite.
Ce premier Volume ne fert , pour ainft dire, que pour faire voir fur quel pied
étoient les Affaires de l'Europe au commencement du Siècle. Ainji on peut le com-
parer à un Vcflibule d'un Palais , dont les differens apartemens font remplis de
curioftez. Ils font , à mefure qu'on y entre, & qu'on y avance, toujours plus ra-
res (3 dignes d'attention. La fuite paraîtra fans difeontinuation.
Je proiefîc que je n'ai le moindre deffein d'offenfer ni desPuiffances, ni des Par -
tiAdicrs. Si je raporte des Pièces , des Conférences , ou des Jugemens des gens
éclairez, ou il y ait des termes indiferets, ou même mordans, le blâme ne doit pas
rejaillir fur moi. Ce/1 d'autant qu'on a été forcé de les raporter par la necefjîté
de l'intelligence des différentes vues de leurs Auteurs , qui peuvent les avoir Jupo-
fees à leur honte.
Comme l'imprefflon s'en fait dans une grande diftance du lieu de mon prefent fé-
jov.r , je n'ai pu y avoir l'œil. Ainfi s'il s'y efl gliffê quelques fautes groffes ou lé-
gères, foit d'impreffion, foit pour n 'avoir pas pu déchifrer mon écriture ou autre-
ment , elles ne doivent pas m' être imputées. Comme l'on n'efl pas infaillible , s'il
y avoit quelque défaut , par inadvertence ou autrement , dans le raport des Affai-
res , l'on trouvera la plus foâmife docilité pour y fupléer ou le redrejfer.
Je fuplie très- humblement le Lecleur , d'avoir une généreufe indulgence pour
mon ftile. Comme la Langue Françoife n'efl pas mon Idiome naturel, je fuis bien
éloigné de me piquer d'en J'avoir l'élégance, & les beautez. De forte qu'on peut
regarder la matière de mon Ouvrage comme un beau Diamant , qui ne perd point
de fa valeur, quoi qu'il ne foit pas mis en œuvre avec tout l'art , &? toutes les de-
licateffes néceffaires pour en rehauffer l'éclat.
M E M O I-
MEMOIRES,
NEGOTIATIONS,
TRAITEZ,
E T
RESOLUTIONS D'ETAT;
Depuis le commencement du XVIII. Siècle.
M
L
jA Guerre commencée en 1688. n'eut pas les favorables fuc-
; ces que les Alliez auroient fouhaitez. C'étoit par raport au
deflein d'amoindrir l'exhorbitant pouvoir de la France. Auf-
fi par fa longue durée aplanit-elle le chemin à la Paix. La
France la preffoit par toute forte d'artifices 6c d'induftrie;
félon quelques-uns., par épuifement , félon d'autres , par raport
à fes vafr.es veuës fur la Monarchie d'Efpagne. Toujours convient-on que
c'étoit par des veuës de Politique , fupérieures fans contredit à toutes celles du
refte de l'Europe, qu'elle faifoit prôner le fpécieux & éblouiffant nom de Paix.
Le Roi d'Angleterre Guillaume III. craignoit qu'on ne lui fournit
plus des Subfides affez abondans pour pourfuivre la Guerre. La raifon en
etoit , qu'une partie de la Nation Angloife prenoit à tache de le chagriner.
Le prétexte en étoit que les lbmmes que le Parlement fourniflbit , étoient di-
verties par des Etrangers.
Déjà le Duc de Savoie avoit fait fa Paix particulière avec la France. L'on
crût que c'étoit de la part de celle-ci qu'il fut répandu dans le public, que le
preçexte en avoit été quelque déclaration faite par le Roi Guillaume au
Comte de la Tour , fon Envoie Extraordinaire , qu'on ne s'aheurteroit pas à
faire avoir au Duc l'importante Fortereflè de Pigncrol. Cette infinuation
dans le public étoit pour pallier le véritable i-eflbrt de cette Paix particulière,
qui ne fut négociée que par furprife. La grande confpiration faite contre la
vie du Roi Guillaume en 1606. étoit tenue d'un fuccès fi infaillible , que
pour le tems qu'elle devoit être exécutée , la Cour de France dépêcha une
pedonne de confidération vers le Duc de Savoie. Elle fit repreiënter à ce
«fe. /'. A Prin-
t MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
Prince que le Roi Guillaume venoit d'être tué. Qu'il favoit que ce Roi
étoit l'arc-boutant ou l'apuis de la Grande - Alliance , laquelle alloit être par
là entièrement renverfée, 8c qu'ainfi le Duc devoit fonger à foi. Que la Fran-
ce avoit de la confidération pour le Duc, 8c qu'elle vouloit bien lui accorder
des conditions de Paix avantageufcs. Le Duc fut fùrpris de cette nouvelle.
L'Emifîàire s'en aperçvk. C'eft pourquoi il déclara d'un air mâle & allu-
re, qu'il faloit qu'il eut là-defius une reponfe promte 8c precife. Le Duc de-
manda une demi heure de tems pour repondre. Sa demande lui fut accordée.
Il le promena là-deifus dans fon Cabinet, 8c le tems s'étant écoulé, il accepta
les offres de la France. Dès que le Roi Guillaume aprit cette nouvelle, il
fit arrêter des Lettres de Change, tirées fur Livoume & fur Gènes à l'ordre
du Duc. Elles montoient à trente mille livres fterlings. C'étoit à compte de
cent mille, que l'Angleterre devoit au Duc pour des arrérages du fubfide.
Peu de tems après le Comte de la Tour, Envoie du Duc, fit raport de cette fur-
prife,pai' laquelle on avoit attiré fon Maître dans le piège. Le Roi Guillau-
me modéra a ce récit fit colère contre le Duc , 8c lui fit toucher une bonne
paitie des Lettres de Change. Pour prouver la furprife, le Comte de la Tour
allégua que fi le Duc fon Maître avoit donné les mains à la Paix, par quelque
connivence de mauvaile foi, il auroit attendu de le faire, qu'il eut reçu la
valeur des Lettres de Change. Ce Comte qui paroiflbit au defefpoir de ce que
le Duc fon Maître venoit de faire, eut même la mortification de le voir char-
gé par ordre de fon Maître, d'aller faire des complimens à la Cour de Fran-
ce. Celle-ci avoit exigé du Duc de Savoie cette foumiflîon par la perfonne
du Comte. On en attribua la raifon à la belle Harangue que ce Comte fit à
fa première Audience lorfque le Duc fon Maître reconnut le Roi Guillaume
en* qualité de Roi de la Grande Bretagne. Elle tendoit trop à infliger de la
flêtrifiiire à la France, pour que celle-ci n'en confervat du refientiment. On
peut en juger par la Harangue même, que ce Comte prononça le iz. No-
vembre i6po. Comme elle peut avoir été oubliée, on la met ici pour la cu-
riofité des Lecteurs.
SIRE,
Haran- J5 Son Altefle Roïale félicite Vôtre Majefté fur fon glorieux avènement à
Syedl1 „ la Couronne dûë à fa Naiflance , méritée par fi vertu, 8c foûtenuë par
de"late . fa valeur. La Providence l'avoit deftinée à vôtre Tête facrée, pour l'ac-
Tour au „ compliflèment de fes deffeins éternels, qui après une longue patience, ten-
Roi _ dent toujours à fulciter des âmes choiiîes , pour reprimer la violence &c
Guillau- protéger la juftice. Les merveilleux commencemens de vôtre Règne font
des picfiges affurez des bénédictions que le Ciel prépare à la droiture de
vos intentions, qui n'ont point d'autre but que de rendre la première gran-
deur à ce floriflàntRoïaume,. 8c de rompre les chaînes, dont l'Europe eft
prefque accablée. Ce magnanime delfein, digne du Héros de nôtre Siè-
cle, remplit d'abord S. A. R. d'une ioïe indicibk; mais elle fut contrain-
te de la tenir refervée dans le fecret de fon cœur > & s'il a pu la faire écla-
ter dans la fuite, il en a l'obligation au nom même Je Vôtre Majefté, qui
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25
ET RESOLUTIONS D'ETAT. ?
^, a fait concevoir des efperances de liberté , après tant d'années de fervi-
„ tude.
„ Mes paroles & le Traité que j'ai figné à la Haïe avec leMiniftre de Vô-
„ tre Majefté , n'expriment que foiblement la pafïïon qu'a mon Maître de s'u-
„ nir à Vôtre Majefté, par fon attachement inviolable à fon fervice. L'hon-
„ neur, Sire, qu'il a de vous apartenir, a formé les premiers nœuds de cet-
„ te Union; le refpect infini qu'il a pour vôtre perfonne facrée, les a ferrez
„ plus étroitement ,& la protection , que vous lui accordez avec tant de gene-
„ rofité , achèvera de les rendre indiffolubles.
„ Ce font les fentimens finceres de S. A. R. en me donnant cette Lettre de
„ créance ; auxquels je n'oferois rien mêler du mien ; car quelque ardent que
„ foit le zèle , & quelque profonde que foit la vénération que j'ai pour la
„ gloire de Vôtre Majefté, je ne faurois mieux m'en expliquer, que par un
„ nlence de rerpeér. & d'admiration. ,
Ce détachement du Duc de Savoie fit quelque peine aux Puiffances , qui
étoient dans la Grande- Alliance contre laFrance. D'ailleurs ilyavoit de la dif-
pofition dans la Republique de Hollande pour la tranquillité. C'étoit en vûë '
de faire par là fleurir fon commerce. Il n'y avoit que ceux qui tiroient des
fûbfides & de greffes fommes pour leur troupes , qui auroient voulu rendre
éternelle la difeorde. La France avoit fait infinuer, pour ainfi dire, les Pré-
liminaires de la Paix. C'étoit par un Mémoire que le Comte tiAvaux (on
Ambaffadeur en Suède , prefenta à cette Cour-là pour en être la Médiatrice.
Ce Mémoire aplaniiToit bien des difficultez. La plus icabreufe étoit la recon-
noiffance du Roi Guillaume pour Monarque de la Grande Bretagne. C'eft
ce qu'on peut voir par ce Mémoire, qu'on raporte ici.
QUoique le Roi T. C. foit en droit de prétendre que VEfpagne l'aïant at- Memoi-
taquée, nonobftant les offres qu'il lui faifoit du maintien d'une bonne TS
Correfpondance avec Elle, toutes les Conquêtes dont il a plû à Dieu favori- d'Avaui
fer fes Armes, tant en Flandres qu'en Catalogne , lui doivent demeurer pour préfenté
le dédommagement des dépenfes qu' Elle lui a caufé : néanmoins pour facili- alaCouï
ter le rétabliffement de la Paix dans toute la Chrétienté , il veut bien rendre T. Sue'
pour cet effet au Roi Catholique l'importante place de Rofes , celle de Belver ,
" en un mot tout ce qu'il a conquis pendant cette Guerre en Catalogne , fans en
rien referver.
On peut dire auffi que les Etats Généraux des Provinces-Unies fe devroient
contenter du rétabliffement du Commerce, que S. M. T. C. confent de régler
fur le même pied q&'il a été par le Traité de Nimegue ; Néanmoins le Roi T.
C. veut bien pour former une Barrière ,qui leur puiffe ôter toutfujet d'inquié-
tude, faire remettre encore au pouvoir du Roi Catholique les Places àtmons^
Charleroi & Namur , en l'état qu'elles font, & rétablir par ce moyen h. Bar-
rière, dont on ert convenu par les Traitez de Nimegue.
S. M. T. C. confent même dès à cette heure qu'en cas de mort du Roi
d'E/pagne fans Enfans, YElecleur de Bavière ait les Pais- Bas Efpagnols, quoi-
que plus à la bienlèance de la France qu'aucune autre partie de cette Monar-
A 2. chie,
4 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
chie, Se veut bien confirmer la Renonciation à cet égard, tant pour lui que
pour Mr. le Dauphin ^avec toutes les formalitez qui feront eftimées neceflaires j
a condition néanmoins que ce fera feulement au profit de YEletleur de Baviè-
re Se de fes Héritiers Se non d'autres , Se que Y Empereur fera une femblable
Dcchratton.
S. M. T. C. ne doute pas que toute V Europe Se les Etats Généraux en par-
ticulier ne regardent cette Renonciation des Pais- Bas Efpagnols en faveur de
Y Electeur de Bavière comme la plus forte Barrière qu'ils puiiTent defirer,pour
rendre la Paix inviolable.
Bien que YEvêaue Se le Pais de Liège aient joint leurs Armes à celles des
Ennemis de S. M. T. C, Elle veut bien néanmoins rendre la Fille Se le Châ-
teau de Huy à l'Evêquc, Se même le dédommager de Dînant Se Bouillon en
réunifiant au Pais de Liège telle portion du plat Pais de Luxembourg qui fe
trouvera être le plus à la bienféance dudit Si". Evêque , Se qui fera eilimee con-
venable par des Arbitres.
Quant aux affaires d' ylngleterre , la Majefté Roi'alc étant blejfée en la perfôn-
ne du Roi de la Grande Bretagne , S. M. T. C. ne doute pas que le Roi de
Suède Se Y Empereur même ne fe portent à propofer quelque expédient polir
terminer ce différent. Et au furplus le Roi T. C. n'a aucune prêt en/ion direcle
ni indirecle contre 1' 'Angleterre , à la referve de ce qu'on a pris fur lui pendant
cette Guerre dans les ljles& l'erré ferme d' Amérique , dont il demande la refti-
tution , Se il elt prêt à renouveller avec cette Couronne les derniers Traitez
de Commerce qui avoient lieu quand la Guerre a commencé,
Déduction. Tour faire voir que fitr les conditions Offertes par
la France , le repos peut être rétabli dans la Chrétienté fur un
pied jufîe , raifomuihle & de durée.
LEs Etats Généraux , qui ont donné occafion à toute cette Guerre, parle
fecours qu'ils ont prêté au Prince à' Orange pour envahir Y Angleterre y
peuvent-ils fouhaiter autre chofe que de renouveller les Traitez de Paix Se de
Commerce avec la France, fur le pied qu'ils etoient lors que cette Guerre a
commencé, Se n'ont-ils pas a, (fez gaigné , lors qu'ils ont obtenu le but qu'ils
foubaitoient en donnant leur fecours pour YétabliJJ'ement du Prince d'Orange
en Angleterre ?
, Le Prince d'Orange veut-il être quelque choje de plus que Roi d' Angleterre}
S: que peut-il defirer, lors que le Roi T. C. demande feulement la reltitution
de ce que Y Angleterre lui a pris dans les IJles' & 'terre ferme de l'Amérique,
5c offre de rétablir les Traitez qui ont été rompus par cette Guerre.
Que ii les Etats Généraux demandent qu'on remette la Barrière dans les
Pâ*ïs-Bas Efpagnols au même état qu'elle a été réglée par le Traité de Nim-
wegue, on verra que le Roi T. C. l'a offert dans les Conditions qui touchent
X'Efpagiie:
A l'égard de YEfpagne ,on peut dire qu'elle ne devoit pas efperer de fi bon-
nes conditions. Elle a déclaré la Guerre à la France Se a perdu cinq de fes meil-
leures
ET RESOLUTIONS D'ETAT. f
leures Places , trois dans le Païs-Bas & deux en Catalogne, 6c une grande éten-
due de Pais. La France rend tout 6c fe contente que l'on convertifîè en Paix le
Traité dcTreve qui a été fait en 1684., ainfi on rétablit la Barrière, qui a et»
ftipulée & marquée dans le Traité de Nimegue , de iiUuprt à Namur , de la
Mer à la Meufe.
On lailîè à la France Luxembourg, que les Etats Généraux 'jugèrent à propos
de lui céder par la Trêve de 1684., pareeque c'eft une Place fïtuée 2f . lieues
au delà de la Barrière & que c'étoit le plus raisonnable équivalent que les Ef-
pagnols pouvoient donner au Roi de France, pour les preten '.fions qu'il avoit
fur divers lieux fituez dans la Barrière 6c dans le Cœur des Païs-Bas Efpa-
gncls
Le Roi T. C. a plus fait, car pour ôter tout fujet d'inquiétude à l'avenir
aux Etats Généraux, il a confenti que les Païs-Bas Efpagnols, qui font plus
à la bienfeance de la France que tout le reite des Etats du Roi Catholique ,
demeureront en toute Souveraineté & propriété à VEletleur de Bavière , en cas
de mort du Roi d'Efpagne fans Enfans , pourvu que X Empereur donnât le mê-
me contentement^ de fou côté. Et S. M. T. C. aïant fû qu'on donnoit à un
offre fî confidérable une interprétation fort maligne , Elle confentira volon-
tiers qu'il n'en foit point parle, fi les Ennemis ne croient pas cette offre avanr
tageufe pour Eux.
L'Empereur aïant pris prétexte de dire qu'il étoit inutile de faire 'la Paix,
puis que le Roi T. C. pouvoit la rompre dans peu d'années, fi le Roi d'Ef-
pagne venoit à mourir fans Enfans , il a démandé pour cet effet que le.
Roi T. C renonçât tout de nouveau à cette fuccefîîon. Quoique S. M. T.
C. pût alléguer qu'il étoit hors de raifon de laiffer périr tant de milliers de
perlbnnes fous ce prétexte , 6c que s'il avoit lieu , il faudrait encore continuer
la Guerre pendant 40. ans, fi le Roi d'Efpagne vivoit auffi long-tems ; que
cette affaire - là n'avoit rien de commun avec la Guerre prefente 5 que la re-
nonciation faite par la Reine de France étoit nulle, comme il lé peut voir clai-
rement par tous les Ecrits qui ont été faits fur ce fujet ; 6c que quand elle
aurait été valable, elle ferait devenue caduque , pareeque les Efpagnols n' 'ont pas
fourni les fommes qu'ils étoientobligez de donner dans un certain tems. Néan-
moins le Roi T. C. pour faire voir qu'il eft bien éloigné de chercher des oc-
cafions de faire la Guerre , veut en ôter tout prétexte.
Quoiqu'après le refus que le dernier Duc de Lorraine a fait de ce qui a été
ftipulé en fa faveur par le Traité de Nimegue, l'Empire n'ait plus droit de fè
mêler de ce qui regarde la Lorraine, néanmoins S. M. T. C. avoit accordé
au Prince fon Fils aine les mêmes avantages que l'Empereur 6c l'Empire ont
fut inférer dans le Traité de Nimegue, à la referve de Sarre -Louis , Bitfche ,
6c Hambourg, pour lefquels cependant S.M.T.C.vouloit bien convenir d'un
équivalent de pareil revenu ; mais comme on a fait réprefenter au Roi T. C.
que les 4. Chemins d'une demi lieue de largeur chacun , qu'il fe refervoit dans
les Etats du Duc de Lorraine, les feparoient entièrement, S. M. T. C. y a
eu égard , 6c quoiqu'elle dût poffeder ces 4. Chemins en t»ute propriété 6c
Souveraineté tant par le Traité de Nimegue que par l'accommodement de
\66i. Elle veut bien fe contenter du feul pajfage pour fes Troupes, enpayant
A 2, 4t
6 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
de gré à gré ce qui leur fera fourni , à la charge que cette reftitution des 4.
Chemins tiendra lieu du dédommagement de Sarre-Louis , autrement Faudre-
• vange, Bitfche &c Hombourg . & deLongwy, auquel S. M. T. C. s'étoit obligée
par le Traité de Nimegue. Et comme cette offre cil infiniment plus avanta-
geufe pour un Duc de Lorraine qu'aucun autre équivalent , que fes Etats de- "
meurent réunis par-là, 8c qu'on lui rend dix fois plus que ces 4. Places ne va-
lent > il eft fans doute qu'il ne peut que remercier le Roi T. C. de la manière
genereufe dont il ufe envers lui en cette occafion.
Pour ce qui regarde Y Empire , on trouvera que le Roi de France ne pou-
voit offrir des conditions plus avantageufes, fi on veut regarder l'état prefent
des affaires , ni qui fuffent plus propres à conferver le repos entre la France 6c
l'Empire, fi on veut confidérer la fituation des Lieux que la France cède, &
de ceux qu'elle fe referve : èc il faut avouer qu'il n'y a pas d'aparence que
l'Empereur puiffe reprendre par la force des Armes aucune des trois Places
que le Roi de France offre de rendre on de rafer ; & qu'il fe ferait contenté de
beaucoup moins, fi on avoit difputé pied à pied, dans uneAffemblée,les con-
ditions de la Paix.
S. M. T. C. met pour fondement par cette Paix que les Traitez de ÎVefi-
phalie 8c de Nimegne demeureront dans leur force 8c vigueur .
Qi_'e celui qui a été conclu à Ratisbonne au mois d'Août 1684., fous le
nom de Trêve pour 20. années foit converti en un Traité de Paix définitif, avec
les changemens ci-après expliquez , & qui doivent fervir de preuves convain-
cantes à tout l'Empire que le Roi T. C. n'a aucune penfée d'y faire des con-
quêtes j mais qu'il veut feulement rétablir & affermir tant pour lui que pour
les Succeffeurs une bonne 8c parfaite correipondance avec l'Empereur 8c les
Etats 8c Princes d'Allemagne.
Que, pour compenfation de la Ville de Strasbourg 8c des Forts, dont le Roi
T. C. eft en polîelfion 8c que S. M. T. C. retiendra incommutablemtnt , tant
pour Elle que pour fes Succeffeurs , premièrement Mont-Roïal 8c Trarbach
îbient rafez 8c reftituez au Prince à qui ils apartiennent, fans qu'on puiffe ja-
mais Fortifier ni l'un ni l'autre de ces deux poftes.
En fecond lieu que tout les Ouvrages du Fort-Louis 8c de Hunninguen qui
font au delà du Rhin à l'égard de la France, foient pareillement démolis.
En troifieme lieu de rendre Philisbourg , fortifié avec lbn fort , 8c Fribourg
au même état où il eft : S. M. T. C. eft perfuadée que tout les Princes 8c
Etats de l'Empire qui défirent la Paix feront convaincus que des offres fi avan-
tageufes à toute l'Allemagne , font non feulement fufhïantes pour la compen-
fation des Ville 8c Fort de Strasbourg , mais auflî pour leur fervir de garand &
d'affurancedelayîrfW//?' avec laquelle Elle veut bien entretenir une parfaite cor-
îcfpondance avec Eux 8c leur ôter à l'avenir tout fujet d'inquiétude 8c de dé-
fiance. Ils n'en peuvent en effet délirer une plus grande preuve que l'aban-
donnement de l'importante place de Mont-Roïal que le Roi T. C. a rendu
préfque imprenable par les Fortifications qu'il y a faites, facrifiant au bien de
la Paix les excetiûves depenfes qu'elle lui a coûté 8c délivrant par-là tous les
Etats voifins de l'inquiétude que cette Place leur pourrait donner.
Celle de Philisbourg que le Roi T. C. a poffedé près de 30. années, en ver-
tu
ET RESOLUTIONS D'E T A T. 7
m du Traité de Munjler, n'eft pas d'une moindre confequence, & comme il
y a fait ajouter de très belles Fortifications, depuis la dernière conquête qu'il
en a faite,, à prefent qu'Elle lui eft revenue par le droit de la Guerre, il en
pourroit retirer de grands avantages , s'il n'étoit bien perfuadé que la Paix
qu'il offre de faire, ne fera jamais altérée de part ni d'autre.
C'eit par cette raifon auffi qu'il veut bien faire rafer , ainfi qu'il a été dit ,
les Ouvrages qui font au delà du Rhin, tant au Fort- Louis qu'à Hunninguen
8c remettre à Y Empereur la Place de Fribsurg, dont les Fortifications ne laif-
fent rien à defirer, pour la rendre prefque imprenable.
S. M. T. C. veut bien encore remettre YElecleur Palatin en pofleffion de
Heidelberg 8c de toutes les dépendances du Palatinat; déclarant même qu'en-
core qu'on ait fait voir que les droits de Madame la Ducheffe d'Orléans fa
belle Sœur, à caufe de la Succeffion des deux derniers Electeurs fes Père ÔC
Frère, foient bien établis fur plufïeurs Terres & Fiefs dudit Païatinat, néan-
moins Elle veut bien fe charger entièrement de la dédommager, en forte que
le dit Electeur demeure paifibie Poffeffeur de tout le dit Pais.
Le Roi T. C. confent auffi qu'en cas qu'il y ait quelqu'une des Réunions
ci-devant faites, qui ne foit conforme aux Traitez,, il foit nommé des Com-
miffaires de part & d'autre, pour examiner de nouveau les raifons de ceux qui
en porteront leurs plaintes , & en cas que lefdits Commiflaires n'en puif-
fent convenir, S. M. T. C. s'en raportera à l'arbitrage de la République
de Venife.
Et à l'égard du Duché de Deux- Ponts, le Roi de France offre de le re-
mettre au pouvoir du Roi de Suède , dans l'Etat où il ell à prefent , & fans y
rien prétendre à Y avenir, quoiqu'il paroiffe par les titres, que ce Duché dé-
pend de l'Evêché de Metz.
L'Empereur aïant fait connoître. qu'il ne verroit pas volontiers que le Roi
de France demeurât en pofleffion de Cafal, Sa M. T. C. confent de remettre
cette Place au Duc de Mantouè , pourvu qu'Elle ait par la Paix les furetez
neceflaires pour empêcher que la Maifon à" Autriche ne s'en puiffe emparer, ce
q\ii convient également au repos de Y Italie.
Tout ceci faifant voir, que les propofitions de la France font auffi avanta-
geufes aux Ennemis de S. M. T. C. , qu'ils en pouvoient defirer , ils n'ofent
auffi s'en plaindre ôc ne font difficulté que fur la Ville de Strasbourg; car il
faut bien qu'ils allèguent quelque chofe pour prétexter le refus qu'ils font de
faire la Paix. Comme tout ce qu'ils dilènt fe réduit à deux points; l'un que
la Cejfion de Strasbourg à la France ferait contre les Traitez de Weftphalie , l'au-
tre que cette Ville eft trop confiderable pour pouvoir être abandonné par V Em-
pire, il faut détruire ces deux raifons, ce qui eit très-aifé à faire.
On dirait à entendre alléguer aux Impériaux les Traitez de Weftphalie , qu'ils
les ont toujours tenus pour une Loi facrée , qu'ils n'ont jamais violée ; cepen-
dant on ferait un Livre entier des Contraventions qu'ils y ont faites. Je me
contenterai de dire
Que Y Empereur y a contrevenu à l'égard de la Suède dans la Guerre de
Pologne 5c de Dannemark, ayant affilié ces deux-Couronnes contre le feu Roi,.
Charles Gustave j 8c à l'égard de la France en 1673., aïant déclaré la
Guère-
8 MEMOIRES, NEGOT1 ATIONS, TRAITEZ,
Guerre à la France en faveur des Hollandais, quoiqu'il eut promis deux mois
auparavant par un Traité folemnel de n'en rien faire.
On convient toutesfois que les 'traitez de IVeftphalie doivent être régardez
comme une Loi fondamentale de l'Empire. C'eft de cette forte que la France
les confidére, & ellepofe pour fondement de la Paix qu'ils demeureront dans
leur force & vigueur j mais quoique tous les établifTemens nouveaux que ces
Traitez ont fait dans l'Empire, doivent demeurer à perpétuité . il eft certain
néanmoins que quand on trouve qu'il eft neceflaire pour le bien de la Paix ou
pour d'autres grandes raifons, de changer quelque chofe à ce qui a été réglé
par les Traitez de IVeftphalie., on le peut faire fans les enfreindre , & on l'a
fait plus d'une fois depuis leur Conclufion, {ans qu'on ait prétendu pour cela
qu'ils aient été violez > fans parler du Neuvième Eletlorat que V Empereur vient
de créer contre la teneur des Traitez de IVeftphalie , n'eft - il pas vrai que les
Ducs de IVolfenbuttel ont revendiqué la Ville de Brunswick Capitale de leur
Duché depuis laPaix de Munfter, <8c que l'Empire n'y a rien trouvé à redire,
quoiqu'Elle fut Ville Impériale ?
L'Evêque de Munfter a fait la même chofe de fa Capitale: l'Evêque de
Mayeme ai! Er fort.
On ne peut pas obje'éber que l'on n'a pas démembré Brunsivick, Munfter &
Erfort de l'Empire & qu'ainh* ils ne peuvent être comparez à Strasbourg
qu'on veut aliéner; car je ne prétend pas encore parler du démembrement;
je foû tiens feulement dans cette première propofition qif 0» a fait des change-
mens aux Traitez de IVeftphalie fans qu'on ait dit pour cela qu'ils étoient rom-
pus; or que ce changement iè fuTe au dehors ou au dedans de l'Empire, c'eft
toujours une innovation aux Traitez de IVeftphalie: Et fi l'Empereur dépouil-
loit un Prince des Etats que les Traitez lui ont ajugez, pour les donner à un
autre, il n'y a perfonne qui ne foûtienne qu'il contreviendroit aux Traitez de
H'eftphalie, quoiqu'il ne démembrât point l'Empire,
Je dis plus , qtfun démembrement de P Empire eft moins contraire aux Traitez
de IVeftphalie qu'un des changemens ci- de ff us fpecifiez-, car fi on veut confidérer
les caufes de la Guerre que le Roi Gustave Adolphe a porté dans l'Em-
pire, on trouvera que ce n'a été que pour empêcher les changemens que Ferdi-
nand 1 1. vouloit faire au dedans de l'Empire au préjudice des Droits & Li-
bertez des Etats & pour réparer ceux qui avoient déjà été faits. Aufîi fait-
on que tout le Traité de il l 'un fier ne roule que fur la reftitution de ce que l'Em-
pereur avoit ufurpé ou que des Princes avoient pris les uns fur les autres. Ain-
fi le véritable efprit de ces Traitez, eft d'empêcher à l'avenir des changemens
de cette Nature, & de pourvoir à ce que chaque Prince 8c chaque Ville de-
meurât dans l'Etat où il a été mis par les Traitez de IVeftphalie.
Au refte bien loin que les démembremens de l'Empire foient défendus par
ces Traitez, quand ils fe font pour le bien de la Paix, ils y font même auto-
rifez, puifque, par ces Traitez., on a démembré Metz, Thoul, Verdun, les
deux Alfaces , Philisùourg.
hors qu'on a fait la Paix à Nimegue , quoique l'Empereur eût attaqué h
France, contre la teneur des Traitez de IVeftphalie , néanmoins on a juge pour
le bicii de la Paix de lui laitier Philisbourg, qui apartient u la France par les
irai-
ET RESOLUTIONS D'ETAT. y
Traitez de Munfler , & de laitier en échange Fribourg à la France quoique ce
fut une Ville héréditaire de l'Empereur. On a donc aliéné Fribourg de l'Em-
pire. Si on répond qu'on Ta échangé contre Philisbourg qui eft rentré dans
l'Empire, je conclurrai toujours que ma proportion eft vraie qu'on peut fai-
re pour de bonnes rat fins des changemens aux traitez defFeftphalie, 6c que iï on
a changé Philisbourg contre Fribourg à la Paix de Nimegue, on peut a prefent
changer Strasbourg contre Philisbourg, Fribourg 6c tous les Etats mentionnez
ci-deiïus. On ne peut pas dire que le Roi T. C. n'a Philisbourg que par droit
de Conquête, il l'a eu par le Traité de Munfler, èc l'aïant repris depuis cette
dernière Guerre, il eft rentré dans fon ancien Droit, comme l'Empereur pré-
tendroit avec raifon devoir conferver Fribourg comme une Ville héréditaire ,-•
s'il la pouvoit reprendre, fans qu'on pût lui objetter qu'elle ne lui apartient
que par droit de Conquête.
Ainfi on peut dire qu'il eft permis de changer quelque chofe à ces Traitez quand
on le trouve necejfaire pour le bien de la Paix. Il n'eft donc plus queftion que
de faire voir que la Celfion de Strasbourg à la France n'eft pas une choie fi
confiderable que les Autrichiens le publient, & que c'efi le moïen le plus court
& le plus facile d' 'avoir une Paix jufte &? de durée.
Je remarquerai en parlant cette circonftance dans l'affaire de Strasbourg , qui
rend le Droit de la France plus fort que celui des Ducs de Wolfenbuttcl 6c des
autres qui ont réduit leur Capitale. C'eft que le changement qui eft arrivé à
l'égard de la Ville de Strasbourg, s'eft fait du confentement de la plus faine
partie des Habitans 6c que tous y ont enfin donné les mains ; Se on peut dire
que c'a été pour leur avantage, parce que cette Ville étant Impériale , Elle
ne pouvoit fe difpenfer, quand les Guerres arrivoient, d'être dans les intérêts de
l'Empire -, 6c d'un autre côté fa fituation l'expofant aux Armes de la Fran-
ce, 6c l'éloignant des fecours de l'Empire, elle fe trouvoit dans un état fâ-
cheux.
Lors que cette Ville y a cherché des remèdes , en faifant des Traitez de
Neutralité avec la France, l'Empereur l'a auffi-tôt obligée de les rompre , 6c
l'a réjettée dans de nouveaux malheurs , en l'expofant au reflentiment que la
France avoit de fon infidélité.
Si l'on compare fon état , depuis qu'elle eft à la France , pendant la prefèn-
lênte Guerre, on y trouvera une grande différence de celui où elle a été pen-
dant celle de 167Z., puifqu'elle n'a pas reflènti la moindre incommodité pen-
dant celle-ci.
Mais fans entrer dans tous ces raifonnemens , 6c iupofant même que la Fran-
ce n'eut aucun droit fur Strasbourg, voïons fi le Roi T. C. donne un équiva-
lent raifonnable. Il faut confiderer pour cela la grande étendue de Pais 6c la
quantité de Places fortes dont le Roi T. C. eft en poffefîîon, 6c qu'il offre de
rendre ou de rafer pour équivalent de Strasbourg , favoir Fribourg 6c Philis-
bourg en leur entier; Mont-Roïal, Trarbach , avec les Ouvrages de Humtinguen
6c du Fort- Louis, qui font au de là du Rhin à l'égard de la France , raiëz,
VEleclorat Palatin 6c tous les autres Etats de l'Empire dont il eft en polïêf-
fion, 6c plus de deux tiers du Palatinat qui apartiennent inconteftâblement à
Madame la Duchejfe d'Orléans , par la fucceflîon de fes Père 6ç Frère, der-
Tom. I. B nias
io MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
niers Elc&eurs,dont il s'eft obligé de dédommager Madame laDuchefle d'Or-
léans. Si on compare tout cela avec la feule Ville de Strasbourg, on trouve-
ra que le Roi de France rend beaucoup plus à l'Empire que Strasbourg ne
peut valoir. Aufiï eft-ce par un efprit d'équité 6c par un defir fincére d'éta-
blir une Paix qui maintienne pour toujours la France & l'Empire en repos,
que le Roi T. C. aime mieux conferver une Ville qui eft du côté de la Fran-
ce 6c en céder deux du côté d'Allemagne, rafer tant de Places 6c de Forts,
6c rendre une fi grande étendue de Pais.
On doit confiderer que la Ville de Strasbourg fe trouve feule 6c (ans aucun
Pais, qui en dépende, au milieu des Etats du Roi de France, 6c on doit
conclurre de là qu'elle ne peut jamais être en d'autres mains d'aucune utilité ,
mais feulement pour nuire à la France ; que Fribourg 6c Philisbourg fe trou-
vent pareillement entourez de tous cotez de terres de l'Empire , 6c que ces
deux places par confequent ne peuvent être d'aucune utilité qu'en cas de
Guerre contre l'Empire, ce qui fait voir que le Roi T. C. a réfolu de con-
ferver inviolablement la Paix , efperant que l'Empereur en ufera de même.
Ceux qui voudroient alléguer que Strasbourg donne un pafTage au Roi de
France dans l'Empire, n'ont aucune connoifTance de la Carte, ou ne veulent
pas faire reflexion que Philisbourg donne la même entrée 6c bien plus avanta-
geufe en ce que c'eft beaucoup plus bas, 6c par confequent dans le Cœur de
PEmpire> que dePbilisbourgon entre, fans aucun obftacle, dans les Plaines de
la Franconie , 6c qu'aïant ce pofte au de-là du Rhin, pour y faire des Maga-
fins, 6c y entretenir les Armées , il eft infiniment plus avantageux, pour une
Guerre OfFenfive à l'Empire , que celui de Strasbourg.
L'Empereur a fi bien connu cette vérité 8c l'importance de cette Place,
qu'il a mieux aimé céder par le Traitez deNimegue une Ville héréditaire con-
fiderable par elle-même, comme eft Fribourg, que de laifîèr la France en pof-
feffion de Philisbourg.
Je ne crois pas non plus qu'on objecte que le R S\ de France a attaqué l'Em-
pire èc qu'il doit rendre Strasbourg, qu'on lui avoit cédée pour 10. ans par la
Trêve faite 4. ans auparavant. L'Empereur déclara la Guerre à la France en
1673. 6c a néanmoins confervé par la Paix Philisbourg, qu'il avoit pris fur la
France dans cette Guerre-là, 6c quoique l'Efpagne ait déclaré la Guerre à la
France, le Roi T. C. offre néanmoins de rendre toutes les Places qu'il a con-
quifes fur cette Couronne.
Enfin on peut dire que fi on vouloit entrer dans la difcuffion des Traitez-de Mun-
fler , de Nimegue &? de Ratisbonne , on feroit revivre des conteftations infinies,
qui ont été terminées par le dernier de ces Traitez , 6c qui fourniroient plutôt
de nouvelles matières de Guerre, que des moïens de la faire cefier: On en-
tameroit une Negotiation qui dureroit autant que celle de Munfter , au lieu
que par les rafemens 6c reftitutions propofées , on concilie ce que contiennent
ces trois Traitez 6c on pourvoit pour toujours à la fureté de l'Empire , aufiî
bien qu'à celle de la France , êc par confequent à une perpétuelle durée d'u-
ne bonne 6c parfaite correfpondance.
C'eft là-ddKis que la France envoïa une perfbnne à la Haïe , qui fut fore
fe»
ET RESOLUTIONS D'ETAT. n
fecretement introduite auprès de quelques Membres des Etats Généraux par
un nommé Mollo, Marchand d'Amfterdam , homme d'intrigue & de capaci-
té. On convint qu'on admettrait à Maeftricht, Caillercs^ pour convenir au-
tentiquement des Préliminaires avec Mr. de Dyckvelt. Après quelque tems ,
pour ne pas entrer dans un détail qui ne ferait pas de mon fujet, l'on convint
de Rysivick pour y traiter.
Après plufieurs conférences la Paix y fut conclue, premièrement avec l'An-
gleterre & la Hollande. Quelques jours après on fît celle avec l'Efpagne.
Celle de l'Empereur & de l'Empire traîna quelque tems. C'étoit par la mul-
tiplicité des intérêts 6c par l'indolence des Membres du Corps Germanique.
Il falut pourtant dans la fuite la conclurre à la hâte. C'étoit p.irceque la Fran-
ce, étant venue à bout de faire brèche à l'Alliance, la preffoit, la foudre des
menaces à la main , en y preferivant le tems. Elle ne héfita point de rendre
plufieurs Places , ainfi qu'EUe n'avoit pas fait difficulté de reitituer plufieurs
Villes desPaïs-Bas Efpagnols qui formaient la fameufe Barrière , pour la fureté
des Provinces-Unies. Elle ne s'étoit pas même refervé l'importante Forteref-
fe de Luxembourg. Le Miniftre Efpagnol avoit infifté fur fà reddition , mê-
me contre les ordres de fa Cour, qui alarmée de la perte de Barcelonne, n'af-
piroit qu'à la Paix. L'on jugea que la France, étant informée de l'état in-
firme de Charles II. , fes vues tournoient fur cette Monarchie énervée.
Ainfi elle ne defefperoit pas que ce qu'elle rendoit, ne revint bien-tôt avec
ufure à fa Maifon.
Pour en éloigner les obftacles elle prit dès ce tems -là des mefures. Elle
commença par profiter du zèle hors de faifon d'un Prince Catholique de
l'Empire qui avoit fuccedé à un Etat Proteftant. Par des Négociations fè-
cretes avec ce Prince, ménagées par des Miniftres dans un Village , fous le
prétexte des contributions, elle fit inférer dans le Traité de Paix avec l'Em-
f)ire le quatrième Article. C'étoit pour être une fource de défunion entre
es Princes d'Allemagne. La vûë en étoit d'empêcher une autre fois leur Li-
gue, qui venoit de le rompre. Pour y parvenir elle faifoit fous main aigrir
les Princes Proteftants , pendant qu'elle faifoit roidir les Princes Catholiques
au fujet de cet Article. Pour animer les premiers on fiiifoit prôner le Traité de
TVeftphalie qui étoit le Bouclier de leurs Libertez , & contre lequel cet Article
tendoit. On faifoit en même tems infpirer aux Catholiques que le même
Traité avoit été trop avantageux aux Proteftans. Ainfi qu'il faloit foûtenir
l'Article IV. de celui de Ryswick. On tira même de l'avantage de ce que
tous ces Traitez qu'on venoit de faire, n'avoient pas été faits conjointement
entre tous les Alliez.
Véritablement tous ces Traitez, faits les uns après les autres , aigrirent les
Membres du Corps Germanique , qui furent biffez les derniers . Aufïï fes
Plénipotentiaires fe prefïèrent-ils de s'en retourner. Le Comte de Caunitz,
impatient de prendre poffeffion de fa nouvelle charge de Chancelier à la Cour
Impériale, fut des premiers à vouloir partir. Par- là l'on n'eût pas le tems de
négocier une nouvelle Ligue. Elle devoit être pour aflurer la fucceflïon d'Ef-
pagne à la Maifon $ Autriche. Le Roi d'Angleterre & les Etats Généraux
y ctoient fortement portez. Don Bernardo de Quiros, Miniftre d'Elbagne,
B 2, avoit
ii MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
avoit même ordre d'y concourir. Les inftances des Miniftres de ces Puilîàn-
ces ne purent arrêter le départ de ceux de l'Empire. Ainli ce prevoiant def-
fein échoua.
La Cour Impériale fe flattoit d'autres moïens pour s'alîurer de la Monar-
chie d' Efpagne. On lui infinuoit qu'il faloit attirer à lbn parti des princi-
paux Efpagnols. On négligea ces figes répréfentations. C'étoit pirceque
l'on fc fioit fur la Reine d'Efpagne, 6c beaucoup fur la Comtelïè de Berlips ,
qui n'étoit que Femme Se étrangère. Il eft vrai qu'elles avoient beaucoup
d'attendant fur l'efprit de ce Roi. Elles ménagèrent avec lui de faire aller en
Efpagne l'Archiduc Charles. Le Roi fe plaifoit même à s'entretenir avec
Elles de la manière que ce Prince y vivroit. Le Miniftre de l'Eleéteur de
Trêves, qui avoit de l'habileté propofa d'envoier quelques Troupes Alleman-
des en Efpagne & en Amérique. Elles dévoient être à la iblde du Roi Char-
les. L'obftacle de la dépenfe du tranfport en retarda la refolution. La Fran-
ce qui craignoit de telles précautions, les empêcha par des menaces, aufîî-
bien que le voïage de l'Archiduc Charles pour l'Efpagne. Ce dernier lui
étoit tant à Cœur, le regardant comme le coup qui traverfoit le plus fes vues,
qu'elle exigea dans la fuite par l'Article VIII. du fécond Traité de Partage ,
ainfi qu'on verra en fon lieu, que l'Archiduc ne pourrôit pas palier en Efpa-
gne. Les menaces de la France avoient beaucoup d'influence. Elle étoit
reftée Armée, au lieu que les Alliez réformèrent leurs Troupes d'abord après
la Paix. Le Parlement d'Angleterre ne voulut lailTer fur pied que fept mille
Hommes pour la garde des Places Fortes du Roïaume.
On ne laiffà cependant pas de fonger à prévenir les inconveniens qui nai-
troient de la mort du Roi Charles. On propofa pour fon SuccefTeur le
Prince Electoral de Bavière fon Neveu. La France qui en avoit fait faire la
propofition l'agréa. On infinua que la raifon de cet agrément étoit, parce-
que par -là cette Monarchie fortoit de la Maifon d'Autriche. L'on a tenu
que le Comte de Portland , qui avoit eu des entrevues avec Bouficrs, lors
qu'en fortant de Namrtr, il fut arrêté par Mr. Dyckvelt> avoit jette les fon-
demens du premier Traité de Partage , qui fut enfuite fait en faveur du mê-
me Prince Electoral Se qu'on trouve à propos d'inférer ici.
Conclu ÇOit notoire à tous qui ces prefentes verront , que le Sereniffime 6c très-
entre le ^ puiflànt Prince Guillaume III. par la grâce de Dieu , Roi de la
Roi de Grande Bretagne, 6c le Serenilîîme, ?c très-puiflànt Prince Louis XIV.
la Gr. auifi par la grâce de Dieu Roi Très -Chrétien de France 6c de Navarre, 6c
Bret., le ies Seigneurs Etats Généraux des Provinces-Unies des Pais-Bas , n'aïant rien
Très- de plus à cœur, que de fortifier par de nouvelles liaifons la bonne intelligence
Ch. , & rétablie entre fa Majefté de la Grande Bretagne , fa Majefté Très - Chrê-
J« E- tienne, 6c lefdits Seigneurs Etats-Généraux, parle dernier Traité conclu à
r'u Ryswik , 6c de prévenir, par des mefures prifes à tems, les évenemens, qui
touchant pourroient exciter de nouvelles guerres dans l'Europe , ont donné pour cet
le [.Par- effet leurs plein-pouvoirs , pour convenir, d'un nouveau Traité , fçavoir fa-
jagede <j]te Majefté Britannique, aux Sieurs Guillaume de Bentink, Comte de Port-
narchiê Iand > Chevalier de l'ordre de la jaretiere, Confeiller au privé Conleil du
Roi
ET RESOLUTIONS D'E T A T. 15
Roi de la Grande-Bretagne , fon premier Gentilhomme de la Chambre, & d'Efpa-
Généïal de fa Cavalerie ; 6c à Jofeph Williamfon, Chevalier, aufïi Confeiller gne. A
au privé Confeil dudit Roi , Se Garde de Tes Archives d'Etat : Sadite Majef- ja Haic
té Très-Chrêtienne au Sieur Comte deTallard, Lieutenant-Général de lés oftobet
Armées, 6c de fa Province deDauphiné, fon Ambaffadeur Extraordinaire en 1698..
Angleterre ; & lefdits Seigneurs Etats Généraux aux Sieurs François Ver-
bol t, Sénateur & Bourguemaitre de la Ville de Nimegue , Maître Géné-
ral des poftes dans le Duché de Gueldre , Comté de Zutphen , 6c autres
lieux; Friderik Baron de Rhecde , Seigneur de Lier, St. Antoine 6c Ber-
lée, Sec. Commandeur de Buren, de l'ordre de la Province de Hollande 6c
Weft-Frife j Antoine Heinfîus , Confeiller Penfionaire , Garde du Grand
Sceau, 6c Sur- Intendant des Fiefs de la même Province de Hollande 8c Weft-
Frife } Jean Becker, ancien Sénateur, & Bourguemaitre de Ville de Mid-
delbourg; Jean vander Does, Seigneur de Bergeftein, de l'ordre de la Pro-
vince d'Utrecht; Guillaume van Haren, ci-devant Grietman du Bilt , Dé-
puté de la part de la NoblefTe aux Etats de Frife, 6c Curateur de ï'Uni-
verfité de Franeker ; Arnold Lencker , Bourguemaitre de la Ville de Deven-
ter ; 6c Jean de Drews > tous députez en l' Aflemblée defdits Seigneurs Etats
Généraux , de la part de la Province de Gueldre , de Hollande 6c Weft-Fri-
fe, de Zelande, d'Urecht, de Frife , d'Overyffel 6c de Groningue 6c Om-
melandes , lefquels en vertu defdits pouvoirs font convenus des articles fui-
vans.
I. La Paix rétablie par le Traité de Ryswik entre le Sereniflîme 6c très-
puifîànt Prince Guillaume III. Roi de la Grande Bretagne, le Serenif-
lîme 6c très-puifîànt Prince Louis XIV. Roi Très-Chrétien , de France
6c de Navarre, 6c les Seigneurs Etats Généraux des Provinces - Unies des
Pais-Bas, leurs héritiers 6c Succeffêurs , leurs Roïaumes , Etats 6c Sujets
fera ferme 6c conftante , 6c leurs Majeftez, 6c lefdits Seigneurs Etats Géné-
raux feront réciproquement tout ce qui pourra contribuer à l'avantage, 6c à
l'utilité de l'un 6c de l'autre.
II. Comme le principal objet, que fadite Majefté de la Grande Bretagne,
6c fadite Majefté Très-Chrêtienne , 6c lefdits Seigneurs Etats Généraux , fê
propofent , eft celui de maintenir la tranquilité générale de l'Europe , ils
n'ont pu voir fans douleur, que l'état de la fanté du Roi d'Efpagne foit de-
puis quelque tems devenu fî languifîant , qu'il y a tout lieu de craindre, que
ce Prince n'ait plus long- tems à vivre: quoi qu'ils ne puiffènt tourner leurs
penfées du côté de cet événement, fans affliéHon, par l'amitié fincere 6c vé-
ritable, qu'ils ont pour lui, ils ont cependant eftimé, qu'il étoit d'autant
plus néceflaire de le prévoir , que Sa Majefté Catholique n'aïant point d'en-
fans, l'ouverture de fa fuccelîîon exciteroit infailliblement une nouvelle guer-
re, fî le Roi Très-Chrétien foutenoit les pretenfîons, ou celles de Monfei-
gneur le Dauphin, fur toute la fucceflîon d'Efpagne, que l'Empereur fît auf-
ïi valoir fes pretenfîons, celles du Roi des Romains, de l'Archiduc fon fé-
cond Fils, ou de fes autres Enfans; 6c PEleéteur de Bavière, celles du Prince.
Electoral fon Fils aîné fur ladite Succeffion.
III. Et comme les deux Seigneurs Rois, 6c les Seigneurs Etats Géné-
B 3 raux
14 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
raux défirent fur toutes chofes, la confervation du repos public , 6c d'éviter
une nouvelle guerre dans l'Europe, par un accommodement des difputes 6c
des difterens , qui pourraient refulter au fujet de ladite Succeffion , ou par
l'ombrage de trop d'Etats , reunis fous un même Prince ; ils ont trouvé
bon de prendre par avance des mefures neceflaires , pour prévenir les mal-
heurs , que le trille événement de la mort du Roi Catholique fans Enfans ,
pourrait produire.
IV. Ainfi il a été accordé 6c convenu, que fi ledit cas arrivoit , le Roi
Très - Chrétien tant en fon propre nom , qu'en celui de Monfeigneur le
Dauphin, fes Enfans, Mâles, ou Femelles, Héritiers 6c SuccefTeurs nés 6c
à naître, comme aufii mondit Seigneur le Dauphin pour (bi-méme, fes En-
fans, Mâles 6c Femelles, Héritiers 6c SuccefTeurs, nés 6c à naître, fe tien-
dront fatisfaits , comme ils fe tiennent fatisfaits par la prefente , que mondit
Seigneur le Dauphin ait pour fon partage , en toute propriété , pofïèifion
pleniere 6c extinction de toutes fes prétentions fur la fucceffion d'Eipagne,
pour en jouir lui fes Héritiers 6c SuccefTeurs , nés 6c à naître, à perpétui-
té, ( fans pouvoir jamais être troublé , par quelque prétexte que ce foit , de
droit , ou de prétentions , directement ou indirectement , même par cef-
fion, appel, révolte, ou autre voie , de la part de l'Empereur, du Roi des
Romains, de l'Archiduc Charles, fon fécond Fils, de fes autres Enfans ,
Mâles ou Femelles , 6c defeendans , fes Héritiers 6c SuccefTeurs , nés 6c à
naître , ni aufîi de la part de PEleéteur de Bavière, au nom du Prince E-
leétoral de Bavière, fon Fils aîné, ni dudit Prince Electoral, leurs Enfans def-
eendans, Héritiers 6c SuccefTeurs, nés 6c à naître) les Roïaumes de Naples,
6c de Sicile , les places dépendantes prefentement de la Monarchie d'Efpa-
gne , fitués fur la côte de Tofcane , ou Iles adjacentes ,; comprifes fous le
nom de St. Stephano, Porto Hercole, Orbitello , Jelamone , Porto Lon-
gone, Piombino , en la manière , que les Eipagnols les tiennent prefente-
ment, la Ville 6c Marquifat de Final, en la manière pareillement que les Ei-
pagnols les tiennent, la Province de Guipufcoa , nommément les Villes de
Fontarabie, 6c St. Sebaftien, fituées dans cette Province, 6c fpecialement le
port du paflage , qui y eft compris ; avec cette reftriétion feulement , que
s'il y a quelques lieux dependans de ladite Province, qui fe .trouvent fitués
au delà des Pirenées ou autres Montagnes de Navarre, d'Alava, ou de Bif-
caye du côté de l'Efpagne, ils refteront à l'Efpagne} 6c s'il y a quelques lieux
pareillement dependans des Provinces foumifes à l'Efpagne, qui ioient en
deçà des Pirenées ou autres Montagnes dis Navarre, d'Alava, ou de Bifcaye
du côté de la Province de Guipufcoa, ils refteront à la France ; 6c les tra-
i'ets defdites Montagnes, 6c lefdites Montagnes, qui fe trouvent entre ladite
3rovince de Guipufcoa , Navarre, Alava, 6c Bifcaye, à qui elles appartien-
nent , feront partagées entre la France 6c l'Efpagne, en forte qu'il réitéra au-
tant defdites Montagnes, èc trajets à la France de fon côté, qu'il en reliera à
l'Etpagne, du fien, le tout avec les fortifications, Munitions de guerre, Pou-
dres, Canons, Galères, Chiourmes, qui fe trouveront appartenir au Roi d'Ef-
pagne , lors de fon décès fans Enfans, 6c être attachées aux Roïaumes, Pla-
ces, Iles ôc Provinces, qui doivent compofer le partage de Monfeigneur le
Dau-
ET RESOLUTIONS D'E T A T. if
Dauphin ; bien entendu , que les Galères, Se Chiourmes & autres effets ap-
partenant au Roi d'Efpagne & autres Etats , qui tombent dans le partage du
Prince Electoral de Bavière lui relieront; celles qui appartiennent aux Royau-
mes de Naples, Se de Sicile, devant revenir à Monfeigneur le Dauphin, ain-
lî qu'il a été dit ci-defllis : moyennant lefquels Royaumes , Iles , Provinces
Se Places, ledit Roi Très- Chrétien tant en fon propre nom, qu'en celui
de Monfeigneur le Dauphin , fes Enfans, Mâles ou Femelles, Héritiers &
SuccefTeurs, nés Se à naître, comme auffi mon Seigneurie Dauphin pour
foi-même, fes Enfans, Mâles ou Femelles , Héritiers & Succeflèurs nés &
à naître (lequel a auflî donné fon plein-pouvoir pour cet effet au Sieur Com-
te de Tallard ) promettent Se s'engagent de renoncer lors de ladite Succcf-
fîon d'Efpagne, comme en ce cas-là ils renoncent dès à prefent par celle-ci
à tous leurs droits Se pretenfions fur ladite Couronne d'Efpagne , Se fur les
autres Roïaumes , Iles , Etats , Païs & Places , qui en dépendent prefente-
ment, Se que de tout cela ils feront dépêcher des actes folemnels dans la plus
forte, & la meilleure forme, qu'il le pourra , qui feront délivrés au tems de
la Ratification de ce Traité.
V. Ladite Couronne d'Efpagne , Se les autres Roïaumes , Iles , Etats ,
Païs Se Places , qui en dépendent prefentement , feront donnés Se affignés (à
l'exception de ce qui a été dénoncé dans l'Article précèdent, qui doit com-
pofer le partage de Monfeigneur le Dauphin ) au Prince Fils aîné de l'Elec-
teur de Bavière en toute propriété Se poffeffion pleniere en partage Se extinc-
tion de toutes fes pretenfions fur ladite Succeffion d'Efpagne, pour en jouir
lui , fes Héritiers Se Succeflèurs , nés Se à naître , à perpétuité , fans pou-
voir être jamais troublé , fous quelque prétexte que ce foit , de droits ou
de pretenfions, directement ou indirectement, même par ceffion , appel, ré-
volte, ou autre voie, de la part du Roi Très - Chrétien , de Monfeigneur le
Dauphin, ou de fes Enfans, Mâles ou Femelles , fes defeendans Héritiers Se
Succeflèurs, nés Se à naître, ni de la part de l'Empereur, du Roi des Ro-
mains , de l'Archiduc Charles fon fécond Fils, de fes autres Enfans , Mâ-
les Se Femelles , Se defeendans , fes Héritiers Se Succeflèurs , nés Se à naî-
tre: moïennant laquelle Couronne d'Efpagne, Se les autres Roïaumes, Iles,.
Etats , Païs Se Places , qui en dépendent , l'Electeur de Bavière tant en qua-
lité de Père ', Se de légitime tuteur Se adminiftrateur du Prince Electoral fon
Fils aîné, qu'au nom dudit Prince Electoral, Se qu'en celui de leurs enfans ,.
Héritiers Se SuccefTeurs , nés Se à naître, comme auflî ledit Prince Electo-
ral, dès qu'il fera majeur, pour foi-même, fes Enfans, Héritiers Se Succef-
feurs , nés Se à naitre , fe tiendront fatisfaits , que ledit Prince Electoral ait
pour fon partage la ceflïon , faite ci-deflus dans ce même Article j Se ledit
Electeur de Bavière, tant en qualité de Père, Se de légitime tuteur Se admi-
niftrateur du Prince Electoral fon Fils aîné , qu'au nom dudit Prince , &
qu'en celui de fes Enfans , Héritiers Se SuccefTeurs, nez Se à naitre, renon-
cera lors du décès de Sa Majefté Catholique , Se ledit Prince Electoral dès
qu'il fera majeur , à tous droits Se pretenfions fur la portion afîîgnée à Mon-
feigneur le Dauphin , Se fur celle qui doit être afîîgnée à l'Archiduc Charles
dans l'Article fuivant, Se que de tout cela ils feront dépêcher des Actes fo-
lemnels
16 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
lemnels dans la plus forte , & la meilleure forme, qu'il fe pourra, à fçavoir
l' Electeur de Bavière dans la qualité ci-deffus dite, lors du décès de Sa Ma-
jefté Catholique fans Enfans , 6c ledit Prince Electoral, dès qu'il fera ma-
jeur.
VI. On exceptera toutefois encore defdites ceiîîons Se affignations le Du-
ché de Milan , que les deux Seigneurs Rois , Se les Seigneurs Etats Géné-
raux font convenus devoir être donné à l'Archiduc Charles d'Autriche,
fécond Fils du Sereniffime 6c Très-puiffânt Prince L e o p o l d , élu Empereur
des Romains, en partage 6c extinction de toutes les pretenfions 6c droits,
que ledit Empereur , le Roi des Romains , l'Archiduc Charles fon fécond
Fils, tous fès autres Enfans mâles ou femelles 6c defeendans, fes Succeflêurs
6c Héritiers , nés 6c à naitre, pourraient avoir fur ladite fucceflion d'Efpa-
gne, lequel Archiduc aura en toute propriété 6c poflèflion pleniere ledit
Duché de Milan, pour lui, fès Héritiers 6c Succeflêurs, nés 6c a naitre pour
auffi en jouir à perpétuité, fans pouvoir être jamais troublé fous quelque pré-
texte que ce foit , de droits 6c de pretenfions , directement ou indirectement ,
de la part du Roi Très-Chrêtien 6c de mondit Seigneur le Dauphin , ou
des Princes fes Enfans 6c defeendans, fes Héritiers 6c -Succeflêurs , nés 6c à
naitre, ni aufli de la part de l'Electeur de Bavière , au nom du Prince E-
lectoral, fon Fils aine , ni dudit Prince Electoral, leurs Enfans , Defeen-
dans, Héritiers 6c Succeflêurs , nez & à naitre.
VII. Moyennant lequel Duché de Milan , l'Empereur auflî tant en fon
propre nom , qu'en celui du Roi des Romains , de l'Archiduc Charles
fon fécond Fils, fes Enfans, mâles ou femelles , leurs Enfans, Héritiers 6c
Succeflêurs, nez 6c à naitre; comme aufli le Roi des Romains, 6c l'Ar-
chiduc Charles , dès qu'il fera majeur, pour lui-même, leurs Enfans,
Héritiers 6c Succeflêurs, nez 6c à naitre, fè tiendront fatifaits , que l'Ar-
chiduc Charles ait en extinction de toutes leurs pretenfions fur la fuccef-
fion d'Efpagne , la ceflion faite ci deflus dudit Duché de Milan ; Se le-
dit Empereur tant en fon propre nom , qu'en celui du Roi des Romains ,
de l'Archiduc Charles fon fécond Fils, fes Enfans, mâles ou femel-
les , 6c les leurs , leurs Héritiers 6c Succeflêurs ; comme aufli ledit Roi
des Romains , en fon propre nom , renonceront lors du décès de Sa Maje-
fté Catholique ; 6c F Archiduc Charles, dès qu'il fera majeur , à tous
autres droits 6c pretenfions fur ladite Couronne d'Efpagne , 6c fur les au-
tres Roïaumes, Iles, Etats, Pais 6c Places qui en dépendent, qui compo-
fent les Partages, 6c les portions, afligneés ci-deffus à Monfeigneur le Dau-
phin , 6c au Prince Electoral de Bavière ; 6c que de tout cela ils feront dé-
pêcher des actes folemnels dans la plus forte, Se la meilleure forme, qu'il fè
pourra, fçavoir l'Empereur, Se le Roi des Romains, lors du décès de ta Ma-
jefté Catholique fans Enfans, Se l'Archiduc Charles, des qu'ils fera Ma-
jeur.
VIII. Le prefènt Traité fera communiqué à l'Empereur, Se à l'Electeur de
Bavière, par le Roi de la Grande Bretagne, Se les Seigneurs Etats Généraux
auffi-tôt après la fignature , Se l'échange des ratifications; Se Sa Majelté
impériale, le Roi des Romains, Se ledit Electeur feront invités de l'aprouver
lors
ET RESOLUTIONS D'E T A T. \y
lors du décès de faMajefté Catholique fans Enfans; 8c l'Archiduc Charles,
ainfi que le Prince Electoral de Bavière dès qu'ils feront Majeurs.
IX. Que fi l'Empereur, Je Roi des Romains, ou l'Electeur de Bavière
refufent d'y entrer, les deux Seigneurs Rois, 8c les Seigneurs Etats Géné-
raux empêcheront le Prince, Fils ou Frère de celui, qui réfutera, d'entrer en
poflèffion de ce qui lui fera affigné-, Se fa portion demeurera comme en fe-
queftre entre les mains des Vice-Rois, Gouverneurs 8c autres Regens, qui
i y gouvernent de la part du Roi d'Efpagne , lefquels ne pourront s'en defaifir,
que du conièntement des deux Seigneurs Rois, 8c des Seigneurs Etats Gé-
néraux, jufques à ce qu'il aura agrée ledit partage, 8c cette Convention ; 8c
en cas que nonohftant cela il voulut prendre poflèffion de fa portion, ou de
de celle , qui fera affignée aux autres , lefdits Seigneurs Rois , &c lefdits Sei-
gneurs Etats Généraux, comme au ffi ceux qui fe contenteront de leur partage,
en vertu de cette convention , l'empêcheront de toute leur force.
X. Le Roi d'Efpagne venant à mourir fans Enfans 8c ainfi le fufdit cas ar-
rivant, les deux Seigneurs Rois , 8c les Seigneurs Etats Généraux s'obligent
de laifler toute la fucceffiondans l'état, comme alors elle fe trouvera, fans s'en
faifir en tout, ou en partie, directement ou indirectement; mais chaque Prin-
ce pourra d'abord fe mettre en poflèffion de ce qui lui eu: affigné pour fon par-
tage, dès qu'il aura fatisfaitde fa part aux Articles cinq,fix,îept 8c neuvième,
Îjrecedans celui-ci ; 8c s'il y trouve de la difficulté , les deux Seigneurs Rois, 8c
es Seigneurs Etats Généraux feront tous leurs devoirs poffibles , afin que
chacun foit mis en poflèffion de fa portion félon cette convention , 8c qu'elle
puiflè avoir fon entier effet, s'engageant à donner parterre, 8c par mer,
les fècours 8c affiftances d'hommes 8c de Vaiflèaux neceffiùres , pour con-
traindre par la force ceux qui s'oppoferont à ladite convention.
XI. Si lefdits deux Seigneurs Rois, 8c les Seigneurs Etats Généraux, ou
quelqu'un d'eux , font attaquez , de qui que ce foit , à caufe de cette conven-
tion , ou de l'exécution qu'on en fera ; on s'affiliera mutuellement l'un l'au-
tre , avec toutes fes forces 8c on fe rendra garant de la ponctuelle exécution
de ladite convention , 8c des renonciations faites en conféquence.
XII. Seront admis dans le prefent Traité tous Rois , Princes 8c Etats,
qui voudront y entrer, 8c il fera permis auxdits deux Seigneurs Rois, 8c aux
Seigneurs Etats Généraux, 8c à chacun d'eux en particulier, de requérir 8c
inviter tous ceux qu'ils trouveront bon de requérir 8c inviter, lefquels feront
femblablement garants de l'exécution de ce Traité , 8c de la validité des re-
nonciations , qui y font contenues
XIII. Et pour aflurer encore davantage le repos de l'Europe , lefdits
Rois , Princes 8c Etats , feront non feulement garans de ladite exécution du
prefent Traité, 8c delà validité defdites renonciations, comme ci-deffiiSi
mais fi quelqu'un des Princes , en faveur defquels les partages font faits , vou-
loit dans la fuite troubler l'ordre établi par ce Traité , faire de nouvelles en-
treprifes y contraires, 8c ainfi s'agrandir aux dépens des autres, fous quelque
prétexte que ce foit , la même garantie du Traité fera fenfée devoir s'éten-
dre auffi en ce cas, en forte que les Rois, Princes 8c Etats, qui la pro-
mettent , feront tenus d'employer leur forces , pour s'oppofer auxdites en-
Tom. I. C tre-
iS MEMOIRES, NEGOCIATIONS, TRAITEZ,
treprilcs , & pour maintenir toutes choies dans l'état convenu par lefdits Ar-
ticles.
XIV. Que fi quelque Prince que ce foit, s'oppofe à la prife de poflèffion
des partages convenus, lefdits deux Seigneurs Rois, 6c les Seigneurs Etats
Généraux feront obligez de s'entraider l'un l'autre contre cette oppofition,
& de l'empêcher avec toutes leurs forces, 6c l'on conviendra , d'abord après la
fignature du prefent Traité , de la proportion , que chacun doit contribuer ,
.tant par Mer , que par Terre.
XV. Le prefent Traité fera ratifié 6c approuvé par lefdits deux Seigneurs
Rois, 6c les Seigneurs Etats Généraux, 6c les Lettres de Ratification feront
échangées dans le terme de trois femaines, ou plutôt fi Elire fc peut, à comp-
ter dii jour de la fignature. En foi de quoi nous avons figné la prefente, 6c
mis le cachet de nos Armes. Fait à la Haïe le 1 1. Oétober i6p8.
Etoit figné,
(L.S.) Portïand. (L. S.) ïallard. (L. S.) F. Verholt.
( L. S.) IVilliamfQn. (L.S.) F.B.de Rbcede.
(L.S.) A.Heinfius.
(L. S. ) Johan Becker.
(L. S.) J. vander Dees.
(L. S.) W. van Haren.
(L. S.) Ar. Lencker.
(L.S.) J. de Drews.
Articles T E Roi Très-Chrétien, le Roi de la Grande Bretagne 8c les Etats Gêné-
fficrets. !__/ raux aïant agréé le Traité de Partage qui a été fait de la Succeffion à la
Couronne d'Efpagne, pour prévenir par ce moîen les malheurs , qui pour-
roient arriver dans l'Europe par la mort du Roi d'Efpagne fins Enfans, 6c la
Élus grande 6c meilleure partie de ladite Succeffion aïant été donnée au Prince
électoral de Bavière, fans avoir pris aucune meiure pour refoudre 6c convenir
à qui elle tombera après lui , s'il arrive qu'il meure auffi frais Enfans j lefdits
deux Rois 6c les Etats Généraux pour prévenir les difputes 6c les guerres que
cela pourrait produire, ont agrée par ces z^rticles iécrets, qui auront autant
de force 6c de vertu que le Traité ci - defllis , auquel auffi ils ont rela-
tion, que
I. S'il arrive que le Roi d'Efpagne vienne à mourir fins Enfans, 6c que
par confequent les Roïaumes d'Efpagne , les Indes 6c autres Païs 6c Etats qui
ont été donnez en partage au Prince Electoral de Bavière, viennent à lui é-
cheoir; l'Electeur de Bavière d'à-prefent fera Tuteur 6c Curateur du Prince
fbn Fils, durant fa Minorité pendant tout lequel tems il aura le Gouverne-
ment defdits Roïaumes, Ifles , Places 6ç Etats, qui ont été donnez audit
Prince Electoral fon Fils par ledit Traité.
II. S'il arrive que ledit Prince vienne à mourir fins Enfans , S. A. El. lui
fuc-
ET RESOLUTIONS D'E T A T. \9
foccedera dans la poflêflîon 5c jou'iflance defdits Roïaumes &c. , qui lui ont
été donnez pour fa part , & les aura en pleine propriété pour lui ÔC les Enfans
Mâles & Femelles, Defcendans , Succeflèurs & Héritiers, nez ou à naitrej
de manière que fi l'Empereur, le Dauphin, leurs Enfans Mâles ou Femelles,
Defcendans, Succeflèurs & Héritiers, ou aucun autre prétend avoir la moin-
dre pretenfion à ladite Succeflîon, le Roi Très-Chrétien , le Roi de la Gran-
de Bretagne & les Etats Généraux s'engagent eux-mêmes de nouveau d'em-
ploïcr toutes leurs forces par Mer -& par Terre', pour maintenir l'ordre éta-
bli dans cet Article, touchant la Monarchie d'Efpagne, dont ils font unani-
mement demeurez d'accord j efperant par cette précaution entretenir la tran-
quillité de toute l'Europe , qui eft depuis peu fi bien établie.
Tous les Rois, Princes 6c Etats, qui voudront bien entrer dans ce Traité,
y feront admis, fi-tôt qu'il fera rendu public , au tems de la mort du Prince E-
leétoral , au cas qu'il vienne à mourir îàns Enfans. Et lefdits deux Rois' & Etats
Généraux, ou chacun d'eux en particulier, feront prier 6c inviter ceux qu'ils
trouveront à propos, d'y entrer, qui, de même que les autres feront Garands
de ce qui eft contenu dans ledit Article fecret. En témoin dequoi Nous qui
avons figné le Traité qui a relation au prefent Article , avons aufli figné ce-
lui-ci & y avons apofé nos Cachets. A la Haïe le 1 1 . Octobre i6p8.
Signé,
Tallard. Portland. f-Filliamfon.
LEfdits deux Rois & Etats Généraux font demeurez d'accord qu'en cas ^utrs
que le Duché de Milan vint à être en fequeftre , en vertu de laClaufemen- fe„ete
donnée au IX. Article du Traité conclu aujourd'hui, entre les mains du Prin- concer-
ce de Vaudemont, qui en eft à prefent Gouverneur, la chofe fequeftrée, ôc nant le
par confequent le Duché de Milan , fera adminiftrée, 8c gouvernée par le Prin- fcquefac
ce Charles de Vaudemont fon Fils. Le prefent Article fecret aura la même c^é ^~
force que s'il étoit inféré dans le Traité , auquel, il a raport. A la Haïe le Milan.
ii. Oétobre 1698.
Signé,
Tallard. Porthnd. WïIUantfcn .
E
N explication des Articles cinq , fept & dix du Traité, pafle à la Ha'ie Autre
ce jourd'hui on eft convenu, que quoique l'Archiduc Charles ne doi-
ve donner fon acte de renonciation, que quand il fera Majeur , pourvu que
l'Empereur , & le Roi des Romains aient donné les leurs , ledit Archiduc
pourra entrer en poflêflîon de fon partage lors du décès de fa Majefté Catho-
lique, fans Enfans, quoi que Mineur: bien entendu,, que ledit Archiduc fe-
ra toujours obligé de donner fon A été de Renonciation , quand il fera Ma-
jeur j & pareillement on eft convenu , que quoi aue le Prince Electoral de
C z Ba-
Article
fecret.
I
io MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
Bavière {bit mineur, pourvu que l'Electeur de Bavière Ton Père en qualité de
Père, &C de légitime Tuteur & Adminiiirateur dudit Prince ait donné le lien
ledit Prince Electoral de Bavière pourra entrer en polTelfion de Ton partage,
lors du décès de fa Majeitc Catholique fans Enfans , quoique mineur : bien
entendu, que ledit Prince Electoral de Bavière fera toujours obligé de don-
ner fon Âéfce de Renonciation , dès qu'il fera Majeur : en foi dequoi Nous,
[ui avons /igné le Traité avons auffi ligné le prefent Article, & mis le cachet
e nos Armes. Fait à la Haïe le- il. Octobre 16,8p.
Etoit ligné r
(L. S.) Portlvid. (L, S.) Tallard. (L. S.) F. rerbolt.
(L. S.) miUamfon. (L. S.) F. B. de Rbede^
(L. S.) A. Heinfius.
(L. S.) Johan Becker.
(L. S.) J. vander Does.
(L. S.) W.i)an Haren.
(L. S.) Ar. Lencker.
CL. S.) J.deDrews.
Il eft à remarquer que le Dauphin de France donna, de même que le Roi
Très-Chrêtien fon Père, pouvoir, avec renonciation exprefle à la Couronne
d'Efpagne , de ligner tant ce premier Traité de partage , que les Articles le-
erets. D'ailleurs que le Roi Très-Chrêtien autorifa le Dauphin à donner
tous les Actes nécefiaires pour la même fin. Tous lefdits Actes étant datez
du ip. d'Août 1608. Les Ratifications furent auffi données en date du 24.
Octobre 1698. On ne les met pas ici,, parce qu'on les juge fuperflues , non
plus que les precedens Actes.
Ce Traité ne fubfilîa pas fort long-terns. Ce fut par la mort inopinément
arrivée à ce jeune Prince, non fans foupçon qu'elle avoit eu quelque violente
fource étrangère. Pour détacher l'Electeur de Bavière des intérêts de la Mai-
fon d'Autriche, on tâcha de lui perfuader, qu'offenfée par ce Traité de Par-
tage, elle avoit eu part clandellinement i cette mort prématurée. L'Elec-
teur en a paru fi perfuadé, qu'il n'a pas héfîtë de le donner à connoître dans
un Manifelte qu'il publia quelque tems après , favoir en 1704. Ainfi qu'on
le importera en fon lieu. Cependant bien des gens pénétrans, qui ne trou-
voient pas la Maifon d'Autriche de la Branche d'Allemagne, capable d'un fi
noir attentat, attribuèrent plutôt ce coup d'Etat à une Cour plus voifine de
Bruxelles , que celle de Vienne. La mort du Prince Electoral difpenfa la
Cour Impériale, & celles des autres Puilïances , qu'on avoit invitées à ac-
cepter &C à garantir ce Traité , de fe déclarer là-defTus.
On prit cependant d'autres mefurcsj Se le Comte de Portland jetta , pen-
dant
ET RESOLUTIONS D'E TAT. ' il
dant fa fomptueufe Ambatîade en France,, les premiers fondemens du fécond
Traité de Partage. La Négociation de ce Traité ne relia pas fecretfl: On
la fût à la Courte Madrid par les infinuations, à ce qu'on crût de la France,
qui travailloit à aigrir les Espagnols par un tel Partage. Aulïï cette Cour-la
envoïa-t-elle des ordres à l'es Ambaffiideurs en Angleterre & en Hollande de s'en
plaindre dans les termes les plus forts. Le Marquis de Canaks prefenta pour ce-
la un Mémoire à la Régence, en l'abfcnce du Roi Guillaume, qui avoit paf-
fe la Mer & fe trouvoit à Loo,. pour prendre le divei tiiïement de la chaffe.
La Régence lui dépêcha d'abord un Exprès pour lui porter ce Mémoire, qui
fut trouvé excéder tout devoir. En voici la copie.
jRemierement que le Roi fon Maître aïant apris avec des évidences certai- Mém
fances
raffee) forgent aujourd'hui aétuellement de nouveaux Traitez iur la Suc- faç^ni-
ceffion de la Couronne d'Efpagne, & (cequieit le plus déteftable) machi- les aux
nent fa divifion & répartition; il ordonne à fon Ambalfadeur Extraordinaire, Lords
Refident en ce Roïaume de faire connoître aux premiers Lords^ & Miniftres <^'YC.
le reflèntiment que caufent à Sa Majefté ces opérations 8c procédez qui n'ont terre; '
jamais été vus ni entrepris par aucune Nation fur les intérêts ou Succeffioft
d'une autre; & moins encore durant la vie d'un Monarque, qui eft dans un
âge fi proportionné à pouvoir efpérer (pour plufieurs années) une Succeffion
tellement defirée de toutes les Nations , que fins une avarice déteftable on ne
fe laifferoit pas emporter à l'ambition d'ufurper 6c de bouleverfer le Raïs
d'autrui. - ■
Que fi cela fe permettoit & n'étoit pas contraire a la Loi naturelle, il n'y
auroit aucune Nation ni domination en fureté contre les machinations 6c
tromperies de la plus forte ou de la plus malicieufe , au lieu que la raifon 6c
non la force limite les Nations. '
Que s'il étoit permis aux étrangers de prendre connoifTance &c de met-
tre la main dans les lignes de la Succeffion ■ des Rois 6c des Souverains, il
n'y auroit ni Statuts , ni Loix Municipales à obferver chez les uns ;, ni
chez les autres, ni qui fuflent libres des attentats d'autrui ,. bien moins encore-
celles de la Couronne d'Angleterre.
Que fi on mettait des aguets aux indiipofitions des Souverains , il n'y au-
roit aucune fanté confiante, aucune vie en fureté, pendant que l'un 6c l'au-
tre dépend de la main de Dieu Tout-Puiffant , qui règle la vie ,. la mort 6c
les Empires.
Que les impreflîons qui fe font de Roïaumes à autres ,. pour tenter la foi'
des fujets , 8c exciter leurs Efprits à des foûlevemens , font une offenfe 8c un
degré moins qu'infidélité à la bonne foi , qui fe doit obferver entre des .Chré-
tiens , 8c à plus forte raifon entre les Alliez &C Amis.
Que l'on ne doit pas préfumer d'aucun Prince , ni Nation , 6c encore moins
du Roi de la Nation Efpagnole , qu'ils foient fi négligens que l'on ne prenne
pas les mefuresjuftes furies accidens à venir 8c inopinez (s'ils arrivoient) pour
C $ alTûi-
ii MEMOIRES, NEGOCIATIONS, TRAITEZ,
aflûrer la tranquillité de la Paix publique, 8c le repos de l'Europe, quia
été, & eft l'objet du Roi 8c de la Nation durant tant de Siècles, comme il
fe fait 8c fc fera toujours.
Que fi ces démarches , ces projets Se machinations ne s'arrêtent prompte-
ment , on en viendra fans doute à une Guerre funefte 8c univerlélle dans toute
l'Europe, difficile à arrêter quand on le voudra, & d'autant plus fenfible &
préjudiciable à la Nation Angloife qu'elle vient tout récemment d'éprouver
& de fentir ce que lui ont caufé les nouveautez & la Guerre paflee. Cette
matière eft fi digne de réflexion & de confidération, que l'on ne doute pas
qu'elle fera reconnue telle par le Parlement, la Noblefle & toute la Nation
Angloife , qui a toujours été fi prévoïante dans tous les tems préfens 8c à
venir.
La même Nation doit confidérer fes intérêts particuliers , les Commerces
Se les Traitez qu'elle a principalement avec le Roi 8c la Nation Efpagnole ,
dont l'altération , la divifion ou féparation lui entraîneroit de nécefîité des
préjudices, 8c dommages coniîdérables , 8c tout cela fe prévient en coupant
les projets commencez 8c ne donnant pas les mains à des nouveautez domma-
geables en tous les tems aux Empires 8c Souverainetez.
Que rAmbafîàdeur Extraordinaire d'Efpagne rendra Manifefte au Parle-
ment i quand il fera afiemblé, ce jufte refientiment qu'il exprime aujourd'hui,
ainfi que le Roi fon Maître l'a fait entendre à tous les Miniftres publics des
Rois , Princes 8c Républiques qui refident à la Cour de Madrid
Le Roi Guillaume n'étoit déjà pas fort content de ce Marquis j en
premier lieu pareequ'il avoit quelques mois auparavant prefenté un Mémoire
fur l'invafion de Darten par les Ecofiois. Voici le Mémoire qu'on avoit
trouvé menaçant.
Mémoi- /'"""'Omme l'Ambafîadeur Extraordinaire d'Efpagne fe trouve obligé par or-
re du v_/ dre exprès de reprefenter à fa Majefté Britannique ce qui fuit , il prie
Marquis Monfieur de Vernon de reprefenter à fa dite Majefté que le Roi fon Maître
de Cana- çe trouvant informé de difterens endroits 8c dernièrement par le Gouverneur
nriva- de la Havana, de l'infulte 8c attentat de quelques Navires Ecoffois équipez , qui
lion de avec gens 8c train requis tâchent de prendre pofte dans les Souverains Do-
Darien. maines de Sa Majefté dans l'Amérique 8c en particulier dans la Province de
Darien.
Sa Majefté a reçu ces notices avec beaucoup de defagrement comme une
marque de peu d'amitié 8c rupture de l'Alliance qui a été toujours entre les
deux Couronnes ( laquelle Sa Majefté a obfervée piques ici , 8c obferve tou-
jours fort religicufement, de laquelle ont reiulté tant d'avantages &c tant d'u-
tilitez tant à S. M. qu'à les fujets) en fuite de laquelle bonne correfpondan-
ce S. M. ne s'attendoit pas à ue pareilles foudainjs infultes &z attentats de*
fujets de S. M. , &C cela en tems de Paix, fins prétexte ni aucune caufe dans le
plus interrieur de fes Domaines.
Tout ce que le Roi veut qu'il foit prefenté à Sa Majefté 8c que Sa Mjjcf-
ET RESOLUTIONS D'ETAT. 25
té te trouve fort fenfible à de pareilles hoftilitez & injuries procédures, con-
tre lefquelles Sa Majeité prendra les mefures qui conviendront. Londres
le y de Mai 16pp.
En fécond lieu p.irceque cet Ambafladeur avoit voulu fe donner l'éilbr pen-
dant que le Roi étoit à table de fe promener dans la Chambre à tête couver-
te, ce qui étoit abfolument contre l'ufage de la Cour Britannique. Aurfi lui
fit-on dire, ou de s'abftenir de fe couvrir, ou de ne pas paraître à la Cour.
Cet Ambafladeur aima mieux s'abfenter de la Cour, où il n'avoit déjà point
paru depuis quelque tems. Le réfutât de fon Mémoire touchant le Traité
de Partage qu'on négocioit , fut que le Roi Guillaume envoïa ordre en
Angleterre de faire fortir du Roïaume le Minillre Efpagnol. Cela fut exécu-
té de la manière que le même Marquis de Canales l'écrivit à Don Bernard»
de Quiros fon Collègue en Hollande. Il lui manda que le 1 o. le Secrétaire
d'Etat Vernon s'étoit transporté chez lui, & lui avoit dit ; „ que Sa Majeité
„ Britannique avoit reçu le Mémoire qu'il avoit prefenté aux Lords Regens,
s, & que l'aïant examiné , il l'avoit trouvé infolent Se féditieux. C'eft pour-
„ quoi aïant raifon d'en témoigner fa jufte indignation, il avoit ordre de lui
„ lignifier qu'il eût à fortir du Roïaume dans 18. jours, à comter de celui de
„ cette notification. Que pendant ces 18. jours ou moins, qu'il relierait à
„ Londres, il eût à fe tenir dans la Maifon fuis en fortir. Le Marquis de Ca-
vales repondit là-deflùs Te Deum Laudamus. Après cela il demanda d'avoir
cette notification par écrit. Mais le Secrétaire d'Etat Prernon lui dit qu'il ne
.l'avoit pas ; mais qu'il la lui dieferoit. Le Marquis l'écrivit à mefure qu'on
la di6toït,& ajouta enfuite qu'il étoit prêt d'obéir, en toutes fes circonilances r
aux ordres qu'il lui donnoit de la part de Sa Majeité.
Après cela le Marquis demanda au Secrétaire d'Etat Vernon ,. fi aïant befoin
de quelques gardes pour fortir en fureté du Roïaume, on les lui accorderait.
Vernon repondit qu'il le croïoit, & qu'il en parlerait aux Lords Regens. Le
Marquis ajouta s'il pouvoit s'adreflèr à lui pour cela, & fi on ne lui accorde-
rait pas le necejfaïre , s'il en avoit à faire pour fortir du Roïaume. Le Se-
crétaire d'Etat lui repondit qu'il en parlerait comme du reite aux Lords Ré-
feenSi & qu'il pouroit s'adrelfer à lui pour tout cela. Le Marquis fit aporter
enfuite du chocolat & plulîeurs autres rafraichiffemens. Il marqua dans fa re-
lation à Don Bernardo de Quiros , qu'il témoigna toujours de la gaieté au
lieu qu'il lui fembla que le Secrétaire d'Etat Femon étoit penfif. La de-
mande, pour avoir le necc/faire pour fortir du Roïaume, venoit furce qu'il le
trouvoit dénué d'argent, & d'ailleurs accablé de dêtes. Aulîi lui fournit-on
à fon départ ce qu'il demanda.
En attendant Don Bernardo de ^uiros avoit reçu ordre de prefenter un
Mémoire for le même fujet, & de s'en plaindre le plus fortement poffible,
fans fpecifier autre chofe que d'y nommer l'Angleterre, la France & la Hol-
lande. Cela fit juger que le Marquis de Canales n'avoit reçu que des ordres pa-
reils, & par confequent de ne pas s'exprimer de la manière outrée qu'il avoit
ir, pareeque c'étoit faire brèche à l'autorité Roïale. Don Bernardo de §hd-
modera fon Mémoire ', fur l'avis des ordres que le Roi Guillaume
avoit
fait,
ros
tatsGé-
nciaux
24 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
avoit envoïcz de Loo en Angleterre touchant le Marquis de Cattales, & fur
quelque reprefentatiqn , que quelqu'un lui fît. C'étoit qu'un habile Mini-
ltre ne devoit pas s'expofer à de fâcheux incidens en donnant trop d'éfTor à la
paffion, 5c qu'il valoit toujours mieux dans de pareilles occafions, jetter, par
une modeite retenue, dans le tort les Puiftances, avec lefquelles on avoit à tai-
re. Auffi drefla-t-il un Mémoire delà forte. Il fut le prefenter au Prefident
de fcmaine tel qui le voici.
MESSIEURS,
Mémoi- /~"\Uoi que Sa Majefté eut reçu dès Tan pafTé divers advis réitérez par Ces
de^Don \^ Ambaflâdeurs 6c Miniftres qui font aux Pais du Nort, de certaines Ne-
do de gociations qui s'y traitoient , entre l'Angleterre, la Hollande, & la France,
Quiros touchant la Succefîîon d'Efpagne8c le Partage d'icelle ; Et que même ces advis
aux E« fuffent accompagnez de circonftances fi particulières, 8c d'Indices fi forts que
l'on ne pouvoit prefquepas les révoquer en doute. Néanmoins la parfaite con-
fiance que fadite Majefté a toujours eue en fesamis 6c Alliez, ne lui permetant
pas d'ad jouter aifement foi à des chofës fi peu convenables à l'amitié , qui
eft.'entr'eux, elle avoit auffi jugé à propos de fufpendre fon jugement, 6c de
diferer fes plaintes jufques à ce que le tems lui eut donné de plus grands éclair-
ciflèmens ou que lefdites Négociations venant à ceffer , Elle eut par même
moïen occafion de les oublier tout-à-fait.
Sa Majefté avoit donc pris le parti du filence; mais comme Elle a été de-
puis informée, que l'on travaille encore actuellement à de nouveaux Traitez,
iur le fondement de ceux que l'on dit avoir été faits ou fort avancez, il y a
environ un an ; 8c que les avis que fes Miniftres lui en ont donnez fans diiéonti-
nuation, fe font trouvez confirmez par ceux que Sa Majefté a reçus d'ailleurs,
d'une manière même fi publique que toute i'Europe en a eu connoiflance ;
Elle a crû qu'EUe ne pouvoit plus diffimuler, ni le faire fans manquer à ce
qu'Elle doit à Elle-même 8c à les Peuples.
La furprife que lui ont caufée des nouveautezfi étranges, & fi préjudiciables
à fes Etats, a été d'autant plus grande , auffi bien que le deplaifir qu'Elle
en a reflènti , que jamais telles choies n'avoient été par ci - devant pratiquées
ni entreprifes pendant la vie d'aucun Roi , 6c qu'elles font entièrement hors
de fâifon pendant la fienne, Sa Majefté aïant à peine atteint fa trente huitiè-
me année.
Il elt vrai qu'il n'a point encore plû à Dieu de lui accorder de Succefïèurs;
m»ùs ni cette raifon , ni celle de fes indifpofitions patlées ne font point fufi-
làntes pour déléfpérer d'avance, comme il femble qu'on faiîé, de la poffibili-
té d'une choie fi naturelle, 6c pour alarmer fes bons fujets par des craintes &c
par des augures fâcheux , qui étant répandus dans le monde, ne peuvent l'er-
vir qu'à troubler le repos 6c la douceur dont l'Europe jouît à prefent.
Sa Majefté, qui par la bonté divine vient de recouvrer la Santé, peut rai-
fonnablement lé flater que Dieu continuant de lui départir fes grâces, 6c exau-
çant les vœux ardens de fes Sujets, lui donnera des Enfans, 6c lors que cela
arrivera, il n'y aura rien qui ne foit dans l'ordre naturel des choies. Com-
bien
ET RESOLUTIONS D'E T A T. if
tien de Rois 6c de Princes, moins jeunes que Sa Majefté, ont obtenu lignée
après en avoir été privez encore plus long-tems qu'Elle? Les exemples en
font frequens dans l'Hiftoire , & nous en avons un devant les yeux en la Per-
fonne dû Roi Très-Chrêtien,qui fufit pour tous ceux qu'on pourrait alléguer.
Mais fupofé même (ce que Dieu ne veuille permettre) que la Providence
Eternelle , dont les voies font impénétrables, eut réfolu d'afligerles Etats d'Ef-
pa<me jufqu'au point de retirer Sa Majeué fans lui donner poftérité} les Puif-
fances Etrangères en feroient-elles plus en droit de faire des Traitez touchant
fa Succeffion ?
Sa Majefté, qui eft extrêmement jufte en toutes choies, ne fouhaite des
autres Rois 8c Princes que ce qu'Elle obferveroit Elle-même en pareil cas à
leur égard. Et comme Elle eft perfuadée qu'ils auraient très -grande raifon
de trouver mauvais que l'on entreprit de faire des Traitez touchant la Succef-
fion de-leurs Etats, Elle ne confentira jamais auffi que l'on en fafle touchant
celle d'Efpagne.
Le droit d'en régler l'ordre & d'en prefcrire la manière n'apartient qu'à
Elle 5c à fes Roïaumes. Elle ne le tient que de Dieu non plus que fa Cou-
ronne, 8c il ne faut pas penfer qu'Elle permette jamais que l'on y donne au-
cune atteinte fans fe défendre de toutes fes forces, 8c jufques à la dernière
extrémité. De forte que fi les Puifiances qui recherchent , ou qui font recher-
chées de femblables Traitez, n'ont envûë que de rendre la Paix durable, com-
me cela eft à fuppofer, elles doivent s'afiurer que ce feroit au contraire l'in-
faillible moïen d'alumer en Europe le feu d'une fanglante Guerre , 8c qu'en
tel cas, non feulement on verrait prendre les armes d'un commun accord à
tout -ce qu'il y a d'Efpagnols 8c d'autres fujets de la Couronne, depuis les En-
fans de quinze ans juiques aux viellards de feptante, mais que plutôt que de
foufrir le moindre partage des Etats qui compofent la Monarchie , 8c qu'on
difpofât ainfi de leur fort , ils auraient recours à tous les moïens légitimes
.qu'ils jugeraient pouvoir leur fervir, quels qu'ils pûflènt être, fuivant en ce-
la la maxime qui veut que dans les maux extrêmes , on emploie d'extrêmes
remèdes, 8c fe confiant que Dieu, protecteur du bon droit, bénirait leurs juftes
efforts 8c fe déclarerait en leur faveur.
Au refte on doit être perfuadé que de quelque manière qu'il plaifè à Dieu
d'ordonner de Sa Majefté , Elle a trop à cœur la fureté de fês Peuples 8c le
bien public de l'Europe pour ne pas difpofer en tout cas les chofes par raport
à la Succeffion avec toute la prudence requife, 8c félon ce qui fera le plus jufte
8c le plus à propos pour l'un & pour l'autre.
Tous les Traitez 8c Concordats que les Etrangers pouroient faire entr'eux
fur ce point, feraient donc également fuperflus, contraires à l'honneur de la
Couronne d'Efpagne 8c de dangereufe conféquence, &t l'on doit convenir que
Sa Majefté en étant bien avertie, ne peut .ni ne doit fe difpenfèrde s'y-oppo-
fer. C'eft auffi la ferme refolution qu'Elle a prife, 8c qu'Elle a ordonné à fes
Miniltres qui font en France , en Italie , 8c dans les Pais du Nord , de faire
connoître aux Princes 8c Etats auprès defquels ils réfident, dans la manière la
.plus exprefTe et la plus notoire , avec commandement d'aporter d'autre part
toute la diligence, 8c tous les feins poffiblcs pour arrêter le cours des fufclites
ftom. I. D Né-
2.6 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
Négociations ou Traitez , répréfentant , 6c remontrant pour cette fin, les
mauvais éfets qu'EUes ont déjà produits , 6c ceux qui en pouroient refulter à
l'avenir.
Et parce que Sa Majefté n'a rien plus à cœur que de prévenir lefdits mau-
vais éfets avec leurs fuites, Elle a de plus ordonne que iémblables offices fuf-
fent paffez envers les Mi ni lires des fùfjits Princes, étant à Madrid, à ce qu'ils
concourent par leurs prudentes répréfeotations au maintien de la tranquilitc
publique ,.qui eft ,avec la confervation des Droits 6c de l'honneur de la Couron-
ne, le légitime but que Sa Majefté fe propofe en cette affaire , s'éforçant de
couper pied de bonne heure à des Négociations , defquelles il eft à craindre , fi
elles étoient continuées, qu'il ne vint a naitre l'occalion d'une nouvelle guer-
re auffi facheufè 6c auiîî diiîcile à terminer , que celle dont on vient de
ibrtir.
Or comme il eft de l'Intérêt général de toute l'Europe, 6c en particulier
de l'Angleterre 6c de la Hollande d'éviter autant que faire fe peut les fufdits
inconveniens , . Sa Majefté fe promet qu'en cette vue on lui donnera des affii-
rances pofitives que non feulement de iémblables Traitez ne fubfifteront pas ,
en cas qu'ils foient déjà faits} mais aufïï qu'ils ne fe feront point à l'avenir,
6c que plutôt, fi befoin eft, on affiliera Sa Majefté de tous les fecours qui lui
pouroient être néceuaires pour le maintien d'une caufè fi jufte , 6c dans laquel-
le, l'honneur, les droits, la Liberté, 6c la fureté de tous les autres Princes de
l'Europe fe trouvent engagez.
Le Préfident refufà de l'accepter à caufè des procédures afîêz violentes te-
nues quelques années auparavant à la Cour de Madrid contre Belmtmte ou
Schonenberg Miniftre des Etats Généraux à cette Cour-là. Don Bernardo de
ghiircs pria fur ce refus le Préfident de lèmaine de vouloir bien prendre , 6c
porter a Paffemblée une Lettre du Roi Catholique fon Maître, qu'il accepta.
Mais y aïant été lûë, on la trouva datée de Madrid du 2,1 . Juillet iôpf . por-
tant créance fur Don Bernardo de ghtiros, comme Ambaffadeur de Sa Ma-
jefté.
Les Etats Généraux prirent là-deffus une Refolution , qu'on fit remettre
par l'Agent de l'Etat à cet Ambaflàdeur-là. On peut voir de quoi il s'agif-
fbit par la Refolution même que voici.
Extrait du Regiftre des Réfolutions des Hauts
& PuifTànts Seigneurs les Etats Généraux
des Provinces Unies des Païs-Bas.
£>u Lundi \z. Oïïohre 1699.
Rcfolu- }J 1" E Sieur Verbolt Préfident de l'Afîèmblce a répréfenté 6c fait connoître à
!!?ntsdes m ■1—' Leurs Hautes Puiffances que ce matin le Sieur de Quiros étoit allé chez
Gêné- »3 w'j & avoit prefenté un Mémoire pour être par lui remis entre les mains
raux „ de Leurs dites H. H. P.P. Et que ledit Sr. Verbolt, à caufe du diférent
„ qu'il
ET RESOLUTIONS D'E T A T. z7
„ qu'il y a, entre Sa Majefté Catholique & Leurs H. H. P. P. au fujet des fur une
„ Procédures tenues ci - devant à Madrid contre le Sr. Schonenberg & des &.& e
„ refolutions prifes à cet égard par Leurs H. H. P. P., avoit fait dificulté de £â?l
„ recevoir ledit Mémoire ; que là-deflus ledit Sr. de Quiros l'avoit prié de
„ vouloir bien prendre 8c porter dans l'Aflèmblée une Lettre de Sa Majefté
„ Catholique, au'en même tems il lui, avoit prefentée , & qu'il avoit reçue,
„ laquelle Lettrc'il a livrée à l'Aflèmblée, laquelle y aïantété lue, il s'eft trou-
„ vé qu'elle étoit écrite & datée de Madrid le zi. Juillet iôpf. 8c qu'elle
„ contenoit créance fur le Sieur François Bernardo de Quiros comme Am-
„ bafiadeur de Sa Majefté.
„ Surquoi Délibération aïant été faite , Leurs H. H. P. P. ont témoigné
„ leur aprobation à toute la conduite qui a été tenue en cette rencontre par
,, ledit Sr. Verbolt Préfident ; & il a été de plus trouvé bon 8c arête que com-
„ meilparoît par la date delà fufdite Lettre, qu'elle a été écrite avant que fut
„ commencé le démêlé qui fe trouve préfentement entre Sa Majefté Catho-
„ lique & Leurs H. H. P. P. au fujèt des procédures tenues à Madrid con-
„ tre le Sr. de Schonenberg , muni de Lettres de créance de Leurs H. H.
,, P.P. Se admis en vertu d'icelles comme Miniftre de Leurs Hautes Puiflàn-
„ ces à la Cour de Sa Majefté Catholique. Que fur les juftes plaintes de
„ Leurs dites H. H. P. P. fur lefdites Procédures, par lefquelles elles ont El-
„ les-mêmes été fortement lezées en la perfonne de leur Miniftre , il ne leur
„ a encore été fait ni donné aucune fufifànte fatisfaétion , & que nonobftant
„ tous les bons offices de Sa Majefté Impériale 8c de fa médiation très agréa-
„ ble à Leurs H. H. P.P. , le diférent fufmentionné n'eft point encore aflbu-
„ pi, faute de ladite fatisfaétion , ce qui aufïï eft aparemment la raifbn pour-
„ quoi la fufdite Lettre, quoique déjà vieille de plus de quatre ans,n'avoit point
„ encore été délivrée jufques ici. Que par confequent l'affaire fe trouvant
„ encore dans le même état qu'elle étoit lors qu'au z. Décembre i6pf. Leurs
„ Hautes Puiflances furent neceflîtées de refoudre que par provifion on ne re-
„ cevroit point de Mémoires d'aucuns Miniftres de Sa Majefté Catholique ,
„ qu'on ne prendrait point de refolution là-deflus, ni n'entreroit-on en con-
„ férence avec eux, laquelle refolution fut dès lors fignifïée 8c notifiée audit
,, Sieur de Quiros -, il fera déclaré comme Leurs Hautes Puiflances déclarent
„ par la prefente refolution, que tant que PofFenfe faite à Leurs Hautes Puif-
„ Tances en la perfonne du Sieur Schonenberg, leur Miniftre, ne fera point
„ reparée comme elle ne l'eft point encore jufqu'ici , ni le démêlé furvenu
„ là-deffus aplani , ledit Sieur de Quiros ne peut pas être admis en la qualité
„ d'Ambaffadeur de Sa Majefté Catholique, ni aucuns de les Mémoires ac-
„ ceptez ni réfolus là - defîus , ni qu'on ne pourra entrer en conférence a-
„ vec lui, mais que fi -tôt que le tort fait à Leurs H. H. P. P. aura été
„ reparé, que le démêlé furvenu en cette occafion aura été aplani, Leurs
„ Hautes Puiflances de leur côté montreront la confidération qu'Elles ont
„ pour les Miniftres de ladite Majefté, puis qu'Elles verront toujours fort
„ volontiers le retabliflement de la bonne correfpondance réciproque 8c de
„ la communication par les Miniftres de part 8c d'autre, laquelle n'a été in-
„ terrompuë qu'à l'occafion des iufdjtes procédures cemmifes contre le Sieur
D z „ de
z8 MEMOIRES, NEGOTI ATIONS, TRAITEZ,
„. de Schoncnberg. Et fera l'Extrait de cette refolution de Leurs Hautes
„ Puiflànces remis par l'Agent Rofcnboom entre les mains dudit Sieur de
„ Quiros pour lui fcrvir d'avis.
Il y a pourtant à remarquer que lés Etats Généraux aïant été avertis du.
deflein de Don Bernardo de Quiros de prélenter fon Mémoire , avoient inf-
truit le Prélldent de femaine de le refufer fur le prétexte inféré dans la Re-
folution.
Dès que Don Bernardo de Quiros eut reçu , par les mains de l'Agent de.
l'Etat, ladite Refolution, il travailla à y taire une. réponiê telle qui fuit.
Rcponfe y 'Ambafladeur d'Efpagne Réfident en Hollande aïant vu par la Réfolu-
bafla-"1" tlon deMeflieurs les Etats, du Lundi douzième Octobre préfent mois , que-
deur Leurs Seigneuries ont aprouvé le refus que le Sr. Verbolt Prélldent de femaine
d'Efpa- avoit tait d'accepter le Mémoire qu'il avoit fouhaité de lui remette entre les.
gne Re- mains, au nom Ju Roi fon Maître, pour être:lû dans l'.AiTemblée Se que même Et
enHol- ^es avoient pris laRéfolution de ne plus recevoir à l'avenir fes Mémoires, 6c de
lande,fur ne lui accorder aucune conférence, ne peut fe difpenfer de marquer Pétonne-
lai Réio- ment & le déplaifir qu'il a reçu en aprenant une nouvelle fi furprénante en.
ktion de £fet & de fi dangereufe conféquence.
ficurs les ^ comrae il femble par l'Enoncé de la Refolution qui lui a été délivrée,.
Etats qui que Leurs Seigneuries confidèrent ledit Ambafladeur, comme n'aïant point
lui fut encore été admis ni reconnu en qualité de Miniftre du Roi , 8c que ce foit.
délivrée fur ce fondement qu'elles croient ne devoir pas recevoir fes Mémoires.
Oclobre n* communiquer avec lui, il a jugé à propos de faire les repréfentations. fui-
:<>99. vantes.
Il dit donc , que fins avoir recours à la Notoriété publique ni aux té-
moignages de tous les Rois ôc Princes de l'Europe qui l'ont unanimement re-
connu pour Ambafladeur d'Efpagne , fans même en excepter le Roi de la Gran-
de-Bretagne, il lui fufit de rapeller ce qui fe pafla à fon ég.u'd lors de fon ar-
rivée en ce Pais, il y a environ fept ans. Ledit Ambafladeur vit alors le Sr...
Pcnfionnaire, lui déclara fa Commiflïon ,.&.lui communiqua fes Lettres de.
Créance , avec intention de. les lui laifler comme au Miniitre ordinaire de.
Leurs Seigneuries, afin de les leurs faire; voir, s'il le-jugeoit à propos > mais il
en iut empêché par ledit Sr. Penfionnaire , qui lui dit avec honnêteté que
fon caractère étoit aflez connu aux Etats par les Lettres qu'ils avoient reçues,
de leurs Miniftres d'Efpagne, 5c qu'ainfi il n'étoit pas nécefiaire qu'ils vident
pour lors fa Lettre de Créance.
Ledit Ambafladeur fe referva donc à la prefenter, félon la coutume, le joui
qu'il prendroit fon Audience publique , & il n'auroit pas aufli manqué de le.
faire, fi l'intérêt commun des Alliez, qui l'obligea à partir pour leBrabant,
afin d'y travailler avec la concurrence des Etats à une prohibition générale
du commerce avec la France , ne l'eut aufli contraint à diférer ladite Au-
dience pendant un fort long-tems, & fi l'Interdiction qui furvint enluite ne
l'en avoit privé depuis tout à fait.
Telles ce non autres furent les véritables raifons: qui empêchèrent l'Ambaf-
fadeur
qui
ehofes. L'une queVïl a' fait preiènter en dernier lieu fadite Créance à Leurs
Seigneuries, ce n'a point été dans la vue de fe faire légitimer Miniftre du
Roi,, puis qu'il fe tenoit déjà: pour tout légitimé ; mais feulement pour appa-
roir par écrit de fadite légitimation , laquelle il fembloit que le Sr. Penfionnai-
re vouloit lui difputer. L'autre que. nul obftacie provenu de fa part ne l'a ja-
mais empêché de prendre fon 'Audience : ledit AmbafTadeur s'étant tenu en
tout tems en état de recevoir cet honneur , & aïant toujours entretenu les
Equipages néceflàires à cet effet. En forte que les feuls voïages ci-defTus men-
tionnez & l'Interdiction, de laquelle ils ont été fuivis, font les feules & uni-
ques caufes de cette omiÔion.
S'il y a eu de la faute en cela, elle ne doit donc pas être imputée au ci-def-
fus mentionné AmbafTadeur, puis qu'il n'a jamais tenu à lui qu'il ne fe foit
acquité publiquement des devoirs accoutumez. Mais comme après tout , ces
devoirs ne font que fuperficiels & nullement néceflàires en eux-mêmes, l' Am-
bafTadeur ne fçauroit comprendre auffi que l'on puifTe fe fervir valablement
de leur omiflîon pour ignorer aujourd'hui fon Miniftere , & fou admiffion
paffée. -•'"..';>
Tous les Politiques conviennent que les Lettres de Créance fervent moins à
authorifer le Miniitre en fes Négociations qu'à déclarer fon Caractère. Ils
conviennent de plus que ni l'Entrée , ni l'Audience publique, ni les autres
formalitez de cette nature ne font point abfolument néceflàires pour fa légiti-
mation , & ils demeurent d'accord enfin que ladite légitimation eft cenfée fii-
fifamment faite dès que le Souverain, auquel le Miniitre eft envoie a bien vou-
lu entrer avec lui en Négociation.
S'il étoit belbin d'exemples là-defllis, on en pouroit raporter une infinité,
mais la chofe eft fi claire qu'ils feraient entièrement fuperflus. Il n'y a que
l' AmbafTadeur delà Majelté Catholique, à qui l'on faflè ces fortes de difieul-
tez, & il y a lieu de les trouver d'autant plus étranges & inopinées que Mef-
ficurs les Etats Généraux les avoient eux-mêmes levées dès le commence-
ment, en communiquant avec lui par le moïen de leurs Miniitrcs , recevant
fes Mémoires & y répondant.
Ledit AmbafTadeur ne croit pas que Ton puifîe lui objecter là-defTus que
L. L. S. S. n'en avoient ufé ainfi en fon endroit qu'en qualité de Plénipo-
tentiaire au Congrès des Alliez qui fe tenoit à la Haïe , & non en qualité
de Miniitre réfidant auprès d'Elles. Mais comme il eft bien aifé de prévenir
abfolument en cet écrit toutes les objections qu'on lui pourrait faire , mê-
me les moins aparentes, il ne laifTera pas de. refoudre celle-ci ; pour lequel
effet il dit ,
Que fans parler des diferentes Lettres écrites par le Roi à Mefîicurs les Etats ,
dans lefquelles Sa Majefté le nommoit & déclarait toûiours fon AmbafTadeur
vers Leurs Seigneuries , ce lui eft affez d'alléguer deux ehofes. La première eft
l'intimation qui lui fut faite au mois de Décembre i6pf. de l'Interdiction
D 3 por-
30 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
portée contre lui comme Miniftre d'Efpagne à l'Etat. Et la féconde que quoi-
que L.L. S. S. continuaffent depuis à recevoir les Mémoires des Minières or-
dinaires du Congrès, Elles ceffèrent de recevoir les fiens, fçavoir ceux qui é-
toient foûffignez ôc formels. Preuve certaine , comme on voit , de la récogni-
tion de fon Miniftere vers L. L. S. S ; & procédure qui feule aurait furrf de
Droit pour la légitimation , quand même il n'en auroit pas confié d'ailleurs
comme il faifoit par la précédente communication & formelle récognition '
dont l'AmbafTadeur a les preuves en main.
Cette vérité eit fenfible d'elle-même, mais pour la rendre encore plus pal-
pable, l'AmbafTadeur pofe 6c avance pour définition inconteftable de l'admif-
fion d'un Miniftre ,
I. Que tout homme authorifé pour cet éfet par un Souverain, eft Miniftre
vers ceux 6c à l'égard de ceux avec lefquels il eft authorifé de traiter , ôc avec
lefquels il traite éfeétivcment. De forte que s'il eft authorifé pour traiter a-
vec plufieurs Puiffances, 6c qu'il traite éfeétivement avec Elles, il eft Minif-
tre vers toutes lefditcs Puiffances de la part du Souverain qui l'emploie, de
la même manière ôc en la même façon qu'un homme qui eft authoriic de plu-
fieurs Puiffances pour traiter avec une feule 6c qui en efet traite avec elle, eft
Miniftre de toutes 6c chacune defdites Puiffances vers celle-là, foit qu'il faffe
fa Réfidence ordinaire auprès d'Elles ou non.
II. Que ce n'eft ni la Lettre de Créance , ni l'Entrée, ni l'Audience publi-
que qui conftituent la légitimation du Miniftre, mais bien fon admiffion aux
Négotiations éfecKvcs 6c la communication réelle qu'on lui accorde.
Or eft -il que PAmbaffadeur fufmentionné à été authorifé par le Roi fon
Maître dès le tems de fon arrivée en ce Païs-ci , pour négocier 6c traiter avec
L.L. S. S. 6c qu'il a éfeétivement négocié 6c traité avec Elles en diverfes
manières.
Donc il eft Miniftre vers Elles. Donc il a été reconnu pour tél.
A tout ce que deffus onpeut joindre les Paffeports fouventefois accordez par
L.L. S. S. pour le paffage des meubles 6c autres éfets dudit Ambaffadeur ,
comme apartenans au Miniftre du Roi refidant en Hollande. Les autres
Franchifes toujours concédées j une Réfidence aéhielle à la Haïe 6c rendue
fixe, nonobftant les fréquentes allées 6c venues de l' Ambaffadeur , parcelle
d'une partie de fes Gentilshommes 6c Domeftiques 6c particulièrement d'un
Secrétaire ; des Conférences très - fréquentes avec le Penfionnaire 6c avec les
autres Miniftres de L.L. S. S., fur toutes les affaires qui fe font offertes^ 6c
enfin des Mémoires fournis 6c repondus fur diverfes matières, quoique non foû-
fignez, lefquelles chofes concourent toutes 6c font voir clair comme le jour,
qu'il ne doit plus être queftion ici d'admetre l'AmbafTadeur 6c de le reconnoi-
tre puifque dès long-tems il eft tout admis 6c reconnu; mais feulement de
fçavoir fi L.L. S. S. ont pour agréable de continuer à communiquer avec
lui comme Elles ont fait auparavant , ou fi Elles ne trouvent plus à propos
de le faire.
L'AmbafTadeur fait trop quel eft fon devoir pour prétendre s'oppofer en
rien là-deffus aux refolutions de L.L. S. S.; mais comme il paraît par celle
dont
ET RESOLUTIONS D'ETAT. 31
dont l'a&e lui fut délivré en dernier lieu, qu' Elles ne font pas bien informées
de ce qui a été pratiqué à fon égard par le parte r il a crû être obligé à en
donner, comme il fait en cet écrit, une briève expofition.
Il ad joute, par forme de réfumption Se pour un plus parfait éclaircuTement
de la cliofe , que le Miniftère des Ambaflades admet deux voies de commu-
nication; l'une publique & qui entraine avec elle les cérémonies & les for-
malitez, l'autre privée 8c particulière , & dès lors fans conféquence Se fans em-
barras.
La première voie de Communication exige les Entrées, ics Audiences pu-
bliques, les Conférences de bouche avec le Souverain, en un mot l'aparat 8c
les formalitez qui font inféparables du Caractère, quand il eft expofé en pu-
blic. Mais l'autre fe trouvant dépouillée de tout cet embarras confîfte uni-
quement dans l'eflentiel de la Négociation , admetant pour cet éfet non feu-
lement les Conférences particulières, mais aufli les proportions & les repon-
fes jufques aux Traitez inclufivement.
L'Ambafladeur demeure d'accord que depuis l'Interdiétion qui lui fut figni-
fiée le 2.. Décembre i6pjr. il n'a point mis en ufage la première voie de com-
munication auprès de L.L. S. S. mais pour ce qui eft de l'autre il eft clair par
tout ce qu'on vient de dire qu'elle lui avoit été entièrement ouverte ci-
devant.
Les formalitez retranchées, Leurs Seigneuries avoient bien voulu recevoir
fes mémoires, y repondre, & ordonner à leurs Miniftres de conférer avec lui.
L' AmbaMadeur de ion côté s'étoit contenté de cette manière de communica-
tion. Le Roi fon Maître, dont les intentions ont toujours tendu à entrete-
nir la Paix & l'amitié avec ces Provinces , aux termes du Traité de quarante-
huit & des autres dont il a été fuivi, avoit aprouvé fa conduite & avoit bien
voulu accorder une pareille communication à Monfieur Citters Ambaftadeur
de L.L. S. S. auprès de fa Maj efté. Il avoit reçu fes Mémoires, il y avoit
repondu 8c il avoit même nommé un CommiiTaire qui fut le Marquis de los
Balbafes pour traiter avec lui.
Un tempérament fi louable 8c fi neceflaire au bien général de l'Europe 8c
à l'intereft particulier des deux Nations aïant eu lieu de part & d'autre depuis
l'Ioterdiélion , on avoit reparé, du moins à quelques égards les inconveniens ,
& avoit donné moïen aux deux PuifTances de prendre enfemble les mefures qui
leur étoient réciproquement convenables , fans que lesdifterens furvenus au fu-
jet du Sr. Schonenberg y aportât aucun empêchement. Il y avoit même
lieu d'efperer, les chofes étant en cette difpofition, que moïennant la très Ca-
ge & très prudente Médiation de fa Majefté Impériale & conformément au
fincère defir du Roi , on auroit pu en peu de tems parvenir à un entier ac-
commodement. L'Ambafladeur en particulier s'en étoit toujours flatté -2c
comme il n'a jamais épargné fes foins ni fes peines, quand il a falu procurer le
bien public , 8c que d'ailleurs il a toujours été meu d'une véritable inclina-
tion pour le bien de ces Provinces , il fe propofoit avec plaifir de fe fervir de
ladite Communication particulière pour contribuer de fa part autant que fai-
re fe pouroit , au retabliflement de cette même union 8c bonne intelli-
gence
3i MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
gcnce qui avoit rcgné depuis tant d'années entre Sa Mnjefté & Leurs Sei-
gneuries.
Ce n'a donc pu être fans un regret très fenfible que l' Ambaffàdeur fufmen-
tionné, s'eft vu privé par la notification qui fut faite le if. Oétobre pre-
fèntmois, dès moïens de pouvoir travailler a l'avancement d'une œuvre fi de-
•firable , & i\ necefTaire au repos général de l'Europe. Et (on déplaifir a été
d'autant plus grand, qu'il craint que lors que Sa Majefté aura été informée du
refus queL.L. S. S. ont fait de vouloir entendie Iesjultes plaintes contenues au
Mémoire qui a été inutilement préfenté 6c lu par fon Ambaffàdeur au-Penfion-
naire & au Prefident de fëmaine, Elle n'en conçoive un mécontentement plus
•grand qu'il n'eft à fouhaiter, 6c que rapellant fon Ambaffàdeur, elle ne pren-
ne au refte des mefures moins conformes à l'Intérêt de L.L. S. S. qu'Elle n'a
fait par le paffé.
Le fufmentionné AmbafTadeur du Roi fouhaite de tout fon cœur que Mef-
fieurs les Etats faffent une ferieufe attention fur ces chofes, pendant qu'il en
eft encore tems, c'eft-à-dire avant que S. M. ait pris des réfolutions finales
fur une affaire de cette importance.
Et .comme il eft perfuadé que tout ce qui a été fait à cet égard, n'eft ar-
rivé que parce que L.L. S. S. n'ont pas été pleinement informées des cir-
qu après ;
cienne correfpodance eft réciproquement nécefîâire aujourd'hui , Elle ne fe-
ront plus dificulté de donner à Sa Majefté les fatisfaftions qu'Elle defire
& qu'Elle eft en droit d'attendre de leur profonde fageffe & de leur équité.
On trouva à propos de ne rien répliquer à ce Mémoire, afin de ne pas en-
trer en négociation avec cet Ambaffàdeur, 6c de pouffer la réfolution qu'on
tétoit difpofé à prendre pour la conclufion du fécond Traité de Partage. . .
Pendant cette négociation on eut des avis feercts qu'on formoit des pro-
jets, qui menaçoient le Nord d'un furieux orage. Le Czar en retournant de
•fon voïage qu'il avoit projette de taire en Italie , .pour apaifer dans fon
Pais, le remuement des StreJitz.^ s'aboucha en Pologne avec le Roi Auguste.
Les fuites ont fait voir qu'il avoit concerté avec ce Prince d'attaquer la
Suède. Mr. de Lilienrooth Ambaffàdeur de cette Couronne follicita là-deffus
l'Angleterre 6c la Hollande à taire avec fon Maître un nouveau Traité d'Al-
liance. Ces Puiffances avoient déjà fait le 14. Mai i6p8. une Convention
Préliminaire de la manière qui fuit.
,-Conven- f~iUm Sacra Regia Majcjîas Suecia &? Ccl/t ac Prœpoîcntes Domim ordines
tion en- ^_^ Qenerajes fœderati Belgii , vigore articuli feparati rénovât ionis fœderum
Suède Hoïïandia die 12. Februarïi nuper conclu fa , con-vencrint de adhibendis utriufque
l'Angle- efficacioribus officiis , ut facra Regia Majeftas Mflgnœ Britannia cum alie me-
terre & moratss Partïbus contrabentibas talem interioris amkitia &? borue corrcfpondentia
landc°!* necejjitudimm , mutua defenfionis confœderationem inire velit , quaUm non tan-
tum
ET RESOLUTIONS D'E T A T.
iam ipforum fecuritati convenirc, fcd &? confervanda Orbis Cbriftiani tranquil-
litati necejfarium exifiimaverit ,<*tf quant fœderationem &*reciprocam obligationem
ineimdam altè memoratus Britannia Rex poft modumfe accéder e declaravil. Mi-
niflri itaque altè memoratorum Regum £5? Dominorum Ordinum Gencralium Foe-
derati Belgii plcnà potefiate muniti ,nimirum à parte Sacra Regia Majejlatïs Bri-
tannia , ltiu[iiïjjimus& Excellent iflimus Dominas Jofephus Williamfon Eques Au-
ratus ,pradicla Sacra Regia Majeflatis à Confiliis intimas , ejufdemque Legatus
Extraor dinar im & Plenipotentiarius; à parte Sacra Règne Majeflatis Suecia^
Illuftrijjimus £s? Excellent if/imus Dominas Nicolaus Liber Baro de Lillienrooth ,
ejufdemque Régime Majeflatis Secretarius Status , atque ad Celfos £5? Prapot entes
Dominos Ordines Générales Foedcrati Belgii Legatus Extraor dinar lus & Pleni-
potentiarius ; & à parte Dominorum Ordinum Gêner alium fœderati Belgii , Domi-
nus Baro deHeckeren, Dominas de Niblechorft , Comitatus Zutphanienfis Prator,
ut £s? Urbis & Agri Silva Ducis Prator fummus; Jobannes van dcr Does, Ci'
vitatis Gaudina Senator £5? Confularis -, Antonius Heinfius , Dominorum Ordinum
Hollandite £ï? fVeftfriJJïa Confiliarius Syndicus , corundem magni Sigilli Cuflos £«?
Feudorum Prafes ; Petrus van Heecke , Dominas de Koukcrck , Senator Urbis
Flijjinga-, Jobannes van der Does , Dominas de Bergenflein ex Ordine Equeflri
Provincia Ultrajeclina ; Hejfel de Siminia , ad Con/eJ/um Dominorum Ordinum
Frifta Deputatus\ Amoldus Lemker^ Civitatis Daventricnfis Con/ul; Ludolpbus
Ludolpbi, Civitatis Groningenfls Senator ; omnes in ConfeJJus Dominorum eorun-
demDeputati : c'um hîc Haga-Comitum inflitutis Colloquiis , atque poft accuratam
delibcrationem animadverterint banc confœderationem ita comparatam ejfe ut non
facile , ex omni parte , tam brevi tempore quodfibi baie opère perficiendo propofue-
rant , abfolvi pofjit , confultum deinde duxerant , vi acceptorum mandatorum , for-
muli/que eorundem rite commutatis , ad ineboandum opus tam fàlutare , atque pro
fundamento ejufdem inprafens de tali fœderis atlu gêner ah convenir e , prout arti-
culis fequentibus confiât.
I. Sit amicitia fida, , fincera £<? conflans inter Sacram Regiam Majeftatem
Magna Britannia , Sacram Regiam Majeftatem Suecia , nec non Celfos & Prœ-
patentes Dominos Ordines Générales fœderati Belgii , qui in hujus fœderis defenfivi
Leges , in mutuam fecuritatis aftèrtionem , confentiunt , ad utÙitatem , bonorem £s?
commoda invicem promovenda Jefe adflringunt , deque adverfis aliorum conflliis £5?
rnachinationibus tempeflive pramonere & eis avertendis communi auxilio tueri
promittunt.
II. Scopns bujus triplicis fœderis erit non tan! km pro altè memoratorum defett-
fione 6? fecuritate amicitia ; fed & Pacis tranquilitatifque contra quameunque
aggrejfl'jnem in Europâ ajfertio atque confervatio.
III. Ut autem altè memorati Fœderati taniô melius convenire pofjlnt de modo
£5? mediis ad obtinendam l&nc fcoptim fpeclantibus , ftatutum fimttl efl , ut quant
primant demminentur certi Plenipotentiarii^ qui nomine altè memoratorum Regum
emendationem £s? renovationem fœderum , qua antea inter Magna Britannia &
Suecia Coronas, tùm pro flabilienda arclioris amicitia neceffltudine , tum circà
commercia utrorumque fubditorum divin&a funt , (ufeipiant , qua tamen rénovât io-
nés non impedient , qub minus Miniflri triinn Fœderatorum , quant ociùs & Jim
alla interpofttâ morâ , adfumant 13 promoveant negotiationem de componendis omni'
l'ont. I, E bus
^4 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
bus & fwgulis requifitis , quœ triplicihuic fœdcri intègre perficiendo infcrvire exi-
fiimabuntur . •
IV. Prxfens autcm convertit) generalis feu bafis folida atque incorrupta prœfa-
ti fœdcris defenjïve trip/icisy nufic ftatim initium caplet , ità ut Ji evenerit borum
Fœderatorum aliquem in Regnis , Statibus vel Provinclis fuis, in Europà fitis,
boftiliter invadl, eidem reliqui abfque ullâ excufatlone, moràvel prœtextu, prœ~
fenti auxilio fuccurrant , neque ab ijîo auxilio defiftant antequam parti lœfis ple-
narle fatisfatlum fit.
V. T'eneantur partes contrahentes confilia fua communie are atque illas potifiï-
mum rationes invicem inire , quibus Pax gêner ails confolidari £5? corroborari queat ,
adebque promittunt re ipfà atque efficaciter mutuis auxiliis fibi profpicere contra,
quameumque aggrefilonem , quœ tranquilitaten in Europà turbare pojfit.
VI. Nihil derogabitur , hâc conventione , IraSiatibus vel Fœderibus inter partes
contrahentes quovis tempore antehâc conclufis, fed eadem potius in integro vigore
fuo permaneant.
Vil. Ratihabebitur bac Conventie £ff fiât commutatio formularum Hagœ-
Comitum intra tempus [ex feptimanarum , à die fignaturœ computendarum , vel
citius fi fieri poterit .
In quorum omnium fidem £f? robur , altè memoratorum Regum , uti £s? Celforum
6? Preepotentium D. D . Ordinum Gêner alium fupra ditli Plenipotentiarii hune
atlum Fœderis , cujusfex inftrumenta confecla funt , fubfcripferunt £5? figillis fiuis
muniverunt. Abtiini Hag<e-Comitum die ~ Maji 1698. ftgnatum erat.
(L. S.)J. Williamfon. (L. S.) N. Lillienrooth.
(L. S.) Baro de Heckeren
(L.S.) J.
vander Does.
(L.S.) N
Heinfius.
(L.S.) P.
van Heeckc.
(L.s.yj.
vander Does.
(L.S.) H.
Siminia.
(L S.) A.
Leraker.
(L.S.) L.
Ludolphi.
Les Provinces - Unies des Pais -Bas étoient fort portées à cultiver l'amitié
avec la Couronne de Suède. C'étoit fur tout par raport au Commerce de
leurs fujets dans la Mer Baltique. Aufïï dès que la Paix de Ryswick fut fiite,
remercïèrent-Elles le Roi de Suède de fes foins dans cette Négociation , par
une Lettre qui fut remife au Baron àVIeeckcren, qu'on lui dépêcha à Stockholm,
en qualité de Miniftrc Plénipotentiaire. Voici en quels termes cette Lettre
étoit conçue.
SERENISSIME &c.
^Ure f~~\^od pofitis armis , quibus inter fe mi fer e âccertabant Cbriftïani Principes,
def tats V_^ pacem habemus , quam bodie ratam efji jufferunt , qui poflremi earn amplexi
au Roi f uerant , ici Régime Majcfiatis Fejlrœ piis cutis , £f? faluberrimis confdiis Europà
de Sue- débet ; & nos , qui pars magna fulmus eorum , ad quos belli calamitates pertlnue-
dc- rinty £5? pacis commoda fpeclant , Regia Majefiati Feflns acceptum ferlmus , £s?
gratias,
ET RESOLUTIONS D'ETAT. ?;
grattas, quant as pojfamus maximas, agimus: opus erat arditum, &? ntultum dif-
ficile , conciliare averfos, & longo bello exafperatos Principum animas , hoc fa-
mé» à divo Parente fufceptum , Regia Majefias Vefira citius , quant pr opter rei
magnitudincm fperari poterat , ad optatum finem perduxit ; gloriofum hoc rêver â
efi Majeftati Vefira , (3 feelicem conjiliorum fuorum exitum gratulamur , multum-
que gaudemus , quod , ita dirigente Divinâ Provident iâ , J'alus noftra , &? tran-
quillitas, cum immort ali Regia Majeftatis Veftra gloriâ conjuncla fit ; nonenim
alius qtufquam efi , cujus officus Nos magis devintlos ejfe cupiamus. Laudanda
eiiam Nobis efi Prudent ia , Labor , i3 Fides Legatorum , qui juffa Majeftatis
Veftra in hoc Negotio executi funt , 13 qui Spart am banc tam pulchrè ornarunt ,
ut nihil àfe defiderari pafjï fint, quod à quoquam fperare fas fit ; verum ne nimis
longi fimus , pluribus gratitudinem Noftram ore tenus teliandam dedimus Plenï-
potentiario Noftro Baroni de Heeùkeren, 13 Refidenti Rumphio , quos ut Regia,
Vefira Majefias bénigne audiat , amicè rogamus. Caterum &c.
Die 13. Decembris i6p 7.
Pour témoigner à ce Roi la bonne opinion que les Etats Généraux avoient
de fa généreufe 6c Chrétienne libéralité , ils lui écrivirent aufli , une année a-
près , une Lettre en faveur des Réfugiez François. Par laquelle ils rendoient un
authentique témoignage à l'ardente charité des Cantons Evangeliques de la
République Helvétique ,ainfi qu'on peut le voir par la Lettre même, qui fuit.
SERENISSIME &c.
QUam gravis atque crudelis oppreffio innumeram hom'mum Reformatant Fidem Lettre
profitentium multitudinem aliquot rétro annis ex Galliâ &? Pedemontio exe- des Etats
grrit, nec Regia Majeftati Vefira, nec cuiquam ignotum ejfe putamus : neminem Gé^r:
etiam , fi auclores tant or um malorum excipias, qui non indigna tôt Fidelium for- ^ s°^
tis mifereatur ; non latet etiam , quomodo pracifâ poft pacem non ita pridem con- de.
clufant , omni de redit u in patriam fpe , quamvis aliàs exiguâ , ab eo tempore ,
tôt exulantium, qui poft habitis pro vero Dei cultu ., patrià , proximis , opibust
fort unis , fc? quidquid in terris earum haberi folet , ubiqae ferè locorum circum-
aguntur , multum autla fit calamitas. Inter hos autem qui maxime laborant9
Q prafentiffimo auxilio indigent ; fefe offert ingens illa fratrum multitudo , quoi
vicina atque conter mina G allia (3 Pedemontii Helvetia excepit, & haclenus lau-
danda & imitanda charitate fovet ; horum numerus, uti ad Nos relatum efi , ad
oclo ferè millia afcendit ; ad quos nuperrimi acceffere , paulà minus quam tria
milliaeorum, qui ex Galliâ oriundi in Vallibus Alpinisjedes fixeront , inde rur-
fss emigrare juffi : hune tantum populum cum arcla nimis Helvetia fines , (3
gentis ind'tgena abundantia non captant, aut diutiîts ibidem commorari patian-
tur, digna je prabet materia , in qaa Prote fiant ium tam Principum quam prtva-
torum pietas (3 charitas exerceatur; nudi enim (3 egentes, incertique quas novas
fedes ipfis deftinarit Divina Providentia , folllcite (3 anxiè exquirunt. Num qu;s
Prinepum Evangelicorum , eos in aliquâ terra parte loaue, in quâ Deum libère
(3 rite colère , (3 manuum labore atque induflrià fibi & fuis viclum pantre
queant , & nùm qui eos pecttniâ & attxiliis ad deducendas colon as , & fiabihenda
E 2, no-
3<î MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
nova domicilia, neceffariis adjuvare velint, quo adjumento, famé, &? inopiâ ipjh
pereundum foret : nullum dubitandi locum relinquit eximia RcLe Majeftatis
Peftra pietas , quin arumnis atque calamitatibus , tant a multitudinis commota,
cum aîiis Principibus fratribufque Chriftidnâ charitate incenfts, b'ifce miferis fuc-
currere cupiat & Nobifcum cenfeat, caufam eorum, qui oh rejctlos errores & fa-
parftitiones Pontificias, tam dira patiuntur , aque fpetlare ad Mines Prote fiantes ,
atque communibus facultatibus corum ind'gentiœ & neceffïtati occurrendumjjfe ,
fie enim ex conjunclis contributionibus majiis ipfi folatium Contient , &? plmibus
Jlipem confèrent ibus, minus gravis erit erogatio. Nojlra quidam terra tam an-
gttjlis circumfcribitnr limitibus tôt que replet a eft ex Gai lia Relig'anis caufà profu-
gis, ut plures alere nequeatytàm difficilis pr<etercàï3 fingularis ob foli iniquitatem
eft agri cultura,ut operam in eâ perdant, quotquot uberiorem glebam vertere af-
fuetifunt , qudpr opter fifub imperio Regia Majeftatis Vefira%prapertim in pro-
vinciis ejus Germanicis , major daretur opportunitas , Regiam Majeftatem Veflram
enixe rogamus, velit huic genti afflicla vel parti corum terras , ubi domicilium
ftatuant, largiri;fm minus, cam apud Principes, in quorum ditione extat talis op'
portunitas, intercefiione & favore juvare, ut ab iis jlationem aquar.i impetrent ;
quod autem pracipuum eft , ut pro Regiâ Majeftatis Veftra pietate, munificen-
tiâ 6? liberalitate eganis £f? miferis bifee fidelibus , pecuniâ £s? opibus longâ pace
florentifjîmis fubvemat yne tôt tempeftatibus jaclati in extremis, ut nunc Junt ,an~
guftiis diftituantur , nobis quoque in animo eft ubi certum quid cognoverimus de lo-
co , ubi errorum finem bac pia gentis examina invenient , iis opem Noflram
pro facultatibus , graviffimo bcllo multhm atiritïs, conferre &? Regiam Maje-
ftatem Veflram aqui bonique confulturitiu confidimus , quod nullà re moti njfi
pio ergà fratres cum inopiâ 6? mtjeriis colluclanies affeïlu , eos Regia Ma'e-
ftatis Veftra favori (J benefidentia_comœenda;nus. £htod r eft a t..
Sereniiîime &c.
Ilig.c-Comit. die 6. Nuvembris 169S.
Le Baron a'Pckawt 8c le Refidèat Rumpf aplanirent à la Cour de Suède
îe contenu du Traire (uivant, qui tut cnliiite ligné à la Haïe le 23. Janvier
170.0. avecfîx Articles fecrct's.
Traité /~\Uandoquidem Sacra Regia Majcftas Suecia, Sacra Regia Majeftas Magna
entre la V^ Brittannia , & Celfi ac Prapotentcs Domini Ordincs Générâtes Fœderati
Suède, Belgii, eo îratlatu , qui f; Maji i6p3. Haga-Comitum conclu fus & fignatus
terre & fult ' mittt,<e defenftonis Confœderationem iniei int , tàm ad prajlandam Rrgns ,
kb Etats Statibus , £5? Ditionibus Partium contrabentium fecuritatem , quant ad confier*
Gàaéti vandam in Orbe Cbriftiano pacem & tranqui Hit aient ; cumque vigere Articule
tertii ejufdem Traclaius nominandi fuerint ab unâquàque parte Minflri (J Ple-
nipotentiarii , ad promovenda 13 componenda omnia & fingula , qua intégré
perficiendo eidem Fœderi infervire poff'e exiftimarentur. Proptcrcà atque eum in
iinem Sereniff. ijj Patent. Princeps £jf Dominus Carolus XII. , Dei Grztiâ S:ie-
■•orum, Gotbcmm, Fandalorumque Rex &c. &V. &c.ScreniJf. & Patent. Prin-
ceps
ET RESOLUTIONS D'ETAT. 37
ccpi (3 Dominus Guliehms III. eâdem Dei Gratta, Magna Britannia Francis,
(3 Hiberuia Rex (3c. (3c. (3c. Àtque Cclfi (3 Prapotentes Domïni Ordines Ge- ■
ncralesUmti Belgii, wmtnavcnint (3 conflit tter uni Plempotenîiarios fuos ; Ici-
licet Ren Sueciœ IlluftriJJimum (3 Excellentiflimum Dominum Nicolaum ■ Liber im
Baionem de Lillienroth (3c. Rex Magna Britannia Illuftrijfimum (3 Excellentif-
f.mum Domlutmjofephum PVilliamjon , Equitem Auratum , (3 c. Et Domini
Ordines Générales , Dominos Jehamiem ab EfJ'en ,-(3c. Francifcum de Breeden-
hof ■■ (3c. Âstonlum Heinfiinii , (Je. GûlieTîkum de Najfau , (3c. Evcrbardum
de JVeede, (3c Gulielmum de Haaren, (3c. Ariiokh:m,'Lem!ar, (3c. (3 Ludol-
phum Gôckinga , omîtes -in Confefju eontndem Députât as , --qui, vr Pote liât is
ipfis concefile , (3 mandatât \um fiuorum , in fequentes Faderis Legcs convene-
runt. ,,
I. Primb mancat in vigore fuo TraSatus Confœderationis die ~ Maji 169S.
Conclu/us, (3 vi prafentium confirmetur , eodem modo ac fi de>verbo adverbum
hic infertus effet. _ , • _
II. Itidem intégra (3 in vigore fuo maneakt-cun&a Fœdera , tam inter ait'tjji-
mè mumoratos Reges invicem , quant inter fingulcs corundem cnm altiffimè mémo-
ratis Dominis Ordinibus Gcneralibtts Uniti Belgii 'mit a, unum quoique fecundum
tempus durationis eidem prafixum.
III. Htec autem Fœdera locum habcant , non folummodb in cafibus inibi com-
prehenfis (3 determinatis , verùm etiam fpeciàtim fi contingeret unum vel pl'u-
res jam nominatorum Fœderatorum (3 Contrahentium invadi , occafione hujus
f céder is , fub -quoeumque colore velprœtexttt id fieri pojjit.
IV. Ideàque fuprà memorati Contrahentes fponftonem , (3 garantiam recipro-
cam in fe fiufcipiunt Regnorum , Statuum, Provinciarum , Ditiomm (3 Terra-
rum fuarum in Europâ, feque invicem omni meliori modo contra aggrejfïones, in-
fejïationes , vel oppreffiones hodiles quafeunque tueri promittunt ; quamprimiim
itaque unus Confœdcratorum lacejjitus fuerit , ambo reliqui concunant ad eum
defendendmn , fecundum Leges Tiaclatuum cum eodem initorum , Ut & ex Lege hu-
jus Fœderis commuais -, quod fi auxilia per ho/ce 'Fraclatus promi/fa , non fiuffi-
cerint, omnes vires pojjtbiles & Ncceffariœ adhibeantur ad defendendmn eum,
qui provocatus fuerit , (3 ad et procurandum juftam fatifatlionem.
V . Q uoniam autem altiffimè memorati Fœderat i exifthuaverint fecuritatem Regno-
rum, Statuum, Provinciariu-m, Ditionum, (3 Terra rum fuarum magnam par-
tem conftitutam efje in confervatione pacis generalis inter Principes Chrifiiams ,
Illorum magnoperè inter fit , ne per opprejfiones (3 aggreffiones etiam alibi f atlas,
eorum Régna , Status atque Provincia traclu temporis turbentur , (3 cum aliis
bello involvantur , proptereà fibi invicem promiferunt (3 hifice promittunt , fe
tuituros (3 vindicaturos fpeciàtim Tratlatûs fiequentes.
VI. Scilicet Pacem Qfnabrugcnfem, Monafterienfem , Ao. 1648. (3 Pacem
Neomagetifem , Ao. 1678. cjr 1679. ut (3 Traclatum Pacis inter Imperatorem
& Imperium atque Regnum G allia , Ryswici die 20. Oclobris Ao. 169J. cmi-
clufum , quatenhs hic non dificrepat à T'raclatibus Pacis Ofnabrugenfis , Mena-
fifrienfis (3 Neomagenfis .
VII. Sicuti (3 Traclatus Pacis Rysïvki conchtfos ao. Septembris 1697. ut-
E 3 tet>
1700-
38 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
1700. ter Regem Magna Britannia & Regem G allia, &? Dominos Ordines Générales
■ Uniti Belgii.
VIII. Ut autem hac fponjîo five Garantia efficacicm fc? effeclum fuum fortia-
tur, altiffimè memorata partes contrabentes omnem opérant impendent , ut pacla
fuperkribus Articulis recenfita abfque ttllâ violatione farta , tecla maneanî , fin au-
tem quocunque modo infringi vel violari contigerit , feparathn atque conjunclim,
via &? mediis amicabilibus annitentur ad obtinendam reparationem facile vio-
lationis & infraclionis eorundem Traclatuum Pacis; Fer km fi hi conatus &
Officia inutiles caderent , vel fi bellum excitaretur , antequam partes conci-
liari pojffent , fingu/i Fœdcratorum ad prajlandam modo diclam fponfionem fi'
i/e Garantiam , & ad obtinendam reparationem violationis &? infraclionis me'
moratorum Traclatuum Pacis , dabunt fex Mille Milites , quantociks unus
Fœderatorum eos pojlulavcrit , vel id neceffarium duclum fuerit , idque do-
uée violationes & infracliones facla , fuerint reparata , &* Pax refiituta
fuerit.
IX. Ita tamen ut hi fex Mille Milites ', non nift femel à quovis Confœderato-
fum in auxilium exigi poterunt , adeb ut fi uni Fœderatorum mifi fuerint vir-
tute bujus Fœderis communis , praterea alii mittendi non fint , fed Confœde-
rati inter fe convenient de loco ubi Us maxime neceffarium erit.
X. ^uod fi quis Fœderatorum , cafu exigente , alteri prafiiterit auxilia ,
Paclis peculiaribus flipulata , five in totum, five ex parte, tune non tenebifur
eidem Fœderato prafiare auxilia ex capite hujus Fœderis communis , nifi refi-
duum ejus , quod fupererit numéro auxtliorum ex Fœdere cemmuni , numerum in
Fœdere peculiari déterminât um excédât.
XI. Sed fi contigerit hac auxilia non fufficere ad ftabïliendam Pacem, vel fi
pranominati Fœderati , vel eorum aliquis bello etiam involvatur , e ô cafu agent
Fœderati inter fe de augendis auxiliis , fecundum ea qua contenta funt in Articulo
quarto hujus Fœderis.
XII. Obftringuni etiam fe Fœderati , fe non daturos auxilia, vel opem latu-
ros hofiibus eorum , vel illius , qui bello implicitus fuerit , fed e contrario fe in-
cubituros in boc ut ejus vires diminuant ur , eumque in finem Fœderati confilia
confèrent', an non Commercia cum hoflibus Fœderatorum, vel hœderati , prebi-
beri, vel alio modo taies ho fies debilitari, & omnis acccffio virium eorum impe-
diri pofjit.
XIII. Cafu eveniente , quo antediSa auxilia certum in locum miltenda fint ,
Fœderati fimul opérant navabunt ad facilem & fecurum reddendum militum tran-
fitum , ad quem obtinendum officia adhibebunt apud Principes , quorum terra
tranfeunda erunt.
XIV. Mentor at a Copia militares in auxilium :niffa, quemadmodum jam die-
tum eft , fint fub Imperio Ducis vel Generalis Fœderati réquifili , manebunt
quoque in uno eodemque exercitu juncla , quafenus ratio bclli tulerit , Dux
autem jam dicliis Prafeclo vel Gênerait Requirent is parère tenebitur.
XV. Hi Confœderati , qui Bello implicabuntur , finecrè & fideiiter omnia qua
geruntur invicem communicabtint , nec ullam Négociai ioitem fufctpient , nec indu-
das aut Pacem facient , ab/que mutuo confenfu.
XVI.
ET RESOLUTIONS D'E T A T. $o
XVÏ. Confèrent itidem de omnibus cum eo Fœderatorum qui bello involutus 1700.
non fuerit , eumque etiam comprehendent m Traclatu Pacis futur œ , CS? inte- -
reà cum eo communicabunt de modo , quo auxilia miffa maxime utilia effici
queant. ««■.■, j r r
XVII. Licitum fit aliis Regibus , Principibus & Statibus ad prœfens Fœ-
dus accedere , quatenus ïllorum accefio ad promovendam &? ajferendam tran-
quillitatem publicam conducere , communi Confœderatorum conjenfu , utilis judi-
cabitur. - '".
XVIII. D tiret hoc Fœdus in annos otlodecim : fcr permutabuntur Tabula
Ratificationum Hagœ-Comitum mira fpatium dttorum vel trïum menftum , vel
citiùs , fi fieri poterit.
In quorum fidem Nos fupramemorati Plenipotentiarii prœfens Fœdus , cujus /ex
inflrumenta confekla Jiin't , fubfcnptionibus Ù figillis Nojiris munivimus , fcilicet
Ego Nicolaus Liber Baro de Lillienroth pro Rege Sueciœ , Hagœ-Comitum.
die r, Januarii Ao. 1700. Ego Jofephus IFilliamfon pro Rege Magna Britan-
niœ] ' Londini die ~ Januarii Ao. 1700. £j? Nos Députât i Dominorum Ordinum
Generalium pro iifdem, Hagœ-Comitum die - Januarii Ao. 1700.
(L. S.) N. Lillienroth. (L. S.) J. WiUiamfon. (L. S.) J. v. EfTen.
(L. S.) Fr. v. Breedenhof
van Oofthuyfen.
(L.S.) A. Heinfius.
(L.S.) W.de Naflàu.
(L.S.) E. de Weede.
(L.S.) W. van Haaren.
(L. S.) Ar. Lemker.
[L. S.) S. L. Gockinga.
Articuli Separati Secretî.
QUaudoquidem hodiè Fœdus defenfivum condufum fit inter Sacram Regiam Ma-
jefiatem Sueciœ , Sacram Regiam Majeftatem Magnœ Britanniœ , & Cclfos
acPrœpot entes Dominos Ordines Générales Uniti Belgii , ai que in re communi vifum
fuerit, eidem quofdam addere Articulos , qui ejufdem fint valoris, ac fi in ipfo
Traciatu exprefii forent , itaque conventum eft tenore fequenti.
I. Tueantur é? vindicent altifiïmè memorati Faderati non folum Pacem £5?
Tratlatus, quorum mentio facla in Articulis 6. &? 7. Fœderis Piincipalis, fed
ctiam prœtereà Traclatum Pacis inter Reges Galliœ & Hifpamarum die xo. Sep-
tembris 1 697. Rysivici condufum.
II. Si Rex Magnœ Britanniœ & Domini Ordines Générales adacli fue-
rint bellum fufcipere pro vindicatione five Garantie Pacis Ryswicenfis , eo
cafu , Rex Sueciœ obligatus erit , loco fex mille miliium , in Articulo otla-
vo TracJatûs Principalis memoratorum , Us auxilium prœbere decem milita
railitum , veflitorum , £5? benè armât or um , cum adjunclis tormentis cam-
fefiribus neceffariis , nec quicquam Rex Magnœ Britanniœ aut Domini Or-
dines Générales folvent pro honm deleclu & tranfmiffione , fed is , qui
lias
4o MEMOIRES, NEGOTI ATIONS, TRAITEZ,
1700. bas Copias a -.s M <.'.■■ es rcqufh-crit , ab eo tempore^ quo ex Stationibus Pomerania
• & Bvehmœ c -devint, ad itcr wgrediendum^ eofdem fuftentabit , & ftipendia iif-
<lem prabebi! , fecundum normam& modum in folutione militia Dominorum Or di-
num Generaliam ufitatum ; & iiberum erit bis Copiis omni temporc fupplementa
légère in Regnis G? 'terris Sacra Regia Majeftati Suecia fubjetlis.
III. Nuilus Fœderatorum obligatus fit promijja auxiliu mittere in Italiam,
Hifpaniam, vel in alla loca .equè ant longius remota, fed fi requirens ibidem fup-
petiis opus babtierit , aliundreafdem accerfet , intérim autcm uti poterit prafatis
auxiltaribns copiis in 'Terris inagis vicinis vel propriis , tàm ad hoftem divcrten-
dum , quàm ad fui &? Fœderatorum fuorum defenfionem.
IV. ghicmadmodum etiam alïiffimè mcmoratis quàm maxime cordi ejl tran-
quillitas in Septcutrione , cumque ei'.m in finem finguli feparatim jam antehàc Je Fi-
dejujfores & ^indicés conflit uerint Tratlatûs Altcnoenfs intcr Regem Dama &
Ducem Holfatia-Gottorpienfis ccnclujï , atque exifliment ab objervatione bujus
Tratlatûs magnâ ex parte pendere modo indigitatam tranquillitatem in Septentrio-
fie , itaque conftdtum efi'e duxerunt , hoc ip/o de novo fefe invicem objlringere ad
Vindicationem five Garantiam ditli Traclatus Altenoenfis^ & bac Vindicatio five
Garantia pro flaîu prefenti locum babebit contra quamcunque aggrejjionem & viam
fatli, remit tatur autem Controierfia inter Regem Dania & Duce m Holfatia-
Gottorpienfis ad Negotiationem Pinnenbergcnfem , ut ibi terminetur quantociùs
fieri pofjit.
V. Huic Fcederi accedere poterunt , fi ita Ipfis vi/um ifuerit , Imper ator & Rex
Hifpania , tanquam ii ad quos Vindicatio five Garantia Pacis Rysivicenfis non
minimâ ex parte pertinet , & cum iis de conditionibus convenietur.
VI. Rex Magna Britannia {§ Domini Ordines Générales [pondent , fe omnem
diligent iam £5? operam adhibituros^ ut Rex Hifpania Régi Suecia folvat ^ quan-
tum debebitur pr opter Naves Suecia^ bellis pracedentibus , àfubditis Régis Hif-
pania injufle captas.
In quorum fidem Nos Infrafcripti Lcgati Extraordinarii & Plenipotentiarii
Regum Suecia & Magna Britannia , £5? Députât i Dominorum Ordinum Gene-
ralium Uniti Belgii , nominati in Traclatu Principali , articulas hos feparatos^
quorum fex inflriimenta confetla funt , fubfcriptionibus & Sigillis Nofiris munivi-
tnuS) Scil. Ego Nicolaus Liber Baro de Lil/ienrotb, pro Rege Suecia , Haga-
Comïtum die - Junuarii Ao. 1700. Ego Jofeph. Williamfon pro Rege Magna
Britannia ^Londini die - Januarii Ao. 1700. £5? Nos Deputati Dominorum Or-
dinum Generalium pro ïifdem , etiam Haga-Comit. die j-j Januarii 1700.
(L. S.) N. Lûlienroth. (L. S.) J. Williamfon. (L. S.) ]. v. EfTen.
(L.S.) Fr. v. Breedenhof
van Ooithuyfen.
(L.S.) A. Heinfius.
(L.S.) W.de NaJTau.
(L.S.) E. de Weede.
(L. S.) W. van Haaren.
(L.S.) Ar. Lemker.
(L.S.) S. L. Gockinga.
La
ET RESOLUTIONS D'ETAT. 41
La Ratification de ce Traité ne fut échangée par i'Ambàiïàdeur de Sue- 1700.
de que vers la fin du mois de Mars fuivant. En ce tems-là on reçût un dé- '.
tail de ce qui étoit arrivé à l'Ambafradeur de France à la Porte , en allant à
l'Audience du Sultan. Quoique cette affaire rie foit pas fort interefTante pour
le public, elle Tell: néanmoins allez pour les Cours & leurs Miniftres , relati-
vement au Cérémonial, qui eft un point fort délicat, & qui fouvent eft une
feabreufe pierre d'achopement. C'eft pourquoi on en raportera ici la re-
lation.
LE f. Janvier 1700. Mr. de Ferioles AmbafTadcur de France à la Porte Ce Relation
rendit de grand matin à la Marine, accompagné des Gentilshommes de dececlui
fa Mailbn & de la Nation. Il avoit donné de fi bons ordres que tout ion cor- j^c pg.
tege fut afiemblé dès le point du jour qui fut très-beau. riol'es
Loriqu'il fut paffé à Conftantinople avec toute fa fuite , il y trouva le Ambaf-.
Chiaoux Baffi, 40. Chevaux, 80. Janiflàires 6c fo. Cavaliers, que la Porte y j\dpUr
avoit envoïez, fans comter 60. Chevaux que l'AmbaiTadeur y fit trouver par ceàfon"
fes ordres. Audien-
Ces JaniiTaires marchèrent deux à deux : en tête il y en avoit fix de l' Am- ce * la-
bàfiàdeur ; ion Maître d'Hôtel à Cheval} fix Valets de Chambre à pied, 6c Portc''
une partie de fa Maifon. Vingt & cinq Valets de pied vêtus d'une magnifi-
que livrée précédoient à pied les Dragomans ou Interprêtes , à Cheval. Les
Gentilshommes plus richement vêtus les uns que les autres marchoient avec
tant d'éclat 6c en fi bon ordre, que les Turcs , dont les places 6c les rués é-
toient toutes remplies étoient charmez de cette Cavalcade.
Le Chancelier marchoit devant les Chiaoux , dont le Chef voulut avoir la
droite fur l'AmbaiTadeur ; mais voïant qu'il ne pouvoit en venir à bout, il
aima mieux paflêr devant à la fuite de fes Chiaoux. L'AmbaiTadeur avoit fix
Eftafiers autour de fon Cheval proprement vêtus à la Turque. Quatre Ca-
pitaines marchoient deux à deux avec les Officiers 6c les Gardes Marines , dont
le nombre avoit été fixé à trente. Toute la Nation les fuivoit à Cheval.
De forte qu'il y eût plus de 500. Hommes très bien montez , car la Nation
avoit fes Chevaux, 6c 100. Hommes à pied, dont la marche fut très bien ré-
glée vers les murs de la Porte du Serrail , qui eft allez aparente. Il y a-
voit un concours de Peuple extraordinaire ; St comme il faloit y monter par
une hauteur , les Turcs eurent un plaifir extrême de voir venir de loin ce
Cortège.
Quand on eût gagné la première porte du Serrail , l'on traverfa à Cheval
une longue Cour où l'on mit pied à terre. On en paffa une féconde à pied
pour aller au Divan, qui eft à gauche des apartemens du Grand Seigneur.
Plufieurs Officiers de la Porte dans leurs Habits de pompe, un long bâton
d'argent à La main vinrent recevoir I'Ambàiïàdeur à la féconde Porte. A
peine eut on pafTé cette féconde Cour, qui eft environnée de Galeries, 6c
dont le chemin eft bordé de barrières , que 4000. JaniiTaires qu'on y avoir,
fait trouver pour cette Audience, coururent à perte d'haleine vers le chemin,
•où on avoit jette quantité de pain, 6c d'ecuclles pleines de ris. On fut agrea-
T'm. I. F y^
4i MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
1700. blement furpris de cette imiption imprévue , qui fe fit d'abord qu'on eût
" pafle.
On avança à la Salle du Divan, qui eft le lieu où les Miniftres s'aflêmblent
pour y juger des différais des parties. Ce lieu eft de plein pied, joignant une
gallerie, qui environne les Bâtimcns du Grand Seigneur. Sa voûte eft toute
dorée, Se remplie de Caractères Turcs. Il y en a une autre , qui n'en eft
feparée que par des barraux de bois ; c'eft où les Officiers fubalternes s'af-
foient fur des tapis contre terre. Le bas de la Salle du Divan eft couverte
d'un Tapis. 11 y a trois bancs couverts d'étoffe de foie. Celui du milieu
fur lequel le Grand Vifir eft aflîs, eft couvert d'un tapis de velours cramoifi
bordé d'or. Au milieu fur la tête du Grand Vifir, il y a une petite fenêtre
quarrée en forme de jaloufie, d'où le Grand Seigneur entend & voit tout ce
qui fe paffe dans le Confeil. A la droite du Grand Vifir, il y avoit trois Vi-
firs à trois queues dont le premier & le troifiéme étoient Beaufrères du Sul-
tan. A la gauche étoient les deux juges d'Europe & d'Afie. Le premier de
ces juges avoit un Turban vert , tout différent des autres par fon exceffive
grandeur. Ce juge defeend de Mahomet. Le fécond avoit aufiî un Turban
de la même façon, excepté qu'il étoit blanc. Sur les bancs des deux cotez
étoient les Tréforiers d'une part & fon Lieutenant tenoit la place de celui
qui paraphe , 6c qui étoit abfent à caufe d'une indifpofition. Le Grand Vifir
avoit un Turban de cérémonie , comme les autres Spahis & Officiers vêtu
d'une Vefte blanche doublée de Martre Zibelline, qui étoit bordée d'un fa-
tin vert, & il avoit une groffe Emeraude au doigt. Les 3. Spahis qui font Vi-
firs, avoient une Vefte verte doublée de Zibelline par deffus une Vefte de
Satin blanc. Les autres en avoient de couleur de gris de lin & rouge. Les
Turcs ont une gravité dans leurs vêtemens , qui joint à un grand filence
qu'on garde dans les cérémonies , impofe un refpeér. tout particulier. Auffi-
tôt que l'Ambafladeur fut entré par la porte de la Cour, le Grand Vifir en-
tra dans le même tems. L'Ambafladeur étoit fur le Tabouret qui étoit à la
droite du Vifir. Mauro Cordato, qui avoit été deux fois Plénipotentiaire,
ôcdont l'office eft de premier Drogueman de la Porte par furvivance , étoit de
bout à côté de l'Ambafladeur, qu'il entretenoit, pendant que le Grand Vi-
fir donnoit Audience à quelques Turcs, qui plaidoient eux-mêmes leurs
caufes.
Onrenvoïales affaires aux Cadifleskers, qui, quoique fubalternes, jugent
Se décident tous les différons, fuivant la coutume du Pais.
Apres quelques jugemens rendus, il falut dîner. On ne fit pas' grande fa-
çon. On aporta 4. Tables devant les Vifirs, & les Officiers qui traitoient.
L'Ambafladeur mangea ici.il avec le Grand Vifir , &C s'aflît direclrement de-
vant lui au deflbus de la jaloufie, d'où le Grand Seigneur eût le loifir de con-
fidérer cette cérémonie. Mauro Cordato lui fervoit de Drogueman pendant
le dîner. L'Ambafladeur lava dans un Baflîn d'argent, ôc le Grand Vifir lava en
même tems dans un Baflîn de cuivre, car les Turcs ne fe fervent point de
Vaiflelle d'argent. La Table étoit en forme de Baflîn d'argent creux, ibû-
tenu par un pied de bois. On fervit plufieurs plats de porcelaine d'un grand
pré-
ET RESOLUTIONS D'ETAT. 43
préparatif de ragoûts, accommodez à la Turque, & on en changea Couvent, tjoo.
Quoiqu'ils ne fuifent pas fort apetiiïàns , l' Ambaffadeur fit honneur à la ta-
ble du Vifir, 6c goûta de tout par complaifance. On fervit enfuite quanti-
té de Confitures dans des porcelaines , dont le jus étoit fort ambré Se abon-
dant. Les Turcs l'aiment plus que le fruit Se le boivent à la place de vin.
On fervit cependant dir ibrbet , qui fut trouvé très-bon , 8c dont on fut
obligé de faire , comme les Turcs , qui en font leur boilfon ordinaire.
Quinze Officiers Se gens diftinguez de la fuite de l'Ambaffadeur mangè-
rent aux autres tables avec les Vifirs Se Officiers, qui en faifoient les hon-
neurs.
D'abord après le dîner on fit entrer dans la Salle du Divan un Miroir qui
faifoit partie des préfens magnifiques que PAmbaffiideur vouloit faire au Grand
Seigneur. Le Vifir demanda fi ce préfent venoit de la part du Roi. En
éfet ce Miroir étoit d'une beauté 8c d'une grandeur extraordinaire, 8c toute
l'affemblée le régarda avec admiration. L'Ambaffadeur repondit que ce pré-
fent venoit de fa part. Après qu'on l'eût fait voir en face de la jaloufie, où.
le Sultan pût le confiderer à loifir , on le fit porter vers la Salle du Grand
Vifir, où étoient les autres préfens.
Le Chiaoux Baffi avec un grand Maître de Cérémonie, avec leurs bâtons â
la main , vinrent recevoir la lettre que le Grand Vifir écrivoit au Sultan , pour
demander Audience pour l'Ambafîadeur. C'eft ainfi que l'on fait les affaires
de la Porte, où l'on écrit 8c l'on fait reponfè par lettre. Les deux Officiers
raportèrent la réponfe du Sultan, Se la remirent au Grand Vifir en lui tou-
chant le bas de fa robe avec la main. Le Vifir baifa la Lettre 8c la porta à
fon front j 8c après l'avoir lûë, il fit avertir l'Ambaffadeur de paffer dans la
Cour, pour y recevoir les 40. Caftans qu'on lui diftribua Se à fa fuite. Il y
avoit un banc couvert d'écarlatte proche de la porte de la Salle d'Audience.
Il s'y affit en attendant que le Grand Vifir eût paffé aux apartemens du Sul-
tan. Quoiqu'il fit un très -grand froid, il fut obligé d'y refter plus d'une
heure, à caufe des conventions qui furvinrent. Jufques alors la Cérémonie
s'étoit paffée avec tous les agrémens , Se tous les honneurs qu'un AmbafTà-
deur put jamais en efpérer } mais le Baffi , piqué de n'avoir pas eu la droite en
venant du Port , dit à Mauro Cordato que l'Ambaffadeur ne pouvoit point
voir le Sultan avec des armes. Que c'étoit contre la coutume , 8e qu'il fa-
loit lui dire de les ôter. Mauro Cordato , Grec de Nation, qui avoit des
mefures à garder avec les Turcs, dont il eft le premier Interprète , voulut s'en
plaindre au Vifir ; mais il fut obligé de dire à l'Ambafîadeur qu'il ne pouvoit
voir le Sultan avec fon épée. L'Ambaffadeur lui répondit qu'il étoit furpris
de la difficulté qu'on lui faifoit, 8e que c'étoit l'iifage." Que Mr. Trumballe
Ambaffadeur d'Angleterre avoit eu fon Audier.co du Sultan l'épée au côté,
auffi bien que Mr. Collier le Père. Que l'exemple de Caflagnieres , [connu
en fuite fous le nom de Marquis de Chàtcauneuf , Ambaffadeur de Fiance en
Hollande, après la Paix d'Utrecht] étoit trop récent pour l'avoir fi-tôt ou-
blié} 8e qu'ainfi il ne pouroit voir le Sultan (ans épée , qui étoit fon princi-
pal ornement. Mauro Cordato fe trouva tort intrigué dans cette Conféren-
ce, qui dura plus d'une grolfe heure , 8e qu'il affeéta de faire à l'oreille de
F i l'Ara-
44 MEMOIRES, NEGOTI ATIONS, TRAITEZ,
1700. l' Ambafladeur qui parla toujours Latin, avec uo fi haut ton de voix , que la
* — ~ — Nation 6c les Officiers, qui étoient à fes cotez l'entendirent diftinctement.
Mauro Cordato protelta en affinant que Mr. Catlagnieres avoit déguifé la vé-
rité. L'Ambafladeur lui répondit qu'un Mini lire de l'Empereur de France
n'étoit pas capable de lui impofer } qu'il l'avoit écrit au Roi , & qu'étant
Homme d'honneur, il étoit plus croïable qu'Eux qui difoient le contraire,
£c qui n'avoient pu affilier à l'on Audience. Mauro Cordato commença de
fe troubler, 6c fut parler au Grand Vifir, pour lui expofer les raifons, 6c la
vigueur avec laquelle l' Ambafladeur foûtenoit fa prétention. Mais il revint,
la larme à l'œil , accompagné des anciens Maîtres de Cérémonie , des Capigis
Baffis pour l'aflurer de la part du Grand Vifir que fi cela s'étoit fait , l'on ne
s'en étoit pas aperçu. L'Ambafladeur répondit qu'ils n'avoient qu'à fermer
les yeux 6c ne pas regarder fon Epée. Il l'aflura de la part du Grand Vifir
qu'il pouvoit entrer fans Epée , que le Sultan en écrirait au Roi pour le dif-
culper. L'Ambafladeur lui répondit qu'il n'étoit pas befoin de demander ex-
eufe d'une faute qu'il ne vouloit pas commettre. Mauro Cordato lui dit que
le Grand Vifir offrait de lui donner un Certificat , figné de fa main 6c des
Grands de l'Empire, pour l'aflurer qu'aucun Ambafladeur ne verrait jamais
le Sultan l'Epée au côté, non plus que celui de l'Empereur. Mais l'Ambaf-
fadeur ne voulant -point préjudiciel- aux droits- des Ambafladeurs , répondit à
Mauro Cordato qu'il pouvoit dire de fa part au Vifir qu'étant le premier
Ambafladeur à la Porte, il tâcherait toujours de faire des loix avantageufes
V>our les autres, 6; de ne pas en foire, qui puilîént détruire leurs honneurs 6c.
ïeurs prérogatives. Le Grand Vifir envoïa dire pour réponfe à l' Ambafladeur
qu'il ne verrait pas le Sultan-} mais il répondit avec un air doux Se accom-
pagné de grandeur , qu'il étoit fâché de ne pas avoir cet avantage, 6c qu'il
ne pouvoit acheter l'honneur de. voir Sa Hautefiè parla proftitution.de la
gloire de fon Prince 6c de la dignité du Caractère, dont. il l'avoit honoré.
Enfin après avoir mis la juftice de fon côté , 6c après avoir aporté les meil-
leures raifons du monde pour convaincre leur entêtement, il protelta publi-
quement qu'on pouvoit lui ôter la vie , mais non pas fon Epée, à laquelle
ton honneur étoit attaché. Il répréfenta même qu'ils dévoient lui laitier la
liberté de fon habillement puis qu'on ne trouvoit pas à redire au leur 5 qu'il
ne croïoit pas qu'ils puflent foupçonner un homme qui répréfente la person-
ne d'un fi grand Prince, incapable d'aucun mauvais deflèin j qu'ils ne pou-
voient lui faire l'affront de le defarmer. Il fupola même que II le Roi de
France dévoit voir le Grand Seigneur , l'on ne l'obligerait pas à fuivre les
Maximes Turques, non plufque le Grand Seigneur les Françoilès, s'il voïoit
l'Empereur de France, 6c que taillant vifiter le Grand Seigneur par fon Am-
bafladeur qui répréfente fi perfonne ,. on avoit tort de1 le traiter avec cette
fevérité. Jamais on n'a parlé avec plus de jufteflè, que parla alors l'Ambaf-
fadeur, où tout autre aurait réfléchi plus d'une -fois fur Ces réponfes pour
combattre la fierté indomtable des ces opiniâtres. Il parla modérément, mais
avec tant de pretènee d'clprit 6c de courage, que Mauro Cordato ne pouvant
le faire refondre à quitter fon Epée, en pleura d? douleur. Comme il eft né
durcies Terres de la Porte, 6c qu'il en connoît mieux le génie que tout autre,
il
ET RESOLUTIONS D'ETAT. 4f
il prévoïoit que les fuites de ce différent pouvoient lui être defavantageufès , I700*
& qu'il pouroit en être la victime , auffi bien que le Chiaoux Bafli qui y *~
avoit donné lien > il conjura l'Ambafladeur par fon ancienne amitié de paf-
fer par-defllis cette formalité. L'AmbafTadeur lui répondit qu'il l'eftimoit
fort ; mais qu'il ne pouvoit ternir la gloire de fon Prince , ni fon pro-
pre honneur pour l'amitié d'un particulier. Mauro Cordato le pria de con-
férer avec les Capitaines Se Officiers des Vaifléaux du Roi pour favoir leurs
fentimens. L'AmbafTadeur lui répondit que les ordres du Roi étoient fî
clairs , qu'ils n'avoient beibin d'autre interprête que celui , auquel ils avoient
été confiez. Enfin il poufTa la chofe fi loin qu'il dit à l'Ambafladeur que ce
jour ferait terrible, & qu'il allumoit un feu difficile" à éteindre. L'AmbafTa- »
"deur lui dit que ces menaces ne l'épouvantoient pas, aïant la juftice de fon
côté; & que fi ce feu s'allumoit une fois, ce ferait tant pis pour le plus foi-
ble & qu'il favoit bien de quoi il voûtait parler. A la fin l'Ambafladeur
craignant qu'on ne raportàt pas ces raifons au jufte , il demanda à les expli-
quer au Vifir , qui refufa de l'entendre. Il lui envoïi cependant les Capigis
Baflîs & tous les Officiers de la Porte pour l'afilirer que ce n'étoit point l'ufa-
ge , d'entrer avec des Armes. L'Aga des Janiflâires , qui eft un des pre-
miers emploïez de la Porte, & qui commande la milice de l'Empire vint lui-
même répréfenter à l'Ambafladeur qu'il ne pouvoit voir le Sultan avec des
armes-, que le Grand Vifir même ne le pouvoit, Se qu'ainfi il ne devoir pas
faire cette difficulté. Il fut furpris d'entendre les bonnes raifons que l'Am-
bafladeur lui apoita, & de voir la fermeté, avec laquelle il foûtenoit fes in-
térêts. L'Ambafladeur lui dit qu'il y avoit de la différence d'un fujet à un
AmbafladeuK. Tous les premiers de la Porte étoient préfens à cette conver-
fation , qui fe pafla toujours fur le banc au milieu de la Cour. Toute la Na-
tion & les Officiers de Marine étoient aux cotez de l'Ambafladeur fans Armes
au milieu de 400. Janniflaires & beaucoup d'Officiers du Serrail , tous gens
fans aucune éducation ni politeflé. Tous les Officiers de la Perte voulurent
l'éprouver; mais leur aïant répréfenté qu'il démandoit une chofe d'ufage
& de juftice , fur laquelle il ne pouvoir fe rélâcher' fans s'attirer la dilgra-
ce de fon Maître & l'indignation de tout le monde, le Vifir voulut obtenir
par fupercherie & par violence ce qu'il n'avoit pu gagner par des raifons
fans fondement. Il pafla du Divan aux apartemens du Sultan ; traverfa la
Cour, falua l'Ambafladeur, qui étoit fur le banc, en attendant leur reponfe,
& lé fit avenir de venir à l'Audience. L'Ambafladeur ne l'accepta que fin-
ie pied qu'il avoit démandé , & s'informa avant que de fe, lever du banc, û
le tout étoit réglé, & on l'àflura qu'oui. Il y fut avec 15*. hommes qui é-
toient deftinez pour l'accompagner. A peine eût-il pafle la première porte
qu'il entra en défiance.' Il fe mit fur fes gardes, car il s.'aperçût que de if.
perfonnes qui dévoient le fuivre, les Capigis Baflis n'en avoient laiffé paficr
que fix. 11 mit la main gauche fur la garde de fon Epée, qu'il avoit couver-
te de fon juftaucorps, £c quand il vid deux Capigis, qui venoient le prendre
fous les bras, fuiyant la coutume, il leur fît dire par Fonton fon Interprête,,
qu'ils ne le pieflaflént pas trop quand il ferait la révérence au Grand Seigneur.
F 3 A
46 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
1700. A peine cet Interprête eût-il achevé de parler qu'un autre Capigi vingt à lui
par devant Se lui porta fes deux mains fur les cotez pour lui arracher lbn E-
pée. Il ne put en venir à bout 6c reçût un grand coup de poing dans le vi-
fage, & un coup de genou dans l'eitomac , qui le fit reculer quatre pas.
L'Ambafladeur dit d'un ton de voix fort élevé qu'on ne dévoit pas ainfî vio-'
1er le Droit des Gens, Se s'adreflant à Mauro Cordato, qui étoit plus mort
que vif, il lui démanda s'ils étoient Ennemis.
Les Capigis qui avoient voulu ledefarmer, revinrent à la charge j mais
l'Ambafladeur s'étant débarafle des deux qui le tenoient fous les bras , fe mit
à la tête des Officiers qui étoient dernière lui, 8c aïant porc ï la main fur
la garde de fon Epée, réfolut de percer celui qui voudrait i'aprocher. Auflî-
tôt le Chef des Eunuques blancs vint de la part du Grand Seigneur, qui en*
tendoit ce tumulte, Si: cria de la porte de la Chambre d'Audience qu'on ne
fit point de violence à l'Ambafladeur. On prefla fort les Officiers qui é-
toient à fa fuite , 6c on voulut les tâter pour voir s'ils étoient defarmez. Le
Chef des Eunuques blancs dit à l'Ambafladeur que s'il vouloit entrer fans E-
pée , il leroit le bien venu 9 à quoi l'Ambafladeur aïant répondu qu'il ne le
pouvoit, ni ne le vouloit, l'autre lui dit qu'il pouvoit donc s'en rétourner.
Volontiers, lui répliqua l'Ambafladeur , Se fortit fur le champ. Tous ceux
3ui étoient dans la Cour crurent que l'Âucience étoit finie > mais on en fut
étrompé lorfqu'on vit l'Ambafladeur remettre très-foigneufement les Caftans
qu'on lui avoit donné. Tous les gens de fa fuite en firent de même. On
envoïa apeller l'Interprète de l'Ambafladeur pour lui dire de remporter le
préfent , qu'il fit raporter d'abord au Palais de France. Dépuis que l'Empi-
re Ottoman fubfifte on n'a jamais ouï dire qu'on ait fait laiflèr les préfens du
Sultan, ainfi que l'on a fait les Caftans.
On crut d'abord que l'Ambafladeur 6c fa fuite feraient obligez de s'en re-
tourner à pied } mais on trouva les chevaux de la Porte , 6c les autres amenez
par l'ordre de l'Ambafladeur. Il falut pourtant attendre quelque tems, pour
laifler paflër les Janiflaires , qui coururent recevoir leur folde vers leur Aga,
qui pafla en fuite avec des habits de la dernière magnificence. On gagna la
Marine avec le -même ordre, avec lequel on étoit venu. Les Vaifleaux du
Roi faluèrent l'Ambafladeur à fon retour. Ils étoient prêts de faluër le Graud
Seigneur d'une falve Roïale, mais il y eût ordre de n'en rien faire. On Ain
obligé de pafler terre à terre , pour gagner le port , où l'Ambafladeur
monta à cheval pour aller à la Maifon de Campagne.
Il elt à remarquer, qu'environ cinq ou fix femaines après,leBaileou Ambaf-
fadeur de Venife à la Porte, eût Audience du Sultan fans épée. Il en fut
de même quelque tems après touchant le Comte d'Ottinguen Ambaflâ-
deur de l'Empereur , qui alla auffi à l'Audience du Grand Seigneur fans
cpée.
Pendant qu'on en ufbit fi mal à la Porte , le Roi de Maroc témoi-
gna bien plus de vénération pour le Roi de France. Il envoïa à ce der-
nier un Ambafladeur , qui lui fit le difcours lûivant.
„ Très
11
11
11
ET RESOLUTIONS D'ETAT. 47
1700"
„ npRès-Haut , Très-Puifiant , Très-Excellent , Très- Magnanime , 6c — —
„ A toujours Invincible Empereur de France Lo u 1 s X I V. Dieu Bé- ^3°^
,, niffe à jamais le Règne de V. M. I. après avoir rendu à Dieu les grandes ^ycha
„ louanges qui lui font dues, je dirai Sire que. l'Empereur Moulay Ismael Ambaf-
„ mon Maître, Fils du Cherif, qui defeend des Princes de la très haute Mai- fedeur
„ fon de Hachem, qui cil Empereur des deux Mauritanies , Roi des deux rJc ™~
„ vaftes campagnes de l'impénétrable Afrique, Prince du Biledulgerid & au Roi"
„ Souverain d'une grande partie du Païs des Nègres, aïant par une grâce à j» pre-
„ fpeciale de Dieu rétabli la Religion Mufùlmanne dans les onze Roïaumes ™ier.e
„ qu'il a conquis, 6c étendu fon pouvoir Souverain fur tous les Peuples qui cel Mar*s
réfident dans ce grand continent, il a fait confifter le comble de fa gloire I7Co.
à aquérir l'amitié du plus grand 6c du plus puiffant Empereur de l'Europe.
Il m'a établi dans le Port de Salé pour y avoir la conduite de fa Marine 6c
de fes Vaifieaux, & j'ai été auez heureux pour profiter de Poccafion qui
m'a été fournie par l'arrivée de vos Navires de Guerre , de donner à V.
M. I. des preuves du profond refpeéï que j'ai toujours eu pour elle. Je me
fuis transporté dans leur bord 6c de concert avec vos Officiers j'ai négotié
un Traité dans l'intention de contracter enfuite avec V. M. une Paix & u-
ne amitié indiflbluble 6c d'éteindre les feux de la Guerre. Sur l'avis que
j'en donnai à l'Empereur mon Maître , il-me permit de le ligner , 6c il
m'a donné depuis les Pouvoirs nécelTaires pour y mettre la dernière main.
Cette amitié fera toute pure 6c définterefTée.les conquêtes de V. M. I. ne
fçauroient donner de jaloufie à Moulay Ismael puifqu'il fût des vœux
pour la profperité de fes armes j mais il fait en même tems fes éforts pour
imiter fes vertus héroïques ; car lorfque V. M. I. châtioit fes Ennemis par
Mer 6c par Terre, mon Maître fiifoit la Guerre aux Turcs 6c aux Nè-
gres , 6c il leur a accordé la Paix auSïï<ôt que V. M. I. l'a donnée à
l'Europe.
„ C'cft dans l'intention de mériter cette amitié que ce grand Prince m'en-
„ voie aujourd'hui au pied de vôtre Trône Impérial , en qualité de fon Am-
„ bafiadeur, pour préfenter à V. M. toujours Augufte une Lettre de fa part,
„ qui contient des exprefiïons pleines de vénération pour le premier 6c le
„ plus grand Empereur de la Chrétienté, lequel à l'exemple de fes illuftres
„ Ancêtres , dont il tient fon Sceptre , a étendu bien loin par fa valeur les
„ Frontières de fon vafte Empire. Quoique je fois chargé de paroles très
„ Sécrètes 6c très importantes pour V. M. I. je ne l'entretiendrai jamais que
„ de ce qui fera également utils 6ç agréable aux Maîtres 6c aux Sujets de
,, l'une 6c de l'autre Nation. Je finis, Sire, en félicitant V. M. de ia part
„ de mon Maître de l'heureux fuccès d'une Guerre fi fanglante 6c fi longue,
„ dans laquelle après avoir vaincu un nombre innombrable d'Ennemis; elle a
„ fait paraître une modération jufqu'alors inouïe, en faciïfiant les avantages
„ que lui promettoit le continuation de la Guerre, à la gloire de donner la
„ Paix à tant de Nations vaincues. Moulay Ismael ne celle de méditer fur-
„ une grandeur d'ame fi digne du Héros de l'Europe, 6c dans l'idt'e augufte
„ qu'il s'en forme , il dit fouvent que l'on connok bien que V. M. fouuent-
,i h
-.1
4§ MEMOIRES, NEGOTIATÏONS, TRAITEZ,
I7!:'°- „ la bonne caufc , puifque Dieu couronne toujours fes projets de la vi£toi-
"" 5» re Se du fuccès qu'Elle en attend ; Il ne doute point que puitque V. M. I,
„ a établi la tranquillité & le repos parmi tant de Peuples , elle ne donne les
mains à ce que les pauvres Captifs des deux Partis , qui font les feuls qui
n'en jouïflent point , rclTentent aiiflï Péret de la clémence. Ce fera le fon-
dement d'une éternelle Paix & de l'amitié parfaite que mon Maître délire
& comme il efl le Prince de toute l'Afrique le plus puiiïant , le plus grand
& le plus redoutable, il ne peut faire une plus digne offrande que de don-
ner la ilennc au plus puiflant, au plus grand Se au plus redoutable Empe-
reur de l'Europe.
55
55
5»
55
Traduit d'Arabe en François par M. F. Petis
de la Croix , Secrétaire Interprète du Roi.
Puis qjj'o n efl fur le chapitre de ce Roi Afriquain , on raportera une
Lettre que le Bey de Tunis écrivit prefqu'en même tems aux Etats Généraux
de Provinces-Unies. Elle n'eut cependant quelqu'éfet , que quelques années
après. Voici l'extrait de cette Lettre.
Extrait
d'une
Lettre ,
que
Murât
Bey de
Tunis,
Bafla&
Dulati,
a écrite
à Mef
iieurs les
Etats
Géné-
raux &
qu'il leur
fit pré-
fenter
par ion
Député
à la Haïe
Je 3. Fé-
vrier
1700.
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59
55
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55
35
55
55
5»
55
Î5
MUrat Bey de Tunis, BaiTa Se Dulati demande par fon AmbaiTadeur
la Paix aux Etats Généraux 8c leur offre le Commerce libre pour
leurs fujets, en faifant avec Eux un Traité , qui conûiteroit en ces trois
points. Le Premier eft de maintenir la parole. Le Seconde de n'être pas
trop ferme fur les demandes pour moyenner raccommodement. Le Troi-
fîème d'avoir pour lui bon Cœur, comme il l'avoit pour eux, Se mainte-
nir tous les Articles, dont ils feroient d'accord enlcmble , oubliant le paf-
fé, fans retenir aucune rancune. Tout ceci étant pris de commun accord
entre les deux Parties. Il demande, pour leur fervice commun , 12. piè-
ces de canon de bronze Se 12. Acupams, 16. de 24. livres Se les autres ô'.decT.
livres j 1000. boulets de canon; foo. fufils de fix acupams; ifoo. quintaux
de poudre; 4. mortiers à bombes, Se 1000. bombes, 8. cables, Se 24.
mâts pour des vaiiTcaux. Avec cela la Paix feroit faite pour toujours, Se
les Marchands Se vaifïeaux de l'Etat pourroient venir fans le moindre empê-
chement, dehors Se dedans fes Ports, par Mer Se par Terre, lans qu'ils
paient aucun droit des Marehandifes qui fortiroient , mais de celles qu'ils
feroient entrer, 3. pour cent. Ce Traité étant conclu Se fïgné par fon
AmbaiTadeur. il feroit bien aifequeL.L. H. H. P.P. vouluiiîènt nom-
Conful pour réfider auprès de lui , comme un moïen d'entrete-
Donné de la Cour, le jour qui correlpond
mer un
nir une bonne
au 27. Août 16pp.
pour
intelligence.
Pendant ces afFaircs-là , l'orage qui menaçoit le Nord commença à
éclater dans le Duché de Holilein. On en dira le plus fuccinctement poiîible
les fondemens Se les prétextes.
Les Duchez de Holilein Se de Slcswick , quoique réellement partagez entre
le
.ET RESOLUTIONS D'E T A T. 49
le Roi de Dannemarck & le Duc de Holftein, la Souveraineté 8c la Régen- 1700-
ce eft entièrement commune entr'eux. C'eft en vertu des anciennes Unions
Se Pactes de Familles , confirmées par plufieurs Traitez, 8c corroborées par
celui d1 ' Altena en 1689. Par ce dernier, le Roi de Dannemarck devoit rendre
certaine terre, à quoi il n'avoit pas fitisfait. Sur les plaintes du Duc, les
Médiateurs 8c Garands du Traité d' Altena firent établir des Conférences à
Pinnenberg. A leur ouverture, le Dannemarck fit préfenter un Acte de Pro-
teftation de vouloir faciliter la Négociation ; mais que fi le Duc faifoit la
moindre innovation , pendant la durée des Conférences , il la prendrait pour
une rupture. Les Miniftres Médiateurs après l'acceptation de cette protefta-
tion, promirent par un Acte, qu'ils s'interpoferoient pour empêcher que le
Duc ne fit aucune entreprife contraire aux Unions , 8c particulièrement
aucune nouvelle levée ni introduction de troupes étrangères dans le Païsj "ni
même aucune conftruction de nouvelles fortifications. Cependant le Duc ne
fe conformant pas à cet Acte , attira des Troupes dans fes terres , 8c conti-
nua des fortifications nouvellement commencées. Le Dannemarck , après
des plaintes inutiles, fit rafer ces dernières en 1697. Là-deflus le Duc époufa
la Sœur du Roi de Suède, qui le déclara Généralifïïme de fes forces , & fur
cet apui il fit élever de nouvelles fortifications, alléguant que le fécond Ar-
ticle du Traité d' 'Altena lui donnoit le droit de les bâtir 8c de les pofïêder.
Le Dannemarck y contredit par des prétextes bien ou mal fondez , qui
ne manquent jamais aux Cours., La véritable raifon en étoit que le Danne-
marck etoit entré dans la liaifon fecrete entre le Czar , 8c le Roi Auguste
contre la Suède. Il y avoit même quelques Cours d'Allemagne, qui fomen-
toient ces troubles , ne pouvant fouffrir l'érection du neuvième Electorat en
faveur de la Maifon de Lanebourg-Hannover. Parmi ceux-là il y avoit le Duc
de Brumiuick-Wolfembuttel , qui croïoit qu'on donnoit par la atteinte à fa
Maifon , vu fon droit d'ainefTe. Les Médiateurs firent ce qu'ils purent pour
empêcher l'incendie. Ils propofèrent divers expédiens. Ceux-ci furent ré-
jettez, par fois par le Dannemarck, 8c d'autres fois par la Suède , ou par le
Duc de Holftein. C'eft fuivant que ces expédiens pouvoient avancer ou re-
tarder les préparatifs militaires. Il eft vrai que l'on a toujours aperçu de la
bonne foi de la part de la Suède dans les Négociations des Médiateurs. Mais
Enfin le Dannemarck, qui avoit fes Troupes plus à portée que la Suède, en-
tra avec elles dans le Holftein 8c dans les terres de la dépendance du Duc de
ce nom. Les Forts furent pris , ou abandonnez , 8c enfuite démolis. Les
Danois allèrent même affiéger l'importante forterefle de ïonningen. Le Géné-
ral Suédois Bannier, qui y étoit entré, la défendit avec toute la vigueur 8c la
fàgefle poffible.' Cela donna le tems aux Troupes des Garans d'y marcher au
fecours. Les Etats Généraux y envoièrent de leur part trois mille hommes
fous le Général Dopft. Ainfi les Danois, qui avoient pouffé ce fiége-là bien
-avant , furent obligez de le lever 8c de fe retirer. On fit là-defius un Di-
ftique fur l'Anagramme de Tonningen^ tel que voici. Tonninga , Anagram-
me, non tangi,
Tom. I. Xj i. ■ :„ Ton-
ro MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
I7O0. r*ï'''. T>
- „ Tonningam tangens Rex Danus* tangitur ipfe ,
„ Sic fx nontangi, tangerc , Dane , cave
Quoique la levée de ce fiége fut un coup fort important, l'on ne s'arrêta
pas là. Il s'agiiïbit d'éteindre un feu , qui men içoit d'une longue durée.
Nonobftant les emprefîemens des Miniftres de France , le Comte de Guifcard
en Suède, Se la Comte de Chamilli en Dannemarck , pour calmer l'orage ,
quelqu'un prétendoit qu'ils fomentoient la difeorde. C'étoit afin* que , la
mort de Charles II. Roi d'Efpagne arrivant , une guerre dans le Nord
fervit de diverfion aux Puiflances engagées dans le fécond Traité de Partage
de la Monarchie d'Efpagne.
L'Angleterre & la Hollande armèrent une Flotte. Celle-ci fut envo'iée
vers la Mer Baltique. Les Danois en armèrent une de leur côté pour s'opo-
fer à la jonction de la Flotte combinée avec celle de Suède. La iituation du
Sund étoit pour cela favorable aux Danois. Mais ils quittèrent cependant ce
deflein à l'aproche de celle-là. Ainfi la jonction fut faite. Cependant an
ne voulut pas fe déclarer ouvertement contre le Dannemarck. C'efr. pour-
quoi l'Amiral Anglois Roock fut chargé de fiiivre les ordres du Duc de Hol-
ftein. Celui-ci lui donna la CommHfion fuivante.
'wXôn ^JT^ Fridericus, Dei Gratta,- Hœres Noriuegiœ, Dux Slefwici, Holfa-
du Duc -*-^ ***■> Stormaria 6? Ditmarfiœ , Coma in Oldenburg & Delmenhorft , Re-
de Hol- giœ Majeflatis Suecïœ Copiarum Militarium in Provinciis Germania GoneraliJJi"
ftein à mus, notum teftatumque facimus.
JAmiral Pofiquam Rex Daniœ , rejeclis omnibus tant à Mediatione Cafareâ - Brande-
burgicâ , quant à Dominis Sponforibus , ac FideijuJJbribus Pacis Altonavienfis
interpofiiis officiis , 'Terras ac Provincias nojlras miliîibus fuis invadere , fubditos
variis exatlionum gêner ib us vexare; fortalitia ac munimenta bojlili modo aggre-
di, occupare , occupai a folo œquare , eoque ipfo bello indiclo hoftem fe profiter i ,
difiamque pacem Altonavienfem violare, imb plané evertere non cfi veritus, Sa-
cra Régla Majeftas Magna Brïtann'ue hifee commota , fuaque nominatœ Paci
Altonavienfi promifi'œ Guarantite fatisfacere cupiens, ex fingulari in Nos affetlu,
Clafjem fuam in auxilium Nobïs miitere , & fie ab oppreffione Nos liber are vo-
ïuit. Bine Autoritate ab Altè memoratà Sacra Regiâ Majejiate nobis conceffà ,
pradicla Anglican* ClaJJïs Architala£'um,Illuftri£imumDominum de Roock, bifee
rogamus, velit , clafi fibi commiffà , noflrum interefje adverfus Regem Dania
cmmbusviribus, omnique modo ut ipfi ex Commijfione hâc noflrâ, juxtà belli ra-
tionem vifum fuerit optimum , tueri , defendere , atque agere. Nos quidquid ab
ipfo hoc in negotio it a fuerit aclum, ratum femper babebimus. Quod hifee fgni-
f.care ac ftmul nojlrâ fubfcriptione , ac figiÏÏi appofitione corroborare violuimus.
Dabantur in Caftris Pinnembcrgicis die 22. Junii Anno 1700.
Il faut remarquer qu'au commencement de ces brouille ries, un homme de
Marine de la Rochelle alla fe préienter à l'Ambalîadeur de Suède Lillienrooth,
1
ET RESOLUTIONS D'ETAT. 5-1
& lui donna un plan pour détruire par un bombardement la Flotte de Dan- I7°g-
nemarck. Voici la copie de ce plan.
L'Entrée par Mer dans Copenhague a à la droite une Citadelle ôc tout joi- Projet
gnant une Batterie , & à la gauche un Baflïn qui aboutit par un grand ^^'
Canal à la Ville & la traverfe. C'eft dans ce Baflïn que (ont tous les Vaif- pour
féaux du Roi de Dannemarck araaiez les uns aux autres, 6c ce Baflïn n'eft bombar-
féparé de la Mer que par des palliflades , Se enfuite par une chaufle qui les der une
met à l'abri d'être -abordez} mais ils ne font pas à l'abri des Bombes. C'eft nolK'
pourquoi, en cas de rupture, il eft très-facile de les aller bombarder. Et pour
cela l'on pourrait faire équiper une petite Efcadrc, dans laquelle il y aurait
2. à 4. Fregattes de 24. à 30. Canons ou plus grandes & les aprêter avec
des Rouleaux de Cables pour foûtenir le Pont , ainfi qu'il à été pratiqué par
les Anglois au bombardement de Saint Martin de Ré y fur chacune defquel-
les l'on mettrait deux Mortiers & des Bombes, 6c on irait droit devant Co-
penhague, 6c étant encore à la Voile aufli bien que l'Efcadre, fi on veut,
elles pourront très facilement bombarder 6c brûler tous lesVaifTeaux de Guer-
re qui font dans le Baflïn. Il faudrait fe fervir de Fregattes , pareeque
fi l'on préparait des Galliottes à Bombes le Roi de Dannemarck en étant
averti pourrait foupçonner le deflein. La chofe eft d'autant plus facile que
les Fregattes peuvent mouiller à portée pour bombarder fans être à portée
ni du Canon de la Citadelle ni de la Batterie qui y eft joignant.
L'on n'entrera point dans le détail de tous les avantages qu'il en peuvent ré-
fulter à la Nation Suèdoife, ni de la gloire que Sa Majefté y aquerra,en cas de
de rupture, dans un commencement , ni qu'elle fera Maître de la Mer Baltique,
puifque le Dannemarck ne pourrait fe remettre de dix ans de cette perte , ni
enfin d'une infinité d'avantages qui en réfulteront 6c qu'on laiflè à la confide-
ration de Sa Majefté & de fes habilles & éclairez Miniftres , fe remettant à
la générofité Rôialle de Sa Majefté pour la gratification que l'avis mérite.
Cet Ambafladeur aïant amufé , pendant plufieurs femaines le Rochelois,
s'en défit affez brutquement , après s'en être fait un mérite auprès de fa Cour.
Cela irrita cet homme -là, qui en avertit le Miniftre de Dannemarck} lui
donna la copie du plan, 6c il n'en fut pas pour cela mieux récompenfé. Ce-
pendant le Dannemarck profita de cet avis. Il fit faire plufieurs Barques
plattes 6c fortes, nommées Pramen^ avec des batteries de plufieurs pièces de
Canon, à fleur d'eau , outre quantité d'eftacades 6c de chaînes. L'Amiral .
Roock ne laifla pas que de jetter quelques Bombes dans la partie de la Ville
apellée Chrifiianftad , qui eft comme un Fauxbourg feparé de Copenhague
par un large canal. On jugea que cet Amiral fit cette petite expédition,
non pas pour faire du dommage au Dannemarck , mais feulement pour lui
faire voir qu'on pouvoit lui en faire.
Sur cela le Roi de Suède entreprit de faire une defeente dans l'Ifle de
Zéeland) où Copenhague , Capitale du Dannemarck, eft fituée. Aufli exé-
■cuta-t-il cet héroïque deflein d'une manière fort heureufe , quoique fort
hardie. Les Danois y aportèrent quelque opofition} mais iis furent bien-
Q 2, tôt
fi MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,"
1700. tôt difpcrfez par la Valeur des Suédois, quoiqu'ils euflènt été obligez de dé-
""" barquer dans l'eau, qu'ils avoient jufques aux aifelles , pour pouvoir aborder
la terre. Le Roi de Suède en fît autant à la tête de fes Troupes, 6c ne pro-
fita nullement , par un principe de généralité , du defordre des Danois. Au
contraire il fit obfcrvcr une exacte diieipline à fes Troupes , 6c empêcha tout
defordre Se tout dégât.
La nouvelle de cette defeente aïant été portée au Roi de Dannemarck qui
étoit dans fon Camp en Holffein , le fit palier en hâte dans la Zéeland, 6c
Iaifia des Plénipotentiaires pour traiter de la Paix. Elle fut conclue à ïraven-
dal par le Traité qui fuit.
uiu nom de la Sainte Trinité.
S Oit notoire à un chacun que de grands differens étant furvenus depuis
l'an iô"7f. entre Sa Majefté le Roi de Dannemarck, 6c fon AltefTe le
Traité
de Paix
Conclu
entre Sa Duc de Slefwick-Holfrein-Gottorp , qui ont été terminez par les Traitez de
Majefté Fontainebleau en 1679, 6c par ceux d'Altena de 1689. il en efr. néanmoins
le Roi fm-venu de nouveaux à caulê d'un fentiment contraire fur l'interpréta-
nemarck t^on ^e quelques Articles contenus dans ces derniers Traitez, qui ont été fui-
ti Son vis d'hofîilitez 6c d'une Guerre publique entre le Roi de Dannemarck 6c de
Alt. le Norwegue, 6c le Duc de Slefwik-Holitein-Gottorp , à préfent régnant 6c
^u[de fes Hauts Alliez, nonobftant les foins 6c les bons-' offices de S. M. ï. 6c de L.
fteyû_ A. E. de Saxe 6c de Brandebourg, s'entremettant dans l'affaire de la Haute
Gottorp, Médiation, de même que ceux des Hauts Garans du Tnùt-é d'Altena: Et
parla comme on n'a pas manqué de continuer 6c d'employer tous les foins 6c
tiotfdés les devoirs poulbles jufques à la fin, de la part de S. M. I. 6c de S. A. E. de
Puifun- Brandebourg, pour prévenir 6c arrêter à tems les fuites d'une telle Guer-'
ces Al- re , 6c pour rétablir le repos Se la tranquillité dans le Cercle de la Baffe-
liees Ga- Saxe Se les Pais voifîns du Quartier du Nord ; de même que les bons .off-
rantes & £ces g^ jes çQms extraordinaires des Miniflres 6c des Garans refpeétifs, pour
Mini- Ie rétabliffement d'une Paix fiable 6c folide avec une bonne 6c parfaite intel-
fircs. ligence entre S. M. D. 6c le Duc d'Holfteinj lefdits differens ont été enfin
accommodez , 6c les Parties oppoiantes font convenues , fuivant ce Traité
conclu , des Articles fuivans.
I. Tout ce qui s'effc paffé à l'égard defdits differens 6c commis de part 6c
d'autre tant par Mer que par Terre, fera entièrement oublié par cette Paix
' & Amniltie, d'une manière qu'on rfy fongera plus, bien loin d'en faig; quel-
que prétenfion contre qui que ce foit. Les Villes de Lubec 6c de Ham-
bourg jouiront auffi de cette Amnifiie , de même que leurs Sujets 6c ceux
qui en dépendent , auxquels il ne fera jamais imputé aucune chofe ni £iit le
moindre tort à l'égard de ce qui s'efr. paffé pendant ces troubles.
II. On confirme encore par ce Traité entre le Roi de Dannemarck 6c de
Norwegue 6c tous fes fujets d'un côté, 6c le Duc de Slefwyk-Hôlftein 6c
Pais incorporez de l'autre, les unions faites en 15-53. 6c 161$. ('à la referve
de ce qui a. été fîipulé aux Traitez du Nord en 16 f S. 6c 1660. à L'égard de
la Caffation du vaffelage 6c la Souveraineté obtenue) dé même' que toutes les-
Con-
ET RESOLUTIONS D'ETAT. n
Conventions & les Traitez jufqu'à l'An lôjf. Les Paix de Wefttalie, du I7°Q-
Nord, de Fontainebleau, d'Altena & le Recès de Glukitad, ont été renou-
vellés £c confirmés par ce Traité ; a condition néanmoins que lefdites li-
mons, comme des Alliances perpétuelles, ne feront expliquées que félon les
paroles Se que les differens qui pourront à l'avenir furvenir entre les deux
Ducs Régens, feront terminez entr'eux à l'amiable, ou par la Médiation des
Puitfànces que l'on choifira pour cet effet.
III. La Commune Régence ou Communion fur les Prélats , lui* la IN o-
bleflè'& fur quelques Villes, qui a fubfiffée jufqu'à préfent, fera continuée
furie même pied, & cela fans préjudice néanmoins des difpofitions ilipulées
dans la Paix du Nord, & enfuite dans le Recès de Glukftad touchant la Ré-
partition defdits Prélats ôc de ladite NoblefTe -, à condition expreffè néan-
moins qu'aucun des deux Partis ne pourra difpofer de la moindre chofe tant
en tems de Guerre qu'en teins de Paix, à l'égard de ceux qui dépendent de
la Régence Commune, Places ou Biens , fans le çonfentement de l'autre
tant pour l'Adminiftration de la Juftice, Ordres, Patentes, Exécutions, que
pour les Quartiers, Contributions ou autres Charges de quelque nature qu'el-
dans le Civil que dans le Spirituel, auffi à l'égard des Colleftes fous la Juril-
d'iétion & Régence Commune, fans aucune exception ni exemption , 6c
qu'ils maintiendront auffi leurs Droits Se Privilèges ; Chaque Partie exercera
feule la Souveraineté Ducale & les Droits qui en dépendent dans les Pais,
Villes 6c Bailliages qui ont déjà été répartis} fans qu'aucun y puiffè apporter
de l'empêchement, fous prétexte de Communion, ou de quelque autre na-
ture que ce puiffè être.
IV. Et afin de prévenir avec d'autant plus de facilité toutes }es difputes 8c
prétextes, qui en pourront furvenir à l'avenir, il a été conclu en général, que
les deux Parties en vertu des anciens Traitez Se Obfervations , demeureront
dans une même égalité, Se les deux Duchez jouiront de femblables Droits.
Que Sa Majefté Danoife & lès Succeffèurs , comme Ducs Régens^ de Slef-
wyk-Holftein , ne fe pourront appropier aucune préférence ou prérogative
dans aucun Droit (à la referve de celle de ratione Ordinis, mentionéc ci-de-
vant ydeflus le Duc d'Holftein-Gottorp & fes Succeffèurs auffi comme Ducs
Régens de Slefwyk-Holftcin , mais qu'on le laiflèra dans l'entière égalité
Se même Droit entre les deux Parties.
V. A l'égard de la défenfe des Pais de Slefwyk-Holftein , lors que les
deux Parties pourraient être attaquées par quelques Puiffances Etrangères %
alors, avec nylon, elles tâcheront de l'empêcher avec leurs Forces de part
& d'autre, BC parleurs' Confeils réciproques, & de procurer les Subfides
néceffaires dans les Diètes Communes, comme de coutume. Cependant au-
pourr
même dans un tel cas, une des Parties ne pourra pas s'attribuer la moindre
G 3 » cho-
|4 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
1700. chofe des Collectes des P;ùs l'un de l'autre, pour ce qui régarde l'une des
■n Parties en particulier. Puisque tous les Difrerens d'api éfent , font princi-
palement furvenus fur le Droit de porter des Armes , 8c particulièrement au
fujet des Fortereffes 8c de ce qui en dépend, de même que des explications
contraires des Traitez d'Altena, on a affermi 8c déclaré par ce Traité , Que Son
Alteffe 8c fes Succeffeurs auront le pouvoir & le plein 8c franc Droit des
Armes, Armemens, Alliances 8c Fortereffes avec tout ce qui en dépend,
de même que l'exercice. A quoi les Parties ont cependant accordé, i.
Qu'aucune des deux Parties ne pourra contraire des Fortereffes qu'à z. lieues
de celle de l'autre. 2. Et fur tout, elles ne pourront rien fortifier qu'à une
lieue du Territoire de l'un de l'autre , dont les Places Communes n'y font
point comprifes. 3. Aucune des deux Parties ne pourra auifi conftruire des
Forterefies qu'à une lieuë du chemin 8c du paffage ordinaire de Flensbourg à
Rensbourg, 8c de là à Itfchoe, à Glukftad 8c à Hambourg. 4. Et afin que
l'une des Parties ne caufe point d'ombrage ni de jaloufie à l'autre par l'entre-
tien d'un trop grand nombre de TroUpes dans les Duchez, ou par de trop
groffës Armées, il a été arrêté que l'une des deux Parties ne pourra avoir plus
de ôboo. hommes , tant Cavalerie qu'infanterie dans les Duchez de Slefwik-
Holftein (qui ne pourront jamais être employez pour opprimer l'un ou l'au-
tre) à moins d'une neceffité évidente ; principalement lors qu'il y auroit ap-
parence d'une Invafion étrangère , ou d'un danger évident, ou que Sa Ma-
jefté' Danoife doive donner quelque affiftance à fes Alliez } alors le pafîagc
dans les Jurifdictions des Duchez doit être libre par droit 8c raifon ; Mais com-
me il pourroit arriver que Son Alteffe le Duc d'Holftein-Gottorp ne ferait
point toujours pourvue d'un tel nombre de Troupes , 8c que l'occafion ne
permet pas qu'Elle les tienne toujours liir pied. Elle aura toujours la liber-
té, fi elle le juge à propos, d'en prendre de fes Alliez 8c Amis de l'Empire
Romain 8c du Cercle de la Baffe-Saxe , jufqu'au nombre de 3000. hommes,
de les faire entrer dans les Duchez 8c d'y loger. Si elle veut auffi avoir quel-
que Troupes des puiffances étrangères , qui quittent leur ancien fèrvice , 8c
3ui entrent dans le fien fous ferment , elle pourra le faire } Ces Troupes ne
evant être confiderées que comme des Troupes de Gottorp j II fera à la li-
fte difpofition de Son Alteffe de prendre plus de 3000. hommes , elle en
pourra même prendre jufqu'audit nombre de 6000. à condition néanmoins
qu'elle n'en prendra pas plus de 3000. hommes d'un Potentat feul.
Enfin il a auffi été arrêté , que dans le paffage des Troupes l'une des par-
ties ne chargera pas les fujets de l'autre par des quartiers, fi non en tems de
neceffité , moyenant une préalable requifition, que pour lors on accorderait
Une nuit de logement ; à la charge néanmoins de payer tout ce qui leur fera
fourni ; 8c de tenir une exacte dilcipline j mais le fimple paffage ne fera pas
refufé, pourvu qu'on le demande auparavant. -
VI. Le Traité d'Altena 8c la rettitution des biens de Gottes-Gabe feront
pleinement mis en exécution au Duc de Holffein- Gottorp, fix femaines après
réchange de la Ratification -, mais en tout cas le regrès demeurera infaivo à
la maifon Ducale de Holitein-Pleun.
VIL Son Alteffe de Holftein-Gottorp ayant auffi fait reprefenter que la
Vil-
ET RESOLUTIONS D'E T A T. ff
Ville de Chriftian Prys ou Freedericksort a caufé beaucoup de dommage, Se 1706.
plusieurs furcharges à fes Pais 8c dépendances, principalement à la Ville de " " ■ ■'
Kiel, contre la teneur du Recès de Glukftad, 6c ayant requis que cette For-
tereflè puifTe être démolie , il a été promis de la part de Sa Majefté Danoife
qu'il fera encore efficacement , £c entièrement remédié fur ce point aux plain-
tes de la Maifon de Holftein-Gottorp , & que le Recès de Glukftad fera auffi
pleinement obfervé en toute fon étendue tant en tems de Paix qu'en tems de
Guerre; que les dépendances de Gottorp, 6c nommément la Ville de Kiel ne
fouffriront plus rien à l'avenir de ladite Eorterefîè. Puilque aufli , M contre
toute attente en cas de contravention, 8c après en avoir requis la fatisfaction ,
on n'en fît point de réparation dans les fîx fèmaines après la requifition fai-
te, Son AltefTe en vertu du confentement accordé , fous des conditions,
dans le Recès de Glukftad, touchant cette ForterefTe,fe referve tous fes droits
iàins 8c entiers.
VIII. A l'égard de la convention qui a été faite en 1647. avec le Chapi-
tre de Lubec de la part de Holftein-Gottorp , pour l'Election Epifcopale ,
pour fîx générations, S. M. Danoife accorde que tout reftera félon le Recès
de Glukftad de l'An 1667. 8c les promeflès qui y ont été faites, 8c qu'elle ne
permettra pas que l'on faflè directement ni indirectement aucune chofe con-
traire à ce Recès.
IX. Comme il a été reprefenté de la part de Son AltefTe de Sleswyk Hol-
ftein-Gottorp , tant à la Haute Médiation , qu'à Sa Majefté Danoife &c de
Norwegue quelle perte confiderable, 8c quelle ruine fa maifon 8c fes Pais ont
fbuftert par les differens paflez, Sa Majefté par amitié , 8c par une affection
de confanguinité, confent de faire payera Son AltefTe de Holften-Gottorp la
fbmme de 2,60000. Richdales en bonnes 8c valables Crones Danoifès, 8c cela
fans faute à Hambourg entre ci 8c la foire prochaine de Kiel , dans l'Octave
des 2. Rois de l'année prochaine mille fept cens un, laquelle fomme doit être
affignée dans 12. jours après la fignature du Traité, fur la Banque de Ham-
bourg , ou fui' de bons 8c feurs Marchands j Et il en fera donne une entière
afïurance aux Commiflaires de fon AltefTe, qui en recompenfe fe defîfte de
toute forte de prétenfions, tant formées qu'à former, touchant le dédoma-
gement de cette Guerre.
Son AltefTe renonce de fon côté; 1. Aux dépens caufez en i66j. par les
Troupes du Roi. 2. Aux prétenfions qu'a la Maifon Ducale de Gottorp en
vertu de l'égalité, defquelles prétenfîons il a été fait mention aux Traites de
l'An 1661. 8c dans le recès de Glukftad. Et 3. à ce qui a été levé dans la
partie Ducale du Duché de la part de S. M. D. .après le 23. de Juin 1680. en
confîderation dequoi S. M. D. renoncera auflî à toutes les prétenfions qu'elle
pouiToit former pour les dédommagemens des frais faits au fujet de cette
' Guerre.
De plus , il a été accordé que tout ce qui pourroit avoir été exigé 8c levé
des Domaines 8c Rentes des Duchez de Sleswyk Holftein dans les Pais de
Tun ou de l'autre jufqu'au 14. Août inclufivement , reftera à celui qui a pro-
fité; mais ce qui pourroit avoir été exigé 8c payé depuis le if. Août inclufi-
vement , fera reftitué de bonne foi dans 4. femaines.
De
f6 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
1700. - • De même que les Contributions exigées desPaïs, Bailliages & Villes de
' ~* part & d'autre , & lefquellcs ne fe trouveront; pas avoir été effectivement
payées le 14. de ce mois, ou plutôt , cefTeront,' 5c ne feront point exigées*
Pareillement les Obligations ou Cautions données pur les V illes , pour les Con-
tributions extraordinaires , qu'on a impolees, céderont, 6c feront annullées par
le prefent •-, mais les Contributions déjà impoiées Se lignifiées aux Prélats 6c
Nobles, feront payées 6c exécutées juiques à la fin de ce mois.
X. Comme l'on a trouvé , 1 . Que les deux Advoyeiies Royales, com-
munnément nommées Voigteyen, Breukel 6c Ulfenis lïtuées dans le Baillia-
ge de Gottorp près de Sleswyk , Se en fécond lieu le Village Feddring fitué
dans le Nord Ditmarlèn , ont donné bien fouvent occafion à plufieurs diffi-
ficultés , S. M. après en avoir été requife, a confenti 6c promis d'échanger
ces Biens contre un équivalent des terres du Chapitre de Sleswyk , ou contre
d'autres, qui pourront être à la commodité 6c bienfeance , de faire trouver
"la proportion de ces biens qui s'échangeront ou feront échangés fuivant les
Regitres de fix ans , & de vouloir faire régler cette affaire dans l'efpace de
quatre mois. En cas auffi qu'il y eut dans les portions Royales quelques fujets
Ducals , ou des biens communément appelles * Manck-guter , qui pour-
voient accommoder fa Majefté ; Son Altefiè pour lui complaire, admettra
volontiers un pareil échange de ces biens.
XI. A l'égard du Bureau de la Douane , qui a été établi de la part du
Roi anciennement à Lyft dans le Bailliage de Tunderen, il a été convenu
qu'on n'y exigera en aucune manière aucun droit des Sujets de fon Alteflê le
Duc de Slefwyk-Holftein-Gottorp , ni auffi des marchandifes 6c denrées qui
viennent directement de la Mer à la Ville 6c Bailliage dd Tunderen , ni de
celles qui vont de là en Mer j mais qu'elles feront entièrement déchargées 6c
libres de ces impôts , fins être obligées à païer aucuns droits , de quelque
nom 6c de quelque nature qu'il puiflè être.
, Tous les autres differens 6c griefs qui pourroient refter à vuider , feront
entièrement levés & terminés à Hambourg, par les Confeillers des deux par-
ties, qui pour cet effet feront députés de part 6c d'autre j 6c cela de bonne
foi, 6c dans l'efpace de fix femaines, à comper du jour que ce préfent Trai-
té fera ratifié.
XII. Comme fon Alteflê de Brunfwyk-Lunenbourg-Zcll a fait bâtir, pen-
dant ces Troubles, une Redoute dans l'Ifle de Grevenhof fituée devant le
Port de Hambourg , Elle a auffi confenti que ledit Fort fera évacué 6c démo-
li immédiatement après la Ratification de ce Traité} fur quoi S. M. de Dan-
nemarck 6c de Norwegue a pareillement promis que la conftruétion du fuf-
dit Fort, ne fera jamais allégué au préjudice de qui que ce foit, 6c que celui
de l'Ifle de Grevenhof, non plus que des accroiflëmens qui pourroient s'y fai-
re ci-après, il ne fera jamais fait aucun trouble ni empêchement à la Navi-
gation en manière quelconque.
XIII. Sont compris dans cette Paix 6c Amniftie les Hauts Garants du Trai-
té d'Altena, leurs Succefîeurs , Roïaumes, Etats 6c dépendans ; Et tout ce
qui
* Communaux.
ET RESOLUTIONS D'ETAT. 59
qui a été fait 6c commis de leur part contre l'une ou l'autre des deux parties, 1709.
fera oublié à perpétuité, fans jamais y fonger ou toucher en mal. '
Sa Majefté de Dannemarck confent 6c promet particulièrement par la pré-
fente, pour Elle & fes Succe/Teurs, qu'à l'égard de ce qui s'eft paflë jufqu'à
prêtent, ni fous quelque autre prétexte que ce puiflê être, Elle ne veut Elle-
même, ni par voie de fait, rien entreprendre contre Sa Majefté de Suéde,
ou la Sérénifîîme Maifon de Brunfwyk-Lunebourg, de Cell, de Hanover, ni
donner aucun Confêil ou affiftance directement ni indirectement à leurs En-
nemis adverfaires > 6c à ceux qui déjà ont entrepris , ou entreprendront quel-
que chofe dans la fuite, contre fadite Majefté de Suéde, & contre ces Séré-
niffimes Maifons : mais au contraire, Elle promet nonobftant tout ce qui
s'eft palTé jufqu'à préfent, de vivre avec Elles, 6c particulièrement à l'égard
de Sa Majefté Suédoife 6c la Couronne de Suéde, félon la teneur des Con-
ventions 6c Traitez conclus entre les deux Rois 6c Roïaumes du Nord, dans
une parfaite harmonie 6c bonne intelligence, 6c entretenir une bonne corret-
pondance, amitié 6c voifinage: fur quoi Sa Majefté Suédoife 6c la fufmen- .
tionnée Sérénifîîme Maifon déclarent le vouloir comporter de même envers
la Couronne de Dannemarck , 6c de tenir en toute manière une parfaite ami-
tié 6c correfpondance voifïne avec Sa Majefté Danoifè.
XIV. Sa Majefté Impériale 6c les autres Hautes PuifTances, qui jufqu'à
préfent, fe font aquitées de la garantie du Traité d'Altena, de même que S.
M. le Roi de France 6c les Electeurs &c Princes de l'Empire, aufquels l'une
ou l'autre partie pourrait avoir confiance, 6c qui feront nommez dans deux
mois, feront invitez à garantir ce Traité 6c les Articles féparez envers les
deux parties.
XV. L'Echange des Ratifications de ce Traité fe fera à Segeberg dans
fept jours après la fîgnature , 6c plutôt s'il eft pofîîble.
En foi 6c confirmation dequoi il a été fait deux Copies de cet Acte qui
ont été fignées par les Miniftres autorifez des deux Parties, 6c fceUées de leur
Cachet. Fait à Travendal le 18. Août 1700.
Signé,
(L. S.) Jean Hugo de Lente. (L. S.) Magnus de JTedderkop.
(L. S.) Chriftof. Élome. (L.. S.) Pincier van Konigfieya.
Outre ce Traité il y eut fix Articles féparez 6c fécrèts, qui furent fî-
gnez en même terns, 6c que voici.
I. COn AltefTe Monfieur le Duc de Holftein-Ploën , fes Héritiers 6c Def- Articles
<-3 cendans ne feront point troublez ni grevez contre les Accords 6c Re- j,eC!trs .
ces, qui ont été paflèz entre Sa Majefté Roïale de Dannemarck 6c S. A. de xé]*'
Slefwick-Holftein-Gottorp ; mais ils jouiront paifiblement de tous les Droits Tm-cn-
qui leur ont été aquis par lefdits Rècès, 6c de tous ceux qui leur apartien- dal,
Tom. I. H nent
I700.
f8 MEMOIRES, NEGOCIATIONS, TRAITEZ,
nent d'ailleurs, leurs Seigneuries, Baillagcs 6c Biens y annexez, fans y être
inquiétez ni moleftez par perfonne quelle qu'elle puiffe être. Le tout néan-
moins fauf & fans préjudice du Traité d'Altena. Cet Article léparé aura la
même force, & fera du même effet, que s'il étoit inféré mot à mot au Trai-
té principal 6c l'on en a fait trois Actes, lefquels ont été fignez par les Mi-
niftres Plénipotentiaires des deux partis 6c féellez de leurs Cachets. Fait à
Travendal le 1-8. d'Août 1700.
II. S.- A. de Slefwick-Holftein-Gottorp promet d'emploïer lés offices les
plus efficaces auprès de Sa Majefté Roïale de Suéde , & s'engage d'obtenir
d'Elle. Primo que toutes hoftilitez, Contributions 6c exactions ceffent dans
Tille de Zéeland , 6c dans toutes les autres Mes de Dannemarck dès le jour
que le Courier, que S. A. expédiera ce foir pour notifier à Sa Majefté la
conclufion du préfent Traité, arrivera auprès d'Elle j 6c que tout ce qui n'au-
ra pas été reçu jufques audit jour inclufi-ve de l'arrivée du Courier ne foit
point exigé dans la fuite. Et fecundb que les Troupes Suédoifes foient reti-
rées fins aucun retardement du Roïaume de Dannemarck , immédiatement
après que l'échange des Ratifications du préfent Traité , aura été notifié à Sa
Majefté Roïale de Suéde, ou à fes Généraux en Zéeland, à moins que le
vent ou l'orage n'y aportaffent empêchement. Laquelle Déclaration 6c pro-
meiiè a été lignée par S. A. de Slefwick-Holftein , 6c munie de fon Cachet
à Segcberg le 18. d'Août 1700.
III. En cas que le paiement des z6o. mille Ecus promis dans le IX. Arti-
cle du Traité ne fe fafle pas en quinze jours, à compter d'aujourd'hui, on
cft convenu que le Hardebredtftedt, ou Norgesharde fera remis à S. A. de
Gottorp, pour hipoteque, avec tous fes Droits , apartenances , 6c fupériori-
tcz, & qu'Elle en jouira paisiblement } fadite Altefle promettant auili de fe
contenter de fix pour cent pour l'intérêt de fon Capital, 6c de ne rien exiger
au de-là fur les Contributions & Revenus de ce Baillage. En foi de quoi les
Miniftres Plénipotentiaire^ des deux Partis ont figné le préfent Article féparé
de leurs mains , & y ont apoie leurs Cachets, voulant qu'il ait la même va-
leur 6c le même effet que s'il étoit inféré au Traité principal. Fait à Tra-
v€ndal le 18. Août 1700.
IV. Les Miniftres Plénipotentiaires de. Sa Majefté Suédoife, de S. A.
Electorale de Brandebourg, & de la Sereniffime Maifon de Brunfwick-Lu-
nebourg ont defiré 6c inftamment recommandé que Sa Majefté Danoife ne
contefte plus les droits de fupériorité de la Ville de Lubeck fur Mciflingen,
Niendorf , Reecke , Stockehdorf , Morie , Eckjjorft, Danckehdorf §CÏrent-
■horft; fur quoi les Sieurs Miniftres Plénipotentiaires du Roi de Dannemarck
ont déclaré qu'ils efpérent d'obtenir que Sa Majefté pour montrer fes bonnes
intentions à l'égard de les Voifins 6c Etats du Cercle , & la confidération
qu'Elle a pour leur interceffion, donnera les mains aune Sentence Impéria-
le, 6c que fans atend:-e qu'elle foit prononcée, Sa Majefté fera rendre à la
Ville de Lubeck le Bien 6c Village de Meiflingen avec fes apartenances, 6c
le droit de fupériorité fur icelui, dès que ladite Ville l'aura demandé par une
Dépuration. En loi doquoi le préfent Article féparé a été figné 6c féellé par
les
ET RESOLUTIONS D'ETAT, f9
Je? Miniftres Plénipotentiaires du Roi de Dannemarck, à Travendal le 18. 1700-
d'Août 1700. '
V. Sur l'inftance faite au nom des Hauts Directeurs du Cercle de la Baffe
Saxe, par les Sieurs Minières Plénipotentiaires de Suéde, Brandebourg, &
Brunfwick-Lunebourg à ce que Sa Majefté Danoife veuille remettre à l'Evê-
ché de Lubeck la fomme de 120. mille Ecus, demandée par Elle pour cer-
taines Affignations Impériales} on s'eft déclaré de la part de Sa Majefté Da-
noife, qu'Elle ne prétendra plus dudit Evêché que ce qui eft ordonné par la
Matricule de l'Empire 6c du Cercle, 6c ce qui en relie dû, en rabatant là--
defTus tout ce que Sa Majefté a déjà reçu. Que dans iîx femaines Elle apoin-
tera cette affaire pour la liquidation , 6c qu'en toutes choies Elle en ufera en
toute équité avec ledit Evêché 6c Chapitre de Lubeck, & lui accordera ce
qui a été accordé à quelques auties Etats. En foi dequoi ce préfent Article
féparé a été figné par les Miniftres Plénipotentiaires des deux Partis , vou-
lant qu'il foit du même effet, force 6c valeur que le Traité principal. A
Travendal le 18. d'Août 1700.
VI. Sur l'inftance faite en ces préfens Traitez à ce que pour le bien du
Commerce de l'Elbe Sa Majefté de Dannemarck Se de Norvvegue voulut
faire démolir 6c rafer le Fort de l'Elbe, dit Hillerfchantz , Sa Majefté Roïa-
le s'eft déclarée qu'elle vouloit biffer ce point-là à l'arbitrage de Sa Majefté
de la Grande-Bretagne 6c de Meilleurs les Etats Généraux des Provinces-
Unies des Pais-Bas comme Garands, 6c de Sa Majefté de France, 6c que
deux mois après que leur Sentence feroit donnée, elle y fatisferoit. Pour af-
furance de quoi le préfent Article féparé a été figné par les Miniftres Pléni-
potentiaires des deux Partis, 6c il aura la même force 6c valeur que le Trai-
té principal. Fait à Travendal le 18. d'Août 1700.
Signé,
(L. S.) Jean Hugue de Lente. (L. S.) Chriflophle Blome.
L "E s Miniftres d' Angleterre 6c de Hollande donnèrent d'ailleurs un Acte
de Garantie du XIII. Article du Traité principal, 6c cela à la requifîtion de
la Couronne de Suéde. L'Acte étoit conçu en ces termes.
COmme par le XIII. Article du Traité de Paix, conclu ce jourd'hui Garantie
entre Sa Majefté de Dannemarck 6c S. A. Monfieur le Duc de Slef- dcl'Ar-
wick-Holftein-Gottorp , il a été promis de la part de fa très-haute mention-, 11e. 5y
née Majefté, qu'Elle ne donnerait aucun fecours aux Ennemis de Sa Majef-
té Suédoife, ni de fait ni de confeil, ni directement ni indirectement, 6c que
les Miniftres Plénipotentiaires de Sa Majefté de Suéde pour ce Traité, ont
déclaré que cela devoit fpécialement s'entendre de Sa Majefté de Pologne,
Electeur de Saxe , qui a attaqué la Couronne de Suéde en Livonie hoftile-
Tncnt 6c publiquement. Sur quoi les Sieurs Miniftres Roïaux de Dannemarck
iè font aufîî déclarez à Nous fouffignez que félon le contenu 6c la bonne foi
H à dudit
6o MEMOIRES, NEGOCIATIONS, TRAITEZ,
1700. dudit Article XIII, Sa Majefté de Dannemarck & de Norwege ne donne--
' roit aucun fecours ni aide, foécialement à Sa Majefté Roïale de Pologne &
Electeur de Saxe, dans là prefente Guerre contre Sa Majefté de Suède, ni
par Terre, ni par Mer, ni directement ni indirectement; ce qui a été aufïï
accepté de la part de Sa Majefté Roïale de Suède. C'eft pourquoi Nous
"auifi defiïant d'avancer & d'afïurër la conclufion de la Paix, certifions &; té-
moignons par le préfent Acte que cela a été accordé ainfi ; offrant & promet-
tant en outre, de procurer la Garantie de nos très-Hauts Seigneurs Princi-
paux, fpécialement fur ce point dans le terme de fix femaines, & la Ratifi-
cation de cet Acte en quatre femaines. Fait à Segeberg le 18. d'Août 1700.
Signé,
(L. S.) Jaques Crejfet. (L. S.) If Hacrsholte.
Les Miniftres de Brunfwick-Lunebourg donnèrent à part un A&e de la
même teneur.
Ledit Miniftre d'Angleterre Crejfet aïant fort porté les intérêts du Duc de
Holflein, et étant peu après fur le point de retourner à fa Cour, le Duc lui
donna des Lettres Recredentiales de la manière qui fuit.
Sereniflime ac Potentifïime Rex ,
- f^Um avita îlla, quam Regiam Majeflatem JÛania me que hit er fat a temporam
les ^^ ititerruperant , amicitia, fingulari Divini Numinis bénéficia variorumque
Recre-
dentials
gem An- Principum & Potcntiarnm indefïfjli operâ tandem Traïer.tbaliœ ex veto reflau-
glise pro rata, Paxque parla &? ejus Ratificatio utrïnquc folemnitcr fubfccuta fit , non
Domi- poffum qitin Regue Majeftati Veftrœ me multis nominibus bâc in re obftriclum
mim de ^enuo agnofeam, & pro infigni Ulâ cura {s? ope quam ad compefeendos Septentrïo-
tiis motus , Pacemque redïntegrandam , per Abkgatum fuum Extraordinarium
Dominum de Crejfet per quadriennium integrum adhibere non gravât a eft , débitas
fummo jure réitérera gra-tes , praprimis etiam quod toto Negotii tempore virum -
rafts probitatis & prudent ue cjr quo magis idoneus eligi non potuit , hic adejfey
Regia Veflra Majeftati placuerit. Cœlemm cum peraclojam negotio difeeffum pa-
rafe conflit uerit prxdiftus Dominas Ablegattis , eum ob infignia mérita mihi ac-
ceptijfimum , condigno apud Regiam Majeflatem Veftram teftimonio profequi
meum efje exiftima-vi; certb confidens , Illum pro cà, quâ praftat fide & integri-
tatc , idoneum porrb te/iem cjf fponfurem futnrum ejfe me te vbfervantia £5? nun-
quam iniermoritura gratitudinis erga Majeflatem Vcftram , cui Deus Optimus
Maximus ad promoveudum porrà commune bonum vitam longam , felicefque rerum
fuccefj'us largiri velit. Dabantur Hamburgi die zj. Septembris Anno ijoo. ■
Friuericus Dei Gratiâ Hxres Norvegia?, Dux Slefwici,
Holfatùv, Stormariae & Ditmarûa;, Cornes in Oldenburg
& Dclraenhorftj £vc,
Le
ET RESOLUTIONS D'E T A T. 61
Le même jour ledit Duc dépêcha des Lettres Requifitoriales au Roi de la 1700.
Grande Bretagne , pour implorer (à Garantie du Traite qu'on venoit de con-
dure à Travendal. Elles étoient de la teneur fuivante.
Serenifîîme Se Potentifîîme Rex.
QUod noviffiniis hifee moîibus , qui Regiam Majefiatem Daniœ meque inter RequiTi-
fuborti, Septentrionis qttietem per intégrant quadriennium dubiam reddide- q"*,.^.
rant , publiceeque non ita pridem -reftauratœ tranquillitati exitium minari vide- ti£e a'^
bântur Regia Feftra Majeftas pro affecta erga me fuo Conciliât or £ïf vindex ac- Regem
eedere , ' fuamque operam, autoritatem, & cum res in fiammam erupifjet , fuUm AngU-e.
auxilium etiam efficaciter imper tiri non dedignata fit , ufque donec nupero 18. die
Auguftt Pax Traventhaliœ conclu/a , &, quo ipfa fanguinis propinquitas invita-
bat, fœlix animorum conjunclio fubfecuta finem negotio impoftierit ; hoc utpote m-
figne Régis Majeftatis Feflra bénéficiant benevo'.entiœque quod pofleritas etiam
■mirabitur, argument um grato animo veneror, perpetuâque commémorât ione cele-
brabo. Cum igitur Pace reflitutâ omnia mea vota eo jam confpircnt ; ne novis
turbarum tempeftatibus coneuflfa tranquillitas amplius cornière, fedpotius renovata.
amicitia fecurior coalefcere, & ab omni parte inviolata dur are poftit.' Proinde eâ
quâ par eft obfervantiâ & quod negotii gravitas requirit , quant impenfijjimè Re-
viam Veflram Majefiatem rogatam volo , ut , qu<£ conciliando Recejjui Altona-
•vienfi operam & autoritatem fuam olim commodare non gravata eft , ita etiam
Pacem banc ïraventhaliœ aufpiciis fuis initam &f quœ controverfus de fenfu prio-
ns fraclatus enatis finem tandem imponit , Guarantiâ cjf autoritate fuâ porrà
munir e , mihique defuper , confuetam formulam impertiri velit , quo folido œqui-
tatis & juftitite fundamento nixus ilîe Traventhalienfis Tr a cl a tus fubjeclo ad hue
tara potenti fulcro , ad pofteros interner ata tranfmittatur. Faciet eo ipfo Regia
Veflra Majeftas non tantum quod juftitiœ ipfius , gloriœque Nationis Britannica
&? amori pro bono publico conveniens eft ; fed etiam Me 13 Domum meara hoc
nunquam intermorituro affeclus fui document 0 in œternum fibi devinciet , qui c<e-
terum Regiam Veflram Majefiatem in longam annorum fericm , gUriœqae incre-
mentum Omnipoter.tis curœ 6? tutelle comme ndo. Dabantur Hamburgi ij. die
Septembris Anno ijoo-
Fridericus Dei Gratià Hœres Not vegvx , Dux Slefwiei ,
Holfatix* , Stormarise, 6c Ditmarilse, Cornes in Oldenburg
& Delmenhorft.
Regiae Veftrte Majeftatis
ad quœvis officia paratiiîmius
Fridericus Dux Slefw. 3c Holf.
SereniiTïmo ac Potcntiffimo Principi,
Domino Guilie l.m o Tertio ,
Magna; Britannia; , Francise 6c
Hibernia: Régi, Fidei Defenlbri,
• Domino Conlanguineo, nobis plu-
rimum colendo. *
H 5 Le
6z MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
1700. Le même Duc en écrivit une pareille auRoi Très-Chrétien, dont la Co-
■ pie fuit.
Sereniffime ac Potentiffime Rex.
Kequifi- (~\Uod novijflinth in his oris motibus qui Regiam Majefiàtem Dania, rneque
toriales V^J inîer fato temporum Juborti Septeutrionis quittent per integrum ferè qua-
Guaran- driennium dubiam reddiderant, publics que non ita pridem reftitutœ tranquillitati
tiae ad interitum minari videbantur , Regia Feflra Majefias pro affeclu fuo erga me^
Gali:re. Domumque Gottorpienfem Conciliatcr accéder e, fuamquc opérant & autoritatem
fer varies Miniftros eo imper tiri non dedignata fit , donec 18. Augufli die Pax
Iraventha'ics fœliciter conclufa, £5?, quo invitabat propinqua fanguinis necefiitu-
do, folida animorum conjanclio fubfecuta fit, hoc utpote eximium, quâ Regia,
Ftfira Majefias me ampleclitur benevoïentiâ argumentum grato animo veneror^
perpetuâque commémorât ione celebrabo. Cum ïgitur Pace tandem re Habilita , om~
nia vota mea eo jam confpirent, ne novis turbarum tempeflatibus concujfa tran~
quillitas ampUus corruere , fed potius refiaurata amicitia inviolata per pofieros
propagari pofiît. Idcirco Regiam Vefiram Majefiàtem eâ quâ par efl , & quam
Negotii gravitas requirit, obfervantiâ & operâ enixijfime rogatam volo, ut9
' quemadmodum ejus Autoritate Tratlatus Fonte-bellaquenjis quondam initus efl, ita
eontroverfiis tam exinde quam ex Altonavienfi Receflu enatis , finent tandem im-
ponentem, ope que Regia Majeflatis Vefirœ conciliât am & in commune Or bis émo-
lument uni , vergentem Pacem Traventhalenfem Guarantiâ £5? autoritate fuâ mu-
vire, mihique defuper confuetam formulant imper tiri non dedignetur, quo folido
aquitatis ($ juflitlœ fundamento fubnixa illa Traventhahnfis Pax,fubjeclo adhuc
tant potenti fulcro ad pofieros interner at a tranfmitti queat. Faciet eo ipfa Regia
Veftra Majefias non tantum quod jufiitiœ , ghrixque ipfius & amori pro falute
publicâ conveniens efl , fed etiam hoc nunquam intermorituro benevalentia fu<e ar-
gumento me Domumque meam in sternum fibi devinciet, qui cœterum Regiam
Vefiram Majefiàtem in longam annorum feriem , gloriœque incrementum Divini
Numinis cura & tutela commendo. Dabantur Hamburgi die zj. Septembris
jinno 1700.
Fridericus Dei Gratià Hxres Norvège, Dux Slefwici, Hol-
fàtiaè , Stormarias 6c Ditmarfue , Cornes in Oldenburg 6c
Delmenhoril.
Regia; Veftrae Majeflatis
ad qurevis officia paratiflimus
Fridericus Dux Sleiw. 6c Holfat.
Serenifhmo ac Potentiffimo Principi,
Domino Ludovico Decimo Quar-
to , Galliarum ôc Navarrx Régi
ChriftianirHmo, Domino Conlangui-
iieo noltro chariffimo.
La raifon pour laquelle le Duc écrivit ces Lettres Requifîtoriales au Roi
Très-
ET RESOLUTIONS D'E T A T. <?;
Très-Chrêtien, étroit qu'à la follicitation du Dannemarck, le Comte àeCha- 1700.
milli avoit offert la Médiation de fon Maître pour apaifer ces troubles-là , fails ■ ■ ■
réjetter celle de l'Empereur, ni des autres Puiflances Médiatrices ou Garan-
tes. Cependant que fi ces dernières venoient à être reeufées , la France fe-
roit feule la Médiatrice. Le Duc de Holitein regimba à cette propofition.
Il falut pourtant qu'il y aquiefçât, fur de fortes paroles & menaces du Com-
te de Cbamilli, en vûë à ce qu'on fupofa, de troubler ou tirer en longueur
la Négociation. C'auroit été en faveur du Dannemarck , qui le flatoit tou-
jours du fecours du Roi Auguste, & d'une Déclaration de Guerre du Czar
contre la Suéde. Le Dannemarck s'y attendoit fi fûrement que fon Envoie
qui étoit à la Haïe n'en raifort aucun miitère, & le déclaroit dans la conver-
fation à tous les autres Miniures. Ce qui fortifia le foupçon qu'on avoit des
vues du Comte de Chamilli pour rendre infruclueufes les Négociations , fut
un Difcours que le Comte de Briord fit au Confeiller Pensionnaire de Hollan- '
de. Comme l'Ambafiadeur de Suéde demandoit aux Etats Généraux les fix
mille hommes de fecours portez dans l'Article VIII. du Traité qu'on venoit
de faire, le Comte de Briord dit au Penfionnaire que le Roi Très-Chrêtien
ne vouloit nullement fe mêler de cette Guerre-là, Se que de fon chef il lui
difoit, qu'il vaudrait mieux qu'on ne donnât aucun fecours à la Suéde, afin
de venir tant plutôt à bout de la Paix du Nord. Le Confeiller Penfionnai-
re, qui regardoit plus loin, lui répondit, qu'il lui étoit auffi permis de dire
fon fentiment particulier, qui étoit, qu'il croirait trahir les Etats, en leur
donnant un tel Confeil.
Comme les Envoïez d'Angleterre & de Hollande nllant voir le Roi dà
Dannemarck, menèrent avec eux celui de Suéde, Ton propofa dans le Con-
feil de ce Roi, fur une clandeftine infinuation du Comte de Cbamilli , fi l'on
arrêterait ledit Envoie de Suède. L'on conclut cependant à la négative.
Ce fut le Secrétaire d'Etat du même Roi, nommé JeJ~en? qui le dit à l'En-
voie d'Angleterre. Sur quoi celui-ci lui dit qu'on aurait pu le faire ; mais
que le Roi de Suède s'en ferait reffènti d'une manière, à en faire repentir
ceux qui l'auraient fait. Jejfen parla là-deffus en termes méprifans des For-
ces tant maritimes que terreirres du Roi de Suède. Cela augmenta le foup-
çon que nonobitant une Lettre du Czar, que fon Ambaffadeur à la Haïe avoit
communiqué aux Etats, à l'AmbafTadeur de Suède Lillienrootb & à d'autres
Minillres, le Dannemarck comptoit fur la Ligue avec le Czar, & le Roi de
Pologne, & même avec le Brandebourg. Ce dernier avoit fait avancer à
Lentzen, fur fes Frontières, un Corps de huit mille hommes, fous prétexte
d'afîurer fon Pais , mais l'on croient que c'étoit par une demangeaifon de re-
muer. Cependant il n'exécuta rien , parce que le Traité de Traversai mit
fin aux troubles de ce côté-là.
La Copie de ce Traité fut aportée au Roi Guillaume , qui fe trouvoit à
Loo. Il en eut bien de la joie. C'étoit entre autres raifons, parce que par-là
le Roi de Dannemarck n'en fortoit pas avec avantage. La raifon en étoit, que
Sa Majeité Britannique avoit quelque fujet de mécontentement de ce Roi-là.
Un jour étant à table il avoit dit que le Roi Guillaume -ne pouvoit pas
• beaucoup dans l'Europe, étant peu d'accord avec fon Parlement. Ce qui
aï* ne
H MEMOIRES, NEGOTIATIONS,' TRAITEZ,
1.700. aïant été raporté en Angleterre, Sa Majefté Britannique avoit dit au Mar-
"" ' ■* quis de la Forêt, attaché au Dannemarck, 6c qui avoit paffé au fêrvice du
Roi Auguste, qu'il feroit voir au Dannemarck, qu'il pouvait encore quelque
chofe dans V Europe.
Quoique le calme fut rétabli, par le Traité de Travendal, dans le Danne-
marck 6c dans le Holftein, il ne le fut pas entre la Suède & le Roi Augus-
te. -Ce dernier Clivant les fecrèts engagemens avec le Czar, après avoir
amufé la Suède par de vaines Négociations pour un renouvellement d'Allian-
ce, leva le mafque. Il ne le fit pourtant pas que pied à pied. Il prétendit
même de vouloir faire palier pour premier Agrefieur le Roi de Suède ; afin
de donner quelque couleur à l'invafion que les Troupes Saxonnes firent en
Livonie. On oublia pourtant ce prétexte dans le Maniferte que ce Roi fit
publier dans la fuite, ainfi qu'on le verra ci-après. C'eft en alléguant qu'il
attaquoit la Suède en vertu des Paila Conventa avec la République de Polo-
gne, par lefquels il s'étoit engagé de récupérer à la République ce qu'on lui
avoit auparavant arraché.
La première nouvelle qu'on eut à la Haïe de la marche des Saxons, fut
par un. Mémoire en Flamand du Miniftre du Roi Auguste en date du ip.
Mars 1700. Il y faifoit part aux Etats Généraux que le Roi fon Maître
avoit apris par un Ecrit qu'il avoit reçu, 6c dont il ajouta la Copie, du
Lieutenant Général Flemming , qui commandoit fes Troupes en Lituanie,
qu'il avoit été obligé d'entrer en Livonie, par les railbns déduites dans cet
Ecrit. Que Sa Majefté Polonoife avoit toujours eu intention de vivre en
tranquillité avec la Couronne de Suède. Ainfi que non feulement les Etats
Généraux aprouveroient la conduite du Lieutenant Général Flemming j mais
auflî qu'ils î'affifteroient , plutôt que le Roi de Suède, qui avoit donné le
premier l'occafion à ce trouble. Voici l'Ecrit qu'il ajouta à fon Mémoire.
Tv5a?lfef" TAques Henri de Flemming, Confeiller Privé, Général de la Cavalerie,
comte ^ & Colonel d'un Régiment de Dragons de Sa Roïale Majellé de Pologne,
de Flem- 6c AltefTe Electorale de Saxe.
ming en Fait favoir que les diverfes menaces, frites de la part de la Suède, jointes
c" Uvo- * *a con^u'tc 9ue ceilx l1" commandent pour Sa Majefté Suèdoife dans la
,,;e, . Livonie, «voient tenue depuis quelque tems, ne lui donnant plus lieu de
douter, qu'ils n'attendoient plus que les fecours qu'on devoit leur envoïer de
Finlande, d'Ehrften, & de la Carelie, pour venir attaquer les Troupes du
Roi fon Seigneur 6c Maître dans les quartiers qu'elles occupoient en Litua-
nie ; 6c que voulant prévenir l'exécution d'un fi dangereux deflein, il s'étoit
crû obligé de s'avancer dans la Livonie, 6c de s'y afiiirer d'un Pofte, d'où il
pourrait plus aiiément s'opofer à toutes leurs entreprifes. Mais qu'étant bien
. perfuadé que l'intention de Sa Majefté Polonoife cft, que tous les Sujets de
ce Duché, tant Nobles que Bourgeois, 6c autres Habitans de la Campagne,
ne foufïient aucun dommage de la part de fes Troupes, foit en leurs perîbn-
nes, foit dans leurs Biens, il déclare que Sadite Majefté voulant bien les
prendre tous fous fa protection générale, il eft prêt de faire délivrer à un
chacun toutes les Sauvegardes, dont ils auront befoin. Qu'il a pour cet effet ■
défen-
ET RESOLUTIONS D'ETAT, 6y
défendu très-exprcfTément à tous les Officiers , Cavaliers, Soldars, & autres Ï700.
gens qui fervent dans les Troupes qu'il commande, de piller ou brûler leurs *—
Maifons, de rien exiger d'eux, Se en un mot de ne les inquiéter en aucune
manière. Qu'il a ordonné en même tems que tous ceux qui contreviendronj:
à la préfente Déclaration feront confidérez comme Rébelles aux Ordres du
Roi fon Maître & punis de mort. Qu'il donne pouvoir à tous les Habitans
de ce Duché, auxquels ils auront caufé le moindre dommage, de les arrê-
ter, de les mettre aux fers, 8c de les amener dans le Quartier général, s'ils
font Commandans pour y être exécutez > & s'ils font bas Officiers ou Soldats,
de jes faire pendre fur l'heure, & dans le lieu même où le délit aura été com-
mis. Que tous les Habitans de ce Duché, qui relieront tranquilles, & ne
commettront aucunes hoftilitez contre les Troupes de Sa Majerté, jouiront
de fa protection & du bénéfice de fes Sauvegardes. Qu'au contraire ceux qui
fe comporteront autrement, ne verront pas feulement leurs Biens , mais en-
core leurs perfonnes expofées à la fureur du Soldat, & détruites par le fer
ou par le feu. Qu'au furplus l'intention de Sa Majefté étant de ne donner
aucun ombrage aux Habitans du Duché de Courlande , la préfente y fera
envoïée, publiée & même diftribuée aux Chefs de famille , tant pour leur
fervir de Sauvegarde, qu'afin que chacun d'eux s'y puiffe conformer.
En foi de quoi j'ai figné les préfentes, & confirme de mon Seau. Donné
dans le Haut Quartier à Janitfchan le zo. Février 1700.
Signée
Flemming.
Apre's cette démarche non attendue, ce Général attaqua le Fort de Koker
fur la Rivière Duna , à l'opofite de la Ville de Riga. Il prit auffi quelques
autres portes avec d'autant plus de facilité, que les Suédois ne fe doutant
point de cette fupercherie, n'avoient point pris de précaution pour leur dé-
fenfe. Flemming invertit même la Ville de Riga ; mais comme il n'avoit
point affez de Troupes pour en faire le Siège, ÏÏ la menaça d'un bombarde-
ment. Le Comte de Halberg, Gouverneur de la Livonie, 'fit brûler le beau
Fauxbourg de cette Ville-là, afin que les Saxons n'y prhTent point porte.
Flemming n'exécuta cependant pas fon defiçin de bombarder cette Capitale de
la Livonie. C'étoit pour ne pas aigrir les Hollandois, qui y avoient pour
plus de deux millions d'effets. Le Dannemarck fit prôner parmi les Mar-
chands d'Àmfterdam que c'étoit à là confidération que le Roi Auguste
avoit épargné Riga. L'Envoie Danois alla même à Amfterdam pour s'aqui-
ter de cette Commiffion. La vue en étoit de faciliter parmi ces opulens Né-
gocians-là un emprunt que fon Maître vouloit faire , pour pouvoir païér les
260. mille Ecus, qu'il avoit promis au Duc de Holrteinpar le IX. Article
du Traité de travendal. Flemming fe voïant traverfé dans fes defleins contre
Riga, par l'incendie du Fauxbourg, & d'ailleurs pour tâcher de fe captiver
les Peuples, par un témoignage de tendrelfe pour eux, en écrivit au Comte
de Halberg la Lettre fuivante.
Tom. L ï MON-
66 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,..
if 60.
MONSIEUR,
Lettre
dut.
Flem-
„ ^Omme les Officiers, qui font priibnniers ont fouhaité d'écrire à Ri-
^c „ V_v ga, je ne puis laiflê*r échaper cette occafion de vous marquer l'éton-
„ nement que m'a caufé l'horrible incendie du Fauxbourg. Ce n'efc pas que
au C. » je veuille contrôler vôtre conduite ; mais je ne vois pas que vous aïez eu
deHal- „ aucune bonne raifon pour en venir à ces extrêmitez & à des moïens fi vio-
^crS> „ lens. Si c'étoit en Eté, on aurait eu lieu de craindre que le Fauxbourg
jieurde" " auro^ Pu donner quelque avantage aux affaillans, pour" faire leurs tran-
la Livo- 55 chées, quoique dans le fond cela ne gagnerait pas deux jours, Se par con-
uie. . „ féquent ne peut pas à beaucoup près balancer la perte de ce beau Faux-
„ bourg, qui a coûté des millions. Mais nous fommes préfentement en Hi-
„ ver, qui eff un tems où l'on ne craint point de Siège dans les formes; de
„ forte que la proximité du Fauxbourg ne pouvoit en aucune façon nuire à
„ la Ville. D'ailleurs on auroit pu y placer le renfort de Finlande Se fon
„ Canon, ce qui ne pourrait pas fi bien fe faire dans le Port de Livonie.
„ Enfin j'affure fur mon honneur Se fur mon ame, que je n'ai jamais eu def-
„ fein de me fervir du Fauxboutg , pour en tirer aucun avantage contre la
„ Ville ; car l'on n'aurait pas attendu fi long- tems, Se la chofe auroit déjà
„ été faite, je prie donc qu'on ait pitié des pauvres gens, Se qu'on n'ache-
„ ve pas de ruiner ce que les flammes ont épargné. Je me promets de vôtre
„ générofité, Monfieur, que vous ne prendrez pas ceci en mauvaife part , Se
„ que vous croirez que je fuis prêt de vous rendre fervice en d'autres occa-
fîonsj étant, Monfieur, Sec.
»
Le Comte de Halberg fut étonné de recevoir une Lettre qu'il trouva gro-
tefque, fur tout pareeque celui, qui lui écrivoit, manquoit de cette expé-
rience que lui-même avoit aquis par de longs fervices. D'ailleurs fur les aflli-
rances qu'il dormoit fur fon honneur Se fur fon ame de n'avoir eu aucun def-
fein fur le Fauxbourg. Cependant il trouva à propos de fe fervir de cette
difiîmulation, qui eft une des plus fignalées vertus des Politiques. C'eft
pourquoi il fe contenta de faire la courte réponfe qui fuit. .
MONSIEUR,
Réponfe „ T'Ai vu par vôtre Lettre du 16. Février, laquelle m'a été aportée par un
^ £", „ Tambour, que vous témoignez entre autres chofes une grande com-
ber" " » * Pa^î°n touchant le Fauxbourg qui a été brûlé. Mais comme il ne s'efr.
„ rien pratiqué en cette occafion, qui ne foit autorifé par le Droit de la
„ Guerre, Se qu'on fait de même par tout le Monde Se dans toutes les Pla-
„ ces en pareil cas, je (aurai bien m'en juftifier en tems & heu. Cependant,
„ Monfieur, je ne laiflerai pas de réfléchir autant qu'il me fera poifihle fur
„ les raifons que vous m'avez alléguées, & je tâcherai de répondre aux hon-
,, nêtetez que vous me témoignées. Je fuis, Sec. Sec.
ET RESOLUTIONS D'E T A T. 67
L e Roi de Suéde , qui avoit agi de bonne foi envers le Roi A u g u s te , 1700 ■
dans le deflêin de renouveller les Traitez avec lui , aïant apns l'mvafion des
Saxons dans la Livonie, s'en plaignit au Roi de France, comme Garant du
Traité d'OIiva, que le Roi A u gu s t e venoit d'enfraindre. Il le fit par une
Lettre en termes fort plaintifs, dont la Copie fuit.
Ad Regem Galliar.
I
NOS CAROLUS, 8cc. &c.
Ntra prœclara operum monument a, qu£ Majeftatis Feftrœ gloriam miriftcb il- Lettre
_ luftrant, non poflremo loco babenda eft Paciftcatio Olivenfis, non modo Ma- ^f0},
jeftalis Fefîrœ mediatoriâ interpo/itione condita ac conciliata , fed 13 luculentâ ^ ^ e
ejufdem fponftone ac Guarantià munit a ac fpeciali infuper diplomate confolida- de Fran»
ta eoque graviits Majeftas Feftra baud dubie latura eft , tam folemnibus paclis , ce.
-hacleniis religiosè ac rêver enter habitis, nunc quant maxime fœdam labem inferri.
Nuntiis quippè prorfùs mexpeclatis certiores redditi fumus , Copias ac Cohortes il-
lasmlitares Saxonum , hacJenus appellations notas , qu<e aliquandiu in Litbuaniâ
circa Polangiœ oram fubfiiterant , atque in Curlandiam progreffte fuerant , fubita
(3 improvifâ irruptione , nullis omnino à parte noftrâ lacefjentibus caufts , nuïlâ
pr£vià denuniiatione , adebque per fummum nef as , ac more inter Chriftianos
Principes ac Status plané inufttato , in Provinciam noflram Livoniam hoftilem
impetum ac invajionem feciffe, milites noftros circa Provinciœ limites in excubiis
fiantes, armatâ manu oppreftiffe, munimenta ac caftella quœdam per vim oppu-
gnaffe, ad ipfam denique dicta Provinciœ Metropolim Rigam infefta ftgna ad*
moviffe, compulfâ in eam necejjitatem urbe , ut incenfis pajjîm fuburbiis elegantif-
fimis, (3 maximis cïvium impenfis adufum 13 amœnitatem inflructis & adorna-
tis, ad defendenda adverfus hoftiles infultus ipfa mœnia, curam prœcipuè intende-*
ret, editis prœterea aliis facinoribus , é quibus palàm eft apertam 13 hoftilem
aggreftîonem in Nos exercer i cœptam\ §hio quidem in rerum articula primum fum-
mum teftamur Numen, nibil à nobis vel admiffum vel cogitatum , quod inimici-
tiis ejufmodi ac violent lis anfam prabere turbandœque Pacis prœt'.xtum fuppedita-
re pofjit. Cum Rege ac Republicâ Polonne ftnceram cohiimus amicitiam fidamque
ac conçordem viciniam; per Miniftros & Ablegalos utrinque Noftros, mutua be-
?ievo!entiis affetlum mvkem teftatiorem fecirnus , adfunt etiamnum iifdem in locis
■ M'mifiri No/tri, nec unquam innow.it, quicquam querdarum aut gravaminum à
parte Polonia motum efj'e , quod dijfenfionum qualemcunque materiam ac ne fufpi-
cionem quidem fuggerere potuiff'et, fed nec cum aliis Poteftatibus bello impliciti fu-
mus, ut ha copia, faltem pro auxiliaribus , alteri cuidam militât mis reput ari
fofjint, ac ne quidem baclenus innotuit, cujus velnomine, vel aufpiciis bac in-
vafto patràta fit ; nift quod intelleximus quendam Régis Polonia Gêner alem Lo-
cum tenentem Flemingium effe, fub cujus duïiu atque Imperio Copia illae graffari
cœperunt : Cum igitur illa aggrefjïo prorfus pro nefariâ ac fœdâ babenda eft-, Di-
vinant utique in authores ejufdem pervocatura vindiclam , ac in bonorum omnium
fenfuque bonefti praditorum reprehenfîonem atque averfwmm meritb incurfura%
nonpotuimus non ad Majeftatem Ftftram ejus rei déferre notitiam, nulli dubitan-
I i Us^
68 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ'*
1700. tes, quin Majefias Vefira pro fummâ fuâ fapientiâ ac perfpicacijftmo judicïo in-
— — — vafioneni tàm enormèm ac inbumanam pro eâ fit exiflimatura, qua communï
Chriflianoram Principum ac Statuant ope fit comprimenda ; ne par ta nuper Eu*
ropeo orbi tranquillitas , novis rursiis beUorum tempefiatibus concuffa, in priftinas
perturbationes recidat ; videt igitur Majeftas Veftra hifce diclarum copiarum im-
piis aufs violata ac conculcata Pacla Olivenfta, quorum pr a cateris Majeftas
Veftra utpoîe eorundem conciliât or £5? Sequejler , Fideijufforem , Cufiodem , ac
Vindicem fe fore profeffa eft\ hàc quidem verborum formula Art. 36. Majefta-
tcm Veflram, executionem horum Patlorum, eorumque obfervationem ac perpe-
tuitatem inter pacifcentes omni meliori , quo fieri potefi modo , etiam armis , ubi
amicabilia média non proce (forint , afferturam , & fe quis eorum fub hàc fideijuf-
fione comprebenforum , illa violarit , arma vire/que fuas parti la fa ad ejus re-
quifitionem juniluram. Cum igitur Majefiatis Vefira Gloria ipfiufque juftitia &
aquitatis inter fit , ob promiffam tam folenniter Guarantiam Patlorum Qlivenfium-
integritati ac Sanblimonia confulere ac contraventions tam énormes adversùs en
commijfas ac perpetratas , ferià atque fevera indignatione ac vindicte profequi,
Fœderis qubque non ità pridem nos inter ac Majefiatem Veflram pro tuendâ iran*
quillitate publicâ initi ratio idem exigat, non dubitamus Majefiatem Veflram de
idoneis con/lituturam mediis, ad rem tantam tamque neceffariam pro dignitatis
fua magnitudine quantocius exequendam. §>uâ de re Minifiro No/lro ad Majef-
iatis Vejlra Aulam commoranti apud Majefiatem Veflram fufiùs ut agat in man-
dats dedimus. Tandem peramicè requirentes, dignetur Majeftas Veftra illum
bénigne audire, ac defederiis nofiris bemvolâ , ut confidimus gratificatione annuere.
Quod ut Majefiati Veftra gloriofum atque magnificum futur uni eft , ità nos ad
repende nda paria amicitia & offtciontm fludia, ubi ufus tulerit validiffimis ad'
Jlringet vinculis \ Qui de catero Majefiatem Veflram Deo ter Optimo Maxi-
mo ad fumma quavis profperitatis omnigena incrementa ex animo commendaîam
cupimus.
Dabantur &c. &c. Die 14. Mart'ù Anno 1700.
C A R O L U S.
Peu de tems après le Roi Auguste fit imprimer à la Haïe, pat le moïen
de fon Miniftre, un Manifefte Latin, fous le titre de Jufta Vindicia &c. Ce
Miniftre en prélènta même un exemplaire aux Etats Généraux. L'Ambafla-
deur de Suéde Lillienrootb en étant averti , préfenta aufîi aux Etats un aflêz
long Mémoire, auffi en Latin, fuivant l'ufage que les Miniilres de Suède ont
confervé de préfenter les Mémoires en cette Langue-là. Dans ce Mémoire
il répondoit par quelques articles au Manifefte du Roi Auguste, & deman-
doit du fecours des Etats contre ce Roi -là. Sur ce Mémoire les Etats fi-
rent enlever de chez le Libraire, enpaïant, tous les Exemplaires du Mani-
fefte. On ne pût cependant pas avoir ceux que le Miniftre du Roi Augus-
te s'étoit fait donner. C'eft pourquoi on eut de la peine à en avoir. Voici
ledit Manifefte, qui fera fuivi du Mémoire de PAmbafladeur de Suède.
JUS-
1700.
ET RESOLUTIONS D'E T A T, 69
JUSTiE VINDICI^EÔC fumma Armorurri Juftitia, ex parte Sacrœ Re-
gix Majeftatis Poloniarùm , juxta obligationem Pactorum Conventorum ,
prxftitumque Reipubkca; juramentum, contra Serenifîîmum Regem 6c
Coronam Swecias , rationé ruptse toties Pacis perpétuas y violatoium Pacto-
■ mm Olivenfium, necnon noviffima: exagitationis 6c orïenfîonis Sereniffimi
Régis Danias 6c Norvegix , Perpetui Fcederati Regni Polonia; ,. ac Co-
piarum Regiarum aggremonis, manifeftantur. Anno vindicata Salutis ALter-
na M. DCC. Hagre-Comitis, apud Henricum van Bulderen, Bibliop.
APrimis Regni Polonia liberis inclyta Gentis fuffragiis fibi dcîati , aufpiciis, Manifef-
Sacra Regia Majsftas , cum internant tranquillitatem , tant ab extra illi- te du
bâtant cum Vicinis bona Amicitia , mutua fecuritatis , & Paclorum Faderum Ro,j ^u"
cbfervantianty inter fancliores repofuit curas , nihilque magis in votis babuit , foUCw]ê
quant inter virentes & fioridas Aima Pacis oleas perennent Reipublica fpeclare fon ir-
felicitatem, & pulcherrimunt in dies efflorefcenùs Polona Liber tatis fovere vigo- ruption
rem fplenderemque , ac fines Regni hujus non tant gladio , quàm juftitiàterminare. enLivo
Hune in finem , compofitis turbidi inter regni dijfidiis , reduclâ publicà Status con-
fident iâ, Ottomanicà Porthâ , folâ armorum oflentatione, & validi Exer citas
robore^ ad deponendum bellum compulfâ^ PaceDomi Forifque partâ9 ac gloriosè
frôla tis Regni terminis, recenter obortù Ncgotiô Elbmgenfi per Amicos Traclatus
mm Seremjfimo Eleclore Brandeburgico fopitè , nihil aliud Sacra Regia Majejlas
intendebat, quàm altâfrui quiète , £s? tôt à Cbriftianitate in gremio Pacis recum-
lente , eâdem dulcedine otii Gentes fibi à DEO commijfas, pofi -tôt trifiia ci? in-
commoda folari.
Sed longé aliter evenit , ahrupti fuccefifus y elujafpes, vota ad irritum redaclay
àum Paci femper adverfus infejlufque Suecorum animns , rupto fapius Fœdcre Oli-
ven/î, f racla F 'ace perpétua , luculentifque aperta hoflilitatis contra Rempublicam
judiciis toties teflatis , novijîmè, per temere erecla mummenta in Ducatu Holfa-
tia^ & fuperimmiffas copias Sueticas , SereniJJtmo Rege Dania & Norvegia
Perpetuo Fœdcrato Regni Polonia enormiter offenfo , £s? per hoc mutuo Fœdere
Anni i6yy, tant ci? anteaclis Confœderationibus Anni 15*63, Anni If6"4, &
Anni iftff, lœfis , ac innocenté copiarum Sacra Regia Majefiatis , circa inftau-
rationem P or tus in Polonga defudantium , infra exprefia impetitione, vel invitant
Sacrant Regiam Majefiatem Polonia firinxit & provocavit , adfubitb capienda
arma ci? antevertenda ea mala^ quibus Corona Suecla retroaclis Annis^ violatâ
facrâ Paclorum ci? Induciarum Religione^ po/lpofilis Divinis humanifque Juri-
bus, ex improvifo praventam , £5? nihil flmile metuentem , afflixit Poloniam,
Regnumque ijlud, antiquum totius Chrijlianitatis antemurale graviter concujfit.
Nondum memorïam deterfit oblivio , olim Ericum Suecorum Regem , non atten-
dis vinculis Paclorum y necejfitudinis , primum Livoniam invafijje , Ci? per pro-
ditionem ac fraudem_ Ducis Mekelburgici Coadjutoris Archi-Epifcopi Rigenfis ,
Revaliam cumEfthoniâ violenter inter cepijfe. Nota publicarum cladium, & ir-
ruptionum in ulteriorem Livoniam nomina in Anno 1601. per Carolum Ducem
Sudermania , quandb,non tantùm pulfus è folo 13 folio légitimas Regni Suecia
Rtx c> Hares. Sjgismundus III, Diva memoria Rex Polonia , fed & Re-
I 5. giones
7o "MEMOIRES, NEGOCIATIONS, TRAITEZ^
^1700. gioncs Reipublicœ infeftatœ, infeffœ Urbes & occupât a; fciunt fecula innocentes
"' ' - Polonais & nibil minus quant Suecorum arma méditantes, fidentefque ftantibus
adhuc Inducih pro Livonia Jiabilitis in Anna 1617, &? i6zi. nultius culpœ
confcios, infuper molem bclli Suetici apud memoratum Divœ mentor ia Sigifmun-
durn III. Régent Poloniœ deprecantes , inopinatâ hoftili invafione à Guftavo Adol-
fho prias in Livoniâ , demiim in PruJJiâ , turbatos , e 0 ipfo tempore , quô Poloni
contra immanifiimiim fui & Chrijîiani Nommis bofiem ad Cbocimum cr tient 0 prœ-
lio dccertabant.
Manet , manfuraque efl in animis £5? memoria hominum attentata per Car ohm
Gaflavum Rcgent Sueciœ , abrupt is viginti-fexcnnahbus Induais, non attenta Pa-
ce Ifreftpbalicà Poloniam contprebendente , .invajio tanto atrocior, quanta fœpilis
gcntinatâ perfidiâ , jufto Orbis jtidicio , uti [me ullâ jujià & légitima caufa pofi
remotos à Sceptro Suctico , & jant extorres fatlos legitintos Principes aliéna in
Orbe vivent es 1 improbata fuit. Hoc demùm fupererat, ut non contentus erepttt
Regno Sueciœ, exhauflis latè Provinciis Polonis, fpoliatis per licentiam & rapi-
?tam militunt Ditionibus £5? Terris Regni hujus, fufo prodige innocenti fanguine ,
tumidâ fpe univtrfam devoraret Poloniam: mandatant protunc belli calamitati-
bus , & velut univerfali diluvio fuperfufis armis Mofchorum , Kofacorum , per-
fidi Tranfylvani , 6? quod ufpiam ex vicino circumfitarum Gentium conjurato odiot
in perniciem Poloniœ confpir avérât. Et certè in ultimum prœcipitajfet interituntt
•nifi Divina adftitiffet proteclio , £5? propinquo mentis Poloniœ commota periculo
*vicina Auftria (quœ Cœlunt pietate, orbem Germanicum Imperio pojjidet ) collap-
fas res Polonas, fubmijjb judo numéro Exercitâs, refeciffet^ £5? illum torrent em
effufœ potentiœ Sueticœ opportuna rébus Poloniœ Danica diverfio per Magnant-
mum Principem Fridericum III. Darnœ & Norvegiœ Regem , ex vt ïnitœ Colli-
gationis avertifjet , virefque Suecorum didraxiffet . Res fané miferanda £ï? ipfis
Barbaris videbatur , movitque déplorât a illa Regni Poloniœ conditio Machometum
Geremn Hanunt TartarorumCrimenfium, ut non fine gémit u quifpiam fuper ad-
■vocata ab ipfo^ in il là fupremâ ne ce (fit ate, per Polonos auxiliai protulerit: Quqs
malt Chriftiani oppugnabant , bos boni infidèles defenderent .
Sed bœc omnia jam prœterlapfa , illorum temporum loquuntur Annales , nova
ac prœfens calamitas trudit antiquœ tnemoriam , £5? e 0 grandior injuriarum atroci-
tas ex fequentibus refait at amùs; qnandb pofi fiabilïtam operofà Chrifiianiffimi
Régis Galliarum Médiat ione , Pacem Olivenfète, &? tanto Reipublicœ cum dif-
fendio in favorem ftabilis Amicitiœ conclufam^ fœdifraga femper £5? fufpecla Sue-
corum amicitia, fréquent ati bolides atlas conatus , rapt a quies populis^ perlent a-
3a infidiofa molimina , £5? graves macbinationes ven'mnt in lacent , ac res tranfac-
tas velut in fpeculo eventus reprœfentat : ut in aperto fit Sacrant Regiam Majef-
tatem Poloniœ ^ que m jufiits in bofiem fat dolor, quent Ultorem & AJfcrtorem
fublica expofeit vindicîa, fummœ innltï jufiitiœ, atque ttupero armorum fuorum
in Livonia tepentino progreffn, contra Aggre (fores Suecos, Ruptores Pacis per-
petuœ, jufiè & .légitimé procefjîfje. Non jam ringatur ittvidid, a ut tetricà Ma-
•* Senfi- kvdoram impreffione aliorum * inducat fiuporent; & , fi quœ adverfa fn.guutur ,
-bus. Jp.irgat in vulgus: Nemo enim potefi* nifi cognitâ caufâ, Jus &? injuriant difeer-
nerc, quod fi quifpiam jufi as necefj'arii belli rattones maturô judicio expendat , fa-
/jlè cognofcet) nullam partem jufiitiœ ab hoc infiituto Siicrœ Ragiœ Majefiatis
alie-
ET RESOLUTIONS D'ETAT. 71
aliénant ep, me tantum fpei in~ armis Sacrant Regiam Majeftatem repyfuiffe, 1700.
ut mente exciderit œquitas caufœ ; quinïmh, cum ex Paclis Olivenfibus flepius g.
Su fris violât «, & illa hoftili in Marchiam Braudeburgenfem , contra eadem
Patla Olivcnfia {quœ Sereniffimum Eletlorem pariter complectuntur ) in Anno
1 ç-jr. facla irruptione , penitus labefaftatis , nullttm Reipubliu prœfidium vide-
rit: plane confidere Sacrant Regiam Majeftatem Divinae Clémentine , quodjuf-
tam de bofte repetet ultionem & bis, qui oderunt Pacem, retrtbuet : à quo Jlat
Jus, abeoDEUS.
Porrà , ut omnia Suetica attentat a contra memorata Patla Olivenfia, toti
Mundo, & praeprimis , Gêneraient Guarrantiam fuftinentibus Pri,:cipibus, &*
ipfi Reipublicae Polonae, pro pleniori rcrum notitiâ, tantoque major i in proxime
futur is Comitïts belli profequendi, cura & zelo, pateant; placet feriem horuni
omnium exprimere: & inprimis juxta Tabulas Perpetuae Paris, Articulofque in
Inftrumento- Olivenfi poftos , annotare.
Pax Olivenfts, prout illo tempore coaluit (qui undique preffi Poloni, & longâ
à diverfis Hoflibus armorum tempe flate jatlati & quaffati, ab ulteriori belli fe-
nndi onere abborrebant, recolligendifque viribus fuis aliquod vovebant refpirium)
im hôc ur.ô furrexit fundamento, ut •vera finceraque effet amicitia, prifeâ Polo-
nâ fide ci? candore, poft tôt damna & caedes, funditufque devajlatum Reguunr
fuum , nibil amplius exigent e , uti edocet.
I. Çlt Pas Univerfalis 6c perpétua , 6c vera fîneeraque Amicitia inter Se-
^ reniflîmum 6c Potentiffimum Principem ac Dominum, Dominum
Joannem Casimirum Regem Pôlonia.-, Magnum Ducem Lithuaniae 6cc.
Sec. ejufque Regix Majeftatis Succeflores, ac Pofteros Reges Polonia?, Ma-
gnos 'Duces Lithuanix, atque fubje&as illis ditiones 6c Provincias, atque ejuf-
dem Majeftatis 6c Regni Polonix Confœderatos. Imprimis Sereniffimum 6c
Potentiflîmum Principem ac Dominum, Dominum Leopoldum Eleclum
Romanorum Imper at or em femper Auguftum, Germanix, Hungarix, Bohe-
miàs, Dalmatix, Croatie, Schlavonix Regem, Archiducem Auftrix 6cc.
6Cc. 6cc, ejufque Majeftatis Hxredes ac Succeflores, Provincias ac Ditio-
nes, intra, vel extra Imperium Romanum fitas; 6c Sereniffimum Principem
ac Dominum, Dominum Friderictjm Wiliielmum Marchionem Bran-
deburgenfem, S. R. I. Principem Eleclorem 6c Archi-Camerarium, Magde-
burgi,. Pruffix 6cc. 6cc. 6cc. Ducem, ejufque Serenitatis Hxredes ac Succef-
fores, Provincias ac Ditiones, intra, vel extra Imperium Romanum fitas,
abuna: Atque Sereniffimum 6c Potentiffimum Principem, ac Dominum,
Dominum Carolum Suecorum, Gottorum 6c Vandalorum Regem , Ma-
gnum Principem Finlandix 6cc. 6cc. 6cc. ejufque Majeftatis Succeflores ac
Pofteros Reges Suecorum , Regnumque Suecix , atque fub jeclas illi , intra,
vel extra Imperium Ditiones ac Provincias ab altéra Parte ; ita, ut altéra
Pars alteri pofthac nihil hoftilitatis inimicitix,.clàm autpalàm, directe vel
indirecte inférât,, vel per fuos, aut per alios infenï faciat, nec alterius hofti-
bus auxilia quoeunque nomine prxftet, nec cum alterius hoftibus Fcedera
huic Paci contraria ineat, nec quidquam in , alterius Status 6c fecuritatis di-
minutionem per le vel per alios moliatur, aut tentet, vel tentare faciat, fed
titra-
7* MEMOIRES, NEGOTUTIONS, TRAITEZ,
i"30- utraque Pars akerius utilitatem, honorem , ac commodum promoveat, &
*" ■ ■ - fidatn invicem vicinitatem, Paccm & amicitiam ferjo colat ac lervet. Pacti
vero & Fœdcra omnia, quae Partes pacifcentes inter fe, vel cum aliis Princi-
pibus ac Statibus utrinque fancita habent, quô ad omnia fua Punéba, Claulù-
las ., & Articulos intégra , & in pleno robore fuo permaneant , ita tamen ,
ut per ea prxfens traniactio Pacis nullum pnejudicium patiat.ur.
NOndum vulnera obduxit cicatrix necdum unius Anni elapfum fpstium ab a cl a
conclu/a Pacis , £s? dum recens reverentia PacJorum & fanftitas Fœderum
obverfabatur, jam immemor pramifforum Suecia , quavis confervanda Pacis an-
tidota in toxicum convertit; quando infeflum libéra Polonorum Regum Eleclioni,
in everfwnem Status & Legum Cardinalium , per Légation fuum Comitem Todt ,
certum compilavit Fœdus, & de faclv in Aimo 1661. fidem obftrinxit, authora-
turos Suecos duodecim Millium Exercitum , ad afferendam , & opprimendam ar-
mis libérant in Polonia Eleclionem. Quis crederet unquam Suecos , projeclâ re-
centium Fœderum religione, talia prafumpfiffe j ut contra Prarogativam libéra
Gentis Palona , in hoc Libertatis fajligio conflit ut a , impio & fœdifrago au fit
con/piraverint , atque in debellatis animis Abfoluti Sceptri potentiam fundare vo-
luerint ? Hune primum fincera ac ficla amicitia produxit Suecia fruclum , quent
fur or, odium ($ invidia procudit, aefi parum fuiffet vibrato ferra, vifeera Po-
lonia fer ut at a , cadibus omnia profanât a , Domus Nobilium , &? vitâ cariores
PEI Immorialis £5? SanSlorum Aras exfpoliatas fuifje ; nifi Ma quoque principa-
lis £5? maxima ab omni avo coava Polonorum Libertas , vere Pupilla , DEUM
ipfum Tutorem habens , à Suecis fubrueretur , & proculcato Nobilitatis Jure ac
décore , liberis cervicibus grave fervitutis jugum imponeretur : Accipe Pofteri-
tas", quod poft tua fiecula narres! Hac erant molimïna Suecorum, bac rota
magnarum cogitât ionum , quô fuô facinore fatis oftenderant , quomodb erga libtr-
rimum ab omni avo Polonia Regnum propenderent. Erupit rurfus celât um virus
feclore , & depofitâ Jimulata Amicitia larvâ , extrema praefumpfit Suecorum
rnalignitas , dum poft intentât a pluries Illuftrimo Duci Curlandiae & Semigalliae
Vafallo Sacrae Regiae Majeflatis £5? Reipublicae pericula , Mata damna intole-
rabilia , graves angarizationes £s? oppreffoncs ( rcfpeclu quarum repetit ae fupplices
auerimoniae ad Thronum Antccefforum Sacrae Regiae Majeflatis deferebaatur )
eb demunt proceffit , ut fublato omni Patlorum Olivenfitum refpecîu, hoftili mo-
do , armât â clafje, milite £5? tor mentis bellicis inflruclâ , Portum & Lit tara Du-
cat us Curlandiae {qui efi haer évitas Reipublicae ) violenter invaferit , £5? nullo fa-
cinorum fuorum taïïa rubore , Naves Curlandicas cum enormi damno Illuftriffimi
Ducis, (^ longé gràviori praejudicio Reipublicae inter ceperit , & difracld pro-
tanc Polonia bello T'urcicoi ex vi Sacri Fœderis, impuni Curlandiam infefiave-
rit , liberum ufum Maris Balthici, ad fupremum Reipublicae Domwiuw, &
jf us Majeflatis, pari cum aliis Vicinis Jure fpe étante m negaverit, eâdemque vio-
kntiâ\ Naves Nobilium, latrocinium maris pro gloria habendo, plurimis vicibus
rapuerit , £5? tanquàm praedam ac fpolium abflulerit. £>hio fuo tiefario progrelfu,
palàm £s? directe hoftilitatem contra Rcmpublicam attentavit, Pacemque Perpé-
tuant OUvenfem violavit. Indigna, Dii boni/ & quae Cœlo tefte fièrent ; &
^•.'.as Poflerorum memoriac reïtnauerentur ' Super gravem Mum cafum fenfibili
motus
ET RESOLUTIONS D'ETAT. 75
motus alteratione Sereniffimur Joannes III. Rex Polonite, compellavit eo nomi- 1700.
ne SereniJJimum Rcgem Sucette , & indignitatem rei , manifeftamque rwturam •
Paclorum exprobravit; fed rndla tune à Rege Suecite data fatisfaclia, viultomi-
yùis naves reftitûta , £î? Polonis bello Ottomanico implicatis, queri tummagis in-~
juriant, quàm ulcifei, 6? w» »* réprimera, illa tempora permit tebant \ g)uis
autan non concedet illam aggrcffivnem apertam fuijfe hoflilitatem ! IJoftcs enim
non folhm œjlimàntar , qui jam navali aut terreftri prœlio pugnam incifiuftt^ fed
pro talibus habendi , §■»*' machinas admovent Portubus aut mteniis. 6)uis non ;vi-
det hoc unum Sueciam fentpeï intentiffe, quod Majores ejus tôt jam vnhentibus
an, ùs pêrtentabant , ut Balthicum Mare fui Juris faccret ? Folvebat hœc omni»
Guftavus Adolphus , agit abant pof cri ejus, & jam fingu.is annis armât am claf-
fini ad littora Curîandia tranjrntttebant, non fine h or r or e & évident i diferimine
totius Curlandits 13 SemigaWte , prafertim à tam periculofo vicino , qui liberta-
tem dominandi, & late regnandi cupiditatem omni Juri femper antepofuit : Nec
facile elt pacatam degere vitam, qui violât fadis communia Fcedera Paris,
Sequitur nunc
IL ÇIt utrinque perpétua oblivio & Amneftia eorum omnium, quœ quo-
i3 cunque modo locoque, ac quacunque Pacifcentium Parte haétenus
hoftiliter fa£ta funt, ita ut nec eorum, nec ullius alterius rei caufà vel prre-
textu, ulla pars alteri pofthac quidquam hoftilitatis aut inimicitia;, (pecie
Juris aut via facti, inférât, aut per fuos, aliofve inferri faciat. Hâc Gene-
rali Amneftiâ gaudeant omnes & finguli, cujufcunquc Status, Conditionis
ôc Religionis ruerint, ut & omnes Communitates, quse ab utrinque Partes
hoftiles iecutte funt, aut in hoflilem porTeffioncm devencrunt, nec ullis hoc
bellum prajudicio & noxas fit , iuis junbus Privilegiis ac Confuetudinibus
Generalibus , tam in Ecclefiafticis, quàm in Civilibus Proranifvè, quibus an-
te hoc bellum gavifi funt, fed iis in totum fruantur fecundùm Leges Re-
gni &c.
Q Vanta damna fub tempus Sueticte Invaftonis perpeffa fuerit Polonia , nullo
unquam pretio œftimanda; toti palàm confiât Orbi: ë)uœ enim Provincite?
quts Regiones crant? nijï cruentte , expilatte, (3 devaftatte : cum Gladiatores to-
to Orbe collecli, cadibus 13 incendiis ubique grajjando , cuncla ad fumrnam foli-
îudinem redegijjent, ut tàm ingentes ruina & détriment a fatius defleri, quàm
compenfari pot uiJJ'ent -, in pignus nihilominus duraturte Aniichu? data funt perpé-
tua oblïvioni, 13 œi'itern* irfepulta Amneftiâ, hue fila exprejjis ver ht s pr<ecau~
ta indemnitate , ut omms Jurium , Libertatum &? Privileglorum pnerogativa,
etiam iis inviolata fnvaretur , qui in boHilem pnjjejfionem , cogente dura illa lem-
porum & Fatorum neccjfitate, devenerunt : Non poterant enim Livones Indigents r
Regni, in abfolutam tradi (crvitutem, qui cum anteaclis fœculis pulchrà Lilerta-
te vigerent , tum circa [pontaneum ad Kempublicam Polonam recejjum in Anno
15*61, Dipomate Sigifmundi Augufti Régis, omnes Immunit at es , {3 Privilé-
gia, ac infeparabilem unionem & confolidationem cum Corpute Rcgni & Magns
jDucatus Litbuauiee frmatam 13 ajfecuratam acccpcrunt , (3 injuper Sacramchto
l'ont. I. K Jura-
74 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ ,
1700. Juramenti per pracfatum Divum Sigifmundum Auguftum praejîiti , praerogatU
■ vam Jurium fuorum inviolabilitcr flabilitam habuerunt : prout juramentum ejuf-
dem Régis Sigifntundi Augufli, Ordini Equefiri Ducat ûs Livoniae p-ot une fo-
ie unit cr fa du m , edifferit de ténor e tali : Ego Sigismundus Augustus
DEI Gratta Rex Polonise , Magnus Dux Lithuâniae , Rufllte, Pruflîse,
Mafbvise , Samogkias , Livonia:que, Dominus & Hxres, juro, fpondeo,
ôc promitto, ad hsec Sariéta DEI Evangclia; quod omnia Jura, Liberta-
tes, Privilégia, Immunitates Provincial Livoniae, Ecclefîafticas & Secula-
res , Eccleiiis quoque 6c Spirituali Statui , Archi-Epifcopo , Epifcopis,
Principibus , Magiftris, Capitulis, Commcndatoribus , Advocatis, Nobi-
libus, Vafallis, Civibus, Incolis, & quibuflibet Perlbnis, cujufcunque Sta-
tus ac Conditionis exiltcntibus , per Imperatores Romanos, alios quofeun-
que Reges, Duces, Principes, Ordinis Teutonici Magiftros, 6c alios legi-
timos Magillratus illi Provincix & Statibus conceflas, manutenebo, ferva-
bo, cuitodiam, & attendam in omnibus Conditionibus atque Pundtis. Om-
nia illicite ab eâdem Provinciâ alienata, aut per hos belli tumultus Mofcho-
rum avulfa, pro pofle meo 6c conjun&arum Provinciarum mearum, ad pro--
prietatem ejufdem Provinciâ; armis five Paftionibus recuperabo, aggregabo.
Terminos ejufdem Provincix non minuam, fêd pro pofle meo, diminuta 6c
in poteltatem hoftium redadta recuperabo , defendam , dilatabo : fie me
DEUS adjuvet, 6c bxc Sanclra DEI Evangelia.
In hoc fundamento non folum Originaîis Diplomatis & Jurisjurandi Sacra-
tnenti, fed & fibfecutaram Conflit 'utionunt in Comitiis Regni Gêner alibus , prae-
fertim 1 569, firmatis fuis Juribas, Liber tatibus ci? Privilegiis , fat abunde
Provinciâ Livonica provifa fuit , ci? eut avulfa ex vi Juramenti praetacli , ci?
facrofantlae fponfonis reftitui ci? aggregari debebant , nequaquam ipfa alienari ,
aut avelli à Cor pore Reipubhcae licite pot ait : cum Par in Parem in libéra Re-
publica ci? aquali Statu , nullam babcat poteftatem , ne c tantum v.llis CommiJJïo-
nibus à Republica concefjtm fuiffet àlienanài Provincial , quœ Juris Publia ef-
feni : imo fondamentales Rfgni id fieri vêtent prohibe ant que Leges^ prœcipuè ve-
rb Conflitutio 1 646 , pofi redditum T'rubecenje Territorium Magno Mofchurum
Duci , Lcge perpétua cavit , ne in poflerum taies alienationes fièrent , quae ci?
paritati Status Libcrrimae Genîis , ci? Capitulationi Paclorum Conventorum , tôt
Regum Poloniae , de recuperandis non alienandis Provinciis è diametro repugna-
rent, tant praeprimis Pars ipfa., de qua alienanda agitur^ confenfim fuum prae-
bere teneretur. Plis omnibus non obflantibus, Livonia, quae neque dari , neque
aecipi, faîvà Republica , poterat , in plénum Dominium Sueciae tradita ci? refi-
gnata: cum ea tamen jurium 6? Privilcgiorum refrvatione , ut fupra in prae-
fato Articula exprêffum cfl. Hinc quhn injurium in Rempublicam ! quant Paclis
eonirarium , indutlum in illam Provinciam Defpoticum Regimen! dum triflem
fervitutem fub gravi jago gementes , ci? querimoniis fidera pulfantes déplorant
Livones : alii Bonis , Fort unis , ci? Honoribus mulblati, alii tnoti fuis fèdibust
dura tolérant exilia, alii rigidiffimis carceribus confiricTi, aut exqttifit.i carnifici-
rià lacerati extrema fubiêre fupplieia. Patiuntur perindè vint PaËla Olivenjta ,
«xcitaiur ïnter ancres jurât a fides Praedecejfmim Sacrae Regiae Majeflatis , nec
Manei
ET RESOLUÏIONS D'ETAT. yj-
' Mânes eorum conqv.iefcere pojfunt, inviolabilia Regum Diplomata, 13 ipfa Le- 1700.
ges Regni pejfumdata (3 violât a , ncqtte aliud Livonibus retiquum , quant tenere — —
Libertatem , aut mori ante fei-vitium..
Non ea Serenijfmi Joannis Cafimiri Régis Polonia inckmentia : qui &? hofli-
les Partes fe cutis, pcetias Rebellionis non tantum indulfit, fed 13 Jura intacla,
juxta prafcriptum Paclorum ', fervavit , & , quod omnem Juperat bonitatem, il-
luflre ad omnem venturam Pofteritatem dédit exemplum memoranda aquanimita-
tis ; ciim juxta Articulum III infra txpt\Jiim , fiblo amore Pacis , tam Regno
Hareditario Statue , quàm (3 Avitis Bonis cejfit (3 rcnuntiavit : qub firmius
Sueciam connecter et Polonia , perpet uamque inviolabuiter radicaret Pacem. Uti-
nam Suecis fimilis moderatio 13 abfiinentia alieni fuijfet , profetlo non tantum
bellorum ïerris omnibus geftum fui/et, neque plus hominum ferrum fc? arma,
guèm naturalis Fatorum conditio abfumfijfet,
III. ÇEreniffimus Se Potentifllmus Princeps ac Dominus , Dominus Joan-
iJ nés Casimirus Rex Polonias, pro fe ac Hœredibus, Pofteriique
fuis, amore Pacis, vigore hujus Inftrumenti Pacis, folenniter ex nunc Se in
perpetuum renuntiat omnibus pnetenfionibus in Regnum Sueciae, ac Ma-
gnum Principatum Finlandias, & alias ipfis fubjeétas Provincias, Regiones,
X)itiones, Civitates, Caftra & munimenta, five haec omnianuper, five ab
antiquo acquifita fint, neenon in Bona Avita in Regno Suecia: di&ifque Pro-
vinciis fita, in Regnum Succiœ diétafque Provincias & Bona, prsefentibûs &
futuris temporibus nihil quidquam prastenfurus.
ASt non intra hos terminos fubftitit aliéna appetens Suecorum aviditas; &
qu<e Régna ac Imperia ereptum ibat. Jam ipfam Regni Provinciam Livo-
nicam trans Dunam, Ù Partes cis Dunam fine feitu &? confenfiu Ordinum Livo-
nia , ut fupra indigitatum ejî , ita volentibus Fatis -, protunc eripuit Reipublica
& ferme extafit , licetfi nullum unquam legitimum folidumque Jus ad Livoniam
habuerit, in quo prima veftigia Antece (fores cjus, per hofiiles irruptioucs impreff'e-
runt, (3 demum intervenientibus hduciis, pojjeffioni per Jolarn ufurpaticnem infti-
terunt. Sed eh infelicitatii deventum erat , ut Ordines &? Subdili in Livonia
per Pabla Olivcnfia, obedientia vinculo, {$ fi délit atis Sacramento exfioiverentur :
attamen Ordines Livonia., à Jurarnentis Regum, Paclis Conventis (3 obligatio-
ns totius Reipublica, fiipuhta defer.fionis (3 infieparahlitatis, Rcgem 13 Rem-
publicam Polonam non exfiolverunt, hno adhuefir miter bar et Sacra Regia Ma-
jeftas 13 Refpullica nexu pr a fat arum obligationum ; & chm, magmtudtnt inju-
riarum, oppreffïonum , & gravaminum, prefibs & affliclos , fraclis Juribus,
' Privilégiai atque Immunitatibus fub illa dura tyrannide interire videaî ; quid
juftius ? quàm opprcjfos fu'olevare , (3 propriis Cnïbus viam pondère , Legibuf-
que Divinis £3 '-humants inharendo, qua injuftis Dominis ac Tyramiis fcelm (3
nef as agentibus , nequaquam pàrendum décernant , grave jugtim Concivium (3
quondam Ccnfratrum fiuorum armis excutere , £5? l'hrono Regni hujus (à quo il-
licità aliénations exciderant) Jure Pofiliminii refit ucre, reintegrare , & confoli-
darc? Beatas fore Refpublicas, in quibus âliorurri injurias fuas quifque exiiti-
mat. Obligatur ad bac Sacra Regia Majcflas ex cimfcientia (3 vïnculo Jura-
K 1 menti)
75 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
1700. menti, circa feliccm fuam inaugurât ionem folmniter praftiti , tenetur ad vindicias
— — violât or um Paclnrum, ub non fcrvatas Leges & Libertates Livonibust ne de/pe-
ratis auxiliis Liber ationis fua ( qtiod DEUS avertit ) alium quarante & inve-
ntant Protetlorem & Dvmi.Mtn^ cum infigni £5? irreparabili darn.io Reipublica^
& mctuendà Fatali confeqnentiâ : ne ex eodem ajfumpto Proteclore major quando-
que boftilitas confurgcre pojfit.
Elici ex eodem Articulo non minus potefl alia enormis lafio Pacis ptrpetua &
gravis Reipublica offenfio , pofl quant Suecia, non tant h m CommiJJtonem Dijlimi-
tationis . Livonia cum G&mmiffariis Reipublica , in (patio quatuor feptimanarum
in Paclis praferiptam protelavit , dijlulit , fJj tandem eïufit ; fed ultra prafatam
enormem avulftonem Livonia Septentrionalis , £5? terminas ufurpata fnb Induciis
pojjeffionis, nec deoccupatas certas Prœfe duras in Semigallia , Illuftrijjîmo Dtici
Curlandia, adhuc tria milliaria fundi Reipublica temerè& injuflijjïme ademit^atque
imminutis Regni terminis , pro fuo arbitrio , in fummum Reipublica contemptum ,
non requifitis neque- exfpeclatis CommiJJ'ariis Regni Polonia , limites determinavit ,
figna met alia pofuit , nuper ipfum Fovtalitium Duneniiinda t ex alia parte Duna
fluvii in folum Curlandicum tranftulit , & repofuil ; cuncla in opprobrium Notai-
nis Poloni , £5* couvul/ionem Paclorum dirigendo prout edocet /îrticulus
IV. ÇEreniflîmus Rex, & Status Ordinefque Re^ni Polonix Magnique
v3 Ducatus Lithuanix , à modo & in perpetuum cedunt vi hujus Pa-
cificationis Sereniflîmo Régi Suecix ejufque Succdlbribus Regibus Rcgno-
que Suecix omnem illam Livoniam trans-Dunanam , quam Suecia haétenus
per tempus Induciarum tenuit & pofledit, ut & Partes cis-Dunanas omnes,
& Infulam Runen in Mari fitam , quas per idem tempus Induciarum Suecia
tenuit & pofledit, neenon quodquid Juris Rcgibus & Reipubiicx Polonx in
Efthoniam & Ofoliarn haétenus ullo modo competere poterat. Atque hxc
quidem omnia & fingulâ cum omnibus fuis pertinentiis, Terreitribus & Ma-
îitimis, Urbibus, Arcibus, Propugnaculis, Bonis, & Proventibus, neenon
Juribus, Jurifdic"tionibus Regalibus & Superioritatibus tam in Ecclefiailicis,
quàm in Politicis , nullis penitus exceptis , in plénum Dominium & proprie-
tatem Regum Regrtique Suecia; transférant, Ordinefque & Subditos in illa
Livonia, ejufque recenfitis partibus, omni erga Regem & Rempublicam Po-
lonam obedientix vinculo & fidelitatis Sacramento exfolvunt, nihil unquam
in eos diélam Livoniam ejufque pertinentias poflhàc prxtenfuri; cis Dunam
autem Sereniflîmi RegesRegnumque Suecix, nonulteriùs, quàm hactjnus,
fines lux- pofleflîonis in Curlandia aut Semigallia promoveant, aut fervitutes
à fubditis Illuflriflîmi in Curlandia Ducis exigant , aut ullum jus ligandi,
aliudvè quodvis in Curlandia- aut Semigallia prétendant. Commiflàrii verô
ad declarandos ' & determinandos ab utrâque Parte fines abutrinque deputa-
buntur,. & Commiflîo hsèc intra quatuor ieptimanas, à fubfcripto Tractatu
inchoetur, &C intra duas expediatur &c.
ECce quàm evidenter Suctici contra Pacla progrejfûs enormitas ehcefcit ! nec
unquam illi voluntatem Regni Poloni a laccjjendi^ difccrpendi & lacer audi^
fed occafiomm defuij/è, in confejo cji. Majus verà vu' nus Reipublica , dedecus
buic
ET RESOLUTIONS D'ETAT. 77
huic Regno inflitlum, quandb pafi fanât am in Conitiis Generalibus 1690 erec- 1700,
tio;iem Portas £5? Civitatis Polo, ga in Ducœtit Samogitite , ad littora Maris '
Balthia , idque opcrà cert/e fiocutatis jingïihtnâ pérfiiiendam , quo minus ad ef-
feclum perduceretur , variis modis & comminatiombus impcdivit, (3 in aliéna
Regio- ac Dominïis partent fibi Imper u arrogivit, immifjtfqut Speculatoribus £5?
Architeclis militaribus, clandefiinè fit uni loci illius delineari fuit , non fine mani--
fefio ha fiilis animi indicio, & prœconceptà infidiarum contra Rempublicam medi--
tatione. Denique Naves Polongam covunea-ntes areftari & fiequejirari fecit, ne-
que priùs, dimifit , nifi fe fe ingeuti lytro redemijhit , qui bu s poflhac liber am na-
•vigat'w^em interclufit, pnefatamque focietatem Anglicanam, contimiis preffuris ,
molefiiis, mercimoniorum direptionibus , (3 ïmpcndmtibus periculis ac minis dif-
perjit , ad incitas redegit , & ad dejerendum opus illud tàm utile , & projicuum
toti Regno , \3 Mag:.o Ducatui Lithuaniœ compulit , & coègit , ac cum fummo
13 inœjïimabili damno abominabilem defolationem , loci illius tàm pulchre funda-
ti, caufavit.
lïœccitiè Paclorum , qua fantle coii 13 euflodiri debehant , obfervantia ? hcec-
c'we fida 13 fincera AmiàtiiS documenta ? talefnè frutlus perpetuae Pacis Oli~
venfist Procul haec à Polonis invidia £3 malignitas , qui pro fiabilienda inter
utrumque Regnutn optima confident ia , plura induljêre quam debuerunt , ficut ex-
plicat § F. in Artic.
V. § v. /^\Uo lavorem Commerciis Se Navigationi Sacra Regia Majeftas
V*£ Polonise conteltetur, ligna nautica in Domeines & Luferochrfc
exftructa confiitere permittit. De racione verô confervationis & manutentio-
nis eorundem convenietur à Suecis , cum lundi Dominis ; nullo inde Jure
aut pnetenfione Regni Suecia; in iundos diâx>s } aut Territorlum Pikinenfe
enafeente aur. encifcituro;
PRofeclo tôt hofiuia , tàm multas & magnae injuriae à-Suecia patratae, nifi-
dolorem Sacrae Regiae Majcftatis exacuifj'ent, (3 patient iam tôt annorum
[patio laffatam devici fient, non accéder et ad Decretorium Jlylttm, & vindicanda
haec damna ac praejudicia , & contemptum inclytae Geutis Polonae , cujus fib'u
tradita tutela , non ferait us. Quodfi qu'ici unquam adverfus Rcligionem Paclo-
rum emerftrit , non ficus, quàm fito proprio commovetur pcriculo; 13 omnem fe-
licitatem publicam , fiuam effe reputat. Tanto autem majori zeh (3 ardore fertur
Sacra Regia Afajeflas, quanto propihs intelligit omnia eoufque temporis per Sue-
cos impunè gefta (3 pertentata. Obtendit olim Carolus Gufiavus Rex Suecorum
faedifragae irruptioni in vificera Regni Poloniae certos prœtextus, in illo Com-
mento brevis 13 prœliminaris enumerationis CaufiiruM,Both\um Colontllum
cum militaribus Copiis Provincias & Ducatus Regni Polonix, ad infcilan-
dam armis Livoniam, connivente aut inftigante Rege Poloniic Vladillao IV.
pervafîfle; quod tamen ipfio fatente tantum abfuit , ut credi poffet. Allegavit
ftwilitcr, Krokovium Gciariani Exercitûs Duccm per Poloniam in Pomera-
niam traniiilTe, & rursùs improviso 6c irremediabiii tranlîru per Poloniam
rediiiTe, fe ieque diferimini fubouxiflë, quod à parle Polona in illo infperatù
eventu, minime arceri, aut averti potuity cum loca omnia (3 confinia pracjuiiii
K 3 auda-
78 MEMOIRES, NEGOTI ATIONS, TRAITEZ,
17OQ. nudata fuifent, neque Regem &? Rempublicam bac impojlura, acfi ultra concejjl
'■ tranfitùs &f reditûs, quem cafus dederat , ?nent aliter objecla gr avare potuit.
Quant longe praejlaî violentas £5? temerarius in Anno 1678 iranfitùs Gêner alis
Horn cum Exercitu Sueticoper Curlandias &? Samogiiiae Ducatus, contra Sere-
iiifjhnum Eleclorem Brandeburgictm , perpctuum Fœderaîum Regni Polon'ia, ab-
ruptis Partis Oliven/iùus, infcio & infalutato protunc Rege Poloniae, prœfump-
tiis &? effetluatusi quàm vertus ab omni œquitatis ratione abborret, tôt ingentia
damna , mtllis ordinatis rationibus itincrum , pcr militarem licentiam & extor-
fioncm intuliffe , cuntla rapinis ac vioïentiis pervia feciffe , ne c allant injuriatis
& quer niant ibus fatisfaclionem prafiitiffe^ prorsus bofiîliter cumfumma dépopu-
lation Regionunt perrupijfe, £s? gravem incujjtjje metum Provincialibus , undç
fuper agrorum vaftitatem , Colonorum ruinant , attritas opes Nobilitatis, & cau-
fatam folitudinem affliclorum lachryma perfonuêre.
Pudet re ferre tôt infultibus t§ prœjudkïis, & his indecoris , continua tenore
fluentibus aff éclatant Rempublicam. Sed quid hœc altum tuwens Suecia, & feliçi-
tatis fuœ modum ferre nefcia conjideraret ? qu£ nec Paclis Olivenfibus Aruculis
XL dijponentibus, grandia débita per Duces &f Officiarios Bcllicos lorunii &
Elbingae contracla , praefatis Civitatibus non tantum bonâ fide , prout conventum
erat, exfolvit, fed realem & effeclivam fatisfaclionem , per exquifita diverticu-
la & artificiofas adinventiones fuas elufit, Patlifque ipfis in Praefato Articula
infra exprejfo contravenit.
XI. T"\Ebita inter utriufque Partis Subditos Se Incolas, tùm etiam à Du-
l^J cibus & Officiariis belli ubicunque contracta, utrinque bonâ fldc
fokentur Sec.
JUfto défunt verba dolori fuper conflriiïam &? coarclatam Contmerciorum libcrta-
tem: ingentifcunt Incolae fub intolerabili novorum vecligalium onere, verèfan-
guifugis prejfuris, fpretà authoritate Paëlorum, quae Articula XV. diferte oblo-
quuntur.
XV. /"^Ommercia priftina fint libcra & non impedita, inter utrumque Re-
V^v gnum Polonias Magnumque Ducatum Lithuania;, êc Suecire, lub-
}e£tas illis Provincias , Subditos & Incolas , tam terra quam mari , & in ve-
teri ufu atque exercitio, quo fueiunt tempore Induciarum , conferventur.
Imprimis fit liberum Commerciorum exercitium , liberaque defluitatio îner-
cium per fluvium Dunam Sv Bulderaviam Subditis & Incolis Regni Polonne,
Magnique Ducatûs Lithuania:, & Polonicae Curlandiicque ac Semigallnv j
cum Subditis Incolifvè Livoniœ Suetiav: & vice veifà Subditis Incolifque
Regni Suecice & Livonix Sueticte, fit liber commerciorum ufus per eadem
flumina, cum Subditis Incoiiiquc Polonix , Lithuamx Polonicx & Curlan-
dix Semigalliceque : Teloniorum vero 5c veftigalium influmine Duna & Bul-
deraa, ut maritimorum in Livonia, eadem ratio, £c in iiidem tantùm locis
ab utraquc Parte in poittrùm fit, uti, &: ubi t m pore Induciarum, & ante
hoc ultimum bcilum fuit. Majoris quoque Polonix Incolx , cujufcunque
conditionis fint, five terra, five aquâ commercia i'ua cxerccntes, nullis no-
vis
ET RESOLUTIONS D'E T A T. 7P
vis Teloniis & gabellis Stetini onerabuntur. Civitas quoque Gedanenfis , 5c 1700.
alise Prulïïae Civitatesj inRegno Suecke ôc fubje&is Provinciis illi, gaudeant "' ," ■ '
eà libertate Commerciorum & vecïigalium , quâ gaviise funt ante noviffi-
mum bellum.
Nlbilominus non Fœdus fanclum , non metus infringendorum Pacîorum coniï.
nuit Suecos in Officio, quin t urgent es fitas cupiditates pcr difpendia rei Po~
lona expièrent , & gravijjïma tam fuper Curlandicas Mittavienfes, per f ] avilira
Bulderaa Rigam devetlas, quant £5? Mofchoviticas mer ce s, telonia flatucrint,
& ultra omnem juftitia rationem, crudekm impofuerint exatlionem , fummo Po-
lonii ■ oneri , qui tanquam ultimi confttmentcs, auclà pretià bac omnia fuftinerey
13 prcprià are eluere debent, (3 quod minime ferendum eft , mer ces fc? friment»
Palatinatuum Alba Ruffia , Magni Ducat us Lituanie Dunâ flumine Rigam. ve-
nientia , quotannis , miferandum in modum , pro libitu taxât a , novo génère De-
cimarum aggravât a , aliifque injuriis & extorfionibus , non Chrifiiano modo one-
rata , expert a quotannis illorum Palatinatuum Nobilil 'as , fenjit non fine amari-
tudine doloris ex lucro ceffanîe 13 damno émergente , pigebatque Nobilem Populum
dare tali modo tributa externo Principi , qua nunquam confueverat 13 tam contra
Pacis Leges opprimi , quàm ad extrema per illam tributariam impofitionem ener-
liari ac ad medullas evifcerari , dolendum prorsus 13 indignum quis dubitet ?
Accefjit ad cumulum malorum 13 prajudiciorum Reipublica folidaria monetu
Scbillingorum Riga in Anno 1667, in fummaquantitate cufa (3 confiât 'a , fal-
foque Polonia ftemmate fabricata, verè arugo Reipublica, qua totam infecit Li-
thuaniam, negotiationes , quibus Régna flore fcunt , afflixit, commercia cum vici-
nis difiraxit, i3 opes Regni , aurum & argentum vili pretià exbaufit : non alio
fine, quàm ut Rempublicam penitus exinaniret, utque aliquando fortiori s efca %
fieret infirmior.
Neque omittenda efi Pofla Suetica, non Patlis Olivenfibus conceffa, non ulli
authoritate Legnm fundata , temere (3 indebitè pcr Ducatus Curlandia & Sa-
mogitia difpofita, & in grave prajudicium Jurium Regalium £5? Reipublica :
nil taie Majores Nojlri vider unt , nil fimile in Exteris Gentibus praclicari con-
fiât , cum nullus Regum ac Principum in propriis Dominiis talia unquam permi-
ferit , in maximum fummi Imperii detrimentum.
His omnibus £j? fingulis expofitis , Cbriftiani Or bis efto judicium , quàm gravi-
ter £3? enbrmiter Corona Succia, tôt repetitis vicibus aternum Fœdtts Obvenfe
ruperit, fregerit, £5? de fatlb violaverit. Et jam pridem tanquam Aggrcfflr \3
InfracJor Pacis , beneficio eorundem Pacîorum exciderit , (3 tant gêner alem Guar-
rantiam Sacra Cafarea Majeftatis (3 Serenifiimi Ekcloris Brandeburgici in Ar-
tic. XXXV ' , quàm 13 perpétuant eviclionem in Artic. XXXVL ChriftianiJJîma
Galliarum Majeftatis, cujus ope ac fiudio Pax Olivenfis promût a, 13 ad optât uni
finetn per dut! a fuit, per fuprafcripta attentatafua laferit, 13 jufiam vïndiblani
incurrerit : prsut bac omnia u ter que Articulas plenius élucidât.
XXXV. /^\U6 firmior , flabilicr, & fecurior Pax hxc coalefcat, Se ab
V^ omni parte intemerata duret , promittunt fupra mcmoraric
Partes Pacilcentes omnes, tam Principales, quàm Fœderatce : le hanc tranf-
actio-
So MEMOIRES, NEGOCIATIONS, TRAITEZ,
j->oo. actionem & Pacem, omncfque ejus Articulos, Gapita, £c Claufulas, fanclrè
6c invioïabiliter fervare velle 6c debcrc: & ne in pofterùm violari queat, le
invicem ad Gencralem Guarrantiam , 6c eviclionem mutuam, ac defenfio-
ncm reciprocam , omni ex parte obitringunti Kifce quafri fieri potert, fie?
miffimè fpendentes, ut fi cqntingat uham Partem ab altéra, vel pluies à plii-
ribus, Terra vel Mari, bello contra hanc Pacificationem impeti , Aggrellbr
ipib facto, pro Infraftorc hujus Pacis ab omnibus habeatur, ejuldemque be-
neficio excidat, 6c tum altéra, reliquieque Pacifcentium Partes, Parti ..lsejGej
ad fummum intra duos Menfes à requifitione Partis kelje., eidemque commu-
nibus armis affi itère, 6c bellum tamdiu contra AggrerTorcm profequi, douce
Pax communi omnium Partium conljenfu reftituta r'uerit , inyieem tencantur.
XXXVI. /TU m autem pro rrmjori fecuritate hujus Pacificationis , tam Se-
K^j reniffimus ac Potentiffimus Rex 6c Refpublica Polonia:, quàm
Sereniffimus ac Potentiffimus Rex SuëcifÇ, ut 6c Sereniffimus Eiector Brari-
deburgicus, poftulârint, ut Sercnifïïmus & Potentiffimus Princcps ac Do-
minus, Dominus Ludovicus XIV. Galliamm 6c Navarrx Rex Chriltianif-
fimus, cujus ope ac ftudio inter pr^ememoratos Sereniffimos Reges , 6c Se-
reniffimum Electorem Brandeburgicum Pax promota, 5c mediatione ad op-
tatum finem perducta eit , executionis 6c oblervationis illius inter eofiem Fi'
.dejunor exifteret ; Sacra Regia Majeftas Chriftianiffima poftulationibus ac
"Votis illorum annuens., eodemque animo Pacis hujus perpetuitatem exop-
tans , quo eam procuravit : pro le ac Succeflbribus fuis Regibus Gallia; fpon-
det ac promittit, idque per Illultriffimum 6c Excellentiflimum Dominum,
Dominum Antonium de Lumbres Legatum fuum plenariis mandatis ad hanc
Guarrantiam cavendam, inltruétum: iè Executionem horum Paétorum , ec-
rtimque obfervationem , ac perpetuitatem inter eofdem lupra nominatos Prin-
cipes, omni meliori, quo fien poteit, modo, etiam armis, ubi amicabilia
média non procefferint , afferturam. Et fi quis eorum fub hac Fidejulfione
comprehenforum illa violàrit, arma virefque luas Parti ladas ad ejus requifi-
tionem juncturam. Quod ut firmiùs omnibus conllet, promittit diétus Do-
minus Legatus Gallicus, fe Ratificationem Régis fui luper hanc Guarran-
tiam, eodem tempore, quo ratihabitiones Pacis commutabuntur, extraditu-
rum. Integrum quoque erit Pacifcentibus omnibus, eandem Chriitianiffimi
Régis Guarrantiam 6c FidejuffionL'm fufeipere, 6c alios quoque in tempore
Ratihabitionis ad idem Offich genus invitarc, 6c denominare Principes ac
Poteitatcs.
DlJJÏmuhre equidem hanc manifeflam Paftorum rupturam , £5? totics intenta'
tam hoflilitatcm prateritis temporibus debuit Refpublica , pariim Dumcfli-
cis malts ci? turbis fejff'a (à1 involqta, part im flagrante bellu Turcico 5iftentas do-
uée exoptata affulgeret occaflp ruptorum Patlorum débitas repetere pœnas , &?
hanc iniquitatem , ac tnflolentem riirhiœ potentice ferociam coër'cere, auxiliumque
Generalis Guarrantiœ ad reprimeudum , £5? intra termina^ modeftitc redigendum
Aggrefl'orem invocare. Metuendtm enim erat , ne hoftis fragili & flux -a fuie ,
fuerimonias Noflras & uîtionem anteverteret , aut occaflonem irruendi tu vifeera
Regni ,
ET RESOLUTIONS D'ETAT. 81
Regni, perinde fument : quo magis compertum eft ex allegatis fuperius exemplis , 1700.
eundem boftem tanto l'erratum Pélagique /patio disjunclum , contra Pacla £s* ■
Inducias in Poloniam tôt les irrupifj'e, cjf circa mcmoratas prœftigias ac inania
Caufarum ultimi fui belli Sue t ici, ipfam pracufloditionem Juris Reipublica ad
Infulam OEfeliam, Suecis à Dama, vigore Patlorum Bromfebroenfium ceffat,
ex juftis rat ion: bus per Camerarium Bergk Régis Vladiflai faclam, pro futih pra-
textu obtendijfe. Recondere itaque dolorem, fc? injurias fuas tantifper fubticere
fecurius duxit Refpublica , quàm manifeftari vulnera , qua pro tune neque palpa-
ri , neque curari , aut medelam recipere à feroei hofle poterant : multominus Evic-
tores fuos & Fidejujfores , vigore Generalis Guarrantia, contra Aggreffbrem &
T'urbatorem Pacis implorare, aut arma & vires eorum follicitare fibi iicuit , cum
contra Orientis Tyrannum non fine magno rerum fuarum periciilo res gereretur ,
0? bella bellis accumulare minus confultum effet.
At nondim à gravi & diffuili bello Turcico, non ita pridem féliciter détermi-
nai'0, rejpiravit Refpublica, nondïim dulces Pacis delicias primis labris degufta-
vit , & jam rerum novarum cupidine & odio prafentium, novum turbidi Confil-
U facinus £5? atrox intentatum auja Suecia ; dum in ait a Pace quiefeente Orbe
Chrifliano ( cum fe omni periculo defunclos Fœderati ci? Viciai crederent) gravi f-
fimas in Ducat u Holfatia , per promotam fuo motu & indue! ione ereclionem mu-
nimentorum, non tuendi , fed nocendi causa, ingentes excitavit turbas , & contra
Sereniflflmum Regem Dama £î? Norvegia , Pcrpetuum Colligatum Sacra Regiœ
Mujeftatis & Reipublica Polona , in deteftandam , nec jam amplius tolerandam
erupit audaciam. Exhorruit vicinum fatum Sacra Regia Majeftas , pravidens ,
& altius fufpiaens , h<ec Suecorum meditamenta , tum ultro citroque irritât am
Pacem, convulfa Pacla DanoSuetica, Pace Olivenft fanclè comprehenfa & fta-
bilita , tanto fenfbiliîis commota fuit , quantb propius ex illa altïffima Orbis
Chriftiani fpecula , cui Polonorum Regum ïhronus fuperimpofitus , obortam ab
Aquilone tempe flatem conftderat, & quorfum res if a vergeret , fublimi expendit
cognât ione : Pofquam enim bellico apparat u perflrepit Septentrio , onerantur claf-
fibus maria , & fi quid ufpiam eft virium , in extremum Confœderati Régis &
Rcgni Dania armari ccepit excidium. Sjhùs hac Suecorum deftinata, periculi
pleua non adverteret ? qui ab omni hominum {5? ge forum memoria , nihil aliud
egerunt, quàm ut everfôRcgno Dania & Norvegia, opprefsà Poloniâ , abfolu-
tum maris Balthicï& Monarchie Stptentrionaiis Domimum, & integram Com-
merciorum poieflalem fbi firmarent , quo magis Orbi Chrifliano pradominari
pof'ent. Hinc Manififta Fœdcratorum à multis Saculis ab invicem Regmrum ,
ad belium gerendum pr avocat io, & ad mutuam defenftonem fuprema impofita ne-
ce fit as, ex vi Perpétua Colligationis Pattorum 1564, & 1 f<î J" , podireclè ad-
verihs Sueciam inter Coronas Polonia & Dama in per pet uum bùtorum, tum &
poserions Confuederationis ck Aclu & data Haffnia die 1 S Meufts JulU Anna
Domini 16 fj inita, cujus ténor fequitur talis.
SErcniffimi & Potentiffimi Principis ac Domini, Domini Joannis Ca-
simir! Régis Polonia; , jyiagni Ducis Lithuanix, Ruffiir, Pruflia-,
Mafovia:, Samogitix, Livoni^, Smoleniciae, Czcrnicchiovixquei neenon
Suecorum, Gottorum, Vandaîorumque Régis Hirrcditarii , Domini nui
Tom. I. L ( lemen-
1700.
8i MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
Clementiffimi, Rcgnique Polonix Intcrnuntius Extraordinarius Ego infra-
fcriptus Subdapifer GracôviéhnV, Intimufque Rcgix Camerx Familiaris Tb-
bias MorfztintHS notum tellatumque facio. Quod iîcuti à mukis retib annis,
Regibus Regnoque Danix, pervetuita & intimior interceffit amicitia, atquc
eidcm non folùm corroborandx , fed & arctiori Focdcmm ncxu adaugendx
commodum acciderit, quod M.mdato & Nominc Sacras Regix Majcitatis
Polonix, in Auîa Screnilfimi & Potentiffimi Principis ac Domini, Domini
Fridertci III. Danix, Norvcgix, Vandalorum Gortorumque Régis,
Ducis Slefvici, Holfatix, Stormarix, Dithmaiiîxque, Comitis in Oldem-
burg 6c Delmenhorft, fufficicnti poteftate initruclrus exifiens, promptulquc
tranfîgendis , qux fequuntur negotiis me obtulerim : Ita quoque di£ta Sacra
Regia Majeftas Dania; , infrafcriptis Deputatis Commiifuiis Generofis D.
D. Regni Danix Senatoribus , dicri Regni Aulxque Magiftro 6c Supremo
Thefaurario Kallundbergi ac Movx Prxfîdibus, Joachimo Gerfiorff in Tund-
bykolm Equiti, & Pctro Reedtz in Pygeihaip, pari & fufficienti poteftate
numitis, clcmentiiTimè injunxit, ut perpenfis 6c confideratis, unàiis, qux
pro roboranda amiciria mutua, & pro utriuique Status falute & incolumitate
prxfentis temporis , ac remm circumftantiis convenientiffima judicarentur,,
certi quid de iis firatueremus , atquc lub Articulis quibufdam mutui Fcederis
comprehenderemus. Qyamobrem de infrafcriptis negotiis poil fedulam eo-
riim deliberationem, fequenti ratione convenimus. I. Eric inter Regem Re-
gnumque Polonix ab una, & Regem Rcgnumque Danix 6c Norvegix ab
altéra parte, vera 6c fincera Pax 6c Amicitia, ita ut neutra Pais alteri in-
commodum ullum , aut detrimentum , neeperfe, nec per alios inferat, aut
inferri faciat, fed femet invicem bonâ fide 6c candide affcâu complectantur,.
& alter alterius commoda promoveât, damna verb & detrimenta , quantum
in ipia erit, impediat, & avertat. II. Utriuique partis Subditi 6c Vaiàlli
eandem Pacera & Amicitiam inter fe colent, 6c ubique locorum , ubi fibi
obviam ficti erunt, tàm per terrain, quàm per marc, non modo ab omni
Ixfionc 6t injuria invicem abitinebunt , fed Se omnem bcnevolentiam , 6c
arnica officia,, alter alteri mutuo exhibebunt. I1I-. Utriufque Régis Subdi-
tis liberum erit, alterius Provincias, Emporia, Portus flumina cum merci-
bus fuis tàm terra quàm mari adiré- fine ullo impedimento,. ubique verfaii 6c
negotiari, dummodo confucta vectigalia fotvant: ita tamen, ne Leges 6c
Statuta Provinciarum , quibus alise Nationcs omnes fubjacent, ullo modo
violentur 6c infringantur, prxfertim quod attinct Influas 6c Portus quoldam
ad Regnum Norvegix fpectantes, in quibus ne ipfis Subditis Regiis negotia-
ri licet abique fpeciali Régis indulto 6c privilegio. Qr.andoquidem Univerli >
Tcrrarum Orbi perfpcctum fit, Suecorum molimina 6c conatus omnes cb di-
rigi, ut fines Imperii in Vicinorum detrimentum ac opprciîîonem dilatent,
Dominiumque Maris Balthici fibi folis vindicent, qux ex recenti in Regnum
Polonia:, 6c prxfenti in Regnum Danix facto hoitili impetu fitti.s liquct >
capropter SerenifSmus Rex Polonix, 6c Sereniffimus Rex Danix ac Norvc-
giiv, magnoperë dclîderantes incommodis jnalifquè, qux indè exoriri pof-
funt, occurrere, convenit, ut inter fumiiè memoratos Reges iincerum èc
inviolabile ianciretur Fcedus hec modo. IV. Eric inter Regem Regnumquc
Polo-
ET RESOLUTIONS D'ETAT. 85
Polonis Sec, & Regem Rcgnumque Daniae &c. arnica Se ftabilis confœde- 1700-
ratio adversùs Sueçîïe Regem, per Provincias Regni fui finitimas terra mari-
que bello perfequendum. V. Ad Confœderationem hanc Reges, Principes,
Refpublicœ ac Civitates, quorum omnium quidquam interenV, quique honef-
tis conditionibus patent, non folùm admittentur, fed 8: invitabuntur, nomi-
natim Sacra Reg;a Majeftas Hungariaî , Magnus Dux Mofchovias , Ordincs
Générales Fœdèrati Belgii , & Sereniiïimus Eleâror Brandeburgicas. VI.
Neutri Parti lit liberum, trium annorum, poft Fcederis hujus confirma tio-
nem, Spatio, Pacern, Inducias, five armiftitium aliquod tra&are, & multo
minus cerrludere cum Suecis, infeio vel non inclufo altero, i\ iifclddi ac
comprehendi velit ac defideret. VII. Fida & fincera Amicitia, mutuaque
focietas inter fummè memoratos Reges futura eft. Infuperque, proviribus,
& quantum fieiï poterit, altéra alterius partis commodo, incolumitati, &
fecuritati inferviet, confuletque: quemadmodùm etiam in contrarium, Re-
gem Suecise utriufque hoftem , damnoque ac detrimento quoeunque afhcient,
8c omnibus Copiis viribufque aggredientur. VIII. In poiteram quicunque
invadetur à Suecis, ab alio fuccurratur, ita, ut fi Pax vel Inducia; femel
concludantur, & Rex Regnumque Suecias, ex quoeunque prastextu, direc-
te vel indirecte aggredietur Reges & Régna Polonise, 6c Daniaz, in Provin-
ces, Terris, 6c lbcis eorundem, ut Rex 6c Regnum injuria affeclrum in bel-
lum defeendat : obligabitur etiam Rex 6c Regnum Confcederatum ad aper-
tum bellum defeendere contra Suecos, neque Pacem poftea traclrare, vel
concludere, nifi ex communi confenfu. IX. Qyodfi contingat, ut alter-
utrum Regnorum Poloniaz 6c Danise cum fuis Provinciis liberetur ab Exerci-
tu Suetico , totaaque vires eiufdem hoftis transferantur contra unum ex prse-
di£tis Regnis , obligabitur alterum Regnum Confcederatum ad ferendas fup-
petias, qua2 ex parte Poloniîe, per Exercitum terreftrem, ex parte verb Da-
niœ , per Claflèm Maritimam armatam , prreftabuntur. X. Cum vei ô Rex
Suecias violatà inter Coronas Septentrionales, nuper fa&â, £<: utrinque fo-
lenniter confirmatâ Pace Exercitu fuo, praeter omnem exfpeftationem , in
Provinciam Seelandise irruperit, ejufdemque Metropolim ex omni aditu clau-
lèrit, Rex Poloniae competentibus 6c fatis idoneis Copiis, Régi Danias, fi-
ne mora auxilio venire obligabitur , cujus refpe&u , fimiliter Sereniffimus
Daniae Rex Portui Gedanenfi contra infeftam Suecorum aggreffionem , fi
qnando hase evenerit, clafie armata fuccurrere. XI. Tractatus hic, intra
duorum Menfium , ab hoc die numerandorum , fpatium, à Sacra Regia
Majeftate 6c Senatoribus Refidentibus Regni Poloniie ab una , 6c Sacra Re-
gia' Majeftate 8c Sénat oribus Regni Danias ab altéra parte approbabitur 8c
confirmabitur, eodemque tempore tradeturj 8c permutabitur utrinque prre-
diftus Traftatus. Et Sacra Regia Majeftas Senatufque Polonia: obligabun-
tur fpecificatas claufulas ejufdem, in proximis Comitiis Generalibus Regni à.
diâa Sacra Regia Majeftate Poloniie 8c omnibus Ordinibus Regni inlliper
confirmatum 6c approbatum fore. Dictus tamen Traétatus interea temporis ,
-ab utraque parte fideliter &c ex omni parte obfervabitur. In quorum omnium
evidentiam 8c robur , conferipta funt bina hujus Traétatûs 8c Fcederis
ejufdem tenoris exemplaria , qtue invicem tradita , Nos fupranominati
L z pro-
84 MEMOIRES, NEGOTI ATIONS, TRAITEZ,
1700. propriis manibus fubfcripfimus, 6c Sigillorum Noftromm impreffione 6c ap-
** - penfione munivimus. Halfnix die ut fupra. Tobias Morjztyn (L. S.) jfoa-
chimusGerJiorffCL.S.) P. Reecltz (L. S.)
Quant qnidem CoUigationen Univerfa Rcjpublica in Comitiis Regni Generalibus,
Atmo 1658 confirmavit (3 roboravit îitiUo :
Approbatio Pattorum cum Serenillïmo Rege Danix.
SImiliter cum fua Majeftate Danix Pa£ta per Generofum Tobiam Morfz-
tyn Subdapiferum Cracovienfem , Aulicum Noilrum, Noitro & Rei-
publicx Nomine de Actu & data Haftnix die 18. Julii Anno i6fj inita 6c
conitituta, in omnibus eorundem ligamentis Se conditionibus , authoritate
prxfentium Comitiorum approbamus.
Dcderunt infiiper perenne robur eidem ColUgatloni Patla fraclatûs Olivenfis in
Articulo I. fupra infèrto. de fervandis Paclis 0? Confœderationibus inter Partes.
Pacifcentes , 13 prafertim in Artic. XXXI.
CUm verb ad ftabilitatem hujus Pacis plurimùm interfît, ut univerfaliter-
componatur, Se inter omnes belli hujus focios, fbeuritati Commercio-
ns m plenè profpiciatur, ideb licet controvérfix, qux Serenilfimo Rcgi Re-
gnoque Suecix, cum Serenifiîmo Rege Danix intercedunt,. hic commode
decidi non potuerint, Se in ipia Dania cum fpe fucceffûs tracîentur : nihilo-
minùs conventum ett, ut Sercnifiimus Danix Se Norvegix Rex, ejuique
Régna 6c Ditiones in hoc Tractatu, conclufa in Dania Pace comprehendan-
tur, ita ut ea- omnia, qux inter altë memoratos Suecix 6c Danix Reges
conclufa 6c coniHtuta fueiint, ad hanc Pacem, pariter, ac il in hoc ihftru-
mcnio fpecificè inferta forent, pertincre cenieantur, lalvo per omnia ipfo
Tractatu in Dania inter utrofque Rcgcs ce Régna conclufo , vel concludendo.
yUravit ad hœx Sacra Regia Majeftas Polonix , &-folenniffime in Paclis Con-
sentis Ordinibus Regni Je fe obligavit, Pacla & Fœdera cum Fici;.is inviola-
bïlitrr manutenere , objervarc, (3 reruvare vile.
Quapr opter exaclo judicio res pondérant ibus facile affcfni , ntrum Sacra Régi a.
Majeftas Poloni.e ex vinculo prafatœ Colligationis ftbi 13 toti Rcipubiiae incum-
bentis, 13 ex obîigaiione Anliquijlimorum Païlorum 13 Confœderationum , ob in-
jlgnem Poloritœ à Dania novijjime navatam opérant , totamque molem belli Sue-
tici in fe dérivât arn^ 13 JlorentiJ/mas ereptas Provincias, videlicet Scaniam,
Blekingiam, Ilallandiam, & Prxfetluram Bahufienfem , aliafque ampliffimas
Regiones inter ancipitia (fia , 13 in dies à Sueco infejiïora , non teneatur J'ub-
lienire apsrto bcllo Serenijjimo Régi Daniœ , (3 omnibus modis vim vi pvopuljare ,
diverfîonetà faccre , nec prxfentia durit axât , fed 13 futur a in tue ri: ftquidem
etiam Pact.i ipfji O/iven/ia, commumm Regnorum Polonia (3 Danix Pacem (3
caufam ejje voluerunt.
Stibeant adhuc cdamnm injurue Sacra Régies Majejlali Poloniœ , à Sueciay
contra
ET RESOLUTIONS D'ETAT. Bf
contra Jura boneflarum Gcntium, &? ipfam propinqui fanguinis neceftïtudinem, 1700.
grandi cum ignominia illata. ghiamprimum enim Sacra Regia Majeftas poft fe- ■
lie em fui in Campo Eleclorali Inaugurât ionem in primo Regni hujus aditu, fidam
& frdceram Régis Suecia amicitiam ftbi conciliare voluit , coque motivo Ablega-
tum fuum inditatè Sztokholmiam expedivit; non tantum votis ci? cxpeclalioni
Sacra Regia Majeftatis non refpondit Suecia , fed cum fumma indignitate , Sa-
cra Regia Majeftatis Ablegato repulfam dédit , eundemque injalutato Rege Sue-
cia retrovertere fecit : certifpmum radicata in peclore hoflilitatis prodente docu-
mentum , &? indubitatam in quovis advetfo cafit , contra Sacram Regiam Majef-
tatem & Rempublicam infenja infeftaque vicinia fua makvokntiam. Verhn
potuit juflâ lance rependere Sacra Regia Majeftas Polonia , & pari contemptu
Ablegatum JSueticum Gêneraient Felling, vertus fpeculatorem ad exploranda Re-
gni negotia immijjum,- traclare-y fed cum probe noverit Sacra Regia Majeftas ,
Jus Legatorum Divino bumanoque velatum prafidio , cujus tant fancJum & ve-
mrabile nomen eftjc débet , ut non folum inter Ficinorum fur a , fed ci? hoftium
tela incolume verfetur ; ideirco pr a fatum Sueticum Ablegatum Veiiing non folum
convenienti dignatione excepit , fed & Aulam fuam comitantem , omni benevolen-
tia génère cumulavit y ac plus quam Civilia agitantem; fumma cum patientia to-
leravit. Non latebant Sacram Regiam Majeftatem clandeflina ejus macbinatio-
nés, pernitiofa wolimina , £s? turbida ad concitandam inter Status diffidentiam
facliones , tum fwiftra fparfa infufurrationes , qua in publicum Reipublica ma-
lum facile redundare poterant. Dijpmulavit bac omni-a Sacra Regia Alajeftas
pro congenita fibi aquanimitate , neque collidenda inter utrumque Regnurn amici-
tia ullam ex Perfona fua occaftoncm dare -voluit ', ûftenditque altiorem omnibus in-
juriis , ci? verè Regium animum , atque bis occultis cuniculis Ablegati Suetici in '
exitium Reipublica vergentibus , ta-aturo fuo judicio & prudentiâ viam obftruxif-
fe, fat: s babebat.
Ad extremùm praterire nef as eft, quomodo Copiis Miiitaribus Sacra Regia
Majeftatis Polonia ad erigendum Portum in Polonga vigore Çuprafcripta Confti-
tutionis, ci? Poft-Comitialis Senatûs-Conftlii in oras illas deftinatis, byemaliqus
tempore in Stativis fuis pacificè degentibus , non folum Gubcrnator Rigenfts, citra.
ullam datam caufam , au fus via s publicas inter à père , dive;f;s infidias tenderc ,
fed & fpcculaîores clanculum dimitterc, Defertores Caftj/>rum fupprimere , &
circa requifttam profugorum extraditionem mi fis Ofjicialibus illudere , neenon con-
tinuis h rit amen', i s laceffere , primoque Finnorum adventu excidium interminare ,.
ut tandem ad novifllma in Livonia attentat a mutuamque ho/lilitatem , occa/ione
&? crlpà prafati Gubernatoris Rigenfts, deventum fucrit : Incendium nimirùm
jullè ei imputatur, qui fteem intulit, cum prohibere pofiet, ac fcintillas
reftinguere , omnino noluit.
A ff un dit olcuni igni , & exortinn ad prafens co m agis ex agit at incendium in-
domita Suecorum infolentia, dura naves Bellicas ad Gcdancnfa Promontorium
Hcla. diclum, twcifjime fuperimwiftt , i bique fubfiftere , & tam naves Ho II and i-
cas, quant 6? alias detincri (jf revideri fecit , Accolas fc? Provinciales grandi
reboantium tormentorum fragore exterruit, liberam navigationem, & commercio-
riim fecuritatem inter! urbavit : ut verè dicipojftt; Tnmquilkç priùs explorant
adverfâ rates, arque ip(ii pericula diieunt.
L 5 Nunc
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85 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
1700. Nunc itaqtte probatà Sacra Regia Majejlatis innocent iâ; & Suecorum culpâ,
— per tôt deduclioncs violationis Juris Gentium &? Paclorum Qtipenjittm, rupta
Pacis perpétua, repetit os fafiïts vi armorum hojiilcs atlas & conatus, (3 con/pi-
rationcm in jugulum Libertatis Polona , (3 everfionem Status , opprejfam gravi
tyrannide Nobilitatem Livonia , attentatam invafio-ant littorum Mans Balthici
Juri Reipublica fubjeclorum , rapt as naves tam Illufti ifftmï Ducis Curlandia ,
quàm & Nobilitatis, armatâ claJJ'e mterturbatam quotannis quittent , fcqueftra-
tas naves .y 6? fubhaftatas mer ce s Polongam de/linatas, di/per/am Anglicanam fo-
cietatem, vioknto tranfita peragratas CurlanJia & Samogitia ferras, grafi'an-
tibus (3 populabtmdis Copiis Militaribm fub Gêner ali Suetico rîorn , tribut ariam
exaclioncm à Nobilitate Alba Ruffia Magrit Ducat us Lithuania, tôt tantaque
public» enormia damna , (3 prajudiciz caufata , tam novifiimam infeftationem
SereniJJïmi Régis Dania £î? Norvegia Fœderati Regni Polonia , necnon gravent
Sacra Regia Majeflatis inptrfona Ablegati fui lafionera, ultimarie lacejfitas Co'
fias Regias, (3 interturbatam fecuritatem Portas Gedanenfis, quifquis probe co-
gnoverit , non amplius dubitabit , jurenè an injuria Sacra Regia Majeftas pro-
cefjerit: dîim fie coaila , irritata, & provocata juftè induit arma, inharendo-
que Patlis Couvent is , & à nexu folennis Jurisjurandi confeientiam fuam clibe-
rando , necejjarïb in Arenam défendit , 13 ex juftis , legitimis ac relevant ibus
caufts, pacé fufpetlà tutius bellum fibi eligit. Juilum feilicet eft bellum, qui-
bus necefTarium j & pia arma, quibus nulla, nifi in armis , falus reliâa.
Naturali quoque Jure, ubi aut vis Mata anetur, aut ab eo, qui deliquit9
peena depofeitur, nulla requiritur denuntiatio. Affert juftitia fecuritatem con-
fient! a , tranquillatque animum , cum ad propulfandam vim , natura ipfa bel-
lum indicere videatur , 13 fi pars una Fœdus violaverit, pot eft altéra à Fcedere,
13 ex vi Paclorum Olivenfium fubitb ad arma recurrere. Adhac publias potef-
tatibus, quibus defendendi & ulcifeendi Jus competit , licet pr avenir e vim non
prafentem , fed qua h longe imminere videtur , incendiumque potius in aliéna Do-
nt 6 extinguere, quàm in propria opperiri, prafertim in t ali bus circumflantiis ,
ubi neque mius diei fpatio , fecurum Pacis Regnum efje pot eft , (3 impendent em
cervicibus hoflem pra foribus ftantem 13 minitantem , in fingulas horas & mo-
ment d expavefeere , £3 fub ipfo Fort una minant i s itïu , hoftilcm impetum fttfttne-
re cogitttr: Pcjor vkldicet cit belloPax, qua arcano ubere b? lia laéhit , tum
quid inter apertum hoftem , 13 inter cum , qui hofiilia toties , immemor Divini
humanique Juris, agitaverit , inter fit? nemo non videt. Neque ab co quiet am
unquarn fore Re-npublicam , (3 aliquando détériore conditionc bella fubituram.
Adhucne exfpeclaret Sacra Regia Majeftas, Regni Provinciis hoftium arbitrio
expofitis, ut rurfus inundatis in ipfa vi/cera Exer cit ibus innocuam Rempublicam
credentem Religion! Paclorum Olivenfium, ex inopinato obrueret , & per Polonos
campos ferox hoftis exfpatiaretur, fedemque belli in Polonia fibi figeret, aut, ut
j>riùs Fœderatum Regnum Dania , à fundamentis conçut eret ac everteret , cum
quo , coftlem Amicos , eofdem hoftes , ex ncxu prafata Confœderationis Sacra Re-
gia Majeftati Rcgnoquc Polonia, habere neceffe eft; (3 qui non repcllit inju-
riam àSocio, fi potelt, tàm eit in vitio, quàm ille, qui lacit. Hinc fidem
cbligatam Colligato Régi 13 Regno Dania ex Pailis Convenus, folenni juramen-
U fuper aianut emnda Fœdera firmatii exfolvere incmv.bit Sticra Regia Majeftati,
(3
ET RESOLUTIONS D'E T A T. g7
(3 viticulatam eliberando confeicntiam contra ïurbatorem Pacis Suecum ferrum
expedire, arma cape f ère, & eoufque propriis viribus Diverfionem fuftinere, dô-
me Refpublica in proximis Comitiis Generalibus belli profequendi ratioms non ini-
bit. Effi agitât id cura publica confervationis , pr avenir e prias Hoftem , quàm
ad Nos perveniat, bellumque in eos fumere , qui prions Pacem ruperint; exigit
feras (3 ferias vindicias toties concujfa £s? exagitata Refpublica j evincunt hune
zelum 13 ardorem Sacra Rcgia Majeftatis oppre •forum, & Jub gravi Tyrannide
gementium Eivonum lachryma, quorum miferam fervitutem falsb Pacem vota-
mus ; obligant Santla Patlorum Leges , ut Provincia Livonica , cujus bénéficia
Suecia, propter rupturam Pacis (3 Fœderis excidit, ad primavum Corpus Rei-
publica redeat; expofeit ipfa juftitia, ut qui liber i fuerunt fuam recipiant liber-
tatem , 13 hoftili eximantur Imperio : neque cunclationi locus eft in hoc Confilio ,
quod non poteft laudari nifi per atlum.
In fundamento itaque prami (forum, folennijfimam Sacra Regia Majeftas Po-
hnia Mamfeftationem coram Domino Exercituum DEO , Externis Regnis (3
Rebufpublicis , univerfa Chrijiianitate , ac pracipue affumptam Generakm Guar-
rantiam 13 evitlionem Patlorum Olivenfium tuentibus Sereniffimis Principibus
ingeminat : fe ad fortiora média (3 bellum gerendum ob fuperiùs expreffas rationes
débita ultionis , (3 coatla defcnjionis, fubitaneique ad arma recurfus Jlringi &
compelii , 13 horum omnium , qua ex prafenti bello evenire poffunt , innocuum fo-
re, fir miter que fperat Sacra Regia Majeftas jufti (3 legitimi progrefius fui àjuf-
tis Arbitris approbationem : Pro caufa pugnantibus arqua ,. Se veniam lperare
licet.
Invocat p-oinde Sacra Regia Majeftas jujlum ultorem D E XJM, fraHorum
Patlorum Vinàicem, cujus in manibus fit a, cujus è digitis pendilla omnis morta-
lium 13 Rcgnorum fialus, ut fiua aquitati Divinâ ope afftftat, 13 hune gladium
pro de/en fione Juflitia firitlum ad gloriam Nominis fini profpcrct & benedieat ,
neenon Provinciam Livonicam Corpori Reipublica, uti à Cardinibus Regni illi-
cite avulfam reflituat , tnultafquc Myriades opprefibrum , & quotidie pro c/ibera-
tione fui ad cœlum clamantium, po'ft tôt exantlatas arumhas Divinâ confoletar
gratui, (3 tandem fecuram, horieftam, perpétuant, & ïriviolabilem ad nunquam
defiturmn avum Pacem (3 concordiam largiatur.
Recurrit queque Sacra Regia Majeftas Polonia , infifîendo fiape memoratis
Patlis Olivenfibus tàm ad Jniecedancos Fœderatos & belli Socius, Sacram Ca-
fiarcam Majefialrm (3 Sereniftïmum Eletlorem Brandebttrgicum, quàm ad perpe-
tumn Evicî'orem (3 T'utorcm ejufdem Fœderis (3 Pacis Olivenfis Cbriftianijjimam
Galliarum Majeftatem, per que omnia Sacra Patlorum, flipulata def enfouis 13
fdejuffîonis ohteftatur; ut cum res prafens mafculis confins agenda , (3ferro.de-
cîdenda evenerit, examinatà caufà 13 expenfis juftifiimis Sacra Regia Majeftatis
rationibus, mira deftinatuni tempus conjunclis viribus cor.tr a- Turbatorem Pacis
Perpetuae Suecum adeffè, eundemque pro communi hofte reput are, injuria fque
Sacrae Rcgiae Majeftatis 13 Regni Poloniae tanquam fuas proprias vindicare ve-
lint. Convenit id ubligationi patlorum, convenu juftitiae , convenit excel/o ani-
ma aile mêmoraiorum Fœderatorum ac Evifïorum Pacis Olivenfis, ne différant
'jUion: s fcntcntlam , quafi jam, apud DEUM, omnis vinditlae ratio conquis -
verit; nec pojfe faniïius (3 digniùs Nomini fuo rcfpondcre, quàm fi hoftem Sue-
cum
88 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
1700. cum- ttndiquaque aggrediantur , £5? ita Poloniae & Daniae , arclè invicem à re-
—• troatlis temporibus connexas rat ioi.es ae filment, ut una fine altéra fubjijîere ne-
queat , ac botta malaque ad utrattique partent pertineant.
Celli ac Prsepotentes Domini.
Mémoi- jNnotuit mihi exhibitum nuper effe Cdfis ac Praepotentibus D. D. V. V. fcrip-
redu tum quoddam Vindiciurum titu uni prae fe ferens , caufafque enumcrans , quas
Mfriiftre author bello quo Sacram Regiam Majeflateni Rcgem me ton Clément ijjîmurn Rex
toi chant ^>0^0"^e adortus ejl , obtendere conatur. Scatel hoc fcriptum infcetis, ditleriis ,
le Mani- calumniis , injuriis^ atque commentés i & tum diclwnis proterviâ, tum argument i
telle du vanitate libellum potins famofum redolet quàm pûblicum aliquod Ma,àfeftum, cum
Roi Au- nimirum hoc ita concept um efie debeat , ut moderationem & rationes , fi non ex
affe ver as , fait cm verifimiles in eo agnofcere queat. Cum igitur audiverim fcrip-
tum hoc praelo hic iterum fubjici, confido C. ac Praep. D. D. V. V. id non ptr-
ir.ijfuras, fed potius fevere vet attiras effe^ non tantum artlae amiatiae , quae
Sacrae Regiae Majeftati £5? Celf. ac P. P. D. D. F. F. intercéda, fed & pro-
priae aequanimitatis intttitu, quae non finet ut graves & fœdae contumeliae in
Regium twmen, totamque Suecorum gentem injuriae in vttlgus fpargantur. Eo
majoribus caufis adducor ut id à Celfis ac P. P. D. D. V. F. requiram, quod
hîc complures fe fe offerunt rationes ambigendi an Régi Poloniae de tenore hujus
firipti exacte iconftet. Magis enim credibile eft , turbulent um quemdam belli in-
cenforem, five odio & malevolentià , vel intempe flivi zelifervore abreptùm , five
privât is commodis velificaturum, haec in cerebro fuo nata figmenta calamo confi-
gure voluiffe , ut invifam redderet Sacram Regiam Majeftatem Regnumque Sue-
ciae Ordinibus Polonicis^ Eofque irritât os ad ultionem coucitaret, atque fimul
qualemcumque fucum obduceret facinori , or bis detejlationem commeriti; Neceffum
enim vifum eft injuftiffimo Bello aliquem colorem ut ut dilutum illini , imminuendo
ut cum que horrori, à bonis omnibus ex in concept 0. Rationes autcm quas habeo
ihibitandi, hic ferèfunt.
I. Extra fidem efh , Regem Poloniae , fi plcnam rei haberet notitiam , concef-
furuni efie ut publkae lucï exponeretur itijuriofus libellas , fiquidem à décor 0 aequè
ac ab iifu inier moratiores recepto, valdè remotum eft , indignis ejufmodi modis
Rcges, fummafque Pote fiâtes fibi invicem occurrere. Quantumvis enim Rex
Poloniae fablû ipfo , juflitiae pietatifque Chriftiame limites tranfilire fufiitiuit ,
praefumendus tamen eft à verborum intempérie abflincre, me acerbis vocibus in
eum graffari velle quem iniquïs arrnis obruere aggreffus eft.
II. Proprinc Confcientiae teftimonio cunviclus eft Rex Poloniae, fe caufis invi-
ta veritate in libcllo memoratis , ad bellum tient iquam efj'e induclum ; probe gna-
rus , non omnino omnibus occultas me genuiuas illasquas in dnimo habet, ita ut
uieritb vereri pojjit ne tali occafione fponte data confilia iftbacc ctiam pubhcè in-
r.otefcant, quae Régi tant opère ipfius intereft ne deftinatis excidat.
III. Si verae efj'ent eau fie in feripto recenfitae, illafque ab exordio mottium
cognitas habuifjet Rex Poloniae, dnbium non eft qui n primo ftatim initio eas ad-
bibuifj ' t , confeftim profeffus ideo à Duce Exercitus fui infefta Livoniae arma il-
Uta% Rigamqiie obfidïone ànïïam efj'e . His certe caufis protinus ufus fuijet , non
aliis
ET RESOLUTIONS D'ETAT. Sp
aliis longeque dtverfis quas tune temporis Dux ifie , nefario conatu pratendebat , 1700.
fateutejofimodum Rege, fie de irruptione ifla nihil in mandatis dediJJ'e, etiamfi quod
Gênera lis or fus fit , Rex profequi velit. Hac itaque fibi nuïïo modo confiant & aï-
terutrum ut connut necefie efi; mit enim f al fa erant ifia qua Flemmingius tune
jaclabat, aat commentitia funt hac quœ feripti Author crepat , Régi Jaltem co
t empare] itérant incognita. Unde evidenti]Jtmum~efi , hac pofiea denuim confitla,
Bello nequaquam ortum dedif/e.
IV. Vix veri fpeciem habet, uti voluifie jejunâ iftâ fallaciâ, quâ incaui'o
Leclori fucum facere fe poffe fperavit Ubelli Script or. Hic enim inter alios Paclo-
rum Olivenfium articulas, etiam trigefiimum quint um productif fied truncatum,
atque refeclis lis qua rem omnem conficiunt . Cum videlicet is ipfie § apertijjimè
defiiiiat a^uœ' via foret inetinda, fi ab ait er titra parte Patent violari contingeret ,
caufia fiuœ timens feriptor facile ' fenfit non è re fua effe ut ïntegrunt receuferet arti-
culum , qui folus abundè refellit &?- unico velut iblu funditïis evertit quidquid
demum five jure , fivê injuria, exeufandis Régis Poloniœ armis prœtèxti poffît.
Miré igitur mutilât um eum in médium protulit, quâ tamen frigidà cavillatione
tantum abefi ut paulo fagaciori illudat ut potius deteclâ fraude, Leclori s dolosife-
cum agi perfpkientis indignationem commoveat > atque juxtà déplorât am fe defen-
dere caufam manifefliffime prodat. Ità igitur inane artificitm à Regc ipfio pro-
fetlum ejfe mihi agrè probatur.
V. §>u,omodo Rex ajfcrcret fe Reipublica caufam tucri, cum hujus nunquam
audita fuerint querela? Nihil certè Reipublica in Confilium fané non adhibitœ de
violât â Pace, nihil de bello nifi jam inchoato compertum, cujusfanè nuntitm non
minus attonita excepit quant r cliqua- Euro pa omnis- Àpparet itidem ex nupero
Senatus Polonici Confilio, auam tailla prorfus Reipublicœ in Negotio 'partes fue*
rint : 13 nemini non confiât qtianto molimine poftmodum Rex allaboraverit ut
Rempublicam in fient entiam fuira pellicerct , quamvis irrita hucufque fuccejjh.
VI. Fortaffis etiam haud expediret Régi , caufie huic Reipublicœ nomc.i immif-
cere ; dtim enim eâ inficia atque inconfiultd , bellum or fus efi , arrogavit fibi omnint
unum è ntaximis , longèque folemmjfimis jutibus, qua i;t regimine , ubi cuncla ex
folius Principis arbitrio pendent, exerceri queant , idque egit quod non nifi in Im-
perio omnibus nnmeris abfoluto, fieri confuevit. Rem perkulofijfimi profeclb in
libéra Republicà exempli, £•? lethale aliquando vulnus infligere aptam liber tati
Ordimun, cujus hi follicitam adeb curam mérita gerunt.
VII. ■ Poierat etiam vider i minus congrmim rationibus Régis, eb quod hoc patio
Sacra Rcgiœ Majefiati Domino meo démenti ffimo occafio nafeerctur , renovandi
erga Rempublicam fpecimina in ipfam affeclus defideriique , quod Sacra Regiœ
Majefiati fiemper fuit £5? erit , tuendi fidam , vicinam , confiantemque cum eâ
amicitiam, haSlenits cum tanto utrinque commodo, mutuâque utilitate excuit am.
VHP Multb notiorem habet Rex Poloniœ veram rerum indolent quant ut ami-
citiœ cum Rege Daniœ initœ pratextu uti, eique ut pahnario ferè argument 0 in-
niti voluifie t , caufatus fibi per eam non licere Daniœ ckejfe in bello contra Sue-
' data. Sacra etenim Regiœ Majefiati Régi Meo Clementiffimo neque bellum efi
cum Rege Dama, neque animus bellum habencli. Nihil potius magis in votis ha-
bet quant verœ £5? perennis amicitiœ confiervationem ; fperans eamdem etiam Ré-
gis Daniœ mentent ejfe. Nam Holjaticam controverfiam quod attinct ,. Sacra
fsm. /.- M Regid
o> MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
i_oo. Regi.i Majefias pari cutn rcllquls Potefiatibus, quels Duels Guarantia incum-
• bit , pafili proc?fiît , nec alias quant ifia in hoc negotiofibi partes vel'fiumpfiitvel
fumet; là qnod Sacra Régla Majefias , protit notorlum eft 9 fiepius, itérât ifque
vieibus decluravit. Omnium autem qiue cuncll fponfores bac in refive hacJeuus
egerunt five in pofterum agents uni eus feopus Fax, 0 quam refiaurarl Internera-
tamque fervarl tant opère unlvcrfi exoptant. Neu tique enlm ab illis quarltur Da-
ma opprcjjîo , vel cujufcumquc Injuria , mulio minus ut Dania quicquam adima-
tur , et fi difpari exemplo praeat Rex Polonia , qui apertè profiter i non veretur ,
fibi conflltutum efiè Livonlam Sacra Régla Majeftati Succla eripere.
Has igltur ob ratlones plurimafique alias , quas hic recenfiere non attinet , per-
fiuadere mihi nequeo Rcgcm Polonla notltiam habere eorum , ex quibus coutume-
liofum hoc ficriptum confiât um cft. Fas potius eft credere eum , fi cognita ipfi efi-
fent ficripti contenta , id publiée non emljfurum quln &? lu autborem ut Improbuni
dlffamatorem feverè efi'e anlmadverfurum , cum id exigere videatur dignliatis ra-
tio atque il la bonefias, quâ id fafiigii Principes , etiam inter Arma, mutuum
de eu s , fianclum Majefiatls charatlerem , alter in altero colunt. Cum autem in hoc
fcripîo effrœni licentiâ, calumnia in Sacram Regiam Majefiatem & intégrant
Suecicam Nationcm audaëler eruElentur, non poterit non condigno re/ponjb Id re-
fundi, attamen tali quod flyli mode fila raîlonumque pou 1ère, or bis (enju bonefli
praditi judicium fiubire non reformldet. Quam primum autem hoc confie il uni fiue-
rit , quod primo quovis tempore futurum conjicere licet , haud gravatim fer et Rex
Meus ClementiJJïmus une eodemque tempore ficriptum {$ refponfum in publicam lu-
cem prodire, ut liber o neutrique parti obnoxlo Leclorls judiclo , eofacillus ver a à
falfis, frivola à fiolidls dificernantur , atque inflituta comparatlone omnes cordati
& à ftudio partlum immuncs, luculenter agnoficant quanta injuria Sacra Regiœ
Majefias non tantum armis lacefifatur , fied etiam. immerens conviais preficinda-
tur.
Inter ea temporis certam fipem fiovet Sacra Régla Majefias fi bl contra infenfum
adeb hofiem, qui cltrà ullam caufiam & quafi pruritu quodam in tranfiverfium aclus
in bellum projllïit , Celfiarum acP. P. D. D. F. V.ejficax auxllium non defeclu-
rum, quod cmnlnb fiperare jubent Fœdera tam prijlina , quàm novifiime Inter Sa-
cram Regiam Majefiatem ac P. P. D. D.V. V.fanclta. Die p. Julii 1700.
L e s gens trouvèrent le titre du Manifefte afTez fingulier, en ce qu'on
y parloit du Roi de Dannemarck, comme du perpétuel Confédéré de la Po-
logne. Il eft vrai que le Roi Auguste propoia au Confeil du Sénat de Po-
logne, de donner affiftance au Roi de Dannemarck ; mais , ce Confeil s'y opofa
par le Décret fuivant.
Décret /~\Uandoquidcm prafens Senatus Confilium nequit abfique tôt a Republlcâ declara-
-ït ' frs "^ re tifiifientiam Serenlfiîmo Régi Dania , ex vi Fœderis cum Republicâ Inlti
Polonoîs contra Suecum, promlttlt fiua Régla Majefias defignare Comitia Gêner alla Deo
qui re 'fa- dante, in menfe Decembri, £s? modo arnicififimis literls refpondcndum Régi Da-
fèn; tout n-l£_ Intérim II ter as expedlet Unlverfales ad Palatlnatos & terras cum infiorma-
*tt°Dan- Î!0)K & exprcjfione caufiarum inchoati belli., eum Sueco, in quibus literls univer-
. fulibus exprimet purlfiimam intentionem fiuam , quod fi Deo adjuvante rceiplet
Daca-
ET RESOLUTIONS D'E T A T. 9i
Ducatttm Livoniœ , Reipublicœ aggregabit , juxta juramentum de recuperandis 1700.
avulfis, quod ipfum fpcciali diplomate cavere parafas eft. Intérim quia Refpu- ■
blica, abfque comitiis in hoc hélium non defcendet, nolens effe gravis alio modo
ReipublictS) fua Regia Majejlas propriis Jlipendiis & armis militabit & non defe-
ret Rcgcm Daniœ. ghiod fi necejjitas urgebit , parafa erit Jua Regia Majeftas^
Comitia extraor dinar ia duarum feptimanarum, abfque folemnit.itibus indicare. In-
terea commendat fupremis Exercituum Ducibus Regni , &? Magni Ducatus Li-
tuanie Gêner alibus omnem vigilant iam^ circa cujlodiendos limites Patrie , &
quatenus citm fuà Regid Majeftate in omnibus occafwnibus corrcfpondeant , quorum
arbitrio & prudentie etiam Cajlrorum metatio rclinquiltir.
Le Roi Auguste voulut là-defllis envoïer de Saxe quelques mille hommes-
à l'aflîftance du Dannemarck lors des troubles de Holftein : mais il n'en vint
pas à l'exécution ; tant parce que ces troubles venoient de finir par la
Paix de Travendal, que parce que l'Electeur de Brandebourg ne voulut pas
en accorder le paflage. 11 en fit favoir les raifons au Roi Auguste par le
Baron de Schmettau. Elles confiftoient „ en ce que la Guerre n'étoit pas Rai/bns
„ déclarée au Dannemarck pour avoir befoin d'un fecours étranger. Que la pour lcf-
„ Médiation étant occupée à Hambourg à procurer la fatisfaction audit S"^'ls
„ Dannemarck par un accommodement jufte Se équitable, il étoit du de- de gr*'n.
„ voir de l'Electeur comme Médiateur, Garant, Se Condirecleur du Cer- debourg
„ cle, d'empêcher la rupture, plutôt que d'y contribuer en favorifant ce refiïfe le
„ paflage. D'ailleurs, qu'il ne pouvoit rien faire fur de femblables points, fins Pafla|e
„ la participation des autres Condirecleurs ; Se cela, d'autant plus que le Du- ™*s a"
„ ché de Mecklembourg étant mis en fequeftre entre leurs mains, leur con-
„ fentement étoit néceflàire pour un tel paflage. Car, s'ils venoient à le re-
„ fufer> les Etats de Brandebourg (broient ruinez par le féjour de ces Trou-
„ pes d'aflîftance. De plus , que ce feroit donner lieu au Duc de.Holftein de
„ iè plaindre d'avoir un Médiateur partial. Que l'Electeur étant Garant du
„■ Traité d'Altena ne pouvoit rien faire fans la participation des autres Ga-
„ rans qui étoient l'Empereur, le Roi d'Angleterre, les Etats Généraux,
„ Se l'Electeur Se Maifon de Lunebourg. Que le Roi de Suéde avoit fait
„ expreirément déclarer par fes Minillres, que ni lui , ni le Duc de Holftein,
„ n'entendoient aucunement d'entrer en Guerre, mais de continuer la Mé-
„ diation : ajoutant , que fi l'on accordoit un tel paflage , l'on ne devoit pas
„ trouver mauvais que Sa Majefté Suedoife'fit occuper les poftes néceflaires
„ pour s'y opofer. Par-là le Duché de Mecklembourg Se le Païs de Bran-
„ debourg deviendroient le Théâtre de la Guerre. Que néanmoins l'Elec-
„ teur paflèroit fur toutes ces confidérations , s'il s'agidbit de défendre le
„ Dannemarck contre une injufte agreftion, auquel cas non feulement il ac-
„ corderoit ce paflage, mais fe déclareroit même pour lui procurer une jufte
„ fàHsfacrion Sec.
Cet Electeur en agit de la forte, Se en eut une aprobation générale. Il
eft à remarquer qu'en 1690. il avoit furpris la Ville à'Elbing, Place confidé- ■
rable, du reifort de la République de Pologne. C'étôit parce que cette Vil-
le lui avoit été hipotequee en i6f 3. pour la fomme de 400. mille écus. On
M 2, con-*~
9Z MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
1700. convint le ii. Dccembre de certc année-là de la refHtution de cette Ville,,
* par un Traité , qui fut conclu à Varibvic. Le précis de ce Traité était en
plufieurs Articles qui portoient.
'Traité * /~V-*E ^ **-°* ^a' République de Pologne d'une part, 6c le Sereniffime
pour la . V^_ Electeur de l'autre, le failbient une réciproque promefTe de ne jamais
Reltitu- garder aucun reiïêntiment , tant pour la prife à Elbing, que pour ce qui
d'EIbi avoit été dit, écrit, ôc publié de part 8c d'autre fur ce Sujet } 6c de rétablir,
conferver, 8c affermir entr'eux une confiante ôefîneere amitié, une union in-
violable, 8c une Alliance perpétuelle.
II. L'Electeur promettoit de retirer fes Troupes d'Elbing le premier Fé-
vrier fuivant, Se de renoncer à perpétuité à toutes les prétentions, qu'il
avoit fur cette Place, 8c de la rétrocéder à la Pologne en préfence des Com-
mifTaires, qui feroient nommez à cet effet, fans en altérer en aucune maniè-
re les anciennes Fortifications.
III. Cet Electeur s'obligeoit auffi de laifTer dans cette Ville-là tout ce que
les Troupes y avoient trouvé en y entrant, 8c de n'emporter que ce qu'il y
avoit fait transporter depuis l'occupation de ladite Place.
IV. Le Roi 8c la République de Pologne s'engageoient de leur côté à
païer dans Varfovie à l'Electeur, trois mois après la tenue de la Diète géné-
rale du Roïaume, la fournie de 300. mille Rixdallers, à laquelle l'Electeur
avoit bien voulu réduire celle de 400. mille, pour laquelle la Ville lui avoit
été hipotequée. D'ailleurs, pour plus grande fureté de ce paiement, de re-
mettre à l'Electeur, ou à ceux qui feroient nommez de fa part, la veille de
l'évacuation d'Elbing, les Joyaux de la Couronne fous un double Inventaire li-
gné 8c féellé, pour être rendus dans le même état lors du paiement.
V. Au défaut d'icelui , le Roi 8c la République confentoient que l'Elec-
teur retint non feulement les Joyaux , mais qu'il pût auffi fe remettre en poi-
feffion de ladite Ville d'Elbing, pour en jouir oc de tous fes revenus jufqucs
à un entier aquit.
VI. Qu'on nommeroit des CommifTaires réciproquement, pour terminer à
l'amiable le différent pour le trajet fur la Viffule , 8c pour le Droit apellé le
Strcimgelt , levé par les Officiers de l'Electeur.
Il y avoit trois autres Articles de peu de réflexion.
Ce Traité fut exécuté en fon tems, tant par raport à la rernife des Joyaux,
qu'à l'évacuation de la Ville. Les CommifTaires Polonois y firent chanter le
Te Deum-, 8c le jour fuivant, qui étoit le 3. de Février, le premier de ces
CommifTaires , qui étoit TEvêque de Warmie, y fit un Difcours aux Magis-
trats 8c Bourgeois. Comme on le trouva fort bien tourné, on croit faire
plaifir au Public de le donner ici.
iDifkpurs „ "V TOiis fommes venus ici avec un plein &C entier pouvoir, en qualité de
aej ^vc~ „ I M CommifTaires Députez de notre Sereniffime Roi 8c de la Répu'bli-
^Vajjnie " l110' Pour r'uvoir ce qu'un revers de fortune nous a dernièrement ravi, &c
xux H«- k P^ Clltrc les mains d'un Voifin. Nous reconnoiifons avant toute chofe,
.- . „ „ comme
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ET RESOLUTIONS D'E T A T. p?
comme une grâce toute particulière du Grand Dieu, que l'incendie, dont 1700-
cette étincelle nous a tant menacez, n'eft plus à craindre, 3c qu'après le bj-~
trille nuag» de ce mauvais fuccès, l'agréable jour vient de paraître. La d.£lbing-
Paix tant defîrée eft préfentement rétablie fous les aufpices du Ciel, & .
procurée fans eftufionde fing, par la bonne fortune, qui puifle être per-
pétuelle, de nôtre Sereniffime A u g u s t e; par les moïens , dont l'Emi-
nentiffime Cardinal Primat a heureufement afluré les affaires préfentes &
futures} & enfin par la Négociation des Commiflaires Députez tout ex-
près pour cela, par Sa Majefté nôtre Maître, par la République, & par le
Sereniffime Electeur de Brandebourg. Tout ce qui a altéré les Confédé-
rations facrées, eft préfentement enièveli dans une Amniftie, & il ne refte
plus de droit pour les chofes pafTées que celui de les oublier. Dieu veuille
que cette amitié entre de fi grands Princes, & entre les deux Etats voiiins,
puifle durer toujours pour le bien des deux Parties. C'eft ce que tous les
bien intentionnez fouhaitent , malgré ce que les gens préoccupez en difent
ou penfent autrement. Vous, ô Citoïens,qui êtes préfentement ramenez
fur le bon chemin, confidérez combien vous êtes obligez au Sereniffime
Roi & à la-république de ces peines & dépenfes , qui ont fervi à vous re-
tirer des mains étrangères. Confidérez l'Armée qu'on a tenue fur pied
pour cette feule néceffité à fi grande charge de la République, & qui n'a
pu être congédiée que par une Diète. Confidérez tous ces Confeils qu'on
a eus jour 6c nuit, & réitérez au préjudice de'nos aifes 8c de nos fantez.
Confidérez les envois aux Médiateurs , 6c les dépenfes qu'on y a faîtes, ou-
tre les incommoditez de tant d'allées & venues. Confidérez les bijoux,
qui font prefque le feul ornement du Roïaume, 8c qu'on a donnez en gage ,
afin que vous foïez délivrez. Confidérez finalement ce que vous avez
fait à Nous, & à Vous-mêmes ; le danger & la ruine, dont toute la Chré-
tienté et oit menacée à cet fgard, & que vous avez failli de nous caufer.
Cette belle Forterefie, qui auroit été digne d'une plus grande défenfe,
s'eft rendue, non pas fur des attaques, mais fans coup férir, & fur les feu-
les aparences d'être attaquée; comme fi elle n'étoit munie de tant de fof-
fez & de murailles , que pour fa pompe , & nullement pour fa défenfe. Il
fcmble que vous & vôtre Peuple n'aviez pas aflez de force pour pouvoir
réfifter, ni aflez de courage pour l'ofer faire. Quelle tache perpétuelle
n'en reftera-t-il pas à vôtre honneur ! 8c quelle perte de fidélité & de vô-
tre bonne foi , dont le dernier hommage & ferment ne fait prefque que
fortir de vôtre bouche! Car encore que cette plaie fe guérifle, la cicatri-
ce en paroîtra toujours. Je ne voudrais pas ici, & par un fâcheux récit
de cette malheureufe aélion , vous rendre plus confus , ni troubler vos
cœurs, qui en font peut-être déjà entièrement revenus, & difpofez pré-
fentement à de meilleurs fentimens, fi nous n'étions pas obligez à parler
8c à reprocher, afin 'qu'on ne nous le reproche. Je fouhaiterois que nous
puiffions auffi bien oublier que taire les chofes paflees 8c les injures de
ce tcms-là-, car je dis le moins de ce qu'on devroit dire, 8c je ne dirais
que de pures véritez, fi je voulois reprefenter ce que vous avez commis
par vôtre faute, par vôtre précipitation, 8c plutôt en efpérance des émo-
M 3 „ lumens
p4 MEMOIRES, NEGOTI ATIONS, TRAITEZ,
1700. „ lumens particuliers , que de crainte de dommages publics. N'avez-vous"
■* „ pas couru riique, félon les Loix publiques de tous les Roïaumes, de per-
„ dre vos privilèges, vos biens, 6c vos têtes? 6c fi le tcmsîe ibufFroit, je
„ vous montrerais que cet Ecrit, qui a para pour vôtre juftification, étoit
„ plutôt à vôtre préjudice. Ainfi le châtiment devrait fe faire à proportion
„ du Crime. Mais, c'eft la clémence de nôtre Serenifîîme Roi 6c la confi-
„ dération de toute la République, qui aime mieux de vous corriger, pour
„ en donner l'exemple à la Pofterité , que de vous perdre ; 6c ils Ce conten-
„ tentent de guérir les bleflures fans les couper, à l'imitation d'un bon Mé-
„ decin , qui ôte les maladies fans toucher les malades, car un bon Juge con-
damne les fautes , fins haïr les coupables. La bonté de nôtre Auguste
comme d'un Père, 6c l'affection de la République comme d'une bonne
Mère , vous reprendront entre leurs bras , après que vous aurez été affez
châtiez 6c mortifiez; mais, comme l'on ne prévoit pas bien les choies futu-
res fans examiner les pafiëes, 6c que par les cas préfens l'on fe précaution-
ne fagement de l'avenir, Nous, étant portez d'un véritable amour envers
vous, avons jugé à propos, avant que de toucher à ceux-ci qui ont fait le
mal , de nous fervir de cette modération , à lavoir de parler préalablement
„ à vous qui avez eu, 6c qui avez encore la direction, 6c de vous demander
„ immédiatement, 6c fans intervention d'Arbitres, les perfonnes, qui étoient
coupables d'une fi vilaine trahifon,- Que nous puiffions favoir première-
ment par vôtre propre jugement , pourvu qu'il foit convenable, comment
on pourrait effacer devant le monde un fi grand Crime ; comment réparer
de fi grands dommages de la République ; quelle forte de châtiment , 6c
ce qu'on devrait ordonner d'ailleurs dans une affaire fi délicate 6c fi impor-
tante ? Et quand vous aurez bien reconnu la faute , redreflez les choies qui
fe font fi vilainement paiîees, 6c propofez par vous-mêmes les moïens les
„ plus propres à en guérir la plaïc. Vous vous attirerez l'affection paternel-
le du Sereninîme Roi 6c la maternelle de la République; à faute de cela,
Nous ferons obligez de procéder félon la rigueur de la Juftice , 6c par le
chemin qui nous eft marqué dans nôtre Inftruétion, pour corriger 6c pu-
nir ce qui eft arrivé, 6c pour empêcher par de bonnes Ordonnances, qu'il
n'en arrive plus de même à l'avenir.
Les Magiftrats alléguèrent plufieurs raifons pour fe juftîfier. Mais elles ne
produifirent aucun effet. La vûë du Difcours qu'on. vient de raporter étoit
uniquement d'obliger la Ville à contribuer quelque bonne fomme , 6c non pas
de lui ôterfes privilèges, ni de noter fes Magiftrats d'infamie. Auflî convint-
on deux jours après, qu'elle conferveroit fes privilèges, 6c ferait difpcnfée com-
me auparavant de recevoir garnifon de la République. C'étoit cependant
Conven- fous cinq claufes. 1. Que lors que l'on voudrait retirer les Joyaux de la
;:onsfai- Couronne d'entre les mains de l'Electeur de Brandebourg, la Ville fournirait
lesayec ^Q n,j]}e £cus p0ur fon Contingent dans les 300. mille, pour leiquels les
crhlbinc. joyaux avoient été engagez. 2.. Qu'au lieu de deux cent Soldats qu'elle
avoit coutume d'entretenir, clic aurait fur pied 500. Fantaflins & 30. Cava-
liers, 6c en cas de danger elle augmenterait ces Troupes jufqucs à deux mille
hom-
ET RESOLUTIONS D'E T A T. 9ft
hommes effectifs. 3. Qu'elle prendrait un Commandant expérimenté, qui 1700.
prêterait un Serment fort ample,- félon la Formule que les Commiflîiires en ~~
donneraient. 4. Qu'outre l'ancien Serment le Préfident du Confeil ferait
tenu dé jurer de ne jamais rendre la Ville à qui que ce foit, à moins. qu'elle
ne fût réduite à la dernière extrémité. Et enfin f . que l'on accorderait aux
Catholiques Romains & à leur Eglilé dans h Ville, certains privilèges, dont
ils n'avoient pas auparavant jouï.
Outre la vûë de ces Commiflaires on attribua la furprife d'Elbing à quel-
que connivence entre le Roi Auguste & l'Electeur de Brandebourg. Le
premier avoit en vûë de fe conferver dans la Pologne fes Troupes Saxonnes.
Les Polonois s'aheurtoient à vouloir faire fortir du Roïaume ces Troupes Al-
lemandes. Cet orage étant paffé , ce Roi-là fufeita enfuite dans la même vûë
Oginski contre la Maifon de Sapieha en Lituanie. Cela fut par le cours du
tems la fource de bien des troubles, ainfi qu'on verra dans la fuite. D'ail-
leurs, l'Electeur de Brandebourg s'étoit formé l'idée de prendre le Titre de
Roi en Pruffe. Par le moïen de la furprife dCElbing, Se par le Traité de fa
reftitution , il eut lieu d'entrer en fecréte Négociation pour faire aprouver
par la République de Pologne cette nouvelle Roïauté. C'étoit le point le
plus feabreux , parce que cela intéreiîbit de plus près cette République.
Cet Electeur en obtint fon confentement , qui fut enfuite contefté. Ce fut
en lui donnant des Lettres Reverfales, que cette Roïale érection ne tirerait
point à conféquence contre la République. Voici ces Lettres Reverfales.
FREDERICUS TERTIUS, DeiGratia, &c.
f\Mnibus quorum interejl notum facimus , cum 'titulum ci? Dignitatem Regalem, Rèverfa-
quibus ante plura fœcula fulgebat Ducaiis noflra PruJJia, reajfumendum me- ,es Rei-
ritb cenfeamus , nihil ex hac Majeflatica prœrogativa PruJJiœ Nojlrœ quœ nunc poionke
Ducaiis appellatur, prajudicii inferendum nec inferri pojfe juri ac pojfejjioni Re- datae ab
gain PruJJiœ, quâ SereniJJimus Rex & Rejpublica Poloniœ gaudent , neque ni- Ele&ore
lam in eamdem PruJJiam Regalem prœtentionem à nobis ac Succejforibus Noftris Bra^.de-
inde vindicandam ; Paila quoque Bydgojlienfia perpetui Fœderis SereniJJïmam ù
Regiam Majeftatem , inclitamque Rempublicam ci? nos inter , prœcipue vero Art.
VI. quo cautum eft ut deficientibus mafcuUs ex lineâ légitima Divi quondam Pa-
rent i s Nojlri Defcendentibus Serenijjimis Regibus ci? Reipublic*e Poloniœ jus fuum
integrum in alte memoratam PruJJiam Ducalcm refervetur , plenè ac facroj'anclè
fervanda ,_ neque ullatenits vel in toto vel in parte g, Nobis ac Succejforibus NoJIris
infringenda ac violanda, in quorum fidem Dat. Coloniœ ad Spream die 8. Junii
1700.
Pekdant ces Troubles 6c ces Négociations, on poufîbit celles pour le
fécond Traité de Partage de la Monarchie d'Efpagne. Nonobstant les tre-
moufTemens des Efpagnols, les vues de ce Traité fubfiftoient toujours. Il y
eut cependant des traverfes. Elles venoient entre autres de la part de l'habile
Mr. Dyckvelt, Préfident des Etats de la Province d'Utrecht. Ce grand
homme fe méfioit de cette manœuvre de la France. Il lbûtenoit que les
vues
96 MEMOIRES, NEGOCIATIONS, TRAITEZ,
tjop. vues de cette Couronne-là ne tendoient qu'à fiiire tomber l'Angleterre & les
' — : — Etats Généraux dans des pièges fort dangereux. Il en alléguoit un exemple
récent fur la même matière. C'elt qu'au tems que cette Couronne avait
pouffé à la perfection le premier Traité dudit Partage, elle avoit fait des dé-
marches contraires j en railant remetre entre les mains de Charles
II. Roi d'Efpagne par ton Ambafladeur un Mémoire , dont il recommanda
à ce Roi-là le lecret. Mr. Dyckvelt, qui avoit trouvé le moïen d'avoir !a
Copie de ce Mémoire, le produifit tel que voici en Italien.
SIRE,
Mémoi- JL Rà mio Signore m'hà commandato di dire à Vofira Maefià, che doppo ch" 'El-
it fecret la Vhà ajjicufato pofiitivamente, ts 'à taie effetto incarïcatone me fiefijb , di non
écrit par innovaré già mai cofia alcunâ contraria alla Pace , ed allafuapontuale effervan-
la Fran- Za , fiè/nbrarebbe or a bien difficile al Rè mio S ignore , di dar fede alla mova
Roi d'un Tefiamento fatto dalla Mae/là Vofira in f avère dcl Prencipe Elett orale di
Charles Baviera , fe cib non gli venijjè confirmât o in . modo , cbe non <vi refila piu luogo
U- alcuno di dubitame.
Per taie incidente , Sire , cbe mai potera afipettarfi dal Rè mio Padrone , at-
tefa Pintiera confiidenza cbe aveva nella Regia parola di Vcfilra Maefià , fiarebbe
mancare aW amieizia medefiima , délia quale bà ricevuto Vofira Maefià , doppo
la conclufione délia Pace tanti contraÇegni perla fiua parte , ed ancora à cib che
dève per confiervare il ripofo aW Europa; e finalmente a/l' obbligo cbe gli corre
di mar.tenere le ragioni, che le leggi ed i cofimui inviolabili délia Monarchi.i fia-
bilificono in fiavore dcl Delfino umeo Figlio difiua Maefià, s1 Ella non diebirrafife
fin cl1 or a, corne m'bœ commendato di dire alla Maefià Vofira, cbe prenderà le
mifiure necefiarie per impedire ml. medefimo tempo la rinovazione délia Guerra ,
ed il pregiuàicio cbe pretendi aver ricevuto. Cib cbe devo aggiungere à quefio,
Sire, è cbe il Rè mio S ignore ri mira corne oggetto piu dejiderabde quello di veder
godere per lungo tempo à Voflra Maefià gli Stati , che bà ricevuto da Dio , - e
Vofira Maefià- fia bene cbe non bb mai per parte del mio Rè, portât o alcune ifilan-
ze , che riguardi quanto appartienne alla Succefiione.
Finalmente, Sire, confideri Voflra Maefià fe quefta attenzione cofi difinteref-
fata dcl Rè mio S ignore , ed il defiderio cfrcgli bà mofirato di mantenere una per-
fietta ii'Jclligeuza- cou que fi a Curona, meritava che fi prendcjjè una fomigliante
rifoluzione, e quanto F Europa tuita potrà rimproverarle un giorno, fie per difia-
ventv.ra la defirezza del Rè mio Signore non venifife, ad impedire il. torbido, cbe
puo temerji alla tranquillita générale per quefio accidente. '.
. Mr. Dyckvelt ajouta encore, que l'on fàvoit que le Comte de Tallard
avoit dit en confidence à quelqu'un, qui lui propofoit à Londres d'avoir
quelque clandeiline intelligence avec lui, qu'il avoit précifément dans fes Inf-
tructions de ne faire la moindre choie, qui pût donner lieu au moindre loup -
çon. Ce que l'on devoit regarder comme un ibporifique.
Ceux, quiétoient pour figner le Traité, diioibnt qu'il falloit attribuer ces
précautions de la France , à la crainte qu'elle avoit du Roi Guillaume
comme
ET RESOLUTIONS D'ETAT. &j
comme étant le principal Auteur de toutes les Alliances contre elle. Que 170$.
c'étoit à cette crainte-là qu'on devoit attribuer les grandes carefles qu'on —
avoit faites au Comte de Portland pendant fon AmbaiTade, Se la promptitu-
de, avec laquelle le Roi Très-Chrêtien avoit, à la requifition de Sa Majefté
Britannique, fait rendre au Marquis de la Forêt, 6c à Maimnl, qui avoit
été Miniftre à Charenton, les biens que l'un 6c l'autre avoient laiffèz en
France, lors qu'ils s'en retirèrent pour leur Religion.
Mr. Dychvelt s'écria là-deflus, qu'une pareille crainte étoit mal fondée.
Qu'il connoiflbit l'humeur fiére 8c hautaine de la France, 6c que les mauvais
fùccès que les Armées confédérées avoient eus à l'attaque de Steinkerke, 6c à
la funefte déroute de Lande» 6c en d'autres occasions n'étoient pas capables
d'infpirer de la crainte. Que par raport à la reftitution des biens des deux
peifonnes nommées, il ne falloit en inférer autre chofe, fi non que la France
ne l'avoit permire, que parce qu'il ne s'agiflbit que de quelques chaumières,
6c regardant la demande qu'on en avoit faite en faveur d'un Avanturier 6c
d'un lîmple Predicant , comme une efpéce de bafiefle.
Ges raifons, bien loin d'être aprouvées, furent caufe que celui qui les allé-
guoit, en fouffrit une efpéce de difgrace de la part du Roi d'Angleterre ; 6c,
pour ne pas s'attirer pis, il figna enfuite avec les autres Députez de la Répu-
blique ce fatal Traité de Partage, tel que le voici.
SOit notoire à tous qui ces préfentes verront, que le Séréniflîme 6c très- Traitc:
puifîant Prince Louis XIV., par la grâce de Dieu, Roi Très-Chrê- r^t.
tien, 6cc. 6c le Séréniftime 6c très- puiffant Prince Guillaume III., auffic, le
par la grâce de Dieu, Roi de la Grande-Bretagne 6cc. 6c les Seigneurs États Roi dc
Généraux des Provinces- Unies des Païs-Bas, n'aïant rien de plus à cœur que 5^' &
de fortifier par de nouvelles liaifons la bonne Intelligence rétablie entre S. ies États
M. T. C., S. M. de la Grande-Bretagne, 6c lefdits Seigneurs Etats Gêné- Géné-
raux, par le dernier Traité, conclu à Ryfwick, 6c de prévenir par des me- ""* des
fures prifès à tems les événemens, qui pourroient exciter de nouvelles Guer- t0'ucj,ânt
res dans l'Europe, ont donné pour cet effet leurs Pleins-Pouvoirs pour con- le il.
venir d'un nouveau Traité : fçavoir, Sadite Majefté Très-Chrétienne, au Sr. Partage
Camille d'Hoftun, Comte de Tallard, Lieutenant Général des Armées du ^| la
Roi 6c de la Province de Dauphiné, Ambaffàdeur Extraordinaire dc France cji°enar"
en Angleterre} 6c au Sr. Gabriel Comte de Briord, Marquis de Senofan, d'Efpa-
Confeiller du Roi en tous fes Confeils , 6c fon AmbaiTadeur Extraordinaire gne , le
auprès defdits Seigneurs Etats Généraux des Provinces-Unies des Païs-Bas: 1S Mïrs
Sadite Majefté Britannique, au Sieur Guillaume Comte de Portland, Vicomte I7001"
de Cirencefter, Baron de Woodftock, Chevalier de l'Ordre de la Jarretière
6c Confeiller du Roi en fon Confeil Privé ; 6c au Sr. Edward Comte de Jer-
fey, Vicomte Villiers, Baron de Hon, Chevalier Maréchal d'Angleterre,
premier Secrétaire d'Etat 6c Confeiller du Roi en fon Privé Confeil : Lefdits
Seigneurs Etats Généraux, aux Sieurs Jean van EJfen, Bourgmaître 6c Séna-
teur de la Ville de Zutphen, Curateur de l'Univerfité àHarderwick ; Frédé-
ric Baron de Rheedc, Seigneur de Lier, St. Antoine, Terlée, de l'Ordre de
la NoblefTe dc Hollande" 6c Weft-Frifej Antoine Hcinfius, Confeiller Pen-
Tom. I. N fionnaire,
PS MEMOIRES, NEGOCIATIONS, TRAITEZ,
1700. fionmire, Garde du Grand Sce.m, & Sur-Intendant des Fiefs de la même
Province; Guillaume de Naflau, Seigneur d'CWjra, Cortyne, &ç. premier
Noble, 6c reprefentant la Nobleflè dans l'Affemblée des Etats, & Député
Confciller de Zélandej Evcrhard de Weede, Seigneur de Wcede, Dvckvelt,
Rattcles, Sec. Seigneur Foncier de la Ville d'Oadewater, Doyen & Efeolatre
du Chapitre Impérial de Ste. Marie à Utrecht, Dyckgrave de la Rivière du
Rhin dans la Province d'Utrecht, Préfiderjt des Etats de la même Province >
Guillaume van Haren, Grietman du Bildt, Député de la Nobleflè aux Etats
de Frife, Se Curateur de l'Univerfité de Franequer; Arnold Lemker , Bourg-
maître de la Ville de Deventer ; Se Jean van Heeck, Sénateur de la Ville de
Groningue; tous Députez dans l'Affemblée defdits Seigneurs Etats Géné-
raux, de la part des Etats de Gueldre, de Hollande Se Weft-Frife, de Ze->
lande, d'Utrecht, de Frife, d'Over-Yffel , de Groningue & Ommelandes:
lefquels, en vertu defdits Pouvoirs, font convenus des Articles fuivans.
I. La Paix rétablie par le Traité de Ryfwiek entre S. M. T. Chrétienne, -
Se Sa Majefté Britannique, Se les Seigneurs Etats Généraux des Provinces-
Unies des Païs-Bas , leurs Héritiers 8c SuccefTcurs , leurs Roïaumes, Etats, 8c
Sujets , fera ferme Se confiante ; 6c leurs Majeftez , 6c lefdits Seigneurs Etats
Généraux , feront réciproquement tout ce qui pourra contribuer à l'avantage
Se à l'utilité de l'un 6c de l'autre.
II. Comme le principal objet que Sadite Majefté T. C, 6c Sadite Majefté
de la Grande-Bretagne, Se lefdits Seigneurs Etats Généraux lé propofent , eft
celui de maintenir la tranquillité générale de l'Europe ; ils n'ont pu voir fans
douleur que l'état de la fanté du Roi d'Efpagne foit devenu depuis quelque
tems fi languiflant, qu'il y a tout à craindre pour la vie de ce Prince, quoi
qu'ils ne puiiTent tourner leurs penfées du côté de cet événement fans afflic-
tion, par l'amitié fincére Hi véritable qu'ils ont pour lui. Ils ont cependant
eftimé, qu'il étoit d'autant plus néceffaire de le prévoir, que S. M. Catholi-
que n'aïant point d' Enfans, l'ouverture de fa Succeflîon exciteroit infaillible-
ment une nouvelle Guerre, fi le Roi Très-Chrêtien foûtenoit fes préten-
tions , celles de Monfeigneur le Dauphin ou' de fes Defcendans, fur toute la
Succeffion d'Efpagne > & que l'Empereur voulût auffi faire valoir fes préten-
tions, celles du Roi des Romains, de l'Archiduc fon fécond Fils, ou de fes
autics Enfans mâles ou femelles, fur- ladite Succeffion.
III. Et comme les deux Seigneurs Rois 6c les Seigneurs Etats Généraux
défirent fur toutes chofes la confervation du repos public, Se d'éviter une
nouvelle Guerre dans l'Europe par un accommodement des difputes 8c des
différens qui pourroient réfulter au fujet de ladite Succeffion, ou par l'om-
brage de trop d'Etats réunis fous un même Prince; ils ont trouvé bon de
prendre par avance des mefures nécefTaires pour prévenir les malheurs, que le
trifte événement de la mort du Roi Catholique fans Enfans poarroit pro-
duire.
; V. Ainfi, a été accordé èc convenu, que fi le fufdit cas arrivoit, le Roi
Très-Chrêtien, tant en fon propre nom, qu'en celui de Monfeignear le Dau-
phin, fes Enfans mâles ou femelles, Héritiers Se SuccefTcurs, nez Se à naître,
comme auflî mon dit Seigneur le Dauphin, pour foi-même, (es Enfans mâ-
les
s" ET R.ESOL U.T IONS D'E T A T. 99
les ou femelles, Héritiers 8c SuccefTeurs, nez & à naître, fe tiendront Taris- l700-
faits, comme ils fe tiennent fatisfaits par la prclente, que mon dit Seigneur '
le Dauphin ait pour fon Partage, en toute propriété, pofTeflion plcniére, &
extinction de toutes les prétentions fur la Succeflîon d'Efpagne , pour en
jouir, lui, fes Héritiers, SuccefTeurs , Defcendans, mâles ou femelles, nez Se
a naître, à perpétuité, fans pouvoir être jamais troublé fous quelque prétexte
que ce foit de droits ou de prétentions , directement ou indirectement , mê-
me par Ceffion, Appel, Révolte, ou autre voie, de la part de l'Empereur, du
Roi des Romains, du Serenifîîme Archiduc Charles fon fécond Fils, des
Archiduchefles, de fes autres Enfans mâles ou femelles 8c Defcendans, (es
Héritiers, SuccefTeurs, nez & à naître, les Roïaumes de Naples & de Sici-
le en la manière que les Efpagnols les polTédent préTentement } les Places dé-
pendantes de la Monarchie d'Efpagne, fituées Tur la Côte de ToTcane ou
Mes adjacentes, compriTes fous le nom de Santo Stephano, Porto Hercole,
Orbitello, Talamone, Porto-Longone , Piombino, en la manière aufii que
les ETpagnols les tiennent préfentement ; la Ville & le Marquifat de Final ,
en la manière pareillement que les Efpagnols les tiennent ; là Province de
Guipufcoa, nommément les Villes de Fontarabie 8c de St. Sebaftien, fituées
dans cette Province, & Tpécialement le Port du Paflàge, qui y eft compris,
avec cette reftriérion feulement que s'il y a quelques Lieux dépendans de la-
dite Province, qui Te trouvent fituées au delà des Pyrennécs ou autres Mon-
tagnes de Navarre, d'Alava, ou de BiTcayc du côté de l'ETpagne, ils refte-
ront à l'ETpagne; & s'il y a quelques Lieux pareillement dépendans des Pro-
vinces foûmifes à l'ETpagne, qui Toient en deçà des Pyrénées ou autres Mon-
tagnes, de Navarre, d'Alava, ou deBiTcaye, du côté de la Province de Gui-
puTcoa, ils refteront à la France; & les trajets deTdites Montagnes, Sk lefdi-
tes Montagnes qui Te trouveront entre ladite Province de GuipuTcoa, Navar-
re, Alava, ou de BiTcaye à qui qu'elles apartiennent, Teront partagées entre la
France & l'ETpagne, en forte qu'il reftera autant defdites Montagnes & tra-
jets à la France de Ton côté, qu'il en refiera à l'Efpagne du fien; le tout
avec les Fortifications, Munitions de guerre, Poudres, Boulets, Canons,
Galères, Chiourmes, qui fè trouveront apartenir au Roi d'Efpagne, lors de
Ton décès fans Enfans, & être attachez aux Roïaumes, Places, Mes, & Pro-
vinces, qui doivent compofer le Partage de Monfeigneur le Dauphin: bien
entendu que les Galères, Chiourmes, 8c autres effets appartenais au Roi
d'Efpagne, par le Roïaume d'Efpagne, 8c autres Etats qui tombent dans le
Partage du Sereniffîme Archiduc , lui refteront. Celles qui apartiennent aux
Roïaumes de Naples 8c de Sicile devant revenir à Monfeigneur le Dauphin,
ainfi qu'il a été dit ci-defTus.
De plus, les Etats de Mr. le Duc de Lorraine, à favoir les Duchez de Lor-
raine 8c de Bar, ainfi que le Duc Charles IV. de ce nom, les pofTédoit,
êc tels qu'ils ont été rendus par le Traité de RyTwick, feront cédez 8c tranf-
portez à Monfeigneur le Dauphin, Tes Enfans, Héritiers 8c Succefîèurs, mâ-
les ou Temelles, nez Se à naître, en toute propriété &c poflèffion pleniére, en
la place du Duché de Milan, qui Tera cédé 8c tran.'porté en échange audit
Duc de Lorraine j Tes Enfans, mâles ou femelles, Héritiers, Defcendans,
N i Suc-
ioo MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
1700. Succefleurs, nez Se à naître, en toute propriété Se poffdîion pleniére, le-
• quel ne réfutera pas un Parti fi avantageux. Bien entendu que le Comté de
Bitfche apartiendra à Monfr. le Prince de Vaudemont , lequel rentrera dans
la poflefllon des Terres dont il a joui ci-devant, qui lui ont été ou dû être
tendues en exécution du Traité de Ryfwick. Moïennant lefquels Roïaumes,
Mes, Provinces, Se Places, ledit Roi Très-Chrétien, tant en foir propre
nom, qu'en celui de Moniéigneur le Dauphin , les Enràns mâles ou femel-
les, Héritiers & Succefleurs, nez Se à naître, comme auflî mon dit Seigneur
le Dauphin pour foi-même, fes Enfans,. mâles ou femelles, Héritiers Se Suc-
cefleurs , nez Se à naître , ( lequel a auiîï donné fon Plein- Pouvoir pour cet
effet , au Sieur Comte de Tallard , Se au Sr. Comte de Briord ) promettent
Se s'engagent de renoncer lors de l'ouverture de ladite Succcflion d'Efpagne,.
comme en ce cas-là ils renoncent dès. à préfent par celle-ci, à tous les Droits
& Prétentions fur ladite Couronne d'Efpagne & fur tous les autres Roïau-
mes, Mes, Etats, Païs, Se Places qui en dépendent préfentement, à l'excep-
tion de ce qui eft énoncé ci-deflus pour fon partage. Et de tout cela ils fe-
ront expédier des Aétes folemnels dans la plus forte Se la meilleure forme
qu'il fe pourra, qui feront délivrez, au tems de l'échange des Ratifications de-
ce préfent Traité,. au Roi de la Grande-Bretagne, 8c aux. Seigneurs Etats Gé-
néraux.
V. Toutes les Villes, Places, Se Forts fituez dans les Roïaumes Se Provin-
ces qui doivent compofer le Partage dudit Seigneur Dauphin feront confer-
vez fans pouvoir être démolis-.
VI. Ladite Couronne d'Eipagne, Se les autres Roïaumes, Mes, Etats ,-
Païs, Se Places, que le Roi Catholique poflède préfentement, tant dehors
que dedans l'Europe, feront donnez ce aflignez au Sereniilimc Archiduc
Charles,. fécond Fils de l'Empereur (à l'exception de ce qui a été énoncé
dans l'Article quatre, qui doit compofer le Partage de Moniéigneur le Dau-
phin, Se du Duché de Milan en conformité dudit Article quatre ) en toute
propriété Se pofieflion pleniére,. en Partage Se extinction de toutes fes préten-
tions fur ladite Succcflion d'Efpagne , pour en jouir lui Se fes Héritiers Se
fe s Succefleurs , nez Se à naître, à perpétuité, fins pouvoir être jamais trou-
blé fous quelque prétexte que ce foit de Droits ou de Prétentions, directe-
ment ou indirectement, même par ceflîon,. appel, révolte, ou autre voie, de
la part du Roi Très-Chrétien, de mon dit Seigneurie Dauphin, ou de fes
Enfans mâles ou femelles, fes Héritiers Se Succefleurs, nez Se à naître : moïen-
nant laquelle Couronne d'Efpagne Se autres Roïaumes, Mes, Etats, Païs, Se
Places qui en dépendent, l'Empereur, tant en fon propi-e nom, qu'en celui
du Roi des Romains, du Sereniflîme Archiduc Charles, fon fécond Fils ,
des Archiducheflls fes filles, fes Enfans, leurs Enfuis, mâles ou femelles,
Héritiers, Defcendans, ou Suoceflèurs -, nez Se à naître > comme aufli le Roi
des Romains pour lui, Se le Sercniflime Archiduc Charles, dès qu'il tera
Majeur, pour lui-même, leurs Enfans, Héritiers Se Succefleurs, mâles ou
femelles, nez Se à naître -, fe tiendront fatisfaits que ledit Sercniflime Archi-
duc Charles ait en extinélion de touus leurs prétentions fur la Succcflion
d'Efpagne ladite ceflion faite ci-deflus. Et ledit Empereur, tant en fon pro-
pre
ET RESOLUTIONS D'E T A T. 101
pre nom, qu'en celui du Roi des Romains, du Sereniffime Archiduc Char- 1700.
les, fon fécond fils, des ArchiduchefTes fes filles , fes Enfans mâles ou fe- — —
melles, Scieurs Héritiers,- & Succeffeurs, comme aulfi ledit Roi des Ro-
mains en fon propre nom, renonceront, lors qu'ils entreront en ce préfènt
Traité, Se qu'ils le ratifieront, & le Sereniifime Archiduc Charles dès
qu'il fera Majeur, à tous autres Droits Se Prétentions fur les Roïaumes, Ifies,
Etats, Pais, & Places, qui compofent les Partages Se les Portions affignées ci-
deffus à Monfeigneur le Dauphin, Se à celui qui aura le Duché de Milan par
échange de ce qui fera donné à mon dit Seigneur le Dauphin. Et que de
tout cela ils feront expédier des Actes folemnels dans la plus forte Se la meil-
leure forme qu'il fe pourra ; fçavoir l'Empereur Se le Roi des Romains quand
ils ratifieront ce préfent Traité, Se le Sereniffime Archiduc dès qu'il fera
Majeur,, lefquels feront délivrez à S. M. Britannique Se aux Seigneurs Etats
Généraux.
VII. Immédiatement après l'échange des Ratifications de ce préfènt Trai-
té, il fera communiqué à l'Empereur, lequel fera invité d'y entrer} mais, fl
trois mois après, à compter du jour de ladite invitation, ou le jour que S.
M. Catholique viendra à mourir, fi c'étoit avant le terme de trois mois, S:
M. Impériale, ou- le Roi des Romains, refufoient d'y entrer, Se de convenir
du Partage affigné au Sereniffime Archiduc, les deux Seigneurs Rois ou leurs-
SuccefTeurs, Se les Seigneurs Etats Généraux conviendront d'un Prince, au-
quel ledit Partage fera donné : Se en cas que nonobftant la préfente Conven-
tion ledit Sereniffime Archiduc voulut prendre poftèffion,ou de la Portion qui-
lui fera échûë avant qu'il eut accepté le préfent Traité , ou de celle qui fe-
roit affignée à Monfeigneur le Dauphin, ou à celui qui aura le Duché de
Milan par échange, comme il eft dit ci-defiùs, lefdits deux Seigneurs Rois
Se les Seigneurs Etats Généraux,. en vertu de cette Convention, l'empêche-
ront de toutes leurs forces.
VIII. Le Sereniffime Archiduc ne pourra parler en Efpagne, ni dans le
Duché de Milan, du vivant de Sa Majefté Catholique, que d'un commun
confentement, Se point autrement.
IX. Si le Sereniffime Archiduc vient à mourir fans Enfans, foit avant ou après
la mort du Roi Catholique, le Partage qui lui eft affigné ci-defius- par l'Ar-
ticle fix de ce Traité paflêra à tel Enfant mâle ou femelle hors le Roi des'
Romains, que S. M. Impériale trouvera bon de défigner : Se en cas que Sa-
dite Majefté Impériale vint à décéder fans avoir fait ladite défignation , Elle
pourra être faite par le Roi des Romains ; mais le tout à condition que ledit
Partage ne pourra jamais être réuni , ni demeurer en la perfonne de celui qui
fera Empereur ou Roi des Romains, ou qui fera devenu l'un ou l'autre, foit
par Succeffion , Teftament , Contract de Mariage , Donation , Echange ,
Ceffion, Appel, Révolte, ou autre voie: Se de même ledit Partage du Sere-
niffime Archiduc ne pourra jamais revenir ni demeurer en la perfonne d'un.
Prince, qui fera Roi de France, ou Dauphin, ou qui fera devenu l'un ou
l'autre, foit par Ceffion , Teftament, Contract de Mariage, Donation,
Echange, Ceffion, Appel, Révolte , ou autre voie.
X. Le Roi d' Efpagne venant à mourir fans enfans, Se ainfi le lufdit cas
N 3 arri-
ioi MEMOIRES, NEGOTiATIONS, TRAITEZ,
;-:o. amvant, les deux Seigneurs Rois 6c les Seigneurs Etats Généraux, s'obli-
1 gent de laiifcr toute la Succeffion dans l'état comme alors elle le trouvera
fans s'en laifir en tout ou en partie, directement ni indirectement; mais cha-
que Prince pourra d'abord le mettre en poMeffion de ce qui lui elt affirmé
pour fon Partage, dès qu'il aura fàtisfait de fa part aux Articles quatre 6c fix
précédens celui-ci: 6c, s'il y trouve de la difficulté, les deux Seigneurs Rois-
6c les Seigneurs Etats Généraux feront tous leurs devoirs poffibles, afin que
chacun foit mis en pofTeffion de fa Portion , félon cette Convention , 6c qu'el-
le puifle avoir fon entier effet, s'engageant à donner par terre 6c par mer, les
fecours 6c aflîltances d'hommes 6c de vaiflèaux pour contraindre par la force
ceux qui s'opnoferont à ladite exécution.
XI. Si letdits Seigneurs Rois, ou les Seigneurs Etats Généraux, ou quel-
qu'un d'eux, font attaquez de qui que ce foit , à caufe de cette Convention
ou de l'exécution qu'on en fera, on s'affiliera mutuellement l'un l'autre avec
toutes lès forces , 6c on fe rendra Garand de la ponctuelle exécution de ladite
Convention 6c des Renonciations faites en confequence.
XII. Seront admis dans le préfent Traité tous Rois , Princes, 6c Etats qui
voudront y entrer, 6c il fera permis auxdits deux Seigneurs Rois 6c aux Sei-
gneurs Etats Généraux 6c à chacun d'eux en particulier, de requérir 6c invi-
ter tous ceux qu'ils trouveront bon de requérir 6c inviter d'entrer dans ce
préfent Traité, 6c d'être femblablement Garands de l'exécution de ce Traité
6c de la validité des Renonciations qui y font contenues.
XIII. Et pour aflirrer encore davantage le repos de l'Europe, lefdits Rois,
Princes, 6c Etats feront non feulement invitez d'être Garands de ladite exécu-
tion du préfent Traité 6c de la validité defditcs Renonciations comme ci-def-
fus: mais fi quelqu'un des Princes, en faveur defquels les Partages font faits,
vouloit dans la fuite troubler l'ordre établi par ce Traité, faire de nouvelles
entreprifes y contraires, 6c ainfi s'agrandir aux dépens les uns des autres, fous
quelque prétexte que ce foit, la même Garantie fera cenfée devoir s'étendre
auffi en ce cas; en forte que les Rois, Princes, 6c Etats qui la promettent fe-
ront tenus d'emploïer leurs forces pour s'oppofer auxdites entreprifes 6c pour
maintenir toutes chofes dans l'état convenu par lefdits Articles.
XIV. Que fi quelque Prince que ce foit s'oppofe à la prife de pofleffion
des Partages convenus , lefdits deux Seigneurs Rois 6c les Seigneurs Etats
Généraux, feront obligez de s'entr'aidei l'un l'autre contre cette oppofition
& de l'empêcher avec toutes leurs forces ; 6c l'on conviendra, d'abord après
la Signature du préfent Traité, de la proportion que chacun doit contribuer
tant par Mer que par Terre.
XV. Le préfent Traité, 6c tous lesAct.es faits en. confequence ou qui y ont
raport, 6c nommément les Actes folemnels que S. M. T. Chrétienne 6c Mon-
feigneur le Dauphin font obligez de donner, en vertu de l'Article quatre ci-
delfiis, feront enregistrez au Parlement de Paris, Suivant leur forme 6c l'ula-
ge ordinaire, pour avoir lieu aux conditions qui y font portées, dès que l'Em-
pereur fera entré dans le préfent Traité, ou au bout des trois mois qui lui l'ont
donnez pour cet effet , s'il n'y entre pas plutôt -, 6c pareillement Sa Majeité
Impériale fera tenue, quand Elle entrera dans le préfent Traité, de le faire
aprrou-
ET RESOLUTIONS D'E T A T. 10?
approuver 8c enreglftrcr avec tous les Aftes faits en conféquence, ou qui y 1700.
ont rapport, nommément les Actes folemnels que S. M. Impériale, le Roi "
des Romains, & le Sereniffime Archiduc Charles feront obligez de donner
en vertu de l'Article fix ci-deffus, en fon Confeil d'Etat, ou ailleurs, fui-
vant les formes les plus authentiques du Pais.
XVI. Les Ratifications des deux Seigneurs Rois 8c des Seigneurs Etats'
Généraux feront toutes trois échangées en même tems à Londres, dans l'ef-
pace de trois femaines, à compter du jour que lefdits Seigneurs Etats Géné-
raux auront figné, & plutôt li faire fe peut. Fait & figné à Londres le 3.
Mars Nouveau Stile 1700. & le 21. de Février Vieux Stile 1699, par Nous
Plénipotentiaires de France & d'Angleterre, & à la Haïe le if. dudit mois
de Mars 1700, par Nous Plénipotentiaires de France, d'Angleterre, & des
Seigneurs Etats Généraux > les deux Seigneurs Rois , tk lefdits Seigneurs
Etats Généraux , étant convenus que la fignature de ce prêtent Traité fe fera
de la forte: en foi dequoi Nous avons figné le prêtent Traité de nôtre main,,
Se tait appofer le Cachet de nos Armes.
(L.S.) ïallard. (L.S.) Portland: (L.S.) J.vanEfen.
(L.S.) Briord. (L.S.) Jerfey, (L.S.) F. B. de Rheede.
(L.S.) J.Heinfms.
(L.S.) PF.deNaffau.
(L.S.) E.deWeede.
(L.S.) W.v. Haren.
(L.S.) Ar. Lemker.
(L.S.) VanHeeck.
SA Majefté Très-Chrêtienne , Sa Majefté Britannique, 6c les Seigneurs Article
Etats" Généraux, font convenus, premièrement, que fi le Roi d'Eipa- léparé,
gne ne veut point entrer dans ce Traité,. & que nonobstant il voulût foire
démolir les Villes, Places, & Ports fituez dans les Roïaumes 6c Provinces qui
doivent compofer le Partage de Monfeigneur le Dauphin, ou du Duché de
Milan, 8c dépendances detdits Roïaumes 8c Provinces, les deux Seigneurs
Rois 8c les Seigneurs Etats Généraux s'y opoferont par toutes fortes de
moïens.
Secondement, que lefdits Seigneurs Rois, 8c lefdits Seigneurs Etats Géné-
raux, emploieront leurs offices auprès de Sadite Majefte Catholique, pour
empêcher que les Gouvernemens des Provinces qui doivent compofer le Par-
tage de Monfeigneur le Dauphin, ne fortent des mains entre lefquelles ils
font ; 8c, s'il fe fait quelque changement , ils emploieront auiTi leurs bons offi-
ces , pour que lefdits Gouvernemens foient donnez à- des Efpagnols naturels.
Et troifiémement, Sa Maiefté Britannique 8c les Seigneurs Etats Géné-
raux s'engagent de garder comme en dépôt les Aftes folemnels du Roi Très-.-
Chrétien 8c de Monfeigneur le Dauphin, qui leur doivent être remis entre-
les mains, en conformité de l'Article IV. du préfent Traité figné à Londres
le 2. Mars N. S. 1700. 8c le 21. Fév. V. S. 1699. 8c à la Haïe le 2f. dudit
mois de Mars 1700, 8c d'en donner une Déclaration, en même tems que lef-
dits
io4 MEMOIRES, NEGOTI ATIONS, TRAITEZ,
1700. dits A&es feront remis entre leurs mains: 8c que l'Empereur ni le Roi des
" Romains ne feront point reçus dans le fufdit Traité, qu'ils n'aient pareille-
ment remis les A6f.es folemnels, qu'ils font tenus de remettre en conformité
de l'Article VI. du fufdit Traité, qui feront dans les mêmes termes ou équi-
valents, à la fatisfa&ion & à la fureté des Parties intéreffées, femblables au
modèle fuivant , ci-deflbus inféré.
Acte de Renonciation qui doit être faite par V Empereur en cas du décès
de Sa Majefté Catholique fans Enf 'ans , pour être ternis aux Parties intérefj'ées ,
fuivant le Traité paffé à Londres le 3. Mars N. S. 1 700. à? le Xi. Fév. V.
S. 1699. & à la Haïe le if. dudit mois de Mars 1700, dans les propres ter-
mes énoncez ci-deffous ou équivalents , ou les Parties intéreffées avec Sa Ma-
jefté Impériale trouvent leur fureté, après lequel Acte délivré :, V Archiduc ou
fes Tuteurs enfon nom pourront entrer en poffejfion defon Partage.
„ T Eopold, par la grâce de Dieu , élu Empereur des Romains Sec. à
„ 1~j tous ceux qui ces préfentes verront , favoir faifons , qu'uïant reçu Se
„ examiné le Traité fait entre le Roi Très-Chrétien, le Roi de la Grande-
„ Bretagne, Se les Seigneurs Etats Généraux des Provinces-Unies des Païs-
„ Bas, à Londres le 3. Mars N. S. 1700. Se le xi. Fév. V. S. 1699. 8c à h
„ Haïe le Xf. dudit mois de Mars 1700. pour régler la Succeffion de la Cou-.
„ ronne ^d'Efpagne, en cas que Sa Majefté Catholique vint à mourir fans
„ Enfans, 8c prévenir les fuites fâcheufes qu'un tel cas pourrait faire naître,
„ s'il n'y étoit pourvu à tems, dont la teneur s'enfuit.
Ici doit être inféré le Traité.
„ Et ledit cas, à favoir le décès du Roi d'Efpagne fans Enfans venant à
„ -arriver, nous déclarons tant en notre nom, qu'en celui du Roi des Ro-
„ mains notre Fils aîné , de l'Archiduc Charles notre fécond Fils, des
5, Archiduchefîês nos Filles, 8c nos autres Enfans 8c Defcendans mâles ou
5, femelles, les 'Héritiers 8c SuccefTeurs nez 8c à naître, d'avoir agréé, aprou-
„ vé, 8c ratifié, comme nous agréons , aprouvons, Se ratifions par la prelénte
„ ledit Traité félon fa forme 8c teneur, Se de nous obliger 8c engager, com-
„ me nous nous obligeons 8c engageons par le préfent Aéte, à obferver Se à
„ faire obfèrver ledit Traité aux mêmes conditions, obligations, ou Garan-
„ ties, qui font portées, 8c qui auront les mêmes forces que fi elles étoient
„ de nouveau ici répétées, 8c fpécialement les Articles IV. VI. VIII. 8c IX.
„ dudit Traité, par.lefquelles a été fait un Partage de ladite Succeffion de la
y, Couronne d'Efpagne en faveur du Dauphin de France, 8c de l' Archiduc
„ Charles notre lecond Fils, à condition que par nous en ferait expédié
„ des A6tes folemnels d'Acquit Se de Renonciation dans la plus forte Se la
„ meilleure forme qui fè pourroit, Se délivrer au tems que nous entrerons
„ dans le Traité fufdit : -Se, n'aïant rien de plus à coeur que de fàtisfaire audit
„ Traité., 8c prévenir toutes fortes de difputes qui pourraient furvenir au fu-
„ jet de ladite Succeffion de la Couronne d'Efpagne, nous avons déclaré ,
„ comme nous déclarons par la préfente, tant en notre propre nom., qu'au
-, nom du Roi des Romains notre Fils aîné. Se de l'Archiduc Charles
„ notre
y>
ET RESOLUTIONS D'ETAT. iof
„ nôtre fécond fils, des Archiduchëflès nos filles, ôc de nos autres Enfans & 17°°-
„ Defcendans mâles ou femelles, Héritiers ôc Succeflèurs nez & à naître i
„ que nous nous tenons fatisfaits du Partage affigné audit Archiduc Char-
„ les nôtre fécond fils , par le VI. Article , en extinction de tous nos
„ Droits, actions 6c prétentions fur le Partage affigné au Dauphin de Fran-
„ ce par l'Article IV. dudit Traité, fans aucune exception , ni réferve, ôc
„ fans que nous , ledit Roi des Romains , ledit Archiduc , ôc nos autres En-
fans , y puiffions prétendre davantage , & qu'enïùite moiennant les Roiau-
mes , Etats , Mes , ôc Provinces , affignez audit Archiduc nôtre fécond
fils, par l'Article VI. dudit Traité, nous déclarons de céder ôc tranfpor-
ter, comme nous cédons 6c tranfportons par la préfente, tant en nôtre
„ propre nom , qu'en celui du Roi des Romains , l'Archiduc Charles,
„ les Archiduchëflès nos filles, 6c nos autres Enfans, mâles ou femelles,
„ Héritiers 6c SuccefTeurs nez 6c à naître, audit Dauphin de France, les
„ Enfans 6c -Defcendans , mâles ou femelles , fes Héritiers 6c SuccefTeurs nez
„ 6c à naître, conformément audit Traité, tous nos autres Droits, actions ôc
„ prétentions , que nous ou nos Enfans , mâles ou femelles , Héritiers 6c
„ Succeflèurs nez 6c à naître, avons, ou prétendons avoir fur ladite Succef-
„ fion de la Couronne d'Efpagne , fans aucune exception, ni réferve, 6c con-
„ fentons 6c accordons en conféquence, que ledit Dauphin jouïfiè de fon
„ Partage, en toute propriété 6c poflèffion pleniére, pour lui, fes Enfans
„ 6c Defcendans, mâles ou femelles, Héritiers 6c SuccefTeurs nez 6c à naî-
„ tre, à perpétuité, fans- pouvoir être jamais troublé par nous, ou nos En-
„ fans 6c Defcendans, mâles ou femelles, nos Héritiers 6c SuccefTeurs nez
„ 6c à naître, fous quelque prétexte que ce foit, de Droits ou de Préten-
„ tions, même par Cefhon, Appel, Révolte ou .autre voie: 6c en outre
„ nous déclarons, tant en nôtre propre nom, qu'en celui du Roi des Ro-
„ mains, de l'Archiduc Charles, des ArchiduchefTes nos filles, 6c de nos
„ autres Enfuis 6c Defcendans, mâles ou femelles, Héritiers 6c Succeflèurs
„ nez ôc à naître, de renoncer, moiennant ledit Partage contenu dans l'Ar-
„ ticle VI. dudit Traité, comme nous renonçons par la préfente, à tous les
„ Droits, actions 6c prétentions qui nous apartiennent , ou que nous préten-
„ dons fur ladite Succeffion de la Couronne d'Efpagne, 6c fur les autres
„ Roïaumes, Ifles, Etats, Pais, 6c Places, qui en dépendent, 6c qui par
„ ledit Traité , font cédez 6c affignez au Dauphin de France.
„ Enfin, nous promettons, tant en nôtre propre nom, qu'en celui du Roi
„ des Romains, de l'Archiduc Charles, des ArchiduchefTes nos filles, 6c
de nos autres Enfans 6c Defcendans, mâles ou femelles, -Héritiers 6c Suc-
ceflèurs, nez 6c à naître , que nous bifferons avoir, fans aucun empêche-
ment, audit Dauphin, fes Enfans ôc Defcendans, mâles ou femelles, leurs
Héritiers 6c Succeflèurs nez 6c à naître, tout l'effet 6c la jouïflance dudit
Traité. En foi de quoi , 6cc.
„ Cet Article aura la même force," que s'il étoit inféré mot à mot dans le
„ Traité auquel il a raport,6c fera enregiftré au Parlement de Paris, immédia-
„ tement après la mort de Sa Majefté Catholique, fans Enfans.
„ Fait 6c figné à Londres, par nous Plénipotentiaires de France 6c d'Angle-
, îTm». I. O „ terre,
10(5 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
i7°°- » terre,le }. Mars 1700. Nouv. Stile, 6c le 11 . de Février i6y<?. Vieux Sti-
" » Ifii & à la Haïe, par nous Plénipotentiaires de France, 6c des Seigneur*
„ Etats Généraux, le Zf. dudit mois de Mars 1700.
( L. S. ) Tallard. ( L. S. ) Porihvnd. ( L. S. ) ?. ™» £^«.
( L. S. ) jBria*A ( L. S. ) Jerfcy. ( L. S. ) F. 5. <fe Rheede.
(L.S.) A. Hein fins.
(L.S.) IV.deNaffau.
(L.SJ E.de TVecde.
(L.S.) W.v.Haren.
(L.S.) y/r. Lemker.
(L.S.) VanHseck.
Article
fccrer.
SA Majefté Très-Chrêtienné, Sa Majefté Britannique, & les Seigneurs
Etats Généraux, aïant defîré prévenir la Guerre que pourroit produire
la mort de Sa Majefté Catholique fans Enfans , font convenus du Traité au
fujet de fa Succefîîon , qui a été figné à Londres le 3. Mars Nouv. Stile 1700.
Scie 21. Février Vieux Stile 1 6pp. 6c à la Haïe le 2f. du dit mois de Mars 1700.
Et comme il eft dit dans l'Article IV. dudit Traité, que les Duchez de Lor-
raine 6c de Bar feront cédez à Monfeigneur le Dauphin par échange du Du-
ché de Milan, qui feroit remis à Mr. le Duc de Lorraine, & que les deux
Seigneurs Rois, & les Seigneurs Etats Généraux eftiment que rien n'eft plus
convenable pour le but qu'on fe propofe, que d'emploïer tous leurs offices,
foit conjointement, foit ieparément, pour engager ledit Duc de Lorraine à y
confentiiT-
Mais comme il eft néceflaire de terminer qui feroit le Prince, à qui le
Duché de Milan feroit remis, & ce qui feroit donné à Monfeigneur le Dau-
phin pour fon dédommagement, à la place des Duchez de Lorraine & de
Bar , fi contre toute apparence Mr. le Duc de Lorraine ne vouloir pas don-
ner fon confentement à cet échange, nonobftant lefdits offices 6c devoirs
continuels 6c réitérez durant la vie du Roi d'Efpagne, ou jufques au tems
convenu ci-deflous après fa mort ; les deux Seigneurs Rois , & les Seigneurs
Etats Généraux ci-defilis nommez, font convenus qu'en ce cas Sa Majefté
Britannique 6c les Seigneurs Etats Généraux choifiront une des deux alterna-
tives fuivantes, au bout dudit tems après la mort de Sa Majefté Catholique.
Savoir, de remettre ledit Duché de Milan entre les mains de Monfr. l'E-
lecteur de Bavière, pour en jouir lui, fis Enfans mâles ou femelles, Héri-
tiers, Succefieurs 6c Dcfcendans, mâles^ou femelles, nez 6c à naître, à- perpé-
tuité, en toute propriété 6c pofieffion pleniére, en joignant en échange la
Navarre au partage de Monfeigneur le Dauphin, pour en jouir lui, fes En-
fans màlcs ou femelles, Héritiers, Succefieurs Se Dcfcendans mâles ou fe-
melles,ncz 6c à naître, en toute propriété 6c pofieffion pleniére j ou au lieu de
la Navarre, la Ville 6c le Duché de Luxembourg, 6c le Comté de Chiny.
Ou bien remettre ledit Duché de Milan à Monir. le Duc de Savoie, pour
en jouir lui , fes Enfuis, mâles ou femelles, Héritiers, Succelfeurs 6c Dcf-
cendans, mâles ou femelles, nez 6c à naître, à perpétuité 6c pofieffion plenié-
re, en joignant en échange au partage de Monfr. le Dauphin, la Ville 6c le
Comté
ET RESOLUTIONS D'E T A T. 107
Comté de. Nice, la Vallée de Barcelonette , & le Duché de Savoie, pour IJ00-
en jouir à perpétuité, en toute propriété 8c pofléfïïon pleniére, lui , fes En- — — -
fans, Héritiers, Succeffeurs 8c Defcendans, mâles ou femelles, nez & à naître.
De plus, les deux Seigneurs Rois, & les Seigneurs Etats Généraux, font
convenus par cet Article fccret, que, quoi qu'il foit dit par l'Article VIL
dudit Traité figné à Londres le 3. Mars Nouv. Stile 1700. 8c le il. Février
Vieux Stile 1699. & à la Haïe le if. dudit mois de Mars 1700. que l'on
conviendra d'un Prince auquel ledit partage du Sereniffime Archiduc fera
donné, en cas que l'Empereur & le Roi des Romains ne veuillent pas fouf-
crire audit Traité, après le terme de trois mois expiré, à compter du jour
que la notification lui en fera faite, néanmoins l'Empereur fera reçu à fouf-
crire audit Traité deux mois durant, à compter du jour que la mort de Sa
Majefté Catholique aura été lignifiée de la part de Sa Majefté Très-Chrê-
tienne, à Sa Majefté Britannique,. 8c aux Seigneurs Etats Généraux} mai?
en cas que Sa Majefté Impériale refufe d'y entrer dans le tems ci-deffus mar-
qué, les deux Seigneurs Rois ou leurs Succeffeurs, & les Seigneurs Etats
Généraux, conviendront au bout du tems ci-deffus marqué d'un Prince au-
quel ledit Partage fera donné : 8c le furplus de ce qui eft dans ledit Artfele
VII. à quoi il n'eft point dérogé par ce qui eft dit ci-deffus, fera exécuté
ponctuellement.
On eft convenu de plus, que fi le Serenifïîme Archiduc pafToit en Efpa-
gne, ou dans le Duché de Milan, quoi qu'il foit dit dans l'Article VIII. du
Traité auquel ce préfent Article fecret a raport , qu'il n'y peut paffer avant
la mort de Sa Majefté Catholique que du commun confentement des deux
Seigneurs Rois, 8c des Seigneurs Etats Généraux, Sa Majefté Britannique
8c les Seigneurs Etats Généraux s'engagent de faire tous les devoirs 8c tous
les efforts poffibles, même d'en venir jufques aux voies de fait, s'il eft nécef-
faire, enfin de prendre toutes les mefures convenables de concert avec Sa
Majefté Très-Chrêtienne, pour obliger Sa Majefté Catholique 8c les Efpa-
gnols, à le renvoier hors de l'Efpagne, ou du Duché de Milan, fans aucun
retardement.
Cet Article aura la même force que s'il étoit inféré mot à mot dans le
Traité auquel il a raport, 8c fera enregiftré au Parlement de Paris immédia-
tement après la mort de fa Majefté Catholique fans Enfans. Fait 8c figné à
Londres, par nous Plénipotentiaires de France Jk. d'Angleterre , le 3. de
Mars 1700. Nouveau Stile, 8c le il. de Février 1699. Vieux Stile} 8c à la
Haïe, par nous Plénipotentiaires de France 8c des Seigneurs Etats Géné-
raux, le if. dudit mois de Mars 1700.
(L. S.) ïallard. (L. S.) Portland. (L. S.) J. van Effen.
(L. SJ Briard. (L. S.) Jerfey. (L. S.) F. B. de Reede
- (L. S.) A. Heinftus.
(L.S.) fF.de Najfau.
(L. S.) E.deJVeede.
(L. S.) W. van Haren.
(L.S.) Ar. Lemker.
(L.SJ FanHeecL
O i II
1700.
Difcours
deMr.de "
Bonre- »
108 MEMOIRES, NEGOCIATIONS, TRAITEZ,
Il y eut des gens qui fe piquoient d'être clair-voïans, qui crûrent que ce
qui avoit le plus porté le Roi d'Angleterre à faire figner ce Traité, étoit
qu'il avoit quelque entêtement, que la France n'auroit pas oie y contrevenir.
Cet entêtement, difoicnt-ils, procedoit' de quelque idée d'Héroïfme, que les
heureux fuccès de la Révolution d'Angleterre, 6c la récente 6c gloricuic pri-
fè de Namur, apuiez de la flaterie de quelques-uns de fes intimes Courtifans,
lui avoient imprimée. Quoi qu'il en (bit, ce Traité fut ratifié peu de tems
après.
Il eft. à remarquer, qu'outre le Comte de T'allard, ce fut le Comte de
Briord, qui le fîgna de la part de la France. Celle-ci , qui avoit Bonrepaux-
pour fon Ambaflàdeur à la Haïe, le rapella, à caufc qu'il fut trouvé trop
complaifant pour la République. Il prit fon Audience publique des Etatj
Généraux, auxquels il fit le Difcours qui luit.
MESSIEURS,,
SI ma fanté eut pu fuporter plus long- tems l'air d'un Climat qui m'eff!
étranger, l'Audience que je prends aujourd'hui n'auroit pas fuivi de fi
pau'jTaux 55 près celle que Vos Seigneuries m'accordèrent l'année dernière. J'eipére que
E. G. en „ fi EHes fe fouviennent encore de la joie que je leur témoignai pour lors,
prenant w je l'honneur que le Roi mon Maître m'avoit fait, en me choififfant pour
congé. ^ çQn Arabaflàdeflr Extr. auprès de Vos Seigneuries, Elles feront bien per-
„ fuadées que ce n'efl qu'avec beaucoup de regret que je viens aujourd'hui
„ prendre congé d'Elles. Je leur avouerai cependant que ce regret eft mo-
„ aéré par la vue de la fituation où je laiffe les chofes. La Paix 6c la bon-
„ ne correfpondance n'ont jamais été plus lblidement établies entre la Fran-
„ ce 6c cet Etat, qu'elles le font préfentement. Toutes les affaires qui reftent
„ à régler en exécution du Traité de Ryfwick font heureufement terminées.
„ Il n'efl queftion que de s'abandonner de part 6c d'autre aux fentimens de
, „ confiance 6c d'amitié, fi naturels à la France pour cette République, 6c
„ à cette République envers la France. Aufîî, Mefîïeurs, voïez-vous par
„ la Lettre de Sa Majeftc que j'ai eu l'honneur de préfenter à Vos Seigneu-
„ ries, qu'Elle m'a très-expieffément chargé de les afïurer du defir qu'EUe a
„ de voir la Paix fe perpétuer dans l'Europe, 6c de pouvoir en particulier
„ donner à cette République des marques de la continuation de ion amitié
„ de fon eftime.
„ Je me flate, Mefîïeurs, 6c la manière, dont Vos Seigneuries ont toû-
M jours agi avec moi , me perfuade que Vous n'aurez pas pour defagréable
,, que j'ajoute à ces aflurances, celles de la- vénération 6c de l'eftime très
„ particulière que le fé jour que j'ai fait ici , m'a. infpiré pour ce Gouveme-
„ ment 6c pour les Membres qui le compofent. Ces fentimens ne font pas
„ moins fincéres en moi, que la parfaite reconnoiffance que j'ai des bontez,
„ dont Vos Seigneuries m'ont honoré. J'en garderai toujours précieufement
„ le fouvenir , 6c je m'eftimerois heureux, il je pouvois, Meffieurs, vous
„ faire connoître pai- mes très- humbles fervices, à quel point j'y ai été fen-
„ fible,
Voicr
ET RESOLUTIONS D'ETAT.
Voiei la Lettre de Rapel du Roi Très- Chrétien.
Très-Chers, Grands Amis, Alliez, & Confédérez.
„ T A fatisfaction particulière que Nous avons des fervices du Sr. de Bonre- Lettre
„ JL/ paux, Nôtre AmbafTadeur Extr. auprès de Vous, Nous auroit porté de Rapcl
„ à le laifler plus long-tcms dans cet emploi , fi fa fanté avoit pu lui permet- du Roi
tre d'en continuer encore les fonctions. Mais Nous avons accordé aux * ' ^*
inftances qu'il Nous a faites par cette raifon, la permiffion qu'il Nous a
demandée de revenir auprès de Nous. Il ne pourra rien faire avant fon
départ , qui Nous foit plus agréable qu'en vous témoignant , comme
Nous lui avons ordonné,, que Nous confêrvons toujours les mêmes fenti-
mens pour le maintien de la tranquillité générale , 6c pour vos avantages
particuliers} & qu'en toutes occaûons Vous recevrez des marques de l'efti-
me 6c de l'affection que Nous avons pour Vous. Priant Dieu, qu'il vous
ait, Très-Chers, Grands Amis, Alliez, 6c Gonfédérez, en la fainte Se
digne garde. Ecrit à Marli, le 13. Novembre iôpp.
Vôtre bon Ami, Allié, 6c Confédéré,
Signé, LOUIS. r
Et plus bas , CoLBERT.
Le Comte de Briorcl arriva à la Haïe quelques femaines après, où il fîgna
ledit Traité de Partage avant d'avoir fait ion Entrée publique.
Dè3 que ce Traité fut réciproquement aprouvé oc ratifié, les trois Puif-
fanecs Contractantes en firent faire, chacune à part, la communication à di-
vers Rois, Princes, 6c Etats, pour les inviter à y accéder 6c à le garantir.
Les repréfentations que les Etats Généraux firent faire pour cela à diverfes
Cours, étoient de la même teneur qu'ils les firent faire à la Cour de Danne-
marck , par le Mémoire fuivant:
TRES-HAUT ET TRES-PUISSANT ROL
„ T Es fouiîîgnez Envoie Extraordinaire, 6c Réfîdent des Etats des Pro- t ...
„ L/ vinces-Unies , font chargez par un ordre fpécial de Leurs Hautes tion dés
„ Puiflances de reprefenter à Vôtre Majefté, qu'on a fait, pour la confer- E. G. au
„ vation, repos 6c Paix de la Chrétienté, un Traité entre le Roi de Fran- Roi de
„ ce, Sa Majefté Britannique, 6c L. L.H.H. P. P.,. en cas que Sa Majef- ^"cnke"
„ té d'Efpagne vint à décéder fans Enfans^ 6c que dans le XII. Article du touchant
„ fufdit Traité on eft convenu qu'on y admettroit tous Rois ,. Princes ,*. 6c 'le Traité
„ Etats qui voudront y entrer, 6c qu'il eft permis aux fuldites Hautes Ma- de Pâr'
., jeftez, le Roi de France, 6c de la Grande-Bretagne, 6c àL. L. H. H. ta§e'
„ P. P. &c à un chacun d'eux en particulier, d'inviter tous ceux qu'on trou-
an veroit à propos d'accéder audit Traité, 6c de le gai-antiri 6c que leurs
O5 „ fut-
r-co.
MO MEMOIRES, NEGOCIATIONS, TRAITEZ,
futilités Majcftez 6c Hautes Puiflances, ont trouvé bon qu'il étoit à pïc-
fent le tems d'en faire part aux autres Rois, Princes, 6c Etats, 6c à cette
fin d'envoier leurs Miniftrcs vers des Cours étrangères, Elles ont donné
ordre aux fouflîgnez de communiquer ledit Traité à Vôtre Majefté, pour
la fuplier de vouloir y entrer, 6c d'aider à le garantir. Et pour cet effet,
de repréfenter à Vôtre Majefté que L. L. H. H. P. P. ont toujours eu à
cceur, 6c fpécialement depuis la dernière Paix de Ryfzvick, la coiîfervation
d'une Paix tranquille, 6c du repos de la Chrétienté, n'aïant point eu d'au-
tre but en faifant ledit Traité, que celui de la continuation univerfelle de la
Paix 6c du repos ; 6c qu'étant confidéré que fi d'avantuie le Roi d'Efpa-
gne, qui eft à préfent dans une grande indifpofition, ainfi que l'on fait ,
vint à mourir fans Enfans, un tel décès nous cauferoit de nouveaux trou-
bles 6c Guerres, fi l'on n'y prévenoit à tems, ce qui a été la caufe qu'on
a fait ce Traité. L. L. H. H. P. P. efpérent 6c s'aflurent que ces mêmes
confidérations fléchiront tous les autres Rois, Princes, 6c Etats, qui ai-
ment le repos 8c la Paix , fpécialement Vôtre Majefté à accéder au dit
Traité, 6c d'en accepter la Garantie. Les fouflîgnez efpérent que lors
que Vôtre Majefté aura confidéré l'importance de cette affaire, voudra
bien concourir à maintenir les mêmes intentions , 6c le même but falutaire
des fufdits Hauts Rois, 6c de L. L- H. H. P. P. pour le bien commun dç
la Chrétienté. A Rcnsbourg, le f. Juillet 1700.
Signé,
Haersolte , 6c Robert Goez.
Le Roi d'Angleterre fit faire de fon côté de pareilles repréfentations,
nuffi bien que le Roi de France. Celui-ci fit même préfenter au Roi d'Ef-
pagne, par fon Envoie Extraordinaire BUcour, le Mémoire fuivant.
SIRE.
53
Notifi-
cation „
du Trai-
tédePar- •
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te au Roi 33
d'Efpa-
gnc.
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QUoique le Roi mon Maître ait déjà fait aflùrer diverfes fois Vôtre
Majefté Catholique, qu'il étoit refolu de contribuer tout ce qui eft
en fon Pouvoir, pour la confervation de la Paix qu'il a plû à Dieu de re-
donner à l'Europe, 6c que fa Majefté s'en foit Elle-même expliquée der-
nièrement au Marquis de Cajiel dos Rios, Ambafiàdeur d'Efpagne ; cepen-
dant, comme la fincéritéde fes intentions ne fauroit trop éclater, fa Ma-
jefté m'a ordonné de renouveller ces aflurances qu'Elle avoit déjà données,
6c de notifier en même tems que le Traité conclu depuis peu entre fa Ma-
jefté, le Roi' d'Angleterre, 6c les Etats Généraux des Provinces-Unies ,
n'a pour but que de conferver pour long-tems le repos de la Chrétienté.
Sa Majefté 6c fes Alliez avoient lieu de croire, qu'aïant communiqué à
Vôtre Majefté les mefurcs prifes pour le maintien de la tranquillité publi-
que, Vôtre Majefté fe feroit jointe à eux, pour les faire réuflîr, d'autant
plus volontiers' qu'Elle ne pouvoit en recevoir, aucun préjudice } m lis
qu'au contraire ces mefures pouvoient mieux affermir le repos de lès
„ Roiau-
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ET RESOLUTIONS D'ETAT. nï
Roïaumes, Se que c'étoit-làle véritable moïen de prévenir, par un Partage l700-
jufte Se équitable, les difFérens qui pourraient furvenir entre les Préten-
dans à la Monarchie d'Efpagne, en cas que par un tnrte événement, qu'on
ne peut empêcher m obvier, cette .grande Succeffion devint un jour va-
cante. Mais comme diverfes confidérations, qu'il n'eft pas nécefiaire de
réfuter ici, ont détourné le Roi Catholique d'entrer dans le Traité de
queftion, j'ai ordre du Roi mon Maître de déclarer, comme je fais par ce
préfent Mémoire, qu'étant peifuadé que ce Prince fe fouviendra des pro-
m<°fles qu'il a faites, Se fouvent réitérées depuis la Paix, qu'il ne prendrait
aucune réfolution capable de troubler le repos public , Sa Majefté efpére
qu'il les effectuera ponctuellement. Elle a même tant de confiance en fa
parole, qu'Elle a de la peine à ajouter foi au bruit qui fe répand de tous
cotez, qu'il y a des ordres donnez pour recevoir des Troupes de l'Empe-
reur, ou autres étrangères, dans les Roïaumes de Naples Se de Sicile, le
Duché de Milan, Se autres Etats , dépendans de la Couronne d'Efpagne.
, Que néanmoins, fi ce bruit vient à fe confirmer malheureufement , fa Ma-
„ jefté prévoïant dès à préfent les fâcheufes fuites, qui pourraient réfultev
'd'une telle -entreprife, fe trouve obligée pour le bien dé l'Europe, d'aver
conformément audit Traité , agiront de concert avec Elle pour faire
Et que Sa Ma-
jeur envoie de fes
échouer les entreprifes, qui pourraient y être contraires,
jefté ni fes Confédérez ne fouffriront jamais que l'Empere
Troupes ou autres étrangères, fous quelque prétexte que ce foit, dans au-
cun Etat de la dépendance de la Monarchie d'Efpagne. Le Roi mon
Maître m'a encore ordonné d'ajouter à ceci , que comme il veut bien
croire que l'intention du Roi Catholique eft de maintenir la Paix, Se que
par conféquent il ne prendra aucune résolution capable de rallumer h
Guerre, Sa Majefté renouvelle aura" fes affurahees, de ne donner aucune
^ atteinte à fon repos, Se de le laiffèr paifiblemcnt jouir du Gouvernement
„ de fes Etats ; ou' Elle fouhaite qu'il les puhTe poiïeder long-tems. Qu'en-
„ fin Sa Majefté s'engage en fou particulier, de ne rien entreprendre fur
„ quelque partie que ce foit des Etats de la Couronne d'Efpagne, pendant le
„ cours du Régne de Sa Majefté Catholique, en cas que l'Empereur veuirK
„ promettre de ne foire marcher aucunes Troupes en Italie, foit fiennes
„ propres, foit étrangères, Se s'obliger auffi à ne point prendre poffëiîion
„ fous Quelque prétexte que ce puiffé être d'aucune partie de la Succcffion
►„ du Roi d'Efpagne pendant fa vie. A Madrid le p. Septembre 1700.
I Comme les difFérens que les Etats Généraux avoient avec la Cour de Ma-
drid, au fùjet de leur Envoie Schcr.enbcrg^ avoient été terminez, & que cet
Envoie y avoit eu Audience , ils le chargèrent de faire au Roi Catholique
des repréièntations pareilles à celles de la France : Se comme l'on étpit con-
venu d'une réciproque readmiffion de Miniftres, Don Bcrnardo de Çhinos ie
rendità la H.ù'e de la part du Roi Catholique. La France infiihnt toujours
fur
iiî MEMOIRES, NEGOCIATIONS, TRAITEZ,
1700. fur le but de ces repréfentations, les Etats Généraux prirent une Réfolution,
— -— dont ils firent livrer la Traduction audit Don Bernarclo de £%uiros , dans les
termes fuivans.
Extrait du Regiflre des Réfolutions de Leurs Hautes Puijfances les Seigneurs
Etats Généraux des Provinces-Unies des Pais-Bas.
Du Lundi 2,6. Septembre 1700.
.Repre- „ "in Tant confidéré, que par des avis nouveaux fe confirment de plus en
,enta", „ d plus les premiers, que L. H. P. avoient reçus, comme fi le Roi d'Ef-
É°G. CS » Pa8ne avoit confenti, & donné permiflîon, à laifler entrer, 6c recevoir
pourém- » des Troupes de Sa Majefté Impériale, 6c d'autres Troupes étrangères, en
pêcher „ Italie ; après une préalable délibération, il a été trouvé bon 6c réfolu,
YielcS » puifque le Sr. de ghiiros, Ambafladeur du Roi d'Efpagne eft arrivé ici ,
ImpUP" » qu'on lui repréfentera, que Leurs Hautes Puiffances ont envoie leurs 01-
n'er.trcnt „ dres quelques jours parlez, au Sr. de Schenenberg à Madrid , pour faire
en Italie. 5> connoître à S. M. l'apréhenfion , que L. H. P. ont de nouveaux troubles,
„ en cas qu'une telle permiflîon fût donnée 6c exécutée. Que L. H. P.
„ n'ont rien plus à cœur, que la confervation de la Paix, 6c du repos pré-
„ fent de la Chrétienté, qu' Elles prévoient qu'aiïiirément , en cas qu'on fie
„ pafler des Troupes Impériales ou d'autres Troupes étrangères en Italie,
„ une telle démarche cauferoit de nouveaux troubles.} parce que S. M. T.
„ C. s'y opofant, L. H. P. avec le Roi de la Grande-Bretagne feraient re>
„ quis d'en faire autant, en vertu du dernier Traité. Qu'ainfi L. H. P.,
„ fuivant l'amitié, dans laquelle Elles ont l'honneur de vivre avec S. M. C,
„ & laquelle Elles tâcheront de leur côté d'entretenir toujours religieufe-
„ ment, 6c de cultiver de plus en plus, le fentent obligées, de donner aufii
„ part de cette leur appréhenfion, audit Sr. de Ghiros, 6c de le requérir,
„ d'en vouloir avertir fadite Majefté au plutôt, 6c même par exprès, s'il
„ eft poflîble, 6c d'y joindre fes bons offices, à ce qu'on ne fafle palier au-
„ cunes Troupes étrangères en Italie, fous quelque prétexte que ce puifie
„ être, 6c que fa Majefté Catholique ne donne, ni ne fafle donner de fa
„ part , aucuns ordres , à fes Gouverneurs ou autrement , pour les y rece-
„ voir, 6c en cas que les ordres fuflent déjà donnez, qu'inceflamment ils
„ foient révoquez, afin qu'il n'en arrive de nouveaux troubles, ce que L.
„ H. P. fe promettent afllirément de la haute fagefle de Sa Majefté Catholi-
„ que, 6c de fon inclination pour la Paix, ni qu'Elle ne voudra point don-
„ ner occafion à de nouveaux mouvemens. Que cependant L. H. P. aflu-
M rent réciproquement, que fi fa Majefté Impériale 6c fa Majefté Catholi-
„ que veulent promettre, de ne point fiiire entrer des Troupes Impériales,
„ ni autres Troupes étrangères en Italie, 6c que durant la vie de S. M. Ca-
„ tholique, S. M. Impériale ne fe mettra en poflcflïon d'aucune partie de la
„ Succeifion, fous quelque prétexte que ce foit, L. H. P. s'engageront à
„ ne rien entreprendre avec leurs Hauts Confédérez pendant la vie de fa M.
„ C. , fur quelque partie que ce foit des Etats de la Couronne d'Efpagne.
„ Ec
ET RESOLUTIONS D'ETAT, 113
„ Et fera l'Extrait de la préfente Réfolution de L. H. P. donné, par l'A- 1700.
„ gent Rofenboom audit Sr. de guiros, pour la fin flifmentionnée, à quoi le ■
„ dit Agent ajoutera, que le Roi de la Grande-Bretagne a fait favoir à L.
„ H. P., que le fentiment de Sa Majefté fui- ce fujet eft conforme au conte-
„ nu de la prélente Réfolution.
Depuis que ledit Traité de Partage fut fait, les trois PuifTances Confédé-
rées en firent donner la communication à l'Empereur. Ce Prince prévoiant
que ce fèroit aigrir les Efpagnols que d'y donner les mains, laifîà écouler les
trois mois qui lui avoient été preferits, pour l'accepter. Comme on le pref-
fà de répondre aux repréfentations qu'on lui avoit faites, il le fit enfin faire,
mais feulement de bouche, aux Miniftres refpeétifs de ces PuifTances Confédé-
rées, de la manière qu'on le voit par la Relation fui vante, qui fut par eux
envoiée à leurs Cours refpeclives.
De la Cour Impériale à Neuftat , ce 18. d'Joût 1700.
1
APre's avoir long-tems attendu la Réponfe de l'Empereur fur le Trai- Réponfe
té du Partage de la Monarchie d'Efpagne, fait entre les Rois de ^e l'Eni-
France 6c d'Angleterre, & les Etats Généraux des Provinces-Unies , Sa p^cr"r
Majefté Impériale la fit donner le 17. par le Comte de Harrach^ aux Mi- port au
niftres de France & de Hollande, verbalement, & à chacun en particu- Traite de
lier. Ce Comte leur dit, que l'Empereur confidérant la bonne fanté du Partage.
Roi d'Efpagne 6c l'on âge, qui devoit raifonnablement faire efpérer des
Héritiers de fon Corps, ne trouvoit pas bien féant, à Lui fur tout qui
étoit Oncle 6c plus proche parent de Sa Majefté Catholique , d'entrer de
fon vivant dans des Engagemens pour le Partage de fa Succefîîon. Que
s'il arrivoit que Sa Majefté Catholique vint à mourir fans Enfans, ce que
l'Empereur ne fouhaitoit pas en aucune manière, Sa Majefté croïoit avoir
feule droit à fon entière Succefîîon, 6c au défaut de la Ligne d'Autriche,
le Duc de Savoie, conformément à la Difpofition 6c -au Teftament de Phi-
lippe IV. Roi d'Efpagne.
„ Le Comte de Harrach ajouta, parlant au Marquis de Fillars, Envoie
de France, que Sa Majefté Impériale efpéroit que cette Réponfe n'inter-
romproit pas la bonne intelligence, qui étoit entr'elle 6c le Roi fon Maî-
tre, 6c que Sa Majefté Très-Chrétienne fe garderait de procéder à la no-
mination d'un Héritier; mais, que s'il arrivoit, qu'Elle s'emparât d'au-
cune Partie de ladite Succefîîon avant la mort du Roi d'Efpagne, l'Em-
pereur s'y opoferoit.
„ Le Comte de Harrach dit aufîï à Monfr. Hop, Envoie des Etats Géné-
raux, que l'Empereur prioit le Roi d'Angleterre 6c les Etats Généraux,
de fe difpenfer de nommer un Héritier, 6c qu'il ne doutoit pas de leur
bonne amitié 6c correfpondance.
„ Le Comte de Harrach fit venir chez lui le Secrétaire d'Angleterre, qui
eft à Vienne, 6c lui fit la même Déclaration,
Tom. L P I r.
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1*4 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
fToo. 1 1, n'y eut prefquc point de Princes qui vouluffent garantir ce Traité. Le
■ Roi de Dannemarck déclara feulement aux Miniftres des trois Puiffances,
qu'il y aurait donné les mains , fi on l'avoit traité plus doucement dans fes
difrcrens avec le Holftein, ôc fi, on avoit eu plus d'égard à Ton honneur, &
à fes Droits.
Parmi les Efpagnols il fe forma des Partis. L'on prit à tache de faire cou-
rir le bruit, que la Reine d'Efpagne étoit greffe. Le Comte de Briord en
débita même la nouvelle. En ce tems-là un certain Avanturier, qui fe faiibit
apeller le Chevalier des STWw/Zcj, faifoit les Gazettes Françoifes à la Haïe. II.
inféra un jour dans fon Suplement des expreffions injurieules à cette Reine,
la faifant foupçonner de mêler un fang impur au Sang d'Autriche. L'En-
voie de l'Empereur préfenta un Mémoire là-deffus aux Etats Généraux, de-
mandant la punition de ce Gazettier. Don Bernardo de ghiiros, qui étoit ab-
fent, en écrivit de greffes plaintes au Confeiller Penfionnaire. Le Gazettier
fe tranfporta' ailleurs.- Il voulut dire pour fa juftification qu'il avoit reçu ces
expreffions d'un Garde-Marine de fa connoilfance. On voulut aprofondir
l'affaire, qui fe trouva véritablement fuggerée par un tel homme. L'on fût
cependant que c'étoit un Commis du Bureau du Marquis de T'ont, qui l'a-
voit donné par écrit à ce Garde-Marine. Après quelques bruits, tout s'éva-
nouît. Cependant, bien loin que la Reine fût greffe, un parti d'Efpagnols
forma le defîèin de porter leur Roi à répudier la Reine, Se à paffer à de
troifiémes Noces. On n'eut pas le tems de pouffer ce deffein à bout, qui
étoit pourtant regardé comme pouvant être un remède contre le Partage de
la Succeffion. Il y avoit un autre parti, qui n'aimoit pas le Gouvernement
des Païs-Bas Efpagnols entre les mains de l'Eleéteur de Bavière. Ce parti fit
un Projet de faire tranfporter ce Gouvernement à l'Electeur Palatin, & cela,
ou à vie,, ou à perpétuité.. C'efl; d'autant plus que n'aïant point d'enfans,
Ton ne devoit pas avoir de Tapréhenfion pour la dernière. D'ailleurs,, la vûë
en étoit de chagriner les Etats Généraux par l'établiffemcnt du Commerce
en ce Païs-là, Se les obliger, pour fe défifier d'un tel établiffement , à fe dé-
tacher du Traité de Partage. Don Bernardo de ghiiros étoit prefquc le prin-
cipal Promoteur de ce Projet. Il aimoit les Païs-Bas Efpagnols, Se avoit de
l'averfion pour l'Electeur de Bavière, parce que, félon lui,, ce. Prince ufoit de
- violence envers les Peuples. Il n'ofoit cependant pas témoigner ouvertement
fes fentimens. Il fit fous main porter les Communes de Bruxelles, qu'on
apelle les Nations, qui font les Corps de Métiers d'Orfèvres,. Drapiers, Po-
tiers d'étain, Charpentiers ou Mcnuifiers, Bouchers, Serruriers, Braffeurs,
Cordonniers Se Savetiers, à dreffer quelques plaintes , pour être redreffées à
la Cour d'Efpagne. Ces Communes adrefférent ces plaintes à Don Bernardo
de Quiros, qui, pour détourner le foupçon qu'il y eut part, les refufa, ôc.
confeilla en public aux Communes de les adrclfcr à l'Electeur de Bavière. Il
fit même plus, car il écrivit une Lettre à l'Eleébeur, dans laquelle il lui difoit
ics fentimens fur la- manière que-cçs plaintes dévoient être redreffées > mais
l'Electeur lui renvoia fa Lettre toute cachet ée,-.fans vouloir la lire. Ces plain-
tes furent cependant envoices à la Cour- d'Efpagne, où le Comte de Monter ci,,
îftéfident déjà Chambre de Flandres, Ami de Don Bernardo, Si Protecteur
des
ET RESOLUTIONS D'ETAT. nf
des Communes, les fit valoir. On ajouta à ces plaintes d'autres fecretes con- ï?00-
tre l'Electeur, le dépeignant indirectement comme un Prince, qui ne don-
noit les Charges 6c Emplois qu'à ceux , auxquels il débauchoit les filles ou
les femmes. Il fut là-deffus propofé au Confeil d'Efpagne de donner le Gou-
vernement des Païs-Bas à un Efpagnolj mais le crédit de la Reine prévalut,
6c l'on réiblut de laifler le Gouvernement à l'Electeur tout autant qu'il vou-
droit y refter. Cette rélblution étonna, il eft vrai, ceux qui avoient pris à
tâche de faire changer le Gouvernement > mais, ne les rebuta pas. Us cru-
rent que pour y reiiifir, on devoir entièrement brouiller lès, Peuples avec
l'Electeur. On fit courir pour cet effet fous main un Traité , qu'on fupo-
lbit avoir été précédemment fait entre l'Electeur, 6c Mr. Dyckveît de la part
des Etats Généraux, pour affiirer la Souveraineté des Païs-Bas Efpagnols au
Prince Electoral de Bavière, 6c cela avant le premier Traité de Partage, Se
la mort prématurée de ce Prince. Il y avoit dans ce Traité des articles pré-
judiciables aux intérêts des Peuples, capables d'infpirer de l'averfion pour les
Contractans. Voici ce Traité.
Traité d'Alliance entre L. H. P. les Etats Généraux des Provinces-Unies d'une Préten .
part , ci? Son Altejfe Electorale de Bavière d'autre part , touchant la Con fer- dii Trat-
vation des Païs-Bas Efpagnols, après le décès de Sa Majefté Catholique. Fait itcej"u'c
à Bruxelles, le z8. du mois d'Août 1698. Traduit du Latin. Gêné-*
raux 6c
LEs affaires d'Efpagne étant par la ftérilité, tant de la Reine défunte d'Ef- l'Heô.
pagne, que de la préfente aujourd'hui régnante, Epoufe de S. M. C. le ^e,Ba"
Roi Charles II., par la grâce de Dieu, Roi d'Efpagne 6c des Indes, dans
une telle fituation qu'après le décès de fadite Majefté Catholique, l'on a rai-
fon de craindre de très-grandes Se dangereufes révolutions fur la Succeffion
dans fêsRoïaumesj (ce qu'il plaife pourtant au Tout-Puiffant de prévenir,
en accordant à Sa Majefté une Poftérité féconde:) Lés Etats Généraux des
Provinces-Unies d'une part, 6c le Sercniffime Prince & Electeur Maxirh-
lien Emanuel d'autre part, confidérant les troubles Se les malheurs, qui
pourroient naître au fujet de la Succeffion Efpagnole, laquelle toute réglée
6c décidée qu'elle paraît être par la Paix des Pyrénées, fera peut-être révo-
quée en doute par quelques Puiflances, ont jugé à propos 6c même très né-
ceffaire, 6c cela par un pur mouvement d'équité 6c pour l'amour du Bien
public, d'entrer dans une Alliance 6c Confédération particulière, qui n'a
uniquement pour but que la confervation des Païs-Bas Efpagnols , 6c de con-
clure pour cet effet entr'eux les Articles fi îivans.
I. L. H. P. les Seigneurs Etats Généraux des Provinces-Unies s'obligent
Se promettent en vertu d'icelle, au cas que Sa Majefté G. à préfent régnante
doive décéder fins Poftérité légitime, nommément fans enfans, de prendre
alors toutes les Provinces du Païs-Bas Efpagnol, dins l'état qu'elles le trou-
vent à préfent, 6c conformément au Traité de Paix deRyfwick, en leur
Garantie &c Protection, en faveur de Son Altefle Sereniflîme le Prince Elec-
toral de Bavière, promettant de défendre lefdites Provinces pour le Serenifii*
me Prince Electoral de Bavière contre tous ceux qui y pourroient prétendre*
P 2, «C
ix6 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
1700. 2c qui s'en voudraient emparer, foit par force ouverte, ou par d'autres moïens,
*~ de quel prétexte, couleur, ou nature qu'ils foient. Et comme la conferva-
tion des dits Etats Se Provinces que les Seigneurs Etats Généraux confîdé-
rent comme la Barrière & l' Avant-mur de leur République, leur importe
beaucoup à eux-mêmes, ils ne prétendent point d'autre fatisfaétion pour cet-
te protection promife, ni pour le préfent, ni pour l'avenir, que l'obferva-
fion inviolable de tous les points, dont on eft convenu en ce Traité de part
& d'autre. Cette protection, dont les Seigneurs Etats Généraux fe char-
gent en faveur du Sercniiïîme Prince Electoral de Bavière, durera 8c conti-
nuera juiques au tems que tous les différens,qui naîtront au fujet de la Succef-
fion Efpagnole, foient réglez 8c terminez au contentement univerfel de tou-
te l'Europe, 6c du Bien public.
II. Quand le Sereniffime Prince de Bavière, à qui la Succeflion Efpagno-
le apartient par droit de Naiffance, préférablement à tous les autres qui y
pourraient prétendre, fe fondant en ceci fur la Paix des Pyrénées, qui lui a
procuré cet avantage, devrait fe trouver un jour dans la paifible jouïfïance
& pofTefîîon des Roïaumes & Provinces, apartenant au Roi & à la Couron-
ne d'Efpagne, 8c que par conféquent alors la protection des Seigneurs Etats
Généraux ne lui devrait être plus néceflàire, lefdits Etats Généraux feront
obligez de retirer toutes leurs Troupes 8c Garniions des Villes, Forts, Châ-
teaux, Châtellenies, 8c Villages des Païs-Bas Efpagnols, fans aucun retarde-
ment, 8c de bonne foi.
III. Cette fortie de Troupes Hollandoifcs fe fera précifément trois mois
après,- que l'intimation de la part de Sa Sérénité le Prince Electoral de Ba-
\icre en aura été faite auxdits Seigneurs Etats Généraux.
IV. Après que les trois mois feront expirez, les Troupes des Seigneurs
Etats Généraux fortiront du Païs-Bas Efpagnol en bon ordre, fans faire au-
cun dégât, ni dans les Places ou Lieux, qu'ils feront obligez de quitter, ni
dans le plat Païs , où elles parferont.
V. Nulles prétentions quelles qu'elles puiffent être, foit hypoteques vieil-
les ou nouvelles qui pourraient fe trouver, ou qu'on pourrait former, n'a-
porteront du retardement à l'évacuation entière dudit Païs-Bas Efpagnol.
Vf. L. H. P. les Seigneurs Etats Généraux ne cherchant rien avec plus
d'cmprefïêment que de jouir d'une Paix perpétuelle, 8c d'entretenir une très
bonne correfpondance avec toutes les Puiflances voifines ; 8c n'aïant rien aullî
plus fortement à cœur que la confervation de leur Etat fouverainement aquis
de bon droit , dont ils regardent le Païs-Bas Efpagnol comme la Barrière
qui leur fert de défenfe, déclarent par cet Article expreflèment que leur in-
tention n'eit point de fe mêler fi avant dans les affaires de la Succelïion Efpa-
gnole que d'en vouloir décider, ni en général, ni en particulier, remettant
tout cela plutôt à la Difpofition Divine, dont ils cfpércnt un tel expédient,
qui préviendra toute effulîon de fang Chrétien.
VII. Le Sercniiïîme Electeur de Bavière en reconnoifïance de cette géné-
reufe protection , dont les Seigneurs Etats Généraux veulent bien fe charger
en faveur du Sereniflîme Prince de Bavière Ion Fils, promet tant pour lui
que pour ledit Scienilfime Prince, de céder, d'abord après le décès de Sa
Majeité
ET RESOLUTIONS D'ETAT. n7
Majefté Catholique aux Seigneurs Etats Généraux à perpétuité le Fort Ma- i"0"1.
rie fur l'Efcaut avec toutes les Annexes, fpécialement le Droit de Péage 6c
Gabellej en forte pourtant que ce Droit n'en doive point être altéré ni aug-
menté, & que les Denrées 6c Vivres deftinez pour la Cour de Bruxelles ,
foient exempts de païer aucun Droit.
VIII. 'Il ne fera point permis de tranfporter aucune Marchandife d'étran-
gère Fabrique par Oftende, Neuport^ Bruges, ni par aucune autre Place
Maritime à Anvers, & encore moins d'aprofondir l'Efcaut entre Gand, Den-
dermonde, 6c Anvers pour l'ufage de plus gros Vaifièaux que ceux qu'on y
voit à prêtent ; 6c, pour empêcher d'autant mieux toutes les contentions du
commencement de cet Article, à {avoir le tranfport des Marchandifes d'é-
trangère Fabrique, il fera permis aux Etats Généraux d'établir, 6c de faire
bâtir un Comptoir de Vifitation fur le bord de l'Efcaut entre Gand 6c Den-
dermonde, qui fervira à vifiter tous les Vaiffeaux, tant grands que petits, qui
parferont dudit Gand à Dendermonde, & même d'avoir un Contrôlleur à
Gand , duquel les Conducteurs des Vaifièaux , qui veulent paner de Gand à
Dendermonde, feront obligez de prendre un Certificat ou Lettre d'Afluran-
ce fur les charges de leurs Navires, pour le faire reconnoître après des Dépu-
tez Hollandois à ladite Vifitation.
IX. Cette Vifitation des Navires allant de Gand à Dendermonde, fe fera •
toujours en préfence de deux Commifiaires Députez de la Cour de Bruxelles,
tout exprès pour cela, & quand ils le trouveront quelques Contrebandes dans
les Navires, le Comptoir arrêtera le Bâtiment avec ion Conducteur, 6c en
donnera notice à la Cour de Bruxelles, qui déclarera dans le tems de huit
jours, les Marchandifes de Contrebande déchues au profit du Comptoir Hol-
landois, 6c chargera le Conducteur d'une peine^Arbitraire pour avoir voulu
violer le droit des Vifitations que les Seigneurs Etats fe font aquis par ce pré-
fent Traité.
X. Son Altefle Electorale fera affigner aux Députez Hollandois pour la
Vifitation fufmentionnée un Endroit ou Place commode entre Gand 6c Den-
dermonde fur l'Efcaut, pour la commodité d'une Maifon, ôc d'un Jardin
Potager que les Seigneurs Etats Généraux feront bâtir à leurs propres fraix,
à condition pourtant qu'on ne fera point l'exercice de la Religion Proteftan-
te dans ladite Maifon & la Place en dépendance, ce qui eft expreflement dé-
fendu. Pareillement eft défendu aux Etats Généraux des Provinces- Unies 6c
à tous leurs Sujets de s'y établir, ou d'y acheter des Terres, Matériaux, ou
femblables ni là, ni dans le voiiînage. En récompenfe Son Altefle Electo-
rale veut bien , 6c promet pour Elle 6c pour Ion Fils de donner une Garde de
quinze Moufquetaires avec un Sergeant de lès propres Troupes aux Députez
de L. H. P. pour ladite Vifitation, qui les affilieront dans la fonction de
leurs Charges, 6c les ferviront fidèlement jour 6c nuit en tous les belbins,
tant pour empêcher que les Conducteurs des Vaiflèaax ne puiflènt contreve-
nir à ce qui par ce Traité, a été ftipulé èc arrêté, qu'aulfi pour les défendre
contre les infultes des fripons , médians, 6c vagabonds.
XI. Il eft permis aux Députez des Etats Généraux pour la Vifitation des
Vaiffeaux , allant de Gand à Dendermonde, d'entourer leur Maifon 6c demeu-
P 3 re»
i-co.
iiS MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
re, d'un Foflc de la largeur de deux toifes, Se .non pas plus large; mais, tout
autre Ouvrage de femblable nature leur eft expreflement défendu.
XII. Comme on eft convenu ci-deflus par l'Article IX. que la Vifitation
des Vaiflèaux, allant de Gand à Dendermonde, ne fe fade jamais fans la par-
ticipation de deux Commiflaircs Députez de la Cour de Bruxelles , qui feront
obligez de fe tenir prêts jour Se nuit pour cela, pareillement il n'eft pas per-
mis aux Députez des Seigneurs Etats Généraux d'arrêter, ni conduire, ni
Vaiflèaux, ni Marchandifes , fans la participation defdits Commiflàires Dé-
putez de la Cour de Bruxelles ; d'où il ne s'enfuit point que ces Commiflâires
puiflbnt refufer leur accès, en cas qu'effectivement on ait trouvé des Contre-
bandes dans un tel Vaiflèau, ou favorifer en cela les Conducteurs.
XIII. Tout au contraire lefdits Commiflaircs Députez de la Cour de Bru-
xelles , feront obligez de s'engager folemnellement, Se par Serment, à l'obfer-
vation inviolable de leurs Inftruétions , dont il fera donné Copie aux Sei-
gneurs Etats Généraux des Provinces-Unies.
XIV. Son Alteflè Electorale de Bavière promet, tant pour lui que pour
le Sereniflïme Prince Electoral fon Fils , de retracter l'Octroi nouvellement
accordé par Sa Majefté Catholique à fes Sujets du Païs-Bas peur la forma-
tion d'une nouvelle Compagnie des Indes Orientales dans ledit Païs-Bas Es-
pagnol , Se s'oblige qu'un tel Octroi ne leur fera jamais plus accordé.
XV. La Ratification de ce Traité fera échangée en feize jours à compter
à celui de la date, Se fera fecret autant qu'il fe peut de part Se d'autre. Fait
Se conclu à Bruxelles le 2.8. d'Août i6pb.
Signé,
( L . S .) Eïerard de Weede de Dyckveït . ( L . S .) Pryel Meyer.
Il étoit cependant aifé de voir la fauflèté de ce Traité, parce qu'on fupo-
foit qu'il avoit été figné par Mr. Dyckveït , fous ce nom. Il eft cependant
confiant , que ce grand Miniftre a toujours ligné tous les Traitez fous fon
nom Sefurnom de famille, qui étoit Everard de Weede. On fit même plus,
car Ton en fit courir un autre en Allemand, qui étoit encore plus fort.
L'Electeur fit brûler l'un Se l'autre, par le Bourreau. Il fit même pro-
mettre dans les Nouvelles publiques trois mille piftolles à qui découvrirait
l'Auteur de ces pernicieux Ecrits. L'Envoie de cet Electeur préfenta aufli
aux Etats Généraux un Mémoire, pour les inviter de la part de fon Maî-
tre à concourir avec lui à cette découverte par les moïens les plus effica-
ces, puis qu'ils y étoient mêlez , afin d'en faire une punition aufli exem-
plaire que le meritoient des Ecrits fi déteftables. On afficha aufli des Paf-
quinades contre Priel Meyer , Miniftre Allemand de l'Electeur , le nom-
mant par dérifion, Bachelier de Y une cj? Vautre Loi. On en afficha aufli con-
tre le Comte de Bergeick , le traitant d'abominable. On fit des difeours
odieux contre celui-ci, le faifant defeendre de la femme d'un Peintre, qui
aïant peint une nudité fur l'original de fa femme qui étoit fort belle, l'apor-
ta en Efpagnc à Philippe IV., qui par là devint amoureux de l'original ,
Se la voulut avoir. Le Peintre étant mort, Philippe la maria à un petit
Gentilhomme des Païs-Bas, nommé Bergeick, homme de peu de renommée,
defti-
ET RESOLUTIONS D'E T A T. uP
deftitué des dons de la fortune, & qui fe la procuva par cette voie, eftimée 1700.
honteufe parmi les Efpagnols. Après ces fades démarches, on propofa de '
faire un Canal pour faciliter le Commerce. On fit interdire les Marchandifes
de Fabrique étrangère 6cc. , afin que tout cela fut une pierre d'achopement
à l'Electeur. Comme Mr. Dyckvelt étoit allé à Bruxelles deux ou trois mois
auparavant, l'on fit infinuer aux Habitans de cette Ville-là, qu'il y étoit al-
lé pour donner de l'argent à l'Electeur afin de rompre le deifein qui regar-
doit le Commerce; 6c cela les aigrit tellement, que Mr. Dyckvelt même n'o-
foit prefque pas paroître en public. Il eft vrai qu'on donna à l'Electeur cinq
cent mille écus; mais ce ne fut que par un emprunt qu'il fit de quelques par-
ticuliers fous la garantie des Etats Généraux, 6c fur de précieufes pierreries,
qu'il donna en gage, 6c qui y étoient encore l'an 171 <5., ainfi que l'on verra
en fon tems. C'étoient cependant ceux de Gand 6c de Bruges qui s'opofoient
au defTein du Canal. Mais on divulgua, pour rendre odieux les Hollandois,
que l'opofition fe faifoit par leur refTort. Les Peuples avoient été fi aigris fur
tout cela, que l'Electeur aïant demandé aux Communes le renouvellement
des Accifes, qui alloient expirer, elles les accordèrent , mais fous de certai-
nes conditions. Elles fe fervirent pour les drefler d'un Avocat, nommé van
der Meukfi, homme foupçonné de corruption de la part des ennemis de TE-
lefteur, d'un efprit mutin 6c trop attache aux privilèges des Communes. II.
ne voulut cependant pas s'y emploïer, fans en demander la permifîïon. Ce-
lui-ci la lui accorda. C'étoit dans la croïance, que ces conditions n'excéde-
roient pas les bornes de la foûmiffion d'un Peuple envers fon Souverain. Ce-
pendant l'on fut furpris qu'elles étoient en 3 }. Articles, dont une partie ten-
doit à vouloir donner la Loi. C'étoit en demandant, „ que les Miniftres,, j)emnn-
„ fur tout étrangers, fuflènt éloignez -, qu'il n'y eut perlonne exemte de des des
„' païer; que les Troupes fufient pa'iées} qu'on rendit compte des fommes ^atH°nS
„ reçues, qui n'avoient pas été apliquées aux ufages, auxquels elles avoient ^j££*
„ été deftinées, comme de païer les Soldats, qui n'avoient point reçu leur
„ paie, 6c qui n'avoient pas été habillez, étant délabrez, nuds,.6c en un état
„ pitoïable; qu'on châtiât ceux qui avoient détourné à leur profit les fom-
„ mes axeordéesj 6c fur tout qu'on confentit au Canal, à TétablifTement dit
„ Commerce, 6c à l'exacte défenfe des Manufactures étrangères.
L'Ele&eur trouvant la Majefté du Roi Catholique ofFenfée par ces Arti-
cles, fit fourdement venir de fes Troupes, qui entrèrent dans Bruxelles, 6c
s'y faifirent d'une porte. Le jour de l'entrée de ces Troupes,, il y arriva une
affaire, qui fit beaucoup de bruit: Le Quartier Maître Général s'en retour-
nant un foir chez lui dans fon Carotte, avec un Laquais, portant le flam-
beau, rencontra quatre perfonnes en manteau, qui tinrent la rue,. 6c firent,
détourner le CarofTe pour parler auprès d'un.Cimetiére , d'où, on lui déchar-
gea un coup de fufil à quatre balles : deux relièrent dans le CarofTe ,_ 6c deux
y parlèrent à travers. Par bonheur pour lui , il étoit panché à côté dans le-
CarofTe, 6c il ne fut blefTé que d'un éclat de la glace du CarofTe. L'Aifaiîîn
fe fauva,. 6c laifia un Manteau rouge doublé de bleu, comme d'un Cavalier,,
& la Carabine qui avoit été récemment fciée pour raccourcir, 6c dont le.
canon étoit couvât. d'un drap blanc y pour en cacher l'éclat du métaL Cet-
te
no MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
i?00- te affaire étant divulguée, des gens remarquèrent, par habileté ou par mali-
ce, que ce Quartier Maître Général n'étoit pas haï > que s'étant marié de-
puis une année, il n'étoit point homme d'intrigue avec le Sexe; qu'il n'avoit
aucune mauvaiiè affaire, 6c n'étoit pas même malfaifantj ainfi ils infinuérent
au Peuple qu'il avoit été pris pour un Bourgmaître , qui avoit une pareille li-
vrée, oc qui étoit un de ceux qui ibûtenoient avec le plus de chaleur les
Droits que les Communes s'attribuoient. Cela fit d'autant plus d'impreffion",
que le Manteau & la Carabine de l'Aflàffin ne furent expofées que pendant
une journée à la porte de la Maifon de Ville, pour favoir fi quelqu'un les
connoîtroit, & qu'on n'en pouffa pas plus loin la recherche. Deux ou trois
jours après, l'Avocat van der Meule» fut faiii par deux Officiers militaires,
même dans un lieu privilégié, 8c mis dans une baffe Foffe. Le jour fuivant,
les Communes s'attendoient d'être apellées par le fon de la Cloche, fuivant
la coutume, mais ce fut en vain. Cela produifit une efpéce de fermentation
parmi la canaille, qu'on voïoit attroupée en plufieurs pelotons. Cet attrou-
pement fut caufe qu'on fit fermer l'entrée du Parc , derrière la Cour. C'efl;
parce qu'au tems du Marquis de Grana , la populace voulant envahir la
Cour, & ne pouvant le faire, parce qu'on y avoit mis des Canons, s'y four-
ra par ce Parc. Deux jours après, au point du jour, quelques Soldats allèrent
chez un Orfèvre pour le faifir, mais s'étant évadé, ils s'y logèrent. Il en
arriva autant chez deux autres de cette profeffion-là, puis chez deux Braf-
ièurs, chez un Drapier, 8c chez quelques autres , tous gens qui avoient fait
paraître le plus de zèle dans ces affaires. Ceux qui s'étoient fauvez furent
contumacez. C'efl par la fage prévoïance de l'Electeur, que ces troubles fu-
rent enfuite calmez, 6c que les Communes furent obligées de rentrer dans
leur devoir. On a trouvé a propos d'mférer ici ce peu de circonftances , pour
faire voir julqucs où l'animofité de quelques gens peut mettre -en péril un
Païs.
Pendant que le Roi d'Angleterre étoit à Loo, il y arriva deux choies affez
finguliéres. L'une étoit, que le Comte de la four, Envoie du Duc de Sa-
voie, s'y rendit avec une Commiifion fecréte de la part de fon Maître. Don
Bcrnardo de ghuros crût que c'étoit pour tâcher de faire nommer le Duc à la
place de l'Archiduc Charles. Mais, l'on fut informé de fource, que le
Duc aïant apris par le Traité de Partage qu'il n'y avoit aucune part, crut
pouvoir en tirer, comme on dit, pied ou aîle. C'efl pourquoi il avoit dépê-
ché le Comte de la Tour à la Cour de France : c'étoit pour s'y plaindre com-
me il fit, de ce que nonobftant la proximité du làng, le Roi Très-Chrêtien
n'avoit rien fait pour lui. Cependant il y fit une propofition, avec offre, fi
elle étoit acceptée, que le Duc ferait entré dans la Garantie du Traité. La
propofition confiiloit, en ce que le Duc céderait à la France le Duché de
Savoie qui étoit à fa bienléance, avec toutes les prétentions qui y font anne-
xées, & qu'en échange on lui donnerait le Roïaume de Naples. On lui ré-
pondit à la Cour de France, que fa propofition pourrait être confidéiéej
mais qu'il falloir qu'il la propolât auflî aux aunes Alliez, l'Angleterre 8c les
Etats Généraux. C'clt ce que le Comte de la Tour Ht, mais fans aucun iuc-
cès. Une des raifons la plus forte que le Roi Guillaume 8c la Hollande
eurent
ET RESOLUTIONS D'ETAT. tli
eurent de rejetter la propofition, eft. que le Roi de France aïant la Savoye 1700.
avec les prétentions annexées, quoi que non fondées & furannées , il auroit '
été en état de les faire valoir mieux que le Duc. Par-là la Ville de Genève,
Se le Pais de Vaux, où tout cil de la Religion Réformée, auraient pu cou-
rir quelque danger. D'ailleurs, l'on n'étoit pas fâché de donner quelque
mortification à ce Duc-, fur ce qu'après la Paix avec la France, il avoit fait
faire une Harangue au Roi Jaques, qui paroiflbit entièrement contraire à
celle que le Comte de la Tour avoit faite à Londres, lors qu'il félicita le Roi
Guillaume fur fon avènement à la Couronne , & qui a été raportée ci-
deflùs.
L'autre Affaire fînguliére eft, que le Duc de Glocejîer, qui étoit l'elpéran-
ce des Anglois, étant malheureulement venu à mourir, la Princeflè Anne
de Dannemarck f 1 Mère , envoïa fort clandeftinement un Exprès à la Cour
de St. Germain, pour y faire lavoir cette moi t. Le Comte de Mancbefte r ,
qui étoit Ambaffadeur d'Angleterre à Paris, & qui veilloit fur cette Cour-la,
en fut averti. Il dépêcha fon Secrétaire Cbetwind 'fous d'autres prétextes a
Loo pour en informer le Roi. C'étoit parce qu'une pareille démarche , fi.
contraire à ce que la Princeflè Anne avoit toujours témoigné, fit apercevoir
qu'Elle avoit de pernicieulès vues. On les verra dans un Ecrit fecret, qu'on
a eu lors du tems de fa mort.
Cela fit former le deiïèin au Roi Guillaume de fe tranfporter en Angle-
terre, pour porter le Parlement à régler la Succeffion dans la Sereniiîïmc
Maifon de- Hanoi w.
En ce tems-là , la difficulté qu'il y avoit avec la Cour de Madrid relative-
ment à Schonenberg, aïant été, ainfi qu'on l'a dit, terminée par la Médiation
de l'Empereur, on fit favoir à Don Bernardo de j^airoj, que les Etats Gé-
néraux l'admettraient en qualité de Miniftre d'Efpagne. Auflî fe rendit-il
fur cela à la Haïe. Il eut occafion. en ce tcms-là de faire voir fon humeur
portée à la Magnificence. L'Eleétrice Douairière de Hanover, Se celle de
Brandebourg fa fille , s'y trouvèrent. Il les régala fplendidement ; & lors
qu'elles partirent, il leur fit trouver dans le Yacht, que les Etats Généraux
leur avoient donné pour les tranfporter à Amfterdam , toutes fortes de confi-
tures & de rafraichiflcmens,. Le Prince Electoral d'alors, qui eft à prêtent * * 1711.
Roi de Pruflè, fe trouvant à la Haïe en même tems que l'Electrice fa Mère,
Don Bernardo de Qiùros lui fit préferît d'une chaife roulante, venue de Ro-
me. Il la lui envoïa- chez le Miniftre de Brandebourg, après que le Prince
fut parti. Cet Envoie voulut faire un prêtent de douze piftolles au Gentil-
homme qui la préfentoit; mais celui-ci les refufant, & un Officier fubalter-
ne de la Maifon les aïant acceptées, Don. Bernardo de Quiros le chaflà de la
Maifon. Pendant que le Prince Electoral étoit encore à la Haïe, il perdit
un Epanieul , dont le Roi de la Grande-Bretagne lui avoit fait préfent à
Loo. Comme il aimoit ce chien, Se qu'il ne vouloit point partir fans le trou-
ver, on le fi: inutilement crier par la Ville. Le Comte de Dhona fon Gou-
verneur, aïant reçu ordre de Berlin de s'en retourner incefîàmment, fit par-
tir le Prince. Don' Bernardo de Quiros dépêcha un Exprès à Amfterdam,
pour reporter au Prince le chien, qu'il avoit eu loin de faire trouver. On
Tom. I. ■ Q^ fut
lit MEMOIRES, NEGOTIATIQ NS, TRAITEZ,
ï-co. fut un peu furpris de l'cmpreiTèment de ce Miniftre Efongnol à fe diftingucr
' en certe occafion par ces magnificences. Mais l'on fût que c'ctoit en vue
de Eure diminuer le fouvenir, que les Electrices 8c ce Prince avoient du bon
traitement que l'Electeur de Bavière leur avoit fait à Bruxelles. Quatre ou
cinq jours après Don Bcvncirdo de ghiirus alla à l'Audience publique des Etats
Généraux. Il leur fit le Difcours qui fuit y avec la Réponlc,
Haran_ „ M E S S I E U R S,
gue farte
par Don n /^'Est avec une joie bien grande que je puis enfin me trouver dans vô-
coBer-" » ^^ tre IMuftre AlTemblée, & témoigner de bouche à V. S. en quels
nardode m fentimens d'eftime & d'amitié Sa Majeité continué d'être à leur égard.
Quiros, „ Je me ferois même aquité plutôt de ce devoir, fi je n'avois été retenu
Ambaf- ?j par ies différentes & fâcheufes nouvelles qui nous font venues d'Efpagne
d'Ffpa- » depuis quelque tems: mais, comme par la grâce de Dieu, la Convalefcen-
gneaux n cc du Roi mon Maître a diffipé nos allarmes, je n'ai pas voulu différer
iitats n davantage une fonction qui me fait autant de plaifîr que d'honneur.
Gène- ^ Les orc|res Jont; \\ a p\u au r0j mon Maître de me charger, font, Mef*
dans fa 55 licurs, d'affurer Vos Seigneuries qu'il fouhaite de refferrer de plus en plus
première „ les nœuds de l'ancienne corrcfpondance qui a régné ci-devant entre Sa:
Audien- n Majcfté & Vos Seigneuries. Sa Majeité ne doute pas que ce qu'Elle vient
"'le8, „ de taire tout récemment en confideration du Roi de la Grande-Bretagne,
brci7oo. » 8c de Vos Seigneuries, ne foit un puiflânt moïen pour cela* 8c Elle elpé-
„ re que la généreufe facilité qu'Elle a marquée en cette occafion, Vous
portera à reprendre vos anciennes maximes, 8c à concourir comme autre
fois avec Elle à ce qui eit de l'intérêt commun, Se à ce qui peut veriu-
„ blement affiner le repos de l'Europe.
„ En mon particulier, Meilleurs, je l'efpérc autant que je le fouhaitc.
„ Heureux, fi mon refpect pour Vos Seigneuries, 8c mon exactitude à fecoi>
„ der en toutes choies les faintes intentions du Roi mon Maître, peuvent
„ contribuer à un fi grand bien.
„ C'eft au moins, à quoi je continuerai de donner tous nies foins, afin
„ qu'à mon retour en Eipagne je puiffe remporter la (àtisfaction d'avoir été
„ jufques au dernier jour en ces Provinces, un Miniftre de Paix, d'Amitié,
8c de Corrcfpondance: .
55
55
55
Réponse que le Préfident de Semaine lui fit.
ffP°n- «MONSIEUR,
kau " *
jiccé- n T Eurs Hautes Puiffances font d'autant plt*s fcnfibles à lajo'iedcvoir
«kiit. „ 1— / en leur Aifemblce un Miniitre de Sa Majeité Catholique, qu' Elles
„ avoient été privées depuis long-tems de cet honneur, par une fatalité, qui
„ leur avoit caufé beaucoup de regret. Elles ont, Monficur, tant de ref-
„ pect 8c de vénération pour fa Pcrfonnc ficrée, 8c Elles font une eitime fi
M particulière dç fon amitié, qu'Ellcs feront toujours portées à emploïer
„ tous-
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55
ET RESOLUTIONS D'ETAT. uj
„ tous les moïens poffibles pour la mériter, la cultiver, & la confcrver. Et ^7°^
„ comme il e£t confiant que de la confervatian de fa chère vie dépend entié-
,, rement le repos Se La tranquillité de l'Europe, Elles prient Dieu de tout
„ leur cœur de vouloir prolonger Tes jours, le rétablir en fa première fanté,
„ Se de lui donner à la fin un SuccefTeur qui foit digne de gouverner une fî
vafle Monarchie.
„ Quant au fujet , Monfieur , de vôtre retour, Se du nouvel emploi,
j dont il a plu à Sa Majeflé de vous honorer, L. H. P. ne vous en feront
,., aucun compliment, étant perfuadées que vous ne doutez pas de l'eflime &
„ de la cbnfidération qu' Elles ont toujours eu pour vous, 6c pour vôtre mé-
„ rite. Ainfi, Elles fe contentent de Vous afïïirer, qu' Elles continueront toû-
„ jours en ces fentimens à vôtre égard, Se que vous leur êtes le tres-bien
„ venu.
Ce que cette Audience publique eut de plus fingulier , efl qu'il fît retou-
cher par l'Auteur des Lettres Hifloriques plus de quatre fois la Harangue,
afin de paflèr légèrement, Se comme en gliflan't, fur la maladie Se la conva-
lescence du Roi fon Maître. C'ell que fuivant les avis qu'il avoit reçu d'Ef-
pagne, l'on n'y efpéroit, rien de la vie de ce Roi. Véritablement, ce Mi-
niftre y parloit au nom d'un Maître qui n'étoit plus. Se cette fonction pu-
blique de fon caractère fe faifoit après le décès d'un Prince qui en faifoit tou-
te l'autorité. On ne tarda même que quelques jours à recevoir la nouvelle
de cette mort. Comme elle entraîna après foi de la furprifè, de la crainte,
& des Négociations de quelque durée, l'on attendra à en parler, pour re-
prendre à préfent les Affaires de la Guerre qu'on faifoit en Livonie contre la
Suéde. v '
Le Roi Guillaume qui fouhaitoiu d'éteindre ce feu-là , dépêcha fecréte-
ment un nommé Picard ', Penfionnaire des Ommelandes, homme d'efprit,
capable de Négociation Se d'Intrigue , pour aller vers le Roi de Pologne.
Pour rendre fon habileté plus efficace, on le munit de quelques Lettres de
Change. C'étoit pour négocier avec ce Roi-là, Se le porter, moïennant une
bonne fomme, à la Paix. C'étoit cependant à condition que ce fût fur des
fondemens folides, pour ne pas craindre qu'au Printems fuivant il ne vint a
rompre fous d'autres prétextes aufîï frivoles, que ceux qu'il avoit pris, pour
entrer en Livonie. Picard avoit aufli de bonnes Lettres de Change pour ga-
gner quelques Sénateurs, Se autres Perfonnes diilinguées en Pologne, fort
Vcnfibles à ces fortes de Perfuafions pécuniaires j afin de porter la Diète, qui
alloit s'afTembler, à obliger le Roi de Pologne à faire cette Paix. On la
fouhaitoit d'autant plus, qu'on ne doutoit prefque plus que le Czar n'entrât
auffi en danfc contre la Suéde. L'Ambafîadeur de ce Monarque de la Ruf-
fie, depuis fon arrivée à la Haïe, avoit vécu 'civilement avec celui de Sué-
de. Celui-ci lui étoit allé rendre la première vifite comme au dernier venu
avec une grofTe fuite, dans fbn Girofle de parade à fîx chevaux. L'Ambal-
fadeur Mofcovite en la lui rendant, auffi bien que dans la fuite, l'afTura de la
fincére Se ferme intention du Czar de vivre en bonne amitié avec le Roi de
Suéde, Se de maintenir les Traitez qu'il avoit ratifiez le S, Se 20. de No-
Q^l vembre
124 MEMOIRES, NEGOCIATIONS, TRAITEZ,
_ r7-)J- vembre de l'année précédente 1699., & fuivant la Lettre du Czar au Roi de
" Suéde du 14. Avril de l'année courante 1700. Même, comme l'Ambafladeur
de Suéde lui parla de la Paix qu'on négocioit entre le Roi fon Maître Se ce-
lui de Pologne, le Rumen ajouta qu'il feroit fort avantageux au Roi Au-
guste de faire incefîamment la Paix avec Sa Majefté Suédoife, puis qu'il ne
devoit aucunement fe fîater de pouvoir obtenir le moindre fecours du Czar
fon Maître, qui ne vouloit aucunement fe mêler dans la Guerre de la Livo-
niç. C'étoit d'autant plus que le Czar vouloit être connu pour religieux Ob-
iervatcur de la foi donnée. Que ce Monarque fe fouvenoit qu'il étoit fur un
Trône aufll haut qu'il y en eut dans tout le monde, 8c que s'y trouvant il ne
vouloit jamais rien commettre qui en fût indigne. Ainil , il avoit de l'aver-
iion.pour tout ce que l'âge prêtent 8c futur pourroit lui reprocher: ce
qu'on pourroit faire, s'il attaquoit un Roi ami , fans en avoir quelque fujet.
Cependant , cet Ambaiïàdeur Ruffien préfenta aux Etats Généraux un
Mémoire Latin en date du z. de Septembre. Il y ajouta un Ecrit portant
des plaintes que le Czar avoit déjà faites au Minjftre de Suéde qui rélïdoit à
Mofcou, 8e demandoit fur ces griefs une dûë fatisfaction. Voici le Mémoi-
re Se l'Ecrit.
Mémo;- CELSI AC PR.EPOÏENTES DOMINE,
l'Ambaf-
fadeurde ÇUvi mïffi Utera dis \6. Juniï Afofcovia exarata pofteriori demum nnncio Au-
Moico- gUjfi fa j§_ j:jc tra^itafunt , qua ouoddam Afanddnim fiia Qzarera Mijef-
Griefs du *at*s confine dm , quod Vcflris Ccljjs ac Prapoîentibus Domiuaiionibus abfque ull'i
Czar thorâ inftmicindum fit: ideo mearUrii partium ejfe duxiîllud^cutn Mis commu-iici-
contre la re , demonftrans teaorem ilïïus fèquenti -modo: quoi cum de refponfione-' certior
Suéde, fatla fit fua Czarea Atiijeftas à Cclp a; Prap. Domims Stanbus {quod fia
Czare.i Majefiâs bcllo Livoniehfi cum Coronâ Succicâ immefiere nolif) hue ad~
modum, contenta cfî , hanc eam aemonfirationem fv.am mine illasc obfervare , ac
Pa'cem abfijue Offenfioné eam Corohâ Succicâ, ob petitionem Gel for nui ac Prapo-
tentpn S'tatuùm confia va; c •nelit ; tantum aefiderat apud illos Celfos ac Prapo-
tëtites Dominos Status ut finalitcr fignïficent Aiimfiro Suecico ac fua Regia Ma-
jejîati feribant quod in commorationc Alaghorum ac Pkmpotentiariprium Legalo-
ru'tn Mofeovhe locfffus fit Mis, Tfttïmus Bajariniïs ac Broyez Siberia, Theodorus
Alex; des Goloivinius cun: Coilcfis, de communibils Injnrïis in parlera Sué Czave.e
M.yefiatis, maxime autan inter alias bac , qjïa in dedecus ipfuts Czarea Ma-
jefiatis Mata efi Riga. Cum toii fierè Mitrido confia , quod f'ua Czarea Aîajef-
tas pratéritis annis Riga 'fuent, indeqite tamBstaviam ^roficifci volwrit ; quod
je qtfpqué faillir os a; relaturo's ejfe abfque uïla mer), ad S. Reg. Alajejlatcm in re-
d'au Jfko prcmi/cru:;t; quâ de re etiam Mis feriptum tradiiuni efi, cura fubfirip-
tic tim fupradichrum Conf-diariorum Aioficcvia'. Scd hoc uf pie ad tempus
m:: : fonfum ficutiim, lec ".dhuc ulla fatisfuelio prafiita efi; quamok .
C : ac Pràpotentès Domini hisbcnPa: prudenter perpènft) .de injuria ipfius fiïœ,
Perfona Czarca Majefiatis fatisfacJione, •&ihdiblâ dignà JcriùanS$ qua aiitèm (y
quelles Ma û'nt injuria , ï'c/tris Ce/fis 'acPrap. DorHfa'at tombai dur
. a '; '-. .,: Ci:ar;J, q:t . , yrpctu.i pr'fpiroru-n fuccejj'num iucrcwe,,:.i
ET RESOLUTIONS D'ETAT. iïj
apprecor-, manfiurus ad quavis ami rit ia Officia par atifijlmus. Haga C omit a m die l"00.
2. Sepfembris, Anno 1700. Signaturn erat.
Sacra Sacratiffima Czare<e Majeftatis Magni Potentififimi Imperatoris Mcf-
covia Mimas Okolniczy Locum tenens Jarofilavids Legatus,
Andr. Artemonides Mathueof.
Piweterito 169p. Anno, fccundum mandatum Magni Domini Czari & Ma-
gni Ducis Pétri Alexidis totius Magna:, Parvce, Alba;que Ruflia; Au-
tocratori, exiftentes in Conferentiis , Intimus Bajarinus & Prorex Sibi-
ritè Theodorus Alexides Golowinius cum Collegis, Succico Magno
ac Plenipotentiario Lcgato Johanni Bergenhelmo cum Collegis, pro-
poiuerunt , ôc in feriptis , manuum fuarum Subfcriptione dederunt ut fe-
quitur.
pOJIeaquam prateritis diebus exifientes in Conferentiis fiua Czarea Majefiatis
Intimus Bajarinus Ocolnitzius, & intimus Confiliarius , (3 cateri Collega
Magnis ac Plenipotentiariis Legatis fiua Regia Majefiatis in ifiis Colloquiis mal-
toties demonfirarunt , 13 in feriptis dore promiferunt injuriant qua pra cateris ita
apellari potefl : quod cum Anno 1697. fua Czarea Majeftatis , Magni ac Ple-_
nipotentiarii Legati ex Mandato Iter fiaficepififient Mufcovia cum quibufdam pra-
daris Foluntariis {Voluntaires vulgo fie diclis) in Régna Europaa per ditionem
Sua Régi a Majeftatis per Urbem Rigam, tune in prafiatd Urbe, non tar.tum
in receptione f juxta Obfcr-vantiam traclatûs Paris, fed etiam in commoralione
maxime av.tm in dificefifu illi non tam fiatisfiaili, quin potius injuria , ac oppro*
brio afifietti 13 inimice traclati funt , cujus hic ex parte rnentio fit. Certior enim
faclus Dominai, Gêner alis ac Gubernator urbis Rigenfis per litsras ip for uni de
adventu Magnorum ac Plenipotentiariorum Legatorum in Confinia neficivit illos
juxtà dignitatem recipere, ac idoneos Prafieclos receptionis (Prifiavos) nec equos
illis mittere aut pabula dare ; non modo ob Amicitiam Firinam aut alias ob cau-
fias , fed illud quoque ntquaquam pecuniâ expeti potuit , quà ratione ufque ad Ri-
ga'm iter fuum maximâ egefiate in finis (cquis) profiequi coaïïï fiant. Riga au-
tem non modo ab honeflis Firis & Nobiiitate, in receptione honorati ac recepti
fu>it\fièd à parvo numéro mercatorum ipfis oc car fin s faclus eft. Afifignata fiant ipfis
'Domicilia haucï bona {3 qv.idem mercatwia, p'ro quibus autem illi coacli funt fi'ol-
vere pecuniam pro tahbus Mgneis hypocauftis pro qua libet domo tantum , quantum
pro magnis Lapidés Palatiis. Ad bac à'nemine, re alla honoris gratià donali
fiant ( quod etiam non defukrarant) fied ignominiosè tempore diei Sancli rcfiurreclio-
tiis Chrifii, caterifque omnibus diebus, nihil me pabul.i pro equis vendiderunt ,
quid autem illi vendiderunt pro hoc ( quamvis Legati ifti magni pecunia non pe-
pferecrint ) plurii deriesfibi folvi curarunt.
Apad âurigàs (Mcficovitieos) etiam equos bonos pro pretio minime ob invendil'.-
le pabulum, deccmfii-zveris, (folidis) 13 pauïo plurHs, qnafii fiub vendit ione fiump-
fer mit , perfonas, ac Sa -vos ad Légat ionem pertinentes abfique Vigilibus nullibi
ire aut tranfire non fiverunt , ac quemeunque , quaficunque etiam ob eau fias ire vo-
hierinî, fiecuti funt Milites duo, aut plans, tamquam malcfiicum , (3 plures ficx
hominam numéro non irtromfirunt in Urbcm , ne c Itiarn in arcem ad Gabernato-
ii5 MEMOIRES, NEGÔTIATIONS, TRAITEZ,
1700. rem, fed prœterea in eos graviter inveeli funt , ac coutume lia eos affecerunt , &
•• iftos loco capïtalium hoflium , ac explorât orum habuerunt : ad hœc itlos percuter e
ac detinere gloriati funt t quod autem manifefium Dei patrocinium non pcrmifit ,
de cœteris autem Fer bis meliks tacêre quam fcribere convenit : quod autem omne oh
malam adminifirationem à Domino Gênerait ac Gubernatore Confulibufque prove-
vit -y quamvis autem fua Czarea Majeftatis magni Légat i, de hoc & alto multo-
îies pneclaros fuos Nobiles ad eum miferint, conquête nt es de J'uo infortunio, atta*
tnen ille non tantum ipfis in hâc re auxilium ferre reeufavit , fed ctiam eos magnos
Légat os confolari, aut deleclare noluit, monfirans fenfibile ad amicitiam fajli-
dium, fimulatè dixit , fe jacere <egrotutn ob obitum filia fua, quam ob caufam fie
Dominos Pienipotentiarios Légat os invifere nonpoffe, cum tamen hoc nihilfuerit.
In difeeffu Magnorum Illorum Domînorum ac P lenipotentiariorum Legatorum
ix Riga , trans fiuvium Duinam eos non modo quibujdam Navibus bonejlioribus
(Jachti &? Boot) non honoravit , fed etiam pro parvis acferè deformibus Scapbis
.cum quibus eos milites ac alii mer cède conducli auriga tranfvexerunt pretium fiump-
ttim efl tantum , quantum pro Navibus , & ad Confinia ufique Ducis Curlandiœ
deducli funt illi, abfque ullo honore atque comitatu.
Curfior magnorum ac Plenipotentiariorium Legatorum Jacobus Sunvvvetz mifi-
fus è Curlandiâ in Rigam à Domino Generali Gubernatore très dies detentus &
txamini fubjeclus efi , ut diccret ubi fua Czarea Majeftas nunc degat , & alia
huic contraria verba, prœterea luftrationi ac vifitationi expofitus , atque fummo
opprobrio affeclus efl, ac ignominiosè, tanquam inimicus 6? captivus in arreflo
detentus, & non modo feripta aut Literœ , fed etiam respœnè omnes ei ablatœ
13 accuratè perlujlrata fuerunt , quem demum cum nihil contrarii in ipfo invenifi-
fent cum omni exaclione ac dedecore miferunt.
Adhuc etiam erubefeunt illi grati Domini, illis magnis ac Plenipotentiariis
Légat is fua Regue Majeflatis prater alia cujufdam Barbarici, ac invifs Sufipi-
cionis Domini Generalis ac Gubcrnatoris Rigenfis reminifei ; quod multifariam ad
magnos ac Pienipotentiarios Légat os mittens , afperè vociferatus fit, quafi qui-
dam ex Miniflris ac perfonis ad Légat ionem pertinentibus , circumeundo urbem ,
fortalitia ac munimenta lujlrent ac dimetiantur , vociférât ioties , turbines ad quem-
eunque tumultum excitent, quod verofub ver a promijfwne non faclum, &? omnibus
cum vigilibus ire cogebantur : ad quid fua Czarea Majeflatis Magni ac Plenipo-
tentiarii Legati refpondcrunt ut illud facientes,fi modo quidotn ex Miniflris Lega-
torum cujufcumque conditionis ifta perfona fint tanquam malefci, juribus quibufi-
cunque illi velint, capti fuerint dijudicarentur pr opter ea quod nobis certb certius
eonfiet, hoc ab ullo ex illis fieri.
Cum autem tempore vernah ingruenti Magni ac Plempoientiariï Legati Navis
f.bi procurari deftderarent ad conficiendam fibi propofitam via>>; , mittendo quofi-
dam Miniflros in Portum ad mare fit um, ut Naves iflas p> œfeitu Geaeratu #c
Gubernatoris lufl tarent, tune non tantum if os per urbem, vel prope urbem tranfi-
miferunt via or dinar iâ, fed eos circa omnta Suburbia in agro circumduxcrunt ,
militibus circa plat eas cmnfidopctis fiant ibus.
Sed de aliis fcribere non necefje efl, quia jam toti mundo notum ac compertum
efl, quod fua Czarea Majefias ipfii in perfona ilio tempore cum magnis ac Pleni-
jpotentinriis prafiens fuerit } (à hafiupra memorata omt.es contumelia ipfam perfib-
nam
ET RESOLUTIONS D'ETAT. u7
nam Hiius tetigerant, quâ pr opter fua Czarea Majeflatis intimus Bojàrinus cum 1700.
Collegis fais exi/lens in Colloquio, fua Regia Majeflatis magnos ac Plenipoten* h
tiarios Legatos rogat ut de his omnibus ad Sacrant Réglant Majeflatem yerè de*
fsratur & fine Czarea Majeflatis fummo honori & poft ipfum magnis -ac Pleni-
potcntiariis Legatis, in omnibus fatisfatlio ac defenfio ab illâ injuria fiât , Jiqui-
dem hac injuria ac dedecus, non tantum traclatibus Paris & vicinitati admo-
dunt contraria ac infenfa , fed etiam juri communi gentium v.ildè incongru en s
aïque inutilis audit , de quo non dubitat Clemcntifftmus Nofter Czar ac Domi*
nus, quin fua Regia -Majeflas tanquam Dominus valdè prude ns perpenfoboc,
quod ad majorent amiciti'am pertinet, dederit Defenfionem adverfus banc conta*
meliam perpétrantes , 13 f«* Czarea Majeflati per dilcclas Literas fgnificave*
rit. In damnis autem fuis , illi magni ac Plenipotentiarii Legati contenti funt
gratiâ ac clementiâ Clemcntifflmi Czaris ac Domini fua Czarea Majeflatis.
Ad hac offert quoque quarelam fuœ Czarea Majeflatis Légat us intimius Confi*
liarius rêver tens ex T'urcicà commifjïone, Procopius Bogdanowitz Wofnitzin ,
dicens, quod f tires ruftici Livonenfes , auriga, ipfum innocenter expoliaverint ,
avehendo totim carrant, in quo pecuniâ , argenti, 13 alius varii fupelleclilis plus
quam mille rublonibus , pofltum fuit , de quo Domino Gênerait Gubernatori cum
Literis ejus fpecificatio miflâ, fed nunc bis accuratè perluflratis rébus prater iflam
fpecificationem refert, quod iflic etiam inifla fuerit annulus cum adamantibus ob-
duclus pretio 300. thalerorum, 13 2.. tapetes Gallici admodum pulchri .
Sequentes injuria quarum infra in hoc fcripto fit mentio defiderat fu<s Czar e a
Majeflatis intimas Bojarinus cum Collegis ut etiam è parte Regia fua Majeflatis
jaxta vcritatem ipfam fatisfaclione refarciantur , in quo necdubitant, quin fua
Regia Majeflas poft relationem illorum magnorum ac Plenipotentiariorium Légat 0-
rum, ipfam juflitiam ad implendam ami cabilem Paris confervationem, inperpe*
tuant adminiflrari ac illam dignis folutionibus recompenfari jubeat.
Sed ha infra nominata injuria tradita funt, juxta Libcllum Prafetli fumnti
Curforum Matthœi Winnii de multis injuriis in Prafeclum ac Direilorem Pof-
ta Rigenfis, quia malt as Literas detinuerit ac refignaverit , nec non multas Lite*
ras non acceperit , ut direclione Pofla privetur & ipfi alius praficiatur.
Libellas fupplcx Gerafini Befcoviiw Vico Hortulano de pecuniâ pro mercibus
'in Rigcnfem Civem Henricum Cliverum fummâ mille rublonum, thalerorum
fiimma o-pcnfarum 300. rubl. ut bac pecunia adjudicetur.
Libellas Oftacovienfls Antonii Tockini in Narvenfes Cives in Andream Func-
kenum 13 Simeonem Numengenum de pecuniâ pro mercibus fummâ 600. ru*
blon. ut mandatant executioni mandetur.
Supplicatio 13 extrailum negotii Thomse Killermani in bonis Martini Buel-
lingii fummâ 16. mille rublon.
Supplicatio Boldwini Andrex filii in Aulicum Suecicum Cafpamm Klingen-
fternum in defeclu traditionis velarium, tinteaminum, ac tormentorum fummâ
3000. rublon.
- Le jour que ce Mémoire fut préfenté, les Etats Généraux prirent la réfo-
lution de communiquer au Roi de Suéde ces deux Ecrits par une Lettre,
pour
iiS MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
•1700. pour offrir leur Médiation &c, tùnfi qu'on peut voir par la Réfolution même
' qui luit.
Excerptum ex Libro Decretorum Cclfomm & Prxpotcntium Domi-
norum Ordinum Generalium Uniti Belgii.
Die Vénerie 3. Septembris 1700.
Rifblu- T)Omini Ham & cœteri Celforum £s? Prœpotentium Dominorum Ordinum Gène-
tion des ralium ad res exteras Députât i qui virtute Décret i torum & commijfonis
EG- hefiernee colloquuti funt cum Domino Andr. Artemonides Mathucof Légat i ordi-
coramu- mr" Czarea Majejlatis MoQtoviœ in conventu Dominorum Ordinum. Genera-
niquer Hum retukruntjam nominatum Dominum Lcgaîum ore tenus expfuijje & in.fcrip-
au Roi to ipfis reprefentaffe contenta in Mcmoriali hic fcquente.
de Suéde
les Griefs ' . . .
du Czar. Fiat inlertio.
Super quibus inflituta délibérât zone conclufum &? decretum efi fuprà fcriplttm
Memoriale communicandum ejje Régla fuœ Majejlati Sueciœ, iliamque rogandam
curare velit ut ad querelas in eo commémorât as refpondeatur £5? Czareae fua Ma-
jejlati de ils fatisfiat quemadmodum cum aequitate & confervatione Pacis &
amicitiae inter fuam Regiam Majeftatem & fuamCzarcam Majeftatem convenir e
arbitrabitur; bis etiam addendum, fi forte bac in causa dfficultates aut controver-
fiae exoriri poffent , Dominorum Ordinum officia ad eas tollendas & componeudas
parafa fore , eaque offerre pro neceffitudine quae Mis cum Regia fua Majefiate in-
ter cedit & ' pro amicitia quam cum Czar e a fua Majefiate colunt Lit ter as autem in
hoc negotio ad Régent Siieciae feribendas cum earum exemplari per Agentem
Rofenboom tradendas Domino Baroni de Lilienrodt Regiae fuae Majeftatis
Sueciae Legato Extraor dinar io & ab eo petendum ut Mis tranjmittere Ç$ officia
fua iis jungere velit, que omnis jujla querendi materia Czareae fuae Majejlati
praecidatur.
En vertu de cette Réfolution s on écrivit d'abord au Roi de Suéde la Let-
tre fuivante.
SERENISSIME.
Lettre ÇUm pofi Mata nuper in Livoniam., Regiae Majeftatis veftrae Provinciam in-
des Etats fejja poloniae figna rumor longé latèque fpargeretur , Magnam Mofchorum
c,cae" Czarum Ce haie bello fociiim datuntm, vel auxilia Régi Poloniae mijjurum, fu-
Uoide per his animum Czareae fuae Majeftatis pertentare & cognofecre , & fi quid taie
Suéde, meditaretur , de tali cenfilio dimovere conati fiiimus. Refponfum nobis efi Jatis
du ?. ex voto, nihil Czareae fuae Majejlati inimicitiarum cum Rcgiâ Majefiate vcftrâ
170^ intercéderez quiu potius Pacern & amicitiam non ita pridem uovo Fœdere firma-
tam, à parte Czareae fuae Majeftatis fartant &? te clam futuram. Officia au-
tan
ET RESOLUTIONS D'E T A T. 149
'cm qua -hàc in causa adbibuimus , occaftonem prabuifife videntur , cur Czareâ I 700-
Jua Majeftas cum fibi de injuriis quibufdam fatisfaclum non ejfe gravitttr , née ■ '
refpon/um ad querelas, Légat i s Régi te Majeftatis Veftra Mofcua de iis f atlas ,
earum notitiam per Legatum fuum hic loci degentem ad nos detulerit, ut Regiam
Majeftatem veftram illarum commonefaceremus , quemadmodum hoc plenius Regia
Majeftati veftra conftabit ex memoriali à Legato Czareâ fua Majeftatis nabis
exhibito, cujus exemplar his litteris noftris junximus. Ntilli quidem dubitamus,
ou in pax £5? amicitia cum Czareâ fua Majeftate, Regia Majeftati Veftra curie
& cor ai fit, atque Regiam Majeftatem Veftram ultrb curaturam, quicquid ad,
earum confervationem conducere qucat , tamen rogati pratermittere nonpotuimus,
quin Regiam Majeftatem Veftram certiorem faceremus eorum , qua nobis à Le-
gato Czareâ fua Majeftatis expofita fuere. Regia autem Majeftas Veftra ipfa
per fe fatis intelliget., quam necejjariam & c re fua fit , querelas bas aquâ &? ad
eonfervandam amicitiam & pacem, tempérât â rcfponfione, quantocius amoveri (S
dilui, ne mat cria vel a>ifa controverfiarum ac content ionum relinquatur. Quodfi
opcram noftram hoc in negotio Regia Majeftas Veftra fibi utikm £5? alicujus mo-
ments fore exiftimaverit , officia noftra ad fedandas &" tollendas controverfias , fi
quas hinc enafci contigerit, pro neceffitudine qua nobis eft cum Regiâ Majeftate
Veftra, &? Pr0 amicitia quam cum Czareâ fuâ Majeftate colimus , Mentes ojfe-
rimus, in hoc femper & conftanter laboraturi, ut Pax & Concordia ubicumque,
pracipue autem inter principes nobis Fœdere & Amicitia conjuntlos,falva & in-
violata tueatur, Caterum 13 c.
L'Ambassadeur de Suéde préfenta aux Etats Généraux le Mémoire Cli-
vant, pour leur faire lavoir qu'il avoit dépêché leur Lettre, Sec.
CELSI AC P P. D D.
Ç\Uandoquidem Sacra Regia Majeftatis Domini mei Clementiff. mandata ad Mémoi-
*£^me pervenerint quœ Celfis ac P P. D D. Veftris à me exponenda funt . Ita- pAmLf-
que quâ par eft obfervantiâ rogo ut cum earundem Députât is colloqui poffe , pro fadeur de
folitâ benevokntiâ tnihi concedatur. Injuxit mihi Sacra Regia Majeftas Rex Suéde
meus Clementiffimus ut fuo nomine débita gratiarum aclione apud Celfas ac P P. Lilicn-
Z> D. Veftra s defungerer, pro eximio prorfus & enixo ftudio, quo viribus non [o°Sep?
minus quam confins cum Sacra Regia Majeftate fociatis, reftauranda Paci Sep- ï7ôo.
Untrionali indefejfam opcram impendere ' voluerunt ; miffà eum in finem ver fus
Mare Balthicum Clajfe Navium Bellicarum atque fimul Hamburgum Ablegato
Miniftro , congruis mandatis inftruclo. Quant umvis enim mififa fuerit ifta Claf-
fis,,ad Guarantiam à Celfis ac PP. D D. Veftris fufeeptam, Sereniffimo Du-
ci Holfatia praftandam ; hâc eâdem tamen occafione , pluribus , iifque infignibus
Documentis experta eft Sacra Regia Majeftas amicitiam , £5? pronum erga fe af-
fetlum Cclfarum ac P P. D D. Veftrarum. Et quandequidem ifthac Pax, etiam
in -Sacra Regia Majeftatis commodum redundat , fummoperè eo nomine fe devinc-
tam profit etur Sacra Regia Majeftas nullam pratermiftura occaftonem, teftanda
grata mentis idoneam. Cumque ftrenua £5? infignis à D. Allemonde navata ope- "• .
ra praclarè enituerit , atque pari ter fa lut 'are Pacis opus, fummà D. de Cranen-
Tom. I. R, burg
ip MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
1700. burg dexteritate, officiifque, laude omnino dignis, promet um fit , Sacra Regia
— Majeftas ut r unique ob rem egregiè geftam , Régis fui teftimonio condecorandum
cetij-
Qjiod attinet ad Negotium mihi à Celfis ac PP. D D. Veftris mcïiorem in
tpodum , commendatum , gravamina nonnulla à Magni Mofcorum Czaris Légat 0 ,
Ccl/ a-, nm & P P. D D. Veflrarum Députât i s in Colloqtiio nuper expoftta, con-
cerneh s , Sacrant Regiam Majeftatem abfque mora de eo certiorem reddidi , atque
Literas Celfarum ac P P. D D. Veflrarum banc ob caufam Sacra Regia Majef-
tati perferiptas^ unâ cum exemplari Memorialis eique adjuntli feripti, à prafaio
Domino Légat 0 exbibiti , tranfmifi. Humillimè praterea retuli quant operè curay
cordique fit Celfis ac P P. D D. Veftris ut amicitia inter altifjïmè memoratas
Regiam , Czareamque Majeftates perpétua vigeat. Hac igitur Celfarum ac P P.
D D. Veflrarum benevola officia non poffunt non gratifjïma effe Régi meo Clemen-
tifflmo , cum conflans ipfi deftderium fit fuâ ex parte fedulb colendi quin & in dies
augendi veram £5? non fucatam amicitiam , quâ Czarea fua Majeflati jungitur .
Certus propterea omnino fum , moleflè admodum intelletluram Sacram Regiam
Majeflatem quidquid Riga ante triennium acciderit Czarea fua Majeflati , vcl
minimum conquarendi anfam prabuerit. Cum cnimfua Regia Majeftas maximi
mérita faciat SereniJJimi Czaris perfonam , fummafque ejus dotes , dubium non eft
quin talem ejus quicquid fuerit , rationem fit habitur a, fuamque fmeeram amici-
tiam luculentis adeb indiciis comprobatura fit ut Czarea fua Majeftas re ipfâ fen-
tiat quantifiât. Mihi quidem non confiât , quid bâc de re Magnis Sacra Regia
Majeftatis Légat i s Mofcovia fuerit propofitum. Sic inter ea arbitror , Eosy id
fibi unice demandatum , fientes, ut aternum Pacis Fœdus quod Regiam , Cza-
reamque Majeftates , Earumque Régna & Subditos haud vulgaris amicitia nexu
corjungit) denuo rénovât um folemniter firmarent t Hoc negotio ex voto peraclo
domum reverfos effe ; différentes proculdubio cuncla alla ufque dum Magna Cza-
rea Majeftatis Legatio Holmiam adpelleret , ubi tiim , fi quid unâ alterâve ex
parte complanandum reftaret, facili negotio de eo amice convenir ipoffet. Hac
exigua mora nihil certè immutabit folidam illam amicitiam , ad quam invicem con-
fervandam,ambo fummi Principes, pari folertiâ, paribufque ftudiis, arnica amula-
tione concurrunt. Memoratus enim Czarea Majeftatis Légat us , plus unâ vice
banc Domini fui ClementiJJïmi mentem teftatiorem reddidit , idque validiffimis
declarationibus conftitutum ei effe , non tantum bello , quo Livonia flagrat fe non
immifeere, fed & amicitiam cum Sacra Regiâ Majeftate omni exquiftto Officio-
rum génère excolere , calumniam appellans quicquid huic adverfum , maligni ho-
mmes divulgare conati funt. Vfus eft bâc occafione ver bis memoratu profeclè di-
gnis , utpotè immortale decus Czarea fua Majeflati conciliaturis & qua pracla-
rum exemplum prabent , ab aliis , ni fi queis fm'iftra viliorque mens effet , imitan-
dum. Hac feilicet verba fuerunt : Sereniffimum Czarem ita in animum induxiffe
fuum ut ante omnia , fidei data religiofiftimus cuit or videri velit. Memorem ni-
mirum effe, infidere fe folio, nulli totius Or bis potentiâ fecundo , feque adeb tam
excelfo Joco pofitum , nihil unquam committere velle quo tanto faftigio minus dignus
enipiam videatur. Averfari igitur fe £5? afpemari quodeumque indecorum facinus ,
quod prafens vel futura atas ipfi exprobare pojfet; id quod fier et fi amicum Re-
gem, nulla injuria laceffitus, bello adoriretur ; Generofa profetlo , tantoque Mo-
nankâ
ET RESOLUTIONS D'E T A T.
ifi
narchâ verè digna /entent ta, fempiterna ejus gloriœ futur a teftis. Tantis itaque
ajfeverationibus innixa Sacra Regia Majeflas fatis fuperque fecura efjc potejl,
amicitiam Ma ex parte illibatam intcgerrimamqiie pràftituram -, fc? quamvis in
prœfentiarum , Nomme Czareœ fuœ Majeftatis gravaminum quorundam mentio
injetlafit, ejus tamen indolis ea neutiquam funt ut amiciliam ullo modo convellere
pofiînt; prafertim cum ad id accédât, quod ad Celfas P P. D D. Fefiras fint
delata-, Quibus bine cum Sacra Regia Majeftate arcliflimœ neceffitudinis , &? il-
Une pariter cum Serenijftmo Czare is amicitioe ufus intercedit , ut arduum ipfis
futurum non fit, tôlier e &? amovere quicquid ulla fimultatis vel offenfa fpecie ,
tam amicos Principes collidere poffit. Nihil igitur fuperefi , nifi ut ratione Régis
Polonia id dumtaxat addam, quod fi contingat eum maie confultum bello profe-
qui, armaque ejus prêter fpem profpera ipfi evenire aut etiam eum Belli focios,
vel quacumque ratione adjutores babere pojfe , Sacrant Regiam Majcftatcm plenà
cum fiduciâ id omninb fperare fibi Celfas ac P P. D D. Fefiras non minus ac
Regiam Majeftatem Magna Britanniœ , vigore fanât or um hinc Me Fœderum,
quam efficacifjïma ope £5? auxilio effe adfuturas.
L e Roi d'Angleterre trouva aufll à propos d'offrir de fon côté fa Média-
tion au Czar. C'eft pourquoi il lui écrivit quelques femaines après une Let-
tre en Anglois. Comme l'Ambafladeur Ruffien ne l'entendoit pas, il falut
la faire traduire en Latin, telle que la voici, 6c il falut la renvoier en An-
gleterre, pour y faire apofer le Grand Seau.
17c©.
GULLIELMUS ÏERÏIUS ,
Dei Gratia, Rex Anglia, Scotia,
Franciœ, & HibernitS, FideiDefen-
for &c. Altiffimo , PotentiJJîmo, £5?
Illufirijfîmo noftro Fratri DilecliJJimo
Magno Domino P EÏRO A LE-
XEIEfFirSO, Czaro fc? Ma-
gno Duci, &V.
Guillaume Troisième , par la Lettre
grâce de Dieu, Roi d'Angleterre, du Roi
d'Ecofle, de France, Se d'Irlande, £Angle
Défenfeur de la Foi , 6cc
Très-Haut, très-Puifîànt , 6c très-
Illuftre Nôtre très -cher Frère
Pierre Alexeiewits, Grand
Seigneur, Czar , 6c Grand Duc de
toute la Haute, Baflè, 6c Blanche
Ruffie , le Soutien de Mofcovie ,
Kiovie, Vlodomirie, Novogardie,
Czar de Cazan, Czar d'Aftracan,
Czar de Sibérie, Seigneur de Ple-
xoe, 6c Grand Duc de Smolcns-
ko , Iverie , Legorie , Permie ,
Viatkye, Bulgarie, ôc autres, Sei-
gneur 6c Grand Duc de Novogo-
rod , 6c des Pais bas de Czernegor-
ky, Refansky, Roftovesky , Jero-
ftave, Boelozerky, Udorsky, Ob-
dorsky , Condinsky, 6c Comman-
dant de toutes les Côtes Septen-
trionales , Seigneur des Pais de
R 1 Po-
a terre au
Au Cur.
ïfi MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
I7°°- Joersky, Cartilinsky, ScGruzens-
" ky, Czar des Pais de Gaberdins-
ky, Czereasky, 6c des Ducs des
Montagnes , 6c de divers autres
Etats 6c Pais del'Elr, du Weit,
6c du Nord ,. depuis le Père &
Grand Père, Héritier, Seigneur, 5c
Conquérant, envoie falut & fou-
haitc tout bonheur 6c profpérité.
Potentifiime , GbariJ/îm, & Dilcc
tijjime Frater.
Ç'Ingularis obfervantia , perfonalifque
noflra erga Veftram Czaricam Ma-
jeflatem amicitia , Nos ad omnes Vef-
tra Czarea Majcfiatis res £5? militâtes
curandi & promovendi occafiones cap-
tandas tmpulit , omneque quod Veflrœ
ficundum Nos quieti ci? fiatisfaclioni
f avère pote [i , faciendi , ardenfque Nof-
trum pro Generali Europœ tranquïllita-
te fludium uti de optabilïjjïma poffibili
re, non finit nos obvias ullas rejicere
eccafionesj noftra efficaciora impendendi
officia in occurrendo publiue Pacis tur-
bationi aat ad illam, fi concujjam aut
fraclaniy tempe flive reftatirandam. l'a-
lia Nos ad Czareœ Majelîatis trefirœ ,
res. ut proprias ajfimendi ïn Tractât u
Carlowitfenfi induxerunt , femperque in
tali manentes propofito bique eâdem pro-
fenfione , Feftram- Czaream Majejla-
te>My ejufque Subditos Pace, ficuti fj?
filios tune Chrifliani Orbh Principes ,
frui videndi, ad primant defiderii F'ef-
tri pgnificationem Vefiras cum Turcico
Jmperàtvre inducias protrahendi , ci?
quod Legatus nojler Extraordmarius ad
jiulam Qttomanicarn Veflrœ Czareœ
Majeftatis Miniflris confdiis & bonis
oficiis ad Mas obtinendas prefto efient ,
fine morâ conjentienies , immédiat os mi-
fimus Legato Noftro Coritlantirwpoli or-
dines utfécundum FeUrœ Czar c a' Ma-
jelîatis defideria ageret , quâ négociât io-
Très-Puifîant 6c nôtre très-cher
Se très-aimé Frère.
L'Estime finguliére 6c l'amitié
perfonnelle que Nous avons pour
Vôtre Majefté Czarienne, Nous fait
embrafïèr toutes les occafions de pro-
curer 6c avancer les intérêts & les
avantages de V. M. Czarienne, 6c de
faire tout ce qui, félon nôtre penfée,
peut contribuer à vôtre repos 6c à
vôtre fatisfaétion j & le zélé que
Nous avons pour la tranquillité gé-
nérale de l'Europe , que Nous regar-
dons comme la chofe la plus defira-
ble qui foit pofîîble , ne nous permet
pas de négliger aucune occafion qui
iè préfente d emploïer nos meilleurs
offices pour prévenir ce qui peut
troubler la Paix publique, ou de la
rétablir à tems , s'il arrive qu'elle foit
ébranlée ou rompue. Ces motifs
Nous portèrent à prendre un foin
particulier des intérêts de V. M. Cza-
rienne au Traité de Carlowits , 6c
pcriiuant toujours dans la même pen-
fée 6c la même inclination de voir V.
M. Czarienne 6c fes Etats jouir des
fruits de la Paix , ainfl que firent
alors l'e reite des Princes de la Chré-.
tienté, à la première lignification de
vôtre defir de prolonger vôtre Trêve
avec l'Empereur de Turquie, 6c que
nôtre Ambafiadeur Extraordinaire à
la Porte Ottomanne pût affilier les
Miniihes de V, M. Czarienne par fes
ne
ET RESOLUTIONS DrE T A T.
*f?
ne longis conclu] à induciis , ex toto corde
Vcftrœ Czarca Majelîati de hoc felid
gratulamur fucccjju , ut de re , qu<e ul-
to abfque dubio , Veftra Czarea Ma-
jeftati , ejufque fubjeilis & regionibus
omnem emittet profperitatem. Et ob-
viant habentes , haud ita pridem occa-
fionem , Nojhorum Bellicarum Navium
Clajfem in Balticum Mare mittendi,
firicla Architalofjo , aliïjque ducloribus
nofiris , mandata dedimus , ut omîtes
Veftra Czareœ Majeftatis naves quas
obvias habercnt diftingucrent , ergaqua
illas omni cum urbanitate , intimoque
amorti fenfu fe gérèrent. Et in tdterius
Noftra erga Veftram Czaream Majef-
tatem objervantiis , affeclufque argu-
mentum, à Légat o Veftrœ Czarea Ma-
jeftatis apud Confœdcratarum Provin-
ciarum Générales Status , Audientes
Veftram' 'Czaream Majefiatem valdè à
Coronâ Suecicâ alienatam ejfe injuria-
runiy ab aliquibus illius Corona fubjec-
tis, Veftrae Czareae Majeftatis Lega-
tis ac Plempotentiarns in tranfitu per
Livoniam , illatarum caufa , & refpon-
fionis quaerimoniis Suecicae Légat ioni
ad Aulam Veftram fatlis procraftina-
t/one, Veftrae Czareae Majeftati nof-
tram offerimus mediationem , meliora-
que officia ad omnes amicabiliter com-
ponendas contentiones qttae inter Vef-
tram Czaream Majefiatem infurgcre
potucrunt & Regem Sueciae, erga quem
Tracîatuum , 13 Confœderalionum an-
tiquarum & récent ium irttcr Nofiram
13 Suecicam Coronas caufà magnam
babemus obfrvantiam. Nihilque peni-
tus dabilamus quin noftri gratta, nof-
tris velit perfuaftonibus & admonitio-
nïbus aures prœbere , (3 Veftne Czarea
Majeftati rationabilem dare fatisfaclio-
nem. ^uapr opter Vejtram Czaream
Majefiatem enixè rogamtis ut velit ex
fit a parte compo fit ioni indulgere dignarï,
& ut tait intentione de loco ad omnes
avis 6c Tes bons coniêils pour en venir 1700.
à bout , Nous y concourûmes d'à- '
bord , 6c donnâmes immédiatement
les ordres à nôtre Ambaffadeur à
Conitantinople d'agir fuivant le deïïr
de V. M. Czarienne, laquelle Négo-
ciation étant finie par une longue
Trêve , Nous congratulons de tout
nôtre cœur V. M. Czar erne de cet
heureux Succès , comme d'une chofe
qui produira très - afïûrément toute
forte de profpérité à V. M. Czarien-
ne 6c à Tes Etats 6c Païs. Et aïant en
dernier lieu occafion d'envoïer une
Eicadre de nos VaiiTeaux de Guerre
dans la Mer Baltique, Nous donnâ-
mes des ordres précis à nôtre Amiral
6c autres nos Commandans de distin-
guer les Navires de V". M. Czarienne
qu'ils rencontreroient 6c de les traiter
avec toute forte de civilité 6c d'ami-
tié j 6c par un dernier témoignage de ,
la considération 6c de l'affection que
Nous avons pour V. M. Czarienne,
aïant apris par l'Ambafradeûr de V.
M. Czarienne auprès des Etats Gé-
néraux des Provinces-Unies, que V.
M. Czarienne eft fort mal Satisfaite
de la Couronne de Suéde , à caufe
de quelques injures qui doivent avoir
été faites par quelques-uns des Sujets
de cette Couronne aux Ambaffadeurs
6c Plénipotentiaires de V. M. Cza-
rienne à leur paflage dans la Livonie,
6c par le délai de donner une réponfe
aux plaintes flûtes à leur AmbaiTade à
vôtre Cour, Nous offrons à V. M.
Czarienne nôtre Médiation 6c nos
meilleurs offices pour accommoder
amiablement tous les différais qui
peuvent être Survenus entre V. M.
Czarienne 6c le Roi de Suéde , pour
lequel Nous avons beaucoup de con-
dération , à çaiifè des Traitez 6c Al-
liances anciennes 6c préfentes entre
nôtre Couronne Se celle de ^uédej
R 3 termi-
if4 MEMOIRES, NEGOTI
1 700. tcrminandas modo amicabili difcordias ,
abfque apertâ Paris difruptiow conve-
niatur, ut que Vcftra Czarea Majeftas
eodeni velit tempore omnes hojlilesfuf-
pendere aclus. Spe ducimus difcordias
in illarum examine fore taies, ut média
ad illas componendas invenire arduum
«on ait. Et tam magnum de Veftrce
Czarea Majeftatis juftitià , aequitate,
& honore judicium habemus ut cum
caufà credimus , fe noftris ftudiis &
amicabilibus conatibus obviam ire, &
fore paratam debitam excipere à Corona
Suecica fatisfatlionem potius quam bel-
Itim fufeipere , quod quando aliae viae
nullo cum fuccejfu fe habent , extremum
eft remedium,& ut Feftra Czarea Ma'
jeftas fuà -velit humanitate , fuis taliter
profpicere fubjeclis ut poffint fruclus col-
ligere Paris, quam illis Veftra Czarea
Majeftas poftremo curavit, & beneficio
frui Commercii tam féliciter ftabiliti &
po/tremo inter ipfos & Noftros, alio-
rumque vicinorum Populorum fubditos
aubli ; &? quod Paris continuatione ex-
cultum, florefeens reddet Veftrae Cza-
reae Majeftatis Imperium , £5? nomen
Vejtrum magna fua moderationc fama
celeberrimuip , publicam tranquillitatem
omnibus aliis praeponendo refpeclibus.
Sic longum &f falix Majeftati Feftrae
Czareae regnum augurantes, Omnipo-
tentis Proteclioni commendamus. Da-
tum Hagae Comitis die zj. Oclobris
uinno Domini 1700. Regnique Noftri
iuodecimo.
jlffeclionatijfimus Frater, &c.
ATIONS, TRAITEZ,
& Nous ne doutons nullement qu'il
n'ait pour nous l'égard d'écouter nos
perfuafions 8c nos avis , 6c qu'il ne
veuille donner à V. M. Czarienne
toute la fatisfacrion qui fera raifonna-
ble. C'eft pourquoi Nous prions in-
ftamment V. M. Czarienne qu'il lui
plaife d'incliner de fon côté aux ter-
mes d'accommodement, 8c qu'à cet-
te fin on puiffe convenir d'un lieu
pour terminer toute mefintelligence,
d'une manière amiable , fans en venir
à une rupture ouverte, 8c que V. M.
Czarienne veuille en même tems fuf-
pendre tous, attes d'hoftilité. Nous
efpérons que les différens paraîtront
dans leur examen , être d'une telle
nature qu'il ne fera pas difficile de
trouver des moïens de les ajufter : Et
nous avons une fi grande opinion de
la juftice, de l'équité, 8c de l'honneur
de V. M. Czarienne que Nous avons
raifon de croire qu'Elle viendra à la
rencontre de nos offres 6c de nos ef-
forts amiables, 6c fera prête d'accep-
ter toute fatisfaérion raifonnable de la
Couronne de Suéde plutôt que d'en-
trer dans une Guerre qui elt le der-
nier remède , lors que toute autre
tentative eft fans fuccês, 6c qu'Elle
voudra par fâ bonté avoir tel égard
pour fes Sujets , que de leur laifîer
cueillir les fruits de la Paix que Vô-
tre Majefté Czarienne leur a procuré
en dernier lieu , 6c jouir du bénéfice
de ce Commerce qui a été fi heureu-
fement établi , 6c dernièrement aug-
menté entre Eux, nos Sujets, 6c quel-
ques-unes de nos Nations voifines,
6c qui étant cultivé par la continua-
tion de la Paix rendra floriflans les
Etats de V. M. Czarienne, 6c vôtre
nom recommandable pour fa grande
modération , en prçférant le repos
public à toutes autres confidérations.
Ainfi fouhaitant un long 6c heureux
Règne
ET RESOLUTIONS D'E T A T. iff
Régne à V. M. Czarienne, Nous la 1700.
recommandons à la protection du ■
, Seigneur Tout-Puiffant. Donné à
nôtre Cour à la Haïe, le Z3. d'O&o-
bre l'An de Nôtre Seigneur 1700. &
de nôtre Régne le 12.
Vôtre très-affectionné Frère.
Guillaume Roi.
C o M me les Etats Généraux firent dépêcher par un Exprès de l'Arnbafîâ-
deur de Suéde leur Lettre, l'on ne tarda pas à en recevoir une Réponfè Gitis-
fàifante, telle que voici.
NOS CAROLUS DEI gratia , Suecorum, Gothorumque, Vandaîorum- Réponfc
que Rex &V. Cel/is ac Praepotentibus Noftris bonis Amicis ac Fœcleratis Do- du Roi
minis Ordinibus Gêner alibus Fœderati Belgii. Salutem & profperos rerum Suc- ^^^,
ceffus. tre des
Celfi (3 Praepotentes Domini, Amici, (3 Fœderati.
EX literis Veftris Hagae Comitum die 3 . menfis hujus Septembres ad Nos da-
tis, iifque adjunfto Memoriali à magni Mofcorum Czaris Légat 0 apud Vos
degente, Vobis exhibito, intelle ximus quemadmodum officia Veftra ad alendam
Nos inter (3 Czaream fuam Majeftatem Pacem & amicitiam adhibita , occafio-
nem praebuerint , cur Czarea fua Majeftas cumfibi de injuriis quibufdam fatis-
faSfum non fit , nec refponfum ad querelas Legatis noftris Mofcoviae de Us f atlas
-obtinuerit, earum notitiam ad vos deferri voluerit; unde vifum vobis eft, cer-
tiores Nos facere eorum, quae vobis à Legato Czareae fuae Majeftatis expojîta
fuere, fimulque officia veftra ad fedandas (3 tollendas controverfias , fi quas bine
enafei contigerit , pro ea qua vobis jungimur amicitia & neceffitudine offerre.
Haec Veftra concertât™, uti fincerum Veftrum erga nos affeclum abundè décla-
rât, ita non poteft non ejfe nobis magnoperè grata 13 accepta, nec dubitare veli-
iis quin ad ampletlanda quavis idonea accongrm média, quibttsNos inter ac Cza-
ream fuam Majeftatem firma amicitia fidaque vicinia fabiliri ac corroborari pof-
fit prono propenfoque feramur animo, nec enim in mentem nobis unquam venitjuf-
titiœ ac aquitati deeffe nec in medendis Gravaminibus ac querelis inter utriufque
Subditos ac Miniftros forte exortis , multo vero minus in negotiis ad exiftimatio-
nem (3 honorem ipfius Czare<e fu<e Majeftatis, vel Lcgatorum ejus pertinentibus.
Cueterum cum ratio (3 prudent ia fuadeant fengula rerum momenta probe 13 exaclè
cognofci 13 expendi, antequam quicquam decernatur & ftatuatur neceffarium exif-
timavimus Legato noftro Extraordinario apud Vos commoranti iUuftri Nobis fin-
Cere fideli Libero Baroni de Lilieroot m mandatis dare , ut cum Deputatis à vo-
bis couftituendis quant ociùs congrediatur , cumque Us qualitatem gravaminum à
Legato Czareo prolatorum rite examinet 13 difeutiat: Nec ingratum nobis fut u-
rttm
E. G.
if<S MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
T700. rum cfi, fi pofi cognitam exailc caufam vcfmet ipfi totius hujus negoiii arbilrutm
" fufapere non detrccletis^ qub omnibus palam fiât , nihil nos dej 'ugerc , quod ami-
ci tiam, nos inîer £5? Czaream fuam Majeftatem interner aïe confervandam fpe tia-
re pojjit , qui de catero pro oblatis Vefirïs benevolis officiis , Vobis gratias agimus
maximas , vofque D EO ter oplimo maximo ad faufta quavis & profpera ex
animo commendatps cttpimits.
Vefier bonus Amiens ac Fœdcratus .
Dabantur in Oppido noftro Chrifiianfiadt , die 5.
Septembres , Stilo veteri, Anno 1700.
CAROLUS.
L'Ambassadeur de Suéde leur préfenta auffi le Mémoire fuivant.
CELSI ET PÂjEPOTENÏES DOM1NI.
Mémoï- ATtulit mihi befternus Tabellarius Sacra Regia Majcftatis Domini mei Clémen-
ce de ' ' tiffimi mandata , ut ejufdem refponfarias ad Celfijfimarum ac Prapotentium
l.'Ambaf- Dominationum Veftrarum lifteras , occafione Mcmorialis à Screnifiîmi Mofcormi
de Suéde Czaris Domino Legato hic degente nuper exhibiti fibi perferiptas , Celfis ac Prap.
aux E. Dom.Veftris offerrem^atque fimul Mentem Sacra Regia Majcftatis circa varia mo-
G. du ment a hâc pertinent ia uberiùs exponerem;Clementiffimis hifee Mandat is, prima occa-
pt* fione quant Celfa ac Prapotentes Dominationes Veftra mihi indicere dignabuntur ,
humillimè morcm gefturus fum , aft fateor incertum me ejfe an amplius, & quo-
ufque ea ipfa prafenti rcrumfaciei congruant. Accidit enim prater omnem fpem
quam SantJa adeb promijfa, totiefque repetit a déclarât iones merito dabant, Cza-
ream fuam Majeftatem per literas quarum apographum mihi Berolino tranfmijfum
eft , Régi Polonia pollicitam effe non tantum fe bellum indicluram , fed etiam
cura Auxiliaribus copiis fe ipfam propediem ei adfuturam. Adaclum itaque me
video , ut de auxiliis vi patlorum tam pridem quam nuper admodum initorum
Sacra Regia Majeftatï promiffis, & qua litteris praterlapfo menfe Marti i exa-
ratis Sacra Regia Majeftas ipfa requifivit , Celfas ac Prap. Dom. Veftras ite~
rum compellem , idque eb enixiùs quo gravior urget neceffitas , tantorumque hoftium
impetus. Celfa ac Prap. Dom. Veftra finceram fuam erga Sacrant Regiam Ma-
jeftatem amicitiam reapsè atque tôt document is comprobaverunt , ut nullo modo
dubitare poffit Sacra Regia Majeftas quin & hâc occafione parem affetlum exper-
tura fit. Reliquis etiam benevola hujus in fe "jolnntatis indiciis accenfebit fuci
Regia Majeftas, quod teftari voluerint Celfa ac Prap. Dom. Veftra fe ad conci-
liandam cum hoftibus Pacem , operam fuam conferre velle : Eo gratiora erunt
haec Celfarum ac Praep. Dom. Veftrarum ftudia qub fincerius fua Sacra Regia
Majeftas & ipfa in Pacem, dummodo aequa ea fit atque tttta , propendet. Interect
yerp dum huic reducenàae Celfas ac Praep. Dom. Veftras, laudabili ftudio in-
cumbere perlubens S. R. Majeflas animadvertit , certo fibi nihilominîis pollicetur
nullam propterea in ope à Celfis ac Praep. Domin. Veftris praeflandâ moram fu-
turam. §>uin potius Celfas ac P. D. Veftras Auxilia tum patlis, tum neceffi-
tati imminent ique periculo adaequata fine ulld temporis jac~lurà, tantoque promp-
tiies
ET RESOLUTIONS D'E T A T. ir7
Hits efte xxpedituras , quo magis apparet reftauranda Paci haud aliud efficacius 1700.
dari remedium. Gratâ de catero mente agnofcet Sacra Regia Majeftas amicam •
opem, & fimal ac ejus bénéficie- ex hifee difficultatibus elutlari dabitur ad vicem
Celfts ac Prap. Dont. Veftris rependendam omni tempore erit paratiffima. Ego in- '
terea ut f avens Cclfarum ac Prap. Dont. Veftrarum refponfum mihi ocius obtin-
gat quà decet Obfervantiâ rogo. Haga Comit, ~. Sept. 1700.
N. LlLLIEROOT.
Pour le Czar il ne répondit au Roi d'Angleterre, qu'après avoir com-
mencé la Guerre contre la Suéde, ainfî que l'on dira en fon tems. Voici en
attendant la Traduction de cette Réponfe du Czar.
Poji Nomina ac Titulos utriufque Majeftatis.
EX Literis Veftra Regia Majeftatis , datis Hagœ Comitis die zj. menfis Oclo- Réponfe
bris intelleximus , Nos Magnus Dominus, noftra Czarea Majeftas, Veftra d«-C*«
Regia Majeftatis fingularem amicitiam, erga noftram Czaream Majeftatem , ac ^Ane?
pro gêner ali Europe tranquilitate ftudium, fi quando pradicla generalis à quodam terre f *" ,
frangatur tranquilitas ; quod etiam in rébus noflri magni Domni, noftra Cza-
rea Majeftatis Carlowizii procurandis ut propriis fuis , atque in traclatibus iftis
Effe&um oftendit; ad bac, quod Veftra Regia Majeftas optet, ut noftra Czarea
Majeftas eodem modo quo etiam reliqui Chriftiani Principes illîc tranfaclionem
Paci s adipifeamur, poftett vero pro de fiderio noftra Czarea Majeftatis, Légat 0
fuo Veftra Regia Majeftas , Conftantinopoli, mandata dederit, quo Me ibidem
noftris Miniftris ad obtinendas atque protrahendas inducias , confiliis boni/que offi-
ces prafto effet fine morâ, qui bus etiam longis indu dis tandem conclufis de felici
earum fucceffu Veftra Regia Majeftas, noftra Czarea Majeftati perdikelè gra-
tuletur. Praterea quod Veftra Regia Majeftas haud ita pridem in mijfione Claf-
fis Bellicarum Navium in mare Balticum Architalajfo fuo , aUifquc ejus duclori-
bus in mandat is dederit , ut erga ornnes noftras,quas obvias haberent, Naves cum
omni urbanitate ac amore fe gérèrent, £5? in ulterius Veftra erga noftram Cza-
ream Majeftatem aftimationis argumentum certior facla Veftra Regia Majeftas de
reïatis injuriis à Legato noftro apud Générales Ordines Fœderatarum Provincia-
rum, atque de gravaminibus nobis illatis à Coronà Suecia, in tranfitâ Pknipo-
tentiariorum Légat or um noftrorum per Livoniam , de quibus Légat ioni Suecia,
qua apud Aulam Noftra Czarea Majeftatis fuit ad componendas eas, rcmonftra-
tum eft, Veftra Regia Majeftas, ad complanandas iftas contentionés , ub fingu-
larem amicitiam ac Fœdus cum Rege Suecia fuam mediationem, ac meiiora officia
nobis offerre velit; non dubitans quin Rex Me, Veftra Regia Majeftatis gratiâ,
confiliis veftris aurem prabere velit, &f nobis in omni re juftâ fatufaciat , eâque
propter roget , ut Noftra Czarea Majeftas in bifee dignetur amicitia redintegran-
da facilem fe prabere , ac hune adfinem, ut locus defignaretur , in quo difeordia
modo amicabili componantur, abfque ullâ apertà Paris ïllœfifne, £5? ut Noftra
Czarea Majeftas iuterea velit omnes hoftiles fufpendere impetus ; etenim Veftra.
Regia Majeftas 'confiait fore- ut ha diffenfioncs avfyue mole (lia fopiri qwant , &
Tom. I. S mbà
if8 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
1700. «obis aqiia fatisfaclio à Corona Suecja prœflctur, abjquc fufceptïone belli, quod'
- cxtremv.m, pofi alia fruftrà tentât a, eft rcmedium, & ut Nos Magqus Dorai.
nus, Noftra Czarea Majgfiast vclit fuis profpkere Subditis, illifque Pace nuper-
rimè récupérât A frai concédât , atque fmul Commercio haud ità pridem féliciter
ftabilito, & non ità auclo in ter Confœderatas aliafque Nationes, & quod bac
■pacificatio nos ac Imperium noftrum magis c x cuit mn flore [cens redditura fît, gêne-
raient tranquillitatem prapomre velimus, qud pr opter Nos, Magnus Dominas,
Noftra Czarea Majeftas, auxilium, quod Légat 0 noftra Czarea Majeftatis cum
Turcis in Commifftone exïftcnii Carloivitzn latum eft, gratè accipimus, de Lega-
tis Veflris , atque aliorum erga Nos Magnum Dominum , Noftram Czaream
Majeftatem, negoticrum propenfione , atque prœfenti , de Pace nobifcum , Feflra
Régi a Majeftatis propojitiom cum Coronâ Suecicà infujcepto bello, ob multas m-
bis illatas ab ipfis injurias y non recufamus; atque de loco huic rei dejignando,
ac tratlatione Pacis habita , juxta obligationem Fœderis inter nos pacli, cum
Regiâ Majeftatc Polouia communicatione , Veftra Régi* Majeftati confeft m no-
tifie abimus. Inter ta optaynus Nos, Magnus Dominas, Noftra Czarea Majeftas,
Vobis à Deo Fratri noftro, Magno Domino , Veftra Régi* Majeftati longa-
"oam incolumitatem , ac pro/perum in Regnis veftris Imperium. Datum Imperii
Noftri in Aulâ Imperiali Metropoli-Mofcoviœ Anno à Nativitate DEI Redemp-
toris Noftri Jefu Chrifîi 1700. menfts Decembris. die 7. Regmiinis autem Nof-
tri ip. Anno.
L a France fe mêloit aufîi de vouloir rétablir la Paix du Nord. Elle avoir,
pour cela des Miniftres, tant auprès du Roi de Pologne, que de celui de Sué-
de. L'un & l'autre s'emploïérent pour finir les troubles. On peut le voir
par les deux Mémoires , que le Comte de Guifcard préfenta à la Chancellerie
de Suéde , de la teneur 6c date fuivante.
Mémoi- » "\iC Onsieur du Hcron, Envoie Extraordinaire du Roi mon Maître au»
re du » iVJL près du Roi de Pologne , m'écrit par un Courier qu'il m'a dépê-
Comte „ ché le troifiéme de ce mois du Camp devant Riga, que n'aïant pas dif-
**e9ui'"' » continué d'emploïer tout ce qui lui a été poffible pour porter Sa Majefté
fente a"6" » Polonoife à prendre le parti de terminer à l'amiable les différens qu'Elle a
la Chan- jj avec la Suéde, ce Prince lui a déclaré en dernier lieu qu'il croïoit avoir
eelleric J5 déjà témoigné qu'il n'étoit pas éloigné de ces fentimens-là , par l'accepta-
î|e SJlé" » tlon 9U^ arP*j ïaite delà médiation du Roi mon Maître y mais, que pour
, f ' § „ en donner encore de nouvelles, preuves y il confentoit d'envoïer des Pléni-
tembre „ potentiaires à Dantzig ou à Olive, lefquels pourroient convenir en peu de
1700. n tems avec ceux du Roi de Suéde des prétentions réciproques, & qu'il of-
froit même de faire traiter avec Meilleurs Dahlberg Se ÎVelling, enfemble,
ou féparément, félon que Sa Majefté Suédoife trouveroit bon de leur en-
voïer les Pleins-Pouvoirs. Il content enfin de remettre à la décifion du
Roi mon Maître la reftrtution des Forts qu'il occupe en Livonie , ne pou-
vant avec honneur commencer à traiter par cette Reftitution préliminaire"
& muiïtêe que la Suéde demande.
„ En cas que 1a Négociation qu'on propofe fe terminât ( comme il y au-
„ roit
55
»
Î5
55
!
ET RESOLUTIONS D'E T A T. . ifo
„ roit fujet de l'efpérer) par le rétabliflement d'une bonne intelligence entre 1700.
„ les deux Rois, celui de Pologne contribuerait autant qu'il lui leroit poiïi-
„ ble à la continuation de la Paix entre la Suéde 6c la Mofcovie ; Se fi le^
„ Czar l'avoit déjà rompue , il s'obligeroit à ne lui donner aucune afliftance*
j, directement ni indirectement. Mon dit Sr. du Héron ajoute, qu'il travaille
„ à faire différer le Bombardement de Riga, & qu'il efpére y réùflîr, julqu'à
„ ce qu'il reçoive ma réponfe par le retour de fou Courier qu'il me prie de
„ lui renvoïer diligemment.
,, Les difpofitions qui font l'effet des foins continuels que prend le Roi
„ mon Maître du rétabliflement de la tranquillité dans le Nord , paroiffent
„ d'autant plus juftes 6c convenables à ce que la Suéde peut defirer dans la
„ conjoncture préfente, qu'elles remettent les différens en queftion à la Mé-
,, diation Se à la décifion du Roi mon Maître, qui en la même qualité a
„ donné à cette Couronne de fi grandes marques de fon eftime 6c de fon
„ amitié dans la Négociation du Traité d'Olive, & a continué depuis ce
„ tems-là , à lui témoigner les mêmes fentimens en toutes fortes d'occa-
fions.
55
Copie d'un Mémoire donné à la Chancellerie , le 6. Oclohre 1700.
„ T E Roi mon Maître aïant tout fujet de croire que fes offices auprès du
„ 1— t Roi de Pologne auront le bon fuccès qu'il en a dû attendre, m'or-
„ donne d'avoir l'honneur de témoigner au Roi de Suéde que s'il veut Ce
„ contenter comme le Sieur de Palmquift , fon Réfident en France , a té-
„ moigné le croire, que le Traité d'Olive foit rétabli , & qu'on prenne les
„ furetez néceflaires pour empêcher qu'il ne foit troublé à l'avenir, Sa Ma-
„ jefté fe promet que le Roi de Pologne ne refufera pas de s'accommoder à
„ des conditions auffi jufles.
„ Je dois repréfenter en même tems à Sa Majefté Suédoife qu'il ne fera
„ pas poflible de porter ce Prince à rendre les Forts qu'il occupe en Livonie
„ avant que de traiter, 6c même que fi on veut faire entrer dans la préfente
„ Négociation la difcuflîon des Griefs 6c des Dédommagemens prétendus
„ réciproquement, il ne fera pas poifible qu'elle n'éloigne beaucoup le réta-
„ bliflement de la Paix.
„ Enfin, le Roi mon Maître me charge de demander à la Chancellerie de
„ Suéde après la repréfentation ci-deffus , un Projet de Traité tel qu'on croit
„ le devoir propofer , afin que l'aïant fait examiner, 6c communiquer au
„ Roi de Pologne, il l'appuie aufli fortement qu'il fera néceflàire pour rem-
„ plir tout ce qu'on peut attendre d'un bon Garant 6c Allié fur des préten-
„ tions juftes 6c conformes à la Paix.
„ Et comme je me trouve avoir prévenu les ordres du Roi mon Maître
„ par le dernier Mémoire que j'ai remis à la Chancellerie, j'ai lieu d'en at-
„ tendre une réponfe prompte , 6c qui convienne aux bonnes intentions de
„ Sa Majeiié pour l'entier réubliffement de la tranquillité du Nord, 6c
„ pour continuer de donner au Roi de Suéde toutes les marques poflibles de
„ fon eftime 6c fincére affection.
S 2, Les
itfo MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
1700. Les Etats Généraux, qui avoicnt toujours en vue la tranquillité publi-
■ que, & fur tout celle du Nord, à caufe du Commerce de leurs Sujets, fou-
haitoient fort aufïï d'offrir leurs bons offices au Roi de Pologne à ce fujet.
Le Miniftre de ce Roi leur en ouvrit le chemin par un Mémoire, qu'il leur
préfenta, en date du 2.8. de Septembre, dans les termes fui vans.
Me'm°|- „ H A U T S ET PU I S S A N S S E IG N E U R S ,
re de Mr. '
de Gers- ,.-'■',
dorf.Mi- „ C'A Majefté le Roi mon Maître croit encore Vos Hautes Puiflances fes
niftre^ de „ Cj bons Amis, êc m'a ordonné de les afliirer qu'il eil inébranlable dans
sux'e'g " ^'"lt:en^on d'augmenter plutôt que de diminuer la bonne amitié 6c intelli-
' „ gence, qui a été jufqu'ici entre Sa Majefté, fes Prédéceflèurs , 6c Leurs
„ Hautes Puiflances les Seigneurs Etats Généraux des Provinces-Unies, &
„ fè promet à l'avenir autant de Vos Hautes Puiflances. Je dois aufli com-.
„ muniquer à Vos Hautes Puiflances la Copie ci-jointe d'une Lettre écrite
„ de Sa Majefté le Czar de Mofcoviej 6c bien que l'on puifle voir par-là r
„ que le Roi mon Maître efl en état de pourfuivre fes jultes defleins, après
„ toutes les peines que l'on s'eft donné de vouloir détourner Sa Majefté le
„ Roi de Dannemarck 6c Norvvegue de fon Alliance, Sa Majefté déclare
„ néanmoins, de ne pas refulèr un accommodement honnête avec la Suéde,
„ 6c de vouloir emploïer les bons offices, à lui en procurer autant de Sa Ma-
„ jefté Czarienne, pourvu que cela fe fafle à des conditions convenables
„ avec la Juilice 6c avec les Intérêts de Sa Majefté 6c de fes Alliez, comme
„ Vos Hautes Puiflances le peuvent voir plus amplement dans la Lettre de
„ Moniteur le Baron de Patkal, Confeiller Privé de Sa Majefté le Roi mon
„ Maître. Comme Vos Hautes Puiflances témoignent tant d'empreflement
„ pour la Paix de l'Europe en général, cette dilpofîtion du Roi mon Maî-
„ tre ne peut que s'accorder avec leurs fouhaits. C'eft à cette heure au Roi
„ de Suéde d'en profiter ; 6c moi Je fuis avec beaucoup de refpcct, Sec.
„ Ce 2.8. Septembre 1700,
Lesdits Etats Généraux prirent d'abord la réfolution d'écrire à ce Roi-là.
la Lettre drivante.
SSfeui SwemJJÏme fc? Potentifiime Rex ,
Géné-
raux au ÇUm Rcgne Mzjeftatis Vcflra Refidens Dont. Baro de Gersdorff nobis firiptl tcf-
j*°! de t dus fit, prepenfum Regià Majeftàfis Feftrœ erga nos affecJum, pronamque
ne* volant a! cm coiendi 13 inagis etiam corroborandi amicitiam, qius nobis cum Regià
MajcJIaie Vejlra intercedit , prœtermittere non potuimus quin Regia Majejlati
Ve'jlrœ gratias ager crans, nobifque gratularcmur de tàm bsnevolo 6? amico ejus
erga, nos anhno , vicijjim teflantes , nihil nos unquam à nobis defiderari pajfuros^
coranique ad fovendam augendamque mutuam amicitiamij} veram concordiam in-
ter Rcgïam Majejlatem Feftram a/que Ranpublicam Nofiram, condticere pote-
r.unt, qnippe qui Regiam Majeftatem Vejlram ejufque Fit tûtes heroicas femper
quàm maxime ventral i ftiKUSy & ejas amicitiam magnifecerimus (3 fummoperè.
deft-
■'u-
ET RESOLUTIONS D'ETAT. i<5i
defideraverimus. Cœterum cum modo nominatus Dont, de Gersdorff ' fimttl nobis 1700.
communicaverit Htteras à Magno Mofcorum Czare ad Regiam Majefiatem Fef~
tram fcriptas , £5? addiderit pr opter eà tamen Regiam Majefiatem Veftram,aquam
Pacem cum Coronâ Suecia minime averfaturam , imo & Reg'ne Majeftatis Fef-
tra officia parafa fore , ad procurandam eodem modo cum Czared fuà Majefîato
concordiam , bac mentis Regiœ Majeftatis Feftrx ad Pacem proclivis déclarât lo
nobis gratijjïma fuit ; quemadmodum enim exortee in Livonià ante aîiquot tempus
turbae fummo nos mœrore affecerunt , fie femper veritifumus , ne nifi quantociùs
fedarentnr cum tempore ait lus exfur gèrent Ifj latius diffunderentur £5? ne collapfae
quietis reftauratlo tantb dlfficillor foret , quo longiiis differretur ; nabis autan qui-
tus Pax & tranquillltas publica femper in votis ci? cor cil eft , jucundum £5? accep-
tum futur um eft, fi abfque morâ belli fiamma in Llvon'tâ extingui, & quies ils
oris priftlna reddi- contlgerit , pr opter ea Regiam Majefiatem Veftram enixe £5?
amant er rogamus, ut rationes & vlas £5? quam breviffime ducentes inlre , £5? in
ils fe facilem praebere velit, nec quicquam intereà aggredi, quod praefentem rerum
Statum in deterius mut are , vel Pacis amicam conciliationem magis difficilem effi-
ccre poffet ; fed multo magis illico de Armifiitio £5? loco congrejfus convenire. Quod
Ji ad reducendam tranquillitatem & concordiam officia £s? opéra nofira Regns Ma-
jefiati Veflrx grata & utilis videbitur, eamfedulb &? lubentes adhibebimus , ubi-
cumque (jj quando Regia Majefias Feflra illâ uti •uoluerit ,. & qudcunque data
occaftone animi nofiri pro confervandd Pace & qulete publicâ & pro refiaurandA
eâdem quatenus luxât a vel collapfa eft , Studiofiffimi, documenta dare annitemur
fœlicefque nos exiftimabimus , fi collât a nofira eum m finem confilia & officia, ali-
cujus moment i fuiffie comperiemur. Caeterum y
Sereniffime & Potentiffime Rex.
Datae Hagae Co?nitum, die 19. Septembris 1700.
.Ils ne purent s'empêcher d'y parler de la Lettre, qui y étoit jointe, &
que le Czar avoit écrite à ce Prince. Le Comte de Briord avoit reçu de
l'Envolé de France du Héron, la Copie de cette Lettre, qui déchifroitTaflez
les defleins du Czar, formez de longue main. Cependant, bien des gens
l'attribuoient à une diflîmulation du Roi Auguste, qui auroit pu en impo-
fer à 1'Envoïé de France, afin d'obliger le Roi de Suéde à une Paix avanta-
geufe à la Pologne. Mais, puisque l'Envoie de ce Roi l'avoit communiquée
aux Etats. Généraux, elle parût fort autentique. Elle étoit conçue en ces
termes.
„ Très-Cher Frère et Seigneur Voisin, Lettre
Ou s ne devez croire en aucune manière que je néglige l'entrepiïfë au Roi)
dont il eft queftion, & qui n'a été différée que par des obftacles rà- de Pol°*
„ cheux. Mais comme par l'alliftance Divine Nous venons de faire une gne'
„ Pa;x pour trente années avec le Turc, & même avec affèz d'avantage Se
„ de profit, Nous commençons à travailler à l'exécution de nôtre deflein ,
S 3 „ aïant
11
11
11
\6i MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
170a. „ aïant à cette fin envoie ordre au Gouverneur de Novogrod de publier au
• „ plutôt la Déclaration de Guerre, d'entrer en Livonie, & d'y affiéger les
meilleures Places. J'ordonnerai aurfi fans rien négliger de taire marcher
les autres Troupes, 6c je prétens me trouver là en perfonne avant la fin
de ce mois } n'aïant point d'autre but que de prendre en main avec l'aide
„ de Dieu les intérêts de Vôtre Majefté.
.L'on ne parut guéres content en Hollande du procédé du Czar. C'efr,
parce qu'il paroifioit avoir joiié l'Etat par des proteftations fimulées, qu'il
avoit fait faire par fon Ambafladeur, 8c qu'on ne demandoit pas. Aufli l'Ambaf-
fadeurde Suéde ne perdit-il point de tems, 8c follicita puiflamment le (êcours
ftipulé dans le Traité conclu entre fon Maître , l'Angleterre, 6c les Etats Gé-
néraux. Cet Ambafladeur Suédois repréfenîa fort le dommage que la Hol-
lande pourroit dans la fuite reevoir, fi les Mofcovites, s'emparant de Nerva,
avoient un Port dans la Mer Baltique. Car, quoi qu'il femblât que cela pût
faciliter le Commerce avec la Mofcovie, il y avoit à craindre que le Czar,
qui aimoit la Marine, ne voulût attirer le Commerce à lui , 8c le faire faire
par fes propres Sujets 6c par (es propres Navires, qu'il feroit confiruirej ce
qui ôteroit l'emploi aux Navires 8c aux Matelots Hollandois qui alloient en
ce Païs-là. Ce fut là-defliis que le Cohfeiller Penfionnaire Heinfius fit le
voïage de Loo, pour en conférer avec le Roi de la Grande-Bretagne, 6c en
lavoir fes fentimens > car il paroiflbit que le Nord étoit menacé d'un grand
incendie. On craignoit même que la Cour de Berlin, qui paroifioit avoir
été jufques alors aux aguets, ne voulut profiter de ces mouvemens. Cette
Cour n' étoit pas en bonne intelligence avec le Roi d'Angleterre. C'étoit à
' Poccafion du Miniftre d'Etat Dankelman, qui avoit été envoie prifonnier à
Spandau , 6c pour lequel Sa Majefté Britannique s'intérefioit pour lui procu-
rer la liberté, le fâchant doué de la plus exaéte probité. L'Eleéteur de Bran-
debourg avoit difgracié ce Miniftre, parce qu'il avoit tâché d'amoindrir la
considération que ce Prince avoit pour la femme du Grand Chambellan Colb,
connu depuis fous le nom de Comte de JVartemberg. Cette femme altiére ,
d'une extraction baffe 6c obfcure, 6c qui, en premières Noces, avoit été
unie à un Valet de Chambre de l'Eleéteur, en fut fi irritée, qu'elle s'étoit
prévalue de Pafcendant qu'elle avoit fur l'efprit de ce Prince, pour perdre
Davkclman^ 6c pour élever fon Mari au degré de faveur où on l'a vu depuis
fur le débris de cet intègre Miniftre. Aufli la nouvelle Dignité Roïale de
l'Elefteur n'auroit-clle pas été aprouvée par le Roi d'Angleterre, ni les Etats
Généraux, fi les difficultez fur la Succefiîon d'Efpagne n'euflent pas été tel-
les, qu'on ne pouvoit fe pafler de vivre en bonne intelligence avec l'Electeur.
Celui-ci avoit cependant renouvelle le premier d'Août les anciens Traitez
d'Alliance avec les Etats Généraux , par le moïen de leur Miniftre le Géné-
ral SQpâam.
Outre la crainte qu'on avoit de la part de la Cour de Berlin, on avoit cel-
le de la Confédération de plufieurs Princes d'Allemagne contre l'éreétion du
neuvième Eleétorat. Ces Princes, qui faifoient pour cela tenir des Confé-
icnccs à Nuremberg, eurent recours a.u Roi de France , comme Garant du
Traité
ET RESOLUTIONS D'E T A T. i<r$
Traité de Weftphalie. Celui-ci, qui, fuivant quelques Politiques, faifoit *700-
fomenter cette difeorde, fit prefenter à la Diète de Ratisbonne, le Mémoire " ' ' "
fuivant.
„ T E Plénipotentiaire de France a reçu ordre du Roi fon Maître, de fai- Repré-
?, JL> re connoître aux Electeurs, Princes, 6c Etats de l'Empire, affèmblez fenU-
„ par leurs Députez à la Diète générale à Ratisbonne , que quoique Sa Ma- m™^
„ jette ait toujours regardé comme une nouveauté également contraire aux deFran-
„ 'Conftitutions générales de l'Empire, fie au Traité de Weftphalie, l'érec- ce à la
„ tion du neuvième Electorat fait au commencement de la dernière Guerre Diéfe dc
„ en "faveur du Duc de Hanover, Elle a cependant gardé le filence, 6c fur bonne
„ le fond de l'affaire , 8c fur Pobmiffion des formalitez qu'on devoit au moins ]e 14. '
„ obferver, pour conferver en quelque manière les Droits des Princes de Sept.
„ l'Empire ; perfuadée que leur recours à l'Empereur auroit tout l'effet, I700«
„ qu'ils fe promettoient , & qu'obtenant de leur Chef la juftice qu'ils en de*
„ voient attendre, les juftes plaintes caufées par cette nouvelle érection fe-
„ roient bien-tôt apaifées: mais, comme' les Proteftations des Princes ofFen-
„ fez pour cette innovation font depuis plufieurs années entièrement inuti-
„ les, qu'ils connoiffent par la réponfe que l'Empereur leur a fait en dernier
„ lieu, qu'ils ne doivent rien efpérer de leurs remontrances, que les raifons
„ folides tant de fois emploïées demeurent fans effet , qu'enfin , Ils ont
3, compris que leur unique reffource confiftoit à s'adreffer aux Garants du
„ Traité de Weftphalie, engagez à maintenir l'exécution de ce Traité, 6c
„ que dans cette vûë , Ils ont effectivement eu recours à Sa Majefté pour le
„ maintien des Loix de l'Empire, 6c des Conditions des Traitez également
„ bleffèz par les nouveautez introduites en faveur du Duc de Hanover j le
„ Roi voulant marquer en toutes occafions, 6c principalement dans la con-
„ joncture prefente, fon affection pour les Princes de l'Empire, l'attention
„ qu'il donne à leurs Intérêts , le defir qu'il a de faire exécuter pondtuelle-
„ ment les Traitez dont il eft Garant, Sa Majefté portée par ces confidé-
„ clarer
,, nom des
„ comme Garant du Traité de Weftphalie, de protéger ces Princes fuivant
„ leur demande, dans les Droits qui leur font aquis par ce même Traité, 6c
„ de foutenir les réfolutions qu'ils ont prifes, ÔC les liaifons formées pour
„ maintenir leurs prérogatives. Que fon intention non feulement eft d'in-
„ terpofèr, pour cet effet, les offices les plus preffans, mais aufti d'emploïer,
„ s'il eft neceffâire, les autres remèdes convenables pour empêcher que les
„ Loix de l'Empire & les Conditions des Traitez ne foient violées par l'éta-
„ bliffëment de la nouvelle Dignité Electorale, qu'on prétend ériger, non
„ feulement fans néceffité, mais encore au préjudice de la Bulle d'Ôr , de la
„ Déclaration faite par l'Empereur le 16. Mars 1647, 6c du Traité de Weft-
„ phalie : qu'enfin Sa Majefté ne doutant pas que les inftances faites de fa
„ part en faveur des Princes correfpondans ne foient examinées avec toute
„ l'attention nécefiaire, Elle l'affure aujfi, qu'il ne fera pris déformais dans
„ cette
154 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
1700. „ cette affaire que le? Réfolutions les plus conformes au maintien de la tran-
— „ quillité générale de l'Empire. Le 14. Septembre 1730.
La Guerre furvenuë quelques mois après, enfui te de la mort de Char-
les II. Roi d'Efpagne, fit fufpcndre les plaintes, Se elles ont enfuite été
entièrement éteintes par la Paix d'Utrecht.
Pour continuer ce qui regarde la Guerre du Nord. Le Miniftre du Roi
de Pologne préfenta un nouveau Mémoire aux Etats Généraux. C'étoit
pour leur prôner que c'étoit à leur confédération que le Roi fon Maître avoit
pris le parti de ne point bombarder Riga, & d'en lever le Siège. On favoit
pourtant que c'étoit pour toute autre raifon. En premier lieu, c'étoit la dif-
ficulté de l'entreprile ; la defertion des Troupes, qui aimoient mieux aller lêr-
vir un Roi Luthérien, que le leur qui avoit changé de Religion} & le man-
que d'argent. D'ailleurs, le maître motif étoit l'apréhenflon que les Trou-
pes , qu'on avoit embarquées en Suéde pour la Livonie , n'allaffënt débarquer
en Courlande, ne coupaffënt par-là le chemin aux Troupes du Roi de Polo-
gne , Se n'allaffënt enfuite faire une invafion dans la Saxe. Cette dernière
crainte paroiffbit avoir quelque fondement. Auffi le Roi d'Angleterre en
parla-t-il à l'Ambaffadeur de Suéde, qui fe chargea d'en écrire au Roi fon
Maître. Il ne tarda même pas beaucoup à en recevoir la réponfe. Il fut la
notifier à Sa Majefte Britannique & aux Etats Généraux. Elle portoit, que
le Roi de Suéde fe défiftoit entièrement du defiein d'envahir la Saxe. Pen-
dant cette notification, le Comte de Dbom, qui fe trouvoit à la Haïe avec le
Prince Electoral de Brandebourg, notifia auffi, de la part de l'Electeur fon
< Maître, au Roi d'Angleterre, que fon Maître s'opoferoit de toutes les For-
ces au deffëin de l'entrée en Saxe. Il s'aquitta même de cette Commiffion
d'une manière hautaine, qui déplût; ce qu'il auroit pu faire autrement , s'il
avoit fçû que ce deffëin ne fubfiftoit plus. Voici le Mémoire du Miniftre
. de Pologne.
Mémoi- „ HAUTS ET PUISSANS SEIGNEURS.
re du
de l'olo- 3) A Pre's la proteftation d'amitié que j'ai eu l'honneur de faire à V. H.
gne à „ -ZjL P. de la part du Roi mon Maître il y a quelques jours, j'ai à l'heure
L.H.P. n qU'il eft la joie d'en mettre devant leurs yeux un exemple éclatant, s'il y
„ en a jamais eu au Monde. Tout étoit prêt pour le Bombardement de la
„ Ville de Riga, comme tout le monde en eft déjà informé, Se on fe pou-
„ voit promettre avec fondement de la contraindre à fe rendre plutôt de cet-
„ te manière que par des attaques formelles. Mais, dans le tems que les Ha-
w bitans de ce lieu craignoient que leur Ville ne fût entièrement confirmée
„ par le feu, le Roi mon Maître changea l'on deffëin, & Sa Majefté m'a
„ ordonné de déclarer à V. H. P. que cela s'eft fait dans la feule confidé-
„ ration des Comptoirs, Biens, 6c Effets, que les Négocians & Sujets des
„ Provinces-Unies y poffedent; fe perfuadant que V. H. P. feront d'autant
„ plus convaincues par-là que Sa Majefté embraffë avec plaifir toutes les oc-
j, calions, par lefquellcs Elle peut témoigner à V, H. P. le defir fincére
„ qu'Elle
ET RESOLUTIONS D'E T A T. r6f
qu'Elle a d'entretenir avec Elles une intelligence parfaite 8c une amitié fo- I7°°-
lide, 8c qu'Elle favorife avec empreflement l'agrandiflement d'un Com- " '
merce libre entre fes Sujets 8c ceux de V. H. P. Sa Majefté fe trouve au
relie encore dans la difpofition que V. H. P. auront déjà remarquée dans
celle que je leur reprefentai le z8. du paiTé, 8c je fuis 8c ferai toujours avec
beaucoup de refpect ,
A la Haïe, ce 4. d'Octobre 1700. W. H. de Gersdorff.
Il arriva en ce tems-là un autre Miniftre du Roi Auguste auprès de Sa
Majefté Britannique. Sa Commiiîïon étoit de fblliciter la Paix avec la Sué-
de. Il en parla a Sadite Majefté Britannique. Ce Miniftre, qui s'apelloit
Kirkncr, Saxon de Nation, avoit été Secrétaire du Plénipotentiaire de Saxe
à la Paix de Ryfwyck. Il tâcha d'infinuer adroitement, 8c fous main, que
fi le Roi fon Maître étoit abfolu,' ce Roïaume-là ferait en peu de tems l'a
plupart Proteftant. C'eft qu'il prétendoit qu'il y avoit quantité de Grands
8c de Noblefle qui l'étoient dans l'intérieur, 8c qu'ils ne déguifoient leurs
fcntimens que de la manière que les Juifs font en Portugal , 8c parce qu'ils
furent perfécutez l'an 167 f. par le feu Roi Jean Sobieski , fous le prétexte
qu'ils étoient Ariens. Ces clandeftines infînuations donnèrent lieu aux Minif-
tres les plus éclairez de foupçonner que le Roi de Pologne avoit le defîein
d'attenter à la Liberté de la République , Se qu'il n'offroit de faire la Paix
avec la Suéde, que pour ne l'avoir pas à dos dans fon Expédition, 8c ne fe
joignit à ceux des Polonois, qui, aimant leur Liberté, fe réveilleraient.
En ce tems-là l'Ambafladeur de Mofcovie, fut enfin obligé, par les or-
dres du Czar , d'avouer, contre fes précédentes aflurances contraires, que
fon Maître avoit déclaré la Guerre à la Suéde , 8c étoit actuellemeat en mar-
che contre elle. Il le fit par le Mémoire fuivant.
CELSI JC PRjEPOTENTES DOM1NI. Mémoi-
re déli-
pRoIixa ac plus vice fimplici, à Celjîs ac Prapotentibus Feftris Dominationi- pAmbaf-
bus y ad Sacrant Czaream Majeftatem Clementiffimum meum Dominum, nu- fadeur de
perrimè prateritis temporibus , per delegationem veftri Jlgentis Domini Rofenbo- Mofco-
mii, fuit petitio, ne ob obligationem, antiqua erga Sacrant Czaream Majefla- XJ5 aux
temamicitits Vejlrarum Celfarum ac Prapotentum D ominationum , atque ob con- de L H.
firmationem illius in pofterum y,Regiœ Majeftati Danic<e adverfum Coronant Sue- P. dans la
cicam, fua Czarea Majeftas jwifjîone exercituum fuorum adverfus Livonïam fuc- c°nfe-
currere velit, quâ de re per litteras meas^fuœ Sacra Czarea Majeftati mihi J?oftdu
référendum effet. Ad quant Veflrarum Celfarum Dominationum petitionem pro* 1700."
penfa fua Sacra Czarea Majeftas Clementifjimus meus Dominas per me Celfis
Dominationibus Veftris -per clément er refpondere dignatus eft^fe pro Feftrarum Cel-
farum, ac Prapotentum Dominationum petitione, ob antiquam ac intimam ami-
citiam in hofliles conatus cum Coronâ Suecicà inire nolle , nifi quatenus ex parte
Suecicâ , quœdam injuria fiant, 'fantum ne Veflra etiam Cclfa ac Prapot entes
Dominationes ob talent exhibitiomm ac confervationem ver je Feftrarum JDomina-
Tom. I. T tionitm
166 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
1700. tionum amicitia erga fuam Sacram Czaream Majeflatem ipfa bis Negotiis im-
- mifcerc vclint, agendo boftiliter adverfus Confœderatum fia Czarea Majeflatis
contra Rcgiam Majeflatem Danicam-, ex quo major ac percon flans amicitia in-
tra fuam Sacram Czaream Majeftatem ClemeniïJJîmum nieum Dominum al que in-
ter Celfas ac Prapotentes Veflras Dominationes augi poffit. Ad quam relaiionem
meam Veflris Celfis ac Prapotentibus Dominationibus faclam , nomine Veftrarum
Celfarum ac Prapotentum Dcminationum mlhi Dominas Confiliarius Penftonna-
ritts peramicè refpondit , qitod Veflra Celfa ac Prapotentes Dominationes tàm
cum Suecicâ quam cum Danicâ Coronis Fœdus ineant defenftvttm, fed quoniam
Regia Majeftas Danica, invafione inUrbem Tonninguenfem Duci Holjatia fub-
jeclam , médium ad componendum Boréales Hojlilitates , violavit ; banc ob cau-
fam Celfa ac Prapotentes Veftra Dominationes , évidentes Majeftatem Rcgiam
Danicam à Médiat oribus in fuis Negotiis propofitionibus faclis fuam inclinationem
non demonftraffe , conjunclas fimul cum Clajfe Regia Majeflatis Magna Bvitan-
nia mi fer tint fuas bellicas Naves in Fretum Danicum vulgb Sondt diclum, quo
Pax facilius reconciliari poffet , fed malam Veftra Celfa ac Prapotentes Domi- ~
nationcs intentionem adverfis Coronam Danicam , ac ininucitiam non babuiffent ,
ne c aliud Veftrarum Celfarum ac Prapotentum Dominationum deftderium fuiffet ,
fed tantum quo Pax commimis confervaretur : quemadmodum etiam fecundum de-
fukrium fua Sacra Czarea Majeflatis Clementifftmi met Domini, Celfis Veflris
ac Prapoientibus Dominationibus à me propofttam impenderc velitis. ffjua autem
Veftrarum Celfarum ac Prapotentum Dominationum bona inclinatio Jua Sacra-
Czareae Majcftati promifla , poftea alio modo circumfcripta fuit, & loco amicae
Veftrarum Celfarum ac Praepotcntum Dominationum propenjionis, ac remet ionis
illius bofiilitatis, mer à invafione inopinatâ, bcllicarum Veftrarum ac Confœdera- ,
tarum Navium, tum Regiae Majeflatis Danicae Claffis, tum ipfa illius Mctro-
polis multiplia infeflaticne à jaclis Olliis igniariis, vulgo Bombes diclisjaefa eft,
damnum cœpit > Cum tamen nulla in boc boftilitas ex parte Danica incepta fue-
rit, quo talis omnino inimicitia juxta demonfiralionan neutralitatis fuae Sacrae
Czareae Majcflati promiffae boc in bellum mutata fit, illudque adverfus jura gen-
tilitîa valde progrcffum. 6>uà de re Ablegatus Danicus ad Aulam fuae Sacrae
Czareae Majeflatis dcgens , infrmavit Memoriale, nomine Régis fui Domini,
magnopcre petens ut taie intolcrabile damnum fuae Sacrae Regiae Mijeftati illa-
tum, fua Sacra Czarea Majeflasjubcre dignetur , quo ex Clafj'e Veftrarum Cel-
farum ac Praepotcntum Dominationum, Naves Mcrcatoriae Batavienfcs in Por-
ta Divi Arcbangeli arrefto detinerentur. §toâ in re autem ob perconftantem ac
vetacm amicitiam, qua inter fuam Sacram Cza?e+m Majeftatem ac Veftr as Cel-
fas ac Prapotentes Dominationes intercedit, ipft AUcgato reeufatum eft. Deiude
accepto fua Sacra Czarea Majeflatis Clementiflfwii mei Domini perbenigno Man-
dato, in Colloquio Veflrarum Celfarum ac Prapotcnt/m Dominationum Domi-
nis tum temr-oris exiftehtibus Députât lis, Domino Hamo cum relirais, demonftravi
quoi fua Sacra Czarea Majejlas fuperiorem fuam Dcclaratiouem, Veftris Ce/fts
ac Prapotentibus Dominationibus faclam atque Pacan juxta petilionem Veftr a-
mm Celfarum ac Prapotentum Dominationum, cum Corona Suecica abfjue lafio-
ne confirvare velit, ft'l rJ Ce! fa ac Prapotentes Veftra Dominationes finaliter
vcUnt demoriftrare Miniflro Suecico ac Regia fua Majcftati Suecia fer ibère de
fequen-
ET RESOLUTIONS D'E T A T. i6y
fequenti Negotic: ghwniam in commoratione Magnorum ac Plenipotcntiariorum ijoo.
Legatorum Suecicorum Mofcovia, ipfis diclum fuit fufficienter mm requifttione de
communibus injuriis , in partem fua Sacra Czarea Majcfiatis , maxime autem de
ca , ad dedecus ipfius perfona fua Sacra Czarea Majcfiatis , Ckmentifjimi mei
Domini pertinent! , Riga illata , cum toti fcrè mundo conftiterit fuam Sacrant
Czaream Majcftatem Riga: fuiffe prateritis Annis , ac iter fttum ver fus liollan-
diarn intendiffè , quod illi Suecici Légat i etiam fi facluros ac relaturos efife ad Ré-
gi am fuam Majcftatem poji redit uni fuum ah [que morâ fir miter poiliciti funt : quâ
de re etiam ipfis datant efi Memoriale fubfcriptirm exiftentium tum temporis in
iflis ColloquiiS) intimi Bojarini ac Prccgis Siberia , Tlxodori Alexides Gahivi-
tii , caterorumque Collegarum Mofcovia , fed hoc ufque ad tempus fua Sacra
Czarea Majeftati ex parte Suecica nulla in fuis injuriis exhibita efi fatisfiiclio,
tnulto minus ne iillum qttidcm refponfum jv.clum, ex quo va/de iafus efi Bonor fua
Sacra Czarea Majcfiatis Clemeutijfimi mei Domini , quarum injuriarum copia ,
tneliorem ob notitiam communicata efi per me ifiis Dominis Deputatis Vcfirarum
Celfarum ac Prapotentum Dominationum &f ut Veftra Celfa ac Prapotentes
Dominationes prudcnti hoc animo conjiderante de fatisfablione i-indiclà digna inju-
riae ipfius fuae Sacrae Czareae Mjefiatis perfonae , littcris fuis apud Regiam
fuam Majcftatem, fccundum firmam difpofitionem antïquae ac confiantis amicitiac
quae inter fuam Sacram Czaream Majcftatem ac Veflras Ceîfas ac Praepotentes
Dominationes inter cedit, in cunnibus perfcclam fatisfaclionem procurare dignentur.
Nunc iiero à die vigcfima tertia praeteriti Menfis Augufli juxta flilum veterem
ufque ad praefens tempus pofl meam Declarationem à Veftris Celfis ac Praepoten-
tibus Dominationibus (quale refponfum fua Regia Majefias Suecica ad Veflras
Cel/as ac Praepotentes Dominationes miferit refpetlu literarum Vefirarum, &?
hic degens illius Légat us qui bus fcriptis fuis pro Declaratione Veftrà Veftris Celfis
ac Praepotentibus Dominationibus refponderit ) ex congregatione Vcfirarum Celfa-
rum ac Pracpoîentum Dominationum inter Danicam & Suecicam Coronas incep-
tis rébus immifcere nolit modo ut fatisfatlio fiât ex parte Suecica in ifiis injuriis
nous in partem fuae Sacrae Czareae Majefiatis , maxime autem Rigae illatis ipfi
fuae Sacrae Czareae Majefiatis perfonae , de quibus ex propofitione meâ fuperio-
ri^ Veftris Celfis ac Praepotentibus Dominationibus omnimode confiât. Ad quas
injurias Légat i Suecici qui Mofcoviaefuerunt, refponderunt , fe certh certius banc
illatam injuriant noioriam ipfimet perfonae fuae Sacrae Czareae Majeftati Rigae
injeclam ad Regem fuum Dominum illorum relaturi fait ac pètent ut illi omnim
fatisfai, quâ de re non fcrnel & ipfa fua Sacra Czarea Majefias ifiis Légat is
ioqui dignatus eft. Cujus poft affecurationem fua Sacra Czarea Majeftas Clemen-
tifjimus meus Dominus, ad Aulam Suecicam mittere voluerit Refidentem ad de-
clarandam expletionem à fe antecedentium Traclatuum Magnorumque ac Plenipo-
tenliariorum Legatorum confirmationem. A difeeffu autem horum Legatorum f'tif-
ficienti nunc tempore praeterlapfo, non tantum ipfi ex parte Suecica ulla fiitisfac-
tiu data eft, fed infuper in contrarietatem falfificam Rigcnfis Gubernatoris jufiifî-
cationem tradidit in Cancellaria Legatoria , Refidens Suecicus Memoriale es? Li-
t.rarum Regiarum ad fe firiptarnm copiam, in quà ne minima qu'idem fatisfaclio
facla, cum tamen facili fibi medio faclis mandat is- fuper Gubernatore Rigenfi illud
fuae Sacrae Czareae Majefiatis defiderium implere potuiffent, de quibus omnibus
T i fia
I-C'O
1(58 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
fia Sacra Czareci Majeftas certior facla banc exiftimans fummam contrariété
- tem in ipfuis fuae Sacras Maj'cftatis Perfonam, gravi injuria Rigae ajfcclam,
ac dcinde propofitam querelam adverfus Gubernatorem atque alias a Legatis Sui-
cicis fleccipénditam , atque videns quod fccundum obligationem Fœderis ac vicinae
erga fitam Sacrant Czaream Majeftatcm fincerioris amicitiae , per taie fufficieus
tempus ac fccundum promifftoncm Legatorum mtlla fatisfablio ex parte Suecicâ fe-
cutaftt , ac in pofterum fpes fibi adempta eft ; idco ob notas fuae Sacrae Czareae
Majeftati ipfimet ejus Al.ijeftati illatas injurias & non exhibitam fatisfacJionem ,
promiffiam à Legatis Suecicis juxta démon ftrationem ipfius fuae Sacrae Czareae
Afajejtatis Perfonae ipjis faclam , Sacra Czarea Majeftas voluit dcclarare bel-
ïum Corona Suecta ac verfus Confinia illius exer citas fuos mit tere , ac Czareae
Majeftaiis litcras de bac declaratione ad Reftdentcm ad Aulam Suecicam degen-
tem tranfmntti jufjît. In Vejlrarum Celfarum ac Praepotentum Dominationum
Neutralitate ( quod nunquam juxtà antiquam ac firmam Veftram Amicitiam ex-
peclandum ) fua Sacra Czarea Majeftas Clemcntijfimus meus Dominas inter Sue-
cicam ac Danicam Coronas omninb^ abjque afjeveratione relinquit: quemadmo-
dum ab initio Veflrae Celfae ac Praepotentes Dominationes per me fuae Sacrae
Czareae Majeftati dcmonftrarunt , fe inter utramque Coronam Pacem reconcilia-
taras effe , mox vero poftea abfque ullâ Caufà mala hoftiliter parti Danicae intu-
liffe , quali modo nunc etiamfua Sacra Czarea Majeftas à Veftris Celfis ac Pra-
potentibus Dominationibus incertus in fatisfatlione compenfanda juftitia fui ex
parte Suecica, banc ob caufam Celfis ac Prapotentibus Dominationibus Veftris
hac me A declaratione notitiam rnibi proponere jaftfit , indigens à Feftris Celfis ac
Prapotentibus Dominationibus de hoc fupra memorato refponfionis , qui de catero
Feftris Celfis ac- Prapotentibus Dominationibus , omnes profperos rerum fucceffus
apprecor.
Haga Comiîis die 6. Otlohis Anno 1700.
Andr. Artemonides Mathueof. •
Comme l'ufàge des Princes eft de donner une couleur de juflice à leurs
entreprifes militaires, le Czar n'oublia pas la formalité du Manifefte. On en
reçût un qui avoit été publié à Mofcou, en date du 18. de Septembre 170a
Il ctoit en Latin, tel que voici.
jNtcr omnes ca'ufas , anibus Czarica Majeftas ad rumpendam cum Suecis Pa-
cem permota fuerat , ha c vel praapua 'cft , quod Rex Suecia extemà quidem
fpecie omnia officia arnica tranquillaque vicinitatis ci exhibuerit , atque ut de fi-
de fui magis perfuaderet , &? Czarum quaji in foporem daret , légat ionem quoque
folcmnem miferit , qua repetitam Paclorum conftrmatiomm in fpeciem urgeret.
Clanculum au tem varias infidias ti machinât us fit ^ atque inter alla Regem Polo-
nia in focietatem invitaient ut conjunclis viribus Czarum aggrederentur. Clan-
(■eftina quoque Suecorum machimtiunes effecerant ut Conflantinopoli Pax Turcam
inter £5? Mofcum multis modis retardata fuerit. /ta Succi ultimam Mofcis moli-
ti fv.nt pernicicm. Cum igitur Rex Sueciae nulle juft.i de Caufà Czarum laceftlf-
jet, & fimulatà amicïiià ipfuw, totumque ejus Jmperium , potsntijjîmis boftibus
adver*
ET RESOLUTIONS D'E T A T. 169
adverfus eum concitatis, evcrtere atque pejfundare fraudulenter cogita [Jet; non 1700,
pqiuer.it non Czarus coram Univerfb Orbe & Chriflianis maxime Principibus " " *
perfidiam banc atque fraudent detegere, fperans divinis bumanifque Legibus jufm
tum ac conveniens judicatunt tri , ut Czarica Majeftas Imperiijui curam gcrat ,
atque à Deo concefja fibi potejiate utatur , il/a toque bello, glifcentem nimis Sueco-
tum patent iam ita confringat , inque eo llatu collocet , ne perniciofas , perfidafque
Machinationes in poftcrum exequi valeant. Atque confidit fore ut hoc propofi~
tum fttum ab honeftis omnibus, & fludio part iam vacuis , eo juftius habeatur, quo
magis notum efl , Provïncias Careliam &? Ingriam antiquités Magno Ducatui
Mojcoviae extra omnem contrôler [iam fubjeclas fuijfe , à Succis verb , quijuxtà
evrum fymbolum , ex rapto vivunt , & omnes vicines fpoliaverant , fub initium
bujus Seculi, cum Mofcovia internis diffidiis laboraret , occupât as atque avulfas.
'ghto faclo cum viam primum invenijfent occupandi Livoniam , & bellum poft co-
in Prufjïam, inde in Germaniam transferendi , maximam ex rébus gejiis gloriam ,
fummamque famam confecuti funt.
z. Cum Regno Daniae Czarus, ejufque Anteceffores antiquo Fœdcris vinculo
juncli funt , quo ad auxilia ei ferenda, & injurias quaflibet, tanquam ipfi fibi
fatlas vindicandas obligantur. Itaque quoniam Rex Sueciae Zeelandiam valida
manu invaferat , Metropolique abfentis Régis infejlatâ , & toto Regno Daniae in
difcrimen ultimum conjeclo , Regem non modo ad iniquam Pacem cum Duce Hol-
fatiae ineundam , fed etiam ad Regem Poloniae amicum £5? Socium ab câdem ex-
cludendum adegerat , quo diftratlum à Socio opprimendi major occafio effet i Sa-
cra Czarica Majeftas coram Deo £5? hominibus fe adftri&am fatetur , ut injurias
hafce fidifjïmis amicis^ fociifque illatas ulcifcatur, £5? inita contra illos conjîlia
infringat-, quo fuam &? Fœderatùrumfecuritatemarmisr.ece£driisaliquandofta-
biliat, confidens juftifjïmae Caufae Deum adfore.
Deux jours après que l'AmbaiFadcur de Mofcovic eût préfenté fon Mé-
moire, celui de Suéde en préfenta un autre, pour demander une Conféren-
ce, dans les termes fuivans.
CELSI AC PP. DD. Mcmoi-
<Ê rede
ÇUm nupero Memoriali die \\ Septembris exhibito certiores reddidcrim Celfas ac \^^
PP. DD. Veftras queadm«dum à Sacra Regia Majeflate Domino meo Cle- de Sué-
mentiffmo injuntlum mihi fuerit ut ad Celfas ac PP. DD. Veflras pleniorem de.
atque exaelam notitiam deferrcrem fingulontm moment or um qua fpeblant ad gra-
vamina £5? quarelas à parte Serenijfimi Mofcorum Czaris mot as ; fuper qttibus
mentem Sacra Regia Majefiatis , ipfiufmet refponforiis Celfe ac PP. DD.
Veftra abunde perfpexerunt . Itaque met efl officii ut quo par eft cultu , porrb
rogem, dignentur Celfa ac PP. DD. Feftra denominare Députât os, cum qui-
tus colloquendi facilitas quàmprimum fieri pof/ît , mihi obtingat , quâ occafione
juftam S. R. Majefiatis caufam manifefliftîmè ob oculos expofiturus fum , ita ut
palam fat Univerfis , Sacram Regiam Majedatcm in hoc negotio nihil quodfua-
rum fuerit partium intcrmiffifje quin £5? plura quàm Pacla exigunt prœfiitifie ; fi-
cuîi & etiamnum S. R. Majeftas nihil in fe de/iderari patietur, adeè ut auicquid
T 3 à
170 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
1700. à CeJfis ac PP. D D. Veflris rationi £5? œquitati confentaneum effe judicabitur ,
' 'prompte fe amplexurum profit eatur. Haga Comitis die "— jjj^ 1 700.
Comme cette Conférence lui fut accordée, outre ce qui pouvoitjufti fier
le Roi de Suéde, cet Ambafladeur infifta fortement fur le fecours ftipulé par
le Traité récemment fait, & pour avoir en emprunt une fomme d'argent
fous la Garantie des Etats Généraux. Le Miniitrc du Roi de Pologne, qui
par fa longue habitude s'étoit fait des amis fur-tout à Leide, fut d'abord aver-
ti de ce que l' Ambafladeur de Suéde avoit dit dans la Conférence. Il alla en
faire le raport à l' Ambafladeur de Mofcovie, qui trouva à propos de s'y opo-
fer par le Mémoire qui fuit.
Mémoi- CELSI AC PRjEPOÏENÏES DOMINI,
re de
fadeur3*" JNnotuit mihi pcnitus , non tantum Memoriali nuper iradito Celfis ac Prap.
de Mof- Domin. Veflris, fed etiam Colloquio non ita pridem cum Dominis Députât is ex
covie. Veftra Illufiri Congregatione infiituto , quod Regia Majeflatis Suecica hîc degens
Dominas Legatus diligent er petierit à Celfis ac Prapot. Domin. Veflris in veteri-
bi'.s ac nuper admodum confirmatis cum Veflris Celfis ac Prapot. Domin. Paclo-
rum Fœdcrum conventionibus , auxïlia , tam copiis quam mutuatione pecunia ne-
ceffaria ad alendam Regias Domini fui Militares copias contra Modernos S. S.
Czarea Majejlatis Domini mei Clément ijfimi Exercilus in Livoniam expeditos ,
fludiosè exponens obligations Veflrarum Celf. ac Prap. Domin. Régi ipfius pro-
mijfias. Interea ht S. Czar. Majeflatis prafati Exercitus mijfi funt ad debellan-
dum contra Coronam Suecicam , non beneplacito fua Czar. Majeflatis ad violan-
dam Pacem cum Coronà Suecicâ , quoddam ob defiderium fuum , fed ipfà invita
coatlione , cb quod pofl crebra fua defideria , variis modis expenfa , ex parte Sue-
cicâ ad Fœdus^ ac mole fias demonflrationes, Magnis illius Légat i s qui Mofcovia
degerint commttnicalas, tam à Minifiris S. Czar. Majeflatis ad hac negotia Dé-
putai'is, quam etiam maxime à fuà Sacra Czareâ Perfona, plus vice fimplici ,
de prateritis gravaminibus , prafertim de iltatione injuria ipfimet ejus Magni Do-
mini perfona, Riga facla, £5? pofl h.inc falfifico Gubematoris Rigenfis refponfo ,
S. S Czar. Majeftas Dom. meus.Clem. apertè viderit nullà in re fibi fatisfablio-
nem ex parte ilhrum Suecicâ preflitam ejjc ; qualibus reliquis gravaminibus non
folum Regnum ipfius offenfum, fed etiam ftiam fummam Czaream perfonam, Ri-
ga faclâ injuria , admodum lafam efj'e , quod nunquam fecunduni characlerem fa-
crum illius Sacri Magni ïhroni tolerari potefl , ob apertam inconfiderationcm &
non praflitam fatisfaclionem ex parte Suecica ipforum manifeflorum ac multifario-
rttm gravaminum, de qui bus fecundum propofitmiem meam Veflris Celfis acPrap.
Domin. faclam, dilucidè propofitum efl. Nunc vcro S. Rcg. Majeflatis Suecica,
Veflris Celfis ac Prap. Domin. , fecundum Veflras Litteras ad omnia hac à me
propojita Veflris Celf. ac Prap. Domin. grava mina, Refponforia Lit ter a indi-
ca.nt, abfque ullo hoflili molimine cum S. Czar. M-jcflite, in omnibus preftare
fua Czar ' Dom. n:eo Clementifllmo fatisfaclionem fe velle , inquc iifdem
S. fisg. Majefias Suecica rogat cum inflantfk ne Vcjira Celf. ac Prap. Domina-
tioncs
ET RESOLUTIONS D'ETAT. 171
tiones Mediationem detraclent. Quâ de caufà Veflr g Celf. ac Prap. Dominât io- 1700.
neS ftudiosè ac diligent er, qualitate confueta Veflr te prudent iœ ac defiderii pacifi- '
ci , in promotionem fuam maturantis , ad illa bclla incœpta inter Amicum veterem
Confoederatum Veflr um Czaream fuam Majejiatem Dont. Clément ifflmum £s? Co-
ronam Suecicam removenda, dignata fint , menfis Oiïobris die Jêxta, Députât io-
ne Agentis veflr i Dom. Rofenbomii , tradere mihi perdileclas Littcras fuas , ut
eas ad ipfam S. Czar. majejiatis Clementiffimi mei Dom. Perfonam, celeriori
tabellario mittercm , quod etiam abfque mord fcci , in qttibus autem Veflr a Ceîfa
ac Pnep. Dominations peramice rogantes S. S. Czar. Majejiatem , apertè ré-
novantes augentefque futim Fœdus in conftanti amicabili neceffitudine ad totalem
fatisfatlionem ex parte Suecicâ notorum gravaminum, Jiabilem ac firmam fuam
dignatœ funt 0 ferre S. S. Czar. Majejiati Mediationem : Et fccundum promiJJ'am
S. S. Czar. Majejiati Dom. meo Clementiflfwio à Veflris Celf. ac Praip. Domina-
tionibus Mediationem , bis Veflris per me mijjîs Litterïs perdileciis, non dubito
quin ulla minima aliàs commutât io erit ad petit a bujus Domini fupramemorati Le-
gatiy abfque incerto S. Czar. Majejiatis ad Veftr. Celfas ac Prœp. Dominationes
rejponfo, celerioris propenfionis , ac inneceffaria completionis. ^uamobrem coac-
tus fum , fuper bis pertinent ibus, atque officio mei debiti ex mea parte requirere
Veflras Celfas ai Prtepot. Dominationes ut fecundum Conflit utionem jam pridem
faclœ conflantis illius cum S. S. Czar. Majejiate neccfjitudinis Veflrœ eb amplius
dùgendiC £5? magis magifque abundanter promovendœ erga S. S. Czar. Majefla-
tem9 fecundum veflras mijfai bas littcras £5? exbibitam in bis rébus Mediationem ,
•velint banc veflram promijfam Déclarai ionem intègre fervarc abfque ullâ violatio-
ne illius amicitia cum S. S. Czar. Majeftate ClementiJJimo meo Dom., qu<e peren-
nibus temporibus cum Feflr. Celf. ac Prœp. Dominationibus excuit a, ac femper
confiant er fanfleque confervata efly ac Petit a apud Veflr. Celf. a; Prap. Domi-
nationes Reg. Majejiatis Sueciue Domini Lcgaii de auxiliis reeufare , donec fedu-
îâ £5? indufiri petitione Feflra ad S. S. Czar. Majejiatem, fecundum veflras per-
diktlas Litleras de mediatione horutn fupradiclorum Negotiorum Veflris Celf. ac
P)\ep. Dominationibus certum refponfum fuo tempore mifj'umfit; inde manifeflifji-
mis modis intogritas confervatœ , fldelis, ac incorruptœ erga S. S. Czar. M.yejîa-
tem Dom. me uni Clementifjimum amicitia à Veflris Celf. ac Prœp. Dominationi-
bus cognofeetur : pro quo vicifflm in opportunis occafwnibus amicabili recompenfa-
tione remùnerari curabit banc adeptum honorcm talis ftbi apport urne occafionis. Me
oppcrtùit bac omnia referre Veflr. Celf. ac Pnep. Dominationibus quo melius ac
confeflim à Veflr. Celf. ac Praep. Dominationibus refponfum de bis praefatis ré-
bus acciperem. Ilagae Comitis, die 13. menfis Oclobris Anno 1700.
Legatus An dr. Artemonides Mathueof.
Li
date
le Me
lui firent remettre en Flamand, en date du 15". du même mois d'Oétobre.
Elle portoit :
„ QS'îùânt examiné fon Mémoire , ils trouvoient qu'il contenoit deux
„ points.
17* MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
'700- „ points. -L'un touchant L. H. P., 6t la conduite tenue par Elles envers
—— „ le Roi de Dannemarck} Se l'autre concernant les railbns, qui avoient por-
té, le Czar à déclarer la Guerre à la Suéde.
„ Touchant le premier point, que L. H. P. avoient vu avec regret par le
Mémoire , qu'il y avoit quelque réflexion , comme fi leur conduite en ce-
la n'avoit pas été telle qu'on fe feroit attendu. Cependant, qu'Elles
M
v>
„ croïoient, que dans les différens entre le Roi de Dannemarck, 6c le Duc
„ de Holitein, Elles n'avaient rien fait, que ce qu'on devoit attendre d'un
„ Etat pacifique, & à quoi Elles étoient obligées , ainfi qu'Elles avoient
„ précédemment donné à connoître. Que pour le montrer , L. H. P. de-
„ voient d'ailleurs dire, qu'Elles avoient remarqué que dans la fuite il pa-
y, roiffoit qu'on fupofoit dans ledit Mémoire une Guerre entre les deux Rois
„ de Suéde 6c de Dannemarck ; mais que fi l' Ambaffadeur s'informoit mieux,
,v il trouveroit qu'il n'y avoit eu aucune rupture ni Guerre entre ces deux
„ Rois-là, mais bien entre le Roi de Dannemarck, 6c le Duc de Holitein,
„ au dernier deiquclsJe Roi de Suéde, aufiî bien que la Grande-Bretagne &
„ leur République, avoient donné de l'afîîitance , fuivant la Garantie, à la-
„ quelle ils s'étoient engagez pour délivrer ce Duc de l'oprefîion , qu'on lui
„ faifbiL Pour ce qui concernoif les troubles de la Livonie , ils ne regar-
„ doient point le Roi de Dannemarck , mais le Roi de Pologne , entre le-
„ quel 6c le Roi de Suéde il s'étoit allumé une Guerre. Que pour ce qui
„ regardoit les Affaires mêmes, L. H. P. n'ont en tout tems eu a cœur que
„ la confervation du repos 6c de la Paix dans la Chrétienté, 6c particuliére-
„ ment entre les Princes & Etats voifins, avec lefquels Elles étoient en ami-
„ tié Se en Alliance. Par conféquent , leur jufte intention 6c leur ardeur
„ pour le maintien de la Paix publique, dès qu'Elles aprirent que les diffé-
,, rens entre le Roi de Dannemarck, 6e le Duc de Holitein, paroifîbient de-
voir avoir de plus grofTes fuites , ont emploie tous leurs devoirs , pour ar-
rêter les voies de fait, afin de pouvoir terminer à l'amiable les diiputes, &
n'ont pas clandeftinement , mais ouvertement, donné à connoître qu'en
1680, Elles avoient accordé leur Garantie du Traité d'Altena, duquel lef-
5, dits différens prenoient leur fburce j ainfi Elles ne pouvoient pas s'en dé-
„ partir, ni éviter, en vertu de cette Garantie, d'aller au iécours de celle
„ des deux Parties , qui auroit été attaquée par la force & par des hoftilitez.
„ Nonobstant cela, le Duc étant attaqué dans fon Païs par les Troupes du
„ Roi de Dannemarck, Elles avoient prié ce Roi-là de s'abftenir de fembla-
„ blés procédures de fait, car autrement Elles auroient été obligées de prê-
a, ter réellement leur Garantie. Elles avoient eu le malheur de voir qu'on ne
„ prêtait point l'oreille à leur fige confeil. C'eft pourquoi Elles furent for-
„ cées d'envoïer, conjointement avec la Grande-Bretagne, une Efcadre dans le
5, Sondt , pour l'exécution de leur Garantie, non comme Ennemis, mais
„ comme Garands du Traité d'Altena, pour faire cefler les hoitilitez du Roi
„ de Dannemarck , 6c porter les chofes à une amiable Négociation pour ter-
„ miner les différens. La Paix Sç l'amitié fubfiltoient cependant avec le
„ Dannemarck & L. H. P., auffi bien que le Commerce entre leurs Sujets
î7 ,6c Habitans refpeétifs, qui continua à être ouvert. Que L, H. P. firent
,, donner
ET RESOLUTIONS D'E T A T. 17;
„ donner par écrit au Roi de Dannemarck de l'envoi de leur Efcadre dans le 1 700.'
„ Sondt, 8c des vues qu'on avoit par-là. Que la Grande-Bretagne en avoit
„ en même tems ufé de fon côté de la forte, avec ordre de faire céder l'exe-
„ cution de la Garantie, dès que le Dannemarck auroit réfolu de rapeller fes
„ Troupes hors du Pais du Duc de Holftein , Se de faire terminer , fans la
5, voie de fait, mais par une Négociation amiable , les difterens. En con-
„ féquence de cela, la Paix & Amitié entre le Roi de Dannemarck 8c Elles,
„ & le Commerce & la Navigation entre les Sujets 6c Habitans refpe&ifs,
„ ont continué fans interruption -y de forte que les Navires de la République,
„ en parlant au Sondt à l'accoutumée , ont déclaré leurs Cargaifons 6c paie
„ les Péages au Roi de Dannemarck. Pareillement l' Efcadre de leur Etat
„ n'avoit fait la moindre difficulté aux Navires Marchands de Dannemarck ,
„ 6c les ont laiiîe librement pafler. Et lors que du côté du Dannemarck il
„ y eut quelque apréhenfion, L. H. P. déclarèrent d'abord leurs intentions.
,, Aufïï des qu'il fut fait un accommodement entre le Roi de Dannemarck
„ & le Duc de Holftein, 8c le tout étant pacifié, rapellerent- elles leur Ef-
„ cadre, & la Paix 6c l'Amitié entre le Dannemarck 6c leur Etat refta en
„ fon entier, fans faire un nouveau 6c fpécial Traité, comme n'étant pas
„ nécefTaire, puifque l'Amitié n'avoit jamais été rompue, ni interrompue.
„ Il en eft arrivé de même de la part des Rois de la Grande-Bretagne 6c de
„ Suéde. Le tout s'étant parle de la forte, L. H. P. ne pouvoient com-
„ prendre comment, 6c fur quel fondement, on peut inférer fur ce qui s'eft
„ pafie touchant la Flote 8c près de Copenhague, que de leur part il s'eft
„ fait des chofes, qui n'étoient pas conformes à leurs promefîês, puis que le
„ contraire paroît par ce que deflus. Car L. H. P., auffi bien que les Rois
„ de la Grande-Bretagne 6c de Suéde , ont bien envoie leurs Efcadres au
„ fecours du Duc de Holftein, comme à celui, qui étoit attaqué, 6c au-
„ quel conféquemment ils étoient. obligez par leur accordée Garantie d'en-
„ voïer du fecours. Mais tout ce qui a été fait par les fecours envoïez, ne
w l'a été que de la part du Duc de "Holftein, fans que lefdits Rois de la
„ Grande-Bretagne 8c de Suéde, ni L. H. P., ainfi qu'on l'a dit, en foient
„ venus à une rupture ; mais leurs fecours n'ont été confidérez que comme
„ Auxiliaires. D'ailleurs, L. H. P. ont même là-defllis laiiîe agir avec mo-
„ dération, non pas fuivant qu'il fe pratique dans la Guerre, mais feulement
„ autant qu'il étoit nécefTaire pour le rétablifTement de la Paix entre le Roi
„ de Dannemarck 6c le Duc de Holftein. Qu'il étoit notoire que de fem-
„ blables Alliances défenfives étoient fouvent contractées entre des Rois,
„ Princes 6c Etats avec promené de réciproques fecours, Se qu'en cas de dé-
„ fenfe, en vertu de telles Alliances, on envoïoit les fecours ftipulez, fans
„ entrer aucunement en une commune Guerre , ni en venir à une rupture >
„ 6c cela eft conforme au Droit des Gens: Qu'en pareil cas L. H. P. au-
„ roient été obligées d'envoïer du fecours au Roi de Dannemarck , s'il avoit
„ été attaqué.
„ Que la Réponfe donnée de la part de L. H. P. à l'Ambafîadeur par le
„ Confeiller-Penlionnaire, 6c dont le Mémoire parle, porte la même chofe,
„ 6c rien n'a été fait contre fon contenu.
ïom. I. V ,, Que.
174 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
I7°°* „ Que L. H. P. auroient lieu de fe plaindre, que pendant que l'Amitié en-
T '■ ™ „ tre Sa Majefté Danoife & leur Etat étoit en fon entier, 6c que le refpeéUf
„ Commerce n'étoit point interrompu, puifque les Sujets de l'Etat fréquen-
„ toient tons les jours les Havres du Dannemarck, Sa Majefté avoit en mê-
„ me tems fait propofer à Sa Majefté Czarienne d'arrêter dans fon reflbrt les
„ Navires des Sujets de l'Etat. Mais puis que la Paix 6c le repos eft rétabli,
„ L. H. P. le parleront fous filence. Cependant, Elles ne peuvent s'empê-
„ cher de remercier Sa Majefté Czarienne de ce qu'Elle n'a pas voulu prêter
,j l'oreille à de telles propofitions. Qu'elles le prennent 6c le reconnoiflènt
„ comme une marque, tant de l'ancienne Amitié qui fubfifte toujours de Sa
„ Majefté Czarienne envers Elles, que de fon équité 6c juftice, qui ne lui a
„ pas permis d'en agir de la forte, 6c d'arrêter fans aucune jufte raifon les
„ Navires des Sujets de l'Etat. Qu'Elles y correfpondront en toute occa-
„ fïon, avec toutes les réciproques marques d'Amitié, puis qu'Elles ont pour
„ celle de Sa Majefté Czarienne une haute eftime.
„ Pour ce qui regarde le fécond point, nommément les raifons qui ont
„ porté Sa Majefté Czarienne de faire la Guerre à la Suéde, L. H. P. ne
„ fauroient le déclarer fur la fubftance 6c la matière de cette Guerre, puis
„ que c'eft une chofe qui ne les regarde pas directement, 6c n'en ont pas une
3, fuffifante connoiflànce. Cependant, pour ce qui regarde la manière, dont
„ on leur fait la notification, il eft vrai , que lors des troubles arrivez en Li-
„ vonie par les entreprifes du Roi de Pologne, Elles ont fait prier Sa Ma-
„ jefté Czarienne de ne pas s'en mêler, ni d'envoier des Troupes contre le
„ Roi de Suéde. Sur quoi Sa Majefté Czarienne eut la bonté de leur faire
„ favoir par fon Ambaflàdeur l'intention qu'Elle avoit de maintenir religieu-
„ fement la Paix 6c l'Amitié avec le Roi de Suéde, fans faire la moindre
„ chofe au contraire. Que cet Ambaflàdeur s'en reflbuvenant, pourra peut-
,5 être fe rapeller, que par cette déclaration il n'étoit fait mention de la
„ moindre condition ou injure. Que la première fois qu'on donna connoif-
„ fance à L. H. P. que Sa Majefté Czarienne croïoit d'avoir quelques raifons
„ de plainte contre le Roi de Suéde fut en date du' Z3. d'Août vieux ftile,
„ du 1. Septembre nouveau ftile, par le Mémoire que fon AmbarTadeur pre-
„ fenta dans une Conférence à leurs Députez. Que fuivant la demande faite
„ dans ce Mémoire L. H. P. en donnèrent d'abord connoiflànce au Roi de
„ Suéde, 6c à fon Ambaflàdeur auprès d'Elles. Que le z8. fuivant Elles en
„ avoient reçu la réponfe de ce Roi-là , favoir avec autant de promptitude
„ qu'on pouvoit le faire, fi l'on confidére le tems qu'il faut pour recevoir les
„ Lettres de Suéde. Que L. H. P. fans perdre du tems avoient réfolu deux
„ jours après de communiquer par Lettre à Sa Majefté Czarienne la réponfe
„ du Roi de Suéde. Mais s'etant écoulé quelques jours pour l'écrire, 6c
„ faire copier les Lettres, on n'a pu fi-tôt les remettre à l' Ambaflàdeur, 6c
„ aux quelles on fe raportoit. Que cependant L. H. P. ont apris avec dé-
plaifir par le Mémoire de PAmbaflàdeur du 6. Oèlobre, prefenté dans une
„ Conférence, qu'avant que Sa Majefté Czarienne ait pu recevoir par L. H.
„ P. la réponfe fur les plaintes, Elle avoit trouvé à propos de déclarer 6c fai-.
„ re la Guerre à la Suéde. Que L. H. P. auroient fort foi
fouhaité que Sa Ma-*
« jefté
ET RESOLUTIONS D'E T A T. tjf
„ jefté Czarienne n'en fut pas venue" à une fi extrême réfolution, & priant 1700.
„ encore que Sa Majefté Czarienne veuille la rendre fans effet , ou du moins "
„ la fufpendre par provifion , 6c de laiffer terminer à l'amiable les différens
„ que Sa Majefté Czarienne a avec le Roi de Suéde ; 8c que l'Ambafladeur
„ veuille empîoïer fes bons offices pour cela auprès de Sa Majefté Czarienne ,
„ avec aflurance, que L. H. P. étoient encore portées d'emploïer pour un
„ amiable accommodement leurs devoirs , en forte qu'ils foient agréables
„ tant à Sa Majefté Czarienne qu'au Roi de Suéde.
Les Etats Généraux firent remettre par leur Agent cette Réfolution à
l'Ambafladeur de Mofcovie. On peut voir par le contenu , combien ils
étoient piquez d'avoir été jouez par la Cour Ruflïenne.
La Réponfe de la Suéde fur les Griefs du Czar qui lui fut envoïée, étoit
une Lettre du Gouverneur Général de la Livonie. Elle avoit été écrite plus
de fix mois auparavant au Roi de Suéde par ce Gouverneur- là, fur les mêmes
Plaintes, qui avoient été faites à Mofcou aux Miniftres de Suéde. Elle cft
telle qu'on va la voir.
SIRE, Lettre
duCom-
J'Ai reçu avec très-humble vénération la Lettre que V. M. m'a fait la gra- Hafbe're
ce de m'écrire du 2.8. Novembre dernier, avec l'Extrait de la très-humble Gouver-
Relation des Ambaflàdeurs de V. M. à Mofcou du n. Octobre, touchant ncur de
les plaintes faites par les Commiflaires du Czar, qui prétendent que l'Ambaf- '* Livo-
fade de leur Maître qui pafla l'année 1697. par cette Ville, n'y avoit pas été Roi de
reçue avec des honneurs convenables, mais qu'on les avoit au contraire trai- Suéde,
tez d'une manière indue, comme des Barbares 6c des Tartares. Les Ambaf- pour fe
fadeurs de V. M. m'ont bien écrit pendant leur féjour à Mofcou, 6c m'ont |uftlfîer
communiqué une traduction des mêmes plaintes, produites parles Miniftres piajntes
du Czar dans une Conférence; mais comme leurs Lettres ne m'ont pas été des Mof-
renduës, aïant été interceptées en Mofcovie avec plufieurs autres avant que covites.
d'arriver ici , cela a fait que je n'ai eu aucune connoiflance ni information de
ces plaintes qu'au retour des Ambaflàdeurs de V. M. à Mofcou, 6c à leur ar-
rivée à Nerva, d'où ils m'ont écrit, m'envoïant des Copies de toutes les Let-
tres perdues. J'ai d'autant plus deraifon, Sire, de remercier très-humble-
ment V . M . 6c de reconnoître la grâce qu'EUe me fait , en «l'ordonnant de
lui faire un fidèle raport de la vérité de ce fait , 6c avec toutes les circonf-
tances, puifque cela me donne lieu de mettre au jour moi-f innocence , 6c de
pouvoir mieux me juftifier de leurs injuftes accufations. Elles feroient , Sire, ,
trop fènfibles à un homme, qui a tâché toute fa vie d'aquerir de l'honnête-
té, aïant fréquenté les Païs 6c les endroits dans le monde, où la civilité 6c la
complaifance font le plus en ufage, 6c l'on ne feroit pas peu affligé, de fe
voir après cela, fi miièrablement chargé de pareils reproches, 6c de voir
qu'on veut faire accroire qu'on fe foit conduit d'une manière fi peu convena-
ble comme l'on prétend, 6c que l'on n'auroit ni de l'honneur, ni de l'hon-
nêteté, ni aflez de jugement pour recevoir l'Ambaflade d'un fi grand Prince.
Mais, Sire, quand je confidere à cette occafion le génie 6c la coutume de
V 2. .la
i7<* MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
1700. la Nation Mofcovite, je puis facilement me confolerj car plus les tr.iite-t-on
•— — 1 — civilement Se plus leur fait-on des honneurs, moins peut-on atteindre le but
qu'on fe propofe en voulant les contenter ; mais l'on fe trouve au contraire
plutôt incommodé par leurs prétentions fans bornes , pour de plus grands
honneurs 6c avantages. L'on elr. même infailliblement paie par Eux d'ingra-
titude pour tout le bien qu'on leur fait , à moins qu'on ne leur accorde tout
ce qu'ils prétendent. Ce m'eft, Sire, la meilleure fatisfaétion que je puifîe
fouhaiter de pouvoir témoigner à V. M. combien je fuis aceufé en cette oc-
cafion fans fondement par les Commiffàires Mofcovites. J'ai d'autant moins
manqué d'emploïer tous mes foins, 8c de donner les ordres néceflaires pour
faire en forte que cette Ambaflade fut bien reçue 6c traitée avec toutes les
marques d'honneur poffibles, & même avec plus de diftinéHon qu'aucune des
précédentes qui avoient autrefois pafle par ici. Comme j'ai bien pu com-
prendre combien il étoit néceffaire dans les conjonctures préfentes pour l'en-
tretien & la conservation d'une bonne intelligence, j'ai aufîî pour cette mê-
me fin fait distinguer leur réception des précédentes en tout ce que j'ai pu,
ou que j'ai crû néceffaire Se faifable. J'aurois bien fouhaité pour ma plus
grande fureté d'avoir pu être pourvu fur de certains points des ordres précis
Se de la réfolution de V. M. afin d'avoir pu me conduire plus fûrement ; mais
comme le peu de tems que j'avois, ne me permettoit pas d'attendre les or-
dres que j'avois très-humblement demandez à V. M., je fus obligé de cher-
cher fur les lieux les InftruéHons néceffaires, ëc d'écrire pour cette fin tant à
Revel qu'à Nerva, afin d'être de là inftruit de ce qui s'y étoit pratiqué au-
paravant en de pareilles occafions, fur tout pour fivoir fi quelque Ambaflade
de Mofcovie, de celles qui ont auparavant paffé par l'un ou l'autre de ces
deux endroits, y avoit été traitée: la réponlé fut la même par tout, à lavoir
qu'on ne les avoit nullement traitées, ni défraïées. J'en envoie une lifte qui
contient le nombre des AmbaiTades de Mofcovie qui depuis l'année 1660. ont
paffé par l'Eftonie, la Livonie, & l'Ingrie, allant partie en Suéde, partie
vers d'autres Princes; 6c de toutes celles, il ne s'en trouve pas une qui en
aucun des fufdits lieux ait été reçue 6c traitée autrement qu'à l'ordinaire.
Cependant , je donnai ordre pour leur réception , prenant en cela pour but
principal ce que les Traitez mutuels ordonnent en de pareils casj 6c je tâchai
de plus, autant qu'il paroiflbit être convenable, de faire augmenter d.ins la re-
, ception de cette Ambaflade l'honneur 6c le traitement accoutumé, afin de
leur donner par là des marques d'une plus grande amitié. Je donnai à Mr. le
Major Glaflènop, qui eft un fort honnête Se poli Gentilhomme, la Com-
miflion d'être leur Preftaf ou Maréchal, auquel je joignis le Capitaine Dorn-
-feld, 6c un Gentilhomme verfé dans la Langue Mofcovite, les faiiànt partir
pour Nyenhuifen, qui cft fur la Frontière, inçeflàmment après que j'eus la
nouvelle que l' Ambaflade étoit partie de Mofcou y afin qu'ils fuilent prêts
pour l'y recevoir a fon arrivée fur nos Frontières, comme il paroit par mes
Lettres, ordonnant en même tems aux Prévôts des Cercles de mettre ordre
de bonne heure pour que les Voitures, comme auifi les Vivres fulîènt tenus
prêts. Pour cette û\\ chacun d'eux reçût avec lui des Lettres Patentes Cv
des Paflèpqrtoi 6c outre cela ils eurent ordre de ehoifir par tout le Puis de
bonnes
ET RESOLUTIONS D'ETAT. 177
bonnes Auberge?, 6c Hôtelleries, tant pour les Soirs que pour les Midis. Au 17013.
refte , il étoit févérement défendu à Mofcou pendant un certain tems de faire — —
aller les Portes de là ici, 6c même de lailîer partir perfonne, de forte qu'entre »
autres nôtre Interprète Soldan, y fut détenu aflëz long-tems, ce qui fe fai-
foit fans doute , afin que la nouvelle que le Czar en perfonne accompagnoit
fon Ambafiàde, ne fut point rendue publique ; lors qu'enfin la Pofte recom-
mença d'aller, on ouvrit les Lettres, 6c on les vifita: ainfi,ilnous étoit fort
difficile d'avoir ici quelque nouvelle de leur arrivée. Outre cela, on faiibit
courir le bruit de leur part , comme fi PAmbaflade avoit changé le deflèin de
venir 6c parler par ici , 6c qu'elle étoit réfoluë de prendre fa route par la Li-
vonie Polonoife; mais peu de tems( après il arriva un Major, 'nommé Jean
Smith , avec une partie du bagage. Il fut fiùvi d'un Courier avec la Lettre
de notification du Vayvode de Plefcow du 14. Mars, dans laquelle pourtant
il n'avoit marqué aucun terme précis pour l'arrivée de PAmbaflade fur nos
Frontières, 6c encore moins le nombre de fa fuite} ce qui m'obligea durant
fix femaines de faire tenir prêts fur nos Frontières les chevaux deftinez pour
leur voiture, ce qui ne pouvoit pas fe faire fins caufer de grands dommages
& des pertes confidérables aux Païfans} car après les avoir renvoïez, il falloit
les rapeller, après les avoir encore fait attendre long-tems en vain , il falloit
de nouveau les faire retourner chez eux de même qu'auparavant} à caufe dur
retardement de l'arrivée de PAmbaflade. Il y eut même de très-grandes dif-
ficultez chaque fois à faire venir des chevaux , 6c quand à la fin les Ambafla-
deurs m'çerivirent du 21. de Mars de Plefcow pour me notifier leur arrivée
en cette Ville, fans marquer pourtant pofitivement le tems quand ils croïoient
pouvoir arriver fur nos Frontières, je leur répondis le 16. du même mois,
que bien que je n'eufl'e reçu aucune réponfe du Wayvode à la Lettre que je
lui avois écrite le 25 de Mars, ni aucune ouverture ou information particu-
lière, tant du tems que PAmbaflade arriveroit, que du nombre de là fuite, ce
que j'avois pourtant fouhaité d'aprendre par la Lettre fufdite du Wayvode, je
n'avois pas laifle néanmoins d'ordonner tous les préparatifs néceflaires & pofli-
bles pour les bien recevoir , & pour les faire traiter & conduire par ce Du-
ché avec des honneurs convenables, efpérant qu'ils recevroient en bonne part
ce qui fe pouvoit faire pour leur accommodement , puis qu'on emploïoit tous
les moïens que l'état prêtent du Pais ( qui pour lors ië trouvoit accablé d'une
très-grande famine 6c cherté) pouvoit permettre, pour leur témoigner par là
une véritable amitié, 6c pour fatisfaire au Traité de Paix de Kardis. Enfin,,
après de longs délais , PAmbaflade arriva brufquement le 2f . de Mars fur la
Frontière. Elle fut reçue, logée 6c traitée à Nyenhuiiën de la manière ra-
contée dans les Relations du Lieutenant Thifons, 6c du Notaire du Cercle.
On peut auffi voir par la Relation du Notaire de ce Cercle, nommé Crely,
de quelle manière elle a été conduite par le Cercle de Riga , 6c jufques à la
Ville. A fon aproche, j'envoïai à fa rencontre le Lieutenant- Colonel Palm-
itrank, 6c le Major Rank, avec mon Carofle à fix chevaux, accompagné
de douze Trabands, portant la livrée de V. M. 6c de dix de mes Pages tk
Laquais bien habillez, avec une fuite confidérable de fo. Carofles apartenant
tant à des Officiers qu'à d'autres particuliers, comme autli le Girofle du Ma-
V 3 giflm
178 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
1700. giftrat de la Ville, attelé de fix chevaux, de plus une troupe de 36. hom-
-— -— mes, avec des habits galonnez, & des plumes blanches aux chapeaux , qu'on
apelle communément Swartendaupter, qui fut fuivie d'une autre troupe de
Bourgeois à cheval au nombre de 140. tous bien mis, parez, 6c équipez avec
leurs Etendards, Timballes, & Trompettes, qui, tous l'épée à la main, fini-
rent la marche. Tout cela fe fit afin de rendre l'entrée d'autant plus diftin-
guée; perfonne ne pouvant nier que l'aparat, qui s'eft fait en cette occafion,
n'ait furpafle de beaucoup les honneurs qui ont été faits auparavant, tant ici
qu'ailleurs, aux autres Ambaflàdes. En cet ordre ils entrèrent par la Porte de
la Ville, nommée Sandport, où étoit porté un Bataillon fous les armes j ils
travcrférent ainfi la Ville parlant par le Marché où étoit pareillement rangé
un autre Bataillon , 6c fortant par la Porte dite Carhport , où fe trouvoit un
troifiéme Bataillon, tous trois aïant des Hautbois 6c des Tambours, qu'ils
rirent fonner continuellement, ils furent conduits dans leur Quartier fur le
Quai dans le Fauxbourg, communément apellé le Stadien, où toutes les Am-
baflàdes précédentes ont toujours logé. Durant tout le tems de leur féjour
ici, un Lieutenant, avec 70. Soldats, montoit tous les jours la garde devant la
porte de leur Hôtel , 6c ils furent faluez à l'entrée 6c à la fortie de la Ville de
16. coups de gros Canons à chacune des Portes. D'abord qu'ils furent en-
trez dans l'Hôtel préparé pour leur demeure, j'envoïai le Major Wrangel
avec le Capitaine Lilienftierna les féliciter de ma part fur leur heureuiê arri-
vée, 6c ils m'envoïérent un Lieutenant-Colonel avec le Coufin de Mr. le
Fort pour m'en remercier. Comme j'avois ordonné au Capitaine Lilienftier-
na de refter toujours auprès d'eux, pour recevoir leurs ordres, fur-tout ceux
de Mr. le Fort comme le premier ; aufli a-t-il formé un Journal de tout ce
qui s'eft pafle tant à la réception qu'en la lùite , 6c pendant tout le féjour de
PAmbaflàde en ces quartiers; c'eft aufïï de fon Journal qu'eft extraite la Re-
lation. Le même Capitaine affiire que les Ambafladeurs ont témoigné d'ê-
tre très-fatisfaits du bon accueil 6c traitement qu'ils reconnoiflbient avoir re-
çu. Ce qui fe confirme encore par la Lettre du Commiflàire Kniper, écri-
te de Mofcou le 16. Juillet, où il/lit avoir apris la même chofe, lavoir que
le Chef de PAmbaflàde Mr. le Fort avoit écrit à Mofcou fur ce fujet en des
termes qui en marquoient beaucoup de fatisfaéKon 6c de reconnoiflànce. Je
commandai pareillement à tous les Colonels, Lieutenans-Colonels, Majors,
£c autres Officiers d'aller tous les jours tour à tour rendre des Vifites , 6c fai-
re leur Cour aux Ambafladeurs, ce qu'ils ont aufli continué de faire pendant
tout le féjour de PAmbaflàde ici. Outre cela, je me fis moi-même informer
prefque tous les jours par des Gentilshommes de l'état de leur fanté , leur of-
' frant en même tems mes fervicesj mais-, fi je ne fuis pas allé en perfonne leur
rendre Vifite, 6c ne les ait pas traitez au Château, c'eft que cela ne s'eft
jamais pratiqué, 6c feulement parce que je l'ai crû fuperflu, tant à l'égard de
ce que cette Ambafladc n'étoit pas envoïée vers V. M., mais à d'autres Puif-
fances, qu'à caufe qu'aucune Ambaflade de toutes celles qui ont paflè autre
fois par ces Provinces n'a été traitée par aucun des Gouverneurs qui m'ont
précédé. J'aurois même d'autant moins pu le faire, que j'étois obligé à caufe
de mon indifpoiition de tenir le lit Pefpace de cinq («naines 3 mais cela ne
s'eft
ET RESOLUTIONS D'E T A T. i7P
s'eft. nullement fait en confédération de la mort de feu ma Fille, comme ils le I700-
prétendent fauffement , puis qu'elle ne mourut que le i<5. d'O&obre l'an
1698, & par conféquent une année & fept mois depuis leur départ d'ici.
Comme durant leur féjour, plufieurs de leur fuite commencèrent d'aller à
cheval autour de la Ville, & fur toutes les hauteurs, ne fe contentant pas de
reconnoître la Place avec des Lunettes d'aproche, mais qu'ils entreprirent
même de defigner 8c dreffer le Plan 6c la fituation de la Ville , jufques à vou-
loir fonder la profondeur des FofTcz en fe promenant fur les Remparts, Se fur
la Contrefcarpe, tout cela m'obligea de faire prier Mr. le Fort de vouloir
bien défendre à fes gens ces fortes de libertez, puis qu'étant lui-même un
Général expérimente , il favoit bien que de telles chofes ne fe fouffroient pas
en aucune Fortereffe de l'Europe. Il reçût cet avertiflement fort bien, ex-
cufant ce qui s'étoit paffé, 8c promettant1 de le défendre à l'avenir à fes Mof-
covites mal apris. C'eft ainfî que s'eft paffé ce qu'ils raportent être arrivé à
cette occafion, 8c dont ils fe plaignent avec fi peu de fondement, préten-
dant qu'on les ait tenus fi ferrez qu'ils n'avoient pu fortir de leurs Logemens}
ce qui ne s'eft nullement fait , puis qu'ils ont tout au contraire marché avec
une liberté entière, 8c en troupes, par toute la Ville, entrant dans toutes les
Boutiques, chez les Ouvriers, aux Cabarets, & par tout ailleurs où bon leur
fembloit, de quoi tous les Habitans de Riga peuvent rendre témoignage.
Au refte, il eft étrange que les Commiffaires du Czar aient avancé qu'en
confidération de la prefence de la haute Perfonne de S. M. Czarienne on au-
rait dû faire quelque chofe de plus que ce qu'ils débitent avoir été fut, car
il étoit défendu à ceux de l'Ambaffade, fous peine de la vie, de divulguer
que ce grand Prince fe trouvoit parmi eux en Perfonne, à caulb de quoi on
avoit auffi raifort de croire de nôtre côté qu'il auroit été mal reçu par S. M.
Czarienne, fi nous euffions fait femblant d'avoir quelque connoiffance de fà
haute prefence chez nous. Jufques ici toute l'Ambaffade s'étoit auffi montré
fort contente, comme auffi en effet elle ne peut pas raifonnablement fe plain-
dre d'aucune chofe j mais, quand à la fin le tems vint de païer ce qu'ils ayoient
dépenfé ici, l'on commença à s'apercevoir de quelque chagrin, ce qui m'o-
bligea de faire revoir 8c modérer les Comptes un peu trop forts de leurs Hô-
tes, faifant mettre tout à un fi jufte 8c raifonnable prix qu'il étoit poffible.
Et, afin que V. M. puiffe voir combien c'eft fans fondement qu'ils fe plai-
gnent, comme fi l'on avoit hauffé pour eux le prix plus qu'au double au de-
là de la jufte valeur, 8c que pour le tranfport de la Rivière de Dhuna, on
leur avoit efcroqué 80. Ducats, j'en ai fût faire la fpécification à ma requifi-
tion par le Magiftrat de cette Ville, 8c il y a une lifte de la fuite de rAm-
baflade qui n'étoit pas peu nombreufe , 8c enfuite une fpécification de ce qui
a été païé à chacun des Hôtes pour leur logement, pour du bois, des chan-
delles 8c autres chofes de cette nature , ce qui leur a été païé , non pas com-
me une chofe exigée par eux, mais fuivant le bon-plaifir des Ambaffadeurs,
8c par manière de diferetion. Je puis d'ailleurs protefter fur ma confeience 8c
fur mon ame , que j'ai cherché 8c emploie tous les moïens poflîbles pour les
contenter, 8c que j'ai tâché en toute manière de leur témoigner toute forte
de civilité, quoique maintenant ils expliquent tout avec malignité. Du ref-
te.
i8o MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
i^oo. te, ce n'étoit pas ma faute qu'il y eut alors une grande cherté 6c difette de
— toutes choies, laquelle fut générale dans ces quartiers, & dont j'ai reflenti
les effets auffi bien que tous les autres} & comme ils le plaignent encore beau-
coup, comme fi on ne les auroit pas voulu honorer à leur départ avec des
Yachts & de. jolis Bateaux au trajet de la Rivière de Dhuna, je puis pour-
tant dire que nonobftant qu'il ne fe trouve point de lemblables Bâtimens ici,
i'avois néanmoins mis tel ordre, que les principaux furent .transportez dans
un joli Yacht, tendu de Drap rouge, Se orné d'un Pavillon Roial, & le
refte dans deux autres Yachts, & dans plus de ;o. grands Bateaux, tels qu ils
font ici en ufage , qui tous furent ordonnez pour leur fervice , outre
qu'en traveriànt la Rivière on les honora de 51. coups de Canon ; de lorte
qu'en tout ceci leurs aceufations font contraires à la vente, puis qu'outre ce-
la ils forent encore d'autre côté conduits jufques à la Frontière de la Cour-
lande dans deux CarolTes du Magiffrat de la Ville, étant alors impoffible, tant
à caufe du violent cours de la glace qui fe trouvoit dans la Rivière, que pour
la tics-grande quantité de leur Bagage, de pouvoir trouver autant de Bau-
mens 6c de Barques qu'il auroit falu pour pafîer un plus grand nombre de Ca-
rolTes, 6c quelque Cavalerie. L'on ne me doit pas non plus imputer le trafic
que ceux de la fuite de l'Ambaffade ont fait de leurs Chevaux revenus de la
Courlande, fur ce qu'ils n'ont pu les vendre qu'à dix Copek par pièce i c'elt
une chofe qui ne me touche point, 6c dont je n'ai eu non plus aucune con-
noifTance} encore moins fuis-je informé de leur Courier renvoie de Courlan-
de, nommé Jacob Scaronzofs, que je n'ai jamais vu , & : dont je n ai jamais
entendu parler, 6c les attestions données par l'Hôte de l'Auberge ordinaire
des Mofcovites, apellé Mehrman, 6c par les deux Marchands Hmtz 6c O//-
kin, auxquels toutes les Lettres des Mofcovites font ordinairement adreffees
par l'Intendant Jarmerfted, 6c par le Préfeft du Portant Gerdsgroens, peu-
vent fervir de preuve fuffifante qu'un tel Courier n'a jamais ete ici} aufli
n'eft-ce qu'une pure fiétion. Ce qui eft enfin mentionne du foupçon que
j'aurois conçu dfun certain Surowoy, qui doit avoir ete fi fouvent envoie aux
AmbalTadeurs Mofcovites, ce m'eft une affaire entièrement inconnue 6c fans
fondement} je n'en ai jamais ouï parler, encore moins 1 ai-je vu ou connu ;
de forte que "fur ce point je ne puis donner aucune explication. . .
Il plaira à V. M. de voir par tout ce qui a été dit, combien je fuis inno-
cent de toutes ces imputations, dont on me veut charger } c cit auffi pour-
quoi je iiiplie très- humblement V. M. de vouloir bien me hure la grâce que
de me prendre fous fa grande protedion , puifque je puis d'ailleurs affiner que
je n'aurais jamais laiffe rien manquer au refpeft du a un auffi grand Pj^cc
que l'eft S. M. Czarienne, fi là prefence en ce lieu eut ete connue^ 11 eit
vrai, que j'ai été jaloux 6c vigilant pour une Foitercfie frontière du Roi mon
Maître; mais à cet égard je me ferais attendu plutôt a des louanges qu a du
blâme de la part de S. M. Czarienne comme étant un grandConquerant. L, eit
donc, Sire, ce que j'ai pu à la hâte raporter pour ma defenle qui paraît al-
avois
fez clairement par les «teftations alléguées en original. Mais ii jamais j av.
rû m'imaginer ou prévoir qu'on me chargerait de lemblables choies, J aurais
bien pris d'autres précautions pour ma deîenfei mais, ma conicicnce ne me
ET RESOLUTIONS D'E TAt i8r
reproche rien, aïant ufé de plus de civilité à leur égard que l'on n'étoit obli- 1700.
ge de faire, comme auffi effectivement on leur en a rendu beaucoup plus '
qu'à tous ceux qui ont pafle auparavant par ici. J'efpére que V. M. daigne-
ra recevoir avec fa clémence ordinaire la juftification de celui qui elt , 6c fera
toute la vie ,
SIRE,
De Vôtre Majefté,
A Riga, le 8. Le très-humble, très-obéïffant ,
Mars 1700. & très-fidéle Serviteur, 6c
Sujet,
E. DE HALBERG.
La Réfolution des Etats Généraux -fur le Mémoire de l'Ambafladeur de
Mofcovie du 6. Octobre raporté ci-defîus , 6c qu'on ne prit qu'un mois
après, étoit conçue de la forte.
„ Qu'on donnerait en Réponfe audit Mémoire : Que depuis longues an-
„ nées ils avoient contracté, 6c de tems en tems renouvelle des Traitez d'Al-
„ liance défenfive avec le Roi de Suéde, qui ne tendoient à l'offenfe ni au
„ defavantage de perfonne ; mais feulement à s'entre-aider 6c fe défendre con-
„ tre les Forces étrangères 6c l'oprefîîon ; 6c réglant le fecours qu'on devoit
„ réciproquement envoïer en cas de befoin 6c d'attaque. Que le Baron de
„ Lillienrooth , Ambaffadeur Extraordinaire de Suéde , dans le préfent cas
„ d'attaque de la Livonie par les Troupes du Roi de Pologne, 6c même dans
„ la fuite par les Armes Ruffiennes , avoit demandé d' Elles des fecours ftipu-
„ lez par les Traitez; qu' Elles ne veulent rien dire touchant les raifons, qui,
„ fuivant le contenu du Mémoire, ont porté Sa Majefté Czarienne à faire
„ la Guerre à la Suéde. Qu'Elles avoient fouhaité que les chofes n'eufïènt
„ pas été portées à de telles extrêmitez , 6c encore ne verroient-Elles rien
„ plus volontiers, finon que le feu de la Guerre qui s'eft allumé, vint à être
„ éteint dans fes commencemens , 5c que les différens puflènt être'afîbupis
„ par un accommodement amiable. Que L. H. P., pour y contribuer en
„ ce qui dépend d'Elles, par- un jufte amour 6c inclination pour le repos 8c
„ la Paix, 6c en confédération de l'amitié, dans laquelle Elles vivent, tant
„ avec Sa Majefté Czarienne qu'avec les Rois de Suéde 6c de Pologne,
„ avoient offert tous leurs bons offices pour avancer un fi bon ouvrage.
„ Qu'Elles en attendent encore avec ardeur l'effet. Cependant, qu' Elles
„ n'ont encore rien réfolu fur les inftances de l'Ambafladeur de Suéde. C'é-
,, toit pour cette raifon qu'on n'avoit pas encore répondu à fon Mémoire.
.,, Mais comme Elles étoient informées, qu'il preffoit une Réponfe, Elles
„ n'ont pas voulu différer davantage de lui donner connoiffance , 6c de dé-
„ clarer qu'il leur feroit au plus haut point agréable, fi. par une prompte fuf-
„ penfion des hoftilitez commencées, 6c par un accommodement des diffe-
„ rens qui étoient fur le tapis, Elles puffent être mis hors de la riéceffité de
„ devoir encore délibérer fur lefdits fecours; 6c de pouvoir avoir par-là plus
„ d'occafion de témoigner en toute manière la ferme inclination, qu'Elles
Tom. I. X „ ont,
181 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
1700. „ ont, autant qu'il dépend d'Elles, de cultiver l'ancieniie amitié qu'Elles
— „ avoient l'honneur d'entretenir avec Sa Majetlé Çzarienne, dont Elles ont
„ toujours eu une haute eltime, & qu'Elles conferveront.
L'Àmbassadecr de Suéde, en préfentanten ce tcms-là le Mémoire fuivant,
y parla dans une Conférence de la Réponfe de la Suéde au Manirelle du
Czar. Cette Réponfe aïant paru belle aux Politiques, on en ajoute auiîi le
précis en peu de mots.
Mémoi- CELSI AC PR.EPOTENÏES DOMINE
re de
L'ITe A^tiUt mïï°l befiernus Tabellarius, Sacra Regia Majeftatis Domini mei Cle-
rooth. k mentijjïmi mandata ut ejufdem refponforias ad Cdfiarum ac PP. DD. VV.
H terris, occafione Memorialis à SereniJJimi Mofcorum Czaris hic degente Domino
Légat 0 nuper exbibiti, fibi perferiptas, Celfis ac P P. DD. VV. offerrem, at-
que fimul mentent Sacra Regia Majeftatis cire a varia moment a hûc pertinent ia
uberius exponerem. ClementiJJimis bifee Mandatis, prima occafione , quam Celfa
ac P P. Dominât iones Vefira mihi indicare dignabuntur , humtllimè morem geftu-
rus fum ; afl fateor incertunt me efje an amplitts & quo ufque ea ipfa , prafenti
rerum faciei congruant. Accidit enim prater omnem fpem , quam fancla adee
promiffa, toticfque repetita Declarationes merito dabant , Czaream fuam Majef-
tatem per h ter as , quarum apographum mihi è Berolino tranfmiffum efit Régi
Polonia pollicitam ef/e , non tantum bcllum fe indiclurum, fed ($ non tantum
aim auxiliaribus copiis fe ipfam propè client ei adfuturam. Adaclum itaqtte me video
ut de auxiliis, vi Paclorum tant pridem quam nuper admodum initorum, Sacra
Rcgia Msjcflati pronïtfifis & qua literis praterlapfo Menfe Martio exaratis Sacra
Regia Majeftas. ipfa requfivit , Celfa ac PP. Domïnationes Vefira finceram
fuam erga Sacrant Regiam Majeftatem amicitiam re ipfà atque toi Documentis
.comprobaverunt , ut nullo modo dubitari pofjlt quin 13 hàc occafione parent affec-
tum fit expertura. Reliquis etiam benevola hujus in fe voluntatis indiens recenfe-
lit Sacra Regia Majeftas quod tefiari voluerint Celfa ac P P. DD. Vefira fe ad
cunciliandam cum boftibus Pacent opérant fuam conferre velie. Eb gratiora erunt
bac Cclfarum ac PP. DD. Vefiram ftudia , quo fincerius Sacra Regia Majef-
tas & ipfa in Pacem , dummodo aqua ea fit atque tuia, propendet.
Intcreà. verà dum huic reducenda Celfas ac P P. Domiuatioues Veftras lauda-
bili fliidio incumbere , perlubenter fua Regia Majejlas anhnadvcrîit , certo fibi
nïhihminus pollicetur nullam pr opter ea in ope à Ce fis ac PP. DD. Vcfiris prœ-
fiandâ moram futur am, quin pvtius Celfas ac PP. DD. Vefira s auxilia tum
Paclis, tum neceffitati imminentique periculo adaquata, fine ullà tentporis jaclu-
râ , tantbque promptius cfje expedituras quo magis apparet , refiauranda Paci
haud aliud cjjicacius dari remedium. Gratâ de catero mente agnofcet Sacr.i Re-
gia Majeftas amicam opem, ac fimul ac ejus bénéficia ex hifee difiicultatibus cluc-
tari dabitur, ad vieem Ce/fis ac PP. D D. Vefiris rependeudam omni hmpore
crit prompt iftîma. Ego inlerea ut f-.vcns Celfarum ac PP. D D. Veflrarunt ref-
ponfum mihi oc'ùs obtntgat, quâ decet obfervanUa rogo. Ilagœ Comitis, die '.[.
Oâobris 1700.
Le
ET RESOLUTIONS D'E T A T. 18}
Le Titre de la Réponfe de la Suéde étoit , DifcuJJio criminationum , qui. 1700.
bus ufus eft Mofcorum Czarus, cum bello Suecis, contra jusjurandum & nuperri-
me datant fidem , illato prœtextum quœrcret.
Il y avoit au revers du feuillet du Titre un Partage de Ciceron: Il portait,
Pœna divin a perjurii, exitium: humam, dedecuseft.
En fuite , „ Bellizarius apud Procopium. „
Turpe eft cum aliis omnibus , quibus vol minime virtm eft cordi tum Principi
<virO) menîiri ac fidem f altère , jusjurandum autem , & PaSla etiam feripto fim-
cita violare , ne abjeUijJimo quidem homini décorum ejje arbitror.
Le contenu de ce Livre roule fur les Sermens du Czar faits fur les Saints
Evangiles, à l'occafion de divers Traitez, qui y font alléguez. On y ré-
pond d'ailleurs aux points contenus dans le Manifefte du Czar, qui a été ra-
porté plus haut. Il y a auflî diverfes Lettres, tant du Czar au Roi de Sué-
de , que de fon Ambafladeur le Fort au Chancellier Comte à'Oxenftern. On
trouve à propos de ne pas raporter le contenu entier du Livre, à caufè de fa
longueur ; quoi qu'il foit curieux, Se tombé entre les mains de peu de per-
fonnes.
Pendant que le Czar 5c le Roi de Suéde fe faifoient la Guerre, les deux
Ambafladeurs de ces deux Puiflances fe la faifoient auffi. Ce qu'il y avoit
de fingulier eft , que les deux Ambaflàdrices difputoient entr'elles de la Beau-
té. Il y avoit entr'elles cette différence, que celui de Suéde avoit pour la
fienne toute la complaifance poflîble , & le Ruffien la tenoit de court , pouf-
fé par la déréglée paffion qui régne en Mofcovie, d'une exceflïve jaloufie.
On en dira une petite particularité, pour divertir le Lecteur. Cet Ambafla-
deur Ruflîen avoit fait apeller un Cordonnier pour faire des fouliers à fa Fem-
me. Cet Ouvrier, après avoir pris la mefure de la longueur du foulier, vou-
lut la prendre de la largeur. Il falut pour cela qu'il élevât tant foit peu la
jambe de PAmbaflàdrice. Son Epoux en prit un accès de jaloufie , qui le
porta à décharger plufieurs coups de canne fur le pauvre Ouvrier, Se le fit
chafler fort mal-traité. Il ne perfifta cependant pas fort long-tems dans cet-
te paffion j car, pour faire accroire qu'il en étoit revenu, Se croïant par-là s'ê-
tre fort civilifé, il lui lâcha dans la fuite, peut-être à fon dommage, un peu
trop la bride. Il avoit l'entêtement d'aller plus haut que l' Ambafladeur de
Suéde i 8c il fut feandalifé de ce que le Gazettier Flamand d'Amfterdam ,
dans l'article où il difoit que les deux Ambafladeurs avoient été complimen-
ter Sa Majefté Britannique, avoit mis celui de Suéde avant lui. Il envoïa
tout en colère fon Interprète chez un Flamand , qui correfpondoit avec le
Gazettier , pour le menacer de lui faire donner un coup d'épée au travers du
corps. L'Ambafladeur de Suéde avoit cependant de fon côté quelque foi-
blefle pour fon Epoufe. Du moins la poufloit-il fi loin que pour quelque pi-
que entre femme 8c femme, il prefenta aux Etats Généraux un long Mémoi-
re Latin. Quoi que ce foit une affaire particulière, on ne laiflera pas de le
donner, puis que fon contenu roule fur la dignité des Femmes des Ambafla-
deurs, ôc qu'elle y eft foûtenuë d'une manière vive 8c folide. Voici le Mé-
moire.
X z CELSI
1700.
i«4 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
CELSI AC PRALPOTENtES DOMINI,
Mémoi-
iw ttCH jNtegro fere biennio , quo Régis mei Clément ifflmi negotia hoc in loco geffi , ope
Liilien- ac beneficib Celfarum ac Prœpotentium Dominationum Vejirarum & honore iif-
rooth. - que juribtts £j? pnerogativis , qtias caracleri mihi commiffo omnium gentium jura
- tribuunt , integerrimè mihi frui licuit; toto enim ejus temporis decurfu CC. ac
PP. D D. Veflris non univerfis iantum fed &? fingulis maximas eo nomine lau-
des , grates , £5? reverenîiam me omnino debere agnofcam. Incitavit me certe fit*
mulumque mihi addidit infignis hœc CC. ac PP. DD. Vejirarum bencvolentia ,
ut fwcero atque fnmmo fludio quicquid mcarum fuit virium intenderim ad promo-
venda hujus Reipublic<e commoda & incrementa. Succefpt etiam hic conatus eo
ufque ex voto ut CC. ac PP. D D. Veftrœ, plenijjimâ fiduciâ de Rege meo Clé-
ment ijfimo conceptd , fua poùjjîmîim Regiœ Majefiati detulerint Mediatorium mu-
nus atque conciliationem Pacis , qua etiam ejus aufpiciis Rifwici ante quadrien-
nium féliciter coaluit. Hanc poftmodum intimiorem inter fuam Regiam Majejia-
tem & CC. ac PP. D D. Vefiras amicitiam adhuc magis magifquc augeri , &
novorum ad priftina Fœderum accejjione corroborari eontigit, non fine utriufque
partis uti & Regnorum , Ditionum , &? Subditorum maximo emolumento , mutuâ-
que fecuritate. Horum ideb comprimis mentionem facere vifum, quod anfam mihi
prabeant commemorandi quemadmodum in cunclis hifee negotiis , quibus peragen-
tiis mea opéra adhihita eft, quin & triginta quinque annorum /patio , quibus fi-
milia minifteria mihi fuerunt concr édita , fape numéro tum propria experientia ,
tum aliorum exemplis fuerim edoclus , quanta fit utilitatis, quinimb neceffitatis, ut
illis quibus negotia publica ejus gencris traclanda demandantur, tanquàm peculiaris
fanclimonia priefidio munit is, peculiaris etiam honos ac révèrent i a exhibe ai ur, at-
que nonfolum ip/i , fed etiam perfona ac res ad ipfos pertinentes eo fruantur patro-
cinio, iifque immunit atibus & privilegiis, qua cunclarum gentium jus lis addixit.
Quantopcre fane id fieri expédiât CC. ac PP. DD. Vejlrœ fummà cum pru-
dentià optime perpenderunt , dum & intuitu fuis in ditionibus Edifia promulga-
runt , pi'.blico applaufu excepta , quibus prœterea executioni. mandandis C C. ac
PP. DD. Veftrœ fedulb incubuerunt , fevere in eos, qui contra delinquere aufi
funt , animadvertendo. Ad eundemmodum fuis Minifiris apud exteros conftitutis
contra quameumque violentiam feu violât ionem ejufmodi jurium & prarogativa-
rum fua tutela efficacité)' projpexerunt. Atque fie agenda unâ ex parte teftatum
reddiderunt eequltatem fuam tfj laudabilem curant , quâ exterorum Miniftrorum
pênes fe commorantium junbus confultum efje voluerunt , ex altéra verh pariter
fuis Minifiris, quacumque competerent redit curaverimt, neutiquam concedentes
iis quicquam decerpi , £s? minimum prœjudicium ajferri. Et certè ni fi firiclè id
obfcrvaretur , vacillant apud alias gentes fummarum Pote fiât uni dignitas , tan-
tum non in contemptum mox prolap/ura quin &? omni oppertunitate privarentur
cum aliis agendi Juper negotiis, undè Regnorum, Ditionun^ y Subditorum tamen
falus de pend et.
Cum itaque hœc omnino ita fefe habeant , peniths fum perfuafus oppidb quoque
jntellecluras effe CC.ac P P. D D. Veflras quod cum ipf<e femper propenfo affec-
ta, omnique honore me profequi clignât a fiât , mihi tamen catifa fit fummopere
con-
ET RESOLUTIONS D'E T A T. i8f
conquerendi , tum de contemptu, quo munus & car acier qttem fujlineo , affetlus 17°°-
eftt tum de injuriis mihi , nihïl taie merenti , nuper illatis. Cujufmodi illa fuit
& quomodo res contigerit , CC. «f PP. DD. Veftra , haud gravatim perfpi-
cient ex verà facli narratitàtdoic adjunftâ. Teftimoniis opus non erit , cum auclor
injuria quafi re egregiâ gej?Ê fibi ipft placeat fcf pluries de eà poftmodum glorian
puhbrum duxerit. Accidit praterea res hac in prafentià tôt illuftrium perfona-
rum utriujque Sexûs, tàm percgr inarum quàm indigenarum , ut fons inficias ire
nequeat, & fi facere fuftineat , veritas tamen facillimè explorari poffit. P rater-
quant quod è fmplici duplex tum fier et injuria , dum priori fuperadderetur invere-
cunda infimulatio , quafi taie aliquid confingere mens effet. Praontarem fane rem
aliter fe babere, ut integrum mihi effet inhibere querelas , à quibus quàm labcn-
ter abflïnerem facile judicabit quifquis modo cogitaverit , me non commodum indè
nec voluptatem ex re adeb ingrat à capere poffe; fed munus quod gero atque came-'
ter mihi concreditus non fmunt ut offenfàm banc fupprimere vel reticere pofftm , fi- ,
quidem obftriclus fum ad rationem eo nomine Régi meo ClementiJJimo rcddendam.
Difiuli tamen quantum pot ut , molefliam creare CC. ac P P. DD. Feftris, que-
rclis meis, ne videlicef fonti tempus deeffct ad faniorem rnentem redeundi , cum
non omninb defperarem demum culpam agnitam & média mihi fatisfaciendi quafi-
tum tri. Sed cum id nullo modo faclum fit , ulteriores mora mihi vitïo verteren-
tur ; ità ut tandem, licet maxime invitas, querelas ad CC. ac PP. DD.Veflras
déferre cogar.
Frufirà affcritur,uti quidem à quibufdam fieri audio,quod Legatî conjux non pof-
fit vindicari fibi jura atque dignitatem marito competentem: quibus enim hi taies
rationibus innitantur ego certè non perfpicio. Nam uxor fequitur conditionem ma-
riti. Hac régula eft univerfalis atque exceptionis cxpers , nifi quandoque ici eve~
niât uxoris cvmmodo, ut quidem alicubi certis cafi bus fieri confucvit. Ad hac
quam abfonum foret, marito munus habente, uxorem tamen alio loco &? diverfo
cenferi , infinita fane profilant exempla quod Legatorum Conjuges pro officio &
car acier e maritorum honorant ur, iifdemque ac ipfi juribus ac prééminent iis gau-
deant; ita ut tanquam maritis ipfis accidiffe reput etur quicquid Conjugibus exhi-
iitum fuerit. Atque hic moris hujus exempla tam fréquent la funt , tamque nota,
ut ullum eorum proferre fupervacaneum fuerit.
Catcrum, quod injurias altinet , adeo fuerunt énormes, ut nemo fine fafiidio &f
natif cà andiverit, ita nimirum comparâtes , ut tamen fi non la fus fuerit car acier e
q;te;n vacant reprefentante munit us , qu'eue graviorcm idcirco pœnam exiger e po-
teft, tnfolentiam tamen non impunè ferre debcret auclor contra quemctimque aliunt,
patratam. At quod contemplum, quo in perfonà uxoris ego lafus fum concernit %
aquè defuper mihi conquerendi jus eft ac de ipfià injuria, prafertim cum appareat
iiiquam illam & illepidam pratenjionem injuria fuiffe caufam atque argumentum
ad quod fous apertè provocaverit & quo lingua intemperantiam tanquam licitam
defendere voluerit. Notorium eft ut deduxi quo loco &? honore Regum Principum-
que habcantur Legdtorum Conjuges, il à ut ab fur dum fit aquè ac inaudit um veni-
re 'poffe in mcntem privât is perfonis honorem illis debitum velle in privât is adibus
denegare. Occurrunt quidem in commercio vît a varia occafiones, quibus abfque
prajudicio juris & honoris amicà familiaritate vivitur, ità ut proédria jus adeo
rigide non cxigatur : attamen mmo lenetur dejurefuo difccdere, nequt fi unâ al-.
X 5 ' twâvt
inè MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,'
1700. terâve occafione fponte quid renùffum fuerit , id in confuetudinem abirc débet , alias
-■ enimjus dubio car acier defpeclui m ox foret obiïoxïùs, ft pauci quidam de jure hoc
in controverfiam vocando , adeof.ie more novo introducendo inter fe convenir e pr<e-
J rumant , quelles feilicet hic dari perhibetur; id vers non morts nifipravi, non ufus .
nifi corruptiyiomen meretur, atque autloribas fuis exiguam certè in exteris Regioni-
lus laudem comparabit. Neque verà hec in cafu valet ici quod aliàs dicitury non
aliundè fecum invehendam ejfe legem fed confuetudinem , quœ in loco ttbi degeris ,
cbtineat fequendam ejfe. Hic enim nihil novi exigitur , fed id dumtaxat quod Çem-
per ufui fuit receptum , 6? adhuedunt ubique locorum viget. Alter vero ifte mos
quem hi in fraudem honoris Miniflro carablere infignilo debiti, inducere fatagunt ,
priori confuetudini '* mo Ferbo Divino, juri hofpitalitatis & gentiim, humants
denique ac civilibus legibus ac confiitutionibus adverfatur. Sacri Codicis Ferba
funt : ne primo in loco confideas , ne digniore fuperveniente indc tibi fit facifeen-
dum. Deus ordinis efi Deus, voluitque adeb ejfe gradus^ alter um altero fubli~
mïorem , ut décent er omnia in ordine agantur. Apud omnes moratiores gentes offi-
ciofs œmulaiionis materiam prœbet honorare ëxteros atque hoc ipfum juris quod
hofpit'alitatïs appcllatur, partem conjlituit. Prifcis temporïbus in eos qui lœfi hii-
jus juris rei peragerentur, feveris pœnis animadvertebatur. Noftrâ verà œtatc
qttamvis pœna fit fublata , judicium tàmen parum illis décorum & quœdam veluti
facli nota remanet. Nemini purrb non confiât quid omnium gentium jura tribuant
Minijlris publias , prafertim Us , quibus caracler Principem reprefentans inharet^
qui à longifjïmo rétro t empare in omnibus Aulis primores habit 1 (3 honore ac pra~
fogativis excepti funt , quibus eximii aliquid 13 pretiofi ineffet. Denique ex Confti-
tutionibus civilibus aptius fane exemplum adducere nequeo , quam Ëditlum hîc lo-
ci Anno 1651. publicatum, quod deferiptum hic fubjicioy quandoque clarijftme fen~
tentiam pronuntiat illius , cujus animus fuit contumeliâ me qfficiendi.
Inter ea , prtetermittere non pojfum quin verbo occurram illis quijaclant liber ta-
tem in Republicâ libéra , qu<e fummam incolarum felicitatem confiituit, conantes
videlicet hîc inferre ideo agere vel omittere illis licere quicquid libuerit. Afi verà
quis ajferet in licentiâ , in vaga ac prœpofiera confufione & abufu , denique bonis
moribus adverfo confiflcre libertatem? In omni benè conflitutd civitate qualis pro-
fetlb eft inclyta hœc Refpublica , concinnus ordo atque gradibus diftintla cujufvis
munera 13 dignitates reperiuntur: neque aliter enim ttllum fubfiflere pojfet Impe-
rium, ubicumque virtuti fuum prœmium, 'vit Us Jiia pwia confiât , boni mores œfii-
mantur , defpiciuntur mali, nul/a libertas in dprai-nà confietudine confifiit,
bac rurfus immodeftiam (3 proterviam exeufare ncquit , protervia vero nunquam
vim legis inducere , nunquam exempli inftar haberi poteft.
Cmn igitur illatce mihi injuries atque offenfe indignitas merito me valdè officiât,
itaque injufiitià & œquanimitate CC. ac PP. D D. Fefirarum colloco fiduciam^
Eas Caufa hujtts condignam ipfiufqtte rei mturœ nec non àmhiiia inter fuam Re-
giam Majefiatem (3 Cclfas ac PP. DD. Fcflras intercedenti (3 demum fimula-
ri benevolentics ac favori , quem confiant er hucufque expert us furn , conjentaneam
habituras efie rationem. Ilagœ Comilis die 30. Novembris 1 700.
Sign.
N. LlLLIENROOTH.
Ma-
ET RESOLUTIONS D'E T A T. iS7
1700.
?[A Adame V Ambaffadrice de Suéde allant le 24. d'Oclobre dernier 1 700. en ii- «
1 fite chez Madame la Comtejfe de Hoorr.e, y trouva grande Compagnie, ci? Species
parmi des autres Madame de la Lecke la Douairière , avec fa Nièce. &uand fatfi
l' Ambaffadrice y entra, toute la Compagnie fe leva, tjj demeura quelque tems de- jjjj™^
bout auprès de la Cheminée, continuant la converfation. Madame la Comteffe de ce^u '
Hoorne les aïant prié de s'ajjcoir , Madame de ia Lecke, & une autre Dame, adjunc-
prirent leurs places de fùn côté; {$ V Ambajfadrice fe trouvant de Vautre côté de «.
la Cheminée prit une chaife qui état auprès a" Elle pour s'y mettre ; mais, remar-
quant que la Nièce de Madame de la Lecke, qui eft une jeune Demoifelle, s'a-
vança pour s'enfaifir, Elle lui fit une révérence, .ci? lui dit : Vous voulez bien,
Mademoifelle, que je prenne ma place icij à quoi la Demoifelle ne répondit rien.
Deux heures après ou environ, P Ambaffadrice s'en alla chez Madame Suaflb, bu
VAffemblée et oit ce jour-là, & Elle y rencontra en entrant Monfieur le Comte de
Dhona, Gouverneur du Prince Electoral de Brandebourg , qui P arrêta un -mo-
ment, pour l'entretenir; mais , elle n'y fut pas plutôt entrée, que Madame de la,
Lecke, qui y et oit déjà, partit brufquement de fa place, & prit en pajfant par la
main une Demoifelle Françoife , nommée Mademoifelle de Nemours, qi? elle en-
traîna avec foi, pour être témoin de la belle expédition qu'elle alloit faire. Elle
fendit la prejjè , aprocha de V Ambaffadrice , ci? avançant la tête lui dit tout haut
dVm ton aigre ci? plein dïanimofité ci? de colère, Madame, je viens vous dire que
vous êtes une impertinente, pour avoir pris tantôt la place de ma Nièce. L' Am-
bajfadrice, fort étonnée d'un Compliment fi inopiné, fe tourna tout d'un coup fans y
répliquer nnfeul mot. Car , outre qu'elle ne trouva pas à propos de fe commettre
fa _
que de l'iujujlc prétention (le . ladite Dame, gui pafferoit pour ridicule parmi le
honnêtes-gens, tant ici qu'en tout autre pais du monde, oïi la polit effe ci? les bon-
nes -mœurs fut en pratique. Elle n'ignoroit pas non plus le rang que les Ambaffa-
drices ont en toutes .les Cours, ni la considération qu'on y a pour elles; de forte
qu'il lui paroijjbit extraordinaire qu'on voulût la lui difputer dans une maifon par-
ticulière , ci? qu'on lui en fit un f net de querelle ? L' Ambajfadrice croïoit an
■commencement , que Maâam de la Lecke venait lui faire exeufe de l'Incivilité de fa
Nièce $ mais, elle en fut bien-tôt détrompée. Il n'y a guéres d'exemple qu'une fem-
me de qualité fe fait oubliée juffies à un tel point que Madame de la Lecke a
fut en cette oCcafion. Aujf , en fut-elle blâmée par la plupart de V ' AJfemblée , qui
et oit fort nombreufe.
Quelques perfonnes crûrent qu'il avoit auflî.eu deiTein, en préfentant ce
Mémoire, d'éluder qu'on ne lui parlât pas d'une Rciblution que les Etais
.Généraux venoient de prendre le jour précédent. C'étoit pour fe plaindre de-
ce que le Gouverneur de Revel, pour la conrervation de l'Armée de l'on Roi,
nvoit arrêté des bleds que les Négociais d'Amrterdam avoient acherez, en
cette Ville-là. Il-eil vrai, que le prétexte en fut pour y mettre defliis un
nouvel Impôt > contre lequel la Ville d'Amiterdam ierécrioit, à l'milauce
des
188 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
des Intéreffcz. Aufïi, ne lui en parla-t-on pas, 6c on fe contenta d'en faire
faire des Plaintes à la Cour de Suéde par le Réfident de l'Etat, Rumpf.
On fît faire en ce tems-là d'autres Plaintes à la Cour de Dannemarck.
C'efl fur ce qu'Elle ne faifoit pas, félon les Accords , entretenir les Fanaux
fur quelque Ifle vojfine, & que cela avoit été la caufedu naufrage de quel-
ques Navires Marchands d'Amfterdam.
LeCzar avoit cependant aflîégé la Ville de Ncrva. Le Roi de Suéde, vou-
lant fecourir cette Place, qu'il croïoit en danger, la lâchant mal fortifiée,
& avec une mince Garnifon, au lieu de tourner fes armes contre le Roi Au-
guste, débarqua du côté de Revel. On différera à en dire le fuccès, qui
fut accompagné de curieulcs circonftanccs , après qu'on aura raporté la mort
de Charles Second, Roi d'Elpagne, 8c les Négociations, qui en réfulté-
rent.
Peu de jours après que Don Bernardo de §)uiros eut fon Audience publi-
que, l'on reçût les fatales nouvelles que Charles II. Roi d'Elpagne, au
nom duquel il avoit pris fon Audience, ëtoit décédé le premier du mois de
Novembre 1700. Ledit Ambaffadeur prefenta même à Mrs. les Etats un
Mémoire pour leur en donner part, avec le précis du Teftament du feu Roi
Charles II., en faveur- du Duc d'ANjou. Il y a dans ce Mémoire les
raifons pour juitifier les difpofitions, qui y étoient contenues, de la teneur
fuivante.
LA conjoncture prefente du tems & des affaires, & les ordres précis que le
foufligné Ambaffadeur Extraordinaire d'Efpagne a reçu de la Haute Ré-
Mt moi-
re de
Don
Bernar- gence, en date du 6. de ce mois, 8c defquels il a bien voulu donner leébure
«!° de en original à Monfieur le Préfident, 6c à Monfieur le Confeiller-Penfionnaire,
Ambaf- ne M permettant pas de différer plus long - tems la notification 6c communi-
fadeur cation des chofes importantes qu'il doit notifier 6c communiquer à V. S. il Ce
d'Efpa- trouve obligé de le faire par le prefent Mémoire.
gne.pre- £e f0uffigné Ambaffadeur fait donc fçavoir en premier lieu à V. S. le trille
Meflrs. accident dont il a plû à Dieu d'affliger l'Eipagne, en retirant à lui le Sere-
les Etats niflîme 6c très-Puiffant Roi Charles IL, qui vive en gloirej 6c en fécond
Gêné- ]jeu, rinflitution 6c étabhffement d'une très fige 6c haute Régence en la
"UNo- ^er^onne ^e Sa Majefté la Reine, conjointement avec les fix Excellentifli-
vembre mes Gouverneurs nommez 8c choifis par le feu Roi d'heureufe mémoire en-
j"oc. tre les principaux Seigneurs de la Monarchie.
Ladite Haute Régence, au nom de laquelle le foufligné Ambaffadeur fe
donne aujourd'hui l'honneur de vous parler, fâchant que l'Efprit équitable 8c
paifible .de vôtre Gouvernement vous fait toujours prendre un intérêt parti-
culier dans les chofes qui concernent le repos public , lui a ordonné de vous
faire part au plutôt pollîble des difpofitions teflar,->entaires du feu Roi fon
Maître , 6c de là fagefîe avec laquelle il a décidé l'importante difficulté de la
Succcflion de fès Roïaumcs.
V. S. fçavent mieux que perfonne, ce qu'il y avoit à confldérer en cette
affiire. D'un côté, le Mariage delà Sereniflimc Infante Marie Thérèse
avec le Rot T. C. Louis XIV. avoit donné lieu au Sereniflimc Dauphin de
former
ET RESOLUTIONS D'ETAT. 189
former des prétentions fur la Succeffion, & d'autre part, la Renonciation fo- i"*oo.
lemnelle de la même Sereniffime Infante Marie Thérèse, s'y opofoit. ""
Tout cela a été fi fouvent debatu , expliqué, Se prouvé, qu'il feroit fuper-
flu de s'y arrêter davantage ; mais ce qui, dans la fituation prefênte des Affai-
rés, mérite particulièrement vôtre attention Se vos réflexions, c'éft l'intérêt
général de l'Europe, qui s'opofe également à l'union de deux Monarchies, 8c
à la divifion de celle d'Efpagnc.
Le fouffigné Ambalfadeur lçait bien que V. S. ne l'ont pas toûiours conçu
ainfi, puifque même Elles n'ont point fait difficulté d'entrer en des Traitez
formels pour le Partage de la Succeffion; mais V. S. n'ignorent pas non plus
les juftes Remontrances qu'il leur a faites à ce fujet au nom du Roi fon Maî-
tre, Se que l'événement ajuftifiées. Tous les Princes de l'Europe parurent
furpris de ces Traitez, dès qu'ils en furent informez. Ceux d'Italie, les re-
gardèrent comme les Décrets de leur perte, Se commencèrent à travailler à
des Ligues pour s'y opofer. Une partie de ceux d'Allemagne, en fit de mê-
me, quoi que plus iburdement; & les autres refuferent de les ligner, à l'exem-
ple des Rois du Nord , Se des Cantons Suiffes : Se enfin l'Empereur, qui dc-
voit en recevoir le principal avantage, les rejetta entièrement après un long
délai. Que V. S. jugent des fuites qu'auroient pu avoir ces Traitez , 5c il
l'Eipagne auroit manqué d'Amis Se d' Alliez, dans la réiblution qu'elle avoit
prife, de périr plutôt en Corps &? avec honneur, que de fe laijfer démembrer avec
honte. Mais heureufement les choies ont tourné d'une autre manière j &, dans
la grande perte que PEfpagne vient de frire, elle a fujet defe confoler, en
confidérant le bon ordre que le feu Roi a pris foin de mettre à la Succeffion.
Ce Prince, qui ne pouvoit êtrefurpaffé en debonnaireté, en piété, Se en
toutes fortes de Vertus Chrétiennes 6c morales , aïant reconnu dans les fré-
quens Confeils qu'il tenoit avec fes principaux Miniftres d'Etat ôc de Juftice ,
que la Renonciation des Sereniffimes Infantes Anne, 6c Marie Thérèse,
étoit uniquement fondée fur l'inconvénient qui réfulteroit de l'union des deux
Couronnes ; & aïant reconnu auffi, que ce motif fondamental venant à ceflèr,
l'ordre ordinaire de la Succeffion ne pouvoit être troublé, ni changé, &
qu'enfin , ce cas exiftoit réellement Se de fait en la Perfonne du Sereniffime
Duc d'ANjou, fécond Fils du Dauphin, Sa Majefté l'a déclaré pour fon
Succeffeur Univerfel, en tous fes Etats, Roïaumes, Se Seigneuries, fans au-
cune exception.
Mais, comme il pourroit arriver, (ce que Dieu ne veuille permettre) que
le Sereniffime Duc d'ANjou, maintenant mon Roi Se Maître, après être
parvenu à la Couronne , viendrait à mourir fins Enfansj ou que cet accident
funefle arrivant au Sereniffime Duc de Bourgogne, il fe verrait apellé au
Trône de France, Se le voudrait préférer à celui d'Efpagne, ce qui pourroit
donner lieu à de nouvelles difficultez ; Sa Majefté y a pourvu , en nommant
Se défignant en tel cas, le Sereniffime Duc de Berri pour SucceiTeur à la
Couronne, aux mêmes conditions que le Duc d'ANjou, Lui fubiiituant, pour
cet effet, le Sereniffime Archiduc d'Aur-RicHE, Fils puîné de Sa Majefté
Impériale, Se à celui-ci le Sereniffime Duc de Savo\e, à ï'excluûon totale
de Sa Majefté le Roi des Romains, afin que la Monarchie ne puiife jamais fe -
fom. I. Y trou-
ipo MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
1700. trouver unie à l'Empire , non plus qu'à la Couronne de France.
" Sa Majcfté la Reine, & les Excelleiuiiïïmes Seigneurs Gouverneurs, fe pro-
mettent, que Y. S. , reconnoiffant combien cette diipofition eft julle & con-
venable au Bien public, en aprendront la nouvelle avec joie, & fe feront un
plaint de contribuer, fi beibin eft, à en procurer la paifible exécution.
Il eft vrai que pour parvenir à un (1 grand bien, ce ne feroit pas a'fcz, que le
feu Roi eut eu la fage prévoïance dérégler l'ordre de laSuccerlîonpar uaTefta-
ment plein d'équité, M ni même que plufieurs grands Princes, 6c Etats, le dé-
clarafTent pour le maintenir, il Sa Majcfté Très- Chrétienne ne vouloit bien
de fon côté y donner les mains. Mais, V. S. aprendront par Mr. l'Ambafla-
deur de France (fi déjà il n'a pris foin de les en informer) que le Roi fon
Maître, content du puiffant & floriflànt état que Dieu a fournis à fes Loix , 6c
ne voulant point s'opofer aux juftes diipofîtions , qui ont apellé le Sereniflîme
Duc d'Anjou fon petit-Fils, 6c prefentement mon Roi 6c Maître, à la Cou-
ronne, ni entrer en Guerre contre fon propre Sang, a mieux aimé renoncer
à tous les avantages qu'il pouvoit efpérer du Traité de Partage.
Le defintéreflement de S. M. T. C. en cette rencontre eft d'autant plus
digne de louange, qu'il afllire la tranquillité publique, 6c garantit l'Europe
d'une Guerre autant à craindre par le Traité de Partage, que par la Réunion
des deux Couronnes; étant certain, que la Maxime fondamentale de l'Efpagne,
doit être 6c fera toujours de fe maintenir entière, comme elle a été ci-devant,
fans fe départir de fes anciennes Alliances, du moins autant qu'elle pourra les
conferver.
Pour ce qui eft du Sereniflîme Archiduc, 6c des efpérances qu'il auroit pu
concevoir, je puis aifurer V. S. que rien n' auroit été plus agréable au feu Roi,
que d'apeller ce jeune Prince au rang des Monarques, ii lajuftice qui dirigeoit
toutes iés actions 6c toutes fes penfees, ne lui avoit fait connoitre que l'avan-
tage de la Succelîîon regardoit uniquement le Sereniiîîme Duc d'Anjou. C'eft
ce qui l'a obligé auflî à le déclarer, 6c à le ftatuer a.infi.
Tout ce qu'il a pu faire d'ailleurs en laveur de la Famille Impériale, il l'a
fait avec joî'e: il y en a des preuves bien fenfiblcs dans fon Teftamcnt, puis
qu'il y dciîgne le Sereniiîîme Archiduc pour Succeîfeur à la Couronne au dé-
faut des Ducs d'Anjou, 6c de Benj. Mais, il ne s'en eft pas tenu là; car,
pour engager de plus en plus les deux Auguftcs Maiforis à conferver la Paix
entr'EUes, il les prie, 6c les exhorte, par fon Teitament, à affermir cette
Paix 6c cette Union par les liens d'un Mariage entre le Duc d'Anjou , 6c une
ArchiduchcfTe.
Le foufllgné Ambafiadeur cfp.'rc que V. S.,faifant attention au contenu du
preiènt Mémoire, demeureront plcineme: t convaincues du dciîr ardent 6c (în-
ccre dans lequel Sa Majcfté la Reine, 6c les Exceilentillimes Seigneurs Gou-
. icurs, fe trouvent de contribuer tout ce qui leur fera poflîbTe pour entrete-
nir avec tous ksPrinces 6c Potentats de l'Europe une véritable Paix, Amitié,
& Correfpondance, 6c particulier' nient avec Sa Majcfté Britannique, 6c V.
S., qui font les anciens Amis, Alliez, 6c Conicdérez de la Couromu à'EC-
pagne.
Au refte, le ibuiTgné AmbuTdcur prie trcs-init-amir.cn: V. S. d'être per-
• iuadées ,
ET RESOLUTIONS D'ETAT. tjpi
fuadées, que comme il n'a eu jufqu'ici pour but en toutes les Négociations ijc0-
que la Paix publique, 8c le bien réciproque des deux Etats, conformément — —
aux ordres continuels qu'il en recevoit du feu Roi , de même à l'avenir il
emploiera fes foins les plus affidus, & fon aplication la plus grande, pour par-
venir à la même fini latisfaifant ainil tout à la fois à fon devoir, 8c aux fenti-
mens d'eftime, de refpecï, 8c d'afreélion, qui lui ont été infpirez par la fa-
geflê de vôtre Gouvernement) Fait à la Haïe, le 24. Novembre 1700.
Etoit figné,
Don Francisco Bernardo de Quiros.
AU Nom de la trés-fainte Trinité Père, Fils, 8c Saint Efprit, trois Per- Le Tcf-
fonnes dillin&es, & un fcul vrai Dieu, & de la très-glorieufc Vierge tamçnt
Marie Mère du Fils, & Verbe Eternel, Nôtre-Dame, 8c de tous les Saints ^^°e\
Bienheureux. ' II. du
Nais Charles, par la grâce de Dieu, Roi de Cajlille, de Léon, d ' Arragon, 1. Oft.
de Sicile,, de Hierufalem , de Navarre , de Grenade, de Tolède , de Valence , de Il°°-
Galice, de Majorque, de S ar daigne, de Scville , de Cor doue, de Corfe, deMur-
cie, de Jaen, des Algarves, d" Algecire, de Gibraltar, des Iles Canaries, des
Indes Orientales 13 Occidentales, Iles & Terres fermes de la Mer Oceane, Ar-
chiduc d'' Autriche , Duc de Bourgogne , de Brabant , de Milan, d'' Athènes , 13 de
Ncv.patrie, Comte d'Aufpurg, de Flandres , de Tyrol,ï3 Barcelone, Seigneur de
Bifcaje (3 de Mali nés, 8cc. 8cc.
Reconnoiflant comme mortel, que nous ne pouvons éviter la mort, peine à
laquelle nous fommes tous affujettis par le péché de nôtre premier Père, &
nous trouvant arrêté au lit, de la maladie dont il plaît à Dieu de nous vifiter,
Nous faifons nôtre Teftament, aïant le jugement fain & libre , félon qu'il a
plû au Seigneur de nous l'accorder, Ordonnons 8c déclarons par cet Ecrit
nôtre dernière volonté.
Premièrement, nous fuplions Jesus-Christ nôtre vrai Dieu 8c Seigneur,
Dieu ôc Homme, que par les mérites de fa Paffion 8c de fon Sang, il n'entre
point en compte avec nous le plus grand des pécheurs, que pour nous faire
miféricorde, & ufer de fa clémence 5 Et quoi que nous aïons été ingrat, que
nous ne l'aïons pas fervi comme nous y étions obligé , ni reconnu fes faveurs
particulières, 8c les grâces fpirituelles 8c temporelles qu'il a répandues fur
nous, en obéïfïànt 8c accomplifTànt parfaitement fa fainte Loi, 8c en l'aimant
comme nous devons pour tant de bienfaits extraordinaires, il lui plaife néan-
moins nous accorder fa grâce, afin que nous mourions en fa fainte Foi , 8c
dans l'obéïiTance de l'Eglile Catholique-Romaine, comme nous y avons vécu.
C'eft ce que Nous proteftons , promettons, 8c voulons faire, étant fon loïal 8c
fidèle Fils.
1 1. Et afin que je me repente vivement de mes péchez , 8c que j'en aie
une véritable douleur qui en ibit le remède avec la vertu 8c la grâce des Sa-
cremens que la miféricorde de Dieu a établis dans fon Eglife, Nous fuplions
la très-fainte Vierge Marie fit Mère, Avocate des pécheurs 8c la nôtre, qu'el-
le nous favorife tout le tems que nous relierons en vie, particulièrement au
départ de nôtre anae , de fon iêcours 8c de lbn interceffion , afin que fon Di-
Y z vin
192 MEMOIP.ES, negotiattons, traitez,
1700. vin Fils nous accorde fa faveur 3c fa grâce. Et comme nous l'avons toujours
- ■ ■ eue pour Dame Se pour Avocate avec toute la dévotion dont nous avons été
capable dans nos extrêmes foibleffcs, Nous eipérons qu'elle Nous regardera
miféricordieufement en tout tems, 6c fur. tout dans l'état preffant de la mort,
feion la dévotion, l'affection, 6c l'attachement que nous avons toujours eu au
fouverain 6c fingulier bénéfice qu'elle a reçu de la puiffante main de Dieu,
lors qu'il l'a préfervée de toute coulpe en fa conception: Et en vûë de ce
pieux miftére, Nous avons fait toutes les diligences poiTibles auprès du Siège
Apoitolique pour l'établiffement de ce dogme-, Se, fouhaitant en augmenter la
dévotion dans nos Roïaumes conformément à ce qu'en a ordonné le Roi nô-
tre Père 6c Seigneur, Nous avons commandé qu'il fût empreint fur nos éten-
darts. Et en cas que pendant nôtre vie Nous ne puiflîons en obtenir la déci-
sion , Nous prions très affeclueufement les Rois nos Succeffeurs qu'ils en con-
tinuent les inftances faites en nôtre nom avec beaucoup d'empreffement juf-
ques à ce qu'ils l'aient, obtenue. Pareillement, Nous fuplions les bienheureux
St. Michel Archange, l'Ange & les faints Anges de nôtre garde, 6c les faints
Apôtres St. Pierre 6c St. Pauî, St. Jaques Patron d'Efpagnc, St. Charles 6c
St. Philippe, St. Dominique, St. Benoit, St. François, Ste. Terefe, (de
laquelle nous fommes dévot d'une façon particulière) qui font tous mes Avo-
cats, avec tous les autres de la Cour eclefte, afin qu'il leur plaife intercéder
pour Nous envers nôtre Dieu & Seigneur pour la même fin , ôç afin qu'il
nous accorde la grâce efficace pour nous repentir de tout nôtre cœur de tous
nos péchez, 6c que nous le puiilions aimer fincérement comme il le mérite.
III. Nous ordonnons qu'après nôtre décès, nôtre corps foit porté avec le
moins de pompe que nôtre Dignité Roïale le pourra permettre au Momitére
de St. Laurent le Roïal, afin qu'il y ibit enféveli dans le Panthéon deftinc
aux corps des Seigneurs Rois nos Prcdéceffeurs & à ceux de nos Succeffeurs,
<Bc que le nôtre y ibit placé dans fou rang fuivant l'ordre que le Roi nôtre
Seigneur 6c Père a donné pour la fepulture des corps de la Famille Roïale
quand il acheva cet ouvrage.
IV. Et pour ce qui regarde les fondations qui ont été faites par nos ordres
dans ce Monaftére, 6c les rentes que nous y avons deflinées, Nous voulons 6c
entendons que le tout foit exécuté 6c réglé de la manière 6c dans la forme
que nous l'avons ordonné dans lefdites fondations 6c dotations.
V. Nous déclarons 6c ordonnons aux*Rois nos Succeffeurs qu'ils aient un
foin tout particulier de la confervation de ce Monaftére Roïal, 6c qu'ils l'en-
tretiennent avec autant de magnificence 6c de grandeur que le Seigneur Roi
Philippe II. nôtre Biiaïeul le fonda 6c dota.
VI. Nous ordonnons, que le jour de nôtre mort, tous Jcs Prêtres 5c Reli-
gieux du lieu dans lequel nous mourrons, difent la Meffe pour nôtre Ame;
6c que fur les Autels Privilégiez on dife toutes celles qui fc pourront célébrer
durant trois jours ; 6c Nous voulons de plus qu'on en dife pour nôtre ame
jufqucs au nombre de cent mille autres: Et Nôtre intention eit que celles qui
par la Miféricorde de Dieu ne nous feront pas néceffaires foient apliquées au
fouhgcment de nos Aïeuls, 6c autres nos Prédéceffeurs j &c, en cas qu'ils n'en
aient pas befoin, on les apliquera aux âmes du Purgatoire qui en auront le plus
de
ET RESOLUTIONS D'E T A T. ipj
de néceflîté; car c'eft Nôtre intention, 6c que les Exécuteurs de Nôtre pré- I7C0-
Cent Tcftament en chargent ceux qui des devront dire, afin qu'ils le confor-
ment entièrement à Nos ordres: ils marqueront aufiî la charité qu'on en doit
donner.
VII. Et à l'égard de ce que le Roi nôtre Seigneur 6c Père ordonna de
colloquer trois mille ducats de rente ( qui effectivement ont été colloquez )
fur la lolde des huit mille foldats que le Roïaume accorda comme mineur, en
cette Ville de Madrid, & fa Province, avec fon confentement, pour rache-
ter des captifs, marier des orphelines, 6c tirer des pauvres de la prifon; 6c
enfuite augmenta cette fomme jufques à fix mille ducats de rente par an, col-
loquez fur ladite folde de ces huit mille foldats j 6c que fi on ne les y trouvoit
pas , on les colloquât fur les rentes les plus certaines & affurées qu'on trouve-
roit débaraffées, vacantes, ou qui vinifent à vaquer après fa mort; &: que
ces fix mille ducats de rente fufîènt emploïez , fçavoir deux mille pour rache-
ter des captifs, préférablement ceux qui auraient fervi en (es Armées 6c fur
fes Fiâtes j Se enfuite fes autres fiijets, en préférant les enfans, 6c les femmes,
& autres qui feraient en plus grand danger fpiritucl. Deux autres mille du-
cats de rente feraient emploïez pour marier des orphelines filles des ferviteurs
des nïaifons Roïales; 6c les autres deux mille ducats reflans s'emploieraient X
tirer des pauvres des priions, lâiflant l'élection des perlbnnes en tous lefdits
cas ( en ce qui ne fe trouverait pas contraire à ce qui eft ordonné à l'égard
des captifs) à la difpofition &C volonté des Rois fes Succefféurs, de ion Con-
fefièur, & de fon grand Aumônier, lefquels dévoient propofer les perfonnes
qui en auraient le plus de néceflité, & en qui l'on trouverait de plus légiti-
mes motifs pour jouir de cette aumône , à condition de préférer toujours les
ferviteurs des Rois 6c Reines régnant , & qu'avant toutes chofes on païât les
dettes de fa Majefté. Je déclare, 6c c'efl ma volonté, que ceci s'obferve,
s'accompliffé , & s'exécute de point en point & à la lettre ainfi qu'il fe trouve
écrit.
VIII. Comme je reconnois que je fuis infiniment redevable à Dieu nôtre
Seigneur, 6c que je defire le bien fpirituelde celui qui me fuccédera légiti-
mement en ces miens Roïaumes & Seigneuries, je le prie & l'en charge af-
feétueufement, que comme Prince Catholique, aïant égard à fes propres inté-
rêts & au bien de fes Roïaumes, il foit fort ibigneux de la Foi, & obéïffant
au Siège Apoftolique Romain, qu'il vive & agiflè dans la crainte de Dieu,
obfervant religieufèment la fainte Loi, & fes Commandemens, procurant fa
gloire Divine, l'exaltation de fon nom, la propagation de la Foi, & l'aug-
mentation de fon fervice ;' qu'il honore l'Inquiiition, l'aide 6c la favorife,
pour les foins qu'elle a de garder la Foi , chofe fi néceflaire principalement
en ce tems où tant d'Herefies ont la vogue : qu'il honore & protège l'Etat
teciéfiaftique, lui conferve & lui faffe conferver fes Exemptions, & Immu-
nitez -, qu'il honore & favorife les Communautez Religieufes, 6c qu'il en
procure avec un foin particulier la réformation autant qu'il fera befoin : qu'il
adminiftre en fes Roïaumes la juitice avec équité : qu'il aime fes Vaflaux 6c
Su'ets, 6c leur procure toute forte de biens 6c de profpéritez, les aimant d'un
amour Paternel -, ce qui lui attirera leur cordiale affection, Ce que faifant,
Y 5 nôtre
194 MEMOIRES, NEGOTï ATIONS, TRAITEZ,
1700. nôtre Seigneur l'aflî fiera d'une façon particulière, 6c l'aidera 11 proportion de
■ la charité dont il niera : far- tout, je le charge de veiller avec un grand foin
fur les Mini lires, ne diflimulant point leurs défauts lors qu'ils manqueront de
* fincérité, même dans les plus petites choies, parce que c'elt le pi us grand
mal qui peut arriver dans un Gouvernement, & auflî parce que j'ai été ex-
trêmement ennemi de tels abus.
IX. Comme la Religion Catholique-Romaine s'eft obfervéc, 6c s'obferve,
en tous mes Roïaumes, Seigneuries, 6c Etats, 6c que mes Prédécefleurs de
glorieufe mémoire l'ont profefTée, Se maintenue, 6c ont dépenfé 6c engagé
le Patrimoine Roïal pour la défenfe, préférant l'honneur 6c la gloire de Dieu,
6c de fa fainte Loi, a tous les intérêts 6c conlîdéiations temporelles; 6c com-
me c'elt le premier devoir des Rois, Nous prions èc chargeons nos Succef-
feurs que pour s'en bien aquiter ils en ufènt de la même manière : Se s'il arri-
voit (ce qu'à Dieu ne plaife) que quelqu'un de mes Succefleurs vint à pro-
felTcr quelque Hercfie de celles qui ont été condamnées 6c rejettées par nôtre
fainte Merc l'Eglife Catholique- Romaine, 6c qu'il s'éloignât 6c fe féparât de
cette unique 6c vénérable Sacrée Religion , Nous le tenons 6c déclarons in-
capable 6c inhabile au Gouvernement 6c Régne de tous lefdits Roïaumes 6c
Etats, ou d'aucun d'eux, 6c indigne de ce haut rang; Nous le privons de la
Succelîîon, de laPoffeflîon, 6c du Droit qu'il y peut avoir, abrogeant 6c dé-
rogeant; Nous déclarons nulles toutes les Loix, Proclamations, 6c Ordon-
nances qui pourraient y contrevenir, 6c Nous Nous conformons aux Loix
Canoniques 6c aux faints Conciles 6c Réglemens Pontificaux, qui privent les
Hérétiques 6c Apoflats des Seigneuries temporelles, emploïant (comme de
' fait nous emploïons en cette occafion) toute nôtre pleine puiffance, certaine
feience 6c autorité, avec les claufes 6c expreflîons necelïàires, afin que ce qui
efl: ici contenu s'accomplifle, fe garde, s'exécute, 6c ait force de loi, comme
fi elle étoit faite 6c publiée en l'Aflèmblée des Etats, avec les folemnitez né-
ceffaires , en chacun de nos Roïaumes 6c Etats.
X. Je prie auflî 6c charge mes Succefleurs que durant le tems de leur Ré-
gne ils gouvernent les choies plutôt par la confidération de la Religion, que
par des intérêts Politiques. Parce qu'ainfi fiifant, ils attireront fur eux le Ce-
cours 6c l'aflîftance de Dieu nôtre Seigneur, lors qu'ils préféreront l'exalta-
tion de la Foi à leurs commoditez propres. Car nous avons mieux aimé 6c
trouvé plus convenable dans les grandes affaires qui me font arrivées de man-
quer aux raifons d'Etat , que de diflîmuler le moins du monde fur les matières
qui regardent la Religion.
XI. Nous enjoignons à tous les Succefleurs de cette Couronne, qu'en re-
connoiflànce 6c révérence de la vénération fuprême que tout fidèle Chrétien
doit avoir pour le fouverain Miltére du très-làint Sacrement, 6c principale»
ment Nous pour la plus étroite 6c finguliére vénération que nous y avons, 6c
toute la très-Auguflc Maifon d'Autriche, Nous avons ordonné que pour en
mériter une plus grande faveur 6c pour nôtre confolation, on le plaçât en la
Chapelle Roïale de nôtre Palais, 6c qu'on continué de l'y conferver toujours,
ce que nous efpérons de la piété de nos Succefleurs; 6c auflî les chargeons, Se
leur ordonnons, qu'on continue la folcmhité des quarante heures, laquelle fe
celé-
ET RESOLUTIONS D'E T A T. tsf
célèbre au commencement de chaque mois, la faifant avec le plus de dévo- 1700.
tion & de zélé qu'on y puifie aporter ; 6c qu'on y continue les Offices divins
en ladite Chapelle, avec les mêmes foins que jufques à préfent nous l'avons Q
fait pratiquer, fie même avec plus d'exactitude, s'il le peut. Ainfi nous vou-
lons que tous les Miniftres Se Officiers de madite Chapelle Roïale, de la M11-
fique, d'Inftrumens, fie de Voix, fie tous les autres, qui préfentement s'y
trouvent , fie ceux qui leur fuccéderont, foient confervez j aïant affigné pour
leur entretien plufieuis rentes.
XII. Si Dieu par fa Miféricorde infinie vouloit nous donner des Enfans lé-
gitimes, nças déclarons pour nôtre Héritier Univerfel de tous nos Roïaumes,
États fié Seigneuries le fils aîné, & tous les autres qui, par leur ordre, doi-
vent fuccéder > Se, au défaut des mâles, les filles en feront héritières, confor-
mément aux Loix de nos Roïaumes. Mais, comme Dieu ne nous a pas encore
accordé cette grâce dans le tems que nous faifons ce Teftament, fie comme
nôtre premier & principal devoir eft de procurer le bien 8c l'avantage de nos
Sujets , faifant en forte que tous nos Roïaumes fe confervent dans cette union
qui leur convient, en obiérvant la fidélité qu'ils doivent à leur Roi, fie Sei-
gneur naturel, étant perfuadé que l'aïant toujours pratiquée ils fe conforme-
ront à ce qui eft le plus jufte, s'affermiffant fur la fouveraine autorité de nô-
tre préfente difpofition.
XIII. Et reconnoiffant conformément aux réfultats de plufieurs Confulta-
tions de nos Miniftres d'Etat fie de la Juftice, que la raifon fur quoi on a fon-
dé la Renonciation des Dames Donna Anna 8c Donna Maria Teresa,
Reines de France, ma Tante, fie ma Sœur, à la fucceiîion de ces Roïaumes,
a été d'éviter le danger de les unir à la Couronne de France ; mais, reconnoif-
fànt aufii que ce motif fondamental venant à ceffër, le droit de la fucceffion
fubfifte dans le parent le plus proche, conformément aux Loix de nos Roïau-
mes, fie qu'aujourd'hui ce cas fe vérifie dans le fécond Fils du Dauphin de
France) pour cette raifon, Nous conformant aux fufdites Loix, nous décla-
rons être nôtre Succeffeur (en cas que Dieu nous apelle à lui fuis lailîer des
Enfans) le Duc d'Anjou, fécond Fils du Dauphin ; & en cette qualité, nous
l'apcllons à la fucceifion de tous nos Roïaumes Se Seigneuries, fans en excep-
ter aucune partie -, Se Nous déclarons fie ordonnons à tous nos Sujets 8c Vaf-
faux de tous nos Roïaumes fie Seigneuries, que dans le cas fufdit, fi Dieu nous
retire fans Succeffeur légitime, ils aient à le recevoir, &c le reconnoître pour
leur Roi 8c Seigneur naturel , Se qu'on lui en donne aufiî-tôt la poffeifion ac-
tuelle, fans aucun délai, après le ferment qu'il doit faire d'obferver les Loix,
Immunitez, fie Coutumes de nofdits Roïaumes Se Seigneuries ; Se, parce que
nôtre intention eft , 8c qu'il eft ainfi convenable pour la Paix de la Chrétien-
té, 8c de toute l'Europe, 8c pour la tranquillité de nos Roïaumes, que cette
Monarchie fubfiftè toujours féparée de la Couronne de France, Nous décla-
rons en conféquence de ce qui a été dit, qu'au cas que le Duc d'Anjou vien-
ne à mourir, ou au cas qu'il vienne à hériter la Couronne de France, &c qu'il
en préfère la jouïffance à celle de cette Monarchie, en tel cas, que ladite Suc-
cefiion doit pafler au Duc de Berry fon Frerc, troifiéme Fils dudit Dauphin,
en la même forme Se manière j 8c en cas que ledit Duc de Berry vienne à
mourir
ioô* MEMOIRES, NEGOTI ATIONS, TRAITEZ,
I7°0- mourir auifi, ou qu'il vienne à fucceder à la Couronne de France, en ce cas
" Nous déclarons, & apellons à ladite Succefiïon l'Archiduc fécond Fils de
0 l'Empereur nôtre Oncle ; excluant, pour la même raifon ôc inconvéniens,
contraires au bien public de nos Sujets & Vaffaux, le Fils premier né dudit
Empereur nôtre Oncle ; 6c venant à manquer ledit Archiduc, en tel cas nous
déclarons & apellons à ladite Succeifionîe Duc de Savoye & fes Enfans, &
nôtre volonté eft que tous nos Sujets 6c VafTaux l'exécutent 6c s'y foûmettent
comme nous l'ordonnons, 6c qu'il convient à leur tranquillité, fans qu'ils per-
mettent le moindre démembrement , 6c diminution de la Monarchie fondée
avec/tant de gloire par nosPrédécefleurs: Et, parce que nous defirons ardem-
ment que la Paix 6c l'Union fi importante à la Chrétienté lé conferve entre
l'Empereur notre Oncle 6c le Roi Très-Chrétien, nous leur demandons 6c
les exhortons d' affermir ladite Union par le lien de Mariage d'entre le Duc
d'Anjou 6c l'ArchiduchefTe, afin que par ce moïen l'Europe jouïflè du repos
dont elle a befoin.
XIV. Et au cas que nous venions à manquer de Succefleur, ledit Duc
d'Anjou doit fucceder en tous nos Roïaumes 6c Seigneuries, non feulement à
ceux qui apartiennent à la Couronne de Caftille, mais aurfi à ceux de la Cou-
ronne d'Arragon 6c Navarre, 6c à tous ceux que nous avons dedans 6c dehors
. l'Efpagne, notamment à l'égard de la Couronne de Caftille, Léon, Tolède,
Galice, Seville , Grenade, Cordoué, Murcie, Jaen, Algarves, Alguires,
Gibraltar, Iles Canaries, Indes, Iles 6c Terre ferme de la Mer Oceane,
• du Nord, 6cduSud, des Philippines 6c autres Iles, Terres découvertes, 6c
qu'on découvrira à l'avenir, 6c tout le refte de quelque manière qu'il apar-
tienne à la Couronne de Caftille. Et pour ce qui regarde la Couronne d'Ar-
ragon, en nos Roïaumes 6c Etats d'Arragon , Valence, Catalogne, Naples,
Sicile, Majorque, Minorque, Sardaigne, 6c toutes les autres Seigneuries 6c
Droits, de quelque manière qu'ils apartiennent à cette Roïale Couronne} 6c
dans nôtre Etat de Milan, Duchez de Brabant, Limbourg, Luxembourg,
Gueldres, Flandres, 6c toutes les autres Provinces, Etats, Dominations, &
Seigneuries qui nous apartiennent 6c peuvent nous apartenir dans le Païs-Bas,
Droits 6c autres Actions qui nous font échues en vertu de la Succeflîon def-
dits Etats. Nous voulons, qu'auffi-tôt que Dieu nous aura retiré de cette vie,
ledit Duc d'Anjou foit apellé, 6c foitRoi, comme, ipfofaEîo, il le fera de
tous ; r.onobflant toutes fortes de Renonciations 6c Aébes qu'on ait faits au
contraire, parce qu'ils manquent de juftes raifons 6c fondemens. Nous or-
donnons aux Prélats , Grands, Ducs, Marquis, Comtes, 6c hommes riches;
aux Prieurs, 6c Commande ars , Gouverneurs des Maifons fortes 6c autres,
aux Chevaliers, Avancez, 6c à tous les Conièils, Administrateurs de Juftïce,
Prévôts, Echevins, Officiers, 6c gens de bien de toutes les Citez, Villes,
Paroiflcs, 6c Terres de nos Roïaumes, 6c Seigneuries, 6c à tous les Vice-
Rois 6c Gouverneurs , Châtelains, Commandans, Gardes des Frontières de
deçà 6c delà la Mer, 6c tous autres Miniftres Se Officiers tant du Couverne-
ment de la Paix, que des Armées 6c Flotes fur Terre 6c fur Mer, 6c aufïi en
tous nos Roïaumes 6c Etats de la Couronne d'Arragon, de Caftille, de Na-
varre , Naples 6c Sicile, 6c Etats de Milan, Païs-Bas, 6c en tout autre lieu
nous
ET PvESOLUTIONS D'E T A T. tP7
nous apartenant & à tous nos antres Vaflaux, Sujets naturels, de quelque 1700.
qualité, & prééminence qu'ils puiflcnt être, en quelque lieu qu'ils habitent
& fe trouvent, pour la fidélité, loïauté, fujettion, oc vafiellage qu'ils nous
doiyent 8c font obligez, comme à leur Roi ce Seigneur naturel, en vertu du
ferment de fidélité & hommage qu'ils nous ont fait 6c nous ont dû faire, que
lors qu'il plaira à Dieu de nous retirer de cette vie, ceux qui fe trouveront
prefens fi-tôt qu'il viendra à leur connoifiance , conformément à ce que les
Loix de nos fudits Roïaumes', Etats , & Seigneuries ordonnent en tel cas , &
lé trouve établi en ce Teftament, qu'ils aient à recevoir le fufdit Duc d'An-
jou (en cas que je vienne à mourir fins Succeflîon légitime) pour leur Roi &
Seigneur naturel, propriétaire de nofdits Roïaumes, Etats, 8c Seigneuries,
en la forme déjà réglée. Qu'on arbore les Etendards pour fon fervice , en
faifant les actes des folemnitez qu'on a coutume de faire en pareilles occafions,
conformément à la coutume de chaque Roïaume Se Province; qu'ils prêtent,
fanent prêter, Se montrent la fidélité Se obéïfiance à quoi, comme Sujets Se
Vaiïaux, ils font obligez envers leur Roi & Seigneur naturel ; Et nous or-
donnons à tous les Commandans des Forterefies, Châteaux, Se Maifons de
plaifance , & à leurs Lieutenans, de quelques Villes, Villages, Se lieux de
Peuples que ce foit, qu'ils rendent hommage, félon les coutumes d'Efpagne,
de Caftille, d'Arragon, Se de Navarre, Se tous ceux qui leur apartiennent ,
ôc dans l'Etat de Milan 8c autres Etats Se Seigneuries, on le rendra félon la
coutume de la Province 8c lieu où ils fe trouveront , ils le garderont pour le
fervice dudit Duc d'Anjou tout le tems qu'il leur fera ordonné pour le remet-
tre par fon ordre à celui qui leur fera envoie , leur ordonnant de faire accom-
plir exactement tout ce qui a été dit , pour ne pas s'attirer les peines que mé-
ritent les Rebelles 8c defobéïflans à leur Roi par leur violement de la foi 8c
de la loïauté qui lui eft dûë.
XV. Si.au tems de nôtre décès, nôtre Succefîèur ne fe trouve pas dans
ces Roïaumes, la plus grande 8c la plus exacte prudence étant néceflaire pour
leur Gouvernement univerfel , conformément à leurs Loix, Conftitutions,
Privilèges, Se Coutumes, ainfi que le Roi nôtre Seigneur Se Père a remar-
qué , jufques à ce que ledit Succefieur puiliè pourvoir au Gouvernement ;
Nous ordonnons qu'incontinent après nôtre décès il fe faffe une AfTemblée,
-compofée du Préfident du Confeil de Caftille , du Vice-Chancelier ou Pré-
sident du Confeil d'Arragon, de l'Archevêque de Tolède, de l'Inquifiteur
Général, d'un Grand, 8c d'un Confeiller d'Etat , que nous nommerons dans
ce Teftament, ou dans le Codicille que nous y joindrons, ou dans un Mé-
moire figné de nôtre main ; Se pendant le tems que la Reine , nôtre très-che-
re Se bien aimée Epoufe, voudra demeurer en ces Roïaumes 8c Cours, nous
prions Se chargeons Sa Majefté d'affifter &c autorifer la fufdite AfTemblée qui
le tiendra en lit prefence Roïale, dans l'apartement Se lieu que Sa Majefté lui
plaira de marquer, fe donnant la peine d'intervenir dans les affaires, aïanc
voix délibérative de qualité, en forte que les fentimens étant égaux, la partie
de ceux à qui elle s'ajoindra fera préférée , mais dans les autres occafions elle
fe joindra au plus grand nombre. Se nous voulons que ce Gouvernement dure
Tom. Z Z Se
ipS MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
1700. & fubfîfte jufques à ce que nôtre Succefleur aïant fçû nôtre décès, y piiifîe
" pourvoir auflï-tôt qu'il aura atteint fa majorité.
XVI. Et comme nous fommes obligé en qualité de Père Univerfcl de tous
nos Sujets 6c Vaflaux, au cas que nôtre Succefleur foit mineur, de donner la
meilleure Régie qui foit poflîble à nos Roïaumes, 6c la plus conforme à leurs
Loix, Privilèges, Conltitutions 6c Coutumes, Nous nommerons des Gou-
verneurs naturels d'iceux , afin que félon nôtre haute & Roïale difpofition , 6c
au nom de nôtre Succefleur, ils gouvernent nofdits Roïaumes, en toute paix
ôc jufticei 6c qu'ils pourvoient aufïi à leurs défenfes, en forte que nofdits Su-
jets fë confervent, dans la tranquillité, repos, 6c immunitez, dont ils doivent
jouir fuivant les Loix , Privilèges , Conltitutions, 6c Coutumes de chacun , 6c
auflî qu'ils demeurent dans la fidélité qu'ils doivent à leur Roi 6c Seigneur na-
turel, dont ils fe font toujours fait un devoir indifpenfable. Nous nommons
pour Tuteurs de nôtre dit Succefleur pendant fa minorité jufques à l'âge de
quatorze ans les- mêmes que nous avons nommez pour ladite Aflêmblée, afin
qu'ils gouvernent au tems de nôtre décès , 6c julques à ce que nôtre Succef-
leur vienne dans nos Roïaumes ^ lefquels Seigneurs nous nommons pour Tu-
teurs 6c Curateurs durant la minorité de notre dit Succefleur pouvant ulèr
pour cela de tout le pouvoir à leur gré, afin qu'en fon nom ils gouvernent
nofdits Roïaumes, en la même forme 6c manière que nous pourrions faire
étant en vie, ou nôtre Succefleur étant en fi majorité, obfervant la forme
6c manière de Gouvernement ainfi que nous dirons ci-après. Pour cet effet,
nous • relevons les fufdits Tuteurs de l'obligation de donner caution , voulant
qu'en vertu de cette nomination feule, 6c du ferment qu'ils 1 doivent faire 6c
prêter, ils puiflent gouverner fans aucune autre aprobation, confirmation, ni
diligence ; en forte que pour cette nomination nous nous fervons de toute nô-
tre puiflance Roïale dans toute fon étendue, annullant, comme en effet nous
annulions, (en cas qu'il foit néceflaire,) toutes fortes de Loix, Chartres, Pri-
vilèges, 6c Coutumes, 6c qu'il elt néceflaire 6c requis, pour le plus grand
bien de nos Seigneuries , 6c de nos Vaflaux , dans les cas extraordinaires , ce
qui ne fe Eut qu'en cette occafîon , aïant égard à tous les motifs 6c circon-
f tances qui y concourent, 6c obligent à y pourvoir ainfi pour éviter les maux,
qui pourraient arriver en faifant autrement.
XVII. Le Vice-Chancelier que j'ai nommé pour Tuteur en l'Aflemblée
doit être auflî, (ainfi que je le nomme) Tuteur fpécial 6c particulier pour ce
qui regarde le Roïaume d'Arragon, dans les cas eC affaires, où befoin fera,
éc conformément à fes Privilèges,' afin qu'il adminiftre la Tutelle de nôtre
Succefleur en ce Roïaume-là; èc fi celui qui viendrait à préfider dans le
Conliïl d'Arragon, ne le peut être conformément à fes Coutumes ; 6c fou-
haitant, ainfi que nous fouhaitons, de proportionner nôtre difpofition feule-
ment à nôtre pouvoir comme Seigneur naturel de ces Roïau'mes-là, fins dé-
roger, ni altérer, ce dont nous ne pouvons difpcnfer ; 6c difpenlant en tout
ce que nous pouvons, 6c convient à nôtre fupréme puiflance, Nous nom-
mons pour Tuteurs de nôtre Succefleur le plus ancien Régent' gradué des
deux qui font naturels d<i ce Roïaume-là , 6c qui fera en charge dans le Con-
fcil
ET RESOLUTIONS D'ETAT. ipp
fcil d'Arragon, lors que je viendrai à mourir, ou après, afin que comme 17°°-
Tuteur nomme il ait l'adminifiration & l'autorité que nous lui pouvons don- '
ner, & que nous lui donnons à l'égard des chofcs & des cas qui conformé-
ment à leurs Immunitez 6c Privilèges pourront être néceflaires; bien entendu
<jue dans les matières 6c affaires d'Etat, Guerre, Gouvernement, Grâces, &
Provisions d'Offices, on ne doit y faire aucune nouveauté, 6c elles doivent
paffer par les Confeils d'Etat 8c de Guerre, 6c celui d'Arragon, ainfi qu'il
s'eft pratiqué, 8c qu'il fe pratique ; 8c les confultations qui le feront dans les
fufdits Confeils, fe porteront à l'Aflèmblée des Tuteurs, afin qu'on y prenne
la réfolution en la forme Se manière que nous ordonnons dans les autres affai-
res ; & au cas que le plus ancien Régent dudit Roïaume vienne à mourir, ou
qu'il vienne à manquer à l'Aflèmblée, nous nommons pour Tuteur en la pla-
ce, celui qui le fuit} 8c ainfi on entrera fucceflivement en la Tutelle dudit
Roïaume d'Arragon jufques à ce que nôtre Succefleur gouverne. Pour cet
effet, Nous déchargeons ledit Tuteur de l'obligation de donner caution , &
de tout ce dont nous le pouvons difpenfer, en vertu de nôtre Souveraineté Se
pleine puiffance, afin que par cette nomination 8c ce ferment, le Régent à
qui écherra l'adminiftration de cette Tutelle la puiiïè exercer.
XVIII. Ledit Régent qui fera Tuteur réfidera en cette Cour, remplira fa
place dans le Confeil, 8c afliftera dans l'Aflèmblée des autres Tuteurs , parce
qu'il faut qu'il foit informé des Mémoires 8c Apointemens univerfels, 6c que
dans la même AfTemblée il y fourniflè les particuliers fur les Affaires du Roïau-
me d'Arragon} 6c afin qu'il fçache les fentimens des autres Tuteurs, 8e fc
conforme au plus grand nombre desRégens pour difpofer 6c régler les Affaires
de ce Roïaume-là , félon qu'il fera le plus à propos pour le fervice de Dieu Se
de nôtre Succefleur , 6c pour l'adminiftration de la Juftice , l'avantage , la
paix , 6c le repos de ce Roïaume-là.
XIX. Nous donnons à tous les Miniftres 8c perfonnes que nous nommons
& nommerons, le pouvoir, l'autorité, 6c la puiffance que nous leur pouvons
donner comme Père, Roi, Se Seigneur de nos Sujets 6c Vaffaux, 6c même
tous les avantages que les Loix , Proclamations , Conftitutions , 6c Coutumes
de nos Roïaumes leur donnent fans aucune exception, afin qu'ils gouvernent
durant la minorité de nôtre Succefleur, en Paix, 6c en Guerre, faflènt des
Loix , pourvoient aux Dignitez 6c aux Charges , tant grandes que petites ,
dans la Police, 6c dans la Guerre, préfentent les Prélatures, Evêchez, Ab- ■
baïes, Se toutes les autres Dignitez Ecclefiaftiques , de la même manière que
nous le fàifons 6c pouvons faire, 6c cela en qualité de Tuteurs, en difpofant
de tout comme lui-même étant majeur en pourra difpofer} 6c pour cet effet
nous les établiflbns Tuteurs, 6c tenons pour établie 6c réglée ladite Tutelle,
à condition qu'avant que de l'exercer ils falfent tous , 6c un chacun d'eux , le
ferment de fidélité à nôtre Succefleur, ppur fa confervation , Se pour lui pro-
curer tous Ces avantages 6c le bien de nos Roïaumes, 6c de nos Sujets 6c Vaf-
faux, 6c de les garantir de toutes fortes de dangers, 6c de faire tout ce que
de fidèles Tuteurs font obligez, 6c diront toujours leurs fentimens aïant égard
au fervice de Dieu, Se à l'exaltation de la fainte Foi, à l'adminiftration de la
Tultice, 6c à l'obéïflance dûë à nôtre Succefleur-, ils garderont aufll le fecret
Z i de
zoo MExMOIP.ES, negotïations, traiter,
ï-oo. de tout ce qui fe traitera en l' AfTemblée. Le Préfident ou Gouverneur du
~ Confeil, prêtera fon ferment entre les mains de tous ceux de ladite Aflèrn-
bléc, après qu'un chacun d'eux l'aura fait Se prêté entre les fiennes.
XX. Lcfdits Tuteurs que nous nommons, Se laiderons nommez, doivent
- admiiiïftrér tous enfemble, 8c non pas les uns fans les autres ; Se pour cet ef-
fet, ils fe doivent alTemblcr dans un apartement delà Maifon Roïale , tous
les jours Se toutes les heures qu'il fera néceffaire de conférer fur les Confulta-
tions 8c Affaires, tant générales que particulières, donnant leurs foins à cel-
les-là préférablement aux autres, inltruifant, 8c failant le raport de tout au
Secrétaire qui nous lert dans les Dépèches universelles , -lequel nous nom-
mons afin qu'il continue dans le même emploi ; 8c pendant que la Reine nô-
tre très-chere 8c bien-aimée Epoufe demeurera dans ce Roïaumc, Se qu'elle
fe trouvera en ladite AfTemblée* (comme dit eft) elle fe convoquera en l'apar-
tement de la Maifon Roïale que Sadite Majefté y marquera, Se. l'on y opine-
ra fur chaque Affaire, 8c on exécutera les réfolutions prifes à la pluralité des
voix ; Se dans les grandes 8c difficiles Affaires on prendra les avis de ceux qui
feront malades , 8c de ceux qui feront abfcns , fi le plus grand nombre le trou-
ve à propos.
XXI. Toutes les Confultations des Confeils fe porteront à la Secretairerie
des Dépêches univerfelles , 8c on les mettra entre les mains de celui qui en fe-
ra le Secrétaire : elles feront ouvertes en PAfTemblée où chacun en dira fon
fentiment, en la manière qui a été dite, ledit Secrétaire y apointera la réso-
lution prife à la pluralité des voix , Se le jour fuivant la raportera après l'en-
regitrement, à moins que la néceffité 8c' brièveté ne requière de la raporter
incontinentj Se cette réfolution fera vifée par Sa Majefté dans l'endroit que
j'ai accoutumé de le faire, lors que la Reine nôtre très-chere 8c bien-aimée
Epoùié affiftera en PAfTemblée, 8c plus bas elle fera aulfi vifée par deux de la-
dite AfTemblée; 8c lorfque Sa Majefté n'y affiliera pas elle fera vifée de tous
ceux qui compofent ladite AfTemblée, félon lçur rang, ou pour le moins de
quatre: 8c qu'à l'égard des Confultations du Confeil d'Arragon, elles doivent
être vifées du Vice-Chancelier ou Régent plus ancien qui aiîiftera en TAiTem-
blée, 8c en la conclufion des Affaire? tant générales que particulières, on les
exécutera dans les Confeils par Décrets, vifées en la même manière que le
font les Réfolutions des Confultations, ou par des Mémoires lignez du Secré-
taire des Dépêches univerfelles, le tout félon la réfolution de l'Affemblée.
XXII. Et à l'égard des Dépêches que nous lignons, tant de nôtre main
Roïale que par l'impreffion de nôtre Seing, Elles ièront lignées par la Reine
nôtre tres-chere 8c bien-aimée Epoufe, dans le même endroit que nous li-
gnons; mais pour tous les autres de l'Affemblée ils ligneront plus bas: 8c fi
quelques-uns en étoient empêchez, il faudra du moins qu'il y en ait quatre
qui lignent: mais pour ce qui regarde l'Arragon , elles doivent être toujours
fignées du Vice-Chancelier, ou Régent le plus ancien du Confeil d'Arragon
qui affiftera dans ladite , AfTemblée, 8c les Secrétaires d'Etat les contrerole-
ront dans l'endroit ou l'on a accoutumé, Se les autres emploieront ces mots,
par cornmandenient de Sa Majeflé. Toutes les Dépêches doivent commencer
par le nom de nôtre Suceèflèur Régnant, ou bien par celui de lit Dignité
Roïale ^
ET RESOLUTIONS DTE T A T. 201
Roïale, & nous voulons avec toute nôtre Puiflancc Roïale, que tous ces i?0^-
Actes, Papiers, & Ordonnances pour le bien de nos Sujets foient comme fi
elles étoient des Lettres, & Billets, du Roi Se Seigneur naturel de ces Roïau-
mes , Se que ceux qui n'y obéiront foient châtiez comme le méritent tous
ceux qui n'obéïflent aux Lettres , Billets , 6c Dépêches de leur Roi Se Sei-
gneur naturel.
XXIII. Et^rrce que l'Aflemblée, non feulement doit expédier ce que les
Confeils propFnc'nt , mais qu'elle doit auffi pourvoir à tout ce qu'elle trouvera
être le plus utile Se le plus avantageux à nôtre Succeflcur, & au bien univer-
fel de nos Roïaumes, Sujets, & Vaflaux, & s'il arrive que quelqu'un de l'Af-
femblée donne quelque avis, ou qu'il le propofè, on opinera auffi en l'Aflèm-
blëe, & on y refondra ce que le plus grand nombre trouvera à propos.
XXIV. Et y aïant égalité d'opinions, en cas que la Reine nôtre tres-che-
re & bien-aimée Epoufë n'y fut pas, on doit apeller le Prérident du Conléil
auquel apartient l' Affaire qu'on traite, ou le Doïen du même Confeil, fi le
Prefident n'y eff pas. Et fi le Doïen n'étoit pas en l'Aflemblée, on doit apel-
ler celui qui le fuit en Dignité.
XXV. L'heure la plus convenable pour l'Aflemblée, fera tous les matins
quand on fort des Confeils; Scelle Te continuera les jours de Fête, en com-
mençant une heure plutôt que ies autres jours: que fi cela ne fuffifoit pas
pour la Dépêche,on marquera quelqu'après dinéc de la femaine la moins occu-
pée j Se s'il arrive une Affaire. importante à quelque heure que ce fbit, on en
donnera avis inceflamment au Secrétaire de la Dépêche univerfelle, ou par les
Miniffres de l'Aflemblée, aux Préfidens des Confeils; le Secrétaire ira en aver-
tir la Reine nôtre très-chere Se bien-aimée Epoufe , qui l'aiant communiquée
au Prefident du Confeil réfoudra s'il faut convoquer incontinent l'Aflemblée,
pour y pourvoir ; Se en cas que Sa Majefté fût abfente le Secrétaire des Dé-
pêches en avertira le Prefident du Confeil, Se le Vice-Chancelier, ou Prefi-
dent d'Arragon, lefquels trouvant à propos de convoquer l'Aflemblée, on le
fera; Se lors que l'Affaire demandera qu'il y foit promptement pourvu dans la
Cour, le Prefident ou Gouverneur du Confeil y pourvoira en informant l'Af-
femblée aufli-tôt, fi l'importance de l'Affaire le requiert.
XXVI. Nous ordonnons à tous ceux de ladite Aflemblée qu'ils foient dans
une parfaite union , étant très-important pour le bon Gouvernement Se pour
le bien de ces Roïaumes; Se quoique nous foions perfuadé que la Reine notre
très-chere Se bien-aimée Epoufe, les entretiendra dans ces bons fentimens
par fon exemple, néanmoins pour nous aquiter de notre devoir, nous prions
Se exhortons Sa Majeffé qu'elle y emploïe tous fes foins.
- XXVII. Ce qui importe le plus pour le bien Se avantage de ces Roïau-
mes, . c'eit d'y avoir notre -Succcfleur: s'il fc trouve en fa Majorité, nous le
prions Se exhortons d'y venir en diligence; Se en cas qu'il foit en fa Minori-
té, Nous ordonnons Se chargeons l'Aflemblée de l'y follicitcr, étant très-
important qu'il arrive en ce Roïaume avec le plus de fureté Se de diligence
qu'il ièra poifiblc.
XXVIII. En cas que notre Succefleur foit en fa Majorité, auffi-tôt qu'il
arrivera en cette Cour, l'AlIembice lui rendra compte de l'état de toutes les
Z 3 affaires,.
zoz MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
1700. Affaires, 6c même des Affaires qui auront été exécutées en fon abfence, fi el-
— — k-s font d'une affez grande importance pour l'en inifruire.
XXIX. Et fi notre Succeffeur cil encore en fa. Minorité, nous voulons, 6c
c'efr. notre volonté, que félon fon âge on lui rende compte des Affaires qu'on
traite en l'Affemblée, afin qu'on fâche que la fuprême Puiflànce réfide en fa
perfonne, comme aufii afin qu'il s'inftruife, biffant au jugement de l'Affem-
blée la forme 6c manière qu'on y doit obferver; 6c par lc|jnêmes Raifons
aïant atteint un âge affez avancé pour entendre la Confultawn ordinaire du
Confeil deCaftille, conformément aux fentimens de l'Afiemblée, ledit Con-
feil la lui fera en la même forme 6c manière qu'à nous, parce que c'eit un
aéte de l'autorité fuprême que nos Su'ets 6c Vaffuix, doivent reconnoître ré-
fider en fa Roïale perfonne, quoi qu'à caufe de fa Minorité les Tuteurs 6c
Curateurs que Nous avons nommez en aient l'adminifiration ; 6c lors que ce
qui vient d'être dit ne fe pourra pas exécuter, le Confeil de Callille obfervera
la manière ordinaire dont on conlulte lors que nous fommes abfens.
XXX. Nous déclarons qu'en l'Affemblée que nous avons nommée, foit
pour l'abfence de notre Succeffeur, étant déjà Majeur, foit pour être Tu-
teurs 6c Gouverneurs de ces Roïaumes tandis qu'il n'aura pas atteint fa Majo-
rité : On pourvoira aux quatre Places 6c Charges du Préfident ou Gouver-
neurs du Confeil, du Vice-Chancelier ou Préfident d'Arragon, de l'Arche-
vêque de Tolède, 6c de l'Inquifiteur Général, pour entrer en ladite Affem-
bléej en cas qu'il en vienne à manquer quelqu'un d'eux par mort ou quel-
qu'autre caufe valable ; fi cela arrive après mon décès, lefdites Charges feront
remplies dans le tems de la minorité de notre Succeffeur à la pluralité des
voix par ladite Affemblée : 6c à l'égard du Grand , 6c du Confeiller d'Etat, fi
nous ne laiffons aucun Mémoire écrit de notre main pour déclarer ceux qui
doivent fuccéder , au défaut des premiers que nous avons nommez ,
(que fi nous laiffons cela fait, nous voulons qu'on l'obferve inviolablement
aufii) l'Affemblée en élira en cas qu'il en vienne à manquer, en la manière
fufdite, aïant beaucoup d'égards à la nomination du Grand, en confidéra-
■tion de ce qu'il reprefente la Nobleflè de nos Roïaumes , que Nous 6c nos
Prédéceffeurs avons toujours beaucoup eftimée : pour ces raifons , nous avons
voulu 6c ordonné que cette partie de nos Sujets il confidérable par fes vertus
& par fon rang participe avantageufement au Gouvernement de nos Roïau-
mes : 6c pour ce qui eft du Confeiller d'Etat , on fera en forte que ce foit une
perfonne fort intelligente 6c fort exercée dans les Affaires d'Etat, comme il
cft abfolument néceffaire,. parce qu'elle doit en cette Ailèmblée reprefenter
ce Confeil que nos Prédéceffeurs 6c nous avons tant eftimé.
XXXI. A l'égard du rang qu'on doit occuper en l'Afiemblée , on le con-
formera aux ordres établis fur cela, 6c qui furent obfervez pendant notre mi-
norité, 6c nous déclarons qu'on lé doit placer de la manière que nous les
-nommons, 6c après eux le Grand, 6c le Confeiller d'Etat fe placeront ainfi
qu'ils arriveront l'un après l'autre; 6c en cas qu'il y ait un Cardinal de la fain-
te Eglife, il précédera feulement à l'égard des places, le Préfident du Con-
feil , 6c le Vice-Chancelier d'Avragon.; 6c fi la Reine notre très-chere &c
bien-airuée Epoulc s'y trouve, on lui donaera .un fauteuil $ 6c à l'égard de
l'ordre
ET RESOLUTIONS D'E T A T. 20$
dre à donner fa voix, il s'obfervera félon la coutume des Aflèmblées, 6c non r700«
pas du Confeil d'Etat. '
XXXII. Les Tribunaux, que nous laiflbns en nos Roïaumes, feront con-
fervez dans l'état où ils font prefentement : pour cet effet , nous leur commu-
niquons de nouveau toute l'autorité qu'ils ont prefentement, nous fervant
pour cela de tout notre pouvoir Roïal. Les Ministres, tous les Vice-Rois
ce Gouverneurs , 6c autres perfonnes qui fe trouveront revêtues de Dignitez-
dans le tems de notre décès , feront maintenus jufques- à ce que notre Succef-
feur, ou l'Aflemblée, que nous avons nommée, y aporte quelque change-
ment en vertu' de la puiflance que nous leur laiflbns, félon les motifs qu'ils en
pourront avoir ; 6c afin qu'ils exercent lcfditcs Charges, nous leur donnons
tout le pouvoir que nous leur pouvons donner, 6c nous ordonnons à nos
Roïaumes 6c à nos Sujets qu'ils leur obéïffent en la même manière qu'ils nous
ont obéi.
XXXIII. Comme tout ce qui efl dit ci-defllis, efl: fort avantageux pour la
défenfe de nos Sujets afin qu'ils vivent en paix , ce , dont l'Aflemblée à qui
apartient particulièrement le gouvernement de nos Roïaumes doit avoir un
grand foin, eft que les Tribunaux foient exaéts à s'aquiter de leur devoir > 6c
ainfi nous les chargeons de nouveau fort particulièrement qu'ils aient un grand
foin, de faire obferver toutes les Loix, Difpofitions, 6c Réglemens que nous
aurons donnez pour la bonne administration de la JuStice, 6c pour l'équitable
gouvernement de nos Sujets. Et parce que la forme qui fe pratique pour l'é-
tabliflèment des Tribunaux fe trouve fort utile, depuis fort long- tems, au gou-
vernement de cette Monarchie, à caufe des grands Roïaumes dont elle efl
compofée, 6c que le Gouvernement fe règle, 6c les Affaires s'expédient plus
facilement par cette voie en la Suivant exactement j Nous chargeons nos Suc-
ceflèurs de la maintenir 6c continuer, 6c fur-tout qu'on obferve ponctuelle-
ment les Loix 6c Immunitez de nos Roïaumes, 6c que tout leur gouverne-
ment foit administré par des perfonnes naturelles d'iceux, fans qu'on s'en puif-
fe difpenfer pour aucune caufe que ce foit : car, outre le droit que nos Roïau-
mes ont pour cela, il s'eSt trouvé de très-grands inconvéniens, lors qu'on a vou-
lu faire le contraire.
XXXIV. Nous ordonnons qu'on reltituë à la Reine Donna Marianne
notre très-chere 6c bien-aimée Epoufe tout ce qu'elle aura reçu de la Dot,
6c que notre Succefléur, èc lès Exécuteurs de notre prefent Teftament , lui
paient tout le furplus de ce à quoi Nous Nous fommes obligé ; 6c outre cela
on lui donnera durant fa vie, 6c Veuvage, quatre cent mille Ducats par an
pour fon entretien, à compter du jour de mon décès.
XXXV. Et par la- bonne volonté 6c amitié que nous avons eue 6c avons
pour la Reine notre très-chere 6c bien-aimée Epoufe, nous lui laiflbns &
donnons tous les Joïaux, Biens, 6c Meubles, qui ne font pas affeétez à la
Couronne, 6c tous autres Droits que nous avons, 6c qui nous peuvent apar-
tenir j 6c nous ordonnons à tous nos Sujets qu'ils la refpeétent, la vénèrent,
6c la fervent, afin qu'elle trouve dans l'amour 6c la révérence de tous nos Su-
jets la confolation que je voudrois bien lui procurer: 6c nous prions affVétueu-
fement notre SucceCeur, 6c nous l'exhortons aufii instamment qu'il noir, eft •
poflible ,
Z04 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TPvAITEZ,
I7<30. pofiïble, que s'il plaît à la Reine nôtre très-chere & bien-aimée Epoufe de fe
'. retirer en quelqu'un de nos Roïaumes d'Italie ; 6c qu'elle voulût pour le bien
& l'avantage du Roïaume s'emploïer à fon Gouvernement , qu'il lui plaife de
difpofer dudit Gouvernement en la faveur, 6c de lui donner des Miniilres, les
plus honorables 6c de la plus grande expérience qu'il s'en pourra trouver; Et
Ci elle a deflein de vivre en quelques Villes de ces Roïaumes d'Efpagne, il
plaife à nôtre Succefleur lui donner le gouvernement de ladite Ville qu'elle
aura choifie pour fa retraite, 6c de toutes fes dépendances avec la Jurifdic-
t.ion.
XXXVI. Si au tems de nôtre décès nôtre Succefleur fe trouvait être mi-
neur, nous ordonnons que nôtre Roïale Maifon lé conferve en la forme Se
état qu'elle fe trouve, afin qu'elle lui ferve dans les mêmes Offices, 6c Char-
ges qu'elle a prefentement, ou qu'elle aura au tems de nôtre décès, en conii-
dération du rang & des bons fervices de ceux de la première Hiérarchie, &
aïant aufli égard aux bons & agréables fervices que les autres qui la compoiènt
ont rendus : & fi nôtre Succefleur étoit en fa Majorité , nous fouhaitons qu'il
lui plaife de faire une forte attention à ces importantes raifons pour conferver
dans leurs Offices ceux du premier rang, afin de conferver à la Maifon Roïale
fon luftre & fa magnificence, 6c à cette même fin, fe fervira des autres félon
qu'ils le trouvent dans leurs Emplois 6c Charges, parce qu'ils s'en font bien
aquitez jufques à prefent.
. XXXVII. Nous voulons que les Serviteurs de la Maifon Roïale 6c ceux
de la Reine nôtre très-chere 6c bien-aimée Epoufe, 6c ceux de la Sereniffime
Reine nôtre Mère 6c Dame (de glorieufe mémoire) foient maintenus dans la
jouiflance de leurs portions, 6c autres émolumens annexez aux Emplois de
chacun pour tous les jours de leur vie ; Et en cas qu'il arrive que quelqu'un
d'eux foit hors d'état de continuer le fervice lors de nôtre décès, le Roi nô-
tre Succefleur ne laiflera pas de lui continuer fa fubfiftance 6c autres émolu-
mens.
XXXVIII. A l'égard de nôtre Noble Garde du Corps, comme elle n'a
été établie que pour être emploiée à la garde du Roi actuellement régnant ,
Nous voulons que fi nous venons à décéder fins laifler de Succefleur , ladite
garde foit levée, 6c fon Corps de garde ôté de nôtre Palais, 6c néanmoins
qu'elle foit maintenue au même nombre de Soldats avec fon Capitaine ou
Gouverneur, 6c les autres Officiers qui y font, jufques à ce qu'elle puifle fervir
notre Succefleur; 6c fon gouvernement 6c provifion de fes places, 6c Char-
ges, fubfiiteront en la même manière 6c forme, qu'elles ont fait jufques à
prefent .
XXXIX. La garde Efpagnole, 6c Allemande, continueront d'affilier au
Palais Roïal comme elles ont fait jufques à prefent pour la bienféance 6c pour
fprvir la Reine nôtre très-chere 6c bien-aimée Epoufe, 6c porter les paquets
qui feront adreflez à l'Aflemblée, 6c à la Secretairerie des Dépèches, ainli
qu'il s'elt obfervé pendant notre Régne.
XL. Pour ce qui regarde la fleur de lys d'or, 6c beaucoup d'autres Reli-
ques qui apartenoient au Seigneur Empereur Charles-Quint nôtre Tris-
ïu'eul , 6c le lignum Crucis 6c plufieurs autres Reliques qui font dans le Reli-
quaire
î
ET RESOLUT TONS D'E T A T. zo|
quaire de la Chapelle Roïale, 8c dans leTrefor que le Roi nôtre Seigneur Se x700-
Père, a 1 aidez afrcéries, Se annexées à la Couronne , Se fuivant la dilpofition ~
que le Roi nôtre Seigneur Se Perc en a fait, nous ordonnons qu'elle s'obferve
en la même manière, Se conformément à ce que Sa Majefté en a ordonné.
XLI. Et comme le Roi nôtre Seigneur Se Pcre a laifle annexez à ladite
Couronne d'autres Meubles Se Joïaux qui font dans ledit Treior de ce Palais
de Madrid , Se plusieurs- autres Ornemens , Peintures, 8c Tables précieufes qui
font audit Palais , nous ordonnons-que les Créanciers à qui ils font hipotequez
en foient païez Se fatisfaits par la Couronne jufques à leur valeur, la chofe de-
vant être faite ainfi pour l'honneur de la Couronne} Se, conformément à ce
Règlement, nous ordonnons qu'il s'oblèrve Se s'exécute dans la même manière
que Sadite Majefté l'ordonna.
XLII. Et à l'égard du Palais, Se autres Maifons Roïales, que nous avons
en cette Cour, Se aux environs, Se dans d'autres Citez , Villes, Bourgs, Se
Villages, nous ordonnons que tous les Tableaux, Tapifièries, Miroirs, Se tous
autres Meubles qui les ornent, reftent annexez comme nous les annexons dès
à préfênt avec toute la force du pouvoir -que le droit nous donne dont nous
nous "
ronne :
ni ali
des c'hefes qui y font} Se pour Paccomplifièment de cette nôtre volonté nous
ordonnons que lefdits Meubles Se Ornemens foient reconnus, par des Inven-
taires qui fe trouveront dans lefiites Maifons, Se qu'on en rafle de nouveaux,
y ajoutant ce qui ne fe trouvera pas dans les vieux, Se dans les Contrerôles ,
Se Bureaux ; Se en ceux de nôtre Màifon Roïale on y en gardera des Copies
autentiques aïant inféré cette çlaufe, afin qu'en tout tems il fôit notoire que
lefdits Meubles font annexez, Se qu'ils ne doivent point être donnez, ni alié-
nez, en aucune manière par nôtre Succefleur Se Succefleurs} fi ce n'eft en
cas oue pour la défenfe de nôtre Sacrée Religion, Se de nos Rcïaumes, on
foit contraint d'ufer des (ècours que lcfcîites choies peuvent produire dans des
occafions fi légitimes} pour lefquels cas nous laiflbns libres tous ces Meubles,
dont il fera néceflaire de fe prévaloir Se fervir, Se non pour aucun autre, quel-
que preflant Se important qu'il puifle être; Se comme nous avons dépenfé
quelques fommes confidérables en pluficurs Bàtimcns Se Ornemens, Se que
nos Roïaumes Se nos Sujets nous en ont auflî fourni beaucoup pour nous faire
plaifir, nous ordonnons qu'on eftime Se qu'on paie leur prix à nos Créanciers
par les foins de l' Aflèmblee des décharges , attendu que ces Meubles que nous
y avons ajoutez peuvent être affectez à nos Créanciers*
XLIIt. Le Roi nôtre Seigneur Se Père nous a laifle S: donné, Se à nos
Succefleurs aux Roïaumes, un Crucifix auquel font attachées des Indulgen-
ces, Se qui eit pofé en notre Garderobe, avec lequel notre Seigneur l'Empe-
reur notre Triiaïeul mourut, Se les autres Rois jufques à Sa Majefté, Se nous
efpérons faire la même chofe: Nous conformant à cette difpoiîtion Se prati-
que, nous le laiflbns à notre Succefleur, Se Succefleurs à la Couronne, com-
me étant une très pieufe dévotion Se funt Mémorial.
XLIV. Nous déclarons que nous avons toujours fouhaité de faire juftice à
fora. I. A a nos
206 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
ï703- nos Sujets & Vaffaux, Se que jamais nous n'avons eu intention, ni volonté,
— ; — - d'offenfer perfonne-, mais au cas que quelques-uns aient eu fujet de plainte ou
qu'ils aient pu prétendre quelque choie, en vertu de nos réfolutions & difpo-
fitions, nous ordonnons qu'on leur donne fatisfaétion en tout, Se qu'on paie
tout ce que je dois à mes Serviteurs & Domcftiques Se à toute autre perfon-
ne > Se nous prions Se chargeons notre Succeffeur Se tous les autres qui gou-
verneront en fa minorité , qu'ils fupléent ce qui manquera de notre fonds
Roïal jufqucs à la véritable Se. parfaite fatisfaâion de nos dettes Se des torts Se
outrages que nous pourrions avoir faits.
XLV. Nous prions. Se chargeons nos Succeffeurs, que durant le tems de
leur. Gouvernement en ce Roïaume, ils évitent avec foin les dépenfes fuper-
fluës, Se qu'ils foulagent leurs Sujets, Se diminuent les Tributs, Se Impor-
tions; car, quoi qu'ils les accordent volontairement, ils ne laiffent pas de s'en
trouver furchargez, parce que la prière Se la volonté des Rois en cela leur fait
faire de trop grands efforts : Se fi les Rois avoient le moïen de remédier à
leurs néceflîtez quoi qu'elles fuffent bien preffantes , . ils ne devroient jamais
demander aucuns fecours à leurs Sujets Se Vaffaux j ainfi l'on doit abolir les
Tributs toutes les fois que les néceffitez ceffènt.
XLVI. Pareillement je charge nos légitimes SuccefTeurs à. nos Couronnes
& Seigneuries, que pendant qu'ils en feront les Poffeffeurs ils honorent leurs
Roiaumes Se veillent pour leur confervation Se pour leur avantage , qu'ils
confîdérent, favorifent Se protègent leurs Sujets fuivant leurs mérites ; Se quoi
que ceci foit général pour tous nos Roiaumes, nous leur recommandons par-
ticulièrement, d'avoir beaucoup d'amour Se de foin de nos Roiaumes d'Efpa-
gne, Se plus expreffément encore pour la Couronne de Caftille, parce qu'il
cft notoire que les forces de monde , Se d'argent , qu'elle a fourni , dans le
tems de nos Seigneurs les Rois nos Aiculs, en celui du Roi notre Seigneur Se
Père, Se au nôtre, pour les Guerres de Flandres, Allemagne, France, Italie,
Se autres endroits -, Se les fervices Se effuiîon de fang qu'elle a rendus Se fouf-
ferts, Se qu'elle rend Se fouffre au continu, pour la défenfe de la Religion Ca-
tholique , ne fe peuvent affez reconnoître.
XL VII. Item qu'on adminiftre, Se qu'on faffe adminiftrer la Juftice à tous
nos Roiaumes Se Seigneuries, à nos Sujets Se autres perfonnes, équitable-
ment Se fans aucune acception de perfonne. Se qu'en ceci ils foient les Pères
Se les apuis des Orphelins, Veuves, Se perfonnes néceffiteufes Se miférables,
afin qu'elles ne foient pas oprimées par les Riches Se Fuiffans: car c'eft le de-
voir efTentiel des Rois, afin qu'à chacun foit confervé fon Droit, Se que tous
vivent en paix Se tranquillité, amour Se obéïffance envers leur Roi.
XLVIII. Nous recommandons très-particulièrement à notre Succeffcur Se
Succeflèurs de favorifer Se protéger tous les Sujets Se Vaffaux étrangers , Se
de fe fier en eux comme l'on fait de ceux de CafHlle, parce que c'eit le
moien le plus efficace pour les conferver en amour dans les endroits ou notre
préfence Roïale ne fe trouve pas.
XLIX. Et parce que j'ai trouvé ces Roiaumes fort chargez de Tributs ,
nous les avons foulugrz dc'quelqucs-uns, n'aiailt pas fait en cela ce que nous
aurions voulu 3 les Guerres Se les ncccflïtcz de notre tems nous en aiant em-
pêché)
ET RESOLUTIONS D*E T A T. 107
péché. Cependant, comme il eft très-avantageux à notre Couronne de foula- i?00-
ger nos Sujets le plus qu'il fera poffible, Nous recommandons à nos Succef- '
leurs d'Ôter de ces Tributs le plus qu'il leur fera poffible, 6c que les ncceffitez
publiques le permettront; 6e que le provenu de ces fubfides , & d'autres ren-
tes, Se du Patrimoine ne foit emploie, ni confumé en gratifications, ni au-
tres bienfaits volontaires: car cela ne fe peut, ni ne fe doit, parce que c'eft
le fang des Sujets, 6c qu'il n'y a que la defenfe de la Religion, qui puiffe juf-
tifier l'incommodité qu'on leur fait en cela; 6e pour mieux y reufîir on doit
procurer par tous les moiens poffibles de dégager lefdites rentes.
L. Nous conformant aux Loix de nos Roiaumes qui défendent l'aliénation
des Biens de la Couronne 8c de fes Seigneuries, nous ordonnons Se chargeons
notre Succeïïcur 6e SuccefTeurs que durant le tems de leur gouvernement ils
n'aliènent aucune chofe defdits Roiaumes, Etats, 6e Seigneuries, ni qu'ils
les divifent ni partagent , mêmes entre leurs propres Enfàns., ni en faveur
d'aucune autre perfonne; & nous voulons que tous lefdits Roiaumes 6e tout
ce qui leur apartient, ou pourrait apartenir enfemble, ou à chacun en parti-
culier, 6c tous autres Etats qui pourraient apartenir par fucceffion à nos Hé-
ritiers après nous, fe confervent enfemble, ÔC foient toujours ! joints comme
des Biens indivifibles 6c impartiables de cette Couronne, 6c autres nos Roiau-
mes, Etats, 6c Seigneuries, ainfi qu'ils font préfentement ; 6c fi par grandes
& prenantes néceffitez ils vouloient aliéner quelques Sujets, ils le feront avec
le Confeil Se au gré des perfonnes intéreffées, 6c contenues en la Loi que fit le
Seigneur Roi Jean Second, parce qu'elle fut établie du mutuel confentement
dans les Etats qui fe tinrent à Valladolid l'an mil quatre cens quarante-deux.,
6c enfuite confirmée par les Seigneurs Rois 6c Reine Catholiques Ferdinand
Se Isabelle nos Prédécefleurs, le Seigneur Empereur notre Trifaïeul en
TAfiemblée qu'il tint à Valladolid L'an mil cinq cent vingt 6c trois, 6c depuis
par notre BifaïeUl, notre Aïeul, 6c le Roi notre Seigneur 6c Père, par leurs
Teftamens, 6c de nouveau nous la confirmons, voulons, 6c ordonnons, qu'on
la garde, 6c qu'on l'accompliffe.
LI. Et comme la Reine Isabelle, 6c après elle le Seigneur Empereur
notre Trifaïeul, 6c les autres Seigneurs Rois fes SuccefTeurs jufques au Roi
notre Seigneur 6c Père, ont laifîe 6c ordonné en leurs Teftamens , que tous
les Droits, Impofitions 6c Tributs apartenant à la Couronne Roïale 6c aux
Patrimoines de nos Roiaumes 6c Seigneuries, foient perçus par tous les
Grands Se Chevaliers de ces Roiaumes, nous le voulons 6c réglons auffi en la
même manière.
LU. Or comme les grandes occupations qui nous font fûrvenuës en tems
de Paix, 6c de Guerre, 6c quelques autres Affaires importantes, durant le
cours de notre Régne nous ont empêché de remédier a plufieurs abus, 6c
principalement à celui des impofitions des Droits que les Grands ont coutu-
me de lever : pour obvier à ce que les Grands 6c autres perfonnes ne veuillent
les continuer comme en aiant un Droit irrévocable, par notre tolérance 6c
diffimulation ; nous voulons leur déclarer que nous ou nos SuccefTeurs fommes
en droit 6c pleine PuifTance d'en changer l'uiage, comme effectivement nous le
changerons quand il nous plaira. Pour cet effet, de notre propre mouve»
Aa 2, ment,
2o8 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
itco. crient, certaine feience Se pouvoir Roïal abfolu, duquel nous voulons nous
~~ fervir Se nous fervons en cette occafion comme Roi Se fouverain
Seigneur, ne reconnoiflant dans le temporel aucun Supérieur en la Terre j
nous révoquons, caflbns, annulions, & déclarons pour néiuit, & d'aucune
valeur, ladite tolérance,- diflïmulation, & licence, que nous aurons fait paroî-
tre ou foufferte & accordée & que nous pourrons accorder de Paroles , & par
écrit, pofleflîon & jouïfîance d'un long Se très long tems, quand il ferait de
cent ans, & tel que pourrait être de mémoire d'homme, afin qu'il ne leur
puiflê pas être d'aucune utilité, & que le droit de la Couronne relie toujours
en ion entier; & que nous Se les Rois nos Succeflëurs auxdits Roïaumes puif-
fîons r'incorporer à la Couronne, & à notre Patrimoine Roïal, leldites Im-
portions, Tributs, & Droits, de quelque manière qu'i}s leur apartiennent,
comme étant chofes annexées à ladite Couronne, dont jamais elles n'ont pu,
ne peuvent, ni ne pourront être féparées , en vertu. d'aucune tolérance, per-
miflion, diflïmulation, ou jouïffànce immémoriale, ni par une licence expref-
fe ou Coftceflïon , qu'on pourrait avoir de nous Se des Rois nos Prédécef-
feurs, en vertu de ce que la Reine Isabelle, le Seigneur Empereur mon
Trifaïeul, Se les autres Seigneurs Rois leurs Succeflëurs jufques au Roi notre
Seigneur Se Père, ont laiflé réglé.
LUI. Nous déclarons que nous avons toujours eu foin d'empêcher que les
Gaiennes 5c Forêts que nous avons en plulïeurs endroits de nos Roiaumes ,
ne caufaflènt aucun dommage à nos Sujets Se Vaflaux en leurs biens Se héri-
tages. Cependant, lï au tems de notre décès on n'a point donné de latisfac-
tion aux Villages qui en ont reçu dommage par notre chafle, nous ordon-
nons que notre Grand Veneur examine les pertes de nos Sujets, Se que félon
Je raport qu'il en fera on les fatisfafle incontinent fans aucune autre vérifica-
i tion ni diligence.
CD
LIV. Pareillement nous déclarons que pour les augmentations des Bâti-
mens que nous avons ordonné de faire au Buen-Retiro , Palacio^ Se autres
Maifons de Campagne, qui ne font fous la Direction de l'Aflèmblée > defdits
Bâtimens, Se Forêts, nous en avons aflïgné le coût fur les deniers provenant
de nos Roïales dépenfes fecrétes, l'aïant fait diitribucr par les mains dejoleph
del Olmo , Intendant des Bâtimens Roïaux ; Se parce que peut-être ces Bâ-
timens feront continuez par la même main, ou par celle de l'Intendant qui
lui fuccédera, nous ordonnons, Se c'ell notre volonté, qu'on le fitisfafle, fé-
lon qu'il aparoîtra lui être dû pour les Bâtimens fui'dits, conformément au
raport qu'il en produira, fait avec ferment, aïant été fait pour un plus grand
Ornement Se commoditez defdites Maifons Roïales : Se comme il fe peut que
Don Philippe de Torres notre Secrétaire de la Chambre en charge , Se l'on
SuccefTeur, auront fourni quelques fommes fur l'argent qu'ils reçoivent del
Bollïllo Se autres revenus, nous ordonnons, qu'on s'en raporte a ce qu'ils
en diront, à caufe de la confiance Se expérience que nous avons de ces Do-
mefliques.
LV. Nous ordonnons que toutes nos dettes ibient païées au plutôt par les
foins de tous les Exécuteurs de notre Teflament nommez en l'Aflèmblée
qu'on doit tenir pour cela avec le Secrétaire des décharges , en pourvoïant
cou-
ET RESOLUTIONS D'E T A T. 109
convenablement à ce qui preffera le plus , 6c fur-tout pour ce qui regarde la 1700.
décharge de notre confcience. -'
LVL Et parce que dans les Teftamens des Seigneurs Rois nos Prédécef-
feurs, il y a plufieurs claufes qu'on a répétées jufques au Roi nôtre Seigneur
Se Père, pour ce qui regarde la décharge de leurs confeiences, qui par le
malheur des tems n'ont pu être exécutées ; 6e que pour cet effet des le tems
dudit Seigneur Empereur, on a afligné plufieurs Rentes de la Couronne qui
font en la difpofition de l'Aflemblée des décharges , nous ordonnons qu'elles
s'adminiftrent en la même forme 6c manière, y ajoutant .celles que le Roi
nôtre Seigneur & Père y deftina, afin que de leur produit on fatisfafle aux
dettes, fans diminution du capital, affigné à l'exécution du Teftament, Se fans
qu'il s'en faffe aucun décompte ,' mais qu'elles demeurent toujours entières
étant païées fort ponctuellement y allant de l'intérêt de nos Succeflcurs, afin
qu'on obferve la même chofe à leur égard.
LVII. Et en ce qui refte de tous nos Biens, Droits, Se Actions "de quelque
manière qu'ils nous apartiennent de nôtre Teftament, étant païez entière-
ment, félon fa forme Se teneur ; nous laiflbns Se nommons pour nôtre Héritier
ledit Succeffeur de nos Roïaumes, afin qu'il en. jou'iïïè avec la Bénédiction de
Dieu , Se en vertu de cette déclaration de nôtre volonté.
LVIII. Pour la prompte exécution de ce préfent nôtre Teftament, Se
dernière Volonté, nous nommons pour Exécuteurs, univerfellement en tous
nos Roïaumes, Etats, Se Seigneuries, dedans Se dehors l'Efpagne, la Reine
nôtre très-chere Se bien-aimée Epoufe ; nôtre Echanfon , Se à lbn défaut le
plus ancien Gentilhomme de chambre jufques à ce qu'il y en ait} nôtre pre-
mier Majordome, Se à fon défaut le plus ancien Majordome jufques à ce
qu'il y en ait; nôtre premier Ecuier, ou celui qui exercera fa Charge^ notre
premier Aumônier; nôtre Confeffeur, Se celui qui lui fuccédera en Cet Em-
ploi ; celui qui fera Préfident ou Gouverneur du Confeil de Caftille , Se n'y
en aïant pas, celui qui fera le plus ancien, jufques à ce qu'il y en ait; celui. qui
fera Vice-Chancelier d'Arragon , Se n'y en aïant pas, celui qui fera le plus an-
cien, jufques à ce qu'il y en ait; celui qui fera Inquifiteur Général, Se n'y
en aïant pas, celui qui fera le plus ancien du Confeil de rinquifition,jufqu'a ce
qu'il y en ait; le Préfident des Indes, Se à (on défaut le plus ancien, iuf-
ques à ce qu'il y en ait; celui qui fera Prieur de St. Laurent le Roïal: Se
nous voulons , Se ordonnons, que nofdits Exécuteurs de ce Teftament , fè faf-
fent inftruhe, & qu'ils puifîènt euvoïer ceux du Gouvernement dans tous les
endroits de nos Roïaumes Se Seigneuries, dedans 6e dehors l'Efpagne y Se au-
tres Miniftres 6e perfonhes qui y réfident, félon qu'ils le jugeront à propos,
pour l'exécution 6e entier accompliffement de ce nôtre Teftament.
LIX. C'eft nôtre volonté, 6e nous ordonnons, que cette nôtre écriture ,..
Se tout ce qui y eft contenu, foit tenu pour nôtre Teitament, 6e dernière
Volonté, en la meilleure forme Se manière qu'il puifiè valoir, Se être plus
utile 6c plus favorable: 6c fi ce préfent nôtre Teftament avoit quelque dé-
faut, ou omillïon, ou qu'il manquât de formalité , ou folemnité requilè tant
grande qu'elle puiffe être, ou qu'il y eut quelques autres défauts, Nous, de
nôtre propre mouvement , certaine feience , 6e pouvoir Roïal abfolu , duquel
Aa j nous,
no MEMOIRES, NEGOTÏATIONS, TRAITEZ,
■I7ÇQ- nous voulons ufer en cette occafîon, 6c duquel nous ufons, nous y fupléons
*~ & voulons, Se c'eft nôtre volonté, qu'il y foit fupléé, 8c ôtons 6c levons tout
obftacle & empêchement à l'exécution de nôtre fufdit Teftament , ainfi de
fait, comme de droit j 6c voulons, déclarons, èc ordonnons, que tout ce
qui y eft contenu , s'obferve, s'exécute 6c accompliiïe, fans avoir égard à
aucune Loi quelle qu'elle foit , Conftitutions , Proclamations, 6c Décrets
communs, 6c particuliers, defdits Roiaumes, Etats, èc Seigneuries, qui y
foient contraires ou qui le puifTent êtrej 6c nous voulons 6c ordonnons que
chaque article ou partie de ce qui eft contenu 6c déclaré en ce nôtre Tefta-
ment , foit regardé 6c tenu pour Loi 6c qu'il ait force 6c vigueur de Loi , fai-
te 6c proclamée aux Aflemblées générales avec meure délibération , 6c qu'au-
cun Privilège, ni Droit, ni aucune autre Difpofition, lui préjudiciej parce
que nôtre volonté eft que cette Loi que nous faifons ici déroge, 6c abroge,
comme étant dernière, toutes fortes de Privilèges, Loix, 6c Décrets, Cou-
tumes, Manières, 6c autres Difpofitions , de quelque nature que ce foit, qui
pourroient y contredire : 6c par ce nôtre Teftament nous révoquons, 6c dé-
clarons pour non avenu, 6c d'aucune valeur, ni effet, tout autre Teftament,
Codicile, ou Codiciles, ou quelqu' autre dernière Volonté qu'avant ce Tefta-
ment nous aïons foit, 6c oétroïé, avec quelques fortes de claufes dérogatoires,
en quelque forme 6c manière que ce foit , lefquels 6c chacun d'eux qu'on pro-
duife, voulons 6c déclarons qu'on n'y ajoute point de foi en Jufticè, ni autre
part : fauf celui-ci que nous faifons à cette heure , 6c déclarons que c'eft nô-
tre dernière Volonté, en laquelle nous voulons mourir, 6c eft écrit en cin-
quante 6c deux feuilles, toutes en papier de lettres ou paquets entiers de cette
écriture, 6c des papiers communs, 6c trois 6c demi en blanc. En foi de-
quoi , Nous le Roi Don Charles le reconnoifïbns 6c le fignons en la Ville
de Madrid , ce deuxième Octobre 1 700.
Ainfi figné.,
YO EL REY.
Copie T^TOus Charles., par la Grâce de Dieu, Roi de Caftille , de Léon,
du Co- .L\ d'Arragon, Comte de Flandres., 6cc. Difons, que nous trouvant en la
diCnCA U maladie qu'il a plû à nôtre Seigneur de nous envoïer : mais pourtant avec no-
nce tre entendement ordinaire avons o&roïé, 6c fait un Teftament fcellé , daté
du z. d'Oérobre de l'an 1700, par devant Don Antoine de Ubilla 6c Médina,
Chevalier de l'Ordre de St. Jaques, de nôtre Confeil d'Etat, de la Négocia-
tion d'Italie 6c des Dépêches univerfelles , Notaire Public , en tous nos
Roïaumes, 6c Seigneuries, &C les témoins qui y font nommez.
I. Et parce qu'en une des claufes qui y font contenues, nous déclarons 6c
quelqu
Roïaume, elle voulut s'apliquer à le gouverner, nôtre SuccefTeur en pourra
difpofer en fa faveur, lui donnant des Miniftres expérimentez 6c pourvus de
toutes les qualitez néceflairesj 6c fi elle vouloit vivre en quelqu'une des Vil-
les
ET RESOLUTIONS D'ETAT. iti
lès de ces Roïaumes, on lui en donnera le Gouvernement, 6c de tout fon 1700.
territoire avec la lurifdiftion : 8c à préfent pour une plus grande extention de
ladite chute, 6c "pour la ïàtisfaétion de la Reine, nous voulons que fi elle
trouvoit lui convenir plus, à caufe de fon rang, de fe retirer dans les Etats
que nous avons en Flandres, pour y vivre, 8c qu'elle voulut fe dédier à les
gouverner, il lui en fera donné le Commandement 8c le Gouvernement par
notre SuccefTeur, en la même forme & manière qu'on auroit fait pour quel-
qu'un des Roïaumes d'Italie qu'elle auroit élu, en vertu de la claufe du Tcf-
tament, lui donnant des Miniftres qui feroient les plus propres pour cela.
II. Nous ordonnons, que l'édifice que nous avons commence (en vûë d'u-
ne plus grande vénération au Saint Sacrement) en la Chapelle du Palais
Roïal , que nous avons en cette Ville de Madrid , & dont on paie fur mon -
^ compte la dépenfe & celle de fes ornemens , s'achève par notre SuccefTeur juf-
ques à le mettre en bonne forme, fuivant en tout les Plans 8c Accords qu'on
a faits, 6c qu'on l'avance le plus promptement qu'il fera poflîble, en forte
qu'on y puiflè pofer au plutôt le Saint Sacrement avec la folemnité requife.^
III. Nous ordonnons 6c donnons aux Convents Roïaux des déchauffées
Francifcanes ; à celui de l'Incarnation ; aux Auguftines Recolettes ; à celui
de Sainte Terefe, 6c à celui de Sainte Anne j aux Carmélites Déchauflees,
une pièce de meuble à chacun pour fon ornement, ainfi que la Reine notre
très-chere 6c bien-aimée Epoufe, le choifira, 6c nous la prions 6c exhortons
dé l'accomplir ainfi.
IV. Item nous voulons, 6c c'eft notre volonté, que le Convent des Reli-
gieufes Carmélites Déchauflees , du titre Saint Jofeph, de la Ville d'Avila,
s'incorpore £c s'agrège au Patronat Roïal, aiant ordonné pour cela la fomme
ou fommes qui feront néceflaires : devant être réglé le tout par la Chambre
de Cailille félon la forme accoutumée.
V. Nous ordonnons 6c commandons, que quand on paiera les dettes que
nous laiflerons , on paie aufli tout ce qui fera du jufques au :,our de notre dé-
cès, dont on prefentera un état fuivant l'ordre de la Reine notre très-chere
6c bien-aimée Epoufe.
VI. Aiant fouhaité toute ma vie que la glorieufc Sainte Terefe de Jefus ,
ait le Compatronat de nos Roïaumes d'Efpagnc pour la fpéciale dévotion que
nous lui portons, .nous recommandons à notre SuccefTeur 8c à nos Roïaumes
qu'ils difpofent la chofe comme en devant attendre de très-importans bénéfi-
ces par l'interceffion de cette Sainte.
VII. Et afin que ces précautions ne foient pas inutiles, nous faifons ce Co-
dicile, que nous voulons, qu'il vaille comme fi tout fon contenu étoit inféré
dans notre dit Teftament fcellé, que Nous laiflbns en toute fa force 8c vi-
gueur, en ce qui ne fera contraire à ce que nous ordonnons ici, 8c nous or-
donnons 8c voulons qu'il aille, 8c que quand on l'ouvrira, avec la folemnité
du Droit, on hiTe le même de ce Codicile, 8c qu'on le joigne avec lui, afin
qu'il en ait la même valeur 8c force ; Se il eft écrit en quatre feuilles avec
celle-ci. Et pour Pautorifer 8c reconnoître fcellé, nous l'avons figné en la
Ville de Madrid le cinquième jour d'Octobre de mil 8c fept cens.
Ainfi ligné'. Y.O EL R.EY.
CQ-
1700.
zii MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
' CO P IE du Mémoire mentionné dam le Teftament.
NO us nommons Don Rodrigue Manuel Man triques de Lara, Comte de
Frigiliane, Gentilhomme de notre Chambre, de notre Confèil d'Etat,
afin que comme en étant Minirtre, il entre en l'Affemblée que nous avons
affignée par notre Teftament, pour le gouvernement de nos Roïaumes, dans
l'intérim jufques à ce que notre Succeffeur en piaffe prendre pofieflîon ; & fe
devant trouver en l'Afiemblée un Grand aulli pour reprefenter la NobleiFe,
nous nommons Don Francifco Cafimiro Pimentel, Comte de Benavent, no-
tre Echanfon : 8c , afin qu'il foit exécuté ainfi , nous l'avons figné à Madrid
le z. Octobre 1700. Ainfi figné,
YO EL REY.
L'on fut furpris de ce Teftament. Cependant, Ton s'attendoit toujours
que le Roi Très-Chrêtien obferveroit religieufement le Traité de Partage.
C'eft d'autant plus que le Comte de Briord l'avoit plusieurs fois affiiré. Il
avoit même , par ordre, demandé un fecours de Troupes & de VaifTeaux
pour aider à la France à fe mettre en pofTeffion de ce que le Traité de Parta-
ge lui dellinoit. On lui avoit répondu que pour les Troupes elles étoient
prêtes , & qu'on accordoit douze Vaifîèaux , qu'on ordonnoit aux Collèges
de l'Amirauté de préparer. On en avoit promis quinze de la part de l'Angle-
terre i mais comme au commencement d'Octobre le Roi Catholique avoit
paru fe rétablir, on avoit ordonné de travailler lentement à l'armement de ces
Navires. Les nouvelles de ce rétabliffement furent caufe que le Comte de
Sinzendorf) Envoie Extraordinaire de l'Empereur à la Cour de France, qui
avoit fait demander une Audience au Roi de France, en vûë de déclarer l'ac-
ceptation du Partage , fut trouver le Marquis de Torci. C'étoit pour le prier
de dire au Roi, qu'il ne vouloir pas lui donner le trouble de la lui donner,
puifque fa Commifiion n'avoit point de lieu. Ce répit ne dura cependant pas
long-tems. C'eft que dès le 1 1 . de Novembre l'on fe prépara à aprendre la
mort du Roi Catholique. C'étoit par un Exprès que le Comte de Briord re-
çût ce jour-là -à midi avec la nouvelle de la rechute de ce Monarque. Ce
Comte alla d'abord faire part de ce trifte avis à Don Bemardo de Quiros. Ce-
lui-ci, quoi que pénétré de douleur, n'oublia pas fes intérêts. Il fit quelques
ouvertures indirectes au Comte pour être indemnité de tout ce qui lui étoit
dû par la Cour de Madrid, alléguant que fans cela il étoit ruine. Le Comte
lui fit efpérer, qu'il pourrait bien le faire récompenfêr par Ton Maître, fi le
cas écheoit. Ledit Comte alla enfui te vers le Confeiller-Penfionnaire, pour
lui faire la même communication. Sa vifite dura bien une heure, Se ne rou-
la que fur des proteftations de lincérité du Roi Ion Maître pour l'exacte ob-
fervation du Traité de Partage. Il infifta même de nouveau fur l'Armement
Naval, afin qu'on le prcfîat. On ne tarda cependant pas à s'aperce» oir, que
toutes ces pompeufes ck: réitérées afïiirances n'étqient qu'un fbporifique palia-
tif. Car le Jeudi iS. Novembre arrivèrent deux Exprès, L/uiv étoit de h
Cour
ET RESOLUTIONS D'ETAT. 213
Cour Impériale au Comte de Go'és, & l'autre de celle de France au Comte I7°5-
de Briord, qui arriva à onze heures. Le premier alla à quatre heures après
midi chez le Confeiller-Penfionnaire , pour lui déclarer que Sa Majefté Impé-
riale ne donnerait jamais les mains à aucun Traité pour partager la Monarchie
d'Elpagne. Cette démarche parut d'abord fort réfoluë, d'autant plus que
l'on ne croïoit pas la Cour Impériale en état de pouvoir pouffer avec fuccès
•ies prétentions. Le Comte de Briord , qui en avoit été averti, fè rendit auiTi
chez ledit Confeiller-Penfionnaire après fix heures du loir. En vertu des or-
dres qu'il avoit reçu par fon Exprès , il lui déclara , que le Roi ion Maître ,
aïant pris en coniîdération les Affaires préfentes, voïant que l'Empereur n'a-
voit point accepté le Traité de Partage, &c que peu de Princes, fur- tout les
Couronnes du Nord n'y étoient point entrées, & voïant d'ailleurs la peine
que faifoit au Roi d'Angleterre la Sicile entre les mains des François, que
pour d'autres importantes raifbns, & attendu la difpolîtion univerfèlle des Ef-
-pagnols, & même leur empreflement pour avoir le Duc d'Anjou pour Roi,
il avoit, après une -mûre coniîdération de deux jours, réfolu d'aquiefcer à la-
demande des Efpagnols , & de leur accorder le Duc d'Anjou. Il ajouta , que
Sa Majefté Très-Chrétienne favoit bien que par-là Elle perdoit beaucoup; mais,
qu'elle aimoit mieux renoncer aux avantages, que le Traité de Partage pro-
curait à fa Couronne, que de donner lieu a une Guerre qui troublerait le re-
pos de toute l'Europe} qu'il efpéroit que la réfolution du Roi fon Maître fe-
rait aprouvée, lî l'on vouloit mûrement confidérer l'avantage qui peut en
réfulter pour la tranquillité publique. Le Confeiller-Penfionnaire, quoi qu'é-
tourdi du coup , fit au Comte de Briord de fortes, mais inutiles repréfenta»
tions. Ce qui donna lieu au Comte de Briord de parler de la peine, que fai-
foit au Roi d'Angleterre, la Sicile entre les mains des François, fut que ce
Roi, avant que d'aller s'embarquer pour repaffer en Angleterre, avoit fait à
ce Comte une Propofition. Elle confiftoit à donner la Sicile à l'Electeur de
■Bavière. C'étoit, ajouta- t-il-, afin que le Parlement Britannique ne prit trop
d'ombrage, fi la France avoit ce Roïaume-là, à caufe du Commerce du Le-
vant, qui pouvoit par-là recevoir quelque interruption.
Le lendemain de cette notification, les Etats Généraux s'étant afïêmb lez
plus matin qu'à l'ordinaire, délibérèrent là-deffus. Ce fut cependant fans en
venir à aucune réfolution , parce qu'ij/fàlloit attendre de favoir là-deffus les in-
tentions du Roi de la Grande-Bretagne. Sur le loir les principaux de l'Etat
tinrent une efpéce de Confeil Secret. On y examina quelle utilité ou quel
dommage pouvoit réfulter à l'Etat, le Duc d'Anjou étant mis fur le Trône
de la Monarchie Univerfèlle d'Elpagne. Quelques-uns furent d'abord d'avis
que cela n'étoit aucunement préjudiciable à la République. C'étoit parce
que par-là la Monarchie Efpagnole venoit à relier fur le même pied qu'elle
avoit précédemment été, aïant un Roi particulier qui la faifoit continuer,
fans qu'il y eût rien qui fut annexé à la Couronne de France. D'autres , pe-
lant plus avant la matière-, repréfentérent les mauvaifes fuites, que ce chan-
gement pouvoit entraîner. On y dit, que peut-être la première chofè que, le
nouveau Roi ferait, ferait d'exiger que les Etats Généraux retiraffent leurs .
Troupes des Pais-Bas Efpagnols, où peut-être la France y fubftitucroit d(?s
Ism, I. Bb fiennes.
*ftf MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
1700. fiennes. Par-là, la fameufe Se facréc Barrière, qui fubfiftoit, pour ainfi direy
" depuis le Roi Henri IV, & qui faifoit la fureté de la République, vien-
drait à être renverfée. Qu'il y avoit à craindre qu'en vûë d'affbiblir l'Etat,,
on rétablirait le Commerce à Anvers, (bit par le Canal qui avoit été récem-
ment propofé-, foit par le paflage de la Zélande, & par l'Efcaut, qui n'étoit
bouché que par les Traitez. Qu'on étoit informé que ce jour-là même le
Comte de Briord aïant été faire une vifite à Don Bernardo de Quirosr ces
Miniftres s'étoient embraflèz à fix reprifes pour fe féliciter fur l'acceptation
du Teftament, Se le dernier avoit dit, qu'on pouvoit rétablir le Commerce
d'Anvers par les anciennes voies de Mer , fans faire brèche aux Traitez , qui
y paroifToient opolêz. Qu'il pourrait arriver y que ni l'Angleterre, ni la Ré-
publique, ne pourraient rien tirer de l'argent qui venoit des Indes Occidentales
Efpagnoles, car la France ferait en forte d'en attirer la plus grande partie
dans ion Pais. Que ce n'étoit pas dès lors qu'on favoit la mauvaife volonté
de la France contre l'Etat, qu'elle regardoit comme celui qui avoit le plus
traverfé fon agrandiflément ; & qu'il pourrait arriver que le Roi de France
porterait fon Petit-Fils à faire revivre fes prétentions fur l'Etat , qu'il apuïe-
roit de fes Forces. Que quoi que la France en agit en cette conjoncture ci-
vilement, nourrillant toujours fon indignation contre l'Etat, elle en coniér-
voit toujours la mémoire, quoi qu'elle fuprimât l'eflbr de prétendues offenfes.
Que le nouveau Roi d'Efpagnc, étant une Branche des Bourbons, ferait tou-
jours attaché aux intérêts de celle de France, ainfi que les deux Branches
& Autriche avoient toujours fait. Qu'il étoit vrai qu'il y avoit des Traitez,
mais qu'ils n'étoient inviolables qu'autant que la Force les rendoit tels. Que
dans la fuite on pourrait même attenter de traveifer le Commerce des Indes
Orientales, qui étoit un des principaux foûtiens de la Nation, fans compter
celui du Levant, qui n'en étoit pas un des moins confidérablcs. Que les Ma-
nufactures de laine de la République pourraient tomber par l'empêchement
qu'on pourrait aporter de tirer les laines d'Efpagne, la France les faifant peut-
être enlever toutes pour faire valoir les fiennes. Cela ferait deferter du Païs
un nombre très-confidérable d'Ouvriers & autres Gens, qui étant réduits à
la mendicité,, fe tranfporteroicnt ailleurs pour trouver de quoi vivre. Ces
raifons avec d'autres déduites par des gens fages & clair- voians firent tomber
d'accord, qu'il y avoit du danger à concourir à l'exécution du Teftament en
faveur du Duc d'Anjou. On 'mit après fur le tapis, ce qu'on pouvoit faire
pour l'empêcher, puis que la chofe étoit apuiée par un Teftament, 6c par
l'inclination univerlèlle des Efpagnols, & que d'ailleurs la France fe trouvoit
armée & puifiante. A l'égard d'il Teftament, on allégua que le Traité de
Partage, qu'on avoit fait, le rendoit de nulle valeur ; d'autant que le Trai-
té étoit fait en cette vûë: puifque fupofant que le Roi Catholique pouvoit
laiflèr pour Héritier un des Fils de France, l'Archiduc, ou à tout compter
quelque autre Prince, on y étoit convenu, que pour l'empêcher, on ferait
un tel Partage, Ti Sa Ma]efté Catholique mourait fins Entans. Que pour
l'inclination des Efpagnols pour le Duc d'Anjou, elle n'étoit pas fi univerfel-
h-, qu'il n'y en eût beaucoup parmi les Grands Se le Peuple, qui fufi'ent pour
la Mailbn d'Autriche. Qu'il étoit à préfumer que ce n'étoit qu'un Parti
formé-
ET RESOLUTIONS D'E T A T. iif
formé de longue main, oui avoit profité de la délicateffe d'une confcience I700-
-farcie d'ignorance 6c de dévotion du Roi défiant, pour le porter à faire un tel
Teftament. Qu'il y avoit beaucoup de Grands exilez , & que la Maifon
& Autriche avoit en Efpagne fes Partifans, auffi-bien que celle de Bourbon,
quoique celle-ci eût prévalu par une intrigue, qui feroit peut- être déteftée
par le refle de la Nation. Qu'à l'égard de la Puiffance de la France, elle ne
paroiflbit plus fi redoutable , parce que la Guerre pafiee l'avoit affoiblie
d'hommes, d'argent, 6c de Commerce, 6c que fes Troupes n'étoient plus fi
nombreufes. Que l'Empereur n'avoit plus de Guerre avec les Turcs, & que
fi le Duc d'Anjou étoit envoie en Efpagne, & qu'on en vint à une rupture
pour s'y opofer, les Efpagnols n'aïant ni Troupes, ni d'hommes aflez pour
en faire, 6c l'Efpagne étant prefque toute environnée de Côtes Maritimes, il
falloit que la France y envoïât des Troupes pour les garder. Cela diviferoit
extrêmement fes Forces, 6c ce ferait juftement le moïen de l'affoiblir, pour
l'obliger enfin à entendre raifon. Que le même danger , qui menaçoit la Ré-
publique, regardoit auffi par d'autres raifons l'Angleterre, l'Allemagne, & l'I-
talie. Par-là, il y avoit à efpérer, que tout le refte de l'Europe aïant prefqu'un
même intérêt , concourreroit à un même defîêin. On propofa eniuite quel
moïen pouvoit être le plus efficace 6c le plus prompt, pour remédier à ce
danger imminent? Un de la Compagnie dit hautement, que c'étoit de faire
la Guerre. Que l'établiiTement du Duc d'Anjou en Efpagne feroit la caufê-
de la perte de la République, 6c peut-être même du refte de l'Europe, &
que périr pour périr, il valoit mieux le faire en braves gens, à l'exemple des
Ancêtres, ôc tenter fi par le fort des Armes l'on ne pouvoit pas fe fauver du
Naufrage. Qu'il étoit même néceflàire de l'entreprendre d'abord, fur- tout
pendant que la plaïe étoit récente, 6c faignante, que d'attendre que les efprits
fufient refroidis, 6c'que la France eût du relâche. /TD'autres y opoférent, que
la République fe fentoit encore des malheurs des deux précédentes Guerres.
-Que fes Finances étoient prefque à fèc , 6c qu'on étoit encore dans quelque
accablement de dettes. On repondit à cela, que les Sujets feraient fi indi-
gnez de la brèche que la France faifoit au Traité de Partage , qu'ils témoi-
gneraient une ardente difpofition à fe faigner pour en tirer raifon. On y opo-
ià auffi, que les Anglois, d'un efprit inconftant 6c remuant, ne voudraient ja-
mais entrer dans une nouvelle Guerre. Que leurs dettes de la Guerre précé-
dente n'étoient pas encore éteintes, 6c qu'ils regarderaient celle qu'on propo-
foit comme non néceflàire pour eux. C'étoit dans l'entêtement où ils étoient
qu'avec une Flote 6c leurs Milices, ils pouvoient fe défendre feuls, s'ils ve-
noient à être attaquez. On répondit à cela, que parmi les remuans il ne
laiffoit pas que d'y avoir de braves gens 6c de bonnes têtes, qui compren-
draient que le danger les regardoit auffi-bien que les autres Nations. Que
s'ils fe tenoient les bras croifez, regardant tranquillement les événemens, ils
pourraient à la fin fe trouver eux-mêmes hors de reflburce, 6c en danger d'ê-
tre furpris par une invafîon, qui pourrait entraîner la perte de leurs Biens,
*de leurs Vies, de leur Religion, 6c de leurs Libertez 6c Privilèges, qui leur
étoient fi chei s , 6c pour la conservation deiquelles la Nation avoit fait tant
d'efforts. Qu'il étoit vrai qu'il y avoit de la jalouûe entre les deux Nations,
Bb i fur-
ziô MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
ï'"700, fur-tout à caufe du Commerce; mais, qu'on pouvoit trouver quelque tempé-
rament pour la diltîper, &c que le plus expédient étoit de faire une Ligue or-
fenlîve Se défenfive avec l'Angleterre. C'étoit en laiflant une porte ouverte,
pour y laifTcr entrer toute autre Puiffance. Qu'il ne falloit point douter que
l'Empereur n'y entrât d'abord, auffî-bien que les Electeurs de Brandebourg
& de Hanover, Se la plupart des autres Princes d'Allemagne. Qu'il hdloit
faire tous les efforts polfibles pour éteindre le, feu allumé dans le Nord, £c
engager ces Couronnes-là à participer à la gloire de fe fauver elles-mêmes ,
en fauvant le relie de l'Europe du Naufrage. Tel fut à peu près la fubltanee
de cette Conférence, qu'on fût par un des Membres, qui en étoit. On ne
refolut cependant rien jufques à ce que l'on eût reçu le lendemain Samedi des
Lettres d'Angleterre. Elles portoient, que le Lundi précédent le Roi de la
Grande-Bretagne avoit reçu un Exprès de France à deux heures après midi.
Ce Monarque manda d'abord le Comte de Portland, comme celui qui avoit
■v eu le plus de part dans le Traité de Partage. Ils furent enfermez fort long-
tems avec le Courier. C'étoit fur le même fujet du Teftament accepté par
la France. Perfonne autre ne fût ce jour - là le fujet de la venue de l'Ex-
près, ni la Réfolution qu'on avoit priiè là-deflûs ; car le Roi parut le foir au
Bal qu'on faifoit, à caufe du jour de fa Naiifance , d'une grande tranquillité
apparente, foûtenuè' par fâ froideur, & taciturnité naturelle. Dès que les
Etats Généraux eurent reçu ces Lettres, ils s'affemblérent à huit heures du
matin, & relièrent enfemble jufques à huit heures du foir. Après pluficurs
délibérations fur les chofes mêmes dites ci-deiTùs , ils réiblurent de dépêcher
un Courier à leur Atnba'îàdcur à la Cour de France, Mr. de Hecmskerck.
C'étoit avec ordre de reprclenter à la Cour, ainfi que le Roi d'Angleterre fai-
foit fûre de ion côté, que les Etats avoient fait le Traité de Partage,, avec
intention, qu'il fût religieusement obfervé de part ôc d'autre. Qu'ils apre-
noient avec furprife , que Sa Majefté Très-Chrêtiennc prenoit des réfolutions
qui y étoient directement opofées; & comme ils étoient dans la réfolution de
s'en tenir au Traité, ils clpéroient de Ton équité qu'Elle s'y «endroit auiïï,
& qu'Elle fongeroit mûrement à ce qu'ils lui fàifoient repréfenter. Il fut
d'ailleurs réfolu d'envoier le même foir huit Députez vers le Comte de Briord^
pour lui notifier cette Réfolution. Pendant cet envoi,, les Etats relièrent af-
iemhlez pour recevoir le raportdc leurCommiifton. Lors que les Députez s'en
aquitérent, le Comte s'étendit fur la modération du Roi fon Maître d'abandon-
ner les avantages qu'il avoit par le Traité de Partage.Que fon dit Maître aimoit
la République, éc que le Duc d'Anjou étant fur le Trône d'Efpagne auroit
les mêmes intérêts que les autres Rois les Prédécelfcurs avoient eu de la main-
tenir d'ans l'état où elle étoir. Que c'étoit l'intérêt de la France de la voir
de même, ce qu'on ne devoit prendre aucun ombrage de la réfolution de l'ac-
ceptation du Teftament ; puilque. Il elle étoit mûrement conlldérée, l'on
trouveroit qu'elle étoit même plus avantagculè à la République que le Pajfta»
gc, puis que celui-ci agrandiffoit la Couronne de France par deux Roïaumes
& par deux Provinces , 6c que la Barrière reltoit toujours &zc. Les Dépu-
tez ne voulurent point entier en aucune difcullion, fe bornant à. leur limple
CommflHon.
E:>
ET RESOLUTIONS D'E T A T. 117
En ce tems-là, Don Bernarào de Quiros alla chez tous les Miniftres étran- 17°°-
sers difant d'avoir ordre de la Régence d'Efpagne de leur notifier à tous la "
mort du Roi Catholique, & le contenu du Teftament. Il ajouta, que toute
la Nation étoit fâchée de ce que la Monarchie fortoit de la Ligne Mafcuhne;
mais, que le fcul moien d'en empêcher le démembrement étoit de faire juftice
aux Princes de France ; que pour lui il auroit fouhaité que l'Archiduc eut pu
être Roi. 11 les pria tous en particulier d'en écrire à leurs Maîtres-, difant
que la Nation Efpagnole eipéroit qu'on trouveroit bon ce qu'elle avoit fait en
cette occafion.
Cependant, les Etats Généraux firent venir le Comte àt'Jthlonc, qui d'a-
bord ordonna à tous les Officiers , fur-tout ceux des Troupes qui étoienc
dans les Païs-Bas Efpagnols, de le rendre inceflamment à leurs Garnifons.
On réitéra même ces ordres quelques jours après. Le Général d'Opdam, qui
avoit été à la Cour de Berlin pour renouveller les Traitez, 8c qui en étoit.
fraîchement revenu , eut ordre d'y retourner. 11 avoit auflï celui de tâter en
parlant la Cour de Wolfembuttel, dont on avoit quelque foupçon. On dé-
pêcha d'ailleurs ordre à tous les Miniftres de la République dans les Cours du
Nord & d'Allemagne, de mettre fur le tapis de nouvelles Alliances. Par ra-
port à celle de Berlin, on en concevoit de bonnes opinions. Elle fit infinuer
par fon Miniftre à la Haie, qu'elle étoit prête d'entrer dans tous les engage-
mens de la République, 8c du Roi de la Grande-Bretagne. Tout cela étoit
en vûë de faire aprouver la Roïauté, dont il avoit entrepris de fe parer, dans
la Prufle Ducale. L'Eleéteur s'étoit afiuréque le Czar, les Rois de Danne-
marck & de Pologne, auflî-bien que quelques Princes d'Allemagne, le re-
connoîtroient en cette qualité. L'Angleterre 8c la Hollande y avoient quel-
que répugnance -, c'eft fur ce que cette nouvelle Dignité pouvoit rendre l'E-
leéleur une efpéce d'Amphibie, qui pouvoit dans la fuite fufeiter des embar-
ras par la diftinétion de Roi , & d'Eleéteur. Cependant, celui-ci s'étoit af-
finé auffi de Paprobation de l'Empereur par un Traité. Par icelui il cédoit à
Sa Majefté Impériale divers arrérages, & avoit promis de lui envoier à l'oc-
cafion un nombre de Troupes. On avoit pris en Hollande quelque ombrage
de ce Traité ; mais le futur Roi fit afjurer les Etats Généraux que ce n'étoit
qu'un renouvellement de celui de 1686, qu'il fit à leur follickation, & mê-
me qu'il n'avoit ordonné à fon Miniftre à Vienne de le figner, qu'après avoir
apris l'acceptation du Teftament de feu le Roi d'Efpagne. Il y avoit eu quel-
que accroche à cette Roïauté. C'étoit parce que la Cour Impériale preten-
doit de devoir donner pour cela un Diplôme, moiennant une grofle fomme,.
& d'obtenir une Chapelle publique pour les Catholiques Romains à Berlin.
Cependant, elle s'en relâcha, fur ce que cette Roïauté s'établifioit dans un
Païs, qui n'étoit pas du reflbrt de l'Empire, 8c que la Chapelle ne pouvoit-
avoir lieu dans une Capitale toute Réformée. Pour n'avoir pas d'autres opo-
litions, le plan fut que cet Electeur fe feroit proclamer par iès propres Sujets
à Coningsberg. Il prit même d'avance ce titre, le 24. de Novembre, en le
prochmant lui-même Roi en Prufie, en buvant à la profpérité de Frédéric.
Premier, qu'il porta au Grand Chambellan, tk. qui pafta à la ronde ; ce qui
pnioiflbit une Scène de Théâtre. Après cela3 on fit ;ous les préparatifs pour
jBb 5 ' a]kr
n8 MEMOIRES, NEGOTI ATIONS, TRAITEZ,
\Jc-o. aller fc faire couronner à Coningsberg. Les conjonctures de ce tems-là, qui
r " - étoient fort fcabreufes , influèrent fur l'Angleterre & fur la Hollande pour lç
reconnoître en cette qualité. D'autant que ce Prince fit aflurer en termes
exprès, qu'il entrerait de tout fou cœur & de tout fon pouvoir dans tous
leurs dcflèins. Il fit en même tems infinuer, qu'il étoit fort prefle par l'Em-
pereur Se par la France, d'entrer dans des engagemens. Pour mieux en con-
vaincre, touchant cette dernière, il fit communiquer par fon Miniftre au
Conlèiller-Penfionnaire la Copie de la Lettre que Sa Majeilé Très-Chrêtien-
ne lui avoit écrite à ce fujet, Se que voici.
Lettre. « "\/f^N Frere» l'intérêt que Vous prenez à ce qui me regarde, ne me
<|u £oi „ 1V-L laide pas lieu de douter, qu'en même tems que vous avez apris avec
ceàl'E-" m douleur la mort du Roi d'Efpagne, Vous ne foïez bien aife aufli de fça-
lefteur „ voir, que j'ai accepté la Difpofîtion que ce Prince a faite de fes Roïau-
de Bran- n mes, en faveur de mon Petit-Fils le Duc d'Anjou. Ainfi, joignant ce
debourg. ^ nouveau droit à ceux de fa naiflance", Se étant apellé par les vœux unani-
mes de tous les Peuples, je vous afliire que fon avènement à la Couronne
d'Efpagne fera le gage afluré du maintien de la tranquillité générale. Je
puis vous dire aufli, que connoiflànt comme il fait mes ientimens pour vous,
les fiens y feront conformes, Se vous devez croire que je ferai bien aife de
marquer dans les occafions l'eftime fie l'affection que j'ai pour vous. A
Verfailles, Je zi. Novembre 1700.
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Ledit Roi de France écrivit à prefque tous les Princes de l'Europe lûr le
même plan de la Lettre qu'on vient de raporter , Se dont on n'en fera pas
d'autre raport, puis qu'il y aurait de la fuperfluité.
Les François publièrent en ce tems-là , que le Roi de Dannemarck avoit
reconnu le Duc d'Anjou. On regarda cela comme une foupleflê pour en im-
pofer à d'autres Princes; puis que l'Envoie dudit Dannemarck aflura, que le
Miniilre de France aïant fait part au Roi fon Maître de ce changement , ce
Monarque lui avoit répondu qu'il prenoit intérêt à tout ce qui regardoit la
Famille du Roi de France; mais, que cette expreifion étoit trop vague, pour
vouloir la particularifer à une reconnoiflanec de la Roïauté du Duc d'Anjou,
Les Etats Généraux paflbient en attendant en bonne correfpondince avec
le Comte de Goës, Envoie de l'Empereur. Ils firent taire par fon canal à Sa
Majefté Impériale de fortes exhortations pour confentir à quelque Négocia-
tion d'Accommodement avec la France. On elpéroit d'autant plus d'en ve-
nir à bout, que le Comte de Sinzendorf^ qui étoit comme Miniltre à la Cour
de France, & qui s'en étoit abfenté pendant la reconnoiflanec qu'on y avoit
faite du Duc d'Anjou pour Roi d'Efpagne , avoit reçu ordre d'y retourner.
C'étoit cependant fans y demander la moindre Audience. Le Comte de Go'cs
■recevoit fouvent des Couriers de Vienne , dont on cachoit la venue autant
qu'on pouvoit. Le dernier, qui arriva le 1 1. de Décembre, porta à ce Com-
te des Lettres, qu'il alla d'abord communiquer au Conlèiller-Penfionnaire,
qui étoit l'ame des Affaires. Elles portoient le delfein qu'on avoit formé à la
•Cbur Impénale d envoicr des Troupes eu Italie. Il y avoit aufli la Copie de
k
ET RESOLUTIONS D'E T A T. zip
la Lettre que l'Empereur écrivoit aux Milanois , pour les retenir dans fon 1700.
ôbeùTance, ainfî qu'on va la raporter. •
LEQPOLDVS, fcfc.
Lettre
UNiverfs &? fmgulis nojlris 6? Sacri 'Imperii fidelibus dileclis ; Gubernato- de l'Em-
ri, Prxfidi, Sénat uï , Magijlratibus , Populo, Officiariis, Subditis, at- Ï^Mi-
que Incolis nofiri Sacrique Imperii Ducat 'us Medioianenfis,Comitatuum Papiœ, £s? lanois.
Angleria, nec non Marchionatus , £•? P or tus Zinarienfis, , uti & Caflri Franchi ,
" Cajlri, & Caftellaniœ Vallis Rhetiœ, Cajlri, Burgi , & Villarum Car cher arum
&? Buglii, medietatis Caflri, &? Villarum loci Cameiran<e,.Caftri , loci, & Vil-
larum Par oldi, Cajlri &? Villarum Meroaldi; Cajlri &? Burgi Maximini, partis
Pocha Linghii, Cajlri & Villarum River nalis, Cœnercii & Amafchii, Cajlri
&? Villarum Stellanelli , Cajlri & Burgi Salliceti, Calizani, Exilia, Burmi-
dee, oElavœ partis locorum,.& Caftrorum novelli Sinei , Montisforti , Montisve-
ri9 & Cajlilleti Vallis Turroria, ac fingulorum locorum, Cajlrorum, Villarum
& Terrarum eb pertinentium, ha/ce litteras vel earum exemplaria authentica leclu-
ris, aut legi audit mis, gratiam nojlram Cœfaream, & omne bonum. Adfollici-
tudimm nojlram Imper ialem cum primis pertinere agnofcimus , fedulo curare , ut
Sacri Romani Imperii jura intégra ferventur, atque illibata : Cum igitur famd
publicâ intellexerimus , faclum ejfe ex infcrutabili Divinœ Providentiœ Decreto ,
ut Serenïffimus quondam 13 Potentijjïmus Dominus C ARO LUS H.Hifpa-
niarum S Indiarum, Rex Catholicus, Frater, Confobririus,& A finis nojler Cha-
rijjimus glorioje memoriœ Dicm fupremum impralis clauferit; ac proinde fupra-
dicla Feuda , f ua à Sacro Romauo Imperio pojfedit atque eo nomine homagium
nobis , (3 Sacramentum fidelitatis dixit , ad nos velut direclum Dominum , Sa-
cmmque Romanum Imperium redire fas fit , hinc efi quod pro Cœjarei nojlri offi-
ciï mumri poffejfionem dicli Ducatus , cxterorumque Feudorum cum omnibus eo
appcrtimntibus locis nobis , (3 Sacro Romano Imperio cenfuerimus vindicandam j
Vobis itaquc omnibus &. Jïngulis- fer ib, & fab rebellionis pœnà cdicimus, injungi-
mus, 13 mandamus , ut clone c nos de prœfato Ducat u, aliifque Fendis, aliter dif.
pofuerimus, neminem alium prater nos Dominum agnofcatis, ncque ullins alterius,
qnam nnflris jujjionibus obediatis , fi quœ verb aliundè vobis eo nomine vis intente- •
tur , eam cnnni conatu , pro viribus reppcllatis , atque in omnibus vos prout fidèles
nojlros (3 Sacri Imperii Subditos, &? Vafallos decet, nobis, ut, direclo, natu-
rali , vcro , (3 légitima Domino Vejlro , diclifque nojlris , obfcquentes exhibeatis ,
quatenas nojlram &? Sàcri Imperii indignationem graviffimam & fupra commina-
tam rebellionis notam, & pœnam evitare voïueritis. Atque hac ejl feria mens,
ac voluntas r.ojlra , qui contra injujlam vim efficacem proteclionem nojlram vobis
promittimus.
Harum tejlimonio litterarum , quas manu nojlrà fubfcriptas, Sigilli noftri
Cafarii imprefjîone communi jujfimus. Dabantur in Urbe nojlrà Viennci zz. No--
"Jembris Anno Domini 1700.
L'on n'étoit pas au fond fâché, que dans la penfée de l'Empereur de ne
prêter l'oreille à aucun Accommodement } il prît quelque vigoureufe réfolu-
• ' tion.
zzo MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
1700. tion. Car il paroiiîbit qu?on pouvoit fe flater, que lors qu'il le feroit embar-
~~- — • que dans une Guerre, il trouveroit des amis. On recommanda fort au Com-
te de Goès de faire que l'Empereur travaillât à s'affurer pour lui le Danne-
marck. C'étoit dans î'afTurance dont on fe fiatoit que la Suéde feroit tout ce
que la République trouveroit à propos. On prit auffi le defTein de s'alTurer
fur- tout des Princes Proteftans. Le Landgrave de Heffe-CafTel, dont la Mai-
fon a toujours été attachée aux intérêts de la République, envoia aux Etats
Généraux le Lieutenant-Colonel de les Gardes pour négocier avec eux. Cet
Officier alîura , que fon Maître n'auroit pas de peine de fe défiiter de l'opofi-
tion au neuvième Elcétorat. C'étoit d'autant plus que la Cour de Berlin lui
avoit dépêché un Exprès fur le même fujet avec aparence d'une bonne in-
fluence.
Les ordres, que les Etats Généraux avoient envoiez à leur Ambafladeur en
France, furent exécutez le if . de Novembre. Ce fut par le Mémoire qu'il
y prélènta de la teneur fuivante.
Mémoi-
re de
Mr. de
Heems-
kerk au
Roi de
France,
par ra-
port au
Traité
de Par-
tage &
au Tef-
tament
de Char-
les II.
LE fouffigné Ambaffadeur Extraordinaire des Etats Généraux des Provin-
ces-Unies des Pais-Bas , vient de recevoir des ordres des Seigneurs fes Maî-
tres, de reprefenter très* humblement à Sa Majerlé Très-Chrêtienne, que L.
H. P. ne le font pas attendues à la réfolution qu'il a plû à Sa Majefté de leur
faire notifier par fon Ambaffadeur Mr. le Comte de Briord, au fujet du Tef-
tament du feu Roi d'Efpagne en faveur de Monfeigneur le Duc d'Anjou,
puis qu'elle eft contraire au Traité fait par Sadite Majefté Très-Chrêtienne
avec Sa Majefté Britannique, 6c Leurs H. P. touchant la Succeffion de Sa
Majerlé Catholique, lequel Elles croient devoir être obfervé, en tout, 6c
dont on ne devroit fe départir, que de concert, & d'un contentement unani-
me de tous les Contractons ; outre que le tems dans lequel , félon l'Article fe-
cret, l'Empereur peut entrer dans ledit Traité, n'efl j?oint encore expiré, 8c
que conformément à icelui L. H. P. , après avoir reçu la nouvelle de la mort
dudit Roi d'Efpagne, y ont encore invité Sa Majefté Impériale de nouveau
& de la manière la plus perfuafive.
Que par ces raifons, L.H.P. efpérent que Sadite Majefté, confidérant cette
Affaire de nouveau, aura auflî la bonté d'y faire de nouvelles réflexions, avec
ordre à leur dit Ambafiadeur de prier Sadite Majefté de perfîiter à fe tenir au
Traité fufdit, Se de l'obferver en tout ce qui la regarde.
Tait à Marli, ce zf. Novembre 1700.
Etoit figné.
V- Heemskerck.
On donna u cet Ambaiïadeur une fort longue Réponfe à ce Mémoire.
Elle fut même envoiée au Comte de Briord, qui la prefenta le 4. Décembre
avec un Mémoire, & une Lettre du Roi Très-Chrêtien, ainfi qu'on va les
«raporter.
LE
- ET RESOLUTIONS D'E T A T. zn
ryoo.
E fôuflîgné Ambaflîideur Extraordinaire de France, aïant reçu par un Ex
de Fran*
ce aux
Etats G é-
néraux.
Sa
LIPPE
muniquer en même tems les juftes motifs qui l'ont obligée d'accepter le Tel- awxEtats
tament du feu Roi d'Efpagne, lefquels font contenus dans le Mémoire joint Géné-
à la Lettre du Roi, ledit Ambafîideur a fait remettre la Lettre & le Mémoi- nux-
re à Monfieur de Haren, Préfident de la Semaine. Il fouhaite que .V. S.
fàflênt toutes les réflexions convenables à l'état préfent des Affaires, 8c au
•Bien 8c à l'Avantage de cette République, laquelle peut ÔC doit compter fur les
aflurances qu'il a ordre du Roi fon Maître de donner à V. S. de la continua-
tion d'une amitié 8c du defir fincére, que fon Maître a de maintenir l'Allian-
ce & la bonne Correfpondance qu'Élle a avec cet Etat. Ledit Ambaflàdeur
eft perfuadé que V. S. correfpondront aux favorables fentimens du Roi fon
Maître. A la Haïe, le 4. Décembre 1700. Etoit figné,
Brior-d.
TreVChers , Grands Amis, Alliez, et Confederez. Lettre
du Roi
„ T A tranquillité de l'Europe eft fi folidement établie par la jufte difpofi-
„ JL*tion que le feu Roi d'Efpagne nôtre très-cher & tres-aifné Frère a fait
„ de les Roïaumes & Etats en faveur de nôtre très-cher & très-aimé Petit-
„ Fils Philippe V, prefentement Roi d'Efpagne, que Nous ne doutons
„ pas de la part que Vous prendrez à fon Avènement à la Couronne. Nous
„ lui avons déjà fait connoître l'afreftion véritable que Nous avons pour
„ VouSi & comme Nous fommes perfuadez que lès fentimens feront confor-
^, mes aux nôtres, l'étroite intelligence qui fera déformais entre. nôtre Cou-
„ ronne & celle d'Efpagne , Nous donnera de nouveaux moïens de Vous
„ marquer l'intérêt que Nous prenons à ce qui Vous regarde, 8c l'amitié fin-
„ cére que Nous avor.s pour Vous. Le Comte de Briord nôtre Ambaflàdeur
„ Extraordinaire Vous en donnera de nouvelles aflurances j 8c cependant
„ Nous prions Dieu, qu'il Vous ait, très-Chers, grands Amis, Alliez, &
„ Confédérez, en une bonre 8c digne garde. Ecrit à Verfailles, le 19. No-
„ vembre 1700. Etoit ligné, Votre bon Ami, Allié, 8c Confédéré.
Louis,
SI Meffieurs les Etats Généraux des Provinces-Unies paroiflent prefente- Répoiife
ment furpris^ que le Roi ait accepté le Teftament du feu Roi d'Efpagne, dela
ils remercieront bien-tôt Sa Majefté de préférer en cette occafion le repos pr0L)Lde
public aux avantages- de fa Couronne. Il fufHra qu'ils aï'ent le tems d'exami- au pre-
ner avec leur prudence ordinaire les troubles infinis, que l'exécution du Trai- cèdent
té de Partage produiroit; 8c cette même prudence les fera defifter de la de- Mémoi-
mande contenue dans le Mémoire qu'ils ont remis à l' Ambaflàdeur de Sa Ma- «f eMr*
r«m. I. Ce fefté, "
des£.G.
ztt MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
1700. jefté. Ils avoueront que le malheur de l'obtenir feroit commun à toute l'Eu-
— rope, 6c certainement ils jugeront que rien n'eft plus opofé au Traité que
kerk , d'en abandonner l'efprit pour s'attacher uniquement aux termes.
AmbaiT. Car enfin, il a fallu dans cette conjoncture distinguer l'un 6c l'autre. L'ef-
prit & les termes du Traité étoient unis pendant que le Roi d'Efpagne a vé-
cu. Les dernières difpofitions de ce Prince, 6c fa mort, y mettent une telle
différence, que l'un eft abfolument détruit, fi les autres fubfiftent; le premier
maintient la Paix générale, les termes caufent une Guerre univerfelle. Cette
feule Obfervation vraie décide du choix à faire pour fe conformer à l'objet
principal du Traité, tel qu'il eft expliqué par les premiers Articles, maintenir
la- tranquillité générale de /' Europe , conferver le repos public y éviter une nouvelle
Guerre par un Accommodement des difputes £ï? des diférens qui pour oient réfulter
au fujet de la Succeffion d'Efpagne , ou pour V ombrage de trop d'Etats réunis fous
un même Prince. C'eft par de tels motifs que le Roi a prie avec fes Alliez les
mefures néceflaires pour prévenir la Guerre, que l'ouverture de la Succeffion
d'Efpagne fembloit devoir exciter.
La vûë de Sa Majefté n'a pas été d'aquerir par un Traité les Roïaumes de
Naples 6c de Sicile, la Province de Guipufcoa, 6c le Duché de Lorraine: fes
Alliez n'avoient aucun Droit fur ces Etats. Peut-être auroit-Elle obtenu des
avantages plus confidérables par fes Armes, fi Elle avoit. eu deffein de les em-
ploïer à l'occafion de la mort du Roi d'Efpagne j mais, fon principal objet
étant de maintenir la Paix, Elle a traité fur cet unique fondement. Elle a
permis à Monfeigneur le Dauphin de fe contenter du Partage deftiné à lui
tenir lieu de tous fes Droits fur la Succeffion entière des Roïaumes d'Efpagne.
S'il arrive donc que les mefures prifes dans la vue de maintenir la tranquillité
publique produifent un effet contraire, qu'elles engagent l'Europe dans une
nouvelle Guerre ; s'il devient nécefîaire pour conter-ver la Paix d'uier de
moiens difFérens de ceux qu'on s'étoit propofé} fi cette route nouvelle ne
caufe aucun préjudice aux Puifîànces Alliées de Sa Majefté} fi le feul delàvan-
tage retombe fur Elle, 6c qu'Elle veuille bien facrifier fes propres intérêts au
bonheur général de la Chrétienté : non -feulement, il dépend de Sa Majefté de
le faire , mais encore Elle a lieu de croire que fes Alliez loueront fa modéra.-
tion, 6c fon amour pour la Paix, plutôt que de fe plaindre d'un changement
que le Bien public demande, 6c qu'ils le remercieront d'une Réfolution qu'il
etoit impoffible de différer fans s'expofer en même tems aux longues 6c ian-
glantes Guerres, que Sa Majefté de concert avec Eux a voulu prévenir.
On en voïoit déjà les premières apra'ences. Les Efpagnols, jaloux de con-
ferver leur Monarchie en fon entier, fe préparaient de tous cotez à la défen-
i'e. -Le Milancz,*lcs Roïaumes de Naples 6c de Sicile, les Provinces, les
Places comprifes dans le Partage, tout fe mettait en état de fe maintenir uni
au Corps de la Monarchie d'Efpagne. La Nation der.iandoit feulement, pour
s'opofer à la divifion, un Roi qu'Elle pût légitimement reconnoître } 6c, quoi
que l'inclination de tous les Etats des Roïaumes d'Efpagne fût univerfcllement
portée pour un Prince de France, les Sujets de cette Monarchie auraient été
fidèles a ceux que la diipofition du feu Roi Catholique leur indiquoit au refus
d'un Fils de Monfeigneur le Dauphin. Ils n'étaient plus incertains que fur
l'ac-
ET RESOLUTIONS D'ETAT. 225
l'acceptation > car enfin, le feu Roi aïant rendu juftice aux véritables Héri- 1700."
tiers, leur refus auroit autorifé l'Efpagne à fe foûmettre à l'Archiduc. Per- "'
fonne ne doutera aparemment que l'Empereur eût accepté le Teftament. La
Succeffion d'Efpagne pour fon fécond Fils avoit été le but de fes longues Né-
gociations à Madrid, fes Traitez dans l'Empire étoient pour la même fin. Il
n'avoit refufé de foufcrire à celui de Partage, que dans cette unique efpérance.
Il feroit bien difficile de perfuader que prêt de recueillir le fruit de tant de
peines, il eut voulu le perdre 6c fe contenter des mêmes offres qu'il avoit
conftamment rejettées.
Ainfi, l'Archiduc devenant Roi d'Efpagne du confentement de toute la Na-
tion, il falloit pour exécuter le Traité conquérir les Roiaumes 6c les Etats
réfervez pour le Partage de Monfeigneur le Dauphin. Il n'y avoit plus lieu
d'alléguer le tort fait aux légitimes Héritiers , leurs Droits avoient été recon»
nus, il falloit attaquer un Prince déclaré Succeffeur de tous les Etats dépen-
dais de la Monarchie.
Ses nouveaux Sujets accoutumez à la fidélité envers leur Maître , inftruits
du refus des véritables Héritiers, auroient été auffi zélez pour lui que toujours
ils l'ont été pour les Rois précédens.
Meffieurs les Etats Généraux, informez par le Roi de toutes fes démarches
pour l'exécution du Traité , favent que Sa Majefté follicitant ouvertement les .
Princes de l'Europe d'entrer dans les mêmes engagemens n'a jamais tenté par
des voies fecretes la fidélité des Sujets du feu Roi Catholique. Elle n'avoit
donc nulle intelligence, ni dans le Roiaume de Naples , ni dans celui de Sici-
le, ni dans aucun des Etats compris dans le Partage de Monfeigneur le Dau-
phin } la force ouverte étoit l'unique moien de les attaquer. Mais, la Guerre
une fois commencée, après avoir refufé la juftice que le feu Roi Catholique
vouloit faire aux Princes de France, étoit difficile a terminer. Un Roi pof-
fefïèur de toute la Monarchie d'Efpagne fuis aucune condition auroit été ré-
duit à de grandes extrémitez , avant que de céder les Roiaumes de Naples &c
de Sicile, la Province de Guipufcoa, le Duché de Milan, 6c les autres Pais
6c Places, dont le Partage de Monfeigneur le Dauphin devoit être compofé.
Il eft inutile d'examiner quelles auroient été les fuites de cette Guerre. El-
le étoit: inévitable, 6c cette certitude fuffit pour faire voir que les fages pré-
cautions, prifes pour maintenir une Paix inviolable dans l'Europe, étoient ab-
folument renverfées par les mêmes moiens qu'on avoit feuls jugez propres à
l'entretenir. On dira peut-être que l'Empereur connoifiant les inconvéniens
de la Guerre, fes incertitudes, les malheurs qu'elle entraîne avec elle , auroit
accepté le Traité} que renonçant au Teftament , il auroit obligé l'Archiduc
à fe défifter de fes Droits, & à fe contenter du Partage ftipulé pour lui.
L'Empereur étoit certainement maître de le faire j mais . fes refus précédens,
portez julqu'à l'extrémité, permettoient-ils de croire qu'il prît cette réfolu-
tion? Quand même il l'auroit prife, le repos public en étoit-il plus affuré?
Le Duc de Savoie efl: fins aucun engagement , il efl: apellé par le Teftament
au défaut des Princes de France 6c de l'Archiduc, quelle offre pouvoit-on lui
faire afîèz coiifidérable pour l'empêcher de faire valoir fes nouveaux Droits ,
& pour balancer les avantages qu'il pouvoit en efpérer?
Ce 2 On
ni MEMOIRES, NEGOCIATIONS, TRAITEZ,
1700. On ne dira pas que les Puifiânces Alliées l'auroient fubftitué à l'Archiduc."
■ Ce n'elt pas le cas , puis qu'on fupofc que l'Empereur auroit accepté le Trai-
té, Se que l'échange à lui propofer ne (bit infiniment inférieur à ce que l'ave-
nir lui prefentej &c Ton intérêt particulier ne Pobligsoit pas à faire valoir Je
Telhimcht en faveur du Prince qui auroit voulu s'y conformer.
Enfin, la difpofition faite par le feu Roi Catholique produifoit encore de
nouveaux embarras pour le choix du Prince àiubftituer à l'Archiduc. Puif-
que Meilleurs les Etats Généraux rapellent cet Article fecret du Traité, Ils
auront aparemment examiné quel Prince, en état de ibûmettre les Efpagnols à
fon obéïfiance, auroit voulu malgré la Nation monter fur le Trône d'Eipa-
gne, 6c foûtenir les reftes de la Monarchie démembrée contre les entrepniès
de l'Archidue, autorifé par le Teftament du feu Roi, & contre celies du
Duc de Savoie, intérefie à maintenir ces dernières difpofitions. Il ne paroît
pas qu'on eut aifément accommodé tant de différens, fans aporter le moindre
trouble à la tranquillité publique } on ne pouvoit prévoir, au contraire, qu'une
Guerre universelle: il falloit donc emploier, pour conferver la Paix, des moiens
différens de ceux qu'on s'étoit propole en lignant le Traité.
Le plus naturel, le plus conforme au maintien de la tranquillité générale r
le fcul jufte, confiitoit dans la réfolution que le Roi a prife d'accepter le Tef-
tament" du feu Roi Catholique. Si quelque Prince a droit de s'opofer à fes
dernières difpofitions, il fuffit de les lire, pour juger que ce Droit apartient
feulement àMonfeigneur le Dauphin. Lors qu'il veut bien, s'en défifter en fa-
veur de fon Fils, le Teftament s'exécute fins trouble, fins efrufion de fang}
& les Peuples d'Efpagne reçoivent avec la Paix un Prince que la Naiflance,.
la difpofition du feu Roi , les Vœux unanimes de tous les Etats de la Monar-
chie apellent à la Couronne.
Si quelque Puiflànce entreprenoit d'attaquer tant de Droits réunis , elle
Ce chargeroit inutilement du nom odieux de Perturbateur du Repos public y
elle commencerait une Guerre injufie, fans aparence de fuccès. Mais, fi cette
Guerre paroiftbit injufte lors qu'elle feroit entreprife par des Puifiànces qui le
croiroient intéreffées à traverfer les avantages d'un Prince de Fr&nce , feroit-
il de l'équité du Roi, de fa tendrefle pour le Roi d'Efpagne, de tourner fes
Armes contre une Nation, dont le feul démérite feroit d'aporter à fon nou-
veau Roi, Petit-Fils de Sa Majefté, la Couronne d'une des plus puifiantes Mo-
narchies de l'Europe, ce de lui demander pour toute grâce de vouloir bien-
l'accepter ?
L'élévation des Rois ne peut les difpenfer de faire connoître l'équité des
Guerres qu'ils entreprennent. Quelles raiforts Sa Majefté, jufte comme elle
eft, pourroit-clle donner de reprendre les armes pour féparer une Monarchie
déférée toute entière au légitime Héritier?
On avoit voulu le priver de fes Droits : l'Empereur, fe croiant affuré des
intentions du fcuRoi d'Efpagne, fe promettait d'en recueillir toute la Succef-
fioiv, lajuftiee, l'honneur, l'intérêc de la Couronne, la tendrellè paternelle,
obligeoient également le Roi à foûtenir de toutes fes Forces les Droits de
Monfeigneur le Dauphin. Les fuccès précédens inltruifoient de ce qu'on
devoit craindre de l'effort de fes armes. Le Roi d'Angleterre & les Etats
Gçné-
ET RESOLUTIONS D'E T A T. zzj
Généraux délirèrent également de prévenir la Guerre: le Roi y confentit, I700<
Monfeigneur le Dauphin vouloit bien abandonner la plus grande partie de fes — -—
Droits; à condition que les Etats, qu'il s'étoit réfervez, lui feraient affurez.
Ce defir égal de. maintenir la Paix, produifit le Traité; & c'eft ainfi que par
des fages précautions, prifes pendant la vie d'un Prince, dont les fréquentes Se
dangereufes maladies annpnçoient une mort prochaine, on crut en partie ren-
"dre°juftice aux véritables Héritiers, & établir en même tems le fondement
d'une Paix folide dans l'Europe.
Les difputes excitées fur la validité de la Renonciation de la feue Reine fer-
virent de motif à cet Accommodement: en effet, il eut été inutile, fi la nul-
lité de cette Renonciation eut 'été auffi bien reconnue pendant la vie du feu
Roi Catholique, qu'elle l'a été déclarée par foh Teftament. Enfin, il étoit
nécefîaire que le Roi voulût bien expliquer pofitivement,s'il acceptoit le Tef-
tament tel qu'il eft en faveur du Roi fon Petit-Fils ; ou bien, fi Sa Majefté
le refufoit abfolument.il n'y avoit point de milieu,point de changement,à pro-
pofer. Sa Majefté acceptant le Teftament, les -Droits fur toute la Succeffion
en entier paflént incontestablement à ce nouveau Roi d'Efpagne. Il ne lui
eft point permis de les féparer, d'accepter une partie de la Succeffion, St de
refulèr l'autre.
Le refus du Teftament tranfportoit tous les Droits à l'Archiduc; il ne ref-
toit pas même aux véritables Héritiers de raifon légitime de fe plaindre qu'on
leur eût fait aucune injuftice: par conféqucnt, en quelque cas que ce foit, Sa
Majefté voulant maintenir les conditions du Traité étoit obligée d'attaquer
un Prince vivant, légitime pofleffeur de la Couronne d'Efpagne; & toutes
les mefures qu'Elle avoit prifes avec fes Alliez regardoient feulement le Parta-
ge de la Succeffion d'un Prince, dont la mort paroiffoit prochaine. Puifque
la Guerre étoit inévitable, qu'elle étoit injufte, fi le Roi eut pris la réfolu-
tion de s'en tenir précifément aux termes du Traité de Partage, Meffieurs les
Etats Généraux n'ont aucun fujet de fe plaindre que Sa Majefté l'ait préve-
nue, en acceptant le Teftament, à moins que cette réfolution ne leur caufe
quelque préjudice. . Jufques k prejTent, on ne le découvre point. La feule vûë
qu'ils ont eue en traitant, leur unique intérêt , a été d'affurer la tranquillité
générale: on leur doit la juftice de déclarer qu'ils n'ont ftipulé pour Eux-
mêmes, aucun Avantage particulier, nulle Province, nulle Place,, nul Port
de Mer, dépendant de L" Monarchie d'Efpagne,. foit dans l'ancien, foit dans
le nouveau Monde, nul Article feciet pour faciliter leur Commerce. Ils ont
proprement fait l'office de Médiateurs defintéreffez entre le Roi & l'Empe-
reur; ils ont voulu pacifier par avance les troubles, que les différens récipro*-
ques- fur la Succeffion fembloient devoir bien-tqf produire. Si l'Empereur,
marquant le même defir de maintenir la Paix , eut fouferit au Traité , les en-
gagemens pris alors entre les feules Parties véritablement intéreffées à la Suc-
ceffion auraient été difïeïens; mais, il n'y a dé Traité qu'avec les Média-
teurs : & Meilleurs les Etats, informez de toutes les démarches du Roi par
raport au Traité , favent l'inutilité des inftahees faites à Vienne au nom de Sa
Majefté. Ils favent que l'Empereur, perfuadé que l'Archiduc ferait apellé à
Ce 5 là
lit MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
*700« la Succeffion entière des Roïanmes d'Efpagne, ne vouloit s'engager à la fé-
"' paration des Etats de la Monarchie, qu'autant qu'elle lui auroit ete utile pour
étendre fon autorité en Italie. Qu'ils fe plaignent donc de l'Empereur, Se de
fes refus continuels, s'ils voient avec peine que Sa Majefté ait accepté le
Teftament. Quoi que le Mémoire remis à fon Ambafïàdeur puifle donner lieu
de le croire, elle veut cependant fufpendre encore fon jugement, jufqu'à ce
qu'ils aient fait de plus ferieufes réflexions fur ce grand événement. Elle
connoît la fageffe des Confeils de la République. Toutes chofes bien exami-
nées , Meilleurs les Etats Généraux trouveront peut-être que tant d'Etats
aparences lont qu us pr
fes tenues, l'état prefent de la Monarchie d'Efpagne, gouvernée par un
Prince de France , fans diviflon de fes Etats. Les Peuples, en Angleterre Se
en Hollande, prévenoient déjà ce que le Gouvernement déciderait en cette
occafionj Scieurs plaintes, fur l'union des Roïaumes de Naples Se de Sicile à
la Couronne de France, marquoient ouvertement leur inquiétude pour leur
Commerce de la Méditeranée. _
Si le Roi d'Efpagne eft Prince de France, fa haute naiflance, fon éduca-
tion, Se .l'exemple du Roi, lui font connoître ce qu'il doit à fa gloire, au
bien de fes Peuples , Se aux intérêts de fa Couronne. Ces confidérations fe-
ront toujours les premières dans fon efprit, elles le porteront à relever la
fplendeur de fa Monarchie} Se d'ailleurs la tendrefTe du Roi pour Sa Majefté
Catholique feroit certainement la plus forte Barrière, l'affurance la plus foli-
de,que l'Europe pourroit deflrer: Se fi l'attention du Roi à maintenir la Paix
permettent encore la moindre crainte des deffeins de Sa Majefté, on prendrait
bien plus d'ombrage de trop d'Etats réunis fous un même Prince, fi le Trai-
té pouvoit avoir fon exécution.
Ces réflexions perfuaderont aparemment Meffieurs les Etats Généraux, que
la Juftice, le bien de la Paix, Pefprit même du Traité, ne permettoient pas
que le Roi prît d'autre réfolution que celle d'accepter le Teftament du feu
Roi d'Efpagne ; qu'elle convient aux intérêts particuliers de la République
de Hollande} qu'elle eft conforme à ceux de toute l'Europe. Le malheur
feroit donc général, s'il étoit poffible que Sa Majefté eût égard, après la
déclaration qu'Elle a faite, aux inftances contenues dans leur dernier Mémoi-
re} Se véritablement Elle eft perfuadée que jamais ils n'ont eu intention d'en
obtenir l'effet. Ils font trop éclairez, pour avoir formé des vœux auflî contrai-
res à leurs lumières, Se aux véritables intérêts de leur République. S'ils
étoient capables de les oublier allez, pour fouhaiter effectivement que Sa Ma-
jefté voulût exécuter les conditions du Traité, ils auraient fait voir les moiens
afibrez d'accomplir le Partage fans Guerre, Se du contentement général de
toute l'Europe } ils auraient au moins nommé les Princes prêts à joindre leurs
Forces pour en garantir tous les Articles } ils auraient dénoncé celles que la
République de Hollande auroit données, ioit par Terre, fort par Mer. Le
Mémoire, cependant, ne contient rien de lémblable : MefHeurs les Etats pro-
pofent
ET RESOLUTIONS D'E T A T. n7
pofênt feulement d'accorder encore à l'Empereur le terme de deux mois, 1700.
porté par l'Article fecret du Traité. Ont-ils déjà perdu le fbuvenir, qu'il y a ■
îept mois que ce Prince, délibère i que fes réponfes, aux différentes inftances
qu'on lui a faites , contenoient feulement un rems abfblu de foufcrire au Par-
tage? Qu'ils examinent quel aurait été le fruit de cette nouvelle Propofition.
L'Empereur refufoit le Partage, fur la fimple efpérance, que le Roi d'Efpa-
gne apelleroit l'Archiduc à la Succeffion i cette efpérance étoit vaine alors,
êc l'effet l'a vérifié: cependant, fî elle étoit capable de fufpendre les réfolu-
tions de l'Empereur, que ne ferait point la certitude qu'il auroit prefentement
de procurer à l'Archiduc toute la Succeffion d'Efpagne ? Car enfin, le délai
de deux mois propofé en cette occafion par les Etats Généraux auroit été re-
gardé avec raifon par les Efpagnols comme un refus, que le Roi auroit fait
du Teftament du feu Roi Catholique. Il n'y avoit pas d'aparence d'exiger
d'eux d'attendre une réponfe pendant un auffi long efpace de tems ; encore
cette réponfe, fuivant les termes du Traité, ne pouvoit être qu'un refus. Ainfi,
la Régence d'Efpagne étoit obligée , pour fe conformer aux intentions du feu
Roi Catholique , de déférer la Couronne à l'Archiduc } & l'Empereur obte-
noit, pour le fimple délai que Meffieurs les Etats propofent, ce qu'il a recher-
ché avec tant de peines : ainfi, fous le prétexte fpécieux de l'exécution du
Traité , ils afîlirent à jamais la grandeur 6c la puiflance de la Maifon d'Autri-
che. Sa Majefté veut bien croire qu'ils n'ont pas eu ce deffein : ils connoif-
fent trop l'intérêt qu'ils ont de mériter par leur bonne conduite l'honneur de
fon affection, 6c la continuation des marques de fa bienveillance. Elle s'affu-
re donc, que faifant plus de réflexion qu'ils n'ont fait aux témoignages qu'Elle
donne de fon attention au maintien du repos public, au facrifice qu'Elle veut
bien' faire dans cette vue" des Etats confidérables qu'Elle regardent comme
devant être unis à fa Couronne, ils changeront leurs plaintes en remercie-
niens ; £c, félicitant au plutôt le Roi d'Efpagne fur fon avènement à la Cou-
ronne, ils tâcheront de mériter du Roi les mêmes marques de bonté 6c de
protection, qu'Eux 6c leurs Ancêtres ont reçues de Sa Majefté 6c des Rois
fes Prédéceffeurs.
O n reçût prefqu'en même tems une Lettre par les mains dé Don Bernar-
do de Quitus, que la Reine Douairière d'Efpagne , 6c la Régence, écrivoient
aux Etats Généraux , de la teneur fuivante.
„ 'T^Res - Chers et Grands Amis. Nous vous fîmes part par nôtre Lettre-
„ A Lettre de l'onzième de ce mois, du décès, 6c de la difpofition tefla- de la
„ mentaire du feu Roi Charles II. nôtre Sire, ( que Dieu ait en gloire) Reine
„ à quoi nous ajoutons prefentement la nouvelle de l'accomplifïèment de fa ]??"a£
„ dernière Roïaîe volonté touchant ce point ; le Roi Philippe V. nôtre qS &
„ Sire, étant déjà actuellement acclamé, 6c les Etendards arborez en fon Régence
„ Roïal nom. Comme Nous nous promettons, que vous prendrez bonne d'Efpa-
„ part à nôtre joie, Nous vous affûtons auffi, qu'en toutes occafions de §£jt* :
„ vous pouvoir complaire, Nous tâcherons de vous témoigner nôtre parti- Gené-
„ culiére eftime 6c affection. Sur quoi Nous prions Dieu, qu'il vous ait, raux.
„ très-
2z8 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
1700. „ trcs-chers & grands Amis., en fa fainte garde. A Madrid, le zz. de No-
•' „ vembre 1700.
• Vôtre bien bonne Amie,
MOI LA REINE.
* r
Le Card. de Porto-Carero.
Don Manuel Arias.
M. Ferdinando d'Arragon.
» El Inquisit. General.
El Conde de Benavente. * •
Don Rodrigo Emanuel.
Mantriques de Lara.
D. Joseph de la Fuente.
Les Etats Généraux ne répondirent pas d'abord, ni à cette Lettre, ni an
Mémoire du Comte de Briord. Cependant, après en avoir fait l'examen
pendant quelques jours, on prit le Mercredi 8. de Décembre deux Réfolutions.
La première regardoit la Lettre de la Régence d'Efpagne. Elle portoit,
„ qu'il falloit y répondre, ainfi que l'on fit, en termes pleins'de civilité & de
.„ condoléance fur la mort du Roi d'Efpagne de gtorieufe Mémoire. On
„ ajouta, que touchant la claufe du Teftament de ce Roi touchant les Héri-
.„ tiers Univerfels, L. H. P. ne pouvoient pas, à caufe de la Constitution de
„ leur Gouvernement, fe déclarer là-defTus. C'eft puis qu'elles étoient obli-
?, gées d'attendre le fentiment des Provinces refpe&ives , auxquelles on en
„ avoit donné connoifiance. Cependant, le feu Roi aïant fagement étabh la
.„ Reine & la Junte pour le Gouvernement de fes Roïaumes & Provinces,
.3, on leur fouhaitoit toute forte de bonheur. Que de leur côté Elles pren-
„ dront toujours fort à cœur la confervation 6c le maintien de l'amitié &
„ bonne correfpondance entre la Couronne d'Efpagne 6c la République, ain-
„ fi qu'elle avoit été cultivée pendant plufieurs années.
La Lettre, qui fut dreflee en conformité, fut envoïée à l'Envoie de l'Etat,
autorifé pour vaquer aux Affaires de la République à la Cour de Madrid ,
pour l'y préfenter. On fit même remettre par l'Agent de l'Etat la Copie de
cette Rélolution à Don Bernardo de Çhàros.
Le même jour, on prit *.ine autre Réfolution pour écrire au Roi Très-
Chrêtien en réponfe de fa Lettre, qui étoit jointe au Mémoire du Comte
de Briord. Le contenu de la Réfolution portoit, „ qu'on répondrait à cet-
„ te Lettre en termes civils, & qu'on témoignerait à Sa Majelté que L. H.
„ P. avoient reçu avec plaifir la notification Se l'affurance qu'il avoit plû à
„ Sa Majefté de leur donner par fa Lettre par le canal du Comte de Briord ,
„ de la continuation de fon amitié & de fon inclination pour l'Etat. Qy'El-
„ les avoient toujours pris, & prendraient toujours, beaucoup de paît à ce
„ qui concerne le bien & la grandeur de Sa Majefté 6c de fa Maifon Roïale.
„ Cependant, qu' Elles efpéroient que dans cette occafion Sa Majefté fau.ni
„ aifcmait confidérer, félon fa grande fageffe, qu'Elles n' étoient pas en état
• „ de
ET RESOLUTIONS D'ETAT. 119
de pouvoir d'abord s'expliquer fur le changement. C'eft parce qu'étant 1700.
une Affaire d'une fi grande importance, Elles étoient obligées, fuivant la
„ Conftitution de leur Gouvernement , d'attendre le fentiment des Etats des
„ Provinces refpectives , auxquels on en avoit donné connoiffance. D'ail-
„ leurs, que c'étoit une chofe qui regàrdoit en commun & Elles & Sa Ma-
„ jefté Britannique, à caufe du Traite conclu fur la Succeflïon d'Efpagne > &
„ par conféquent Elles croïoient dé devoir en agir avec participation de ladi-
„ te Majefté Britannique. Cependant, elles n'ont pas voulu aporter le moin-
„ dre délai à remercier S'a Majefté pour la nouvelle aiïurance, qu'il a plû à
„ Sa Majefté de leur d/nner par cette occafion , de fon amitié, 8c de fonaf-
„ feér. ion pour leur Etat. Audi l'avoient- elles reçu avec beaucoup de refpe&j
„ 8c en connoiffant le prix , Elles tâcheroient par tous les foins poflîbles de la
„ cultiver de plus en plus, comme n'eftimant rien de plus que h. bonne in-
„ clination de Sa Majefté pour la confervation de la Paix, 8c de la tranquilli-
5, té publique.
On drefia en conformité de cette Réfolution la Lettre pour le Roi de Fran-
ce, qu'on envoïa à l'Ambaffadeur de la République pour la lui remettre. On
envoïa pareillement l'Extrait de cette Réfolution au Comte de Briord par leur
Agent, pour lui lërvir de Réponfe à fon Mémoire.
Comme ce qui s'étoit pane à la Cour de France lors de l'acceptation du
Teftament de Charles II. Roi d'Efpagne n'étoit pas encore bien connu ,
l'on en fut enfuite éclairci. On eut la Copie de quatre Lettres que la Junte
ou Régence d'Efpagne avoit écrites au Roi Très-Chrétien , en date du pre-
mier, du 3, du 7, & du 16. du mois de Novembre, avec une réponfe du-
dit Roi Très-Chrêtieixdu 12. du même mois. Ces Lettres 8c cette Réponfe
font telles qu'elles fuivent.
SIRE, Lettre
de la
Aujourd'hui, fur les trois heures du foir, Dieu a retiré de ce monde le ^uenteen°u
Roi Charles Second, nôtre Seigneur 8c Maître, pour le faire jouir, ce(j'Ef-
( comme nous devons le croire) de fa gloire éternelle. Son Teftament a été pagne au
ouvert immédiatement après fa mort avec les folemnitez de droit : 6c s'y trou- Roi de
vant dans la claufe qui concerne l'Héritier ôc Succefieur de tous fes Ro'nu- France«
mes, Etats, 8c Seigneuries, qu'il apelle, fans nulle exception, le Serenifîïme
Duc d'Anjou, Fils du Serenifîïme Daufîn, avec ordre de lui en donner fans
aucun délai la pofléfllon actuelle , après qu'il aura prêté le Serment qu'il doit
faire d'obferver les Loix, Privilèges, 8c Coutumes de chaque Roïaume 8c
Seigneuries, ainfi qu'il eft plus amplement exprimé dans les deux Copies ci-
jointes -, 8c que Sa Majefté, que Dieu abfolve , établit une Junte pour le
Gouvernement général de la Monarchie, jufques à ce que fon Succefieur
puifie la gouverner lui-même: la Reine, qu'il a nommée pour en être, fi
c'eft fa volonté d'y afiïfter, 8c les Miniftres foufiîgnez , s'aquitent de l'obli-
gation qu'ils ont d'en donner la première nouvelle à Vôtre Majefté, laquelle
fera fuivie de toutes les autres diligences 8c informations, qui feront néceflai-
res en cette occurrence. C'eft a quoi fe réduit tout ce dont nous avons à
^totn. I. . Dd donner
tp MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
1700. donner avis à V. M. Dieu la conferve, comme il en eft befoin. A Madrid,.
— — le 1. de Novembre de Tan 1700.
MOI LA REINE.
Le Card. Portocarrero.
Don Manuel Arias.
L'Eveque Inquisiteur General.
Don Rodrigue Manuel Manriques de Lara.
Le Comte de Benavent.
Lettre
du Se-
crétaire
d'Etat
Don
Antoine
de Ubil-
LE Roi Charles, mon fouverain Seigneur Se Maître, étant décédé le
premier- de ce mois à trois heures après midi , Ton Teftament a été ouvert,
immédiatement après, avec les folemnitez de droit. Il s'y eft trouvé une clau-
fe dont la Copie eft ci-jointe, dans laquelle il nomme pour fon Succeflèur en
tous fes Roïaumes, Etats, Se Seigneuries, le Sereniflime Duc d'Anjou, Fils
du Sereniflime Daufin, avec les charges 6c conditions, qui y font exprimées*
Se une autre claufe dont la Copie eft pareillement ici, contenant la forme
qu'il donne au gouvernement de la Monarchie, jufques à ce que fon Succef-
teur puifle la gouverner lui-même. Et la nuit du même jour il s'en eft donné
avis au Roi Très-Chrêtien , en lui envoïant auflî les Copies citées dans la
Lettré ( de la Reine ) adreflee nu Marquis de Caftel-dos Rios, pour la re-
mettre entre les mains de Sa Majefté , ainfi qu'il lui eft ordonné par une Let-
tre dont la Copie eft avec celle-ci : 6c l'un 6c l'autre s'envoïe double par un
Courier extraordinaire, que je dépêcherai cette nuit avec une nouvelle Lettre
qui marque l'empreflement que nous avons de voir nôtre Roi. Et par le
commandement de la Reine, ma Maîtrefle, 6c des Régens, je communique
tout ce que deflus à Mr. l'Envoie. A Madrid, le 3. de Novembre 1700.
UBILLA.
Seconde
Lettre
des Ré-
eens au
Roi de
France.
SIRE,
DAns une Lettre du premier de ce mois envoïée par un Exprès, nous
donnâmes avis à Vôtre Majefté, que Dieu avoit apellé à foi le Roi
Charles, nôtre Seigneur ôc Maître > 6c nous joignîmes à cette Lettre la
Copie d'une claufe qui s'eft trouvée dans fon Teftament, par laquelle il nom-
me pour Succeflèur en tous fes Roïaumes le Sereniflime Duc d'Anjou , Fils
du Sereniflime Daufin, avec les circonftances qui y font contenues j comme
auflî la Copie d'une autre où Sa Majefté, que Dieu abfolve, établit une Jun-
te deMiniitres (qui eft déjà formée) pour le Gouvernement général de la Mo-
narchie, jufques à ce que fon Succeflèur puifle la gouverner lui-même. Mais
comme dans le rude aflaut de ce jour-là, il nous fut impoflîble d'exprimer
plus vivement les fentimens de nôtre cœur à Vôtre Majefté, nous le faifons
aujourd'hui, en lui témoignant, que bien que nous réglerions avec une juite
douleur le Maître que nous venons de perdre, celui qu'il nous a donné par
fon Teftament nous fait revivre, Se relevé nos efpérances à tel point, que
nous
ET RESOLUTIONS D'ETAT. ip
nous & tous fes Peuples nous attendons avec impatience le bonheur de vivre 1700,
fous fa domination. Car, outre que l'on pourrait affurer avec vérité, que tel ■
étoit auparavant le defir unanime de cette Nation, voïant que le Roi Char-
les n'avoit point d'Enfans légitimes ; le Prince qu'il a choifi fe trouve au-
jourd'hui apuié Se fortifié du fang, du droit, Se de l'inclination générale.
C'efl pourquoi nous demandons à V. M. que le digne SuccefTèur de cette
-Monarchie commence fans différer à difpofer de fes Etats , afin que nous
aïons bien-tôt la confolatiôn de jouir de la douceur de fon Gouvernement.
Et, pour cela, nous lui offrons dés maintenant, comme chofe qui lui apar-
tient en propre, nos foins Se nos fervices en tout ce qui pourra lui faciliter
les moïens de poffeder ces Roïaumes avec la tranquillité Se la félicité que
nous lui annonçons. Cependant , nous refions Se refterons avec une obeïf-
fance, une promptitude, Se un attachement fîneere Se confiant, qu'il éprou-
vera dans tous les événemens grands Se petits : Se tout cela nous paraîtra peu
de chofe, en comparaifon du defir ardent que nous avons de le bien perfuader
en tout de nôtre fidélité Se de nôtre amour. Dieu garde la perfonne de Vô-
tre Majeflé Très-Chrêtienne , comme il en efl befoin. A Madrid, le 3. de
Novembre 1700.
MOI LA REINE.
Le Comte Don Manuel Arias.
L'Eveque Inquisiteur General.
Don Rodrigue Manuel.
Le Comte de Benavent.
SIRE, Troifié-
me Lct-
EN conféquence de ce que nous écrivîmes à Vôtre Majeflé par un Cou- ^ ^
rier extraordinaire, dépêché le 3. de ce mois, au fujet de la mort du Roi aUR0i
nôtre Maître, que Dieu abfolve, offrant de lui remettre le Teflament Se le de Fraa-
Codicile qu'il a laiflez, lefquels étoient prêts dès lors; nous lui envoïons l'un ce-
Se l'autre par cet Exprès , afin qu'elle ait une connoiffance entière de toutes
les circonflances qu'ils contiennent > nous fervant de cette occafion , ( com-
me nous ferons de toutes les autres, ) pour dire à V. M. que la Noblefîe 8c
les Peuples demandent leur nouveau Roi avec des inquiétudes fie des détrefles
inconcevables: de forte que, bien loin de vouloir prêter l'oreille ni confentir
à aucune nouveauté ou variation dans cette grande Affaire, ils font tous dans
la même réfolution de la foûtenir Se maintenir, étant aufîi perfuadez qu'ils le
font de la juftice Se de la raifon de cette Caufè. Ce que nous reprefentons à
V. M. pour la réfoudre à donner promptement à nos prières , Se à nos inflan-
ces réitérés, un Prince qui efl fi defiré, Se attendu avec des acclamations
qui s'augmentent de jour en jour: outre, les avis que nous recevons a tous
momens, des aplaudiffemens faits au Teflament du feu Roi, accompagnez
N- des louanges de celui que Dieu nous a donné, Se des vœux avec lefquels on
Dd 2 afpirc
z]z MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
1700. afpire à le voir en poffeffion du Commandement. A ces vives & tendres ex-
■ préfixons nous ajoutons la ratification de toutes les offres fincéres, que ces
Roïaumes font en général 8c en particulier , de tout ce qu'ils pourront faire
pour le fervice du Roi qu'ils attendent ; Se la congratulation que nous devons
à V. M. de voir le fécond de les Petits-Fils nommé 8c proclamé Roi d'Efpa-
gne, avec des circonftances aufîî finguliércs que le font celles qui fê rencon-
trent en cette conjoncture. Dieu garde la peribnne de Vôtre Majefté Très-
Chrêtienne, comme il en eft befoin. A Madrid, le 7. Novembre 1700.
MOI LA REINE.
Le Comte Manuel Arias.
Don Rodrigue Manuel.
Le Comte de Benavent.
Don Antonio de Ubilla et Médina.
Réponfe 'HpRès- Haute, Très-Puiffante , 8c Très- Excellente PrincerTe , nôtre tres-
duRoi X chère, & très-amée bonne Sœur 8c Coufine> très-chers 8c bien-amez
ce à là ~ Coufins ) & autres du Confeil établi pour le Gouvernement univeriel des
Junte Roïaumes èc Etats dépcndans de la Couronne d'Efpagne. Nous avons reçu
d'Efpa- la Lettre fignée de Vôtre Majefté, 8c de Vous, écrite le premier de ce mois.
£ne> Elle nous a été rendue par le Marquis de Caftel-dos-Rios, Ambaffadeur de
Très-Haut, Très- Puifiant , 8c Très- Excellent Prince, notre très-cher 8c
très-amé bon Frère 8c Coufin, Charles Second, Roi des Efpagnes, de
glorieufe mémoire. Le même Ambaffadeur nous a remis les clautès du Tef-
tament fait par le feu Roi fon Maître, contenant l'ordre 8c le rang des Hé-
ritiers qu'il apelle à la Succeffion de tous fes Roïaumes 8c Etats ; èc la fage
Difpofition qu'il fait pour le Gouvernement de ces mêmes Roïaumes, jufqu'à
l'arrivée 8c jufqu'à la majorité de fon Succefîèur. La fenfible douleur que
nous avons de la perte d'un Prince, dont les qualitez 8c les étroites liaifons
du fang nous rendoient l'amitié très-chere, eft infiniment augmentée par les
marques touchantes qu'il nous donne, à fa mort, de fi juftice, de fon amour
pour des Sujets fidèles, 8c de l'attention qu'il aporte à maintenir, au de-là du
tems de fa vie, le repos général de toute l'Europe, 8c le bonheur de fes Peu-
ples. Nous voulons de nôtre part contribuer également à l'un 8c à l'autre,
8c répondre à la parfaite confiance qu'il nous a témoignée. Ainfi , nous con-
formant entièrement à fes intentions marquées par les articles du Teftament
que Vôtre Majdlé, &c Vous, nous avez envoïez, tous nos foins feront defor-
- mais de rétablir par une Paix inviolable, par l'intelligence la plus parfaite, la
Monarchie d'Efpagne au plus haut point de gloire où jamais elle ait été.
Nous acceptons , pour nôtre Petit-Fiis le Duc d'Anjou , le Teftament du feu
Roi Catholique. Nôtre Fils unique le Dauphin l'accepte auffi: il abandonne
fins peine les juites droits de la feu Reine fil mère 8c nôtre très-chere Epaule,
reconnus incontcftables, auili bien que ceux de la feu Reine nôtre très-hono-
réc D^me 8c Mère, par les avis des diiferens Miniitrcs d'Etat 8c de Juftice
con-
ET RESOLUTIONS D'ETAT. 22;
confultez par le feu Roi d'Efpagne. Loin de fe réierver aucQne partie de la I703-
Monarchie, il facrifie fes propres intérêts au defir de rétablir l'ancien luftre *
d'une Couronne que la volonté du feu Roi Catholique & la voix de fes Peu-
}>les déférent unanimement à nôtre Petit-Fils. Ainfi, nous ferons partir incef-
àmment le Duc d'Anjou, pour donner au plutôt à des Sujets fidèles la con-
folation de recevoir un Roi bien perfuadé , Que Dieu l'apellant au Trône ,
fon premier Devoir efl de faire régner avec lui la Juftice & la Religion ;
Qu'il doit donner fa principale aplication à rendre fes Peuples heureux, à re-
lever & à maintenir l'éclat d'une aulli puiflante Monarchie; Qu'il eft obligé
de connoître parfaitement & de récompenfer le mérite de ceux qu'il trouvera
( dans une Nation également brave Se éclairée ) propres à le fervir dans fes
Confeils , dans fes Armées, & dans les differens Emplois de l'Eglife 8c de l'E-
tat. Nous l'inftruirons encore de ce qu'il doit à des Sujets inviolablement
attachez à leurs Rois, de ce qu'il doit à la propre Gloire. Nous l'exhorterons,
à le fouvenjr de fa Naifiance, à conferver l'amour de fon Paï's; mais, unique-
ment pour maintenir à jamais la Paix Se la parfaite intelligence, fi néceflaires
au commun bonheur de nos Sujets Se des fïens. Elle a toujours été le prin-
cipal objet de nos fouhaits: Se, fi les malheurs des conjonctures paffées ne
nous ont pas permis de le faire connoître, nous fommes perfuadez que ce
grand événement va changer l'état des choies ; de forte que chaque jour nous
produira déformais de nouvelles occafions de marquer nôtre eltime 8c nôtre
bienveillance particulière pour toute la Nation Elpagnole. Cependant, nous
prions Dieu, Auteur de toutes confolations , qu'il donne à Vôtre Majefté cel-
les dont elle a befoin dans fa jufte arrliétion; Se .nous vous aiTurons, Très-
Haute , Très-Excellente, 8c Très-PuifTante Princefle, nôtre très-chere 8c
très-amée bonne Sœur 8c Coufine, Très-chers 8c bien amez Confins, Se au-
tres du Confeil établi pour le Gouvernement d'Efpagne, de l'eftime particu-
lière Se de l'afteérion que nous avons pour vous. Ecrit à Fontainebleau le 12.
Novembre 1700. Au defious eft écrit: De Vôtre Majefté, bon Frère Se
Coufin. Signé LOUIS. Et plus bas, Colbert. Et au defllis de cet-
te Lettre eft écrit: A Très- Haute, Très - Excellente , Se Très-PuifTante
Princeiïè, nôtre très-chere Se très-amée bonne Sœur 8c Coufine, la Reine
d'Efpagne; Se à nos très-chers Se bien amez Confins, Se autres du Confêil
établi pour le Gouvernement univerfel des Roïaumcs 8c Etats dépendans de
h. Couronne d'Efpagne; avec un Cachet du grand Sceau fecret.
SIRE, Quatriè-
me Let-
SUr l'avis que nous avons donné à Vôtre Majefté de l'affli&ion où nous J* ^s
étions à caufe de la mort de nôtre très-aimé Roi 8c Maître Don Carlos au Roi*
de glorieufe mémoire, Se de la prudente Se inconteftable Difpofition qu'il a de Fr.\a-
faite dans^ fon Teftament, en apellant à l'entière 8c univerfelle Succeiïïon de cc-
tous fes Etats le nouveau Roi Don Philippe V. nôtre Seigneur Se Maître,
auparavant Duc d'Anjou toujours heureux Petit-Fils de V. M., 8c en donnant
par intérim une forme pour les gouverner ; Elle a bien daigné ( Se nous en
avons une grande reconaoiiîance ) nous témoigner, par fa Lettre du xz. du
Dd 3 courant y
*Î4 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
1700. courant, la fenfible douleur que lui a caufée la perte d'un fi grand Prince,
"» & déclarer qu'elle acceptoit & aprouvoit le contenu du Teftament du feu
Roi, le confirmant 8c autorifant avec toutes les formes 6c précautions qui
peuvent aflurer pour jamais la pofieflîon d'un fi grand Héritage. C'eit pour-
quoi, après avoir rendu à V. M. les actions de grâces les plus tendres & les
plus reipeebueufes que nous lui devons pour cette acceptation, 8c pour les té-
moignages finguliers d'eftime 8c de bonté dont il lui a plu de nous honorer,
fie nous en particulier, 8c toute la Nation Efpagnole en général} (manières
propres 8c caractériftiques du cœur magnanime d'un Monarque fi fameux })
nous la pouvons affurer, que par fa haute prévoiance elle a fçû récompenfer
par anticipation les démonfirations d'allegrefiè , qui, au milieu de la confier-
nation que nous'eaufoit la perte que nous venions de faire, nous ont fait ban-
nir la douleur pour célébrer en cette Cour avec un aplaudiflement général la
Lettre obligeante de V. M. Nous croïons bien. Sire, que le nouveau Roi
viendra inftruit, ainfi que V. M. nous le promet, en toutes ces hautes, pru-
dentes, 8c Chrétiennes Maximes, qu'il aura fans doute bien aprifes fous la difei-
pline d'un fi glorieux, fi heureux, 8c fi habile Aïeul j 8c que, fous les aufpices
de l'un 8c de l'autre , nous verrons reverdir les Lauriers fur fon auguite front.
Cette nouvelle obligation nous fera confervev à jamais dans nos cœurs, 8c dans
nôtre mémoire , des régies fi fages 8c fi fûres j 8c ces Régies feront pour nous
de vifs 8c puifians égui lions pour procurer en tout fon exaltation èc celle de
cette Monarchie, 8c pour cultiver toujours de plus en plus une étroite ami-
tié , union , 8c correfpondance entre les Sujets des deux Couronnes. Nous
nous félicitons d'avoir enfin rencontré l'heureux fiécle dans lequel la Provi-
dence Divine avoit ordonné, que fût indiflblublement étraint ce Nœud Roïal,
que le malheur des tems 8c la jaloufie que la Valeur 8c la Puiflânce nourrif-
foient entre les deux Nations , avoient toujours dénoué. Nous tous fès fi-
dèles Vafiaux, Nous foûpirons avec impatience Se avec inquiétude dans l'at-
tente de nôtre très-aimable Roi , 8c fur la promeflè que Votre Majefié nous
fait que Nous le verrons bien-tôt} faveur, dont Nous lui fàiibns de nouveaux
Remercimens. Nous comptons toutes les heures : 8c, pour les avancer en tout
ce qui peut dépendre de nos foins, Nous avons donne les ordres pour le faire
proclamer avec les cérémonies accoutumées dans les Roïaumes d'Efpagne, 8c
dans les autres Etats qui en dépendent } 8c cela s'eft déjà exécuté en cette
Cour, à l'exemple de laquelle on ne peut douter, félon les avis que nous
avons
Protefta- * Aujourd'hui 1. Décembre 1700. avant midi, au Mandement de Très-Haut, Très-
tions du Puiffant, & Très-Excellent Prince, Monfeigneur Philippe fils de France, Frère unique du Roi,
Duc Duc d'Orléans, de Valois, de Chartres, c de Nemours: Les Confeillers du Roi, Notaires au
d'Or- Chàtelet de Paris fouffignez , fe font tranf'portez au Palais Roial , rue S. Honoré , ParoilTe
Ieans & S. Euftache, demeure ordinaire de mondit Seigneur; où étant Son: Altejfe Roiale a dit &
duDuc déclaré, que le feu Roi d'Efpagne Charles 11. aiant regardé pendant fa vie, comme une.
de Char- obligation indifpenfable de laiffer la Succeffion de fa Couronne aux Princes qui y font apel-
trescon- lez par l'ordre du Sang, & par le droit commun inviolablement gardé dans l'étendue de
tre le fes Etats, il s'en eft clairement expliqué par l'Article XIII. de fon Teftament fait à Madrid
Telia- le i. Octobre 1700: Où, après avoir reconnu que !e motif des Renonciations faites par les
nient de Contracls de Mariage des Serenifiîmes Infantes Anne & Marie-Therefe , fuccefïivement Rei-
Chailes nés de France, à la Succeffion desRoiaumes d'Efpagne, n'a été que pour éviter leur Union
11. "■ à
ET RESOLUTIONS D'ETAT. ztf
avons reçus ± que ne fe conforment toutes les Provinces, qui compofent le 1700.
Cercle de cette Couronne, attendu l'union qu'elles ont toujours confçrvé en- — — —
tr'elles: d'où il arrivera, que par une noble émulation , elles fe feront un
point d'honneur de célébrer à l'envi cet heureux Evénement, 6c de redoubler
leurs prières 6c leurs vœux pour la fente , profpérité , <k longue vie de Votre
Majefté} comme Nous le délirons, & comme la Chrétienté en a befoin.
A Madrid, le 2.6. de Novembre de l'an 1700.
MOI LA REINE.
Le Card. Porto-Carrero.
Don Manuel Arias.
Don Ferdinando de Arragon.
L'Inquisiteur General.
Don Rodrigo Manuel Manri<tue$ DE Lara.
Le Comte de Benavent.
La première Lettre fut rendue par le Marquis dos Rios le 10. On afiem-
bla d'abord le Confeil, dans lequel après quelque délibération il fut réfolu de
reconnoître le Duc d'Anjou pour Monarque univerfel de toute l'Efpagne.
Cette reconnoiftance fut exécutée le 16. Sa Majefté Très-Chrétienne, en la
prefence du Marquis dos Rios, fit apeller le Duc d'Anjou dans fon Cabinet,
& lui dit : „ Monfïeur , le Roi d'Efpagne vous a fait Roi. Les Grands
„ vous demandent, les Peuples vous fouhaitent, Se moi j'y confens. Son-
„ gez feulement que vous êtes Prince de France. Mais, je vous recommande
„ d'aimer vos Peuples, de vous attirer leur amour par la douceur de votre
„ Gouvernement, & de vous rendre digne de régner dans la Monarchie, fur
„ le Trône de laquelle vous montez.,, Enfuite, le Roi Très-Chrêtien s'éten-
dit fur la Grandeur de la Monarchie , & fur les hautes qualitez de la Na-
tion. Tous les Princes furent féliciter ce nouveau Roi. L'Académie Fran-
çoiie s'aquita de ce devoir , par une Harangue qu'on peut voir dans les
Journaux publics, n'étant pas une Pièce qui lbit intéreflante pour les Né-
gociations.
Cette reconnoiflance eût cependant une modification extérieure. C'eft
parce que Moniteur, Frère unique du Roi, y protefta d'abord contre*. C'é-
toit
à la Couronne de France , & que ce motif venant à ceffer, le Droit légitime de cette Suc-
ceffion réfîde en la Perfonne du plus proche Parent, iuivant les Loix de ces Etats: Que;
^ans cette vue, ledit Seigneur Roi Charles II. trouvant que l'inconvénient ceffe en la Per-
fonne de Monfeigneur le Duc d'Anjou, fécond Fils de Monfeigneur le Dauphin, il le déclare
pour fon Succdîeur, 8c comme tel il l'apellc à la !nicceffion de fes Roiaumes; Se, en cas
qu'il décède fans enfans, ou qu'il parvienne à la Couronne de France, il apelle après lui
Monfeigneur le Duc de Berri, fon Frère puis-né: Qu'on ne peut douter que le même efprit
de juftice & d'affeétion , qui a porté ce Prince à fe déclarer fi ouverte -ment en faveur des
plus proches Héritiers de fon Sang, n'ait été de conferver à S. &. R. , &à fes Defcenda.ns,
les Droits qui leur apartiennent légitimement par leur Naiffance félon l'ordre de leur degré
après Mejfeigneurs lesDius à' Anjou es de Berri: Que cependant, foit par obmiffion, ou d'au-
tres motifs contraires à fon intention, & à la Loi inviolable fi ausentiquement reconnue
par,
2}S MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
1700. toit à l'égard de la Subftitution de l'Archiduc, au cas que le Duc de Berri
"~ — " parvint à la Couronne de France, ou vint à mourir tans enfans. Monfieur
prétendoit qu'alors ce feroit à lui & à fes enfans , que la 'Succefîion devroit
apartenir, comme au Fils puis-né à? Anne d' Autriche , dont la Renonciation
ne pouvoit avoir plus de force que celle de Marie-Thérëfe. Monfieur le Duc
de Chartres proteita auiîî au même effet, en qualité de Fils & préfomtif Hé-
ritier de Monfieur le Duc d'Orléans.
Cela n'empêcha point le nouveau Roi de partir le 4. Décembre pour l'Ef-
pagne. La route qu'il tint, avec les circonftances de fon Voiage, font allez ra-
portecs dans les Journaux publics. Ce Roi envoia à Bruxellles une Lettre
d'Amnillie fignée de fa propre main pour les Bourgeois prilcnniers, fugitifs,
& proferitsj ce qui rendit le calme en cette Ville -là: 6c il le captiva par-là
l'amour des Bruxellois. On crut communément que ce coup partoit de Fin-
fïnuation de Don Bernardo de ghùros.
Cet Ambaffadeur Efpagnol donna le Dimanche 19. un magnifique régal
pour célébrer l'anniverfaire de la naiflance de fon nouveau Maître. Il avoit
le jour auparavant fait inviter dans les formes lesMiniftres étrangers, dont il y .
avoit à la Haïe grand nombre ; mais, il n'y eut que le Comte de Briord , le
Baron de Lillienrooth , & le Baron de Lancier Miniftre de Baviéie. Il s'y
trouva cependant auiïï le Comte d* Auvergne , le Prince d'Epinois, & deux au-
tres Particuliers. Les autres Mini lires furent dîner chez le Comte de Goësy
Envoie de l'Empereur, qui les avoit invitez trois jours auparavant. Ce fut
à Poccafion , que s'étant trouvez tous à dîner chez l'Envoie de Dannemarck ,
ils convinrent de fê traiter tour à, tour; &, quoique pas un ne s'expliquât, ils
avoient tous pour but d'éviter de fe trouver chez Don Bernardo de J^a/rw, afin
de ne pas s'émanciper fans ordre de boire à la fanté du nouveau Roi. Il n'y
eut que l'Envoie de Brandebourg, qui ne s'y trouva pas , aïant dîné dans là
pro-
par le Teftament, & fi exactement obfervéedans la Succeffion de la Monarchie d'Efpagne,
le Sereniflîme Archiduc Charles d'Autriche fécond Fils de l'Empereur , plus éloigné en degré,
8c iiîu de Marie-Anne d'Autriche Sœur puis-née de la Reine Anne d 'Autriche Mère de Son
Altefje Roiale, fe trouve apellé à la Succeffion; & qu'après lui, & fes enfans, S. A. R. Mon-
feigneur le Duc de Savoie 8c fes defeendans, qui font d'une fouche encore plus éloignée,
le trouvent auffi apellcz: Qu'encore que cette Difpofition ne puiife donner aucune atteinte
aux Droits de S. A. R., ni déroger aux Loix des Roiaumes d'Efpagne, qui apellent les
Héritiers légitimes félon leurs degrez à la Succeffion de la Monarchie, & qu'elle foit con-
traire à la Déclaration qu'a fait le Roi par fon Teftament, qu'il veut laiffer fa Succeffion -
dans le Droit commun , mondit Seigneur a crû qu'il manqueroit à ce qu'il fe doit à lui-mê-
me, à fes Defeendans, & au SangRoial de France, s'il gardoit le filence dans une occafion
li importante. Il fouhaite que le Droit, que fa Naiffince lui donne, demeure pour toujours •
en fufpens, 8c que la Lignée des Princes que l'Ordre du Sang apelle avant lui s'étende li
loin dans les Siècles futurs, que fa pofterité la plus reculée n'ait jamais occafion d'en jouir;
niais , il ne doit pas fouffrir qu'une prérogative d'honneur fi éminente, un droit fi inviola-
ble que le fien, & celui de fes defeendans, foit obmis; que fans parler de lui, on apelle des
Princes qui ne peuvent légitimement recueillir cette Succeffion qu'après lui 8c les defeen-
dans. C'eir pourquoi, S. A. R. a protéflé 8c protefie par ces prefentes, que l'obmiffion de fa
Terfonne fc de fes Defeendans dans le Teftarnent du Roi Catholique daté à Madrid le z.
Octobre -1700. ne pourra donner aucune atteinte ni préjudicier à les Droits , &c à ceux de '
fes Defeendans, fur les Roiaumes, Etats, Terres, 8c Dominations d'Efpagne 8cc.
ET RESOLUTIONS D'E T A T. 237
propre m.iifon. La raifon en étoit qu'il ne pouvoir aller chez le Comte de 17°°'
Cois. Ces deux Miniltres ne s'éroient point vus qu'en lieu tiers. C'éroit à — —
caufe des difficultez du Cérémonial , qui étoient furvenuës quelque tems au-
paravant à caufe du Baron de Lancier , & des prétentions du Comte c'e Goës,
de vouloir recevoir la première Vifite des Mi ni (très, & même des"Envoïez
des Electeurs. C'eft ce dont on aura lieu dans la fuite de parler.
Le même jour 19. le Comte de Briord aiant reçu un Courier de fa Cour,
alla prefTcr les Etats Généraux à fe déclarer fur les*Affaires. Il dit qu'il avoit
ordre du Roi fon Maître d'afiurcr les Etats qu'il n'avoit aucun deiïein de met-
tre de fes Troupes dans les Places des Païs-Bas Efpagnols, à moins qu'il n'y
fût forcé, 8c qu'il avoit toujours celui de continuer l'amitié 8c la bonne cor-
refpondance avec la République. Cet Ambafladeur,qui avoit fixé fon Entrée
publique au 2.7. de Décembre, la différa par une nouvelle prétention, qui n'a-
voit cependant point de fondement. Il alleguoit qu'il avoit trouvé dans le
Journal de Bonrepaus fon Prédéceflcur, qu'on lui avoit donné une Garde de
Halebardiers Suiflès, 8c il vouloit en avoir auffi. On lui répréfenta que cela
n'avoit jamais été pratiqué, puis que ces Halebardiers étoient des Gardes,
qui fervoient le Roi d'Angleterre comme Stadthouder , qu'il païoit de fon
propre argent, 8c qui par confequent n'avoient jamais été emploiez pour au-
cun fervice ou fonction des Etats. Il dépêcha ïà-deflus un Exprès en France
pour favoir comment il devoit fe conduire. On crût que Bonrepaus pouvoit
s'être trompé, en allant à l'Audience, 8c qu'aïant vu quelques Sergeants ou
Corporaux des Gardes à pied , qui avec leur Halebarde faifoient faire place ,
il avoit crû que c'étoient des SuifTes, 8c qu'il f avoit mis de la forte dans fon
Journal. Pendant que ledit Comte de Bricrd attendoit le retour de fon Ex-
près, H en recrût un. Il notifia là-defTus à l'Etat que fon Maître étoit prêt
d'entrer en Négociation 8c de donner des furetez raiibnnables à la Républi-
que dans les Païs-Bas Efpagnols , 8c qu'on pouvoit négocier avec ledit Comte
ce avec Don Bernardo de ghiiros. La même chofè fut confirmée par l'Am-
bafTadeur de l'Etat Heemskerke. Celui-ci mandoit , qu'aïant préfenté au Roi
Très-Chrêtien la Lettre des Etats Généraux , touchant les fix femaines qu'il
faloit félon la Conftitution du Gouvernement pour la Réfolution de Provin-
ces Refpectives, Sadite Majefté lui avoit dit, qu'il trouvoit que les Etats
faifoient bien, 8c qu'il efperoit que leur Réfolution feroit conforme à fes fou-
haits. Cependant , qu'Elle étoit prête à concourir à tout ce que les Etats
fouhaitecoient pour leur fureté du côté des Païs-Bas Efpjg.'iols.
L'on tfétoit cependant pas fort content de toutes ces expreffions endor-
mantes. C'eft fur tout lors qu'on réflechiiîbit fur celles contenues dans le
Mémoire 8c les Motifs , que le Comte de Briord avoit préL-ntez en date du
19. de Novembre. On trouvoit ces expreffions trop hautaines envers un
Etat Souverain. On fut d'ailleurs fort feandalifé d'une Eftampe , qui avoit
été faite à Bruxelles. Il y avoit le Portrait du nouveau Roi 8c un Lion à fes
pieds avec un Tapis où il y avoit les dix-fept Provinces, dont fept étoient
déchirées, auffi-bien que fept fleurons de la Couronne. D'ailleurs, il y avoit
la demande au nouveau Roi, afin qu'il rétablît fa Couronne entière. Quoi-
Tom. I. Ee que
238 MÉMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
1700. que cette Eftampe ne fût que l'Idée de quelque particulier, on prit les cho-
1 ■ fès fur un pied ferieux, 6c allez ufuel dans une République, fulceptible de
tout, lors qu'Elle prévoit d'être expofée à des dangers.
Le Comté de Eriord reçût de retour fon Courier , qu'il avoit dépêché à
fa Cour à caufe de fes préreniions pour l'Audience. Ses ordres furent de s'en
dêfifter, De forte qu'il fît fon Entrée le Mercredi 2.9. Décembre. Il fe ren-
dit le matin à Delft, où félon l'ufage le Maître d'Hôtel des Etats le régala.
Etant enfuite entré dans un Yacht des Etats il débarqua à moitié chemin, où
il trouva le grand Caroflé à 6. Chevaux des Etats, avec deux de leurs Dé-
putez. Ceux-ci le reçurent , 6c le firent entrer pour occuper feul le fond
du derrière, ÔC occupèrent le devant. La marche étoit précédée par un Ca-
roflé à 4. Chevaux du Maître de Hôtel de l'Etat. En lùite mai choient dix-
huit Valets de pied, avec une livrée qui ne fut pas admirée. L'Ecuier 6c
les Pages precedoient à Cheval le grand Caroflé de l'Etat. Celui-ci étoit fuivi
par 3. Carofles de l'Ambafladeur, où il y avoit fon Secrétaire 6c fes autres
Officiers. Un long Cortège d'environ foixante Carofles à fix Chevaux, à
quatre, Se à deux, fermoit la Marche. Dans quelques-uns de ces Carofles, il y
avoit quelque Perfonne de la part des Maîtres, 6c d'autres étoient vuides. Par-
mi ces Carofles il n'y en avoit point de la part dés Miftres étrangers 5 car, l'u-
fage en avoit été aboli , pour éviter les inconveniens de la précédence. Ce
font les Etats Généraux, qui envoient dire à ceux qui ont des Carofles de les
envoier au Cortège. Ils donnent pour le Cocher 6c le Portillon, à ceux de 6".
Chevaux quatre écus, deux pour ceux à 4. Chevaux, 6c un à ceux de deux.
Mais cette gratification fert auffi pour le Cortège, qui accompagne l'Ambaf-
fadeur à l'Audience publique le troifiéme jour. Dès que ce Cortège fut arri-
vé à laMaifon deitinée pour y traiter l'Ambafladeur ,les Députez des Etats for-
tirent les premiers du Caroflé, 6c lui donnèrent la main juiques à l'Apaitement
qui lui étoit deftiné. Mais, dès qu'ils l'y eurent inftallé, comme fi c'étoit fa
propre maifon , le Comte leur donna la main pour les conduire au Caroflé,
dans lequel ils montèrent, 6c les vit partir. Peu de tems après, fept Dépu-
tez des Etats avec le Greffier furent pour complimenter l'Ambafladeur , qui
les vint recevoir à la deicente de leurs Carofles. Il leur donna la main, 6c
les reconduifit de même , &: les vit partir. Le Vendredi , qui étoit le troifié-
me jour, deux Députez l'allérent prendre avec le même Cortège, pour le con-
duire à l'Audience. Les Gardes qui étoient à la porte de" la Cour prefenté-
rent les armes. La grande Garde dans l'intérieur de la Cour fe mit fous les
armes, 6c les Tambours battirent aux champs , les Officiers étant à la tête,
6c faiiant face à l'AmbaiTâdeur. Ccluici-ci defeendît au pied de la montée de
la grande Salle du Palais, par laquelle il pafia au milieu des deux Députez,
pour aller à la Chambre de l'Afièmblée des Etats. Là, il prit place dans un
Fauteuil de velours cramofi. Celui-ci eil deftiné pour les Amball'adeurs ; au
lieu qu'on n'en donne qu'un de Drcp aux Envoiez. Ce Fauteuil eit en en-
trant dans la porte de la Chambre vis à vis de celui du Préfident de femaine.
Les deux Députez prirent place aux deux cotez de l'Ambafladeur, 6c les au-
tres Députez occupoient le relie de la Table. Le Greffier étoit derrière le
Pré-
ET RESOLUTIONS D'E T A T. i^
Prélldent , debout, 6c chapeau bas, pendant toute l'Audience. Dès que le 1700.
Comte eut commencé fon Dilcours il le couvrit, 6c toute l'Aflèmblée desE- ■
tats en fit autant. Le Dilcours, que ce Miniftre fit, eft tel qu'il fuie.
„ MESSIEURS, Difcours
du Com-
„ TE viens donner, à Vos Seigneuries, de nouvelles alîurances de la conftan- 5|r- rii
„ J te amitié du Roi mon Maître , 6c du défir fincére , qu'il a d'oblèrver f0'n &n*
„ inviolablement la dernière Paix. Toutes les démarches, queSaMajefté a faj- dience
„ tes depuis qu'Elle a été conclue , ont dû convaincre le monde entier , publique
„ qu'Elle n'a eu d'autres vues que de maintenir par tout la tranquillité publi- Decem-
„ que. S. M. a crû en dernier lieu en donner une preuve convaincante en ac- brei7oc«
„ ceptant leTeftament du feu Roi d'Efpagne. En éfet, Elle établit cet équi-
„ libre fi fouhaité dans toute l'Europe j 6c fon union avec la Couronne d'Ef-
„ pagne ne fervira à l'avenir qu'à maintenir la Paix dans toute la Chrétienté.
„ C'eft le feul but qu'Elle s'ell propofé en renonçant à de fi grands avantages
„ poiir fa Couronne.
„ S. M, efpére, Meilleurs, que V. S. convaincues de cette vérité, cor-
refpondront à de fi favorables fentimens pour le bien public, 6c qu'Elîes
contribueront à la confervation d'un auflî grand bien que celui de la Paix.
Perfonne ne met en doute , qu'elle ne foit la fource de tous les biens ; 6c vô-
„ tre République eft la Puiffance de toute l'Europe qui a le plus d'intérêt de
„ la maintenir. Vous avez allez répandu de fang, pour établir vôtre Liberté;
„ 6c elle eft préfentement fi affermie, que vous n'avez plus qu'a jouir tranquille-
„ ment de vos longs travaux 6c de vos dépenfes infinies. C'eft par le moyen
„ de la Paix que vous maintiendrez cet Etat fi floriflant, 6c que vous aug-
„ menterez ce Commerce que vous avez étendu jufques aux extrémitez de la
„ Terre. Vôtre union fincére avec S. M. fera le fondement le plus folide de
la durée de cette Paix : fa Puiffance eft fi connue de tout le monde , qu'on
ne doit pas foupçonner que d'autres motifs que le bien public l'engagent à
defirer la Paix.
„ La fituation de Vôtre République eft telle, que non feulement Elle peut
conlèrver cette Paix chez Elle, mais encore beaucoup contribuer à la main-
„ tenir dans la plus grande partie des Etats de l'Europe. Pour parvenir à un
„ bien fi fouhaité, vous n'avez, Melîîeurs, qu'à bannir des foupçons mal fon-
„ dez, des craintes anticipées, 6c à fermer les oreilles aux follicitations des
„ ennemis 6c des envieux de la gloire du Roi. Rappeliez, Meilleurs, dans
„ vôtre mémoire cet heureux tems où par vôtre union avec la France , 6c
„ par une parfaite correfpondance , on travailloit à fe procurer mutuellement
„ toute forte d'avantages. Il dépend de V. S. de remettre toutes chofes
„ dans le même état. Par une telle conduite, vous obligerez le Roi de vous
„ continuer cette bien- veillance que vous avouez vous - mêmes vous être II
„ précieufe. S. M. ne vous demande pour tout prix/de fon amitié, que de
,, concourir avec Elle à maintenir cette tranquillité 11 utile , 6c 11 fouhaitéc
„ par toutes vos Provinces.
„ Ce feroit très -inutilement, Meilleurs, que je m'expliquerais plus ample-
Ee' 2. „ ment
Î5
5?
?»
5?
M° MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
l7co- „ ment fur tous les avantages de la Paix. -Cette Afîêmblée, qui eft compoféc
„ de gens (i fages, fi confommez dans les Affaires, Se fi zélez pour le bien
„ public, n'a fans doute d'autres intentions que de procurer un fi grand bien.
„ D'ailleurs, un homme de ma profeffion n'elt pas accoutumé à de longs dif-
„ cours. Je finis donc, en protelhnt à V-.S. que je tâcherai toujours de prou-
„ ver, plus par des effets que par des paroles, que jamais Miniibe ne viendra-
„ dans ces Provinces avec de meilleures intentions -, que j'ai, pour cette Illu-
„ ftre AfTemblée , toute la vénération qu'Elle mérite ; 6c que j'honorerai
„ toujours très- parfaitement tous les Particuliers qui la compolént.
L e Préfident de Semaine répondit à ce Difcours de la forte:
,, Monfieur, les fréquentes marques , que nous recevons tous les jours de
,, la bonté de Sa Majefté, nous.font efperer de poflêder entièrement l'hori-
„ neur de fa bienveillance fie de fon amitié.
„ Celles, que Nous venons de recevoir aujourd'hui, tant par la Lettre de Sa
„ Majetté , que par la bouche de fon Miniftre , Nous y confirment. Soiez per-
„ fuadé, Monfieur, que L.H. P. y feront toujours fort fenfibles, 5c qu'Elles
„ feront tous leurs efforts, pour travailler avec beaucoup de foin fie d'aplica-
„ tion à les conferver. Quant à leur eftime, refpect, & vénération pour le
„ Roi Très-Chrétien , ils ne prétendent pas d'en faire aucune proteftation ,
„ puis qu'Elles efperent, Monfieur, que vous en êtes affez perfuadé,Sc qu'El-
„ les font refoluës de faire voir par leur conduite jufques à quel point Elles
l'honorent.
„ Cependant, Monfieur, nous fommes très- ravis d'aprendre que Sa Maje-
ité a la bonté de continuer à garder des fentimens fi avantageux pour cet
Etat, & pour toute l'Europe.
,, Le foin, dont il lui plaira de s'apliquer à la confervation de la Paix gé-
nérale,fera toujours fécondé par celui deL. H. P., qui n'ont aucun autre but
au monde , que de voir bien établi le repos , la Paix , 2c la tranquillité dans
tous les endroits de l'Univers.
„ Quant à vous, Monfieur, Nous vous fommes très obligez de la peine
„ que vous prenez de venir ici ; mais bien plus particulièrement pour l'efli-
me que vous témoignez avoir pour cet Etat , fie dont nous avons déjà goû-
té les effets. Nous vous prions, Monfieur, de garder ces mêmes fentimens,
fie d'être abfolument perfuadé que L. H. P. y feront très-fenfibles , fie
qu'Elles auront toujours des confédérations toutes particulières à vôtre
égard, fie pour vos mérites.
55
55
>5
55
55
Apres cela, ce Comte fut reconduit à l'Hôtel des Ambaffadeurs avec le
même Cortège, fie avec les mêmes Cérémonies.
On fe divertit quelques jours auparavant d'une Avanture de ce Comte. Ce-
lui de [Fratijlaw , Envoie de l'Empereur, étoit arrivé de Vienne, pour palier en
Angleterre. Pendant qu'il attendoit un bon vent pour faire le trajet , il alla à
la Société chez une Dame. Le Comte de Briord, qui y joiioit à l'Hom-
bre , parut décontenancé de f.i préfence , Se renonça , ce qui lui fit faire la
bête.
ET RESOLUTIONS D'E T A T. 241
bête. On plaifanta là-deffus en regardant aux Affaires d'alors, comme fi 1700.
cette bévûë eut été un préfage de celles à venir. Il avoit peu de tems aupa- ■
ravant effuié une petite elpece de mortification. C'eft que comme le Danne-
marck tâchoit de flatter la France, à caufe de ce qu'il avoit fouffert, par la
Paix de Travcndâl, l'Envoie Danois Stocken, par la là-deffus avec le Comte
de Briord. Celui-ci fe laifla échaper qu'il faloit laiflèr faire aux deux Puiffan-
ces Maritimes, qui étoient les Précepteurs des Princes du Nord. L'Envoie
Stbcken en écrivit à fa Cour. Celle -ci en fit faire des plaintes à celle de
France, qui ordonna au Comte de Briord d'en faire Excule à l'Envoie St'oc-
ken , dont il s'aquitta.
Dans le tems des Cérémonies envers le Comte de Briord , Don Bernard» -
de ghtiros reçut une Lettre du nouveau Roi , pour les Etats Généraux. El-
le étoit datée du 18. Décembre , & avoit été écrite de Poitiers. Cet Am-
baffâdeur d'Efpagne en la préfentant y ajouta un Mémoire. On verra la te-
neur de la Lettre 6c du Mémoire, comme fuit.
la
■>•>
TRès-chers & grands Amis 6cc. Quoi que le Sr. Don Fi ancifeo Ber- Lettre
nardo de Quiros vous ait donné part de la mort feu Roi Carles du nou"
II. d'heureufe Mémoire , nôtre Sire & Oncle , 6c de nôtre avènement à Xf|" Roi
, la Couronne d'Efpagne, en vertu du Teftament par lequel il nous a appelle gneaux
„ à la Succeffion Univerfelle , comme fon plus proche 6c légitime Héritier, Etats
Nous fommes cependant fi perfuadez du defir que Vous avez d'entretenir Gêné-
avec Nous la même correfpondance , que vous avez toujours maintenu R
avec le feu Roi nôtre Predeceffeur, que Nous voulons vous donner les pre-
mières marques de nôtre Amitié en vous communiquant Nous mêmes cet
avènement. Ainfi, Nous ordonnons au Sr. de Quiros, Confeil 1er de nôtre
Confeil 6c Chambre des Indes , prefentement nôtre Ambaffâdeur Extraor-
dinaire auprès de Vous, de Vous rendre cette Lettre de nôtre part, &c de
„ Vous affurer en même tems , que nous ne fommes pas moins portez pour
„ vos avantages , que le Roi nôtre Sire , 6c Oncle, de glorieule mémoire.
„ Comme nous ne doutons pas, que vous n'ajoutiez une entière créance à ce
„ que nôtre Ambaffâdeur Extraordinaire vous dira de nôtre part, il ne nous
„ refte qu'à prier Dieu , qu'il vous ait très-chers 6c grands Amis en fà lâin-
„ te garde. Ecrit à Poitiers le 18. Décembre 1700.
Vôtre bien bon Ami ,
Philippe.
LOrs que le Souffigné Ambafladeur Extraordinaire d'Efp.igne fe donna l'hon- Memoi-
neur, de notifier à V. S. la mort du feu Roi Charles II. , les difpofi- [,edc, f
tions de fbn Teftament , 6c l'avènement de Sa Majefié Philippe V. fon facj^ur
Maître à la Couronne, il ne manqua pas de vous affurer en même tems de d'Efpa-
la ferme Réiolution , dans la quelle fe trouvent la haute Régence, 6c toute la gne àL.
Monarchie, de maintenir avec V. S. l'ancienne Amitié, Alliance, 6c Con- H. P.
fédération. Ces affurances, qui vous ont été depuis confirmées par des Let-
Ee 3 très
141 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
1700. tics de la Régence, adreflees directement à V. S. font d'une manière encore
" plus exprefle 6c plas particulière dans celle de Sa Majefté même , que le
Souflîgné AmbafTadeur Extraordinaire vous prefente ici. V. S. y trouveront non-
feulement des exprefîîons très-fincéres, d'eftime , 8c d'amitié ; mais auflî une
entière perfuafïon , que de la part de V. S. on contribuera tout ce qui fera
néceflàire pour l'entretenir. Ses ordres, 6c les inftructions du Souflîgné Am-
bafladeur Extraodinaire , font auflî précifément conformes à celajSccommeSa
Majefté ne doute point que V. S. ne reçoivent avec joie, Se félicitation , les
nouvelles de fon heureufe exaltation au Trône d'Efpagne, Elle lui a fingulie-
rement enjoint , d'emploier la créance , dont Elle le munit par les Roïales
Lettres ci-jointes, pour affûter de plus en plus V. S. qu'en fuccédant au feu
Roi dans fes Roïaumes 6c Etats, Elle lui a pareillement fuccédé dans les fen-
timens d'affection 6c bienveillance, qu'il avoit pour V. S. Fait à la Haïe le
zp. Décembre 1700.
Don Francisco Bernardo de Quiros.
Il eft à remarquer, que lors qu'il préfenta cette Lettre 6c ce Mémoire, le
Préfident de Semaine fit quelque difficulté de les recevoir, 6c pria même l'Am-
baflâdeur d'attendre quelques jours pour les remettre. Mais aiant dit, que
fes ordres étoient précis de la rendre, le Préfident les accepta, en ajoutant
qu'il ne devoit donc pas trouver étrange fi les Etats ne lui donnoient pas une
Réponfe auflî prompte qu'il le fouhaiteroit.
En même tems ledit Don Bernardo de Quiros fît fècretement imprimer feu-
lement une centaine d'Exemplaires d'une Lettre qu'on fupofoit écrite d'An-
vers. Son deffein étroit de la diftribuer aux Miniftres , 6c dans les Villes de la
Province de Hollande. Il fe flatoit que les raifons de cette Lettre influe-
roient beaucoup pour fubir les Loix de la France. On peut voir cette Lettre
par fa teneur.
Lettre MONSIEUR,
écrite
d'Anvers •«■ Ors que j'eus l'honneur de vous informer de la mort du feu Roi, Se du
Decem- Teftament plein de fageffe 6c d'équité, par lequel il avoit apellé le Duc
breiyoo. d'Anjou à la Couronne, je crûs vous donner tout à la fois deux nouvelles,
par Mr. dont l'une feroit capable de calmer entièrement les foucis , que l'autre auroit
N. à Mr. pU vous caufei-. Cependant, je vois par les Lettres, dont il vous a plû m'ho-
Hollan- norei"j que mes conjectures ne fe font pas rencontrées juftes. Vous me pa-
de. roiffez furpris 6c confterné. A vous entendre, le Teftament du Roi eft un
coup inopiné, 6c terrible, 6c va devenir la Source d'une infinité de maux 6c
de miféres. Je ne fai, Monfieur, quia pu vous fuggérer ces notions étran-
ges ; mais, je confefTe ne pouvoir comprendre comment un homme auflî éclai-
ré que vous a été capable de les recevoir j ni comment vous pouvez accor-
der des idées auflî contradictoires que celles, dont il femble que vous foiez
Î)révenu. Si vous craignez la grandeur de la France, pourquoi voulez-vous
'augmenter en détachant deux Roïaumes, 6c deux Provinces de l'Efpagne ,
pour
%
ET RESOLUTIONS D'E T A T. 24?
pour les lui donner? Et fi au contraire cette Couronne vous paroît peu re- I700«
doutable, pourquoi vous allarmez-vous de la penfée qu'elle pourra un jour — —■
vous faire la Guerre, 6c que vous n'auriez pas l'Efpagnc pour vous foûtenir?
La contradiction eft fenfible. Mais, comme ceux qui embraffent une mé-
chante Caufe, ont accoutumé de la foûtenir par de méchantes raifons, &
que j'entrevois à peu près celles que l'on vous aura alléguées pour vous infpi-
rer les fentimens où vous êtes, je veux bien entrer avec vous en quelque di£
cuflîon.
L'Affaire confifte en deux Points généraux, qui renferment en eux tout ce
qui peut être dit fur cette matière ; l'un de Droit, 8c l'autre de Convenance.
Dans le premier, il s'agit de favoir fi le Teftament du feu Roi Charles efl
jufte & conforme à l'équité j 8c dans le fécond, fi le Traité de Partage efl
plus convenable à l'intérêt commun de l'Europe, que ce même Teftament?
T'ai mis le Droit en premier chef, parce que toute Caufe qui en eft dénuée
tft infoûtenable, 8c parce aufîî que c'eft le point le plus clair, 8c le moins
embarrafle.
Effectivement , pour démontrer la juftice du Teftament du feu Roi dans le
Règlement de la Succeflîon, il fuffit de la fimple Expofition du Fait.
Philippe IV., Roi d'Efpagne, eut quatre Enfans de fes deux Mariages,
avec Elizabeth de France, 8c Marie-Anne d'Autriche} favoir, Marie-
Therese, Marguerite-Therese, Balthazar, 8c Charles.
Marie-Therese fut mariée en io"6o. au Roi Très-Chrétien Louis XIV.
8c a eu Pofterité. Marguerite-Therese époufa en 1666. l'Empereur
Leopold-Ignace aujourd'hui régnant, 8c eut une Fille, qui depuis a été
Femme de l'Electeur de Bavière, mais dont il ne refte point d'Enfans. Bal-
thazar mourut au berceau; cF Charles, après avoir régné }f. ans, vient
de mourir fans Pofterité. De forte que la Couronne a dû tomber en Ligne
Collatérale. Que toute perfonne, qui a jamais ouï parler de Succefllon, juge
maintenant où il faut chercher cette Ligne, 8c fi ce n'eft pas en celle , qui
tire fon Droit de Marie-Therese, préferablement à toute autre.
Vous me direz, fans doute, que cette Princefie, en fè mariant, renonça à fon
Droit de Succefîion , 8c qu'ainfi on n'eft à plus à lieu d'y revenir , pour le
faire valoir de nouveau. Mais, à cela, je vous repondrai par une diftinétion.
La Renonciation eft valable, 8c doit fubfîfter, eu égard au motif, 8c dans
le cas qui l'a caufée: j'en conviens. Mais, qu'elle doive avoir auffi lieu dans le
cas où ce motif n'exifte point, c'eft ce que je nie, 8c ce que l'on ne fimroit
foûtenir, fins renverfer toutes les Conft initions 8c Conventions du Monde.
Or le motif, qui avoit caufé la Renonciation de la Reine Marie-Therese,.
n'etoit autre que la crainte de voir les deux Monarchies réunies par Suc-
ceflîon dans une feule 8c même Perfonne. Le Fait eft notoire, 8c le Con-
tract de Mariage de ladite Reine Marie-Therese le porte formellement
Article IV., où il eft dit, que la Renonciation fe fait, afin que les deux
Couronnes, étant fi grandes 8c fi puiffantes, ne puiffent être' unies en une
feule, & que dès à grêlent l'on prévienne les occafions d'une pareille jonction,
Le Teftament du feu Roi Philippe, qui lùivit peu après, s'explique en ter-
mes
244 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
1700. mes peu differens, Article XVTT.,6c remarque expreflement que le motif de la
• ■ Renonciation eft pour prévenir les grands dommages qui pouvoient réfulter
de la jonction des deux Couronnes, 6c des Etats en dépendant.
Or^ je demande, où cft aujourd'hui l'exiltencc de ce cas? Eft-ce donc le
Dauphin, ou le Duc de Bourgogne, que le feu Roi vient d'apcller à la Suc-
ceflion? Ni l'un, ni l'autre. C'tlfc le Duc d'Anjou, fécond Fils de France,
& fort éloigné, félon Tordre de la Nature, de. parvenir à la Couronne de
France, puifque fon Aïeul, fon Père, 6c l'on Aîné, font, grâces à Dieu,
pleins de vie, 6c de fanté.
De plus , fupofons, ce que Dieu ne veuille permettre, que ces trois Auguf-
tes Têtes venant à manquer , le Roi Catholique d'aujourd'hui le trouvât
apellé à la Couronne de France, il ne s'en fuivroit pas de-là que les deux Etars
vinflent à fe réunir. Le Teftament du feu Roi y a pourvu, en ordonnant
qu'alors fon Succefleur feroit obligé d'opter ; & , au cas qu'il voulût préférer
la Couronne de France, le Duc de Berri fon puifné deviendrait Roi d'Efpa-
gne aux mêmes conditions.
j Je ne fai fi je me trompe , mais il me femble que des difpofitions de cette
nature font entièrement irréprochables. J'oferois même avancer , que fi un Par-
ticulier fe trouvant dans le même cas avoit tefté d'une autre façon,6c avoit vou-
lu régler autrement l'ordre de la Succefiïon, il n'y aurait point de Tribunal qui
ne déclarât fon Teftament nul.
Or, fi le Teitament du feu Roi eft jufte ,ce que l'on ne fauroit contefter,
comment pourroit-on s'y opofer juftement ? La juftice 6c l'équité font uni-
ques. Elles ne peuvent pas changer de nature, en changeant de Pais, ni pro-
téger en même tems deux Partis contraires. C'eft auffi ce que le Roi Très-
Chrêtien a très- bien reconnu. S'il iT avoit ipulu confulter que fes intérêts,
il s'en feroit tenu au Traité de Partage ; & , au hazard d'une Guerre , il aurait
cflaié de fe rendre maître des Provinces, qui lui étoient defignées: mais, l'é-
quité qu'il a remarquée dans le Teftament du feu Roi Charles, lui a fait
quitter toutes ces penfées. Il a vu que fon honneur, fa confeience, 6c la bon-
ne politique, ne lui permettoient pas d'entreprendre , par complaifance pour
des Etrangers, une Guerre, dont l'unique but feroit de ravir à l'on Petit- Fils
une Couronne, qui lui eft légitimement échue} mais qu'au contraire il trou-
verait dans le parti qu'il a pris toute forte de fureté , d'honneur, 6c d'a-
vantage
Le fentiment d'un fi grand Roi contre fes propres convenances , efi
fans doute d'un poids confiderable ; mais, ce qui décide entièrement la que-
ftïon, c'eft le contentement univerfel Se unanime de tous les Etats 6c Ordres
de la Monarchie. Jus ejî in regnis. On ne fiuroit nous coutelier le droit de
reconnoitre celui à qui nous devons obéir, 6c de juger s'il a les qualitez pour
cet effet. Cela eft fi vrai, que le feu Roi, avant que de difpoier de la Suc-
cefiïon, trouva neceflaire de confulter fes Confeils d'Etat 6c de Juftice, 6c que
ce fut fur leurs Confultes qu'il régla Ion Teftament de la manière qu'il fit.
Nous adhérons tous à ce Teftament , 6c reconnoiffbns le Duc d'Anjou pour
nôtre Roi Si Seigneur. En faut-il davantage ? Peut-il vous relier encore
quel-
ET RESOLUTIONS D'E T A T. 14;
quelque difficulté fur la queftion de droit. Je me perfuade que non; Sc,danscet- I703-
te fupofition, je paffe à la feconde,fàvoir celle de la convenance au bien public. *
Cette queftion paroit d'abord un peu plus embarraffée que l'autre,Sc elle l'eft
en effet; par ce que la plus part des hommes, portez à ne reconnoitre bienfeant
& convenable que ce qui favorife leurs intérêts particuliers , ne manquent ja-
mais de raifonnemens bons ou mauvais pour maintenir leur Thefe ; & que
dans l'Affaire dont il s'agit, ces mêmes intérêts particuliers, étant fort dife-
rens les uns des autres , il ne faut pas douter auffi que chacun ne fe faflè une
convenance publique à fa manière. Mais , pourvu qu'on veuille aporter ici de
la bonne foi, il ne fera pas mal-aifé de reconnoitre que leTeframent du feu Roi,
bien loin d'être d'une nature à devoir troubler la tranquillité publique , com-
me on le publie dans vos Provinces, il en a pofé les fondemens folides,Sc peut
fervir utilement à l'établir & à la rendre durable, pourvu feulement que de vô-
tre part Se de la part de l'Angleterre, on ne fe laiffe point engager mal à pro-
pos dans une Guerre, qui palîèroit pour la plus injufte du monde.
Je fai que vôtre Traité de Partage porte au frontifpice le Motif du Bien
public Se de l'affermiffement de la Paix "générale , Se je veux croire qu'en le
fàifant vous aviez réellement ce but en vûë. Mais, la première chofé que
je vous repondrai là-deflûs , fera la même que j'ai déjà eu l'honneur de
vous reprefenter touchant la Renonciation, c'eft-à-dire, que là où le Mo-
tif ceffe , la Conftitution Se la Convention cefîènt aufîï. Vous vous êtes
portez au Traité de Partage pour empêcher la Guerre , & il fe trouve
que bien loin de l'empêcher, il l'allumeroit dans le Monde ; donc, il doit
refter nul Se fans valeur. Que fi vous me dentandez comment ce Traité,
aiant été fait dans une fi louable intention , pourrait produire un effet fi
contraire à fa fin , je vous répondrai avec Mr. de Quiros , Ambaffadeur
Extraordinaire du Roi dans fon Mémoire aux Etats du 12. Octobre i5pp. ,
favoir ; „ Si les Puiffances qui recherchent ou qui font recherchées pour
„ de femblables Traitez n'ont en vûë que de rendre la Paix durable,
„ comme cela eft à croire , Elles doivent s'affûrer que ce ferait au con-
„ traire le moien d'allumer en Europe le feu d'une fanglante Guerre} Se
„ qu'en tel cas, non feulement on verrait prendre les armes d'un commun
„ accord à tout ce qu'il y a d'Efpagnols 8c d'autres Sujets de la Couron-
„ ne-, depuis les enfans de quinze ans jufques. aux vieillards de 60. -, mais
„ que plutôt que de fouffir le moindre Partage des Etats qui compolënt
„ la Monarchie, Se qu'on difpofât ainfi de leur fort, ils auraient recours à
„ tous les moïens légitimes, qu'ils jugeraient leur pouvoir fervir, quels qu'ils
„ puflènt être: fuivant en cela la Maxime, qui veut que dans les maux ex-
„ tremes , on emploie d'extrêmes remèdes ; Se fe confiant que Dieu, Pro-
5, teéteur du bon droit, favoriferoit leurs juftes efforts, Se le déclarerait
„ pour eux.
Voilà , Monfieur , ce qui rendrait vôtre Traité l'inftrument delà Guerre,
Se non pas celui de la Paix. Mr.de Quiros vous parloit en homme fincere,lors
qu'il vous faifoit ces Remontrances ; Se l'événement les a juftifiées , puis qu'à
peine a-t-on eu connoifTance de ce Teftament du Roi, en Efpagne, que tous
les differens Etats, qui compofent La Monarchie , ont déclaré qu'ils facrifie-
Tom. I. Ff raient
i4<5 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
1700. roient biens, Se vies, pour le maintenir , 8c pour s'opofer à toute forte de dé-
memhremcnt. J'efpére que vous ferez là-deims une ferieufe reflexion , Se que
vous ne rejetterez pas les offres amiables de Paix, Se d'Union, que l'on vous
fait tous les jours de la part du Roi & de la Nation. Il ne faut pas que vous
cédiez de nous confiderer comme vos amis , ni que la bonne correfpondance
qui va s'établir entre les deux Couronnes vous donne la moindre inquiétude.
Quoi que nous aïons reçu pour Roi un Prince de France, il ne s'enfuit pas
que nous devenions François pour cela , ni même qu'après avoir été animez
d'un zélé fi ardent, Se fi unanime, pour le maintien de l'honneur, 6c des pré-
rogatives de la Couronne, 8c pour la confervation delà totalité de la Monarchie,
nous nous defiitions de ce but honnête 8c jufte, maintenant que nous l'avons
obtenu. Vous devez, Monfieur, avoir meilleure opinion de la Nation Efpa-
gnole. On ne lui a jamais reproché d'avoir le cœur bas, ni d'aimer l'efclava-
ge, 8c Elle ne donnera pas fujet de le faire à l'avenir. L'amitié du Roi Très-
Chrêtien nous eft chère Se precieufe , Se nous ferons toutes ebofes poffibles 8c
juftes pour la cultiver Se conferver. Mais, quelqu'cftime que nous en fafîions,
Elle ne nous obligera pas à renoncer fans fujet a nos anciennes Alliances , Se
Confédérations. La conduite , que nous avons tenue par le pafie avec la Bran-
che d'Autriche en Allemagne, pourra vous faire juger de celie que nous tien-
drons à l'avenir avec celle de Bourbon en France. L'Union etoit étroite*
elle avoit été laiffée pour Maxime aux deux Branches par les anciens Fonda-
teurs : 6c de part Se d'autre on s'efrorçoit chaque jour de l'entretenir par tou-
rtes fortes d'égards , & de bienfeances. Mais cela n'empechoit pas que l'une
Se l'autre Branche ne tendît à les propres intérêts , Se avantages , dans toutes les
c'nofes où la Raifon d'Etat fe trouvoit engagée. Je n'en veux point d'autres
Exemples que ceux des Traitez de Munfter, de Nimcguc,Sc de Ris\vick,qui
tous trois ont été conclus feparcment, malgré les vives initanecs des Miniftres
rdpectifs de PAugufte Maifun ; ou bien la dernière Guerre , dans la quelle le
Roi Catholique ne s'engagea à la folliciration des trois Puiilances , que long-
terns après que l'Empereur s'y fût interefle.
Le peu d'Exemples que je vous cite entre plufieurs autres comme les plus
recens, 6c les plus remarquables , doivent iùffire pour vous faire connoître ,
qu'il n'y a parentage ni union qui puifTe engager un Prince fige à fe départir
de fes vrais intérêts pour faire plaifir à fon parent 6c à fon ami. D'où vous
devez conclurre deux chofes } l'une, que Sa Majefté ne le feroit pas, quand
même Elle en feroit fortement follicitée ; l'autre, que le Roi Très-Chrêtien
ne lui demandera jamais rien qu'Elle ne puifle faire avec julïice.
D'ailleurs , on fait avec certitude que Sa Majefté Tiès-Chrêtienne ne veut
point la Guerre 6c que toutes fes intentions font tournées du côté de la Paix.
Vous ne pouvez l'ignorer, Monfieur, après la preuve éclatante de Modération,
de Juftice, Se de DefinterefTement, que ce Monarque donna auflî-tôt après la
mort du Roi Charles II. en acceptant purement 8c fimplement les difpo-
fitions de fon Teftament dans le point de la S.icceifion. Mais bien moins en-
core à cette heure, puifque par un effet fingulier de fon affl-clion envers vous ,
8c de la propenfion à la tranquillité de l'Europe , il vous a fait faire des ou-
vertures les plus avantageufes du monde touchant la Barrière du Pais-Bas j
vous.
ET RESOLUTIONS D'E T A T. 247
vous offrant de concourir en ce point avec Sa MijcRé Catholique pour vous
procurer une raifbnrjahie fureté. Vous êtes bien pcrfuadé auffi, que dans la con- *
joncfcure prdente , l'Efpagne 11c fonge point à vous attaquer. Ainfi, voilà toutes
vos craintes, 6c vos fraïeurs, réduites à un avenir incertain, Se à des foupçons ,
Se des Ipeculations anticipées de ce qui pourrait arriver un jour. - Avoiiez-
moi , Monfieur , gu'il faut aimer bien peu fon repos , pour fe tourmenter réelle-
ment Se de fait fur des Idées d'une poiîibilité future , dont Dieu feul par fa
toute-feience peut pénétrer l'événement. Mais, fi en cela il y a peu de rai -
fon, il y en aurait encore moins à i'e porter fins caufe à une Guerre effective
fur des api eheniions vaines ; puifque ce ferait choifir dès à préfent , pour remè-
de, le mal le plus grand, que l'on pourrait craindre à l'avenir.
Quant aux bruits qui courent parmi vous comme fî l'on avoit deffein de
donner les Païs-Bas au Roi Très- Chrétien, en échange de quelque autre Pro-
vince, je puis vous affurer qu'ils font faux , artificieux , Se controuvez. Auffi,
vous n'y devez pas faire plus d'attention qu'à tant d'autres fupofitions auffi
groffieres que malignes , dont certains mechans Efprits remplifTent le public
par le moien des Libelles fatiriques qui paroiffent journellement fur ces matiè-
res, & qui certainement ne devoirent être fouferts ni de part ni d'autre. Non
feulement le Teftament du feu Roi défend expreffement , Article 1$. 6c fo. de
faire dans la Monarchie aucune forte d'aliénation , ou de feparation , même
en faveur des Enfans du SuccefTeur j mais, ce qui eft encore plus fort, 8c fait
voir clairement le peu de fondement de ces bruits, c'eft que l'intérêt de la
Couronne ne peut pas compatir avec un femblable Démembrement ; fur-tout
dans une Partie de la Monarchie auffi confiderable que le Païs-Bas , de la pof-
feffion duquel dépendent nos principales relations avec les Puifîànces du
Nord , 6c diverfes autres convenances 6c confiderations d'Etat non moins
grandes que celle-là.
D'ailleurs, quelle aparence y a-t-il que nous puiffions abandonner ces Pro-
vinces , pour la confervation defquelles nous avons combattu tant d'années Se
depenfé tant de millions , maintenant que par le moien de la bonne intelligen-
ce, dans laquelle nous allons vivre avec la Couronne de France , nous avons
lieu d'éfperer de les poffeder en repos, Se de les voir fe rétablir par une longue
Paix de leurs dommages paffez. Non, Monfieur, vous ne devez pas le croire.
Les Flamands ont marqué trop de fidélité , trop de confiance , Se trop de zélé
dans leur Union à la Monarchie : l'amour que les Efpagnols leur portent , en
confideration de ce qu'ils ont foufrert pour le maintien de cette Union , cil
trop grand} Se enfin il y a entre les deux Nations une eftïme trop mutuelle,
pour permettre jamais ni aux uns ni aux autres de confentir à une feparation.
Auffi, a-t-on peu fongé à faire fortir de ce Pais les Troupes Hollandoifes , pour
y faire entrer celles de France. Tout ce qu'on vous débite là-deffus ne tend
qu'à vous jetter mal à propos en des foupçons , capables de produire de très-
mechans effets. Ne vous y biffez donc point furprendrej Se fur tout prenez
garde que les vaines alarmes que vous avez déjà témoignées , en faifant mar-
cher vos Officiers avec tant de précipitation dans les Garniibns de Flandre, Se
de Luxembourg , ne vous engagent encore en quelque autre démarche con-
traire à yos intérêts. Je vous l'ai déjà dit , Se on l'a fait entendre à Meifieurs
Ff 1 les
1700.
z+$ MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
les Etats d'une manière, qui ne fouffre point d'équivoque. Il ne tiendra qu'à
vous que le Pars-Bas Éfpagnol ne vous ferve de Barrière à l'avenir comme
par le parle. Mais , vous jugez bien que le moïen de vous conferver cette Bar-
rière ne feroit pas de faire la Guerre à l'Efpagne. Ce ieroit au contraire celui
de la perdre, & d'ouvrir la porte aux Armées ennemies, de les-introduire juf-
ques au cœur de vôtre Pais , Se en un mot d'attirer fur vous tous les maux
que vous craignez.
Quelques Avis d'AmfterJam portent que l'on arme pluficurs Vaifleaux dans
ce Port , Se qu'il y a fur le tapis un deflein pour les envoier aux Indes d'Ef-
pagne, afin d'y faire reconnoître l'Archiduc de gré ou de force. Je veux,
croire qu'il n'en eft rien, Se que ces Avis font mal fondez. Mais,fupofé qu'ils
fe trouvaient bons, je ne pourrois m'empêcher de vous dire que jamais Con-
feil plus pernicieux que celui-là n'auroit été donné à Mrs. les Etats. La
chofe cil; fenfible; car enfin, ou cet Armement feroit peu confiderable, ou il
le feroit beaucoup. S'il étoit peu confiderable, vous jugez bien qu'il devien-
droit dès lors inutile. Ce n'eit pas avec dix ou douze Fregattes qu'il faut en-
treprendre de fi grandes Expéditions. Et s'il étoit grand Se fort, tout l'avan-
rage que vous en retireriez, c'en: que vous laiiîeriez ici vos côtes expofées 6c
vos Marchands à l'abandon, tandis qu'avec beaucoup d'oftentation Se de dé-
penfe vous iriez chercher les Avantures à l'autre bout du monde, Se tenter une
Révolution d'un fuccès d'autant plus douteux Se difficile, que les François ne
manqueroient pas fans doute de s'y trouver aufii-tôt que vous, pour nous prê-
ter la main, Se nous aider à vous y bien recevoir.
Voulez-vous donc m'en croire? Mettez fin à vos méfiances; ne différez
plus a rendre à Sa Majefté l'honneur qui lui eft dû à fon Avènement à la Cou-
ronne. Montrez-vous amis des Efpagnols, & ne vous portez à aucune nou-
veauté. Par ce moïen, vous obtiendrez ce que vous avez eu en vûë: le Païs-
Bas icra toujours vôtre luretéj la liberté de vôtre Commerce ne recevra au-
cune atteinte > & vous trouverez dans la Nation Efpagnole une corrcfpon-
dance & une amitié réciproque. Vous voiez , Monfieur, que je ne vous donne
pas des Confeils intereflez; du moins devez-vous le voir. Car enfin envoïez
des Ambafîadeurs pour féliciter Sa Majefté, ou n'en envoïez pas;opofèz-vous
à fon exaltation, ou marquez-en de la joïe; il n'en fera ni plus ni moins Roi
Se Monarque Univerfel de toute l'Efpagne au grand contentement de fes Peu-
ples. Le plus grand malheur qui pût nous arriver, fi vous veniez à nous fai-
re la Guerre , feroit de nous défendre, Se je vous donne à considérer, fi
dans une telle occafion les fecours du dedans Se du dehors nous manque-
roient.
Si toute l'Europe a para furprife , émerveillée, Se ind ignée, quand vous avez
entrepris de partager les Etats d'un Roi vivant , à combien plus forte raifon
entrera-t-elle dans tous ces fentimens , fi elle venoit à reconnoitre qu'aulfi-tôc
apiès fon trépas vous voulutfiez prendre les armes contre fon légitime Succef-
feur, Se empêcher l'exécution d'un Tcftament , qui n'a pour objet que la
confervation des anciens Domaines de la Monarchie, Se la tranquilité publique?
Encore un coup, vous devez y réfléchir mûrement, a vaut que de palier outre
en une chofe de cette importance. Une Guerre auffi injufte que ce feroit
cel-
ET RESOLUTIONS D'E T A T. 249
celle-là ne pouroit pas être favorifée de Dieu. A la vérité, il vous feroit aifé 1700.
d'y entrer, mais fort difficile d'en fortir avec avantage. Songez aux maux ■
fans nombre qu'elle en traineroit après elle , & fur tout au préjudice qu'elle
cauferoit à vôtre Commerce , à celui de l'Angleterre , & enfin à tous vos
Marchands, qui négocient fi avantageufement dans les Ports d'Efpagne, de
France, & d'Italie. Il n'y aurait plus rien à faire pour eux en tous ces Ports.
Une fimple Efcadre aifée à entretenir leur fermerait pour toujours le Détroit
de Gibraltar, & par conféquent la Méditerranée, d'où dépend le riche Com-
merce du Levant. Cadix , qui leur fert de Cief Se de Canal pour faire cou-
ler dans leurs Coffres la meilleure partie des Trefors du Nouveau Monde,
leur feroit auffi fermé ;&z qui fait fi la Fortune inconftante , venant à changer
de Parti dans le Nord , ne vous ôteroit point encore la Mer Baltique , Se ne
vous réduirait point par ce moïen à la déplorable extrémité de manquer de
pain, Se de ne pouvoir pas en obtenir pour de l'argent.
Ne m'allegue7. point vos Forces Maritimes. Je lai qu'elles font grandes }
mais , je fai en même tems qu'elle coûtent beaucoup , auffi bien que les Trou-
pes étrangères que vous pourriez obtenir des Princes d'Allemagne ; & qu'ain-
lî, il vous fera très difficile de les entretenir. D'ailleurs, l'expérience ne vous
a-t^elle pas fait voir pendant toute la demierre Guerre, que malgré les nom-
breufes Flores que vous équipiez tous les ans avec l'Angleterre, les François
vous ont enlevé un nombre infini de Vaiffeaux à l'embouchure même de vos
Ports? Que fera-ce donc , s'ils viennent à unir leurs Forces Navales à celles des
Efpagnols, après avoir mis ces derniers en bon état, comme il leur fera très-
facile, pour peu qu'ils veuillent ouvrir leurs Magazins & donner une partie de
leur fuperflu? N'eft-il pas à craindre que la même chofe n'arrive encore une
fois? Je ne dis rien de la difficulté que vos Flotes trouveraient à tenir la Mer
dans les tems orageux , fans pouvoir fe réfugier en aucun Port d'Efpagne
ou de France. Peut-être efperez-vous, qu'à leur défaut, ceux de Portu»-
gal vous feront ouverts j mais, outre que la chofe eft encore douteufe, puif-
que vraifemblablement Sa Majefté Portugaife gardera de grandes mefures
avec les deux Couronnes , cette feule relfource ne fuffiroit pas pour vous
mettre à couvert de tout danger. Mais, c'eft à vous d'y penfer} l'Affaire
vous regarde. Pour moi , qui n'ai pris la plume , que pour vous donner un
Confeil falutaire , 8c vous détourner de prendre des engagemens qui pour-
raient vous devenir préjudiciables, j'attendrai avec patience l'ifluë de tout
ceci j Se je vai finir ma Lettre , après vous avoir conjuré de pefer mûrement
les chofes que j'ai eu l'honneur de vous dire. Sur- tout, Monfieur, je vous
prie de bien confiderer , que s'il eft vrai qu'il foit nécefiaire au bien commun ,
qu'il y ait en Europe une Puiffance capable de contrebalancer celle de la
France, il n'eft pas à propos de chercher à aftoiblir celle d'Efpagne; Se qu'en-
fin,s'il n'y a que la fureté de la Barrière qui vous fafië de la peine, vous avez
lieu de vous mettre l'elprit en repos, puifque l'on eft diipofé à entrer là-
deflus en tout équitable Accommodement ; & qu'il ne dépend abfolument
que de vous d'obtenir ,dès à préfent , par les voies de la douceur, le plus
grand avantage que pourriez eipérer par celle d'une longue Guerre , quand
même vous la feriez avec fuccès, ce qui néanmoins eft fort douteux. En
Ff 5 un
ifo MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
xyCfO. un mot, Monfieur, £c pour conclufion, il Haut que vous conveniez qu'il n'y
— — ■ a Intérêt quelconque, ni Raifon divine ou humaine, qui puille vous confeillcr
de prendre les armes contre les Efpagnols vos anciens AmisSc Alliez , unique-
ment parce qu'ils ne veulent pas fouler aux pieds les laintes & dernières Dif-
pofitions de leur Roi, donner les mains à leur propre dellruétion 5c démem-
brement, & fe rendre coupables de rébellion envers celui que Dieu leur a don-
né pour légitime Roi ôc Seigneur : mais , que plutôt , vous devez rendre à
Dieu des attions de grâces infinies, de vous avoir heureufement tirez du ter-
rible embarras , dans lequel vous feriez infailliblement tombez par les fuites
d'un Traité aulfi généralement delaprouvé , même en Angleterre & en Hol-
lande, que l'étoit celui de Partage. Je fuis,
Monfieur, &c. &c.
L'Ambassadeur de Suéde fe donnoit cependant beaucoup de mouvement,
tant envers les AmbafTadeurs de France 6c d'Efpagne, qu'envers les Etats Gé-
néraux. Cela attira des ordres au Comte de Briord de lui témoigner de la
part de SaMajefté Très-Chrêtienne,qu'Elle aprenoit avec plaifir les foins que
ce Miniftre Suédois prenoit pour exhorter les Etats Généraux à la conferva-
tion de la Paix. On remarqua que par fa conduite il ambitionnoit une nou-
velle Médiation.
On ne tarda pas de voir un Livret, fous le titre de Réflexions fur la Lettre
d'envers, qu'on vient de raporter. On jugea que les Réflexions valoient de
beaucoup plus que la Lettre. Mais , comme ce Livret n'étoit que la produc-
tion d'un Particulier,, quoi qu'on en débitât plufieurs milliers , on fe parfera
de le raporter ici.
Voilà en quel état ctoient,à la fin de l'An 1700, les Affaires dont on a fait
raport , & qui fervent comme d'Introduction pour celles d'Importance qui
s'en font enfuivies.
Fin de l'Année M D CC.
MEMOI-
MEMOIRES,
NEGOTIATIONS.
TRAITEZ,
E T
RESOLUTIONS D'ETAT.
ANNEE M. D C G I.
è^^éèPI^^ commencement de l'Année i70i.,il parut un petit Traité en 1701.
<-rrj« ,^îh Latin. Il portoit pour titre, Synopfts quorundam Jurium Au- '
gpfc A 5S fîriacorum, ôcc. Il tendoit à établir des Droits delà Maifon
ï$t Hf? ^'Autriche à la Succeffion de la Monarchie d'Efpagne. On
^7y^<,^MiS\ 'e fàauifit même en François, & fut imprimé en cette Lan-
i%fâbs>ic'*'ïSn* gue. Comme il n'étoit que la production de quelque Particu-
lier, on trouve à propos de ne pas l'inférer ici. C'eft d'autant que l'on veut
ne reporter que des Pièces autentiques, 6c autorifées.
Dans les feabreufes circonftances où l'on étoit, la fageflè des Etats Géné-
raux leur infpira de prendre des précautions pour la fureté de la République.
C'étoit en cette vue que leurs Députez avoient tenu une Conférence avec
ceux du Confeil d'Etat. Le fujet en étoit quelque information qu'on avoit
prii'e, que les Magafins de l'Etat, & fur tout des Frontières, n'étoient pas
bien pourvus. Auffi fut-il rélblu le 20. de Décembre précédent, de prier le
Confeil d'Etat de dreflèr & prefenter une Pétition ou Demande de deux mil-
lions. Cette fomme devoit fervir à acheter des Munitions & autres néceffitez
requifes à ces Magafins.
Tout le monde étoit généralement la bouche béante dans l'attente de ce
qui le pafferoit en Angleterre. Le Roi Guillaume, depuis fon retour en
ce Roïaume-là, prorogea le Parlement jufques au 17. de Janvier 170 1. Bien
des gens furent furpris d'une prorogation fi éloignée du tems que le Parle-
ment avoit accoutumé de s'afîémbler fous fon Régne. Cependant, après de
plus mûres réflexions , on s'aperçût que le Roi l'avoit fait pour deux fins.
L'une étoit, pour attendre le parti que les autres Puifiances prendroient fur les
nouvelles & fort feabreufes Affaires d'Efpagne. Ce Roi prevoïoit que les dé-
marches des autres Puiflances pourraient beaucoup influer fur l'elprit de la
Nation Anglôife. L'autre étoit, pour faire que les Réfolutions du Parle-
ment
tft MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
170 1. ment d'Ecoffe puflcnt fervir d'exemple à celui d'Angleterre. Cet exemple
— devoit aparemment être de grande efficace , puis que les Réfolutions avoient
tourne d'une manière fort favorable à la Cour Britannique. Non feulement
on y avoit accordé au Roi de gros Subfides, mais on lui avoit même permis
de conferver les Troupes qui étoient fur pied en ce Roïaume-là. Ce qui eut
le plus d'influence pour faire prendre ces Réfolutions, fut l'inclination que le
Roi témoigna à donner les mains à toutes les Affaires de la Religion Presbite-
rienne, dont les Ecoffois étoient opiniâtrement entêtez. Cela fit même que
l'intèreffant obftacle de l'Affaire de Darien, qui fut mife fur le tapis, avoit
été ajournée, & vemtizftne die, par où l'on n'en parla prefque plus.
Cependant, Sa Majefté Britannique commença à flotter, fi Elle devoit
faire tenir le Parlement dans le tems auquel il avoit été prorogé, ou fi Elle
devoit le caflèr, & en convoquer un nouveau ? Suivant l'Aète du Parlement
triennal, celui qui fubfiftoit pouvoit encore tenir une Séance. L'efprit Whig
y dominoit, 6c. les principaux de ce Parti fe donnoient beaucoup de mouve-
ment pour la tenue de la Séance. Les aparences pouvoient même les flater
de quelque bon fuccès. C'étoit d'autant plus que les Chevaliers Jean How,
Seymour, Musgrave, 6c Harcourt, qui avoient été les plus opofez, & même
ouvertement, aux intentions du Roi dans la Chambre des Communes pendant
les précédentes Seflîons, furent trouver Mylord Portland. Ils lui dirent que
les conjonctures courantes les obligeoient à vouloir fervir le Roi. C'étoit
pourquoi ils le prioient de ne pas caflèr encore le Parlement. La raifon en
étoit, parce qu'il fe fourreroit peut-être quelques Membres d'un tempéra-
ment affez turbulent, pour traverfer les plus falutaires Réfolutions. Ces qua-
tre étoient à la tête d'un Efcadron volant, qui à l'aide de quelques Amis, qui
par ignorance, ou par déférence, opinoient du Bonnet, taifoient pancher la
balance du côté qu'ils vouloient. Le Roi tint plufieurs Confeils pour délibé-
rer fur la caflàtion du Parlement. Les Whigs, qui étoient du Parti domi-
nant, tâchoient de complaire au Roi, pour fe maintenir. Les Thons en fai-
foient de même , pour tâcher de reprendre le deflus. Cette ambitieufe émula-
tion étoit une reflburce au Roi pour venir à bout de fes deffeins. Les Whigs
avoient le plus contribué à l'élever fur le Trône. Il eft vrai que bien-tôt
après il favorifa le Parti Thori. Il fut pourtant obligé, après la déroute de la
Flotc de Smirne, de s'abandonner de nouveau au Parti Whig. De forte,
que voulant faire reprendre le defllis aux Thoris, cela ne pouvoit bonnement
fe fiiire fans la Convocation d'un nouveau Parlement. Quoique l'Acte Trien-
xial fixât la tenue des Parlemens, il étoit au pouvoir du Roi de le caffer à fa
volonté. Comme cet Aéte a Elit beaucoup de bruit , quoi qu'il ait enfuite
été changé 6c révoqué depuis l'Avènement du Roi George à la Couronne
par un autre qui l'a tait Septcnnaire, on croit de faire plaifir au Leèteur d'eu
inférer ici la Traduction, ainfi qu'elle fuit.
„ L'Année fixiéme du Régne de G u 1 l l a u m e & de Marie , Roi &
„ Reine d'Angleterre, d'Ecoffe, de France, Se d'Irlande.
„ Dans le Parlement commencé à Weltminitcr le 2.9. de Mars de l'Année'
„ du Seigneur 1689, de la féconde Année du Régne de nos Souverains Sei-
,', gneur 6c Dame, Guillaume 6c Marie, pur la Grâce de Dieu, Roi
„ 6c
ET RESOLUTIONS D'ETAT. zfj
„ Reine d'Angleterre, d'Ecoffé, de France, 6c d'Irlande, Défenfeurs de la 1701.
„ Foi, 8cc. =—
„ Et de là continué par diverfes Prorogations 8c Ajournemens jufques au
„ 12. de Novembre 1694, étant la fixiéme Séance du prefent Parlement.
„ Acte pour de fréquentes Afièmblées, 8c Convocations des Parlemens.
„ D'autant que par les anciennes . Loix êc Statuts de ce Roïaume , on
„ doit tenir de frequens Parlemens, 8c d'autant que de frequens 8c nouveaux
„ Parlemens tendent beaucoup à l'heureufe Union 8c bonne Intelligence du
„ Roi 8c du Peuple, Nous les très-fidéles 8c très-obéïiïans Sujets de Vos
„ Majeftez les Seigneurs Spirituels 8c Temporels., 8c les Communes, affém-
„ blez dans le prêtent Parlement, liiplions très-humblement Vos Majeftez
„ qu'il puiffe être déclaré 8c paiïe en Acte dans le prefent Parlement ; èc il
„ ell par-là déclaré .8c paiïe en Acte par Leurs Majeftez le Roi &c la Reine,
„ par 8c avec l'avis, èc le confeiitement, des Seigneurs Spirituels 8c Tempo-
„ rels, 8c des Communes, affëmblez dans le prefent Parlement , 8c par leur
„ Autorité, que par l'avenir il fera tenu un Parlement du moins une fois en
„ trois ans.
„ Il eft d'ailleurs paiïe en Acte par Ladite Autorité, que dans trois ans au
„ plus, depuis 8c après la diffblution du prefent Parlement, 8c ainfi de tems
„ en tems à jamais ci-après, depuis, 8c après la fin de chaque autre Parle-
„ ment , on dépêchera des ordres légitimes fous le Grand Seau , par la di-
„ rection de Vos Majeftez, vos Héritiers , 8c Succeffèurs, pour la Convoca-
„ tion, PAflèmblée, 8c la Tenue d'un autre nouveau Parlement.
„ Il eft de plus paiïe en Acte par ladite Autorité , qu'à l'avenir aucun Par-
„ lement, quel quecefoit, qui fera en aucun tems ci-après convoqué, af-
„ femblé, 8c tenu, ne pourra être continué plus long-tems que feulement
„ pour trois ans au plus, à compter du jour, auquel par les ordres le Parle-
„ ment fera fixé de s'affëmbler.
„ tl eft de plus paiïe en Acte par ladite Autorité, que le prefent Parlement
„ ceffèra 8c finira au premier jour de Novembre, qui fera dans l'Année de
„ Nôtre Seigneur mille fix cent quatre-vingt àc feize , à moins que Leurs
„ Majeftez ne trouvent à propos de le diiïoudre plutôt.
L'on croit qu'il ne déplaira pas au Lecteur d'ajouter ici, le plus fuccincte-
mentpoiïible, quelques Èclairciiïèmens. En premier lieu, l'on pourroit trou-
ver étrange de voir dans le Titre, que c'eft la féconde Année du Régne de
Leurs Majeftez, que le Parlement avoit commencé le 20. Mars 1689. C'cft
puis que Leurs Majeftez n'avoient été déclarées Roi 8c Reine, que le 1 2. Fé-
vrier de 1689. Sur quoi il clt à remarquer, que fuivant Village d'Angleterre
cette Déclaration n'auroit dû être comptée que pour l'Année 1688. C'eft
parce que l'on n'y commence à compter l'Année qu'au ij. de Mars. De for-
te, qu'il le trouvoit que le 20. de Mars de l'Année 1600., n'étoit en Angle-
terre que le 20. dudit mois de Mars de 1689, 8c que la féconde Année de leur
Régne avoit commencé dès le 1 3. de Février. En fécond lieu, l'on doit re-
marquer que les Bills, qui font les Projets des Actes, ne s'apellent pas de ce
dernier nom, que lors qu'ils ont le confentement du Roi, car alors ils partent
en Acte, qui eft une Loi. Pour avoir force de Loi, il faut le confentement
7 îom, L G g des
if 4 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
1701. des trois Parties ConfHtuantes, favoir , de la Chambre des Seigneurs , de celle
' des Communes, 6c du Roi. Aulîî ce Bill triennal, quoi qu'aprouvé par les
deux Chambres, ne pâfîa-t-il pas en Aâe pendant deux fois, parce que le
Roi refuia d'y donner fon confentement. Enfin, en troifiéme lieu, il eft à
remarquer que le Roi a le droit de proroger le Parlement, & de le diiîbudrej '
mais, il ne peut pas l'ajourner. La raifon en eft, que c'eft un Privilège des
Chambres de s'ajourner Elles-mêmes. Il eft vrai, que le Roi peut leur com-
mander de s'ajourner dans leur Affèmblce jufques à tel :.our qu'il trouve à pro-
pos de leur preferire. Il eft auffi bon de lavoir la différence qu'il y a entre
Prorogation Se Ajournement. Lors que le Roi proroge le Parlement, quand
• ce neferoit que pour un jour, toutes les Affaires, qui font fur le tapis, quoi
qu'avancées, Se même les Bills prêts à palier en Acte, tombent, comme fi l'on
n'en avoit jamais parlé: au lieu que par l'Ajournement, toutes les Affaires en-
tamées fubfiftent, 8c on les avance lors que le Parlement s'affemble au jour de
l'Ajournement, ou des Ajournemens; car une Séance peut durer long-tems ,
en s'ajournant à plufieurs reprîtes.
Le Roi trouva enfin à propos de Caffer le Parlement, Se d'en convoquer
un nouveau. L'avant - coureur de cette Réfolution fut quelque changement
dans le Miniftére. On révoqua la Commiffion d'un des Secrétaires d'Etat,
favoir, de Vernon, qui de premier Commis, devint Secrétaire d'Etat lui-
même, & qui étoit un fort laborieux Whig. Le Chevalier Hedges, qui
étoit Thori, fut mis à fa place. On donna, à Mylord Godolphin, la Char-
ge de Premier Commifiàire de la Treforerie. Il étoit Thori , quoi que dans
la fuite les Conjonctures l'aient fait habilement changer de Parti. Il fut fub-
ftitué à un nommé Smith, grand Partifan des Whigs. Cette Caffation du
Parlement, qui influa fur l'efprit de la Nation, pour détefter le manque de
foi de la France, par raport, au Traité de Partage, fut publiée par une Pro-
clamation de la teneur fuivante.
«Guillaume R.
„ TPV Autant que Nous avons trouvé à propos pour diverfes importantes Se
„ jLJ grandes Considérations , Se de l'Avis de nôtre Confeil Privé, de caffer
„ ce preiént Parlement , qui eft à cette heure prorogé au Jeudi 6 , ( Vieux
„ Stile) de Janvier prochain > Nous publions à cet effet notre prefente- Pro-
„ clamation Roïale, Se caffons par icelle ledit Parlement. De forte, que les
„ Seigneurs Spirituels Se Temporels, Se les Chevaliers, Citoïens, Se Bour-
„ geois, Députez au Parlement preiènt, font exeufez Se exemptez de s'af-
„ fembler ledit jour du 6. du mois de Janvier prochain. Et, afin que Nos
., Amez Sujets voient la confiance que Nous avons en leur affeélion, Se com-
„ bien Nous fouhaitons de Nous trouver avec eux, Se avoir leur Avis, étant
„ aflemblez en Parleraient, Nous faifons favoir par la prefente Proclamation
„ à Nofdits Sujets, qu'à caufè de quelques Affaires de la plus haute confé-
„ quence pour ce Roïaumc, Nous avons defièin de donner Nos ordres au
„ Garde de Nôtir Grand Sceau, d'expédier des Lettres Circulaires, félon les
„ véritables formes des Loix, pour convoquer un Nouveau Parlement, qui
s, com,-
ET RESOLUTIONS D'E T A T. ifr
„ commencera fes Séances àWeftminfter le Jeudi fixiéme du mois de Février 170 1.
„ prochain. Donné à nôtre Cour de Kenfington le ip. de Décembre 1700, ■
„ 6c de nôtre Régne le douzième.
I l falut au Roi tout ce tems , pour l'Afîemblée du nouveau Parle-
ment, parce que, fuivant les Loix, il faut l'efpace de fix fem aines pour l'é-
leciion des differens Membres des Communes. Ces Membres prennent diffé-
rens noms, Ceux, qui font élus par les Provinces, s'apellent Chevaliers > ceux,
qui font élus par les Villes, qui ont droit d'envoïer des Députez au Parle-
ment, s'apellent Citoïensj 6c ceux , que les Bourgs élifent, s'apellent Bour-
geois.
Pendant cet intervalle en Angleterre, il y en eût auffi un en Hollande,
qui fufpendit pour quelque tems les Négociations avec la France. La raifon
en vint par une fàcheme incommodité du Comte de Briord. Cet Ambafîâ-
deur voulut, félon l'ufage, régaler, après fon Audience publique, quelques
Membres des Etats Généraux. Le repas dura long- tems. Il fe fentit preffé
de faire de l'eau, 6c il crût être de la civilité de ne pas fortir de table pour
fatisfaire à cette néceffité. Cela lui caufa une rétention d'urine , qui le mit
aux abois. Il fallut pour le foulager faire venir des Chirurgiens d'Amfterdam.
Ceux-ci fe fervirent de la ponction, qui, n'aïant pas beaucoup d'effet, fut fui-
vie de la taille. L'indifpofîtion de ce Comte continuant, fon Secrétaire dé-
pêcha la nuit du 6. au fèpt de Janvier un Exprès à Verfailles , pour y porter
ce contre-tems. La Cour réfolut d'envoïer à la Haïe le Comte àïAvaux^
afin de ne pas interrompre les Négociations. Il n'y arriva cependant qu'au
commencement du mois de Février fuivant, ainfi qu'on le dira en fon tems.
En attendant qu'on ait lieu de parler de ce que ce nouveau Miniftre fit à la Affaires
Haïe, on reprendra ce qui regarde la Guerre dans la Livonie. On a déjà dit dÇ évo-
que le Czar avoit affiegé Narva, 6c que le Roi de Suéde alla avec une poignée nie'
de monde pour fecourir cette Ville-la, qui étoit la plus preflee. Il avoit def-
fein d'aller, après ce fecours , mettre en bon état les Villes de Revel 6c de
Riga, qui étoient contées pour les deux Mamelles de la Livonie. Le fècours
de Narva fut donné d'une manière fort glorieufè pour le Roi de Suéde.
L'AmbafTadeur de ce Roi, Lillienrooth, en reçût la Relation de la Chancellerie
de Stockholme. Elle avoit tardé à arriver à cette Capitale-là, parce que l'Ex-
près du Roi qui la portoit ne pût y aller par Mer , à caufe des vents contrai-
res. Ainfi , il lui avoit falu faire par terre le tour du Golphe Bothnique. On
met le précis de cette Relation, à caufe de quelques acceflbires qui y font rela-
tives, ainfi qu'on pourra voir dans la fuite.
RELATION.
<n T E 2,3. Novembre nouveau ftile le Roi de Suéde marcha de Wefemberg
„ L» qui étoit à la diftance de quinze lieues de Narva._ Il n'avoit avec lui
„ que huit mille hommes. Sa marche fut fort difficile. Il lui falut franchir
3) des chemins impraticables, des défilez très-rudes, Se traverfer un Païs brûlé ,
G g x „ brouté
zf6 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
I701' „ brouté, & defolé par les Mofcovites. Il n'y trouva la moindre chofe polir.
" „ la fubfiftance des Soldats, 6c pour la pâture des chevaux. Le Roi arriva le
„ ip. à Lagent fitué à une lieue 6c demi de Narva. Pour y arriver, il lui
„ avoit falu s'ouvrir divers paflàges de difficile accès , 6c gardez par fix mille
„ Mofcovites fous les ordres de Scheremetof. Celui-ci avoit fait pafler la
„ Rivière de Puhajoggi à fes Fourageurs. Ceux-ci, furpris par l'Avantgarde
„ des Suédois, la rep.iflerent en defordre 6c avec perte , fins pouvoir empor-
„ ter leurs trouffes , 6c avec leur Général s'enfuirent de nuit vers Narva. A
„ caufe de l'obfcurité de la nuit qui étoit furvenuë , le Roi ne put traverfer
„ que le lendemain la Rivière , d'où il arriva à Lagent. Le jour fuivant 30.
„ l'Armée Suedoife fe mit en mouvement de grand matin , 6c arriva vers le
„ midi à la vûë des Mofcovites. Leur Camp s'étendoit depuis les bords de
,, la Rivière de Narva 6c le Moulin de Porreus, jufques à Joala. Il étoit for-
,, tifié du côté de la Ville par de bonnes Lignes , 6c du côté de la Campagne
„ par un Retranchement, compofé d'un rempart épais 6c haut, de foffez lar-
„ ges 6c profonds , de parapets, de chevaux de frife, 6c dePaliflades. Il y avoit
„ d'ailleurs plufieurs ouvrages extérieurs détachez , 6c des Batteries placées fur
„ des hauteurs avantageufes. Non-obftant un grand feu de l'Artillerie Mofco-
„ vite, le Roi de Suéde s'avança pour reconnoître ces Retranchemens. Aïant
„ (bigneufement confideré toutes chofes , il forma deux Attaques, l'une à la
„ droite, 6c l'autre à la gauche, 6c en fit une difpofition , (qui dans la rela-
„ tion eit détaillée )j 6c régla le lignai, 6c donna le mot, qui etoh^ivec l'aide
„ de Dieu. A deux heures après midi, le fignal, qui étoit de deux fufées, fut
„ donné. L'Infanterie des deux Ailes s'avança en même tems, à la faveur
„ d'une épaifle neige qui lui donnoit à dos. On attaqua avec tant de vigueur,
„ 6c fi heureufemcnt,que dans l'éfpace d'un quart d'heure on força lesRetran-
„ chemensdes Mofcovites, tant à la droite qu'à la gauche, malgré la forte re-
„ fiftance qu'ils firent pour les défendre. Ils furent enfuite pouffez des deux
„ cotez avec une grande perte des leurs. Ceux de leur Aile droite , étant
„ pourfuivis jufques à la Rivière de Narva, fe jetterent fur le Pont, pour fe
,, fauverj mais fe trouvant furchargé par le trop grand nombre des fuiards ,
„ il le rompit , 6c fut caufe qu'une bonne partie d'entre eux furent noïez. Les
„ autres , réduits à la néceflîté d'une defenfe defefperée , formèrent un Retran-
„ chement de chariots , entre leurs maifons de bois , 6c leurs cabanes de terre.
„ L'on fut par-là obligé de les attaquer de nouveau dans les formes. Il fe fit
„ grand feu de part 6c d'autre en ce lieu-là jufques à la nuit. Les avantages
„ que l'Aile droite des Suédois remporta ne furent pas moindres que ceux de la
„ gauche. Elle défit entièrement les Mofcovites 5 6c, les aiant mis en derou-
„ te , les Suédois fe trouvèrent en état de pouvoir fe partager. Par-là , les
„ Bataillons des Gardes allèrent joindre l'Aile gauche où etoit le Roi. La
„ Cavallerie ne demeura pas non plus oifive. Quoi qu'il lui fût fort mal ailé
„ d'agir, par ce que le Camp étoit tout plein de baraques 6c de maifons, 6c
„ qu'elle avoit ordre de foûtenir l'Infanterie , elle répara par une conduite
„ pleine de courage le defavantage que lui donnoit le mauvais terrain. L'ob-
„ feurité de la nuit fit a (1er le Combat. Le Roi poita les Troupes qu'il avoit
„ avec lui entre la Ville 6c les derniers Retranchemens des Mofcovites, 6c les
» au-
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ET RESOLUTIONS D'E T A T. zf7
autres, fclon la fituation du lieu, vers tous les endroits, d'où l'on pouvoit i7or-
attendre quelque furprife. Il envoia auflî , s'aflurer de la principale Batte-
rie , qui étoit placée fur une hauteur, Se du refte de l'Artillerie. Par-là,
toute communication entre les deux Ailes Mofcovites fut coupée. La
droite, qui avoit été pouffée jufques à la Rivière de Narva, l'aiant remar-
„ que , jugea qu'elle étoit enfermée d'une manière à ne pouvoir plus fè re-
„ tirer. Le foir même, les Officiers députèrent vers le Roi , pour fe (bû- .
„ mettre à fa grâce ; ce qui leur fut accordé. Là-deflus , les principaux Gene-
„ raux Mofcovites allèrent pofer leurs armes aux pieds du Roi , Se fe rendi-
„ rent avec le refte de leurs Troupes à diferétion. Ils le mirent en poflèflîon
„ de leurs portes. Il envoia deux Battaillons de fes Gardes, pour les occuper.
„ Enfuite, il permit aux Soldats & aux Officiers de pafler la Rivière , Se de
s'en retourner chez eux ; ne jugeant pas de devoir les retenir prifbnniers , à
caufe du grand nombre, 8c de la quantité qu'il eut fàlu de provifions pour
les nourrir. Il ne retint que les Généraux, Se quelques uns des principaux
Officiers. Il les obligea, cependant, de lui remettre tous leurs Etendards Se
Drapeaux.
„ L'Aile gauche des Mofcovites étoit pareillement affiegée par les Suédois.
Celui, qui commandoit le refte de cette Aile , aiant apris ce qui s'étoit pafle
à la droite , envoia auffi demander la même grâce. Le Roi de Suéde la
lui accorda. Ce fut à condition qu'il laifleroit toutes les armes de fon Aile.
Là-deflus, tous les Regimens Mofcovites allèrent mettre leur Armes, leurs
Enfeignes, & leurs Etendards, aux pieds du Roi. Ils marchèrent enfuite ,
tant Officiers que Soldats , la tête nuë, devant les Suédois , pour pafler la
Rivière Se fe retirer.
„ Après leur retraite, les Suédois prirent l'entière pofleffion du Camp Mof-
covite, où il fe trouva un butin confîderable. L'Artillerie étoit compofée
de cent Se quarante cinq pièces de Canon toutes neuves, dont quelques-
unes portoient quarante-cinq livres de baie ; vingt huit Mortiers auflî tous
„ neufs, de différente invention; Se quatre Haubitz. Il y avoit auflî une quan-
„ tité extraordinaire d'Amunitions de Guerre Se de Bouche; fix paires de
„ Timbales , cent cinquante-trois Drapeaux , Se vingt Etendarts. Il y en
„ avoit eu d'ailleurs plufieurs autres déchirez dans l'Aétion, d'autres perdus dans
„ robfcurité , ou tombez dans la Rivière , dont on en retira quelque-uns,
„ comme auffi d'entre les corps morts. Ce qu'il y eût de plus particulier eft
„ qu'on eût la Caifle de Guerre , que le Czar avoir, laiflee avec une grande
„ quantité d'Armes , de Tentes , Se Outils de Guerre , avec une exceflïve
„ provifion de Vivres Se de Fourage. Il y avoit dans la Caiflè 162.. mille
„ Ecus.
„ Tous les Officiers , tant Généraux qu'autres , Ce fignalerent , chacun dans
„ fon Pofte, aufli bien que les Soldats.
„ Pendant le Combat , le Duc de Croi , à qui le Czar avoit Iaiffé le com-
„ mandement de fon Armée le jour précédent , en fe retirant à Paproche
„ Suédois, foit par aprehenfion ou autrement; ce Duc, dis-je , voiant que
„ tout étoit perdu , s'alla rendre , avec d'autres Généraux Se Officiers, pri-
„ fonnier aux Suédois. Ce Duc , fe trouvant enfuite dans Narva avec les au-
Gg 3 „ très
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2.r8 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
1701. „ très Généraux Mofcovites , aux quels le Roi de Suéde fit rendre leurs
-' épées, 6c manquant d'argent & de crédit, ce Prince lui envoia une bourie
„ de mille Ducats.
Cette Victoire fut d'autant plus glorieufe pour le Roi de Suéde, qu'il
n'avoit qu'une poignée de Monde, ÔC que l'Armée Mofcovite montoit à qua-
tre-vingt mille hommes. D'ailleurs, cette dernière avoit le tout en abondan-
ce, au lieu que les Suédois étoient affoiblis par de grandes fatigues, par une
marche très- pénible , 6c par le manquement de Vivres & de Fourages, dont
les hommes aufli bien que les chevaux avoient été privez pendant plufieurs
jours. La perte des Mofcovites, tant tuez que noïez , étoit fuputée à dix-huit
mille hommes. Celle des Seudois pouvoit monter à deux mille hommes-,
tant tuez que bleflez , dont plufieurs des derniers furent guéris. Cette Vic-
toire fût remportée le même jour dans lequel, une année auparavant , le Czar
avoit juré la Paix. Si le courage des Suédois fut incroïable , c'eft que^ le Roi
le leur influa, par fon intrépidité, par fa préfence dans les endroits où le feu
étoit le plus chaud , 6c par les ordres qu'il donna avec toutes les marques du
plus expérimenté Général.
Le Roi de Suéde fit trois jours après publier à Narva une Déclaration.
Elle portoit en fubftance :
„ Que le Czar de Mofcovie étant venu ravager fes Terres Se Pais, aflîé-
„ ger fes Places, 6c defoler fes Sujets, fans y avoir été porté par aucune cau-
„ te légitime, Sa Majefté Suedoife étoit réfoluë à pourfuivre fa Victoire, Se
„ à renvoïer chez lui le dommage qu'il avoit réfolu de lui faire. Que tou-
„ te fois comme Prince Chrétien il vouloit ufer de Clémence envers les Su-
„ jets du Czar. Qu'ainfi, il offrait fa Protection Roïale à toute la No-
„ bleffe, aux Ecclefiaftiques , aux Bourgeois, aux Marchands, 6c aux
„ Païfans de la Ruffie, fans aucune exception. C'étoit aufïï en faveur de
„ leurs Femmes 6c Enfans. Sa Majefté leur promettoit de les maintenir
„ dans leur Religion, Libertez, 6c Privilèges ; même de fuprimer une partie
„ des Taxes, dont ils étoient accablez. C'étoit à condition qu'ils demurraffent
dans leurs Habitations 6c Héritages, fans fe retirer ailleurs, ni fins rien dé-
tourner de leurs effets. D'ailleurs , qu'ils euffent à fournir volontairement
ce qui leur feroit demandé pour l'entretien de l'Armée, avec nromeffe que
lesprovifions,qu'ilspourroient donner au de-là leur contingent, leur feroient
fidèlement païées par fes Commiffaires. Que dans l'efperance qu'ils feroient
ce qu'on leur demandoit, Sa Majefté avoit refolu de leur donner des Sauve-
Gardes, 6c de défendre fous peine de la vie à fes Officiers 6c Soldats de leur
faire le moindre tort. Mais, que s'ils viennent à abandonner les Lieux de
leur demeure, 8c à fe fauver plus avant dans le Pais avec leurs effets , ils
dévoient s'attendre à être traitez comme Ennemis, &L à avoir leurs Maifons
„ 6c leurs Biens ruinez par le fer 6c par le feu.
L'Ambassadeur de Suéde, Lillienrooth, en préfentant aux Etats Géné-
raux la Relation de la Viâoire de Narva, y ajouta le Mémoire luivant.
CEL-
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: ET RESOLUTIONS D'E T A T. zf9
CELSI AC PRjEPQÏENTES DOMINI. *— L-.
Memoi-
VEJïernâ die Tabellarius attulit mihi lifteras Sacra RM. Régis mei Clementijjlmi , re de
dietl.Novemb. Feteris Styli anni prœteriti prœfcriptas,nunciantes felicem prœlii \ jmb*f~
bidub ante propè Urbem Narvam commiffi eventum;illuflrem nempe FiSloriam quâ s^ede
divini Numinis bénéficie potita efi S. R. M. Cff quidem adhuc majori Mofcorum
clade quatn commun! ha&enus famâ fuerat compertum : ità ut prorfus elucefcat^
ubi Deus juftae eau fie propitius adeji quantumvis immanent multitudinem , vel ab
exiguâ manu facile profligari. Injunxit mihi fimul S. R. M. ut lœti hujus nuntii
participes confeflint redderem C. ac PP. DD. FF. ut potè tant artlo &? amici-
ti<e 6? fœderum nexu fibi conjuntJiJfîmas , adeèque uti confiliorum 6? rationum
utrïnque communium,ita fc? gaudii partent procul dubio fibi vindicaturas. Hoc igi-
tur Clementiffimo mandato hifee defungor , idque eo lubentius cum ipfâ gratijjimè
ceriâ experientià jam didicerim quantus favor à CC. ac PP. DD. FF. manave-
rit adfingulos earum fubditos hujufque regionis incolas , publico certatim applaufu
vitlricium armorum Sacra R. M. fuccejjkm profequentes. Hag<e Comitis die ~
Januarii 1701.
„ HAUTS ET PUISSANS SEIGNEURS,
„ de JNarya, à (avoir une Victoire infigne remportée par Sa Majefté fous la dent.'
„ Protection de Dieu, & par une perte des Mofcovites beaucoup plus. grande
„ que celle qu'on avoit fû par les Nouvelles ordinaires. De forte qu'on peut
„ voir clairement, qukjn petit nombre peut en défaire un très-grand, lors que
„ Dieu eft favorable. à "une jufte Caufe. Sa Majefté m'a chargé en même
„ tems de faire part de cette 'bonne Nouvelle à Vos Hautes Puiflances, com-
t, „ me à celles avec lefquelles Elle a une liaifon û* étroite d'Amitié Se d'Allian-
„ ce ; dans l'affurance qu' Elles prendront la même part dans fa Joïe, qu'Elks
„ prennent dans les Confeils & les Raifons qui leur font communes avec
„ Elle. ,!
„ Je m'aquite par celle-ci de l'ordre que j'ai reçu, & d'autant plus volon-
„ tiers, que j'ai déjà apris avec plaifîr par certaine expérience les marques de
„ fatisfaélion que V. H. P. ont donné à tous les Sujets & Habitans de ce
„ Pais, qui ont reçu apurement avec une Joïe univerlélle le fuccès des Armes
„ vi&orieufes de Sa Majefté.
„ A la Haïe, le 12,. janvier 1701.
Signé, de Lillienïiooth.
Il parut en même temps quelques Vers Latins faifant allufîon à la Rivière
de Varna en Hongrie , dont l'Anagramme de Narva fburniflbit la penfée.
Voici ces Vers.
NAR-
3.60 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
1701.
NARVA, ANAGRAMMA, VARNA.
NOmina fedifragis fatalia bina notantur;
Varna quidem antiquo, tempore Narva novo,
Hungare, ut ad Varnam perjuria feda luifti ;
Ad Narvam prorfus fie tua, Mofche, luis.
Aliter.
Varna Jagellonidi , Mofcho fed Narva Tyranno
Nomine fatali Cladis origo fuit.
Par in utroque feelus: Divos contempfit uterque,
Et modo juratam rupit uterquem fidem.
Exitus haud difpar : ferro cadit ille cruento i
Evadit céleri turpius ifte fuga.
At qui funeribus potuit fuperefle fuorum
Innumeras patitur veriùs ipfe neces.
Jageîlon, Roi de Hongrie, non obftant la Paix conclue avec le Turc , voulut
P attaquer. Sur quoi F Empereur Ottoman prit , dit-on , le Traité de Paix
en main, dijant, Jéfus-Chrift , qui es le Dieu des Chrétiens , venge toi-mê-
me cette Perfidie, paiement le Hongrois fut défait. On trouvoit le Portait de
Jagellon dans la Perfonne du Czar.
L e lendemain , le même Ambafiadeur de Suéde préfenta aux Etats Gé-
néraux le Mémoire fuivant , pour démander du fecours , apu'iant fa démande
par plufieurs fol ides raifons.
Mémoi- CELSI AC PRMPOTENTES DOM1NI.
re de
fadeur*1"" A^u^a fuit S. R. M. Rex meus Clément iffimus ut literis fuis die 14. prœter-
deSue- fapfi Menfis Martii exaratis CeJfas ac PP. DD. VV. de auxilio contra Re-
de. gem Poloniœ , vi fœderum ipfa compellaret. Cumque poftmodum etiam Czarus
Mofcoviœ , abfque minimâ caufâ idoneâ , Pacem abrupifjet , quant tamen aternam
ejj'e oportebat , quamque jure jurando per Chrifti Evangclium iaterpojîto , ipfe cor-
roboravit, atque nuper folemni modo confirmavit ; Ego nomine S. R. A/., ejuf-
que Clément ijfimo juffu , pariter contra cum, C. ac PP. DD. VV. opem tum ore
tenus tum feripto requifivi. Uti etiam réfponfunt cenfidere jubens Celfas ac PP.
DD. VV. neutiquam S. R. M. defuturas , fed fœderum leges bonâ fide aiimple-
turas; Afi velle adhuc prius periculum facere an S. R. AI. hoftes ad reflau-
randam pacem induci poffent, litteras hune in finem jam dudum ad eos dede-
runt Celte ac PP. DD. VV. ad quas tamen in hune ufque diem nibil re-
fponft fecutum ejl. Manifcjliffimo certe indicio hoflibus mentem effe à Pace
prorfus aliénant, £s? Vrbium, Portuum, ac Pruvhic'.anim S. R. M. cupidine
flagrantem. Nulla igitur alla via fuperefl nifi ut omnibus viribus obviant
eatur
ET RESOLUTIONS D'E T A T. z6i
eïtur infefjis aque ac perfidis hofiibus , quo perniciofa eorum confilia diflurben- iyoî.
tu;: S. R. AI. va/idum huic fini atque prafens C. ac PP. DD. FF. a/ixi- ' —
lïum, omnino fibi pollicetur , coque minus de eo dubitat quodjajn experts, fit fincera
C. ac PP. DD. FF. amicitia fpecimina , quodqm omnibus confiet quant intégra.
Jemper fide ipfa fœdera fua prafient. Non opus efi C. ac PP. DD. FF. remjam
abundè eis perfpecl.im hic exponam, quant opère fcilicet de propria ipfarum iitilita-
le bic agatur. Id dumtaxat commcmorare juvat , quam evidentiffimè viderint
quanta perfidiâ ufi fint bofies , &? quam fubdole Pacis fanclimoniam conculcave-
rint. Ipfa etiam C. ac PP. DD. FF. tejies fuerunt , quam prompt am vicijfftm
Je exhibuerit S. R. M. ut quo unquam fieri poffet modo occurreret , anfamque
omnem praciderit quibufcumque vel maxime frivolispratextibus ac undèundè conqui-
fitis beili caufis, ut pot è hoc ma xi ma cura & follkitudine evitare ennixa. Praterea
certus fum C. ac PP. DD. FF. non pojfe fine horrore cinimum advertere ad im-
munit atem fine exemplo (y plufquam Barbaram , quâ grafatus efi Czar Mufco •
via in S. R. AI. dïtiones & fubditos, quos calamitofA infelkitate in ejus manus ac
potefiatem pervenire- contïgit. Commovebunt bac omnia procul dubio C. ac PP.
DD. FF. ut tantam truculentiam , tantafque injurias, quo par efi animo intuen-
tes, con fur gant protinus in efficax S. R. M. auxilium , idque eo maturihs promp-
tiufque expédiant , quo magis apparet jam verè opportunum adefi tempus hofteni
premcndi & quovis modo urgendi , pofteaquam S. R. M. divina jufiicia adminiculo
atque jux ta luculcnttjfimo exemplo, adeo infignem Fitloriam de numerofijfimo Muf-
cwum exercitu ad Narva Mania confecucla efi. Si enim nunc S. R. AI. itafu-
blevetur ut Fitloriam plene perfequi valeat , fpes efi pojfe quantocius hofii extorque-
ra defiderium aqua ac tuta pacis, qua precipuus fit S. R. M. fcopus. Afi vero
fi tempefiivum adeo momenttm negligeretur ita ut fpatium daretur hofii vires re-
colligendiatque Macbinationas qua s cum fociis Amicis fuis firuxit perfide ndi, va-
num profeSio fuerit expeclare Pacem. <f$uin bellum indies gravius S. R. AI. in-
cumbet, quo ipfo Provincia ejus fummo periculo &? exponerentur atque fimuï Corn-
mercia fubditorum bujus Reipublica damno afficerentur irreparabili.
Nul/us igitur dubito quin C. ac PP. DD. FF. pro rei pondère, fuâque fummâ
prudentiâ eas ineant rationes eamque capefcant refolutionem qua ipfamm utilitati
pariter ac bonori cedat, refpondentem plena fiducia quam meritb fovet Rex meus
Clementififimus , qui praftita fibi amicitia memor gratam ei vicem rependere nun- '
guam intermittet. Haga Comitis die ~ Januarii 1701.
„ HAUTS ET PUISSANS SEIGNEURS, Traduc-
tion du
Mémoi-
„ C A Majefté le Roi mon Maître fe trouva obligé par des Lettres du 14. ™l
„ kJ du mois de Mars pane de demander en vertu des Alliances du fecours à derLi
„ Vos Hautes Puiflances contre le Roi de Pologne. Et comme après le Czar Wr-de
„ de Mofcovie rompit auffi fans la moindre caufe légitime la Paix , qui de- L,lll^n-
„ voit cependant^ être éternelle, puifqu'il l'avoit jurée fur les Evangiles, & p°Seatê
„ l'avoit confirmée folemnellement dans la fuite ; je demandai au nom de Sa aux E-
„ Majefté, & par fon commandement, tant de bouche que par écrit, pareil- tacsle
„ lement du fecours contre lui. Auift, la réponfe de V. H. P. iaifoit - elle 1,3'd^
Ton. I. H h efoerer Ja"Vieï
14 " m tipv.rei I70î„
t6z MEMOIRES, NEGOCIATIONS, TRAITEZ,
1701. „ efperer qu'Elles n'auroient pas manqué à S. M.; mais qu'Elles auroient fa-
» — — ,, tisfait «le bonne foi aux Articles des Traitez ; & que feulement Elles vou-
„ loient tenter de porter les Ennemis de Sa Majefté au retabliilément de la
,, Paix. Pour cet effet, Elles leur envoïerent il y a long -tems des Lettres ;
„ mais jufques à préfent on n'a reçu aucune réponfe : ce qui eft un Indice
„ très certain que la penfée des Ennemis eft abfolument éloignée de la Paix
„ 8c ne tend qu'à s'emparer des Villes, des Ports, & des Provinces de Sa
„ Majefté. Il ne refte donc aucun moïen que de s'opofer puiflamment à des
j, Ennemis également dangereux 8c perfides , afin derenverler leurs pernicieux
„ Confèils. Sa Majefté s'attend à cet effet à un prompt 8c puiflant fecours
,, de V. H. P. avec d'autant plus d'affurance,qu'EUe a déjà reçu des marques
,, de leur fincere Amitié , & que toute la Terre fçait avec combien de bon-
,, ne foi Elles gardent toujours leurs Alliances. Il n'eft pas neceflaire que
„ je leur mette devant les yeux une chofe qui leur eft fi connue, favoir com-
„ bien il s'agit en cette occafion de leur propre utilité. Mais il n'eft pas
„ hors de propos de leur repréfenter avec combien de perfidie les Ennemis fe
„ font conduits, 8c avec quels fubterfuges ils ont foulé aux pieds la fainteté
„ de la Paix , ainfi qu'Elles ont évidemment vu. V. H. P. font auffi te-
„ moins de la promptitude de Sa Majefté à concourir de fon côté en toute
„ manière pour ôter les prétextes frivoles 8c les caufes mandiées de la Guerre,
„ & avec combien de foins ôc de démarches Elle s' eft efforcée de l'éviter.
„ C'eft pourquoi je m'aflure que V. H. P. ne fauroient regarder fans horreur
,, la cruauté fans exemple 6c plus que Barbare, avec laquelle le Czar de Mof-
„ covie a ravagé le Pais de Sa Majefté 8c a traité les Sujets qui ont eu le
„ malheur de tomber entre fes mains. Toutes ces chofes porteront fuis dou-
„ te V. H. P. , fur la reflexion de telles cruautez èc de telles oftenfes, à don-
„ ner un puifîànt fecours à- Sa Majefté , &c ce d'autant plus promptement
„ qu'il femble que le tems eft propre de prefîêr l'Ennemi , 8c de le contrain-
„ dre en quelque façon, après que par le fecours de la Juftice divine, auffi
„ bien que par un exemple éclatant , Sa Majefté a remporté une Viétoire fi
„ fignalée fur une Armée très-nombreufe de Mofcovites près des remparts
„ de Nerva. Car fi Sa Majefté vient à préfent à être fecouruë en forte
„ qu'Elle puifie fuivre amplement fa Viétoire, il y a efperance qu'on pour-
„ ra faire naître aux Ennemis le defir d'une Paix fûre ôc équitable, ce qui.
», eft le principal but de Sa Majefté. 'Mais fi l'on néglige un moment fi
,, précieux , 8c que l'on donne le tems aux Ennemis de fe rallier 8c d'exe-
„ cuîer de nouveau les complots concertez avec leurs Amis 8c Alliez,
„ ce fera en vain d 'efperer la Paix. Au contraire, Sa Majefté aura fur les
„ bras une Guerre plus onereufe, qui mettra en grand danger Ces Provin-
,,. ces , 8c à même tems le Commerce des Sujets de cette Republique fouf-
„ frira un dommage irréparable.
„ Je ne doute point que V. H. P. félon leur prudence accoutumée,
„ & iclon l'importance de la chofe , ne goûtent ces raifons 8c ne pren-
„ nent une résolution également convenable à leur intereft 8c à leur hon-
„ neur 8ç qui corrcfponde à l'attente que Sa Majefté a conçue avec rai-
„ fon
ET RESOLUTIONS D'E T A T. i<5$
„ Ton. Sa Majefté d'ailleurs ne manquera jamais de témoigner fa re-
„ connoiflànce de l'Amitié qu'on lui a montrée. A la Haïe le 13. Jan-
„ vier 1701.
Signé,
LlLLIENROOTH.
Sur le premier Mémoire, les Etats Généraux félon Pufage ordinaire firent
féliciter l'Ambafladeur fur la Victoire de Narva. La Relation qu'il en avoit
donnée pénétra fi vivement l'Ambafladeur Mofcovite, qu'il préfenta' aux E-
tats Généraux le-Mémoire fuivant , en vûë de diminuer , ou de rendre in-
certaine , la Victoire des Suédois.
CELSI AC PRjEPOrENTES DOM1NL -J. .
Mémoi-
re de
TJEjlernâ die Tabellarius mihi attuïit hue Mofcoviâ , die i6.menfis Decembris l'Ambaf-
Veteris Styii prateriti anni , fer fpatium 2.7. dierum , fua Sacrœ Czarea ? ^"V
Majeftatis, Clément ijjimi mei Domini Mandat um , quod in fua inclufione mihi covje, "
communicavit , ad fuperiores , à Celjis ac Prapotentibus Dominationibus Veflris
eblatas, à me ad fuam Sacram Czaream Majejlatem antea tranfmijfas literas ,
«une ad hafee , cum perfpicua Dcelaratione , ad Veftras Celfas ac Prapotentes
Dominationes fua Sacra Czarea Majefiatis refponforias literas , quas decenti
mea reverentiâ^ac eâ, quâpar eft^ Veneratione Vobis meis Dominis^ cum hoc meo
adjuntlo Memoriali ojfero , quo etiam Clementifjimo Mandat 0 communicato , fua
Sacra Czarea Majeflati Clementijjimo meo Domino placet femper ac conftanter
fuam amicitiam vobifeum meis Dominis confervare , ac nunquam ficuti antiquitus
amicabiliorem Veftrarum Celfarum ac Praepotentum Dominationum petitionem
defpicere , fi modo , ut antea , ita nunc quoque in illà antiquâ difpofitione , Veftra-
rum Celfarum ac Prapotentum Dominationum amicitiâ nullam fui demonftrat
commutationem^ quam pro tejlificatis magnifeftis fignis fedula prudent ia , atque
experientia Veftra ex quâ vefira ergafuam Sacram Czaream Majejlatem amicitiâ
femper accrefeit , nullatenus immutandam fore exifiimo. Praierea adjungo ,
quod hifee temporibus , tam publias harum Provinicarum hovellis , à Novitatum
feriptoribus inaniter compilatis , quam etiam Memoriali , Régis Suecia hic refidens
Minifier , num Régis fui mandat 0 an ficlufiio dijfeminarit , difpargens ( quafi ex
quûdam perniciofo pruritu lingua fua malè ac injucundc duel us) Régis fui PTiclo-
riam admodum numéro fam , ex Confliclu ad Isfarvam exorto , divulgando majorent ,
quàm communi haclenùs famâ fuerat compertum , Mofcovienfis exercitus Cladem,ac
quafi ipfâmet magnâ fortunà hâc ex occaftone cum lucro recuperatum fit quoddam
commodum ex parte Suecicâ : quod vero nullatenus verum eft , atque omne tantum di-
vulgatum , non ob certam impletionem hujus rei tanquam certa atque verifica ,
fed etiam quemadmodum confuetum hofti , indurare ac molefiare hâc di-verfwne in-
certâ animos amicabiles , certo amore adbarentes, fua Sacra Czarea Majcftati,
Hh 1 ' q:-od
i64 MEMOIRES, NEG OTIATIONS, TRAITEZ,
170 1. quod etiam ipfum invent um non tantum, fed quoque de fe excogitatum ex parte.
' Suecia Victoria , certà propofitione coarguit fupra memoratum , ac nunc mihi tra-
dition fua Sacra Czarea Majefiatis Clément ij/îmi met Domini Mandat um ; quoi
Conflit! us cum Suecis accident hoc modo, Quoniam magna coilecata fuerunt Caftra
circaurbem Narvenfcm in circuitu amplius fpatium habentia militari germanici ex
unà pa> te in quà walefici ac proditores fua Sacra Czarea Majefiatis officiaks
ac prafctli legionum Chiliarchus de Blumberg neenon Capitancus Homor quidam fie-
terunt; fecundum fitam jurisjurandi violât ioncm ipfomet malo prétexta (quorum
nornina hic in novellis conlincantur intereos , qui in Captivitatem quafl addutli
funt à Suecis) tune HUcconfefiim Sueci invaferunt, ac in mediam aciem perrum-
pentes, quibufdam pedeflfibus fua Sacra Czarea Majefiatis legionibus difpendium
ac detrimentum intulerunt : cum verb ingrejji fini in major em Confliclum , tune quo~
que ex hoftibus non minus deflderati funt quam ex Mofcovitico exercitu. Deinde
fumpferunt verbum (paroi vu/go fie diclum) ex parle hoflil '', eddem die hora jam
fecunda notlurna : it à fecundum etiam computationem ipfam nunqua.în calandam
fua Sacra Czarea Majefiatis, tum officialium , cum feriptorum ac inferiptorum
militarium perfonarum jatlura ultra 5000. in hoc Conflitlu non fuit, atque excr-
citus omnes fua Sacra Czarea Majefiatis abierunt nunc ab Urbibus ho/lilibus ,
non vero ob pratenfam , atque à Suecis ubique terrarum diffeminatam contrariant
caufam , fed ob véhément cm hyemis injuriam , ac degunt nunc i/ii omnes exercitus
fua Sacra Czarea Majefiatis Ma se in vicinis urbibus, ver fus Suecorum confinia
Jitis , nempe Novogardia ac Plefcovia , quod non pot ni non ipfà hâc veritate rei
illius indutlus in manifeftam pracijlonem harum falfo teflatarum divulgationum ex
parte Suecica, & ab cjufmodi m aie conquifitis j amis , pr avenir e, hâc Jcriptâ meâ
^Demouflratione , ad vefiras Celfas ac Prapotentes Dominationes delatâ , benè
feiens, quod vos met Domini pro Vefiro prudent i amore feiulb , haud inquirentes
ac invefiigantes hifee allât is ad Vefiras Celfas ac Prapotentes Dominationes , ina-
nibus rumoribus non contentieritis-, quemadmodum Ego ab [que dubio confido forey
ut pro antiquâ , £5? nunc animitus extendendd, erga fuamSacram Czaream Maje-
ftatem neceffitudine veflrà, amer atque cenjunclio vcflra, in dies fmgulos firmi--
ter ac conftanter in majorem vint, acfœdus fua Sacra Czarea Majefiatis augea~-
j îi'.r. Haga Comitis die ij.-mcnfis Januarii Anno 1701,
Avec ce Mémoire il y avoir, la Lettre du Czar en Réponfeà celle des
Etats Généraux, en date du 19. de Septembre 1700., qui a été ci -devant
raportée.
Tranfh- rpx lit 'cris Celfarum ac Prapotentum DominationumVefirarum, Haga Comi-
\\o Lue- tum die 2.9. Septembris Anno 1700. datis intclleximus. Nos Magnus Domi-
<u& »*î) Nvfira Czarea Alajefias, quod vobis Celfis ac Prapotentibus Dominis nof--
1. ï.jk jb tram âttplicem. confirmai iouemper Legatum noflrum , Haga Comitum refldentem,.
Sacire fîcuti. etiam per Refidentem Vcfirum Dominum vander Hulfl , ad aulam nofiram,
; ."j 1 Czareajtâajefiatïs degentem, de Confervatione Pacis & fœderis cum CoronaSue-
Cei'fjs t kâ audit» valde 'acception fuerit , ob commune fœdus , quod Fefiris Ceifis ac
Vtxpo- Prapotentibus Dominai ionibus tant cum nofirâ Czarea Majefiate quam cum fuâ,
ET RESOLUTIONS D'E T A T. i6f
Regiâ Majeftate Stiecicâ inter cedit ; &? quomodo poftea no fier Légat us in Conférai- 1701.
tià cum quibufdam Dominis Statibus ex congregationc Vcftra ore tenus , fed poftea
etiam in fcripto declaraverit noftra Ozareà Majcftatis bonam intentionem in fupe- tentes
riori prapofitione ac in violatiom Paris cum prafatâ Coronâ Suecicâ , fed modo Domi-
quemadmodum ipfie' adhtic reminifei velitis cum hàc Conditioner ut Noftra Cza- p^ôones'
rea Majeftuti in faclis injuriis, prafertim Anno 1699. praterita noftra foknnis m{naac
Legationis, in Livoniâ, per Veflram mediationem , à Rege Sueria fatisfatlio pra- Titulos
fietur , quod Veftra Celfa ac lJr<£potentes Dominationes bénigne aeceperitis, atque Su»
de his, fecundum feriptum Lcgati nojlri vobis traditum Regia Majeftati Sueciae M^cfa-
notifteaveritis , nunc quoque rcfponfum Regiae Majeftati Sueciae ad id adepii cum tjsac
hifee ad Noftram Czaream Majeftatem mittatis , in quibus praefata Regia Maje-- Celfa-
flas déclarât ', fe inclinât ionem habere ad confervationem bonté ac fidae simicitiae ™m ac
atque Vicinitatis, cum Noftra Czareâ Majeftate , nec ipfi in mentem unquam ve- ter*jj°^:
nijfe contra Juftitiam in querelis inter utriufque Miniftros noftros exoitis, multo Domi.
verà minus in- iis ad honorent Noftrae Czareae Majeftatis pertinent ibus quicquam natio-
committere, & quod praefatae fuae Regiae Majeftatis in mandatum datum fit apud nun1,
vos commoranti Legato Lillienrooth ut ille cum Dominis Deputatis veftris de hoc con-
ferret , 6? fecundum pofjibilitatem omnia reconciliarc inniteretur , £5? quod Veftra
Celfa ac P tapotent es Dominationes non dubitetis , quin Nos Magnus Dominus,
Noftra Czarea Majeftas veftrum Arbitrium in hoc negotïo accipiamus , de quo
Nos Vobis anteà inferiptis demonftravimus , £5? quod Veftris Cclfarum ac Pra-
potentum Dominât ionum ojfciis in hoc Noftra Czarea Majeftati acceptum fue-
rit : ideoque rogatis , ut , ficut fua Regia Majeftas Suecia dédit plenariam po-
te ftatem fuo Legato apud vos commoranti , ita quoque twftro Legato detur plena-
ria poteftas apud vos degenti, de lois gravamirûbus cum Dominis Veftris Députa--
tis conjerre , quo vos illam Inconvenicrjtiam pacificare poffitïh, cum affirmât ione ,
quod omnia qua fieri poffint huic contribuere velitis ; nec dubitetis , quin Noftra
Czarea Maje H as non a que, ac fua Regia Majeftas Suecia, ad bac prono ferà-
tur animo. Praterea Ve(lra Celfa M Praepotentes Dominationes indicetis quod
Rcgiae Majeftatis Poloniae Minijîcr Vobis copiam Litcrarum noftrarum ad Re-
gem ipfius "feripiarum tradiderit , de Déclarât ione Belli à nobis , atque de miffio-
ne exercitus adverfus Coronam Suecicam , quod Vobis fummopere mirabile vifum
fit -, £5? rogetis nos iterum , ut banc rem perpendamus quod gravium cventmtm £5?
devaftationum terrarum atque hominum ex bello exifterent , £<f quàm moleftè in-
eeptum bellum iterum terminctur, & ut Noftra Czarea Majeftarnoftrà equita-
te ac amore Paris , in Ccncluftone Paris cum Porta jam pridem • demonftratis ni-
hU, quod Traclatus Paris contr avenir i ac infringi poffit conaremur ; fed fi quae-
dam gravamina inter nos & Regem Sueciae exortae effent , haec potius medio
amicabilis compofitionis , quant arnus fedare velimus ; ad -quod Vos Celfi ac Prae-
potentes Do mini, Vcftra officia ac mimera conferre promittatis , £5? ad quod nihil
aJiud nïfi amor Paris, & communis nuietis Vos induxerït , nec libentiitsvideretis,
ut inter Noftram Czaream Majeftatem & inter fuam Regiam Majeftatem
Sueciae controverfia , multo minus bellum exoriretur , ideo , quod vobis cum utro
vcftra bona amicitia iuterced.it atque in hâc re à nobis bonam Inclinationcm
expeclaturi.fitis. Et quoniam Vefirae Celfaeac Praepotentes Daninationes
Hh ? in
z66 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,1
1701. in literis veftris Nobis Magno Domino, Nojïrae Czareac Majeftati indicetis du-
• •* ■■ bium Veflrum ex his duabus rébus, primum, quod duabus vicibus à Nobis fecuri
redditi , in amicitiâ cum Coronâ Suecicâ , nunc autem Déclarât ionem belli cura
ifta Corona, de quo Nos Magnus Dominas, Noftra Czarea Majeftas notificamus
Veftris Celfis ac Prapotentibus Dominât ionibus, quod bac Noftra Czarea Maje-
ftatis confirmatio non injufta fuit. Legati etenim Regia Majefiatis Suecia Nos
in hoc fir miter fe euros reddiderunt ut in noftris injuriis multoque magis in eo quod
Rigae nobis contigit , plenariam Sua Regia Majeftas praeftaret fatisfaSlionem
confeftim, quod Nos Magnus Dominas, Noftra Czarea Majeftas fecuri redditi,
fcf expeclavimus illamper quofdam menfes;fed cum poft longiorem expetlationem
loco accepti ac amicabilis fatisfaclionis Nos Magnus Dominas Noftra Czarea Ma-
jeftas accepimus refponfum Rcgia manu fubfcriptum (per CommtfJ'arium Suecicum
Kniperum)/ in quo non tantum quaedam /atisfaclio exhibita , fed etiam Juftifica-
tio Autorïlms illa gravamina transmutata funt in veritatem ; quamobrem Nos
Magnus Dominas , Noftra Czarea Majeftas , in hoc aliter procedere atque inju-
riam cum injuria vindicare coacli fummus ; attamen Chriflianè non detreclamur
Pacem fufficientem, &? Veflrum conftans Arbitrium , abfque tali Conditione , &
violentia , quae exhibita fuit parti Danicae in Holfatico negotio ; ad haec ( Veftrae
Celfae ac Praepotentes Dominât iones ) recordamini Nos de véhément ibus Even-
tibus belli ac infperatis finibus , fed haec adverfus acquit atem nihilfunt, fiquidem
etiam eventus non pridem fatlus oftendere poteft in Pace cum Porta, quomodo Nos
Magnus Dominas, Noftra Czarea Majeftas relicli fu:mus ab omnibus. Attamen
auxilio fummae ac Chriftianae intentionis non inutiliiis quam caeteri adepti fu-
mus. Maxime autem Vefiram Celforum ac Praepotentum Dominorum Statuant
fetitionem , ut potè antïquitus amicabilius Nos Magnus Dominas , Noftra Cza-
rea Majeftas contemnere non poffumus , ac optamus, ut per Veflrum Arbitrium ,
felix Pax cum Corona Suecicâ recuperetur, quamobrem Nos inftanter Legatos
Veftros expetlabimus.
L'on voïoit par la conclufion de cette Lettre, que la perte de la Bataille de
Narva avoit infpiré au Czar quelque docilité pour la Paix. Elle ne fut ce-
pendant d'aucun effet ; parce que le Roi de Suéde aïant quelques mois après
dirigé fa marche vers Riga, pour s'opofer aux Troupes Saxonnes, ainfi qu'on
le dira en fon tems, le Czar fe rafïura, & prit enfuite des mefures, tant avec
le Roi de Pologne, qu'avec celui de Dannemarck, pour continuer la Guer-
re: 6c d'ailleurs, d'autres, pour fe pourvoir du neceflaire pour la faire, par l'a-
chat de Navires ôt Munitions dans Amfterdam. Sur l'Avis que l'Ambaiïàdeur
de Suéde en eût, il prélénta aux Etats Généraux un Mémoire pour l'empê-
cher, dans les termes qui fuivent.
Mé;noi_ CE LSI AC PRMPOÏENTES DOMINE
re de .....
l'Ambar- fUm omni ex parte nuntiis atque indiciis minime vanis certior reddar Sacra Re-
ftdeurdc v> nj^ Majeftatis, Régis mei Clément ifftmi hoftes porta inter fe , & cum aliis
auxE- fuis am'uis, infefià de bello profequendo conftha , fervidè agitare , &? nihil non
moli-
. ET RESOLUTIONS D'E T A T. i6j
moïiri, quod in Sacra Règne Majejlatis noxam redundare queat , hofce turbidos fjox.
eortim conatus indicandos cenfui Ctlfis ac Prœpot. Dominationibus Veflris , «/- -•
tro procul dubio agnituris t quant opère necefjum fit , ut abfque morâ malis bide tats,'
eminentibus occurratur. Spero igitur, cum bonâ Celf. ac Prœpot. Dom. Feflra- ™^
rum w/id, fore, quod bac occafwne ftmul , qua par efi obfervantia , eafdemfub-
monefaciam , de refolutione ad Memoriale die ,\ Januarit exhibitum , quant
primum impertiendà , quant asteroquinjuflx expeéJationi parem futur am , e o minus
ambigere fas efi, quod quant egregie fini animât a Celfae ac Praepot. Dom. Feflrae
jam cogncviffe mihi licuerit , praetereaque abunde nota fit , eartmdem in fanStè
adimplendis fœderibus fuis , fidcs & alacritas. Id igitur unicum verbo tetigiffe
fuffecerit , ad tempus ante omnia ejfe refpiciendum utendumque occafwne jam
verè idonea , ne videlicet ullum vires reftaurandi fpatium concédât ur hofii , alio-
quin haud dubio uti infenfo magis animo, ita & majori mole refurreSluro.
Quando quidem etiam intellexerim , effe , qui pro Mofcorum Czare id agant ,
ut puîvis pyrius , arma , aliaque bello neceffaria bine in Mofcoviam tranfvehenda
(onquirantur, quin &f dari in hifee Provinciis , praefertimverb Amftelodami mer-
catores, qui lucri cupidine inefeati , fua [ponte apparatum ejufinodi bellicum , tum
Mofcoviam ver fus , tum in ufum Régis Poloniae tranfmittere in animo habeant.
Itaque praeterire non debui , qub minus nomine Sacrae Regiae Majejlatis Celfas
ac Praepot. Dom. Vefiras decenter requirerem ut fubditis fuis talium mercium il-
Ikit a exportations feveri interdicant, ut pote mutuae amicitiae fœderibufque con-
trariae & praefertim patlis, ratione commerciorum Anno 1678 initis Art. 14.
&? if. difertè prohibita.
ghtibus denique & hoc accedit quod fperare liceat , hofie m demum Pacis confilia
amplexurum, fi média bellurn alendi ($ protrahendi tempefiivè et praefeindantur,
Hagae Comitis die 27. Januarii 1701.
Signatum erat,
H. DE LlLLIENROOTH.
Ce Mémoire fut fuivi peu de jours après par un de l'Ambaflàdeur du Czar,
qui pafla pour une Pièce comique. La voici.
Si CELS1 AC PRMPOTENTES DOMINI. Mémoi-
re de
'KfOn ita pridem vebis meis Dominis, accepto fibi Czareae Sacrae Aîajcfiatis , l'Ambaf-
Clementiffimi met Domini Mandato e Mofcov'm , pênes oblationem S. Cz. M. jje ^Iç.
refponforiarum literarum ad F. C. ac P. D. , illufiris Congrcgationis Fejlrae covie, '
Praefidi Domino Saleco , notumfeci vobis meis Dominis de Confliclu S. Cz. M.
exercituum cum Rege Sueciae ad Urbem Narvenfem habito , fuperiori meo Me-
moriali manifefle. Nunc autem manifefiiori ac prolixiori accepta cum Mandato
S. Cz. M. miffo ad me è Mofcovia 13. die praeteriti Decembris fecundum fiylum
veterem fuperiori Anno 1700. illius pugnae Relatione,eam ficut ob Mo s eventusy
ita nunc quoque ob ifias ex hoflilibut Suecicis Urbibus difljemjnatas per tôt ni» mun-
dum
z68 MEMOLR-ES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
i~oi. dum diffamation! s de exercitibits S. Cz. M. , ex quo fibi fortunam ac Vicier iam
' ' adfcnbunt , in parte S. Cz. M. quafi militas jatluras ac ipfum dedecus divulga-
runt , tion pctui iutermittere quia Vobis meis Dominis ianquam antiqttis artiicis S,
Cz. M. iterum amiunciarcm Relatumem iftius Confliclus Jequentem } quomodo obji-
dium ta bis Narvae finiverit ; quod cum in Caftris S. Cz. M. de exercitibits hojli-
libus cer tiares fafli efj'ent , tune Dominas dax Excr citas Gêner alis Borijlius Petro-
ixitz Schcrmetus cum quodam agmine equitatus ex quïbufdam Centuriis Mofco-
i-ienfium, Smolcnfcienfium, ac Novogardienfium Nobilium conftftentis^circa quae-
dam milaaria à Cajiris ad excubias agita,ulum , ac hoftiles 'motus explorandum
mij/'us ejl , qui vero paulb poft Suecicam cohortem 600. Equitum aggreffus , eam-
que profiligavit , praefeclis illius Majori Patkulio cum Magiftro Equitum , ac
cjus vicario in captivitatem fecum abdutlis, qui dixer tint quod ad Urbem Wefen-
burgi quaedam pars exercitus f 000. fub duclu Generalis ÏVellingii commoreretur.
Rcx quoque Pernaviam accefterit, fed militia admodum pauca cum eo tranfvecla
fit, attamenfi tranfportatis omnibus legionibus exercitus excrefeet ad 40000., quod
tam cité quidem fieri non poterit , qaibus coUigcndis adhuc quœdam hebdomada
confwmerentur ; quâ excepta notitià munimentam Caftrorum ac obfidionem Urbis
frotrahere cœperunt , expédiantes plures amplius inftruclas bellicos , qui vero ob
malas i-ias tranfvehi non potaerunt, Jicut & 17000. peditatus , 16000. equita-
tus, quod etiamjam pridem adefje defideraverunt , quorum adventu impetus in Ur-
bem fieri debuit. Sed eo die menfis Novembres Centurio quidam ex S. Cz. M. fa-
te/lit io y ex primaria Ccnturia baliftariorum Johanncs Gumert, qui fèmper proxi-
tnè S. Cz. M, fuit, periit , nefeio quo\ quem nonnulli fuffocatum in aquâ vel ca-
ptum fui (Je putaverant ; fed ille malefico animo ad hoflem tranfiit , ac de omni-fta-
tu Exercitus S. Cz. M. , ac de intentionibus hofli manifeftavit, &? confilium de-
dit , ut Mofcovienfes aggrederentur antequam exercitus illorum augeretur. Inter-
na S. Cz. M. meus Clem. Dominus die 18. hujus ex Cajiris exire voluit, & fe-
xum CampidacJorem illujlrem Dominum ïhoedorum Alexidem Galloivinum ad ad-
ducendam r cliquas S. Cz. M. legiones, qub militares copia ac apparat us bellici hoc
Celfo S. Cz. M. mandato confejlim in fupramemorata Caftra feflinarent ; quo
etiam tempore imperium reliquis ducibus belli traditum fuit , qui cum adventum
Exercitus Suecici tam citb non fore exiftimaverint , ideo ab illorum apropinquatione
nullatenus fibi -veritifunt : attamen poft alteram diem , ac quod plus excurr.it die
19. hujus contrarium intellexerunt , quod Rex Sue ci te cum omnibus viribus, quo
ufeumque colligere potucrit (qu<s ufque ad 3000. excrefeife perhibebantur) abfol-
vens tridub e.xpeditionem fuam , abfque ufu cibi ac quiet is , inopir.ato ad S. Cz.
M- Caftra apropinquavït , ac tempeftate , -vento , ac nivibus denfis, nebulâque
franfmixtis eifavente, induxit hoc médium in comniodum fuam impendendi , im-
petum faciens in locum ubi mun'mentum non erat admodum firmiter obvallatum ,
.de quo illi di lucide à fupradiclo proâitore ac transfuga Gunter to indicatum fuit\
4ibi etiam ipfee tantum -médiocres legiones crant colloc.n '<e, fiquidem Mis Caftra S.
Cz. M. ob "debilem defenftonem ex ifta parte in quâ inimicos "non cxpetlarunt ado-
riendi admodum moleftum non fuit , quapropter hoftis quandam poft defe.ifionem
in munimentam prorupit, & utrinque cum exercitibus S. Cz. M. conflixit , quem-
admodum tune munimentam mirum in modum extenfam , ac militibus non fans in-
ftruclum.
ET RESOLUTIONS D'E T A T. 169
ftrucJum, banc ob caufàm illi juxta limas pofttos , ac non bono ordine difpofitos 1701,
milites in confuftonem redegerunt ; donec illi in una parte fnb ducJu Domini Gène- — — —
ralis Adami Weideni , in altéra autem regione pênes Briobranienfem , atque Semé'
novienferti Legiones ad perfeverandum coatlifint, ubi utrinque confliclus fuit vehe-
mens & ufque ad feram noclcm duravit ;fcd Generalis IVeide poft fortem propugna-
tionem illos maxima cum confit fione ex Caftris fuis difcedere coegit , in quâ atliona
ille bis véhément er la fus fuit , ita ut ipfe quoque hofles amplius perfequi non potue-
rit ; ficuti etiarn in altéra parte ifta dua prafata legiones infuper cum aliis forti-
ter ufque ad tertiam horarn noclurnam congre ffi (unt , ita ut Suesi vident es Je in
Caftris omninb-exercitibus circumdatos , atque nefcii quot illorum adhuc in munimen'
tis retrorfum effent , prœler opinionem ter tibicincs fuos miferunt ac inducias po-
pofcerunt , ad quas deinde Générales Sua; Cz. M. confenferimt , mutatis obfedibus
utrinque , congrejfi inter fc coliocuti funt , quâ etiam data fide conventum ac accor-
datum eft, ut Mofcovienfes copia obftdionem folverent , ac cum omnibus machinis
bellicis ac apparat ibus abfque impedimentis in bono ordine , fed non omnibus ftmul ,
legio poft legionem difcederent. Generalis autem Weiâc cum fuâ militiâ de bàc con-
vention, ob diftantiam Caftrorumy nihil fcire potuit , quoniam exercitus Sue ci cas
in medio ftetit ac omnis communicatio cum aliis , illi Generali abfciffa erat , cui
maximam miferiam hoc infort unium eau fatum ejl ; cum vero infaclis induciis ac
Regia M. ex ore ipfius data fide aut Parole, ubi tune aliqui Générales, ac fummï
Ordinis Officiales ad manum Régis Suecici exofculandam admiffi erant , plenariè
confiderent ac inciperent fe praparare ut Exercitibus juxta fupradiclum difcedere
jubeatur , quemadmodum jam primum Briobranienfs ac Semenowlên'/is , ac alla
Legiones per pontem in bono ordine cum armis omnibus tranfierunt , & bac Cou-
ventio pacla per Dominum Generalem Majorem Buterlinum Generali TVeide indi-
cata fuit, atque ille poft iftam notificationem abfque ullâ mora militiam fuam ad
difeeffum praparabat , ac jam deducebat : tune Sueci poft feparationem exercitus
intelligentes quod illi cum reliquis fe recolligere poffent , conventionem fuam contra
omnium gentilitia, atque bellica jura violer unt , ac poftea expopefeerunt ut Legio-
nes arma deponerent ; & quanquam illi contradixerint ipfts quod hoc Régime fi'
dei data , ac omni honeftae promiffioni contrarium effet , fed conftderando.jam
faclam eft? feparationem, nec fruftram effufionem furguinis permiitendam efje ob
majores vires Suecorum , in id confentire coaeli funt, ubi poftea Sueci uticuw
que graffati funt in multos Germanos- Officiales, Chirurgos ac Apotecarios , /'/-
ludentes ipfis, nominanclo eos Canes Saxonicos, atquet iftos abfque ullâ defenfto-
ne faevïter trucidarunt , ac Caflra defpoliarunt , violât ione Régi ae fide i , atque
multos bellicos apparatus loco praedae fibi vindicarunî ; £5? quanquam Gênera-
les, ac fummi Ordiius Prafecîos certos ac feutres reddiderunt , & poft difeeffum
. exei'cituum omnium , illos quoque dimijj'uros effe , attamen illi poftea contrarium
èxperiri coaeli funt , ac in Narvam tauquam caplivi deduhi funt. ghtanta
autem fitcrit jaclura S. Cz. M. exercituum , poft terminât ionem confticlus , de
hoc vobis meis Dominis abfohttc eompertum eft ex mea fuperiori Relatione : Exer-
citus autem noftri nuuc fub h?iperio Generalis Principis Repnini ad Confinia S.
Cz. M. cum Suecis terminant ia illafi in procinclu fiant. Juxta hanc Relatio-
nem mcam iftius eventus tanquam a^tlquis in confiant i amicitiâ fine ullâ- mu-
■ 'Tout. I. I i tatione
27o MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
1701. tctione vobis Ce l fis ac P. Aleis Dominis S. Cz. M. Ckm. Met Domini ami-
— cis coati us fium officia meo à vobis Mets Dominis pi'openfiè peîere quoniam mi-
hi confiât quad Suecicus Minifler hic degetis , pro ftio non ita pridem traàito
Memorïali orgeat fiecundum Traclatus y ac rcmvatum Pœdens cum vobis Aleis
Dominis pactum , non tantum de mit end is Régi ipfius auxiliis mllitarium Co-
piarum ac Navium à V. C. ac P. D. contra Exercitus S. Cz. AI. v&fitri
antiqui Amici , fed etiam prêter tranfiaclionem , intermiftem qunfi. volontariam
di ffirnulationem fiuam à Je inbibendi vobis Aleis Dominis ut quo ex mandat 0
vejîro vetetur harum Provinciarum Mercatoribus vcndendi varios beîlicos ap-
parat us ac infinie! us , fi quando ifli S. Cz. M. opus fuerint , & illos Alofico-
viam non tranfmittendi j quod autem juxta paclum cum Rege ipfius ufque ad
mmc à vobis Meis Dominis bau 'quaquam accordât um fuit , fecundum quas dc-
nuo adhibitas propofitiones manifefiam libero commercio violentiam , £5? ex hâc
impofterum futuram anguftiam auget. Quapropter rogo buniliter vos Aleos Do-
minos ne in bis ab ifio indigentibus ifii confient iant , donec fecundum veftras
LiteraS) inacceptione Mediationis F. C. ac P. D. ex utràquc parte , fient à-
Cz. M. ita à Regia Aï. Sue cite , non pridem refponforïœ S . Cz. AI. Clem. met
Domini vobis Meis Dominis tradita à me Literie , plenarium ilîms effeblus com-
pletionem acceperint , ex quo manifecla iftarum rerum fidelibus fignis amicitia
inter S. Cz. M. £5? V- C. ac P. D. dilatari non neglgitur , jed in defide-
rio ultra fœdus, illius Miniftri pet ita ipfius omnimode abfcindcwî , ac in t em-
pare accident alis ufiurpationis in emptione ac in tranfimifijîone ex bis Oris yfi
quidam beïlici apparatus necefiarii erunt , confientient , qttemadmodum & hoc
antea à vobis meis Dominis perdileMe fiatlum eft , quod vicififm fc? mercatori-
bus Veftris Meorum Dominorum commorantibus in Czarea Urbe Aîoficoviœ &?
in aliis S. Cz. M. Jmperii Urbibus^ ClementiJJimo fuo Czareo Refpeclu , in
petit ionibus fiuis tali modo compenfabitur ; ex quo non dubito quin pro dilucidis
teftimoniis minitna Vejlrorum Aleorum Dominorum cum Cz. Sacra M. in
antique vefira amicitia , permutatio ac negletlio futura fit. In indigentibus
à me , etiam humiliter peto ut de omni fupradiclo , mibi Fcflrœ Dominorum
meorum finalis intentionis refiolutionem indicare digtientur^ quo de boc incunclan-
ter F. C. ac P. D. refponfium ad S. Sac. Cz. AI. Clem. meum Dominum
déferre queam. Hag^e Comitis die p. Februarit Anno 1701.
Trnduc- » HAUTS ET PUISSANS SEIGNEURS,
tien da
précé- M T£ communiquai en dernier lieu à VV.SS. par un Mémoire que je pré-
Mémoi- " tentai à Mr. Salée Préfident de vôtre Ulultre Aflemblée pour accom-
re de >j pagner la Réponfe de S. M. Cz. à VV. SS.- de h manière que s'étoit
J'Ambaf- „ pane le Combat près deNarva entre les Armées de S. M.Cz. , 6c du Roi de
!?dMrr »■ Suéde. Mais, aïunt recû depuis avec les Lettres de S. M. Cz. datées de
„ Mofcow le 2$. de Décembre vieux ftile de l'année paflee 1700. une Rc-
„ lation plus exacte de ce Combat , j'ai crû que je ne devois point perdre de
„ teins de la communiquer à VV. SS. comme étant les anciens Amis de S.
„ M. Cz. tant pour les éclaircir du luccès , que pour dirîîper les bruits dif-
„ fiima^
vovie. 5»
"5
31
33
ET RESOLUTIONS D'E T A T. i7i
famatoires publiez par toute la Terre , par les Villes ennemies de Suéde 1701.
contre les Armées de S. M.Cz.; les Ennemis s'attrîbuant le bonheur & la — —
Victoire, 6c publiant une grande perte & deshonneur du côté de S. M.
Cz. Voici comment le Siège de Narva a été levé Comme on.avoit eu
„ des Avis certains dans le Camp de S. M. Cz. de l'Armée Ennemie , le
„ Général de l'Armée Mr. Petrowits Shermet , fût détaché avec un Corps
„ de Cavalerie de quelques Compagnies de Nobles de Mofcovie de Smo-
,, lenfco & deNovogorod, qui s'avança à quelques milles du Camp pour bat-
„ tre I'eftrade & pour prendre langue des Ennemis. 11 rencontra bien-tôt un
„ Corps Suédois de 600. Chevaux qu'il attaqua & défit , & prit prifon-
„ niers le Major Patkul avec le Commandant delà Cavalerie, & fon Lieute-
„ nant. Ces prilbnniers importèrent, qu'une partie de l'Armée de cinq mil- •
„ le hommes étoit à Wefenbourg fous la conduite du Général Wellingj que
„ le Roi étoit arrivé à Pernau, mais avec fort peu de Troupes ; que cepen-
dant, après leTranfport de toutes les Troupes, l'Armée monterait à 40000.
hommes , & que l'on ne pouvoit ramafîèr ces Troupes que dans quelques
„ femaines. Ces Avis firent étendre le Camp 6c les Attaques , dans l'attente
„ d'un plus grand Apareil de Guerre, que les mauvais chemins avoient empêché
,, de tranfporter , auffi bien que de 17000. hommes d'Infanterie , 6c 16000.
„ de Cavallerie, dont on fouhaittoit l'arrivée , afin de donner un AfTaut à ht
„ Ville. Mais le 10. de Novembre, un Capitaine de la Garde de S. M. Cz.
„ nommé Jean Gumeit , qui étoit toujours près delà Perfonne de S. M. (e
„ trouva manquer , fans favoir comment 5 les uns aïant crû qu'il étoit noïé,
„ 6c d'autres qu'il avoit été fait prifonnier. Mais , il avoit pafle du côté de
„ l'Ennemi à un méchant deffein, 6c l'informa de l'état de l'Armée de S. M.
„ Cz. 6c de fes intentions ; 6c il confeilla d'attaquer les Mofcovites avant que
.,, leur Armée fut renforcée. Cependant , S. M. Cz. le 18. voulut foi tir du
Camp , accompagné du Général Théodore Alexide Golowin, pour hâter
la Marche des Troupes 6c des Apareils de Guerre, 6c les conduire au Camp,
dont il laiffà le foin aux autres Généraux. Ceux-ci, qui n'attendoient pas
fi-tôt la venue de l'Armée Suedoife , ne fe méfioient nullement de leur
aproche j mais le lendemain ils aprirent le contraire , 6c le Roi de Suéde
avec toutes les Forces qu'il avoit pu ramatfer , 6c qu'en difoit monter à
„ ?oboo. hommes après une Marche de trois jours , fans s'arrêter , 6c fe ra-
„ fraichir , s'aprocha du Camp de S. M. Cz. 6c fécondé par le méchant
„ Tems, par le Vent, par les Neiges épaifies, mêlées de Brouillard, il atta-
„ qua un Pofte, où les Retranchemens n'étoient pas forts, £c qui lui avoit
„ été indiqué par ledit Traître 6c Deferteur Gumert, 6c où auffi il n'y avoit
„ pas beaucoup de Troupes :ainfi il ne lui fut pas difficile d'attaquer le Camp
„ de S. M. Cz. du côté où il y avoit une foible défenfe , 6c ou on ne s'at-
„ tendoit pas à l'Ennemi. C'elr. pourquoi, après quelque defenfe, il força
„ les Retranchemens, 6c combattit avec l'Armée de S. M. Cz. Et comme
„ les Retranchemens étoient fort étendus, 6c qu'ils n'étoient pas bien garnis
„ de Troupes , celles qui étoient près des Lignes , 6c mal rangées , fuient
„ mifes en defordre , jufques à ce que les Ennemis furent arrêtez, d'un côté
3, par le Général Adam Wéede, 6c par l'autre par les Regimens dès Bùobra-
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171 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
l701' „ fens, & de Semenowitz, où le Combat fût chaud, 6c dura bien avant dans
la nuit. Mais le Général Wéede , après un rude Combat les repoufTa en
très-grand defordre, Se comme il avoit reçu deux blefîures,il fut hors d'état
„ de les pourfuivre plus loin. De l'autre côté, lefdits deux Régimens, joints à
„ quelques autres, fe battirent vaillamment jufques à trois heures de nuitj de.
„ forte que les Suédois fc voïant dans le Camp environnez de tous cotez, 8c
„ ne fichant combien des leurs s'étoient retirez des Retranchemens , ils envoïe-
„ rent, contre toute attente, par trois fois des Trompettes pour demander
,-, une Sufpenfion d'Armes , à laquelle les Généraux de S. M. Cz. confenti-
„ rent} Se après l'échange des Otages, s'étant- abouchez , on convint que les
„ Mofcovites lèveraient le Siège, & qu'ils fe retireraient avec toutes les Ma-
„ chines 6c Apareils de Guerre, fans aucun empêchement, 6c en bon ordre,
mais non pas tous enfemble , mais Régiment après Régiment. Mais le
Général Wéede avec fes Troupes ne pût point favoir cet Accord , à caufe
de la diftance ; car l'Armée Suedoife étoit entre deux , qui coupoit toute
communication avec ce Général , ce qui fut caufe de fon malheur. Après
cette Trêve, 6c après la parole donnée par Sa Majefté même, quelques
Généraux, 6c principaux Officiers, furent admis à baifer la main du Roi de
Suéde } 6c fe confiant fur la bonne foi , commencèrent à fe préparer pour
faire partir l'Armée , ainlî que firent les Régimens de Briobrafens 6c de Se-
menowits , 6c quelques autres, parlant par le Pont en bon ordre, 6c avec
toutes leurs Armes. Cet Accord fut communiqué par le Général - Major
Buterlin au Général Wéede , qui fans délai fe prépara à partir avec les
Troupes, 6c il étoit déjà en Marche, lors que les Suédois, après la fépara-
tion des Troupes, voïant qu' Elles pouvoient fe rallier , violèrent l'Accord
contre le Droit des Gens, 6c de la Guerre, 6c demandèrent que les Régi-
mens miffent les Armes bas ; 6c quoi que ceux-ci s'y opofaiïènt, comme à
une chofe contraire à la Parole du Roi, 6c à l'honnêteté promife , réfiechif-
„ fant cependant que les Troupes étoient divifées , 6c pour éviter l'efrufion
„ de fang par les Forces fupérieures des Suédois, furent obligez d'y aquiefeer :
„ après quoi les Suédois fe jetterent fur plufieurs Officiers Allemands , 6c fur
„ des Chirurgiens 6c Apotiquaires , les apellant par dérifion, Chiens Saxons, 6c
„ mirent ces Gens,, qui étoient fans défenfe, crullement au fil de l'épéej pil-
„• lerent le Camp, contre la foi Roïale, 6c fe faifirent de toute l'Artillerie , 6c
„ autres Apareils de Guerre. Et quoi qu'ils enflent affùré les Généraux, &
„ autres Officiers, qu'après le départ de l'Armée , ils les relâcheraient y ce-
„ pendant ils furent obligés à éprouver le contraire , car ils furent conduits à
„ Narva comme prifonniers. A l'égard de la perte du côté de l'Armée de S.
„ M. Cz. après le Combat , VV. SS. en ont été pleinement informées par
„ mon précédent Mémoire. Et Nôtre Armée eft à prefent fous le Comman-
„ du Général le Prince Repnin aux confins des Etats de S. M. Cz. qui font
„ Frontières des Suédois , Se en bon état.
„ Cette Relation que je prefenteà VV. HH. PP. comme aux anciens Se con-
„ ftans Amis de S. M. Cz. peut les éclaircir du fuccès du Combat, 6c je me
„ trouve obligé d'avoir recours à Elles; car, comme je fuis certainement infor-
ÎS me a que le Mini lire de Suéde, qui refide ici ,preffc VV. SS. par le Mémoi-
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15
» i-e
ET RESOLUTIONS D'E T A T. zjfj
re qu'il vient de donner tout récemment, en accompliflèment des Traitez Se 1701.
des Alliances renouvelées avec VV. SS. non feulement d'envoïer à fon '
Maître des-Troupes Auxiliaires, Se une Flote contre l'Armée de S. M. Cz.
vôtre ancien Ami ; mais aum* que VV. SS. défendent aux Marchands de
ces Provinces de vendre divers Inftrumens Se Apareils de Guerre, au cas
que S. M. Cz. en eût à faire , 8c de ne les envoïer point en Mofcovie, ce
qui jufques à prefent n'a point été accorde dans les Traitez avec fon Roi,
ce qui tendroit à troubler manifeftement le Commerce, Se à en augmen-
ter à l'avenir la difficulté. C'eft pourquoi je fuplie humblement VV". SS.
de ne confentir point à fes Demandes, iulques à ce que la Médiation de VV.
HH. PP. entre S. M. Suedoife, félon la Réponlé de S. M. Cz. que j'ai der-
nièrement prefent ée à VV. SS. , ait un entier effet j ce qui fera une mar-
que évidente qu'on ne néglige point d'augmenter la bonne Correfpondence
entre S. M. Cz. Se VV. SS. $ Se ainfi qu'Elles réjetteront entièrement les-
Démandes de ce Miniftre, qui font au delà de ce qui a été Ifipulé dans les
Traitez , Se qu'Elles confentiront à l'Achat Se Tranfport de ce Païs, des
Apareils de/Gurre, au cas qu'on en eût à faire, ainfi que VV. SS. ont fait
amiablement par ci-devant. Ce qui fera réciproquement fait aux Marchands 1
Sujets de VV. PP. qui font à Mofcou , ou dans les autres Villes de l'Em-
^ pire de S.JV1. Cz. } Se par les marques évidentes d'Amitié queVV. SS. ont
donné envers S. M^ Cz. j'éfpére qu'Elle ne recevra aucune atteinte ou alté-
ration. Je fuplie auffi humblement VV. SS. de daigner me donner, fur
tout ce que defTus , une Réfolution de leur finale intention , afin que je
puifTe fans délai envoïer la Réponfe de VV. HH. PP. à S. M. Cz. mon-
trés-clément Maître. A la Haïe le 0. Février 1701.
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L'Ambassadeur de Suéde , à qui la Copie de ce Memorie étoit par-
venue, en fit des rifées avec les autres Miniftres étrangers. Même, pour en
divertir le Public , il fit faire par le turlupinant Auteur * de i'Efprit ou * Gueu-
Nouvelles des Cours, quelques Remarques fur le Mémoire , qu'il fit imprimer deville»
fort clandeftinement , Se en petit nombre, de la manière qui fuit.
MONSIEUR, Remar_
ques fur
LE mouvement des Troupes Francoifes fur nos Frontières m'ayant donné le ¥^
quelques occupations, j'ai été privé de ce loilir qui m'eft fi cher, quand ?u°eir
il me permet de m'entretenir librement avec vous. Je ne fuis à moi que l'Ambaf-
d'hier au foir, Se mon premier foin eft de répondre à vos deux dernières Let- fadeur de
très qui m'ont donné beaucoup de plaifir, Se j'en ai toute la reconnoiffiince Molco,"
qu'elles méritent. fe'nta e"
Le prétendu Mémoire de l' Ambadadeur de Mofcovie datte du p. de Fé- aux Etats
vrier, dont vous avez bien voulu me faire part, a été pour moi une véritable Gêné-
Scène. Je n'en fais peint le fin, je donnai dedans d'abord} &c jamais on n'a Qaipe'v
commencé délire une Pièce de meilleure foi. Mais, en continuant, j'ouvris 1701.
les yeux, Se j'aperçus de la tricherie. Néanmoins, l'Auteur a beau fe cacher,
fon voile ne m'empêche point de le reconnoître. Vous fouvenez-vous de cet
Ii 3 IL-
z-4 MEMOIRES, NEGOCIATION S, TRAITEZ,
tlTOi . Illuirre que nous voyions autrefois enfemble à Paris? Vous écoutiez Tes Rcciti
■ -avec une attention admirable, l'on peut dire que vous le dévoriez. La Re-
lation Mofcovite a bien l'air des fiennes, Se vous pourriez^avec quelque ap-
parence de vérité être foupçonné d'être l'Auteur du Mémoire: Mais lans en-
trer en examen, je veux prendre h chofe pour féricufc,8c vous régaler de mes
Remarques, fous la condition d'un fecret inviolable-, car, la matière eft déli-
cate, Se je vous croi trop de mes amis, pour vouloir me commettre avec une
Patfiànce fi formidable. Elle eft la terreur des No^velliites : fon feul nom
fait trembler les Gazctiersj Se, fi ces pauvres gens n'avoient pas la prudence
de s'obferver, l'Hôpital feroit leur unique relîburce.
L'on m'a affiné que ce fier Miniftre avoit mis en campagne je ne fiii com-
bien d'Efpions pour détener la Pieflè d'où font fortis Les Sentimens d'un Offi-
cier Flamand fur fon Mémoire du if .Janvier: c'étoit aparemment dans le def-
fein de porter fes Plaintes à l'Etat, Se de demander qu'on fît un exemple du
téméraire Auteur. Mais, y penfe-t-il? Connoît-il bien les loix du réciproque
Se de l'égalité? Quoi! il lui fera permis de tout dire fans qu'on ofe lui répon-
dre? Quel droit a-t-il de brider le Public, & d'enchaîner la Raifon? Fait-il fa
rélîdence où il eft, pour oprimer la Liberté Se lui fermer la bouche? Qu'il au-
roit eu bonne grâce à crier auprès de Meilleurs les Etats Généraux , Se à leur
demander juftice, lui qui n'a point rougi de Ggner Se de prefenter ce Mémoi-
re, que l'on peut dire être fort injurieux ; Se, après qu'ils ont eu la complai-
fance de le recevoir, il ofera leur demander réparation d'avoir été contredit?
L'Ambaffàdeur de Suéde ne fe feroit pas tû, fins doute, s'il n'avoit pris
fagement le parti de méprifer uneFauffeté manifefte, Se de ne fe vanger qu'en
laiffant boire à l'Auteur tout l'Affront qu'il en doit recevoir s'il aime la réputa-
tion. Mais, la conduite du Miniftre de Suéde n'eft pas une loi pour tout le
monde, Se ion filence ne défend pas au Public de produire fes fentimens. Il
y a des confeiences tendres fur ce qui touche la juftice : une Fauffeté débitée
avec affùrance caufe un vrai chagrin aux honnêtes gens ; ils volent au fecours
de la Vérité , quand ils voyent qu'on l'outrage -y Se la feule Probité eft un titre
fuffifant , pour fe foûlever contre PImpofture. C'eft donc au Miniftre du Czar
à n'avancer que des faits ou des chofes inconteftables, s'il veut qu'on le croye,
Se s'il prétend ne ti'ouver perfonne dans fon chemin: fes cris feront inutiles,
tant que fes Mémoires ne feront pas plus réguliers. Meilleurs les Etats Géné-
raux pouront avoir la patience de recevoir encore ces Ecrits tortus; mais, fi on
les redrefîè par des Remarques modeftes Se judicieufts, ces Juges Républicains
ne le trouveront point mauvais. Il eftvrai.que ce Miniftre Mofcovite n'eft
pas homme à fe rebuter pour ces obftacles} fon grand pouvoir contre la Liber-
té du Nouvellifte lui enfle le cœur; il s'aplaudit d'être craint , Se il fe ju-
geroit invincible, fi deux ou trois Miniftres étoient autant Mofcovites que
lui. Mais, fa Politique eft encore jeune ; il faut avoir de" l'indulgence pour
elle : peut-être que le tems Se l'expérience lui aporteront la maturité nécef-
faire; Se, pourvu que cet Ambaffadeur veuille étudier ceux qui excellent dans
fon Caractère, il ne faut point dclêfpérer qu'il n'imite à la fin ces bons Se ha-
biles Orignaux.
J'avois ce petit eflbr à prendre, avant que de me mettre en courfe: venons
au
ET RESOLUTIONS D'E T A T. z7f
au Mémoire. Pour examiner cette Pièce avec plus de méthode, j'en digérerai 1701'.
la fubltance, 5c je vous en remetrai le précis devant les yeux. On tâche — — *—
d'abord de gagner la prévention du Lecteur, 6c de le le rendre favorable, en
affairant que toutes les Relations du Combat devant Narva étant veuuës des
Villes Suédoifes, la fource n'eft pas pure; 6c que l'on doit le tenir en garde
contre une Nation , qui conte les chofes comme elle fouhaiteroit qu'elles fuf-
fent arrivées: mais voici, félon la bonne foi Mofcovite,à quoi il faut s'en tenir.
Le Général Schermethof, à la tête de quelques Régimens, avoit mis en dé-
route 600. Suédois ;6c pris un nommé Patkul,qui les commandoit. On quef-
tionna les prifonniers, 6c fur leur raport on preifa moins le Siège, 6c il fut
réfolu qu'on attendrait un renfort coniîdérable. Cependant, le Colonel Gum-
mert eut la perfidie de deferter ; 6c s'étant rendu lâchement à l'Armée de
Suéde, il y découvrit les intentions, 6c Fétat des forces, du Czar fon Maître.
Huit jours après, favoir le 18. Novembre vieux ftile, il plût au Czar de ne
plus honorer lès Troupes de fa prefence: ce Prince quitta le Camp, efeorté
tic l'on premier Général Théodore Alexis Gallewin, 6c le repofa de la con-
duite de fon Armée fur les autres Généraux. Ceux-ci, qui ne fe défioient point
de la diligence prefque -ailée du Roi de Suéde, apprirent avec le dernier eton-
nement que ce jeune Mars s'aprochoit d'eux avec trente mille hommes ; 6c
en effet il parut devant le Mofcovites le ip. Novembre v. ft. Pour mettre ce
Prince dans le tort , on l'accule d'une Témérité inouïe, 6c l'on veut qu'il ait
facrifié l'Humanité à la Valeur, en faifant courir fon Armée trois jours 6c trois
nuits fans manger ni boire. Après cette Marche de jeûne, 6c pire que la Re-
traite de Jouas, le Roi de Suéde eût la malignité de profiter d'un Brouillard
épais, pour s'aprocher des Retranchemens ; 6c, fuivant les avis duDeferteur le
Colonel Gummert, le Roi prit le Camp par fon foible, 6c s'adrefla au Quar-
tier qui étoit gardé par les Soldats les moins aguerris. Comme le Camp avoit
plus d'étendue que de force, les Suédois n'eurent pas beaucoup de peine à
franchir la barrière, 6c à mettre quelques Régimens en defordre: les Mofco-
covites fe défendirent en braves, 6c le Combat ne finit qu'avec le jour ; mais'
enfin, le Général V/eide, bien fécondé par fes vaillantes Troupes, força la
Victoire de fe déclarer pour lui ; 6c le Roi de Suéde, fe trouvant envelopé
de tous cotez, mandia humblement une Trêve par trois- Trompettes confé-
cutifs: 6c, grâces- aux deux bleflures du Général Mofcovite, Sa Majcfté eût
le bonheur d'obtenir miiëricorde. La Capitulation portoit que les Mofcovi-
tes lèveraient le Siège , 6c fe retireraient en gens qui ne cèdent point à
l'Ennemi. Les Généraux s'étant endormis fur l'Accord, 6c ne penfant plus
à rien qu'à faire une Retraite honorable, les Suédois par une injuftice criante
rompirent la Capitulation, 6c fe jettérent en furieux fur des gens dont ils ve-
ndent d'éprouver la générofité. 11 ne tenoit qu'aux Mofcovites de punir
une fi noire infraction: quoi qu'ils fuflènt coupez, ils auraient pu fe battre},
mais, moins fenfibles à la vangeance qu'à la confervation du genre humain ,
ils eurent la bonté d'épargner le fang , ôc ils confentirent à tout ce que le
Roi de Suéde voulut. Tant de douceur devoit bien toucher les Suédois; mais,
a quoi lèrt d'être bon parmi le; méchans? La patience Mol co vite ne fit
qu'çnfiammer la fureur Suédoife; celle-ci recommence de plus belle à trem-
per
t76 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
i~oi. pcr fon cpcc, l'on fait du carnage, l'on pille tout ce qui fe prefente fous h
" ' main , ph s'aproprie fans façon ce qui n'eft point a loi , 6c les Généraux
font conduits prifonniers à Nerva fans aucun refpecfc pour la foi publique.
Ici finit la Relation de ce fameux Combat.
Après cela, l'Auteur du Mémoire fe fonde en raifon pour pevfuader* à
Meffieurs les Etats Généraux de ne point fecourir la Suéde en vertu de
leurs Traitez, ôc de ne point défendre le Tranfport des Marchandées de
contrebande. Il conclut par la Médiation que les Etats Généraux ont offerte
au Czar, 6c il voudroit voir à quoi Elles fe détermineront là-defilis. Oeil le
Tableau en petit de la Pièce que j'ai deflèin d'examiner. Souffrez à pré-
fent mes Remarques.
Mon premier embaras eft de concilier l'Ambafladeur de Mofcovie avec
lui-même dans fes deux Mémoires, dont l'un eft. du tf. Janvier, 6c l'autre
du p. Février. Ce Miniftre parle également dans tous les deux fuivant les In-
ftruélions 6c les Ordres qu'il dit avoir reçus du Czar fon Maître j mais, fon lan-
gage n'eft rien moins qu'uniforme : vous le verrez en fon lieu. Laiflèz-moi ,
s'il vous plaît, fuivre le fil de l'Ecrit.
Pour infirmer les Relations du Combat de Nerva, 6c répandre fur elles un
doute public qui ferait bien de l'honneur à la Mofcovie, l'Auteur du Mé-
moire les fait voler vers nous d'un Pais intérefle , foûtenant qu'elles font tou-
tes venues des Villes de Suéde. L'aétion de Nerva s'eft paffee dans un lieu
d'où il n'étoit pas aifé d'en aprendre autrement les particularirez : on ne dif-
pofe pas de la fituation des endroits comme de la vitelfe des Couricrs j 6c ceux-
ci prennent leur chemin, 6c ne le font pas. Mais, fi toutes les Relations ont
patfé par les Villes de Suéde , il ne s'enfuit pas qu'elles foient toutes Suédoi-
fes: il y en a pluficurs écrites par des mains neutres > il y en a même de la
part des Généraux du Czar: celles-là font- elles flateuiès , 6c peut- on s'en ra-
porter à des témoins plus irréprochables? Cependant, aucune des Relations ne
varie dans fon Narré, & l'on n'a point vu que la voix commune leur ait donné
de démenti. Le Miniftre Mofcovite n'en peut pas dire autant : pas une Let-
tre ne fait pour lui, fon Récit n'a que fa parole pour garant, 6c cela ne don-
ne pas des idées fortavantageufes de fa fincérité.
Pour donner quelque luftre aux Arme» du Czar , l'Auteur du Mémoire com-
mence (à Description de guerre par la mémorable Défaite de 600. chevaux Sué-
dois, 6c fait un prifonnier de leur Commandant. Avant que d'éclaircir -le
fait, remarquez, je vous prie, Monfieur, & donnez moi fur cela tout l'a-
quiefeement de vôtre efprit : car la choie eft incontestable , que les Partis
Mofcovites ont toujours eu l'honneur d'être bien battus par les Partis Suédois
dans toutes les rencontres de cette Campagne ; 8c c'eft ce dont les derniers ont
rendu grâces au Ciel, qui les a protégez contre le nombre beaucoup fupérieur,
6c qui s'eft déclaré pour leur bonne Caufe. A l'égard de cette grande VicTroire
Mofcovite, en voici le dcnoûmcnt. Ces 600. Cavaliers aïant rencontré un
détachement de 2000. hommes les attaquèrent d'un courage intrépide 6c les
défirent à platte couture. Comme ils retournoienr. à Wefenbourg chargez
de gloire 6c chargez de butin, ils trouvèrent le Général Scherementof a la
tête d'un gros de Cavalerie, 6c maître d'un partage dont il s'étoit faifi. Ces
vail-
ET RESOLUTIONS D'ETAT. ,277
vaillans hommes, bien loin de reculer, rompirent cette barrière, 6c s'ouvri- 1701.
rent un chemin, ir.ns perdre que fort peu des leurs, & fans trouver rien à re- —
dire à la Capture qu'ils traînoient avec eux. Il eft vrai que le Commandant ,
& un autre Officier, v demeurèrent prifonniers; mais, quelle honte peut-on en
faire aux Suédois. C'efl une preuve que ces deux Combattans ne s'étonnè-
rent point de l'inégalité des forces, & qu'ils ne le rendirent qu'à l'extrémi-
té. Jenefçai li 600. Mofcovites auroient eu autant de fierté, & s'ils n'au-
roient pis refpeclé d'abord le nombre de deux mille Suédois en rendant les
Armes à la première fommation.
Sur le rapport de ces prifonniers, le Czar, dit l'Auteur du Mémoire, mo-
déra le premier feu de fon courage, 6c réfolut de faire traîner le Siège de
Nerva jufqu'à l'arrivée d'un gros Renfort. Je vous avoue que cela me pafle.
Vous, Monfieur, qui êtes fi fécond , 6c fouvent fi heureux en conjectures,
y decouvrez-vous quelque apparence ? Il eft du devoir d'un bon Général de
ne point laifTer ralentir l'ardeur de fes Troupes, 6c en Maxime de Guerre le
plus vite eft toujours le mieux quand on eft le plus fort > la lenteur n'eft loua-
ble, que lors qu'il y a trop de rifque,ou que l'on efpére en reculant confumer
l'Ennemi peu à peu. Or, les Mofcovites ont publié avec orientation que le
Czar afiîégeoit la Place avec un Monde d'Armée} l'on ne parloit pas moins
que de 150. ifo. 180. mille hommes. Les Miniftres étrangers à Mofcou, per-
fonnes d'autant plus dignes de foi qu'ils font fur les lieux," l'ont confirmé; Se
cela eft conforme à ce que l'Ambafladeur de Mofcovie en a publié- à la Haïe.
Mais, je veux qu'on ait groin" les objets de la moitié, car une Armée Mofco-
vite paroît toujours de loin beaucoup plus épaifie qu'elle n'eft, cela devoit-il
arrêter le Czar, 6c n'avoit-il pas encore des forces de refte pour réduire une
Place mal gardée 6c dépourvue de bien des chofes?
Je vous ai promis de vous indiquer les Contradictions qui fe trouvent dans
les deux Mémoires, 6c il y en a une ici qui ne doit pas nous échaper. Dans
l'Ecrit du zy. Janvier, ce font le Colonel Biomberg 6c le Capitaine Hamor,
qui ont donné occafion à cette légère difgrace dont la Grandeur Mofcovite a.
été entamée, 6c au petit defordre qui arriva dans le Camp. Mais , dans le Mé-
moire du p. Février, c'elt la trahifbn du Colonel Gummert qui a fait tout le
mal. Il eft vrai que l'Ambafladeur de Mofcovie avance dans Ion fécond Ecrit
qu'il avoit reçu des Informations plus exactes, 6c mieux circonftanciées du
Combat; mais , cela ne prefupofe pas qu'il ait énoncé le faux la première fois,
puis qu'il fçavoit les chofes de fource, 6c que le Czar fon Maître l'en avoit
informé. Il lui étoit permis dans le premier Mémoire de iuprimer la defertion'
duColonelGummert;mais,il ne pouvoit pas dans le fécond parler fous filence
la prétendue perfidie du Colonel Biomberg 6c du Capitaine Hamor: là il les
noircit , ici il les lave indirectement , en raportant à une autre caufe le dé-
rangement du Camp Mofcovite, 6c alléguant de nouvelles raifons pour mieux
plâtrer une déroute qui lui fait grand mal au cœur. Mais, que penfez-vous
de ces prétendus Traîtres ? Sans mentir , c'étoit de pauvres gens. Renon-
cer à un Parti armé de cent mille hommes, pour fe ranger auprès d'une
Poignée de monde, qui a la témérité d'attaquer en plein jour, Se dans toutes
les formes, n'eil-ce pas fortir de fon devoir pour courir à fa perte, 6c com-
fom. 1. Kk met-
1701.
278 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
mettre tout exprès une infidélité pour aller chercher la. mort. Il n'eft pas
vrai, dira-t-on, que l'Armée Mofcovite fût fi nombreufe: cependant, géné-
ralement toutes les Relations 6c de Mofcou, 6c des endroits voifins, l'ont pu-
blié de même. Que faut il croire, fi tant de témoins oculaires nous trompent?
Où eft la toi morale , fi la faufTeté trouve même fur les lieux tant de gens qui
parlent pour elle? Mais, je veux que le Czar n'ait fait que du bruit, 6c qu'il
n'ait été fort qu'en idée, que fait cela à la chofe?Il eft confiant que le Roi de
Suéde avant fon départ de Pernau, c'eft à dire long tems avant les defertions
prétendues, avoit refolu de tenter le fecours de Ncrva , 6c d'attaquer cette
Armée formidable. Ce Monarque eft donc redevable de fon avantage à fon
grand cœur, 6c non point à la bafletre d'ame de quelques Sujets de fon Enne-
mi. Quand il aurait profité d'une trahifon, ce n'eft pas un crime en morale
de guerre ; mais, croyez-moi, Monfieur, le fait eft une invention grofliére ,
forgée pour furprendre la crédulité des fimples, je vous affure; 6c je ne pui»
le tenir de meilleure part, qu'il n'y a eu ni traître, ni trahifon.
J'en fuis à la Retraite furprenante du Czar. L'Auteur du Mémoire nous
aprend que ce Prince difparut de fon Camp avec fon premier Général le 18.
Nov. 6cque tel étoit fon bon plaifir. Si cet Ecrit n'avoit été compofé que pour
la Mofcovie, l'on n'auroit rien à opofer à cette raifon, elle ferait de poids.
Une Puifiance abfoluë' & defpotique n'eft point obligée de s'expliquer autre-
ment avec fes Sujets: c'eft à eux d'adorer la volonté du Souverain, 6c de ref-
pecler aveuglément les raifons qui le font agir} fon vouloir eft la loi eflentiel-
le, 6c fon bon plaifir juftifie tout ce qu'il fait. Mais, le Public ne porte pas
cette pelante chaîne, il jouît d'un droit que la fociété humaine lui donne, 6c
que les Puifiances les plus imperieufes ne (auraient lui ôter. C'eft de décider
fur les actions éclatantes , 6c de ne donner fon aprobation qu'au vrai mérite.
Les Princes pafiént par fes mains, comme les autres hommes: le Public eft un
Tribunal fuprême , dont les Maîtres du Monde ne peuvent décliner l'autorité.
Dilons plus, c'eft fur eux que ce Juge incorruptible exerce une juftice plus fe-
vere 6c plus rigoureufe: plus il trouve d'élévation, plus fes arrêts font équi-
tables > 6c , fi cela lé peut dire , il lé vange de fon infériorité par la juftice même.
C'eft en fa confideration, que les plus grands Princes font ceux qui s'obfervent
le plus exactement : ils craignent d'être condamnez par ce Public également
éclairé 6c impitoyable; 6c ils tâcheraient plutôt de s'attirer fa faveur par de
mauvaifes raiibns, que de ne lui rien dire. L'Auteur du Mémoire a donc
prisa côté, quand il a crû que laRetraite prudente de fon Maître ferait piaille-
ment juftifiee dans le Monde par la Raifon afîbmmante du bon plaifir? Il doit
fçr.voir que les Héros ne travaillent qu'à fc bien peindre pour jamais dans l'ima-
gination des hommes; 6c, s'il veut que fon Prince en l'oit un, il devoit afili-
rer fa réputation de valeur contre le foupçon du Public qui ne fera point
mal fondé, tant qu'on dira que le Czar a abondonné fon Armée parce qu'il a
trouvé du plaifir à le faire. Remarquez, Monfieur, que l'Ambaflàdeur de
Mofcovie fe gendarma avec un zélé tout Minifterial contre les Journaliltes qui
débitèrent la Nouvelle de fa Retraite, il la traita de Colomnie injurieufe à la
bravoure de fon Maître, 6c il fouilla par tout ou il pût, pour démêler celui
qui l'avok inventée , 6c pour en avoir làtisfaction». Lu venté , n'eit-ce pas un
pl.û-
ET RESOLUTIONS D'E T A T. Z70
plaifant retour après tout ce fracas, de nous venir dire^ froidement, que le I7°i
Czar s'eft retiré pour ion plaifir? Si cet AmbafTadeur eue été moins vif, &
qu'il fe fût aflèz polfedé pour attendre l'éclairciffèment du fait, il aurait un
peu meilleure grâce à nous aprendre que le Czar ne jugea pas à propos de
refter au Camp : mais, cela ne le tirerait pas du défilé j car il cft aife de prou-
ver que le Czar étoit bien inftruit que le Roi de Suéde marchoit 6c venoit
droit à lui. Le Général SchermethofF, qui venoit d'éprouver au pàââge de
Pohaioggi que les Suédois ne fe mefurent pas par le nombre, annonç i l'apror
che de l'Armée Suédoife : 6c cette Nouvelle jetta dans tout le Camp Mofco-
vite une certaine frayeur , que d'autres nommeraient confternation ; ce qui ne
préfageoit aflûrément pas la Victoire. L'Ambaflaieur- de Mofcovie n'ignore
pas cette circonftance; d'où je préfume, que le fécond Mémoire n'eft point de
l'a façon: car, quelle aparence que ce bon Miniftre eût voulu en impofer fi
hardiment, en avançant que les Généraux qui commandoient après le départ
du Czar ne s'imaginoient pas que les Suédois leur tomberaient fi-tôt fur les
bras ? Il n'eft pas moins abiùrde de dire que les deux Officiers transfuges a-
veient révélé le fecret du Czar, & découvert fes defTeins. Un Colonel, 6c un
fimple Capitaine , font-ils du Confeil Privé ? Quand ils en feraient , il faudrait
qu'un Prince eût le goût bien mauvais, 6c qu'il fût peu entendu à difeerner
fon monde, pour confier les Affaires d'État à des Sujets capables de fe donner a
lbn Ennemi. Je fuis fur que le Miniftre de Mofcovie ferait fâché qu'on eût
une opinion fi bafîè de fon Prince, 6c de fon Gouvernement. Mais, aii fond,
qu'elle lumière pouvoit recevoir le Roi de Suéde fur les projets du Mof-
covite? Ce Prince ne fçavoit-il pas que le Czar vouloit prendre Narva, tail-
ler en pièces les Troupes Suédoifes , 6c fubjuguer toutes les Provinces au
de là du Golfe Botnique , comme il s'en eft vanté lui - même , à l'excep-
tion de la paatoe qui devoit fervir de place d'Armes aux Saxons du Roi de
Pologne, 6c lui faciliter avec le fecours de fon Allié la conquête de là Repu-
blique ?
Le Roi de Suéde, prétend nôtre Auteur , étoit fort de joooo. hommes.
Apparemment que ceux qui les ont comtez ne l'ont pas fait de fens froid, la
crainte leur avoit brouillé le regard, 6c leur avoit rendu les yeux multiplians :
un homme qui a peur n'eft jamais dans le point de vûë , il eft fujet à prendre
l'ombre pour le corps, 6c ibuvent il compte trais pour un. On ne fait point
une injultice au Roi de Suéde, de le pofter à la tête de jo. mille hommes : l'é-
tendue de fes Etats lui en fournirait davantage; mais, comme l'on ne groffit ici
fon Armée, que pour diminuer la beauté de fon Action, je ne crains pas de dire
que les 30. mille hommes n'ont point d'autre être que dans le Mémoire, Se
chez ceux qui font aïTez bons pour y ajouter foi. Le Roi de Suéde n'aurait
pas, fans doute, mené moins de troupes au fecours de Narva , s'il n'eut pas
crû cette Ville aux abois : mais , refolu de tout rifquer pour la délivrance d'une
Place dont la confervation lui étoit d'un intérêt important, il s'abandonna à
. la protection de Dieu ; 6c , fe repofant fur fa bonne caufe , il encouragea fes
Soldats à le fuivre. Le nombre n'approchoit pas de la fupucation Mofcovite :
l'en peut même confeflèr que ce Monarque avoit trop peu de forces pour une
Kk 2. telle
i8o MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
1701 • telle Entreprife ; mais, avec (à confiance au Ciel, il n'en crût que la propre in-
* trepidité, 8c heureufement il n'a pas eu fujet de s'en repentir.
Me voici à un Endroit du Mémoire où je ne puis tenir mon ferieux ; &
quand vous devriez me gronde;-, il faut que je l'égayé. Depuis que le Sy-
fteme de la Guerre fubiiftc^ £c que les hommes fe l'ont donné la permiffion de
• s'entr'égorger de bonne amitié Se de bonne foi , je ne croi pas qu'on ait rai-
fonné plus agréablement. Meffieurs les Mofcovites , religieux obfervateurs du
Droit commun, font fort feandalifez du procédé des Suédois. Quoi! venir fi
vite à l'Ennemi? Le prendre au dépourvu, & fans qu'il s'y attende? Avoir la
milice d'aborder les Retranchemens par un Brouillard 8c un tems obfcur?Etre
aflèz lâche pour attaquer par l'endroit le plus foible, 8c gardé par les Troupes
le moins aguerries? Tout de bon, cela n'en eft pas. 11 faut de la fincerité
dans la Guerre, ou ne s'en pas mêler. Si les Suédois avoient été des gens tout
unis, ils auroient voulu voir les Mofcovites dans leur naturel, & n'auroient point
ufé de fupercherie. Que n'envoyoient-ils dire au Czar par un Courier, Nous
arriverons un tel jour , ci? à telle heure, tenez- vous prêts. Etant arrivez, il
leur étoit d'un devoir indifpenfable de laiffer dillîper le Brouillard, de voir fi
le vent ne leur ferait point trop fivorable' , 6c fi le Soleil ne donnerait
pas dans les yeux à l'Ennemi: ils dévoient examiner les Retranchemens, obfêr-
ver la contenance des Soldats qui les défendoient, leur prefènter le fleuret &
eftocader contr'eux pour leur tâter le courage j &, ne les trouvant pas d'une
allez. bonne refiftance, il filloit avertir qu'on y eût égard. Alors le Suédois
aurait remporté une Victoire fans tache, 8c le Mofcovite aurait combattu
avec plus de fuccès; car, enfin, il n'eft pas honnête de dérober traîtreufê-
ment à une Nation les moïens de fe montrer telle qu'elle vaut. A propos de
ces endroits foibles , n'avoit-on pas raifon d'y placer les Troupes les moins
aguerries? C'étoit probablement pour les aguerrir tout à fait; car je ne penfe
pas qu'on ait fait cette union par convenance, 8c pour joindre uneroibleffe à une
autre: la Science militaire défend cela; 6c les Mofcovites la poffedent trop
bien , pour y faire de fi lourdes fautes. Que vous dirai-je de ce Camp trop
vafte pour les Troupes qui le gardoient ? Il me femble qu'il vaudrait autant
camper en raie Campagne. Vous verrez que la- Perfidie aura fait tout cela:
elle aura tracé le plan des Retranchemens, pratiqué les endroits foibles, con-,
feillé d"y mettre les Soldats timides, perfuadé d'étendre le circuit du Camp.
Car c'eft une étrange chofe,que le Deitin: quand une Armée doit être défai-
te, le malheur eft de tout, & la trahifon eft toujours la caufe dominante.
Mais, fi les Mofcovites avoient été au devant de l'Ennemi, ils auroient évité
la furprile & les traîtres auroint échoué.
Comme l'Auteur du Mémoire, quel qu'il foit, eft fans difficulté Mofcovite
de naiffanec, ou du moins de Parti, permettez -moi de clogmatifer un peu
fur ce que je viens de vous dire, quand ce ne ferait que pour vous divertir de
la diverfité des fentimens des hommes. Comment le Suédois parle-t-il de fon
Roi touchant le Combat de Narva? C'eft un Prince, dit-il, qui n'a point
agi par paffion ni emportement, qui a examiné la Caufe félon toutes les règles
de la juftice, Ôc qui a trouvé qu'elle y étoit parfaitement conforme. Pe;-
fuadé
ET RESOLUTIONS D'ETAT. 281
fùadé qu'il y a un Dieu, fcrutateur des âmes, rémunérateur du bien, Se ijor.
. puniflèur de l'iniquité, il s'eft tourné vers lui, & l'a prié de favorifer fon — "" — '
droit. La pureté du Culte, dont il fait profefiîon , lui donne de l'horreur pour
la perfidie-, St, jugeant des autres par fa pieufê droiture, il ne peut concevoir
■qu'un Prince jure fur l'Evangile de violer làfoi,'& d'exercer des cruautez
abominables fur des innocens. Bàtifîant fur ces Principes folides, il s'anime
d'une noble ardeur, fâ prudence èc fon courage le fécondent, fes Troupes
comptent fûrement fur la Viclore en le iuivant : en effet , les difficultez
s'aplanifTent devant lui, fon fier & perfide Ennemi n'a point l'affurance de
l'attendre, il diiîîpe une Armée- nombreuse qui lui a refifté autant qu'il fal-
loit pour le montrer invincible, tout lui cède, & il en bénit Dieu: voilà la
Defcription Suédoife, qui n'eft pas fort exagérée, comme vous fçavez. E-
coutons l'x\pologic îVîofcovite, deux mots en font toute l'énergie. Le Roi
de Suéde a eu un petit avantage fins aucune gloire , parce qu'il n'a fait que
profiter d'une trahifon: fi bien que d'un côté le Ciel a protège la juftice, &
de l'autre un crime a produit le bon fuccès ; d'un côté , ce grand ouvrage eft
le doigt de Dieu,& de l'autre, la Majefté Divine eft offenfée. A vôtre avis,
Monfieur, lequel des deux trouvera plus de foi chez la pofterité? L'Ambafîa-
deur de Mofcovie fait un grand fonds fur la validité de fon témoignage, il a
de l'impatience que la Terre ne foit repeuplée de nouveau, & il voudrait, ce
femble, que nous fufîîons déjà la pofterité. Mais, je doute qu'il foit plus crû
de l'avenir que du prefent. Il aceufe les Suédois de foibleffe & de lâcheté ,
'd'avoy- mis la perfidie en œuvre; & il prétend par là amoindrir la gloire de
leur Monarque. C'eft peut-être que ce grand perfonnage ne veut rien donner
à la prudence, & qu'il a. pour théze que les feuls obftacles mettent le prix à
la valeur. Mais, il ne peut pas s'y prendre plus mal, pour faire ià Cour à fon
Maître; car, ce Prince, dans la décifion de l'Affaire de Narva, a été fort pru-
dent, & a coupé pié à toutes les difficultez.
Vous ne devez pas exiger de moi une exactitude géométrique dans mes Para-
phrafes fur le Mémoire; non, Monfieur : il y a trop de choie?, qui ne valent pas
la peine d'être refutées, & il feroit moins aile de finir que de commencer fur
toutes les pauvretez qu'il contient. Je ne m'attacherai qu'aux endroits qui
choquent plus i'enfiblement la vrai-femblance. Prenons l'Article de l'Emba-
ras des Suédois ; ce n'eft pas le pire.
La première furie de l'Armée de Suéde aïant un peu étourdi Meffieurs les
Mofcovites, & ces bonnes perfonnes commençant déjà à perdre la Trammon-
tane, le Général Waeide revint comme un lion fur les rangs, & rejioua la
partie fi fanglamment, que le Camp démonté fe remit en belle humeur. Ce
fut alors que les chofes changèrent bien de face, & que l'on éprouva l'incon-
ftance du Sort. Les Suédois, qui fe croyoient maîtres du terrain , & qui chan-
toient déjà le triomphe, furent repouffez vigoureufement; mais, leur mauvaife
fortune n'en demeura pas là. Comme ils le difpofoient à chercher leur falut
dans la fuite, les autres Généraux, animez par le bon exemple de leur Collè-
gue, fe prelëntent à eux, & leur ferment le paffage: en moins de rien, ces
malheureufes Troupes fe virent envelopées , & tous les efforts qu'elles firent
Kk 3 peux
zSz MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,"
1701. pour fe dégager furent inutiles ; PoSfcOrité àé la nuit rendoit leur état plus
• ■ trille & plus affreux. Que faire? De jetter les Armes Se demander miféri-
corde à genoux, c'eût été une flctrilfure honteufe au Roi 6c à la Nation ;
& il étoit du bon fens de garder cette reflburec pour la dernière. L'on prit
donc un parti bien plus honorable: ce fut d'envoyer un Trompette pour pro-
pofer une Trêve ; mais l'Ennemi , enflé de fon avantage , s'en moqua, Se il a-
voit raifon. Les dcfolez Suédois ne fe rebutent point, ils donnent un fécond
Affaut à la généralité Mofcovitc; Se fè voyant encore rejettez, un troifiéme
Trompette va faire de leur part la dernière tentative. Pour le coup, les Gé-
néraux viétorieux fe laiflérent fléchir, & ils eurent la bonté de confentir à
un Accommodement. Mais, à quelle condition? Si je n'avois pas lu la Rela-
tion, j'aurais gagé cent contre un que les Mofcovites auroient demandé aux
Suédois de fe laillêr déformer, Se de îé foumettre à la diferétion du Vainqueur ;
Se je pofe en fait, que tout homme bien fente l'aurait jugé de même. Mais,
on ne fçait pas ce que c'eft que le Mofcovite : quand iî veut faire du bien , ce
n'eft pas à demi , Se fo charitable compaffion lui ferme les yeux fur fon propre
intérêt. On capitule donc , Se toute la Convention fut que les Généraux lè-
veraient le piquet, Se fe retireraient honnorablement ; fi bien que les Affiégeans
confentent en Vainqueurs à traiter , Se les Affiégez traitent en Maîtres : les
Généraux font grâce au Roi de Suéde, Se le Roi de Suéde leur donne la
Loi. L'Auteur du Mémoire a bien prévu le ridicule de cette Contradiction ,
Se il s'éforce de la refoudre par une raifon divertiffante : il juftifie la Retraite
des Généraux fur ce que ces Commandans, étant coupez, ils ne poiy'oient
pas avoir de communication. Qui les empêchoit de fe joindre? Ils tiennent
les Suédois dans le filet, ils les battent à toute outrance, ce font ceux-ci qui
demandent Trêve, Se l'Armée du Czar eft coupée, il n'eft pas permis aux
.Généraux de réunir, leurs forces, Se d'agir de concert. A-t-on jamais vu un
pareil galimatias? Comment ces Généraux capitulerent-ils , s'ils n'avoient pas
la liberté de s'affembler? Les Suédois, dira-t-on , occupoient le milieu du
Camp : foit; mais, c'étoit en gens qui auroient voulu en être bien loin, Se ce
polie ne leur étoit pas plus avantageux que la cour d'une prifon à des crimi-
nels. De deux choies l'une, ou le Mofcovites traitèrent avec fuperiorité , Se
c'étoit aux Suédois à fubir le joug j ou les Suédois dominoient fur leur Ennemi,
Se c'étoit à eux à lui donner la Loi. LaClauiê de la Capitulation, je veux dire,
la Retraite des Mofcovites, ne laiffe aucun doute à l'elprit pdnr té déterminer
fur l'un de ces deux points: mais, que deviendrait nôtre Auteur? Le taxerions-
nous d'Impofture ? Il y auroir de la dureté. Il fera plus humain de trouver un
biais pour concilier fon opolîtion formelle. Oui , il faut rendre juftice , à
tout le monde: les Mofcovites font d'une rare valeur, Se les Suédois font
d'une habileté toute neuve; ceux là fe battent en gens de cœur, ceux-ci né-
gocient avec une adrcilé mervcilleufe ; les Mofcovites reduifent l'Ennemi à
demander grâce, Se les Suédois terraffez perfiîadcnt à leur Ennemi de s'enfuir.
C'eft ainfi que le mérite eil partagé, Se qu'une feule Nation n'a pas toutes
les belles qualitez. Dans le ferieux , l'Evénement eft bizare , Se l'Hiftoire
n'aura jamais d'Epoque plus curieufej les Affiégez battent la Chamade , Se
les
ET RESOLUTIONS D'E T A T. 283
les Afïïégeans fe rendent à difcretion. Nôtre homme eft verfé dans l'Intrigue: 1701.
le tour, l'épifode, & l'incident ne lui manquent pas; mais, le denoûment *
n'eft pas fon fait, il n'y eft pas heureux.
Plus j'avance dans ma matière, moins je croi que l'Ambalfadeur de Mofcovie
eft Auteur de la Pièce dont je vous fais la difcuflîon. Je me fouviens que ce
Miniftre aprit au Public dans fon Mémoire du 27. Janvier que la rigueur de la
faifon avoit contraint les Mofcovites à lever le Siège de Narva. Aujourd'hui,
ces Troupes fe font retirées par Capitulation. Je conclus de là , que ce n'eft
pas la même plume qui écrit j 6c il me femble qu'un Ambafîadeur doit être
aufiî uniforme dans fa parole, que fon Caractère eft facré. L'on ne pardonne
point le dédit à ces Tètes illuftresj 6c fi on leur faifoit grâce de la mauvailè
foi, l'on fe riroit au moins de leur légèreté. Autre preuve trés-juftificative
pour le Miniftre de Mofcovie : c'eft la Rupture de la Capitulation par les Sué-
dois. Ce point eft ineftimablej 6c, avec toute vôtre pénétration, montrez-y
moi , fi vous pouvez , un grain de bon fens. Les Suédois étoient à l'extré-
mité -, encore un refus au troifiéme Trompette, 6c cette pauvre Armée n'étoit
plus qu'un tas de morts èc de prifonniers : on a pitié de leur trifte fituation, 6c
pour leur faire réparation d'honneur de les avoir fi maltraitez, on leur fait pre-
îênt de la Victoire, 6c l'on s'engage d'abandonner la partie. Lors qu'on ne
jenfe à rien qu'à fe retirer paifiblement , -6c en Guerriers qui fçavent meprifer
a fauffe gloire de vaincre; les Suédois, ces Monftres d'ingratitude, rompent
; eur parole par une perfidie exécrable , ils fe jettent comme des Loups fur
leurs Bien-faiteurs , arrachent les Armes, fe faififlènt des Généraux, 6c pil-
lent tout ce qui étoit au Camp. Ce font, Monfieur, de terribles gens, que
ces Suédois. S'ils ne font pas de bonne foi, ils font d'une étrange fatigue:
pour moi, j'admire comment ils peuvent y fournir. Souvenez -vous qu'ils ont
fait une violente marche, 6c que depuis le tems qu'ils jeûnent, leurs entrailles
doivent crier fiimine: n'oubliez pas non plus, qu'ils ont été dans le lac, enfer-
mez à ne pouvoir échaper, 6c confequemment que leurs Ennemis étoient
beaucoup plus forts qu'eux ; enfin, l'on vient faigner cette Armée, 6c la fai-
gnée a été fi copieufe qu'elle a dit, laijfez-moi, je n'en pais plus. A-t-elle un
moment de relâche? la voilà plus furieufe 6c plus indomtable que jamais y elle
tue, elle mairàcre, elle s'aproprie tout ce qu'elle rencontre, 6c vous diriez
que ces Troupes fortent tout fraîchement d'un bon quartier d'hyver. Je n'en-
treprendrai point de réfuter cette calomnie, j'aurais honte de le faire, 6c il
me fc-rnble que ce feroit prodiguer la raifon. Vous avez lu toutes les Relations
du Combat, vous en avez vu de perfonnes defmtereffées, y avez- vous trouvé
la moindre trace d'une infidélité fi barbare? Mais l'Auteur du Mémoire croit
fon crédit bien établi dans le monde, il ne tient qu'à diffamer un Grand Roi
6c toute une Nation fans fournir les preuves neceffaires pour perfuader. La
chofe méritoit bien qu'on fe precautionnât de quelques Lettres inconteftables,
ou qu'on produisît une Copie bien fignée de cette prétendue Capitulation.
11 eft rejouïfTant de voir un Moicovite en Pais étranger propolèr gravement
les productions de fa cervelle, 6c vouloir que l'on compte defius comme fur
l'Evangile. Cet inconnu ne pouvoit nier que le Roi de Suéde s'étoit rendu
Maître du Camp des Mofcovites 6c de tcut leur Butin; le Public en étoit in-
ftruit
C70I
2S4 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
ftruit à n'en pouvoir jamais être deperfuadé. Que fait il ? Il noircit la réputa-
" tion d'un jeune Se admirable" Conquérant, Se il foûtient inconfiderement, que
ce Prince n'eft victorieux qu'à caufe qu'il avoit manqué de parole. Si l'on a-
voit attibué aux Mofcovites ce que le Mmiitre attribue aux Suédois, peut-
être le Public n'en feroit-il point diiconvenu. Il peut bien être que les Mof-
covites, en fuïant,Se defarmez, auront efliivé le reiiéntiment des habitarrs de la
Campagne : je ne doute point que les Païtans n'en aient égorgé tout autant
qu'ils ont pu -, mais, ils ne doivent s'en prendre qu'à eux-mêmes. Pourquoi ont-
ils fatisfait les premiers leur rage Se leur fureur fur ces miferables innocens ?
Tous les hommes ne font pas fi généreux qu'ils le font, tous ne fuyent pas
devant un ennemi qui demande grâce ; mais, ces meurtres ne fe font pas faits
par ordre du Roi de Suéde. Ce Prince eft encore plus humain qu'il n'eft vail-
lant, 8c il n'aime à verfer le fang, que dans une occafion légitime.
Mais, pendant que j'en fuis à la fuite des Mofcovites, prenez garde,, Mon-
iteur, que l'Auteur du fécond Mémoire ne Fait point mention de ce Pont qui
fut rompu par la pefanteur des fuïards , & qui fît périr dans les eaux un fi
grand nombre de ces Soldats pourfuivis. L'omiiîîon eft prudente} car, com-
ment raporter cet accident , fans inculquer en même tems que les Mofco-
vites étoient dans la dernière confternation , 6c que leur Retraite étoit une dé-
route'dans toutes les formes. L'Auteur renvoyé donc Meilleurs les Etats Géné-
raux au Mémoire du Zf. Janvier, qui porte que le Czar n'avoit perdu que
3000. hommes. La brèche étoit bien étroite à une Armée fi nombreufe, pour
quitter le Combat fie la Place: qu'eft-ce que c'eft que trois mille têtes de moins
dans une Armée Mofcovite? Comme trois mouches dans un efiàin. Eft-il pof-
fible qu'on lève un Siège, qu'on rende les Armes, qu'on abandonne l'Artilerie
fie le Bagage, pour fi peu de chofe? Cela fent bien la Contradiction. Mais, ne
m'aviez-vous pas dit, Monfieur, que les Miniftres étrangers à Mofcou a-
voient mandé que le Czar confefîbit avoir perdu environ 6000. hommes , Se
qu'il avoit ordonné à fon AmbafTadeur à la Haïe d'en convenir? Ce Miniftre
ne l'a pourtant point fait, Se il a mieux aimé defobéïr, que d'affoiblir les for-
ces de fon Maître.
La Relation finilîant là, il ne me refte plus que d'examiner les Propofitions
faites à Meflîeurs les Etats Généraux. L'Auteur trouve mauvais que l'Ambaf-
fadeur de Suéde demande du fecours pour le Roi fon Maître, en vertu des Al-
liances contractées ; mais, il ne lui plaît pas d'en alléguer la raifon. C'eft à ces
Souverains à la pénétrer, ou à recevoir aveuglement fon Avis: peut-être eft-il
du fentiment , que l'obfervation des Traitez eft arbitraire, fie que fi l'intérêt les
forme, le caprice a droit de les détruire. C'eft la Politique de fon Pais, fie il
ne fcioit pas étonnant qu'il, la fuivit. Il eft vrai que nôtre homme recule Se
fe met en état de parer la botte, en fe raportant aux anciennes Liaifons que
Meflîeurs les Etats Généraux ont avec la Molcovie : mais, le coup n'en porte-
ra pas moins > car , j'ai déjà eu l'honneur de vous dire , que cette Republique ,
n'aïant jamais traité avec le Czar pour une defenfe mutuelle, ne peut fe dif-
penfer de fatisfaire aux obligations qu'Elle a contractées avec un Prince qui fe-
rait lui-même dans le devoir de la fecourir fi elle étoit attaquée. L'Auteur du
Mémoire ne peniè pas qu'en matière de fidélité conventionnelle, le plus em-
porte
ET RESOLUTIONS D'ETAT. i8f
porte le moins, 6c le fort prévaut fur le foible. Nous nous fommes promis 170 *•
de veiller réciproquement à la confervation de nos biens ; je dois le faire : mais, — —
vous attaquez un Ami avec qui j'ai traité pour affurer ma liberté, ma perfon-
ne, ma vie ; je dois rompre avec vous, pour courir à fa défenfe. Eft-il jufte,
comme le Mémoire femble vouloir l'infinuer, que Meffieurs les Etats Géné-
raux manquent à la fci qu'ils ont donnée à la Suéde, & fe privent par là du
fecours de cette Couronne fins aucun autre motif que celui d'une complaifan-
ce pour le Czar, & pour conferver l'honneur de fes bonnes grâces?
Touchant la liberté du Commerce & le tranfportdes Marchandifes de Con-
trebande, l'Auteur eft un fort honnête homme fur cet Article-là: car, il s'en
raporte au Droit des Gens, le fondement de la Société, & le lien de l'Equité pu-
blique j mais, il a le malheur de n'être pas profond dans la matière. Qu'il pren-
ne là-deffus de bonnes Leçons, qu'il fe faffe inftruire de l'ufage des Contreban-
des en tems de Guerre} mais, qu'il life fur-tout le Traité de Commerce paffé
en 167p. entre la Suéde & les Etats Généraux : il aura des lumières plus pu-
res, j'en fuis fur i & il fera forcé de confeffer l'injuftice de fa Demande, & les
très-juftes fondemens de celle du Roi de Suéde.
Pour rendre cette dernière Négociation efficace , le Miniftre mafqué a pris
un détour: il s'eft avifé, 'finement de demander à Meffieurs les Etats Généraux
que la chofe demeurât fufpenduë jufqu'à ce que ces Souverains aient pris leur
parti touchant la Médiation qu'ils ont offerte au Czar , & que ce Prince a
acceptée. Mais , qu'entend le Mofcovite par cette Médiation ? Vous ne m'en
avez jamais parlé, Monfieur: m'en auriez vous fait un miftere? J'ai bien fû
que Meffieurs les Etats Généraux s'étoient offerts pour prévenir la Rupture en-
tre le Roi de Suéde & le Czar, lors que l'Ambaffadeur de Mofcovie a la Haïe
produifit un Mémoire de Griefs ridicules, contre le Gouverneur deLivonie,
dont il demanda fatisfaétion au Roi de Suéde. Il ne m'eft pas nouveau non
plus, que le Czar prévint le bon Office de Meffieurs les Etats en rompant la
Paix avant que d'avoir reçu Reponfe. Vous-même, à qui j'ai l'honneur d'écrire,
il ne vous feroit pas échapé de la mémoire , que le Roi de Suéde étoit prêt de
Elire pefer ces Plaintes à la balance de la juftiçe', s' offrant à toutes les fatisfac-
tions raifonnablcs , &c ordonnant à fon Ambaffadeurà la Haïe d'affurer Mef-
fieurs les Etats qu'il s'en raportoit à leur Arbitrage ou à leur Médiation. Mais ,
cette offre des Etats Généraux n'eft plus de mifej c'eft un fruit hors de faifon.
Il étoit queftion alors de conjurer l'orage ; il s'agit à prefent de le calmer: on
vouloit empêcher que la Guerre ne s'allumât ; St il faut penfer à l'éteindre. Je
ne veux point fouiller dans le cœur du Roi de Suéde ; c'eft un endroit fàcfé
pour moi, ôc dont l'entrée m'eft défendue. Je ne fuis point de fon fècret}inais,
à juger de fes intentions par fon intérêt & par fes fentimens, qui font toujours
Chrétiens, ce Prince ne s'éloignera jamais d'une Paix jufte & raifonnable. Il
eft auffi bon que vaillant 5 6c il n'aime pas moins les hommes , qu'il eft digne
de les gouverner. Je croi bien auffi qu'il aura toujours beaucoup d'égard pour
Meffieurs les Etats ; mais, je ne puis m'imaginer qu'il veuille changer en Mé-
diation le Secours qu'il attend d'eux par le Droit d'Alliance: du moins, cela
ne me paroît-il pas de fon véritable intérêt.
Voilà, Monfieur, tout ce que vous aurez de moi fur le Mémoire) ne vous
ÏÏom. I. ~ Ll plaignez
i8<$ MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
170 1. pbignez point que je l'»i épargne en pluficurs endroits: je vous ai donné tout
mon loifirj & quel tems ne în'auroit-il point fallu, pour vous dire tout ce que
j'en penfe. Je ne fçai s'il en: vrai ou faux , c'eit de quoi je me mets pas en pei-
ne; mais, j'ai voulu fatisfaire à vôtre volonté par cet ordinaire, puis que je
parts demain fans fçavoir quand je ferai de retour. Je fuis.
Monsieur,
Vôtre 6cc.
A Bruxelles le 2$.
Février 170 1.
Ce qui augmenta la rifée, fut que l'Ambafîadeur de Mofcovie avoit offert
au Comte de Biiord d'établir le Commerce en France après la prife de Narva,
& cela par ordre du Czar. Le même Ambafladeur Lillienrooth fit aufïï im-
primer deux Pièces , pour distribuer tant aux Etats Généraux qu'aux Mini-
lires Etrangers , 8c à (es autres Amis. L'une de ces Pièces fervoit deReponfe à
la publication d'un Ecrit du Général Flemming, lors qu'il envahit laLivonie
avec les Troupes Saxonnes. L'autre étoit en Reponfe au Manifefte du Roi
de Pologne même. Comme ces deux Pièces font fort bien écrites , & (qu'el-
les font intereîîantcs , on a jugé à propos de ne pas en frultrer le Public. C'eit
pourquoi on les donne ici.
Examen Ç\Uam confiliorum viam baïïenus inflitifj'ent Suionum reges, quiqus eorum fui ffet
Caufa- «^^ animas in co^ifervanda orbis Chrifliani tranquillitate , non Mis , qui publica
Copia-" êettt'!im acla examinart '.penitius folent , obfcurum ejfe confido; neque eorum quem-
mm quant tam injuflum fore rerurn œfîimatorem , ut, fecum reput ans infignem iftorum
Saxoni- opérant in reftinguendà atrocijfimo illo, quo Europa nuper flagrab'at ,bello %tum con-
caruin , fianter cultant cum vicinis pàpulis pacem ac amicitiamteos libidine vexandi aliosar-
canrar fiffe dixerit^ aut infolentioris facli , novas belli jl animas excitât uri, arguent. Qui
Dux im> imper defuntlus efi, rex longiori vità utique diguïffimiu , cum fuperiori beilo tôt
prôviias wuftiata virtutis documenta dediffet3 ut rei militaris gloriâ facile omnes fiue œta-
j |1' • fis a.iteceUere judïcaretur : adeo tamen à profundendo hr.mano fauguine abhorruit ,
Livo- ut iaceffitus quortwdam injùriis, invitante epportuniïate fummâ\ quee vicloriam
niamlr- ac fucceffus polliceri videbatur uberrivios ■-, pacem tantum non injujlam juftifimo
pni p;\ifeïret bello ; rj? magna animi modérât 10m contr/>verfias , qus forte fubnajc e-
piae exe- fral,tur ^ rationum pondère, quant gladiortwi acte difeeptare mollet. Haufit hoc
rifque quoque ex indole divi parent 'is , qui hodie rerurn potitur , filius augufliffn.us ,
i- ut pacem illacejjïtus nutrire frnniter 'fibi in animinû induxerit : G? ficut au-
re fpeia habitit Iceiifima, conciliât a inter principes Chrifiianos pace ac concordiâ,
adeoque tant mcmorabilï faclo regni fui primordia nobilitavit -, ita nihil habitit
antiquius, quant illorum, quibufeum vêtus regno fuo conjttntfio eràt ac necefi;tu~
do, amicitiam fibi pignerari , &? , quantum v.ileret , fumma ope an.dfi , ut a-
lendis funultatibus ornais materia prtecideretur. In regem aui'em , regnttmque
Polonr.e, eo propenfiori Jtudio ferebatur , qnod magna cum topailorum obligatio
tfi'-t, C5?, exfijritïa Jtirpe r..fœorum, fimul omnis ;:::v'!;vrim caufa , qua utra-
qùe gens aïiquando çollidibalur , fublata at'jue funditus exftirpatit videretnr.
Proin-
1 1 iiur.
ET RESOLUTIONS D'E T A T. z%
Proinde nullum officiorum gcnus omiffum efi, quod ad benevolentiam tcflandam, ijoi.
fidenique fincerà vicinitatis corroborandam conducere exiflimaretur : neque rttr- ■■■
fus pat rat um quidquam , quod régis reipublicœque Polonorum offenfioncm provoca-
re, in:ilto minus paccm Olivenfem, tant folennttèt fancitam, tam luculentis legi-
bus comprehenfam , tanta deniqne fponforum aucloritate muuitam j labcfaccre pau-
lim , 6? omnmo convellere idoneum effet. Non potuit igitur non magno animo-
.r uni mot u accipi, ab ifto latcre, unie pacata -omnia 13 arnica fpjrabantur , ptb-
dok ac improvifo in Livoniam irrupiffe exercitum , &? , oppreffts armât a manu li-
mitant cuftodiis, munimenta ac caftella vi aut ajltt occupa fe, Rigamjtie , totius
fegknis caput , eo neceffitatis çompulijfe , ut ad arcendani ab rp/is vi.enibm "vim ac
impetum, fuburbana eiegantiffima , qu£ ingenti fumtu ad tîfitm aï que amœnita-
tem exjlruéla erant, fubjeclo igné, deureret : fpe vero capiendœ per infidias urbis
depulfum, àgrvs faro fiammaque Life pervafiajfe\ foiicitatis ad rebèïïioriem ne
perfidiam incolis , £j? cœfis , aut abduclis , quos m fide permànfuros appnrc'j.u.
Etcnirn eu m de bac incurfwhe rumor aliquis Holmia émanant, initia plerifqne ab
iis ficlus credebatur , qui confilia Suionum libenter voluiff'ent difturbata : fed cum
certi nuncii adferrent ab ifiis copiis, quœ Saxonum adpellatione in Lithuahia ali-
quandiu oberraverant , provinciam hofiiliter diripi, y nihil non exerceri, quod
immaniffimi belli fpeciem referret ; adhuc tamen ignombatur , ctijus aufpicio tam
atrox fâcinus fufeeptum effet. Neque enim à parte régis , aut fier eni film œ reipubli-
cœ Polonorum , ulla expoflulatio , aut querela , excepta efi , quœ lèvent frigoris ,
nèdum belli prœberet fufipicionem. ghios , fi cunbla illius , quod à pacificatione
Olivenfi ad noftram ufque memoriam pat et , temporis acla recognofeat , fi fiolici-
îe etiam excutiant omnes latebras, unde in bellum prurientibus prœtextus fiole nt
depromi , nullam apud Suiones infrablœ ifiius pacis culpam exjlare , haud œgre ,
qua funt animi magnitudine ac œquitate, confie (Juros effe crediderim. Ccrte ob-
fuiffe reipublicœ Polonorum incréments Suiones, aut temporibus infidiatos effe,
ut dubia eorum fortùnâ ad quœ du s &? compendium uterentur , nunquam reperient :
quin potins affliclis eorundem rébus bond fide indoluiffe , atque amicœ gentis incolu-
mitatem , haud aliter ac fuam , cordi habuijfe , ex multis £s? non obfcuris docu-
ment is intelligent. Ita enim fiemper judicarunt , bocque per fuafiffimum fibi ha-
buerunt Suiones , expedire utrifque quant conjuntliffïme "oi-vere , omnïâque confi-
lia fiua ad muiuam defienfionem utilitatemque confiociare , quod ea utriufque regni
c'ortditîo fit , ut, propter vicinorum potentiam, unius fecuritati minus bene lit pro-
fpeclum, cum alterius falus in di/crimen vocetur. Et quanquam exiffimare potu-
crant Succi, non parum fua intereffe , quis tam va/idœ ac vicinœ nationis gubema-
culum capefferet; nunquam tamen fas putarunt alienis fefe curis immifeere , lit in'
regibus ehgendis Polonorum animas ad eam partem , quant fibi credidiffent fore
proficuam, fitafu ac chortatioue impellerent j neque ut id facerent , ambientium
precibus , (3 lautis quant umvis conditionibus adduci poterant. Idque cum aliàs , .
tum nt'pcr incorrupta fide prœflitum effe non gravât e ipfi meminerint , cum, feiffîs
in contraria ordinum ftudiis , neutri [e faclioni affociaff'ent , fed, ut tllibata atque
intégra fiaret fuffragiorum libertas, ornni ope .atque voto contendiffent. Quod fi
hune animum in rempublicam gejfiffent Sueciœ reges , fi ipfi quoque Poloni non
pauca mutuœ benevolenîiœ p'rgmra exbibuiffent , quis eorum régna non flabili ami-
Ll z citid
z88 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
1701. citiâ congluîinata cjfe fperaret aut infeflam ab ea parte viciniam me tuer et? Sed,
■ titi par ejl , crcdimus perfijlere in antiqua fide ac benevolentiâ Sercniffimam Polo-
norum rempublicam t atque ignaram , expertemque fuijfe omnium , qua nequiter
ac perfidiofe in Livonià fatlafunt : at vero ipfum rcgem qua res tant opère à Suio-
num amicitiâ alienavit , quaque injuriarum fpecies ad tantam violentiam incitavit ?
Niji forte ex fereniffïma domo , unde oriundus , concept um in Suiones ocliv.m in
regnum remque publicam Polonorum introduxerat. ' Atqui vêtus cum illa domo
Sueciœ nccejfitudo intercejferat , cum multas ob rationes , tum fœdcris Vejîpbalici
catifâ , quam non interruptis officiis invicem excuit am cjfe atque fiabilitam, neque
tanti temporis trailu unquam rcfrixijfe, confiât. Scd cum Polonorum diadema
ambiret , indignationem ejus in Je converterant. Si ad eleclioncm régis parum 0-
pera contuliJJ'ent Suiones, an pr opter ea obfiitiffe dicendi fùtitî quod ab ejufinoSi
confiliis, qua comitiorum libertatem tollcrmt , vel labefaclareut , quam longiffi-
me fe removcre ftatuifjent : turbis vero, qu<s eletlionem infecutae funt, fefe im-
merger e ad pervicaciam alterutrius fcilae alcndam, cumjam fumma rcrum effet
confufio, non fus, aut utile , judicaffent. Regnum aut cm adeptû tant um abc fi ,
ut ullum honorern^ qui régi atque amico haben ifolet , ipfi denegaverir.t , ut, miff'o
legato , tantos fortune auclus gratuïati fint , benevolentiamquè omnem prolixius
detulerint. Qua gratiffima fibi fuifje non ipfe diffimulav.t , cum fupcriori aflate
Galetfcium, è fcnatorio ordine, in Sueciam abkgaff'et. Qnin tum per eunden: ,
£s? poflea cum legato régis Sueciœ , Vellingio , qui ad aulam ejus commorabatur ,
de artliori cum Suecis fœdere ineundo quod ad utriufque partis fecuritatem & or-
namentum fpeclaret, ageré non dubiîavit, ejufque conditions fcripto compre-
henfas in Sueciam tranfmifit : ut hoc velut certijjimo argumento illorum inmcen-
îia illuflraretur ; alterius vero partis perfidia , quam jam tum altijjlme animis defi-
xam habebat , deteflabilior omnibus redderetur. £)uamvis autem ipfam Polono-
rum rempublicam hoc f céder e, quo excludebatur, complet! i ftmul Rex Suecia pra-
optajfet j non tamen cum rege , tanquam Eleclorc Saxonne , fi. in fententiâ perfli-
tiffet , propiori focietatis vinculo jungi recufavit. Verum , ut mgx compertum
ejl , non id tum agebatur. Hacfcilicct plus quam Punica verfutià' Suionum ani-
mas ab immanitate confilii , quod jam fecreto coqucbatur y averteré vifum ejl ,
v.t incautos, £5? valut Sirenum cantufopitos, mox elideret , & ubcriorem fraudis
mercedem nancifceretur. Interea non hoc fe fine injuria continet: adhibentur alite
artes , nefcio an magis décora. Quo enim Suecicum nomen mag'ts foret invifum ,
énque gravius apud alios principes odium venir et, in aulâ Cafarca, per Miniflros
vecordes ac impudentes, tradebatur, cum regibus Gallia &? Polonia fadus adver-
' fus domum Auflriacam Suiones quarere : apud Chrijlianiffïmum regcm , ecfdcm
cum Cafare £s? rege fuo contra ipfum confilia infefta communicaffe ., Quamquam
hac calumnia falfiffima deprchenfa efl , 6? ipfa vcritate duduni difcuffa : varium
tamen aula iftius genium, & ad fraudes acutum, fatis manifcftabit. Seâ remiffi-
us paulo loquamur : reverentius etiam fentiamus de eo, qui fantliffimum in taris
nomen gcrit , & fummo rerum humanarum apici impofitus efl : quaramus , fi fié-
ri poffit , qualemcunque colorent tant a turpitudini obtcgenda. Neque enim cre-
dibile efl , tam dégénères dolos in iftam animi celfitudinem cadere potuiffe , ut,
ruptQ humana focietatis vinculo , atque amicis & innoxiis per fummum nefas &
cxecran-
ET RESOLUTIONS D'E T A T. i8p
execrandam cultioribus populis perfdiam, deceptis, maculant , nul! a œtate eJuen~ I70ï'
dam, famés fu£ inurere voluer it. Sujpicemur non juftam rcgi Poloniœ defuiffe — — —
caufam invadendi Suîonum provinciam , ut , _yî nonfuas, fociorum tamen injurias
ulcifceretur. Hic vero primum /cire velim , j«cw ejus fœderatorum Suiones vio-
laver ant, ut contra hos tam fanclam ilii operam ferret? Cura nullo vicihorum iftis
inimicitite, nedum bellum eft : controvcrfia, qua cum aliquo forte orta efi , ut
arnica ratione cornponatur , nondum fpcs omnis decollavit. Infolens autem &?
inaudit um ejl, fœderatos bclïum inchoare: quiefcere ipfum , qui ab illis auxilium
Jiipulatus eft. Ut caufam fociam promovcas , ut pertinaciam advcrfarii frangas ,
aquafque conditiones refpuentem vi adigas , liceat in promtu habere , liceat often-
tare arma: inferre ea, cumfocium nondum alter lacejf.it , &? quamdiu conciliatio-
vi locus eft , prapofterum habetur & rationi adverfum. Qnamquam cur eo labi-
mur, ut tégument um huicflagitio quceramus ? Cum neque banc, ne que ullam om-
nino caufam inceptis fuis prœtexere eatenus voluit , ut , quod nefarie ab eo fufcep-
tum erat, bellum faltem , non latrocinium dici pofj'et. Securus famœ , fecurus
odii , quod ob inauditam perfidiam apud Deum homincfque incurreret , pergit ,
quo effrenata eum rapiebat cupiditas , & , ne denunciato quidem bello , cujus fufci-
piendi caufam non habuit, cohortes domi omni flagitio imbutas, adque cœdcs ac
rapinas jam longo ufu exercitatas , in provinciam jujlis prœfidiis nudam, & , ut in
fumma pace , nullius malt timentem, fubito effudit, ut, quant va/lit atem fuis in
regionibus fecerat , alienœ pravinciœ clade & exitio reftingueret. Et ne quid ad
' funnnam indignitatis deefjet , infâmes aliquot , &? propudiofi homines, in focieta~
tem tam pr/eclara expeditionis adfumti j quorum Anteftgnanus , Patkullus quidam ,
proditore pâtre genitus , ut gentilitium dcclecus novo fcelere propagaret , populares-
fuos, quod & antca tent avérât , ad rebellionem concïtare inferecepit. Quis ta-
men credcret in hoc latronum grege hune folum inventum fuijfe, cui major pauloy
quam reliquis, fanas cura effet "î Sacerrimum hoc caput , quod camificum ma-
tiibus, & debitis ne.quiti.-e fu£ pœnis, fuga qùondam eripmt , ut huic mititia non
modicum aliquando de eus accéder et , adeo omnis pudoris fenfus non deftituit , ut ,
nef ar ils Jicet conatibus titulum al quem prœtexendum efj'e , infaniffima etiam men-
te non perfpiceret. Hic igitur nebulo, cujus confilio totum hoc negocium ageba-
turj ïnvcnijfe fe rat us, ubi illam fuam prœclaram fapientiam o fient ar et, Paike-
L'.m fine nationis homincm , £5? defertorem , qui tune copiis hifee prœerat , impu-
lit , ut, miffïs ad illuflrifjïmum fenatorem {5? comitem Dahlbergium , qui regioni
ac urbi prxfidet , literis , primus cmfam , ft Diis placet , aperiret. Nimirum ne
du bit are qui s poffet de juflitiâ illius belli, quod perduellis promu Igajfet j tum ut hoc
indicio conflaret , quos viros facramento adailos haberet Rvt Polonia , quorum
duces flagitiis ignominiifque confetli & cooperti effent. jfi proditori ac rebelli ,
qui boneflatem dudum omnem confumferat , tam fur lofa in mentem veniffe multis
fortajfe miruni non videbitur : comminifei enim tantifper quœdam nccejfum ha-
buit, cum ver a non fuppeterent : Flemmingium vero, extrancum, inconfulte ac
temere iftius démentis accejfifje intolerandum nimis eft, & fempiterno probro di-
gniffimum. Nam in caftra, qua in Samogithiœ oram Lithuania evomuerat , rê-
ver fus, cum matura jam confiliis fuis cuncla invenifjet , nugas hafee, infulfasU-
cet &f ridiciilas ,tanti fecit , ut non modo in argument um nefarii belli (irriper et ,ve-
Ll 3 rum:
- /
ipo MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
1 70 1 . rum £5? typis divulgari permit ter et. Invidijfe adparet alteri invention'; s gloriam :
fj?, ut palmam prœfaltatori fuo dubiam facerct , quœ impuriffimo cerebro hic pro-
cuderat , non mi non vecordiâ projcminavil ipfc dux fj? caput. Tant us flupor , an
infania, hune hominem ïjtvafit , ut auderet jperarc , quenquam fore tant jlolidum ,
ai crederet, aut tam improbum, ut f admis tetemmum, & cuntlis feculis defpucn-
dim , non abominaretur ; neque vident , eo latins fœditatem ejus fp.irgi , quo
Solicita magis dcfenfione agit et ur. ISon contemtim adeo de nofira atate judicari
oportuit, quee^ cum ad abfrufifîma queeque detegenda fatis ingeniofa fit , ad tam
clara , &? in aperto pofita , cœcv.trret : neque tam fterilis cji virtutum , ut in bac îho-
rurn corruptelà, non plurima pulcerrimaque honeftatis ci? probitatis nomina profé-
rât. Itaque if lins fatli tnrpitudincm fine cliibio perfpicicm t, qui jamftmï, homi-
nes,& exfecrabuntur : pofteritas etiam inter eminentiffîma funimîe perfidie aever-
fuh£ exempla, .qua nojlrum feculum infamarunt , allegabit & reponet. Nec ma- ■
gis affiner et vomicamjfaiu jodere , cîijus purjilentia & fpur ci ffima finies contem-
plant htm oculh f fatis pcllucet , ni fi effrom adverfariorum ma lit ta eo ufqu: proceffe-
rat, ut in pravè cœptis honeftiorew pertinaciam judicaref, quam pœnitentiam ,
fcelufque rnanifcjliffimum mentito colore inducere fatageret : prorfus quafi non
fuffecerit viola ffe gentium jura , conculcaffc (ancJifJînia pacla , adcoque nefando
fe fiagitio bbflrinxiffc , nifi , qiue perfide Jhut patrata , impudcnler etiam defen 'an-
fur. Atque haclenm opéra? pretium fucrit , fœditatem hujusrei, fublato vélo, in
adfpetlutn hominum lucemque paulifper exponere , ne fimpliciores , quibus ferles
rerum minus ejl perfpecla, prafijgiis horum delttfi , Jequius judicent : tum ut intel-
ligant cuncli , quantum fidei iftis hominibus in poflerum fit tri'ouendum, qui, con-
. temta honefli cura, jus fafque omne fia; poftponunt hbiûini.
Itaque , adttltà jam perfidiâ , cum f admis, qnod cum animo fuo flatutum
atque deliberatum diu babucrat , exfequi plmuiffet , caflra ad Janifcam , non
procul limite Curland'nc fitam , admota funt. Inde ad III. Nonas Febr. miffa
ad prafeclnm Livoniœ Epiftolà , arregantice £f? ftomachi pkniffima , indicat :
Difplicere fibi, & fufpeclas valde Suionura aétiones effè, quôd tanquam metu
alicujus inuptionis tantos faciant apparatus. Haud enim aliter ac fi hoilis ad
portas effet, ex propugnaculis & vallis urbis haftas , falces , ferrataique protendi
clavas : plura veiTus partem , qux Curlandiam f pcétat , per muros tormenta di-
fponi: majores folito vigilias agi , oppidanis etiam ad arma vocatis : ftationes
cquitum limiti praetendi : & Rigam commeantes, prœfertim duces mihtares,
qui è caftris Saxonum veuille compeiïuntur , uiligentius excuti obfervarique:
quin & emiffbs, qui hiberna corum fpecularentur : quodque indigniffimum ef-
fet, ab excubitoribus limitancis prohibitos elfe , qui deiertores per iblum Li-
vonicum perfequerentur. Simili a {§ prorfus gemina literis, quas ad regem Polo-
vice fingere plaçait , Flemmingius , ' otliduo intcrjetlo , perfcripfit : & quoniam hœc
fortafjïs jejuna nimis {3 frivola ipfi videbantur , putidiffimo mendacio , quod ei pup-
pis ac prora effet , eadem fulcire voluit : Minitabundos jaéhirTe Suecos, le, acci-
tis quamprimum è Fjnlandia , Carclia , Se Eltonia majoribus copiis , hiberna
Saxonum in Lithuania adorturos: ideoque prudentis elle, antequam hsec ma-
nus coiret, tam infella molientes pecupare, locaque pntfidiis idonea infidere,
undebellum, quam longiffime poflet, à iînibus regni arceret , fedemque ejus
potius
ET RESOLUTIONS D'E T A T. i9i
potius in eorum , qui pi'ius lacdîîverant 3 provinciâ locaret. Qjiapropter hxc 1701.
pofirema f.fiicere juclkavit , qua diplomalibus , per Livouiam mox dijjeminandis ,
inférèrent ur. Ha eau fa fiait , quasjufto buic ac necefiario , fi Diis placet , beïïo
-frtgtenâere non duùitavit , digniores profeclo , f «<? cra £5? perpetuis obruerentur te-
ncbiis, quant ut , cum feeuli nofiri infarnia'y in lncem ce or a hominum protruderen-
tur, Sane boni omnes dolebunt ac indignabuntur in tant a lace elegautiorum morum
prodi exempta, qua prifea Barbaries ignoravit, Ckriftique nomen & fiacra profiten-
tibus fia:ictifiima jura tam proterve haberi, quœ fumma religione colunt & obfier-
vant gentes immanifftmœ. Sed adeo in hifee hominum portent is ratio obbrutuit , ut
aufi fint fperare tam inficetas fie calumnias orbi adprobaturos efje ,quas non fine con-
temtu, &Jr;ïfu generis humani propalajje eos certum eft. Quiu & aliorttm Prin-
eipum auxilia expofeere non verentur , quorum tamen omnium non minus , quant
iilorum , qui la fi funt , fummopere interefi , faciuus hoc quant feverijfime vindiea-
ri, ne contagionem ipfafpes impunit ai is latins agat. Narn cum omne fœdum exem~
plitiîi focietati hominum nocet , tum illnd longe eft nocentifiimum , quod ipfum fiocie-
tatis humame vincuïum tôlier e docet. 'Tant verifiime à veteribus traditum eft , to-
tins injuflitix- nullam effe capitaliorem , quœm eorum , qui tum , cum maxime f al-
liait , id agunt , ut viri boni videantur. Verum ne partium eau fis velifieari vi-
de ar , âge, excutiamus ipfias viri -rat loues , an quid fiant contineant , quo tam im~
mane fatlum exeufiarï pofjït.
Initia offenfium fc Suionum metu non dijfimulat Ficmmingius. Qui enint fie ad
euftodiam urbis advigilant , diffidentiapt quandam & infejlum in copias Saxonicas
animum fiatis manifefiare. Per Deum immort aient ! Quid unquam infiulfius dici
potuit ? Qu<e injuria unquam coutumeliofius illata cuiquam eft? Qitid ad perver-
tendam generis humani focietatem , £5? bellum quoddam omnium in omnes profe-
minandum aptiust jln vero unquam fando audit 'uni eft, jufiam inde alterum inva-
deudi caufam nafici , fi Je ref-jue fiuas arcliori fepferii euftodià ? Quid tut os pofthac
ab improborum dufu nos prœftabit , fi crimen erit invafioribus non prœbuifi'e jugu-
lum, nos noflrafque fortunas non eorum permififje libidinit Nam fiecuros , 6? iu-
cautos, cum libuerit , oppriment', in fit; defeufionem intentas ctiam jure poterunt.
Gratuletur fibi f unira ac latrouum natio tam firenuum patronum , tam rnitem a-
quumque judicem , qui caufam eorum non proleîaiiis argument is defendendam fin-
ficepit : cujus fententiâ impune licebit domos effriugere & dicipere , fi diligent wr
p.iulo pater familias januam olferaverit ; fi, appropinquante grafiatorum 'manu,
vigilias iutenderit; fi ante veftihulum non prœftolatus, patentibus portis tam gratos
hojpites ir.tromifierit. Nempe injuriofum videbitur , fidern viris non haberi , quod
fperari pofiet , pofquam viciui adés compilaveratit , tam paras ïnnocuafique ma-
nus a mets abftinere velle fortunis : injuriofitu longe erit , fit arma adverfas fiubita ttt-
multus comparât a habeam. Itaque fit manipnlum ifium pradonwm interrogavero ,
quare me infeftatum vmiant , retlijjïmè refpondebunt , quod eorum probitati fub-
dijfidere -jifus fini , fores occludendo , Qf arma comparando , queis licentiam
grafiatorum , Ji qnando irruer'mt , retundere queam atque compefeere. Si ulterius
infiem , quare à meo fe non lo.igius amoveaut dotnicilio , ut mihi timere non fit
necefiîtm ? Credo , recîijjïme ctiam repofituri funt , fibi prœdà vivere adfuetis iil.tc
quoque lient fj'e ac.edere. Appojita refiponfio , m c hercule , 13 latror.um -acumine
dignif-
191 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
170 1. digniffma ! Non ovum ovo tam fimile , quam horum moribus dticis nofiri ratio- .
" cinatio. Stomachatur vir Suiones in fua urbe excubias paulo intentius agere, ar-.
iliaque adverfus hojlilem impetum expedita habere : cum nemini , nifi vint inten~
tanti , pericuîum inde impenderet. Ubi inflrumenta quoque , quœ hojli mœnia
fubainti opponi [oient , ridicula exaggeratione recenferi vides : tanquam &? hoc ar-
merum genus adhibttiffe , non impetrata Saxonis venta 9 pkiculum effet. Cavil-
latur etiam tormenta Curlandiœ obverfa effe : quafi ad fua cafira , qtue, totius Pro-
vincia interjetlu , ab tirbe Rigenfi dirimebantur , telorum jattus pertingerent.
Satis loci intereapedine tutus effe pot ait siugator,nifi immani qmdam feritate nimi-
. um vilis cruor humanus effet , ut pecudum injlar matlandos ira propugnatorum
?nilites objiceret. §hiod fi intentior munit orum îoeorum cujiodia anfam belli datt
cuis ea non damnabit ? Aut fi retineat , ecquando formidinis expers erit , cum tôt
fontes bellorum recludi poffunt , quot loca qui/que populus prœfidiis t entier it ? Sed
vereor, ne fur dis eorum aurJbus, qui arces prœjertim limitaneas ab inopino hojli-
um incurfu falvas cupiunt , bac prœcepta novus doclor canat , cum omnia belli ju-
ra , quee inter gentes ufus &? ratio conftituerant , pervolventi nondtim occurrit ul-
lum9 quo munitiones quifque fuas armis excubiijqtte firmare vetatur , nijuflam al-
terius iram infe convertere velit. Equidem ob leviffmas fiepe caufas atrocia bella
exarfiffe Mémorise proditum efi ; ridiculas rnagis obtentui fumtas , nondum legi-
mtts: Prorfus veterem lupi fabulam injtaurari videmus, ovieuhe turbati fltminis
calumniam i ni entant is, quamvis è fuperiori ripa ipfe bi béret. Vertim hojli lis in-
dicium animi erat injujlus timor. Neque enim odiffe non poteft , qui timet. Ghûe-
viffent à bello Saxones, nifi intempe fliva Suionum diffidentiâ fuiffent irritât i. Ni-
rnirum nulla omnino caufa Suecis erat , non plurimum fiducie in continent ia eo-
rum collocandi , qui totam Lithtianiam , quam à vajlatiohe defenderent , mifere
perpGpulati funt : quibus vicias nullus , nifi exrapinâ: qui ob prœdationes & vio-
lentiam, cocunte tandem incolarum manu , in ultimam Polangiœ oram ejecli funt
atque exturbati. Vita feilicet genus nmtaverant , &? fantlius agere decreverant ,
poftquam pudenda omnium rerum penurià ac nuditate conjli&ari cœperunt , cum
que iis confilia mifeere, qui rem Suecicam vexare ,fe? perturbare cupiebant : prafer- -
tim cum opima in propinquo prada oftent arêtier , fauces eneclas, & diuîina famé
arancantes , nova libidine facile profitât uni. Nihil igitur de eorum fuie fufpicari
oportebat, qui non jam muffitabant , ut antea, fed aperte & jatlanter vocifera-
bantur , je régi Danorum fuppetias latum ituros. Gh.amquam autem cum iflo rege
nulla Suecis inimicitia erat : eo tamen res fpetlare cœpit, ut non diu tempe; attiras
ab injuriis vider et tir, fi aliorum auxilia concire potuiffet. Quid fi eos confidera-
7iius , qui in commilitium adfciti , jam tum non modo iifdem cafiris contineban-
tur, fed & fumma rerum pr ce crantï Cum in bac , inqtiam , cafira fentina qttae-
dam perdit orum civium confluxiffet -y cum parricides , fiagitiofi , perduelles iifdem ,
tanquam fancliffima ara, reciperentur ; cum rotâ & eculeo frangendi , ad honora-,
ta Minifîeria prodticerentur j cum praecipuum in Confiliis locum tenerent , quos
confeientia feelcrum implacabiles patriae reddidiffet : Suionum fecuritati optime
tune profpeclum quis non intelligat ? Non ignotum erat , qttid cum horum latro-
ntim principe in aulâ régis Polaniœ agitabatur , qui cum furiis fuis £5? metu ultimi
fuplicii exagitatus , nufqtiam locorum tuto fubfificre poffet , invenil tandem afy-
lum
ET- -RESOLUTIONS D'E T A T. 2p?
lumt ubi non tantum inviol abilis& facrofanclus effet , verum etiam latentem ani- 1701.
mi pefiem produceret. JJlius furoris maturitatem in hoc tempus erupijjè qui s non
videt ? obftetricis vicem fungente Saxone , &? pias manus fupponente , ne mqn-
firum teterrimum , £5? arujpicum luflrationibus expiandum, in ipfo or tu elidere-
tur. Hoc pracurfore £5? emiffario cum ad quofdam principes , tum pnecipue ad
folicitandam popularium fidem , uteretur ; ha ne profligatiffimorum hominum
eircumfe, tanquam Jiipatorum , catervam cum haberet ; hœc probra & dehonefîa-
menta militiœ fi/a cum adfcriberet , dubitare quifquam pojfet , quid animo inten-
deret? Eventus ipfe comprobavit non fuiJJ'e vanum,fi qui fuit, Suionum timo-
rem. Enimvero cum prudens difjidentia faîutare bonis omnibus cenfetur muni-
tnentum ; reclius longe Suiones rébus fuis confuluijfe opinor, fi timorem quendam
aluifjent , neque innocentiâ fua , &" paflomm fanclimoniâ , confifi , fecurius pau-
lo egiffentf& blanditiis Saxonis, ac fallaci lenocinio, tam faciles credidiffent. Si
quid peccatujii ab us fit , in hoc fort affis argui poffunt , quod nihil timendo nafeens
malum corroboraient-, & ficariis ifiis nudum latus, qua maxime ad iclus patuit,
ex infidiis fodiendum prabuiffent. Non direptam crudeliter nobiliffimam provin-
ciam dotèrent hodie , non muntiffima cafiella expugnata vidèrent, nifi aftutififimœ
fimulationis artificio in foporem quali refoluti fuiffent '. Cum monflri quid ali ab
amicis monerentur, tant us erat gentis candor, ut alios ex fuo reput aret ingénia:
atque , ut franger e fidem, privât 0 turpe , principi etiam nefarium ac abominandum
fuerit; ita amicum & propinquum regem tam gravi Jufpicione onerare non fuftine-
ret. 6)uamdiu vim non intentabant copiée ejus , intraque fuetam fe cohibebant re-
gionem , nihil ad fe pertinere Suecus put abat , quibufnam ex agris Lithuania pr<?-
das conveclafi'ent : fatis habebat providifj'e , ne in fuos fines vaga aliqua & popula*
bunda manus excurreret. Tandiu ultro citroque commeantibus non modo aditus
patebat , verum etiam familiaritas. Cum nuila fere dies abiret , quin ab exercitu
Rigam ventitaret aliquis , menât ûs vel aliorum negotiorum gratiâ ; cuivis honor ,
atque ea officia, qua peregrinis & amicis exhiber i jubet humanitas, non gravât e
funt prcefiita. Nuila tune querela audit a efi,& ne fufpicio quidem alienati animi,
multo minus, quod bellum tamfubitum &? atrox excitare pojfet. §)uam igitur ne-
quiter ludat , qui habit os afperiori modo advenas obijcit, jam put a omnes intellige-
re : nec diffiteri poterit ipfe eorum dux , qui Rigenfibus pro exquifito cultu , quo
eum exceperunt , hanc gratiam refert, ut eorum urbi everfionem & extremum mi-
nitel ur excidium. Quam prof uijfet hofpitis fidem ita tune degufiajfe, quam nunc
fevitiam ejus fumme fuo chlore cognofeunt ! Nemini Suionum de exploratoribus
queri tune m mentent veniebat , cum integer corycœorum exercitus in foro , in adi-
bus, in templis, in vallis , & propugnaculis urbis cir ciimcur fit aret , cum eorum du-
cem fi nu fuo, & intra moenia , foverent ; qui , qua eft immanitate, opportuna ur-
bis loca ocrtlis nvtuffe ,& incendiis ruinifque jam tum defignaffe perhibetur. jitqiù
eidem piacuhm e/t , totius urbis £5? provinciœ excidio cluendum, fi qui s è Livanià
viaîor loca fiativis fuis vicina tranfiiffet: illum £5? commilitones fuos munitam Sui-
onum urbem frequentaff'e , pro beHeficio venditabitur. Adeo ab hominibus, libi-
dine fua efjeratis, fani quidquam frufira exfpeciaveris ! qui, quod apud moral os
populos, quos in ter pax eft ac amiatia, fine nota inhumanitatis non denegatâr,
quoique ipfi facere non eriibimwt , etiam Mis ipfis diebus quibus expeduioncm
%om. I. Mm hanc
is>4 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
170 1. banc funefiam fufcipiebani , inviolata paris crime» detorquent. Piget commenta
■-■ btsc rc fut are , abftirdiora cette , quant qua febricitam fomniare poJJ'et : & nefcio
annon multis videatur fupervacaneum , nugis bifce diluendis vel unum verbum im-
pendiffe. Mihi enim perfuafijjimum eft , neminem , cul mica fana nient is fuper-
eft , non ptttidam banc calumniam vidcre : neqtte adduci pojfttm , ut credam ipfos
illos fabuhe hujus infipidijfima an cl ores , quamvis fi renne front em perfricuiffent , fe-
rio bac tradidijje; ver uni ni fpecimen ederent , tam fibï proclive ejj'e ver bis orbe ta
ludifuari) quam immerentes fallaciis turpitercircumvenire.
Sed reperifie aliquid. fibi vifus eft migator , cum defertores rcceptos objiciat :
quod mirum in niodum vcrbis exag-gerat , ut inde Suecos non modo boftilan /«•
dtiijfe animum , fed ipfo fatlo eum exferuijfe probet. Quis enim pofthac dubitabit
non jufta arma effe fiuas rcs repetentium? fguidenim è fuga retrahere cupientes pro-
hibèrent , qui ad limitent erant équités} Mtror , ut ad fiu^endum eft%ngeniofiffi-
wtus, non dixiff'e à Sueeis ad transfugia etiam folicitatos ejj'e : quemadmcdum ipfs
ad defeclionem perfidiamquc quà minis , quà promijfis Livonos permiccre anniti-
tur. Enimvero an Jex dimacha , tôt enim fuifje perbibet , fines Livonia ingrejfi
fint, adbuc ignorât ur. Sed finge intrafie , qnos ad figna defcrenda longa ejuries
compulcrat , an ideo prafidia Suionum perrumpere vique profugos abftrabere Saxo-
ni fas crat? Non inter privai os id juris eft , »/, effraclis vicini adibus , erronem
fervum abducere liceat : qui te cum telo venientem fi. limine tecloque prohibeat ,
injuria , puto , tenebitur : cum et non fatis cautum fit, quatenus, cum admijfus
fueris ,tua progrejfùra fit licentia ; & ni receptator rcftituat fiponte^alia via ad red-
dendum cogi poffit. Principi longe fublimius ejj'e jus nemo fianus unquam negave-
rit ; cui immatte quantum decederet , quantum periculi iufidiarumque maneret ,
fi armatas cohortes immittere , inque territorio fuo conftituto manus injicere , &
quovis pratextu vim adfcrre aller poffet. Nondum quifquan repertus eft , qui. jus
hoc omnium populorum confenfu receptum , omnium fapientum traditions ad-
probatum , ipfaque natttrâ injitum , improlo aufu folicitaret , pratcr unum latro-
nem , cujus infania majorne , an ftupor inccrtum eft ; nedum ut inde caufam belli
ercej'eret. Sicut igilur ad tutelam fiuam opemque confugientes recipere -, jure gcn-
tium non probibetur princeps ; ita receptos tautifiper tuendos ejfe , aut cuftodiâ âfi-
fcrvandos, donec de eau fa eorum cognofeatur , (3 bumanitas fuadet , (3 ratio pO'
ftulat, <$>ui enim frire pojjls , qv.o animo accejferit profugus? annon jujfu ejus ,
cujus odium prafert , ut , occultât 0 dolo, necendi cccafioncm captet , aut rêver- ■
fus y quid rerum alibi geratur , amneict. Tum demum querela îoeus fuerit , fi ad
fœnam depofeentibus non dedalur. At vero famelicos , qui profugiffe dicebantur ,
num interpellâtes prafes provincia , fi qui forte reperti, aut urbe dudum non fuif-
fient exterminât i , reddere abnuebat ? £hjanquamfi retihuifi'et , prœfcrtim ifto re-
rum articula^ commun! gentium confuctudlne fe pot ni ff et tueri , qua fontes alic-
num îerritorium ingreffi , non deduutur , ni fi paclorum legibus aliter fit conven-
tum, aut atrocitas [céleris, qttalis in parriridà Patkullo, deteftabiles & mijericor-
dia indignos effeccrit. Mirum cum bac iliuftrifàmo viro objiceret , ni os illudfer'
reum & inverecundum rubor [uffuderit ! Qui hune conjuratiouis mantfeftum ,
quem omnium regum caufa ad uliimum rapi fupplicium dudum oportuerat , non
fifècjit modo, fed& extulit, & fovity is , ittquam , ipfie pacem non violavit: ad
Suio- -
ET RESOLUTIONS D'E T A T. z9r
Sniones profugijffè quofdam , quo s ut i que non retinuiffcnt , idvero crimcn habetur 1701.
favifftmo bello vindicandum. Quid fi hune ad fupplicium dedi Suiones peftulaf- ■■
fent, credo , pro confcientia fua teneritate ipfe nebulo adfenftffet , aut eum rcddi-
diffet Saxo, quo fiitellite £5? adminiftro furoris fui utt conftituerat. Sed ipfum fua
pœna manet , J'ubeuute memoria f celer um , furiijque flimulantibus , qua impiam
(inimam, noble dieqv.e circumflant cjf infettantur. Equidcm quicquid egifjet jum-
snus vir, eut provlncite fiilus ac euftodia à fi reg. Maj. Suecia demandata eft, tan-
tum abeft, ut criminari quifquam jure poffit , ut {anima laude maclandum ejfe in-
vitas ctiam hojîis fateatur . ghti hic tanquam in fpeculâ cpnftitutus ySitm facile fro*
fpiceret futuram tempeftatem, prudentia fua judicavit ejus vim , quantum pojj'et ,
infringere , aut forti animo excipere. In propmquo erant kgiones pradatoria , fi
nondum infefta , dubia tamen fide. Adhac non jufurrationibiis vagis £s? rumori-
bus vvulgabatur , quid cogitaffent , fed inditiis certis camper tum erat. Quœ om-
tiia ficut fufpicionem primu.n , fie mox diligentiam ejus augebant. Certe atliones
taniiviri, citra part mm Jludia, afttmantibus nibil omnino occurret , quod ducem
Saxonum tantillum offendere , multo minus tant a immauitate animum ejus in-
jlammare potuijfet : ver ttm fi qua offenfa fait a efl , illam omnem ex dolore
tant a ad irritum cadentis fpei provenijfe palam eft , quod prudentijfimum fiagacijfi-
mumque fenem lucHficari , & , quemadmodum jperaverat , imparatum opprimere
nequiifi'et.
Reftat jam gravijfima querela , &? atrociffimum crimen , quod fi diluer 0, ut
confido , aliud argument um tegenda fua perfidia circumfpiciat Flemmingius , ne-
ceffumeft. îale autem eft , ut in eo ex fuit are fibi pracipue videatur. Namfupe-
riora , qua objecerat , contorta nare , & deridiculi caufa, protulijje crédit ur , ut
effet , quod in fympofiis , & interfuos, rifu & joco agitant. Conflit uiffe autem
Suiones, ait , legionibus e Finlandiâ excitât is , hiberna Saxonum adoriri. Faveo
homini : utinam vera dixiffet ! Neque ille , neque fodales ejus , quamvis adau-
dendum projeclifjîmi fmt , tant os fibi animas fumftfjent , ut nob'ilifftmam floren-
tiffimamque provinciam tam nequiter diriperent. Sed quo indice de h te Suionum
propofito eruditus erat ? à quo didicit ? O port et illum fallacia , qnam pr inceps fa-
its adornabat , nimis f uiffe ignarum : quod tamen non credo. Cur enirn ipfum
admifjîonis intima , fecretorum arbitrum, audacia tôt les expert a , fraudum ftru-
endarum artificem fumntum & folertifjîmum , cum poftremum ab amplexu fuo
dimiferet , tanti momenti rem celaret ? Ab illo totam feenam , nifi eam ipfe in-
jlruxiffet , eborago Patkullo , difeere potuerat. Ab illo igitur audivit fuccefftffe
fraudent ,quam iniendebat : Suiones blandhiis fê fiducie novt foederis af/bpitos^oti'
um agere , nufquam fe commovere. £hto enim tempore Vcllingio , legato régis
Suecia, qui tune Drefda morabatur , capita arclioris fœderis cum ùaecis feriendi
tradtderat ^ cum hi credulitate nirnia, cujus pœnam nunc luunt , efje putabant fe
a metu fecuros ; cum Cimbricum negocium omnes horum cogitationes eô adverte-
bat, tincle turbas aliquando cruptutas adparebat : eo feilicet tempore , 6? alienijfi-
mo rerum flatu , regem amicum , ut opinabantur , & jam novo fadere fibi alli-
gandum 5 bello laceffere cogitarent, ex amicijjîmo infenfifjïmum jibi reddae , & ,
fuper occulte infeftos , apertis tnimicitiis hoflem quarcre confultum ducerent.
^uidf cum ipfe Flemmingius alterumjam menfem Livouia vfeeribus inhareret ,
Mm z cutii
iç>6 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
1701. cum totam provinciam populabundus peragrarct ,' cum cajlella expugnaret , ipfam-
— que urbem obfidione quateret ; quem adparattim tantœ moli parent deprcbeudit ?..
Num armatum fibi obvïutn fuiffe affirmabit , pater unam alteramvè equitum Hu-
mas , quarum vêtus in Livoniâ jïatio , 13 prafidia , qua munitionibus impofita
erattt , mudica oppido 6? debilia ? Qui bellum meditantur , qui occafiumbus im-
minent, an fuas fie digérant rationcs , cum rei militaris non imper it us efi , qiaefo,
ipfene crédit ? Noverat in Finlandiâ legioncs ejfc validifjhnas : intellïgebat etiam
evocandas ejfe , fi quis Livoniam infefiaret , inde çalamniœ huic apta materies ,
quam fuco aliquo incrufiatam orbi propinare non crubuit. ghtis eum nunc dubitet
fallendi artem callere, qui folerter adeo veris fa If a prebare novit? Siquidem falfa
tant uni, quœ veri nibil admiflum habent , quifquis locutus fuerit , clifficilius ,quod
•cuit , alteri perfuadebit. At unum mtiitem e Finlandiâ accitum fuiffe , antequam
ipfe jam non meta ac terrore provinciam adflabat , fed quadam indagine cinclam
tenebat, incendiifque (3 rapinis fœdabat , cavillator ut fit , non fuftinebit jam affir-
mare. lantum abfuit, ut periculum ab eo latere hybernis fuis metuerit. Ifardi-
as igitur eo penetravit Finnicus miles, longo & dïfficili itinere, quum non navigà-
bile effet mare, nec glacies tranfveclioni firma. Quam anni tempeftatem deiige-
bat bofiii, ut, cu.m majori circuit u duceretur ifle , interea ipfe provinciam oppri-
mer et , aut expilaret. Quod vero conjiciebat adfore tandem, eo magis tum fefii-
nare , G? nefaria anïmi deflinata tegere. Cum c'olis inflruclijfimus in hyberna re-
dit'ffet , atque fubolfeciffe aliquid Rigenfes de failacià , quœ firuebatur , forteque
parztiorcs, quam cxfpebJaverat , ejfe audiviffet, tam graviter excandefeebat , ut
legato fuo , quod folertius confilium non diffimulaffet , pêne oculum erucrit. Tum,
die nulla interpofita , per Curlandiam quam celerrime agmen rapt abat : £5? quam-
vis excubias equitum, ad limitem Livoniœ pofitas, facile fuperaffet : pauci enim
erant : tumen cum per illos hôftis adventus effet nunciatus , excitât os hoc tumul-
tu oppidanos , (3 , qui proxima urbi cajlella infidebant , vebementiffime indole-
bat. lnfrendebat dentibus non primo impetu capi potuiffe urbem, cujus oppugna-
tionem non paitco fanguine ftaturam pravidebat , pofiquam ad vanum irritum-
que fcclejlus Carlovicii ajïus redatlus erat. Hic enim, fi non alter , cum pau-
h ante, a régis Sueciœ légal is, literas ad prœfeclum Livonite commendatitias Mof-
coviâ attulïffet , hofpit aliter inprimis comiterque exceptas efi. In cafira Saxonum
pofica abit. Unus & alter dies interceffit , fingit , an rêvera defiinafet , fe Mofco-
viam rêver ti velle, tranftumque profe 6? comttatu petit, & obtinet. Nec mora :
rhedas ingentes armis , fealis, pyrobulis onujlas , cum artis iflius gnaris, prœmit-
tit , ut, bis portas urbis occupant ib us, telor unique ignitorum jaclu prœfidiarios ar-
centibus, valida dimacharum ma nus, qu.e prope infequeretur , irrnmpcret. Sed
cum paulo maîurius, quam dimacbœ , impedimenta bac ad limitem veniffent ,
excubitores fraudem detegunt , &? per equitum velociffimos Rigan nunciant. Dir
fiurbatum igitur , quod, renuente Dco , fufce'ptum erat confilium : &f improbiffi-
mus bujus doli macbinator, in oppugnaîionc Nyemund<e , dignas mox perfidià fia
pœnas dédit , globo ignito lacérât us : egregia morte , fi in caufa bonefia cecidïffet.
Hccc y fimilia cum tentaret Flemmingius , de metu a Finnico exercitu mutire au-
det? Is orbi tant inficetam fabulant obtrudet , met h futur œ oppreffîonis arma fe fum-
fffe, nec laceffiffe , fed bellum parantes Qccupaffeï Enithvcro quam abfurda valde
rrr^rr E T RESOLUTIONS D'E T A T. z97
& infujficiens belïï caufa met 'us fit , &? quant liquido prias conftare debsat de infeffa 170 1,
alterius voluntate, quant ad extrema provolare , îardiusque molientem oprimere •••
liceat, fi quis favore innoxite defenfionis gaudere velit, & piunt jufl unique bellum
gerere , quamvis folidifjimas rationes , cordatiffîmo cuique* femper adprobatas ,
adfcrre poffem : Az#2<?» , ca«» « nuïïus omnino metus erat , nifi ut fraudes fu<s
jam diu méditât a, parum commode procédèrent , ex hoc capite amendant homi-
nis coar guère non necefi'um dnco. Efl enim ipfa fallaciarum ferles retexenda. Cum
epijîola apud regeni fuum excufare fatageret fubitam injufju ejus irruptionem ,
ad quamfctlicet timor a Finnico milite impendens illum adegiffet , num ferio agit"i
Hoc fidem apud ullum inveniet, qui paulo emunblioris naris efl , ipfum, incon-
fulto rege acinfcio, bellum tenter ariam ac periculofum fufccpiffe, &?, cum Mars
communis efi , 13 eventus belli incertus fummam rerum in apertijjimum difcri-
men fponte fuà dedijfe ? Nam licet conjicere potuiJJ'et , non difpliciturum inquieto
animo, £5? vafiaconfilia agitant i, bellum tant opportune confiât uni, (3 pulcerrt-
mts provincia , fi dolus fuccefium habuififet , accefiïone compenfadum : cum ta-
men probe intelligent, non decere mini fir uni limites muneris fui excéder e , in re
prxfertim tam ardua, quod facile cont ingère potuiffet , ut, etiamfi profpere , pra-
ter veniam tamen , pugnaffet , exemplo multorum temeritatem Banc imperiique
contemtum capite Itteret ; faltem régis fui , non procul adeo confiituti , confilium
jufiumque exquifivifi'et , demonflrato periculo , in quod exercitus ejus brevi incur-
reret. Ghtodcunque dicat , non levi principem fuum fufpicione urget , quafi , eo
contemto, (3 in voluptates refoluto , ipfe dominationem teneret , prœcipue , ut
plamjîme apertiffimeque efi expofitum , cum, remoto omni metu a Finnorum ir-
ruptions , paucorum dierum moram tolerare potuiffet , donec peculiari mandata
ad négociant periculofifjïmum obeundum infirueretur. Bene baberet , fi in hoc
ipjo culpa tantummodo refideret ! Jpfitis 13 fodalium dédit ione , débit ifque fuppli-
ciis, quampr imam hoc facinus expiandum effet. Verum falvus efl : agnofcit prin-
ceps faclum, défendit, protegit. Ille régi melius longe , quant Rexfibi , confu-
lere volebat ; quod cum videret perpetuam ei levitatis notam inde inuflum iri ,
maluit ipfe eam fubire , ingenti certe in illum amoris pignore. Multi euim pro
rege vitam non dubitarunt profundere, hic etiam famam. Quam expediiffet quo-
que, ne qui [quant eorum, qui fummo in terris fajligio admoti funt , taie facinus
committendo, crimen fœdififimum , totique hominum generi ac focietati perniciofîfii*
mum , fito exemplo illuflrius redderet , 13 perfidiant , vitiorunt ultimam , in regia-
rum virtutum chorum adfcriberet : in Fkmmingio, quod peccajfet , & jaclura vi-
lior , (3 exemplum fuifiet obfcurius.
Sed quid illum tdterius exagitem , qui fe quidem hujus facinoris minifirum prœ-
huit , c<£terumju(fu & aufpicio princïpis fui? §)uo œquius efl veritate tant a confi-
xum , ac fatentem , paululum recreare. Concédant igitur tantifper offen/iuncu-
lam a Rigenfibus datant effe : Finnos quoque , Ma Saxonum terricula , quamvis
cent uni amplius milliaria trans mare, procul in fuis agns , degerent , per noclur-
nas vifwnes animo ejus obfervatosfuiffe : tant uni feire libet, an Samogitharum ca-'
fias dir'ipcre , £5? pradari horrea , militi Saxonico ideirco tuto non licuit ? Num , tor-
tor con filent i a, metus eo valuit, ut pacem tant a perfidiâ rumperet Saxo, & , non
indicat a injuria, qua Ufus effet, nondamni, fiquid datum, réparât ione verbo ten~
Mm 5 ^ tata9
isS MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
1701. tata, bellum omni crudelitatc adgrcdcrctur? Nolo ad gentium ctiam bnrbarica-
— •■■ ■ ' rum mores provocare ,quibus teqttumfomper vifum efi , omnia prias txptriri, quant
armis de cerner e : nolo Deum injujiorum beibirv.m vindicetn inculcare , ne ficlam
fovtaffiî ran et narrare videar: pacifient io Olivenfis , quà œterna inter régna Suio-
tutm & Polonurum amicitia ftabilita efi, quam utraque gens ut tiormam, & k-
gem Çantlijfime fervandam , mutuo corfmfu receperat , quœ denique imperatoris
Germanorum, Galline régis , & elecloris Brandeburgici fpovfione ac eviilone quam
firmijjïme corroborât a efi, longe aliam tollendi dififidia, fi quœ orirentur, rationom
prœfcribit. * Kœc enim quameunque injuriam , quœ citra vhn armorum fit ,
bello ulcijci vetat, donec is , qui la 'fit , pojlquam décent er efi admonitus, damnum
rejarcire abnuerit. lum demum alleri, fatla prius légitima belli de.ninciatione ,
jusfuum armis perfequi licebit; quod ut obtineret, fiponjbres quoqtte ad auxilia lœfo
ferenda fefe obfirinxerunt. Hac nauci habuit rex Poloniœ, qui jam ■'udum cœpit
omnia facra contemnere : horum nihii tentavit : nec de ulh unquam injuria que h us
ejl : adeo Sueci in illa refarcienda non poterant tergiverfari.
At vero cum omnia , quœ nefario huic bello prœtexere hatlenus volait, de exqui-
fitiffimo calumniarum génère depromta ej]e quivis intelligat : quœ tandem intimior
cauj'a regem Poloniœ ad tantam injuriam ftimulavit ? Refipondet Flemmingias :
Jusjurandum reipublicx Polonse datum , ut avulfa recuperaret. Hue enim ip-
■fum monet epifiolà Janifcœ feripta. Bene fiamx principes fui religiofus confilia-
rius , qui ad flagitia eum adhortatur ! Sed confeientiam liber are atque exonerare de*
huit , quod olim , cum rex eligeretur , ejus nomine ad id jurejurando fe reipublicœ
Polonorum objlrinxiffet . Quam folers efl libido ad fingendas caufas furoris ! Ab
illo unquam Poloni poftularunt , ut regem fuum fraudibus infirueret , ipfi mox rei-
publicœ perniciem accélérât uris ? Unquam ilh petierunt , ut "violât 0 gentium jure , per
dolos &? clandeflina latrocinia ad ea recuperanda, quœ.folemni paclo cefferant ,
grajfaretur? Gens magnanima, 13 tam candure animi , quam virtute prœfians ,
non furari folet vitiloriam , fed aperto Marte hoflem , fi quem , habet , adgredi : ne-
que ita diffidit viribus fuis, ut ignobiles & turpes fraudes infocietatem belli adfcifcat,
armaque hatlenus intemerata , & toties adverfus communem Cbriftianorum hoflem
tam for ti ter , tamque féliciter fumta foediffima labe contamine t. Non poterit non
averfari iftud régis fui faclum, quod famam innocuœ gentis fi non macula quadam
adfperfit , at fidem ejus apud vicinos populos nonnihil labefaêiavit j qui hoc ievita- '
fis exemplo moniti, in eorum amicitia, quibus pr inceps tam_fluxi animi imperitat1
parum fiduciœ collocabunt. Etiamfi pro eximia ftta fapientià facile judicaverit9
qua.mjurisjurandi, quod reipublicae dédit , fervans fuerit , qui dolos & verfutias
inter artes imperatorias dndum cooptaverat. Cum ad tam fœda & abominanda
principem fut.m infiigaret homo profanas, fuftinet profari , manu Dei viam quafi
ad haec perficienda demonftrari. Equidem, quem Deum ipfe colat, ignorare me
profiteur: hoc tamen recle mihi videor ajfimare poffe ,atq;te fanis omnibus adproba-
turum me confido , fi quemqam cjfe credidijjet Deum ; qui totum hoc univerfuam
vutufuo £s? providentia régit, quique recle fat! a ineffabili &? aeterno gaudio, pra-
va verb , G? legibus fuis adverfa9 perpetuis apud rualos genios cruciatibus maélabit,
nun-
" Pacificatio Oliv. ait. 3j. ■
ET RESOLUTIONS D'E T A T. i99
mnquam ad tam horrenchm exfecrandumque crimen prolapfus fuiffet. Cerîe id,quod 1701.
Chriftiani colimus , numen cum omnïa f celer a , tum fraudes 6? injufia bella , quam -
maxime abominari ,.. i$ feveriffime punire, a fapientibus viris, qui in Saxonia doc-
trinam ejus profit eut ur , audire potuiffet. Illud numen , quod fie ludibrio habet ,
temeratœ legis fuœ pœnas ab ipfo expetkurum,& 'Matas non minus fibi, quam Suecis,
injurias fimul atiquando ulîurum efic fi praedicam, nihil a fantlifjîmo verbo ejus a-
lienum flatuere me certus fum. Pro meliori enim caufa flare folet ,i$ ,quos perdere
vuit ,p;ius occœcare ; ut adeo fpes fit brevi ratum fore , quod per furorem vaticina-
tus cfi, manuDei hase conlïlia gubernari,yêi ita, ut fentiat ,averfonumine ,ea.
fufeepta effe, repique fe non ad vicloriam, fed ad exitium. Age porro ,qui fie tam
rehgiojam fœderum inlerpretem exiftimari voluit , qua jurisjurandi neceffitate
conftrtclum effe affeverabit regem Poloniae ad Livoniam vindicandam ? Neque c*
mm bac cum regno Polonico ita unquam coaluit , ut avulfa dici pofj'et\ qu<e , de-
(trucla a Monis republica eqiiitnm Teutonicorum , ambigua finitimorum contenu'
one , dubioque Marte , aliquaiidiu vexât a cfi , donec prévalent ibu s Suionum ar-
mis jure belU ccderet._ Interea ifio tumultu, & crebra fortunœ varietate , cum Li-
thuanorum focietatem amplexa effet , ab ordinibus regni Polonici acerrime contra-
diclum cfi , iniquiffimo femper animo hanc conjuntlionem ferentibus , neque un-
quam, ajfentienbus , ut, quam ipfi regno vohiiffent infertam, Litbuaniœ acceffio
fier et. Ita dubia hœc provincia flutluabat , neutra parte concèdent e , ut alterius
ditïoni adjiceretur. §)uo igitur paclo avulfa appellabitur, quœ cum regno ifio nun-
quam confolidata fuerat ? Contra ea , fi id nunc agendum effet , multis indubiifque
eorum, qui res geftas populorum feptentrionalium feriptis illufirarunt , tcfiimoniis
probari pofi/et , Livoniam Curlandiamque veteres Suionum effe provincias , £s?
antequam ordo Teutonicus in Mas irrupiffet , multis rétro feculis eorum paruiffe
imper io \ ab lis quoque facra Cbrifiiana primum accepifj'e : fed glifeentibus in Sue-
cia bellis domeflicis , • peregrinas nationes occafionem captaffe bas regiones invaden-
di, quœ nomen Suecicum paulatim ita afflixeiunt, ut in maritimis tantum oris, &?
iujulisfere, qua bis prœtexuntur , vefiigia ejus remanerent. Itaque in prifeo Su-
ionum in banc provinciam dominio jus ait quod accerjere liber et , bis avulfa veriusy
poflea non tam occupata, quam récupérât a cenfebitur. Ghtibus addi poffet , Livo-
niam, qua in tut clam imperii Germanici pofimodo recept a fuerat, jufio diploma-
te Snecis, ab imper atore Carolo V. conceffam effe , ut dédit itiam adverfus vint
MoJ 'cor uni protégèrent : Polonis autem a magiftro cquiîum eorundem , renitenti-
lus horum nonpaucis, ejus permijfam effe partem; qui t amen, ut precarius ma- ,
glfiratus, non majori Livoniam jure alicnare poluit , quam eletlor Saxonicus hodie
regnum Polonicum donare alteri, aut vendere. Sed quid opus hœc jam repeter et
Nam fi Polonis jus aliquod in Livoniam brevis olim poffeffio peperiffet , id quale-
ennque demi'.m fuerit , pace Olivenfi * renunciatv.m cfi, atque abolitum; quam
conveiitionem or dînes rcipublica Polonorum non tatum firmam raiamque babue-
runt ,vcrum & folennem ejus adprobationem codici legum fuarum inféré voluerunt.
"t" §ua igitur fronte Livoniam inter illicite avulfa reput averit, quœ tam folennî
ac legitimo modo conceffa cfi ? Aut qui potuerint ab eo Poloni pofiulare , ut , quod
* Art. 46. j Ratifkatio Pac.-Oliv. a Sénat. & Nobilit. Polon,
5oo MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
iroi. ipft commuai olim confenfu cum Suecis paclifunt , Rcx infringeret ac violaret? Si
1 neque vcrbis fides, nec pailis obtigatio .inell , quid ait met bella comporter e , qua
tenter e Cs? nu lia injuria provocatus aller, quandocunque voluerit ,renovabifi Subla-
to hoc vinculo, quo fialus hominum ac focietas hailenus contineri vifia eft , quid
tandem fupercrit, quod genus mortaliunt ab inter necione falvum prœftiterit} Quant
faciem h<ec vita indaet, nifi belluinam, & qualem dux nofter optât , perpétuant
quamdam bellorum lalrocinior umque licentiam ? Peffime igitur cum univerfo ho-
minum generi confultum it , qui , excufjo ex animis meiu & rêver entiâ Dei , quo
tefte fœdera atque pacla ineuntur , fidem flocci habendam docet , tum ftbi exem-
plum ftatuit perniciofum , inque ipfius caput aliquando rctundendum. Qui enim
*Pfe fecurus erit , quo ntagiftro, alii tam expeditam f aliénai viam diduerunt ? Et
quo jure alterum incufiabit, y?, ut eft magna rerum omnium vicijjitudo , paria pa-
ir are illi conimodum forte vifumfuerit? Qui fidem femel decoxit, eum etiam Mi,
■quibus amicis utitur, metucnt : & qui decepti funt, ne iterum decipiantur , inten-
tius cavebunt ; cum bis ad eundem impingere lapident ftultis fiolis concefijum eft.
Documentum certe habuerint vicini principes , quantum ejus amicitiœ tribuendum ,
quem non pudor a turpitudine , non fides a levitate , nec innocentia ab injuriis re-
l'ocarit. At enim cum jur abat religiofus vir , regem avulfa recuperaturum , ad
quant cœli p/agam vultum convertebat ? Quid terraruni potijjîmum mente coqcipie-
batl An Livoniam? At fola non eft , quœ putatur regno avulfa Polonico. Nifi
igitur , ad modum certi generis facrificulorum, verba a mente- aliéna recitaffet , eo*
dent carminé devovebat , quantum olim regionum Poloniœ quacunque ratione ob-
noxium fuiffet . Namfi Livoniam inter avulfa computat, in quant fiabile firmum-
que jus Poloni nunquam adepti fiant, qua etiam Suecis légitima paÙione cefifierant,
quid earum regionum, quarum alienatio meliore jure non nititur , fata morabitur?
Dubitabit quifquam vicinorum de intentione £f? mente régis Poloniœ, quœ nonjam
magis libéra eft , fed religione adftricla , Flemmingio interprète , &? metum perju-
rii incutiente, nifi proxima qnœque tam fpeciofo titulo admordeat. Pacla fcilicet
illum retinebunt , qua , quant facile vulpcs pyrum corne fi , infulfis calumniis infir-
mare ac evertere noverit. Bene igitur jur ifuo in Boruffiam cautum exiflimet do-
mus Brandeburgica. Magnus item Mofcorum dux in Kiovienfem , & Smolefcen-
fem provincias diuturnum fibi polliceatur imperium, Annon Daciam univerfam ,
cujus partent Hungariœ Rex, partent Turcarum Imperator tenet , ad vêtus obfie-
quium compellere cogitabit, quod vctligalis olim &? tribut aria Pvlonorum fuerat?
Quin , Hungariam ipfa?n aliquoties Polonia conjunclam fuijfe confiât : quo minus
illam recuperare negliget. Silefia a primis regni incunabulis Polonia adhtsfit. II-
lam igitur tant oppurtunam , tam necefiariant , arccm quondam & propugnaculum
Pcloniijtf) inperpetuum a corpore regni avelli Rex patietur ? Siquidem ut fidem rei-
publica datam folvat , £s? teneram Flemmingii confident iam a crimine perjurii libe-
ret, religiofus pr inceps nihil intentatum inaufiumque linquct. Non petttit aperîi-
tis animum & cogitatata nudare , te tins alioquin & diffimulandi callidus : nec per-
tinacius bclli caufiam quarenti qu.dquam turpe aut illicitum fuerit , cum ,
qui Deum fallere non eft veritus , homines pofthac decipere inter ludura re-
putabit.
Lhimv;ro,fi crcdidijfet Flcmmingius non parvunt glorix régis fiai cumulant accé-
der e
ET RESOLUTIONS D'E T A T. 501
dere, quod Suiones iwmer entes , & paci confifibs , per dolum atque injidias cir- 1701.
cumveniffet ; Jijam non nef as putajfet Livoniam, qua légitime Mis concejfa eft,
propter jusjurandum armis vindicare: per cujus genium dejeravit , fe quoque ani-
mes provincialium ad perjuria adaclurum? Quodnam decus inàe reportaret , fi ,
quorum fortunas ferro atque flammâ corrupit , eorundem quoque fidem ac con-
feientias depravarct ? quid commodi, quid ornamenti, Livonis inde conciliaret vin-
dex ac affertor ? Quos profeclo intégra exiflimationis cives habere potuififet , fi forte
provinciam fubjugaJJ'et , eos nonni/i flagitio pollutos , feelere obligatos , ignomi-
niofios Éj? infâmes in poteftatem recipere prœoptavit. Jntelligere tantum potuit ,
non ejfe in civium potefiate fidem , quam régi legitimo femel jurajfent , citra fa-
dijjîmum perjurii crimen , abrumpere , fieque alieno dominio contra ejus volunta-
tem veniamque fubjicere : neque obligationem illam , qua régi fuo cives fitnt de-
vincli, ftatim tolli £5? exfpirare , fi. contingat injujîis aliorum armis provinciam op-
primi ; quamdiu ejus curam vêtus dominus non abjecerit , aut ita viribus fit débili-
tai'us , ut eam recuperandi nulla fpes & ratio fuperfit. Quanquam ne tune quidem
priori juramento exfolvi eos, ut alterius imperium ampiccli pojjïnt , apud cultio-
res gentes receptum eft, nifi pravia ejus renunciatione , cui haclenus fide & obe-
dientià obligati fuerant. Verum, ut apparet, id unice hic homo ftuduit, ut du-
bia cum principe fuo palmâ contenderet , Mené injujiius fufcepijfet hoc bellum ,
an nequius ipfe geffiffet. In eurn finem dififeminavit veterator quaquaverfum Li-
bellos, putidïffimis calumniis & omni impietate refertiffimos , quibus intolerabile
Suionum jugum crepat , &? rurfus vetera Pjolonorum in Lïvonos merito in cœlum
extollit, aureofque montes prolixe polîicetur, vulpe pellace benignior , fi, defer-
tojujîo domino ac rege , fe grajfiaiorum partibus adjungerent. Sperare potuit bel-
lua , tant impio ediclo capi potuijfe Livonos ? tam detefiabili facinore deleclari ?
tant veteratoria arte perfuaderi , ut palpum fibi obtrudi finerent , & f amant hone-
jlatemque , quam maximum bonum mortales aflimamus , tam temere prodige-
rent"î qui non minus conflantia laude, quam virtute bellica confpicui , nobilita-
tem a majoribus partam , vitamque haclenus fine probro aclam, tam enormi inqui-
narent flagitio ! Sjhiam ftolide ex uno alterove perditorum hominum , qui ob vi-
tam confeeleratam aut profugi, aut ejecli nifi, perturbata patria , J'pem falu-
tis nullam vident , de tôt a gente ferat judicium ! qua fidem, quam puram adhuc in-
violatamque regibus fuis praftitiffet , ab hoc nequitia mancipio tentari , Jiniflraque
adeo vellicari oplnione , quam maxime indignatur. 'Tam atrox ac abominan-
dum cunblis hoc vïfunt fuerat , ut etiameos, quorum animus vacillabat , in fide
£5? officio magis confirmaret , qui durijfima quœque in patrie per ferre , aut etiam
cum Ma per ire , malle aperte profitent tir , quam ifiius dominium fiubire , cu-
jus omnes togitationes, dicta, facla, fraude, mendaciis , crudeiitate confîare in-
tclligunt. Hujus conflantiœfpecimen cepit ipfe dux , cum , immifjb latronum
ghbo , non minis , non magnis pollicitationibus quenquam honeftioris loci Livo-
num ad fiuas partes Micicere potuijjet ; contra non paucos invenijfet , qui cum fortu-
narum fuarum naufragio fidem fervare maluiffent. Prodttoribus autem , quos
finu fuo ac complexu dudum recepit , vifa hac popularium fuorum conftantià ,
tant us dolor imifius efl , tant acer confident ta morfus infliclus , ut, cum hacle-
nus majori fiolatio cum multis , quam fi foli périrent , interituros fe fiperaJJ'ent ,
fora. I. Nn quan-
?oz MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
1,701. quandoquidevi konefte vivere magis non pojfunt , jam cruciatus fitos tolerare ub
" terius nequeant , (3 perfcntire demutk , ferioque agnofcere dedecus fuum incipiant.
Utraque pars in caufa licet diffim.il} , diverfis item voluntatibus , pcrcipit tamcn
jam, & pêne oculis cernit im>ni;ere arvicibus fuis jugum graviffimum , parari
confient iis vira , & haudfcio, an toti genti excidium ac tnteritum, ni , ut bafte-
nus in tutela Suecicte manfuetudinis perfveret . Aut quœ forent prtemià~l3 émolu-
ment a , q uœ bac defetlione & turpfjfimv fcckre redimerent Livoni ? Primum ini-
que cerium efl , non paffuros Suiones eripi fibi provinciam tanto fanguine partant,
tôt tantifque laboribus defenfam ; aut extorqueri fibi vicloriam ab ep hofle , queht
a majeribus fuis toties perculfum , adque incitas redaclum , meminerint : buic
autem bello , utcunque fe initia dederint , eo pervicacioribus animis inhisfuros ,
quo juftiori caufà ad vindiclam ftimulantur. §)uid tum de Us fier et , qui inexpia-
bili perjurii crimine fe adftrinxerint , facile eft judicatu. Non dubium eft, quin in
defeclores , tutamque eorum Jiirpem , eo gravius animadverteretur , quo atrocius
longe hoc crimen cenjetur , & tefos majon odio ac ira inflammare folet. Deinde
laxius fttb eo imper. ium an credibile eft Livoniam expert uram, qui ab eo tempore,
quo feeptrum nacliis eft , curas cogitatiorefque omnes in hoc confixas habuit , ut ,
everfa veteri apnd Polonos reipublicte forma , abfolutam fibi acquirent poteftatem ,
13 e republica libéra regnum redderet adduclius atque hœreditarium. Propterea co-
pias Saxonicas in Pcloniam accerfivit , fpeciofo quidem titulo , tanquam adverfus
Turcas, re tamen ipfià, ut difeordià inter magnâtes nobikfque callide excitata , al-
teros fovendo , univerfos opprimeret. Sed cum hanc fraudem , etiamfi initio
cautior fuiffet, detegerent prudentiores, qui fubdolis régis promiffis ac beneficiis
inefeari quoiundam temeritatem dolebant, (3 jam in eo efient , ut hofpites liber tati
fuœ ac fortunis prœgraves foras ejicerent , levare LUhuaniam bac fentinà coaclus
eft, cui récipient Livonia peropporluna videbatur. Procul enim abeffe feiebat ,
qui colluviem hanc influentem réprimèrent : £3 cum ea, qu£ vellet , confetla ha-
béret , inde , tanquam ex propinqua arec , majori vi rurfûs ingrueret. Itaque
tali r er uni fiât u quodnam alîevamentum Livonia habit ur a effet , quant funefti hu-
jus belli, nefariique conatus, arenam elegerat , nemo tain ftipes erit , qui non vi-
deat. Ineptum valde eft credere , cogitaffe unquam regem de illa Polonia adjici-
enda, quant, Patkullo etiant fatente , ût feparatum dominium fibi retinere confti-
tuit ; non alio fine , nifi ut Polonos contumaciter relublantcs hoc freno coerceret.
Otio tune inprimis Riga frueretur , feftofque die s ageret ,cum hinc 13 illinc infeftas
•voliîare acies cerner et , feque unam , quam propugnaculum tyrar.nidis deftinave-
rat , peti & uffiigi. Confcientiis quoque incolarum quies parta effet ac tranquillitasy
cum , invalefcente lue jefuitica , tôt evertenda religionis cuniculos agi vider et ,
quoi templa £s? collegia exftruerentur. Non hic commemorabo , quœ patrum me-
morià tentât a funt £5? peracla : tantum revocentur ad animum , quœ temporibus
Stephani régis (3 Sigifmundi III. ab hoc hominum génère civitas perpeffa effet. Fie *
rentiorem vero is urbem redderet, atque immunitatibus juvar et , qui hœrcditariis
urbibus omnem fuccum £3 Janguinem fubduxerat : Gedanum autem , civitatem de
Je optime meritam , cui tantum débet , quantum qui s diaderna oferenti , non v.na
calamitate afflixerat. H<ec enim fine dubio imper ium ei tune firmavit , cum Fran*
cijeum Contium , gentis Borbonice principem, qui a primoribus Volor.orum ad
regmm
\
ET RESOLUTIONS D'E T A T. }&j
regr.um vocatus, claffevi illuc appulerat , portu fuo 13 exfcenfone prchibuiffct : 1701.
vcrum quant gratiam ab co iniit ? qui , arnoto œmulo , tanti beneficii irnmemor ,
confervatricem fuam non modo pecunid non vexare cœpit , fcd etiam vetera ejus
jura & privilégia , quœ exauclurum fe promiferat , variis artibus circumfcribere.
guid hoc fatlo indignius? Sed parut» crat urbem fidiffimam , 6? conftantiffime fu-
as partes fecutam, ita illufiffe , nift altcrius vindiEtœ eandem proderet. Nam cum
eo ipfo gravijjimum régis Galliarum odium in fe concitajfet , qui ulîioncm fpreti
conjanguinei principis quœrebat , ab eo, w/'#.r gratiâ banc inimicitiam Jufceperat ,
deferta efi, Î3 extranei régis arbitrio dédit a, ut duriores quafque legcs, quas infen-
fus dederit, Jubeat , ni cladem 13 ex tréma quœvis expcrir; malit. Non igitur falfit
conjeclurâ , non vana fpe , f attirant fub hoc principe fort cm Livonï prœ fumant :
qui quanttfc nuque jam pollicitationibus eorum animos latlaverit , tafii fancle eas
poflmodo fervaret , quam fidem Gedanenfibus datant , quamque flipendia copiis
Polonicis , circa initia regni promifjd , folverat. Nunquam iliic ab anima fut
impetraverit , ut a regu/d receptajam & probata tantiUum recédât, quâ,ut puer os
tait s , ita viros promijfis fallendos efe utile cenfet. Qui» cum militent aleret nu-'
merofum , quo infana hœc confilia facilius exfequeretur , unde fumtibus tolerandis
13 quotidianis effufionibus pccuràam corraderct, nifi ex provincia oppreffa (3 fubju-
gata ? Tranfalpini thefauri in longum non fufficient. Germanicas regiones colla-
tionibus & tribut is acerbijjîmis dudum exhaufit ; quarum partent cum vendidifjet ,
partem fœneratoribus (3 extraneis oppignerajfet , tantum as alienum conflavit, ut,
fi reliquas vcnderet, vix quidquam inde ex/culpi pojfet. Polonia nihil ad fuam per-
niciem conferet, quœ militent veteranum fiipendiis fraudatum , 13 où id tumultuo-
fus agentem , difficulter in obfequio continebit. Lithuaniœ tantam paffim prœda-
toriis cohortibus calamitatem vaflitatemque intulit , quantam a fœvijjïmo bofie vix
pafi'a effet. Licet bine augurari beatam vitam , benevolentiam ac libertatem , quant,
rex Poloniœ prœfiiterit j qui quemeunque populum haclenus ad Ht, egentiffimum af-
fliclijjimumque reddidit.
Quœ infolentia cum in omnium ora oculofque incurrat, fufiinet tamen Fkm~
mingius Suionum jugum crepare. O prœclarum libertatis vindicem ! O Livonïœ
columen ! Jîgere Diis grattas convenit , qui , cum Livoniant recreare confiituifjent ,
hoc duce potijfimum voluiffent utï; eut velut alteri Jovi Sofpitatori aram pofthac
locabunt incoU. Ni forte ut Mofem fuum, qualem fe ipfe vendit at , illum fu/jpi-
cere malint , qui eos ex Livonia, ceu fervitute JEgyptiaca , educlos nefeio in quas
Scythiœ folitudines in perpetuum detrudet. Nam cum alia Palœftina propior non
ejl , illud omnino futurum indigente fibi perfuadeant , fiquidem nec Mifes, quent
imitari fe jailitat , Hebrœos aliter liberare potuit,nifi in vafta regionum incuit arum
ejeclos. Non pofjum , qui» hœc cogitans proruptam hominis audaciam inclamcm ,
&i ut levifjime dicam y caninam impudeutiam , qua in Suionum leges 13 itnpcri-
um debacchatur. §>uis enint os illud (3 faftumferct ? /r, cujus princeps ad domi-
na tionem atque prœdam femper biat , de tributorum gravit ate hifeere audet ! ®ui
fidem (3 promifjd inter inania reput at, privikgiorum imminutionem increpabit !
Pari vecordiâ regiorum prœfeïïorum in controverfiis , quœ inter publicanos & agre-
flem plebem oriuntur , examina ndis curam fugiilat , in id inflitutam, ne Harpyis
quibufdam in pauperculorum bona (3 corpora impune fevire liceat: aqu.vnque ju-
Nn j ris
304 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
1701. r'5 adminijlrationem , quant optimus qui/que non tantum fumma laude dignam,
- • . verum etiam in republica bene conflituta maxime necefjariam judicaverit ? crïmen
vocat perfidie ac rcbellionis fcelere ulcifcendum. Adeo ifti bomini fuffuj'a bilis ce-
rebrura turbavit,ut non videat fe ilhs laudare, quos ita vitupérât. <%uis crcderct
■ ad extraneiim fpeciare , quo honoris gradu quemque civium fuorum rex Succiœ dig-
vatus fucritï Hic tamen totis babenis in maledicentiam effunditur , ut ojicndat m-
bonoratam effe apud Suiones fortiurn virormn operam. Qitamvts autem omnium
confejjione conflet nufquam gentium majores , quam in Suecià-, viris militaribus
honores tribai; ncc plurcs alibi ab bumili ordine ad amplijjimos dignitatis gradus ,
ob bellica facinora , adfcendifj'e ; tamen , quare nonnullos honoratiori loco ejjè
voluifient , regibus Suionum ratio non défait , huic qaoque nugatori , fi faperet ,
adprobanda^ Quod fi eorum fortunam , quosjacêre hacîenus criminalur , ampli-
orem poflhac ornât ioremque efj'e voluerint , quid tune allatraret mortalium itnpu-
dentiffîmus'i Nam décret orum ejufmodi non invjcla adeo £5? œterna ratio efl, ut
non facile mutari poffint &? foleam f, quod ea reipublicte tempora flepe incidant ,ut ,
quorum opéra minoris olim habita fuerat , deinceps majori in precio ac honore ha~
bendam effe prince ps exiflimet. Sed cum nihil ineptiarum omififljet prafligiator ,
quibus Livonos ad feditionem impelli fojj'e fperabat , tum vero inprimis rabiem
juam armât, & omne acer bit atis virus evomtt, ut Rigenfes, oflentatis damnis ,
qute fub Suionum imperio paffi funt ,a fide £5? conflantia d'.moveat. Ferum ut om-
îtes intelligere poffint, fluporem hic cum fumma animi malitiâ contendere , 6? huic
magis voluntatem &? libidinem criminandi fuppetere , quam materiem , qnid inep-
îius adverfariis objicere potuiffet, quam incenfam an te aliquot annos per ne fart os
homines urbem ? quos planum efl à quibujdam iflius nationis , quam fortaf-
fîs hoc bello fociam habiturus efl rex Poloniœ , fubornatos futjj'e. Non me-
liori ratione bujus incendii culpa in Suecos confertur, ac fi eos hodie aceufarc
velit , quod ipfe vicos pajjim exurat j dignus mehercule iifdem rogis , quibus
prius maleficittm punitum eji. Jam vero , quod fuburbio Rigenfium faces fint
injeîiœ , cui culpa imputanda efl ? iifne , qui ex infidiis urbem capere vole-
bant , an vero bis , qui aliter eam defenderc nequibant , ni fi exuflione œdificio-
rum , ex quibus oppugnari potuiffet ? Tarn jufe Suecis hoc damnum exprobrave-
rit, quam gubernaiori navis jacluram mercium, quod per ire nolit ; aut infanabile
vulnus habenti , quod ferro brachium refecandum prxbeat , ut vitam lucretur , &
reliquum corpus a contagione fervet. Equidem credo tam Saxor.em , quant Sue-
cos , fummo dolore confpexiffe pulccrrimas œdes flammà devorari ac conciderc j
verum illum , quod inde teéia urbis ipfamque arcem , jicut deflinaverat , oppugna-
re non potuiffet , hos, quod, ut bofiium faucibus eam eriperent , ad banc ne-cejjt-
tatem compulft effent. 6)uem cafum fiajudem impendere urbi facile prœvidebat ,
_//' tam inftgnis ejits raifericordiafuiffet, cur ab oppugnanda non abflinuit ? nunc ca-
lamitatem, quam ipfe facerat , miferari, corum truculent» efl htimanitas, qui ri-
dendo injurias- inférant. Porroy licet nulli non populo ujitatum fuerit , annonà
tngravejcente , frumenti exportationem inhiber e , imo ni J'uos cives famé crudelster
vecare vclit, necefj'ar.am cenfeatur : tamen & bine calumniar.di anfii arrepta efl.
sitqui hoc non tam e/i principem, qui vetat , quam Deum accu/are, qui fterilita-
tem immiftt. Si pr opter ejufmodi mandata, quœ neccfjitas extorquet , juftam de-
fetlh-
ET RESOLUTIONS D'ETAT. 3of
fetlionis caufam haberent cives, jam dudum omne imperii nomen in Europa fuif- 1701.
Jet fiublatum-, cum nu lia gens , nullum regnum , nulla refpublica invenitur, qui bus ■■
per hofce annos ejufmodi exempta non fréquent at a fint.
Sed quid Jingulas hujus infulfitates perfequar? Ncque enim bas attingere libuit ,
quod cligna rejutatione vifie efifient , quandoquidem nihil à Suionibus commififium
quod afiperius imperandi genus arguât , quodque princeps etiam indulgentifjîmus
non facere foleat : ver mit ut planum fier et omnibus , qui- filagitia deteflantur ,
nihil morari ducem noftrum , quo Livonos ftmiles fibi faciat , metumque numi-
nis , & reverentiam jurisjurandi ex eorum animis expellat j atque ut id confequî
pofijït , tam caca rabie in criminationes ferri , tant a impudentia debacchari , ut non
procul abhorre at ab infanià. Mirum quid reponeret ïpfe , fi S axones , fit Polonos,
ad paria in fuum principem audenda adhortaretur alius , probabiliori longe ratione
illis religionis , his libertatis periculum reprafientaturus ? An vero confilïa ejus pe-
nitius tntrofpicienti dubium erit , quin utriufique opprefifionem anima agitet , qui
facra omnia profanare cœpit , & nihil penfi habere , quod fuis non conveniat cupi-
ditatibus (3 dominandi libïdini. Certe non ex vano fuit, quod prudentijfimus quif-
que Polonornm formidabant, ait i us i/lud pe net rare , tentarique eorum libertatem ,
cum , part a etiam pace , peregrinas copias , quas in regnum induxerat , contra
pacla 6? conventa obftinatius retineret. Quid enim morœ (3 tergiverfationis erat9
nift ut rempublicam àrmis opprejfam non ex legum praficripto, fied fuo arbitratu re-
geret, 13 fialuberrima liberté gentis jura, quibus immenfum haclenus viguit, pefi-
fiundaret. Ifto exercitu 13 inftrumento dominât ionis fret us , non occulte , "fied palam
viunia fenatus (3 ordinum in fie trahere cœpit, paclaque & conventa ; quibus tam
hbertas eorum innititur , quam régis poteflas coercetur , fiufque dcque habere.
Quid enim horum eft , quod conculcatum jam non videant Poloni? Et quant ulum
refilât, ut regem nullis legibus adftritlum habeant? Namfi inter certififima fiurnmï
tmperii pignora , quod nemo unquam dubitavit , jus belli ac pacis emineat , quœ
timbra libertatis fiupererit, cum inficia (3 inconfulîa republicâ, f céder a pangere , &
bella indicere pro lubitu Rex eorum potefil ? quandoquidem arma tenenti reliqua
omnia parebunt , nec vetera fiubvertere ,adque animi fient cntiam fingere & reforma-
re difficile erit. Ifta quidem à rege fiuficepta efifie non ad reipublicœ incrément um ,.
fied ad fittam dominationem fiabiliendarn , documenta fiuerint iftius fiœderis capita,
qua légat 0 Suecico, fiicut fiupra memoratum, paulo ante tradidit. In quo , mo-
nentibus licet Suecis , cum nullam reipublicœ rationem, haberi voluififiet , divinars
facile Polonis fiuerit, quo i/lud tenderet, (3 fimul intelligere Suiones eorum liberta-
ti y quam finis commodis , fuififie , amiciores. Ncque tamen omnino nulla eft eau-
fia Polonis fiufipicandi , apud aliam gentem , quod Suionibus perfuadere nequiit ,
quicquid in fipeciem renovandi fiœderis jaclatur , regem fuum facilius obtenturum.
Jam vero bellum, quod improvifio & temere Suecis illatum eft , quid aliud arguit?
Quod etiam fi refpublica non potuit prohiber e ; verumtamen fit inceptum jam ra-
tum haberct , fiuifque opibus fiuflentaret , maximum ad auiloritatem fiuam mo-
mentum accefijïfife Rex vider et , eaque adprobatione jus fiibi acquifitum de fnmniâ re-
rum pro arbitrio fiatuendi. Non enim exempla , ubi inceperunt , fiubfiftunt : fio-
lutis fiemel legibus , creficet in immenfum licentia. Eo paéo animadverterent Po-
loni fiublatum efifie illud Palladium, quo manente, Hbertas eorum fialva fucrat ,ju--
Nn j fa
1731.
5o5 MEMOIRES, NEGOTI ATIONS, TRAITEZ,
ra ordinum evcrfa ; 13 onmem v':m regni è libcris ccmitiis in unius arbitrium trans-
' fer ri, qui pro fua lubidine rempublicam invitât» gravi ffimis fur bis ac periculis im~
plicare pofj'et. Non dcefiet unquam pcregrino militi inducendo idoneus pratextus ,
' cujus auxilio praferocis populi (3 Itbertatis amantijjimi vires anima/que domaret ,
jugoque aliéna gcntis , linguâ (3 moribus quam maxime difcordis , colla libéra fub-
jiceret. Non obfcurnm hoc ejus confiUum erat in Elbingenfi controverfia , in qua
urbe occupanda fi non connivijjèt , vehementer iamen hac reïpitblica jatlurâ de-
letlatus eft , ut copias, qua s exoncrare jam /imulaverat , diutius detinendi caufam
haberet ; ideoque nullis ordinum precibus flebli pot ait j ut toliendo huic dijjidio ope-
ram fuam interponerct . Quod cum Poloni nihilominus , invita rege , perfecif
Cent , non alla ratio exercitum in propinquo habendi vifa eft , ni fi ut Livoniam inun-
daret. Sane omni luce clarius eft , non aliam ob caufam hanc provinciam correp-
tam eJJ'e , quam quod vefanis deftinatis peridonea vifa effet , ut, fi hanc opprime-
ra, ab ea parte Poloniam obfeffam teneret , (3 j incumbeute aliunde regionum
Germanicarum mole, letbale tandem vulnus libertati reipublica infligent. Qua
quidem mihi jam jure meritoque latari videtur , quod, rege ad hanc dementiam
impulfo, patefcere animum ejus & illicitos conatus, 13 fimul planam apertamque
viam fibi munir i fient iat ad depellendam, quam machinai ur, è cervicibus civium
fervitutem. Nunquam enim impio hoc bello Suiones laceffivïffet , nunquam tant
temere eos adgreffus fuifjet , qui protervitatem tantam ulcifci acerrime poterunt ,
nifi D e u s improborum ultor ac vindex confilium ipfi eripuiffet. Vnde non du-
biis fignis conjetlare licet ac divinare, impendere huic fatum aliquod, & pœnas te-
meritati fua débitas appropinquare jam , autadejfe: certc manuDsi viam Pe-
ïonis manifeftari , quâ infidias , qua abfcondita quodammedo antea , jam erupe-
runt , declinare , feque fuamque libertatem tutari poffint. Qua enim major un-
quam opportanitas fuerit opprefiores reipublica coercendi , (3 S axones fimul omnes
finibus Polonia exterminandi atque ejiciendi ? Qua occafio amplior à rege extor-
quendi myriadas illas pecunia , quas militi Polonico liber aliter promifit , fed in
hune ufque diem injufte detinuiO. Adventarunt jam legiones fortifjima, quas me-
tuere fe antea flngebat, nunc vere timet : aderunt max e Suecià majores copia,
quarum omnium auxilio Polonïs facillïmum erit licentiam Saxonum compefeere ,
(3 indomitas libidines refrenare. Neque agre rex Suionum id conce (J'erit , qui, in
vicem fervati fœderis , & ftabilis in pofterum amicita pïgnus , hanc gratiam Polo-
nis libcnUr referet : praftare autem hoc , quod vellent , eo expeditius poterit ,
quod Anglorum Batavorumque clafiibus, aliifque fœderatorum auxiliis, rege Da-
-nia coercito, intraque fines fuo s reprej/o, omnes copias regnique vires in Livoni-
ani tranfportare ipfi integrum fuerit. Has igitur aquum eft velut cœlo delapfas à
Polonis fufpici , quos fera alioquin panitentia Jubierit , ]i occajioncm bellijfimam ,
ac divinitus fibi monftratam negligant : fiquidem connivendo , (3 immaniffimi animi
deflinaia foveudo , fuo jumento malamfibi rem arceffiverint , fureniique gladium ,
qua ipfi mox jugidandi, prabuerint. Hoc certe perfuafiffimum fibi habeant , nul-
los hoc bello progrejfus regem fuum fatïurum , qui non in ipformn exitium perni-
ciemjite redundaverint .
Qua cum ita fint , cumque non conjcBuris , fed document is luce ipfa clariori-
bus patt fa Hum fit , quam itjufie hoc bcllitm à rege Polonia fufeepium fi! , quant
turpi-
ET RESOLUTIONS D'E.T A T. 307
turpiter à ducibus ejus geflam, quam impudenter déni que defenfum-, fas quoque 1701.'
fit fferare neminem fore , cui aliquis bonefli fenfus , cui publica falus ac tranquilli- -
tas cordi efl , qui ijiùts régis libidinem non toto animo averfeîur , qui nulla induclus
injuria, fcd ex folci animi imtotentià, & dominandt cupiditate , folennem paclo-
rumfidem violavit ,£5? fopitum nuper cum incredibili or bis Chrifliani lœtitiâ incen-
dium , nunc cum fummo ejufdem dolore ac metu refufcitavit , totque hominum
•vît as fimul & fortunas in cafum dédit. Omnes certe principes dolent ius ferent , ab
eo , qui facrojanclum régis nomen , & eminenliffium rerum humanarum decus
gerit, mot a efj'e iflius juris fundamenta, quo focietas gentium haclenus inconcuf-
fajletit, nec qiiidquam tant fanblum ac inviolable baberi, quod libidini non fuc-
cumbat. Qui fœdere Evangelico continentur , non poterunt non ominari , quià
prœfidii in illo pofitum babeant, qui cum fe reclorem afjertoremque iflius fœderis
gerat , non tantum religionem avitam, in ipforum opprobrium, defeiuit, verum
etiam regem pracipuum fuœ rcligionis fulcrum ac propugnaculum , quantum in fe
efij'et, Jubruere ac convellere non dubitavit. Eos denique, ad quos infatlœ pacis
vinditla pertinet , inprimis regem Chriflianifiimum, cujus fponfio atque auSlorititas
petulanter lœfa 6? contemta efl, fpes erit certifjima non pajfuros temeritatem banc
fore inultam , •verum omnia confilia virefque collaturos cffe, ut, quœ manifeflis
pailorum legibus exprimitur, pœna quam celerrime fœdifrago & aggrejfori injîiga-
tur. Si quos privât i lucri fpes , aut abfconditum odium in tranfiverfum egerat , ut
oleum akndo igni fuffundere utile put averint , eos fi non pudor , aut boneftatis cu-
ra, à turpitudine bujus focietatis retinebit , apertijjimum certe difcrimen , quod
vicinis omnibus ac toti Europœ inflare jam vident atque impendere, debortari de-
beret , ne immenfe unius ambitioni ac exitiofls deftinatis lenocinando , incendi-
um, proximam quamque gentem eadem flammâ correpturum , occulte nuirirent,
aut fuggeflis facibus latius fpargcrent ; reclius longe , £5? majori adplaufu fanioris
orbis , id operam daturi , ut communibus auxiliis quam ocyjfime exflingueretur.
Quafpes fi regem Succiœ fruftretur , non propterea caufam defpondebit , aut ufque
adeo animis concidet, ut non ar mis jus fuum ajfecuturum fe confidat : quin divini
numinis auxilio fret us, & fupra infitam virtiitem jufliffimo dolore ftimulat us, fpe-
ret fe tam firenue temerarium hoc atque impium bellum profligaturum, quam fi-
dem haclenus fimpliciter coluit , eoque Icetiorem hifce turbis finem impojiturum ,
quo fœdius initium eis attukrat rex Poloniœ.
Confilia calida & audacia , prima fpecie laeta.tradhtu dura.eventu triflia funt. Livius.
Veritas à Calumniis vindicata, feu ex parte Sacra; Regia; Majefta- Réponfe
tis Sueciœ jtiftifllmum Reiponfum, quo manifeftantur Artes & Ca- s^e
lumniae quibus Rex Polonix injuftiiïîmum,, & divinis humanifque au Ma-.
Juribus maxime deteftabile, Beilum infucare , & contra Pa&a con- ^Jj
venta, pra:flitumque Juramentum , Reipublica;, cui praseft, Li-dePo-
hertatem , û poterit , {imul oprimere nitituiv lo8ne'
£ Um feflinatio vetuerit integrum adverfarii Libellum, ut conflitutum erat, typis
j.md e.\cudere , •Vijam efl quoddam ejus Cowpendium hic pramitiere , &? in
brevi
5o3 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
1701. brevi quafi tabclla ferkm crhn'mationum omnium reprxfentare , »/, is intelle flis ,
" incorruptius certiufque de oppofito Rcfponfo judicari pojjït.
Infcriptio: Just^ Vindici.e Ç£ funma jûrmorum Juflitia ex
farte Sacra Regia Majefiatis Toloniarum , juxta obligationem
'PacJorum Conventorum , prœjlitumque Reiptihlica Juramentwn ,
contra SereniJJïtnnm Regem Çf> Coron am Sueci a, ratione ruptee to-
ties Tacis perpétua , violât or nm TaEîorum Olivcnfîum , nec non
novijjima exagitationis & offenjionis Sereniffimi Régis 'Dania £9
Norvegia , perpelui Fœderati Regni Tolonia , ac Copiarum Re-
giarum aggreffionis , manifcjîantur. Anno Vindicata Salut is
jEtemaM. 7JCC.
ARGUMENTUM.
INitio magnifias verbis Rcgis Polonix in rcmpublicam mérita extolluntur,
qui a primis regni auipiciis cum tranquillitatem internam , tum bonce cum
vicinis amicitia;, paâorum fœderumque confervationem inter fanctiores curas
repofuifl'e dicitur, atque unice in votis habuiffe, ut Polonam libertatem in
dies efflorefcere videret. Itaque compofitis turbidi interregni diffidiis, Turcis
fbla armorum oflentatione ad pacem compulfis, prolatis regni terminis, El-
bingenfi negotio per amicos tractatus fopito , adeoque pace domi forifque par-
ta, cum Polonos dulcedine otii fblari cogitaret, ecce Sueci, quorum animus
paci femper infeftus, rupto faepius fcedere Olivenfi, multifque contra rempu-
bublicam teftatis apertce hoftilitatis indiciis, nuper quoque Rege Dania;, per-
petuo Polonorum fiederato, per imrniflas in Holfatiam copias 6c munimenta
ereéta, orfenfoj & noviffime exercku fuo , qui circa Polangx portum in Li-
thunia defudabat , multis modis infeftato, lubito eum ad capienda arma pro-
vocarunt. Metuebatur enim , neilli, qui divina humanaque jura contemne-
re, & pafta induciafque violare confueverant , ex improvilo Poloniam gravius
affligèrent : fiquidem ex prœteritorum temporum memoria conitat , Ericum ,
Suecorum Regem, /Eftoniam violenter intercepifle , adjutum fraude 6c pro-
ditione Ducis Mcgapolitani : inde Carolum nonum non modo Sigifmundum
folio Suecine pepulifle, fed 6c irruptionibus fuis Polonoium provincias urbef-
que inferb.fierGufiavum porro Adolphum eofdem innocentes induciifque con-
fias inopino invafifîe : 6c Carolum denique Guftavum, abruptis induciis, fi-
ne ulla caufa, gravifilmo bello Poloniam perfide oppreififle , quam in extre-
mum prcecipitafTet periculum, nifi Imperator fuppetias tuliffet , 6c Rex Da-
norum ex vi fœdeiïs Suecos a tergo adortus, eam libcrafTet. Cum hinc Sue-
corum perfidiam tanquam in fpeculo comtemplari poffint 5 grandiorem ta-
men injuriarum atrocitatem ex fequentibus refultare annis, quandopofi: pacem,
magno cum reipublicx di(pendio,RegisChriftianilirmi operâOliva: itabilitam,
Sueci fcedifraga 6c fufpe&a amicitia hoftiles aftus fréquentaient , multaque
inlîdiofc
ET RESOLUTIONS D'E T A T. joj>
ihfîdiofe machinari non defînerent: ut in aperto fît Regem Polonix, quem 1701.
ultorem publica expofcit vindiéta, fûmmae inniti jufKtia;, atque jufte ac legi- -• ■ ■-
time procefllfle, cum repentina irruptione Livoniam invaderet. Proinde cum
milla pars juftitiœ ab ejus inftituto abeft, neque pnelîdium reipublica; ullum
efb, nifi in armis, plane confidit Deum a Suecis , qui toties paéta Oliven-
fia viola verant, &, anno MDCLXXV, in Marchiam Brandeburgenfem ir-
ruperant , juftam repetiturum ultionem. Ut vero omnibus hase Suecorum
molimina pateant, 6c Poloni majori cura in futuris comtnitiis de bello profe-
quendo agant, plaçait Suecorum injurias juxta feriem articulorum Pacis Oli-
venfis recenfeie. Ac primo quidem criminatur-, Suecos certo foèdere per le-
gatum fuum, comitem Tottium, compilato ad liberam clctionem Régis ar-
mis opprimendam impio & fœdirrago aufu confpiraffe, atque ex furore, odio
ac invidiâ, procultaco nobilitatis jure, in debelîatis animis abfoluti feeptri po-
tentiam fundare voluiftè : depofita vero mox fimulatse amicitise larvâ, cela-
tum peétore virus deprom(î(Te, cum Duci Curlandia; intolerabilia damna in-
ferrent., armata clafle litora ejus violenter invaderent , naves râpèrent , & ,
turbato maris Balthici ufu, ex latroniciis gloriam quasrerent, nulla fatisfac-
tione data, neque navibus reftitutis. Neque mirum eu*è talia Suecos patraf-
fe, cum Guftavus Adolphus, ejufque pofteri, maris Balthici dominium fibi
vindicare femper ftuduerant. Arguit deinde Livoniam illicite 6c contra fon-
damentales reipublicîe leges alienatam : Suecos vetera Livonorum privilégia
violafîc, illofque, indu&o in provinciam defpotico regimine, bonis, fortu-
nis, honoribus mul&atos exquifita carnificina laceraife: atque eo œquius eue,
ut fub gravi jugo gementes injuftis dominis ac tyrannis feelus ac nefas agenti-
bus eripiat Rex Polonix, tam ex confeientia 6c juramento ad Livoniam recu-
perandam obligatus, quam neceffitate adactus , ne, defoeratis auxiliis, ipfa
alium quaîrat dominum cum irreparabili reipublicse detrimento. Porro limi-
tationem Livonia; a Suecis elufam queritur : tria milliaria fundi Duci Curlan-
dise ademta : limites , non exfpeétatis commiffariis Polonis , determinatos :
6c Dunemundam caftellum cum opprobrio nominis Polonici in folum Cur-
landicum tranflatum: Polongas portum in Samogithia, difperfa Anglorum,
qui illuc commeabant, focietate, 6c fubhaftatis mercibus eo deftinatis, de-
ftru&um: Hornium Suecorum ducem, anno MDCLXXVIII, cum exercitu
populabundo Gurlandiam Samogithiamque violenter tranfîiflê: grandia débi-
ta, quae a ducibus bellicis Thorunii 6c Elbingas. contracta erant, nondum
feluta: ve&igalia nova mercibus, quee Dunâ 6c Buldera fluminibus Rigam
advectantur., impollta : falfa folidorum monetâ Riga: exeufa Lithuaniam in-
feétam : 6c tabeliariorum denique curfum in grave jurium regalium 6c reipu-
blicae damnnm per Curlandiam temere ôc indebite inftitutum efîè. Hifce
infolita dicTrionis protervia enumeratis, evictores pacis Olivenfis, ex articulo
tricefimo quinto, fui officii admonet : fed eundem prajcipua principe parte,
quie de modo controverfias pacifice tollendi, 6c de belli denunciatione agit,
truncat. Quam fallaciam ut aliquo fuco obtegat, Polonos obtendit turbis do-
rnefticis, belloque Turcico, diftriftos, aggreffionem apertamque Suecorum
hoftihtatem diffimulafle , ne illi folita feiocia perfldiaque querelas fuas antever-
Tom. L Oo tentes.
jio MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
:~oi. tentes, in regni vifcera irruerent : prtdertim cum iponfores fcederis Olivenfis
bcllis quoque occuparcntur. U.t vcro injurias iftas nunc ad animum revoca-
ret, fc pcrpctuo rcipnblicte cum Danis rcedere excitatum cfle, quos Sueci,
mil'fis ad munimenta Holfatia; Ducis exftruenda copiis, lœfiflènt :~ tum inju-
ria libi in perfona ablcgati fui illata, quem, inlalutato Rege Suecia;, retro-
verterc coëgerant : & novillime a gubernatore Rigenfi irritatum , qui legio-
nes fuas Polonga; hybernantes variis modis exagitafiet : poitremum vero om-
nium eft, quod Sueci, bello jam exoito, naves ad promonconum Gedanen-
fe miferant, obfervaturas , ne quid apparatus bellici apportaretur. Tôt igi-
tur juitirfimis caulis cum itimularetur, memorem le jurisjurandi, & padtis
cum republica conventis inhasrentcm , arma induifiï : denunciatione autem
belli opu» non habuifle, cum Sueci vim priores intuliflent. Proinde Deum
invocat fcederum ruptorum vindicem , ut iiia: œquitati afiiitat, & Livoniam
corpori reipublicte reltituat. Evi&ores dcnique pacis Olivenfis obteltatur ,
ut, intra deltinatum tempus, conjunctis armis turbatorem pacis Suecum un-
diquaque aggrediantur, eundemque pro communi hotte reputent , cum fanc-
tius digniuique nomini fuo refpondere nequeant , quam iî Polonix & Daniae
avete ita a retroacTris temporibus connexas rationes œltiment, ut una fine altéra
fubfi Itère non polfit. Atque hax torius rei (cena elt, quam pudenda verbo-
rum , quas prxterire fas fit , colluvie ac feeditate ad invidiam iaciendam ,
Polonoique in odium Suecorum exrtimulandos, initruxerat : quam autem fini-
Itro genio , ex iequemi Refponfo patuerit.
Ç'Um vulgato nuper Libella, cui titulus Juftae Vindiciae, nova quaedam &
in hoc tempus inaudila adjlruendae armorum juftitiae attulijfet Rex Polo*
niae ; non id quidem infolens habebatur , fi vitio humanae naturae , culpam
fnam fùlïcite obtegentis qualiacunque huic bello , quod Cbrifiianus orbis tanto*
père abominât ur , ad levandam invidiam , praetexere voluiffet : hoc robuflio-
ris audaciae vifum , quod, cum ea hic fingerentur , quc.e nunquam fabla aut
Cbgitatii ejjbit , ijia tamen commenta inufttata verborum protervitate orbi ven-
dit aient ur , neque vérités fui [jet Rex Poloniae ne pars- altéra t-am indigne ha*
biîa , abf.cr/b fuco , nalivum rébus colorem cum magno ipjius dedecore reddc*
set. Nom non modo tant uni non immanis ammi videtur, in Sacram Rcgiam Ma-
jefiatem Sueciae, quam prias atrocifimo facto laeferat , verbis q'mqùe fœvne; vc-
rum etiam amoribus cuitiorum gentium valde àlknum, ut principes malediclts fi
invicem appelant, a quibus armât i quoque ob mutuam facrofanclae ijlius, quant
gérant, digmtatis révèrent iam abjlinere decotum cenjent , nec peimittcre, ut in
intégras nationes , earumque reclorcs , virrknti animi fanim éructent incon-
fulti y makferiati homines. §)uin &f longe opinione fallitur quifquis , dic-
tionis intemperantiâ caufam fuam meliorem reddi , aut labem , ex nefario con*
traftam bello , jejunis cavillalionibtis tolli poffe crediderit. Tanta enim cfl vc-
ritatis vis, ut contra ajîutiam , & ficlas hominum infidias , facile Je' ipjani
tueatur : tanta etiam noftrorum temporum /agacitas , ut inanibus & pbakra-
tis diclis decipi nequeat. ^uamvis vero ijiam ■ produit 'aie •■n jujlis modis rctun-
dere proclive ejj'et , curiij fi quifqtutn , feccunduiii ctiniinatioiubus figetem prae-
beat
ET RESOLUTIONS D'ETAT. 511
beat Rex Poloniae : tamen infra fuam magnitudinem ducit Sacra Régi a Ma- 1701.
je/las Sueciae cum i,lo probris certare , quoeum armis contendere cogitur , fpe- ■■ « ■-■
rat que nudam , 13 fine pigmentis , veritatem cordatiffimi cujufque anima fa-
cilius fe infinuaturam effe. l'uni quoque aegre fibi perfuadere potefi Sacra Re-
gia Majejlas tant vilia &? indecora a tanti fajligii principe profecla ejfe : .
qiiin potins 'a profligati pudoris homine , quem in familiaritatem admiferat in-
timant , multa , ipfo infeio , injerta , ut privatae vindiclae liiaret , gentem-
que Polonam improbis calumniis in odium Suecorum exfiimularet : cum prae-
fertim.quam plurimis hic feateat Libellas , quae millam veri fpeciem baient „
pravafque ejufnodi 6? dégénères fallacias proférât , quas m plebejis £5? modicis
per fouis ut turpes , & ab honeftate remotas , cenjitra publica notât , in Princi-
pes ne fufpicio qv.ulem efi. cadere poffe , certe ab iifilem quam longiff.me abeffe
deceret.
■ Inprimis autem vaga ifia flucluatio , & hiconftantia in prodendis bu/us belli
eaufis non levem falfitatis fufpicionem praebuerit. Nam cum ab initio mokfîias
quafdam a praefidio Rigenfi copiis fuis , ad Polangam in Samogithia haerenti-
bus , allatas , metumque ex apparat u in Livonia bcllico , hofiili (3 impro'
vifae in banc provinciam irruptioni obtendijj'et Rex Poloniae : hoc feripto ,
quinque pofl inceptum bellum menfibits publicato , alias longe £5? a prioribus
diverfas caufas adfert , pabîor unique Olivenfium multifariam a Suecis viola-
torum crime» objicit. Verum bas omnes fêtas effe £s? commentitias , non
genuinas hujus belli caufas , cum aliis rationibus demonfirari potefi , tum in-
de clariffîme liquet , quod ne Régi quidem Poloniae ab initio horum motuum
?wtae fuiffent. Nam fi, cognitas habuiffet , qais dubitare potefi , quin ad hor-
rorem demendum , quem omnes ex hoc bello concepiffe intelligebat , bis ipfis
fiatim , non aliis quibuslibet ufus fuiffet ? Atqui quemadmodum Flemmingus ,
qui tune copiis ifiis cum imperio praeerat , nulla fe mandata a Rege babuif-
fe fatebatur ad Livoniam invadendam , fed metu (3 injuriïs^ Suecorum , qui
copias fuas feilicet infe/lajfènt , eo adduclum fuiffe ; (A.) ita ipfe quoque
Rex ducem injuffu fuo banc expeditionem fufeepiffe affirmabat , quamvis eam pO"
fiea adprobaffet , hoc unico praetextu apud alios principes ufus , quod a Sue-
cis hiberna fua vexantibus , 13 infefla molientibus irritatus effet. 3uin ip-
fe Flemmingus in fua ad Regem Epiflolâ , (B.) quafi gaudio ex fuit ans , Sue-
cos bac violent i à ipfi occafionem belli , quam folicite alioquin quaereret , ul-
tro obtuli-fe (3 tanquam obtrudiffe feribit. Unde luce clarius efi , infefla
quidem id temporis confilia agitaffe Regem Poloniae , fed ea exferendi non
idoneum eoufque reperiffe praetextum : atque adeo , quae Libella hoc recenfen*
tur , injurias minime originem huic bello praebuiffe , fed , eo incepto , de-
mm excogitatas ejfe , de quibus antea juxta cum ignari(Jimis Régi nihil cor>
fiitiffet.
Porro , fi enormiter adeo , ut in libello traditur , -pacem Olivenfèm violaf-
fent Sueci , an credibile cuiquam erit , concept um ex tôt laefionibus dolorem
tant diit dijfirnulaffe Ordines Poloniae , neque per quadraginta annorum decur-
ftm verbo faltem indicaffe ? inprimis cum expeditam adeo de injuriis conqueren-
d viam drmnfiret Oliva, ut laefits , accepta injuria } laedentem conveniat ,
Ooî aut-i
lit MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
1701. aut , fi ncqueat , difceptatorem reliquofque pacifcentes eandem moneat. Hoc
. i <vero unqttam tentatum cffe non ipfi Poloni affirmare fufiinebunt. Interea tôt
legatis ultro citroque mijfis- , tôt etiam iiteris , cum alla quaevis detulijfent ,
nulla ttnquam de iflis violationibus mentio facla efi , nulla querela inaudi-
ta : contra de mutuae benevolentiae fidaeque vxinitatis confiantid multa mag-
nifiée dicla reperiuntur. Quae defderare tune vifi f itérant , non gravate Mis
praefiita funt , promtis adeo Sue ci s ad Jidem paclorum in minutis quoque fer van-
dam , ut , cum aliquot abhinc annis tribunus Bcrnigius , in Sueciam ablega-
tus , libros e Polonia fuporiori bello aveclos repufeeret , non modo regia , quae
Holmiae efi , bibliotheca ei pateret , verum etiam privatae excuterentur , po-
tefiate facla protinus , quaecunque volumïna Regum Polonorum infignibus no-
minibufve ornata ifiic iuveniffet , fecum inde avehendi. (C.) Cum interea pet
légat os fuos non femel Suea expofiulaffent de novis vetligalibus , quae in lo-
tis Dunae vicinis contra pacla exigebantur , de adultertna Polonorum mone-
tâ , qud Livonia corrumpebatur , de limiturn direptionibus , de fugitives , de
iniquis mercium Rigenfium detentionibus , aliifque negociis , quibus finitimae
gentes collidi filent y tûhil a Polonis repofitum efi , quo jufiae horum quere~
lae éluder entur. Novifiimus omnium , £5? ante annum , in Sueciam appulit Ga-
letfit us , fenator Palonus , a Rege Fridcrico Augufto mifjus , qui Régis fui
fiiidiuni confiantemque voluntatem colcndi cum Sacra Regia Majcfiate perpé-
tuant amicitiam prolixe praedicavit , paclaque OHvenfia confirmari voluit : eut
de Sacrae Regiae Majefiatis benevolentiâ pari cum humanitate refponfum efi.
(D.) Itaque cum in majus robur firmari a Sacra Regia Majefiate ifia pacla
tune voluiffet Rcx Poloniae , juo judicio comprobavit fable £5? incorrupte a Suecis
in eum ujque diem fuifie fervata. Neque enim, fi tôt modis , ut nunc traditur,
iiifracla ejènt, antequam de damais £5? injuriis fatisfaclum effet t, renovancla cen-
fuiffet.
P rat ère a cum Sena tores , ut ex noviffimae confiultationis ablis liquet , tort a-
rclur Rex ad bellum contra Suecos decernendum , nemo e frequenti fienatu
inventus efi , qui ullius injariae meminiffet , qud pax Olivenfis violata effet :
(3 cum forte unus , quem venalem linguam Régi mancipaffe , & occulta ad
patriae opprefjionem confilia fubminifirafje omnes noverant , Suecos indignis
modis infultaret , ad eriminaîiones ejus adeo peregrinata funt fenatorum aurest
ut non minori Mas inteliigerent fiupore , quam bellum paido ante abfque notifia
reipublicae inceptum attonitis auribus accepiffent. Seilieet très praefiantifiîmi for-
tifjimique Reges , qui Polonis a pacificatione Qlivenfi imperitarunt , impune
rempublicam a Suecis lacerari fivifjent , ne que Mata damna verbo faltem in-
erepuififent : tôt etiam prudentiffimi fenatores , gravijfimas injurias , quales hae
finguntur , von animadvertiffent , aut filent io cum reipublica damno ac de-
deeore tam diu tranfmififjent . Quid efi hoc , fi non proditionis eos infimu-
hre , aut fluporis y aut cette fupiuae ignaviae, quod reipublicae jura vicinorum
libidini expofuiffent , neque , quod eorum rnunus erat , opportune vidiffent ,
■ ne refpublica quid detrimenti caperet ? Sed a J'ummis patriaeque amantiffimis
viris , qui clavum confiliorum kaclenus t entier ant , removenda proc.il duùio
haec fujpxio efi , qui pro fua prudentià , fi, quid damni refpublica pafja fuiffet ,
(Si
ET RESOLUTIONS D'Ë T A T. ?t5
& vidiffent dudum , £j? mature indicaffent. ghiis vero non intelligit , inane hitic \"J0tl
eulpae a Tttrcico bello , & Suecorum ferociâ , quae Polonos bas injurias perfe- '■
qui vetuiffent , effugitim quaeri ? Nam neque toto illo tempore armis cum
Turca decer tarant Poloni : neque jam , ijio bello compofito-, jus erat Régi
proceffum paclorum Olivenfium invert ère. Et cum minuùjjïma ex ifto patio ,
ftcut modo diclum , répétèrent Poloni , de atrocijjimis injuriis £5? jlatum publicum
convellentibus , fi quœ taies ejfcnt , verbum nullum faccrent ? ^uamobrem nemo
tant imperitus rerum erit , qum videat mer a haec commenta ejfe , ante bellum in*
eognita, heri aut nudius tertius , in cerebro [celer ati cujufdam prodttoris , aut per-
niciofi civis, qui ad ipfam rempublicam tollendam cum Rege confpiravit, enata
effe; adeoque ipfum Regem fi aliis caufis ad arma non effet ftimutatus^ hoc bello
in hune ufque diem fuperfedtffe.
Sed non obfcurum ejl , quid Regem Poloniae ad fabulas hafee ampletlendas
impuliffet. Nam cum putidas iflas calumnias , quas Flemmingus fubdolae in
Livoniam irruptioni praetenderat , cum irrifu omnium ac fajlidïo rejici compe-
tiffet , & fidem , quam neque meruerant , nufquam invenire ; Polonos quo-
que bello , quod , infeia republicà , conflaffet , vehementer offenfos effe ;
ut borum iras permulceret , apud caeteros horrorem facinoris minueret , aliis
commentis opus erat. tum demum palam obtendere , reipublicae causa ,. arma
fe induiffe , ui ruptam toties Suecorum culpa pacem O/ivenfem ulcifeeretur ,
ojlentata Livoniâ , quam a corpore Regni abfciffam reftituturum Je jura(feU
Sed cum mhilominus violât arum Reipublicae legum , quitus Rex Polonite w
tatur cuiquam bellum facere , nifi commnicato cum ordinibus regni confilio ,
eorumque veniâ impetrata , reum fe teneri intelligeret , conquifitis undecunque
cavillationibus probandum erat , Suecos paris perpétua ruptores , prius arma
intulîffe , pridem violenter multa egiffe , nuper copias quoque- fuas aggreffos :
fe itaque laceffitum , non inferre bellum , fed repellere 5 quod ut facere pojfit ,
jura permittere. Simul putabat notas e latrocinio Flemmingi impreffas obtegï
poffe , fmijlrofque , quitus lacerabatur , rumores paulatim refrigefeere ; fi
jpeciem nu ne legitimi telli praeberet. Tum quod Eleclor Saxoniae fufeeperat ,
poftea ne Rex Polonite feciffe vider et ur , quod rempublicam in focietatem bujus
belh perîraberet. Hinc vebementiffimœ vociferationes , 13 in improbas crimi*
nationes effufa makdicentia , quitus Sacra Regia Majeftas indigniffîme carpitur :
inclyta Suecorum natio , ut perfida , (3 paci infefta , traducitur : atque ut in
majus odium veniat , vetera e tenebris 13 obliviom protrahnntù/r , falfts (3
delortis narrationitus interpolât a : Sacrae Reg/ae Majeftatis majores , quorum*
fàncla apud omnem pofteritatem memoria vigebit , probris (3 contumeliis profein-
duntur : neque ullis verbis temperatur- r quibus atrum maligni animi virus
evomi poffit. Enim vero non-dubitat Sacra Rcgia Majefias, quin omnes probi
tant fœdam conviciandi libidinem deteftentur , (3 fimuï ex iis , quœ obiter in*
dicata funt , cognofeant infuliofe talia fingi , (3 exaggerari , nullis tejlimoniis
fcf idoneis argument i s fuffult a ; quae [i verbo negarentur, fatis viderentur effe
réfutât a : tamen ut de fuit innocent i a univerfo orti, qui odio ac parti um fiudiïs
vacuus ejl , apertifjime conftet , contumeliofum banc Libellum , penitius in-
trcfpici Î3. excuti jujjït ; ita tamen , ut cum minimo legentium fafiidio , atquè
Oo 3 ea:
')
?i4 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
17© I. ea modérât ione ,. quant am in refellendis acerbiffimis hifce crimïnatioràbus jujîus
' de /or permiferit, ver i tas opprejjd vhtdicetur. Çhiod fi durions ait '/nid refpo~nfi
atroâtas calumniarum ext,njerit, idomne, &. qmdquid inùe parant gr.its prove-
«iftf, impur o ijïhts jeripti auclort , qui nomine tpfius abufus efl , Rcx.-Poionia ac~
csptitm referat.
Javat itaque vefligiaautloris in ijîo Libello fequi, non quidem dut! ara nos ad
cubik veritatis, quae in iftitifmodi litjiris non repentur; demonflratura tamen adi-
Li putitts, cum iflic non adpareat , eandem efje tndagandam. Sud forte opérée pre-
tlum crit , priufqthm longius procedatur , ipfam paulifper mftfiptumm intnert.
&uem en'rm in ip/b aditu Jplendor iflius tituli admirât ione defurum non detinebit ?
Julta: Vindicia; £5? ïumma Armorum J.uititia. De qua ne fortafjïs cuiquam dubi-
tarc in mentem veniat , additur: Juxta obligationem Pactorum Conventorum,
praftitumque Reipublieœ Juramentum. Ex hoc vïdelicet fundamento pulcerri-
ma ijla armorum jujlitia conjurgit , & Régi Polomœ necejfitas elî impofita bellum
Suecis improvifo & fubdoh • inferendi, ut paclis convenus cum republica Polonica
& juramento fuo fatisfdceret . Venqn.patja ifia tonventa perluflrantibus nihil talc
occurrit : contra iis expreffe cautum 'invcnitjtr , ne abfjue confenfu. reipublica beltum
cuiquam Rex inférât , non peregrinum in regnum , aut Lithuaniam , militent intro-
ducat , non exercitum augeat , ne c nova fœdera ineat : vetera autem renovare jube-
tur , £5? pacem cum vicinis illibatam confervare. Ut nunc de reliquis paclorum le-
pgibus nihil dicatur, qu'tbus pra cateris , qui cum antecefferant , Regibus potejîas
laxior non conceditur. (E..) Itaque nemo fatis admirari poterit , paclorum con-
ventorum , qua toties conculcaverat , ipfum mentionem facere aufum ejfe , atque ex
iis jujlitiam armoum adfercre , qua jummam eorum iniquitatem aperte ei expro-
brant. T'antum enim abeft, ut inde manifeftari pojjit , obligationem Régi Polo-
niae impofitam ejfe bellum Sue ci s inferendi, ut ijla patla multifariam ab ipfo te-
nter ata ejfe clarifjïme pateat , cum , infeia republica,, uon tantum Succos bello ag-
greffus fit, cum quibus vetera renovare debuiffet , verum etiam ad eos opprimen-
dos nova £5? clandeflina fœdera cum aliis iniiffet. In ipfa igitur fronte cum
notabile adeo vitium contemplant ium oculis fe ingérât , qua labe interna Jlruclu-
ra laboraverit , non abfurde poteft conjetlari. Et cum Rex Poloniae patla haec-
ce^ quae fervaturum fe jur avérât , tant proterve violaf/et, videat autlor hujus
feripti , quontodo cum Regem, ipfum a perjurio , tum fe a praevaricationis crimi- I
ne liber averit , am ' ïnflifla legibus ftatutifque patriis vulnera^ quae diligent lus
occultari ipfius Régis intererat , impmdenter adeo nudaffet. Ni fi forte ad avul-
fa recuperanda jurisjurandi religione obflritlum fui (Je Regem dicat. At qui for-
wulajurisjurandi habet , Regem illicite nvulfa recuperaturum , non ea , qua le-
gitimis paclis , &? totius reipublicae confenfu, in aliorum potejîatem devenerant.
In horum cenfum cum Livonta referenda ejl , quae non modo patio Olivenfi
Suecis ejl conceffa , verum & alienatio ijla a tôt a republica comprobata , ejtifque
ratihabitio volumini legum Polonicarum , in Comitiis Farfavienfibus , anno t
MDCLXI \ inferta, (F.) quâ jufîitia imagine, aut juramenti necejjitate, ad
eam invadendam Rex addutlus jtt , nemo facile explicaverit. Afl credidit juxta
eadem patla , &? juramentum reipublica praflitum , fe obligatum fuiffè ad bel'
lum Suecis inferendura , haneque curam fibi tune impofitam, cum primumfcep-
triiiti
ET RESOLUTIONS D'ETAT, 3if
tram Polonicum fufciperet : quomodo cuw.pacifca ejus intentione , quam in 170 ri
priucipio bujus Libelh magnifiai adeo ver bis exiutlit at'-Eior , i/ia convenient ? Di~ 1
cit enim, A primis regni aufpiciis cum internam tra.nquillitatem, tum ab ex-
tra ilhbatam cura vicinis bonse atnicitïse , nuuiut fecuritatis & paétorum fce-
derum obfervantiam inter fanctiores curas repoiuiflè Regem Polonia. Mira
verborum complcxio ! Livoniam [ecundum pacla, & juramentum, armis vindica-
re, £5? eripere Suecis, debuit ; & amicitiam cum ii/dem fervare cogitavit : ee-
dem t empote bellum in anima habuit , &? paccm intcr fanëlçor-es curas repofuit,
Htsc adverfa fronte inter Je pugnantia, quamvis m aie Jalers fit , quomodo cçnci-
liabit praftigiator ? In uno homine diverfam fimul naturam incjfe fabulât ur , ^jla-
mmque bifrontem Regem fuum fa cit j in quo bcllï pacifque vit» latitaffe veterum
fuperfiitio crcdidit. £hiid fucum facit ? An illibatant qlm vicinis , ficut tra-
^dit, amicitiam fervabat Re x , cum., quantum poffct ., omni opéra atque Jludio
ahniteretur , ut Danos , Mofcos , aliofque in Suecos concitaret ? - Fœdera &? pac-
ta illi curae fui (fie affirmabit , qui, iis fufque dcque habitis , Livoniam prias ar-
mis opprcffit , quam ulldm ojfenjae caufam indicaffet; Contrariât» prorfus mentent,
Régi hic ajfingi liquet , qui quo t empare profunda fimulatione bellum meditabatur ,
moderatis confiliis , pacifque ftudiis , minime intentas effç potuit. fjhiid attj-
net in re jipcrta argutari ? Subdola m Livoniam irruptiodocuit nibil minus
Regem Poloriue cogitaffe, quam- cum vicinis amicitiam & pacla colère. Si fines
îegni non tam gladio, ut ait , quam juituia terminare voluiiTet , ,cur gladium
flriuxit, anteqtiam viam juris tentaffet? Nam, ut inquit Orator, cum fint duo
gênera decertandi , unum per diiceptationem , alterum per vim , cum que
illud proprium fit hominis , hoc belluarum , tune demum confugiendum
eft ad poltenus , fi uti non liceat fuptriori. Atqm cum , nalla anquani
indicata injuria, qua lac fus efjet , nulla damui , f quid effet dafum, réparatio-
ns tentata , quod ex tenorc patli Qlivenfis facere debuiffet , primitm occulte multa-
in Suecorum pernkiem machinaretur , \nox.\ captât :i occafione , improvifo ci? ex
hifidiis, provinciam torum irriter et , or-bis judicium efi '0 , quam fplendida hac , £5?
in fpeciem fefqaipcdallbus ver bis adomata, pacifici animi prœdicatio Rçgi Poloniie
conveniat ! ■
S'n itaque illud prœclarum in vicinos aequitatis fpecimen : in Polonos quae
animi cjus mens erat ? .Ntfiil, inquit, nwgis in votis habuit, quam pulcerri-
- mum in dies crHorelcentis Polonx libeitatis fovere vigorem viroremque. An
in ipfo dolore, cum haec léger int Poloni, ri fut» continebunt ? An potins peffimum
adulât oris ingenium exfecrabuntur , verniliter ea in principe laudantis, quae ab
ejus confiliis aiienifima fuiffe noveraO. . Scilicet fub hoc Rege Pohna libertas efflo-
ruit., quo -t empare nunquam magis oppreffa , aitt in apertius diferimen vocata
fuit. Si cuntla à prima regni ingreffîone atla ejus percenfeantur , quam paucii
iibertati arnica , quam malt a vi ac terrore replet a inventent ar f Qui liber ae gen-
j tis ptiffragia exterquere maluit , quam accipere ; atque contra leges , peregrinis
copïis in vifecra regni adduftis , non tantum libéras primatam voces occlufit ,
fd etiam itantam vaftitatem intulit , quantam ab immaniffimo hojle vix paf-
f effart, Mcmoria non teneni Poloni infeflas Saxonura acies , peregrinos
fatellites -, & excluant a Régis adîlu , Ï3 propemodum confpcila , nobili-
tatem
\i6 MEMOIRES, NEGOCIATIONS, TRAITEZ,
«701. tatem Poionam , aut , fi qui admiffi fuerint , ex gregalibus fere Catiiï*
"" — nae cjfe , qui patriae faltttem parvi venderent ? §)uis Régis deftinata in ur-
bem Ihorunicnfem ignorât , quant fimulato tranfitu per infidias inter~
cipere cogitavit ? Qui s violenta ejus de exercitu vegni delendo confilia non
fjorrct , cum inter Jatrapam Marieburgenfem , & praefetlum Crafnojiafcium
orta effet controverfia ? Jam vero qttibus artibus ufus eji , ut Mariebur-
gi £5? Pclangae praefecluras , reipublicae ereptas , fui juris efficeret ? Opportu-
nité dominationi firmandae , perpetuifque in opprcfiionem reipublicae copiis alen-
dis , iftae vifae funt j ideoque , contemtis tôt fancliûnibus , ne regnatrix fa-
milm novos fundos acquirat , e as fibi vindicare quovis pretio conflit uit. Cum ,
Sigifmundo tertio imperante , Varmienfis & Zyvicienfis diftriclus in regiam
àomum cjfent trajlati , cum minor timendi caufa effet , quantas turbas hoc
exckavit J ghiam graviter equejlrem ordinem commovit , anxium liber tatis ,
£5? timentem , ne potentia Régis glifceret ! Rénovât a igitur, anno MDCXXX£t
vêtus lex , ne proprios in regno fundos Rex pofjideret. ( G. ) Haec cum -ex pa-
clis convenus probe intellcxifjet , num morabatur Rex hodiernus ? Qui tamen
libertatis Polonae confervator afj'ertorque hic dicitur. Sed neque r cliqua tranjfi-
iire fas eft , quibus cura ejus in fovenda Polonorum libertate eminuijfet. De
vegociis ad rempublicam fpctlantibus non poteft Rex legatos mitterc , fine con-
fenftt fenatorum , 6? praevia in comitiis regni - délibérât ione , fi de fœderibus ,
bello , aut pace agendum fit. (H.) Quid horum cum opprobrio Ordinum rei-
publicae non contemfit Rex ? Quot hifce annis in Galliam , Mofcoviam ,
Daniam , aliafque regiones miffi funt ? quss ultro citroque commeantes vi-
dent , quid egerint , ignorant , nifi quod de novis bellis , novifque fœderi-
bus , egiffe ex eventu poftea edocli fint. Hi mandata accipiunt figillo Régis ,
non reipublicae , obfignata : fenatores in arduis hifce patriae negociis hofpites
funt : unus 13 item alter , quos novandis rébus &? fervitio promtiffimos ex-
pertus efl , de fumma rerum ftatuunt. Ex horum arbitrio cunSa agere , pro-
culcare leges , &? armis confidere didicit. Cum ordines reipublicae affenfif-
fent , ut ex univerfo Saxonum exercitu MCC. in cufiodiam corporis rétine-
ret , quo eo citius reliquis exonerarentur , non modo nullos dimifit , fed etiam
eorum numcrum ad duodecim mille exauxit , quibus Litbuania mi/ère vafla-
ta eft , Curldndia exhaufla , & pofiremo Livonia inundata. Nom ipfum
reipublicae jugulum tune peti-vit , cum jus belli ac pacis fibi arripuiffet , £f? ,
immijfis in iftam provinciam copiis , perpeîuum inter Suecos Polonofque patlum
ahupijfet, Tôt modis cum rempublicam vttlnerafièt, quis ajfentatons bujus pro-
tervitatem, & vile adulandi fludium, non averfabitur , liber tatem Poionam fub
hoc Rege effloruijfe affirmant is, quae tamen proprie mtnc exfiinila efl , aut exi-
tio proxima ?
Sed nonfaniora funt , quae de compofitis turbidi interregni difîidiis & redu-
£ta publici ftatus confidentià fubjiciuntur. Siquidem notiffimum eft , cmnes
ifias turbas (3 difjenfiones^ quae rempublicam, & praefertim Lithuaniam , bodie
concutiunt , ex violenta ipfius Régis ortas efi'e eletlione : cui cum non mo-
ilica , nec ignobilis , reipublicae p.irs repugnaret , neque dari liber i s fuffragiis
focum vider et.) in contrarias fuQioues itum eft 3 quas cum lenibus confiliis
pla-
i
ET RESOLUTIONS D'E T A T. 317
ylacare fibi Rex debuiffet , accito peregrino milite , refragantes oppreffit. In tjùx .
tllos, qui adverfe partis duces fuerant, non deftitit alios ex cquefiri ordine immit-
tere, utyft pofi'ct, illuftres & an tiquas domos , quas , ut propugnacula publias
. libertatis, infenfis occulis intuetur, funditus exfcinderet. Hinc origo omnis diffi-
dent ne , qu£ inter prœcipuas quafdam familias fervet , quant Rex adeo non cupit
tollere, ut , fubjeclis occulte facibus^ eandem nutrire non dejinat, Neque minus
vanum eft , quod de Porta Ottomannica fo!a armorum oilentatione ad depo-
nendum bellum compulfa gloriatur ; cum ex laude profligati féliciter belli Turci-
ci tantillum fibi decerpere nequeat Rex , quin in alienam gloriam involaverit. Qui
enim ipfe terrorem Turcis injueret , cujus temeritatem inp.gni clade in Pan-
noniâ caftigarunt ? sinnon reclius incomparabili virtuti Régis Johannis III ,
•viribufque reipublicae Polonae , £s? foederatorum , quidquid contra Turcas profpe-
re geftum eft , tribuendum , qui opes horum non una flrage duclum afflixerant ?
Conditioms profeclo pacis ïfurca prius obtulerat , quam hic Rex fier et , quiy
prêter ofientationem^ mbil ad banc rem momenti attulit. De negotio Elbin-
genfi , per amicos tractatus , cum fcrentffimo Eleârore Brandeburgico fo-
pito, reclius longe filuijfet. Quid enim gloriœ inde Régi , aut reipublica , accélé-
rât ? Nemo dubitat , quin , ipfo non injciente £s? connivente , Elbinga intercepta
fit ? ut Saxones jam jamque finibus regni exterminandos retinendï caufam haberet :
■impedivïfje poftea confiât , ne controverfia ifta tolleretur. Quid vero iftis arti-
bus cffeSlum efl aliud , quam ut ab Eletlore ad debitum agnofeendum ac per-
folvendum compelkretur refpublica , pretiofampie regni Jupelleclilem ei op-
fignerandam ? T'andem gloriofa hœc Régis facinora convenienti prorfus elogio exor-
fiat , ipfum dum bac patraret , non aliud intendifie, quam alta frui quiète, Ôc
tota Chriitianitate in gremio pacis recumbente , eadem dulcedine otii gentes
fibi a Deo cornmifîas, poil tôt triiiia & incommoda, folari. O Columen auda-
cite ! cui veteratoria bac dicendi ratione perfuadebit , pacem Régi Polonia cura cor»
tlique fuiffe^ quem tôt ïndiciis confiât pacem , neque cogitaffe itnquam , neque
tolerafi'e? Nifi enim véhément i dominât ionis te (lu abforptus, in illicita ruifjet,
tranquillitate ac otio adbuc orbis Chriftianus frueretur , qui tôt atroces belli tem-
peftates eluSatus^ in novos iterum belli turbines , ipfius potiffimum culpâ , abripi
fe & fentit 13 ingemifeit. Fruflra pulverem prudent um oculis objicit : apparet
fucus , patent alla Régis , nemini ignorantur. Poloniâm is dulcedine otii folari
adeo non cagitavit , uî a fe inteftinis turbis hablenus vexatam externo etiam bel-
- lo ) cujus exitus incertus eft , ïmplicare voluerit.
Enimvero nemo invideret , fruflra tantum verborum apparatum hic prodigi , Re-
gemque Polo:ii.e maie confiais laudibus , fi innocune fuijj'ent , in cœlum ferri: atta-
men cum , per injufta cjus prœconia , viam fibi ad vituperandos Suecosfternere , in-
çue re manifejla nugarinon erubefeeret ,paucis coargiienda erat vanitasbominis. Ai
(onvicia enim mox converfus , fantliores curas , qua apud Regern feilicet Poloni<s
pro tranquillitate publica excubabant.^ Suecorum culpa elufas effe criminatur. Quo-
rum paci femper adverfus infeitufque animus , rupto fazpius icedere Oliven-
fi , multifque npertx hoililitatis contra rempublicam indiciis teftatis , uira
per temerè erecta munimenta in ducatu Holiatias , & fupêr immi(Tàs copias
.offenfo Rege D.mias , perpetuo Polonorum feederato , 6c noviffimè copiarura
ïcm. L Pp iliaruirij
ji8 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
170 1. fuarum, quaê circa Polangae portum defddabant innocenti impctitione, (quid
bac vervorum firibligo? ) ipium al arma provocafTet. fjluœ acervatim hic pro-
panant ur fumma accuj.itlov.is capita, facili tiegotio femel elidi poj/ent , fi fimplici
la-bore defungi iiceret: vcrum cum eademi pcr totum Libellum [par fa yfapiui inge-
minentur^ ne repgtiia toties refponfione , faftidium fat ic talque leclori oboriatur,
figillatim quxque infra , ut mer itérant , afimanda -veniunt. Infecta enim par-
tan funt commenta , parti»: in Suecorum invidiam , cavillatcrum more , de-
tort a , ut Suc ces Polonofque , quorum concordai perniciofis fuis in rempubli-
cant dejïinatis obfiat , mutuo bello committeret. If os enim fortafis non abfitr-
de crédit , nunquam aquis animis effe paf'uros , ut veterem regiminis formant
evertat : borum quoque res ita effe comparâtes , ut plurimum fiducie in Sueco-
rum amicitià collocare pofjint , cum praefertim nativa quaedam £s? perpétua ratio
utramque gentem propiori amiciliae nexu conjunxerit , quae , interveniente
privata Reguni caufà , de baereditate regni Succia contendentium , cum
non exiguo cjufdem damno-olm rupta , féliciter tandem Olivae coaluit , fis?,
exfiiucla jam apud Polonos Gufiaviana fiirpe , unde fons omnium difiidio-,
mm , non temere folvi poffe videbatur. §uae cautionis infiar amplifiima effe
pojfunt , Suecos infefii nibil in rempublicam moliri , quam florentem fis? pro-
fperam effe non ipforum minus , quam Polonae gentis refert : adeoque quae- I
cunque hic de indiciis hofîilitatis , fis? iifenfo Siiecorum anime , jaclautur , a
calumnia ejus liquet profit ifci , qui bel la ex bellis fer ère , fis? novis ambos populos
lurbis molefliifque involvcre e re fua effe pu.'avit.
yltque ut hune feopum attingeret , nibil inexpert um omifit. Major um jur-
gia reflaurat , G? vetera odiorum femina , quae Olivae abolita funt atque ex-
fiiucla , refu/citare con fuit uni duxit : cum t amen if a finie jufia fuifjbit , fine mi-
nus , ad bujus belli jufiitiam , quae tôt a ex novifiînii pacli tenorc dijudicanda
cfi , nibil qiiidquam faciant. Si demonflrare Rex potuifjet , iflud paclum à
Succis ruptum effe , fibique ab ordinibus rcipublica ifiius vindicandi necefiitateni
important , quid opus ea , quae fefquialtcro a'bhïnc feculo gefla funt , cum
tant a Suedici nominis infettatione repetere ? Sunt ijla majori animorum con-
tentione- dira difeeptata , quam ut replicari debeant j tôt etiam incorruptis
lu er arum monument is mandata , ut pravis infulfijhue inauditiunculis convellï
nequcant. Atqui dum lettres annales peivolveret , procul dubio obfeiv.iffet ,
quod et , fi patriae amans effet , filentio neutiquam premendum , omnium cla-
dium , qiue Sveciœ Polouiacque Régna aliquancliu affixerant , banc effe origi-
i cm , ouod rcfpublica Polora , privatis Reguni fuorum diffidiis fe iugejf/jct ,
tarbatoribus quibufdam, ut nunc fit , fpes ecrum magna vanitate inflantibus.
Ex iis igiiur , quae olim gefla funt , fatius fuifjet document uni popularibus fuis
capere , unde tôt mala in Poloniam reduudafient , quam perxcrfe eadem , ad ,
exukerandàl corttrn an:n:os , commeniorare , tweique , £5? forte gravioris
belli tubam inflare. Quamquam rcero ifia ex clarîffimorum ingeniorum labori-
bus , quos nulla aeii , aut bominum , malignitds detaet , notijfima fuper-
fiuum l'idetur nunc rcp:tcie : quoniam tatntn eorum nemoriam refricando ,
multa pafjlm de Livonia injufie a Suecis occupât a tkbîateret, obiter illa , £5? tan-
quam in iranfitu , perf.r ingère vifum e(l.
Livomam, ■
ET RESOLUTIONS D'ETAT. 319
Livoniam , cum vicinis provinciis , Sucwum impcrio antiquités paruiffe , 1701.
f&r*«» /f/?« _/z* ««/?«/ , qui propitis ab Ma atate vixerunt , &? , ?«w/ r*-
;n*»rt , infmulari nequeunt quidquam Suecorum gratiœ dedifje. (I.) Cum^
fecylo pofl tiatum Saivatorcm nom jugum detreclare vidcretur , v'.rtute Olai
fccuudi , Régis Sueciœ , ilerum -perpacata efi , tribut is &? obfldibus imper atis ,
perflititque inde in veteris imper ii reverentià , /><?r trecentos cir citer annos : quam-
q:iam Mflonia circa finem feculi etiam duodecimi tributa pependiffe legitur.
(L.) §tàà tempe flate cum malo avilis difcordlae Snecia laboraret , 6? mox
Finnnis , qui rebelles facli , domandis diflringeretur , Livones- laxius habiti ,
piraticis lembis maria late percurfare cœperunt , ipft inteiea Danorum, Rufljo-
rum , ait ara m que finitimarum gentium direptionibus non femel obnoxii. Ac-
cejferunt fimul Germani , qui Visbyam in Gothlandia permutandis mcrcibus
commeare foliti , tune autem tempeftate , an lucri cupldine , in fmum Livo-
nicum delati , cum accolis amicitiam dextrafque jungunt , fatlo fœdere , ut
tuto Mue merces fuas adportare pojjent. Reverfi Meinhardum , qui gentem fe-
ram religione Chrifliana imbucret, fecum advexerunt. Huic fuccefftt in eodem
vtunere Bartoldus , 13 inde Albertus, qui more curiœ Romanae, a qua EpiJ-
copi conftituti erant , quos verbi coeleflis fuavitate trahere debuifent, ferro ac cré-
dibles ad facra Chrifliana cogère maluerunt , accitis non paucis e Germania bellato-
■ ribus , Rigaquc , ut pnefidw adverfus irritât os effet munita. Brevi autem urbs
effl'jrefcere , confluente Mue cum aliunde , tum Fisbyenfium multitudine : con-
tra indigent tantam in propinquo molem furgere videntes , ferocius refijlere.
Quorum viribus impur Albertus , anno quarto fupra feculum duodecimum , c-
quitum Enfiferorum Ordinèm accerfivit , qui , paulo pojl in régulant Jocietatem-
que equitum Cruciferorum , qui in Pruftiâ res gerebant , trafeuntes , Livo-
niam , confinais incolarum caedibus perdomitam , certis legibus inter je divife-
runt. Interca Sueci recuperandi veteres provincias curam non abjecerunt , Cu-
roniam inprimis , anno MCXCy navibus adorti, fed non a/io fuccefju , fiifi ut
Mfioniœ partem , ftcut paulo ante diclum , ad prifeam ftipendiorum confuetu-
dinem revocarent. Interjeélo tempore , Ficiam receperunt , régnante Johanne
fecttndo , Sueciae Rege : ( M. ) fed cum domi Folcun^orum feditio glifeeret ,
forts autem tavaflorum bellunt urgeret , a fuis deflttuti , rem minus profpere
gejferunt. Cirea idem tempus , plures per Livoniam epifeopatus conftituti funty
qui in numerum epifeoporum Germaniae paulatim recepti : 13 cum JEflovia
prias , inde Livonia , a fubjetlione Pruffîca liberatœ ejfent , Plettenbergius Ma-
gifler ordinis ., in claffem f. Romani imper ii , anno MDXXF. relaius eft. Cum
in hoc flatu res ejfet Livonica , inieflims diflïdiis agitari cœpit , & labafeere.
gïuod Bafilides , Rujforum Monarcha , tanquayn e fpecula contemplatus , (cif-
fam in fatliones Livoniam , y invalidant , Mato bello, pêne fubjugavit. Con-
tra hune cum a Caefare & Germaniae ordinibus auxilhm Livones flagitarent,
Carolus V. Turcico bcllo tune occupants, Suecue R-gis opem 6? tutelam eos
bnplorare aurea bttllâ jttjjit : ( N. ) q:i£ mandata a Ferdinando.I. &?
M a x 1 m 1 l 1 A n o II. " Ccefaribus repetita fknt. Itaque cum Mofcus, expag-
natis pracipuis munitionibus , terrorem late circûmferret , ipfifque portïs Revalice
immineret : contra Dani opem ferre reeufarent ; Ketkr'us , Magifler ordinis
Pp 2, toujus
3io MEMOIRES, NEGOTI ATIONS, TRAITEZ,
1701. hiijas ultintus , ncquiret ; Re-valia &? nobilitas jEJlonica , prœceptis Ca-
"■ /arts obtempérantes , mïjjis in Sueciam kgatis , Erici Régis tutelte Je per~
mit tant , & cum aliter non reàpefèntur , ejus poteftati ultro je tractant: (O).
Reliqua pars Livonïœ à Ketlero , ^//i Curoniam fib't reiinuit , perfuafa , #;#>;-
.r/tf/0 Cajiiris infuper habit 'y, Polonis paulo poji Je dédit, U trique regno ea de
caufà grave &f diuturum cum Mofco bellum erat , y«^?« maxime indignante
proyincias fuœ fpei dejlinatas, & jam maximam partent fubjugatas , fibt eripL
In Suecos autem eo majori ira ferebatur, quo fortins fe ipfi oppofuijfent , quiy
ccJJ'antibus Polonis , Joli v'im ejus aliquandiu fujlinuerunt , £5? féliciter fregerunt -y
quorumque armis, quod in Livonia,. quant univerjam, excepta Riga, fubegerat,
glebarn tune temporis retinuiJJent Poloni, merito adfcribendum. Mofco igitttr tune
multa loca ademta , Polonis nulla : Jed cum pojlea Sigifmundus Rex , Polonorum
opibus adjutus, Suecos ex Livonia lacejfere non dejimret , bis occafionem dédit,
reliqttas partes occupandi.
Ex bis igïtur~,.quae flriilim indicata fiant , primum liquet veterem Suionum
provincuim ejje Livoniam , tnjujlis autem equitum Teutonicorurn armis ouu->
fatam , , cum. religionis propagandae fiudium idoneam belli caufiam minime praebe-
at , atque a fana ratione, mitijfimifque Cbrijli praeceptis quàm longijjime abeat ,.
gentera aliquam , quod Chrijliana dogmata tardius ampkflatur , igné ferroque
perfequi & fiubjugare. Si objiciatur , vitium boc ipfi actate quafi deterfum ejje ,
& longa temporis praejcrtptione, evanuifije , quidquid juris Sueci in bas regiones
habuiffent : enim vero quod in privatis caufis receplum ejî , fient de integris
regionibus , quae inter duos populos controverfiae finit , temere non efi pronun-
ciandum ; ita aequum utique potuerit cenferi , ut,, labante jam republica ordinis
l'eutonici, ad veteres pot tus dominos , quorum imperio Jubduela f liera! , Livonia
quafi poftlimïnio rediret , quant, in altertus cujufcimque potejlatem concederet. (P)
Deinde ut ijlo tltulo non niterehtur Sueci ; conccjjtone tamen Caejarum , quoi urn
in Livoniam fupremum ordo dominium agnofcebat, rite illam fuficeperunt : cor,'
ira eorundtm inju/fu eam occuparunt Poloni, iniqua Ketlcri nuridinatione , qui
fiduciariam provinciam ad altos , quam fupremus jttjfijfet dominas, alienandt ' pote-
fiatem nullam babuit. Porro cum jEfionia diclo audiens Imperatori , ad Sueco-
rum opem confugijjit , adparet, falj'o- hic a parte Rcgis Pomtiae tradi, Ericum
Suecomm Kegem, non attentis vineulis pactorum 6c necdlitudinis, Livo-
niam primum invafifTe, & per proditioncm ac fraudem Ducis Mekelburgici,
CoaJjutoris Archiepifcopi Rigcnds, Revaliam cum /Ei'toniâ violenter inter-
cepilîe. Nugae funt & apinœ. ghiœ enim necejjïtudo erat , qu% lex, .quod pac
tum, qu.ie Ericum ab jEflonia in fidem recipienda prohibèrent? Quod Ketlero ,
incov[alto Caefare.y cum Polonis conveuerat , per fe irrilum erat: neque Rcgem
SuccIlC ullo jure flringere pot erat , quin JEftivs fupplkts C5? affticlos in client clam
fufliperety quatuor menfibus an te fe fuaque ipfi dedentes , quam Livi cum Polonis
pacli erant. Quod.ft neglexijjet Ertcus, iflorum fubjugationem fibi va/de per-
tuciojam fore vtdcbat ,, attrapiuram ad ijlam maris Baltici oram vicinum fero-
cem y praepotentem , qui Revalia potiltis , cum Juis regni , tum finit huis late
populis , terrorem clademque inferret. Sed neque ifia Ketlcri patlio sEfiios ■
obligare pot ni t , ut a monitis Caefaris recèdent es, invifo imperio , £5? ad defen-
fivticm .
ET RESOLUTIONS D'E TAT, 311
Jionem fui fiai us inepto, fe frétait ter ent. Quamdiu a Magijlro ordinis prote- 1701»
gi poterant , in ditione cjus permanebant : poflquam ad incitas redaclus , ex- "
iernum iffe patrocintum circumfpiciebat , licuit defertis , & in acie ,
ut dicitur , mvacuhxe conflit utitis falutem fuam quocunquè modo expedire. Eo
enim fine talis focietas ab inïtio conflit ut a intelligitur y ut mutuis Viribus confi-
lii/que omnium , qui ea continetur , vit a &f incolumitas defenderhur , non ve-
ro fit, compage ifla per vim externam luxata, iidemflatus idem poftea jubirent
dominium. ' Shtin ipfa neceffitas jus dat flatui , feu parti civitatis , fe a reli-
quo corpore /cgregandi , fi aliter excidium declinare nequeat , atque id tanto
magis , fi a caeteris ejufdem civiatis membris idem dijcrimen fuo interitu non
fit èepulfura. Atque iflud vinculum , quo capiti & re-liquis membris Mflia con-
xeclebatur, folutum penitus erat\ cum tôt um reipublicae corpus difjiparetur , £5?
Ketlerus in aliéna poteftate conftitutus , ejurata ordinis Teutonici régula , defi-
neret eflj'e Magi/ler ejufdem 6? magiflratus. Quod is fe trader et Polonis, arbi-
trât u J'uo egit. Tmdiderunt fe Danis Oeftlia , & Piltenfis in Curonia regio.
Cur YEjîiis non liceret Suecorum imperium eligere , a quibus auxilium praejèn-
tins , & certiora commerçais fuis commoda pr aventura prœvidebant ? Quare non
violenter intercepit , quemaÀmodum hic fingitur , ÂLftoniam Ericus , fed [pon-
te fe fuaque ojfcrentem , & deditiam in fidem admifit : quod Suecis non parvo
fanguinis impendio ftetit , cum pro illius defenfione , continuatis per integrum
feculum bellis , adverfus immaniffmos hofles .depugnarent , atque ita illius
provinciae , quae ipforum quondam fuerat , nuper vero fuae tutelae permiffa ,
atque dédit a , poffefftonem novo infuper titulo fibi acquirerent. l'uni quoque
illucl a vero abludit , quod de fraude Dacis Meklenburgici tradit , cum tempo-
rum iflorum gnari noverint , biennio denium ab JEfionia dédit a- eundem in
Sueciam trajeciff'e r poflquam in Germania Caefaris opem , ad Polonos Livo-
nià ejiciendos , nequicquam implorafjet. Tanto minus Ericus apus habttit cum
illo de Mflop.ià , quae dudum in fuam poteflatem pervenerat , inîercipienda con-
fpirare.
Ejufdem notae flunt , quae de irruptionibus Suecorum tempore induciarum fa-
clis, £5? abdicato Rege Sïgifnundo fttbjiciuntur , quae more fuo per ver fe narrât s
caufas juflifflmas , quibus ad baec impulfi fuiffent , aflute fubticendo. Sciant
autem fecida , & incorrupta annalium fides teflatur , Polonos omnia detrimen'
ta, quae a Suecispaflfi funt, fuo jument 0 fibi accerfiviffe , dum inconfulto fer-
vore -privatas Région Vîtes fuas facerent , eorundemque pertinaciam opibus fuis
& auxiliis in Suecorum perniciem alerent. Nam ut innocentes ab initio fuif-
fent Poloni , , bellum quo que apud Sigifmundum Regem deprecati effent , quod
prudeutiores eorum fecifje facile credi poiefl ; immanium tamen facinorum ,
quae Rcx ipfe in Sueciam perpatraverat , participes & adjutores exjlitiffe Polo-
nos , atque in focietatem bclli contra Suecos pojlea venifje fciunt quoqtie fecula.
Ghtld multis opus? Piafecius ,. Incident us rerum Polonicarttm feriptor , teftis efl:
Polonos, quantum vis ipiî fibi a tali bcllo pnxxaverent, vel invitos illo implica-
tos fui(îe,pra:iërtim itudio privatorum,qui eavia gratiam Régis demerencon-
tendentes , infeia republicâ,pacta cuniRcgtv^Succias avita incautc abruperunt.
(Oj Nam Sigifnundus truculent is quorundam confûiis prœceps , cum Suecos pcfj'un--
Pp 3 ihrey
3zx MEMOIRES, NEGOTI ATIONS, TRAITEZ,
ijoi. dure. Icgcs Rcgni evertere , confcientiis vim inferfè , & armii bôflilem in tnodum
" — patriam fuam violare non veretur ,' eum ejufque pofleios commuais ordinum
Sueeiae cou foi fus indignas fccptro judicavit. Hinc vindicla £5? ira ardens , bojles
toi orbe Succis q.uerere non deftitit , atque , ut in Finlandiam £5? interiora Sue*
cia ', pénétrant , Mftomam per ducem fuam Farcnsbacbium prias occupandam
JJatn .' , ^,y/ «tff irrumpeis , fopw Suecicas tefte Piafecio non femel laceffivit.
Sjhtid igiturjnjufie a Cjmiol,q i?^, y«/ Z>««V Sudermannia nomine haSenus
durait , faclum , y? v/'w w propulfaret ? U intrus banc iujuriam ,' £<f jEfio-
niœ direptionem , #tf«fl MDC1 , cum "valida manu Livom'am ingrcditur , Wff-
niaque muni/muta & urbes, prater Rigam, in fuam poteftatem redigit, pronis
adeo Livonorum animis , quos Polonici imperii pertœdebat , ut eodem anno Re-
valiae congregati , Sigifmundo 13 rcgno Poloniae abfequium renunciarent , Sue-
corum ikro amicitiam pcrpetuo fœdere ampleclercntir. (R.,) Hune fruclum te*
rnerarii belli l'olonia eepit , pravis quorundam infligationibus in illud allecla ;
quod varia fortuna geflum brevis quies compofnit. Sed non fimul conquievit
Sigifmundi animus , qui iufefia quavis in Suecos machinât us , duces copiarum
corrumpere , &f , fpaifis per Sueciam Libellis , dijfenjiones inter cives , adverfus
Rcgem feditiones excitare laboravit , &? , cum dolus non fuccederet , per Scie-
fincium e Litbuania irrumpenîem jEftoniam ferro £j? igné crudeliffrme vafta-
vit. Qua re motus Gustavus Adolphus, ut boftem averteret , anno
MDCXV i I , armât a zlaffe in Livoniam tendit , y, recuperata Dunemun-
da, & aliis arcibus, petenti Sigismondo inducias in biennium indulftt, ea
kge , ut interea de perpétua pace.agcretur. Ferum Sigifmundo nihil minus cordi
erat , qui bello Turcico celer iter, uti opinabatur, conficiendo tempus lucrari vo-
luit , ut totis deinceps viribus Sueciam aggrederetur. Itaque , decurrente inducia-
rum tempore , per Jacobum Gardiacum , jEftoniœ prafidem , Cbocevicio , qui
Livonia praerat ^ fgnificavit Rex Gustavus, y<? aut pacem perpétuant , aut
longi or es inducias expetere, ne que diutius in ambigu 0 bar ère vellc. (S.) Contra
quae cum Sigifmundus tergiverfaretur , Gustavus AID C XXI, menjè
Augufti , integro fere pofl inducias anno , in Livoniam claffe adveclus , Rigam ,
quae vieloriis Suecorum 'hatlenus moram fecerat , expugnat. Quiâ eft igitur ,
quod de irruptionibus Suecorum declamet , quos Poloni priores laeeftîverant ?
nifi privilégia cautum Sigifmundo demonflraverit , licuiffe ipfi Suecos impu-
ne infeftare , hos zéro prohibitos vim amoliri. ghtid inducias ftabilitas crê-
pât, quas non tant um fantle Sueci fervabant , fed £5? pacem ferio expetebant , tôt
nunciis literifque ad Rcgem fenat unique Polonia mijfis ? Sed cum nihil profi.ee-
cerent , Sigifmundum fponte fua infeftum Polonis ipfis exflimulantibus , qui s Succis
.vitio vèrtërit* Ji illudi fibi non paterenturï Nihil Polonis inopinum accidit, qui,
impios Régis fui conatus juvando, facile pr avide bant fe jufla Suecorum arma in
fe converfuros.
Sed cum pulcrum fibi duxijfet autlor cum larvis lutlari , non mirum eft , fi
Caroli Gustavi Regum cl.vriffimi , memoriam vellicare non omifcrït :
qui fi eut injurias Suecis a Sigifmundo illatas refricare noluit; ita eandem ex filio
importunitatem tolérât e non pot ait , document o edito , fortibus viris non temere
infultandum. ghue maximum Rcgem in ultionan ftimulafjcnt , publicaiis tune
feriptis
ET RESOLUTIONS D'ETAT. " ?ij
fcriplis, toti orbï manifejlala fitnt _, & notiora, quant ut hic rcpèti debant. Ex 1701.
lis coujlabit non ruptffe inducias Carolum, fed «Johanne Casimiro, '■
Rege Polouiœ, ruptas ultum ejfe: nec geminata peifidiâ, fed Joli ta Sutcorum,
tôt que bellis notijfima, virtitte ac fortitudine in f oient tant boftis & nef arias mo-
litiones retudifc. Ne que pax Pfeflphalica , quae hic citatur , Polonos ttitari
pot ait, quœ fiait ipfis Ikentiam non dédit , Jkvijfima quaeque in Suecos perpa-
trandi ; ita Suecos durifjïma ifia lege non adflrinxit , ut injurias qmfvis ad lubi-
tum Régis Poloniœ gratis devorarent. Imo hnjus arrogantia eo majorent incttr-
rit reprehenfionem , quod id tcmporis prœcipue , cmn Mofc-crum &? Cafacco-
rum aï mis peteretur , novîs Rege m Sueciae injuriis provocaret , cujus amicitià
confervata, non modo i forum progrejjus fiftere , fed etiam imminent em cladem de-
clinare facillime Pplonia potuijjct.
Sed non faits efl prateritorum temporum memoriam falfs narrationibus de-
pr avare , nifi affatim qttoque maleditlorum ingérât ur , quafi ad juflitiam hujus
belli orbi adprobandam , fidemque fabulis fuis conciliandam , apprime faceret ,
fi convicia ex irivio arrepta plenis manibus in gentem Suecicam j'pargerct . . Mi-
ra in nugis excogitandis fokrita nativo quodam genio tune videtur animari , &
quafi fe ipfam vincere , quoties probris coacervandis impendit ur , quorum nova,
quaedam , &? inexhaufla , ubertas quavis pagina repullulat. Suecos perfdos ,
f œdif rages , pacis ruptores , & aggrefjores appellare pudor non efl !, quos quie-
tos , £j? nihil minus quant hélium méditantes , infigni turpi verfutiâ circumvenit
Rex Polonia. Sed banc petulantis calami lafeiviam magno anime contemnit
natio Suecicà, quant fc? pacis' artibus , & bellica lande, vigent cm ficut nemo im-
pune lacefjivit ; ita ipfa amicitià fœdera fantle colendo puram integramque fa-
mam fervavit. Tôt conjurai is finitimorum populorum odiis firpe pet ita , glori-
am a majoribus rciiclam fortiter ajferuit , armaque invidendis fuccejflbus late cir-
cumîiilit , nulla haclenus perfidia labe temerata. Aï qui veteris avi memoriam
repiicantt occurret cruenta Uladjslai Jagellonidis timbra, qui violai 'a pacis -,
quant Amurathi , Turcarum Imperaiori , jurejurando confirmaverat , horren-
das paenas luit , miferabili Cbnftianorum flrage ad Vcrnam caefus , anno
MCCCCXLIF. Gcminum Friderici Augusti exemplum annali-
bus poflhac infrendum, quem non immerito qui s mîretur,' cujus faclum imitât ur ,
exitura non perhorefeere . Qui paeem, pofl tôt hella mutais utriufque gentis cla-
dibusgefla, fol: cita de m um Refis Ckrijlianjjimi operà flabilitam, {$ ab ordini-
bus icipublka Polonœ follenniter confirmatam , rupit & infregit , nulla injuria
provocants, non legitimo modo , fed ignobili dolo ufus , Suecos paclis confidentes,
& arUiuris amicitià fimulatione acceptes fubito bello adortus efl , Livoniâ prias
direpta, quam conflit ifl et, cujus jujj'u £5? aufpicio tara atrox facinus patratum
efljet. S; hoc erit lummâ inniti juttitiâ ,£5? julte ac légitime proceflïfie, apparet
apud Regim Polonice jufli nomme venire , quiclquid contra jus fifque , contra
facram paelorum fidem, libido fuggerat , aut occafto fuadeat. Et quomodo il-
lunt ultorem & alîcitorcm publica expofeit vincii£ta , ç-^/ privata lubidir.e ad
bellum flimulatus efl $ £5? non modo r.ullum ad id a repubticâ mandatum habuit ,
verum etiam eo ipjo ijjam rentpuMicam convcllcre deflinavit ? De repentino arrno-
vum progreffu gloritri parum ùoi.cnfiaim, cum is dolo, non virtuti debeatur:
nec
$24 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
1701. ne c magna res erat proviticiam praefidiis nudam , al que , ut in profunda pace^
• — — - nullius mali timentcm , improvifa incmfwnc vafiare , & caflcllum mutm inter.
cipere. Et quis riover ity annon iJJe fuccefjus longam malorum fer km Rcgi Po-
loniae nctlat. Sed praetcrquam quod excelfi animi principes maluerunt femper fe
fortunae pœniterct, quam puderet -vitloria j degcnerejque ejusmodi fraudes , qui-
bus fides publica , Î3 commutas hominum focietas laditur , viliorum hominum
folcrtiae , non Regum jufia arma gerentium , effe judicarunt : ad uitimum quo-
que fortuna temeritati non fuffeccrit. Sed quis miretur profanât am ab ipfo fa-
crofancli fœderis religioncm, qui prof ari audet, nullam partem juftitiae ab hoc
inftkuto alienam eflbj atque fe plane confidere. divina; démentis:, quod juf-
taraNde his, qui oderunt pacem , repetet ultionern: a quo liât jus, ab eo
Deus ? EJl profeclo Deus , qui , qua mort aies gerimus , videt & audit : nec fe il-
ludi patitur. Si ferio bac tradidiffct Res Polonia , fi credidiffet j an te mère hoc
hélium effet motum ? Verum quia Deus jafias ab eo potnas expetit ur us fit , qui ,
perfide rupto focietatis humana vinculo, tôt . innocent 'ium hominum vita acjangitine
prodige ad fuam cupidinem abutitur , ficut rcligione Chri/liana imbuta dubitat
Sacra Régla Majcfias , £î? proInde ejus providentia., majori fiducia , bujus belli
cxittan committit; ita ut fercnlffimi paclorum Olivenfium fponfcres, & reliquus
crbis , manifeflo cognofcant , quam longe bac armorum 13 violcntia libido non mo-
do ajujlitia, fed etiam omni juris imagine recédât , non detretlat provocantem ad
■tabulas Olivenfes fequi , convicîuras ipfum multarum calumniarum , fumma iujufi-
titiœ, £5? iiiolati iflius fœderis , quod inter régna Suecia ac Polonia fanclum perpe-
tuumque efije opportet.
Itaque ad articulum primunt pedem figere lubet : quo confthuitur ut pax
ilt perpétua , vera finceraque amicitia inter Reges , regnaque Suecia; ac
Poloniae , ita ut altéra pars alteri pofïhac nihiî hoftilitatis aut ininncitia:
clam aut palam inférât, nec alterius hoftibus auxilia quocunque nomine pra>
flet, nec cura alterius hoftibus fœdera huic paci contraria ineat, nec quid-
quam in alterius fratus diminutionem per fe vel per alios moliatur, Contra-
venifje Suecia ar_guiîur. Quo paclo ? Certo fcedere , inquit , quod per Lega-
tum fuum, Comitem Tort, compilavit , & de fafto in anno MDCLXI
fîdcm obltrinxit , aucloraturos Suecos duodecim millium exercitum , ad
aflerendam , ce opprimendam armis liberam in Polonia eleélionem. U-
trum Suecis hic V'tio datur ? fi elecJionem liberam afferere voluifi'ent , laudan-
dum eorum officium : fi armis opprimere, culpandi funt . .Sed oportet infignem
fuifj'e impojiorem , qui Régi Poloniae hoc comment uni fuppeditavit , tant a cum
vituperatione genlis Suecica propalandum. £)uem liyuet non infpexiffe mqv.am
apicem iflius fœderis , aut , fi infpexifjet , mortalium ejfe improbifjimum , qui
propenfijfimae erga rempubUcam Polonorum voluntatis pignus , ut crimen lafi
fœderis y objiceret , atque, ut ipfius verbafunt, quaîvis confervanda; pacis anti-
dota in toxicum converteret. Nam quedmodum Suec'i uni ce id optant , ut
liber tas reipublicae farta teôla confervetur ; quod Sacra Regia Afajefias arbitrât ur
Polonis optime confare : ita cum id temporis , quo Johannes Casimi-
rus /e regno abdicare médit abat ur , pernicicm liber tati ordinum macbinari quos-
ilam intclligerent , auxilia Rcgi ac reipublicae Polonorum per legatum fuum ,
Sténo-
ET RESOLUTIONS D'E T A T. 317
Slenonem Biclkiurn , anno MDCLXI ', obtulerunt contra quemcumque aggref- 1701.
' forem cxtraneum , qui libéra Comitiorum fuffragia armât a manu opprimere cona- •<
retur. Ecce id ipfum fcedus '. (T.) An promtijjima bac offerentes ftudiay irnpio
~ & tocdifrago aulu comipiraflè arguentur? An odium ac invidia talem producunt
fruclum, at, quoi fer dere velimui, periculuw ab eorusn cervicibui depellamui ?
' Nihil clam Rege &? Republica aelum : nibil ocsultum. §)uo animo erga rem-
publicam ejfent , Jatii erat Suecii indicare : uti eorum amicitia pro lubitu
\ ipfa poterat. Scilicet in debellatis anitnis abibluti fceptfi potentiam fundarc
voluerant Succi , qui rebui fuii fiibil minui conduccre femper exiftimarunt y
quam veterei reipublicœ Polonœ legei mutari aut tolli. Quod eu m Rexy Fri-
dericus Augustus, probe intellexerit , nihil eft , quod œque animum ejus
odio ac ira in Suecos accendijfet, quoi reipublicœ non defuturoi , forte non imme-
ritoy fufpicatur , fi, quemodmodum cœpit , libertatem iïïuu evertere pergat. Ex-
arjit tune validior hujiu ojfenfœ fax , cum fœdere Suetis nuper propo/îto rem-
fublicam Polonam excludi voluijfet Rex Poloniae ; Sacra Regia Majeftai Sueciae
non aliter in illud confentire , ni fi ipfa refpublica eodem comprebenderetur. ghtod
tune Suecii perfuadere nequiit , quin apud alioi perfecerit , non dubitare po-
terunt ordinei Poloniœ. Compellant Regem Kv gvst vu edere capita fecre- ,
tiorii fœderii , quod , incotifulta republica , ante biennium inierat : invenient
infirumentum fervitutii rite conferiptum ejfe , & confignatum , quam evan-
dendi non facile via dabitur. Ccrte , fi unquam , fub hoc Rege , quo nocentio-
rem hoflem nondum experta eft , libertai reipublica perielitatur , quae ad-
verfui externam vim inconcujfa , domefticii infidiis , tiifi Deui ex machi-
na , fuccubuit.
£>uae de damn'n illuftriffimo Duci Curlandiae illath tanto cum verborum ftre-
pïtu intonuit , vana ejfe & ad invidiam Suecii faciendam perverfe exagitari, ipfa
negocii bujui ferie confiabit. Namque urbi Rigenft , tanquam primae fedi , £5?
praecipuo rerum 'Teutonicarum in Livonia firmament 0 , multa mfignia privilé-
gia , florente ea republica , concejfa funt j précipite auiem ut unicm per iftos
traelui portui boc & emporium fréquent aretur. Exftat Innocenta tertii, Pontifi-
ai Romani , interdiclum , feveriffime vetantii y ne qui! prater Rigenfei , merca-
tune gratia Semigalliam adiret. Cum illi pofiea , fociatit cum Epifcopii £5? or-
dine equefiri armii , Livoniam , Curoniam , Oefiliamque debellafjent , auclori-
tate Wiïbelmi , Epifcopi Mutinenfii , légat i tune Pontifiai , anno MCCXXFIy
tertiam regionum acquifitarum partent obtinuerunt , adeo ut eorum territorium
ab una regione Findoviam ufque extenderctur, ab altéra Oefiliœ Ut t or a àttinge-
ret. Aique ita qui jus Commerciorum £9" Navigationh praoccupaverant , cum
nondum aliœ iflii in or'u urbei conditœ ejfent ; ïidem jam jure dominai mercatu-
ram fibi folis in finu Livonico vindicare poterant. Çjhiod eorum jui tantum
abfuit, ut interpellarent Prafuki , &? Magiflri ordinii , ut poftquam Curlandia
cum Livonia y urbe Rigenfi in imam rempublicam coaluiffet , publiai diplo-
matibui caverent , ne ulla munimenta , aut adificia , in litoribus ifiii exftrueren-
tur , quee Rigenfium commerciii damno impedimentoque efjenî. Ufa eft hoc
jure fuo civitai , per multa fecula , non interrupto ; ampliffimii infuper extero-
rum Principum , qui incrementa urbis optabatit , privilegiii confirmato , ante-'
ïom. I. O^q f«*«
;i(5 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
i-oi. quam Dux Curlandiœ infiitutus fmffet , ««/ /Votf.! divinare potuiffent. fe do*
» ■ w/;;o.f //?/'/« regioms futuros : contra quœ Curoncs ne minimam rationem ad*
ferre pot uerint^ qua jus hoc tant a vetujiate , & longijjimœ temporis prœfcriptio-
11e , fubnixum infirmctur , tf«* Hbcram ipfis circa hœc lïttora navigat ionem o*
lim fuijfe oftendatur. ghtapr opter ctiam civitas , ne qui s c ~vicinia , aut pergri-
k;s nationïius j portant, fuum prœterveclus , <3//0 mer ces adponaret , armatas
quafdam naves habebat , y//<? «^ illicites portas digreffa navigia Rigam deducerent.
Ingravefcente tandem Mofcoyiti&o beïlo , «///.' . Ketlerus paclus fibi Curlan-
diam , Polonorum partes elegfjet , Sigifmundus Auguftui Rex , »//^ô f«w «</
eœteros fiatus Livoniœ , /«»; .W RigenJ'es , /eg/z/o /«o Radivilo , o;»»/<* _/«r« ,
confuetudines & privilégia , civitati intégra & illibata fore folenni paclo fpo*
pondit , /^«* antea faclttm efl } £«.?/# ultimtts Livoniœ fflagi/fer Ketkrus ,
Duc Curlandiœ proclamaretur. £$'• ann0 M D LX I , .rehgiofum ordinem
principali dignitate mutât mus , in ipfo abdicationis atlu. , remiffo Rigenfibus
juramentor quo haclenus ipfi adfiricli f itérant , jura &? privilégia pariter intacla.
reliquit, atque ipforum arbitrïo permifit , utrum Polonorum imper ium accipere\
un libertatem fuam ipfi defendere mallent. JS'eque enim jlatuere aliter ei fas
erat , qui precarius ipfe magijlratus ifia jura , quœ civitas ab antiquiffimis tem-
foribus babuerat , tù etiam Imperatorum , Principumque literis confirmata ,
muturc tiequit , neque Rex Poloniœ quidquam civitati detrahere , ut no vo Duci
arlderety potuit, aut plus ei cum Rigenfium detr intente* qui nondum Régis im*
perium • agnofcebant , confcrrc , quam. is ipfe , antequam Dux fier et . habuiffet ,
aut prijlinus Curlandiœ fiatus permitteret. Atque haclenus in animum nemo
induxerat , ut jura civitatis* imprimis autem mercaturœ £5? navigat 'ionis , per Li*
•vûnïam Curlandtanique , in dubium vecarc auderet : fcd fimul ac novns Dux Cur-
i.wdi/i potitus fueratj paulatim affùrgcie , ad commoda fua refpiccrc, £5? quovis
modo jura urbis ad Je trahere cœpit ; ait cum fe non minus firenuè opfone-
rent Rigenfcs . graves rixœ & contentio?ics ortœ fiunt. Ncndutn Riga Polono-
rum imper ium venerabatur ; libéra erat) &fuijuris: verum . pofi viginti anno*
rum moram , cum regimini Polonico fe Çummittcret , fiipulata fibi antea efi a
Rege Stéphane , ut pi ijlina jura £5? privilégia falva £5? illœfa forent , ne c ul.'a in
re in pujkrum imminueraitur ; & cum quercretur in/clitis in portubus naves o~
nerari , Duci graviter a Rege intcrditlum efl omni navigatione , £s? naviurn 0-
, nerationibus in Curlandia. Ccnfrmavit hoc Sigifmundus , R.x Poloniae , pro-
gato diplomate', quo vaga ifia commerciorum licentia , tant juribus urbis ,
quam vebligalibus regiis noxia, fevcre prohiketur, fatla etiam Rigenfibus potefia-
le , naves illicitos port us adeitates cum mercibus dctinendi; qui £5? tuncnavem
e onufiam , in porta quodam Curonico deprehenfam abduxerunt , approbante
-v ge, i$ a'dhot tante , ut fcmper ita procédant, ghtin & ipfe Dux Curlandiœ ,
Iritiericus , ad prœfeclos fuos /itéras mifit , quibus operam dare jubentur , ne
quid in jraudcm bujus privilégié a Curonibus commit tatur : cui ccrtis cotiditiouibus
Rigenfcs, anno M DCXV, paclo inito, concefférunt , ut occlufis reliquis portu-
btts, Libaviâ tantum & Vindaviâ mètres libère export arentur. §)uœ levitcr hic
ta cl a funt , idoncis literis & dont mentis firmare facile effet , ni refponfum hoc
in nimiavi molem cxcrefcent : proferre autem ea quand'jcunque cxigantur ti-
vit ai
ET RESOLUTIONS D'ETAT. 317
vital parafa efl. Hoc vetufliifimum igitur privilegium , quo civiias per tôt œtates , 1701 .
ar.tequam in Suecorum mènerai poteflatem , &f deinceps per totum induciarum irttèr •
Suecos & Pohnos tcmpus uja fuerat , pace Olivenfi novum robur accepit , çujtts
aiticu/o decmo quint 0 jubetur y ut commercia priitina iint libéra & non impe-
dita tam terra, quam mari, Se in vercri ulu & exercitio, quo fiierunt tempo-
xe induciarum , conferventur. Cum vero nibilmnmus circa oram , quœ finum
Rijenfem fpeclat , novos purtus aperirent Cttrmes , & fiepius moniti , cœpto non
dejiflerent , non alia ratione fifti poterat navigatio ilkgiuma, & urbi tantopere
damnofa 5 quam ut naves , vetitis portubus egrefj'ae , capcrenlur : quae omnes -,
fecus quam hic traditur, ea conditione funt dimijfa , ne deliSum iterarent. Quo
jure fuo cum uterentur Sueci , cui injuriam intuliffe arguent ur ? Sicut enim fun-
dum nieum , me invito , ingredientem vi ac armis arecre , aut , pignoribus
ca.pt is , aliifque modis , ne id faciat, impedire pojfum ; if a quin idem jus i»
mari , quod dominio meo fubjacet , (/ubjaccre autem finum Livonicttm urbi Ri-
génfi jam demonfiratum efl , ) exercere poffim , non ratio ulla aut lex obflat.
Cum illud invaderet Curo , Suecus vero propugnaret , uter alterum pritts laefijfet ,
eo'qite faclo ipfam paeem Olivenfem , cordati judicent. Quis enim Suecis
fuccenfeat , fi privilegium , ex quo anima civitatis peudet , tant» vetuflate
fubnixum , fummh Regibus adprobatum , & pace novijjima corroborât um ,
urbi nollent ereptum, Quis non horum potius moderationem laudet , quod in
tiirbatores commerciorum non gravius animadvertijfent , poflquam continuata
infolentiâ Suecos eo neceffltatis redegijfenf, ut fi commerciorum ufum voluijfent
falvum , non parvis impenfis quotannis litora ifla obfervarent. Non igno~
rantia juris hujus exeufare Je poterant Curones , quemadmodum ducentis abbinc
annis feciffe legmtur ', cum fpeculatoria Rigenfium navis idem tentantes è di-
verticulo revocajfet. Noverant jura civitatis : pacla léger ant: interdiclum Gus-
tavi Adolphi viderant : Ckristinam fua atate litora ifta navibus euflodi-
vijfe audiverant : quo minus ipfis vider i mirum deberet , fi eadem jura nunc tue-
rentur Sueci , non opportunitatem belli Turcici captantes , ut-falfo 'objicitur, fed
eodemjure longa ante œtate ufi. Quam ob rem non adullius injuriam , aut lairo~
cïnium maris , ficut hic calumniatur , fed ad furtivas negotiatiunes , quo nomi-
ne inliteris Sigtfmundi, paulo ante citatis, veniunt, difiurbandas ht£ naves de~
ftinata erant. Quid 'Gustavus Magnus animo volvijjet, temerarium efl pro~
minciare : hoc utique certum efl , ejus beneficio tam accolas quam alias nationes ,
debere, quod mare Balthicum, a Duce Fridlandia libéral um , tuto nunc navigent.
Nec cuiquam, qui vetitis portubus abjlinuijjet , Sueci liber um iflius maris ufum in-
•viderunt unquam , aut ex lit tore Curlandiœ dominium ejus arrogandum fibi putave-
runt; cum alia longe fint i & folidiora argumenta, qua fublimius quoddam in hoc
mare jus Suecis adjirunt : quorum clajjîbus illud quoque multis ante tempeflatibus
navigatum fuerat , quam Curor.icum finum peregrinœ naves detexijfent.
Quant ob rem nemo efl , qui non videat Regem Poloniœ Juo Je jugulajfe gladio^
cum temere ad Olivam provocajfet ) quœ non tantum Suecos abfurdis ejus X$ ini-
quis criminationibus abfolvit , verum etiam 'ipjum gravium injuriarum reum
agit, qui contra manifefla patli Olivenfis verba, clam multa hoftiliter , &? in
Suecici flatus diminutionem , molitus efl, ïnitifque fœderibus buic patto adverfis,
■Q^q i hofl.es
ji8 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
1701. hofies undequaque Mis concitare Jtuduit , £5? mox nefaria ipfe arma intnlit.
• ■ ^uanquam fi intcrrogat ur Rex Poloniae , à quo demandatam habeat banc
accufationem , aqua ipfi , ut ajunt , haerebii. Polonos de injuria qucfios ejje
nondùtn compertum efi : qtiod tamen Oliva jubet , antequam ad arma vcniatur.
Qtiae ipfius in republica pot efi as fit, notifiimum efi: citra cujus mandatant cum
titilla ipfi in Succos aiiio competat , negotïum tamen facit litcmque per
calumniam fingit , cum jure titillant habeat. Negotii igitur ge fit: gravis ipfi ratio
efi reddenda , qui praetcr vecefiîtatem opus pericnlofae plénum akœ fufcepit ,
fummamque rerum in dificrimen te mère adduxit. Ncque aliter de Curlandica
controvcrfia fentiendum , cujus decidenda juflam tranquillamque viam pridem
iniverunt Carolus XI. Rex Sueciae , £5? Fridericus Sigismun-
Dus, Dux Curlandiae, ambo nuper cœlo recepti, conjlitutis utrinque triumviris ,
qui Rigts MDCXCF. convenantes , jura utriufque partis diligent er excuterent ,
difcerncrentque. Et quœ cum Régis , tum Ducis œquitas erat , fublata ejj'et omnis
lis , £s? fopita penitus , nifi immatura eorum morte decifio ejus fuflaminata effet.
Longe ab hac moderatione violent us Régis Polonite animas , qui ut turbas bellaque
fuis deflinatis infiervientia excitet , alienis fe negociis ingerit , propofitam tabulis O-
livenfibus rationeni , quâ conlroverfiae omnes pacate tollerentur^ ferociter abfcin-
dcns.
Sed ad articulum fecundum p-ogredi juvat , cujus initlo mirum ni confunderettir
Rex Polomœ, cum Mo ipfo injuflitiam fibi aperte objici videret. Nam perpétua
forum omnium , qv.œ acîa erant , fancita amnefiia , additur : ne ulla pars alteiï
poithac quicquam hoitilitatis aut inimicitia: fpecie juris, aut via fa£H, infé-
rât. Ab hac fententiâ fibi adeo invifa , qua/i ofienfo Medufie capite , vul-
tum animumque avertens , ad fiueta fibi convicia dila'ntur : rraéta Livonorum
privilégia: inducrum in provinciam delpoticum regimen: ipfos cxquifîta c.ir-
nirlcina laceratos: eoque œqinus efle, ut fub gravi jugo gementes, & queri-
moniis fydera puliantes, injuîtis dommis ac tyrannis, fcelus &: nefas agenti-
bus, eripiat Rex Polonias, ex confcientia quoque 6c vinculo juramcnti ob-
itriclus, ut Livoniam illicite, & contra leges regni, alienatam recuperet ,
cum alioquin metui poîîèt, ne, defperatis auxiliis, alium dominum 6c pro-
teclorem cum irreparabili reipublica; damno qtfoerat-, liée confufie £f? tumul-
tuarie ad articules fecundum & tertium congé fia difiintlius expendi neceffum ejl ,
fepofitis atrocifjïmis cffnvic'tïsty quorum intégra jufiarum feilicet Vindiciarum ficrip-
tori palma rejtrvabiti.r , modo de aeteris, ut fpes efi , remittatur. Ac primum
quidem de privilegiïs videndum , quœ violata ejfe criminatur. Cum varia ,
fiante rcpublicà , ab Arch:epi/copis (3 Aùgifiris privilégia mbilitas Lïvonic*
vhtiHniJJ~ét , indicari oportuerat , quodnam eorum , (3 quibus modïs , vio-
lation effet. Ncutrum facit : fed , AIDLXf, cum Poloms Je fummitte-
rent Livones , omnia eorum jura à? privilégia diplomate Sigismundi Au-
g u s t 1 confirmata eff'e dicit. Verum ifii eodem anno bina privilégia, prius die
XX y 11 ï. Novc mûris , aller uni biduo pu fi , confirmata efie coutenduni : quo-
rum il'litd vetera jura (3 piccrogativas , hoc nova quidam & abfurda contiuet.
Prius illud rite confcclum , ac genuiuum , in Succia nunquam impugnatum
tjl : alla uni , cuni multis indiciis cunfiarei fuppofititium ejfe , merito re-
jeilum.
ET RESOLUTIONS D'E T A T. y^
jeftum. Nam praeterquam quod inufitata pr or fus formula , & modo a regiis 1701.
dipîomatis abhorrenti compilât um cfl , etiam iniqua multa , (3 ipfi Romanen
Jlum religioni , cujus auclorem malum dœmonem appcllat , injuriofa conti-
mt , quod Rcgem ordinefque Poloniae , ifti religioni addiclos , adprobajfe
credibile non eft. Ipfum qitoque exemplar (3 autograpbum nemini vifum ,
\ec in Livoniam perveniffe , ipfi hujus caufae propugnatores fatentur : quae
vero aprographa prolata f itérant , eorum nulli nome» Régis adfcriptum , evidenti
argumenta ne que ipfum autograpbum a Rege Sigismundo Augusto un-
quam [ubfcriptum fuifj'e. Accedit illa quoque ratio , quod in defignatione privile-
giorum , quae Nicolao Radivilo , Ltvonos , nomine Régis Poloniae , in fidem
accipienti, paulo pofi t rade bat ur, nul la bujus mentio fiât, quam tamen , fit tune
exftitifiet , neceffario fieri debuifje nemo non intelligit. Tôt igitur modis
cum arguer et ur , quis mirabitur hoc fuifj'e fufpetlum ? Tant a tamen erat Sacra
Régies Majejlatis clément 'ia , ut fenlentiam fufpcnderct , permijfo ipfi s tempore
inquirendi , an ufpiarn locorum abd'rtum in lucem protrahi pofiet. Interca,
quae jura t3 privilégia finguli , aut univerfi, olimfibi data fu'ifie ofienderant ,
inviolata ipfi s fervata funt , (3 ut in poflerum quoqua fer vent ur, cura Regibus
Suionum erit.
§>uid igitur , quod privilégia Livonorum imminuta ofjiciat , qua omnia in~
tacla habent & illibata ? gHiam vero maligne eadem fus imperio Polonorum
illis fervata fuiffent , quam multis modis convulfa , plena querelarum monu-
ment a ex fiant. (U.) Qu<e intérim vociferationes hic cientur ? quae probra in
Suecicam nationem cumulata ? Cum inopia cirminum ufque eb , quod ar-
gueret , non haberet , contra notifjïmam omnibus veritatem calumniari per-
git , £s? tam crudele (3 intolerandum Suecorum imperium , tam miferandam
j'ub eo Livonorum fortem fingit , ut ex Turcarum annaltbus , aut alterius
gentis barbarae hiftoriâ, declamare bac videatur. Abe/l haec faevitia ab excul-
tis Suecorum moribus, (3 aequiffmis legibus: abhorret à Sacra Regiœ Majeftatis
ingenio , cujus mite ju/lumque imperium non cives tantum , fed etiam vici-
vi populi jufpiciunt , vénérant nr. Sed quemadmodum praeter atrociffimas
exclamationes nibil adfert , quo falfa haec (3 commentitia crimina confirmen-
tur ; ita , res tam levés ac putidae quibtts verbis diluantur , difficile eft repe-
1 ire. Nifi forte , cum Libellum , quo fupplices Livonorum preces , Régis
Poloniae opern implorantium , perferiptae funt , vulgaverit , non decrunt
criminationïbus fuis fiabiliendis tefiimonia. Atqui cum eundem Libellum inter
manus fias ejfe , apud ordïnes regni Rex Poloniae jaclaverit , quare monu-
ïiientuîn tam illuflre non edidit , cum coarguenda Suecorum tyrannidi , tum
rninuendo nefarii hujus belli odio apprime inferviturum ? Sed refpondebit pre-
cul dubio libi hoc non confiait um vider i , quod liceret tune Patkuli cujujdam
proditoris manum ceramque infpïcere , (3 nomen cognofeere , quem , vita
probrojuiii , contubemio fuo dignv.m judicavit Rex Poloniae. Ab hoc enim
mquitiae mancipio haec commenta , ne quifquam de eorum fide dubitaret ,
b&ufit Rex : ab hoc pcrfuafus , fpem Livoniœ occupandae cepil ; hujus etiam
confias , in praeclara bac expeditioue ufiis. Eft enim is ver us ac nobilis fraii-
dum machhw.lor , qui puer doweftico patris exemplo ad proditianem inftitu-
3p MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
-1701. tus, cum adclcviffct , facile ipfum patron ficeler e & audaciafuperaiit. Pri-
• muni igilur diplomata falfa fupponens , popularium animas pertentavit :
tnox fceieris manifeflus , clam prof agit , ne judicis fcntentïam praefens audi-
rct , qua crpite damnatus eft , infliëla memoriae ejus ficmpiterna infamia.
Vagus inde & infabilis , cura artïbui fuis nufquam locus darctnr , Régi Po-
loniae idoneus v'ifus ejl , quo Livonorum , . à quibus occulta fe babere man-
data ncbulo fingcbat , animes inefcaret. Square infamem (3 proditorem non
îJi.tuni) contra fidcm Sacrae Rcgiae Majeflali datam, recepit , verum ctiam hp-
noribus auxit , ut exemplo tani illuflri ad feditionem caeteri allicerentur . Z7?-
runt quae de hoc Livonorum effet opinio , ex noviffimo eorum decreto , quo
prodhort huic , confiliario fuo intimo {$ carifjimo , infamiae notant inuffe-
ru/ttj fi modo in Mo, qui ignomhûis flagitiifque antea coopertus erat , novae pla-
gae locus ejfe poffit , congmfcere potuit Rex Poloniae. Cui fi experimentum nu-
pcrum addiderit , quam nihil mutata in Sacram Regiam Majeflatem con-
flantià irruptionent ejus pertulifjent , quam fortiter peclora fua invaforibus op-
pofuiffent , quam non minis ac magnis pollicitaiiombus ad defetlionem permo-
vert potu'iffent , non dubitabit amplius de Livonorum erga fe jludiis, & quant-
opère ejus adventum exoptaffent , ut Suecorum intolerando jiigo eriperemur.
"Tum quoque cïtficet fidem paUorumque Religioncm fanclius paulo in Livo-
nia , quant in fua aulà , coït {5? obfervari. vie proinde non vehementer angi
animo Rex Poloniae débet , & metucre , ne Livoni , defperatis rébus, tute-
ïam , quant Poloni negaverint , apud aliam gentem quaerant , cum inconcufja
illorum fides , &? internerai us in Sacram Regiam Majeflatem amor & venera-
tio , facile hune ferupulum ei eximant , nec finant dubitare, qttin eadem qua impe-
lum ejus fiuflinuerunt , virtutent confiant iamque quibufeunque aliis , qui eos aggre-
dientur, oppofuerit. Sed quemadmodunt qui aller um ineufat probri , ipfum fe in-
tuer i opertet; ita vero non efl fimile , ex animo haec Suecis objecifje Regem Polo-
niae j qui poftquam Saxoniam fiuam antiquo décore fpoliaverat , graviffimifque tri-
but i s ad incitas redegerat, & in Polonia fub jugum mittenda ont/les curas cogita-
tionefique defixerat , caufam nullam habuit , quare defpoticum Suecorum in Livonia
regimen indignaretur. Sed cum dccrevifjet Provinciam quoeunque titulo occu-
pare , ex quà rigidas Polonorum cervices domaret , multa etiam invita profe-
renda erant , qu.o majori acquit atis fpecie deflinata fua tegeret. Hoc igitur
erat, quare tant ajpere multa in adduclius imperium dixifjet , quod t amen fi
Livonia jam ferret , tanlum abeft , ut tôlier e illud cogitaverit unquam , ut in
illa ipfant dominationis arcem fundare confiituerit.
Itaque ifla ex calumnia profecla ftint : quae fcquuntur . ex vaniloquentià.
2\ .\;n ut oflendat non licite alienatam effe a corpore Reipublicae Livoniam ,
yuam inepte multa & abfurde adferunîur ! Quae enim vis illius argument i
efl y quod ex j^amento Sigifmundi Augufli ducit ? Nam & iile , ut fupra
oftenfi'.ni , invita fupremo domino , foi Livoniam vindicavit -f & promiffis in
tflo juramento abunde fatisfecit , cum quantum poffet , ea quae Livoniae
adempîa erant , & a Mofco occupata , recuperare anniteretur. Neque enim
aliud juravit. Et fi maxime aliud jurafjet , cum id praeflare in ejus potefia-
te non crat, tum tenter arium fuijj et credere, eo ipfo Reipublicae Poloniae fatis
eau-
ET RESOLUTIONS D'ETAT. 331
caution fuij/e , ne Livonin iterum feparari poffet : cum nulli populo id cou- 1701.
tigit , ut , quae femel arripuerît , quicta in perpetuum poffcjfione teneret. Mul- -*"
ta tnim bello amittuntur , aïïa putlionibus , alla dereliclione in allarum gen-
tium, aut Regum , jus tranfeunt. Qui omnes moii , aui amittendi7 aut mu-
tandijuris, non minus advet fus rempublicam Polonam , quant alios , vakbunt.
Nec majoris ponderis fiint fiât ut a de non alienandis provinciis , aut jura-
mcnta Regum y quae ' poftea fa cl a funt , de iifdem recuperandis. Nam ftcttt
illorum, qui fiummam in republica pote ji aient tenent , confenfu hae leges latae
funt; ita quin contrario eorundtm aclu diffolvi & abolcri pofient , minquant du-
bitatum ejî. Jam vero illam conjlitutionem , quant , anno M D C X L V I.
faclam efje dicit , quot modis ipjï Polonorum ordir.es pofiea infregerunt ? Nam
ut nibil dicatur de iis , quae Tunis funt conceffa , EleSori Brandeburgico ,
M D C L V I L fupremum Boruffîae imperium contukrunt , additis quo-
que Pomerellia praefecluris Lauvenburgi &? Buthoviae. Paclis vero Andrufo-
vienfibus , anno MDCLXV IL Smolenfcenfem provinciam , Severiam , {$
totam Ucrainam trans Borifihenem Mofcis tradiderunt , & Kioviant ad ccrthm
tempus, quae nondum reddita efl ; quae pacla aliquoties poflea rénovât a funt , &?
ab ordinibus Reipublicae Polonae confirmata. Quant igitur futiliter legcm du-
dum anîiquatam , £5? toties infirmaUim , hic o'otendit ? Cum vero pacla cum
Regibus conventa de iis , quae ita tradita funt , urgeat , quis interpretari po-
te (if an ineptius, quod ad rem non faciant an imprudentius , quod Reipublicae
Polonae indecora fimul , £s? perniciofa fmt , haec ab ipfo proferantur ? Quid
cnim attinet'hic commemorare , quo juramento fe Reipublicae obfirinxifjet Rex ,
cum aliénât io Livoniac, non Régis fôlummodo^ fed totius Reipublicae confenfu ,
'rite 13 légitime olim facla effet ? Et quemadmodum judicis efl non de legi-
ùus, fed fecundum leges judicare -y ita Rex Poloniae non de paclis , fed fecundum
pacla decernere débet. Si adverfus haec contendat , ex ijïo jurejurando obligari
Regem adomnia, quocunque modo aval fa fuerint , recuperanda , non pot efl non
kvitatis & fluxae ficlci ordines Reipublicae incufare , quoi, quae for is cum vicirûs
gentibus pacli funt ,aliis ils? diverfis fanclionibus convulfum eaut yatque Jimul fane-
tiffimum focietatis humanae vinculum,& publicam paclorum fidem , tollant. Quod
flagitium ab autlore hujus Libelli fibi imputari^non acquis animis Poloni tulertnt ,
qui probe vident bac ratione cum omnem apud exteros fidem fibi derogatum
tri , tum temerario hoc juramento , tamquam publica bellorum tuba , non
tantum Suecis , verum 6? vicinis fimul omnibus , quibus cum Polonis olim
nrgotium fuerat , bellunt indiclunt efj'e ; fiquidem ad jusjurandum ■ Regem
adegifjent , ut contenu 'â patlcrum folennium religione , quae car. que aliéna-
ta ,_ fine difrimine , ad vêtus Reipublicae corpus aggregaret. Si haec Polo-
nis mens fuijfet , cum Régi fuo praejuraffent , eam tegere confultius duxijfent ,.
quam viemoram cognitioni apricari , qui nupera in Suecos perfidia moniti ,
perinde fibi Confilia ceperint. Profeclo nemo non diceret poïïuï eornm fidem ,
fi fantliffinta fœdera per Regcs fubs refeindi non tanium vellent , fed (3 jubé-
fent. Sed neque cum gentis integritate haec illufio convertit : nec jurât a pro-
■ttujjlo Regem valide obligaret , cum jurejurando , eni tsfiis Deus advocatur\
honefla i an tum Ô? recla fanciri debmnt , non fraudes & violationes fœderum.
Quais
35* MEMOIRES, NEGOTÎATIONS, TRAITEZ,
i-»oi. gïuah jusjurandum qui ver bis conceptis juraverit , impie quidem facit ; fed
' geminat culpam , fi juratum impleverit. Sic proinde retle Philo Judaeus :
Sciât , quiiquis ob juramentum injuili aliquid molitur agere, non fe jurisju-
randi oblèrvantcm fore, fed potius everforem jurisjurandi. Addit enim cul-
pam culpx, &, quo abftincre fatius fuerat, actum iilegitimum.- Quare ab
injuria aérions abiljiiens, Dcum veneretur, ut, quae ipfi eit maxime propria.,
miiericordiam ci impertiat. Sed pergit argutari ; Ordines quidem Livonia , per
patla Olivenfia , obcdient'ue vinculo & fidelitatis facramenîo exfoluti funt : at-
tamen iidem a juramentis Regum , padtis conventis , & obligatione totius
reipublicas , Legem 6c rempublicam Polonam non exfolverunt. §)uid ergo ?
Rejpublica Polona juramento , quo obftritli quondam fuerant , exfolverat Livonos :
hi in Sue cor uni verba jurejurando adacli funt: £s? nibilominus veteri jnramento
rempublicam fibi devintlam tenent. 6hi<s cavillatio hac eft contorta £5? ridicula i
Idem popuhis Polonos veteri & Suecos récent i vinculo pariter conftritlus fibi ha-
bet. Qitidni uti ijque fubjeclum effe fimul dicat , fiquidem bœc obligatio ita reci-
procatur , ut, fi imperium fit , cives fint , & fi cives fint , ifiius imper ii obfequio.
contineantur. Itaque in Polonorum potefiate adhuc permanere Livonos affirmât :
quos tamen obedientice vinculo , per patlum Olivenfe , Joint os effe fatetur. Oedipo
conjeclore opus eft, qui hoc œnigma dijfolvat. Si famulus vel minifier a Rege Po-
lonics dinùjfus , Regem à fe dimijfum ejfe negaret , quamvis ipfe fidem operamque
fuam alii domino addixiffet , an ineptienlem ferret ? Sed cum aperte inficias ire non
potucrit feriptor , Livonos , remiffo fibi jurejurando , e Polonorum exiifje potefta-
te j allata tamen e tortuofo ingenio quadam dubitatione, an Poloni iftorum fimul
obligatione libérât i ejfent , rem turbare , & manifefiiffimae veritati tenebras ofjun-
dere cupit. Verum ut ex illius animo fcrupulus omnis £5? folicitudo evellatur , ad~
Monendus eft religiofus homo, rem ita planam fieri, Ji ad animum fibi revocare
non gravetur, Polonos facramento fidelitatis exfolviffe Livonos , quod fatetur -,
hos autem fidem Suecis £5? jusjurandum dediffe , quod Mis , quos veteri juramento
folutos ejfe confitetur , licuiffe non negaverit ; atque ita mutuo confenfu omnem y
qua uterque populus olim connetlebatur, refeiffam penitufque fublatam effe obliga-
tionem. Jln rem tam perfpicuam £s? evidentem mente concipit , an nondum etiam
Livonos a republicâ retle aliénât os effe putat , quod par in parem non habcat po-
teilatem ? Eft , unde hœc quoque fufpicio ipji adimatur. Nam fi invitas e civita-
te ejecifjent Poloni , tum fortaffis hanc juris œqualitatem non inepte Mis occinere
Livoni potuijfent , oppofitoqite veteri patio, expoftulare, non retle fe ab Mis defèriy
cum quibus focietatem olim coiviffent : cum vero ht fidem fuam Suecis jure ju-
rando adftringentes , eo ipfo obfequium reipubtica Polona renunciafjent , faits de-
dar avérant je açquievifje novo imperio , £5? Polonos fimul priflina , qua inter il-
los fuerat , obligatione liber zffe. Si Rigenfes olim reclamantes , £jf Polonum im-
perium ajpernantes , juramento abfolviffet Ketlerus , ut in Polonorum verba
adigerentur \ (V.) cur Livonos non répugnantes, fed in Suecorum fide ac
ditione , in quant jam antea concejferant , prefeverare volentes , facramento
refpubiica Polona liberare non potuiff'et ? Itaque fi Jedulo argumentari voluiffet
auclor , dcmonftraudum ipfi fuerat , Livonos , pofiquam à republicâ non pot aé-
rant defendi , detrecldfi'e Suecorum prœfiidium : ofiendendum quoque cor.ua.-
dixiffe
ET RESOLUTIONS D'ETAT. 355
dixijfe iîlos alienationi huic ; & demum fidem nunquam Suecis dedif'e. Jt 170T.
c uni illi , antequam Oliïœ Polonorum vinculo Joint i fuerant , jurando je Sticcis
obligajjent, 13 idem pojlea multis vicibus jusjurandum itéraient , quant nibil fi-
bi çuffl reipublica Polona bodie commune ejfe puta-verint , cîarïjjîmc oftende-
rant. Proinde non cjî , quod vereatur inquictari regios defimclorum mânes , ni-
fi fortajjïs indignabundi fepulcra fua bodie revifant , quod à fucccforibus tam pra-
ve violentur , quœ religiofijfime ipfi , dum corporibusfuis circumferebmtur , pacli
fuijfent.
£htamvis igitur ex ijlis articulis nibil exfugere potuifft auclor, quo venenum
fuum pafceret , £5? dilutum Jaltem iniquijfimo Régis Poloniœ faclo colorent illine-
ret: infipidis tamen £5? a re ipfa alienis comme:itariis folicitare ijtos voluit. Qui
enim Olivant ejfe violxtatti ex articulo tertio demonftraverit , quod eodem J o-
hannes Casimirus jus illud, quod in rcgnum Sueciœ fibi arrogabat , re-
fignajjeû. An negabit UcuiJJe Régi hoc facere, aut Suecis injttftant ejus declara-
tionem confentire i Quid enim hoc ad Poloniam ? Niji Sueciam quoque inter aval-
fa reputaverit , quod Reges ex illa oriundos quondam habuijfet. Sed cum totius
provincits pojjejfionem in dubium vocare au/us effet , minus cuiquam videri débet ,
fi ex articulo quarto de terminis ejus controverfiam moveat. Limitationem hujus
provinciœ Suecorum culpâ dilatant ejfe , ac elufam criminatur. Sed quo argumen-
to hoc probaver it ? Quando erat , cum Sueci banc controverfiam componere noluif
■fient ? Si detreclaffent congrejfum , fi à Polonis invitati , litis iftius difceptatio-
tient elufijfent , non eJJ'ent ferendi : verum cum illi per legatos fuos de hoc nego-
tio Polonos non femel compellajfent , in criminantis caput culpa recidet. Vi hujus
artkuli ajjignatam fibi Livoniam Tranfdunanam , £5? partes Cifdunanas , quas
tempore induciarum tenuerant , pojjident ; ulterius ne latum unguem unquam pro-
grefji funt. Cum a conterminis extrema Livoniœ turbari intelligerent , aliquo-
ties à Polonis poflularant , ut certo limite fines utriufque regionis diflingueren-
tur: •verum hibellum Turcicum , aliafque caufas prœtexentes , non apport unani
hujus negocii mentionem fierijudicarunt. Cum vero Johannes Tertius,
anno MD CL XXXI. , figendis confiituenàifque certis terminis pronum fe often-
deret^ Carolus XL Rex S ue ci œ , more m nullamfecit, quin prafidi Livo-
nia Jlatim mandant , »/, quam primum commijfarios à Polonis deletlos ejfe in-
tellexifiety ipfe quoque viros ad limitem idoneos mittcret : ( X.) fed in hodier-
num ufque diem nemo comparuit. Quod magis falfam ejfe ejus criminationem li-
quet, Suecos infimulantis , quod non exfpeclatis regni Pohnici commijfariis , Imi-
tent dcterminajjent. Nunquam enim hoc fatlum eft; & quo minus rite fier et ,
■ mora nulla £5? procraftinatio apud illos fuerat Jttris autem eft , ut cum per cum ,
cujiis inter erat conventa impleri^ fietait^ quo minus implerentur, tantundem ha-
beatur, ac fi eadem fuijfent impleta. Sic quoque calumniam redolet , quod de
fundo trium milliarium Duci Curland'ue erepto tradit. Quicquid enim terra cis
Dunam Sueci bodie tenent , patlis cejferat : pofitis pro lubitu terminis nullam fibi
gkbam vindicarant. Cum vigore induciarum fexennalïum ^quœ anno MDCXXIX.
f ail ce erant , Mitaviam Duci Curland'ue refit uifjent Sueci , peculiari cbnventione ,
proximo annoy limes S net ici cis Dunam agri rite defcriptus eft , £s? Novœ Mun-
dce attribut us lotus ille tra3us7 qui Bulderam, inter amnem £5? mare jacet. ( Y. )
fom. iV Rr Pojlea,
3^4 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
1701. Poftea patio Stumsdorfienfe, anno MDCXXXV.^ conventum eft , ut pars utra*
■ que , uti incluons Jexennalibus pofiedcrat , ita deinceps pojjïderet. Quœ omnia
Olivenfi demum pacificatione confirmata funt. (Z.) Quamobrem tantum abeft
ttt ex hoc articulo quicquam contra païia Curlandia ereptum efje demonjlrctur , ut
ex codem plani (finie conjiet , traclum Cifdunanum, quem induciarum tempore te*
nueranî , optimo jure nunc qnoque à Suecis poffideri. Et cum in illo Novamund*
ad confluentem Dunœ & Buidera exftrutla eft , qua fronte afjirmabit eam in
folo Curlandico repofitam effe ? Aut qui in contumeliarn fuique nominis opprobrium
Poloni accipient , fi Sue ri , deftruclo veteri caftello quod iniquiori lo'co fitu/n e-
rat , novam in adverja fui juris ripa ad majorent Dunœ amnis , 13 urbis Rigenfis
fecuritatem , munitionem excitafi'ent ?
Omnia quidem in bac eau fa nugatoria funt , £5? indigna , quac tamen vide*
buntur levia , fi ad ea^ quae fubjicit , comparentur. Ijiis enim prolufiffe videtur
cul maturius calumniae robur : (3 cum bablenus Ma tantum quae recle facla
funt , fufpiciofe aiguere , 13 fuphifmatis quibufdam vellicare , finis babuifiet >
jam aperte ladificari incipit, (3 ea procudere monftra , quae fando nunquam au-
tlita funt. Quis poft bac mirabitur ex vetufto aevo mtilta ad nos fat/a proma-
najfe, cum in tant a noftrorttm temporum luce non défit , qui novas Circes, no*
vafque Cbimaeras orbi obtrudere non vereatur ? £>uos enim tumultus Polonga
excitât. Ignotum obfcurumque vicum non una fabula nobiiitat , Trojana fat a
exaeqtiantcm , cum decimum jam annum à Suecis oppugnetur. Nam anno
MDCXC, celebrem fuiffe tradit , ab eo tempore graves Suecorum infidias vim*
que fuftinuifje : nuper etiam Saxonicas copias , ut infra fabulât ur , ab ii/deni pêne
oppreffas vidiffe. Atque , ut fidem bijee nugis concilie t ^ locus , tempus, perfo-
nae adduntur , modique fere omnes notantur , quibus aliquid fatlum ejfe argui
filet. Ut gênera H comitiorum decreto nobiliftlma in litore maris Balthici Jia-
tio erecla fit : ut operâ focictatis Anglicanae perficeretur : ut Suecorum commi-
nationibus effet inipedita ; qui , imnnffis fpeciiiatoribus , non tant uni locum de-
Jineandum curabant , verum etiam boftilem animum contra rempublicam Polo-
nam declarabant , direptis navibus , focictate difperfa , locoque tam pulcre fttn-
dato ad foUtv.dinem redaclo. £>uid contra hacc opponere Sue ci babent ? Nibil
admodum : nifi quod ambigant , utrum folertiam autloris in nugis bifee concin-
nandis mirentur tmgis , an fiultitiam ejufdem in ils divulgandis rideant. Si
tam operofam fabulam compofuijfet , ut in remous procv.l oris , £s? in coetu
aliquo Cofaccorum , récit aretur , boc habttiffet commodi , ut rudes trucefque ani'
tnos majori in Suecos ira efteraret : jam quare noflri orbis hominibus , quibus
nibil magni occultum effe poteft , tam aperte falfa venditare voluiffet , nemo
facile divinabit , fi non extremae impuder.tiae fpecimen edere cogitaffet. Liceat
Suecis ignorare , quid Polonis de Polonga decretum fit , i3 quicl cum Britan~
nis fuper ifto negotio couvent um : hoc finnpHcis eft veritatis, non audivijje un'
quam illos , portum iftum frequentantes a quoquam mortalium turbatos fuiffe.
Cfoias intérim in bis nugis tragœdias facit ? §uac non in Suecos probra jac-
ta,.tur? Atque ut boruni injujlitiam cum oppojitâ Polonorum indulgent ià con-
tendat , figna nautica in pronontoriis Curlandiae , jv.xta Articulant quint uni ,
pofita objicit , quafi hoc qttoque patlis repugnet , quod fyrtes ijlae , tôt naufra-
giis
ET RESOLUTIONS D'E T A T. ^
g/'is infâmes, frequcntioribus pereuntium fpoîiis non ditentur , quodque aliqui , 1701.
quibus Neptnni Jaevitia parcerct , quacfiuofae accolarum immanitati eripiantur. -'■«
Qjiamquam haec Pharos navigantibus parum utilis ejl , poflquam non unti'.s
Nauplii facibus Capharca ijla Jimul colluçere cœperunt.
Haec feiticet commenta Régis dolorem exacuerant ,ut gentcm Polonam, cui Sue-
ei per îot annos in fuit ancrant a contemtu viudicaret. Namque contcmta haec an-
tca, orba, debilis, ab eo tandem decus , tutelam & robur accepit , qui non tan-
tun; Polonos flocci facere caepit , leges e or uni evertere , eofque enervare , verum &?
ipfam Reïpublicae animant & fpiritiim intercipere conatur. Dura potins & crade-
lis fortuna Poionorum rnuhis exijltmabitur , qui tam diu hune Regcm in Reïpubli-
cae leges infult are vidèrent. Vindicare Poloniae injurias Us conjiit uit , qui e a in
Rcmpubiicam patravit , quae acerrimam non tantum à Polonis, fed etiam eorum
amicis efflagitant ultionem. Iter Hornii, exercitum Suecicum per Samogithiae fi-
nes , anno M DC LXXV III. , ducentis aceufat , quod ad jufium beilum fine
noxa ejus, per cujus regionem tranfitur , tendent ib us denegare inhumanum fiïijfet ,
13 jure gentium patere jolet. Nihil hoc cum tranfitu Bothii 6? Cracovii, Ca-
farianorum ducum, fervente bello Germanie 0 , commune habet qui per Poloniam
in Suecorum provincias non tam f ponte irruperant , quam ab Uladiflao Rege al-
lecli fuerant. Ad haec tranfitus Hornii prorfus erat innoxius , fine alla exaclio-
?ie, aut mitlima injuria, cum omnia parât a pecunia redimerentur , eaque difei-
plina , ut non modo manus iftius exercitus , fed ne veftigium quidem cuiquam in-
colarum nocuerit : at ipfe Rex quot populabunda per agrum Polonum hifee an-
nis agmina duxerat, quibus £5? Poloniam ipfam mifere conculcavit , £5? eorum-,
qui Poloniam ' amicï erant , Provinciam crudeliffime , & latronum ritu , expila-
vit atque oppreffit ? Externas ipfe in Poloniae vifeera copias immerferat , non
ut ïnnoxie tranfirent , fed ut ad Reipublicae oppreffionem ts vaftitatem innibi ni-
dularentur, & inveterafeerent. Nemo incolarum, Hornio iter faciente, de inju-
ria ulla aut maleficio que fus efi : quae autem lamenîationes hodie audiuntur , non
taclis leviter unïus Provinciœ finibus , fed tôt a Republïca me tu ac pavore coneuf-
fa , Lithuania direpta , Curlandia exhaufta , nec hoc in tranfitu , ut finis aliquis
malorum fperari poffet , verum continuât a per aliquot annos violent iâ ? Cum de-
claraverit Rex Fridericus Augustus, quorum venià hœc ab eo, £5? an ex pac-
tis conventis , faSta fini > Sueci quoque demonfirabunt tranfitum Hornii minime il-
licitum prohibit unique fui (fe. Interea feire ipfi fujfecerit , »^« Johankem Re-
gem tune Poloniae , nec Rempublicam, violent um hune, aut injuriofum fibi tran-
fitum unquam reputaffe, aut eo ipfo rupfa exiftimaffe pacla Olivenfa. Si in-
jujla Suecorum arma contra Eleclorem Brandeburgicum fuijfe credidiffent , pro-
cul dubio ipfi auxûium tulifjent : fed bene noverant non ex patio Olivenfi , fed
ex fœdere, quod inter Regem Sueciœ & Eleclorem ,anno MDC LXX III. iclum
-erat , iflud ortttm fuiffe beilum ; cum Eleclor Régi Chrijlianiffimo Suecorum fœde-
rato arma intulifjet.
Nae igitur , fi faperet , puderet aceufaton-m ea referre , quibus infolentiae
Rex Poloniae vertus redarguittir , quam ut quidquam in Suecis jure reprehendï
foffit. Gemïaa bis funt , quae , ex Articulo Undecïmo , de aère alieno , Elbing^
(3 Thorunti .à ducibus Suecorum contraclo profert. Partim enim falfa v.omina
■Rr 2. hic
53<J MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
170 1. hicfingit; partim illorum , quorum refert , injuffu nunc exigit. Elbingenfi civl-
1 tati teruncium Sueci non debent : omnta perfioluta fiunt , nullis rekquis* Tbo-
runienfiibus quo minus idem contingent , falfo traditur diverticula Jolutioni elu-
ckiidae à Sitecis quaeftta effe. Cum enim illi chirographa proferre , 6? ratio-
Mes difpungere , ccjj'arent , £5? omnia , quae Bernigius , eut hoc Negocium ali-
quando cçmmifierant , eorum nomme egiffet , pofiea irrita pronu-icïarent , pro-
crafiinatio & mora fatla efi : ver uni cum nuper fiumma ad liquidant effet per-
ducla , pecunia etiarn repraefentata fuiffet , ni exortae turbae fiolutionem di-
Jiutiffent. Nihil igitur ad Regem Poloniae pertinet , quid', interpofita fi.de ,
cum Thorunienjibus Sueci patli fint ; eut ifti , quoi hoc tempore rationes fint
impeditae merito tribuent. Sed neque Rex Poloniae , quae fecerat , nomina tara
facile expunget : nec ut bellum quifquam fibi ea de caufà indicat , aequum effs
judicabit , qui ad patientiam creditores fiuos, ficut hatlenus, remittere ma-l-
kt.
Sed bujus Libelli propria vis ac indoles efl , cum gravent aliquam calum-
niant intendat , ut , quanto minorem Ma veritatis fpeciem habet , tanto majo-
rai verborum rabie ac petulantià eandem protrudat : prorfus quafi putidis ac im-
becillis commentis atrocitas conviciorum fidem adderet. ghiam enim acerba ad
Articulum decimum quint um aceufatio inftituitur, de novorum vetligalium exac-
tione , quâ commerciorum libertas in- fluminibus Duna £5? Buldera confiringi di-
citur. Verum fit aliqua vcl res minima reperietur, quamabrem videafur nonni-
hil tantum verifimile effe , quod tant impudent er hic arguit , non reeufant Sueci ,
quin cacterae quoque criminationes , quae in hoc feripto conflipantttr , verae ac ju-
fiae pronuncientur,. Nam quod ad vecligal Bulderanum attinet , teftimonia multa
adduci pojfunt , quibus demonfiretur , iftud ab eo tempore , quo rerum in Livonia
Poloni potiebantw , pendi folitum , poftmodo continuo tenore exfiolutum fuiffe , do»
nec Olivae hujus ipftus Articuli, quem violât uni jam dicit, luculentis ver bis flabi-
liretur : Teloniorum vero & vectigalium in fluminc Duna Se Buldcva r ut Se
maritimorum ac terrclkium in Livonia, eadem ratio, & in iifdem tantum lo-
cis ab utraque parte in pofterum iît, uti & ubi tempore induciarum , 6c ante
hoc bellum ultimum fuit. £$uid efi autem, quo altius affurgere improbitas pofi-
fit , cum clarijfimas pacli leges calumniari non vereatur ? Ad haec nulla hujus vec-
tigalis portio ad Sacram Regiam Majeftatem pervenit : totum illud , quod exiguum
valde ac tenue efi , in ufus civitatis Rigenfis , quae maximam hujus tributi partent
ipja fufiinet , eut quoque antiquitus illud deflinatum erat , re/èrvatur. Cum de hoc
aboleado, anno MDCLXXI, cum Duce Curlandiœ paSlioncm feciffet , iis condi-
tionibus, ut ipfe vecligalia terrefiria remit ter et ,ut vins publicas ad vetluram api 'to-
us reddéret, ut eas vehkulis idoneis, £5? fluvios ratibus infirueret; Dux quidem
tune confient ire vifius efi, fied mox a patio &? conventu difeedens , Rigenfibus jure
priftino utendi nccefiitatem attulit. Par falfitas in iis, quae de intolerabili vecli-
gal i Mcfeoviticis , Litbuanicifque mercibus , quae Duna fluvio Rigam clevebun-
w.r , irfipofito declamitat. Nunquam enim nugator probabit fiupra confuetum
port m utn , eut contra pat! a , obolum exigi :. contra prude nter a Reg'-bus Sue-
ciae conflitutum invenict , qui ut mercaturam iis in locis floreiitiorcm face>
rejit ,. conceffs Privilegiis , parte fipliti omris ifias menés levare voluerunt.
£>uod
ET RESOLUTIONS D'ETAT. 5i7
Quoi ipfum multis teftimoniis confirmari poffet , fi praeter convicia quidquam 170 1 ;
attuliffet autlor , quod refutatione dignum exiftimaretur : nunc fatis fit ho- "__
mini impudent ifiimo , ut importunius latrare definat , ipfam experientiam ob-
jicere , quae doccbit , fingulari Regum Sueciae cura 6f indulgent ia effet! um ef-
fc , ut cum antehac naves mercatoriae fexaginta admodum Rïgam quotannis
ventitaffent , naper y &? proximis annis , earum numerus in immenfum auclus
fit , quae e diverfis terrarum plagis folutae , in portum Rigenfem , cum res
varias uftbus humants infervientes , tum incredibilem argenti vim adveclant ,
quae ils mercibus , quae in Mofcovia , Polonia , £jf Lithuania progignuntur ,
eoemendis impenditur. Unde facile conjeclari potefi quantum lucri , quantum-
que rei familiaris incrementum non tant uni illi , qui in his oris négociant ur , ve-
rum etiam opéras ruflicas habentes , ex his Commerces copiant , ut proinde non ener-
vari , ut calumniatur , fed ditefeere iftarum regionum incolas hac mercatura liqui-
diffime confiet. §u^e cum Poloni retla via reputaverint , nunquam in hune diem
de u/lo vetîigalium onere quejii funt : contra ea cum Succi de infolito &? contra pac-
ta inftituto in locis Dunee conterminis portorio^ monuiffent , ipfi œquitate dutlit
niiffîs ad publicanos mandatis , abrogare illud promiferunt. ( Aa ) *
Quemadmodum igitur falfiffimum eft , novis Suecorum vecligalibus confiricJam
efj'e Commerciorum libertatem ; ita pravitate monetae Poloninae Rigenfium Ne-
gotijtiones non affliclas tantum, fed quibufdam annis propemodum exfiinclas
fuifje , fi haec res cum Polonis difeeptanda effet , poffet demonflrari. Nam
cum bi aereis uterentur numulis , quorum quinque impériales , ut appellant 3
internam unius argentei imperialis , quo monetae génère Rigenfes mercaban-
tur , bonitatem vix aequabant ; faïlum eft 9 ut meliori pecunia Livonia exhau-
riretur , &? negotia pêne conciderent. Non unam de hac re querelam Sueci per
légat os fuos ad aulam Polonicam dctulerant , oflenfa fimul ratione, qua res
■numaria emendari poffet : verum cum remedium huic malo tard lus adferretur, ex-
Batavis, Lubecenfibus , Hamburgenfibus9 imo etiam ex ipfis Polonis quidam ma-
la lucri \ cupidine indutli , folidis ejufmodi , q nos domi excuderant , aviver fam fe-
re Poloniam inundarunt. Horum exemplum duo Rigenfes , anno MDCL XVIIf
imiîari conaîi funt , quibufdam ex Livonia Polonica in focietatem affumtis , fed
raox in ipfo facinore deprehenfi^ ju/las luerunt pœnas. Nullam igitur fuper hac
re querelam Poloni unquam moverunt , qui Régi totique regno privatorum au-
fa non ef'e imputanda fapienter judicarunt , pojlquam fontium fupplicio crime»
expiatum erat. Quin eodem tempore clandeftinos in Polonia flaturarios fuiffe
confiât 9 qui investis vilioris notae folidis 9 Livoniam graviter turbarunt. Hœc
quanjuam ignorare non poîerat is ,. qui vetera acla tam diligenter exeufferat y
von veretur tamen falfis opprobriis Suecos mordere , quafi ah ipfis haec fraus
adornata effet , eo- fine , ut exinanita Refpublica , ut loquitur , . ipfis praedae ef-
fet : cum tamen hi numularios hofee non tantum acerrime punirent , verum etiam
Po'onos, ut y abolitaviiiori rnoneta, meliorem cuderent, monitis fuis pêne fatiga-
runt. (BB)
Quœ de tabellario traduntur , arrogantiamne major cm , an infeitiam arguant 1
incertuu efi- Potta Suetica, inquit9 non paélis Olivenfibus concdFa, non ulla
legum auâoritate fundata , temere &C indebite in grave piajudicium juiium-,
Rr 5 10
1$ MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
1701. reg.diu'.n per Curlandiœ Se Samogithix ducatum difpofita cft. Osferrenm!
— — — Audet inter caxfas ketli refe>rey atque impcgnare illud jus, quod Sueci non tantitm
feptuaginta amwarn prajïriptione , verum etiam publias paclis corroboratum hâ-
tent. Nam cum Curlandia veredariis careret , Sueci, ad Commercia promovenda
certa équités fais impenfis alebant, qui per Curlandiam literas ferrent , non pri-
i\ito aufu , Jed anuuente Duce Cmiandite , ci? annuo pretio veredos concedente ,
qui (S> ipje eàdcm commoditate, in fais literis mittendis , uti voluit. Curfus hic
îabellsiiorum paclis inter Suecos ci? Ducem, auno MDCXXXF initis, £5?, an-
no MDCXLV Tlrepetitis, confirmât us «fi-, (Ce) adprobante eadem poftmodo
Oliva cujus Articulo primo fancitur , ut pacbi ac fœdera omnia , qua: pacifeen-
tes inter le, vel cum aliis habent, intégra 6c in pleno robore luo permaneant,
ci? infuper Articulo tricefimo fecundo clanus exprimitur, ut in Livonia Se Curlan-
dia Negotiationes quxvis priitino ufili reltituantur, & literarum Commercia
libéra fïnt. Maie igitur Suecis dicam hic impingit rupta pacis Olivenfis ; quant
ab eo potins violât am ejfe liquet, qui jus tabelhriorum tam longa confuetudine,tot-
que paclis fundatum, interpellation ircit. Agnovit hoc ipfum Dux Curlandia, cum
iter regii tabellarii, anno MDC LXXXy ', turbatum quererentur Sueci, per-
que epijlolam fe promifit prœfeclo tabellariorum , Statio Stenio , aquum jus adver-
fus jubfeffores itinerum adminijlraturum. ( D d ) Ncque idetreo , quod tabellarios
fuos haberent, fupremo Reipublica Polona , aut Ducis , juri quidquam detrahere
in animum unquam induxerunt Reges Suecia , aut Ducem impedire , quo minus fuos
ïpfe veredarios , quos antea nulles habuit pro lubitu infiitueret : ut autem décédèrent
ifiojure, quod folennibus patlis acquiftt um , perque tantum temporis traclum imper-
turbatum habiter ant , neminem put avérant tam iniquum fore qui poftularet , nedum
ut cos pr opter ea violât a pacis aceufaret. Cum auiem falfam feientia perfuafionem
fdn induat auelor , ci? nufquam gentium talia in ufu effe exclamet, mirum quan-
.tutn ignorantiam fuam prodat. Si, quod apud exteros gérer etur , nefeiret, condo-
v.andum ejus infeitia efjet : hofpitem autem in patria ejfe , turpius aliquanto efi.
Nunquamne audivit tabellariis Elecloris Brandenburgici tranfitum per Pruffiam
regakm dari ? Nunquam fama percepit , in plerifque Germania regionibus, hoc
ufurpari ? Rex Dania per Sueciœ confinia longo itinere in Norvegiam tabellarios
miltit. Suecis idem per Daniam atque Holfatiam conceditur. Nec eorum quif-
quam , quod gentium jure licet , iniquum ejfe reput avit , aut pr opter ca majeftatis
jura dividi imminuive credidit.
'Tôt igitur nugis venandis , in quibus ne mica quidem efi veritatis , cum omnes lo-
culos finufque pacis Olivenfis perreptaffet , imprudens tandem Articulo tricefimo
quinto, tanquam feopulo , impaclus, mire perturbât ur. Vidit enim hoc ipfo fen-
tentiam diclam ejfe , qua Rex Poloniœ quod Suecos contra hanc pacificationem
bello impetiiflet, ab omnibus pacifeentibus & lponlbre pro aggrelîbre & in-
fraéïore hujus pacis habetur, ejulque beneficio excidiflè judicatur.-pacifcentcs
vero, & fponfor feederis parti \x(x. communibus armis afliltere Se bellum con-
tra aggrefforem prolèqui invicem tenentur. §>uid ergo faccret ? In ipfo délit!»
manifefio jcm deprehenfus , fudat, pa/let, trépidât, viam qua évadât , circum-
fpicit. Quamvis enim hatlenus impndentiffimi calumiuatoris partes flrenue obive-
rit, (5? inufttatam in artificio accujïitorio peritiam calliditatemque attulerit: am
tamn
ET RESOLUTIONS D'E T A T. 339
tamen inteHrrimorum prudentiffîmorumque judkutn cognitioni tes vamffimas 1701.
adprobaturum Je deÇperaret , quorum fidem corrumpere mn pojffet , illgrum "
fcienti.vn dolo ludere inflituit. Itaque , quâ cœpit , fide criminationes fuas
per/exity h mcque Articulum cà pottjftmum parte , ad quant , 'velut ad obrufi
fam , jujîitia hujus belli exigenda crat , dolofe truncat. Quent proindc inte-
grum hic appvnere juvat : §. II. Si vero contingat unam partem ab alté-
ra , vcl pluies à pluribus gravi aliqua injuria , citra , tamen vim armorum,
vexari , non licebit ideo keib ad arma lubito recurrere , fed ante arnica- ■
biiis componendarum hujulmodi controveriîarum ratio ineunda erit , vide-
licet, ut lxius , accepta injuria, fi immédiate cum lasdente convenire ne-
queat , ahos puciicentes moneat , ut commiflio generalis omnium pacifcen-
tium nomme îmtituatur, ad tasfi confinia , intra fpatium quatuor menfium ,
& in qua inter deputatos utrinque commiflarios negotium difcutiatur, &, fi
poifibhe erit, intra quatuor ad lummum alios mentes terminetur. §. III. Si ve-
ro kedeutem, refractanum ad aequa, quse proponentur, média deprehenderit,
tum lœfis licebit, fâcta tamen prius légitima belli denuntiatione, jus i'uum armi*
proiequi, Stbellum, ut fupra ftatutum elfc, kedenïi inrèrre. §. IV.Quodfi
ver. 1 turbationes vi contrariilque artibus retundantur , folummodo tuendorum
limuum caulâ, adtus ejufmodi pro violatione pacis non reputabuntur : ipia au-
tem i'uper lunmbus controverlïa extra vim armorum terminetur. Tarn nobi-
lem laciniam cur abfcidit (. Si Suecos patlorum Olivenfium reos agere voluijfet ,
ex hoc capite coarguendi erant. Nam ut maxime culpae alicui affines effent ;
eo lumen injufta erunt Régis Poloniae arma , qaod gradus in hoc articulo prae-
fcriptos non Jcrvajfet. An vero unquam Suecos de injuria ulla convcnerat ?
An pacijcentes de eadem monuerat ? An tempus tollendae controverfiae , fi quae
orirelur , determinatum exfpeclaverat ? An denique légitima modo bellum de-
nunciavit ? tlanc Jeriem Oliva diclitat , quant cum neglexijfet , eo ipfo fateatur
necejfeeft, injuflum eum effe aggrej/brem, violât ique fœderis Olivenjis paenam ,
quae hic exprimitur , incurriffe. ghiam vero abfurdum eft atque inverecundum
ta lege pojlulare alterum , in quam ipfe peccaverat / Quare cum videret nugas
fuas calumnia/que omnes , quibus fabricandis tantam impenderat operam , hac
lege abunàe refelli, & quafi uno fpiritu dtfflari, fummamque Régis injufiitiam
ante omnium ocuhs ex pont j prœftigiis quibufdam incautum leclorem circum-.
venir e voluit , maltilata ea parte & hominum cugnitioni Jubduflâ , quae tôt ut» ne-
gocium conficeret. Ipfe igitur aegrotam defperatamque caufam agi confit et ur ,
quam non lege , fed corrr.pt ione legis , non intcgriiate , fed fallaciis obtenturum
fe confidit . £)uis tamen non audacem mugis, quam fatum eum fycophantam di-
ceret , qui univerfis mortalibus verba fe daturum fperaret ; neque metueret , ne ifli
fallaces fucojajque mer ces fibi obtrudi pro indignifjimo ferrent. Sed durât Jron-
tem, & rimam qua elaberetur, fe reperiffe putat , dum bello T'urcico & mteflinis
turbis difraclam rcmpublicam difftmulaffe bas injurias obtendat. £>uam emm lan-
guida hac isf jejuna cavillatio fit , fupra monitum eft. Nam ut, fervente bello
Turctco, Pdioni non e re Jua put af eut Succorum ferociam in il are; quid , eo fini-
to, ipfos delerruif/ct , quo minus ex prœlctipto patlt Olivenjis agerent ? cum ex-
pedita jara &? bello libérât a effet refpublica-, fponfcrcs quoque fœderis pacem ha-
berent,
540 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
1701. bercnt , quae major unquam apport usai as effet cum Suecïs de injurtis cxpoftulandi ,
■ ■ eor unique ferociam comprimcncli ? utrum eft perkulojitis armis adverfarium aggre-
di , an ver bis compellare? jiufus eft Rex contra pacia Suecïs bellum faccrei in-
(onfultis fponforïbus : de damms reparandis juxta leges paclorum , iifdem fponfuri-
bus confciis (3 adjitturis , hifeere non fufiinuit. Nempe timebatur , ne Polono-
rum querimanias anteverterent Sueci , fi légitime in boc belfo ifii procédèrent .
Qnafi vero intempefiivus ficlufque timor juftam pacla violindi , bellumque al-
teri inferendi , caufam fuppcditaverit : aut Poloni unquam a Suecorum irruptioni-
bus fibi metuifjent , cum quibus nu/la ipfis interccjfit controverfia aut Regern foli-
citaffent , ut advsrfus Suecos bellum fufeiperet ^ quod infciis ipfis , & contra regni
leges , fufeeptum ejfe quam maxime jam indignât ur. ghtafe hi Suecorum modefti-
am ht iis9 quœ paclis adverfari put avérant , perferendis antea non cognovifient ,
aut ipfi, ficut lu Bernigio fupra oftenfum eft , fi quid ex paclis fibi debert credidif-
fenty indicare liber c aii/i non fuiJJ'ent. Uude ifia jam fuperbia ferocitafque Suecis
accejjerat , ut amicorum mont ta bello vindicarent ? Frigida , mehercule , fi quae-
quam, £5? minuta ratio eft , commiferatione potins quam refutatione digna. Quid
enim obtufius dici potuit ? Âpparet Vertumno iniquo natum ejfe , qui infulfe om-
tiia & ridicule diceret , nec quidquam fani mente unquam vider et. <guœ de irrup~
tionïbus Suecorum hic ingeminat , vana ejfe 13 inania ex ils , quœ Juperius allât a
funt , liquebit. Inter caufas violât arum induciarum , quod Uladiflaus Rex Oefi-
liam tentajfet , jufie quondam relatum fuijfe nemo negabit , qui noverit Regem
ifium , cum nihiljuris in hanc Infulam , qtue tam diu in Danorum fuerat ditione^
illi competeret , non modo impedire conatum fuifie , ne Sueci trader etur , verum
etiam, mijfis per cubicularium fuum Bergium feditiofis literis , incolas ad defeclio-
nemfolicitajfe. Sedbtec, quœ -olim gefla funt , & repetijam non debebant , Po-
lonos hodie non abfterruijfent , quin controverjïas , fi qu£ natte ejfent , mitioribus
remediis componendas ejfe cenfuiffenL
Sed nondum ineptiarum fatis. Arguitur Sacra Regia Majeftas contra articu-
los XXXV I 13 XXXI venije , quod , fubmiffis fereniffimo Duci Holfatia'
copiis, quarum ope munimenta qu&dam reficerentur , Regem Daniœ perpetuum
Polonorum fœderatum infeftajfet : quœ inani verborum tinnitu ventofaque loqua-
citate exaggerantur , congeflis pro more teterrimis in gentem Suecicam oppro-
hriis , ficlijque fufipicionibus. Enimvero nemo eft , quin intelligat infidias hic
Polonis tendi , ut imagini lœfi fœderis deceptos in furoris fui focietatem adducat ,
ipforumque manibus ad rempublicam jugulandam utatur. Quae enim ratio effet ,
ut , rupto cum Suecis veteri paclo , controverfiis ad eos nihil pertinentibus fe
immifeerent. Nam fœdera fuperioris feculi , quae cum Danis erant , alio fpe-
clabant , ipfaque vetufiate obliterata perperam hic adducuntur : quod , anno
MDC LF II pailum erat , pacificatione Olivenft , anno MDCLX aboli-
tam , 13 nulli ufui eft , poftquam eadem pacificatione ornais bellorum caufia
inter Suecos Polonofque radicitus exftirpata eft , (3 Polonis per fiponfores de
iftius pacli diutumitate fatis cautum. Verum in bac caufa nihil jam eft, quod de-
fenftonis egeat ; falf'a fuiffe omnia , quacunque hic ad Polonos irri}andos , vel
Suecos criminandos , malitiofe allata funt , ftibfecuta nuper inter fereniffinium
Dciniae Regem , & Ducem Holfatjae conymtw docuit , magnoque ifios ruborc
CQïi'
ET RESOLUTIONS D'E T A T. 341
confuclit , qui confilia Sacra Regia Majeftatis tam fmiftra opinone adfpergere fu~ — —
ftinuerunt , multaque effuîire temere , qua , etiam Suecis tacentibus , 7/5/é fw/i- I701.
V«f wï»* fuiffe laquitur. Neque enim Sacra Regia Majeftas unquam cogita-
vit Danis bellum inferre , aut detrimenti quidquam import 'are : verum id unice
fluduit , ut patlum Aitenoenfe , cujus una cum Britannis Batavifque in fe fponfio-
nem fufeeperat , eff celui daretur : cujus articula fecundo cum Duci Holfatia jus ha~
bendi condendique munimenta ai fer te concédât ur, (Ee) ad illa exflruenda cohor-
tem mille ducentorum militum mi fit , quorum paucitate creari fibi periculum minime
Rex Dania timere potuit. . Nec poflea Sacra Regia Majeftas quidquam nifi com-
muni rcliquorum fponforum confûio egerat , idque non alio fine , niji ut qua Dw
ci ex ficie patlorum debebantur, Rex Dania tandem praftaret. Ifta verà moderatio,
qua Sacra Regia Majeftas tifa eft , cum omnem a Suecis cupiditatis vel Daniam e-
-■vertendi, vel orbi Cbriftiano dominandi, ficut objicitur , fufpicionem dimovebit ,
tum Regem Polonia fumma iniquitatis convincet , quod cum indolem hujus
controverfia exatlifftme feiret , orbi t amen, tam univerfo , quam reipublica Po-
lona rem vanifjîmam perfuadere conatus fit ; in memoriam fimul fratris fui ,
Eletloris quondam Saxania , injuria fus , qui una cum Cafare , &? Eleclore
Brandeburgico, patlum Altenoenfe confecerat. Itaque cum ortum illud inter Re-
gem Ducemque diffidium componere debuiffet , artibus fuis & clandeftino cum
Danis fœdere ejfecerat , ut negotiatio Pinnebergenfis , qua pa5li iftius exfecutio
fufeiperetur , per quadriennium protracla fit , &? interea perniciofa Ula de Suecis
fimul £s? Duce Holfatia epprimendis collufio maturefeeret , fefqui altero anno ante
facla, quam Sacra Regia Majeftas ex lege fœderis Duci fubveniffet . §)uis igitur
negaret ipfum effe iftius pacli ruptorem , quod à Suecis violatum effe audacler fmgit ?
Verum Libelli autlorem adeo cacum fecit criminadi libido , ut non videret fe -
taufae huic déplorât a quam maxime nocere, facla iftius jurisjurandi mentione ,
quo Rex fe obligavit pa£ta Se fœdera cum vicinis inviolabiliter manutenere ,
obiervare & renovare vclle. Nam cum inficiaturus non fit Polonos cum Suecis
folenne patlum Oliva iniiffe, cur Rex illud non fervavit ? ghioniam vero non
modo religtvfe , ut jur avérât , non fervavit , fed fraudulenter , ut non debuit ,
infrçgit , utro nomine pofthac conpellari velit, eligere habet. é)uapr opter exatle
judicio rem jonderantibus facile erit affequi , omnia bac fucofa & inania effe ,
cum neque bellum Régi Dania a Suecis illatum fit, neque pacificationi Oliven-
ft repugnarit , quin Duci Holfatia cum cateris fponforibus evitlionem pacli
Altenoenfts praftare iidem potuerint : &? denique Danorum amicitia falfo tribui,
guod fuperiori bello cum provinciarum aliquot jaclura Poloniam à Sue cor um
armis liberaffent. Arclis enim fc? propemodum defperatis rébus Polonorum ,
nufquam Danusfe movebat : poftquam vero Suecos internecione deletos effe fuma
vulgaverat, in feenam belli prodibat , non tam ut Poloniam fablevaret quam ut
fuis commodis ifta opportunitate velificaretur.
Jtqui hatlenns Rex infeliciter reipublica caufam egerat ; qua an aceufatio-
nem tanerariam & infipidam, quam abfqite mandat 0 fufeeperat, ratam habit ara
fit , an, quod credibilius eft, negotii gefli atHone cum illo experiri malit , die s
■aperict. Equidem cum a parte reipublica Polona nulla de injuriis expoftulatio
facla fit , fuperfedere bac refponfione potuiffet Sacra Regia Majeftas , & crimi-
ïom. I. SC ttoftm
5-p MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
1701. nofumhunc Libellum, infulfafque obtntlationes , contemtu ulcifci: verttm ne fikn*
J tium fraudi vert ère tur , pauca hœc reponenda duxit , non ut acerbijfimo iniquif-
fimoque hofli , quem nullo ditlo facto aritea lœferat, fe purgaret, fed ut toti orbi
manifeflaretur , quam exigu» honeflatis cura is ducat ttr , qui veritatem , & citf-
todem virtntum -omnium , verectmdiam ex animo ejecerat. Atqtte ut mentent ab
ornai injuria contumeliâque aliénant habet ; ita ab aquanimitate aliorum ob-
tenturam fe fperat , ut neceffitati potius, quant vituperandi cupidini imputetur ,
Ji ad indignijfima probra , quœ in fe fuamque gentem ingeruntur , refutanda
quœdam adducla inveniantur , quae fempiterna alias obliv'ione fepulta reflius
jacuiffent.
Jam igitur ad ea crimina , quœ à Rege Poloniœ potiffimum moventur , venien-
dum : in quibus objiciendis non meliori fide , quatn haêlenus , cum alicmmt
negotium egerat , uti eum nemo forte mirabitur , qui cogitaverit corroboratam
long» confuetudine audaciam tam facile non deponi. Injuriant in ablegato fuo ,
qui fe Regem ab ordinibus Poloniœ eleclum effe ftgnificaret , fibi illatam queritur :
ftquidem non tantum votis & exfpeftationi ejus non refpondit Sueci-.t , ied cum
fumma indignitate ablegato repulfam dédit , eundemque , infalutato Rege
Sueciaz, retrovertere fecitj certifïimum radicatce in peftore hoftilitatis pro-
dente documentum , & in quovis adverfo cafu contra ipium Se rempubiicam.
inicftœque viciniœ lu ce malevolentiam. Quam maie in aceufatorio mimer e is
verfatur , qui imprudenter (j inconjiderate adverfariis ea objicit , quœ fa/fa effe
non tantum nullo negotio démon ftrare poffint , ver uni etiam ex iifdem novam fibi
gloriœ materiam légers ! Quod utrnmque , in nugatorio boc crimine Suer.is contigif-
Je patebit. Nam, anno MDCXCV 1 , Sacbinus , à republica mijj'us ad nu»
ciandum Régis Johannis obitum , Holmiam appulit , ibique integrum fere bien-
r.ium moratus efi. Jnftquenti anno cum abeuntibus in diverfa ordirtum fludiis ,
bini fimul Regcs in comitiis Farfavienfibus renunciati effent , a Primate regni Pria-
ceps Contins , ab epïfcopo Cujaviœ Eleclor Saxoniœ , hic confeflim confiliariam
f nam Bofium Holmiam ablegavït, ut de eleclione fua Sacrant Regiam Majefl aient
faceret certiorem. jlditum pètent i Sacbinus intercefjît , caufatus, feifla republi-
ca , non effe Regem : £5? cum Bofius , ut repelkretur Ule , poflularet , refpondit
fe a Primate regni , cui, durante interregno, fumma juxta leges patrias po-
teitas effet, nomine ftatuum Poloniae ac Lithuanire miiTum effe, gentiumque
- jus appellare, quo legati effent inviolabiles. Ghietnadmodum igitur Sueci do-
tnefticis Pvlonorum dijjidiis fe ingerere nunquam voluerant , verum ommbus po-
tins fludiis votifque contenderant , ut fiiffragiorum liber tas, ratioque comitiorum in
eligendis Regibus intégra atque illibata conftaret; ita banc controverfiam fui arbi-
tra effe minime judicarunt \> incerto adbuc eventtt^ cum valida fjtis adverfa faclio
rnagno animorum motu rem ageret : Bofum autem , ut Elecluris Saxoniœ miui-
Jiium, admittere nunquam reçu fat ant , diplomate illius poiijfmum ad id indutli ,
quod conjueta inter Reges Sueciœ & Eletlores Saxoniœ formula conceptum erat,
atque eleclorali tantum fxgillo obfignatum. Cum veto alias paulo pofl anuliffst li-
teras, quam^uam & illœ vitio non carebant ; amicitiœ tatnen propinqui Principes
datum ejl, ut, eodem anno, die V1IL Oclobris , bora ter lia pomeridiana , in
foufpeclunt colloquianique Sacrœ Regiœ Majefiatis , in aida Carlbergiana tune
com~
ET RESOLUTIONS D'E T A T. 343
commorantis, introduits. (Ff) multa benevolentiâ exciperetur ; &? difcejfurus , 170!>
cum, anno MDCXCF11I., die 5. Januarii, Sacram Regiam Majeftatem iterum
falutarct , ampliffimis donis décor arctur. Calejcium , yuem fupenori anno legatio-
nem obiifje memoratum efl , quamvis nihil admodum , quod alicujus momenti effet ,
attaliffet , £s? omnï honore percoluït Sacra Regia Majeftas , £5? abcuntem laut9
coi/giario profecuta efl , effufis in eum magnatum fludiis, ccrtatim lautia praben-
tium. Cum utr unique vivere fama refert , aller um etiam hac aftatc, ut ac-
cepta bénéficia grato aliquo faclo remuneraret , una cum Rcge fuo provinciam Sacra
Regia Majeflatis vaflafe; amborum fidesdepofcitur,qui nifi mortalium abfurdiffit
mi fuit ^ cum banc Suecorum humanitatem recolucrint , non potermt iniquitatem
Régis fui non aver/ari, qui officiofam ifiorum amicitiam nomine inquinaret cri-
minofo , illudque malevolentia tribueret , quod certifjhnum animi fortunae fuae
f avertis indicium erat. Refpublica certe Polona , fi nullum antea fidae ftnce-
raeque 'vicinitatis documentum exifîeret , vcl hinc intelliget , quantum illius itt-
columitas cordi Sacra Régi a Majefîati fuerit , qua , quant dut civili diffenfione
ipfi laborabat , nihil admittere voluerat , quod juribus cjus ac Hbcrtati tantillum
dcrogaret. Cum vero tam bénigne Sacra Regia Majeflas legatos Régis excepiflet,
nihil caufa erat , quare illuflrem virum Vellmgium , Suecicum ablegatum ,
contemtim ipfe haberet , a confanguineo Rege mifj'um , ut novum ipfi fafti-
gium gratularetur, & fimul arclioris amicitia foedus offerret. Cui quant 0 major
r honoris fpecies habita efl , tanto infignitior jam evadet Régis fimulatio , poflquam
apparaît non alio fine adhibita hac blandimenta fuijfe , nifi ut iflis infidiis
pefliferum virus occultaret , atque funefla , qua de Livonia invadenda ceperat ,
confilia percoqueret. Si ingrata ejus legatio fuiffet , eo nomine liquet non placu-
(fe 5 îu°d concordiam domi fuafijfet , & Elbingenfi controverfia fedandae ma-
jorem , quam Régi , cui omnc in turbido confilium , expediebat , fidem dili-
gentiamque impendifjet. Nifi enim fixum deftinatumque an'mo Rex habuijfet or-
dinum reipublica jura obterere^ non hac propenfijfima Sacra Regia Majeflatis of-
ficia dedignatus fuiffet aut conditionem novi fœderis rejeciffet : fed cum perci-
peret Suecorum rationes a reipublica falute feparari non potuiffe , prias iflos , ut
expeditius cogitatu perficeret , proruendos ejfe cenfebat. £hio autem teclior hac
fraus effet , majori benevolentiâ fuco legatum ludere , atque in illud ufque
tempus , quo faroris hujus maturitas erumpebat , arclioris amicitia fpe laElare
non dubitavit. (Gg) Non itaque révèrent ia juris gentium , qua légat i fancli
habentur , Regem a contumelia abflinmt , fed aflutia Jubegit , ut dolofe blandi-
rctur , donec maligaitas cjus pareret, quod diu in Suecorum perniciem parturiiffe
liquet , edito mox egregio cbfervantia atque aequanimitatis document 0 , cum legatos
Suecicos, alterum Drefdâ , Farfaviâ altcrum exturbaret venus , quam dhnitte-
ret -, quorum tamen infigni fidaque operà in conciliandis fibi Polonorum animis
paulo antea uti faftinuit. Quare cum tam falubria fuaderet ablegatus Sueci-
cus^ non confilioram explorât or , fed exflincler incendii avilis ; non tubator, fed
conciliator pacis y publicae tranquillitatis erat. Neque enim tum fibi unquant
fumfit, ut aptum fatis exploratorem egijfe fe putaverit in aula Régis Poloniae,
qua artîficio fimulationis adeo trudita efl) ut Panis ipfi s fallendi pracepa traders
fvffit.
Sfi Quant-
344 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
1701. S^uamvis autem nihil non aufurum eum fperari potuijfet , qui , confumU
pudore , tôt commentis calumniïfque fidem decoxerat pollueratque : non ta-
nte» credtdiffet quifquam ujque adeo inverecundia frena laxatum tri , ut puti-
dijf.mam Flemmingi fabulant refiauraret , poftquam experiendo coinpcrtum eji 9
in omnium Principum aulis dudum illam exfibilatam cJJ'e atque explofam , neque
qucuquam inventant , qui non indignaretur credulitatem fuam abfurdijjimis ine-
ptijjimifque nantis tentari , quas conciliando puerorum fomno nutriculae reclius
impenderent . Nemo enim conjeclura facile affequi potefl , quare ijîam Ca-
merinant movere voluijfet : nifi quis diceret ipfum fpernendis rumoribus vali-
dum , delcclari jam opprobriis fuis , atit fuorum ingeniis admodum capi , in
quibus ad audendum fingendumque parent indufiriam proclivitatemque inejfe
vider it. Itaque Flemmingi honori confulturus , ne- inventa tanti artificis péri-
rent , régla aucloritate eadem fuffulcirc voluit. Atqui cum bellum in animo
haberet , quam praflitijfet veram illius caufant Jlatim aperuiJJ'e , atque fins
ambagibus dixifje fe ex certo joedere obligatum fuij/è ad Livoniam corripien-,
dam , ut Suecos ancipiti bello diflriilos teneret , & , fi pofjet , provinciam
tam opportunam in pramium armorum occuparet ! Quod licet nemini non
injuflum videretur ; minorera tamen fidci jacluram fecifj'et , quam nunc tôt
ineptiis calumniïfque coacervatis. Nam ut fateretur fe per Sttecorum latus rei-
publica Polona jugulum pet ère , nemo ab eo pojlulajfet : potuijfet banc men-
tent ea , qua pollet , dextcritate tantifper diffmiulare. jfam vera quot ludi-
briis , quot fibilis excipi ea fentit , qua gerris Siculis vaniora pro juflitiâ
armorum proferuntur ? Quid enim commiferat fummus Livonia prafeclus y
quo dux copiarum Saxonkarum offenderetur ? Copiis , inquit , militaribus ad
erigendum portum in Polonga vigoie conftitutionis.'iupra. fcriptas , & fenatus
confilii poftcomitialis deftinatis, hyemalique tempore in ftativis luis pacifiée
degentibus, aufuseft, titrai ullam caufam datara , vias publicas intercipere ,
diverfas tendere infidias , ipeculatores clanculum dimittere , defertores cal-
trorum fupprimere, nec non continuis initamentis lacelîere, primoque Fin-
norum adventu excidium interminare. Si quis hic fcapham fcapham diceret , vcro-
que nomine bac commenta appellarety quo patio alius defenderet ? Senatus confulto
Saxcnicas copias Polongam deflinatas fitijfs nondam audit uni efi: at ignotum ne-
mini , illas contra leges regni in Poloniam infufas , invita Rege & diu tcrgiver-
verfante , ejcclas atque exterminât as eff'e , neque ipfum antea diphma rezja digni-
tatis impetrajfe , quam bac fentinâ &f p°fe Polonte libertatis rempublicam levaf- .
fet. Polonga igitur confederunty cum ftnibus regni Litbuaniteque exire debuif-
fent , non ut portum , quem fcilicet tempore byemali moliri commodum fuiffet ,
txjlruerent y fed ne occafoni deeffent Livoniam ex propinquo involandi , quam
primum conflit uturn cum fociis tempus advenijfet. Quam vera pacificte copia
bae fuiffet , cum caedibus & rapinis -amnia f cédaient , nibil ad Suecos : fan-
guine enim atque fqrtmis Liîhuanorum paflae funt. At vero c;ti ex hoc grege
vias intercepit gubcrnator Rigenfis? Carlcvicio fortaffe. Accipc nunc Dananni
infidias, & cri mi ne ab uno difce omnes. Namque is Mofcoviam mijfus f ité-
rât , explorât or eorum , qua hgati Suecici agcrent , quibus cum adrepere , blan-
dixi y fludiaque fua offerte non defîneret bonto ajlutiffmus , litcras commendatititis
ad
ET RESOLUTIONS D'E T A T. 54?
«d fupremum Livoniae praefidem , Illuftrijjimum fenatorem ac comité?» , £77'- I"Ot.
«■#;» Dahlbergium , obtinuit , #/£#£ #£ «> ow»i benevolentiae génère cumula- — — —
/ai e/?. Itaqtte cum Régi ea , £##<? «*/# Ruffis convenerant , expojuififiet , fiimu-
lata iterum in Mofcoviam legatïone ^ fâ.anjitum a Rigenfibus impetravit. Sed
hco impedimentorum , quae fecum dhceret , rbedas pyrobolis , aliifque in-
firumentis , £«/» #r//.f //?/«* gnaris, oppktas eodem die , quo irruptio facla efi ,
#</ limitem praemifit , infequente occulte valida dimacharum manu , «^ impro-
vifio £s? £# infidiis urbem caperet : verum cum hos longiori circuit u per erro-
rum duclos impedimenta anteverterent , <r/c//«i ^£ excubitoribus deteclus , &?
Rigam celerrime mnciatus , fpatium dédit oppidanis arma capiendi. Quan-
quam vero tune ad irritum caderet impiti perfidi hominis machinatio ; ex ea
tamen intelligere licet , quare limitem ineufloditum voluifiet dux Saxonum. At
vero cum in vicinia efife.nt intégra infidiatorum caflra , quifiquam demi'
tnirabitur cujlodiis excubiifique itinera fiuiffe obfervata ? Aut quo jure prohi-
bebatur gubernator provincia , quo minus id faceret quod fi neglexijjet , im-
frudentifiimus omnium merito exifiimandus fuifièt. Cui paeato interea aditus
erat interdiclus ? nulla dies abiit , quin ex iifdem cafiris Rigam ventitarent ,
qui per fpeciem mercatus , aliorumque negotiorum ,,. publica privât aque urbis
loca perreptabant , nemine prohibante , quamdiu fufpicio fraudis aberat. Quin
£5? iis tpfis cliebus qui irruptionem proxime prœcedebant , non exiguœ clignât ionis.
duces urbem iviferant ,. bofpitaliter omnes & honorifice excepti , tametfi ex-
plorandi animo eos accefififie £5? tune non obfcura erant indicia , £ff experien-
tia mox confirma vit. Quid efi igitur , quod Rigenfibus hic crimini datur ? JVi-
Jjil aliud , quam quod , appropinquante obfefiforum agmïne , cautius agere aufi
fuerint , atque ill-a , qu<e oculis prope cernebant , fiujpicari : quod denique, ficut
exploratoribus commeatum £5? hofipitia prœbuerant ; ita pariter Us. , a quibus
mijfi erant , urbem ipfiam , munimenta , vitam , £9" fortunas fiuas non luben-
ter tradidififent. Quam vero ridicula £5? impudens efi aceufiatio , cum infidiator
de infidiis queritur; cum cautionem & diligent. >am ifiis, quibus ipfe irijidïas ten-
dit , crimini vert it} Prorfius quafi viatorem latro aceufiaret , quod jugulum impz-
vidus non prabuerit , quodque ferrum toto corpore fponte non receperit , fugaque je
manibus ejus eripere tentarit. Qui circumfpetlionem periclitantibus cfife licitam
negat , quid aliud cupit , quam ut homines, exutâ omni ratione y atque humana
natura exfiintla y immanitatem feris ipfis ignotam induani ,? Nam quid Sueci tune
quœrebant aliud, quid agebant , nifi.ut Lithuanorum Curonumque fipoliis content i
eJJ'e vellent Saxones , fiuis autem finibus (3 agris abfiinere ? An hoc crimen erit cru-
delijfimo. bello vindicandum ? Nam defiertores cafirorum fupprefibs fuifie commen-
tum efi, Us diebus configura , quibus urbem , ut ex Fkmmingi literis apparet ,
circumfidere cœpcrunt , quo tempore ftilicet hofli transfuge reddi [oient : de quibus
antea tamen , cum afiïduo in urbe duces eorum verfiarentur , nulla mentio facla.
erat. Atqui ficut prohibere non poterant Sueci , quin dilaberentur , quibus efuri-
tio erat incommodior ; ita illos , quos prafidia Jua nunquam intrajfe conftabat , in-
dagarefiui officii cfiinou putabant. Si qui ante bellum deprehenfi fui fient , redde-
re nunquam rccujafi'ent : quamquam Saxonum cafiris r tarnquam tv.tijfima ara ,
pradiîores & feelerati fantli &? inviolabiles. habebantur. Itaque defiertores Urne in
Sf 5 urbe
34* MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
["• 1701. urbe ncmo vidit ,- fpcculatores autem quamplut ïnnàs , quos fupprimere adeo non cogi-
• tabat fummus pronmc'ue prœfefius , ut fat i s haberet urbem ab eorum infidiis defen*
dcrc. Num quid eft aliud, quod in Mo accufant , nifi quod purum idoucus aptuj-
qne vider et ut , ^«cw illuderent. Hoc U1os pungebat , £#<; cupidine urbis capiendé
accenfos major i adbuc ira inflammabat '. "~ '>Qnm pulcre alibi fraus procèdent , urcbat
il iot unius finis vigilantiam fopirinulia arte potuijfe; illius diligent iam obflitij/ê,
ne Rïgam fpci fuae defttnatamjam atque defponj'atam fine fanguine caperent. Hoc
eft ue-npe , quod Mi vocant infidias tendere , ïs? contmuis lacejfere irritamen-
tis. Nam fi Mos interrogares , quando , quo loco , 6? quibus modis infidias
erantfaclae, calumniatores ut funt, refpondere non pojfent. Citm exiguo praefi-
dio mur os ingentis operis tucretur , egredi urbe , in aliénant provinciam involare ,
£s? integrum exercitum lacejfere, fanifcilicct £5? prudentis bominis erat. Sed ne-
que in Suecia abfqtte mandat 0 Régis tant facile bellum incipere licet, ac Flemmin-
gns Jibi licuiJJ'e innuit. De Finnorum adventu cui dixit, a ut quare diceret? Et
Ji dixiffit , an credidiJJ'ent Mi, qui Stiecos fpe fœderis, in eum a/que die m duci no-
ver ant ; Finnos autem ultra cent uni milliaria regione degentcs , fi maxime excie-
rentur , ifta anni tempe flate , ob fummam itineris difficultatem , cum neque terra ,
vcque mari commode adireiur Livonia , advenire non potuijje. Haec igitur cum
Saxones optime cognita baberent , praefidia quoque urbi & caftcllis adjacentibus
debilia fuijfe, crevit ils animus, (3 co facilior promittebatur vitloriay quod tant
procul abéjfe noverant , qui opprejfae regioni opem ferrent. Sed baec cum irrifu
omnium excepta , debuijfent autlores ifttus commenti , Ji ullam partem baberent
fen fus , commonefacere , ne fufpetlas fucofafque mer ces itcrum orbi venum pro-
truderent. Nam £5? cautiores jam funt bomines, quant ut praejligiis ejufmo*
di &? inanibus artibus decipi poffint ; & inventas eft , qui convcnienti prorfus
lixivio tam ulcerofum caput perfricare nuper Juftinuit : ( H h ) quamquam mirum
efty quemquam putidijfimis nugis refellendis operam horafque bonas perdere vo-
luijj'e.
Sed quemadmodum aclores induftrii , qui plaufum captant , in extrema
farte acroamata folcnt inducere , mijjioncmquc ludorum lepida fabella profequi j
ita , ut toti hitjtis accufationis Jce;:ae illuftrem claufulam imponeret , pemdicu-
lum crimen adfert , infolentiamque vocat indomitam t quod Sueci , miJJis ad
fromontorium Gedanenfe, Hela diclum , navibus , quae obfervarent , ne quid
àpparatus bellici, hoftibus adveheretur , accolas fïmul 8c provinciales grandi
reboantium tormentorum fragore extermerant, liberamque navigaiionem in-
terturbaverant, praefertim or: 0 jam bello, ^ po/lquam aliquot menfes provin-
ciam illorum vaftaj/èt Rex Poloniae. Novum litora iîla kgentibus praeceptum , quod
■ memoriae mandat, traditur, ne adnavigantes obviofque exonérât is tormentis J'ulu-
tent -, ni autlores bel H habcri velir.t. Sed infra omnes mort aie s abjecla Suecorum for s
erit , quibus , etiamfp antea innocais , belli culpa imputabitur , fi contra hoftes
defenfionent molianîur , vimque vi propulfare audeant. Nimirum juftum cen-
febitur , copiis Saxonicis perfultari Suecorum provinciam , caftella intcrcipi ,
oppugnari Rigam , omy'ique com.-neatu & commerciorum ufu intercludi : quod
îfti adverfus arma tulet int , & rabiem progrejfumque hoftis Jiftere conati fint ,
grawjjîmum crimen erit. Impctne Suecis omnss malevoli injultabunt ; gkria
il'
ET RESOLUTIONS D'ETAT. 347
illius tolerantiae relinquctur , inque perferendis pofthac injuriis omnis bellicofif- 1701,
fimi quondam populi virtus fpeclabitur. Verum iidem meliori paulo jure cum •
comico interrogare fe putabunt , unde Ma lex efi depromta , quâ injuriofum
eft ulcifci adverfarios , aut qua via captent te illi , eadem iplbs capi ? Ta-
metfi in amkorum gratiani ea tune exercere noluerat Sacra Regia Majeftas ,
quibtts adverfus boftem uti_ jura naturae gentiumque in infinitum permittunt.
Satifne commode igitur totum hune minium egiffe videbiîur ? Certe cum multa fu-
riofe dicla reperian/ur; nemo tamen procejfifje legitur , ut injitftum eo vecordiae
unquam prouuncïaverit fe adverfus boftem defendere , jufque illud, quod natura
omnium bominum animis infevit , penitufque commendavit , impugnare haïlenus
fufiinuerit.
ghtamobrem cum ad fatietatem ufque demonflratum fit , nihil fini, riibil vert
hoc Scripto , quod Régis Poluniae nomine divulgatum eft , contineri ; fed totum
Wud ineptiis , abfurditatibus , teterrimis conviais , fraudibus , mendaciifque
confiât um effe, adeoque pro famofo potins Libello quo Sacra Rcgia Majeftas &?
iuciyla Suecorum natio iniqmfihne Jugillatur , quam pro Scripto publico , quo cau-
fae bujus bellt exponerentur , habendum effe: fupervacaneum videtur quidquam ul-
terius incuîcare , quam impium &- nefarium bellum Rex Polonïae fufeitaffet.
Omnes utique mortales , qui reilae mentis ufum habent , nec ira odiove in trans-
iter fum acli funt , cum baec perpenderint , apertiftime cognofeent atque fatebun-
tur , nihil in rempublicam Regemque Poloniae admiftffe Sacram Rcgiam Ma-
jeftatem Sueciae , quod ab amico fidoque vicino alienmn effet , aut fœderi Oli-
venfi Ma in parte adverfam : injuftitiam autem iftius Régis deteftabuntur , qui ,
prvfanata fœderum patlorumque religione , improvifo & fraudulenter pacem ab-
rupit , nulla neceftitate induclus , non jufta caufa , non légitima modo , contra
jiajurandum & confeientiam fuam , contra pacla conventa , & iftius , cui
praeeft , reipublicae leges : £5? invenïcnt proinde fruftra in conclufione bujus Li-
belii rationcs eniendicar't , quibus omiffam belli denunciationem exeufare conetur,
ubi caufa belli nulla eft ; fruftra denique ad paëlum Olivenfe appellari, eu-
jus articulus tricefimus quintus clarigationem bello etiam jufto ac neceffario
praemittendam effe non modo diferte jubet , verum etiam omrem violentiam £s?
hojlilem ablum probibet , donec , reconciliationis via tentata , laedens honeftis
acquifque conditionibus refragare invent us fuerit. ^uo turpior hic eft gemina-
ta fraus , quod, cum legem banc antea mutilaffet , prolatam mine quoque cor-
rumpere audeat, furripiendo voculam negationis , cum tamen luculenter ifta cau-
tum fit , injuria accepta, non liceat ideo lsefa ad arma fubito recurrere , fed
amicabilis componendarum controverllarum ratio antè ineunda fit, Adeo
difficile effe confiât , recli quidquam illum fentire , aut agere poffe , qui femel
malam nientem induerat , atque veritatis via deflexerat. Cum un a- fraus
kovo proteger.da fit , in longam vitiorum feriem itur , quant poflea , etiam
fi velis , pudor vetat abrumpere. Sic quoque ad turpitudinem banc infucandam
inani difputatiuncula illud jus agitatur , quo Princeps vicinum nondum bofti-
lia profeffum , fed e longinquo molientem occupare potuerit. Nam ut prudentùe
eft , cogitatione futura praecipere , & immimentem tewpcftatem prœvcnire ; ita
malitieje metum fibi fingire , ubi ne tnittima qui de m alicujus periculi fufpicio effe
$48 MEMOIRES, NEGOTIATIOMS, TRAITEZ,
1701. poteft , divine humanoque jure deteflanda efi ars, quae goneris hitmani exitio in-
'• venta , belloquc omnium in omnes profetninando apta videatur. Cum auîem exacle
noverit Rex Poloniae , nihil infefli Sacrant Regiam Majefiatem Sueciae adverfus
rempublicam , cujus amicitiam novo fœdere pignerari fibi voîuerat , animo deflinaf-
fe , 13 nihikminus , -omnibus dtclis faclifque ad fallendum inflruclis, tantum peri-
culorum metum Polonis injicere laboraverit , quaft fiantes in cervicibus illorum
Sue ci, extremum in fingulas horas ictum minitarentur-y quid aliud ofiendit , quant
hune fcopmn unice fibi prœfixum ej/e , ut Poloaiam belli arenam faceret , & velut
-viclimam fuccedaneam fuae aviditati fubderet , in quam deinceps exhauftam viribut
&? enervatam pro lubitu dominaretur. Sed nifi nimia ipfum cupiditas excœcaf-
fet , tant perfpicite mentem ejus bodie non vidèrent Poloni , quibus ex tôt malis ,
quœ reipubltcae ab eo imifta funt , hoc boni evenerat , quod didicerint jam veros
amicos ab infidiatoribus dignofcere , ejufque art es cavere , qui ut reipubiicae Majef-
tatem obterertt , perniciojo confilio ingentJque audacia turbare tandem prius quœfi-
verat.
£hii vero confeius fibi efi , fœderum faclimoniam turpi fadoque more fe pol-
luifije , an credibile cuiquam vidtbitur , eum ferio invocafiè Deum fraclorum fœde-
rum vindicem atque ultorem? An fperavcfat tam facile fummum illud fanclifjt-
rnumque numen ludificari pofje , ac homines vaframentis fuis circumvenerat? Sed
illa Deo cura erunl, qui p^o fanât i nominis fui ludibrium juftis aliquando fuppiiciis
rnaclabit , illicitafque machinationes , utcunque calliditate multa ajlutiaque blandi-
rivideantur, pojiquam illam , quam Us prœftituerat, maturitatem attigerint , ad
*vanum irritumqut cum aterno ejus rubore damnoque rediget. Pneclara intérim
fpe Sacra Regia Majefias Sueciœ fuftentatur , cum cogitât omni culpa vacuamque
fe in hoc bellum effe protratlam, ifiaque arma ex ipfa eau fa vires roburque jume-
re , qua non libido , fed neceffitas pro patriae civiumque fuorum /ecut itate expedi-
verit. Fréta igitur optima mentis confcient'ia , ultorem gladium firingit , eo ani-
mo , ut eundem prius non recondat , quam noxio fœdifragorum fanguine devafta-
tioni provincitirum fuarum parentaverit ; Deumque omnipotentem , fupremunt
exercituum dominant, tefiatur, fe puram innoxiamque effe omnium malorum, que
ex bello hoc pr aventura funt ; atque eundem regnorum Jlatorem deprecatur , ut fibi
contra nefariam confpiratioaem iniquiffimorum hoftium confiitluro dignam majoribus
fuis fort itudinem injpiret , atque il a cuique vicloriam profperet , ut juftitia caufae
meruerit.
Confidit deniqne potentiffimos fcreniffimefque Principes , non tantum fponfo-
rem fœderis Olivenfis , Gbrifiianiffrmum Galliarum Regcm , verum & ejufdem
confortes , Sacram Caefaream Majeftatem, £5? Eleclorent Brandeburgicum, tanto
jufiiori indignatione -arrogantiam ifiius Régis percepturos effe., quanto majori te-
weritate ac contemtu pacla, quae religiofifjîme ab Us fancita funt, infregerit^ &
tamen eorum contra laefos auxilium implorare non erubuerit. Certe tantis nomi-
tiibus admodum protervt illudit , qui vindices afftr tore [que illius fœderis, quod ip-
fe violaverat , in iiefandam armorum focietatem folicitare non verelur , adque eo-
r-undem opes pofl bellum temere a fe metum rcfpicere , quorum aucloriatem fuperbe
entea fpreverat , quofque , juxta clariffunam patlorum legem , de injuria prius
Vionere debuijjct , quam ad arma prcfilire. Quis atitem non intelligit , tantun-
dem
ET RESOLUTIONS D'ETAT, 349
■dent iïïum nunc pet 'ère , ac fit diceret aquum ejje , ut , quoniam ipfe jurisju- 1701.
•«•«Wi fœderumque rrfigionem îemeraverat , fponfores quoque fidem non fierva
vent , atque quos ipfe mfidiis fuis primoque impetu obtcrere non potuerat , eof-
dem illi manibus finis elap/bs exciperent atque jugularent ? Satis jam inimicorum
in Succos concitaverat , qui Acherontem ipfum commovere e fedibus fuis la-
horavit , naclufque efl fiocium perfidie ipfi parem Mofcum : at fummos orbis
Chriftiani Principes , qui fidem fiancle colère ïaudi ducunt , vcrœque glorix
Ctipidine trahuntur , tant irnpias artes , fœdamqtte bellandi lïbidinem , totis
animis averfiaturos ejfe fperare aequum efl. ^uos proinde Sacra Rsgia Majefi-
tas exifiimat fe majori jure acfiducià rogare pojj'e atque obteftari ut quant pacem
fummo labore , cura ac diligentia olim ftabiliverant , nunc petulanter , fuperbe , ac
crudeliter violatam ac concufifam ulcifci atque vindicare non defiftant. Atque ut '
arnica iïlorum confdia grato anima agnoficit, parique benevolcntia officia haclenus
p\efiita demereri parafa efl : ita confiummatee eorum prudcntiœ dijudicandum relin-
quit , quant partira fuerit abfurdiflimum hoflem , pacifique ruptorem , ab injuriis de-
hortari, nifit ad Iibidinem ejus coercendam validiora attulerint. Exigit hoc ipfio-
rum aucloritas, qute ferociter [prêta atque conculcata jacet: poflulat décantât a fides
& integritas , ut , quant fancle promiferant , opem auxiliumque mature fierant :
ipfia denique juflitia effi 'agitât, ut communibus armis , fie ut i pacificatione Olivenfi
convenerat , aggrefferem tamdiu perfequatitur, donec fiecura & honefia pax , quce
hefo illata damna refarciat, refliîur a fuerit. ^uo paclo non tantum apud eos ,
quibus officia impenderint , ficmpiternam gratiam inibunt , verum etiam omnes in
univerfium nationes , adeoque totum mortalium genus, immort ali beneficiofibi de*
vincient , qui gratijjïmo pr<edicabunt ore , quod Principes in fuprcmo rerum huma-
narum fafligto collocati , potentiam vire/que à Deo conceffas ad comprimendam
fœdifragorum audaciam adhibuerint , juftaque fieveritate providerint , ne pejfimo
perniciociffimoque exemplo quifiquam pofl bac invitatus , paclorum fœderumque vin-
culum, quo falus humant gêner i s-, & fiocietas omnium gentium continetur, improbo
aufiu rumpere ac dijfolvere tentant.
TESTIMONIA,
Qu2e in ipfo Libello allegantur.
Diploma Jacobi Henrici Flemmingi , Copiarnm Saxonicarum Ducis ad
Livonos.
^MM'MOtum hifice facto, quod , cum a Stiecis in Livonia turbis anfamprœ- I-it-(A.)
$p Jsj p bentibus, qui infefta dudum agit are cœperunt , adjeclis rninis, fie-, cvn-
|| || traclis ex Finlandiâ, jEflonià, £s? Careliâ auxiliis , Rcgis meï ckmen-
IlfeJilti tifiimi copias, Ltthuama hybernantes , adorturos , ipfe coatlus fuérim
ad perniciofiffima hœc molimina prxvenienda , exercitum fnihi commïffum in Livo-
niam adducere, eoque intendere, ut commodum ibi locum occupem, mde hoftïles
ronatus reprimere queam : atque ccrto fciam eam efife Sacra Regix Mafeflatis <vo-
hntatem , ut incoU omnes &? finguli , nobiles , cives, ruricoU , & tujufcum-
Tem. I. Te que
1701
jfo MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
que conditionis , quantum fieri pofflt , illcefi conferventur , ideo ut abfque metu ac
• follicitudine ex periculo corpuris &? vit ce , opum , domiciliorum, for tunar unique
quif'juc deg.it , m tuteiam S icyœ Rcgiœ Majcfiatis rceipere vole &c. Janïfcas
die ~. Ici; aarij, MDCC.
Ejufdem ad Regcm Polonice Epifbola.
"DEgiam Veflram Maie fiât cm certiorcm hifee facio, quod, pofiquam juffu ipfius ,
quantum pot ni , iler acccleravcrayn , heri hue peivenerim. Gcdamim tngrefi'
fus, percepi Suecos in Livonia non parum fibi a copiis Regice Vefirce Majefîatis.
metuere , illifque vehementer diffidere , increbrefeente rumore , quo longius procef-
fiffem, adeo ut ifli irrurtioncm exercitus nojlri in dies èxpetlare dicerentur. Il-
lico ut cafira intraveram , a ■fummo vigiliarum prafetlo , Paikelo , diligenter
qucefivi , num quee a nofira parte cauja illis timendi data ? /Ile innocentiam
fuam declaravit prolatis , qua s ad gêner alcm Gubernatorem Rigcrifem dederat , lu
tais , qnarum excmplar nunc mittitur : unde fatis liquet , nofiros tie minimam -
quidem fu fpicionis ifiius, a Suecis tantum af] éclat ce , aufam prccbuifje , qui licet
copies Vefirce Majefîatis nufquam Je movijfent , nihitominus hafiis, falcibus, fer-
ratifque clavis propugnacula £î? valla urbis Rigenfis prcemuniunt : plura ver fus
part cm, qua Curlandiam fpeclat, per mur os tonnent a difponunt: majores folito
vigilias agunt , oppïdianis quoque ad arma vocatis : fiationcs cquitum limiti
preeteudunt: Rigam commeantes, prcefertim duces militâtes, qui e cajiris noflris
venif/e comperiuntur , diligent lus examinant obfervantque , mif/îs etiam in cafira
fpeculatoribus, qui motus nofiros cxplorarent. gfuin ne faclo quidem hoftili abfii-
nucrunt, prohibendo noflros, qui fvgitïvos perjequerentur , hos vero protegendo ,
cdcoque cmnia quee contra hoflem adhiberi fuient, egerunt. Super heee a plu-
ribus m'ibi nnntic.tnin cfi , gcneralem Gubernatorem Rigenfem , non modo ordi-
narias in provincia eqv.it uni turmas, verum etiam rur kolas cogère; unde liquida
confiât , non cegitare ipfum tantummodo munimenta fua defendere , fed potins
copias nofiras in kibernis confiitutas opprcfj'um ire. <f)uoniam igitur infeflus in
nos Suecorum animas inde fatis pat et, qui initium quafi hofiilis motus fecerunt,
lit cris heri ad gêner alem Gubernatorem mif/îs, cum eo injuriant hanc cxpoflula--
:e volai , cujus rcfponfum cxfpeclo. Inttrea ccercendis eorum conatibus omn'm
parata habco , f.quidem expreffe illi rdnati funt , fe , acceptis ex jEflonia, Ca-
relia , &? Finlandia majoribus copiis , vel Dunam tranfituros. §hto patio ego
cum meis in regione aperta minus [courus furem , ncque infultibus hofiium ul~
lo modo reffiere poffem. ghiapr opter , omnibus rite perpenfis & délibérât is , cou-
venientifjimum & neceffarium maxime judicavi mature cjujmodi confilia prave~
nire , £5? , quod Veflram Rcgiam Majefialem ratum habituram fpero , copias ad
Dunam admovere , ut prcefidio ifiius -fluminis ad averteniam hofiium uruptio-
ncm utar , & impediam , ne fedes belii in regnum , cujus incolumitas Regict
Vefirce Majefiati quam maxime cordi efl , tvanfcratur. Quod meditar.ti a>,i-
m addidere plarcs Régime Vefirce Majefîatis fubditorum qutrelce , ut ex Epi/-
toLi N. N. inaufd cognofeere licet : tant dominas N. N. eo ni negotio auxi-
hum £5? omnia, quee- in ejus potefiate fucrint, obtulit. Equidem jufj'um Régime
Vc(>i\e Majefîatis prias , quam arduum hoece opus aggrederer , impetranamn
mihi
I 70 1 .
ET RESOLUTIONS D'ETAT. 351
mihi fuiffefateor , gnarus tamen, quantum periculi inmcrà, hoc potifiîmum rerum
ftatu, ojficii met ejje daxi ea avertere, qua bellica Regia Vefira Majeftatis gto- '
ria & reipublica commodis adverfari vidèrent ur , hamillime rogitans , ut , qua
porro fadeuda fint , Regia Vefira Majejîas quant mat arrime & plenijfime mihi ex-
ponenda curet. Janifca d. xix. Feb. AIDÙC.
ÇUm Regia Vefira Majejîas in rébus ardais maxime £5? dijficilimis mihi confifa , Lit. (3.)
non modo ■ totum eleclionis negocium mea foiias indiïftrïa , fed etiam adverfus
pyindfem Cttntium excrcitum ducendum , nuperque diffidia , qua in Lithuania exor-
ta , toti rcgno exitium portendebant , fopienda commifcrit , qua omnia , ut gloria
Regia Vefira Majeftatis , £s? falus Regni , cujus fummani fempsr curant Regia
Vefira Majefias gerit, exigebant, féliciter peregeram : ideo cum hoc tempore &
Vefira Majeftatis exifiimatio 6f regni utïlitas , mirum , quantum consentant , &f
qaafi iwuicemfe connectant-, fpc magna excitât us, Regiam Vefiram Majefiatem in
folita erga me fidacia perflituram, hac pulcerrima occa flâne, quam Saeci nobis de~
dentnt , ad commodum noftrum ati volai , ad minimum res uofiras eo in loco matu~
re coliocaturus , ut ifti minas fuas in aclant deducere non valeant, verum potius,
fi ficri poffit , hélium in hofiili regione , £5? extra fines regni , geratur. Sane ex
muliis flgnis colligere licet , manu Dei hac mifeeri , fiquidem S ne ci talent occafio-
nem , quam folicite alioquin quareremus , aval/a recaperandi ( ad qua nomi-
ne Vefira Majeftatis me j'irejurando obftrinxi, qaafi Vefira Majejîas quoque jura-
mento deinceps confirmavit , ) qaafi ultro obtrudant , (<? in manus nobis tradunt.
Janifca , ut fiupra.
"DRomptc quoque ac bénévole Sacra Regia Majefias impertiri voluit domino Allé- kJt- (c0
gato taie , quale defide^avit , novum diploma pro conquirendis atlis publias ex
archivis regiis Polonicis, fi quid eorum adhuc in Suecia poterit reperiri, adjecla
exprejjd menîione bibliotheca Regia, prout eidem nunc quoque extradita J'unt qua-
dam feriptorum volumina , qua hic in archivo Regio haélenus aliquo tempore ,
ignara Sacra Regia Majefiate , ejafqae minifiris infciis , delituerunt , nec antea
cum reliquis aclis eam ob caafiam extradi potuerant , quud in itinere navi , qua
vehebantur, ad Oelandia Ut t or a vr tempefiatis fracla, in ea infiula aliquandiu
remanferunt , nec ante , quant pofi extradita illa alla priora , qua olim ex archivo
hocce regio depromebantur , hue pervencrunt . Mandata quoque regia ad privât os
qaofdam in fpexie Dno Ablegato impertitafuni , quibus iifdemjerio imperatur, ne
quid librorum apud fe retineant , quos ad mentent paclorum refiitui oportcat, re-
gicque praeterea bibliothecario par iter fuit itijuntlum, ut perqaam exacle Sacra
Regia Majeftatis bibliothecam denuo perlufiraret , eidemque eximeret libros, qaot- •
cunque videri pofj'ent in bibliotheca regia Polonica parte quondam fuijjé. Is igitur
.jujpi exfequutas , catalogum ejujmodi librorum quos deprehendifjlt , exhibait, de
quibus etji certo confiet , utrum navi primo in bello hue delati fint , an alla potius
eccafione , prout conjeclura efi, & quidem olim ab ipfo Rege Sigismundo
hic in Suecia relitli , in lis tamen extradendis bibliothecariam fuum cefiare notait
Sacra Regia Majefias, maluUque in hoc fidei fuae abundantis exiftere ttfiimo-
Tt z nium,
3fi MEMOIRES, NEGOCIATIONS, TRAITEZ,
1701. nium, quant ut quidqttam défit , qiiocl ad implenda patla defiderari queat. Hol*
• mia i68i. d. 19. Julit.
Rcfponfio ad Galetfcium, Senatorcm Poloniae, nominc Augufti Régis
ad Regem Suecia; miiîum.
Lit.(D.) ÇUm Exellentia Veftra tum apud Sacrant Rcgïam Majeftatem, Regem ac Dnum
noftrum Clément ijfimum , tum in congrcfj'u nobifcum teflatum fecerit , nïhil
magis in votis effe Sacrœ Régla Majeftati ac Reipublicœ Polonœ , quant cum vi-
finis Regibus ac Principibus bonam amicitiam (3 vicinitatem colère (3 obfervare,
prœfertim cum Sacra Regia Majeftate Sueciœ, cum qua non tantum pax paclaque
patienta Rcipttblica Polonœ , verum etiam ftricla cognât ionis jura , potcntiffimo
Régi Pcloniœ intercedunt , fimulque ab Exellentia Feftra indication fit , tria ipfi
potijfimum ' commiffa efje negvtia hic expedienda, quorum primum concertât paéo-
rum ac fœderum Olivenftum mutuam confirmationem : fecundum ortam intcr
Sacrant Regiam Majcftatcm Poloniœ (3 Elcclorem Brandeburgicum litem circa
Negocium Elbingenfe ; (3 tertium civitatis 1"borunienfis defuleria pro confequenda
folutione ipfi débita. Ad ea Exellentia Feftrœ refpondendum cenfuit Sacra Regia
Majeflas Sueciœ , gratâ afe mente agnafci honorificam banc (3 illujïrem légat io-
tiem a Sacra Regia Majeftate Poloniœ Exellentia Veftrœ commiffam faclantque
per eam conteflationem de fncera ac prœftanti Régis ac reipubliquœ Poloniae VO'
luntate colendi cum Sacra Regia Majeftate Sueciœ amicitiam perpétuant fidamqus
viciniam , eut pari benevolcntiœ candore omni ex parte refpondere fataget Sacra
Regia Majeftas , tum publia boni amore ad provebenda utriufque regni mutua eme-
lumenta & commoda , tum ob infitunt erga Sacram Regiam Majeftatem Poloniae
propinqua cognationis affetlum, unde omnia finecrœ benevolcntiœ officia , (3 op-
timœ voluntatis affeclus a Sacra Regia Majeftate Sueciœ cxfpeflare Jibique fpondc-
repoterit.
§htod in fpecie ait met ad tria illa négocia ab Exellentia Feftra propofitay
13 qt'.idcm i°. deftderatam confirmationem patlorunt Olivenfium , Sacra Re-
gia Majeflas Sueciœ non tant ad renovandam firmandamque diclam pacïficationem
prono promptoque fertur animo, fed & propenfa cft ad ineundas ftriblioris conjunc-
tionis rationes pro ntajori regni utriuj'que •fecuritate , prout res tempufqtie poftula-
verint , (3 quidem remvationis aclum circa pacïficationem Olivenfent vel num
ftatim expediri curaffet , fi ad hoc negocium perficiendum Exellentia Veftra plcna
poteftate fuiffet munit a : cum vero ea fe deftitui dixerit , Sacra Regia Majeftas
Sueciœ minifiro ftto , in Polonia commoranti , gêner alem locutn tenenti , Bar ont
Mauritio Pcllingio ejufmodi remvationis aclum jam hic adornatttm transmit tet , ut
cum Polonico ïhftrumento , in conduis inftaniïbus, à Republica ratibaber.do ibi-
dem commutari pvffit. Dabitur 13 mandat uni de perficiendo firiêtioris conjunclio-
nis negotio , fupra indigitato. 2°. ghted ad Elbir.genfe negocium, Sacra Regia
Majeftas Sueciae ortum cum Eleclore Brandenburgico de co dïftidium Jolicito
prvrfus inttietur a-n'imo , doletque intcr vicinos potent'efque Principes , quorum
bdclotus concordia publico bono admodum profuit , baec efje fubnata difeordia-
rum femina , (3 quamquam partium contentions lis ifta -in controverfias fat gra-
ves
ET RESOLUTIONS D'E T A T. ?f|
ves videatur prolapfa , ad amicabilem tamen earundem compofitionem operam
ac fludium omni me H or i modo cou fer et Sacra Régi a Majejtas Sue cite , magno- I701,
père exoptans ut quantocyus priflina inter diffidentes reducatur concordia , plurimum
fipei reponens in praclara Sacra Régime Majeflatis Polonia aquanimitate (3 mode'
ratione) ne tes ad exirema deveniat. 30. Quod concernit Thorunienfiumjolicita-
tionem, quandoquidem cum illis liquidât io jam facla eft , Sacra Regia Majefta-
ti Suecia cura cordique erit idonea difpicere média , quibus , quamprimum id
fieri pote; it , débita illis fatisfaclio praeftetur. De caetero uti Exellentia Pcf-
trae perfona &- fufcepta ab ea legatio Sacra Regia Majeflati admodum fuit gra*
ta; ita benevola propenfio ei femper permanebit faventijjima. Holmia d. z^.Apr.
i6i>9.
VIdeantur ipdi Pa£ta conventa, quibus promittit Rex , quod fine confenfu Lit- (&•)
republica offenfiva fumcre , externa auxilia in Regnum adducere , 'exerci-
tum Quartianorum aliofquc excrcitits augere^ & privât as copias contrabere nolit.
Chwalkoufcius de jure publico regni Polonia; lib. 2^ cap. 6. §. 1 . Hinc Rex
Polonia inter alla pacla jurât fe abfque confenfu reipublicae, neque bella offen-
fiva fumturum , neque peregrinum militem in regnum , aut Lithuaniam , intro-
dutlurum , neque exercitum aublurum. Bella igitur in comitiis contra bojles
publicantur. Idem de fcederibus ita: In capitulatione Rcges promittunt , quod
pacla 13 fœdera cum extraneis Principibus (3- dominHs renovabunt , de confervan-
da cum iifdem pace ftudebunt, (3 amijfa a corpore reipublica recuperabunt. Parla
autem funt vel antiqua , vel nova-, ad illa renovanda fnfficit confenfu s fenatorum
ad latus refidentium : ad bac vero flabilienda robur comitiorum requiretur. Ad-
datur Hartknoch de rep. Pol.-lib. 2. cap. 2. §. 7. Formula autem juramenti
Hœc eft: Ego N. eleelus Rex Polonia , (totus titulus hic exprimitur. ) fpondeo
& fancle juro Dco omnipotenti ad bac fancla Jefu Cbrijli Evangelia, quod om-
nia jura , liber tates , i?nmunitates , privilégia publica 13 privât a juri communi
utriufque geniis (3 libertatibus non contraria , £i?f. turn pacla per ordines regni (3
wagni Ducat us Lithuania mibi tradita manutenebo , obfervabo , cuflodiam &
ad'rmpkbo in omnibus çonditianibui r, articulis (3 punclis in cifdem exprefjîs. Se
paulo poft: Omnia illicite a regno magnoque ducatu Lithuania , dominiis eorum ,
quoeunque modo aliénât a , vel bello vel quovis alio modo difiraclay ad proprieta-
tem ejufdem regni Polonia {3 magni Ducatus Lithuania aggregabo. Tandem : Et
fi (quod ab fit y ) in aliquibus juramentum violavero, nullarn mibi incola regni
omuiumque dominiorum unius cujufque gentis obedientiam prajlare debebunt , ima
ipfofaclo, eos ab omni fide y obedientia Régi débita liberos fado, ab/olutionemque
nullarn ab hoc rneo juramsnto a quoquam petam^ nec ultra oblatam fufeipiam. Sic
me Deus adjuvet , & bac fantla Chrifli Evangelia.
]\JOs itaque Sénat ores 13 equeflris ordinis a fereniffimo Rege 13 republica Po- Lit. (F.)
lonia lege comitiali delegati commijfarii , promittimus , 13 recipimus , vi
potefiatis nobis à republica conceffa , nomine ejufdem nos omnia & fingula ca-
pita paclis fuprafcripiis comprehenfa , juxta conflit utionem regni , anni mille fi-
rni fexcentefimi quinquagefimi noni, approbare (3 ratibakre, fient i vigore quo~
Tt $ que
5f4 MEMOIRES, NEGOTI ATIONS, TRAITEZ',
1701. que prafentium approbamus &? ratihabcmus : ncc pafjuros ab ullis regni Polt-
• niœ magnique Ducat us Litbuanùe Jiatibus , vafallis, officLilibus ac fubditisf ' ulfo
modo violetri. Cavemufji'.c 13 promit timus diplômata ratificationis hujus pacis ,
tant Sacra Rcg'ne Majeftatis , quant hoc nofîrum , in proximis commit in regni
gêner alibtts conftitutionibus i3 vofamini legum noflrarum infertum iri. Datum
Varfaviœ, die vigeftma fexta Junii Anno 1660. Scquuntur nomina Commii-
fariorurn. Pafta autem Olivenjîa , corumque ratihabitio , conftitutionibus
regni Poionici inferta funt, fequenti anno 1661. vide Hartknock de republica
Polon.lib. I. cap. 8. §. 4.
Lit. (G.) T^Xprimunt hanc legem Maximilianus Fedro ; Palatinus Podoliœ, in Hifto-
XL ria Henrici Y'alefii, pag. 130. Piafecius Chron. ad annum. 1631., in ini-
tie Cafimirus Zawadfcius Hiftoria arcana, lib. 4. pag. 2,26.
Lit. (H.) /^Hwalkoufcius d. lib. cap. 8. §. 1. : Pcr conflitutionem 1^8 8. cautum efl ,
x^v ut h<ec poteflas cum notitia finatorttmprœprimïs ad aulam prœfentium ex'
ereeretur. Hoche idem jus régi convertit , nifi de fœderibus , bello aut pace ,
aliifqtie rébus rempublicam concernentibus traélandum veniat. Nam de bis prius
in comitus deliberatur. De fœderibus Zawadfcius d. 1. pag. ^^f. Ea iniri,
infciis rcipubUae ordinibus , ad qi'.os vêtus regni confuetudo, receptus mos, f un-
datte longa praxi leges, ipfa denique legibus ad liber tatem provecJa reipublicœ na-
tura, cuncla négocia ■ referrt j»JJît , liber tatis exitio propius efl , quam auxilio.
Lit. II. ) TJ Imbertus, qui Diaconus primum , & deinde Archiepifcopus Hamburgen-
JLV fium fuit, vixitque feculo nono, in vita S. Angarii cap. 27. de Curlah-
dis Iiïec memoiix* prodit : Gens quadam ab eis longe pofitay vocata Cbori, Sueo-
num principal ui olim fubjecta fuerat, fed jam tune diu erat , quod rebellando eis
fubjici dedignabatur. Deinde narrata Danorum clade , addit : quod audiens
prœditlus Rcx Oleph (Olaus ejus hominis fecundus ) populufque Sueonum, volentes
fibi nomen acqitirere , quod facere poffent , quœ Dani non ffecerant , (3 quia fibi
ctiam antea fubjecli f itérant, innumerabili congregato exercitu, illas adierunt par-
tes , & primo qiiidcm improvifo ad qtiandam urbem regni ip forum vocatam
Sceburg , in qua erant feptem milita pngnatorum , devenientes , penitus illam
vaflando fmeenderunt. Exinde confortait animo, dimiffis mvibus , lier quin-
que dierum arripientes , ad aliam urbem ip forum , quœ slppnlia dkebatur , effe-
ro corde properabant. Erant autem in illa ùrbe quindecim millia bellatorum, Poft
gravem oppugnationem bis legibus deditionem faciunt Curones. Primo qui-
dsm quicejuid/ex fpoliis Danorum j prœterito anno, in auro & armis acquijtvi-
mus , vobis pro muncre fœderis damus. Deinde pro mioquoque hominum in bac
urbe conjlitutorum dimidiam libram argent i offaimus; (3 infuper cenfum, qttem
antea Joleb'amus vobis dare , perfolvemus , Î3 , datis obfidibus, adbinc fubjecli (3
obaudientes , ftcuti antea ftàmus , veftro imperio effe volumus. Hucufque Rim-
bertus. Confirmât hax Adamus , Bremenfis Canonicus , qui circa finem
feculi tmdecimi floruit. Sed (3 alia interius funt infulaèj inquir, quœfuhjfc'
cm Sueonum imperio, qu.aru.rn maxima efl illa, quœ Cmiand dicitur; iter o.io
die-
ET RESOLUTIONS D'ETAT.- §0
dierum habens. Hanc infulam invita S. Anfgarii Chori nomïnatam credimus, iJOï.
quant tune Sucones tributo fubjecerunt. Prxterea recitatum efl nobis alias plu- '•"
res infulas , in eodem ponto ejje , quarum una grandis Eflland dicitur , non
fiiinur illa, de qua prius dixi. Sub Curonia ctiam Livoniam ccïrhprehenfam
fuiflè amplitudo provincial, qua: o£to dierum itinere conftitifle dicitur, evin-
cit, attendante idem Hartknochio in DifTertatione de republica Curonorum,
§.4. Apud Snorronem Sturlonidem , natione Iflandum, qui anno 1141. in
patrïa iua occifus elr, Ingegerdis ad patrem fuum Olaum tertium , Regem
Suionum, cognomine Skotkonung, ita loquitur: Proinde fi meo confilio res
agenda foret, ut mifjfo hoc, fuaderem quod in Norvegiam competit , jure , in orien-
tales regiones arma transferres , regnaque illa retaper ares , qua olim prifei tenuerant
Sueonum Reges, non ver 0 ita pridem Styrbernus, cognât us nofler, fubjugaverat.
Ad eundem Regem Thorgnyrus, legifer Uplandias, hase verba facit: Thorg-
nyrus, avus meus, fréquent i Jèrmone recoluit res geftas Erici Eimundi, Upfalen-
fmm Régis , quod in vigore eetatis conflit ut us , varias expeditiones fecerit , &
quotannis clajfibus fuis peregre profeclus , Finlandiam , ÂLjloniam , Careliam ,
Curlandiamque ac qua latte in orientent regiones patent, in polejiatcm fuam rede-
gerit : cujus virtutis praclara ad hue ex fiant monument a , caflella, arcefque eximii
operis. Part. 7. cap. 81. Petrus Bertius inCommentariis rerum Germanie :
lib. I. cap. 2,4. Caterum finus Venedicus cum magna parte mcditerrancce regionis
qua: hodie PrttJJîa efl , nec non Livonia univerfa , qua olim fuit Gothiœ orienta-
lis , ufque ad Narvam fluvium, qui in finunt exit Vcnedicitm , hodie militine
l'eut onica par et. Et fane colonos ijlius provinciee olim fub imperio fuiffe Suetico ,
tejianlur Abbatis Padenfis litera , quibus fatetur fe anno domini 1345., ferla -
quarta pofl dominicam cantate , rite & rationabiliter vendidijfe Rogon jurts
Suetici injulam. Et profecto ita efle lingua Suedica, qua non tantum infula-
res in Dagho, Ormib, Nuko, Vrango , Rogo utraque, Runo, inque ple-
riique locis, verum & maritimi in continenti efle utuntur, arguit; hofque
confiât reliquias coloniarum, qua; prilcis temporibus , cum ante Germano-
rum Danorumque irruptiones hx. provincix Regno Suecia; tributarise fuif-
fent hue traduéfre funt. Quod longe pluribus teitimoniis in pceuliari trae-
tatu , ue antiquo Suionum in Livonia imperio , demonitrabitur.
A Utor anonymus, qui tamen putatur fuifle Bermannus Helderungus, in Lit.(L.)
-L -k. Annalibus Livonicis ad annum npo. hanc rem ita riarât : Jâm tune
idem Epifeopus Meinardus cum Duce Suetïie , feutonicis £5? Goihis , Curor.es Lel-
loadierat: Sed timpeflate depulfi , Vironiam, jEfiori:<£ provinciam applicant , &
triduo terrant vaflant. Sed dura Virones de fide recipienda traelarent , Dux , ac-
cepta polius tributo, ab eis velafv.flollens, divertît in molefliam Teutonicorum.
I
Dem ad annum 1200. expeditionem Johannis, Régis Sueciae, qux Viciam Lit (M.-)
occupavit, rerert.
Iplomate Caroli Quinti Bruxellis 15-5-3. ^- 37- Ji-inii , dato, cui aurea bul- Lit, fN.)
la appenia, jubentur Livoni, cum periculum ex armis Mojcovilic'u, Jicut
vit-
Îf6 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
1701. met us erat , ingrueret, Régis Succiœ ', ut intcr illos, qui bus progreffus Mofcovita-
" rum quant maxime fufpeclus efje dcbebaî , auxilium tutelamque impiorare. Alte-
ris item litens iffo"., Gandavi (criptis , Livonia; tuteîa Rcgibus regnoque
Suecia; defertur. Fcrdinandus Gœiar , miffis ad Guitavum Regem lirais
Viennas iffS. die zf . Julii leriptis, prolixe ci Magiitrum equitum, Furftcn-
bergium , 6c oppretîam Livoniam , commendat. Addi his potelt conventio
Caiarrm Maximilianum inter 6c Johaonem Regem in membranis perferipta :
item varia; illius ad hune litera: pro Rigenfium iubfidio , ut if7f. die 20.
OcTrobris, 6c 157p. die 30. Octobris.
Lit. (O.) "KJOs infra feripti fercniflfimi pot enti filmique Principis ac domini , Erici deci'
mi quart i , Suecorum , Gotborum , atque Vandalorum Régis , domini no-
ftri clementijfimi , de putatif plenipotentiarii ,& légat '/', Claudius Chrifiierni in A-
mine , Johannes Laurent ii in ïfienes , -£5? Hermannus Brujerus , confit emur ,
t-efiatumque volumus , hijce patentibus a «obis fignatis literts , omnibus ac fiin-
gulis , cujufcunqiie dignitatis, conditionis aut fiât us , quibus eœdem infpicienda^
attendenda & légendes occurrunt , aut ojferuntur : Cum regiones Livonia , dire-
ct ionibu-s , latrociuiis , atque incend'ûs , abreptâ incolarum multitudine , aliifque
calamitatibus a Mofco , crudeli ac cruento univerfi, Chrifliani orbis hojie , jant
quartum usque annum, graviffime (S miferrime affiiila atque exagitata fuerint j
atque ab eo ufque t empare batlenus , fi eut £s? nunc , a fuo qui/que domicilio fu-
gatus , in exilio vitam irahere compulfus fit, adeo , ut loca ifta omiti auxilio
denudata prorfus rclicla jacucrint : Jam vero fpeclabiles, cou fuit i X$ juris periti
domini , per quant dilecli amicï mfiri , confules , fenatorès & cives urbis Reva-
lienfis , que pr avouant excidium fuunt atque tverfionetn ultimam , fuperius me-
morata Sacra Regïa Majeftatis confilium , folatium , atque auxilium per deputatos
iegatos fuos, fubmififilme imploraverint ac petierint ; atque ideo fumme memora-
ta Sacra Regia Majeftas mifericordia Chrifiiana inftintlu , pro affetlu fuo atque
animo erga ipfos femper benevolo , in honorem omnipotentis Dei , atque cultum fanc-
tijfimorum praeceptorum ipfius , ad confervandam , promovendam , propagan-
damque veram , falvificam , puram , £s? incorruptam verbi divini doclrinam , tum
ad avertendam , qua fubito metuerctur , harum terrarum pejfundationem cum
univerfi Chrifliani crbis inde anxii commodo , non modo praditlis dominis con-
fùlibus , fenatoribus , civibus , &? incolis civitatis Revalienjis , fied etiam toti
huic previncics , clemcntijfiînam y benignijfimam fefe praeftiterit , inprhnis
reputans , quantum periculi exinde crearetur non modo Sacra Règne JMajejlati
atque cœteris Principibus finit imis , verum etiam umvafio Chriftianorum c<etui ,
/; «rfo Revalia , quippe propugnaculcum uniam iftis in regionibus , rawz di-
firitlibus Harrico , Wierlandico , &? Jervico , ;» ^<?/?/j faevijfimi potejlatem
l'eniret , &? /«£ dominio ipfius perftflere cogeretur , <i «{/aj tyrannide nondum vin-
dicati funt ; z;^w auUm3 quo décent er £? modeftia convenienti Sacra Regia Ma-
jeflati domino noflro clementijjlmo , fubjicerent je , rêver end ijjîmo Principi ac demi'
no , domino Gothardo , Magiflro Livonia , />f r légat os fuos ojficiofijjime in meutem
revocaverint , quammi/erey ab ipfo, ut pote magifiratu fuo legitimo, jeun quar-
tum ufque annuni) omnï auxilio & fubpdio defiitutj, periculi '/que exfofiu pror*
Jus
ET RESOLUTIONS D'E T A T. $57
fat fuijfent , ouodque ne tum quidem firma ac prafens vindicafio aut liber atio 1701.
ab ipfo Principe expetlanda effet , infuper dcnunciantes , qua eu?n nccejjïtate
cxtrema confliclarentur , pr opter quam ipfts ncceffum foret , quarcre praeftdia
a!ia (3 levamenta ; eaque ratione Principi ipfi praftitum ante juramentum &? bo-
magium renunciari ac tolli curaverint, atque vicifjïm una cum fpeclabili & con-
fît! to Jenatu,civ\bus atque incolis civitatis Revalienfis Sacra Regia Majcftati
Suecia, domino nofiro clementiffîmo , fefe addixerint , atque ut fubditos dileclos ac
fidos fefe fubmiferint fubjecerintque : Ea pr opter nos ante memorati Sacra Régi a
Majejiatis plenam potentiam 13 caufam gerentes legati , Sacra Regia Majeftatis
vomine, fenatores , équités omnes (3 nobiles diftr ictus Harrici, JVterlandici , £■?
Jervici, una cum fpetlabili fenatu, univerfo cœtu , & incolis civitatis Revalien-
fis , pofiquam ritejam prafiitiffent juramentum obfequii t3 fidei , fmgulos atque
omnes , in tutelam (3 proteclionem Sacra Regia Majeftatis fufcepimus. Idque
fnfce (3 vi literarum prafentium quam firmiffime , ac fieri unquam ejufmodi po-
tefi, ratum habemus , facimus & abfdvimus. Sequuntur articuli convention
■nis, qua privilégia eorum confirmantur. Praterea nos, fapius nominato fena-
tui, nobilihis (3 equeftri ordini , Harriam Virriam 13 Jerviam incohntibus ,
prom itimus 13 ~fpondemus , quod a Sacra Regia Majeftate , domino noftro clemen-
tiffîmo, (3 fenatu regni Suetici plenariam ratificationem borum patlorum.procura-
revelimus atque ut feuda fua Sacra Regiâ Majeftate aut Gubernatore , quampri-
jnum advenerit , accepturi fint. In major em fidem (3 robur bac inter nos con-
sent a, tnanuum noftrarum fubfcrijtione 13 ftgillis confirmamus. Revalia if6i.
die 4. Junii.
-Confirmatio.
TsJOs Ericus XIV. Dei gratiâ , Suecorum , Gothorum , & Vandalorum Rex
13 c. ghiandoquidem ditiones Livonia invaftonibus , latrociniis (3 exuftio-
nibus, depopulationibufque a magno Mofcovia Duce, miferr.me ac peffîme per qua-
tuor fer e annos vexât 'a , devaftata atque peffundata fuerint , adeo, ut omnes pro-
femodum nobiles fuis évacuât i & privât i bonis, in ftatum miferrimum inciderint ,
.atque jam poftea équités ac nobiles diftriclus Harri, Wierlandici , 13 Jervici, quos
magnus Dux infuam nondum redegitgpoteftatem, una cumcivitate Revalienfi, in
anguftiis illis atque arumnis fuis dcferti a magiftratu fuo , Magiftro Teutonici ordi-
tiis in Livonia, ipfius nempe 13 aliorum ope privât i, ut vindicaremus , auxilium
ferremus & liber ar émus, implorarunt atque ut in numerum fubditorum noftrorum
reciperentur , deftderaverunt : idcirco firmis validifque ni tentes rationibus, per com-
-viiffarios fpeilabiles {3 honeftos , Claudium Chrifiierni , Jobannem Laurent ii , (3
Hermannum Brufcrum, équités, nobiles atque incolas dijlrittus Arrici , (3 Jer-
•venfis, eosque, quos in Wirhndià jugo fuo nondum penitus fubmifit Mofcus, in
tutelam (3 fidem nvftram, atque in fubjetlorum noflrorum (3 diletlorumfidorum
numerum, praftito bomcgio, referri & ' fufcipi juffimus : eosque vi pracpmtium ba-
rum literarum patent iuw fufcipimus, & promiffariis noftris , cor.jirmationemque
•veterum privikgiorum (3 confuttudinum fequenti modo ratibabemus. (3c. Nor co-
pias die i. Augufti au no 1 f<5z.
T'om. I. • Vv Vid.
^r8 MEMOIRES, NEGOCIATIONS, TRAITEZ.,
■I7OI. X T
V Id. Grotius de Jure Bel. 6c Pac. lib. 3. cap. 9. §. 1 5.
Lit. (P.)
Lit. (Q.) T)Iafccius Chron. ad annum i<5oo. p. 221. Georgius enim Farensbacb , Caro*
JL lo Duce cum fuis armis m JEftoniam adveniente , (3 Revaîiam ac omnia ,
quae eo ufque in poffefjione Suctica cenfebantur , occupante , cum folum fines
Livoniac Polonicae, ne quid damni a Carolo Duce paterentur , tueri debuif/et ,.
in jEJioniam irrupit , 13 Caroli copias faepe velitationibus lacejjivit. Ac cum
ille ad ipfium mifeffet ficifeitatum , cujus juffu ea faceret , & num ab ordinibus
regni Poloniae paSorum fecuritas , an hofiile quid expeéandum fibi effet , Fa-
rensbacb ejus legatum detinuit , (3 in Poloniam ad Regem mifit. Unde Caro-
lus , cum refponfum non haberet , £5? indies Farensbacbum fibi graviora mini-
tari fient iret , publico ordinum Poloniae nomine ea fieri , ac non ni fi infefia in
fui ditionibus eorum arma exfpeclanda fibi arbitratus , priufquam majores copiât
ex Polonia confluèrent , praevenire , belloque futuro fedem in alieno folo figert
maluit , moxque ingreffus in Livoniam , Parnaviam , (3 plura loca munitiora in-
tercepit.
Lir..(R.) "V TUéatur Fridericus Menius prodrome- Hiftor. Livon. §.. 60. Addatur
V Loccenius Hift. Suce. lib. 8. pag. 441. Livoni vero prœter faevam fa-
mem, etiam, quae eam comitari folet , pefle confliclati , bine â Suedis, inde à Po-
lonts beilo infuper impetebantur \ animis mine in Mas, nunc in bas partes propen-
dentibus. Tandem , arrepto five neceffitatis , five defperationis telo , quod eorum
facerdotes à Polonis ejiciebantur, templa deftruebantur , facrorum liber tas adime-
batur , 13 pontificia religio illis attrudebatur , confilium à Polonis defeifeendi cepe-
runt , mentibusjam fatis alienati ab eis. Pline Suedis non minus ferme , quam à
propriis viribus, in Livonia robur, nec minor fortuna accejfit.
Lit..[s.) T Nduciîc conftitutse erant ab anno 161 8. die 19. Novembris ad annum 16*20.
JL Guftavus autem Rigam 162,1. in Augufto aggreffus elt Antea tamen
Jacobus Delagardius Chodcevicium de longioribus induciis, aut pace, mo-
nuit, literis Revalix 161 9. die 1 2. Oétobris i criptis ; & cum nihil efficeret ,
bellum die 28 Martii 1621 iterum denunciavit.
Lit. (T.) §t 1 CI fereniffimus Rcx Pohniae in libéra ekcJione futuri fuccefforis , aut pofi
tjus mortem , viaxima pars fenatus itidern in pracdicla libéra eleEtione fu-
, turi Régis Poloniae , aut plenarià ejus inftauratione , ab extranea quavis poten-
tiâ, armatà manu turbaretur., aut impediretur , atque propterea neceffariumjudi-
caret , opem amicorum implorare , eandemque â fereniffimis Regibus expeterc, fere-
nifjîmus Rex Suecice , vigor.e prafentium Je obligat & promit tit , f patio quatuor
menfium^ poft requifitioncm faclam^ mittere in Poloniam exercitum , fex milliura
cquitum, 13 fex millium peditum, ad Polonorum optionan, cum convenientibtts
tir mentis, (3 necefj'ariis requifitis bellicis, fub proprio generali, qui, fatlà cum
fereniffimi Régis, aut pofi ejus decefjum, cum reipublicte Polonia cepiis conjunclio-
nty expeditionsm cum ils fimul ', contra que meunque invaforem, copiarum auxilia-
rium
ET RESOLUTIONS D'ETAT. $f9
Ham tîtulq, eum in modum fufcipiet , prout ratione loci 13 circumfiantiarum cum 1701.
Polonis convenietur. ■-
VId. Chytrasi Chronicon ad annum ïf8z. & fêquentes. Neugebaur. Hift. Lit. (U.j
Pol. lib. 10. Sed inprimis Laurentius Mullerus, qui Duci Cuflandiîc
ab epiftolis erat , in vita Srephani Régis Poloni } item Oratio Johannis Tifen-
hulii ad ordines Livoniœ ôc.Rigenfes, Anno 1601 , habita.
ARticulus ottavus pa&i inter Sigifmundum Auguflum, Regem Polonix , Lit (V.)
&Ketlemm, polka Ducem Curlandias : Primum, 13 ante omnia, ar-
cem (3 civitatem Rigenjem , cum omni, quod in eâ antiquitus obtïnuit in re, do-
mïnio , & proprietate, meroque &? mixto imperio, apud imperatores Romanos ob-
tento, de quo nobis illtifiritas ejus condefcendit , illudque nobis reftgnavit , prout
praefentibus refigvaî', ce dit , 0 condefcendit , ab bomagio, quo civitas il la Ri-
genfis illufiritati fua tenebatur, abfolvit , abfohereque &? renunciare coram légats
■in civitatem Rigenfem, per nos ablegando publiée, tum & patentibus literis fuis ;
itiam fi civitas illa ei rei adverfari velit , aut quomodo reclamet , (3 ab ipfo bo-
magio liber osjacere ; nec non omnia diplomata, ab Imper at or ibus Romanis fuper
e'a re obtento, nobis trader e tenebitur.
L Itéras refponforia; Caroli XL, Régis Sueciae, ad Regem Polonia;, die Lit.(X.j
ip.Julii 1682. Reddita nob.s Çunt Màjejlatis Vefira litera, JVarfaviae
data , die 6. me n fis Maji, anni proxime praterlapfi, quibus defiderat Majef-
tas Vefira noftram percipere mentem, fuper infiituenda limitatione Suetica Poloni-
taque Livonia ex paclis Olivenfibus débita. Equidem bujus negotii quam non fue-
rimus immemores , quamque fubinde ad Màjejlatis Vefira praedecifionem tempori-
bus praeterlapfis , per noftros qui ad aulam Polonicam mifii fuerant , mini-
ères , de perficiendo eo injecta fuerit mentio , Majeftati Vefira compertum non
dubitamus, ortà nec aliunde dilatione , quam quod Polonia inter bella vel tur-
bas difiricla , parum opportuna vif a -fuit dicli negotii commemoratio. Caterum
tum propenfi omnino fimus, ad quaevis ea, quae vel paclorum fides, vel firman-
dae nos inter 13 Majejlatem Veftram amicitia exgigit ratio , requifitioni Majef-
tatis Vefira, circa negocium indigitatum, non defuturi, mandavimus nofiro fie-
tiatori, per Livonïam gubernatori gênerait, ac campi marefcballo, domino Cbri-
ftierno Horn, ut quamprimum intellexerit â parte Poloniae ad id obeundum no
gotium conflit ut os efie commijfarios , 13 ipfe deligat viros idoneos, qui de prae-
liminaribus , caeterifque préparât oriis ad futur am, limilationis complanationem
necefiariis , mutua conventione fungantur , cum cenfeamus non alibi quam in la-
cis finit imis id aeque commode fieri poffe , quod rerum indoles poflulare videbi-
tur. De caetero Majefiati Vefira profper os rerum fuccejfus amicijfimo affeclu pre-
camur (3c.
C A R O L U S.
Vv 1 Cou-
55o MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRATTEZ,
ITOI.
' • Conventio Lcgatorum Ducis Curlandise., . Chriftophori Firks 8c Cafpavi
Lit. (Y) Drelingi, cum Axclio Oxenitierna die 7. Junii , Anno 1630.
§. 1. TSjOva Manda, vî Prutenicorum patlwum, £s? prcefentis conventions, ha-
1 bebit ac rètinêbit hvc fexcnnalium induciarum tcmpore , quidquid intra
Bulderaviam flavium & falfum mare concluait ur , eundo h Nova Munda in
Dunam , pcr eandem in Buldcraviam , eamque adfcendendo ufque ad fluvium
Schlokenbdk , ubi munitio praefidiaria five propugnaculum cum molendïno fuit ,
cum utriufque ripae fluvii idius ufu , hinc afcendendo ufque ad extremos terminos ,
quibus pagus Clavern à caeteris pagis praefeclurae Tuckheimcn fecernitur, eofqus
fines ulterius fequendo in ipfum Oceanum ufque y. quidquid horum terminorum am-
bitu concluditur , Novae Mundae cohœrebit. §. z. Similiter Spilva, ut in pofj'cf-
fione Sacra Regia Majeflatis Suecia hatlemts fuit , fie Rigam ulterius fequatur.
§. 3. Praefetlura Dalen/is juxta terminos, cum omnibus & fingulis , quae eo-
rum ambitu continentur, obftdcula quoque Salmonum, nec non bona nobilis £5?
fpeclabilis quondam Johannis Friderici , proconfulis Rigenfis , ad praefetluram
Baldunenfem fpetlantia, hatlenus fub poteflate Sacra Regia Majeflatis Sueciae
poffeffa, una cum terris, quae intra illa bona funt, nunc quoque in manu l§_ po°
tefiate ejus permanebunt.
Lit. (Z.) T)A6ta Stumfdorfienfium induciarum Anno 163 f., §• 6. In Livonia utra--
X. que pars , ut prateritis fexennalibus induciis pojfedit , ita hifee quoque poffi-
deat. Inftmmentum pacis Olivenfis §. 4. Sereniffimus Rex & fiatus ordinef-
(jue regni Polonia , magnique ducat us Lithuania , à modo & in perpetuum cedunt vi
' bujus pacificatlonis fereniffimo Régi Suecia, ej ufque fuccefforibus Regibus , regno-
que Suecia, omnem iliam Livoniam Tranfdunana-m , quam Suecia hatlenus per
tempus induciarum tenait &? pojfedit, ut £s? partes Cifdunanas omnes, &f infulam
Runen in mari fitam , quas per idem tempus induciarum Suecia tenait & pojfedit \
nec non quicquid juris Regibus & reipublica Polonia ïnEfloniam & Oefi'iam hac~
tenus, ullo modo competere poterat. jîtque bac quidem omnia & fingula , cum
omnibus fuis pertinent iis terrcflribus , & maritimis , urbibus , arcibus, propug-
naculis, bonis 6? provent ibus , nec non jur ibus, jurifditlionibus , regalibus & Jiï-
perioritatibus, tam in ecclcfiafticis, quam in polit icis,. nullis penitus exceptis, in
plénum dominium y proprictatem Regum regnique Sueciae tranferunt ; ordinefquv
& fubditos in illa Livonia ej/ffque recenfitis pari ibus, omni erga Regem &? rempli'
ilicam Polonam obedientiae vinculo & fidelitatis facramentv exfolvunt, nibil un-
quam in eos ad diclam Livoniam ejufqtte pertinentias pofihàc praetenfuri.
Lit.
(Aa.)
/[A-dgni ducatus Litbuania illufiribus generofifque fénatoribus , ut & iis qui
publias in eodern ducatu muneribus , dignitatibufque funguntur &c. nec
non harum terrarum incolis cujufcunque dgnation'n & eminentia , in univerjum ont'
tiibus, Ego I lier ony mus Crijpinus Kirftcnfieinius praefati magni ducatus hypotbe~
faurarius magnus , nutariufque perilluflris , pramiffo officiorum devote fraterno-
rum voto , mtum tefiatumque facio, quod bis ipfis eleclïonis comitiis per illufi.
ET RESOLUTIGNSD'ETAT. 361
nuncium Provincialem a ferenijf. atque invicliffima Regia Majefle Suedica ad no- 1 70 r .
firam rempublicam quaedam allata fit querela , quafi f cédera (3 pacla Olivenjia , _'_
jura item & confuetudines atque inftituta vetera efj'cnt a nobis parum religiofe fer-
•vata ; ea pacla fcilicet , qua ad negociantium rationes pertineant , £5? mercium
terras aquafque nojlras pertranfeuntium. ghieruntur eninl veStigalia à fe non fo-
lum per magni ducatus Lithuania publicanos , verum etiam per nonnulios alias or-
dinis equcftris nullo jure ,. fed eo du fit axât colore exigi, quafi Dzuino aliifque flu-
minibus nova quadarn, & ante bac inufiîata port or ia impofita fint. Quocirca
partium eJJ'e mearum duxi ejufmodi conficlas extorfones , non modo non neceffa-
rias , fed etiam cum violatione aima pacis , paclis Olivae fancita , conjunclas de-
bortari. Vosïtaque, viri illuftres, f rater ne etiam atque etiam rogo, aucloritate-
que officii moneo , hort orque , ut ab id genus exacliontbus , in quas profits nobis ni-
hil compctit juris , defiftatis. Enimvero non lubens vidèrent, hanc eandem quere-
lam, ab iis, qui injuria affecli funt '., ad Sacra Regia Majejlatis & univerfae
reipublica tribunal devolutam, per mandata ejufdem atque réfcripta fublatum iri ,
atque decifum. Univerfos item magni bujus ducatus exaclores vecligalium ejufdem
mei offici aticleritate commor.co, atque cobortor, ne quidfupra id, quod ejl tranjac-
tione prafentis eleclionis , inflitutifque antiquis determinatum , ab ullo mercatore ,
ejufdemque mercibus , datis acceptifque liberi ab uno telonio ad alterum tranjitus
literis , iterum pofluletur capiaturque. Adminiftratoribus igitur £5? exacloribus
vecligalium adprime diligens eflo cura , ne quidqnam cuiquam imponatur ultra id ',
quod olim in antiquis fcriptura tabulis, circa modum vecligalium y eorum praci-
pue, qua regia nunc menfa fuftentanda dejlinata funt, définit um ejl. 7'ametji
bac pofteriora vetligqlia tempore non uno eodemquc , ac reliqua conftituta fmf.
Perinde etiam volo mer catorum judicio relinquantur , arbitr toque , quantum hoc
tiomine folvere velint. Ita ut nec hoc, nec alio quovis ■ pratextu quidquam ipfis
exïorquere fas fit , nec imb ipfos in injlituto itinere , curfuque impedire: verum
folutione plena in uno telonio rite facla , in altero fine ulla vexatione moleflia-
ve prorfus liber pateat tranfttus. £>uod omne fancio fub fevera ex decifione offi-
cii met, ad cujusvis relatïonem , fecundum jus pœna. Dat. iVarfavta die- 14.
'raenf.Julii. 1699.
Hieronymus Ciïfpinus Kirftenfteinius Mag. Ducat:
Litkuania Hypothefaurartus.-
UniveHale Régis Poloniie concernera onera veûigalium.
MIchael Dei 'gratta. &c. omnibus ac fingulis cujufcunque flatus vel con-
ditionis,clericis aque ac fecularibus , regiomtm& provinciarum noftrarum
magni ducatus Lithuania incolis, praecipuc epi/copis , praefidibus , cajlellanis ,digni-
tariis, judicibus , provincialibus , prafe&is, officialibufque territoriorum & arcium
provinciarum noftrarum , Pohkmf 's , Witebskenf s , Mifciflavienfis ,ut & diftriblus
Braclavui &Orfzanici, caeterarumque diîionum ad Dunam , notum hifcefaci-
spus,quod teml are eleclionis felids nofra à fereniffimo Rege atque incluio regnoSue-
Vv 3 f/>
jUz MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,'
1701. eue hue miffus légat us prœpotens , C'andius Tott , cornes in Carleburg, baro in
* Sundby , dominas in Ekolfund & Lebala , fenaîor corona Sueticae , campi mare-
fchallus &? generaiis Livoniae gubernaior , nomme Régis & coronae Sueciae , co-
1 ram fenatoribus atque officialibus nojiris coronae Polonïae & magni ducatus Li-
tbuaniae eo t empote ad conferendum cum ipfo députât is , non fine querelà detulerit,
quofdam fubditorum in provinciis noflris , contra quam conventum efl articulo ic.
Olivenfis patli) atque Anno 1661. à republica intégra confirmati fœderis pacis ,
impofuijfe recentia & inufîtata vetligalia , mercatorefque Succicos 13 Rigenfes ,
ad fluvium Dunam , alibique in regionibus campeflribus , variis iniquis exatliom-
bus atque exagitationibus vexaffe. Id quod jam iterum, puft coronationem feli-
cijjîme pcrablam , ab eodem fereniffimo Rege^ regnoqne Suecï<e delcgatus^ chiliar*
cha equeflris , Cafolus Arendorfius , primum coram nobis ipfis ,- atque dein-
ceps pariter coranî fenatoribus atque officialibus tam coron<e quam magni du~
catus Lithuanits , ad colloquium cum ipfo denominatis, repetiit. Çjhtandoquidem
igitur patla nos inter &f vicinos fœderibufque juntlos imper antes exailifjïme atque
firmifjïme euflodienda merito judicamus: proinde ferio loi [ce adhortamur omnes ac
Jingulos fubditos atque incolas magni ducatus Lithuanix , cujufcunque conditionis ,
eos inprimis, quorum feire ea inter -efl , ut à republica confirmât a patla Olivenfia
rite obfervent ^ a privât i s ejufmodi vecligalibus , aliifque vexationibns iniquis ab-
flineant , iifque Suecicos ac Rigenfes mercatores ulterius ne graventur. Cum vero
etiam publiçani a parte noftrâ , ubi noflri rcipublicœque ergo vetligalia exigun-
}îtr9 ut relatum efl , excédant juftum , atque moleftiis variis affligant mercato-
tores peregrinos : ideirco hifee pariter requirimus à thefaurario Lithuaniae , ut
officialibus fuis graviffime injungat , ne minimum quicquam , ultra quam prae-
feripturn efl , oncris mercatoribus Suecis aut Rigenfibus imponant , & fi quid
iniqui admififfe deprehendefint , eos abfque morâ jufte coerceant &c. Cracoviœ
die 30. Novembris 1669.
MICHAEL R E X.
(L. S.)
L;t< Ex memoriali Libelle Suecici Miniftri , Nicolai Tungel , ad Regem
f;Bb) Polonix Johannem Cafimh'um , i66f. die ip. Decembris.
§.2. Ç/quidem commercia débit 0 modo per Livoniam florere non poffunt , »//?,
*" abrogata viliori mortetâ, melior in ejus lociim fubftituatur , nec fufficit in
Livonia hoc prwfiare , mfi etiam in Lithuania^ cum qua pnecipua ipfis fint corn.
rnercia^ idem fiât : defiderat proinde Sacra Regia Majeftas feire, an non placeat
Majtflati Veftra £s? or di ni bus magni ducatus Lithuania confdia cum Sacra Majcf-
tate communicare pro determinanda aliqua fpecie melior is monetœ , ejufdem fortis ac
valons tam in Livonia , quam in Lithuania , poflhac cudenda. Hoc patio mag-
na incommoda &? mala, non minus Litbuaniam, quam Livoniam, nunc aban-
de prementia , opt'me poffe exflirpari , ac commercia débit 0 vigori reflitui , nullum
efl dubium.
Ex
ET RESOLUTIONS D'ETAT, #f$
Ex mémorial! Libello Caroli Arenfdorfîi ad Michaelem , Regem Polonia: , T70î '
Cracovia: 166p. die 2,. Novemb.
D'
|£ re vero monetaria , abfque quâ commercia ne injlitm qu'idem hoc tempo-
re nedum florere poffmt , omnino defpiciendum erit , ut conveniens ali-
qnod adinveniatur médium , quo tam falubre negotitim poterit promoveri. Ne-
que hic repetere opus eft , quantum toti Polonia damnum , detrimentumque
prafins pecunia adferat ; illud faltem nunc urgetur , ut fecundum priora promif-
fa domino legato Totio faila, tum Suecica moneta in regno Polonia, &' mag-
no ducat 11 Lithuania , quant Polonica moneta in provinciis Sueticis , fecundum
valorem & pretium fuum utenda recipiatur, nec minus integrttm fiLSuetica na-
tioni , qtiam aliis Regno Polonia vicinis gentibus Polonica pecunia , pro mer-
cibus Puloiiorum 13 Lithuanorum , uti. Tolli ergo necejfum ejl omnia décréta,
in contrarium data , quibus ejufmodi ufus (3 exercitium menetae Polonicae Sue-
ticis fubditis provinciifque in redimcndis mer cibus hue ufque prohibition efl. Nam
frujlra alias erit fecundum tenorem pailorum Qlivenfium commercia jubere effe libé-
ra, & ufum moneta , quâextrcentur, inter dicere. Neque ita difficulter proceffu-
rum ejl hoc , circa monetam , negoiium , fi ad média £? rationes a parte Sueciae
monflratas 13 oblatas intimius placeat attendere , & adinvenietur fors expeditior
adhuc via, fi conftlia fuper hac re porro communicare lubet , quoà equidem fpero,
ut cum illujlriffimis dominis députât is de hifee juribus conferre pojfim.
Pa&um i6if. inter Suecos ôc Ducem Curlandias. Lir:
(Cc.v
§. 6. jTOmmercia tam fubditis Sacra Regia Majefiatis, regnique Suecia nomina-
tint Rigenfibus , quant fubditis Régis ngnique Polonia (3 magni àucatus
Lithuania , cum Curlandis libéra (3 conceffa fint , itinera quoque peregrinanti-
bus, viatoribus , mercatoribus , 13 veredariis utriufque partis, ufque ipfam civita-
tem Rigcnfem, 13 a civitate ufque in f3 per ipfam Curlandiam , (3 Semgalliam,
.diacefimque Piltenfem patemt. Sique contigerit ullos gaitis utriufque in Curlan-
dia, Semgallia (3 Piltenfis terri toriis fibï obviât e , pacate inter fe Mi & tran-
quille agant , ne c fas fit fié pana fupplicïi vel ad arma ' venir e , vel ' mer cibus mit
pecunia equifque negotiantes fpoliare.
Pa&um inter eofdem 1647.
§. f. QOmmercia fingulis utriufque Regni Suecia Ç3 Polenta, magnique ducatus
Lithuania, fubditis cum Curlandia , libéra (3 conceffa fint , itinera quo-
que peregrinantibus , viatoribus 13 ver-edariis- utriufque partis pateant; fi que con-
tigerit ullos gentis utriufque in diclis ducis terr.it or iis fibi obviai e, pacale inter fe
i3 tranquille ibi agant nec fas fit ad arma devenir e , vel mer cibus a-ut pecunia
■equifque negotiantes fpoliare.
Rc£
364 MEMOIRES, NEGOCIATIONS, TRAITEZ^
l"»OL
*'' Refponfio Ducis CurlandUe ad generalem Livorme gubcrnatorcm. ^ri-
Lit, no i<58f. die i<5. Februaiii.
IDA):
pX h'tfce quamvis Ëxcellentia Vcflra intelligere pofjît , injufiam ejfe Stenii que-
reiam-, nibtlominus fi ille teflimonia adferre potuerit, violatum ejfe curforem
regium, jus aquum ei adminiftran lubenter clementerque curabimus.
\
Lit. Articulus fecundus pacti Altenocnfis inter fereniffimum Danire Regem,
(EcO & Ducem Hollatias.
VE/lituitur fereniffimus Dux in omnes fuas ditiones^ infulas cîi? bona, in fpecie
in prœdium Gottefgabam , in fuprcmum fuum dominium ( vttlgo Souveraini-
tât , ) in regalia jura colleclarum, fœderum, fort alitior uni exfiruendorum & pof-
fidendorum, prœtereaque in^omnia illa jura , fublimitates, & émolument 'a , qux
ante £5? pofi pacïficationes Wefipbalicam & Boréales ufque ad annum lôjf. ha-
biter at & pojjederat , & quœ Serenitati fuœ, vigore pacis Gallica ad Fontem-Bel~
îaqucum , competere poffunt ; qu<£ quidem pacificationes hoc ipfo denuo confirman-
tur^ nec non Serenitatis Jute minifiri, quique alias ad'eandem pertinent , in eorum
b/>na & capitalia.
r Lit. f^Um literas Latinas credentiales fummi ipjîus Trincipis a domino confilia-
(F/. ) rio intima communicatas ad curialia^ eâ formula , quâ inter coronam Sue-
ciae atque Pol'oniœ fieri confuevit , haud exaratas ejfe obfervatum fuerit , in
primis quod Sacra Regiœ Majefiati non pedicatum Majeflatis , ut fieri debuit ,
•verum Serenitatis tantummodo tribut um fit -, ideo mcejfarium vifum fuit domi-
no confiliario in antecejfum aperire , «0» eafdem, alias aut décentes & ad in-
fiitutum confuetudinis prifcœ conceptas literas credentiales recipi , ci? refponfione
in bac aulâ impertiri poffe. Interea tamen Sacra Regia Majeflas bemvo-
Xentiam fuam erga domini confiliarii intimi Principalem fummum declarare vo-
lait , feaue propenfam ejfe ad admittendum atque audiendum dominum confilia-
riùnt intimum, futur A Feneris die hora tertia pomeridiana , pallio pullo veftitum,
quâ domhmm confiliarium intimant introducendi mihi honos continget. ; Holmiœ die •
c. OU. i6s>J.
G. S P A R V E N F E L T-
,Lit Ad Statum protocolli Drefdae, 1700, die f . Febr.
7 J Lterîoris declaratiçnis ergo , regio Sue t ko bac in aulâ prafenti miniftro ,
• domino bar uni a Vtlling , bifce ''ïtperitur, incboatum arclioris conjunc-
fîiônis tf? fœderis tratlatum inter Majeftatem Majeftatem Poloniœ cjf Stteciœ,
qi'onfqne habitis colhc/uiis mtituoque datis propofitiontbus & déclarai ionibus bâcle-
ras £>:> dutlus fuit y jam in data quo manfurum fore , eam ob caùfkm, quod F gip
Majc-
ET RESOLUTIONS D'E T A T. %6f
Majejîas Galliœ denunciaverit fs defiderare , ut ils , quœ ipfum inter &? Re- *70t-
giam Majcflatem Polonix pangenda fub manibus funt , fœderibus , Rcgia Ma- *
jeftas Suecia fimul includatur , quod Rcgia Majeftas Poloniœ Eleclorque Saxoniœ
ufni communi convenientijjimum atque utilijjîmum jttdicat ; atque igitur , cum
delineatio fœderis fanciendi ex Galliâ nondum allât a fit , douée ea hue perfera-
tur , circa rem tranfigendam tam diu paululum fubfijiendum fore ; qui tamen
traclatus , quamprimum ijla proxime ex Galliâ exfpeclata communicatio allât;;
fuerit , illico refumi , atque ad furidamentum & finem certumpoterit deduci. Ac-
tion ut fupra.
W. D. V. Beucheling.
VId. Examen Caufarum , quas copiarum Saxonicarum dux improvifa Lit. Hk,
y fubdolts in Livoniam irruptioni pnetexere , literifque fuis divulgare vo-
luit. 1700.
Les Affaires de la Guerre du Nord , dont on vient de faire le raport, eu-»
rent du relâche pour quelques mois, à caufe de l'Hyver , 8c du retardement
des Troupes que le Roi de Suéde avoit ordonné d'être tranfportées de Suéde
en Livonie. On les reprendra en leur tems, 6c l'on continuera les Négocia-
tions avec la France & l'Efpagne, 8c ce qui y a du raport, avec d'autres oc-
curences.
Sur l'Avis qu'on eut à Verfailles de la maladie du Comte de Briord , on y
réfolut ainfî qu'on l'a dit d'envoier à la Haïe le Comte d'Avaux. Ce n'étoit
pas pour l'y faire relier } mais feulement pour affilier le premier.
L'on reçût environ ce tems-là un Mémoire que le Comte de Caftel-Barco,
que l'Empereur avoit envoie à Milan , avoit préfenté au Prince de Vaude-
mont, Gouverneur du Milanez. C'étoit pour reclamer ce Duché-là, com-
me Fief de l'Empire, dévolu à l'Empereur par la mort de Charles IL
Roi d'Efpagne. Il y avoit auffi la Reponfe du Prince, 8c du Sénat Mi-
lan. Voici ces Pièces.
LE Très -Clément Empereur fon Maître lui a ordonné d'expolêr lés M^raoi"
ordres précis 6c Impériaux au Prince de Vaudemont , ne doutant Comte
point que ce Prince ne connohTe bien , qu'en qualité d'Envoyé 6c de de Caf-
„ Sujet , qui n'a d'autre part à ce qui lui eil commandé que l'honneur de tel-Bar-
„ l'exécution, il doit s'en aquiter avec la plus grande exactitude, vénération, v°v ,?ê
„ 6C rcfpeéfc. ■ ■ SaMaje-
„ Qu'il va donc s'efforcer de le faire , en lui repréfentant l'affection de l'Em- ftéim-
„ pereur fon Maire pour la Maifon du Prince, motif qui le perfuade qu'il ne Pej;ia!e>
„ manquera pas de correfpondre de fon côté avec une entière fîncérité dans ^ p^."a*
',, une occafion fi importante à ce qui efl non feulement de la convenance de cède
„ PAugufte Maifon , mais auffi de fon propre devoir envers Elle. Vaude-
„ Que dans cette fuppofîtion il lui expofe que toute la confiance de l'Em- '«op1»^
„ pereur fon Maître le repofe fur la perfonne du Prince 6c fur fa fidélité , dans membre
„ laquelle il efpere qu'il aura continué dans cette conjoncture, y retenant auf- 1703.
'Tom. I. Xx ,5 11
r>
•>■>
3<S6 MEMOIRES, NEGOCIATIONS, TRAITEZ,
I701- fc fi tous les Etats de Milan, Tes Villes, Lieux, Terres, 6c Provinces, dont
"" j> h Seigneurie utile 6c directe, aufli bien que celle du Marquifat de Final,
„ qui en eft un Annexe, eft échiie par la mort du Roi Don Charles II. à
" l'Empereur fon Maître, 6c au Sacré Empire Romain, nonobftant toutes dîf-
„ pontions contraires, & tous ordres qui pourraient avoir été précédemment
,, envoyés d'autre part, comme aufli nonobftant tout ferment, par lequel lef-
„ dits Etats, Lieux, êc Villes pourroicnt avoir été liez au Roi d'Efpagne, un
„ tel ferment ne pouvant s'étendre plus avant.
„ Qu'il ne demande du Prince au nom de l'Empereur fon Maître qu'une
„ chofe fort jufte, fçavoir de ne reconnoître 6c de n'obéir qu'à lui feul, com-
„ me premier & direct Seigneur , jufques à autre ordre de fa part : Et que com-
„ me l'Empereur ne peut croire que le Prince rcfufe un Aéle d'obéïilance qui
„ lui eft dû, de même il lui promet non feulement la confirmation de tous les
„ Emplois} mais, aufli fa très -clémente 6c Impériale grâce, faveur, 8c
„ prompte aflîftance j comme aufli au Pais , le renouvellement de fes Pri-
„ viléges tant généraux, que particuliers, avec efpérance d'en obtenir de plus-
„ grands de la clémence de l'Empereur.
„ Et d'autant que l'accompliflèment des Loix demande que perfonne n'en.
„ puifle prétendre caufe d'ignorance, 6c afin que qui que ce foit ne tombe
„ jamais en infraction contre un commandement fi jufte 6c fi bénin que celui
„ de l'Empereur, le Prince fe contentera que le fufmentionné Comte par une
3, obligation indifpeniable de fa Commiflion, lui préfente ce Mémoire qui eft
„ conçu félon les formalités convenables au cas prêtent:
Réponfe 3, /^V-Te Ie Prince a toujours devant les yeux l'honneur que l'Empereur fait
duFrin- „ V^ 6c a toujours fait à fa Maifon, 6c à f 1 Perfonne, aufli bien que le ref-
Vaude- » Pe<^ ^ 'a vénération qu'il a pour S. M. L 6c pour toute fon augufte Mai-
mont au » *on: Qu'il croit ne pouvoir lui donner une plus grande marque du défir
Comte 3, qu'il a de mériter fon eftime, qu'en fe conformant à l'obligation qu'il a de
deCaf- ;) fervir le Roi fon Maître avec la même fidélité, 6c le même zélé qu'il a
tel-Bar- ^ marqué pour le feu Roi fon Seigneur (qui foit en gloire) , lequel lui a laifle
,,. ordre de reconnoître celui-ci pour fon légitime Succeflèur} qu'ainfi,il pro-
„ telle qu'il le fervira julques à la dernière goûte de fon Ging , gardant Se
„ maintenant dans une due fidélité 6c obéïlïaace , tout ce qu'il lui a plû
commettre a. fes foins.
cp.
»
•si
AYant repréfenté au Seigneur Prince de Vaudemont Gouverneur, con-
joinctement avec MrJe Préiidcnt du Sénat, tout ce que Vôtre Sei-
gneurie Iliuftriflîme nous avoit remontré hier au foir de vive voix en ma
maifon, 6c aïant remis entre les mains de Monfeisneut le Prince de Vaude-
Amre
Hcgpnfe
au Corn- "
le t|e 3'
C.'aiiel-', „
li.irco, ?J mont les Papiers que V. S. I. nous avoit donnez, fans les avoir ouverts, y
,';. „ ajoutant au refte l'inftance faite par V. S. 1. de fe trouver au Sénat 6c aux
p/ancif- » autres Tribunaux} Monfeigncur le Prince m'a chargé de dire à Votre Sei-
coGuer- „ gneuric Hiuftriflime, tant en fon nom, qu'en celui de tous les Tribunaux &C
>a Chan- n du Public de cet Etat, que vu la teneur defditsiJ.,piers,il ne peut en aucune
lier" „ manière les admettre, ni y conlentir} qu'au contraire, il fait à l'encontre les
„ plus
53
ET RESOLUTIONS D'E T A T. 567
„ plus amples Se folemncllcs Proteftations, pour les raifbns contenues dans la 1701.
„ Réponle donnée à V. S. I. par Monfcigneur le Prince, Se qui eft ci-jointe,
„ à laquelle il fe raporte de nouveau en tout Se par tout , Se s'y conforme j
„ Elperant que Sa Majefté Impériale, félon fa clémence & fa bénignité, ju-
„ ftifiera Elle-même les expreffions de Monfeigneur le Prince par l'inditpenfa-
„ ble obligation où il fe trouve.
L'on reçût auflî la Copie de deux Proteftations faites par le Comte d'Har-
rach Ambafîàdeur de l'Empereur à Madrid contre la Diipofîtion du Tcfta-
ment de Charles II. Elles étoient en Efpagnol , dont voici la Tra-
duccion.
„ T E Comte Louïs de Harrach , Ambafîàdeur du Seigneur Empereur, aïant Copie
„ I—* vu la-Copie des Clauiès du Teltament, qu'avoit fait le Roi Charles pe la,,
„ II. de glorieufe Mémoire, touchant la Succeflîon à tous fes Roïaumes Se tiondu"
.,, Seigneuries, Se qu'il avoit nommé pour fon Héritier Univerftl en iceux,en Comte
„ premier lieu le Seigneur Duc d'Anjou fécond Fils du Seigneur Dauphin , deHar-
5, en fécond lieu le Seigneur Duc de Berri , troilîéme Fils du même ; en troi- ^ V $
}, fîéme lieu le Seigneur Archiduc Charles II. Fils de Sa Majefté Impe- l'Empe-
„ riale,Se en quatrième lieu Seigneur Duc de Savoie, Se fesEnfansja crû, en mu a la
„ vertu de La précife obligation du Caractère Se Miniftere qu'il exerce en cet- c?"1 de
„ te Cour, de proteiter comme il fait, au nom de fon Maître, par cet Ecrit contrôle
„ figné de fa main , de nullité Se invalidité des dites Clauiès de Succeffion, Tefta-
„ exprimées dans ledit Teltament, Se de tout ce qui fe fera en vertu d'icelles, mentda
„ comme contraires Se d'un grand préjudice aux droits juftifiez Se inconte- J*01
„ fiables, que Sa Majefté Impériale a fur toute la Monarchie Efpagnole, LEHsAfi~
„ à laquelle Majefté Impériale il a donné avis d'une nouveauté fi peu atten- traduite*
„ due, Se attendra fes ordres fur ce qu'il devra enfui te exécuter. A Madrid del'Ef-
•>■>
tables, que Sa Majefté Impériale a fur toute la Monarchie Efpagnole, t
. laquelle Majefté Impériale il a donné avis d'une nouveauté fi peu atten- tr
lue, Se attendra fes ordres fur ce qu'il devra enfui te exécuter. A Madrid di
le 6. de Novembre 1700. pagnol.
„ T E Comte Louïs de Harrach , Ambafiadeur de Sa Majefté Impériale en Autre
„ !_/ cette Cour, aïant donné avis à fadite Majelté Impériale de la Déclara- Protefta-
„ tion'qu'il avoit donnée par Ecrit le 6. de Novembre de 1700., Proteftant ti?n»
„ de nullité Se d'invalidité des claufes du Teftament du Seigneur Roi Char- |ai.ceen*
„ les II. , qui foit en gloire ,-pour avoir choifi pour Héritier Univeriel de
„ tous lès Roïaumes Se Seigneuries , en premier lieu le Seigneur Duc d'An-
„ jou,. fécond Fils du Seigneur Dauphin; en fécond lieu le Seigneur Duc de
,, Berri, troifiéme Fils du même; en troiliéme lieu le Seigneur Archiduc
„ Charles , fécond Fils de Sa Majefté Impériale ; Se en quatrième lieu le
„ Seigneur Duc de Savoie, Se fes Fils : Sa Majefté Impériale a aprouvé ladi-
„ te Proteftation du Comte de Harrach, Se lui ordonne precifement de la réï-
„ terer à fon nom, étant certainement perfuadée,que ce n'étoit pas l'intention
„ du feu Roi, ni n'avoit-il le pouvoir de faire une telle difpolition; puis que
„ venant à mourir fans laiflèr d'Enfans légitimes, l'entière Monarchie d'Efpa*
„ gne tomboit à la Peifonne de Sa Majelté Impériale, par la Renonciation de
j, Madame l'Infante Marie Terefe Reine de France , jurée Se confirmée à la
Xx z „ KuX
368 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
Ï701. », Paix des Pircnécs, laquelle efl même corroborée , Se rendue fermement Se
~" ,, folidemcnt valable par le Tellamcnt du feu Roi Philippe IV. de glorieulë
„ Mémoire, lors qu'il deceda. Par où tout ce qui a été fait Se exécuté d'u-
„ ne autre manière différente en ce point , eit nul Se de nulle valeur & ef-
„ fet, pour le notoire préjudice, & grand tort des droits inconteftables de Sa
„ Majeité Impériale, que le Comte de Harrach referve en leur entier, dans
„ la meilleure manière Se forme qu'il puifïe, par ledit ordre de l'Empereur
„ fon Maître, le rendant Public par cet Ecrit ligné de fa main. A Madrid le
„ 17. Janvier 1701.
L'Envoie de Portugal Pacieco fe donna beaucoup de mouvement. H
eut plufîeurs Conférences, tant avec le Confeiller - Pensionnaire , qu'avec le
Comte de Goëz , tant feparement que conjon&ement. Il ne pût s'empê-
cher de témoigner l'inquiétude où l'on étoit en Portugal : c'étoit d'autant
plus qu'à Madrid on avoit écartelé les Armes d'Efpagne avec celles de
Portugal, & même que le nouveau Roi prenoit le Titre de Roi de Portu-
gal dans les Patentes, qu'il avoit eu occalîon de f lire expédier. Cet En-
voie regardoit cela comme un prélude de ce à quoi l'on devoit s'atten-
dre. Il eut auffi une Conférence avec l'Envoie d'Angleterre fur le même fu-
jet. Il le pria de reprefenter les aprehenfions de fa Cour au Roi de la Gran-
de-Bretagne, & que l'écartelure des Armes d'Efpagne avec celles de Portu-
gal fortirioit afTez les craintes où l'on étoit. C'étoit d'autant que la Couron-
ne d'Efpagne avoit formellement renoncé au Armes Se au Titre de Portugal ,
parle Traité de 1667. L'on n'étoit pas fâché que cette Couronne -là prit
l'alarme , parce qu'on comtoit qu'elle pouvoit devenir de quelque utilité. Mê-
me, pour l'augmenter, on lui fit voir des Lettres que l'Electeur de Bran-
debourg avoit écrites de Coningsberg à fon Envoie , pour en avertir fècre-
tement le Confeiller-Penfionnaire. Elles portoient de bonne main, que la
France avoit propofé à TElpagne de conquérir à fes fraix le Portugal, com-
me plus à bienfeance de l'Eipagne , pour l'échanger enfuite avec les Païs-
Bas Efpagnols, avec les Prétentions fur la République. Le même Electeur
confirma cette Nouvelle deux ordinaires après. C'étoit avec l'Addition que
la Cour de France avoit dépêché à Madrid un Commis du Marquis de Tor-
ci avec de groffes remiiës au Duc de Harcourt, Se un Prclënr pour le Cardi-
nal de Porto-Carrero. Il confiltoit en une Croix enrichie de Diamans, dont
cinq valoient vingt mille Ecus chacun. On ajoûtoit que c'étoit en deifein
• ^e g;lgner 'a Régence à confentir à cette Propofition fecrete de la France
pour la Conquête du Portugal. L'Envoie de ce dernier, à qui l'on fit voir
cette féconde Lettre déclara fécrétement au Coniëiller - Pcnlîonnaire , que fï
l'on vouloit venir à une Guerre , Se foûtenir le Roi fon Maître, il s'y join-
droit, Se que Ci l'on vouloit lui dire là-deffus un mot à l'oreille, fon. Maître
prendrait les mefures néceflàires pour cela : qu'il avoit trois mille Chevaux,
Se vingt Se deux mille Homme:» d'Infanterie eifectifs, qu'il pouvoit mettre en
Campagne: qu'il avoit beaucoup de Milices exercées, qui étoient autant de
Miquclets: qu'il n'avoit beibin que de garder les Cotes Maritimes} car par
terre il étoit Maître des Places, qui gardoient les Partages, Se qu'on ne pou-
voit
3
ET RESOLUTIONS D'E T A T. 7,69
voit pas forcer. Que cependant fî l'on ne vouloit pas prendre ce parti: Ton 170 r.
Maître feroit obligé , comme étant le plus en danger d'être englouti, de ce-———
der à là neceflîté , 6c de reconnoître le nouveau Roi d'Efpagne. Il ajouta,
ue dans l'incertitude des Affaires le Roi fon Maître avoit bien écrit au Roi
e France fur l'Avènement à la Couronne du nouveau Roi d'Efpagne; mais,
que cette Lettre étoit en termes fort équivoques 8c ambigus. Comme il
étoit à propos de tenir fecretes les intentions qu'on pouvoit avoir , l'on fe
tint dans une grande referve à fon égard, quoi qu'au fond c'étoit un Mini-
lire bien intentionné.
Cependant, le Confeiller-Penfionnaire manda le 14. de Janvier ces Nou-
velles fecretes au Roi d'Angleterre. Il y ajouta auffi une autre qu'on avoit
de bonne main. C'étoit que le nouveau Roi d'Efpagne avoit dit au pré-
tendu Prince de Galles , Iorfqu'il fut lui fouhaiter un bon Voiage, qu'il
emploieroit toutes fes forces pour le remettre fur le Trône de fes An-
cêtres.
Le même jour l'Envoie d'Angleterre y dépêcha un Mémoire que le Secré-
taire de Holftein Petkum , lui avoit donné. C'étoit pour offrir au Roi de la
Grande-Bretagne quelques Régimens pour fixons de tems à un prix raifbnna-
ble & beaucoup moindre que fi l'on en prenoit de la Maifon de Lunebourg.
Quelques jours après il fit une pareille offre aux Etats Généraux. C'étoit
fur une Lettre du Général Bannier de la part du Duc de Holftein. On fixoit
même le nombre de ces Troupes à fix mille Hommes , 6c ce Général man-
doit qu'il garantiroit que ce feroient de très bonnes Troupes. De la part du
Duc on pouffoit coup fur coup cette Affaire. On envoia même un Plein-pou-
voir au Secrétaire de traiter pour cela. Cet empreffement venoit de l'ombra-»
ge qu'on avoit pris qu'on ne négociât avec le Baron de Bothmar , Miniftre
de la Maifon de Lunebourg, qui étoit arrivé à la Haïe. Cet ombrage étoit
fondé fur ce qu'on avoit repondu fort vaguement à l'offre du Secrétaire du
Holftein, 6c on apréhendoit que cette Maifon-là ne négociât pour les Trou-
pes de Holftein , de même qu'on foûtenoit à tort qu'elle avoit fait dans la
Guerre précédente, comme en aïant alors acheté du Duc de Holftein, ÔC .
les aïant enfuite revendu aux Etats Généraux avec profit. Cette crainte n'é-
toit cependant pas bien fondée ,. parce que l'on tenoit que les Négociations
du Baron de Bothmar ne rouloient en principal , qu'à faire trouver quelque
bon tempérament pour détacher la Cour de Brunswick - Wolfembuttel des
Opofants au neuvième Eleclorat. Auiîî, étoit-ce pour cela, que le Général
d'Opdam le tenoit encore à Brunswick.
' Les Etats Généraux aïant eu avis que Don Bernardo de Quiros , qui étoit
allé en Brabant, avoit dépêché un Courrier en France 8c à Madrid pour y
faire part que la République vouloit abfolument la Guerre , envoiérent de-
mander par leur Agent une Conférence au Comte de Briord qui fe trouvoit
mieux. Comme il répondit qu'il n'étoit pas en état d'entrer en aucune ma-
tière, les Etats prirent une Réiblution le if. de Janvier, pour diffiper les in-
finuations de Don Bernardo de Quiros.
Xx 3 „ Oiù
370 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
1701.
OUï le rapôrt des Sieurs Ham & autres Députez de leurs Hautes Puiflan-
ces pour les Affaires étrangères lefquels en vertu des Refolutions de
LL. HH. PP. du 4. Décembre dernier, & autres de plus nouvelle date,
„ portant coramiilîonlureux,avoient encore examiné le Mémoire que leSicur
Comte de Briord, AmbafTadeur extraordinaire de Sa Majefté Très-Chrêtien-
ne, a donné à LL. HH. PP. contenant les raifons qui ont porté fadite
Majefté à accepter le Teftamcnt du feu Roi d'Etfpagne de très glorïeufe
Mémoire, comme auffi ce qui depuis eft parvenu a L. H. P. fur ce même
fujet plus amplement mentionné aux aétes dej joars marquez ; ïûf lequel
raport étant délibéré, il a été trouvé bon & arrêté qu'on écrira au Sieur de
Heemskerc'k Ambaftadeur extraordinaire de LL. HH. PP. auprès de Sa
Majefté Très-Chrêtienne, avec ordre de reprelénter à ladite Majefté de la
manière la plus convenable que LL. HH. PP. ont examiné avec attention
iterativement le contenu du Mémoire fufmentionnéj qu'elles ont apris par-
là que la conservation de la Paix , & de la tranquilité publique a porte Sa
Il Majefté à accepter ledit Teftament} que Sa Majefté aurait fuivi en cela
l'efprit Se le but du Traité de Partage qui n'eft autre que le maintien du re-
pos public, lequel Sa Majefté croïoit devoir être mieux allure par cette voye,
que non pas par le Traité de Partage. Qu'il leur a été agréable en même
tems de voir que dans ledit Mémoire on leur donne un témoignage vérita-
ble, que dans les engagements du Traité leur feule vûë a été d'aflurer la
tranquilité générale, & qu'elles auftl bien que le Roi de la Grande-Bretagne
ont defiré également de prévenir la Guerre. Que leurs Hautes PuiiTances
peuvent dire en vérité qu'elles ont toujours aimé la Paix & la tranquilité
générale, dans lefquelles elles font perfuadées que confifte leur intérêt &
une grande partie de leur fureté} que cette Paix & tranquilité générale é-
tant rétablies de nouveau dans la Chrétienté par les derniers Traitez con-
clus à Ryfwick, rien ne leur a été plus à cœur que de les conferverj qu'en
toutes occaiîons elles ont tâché de donner des preuves de la fincerité de
leurs lëntimcnts & intentions à cet égard , fpécialement en faifant le Trai-
té fur la Succciîîon du feu Roi d'Efpagne, dans le tems que fes maladies &:
foiblefles donnoient des raifons fuffiiantes de craindre pour ia vie, & d'apre-
hender que l'ouverture de fa Succeffion ne ferait la caufe d'une nouvelle
Guerre, li Sa Majefté Impériale, & Sa Majefté Trcs-Chrêtienne, vouloient
faire valoir & foutenir par les aimes chacune fes prétentions ou celles de fes
Enfâns fur ladite Succeiîion, par lequel Traité LL. HH. PP. ont cru que
3>
Extrait
33
du Regî-
tre des
33
Refolu-
33
tions de
33
leurs
33
Hautes
PuiiTan-
33
ces les
33
Sei.
33
gneurs
Ktacs
Géné-
33
33
raux des
33
l'rovifi-
33
ces-U-
niesdes
3»
Pais-Bas.
33
Du Sa-
33
medi 15.
33
Janvier
1700.
33
33
33
53
33
33
33
33
33
33
*
33
33
33
33
33
33
33
33
-V>
, confervation de la Paix & du repos public, tk. de pourvoir à leur fureté}
3, que leur intérêt git dans la Paix & tranquilité générale} qu'ainfî étant por-
„ tées d'inclination & par intérêt à la Faix elles ne peuvent le dipenfer d'apre-
„ hender extrêmement qu'il n'avinne de nouveaux troubles ôt une nou. elle
„ Guerre, voïant d'une part les mouvements qui lé font du côté de Sa Majc-
33 *té
" ET RESOLUTIONS D'E T A T. pt
„ fié Impériale, & d'autre part les grands préparatifs de guerre de Sa Majefté I701-
„ Très- Chrétienne par l'augmentation de fes Troupes, par leurs mouvements, " ■
„ èc autrement. Que ces démarches caufent beaucoup d'inquiétude ici & ail-
„ leurs parmi le Peuple, craignant une nouvelle Guerre, comme auffi que la
„ fureté qu'il a cm avoir ci-devant dans la Barrière des Païs-Bas Efpagnols
„ pourrait devenir moindre ; qu^ puis que Sa Majefté a fait témoigner à
„ Leurs Hautes Puiffances qu'elle n'a d'autre intention que de conferver & de
„ maintenir la Paix & le repos public, & qu'elle voudrait bien contenter
„ Leurs Hautes Puiffances équitabiement fur leur fureté , & puis que L LJ
5, HH. PP. ne défirent que la conservation de la Paix & de la tranquilité
„ générale & une fureté équitable, èc qu'ainfi Leurs Hautes Puiffances font
„ d'opinion qu'il fera neceflaire & expédient de conférer enfemble fur la con-
„ fervation de la Paix & fur ladite fureté pour fe donner là - deffus recipro-
„ quement tout le contentement qu'on trouvera neceflaire, Se pour examiner
„ quels moïens on fçauroit trouver pour la confervation Se maintien de la
„ Paix & tranquilité générale , & pour affermir ladite fureté ; que LL.
„ H H. PP. s'offrent d'entrer fur ce fujet en Conférence & en Négotiation par
„ leurs Députez avec le Sieur Comte de Briord , ou celui qu'il plaira à Sa
„ Majefté d'authorifer, & que dans cette rencontre comme en toute autre
„ elles tâcheront de faire voir clairement à Sa Majefté non feulement la fîn-
,, cerité de leurs fentiments, & leur penchant pour la Paix & le repos pu--
„ blic, mais bien particulièrement auffi la grande eftime qu'elles font de l'A-
„ mitié & de la bonne affection de Sa Majefté envers leur Republique j &
„ fera l'Extrait de la prefente Réfolution de Leurs Hautes Puiffances, donné
„ par l'Agent Rofenbooin audit Sr. Comte de Briord pour fervir d'une nou-
„ velle Reponfe audit Mémoire.
Ils l'envoïerent au Comte de Briord, qui la dépêcha par un Exprès en
France. Comme par les Lettres de leur Ambaffadeur ils avoient vu qu'il n'a-
voit pu, à caufe de Ion incommodité, faire au Roi de France les Reprefenta-
tions contenues dans leur Réfolution ils la réitérèrent le Samedi 20. du même
mois de la teneur fuivante.
A Près délibération , il a été trouvé bon & arrêté d'écrire au Sr. de Extrait
Heemskerk Ambafîadeur Extraordinaire de Leurs Hautes Puiflances , du Régi-
à la Cour de Sa Majefté le Roi Très-Chrétien , que LL. HH. PP. ont vu ^eJf,
par la Lettre du 11. de ce mois, qu il n avoit reçu que le jour d auparavant tjpns des
la Réfolution de LL. HH. PP. du if. précédent} qu'il drefferoit un Mé- Hauts &
moire fur ion contenu, & qu'étant malade lui-même , il le ferait préfenter Puiffànts
„ par fon Secretaiie, le jour fuivant ; que LL. HH. PP. n'aïant point enco- J^eurs
„ re reçu de Réponie là-defius , le tems aïant été trop court pour cela, ce- Etats
pendant Elles lont dans une ferme confiance que comme Elles ont temoi- Génë-
„ gné par ladite Retblution fincerement, qu'Elles font entièrement portées "u*^rt
„ autant d'inclination que par intérêt , à la Confervation de la Paix, èc tran- ces.u_"
„ quilité générale , £t qu'Elles ne fouhaittent rien plus ardemment que le nies des
„ main-
■>■>
$7* MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
170 î. „ maintien de ladite Paix , & tranquilité générale , avec l'arFcrmiflèmcnt
d'une fureté équitable pour leur Etat, & qu'Elles fe font offertes d'entrer
en Conférence & en Négotiation fur les moïens qu'on pourrait trouver
pour cet effet avec le Sr. Comte de Briord, >Ambaffadeur Extraordinaire
de fadite Majefté Très-Chrétienne , ou avec celui qu'il plairoit à fadite Ma-
jefté, d'authorifer pour cela j puifque fadite Majefté leur a fait témoigner
que fon intention étoit de contenter LL. HH.PP. fur ces points} qu'ainfi
„ fadite Majefté fera entièrement perfuadée de la fincerité de leurs intentions
1, fur ce fujet ; qu'entre tems , LL. HH. PP. aprennent avec un deplaifîr extre-
,, me , qu'en plufieurs Lieux , 6c même en France , on feme des bruits , com-
„ me fi Leurs Hautes Puiffances vouloient la Guerre , pour donner par - là ,
„ s'il étoit pofhble , des impreffions mauvaifes 8c fauffès de l'intention de
9, LL.- HH. PP. Que bien qu'Elles foient affurées de n'avoir donné par
,, leur conduite la moindre occafion à des tels bruits , Se qu'Elles font bien
9, perfuadées que Sa Majefté n'y ajoutera point de foi , que pourtant pour y
„ obvier , 6c les faire évanouir , 6c pour faire paroître d'autant plus la finceri-
„ té de leur intention , LL. HH. PP. ont refolu de déclarer fur - abondam-
„ ment encore une fois, qu'Elles n'ont rien tant à cœur que la Confervation
„ de la Paix 6c du repos Public, qu'Elles ne fouhaitent rien plus ardemment
3, que le maintien de cette Paix & du repos Public avec l'aftermiffement d'u-
,', ne fureté équitable pour leur Etat , 6c qu'on commence au plutôt la Né-
„ gociation propofée pour trouver les moïens convenables pour obtenir ce
„ but j que LL. HH. PP. jugent ladite Négociation d'autant plus necef-
„ faire, qu'Elles apprennent comme fi les Troupes de Sa Majefté commence-
„ roient à fe mouvoir fur le Frontières les plus proches de celles de l'Etat , que
des Généraux Se autres Officiers y viendraient auffi , & qu'on y ferait
d'autres préparatifs de Guerre} que par ces raifons, pour confirmer de plus
en plus la bonne intelligence, 6t la confiance mutuelle, rien ne ferait plus
efficace au fentiment de LL. HH. PP. que d'entamer ladite Négotiation;
„ & que LL. HH. PP. déclarent derechef, que là-dedans, comme en toute
„ autre occafion , Elles feront paroître la fincerité de leurs intentions unique-
„ ment portées à conferver la Paix , à procurer leur fureté , ôc à même tems
à fe conferver l'affeftion , dont Sa Majefté les honore. Que ledit Sieur de
3>
5Î
Sî
}>
5, Heemskerck aura à reprefenter ce que deffus à fadite Majefté au nom de
,, LL. HH. PP. de la manière la plus convenable, 6c qu'il repondra à LL.
51
»
HH. PP. ce qu'il aura fait là -deffus. Qu'auffi un Extrait de la préfente
Réfolution de LL. HH. PP. fera donné par l'Agent Rofenboom audit Sr.
Comte de Briord pour s'en fervir comme de raifon ècc.
Cependant, le but principal de la France étoit de porter les Etats à
reconnoître le nouveau Roi d'Efpagne. De la part de celui-ci l'on fit à Ma-
drid des Reproches à leur Envoie , qui l'étoit auffi de l'Angleterre , de ce
qu'on tardoit à cette Rcconnoiffance. L'on avoit cependant donné par pré-
caution là-deffus quelque Inftruction à cet Envoie- là. Il s'en fervit lorlque
ces Reproches lui furent faites. Elles contenoient en fub fiance} " Qtie, fui-
„ vaut
E T RESOLUTIONS D'E T A T. ?75
^ -vant l'ordre du Roi Catholique du 4. Janvier , en lui faifoir fcvoit que le 17c 1.
„ Roi rrouvoit fort étrange que les Etats Généraux des Provinces- Unies di- — -
„ ferafTent de congratuler & à reconnoitre Sa Majcfié, à' laquelle la Succei-
,, iîon à la Couronne ctoit cchûë. „ L'Envoie des Etats lui repondit qu'il
emploïeroit pour cela fes offices auprès de les Maîtres. Celui qui lui fai-
foi t par ordre ces Plaintes, fie lui parla point du Roi de la Grande-Bretagne >
mais, l'Envoie lui ajouta, „ Qu'il pouvoit lui dire, de la part de Sa Majeilc
„ Britannique, le piaiiir qu'Elle avoit eu de la difpofition du Teltament du
„ feu Roi Chari.es IL j que ladite Ma;efié Britannique 6c les Etats Géné-
„ raux defiroient de maintenir l'Amitié, la bonne Correfpondancc , 6c les
„ Alliances qu'ils avoient eu juiqu'alors avec la Couronne d'Efpagne , à quoi
„ il contribueroient de tout leur poffible. ~ C'étoit dans l'attente que de la
„ part de l'Efpagnc on concourreroit également à faire fubfiller les Traitez
„ de Paix entre l'Efpagne, l'Angleterre, ce la Hollande en leur force 6c vi-
„ gueur , & de les rcnouveller avec toutes les claufes , qui pouvoient les ren-
„ dre plus fermes 6c fûrs pour la convenance 6c utilité des fujets refpeétifs
„ des trois Puiiîances, auffi bien que pour la tranquillité de l'Europe. Que
„ la plus grande preuve que PEfpagne pouvoit donner de fon défir de vivre
„ en bonne intelligence avec Sa Majeité Britannique & les Etats Généraux ,
„ ferait de faire que les Païs-Bas Efpagnols reitaffent toujours unis à la Gou-
dronne d'Efpagne, & qu'ils fuflent gouvernez par leur Roi, afin d'éviter
„ les occafions de jaloufie 6c d'inquiétude aux Voiiïns. D'ailleurs, que pour
„ «prévenir toute forte de méfiance il conviendrait que les garnifons Hollan-
„ doifes qui étoient dans les Places defdits Pais-Bas Efpagnols y refhfîènt de '
„ la même manière qu'Elles s'y trouvoient alors, fous les ordres de Gouver-
„ rieurs Efpagnols. Que l'unique but étoit que ces Pais- là reilaflènt fous la
„ Domination d'Efpagne de la même manière, qu'ils avoient été. Que Sa
„ Majefté Britannique, 6c les Etats Généraux , tant par inclination que par
„ leur propre intérêt , fouhaitoient de conferver l'Amitié 6c la bonne Cor-
„ refpondance avec la Couronne d'Efpagne, 6c que pour preuve de cela, il
„ leur ferait' fort agréable qu'on leur falîè part en la manière accoutumée de
„ l'avènement du nouveau Roi à la Couronne d'Efpagne, 6c de fon arrivée
„ à fa Cour de Madrid. Afin de pouvoir le reconnoitre pour tel Roi d'Ef-
„ pagne avec toutes les demonltrations d'Amitié 6c les folemnitez requifes 6c
„ 6c convenables, en de femblabks occafions, à des Alliez fi étroits 6c an-
„ ciens, comme étoient le Roi de la Grande-Bretagne 6c les Etats Géné-
,, raux , dès qu'ils auraient reçu la Notification du Roi Catholique Don
„ Philippe V.
On demanda à cet Envoie cette Infinuation par écrit avec les mêmes par-
ticularitez, afin de pouvoir la remettre à ce Roi-là félon l'ufage; mais, l'En-
voie s'en exeufa, déclarant qu'il la communiquoit verbalement , en confe-
quence des ordres qu'il en avoit reçu de Sa Majeité Brirannique.
La iubttance de ce que deffus elt tirée -du Raport en Efpagnol , qu'on fit
au Roi d'Efpagne, de 'cette Conférence.
. Cette Infinuation ne fut pas laite allez à tems pour pouvoir influer à pre^-
Stom. I. Y y venir
J74 MEMOIRES, NEGOTI ATIONS, TRAITEZ,
1701. venir un grand fujet de mécontentement aux Etats Généraux. C'eft que
■ • comme la Cour de Madrid avoit donné des ordres à tous ceux qui en dépen-
doient, de fu ivre ceux de Sa Majeité Très - Chrétienne , celle-ci trouva à
propos de faire entrer dans toutes les Places des Pais- Bas Efpagnols , où il y
avoit des Troupes Hollandoifes, bon nombre des fiennes. Cela fe fit avec un
fi grand fecret, qu'on n'en vit l'exécution que le 6. de Février. Les Gou-
verneurs avoient pris pour cela de telles meiùres, que les Officiers Hollandois
n'en furent avertis, que lors qu'on les reveilla, pour leur dire cette Introduc-
tion. Il eft vrai qu'on le leur dit avec des Proteitations de vivre avec les
Troupes Hollandoifes, comme avec de bons Amis»
La première Nouvelle que les Etats Généraux en eurent venoit du Colo-
nel Sickers , qui la leur mandoit d'Audenarde du fix même. Enfùite, ils
la reçurent de toutes les autres Places j & enfin Don Bernardo de Quiros
leur en dit les raifons par un Mémoire du 7. tel que voici , -avec la Répon-
fe qu'on y fit en date du p.
LE foufîîgné AmbafTadeur Extraordinaire d'Efpagne a reçu hier au foir fort
tard un Exprès de S. A. E. de Bavière, qui le charge d'informer VV.
Mémoi-
re de
Btmar- SS. que Sa Majefté T. C. lui a donné part, qu'aïant préféré le Teftament du
do de feu Roi d'Efpagne Charles II. à l'exécution du Traité de Partage, fa
Quiros principale vûë a été d'aiîurer la Paix, qu'il étok impoffible de conferver en
Fnaor- ^liroPej en fah'ant les mefures prifes avec le Roi d'Angleterre , & VV. S5.
dinaire Pour *a maintenir ; qu'Elle avoit éfperé , que les deux PuifTances aïatit
d'Efpa- témoigné le deiir de prévenir la Guerre , entreraient auffi dans les mefures
one- nouvelles , qu'Elle étoit obligé de prendre pour cet effet ; que cependant de-
puis l'acceptation du Teftament, VV. SS. avoient non feulement différé de
reconnoître le Roi d'Efpagne mon Maître en cette qualité; mais, même, qu'El-
les emploient toutes fortes de moïens pour former s'il étoit poiîible des nou-
velles Ligues auffi fortes que la dernière, faite contre Elle dans la Guerre ter-
minée par le Traité de Ryswick.
Que Sa Majefté T. C. jufques à ce jour a attendu tranquillement que VV.
SS. revenues du premier reffentiment , que l'on avoit pris foin de leur infpi-
rer, fiflènt des Démarches convenables pour affurer une Paix folide , & de
longue durée, telles qui convient aux intérêts de vos Provinces.
Que le Roi T. C. n'a rien oublié pour engager VV. SS. à faire des Dé-
marches j que non feulement il leur avoit fait donner part de la Réfolution
qu'il avoit prife avant que de fe déclarer ; mais auffi , que lors qu'elle a été
publique, il a bien voulu encore les en informer par une de fes Lettres à la-
quelle ion Ambaflàdcur avoit joint les allurances les plus fortes de l'Arfeétion
si o. h. a -A' uir ce j.. j-r... _..»trn_ :* a~ . — ;.,^„:. iti,,;^,.
dans des nouvelles liaifonsj qu'on avoit demandé de la part à vos SS. quel-
les allurances Elles deiîroient pour l'avenir , leur promettant de les leur don-
ner, pourvu qu'elles fuilênt jullcs 6c raifonnables ; que fi Vos SS. craignoient
qu'Elle introduite lès Troupes dans les Places d'Efpagne , Elle s'engageoit à
ne
ET RESOLUTIONS D'ETAT. 37$-
ne les y faire jamais entrer, & qu'elle feroit contente que la Garde en fut con- 1701.
fiée aux Troupes Efpagnoies , qui feules font en droit de les conferver pour le * —
Roi mon Maître, qui a en même tems donné part à Vos SS. de fon avène-
ment à la Couronne , par une Lettre que j'ai remife moi-même à Monfr. de
Liere pour lors Préfident de fëmaine. Que tant d'avances faites dans Ja feule
vûë de la Paix ont été inutiles; que la puiffance du Roi T. C. conuë de tou-
tes parts devoit empêcher , qu'on n'attribuât fes avances à l'embarras de foû-
tenir une nouvelle Guerre ; & que fi l'on pouvoit douter des forces, & de
la modération de Sa Majefté T. C. , on croïoit aifement par la conduite
qu'Ellc à tenue, qu'Elle craint la Guerre , & que Vos SS. au contraire la re-
gardent comme un avantage , puifque bien loin de répondre aux avances fai-
tes par Sa Majefté T. C. Vos SS.ne ceffoient de négotier dans les Cours étran-
gères; qu'on ne parle en Hollande, que de préparatifs de Guerre, d'armer
des Vailîeaux, de tenir prêtes de Sommes confidérables d'argent, d'augmen-
ter les Troupes; que les Officiers de celles que Vos SS. ont dans les Païs-Bas
Catholique font actuellement leurs recrûtes , tant dans les Places que dans le
Paî's dépendant duRoi mon Maître; qu'enfin tout paroît d'être en mouvement
ici, que toutes chofes y paroiflent difpofées à la Guerre , dans le tems même que»
4'Empereur fait marcher fes Troupes, foit pour l'Italie, ou pour le Rhin, ce
qu'il ne feroit pas apparemment , s'il n'étoit pas affûté que Vos SS. foûtien-
dront fes intérêts en faifant une Diverfion dans les Païs-Bas Catholiques en ap-
puïant les prétenfions de l'Emprereur fur quelques-unes des Places de ce Païs-
là, 6c en aidant quelques autres Princes à s'en emparer auffi, ce qui auroit pu
arriver, fi Sa Majefté T. C. n'apportoit inceffamment les précautions nécef-
faires à la fureté des Païs-Bas Efpagnols , fur-tout en l'état où ils font pré-
sentement, que les Troupes que Vos SS. ont dans les Places, y font beaucoup
fupérieures à celles du Roi mon Maître ; que Sa Majefté T. C. avoit bien
connu d'abord l'importance de faire fortir les Troupes Hollandoifes ; mais,
perfuadée que Vos SS. defiroient la Paix, Elle a jugé jufques à préfent que le
Bien public demandoit, qu'Elle le fufpendit; mais, qu'enfin il n'y avoit plus
moïen de laiffer plus long-tems les Troupes dans Places d'un Roi qu'Elles ne
reconnoiffent point, & que d'ailleurs Sa Majefté T. C. aïant été priée par le
Roi mon Maître de vouloir prendre foin de la fureté & confervation de Places
des Païs-Bas Efpagnols en attendant qu'il arrive à Madrid , & qu'il foit en état
de le faire par lui-même , fadité Majefté T. C. a jugé qu'il n'étoit pas de la
prudence de différer d'avantage à les garantir du 'danger qui les menaçoit.
Ainfi, Elle a trouvé à propos d'écrire à fon A. E. de Bavière de faire entrer
le 6. de ce mois dans toutes les Places principales un Détachement de fes
Troupes, en chargeant très - particulièrement fadite A. E. qu'Elle ordonne
bien précifément aux Gouverneurs des Places , où les Troupes dévoient en-
trer, qu'au moment qu'Elles entreront , ils aient à faire avertir les Comman-
dants des Troupes de Vos SS. de n'en prendre aucune inquiétude; que les
Troupes Françoifes n'entreroient , que comme Troupes Auxiliaires , & pour
appuïer celles du Roi mon Maître , qui avoit tout à craindre d'un Corps de
Troupes beaucoup fupérieures aux fiennes, dans les Places dont ils ne veulent
pas le reconnoitre pour Souverain ; qu'enfin les Troupes de Francs étoient
Yy 1 iiux
17S MEMOIRES, NEGOTIATIOJSS, TRAITEZ,
1701. aux ordres de ladite A. E. comme eux; qu'elles avoient ordre de vivre avec
' les Troupes de VV. SS; dans toute l'Union & honnêteté , qu'on pouvoir.
defircr; ce qu'on ne devoit pas douter qu'elles n'excutent fuivant l'Obéïiîan-
ce & la Difcipline dans la-quelle elles font accoutumées de vivre. Ce font-
là, Meffiemjs, les motifs & les raifons que le Roi T. C. a eu pour faire entrer
fes Troupes dans les Places du Roi mon Maître , & que j'ai ordre de vous
communiquer en vous affûrant pourtant , que leurs Majettez font toujours
dans les mêmes difpofitions d'entretenir la bonne Correlpondance, 6c Amitié,
avec Vos SS., & d'entrer pour cet effet dans tous les expédients juites , Se
raifonnables, comme fl les Troupes de Fiance n'étoient pas entrées dans les
Places des Païs-Bas Efpagnols. Fait à la Haïe le 7. Février 1701,
Signé).
Fr. Be.rn. de Qjjiros.
Voici la Réfolution qu'on prit en Réponfc.
Extrait „ ^VUï le raport des Sieurs de EfTen & autres Députez &c. &c. , êc:
treds " ^*~^ aïant ^ délibéré là-dellliS;, il a été trouvé bon Se arrêté qu'on don-
Réfolu- 53 ncra pour Réponfe audit Sr. de Quiros fur fon dit A'Iémoire , que Leurs
lions de „ Hautes Puifiances y ont vu que l'envoi des Troupes de Sa Majeité Trés-
kurs „ Chrétienne dans les Places des Païs-Bas Efpagnols eft fondé principalement
Puiffan " ^LU ce ^ue ^-" ^ti. ^' n'aur°icnt P;:S au^z répondu aux avances de S.
ces les s» M. T. C.,. faites depuis le décès du feu Roi d'Efpagne pour la co iferva-
Sei- „ tion de la Paix; fur les préparatifs qu'on faiioit dans ce Pais pour la Guer-
gneurs }J re} & fur l'ombrage qu'on paraît avoir conçu des Troupes de LL. H H.
&né- " ' cllu *°nt reu^es dans les Places des Païs-Bas de l'obéïilance du Roi
rauxdes îj d'Efpagne, comme fi cela ne convenoit point à la fureté defdites Places, .
Pruvin- „ puifqu'on dit que ces Troupes y feraient fuperieures. Que LL. HH. PP.
C(rs"U- J} aïant toujours efiimé pour un grand honneur , qu'Eiies ont pu gagner &.
Pais-B^s 5' conferver l'Amitié & bonne affection de S. M. T. C. , & aïant donné en
du Mer- „ toutes occafions tant de preuves de leur forte inclination pour la Paix &
credi 9. ?J pour le repos public , Elles n'ont pu aprendre fans une douleur fcnfible
„ qu'on paroit vouloir leur infirmer, comme fi Elles, n'avoient pas dûëment
„ repondu aux avances de ladite Majeité, & comme fi Elles auraient du pan- •
„ chant pour la Guerre. Qu'auffi-tôt que Sa Majeité Très-Chrétienne a
„ communiqué à LL. HH. PP. qu'EUe avoit refolu d'accepter le Teftament
„ du feu Roi d'Efpagne de très glorieufe Mémoire, Elles en ont donné part
„ aux Etats refpe&ifs des Provinces-Unies, pour lavoir leur Réfolution, ain-
„ fi que la Conllitution du Gouvernement le demandoit. Qu'auffi-tôt, que
„ fuivant ladite Conllitution Elles ont été en état de former quelque Réiolu-
,, tion fur ce point, Elles ont fait témoigner à :adite Majeité leur intention
„ fincere pour la coniervation de la Paix , & du repos public; & comme
„ Sa Majeité Très-Chrêtienne de fon coté avoit aùlîi lait témoigner à LL..
,, HH^PP. à diverfes fois ion amour pour la Paix & pour la tranuuilité pu-
„ blique.
Fevier
nôj.
ET RESOLUTIONS DrE T A T. ?7;
„ bliquc, Se aiïurer qu'Elle vouloit donner à LL. HH. PP. une fureté rai- 1701;
„ fomiable, qu'auffi Elles feraient prêtes d'entrer en Conférence & en Né- " ■
„ gociation avec les Miniftres de fadite Majefté ici , fur les moïens qu'on
„ pourrait trouver pour parvenir à ce but. Que fadite Majefté a là - deffus
„ donné à connoître par le St. Marquis de Torci le contentement qu'Elle
„ prenoit de cette Réfolution de LL. HH. PP, en y ajoutant que Sa Maje--
„ fté , pour montrer combien Elle étoit promte à chercher les moïens pour
5, un Accommodement, à caufe de Pindilpofition du Sr. Comte de Briord 7
,, fon Ambaflàdeur Extraordinaire, envoîeroit inceffamment ici le Sr. Com-
„ te d'Avaux pour y travailler. Qu'auffi ledit Sr. Comte d' A vaux étoit dé-
„ ja en chemin pour venir ici fuivant les avis qu'Elles ont de Paris. Que
„ LL. HH. PP. aïant fait ce que deflus , & Sa Majefté Très - Chrétienne
„ aïant fait témoigner qu'Elle en étoit contente, Elles n'ont pu aprendre*
„ ainfi qu'Elles l'ont dit ci-deffus, fins douleur, qu'après cela on veuille dire
„ qu'Elles n' auraient pas dûëment repondu aux avances faites par Sa Majefté
„ Très-Chrêtienne. Que LL. HH. PP. ont eu & ont toujours de l'averfioii
pour la Guerre , & qu'Elles ne l'ont jamais confédérée comme un avanta-
ge, fichant très-bien qu'elle eft entièrement contraire à leurs intérêts j ôc "
qu'ainfi Elles ne défirent rien avec tant d'ardeur que la confervation de la
Paix, de la tranquillité publique, & l'affermiffement de leur fureté. Qu'il
„ y a quelques jours qu'Elles en ont fait donner de nouvelles affurances , fur
„ ce qu'Elles avoient apris que les bruits des préparatifs de Guerre que l'on
„ faifoit ici, fe repandoient de plus en plus par tout , afin que la Négocia-
„ tion offerte fût commencée, comme le moïen plus fur Se le plus propre,
„ pour faire ceffer de tels bruits , & à ôter les mauvaifes impreflions qu'ils
}, caufent. Que LL. HH. PP. aïant apris non pas par des rumeurs incertai-
„ ncs> mais, par des avis fûrs, les grands arméniens en France, .Se les mou-
„ vemens qui fc font fur leurs Frontières, ont de juftes raifons dTen être alar-
,y mées, Se de fe mettre en état de défente. Que cependant Elles ont pro-
„ -cédé en cela avec beaucoup de circonfpecrion , Se ont fait moins qu'apa-
„ remment tout autre n'auroit f lit en pareille occafion, pour prévenir par-
là tout fujet d'ombrage, qu'on voudrait prendre de leur conduite. Auffi
font- Elles bien aflurées de n'avoir rien fait, qui peut avoir donné occafion
à de tels bruits, ou à avoir mauvaife opinion de leurs intentions Qu'Elles ■
ne doutoient nullement qu'Elles ne puilTent montrer clairement , ce ceci,
Scieurs fentimens finceres pour la Paix, Se le repos public , dans les Confe-
„ rences avec les Miniftres de fadite Majefté, fi -tôt que le Sieur Comte
„. d'Avaux fera arrivé ici, dont ils attendent la venue avec impatience. Que
„ fi LL. HH. PP. avoient fû que le féjour de leurs Troupes dans lefdites
„ Places du Païs- Bas aurait caufé quelque ombrage, Elles les auraient rapel-'
„ lces, il y a long-tems. Qiie LL. HH. PP. étant averties d'un tel om-
5> biage, ont donné ordre, même avant que d'avoir reçu le Mémoire dudit
„ Sr. de Qu iras, pour demander le renvoi defdites Troupes, puiique LL.
„ HH. PP. les ont envoiées Si laiflees dans ces Places -là pour fefyir à leur
y, fureté, 6> nnl^ment pour y càufer de l'inquiétude. Que LL. HH. PP/
„ ont flfrt f, voir leu- intention fui' cela à ladite Altcffe Eledorale de Bavière,
Yy.3
?>
a
37S MEMOIRES, NEGOCIATIONS, TRAITEZ,
1701. 5i à ce que les ordres neccilàires fuuent au plutôt donnez -de les foire marcher
■ „ pour revenir ici j Se que LL. HH. PP. requièrent ledit Sr. dé Quiros de
„ les féconder par Tes bons offices, afin que tout iùjet d'ombrage, caufé par le
„ féjour dcfdites Troupes dans les Places mentionnées, foitôté: SeJ'Extrait
„ de la préfente Réfolution fera donné par l'Agent Rofeboom audit Sr. de
„ Quiros pour fervir de Réponfe à fon Mémoire.
Co m me cependant on avoit fait entendre aux Troupes Hollandoifes qu'El-
les pouvoient vivre dans la tranquillité jufques à leur rapel , les Etats Géné-
raux le leur envoïerent. C'étoir fur tout parce que Don Bernardo de Qui-
ros , le jour après la préfentation de fon Mémoire leur fît favoir, qu'ils pou-
voient le faire, Se que l'Electeur de Bavière avoit donné fes ordres, afin qu'el-
les trouvafîènt dans leur paflage les Etapes & Logemens neceffaires. Si l'on
fut furpris de la nouveauté de l'Introduétion des Troupes Françoifes dans les
Places de la Barrière, à caufè que c'étoit contre tout ce que le Comte de
Briord Se Don Bernardo de Quiros avoient affûré , que de ce côté - là rien
ne ferait innové ; l'on le fut encore plus fur ce que l'on retarda a laifTer par-
tir les Troupes de Hollande. Les Etats Généraux reçurent même un Ex-
près du Commandant de leurs Troupes, qui étoit à Bruxelles. Il leur man-
doit, qu'aïant demandé de fbrtir avec elles , l'Electeur de Bavière n'y avoit
trouvé aucune difficulté. Cependant, le Brigadier Puifegur , qui de la part
de la Cour de France avoit aporté les ordres à l'Electeur pour l'Introduction
des Troupes Fjançoifes, s'y étoit opofé. C'étoit en alléguant qu'il faloit au-
paravant en donner avis à Sa Majetté Très- Chrétienne. Cela fît craindre
qu'on n'eut deffein de retenir ces Troupes , qui faifoient un Corps d'entre
huit Se dix mille Hommes de Troupes agguerries. Cependant , on les laifla
enfin partir; mais feulement les unes après les autres. C'étoit fous le frivole
prétexte de la difficulté des Maréchaux des Logis à régler tout à la fois tant
de Marches différentes. Puifegur ajouta que ce retardement venoit de ce
qu'il avoit falu attendre que les Troupes de France fu(fent entrées dans les au-
tres Places, afin que les Hollandoifes ne fe miffent dans leur Marche en pof-
ieflîon de quelques-unes. Le Commandant Hollandois lui offrit de relier en
.otage; mais Puifegur lui repondit, que fi les Affaires n'avoient pas été réglées
de la forte , on fe feroit contenté de fa parole. A leur fortir des Places les
Officiers François tâchèrent de débaucher quelque partie des Soldats. Cela
fe fit même d'une manière qui choqua ceux qui lescommandoient.Ces manœu-
vres de la France Se de l'Elpagne augmentèrent l'alarme, Se aigrirent extrê-
mement les efprits. On jugea qu'il étoit de la prudence de prendre des pré-
cautions vers les Frontières. On envoia un Bataillon des Gardes dans le Fort
près de Boifleduc Se un autre à Breda. D'autres Regimens eurent ordre
d'aller dans les autres Places les plus expofées. Les Troupes forties des Païs-
Bas fe rendirent à Maeftricht Se dans d'autres Places. L'Ingénieur Général
.Coehorne fut envoie pour viilter les Fortifications de Berg-op-Zoom. Le
i*rince de Wirtemberg, Gouverneur de l'Eclufe , alla auffi pour faire la ré-
partition des Troupes qui fortoient des Places voifines de celle-là. Comme
l'en mit même en Délibératiou de Eure quelques Lignes , ce Prince fe fit por-
ter
ET RESOLUTIONS D'ETAT. 370
ter une Carte générale du Païs , & il y marqua lui-même avec une plume des 1701.
Lignes, fous la rectification du Général Coehorne. Des Membres du Con- -
fèil d'Etat furent envoïez pour vifiter les Fortifications des Places , & l'état
des Magafins. Sur les Remontrances du Confeil d'Etat, faites en date du 12.
Janvier, de la neceflité de reparer l'emboucheure de-Bas Rhin , vers le coin
du Fort de Schenck , on réfolut d'y faire travailler. Mais , cela dépendoit
des Provinces de Gueldre, d'Utrecht, 6c d'Overiflel , qui étoient chargées
par l'Etat de Guerre de fournir à cette dépenfe-là. Auflï , les Etats Géné-
raux écrivirent-il en date du 22. de ce mois-là aux Etats de ces trois Provin-
ces-là, pour les exhorter à s'en aquitter. Comme l'on fut averti que la Fran-
ce faifoit équiper 12. Vaiflëaux de Guerre à Breit, 12. à Rochefort, Se au-
tant à Toulon, il fut réfolu de faire armer de premier abord vingt VaifTeaux >
d'ailleurs, d'en faire conftruire douze autres. On eut le foin de faire divul-
guer que cet Armement maritime étoit feulement , fuivant la coutume de
l'Etat, pour s'en fervir dans des Convois. C'étoit afin que l'on ne crût pas
que ce fût pour s'en fervir à faire la Guerre. On réfolut d'ailleurs de faire
une Augmentation de Troupes. On contoit que la dépenfe pour l'Arme-
ment maritime, l'Augmentation des Troupes , nouveaux VaifTeaux, Forti-
fications 6c Magafins, montoit au de-là de neuf millions de florins de Hol-
lande. On écrivit aux Provinces pour avoir là-defTus leur concurrence , 6c "
on en reçût le confentement quelque tems après, ainfi qu'on le raportera en
fon lieu. On capitula même pour la levée de deux Regimens François qui
furent donnez à Lillemarais 6c à Viçouze. On fit d'ailleurs publier le 1 f.
Février un Placard , pour défendre la fortie des Chevaux , 6c deux jours
après un autre pour défendre la fortie des Munitions , 6c autre apareil de Guer-
re. On envoia auflï ordre d'inonder une Traite de Païs vers Lillo. Comme
d'ailleurs l'on avoit été informé qu'en Angleterre , le Comte de Vratiilau
avoit, dans une Audience particulière , aflûré le Roi que l'Empereur fon
Maître étoit abfolument réfolu de pouflèr fes Prétenfions par une Guerre j 6c
que fi l'Angleterre 6c la Hollande ne vouloient pas y entrer , fon Maître ne
laifTercit pas que de la faire, remettant le hazard des Armes à la Volonté de
Dieuj on trouva à propos d'entretenir quelque Négociation avec le Comte
de Goëz. Auflî eut- on avec lui diverfes Conférences fecretes. Elles étoient
en confequence de celles que le Comte de Vratiflau tenoit en Angleterre. Un-
Exprès de ce Comte, venant d'Angleterre pour Vienne, arriva le 21. Février
à la Haïe. Il ne s'y arrêta que quelques heures chez le Comte de Goëz, qui
eut enfuite une Conférence fecrete avec le Confeiller-Penfionnaire. On fit
là-deiTus demander à la Régence d'Amfterdam de donner pouvoir à leurs Dé-
putez aux Etats de traiter les chofes fecretes, fans lui en faire raport. Cepen-
dant, cette Régence fit répondre que comme Elle fourniflbit la plus grande
partie de la Dépenfe de la Province de Hollande, Elle ne pouvoit permettre
qu'on prît aucune Réfolution , fins en recevoir la communication. Elle fit
cependant, ajouter que fi le Roi d'Angleterre trouvoit de la neceflité de faire
la Guerre, la Ville y donneroit les mains: Qu'ainlî , le Roi n' avoit qu'à y
faire conlentir la Chambre des Communes du nouveau Parlement ; 6c que fi
celle—
i-'or.
$80 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
celle-là opinoit pour la Guerre, la Ville s'y conformeroit. Cette Ville , qui
croit la feule qui n'avoit. pas encore donné Ton contentement pour une Aug-
mentation c\cs Troupes, l'envoïa enfin le onze de Février. On dilhibua
d'abord là-defîûs partie de l'argent pour l'Augmentation de la Cavallerie.
Les Etats Généraux ne paroiilbient pas fort contens de l'Amballadeur de
Suéde Lillienrooth. C'étoit parce qu'il vouloit entrer fort avant- dans les Af-
faires, & le failpit plutôt en Avocat des François, qu'en Médiateur pour
quelque Accommodement , luivant un ordre qu'il avoit mendié de la Chan-
cellerie eie Suéde , en l'abiénce du Roi. Aulii., les Etats Généraux envoie-
rent-ils ordre à leur Mini tire à Stockholme d'en faire des Plaintes. Cet Am-
bafladeur en étant averti , donnant un jour un Feitin où Don Bemardo de
Quircs , & les autres Envoiez 6c Réfidens fe trouvèrent , à l'exception de
ceux d'Angleterre,, de Dannemarck , Se de Brandebourg , affecta de tenir
quelque Dilcours là-deffus. Il dit qu'on l'avoit foupçonné d'être Paitifan de la
France j rrjais, que fes intentions étoient droites , Se que puis qu'on prenoit les
choies autrement, il n'en parlerait plus. Un Mini lire étranger écrivit cepen-
dant à la Haïe, qu'on ne devoit pas être furpris fi l'Ambaflàdeùr de Suéde
Lillienrooth prenoit le Parti de la France. C'étoit par ce qu'il avoit reçu
des Prefens de celle-là, lors de la Médiation de la Paix de Ryswick-, aupara-
vant même que les Traitez fuffent prêts à être fignez } Se que fa Médiation ,
dans les Occurrences qui étoient fur le tapis , pouvoit bien avoir été prévenue
de la même manière. Pour modérer l'Attachement de cet Ambaffadeur à la
France, Se pour ne pas trouver quelque obftacle d'une fàcheufe conféquence
à la Couronne de Suéde , au cas que les Affaires vinffent à lé difpofer à la
Guerre, on fit le deffein de le captiver le Comte Piper , qui étoit le Favori
du Roi de Suéde, Se Ami de l'Ambaffadeur. C'étoit en lui faifant des offres
pécuniaires, le fâchant fufceptible à recevoir. On agiffoit cependant à l'égard
de cet Ambaffadeur de Suéde avec quelque complaifance relativement à d'au-
tres Affaires. Il venoit de faire chanter le Te Deum dans PEglife Luthérien-
ne, pour la Victoire du Roi fon Maître à Narva. Le Prédicant , dans le Ser-
mon qu'il fit enfuite , parla des Mofcovites en termes fort durs. L'Ambaffa-
deur Ruffien, en aïant été informé par l'Envoie de Dannemarck , alla en fai-
re des Plaintes au Confeiller-Penfionnaire , Se lui en demanda juftice. Mais,
on lui dit que l'Etat ne fe mêloit point de ces fortes d'Affaires.
A peu près dans ce tems-là, on reçût la Nouvelle de l'Erection de la nou-
velle Roïauté dans la Pruffe dans la Pcrfonne de l'Electeur de Brandebourg.
Ce Prince, qui s'étoit rendu à Coningsberg , y fut proclamé Roi en Pruiîè
par quatre Hérauts d'Armes. Cette Proclamation étoit en ces termes :
5Î
Roï
Puifque la Providence avoit voulu que le Duché de Pruffe fût érigé en
oïaume. Se que fon Souverain le Séréniffime Se très-Puifiant Prince Fre-
ç, de Rie en devint Roi, on le faifoit {avoir à chacun par cette Proclamation.
Le Héraut finit cette leéture par un Vive nôtre Roi Frédéric, 13 la
Reine fon Epoufe-, ce qui fut répété par un grand bruit du Peuple.
Cette
ET RESOLUTIONS D'E T A T. ?8i
Cette Cérémonie fe fit le if. Janvier 1701., 6c trois jours après elle fut fui- 1701.
vie par le Couronnement , tant du nouveau Roi, que de la nouvelle Reine. '■
Pour diftinguer cette nouvelle Epoque, ce Roi érigea un Ordre de Chevale-
rie, drivant la penfée qui lui fut fuggérée deux mois auparavant par l'Ecri-
vain de ces Mémoires. Il y eut en cette occafioh une chofe , qui étoit fans
exemple parmi les Réformez. C'eil qu'en érigeant la Roïauté, il érigea en
même tems un Evêché en PrufTe en faveur du premier Miniftre Prédicant de
fa Cour, afin qu'il fit la Cérémonie du Couronnement.
Le Rendent de l'Empereur affilia à toute la Cérémonie. Il parut content
de ce qu'on n'apclloit ce Roi , que Roi en Prufle. Cependant , dans les
Lettres Circulaires qu'il écrivit aux diverfes Puiflànces , & fur tout au Roi
d'Angleterre 8c au; Etats Généraux , il prénoit le Titre de Rcx Borutfiœ.
Son Envoie auprès les derniers reçût de novelles Lettres de Créance comme
Miniftre de Roi, Scfur la Lettre du Notification , ces Etats réfolurent de
k reconnoître commetel en date du Samedi f . de Février.
Cinq jours après, l'Lwoié du nouveau Roi traita quelques Miniitres Etran-
gers. Le Comte de Goiz Envoie de l'Empereur y fut, parce que fur la No-
tification que celui du no.ytau Roi lui avoit faite de fa Roïauté , le Comte
de Goëz fut lui rendre la première Vifite , laquelle celui de Prufle lui rendit
deux jours après. Par-là, laponâille du Cérémoniel fut ôtée par l'accroît de
la Roïauté. L'Envoie de Frugal s'exeufa d'y aller , fur ce qu'étant au
commencement du Carerie, \\ ne fortoit pas, étant en dévotion. Cepen-
pendant, le jour fuivant il'ui tt'a. vifite. Celui de Dannemarck n'y fut pas
non plus , fe trouvant inconmojc.de la goûte , ou feignant de l'avoir. Quoi-
que l'ordre du tems exigerai de ja-ler d'autres chofesj cependant , pour re-
porter, le plus poffible, celle, qii ont une hâifon, on mettra ici la plus part
des fuites de cette Roïauté.
Dans un Confeil des Senateu.s dePologne qui fe tint à Varfovie le if., le
Cardinal Primat propofa entre dauti-s Affaires inteftines, de renvoier la nou-
velle Ereftion de laRoiaute de Fùffei l'examen de la première Diète géné-
rale. C'étoit afin qu'elle n'aportât p^ntie préjudice aux droits de la Couronne
de Pologne. Cependant que le Ronourroit envoier quelqu'un pour compli-
menter ce nouveau Roi de Prune. Queues Membres, comme le Maréchal
& le Chancelier de la Couronne & le Sos-Chancelier de Lituanie, protefte-
rent hautement contre ce Cturonnemen-là. Nonobftant cela, le Roi de
Pologne donna Audience au Conte de \Mllenrooth , que le Roi de Prufle y
envoia en qualité d'AmbafladeurExtraordiaire> Aucun Poionois ne voull/t
fe trouver à cette Audience, ajanr. trouve q-on ne pouvoit pas faire une .
reille démarche , avant que la Réplique ai.mblée en Dieterfe fut decla/é„
fur la nouvelle Roiaute de Prufle. Ce nouveaRoi fit fur ces avis une Dé»
claration, conforme a celle , qui a- e^ rap^rte^^^ par icdlc i{
teftoit que fa nouveUe Roiaute ne iwdoit y aucune maniére fa p^
Roïale, fujette a la République de PoW. D;U mh ne •-*
. cieroit pas non plus aux droits que ladite ^epubut avoit fur la Prufle Du-
cale. C'ëtcat en cas que la Ligne Mafcuhae de & .^ â la lclle feu]e
la Souveraineté de ladite Prufle Ducale avojt erc.defe-.p en \6 * •_ à fail_
<fam. I. Zz gT
$Si MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
1701 . lir. Apres cette démarche un Envoie du Roi de Pologne arriva à Conings-
" berg 8c y félicita le nouveau Roi fur fon avènement à la Couronne. Ce-
lui-ci y reçût en même tems diverfes Lettres de fclieitation de pluficurs au-
tres Potentats, comme du Roi d'Angleterre 8c des Etats Généraux. Il avoit
dépêché d'abord après fa Proclamation fon Envoie Extraordinaire Bertoldi
pour la notifier à l'Empereur. Il eut fon Audience de ce Monarque le 30.
de Janvier , 8c on réfolut à la Cour Impériale d'envoier le Comte de Paar
pour le féliciter. Le Lettre que l'Empereur lui écrivit à ce fujet efr. remar-
quable, en ce qu'il ne lui donnoit que le titre de Dileérioi, qu'il donne aux
Electeurs. Cette formalité avoit été réglée de la forte dois le Traité, qu'on
avoit fait à ce fujet , & dans lequel le nouveau Roi s'éto't entre autres cho-
fes engagé àaffifter l'Empereur, fous une réciproque proneflê, de dix mille
Hommes, en cas que l'un 'ou l'autre vinflènt à être -ttaquez par quelque
Puiffance que ce foit. Le nouveau Roi renoriçoit d'ailturs à cent mille Ecus
d'arrérages & de fubfides, qui lui étoient dûs par l'Enpereur. Voici la Let-
tre de l'Empereur à ce Roi en date du zi, Février 170 1 , traduite de l'Al-
lemand :
Lettre „
del'Em-
l e RUf jj voir qu'en iuite de notre conlentement Ce 3p'(
dcPruf- n damer & Couronner Roi au fujet de fon JMchéJe Pruffe. Comme il efr.
fe.. „ déjà connu depuis long -tems à Votre D-Irctio* que nous avons confervé
„ pour Elle depuis fa tendre jeunefle une &fe6tyn & «ne inclination toute
„ particulière j en confideratibn de la devecion £ de l'attachement qu'EUe a
„ toujours eu pour Nous, pour nôtre Maion Achiducale Se pour tout l'Em-
2 pour cela Nous avons tofjourseu un fînguher plaifir d'apren-
„ la haute Maifon, qui a rendu de fi h>ns frvices à l'Empire ; auffi Nous
„ réjouirions-nous de pouvoir en cett- occa-ion lui en donner une preuve ef-
„ fe&ive, 6c une marque qui durera-oûjcurs j d'autant plus que Nous ac-
„ ceptons avec une particulière fttis'crioi 6c remerciement les proteftations
„ que Vôtre Dile&ion nous a faite, cu'Elle vouloir entièrement dédier &
„ confacrer cette nouvelle digniréRoïak a l'avancement 6c à l'accroiflement
„ de la fplendeur 6c de la profpeiié du Saint Empire 6c de Nôtre Maifon
„ Archiducale. Nous félicitons '/ôtre Dihction de cette haute dignité en
„ bon Ami, Oncle, 6c Frère, «uhaitant «e tout notre cœur qu'avec l'affi-
„ ltance de Dieu, Elle puifle jn feulement la porter heurc«iement 6c avec
„ benediftion, pendant un £Tnd nombre d années, pour la propre gloire 6c
,, pour l'ornement & l'avan'ge de n°tr' c¥r? V??e > maJS $™\e puiflè
" auffi la tranfmettre fans^<:ontmu-ion a ics delcendans ,& affûtant de
plus Vôtre Dileaion * Nous .tirons toujours a coeur fes intérêts, 6c
qu'en toute occafion 'us lui &*** conn°^ que Nous fommes Sec.
11
11
3>
Le Comte de PaanV'avoitrtére"V7,f à Berlin Jour Recette felicita-
tions'enrecounu-d-SedexouteforredIlonueur» & 11VCC ^ prefent d'une
Bague
ET RESOLUTIONS D'E T A T. 385
Bague de la valeur de quinze mille Ecus, que le nouveau Roi lui donna. 11 Uou
fît auflî faire cette notification à la Diète de Ratisbonne. Plufieurs Princes
& Etats de l'Empire y repondirent foit civilement ; mais il y en eut d'autres
qui ne trouvèrent pas à propos de l'accepter , entr' autres les trois Electeurs
Eclefiaftiques, l'Electeur Palatin , & le Grand Maître de l'Ordre Teutoni-
que. Même ce dernier protefta contre dans toutes les formes, comme préten-
dant d'avoir lui-même droit par fon Ordre fur la Prude. On trouva crotefque
que le Pape voulût auffi s'ingérer de faire de fon côté une Proteftation contre
cette nouvelle Roïauté. C'étoit fous le frivole prétexte que cette nouveauté
était très-préjudiciable à la Religion Catholique-Romaine. Sur ce fonde-
ment il fe plaignit avec beaucoup de véhémence dans un Confiftoire public ,
qui fe tint le 21. d'Avril.
C'étoit „ de ce que l'Empereur y avoit donné les mains, 8c avoit même
en quelque manière érigé cette nouvelle Roïauté , fans confïderer qu'il n'a-
„ partenoit qu'au Saint Siège de faire des Rois > que celui-ci étoit un Enne-
,. mi déclaré de la Sainte Eglife, Se qu'il ne pofledoit la Prune qu'en vertu de
l'Apoftafie de fes Predeceffeurs, ôc de l'Ufurpation qu'ils firent de tous les
Biens fierez, tant fur les Chevaliers Teutons, que fur les autres Ecclefiafti-
ques. Il ajouta que pour lui il proteftoit de toutes fes forces contre un
abus fi grandj qu'il n'y donnerait jamais fon confentement , ni de fait, ni
de penfée ; non plus qu'à l'Erection abufive d'un neuvième Electorat en fa-
veur du Duc de Hannover , & qu'il avoit écrit à tous les Princes de fi
Communion, pour les exhorter à ne pas reconnoître ni ce Roi, ni cet
Electeur.
■>•>
55
Il eft aifé de croire qu'à la Cour de Prune on n'eut qu'un dédaigneux mé-
pris de cette démarche. On en eut un pareil pour une étourdie Proteftation ,
qui fut faite à Paris , par devant Notaire d'un Prince de Radziwil contre la
même Roïauté en date du p. du mois de Mars , & dont voici la Copie.
Vox jufta & libéra Joannis Ducis Radziwill , Magni Ducatus Li-
tuanie Inciforis, Lidenfis Gubernatoris, proteflans atque manifeftans
contra attentatum Jus Regni &c. Reipublicse Poloniarum ex ra-
tione utriufque Ducatus Pruiïia; incompetenti Coronâ & Titulo
Regio Regiomonti in Pruffia à Sereniffimo Frederico Tertio
Electore Brandeburgico ufurpati Anno M. D. C. C. I. die 18. Ja-
nuarii , in Acta publica porrecta, ex Actis extrada ,- prado data
in Galliis Lutetise Parifiorum.
COram Confiliariis Régis, nec-non Notariis in Cafteletto Parifienfi fub-
fignatis prxfens adfuit Celfiffimus Princeps Joannes Radziwill, Dux
Olyka, Nieswiez, ôcKlcck, Cornes in Szydlowiec, Mir & Kroze, Sacri
Romani Imperii Princeps , Incifor Magni Ducatus Lithuania; , Lidenfis,
Zz z Jur-
584 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
170 1. Jurborgenfis, Vierzbolovienfis, Uladislàvienfis , êcc. Gubernator, cotrimo-
" rans nunc Pari fi i s in via Sequancnfi-, ex Parochia Sandti Sulpitii , qui infra-
feripta dcclaiavit.
ÇUm ca prima fit 13 pr a ci pua in liber à Re public â liber i'Civis , ubicumque ter-
r arum fit, libertas, &f bac veluli falutaris quadam in publicum effufa libe-
r alitas , bona velle Patria, ma/a nolle fertis tecli/que propriis, & fi quid adbitc
càrius -cita , ufui publi'co immori & immolari , fax in eo mentis hone(/a , gloria
decus ponat fui , non gravatim ideirco pronus , 13 in melius gaudens convertere fa-
ta ultro exilit animus , animât is cunclos Concives , Concivis , ad tuenda jura Pa-
tria, ambitu preffa Sereniffimi Friderici Tertii , Elecloris Brandeburgici ,
•varie infignïti f indebitè nominatif proclamât i lafive , inaugurât i abufivè , corona~
ti impropriè in Regcm PruJ/ia, qtta Reipublica Polona Dominium & hareditas
efl , Ducatufque geffit , non Regni nomen .
Pcnitiîis igitnr re pcrfpeclà , série non lents , nec levis momenti , ver uni monu-
ment i perennis cfje , banc intoierabilem penitiis in herbà fupprimere novitatem , fo-
Jo amore £s? zelo in Patriam excitus , etiam indifians agere , minime anceps &
dubius, u fus voce doloris coramipfo Rege Cbriflianiffimo , adverfus pulàm bis qui
ne El ère & nancifei, in aliéna fundo Coronam rati, dederunt , quod non habiter e,
(3 pofîularunt quod non debucre : Religioni porrà , une (3 Regioni , trifle minati
exinde augurittm. Chriflianiffimorum , Catholicorum , Orthodoxorum ac omnium
in Univcrfiim Regum & Regnorum Majefatibus , pratenfà unâ bac Majeftate
Acatholica grave 13 grande , fequelifque non inanè afiferti prajudicatum (3 praju-
dicium. Polonia vero quod armis varia jaclis, fapè fapius ami boflibus Commu-
nis Patrice , contra omnejns & fas junclis , affequi impoffible vifum, quafito nunc
titulo auferre conatus , Serenifjîmus Eleclor Brandeburgicus , à majoribus quafi
tradito exemplo , vetufiis illis , inquam , ipfis Crucigeris , fuffragantibus pro bono
opère lapides-, captatâ, nefiicam nutritâ, prafe <rt diffidiorum i» Republicâ occa-
fioke , perinde ex Domina veluti in fervam redigi Rerapublicam autumans , (3 il-
lico ipje Dominas, ac fi (3 Rcx, ex Faffallo in Pruffià fieri fatagtns ; immemor
protinus beneficii Reipublica diffitnulantis eo ufque tempus elapfum fœudi , aliàs
jam duditm ad Rempublicam verfi, fuigulari tantummodô prorogatif (3 hoc pri-
vatorum benevolentià : Complurinm item pratenfionum , lafionum , non implcta-
rum conditionum, obligationum in Rempublicam injurias, tumreos aiios reddere ,
fedulis fiudiis folitus , prout in antecedar.eis Traclatibus , £5? in ultimo ratione in-
tercepta Elbingiœ , fat luculenter Orbi notum , ubi ultra menton (3 feitum Rei-
publicœ, fi, & in quantum ab aliquo civium Patriœ aliquid commiffum, & omif-
fum in prœjudicium Reipublica extet.
Contra bac tft id gémis omnia , rcjeiiis pro; fus omnigenis rerum coloribus, £5?
facrofanclè iilafisy &? illibate manentibus primavis juribus Reipublica , qua nul-
lo ufpiani paclo, pratextu, & obtentu privato, vat/o , vcl coaclo , utpotè inter
flagrant ia bel/a, utique contra fidem datam, & obligatam Vafjallatu Reipublica
variari, nec inter dum qu'idem oportuit : [olanniter prote/lor. Prajlb babil 'is , (jf
declicandis fuo loco (3 tempore rationibus ftatûs ad id inconvincibilibus ; ad prafens
lïcei in exteris , fundamentali nihi/ominiis bonorum aque 13 ma/orum Reipublica
compaginis nexu , perinde ac fi in patrià adjîriclus, qu'ode uno quoqtie , fine :mo
quo-
ET RESOLUTIONS D'ETAT. tff
moque) n'thil quidqustm fiât ni , decerni in Re public a pote fi; obviando omnimoda 1701.'
indemnitati Pubiica , 6? prœfcindendo quofuis ulteriores abufus , tantb magisprœ- — —
cufiodiendo , vèl minimas difpofitiones ad agnitionem folii Prufiici , Joli Ré-
gi , reipublkx Poloniarum , idque non Regid , fed Ducali prarogativâ ïnba-
renti.
Hxc omnia ad Comitia Gêner alla Regni remittere perquam neceffarium, & fla-
tta congruum duceris , nec minus pro décore gentis , fc? in Sacram Regiam Maje-
Jlatem Poloniarum , cujus quoque potijfimum jus vertitur , civicâ obfervantiâ , le-
gumque Pair iar uni teneritudine; Eminentifjîmo Cardinali Primati,' Sénat ni pra-
ferlim Refidenti ad latus Régi uni , touque Nobilitati toties quoties ingeminatumr
& patefaclum efio , ornni meliori modo £5* vigore : quia ratione pranominatœ prœ-
tenfie Coronationis & fubfecutarum £5? fubfequendarum lœfionum , £s? pratenfio-
num Rei public £ , imminentiorumque periculorum , hac efi prœfens publica Protefia-
tio , £5? Manifefiatio >' fahâper omnia auclione^ particularitatumque ex gêner a-
litate, dedutlione, profecutione , pleno in robore refervatà facultate.
De quibus fupra declaratis per diclum Cdfiffmum Principem RADZrwiLL
hocce confici Infirumentum per Nos Nicolaum de Lambon 13 Simonem Moufle , No-
tarios fubfignatos requifivit ut in loco £5? tempore Mi utile fit , ad quem utique fi'
nem viderit £5? convenerit. Ablum Parifiis in Palatio ditli Celjifiimi Principis
fupra de fignatO) Anno 1 7 01. die ver 9 nono Martii , horis pomeridianis. Et in-
frà fubfignavit cuni prœdiclis Notariis; ut continetur in nota feu minuta prafen-
tium, queë retenta efi à me diclo Simone Mouffle uno ex pranominatis Notariis.
Sic fgnatim in Originali,
De Lambon et Mouffle.
Pendant ce tems-là, il fe pafïà diverfes Affaires en France. Le Conné-
table de Caiïille y arriva. A fon aproche *' le Roi lui envoia l'Introducteur
Breteuil , avec un gros Cortège pour le complimenter. Il s'en aquitta en ces
termes:
„ T 'Occafion éclatante, Se jufques à préfent inoiiie,qui fait venir Vôtre Ex-
„ L-j cellence ici , engageant le Roi à lui donner une diftin£lion extraordi-
„ naire,& à lui faire rendre les honneurs qui ne font point en ufage à fa Cour
„ pour aucun Ambafladeur, Sa Majelté m'a ordonné de venir julques ici, af-
„ furer Vôtre Excellence de fa part de la joie qu'EUe a de fon arrivée. Vous
„ faurez bien-tôt par fa bouche même, infiniment mieux que je ne pourrais
„ vous le dire, à quel point Sa Majelté porte l'cftime qu'EUe fait de la Na--
„ tion Efpagnole, & avec quels fentimens Elle repond aux marques d'affec-
„ tion Se de confiance , que cette Nation , également vaillante Se fage lui
„ donne chaque jour.
„ Pour moi,Monfieur,je m'eflime bien heureux d'être le premier de nôtre
„ Cour à rendre mes devoirs à Vôtre Excellence, Se à lui marquer l'ellime
,, Se la confidération dont tout le monde efh prévenu pour Elle fur les te-
„ moignages que Nous a rendus Mr. l'Ambaflàdeur d'Efpagne , pour les
' Zz 3 „ fen-
?8<S MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
1701. „ fcntiments duquel Nous avons autant de Déférence , que Nous avons d'A-
■ „ mitié pour fa pcrfonne.
Cet Ambafladeur eut cnfuite de fon Entrée publique fa première Audien-
ce du Roi le 1 4. de Mars. Elle fe pafTa de la forte. Lors qu'il entra dans
la Chambre du Roi, ce Monarque, qui étoit afîîs & couvert, fe leva dès
qu'il l'eut aperçu, 6c fe découvrit. S'érant enfuite recouvert, Se l' Ambafla-
deur aïant fait fes trois révérences, il fe couvrit auflï Se fit le Difcours
fuivant.
»
SIRE,
9»
■>1
JE me préfente à Vôtre Majefté par ordre du Roi mon Maître , Se la re-
connoiflànce qu'il témoigne à Vôtre Majefté de la fituation où elle l'a
mis, s'expliquera un peu mieux par la Lettre qu'il écrit à Vôtre Majefté ,
„ que par tout ce que je pourrais lui dire de fa part. C'cft cette Lettre que
„ je remets entre les mains Roïales de Vôtre Majefté. La Jointe que forma
„ en mourant le Roi Charles II. mon Maître, qui foit en gloire, m'a choi-
„ fi pour venir témoigner avec un profond refpeét à Vôtre Majefté de la part
„ des Roïaumes, du Gouvernement, Se des Peuples qui compofent la Monar-
„ chie d'Efpagne, combien ils ont tous célébré la fage Se prudente diipofitbn
„ du feu Roi , en faveur du Roi mon Maître petit Fils de Vôtre Majefté.
„ Les uns, 6e les autres, avec un refpeér. plein de reconnoiflance remercient Se
„ félicitent Vôtre Majefté dans le tranfport de leur cœur , de voir le Trône
„ d'Efpagne occupé par un Prince qui touche de fi près à Vôtre Majefté.
5, Ils en tirent les confequences les plus flateufes , tant pour la Religion que
„ pour l'Etat. C'eft-ce que cette Lettre dira à Vôtre Majefté, & j'y dois
„ ajouter que c'eft à Vôtre Majefté que nous reconnoiflbns devoir le don pré-
„ tieux qu'elle nous fait d'un Prïfcce. qui a des vertus fi relevées, Se que nous
„ vivrons toujours avec un cœur pénétré de refpeét 6c d'amour pour Vôtre
„ Majefté, 6c pour la bonté qu'elle nous a témoignée, dont nous la fuplirons
,, toujours de nous accorder la continuation : nous tâcherons de l'obtenir par
„ les moïens les plus convenables à l'honneur qu'elle nous fait. Aïant le bon-
„ heur de me voir aux pieds de Vôtre Majefté , qui par fa magnificence me
„ lait l'honneur de m'accorder ces grâces, ces diftinéHons , 6c ces faveurs que
„ je me fuis flaté d'en recevoir , je lui facrifie ma Perfonne , 6c ma Maifon j
6c j'en tire avec confiance fon plus grand relief 6c le mien , 6c le fervice Je
•>•>
„ plus afluré du Roi mon Maître.
L e Roi lui fit cette Reponfe.
„ M O N S I E U R,
5, "^ TOus devez être bien perfuadé que je reçois avec beaucoup de plaifir les
„ V complimens du Roi mon petit Fils ; èc avec beaucoup de iàtisfàc-
3, tion, les reconnoUrances que vous me témoignez de la paît des Roïaumes,
„ Se
ET RESOLUTIONS D'E T A T. 387
„ êc des Etats qui compofent la Monarchie d'Efpagne. Ils ne pouvoient choi- 1701.
„ fir, pour s'en acquiter, une perfonne qui me fût plus agréable que vous.
„ Vous voïez à prêtent l'une & l'autre Nation tellement unies que les deux
„ déformais ne font plus qu'une. Pour moi, je fuis présentement le meilleur
„ Efpagnol du monde, & fi le Roi mon petit Fils me demande des confeils,
„ je ne lui en donnerai que pour la gloire & pour l'intérêt de l'Efpagne. On
„ verra mon petit Fils à la tête des Efpagnols, pour défendre les François j&
„ on me verra à la tête des François pour défendre les Efpagnols. Pour vous,
„ Monfieur , vous devez avoir connu , depuis que vous êtes à ma Cour , la di-
„ ftinclion que je fais de vôtre Perfonne: & la joie, que mes fujets montrèrent
„ hier de vous voir, eft une marque qu'ils connoiflent combien je vous eftime
,, & combien j'aime les Efpagnols.
Le 2p. cet Ambafîàdeur eut fon Audience de Congé, dans laquelle il fît
le Compliment, qu'on va voir avec la Réponfe du Roi.
„ S I R E,
QUand je me vois aux pieds de Vôtre Majefté , je me croirois coupable Adieu
d'une véritable ingratitude, fi je fongeois à m'en éloigner par d'autres Le£Am'"'
„ raifons que par celle de me rendre auprès du Roi fon Petit-Fils. Les bon- <jeur~
j, tez dont Vôtre Majefté a daigné me combler m'engagent pour le refte de d'Efpa-
„ ma vie à joindre au plus profond refpeét. la reconnoiffance la plus vive. Ce Sne«
„ que j'ai vu , Sire , 8c ce que j'ai fenti me feroient apprendre à tous les Ef-
„ pagnols tout ce qu'ils doivent penfer de Vôtre Majefté s'ils ne le fçavoient
„ déjà. Le Roi mon Maître leur dit allez tout^jte que vous êtes, Sire,
„ quand il leur fait voir tout ce qu'il eft. Je lui rendrai compte de tout
„ ce que Vôtre Majefté a fait pour moi par rapport à lui. Je m'eftime-
rai trop heureux toute ma vie d'avoir pu me jetter aux pieds de Vôtre
Majefté. Je lui facrifie ma Perfonne, ma Famille, & tout ce que je fois,.
& je croi devenir par là plus agréable au Roi mon Maître, Petit-Fils de
Vôtre Majefté , & plus propre à le bien fervir.
j>
jj
Ous ne pouviez pas douter, Monfieur , qu'une perfonne que m'en- Reponfc
voyoit le Roi mon Petit-Fils, ne dût m'être fort agréable; mais(|uRoi
,, V vuyoït ic rvoi mon ireut-rus, nc uul m cire ioil agi cauic j mais""""*
„ pour vous , quand vous ne feriez venu ici qu'étant ce que vous êtes , je —
„ vous aurois toujours reçu avec la même eftime & avec la même diftinêlion.
„ C'eft ici une Cérémonie où je ne puis vous parler qu'en gardant certaines
„ formalitez: vous direz donc au Roi mon Petit-Fils combien je fouhaite
„ conferver l'étroite amitié & la bonne intelligence où nous devons toujours
„ être i ôc comme vous devez avoir encore de moi avant vôtre départ une
„ Audience particulière, c'eft-là que je vous dirai tous mes ientimens pour-le
„ Roi mon Petit-Fils, & toute mon eftime pour vous.
L e Roi fit prefent au Connétable de fon Portrait enrichi de la valeur de
vingt mille Ecus, qui eft. le double de la valeur de ceux que la France a accou-
tumé.
}S8 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
î"01- tumé de donner aux Ambafladcurs. Le Connétable, pour témoigner fa gra-
" titude de cette diftinûion, fublïitua ce Portrait dans fa Famille, à Ces Dei-
cendans de mfile en mâle, Se d'aîné en aîné.
Il parut quelques jours auparavant une Pièce fort finguliere. C'étoit des
Lettres Patentes du Roi de France pour conferver au Roi d'Efpagne fon Pe-
tit-Fils les Droits que fît Naiflance lui donne à la Couronne de France. El-
les étoient données en Décembre de 1700. ; mais , Elles ne furent fcellées
qu'en Janvier fuivant, Se enregistrées que le premier de Février. Ces Pa-
tentes font d'autant plus remarquables , qu'Elles étoient contraires faux Re-
nonciations de lj Reine Marie- Therclè. Elles peuvent auffi être un jour des
fources vivantes de brouilleries , pour renverfer les fameufes , mais frivoles
Renonciations, fiites, à l'occafion des Traitez de Paix du Congrès d'Utrechr.
C'eft d'autant que les Affaires des humains font incertaines , 6c que c'eft pref-
que une Règle générale des Cours d'envifager ce qui eft le plus utile , com-
me étant en même tems le plus équitable. Voici ces Lettres Patentes.
•>•>
LETTRES PATENTES,
LOuïs par la grâce de Dieu Roi de France & de Navarre: A tous préfèns
Se à venir, Salut. Les profperitez dont il a plû à Dieu de nous com-
bler pendant le Cours de nôtre Règne, font pour nous autant de motifs
de nous appliquer , non feulement pour le tems préfent , mais encore pour
l'avenir, au bonheur & à la tranquillité des Peuples dont là divine providen-
ce nous a confié le Gouvernement : Ses jugemens impénétrables nous laif-
fent feulement \oit^r,§ue nous ne devons établir nôtre confiance ,ni dans nos for-
ces , ni dans ï 'étendue*de nos Etats , ni dans une nombreufe pofîerité , & que
ces avantages que nous recevons uniquement de fa bonté n'ont de folidité
que celle qu'il lui plaît de leur donner. Comme il veut cependant que les
Rois qu'il choifit pour conduire fes Peuples, prévoient de loin les évene-
mens capables de produire les défordres Se les guerres les plus fanglantes,
qu'ils fe fervent pour y remédier des lumières que fa divine fageffe répand
, fur eux, nous accomplirons fes deflèins, lors qu'au milieu des réjuoiflances
„ univerfelles de nôtre Roïaume, nous envifageons comme une c-hofe poffible,
un trille avenir que nous prions Dieu de détourner à jamais. En même
tems que nous aceptons le Te filament du feu Roi a Ef pagne , que nôtre très- ,
„ cher Se très-amé Fils le Dauphin renonce à fes Droits légitimes fur cette Cou-
„ ronne en faveur de fon fécond Fils le Duc d'Anjou nôtre très-cher Se tres-
„ amé Petit-Fils, inflitué par le feu Roi d'Efpagne fon Héritier univerfel}
„ Que ce Prince connu préientement fous le nom de Philippe V. Roi
„ d'Efpagne, elt prêt d'entrer dans fon Roïaume Se de répondre aux vœux
empreflèz de fes nouveaux Sujets ; ce grand Evénement ne nous empêche
pas de porter nos vues au-delà du tems préfent : Se, lorfque nôtre Succcffion
paraît le mieux établie, nous jugeons qu'il eft également Se du devoir de
, Roi , Se de celui de Père , de déclarer pour l'avenir nôtre volonté conforme
,, aux fentimens que ces deux qualitez nous infpirent. Ainfi, perfuadez que
le Roi d'Efpagne nôtre Petit- Fils confervera toujours pour nous, pour fa
„ Mai-
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ET RESOLUTIONS D'E T A T. 58p
„ Maifon, pour lcRoïaume où il eft né, la même tendreffe Scies mêmes fenti- 1701.
„ mens dont il nous a donné tant de mwques-.que /on exemple uni fiant fes nouveaux T
„ Sujets aux nôtres , va former entr'eux une amitié perpétuelle ci? la cerrefpondan-
„ ce la plus pat 'faite; nous croirions auffi lui (aire une injuftice dont nous fom-
„ mes incapables , 8c caufer un préjudice irréparable à nôtre Roïaume , fi
„ nous regardions déformais comme Etranger un Prince que nous accordons
„ aux demandes unanimes de la Nation Efpagnole.
„ A ces Caufes , Se autres grandes Contïderations à ce nous mouvans , de
„ nôtre grâce lpéciale, pleine puiffance & autorité roïale , Nous avons dit,
„ déclare, & ordonné, Se par ces préfentes fignées de nôtre main , difons,
„ déclarons, Se ordonnons, voulons & nous plaît, Que nôtre très- cher 6c
„ très-amé Petit-Fils le Roi d'Efpagne conferve toujours les droits de foNaif-
„ fonce, de la même manière que s'il failbit fa réfîdence actuelle dans nôtre
„ Roïaume. Ainfi nôtre très-cher & très-amé Fils unique le Dauphin étant
„ le vrai & légitime SucceffeurSc Héritier de nôtre Couronne 8c de nos Etats,
,, 8c après lui nôtre très-cher Se très-amé Petit-Fils le Duc de Brourgognc , s'il
„ arrive (ce qu'à Dieu ne plaife) que nôtre dit Petit- Fils le Duc de Bour-
,, gogne vienne à mourir fans Enfans mâles j ou que ceux qu'il auroit en bon
„ 8c loïal mariage décèdent avant lui ; ou bien que lefdits Enfans mâles ne
., biffent après eux aucuns Enfans mâles nez en légitime mariage} en ce cas
„ nôtre dit Petit-Fils le Roi d'Efpagne, ufont des droits de fo Naiffance, foit
„ le vrai 8c légitime Succeffeur de nôtre Couronne 8c de nos Etas, nonob-
„ liant qu'il fût alors abfent 8c réfîdent hors de nôtre dit Roïaume } 8c im-
„ médiatement après fon décès fes hoirs mâles procréez en loïal mariage vien-
„ dront à ladite iuccefïïon, nonobltant qu'ils foient nez 8c qu'ils habitent hors
„ de notre dit Roïaume: Voulant que pour les Caufes fufdites, nôtre dit pe-
„ tit Fils le Roi d'Efpagne, ni fes Enfans mâles, ne foient cenlêz 8c réputez
„ moins habiles 8c capables de venir à ladite Succeffion , ni aux autres qui leur
„ pourraient écheoir dans nôtre dit Roïaume.
„ Entendons au contraire , que tous droits , 8c autres choies généralement
„ quelconques qui leur pourraient à prélent 8c à l'avenir compéter 8c appar-
„ tenir foient 8c demeurent confervées faines Se entières , comme s'ils réfi-
„ doient 8c habitoient continuellement dans nôtre Roïaume, jufqu'à leur tré-
„ pas , Se que leurs hoirs fuiTent originaires Se régnicoles, les aïant à cet effet ,
, , en tant que befoin eft ou ferait , habilité 8c difpenfé , habilitons Se difpenfons,
,, par cefdites Préfentes.
„ Si donnons en Mandement à nos amez 8c féaux Confeillers les gens te-
„ nans nôtre Cour de Parlement Se Chambre de nos Comptes à Paris Sec. Don-
„ né à Verfoilles au mois de Décembre, l'an de Grâce 1700., Se de nôtre
„ Règne le f8. Signé, LOUIS: Et fur le reply,par le Ro1,Phelypeaux,
„ Se fceilé.
„ Regijlrées , ouï & ce requérant le Procureur Général du Roi , pour être
„ exécutées félon leur forme & teneur. A Paris en Parlement le premier jour de
„ Février 1701.
Signé, D 0 n g o 1 s.
Tom. I. Aaa L'on
300 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
1701. L'on ne fâuroit s'empêcher de raporter ici la Préface de la Déclaration
■ du Roi de France pour la nouvelle Capitation fur fes Sujets. C'cft à caufe
des fpecieux prétextes de la necetiité de cet onéreux impôt.
„ T Ouïs par la grâce de Dieu , Roi de France 6c de Navarre : A tous ceux
„ i— < qui ces prelentes Lettres verront , Salut. La juile difpofition de
Déclara-
tion du
Roi
pour l'é- s> Charles II. Roi dvEfpagne, par laquelle pour conferver fes Roïaumes
tabliffe- „ en un lêul Corps de Monarchie, 6c maintenir le repos général de l'Europe,
ment de n jj a appeUé à laSucceffion de tous fes Etats le Duc d'Anjou nôtre Petit- Fils,
ration'" » H1" en e^- l'Hé^tier légitime par la Renonciation de nôtre très-cher Fils le
Généra- j5 Dauphin, 6c de nôtre Petit-Fils le Duc de Bourgogne, en fa faveur ; aïant
le.d?n" » donné de nouveaux fujets d'envie aux Princes nos voifîns , leur fournit
^ee * „ en même tems des prétextes pour recommencer une Guerre que nous a-
lesle 11. » vi°ns heureufèment éteinte par une Paix, dont les conditions auroient pu
Mars „ être plus avantageufes pour nous,fi nous n'avions préféré le repos de nosSu-
I7°l' » Jcts ^ nos propres intérêts. C'eft dans ce même efpritScdans ces mêmes vues
trée'ê " u k'en ^e nos Sujets 6c de la confervation de la tranquilité de l'Europe, que
l'nrle- 55 Nous avons bien voulu nous defifter des avantages du Traité de Partage, fui-
ra sur. „ vant lequel les Roïaumes de Naples 6c de Sicile, le Duché de Milan, 6c la
„ Province de Guipufcoa , auroient pu nous appartenir ; mais dont nous n'au-
„ rions pu nous mettre en pofïèiïion, fans dépouiller le Duc d'Anjou nô-
„ tre Petit-Fils des droits qui lui font acquis, 6c fans renouveller nous même
», la Guerre , que le bien de nos Sujets 6c celui de toute l'Europe nous obli-
„ geoit d'éviter. Mais les mouvemens 6c les préparatifs qui fc font en Alle-
„ magne, en Angleterre , 6c en Hollande, ne nous huilant pas lieu de douter
„ que quelques Princes jaloux des nouveaux avantages de la Maifon de France,
„ 6c d'autres dans le derLin d'afTujettir entièrement des Peuples, qu'une plus
„ longe Paix auroit pu confirmer dans le relie de liberté dont ils jouïflènt ,
„ n'aient refolu de renouveller la Guerre : Nous nous trouvons obligez de
„ nous mettre en état de leur oppoiér des forces au moins égales à celles
„ qu'ils préparent, pour difputer à nôtre très-cher 6c très amé Frère 6c Petit-
„ Fils le Roi d'Efpagne les droits qui lui font acquis par le Sang, par la dif-
„ pofition du Teiîament du feu Roi Charles II. 6c par les fuftrages 6c
„ le vœu commun de tous les Peuples de fes Roïaumes. Dans ce delîèin
„ Nous avons donné nos ordres pour des levées confiderables de Troupes :
„ mais , comme la Guerre engage inévitablement dans des dépenfes qui exce-
„ deront nos revenus ordinaires} que nous avons fait le fonds pour la levée
„ defdites Troupes 6c pour leur habillement j que nous avons fait les avances
,, pour les Vivres, l'Artillerie, les Magazins, 6c autres dépenfes, pour pou-
,, voir entrer de bonne heure en Campagne, en cas que l'Empereur, les
„ Anglois,6c les Hollandois, continuent dans le defièin de nous faire la Guerre:
„ Nous nous trouvons dans la neceffité d'avoir recours à des fonds extraordi-
„ naires qui foient moins à charge à nos Sujets, que les iccours que nous a-
,, vons été obligez de nous procurer dans la dernière Guerre, par des Traitez,
„ dont plufieurs fubfi lient 6c n'ont pu être, exécutez qu'avec beaucoup de
„ frais, dont nos Sujets ont été Se font encore chargez, fans que nous en
„ aïons
.
ET RESOLUTIONS D'E T A T. 391
„ aïons. profité. Entre tous les moïens qui nous ont été propofez, 8c que 170 1.
„ nous avons meurcment examiné dans nôtre Conléil, Nous avons eftimé ■ ■
„ qu'il n'y en avoit point de plus convenables que de rétablir la Capitation ,
„ qui fe pourra païcr , fans que ceux qui y contribueront en fouffrent un
„ préjudice considérable dans leurs affaires, en s'appliquant à la rendre auflt
„ égale qu'il fe pourra j Se en fàifant ceffer le recouvrement en même temps
„ que la Guerre ceïïèra , en forte que nos Sujets fe trouvent à la Paix au mê-
„ me état qu'ils étoient avant la déclaration de la Guerre. Mais comme il
,, s'eft trouvé plufîeurs embaras dans la Capitation ordonnée en l'année •169^.
„ qui ont donné lieu à des non-valeurs ; en forte que le recouvrement qui en
„ a été fait n'a pas produit les fommes qui nous feroient necefiaires pour fou-
,', tenir les dépenfes indifpenfables de la Guerre, fans le fecours d'autres affaires
„ extraordinaires: Nous avons refolu , en rétabliûant la Capitation , de l'aug-
„ menter, Se de fixer celle de nôtre bonne Ville de Paris Se de chacune des
„ Généralitez, ou "Provinces de nôtre Roïaume, aux fommes que nous efti-
„ mons qu'elles peuvent porter, dont la repartition fera faite pour nôtre bon-
„ ne Ville de Paris, à l'égard des Officiers de Juftice, par les Chefs des
Compagnies j Sec. Stc.
55
•>■>
Comme il s'imprimoit chaque mois un petit Livret fous le Titre à'Ef-
prit des Cours, Gueudeville, qui en étoit l'Auteur, s'égaïa en Réflexions
fur cette Déclaration. Le Comte de Briord , tout malade qu'il étoit , en
fut choqué. Il envoïa fon Ecuier chez l'Auteur pour le maltraiter. Il ne
put cependant exécuter ce deflein , à caufe que des gens du voifinage furvin-
rent. Ce Comte en fit des Plaintes aux Etats Généraux , qui défendirent au
Libraire d'imprimer ledit Livret de YEfprit des Cours. Cela fut caufe qu'il
fut continué fous le Titre de Nouvelles des Cours.
Le Samedi 12. Février le Comte d'Avaux arriva enfin à la Haïe entre cinq
Se fix heures du foir. Il fut le jour fuivant voir le Confeiller - Penfionnaire ,
auquel il dit qu'il venoit avec les mains plaines d'Olivier. Il préfenta
même ce jour -là un Mémoire aux Etats Généraux de la teneur fui-
vante.
„ Le Roi Très-Chrêtien , qui n'a eu d'autre vûë depuis la Signature des Mémoi-
„ Traitez de Riswick,que de maintenir le repos de l'Europe, que cette ^edu
„ Paix y a rétablie, a vu avec plaifir dans les trois Réfolutions de Vos Sei- J^vaux.
„ gneuiies-des if. Se 29. Janvier Se p. du préfent mois de Février, qu'Elles du 13.
„ fouhaitoient d'entrer en Conférence Se en Négociation par leurs Députez Fevner
„ avec le Comte de Briord, ou tel autre qu'il plairoit à Sa Majefté d'autorifer I701-
„ pour conférer enfemble fur laconfervationde la Paix, Se fur les furetez que Vos
„ Seigneuries pourroient équitablement defirer. Et comme la fanté du Comte
„ de Briord ne lui permet pas encore de pouvoir entrer en Conférence, SaMa-
» jefté a commandé au foûffigné Comte d'Avaux de fe rendre pour cet effet in-
„ ceffàmment à la Haïe. Ce que le Comte d'Avaux aïant exécuté avec toute
„ la diligence qui lui a été poffible, il a crû ne devoir point perdre tems à le
„ taire favoir à Vos Seigneuries, Se à leur remettre fa Lettre de Créance,
A-aa 2. „ leur
■ -À.
I— 01.
391 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
„ leur déclarant qu'il eft prêt d'entrer en Conférence avec les Députez de
„ Vos Seigneuries , & que le Roi fon Maître lui a conféré & au Comte de
„ Briord les pouvoirs necetraires pour traiter avec Vos Députez, s'il eft quef-
,, tion de prendre de nouveaux engagemens pour la conlérvation de la Paix.
„ Il peut en attendant les affairer que le Roi fon Maître ne prétend pas fc
„ fervir de fa Puiflance, ni de fon Union avec le Roi d'Efpagne, pour com-
„ mencer une nouvelle - Guerre : Qu'il defire au contraire , que cet évene-
„ ment ferve à maintenir la Paix générale, & qu'il eft prêt à donner à ce fii-
,, jet toutes les afluranecs qu'on pourra lui demander raisonnablement. A la
„ Haïe le 13. Février 1701.
Signe,
Le Comte d'Avaux.
Le même jour qu'il préfenta ce Mémoire, il reçût les vifites des Ambaf-
fadeurs de Suéde & de Mofcovie. Le Lendemain fon Mémoire aïant été lu,
les Etats Généraux le remirent entre les mains de quelques Commiflaires de
leur AfTemblée pour l'examiner, & le firent lavoir au Comte d'Avaux par une
Députation. Celui-ci leur préfenta un fécond Mémoire le Mercredi 16.
qu'il fit même imprimer tel que voici.
„ T 7 Os Seigneuries aïant fait fçavoir au Comte d'Avaux , Ambaiîàdeur.
rtde » Extraordinaire du Roi T. C. qu'elles avoient remis entre les mains
Sa Maje- 30 des Commiflaires le Mémoire qu'il leur a prefenté le 1 5. de ce mois ; l'ex-
ftéTrès- „ treme defir qu'il a de contribuer autant qu'il lui eft poffible au maintien de
Chxè- n ^ paix, l'a porté à ne pas différer de délivrer à Vos Seigneuries un fécond
préfente » Mémoire, qui leur fera connoître encore plus parfaitement la fincerité des
parle m intentions de Sa Majeilé pour le maintien de la tranquilité publique, 6c
Comte „ pour le repos de Meilleurs les Etats Généraux en particulier.
ci'A" „ Les démarches de Sa Majeilé T. C, depuis la mort du Roi d'Efpagne,
fon Ara- î» ont ^a't connoître le véritable defir que Sa Majeilé a de conferver le repos
bafîa- ,, public , & d'entretenir une parfaite intelligence avec Meilleurs les Etats
deurEx- „ Généraux: s'ils ont été allumiez de la refolution qu'Elle a prife d'accepter
traordi- ^ je Teilament de ce Prince, Sa Majeilé, examinant les motiis de la crainte
aiixE'- 55 de Vos Seigneuries, n'a rien oublié pour la diiîïper j Elle vous a informé,
tatsGé- „ comme fes Alliez , des juiles raifons qu'Elle avoit de confiderer les dernières
néraux n difpofitions du feu Roi Catholique^ comme le fondement de la Paix de
des P10- l'Europe. Les plus fortes afliirances de fon aftéclion pour Vos Seigneuries
Unies , 55 ont ete jointes a 1 explication qu Llle leur a donne de les intentions: Mais
a la „ ces mêmes afliirances renouvcllées en toutes occafîons n'ont pu vaincre le
Haïe le J? fiience de Vos Seigneuries, ni les déterminer à répondre à la Lettre que Sa
«riei " Maje^c leur avoit écrite, pour leur faire part de l'avènement du Roi fon
J7CI. » Petit-Fils au Trône d'Efpagne.
„ Il eft inutile de rapellcr a Vos Seigneuries la première demande qu'Ellcs
„ ont fait à Sa Majeilé. Enfin, fa patience a été jufqu'au point de faire di-
Mémoi
ie de la
5) re3
ET RESOLUTIONS D'E T A T. $pj
„ re,& de lauTer croire, que l'état de Tes forces ne lui permettoit pas de com-
„ mencer une nouvelle Guerre: Sa Majefté, uniquement occupée du foin de
„ la prévenir, n'a point été détournée de ce même foin par de tels difcours,,
„ & fon attention continuelle au maintien de la Paix lui a fait recevoir enco-
„ re avec plaifir les deux Mémoires remis à Sa Majefté au nom de Vos
„ Seigneuries. Comme ils lui donnoient lieu de croire que Vos Seigneu-
„ ries vouloient effectivement convenir avec Elle des moïens d'afTurcr leur re'
„ pos , Elle a fiait partir le fouffigné Comte d' A vaux pour écouter les
„ propofîtions que vous auriez à lui faire.
„ Mais, en même tems .que le Roi T. C. a veu tranquilement l'extrême
„ défiance que le Gouvernement des Provinces- Unies a fait ouvertement pa-
„ roître des lînceres intentions de Sa Majefté , Elle n'a pu defàprouver celle
„ du Roi Catholique juitement fondée' fur la Conduite que Vos Seigneuries-
„ ont tenue depuis ion avènement à la Couronne d'Efpagne. Les Mémoires
„ de fon Ambafîàdeur ,& la Lettre de ce Prince , demeurez fans Réponfe , le
„ refus confiant de Vos Seigneuries de le reconnoître en qualité de Roi d'Ef-
„ pagne, cette refolution marquée jufques dans les moindres occafions, dont
„ le détail feroit inutile, ne pouvoient établir la confiance.
„ La Sagefîè de vôtre Gouvernement permet difficilement d'ajouter foi aux
5, bruits répandus y d'un Projet formé d'offrir à ce Prince de le reconnoître,
„ à condition que feparant les Païs-Bas de la Monarchie d'Efpagne il les ce-
„ deroit à l'Archiduc Charles. Il y a peu d'aparence que Vos Seigneuries
„ aient crû, que le Roi d'Efpagne voulût, au commencement de fon Régne,
„ acheter la Paix à ce prix.
„ Mais, quand ces bruits feraient abfolument faux , quand il feroit faux
„ qu'on fit aucun amas extraordinaire d'Armes & de Munitions, aucun pre-
„ paiatifen Hollande pour la Guerre} quand même il n'y aurait nulle Nego-
„ dation pour de nouvelles Alliances , il étdjimpoffible que le Roi d'Efpa-
„ gne vît (ans peine les Places des Païs-Bas impies de Troupes,dont les Maî-
„ très ne veulent point le reconnoître pour Souverain légitime de ces mêmes
„ Places. Le refus de Vos Seigneuries l'a donc obligé de s'adrefîèr à Sa
„ Majefté Très-Chrétienne, & de lui demander les fecours qu'Elle vient de
„ lui donner; mais, Sa Majefté, déclare qu'après avoir pris les précautions ab-
„ folument neceffaires pour établii- l'Autorité légitime du Roi fon' Petit-Fils ,
„ Elle eft entièrement dipofée à convenir inceffamment des moïens d'aflûrer la
^ Paix.
„ Ainfijla tranquilité publique dépend de Vos Seigneuries ; Elle fera bien-
,, tôt affermie pour long- temps, s'il eft vrai que Vos Seigneuries la délirent
„ auiiï ardemment qu'elles le témoignent dans le dernier Mémoire que le
„ Comte de Manchefter Ambafîàdeur du Roi d'Angleterre a remis de vôtre
„ part. Si le Traité de Ryfvvick ponctuellement oblervé jufqu'à prefent ne
„ iuffit pas pour ôter à Vos Seigneuries tout fujet d'allarmcs, èc fur leur feu-
,,, reté,& fur leur Commerce, Sa Majefté veut bien que Vos Seigneuries lui
„ faffeijt de nouvelles propofîtions, mais équitables, & telles que Sa Majc-
„ fté les puifle admettre. Le tems eft précieux ; & (s'il eft permis aux fouf-
Aaa 3 » figné
^P4 MEMOIRES, NEGOTIATIONS,TRAITEZ,
'I701. „ ligne Ambafiâdeur de vous le reprefenter ) fi Vos Seigneuries veulent fincé-
" " ■ „ rement la Paix, Elles doivent éviter de laifièr croire que fous une feinte
„ aparence de Négotiation, leur véritable intention ne foit que d'obtenir ks
„ délais necefiaires pour fe préparera la Guerre. LaConftitution de vôtre
„ Gouvernement, l'attente desRéponfcs du Roi d'Angleterre, n'empêche plus
„ Vos Seigneuries de s'expliquer : Elles doivent être inftruites des intentions
; „ de ce Prince, Elles doivent fçavoir qu'il eit porté à maintenir la Paix,-puis
„ qu'Elles confient à fon AmbafTadeur les RéfoJutions qu'Elles prennent pour
.j, y parvenir.
„ Sa Majefté perfuadee qu'elles font conformes à l'intérêt, que Vos Seig-
neuries ont de contribuer au repos public , s'alïèure auffi que bientôt El-
les s'expliqueront de manière que tout fujet de défiance venant à cefler,
Elle pourra continuer à leur donner en toutes occafions des marques de
l'eitime 18c de l'affection véritable qu'Ellc a toujours confervé pour leur
Republique.
Le Lundi 21. les Etats Généraux prirent une Réfolution en Réponfe
des deux Mémoires, qu'ils lui firent communiquer le jour fuivant, par une
Députation folemnelle. Voici la Réfolution.
Extrait
du Regî-
tre des
Réfuta-
tions de
L.H.P.
lesSeig.
Etats
Géné-
raux des
Provin-
ces-U-
nies des
Pais-Bas,
du Lun-
di ti.
Février
1701.
55
55
55
55
55
55
55
55
55
55
55
55
55
55
55
51
55
«
55
55
5?
35
35
?i
Alant oui leRaport de Mrs. Van Eflen 6c des autres Députez de L. H.
P. pour les Affaires étrangeres,8c enfuite des Réfolution s du 14.8c 17.
de ce mois, aïant examiné les deux Mémoires du Comte d'Avaux Amba-
ffadeur Extraordinaire du Roi de France , par le premier dsfquels il don-
ne avis à L. H. P. de fon arrivée, Se par le fécond pour les prier de fe dé-
clarer fur ce qui regarde la Négociation , pour trouver des moïens pour
conferver la Paix générale ôçpour leur fureté particulière , comme il eft
fpecifié plus au long dans toÉKMémoire Se dans les Regîtres du 14. Se 17.
Sur quoi aïant délibéré, onT|^>uvé à propos que dans une Conférence que
l'on aura avec le Comte d'Avaux on donnera pour Reponfe aux fufdits Mé-
moires, qu'auffi-tôt que L. H. P. ont été avertis par le premier Mémoire
de l'arrivée dudit Comte d'Avaux , ils ont nommé des Députez pour con-
férer avec lui le lendemain, Se qu'ils lui ont déclaré au nom de L. H. P.,
comme ils déclarent encore à préfent, que la Réfolution de S. M. T. C.
d'envoyer ici le Comte d'Avaux leur étoit très-agreable auffi -bien que fa
Perfonne, Se que L. H. P. efperent que leurs dits Députez auront été afTez
heureux pour taire fuffiffemment connoître dans leur première Conférence
que L.H.P. n'ont point donné d'occalion par leur Conduite de prendre
les ombrages qu'ils voient avec chagrin qu'on a pris depuis un tems, Se
qu'ils font venus pour afiurer ledit Comte d'Avaux de la fincere intention
de L. H. P. pour la conservation de la Paix & pour entretenir une bonne
intelligence avec S. M. T. C. Que L. H. P. aïant depuis reçu le fécond
Mémoire qui leur confirme les bonnes intentions que S. M. T. C. a tou-
jours pour la confervation de la Paix, aulli-bien que pour ce qui regarde la
ïûrete particulière de L. H. P. militant beaucoup fur ce point , Se priant
55
L.H,
ET RESOLUTIONS D'ETAT. 395*
„ L. H. P. de fe déclarer au plutôt fur le contenu dudit Mémoire, Elles ont 1701.
„ voulu donner de leur côté une preuve réelle de la fincerité de leurs fenti- — —
„ mens pour le repos public ; fie confiderant que la Négociation pour le re-
„ pos général Se pour la Paix auffi-bien que leur fureté particulière pourroit
,j être retardée par quelque incident inopiné ; d'autant plus qu'Elle doit le
„ foire avec l'intervention de S. M. B. comme intereflè dans le Traité de
„ Partage , aufli-bien que par celle d'autres Princes Se Potentats intereflez
„ dans la Paix générale} Se fur tout que S. M. B. aïant la relation qu'il a dans
5, cet Etat on ne peut fe difpenfer de lui communiquer de tems en tems ce
„ qui fe palTera dans cette Négociation ; fie voïant d'autre part que S. M.
„ T. C. s'intereffe fi fort à ce que le Roi d'Efpagne foit reconnu , pour aller
„ au devant de fès fouhaits Se pour faire ceflèr les bruits dont parle le Mémoi-
„ re, que L. H. P. vouloient attacher à cette reconnoiflance quelques con-
„ ditions, Elles veulent bien déclarer dès à préfent qu'EUcs reconnoitront le
„ Duc d'Anjou pour Roi d'Efpagne & qu'Êlles font refoluës d'entretenir a-
,, vec ce Prince une bonne 8c cordiale Amitié Se Correfpondance comme ils
„ ont eu avec les Rois d'Efpagne fes Prédeceflèurs , fie qu'enfuite L. H. P.
„ font prêtes d'entrer en Négociation avec L. M. T. C. Se C. avec l'inter-
„ vention du Roi de la Grande Bretagne Se de traiter pour la confervation
,5 du repos général fie pour la fureté particulière de cet Etat , comme aura*
„ avec l'intervention de tels Princes fie Potentats, que l'on jugera neceflaires
,, pour cette lalutaire vûë : Qu'ainfi L. H. P. par cette Déclaration fatisfont
„ a ce qu'on a defiré d'EUes , remettant à la fuite de cette Négociation ce
,5 qu'Elles auraient pu demander. Et aïant donné par le rapel de leurs
„ Troupes , qui font dans le Païs - Bas 8c à 'préfent par la reconnoiflance
5) qu'ils font de S. M. Cath. ,une marque fi confiante de l'inclination qu'Elles
„ ont de la confervation de la Paix fie du repos public, 8c qu'Elles fouhaitent
„ avec emprefiement vivre en bonne Amitié Se Correfpondance avec L. M. '
,5 T. C. 8c Cath., Elles croient avoir fatisfait à ce qu'on a requis d'Elles fie
„ qu'ainfi S. M. T. C. retirera fes Troupes des Païs-Bas Espagnols, puis
„ qu'Elles n'^ font venues que parce que celles de l'Etat y étoient reftées : Se
J5 Mrs. Van Eflen aufîî-bien que les autres Députez font priez Se commis par
„ cette Refolution d'en donner avis audit Comte d'Avaux , Sec.
Ensuite de cette Refolution , J'on en prit une autre le lendemain zi.
de la teneur fuivante.
„ Sur le Raport des Députez Sec. du Mémoire du Sr. de Quiros du 19.
„ Décembre 1700. 8c de la Lettre de Sa Majefté qui y étoit jointe, après
„ une préalable Délibération il a été trouvé bon Se arrêté qu'on' fera à ladite
„ Lettre une Reponfe en termes civils pour féliciter Sa Majefté fur fon avenc-
„ ment à la Couronne d'Efpagne , Se pour marquer à Sa Majefté la haute
„ cftime de L. H. P. pour la Perionne Roïale Se pour fon Amitié -, comme
„ aufll pour l'afllirer de leur defir fincere d'entretenir Se de cultiver avec S^
„. Majefté la même bonne intelligence Se étroite Amitié dans laquelle L. H. P,
,, ont
196 MEMOIRES, NEGOTIATION5, TRAIT EZ,
I701, 35 ont cu l'honneur de vivre avec le feu Roi de très - glorieufc Mémoire.
" „ Que cette Lettre feroit envoïée au Sr. de Schonenbcrg autorifé au manie-
„ ment des Affaires de cet Etat à la Cour d'Efpagne, avec ordre de la pré-
„ Tenter à ladite Majefté avec les complimens convenables, Qu'on donne-
„ ra auffi connoilîance de ce qui eft dit ci-deffus, au Sr. de Quiros Ambafla-
„ deur Extraordinaire de fadite Majefté, pour lérvjr de Réponle à Mémoire:
„ Déclarant en même tems que fa Perfonne, en ladite qualité d'Ambalfadeur
„ Extraordinaire de Sa Majefté, eft très-agreable à L.H. P.
O n fit remettre à Don Bernardo de Quiros cette Réfolution , par une Dé-
putation en forme ; 8c l'on dreffà en conformité d'icclle la Lettre pour le Roi
d'Efpagne. On en dépécha une autre de la teneur de la Réfolution qu'on a-
voit fait remettre au Comte d'Avaux en Réponfe de lés deux Mémoires qu'on
envoïa à Sa. Majefté Très-Chrétienne , laquelle y fit environ deux femaines
api'ès la Réponfe fuivante.
Lettre ?j 'HpRès-Chers, grands Amis, Alliez 8c Confederez. La Lettre que Vous
de Fran- » Nous avez écrite le zz. Février confirme l'opinion que nous avions
ce aux n ^e Vos véritables fentimens. Nous voïons avec plaifir l'intérêt que Vous
Etats- „ prenez à l'avènement du Roi Nôtre Petis-Fils à la Couronne d'Efpagne,
Géné" „ & le defir que vous témoignez de contribuer au maintien de la tranquilité
r^Mars » générale, heureufement rétablie par les derniers Traitez. Vous ne devez
I7oi. „ pas douter auffi que Nos intentions ne foïent entièrement conformes à ce
„ que Vous defirez>&, Nous fouvenant toujours de nôtre ancienne Amitié,
j, & de celle des Rois Nos PredecelTeurs > pour vôtre République , Nous fe-
, rons bien aifes que nôtre préfente Union , avec le Roi d'Efpagne , ferve à
Vous faire trouver de nouvelles, furetez pour vôtre Etat, 8c de nouveaux
„ ait, Très-Chers, grands Amis, Alliez 6c Confederez , en fa faite & digne
„ garde. Ecrit à Verfailles le \. Mars 1701. Vôtre bon Ami, Allié, &
.,, Confédéré.
Signé,
LOUIS.
m
Trois jours avant la réception de cette Lettre, le Comte d'Avaux avoit
préfenté aux Etats Généraux le Mémoire fuivant.
„ T E fouffigné Comte d'Avaux, Ambaffàdeur Extraordinaire du Roi Très-
„ JLj Chrétien auprès de Vos Seigneuries, a reçu ordre de Sa Majefté de
vous témoigner qu'Elle a apris avec plaifir la Réfolution que Vos Seigneuries
... ont prife de reconnoître le Roi d'Efpagne. Sa Majefté la regarde com-
„ me une marque du defir que vous avez de maintenir la Paix , 8c comme
% un pas que vous avez fait pour fa confervation, Elle ne donte point qu'après
„ cet-
1?
ET RESOLUTIONS D'E TAT, 397
^ cette première démarche, Vous ne fafliés toutes celles que l'on peut regar- 17OX.
„ der prélentement comme necefTaires pour ôter toute forte d'ombrages. Sa — —
„ Majefté, qui ne defire pas moins de conferver la Paix dans l'Europe, Se de
„ maintenir l'état Ronflant de Vôtre Commerce, aportera de fa part toutes
„ les facilitez que vous pouvez raifonnablement defirer pour aflurer vôtre re-
„ pos. Elle l'a déjà fait} 6c la liberté, qu'Elle a laiflee à vos Troupes de re-
„ tourner dans vos Etats, ne peut être regardée , que comme une marque
„ certaine du defir qu'Elle a de maintenir la tranquilité. Aufli fera- 1- elle
„ bien aife qu'on trouve promptement les moïens de l'affermir entièrement
„ dans les Conférences , que je dois avoir avec vos Députez. Sa Majefté vous
„ aflurant positivement, qu'a'ufli-tôt que tout fujet de défiance fera cefle Se que
„ les chofes feront retournées dans leur premier état , il ne fera plus quef-
„ tion d'augmentation de Troupes , ni d'autres préparatifs de Guérie , 6c
„ lors qu'enfin les Places du Roi d'Efpagne feront en pleine fureté fon in-
„ tention eft d'en retirer fes Troupes , 6c d'en laifler la garde à celles du
„ Roi Catholique.
„ Vos Seigneuries ne doivent point être étonnées que le Roi Catholique
„ fbnge à conferver ces mêmes Places dans la conjoncture préfente, Se le iejour
„ que les Troupes de Sa Majefté Tres-Chrêtienne y feront pendant la Né-
„ gociation , ne doit vous caufer aucune inquiétude , puifque vos intentions
„ pour la Paix ne peuvent être que très bonnes, après les aflurances que vous
„ en donnez au Roi mon Maître, dont Sa Majefté ne veut point douter, per-
„ fuadée comme Elle eft de la fincerité des Paroles de Vos Seigneuries. A
^ la Haïe le f . Février 1701.
Signe-,
Le Comte d'Avaux.
Ce Mémoire, quoique très- obligeant, donnoit cependant fujet de quel-
que défiance. C'étoit d'autant qu'on n'y parloit point des Alliez de l'Etat,
uns lefquels l'on ne pouvoit , ni vouloit-on traiter, ni convenir de rien, &
que d'ailleurs il y avoit des conditions, expliquées d'une manière trop vague,
Se ne faifant entrevoir des efperances que dans une perfpeétive fort éloignée.
Aufli fes Etats Généraux prirent-ils le 9. une Réfolution qu'ils firent commu-
niquer, tant au Comte d'Avaux , qu'à l'Envoie d'Angleterre Stanhope. On
y infera quelques plaintes fur ce que toutes les Troupes de l'Etat qui étoient
dans les Places de la Barrière n'étoient pas revenues, 6c qu'on y en retenoit
quelques-unes. Voici le précis de cette Réfolution.
„ Qu'il a été très-agreable à L. H. P. de voir par la Lettre de Sa Majefté, Réfolu-
„ Qu'Elle a confideré la Reconnoiflance du Roi d'Efpagne par L. H. P. tion des
„ comme une marque de leur inclination pour le maintien de la Paix, com- ? "
„ me en effet il eft vrai que L. H. P. ont fait ce pas pour donner une preuve jy"^
„ réelle de leur véritable intention pour la conservation de ladite Paix -, ce
„ qu'Elles témoigneront encore plus en tout ce qui pourra dépendre d'EUes.
Zw*. /. Bbb „ Qu'il
598 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
01 • •>•> Qïi'il leur eft pareillement très-agreable de voir par ledit Mémoire 6c par
„ ladite Lettre de Sa Majefté , par laquelle il lui a plû de leur répondre d'u-
„ ne manière fi obligeante , la confirmation réitérée des favorables iéntimens
„ de Sa Majelté pour la confervation de la Paix de l'Europe, 6c pour la fû«
„ reté du repos 6c du commerce de cet Etat. Que puifque fuivant leldits
„ Mémoires Sa Majefté a bien voulu donner pour une marque certaine de fon
„ affection la liberté à nos Troupes de venir ici, L. H. P. en attendent l'ea-
„ tier effet ; 6c ce n'eft point fans deplaifir qu'Elles voient que la plus grande
„ partie de leurs Troupes font encore retenues, non-obitanr q. /Elles les
,, aient demandées de nouveau par des inftances réitérées , fuivant la liberté
„ qui leur en a été accordée par Sa Majefté depuis fi long-tems. Que L. H.
„ P. ne fbuhaitent rien tant , comme le témoigne auflî Sa Majefté, que de
„ trouver de promts moïens pour conferver la Paix, le repos public , 8c. leur .
„ fureté particulière. Que L. H. P. par le rapel de leurs Troupes hors des
„ Païs-Bas Efpagnols, 6c par la Reconnoiffance du Roi d'Efpagne , croient
„ avoir fiitisfait à tout ce qu'on a exigé d'Elles , 6c n'avoir laifTe de leur côté-
„ aucun fu jet de méfiance. Qu'ainfi , il ne relie plus rien à faire qu'à entrer
„ en Négociation pour trouver les moïens d'aflùrer la Paix générale, 6c leur
,, iûreté particulière. Que L. H. P. font dès à préfent prêtes à entrer en
„ Conférence avec le Sr. Comte d'Avaux pour délibérer comment 6c fur quel
„ pied ladite Négociation pourra être entamée 6c terminée au plutôt avec
,, l'intervention de tels Princes &c Potentats que l'on jugera à propos pour
„ parvenir à ce but fi falutaire. Les Sis. van EfTen 5c autres Députez pour
„ les Affaires étrangères, étant requis 6c commis pour entrer en Conférence
„ avec ledit Sr. Cçmte d'Avaux iur ce que defïiis, dont on fera la notifica-
„ tion- au Sr. Stanhope Envoie Extraordinaire du Roi de la Grande - Breta-
„ gne , afin d'y agir de concert. Et,, pour cet effet, fera donné l'Ex-
„ trait de cette Réfolution es mains audit Sr. Stanhope par l'Agent Ro-
feboom.
3»
En ce terns-là, l'on prit auffi une Réfolution en Réponfè à un Mémoire
que rAmbafiadeur d'Efpagne Don Bernardo de Qunos avoit préfenté aux E-
t.its Généraux , touchant l'inondation près de Lillo. Comme ce Mémoire
ctoit mal fondé, on y fit le même jour la Réponlê. Voici le Mémoire, 6c
la Réfolution en Rëponfg.
Memoi- ?5 Y £ foufïîgné Ambafïïideur Extraordinaire d'Efpagne s'étoit perfuadé que
l'Ambaf- " -^-' ^" ^- cn colilequcnce de ce qu'il leur a fait eonnoîire le deuxième de
fadeur „ ce mois par le moïen de Mr. le Confeiller-Pcnfiomire , auroient envoie
à'Eim- 5J incdlammcnt les oidres néccfîàires pour faire lâcher les Eclufes à Lillo 6c
fr'^;' iu 35 au Eort Frédéric- Henri, pour arrêter les grands dommages qui dévoient
réfbltcr infailliblement aux Poldrcs Voifins apartenants au Roi fon Maître,
en l'aiflànt lcfdites Eclufes fermées} mais, bien loin d'apprendre que tels or-
dres futfent exécutez , comme le fouffigné Ambairadcur avoit cfpéré , il
„ vient de recevoir des plaintes réitérés de S. A. E. de Bavière fur ce que lef-
„ dites Eclufes étant encore fermées, les eaux avoient déjà couvert unegran-
„ de
3>
3}
ET R E S O L U T T O N S D'E T A T. m
„ de étendue de païs apartenant à Sa Majefté qui en fouflte un notable Pré- I?Cï.
„ judice, lequel augmentera encore plus dans la fuite, fî V. S. n'y veulent pas
„ remédier inceflamment , comme elles peuvent; & alors le fouffigné Ambaf-
„ fadeur fera obligé , comme il elf, dès à préfent , d'en demander à V. S. un
„ dédommagement entier.
„ V. S. regarderaient fans doute une pareille entreprife fur leur Païs com-
„ me un acte d'Hoftilité, fi la Guerre étoit déclarée; mais, en tems de Paix,
„ V. S. ne la pourraient confidérer que comme une infraction rnanirefte des
„ Traitez qui ont toujours été obfervez fort religieulément de la part du
„ Roi Ion Maître, lequel avec raifon fe pourra former la même idée fui- cette
,, entreprife.
„ Le fouffigné Ambafiadeur ne doute pas que V. S., aïant fait une férieufc
„ reflexion fur ce que deflus , ne prennent une prompte Réfolution , dont il
„ fera part en même tems par un Exprès à S. A. E. de Bavière, afin qu'elle
„ puifie prendre fes mefures. A la Haie le p. Mars 1701 .
Signé,
Don Bernardo de Qui r os.
et
9. Mars.
*v À Yant été lu à l'Aflemblëe le Mémoire de M. de Quiros, Ambafiadeur Réfolu
» -L\ Extr du Roi d'Efpagne , touchant la retenue des Eclufes fermées à '10£,^
„ Lillo, &en aïant été délibéré, on a trouvé à propos , que l'on donnera pour "
„ Réponfe au Mémoire dudit Sr. de Quiros, Que dès que Leurs Hautes Puif-
„ fances ont été informées par les plaintes précédentes dudit Sr. de Quiros de
}, l'incommodité , & des dommages prétendus par la retenue de l'Eau à Lil-
,, lo , Elles en ont fait donner connoifiance au Commandant de cette Place ,
„ afin d'en être informées dudit Commandant: Que L. H. P. aïant été infor-
„ mées dudit Commandant, que bien loin d'avoir donné fujet aufdites plain-
„ tes, les Poldres voifins avoient fujet de l'en remercier ; & que jufqu'à pré-
„ fent, le dommage n'étoit pas fi grand, qu'on ne pût le réparer pour moins
,, d'un fou..- Que d'ailleurs ce Commandant avoit promis, aux principaux
„ Propriétaires., qui lui étoient venus parler, d'ouvrir les Eclufes aux premié-
„ res plaintes, & qu'il avoit même donné à leur choix , s'ils aimoient mieux
„ d'avoir les Eclufes ouvertes ou fermées ; leur notifiant , que ce qui s'étoit
„ pafle, n'étoit fait feulement que pour voir , fi le Païs pouvoit être inondé
„ avec de l'eau douce , afin de ne point fe fervir de l'eau ialée en cas de be-
„ foin , dont le Païs ferait gâté : en forte que les Inféreriez en avoient re-
„ mercié le Commandant, & étoient partis fort iatisraits. Qu'enfuite un Paï-
„ fan étant venu fe plaindre des eaux dont il étoit incommo lé , à ce qu'il di-
„ foit, ledit Commandant avoit inceflamment ouvert les Eclufes, afin d'ôter
„ ce prétexte de plainte; Que L. H. P. cependant font étonnées, que S. A.
„ E. de Bavière en ait été G mal informée par les Intéreflez , qui lui ont ra-
„ porté des plaintes mal fondées; Que L. H. P. tacheront toujours de leur
« côté , de contribuer à tout ce qui peut fervir à entretenir la bonne amitié
Bbb 1 M.&
400 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
170 1. „ & Voifinage. L'Extrait de cette Réfolution de L. H. P. fera donné par
' „ l'Agent Rofeboom es mains dudit Sr. de Quiros, pour fervir de Réponfe à
)'
fon Mémoire.
L'o n trouva à popos de n'y pas faire des Plaintes de ce que les François
avoient tracé quelques Lignes. Le Confeil d'Etat en avoit écrit aux Etats
Généraux en date du 24. de Février. C'étoit fur l'Avis que le Commandant
de Lillo en avoit donné. Ces Lignes dévoient s'étendre de la Digue- allant
du Fort de la Perle vers la pointe de Calloos , Se de là fous le Canon de la.
pointe de Lief kens. Ce Commandant mandoit qu'il avoit lui - même vu les
Piquets plantez pour ce deflein. L'on ne voulut non plus lui toucher l'apré-
henfion où l'on étoit, fur l'Avis que l'on avoit reçu que les Troupes Françoi-
iès étoient fi près dudit Lillo, Se de l'Eclufe.
Quatre jours après que l'on eut donné ces deux Réfolutions, on prit celle,
d'écrire à Sa Majefté Britannique. C'étoit fur les Avis de l'Envoie de l'Etat
à Londres de la bonne difpofition du Parlement en faveur de la République,
dont on va parler.
Sa Majelté Britannique , a'iant prorogé d'un mois la Seffion du nouveau Par-
lement, celui-ci s'aflembla le 21. de Février. Le Roi fit dire à la Chambre
des Communes d'aller1, fuivant l'ufage, faire le choix d'un Orateur. La plu-
ralité des voix tomba fur Harlei, connu dans la fuite fous le Nom du Com-
te d'Oxford. Le lendemain 22. , les Communes le préfenterent au Roi,
qui en aprouva le choix , Se parla aux deux Chambres dans les termes qui
fui vent.
Haran- „ MlLORDS ET MESSIEURS,-
guedeSa-
Bruanni- » T ^ Snn^ malheur, qui nous eft arrivé par la mort du Duc de Gloccfterr
que à » 1— ' fait qu'il eft abfolument nécefiaire d'aifurer la Succeffion de laCouron-
fonPar- n ne dans la Ligne Proreftante, après moi, 6c la Princefie.
jement „ Le bonheur de la Nation ,. Se la fureté de nôtre Religion,, qui font les
Févr." » ch°fes q1» nous regardent le plus, femblent tellement en dépendre, que je
1701*. „ ne puis pas douter que vous n'y donniez unanimement les mains j ce que je
recommande férieuiement à vos Confiderations.
„. La mort du Roi d'Eipagne avec la déclaration de fon Succefleur à cette
Monarchie, a fait un fi grand changement dans les Affaires étrangères, que
je me trouve obligé de vous prier de confidérer fort meurement l'état où
elles font à préfent ; Se je ne doute pas que vous ne preniez là deffus les Ré-
folutions les plus avantageufes que faire fe pourra pour l'intérêt & la fureté
de l'Angleterre, pour l'a confervation de la Religion Proteltante en gêné-
il, Se pour la Paix de toute l'Europe.
, Ces choies font d'une telle coniéquence , que j'ai crû qu'elles méri-
toient la confideiation d'un nouveau Parlement , afin qu'on pût connoître
plus piécilcment les Sentimens de la Nation dans cette grande Conjonc-
ture.
»»
„ MES-
ET RESOLUTIONS D'E T A T. 401
„ MESSIEURS DES COMMUNES,
„ TE me trouve obligé de vous recommander d'accorder de tels Subfides
„ J que vous jugerez à propos pour le fervice de cette année , 6c de vous
„ faire refîbuvenir de faire bons les nonvaleurs des fonds, d'aquiter les dettes
„ publiques contractées pendant la dernière Guerre, à quoi on n'a pas encore
„ pourvu.
„ Je fuis auffi obligé de recommander à vos foins l'état de la Flotte , & de
confidérer quelle augmentation il eft néceffaire d'y faire ; étant le boulevard
de la Nation Angloife, elle doit fur- tout être mile fur un bon pied , 6c en
bon état: comme auffi je vous recommande de vouloir fonger à la fureté
des Ports de ce Roïaume , 6c particulièrement de ceux où font nos Vaif-
feaux pendant l'Hyver, auffi bien qu'à donner de bons réglemens, 6c à en-
„ courager le Commerce.
„ Comme ces chofes regardent le Public, j'efpére que vous y penferez fé-
„ rieufement j 6c , fi vous pouviez trouver des moïens propres pour employer
„ les Pauvres, vous vous déchargeriez d'un grand fardeau, outre que vous ren-
„ driez utile à l'Etat tant de mains qui feraient d'un grand fecours à la Na-
„ tion pour, les Manufactures, 6c autres Ouvrages.
„ MYLORDS ET MESSIEURS,
„ J'Efpere que vous prendrez des Réfolutions fi unanimes 6c fi vigoureufès
J'Efpere que vous prendrez des Réfolutions fi
fur les Affaires importantes qui font devant 1
portantes qui font devant vous, qu'il paraîtra par ces'
„ Réfolutions , tant au dehors qu'au dedans , que nous fommes parfàite-
„ ment bien unis enfemblc ; 6c c'eft mon fentiment, que rien ne peut con-
„ tribuer davantage à. nôtre fureté , que de nous rendre confidérables au
dehors.. *
»
L e lendemain les Seigneurs s'étant afTemblez refolurent d'une voix unani-
me de préfenter une Adreffe à Sa Majefté conjointement avec les Commu-
nes, pour l'affurer qu'ils Paffifteroient de tout leur pouvoir pour la fureté de
fon Gouvernement, de la Nation Angloife 6c de fes Alliés , de la Religion
Proteftante en général, 6c pour la Paix de l'Europe. Plufieurs firent là-def-
fus de belles Harangues. L'un dit que ce ferait une honte à la Nation d'a-
bandonner la Hollande , qui avoit tant fait pour la Nation Angloife dans
fon befoin, à un Ennemi qui étoit prêt de l'envahir. Un autre mit fur le
tapis de déclarer la Guerre à la France , avant qu'Elle la déclarât, afin de
fê vanger de l'Affront fait à la Nation en la perfonne du Roi en rompant fans
aucune oecafion le Traité de Partage. Il apuïa même fon Difcours de quel-
ques beaux Argumens. Quelque Evêque s'y étant opofé , le Comte de Peter-
borough fe leva, 6c entreprit l'Evêque, 6c conclut qu'en prenant le parti de
s'opofer au bien de la Nation, il prétendoit peut-être de gagner un Chapeau
de Cardinal. C'eft que l'intention de ce Prélat , tant par raport au Gouverne-
Bbb 3 mène
170 1
40* MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
•1701. ment qu'à celui delà Religion, étoitfort fufpe&e. Le débat termina à fe
— ■ ■ ■ rapoiter au Roi, pour faire telle Alliance avec les Etrangers qu'il trouveroit à
propos. L'Adreiîe aïant été dreflee, 6c unanimement aprouvéc , fut enfuite en-
voyée aux Communes pour avoir leur concurrence. Celles-ci , pour ne pas
Î>aroître les dernières à prendre une pareille Réfolution , n'en firent point la
eéhire. Elles mirent en délibération fi l'on feroit une pareille Adrefie, ce
qui fut voté. Il y eut cependant un débat , fi l'on mettrait qu'on affilierait
le Roi pour la Paix de l'Angleterre, ou pour la Paix de l'Europe en géné-
ral. Les fêntimcns furent partagez fur ce point ; mais , ceux qui étoient
pour y mettre la Paix de l'Europe en général l'emportèrent à la pluralité
des voix.
Il eft certain que les efprits en Angleterre étoient fort aigris contre la Fran-
ce. C'étoit fur- tout fur ce qu'on y avoit apris l'entrée des François dans les
Places des Païs-Bas Efpagnols. Cette Nouvelle cauià une grande fermenta-
tion dans la Ville de Londres. Tout le monde fe jetta chez les Orphevres,
chez lefquels l'on tenoit en dépôt l'argent, 6c fur la Banque , pour retirer fon
argent ; en forte qu'un des plus fameux Orphevres fut obligé de fermer fon
Bureau , 6c la Banque fut contrainte de publier qu'Elle paierait par Al-
phabet.
Les AdrefTes des deux Chambres, dont l'on a allégué le Précis , fans s'a-
mufer à en raporter toute l'étendue , furent préfentées au Roi. Ce Monar-
que fit aux Communes une Réponfe , qu'on va mettre à caufe de fon
contenu.
•>•>
MESSIEURS,
Répon- „ TE vous remercie de vôtre Adrefie, &C de vôtre promt concours aux gran-
fe4u „ J des fins qui y font marquées, lesquelles je tiens être très importantes à
d'Ange- » l'honneur 6c à la fureté de*l' Angleterre : Et je vous afiïïre que je ne
terreaux *» propoferai jamais rien , qui ne ioit pour nôtre commun avantage 6c
Com- „ fureté.
„ Je trouve à propos , puifque j'en ai l'occafion , de vous faire lavoir que je
reçus hier un Mémoire de la part des Etats Généraux. Je vous en re-
mets la Traduction entre les mains , 6c je ferais bien aife d'avoir vôtre
confeil fur le premier Chef qui s'y trouve, comme je demande vôtre affi-
ftance fur le dernier.
'5
munes.
5»
Le Mémoire de l'Envoie des Etats Généraux, dont il eft Eut mention
dans la Reponfe du Roi , eft le fuivant.
Mémoî- h T E fouffigne , Envoie Extraordinaire des Etats Généraux des Provinces-
G tu E" « *""' ^n'es ' a orclre de ttpttfeÂfc* à Vôtre Majefté avec tout le refpeét
Ro?11 « poffible, que L. H. P. aïant confidére que leur retardement à reconnoître
d'Angle- „ le Duc d'Anjou pour Roi d'Efpagne étoit mal interprété, comme fi leur
Icrle- j, but n'était que de gagner du tems , pour fe mettre dans une pofture de
„ Guer-
w
ET RESOLUTIONS D'ETAT. 405
Guerre, fc font crus obligez de Teconnoître le Duc d'Anjou fans condi- 1701» •
tions ; fe refervant à ftipuler dans la Négociation , prête à commencer , — — —
les conditions néceflaires pour aîïurer la Paix de l'Europe , dans laquelle
Négociation les Etats font fermement refolus de rien faire fans le confen-
'„ tement de Vôtre Majefté, & des autres Potentats interelTcz à la Conferva-
„ tion de ladite Paix, comme ils ont expreflement déclaré à l'Ambafladeur
,, de France. Ledit foufîîgné Envoie Extraordinaire a en particulier des or-
„. dres très-exprès de donner à Vôtre Majefté toutes les aflurances poflîbles
que les Etats ne feront aucune démarche que de concert avec Vôtre Ma-
jeux, la priant qu'à cette fin Elle veuille envoier des inftruduons 6c les or-
dres nécessaires à fon Miniftre à la Haïe pour agir conjointement en cette
Négociation, & qu'il ne foit rien conclu fans la participation des uns 6c
„ des autres, 6c jufques à ce que l'Angleterre 6c la Hollande trouvent égale-
ment leur fureté ; ce qui tend en même tems à l'afrermiflement du repos
public. Mais, comme il peut arriver qu'il ne fera pas pofïible de convenir
avec la France 6c l'Efpagne, 6c fur des conditions raifonnables > 6c que la
Négociation étant interrompue les Etats pourront être attaquez par les
„ nombreufes forces, que la France a fait avancer , même jufques fur leurs
„ Frontières, ils ont ordonné audit Envoie de reprefenter à Vôtre Majefté
„ l'extrême neceffité qu'ils auraient dans un fi grand danger, de l'affiftancc de
„ l'Angleterre, 6c de prier Vôtre Majefté d'ordonner que les lecours ftipulez,
„ par les Traitez foient prêts , afin qu'ils puilTent conter fur eux fi le befoin
„. je requiert. A Londres le t. Mars 1701.
De Geldermalsen.
Sur cette communication , les Communes prièrent le Roi d'autorifer fon
Envoie à la Haïe pour agir de concert avec les Etats Généraux dans la Né-
gociation avec la Comte d'Avaux, 6c l'Ambafladeur d'Efpagne. Cet Envoie
reçût la nuit du 2.1. au 22. Mars fa Patente de Plénipotentiaire fons le
Grand Seau d'Angleterre. Il fut le Mardi 22 , à une heure 6c demi après mi-
di, en Conférence avec les Députez des Etats Généraux, pour la leur commu-
niquer ; 6c on y refolut de donner au Comte d'Avaux les Démandes de l'E-
tat , 6c l'Envoie Britannique celles de l'Angleterre. Sept Députez , avec
l'Envoie, furent le même loir chez le Comte d'Avaux , .auquel ils remirent
ces Demandes. Celles des Etats étoient.
I- /^Omme Sa Majefté le Roi de la Grande-Bretagne, 6c les Seigneurs Deman-
V^/ Etats Généraux des Provinces-Unies des Païs-Bas , ont conclu le 2f. des pro-
du mois de Mars de l'année pafiee 1700. , avec Sa Maiefté Très-Chêtiërme , P0'^
.,i»-T'" ■.' j tï -. > ■irT?iToTJ • ".' au Coin-
un lraite de Partage pour prévenir les Troubles 6c înconveniens qui auroient led'A-
pû furvenir au fujet de la Succeflîon du dernier Roi d'Efpagne , en cas qu'il vaux ,
vint à mourir fins Eniiins: 6c comme entre autres le principal obiet des hauts parles
Con. Dcputez
4«4 MÉMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAIT EZ,
*70i. Contractants dans cette Affaire, a été de conferver la Paix Se la tranquilité
r générale dans l'Europe , & d'affermir la fureté particulière de cet Etat} il
des Etats cil évident, que quoique S. M. T. C. ait trouvé bon d'accepter le Teftament
Gêné- cjl] feu R0i d'Efpagne,, laiffânt-là le Traité de Partage, que cependant L.
ai Mars. ^- **• nc ^°'vent point être fruftrées de l'effet du même Traité} mais que
* l'objet du Traité, à fçavoir la Paix Se la tranquilité générale , Se leur fureté
particulière, leur doit être donné, au moins , par quelque équivalent ou au-
tre moïen.
II. Sur ce fondement, L. H. P. demandent, que pour conferver la Paix Se
tranquilité générale , dans laquelle confifte une grande partie de leur fureté
particulière, il foit donné à S. M. Imp. contentement Se une fatisfaétion rai-
sonnable, furies prétendons à la Succeffion d'Efpagne, lefquelles étoient
réglées par le Traité de Partage , 8c que Sa Majefté Impériale foit admife 6c
incline dans le Traité que S. M. de la Grande-Bretagne 8c L. H. P. feront
avec Leurs Majeftez T. C. 8c Catholique j 8c que confequemment Elle fera
invitée à cette Négociation.
III. Que S. M. T. C. dans un certain tems fixé , auffi court qu'on en
pourra convenir , retirera toutes fes Troupes des Païs-Bas Efpagnols, uns y
en biffer aucunes,, 8c fans qu'il lui foit permis de les y renvoier jamais} mais ,
qu'à l'avenir dans lefdits Païs-Bas Efpagnols, (excepté dans les Places de fu-
reté dont il fera fait mention dans l'Article fuivant) on pourra tenir unique-
ment des Troupes Efpagnoles, Walonnes, ou originaires des Païs-Bas de S.
M. Catholique, étant privativement à Elle, à fon ferment 8c à fa folde., 8c
point des Troupes de Sa Majefté T. C. directement ni indirectement} mais, fï
le Roi d'Efpagne venoit à requérir des Troupes du Roi de la Grande-Breta-
gne, ou de L. H. P. , pour la âefenfe de fes Païs-Bas ,il leur fera permis Se les
y envoies
IV. Que pour la fureté particulière de cet Etat , on cédera Se confiera à
la Garde privative de L. H. P. les Villes, Places , Se Fortereffès de Venlo,
Roermonde , Stevenswaard , Luxembourg , Namur , Charleroy , Mons ,
Dendermonde, Damme,8e St. Donaas,, avec leurs Châteaux 8c Citadelles,
enfèmble avec tous les Forts &c Ouvrages de Fortifications y appartenants ,
chacun dans l'état où il-fe .trouve à prefent, avec pouvoir d'y mettre 8c te-
nir telles Garnifons , foit de leur part, foit de celle de leurs Alliez, qu'El-
Jes trouveront à propos &C qu'Elles voudraient requérir pour cela } fans qu'il
foit permis à la France, ni à l'Efpagne,de bâtir derrière ni à l'entour defdites
, Villes, Châteaux, Places, 8c Fortereffès, aucuns autres Forts, Lignes, ni Ou-
vrages de Fortification , ni de faire quelque chofe que ce foit , qui pourrait
porter préjudice à la Garde defdites Villes , Châteaux , Places, Se Fortereffès,
8c en empêcher l'effet.
V. Qu'il fera permis à L. H. P. d'augmenter, diminuer , Sz changer leurs
Garnifons dans lefdites Villes, Châteaux, Places, 8c Fortereffès, toutes 8c
quantes fois , qu'Etes le trouveront bon. Comme auffi d'y envoier des Vi-
vres, Munitions, Armes , Matériaux pour les Fortifications, 8c généralement
tout ce qui pourra convenir , 8c être neceffâire au fervice des Garnifons Se
For-
ET RESOLUTIONS D'E T A T. 4oj-
Fortifications. Que le paflage pour le tranfport de toutes ces chofes, auflî 1701.
bien que pour les Garnifons, tant en allant qu'en revenant, fera libre Se ouvert ■
en tout tems, par les Terres, Se fur les Rivières du territoire de S, M. Catholi-
que, fans qu'on puifli y mettre aucun empêchement , directement ni indirec-
tement.
VI. Que L- H. P. auront le plein Commandement Se Autorité fur les Vil-
les , Places , Châteaux , & Forterefles , où elles auront leurs Garnifons , &
qu'elles y mettront des Gouverneurs , Se Commandans, tels qu'Ellcs le trou-
veront bon, fauf Se fans préjudice des autres Droits 6c Revenus du Roi d'Ef-
pagne, fur Se dans lefdites Villes Se Places.
VII. Que de plus L. H. P. auront la liberté de fortifier , Se de reparer , les
Fortifications défaites Villes & Places, Châteaux, Se Forterefles, ainfi qu'El-
les le jugeront -à propos, & de faire généralement tout ce qu' Elles trouveront
neceflaire pour leur défenfe.
VIII. Qu'aucuns Roïaumes, Provinces, Villes, Terres, ni Places , ap-
partenant à la Couronne d'Efpagne tant dedans que hors de l'Europe, Se fpé-
cialement aucunes Villes' ni Terres des Païs-Bas Efpagnols , ne pourront devol-
ver ni parvenir la Couronne de France, par donation, achat, échange, con-
tra£r. de Mariage, Succeflion par Teftament, ni ab inteflato^ m par quelque
autre Titre que ce puifle être j Se qu'elles ne pourront être foûmnes au pou-
voir ni à l'autorité du Roi Très-Chrétien en aucune manière.
IX. "Que dans les Roïaumes Se Etats du Roi d'Efpagne tant dedans que
hors de l'Europe, Se par confequent auflî dans les Païs-Bas Efpagnols , les
Sujets Se Habitans des Provinces-Unies demeureront dans la jouïflance de tous
.les Privilèges, Droits, Franchifes, Se autres avantages, tant à l'égard de leur
Navigation, Commerce, Se libre ufage des Ports, qu'en toute autre choie,,
tout ainfi qu'ils en ont joui ou dû jouir ci-devant, jufques à la mort du feu
Roi d'Efpagne} Se qu'ainfi toutes chofes telles qu'elles puiflènt être, excepté
ce dont on fera convenu autrement par le Traité à faire , feront laiflees en
l'état où elles ont été du tems de la mort du feu Roi d'Efpagne derniè-
rement décédé.
X. Que le Traité entre la Couronne d'Efpagne Se L.H.P. conclu à Mun-
fler en 1648., comme auflî tous les autre: Traitez Se Conventions entre l'Ef-
pagne Se cet Etat, feront renouveliez, où tenus pour renouveliez, de la ma-
nière dont on pourra convenir enfemble, d'autant qu'ils ne foient changez par
le Traité qu'on fera. . &' ■
XI. Que de plus les Sujets Se Habitans des Provinces - Unies jouiront
dans tous les Roïaumes, Etats, Villes, Places, Baies, Se Havres de la Cou-
ronne d'Efpagne, dedans Se hors de l'Europe, des mêmes Privilèges, Droits,
Se Franchifes, comme auflî de toutes \es Immunitez Se avantages, dont
jouïïfent les Sujets de Sa Majeïté Très - Chrétienne Se des autres Princes Se
Potentats jauflî-bien que de ceux qui leur feront accordez, Se dont ils jouiront
à l'avenir.
XII. Que Leurs Majeftez les Rois de France Se d'Efpagne promettent fo-
lemnellement pour eux, Se pour leurs Suecefléurs, l'obfervation exacte de
ious ces points en général, Se de chacun d'eux en particulier.
Tout. I. Ccc XIII.
4=tf MEMOIRES, NEGOCIATIONS, TRAITEZ,
1701. Xfll. Que le Traité, qu'on fera fur ce Sujet, fera garanti par tels Rois,
■ Princes, & Potentats que l'un ou l'autre des Hauts Contractants y requerrerontj
& cela de l'a manière la plus forte qu'ils trouveront convenir.
XIV. Le Tout avec referve d'amplifier ces points dans la Négociation T
autant qu'on le trouvera neceffaire, pour leur élucidation, & pour l'cclaircif-
fement de leur véritable fens 8c intention, comme auffi pour' prévenir toute
forte de diiputes. Fait à la Haïe le iz. Mars 1701.
Deman- I.
des pro-
L e s Demandes de l'Angleterre étoient dans termes fuivans.
COmme Sa Majefté le Roi de la Grande-Bretagne 6c les Seigneurs
Etas Généraux des Provinces-Unies ont conclu le 2f . du" mois de
au Com- ^ars ^e l'ann£e pafTée 1700. un Traité de Partage pour prévenir les troubles
te d'A- & une nouvelle Guerre qu'on avoit tout fujet d'aprehender par la mort du
vaux) Roi d'Efpagne fans enfansjSc qu'entre autres le principal object des Hauts Con-
par le traétans dans cette Affaire a été de coniérver la Paix 6c la tranquilité générale
temi'airë ^ans l'Europe, & d'affermir la fureté particulière de> Roïaumes de Sa Majefté}.
d'Angle- il eit évident, que quoique S. M. T. C. ait trouvé bon d'accepter le Tefta-
tene,!e ment du feu Roi d'Espagne, fe départant ainfi du Partage, que ccp'en-
?i.Mars. (jant s;l Majefté Britannique ne doit pas perdre l'effet du même Traité, mais
que l'objccl du Traité, à favoir la Paix 6c la tranquilité générale 6c fa fureté
particulière, lui doit être donnée, du moins par quelque Equivalent ou autre
moïen. A cette fin, le Sr. Stanhope Envoie & Plenipotcntiare de Sa Ma-
jefté Britannique auprès des Etats Généraux des Provinces-Unies a ordre de
propofer audit Sr. Comte d'Avaux les Points & Articles fuivans.
II. Que pour conferver la Paix 6c la tranquilité générale , dans laquelle
confifte une grande partie de la fureté particulière des Etats de Sa Majeflé
Britannique , Sa Majefté Impériale fera invitée d'entrer en cette Négotia-
tion & lui fera donné contentement 6c une raifonnable fatisfaétion fur fes
prétentions à la Succeffion d'Efpagne, lesquelles étoient réglées par le Trai-
té de Partage, £c que fadite Majefté Impériale fera adrriifê 6c inclufe dans le
Traité que Sa Majefté Britannique 6c Leurs Hautes Puiffances feront avec
Sa Majefté Trcs-Chrêtiennc 6c la Couronne d'Efpagne.
' III. Que Sa Majefté T. C. dans un certain tems limité, aufli court qu'on
en pourra convenir, retirera toutes fes Troupes des Païs-Bas Efpagnols fans y
en biffer aucunes 6c fans qu'il lui foit permis de les y renvoyer jamais; mais qu'à
l'avenir dans lefditî Païs-Bas Efpagnols (excepté dans les Places de fureté
dont il fera fait mention dans l'Article fuivant ) on pourra tenir uniquement
des Troupes Efpagnoles, Walonnes,ou des Païs fujets à la Monarchie d'Ef- '
pagne privât ivement, fous le ferment 6c à la foldc de l'Efpagne, 6c point des
Troupes de Sa Majefté Très -Chrétienne directement ou indirectement : à
la referve pourtant, qu'il fera permis au Roi de la Grande-Bretagne 6c aux Sei-
gneurs Etats Généraux de pouvoir envoïer de leurs Troupes pour la défenfe
dcldits Païs-Bas lorfqu'ils en feront légitimement requis.
IV Que pour la fureté particulière des Etats de Sa Majefté Britannique,
on cédera Se confiera à la garde privative de Sa Majefté les Villes d'Oftcnde
ET RESOLUTIONS D'ETAT. 407
& de Nieuporr , avec leurs Ports, Châteaux, ou Citadelles,6c avec tous les Forts l70x ■
&c Ouvrages de Fortifications y apartenans, le tout dans l'état où il fe trou-
ve préfentement, avec pouvoir d'y mettre Se tenir telles Gurnifons foit de Tes
Troupes ou de les Alliez qu'Elle voudrait requérir pour cela & qu'Elle trou-
vera à propos i fans qu'il ibit permis à la France, ou à l'Elpagne ,d'y mettre
la moindre Garnifon , ou de bâtir derrière ou à l'entour defdites Villes, Ports,
6c Forterefles, aucuns autres Forts, Lignes, ou Ouvrages de Fortification, ou de
faire quelque chofè que ce foit , qui pourrait porter préjudice à la garde
defdites Villes 6c Forterefles ,6c en empêcher l'effet.
V. Que Sa Majefté Britannique pourra augmenter , diminuer, 6t changer
les Garnifons defdites Villes ôc Fortcrefles.autant de fois qu'Elle le trouvera bon,
& y envoïer des Vivres», Munitions, Armes, Matériaux pour lesFortifications,£c
généralement tout ce qui. pourra convenir, & être necefl'aire au fervice des Gai-
nifons èc Fortifications, fans qu'il lui foit fait aucun empêchement, foit par Mer
ni par Terre, directement ou indirectement.
VI. Que Sa Majefté Britannique aura le Plein Commandement & Autorité
fur lefdites Villes, Ports, Châteaux, & Forterefles, où Elle aura fes Garnifons 6c
Commandans tels qu'Elle trouvera bons,fauf 6c fans préjudice des autres Droits
6c Revenus de la Couronne d'Efpagne fur 6c dans lefdites Villes.
VII. Que de plus Sa Majefté Britannique aura la liberté de fortifier 6c re-
parer les Fortifications defdites Villes 6c Forterefles, ainfi qu'Elle le jugera à
propos, & de frire généralement tout ce qu'Elle trouvera néceflaire pour leur
defrénfe.
VIII. Qu'aucuns Roïaumes, Provinces, Villes, Terres ou Places aparte-
nant à la Couronne d'Efpagne tant dedans que hors del'Europe,6c fpecialement
aucunes Villes, Places, ou Terres desPaïs-Bas Efpagnolsne pourront être cédées
ou tranfportées , ni ne pourront devolver ou parvenir à la Couronne de France,
par Donation, Achapt, Echange, Contraft de Mariage, Succeflion par Tes-
tament, ou ab intejlaro ,ni par quelqu'autreTître que ce puifîé être, 6c qu'Elles
ne pourront être foumifes au gouvoir ou fous l'autorité du Roi Très-Chrê-
tien en aucune manière.
IX. Que dans les Etats 6c Roïaumes de la Monarchie d'Efpagne, tant de-
dans que dehors l'Europe, 6c par confequent auffi dans les Païs-Bas Efpagnols,
les Sujets de Sa Majefté Britannique demeureront dans la jouïffance de tous
les Privilèges, Droits, Franchifes , 6c autres avantages , tant à l'égard de leur
Navigation, Commerce, le libre ufage des Ports, qu'en tout autre <;hofe dont
ils ont joui ou dû jouir jufques à la mort du feu Roi d'Efpagne, 6c qu'ainfï ,
le tout tel qu'il purfTe être, excepté ce dont on fera convenu autrement j par
le Traité à faire, fera laiffé en l'état où il a été au tems de la mort du feu Roi
d'Efpagne.
X. Que tous les Traitez de Paix 6c de Commerce 6c autres Conventions
entre l'Angleterre 6c l'Efpagne feront renouveliez ou tenus pour renouveliez t
de la manière dont on pourra convenir enfemble d'autant qu'ils ne feront chan-
gez par le Traité qu'on fera.
XI. Que de plus les Sujets de Sa Majefté Britannique jouiront dans tous
les Roïaumes, Etats, Villes, Places, Baies, 6c Havres delà Couronne d'Ef-
Ccc i pagne
4o8 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAIT EZ,
1701. pagne, dedans & hors de l'Europe, des mêmes Privilèges, Droits, 6c Fran-
" chifes, comme aufli de routes les immunitez & avantages dont jouïflcnt les
Sujets de Sa Majcité Très- Chrétienne ou des autres Princes 6c Potentats , auf-
fi-bien que de ceux qui leur feront accordez Se dont ils jouiront à l'a-
venir.
XII. Que de la part de la France & d'Efpagne on promettra folemnelle-
ment l'oblèrvation exacte de tous ces points 6c généralement de chacun en
particulier. .
XIII. Que le Traité qu'on fera fur ce fujet fera garanti par tels Rois, Prin-
ces, 6c Potentats , que l'un ou l'autre des Hauts Contraélans y îequerreront, 6c
cela de la manière la plus forte qu'ils trouveront convenir.
XIV. Le Tout avec referve d'amplifier ces Points dans la Négotiation au-
tant qu'on le trouvera nécefiaire pour l'éclairciflément de leur véritable fens
6c intention, comme aufîi pour prévenir toute forte de dilpute. Préfenté à la
Haïe le zz. Mars 1701.
Signé,
Alexandre Stanhope.'
Le Comte d'Avaux, après la Lecture de ces Demandes, fe récria fur leur
contenu, 6c dit que le Roi fon Maître, à l'âge où il étoit, ne voudroit pas
flétrir fa Réputation , en donnant les mains à un femblablc Démembrement de
Ki Monarchie Efpagnole, 6c qu'affurement ces Propositions n'étoient pas rai-
fonnables. On lui répondit, que ce n'étoit pas un Démembrement qu'on
demandoit,mais feulement d'avoir les Places dont jon.faifoit mention, en pu-
re garde, ainfi qu'on avoit fait depuis un long cours d'années. Le Comte ré-
pliqua qu'il n'étoit venu, que pour entendre ce qu'on auroit à lui propoler,
6c qu'ainfi il n'étoit point inftruit fur d'autres choies, Se qu'il en feroit part
au Roi fon Maître, pour (avoir fes intentions, 6c avoir des Inftructions.
Il feroit arrivé un incident fur le Cérémonie!, qui auroit retardé la Confé-
rence, fi l'onn' avoit pas eu la prevoiance d'y apo.ter du remède. C'eft que
les Ambafiadeurs donnent la main chez eux aux Députez des Etats Généraux,
Se ces Députez la donnent toujours aux Envoiez d'Angleterre. Cependant
par une Convention faite entre les Cours- d'Angleterre 6c de France les Am-
bafiadeurs iefpeétifs ne donnent point la main aux Envoiez. Ainfi, le Comte
d'Avaux la donnant aux Députez de l'Etat, 6c ceux-ci la donnant aux En-
voiez d'Angleterre, le Comte d'Avaux la lui auroit par confequent donnée.On
avoit précedement écrit là-deflus au Roi d'Angleterre. Ce Prince avoit là-
defius ordonné à fon Envoie de ne point prendre la main fur les Députez des.
Etats, 6c d'en ulèr avec le Comte d'Avaux tout de même que fi les Députez
des Etats n'y étoient pas préfents. 11 elï vrai qu'il y avoit cette reitriétion ,
que cela feroit fans confequenec.
Deux jours après, y aïant eu une Conférence entre le Confeillcr-Pcnfion-
naire 6c l'Ambafladeur de Suéde, qui avoit été Médiateur de la Paix de Ris-
wick,. que les Euts prétendoient avoir été enfrainte par rapoit à l'Article de
la
ET RESOLUTIONS D'E T A T. 4oP
la Barrière, d'où l'on avoir, fait fortir les Troupes de l'Etat, le Comte d'A- 1701.
vaux en fut averti. Tl alla d'abord après diné chez l'Ambaffadeur de Suéde, J " ' '
& après y avoir demeuré quelque tems , alla faire un tour chez lui , 6c fe
tranfporta enfuite chez le Confeiller-Penfionnaire. Celui-ci qui eft fort habi-
le aperçût aux Difcours que le Comte lui tenoit, qu'il prenoit à tâche de vou-
loir infirmer aux Hollaudois de l'ombrage fur les Demandes des Anglois. Il
réitéra ce qu'il avoit dit lemême jour à d'autres, que les Hollandois étoient •
de bonnes gens, 5c qu'ils ne voïoient pas que la Demande de l'Angleterre ne
pouvoit que leur être extrêmement préjudiciable. C'eft en ce que l'Angle-
terre , aïant Nieuport & Oftende , Elle brideroit abfolument la Hollande &
la Zelande. Il fe laiflâ échaper,en difant que pour deux ou trois Places, U
croïoit qu'on pourrait bien les remettre aux Hollandois, en hipoteque pour les
fommes que l'Efpagne leur devoit , 6c jufques à ce qu'ils en fuifent rem-
bourfez.
L'AmbafTadeur d'Efpagne,Don BernarJo de Quiros,qui aimoit les Pais-Bas
Efpagnols, vit avec une grande colère les Demandes. Il avoit même refolu
de partir d'abord de la Haie, fur ce qu'il n'avoit pas été apellé à la Conféren-
ce > mais, les Ambaffadeurs de Suéde & de France le détournèrent de ce def-
fein. Le Comte de Briord partit en effet peu de jours après. Ce fut après
avoir donné des marquevd'une grande colère, fur les Demandes. Il fe laiflâ
échaper avec quelques perfonnes,que les Hollandois étoient des mal-avifez de
faire de telles Demandes, 6c que l'Affront qu'ils faifoient par-là à ion Maître '
ne pouvoit fe laver que dans leur fang. Son imprudence alla même plus loin j
car il tint des difcours forts indiferets à l'Agent Rofeboom , que le? Etats lui
avoient envoie pour lui fouhaiter un bon voiage. On lui fit aufli le'préfènt
ordinaire aux Ambaifadeurs, qui confifte en une Chaine 6c Médaille d'or de la
valeur de fix mille florins de Hollande.
Sur deux Lettres qu'on avoit reçu d'Angleterre de l'Envoie des Etats,
portant comment le Roi avoit remis fon Mémoire aux Communes, & ce qui
s'étoit enfuivi, les Etats Généraux prirent la Réfolution le ii. de Mars d'é-
crire audit Roi. La teneur de la Réfolution 6c de la Lettre étoit.
„ /^\XJe L. H. P. avoient apris avec plaifîr la favorable réflexion qu'il avoit Réfoîu*'
„ V^ plû à Sa Majefté de faire fur le Mémoire, que leur Envoie lui avoit tion des
„ préfemé à leur nom fur les préfentes Conjonétures , comme auflï la promtc E-G. du
„ Se unanime Réfolution prife là-deflus par la Chambre des Communes, à là II" ar''
I ,, quelle Sa Majefté avoit trouvé à propos d'en faire part, & l'Adreflè pre-
,, fentée,en confequence de ladite Réfolution, à Sa Majefté. Que la haute
„ fageffe de Sa Majefté étant connue à L. H. P. & aïant tant de preuves de
„ fon Amitié 6c Affeélion pour leur Etat, Elles ne pouvoient douter que
„ les fentknens de Sa Majefté ne fuflènt entièrement conformes à ceux de fes
„ Peuples. Que L. H. P. l'avoient déjà vu par fa Reponfe à l'Adreffe, Se
„ avoient trouvé l'une & l'autre fi avantageufes pour l'intérêt commua , fi
„ obligeantes pour Elles, 6c fi juftes 6c généreufesà l'égard de l'accompliflc-
„ ment des Traitez , qu'Ellcs ne pouvoient différer de témoigner fans perte
Ccc 5 „ de
4io MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
i"Ci. „ de tems à Sa Maieité la particulière fatisfa&fon qu'Elles en ont, & la re-
" „ cônnoifTànce qu'Elles en conferveront toujours. Que L. H. P. ont depuis
,, long- tems regarde la bonne intelligence & l'étroite union des deux Na-
„ tions, comme neceflaire pour leur i'ûreté particulière, & pour la conferva-
„ tion de la Liberté & de la Religion de l'une & de l'autre. Que dans la
„ préfente fituation des Affaires, Elles croient que cette bonne Intelligence
„ & Union étoit plus neceflaire que jamais. Ainfi, que L. H. P^ont jugé Se
„ jugent encore que leur intérêt eil infeparable de ceux de Sa Majélte, &:
„ de les Roïaumcs; & qu'Elles étant à prêtent encouragées par les favora-
,, blés difpofitions de Sa Majeité & de ion Parlement ne fe départiront en au-
„ cune manière de leurs fentimens. Que L. H. P. efperoient, que dans" la
„ prochaine Négociation, qu'Elles commenceront conjoinctxment avec Sa
„ Majeité , on pourra trouver des moïens convenables pour l'aft ermiflement
„ de leur fureté refpeclive, pour la confervation de la Paix de l'Europe; L.
„ H. P. étant perfuadées que c'eit l'unique but de Sa Majeité en cette Affai-
„ re. Qu'Elles remercioient Sa Majeité de ce qu'il lui avoit plû de donner
„ des Ordres ôc des lnltructions fur ce fujet à fon Miniitre ici, aflurant de
„ nouveau que l'intention de L. H. P. eft de ne faire aucune démarche dans
„ cette importante Affaire , que de concert & union avec Sa Majeité,
„ de quoi KUe peut faire fond ; comme auflî de leur côté Elles fatisferont fi- r
„ délement & promtement, en cas de befoin,aux obligations des Traitez &
„ Alliances , par lefquelles Elles ont l'honneur d'être engagées envers Sa
.„ Majeité.
Le Comte d'Avaux,qui avoit envoie à fa Cour les Demandes de l'Angle-
terre Se des Etats Généraux, en reçût de retour le Courrier le Samedi 2. d'A-
vril à trois heures du matin. 11 alla ce jour-là rendre vifite à l'Envoie d'An-
gleterre. Il ne lui dit rien autre, fi non que l'Exprès étoit de retour j mais
que les Lettres n'étoient pas encore dechifrées.Il fut auflî rendre vifite à l'Am-
bafladeur de Suéde, à Don Bcmardo de Quiros,au Préfident de Semaine:
Sur le foir il l'alla rendre au Confeiller-Penfionnaire. Il lui dit feulement de
bouche, que toute laReponfe , qu'il avoit à donner fur les Demandes , étoit que
le Roi fon Maître étoit difpofé à obferver le Traité de Riswick, & de le re-
nouveller. Cette Reponfe (urprit extrêmement; mais, au lieu d'influer de la
conlternation , les Etats Généraux n'en furent que plus animez. Le Lundi
quatre, l'Envoie d'Angleterre contera là-deffus avec le Confeiller-Penfionnaire,
& le lendemain avec les Députez des Etats Généraux, pour délibérer fur ce
qu'on pouvoit faire dans une fi feabreufe Conjoncture. L'on fe détermina à
faire communiquer au Roi d'Angleterre ce qui fe paflbit. Le Comte d'Avaux
affecta cependant de dire qu'il attendoit des ordres par le premier Courrier de
s'en retourner. On regarda cette affectation comme une rufe , pour voir la
contenance qu'on tiendrait ., & qu'au bout lacheroit-il encore quelque mot
équivoquement deux.
Dans la vûë cependant de donner quelque efficace à fa Réponfe verbale,
£0 infpirant de la crainte, la Cour de France fit répandre en même tems divers
bruits
-r
ET RESOLUTIONS D'ETAT. 411
bruits. L'on joiïa même des reflbrts, pour les faire infinuer par des endroits, ijov.
qui. ne paroiïîbient pas fufpeârs. Ces bruits étoient que le Pape s'étoit entière- " . *
rement déclaré pour la nouvelle Ro'ùutc d'Efpagne , & qu'il avoit écrit une
Lettre fort patétique à ce fujet à l'Empereur. Que la République de Venilè
avoit pris parti en faveur des Troupes Françoifes qui étoient entrées en Italie,
& leur avoit remis Vérone. Que les deux Couronnes de France & d'Efpagne
avoient attiré dans leur Alliance celle de Portugal par un Traité. Qu'Elles en
avoiont conclu un pareil avec le D.mnemarck , & que l'Envoie de l'Empereur
auprès du Roi de Pologne, qui y ctoit allé pour lui faire des prop->fitions,
s'étoit vu prévenu par l'Envoie de France du Héron. Que tous les Princes
d'Italie s'étoient déclarez en faveur des François. Que les Cercles de Suabe &
de Franconie s'étoient déclarez pour la Neutralité , & avoient pour cela fut
une ASfociation, à laquelle d'autres Cercles, & même des Princes de l'Empire,
étoient invitez de fe joindre. Que le Corps Helvétique étoit fur le point de
fe déclarer contre l'Empereur. Et enfin, pour paSTèr fous filence d'autres points,
& pour jet tei' la consternation parmi les Anglois , que l'ISle de la Jamaïque
avoit été abimée & engloutie par un Ouragan.
Ces Nouvelles étoient pour la plus part éloignées de la vérité, ou du moins
fort altérées. Pour en parler de chacune félon le rang raporté ci-defïlis, on
peut voir que le Pape n'avoit point fait la moindre pareille démarche, 6c s'il
en avoit la volonté, elle avoit été cachée. I! eft vrai que ce Pontife Romain
avoit écrit une Lettre au nouveau Roi d'Efpagne, & une autre à l'Empereur.
L'une & l'autre cependant n'avoient rien , qui eut du raport à ce que l'on
vouloit infinuer. On peut le voir par les Copies de ces Lettres, qu'on ajou-
te ici.
„ 'KJ'Otre très-cher Fils en Jéfus-ChriSt , Salut. Quand vôtre Majefté nous Lettre
„ .lN écrit par fil Lettre datée de Bourdeaux du 90. du mois de Décembre d"PaPc
„ dernier qu'Elfe tire un bon Augure de ce que precifement dans le tems me- d'PT°l
„ me, que Votre Majefté fe met en chemin p:>ur aller occuper fon Thrône gne.PV
,, dans les ESpagnes, Elle a remarqué que nous avons été placez fur le Thrô-
„ ne.Apoftolique; c'eft une preuve bien forte de vos bonnes intentions pour
,, nous, dont vous nous donnez un plus grand témoignage, quand vous nous
„ aSlèurez du foin que vous aurez de vous conferver dans l'idée que vous avez
-, du Siège, où nôtre humilité a été élevée. Mais, quand nous pourrions
„ vous perfuader , pu un aveu fincere de nôtre infuffilànce , que ce n'eft que
„ par une tendreffe Singulière pour nous , que Vous nous regardez avec trop
,, d'indulgence dans les louanges que Vous nous donnez avec tant d'affection }
„ & que Nous puiflïons vous porter à nous plaindre , plutôt qu'à nous felici-
„ ter, par le poids du fardeau qui furpaSTé nos forces , Nous aimons mieux
„ cependant Vous taire les juftes Sujets de nôtre inquiétude , que de diminuer
„ le moins du monde , en vous les exprimant , la joie qui doit vous revenir
„ de l'aplaudiSlèment des peuples, qui Vous voient venir fur le Thrône avec
„ les perfections de vos Percs, & avec vos propres vertus. Allez donc, grand
„ Roi, avancez heu reuferaent , & régnez. Mais, régnez , prenant Dieu pour
„ Guide
4iz MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
*75\. n Guide & pour Protecteur de vos deffeins > 8c égalez la pieté infigne de vos
' ■ „ Ancêtres, par vôtre juitice , 8c par une déférence filiale pour ce Saint Sié-
„ ge. Remplirez fi dignement le Titre de Catholique , que Pevibnne ne
„ puiffe fe défendre d'avouer que Vous l'avez pris avec raifon. Pour nous,
„ nous demanderons au Ciel par nos prières réitérées, comme vous le fou-
„ haitez, qu'il vous éclaire de lès lumières } 6c , pour un gage fincere de nôtre
„ bienveillance paternelle , Nous vous donnons avec beaucoup de tendrefie
„ nôtre Bénédiction Apoftolique. Donné à Rome le 6. jour de Février de
„ l'an 1701.
Avant que de raporter l'Extrait du Bref du Pape à l'Empereur , il eft à.
propos d'en toucher le fondement. Le Nonce Davia étant arrivé à Vienne
s'y tint incognito jufques au 3. de Février, qu'il fit ioi> Entrée publique. Ce
Miniftre de la Cour de Rome , après avoir eu lbn Audience publique de l'Em-
pereur le j"., offrit à Sa Majetté Impériale la Médiation du Saint Père pour
un Accommodement au fujet de la Succelîion de la Monarchie d'Efpagne.
On avoit fuggerc au Pape , que pour porter l'Empereur à fe départir de lés
Prétenfions , il pouvoit lui offrir de mettre l'Archiduc Charles en pof-
feffion des Provinces-Unies des Pais. Qu'on aideroit Sa Majefté Impériale à
fe mettre en poffeiiîon de ce que le Turc poffedoit en Europe , en rendant
l'Empire Héréditaire à fa Mailbn , & foûmettant à ion pouvoir , non feule-
ment les Villes Impériales qui jouïffoient encore de quelque liberté , mais
même la plus part des Princes du Corps Germanique , & fur tout des Pro-
teftants. Le Nonce s'aquitta de la Commifîion qui lui avoit été donnée
avec beaucoup d'inftance. C'eft d'autant plus que la Cour de Rome auroit
trouvé fon conte dans l'extenuon de fon Autorité dans plufieurs Provinces
2c Etats où elle avoit été abolie. Ces offres avoient pour préliminaire , que
l'Empereur n'envoiât point de Troupes en Italie. On repondit à ce Nonce
feulement fur cette dernière propofition ; car , on regarda tout le refte, com-
me un leurre grolîier, qui ne tendoit qu'à /emer de la zizanie 8c de la ja-
loufie. La Reponfe portoit que Sa Majefté Impériale étoit prête d'accep-
ter la Médiation propofée, 8c de ne point envoier des Troupes en Italie. C'é-
tait pourvu que la France voulût en faire de même , fie de retirer celles
qu'Elle avoit déjà envoiées dans le Duché de Milan. L'on ajouta aulli que
la France eût à mettre en fequeftre jufques à l'ifluë de la Médiation, tant
ledit Duché de Milan, que les Roïaumes de Naples ce de Sicile. Le Non-
ce Davia dépêcha par un Exprès à Rome cette Déclaration. Il n'en efpe-
roit cependant pas du fuccès. C'eft fur ce qu'en aïant conféré avec le Mar-
quis de Villars Envoie Extraordinaire de la France à la Cour de Vienne, ce
Miniftre lui avoit dit , qu'il étoit inutile de demander un pareil fequeftre.
C'eft puis que le -Roi Très-Chrêtien n'y corifentiroit jamais, & que tout ce-
• qu'il pourrait faire feroit de retirer" lès Troupes de l'Etat de Milan, pour-
vu que l'Empereur promît 6c s'engageât de fon côté à n'y en point envoier.
L'Empereur trouva même à propos d'en écrire à droiture au Pape. La
Lettre lui fut remife par le Comte de Lamberg Ambaiîadeur de l'Empe-
reur
ET RESOLUTIONS D'E T A T. 415
vear le foir du 6. du mois de Mars., 8c la nuit même le Pontife y fit la Ré- I701-
poîîfe de fa propre main, afin de pouvoir l'envoier le lendemain matin, par ' ~*
un autre Courrier que le Comte tenoit prêt. Le précis de cette Lettre n'é-
toit pas d'un air menaçant , ainfi qu'on l'avoit proné en France , & ainfi
qu'on va le voir.
» /^We la répugnance qu'il avoit eue à fe revêtir de la dignité Pontificale, Extrais
■>■> V^ n'étoit pas feulement, parce qu'il ne s'étoit pas fenti propre à foûte- L,eettare
,, nir un fi pelant fardeau ; mais de ce que la Providence lui avoit fait prévoir du Pape
„ les mifères, dont fon Pontificat devoit être afligé. Que dans le tems qu'à à TEm-
„ ion graWB regret il voioit que la malheureufe Italie alloit devenir le Théâtre pereur.
„ d'une dangereufe Guerre , il ne pouvoit s'empêcher de fe plaindre du" peu
de fuccès de fa Médiation ; qu'il l'avoit offerte les larmes aux yeux , avec
de profonds foûpirs & des inftances réitérées de fes Miniftres, pour la faire
„ accepter par les deux Cours.
„ Que la trille nouvelle qu'il avoit reçue, que la Pefte ravageoit la Dal-
matie, l'avoit porté à interdire tout Commerce jufques vers les Confins de
l'Autriche , & le voifinage de la Carinthié. Et qu'au milieu de cette dou-
ble affliction , il avoit de nouveau pouffé fes larmes & fes foûpirs vers le
Ciel, Rejoignant fes prières à celles de toute l'Europe, il avoit imploré U
mifericorde de Dieu , afin d'éloigner l'un & l'autre de ces fléaux.
„ Qu'il exhortait Sa Majefté Impériale à éviter celui de la Guerre , la
priant d'écouter fes avis paternels , 6c de ne pas permettre à fes Troupes ,
qu'Elle vouloir envoier en Italie, de jetter cette belle partie de l'Europe
par leurs defordres dans le plus grand de tout les malheurs ; Qu'il plût à
Sa Majefté Impériale d'y tenir la main ; en forte qu'Elles ne commiflènt
rien d'indigne de leur Chef, Se de la trés-Illuftre Maifon d'où Elle for-
toit} qu'elles euflent égard à la dignité du Saint Siège, à la Sainte Eglife, &
à Dieu même} qu'elles fe fouvinfTent.de fa Religion éc de celle de les glo-
rieux Ancêtres , que Sa Majefté Impériale avoit protégée par tant d'écla-
„ tantes aftions dont Dieu lui" donnerait la recompenfe au centuple. Qu'il
„ l'elperoit ainfi , & qu'il prioit Dieu d'infpirer à Sa Majefté Impériale ce
„ qui lui étoit le plus convenable &c.
Pour ce qui regarde la République de Venife l'on favoit qu'Elle prenoit
beaucoup de précaution, pour fe maintenir dans une Neutralité armée. El-
le avoit tait venir des Troupes 'de Dalmatie. Elle faifoit des Fortifications
aux Places les plus expofées, Se y avoit renforcé confiderablcment les Garni-
fons. Le Cardinal d'Etrée avoit été envoie à Venife, pour engager la Repu-
blique dans le parti des deux Couronnes, & empêcher l'entrée des Impériaux
en Italie. Ce Cardinal mettoit tout en œuvre pour cela. 11 le faifoit cepen-
dant par toutes les plus grandes douceurs du Monde. La République rendoit
miel pour miel , & le Lion de Saint Marc envieilli dans les mfes de treize
Siècles ne fe laifia pas apriveifer par des apas fi ordinaires, non plus qu'inti-
mider par des menaces qu'il étoit en état de ne pas craindre. Enfin le Sénat
prit le 2y. de Mars la Réfolution de garder ia Neutralité, & de ne le décla-
Tom. I. Ddd ici
•>•>
414 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
1701. rer que contre ceux , qui voudraient troubler la tranquilitc dans fes Etats.
" Cette Rcfolution, qu'on communiqua au Cardinal, portoit ce qui fuit.
Réfolu- „ T A Séréniffime République , après avoir examiné l'état prefent de fes
Sénat'd " Affaires, a trouvé qu'Elle doit regarder comme fes Amis ceux, qui
Venife, »> ne veulent pas porter la Guerre dans fes Etats. De forte que ne voulant
du ij. „ pas entrer dans les raifons, ni de Sa Majefté Impériale, ni des François 6c
Mars. }> des Efpagnols, Elle croit qu'il eft fort jufte que l'une & l'autre Puiffan-
„ ce veuillent la regarder avec la même Amitié, dont on a pris tant de foin
„ de la perfuaderj 6c qu'Elle regardera toujours comme ennemi celui , qui
,, comme tel entreprendra de porter la Guerre dans fes Etats.
Elle donna une Réponfe par écrit d'une femblable teneur à PAmbafîa-
deur d'Efpagne Bazan , qui avoit follicité la République en faveur de fa
Cour. Cette Réponfe étoit conçue en ces termes.
Réponfe,, "\ TOnfieur PAmbaffadeur , la bénigne inclination de Sa Majefté Ca-
ou Sénat ^ IVA tholique pour Nous, paroit clairement par les bons offices que
fe à " » Vous Nous avez notifiez au nom de Sa Majefté le if. du courant mois
l'Ambaf- „ de Mars. Nous recevons avec toute l'eftime & la reconnoiffance ima-
fadeur J} ginable fa Roïale difpofition 6c fes offres généreufes ; & nous recevons de
fine Pa" >' vous avec P^;U^r vos fàges reflexions fiir les conjonctures préfentes j qui à
l'aproche d'une Guerre, peuvent mettre l'Italie dans d'étranges defordres.
Cependant dans une occafion auffi dangereufe que celle-ci, Nous efperons
de la juftice des deux Monarques qu'ils agréeront nos bonnes intentions
»
5J
„ publiques, & auront égard à la juftice de la Neutralité, 6c en confequen-
„ ce d'icelle, ils voudront bien dans toutes les occafions de la Guerre en
ïj
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3»
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»1
cette Province, faire reflentir les effets de leur Roïale bénignité, à nos
Etats Se à tout ce qui Nous apartient. Ce qui augmentera toujours de
plus en plus dans le Sénat les motifs d'une éternelle reconnoiffance, & la
confiante réfolution que Nous avons d'entretenir une bonne Correfpondan-
ce Se un bon Voifinage. Et en vous affûtant de nos iîneeres intentions
pour les deux Couronnes, Nous vous prions de vouloir accompagner Nos
affurances à Sa Majefté par vos bons offices , outre ce que Nous ferons
notifier à cette Cour-là, 6c vous pouvez vous affurer de l'eftime que Nous
avons de tout nôtre Cœur pour vôtre Perfonne, comme étant un digne
&c agréable Miniftre.
L a République fit communiquer ces Réfolutions à l'Empereur par fon
Ambaffadeur à Vienne par un Exprès qui y arriva le fécond jour d'Avril.
Elle en fit de même au Roi Tres-Cln étien par fon Ambaffadeur Pifani ,
qui s'en aquitta le 1 1. du mois.
Par raport au Portugal , l'on ne favoit pas bien qu'en croire. Le Comte
d'Avaux montra une Lettre du Roi Très-Chrétien, dans laquelle il lui man-
do.it la Nouvelle de l'Engagement de ce Roi -là avec les deux Courronnes.
On
ET RESOLUTIONS D'E T A T. 4if
On reçût en même tems d'une main qui ne paroiffbit pas fufpeéte les Articles ija.
de ce Traité, qui étoient au nombre de quinze 6c que voici. ■
6c Nueva Coloma dans la forme qu'il le prétendit en 1 68 1 .
IV. La France lui remet toutes les prétentions qu'Elle avoit fur Ma-
I. T A Paix faite l'an 1668. entre la Caftille 6c le Portugal eft renouvel- Articles
1—/ lée 6c confirmée. du Trai-
I I. La Cailïlle renonce pour toujours à toute prétenfion qu'elle pourroit jj^g
avoir fur le Portugal. entre jei
III. Le Roi de Portugal demeurera Maître abfolu des Mes de St. Gabriel Couron-
nes de
France ,'
deCa-
ranon. _ ftilie , 8c
V. On promet fatisfaétion au Roi de Portugal touchant les affaires de la dePor-
Compagnie des Nègres qui s'envoient de Cacheo aux Indes d'Efpagne. tugal.
VI. Le Roi de Portugal promet de reconnoître le Roi Philippe V. pour
Héritier légitime 6c univerfel de la Monarchie d'Efpagne, conformément au
Teftament de Charlss II. 6c de maintenir ledit Teftament.
VII. Que fi l'Angleterre 6c la Hollande viennent à rompre avec la France ou
la Caftille, le Roi de Portugal ne pourra leur donner aucun fecours ni retraite
en fes Ports. Il pourra feulement y recevoir fix de leurs Navires de Guerre
au cas qu'ils n'en aient pas d'avantage dans 'les Mers ou Côtes de Portugal -t
mais s'il y en a un plus grand nombre, Sa Majefté Portugaifè n'en recevra
aucun.
VIII. Que Sa Majefté Portugaifè ne recevra dans lès Ports aucune pri-
fe de quelque Nation que ce foit , 6c encore moins aucun débarquement
de Troupes.
I X. Que fi à caufe de ce Traité le Portugal fe trouvoit inquiété par l'An-
gleterre ou par la Hollande, alors la Caftille 6c la France feront obligez de
le fecourir avec 30. Navires de Guerre 6c lui fourniront de plus un Million une
fois paie, 6c 500000. Ecus par an , moïennant quoi le Roi de Portugal s'obli-
ge d'entretenir 1 2. Navires de Guerre.
X. Et au cas que la Guerre avenant , les Anglois voulufierrt refufèr à la
Reine Douairière le paiement de fon Douaire, la France 6c la Caftille y fa-
tisferont, comme auffi Elles indemniferont Sa Majefté Portugaifè pendant l'ef-
pace de dix années de toute la diminution qui pourroit arriver en {es Doiian-
nes à. caufe de la Guerre.
X I. Que fi les Ennemis du Portugal entreprennent cependant quelque
choie contre les Conquêtes qu'il a faites , on lui donnera le fecours ne-
cefîaire.
XII. On donnera à Sa Majefté Portugaifè les Officiers de Guerre , dont
Elle aura befoin.
XIII. Que fi les Hollandois refufent de reftituer l'Ifle de Ceylan à Sa
Majefté Portugaifè, en ce cas les Couronnes de France \k de Caftille lui ai-
deront à la reconquérir.
XIV. Qu'en contemplation de la Paix de l'Europe, Sa Majefté Portugai-
fè trouve bon de ne troubler le Roi Philippe V. dans la Succeffion de
Ddd z Caftil-
4i5 MEMOIRES, NEGOCIATIONS, TRAITEZ,
1701. Caftillc, à l'égard d'aucun des Domaines , dont il.eft aujourd'hui en pof*
— felïion.
X V. Que fi quelque Prince vouloit le contredire en cette poiTefîîon , &z
qu'à cette ôccaiion il iurvienne Guerre, Sa Majefté Portugaife lui interdira
tous les Ports de iésRoïaumes & Etats ou il pourroit venir & aborder, & tou-
tes fortes d'embarquement tant de Guerre que de Marchandife, & qi
ceux qui viendront de la part d'un tel Prince feront traitez comir.
:|ue tous
comme En-
nemis, Sec.
O N fut cependant affûté que ces Articles n'étoient que des Propositions
qui avoient été faites au Roi de Portugal, qui ne les avoit pas acceptées. Le
Comte de Waldeitein , qui étoit Envoie Extraordinaire de l'Empereur à Lis-
bonne manda précifement par lés Lettres , que ce prétendu Traité defenlîr*
n'avoit nullement été conclu. L'Envoie de Portugal Pacieco alîura en mê-
me tems, mais fecretement , tant les principaux Miniftres des Etats Géné-
raux, que l'Envoie de l'Empereur, que le Roi fon Maître n'étoit entré en
aucun Engagement avec la France & l'Efpagne.
Il étoit vrai que de la part des deux Couronnes on avoit fait fonner haut au-
près de ce Roi-là, que le Parlement d'Angleterre n'avoit pas aprou' é le Traité de
Partage, & n'étoit pas de fentiment de iecourir les Hollandois. Tout ce qu'on
pouvoit alléguer pour effVaïer ce Roi-là ne pût porter coup. C'eit pourquoi i
on fît fuccéder les menaces aux promeffes,8con publia que le Comte d'Etirée,
nouveau Lieutenant-Général des Côtes. Maritimes d'Etpagne, iroit avec une
bonne Efcadre vifiter Lisbonne. Cela fit que ce Roi-là déclara qu'il ie tien-
droit dans la Neutralité. Même, pour témoigner qu'il dellroit de s'y main-
tenir, il écrivit aux Etats Généraux , pour les détourner de la penfée de la
Guerre. En voici la Lettre.
Lettre CELSI AC P RAiP OTE NTES DOMINE SÏAÏUS
MïÎm GENERALES BELGII FOE DERATE
Portu-
gaife ~pGo Don Pedro, Dei Gratta , Rex Lupan'nc tjj Âlgarbiorûpi , citrà & ultra
auxE- •*-' Mare in Africà t Dominas Guince 13 acquifitionis Navigationis , Commer-
néraux" Cil Etbiop'ue^ Arabie, Pcrfi.s ■,■&? Indiœ &c. tiïittojalutem Feftris Celfis ac Pr<e-
des Pro- patentions Dominai ionibus, ut pote Mis quos tanquam amicos fj? affeilos multara
■vinces- diligo ac œjîimo. Cum prœfenti ftatn tôt lu s Europe , bcllum qnod timetur , mine-
Unies. iur ejijcm magnnm ruinant , ortatn ex damnis qua femper fuere certijfimt Bcliï ef-
feclus , amijjt's commuuiter pace y tranquillitate qiue funt maxiwœ félicitâtes ,
tfuat Deus Regnis confert ; Bellum enim , vel etiam profpcro fuccejfu femper efi
flagellum , cum fuccejfus femper Jint incerti ac dubii ; Vïcloriœ nempe magis quant
àdifpofitionibus humants, dépendent à poteflate £5? manu Dei, qui Dominas cji
txercituum , non poff'um non optare ut Fcfirx AltipotehUa ad pacis confervatior
nem propendeaut •> quia femper Ma magis quàm Bellum , fecurani fcclicitatcm infe
çwtinet , quamvis fœliciter gejlum j £•? cum bac vieim dèjider'mm proveniat à bonà
ac
ET RESOLUTIONS D'ETAT. 4i7_
ac verâ amicitià quant profiteor erga V. C. ac P; Z>., fpero ut infuâ aitâ ac pic- 1701.*
denîi confideratione notum fit Vejlris Celfis ac Prapotentibus Dominationibus ut ' • <,
merctur mei amici affeclus finceritas , ex quo cognofcere poJJ'unt , quanti faciam
fi/.is profperitates Celfi ac Prœpotentes Domini Status Générales ■ Belgii Confœ-
derati , quos tanquam fingulares amïcos & benè affeclos plurimum diligo ac aftimo.-
Dvminus nofler fervet Feftras Celfas ac Prapotentes Dominatiortes mcolumes.
Dation Salvaterra 11. Martiï 1701.
Signatum ,
R E X.
L'o n eut en même tems la copie d'une Lettre que ce Roi avoit écrite à
celui de Dannemarck , pour lui fouliaiter la bonne année. Comme ces deux
Roïaumes font à une grande diftance l'un de l'autre, & que par coniêquent
ils n'ont pas enièmble un grand Commerce , l'on ne pouvoit comprendre d'où
pouvoit procéder cette civilité. Il n'y avoit cependant pas du mirtere. C'é-
toit l'Envoie de Dannemarck Stdcken, qui étoit grand Ami de celui de Por-
tugal , qui avoit ménagé avec ce dernier d'avoir cette Lettre, telle que
voici.
PE t r u s , Dei Gratiâ Rex Portugal^ & Algarbiorum , citrà &* ultra Mare Lettre
in Africâ , Dominas Guinece Conquifitionis , Navigations ^K& Commercii du Roi
! JEtbiopiœ^ Arabite , Perfia^ Indiœque, &c. deffPi°r"
. Serenijfimo ac Potentijfimo Principi Domino Friderico IV. eadem Gra- Roule**
tiàDauiœ, Norvegiœ , Vandalorum , Gotborumquc Régi , Duci Slefvici , & Hol- Danne-
, fatiœ , Stormariœ, atque Ditbmarfia , Comiti in Holdenburg & Dclmenhorfi &V. mark°
i Fratri, Confangmneo , & Amico no/iro. Cbarifimo Salut em. Sereniffime ac Po-
te ut ijjï me Princeps, Frater, Conjanguinee , & Amice ChariJJime. Fera amici-
tia, /încerumque fiudium , quo Majefiatem Veflram ampleclor , fuo quafi jure exi-
gere videtur, ut ipfi pcr bas lit ter as fignificem quant opère cupiam , ut Majeflati
Veftrœ univerfieque Domui Regiœ , mvus hic annus féliciter fuccedat ., ' ne que erit
quidquam mihi aut antiquiîis aut jucundius , quam fi intellexero Deum Opt. Max,
Majeftatis Veftra res omnes non modo bujus emm curriado , fed aliis etiam dein-
cepsfub/ecuturis, benigno numine fovere , 'neque dubito qnin bac vota mea eo ani-
mi candore à Majefiate Veftrà fufcipiantur , quo a me funt profecla. Intérim Ma-
jefiatem Feflram Dei Omnipotentis tutelce accuratifiimè commeiido. Data Olifi-
pone Kalen'dis Januariis Anno Domini M DCCL
MAJESTAÏIS FESTR.E,
Bonus Frater Confanguineus & Amiens ,
Pet rus R.
Quibus lineœ funt fubjecbî, Qmnïa Régis
manu funt feripta ."" .
Ddd 3 Tou-
4i8 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
J70ï- Touchant le Dannemarck , les Etats Généraux & l'Angleterre étoient
"~ perfuadez que cette Cour-là ne prendrait aucun engagement avec la France.
Il eft vrai qu'il parvint entre les mains du Roi d'Angleterre & de celui de
Suéde, un Traité fait entre la France & le Dannemarck ; mais l'on ne tar-
da pas à être éclairci, que c'étoit un faux Traité, que le Secrétaire de Hol-
ftein Petkum ayoit forgé, pour irriter ces deux Rois -là contre le Danne-
marck. C'étoit dans la fupofition que cela pouroit produire quelque avanta-
ge au Duc fon Maître. L'on favoit d'ailleurs que le Dannemarck avoit une
periuafion invincible que la Suéde favoriferoit les deux Couronnes, & qu'ain»
fi il regardoit que c'étoit fon intérêt de fe jetter dans un Parti contraire. On
en étoit d'ailleurs perfuadé par la Négociation qui avoit été entamée avec ce
Roi par le Canal du Prince de Wirtembcrg, pour prendre dix mille Hom-
mes de fes Troupes à la folde de l'Angleterre &c des Etats Généraux, ainfi
que cela fut conclu peu de tems après, félon qu'on le raportera en fon lieu.
Ce Roi voulant profiter de la conjoncture fit même prefenter par fon En-
voie un Mémoire aux Etats Généraux , pour être rembourfé de quel-
ques arrérages , ainfi qu'on peut voir par la copie fuivante de ce Mé-
moire.
LE Souflîgné Envoie Extraordinaire de Sa Majefté le Roi de Danne-
'marck ôcNorwegue, aïant reçu ordre du Roi fon Maître, de renou»
reiases.
Mémoi- „ HAUTS ET PUISSANS SEIGNEURS,
re de
l'Envoie
de Dan- »
nemarck 55
auxE- „ veller auprès de V. H. P. les inftances qui ont été faites de tems en tems,
rats des n à l'égard du paiement de la Somme, que V. H. P. doivent à Sa Majefté,
Unki's w en vertu dQ Traité conclu entre Elle & V. H. P. l'an 1696., il a cru que le
des Pais- ,, chemin le plus court d'en avoir une prompte Réfolution, & le moïen le
Bas.pour n plus efficace de délivrer V. H. P. de cette obligation, ôc en même tems
r"^r* » d'ultérieures follicitations , ferait de prefenter un Mémoire fur ce fujet à
V. H. P. Il s'en acquite donc par celui-ci, priant V. H. P. de vouloir
bien répondre au defir de Sa Majefté dans une demande, fondée fur la bon-
ne foi, fi jufte, Se fi légitime. Sa Majefté le Roi mon Maître fe promet
d'autant plus, Je la juftice, de l'équité, Se de l'exactitude de V. H. P.,
qu'Elles ne fatisferont pas avec moins de promptitude, à ce à quoi Elles fe
font obligées par ledit Traité de 1696. qu'Elles en ont donné des preuves
à d'autres, & que le crédit de l'Etat s'y intérefle.
„ Surtout, fi V. H. P. vouloient encore faire réflexion fur les motifs,
„ qui les ont porté, à s'engager au paiement de la Somme ftipulée , qui
„ comme V. H. P. fçavent, ont été onéreux à Sa Majefté aufli-bien qu'à
„ fês Sujets.
Signé,
S T 6 C K E N.
Les Etats Généraux ne furent pas fâchez de la préfentation de ce Mé-
moire.
55
î>
55
s»
5»
ÎJ
55
ET RESOLUTIONS D'ETAT. 4iP
moire. C'eft parce que par-là l'on détruifoit jufques à l'aparence qu'on fut 170F.
en quelque Négociation avec le Dannemarck. — — «
Pour le Roi de Pologne l'on favoit bien que le Miniftre de France du Hé-
ron le follicitoit puifîàmment pour faire fa Paix, avec la Suéde. Ce Roi té-
moignoit même d'y a»'oir de la difpofition. Du Héron étoit chargé de tâ-
cher de l'y porter, foit afin que la Suéde put être de quelque utilité aux deux
Couronnes, ou que même le Roi Auguste pût donner de l'ombrage à l'Em-
pereur. Mais auflî favoit-on que ce Roi-là devoit rcnouveller fes Fngage-
mens avec le Czar , "duquel il devoit tirer de grofTes fommes, dont il avoit
befoin pour fupléer à fes libéralitez.
Quelqu'efFort que le Cardinal d'Etrée fit en Italie pour y engager les Prin-
ces en faveur des deux Courronnes, il ne pût ébranler le Grand Duc, ni les
Ducs de Modene & de Parme. Les Négociations avec celui de Mantouë
étoient commifes à d'autres, qui y réunirent, ainfi qu'on le dira bien-tôt. Il
eft vrai que le Duc de Savoie s'étoit engagé dans le Parti des deux Rois. Ce
Prince déclara lui-même les Conditions du Traité qu'il avoit fait avec eux.
Par icelui il avoit promis de fournir pour la défenfe du Duché de Milan huit
mille hommes d'Infanterie Se deux mille & cinq cent Chevaux. C'étoit
moïennant un fubfide de cinquante mille Ecus par mois, & le caraétere de
Généraliffime des Forces de France Se d'Efpagne en Italie. D'ailleurs on a-
voit flipulé le Mariage de la féconde Fille de ce Duc avec le nouveau Roi
d'Efpagne , dont on aura lieu de parler ailleurs.
Touchant les Cercles de l'Empire, le Miniftre de France avoit infinué à
l'Aflembléë de celui de Suabe, qui fe tint à Ulm, qu'on eut à fe déclarer û
l'on prenoit le Parti de l'Empereur ou non. Il y avoit la menace, que fi l'Em-
pereur ou l'Empire faifoient marcher des Troupes vers le Rhin, la France
s'empareroit de Philipsbourg, du Fort de Kehl, & de Brifacj & même que
fi l'on augmentoit la Garnilbn de Philipsbourg, la France prendroit cette
augmentation pour une rupture. Dans la vue' qu'on avoit d'empêcher
l'Empereur d'être foûtenu par les Cercles , & par les Electeurs & Princes
d'Allemagne, l'on avoit concerté que l'Electeur de Bavière retourneroit dans
fon Païs pour travailler à faire des AfTociations entre des Cercles & des Prin-
ces. Le Prétexte en étoit le maintien de la Tranquilité publique & l'oblér-
vation de la Paix de Riswick. Cependant, pour empêcher qu'on ne foup-
çonnât que cet Eleûeur-là ne quittoit Bruxelles que pour ce deftèin , on
tâcha d'inlmuer dans le Public, que les deux Couronnes ne fe fioient pas à
lui. On alla même jufques à vouloir afteéter de faire voir que ce Prince étoit
pour ainfi dire gardé à vûë. Ce qui paroiflbit confirmer cette exactitude fut
que cet Electeur fe {entant un jour ou fe difant indifpolé , voulut prendre
quelque promt remède. Il fit pour cela retirer toutes les Perfonnes de la Cour.
Cependant, Puifegur n'en fortit point, & fe tint pendant trois heures dans
le Cabinet, faiiânt lëmblant d'écrire. Ce Prince partit cependant le 22. de
Mars de Bruxelles. Ce fut après qu'il eut reçu une Lettre du Roi de France
par laquelle l'on ne voïoit pas qu'on le privât du Gouvernement des Païs-
Bas. Voici la Lettre.
„ MON
4io MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
170t.
Lettre
du Roi
de Fran-
ce à l'E-
ledtcur
de Ba-
vière.
»
MON FRERE.
VOtrc longue abfence de vos Etats ne me laifTe pas lieu de douter que
vôtre retour n'y foit abfolument neceflàire dans la conjoncture pré-
fente. Il ne feroit pas jufte que vôtre bonne Conduite dans'le Gouverne-
ment des Pais-Bas , & les Services que Vous y rendez au Roi mon Petit-
Fils , vous fiûent abandonner les foins de vos propres Affaires. Comme
„ elles vous obligent à partir avant que vous receviez les Lettres, je puis vous
„ affurer en fon nom', qu'il aprouvera que vous remettiez le Commandement
général au Marquis de Bedmar pour l'exercer en qualité de Gouverneur-
Général des Armes juiques à vôtre retour. Vous le réglerez pour le tems
que vous croirez que vos Affaires pourront vous le permettre , Se vous y
reviendrez aufïï-tôt que vous le jugerez à propos , fans même qu'il foit
nécelfaire d'envoier aucun nouvel ordre pour vous y recevoir. Le Roi
d'Efpagne donnera feulement le lien pour établir les chofes , de manière
que pendant vôtre abfence tout fe paflë comme vous pouvez le defirer.
Priant Dieu qu'il vous ait, Mon Frère, en fa fainte Se digne garde. Ecrit
à Marli le p. Mars 1701.
5»
M
î>
M
9»
»
5Î
„ Vôtre bon Frère,
Signé,
„ Et plus bas.
LOUIS.
C O L B E R
Lettre
du Roi
Philip-
pe à la
Reine
Douai-
rière
d'Efpa-
gue.
Nonobstant cette Lettre, l'on tâchoit encore d'infinuer que cet E.-
lecteur étoit en difgrace auprès des deux Couronnes. On fondoit cette infi-
nuation fur ce que cet Electeur n'avoit plus l'apui, qu'il avoit toujours eu de
la Reine Douairière d'Efpagne, qui étoit elle-même difgraciée. Véritable-
ment le Roi Philippe s'aprochant de Madrid où il arriva le 18. , écri-
vit à cette Reine une Lettre pour l'éloigner de Madrid, dam les termes
fuivants.
„ Ma T r e s-C hère Soeur et Tante.
„ T Es afTurances réitérées que Vôtre Majefté m'a données de fa bonne
„ L* affection, ne me donnent aucun lieu d'en douter. J'aprends ceperw
„ dant par des avis que je reçois, que quelques-uns tâchent par divers moiens
„ de troubler la bonne intelligence que j'ai toujours fouhaite d'entretenir avec
„ V. M. Je n'oublierai aucun foin pour pénétrer le vérité de cet avisj £c
„ jufques à ce que je puiffe en découvrir la fauffeté, je trouve neceflàire pour
„ le
ET RESOLUTIONS D'E TA T. 411
„ le repos de Vôtre Majéfté qu'EUe choifitTe pour fa .demeure une des Vil- 1701.
„ les d'Efpagne , qui fera le plus à fon gré , entre celles , qui lui^ feront — " —
„ propofées de ma part. J'ordonnerai que Vôtre Majefté y foit traitée avec
„ tout le refpeét 6c toute la bienfeance qui eft dûë à une fi grande Reine,
„ & que les fommes deftinées pour fon Douaïre par le Teitament du feu Roi
„ mon Oncle, lui foïent ponétuellement paie.es. J'aurais fouhaité de pou-
„ voir lui témoigner en Perfonne mon Amitié > mais je trouve plus conve-
„ nable à l'état préfent de mes Affaires de laifTer au tems & à mes foins de ju-
„ flifîer la vérité en l'abfence de V. M. , laquelle en attendant doit croire
„ que je fuis de Vôtre Majefté bon Frère 6c Neveu,
•n
Signée
PHILIPPE.
La Reine reçût cette Lettre par les Régens, avec ordre de fe retirer dans
fîx jours. Elle demanda quelque délai pour fon départ, qui lui fut accordé,
& Elle choifit la Ville de Tolède pour fa Retraite. Comme elle alloit fe
mettre en chemin un nouvel Exprès porta des ordres d'éloigner auflî de la
Cour l'Inquifiteur Général , 6c de le renvoier comme l'on fit à fon Evêché de
Ségovie. Le Père de las Torres, qui avoit été le Confefleur du feu Roi, fut
auflî renvoie à fon Couvent.
Pour éclaircir fuccinctement la caulè de la Difgrace de cette Reine on fut
que ledit Père de las Torres avoit dit à plufieurs que le Roi en mourant lui
avoit déclaré qu'on l'avoit forcé à figner fon Teitament. Quelques Grands
prirent de-là occafion de prendre des mefures en faveur de l'Empereur. La
Reine entra dans leurs fentimens, 6c fe mit à leur tête, comme la plus élevée
en Dignité 6c la plus intérefTée au Succès. On tint que la Découverte s'en
fit par des paquets que l'Exprès du Comte de Mancheiter aportoit d'Efpagne,
6c qu'on trouva moïen de foire noïer cet Exprès à un pafTàge d'une Rivière,
afin d'avoir ces Paquets. Là-defîus le Cardinal Porto - Carrero dépécha un
Courrier au nouveau Roi , pour lui donner avis de tout. Cet Exprès le trou-
va à Tartas , 6c ce fut fur cet avis que ce Prince réfolut de faire éloigner la
Reine. Ce ne fut cependant pas fa Difgrace , qui contribua au Départ de
Bruxelles de l'Electeur de Bavière. Ce Prince paflà par Bonn , où il attira
l'Eleéteur fon Frère dans les defleins où il étoit fecretement entré de faire
déclarer des Cercles , des Electeurs , Se des Princes pour une Neutralité, 6c
de faire pour cela une Aflbciation. Les Etats de Franconie tinrent pour cela une
A Semblée à Nuremberg. Le Comte de Louweftein Wertheim s'y trouva de la
part de l'Empereur, 6c Chamois de la part de la 'France. Ce dernier voulut
prévenir ces Etats-là. Il leur infinua que le Roi Très-Chrêtien en acceptant
le Teitament du feu Roi d'Efpagne n'avoit eu en vûë que la continuation de
la Paix de l'Europe, 6c le maintien de la Paix de RiswicL C'en: pour-
quoi il les exhortoit à ne point embrafTer les -intérêts de l'Empereur, 6c à
ne pas permettre le paflîige de fes Troupes par leurs Terres. Le Comte
de Louweftein recommanda de fon côté à ces Etats -là d'aflîfter puiilam-
T'om. I. Eee ment
4ii MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
1701. ment l'Empereur dans la défenfe de fa jufte Caufè, les afllinint d'un puifiant
* fecours qui les merrroit à l'abri des Infultes des François. Il ébranla par -là
quelques Membres. Cependant, il y eut bien des Contertations, Se les Me-
naces du Miniltre de France, que Ton Maître feroit tout mettre à feu & à làng,
fi les Etats favoi iibient l'Empereur , influèrent en forte que la Neutralité y
fut rclblue. C'eft d'autant qu'on avoit encore devant les yeux les vertiges des
cruautez exercées pendant les deux Guerres précédentes. D'ailleurs cette
Neutralité étoit négociée à la manière des Marchands , favoir la bourfe à la
main. On convint néanmoins que ce lèroit une Neutralité armée , & que
l'on mettrait fur pied un Corps de Troupes capable de s'opofer aux Entrepri-
fes que les François pourraient faire contre tel ou tel lieu tous divers Prétex-
tes. L'Empereur trouva même à propos d'y donner en quelque manière les
mains, ne doutant point de pouvoir enfuite attirer à fon avantage la même
Aflbciation.
Cependant, ceux qui l'avoient négociée, firent diftribuer à d'autres Cer-
cles , & à des Membres du Corps Germanique , des Ecrits. Ils étoient faits
fur un pied à rendre fulpeéte la Maifon d'Autriche y ainfi qu'on peut le voir
par la Copie qui luit.
Diverfes FRAGMENT.
Pièces ôc
Fr.ig- ###•*# Ce Député fe leva , & leur tint ce Difcours.
mens lur t »
les Af-
faires TA mais, Meffieurs , on ne s'ert aflemblé pour des intentions plus louables } le
préfen- J repOS <je ja patrie, le bonheur des Peuples, le maintien de la Paix nous a
î'Effipi- tous conduits en ce lieu. Sa Majelté Impériale Nous a honoré de la prefence
re.troû- d'un de les Minirtres: étant Chef de l'Empire, il veutaparamment partager
vez dans la "loirc d'en établir la tranquillité j Ecoutons avec refpcd fes fentimens.
laBiblk»- &
^N de Harangue du Comte de Lewestein.
Très- Louables Cercles , &c.
APres vous avoir fonhaité tonte forte de profperitê de la part de Sa Majeflé Im-
periale, vous me permettrez d'aller tout droit au fait fans aucun détour , &
de vous parler comme un bon Franconien ; c'efl à dire naturellement.
parce que ce qui ne convient point au Chef , doit être rejette de tous fes Mem-
bres , aujfi-bien d.vss le Corps Politique , que dans l'ordre du Corps naturel.
Rien n étant plus juf.e que ce principe, vous êtes trop éclairez pour n'en pas voir
lafolidité.
La féconde rsifon nycfl pas moins convaincante. Voccafion fe préfente ,
fi es- Louables Ccrc.es , que Nous ne trouverons peut - êJre jamais , de travailler
k
ET RESOLUTIONS D'ETAT. 415
k plus utilement du monde h la gloire 13 an bien de l'Empire. Je ne fuis ni Sol- 1701.
dot ni Capitaine, cependant Vous allez voir que le bon fins tient fou-vent lieu d'ex- — — -
periencei, mais je •vous prie que la découverte d'un fecret fi important vous fajjc
connaître quelle confiance la Cour de Vienne prend en vôtre fidélité. Les François
qui meurent d'envie qu'on refte en Paix, pour nous àter toute forte defoupçons, ont
' été a fez /impies de retirer leurs Troupes de l'AIJace , il ne refte pas un homme fur
le Rhin, & je fai par des intelligences qui ne me manquent point , qu'il n'y a à
Strasbourg que des P ai fans, qui en ouvrent 13 en ferment les Portes; En deux
heures Nous voilà Maîtres de cette Fille , 13 par confisquent de toute l'Alface-^
fans perdre un moment de tems il faudra voler en Lorraine , où le Duc bon gré
malgré fera obligé de fe joindre à Nous ,& Dieu fait fi les Eve chez fe feront prier
de Nous recevoir. Là , MeJJïeurs , Nous attendrons l'effet d'une Négociation du
Comte de Trautsmandorff, qui me par oit très-fenfée. Il prétend, & nos Gazettes
l'ont inconfiderement découvert un peu trop tôt ; il prétend, dis -je, que les SuiJ/es
fafiènt retirer toutes leurs Troupes des Pais- Bas Impériaux, (3 j'ai apris par des
voies fecret es , que ce qui accroche cette affaire jufqu'à préfent, c'eft une ignorance
des Cantons, qui ne trouvant point , dit-on, ce P aïs-là fur leur Carte, ont fuf-
pendu leurs réfolutions là-dejfus. Mais on m'affure que fi- tôt que les Cartes feront
Un peu débrouillées, cette affaire ira J an train, & Nous pourrons en fuite aife-
ment conduire le SéréniJJïme Archiduc en Efpagne, & partager la gloire du Prin-
ce Eugène qui le fait reconnaître en Italie. Je ne vous en dirai pas les chemins ,
pour éviter un trop long Difcours; mais ils font très-faciles, & le Prince de Ba-
de eft un bon Guide & a déjà, croiez moi, tous fes camps marquez. Après cela,
MeJJïeurs , imaginez vous quel plaifir de revenir chargez de gloire en vôtre patrie
oit vous trouverez peut-être que Sa Majefté Impériale , touchée de vos fervices, au-
' ra bien voulu fe déclarer Duc de Suabe ou de Franconie, pour donner un illufire '
Chef à de fi braves gens.
Le Cercle du Rhin battit des mains à cette Harangue > on entendit un cer-
tain murmure confus dans celui de Franconie, qu'on pouvoit diverfement in-
terpréter j & celui de Suabe, en doute fi ce Difcours lui plaifoit ou non, a-
voit fécretement dépêché au Prince de Bade pour avoir fes ordres là - deflus.
Après quelques difcours de part 5c d'autre aflez. inutiles, un Abbé fe leva, &
par un ton de voix ferme aïant impofé filence ,
Très- Louable s Cercles, dit- il, fou Excellence en nous aprenant confidemment les
intentions de Set Majefté Impériale , Nous aprend auftï par fon exemple à parler na-
turellement, (3 à mettre en ufage cette franchife Germanique , l'ancien caraclére
de notre Nation. Je m'en fervirai donc aujourd'hui , fi l'on m'en donne la permif-
fion , pour le bien de mon Convent (3 pour celui de P Empire. Permis à qui voudra
de raifonner confequemment. Je n'a/pire point aux diguitez du Confeil Auli^ue ,
je n'ai en vue ni Comté ni Baronie , 13 je ne fuis point , Dieu merci , Penftonnaire
de perfonne. Son Excellence me pardonnera cette petite digreffion. Je remercie
très-humblement Sa Majefté Impériale des profperitez qu'Etle nous fouhaite ; En
mon particulier je n'en connois point d'autre que la tranquillité de la Confidence,
un honnête repos, (3 des biens fujfifans à chacun félon fon état. Et fans examiner
le fuccès de ces grandes expéditions que l'on nous propofe , £3 dont je me raporte à
Ece 1 fon
414 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
1701. (on Excellence, j'examine feulement fi cela nous peut procurer ces profperilez que
* ' ' ■ Sa Majeflé Impériale nous defire.
La tranquillité de la Confidence dans cette conjoncture dépend à mon avis de la
juflke de la Guerre-, Les Sujets qui n'ont -qu'à obéir n'ont rien à examiner , £fjf
l'ordre du Prince les met là- de fus en fureté: Les Etats Souverains ont d'autres
obligations , £5? ne doivent jamais expofer injustement la vie & les biens de leurs Peu-
ples. C'efl à vous , Très- Louables Cercles , à voir lequel des deux Per formages Nous
reprefentons. Si Nous fommes Sujets, obéififons aveuglement : fi Nous [ommes Sou-
verains , examinons fi la Guerre efl jufte ; £<f comme cette décifion n'efl pas ici de
nôtre refort , vivons en Paix en attendant que P affaire foit décidée ou elle devra
l'être. Le fécond point fur lequel je f ai fois confifter le bonheur tant public que par-
ticulier efl ce repos honnête , £5? je ne vois pas que la Guerre , Mère des troubles &
des defordres ,foit guère propre à procurer de pareils biens. L? on pourrait dire qii'en
tel cas il faut pou fer fa prévoiance dans l'avenir -, £5? ne pas Je lai fer enchanter
d'un repos préfent qui peut n'être pas de durée; £5? là- de fus Nous effraier de la
grandeur de la France & des Chimères de la Monarchie Univerfièlle. Mais,
Me fu ur s, fi tout le monde convient que le projet de Partage offert par le fage Roi
d'Angleterre, et oit plus avantageux à la grandeur particulière de la France que
Vacccptation du Teflament , pourquoi Nous allarmons nous de ce qu'Elle a. choi-
fi ce qui convenait le moins à fes intérêts ? Tout le Rhin abandonné , des Pla-
ces fi fortes remifes à l'Allemagne , l'inclination du Roi de France , afez connue
pour la Paix, l éducation £5? l'humeur du Dauphin, dont la douceur £5? la bonté
à ce que Pon dit, font très-éloignées du Génie des Ufurpateurs , ne nous flatent
que d'un avenir tranquille , fi Nous en voulons jouir ; £5? je ne fiai fit c'efl
■prudence ou témérité à des' hommes , de porter leurs vîtes au de là de deux gé-
nérations. Pour le troifiéme point qui regarde les biens de fortune , il faut l'a-
vouer , j'en envi fage cffetl 1 ventent de très - réels dans l'entreprife de fon Excel-
îence , & je vois les riche fes de ce volage d'Efpagne , £5? .de la redutlion de
l'Alface & des Evêchcz. Mais que fon Excellence ne trouve pas mauvais fi mes
Religieux £5? moi qui avons renoncé à ces vanitez , Nous nous contentons des
honnêtes revenus de nos Abbdies. Il ne refile plus que la raifion des intérêts
de l'Augufle Mai/on d'Autriche, qui a été, ce me f omble , aplaudie par bien
de gens , £<? ce zélé devroit même , à ce que je crois , exciter Sa Majeflé Im-
périale à fuivre d'autres projets. L' affection qu'on a pour fes intérêts lui en
doit infpirer une égale , de ne pas expofer les nôtres, & c'efl par cette affec-
tion mutuelle £<? relative du Chef £f? des Membres que s"* entretient le corps na-
turel & politique que Nous a cité fon Excellence , & non pas par un dévoue-
ment général à aprouver tout ce qui peut-être propre à des ufages £5? à des
bienfeances particulières. Et fi tous les Membres par une politique mal enten-
due vouloient s' abandonner uniquement aux bienjeanecs particulières de ' leur
Chef, outre qu'ils perdroient infenfiblement leurs ufages naturels , c7efl que ce
bel ordre établi dans la variété des attributs de chacun venant à fe confondre ,
produiroit par des motifs differens le même inconvénient de cett-e fable fi con-
nue; car une révolte & une complaifance aveugle font également préjudiciables.
Si nôtre tête cchouflée defire de prendre l'air, il faut qu'elle confulte fes yeux
pour.
ET RESOLUTIONS D'E T A T. 417
pour [avoir oh elle doit aller; qu? elle fâche de fes pieds , s'ils font en état de la 1701.
conduire ; de fes oreilles , fi le vent n'efî pas trop impétueux ; & de tout fin Corps ■ '
enfin , pour fentir ci? pour juger par fon raport de i'excez du froid ci? du chaud
ou de la bonne température de l'air. Et fi ces Confeillers font corrompus ou dé-
vouez à une fervile complaijance , que deviendront , je vous prie , le Chef (3
les Membres avec de tels Minières ? On peut donc , Meffieurs , comme vous voïez ,
s'opofer aux préten fions du Chef ci? lui être fidèle ; on peut de même lui obéir
(3 être un perfide à fin égard: Voilà les fentimens finceres, je les juge très-
utiles à la Patrie. Si fon Excellence (3 les louables Cercles penfent autre"
ment , je leur fouhaite un bon voïage , ci? je les prie feulement avant leur départ
de n'avoir pas tant à cœur les belles idées qu'ils ne fongent à la fureté de leur
Pais 13 de leurs Familles , que nos Amis les Danois commencent à ravager de.
tons cotez, l'rifles ci? funefles prémices de nos Entreprifes Militaires!
Il n'eut pas plutôt fini, qu'il Ce fit dans la falle un bruit confus , pareil à
celui qu'on entend autour des ruchei quand les abeilles reviennent des prairies
chargées de l'effence des fleurs Le Comte de Leweftein voulut ré-
pondre , pour faire diffraction à des aplaudifTemcns qui commençoient à l'em-
barraiTer; trois fois il ouvrit la bouche, èc trois fois les raifons ou les expreC-
fions lui manquèrent. Enfin, il s'avila de le menacer du prochain Chapitre
de fes Religieux, où il feroit recommandé comme il faut. A ce Nom de
Chapitre , le pauvre Abbé tremblant comme la feuille , Ce mêlant parmi la.
foule , s'enfuit à l'inftant de l' Affemblée. * * * *,
DIALOGUES.
DIALOGUE PREMIER.
L'Allemagne , la France.
Allem. AH! Trame, mon Ennemie f urée , c'efl donc vous que je vois. Ne cef-
ferez-vous jamais de me perjecuter ? Autrefois vous étiez toujours
prête à me fecourir. Vos Enfans me doivent leur première Origine. Quelle hai-
ne vous pouffe à leur faire tourner les armes contre -moi ?
France. Allemagne, mon ancienne Alliée , que je plains vos malheurs ci? vô*
tre aveuglement !
Allem. Comment plaignez-vous des malheurs , que vous caufiz vous-même?
France. Le Ciel me /bit témoin , fi fai d'autres defirs que vôtre repos ci? vô-
tre gloire.
Allem. Mon repos ci? ma gloire! Quand vous voulez me rendre efclave ci? me
fuir, higucr ! ■
Fiance. Vous élevez des ennemis dans vôtre fein bien plus dangereux pour vô-
tre Liberté.
Allem. Comment donc? Ne formez-vous pas des deffeins contre moi?
Eee 3 France.
4itf MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
1701. France. Hunnmgm ?, Brifac , Fribourg , -/e? Fm* </<? ^>£/, /<? .R,,./ Louis,
<• .. . Philipsbourg, &c. font autant de monumcns de ma fine frit é qui devraient vous
faire juger Ji la France veut entreprendre fur l'Empire.
Allem. // efl vrai que ces démarches m'avaient perfuadée que tous nos démê-
lez étoient finis , mais , les dernières que vous avez faites , m'ont bien defa-
pufée.
France. Mais, de grâce, dequoi vous plaignez-vous?
Aliem. Vous débauchez mes Electeurs & mes Princes , pour les armer con-
tre moi.
France. Pauvre abiifêe que vous êtes! Efl- ce les armer contre vous , que de
tâcher à les unir enfemble pour maintenir cette même Paix dont vous paroijfez
fi contente ?
Allem. Et qui la veut troubler?
France. L'Archiduc d'Autriche.
Allem. Ah! France , vous voulez m'abufer moi-même j cela ri1 efl pas pof-
fible.
France. Le voici qui s'avance, vous pouvez le lui demander.
DIALOGUE II.
L'Allemagne , l'Empereur.
Allem. âVancez , Augufle Empereur , venez mon Fils , venez mon Protecteur , /*
France dit-elle vrai ?
L'Emp. Non, Madame, ne la croiezpas, elle ne le dit jamais.
Allem. Elle m'ajfure qu'Elle ne veut rien entreprendre contre moi, que les
Places qu' Elle nous a remïfes en font foi , &? qu'Elle n'a point de Troupes fur
le Rhin.
. L'Emp. Non; mais Elle en a en Italie.
Allem. En Italie, Ce far? Vous favez que ces Etats font proferits il y a long-
iems pour les Empereurs d'Allemagne.
L'Emp. Ce tfefi pas fur les Droits anciens que je me fonde, il n'efi pas en"
£ore tems de les mettre au jour; c'eft fur la Succeffion d'E/pagne.
Allem. Mais la Succeffion d'Efpagne de Droit naturel n'efi point a vous.
L'Emp. Elle n'efi point à moi de Droit naturel, mais Elle me revient en vér-
in des Actes de Renonciation £5? de quantité d'autres.
Allem. Songez. , Augufle Empereur, que fi des Actes ont le pouvoir de déroger
au Droit Naturel, ils doivent à meilleur titre avoir la force de le rétablir; &
qu'ainfi, fort que vous vous fondiez fur le Droit Naturel, foit que vous vous fon-
diez fur les Acles , vos pretenfions font injufles. L'Allemagne n'efi- elle pas ajfez
belle £5? affez vafie pour le courage le plus ambitieux ?
L'Emp. Il efl vrai, mais mon Fils l'Archiduc?
Allem. Vôtre Fils l'Archiduc fera comme ont été les Cadets des Empereurs : tout
le monde n'efi pas né pour des Roiaumes.
L'Emp.1 On me l'avait bien dit , que vous r? étiez pas difpofée à foûtenir les pré -
ton-
ET RESOLUTIONS D'E T A T. $tf
t enflons de mon Augufle Famille , mais Nous aurons des moïens de vous yen- 1701.
gager de gré ou de force. Prince de Bade , Seyler , Schlick, Evêque de Raab , — ■
écoutez.
DIALOGUE III.
L'Allemagne , l'Empereur , un Etranger , Courtiflins.
Etrang. AH! Madame ! le pitoïable état ou je vous trouve! Je croiois voir de
loin le cortège d'une grande Reine , £5? plus je vous aproche , plus vous
me femblez digne de compajjîon.
Allem. Ami, qui que tu fois , tu vois peut-être la veille de mes funérailles.
Etrang. Mais , quel crime avez-vous pu commettre pour être traitée fi, dure-
ment ?
Allem. Demande-le à ceux qui me traitent fi mal.
Etrang. Mon Cher, dis-moi , je te prie , toi qui traînes cette pauvre Dame aux,
cheveux , de quoi eft Elle coupable ?
Courtif. Infolent ! Comme tu parles h V Augufle Empereur Leopold?
Etrang. Pardon, Meffleurs, je fuis un Etranger, je ne l'aurois jamais connu,
Et bien, Augufle Empereur Leopold, qii a donc fait cette pauvre Dame?
L'Emp. Je veux qu'Elle me fajfe avoir l'Efpagne 13 V Italie ; qu'elle donne
la Flandre aux Hollandois, £5? les Indes à mon Ami le Roi Guillaume.
Allem. Helas ! tout le fang de mon Corps épuifé peut-il fuffire à l'injuflice de
ta demande !
L'Emp. Allons, qu'on ne lui donne pas le tems de fe reconnaître', marchons ,
qu'elle nous fcrve de bouclier contre les Armes de nos Ennemis.
Allem. Barbares ! Fous allez donc vous baigner dans mon fang ? Ou font
vos Capitulations? Oh font vos Sermens?
DIALOGUE IV.
La Jufrice, l'Empereur.
La Jutr. pMpcreur Augufle , fi ta réputation n'efl point fauffe, tu te fonmettras
à mes fentimens. Les Hommes naturellement nez libres ont engagé
une partie de leur Liberté à ceux qu'ils ont jugez les plus propres à leur procurer
le repos & la tranquillité , qu'on ne fauroit avoir qu'en fuivant la Juflice. Cet
engagement à été rcfpeclif; tout un Peuple a dcveïté fes intérêts à un feu l Homme ,
Ï3 cet Homme a dévoué tous les fions au Peuple. En dépouillant le car acier e d? Hom-
me particulier , il rfen doit plus avoir ni les intérêts , ni les vues. Si-lot que tu eus
juré les Capitulations (s? reçu les Sermens de la Nation Germanique , tu ne fus plus
que le Juge £5? le Père des Allcmans. Comme Archiduc d'Autriche tu n'es pas
en droit d'exiger que l'Empire ewlraffe tes querelles dcmefliques : Comme Empe-
reur, les intérêts de l' Archiduc à"" Autriche ne font plus les fais. Ceffe tes mena-
ces, -
4i8 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
1 70 1 . ces , tes pour fuites , 13 tes violences , ou la voix du fang que tu feras répandre m'af-
*■ tirera du Ciel pour le vanger.
L'Emp. Ce qu'Elle dit me par oit digne de quelque attention, Allez, Madame ,
votez Mansfeld; qu'il m'en faffe le raport.
Lajuft. Mansfeld.' Oh Ciel! A quel Tribunal renvoie-t-on la Juftice? Pau-
vre Allemagne , que je te plains!
DIALOGUE V.
L'Empereur , l'Allemagne , Courtifan.
L'Emp. ALlons ,-mes Amis, allons , qu'on faffe hâter le pas à cette Pareffeufe
qui ne fait que larmoyer.
Allem. Helas! Dans quel Gouffre , dans quel Abîme , me veut-on précipiter?
L'Emp. Faites grand bruit , qu'on n'entende pas fes plaintes. Elle pourrait à
ia fin toucher quelqu'un : Nôtre Comte de Schlick a-t-il fait fa tournée ?
Court. Oui, Ce far , il a fait belle peur à Trêves &? à Mayence; c'efl , dit- on,
Pépouvantail des Ecclefiafiiques.
L'Emp. Et Seyler , comment fe gouverne-t-il à Ratisbonne? A-t-il mis fur le
bon pied ces Bourgeois , prétendus Protecteurs de la Liberté des Diètes ?
Court. // les a fi bien réduits, qu'il fer oit en un befoin ebaffer vos Ambajfadeurs
de Ratisbonne , s'il l'avoit bien re/olu.
L'Emp. A t-on des nouvelles de l'Evêque de Raab?
Court. Il a mis en feu tout le Chapitre contre fon Archevêque.
L'Emp. Voilà un brave Evêque ! J'avois peur au commencement qu'il m vou~
lût point s'en mêler; mais l'efpoir du Chapeau a fait merveilles. Qu'on avertijfe
cependant bien tous nos fidèles Confeillers Auliques d'entretenir ces bonnes difpofitions
de leurs Maîtres : & quand Naples fera entre nos mains, ce qi'i arrivera inceffam-
ment , car j'en ai eu révélations quand dis-je nous aurons Na^as & la Sicile, ils
peuvent conter fur l'argent que je leur ai promis.
DIALOGUE VI.
L'Empereur, Kaunitz, Mansfeld, Courtifans, la Paix.
L'Emp. VAunitz, Mansfeld, accourez, faites venir tous ces Incrédules, qui ré-
voquent en doute mes Aparitions. Voicz cet Ange qui addreffe ici
fes pas! Quelle gloire l'environne , quels biens il fcmble nous offrir ! Quelqu'un
douter a-t-il à prefent de la Protection du Ciel pour la Maifon d'Autriche ? Par-
lez, Efprit bienheureux , qui que vous foiez, je fais vœu de vous faire bâtir une
Chapelle , ou l'on chantera tous les ans un Motet de mon Augufte Compofition.
La Paix. Je ne veux pas être feulement la Patrone de ta Chapelle : je la ferai,
fi tu veus , de tout l'Empire.
L'Emp. De tout l'Empire, grande Sainte! c'efl trop de bonté , foiez-la feule-
ment de mes Pais héréditaires.
La
ET RESOLUTIONS D'ETAT. 4z9
La Paix. Ne crains point que ma puiffance fait bornée. . . . Mais avant que 1701.
vous déterminer , ouvrez tous les yeux , £5? volez quels font les biens que je puis — —
procurer.
1 Court. Quelle nouvelle douceur on refpire. !
2. Court. Quelle joie fe répand de toutes parts!
3 Court. Que ces Campagnes font belles!
1 Court. Que ces Coteaux font riches !
2 Court. Que ces F allons [ont délicieux!
1 Court. Quelles Récoltes !
2. Court. Quel Commerce!
Tous enfemble. Que d'or^çî d'argent dans tout V Empire!
L'Emp. Comme de l'or & de l'argent , Kaunitz , cela nous viendra bien k
propos pour V Italie.
La Paix. Attends Kaunitz, attends Ce far, connois qui je fuis, avant que de
jouir de mes faveurs. C'efi moi qui entretiens les douceurs de la vie £j? les inno-
cens plaifirs : C'eft moi qui confie une infortunée vieille (fe par le retour de fes En-
fans , qui rends les Pérès à leurs familles pour le bien de leur éducation , qui
fais fleurir les Loix &? les beauts Arts , qui produis l'abondance : enfin je fuis
un des prefens les plus précieux que le Ciel ait fait à la terre j je fuis la Deejfe de
la Paix.
L'Emp. Kaunits, ~)
Court, tous en- £ Vous n'êtes que la Deejfe de la Paix!
femble. j
La Paix. Oui je fuis la Deejfe de la Paix qui puis tous vous rendre heu-
reux.
L'Emp. Le Comte i'Ortnaw me dira vôtre affaire.
Court. Allez, Madame, allez ; vous n'êtes bonne que pour des Moines , ou des
Paifans.
L'Emp. Quelle parte, Kaunitz, avec tous fes biens ; j'aime mieux le Mi-
lanez.
La Paix. Malheureux aveuglez que vous êtes ! qui n'aimez ni vos Peuples ni
la Jufiice , je vai dans un Pais où l'on me chérira , je le comblerai de gloire &
de biens , tandis que vous ferez abreuvez de fang & de larmes , G? plongez dans
les horreurs d'une Guerre injujle G? malheur eufe.
DIALOGUE VIL
L'Empereur , un Philofophe , Domeftiques.
Domeft. TfOilà un Courrier, Ce far , qui arrrive d' Italie.
L'Emp. Qu'on le faffe venir. Ce fera encore quelque défaite des François
.par le Prince Eugène.
Le Phil. // eft vrai que ce Prince Eugène en tué beaucoup.
L'Emp. Cela n'efi pas concevable } il y en a de compte fait , fi j'ai bien cal-
Tom. I. Fff culé
430 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
170 1. cttlé fyj\^., fans y comprendre un convoi de malades , que Von fit dernièrement
r pajfer au fil de l'épée.
Phil. Comment} Des Malades ! Il me femble que cela ejl bien inhumain.
L'Emp. On nPafj'ure que c'eft bien fiait , (3 que Dieu a ordonné à fon Peu.
pie de' tout tuer jufiques aux animaux.
Phil. Dans l'ancienne Loi Dieu peut Savoir ordonné contre des Idolâtres;
mais dans la nouvelle , oh Von ordonne àïaimer nos Ennemis , on aura peine à
exeufier ces aclions.
L'Emp. Ce n' eft pas mon métier que la Guerre , je laijfe faire mes Généraux ;
il me femble qu'ils apellent cela Fruétus Bclli, (3 qu'ils dlfier.t , plus de morts ,
moins d'ennemis. Enfin , fi c'efil bien ou malfaifje m'en raporte à eux , chacun
aura le fruit de fies œuvres. Car , comme je vous ai dit , ce n'eft pas mon fort que
la Guerre; 13 s'il y a, Dieu merci, fort long tems que je la fais, (3 la ferai en-
core s'il plait à Dieu.
Phil. Le fouhait eft très- dévot; mais penfez-vous être excufable par cette
ignorance ?
L'Emp. Ami, la capacité des Hommes eft bornée, 13 «» Empereur , a vôtre
Avis , doit -il tout favoir ?
Phil. Fous avez raifon, Ce far , ce n'eft pas une neceffttê ; car il n'importe
guéres à fies Peuples qu'il fâche fon Pfautier par cœur , ni qu'il compofe bien en
Mujique.
L'Empereur, agité de l'état des Affaires d'Italie, & des deflèins de rejet-
ter dans les horreurs de la Guerre tous les Etats de l'Empire , qui goûtent à
peine la douceur de la Paix , n'avoit pu de toute la nuit former l'œil d'in-
quiétude. Il cedoit cependant au fommeil , quand il vit dans fa Chambre
une Perfonne s'aprocher de fon lit , qui paroifloit avoir quelque chofe de plus
qu'humain. Sa tête étoit ornée d'une Couronne fi brillante, que l'Empereur
n'en pouvoit foûtenir l'éclat. Cependant , comme ce Prince eft allez iujet
aux Aparitions, il fe remit de la fraïeur qu'il avoit eue d'abord. §)ui que
vousfoïez, dit- il , qui défendez du Ciel pour nôtre afiftftance , parlez , confieil-
lez-nous, mon Fils l'archiduc a bien befoin de vôtre Protêt! ion. Ouvre les yeux,
Empereur, lui dit cette Ombre, 13 connais un Roi que ton intérêt particulier
t'a fiait perfecuter, malgré la Juftice {3 la Religion que tu profejfes. J'étois ja-
dis le Roi de trois Grands Roiaumes : la main du Seigneur s' eft apefantie fur
moi , j'ai adoré fa fainte colère , & un parfait dévouement à fia volonté m'a
mis enfin dans l'état glorieux où tu me vois, 'tremble , Maifon d'Autriche !
Ces vains dehors de pieté n'abufent point celui dont l'œil perce les abîmes , 13 qui
conte les fables de la Mer. Tu fléchis depuis long-tems le genohl devant Baal ,
(3 tu facrifies à l'idole de ton Ambition les Droits fiacrez de la Juftice , les biens
des Peuples, (3 la foi de tes Sermens. Fois les fleuves de fang qui vont inonder les
Etats dont le Ciel Payoit confié le repos 13 la tranquillité. Ecoute les voix la-
mentables qui crient vangeance contre toi. Tu a] roches de ce jour terrible ou tout
l'Univers ne fiera plus rien pour toi; & cette Juftice , que tu as fi peu refpetlée ici
bas, prendra fon vol de la[Terre jufiques aux deux peur f aller charger de repro-
ches.
ET RESOLUTIONS D'E T A T. 451
cbes. Ta vaine Idole , qui n'avoit que les pieds d'argile, tombera en pondre avec 1701.
fes defj'eins ; & ceux qni feront fondez fur la Juftice dureront toujours. A ces — — —
mots, l'Ombre difparut , comme un nuage léger qui fe diflipe. L'Empe-
reur, touché de fraïeur, fit une ferme réfolution de laiflcr l'Europe en Paix;
6c , l'après diné , il aflembla fon Confeil pour trouver le moïen d'envoler
quelque fecours d'argent à Ion Armée d'Italie.
MANUSCRIT
Trouve' dans la Biblioteqjje de *##**.
AYant été emploie en difFerens endroits dans la plus part des Affaires qui
fe font pafTees dans l'Empire depuis la mort du Roi d'Efpagne , j'avois
enfin pris le tems d'aller chez moi. Comme je m'en retournois feul avec mes
gens, toutes les différentes Négociations où j'avois eu quelque part , me re-
venoient incdîamment dans l'Efprit , 6c je me fentois de tems en tems le
cœur preffé de certains fcrupules , d'avoir fervi d'inftrument à retarder une
chofe fi falutaire, que l'Aflbciation de tant de Princes pour le maintien de la
Paix. Je diflipois ces penfées fàcheufes par des idées d'ambition Se de recom-
penfes , 8c ce travail d'efprit joint à la longueur du chemin m'aflbupifibit in-
iènfiblement , quand je crûs voir ou je vis effectivement le même Païs , que
j'avois laifle fi abondant 6c fi riant à mon départ, dans un état qui me fit hor-
reur. Tous nos vallons fi riches étoient incultes , les Villages ruinez , les
Châteaux en cendre, les rivières teintes de fang, quelques Païfans paroiflbient
feulement lur les Montagnes comme des Spectres havres 6c hideux, qui brou-
toient l'herbe comme des bêtes fauvages. Je ne favois que penfer d'un chan-
gement fi déplorable, quand je vis à la defeente d'une petite Colline une Da-
me vénérable, expofée a l'infolence d'une troupe de Scélérats , qui paroiflbient
de différentes Nations ; les larmes couloient de fes yeux comme un torrent \
Elle levoit au Ciel fes mains meurtries , le iâng ruiflelloit de fon corps à demi
nud , 6c le relie de lès vêtemens en lambeaux , fe partagoient parmi ces fu-
rieux. Une lècrete horreur s'empara de mon ame : Mais que devins-je ? Lors
qu'étant à une diltance à la pouvoir re"connoitre , je vis dans ce vifage trifle
6c coloré tous les traits d'une Mère que j'aime tendrement , qui étoit le plus
preflànt fujet de mon Voiage , Se qui me difoit , Ah ! mon Fils , je me meurs ,
£5? vous pouviez me fauver .... Je crie à mes gens , je me jette hors de
mon Carroflè , je cours furieux où j'avois vu cet horrible fpeélacle qui dans
un inftant s'évanouît à mes yeux , non pas comme un éclair , mais comme
quelque funefte météore qui me laiflà rempli d'effroL Je tombai à demi-mort
fur le Gazon , quelques-uns de mes Domeftiques, qui m'avoient fuivi tout
éperdus , me portèrent dans le Carroflè fans poulx 6c fans mouvement. Quand
j'eus repris mes efprits 6c que j'eus queftionné mes gens qui tous difoient n'a-
voir rien vu dans le chemin, me trouvant aflèz près de chez moi, je preflai
mes chevaux dans l'impatience 6c dans l'inquiétude d'arriver. Je ne fus pas
Fff 2. plû-
43i MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
I701- plutôt hors du Carofîe, que je vis cette Mère, qui m'étoit fi chère , venir à
" moi les bras ouverts pour me recevoir, je l'embraflai les larmes aux yeux Se
avec des ientimens que je ne m'étois jamais connus. Je ne lui dis point la
vifion que j'avois eue dans la crainte de l'affliger. Je défendis à mes gens de
parler de l'accident qui m'étoit arrivé, & dont je leur parlai moi-même com-
me d'un Songe. Cela ne me pouvoit cependant pas ibrtir de l'efprit , & je ne
voiois jamais ma Mère, que mon cœur ne foûpirât. Il y avoit déjà quelques
jours que je goutois chez moi la douceur d'un heureux loilîr, une aflèz belle
Maifon, des jardins heureufement fituez & entretenus avec foin, l'occupa-
tion de la chafle , les plaifïrs d'une douce focieté, l'amitié de ma Mère , tout
cela m'avoit achevé de calmer l'efprit. Une nuit, après un aflèz long fom-
meil,dans le tems que nôtre ame commence à diffiper les nuages que les dif-
férentes agitations des fens opolènt à la lumière , les portes de ma chambre
s'ouvrirent, mes rideaux fe tirèrent , je vis entrer une Dame pleine de Maje-
fté , un homme d'une taille au defîbus de la médiocre lui donnoit la main Se
la conduifoit avec refpeér.: il portoit une Couronne fur fa tête, fept Princes
l'environnoicnt , dont les uns paroifToient foutenir fâ Couronne, les autres
fembloient deftinez à aider cette Dame à marcher. On voioit une multitude
dé gens de dilluiétion aplanir les chemins à leur pafTage ; le Ciel paroiiîbit fe-
rein , la terre étaloit lès richeffes par tout où ils adreflbient leurs pas ; j'étois
charmé d'un fi beau Spectacle, quand une voix fe fit entendre qui prononça
ces mots : Voilà le bel Age de V Empire.
La Scène changea bien-tôt, Se je vis revenir cette même perfonne dans un
état bien différent. Celui , qui m'avoit paru lui donner la main , ne la con-
duifoit plus, il la trainoit : un feeptre pefant , qu'il lui avoit mis fur le col,
la tenoit comme fous le joug ; la Couronne , qu'il portoit feul , étant plus
large que fa tête ne comportoit, Pincommodoit Se l'aveugloit en marchant}
de forte qu'il étoit obligé de fe laiffer conduire lui-même par quatre ou cinq
hommes mafquez,qui lui faifoient faire à chaque moment de fauflès démarches,
tandis que cette Dame malheureufe , entrainée au gré de ces mauvais Conduc-
teurs, préfentoit inutilement la main qu'Elle avoit libre à ces Perfonnages qui
m'avoient paru deftinez à la foutenir. Mais , les uns s'exeufoient fur leur
foiblellè, Se paroifToient eux-mêmes avoir les mains liées > un autre étoit oc-
cupé à fe forger une Couronne bizarre , qu'il fe mettoit lui-même fuperbe-
ment fur la tête ; d'autres comme des aveugles fuivoient certains guides qui
d'une main les conduifoient, & de 1 autre tenoient une grande bourfe vuide ,
où il tomboit de tems en tems quelques ducats ; il y en avoit qui temoignoient
delà compaffion,Sequi fembloient la vouloir lècourir, Se quelques uns avoient
la fureur de lui offrir la main pour l'accabler encore d'avantage. Après qu'El-
le eut fait quelques pas dans un fi pitoiabie état , Elle jetta un cri , qui perça
les airs, & j'aperecus des lacs de fang Se des gouffres de feu vers lefquels on la
pouilbit , & où il paroifioit que ces Barbares vouloient la précipiter : A moil
Mes Enfans, s'écrioit-Elle en faifant de vains efforts, à moi; pour jamais je
Juis perdue peur vous , fi vous tardez d^avantage. J'en vis qui firent des dé-
marches pour aller à ion lecours j mais , un tremblement de terre , des nua-
ges.
ET RESOLUTIONS D'E T A T. 455
ges obfcurs, des cris affreux , me mirent en un état à ne pouvoir juger de 1701.
ce que je voiois. Va^ me dit la même voix , raconte ce que tu as vît: il ne — — —
f efi pas permis d'en /avoir davantage. J'ouvris enfin les yeux, que je me trou-
vai baignez de larmes. Je m'habillai tout éperdu , Se je paffai dans Paparte-
ment de ma Mère , à qui je racontai enfin toutes mes Aparitions : je lui en
dévélopai les miilercs ; car , mon efprit fe fentoit à tout moment comme
éclairé par de nouvelles lumières. Je lui expliquai, que ma première vifion
avoit été, aparement , pour me foire connoître que mon infidèle conduite dans
l'Afiemblée des Cercles feroit peut-être caiife de la defolation de l'Allemagne,
qui fous les traits d'une Mère chérie fembloit me reprocher tous les maux
auxquels elle alloit être expofée ; que la féconde repréfentoit l'heureux état
de la Nation, lorfque le Chef & les Membres par un accord harmonique n'ont
en vue que le bien publie} & pour la troifiéme, que c'étoit le véritable por-
trait de l'Etat prefent de l'Empire , où les Loix de la violence avoient fucce-
dé à celles de la juftice, où l'Empereur vouloit porter fa Couronne tout feul
fans conter que les Electeurs ont droit d'y porter la main , où l'on vouloit
enfin plonger l'Allemagne dans des fleuves de fang pour des prétentions &
des jaloufies particulières &c. Et je lui dis le deffein où j'étois d'obeïr à la
voix qui m'avoit commandé de tout publier. Elle trembla du péril où j'ai-
lois m'expofer , que non feulement ma fortune étoit perdue , & toutes les
efperances des premières dignitez du Confeil Aulique , mais que ma vie ne
feroit pas en fureté ; Qy'Elle ne vouloit point que je hazardaffe des chofes û
précieufes fur de foibles imaginations ; qu'à la bonne heure je ne me mêlafle
plus de fervir à troubler les bonnes intentions des gens de bien ; mais, que je
ne m'expolaflè pas témérairement à découvrir des miftéres, qui ne ferviroient
qu'à ma ruïne. Je refolus enfin de céder à fes Confeils. Mais helas ! Elle mou-
rut fubitement le lendemain. Je crus connoître la punition de ma defobéïf-
fancej & pénétré d'un châtiment fi fevere, je refolus de rompre le filence.
Oh Allemagne! Ma Chère Patrie , Mère Augufle de tant de Grands Hommes ,
fui [que tu m'' as choifi pour m'infpirer tes douleurs , malheur à moi fi je n'' 'en fais re-
tentir r Univers; que tout refpecl humain ce/Je , & expions par des difeours fince-
res la honteufe foiblejfe que /ai eue de vouloir facri fier ton repos à de malheureux
intérêts. Jadis un faux Prophète defiiné à la ruine d'Ifraël, faifi de r efprit du
Seigneur fut emploie malgré lui pour le falut de ce même Peuple (3 four la ruine
de fes Ennemis. Ecoutez, donc, Princes £5? Peuples d' 'Allemagne , la voix d'un
Miniftre qui emploie à creufer un abîme fous vos pas^ efi contraint de vous en dé-
couvrir V artifice. Oh courez vous , Princes aveuglez. ? Quel efprit de vertige s'' em-
pare des Cercles £s? des Etats de l'Empire ? Quel efi le vain objet de vos defirs ?
Quel efi le foi b le fujet de vos craintes ? Nous laffons-nous déjà d'être henreux ?
Qyaud la France feroit accablée , quelle utilité retirerions - nous des travaux que
ÎVous aurions foi. <ffm 's , qtfun efclavage affâré? Chaque Fille conquife feroit autant
de chaînes que vous forgeriez pour votre liberté ; £5? où fera vôtre recours , quand on
voudra vous en accabler ? yentens vôtre repoufe; les chofes, dites-vous , fe pouf-
feront jufqu 'à un certain point , enfuit e Nous mettrons des bornes aux conquêtes de
r Empereur , & la France fera encore trop heur eu fe de nous afffier. Quelle fauffeti
Fff 3 de
454 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
1701. de raifonnement! ghielle injufiice ! Vous tremblez au feul Nom de l'Empereur
• fans argent & fans Troupes , vous fouffrez que dans fa foiblejfc il brife , il de-
truife, il meprife , les Confiitutions , les Capitulations , les Droits les plus facrez
de l'Empire -, qu'il fajfe des Elecleurs fans la communication des Princes , des
Rois au préjudice des Eletleurs , qu il profcrive des Souverains , qu'il viole le
Droit de Gens, & qu'en arrêtant un Ambajfadeur il deshonore l' Allemagne par
une aclion qu'on aurait honte même de propofer chez les Nations les plus barbares ;
qu'un ftmple Baron de Seiler régente infolament à Ratisbonne au mépris des Elec-
teurs £s? des Princes; qu'un Comte de Schlick aille jufques fur le Siège Eletloral
menacer les Souverains s'ils ne fe dépouillent de l'amour de la patrie ; qu'un Eve"
que , à la honte de fa race , &? de fon Caraclere , faifant l'Emiffaire de la Cour de
Vienne , abandonne fon Diocefe pour aller prêcher la Difcorde £5? infpirer la fu-
reur di-ns un Chapitre contre fin Prince 13 fon Archevêque ! Vous fouffrez toutes
ces chofis, £s? tant d'autres qu'il n'efi pas neceffaire de vous dire, £5? vous les fouf-
frez pour »' 'avoir pas la force de prononcer un mot , une feule parole , qui pourrait
vous en exempter , £5? laiffer vos Etats £î? vos Peuples en repos £5? en fureté ! Com-
ment donc ces mêmes efprits s'opoferont-ils à un torrent débordé, dont ils n'auront
feulement ofé troubler la four ce ? Car enfin que chacun s'examine £5? rende Juftice
dans fon cœur à la vérité , il avouera en rougiffant , qu'il n'y a que la corruption
ou la crainte qui ait preftdé aux réfolutions favorables à l'Empereur. Ce font là
les feul s principes de tous les mouvemens qui fe font pour la Cour de Vienne, £sf
malheureux que je fuis je n'ai que trop été initié dans ces honteux mifteres! Crain-
drez vous moins, ferez vous moins corrompus , quand cet Empereur fera en état de
vous faire £5? plus de mal £îf plus de bien ? N'alléguez donc point ces raifons fri-
voles. D'ailleurs , y a-t-il de l'humanité £5? de la Juftice de chercher à offenfer
ou à détruire ceux , dont vous pouvez uniquement efperer un fecours , que vous
avez fouvent éprouvé dans vos malheurs j £«? y a-t-il de la prudence de
vouloir ajfoiblir un apui que vous convenez qui doit quelque jour vous foû-
tenir ?
La France eft nôtre A;nie, ou notre Ennemie. Si elle efl nôtre Amie , quel
aveuglement , £s? quelle honte , de s'armer contre Elle ! Si elle eft nôtre Enne-
mie, déclarons les inf raclions & les hoftilitez qui nous le perfuadcnt , & n'héfi-
tons plus à l'attaquer. Mais toutes [es démarches dans la Paix de Ryfivick nous
ont affez perfuadé qu'Elle veut une Alliance inviolable avec l'Empire. Tant de
de mouvemens , d'apareils de Guerre, d'Intrigues, de Négociations ,fe terminent à
favoir à qui doit refier la Succefiion d'Efpagne , £s? je fuis perfuadé que fi cette
Succefiion, indépendamment même des Droits naturels £5? légitimes, avait été re-
mife à la decijion des Etats de l'Empire, ils auraient dû en fuivant leurs vérita-
bles intérêts, en difpofer comme en a fait le Roi Très- Chrétien , £sf refufer ce
Projet captieux de Partage comme une chofe qui alloit rejetter toute l'Europe dans
une Guerre infaillible. Faut-il que Tanimofité du Roi d' Angleterre , qui avoit
fes vues particulières dans ce Traité, faut-il que l'Ambition, il me fâche de laif-
fer échaper cette expreffion; mais enfin j'y fuis contraint; oui, Mefiieurs, faut-il
que l'Ambition de l'Empereur remette le fer £s? le feu dans nôtre Patrie, £5? qu'il
feferve de nos propres mains pour déchirer fes entrailles ? Je veux que tous nos
biens
ET RESOLUTIONS D'E T A T. 45?
biens /oient en fureté , que nos Chefs &? nos Soldats foient invulnérables à Vépée 1701.
des François : après dix ans d'une Guerre avec même des évenemens favorables , ■
les Cercles de Snobe £ff de Franconie en Jer ont-ils plus heureux à la Paix} En fe-
ront-ils plus puiffans ? Qu'ils partagent , j'y confins , la Monarchie d'Efpagne à
leur gré; au lieu d'y gagner un pouce de Terre, ofent-ils fe flatter qu'il ne leur en
contera rien? Oferont-ils dire que la Paix n'eut pas été préférable? Et c' efl -là
cependant tout ce qu'ils peuvent , non pas efperer , mais imaginer de plus avanta-
geux dam les beaux deffeins qu'on nous propofe. Voilà le plus beau côté de la Mé-
daille : Vous tremblerez fi je la retourne à vos yeux. Que les François aient la
fortune favorable , que cette Nation irritée paJJ'e le Rhin : Villes defolées, qui à
feine commencez à vous relever de vos ruines , malheureux Pais oh la Guerre a
laifjé de t rifle s monumcns de fa fureur , dans quel état allez-vous être réduits ?
Pauvres Peuples , Noblefj'e infortunée , vos Terres & vos Maifons à la, merci de
vos Amis & de vos Ennemis, ne feront plus qu'une folitude ejfraiante on régnera
la mort 0? lo mifere. Prince de Bade , la Suabe fe glorifioit d'avoir donné la
Naiffance à un Prince qui fe faifoit une fi belle réputation : faut • il qu'une amey
qui paroiffoit élevée audeffus du commun, ait eu la foiblcffe des âmes vulgaires ^
& que des intérêts particuliers vous aient fait quiter la qualité d'un des Pro-
tecteurs de l'Empire , pour être à la tête de fes plus dangereux Perfecuteurs ?
Vous abufez de cette confiance & de ce dévouement qu'on avait pour voust
6f Vous nous pouffez dans un précipice qui fera detefter vôtre mémoire.
Jeune Duc de FVirtemberg, vous n'êtes plus d'un âge à ne pas ouvrir les yeux
fur vos véritables intérêts , J'uivez les avis du Prince de Bade quand il s'agira
des mouvemcns d'une Armée & des Projets d'une Campagne, mais f niez les Con-
fcils du Comte d'Ortnaw fur les affaires de l'Empire, &? n'aïez en vue que le re-
pos & la fureté d'un Pats que les Droits de vôtre Naiffance ont mis fous vôtre
DirecHon. Defiez-vous des Miniftres qui peuvent avoir d'autres intérêts que les
vôtres, &? contez qu'il efl plus glorieux d* fauver fes Citoïens, que de gagner des
Batailles.
Sage Archevêque de Mayence, dont le Cœur en fecret foupire des malheurs que
vous prevoiez , £5? dont les intentions droites & raifonnables font dignes de Tau-
gu/le place que vous tenez dans l'Empire : Ces lumières , ces mouvemens que
le Ctel vous envoie , font ces talens de l'Evangile que le Maître donne à fes fer-
viteurs. Prenez garde de les rendre inutiles. Vôtre patrie vous tend les bras
d'un côté, l'Empereur vous menace de l'autre , la Juftice & la Pieté vous appel-
lent, la crainte vous veut retenir , & quelle crainte ? font -ce là deux partis à
mettre en comparaifon ?
Pour l'Elecleur de Trêves , il n'afpire qu'à la continuation de la Paix , & de
quelque côté qu'il jette les yeux , fies Etats ne lui foumifftnt que des objets qui
le confirment dans cette refolution. Mais de certains liens fecret s l'embarrafjent &
femblent le vouloir ré jet ter dans un état , qu'il a fi fouvent déploré : Prince vraie-
ment digne de meilleurs Confeils, entre les mains de qui mettez-vous le fort de
l'Eletlcrat de Trêves ? Efl- ce au Confeil Aulique de l'Empereur à décider du re-
pos de vos jours, & de la vie £<? des biens de vôtre Peuple?
Noble Maifon de Bavière y illuflres Succeffmrs des Ferdinands & des Maximi-
liens3
456 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
i~01- liens y tant que nôtre Patrie vous verra marcher fur leurs traces &? vous intereffer
"' four fin repos , Elle ne defefperera point de fonfalut. Songez cependant que les bon-
nes intentions font lefiul tribut que la juftice exige des faibles , mais que les puif-
fans font faits pour la maintenir , & fiuvenez vous que tant que la mémoire d'un
Louis de Bavière durer a, la grandeur de fa Mai/on Jera fecretement proferite dans
le Confeil intime des Autrichiens.
On ne cloute point que le Roi de Pologne ne regarde avec indignation le perfin-
nage honteux que joue à la face de toute l'Europe un Prince du fang de Saxe :
Mais V Allemagne fe flatte que par des démarches nobles & cour ageufes ce grand Roi
fera voir combien il les de [approuve , £s? qu'il témoignera que tes affaires de /on
Roiaume, quelques importantes qu'elles fiient, ne l'empêchent pas d'accorder fis feins
& fin fecours au Pais à qui il doit fin illuftre origine. Pour vous , Cercles de l'Em-
pire , qui avez cent têtes , dont on fe fert pour embarrajfer toutes vos démarches ,
fingez à vous unir , ou vous êtes perdus. Lifez, li fez, vos Archives *: Fous y
trouverez la même conjoncture des affaires , les mêmes refolutions , les mêmes in-
trigues de la Cour de Vienne; Fous y reconnaîtrez vos foibleffes & vos fautes ;
Fous y verrez enfin vos miféres £s? vôtre inutile ■f repentir.
L'Empereur vous invite encore à cette même Tragédie fanglante , dont vous étiez
les Aéleurs Infor tunez. Reconnoiffez cette voix cruelle qui nous crie fans ceffe , que
l'on facrifie fa vie, fis biens, fa famille à la Grandeur de l' Archiduc , quand le
fer & le feu devraient encore défiler l'Empire. Du côté de la France entendez
une autre voix qui vous dit , Princes , confervez vos droits & vos privilèges , Pè-
res élevez vos familles , Peuples cultivez vos terres , jouifjez tous des biens de la
Paix, vivez heureux. Quelle fureur d'héfiter à choifir !
Grand Dieu , qui jetiez l'efprit de vertige £5? d'aveuglement dans les Etats que
vous voulez punir, apaifez vôtre colère. Fôtre main irritée veut-elle s'apefantir
fur nôtre Nation? Si je fuis obligé de crier par vos ordres à mes Citoïens, Encore
.trois jours, & Ninive fera détruite; infpirez leur, donc Seigneur les mêmes fenti-
mens qu'eut jadis ce Peuple; &? qu'à l'exemple de cette Fille condamnée, ils defar-
tnent vôtre vangeance divine , & fi rendent dignes de cette Paix qui ejl le prefint
le plus précieux que vôtre bonté faffe aux Hommes.
FIN.
Le Cercle de Suabe entra dans PAflbciation; 8c, conjointement avec celui
de Franconie , ils invitèrent les autres Cercles & Princes de l'Empire de
iè joindre à eux. Cela fit que les Electeurs Eccléfiaftiques, aïant tenu une
Afiemblée à Lockenftein , refolurent de s'y joindre. Deialleurs Envoie de
France fe jetta fur le Rhin pour y porteries Etats, à la même Neutralité &
AiTociation. ïl fe rendit à Cologne, où il eut une Audience du Magiilrat,
Se il lui remit une Lettre obligante du Roi fon Maître , qui afluroit que
moïen-
* A la première Guerre de Hollande, on propofa à l'Empire les mêmes Afîbciations , &
la Cour de Vienne fit les mêmes Intrigues pour les rompre,
t Lettre d'uu Minillre du Cercle de Suabe à un Chancelier , où il fe plaint de n'avoir pas
•fuîvi lesConfeils de Ferdinand-Marie Electeur de Bavière , & où il déplore l'é-
tat du Païs.
ET RESOLUTIONS D'E T A T. 457
moïennant l'acccfîîon à cette Aflbciation , l'on n'avoit rien à craindre des ar- 1701.
mes de France. -. / _ "
L'Empereur ne négligeoit cependant rien de fon côté pour détruire les
infinuations de la France. Il écrivit à tous les Electeurs, Princes, & Etats du
Corps Germanique pour les porter à favorifer Tes intérêts. Le Roi de PrulTc
envoïa la Copie de celle qu'il en avoit reçu, à fon Envoie à la Haïe pour
la communiquer , ainû* qu'il fit, au Concilier- Penfionnaire. Il envoïa d'ail-
leurs le Comte de Schlick vers plufieurs Princes. Celui-ci fe rendit à Bojin
auprès de l'Electeur de Cologne. Il lui fit de fortes Repréfentations. Il n'en
reçût cependant qu'une Réponfe entièrement opofee. C'eft ainfi qu'on peut
voir par la Relation ci-jointe qu'on en reçût à la Haïe.
A Bonn, le 10. d'Avril ijo 1.
MOnfieur le Comte de Schlick, Général des Armées de Sa Majefté Im- Relation
periale étant arrivé ici Jeudi au foir , eut Audience le lendemain vers l'eIa Né-
midi, fans cérémonies, de S. A. E. dans laquelle aufli bien que dans la Con- fj^n^
férence tenue enfuite avec lui , il dit que Sa Majefté Impériale aïant des Com-
raifons indifpénfables pour - pourfuivre lès Droits à la Monarchie d'Efpagne fe de
par toutes les voïes poflîbles, Elle fouhaitoit, que fon Altefle Electorale ne Schlick
prit aucun engagement avec les Puiflànces, qui les lui difputent, 6c qu'en cas
de rupture elle s'unit avec Sa Majefté Impériale & fes Alliez, y devant être
excitée, par deux puiflans motifs, dont l'un eft l'étroite Alliance, que la
Maifon Electorale de Bavière a avec l'Augufte Maifon d'Autriche , 6c l'autre -
l'intérêt général de tout l'Empire , auquel les Couronnes de France & d'E-
fpagne veulent foûftraire les Païs-Bas, 6c le Duché de Milan, étant à crain-
dre, que par leur Union Elles ne fe mettent en état de fub juger avec le tems
■ le refte de l'Empire , fi les Princes , qui en font Membres, ne fe fervent pas
de l'occafion pour les empêcher, la France n'étant pas encore fi redoutable à
prefent , qu'elle veut le faire paraître. Il a reprefente de plus , que Sa Ma-
jefté Impériale n'étant plus occupée du côté de la Hongrie, pourrait em- ■
ploïer toutes fes Forces contre cette Couronne avec plus de fuccès que jamais,
& que d'autre part les Anglois 6c les Hollandois feront des derniers efforts
pour féconder Sa Majefté Impériale en tous les deffeins , tant pour fe vanger
du mépris, qu'on a fait du Traité de Partage, que pour maintenir leur Re-
ligion, leur Liberté, 6c leur Commerce ; 6c que fi fon Altelîè Electorale vou-
•loit entrer en intelligence avec Sa Majefté Impériale 6c avec Eux, il aurait
ordre, lui qui parlok , de convenir avec Elle en leur nom de tous les avanta-
ges & conditions qu'Elle pourrait fouhaiter , s'en promettant là-deflûs une
Réfolution favorable, puis qu'il s'agifîbit de maintenir la Liberté de l'Euro-
pe , & principalement celle de Princes de l'Empire , qui couraient rifque au-
trement de perdre pour toujours leurs Souverainetés, 6c d'être traitez à l'a-
venir comme l'ont été autrefois les Evêques de Mets, Toul, 6c Verdun, 6c
tout récemment , celui de Strasbourg. Il ajouta, que fi contre toute attente
ladite Altefle Electorale ne vouloir par fe rendre à toutes ces raifons, il ferait
à craindre, que quand les Etendards^ des Puiflànces Alliées fe déploieraient aux
Tom. L Ggg ca-
458 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
170 1. environs de fes Pai's , on ne pourroit plus avoir pour Elle les mêmes égards,
' que l'on auroir, fi Elle le liguoit avec lefdites Puiiîances.
Voilà en fubflar.ee ce qu'il répréfentaj mais , il fut bien ferons qu'au lieu de
recevoir la Réponfe favorable qu'il attendoit, on lui dit que l'on AltefTe Elec-
torale s'étant chargée de fes Archevêchez & Evêchez , préférera toujours
leurs avantages à ceux de ta propre Mailon & Parenté, quand ils ne pourront
pas s'accorder les uns avec les autres ; & que fi Elle vouloir, agir félon la
proximité du Sang, il feroit à examiner . fi les Princes de France defeendus
de feue Madame la Dauphine fa fœur ne lui font par plus proches que les Ar-
chiducs d'Autriche, pour qui neantmoins Elle aura fins ceflé toute l'cftime
& toute la vénération imaginable. Que pour ce qui regarde l'Empire, Elle •
afîuroit Sa Majefté Impériale, qu'EUe ne s'en féparerà jamais, lorfque les Fran-
çois & les Elpagnols préfumeront d'attaquer les Droits dudit Empire ; mais
comme jufqu'à prefènt, ils ont proléfté de reconnoître de l'Empire tout ce
que les Rois d'Efpagne de la Maifon d'Autriche en ont reconnu, il ne lui
fembloit pas , que de la part dudit Empire on ait lieu de defàprouver leur
conduite à cet égard, ni de fe mêler des différens- particuliers, qui font entre
les Maifons de Bourbon & d'Autriche , pour ne pas troubler le repos com-
mun. Que les Cercles de Franconie & de Suabe, fur ce qu'ils avoient trouvé
bon de s'affocier & d'inviter plufîeurs autres Cercles & Princes de fe joindre
avec eux , pour pouvoir conferver la tranquillité , de laquelle ils jouïlïènt
depuis la dernière Paix , & dont Sa Majefté T. C. promet de leur laifler goû-
ter les douceurs; que fî la Cour de Vienne , comme la plus éloignée, ne trou-
ve pas à prefent les Forces de la France redoutables, ces Pais ici, qui font .
plus expofez, ont d'autant pins de fujet de les appréhender , que lon'que ci-
devant l'Efpagnc étoit encore jointe avec les autres Alliez, Sa M. T. C. feule
n'a -pis laiiïc de faire tête ;i prefque toutes les autres Puilfances de l'Europe :
qu'outre cela, fi Sa Majefté Impériale n'eft plus obligée d'entretenir une Ar-
mée contre les Turcs, elle fera contrainte félon fa projets, d'en envoïer une
en Italie, auffi conlidérable, que celle qu'Elle auroit en Hongrie; qu'il faut
avouer cepandant , que par lumen des Anglois Se des Hollandois avec plu-
fieurs Princes & Etats Proteftans on pourroic mettre de grandes Forces fur
pied; mais que l'on avoit vu dans la dernière Guerre , ce que les Catholiques
oc principalement les Princes Ecclefiaftiques , y avoient gagné, dont il refte
encore de funeftes marques dans les Pais de Cologne & de Liège ; que le Roi
' d'Angleterre étoit un Prince d'une Santé peu ftable , & la Nation Angloife
inconftante , & prefque épuifée aujourdhui ; que les Hollandois avoient tou-
jours apuïé la Guerre , & qu'eniuite , ils avoient été les premiers à traiter
féparément, au grand dclàvantage de leurs Alliez. Que de tout teins le Païs de
Liège s'étoit trouvé très-bien des Neutralitez,& que pour l'unique fois, qu'il
s'étoit déclaré, il avoit été fi mal- traité, que les Etats avoient inftammenc
fupplié fon Alteffe Electorale de leur procurer en route manière dans cette
conjoncture une bonne Neutralité, dont fi le nom eft odieux à la vue do tout
le monde, on (ê pourroit contenter de l'effet. Qu'au relie, Son Airelle Elec-
torale a trouvé à propos de s'unir avec Meilleurs les autres Electeurs Eccle-
fiaftiques dans uns Affemblée tenue à Lockcniiein où l'on avoit conclu de fe
joinç
ET RESOLUTIONS D'ETAT, 439
joindre avec les Cercles & Princes aflbciez , dans J'cfpoir , que Sa Majeftc I7°T'
Impériale n'en feroit moins fttisraitcqu'EUc 3 témoigné de L'être de l-'Afloeiar '
tion des deux Cercles fufmentionncz > & q:i 'enfin fon Altcffe Electorale le
confiant dans l'équité & jullice de ladite Majefté Impériale ne peut pas croire,
qu'EUe veuille concourir à faire mal-traiter les Electeurs & autres Princes de
l'Empire , qui par le foin qu'ils ont de la confervation de leurs Etats, ne
voudront par s'engager dans une querelle , qui ne regarde par juiqu'à preiènt
le Corps de l'Empire.
Outre tour ce qu'on négocioit en Allemagne contre les intérêts de l'Em-
pereur, on découvrit à Vienne une dangereufe Con'.piration. Elle tcndoit à
faire foulever le Roiaume de Hongrie , afin de faire une div rlion à l'Empe-
reur, & de l'empêcher d'envoier des Troupes allez confidcrables en Italie.
L'on tint que cette Découverte avoit été faite par des Lettres interceptées
que le Bâcha de Temefwar écrivoit à un Miniltre étrranger à Vienne , a-
vec qui il avoit fait connoilFance, pendant fon Ambafîade à la Cour Impé-
riale de la part de la Porte. On ajoûtoit qu'un certain Capitaine Longue-
val avoit déjà quelques mois auparavant fait la Découverte de ce dcfiéin à
l'Empereur, qui l'avoit laifle faire le zélé pour la conjuration , afin de mieux
jouer fon rôle fur cette Scène tragique, pour en découvrir plus finement le
fecret. L'Empereur dépêcha le Comte Solari pour s'affilier des principaux
Conjurez. Il arrêta près de Tockay le Prince Rogotzki, & Shirmai autre-
fois fon Secrétaire , avec un autre nommé Sandar Gafpar -qui avoit été au fer-
vice du Comte Tekeli. On menaces prifonniers à Neuffad. Comme les
Peuples foupçonnoient le Marquis de Villars , Envoie Extraordinaire de Fran-
ce, de tremper dans cette machination, il auroit couru quelque rifque. La
chofe alla même fi loin, que l'Empereur trouva à propos d'en arrêter le bruit
odieux par une Déclaration en forme. Il ordonna pour cet effet au Comte
de Caunitz fon Vice-Chancellier , „ d'afïurer de (a. part le Marquis de Vil-
,r lars du déplaifir que ce bruit lui avoit caufé. Qu'il lavoit très -bien que
9, ledit Marquis n'avoit jamais eu part dans cette affaire , & qu'il avoir,
„ trop d'ettime pour lui, & le croioit trop honnête Homne, pour ne pas
„ lui rendre juftice en cette occafion, 6c qu'il étoit bien periuadé auffî, que
„ le Roi fon Maître, la Paix n'étant pas rompue , ne voudrait pas favori-
„ rifer les mauvaifes intentions de quelques-uns de les Sujets. La Princelîè
Ragotzki, quoiqu'elle fut affez avancée dans fa grofféffe, partit auffi-tôt pour
aller à Vienne le jetter aux pieds de l'Empereur , & implorer fa démence.
Sa Majelté Impériale lui fit donner un Logement dans un des Fauxbourgs de
la Ville, & lui fit dire „ d'avoir patience, & que fi Elle n'étoit point cou-
„ pable , il auroit foin d'Elle & de lés linfans ; mais , que fi l'on trou-
„ voit qu'elle eut trempé dans la Trahifon de fon Mari, elle feroit punie
j, comme lui.
Voilà ce qui a de la relation à l'Affbciation des. Cercles , qui fervoit aux
Miniltres^ de France pour jetter de la terreur fur les PuilLnces , qui pou-
voient ioùteiiir les Intérêts de l'Empereur.
Ggg z Pour
l'Ambaf-
fsde
de
440 MEMOIRES, NEGOCIATIONS, TRAITEZ,
1701. Pour ce qui regardoit le Corps Helvétique, l'Ambafladeur de Fiance Puy-
" fieux avoit déjà prcfenté un Mémoire aux Cantons, pour tâcher de les porter
à la confervation du Milanois par les raiibns raportées dans ledit Mémoire,,
qui étoit conçu en ces fermes.
Mémoi- Magnifiques Seigneurs,
rc de
mbaf- T£ vous a; j-^jj. connoître par ma précédente que l'événement de la mort du
Fran- '' ^01 d'Efpagnc ne pouvoit que réunir les intérêts de cette Monarchie, a-
ceaux vec ceux de la France , par les juftes prétentions de Monfeigneur le Dauphin
Cantons, fur cette grande Succeilion, Sa Majefté Catholique la laiflant fans pofteritéj
du t. De- £t jes inftinces que je vous ai faites par la fureté de vos partages , ont vu.
cembie ... * < 1 J tr *• 1 r au- ,,r?r S S
J7COi vous faire juger que les obligations de vos Alliances avec 1 Eipagne, pour la
confervation du Milanez , doivent paffèr par confequent en faveur de celui
qui devoit être Duc de Milan : A l'événement de la mort du Roi d'Efpa-
gne il vient d'en fucceder un autre, en confequence de ladifpofition duTerta-
ment du feu Roi Catholique de glorieufe mémoire, que Dieu abfolve, qui
inftitue M. le Duc d'Anjou héritier univerfel de cette Succeffion.
Le Roi y a confenti, ôc a accordé aux vœux des Efpagnols ce jeune Prin-
ce fon Petit- Fils pour leur Roi: il l'a reconnu dans les formes , & S. M le
fait traiter en Roi d'Efpagne, 8c le fait partir aujourd'hui avec un équipage
conforme à fa Dignité, pour fe rendre en fes Etats. Comme l'intention du
Roi, dans le Traité de Triple- Alliance, n'étoit fondé que fur le defir de main-
tenir, & même d'affermir la Paix dans l'Europe ; il n'a pas été difficile à Sa
Majefté de concevoir, que fon acquiefeement au Teftament du Roi d'Efpa-
gne étqit une voïe plus certaine pour le maintien de cette Paix j ainfi l'on ne
doit pas s'étonner fi elle a préféré ce parti à l'exécution du Traité de la Tri-
ple- Alliance s d'autant qu'elle a prévu, que n'aïant été garanti par aucune
de Puiffances de l'Europe que les contractantes, il étoit prefque inévitable
que la Guerre ne fuccedât à la mort du Roi Catholique, lors qu'il fe feroit
agi de l'exécution dudit Traité > l'Empereur, qui y trouvoit même un avan-
tage confiderable, par la confervation de la plus grande partie de cette Mo-
narchie dans fa Maifon , n'y aïant pas voulu fouferire : Et fi l'on a dû remar-
quer la modération du Traité qu'elle abandonne, on doit auffi avouer que
toute l'Europe ne fauroit trop l'admirer, ôc le louer d'une conduite fi defin-
tereffée.
Enfin cet événement peut vous faire comprendre, MM. SS. que toutes les re-
quifitions que je vous ai faites de la part de S. M. pour la garde de vos pafla-
ges, doivent préfentement retomber fous les Négociations de M. le Comte
Caiati Ambafiadeur d'Efpagne, parles-retours des devoirs de vôtre Alliance
avec cette Couronne , puis qu'elle eft préfentement gouvernée par fon Roi
légitime : Comme cela ne defunit pas les intérêts de la France Se de l'Elpa-
gne, je dois vous affiner, que S. M. ne trouve point mauvais, que j'emploie
mes offices en faveur des Négociations dudit Siv Comte Cafati , qui ne man-
quera pas de vous demander l'obfcrvation de vos Alliances, pour ce qui con-
cerne
ET RESOLUTIONS D'E T A T. 441
cerne la confervation du Milanez , en cas que quelque Pu itfànce Etrangère vou- 1701.
lut faire des entreprifes fur cet Etat : Elle m'ordonne de vous faire entendre !"
en même tems, qu'elle continue de confentir de contribuer aux dépenfes con-
venables pour l'entretien des Milices de vôtre Nation, qui feront jugées né-
ceflàires pour la garde des paflàges, & il n'y a d'autre changement dans fes in-
tentions fur cela, fi non que la chofe fe fera conjointement avec FEfpagne.
Comme vous connoiflez parfaitement combien la confervation du Milanez
vous intereffe, je fuis perfuadé que vous n'aurez pas de peine à faire de judi-
cieufes reflexions fur cela. Il eft à croire que M. le Comte Cafati n'agira pas
fans de nouveaux ordres du Roi fon Maître : Mais cet intervale pouvant être
considérable, & pouvant même fuffire pour donner tems à quelque Puiflance
Etrangère de faire paner des Troupes dans le Milanez, je fuis perfuadé que
vous prendrez toutes les précautions que vous jugerez convenables, pour pa-
rer à un pareil incident. Je prie Dieu qu'il vous maintienne dans la profperité
de tout ce qui vous peut être le plus avantageux.
Magnifiqjjes Seigneurs,
Vôtre afFeéKonné à vous lèrvir,
P u y s 1 e u x.
A Soleure ce 1. Décembre 1700.
On tint quelques mois enfuite , favoir au commencement d'Avril 1701.,
une Diète à Baden. Le Comte de Trautmansdorf y parut en qualité d'Am-
bafiadeur de l'Empereur, & le Comte Charles Cafate en une pareille quali-
té de la part du nouveau Roi d'Elpagne. Ces deux Miniftres du premier or-
dre préfentérent à la Diète chacun un Mémoire. On verra par la lecture
d'iceux qui fuivent ce qu'ils propoférent.
Magnifiqjjes, tres-Honorez Seigneurs, 8cc. Mémoi-
re pre-
LA fenfible joïe que j'ai de me trouver dans vôtre Aflemblée, me fait ou- ^nréaux-
blier les incommoditez, les périls, & les rifques de ma fanté, auxquels •J'rn]°ns
j'ai été expofé par un voïage de fi longue haleine & par les mauvais chemins. Com-
Et c'en: avec d'autant plus de fatisfaction que Sa Majeilé Impériale, Roi de te de
Hongrie &c. mon très-benin Souverain m'a envoie ici pour vous aflurer de rraut>
fa bonté Impériale, de la fincere Germanique bienveillance, Se de la continua- fo^'
tion d'un bon voifinage, dont je m'aquitte prefentement. Amhàff.
. Vôtre dernière Ambafiade, compofée de divers Membres de plufieurs Can- c'e s- M«
tons vous a fait voir avec combien de foins, Sa Majefté Impériale leur a don- Imp"
né les audiences & une prompte & fatisfaifante expédition de ce dont ils é-
toient chargés, aïant pour cet effet levé tous les obitacles qui auroient pu en
quelque manière que ce foit, empêcher le retabliflement d'un correfpondance.
G g g. 3 héré-
44* MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
i-oj. b(';-édi>.airemcnt & perpétuellement établie, dont Mcfli.urs les Ambafladcurs
! qui fe trouvent ici, n'auront pas manqué de faire un fidèle raport.
Et comme les conjonctures prefentes qui font d'une vaile étendue, fur les
révolutions récemment arrivées, demandent pour la fureté réciproque, Se
pour l'affermiflèment de la confédération , qu'une députaiion de la part de
VV.SS.me déclare promptement vos rœeeâàireS& falutaires intentions, je n'ai
pas voulu différer plus long-tems à vous demander d'entrer en négociation,
iuivant le Plein-pouvoir que j'en ai: Etant allure que les vrais Pérès de la
Patrie ici affemblez, y feront portez par leur iagafe confommée, par l'amour
de h liberté, & par le zélé lincere pour le bien commun, iiuvant le loua-
ble exemple de leurs ancêtres. Offrant de ma part tous mes fervices imagina-
bles aux Louables Cantons, & à chacun en particulier , comme étant
Mes très-honorez Seigneurs,
Vôtre &c.
François Henri Trautm ansdorf.
Badenle 8. Avril 1701.
Mémoi- Magnifiques et Puissants Sei&neurs.
redu
Comte "T\On Philippe V. mon très-benin Souverain aïant hérité avec la Mo-
Charles \_} na,.cnje d'Efpagne les maximes d'un bon Allié du Corps Helvétique, en
Ambafl. a voulu donner des marques très-évidentes par les ordres qu'il m'a envoie de
d'Efpa- continuer dans l'Ambaffade (laquelle de Père en Fils depuis plus de cent ans,
gne , pré- efi- parvenue à moi , qui me fuis apliqué à la connoifîànce de vôtre Etat ) ÔC
laD^ete ^e jom^ie ^es intérêts de S. M. à ceux des Louables Cantons tant en général
deBa- qu'en particulier, Se même de former les fiens fur les leurs. La conn.uffan-
dcn. ce que VV. SS ont de cette vérité, & l'agréable accueil avec lequel j'ai été
reçu dans toutes les occallons, m'ont obligé en reconnoiffance de meprilèr les
rigueurs de la faifon pour ne me pas priver de la iatisfaction que jai de faire
part à VV. SS. d'une nouvelle , qui leur doit être très- agréable, puis quelle
leur eit très-utile.
Et véritablement quelle nouvelle plusagréable,6cplus remarquable pouvois-
je donner à VV.SS.que la bonne fituation des affaires que la Providence a con-
servées dans ces tems, où la mort de Charles IL devoit les avoir ébran-
lées? Chacun fait les grandes mefures que tant de PuiiTances avoient prifes
pour conferver l'équilibre des Couronnes , ôc dont la prévenante prudence
Î)cur prévenir les inconvénients, n'a fait que comme un Médecin qui bieH
oki de foulager un Malade, l'accable avec des remèdes trop violents.
VV. SS. te fouviendront fans doute du Traité de Partage, par lequel la
France devoit avoir les conhderables Roïaumes de Naples 6c de Sicile, avec
tant d'aunes Provinces, Forts & Ports de Mer, dont la puifiiuice auroit été
auginen-
ET RESOLUTIONS D'E T A T. 443
augmentée par les mêmes moïens, par lefquels on croïoit la mettre dans de tjox.
j uit.es bornes. Mais S. M. T. C. pour ôter tous les prétextes de troubler le re- '
pos public, a bien voulu le départir de tant d'avantages, 8c fe conformant
aux loix fondamentales d'Efpagne, fur lefquelles feules ia Monarchie peut de-
meurer en fon entier , a cédé à mon Roi la Monarchie fans aucune diminu-
tion, démembrement, ou changement de Gouvernement. Il n'y a point de
Prince ou Etat qui pour fes propres intérêts ne prenne toutes les mefures ne-
Cv il aires, afin, quand on voudrait s'opofer aux arrêts évidents du Ciel, afin,
dis- je, d'empêcher qu'il ne le rallumât de rechef la plus cruelle guerre qui fut
jamais. Je dis, aux arrêts du Ciel, car comme en d'autres occafions on fe-
rait blâmé d'ajouter foi aux prédictions des Aftrologues fins avoir égard à la
Providence, on peut dire que celle-ci au tems du grand accident arrivé, a
prédit clairement , que le Droit ferait préféré à l'inclination.
Si cela eft arrivé , ce n'a pas été par défaut de tendreflè, puis que le feu
Roi a toujours chéri fon Sereniffime Oncle, Frère de fa Mère. Ce n'a pas
été par défaut de zélé, puilqu'il l'a témoigné dans toutes les occafions , 2c
chacun fait avec combien de promptitude & de fermeté, il a toujours fait con-
noître que les avantages & les intérêts de Sa Majefté Impériale lui étoient
auffi chers que les fiens propres.
Si Sa Majefté non-obftant une fi forte inclination a bien voulu approfondir
la h"tuation des affaires, 6c a déclaré ce qu'elle devoit à la juftice, fur tout
dans un tems où les rechutes de fa maladie ne lui permettoient pas d'avoir
d'autres vues, qui eft-ce qui ne comprend pas que fi l'on veut combattre tout
cela part des vues particulières, on ne doit point le faire pour troubler la
tranquillité publique. Et fi Ton veut y faire la moindre ceflexion, quel brè-
che ne feroit-on pas à l'équité, fi ceux qui n'ont aucun droit de prétendre à
la fucceffion , s'en vouloient ériger en Juges ?
Je fuis heureux de pouvoir le dire aux perfonnes de l'Etat qui reprefèntent
cette famsufé Republique qui s'eft rendue iî illuftie par fes Armes ; qui fera
à l'avenir l'exemple d'une prudence confommée, 6c d'une juftice fuis tâche ;
qui s'eft toujours opofée aux menaces , aufïï bien qu'aux offres ambigus qu'on
lui faifoit pour l'enveloper dans tout ce à quoi les Traittez la pouvoit obli-
ger ; 6c qui a lu dans les guerres p.ifTées , auffi dangereufes que les conjonc-
tures prefentes , conferver la Paix chez elle 6c l'amitié des Puiiîances
Opofées.
Loué foit mille fois l'Eternel ! qui me donnant l'occafion d'avoir à faire à des
Miniftrcs d'Etat extrêmement prudens, m'épargne la peine de rechercher des
remontrances 6c des perfua fions pour les détourner de croire tous les prétextes
fpecieux 6c fardez de la réunion des deux Couronnes; Les Hiftoires anciennes
6c modernes vérifient affez que les intérêts d'un Etat font toujours les premiers
êc qu'ils defuniffent les Etats les plus étroitement liez.
Par le récit d'une conduite il prudente Sa Majefté fe flatte d'une agréable
refolution de VV. SS. 6c m'ordonne de vous notifier que par Taffiftance de
Dieu, il eft heureufément arrivé à Madrid', qu'il eft monté fur le Trône ,
qu'il a été reçu par lis Peuples avec des acclamations extraordinaires, 6c qu'il a
été
44+ MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
170U été reconnu tant par fes Etats, que par toutes les PuifTances ennemies de nou-
■ veaux troubles dans l'Europe & de la defolation des Pais, qui eft une fuite or-
dinaire des Guenes.
Sa Majefté m'a déplus ordonne de dire à VV. SS. que comme elle a fucce-
dé dans tous les Etats de C h a r l e s 1 1. & dans toutes fes Alliances, elle eft
fermement refoluë de maintenir le Traité d'Alliance avec le Corps Helvéti-
que, & celui de l'Etat de Milan avec les Cantons Catholiques dans tous leurs
points, 6c de fitisfaire aux arrérages avant le renouvellement des dits Traités.
Et pour faire voir l'entière confiance quelle a en tous les Louables Cantons ,
"Sa Majefté leur demande deux Regimens, étant perfuadée que la promptitu-
de de ceux qui font dans l'obligation , 6c l'équité des autres , y porteront tou-
te la diligence poffible , de la même manière qu'il fut fait il y a quelques an-
nées, enfuite des Traités, ce qui n'a pas été refufé , même à ceux qui .ne font
pas dans leur Alliance.
A des perfonnes moins prudentes que VV. SS. je n'obmettrois pas de leur
reprefenter, combien la raifon d'Etat de vôtre Republique demande la conti-
nuation de l'Alliance avec mon Roi puifqu'outre les penfions annuelles, El-
les peuvent toujours compter fur celles de France en fa confideration , & être
fûres en tout tems de leurs fecours , fans lequel VV. SS. feraient dans une
perpétuelle défiance, de crainte qu'on ne mit en exécution ce qu'on a deflein
de faire, fuivant ce qu'on a témoigné dans les dernières Guerres , non pas
par une manière ambigiie, mais par des effets réels, pour renverfer le fon-
dement du Corps Helvétique.
L'Affaire parle d'elle-même, les loix d'un bon Gouvernement le demandent,
& le Roi mon Maître attend de vos Seigneuries une Réfolutiôn digne de
vôtre prudence , de la bienveillance de Sa Majefté , 6c de la confiance ré-
ciproque.
Les Cantons ne réfolurent rien fur ces'Propofitions. Il eft vrai que les
•petits Cantons paroiffoient ébranlez. Le Comte Cafate venoit de leur diftri-
buer quelque fomme d'argent à conte des gros arrérages que l'Efpagne leur
devoit par raport au Duché de Milan. Quelque tems après , le Comte de
Trautmansdorf leur fit des Propofitions telles que voici.
Propositions et Av ant âges que Sa Majejié Impériale veut
bien accorder aux Cantons , moyennant qu'ils prennent les Villes
Foreftiéres & autres Terres antérieures de la Mai/ou d'Au-
triche^ comme V Archiduc Sigismond les pojfédoit lorfque l'Al-
liance Héréditaire fe fit , fins leur Troteéfion ; £9 ceci autant
pour leur propre fureté, que pour les be foins de Sa Majefté Im-
périale.
ï. ÇA Majefté Impériale eft refolue de mettre des Troupes Suifiès dans les
i3 terres antérieures d'Autriche, qui font Frontières de la Suifiê, pour les
garan-
ET RESOLUTIONS D'ETAT. 44r
garantir de toute infulte , 6c pour cet effet Elle demande deux Regimens de *7&!
la Nation fous une Capitulation dont on conviendra , lefquels Elle fera lever
tout aufîi-tôt , que les Cantons y auront donné leur contentement.
II. Sa Majefté veut outre cela, & pour mettre. en effet les' offres qui jufques
ici ont été faites de ia paît de bouche , & par écrit , au fujet du paiement des
arrérages des penfions dûs aux Cantons en vertu du Capitulât, d'abord faire
païer trois penfions en argent comptant 6c le reliant par termes, dont on con-
viendra avec le courant de chaque année régulièrement ; & fera ce paiement
affecté aux revenus mêmes du Pais pour plus grande fureté, 6c pour ôter aux
Cantons tout fujet de crainte 6c de méfiance.
III. Sa Majefté offre aux particuliers , qui ont encore quelques prétendons
liquides fur le Milanez, lbit pour des penfions , foit pour des gages ou autre-
ment,, de vouloir convenir 6c traiter avec eux pour une certaine ibmme, qui
leur fera aflîgnée fur les mêmes revenus , 6c païée régulièrement par termes ,
dont on conviendra.
IV. Sa Majefté Impériale remet aux Cantons de voir fi fur ces offres avan-
tageux ils ne pourroient pas trouver à propos 6c de leur convenance, de con-
tinuer 6c conlérver la Capitulation de Milan en faveur de Sa Majefté comme
Seigneur Feudataire indifputable de ce Duché ; avec offre que fi tôt où tard Sa
Majefté venoit à donner l'Inveftiture de ce Fief à quel Prince que ce puiile
être, le Capitulât y' pafleroit auflt avec rembourfement pourtant des deniers
que Sa Majefté aura debourfé à fon fujet.
V. Mais en cas que Sa Majefté Impériale ou la Sereniiîîme Maifon d'Au-
triche trouve à propos de garder ce Duché pour Elle-même, Elle déclare
qu'alors elle y entretiendra perpétuellement une certaine quantité de Troupes
de cette brave Nation , de même que dans les Terres antérieures d'Au-
triche.
VI. Elle n'entreprendra jamais aucun changement à l'égard des penfions ,
& autres avantages ftipulez par le dit Capitulât ; mais laiflera tout dans l'an-
cien état fans en rien diminuer , 6c pour donner une marque évidente de la
propenfion Confédérale de Sa Majefté Impériale envers la Nation Helvétique
Elle lé déclare encore gratieufement ,
VII. De vouloir donner 6c faire jouir à un certain nombre de jeunes Suif-
fes de certaines penfions, 6c autres émolumens dans les Terres héréditaires, pour
pouvoir pourfuivre leurs études : 6c avec cela Sa Majefté veut -
VIII. Bien permettre 6c confentir que l'Alliance faite entre les Cantons 6c
la Couronne de France foit obfervée dans toute fon étendue } mais, au pied
de la lettre, 6c non autrement.
D e la part des Hollandois 6c des Anglois on fit cependant des Plaintes à
la Cour Impériale fur le trouble que fes Commis fur les Frontières de laSuiffè,
aportoient à leur Commerce. C'étoit dans l'efpérance que l'Empereur aïant
befoin del'ailiftance de ces deux Nations -là, y aporteroit du remède. Voi-
ci deux Mémoires , qui contenoient ces Plaintes.
Tm. I H h -h „ Lk
44<5 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
170 1.
„ T E trouble, dont les Anglois 6c les Hollandois fe plaignent, confifle
Mémoi- „ JL; en ce que lefdits Commiflaires ou Peagers arrêtent & faififfent lesMar-
rht0Ui " c*ianc^^es d'Angleterre, 6c de Hollande, qui vont en Suiflc, fous prétexte
trouble " Celles pcurolent apar tenir aux Genevois , ou être vendues aux mêmes Genevois,
qu'apor- j? Ci? aux François, lors qu'elles feront arrivées dans les Païs Neutres.
tentau „ Comme ils fentent bien que leur procédé eit injurie, ils tachent de le
Com_ „ colorer, en offrant de laiffer paffer les Marchandifes, pourvu que Ton de-
desAn- » clare, par une Attelration faite avec ferment , qu'elles n'apartienent pas aux
glois, & „ Genevois, 6c qu'elles n'iront ni à Genève ni en France.
desHol- „ Quand on n'envifage cette offre que fuperficiellcment , il femble qu'elle
lesC°1S' M ^'entraîné Pas aprés foi de grands inconvénients ; mais quand on l'examine
mis de » a fond, 6c fur l'expérience du paffé , ou la trouve injufte, pernicieufe, 6c
S.M.I. „ même impofîîble dans fon exécution j car qui peut affirmer par ferment que
établis }} les Marchandifes qu'il envoie dans les Païs Neutres , n'iront jamais ni à
Air les ^ Genève ni en France ? On découvre donc facilement , qu'ils ne deman-
resde 55 ^ent Pas lefîdices Atteftations, pour être inftruits de la Vérité} mais fimple-
Suifle & „ ment pour en abufer, 6c extorquer de l'argent, comme ils l'ont pratiqué
«l'Italie. 5> dans la dernière Guerre ; car à quel ulàge , lefdits Commiflaires 6c Peagers
veulent ils favoir, ce que deviendront les Marchandifes , lorfqu'elles feront
arrivées dans les Païs Neutres, puis qu'il ferait àfouhaiter pour l'intérêt de S.
M. I. , ci? de fes Alliez, que les François achetaient toutes celles d'Angleterre ,
„ 13 de Hollande ,& d'Allemagne, qui ne fervent pas à l'ufage immédiat de la
„ Guerre , afin de tirer de l'argent de France pour s'enfervir à lui faire la
„ Guerre i
„ On doit remarquer que le Roi T. C, qui entend parfaitement bien fes in-
„ terêts, a deffendu a (es lu jets fous de rigoureulcs peines , d'achetter lefdites
„ Marchandifes dans les Païs Neutres , 6c de les introduire en France , afin
„ de prévenir que l'argent n'en: forte pour des choies, dont on peut fe paffer}
„ puisque la plus part defdires Marchandifes ne fervent qu'au luxe 6c à con-
„ tenter la fantaiile des François : de forte que les CommifJ'aires & Peagers
„ Impériaux , qui aportent de l'obfacle (fous quelque prétexte que ce puiffe être )
„ à l'entrée en Suijfe des fufdites Marchandifes fervent utilement le Roi 1". C. au
„ préjudice de S. M. I. &? de fes Alliez ; comme on le reconnut, lorfque
„ l'Empereur fit examiner la conduite deldits Commiflaires 6c Peagers Impe-
„ riaux en 1603., pour fatisfârre aux plaintes portées contr'eux , de divers
,, endroits, lcfquelles fe raportoient toutes à celles des Hollandois expliquées
„ dans un Ecrit Latin, dont Copie eft: ci attachée.
„ On reconnut auffi , qu'il ne raloit point d'autre Atteflation pour les Mar-
„ chandifes venantes d'Angleterre, de Hollande, 6c d'Allemagne (qui ne fer-
„ vent pas à l'ufage immédiat de la Guerre) que d'en déclarer la qualité, ôc
„ que moïennant cette Déclaration , elles dévoient paflér 6c entrer dans les
„ Païs Neutres, fans aucun empêchement, en païant les droits ordinaires.
„ On reconnut enfin , que lefdits Commiflaires 6c Peagers ne demandoient
,, des Atteftations pour lefdites Marchandifes , inutiles à l'ufage immédiat de
la
55
35
55
J>
v>
ET RESOLUTIONS D'E T A T. 447
la Guerre, que pour avoir un prétexte d'extorquer de l'argent} car les gens 170 T.
de bien ne pouvant attcftcr par ferment , que leurs Marchandifes n'iraient '
jamais en France, leur donnoient de l'argent , pour être difpenfez de faire
ce ferment : & les autres qui vouloient bien donner des Atteftations en
cette forme, n'étoient pas pour cela exempts des vexations ; car tantôt on
fupofoit quelque deffectuoiïté dans l'Atteltation , tantôt on la droit par
adrefle d'entre les Mains du Charriée Sec. afin de tirer de l'argent , pour
prévenir le déchargement des Marchandifes. Il n'eft pas croïable combien
d'extorfions les Commiflaifes & Peagers Impériaux ont faites par le moïen
defdites Atteftations. Ils en avoient introduit l'ulage en confondant les
Marchandifes , qui ne fervent pas à l'ufage immédiat de la Guerre, avec
celles de Contrebande , pour lefquelles il faut de neceflîté une Atteftation
avec Serment, portant qu'elles ne feront, ni vendues à des François , ni en-
volées en France ; mais a l'égard des autres Marchandifes qui ne fervent pas
„ glois ni aux Hollandois , qui font des Nations Souveraines , ce que leurs
„ Marchandifes deviendront quand elles feront arrivées dans les Pais NéU'
» très.
„ C'eft pourquoi ils efpérent de l'équité de S. M. I. qu'Elle ordonnera à
„ tous fes Commiflâires & Peagers , de laifTer librement parler vers les Pais
„ Neutres, toutes les Marchandifes d'Angleterre, 6c de Hollande, qui ne
„ fervent pas à l'ufoge immédiat de la Guerre, lâns demander d'autre Attcfta-
„ tion , qu'une Déclaration de la qualité d'icelles , comme auffi de rendre in-
„ cefTamment toutes celles qu'ils pourroient avoir fai fies , ou arrêtées, fous
„ quelque prétexte que ce puiiïe être, vu que celui dont ils fe fervent au-
„ jourd'hui, (avoir que les Marchandifes d'Angleterre, & de Hollande , qui
„ entrent en Suiffe , pourroient apartenir aux Genevois , eft injufte & abfur-
„ de j car on pourrait troubler le Commerce de toute la ferre , 13 arrêter toutes
„ les Marchandifes du Monde fous un foupçon qu'elles apartiendroient aux Ge-
„ nevois, ce qui eft contraire au Droit des Gens.
„ Si on arrêtoit fous ce foupçon les Manufactures faites à Genève ce feroit
„ un autre cas , parce qu'elles apartiennent originairement aux Genevois.
„ Mais les Marchandifes d'Angleterre , &? de Hollande , apartiennent originaire-
„ ment aux Anglois , £5? aux Hollandois , &? rejlent à eux jufqu'à ce qu'ils
„ aient reçu paiement de la valeur d'icelles, lequel ne fe fait ordinairement que
„ plufieurs mois après qu'elles font arrivées au Lieu de leur deftination , foit
„ à Genève ou ailleurs ■■, de forte qu'en arrêtant ou faififlant lefdites Marchan-
„ difes d'Angleterre,- & de Hollande, on trouble le Commerce des Anglois,
„ & des Hollandois , fans qtPil en revienne aucune utilité à S. M. I: bien au
„ contraire, cela pourrait lui porter un préjudice irréparable} car fi les Ge-
„ nevois, & les autres Païs-Neutres ne reçoivent pas les Marchandifes d'An-
„ gleterre & ^e Hollande, ils n'envoïeront point d'argent aux Anglois, ni
„ aux Hollandois , & fi les Anglois £f? les Hollandois manquent d'argent , ils ne
„ pourront pas continuer la Guerre &c. On pique la prunelle de l'œil des An-
„ glois, Se des Hollandois , quand on trouble leur Commerce fans neceflîté.
Hhh z gui
44§ MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TR.AITEZ,
i-oi.
0^T' noverii quartà e quorum copia GaUiarum Rex, ad cxcrcitus fui robur &?
Qnerela **>*~<ei(peditiones belUcss9 indigent , quant aque e or umïnopià regnum G allia labo-
fupplex ret; nunqmm fatis extollere poterit Aiigujlifjimi _Cafaris prudentiam9 fub gra-
Hollan- vj£ji}ja pooia vêtant is, ne equi è Gcrmania educântur: prapofitis Commijfanis ,
frtegîsu'a- #*' Ulorum-i ut & aliarum rcrumbello neceffariarum 9 evcclui, obfijlant.
torum, Sed quemudrnodum HLi Lex , rite applicita ac fcrvata , falutaris admodum -t
deinju- fie ctiam, fi extra propofitum fincm & prava minifirorum aviditati inferviat, ne-
ftafua- jratj pfofeclo non poteft, rei optima abufum pefpmum effe , &? quod medicainen-
MJJ_ tum fnerat, quoàammodo in venenum degenerare.
ciumin Jam dudum mercatores Batavi conquejlifunt, fuas merces, piper, çafiam, nu-
Germa- ,-es vtyriflicas , caryophylla , Unîea, panttof , couchenillam , faccharum , £5? ;V/
"mPe- geuus alla, aua , ad hélium non nccejaiia, hinc per Germanium exportantur in
Helvetiam, Pedemontium a Italiam, aliafque conterminas regiones amic-as , à Fi-
cariis feu mtniftris illorum Commiffariorum detineri, fub pratextu eas 'mer ces deiu-
ceps in Gallium deferripojfe.
Cum autem bac détention infeià Majeftate Cafaris ,. fiatf& inhonefti lucri
exiorquendi caufjliy ut que mercatores fuas mer ces , grandi pectœiâ datâ\ redimant ,
<://;« alioquin illa ipfs à judicibus , f /w Ftcarii ifti injuftitia fu<e fuffragatores
habent, maie explicata feu conforta lege, in fifeum addicantur j Hollandis ne-
gotiaioribus , /«;« graviter la fis , confultum atque neceffe vifum ejl interceffio- .
ne Cclforum ac Prapotentum Uniti Belgii Dominorum Ordinum , Auguftiffimï
Cafaris jujlitiam ac opem implorare : quo , coercita iflorum hornbmm improbi-
tate, liber tas commerciorum inviola ta fervetur , £5? ne fœderata Gentes , contra
optimum Cafaris intentionem , ^»/«o afficiantur.
Quia jus , «zftr moratiorcs gentes commune , /fep z'tf r<? diclet, longo fermone
epus non ejl probare Invïclo Ca/ari, qui, boni & aquï obfervuntïffimus , £^7*
riayam fitam juris feientiam , jfcr ftftpti w/^ currïculum , y></?<? «çrad'o demon~
Jiravit.
Sufficiat igitur, fi breviter, cum Hugone Grotio, * £5? autoribus quos ipfe lan-
dat , dicamus , jure Gentiura mercibus , ??;oio diflis , tranfitum deberi ,. Se
nemini jusefle iftud impediendi. Commercium enim inter fepofitas gentes
perunitti, interelï focietatis humanasj dura aliarum nationum copia aliarura
isiopia: fuccurrit.
Caterùm fi qui ex iflis Ficariis adverfus bac obtendat , merces illas in Ger-
mani.i detentas , libéras fore , fi juratis mercatorum tejlimoniis conflet , nun-
quam eas in Gallium tranfportatum tri, parât a ejl ad hoc refponfio : primo , quod
ijli homines , ut jam experieutia abunde docuit , hujufuod'i teflimouin exigant ,
non bono publico , fed ut privât is utïlitatibus confulant : adeo ut fi bac illis anfet
prabeatur , timendum fit , ne âffiduis cavillationibus & criminationious merca-
tores infefientur , cum incredibili ftto détriment 0 , & univerfa commerciorum.
pernicie.
Eàdem eni'm ratione qualibet mercimoniorum fpecies , quecumque mifia vel
deftuiata, retineri ac confifeari poffeht , cum timo bonus jarejurando ajfirmure
quectt
* Dt Ji:r. Util, a: P.ic, tib. 1. cap. 1, § 13. art. 5»
ET RESOLUTIONS D'E T A T. 44P
queat , cas nunquam in Gaïïiam importât nm iri. Quis enim anima fua periculo 1701.
refpondebit de faclo alterius, nempe futur i emtoris, quod extra jurantis potefta- ' —
tent ejî ?
Scd fingamus , Helvetios iilas merces porre in Gaïïiam trafmiffuros, quis ta-
men, cui vel jcinfiïïa fana mentis , vel exigu» jaris Gentium cognitio, Hoïïan-
dis 'commercium cum arnica natione , jure gentium permiffum , adimendtim cen-
feat?
Dicent ilïï, quodvis commsrcium in Hehetia tratlum, communi Fœderatorum
bono adverfari, cum merces inde in Gaïïiam deportari poffmt : ideoque , faltem
communis utilitatis ratione , expedire, ut omnis ejus mercatus fpes &f occafio pra-
cidatur. Scd quant à vero aberrent , nihilque efficiat ifîa objeclio , protinus ap-
paret , fi confideremus , fer taie commercium pecuniam , beïïi hervufo , hojlibus
detrabi , in folutïonem ejufmodi mercium , quas non tant uni ex Flandria , fed &
navibus Suecorum Danorumque, aïïunde , cum Gaïïicis meremoniis permutando ,
iumulati accipere poffmt , retentis infua ditione nummis.
^uod cum ipfe Galliarum Rex probe animadverteret , magnis iïïe panis inter-
- dixit , »i? merces cujufcumque generis , qua ad beïïi ufum non fpeilent , in
Gaïïiam devebantur , ficilicet, ne fubditi fui , fe invito , ifliufmodi mercimonia ,.
pecuniis empta, ex hoflium fuorum regionibus , per r Helvetia Pagos in-Regnum
introducani.
Unde etiam facile intelligitur , objeblionem ifiam , videlicet , merces iïïas ex
Helvetia in Gaïïiam deveclum iri, non à jufio meta proficifei, fed ad tuendam
pradam , &? ne graffandi occafio iniquis iïïis bominibus eripiatur , fimulatam atqite
confclam effe.
Goncedimus hbsnter , Avocat oui s caiitum effe ,_ ne qui s fubd.it us Imper ii in Gai-
liant negotietur'.' Sed, fi dicendum id quod rcs eft, q'uid hoc ad prafentem fabli
fpeciemi ubi non Germa ni, fed noftrates, non cum bofie aut Gai lis , fed cum
Helvetiis , Italis, ipfiufque -Imperii fœderatis aut amicis gentibus , commercium
coluut.
Si quis vero ulterins inflet , Imperii fubdilis non licere\ abfque tejlimonio
jurato , cujus fupra mentio fael.i -cfi , ullius generis merces in Helvetiam, aut
coufinia loca , transferre j & fitis bénigne cum noflratibus agi , fi eodem cum
Germants ordine ac jure habeantur ^ ad hoc debito cum honore refpondetnus , .
llo'.l.indos, focios & amicos Imperii Romano - Germanici , &? liberam gentem ,
in lis qua jure 'gentium permifja , (j? fibi ut i lia, al ter i autem non damnofa fmt ,
e;u rancis legibus minime fubjetlos effe.
Scd audire victeàr qui reclament , fi liberum Hollandis in Helvetiam fit corn-
mjrciUni'i fore, uti etiam grau a , quorum interditl.-e exportationi fua confiât ratio,
(y rcs beïï.o utiles, eo devebantur. du objeclioni facile occurri poteft , nimirumx
f mercatores poflhac teneantur ex Hollandia tranfmittere merces , per Linda-
fjùm : & fi Sacra Cœfarcœ Majejlati placiium fuerit , ut co in loco aper titra va-
forum , farcinarumque , de quibus ulla fraudis effet fufpiào , fieri poffiet : ad-
moïïo ad id Commiffario Cœfaris, G? aliqno ex Magifiratu y prafente mandatario
Jeu inflitore mercatoris , ad quem mercimonia pertinent : idque ne fub infpecli-
o.iis praiextu, merces, quod omni fere die accidit , diripiantur velfpolientur. Cum
Hhh 3 wtî
l?oi-
4fo MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
verè Ma infpeUio fiîla fucrit ^ infiitori , detraSlh granis rekufque bcllo neccjfa-
riis, fi qu£ in diâis farcirtis aut vafu reperiantur, ad ulteriorem cœ ter arum mer-
cium tr an fit uni , à Commiffario, modo diclo, daretur falvus conduclus, ufque ad
certam Hefoeùœ civitatcm. Si qui s autern , fine ifïiufmodi Lindavienfi falvo con-
duïiu , ad alia Imperii Telonia , Helvetiœ finibus magis contcrmina , mer ces ad-
ferat, tanquam mérita fufpeclus , omnes farcinas , omniaqtte vafa, fine deleclu ,
minutatim infpicienda exhibeat ubi reperitur.
Itafatisfuperque impedietur mercium^ quœ ab belli ufum pertinent , granoruni'
que eveclus.
Cum igitur, per ea quœ fupra expofita funt, manifefto confie t , Vicariorum
avaritiâ , injuria , audacià , Hollandos mercatores , contra jus gentium , maxime
lœfos ejfe , eique rci abfque Imperii incommoda , imo magno cum ipfius bono ,
facile adhibcri remedium pojfe > ab infigni, & in omne avum memoranda , Ca fa-
ris àequitate , expeSare licet , ifias mviefiias quibus nofirates in Germaniâ affi-
ciuntur , jufiïffimo Imper at or is décréta , brevi cefiaturas, & menés haftews de-
tentas , cum omni caufiat refiilutum iri.
Negotiatoïum nomine (jf rogatu fcripfi
NlCOLAUS MUYS VAN HoLY. J. U. D.
Relativement aux Nouvelles , que l'on répandit à Paris , que l'Ile
de la Jamaïque avoit été engloutie par la Mer, elles fe trouvèrent abfolument
faufles , par l'arrivée de quelque Navire , qui en venoit , & d'où il étoit fraî-
chement parti. Du moins il faloit qu'elle eut plongé comme un Canard, Se
depuis revenue à flot.
On en eut pourtant une plus véritable. C'étoit l'Entrée des François &
Efpagnols dans la Ville de Mantouë le f . d'Avril. Les Troupes des deux
Couronnes fe mirent quelques jours auparavant en mouvement fur les confins
du côté de Pefchiera, Place forte du reflbrt de la République de Venilé. On
comparoit ces Troupes à des Oifeaux de proïe , qui voltigent pour furpren-
dre quelque chofe. La République y envoïa du Renfort, & même le Géné-
ral Molino, pour veiller à fa confervation. Par un artifice fecret on fit inû-
nuër à divers Cours que ces mouvemens fe faifoient de concert avec la Répu-
blique, qui permettoit que la Ville de Vérone fut emportée comme par
force. C'étoit afin que les François fuffent plus à portée d'arrêter les Im-
périaux. Cependant, ledit cinq d'Avril ces Troupes parurent autour de Man-
touë , ou elles occupèrent les polies les plus avantageux. Deux Officiers y
'entrèrent avec deux Lettres. L'une pour le Queiteur Cafado , Envoie d'Ei-
pagne , connu enfuite à la Paix d'CJtrecht £c à l'Ambarlade d'Angleterre
fous le Nom de Marquis de Monteleon. L'autre étoit pour l'Envoie de
France Audifret. Il y en avoit une du Prince de Vaudemont au Duc de
Mantouë de la teneur fuivante.
„ S ERE-
ET RESOLUTIONS D'E T AT. 4fi
Serenissime Prince.
1701.
5»
Lettre
SUr la neceflîté preflante qu'on trouve de mettre dans vôtre Ville Capi- duPrin-
tale une Garnifon fufhTante des Troupes des deux Couronnes, pour la yauje.
]] defence de cet Etat 6c de toute l'Italie, dans laquelle la fureté 6c la con- mont au
„ fervation des Etats de Vôtre Altefle font particulièrement concernées , Duc de
„ puis que le defTein principal que les Allemans ont en venant, eft de fe ren- Man_
„ dre Maîtres de Vôtre Ville, & d'oprimer en fuite Vôrre Altefle auflî bien ouc"
,. que les autres Princes Souverains, Mr. le Comte deTefl'é, Général des
Troupes Auxiliaires de Sa Majefté Très-Chrétienne en Italie fe met en che-
min avec un Corps d'Armée pour aller vers Vôtre Capitale, afin d'y met-
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tre la quantité de Troupes qu'il jugera neceflaires , pour éviter par-là les
grands préjudices qui en pourroient refulter fi on faifoit autrement. Ainfi
je fuplie instamment Vôtre Altefle de permetre que ce Comte puifle le fai-
re fans perte de tems, parce que la moindre répugnance, que Vôtre Altefle
témoignera à aquiefeer à une demande fi juffe 6c fi neceflaire, fera caufe
que Vôtre Altefle verra la ruine totale de l'es fujets, puis qu'il fera necef-
laire de n'avoir aucun égard aux exeufes ou prétextes que Vôtre Altefle
pourrait alléguer , afin d'effectuer une Réfolution fi jufte 6c fi falutaire ,
qui engage l'honneur des deux Monarques , qui fe font mis en defenfe pour
le repos 6c la liberté de toute l'Italie. Je ne doute point que Vôtre Altefle
reflechiflant meurement fur la ruine inévitable, à laquelle Elle feroit expo-
fée par fon refus , ne donne les mains, félon fa prudence , à cette deman-
de. On a nommé Mr. Audiffiet 6c le Quefteur Cafado , afin de convenir
au Nom des deux Rois des Capitulations, qui fembleront les plus conve-
nables à Vôtre Altefle, pour l'introduction des Troupes pour la defenfe de
la place, 6c pour une plus grande fureté de vos fujets. Vôtre Altefle peut
s'aîfûrer qu'outre tous les égards imaginables qu'on aura pour Elle , la Ré-
folution indifpeniàble , que Vôtre Altefle doit prendre fans le moindre
délai , engagera les deux Monarques à une particulière reconnoiflànce.
Dieu veiuUe la conferver longues années , 6c je baife les mains à Vôtre
Altefle.
Serenissime Seigneur,
Vôtre fort obligé 6c fort fidèle Seniteur,
Charles Henry de Lorraine,
À Milan le premier d'Avril 1701.
Il y en avok une autre du Général Tcfle conçue' en ces termes.
„ MON-
1
4fi MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
ï?0î.
«MONSEIGNEUR,
T'Ai cherché jufques à prefent tous les moïens pofllbles de marquer mon
J relpeû & mon attachement pour Votre Alteflè Sereniflîme ; mais je la
tinte.
Lettre
du Corn-
te de "
Tefle au " ,
Duc de ?> luplie présentement , 1 ans rien diminuer du même relpect ni des mêmes
Min- „ fentimens, de me permettre de lui écrire au nom du Roi mon Maître 5c
„ du Roi Catholique lbn petit-Fils. Vôtre Alteflè Sereniflîme n'ignore pas
„ que dans la dernière Guerre le Roi mon Maître n'a rien oublié pour le re-
„ pos de l'Italie, 8c qu'il a préféré au fuccès aparent de les Armes, la joie de
„ pouvoir laiflèr les Princes de ladite Italie dans l'état de Souveraineté légiti-
me , li troublée par les Troupes , les Quartiers d'Hyver, & les Ibmmes
exorbitantes , que ceux qui commandoient les Armes de Sa Majefté Impé-
riale , ont tirées de leurs Etats : Vôtre Alteflè même 6c fes Peuples ont ref-
fenti la pefanteur de cette Guerre.
„ Préfentement, Monfeigneur, que par la marche des Troupes Impériales
dans le Tirol , l'on ne peut plus douter que les mêmes malheurs ne foient
prêts de recommencer, le Roi mon Maître m'a commandé de m'avancer
fur les Etats de Vôtre Alteflè , avec un Corps de Troupes aflèz conïîdera-
blc, non feulement pour empêcher que les Impériaux ne s'en rendent les
Maîtres , mais encore pour préferver vôtre Perfonne & vos Peuples , dev
rinvafion dont ils font menacés. J'ai ordre d'y faire vivre fes Troupes avec
touteeJa régie polïïble, ce de témoigner à Vôtre Alteflè l'eftime ÔC l'ami-
tié que le Roi mon Maître a pour vous 8c pour tome vôtre Maifon. Mr.
le Prince de Vaudemont a les mêmes Ordres du Roi Catholique , 8c c'elt-
pareillement en fon nom que j'ai celui de vous propofer ce qui fuit & de
„ vous y déterminer. Je dis déterminer, Monfeigneur, parce que le tems ell
preflant, & que mes ordres font précis.
„ Je ne vous cacherai donc pas , Monfeigneur , que je marche à Caftel-
luccio avec dix mille hommes 8c un train d'Artillerie, Se que je fais fui-
vie le fufdit Corps de dix mille hommes d'un autre plus grand ; Que vos
Etats & vôtre Capitale font entourez de tout ce qui eft neceflàire pour un
fiége, 6c que je fuplie Vôtre Alteflè Sereniflîme de faire reflexion aux mal-
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„ heurs que fouffriroient vos Peuples, fl par une bonté de vous pour eux,
„ Vôtre Sagcflè ne les préfervoit de la ruine inévitable d'un fiége , de la de-
.„ folation du plat-Païs, 6c de l'effet funefte des Bombes 6c du Canon fur vô-
,, tre Capitale. C'efl pour éviter toutes ces difgraccs, que je me fuis fimple-
„ ment avancé avec dix mille hommes 6c de l'Artillerie , me contentant de
„ faire fuivre le refle avec un plus gros équipage de Bombes 6c d'Artillerie ,
„ 8c que j'ai ordre de vous demander la permiflîon de faire entrer dans Vôtre
„ Capitale les Troupes du Roi mon Maître 6ç du Roi fon petit-Fils. Com-
_,, me Vôtre Alteflè Sereniflîme a auprès d'Ellc les Miniftres des deux Rois ,
„ je la fuplie de faire apeller Mr. d'Audiffret 6c Mr. de Cafado pour écouter
„ les propofitions que lefdits Miniftres vous feront , 6c dont je leur envoie
K préfentement à chacun , une Inftruélion des Rois leurs Maîtres, me reièr-
„ vaut
ET RESOLUTIONS D'E T A T. ffi
vant de vous promettre que tout ce qu'ils pourront avoir réglé avec Vôtre 1701,
AltefTe 6c fes Miniltres, léra fidèlement exécuté, tant de la part des Rois ,
dont je leur envoie les pleins Pouvoirs, que de celle de Mr. le Prince de
Vaudemont , & de moi , qui avons l'honneur de commander leurs Ar-
mes.
„ Comme les momens font précieux , je fuplie Vôtre AltefTe de faire re-
flexion qu'en prenant le bon parti que je propofe & qui eft fi necefTaire ,
elle aura la floire de donner le repos à l'Italie j ne croïant pas qu'à la pre-
mière nouvelle de l'occupation d'un Polie fi important, Sa Majefté Impé-
riale veuille continuer les Projets de l'opprefiion de l'Italie , fur laquelle le
Roi mon Maître n'a nulle pretenfion, ni le Roi Catholique , que celle de
conferver le Patrimoine de la Couronne d'Efpagne > comme auifi que Vô-
tre AltefTe auroit là douleur de voir la defolation de fes fujets 6c de fon
Pais , fi Elle ne vouloit bien , comme je l'efpere , les en preferver par le
Traité que je lui propofe. J'attends vos decifions , Monfeigneur, fur lef-
quelles je prendrai mon parti d'agir, avec douleur , offenfivement. Je la
fuplie au Nom des Rois qui m'ont chargé de cette Commiffion,& au nom
, de vos Peuples , de longer ferieulément à vôtre confervation & à la leur.
■>■>
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5)
5?
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11
Pour moi
vous témoi
moi , Monfeigneur, je chercherai toutes les occafions polfibles de
émoigner le profond refpeét, avec lequel j'ai l'honneur d'être,
Monseigneur, Ofâtifti
De Vôtre AltefTe Serenifiîme,
Le très-humble 6c très-obéïfTant Serviteur,
T e s s i.
Du Camp de Caftelluccio, ce 5". Avril 1701., à
deux heures avant jour.
Le Duc deMantouë tint-là-defTus un Confeil, à la fin du quel on préféra
une Garnifon Françoife 6c Efpagnole à l'Interdit contenu dans les Lettres , 6c
ainfi les Portes leur furent ouvertes.
Lorfque la Cour Impériale en reçût l'avis Elle en fut fort irritée. C'eft
d'autant plus que L'Abbé Tanteni , Envoie du Duc auprès d'Elle , affû-
roit l'Empereur de bonnes intentions du Duc. Auflî envoïa-t-on ordre quel-
que peu de tems après audit Abbé de fortir dans 24. heures de Vienne 6c dix
jours des Etats de Sa Majefté Impériale. Ce fut fur l'information, que pen-
dant que le Duc faifoit affurer la Cour Impériale de fon Attachement à Elle,
il traitoit avec les Envoiez de France 6c d'Efpagne pour leur livrer fa Capita-
le. On fut même que c'étoit le Marquis Baretta , connu dans la fuite dans
fon Ambaflàde en SuifTe 6c après en Hollande, fous le Nom du Marquis Be-
retti-Landi, qui avoit le plus porté avec Fiani le Duc de Mantouë à cette
manœvre. On fut même eclairci , que la conclufion s'en étoit faite moïennant
l'ouï. I. . lii la
Ï70I
4f4 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
la fomme de foixante mille pifloles en comptant, Sç trente fix mille Ecus par
■ mois, pour païcr la garnifon de quatre mille François ou Espagnols. Cet oit
fans conter les gratifications, que ce Marquis Se Fiani en eurent , qui mon-
tèrent paflablcment haut.- C'clt d'autant plus qu'il fit valoir l'importance
de la Ville de Mantouë, qu'il a qualifié, par ion Mémoire donné aux Etats
Généraux le 20. de Septembre 1717. du Nom de la Citadelle d'Italie, Pour
donner quelque prétexte à l'occupation de cette Ville, on publia que c'étoic
pour prévenir les Impériaux , qu'on fupofoit avoir le defièin d'y entrer. Le
Marquis Baretta , pour cacher toute la Négociation , fut envoie à Rome
pour faire au Pape la demande d'un fecours d'hommes 6c d'argent pour garan-
tir la Capitale du Duc. L'Ambaffadeur de Venife l'apuïa même auprès du
Pape, dans la croïanec que cette démarche fe faifoit avec fincénté. Mais,
pendant la Négociation, ce Marquis préfenta au Pape une Lettre du Duc
fur la nécefiké , où fon Maine s' étoit trouvé d'aquieicer aux Demandes des
François. Il apuïa de fon mieux les exeufes de fon Maître. Il allégua que le
Marquis Obizzi, & le Comte de Caftel- Barco , faifoient des Cabales dans
Mantouë dans le tems qu'elle étoit invertie par ces Troupes étrangères. Il
repréfenta que les Sujets de fon Maître auraient été expofez à tout ce que la
licence des Soldats pouvoit exercer fur des gens qu'on veut foûmcttre cVc. Le
Pape, qui ië voïoit joué, ne répondit pas beaucoup au Marquis, qui, après
un tel rolle , partit pour s'en retourner à la Cour.
Après cette Expédition, on mit des Garnifons dans d'autres Places, que la
crainte fit recevoir. On en vouloit même à Berfcllo, Place importante apar-
tenant au Duc de Modene. On envoïa vers ce Prince le même Cafado, qui
avoit négocié en partie la Reddition de Mantouë. Comme il ne reùïliiîbit
pas, le Cardinal d'Etrée y alla en perfonne. Comme le Duc de Modene af-
feérait de vouloir être neutre-, le Cardinal lui montra une Lettre que ce Prin-
ce avoit écrite de fit propre main à l'Empereur, & qui avoit été interceptée.
Par icelle le Duc l'afluroit qu'il ferait toujours attaché aux Intérêts de laMai-
fon d'Autriche. Le Duc n'en fut point ému; &cy avec une réiblution mâle,
il dit ouvertement au Cardinal, qu'il ne démentirait point la Lettre , & que
fon defTein étoit conforme au contenu d'icelle. Aufîï, quelque tems après,
remit-il Berfello aux: Impériaux. Il félicita cependant le Roi de France fur
l'Avènement de fon Petit -Fils à la Courronne d'Efpagne. Le Duc de Sa-
voie fut des premiers à s'aquiter de cette Civilité , même en des termes qui
marquoient une grande déférence, èc une joïe extraordinaire. Le Roi d'An-
gleterre fit une pareille Démarche au départ du Comte de Tallard , qui s'en
ictourna en France. Il l'auroit faite eu même tems que les Etats Généraux,
i: le Roi d'Efpagne lui eut fait la même Notification par Lettre, qu'il avoit
fait à ces Etats-là.
Cette Reconnoifiance ne facilita point les Négociations avec le Comte
d'Avaux. Celui-ci afteéïa un filence, dans la vue que les Etats Généraux-ôc
l'Angleterre feraient quelque pas. D'ailleurs, il attendoit de voir comment
le Parlement d'Angleterre prendrait les choies. Elles tournèrent cependant
au fouhait du Roi. Comme ce Prince avoit ailiiré les Chambie des Commu-
kcs qu'il continuerait à faire part au Parlement du progrès de la Négociation
qui
ET RESOLUTIONS D'E T A T. 4^
qiti Ce faifoit en Hollande , Se qu'il rccevroit toujours volontiers Ton avis là- 1701.
dcilus, pour s'en aquitter, il envoia le Meflàge luivant aux Communes. "— — »
„ GUILLAUME ROI.
„ ÇA Majefté aïant reçu avis du Sr. Stanhope, Ton Envoie Extraordinaire
„ Cj à la Haïe, que l'Ambaftadeur de France en ce lieu-là avoit déclaré à
„ Mr. le Couleiîler-Penfionnaire que le Roi ion Maître n' avoit point d'autre
„ Réponfe à faire aux Demandes des Etats Généraux des Provinces - Unies,
,, fi non qu'il étoit prêt à renouveller Se confirmer le Traité de Rifwick, les
„ Etats ne. devant point s'attendre à d'autres furetez , Se qu'il n' avoit point
„ d'ordre de donner d'autre reponfe audit Envoie de Sa Majefté ; mais que fi
„ Sa Majefté avoit quelque chofe à demander , Elle pouvoit le faire pat fon
„ Ambaiîadeur à Paris ou par le Miniftre de France à Londres, Se qu'il n'a-
,, voit point de Commifiîon de traiter avec perfonne hormis avec les Etats.
„ Et Sa Majefté aïant aufîi reçu deux Rélblutions des Etats, 8c un Mémoire
„ de leur Envoie au liijet des Vaifleaux , qu'ils envoient pour joindre la Flot-
„ te de Sa Majefté, & des fecours qu'ils prient qu'on ié hâte de leur envoies
„ en vertu du Traité fait le $. Mars 167?., Sa Majefté a trouvé à propos de
„ communiquer le tout à cette Chambre, afin qu'ils puiffent être particu-
„ lierement, informez de l'état prefent des Affaires hors du Roïaume, où les
. „ Négociations femblent être terminées par la Reponfe pofitive quel'Ambaf-
„ fadeur de France a donnée aux Etats. Ce que Sa Majefté recommande à
„ la confideration ferieuiê de cette Chambre , comme une Affaire du plus
„ grand poids Se de la dernière confequence, fouhaitant que la Chambre dori-
„ ne fon avis à Sa Majefté là-deflus , pour nôtre propre fureté , pour celle
„ des Etats Généraux, Se pour la Paix de toute l'Europe.
Les deux Réfolutions, dont il eft parlé dans ce Mefiage , étoient de la
teneur fuivante.
Le Lundi 4. Avril 1701.
» A Près une préalable Délibération , il a été trouvé bon. qu'on écriroit à Réfolu-
„ <L\- Sa Majefté de la Grande-Bretagne, que Sa Majefté, comme Ami- g0^^
„ rai-Général de l'Etat, aïant trouvé bon d'alîigner les Dunes pour un Ren- À
„ dez- vous des Navires de l'Etat, qui feront équipez, LL. HH. PP. avoient
„ été averties par le Lieutenant- Amiral d'Almonde, auflî-bien que par d'au-
„ très, que le fond aux Dunes étant fort pierreux , Se les Anchres de l'Etat
„ étant plus grandes, que celles des Anglois, ne pouvoient y prendre fond:
,, ainfi, dans la prefente Saifon, il feroit dangereux pour lefdits Navires, Se
„ courraient rifque de perdre leurs Anchres, Se de tomber dans de grands in-,
„ conveniens. C'eft pourquoi on donnoit à penfer à Sa Majefté fi Elle ne
„ trouveroit pas bon d'affigner ledit Rendez-vous à laBaïe deSte. Hclcne au
„ lieu des Dunes. Que cependant LL. HH. PP. écrivaient aux Collèges de
Iii i „ l'Ami-
Avii!.
4?6 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
ttoi. „ l'Amirauté d'envoicr aux Dunes les Navires qui étoient prêts , pour y at-
~~ „ tendre les ordres de Sa Majeflé. Qu'on donnerait connoifîance aux Col-
„ leges refpeéiifs de l'Amifaute, & on leur écriroit de donner ordre aux Na-
„ vires qui étoient prêts, chacun félon (on contingent dans l'Armement ex-
„ traordinaire, de mettre fans délai à la voile, le vent pouvant fer vir , & de
„ fe rendre aux Dunes pour y attendre d'ultérieurs ordres de Sa Majeflé.
1% Que lefdits Collèges de l'Amirauté aient tout le foin imaginable de prepa-
„ 1er avec toute la diligence pofHble les Navires qui n'étoient pas prêts, &
„ qui font deftinez pour cet Armement extraordinaire, & de les faire partir
„ fins perte de tems pour aller au Rendez-vous. D'ailleurs qu'ils aient à ré-
„ crire ce qu'ils auront fait , & dans quel état étoient les Navires, qui de-
„ voient être refpeétivement armez , 6c quand ils feraient prêts. " D'ailleurs
„ qu'on chargerait lefdits Collèges refpeéiifs de l'Amirauté, de préparer ou-
„ tre ledit armement extraordinaire, encore dix-fept Navires de Guerre,
„ pour être équipez 5c pouvoir mettre en Mer au premier ordre de LL.
„ HH. PP. Et finalement que lefdits Collèges de l'Amirauté avertiront LL.
„ HH. PP. fi & quand les Frégates équipées fur les revenus courans des Col-
„ leges, font envoiées au rendez-vous à Wielinguen, & fi Elles n'y font pas
„ encore envoiées , d'avoir foin qu'EUes mettent fans perte de tems à la
,, voile.
L'au tre Réfolution prifè le même jour étoit de la forte.
Autre „ \ Près une préalable Délibération il a été trouvé bon & arrêté que lé
Refolu- ^ £\ Contre- Amiral de Boer, qui fe trouve à prefent à Wielinguen fera
E°G du 55 chargé ainfi qu'il eil chargé par les prefentes d'avoir 1,'ceil avec les Navires
1 Avril. „ ou Frégates , qui y font fous fon Commandement , ou qui y feront en-
„ voiées, & de prendre garde à ce qui s'y paflera aux environs} & qu'au cas
„ que contre toute attente on vint à entreprendre quelque cholè contre l'E-
,^ tat ou fes Sujets , de repoufier la force par la force, &: d'éviter les hoftili-
„ tez, autant qu'il fera pofiîble, fe fervant en toute occafion des Soldats 6t
„ Matelots, ôc que d'ailleurs ils fui vra les ordres qui lui feront envoiez par
„ LL. HH. PP., ou par Sa Majeflé de la Grande-Bretagne , comme Ami-
,, rai-Général.
Comme le Mémoire de l'Envoie Extraordinaire des Etats Généraux ne
rouloit que fur le fecours fuivant les Traitez , on kur en produifit celui qui
étoit detènfif, fait avec le Roi Charles Second en 167?. On y
ajouta celui fait en 168p. où le premier étoit confirmé avec d'autres. Voici
le premier.
Traité /^Orarne ainfi foit, que le Sérénifiîme Roi de la Grande-Bretagne, outre
d'Allian- ^^ jes engagemens étroits dans lefquels il cil déjà entré avec les Etats Gé-
cntrel'e néraux des Provinces-Unies pour la confervation des Pais -Bas Eipagnols &
Roi l'apui des Intérêts communs de cette partie de l'Europe , auroit fort déliré
•v Angle- d'entrer en même tems dans une perpétuelle Ligue defenfïve avec lefdits E-
tats
ET RESOLUTIONS D\E T A T. 477
tats pour la confervation mutuelle l'un de l'autre , leurs Sujets & Etats, con- 1701.
tre tous ceux qui voudraient entreprendre de les attaquer ou moleftcr: & f
comme lefdits Etats étant de leur part égalemeut defireux d'entrer dans ledit cHAR_
lien perpétuel d'un Traité defenfif avec Sa Majefté auraient donné pouvoir les IL,
au Sieur van Beuningen leur Ambafladeur auprès de ladite Majefté de traiter &la Ré-
& conclurre ladite Alliance, fadite Majefté aïant nommé pour Commiflaires Ç"bpque
de la part, Meilleurs Heneage Baron Finch Grand Chancelier d'Angleterre, vjnces."
Thomas Comte de Damby Grand Treforier d'Angleterre , Henry Comte Unies
d'Arlington Chambellan de la Maifon du Roi, Henry Coventry Ecuïer, 6c desPaïs-
Jofeph Williamfon Chevalier, Premiers Secrétaires d'Etat & des Comman- "^j7en
démens de fadite Majefté , lefdits Commiflaires 6c ledit Ambafladeur après ' s*
plufieurs Aflemblées 6c Conférences ont en vertu de leurs pouvoirs refpeétifs ,
Copies defquels font inférées à la fin de ces Préfentes , arrêté 6c conclu ce
qui s'enfuit.
I. TL y aura à l'avenir entre le Roi , 6c fes Succefleurs Rois de la Grande-
J. Bretagne , 6c fes Roïaumes d'une part , & les Seigneurs Etats Géné-
raux des Provinces Unies des Païs-Bas d'autre, & leurs Etats & Terres appar-
tenantes 6c leurs Sujets réciproquement , une fincere ferme 6c perpétuelle
Amitié 6c bonne Correfpondence tant par Mer que Terre, en tout 6c par
tout, tant dehors que dedans l'Europe.
II. De plus il y aura entre Sa Majefté , fes Succefleurs Rois de la Grande-
Bretagne 6c fes Roïaumes, 6c lefdits Seigneurs Etats Généraux 6c leurs Etats
6c Terres appartenantes, une Alliance étroite , 6c fidèle Confédération pour
fe maintenir 6c conlérver mutuellement l'un l'autre en la tranquilité, Paix,
amitié 6c neutralité par Mer 6c par Terre , 6c en la pofleflion de tous les
droits, Franchifes 6c libertez, dont ils jouïflent, ou ont droit de jouir, ou
qui leur font acquis ou qu'ils acquerront par des Traitez de Paix, d'Amitié,
6c de Neutralité, qui ont été faits ci-devant 6c qui feront faits ci-après con-
jointement , 6c de commun concert avec d'autres Rois , Republiques,
Princes , 6c Villes , le tout pourtant dans l'Etendue de l'Europe feule-
ment.
III. Et ainfi ils promettent 6c s'obligent de fe garantir l'un l'autre non feu-
lement tous les Traitez, que Sa Majefté 6c lefdits Seigneurs Etats Généraux
ont déjà faits avec d'autres Rois, Republiques, Princes, 6c Etats , lefquels fe-
ront exhibez de part 6c d'autre avant l'Efchange des Ratifications } mais auflî
tous ceux qu'ils pourront faire ci-après conjointement , 6c de commun con-
cert, Se de f; défendre, affilier 6c conferver réciproquement dans la poileilîon
des Terres, Villes, & Places qui appartiennent prefentement 6c qui appartien-
dront ci-après , tant à Sa Majefté & fes Succefleurs Rois de la Grande-Bre-
tagne, qu'auxdits Seigneurs Etats Généraux par lefdits Traitez en quelque en-
droit de l'Europe que lefdites Terres, Villes, 6c Places foient fituees, en cas
qu'en tout ce que defllis , Sa Majefté ou lefdits Seigneurs Etats Généraux
viennent à être troublez ou attaquez par quelque hoftilité ou Guerre ouverte,
par qui, ou fous quelque prétexte que ce puifle être.
Iii 3 IV,
4f8 MEMOIRES, NEGOCIATIONS, TRAITEZ,
1701. IV. L'obligation réciproque de s'entre-aidcr6c défendre s'entend auûï pour
■ être Sa Majefté ce lefdits Seigneurs Etats Généraux , leurs Païs & Sujets, con-
fervez 6c maintenus, en tous leurs droits, polfcrhonj, itnmunircz, 6c libertez,
tant de Navigation que Commerce 6c autres quelconques , tant par Mer que
par Terre, qui le trouveront leur appartenir par le droit commun ou être ac-
quis par des Traitez faits ou à faire en la manière fufdite envers 6c contre
tous Rois, Princes, Républiques, ou Etats } en forte que fi au préjudice de
ladite tranquilité, Paix, Amitié, & Neutralité préfente ou future Sa Majefté
ou lefdits Seigneurs Etats Généraux viennent à être ci- après attaquez, ou en
quelque autre manière que ce foit troublez en la pofTcflion , Se jouïflance des
Etats, Terres, Villes, Places, Droits, Immunitez, 5c libertez de Commer-
ce , Navigation ou autres quelconques, dont Sa Majefté ou lefdits Seigneurs
Etats Généraux jouiïîènt préfentement ou auront droit de jouir par le droit
commun ou par les Traitez déjà faits ou qui pourront être faits comme deflus,
Sa Majefté, Se lefdits Seigneurs Etats Généraux en étant avertis 6c requis l'un
par l'autre , feront conjointement tout leur poftîble pour faire ceffer le trou-
ble ou hoftilité , Se réparer les torts ou injures qui auront été faits à l'un des
Alliez.
V. Et en cas que ladite Attaque ou trouble foit fuivie d'une Rupture ou-
verte , celui des deux Alliez qui ne fera pas attaqué fera obligé de rompre
deux Mois après la première requifltion de celui d'entre eux qui fera déjà en
Rupture, durant lequel tems, il fera tous devoirs par fes Ambafladeurs ou au-
tres Miniftres , pour moïenner un accommodement équitable , entre l'Aggref-
feur ou Turbateur, 6c l'attaqué ou troublé, 6c néanmoins donnera pendant
ledit tems un puiflant fecours à fon Allié , tel qu'il fera convenu par des Arti-
cles feparez entre Sa Majefté, 6c lefdits Seigneurs Etats Généraux ; lefquels,
bien qu'il n'en foit fait aucune mention au préfent Article, feront tenus 6c ob-
fervez comme s'ils y étoient inferez ou écrits , demeurant toutefois après le-
dit tems de deux mois expirez , au choix de celui des Alliez qui fera en
rupture de continuer à jouir du fruit du même fecours, en cas que la con-
joncture du tems 6c la conftitution de fes affaires , lui en fit préférer l'effet
à celui de la rupture ouverte de fon Allié.
VI. La Garantie Réciproque étant de cette forte établie , 6c promifë ,
lorfqu'un des Alliez fera attaqué ou troublé , fi l'Etat des Provinces Unies
venoit à l'être, 6c fe trouvoit obligé d'entrer en Guerre ouverte, Sa Majefté
fera pareillement obligée de rompre avec l'Aggrefléur ou Turbateur, 6c d'em-
ploïer toute fa puiflance 6c toutes fes forces par Mer 6c par Terre, 6c les
joindre à celles defdits Seigneurs Etats Généraux quand il fera jugé à propos
pour réduire l'ennemi commun à un accommodement honnête, leur, 6c équi-
table avec la Grande-Bretagne 6c lefdites Provinces Uunies.
VII. Et en ce cas les Forces de Sa Majefté Britannique , 6c defdits Sei-
gneurs Etats Généraux , agiront conjointement 6c feparement , fuivant ce qui
lera alors plus particulièrement concerté entre fadite Majefté, 6c leldks Sei-
gneurs Etats Généraux, lefquels aviferont 6c refoudront enfemblc des moïens
4es plus propres pour incommoder l'Ennemi commun, foit par voïe de diver.-
fion
ET RESOLUTIONS D'ETAT. 4rP
fion ou autrement, afin, comme dit eft , de le réduire plutôt à un accom- 1701.
modemcnt. - ■ ■■
VIII. Le femblable de ce qui eft contenu aux deux Articles immédiate-
ment précedens, fe fera par lcfdits Seigneurs Etats , en cas que la Grande-
Bretagne foit attaquée ou troublée en la manière fufdite.
IX. Quand une fois la Guerre fe trouvera ouverte avec les deux Alliez,
fuivant le préibnt Traité, il ne pourra être fait après par aucun defdits deux
Alliez aucune fufpenfion d'Armes avec celui, qui aura eré déclaré Se reconnu
Ennemy, que conjointement , Se d'un commun confentement.
X. Mais le cas échéant que l'on vint à entrer en Négotiation , foit pour
traiter de Paix ou de Trêve de quelques années, Elle ne fe pourra commencer
par l'un des Alliez, fans la participation de l'autre, 6c fans lui en procurer en
même tems, 6c auffi-tôt qu'à lui même la faculté 6c fecurité requife 6c nc-
ceflàire pour envoïer fes Miniftrcs fur le lieu où en traitera, comme aufli fans
donner fuccefiîvement , & de tems en tems , communication de tout ce qui
fe parfera dans ladite Négociation j 6c ne pourra ni l'un ni l'autre paflèr jufqu'à
la conclufion de ladite Paix ou Trêve fans y comprendre fon Allié , 6c le fai-
re remettre, s'il le defire ainfi, dans la polfeflïon des Pais, Terres ou Places,
6c jouïlïance des Droits 6c Immunitez qu'il tenoit & dont il jouïlîbit devant
la Guerre 6c fins ftipuler de l'Ennemi commun pour l'Allié les mêmes Droits,
Immunitez, exemptions, 6c prérogatives que pour foi-même , fi ce n'eft que
les Alliez en convinflènt autrement.
XL II fera permis à celui des Alliez qui fera attaqué de faire des Levées de
toutes fortes de gens de Guerre dans les Etats de l'autre pour fervir dans
leurs Armées de Terre, pourvu que cela fe falfe fur des Capitulations telles,
que les parties conviendront entr'eux.
XII. Les Ratifications du prefent Traité feront données en bonne forme
6c échangées de part 6c d'autre dans l'efpace de quatre femaines à conter du
jour de la Signature.
En foi de tout de que deflus lcfdits Sieurs Commiflaires 6c ledit Sieur Am-
baflàdeur ont figné les Prefentes, 6c y ont fait appofer le Cachet de leurs
Armes, Fait à Weftminiter ce tioifieme jour de Mais de l'an 167s7.
Finch C, (L. S.)
Damby (L. S.)
AvUngtoh (L. S.) Beuningen (L. S.)
H.Covcntiy (L. S.)
y. min&mfon ( Lys. ;
Articles Sepa.rez.
I. T E cas de l'Article cinquième venant à échoir ledit Seigneur Roi 6c fes
1_» SucceCeurs 6c lefidits Seigneurs Etats Généraux feront obligez de s'af-
fifter mutuellement toutes les lois qu'ils feront attaquez ou tiot.bkz, ï\ir,fi
qu'il
40*0 MEMOIRES, NEGOTI ATIONS, TRAITEZ,
*701- qu'il eft plus au long exprime dans ledit Article, d'un Secours , à fçavbïr1,
" Sa Majclté Britannique lefdits Seigneurs Etats Généraux de dix mille, 6c lef-
dits Seigneurs Etats Généraux Sa Majefté Britannique de fix mille Hommes
d'Infanterie bien armez fous tels Régiments, Compagnies, Colonels, 6c au-
tres Officiers que Sa Majefté & lefdits Etats trouveront à propos & jugeront
le plus propre pour une telle a-ffiftance, 6c de vingt Vaiflèaux de Guerre bien
équipnez & pourvus} 6c livreront 6c entretiendront ledit Secours aux dépens
de celui qui l'envoïcra pour le fervice de celui qui fera attaqué.
II. Lorfque la néceffité des Affaires fera juger 6c connoître, que le Secours
promis 6c accordé devra être augmenté, ledit Seigneur Roi 6c les Seigneurs
Etats Généraux tâcheront d'en convenir enfemble.
III. Le Secours qui fera envoie, fera entièrement fournis au Commande-
ment 6c ordre de celui auquel il fera envoie pour s'en fèrvir, 6c pour le tranf-
porier aux lieux où bon lui femblera, par Eau 6c par Terre , à la Campa-
gne , aux Sièges, à la Garde des Places , 6c par tout où la néceffité ou l'uti-
lité l'exigera.
En foi de quoi les Sieurs Commiffiiires du Roi de la Grande-Bretagne Se le
Sieur Ambaffadeur des Etats Généraux des Provinces-Unies ont figne les pre-
fents Articles feparez , 6c à iceux fait appofer le Cachet de leurs Armes. Fait
à Weltminfter ce troifieme jour de Mars de l'an 167a.
Beumngen (L. S.)
Finch
(L.S.)
Damby
(L.S.)
Arlington
(L.S.)
H. Coventry
(L.S.)
J. JVillïamfon
(L.S.)
V 01 c 1 le Traité d'Alliance fait en 1 6S9.
COmme après plufieurs Infractions de Paix de la part de la France, le Se-
reniffime Roi de la Grande-Bretagne 6c les Hauts 6c Puiffâns Seigneurs
_ les Etats Généraux des Provinces-Unies des Païs-Bas fe trouvent conjoinéte-
Traité
.d'Ami-
tié &
ce entre ment en Guerre contre le Roi Très-Chrêtien , 6c lefdits Seigneurs Etats Gè-
le Roi de néraux aïant envoie les Sieurs Alexandre Schimmelpennick vander Oye,
bGran- Seigneur d'Engelenburgh , Grand Bailif & Dick-Grave de la Ville 6c Mayrie
tissai*7 de Bois-Ic-Ducj Nicolas Witfen, Bourgemaître, Confeiller 6c Treforier de
MesÈ- la Ville d'Amllerdanii Guillaume de Naffau Seigneur d'Odyck , Cortyene,
tatsGé- Seyft, Dryburgen, 6c Blickenburg, Premier Noble 6c feprefentant la No-
ijér.|ux b]cipe daris ]es Etats 6c au Confeil du Comté de Zelande ; Arnout de Citters
vfnces-" ci-devant leur Ambaffadeur Ordinaire en Angleterre ; 6c Everhard de Weede
Unies, Seigneur de Weede, Dyckvelt, Ratcles, 6c Seigneur de l'Affemblée des Etats
du 14. de la Province d'Utrccht} Députez à l'Affemblée des Etats Généraux 6c leurs
*£ût Ambaffadeurs Extraordinaires auprès de Sa Majefté de la Grande Bretagne ,
* 9' & aïant témoigné leur defir par lefdits Ambaffadeurs non feulement de confir-
mer
ET RESOLUTIONS D'E T A T. 461
mer tous les Traitez d'Amitié & d'Alliance qui fubfiftent entre la Couronne 170 1.
-*T Angleterre 8c lefdits Etats Généraux; mais encore d'entrer dans autres en-
gagements d'Alliance plus étroits avec fadite Majefté pour le maintien & la
confervation réciproque de leurs Sujets , Païs, 6c Etats , & pour réduire le
Roi Très- Chrétien à une Paix jufte & raifonnable , qui puifle rétablir & af-
fermir le repos & la tranquillité de l'Europe, 8c comme lefdits Etats Géné-
raux aïant donné pouvoir auxdits Ambafladeurs Extraordinaires de traiter 8c
conclure ledit Traité, Sa Majefté fe trouvant dans les mêmes fentimens, èc
voulant bien concourir à ce deflein, auroit nommé pour Commiflaires de fà
part , Meflîre Thomas Marquis de Carmarthen Prefident de (on Confeil Pri-
ve, George 'Marquis de Hallirax Garde du Seau Privé, le Comte de Shrews-
bury fon Premier Secrétaire d'Etat, Daniel Comte de Nottingham auflï fon
Premier Secrétaire d'Etat , 8c Thomas Wharton Ecuyer Confeiller en fon
Confeil Privé 8c Contrôleur de fa Maifon : lefdits Commiflaires 8c lefdits
Ambafladeurs, après plufieurs Aflemblées 8c Conférences , ont en vertu de leurs
Pouvoirs refpeétifs, Copies defquels font inférées à la fin de ces prefêntes, ar-
rêté 8c conclu ce qui s'enfuit.
j. TL y aura à l'avenir entre le Roi de la Grande-Bretagne 8c fes Succef-
J. feurs, Rois de la Grande-Bretagne 8c leurs Roïaumes d'une part, &c
les Seigneurs Etats Généraux des Provinces - Unies des Païs - Bas d'autre , 8c
leurs Etats, Terres, 8c Sujets réciproquement , une fincere, ferme, 8c perpé-
tuelle Amitié 8c bonne Correfpondance , tant par Terre que par Mer , en
tout 8c par tout, tant dehors que dedans l'Europe.
II. Et pour mieux aflurer cette Amitié 8c bonne Correfpondance , 8c ôter
toutes les difficultez qui pourroient naître entre les deux Parties fous quelque
prétexte que ce foit , il eft arrêté 8c convenu entre ledit Seigneur Roi de hf.
Grande-Bretagne 8c lefdits Seigneurs Etats Généraux , que tous les Traitez
de Paix, d'Amitié, Alliance, Confédération, Commerce 8c de Marine ci-
deflbus nommez 8c mentionnez , feront approuvez èc confirmez de part 8c
d'autre, à fçavoir:
Le Traite de Paix 8c d'Alliance, conclu à Breda le *4- Juillet i<5<5 7.
Le Traité de Navigation 8c de Commerce conclu en même tems 8c
lieu.
Le Traité de Paix 8c < d'Amitié conclu à Weftminfler le ~. Février ■
Le Traité de Marine conclu à 'Londres le 1. d'Octobre 1574. avec une
Déclaration expliquant plufieurs Articles dudit Traité, 8c du Traité de Ma-
rine du ~. Février 1665. conclu à la Haïe le f\ Décembre îôjf.
Article pour prévenir ou compofer les Difputes qui pourroient arriver en-
tre les Compagnies des Indes Orientales d'Angleterre 8c de Hollande conclu
à Londres le £. Mars 167;.
La Ligue defenfive conclue à Weftminfter le 3 . jour de Mars 1 6jj.
Le Traité de concert pour les Flottes d'Angleterre 8c de Hollande conclu
à WhitehalOe 2.9. d'Avril iôSp.
Tom. I. Kkk Le
4^ MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
170 1. Le Traité pour défendre le Commerce avec la France conclu à Whitehall
■ le H- jour d'Août 1689.
Comme lefdits Traitez 8c tous & chacun les Articles d'iceux font effecti-
vement approuvez & confirmez par ce prefent Traité , 6c demeureront en
leur première force & vigueur, comme s'il y étoient inferez de mot à mot, en
tant qu'ils ne contredifènt ni dérogent les uns aux autres ou au prefent Trai-
té , de telle manière que les points & matières ftipulées par un Traité plus
nouveau feront accomplis dans le fens dont on y fera convenu , fans avoir é-
gard à un Traité plus ancien.
III. De plus il y aura entre Sa Majefté 8c fes SuccefTeurs , & lefdits Sei-
gneurs Etats Généraux 6c leurs Sujets 6c Habitans réciproquement une Al-
liance étroite , 6c fidèle Confédération pour fe maintenir 6c conferver mutuel-
ment l'un l'autre en la tranquillité , Paix , Amitié , 6c Neutralité par Mer 6c
par Terre, 6c en la pofleflion de tous les Droits, Franchifes 6c Libertez,
dont ils jouïfTènt ou ont droit de jouir, ou qui leur font acquis, ou qu'ils ac-
querront par des Traitez de Paix, d'Amitié 6c de Neutralité qui ont été- faits
ci-devant, 6c qui feront faits ci-après conjointement 6c de commun concert
avec des. autres Rois, Républiques, Princes, 6c Villes j le tout pourtant dans
l'étendue de l'Europe feulement.
IV. Et ainfi ils promettent 6c s'obligent de garantir réciproquement , non
feulement tous les Traitez que Sa Majefté ou fes Predecefîèurs 6c lefdits Sei-
gneurs Etats Généraux ont déjà faits avec d'autres Rois, Républiques, Prin-
ces, 6c Etats, lefquels feront exhibez de part 6c d'autre avant l'échange des
Ratifications, mais auffi tous ceux qu'ils pourront faire ci -après conjointe-
ment 6c de commun concert, 6c de fe défendre, affilier 6c conferver récipro-
quement dans la pofîèlfion des Terres , Villes ,- 6c Places qui appartiennent
prefentement 6c appartiendront ci-après tant à Sa Majefté 6c fes SuccefTeurs,
Rois de la Grande-Bretagne, qu'audits Seigneurs Etats Généraux par lefdits
Traitez en quelque endroit que lefdites Terres , Villes , 6c Places foient fi-
tués, en cas qu'en tout ce que defliis, Sa Majefté 8c lefdits Seigneurs Etats
Généraux viennent à être troublez ou attaquez par quelque Hoftilité ou Guer-
re ouverte, par qui ou fous quelque prétexte que ce puilfe être ; auquel cas on
fc gouvernera de part 6c d'autre lelon ce qui eft ftipulé dans le Traité fufdit
conclu le 3. jour de Mars 1 6j\.
V. Et comme ledit Seigneur Roi de la Grande - Bretagne 6c lefdits Sei-
gneurs Etats font prefentement en Guerre contre le Roi Très-Chrêtien, Se
que lefdits Seigneurs Roi de la Grande-Bretagne 6c Etats Généraux fe trou-
vent dans une obligation réciproque de s'entre-aider Se défendre, 6c de main-
tenir 6c conferver mutuellement leurs Pais 6c Sujets en leurs PofTeffions , Im-
munitez 6c Libertez, tant de Navigation que de Commerce 6c autres Droits
quelconques, tant par Mer que par Terre, envers 6c contre tous Rois, Prin-
ces, 6c Etats, 6c particulièrement contre ledit Roi Très-Chrétien, 6c afin de
pouvoir mieux parvenir à une Paix jufte 6c raifonnable qui pourroit rétablir
le repos 6c la tranquillité de l'Europe , il eft convenu entre ledit Seigneur
Roi de la Grande-Bretagne 8c lefdits Seigneurs Etats , qu'il ne pourra être
fait
ET RESOLUTIONS D'E T A T. 46;
fait par aucun defdits Alliez aucune fufpenfion d'Armes, Trêve, ou Paix avec IJ01-
ledit Roi Très-Chrétien, ni avec aucun autre Roi, Prince, ou Etat, par le- -
quel l'un ou l'autre defdits Alliez feroit troublé ou attaqué , que conjointe-
ment Se d'un commun confentement.
VI. Et comme ledit Seigneur Roi de la Grande-Bretagne & lefdits Sei-
gneurs Etats font déjà entrez dans un Traité de concert pour faire agir leurs
Forces pendant cette année contre ledit Roi Très-Chrétien , il eft arrêté &
accorde , qu'ils conviendront au plutôt d'autres Articles 6c ftipulations pour
le dénombrement ôc l'emploi de leurs Troupes Se Vaiflèaux de Guerre de tel-
le manière qu'il fera trouvé le plus à propos pour agir avec d'autant plus de
fuccès contre l'Ennemi commun.
VII. De plus il eft convenu entre ledit Roi de la Grande-Bretagne Se lef-
dits Seigneurs Etats, que fi après que la Paix aura été faite avec le Roi Très-
Chrétien conjointement Se d'un commun confentement, comme il eft ci-def-
fus ftipulé , Se que par après l'une ou l'autre Partie fera attaquée derechef par
le Roi Très-Chrétien , ou fi l'une ou l'autre Partie venoit à être attaquée par
quelque autre Roi, Prince, ou Etat, ces cas échéants le Traité d'Alliance Se
de Garantie fufdit conclu le 5. jour de Mars de l'an 167J. entre la Couronne
d'Angleterre Se lefdits Seigneurs Etats , qui eft aufli approuvé Se confirmé
par le prefent Traité, fubfiftera alors en toute fon étendue Se fera exécuté en
tous fes Points Se Articles , comme fi le même ou fèmblable Traité auroit
été fait de nouveau Se depuis la conclufion de la Paix avec ledit Roi Très-
Chrétien; avec cette variation feulement, que la Guerre arrivant en cas men-
tionné dans l'Article de ce Traité , aucun defdits Alliez ne pourra faire aucune
fufpenfion d'Armes, Trêve , ni Paix avec ledit Roi Très- Chrétien, ni autre
attaquant , que conjointement Se d'un commum confentement.
VIII. En ce prefent Traité feront compris tous les Rois , Princes , Se Etats
qui voudront y entrer avant l'échange des Ratifications , ou fix mois après,
du confentement commun de Sa Majefté Se defdits Seigneurs Etats.
IX. Le prefent Traité fera ratifié Se approuvé par ledit Seigneur Roi ,
Se lefdits Seigneurs Etats , Se les Lettres de Ratification feront délivrées de l'un
Se de l'autre en bonne Se dûë forme, dans le terme de fixfemaines, ou plutôt
fi faire fè pourra, à compter du jour de la Signature.
Enfuivent les Pleins-Pouvoirs du Roi Se de la Reine de la Gran-
de - Bretagne.
Gulielmus Se Maria Dei Gratiâ Magna Brltannia Frauda &?
lîibemia Rex £5? Regina &c. &V.
Enfuivent les Pleins - Pouvoirs des Etats Généraux.
Les Etats Généraux des Provinces-Unies des Païs-Bas , à tous ceux qui ces
prefentes verront, falut, &ic.
En foi de quoi les CommifTâircs de Sa Majefté Se ArnbafTadeurs Extraordi-
Kkk z naires
4<î4 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
1701. naires fufdits,en vertu de leurs pouvoirs refpeétifs , ont figné ces prefentes
■» de leurs Seings ordinaires, 6c y ont fait appoier les Cachets de leurs Armes.
Fait à Weftminfter le 24. jour du mois d'Août de l'an 168p.
Carmarthen P. Schimmelpennick vander Oye.
Halifax C. P. S. , JVitzen*
Sbrcwsbury. - Na£au.
Nottingbam. Citters.
WJjarton. Dyckvelt.
Les Communes réfoîurent là-deffùs d'une voix unanime de faire lavoir au
Roi que le très-humble Avis de la Chambre étoit.
„ Que Sa Majefté feroit priée de pouffer fes Négociations avec les Etats
Généraux des Provinces-Unies , & de prendre avec eux toutes les mefures
convenables à leur fureté. Que Sa Majefté maintiendrait le Traité fait
avec les mêmes Etats le 3. de Mars 167?. & que Sa Majefté feroit af-
furéé que la Chambre la mettrait effectivement en état de foûtenir ce-
Traité.
Cette Réfolution fut prife le 13. Avril , & enfuite les Communes tra-
vaillèrent à voter pour cela un Subfide convenable. Le lendemain 14. , elles
firent le Vote fuivant
„ Qu'on donneroit un Subfîde au Roi , pour le mettre en état de main-
„ tenir ledit Traité.
Le 18., le Chevalier Hedges fît raport à la Chambre de la Réponfe du
Roi à l'Avis , qui étoit de la teneur fuivante.
„ Suivant Se conformément à l'Avis de la Chambre , Sa Majefté a donné
ordre à fon Envoie Extraordinaire à la Haïe de pouffer les Négociations
avec les Etats "Généraux , & de prendre là - deffus toutes les mefures qui
pourront contribuer à leur fureté.
„ Sa Majefté Vous remercie de l'affurance que vous avez donnée que cette
Chambre la mettra effectivement en état de maintenir le Traité fait en
1671. avec les Etats Généraux, & Sa Majefté continuera ce Traité, con-
formément à vôtre Avis, ne doutant point que la promtitude , que Vous
avez montrée en cette occafion, ne contribue beaucoup à obtenir la fure-
té demandée.
»
55
55
55
51
JJ
M
L e 11. fuivant , l'Envoie Extraordinaire Stanhope eut Conférence avec
les Députez des Etats Généraux, auxquels il rit part de bouche de ces Vo-
tes du Parlement, & leur livra enfuite la même choie par- écrit par ce Mé-
moire.
„ HAUTS
ET RESOLUTIONS D'ETAT. 45$-
170 x.
„ HAUTS ET PUISSANS SEIGNEURS, —
Mémoi-
„ T E fouffigné. Envoie Extraordinaire du Roi de la Grande Bretagne, ,r,e.de,
„ L-j aïant informé Sa Majefté de ce qui s'eft parle à la dernière Conferen- fadexi^ "
„ ce qu'il a eue avec les Députez de VV. HH. PP., & Sa Majefté aïant d'Angle-
„ auffi reçu les Réfolutions de VV. HH. PP. du 4. Avril , par raport aux terre, du
,, fecours qu' Elles ont de nouveau requis de Sa Majefté en exécution duTrai- 22 Avr"-
„ té de 167!., ledit Envoie a ordre de faire favoir à VV. HH. PP. que Sa
,, Majefté eft non feulement refoluë de fatisfaire aux conditions dudit Trai-
„ té, conformément aux defîrs de fes bons & fidèles Sujets aflemblez en
„ Parlement, qui concourent unanimement avec Elle dans cejufte deffein>
„ mais auffi d'entrer dans tels autres moïens, qui feront trouvez convenables
„ pour procurer leur fureté. Pour laquelle fin ledit Envoie a ordre de con-
„ tinuër à agir de concert avec VV. HH. PP. dans les Négociations qui
„ peuvent y conduire, de la manière qui fera jugé la plus efficace , 6c d'affurer
„ auffi VV. HH. PP. que toutes les mefures qui feront prifès en Angleterre
pour la fureté commune , leur feront communiquées de tems en tems y
comme Elles ont été jufques à prefent.
•>•>
Signé,
Alexandre Stanhope.
A la Haïe le 2Z. Avril 170 r.
éfoîu-
on des
Le lendemain Samedi 2$. , les Etats Généraux aïant délibéré là-deffiis pri- R
rent la Réfolution d'écrire à Sa Majefté ainfi qu'ils firent. C'étoit en difant } tic
„ Que la Réfolution de Sa Majefté fi jufte & fi conforme à ce que LL. HH. f ' %%
„ PP.avoient defiré, leur avoit donné une grande pie ce une fatisfaction très-
„ particulière. C'étoit principalement dans un "tems , dans lequel Elles
„ voioient de quelle manière plus que indifférente on traitait les propofitions
„ qu'Elles avoient Fait conjointement avec Sa Majefté pour la coniërvation
„ de la Paix , ce leur commune fureté , 6c dans lequel Elles voioient pareille-
„ ment augmenter de jour en jour les Troupes , & les préparatifs de Guerre
„ fur leurs Frontières , ce qui les met dans une indifpenfable aprehenfion.
„ Que LL. HH. PP. ont toujours fait état fur l'amitié , & l'affection de Sa
„ Majefté pour leur Etat , auffi bien que fur fa naturelle équité , & fa bon-
„ ne fidélité, avec laquelle Elle eft accoutumée à fatisfaire à fes engagemens,
„ Se Elles n'ont jamais douté qu'à l'occafion préiënte Sa Majefté ne fatisfit
„ au contenu de l'Alliance, qu'Elles avoient l'honneur d'avoir" contracté avec
„ Elle. Cependant , que cette nouvelle affûrance qu'il a plu à Sa Majefté de
„ leur donner préfentement comme un nouveau gage , leur eft d'autant plus
„ agréable, qu'Elle eft fondée fur les fentimens des bons Se fidèles Sujets
„ de Sa Majefté afièmblez en Parlement , 5c de leur unanime concurrent *
Kkk 3 „ la
465 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
1701. „ la même fin, 8c fur ce que cet Etat fe trouve menacé d'un évident péril.
1 , Par-là l'on a fortifié la confiance , & l'attente que LL. HH. PP. ont que
„ le fecours qu'Elles ont demandé, ne tardera pas, 8c qu'Elles en obtien-
„ dront l'entier effet , puis que la neceffité le requiert , 8c un accompliffe-
„ ment des Traitez. Que par-là LL. HH.PP. en ont été fi touchées, qu'El-
„ les fe trouvent obligées d'en témoigner leur fincere reconnoiffance à Sa Ma-
„ jette , 8c de lui rendre de tout leur cœur leurs actions de grâces, & d'affû-
„ rer encore une fois de la manière la plus forte Sa Majefté, ainfi qu' Elles
„ l'ont ci-devant déjà fait , que de leur côté Elles accompliront en tout tems
„ à l'avenir lefdits Traitez. Qu' Elles font entièrement perfuadées , que leurs
„ intérêts dans la confervation de la Paix , 8c touchant leur fureté , auiîî bien
. que pour le maintien de leur liberté, &C de leur Religion , font unis 8c in-
,| feparables de ceux de Sa Majefté 8c de fes Roiaumes , 8c pareillement
,, qu'Elles voient que Sa Majefté prend fi fort à cœur les intérêts de l'Etat,
,j 8c qu' ainfi Elles ne fe fepareront jamais des intérêts de Sa Majefté. Sur ce
„ fondement Elles étoient refoluës de ne prendre aucune mefure dans les Né-
„ gociations commencées fur ce fujet , que de concert avec Sa Majefté , 8c
„ de la manière qu'Elles ont commencé } fâchant que Sa Majefté n'a aufii
„ bien qu'Elles d'autre but , que le maintien du repos public, 8c d'une reci-
„ proque fureté 8cc.
Ils réfolurent en même tems qu'on feroit délivrer à Sa Majefté la Let-
tre de cette teneur par leur Envoie à fa Cour. D'ailleurs , ils firent commu-
niquer cette Réfolution par leurs Députez à l'Envoie Stanhope, pour fervir
de Réponfe à fon Mémoire, 8c le firent remercier de fes bons offices en cela,
8t le prièrent de vouloir les continuer, à fin que le fecours qu'Elles avoient
demandé pût être tranfporté au plutôt.
L'on ne tarda pas à recevoir là-deffus la Réponfe de ce Roi , qui eft la
fuivante.
Letlre HAUTS ET PUISSANTS SEIGNEURS, NOS BONS AMIS
d«R°* ET CONFEDEREZ,
de h "
Grande- # . A
liveta- „ "\JOus avons reçu avec d'autant plus de fatisfaèhori votre Lettre du 13.
gneaux ^ 1>J ^e ce mojs vlC[iX Stile, qu'elle nous marque l'Union parfaite qu'il y
G?i!é- m a dans nos ren"mens Par niPort à l'état prefent des Affaires publiques, nos
raux.du „ intentions s'accordant entièrement avec les vôtres pour la confervation mu-
ej Avril. v tuelle de nôtre fureté commune 8c la Paix de l'Europe. Nous nous
crcuons obligez de vous remercier des afTurances que vous nous donnez de
vos Rélblutions de ne vous feparer aucunement de nos intérêts ni de ne pren-
dre aucunes mefures dans les Négociations où on eft entré depuis peu,
que de concert avec nous. Il eft inutile de vous réitérer ce que nous avons
déjà fait plus d'une fois fur ce Sujet 8c dont nous ne nous départirons ja-
mais. Ainfi nous prions Dieu qu'il vous ait, Hauts 8c Puiffants Seigneurs
n
"M
„ nos
ET RESOLUTIONS D'E T A T. 467
„ nos bons Amis , Alliez , 8c Confederez , en fa fainte Se digne garde. E- 170 1^
„ crit à Noftre Cour à Kenfington , le 2f. d'Avril, 170 1. Se de nôtre - " "•
„ Règne le 1 5.
„ Vôtre bon Ami 6c Allié,
WILLIAM REX.
Ce qui influa beaucoup fur les Communes à prendre une fi vigoureufe Ré-
folution, fut que le Roi leur fit communiquer , auffi bien qu'aux Seigneurs,
une Lettre qui lui étoit tombée entre les mains. Elle avoit été envoiée par
megarde à Londres. C'étoit le Comte de Melfort Secrétaire d'Etat du Roi
Jaques, qui l'écrivoit de Paris au Comte de Perth fon Frère Gouverneur du
nommé Prince de Galles à St. Germain. Ces deux Frères étoient EcofTois,
6c des premiers Profélites que le Roi Jaques fit pendant fon Règne en Angle-
terre. Le Parlement fit imprimer cette Lettre , dont le fujet paroit fort va-
re, & le bon fens y manque. Cependant , pour la curiolité du Lecteur ,
voici.
MONSIEUR, Lettre
deMi-
DEpuis la promené que je vous ai faite de mettre en écrit ce que nous Me]fort
n'avions pas le tems d'achever, je m'y fuis mis ce matin, afin que ma au Corn-
Lettre pût être prête pour donner au premier qui viendra. te de
Je vous dis tout ce que j'avois entendu à Verfailles; la favorable Audience P,ertIl>
que j'eus de Madame de Maintenon , pour laquelle je vous prie de remer- neurciû"
cier la Reine, Se de prier S. M. d'avoir la bonté d'en remercier Madame de Prince
Maintenon, Se de fçavoir d'elle ce qu'il y aura à faire en ceci. Ce fera une de Gai-
grande charité à la Reine. g v^u
Je vous dis entr'autres chofês touchant la grande Flote que le Roi prétend vr/er> *
mettre en Mer cet Etéj Les ordres font donnez, l'argent eft prêt, les Maga-
sins font fournis, Se toutes chofes font en état d'agir chacune en leur lieu. Il
n'y a point de doute que cette Flote ne foit Maîtrefle de la Mer pour un
tems, fi elle ne l'eft pour tout l'Eté, parce que les Hollandois n'ofent remuer
jufqu'à ce qu'ils voient les Anglois prêts, Se qu'ils auront beaucoup à difpu-
ter avant qu'ils foient en état d'agir , s'ils en ont la volonté. Et c'eii la
queltion de fçavoir s'ils l'auront.
Le Roi n'a jamais eu une plus favorable conjoncture que celle-ci , s'il peut
periuadçr ce Roi-ci, que les Affaires foient dans les circonftances qu'elles font}
mais c'en eft la difficulté.
Le Roi Se la Reine ont plus d'Autorité chez le Roi Se chez Madame de
Maintenon qu'aucun autre au monde. Mais ce n'eft pas le tout ; Il faudroit
avoir quelqu'un qui tut bien reçu chez les Miniftres , Se qui leur fît voir ces
preuves, Leurs Majeftez ne pouvant pas entrer, ni faire voir le dérail de tout
cela Se expofer les raifons , taire des Mémoires , par l'approbation de Leurs
Ma-
463 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
170 1. Majeftez, pour les en convaincre, ou en faire connoître la néceffité, 6c pour
— faire voir lu facilité de rétablir le Roi. La gloire en fera à leur Roi, 6c l'a-
vantage à la Religion.
Leurs Majeftez font aflez éclairées, pour connoître comment cela fê
peut faire , & pour tout confiderer } & pour moi je croi que cela n'eft pas
une afaire dont je doive me mêler. Mais leurs Amis en général, qui ne feu-
vent pas la moitié de ce que je fçai de cette Affaire, croient que cela "ne doit
point être fait par unJMmiftre Proteftant , pareiTeux de fon temperamment,
Ennemi de la France par inclination , imbu des communs principes contre le
retour du Roi , par aucune autre Puiflance que celle du Peuple d'Angleterre,
avec capitulation 6c terme, étant fufpeél, pourrait penfer à s'accommoder,
fi pis n'étoit.
Ce Monfieur Carrel eft qualifié, perfonne n'en doute, mais en focieté
avec d'autres: Ceux qui devroient erre emploïez dans cette affaire, ne vou-
draient pas fe fier à lui comme il le faudrait. De forte que fi long-tems que
l'autre fera éloigné de pouvoir pénétrer les affaires, ils ne fe croiront jamais
P-fTurez.
Et au flî le Roi n'a pas un jeu à jouer comme avec ces mêmes perfonnes,
comme font ces Défians nommément le Parti de la Religion Anglicane, les
Catholiques 6c le Comte d'Eftran, 6c je dirai quelque chofe, comme un cha-
cun d'iceux le peut dire. Le Roi ne peut qu'il ne {bit fenfible que le Parti de
la Religion Anglicane 6c leur principal Chef à prêtent l'Evêque de Nor-
wich, qui a gardé le filence depuis long-tems. Et Leurs Majeftez fe refiou-
viendront quel poids la Cour de France a mis fur leur jonftion & du Roi,
(j'entens le Clergé qui n'a point prêté les Sermens,) en l'affaire de la Des-
cente* Pour cet effet tout artifice doit être examiné fans délai pour avoir
correfpondance avec eux , 6c tous obftacles doivent être remuez & mis à
part, je le dis fans exception. Et quoi que quelquefois il foit de dure digef-
tion aux Souverains , qui doivent être obéis fans exception ou referve , de fu-
bir à l'humeur de leurs Sujets, cependant la Prudence les doit inftruire quand
ils ne peuvent pas fans blefler leurs affaires , en ce qu'ils voudront ou veu-
lent, taire ce qu'ils peuvent, 6c fe fouvenir de la Fable du Chien, qui per-
dit la fubftance pour l'ombre.
Les afTurances de ceux qui n'ont point prêté les Sermens , la plus faine &
vénérable partie de l'Eglife Anglicane ferait d'un grand ulage en ce -teins,-
pour perfuader la France d'entreprendre cette grande affairé de la Détente.
Outre leur exemple, leurs Prédications 6c leurs Ecrits au Peuple, que leur
Religion ne court aucun danger , il eft très certain qu'ils le içavent autant
qu'aucun autre le peut fçavoir , 6c ce que l'Eglife d'Angleterre en général
voudrait faire pour le fervice du Roi, 6c font prêts d'en courir tout le ha-
zard, il vaudrait mieux que cela fût à la Cour de- France que de toute au-
tre , ce que je fçai par expérience. Pour les Catholiques 6c autres infortunez
leurs aflbciez, pour le Roi, font comptez pour avoir trop d'inclination. Pour
moi je les compte être inutiles au Roi. Mais il faut que je dife avec permif-
f in, nue cette Entreprife eit la meilleure plume de fon aile, 6c a été juste-
ment
ET RESOLUTIONS D'E T AT. 469
ment fa penfée & celle de la Cour de France en un pareil degré. Ils ont pre- 17OT.
tendu que fi cet Article 6c l'autre concernant le Clergé pût être en évidence, — —
qu'ils pûfiênt concourir avec le Roi à envahir l'Angleterre, ils confident en
fept Régiments de -Cavalerie & Dragons, leurs Armes, Trompettes, Tymba-
les, Tambours, Etendarts, 6cc. qui fuflent tous prêts, & encore en fureté
leurs hommes enrôlez , leurs Officiers choifis , & qu'ils euflent vint chevaux
par Troupes , lefquelles Troupes feraient de diftance dans un Pais de che-
vaux , vint chevaux auraient bien-tôt monté le refte.
Ceux qui ne peuvent pas deviner la grandeur, 6c l'ufage de cette entreprife
en blâment la témérité femblublement quelques Ecclefiaftiques qui ne l'ont
point delaprouvée comme un effort contre le devoir vu qu'il étoit contraire
aux ordres que le Roi en avoit donnés par écrit, pour rompre les defiêins ; mais
je fouhaitte pour tout cela que vous croïez .que vous n'avez pas encore un ar-
gument femblable pour fervir à la Cour de France que celui là. Mais fi vous le
pouviez faire voir comme il aurait été fait il y a quelques années, j'aurais une
forte efpérance pour Pentreprife.de cet été. Mais quand même le Roi aurait
d'autres efpérances jufques à des promeffes de la Cour de France , celle-ci eft
pour donner courage, & s'il eft poffible pour être mife dans les circonftances
qui y ont été. Car s'il arrive jamais une décente exprès en Angleterre , il faut
que cela foit avant qu'ils foient armez, 6c ils ne fauroient l'être avant que le
Parlement vienne à une Réfolution touchant la Guerre, 6c confiderant le peu
de Troupes qu'il y a en Angleterre, fuppofé que ces gens ne foient pas meilleurs
que les milices, qu'elle diverfion y-aura-t-il.
Il ne m'eft pas neceffaire de dire rien davantage fur cet Article, jufqu'à ce
que Sa Majelté'aye une aufli bonne opinion de cette entreprife que j'en ai.
Cela étant je ferai voir.ee que je penfe qui doit être fait autrement: j'en épar-
gnerai la peine. Pour ce qui eft du Comte d'Arran , il ferait d'un grand fer-
vice d'avoir avec lui un homme entendu; il n'en peut avoir ailleurs pour
pénétrer fon tout eft engagé, 6c il doit être las-de ceux avec lefquels il traite
. eu correfpond.
J'eftimerois mieux pour le fervice du Roi que le party dé la Cour prévalut
de la manière qu'elle en a ufé au Parlement d'Ecofle que le party du Pais au-
roit fuivant fon fouhait, d'oppofition au fluds le fait enfler 6c tant que le par-
ti du Pais n'eft point rebuté ou découragé il gagne plus de terrain dans le
Roïaume , qu'il ne pert au Gouvernement , par la le mépris du Gouverne-
ment augmenté , 6c l'on peut juger de la Nation en Général ce qui eft une
autre modération que de ce prétendu Parlement plutôt une canaille Presbite-
rienne mal repréfentant la Nation , car depuis il n'y a eu en-lui que debats-
contre le Gouvernement que feroit-ce dans un Paiement libre , lequel le Prin-
ce d'Orange n'a ofé jamais hazarder: la Nation donc eft enfin la plufpart mal
affectionnée à ce Gouvernement. Il eft de k dernière confequence, que le
Comte d'Arran puifiè connoître ce qu'il doit faire au cas d'une décente en An-
gleterre , ou en ce cas ils foie obligé lui & fies amis pour leur propre -deffenfe
de le mètre en état. 1/ Armée qui^eft ou doit être affectée doit être gagnée
par argent & un peu les conduira bien loin. Les Troupes débandées doivent
«être engagées, 6c les Officiers font fort volontaires. Les places fortes doivent
Sem, .1. L 1 1 •ver.se
\
47? MEMOIRES, NEGOTI ATIONS, TRAITEZ,
1701. être affinées , 6c peuvent être mifes en état de deffence, pour peu de de- .
~ penfe le peuvent fortifier.
Pour faire tout cela il n'eft befoin que de peu de dépenfe, peu d'argent
fervira pour commencer, 6c doit avoir bonne Efperance 6c du Commande-
ment.
Ce n'eft ici que les Chefs pour en difeourir , 6c beaucoup dire de chaque
partie il ne fe peut faire que cette Lettre puifle aporter une conclufion finallej
mais il peut être que par Difcours , je puitîe changer ma penfée ou être da-
vantage confirme en icelk 6c voir plus loin , cela me fait vous incifter de plus
fur deux chofes comme il appert d'une neceilîté abfolue de mettre les choies
fur un droit pie.
Le premier eft d'ôter les obftacles, 6c envoïer les Perfonnes fufpe&es les
uns en Champagne, 6c les autres en Bourgogne, fuivant leur Inclination) 6c
le fécond c'eft le dernier qui doit fervir pour Leurs Majeftez 6c le Prince,
qui eft un établifîbment de certain nombre de Perfonnes fins aucune qualifica-
tion , de traiter de leurs Affaires en préfenec de Leurs Majêftez , lefquclles
nous pourrons librement converfer , 6c propofer tout ce qu'il le peut pour le
fervice de Leurs Majeftezj Et quant au premier il fera pour la réputation du
Roi tant aux Cours de Rome, 6c de France, 6c avec tous les véritables Amis
en Angleterre pour plufieurs raifons.
Comme pour le fécond il s'accorde à l'écriture, en la multitude de Con-
feillers il y a fureté , il n'y a rien de fi dangereux que de commencer par dé-
terminer ce qu'on veut faire, 6c entendre les raifons contraires après, 6c imi-
ter Adder le lourd, qui n'écoutoit point la voix de l'Enchanteur, 6c ne s'étoit
jamais laiiTé charmer fi doucement. Les raifons contre les Réfolurions prîtes
offenfènt, 6c plus de force elles ont , elles oftenfent davantage , avant que la
Réfolution foit prife la raifon a fon efiet : Et les déterminations de l'humeur
6c faction, mais de prudence 6c juftice.
Si je manque en quelque chofe , je protefte que c'eft par faute d'enten-
dement , 6c non de volonté , 6c je prie que Leurs Majeftez foient bien per-
fuadées que ce n'eft point de naturel ni de vanité, mais leur fervice que j'ai
eu en vue.
MON CHER FRERE,
Votre très-humble.
On fit là-defius des recherches, <k l'on trouva quelques armes cachées en
quatre ou cinq endroits. L'on doubla la Garde , 6c le Roi fit publier des
Placards, pour éloigner les Papiftes à dix mille de Londres, 6c pour leur ôter
les Chevaux au defius de la valeur de cinq livres iterling , fuivant les Actes du
Parlement.
Ladite Réfolution du Parlement fit revenir de la furprife où l'on avoit été,
de ce qu'il avoit tardé à la prendre. La raifon de ce retardement venoit,
que l'Efprit de Parti, fi accoutumé en Angleterre, s'étoit reveillé. On vou-
lut dans la Chambre des Communes lavoir auparavant l'ufage de deux cent
mil-
t
k
ET RESOLUTIONS D'E T A T, 471
mille livres fterling , dont Milord Ranelaug , Païcur Général des Troupes 1701.
le trouvoit en amené dans fes comptes, Se qu'il difoit avoir remis par ordre
du Roi au Comte d'Albemarlc. Celui-ci difoit que cette fomme avoit été em-
ploiée en Négociations fecretes. D'ailleurs , les Communes étant compofées
pour la plus paît de Wighs, ceux-ci étoient chagrins de voir dans les Charges
es plus éminentes deux Thoris, favoir le Comte de Rochefter & Milord Go-
dolphinj le premier Vice-Roi d'Irlande, & l'autre premier Commiiîaire de
la Tréforerie. D'ailleurs , les Thoris en vouloient à quatre Seigneurs , qui
étoient à la tête des Wighs. C'étoient les Lords Portland, Sommets, 0>
ford connu fous le nom de l'Amiral RufTel , & Halifax devant Montaigu.
Pour les décréditer & les perdre , on les attaqua fur ce qu'ils avoient confeillé
au Roi le Traité de Partage avec la -France. Les Seigneurs n'entreprenoient
cette attaque , que pour faire des Affaires au Comte de Portland, à caufe
qu'il étoit étranger, 6v les Communes en vouloient aux trois autres , qui diri-
geoient le Parti des Wighs avec trop de hauteur. Les Seigneurs préfentérent
une Adrefle au Roi. Elle étoit forte ; mais , le Roi avoit lui-même tâché
qu'elle fut de la forte, pour empêcher les Communes de jetter trop de feu
dans la leur. Il parut cepandant qu'elle étoit trop précipitée. C'eft en ce
qu'ils y fupoférent que le Traité de Partage n' avoit été connu à aucun du
Confeil. Ils prioient le Roi , qu'il voulût à l'avenir demander ou admettre
dans toutes les Affaires d'importance l'Avis de fes Sujets naturels du Roïaume,
dont la probité éprouvée & les richeffes pouvoient donner une jufte aflurance-
de leur fidélité. Il y avoit à la fin une Claufe remarquable. C'eft qu'après
avoir dit que le Traité de Partage avoit été un coup fatal pour la Nation Se
pour la Paix générale 'de l'Europe, on conclut que la France a manifeste-
ment violé ce Traité , & qu'ils confeilloient le Roi qu'en traitant à l'avenir
avec celui de Fiance , il doit exiger des furetez effectives & réelles. Il efr.
vrai que cette dernière Claufe parut choquante aux Principes des Thoris , qui
tendent à élever la Souveraineté des Rois. Auffi, les Comtes de Notting-
ham & de Rocheller , auffi bien que Milord Godolphin , qui ont toujours
été des Proteitans Politiques , proteltérent avec quelques autres contre cette
Claufe, qui paffa néanmoins à la pluralité des voix. L'Adreffe des Commu-
nes fut plus modérée. Mais, Elles en donnèrent une féconde , qui tendoit à
flétrir celle des Seigneurs. C'étoit en difant que les trois Lords Sommers,
Orfort , & Halifax , pour éviter la Cenfure qui pouroit juftement tomber fûr-
ceux qui avoient donné leur Avis pour le fatal Traité de Partage, avoient tâ-
ché d'infinuer que Sa Majefté l'avoir fait fans l'Avis du Confeil. C'eft pour-
quoi, aïant du reffentiment du traitement qu'on faifoit à Sa Majefté dans cet-
te occafion, Elles la fuplioient d'éloigner de fon Confeil , Se de fa préfence,
pour toû jours, lefdits trois Lords, afin qu'ils ne fufTent plus en état de la trom-
per & d'abufer la Nation. Elles ajoutèrent d'éloigner auiîi le Comte de Port-
land, qui avoit négocié ce Traité fi injufte, & fi fatal, &c.
Les communes ne s'en tinrent pas-là. Elles acculèrent en forme ces qua-
tre Lords à la Barre des Seigneurs. Ceux-ci trouvèrent à propos de préfen-
ter une féconde Adreflè. Elle portoit en fubftance , que les Communes a-
L 1 1 i voient
47* MEMOIRES, NEGOTIATIQNS, TRA4-TEZ,
tjoi. voient aceufé féparement à leur Barre les quatre Lords de Crimes & Malvcr--
— verfations , avec nromeue de préfenter , lorfqu'il en fera tems , des Articles-
particuliers 6c feparez contr'eux & en prouveraient le contenu. Les Sei-
gneurs fuplioicnt Sa Majefté de ne difgracier aucun d'eux, jufques à ce qu'on,
leur eut fait leur Procès , 6c qu'ils eufiènt été jugez félon les coutumes dit-
Parlement, 6c les loix du Pais. Il y eut à cette occafion du débat entre des
Lords. Le Comte de Huntington parla en faveur des aceufez. Il s'attira par-
là quelques duretez par ceux du Parti contraire. Il leur repondit 6c l'on s'é-
chauffa. Chacun fe rangea du côté de ceux de fon Parti, 6c l'on croioit
qu'on en viendrait aux mains, 6c que ce ferait comme une Diète de Pologne.
Cependant, le Prefident de la Chambre harangua, 6c les adoucit.
Les Communes produisirent enfuite les Chefs d'Accufation contre ces
quatre Lords , dont la plus part ne regardoient pas le Traité de Parta-
ge , 6c dont ils furent abious. Comme ce font des matières purement par-
ticulières 6c Parlamentaires, on trouve à propos de ne pas en faire un détail
ennuieux , 6c ainfi de les paflêr fous fîlence. On ajoutera feulement, que
plufieurs des Membres des Communes entrèrent dans ie torrent r fâchant bien,
que les quatre Seigneurs feraient juftifiez,. en vûë qu'en montrant tant de zé-
lé pour la Nation on pût mieux faire les Affaires , 6c empêcher les Peuples
de fe fâcher des Taxes, qu'un Parlement fi zélé impo 'croit.
Pendant ce tems , le Comte d' Avaux , ni les Etats Généraux , ne faifoient
aucune nouvelle Démarche pour les Négociations. Les Députez des Etats
furent en Conférence avec le Comte de Goè'z, 6c avec l'Envoie d'Angleter-
re. C'étoit plus pour donner à penfer au Comte d'Avaux que pour autre
chofe. Ce Comte affec~boit.de fe préparer à partir. Quelques uns de fes gens
furent chez la plus part des Mini lires Etrangers leur offrir à vendre du Lard
de France, qu'il avoit fait venir pour fes provifions. Cela donna fujet à rire.
Les Etats Généraux témoignoient de leur côté un grand défis pour la Paix ;
quoi qu'ils priffent de bonnes mefures pour la Guerre,, qui leur paroiffoit iné-
vitable, ou du moins pour fe mettre en état de défenfe.. En cette vue , ils
firent une Députation vers TAmbaffadeur de Suéde. C'étoit pour lui dire,
que l'on étoit content de la conduite qu'il tenoit en ce tems-là , 6c qu'on fe-
rait bien aife qu'il continuât fes bons offices. Il le promit ; mais, il agiffoit
enfuite d'une manière à ne pas fatisfaire. C'eft qu'il tachoit de détacher les
Etats des intérêts de l'Empereur 6c de l'Angleterre. Il infinuoit aux princi-
paux Membres des Etats , que s'ils vouloient ne. regarder qu'aux leurs, il
croioit que la France pourrait aquiefeer, fi non à toutes , du moins à une
bonne partie de leurs Demandes pour leur fureté particulière. On s'aperçût
qu'il parloit de la forte de concert avec le Comte d'Avaux. C'eft puifque ce-
lui-ci faifoit les mêmes infinuations afîûrant qu'en ce cas les Etats auraient
toute la fatisfr.c~r.ion imaginable 6c qu'on leur donnerait prefque carte blanche.
Cela n'ébranloit pas les Etats Généraux. Ils prirent le deux de Mai une Ré-
folution pour conférer avec le Comte d'Avaux , afin de pouvoir continuer la
Négociation. Voici ladite Rcibluticn.
■>•>
Ouï
ETRE S G LUTIONS D'E TA T. 47?
1701 '
„ /^Uï le Raport des Sieurs de Eflen , Se autres Députez de Leurs Hautes ■
„ V^ PunTnces, pour les Affaires Etrangères lefquels en vertu, 6c en exe- Extrait
„ cution de leurs RelblutionsCommiflbriales de planeurs dates, ont examiné, td^^3'
jy, ce qu'on pourrait faire pour procéder plus avant dans la Négociation enta- Réibhi-
„ mée, au Sujet de la Paix Générale 6c de la fureté de l'Etat. Surquoi aïant tions des
„ été délibéré, il a été trouvé bon & arrêté, que dans une Conférence, on Etats
„ représentera- au Sieur Comte d'Avaux AmbafladeUr Extraordinaire de Sa ~jl"e"jj
„ Majelié le Roi Très-Chrétien, que Leurs Hautes Puiflances ont toujours Lundjlt
„ été portées à la confervation de la Paix, 6c du Repos Public, tant par in- Mai.
„ clination , que par intérêt ; que dans cette difpofition Elles ont propofé à
„ ladite Majelié d'entrer dans une Négociation fur les moïens par lefquels on
„ pourrait conferver la Paix Générale, 6c établir leur fureté particulière ;
„ qu'aïant plû à Sa Majefté d'agréer cette propofition , 6c qu'enfuite ladite
„ Négociation aïant été entamée ici Leurs Hautes Puiflances avoient efperé
„ qu'elle aurait été fuivie bien-tôt d'un bon effet , 6c d'une bonne fin , Se
„ qu'Elles ne fouhaitent encore rien plus ardemment. Que cependant depuis
„ la dernière Conférence que les Sieurs Députez de Leurs Hautes Puiflances
„ conjointement avec le Sieur Stanhope, Envoie Extraordinaire de Sa Ma-
„ jefté la Roi de la Grande-Bretagne, ont tenu il y a plus d'un Mois avec^
5, ledit Sieur Comte d'Avaux , il s'elt bien tenu quelques Conférences de
s, bouche fur cette matière entre ledit Sieur Comte d'Avaux, 6c le Sieur
„ Confeiller-Penlîonnaire Heinfiusj mais que Leurs Hautes Puiflances voient
„ à regret que par cette voie , l'Affaire eft encore peu avancée. Que
„ Leurs Hautes Puiflances délirant extrêmement qu'on puifle atteindre le
„ plutôt le mieux , le but propofé par cette Négociation , à fçavoir la
„ confervation de la Paix Générale s 6c l'établiflement de leur fureté parti-
„ culiere, font d'opinion , que pour obtenir cet effet, le mieux ferait de
„ . pourfuivre ladite Négociation fur le pied, fur lequel elle ell commencée.
,, Qu'à cette fin Leurs Hautes Puiflances défirent, 6c font prêtes , de reaf-
5, fumer par les Sieurs leurs Députez , conjointement avec ledit Sieur Stan-
j5 hope, authorifé à cela par Sa Majeure le Roi de la Grande-Bretagne, les
,, Conférences^ avec ledit Sieur Comte d'Avaux , s'il efl: autliorile , èc le
„ délire, de. même, que Leurs Hautes Puiflances déclarent derechef, qu'El-
„ les n'ont autre intention, ni autre but, que la confervation de la Paix , Se
„ .du Repos Public, 6c l'établiflement de leur fureté particulière, 6c qu'ou-
„ tre cela Elles fouhaitent très fortement , de fe conferver l'honneur de l'a-
,, mitié de fadite Majelié pour laquelle Elles ont toujours une très gran-
„ de eftime. Et font requis les Sieurs d'Elfen 6c autres Députez de Leurs-
„ Hautes Puiflances pour les Affaires Etrangères d'entrer en Conferen-
„ ce avec ledit Sieur Comte d'Avaux à cette fin , 6c d'en faire Raport à
„ l'Aflèmblée.
L'o n fit demander au Comte une Conférence. Elle fe tint le lendemain
trois. Elle dura plus de deux heures. Les Députez lui reprcfcméient fort
LU 3 vive-
474 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
1701. vivement le contenu de la Réfolution. Ce Comte ne s'expliqua pas fur l'Ad-
" million de l'Envoie d'Angleterre comme partie principale. Au contraire, il
dit que les intérêts de ce Roïaume-là dévoient être ménagez ailleurs. 11 en-
voia cependant la Réfolution des Etats àja Cour par un Exprès. Celui-ci
fut de retour le 8. Deux jours après il prefenta aux Etats Généraux le Mé-
moire qui liait:.
Mémoi- „ T E fouffigné Ambafladeur Extraordinaire du Roi Très - Chrétien auprès
ieVre~ „ ï-j de VV. SS. a envoie au Roi fon Maître la Réfolution qu'Elles lui ont
le' Corn- »j délivrée te trois de ce mois, par laquelle Elles témoignent le delîr qu'Elles
ted'A- ,, ont que l'on renoue conjointement avec l'Envoie du Roi d'Angleterre les
vaux , 5J Conférences, que l'on a commencé avec lui pour la confervation de laPaix,
GénéUtS " & Pour l'établiiîement de leur fureté particulière, Vos Seigneuries decia-
raux , le j> rant en même tems qu'Elles ne fouhaitent rien plus ardemment que de voir
10. Mai. „ cette Négociation bien-tôt terminée par une bonne & heureufe conclufion.
„ Sa Majeité, à qui le foulligné Ambafladeur a rendu conte de la reponfe
„ qu'il a faite à VV. SS. touchant l'Admiffion de l'Envoie du Roi d'Angle-
j, terre l'a entièrement approuvé. Elle n'a pas moins agréé les allurances que
„ VV. SS. donnent dans ce Mémoire du defir qu'Elles ont de conferver la
Paix, <k comme Sa Majeflé perfifte dans la même réfolution de mainte-
nir le Repos Public , Elle verra avec plaifir qu'on puiflé trouver les moïens
les plus conformes au bien général de l'Europe pour en alfûrer la tranqui-
lité. C'eft dans cette vûë qu'aufîl-tôt qu'Elle a fçû que Vos Seigneuries
„ avoient piopofé de renouer les Conférences, Elle a agréé que le louffigné
,, Ambafladeur les reprit, & qu'il demeurât encore à la Haïe pour cet effet.
Etoit Jîgné,
Le Comte d'Ayaux.
„ A la Haïe le 10. Mai 1701.
L'on communiqua à l'Envoie d'Angleterre la Copie de ce Mémoire, 6c
Ton convint avec lui qu'il y avoit des obfcuritez, touchant fon Admilîîon.
Les Etats Généraux trouvèrent à propos d'en parler au Comte d'A\ aux le
12.., pour en avoir quelque éclaircifTement. Il n'en donna point d'autre Re-
ponfe, que celle qu'il avoit donnée fur cefujet-là, dans la Conférence du
trois. C'ell là-delfus que les Etats Généraux écrivirent le 13. au Roi d'An-
gleterre la Lettre qui luit.
Lettre SIRE,
des Etats
Géné-
raux au
Roi de
55
9J
n
DEpuis la proteflation que Nous avons faite a Vôtre Majeflé , par nôtre
dernière Lettre du 23. d'Avril , de n'entrer en aucune Négociation
la Gran- aVec la France, que de concert avec l'Angleterre , Nous avons jugé à pro-
pos
ET RESOLUTIONS D'E T A T. 47f
pos de demander au Comte d'Avaux Ambafladeur Extraordinaire de Sa Maje- 1701.
lié Très-Chrétienne, s'il ièroit porté 6c authorifé de rentrer dans la Négo- ■
ciation de la manière qu'elle avoit été commencée conjointement avec le de-Rre-
Miniftre de Vôtre Majefté, comme Elle le pourra voir par nôtre Réfolution tagne,
du deuxième cTe ce mois ci-jointe. Le Sr. Comte d'Avaux, l'aïant envoie à £" J 3>
S. M. Très- Chrétienne, après le retour de Ton Courier Nous préfenta le Mé- u'
moire dont nous joignons pareillement la Copie à cette Lettre. Nous l'avons
communiqué au Sr. de Stanhopc Envoïé Extraordinaire de Vôtre Majefté , 6c
après en avoir concerté avec lui , Nous avons trouvé dans ledit Mémoire de
certaines obfcuritez, qui nous firent douter de (on véritable feus. C'cft pour-
quoi Nous avons crû necêflàire de donner part audit Sr. Comte d'Avaux de
la Lettre que Nous nous donnâmes l'honneur d'écrire à Vôtre Majefté le z;.
d'Avril paÎTé, & de nôtre engagement à ne prendre aucunes mefures dans la
Négociation que de concert avec Elle: le Comte d'Avaux a répondu à nos
Députez qu'il étoit venu ici pour traiter des moïens pour conferver la Paix
générale, 6c établir nôtre fureté particulière , que fi nous voulions concerter
la-delîus avec Vôtre Majefté il n'y trouvoit rien à redire , & qu'il étoit con-
tent que l'Envoie de Vôtre Majefté affiliât aux Conférences qu'on auroit fur
ce fujetj mais qu'il n'étoit aucunement autorifé d'entrer en Négociation avec
lui, pour les intérêts de PAngleterrej qui fe devraient traitter ailleurs} à quoi
nos Députez ont reprefenté que dans la confervation de la Paix Générale Vô-
tre Majefté étoit également intereflee avec Nous ; que nôtre lûreté ne pou-
voit être aucunement feparée de celle de l'Angleterre ; que nous avions là-
dedans un intérêt commun entre les deux Nations ; £c que dans la préfente
Négociation, fans faire tort à Vôtre Majefté, on ne la pourrait regarder au-
trement, que comme Partie principale auffi bien que Nous. Mais , nonobftant
plufieurs inftances de nos Députez, 8c toutes leurs railbns alléguées, le Sr.
Comte d'Avaux a perfilté dans la Rcponfe mentionnée , difant de n'avoir
point d'autres ordres , qu'il envoieroit nôtre Réfolution, (dont Vôtre Maje-
llé trouvera ici la Copie) à la Cour de France, fans donner la moindre éfpe-
rance de recevoir une Réponfe conforme à Nos fentiments. Sur le rapport
qui Nous en a été fait, Nous avons jugé , qu'ainfi on fepareroit les intérêts
, de l'Angleterre de ceux de nôtre République. Nous les tenons pour infepa-
rablcs , ôc comme c'eft une chofe évidente qu'ils font tels. Nous n'avons pu
tirer d'autre conclufion de ce procédé , fi non que du côté de la France on
pourrait bien avoir defiein de finir les Conférences , 6c de n'accorder aucune
des furetez demandées, 6c qui font fi nécefiaires à la confervation des Roïau-
mes de Vôtre Majefté, 6c de nôtre République. Nous fommes obligez de
porter tout ceci à la connoiflanec de Vôtre Majefté. Nous prott lions encore
que nos intérêts étant communs avec ceux de Vôtre Majefté dans la prefente
Négociation, 6c infeparables les uns des autres, Nous ne les laiderons divilèz
en aucune manière. Cependant , Sire , Nous ne pouvons nous difpenfcr de
reprefenter à Vôtre Majefté le picfiant btfoin, eu rous ibmmes d'eue fecou-
tus, fans perte de tems, fi nous voulons prévenir la ruine qui nous menace, 6c
le péril extraordinaire, où nous nous trouvons. Elle connok à fond l'état de
no?
47* MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
I"'CI- nos Affaires , & Elle peut aifement juger s'il eft poflible , dans la fituation
' où nous Ibmmes, de refiiter à des forces autant fuperieures, que celles de la
France. C'cft ce qui nous avoit fait demander avec empreffement à Vôtre
Majcftë l'exécution du Traité pafle par l'aveu du Parlement l'an 167?. entre
le Roi Charles II. de glorieufe mémoire, & cet Etat. Nous réitérons
aujourd'hui nos inftances les plus vives , pour avoir promptement le fecours
ilipulé & l'effet tout entier dudit Traité. Nous nous flattons que Vôtre Ma-
jefte voudra bien faire une reflexion ferieufe , fur la fituation où nous fora-
ines , particulièrement après les aflurances pofltives qu'Elle nous à donnée que
les Refolutions de fon Parlement étoient de s'intereffer avec vigueur à Nôtre
confervation , 6c de nous afli (1er dans les belbins où Nous fommes, en four-
mffant les fecours, dont nous fommes convenus. Nous vous dirons Sire, en
quel état la Fiance fe met , & Vôtre Majefté jugera par-là fi nôtre crainte
cil mal fondée, qui ranime Nos demandes. La France, non contente de s'ê-
tre mife en poffeiîion de toutes les Places qui reftoient à l'Efpagne dans les
Païs-Bas , y a jette 6cy fait marcher actuellement tous les jours des Forces for-
midables. On fuit tirer une Ligué depuis l'Efcaut à Anvers jufques à la
Meufe. On va commencer, comme nos avis le portent, une pareille Ligne
depuis Anvers jufque à Oflende. Elle envoie dans la Places les plus frontiè-
res de nôtre Etat une nombreufè Artillerie. Elle fait en diligence beaucoup
de Magazins en Flandres, en Braband, Gueldre, 6c Namur, qu'elle remplit
de toutes fortes de Munitions de Guerre 6c de bouche j outre les grands amas
de Fourage qu'elle fait de tout côté. Elle bâtit des Forts fous le Canon de
Nos Places. Déplus, Elle a travaillé & travaille encore continuellement à dé-
tacher les Princes Nos amis de Nos intérêts., pour les faire entrer dans fon
Alliance, ou du moins les engager à la Neutralité. Enfin, par des intrigues
Se des divifions dans l'Empire on Nous rend inutiles Nos amis, Se on augmen-
te, ceux de la France. Ainfi Nous fommes prefque renfermez de toutes parts,
hormis du côté de la Mer. Voilà, Sire, fins aucun deguilément , la véritable fi-
tuation, où nous nous trouvons réduits , fins rien ajouter à ce qui eft de fait. Ce-
la Nous fait efpcrer , que comme Vôtre Majefté connoit parfaitement Nos af-
faires, Elle conviendra avec Nous, que pour le préfent Nôtre condition eft pi-
re , qu'elle n'a été pendant la dernière Guerre, & plus mauvaife que fi nous étions
actuellement en Guerre, puis qu'on frit des Forts fous le Canon de Nos Places
fortes & des Lignes le longde nos Frontières, fins que nous puiflions l'empêcher, •
comme nous le pourrions foire , fi nous. étions en Guerre. Ces raifôns nous
obligent de nous mettre en état de defenee , plus , que fi nous étions actuel-
lement attaquez} d'inonder Nos Terres, 6e même de couper Nos Digues, pour
rfflûrer Nos Frontières. Nous nous trouvons ncceflitez d'emploïer ces moïens
Se tous les autres, que nous pourrions fu porter dans une Guerre ouverte} en
forte que Nos fujets en fouffrent déjà plus qu'ils n'ont fait pendant la dernière
Guerre. Jufques ici l'hyver nous avoit fervi d'une telle quelle fureté. Cette
faifon eft paffee, 6c nous fommes à la veille d'être envahis 6c renverlez à tout
moment, à moins d'un prompt fecours. Nous nous le promettons de Votre
.côté, Sire, fur tout après qu'il a plu à Vôtre Majellé de nous affûter que
.fon
ET RESOLUTIONS D'ETAT. 477
fon Parlement avoit pris des Réfolutions favorables pour nous. Comme nôtre I701-
neceffité eft preflante, Nous la fupplions de bien confiderer l'extrémité où "'
nous fommes, & nôtre impoffibilité d'éviter la ruïne entière 6c le bouleverfe-
ment de nôtre République, fi on Nous laifle dans cet état. Nous croïons,
Sire, les intérêts de l'Angleterre fi étroitement unis aux vôtres, que Nous
nous expoferons à tout événement , plutôt que de foufFrir qu'on les {epare, ou
de prendre aucunes mefures , que de concert avec Vôtre Majefte. Il eft
très-inutile de lui reprefenter, que la propre confervation de fes Roïaumes la
doit porter à prévenir Nôtre ruine, attendu que nous croïons leur perte infè-
parable de la Nôtre. Les raifons vous en font connnës , mieux qu'à Nous,
Sire , auflî-bien que les fatales conféquences , aux quelles on s'expofe, en
nous laiflant dans cet état ; ce qui nous perfuade que par la confommée pru-
dence de Vôtre Majefté,& par les bonnes intentions de fon Parlement , Elle di-
rigera toutes chofes, 6c fera voir à l'Europe, que rien n'eft plus avantageux
à là fureté, que fes Alliances avec l'Angleterre 6c fon Amitié. Pour Nous, nous
attendons , fans délai , les fecours 6c l'accompliffement du Traité ci-defTus
mentionné , & nous prions Dieu , Sire , de conferver la facrée Perfonne de Vô-
tre Majefté dans une longue fanté, 6c fes Etats dans une profperité floriflan-
•te. Fait à la Haïe le 1 5. de Mai 1701.
L'o N ne tarda pas à recevoir là-defius la Réponfe du Roi , qui fuit.
„ HAUTS ET PUISSANS SEIGNEURS, NOS BONS AMIS ^Pon.r6
ET CONFEDEREZ, delà
LEs affûrances que Vous Nous avez données, par Vôtre Lettre du 13. Breta-6"
de ce mois nouveau ftile , que vous croïez nos intérêts infeparablc- gneaux
ment unis aux Vôtres, 6c que quoiqu'il arrive , vous ne voulez pas vous Etats
en départir, ni prendre d'autres mefures, dans la conjoncture prefente , Gené"jl,
que de concert avec Nous, font fi fortes & fi cordiales , que Nous nous 17" Mai.
trouvons obligez, non feulement de vous en faire nos Remerciemens, mais
auffi de vous affûrer de nouveau, que Nous fommes tout à fait dans les mê-
mes difpofitions , & les mêmes fentimens, à l'égard de vos intérêts, que
Nous ne confiderons pas autrement que les Nôtres. Nous vous donnons
en même tems avis , que nous vous envoïerons inceflamment les fecours
^ que vous avez demandé, les inclinations de Nôtre Parlement aïant promp-
„ tement repondu aux Nôtres ; ce qui Nous a donné beaucoup de fatisfac-
tion, voïant que Nôtre Peuple eft fi fenfible à l'état prefent où vous êtes,
& aux Dangers qui vous menacent , qu'il fonge avec ardeur , à procurer
vôtre fureté. Ainfi, Nous prions Dieu qu'il vous ait, Hauts 6c Puiffans
Seigneurs, nos bons Amis, Alliez 6c Confederez , en fa fainte 6c digne
garde. Ecrit à Nôtre Cour à Hamptoncourt le Jf. Mai 1 701. 6c de notre
Règne le treizième.
„ Vôtre bien bon Allié,
WILLIAM R.
Tom. /. Mmm On
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35
33
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53
478 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ;
i-oi. On reçût en même tems ta Copie d'un Mémoire que le Comte de Wra-
1 tiftau avoir prcfcnté à Sa Majefté Britannique. On voioit par icelui les fenti-
mens de l'Empereur fur les Occurrences de ce tems-là. On peut les voir par
la Copie de ce Mémoire, qui fuit.
Memo. SERENISSIME ET POTENTISSIME REX.
rialeex-
hibitum A multis rétro annis Regem Gallia nimiâ ahreptum ambitionefinfefla cmpiffe ani-
ef\x Aà"' mo a&itare confliia-> Europam armis quaffare, vaftatis vicinis Regionibus op-
Comite Pida & munimenta fibi arripere , omnia mifcere & in libertatem fortunafque
de Wra- omnium co?nmifcere, viamque fibi quovis modo Jiernere ad fummum in omnes Eu-
tiflau, ropœ Principes populofque imper ium^ mimique non fine gravi plurimorum jaclu-
n.Mau. r£ conflat^ Conatibus Régis tant alte fpirantis pro virili fefe oppofuêre , quorum
id fummoperè intererat , Principes Statu/que fœderati junclis viribus fecêre ne
omnia poffet quœ vellet , fpefque efulfit aliqua quiet is pojî fummos exantlatos la-
bores. Armis autem vix pofitis en nova turba , nova undique tempe fiâtes ^ fj?
quoi vi perfici non potuit , variis bine inde machinât ionibus eo deduclum efi à
Chrifiianijfimo Rege ', antiqua ufque revolvente Confilia , utjugum^fi unquam ,
Jam metuendum fit. Accefiione enim tôt Regnorum & Provinciarum Monarchia
Hifpanica^ vires Régis Gallia in id crevêre fafiigium^ ut vixfpes ulla fuperfit fa-
lutis, ni extrema quavis minitanti armis mature obviam eatur. Pratexitur qui-
dem huic Chr. Reg. conatui tefiamentum quoddam Regis\Catboiici Caroli II.,
nuper fato funtli , quo Dux Andegavenfis bares pradicli Régis dici ac confii-
tuifertur. Sednecjufium tefiamenti nomen meretur , quod variis artibus , mi-
fiis , vi denique â Rege Cath. in articulo mortis confiituto extortum efi : nec erat
Régis Cath. tefiamentum condere , renunciationibus Anna Auflriaca &f Maria
Therefia Reginarum^ tefiamentis denique Philippi III. (3 Philippi IV. Re-
gum quibus praditla renunciationes abunde explanantur , è diametro oppofitum &
repugnans. Notum efi univerfo Orbi quâ forma perfecla fuerunt renunciationes
praditla &? facrâ jusjurandi Religione fiabilita , quofœdere etiam Pirenaorum &
paclorum Aquifgranenfium Articulo 8. Neomagenfium Articulo itidem 8. Risvi-
tenfium Articulo 27. quam fieri potefi, pleniffime confimantur. Placuit t amen nu-
per Régi Gallia pofihabitâ paclorum religione totam invadere Monarchiam Hif-
panicam, eu jus legitimus h are s vi jufia fuccejftonis , renuntiationum , tefiamento-
rum 13 paclorum praditlorum exifiit facra Cafarea Majefias , (3 feuda S. R.
Impcrii arripere (in quâ tamen rerum difpofitione omne jus S. C. M. unicè corn-
petit , ) qua omnia' S. CM. jura quafita validiffimis probare argument is facilli-
mum foret , ni res effet omnibus notiffima lueeque meridianâ clarior. Sibi autem
toti Europa in tanto periculo confiituto nolens dcejfe S. C. M. armis fuis fibi vin-
dicare^ (3 fervituti omnibus imminent i firenuè fefe opponere ftatuit. Arduumfa-
tiè &? periculis plénum efife quod aggredïtur negotium , Hbenter fatetur S. C. M.
fedfpem reponens fummam in infolitâ quâ nititur caufà ejus jufiitia , perfuajfijfi-
mum ftbi habet Rcges Principefque fœderatos , quos inter principe?» tenet locum
R. M. V. valida mifjuros aux Ma, & communcm caufam fociatis armis propugna-
turos. Dédit S. C. M. infraferipto Ablegato fuo Extraordimrio in mandatis
ut rem tantimomenti , &? quanam S. C. M. fuper eam effet fententia , Majefiàti
V e fii a
ET RESOLUTIONS D'E T A T. 4r9
Veftra exportent, velitque R. M. V. fœdere anno 1689. conclufo huïc Memoria- iJOl'.
li adnexo , promijfa praftare auxilia , benignumqus infrafcripto Ablegato imper* •
tiri , quant 0 fier i pote (i, ociùs refponfum. Infrafcriptus Ablegatus Extraordina-
rius ex mandatis , qui par ejî reverentiâ , id iterum iterumque petit. Londi~
tii ai. Mai 1701.
JoANNES VENCESLAUS CoMES W R A T I S L A V I EN S I S.
La Réfolution des Etats Généraux du 2. , & communiquée au Comte
d'Avaux le ?. , avoit été prife en une vûë fagement politique. C'eft que
comme le Parlement avoit prié le Roi de faire continuer les Conférences
avec le Comte d'Avaux , conjointement avec les Etats Généraux, pour obte-
nir la fureté de la République, les Etats firent cette Démarche, afin que les
Anglois ne puflent pas dire que c'étoit la Hollande qui refufoit de continuer
les Conférences ; mais de leur faire voir que c'étoit la faute des François,
pour animer par-là les Anglois contr'eux. L'on trouva cette manœuvre d'au-
tant plus néceflâire, que l'on eut des Avis de Paris, que le Roi de France, .
qui n'avoit pu fuprimer fon chagrin contre les Etats Généraux, fur ce qu'ils
ne vouloient pas féparer leurs intérêts de ceux de l'Angleterre , avoit cepen-
dant dit publiquement , qu'il ne vouloit attaquer perlbnne. On regarda cet-
te exprefEon comme tendante à tenir le Parlement d'Angleterre dans une non-
chalance, par raport, tant au Secours pour la Hollande, que pour les Prépa-
ratifs de Guerre.
Il s'écoula quelques jours, fans qu'il y eut quelque Démarche nouvelle de
la part du Comte d'Avaux. Celui-ci , voïant que les Infinuations fecretes ,
qu'il faifoit lui-même, & faifoit faire par l'Ambaflâdeur de Suéde , ne por-
toient aucum coup, il alla le 6. Juin trouver le Confeiller - Penûonnaire , &
lui fit des Propofitions.
Ce Miniftre en fit d'abord le Raport à l'Aflemblée des Etats Généraux,
dont voici la Copie.
„ ! ' E Sr. Confeiller-Penfionnaire a rapporté à PAflêmblée,que le Sr. Com- Extrait
„ •L' te d'Avaux A mbaflàdeur Extraordinaire de Sa Majefté Très-Chrê- d„u Re"
„ tienne étoit venu lui dire de bouche, qu'il avoit reçu ordre de ladite Ma- r^Iu-^
„ jefté de demander une dernière reponfe fur les Conférences entamées ici, à tionsdês
„ favoir fi l'intention de Leurs Hautes Puiflânces eft de les continuer en y ad- Etats
„ mettant l'Envoie Extraordinaire de Sa Majefté de la Grande-Bretagne fans Géné"
„ qu'il eut la liberté d'y faire des Demandes particulières pour le Roi fon 6. Juin.
„ Maître ou lî Elles fe rompront entièrement en cas qu'il ne foit admis,
„ qu'à cette condition-là. Que ledit Sr. Comte d'Avaux y avoit adjouté,que
„ Sa Majefté' Très -Chrétienne ne vouloit point feparer l'Angleterre & Leurs
„ Hautes Puiflânces. Que pour preuve de cela, comme les Demandes de
„ Sa Majefté Britannique ne fe dévoient faire que par fon Ambaflâdeur à la
„ Cour de France, Sa Majefté Très- Chrétienne vouloit bien que LL. HH.
„ PP. y envoyaflcnt un Miniftre qui agirait de concert avec l'Ambaflâdeur
„ d'Angleterre. Qu'après, ledit Sr. Comte d'Avaux avoit fait dire audit Sr.
Mmm i „ Con-
4S0 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
1701. „ Confeiller-Penflonnaire, que l'intention étoit que l'Ambaffàdeur de Sa Ma-
" „ jeité de la Grande-Bretagne pourroit propofer-là les Affaires, comme le
„ Miniftre de Leurs Hautes Puiffànces les leurs , pour negotier là-deflus con-
„ jointement. Sur quoi étant délibéré il a été trouvé bon 6c arrêté de re-
„ quérir Se de donner Commiflion aux Srs. d'ElTen Se autres Députez de
„ LL. HH. PP. pour les Affaires Etrangères, de communiquer ce que def-
„ fus au Sieur de Stanhope Envoie Extraordinaire de Sa Majefté de la Gran-
„ de-Bretagne, d'entendre fes Confiderations fur ce Sujet, Se d'en faire Ra-
„ port à l'Aflêmblée.
O n reprit le lendemain 7. en confidération ce Raport , Se l'on réfolut
d'en faire part au Roi de la Grande-Bretagne. On en donna même l'Avis
au Comte d'Avaux par un Ecrit fans Signature, conforme cependant à la
Réfolution. Celle-ci étoit de la teneur fuivante.
Extrait „
duRegî- n
tre des
RéTolu- "
tions des 33
Etats „
Gêné-
raux , du '
7. Juin. "
33
5)
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33
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33
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33
33
33
33
}>
OUï le Raport des Sieurs d'Effén Se autres Députez de Leurs Hautes
Puiffànces pour les Affaires Etrangères , lefquels en vertu de leur Ré-
folution Commiflbriale du 6. de ce mois ont été en Conférence avec le
Sieur Stanhope Envoie Extraordinaire de Sa Majefté le Roi de la Grande-
Bretagne, Se lui ont communiqué ce que le Sieur Comte d'Avaux Am-
baffàdeur Extraordinaire de Sa Majefté Très- Chrétienne avoit dit au Sieur
Confeiller-Penflonnaire Heinfius, comment il avoit reçu ordre de fadite
Majefté, de demander une dernière Réponfe fur les Conférences entamées
ici > à favoir fi c'eft l'intention de Leurs Hautes Puiffànces de les conti-
nuer, en y admettant l'Envoie Extraordinaire du Roi de la Grande-Bre-
tagne, fans qu'il eut la liberté d'y faire des Demandes particulières de la
part du Roi fon Maître , ou fi elle fe rompraient entièrement , en cas
qu'il ne fut admis, qu'à cette condition-là -, Se ce que ledit Sieur Comte
d'Avaux y avoit ajouté, que Sa Majefté Très- Chrétienne ne pretendoit
point fepaixr l'Angleterre d'avec Leurs Hautes Puiffànces \ que pour preu-
ve de cela, que comme les Demandes de Sa Majefté Britannique ne fe dé-
voient faire , que par fon Ambaffàdeur à la Cour de France , Sa Majefté
Très-Chrétienne vouloit bien que Leurs Hautes Puiffànces y envoïaflênt
un Miniftre qui agit de concert avec l'Ambafladeur d'Angleterre \ Se com-
me en après ledit Sieur Comte d'Avaux avoit fait dire audit Sieur Conieil-
ler-Penfionnaire que l'intention étoit, que l'Ambafladeur de Sa Majefté
de la Grande-Bretagne pourroit propofer-là les Affaires de l'Angleterre
comme le Miniftre de Leurs Hautes Puiffànces pourrait faire les leurs ,
pour négocier là-deffus conjointement. Surquoi étant délibéré, on a re-
mercié les Sieurs Députez de la peine qu'ils ont prife, & de plus il a été
trouvé bon Se arrêté, qu'on envoïera Copie de ce que deffus au Sieur de
Geldermalfen Envoie Extraordinaire de Leurs Hautes Puiffànces à la Cour
du Roi de la Grande-Bretagne, pour en donner part à Sa Majefté Se d'ap-
prendre fes avis là deffus. Qu'en outre on fera fçavoir audit Sieur Comte
d'Avaux, que Leurs Hautes Puiffànces ont trouvé neceflàire de communi-
quer ce qu'il a dit à Sa Majefté Britannique ; que Leurs Hautes Puiffàn-
„ ces
ET RESOLUTIONS D'E T A T. 481
ces ont fouhaité , & le fouhairent encore , qu'on puîné trouver, le plutôt le 1701.
le mieux , les moïens pour atteindre au but , pour lequel la Négociation "
a été entamée ici. Que Leurs Hautes Puiflances verroient très volontiers,
que les Conférences fur ce Sujet , fuflênt continuées ici ; qu'Elles crai-
gnent qu'on ne perde beaucoup de tems , en cas qu'Elles duflent envoïer
'„ un Mini Are à Paris, puifque le Gouvernement de leur Republique efl
tel, qu'il faut beaucoup de tems, avant qu'on puifle venir à une con-
clufion pour nommer un Miniftre, &pour arrêter fes Inftruftions. Que
ledit Sieur Comte d'Avaux étant prefentement ici , 6c les Conférences
y aïant eu leur commencement , aflurement on gagneroit beaucoup de
„ tems, fi Sa Majefté Très-Chrétienne pouvoit trouver bon de les faire con-
„ tinuer ici , fur le pied fufmentionné. Qu'ainfi , pendant que Leurs Hautes
„ Puiflances attendent une Reponfe d'Angleterre, Elles remettent à la confi-
„ deration dudit Sieur Comte d'Avaux, s'il ne ferait pas le plus expédient
„ de pourfuivre ladite Négociation en ce lieu , &C qu'Elles le requierrent de
„ vouloir emploïer fes bons offices pour cela.
Comme l'on s'attendoit à quelque refus de la part de la France, l'on
fut furpris que le Mercredi 1 f . , le Comte d'Avaux fe rendit à quatre heures
après midi chez le Confeiller-Penfionnaire. Il lui dit de bouche , que le Roi
fon Maître vouloit bien pour le maintien de la Paix , que les Conférences fe
tinflènt à la Haïe, & que l'Envoie Britannique y fût admis comme Partie
intëreflee. Il ajouta même, que le Roi fon Maître l'avoit réprimandé pour
avoir été trop difficile là-defllis. Il faifoit cela, comme fi la difficulté étoit
venue de"lui, & non pas de fa Cour. Le lendemain Jeudi 16., le Confeiller-
Penfionnaire en fit le Raport à l'Aflèmblée des Etats Généraux , qui prirent
Réfolution d'en donner connoiflance à l'Envoie d'Angleterre & d'exami-
ner avec lui ce qui feroit néceflaire de faire. Voici le Raport, Se la Ré-
folution.
des
G. du
LE Sr. Confeiller-Penfionnaire Heinfius a raporté à l'AfTemblée, que le Réfblu
Sr. Comte d'Avaux Ambaflâdeur Extraordinaire du Roi de France lui tion de
avoit notifié de bouche, qu'il avoit reçu ordre de Sa Majefté Très-Chrê- P"G- F
tienne d'admettre le Sr. Stanhope, Envoie Extraordinaire de Sa Majefté l6'-Tuij1-
„ de la Grande- Bretagne dans les Conférences pour pouflêr les Négocia-
„ tions commencées fur le pied que LL. HH. PP. avoient fouhaité. Que
„ par-là Sa Majefté Très-Chrêtienne avoit voulu donner une marque & une
,, preuve de fa droite intention pour la continuation de la Paix Se de la tran-
„ quillité publique. Sur quoi aïant été délibéré, il a été trouvé bon Scarrê-
„ té de charger par ces prefentes les Srs. van Eflèn Se autres Députez de
„ LL; HH. PP. pour les Affaires Etrangères d'en donner part à l'En-
„ voie le Sr. Stanhope Se de concerter ^avec lui ce qui feroit trouvé à
„ propos de faire là-deflus.
Mmm 5 Le
4S1 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
170 1. Le lendemain Vendredi 17.., la Conférence fe tint pour ce fujet avec
~ l'Envoie d'Angleterre. Les Députez en firent le Raport à PAfTemblée le
Lundi 10. Et for ce que cet Envoie avoit déclaré le 17. qu'il ne ferait au-'
cune difficulté d'aififter aux Conférences, on réfolut d'en faire demander une
au Comte d'Avaux. Suivant la Réfolution dudit io. on devoit lui dire,
Se's » 0U'U étoit fort aSreabvle a LL- HR ?P- <lue & Majefté Très-Chrê-
E.G.du « ^-^ tienne avoit trouvé à propos- de laifler continuer à la Haïe les Négo-
zo Juin. „ ciations fur le pied demandé, Se de remercier ledit Comte pour fes bons
„ offices qu'il avoit rendu en cette occafion } Se que leurs Députez, conjoin-
„ tement avec le Sr. Stanhope , examineraient avec le Sr. Comte d'Avaux
„ ce qui pourrait être ultérieurement fait pour porter les Négociations avec
„ la meilleure diligence à une bonne fin , dont on feroit Raport à l'Af-
„ femblée.
La Conférence fe tint avec le Comte, fuivant la Réfolution; & le lende-
main 2.1., les Députez firent le Raport de ce qui s'y étoit pafle , de la te-
neur fuivante.
Raport )? y Es Députez Sec. ont raporté qu'après s'être expliquez au Comte d'A-
Ê'gT " vaux Ui'vant la Réfolution de ce jour-là , Se l'avoir remercié de fes
zi. Juin. 55 Dons offices, ce Comte avoit repondu que c'étoit une de moindres mar-
ques de l'inclination de Sa Majefté pour la Paix , & pour le maintien du
repos public > Que fadite Majefté demandoit fincerement la Paix , Se
qu'Elle ne fouhaitoit rien plus fi non qu'EUe fut confervée , Se que de fon
„ côté Elle y contribuerait toutj Se que ledit Comte emploierait pour cela
„ tous les bons offices , qui dépendraient de lui. Qu'eniuite aïant procédé
„ à examiner ce qu'il y aurait à faire pour avancer les Négociations com-
„ mencées , Se les pouffer à une bonne fin, il y avoit eu là-deflus quelques
„ Difcours généraux, mais dont il n'étoit rien refùlté, fi non qu'il y aurait
„ de part Se d'autre des penfées pour trouver des expediens propre pour
avancer les Négociations, & d'avertir de ce qu'on aurait là-deflus à pro-
pofer, Sec.
53
53
35
35
>»
Parmi ces Difcours généraux , on dit que le Traité de Partage aïant été
fait pour donner fatislacr.ion auffi-bien à l'Empereur qu'à la France , puilque
ce Traité ne fubfiltoit plus, il falloit négocier en la même vue'. Sur la ma-
nière de procéder l'Envoie Stanhope dit qu'il n'y avoit perfonne qui pût
mieux fivoir ce qui pouvoit fatisfaire l'Empereur que le Comte de Goez lbn
Miniftre à la Haïe, Se qu'ainfi il falloit l'admettre aux Conférences. Le Com-
te d'Avaux fe fâcha là-deflus, alléguant que l'Empereur n'avoit rien à préten-
dre. Tout cela aïant été envoie au Roi d'Angleterre,, ce Prince trouva que
s'il n'étoit donné quelque fatisfactïon à Sa Majeité Impériale, il étoit impof-
fible de conferver la tranquillité de l'Europe. C'eft pourquoi, il envoïa or-
dre
ET RESOLUTIONS D'E T A T. 48$,
dre à fon Envoie de ne point continuer les Conférences avec le Comte d'A- 170Ï.
vaux, à moins que la France ne voulût donner fatisfàétion à l'Empereur. Il T
envoïa le même ordre au Comte de Manchefter fon Ambafladeur eilFrance,
pour le faire favoir à cette Cour-là. Comme cependant l'on ne trouva pas I
propos d'aller fignifier de but en blanc cet ordre au Comte d'Avaux , 6c qu'on
fouhaitoit cependant , qu'il en fût averti, on alla en faire confidence à l' Am-
bafladeur de Suéde Lillicnrooth, qui fans perte de tems en alla faire part au
Comte d'Avaux. Cependant, l'Envoie d'Angleterre vouloit bien lui en fai-
re paît lui-même j mais, il ne trouvoit pas à propos d'aller en perlbnne chez
le Comte. C'en: pourquoi il le fit obferver, pour favoir où il iroit en vifi-
te. Il fut averti le Dimanche 3. de Juillet, que ce Comte étoit allé l'après
midi chez Don Bernardo de Quiros, pour lui rendre une vifite fur fon retour
d'Aix la Chapelle, où il avoit été prendre les Eaux. L'Envoie y alla d'a-
bord auflî, & les trouvant enfemble il notifia au Comte d'Avaux l'ordre qu'il
avoit de Sa Majefté Britannique de n'entrer pas d'avantage en Conférence
avec lui, à moins que la France ne voulût donner fatisfàétion à l'Empereur.
Il ajouta que puifque Don Bernardo de Quiros étoit bon Ami du Comte, 6c
que les intérêts des deux Couronnes étoient unis , il ne faifoit point de feru-
pule de lui faire cette Notification en prefence de Don Bernardo de Quiros.
Le Comte d'Avaux fe leva avec emportement, 6c dit à l'Envoie d'Angleter-
re, que ce n' étoit pas-lâ le lieu pour lui faire une femblable Notification.
L'Envoie lui répliqua que fes ordres étoient de la lui faire là où il le trouve-
roit, 6c qu'aïant-là l'occafion il en profitoit. On remarqua que le Comte en
parut fâché, 6c même déconcerté.
Cependant , comme le 14. de ce mois-là le Roi d'Angleterre arriva le
foir vers les dix heures à la Haïe , le lendemain , le Comte d'Avaux alla
le foir vers les cinq heures à l'Audience , qui dura un peu plus qu'un
quart d'heure. Il ne parla à Sa Majefté qu'en prefence de Mr. d'Auver-
kerque, de My-Lord Sidnei, 6c de quelques autres, 6c feulement ftir le
trajet de Sa Majefté 6c fur fon heureufe arrivée. Comme le Roi paflbit
par la Salle des Gardes Suifles , il y rencontra Don Bernardo de Quiros.
Sa Majefté s'arrêta, ôc lui parla fort amiablement, lui demandant des nou-
velles de fon Voiage à Aix la Chappelle. Ces deux Ambafladeurs ne fê
rendirent pas à la Cour le Dimanche 17. -, mais , ils furent le Mardi 10."
fouhaiter un bon Voïage à Sa Majefté, qui devoit partir le lendemain pour
vifirer les Places Frontières. Il ne le pafla rien pendant le Voïage du Roi
jufques au Lundi zf. , que le Comte d'Avaux reçût deux Courriers de fa
Cour. Le lendemain matin 26. , il alla notifier au Confeiller - Penfionnaire
que le Roi fon Maître le rapelloit, 6c lui fit voir un Mémoire qu'il avoit
drefle pour cela, 6c qui contenoit les raifons de fon Rapel. Il alla enfui-
te porter le Mémoire au Prefident de Semaine , qui étoit Mr. de Dyck-
velt. Voici le Mémoire que le Comte fit lui-même imprimer.
LE fouflîgné Comte d'Avaux , Ambafladeur Extraordinaire du Roi Très- Mémo'-
Chrétien, étant arrivé à la Haïe au mois de Février dernier, avoit lieu com-
de croire que les ordres que Sa Majefté lui avoit donné feraient fuffiïâmment te d'A-
con-
4$4 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
1701. connoître le défi r qu'Ellc a toujours eu de maintenir la Paix, & que VV.
" ' SS. profiteraient de fcs difpofitions favorables après avoir demandé avec in-
preïenté ^ance ^^ Sa Majefté permît de propofer en des Conférences réglées les fure-
aux E. tez que vous pouviez raifonnablemcnt délirer, & de convenir en même tems
G. , le des moïcns d'éviter une nouvelle Guerre. Cette démarche & l'intérêt verita-
1$. de ble de VV. SS. dévoient également perfuader que les Conférences demandées
•'"" cl auraient un heureux fuccez, & le Roi Très-Chrêtien déclarant que de fa part
il n'oublierait rien pour conlerver la tranquilité publique , il paroiflbit que les
premières allarmes de VV. SS. feraient heureufement calmées ; &que la Con-
fiance en PafFeâion de Sa Majefté difiiperoit les vaines terreurs que l'Avene-
ment du Roi fon Petit-Fils au Trône d'Efpagne leur avoit infpirée. Le
Comte d'Avaux efperoit donc , qu'après une Ambaflade de peu de durée , il
retourneroit bien-tôt auprès du Roi fon Maître avec la fatisfàétion d'avoir été
emploie à prévenir les nouveaux Troubles dont l'Europe étoit menacée. Cet-
te efperance fut confirmée, lorfque VV.SS.reconnoiflant le droit légitime du
Roi d'Efpagne, écrivirent à ce Prince pour le féliciter fur fon Avènement à
la Couronne. Il parut par cettte Refolution digne de leur prudence, que fi
elles perfiftoient encore à demander des feuretez pour elles-mêmes, Elles con-
noifibient au moins l'injuftice des prétentions étrangères , & qu'elles vouloient
éviter pour jamais le dangereux embaras de les mêler à leurs propres intérêts.
Ainfi,le Roi Très-Chrêtien, oubliant le long filence queVV.SS. avoient gar-
dé fur l'Avènement du Roi Catholique à la Couronne , toutes chofes paroil-
foient fe difpofer à l'afermiflement de la Paix , lorfque les propofitions faites
. par VV. SS. 6c celles de l'Envoie du Roi d'Angleterre, donnèrent lieu de
juger que la Paix ferait le fruit de l'étroite union que la conformité de ces
propofitions marquoit entre ce Prince & VV. SS. Elles ont protefté dans h
fuite , que leurs Demandes exceftives étoient l'effet d'une jufte crainte infpirée
par la puiffance du Roi j qu'elles ne dévoient pas être regardées comme une
marque de la confiance qu'elles avoient en leurs forces. Mais fi cette crainte
fi vivement exprimée depuis, dans la Lettre écrite par VV. SS. au Roi de la
Grande-Bretagne, pendant la tenue du Parlement, étoit réelle, fi VV. SS.
en reprefentant les dangers dont elles veulent paraître environnées de toutes
parts, n 'avoient effectivement d'autres veuës que de les prévenir, les moïens
d'y réûlfir étoient en leurs mains, il étoit inutile de mettre une fi grand nom-
bre de Troupes en Campagne, d'acheter chèrement des Alliances étrangères,
d'innonder leurs Provinces , enfin de faire tous les préparatifs extraordinaires
des plus grandes Guerres. VV. SS. avoient Elles-mêmes demandé les Confé-
rences , comme un moien d'aflurcr la Paix : il dépendoit d'Elles de rendre les
Conférences utiles. Jamais l'intention du Roi n'a été de les prolonger par de
vaincs difficultez , & de profiter de ces délais pour fe préparer à la Guerre lbus
une faufle aparence de Paix. Sa Majefté étroitement unie au Roi fon Petit- Fils
n'a point formé d'incident pour faire admettre l'Ambafladeur d'Efpagne aux
Conférences} Elle ne s'eft fervie d'aucun prétexte pour en retarder l'effet ;
Elles étoient ouvertes pour y traiter des feuls intérêts de Vos Seigneuries.^ Il
dépendoit de vous de les terminer en peu de tems, d'y trouver la fureté de
Vos Provinces, les avantages pour vôtre Commerce , une aflurance éternelle
dans
ET RESOLUTIONS D'ETAT. 48f
dans l'Amitié du Roi Très-Chrêtien. Mais, au lieu d'y travailler ferieufement » 1701.
VV. SS. ont encore éloigné la conclufion, en demandant que PEnvo'ïé du
Roi d'Angleterre fut admis à conférer avec l'Ambaflàdeur foûffigné& avec leurs
Députez. Elles ne doivent pas croire que le véritable motif de cette nouvelle
Demande ait échapé aux lumières de Sa Majefté Très-Chrêtienne ; il étoit
facile de pénétrer que ce n'étoit pas dans la veuë d'en avancer le fuccez que
VV. SS. defiroient l'intervention inutile d'une Puiflance qui n'a nul prétexte
de prétendre de fureté pour Elle-même. Si pendant quelque tems Sa Maje-
fté s'y eft oppofée, fi Elle a offert à VV. SS. dç faire traiter fous fes yeux la
Négociation commencée à la Haïe peur Paffermiflëment de la Paix, Elle l'a
fait par le même principe fur lequel elle- règle toute fa conduite, par le defir
fincere de lever tous les obftacles que les ennemis de la Paix ne ceffent d'y ap-
porter} Elle prevoïoit affez le peu de fruit des Conférences de la Haïe, Elle
jugeoit que la difficulté faite fur l'admiflîon de l'Envoïé d'Angleterre ne fe-
roit pas plutôt levée qu'on feroit ingénieux à fufeiter quelque autre incident
plus capable que le premier d'embaraffer encore d'avantage la Négociation: Elle
doutoit a la vérité qu'il fut facile de perfuaderà VV. SS. d'infifter fur la pré-
tendue fatisfaétion de l'Empereur, d'entreprendre le foûtien de ce Prince de
les confondre avec ceux de leur Republique, de s'ériger en Arbitres entre la
Maifon de France & celle d'Autriche, de décider que PhilippesIV. a
eu le droit Se le pouvoir de changer à fa fantaifie toutes lesconftitutions de fes
Roïaumes, d'en exclure à jamais fes véritables héritiers. Que Charles- II.
au contaire n'a pas eu l'autorité de rappeller ces rc.fmes hertiers, & de rétablir
par fon Teftament les Loix fondamentales des Couronnes d'Efpagne: En effet
il étoit difficile de croire qu'une Republique auffi i'age prît en faveur de la
Maifon d'Autriche, & contre la France, la refolution de rompre les Traitez
qu'EUe a regardez comme la confirmation, comme le fçeau, pour ainfi dire
de fa Souveraineté ; Qu'elle voulut s'engager aux dépens, de fes Provinces , du
Commerce de fes fujets, de fes richefles, à foutenir des intérêts Etrangers
peu de mois après qu'elle, a fait une Démarche entièrement contraire, en re-
connoiflant le Roi d'Efpagne : Mais il paroit que. ces Confiderations , dont
on a autrefois fehti la force dans vôtre Republique , ont cédé à des maxi-
mes plus nouvelles.
L'Ambaflàdeur fouffigné abuferoit de la confiance dont le Roi fon Maître
Veut bien l'honorer, s'il lui écrivoit encore qu'on dût attendre quelque fuccès
des Conférences. Sa Majefté eft trop éclairée pour le croire après la Déclaration
que l'Envoïé du Roi d'Angleterre a faite de la part, dit-il, du Roi fon Maître
au même Arnbaffadeur ; VV. SS. font informées de la manière dont cet En-
voie lui a lignifié que le Roi de la Grande-Bretagne ne fe detacheroit jamais
des intérêts de l'Empereur, qu'il n'entreroit dans aucune proposition d'ac-
commodement qu'on ne donne fatisfaélion à ce Prince. Les liaifons de VV.
SS. avec le Roi d'Angleterre font trop étroites, VV. SS. ont trop fait con-
noître qu'elles fe foumettroient aveuglement aux fentimens de ce Prince
qu'elles embraflèroient les partis que lui-même jugerait le plus convenables
pour douter qu'elles n'aient déjà pris la refolution de faire une femblable Dé-
Tom. I. Nnn cla-
4Stf MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
1701. claration à l'Ambafladeur du Roi Très- Chrétien. Elles l'ont même fait par
- ' » ■- avance, puifqu'clles fe font expliquées déjà que leurs Députez ne pouvoient
continuer les Conférences fans l'intervention de l'Envoie d'Angleterre : Il s'en
exclut lui-même , elles font auflî-tôt fufpenduës ; Ainfi ce feroit inutilement
que l'Ambafladeur du Roi Très-Chrêtien , envoie feulement pour ces Confé-
rences, feroit un plus long féjour à la Haïe. S'il n'a pas la fatisfaction d'avoir
accompli les intentions de Sa Majefté en laiflânt la Paix établie pour long-
tems entre Elle & les Provinces - Unies , au moins il aura celle d'avoir faic
connoître qu'il ne dépendra pas d'Elle que le repos public ne foit point inter-
rompu j Que Sa Majefté ne s'eft armée que pour la deffence du Roi fon Pe-
tit-fils \ Que fi Elle avoit eu deflein de faire des Conquêtes, elles étoient fa-
ciles , fes Troupes fur les Frontières de Vôtre Republique donnoient des
moïens aifez de profiter de l'état de foiblefle où vous étiez alors. V'V. SS.
ne craindront point qu'on le dife, puis qu'elles mêmes l'ont publié de tous
cotez > 6c cette vérité, dont elles ont rendu témoignage, leur doit faire con-
noître qu'il a toujours dépendu d'elles , de trouver dans l'amitié de Sa Maje-
fté toute la fureté qu'elles ont cru perdre , lors qu'elles ont veu le Roi lbn
Petit-Fils parvenir à la Couronne d'Efpagne. Si ces reflexions, qu'il eft en-
core tems de faire , ne peuvent empêcher la Guerre , le Roi Très-Chrêtien
a lieu d'efperer que Dieu recompenfant les foins que Sa Majefté a pris pour
maintenir le repos de la Chrétienté, continuera de répandre fur la juftice de fa
caufe les mêmes bénédictions dont fa Divine Providence l'a comblé pendant '
le cours de fon glorieux Règne ; que ceux qui oferont l'attaquer connoîtront »
par les évenemens que ce n'eft ni la foiblefle ni la défiance de fes forces qui
retiennent jufques à prefent fes armes ; qu'ils verront qu'elle pouvoit fe van-
ger des infultes faites en Mer à fon Pavillon, empêcher que fes Sujets ne fuf-
fent enlevez, & traitez comme Ennemis , par les Vaiifeaux Anglois 8c Hol-
landois; Que ces mêmes Vaifleaux vinflent fonder les Ports de ion Roïaume,
tirer fur les Bâtimens François ; Qu'enfin il étoit en fon pouvoir de s'emparer
des Places encore fans deftenfe, & d'obtenir des avantages très-confiderablcs
pour le foûtien d'une Guerre que la conduite des Puiflances voifines lui faifoit
prévoir; Que fi Elle a diflîmulé ces infultes, négligé l'utilité qu'Elle pou-
voit retirer de la fuperiorité reconnue de fes forces, Elle ne l'a fait que dans
la veuë d'ôter jufqu'au moindre fujet de dire qn'EUe ait: contrevenu à l'exac-
te obfervation des Traitez de Ryfwick. ■
L'Ambafladeur foufligné fouhaite que VV. SS. bien convaincues par la con-
duite de Sa Majefté, de la fincerité de fes intentions, prennent, pendant qu'il
eft tems encore , des refolutions conformes à leurs véritables avantages ; &
quoique fon départ l'empêche d'avoir la gloire d'y travailler, il s'intereflèra
toujours au bonheur de vôtre République, après avoir pafle amant d'années à
s'acquitter auprès d'elle des ordres de Sa Majefté,
La Lettre de Rap;l étoit lafuivante.
TRES
ET RESOLUTIONS D'ETAT.
TRES-CHERS GRANDS AMIS ALLIEZ ET
CONFEDEREZ. Lettre
de Rap-
pel du
AjOus avons jugé à propos de rappelîer le Comte d'Avaux , vôtre Ambajfadeur Comte
Extraordinaire auprès de vous , volant le peu de fruit des Conférences que d' A_
vous nous aviez demandées; & que depuis vous avez fouvent interrompues. Nos vaux*
Intentions ne font pas moins portées à Paffcrmiffcment de la Paix, comme il vous
les expliquera avant fon départ. Il ne nous refie qu'à vous ajfurer qu'il dépend
encore de vous de recevoir des marques de nôtre ancienne Amitié pour vôtre Ré-
publique , & du defir que nous avions de vous en faire fentir les effets en toutes
occafions: Sur ce nous prions Dieu qu'il vous ait, Très-cher s grands Amis Alliez
13 ConfedereZy enfafainte (3 digne Garde.
Vôtre bon Ami Allié & Confédéré,
Signé,
A nos très -cher s, grands Amis LOUIS.
Alliez (3 Confederez , les Srs. Etats
Généraux des Provinces -Unies des Et plus bas,
Pais-Bas.
C O L B E R
T.
Les Etats Généraux travaillèrent d'abord à drefier une Réponfe à ce
Mémoire j mais , elle ne fut pas communiquée à ce Comte que le Lun-
di premier du mois d'Août. C'étoit parce qu'on vouloit auparavant
la faire voir à Sa Majefté Britannique , qui ne fut de retour de fbn
Voiage que le Vendredi zo. de Juillet. Comme le Comte avoit fait im-
primer fon Mémoire , les Etats Généraux firent auflî imprimer leur Ré-
ponfe par l'Imprimeur de l'Etat. Mais , elle fe trouva très-mal traduite ;
de forte que pour la reparer , on en fit une autre imprefîîon ailleurs telle que .
voici.
ON a oui le Raport de Meilleurs van ElTen 5c autres Députez de Extrait
Leurs Hautes PuifTances , pour les Affaires Etrangères , lefquels du Re-
pour fatisfiire à la commiffion qui leur avoit été donnée par la Réfolu- §'tre des
tion du 16. Juillet dernier , ont examiné le Mémoire de Mr. le Comte j*érol|j"
d' A vaux Ambafîàdeur Extraordinaire de Sa Majefté Très - Chrétienne con- Etats
tenant les raifons de l'inutilité d'un plus long fejour pour lui , à la Haïe } Géné-
auffi bien que la Lettre de fadite Majefté, par où elle rappelle ledit Sr. Com- nux>.dl»
te d'Avaux , dont il eft fait plus ample mention dans la notule du z6. du Lu2„l«
mois pâlie.
Sur quoi, après Délibération prife, il a été arrêté que l'on fera audit Sr.
Nnn 2 Com-
488 MEMOIRES, NEGOTÏATIONS, TRAITEZ',
1701. Comte d'Avaux cette Réponfe, fur fon Mémoire i favoir, que LL. HH. PP.
■ — ■— fe fcntent fort obligées à ià Majefté Très-Chrêtienne de la bonté quelle a eue
de leur avoir envoie ledit Comte d'Avaux en qualité d'Ambaffadeur Extraordi-
naire, & qu'Elles avoient efperé auiîî bien que fouhaitté, que dans les Confe-
l rences tenues avec lui , on eût pu trouver des moïens efficaces pour parvenir
au but qu'on s'étoit propofé en les établiffant; &. fpecialement , la conterva-
tion de la Paix générale, avec une raifonnable fureté pour cet Etat en parti-
culier.
Que ce feroit une chofe agréable à LL.HH. PP. que ledit Sr. Comte d'A-
vaux ne fût pas obligé de fe retirer avant que d'avoir achevé un deffein fi falu-
taire, & qu'Elles n'ont pu apprendre fans déplaifir que le Roi fon Maître le
rappelle fans que les Affaires foient terminées , & portées au point heureux
que l'on defire.
Et particulièrement parce qu'il femble qu'on veuille imputer à leur condui-
te le mauvais fuccès de la Négociation, 2c l'inutilité de la continuation des
Conférences.
Cependant LL.HH. PP. s'aflurent d'avoir toujours fait, tant avant que
pendant la Négotiation , tout ce qui étoit en leur pouvoir, & tout ce que
l'on pouvoit raifonnablement exiger d'Elles., pour témoigner leur inclination
fincere à la Paix, & pour tacher de porter la Négotiation au point defiré,
fâchant très - bien que leur Etat n'a pas de plus grand intérêt que la confer-
vation de la Paix , dont les fruits font fi doux & fi précieux pour leurs Su-
jets, quand ils peuvent en jouir avec une fureté raifonnable.
C'eft ce qui oblige LL.HH. PP. de rapporter au malheur dutems,que dans
cette Affaire elles n'ont pu perfuader fadite Majefté, de la fincerité de leurs
fentimens, dans lefquels perlïftant toujours, comme Elles font, Elles efpe-
rent d'avoir encor ci-après le bonheur de l'en convaincre.
Quand après la mort du Roi d'Efpagne dernier, Sa Majefté Très-Chré-
tienne, au lieu de fuivre le Traitté fait pour régler fa Succeffion, trouva bon
de fe tenir à fon Teftament, & de faire part à LL. HH. PP. des raifons qui
l'avoient portée à cela, LL. HH. PP. firent connoitre inceffamment à fadite
Majefté les raifons pour lefquelles Elles ne pouvoient prendre fur le champ u-
ne Refolution déterminée, fur une choie de cette importance; 6c depuis, auf-
fi-tôt que la conftitution de leur Gouvernement l'a pu permettre, Elles ont
offert d'entrer en Conférence avec le Sr. Comte de Briord , alors Ambaffadeur
Extraordinaire de Sa Majefté , ou avec tel autre que Sa Majefté voudrait
authoriier , pour avifer enfemble aux moïens de conferver la Paix générale &
établir la fureté particulière de cet Etat, & cette offre de LL. HH. PP. fut
faite fur l'affurance que fadite Majefté leur fait donner qu'elle n'avoit pas d'au-
tre intention que de conferver la paix & le repos public, Se qu'Elle etoit dif-
pofée à faire avoir à LL.HH. PP. une fûrete raifonnable. Quand en fuite fa-
dite Majefté trouva bon d'envoïer ici Mr. le Comte d'Avaux, en qualité de fon
AmbarT. Extr. dès qu'il fut arrivé, & fur la première notification de fa venue,
LL.HH. PP. nommèrent inceffamment des Députez pour entrer en Confé-
rence, & avifer avec lui , fur la manière doi}t on pourrait avancer la Né-
gocia-
ET RESOLUTIONS D*E T A T. 48p
gociation, & en tirer le plus de fruit, avec le moins de retardement: & I7*'1*
quand LL. HH. PP. virenC'par les Mémoires dudit Sr. Comte d'Avaux, que — —
S. M.T.C. s'intereflbit beaucoup à la reconnoiflance du nouveau Roi d'Efpa-
gne, en cette qualité, Elles refolurent de le reconnoitre, & de témoigner
leur inclination a entretenir avec lui une amitié fincere & une bonne corref-
pondance, en déclarant qu' Elles étoient prêtes à continuer la Négociation a-
vec Leurs M. T. C. ôc Cath. avec l'intervention de Sa Majeité le Roi de la
Grande-Bretagne, pour traitter des moïens les plus propres à conferver la Paix
commune, & à aflurer le repos particulier de cet Etat, & cela d'une telle
manière que l'on fît aulîi intervenir dans la Négociation tels Princes & Poten-
tats, 'tue l'on jugerait neceflaire, ou utile, pour parvenir au but falutaire
qu'on s'étoit propofé: Cette reconnoiflance a été faite parLL.HH.PP. après
l'ouverture des Conférences, d'un côté pour donner une marque de leur incli-
nation à la Paix , & de l'autre dans cette confideration que la fin heureufe Se
falutaire de la Négociation pouvoit fe trouver auffi bien après qu'avant la re-
connoiflance, Se comme c'ont été là entr'autres les vrais motifs qui les y ont
portées, LL. HH. PP. ne peuvent croire que par cette démarche Elles aient
?rejudicié à l'intervention de S. M. B. qui eil entrée comme contractante dans
e Traitté de Partage, non plus qu'a l'intervention des autres Puiflânces inte-
reflees à la Paix Générale.
Elles ne croient pas non plus, par là, être entré en connoiflànce, ni avoir
fait quelque decifion de la juftice, ou de l'injuftice des prétenfions de qui que
ce foit, ni feparé leurs intérêts à l'égard de la confervation de la Paix généra-
le de ceux qui y font interefles comme Elles, comme il femble qu'on le veut
induire de la reconnoiflance du nouveau Roi d'Efpagne, dans le Mémoire
dont il s'agit ici.
LL. HH. PP. aïant fait cette reconnoiflance dans la ferme efperance que
par ce moïen il y aurait moins de retardement à la Négociation, demandèrent
au Sr. Comte d'Avaux dès la première ouverture des Conférences, comme S.
M. T. C. après avoir accepté le Teftament du Roi d'Efpagne, Se rejette le
Traitté de Partage dans le quel LL. HH. PP. avoient cru trouver leur repos,
tant à l'égard de la Paix générale , que de leur fureté particulière , avoit pu
leur faire déclarer que par la voie du Teftament on pouvoit parvenir au but
de la tranquilité publique , auifi bien que par le Traité de Partage qui avoit été
fait pour cela, en ajoutant que LL. HH. PP. attendoient 6c defiroient des
Eclairciflemens là-defllis, & prioient ledit Sr. Comte d'Avaux de leur faire
voir par quelques propofitions Se par quelques ouvertures comment la Paix gé-
nérale peut être confervée, & comment on peut aflurer fuffifamment le repos
de leur Etat. Mais ledit Sr. Comte d'Avaux aïant décliné diverfes fois de
s'ouvrir là defliis, demanda de fon côté Se infifta toujours que les propofitions
à faire pour l'intérêt de cet Etat fuflent faites par LL. HH. PP. Sur quoi
LL. H H. PP. aïant concerté fur cette Affaire avec Sa Maj. Brit. ont drellé
leurs propofitions, qui ont été livrées au dit Sr. Comte d'Avaux par leurs
Députez, au même tems que le Sr. Stanhope Envoie de de S. M. B. lui pre-
fenta les fiennes.
Nnn 3 LL.
490 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
1701. LL. HH. PP. font fort furprifes de voir que l'on avance que la Guerre ,
- '-— ■ beaucoup plutôt que la Paix, naîtra de l'union étroite qui eft entre S. M. B.
& Elles, 6c que cette union eft trop marquée par la conformité de leurs pro-
pofitions. Elles ne favent fur quel fondement ont tire cette conclulîon £c
ce mauvais pronoftic , parce que LL. HH. PP. font perfuadées que S. M. B.
en toute forte d'occafions a donné de fuffifantes preuves de fon inclination à
la Paix* & qu'il eft connu de tous, qu' Elles font depuis plufieurs années dans
une étroite Alliance avec fadite Majefté pour leur defence 6c fureté récipro-
que. On fait auffi que l'intérêt de l'Angleterre eft lié avec celui de cet Etat ;
& de plus, on fait que Sa Majefté Britannique a été un des principaux con-
traâans dans le Traité de Partage, & que LL. HH. PP. ont déclaré avant
que de donner leurs propofitions , qu'en cette qualité d'un des principaux
Contraétans , auffi-bien que par les relations étroites qu'il a avec cet Etat , El-
les avoient jugé neceflaire de concerter avec fadite Majefté fur toutes les cho-
fes qui regardent cette Négotiation, fans que l'on ait jamais fait la defîus ni
remarque ni difficulté.
De forte que LL. HH. PP. fe trouvent obligées de le redire encore, qu'El-
ks ne peuvent comprendre fur quel fondement on avance que la Guerre plu-
tôt que la Paix fera le fruit de leur union avec Sa Majefté Britannique, 6c
de quel principe on tire cette conclufion.
LL. HH. PP. font touchées que S. M. T. C. aïant receu leurs propofi-
tions, les ait prifes de manière que jufqu'à prefent Elle n'ait pu trouver bon
d'y faire répondre. Il leur eft revenu diverfes fois, que l'on taxoit leurs pro-
pofitions d'exceffives, fans marquer en quoi confiitoit l'excès -, ce qui eût pu
fournir matière pour entrer & pour avancer dans quelque Négotiation.
La confervation de la Paix générale 8c l'établiflèment de la fureté particu-
lière de cet Etat ont toujours été le fondement 6c la matière de la Négocia-
tion , 6c il eft évident que la Paix générale ne peut être confervée fans donner
fitisfaftion à Sa Majefté Impériale dont les prétentions font connues , jufques
là que dans le Traité de Partage, il étoit réglé de l'approbation de S. M. T.
C. de quelle manière ont "y fatisferoit.
Dès que fadite M.T.C. eut décliné le Traité de Partage, LL.HH.PP.en
termes Généraux ont demandé une iatisfaétion qui fût raifonnable pour Sa
M. Imp. 6c que l'on en convint, avec Elle. On ne peut, pas dire qu'il y ait
rien là dedans d'exceffif , ou qui en approche.
Pour ce qui regarde leur propre fureté, LL. HH. PP. fe font expliquées
f)lus amplement 6c plus en détail, mais pourtant de telle manière, que toutes
es perfonnes qui ne feront ni prévenues ni intereffeés, jugeront que ce qu'el-
les ont demandé , n'eft pas fuffifant , pour les mettre dans une fureté fembla-
ble à celle qu'Elles ont eue, avant la mort du Roi d'Efpagne, 6c à celle qui
leur feroit revenue de l'exécution du Traité de Partage.
Que fi la crainte a eu quelque part en cela, LL. HH. PP. croient en a-
voir eu de juftes fujets , qui non feulement leur ont paru bien fondez mais
aufli à leurs Amis , 6c à leurs Alliés , qui pour cela n'ont pas fait de dif-
ficulté de leur envoïer les fecours qu'ils leur dévoient en vertu de leurs Al-
liances
ET RESOLUTIONS D'ETAT. 491
liances deffenfives, & qu'outre cela le fondement de leur crainte eft fuffifam- 17OT.
ment marqué & reconnu à la fin du Mémoire où la foibleflë de cet Etat eft
amplement expofée.
S'il eût été en leur pouvoir de fortir de cet embarras fans s'armer, fans cher-
cher des alliances avec ceux qui peuvent les fecourir en cas de befoin , & fans
inonder leur propre païs , certainement Elles l'auroient fait. Et elles ne fer
roient pas difficulté de s'en rapporter à la connoiffance qu'a le Sr. Comte d'A-
vaux de la conftitution de leur Gouvernement, s'il n'eft pas d'opinion que
tout ce qu'Elles ont fait, pour fe mettre en deffence, pouvoit venir d'ailleurs,
que d'une entière conviftion de l'extrême danger ou Elles fe font trouvées :
6c Elles déclarent fincerement , qu'Elles ne fouhaittent rien d'avantage que de
pouvoir s'en délivrer, le plutôt qu'il fera poffible. Que dans cette veiie LL.
HH. PP. ont demandé les Conférences, afin que la Paix étant afiurée, leur
danger cédât auffi, & qu'il n'a pas tenu à Elles que les Conférences n'aient eu
un heureux fuccès.
Elles avouent volontiers, que S. M. T. C. n'a pas formé d'incident pour
faire admettre l'Ambaffadeur du Roi d'Efpagne aux Conférences, en ajoutant
que de leur part LL. HH. PP. ne s'y feraient nullement oppofées, aïant dé-
claré diverfes fois qu'Elles confentoient que le dit Ambaffadeur y fût admis 5
6c pour ce qui eft de l'admiffion de l'Envoie de Sa M. B. & du retardement
caufé par là dans la Négotiation, outre que LL.HH. PP. ont déjà marqué
ci devant, que dès le commemencement Elles avoient jugé neceflaire, tant
l'intervention de Sa M. B. dans la Négociation , que l'admiffion de fon Mini-
ilre aux Conférences, ledit Sr. Comte d'Avaux fe fouviendra fans doute,
qu'au commencement on n'a eu aucune difficulté là deffus , finon à l'égard
de la feance 6c du rang dans les Conférences , ce qui a été réglé fans aucune
difpute, fitôt qu'on s'eft donné les eclairciffemens requis, 6c que quand on a
remis les propolitions entre les mains dudit Sr. Comte d'Avaux lé Sr. Envoie
d'Angleterre a affifté à la Conférence, 6c y a livré les fiennes fans aucune dif-
ficulté.
LL. HH.PP. avoient efperé que l'on n'en auroit jamais apporté à ce fujet,
puifque Sa M. B. fi intereffée dans le fuccès de cette Négociation à l'égard
du Traité de Partage, de la Paix générale, 6c de la feûrete particulière de les
Roïaumes , ne pouvoit en être exclue. Les difficultez qu'on a rencontrées
depuis fur ce fujet, ne font pas provenûes de la part de LL. HH. PP. mais
de celle dudit Sr. Comte d'Avaux, qui par ordre de Sa M. T. C. s'eft oppo-
fé à l'admiffion de l'Envoie d'Angleterre, dans les Conférences fuivantes, fur
le même pied qu'il y avoit été admis auparavant ; 6c c'eft la raifon pourquoi ,
les Conférences ont été fi long-tems fufpenduës, au grand déplaifir de LL.
HH. PP. qui dans cette Négociation ne pouvoient aucunement fè laifier fépa-
rer de l'Angleterre. Ainfi la caufe de ce retardement , ne pouvant être attri-
buée à LL. HH. PP. 6c y a'iant des raifons fi juftes, que l'Envoie de Sa M.
B. ne fût pas exclu des Conférences, Elles croient avoir fuffifamment répon-
du à tout ce qui eft avancé dans le Mémoire fur ce fujet.
Elles doivent aufii avouer , que Sa M. T. C. a eu raifon de prefumer qu'El-
les
49* MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
1701. les pourvoient infifter fur la fatisfaction de l'Empereur, puifque ce point a été
"~ le premier Article de leur Demande} maisLL.HH. PP. ne le fouviennent pas
d'avoir jamais donné le moindre fujet, ou la moindre occafion de prefumer
d'Elles , qu' Elles euflent voulu s'ériger en Arbitres entre les Maifons de Fran-
ce 8c d'Autriche , & décider du droit que les deux derniers Rois d'Efpagne
Philippe IV. ScCharlesII. ont eu ou non , pour changer les Conlti-
tutions, & les Loix fondamentales des Couronnes d'Efpagne} & Elles prient
S. M. T. C. de vouloir fe fouvenir qu'avant le décès du dernier Roi d'Efpa-
gne, l'Etat de fa fanté aïant été quelque tems fort languiflànt £. M. T. C. ju-
gea, neceiïaire aufli bien que S. M.B. & LL. HH. PP., de prévoir & de pré-
venir les malheurs qu'on avoit lieu d'attendre , après la mort de ce Prince lans
enfans } puifque l'ouverture de fa Succeffion exciterait infailliblement une nou-
velle Guerre , fi S. M. T.'C. foutenoit fes prétentions 6c celles de Mr. le Dau-
phin ou de fes defcendans fur toute la Succeffion d'Efpagne, & queS.M.Imp.
voulût auffi faire valoir fes prétendons & celles du Roi des Romains , 8c de l'Ar-
chiduc fon fécond Fils , ou de fes autres Enfans, fur ladite Succeffion ; & ces rai-
fons ont porté S.M.T.C, S. MB., 8c LL.HH.PP. à conclure le Traité fi
connu fur la Succeffion d'Efpagne.
Comme LL. HH. PP., en entrant dans ce Traité n'ont aucunement prefu- "
mé de s'ériger en Arbitres fur les differens entre de grands Princes, comme
font l'Empereur 8c le Roi de France , mais feulement ont taché de contribuer
à ce que les parties intereflees fuffient mifes d'accord , que la Paix fut confèr-
vée &c une nouvelle Guerre prévenue , par un Règlement fur ladite Succef-
fion, à quoi Sa Majefté Très-Chrêt. avoit déjà concouru avec Elles, 8c à
quoi Elles fe flattoient que l'Empereur voudrait bien auffi concourir de fon
côté, auffi LL. HH. PP. ne défirent 8c ne cherchent encor autre chofe finon
qu'on puifîê trouver des moïens capables de procurer à l'Empereur une fatis-
faction raifonnable à l'égard de fes prétentions fur lefquelles on avoit fait alors
tant de reflexions , 8c cela ne pouvant plus fe fait e fur le pied du Traité de Par-
tage, qu'on trouve d'autres moïens pour confèrver la Paix, 8c prévenir une
nouvelle Guerre j 8c en ceci on ne peut accufer LL. HH. PP. de foutenir des
intérêts Etrangers, puis qu'Elles ne font qu'infifler fur les mêmes principes
que S. M. T. C. a elle même jugés juiles Se neceffiùres avant que le cas prê-
tent exiftât.
On ne peut de plus leur imputer de faire en ceia une démarche contraire à
celle qu'Elles ont faite en reconnoiflant le Roi d'Efpagne, puifque cette dé-
marche n'empêche pas qu'on ne donne à l'Empereur une fatisfaction raifonna-
ble, 8c que, félon leur opinion, la Paix générale ne peut fubfifter fans la fatis-
faction de l'Empereur, ni leur fureté particulière fans la Paix générale comme
il a été expofé ci-devant.
Si LL. HH. PP. ont une telle fagefle qu'on leur attribue, S. M. T.C. doit
être tout à fait convaincue qu'Elles ne feront rien aux dépens de leurs richef-
fes, mais feulement ce qu'Elles jugeront abfolument neceflàire pour leur "con-
fervation.
Elles font feures de n'avoir, rien fait d'où l'on puifie induire qu'Elles aient
rompu
ET RESOLUTIONS D'E T A T. 493
rompu 'les Traités qui feraient comme la confirmation £5? le fie au de leur Sauverai- ijot.
neté, 6c Elles ne comprennent pas bien, ce qu'on veut dire par là, puis que ■
leurs Provinces ont toujours été Souveraines, que leurs Ancêtres ont emploie
leurs biens 6c leurs vies, pour maintenir leur Liberté contre la violence des E-
trangers, & qu' Elles font obligées & refoluës d'en taire autant à l'avenir; mais
Elles, vivent dans l'efperance que perlbnne ne voudra tirer en conteftation leur
Souveraineté, & bien moins les troubler dans leur jôuïfîânce.
Elles n'ont cherché ni ne cherchent encor à étendre leurs limites, mais
Elles font uniquement, occupées à maintenir leurs droits 6c leurs poficffions,6c
à travailler à la confervation de la Paix 6c du repos tant pour Elles que pour
leurs voiiîns; & ce font là les vrais principes, 6c les véritables maximes de
leur Republique , en quoi Elles ne reconoiffent ni changement ni altéra-
tion.
LL. HH. PP. font bien marries que ledit Sr. Comte d'Avaux attende fi
peu de iuccès des Conférences, & qu'il n'oie en écrire de nouveau au Roi foa
Maître, à caufe de la déclaration que le Sr. Stanhope lui a faite au fujet de la
fatisfaétion de l'Empereur, fur la quelle néanmoins Elles font d'opinion avec
S. M. B. qu'il feroit neceffaire que l'on travaillât, comme fur un préliminaire
des moïens qui doivent fervir à la confervation de la Paix générale, 6c de leur
fureté particulière, puis que cette demande n'eit pas nouvelle 6c que dans les
propoiitions mifes entre les mains dudit Sr. Comte d'Avaux, on a expreifé-
ment demandé tant de la part de S. M. B. que de la part de LL. HH. PP.
que l'Empereur fût invité d'entrer dans la Négociation, pour traitter de fa
fatisfaétion , ce qui eft la même choie que l'on demande prefentement. Leurs
Hau es Puilfances avouent pareillement, qu' Elles ont, non pas une foumijjion
aveugle pour les fentimens de Sa Majeflé B. comme on leur impute, mais une
très-grande déférence pour fes confeils , parce qu' Elles font perfuâdées que fa-
dite iVlajeité elt tout à fait portée au maintien de la paix, 6c du repos public,
6c qu'Elles font convaincues par une infinité de preuves, qu'Elle elt très-af-
feéhonnée au bien de cet Etat. Outre qu'Elles ont une grande confiance en
fa fagelfe 6c en ion expérience, 6c qu'Elles ont de, telles liaifons avec ce Prin-
ce comme Roi de la Grande-Bretagne qu'Elles ne peuvent fe feparer de lui.
Si les Conférences doivent être lufpenduës à caufe de la déclaration du Sr.
Stanhope , 6c à caufe de la conformité des fentimens de LL. HH. PP. avec
ceux de S. M. B. dans cette Affaire , Elles le regarderont comme un très, -
grand malheur; mais fi' S. M. T. C. eût pu trouver bon de faire continuer
les Conférences, 6c d'y taire traitter de la fatisfaétion de l'Empereur, Elles au-
roient efperé qu'enfin par une heureufe conclufion ledit Sr. Comte d'Avaux
aurait pu partir avec la fatisfaétion d'avoir terminé une Affaire de la: plus gran-
de importance , dans laquelle il a pris tant de peines.
Cependant LL. HH. PP. efperent que ledit Sr. Comte d'Avaux qui a veu
pendant fou fejour ici la fineerité de leurs fentimens pour la Paix, aura" bien
que leur refpect pour S. M. T. C. 6c leurs égards pour fon amitié, diffipera à
ton retour, les miuvaiics impreffîons qu'on pourrait lui avoir donné contre
Elles.
Zcm. I. Ooo Elles
494 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
1701. Elles peuvent déclarer véritablement qu'Elics ne favent point avoir donné
' depuis là conclufion de la dernière Paix aucun fujet d'ombrage à fadite Maje^
lié. Il eft bien vrai qu'Elles ont été dans la neceffité d'armer pour leur defèn-
ce, mais Elles n'ont commencé à le Elire qu'après qu'Elles ont veu leur Bar-
rière des Païs-Bas Efpagnols (qui leur a coûté tant de peine ôc tant d'argent,
& qui leur eft fi importante de l'aveu même de S. M. T. C.) occupée par les
Troupes de ladite Majefté,& qu'après que leurs propres Troupes qu'Elles a-
voient rappellées , pour ôter tout fujet d'ombrage, y furent retenues, &
qu'on vit en même tems les grands préparatifs de Guerre qu'on y faifoit.
LL. HH. PP. ne peuvent diffimuler, qu'outre ces grands préparatifs qui
leur donnèrent de l'ombrage, Elles en ont beaucoup pris delà très - étroite
liaifon entre la France & l'Efpigne, & des effets qu'Elles en voïent refait»
de jour en jour, quoi-que le Traité de Partage eût été fait enn'autres rai-
fons, pour prévenir l'ombrage qu'auroit pu donner l'union de tant de grands
Etats.
LL. HH. PP. ont ci-devant déclaré l'opinion qu'Elles ont de S. M. T.
C. favoir que pour commencer une Guerre ou pour continuer la Paix, Elle
ne voudrait point relier fes actions fur fa puiffance, mais fur la raifon & fur
leqime, puis qu autrement aucun de les voilins ne pouroit erre en lurete ;
qu'Elles connolifent de quel prix leur eft l'amitié de fadite Majcfté, qu'Elles
fouhaittent de conferver par tous les moïens poffibles , auffi bien que la Paix
générale, & une fureté raifonnable pour leur Etatj mais, fi malgré tous leurs
foins, il leur faut efiuïer une Guerre contre leur volonté, Elles n'auront
pas du moins à fe 4'eprocher de n'avoir pas fait tout ce qu'Elles ont dû faire
pour l'éviter, ôcainfi Elles fe confoleront dans ce malheur par la confiance
due le Tout Puifîant les affiliera de fon fecours. LL. HH. PP. ne fauroient
fe difpenfer de dire qu'elles ont un déplaifir extrême de voir qu'on les aceufe ,
comme fi leurs Vaifîeaux avec ceux d'Angletterre avoient iniulté les Pavillons
de S. M., enlevé fes fujets, fondé fes ports, ôc tiré fur Ces Vaifîeaux j parce
que LL. HH. PP. aïans pour Sa M. T. C. un extrême refpeclr, elles fe font
toujours attachées avec toute la circonfpeélion pofïible,de fe conferver l'hon-
neur de fon amitié.
Que fi par accident ou autrement, quelques uns de leurs Sujets pouvoient
avoir commis quelque choie qui portât préjudice à fadite Majefté ou à quel-
cun des fiens, 'Elles font prêtes de le faire deûement reparer, & de donner
à S. M. toute forte de fatisfaétion raifonnable.
Quoi qu'Elles n'aient aucune connoifîânce de ce que les Vaifîeaux An-
glois pourroient avoir fait à cet égard , Elles ne doutent pas néanmoins
que Sa M. B. ne foit dans les mêmes difpofitions avec LL. HH. PP. pour
donner à Sa M. T. C. une fatisfaftion convenable, en cas que fes Sujets
rfi'ent fait quelque tort à ceux de S. M. T. C.
Pour ce qui concerne LL. HH. PP. Elles n'ont reçu avis de quoi que ce
foit qui puifTe mériter le nom d'infuite, fi ce n'eft qu'on voulût l'appliquer à
une rencontre qui leur eft revenue indirectement 6c non point par voie de
plainte, touchant ce qui s'eft pafle entre un de leurs Vaifîeaux de Guerre,
ôc
ET RESOLUTIONS D'E T A T. 49'f
Se deux Navires François aflez près de Gennes, au moins d'Avril dernier. La ijoi.
vérité du fait eft , autant qu'EUes en ont pu jufqu'à prefent être infor- ■ -
mées, qu'un Vaifleau de Guerre de cet Etat, nommé le Soleil, icrvant
de convoi à des Vaifleaux marchands, dans la Méditerranée, aïant été fe-
paré par le mauvais tems , des Vaifleaux qui étoient fous fon efcortc , Se,
étant reité feul pendant quelques jours , découvrit à la hauteur de Monaco ,
une Barque côtoïant le rivage, fans favoir de quelle Nation elle étoit , Se que.
le Capitaine voulant parler à l'Equipage pour apprendre quelque nouvelle de
fcs Vaifleaux épars, tira un coup de Canon, pour fignal , félon la coutume,
Se que la Barque aïant pris la fuite il envoïa fa Chaloupe pour la joindre, mais
que l'Equipage s'étant fauve à terre dans une Chaloupe, Se n' aïant laifle que
deux hommes dans la Barque qui firent connoître qu'elle appartenoit aux
François , 6c que leurs compagnons avoient pris la fuite , de crainte que le
Vaifleau de l'Etat ne fût un Turc , on les defxbufa Se on relâcha la Bar-
que , quoi qu'on eût tiré un coup de Canon chargé à bâle de la Ville de
Monaco.
Il elt encor vrai que deux jours après , le même Capitaine aïant rencontre
une petite Frégate, Se fouhaittant de l'approcher pour les mêmes raifons, il
fit arborer un Pavillon blanc avec le fignal ordinaire d'un coup de Canon, Se
que la Frégate fe rangea, fous ladite Ville de Monaco , d'où l'on tira plufieurs
volées de Canon fur le Vaifleau de l'Etat , fans que le Capitaine en ait jamais
pu favoir la raifon.
Les choies étant ainfi , félon que LL. HH. PP. en ont été informées, il
. fcmble qu'une rencontre fi peu coniiderable, Se dans laquelle il n'y a eu qu'un,
peu de mal entendu, ne peut être regardée, félon l'opinion de LL. HH. PP.
comme une infultc au Pavillon de Sa Majeflé.
Après cela, Elles déclarent n'avoir aucune connoiflance de rien qui reflem-
ble à une infultc faite à fes Pavillons, non plus qu'à enlever fes Sujets, à fon-
der fes Ports, & à tirer fur fes Vaifleaux. - '
Il ne leur eft jamais revenu que leurs Vaifleaux aïent rien fait d'approchant,
Se Elles ne peuvent pas croire , que pour la petite Se cafuelle rencontre des
Barques, dont on vient de parler , fadite Majeité puifle avoir conçu Se gardé
quelque mécontentement contre LL. HH. PP.
Au refte LL. HH. PP. ont toujours pris Se prendront foin d'obièrver re-
ligieufement leurs Traités, fpecialcment avec S. M. T. C. Se Elles prendront
volontiers , en tout tems , des Refolutions qui pourront fervir à conferver
l'honneur de fon amitié , Se de fon afteélion , Se à faciliter , autant qu'il dé-
pendra d'Elles, la Paix générale, dans laquelle Elles puiflènt trouver leur fu-
reté particulière.
Et puis que dans le Mémoire , il efl; dit plufieurs fois que LL. HH. PP.
ont encore le tems de refoûdre, Elles déclarent qu' Elles verroient avec plaifiiy
que ledit Sr. Comte d'Avaux reliât encor ici quelque tems , pour avoir occa-
lion de continuer Se de porter à un heureux fuccès les Conférences pour l'éta-
bliflcmcnt de la Paix Générale, Se de leur fureté particulière; Se que pour
cette raifon LL. HH. PP. avant que de prendre congé dudit Sr, Comte d'A-
Ooo 1 vaux
y
496 MEMOIRES, NEGOCIATIONS, TRAITEZ,
1701. vaux, 6c de lui mettre en main leur Lettre de recreance, en réponfe à celle
--■ • Je S. M. T. C, ont bien voulu lui faire remettre la préfente Refolution, pour
fervir de Réponfe à fon Mémoire. A cette fin, l'Extrait en fera livré au fufdit
Comte d'Avaux, par l'Agent Rofemboom.
Etait paraphé ,
vt.
W. VAN H A R E N.
En bas étoit écrit,
S'accorde avec ledit Regître^
Et figné,
F. F A G E L.
L e Comte d'Avaux dépêcha par un Exprès à fa Cour cette Refolution.
Ce fut après qu'il fe fut mis dans le Caroffe de Don Bernardo de Quiros , 6c
qu'ils furent promener enfemble pour l'examiner. Lors que fon Courrier fut
arrivé à Verfailles le Secrétaire de l'Ambaffadeur des Etats Généraux eut oc-
cafion de parler au Marquis de Torci , 6c de lui demnnder fes fentimens fur le
Mémoire du Comte , 6c fur la Réponfe des Etats Généraux. Le Marquis
répondit que la Réponfe étoit bien entendue , 6c qu'il la trouvoit fort réfpec-
tueufe pour le Roi ; Mais, que pour le relie il ne la regardoit que comme un
fimple moïen pour gagner du tems , à fin de fe préparer à la Guerre. Que
perfiilant fur la fatisftetion de l'Empereur , il étoit impofible au Roi d'entrer
en aucune Négociation. C'eft pourquoi le Comte d'Avaux devoit partir ,
puifque l'honneur de SaMajefté y étoit trop engagé, par la longue 6c infruc-
tueuie demeure de ce Miniftre dans un Pais qui ne vouloit pas profiter de
l'ofire de fon Amitié. Le Secrétaire y avoit cependant répondu fuivant la
teneur de la Réponfe. Aulfi le Comte d'Avaux reçût-il le Mardi 8. de retour
fon Courrier avec ordre de partir. Il en cacha cependant la Nouvelle, juf-
ques au lendemain Mercredi à midi. C'étoit pour en biffer profirer quel-
ques Marchands d'Amtrerdam , qui négocient dans les Actions , auxquels il
envoia des la nuit même du mardi cette Nouvelle, qui pouvoit influer beau-
coup fur cette forte de Négoce. Il fut ledit Mercredi faire part de fon pré-
cis Rapel au Confeiller-Penfionnaire, 6c il fut enfuite prendre congé des Mi-
niftres Etrangers de fa connoifiance. Avant que de partir, il préfenta aux
Etats Généraux un Mémoire final , 6c auquel les Etats répondirent par une
Refolution. Voici l'une 6c l'autre de ces Pièces.
x du°C » T " E fou%°ê Ambaffadeur Extraordinaire du Roi T. C. auprès de VV.
dVWaux' » "^ SS. aïant reçu de nouveaux ordres du Roi fon Maître pour fe rendre
du ir. ' „ auprès de fa perfonne Sacrée, fc trouve obligé de prendre congé de VV.
Août. „ SS. 6c de les remercier très- humblement des bontez que vous lui avez té-
„ moigne
ET RESOLUTIONS D'E T A T. 497
„ moigné pendant fon féjour à la Haïe. Il prie très-humblement VV. SS- 1701.
„ d'être perfiiadées qu'il en confervera chèrement le fouvenir, & qu'il ne ne- - ■
„ gligera aucune occafion de faire connoître à VV. SS. le zélé ardent qu'il a
„ pour Vôtre République 6c pour Vos perfonnes en particulier.
Signé,
Le Comte d'Avaux.
,, A la Haie le n. d'Août 1701.
Voici la Réponfe de Leurs Hautes PuifTances à ce Mémoire.
» Ç\^ a lu dans l'Aflêmblée le Mémoire du Sr. Comte d'Avaux Ambaflà-
n *<S deur Extraordinaire de S. M. T. C, prenant congé de LL. HH. PP.
.„ pour s'en retourner auprès du Roi fon Maître, lequel Mémoire eft ici in-
„ fèré (fiât infertio) . Surquoi aïant été délibéré, il a été trouvé bon & ar-
„ rêté , qu'on répondra audit Sr. Comte d'Avaux, fur fon Mémoire, que
„ LL. HH. PP. auraient fouhaité de tout leur cœur, que S. M. T. C. eût
„ pu trouver bon de le laiffer encore ici pour quelque tems , afin qu'on pût
„ finir, s'il étoit poflîble, par un heureux fuccès, les Conférences pour lef- '
„ quelles il étoit venu: Que LL. HH. PP. voient avec douleur, que par fon
„ départ elles feront interrompues : Qu'elles ont tant de preuves de là iâgeffe,
„ de fon expérience , & de l'on zélé pour affermir la bonne intelligence entre
„ Sadite Majefté & LL. H H. PP. , qu'Elles auraient efperé une meilleure
„ fin de fa Négociation, s'il lui avoit été permis de demeurer plus long-tems
„ ici. Mais que puis que les ordres de Sadite Majefté Pobligeoient de par-
„ tir , Elles lui fouhaitent un heureux voïagc , & l'affui ent que fa Perfonne
„ & fa conduite leur ont été tres-agréables, & que ledit S. Comte d'Avaux
„ leur fera agréable auflî fouvent qu'il plaira à S. M. de l'emploïer auprès
„ d'Elles: Qu'Elles le prient qu'étant de retour auprès de Sadite Majefté, il
„ veuille l'affurer de leurs fentiméns refpeéhieux pour (à Perfonne S., de leur
„ très-grande eftime pour fon amitié & pour fon affection, & de leur defir
„ fincere & très-ardent pour la continuation de la Paix & du repos public.
„ Qu'on dépêchera auflî une Lettre de Récréance pour ledit Sr. Comte d'A-
„ vaux, laquelle lui fera remife entre les mains, avec l'Extrait de la prefente
„ Réfolution, par l'Agent Rofemboom.
O n lui donna auflï des Recrédentiales telles que voici.
„ S I R E,
Lettres
Recre-
„ A Près que le Sr. Comte d'Avaux Ambafladeur Extr. de V. M. No'is a- ^m^]es
" a ta* rend" niLettre»PiU' Quelle il lui a plû de le rapeller , Nous fîmes auCom-
„ des Initances a ce qu'il pût encore refter ici pour quelque tems,- pour voir te d'A-
Ooo 3 fiTai
IJOl.
49S MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
„ fi on pourvoit terminer heureufcment les Conférences que Nous avions de-
„ mandées, & pour lefquelles il étoit venu : Mais comme il nous a fait con-
„ noître aujourd'hui, qu'il avoit reçu des ordres nouveaux pour fon retour ,
„ Nous n'avons pas voulu le biffer partir , fans témoigner à Vôtre Ma-
„ jefté que fa Perfonnc nous a été très - agréable , puis que dans toute fa
„ conduite il a donné des marques de fa capacité, de fa prudence , & de
„ fon zèle, tant pour le .fervice de Vôtre Majeflé que pour l'affermil-
„ fement de la Paix & de la bonne intelligence entre Elle & Nous; Se
„ Nous euffions fouhaité qu'il ne fait pas parti avant que d'avoir fini heu-
„ reufement la Négociation. Cependant, Sire, Nous efperons que
„ nonobftant ce rapel, les intentions de Vôtre Majefté feront toujours por-
„ tées à la Paix, & qu'avec fon AmbafTadeur Elle ne retirera point fon amitié
„ & fon affection de nôtre République. Les affurances qu'Elle Nous en
„ donne par fa Lettre nous flatent de cet efpoir. Auilî nous attendons de la
„ fincerite dudit Sr. Comte d'Avaux, qu'il fera un râpent fidèle a V. M. de
„ nos fentimens reipcélueux pour fe Perfonne S., & quel cas Nous faifons de
„ fon amitié; & de nôtre defir très-fort & tres-fincere pour la continuation
„ de la Paix Se du repos public. Nous ne faifons point de dificulté de Nous
„ raporter à ce qu'il en dira à V. M. Cependant Nous prions Dieu, Sire,
„ Sec. A la Haïe le 1 1. Août 1701.
Les Etats Généraux lui accordèrent auiîî le Préfent accoutumé aux Am-
baffadeurs. Il elï vrai qu'il fit quelque difficulté de l'accepter. C'étoit fur ce
que fon Ambaffade étant en toute manière extraordinaire, il n'avoit fait aucu-
ne Entrée ni eu Audience publique , & qu'ainfi il ne croïoit pas de l'avoir
mérité. Cependant, afin qu'on ne qualifiât pas fon refus de Fanfaronnade, il
vouloit bien l'accepter. Comme fon départ étoit trop précipité pour qu'on
eût le Prêtent prêt , qui confiite en une Chaine & Médaille d'Or de la valeur
de fix mille florins de Hollande , on lui fit demander à quelle Perfonne il lui
plaifoit qu'elle fut remife. 11 répondit qu'il laiflbit fans cela à la Haïe ion Se-
crétaire nommé de Barré. Ainfi il partit le Samedi 1 3. vers le midi dans un
_ quelque femaine auparav:
Don Bernardo de Quiros, donna le 1 1. de Mai à dîner au Comte d'Avaux, à
l' Envoie Extr. d'Angleterre, & à trois ou quatre autres Miniltres Etrangers.
Le Comte dit en riant qu'il y avoit environ trois ans que Don Bernardo de
Quiros enleva Luxembourg aux François dans le Traité de Rifwick. Norft,
Réiîdent de pluficurs Princes du Corps Germanique , dit là-deffus que les
François avoient trouvé le moien de le ravoir avec ufure. Don Bernardo de
Quiros en fit une Affaire ferieufe , capable de le brouiller avec le Comte. Ce
qui pouvoit y influer étoit qu'on parloit toujours d'un Traité entre la France
ET RESOLUTIONS D'E T A T.
499
le Serment de Fidélité : Et cette Ceffion ne plaifoit nullement à l'Ambafia- 1701
deur d'Efpagne. .
Le précipité Départ du Comte d'Avaux fit voir qu'il avoit eu quelque vue
cachée, après qu'il eut préfenté fon Mémoire du 2.6. Juillet. C'etl parce
qu'il dit quelques jours après qu'il avoit reçu des Lettres du Roi fon Maître,
par leiqueiles il lui mandoit de ne pas le préfenter , au cas qu'il ne l'eut déjà
tait} Il fit même de plusj car il fit quelque Démarche pour tacher de le reti-
rer ibus main. On crut en ce tems-là que ladite vûë etoit qu'il auroit voulu
détourner les Etats Généraux de donner leur Réponfe en date du premier
d'Août. La rai ton en étoit , qu'Elle faifoit toucher au doigt leur fincérité ,
& qu'on en avoit pas ufé de même à leur égard ; 6c cela pouvoit faire impref-
fion fur le Public.
Comme l'on a jugé à propos de donner tout de fuite les Négociations du
Comte d'Avaux pour le foulagement du Lecteur, fans y entremêler les Affai-
res qui fe paflbient entre-tems, on reprendra celles-ci auffi de fuites félon leur
rang.
On commencera par celles d'Angleterre, jufques au Départ de Sa Maje-
fté Britannique pour paffer en Hollande. L'une des principales fut le Règle-
ment de la Succeffion en la Séréniffime Maifon de Hannover. On en voioit
la nécefîité fans reculer beaucoup dans le pafTé. L'Incendie allumé en Angle-
terre contre la Religion , 8c la Liberté de la Grande-Bretagne, fumoit enco-
re, & le Feu demeuré fous les cendres pouffoit de tems en tems des étincel-
les, qui donnoient de l'inquiétude. Il y auroit eu beaucoup de Débats, fi
une Affaire avoit eu du fuccès. Six Lords furent trouver le Comte de Brian-
çon. Us lui propoférent de faire que le Duc de Savoie donnât un des Prin-
ces fes Enfâns pour être élevé en Angleterre , & dans la Religion Anglicane,
proteitant qu'en ce cas jamais l'Acte de Hannover ne pafferoit}mais, le Duc
n'aiant pas voulu y entendre, le Bill fut drefle pour ce Règlement, & on
y ajouta diverfes Claufes , 6c aiant été aprouvé par les deux Chambres des
Seigneurs 6c des Communes, le Roi le paffa en Acte, dont voici la Copie.
Tour étendre la Succeffion de la Ccurromte d'Angleterre &c. ;
& pour mieux ajfurer les ^Droits & les Libertés,
des Sujets, du 10. Février.
D'Autant que dans la première année du Régne de Vôtre Majefté 6c de
feue nôtre três-gracieufe Souveraine la Reine Marie d'heureufe Mé-
moire, un Acte de Parlement avoit été fait, intitulé, Jcle pour déclarer les
Droits ci? Libériez des [Sujets ci? pour établir la SucceJJîon à la Couronne , dans
lequel, entre autres choies, il avoit été établi, déclaré, 6c paffé en Loi, que
la Couronne, 6c le Gouvernement Roïal des Roïaumes d'Angleterre, de Fran-
ce, 6c d'Irlande, 6c des Domaines qui en dépendent , feroient 6c continue-
raient
foo MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
I701- roient dans Vôtre Majcfté Se ladite feue Reine, pendant qu'ils vivroient con-
" joinctement & pendant la vie de celle qui furvîyroit, Se qu'après le décès de
Vôtre M ijellé & de ladite Reine, ladite Couronne & Gouvernement Ro'i'aî
feraient Se demeureraient aux Héritiers iffiis du Corps de ladite feue Reine,
&au défaut d'une jelle Lignée à lbnAlfeiTe Roïale laPrinceffè Anne de Dan-
nemark & aux Héritiers îiîus de ion Corps, Se au défaut d'une telle Lignée
aux Héritiers procréez par Vôtre Majeilé. Et il fut d'ailleurs par là pafle en
Loi que toutes & chaque perfonne ou perfonnes, qui feraient alois ou dans
la fuite réconciliées au, ou qui auraient Communion avec le Siège ou l'E-
gliiè de Rome , ou qui feraient profeiîîon de la Religion Papilte, ou qui
le marieroient à des Papilles, feraient exclus Se rendus incapables pour tou-
jours d'hériter pofTeder ou jouir de la Couronne Se du Gouvernement de
ceRoïaume, de l'Irlande & des Domaines qui en dépendent, ou d'aucune
partie d'iceux, Se d'avoir, fe fervir , ou exercer aucun pouvoir, autorité
ou Juridiction Roïale dans iceux. Et que dans tous Se chacun lefdits Cas ,
les Peuples de ces Roïaumes feraient & font par là abious de leur fidélité , Se
ladite Couronne 6c Gouvernement defeendroient fucceiîivement Se feraient
pofièdez par telle perfonne ou perfonnes, qui étant Proteilans, auraient héri-
té Se joui d'iceux y au cas que ladite perfonne ou perfonnes , ainii reconci-
liées, aïant communion, profeffaht , ou. fe mariant comme défias , fufîènt
naturellement mortes.
Après avoir fait un tel Statut, Se l'établifTement qui y efl contenu, les bons
Sujets de Vôtre Majeilé, qui ont été rétablis dans l'entière Se libre poffeifion Se
jouïïfance de leur Religion, de leurs LoixSede leurs Libertez par la Providence
de Dieu, qui a béni d'un heureux fuccès les juiles entrepnùs, Se ;es infatiga-
bles efforts que Vôtre Majeilé a fait pour cela, n'avoient point à etperer ou
à fouhaiter un plus grand bonheur temporel, que celui de voir une Roïale Li-
gnée venant de Vôtre Majeilé (à laquelle, après Dieu, ils doivent leur tran-
quillité, Se dont les Ancêtres ont été pendant une longue fuite d'années, les
principaux apuis de la Religion Reformée, Se des Libertez de l'Europe) Se
de nôtre dite très-gracieufe Souveraine la Reine Marie, dont la Mémoire
fera toujours precieufe aux Sujets de ces Roïaumes. Et comme il a depuis
plû au Tout-Puiflant de prendre à lui nôtre dite Souveraine , comme aul-
iî le Prince Guillaume Duc «de Gloceller, qui faifoit toute notre ei-
perance, Se qui étoit le feul rejetton vivant de fon Altefie Roïale là Prin-
ceffè Anne de Dannemarck , au deplaifir Se au regret inexprimable de
Vôtre Majeilé, Se de vofdits bons Sujets qui refiechifent avec douleur par
de telles pertes , qu'il dépend entièrement du bon plaifir du Tout - Puii-
fant de prolonger les Vies de Vôtre Majeilé Se de ion Alteflè Roïale , Se
d'accorder à Votre Majeilé , ou à fon Altefie Roïale une Lignée qui
puiflc hériter la Couronne Se le Gouvernement Roïal , comme délais ,
lèlon les établillèmens reipeélifs contenus dans l'Acte cï-Ueifus mention-
né , implorent la Mifericorde Divine , pour obtenir ces bénédictions :
Et lefdits Sujets de Vôtre Majeilé aïant une expérience journalière du
ibin Se de l'intérêt que Vôtre Majeilé prend pour la prafpcrité prelente Se
futu-
ET RESOLUTIONS D'E T A T. pt
future de ces Roïaumes ,& particulièrement parla recommandation que Vôtre
Majefté a fait étant affile fur Ton Throne pour étendre la Succeffion de lu Cou-
ronne dans la Ligne Proteftante, pour le bonheur de la Nation Se la fureté
de nôtre Religion : Et étant abfolument neceflàire pour la fureté , la Paix, Se
la tranquillité de ce Roïaume de prévenir en icelui tous les doutes & difpu-
tes, qui pourroient y furvenir à caufe de quelques prétendus titres à la Cou-
ronne, Se de maintenir une certitude dans la Succeffion d'icelie , à laquelle
vos Sujets puiflent furement avoir recours pour leur protection , au casque
la Succeffion, établie par l'Aéte fufmentionné , vint à finir. A ces caufes
pour une plus ample provifion de la Succeffion de la Couronne dans la Li-
gne Proteftante, Nous les très-obeïflans Se très-fideles Sujets de Vôtre Maje-
fté les Seigneurs Spirituels Se Temporels, & les Communes afîêmblez en ce
prefent Parlement , fuplions Vôtre Majefté qu'il foit établi Se déclaré , ainfî
qu'il eft établi & déclaré par Sa Majefté le Roi, par Se avec l'avis Se confen-
tement des Seigneurs Spirituels Se Temporels, Se des Communes, aflemblex
en ce prefent Parlement Se par l'autorité d'iceux , que la très- Excellente Prin-
ceflê Sophie Eleétrice Se Ducheflè Douairière d'Hannover, Fille de la feue
très- Excellente PrincefTe Elizabeth Reine de Bohême , Fille de feu nô-
tre Souverain Seigneur le Roi Jaques Premier d'heureufe Mémoire, foit,
Se eft par celles-ci déclarée être la plus prochaine à la Succeffion dans la Li-
gne Proteftante à la Couronne Impériale , Se à la Dignité defdits Roïau-
mes d'Angleterre, de France , Se d'Irlande Se des- Domaines qui en dépendent,
après Sa Majefté Se la Princeflê Anne de Dannemark Se à défaut refpective-
ment de Lignée de ladite Princeflê Anne, Se de Sa Majefté. Et que dès
8c après le décès de fadite Majefté à prefent nôtre Souverain Seigneur, Se de
fon Altefle Roïale la Princeflê Anne de Dannemarck , Se à défaut refpeéri-
vement de Lignée de ladite Princeflê Anne de Dannemark Se de Sa Majefté,
la Couronne Se le Gouvernement Roïal defdits Roïaumes d'Angleterre, de
France, Se d'Irlande, Se des Domaines qui en dépendent avec l'Etat Se Digni-
té Roïale defdits Roïaumes , Se avec tous les Honneurs , Qualitez , Titres,
Regales, Prérogatives, Pouvoirs, Jurifdiélions , Se Autoritez qui en dépendent,
Se qui leur apartiennent , fera, Se continuera à ladite très - Excellente Prin-
ceflê Sophie, Se aux Héritiers iflus de fon Corps, étant Proteftans : Et
c'eft à quoi lefdits Seigneurs Spirituels Se Temporels Se les Communes , au
nom de tout le Peuple de ce Roïaume , fe foumettent très-humblement Se
loïaument tant eux , que leurs Héritiers, Se Pofterité , Se promettent fidel-
lement, qu'après le décès de Sa Majefté, Se de fon Altefle Roïale, Se à dé-
faut d'Héritiers iflus de leurs refpectifs corps, ils foutiendront, maintiendront,
Se défendront ladite Princeflê Sophie, Se les Héritiers iflus de fon corps,
étant Proteftans félon la limitation Se la Succeflîon à la Couronne ci fpecifiée
Se contenue, de tout leur pouvoir, Se aux dépends de leurs Vies Se de leurs
Biens contre toute Perfonne que ce foit qui attentera quelque chofe au
contraire.
Bien entendu toujours, ainfi qu'il eft établi par celles-ci , que toutes Se cha-
cune perfonne ou perfonnes , qui hériteront ou pourront hériter ladite Cou-
Jim. I. Ppp ronne
t7or.
yo* MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
1701. ronne, en vertu de la Limitation de ce préfent A6tc, qui eft, font ou feront
' réconciliées ou qui auront communion avec le Siège ou Eglifc de Rome ,
ou qui feront profeffion de la Religion Papille ou qui le marieront à des Papi-
lles, feront fujets aux incapacitez lefquelles , dans tous 6c chacun defdits cas
font déclarées, ftatuées, £c établies par ledit Aéle fufmentionné. Et que cha-
que Roi ou Reine de ce Roïaume , qui viendra ou fuccedera à la Couronne
Impériale de ce Roïaume en vertu de ce préfent Aéte, prendra le ferment du
Couronnement qui fera adminiftré à lui , à Elle, ou à Eux à leurs réfpeârifs-
Courbnnemens , félon l'Acte de Parlement , fait en la première Année du
Régne de Sa Mejeité, 6c de ladite feue Reine Marie intitulé , 4 cl e pour
établir le ferment du Couronnement ; 6c fera , fouferira , & répétera la Déclaration
mentionnée dans ledit Acte raporté en premier lieu ci-defTus, en la manière
6c forme qui y èft prefeiïte.
Et d'autant qu'il eft requis & neceflaire de pourvoir plus amplement à la
fûretc de Nôtre Religion , de Nos Loix , 6c de Nos Libertez , dès 6c après
le décès de Sa Majefté , 6c de la Princeflè Anne de Dannemarck, 6c à dé-
faut de Lignée refpective, iiïiië du corps de ladite Princcfle ou de Sa Majefté,
il eil ftatué par Sa Majeité le Roi , par 6c avec l'avis 6c confentement des Sei-
gneurs Spirituels 8c Temporels 6c des Communes aflemblcz en Parlement , 6c
par l'autorité d'iceux ,
„ Que quiconque viendra ci- après à la pofîèflîon de cette Couronne , fc
„ conformera à la Communion de l'Eglife Anglicane , ainil qu'Elle eft éta-
„ blie par les Lbix.
„ Qu'au cas que la Couronne 6c la Dignité Impériale de ce Roïaume,
„ vienne à tomber à quelque Perfonnc , qui ne fera pas Native de ce Roïau-
„ me d'Angleterre, la Nation ne fera point obligée de s'engager dans aucu-
„ ne Guerre pour la défenfe de quelques Etats ou Territoires qui n'apartien-
„ dront point à la Couronne d'Angleterre , fiins le confentement du Par-
„ lement.
„ Que nulle Perfonne qui viendra ci-après à la poiîèlîîon de cette Couron-
ne, ne fortira des Domaines d'Angleterre , d'Ecoiîè ou d'Irlande, fans le
confentement du Parlement.
„ Que dès 6c après le tems que cette plus ample Limitation faite par cet
Âcle, aura lieu, toutes les matières 6c Affaires relatives au bon Gouverne-*
ment de ce Roïaume, qui font proprement par les Loîx 6c Coutumes de
ce Roïaume du reflbrt du Confeil Privé, y feront traitées 6c toutes les Ré-
„ folutions qui y feront prifes dcfTus, feront fignées par ceux du Conièil Pri-
vé-qui y donneront leurs avis 6c leur confentement.
„ Qu'après que ladite Limitation aura lieu , nulle Perfonne née hors des
Roïames d'Angleterre, Ecolîè, 6c Irlande, ou des Domaines qui en dépen-
dent, quoi qu' Elles foient naturalifées ou denifées , excepté ceux qui fe-
roient nez de Père &z Mère Anglois , foit capable d'être du Confeil Pri-
vé , ou Membre de l'une ou l'autre des Chambres du Parlement, ou
de jouïr d'aucun office ou porte de confiance foit Civil ou Militaire , ou
d'avoir aucune conceftion de Terres , Mailbns , ou Héritages de la Cou-
„ ronne y
55
5)
55
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55
ET RESOLUTIONS D'E T A T. f0j
,, ronne, pour lui même, ou pour aucune autre ou autres en commifficn ijoî.
„ pour lui.
„ Que nulle perfonne qui a un office ou charge de profit fous le Roi ou
„ qui reçoit une penfion de la Couronne , fera capable defervir comme Mem-
bre de la Chambre des Communes.
„ Qu'après que ladite Limitation aura lieu , ainfî que deffus , les Commif-
fions des Juges feront faites, tandis qu'ils fc coê;porteront bien^ 6c leurs falai-
„ res affurez 6c établis : mais il fera loiiïble de les déplacer fur une Adreffë de
„ l'une 6c l'autre Chambre du Parlement.
„ Que nul Pardon fous le Grand Seau d'Angleterre fera reçu contre une Ac-
„ eufation des Communes en Parlement.
„ Et d'autant que les Loix d'Angleterre, font les droits naturels du Peu-
„ pie d'icelle , & que tous les Rois 6c Reines qui monteront fur le Trône
„ de ce Roïaume, doivent le gouverner conformément auxdites Loix , 6c
„ que tous leurs Officiers & Miniftres doivent refpeclivement les fervir fè-
„ Ion les mêmes Loix : à ces caufes lefdits Seigneurs Spirituels 6c Temporels
„ & les Communes fuplient auffi avec humilité que toutes les Loix & Statuts
„ de ce Roïaume qui tendent affûter la Religion établie 6c les droits 6c les
„ Libertez du Peuple d'icelui, & toutes autres Loix 6c Statuts dudit Roïau-
„ me , qui font" à prefent en force , puiflênt être ratifiez 6c confirmez : -
„ Et fubinc cela les mêmes font par Sa Majefté, par 6c avec l'avis 6c con-
-„ fentement defdits Lords Spirituels Temporels 6c des Communes, 6c par
„ l'autorité d'iceux , ratifiez 6c confirmez.
L a Duchefîè de Savoie , comme Defcendante d'une Fille du malheureux
Charles I. Roi d'Angleterre, fit parvenir entre les mains du Lord Garde
des Seaux une Proteftation contre ledit Règlement de la Succeffion. Elle
étoit en ces termes.
» A nne d'Orléans, Ducheffie de Savoie, Reine de Chypre, Prin-
„ x\. ceffe de Piémont, &:c. 6c Princeffe du Sang d'Angleterre par la Prin-
•,. Protefta-
tion de
„ ceffe Roïale de la Grande-Bretagne, Henriette fa Mère,' fait une fi cheffe'de
„ haute eftime de cette Prérogative, qu'Elle profite bien volontiers de l'oc- Savoie
contre
l'Aifte
cafion qu'Elle a de la faire valoir aux yeux de toute la Nation Anglbifc,
comme un témoignage de la gloire qu'Elle en tire, d'avoir Droit à cet Au-
„ gufte Trône. ^ 5.™
„ Ce 11 pourquoi , étant informée qu'on a délibéré de régler l'ordre de la
„ Succeffion à la Couronne d'Angleterre, dans le Parlement préfentement af-
„ femblé , Elle reprefente au Roi , 6c à ce même Parlement , qu'en qualité
„ de Fille unique de la feue Princeffe Roïale Henriette fa Mère, Elle
,, eft la première apellée, après le Roi Guillaume, ôc la Princefie de
„ Dannemarck , iuivant les Loix 6c les Coutumes d'Angleterre , qui ont
„ toujours préféré la Ligne la plus proche à la plus éloignée. Son Droit, é-
„ tant ainfi reconnu de tout le monde, 6c inconteftable , n'a point befoin de
„ plus grandes preuves ; mais Elle ne laifle pas de protelter contre toute de-
Ppp 2 „ libe-
f04 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
1701. „ libération Se decifion contraire, en la meilleure & plus efficace manière qui
„ fe puilTe pratiquer en femblables cas: En quoi elle fuit plutôt la coutume
„ que la neceflîté, parce qu'Elle a une fi haute idée de la fagefie & de la ju-
„ ftice du Roi Se du Parlement, qu'Elle ne doit rien- craindre de leur part qui
„ puiiTe jamais nuire à elle Se à les enfans.
Les gens la trouvèrent singulière. C'eft en ce qu'Elle fembloit approu-
ver les jultes Soupçons de la Naiflîince du Prétendant ; puifque, bien loin
d'en parler, Elle le. fubitituoit immédiatement après le Roi Guillaume Se
la Princeflè Anne de Dannemarck.
Le Parlement prit d'ailleurs la Réfolution d'affilier le Roi pour avoir une
Flotte de 80. Navires de Guerre avec trente mille Matelots , outre 20. au-
tres pour le fecours de la Hollande , Se la levée de zo. mille Hommes, outre
les dix mille pour le Secours de la Hollande : D'ailleurs , de faire les Alliances
que le Roi trouverait neceflaires pour le maintien de la Paix de l'Europe, Se
pour faire un Equilibre. Le Parlement préfenta pour cela diverfes Adreffés.
Pendant ces Délibérations il y eut quelques Débats. Par raport aux dix mil-
le Hommes pour le Secours de la Hollande , quelques Membres furent d'avis
qu'il falloit donner l'argent pour acheter-dix mille Allcmans, Se d'autres qu'il
faloit les lever permi la Nation. On réfolut cependant de prendre douze Ba-
taillons des Troupes qui étoient en Irlande , qui faifoient cinq milfô Hommes
Se de les recruter au double pour faire le nombre de 10. milles, iuivant le Se-
cours ftipulé par les Traitez. Les Seigneurs préfenterent une Adreffè au Roi,
pour l'afiurer qu'ils emploïeroient biens Se vie pour le maintenir} qu'ils étoient
iênfibles au danger , où la Nation fe trouvoit j Se qu'ils le prioient de faire
une nouvelle Ligue ofFenfive Se defenfive avec les Etats Généraux r Se d'invi-
ter les Princes qu'il trouverait à propos d'y entrer , Se d'en -.faire une autre
avec l'Empereur pour le repos Se la fureté de l'Europe. .
Comme cependant les deux Chambres du Parlement s'amufoient en Débats
par raport au Traité de Partage, Se les quatre Lords aceufez, il y eut de
gens zélez pour le bien de la Nation qui regardeient cette manœuvre comme
tendante à trainer à pourvoir au danger. C'elt pourquoi les principaux de la
Province de Kent firent préfenter aux Communes une Requête de Remon-s
trance. Elle étoit foûcrite par les Juges de Paix, Grands Jurez, Se Francs
Bourgeois. Elle étoit en ces termes.
NOus, les Gentilshommes, Juges de Paix , Grands Jurez , & autres
Bourgeois affëmblez à la Seffion qui fe tient à Maidfton dans la Pro-
vince de Kent , étant profondément confternez du dangereux état de ce
Roïaume Se de toute l'Europe, §e confidérant que nôtre deitinée, Se cel-
le de nôtre profperité dépend de la iageffë de nos Députez en Parlement,
Nous croïons être obligez par nôtre devoir, d'en représenter humblement
les conlequences à la Chambre dans cette Conjoncture, Se de vous prier
de prendre de promtes Réfolutions , Se de faire des efforts finceres, pour
„ répondre à la grande confiance de vôtre Patrie , qui fe repofe fur vous.
» Et,,
Requê-
5>
icdela
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Provin-
ce de
M
Kent au
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Parle-
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ment.
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55
ET RESOLUTIONS D'E T A T. pr
Et, comme 'par l'expérience de tous les Siècles, il efl manifefie qu'au- 170 1,
cune Nation ne fourbit être grande ni heureufe fans Union , Nous ef- — ~
pérons qu'il n'y aura prétexte quelconque , qui foit capable de eau-
fer la moindre mésintelligence entre nous, ni la moindre méfiance de Sa
Majeure , dont les grandes Aérions pour cette Nation font écrites dans le
cœur de fes Sujets , & ne fauroient fans la plus noire des ingratitudes être
jamais oubliées. Nous prions très-humblement cette honorable Chambre
d'avoir égard à la Voix du Peuple : Que nôtre Religion 8c nôtre Sûreté
puiffent être effectivement affermies : Que vos fidèles Adrefles foient chan-
gées en Bills de Subfides ; & que Sa Sacrée Majefté , dont le Règne pro-
pice & fins tache puifie. longrtems continuer fur Nous, foit mife en état
d'affilier puifTamment fes Alliez , avant qu'il foit trop tard. „
Les Membres les plus turbulens des Communes prirent cette Requête ,
comme une OfFenfe faite à la Chambre. Au lieu de Suplication, on la regar-
da comme un Confeil ; & , trouvant cette manière d'agir irréguliere , la
Chambre envoïa en prifon cinq de ceux de Kent , qui l'avoient préfentée.
L'un d'eux fe fauva , pour en porter la Nouvelle à fa Province. Il revint ce-
pendant chez le MefTager ou Sergeant d'Armes , d'où il fut auffi en-
voie tenir compagnie aux autres dans la Prifon. La Chambre déclara cet
Ecrit fcandaleux , infolent , St féditieux } Se pria le Roi de les priver de leurs
Charges.
Comme l'on troùvoit que c'étoit une violente paffion qui faifbit prendre un
tel efibr à la Chambre, on lui apliqua ce que Tite Live dit que c'efl la natu-
re de la Multitude de fervir humblement , ou de dominer avec arrogance.
Véritablement, ce procédé de la Chambre paroiflbit irrégulier. C'eft puif-
que c'avoit été un Grief contre le Roi Jaques d'avoir maltraité les fèpt Evê-
ques pour lui' avoir préfenté une Requête. Auffi en prefentant la Couronne
au Prince & à la Princeffe d'Orange, il fut établi que c'étoit le Droit des Su-
jets de pétitionner le Roi , favoir de lui faire des Représentations. A plus
forte raifon pouvoit-on en agir de. la forte envers le Parlement. Cette Incar-
tade des Communes ne fut pas même bien prife par les Peuples. On beuvoit
par-tout à la Santé de ceux de Kent: On imprimoit leurs Portraits, & enfin
on envoïa à l'Orateur Harlei , & à How, une Lettre pour les menacer, avec
les autres qu'on foupçonnoit agir par des refforts étrangers. Cette Lettre étoic
la fui vante.-
„ MONSIEUR L'ORATEUR, Lettre;.
« à I'Ora-
„ T E Mémoire ci inclus , dont on vous charge, au nom de plufieurs rJurdes
„ ï-i milliers du Peuple d'Angleterre, ne vient point d'aucun Papille Ja- manîu
„ cobite, féditieux, ou d'aucun interefl cle Parti, mais il ell fondé fur l'hon-
„ nêteté & fur la vérité. Et on vous commande de la part de deux cent mil-
„ le Auglois de le donner à la- Chambre des Communes, Se de les informer
„ que ce n'eil point une .moquerie, mais une ferieufe vérité,
Ppp 3 „ On.
fo6 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
t70t. „ On ne demande que la juftice 6c leur devoir, & il eft demandé par ceux
• ■ ■ ■■ „ qui ont le droit de le demander, 6c le pouvoir de les y forcer, alîavoir par
„ le Peuple d'Angleterre.
„ Nous aurions pu nous prefenter à la Chambre en aflez grand Nombre
„ pour les obliger de nous entendre, mais nous avons évité tout tumulte, ne
„ voulant point troubler, mais fauver nôtre Patrie.
„ Si vous refufez de le leur communiquer , vous aurez bien-tôt fujet de
„ vous en repentir.
A Robert Harley Ecuyer , Orateur de la Chambre des Communes.
MEMOIRE
Des Gentilshommes, des libres Poflefleurs, ôc des Habitans des Com-
tez tant en leur nom , qu'en celui de plufieurs milliers
du bon Peuple d'Angleterre -,
Aux Chevaliers , Citoïens , 6c Bourgeois , aflemblez en Parlement.
„ MESSIEURS,
IL feroit à fouhaiter que vous fuffiez d'humeur, 6c que vous euffiez afiez
d'honneur, pour condefeendre à la vérité, quoi qu'elle foit contre vous;
particulièrement venant de nous qui avons un fi grand droit de vous la re-
prefenterj mais puis que les Requêtes, qui vous font adreflees pas vosMai-
tres, ainfi que l'eft le Peuple qui vous choifit, font receuës d'une fi gran-
de hauteur que d'envoïer en une prifon illégale ceux qui vous les prelên-
tent , il faut que vous fouffriez qu'on vous dife nettement vôtre mauvaife
conduite, fans que Nous expofions nos Noms.
„ Si vous trouvez à propos de vous corriger de vos fautes, vous ferez
bien, Se peut-être vous n'entendrez pas parler d'avantage de nous; mais
fi vous ne le faites , lbïez aiîurez, que la Nation ne cachera pas long-
tems fon reilentiment. Et quoi qu'il n'y ait point de procédures é-
tablies pour vous obliger à faire vôtre devoir, cependant la grande Loi de
la Raifon dit, 6c toutes les Nations aprouvent, que tout Pouvoir qui eft au
deflus des Loix, eft oppreflîf 6c tirannique, 6c qu'il peut-être réduit par
des méthodes extrajudiciaires. Vous n'êtes pas au deffus du refîentiment
des Peuples; ceux, qui vous ont fait Membres, peuvent vous réduire au
même rang , d'où il vous choifirent , 6c peuvent vous faire éprouver
un échantillon de leur tendrelfe abufée, en une manière, qui ne vous plai-
»
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„ Lorfque le Peuple d'Angleterre, affemblé en Convention prefenta la
„ Couronne à Sa Majefté à prelënt Régnante , il y joignit une Déclaration
„ des
ET RESOLUTIONS D'ETAT. 5-07
„ des Droits du Peuple, dans laquelle on y expriraoit ce qui avoit été illégal i7or.
„ fie arbitraire dans les Règnes precédens , fie furent exigez comme des — —
„ Droits qui dévoient être obfervez par les Rois d'Angleterre qui fuccede-
„ roient.
„ A cette imitation, Meffieurs, il fuit ici un abrégé des Griefs de la Na-
„ tion, Se de vos Pratiques illégales êc infoutenables , Se une pretenfion des
„ Droits que nous faifons tant en nôtre nom , qu'en celui de ceux entre le
„ Peuple d'Angleterre , qui font à jufte Titre alarmez de vos Procc-
,j dures.
„ I. Etablir des fonds pour de l'argent , & déclarer par des claufes d'em-
„ prunt que quiconque avancera des femmes fur ces fonds fera rembourfé fur.
„ les fubfides fuivans , fi les fonds ne font pas fuffifms ; fie aflîgner en fuite
„ d'autres fonds, fans y tranfporter le défaut des premiers , eft une horrible
,, tromperie faite au fujet qui a prêté l'argent-, & une brèche de la foi pu-
,j blique , tendante- à perdre l'honneur fie le crédit des Parlemens.
,, II. Emprifonner des perfonnes qui ne font pas de vos propres Membres
„ fans autre procédure que par un Vote de la Chambre , 8c les continuer en
„ prilbn fans limitation, eft une choie illégale, une brèche évidente à la Li-
„ berté du Peuple , un établifîement dans la Chambre des Communes du
„ pouvoir dilpenfatif, que vos Ancêtres n'ont jamais prétendu j une opofi-.
„ tion àVA£teHabeas Corpus qui eft le rempart de la Liberté perfonnelle , une
„ deftruelion des Loix, enfin c'eft trahir la confiance qu'on a mife en vous.
iy Pendant que le Roi eft en même tems obligé de vous demander permijfion de con-
„ îinuer a tenir dans les prifons les horribles Affajftns de fa perfonne.
„ III. Arrêter ces Meilleurs , qui par le commandement du Peuple que
)) vous fervez , font venus d'une manière païfible vous faire refTouvenir par
„ des Requêtes de redrefier les Griefs, ce qui a été reconnu par tous les
„ Parlemens devant vous être leur Droit inconteftable , eft une chofe il-
„ légale.
„ IV. Voter que la Requête de Meffieurs de Kent eft infolente, eft une
„ chofe ridicule & impertinente, parce que les libres PofTelîèurs des Fiefs qui
„ vous élifent font vos Supérieurs, & une contradiction en foi -même & un
„ mépris de la Liberté Angloife , fie contraire à la Nature du Pouvoir des
„ Parlemens.
5ï V. Voter que le Peuple eft coupable de s'être laiflé corrompre, de mau-
„ vaifes pratiques, & les emprifonnant comme defius, fins les recevoir à cau-
„ tion, & les décharger après des foûmiffions, fie qu'ils fc. font agenouillez
„ à vôtre Chambre ; fie laifier exiger des fraix exorbitans par vos Officiers,
„ c'eft une chofe illégale qui trahit la juftice de la Nation, vend la liberté.
„ des lujets, encourage l'extorfion fie l'infamie des Geôliers Z< des Officiers,
„ fie interrompt les pourfuites légales des Criminels dans le cours ordinaire de
„ la Loi.
„ Pourfuivre le Crime de corruption par argent dans quelques - uns pour
„ lervir un Parti, fie après ne procéder pas plus loin, quoique les preuves
„ foient exhibées par devant vous, eft un chofe partiale fie injufte, fie un
55 fcandale fur l'honneur des Parlemens.
„ VII.
558 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
€7°l« »» VIL Voter qucle Traité de Partage eft fatal à l'Europe, à caufe qu'il
" „ donnoit aux François trop des Etats apartenant à l'Efpagne , & cependant
„ ne vous interefler point à prévenir qu'ils prilîènt pofferfion du tout; Aban-
„ donner les Hollandois, lorfque les François font à leurs portes , jufques à
„ ce qu'il foit prefque trop tard de les aider , eft une chofe injufte & con-
„ traire à nos Traitez, & defobligeante pour nos Confedeiez, deshonnora-
„ ble à la Nation Angloife, 6c fait voir que vous négligez extrêmement la
„ fureté de l'Angleterre, Se de nos Voifins Proteftans.
„ VIII. Ordonner d'entendre fans délai des Requêtes frivoles pour plaire
„ aux parties dans les Elections , 6c poftpofer & négliger la Requête d'une
„ veuve pour le fang de fa Fille mafiacrée, lans la lire, eft un délai illégal de
„ lajuftice, qui eft deshonnorable à la Juftice de la Nation,
„ I X. Donner des Adreffés au Roi pour éloigner fes Amis fur de fimples
„ imaginations , avant un jugement Légal , ou un article prouvé , eft ille-
„ gai, Se tend à renverfer les Loix, Se taire précéder le châtiment à l'exe-
„ cution , ce qui eft contraire au vrai fens de la Loi , qui eftime toû-
„ jours un fujet être homme de bien , jufques à ce qu'il apparoiiïè du con-
„ traire.
„ X. Retarder les procédures dans des aceufations capitales pour noir-
„ or la réputation des perfonnes, fans prouver le crime, eft illégal, oppref-
„ fif, deftruêtif de la Liberté des Anglois,un retardement de la Juftice Se un
v reproche aux Parlemens.
„ XI. Souffrir qu'on fafTe publiquement dans vôtre Chambre des' Re-
„ flexions indécentes Se rejail liftantes fur la Perfonne de Sa Majefté, particu-
„ lierement par cet impudent Scandale des Parlemens Jean How , fans en te-
,, moigner du reflëntiment , ledit Jean How aïant feulement dit que Sa Ma~
„ je 'fié avoit fait un 'traité de Félonie pour voler fes voifins, voulant infinuer
„ que le Traité de Partage qui étoit en toute manière auffi jufte que lors
„ qu'on fiiit fauter la Maifon d'un homme pour en fauver d'autres, étoit une
„ connivence du Roi pour voler la Couronne d'Efpagne de fes droits , cette
„ manière d'agir , fait de la Chambre un Marché comme celui des Poiftbn-
„ nieres, & c'eft entreprendre d'infuher vôtre Souverain contre l'intention,
„ éc la penfée de la liberté des Harangues, que vous prétendez comme un
„ droit, eft une chofe fcandaleufe pour les Parlemens , defobeïftante 6c incir
,, vile, & un reproche à toute la Nation.
„ XII. L'exaétion , 6c la part exhorbitante de dix Livres par jour, que
„ Vôtre Orateur a four les Votes , en donnant permiftîon à Tlmpri-
„ meur d'en faire la levée fur le Peuple, en les vendant quatre fols par
„ feuille, eft une exadion arbitraire, deshonnorable à la Chambre, Se pefante
„ au Peuple.
„ XIII. Négliger jufques à prefent de païer les debtes de la Nation, com-
„ pofer pour les Intérêts, 8c remettant les Requêtes, eft une chofe illégale,
„ deshonnorable, & qui tend à détruire la foi publique.
„ XIV. Négliger publiquement le grand Ouvrage de la Reformation des
„ mœurs (quoique le Roi l'ait fouvent fort recommandé) au grand deshon-
„ neur de Dieu, Se encouragement du vice, eft négliger vôtre devoir , abu- .
„ fer
ET RESOLUTIONS D'E T A T. Sc9
fer de la confiance qui a été mife en vous, par Dieu, par Sa Majefté, & 1701.
par le Peuple. -
„ XV. Etant fcandaleufement vicieux vous-mêmes , tant dans vôtre Mo-
rale & Religion, que dans la méchanceté de vie , & l'impureté de doctri-
ne, aïant parmi vous des Blafphemateurs publics, & des impudens Renieurs
de la Divinité de nôtre Sauveur, Se les fouffrant fans les reprendre & les
punir , au regret inexprimable de tous les bons Chrétiens , & à l'horreur
de toute la Nation.
„ C'eir. pourquoi dans la vûë de la ruine eminente de nôtre Patrie , pen-
dant que les Parlemens , qui devroient être la fureté Se la defence de nos
Loix & de nos Conftitutions , trahiflent la confiance , 8c abufent le Peu-
„ pie, qu'ils devroient protéger j 8c ne nous reftant autre voie que la force
que nous fommes fort fâchez d'employer , afin que nôtre Pofterité fâche
que nous ne fommes pas tombez , comme des infenfez , fous la tirannie d'un
Parti qui a le deffus ; à cette fin ,
Nous prétendons 6? déclarons ,
„ I. Que c'eft un Droit incontestable du Peuple d'Angleterre, au cas que
leurs Repréfentans au Parlement n'agiflent pas félon l'Intérêt du Peuple ,
de les informer qu'on n'en eft pas fatisfait , de defavouër leurs aérions , Se de
les inftruire des chofes qu'ils trouvent convenables, tant par Requêtes que
par des Adrefles , Propofitions , Mémoires, & autres moïens paifibles.
„ IL Que la Chambre des Communes à part , & autrement que par un
Bill pafle légalement en Aéte, n'a aucun légitime Pouvoir de difpenfer des
„ Loix du Pais, pas plus que le Roi a par fes Prérogatives.
„ III. Que la Chambre des Communes n'a aucun légitime Pouvoir d'em-
„ prifonner aucune perfonne , ou la commettre foUs la garde des Sergeans ,
,, ou autrement , excepté leurs propres Membres, mais qu'Elle doit s'adref-
„ fer au Roi en aïant un bon fondement , pour faire arrêter les perfonnes ,
„ lefquelles doivent jouir du bénéfice de l'Aétc Habeas Corpus , & être de
bonne foi jugez félon le véritable cours de la Loi.
„ IV. Que fi la Chambre des Communes , contre les Loix & les Libertez du
Peuple , trahit la confiance qu'on a mife en eux , & agit négligemment ,
ou arbitrairement 8c illegallement , c'en: un Droit inconteftable du Peuple
d'Angleterre , de leur en faire rendre compte , 8c de pouvoir procé-
der par Convention aflemblée , ou force, contr'eux , comme Traitres de
leur Patrie.
„ Nous trouvons à propos de déclarer ces chofes, comme étant des Droits
inconteflables du Peuple d'Angleterre que vous fervez ; 8c félon ces Droits,
„ (évitant la cérémonie de prefenter des Requêtes à nos Inférieurs, car vous
„ êtes tels par vos prélentes circonftances , les perfonnes envoïées étant moin-
„ dres que ceux qui les envoient, ) Nous proteftons publiquement contre tou-
„ tes vos dites aérions illégales : 8c , en nôtre nom , 8c au nom de tout le bon
„ Peuple d'Angleterre,
Tom. J. Qq q Nous
5)
15
5?
1701
fio MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
Nous requérons 6? demandons ,
„ I. Que toutes les juftes Debtes publiques de la Nation foient païées 6c
„ déchargées.
,, II. Que toutes les perfonnes illégalement emprifonnées , comme defîus,
„ foient immédiatement mifes en Liberté, ou admifes à donner caution, ain-
„ fi qu'il leur efl permis par les Loix, 6c la Liberté du fujet reconnue 6c re-
„ tablie.
„ III. Que Jean How foit obligé de demander pardon à Sa Majeflé pour
„ fès lâches Reflexions , ou chafle fans délai de la Chambre.
„ IV. Que PAccroiflement duPouvoir de laFrance foit pris en confidera-
,, tion , la Succeffion de l'Empereur à la Couronne d'Efpagne maintenue,
„ nos Voifins Protefrans protèges , ainfi que c'eft de l'Intérêt de l'Angleter-
„ re 6c de la Religion Proteftante.
» V. Que le Roi de France foit obligé d'abandonner la Flandre, ou qu'on
„ prefente une Adrefle à Sa Majefté pour lui déclarer la Guerre.
„ VI. Que de proportionnez Subfides foient accordez, à Sa Majefté , pour
„ mettre en exécution toutes ces chofes neceflàires , 6c qu'on prenne foin ,
„ que les Taxes qui font levées, foient mieux reparties, 6c recueillies, 6c les
„ défauts fcandaleux prévenus.
„ VII. Qu'on fafî*e des Remercimens de la part de la Chambre à ces Me£
„ fleurs qui fe font prefentez (i galamment de la part de leur Pais , avec la
„ Requête de Kent, 6c ont été pour cek fi fcandaleufement maltraitez.
„ Ainfi, Meffieurs, vous avez un détail de vôtre Devoir, 6c on efpére que
„ vous y ferez reflexion ; mais, fi vous continuez à le négliger, vous devez
„ vous attendre d'être traitez félon le refTentiment d'une Nation offenfée :
„ car les Anglois ne doivent pas être plus efclaves d'un Parlement, que d'un
„ Roi.
„ Nôtre Nom eft Légion, & nous fbmmes en nombre.
P. S. „ Si vous voulez avoir ce Mémoire fbuferit de nos Noms, cela fera
„ fait à vôtre premier ordre , 6c il fera même prefente perfonnellement. „
Cette Lettre faillit de produire du defordre ; car , le Chevalier How
fit là-deffus un long Difcours, èc dit que puis qu'il n'y avoit point de fureté
pour tenir leur AfTemblée à Weftmunfter, il faloit la tranfporter à Oxford ou
a Exeter. L'on fut furpris, que l'on ne releva pas cet Attentat à la Préroga-
tive Roïale , dépendant abfolument du Roi de fixer les Lieux de l'AfTemblée
qua avec aigr
ré, ne dit mot ; mais, peu après fe leva pour fortir de la Chambre , 6c fit
figne de l'oeil à How de fortir aufîi. Mais, celui-ci le dit à un autre Mem-
bre,
ET RESOLUTIONS D'ETAT. fi i
bre, qui en avertit la Chambre, laquelle aflbupit la Querelle, qui auroit pu 1701
avoir de facheufes fuites. "
D'autres Provinces , & la Ville de Londres même , vouloient faire des
Requêtes, pareilles à celles de la Province de Kent ; mais , le Roi leur fit
connoître que cela lui déplaifoit. Ainfi, on eut la complaifance pour Sa Ma-
jefté de n'en point faire. Cependant , les Grands Jurez , Juges de Paix , &
autres , affemblez aux Semons de la Comté de Warwick , prirent un autre tour
pour dire leurs Sentimens, 8c rirent la Déclaration fuivante.
3»
33
33
3)
33
33
33
COmme nous ne pouvons, fans y prendre intérêt, voir l'Accroiflèment J?'0^1*
du Pouvoir de la France, qui femble fi clairement menacer la Liber- ^ pr0.
té de l'Europe, & particulièrement le Commerce de cette Nation j quoi- vince de
que d'ailleurs Nous ne foïons pas infenfibles aux grandes Dettes que ce War-
Roïaume a contractées , & aux onereufès Taxes dont cette Province ell W1C,C'
chargée; Nous croïons qu'il eft de nôtre Devoir de déclarer en cette con-
joncture, qu'en cas que la Sagefie de la Nation trouvât à propos d'entrer
en des Engagemens pour contrebalancer les Affaires de l'Europe , Nous
„ ne prendrons pas garde aux Dépenfês qu'il faudra faire en cette Occa-
„ fion, à quelque rifque que les fuites puiffent expofer nos vies 8c nos for-
„ tunes. „
Comme le Roi avoit harangué le Parlement en pafTant en Acte le Bill de
la Succeffion, la Déclaration de Warwick fut un aiguillon à la Chambre des
Communes, qui réfolut de préfenter une Adrefie au Roi. Ceux des Mem-
bres, qui, par un Efprit de Parti, avoient femblé retarder les Affaires, firent
de fort vifs Difcours pour la Guerre & entre autres Litleton, Seimour, Bar-
thelemi Shoër: ôc d'autres dirent les premiers, que jufques alors ils n'avoient
pas compris les Affaires} mais, qu'ils voioient alors le Danger de la Nation
& de l'Europe , & la néceflîté qu'il y avoit de faire des Alliances & de fai-
re une Ligue contre le Pouvoir exhorbitant de la France. C'efl là - def-
fus que la Chambre réfolut de préfenter au Roi l' Adrefie qui fut unanime-
ment aprouvée. L'eflènciel d'icelle portoit „ Que les Communes fe-
„ roient toujours prêtes d'aflifter le Roi en toutes les occafions , & de le
„ foûtenir dans telles Alliances qu'il trouveroit à propos de faire conjoinc-
„ tement avec l'Empereur & les Etats Généraux, pour conferver les Liber-
„ tez de l'Europe, la Profperité de Angleterre , Se pour réduire le Pouvoir
„ exhorbitant de la France. „ L' Adrefie fut préfentee en Corps, & le Roi
y repondit gracieufement. Les Communes s'aquittérent enfuite de leurs pro-
menés, & fixèrent les Subfides avec leurs fonds. Il eft vrai qu'EUes retran-
chèrent de la Lifte civile le furplus de fix cent mille Livres fterling , qu'on
avoit accordé au Roi fa vie durant. Ce furplus , qui montoit a plus de
cent quatre vingt mille Livres fterling , devoit être emploie aux ufages
publics. .
L'animofité s'étoit cependant augmentée entre les deux Chambres au fujet
des Lords aceufez. On s'étoit rait divers Meffages cntr'elles ôc au fond "fur
C^qq 2. une
pi MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
1701. une minutie. C'étoit fur le Règlement qui fcroit le premier d'entr'eux , qui
— — — feroit jugé. On prit cette ponéïille à cœur de part Se d'autre. Les Com-
munes prétendoicnt que ce devoit être à Elles à régler cette Primauté, &
les Seigneurs foûtenoient qu'étant les Juges, ils dévoient fixer le rang de ceux
qui étoient acculez. Les Communes firent là-deffus divers Votes contre les
Seigneurs , qui procédèrent au jugement des Acculez , qui furent abfoûs,
parce que les Communes n'y parurent pas pour prouver leurs Accufations.
Les Affaires s'étoient fort aigries ,- fur ce que My-Lord Haveriham avoit laif-
fé échaper quelque duveté contre les Communes dans une Conférence. Auf-
fi, pour terminer ces Débats, le Roi trouva à propos de finir la Séance du
Parlement, 8c de le proroger jutques au 18. d'Août, Se fit aux deux Cham-
bres un Difcours de Remerciement de leur zèle pour le Bien public , Se
pour avoir promtement travaillé aux chofes qu'il leur avoit recommandé à
l'Ouverture de la Seffion, qui venoit de finir. Il remercia fur -tout les Com-
munes pour les Subfides accordez pour les Befoins publics.
Avant cette Proiogation, les Seigneurs prirent quelques Réfolutions pour
opolêr à celles des Communes. Comme elles ne regardent que les Affaires
Parlementaires , on ne les raportera point. L'on fe contentera feulement de
faire mention d'une d'icelles. Elle portoit que les mauvaifes fuites qui pou-
voient réfulter de ce qu'on avoit tant différé d'accorder les Subfides dévoient
être imputées au Confeil fatal , qui avoit retardé l'Affemblée du Parlement,
& les Délais que les Communes y avoient apporté fans neceffité. Comme les
Defordres de la Seffion étoient attribuez au Parti Thory , qui vouloit abattre
celui des Wighs, Se à ce qu'on n' avoit pas continué le Parlement précédent
qui pouvoit encore durer quelques mois, on en rejettoit le Confeil au Comte
de Rochefter Se au Lord Godolphin, qui étoient des principaux Thorysj Se
c'eft pourquoi on l'appelloit un Confeil fatal.
Les Réfolutions des Seigneurs furent tellement du goût des Peuples , que
ceux-ci leur firent prefenter les Remercimens fuivants.
„ M Y-L O R D S,
Remer-
cimens ... r n
du Peu- „ /^'Eft le devoir de chaque particulier de publier la fatisfaction qu'il rc-
ple aux ^ v^v çoit , lorfque la Liberté Se l'Intérêt de l'Angleterre font bien foûtenus ,
cneurs » particulièrement lorfque quelque partie des Legiilateurs fe lignaient dans la
Anglois. ,» délivrance du Peuple.
„ Vos Journaux de cette Seffion ont donné un grand luftre au Pai-
„ rage d'Angleterre} Se il faut que les Peuples reconnnoiffent que dans
„ ce Parlement Vos Seigneuries les ont reprefentez auffi-bien qu'Elles-mê-
„ mes.
„ Vôtre confiante juftice Se vôtre zêlcont maintenu les efprits des Peu-
„ pies. Vô'.re fageffe a éclairé la Nation, Se Nous a difpofez à bien juger
„' du véritable Intérêt de l'Angleterre, auffi-bien que de l'Europe.
„ C'eft vous, My- Lords, qui avez diffipé en Nous les Notions faufîes,
„ par lefquelles Nous étions trompez, Se qui avez ôté le mafque , que quel-
„ ques-
ET RESOLUTIONS D'ETAT. p$
„ qnes-uns avoient pour cacher leur corruption, & la perfidie de leurs def- 1701.
„ feins. ~
„ Vous Nous avez fait voir , My-Lords, que ni la force de l'argent de
France, ni le pouvoir de fes armes, ne peuvent affoiblir vôtre autorité, ni
vous faire négliger la fureté commune ou le bien public.
„ Vos Seigneuries Nous ont donné du repos, puifque Nous voïons com-
ment vous protégez l'innocent contre le danger , & Vous qui êtes nez Ju-
ges , recommandez la Juftice aux Cours inférieures par vôtre glorieux
exemple.
„ Ainfi, My-Lords, Vous ne donnez nullement lieu de douter, qu'ain-
fi que vous protégez l'innocent , vous punirez en fon tems le cou-
pable.
„ Tout le Ro'iaume , My-Lords , aplaudit à vôtre fidélité pour le Roi ,
„ à vôtre affection pour le Peuple -, Se l'incomparable fageflè Se conduite que
„ vous avez montre rend Vos Robes plus vénérables , Se relevé la fplendeur
„ des Couronnes que vous portez.
„ La Cour, My-Lords, vous étoit toujours aquilêj mais à prélênt Vos
„ Seigneuries font en pofleflîon de la Ville de Londres, aufïi-bien que de la
„ Campagne. Vous les avez portez tous à faire journellement des vœux
„ pour Vous , Se à être vos éternels Amis.
Apres que le Roi eut prorogé le Parlement, il pafla en Hollande ainfi
qu'on l'a dit. Il mena avec lui mille Se fix cent Hommes de fes Gardes à
pied. D'ailleurs, il vint cinq mille Hommes d'Irlande. Les trois Regimens
EcofTois qui venoient à la paie des Etats Généraux étoient auflî quelques fe-
maines auparavant arrivez à William ftad. Le jour après l'arrivée du Roi,
ce Monarque fe rendit à midi au Confeil d'Etat, Se enfuite à l'AfTemblée des
Etats Généraux. Il fit à ces derniers un beau Difcours, auquel le Préfident
de Semaine répondit d'une manière convenable Se fage. Voici le Difcours,
Se la Réponfe.
„ HAUTS ET PUISSANTS SEIGNEURS, Difcours
du Roi
„ 1E fuis toujours venu dans ce Pais avec joie, mais fur tout à prefent dans terre aux
„ J cette triite fituation des Affaires, parce que je prévois bien que ma pre- E. G.
„ fênee eft très neceflaire pour le fervice de l'État. J'avois efperé Se fouhai-
„ té, de pouvoir pafTer le refte de ma vie en repos Se en Paix, Se après la
„ fin de mes jours de laiflèr cet Etat dans une tranquile Se florifîànte fitua-
„ tionj A quoi j'ai toujours travaillé, Se particulièrement depuis la dernière
„ conclufion de Paixj Mais il eft furvenu depuis peu de fi, grands change-
„ mens dans les Affaires de l'Europe, qu'on ne peut pas fçavoir à quoi la
„ Divine Providence voudra les faire aboutir. Cependant, je puis afleurer
„ fincerement VV. HH. PP., que foit que les Affaires puiffent être accom-
„ modées ians en venir à de plus grandes brouilleries , foit qu'on foit o-
„ bligé de prendre de nouveau les Armes, je perfifterai dans la même affec-
Q.qq 3 „ «on
P4 MEMOIRES, NEGOCIATIONS, TRAITEZ,
1701. n tion 6c dans le même zèle que j'ai toujours eu pour le fervice 6c la profpe-
' „ rite de ces Provinces, 6c je contribuerai de tout mon pouvoir, à tout ce
„ qui peut tendre à l'avancement du bien de cet Etat , au maintien de fes Li-
„ bertez & de fa Religion , & à fa propre fureté , ainli qu'à celle de l'Eu-
rope. Je fuis ravi de trouver encore ici toutes choies dans un Etat tran-
quile, ce qui après la bénédiction du Dieu tout puifîant, doit être attribué
à la prompte 6c unanime refolution qu'ont prife VV. HH. PP. de fe met-
tre en état de défenfe. Je fuis perfuadé que les Alliez refpeélirs y contri-
bueront auffi tous fortement ; Car je regarde cela comme l'unique moïen ,
ou pour prévenir une rupture, ou en cas qu'on en vienne à une nouvelle
Guerre, pour garantir l'Etat du danger dont il eft menacé par l'union pre-
fente de fi grandes Puiflances. Cependant, ce m'eft une grande fatisfac-
tion de pouvoir affûrer VV. HH. PP., non feulement de mon affèétion,
mais aufli de celle de toute la Nation Angloife , 6c qu'elle eft prête à aflî-
fter cet Etat & à contribuer fortement à fa defenfe 6c à tout ce qui peut
tendre à la fureté commune ; C'eft ce dont VV. HH. PP. doivent être
plainement perfuadées. J'efpere que le Grand Dieu bénira les moïens dont
on fe fervira pour parvenir par la voie desNégotiations, ou par celle de Ar-
mes, en cas qu'on foit obligé de les prendre, au but propoîé, fçavoir une
fureté raifonnable pour la caufe Commune, & en particulier la conferva-
tion de cet Etat dans fes Libertés 6c fa Religion. Je ne fouhaitte rien avec
plus d'ardeur, 6c j'y contibuerai tout ce qui fera en mon pouvoir. Voila
tout ce que je crois necefiaire de dire prefentement ; fi non que je me re-
commande à la continuation de l'Amitié de VV. HH. PP.
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NOus vous remercions de tout nôtre coeur , de l'honneur que vous nous
faites de venir de nouveau dans nôtre Aflemblée, 6c Nous vous témoi-
gnons en même tems la joie inexprimable que nous avons de vôtre heureufe
arrivée. Comme l'abfence de Votre Majefté nous a toujours fait de la pei-
ne, fon retour nous a auffi rejoins chaque fois, mais particulièrement dans
ce tems ici plein de danger 6c d'embarras, où la prefence de V. M. nous
paroit également utile 6c agréable. Nous fçavons bien que Vôtre Majefté ,
pendant fon abfence , a foin de nous 6c travaille à nôtre bien ; mais nous
n'avons pas cependant laifle d'attendre fa venue avec impatience , fçachant
combien la prefence de V. M. eft utile 6c necefiaire en ce Pais dans la con-
joncture épineufe où l'on eft, pour mettre nos Affaires fur un bonpié 6c les
tenir de même avec Pafltftance de Dieu , eu égard à la grande confiance que
chacun a dans cet Etat depuis le plus petit jufqu'au plus grand, en la prudence
6c en la grande capacité de V. M. qui nous adonné fi fouvent à tous, des preu-
ves de cela , ainfi que de fon affection 6c de fon zélé pour le bien 6c la con-
fèrvation de ces Provinces. Nous femmes extrêmement obligez à V.M. 6c
la remercions de tout nôtre cœur de (à perfeverance dans fes bonnes difpo-
fîtions, pour nôtre repos 6c profperité. Nous ne fçaurions aflez exprimer
après;
5J
ET RESOLUTIONS D'ETAT. nf
,, après en avoir eu des preuves fi. fréquentes & fi réeles, la joïe que nous ref- tJOi.
„ fentons pre(êntement , d'en être affinez de nouveau par la bouche de V. ■/
„ M. d'un manière fi cordiale. Nous reconnoifibns 6c fommes pleinement
„ perfuadez, que depuis le dernier Traité de Paix, le loin de V. M. 6c (on
aplication ont tendu à la confervation de cette Paix 6c du" repos public, &
»'
,, qu'ils tendent encore uniquement à procurer une fureté raifonnable à l'Eu
„ rope en général, & en particulier à cet Etat, ainfi qu'aux Roïaumes de
3»
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n
5»
„ Vôtre Majefté. Nous lommes ravis de ce que nôtre conduite depuis les
changemens arrivez dans les Affaires générales, vient d'avoir l'aplaudifiè-
ment de V. M. Et cela nous animera à y perfeverer avec plus de confian-
ce, étant perfuadez que la Paix 6c nôtre fureté ne peuvent être confèrvées
ou recouvrées, fans un effort extraordinaire pour cet effet. Comme l'E-
tat fe trouve en grand danger, & qu'il ne s'agit pas moins que de main»
tenir nôtre Liberté , 6c nôtre Religion , nous fommes refolus de met-
tre en œuvre tous les moïens imaginables , pour la confervation de ces
„ gages fi précieux j Et nous tâcherons d'alléger autant qu'il fera pofi-
„ ble les foins 6c les peines infatigables que Vôtre Majefté fe donne pour
„ la même fin, en apuiant 6c fécondant de tout nôtre pouvoir les bonnes in-
„ tentions de Vôtre Majefté } dans l'efperance 6c attente, que le Dieu tout
„ Puiflànt y donnera fa benediétion. Nous ne fçaurions obmettre', de re-
„ mercier auffi Vôtre Majefté du profond de nos cœurs , des afîèuranccs
„ qu'Elle vient de nous donner, tant en fon nom qu'en celui de fon Peuple,
„ de leur bonne affection 6c de leur refolution unanime à fecourir cet État.
„ Cette louable difpofition de la Nation Angloife en nôtre faveur 6c de la
„ Caufe commune, nous oblige à une reconnoiffànce parfaite, fçachant bien
„ le fond que nous pouvons faire fur l'affiftance d'un Peuple dont le courage
„ 6c la valeur font en fi haute réputation par tout le Monde j Et nous fom-
„ mes redevables à V. M. d'une nouvelle obligation , en ce qu'Elle a fait
„ pour amener fès Sujets dans une dipofition fi favorable, 6c en ce que pour
„ en donner une preuve , Elle nous envoie les fecours promis. Nous fom-
„ mes toujours d'avis que nos intérêts font inféparables d'avec ceux de l'An-
„ gleterrej Et quoi que nous cfperions que cette Nation n'aura jamais befoin
de nôtre Affiftance , nous ne manquerons point à nôtre devoir dans les oc-
cafions. Cependant , nous prions ardemment Dieu , qu'il lui plaife bé-
nir les Confeils de Vôtre Majefté , 6c lui accorder pendant un grand nombre
d'années, une parfaite fanté 6c des forces fufïîfantes, afin de pouvoir conti-
nuer fon application 6c fes foins , pour le bien du public , des Roïaumes
de V. M. & de cet Etat, ainfi que pour la confervation de nos Libertez 6c
„ de nôtre Religion. Et enfin, nous prions V. M. d'être perfuadée, que
comme fon affection 6c fon zélé pout cet Etat fon immuables, auffi nous
perfifterons toujours dans l'amitié 6c la haute eftime nous avons eûë jufqu'à
prêtent pour Vôtre Majefté j 6c qu'auffi long-tems que cet Etat fubfiftera,
nous conferverons une fincére reconnoifîànce des grands 6c incomparables
fervices que nous avons receu de V. M. qui par fa fage.6c courageufe con-
„ duite nous a fouvent tirez des plus grands dangers, 6c qui moïennant l'affi-
ftance
31
M
3»
35
»
fi6 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITE;Z,
1701. ît fiance de Dieu nous délivrera encore de celui où nous fommes prefente-
' „ ment.
Comme Sa Majefté parle dans fon Difcours de l'unanime 8c promte Ré-
folution des Provinces pour fe mettre en bon état , il eft à propos , ce femble ,
de devoir raporter tous les foins pris à ce fujet par les Etats Généraux.
Lorfque ceux - ci aperçurent les Préparatifs extraordinaires que les deux
Couronnes Unies faifoient aux Païs-Bas, & qu'Elles tachoient des defunir les
Etats d'avec l'Angleterre, ils trouvèrent que le plus fur moien pour fe garan-
tir du danger & des vues qu'on pouvoit avoir contr'eux , étoit de fe mettre
en bon état de défenfe. On fongea en premier lieu à garnir les Magafîns
fur- tout des Frontières. Le Confeil d'Etat avoit préfènté pour cela une Péti-
tion de deux Millions en date du 7 Janvier. Les Etats de Hollande , dont
l'exemple donne le branle aux autres, y avoient confenti en date du .1 $. Ce
Confentement fut fuivi par celui de la Zélande en date du z Février, & enfui-
te par les autres Provinces fous diverfes dates. Les mêmes Etats confentirent
auiîi à la Négociation de deux autres Millions pour les Fortifications fur les
mêmes fonds fur lefquels on en avoit négotié quatre en 1688. Ils en firent
de même pour 943100. florins pour l'armement extraordinaire de douze
Navires.
Cependant , à fin que ces Préparatifs ne donnafTent pas lieu aux bruits
qui couroient aux Païs-Bas Efpagnols que les Etats Généraux vouloient la
Guerre , ils écrivirent à leur Réfident Hulft à Bruxelles en date du premier
de Février. Leur Lettre contenoit qu'ils aprenoient avec déplaifir qu'on dé-
bitoit, fur tout dans les Païs-Bas Efpagnols, qu'ils étoient enclins à la Guer-
re, ôc qu'ils ne refpiroient que la Guerre : Que LL. HH. PP. ne pouvoient
regarder ces bruits , que comme répandus pas des gens mal intentionez pour
leur Etat. C'eft puis que LL. HH. PP. avoient en horreur la Guerre & ne
fouhaitoient rien tant que de conferver la Paix & le Repos public, à fin que
leur Etat, qui y a un fi grand intérêt, puifle en jouïr avec une raifonnable
fureté. Âinfi , que ledit Réfident eut à tacher de contrarier ces bruits , &
d'afTurer que LL. HH. PP. avoient une droite intention pour le maintien
de la Paix & du Repos public.
A mefure que les Etats Généraux recevoient de bonnes Nouvelles d'Angle-
terre , ils prenoient des mefures pour fê mettre en bon état. En premier
lieu, ils résolurent de remettre leur Cavalerie fur un meilleur pied. On en
avoit alors Zf . Régimens. Ils avoient été réduits depuis la Paix de Riswick
à trois Compagnies par Régiment. On les remit à 6. Compagnies, chacune
de 60. Maîtres. Ainfi , on ordonna d'en lever foixante & quinze Compa-
gnies. On pouffa l'Armement de Mer jufques à 40. VaifTaux. Il y en avoit
vingt de la repartition de la feule Ville d'Amfterdam. On ordonna même
d'en préparer d'avantage , & de les mettre en état de pouvoir être équipez
au premier ordre. On s'aflûra de quelques Troupes de la Cour de Berlin ,
de la Maifon de Lunebourg, & du Landt-Grave de Hefîè-Cafîèl. Quelques
unes de ces Troupes s'avancèrent même à portée, & quelques Régimens de
Lune-
ET RESOLUTIONS D'ETAT. fiy
Lunebourg arrivèrent même dans les Places de la République. Le Comte 1701.
d'Albemarle, profitant de fa faveur, fit un Régiment Suifle, fans qu'il lui — —
coûtât la moindre chofe. Il tira zç '. hommes de chaque Compagnie Suif-
fe pour le faire. 11 prétendit enfuite , mais vainement , comme Général
des Suifles , d'avoir des Apointemens , en conformité d'une telle Char-
ge. On entra en Négociation avec le Danemarck , avec lequel on fit le
Traité fuivant.
N
Otoire (bit à tous qui y ont intérêt. Après que les Affaires de l'Europe praire
font changées par la mort du Roi Catholique , Sa Majefté le Roi de ^e crître"
la Grande-Bretagne & Leurs Hautes Puiflances les Etats Généraux des Pro- je Dane-
vinces-Unies des Païs-Bas, d'une part, & Sa Majefté le Roi de Danemarck mafek
d'autre part, ont meurement confideré, que pour la fureté de leurs Roïau- &1«E-
mesSc Provinces, il feroit d'une grande utilité que leur ancienne Amitié ôç^rauxi
Confiance fut rétablie , en forte qu'il y eut une parfaite union d'Intérêt 8c
de Convenance, 6c une confidente communication entr'eux , à l'égard de
toutes les Affaires qui pourroient arriver en Europe , 8c qu'on s'y entrepretât
les mains fidèlement, 8c qu'on convint pour cet effet d'une Alliance Defenfi-
ve > Se S. M. le Roi de Danemarck étant informée que Sa Majefté le Roi de
la Grande-Bretagne 8c Leurs Hautes Puiffances auraient envoie ordre à leurs
Miniftres à Sa Cour, d'entrer en Conférence avec les Miniftres , qu'il plai-
roit à S. M. de nommer pour travailler à une telle Alliance Defenfive, a pa-
reillement donné ordre à fes Miniftres ; fçavoir, le Sieur Conraed Comte de
Reventlow , Seigneur de Ffrifenwoldt , Loyftrup , Callbe 8c Clausholm ,
Chevalier, Confeiller Privé, 8c Grand Chancelier de S. M. le Roi de Dane-
marck y le Sieur Siegfried dePleffen, Seigneur de Parin 8c HoickendorfF,
Chevalier, Confeiller Privé de S. M. le Roi de Danemarck 5 le Sieur Knudt
Thott, Seigneur de Knudftrup 8c Gaunoe , Chevalier, Confeiller Privé , 8c
Député dans la Chambre de Finances de Sa Majefté le Roi de Danemarck }
le Sieur Chriftiari de Lente , Seigneur de Sarlhaufen , Chevalier Confeiller
Privé 8c Premier Secrétaire de Guerre de Sa Majefté le Roi de Danemarck}
8c le Sieur Chriftian de Schefted , Premier Secrétaire 8c Confeiller d'Etat de
S. M. le Roii pour entrer en Négotiation fur ce Sujet avec le Sieur Hugo
Greg Refident de S. M. le Roi de la Grande-Bretagne à la Cour du Roi de
Danemarck , 8c avec le Sieur Robert Goes Seigneur de Bouchhorftburg, Re-
fident de Leurs Hautes Puiflances à la Cour du Roi de Danemarck , lefquels
après diverfes Conférences, 8c après la Communication 8c Echange de leurs
Plein-pouvoirs, font convenus des Articles fuivants.
I. Les Alliances Defenfives conclues entre S. M. le Roi de Grande-Bre-
tagne, 8c les Seigneurs Etats Généraux des Provinces-Unies, d'une part, Se
S. M. le Roi de Danemarck d'autre part, le 5. de Novembre 1690. 6c le 3.
de Décembre 1696. demeureront en leur vigueur, 8c font confirmées lk re-
nouvelles en tous leurs Points 8c Claufes horfmis ce qui fera changé par le
prefent Traité.
II. Sa Majefté le Roi de la Grande-Bretagne , 8c Leurs Hautes Puiflan-
ïom. I. Rrr ces
1701.
*On eft
conve-
nu,qu'en
casqu'on
vienne
à une
Guerre,
S. M. le
Roi de
Dane-
marck
pour la
fàreté du
Com-
jnerce
fermera
tous les
Ports &
Havres
de Ion
Obeif-
fance
pourles
Arma-
teurs ôc
les Vaif-
leaux de
Guerre
de l'un
&de
l'autre
Parti , à
moins.
fi8 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
ces promettent de paie* fans aucun rabais , faute , ou délai , les fommes ftipulées
par la fufdite Alliance de l'an 1696., en bonne monoïe d'Hollande à Amfter-
damj la moitié aufïi-tôt que les Troupes dont il ell parlé dans le diziéme Ar-
ticle de ce Traité commenceront à marcher vers les Frontières de Leurs Hau-
tes Pu i (lances, 6c l'autre moitié, fix mois après : defquelles fommes il fc
trouvera une Liquidation exacte à la fin de ce Traité.
III. Et comme il importe beaucoup pour les Traffiquans, que la Mer foie
libre & fûre, * S. M. le Roi de Danemarck promet à S. M. le Roi de la Gran-
de-Bretagne , ci? aux Etats Généraux que pour la fureté du Commerce , en cas
qiCon vienne à une Guerre , Elle fermera tous les Ports ci? Havres de [on Obéïf-
fànce aux Armateurs ci? aux Vaijfeaux de Guerre , h moins que ces VailTeaux de
Guerre ne viennent pour convoier une Flotte de VailTeaux Marchands -t au-
quel cas ils auront libre entrée dans les Ports 6c Fleuves de S. M. mais non
pas quand ils convoieront des VailTeaux particuliers 6c détachez ; Or une
Flotte Marchande ne fera réputée pour telle , que quand elle fera de quaran-
te VailTeaux, ou au de là> & il futfira qu'elle ait été de ce nombre, en paf-
iànt à la hauteur de la Pointe de Jutlàndc, fans qu'il (bit befoin, qu'elle foit
fi nombreufe , quand les VailTeaux de Guerre entreront dans les Ports de Sa
Majefté , puifque lesVaiffeaux Marchans étant arrivez à cette hauteur, tirent
vers le Sond, ou fe difperfent en plufieurs Ports de Norvegue. Pour le refte,
on fe rapporte au quatrième Article Secret de l'an 1696.
IV. Sa Majefté le Roi de Danemarck ne s'oppofera plus contre le o.Elec-
torat; mais Elle promet de fe conformer au contenu du 3. Article du Traité
de 1606., 6c du 7. Article Secret dudit Traité.
V. S. M. le Roi de Danemarck ne prendra aucun Engagement, ni entre-
ra en aucun Traité, par lequel la Paix du Nord puiflè être troublée, ou par
lequel un troifiéme Parti fe puifie former, foit dans le Nord , foit en Alle-
magne, ni fomentera de tels troubles, fous prétexte d'y être engagé par des
Traitez précedens : mais au contraire, S. M. tâchera d' empêcher , que des
Traitez de cette nature ne fe fallènt point en conformité du 4. Article de la
fufdite Alliance.
VI. S. M. le Roi de Danemarck ftipule expreflement la Liberté du Com-
merce pour fes Sujets , en cas qu'on en vienne à une Guerre , 6c ne voulant
pourtant pas permettre que des Etrangers commettent des fraudes, en fe fer-
vant des Paflêports Danois, on eft convenu, qu'immédiatement après la figna-
ture de ce Traité, on examinera la Convention qui fut faite l'an 1690. en-
tre Sa Majefté le Roi de la Gande- Bretagne 6c Leurs Hautes PuiiTances
d'une part, 6c Sa Majefté le Roi de Danemarck d'autre part , au fujet
du Commerce en France, afin de changer cette Convention autant qu'il fe-
ra necelTaire , pour mieux prévenir les fraudes -y 6c jufques à ce qu'on foit
ladite Convention fe-
ce
changement
convenu d'un commun accord de <-i- llm^hiv-ui. ,
ra rétablie dans fa première vigueur , 6c fervira de Loi 6c de Règle pour le-
dit Commerce.
VII. Sa Majefté le Roi de la Grande-Bretagne 6c Leurs Hautes PuiiTan-
ces promettent' de païer à Sa Majefté le Roi de Danemarck, trois cent mille
Ecus.
ET RESOLUTIONS D'ETAT. fip
Ecusde Subfides par an , tout le tems * Que la Guerre durera ; Se le paie- 1701.
ment s'en fera en bonne monoïe de Banca à Hambourg , tous les trois
mois un quart de la Comme ftipulée. Et en cas qu'on n'en vint pas à une * Que la
Guerre, mais que les difleniions prefentes fufient allbupies par un Accommo- Guerre
dément, 6c que pourtant les Troupes de Sa Majefté le Roi 'de Danemarck iji™
ruflent actuellement en marche vers les Frontières de l'Etat ; Sa Majefté le blés dû-
Roi de la Grande-Bretagne 6c Leurs Hautes Puiflances -f ne laijferont pas de reront, a
païer en tel cas, toutes les Levées de/dites Troupes. corn ter
Et fi un Accommodement fe faifoit après la Ratification de ce Traité, mais ti"]]°^.r
avant la marche actuelle defdites Troupes vers les Frontières de LL. H H. PP. grumre
S. M. le Roi de Danemarck fe contentera d'un an de Subfide & d'un quart dupré-
de la fomme ftipulée pour les Levées. ^,nt.
VIII. Sa Majefté le Roi de la Grande-Bretagne promet auffi en particu- riUt '
lier, de païer à Sa Majefté le Roi de Danemarck ce qui lui eft dû encore en tPaïe-
vertu de la Convention de 168p., tant pour le tranfport des fept mille Hom- [cinca$n
mes en Irlande, qu'à l'égard de ce qui refte à païer encore auxdites Troupes outre les
de leur folde en cas qu'on trouve par la Liquidation, qui s'en fera, que tout Levées
n'a pas été paie; 6c le deconte de l'un 6c de l'autre fera fait dans un an après ^ffdltes
la Ratification de ce Traité} 6c le paiement enliiite fans aucun delay , dans pes, trois
la Ville de Hambourg. — mois des
IX. Et pour ôter toute pierre d'achoppement, Sa Majefté le Roi de Da- Sut>fid«
nemarck veut bien defifter de toutes les prétentions , qu'il pourroit avoir à "'P^5'
la charge de LL. HH. PP. à condition que LL. HH. PP. s'obligent à païer
pour S. M. les fommes que la Province d'Hollande 6c la Ville d'Amfterdam
prétendent d'Elle> & à reftituer à fadite Majefté les obligations, que feu S.
M. le Roi Frédéric III. de glorieufe mémoire a données à la fufdite Pro-
vince & à la fufdite Ville.
X. S. M. le Roi de Danemarck promet de faire marcher au fècours de S.
M. lo Roi de la G. B. & de LL. HH. PP. auifi-tôt que le prefent Traité fe-
ra figné trois mille Cavaliers, mille Dragons, 6c huit mille Fantaflins du
Roïaume de Danemarck 6c du Pais de Holftein , lefquelles Troupes feront
dûëment montées 6c armées 6c pourvues de leurs Officiers 6c Généraux. Lef-
dites Troupes feront ferment de fidélité à S. M. le Roi de la Grande - Bre-
tagne 6c à LL. HH. PP. tout de même que les 7000. Hommes des Trou-
pes Danoifes firent ci -devant à Sa Majefté le Roi de la Grande-Bretagne
quand elles entrèrent en fon fervice. La Collation des Charges vacantes , 6c
l'Adminiftration de la Juftice fe fera fur le même pied , qu'il a été pratiqué
à l'égard defdits 7000. Hommes. Sa Majefté le Roi de la Grande - Bretagne
6c LL. HH. PP. paieront pour la Levée defdits Troupes, 80. Ecus pour
chaque Cavalier, 60. Ecus pour chaque Dragon, 6c 30. Ecus pour chaque
Fantaffin. La moitié de cet Argent fe paiera auffi - tôt que lefdites Troupes
feront effectivement en marche vers les Frontières de LL.HH. PP. 6c l'autre
moitié quand elles feront effectivement arrivées fur lefdites Frontières. La Sol-
de 6ç le traitement de ces Troupes fera fur le même pied , que des autres
Troupes de LL. HH. PP., à fçavoir celle des Regimens ordinaires Danois,
Rrr î com-
513 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
i~01- comme celle des autres Regimens ordinaires de l'Etat. Ce paiement (èra
1 mis entre les mains des Commiflaires Danois pour en faire la diitribution fans au-
cun rabat ou diminution, Se commencera du jour que lefdites Troupes fe met-
tront en marche vers les Frontières de l'Etat. Et s'il arrivoit qu'on trouvât à
propos de tranfporter les Troupes qui doivent venir du Danemarck & du Pais
de Holflcin en tout ou en partie par Mer vers le Païs de l'obeiflance de l'Etat,
ce tranfport fe fera aux dépens de S. M. le Roi de la G. B. 6c de LL. HH.
PP. : & en cas de neceffité, il fera permis de fe fervir des Vaiffcaux de S. M. le.
Roi de Danemarck , ou de ceux de fes Sujets, pour faciliter & pour hâter ledit
Tranfport. S. M. le Roi de la G. B.Se LL. HH. PP. pourront garder lefdites
Troupes en leur fervice, auffi long-tems qu'ils le trouveront a propos ; Se
quand ils les voudront renvoier, ils le feront fçavoir a. S. M. le Roi de Dane-
marck trois mois auparavant. Cependant ii quelque rupture ou Guerre fur-
vient , lefdites Troupes continueront , non obltant cela dans le fervice de S.
M. le Roi de la G. B. Se de LL. HH. PP. autant que la Guerre durerai
à moins que S. M. le Roi de Danemarck ne fut attaqué dans les Roïau-
mes & Etats , pour leur avoir fourni lefdites Troupes , auquel cas S. M.
le Roi de Danemarck fe referve le droit Se le pouvoir de les rapeller, auf-
lï-tot qu'il le trouvera néceflaire.
XL En cas que par malheur , un , ou plufieurs Regimens ou Compagnies
defdites Troupes viennent à être ruinées , S. M. le Roi de la G. B. Ôc LL.
HH. PP. promettent de païer fans aucun délai, aux Colonels, ou aux Ca-
pitaines des Regimens ou Compagnies ruinées les Levées néceflàires , poul-
ies remettre fur le même pied qu'auparavant. Et fur la fin de la Campagne,
les mêmes Recrues feront païées aux Officiers Danois qui fe paient aux autres
Officiers de LL. HH. PP. afin que lefdites Troupes fe puiiîént toujours con-
ferver en bon état, pour être renvoïées un jour air un autli bon pied qu'elles
ont été reçues.
XII. Pareillement, S. M. le Roi de la G. B. Se LL. HH. PP. promet-
tent, que fi S. M. le Roi de Danemarck fera attaqué, ou troublé dans la
poiîeffion de fes Roïaumes, Provinces, Terres, Prérogatives, Péages, Navi-
gations, Commerce, ou autres Droits , ils «nvoieront promptement lefdites
Troupes, en leur païant un mois de Gage pour les fraix de leurs retour; le-
quel paiement d'un mois de Gage fera fait de même quand après la Paix, lef-
/ dites Troupes feront renvoïées; Se outre cela, ils envoieront à S. M. le Roi
de Danemarck le fecours par Mer Se par Terre ftipulé dans les Articles Se-
crets du Traité de J'an i6po.; lefquels fecours ils entretiendront durant la
Guerre à leurs propres dépens; S. M. le Roi de Danemarck n'étant obligé
de fournir à ces Troupes, que le Pain Se le Fourage.
XIII. Et pour rendre cette Alliance Se Union d'autant plus parfaite , Se
pour ne laiffer aucun fcrupule aux parties fur la certitude du Iccours qu'ils ont
à efpercr l'un de l'autre , de la manière qu'il a été arrêté ci-deflus ; on eil
convenu expreflèment , que pour juger à l'avenir , fi le cas de cette Alliance
exiite, ou non; il fuffîïa que quelque une des parties foit aéfcuellement atta-
quée par la force des Armes , fans qu'elle ait ufé auparavant de force ouverte
con-
ET RESOLUTIONS D'E T A T. f2r
contre celui qui l'attaque: Mais cet Article ne fera applicable qu'aux occa- ljoù
lions qui arriveront ci-après. Pour leprefent, le lecours de 12000. Hommes ■
marchera vers les Frontières de LL. HH. PP. autfi tôt que ce Traité aura
été ligné , comme il ell dit dans l'Article X.
XI V. Et afin qu'il ne puiiîe à l'avenir arriver aucune brouïllerie entre S.
M. le Roi de Danemarck Se LL. HH. PP. au fujet du Commerce , on effc
convenu aujourd'hui , que le Projet du Traité de Commerce & de Péage de
l'année i6pi fur lequel on a traité premièrement à Copenhague, Se puis
après à la Haïe, fera reafiumé , ajufte, conclu Se figné en même tems que
celui-ci.
XV. Cette Alliance durera pendant l'efpace de dix ans, à corn ter du jour
de la fignature de ce Traité} & les Alliances de iôpo. Se iôpô"., étant renou-
vellées par ce Traité dureront le même tems de dix ans.
XVI. On conviera l'Empereur à entrer en cette Alliance} & iî le Roi de
PrufTe, la Maiibn de Lunenbourg, ou celle de Heiïên-Caflel demanderont à
y être compris, il fera libre aux Hauts Contractais d'y conlèntii*} quand ils
feront convenus entre eux , des Conditions fur lefquelles lefdites Puifiances y
' pourront être reçues.
XVII. Pour le meilleur éclaircifiement de toutes les Claufes de ce prelênt
Traité, qui concernent les Fraix de la Levée, de l'Entretien , du Tranfport,
de la Marche , des Recriics , & du Retour des Troupes mentionnées dans l'Arti-
cle X. , il eft expreflement ftipulé, que S. M. le Roi de la G. B. paiera tous ces
Fraix, lorfque lefdites Troupes feront dans fon fervice , & que les Etats Gé-
néraux les paieront , lorfqu' elles feront dans le Service de LL. HH. PP. * * Cet
XVIII. Les Ratifications du prefent Traité feront échangées à Copenhague A.rticIe
à comter du jour de la fignature de ce Traité en fix femaines , de la part de daens s
Sa Majcfté le Roi de la Grande - Bretagne Se en quatre femaines de la part l'Inftru-
des Etats Généraux. ment fi-
gné par
En foi de quoi nous avons figné ce Traité, Se y fait mettre les Sceaux de ffresDa-
nos Armes. nois.ni
*' en celui
H. G R E G. figné pas
(L. S.) leSr.
Fait à Odenfée ce 20. de Janvier 170 1.
O n prit aufîî des Troupes de l1 Electeur Palatin , qu'on paia fort chère-
ment, Se on en prit aufii de quelques autres Princes du Corps Germanique.
On avoit cependant été en quelque peine de la Cour de Pruilè. C'efr. d'au-
tant qu'Eue ne le preflbit pas de faire avancer toutes les Troupes qu'Elle de-
voit. Elle faifoit follicitcr les Etats Généraux à moienner la Paix entre le
Roi de Pologne 6c celui de Suéde } alléguant que fi cette Guerre ne s'éteignoit
pas, Elle ne pourroit pas affilier la République avec toutes fes Forces. Dans
la crainte d'une Invafion des Suédois dans la Saxe, le Roi de Prufib avoit en-
voie deux mille chevaux au lecours des Saxons } mais > il les contremanda
Rrr 3 pref-
Goéz.
r_i MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
1701 . prefque d'abord. Cependant , les Nouvelles levées que ce Roi foifoit n'avan-
çoientpas, faute, ditbic-on , de Finances. Potfr lever cet obftacle , il fît
un emprunt de deux cent mille Ecus fous la Garantie des Etats Généraux que
ceux-ci lui accordèrent. Il y eut en ce tems-là quelque Trouble à cette
Cour-là. Le Grand Chambellan, qui étoit le Favori de ce Roi, fit faire dé-
fenfe à tous les Miniftres d'Etat de parler à aucun Miniftre Etranger; ce qui
faifoit beaucoup murmurer contre lui. Il prétendent même d'avoir le pas iiir
tous les Miniftres Etrangers , comme poilèdant la première Charge de fa
Cour, 6c le prit même fur le Miniftre de l'Empereur qui s'en plaignit haute-
ment. My-Lord Rabi, connu depuis au Congrès d'Utrecht fous le nom de
Comte de Strafford, avoit pourtant été diftingué à cette Cour-là. Jl y avoit
été envoie par le Roi d'Angleterre, pour féliciter le nouveau Roi fur fon A-
vénement à la Couronne. Le Roi de Prude lui donna , lorfqu'il prit congé,
une belle Bague, qui fut eftimée à Amfterdam, où ce Lord la montra, être
de la valeur de trente mille florins de Hollande. Ce Lord avoit parlé lui mê-
me à ce Roi-là touchant les Troupes, 6c il raportoit qu'il lui avoit répondu
qu'il en donneroit , fi l'on lui donnoit de l'argent. Cependant, l'Empereur
remettoit les huit mille hommes , que la Cour de PrufFe devoit lui fournir ,
au fervice de Etats Généraux. Le Général d'Obdam , qui étoit de la part
des Etats Généraux à cette Gour-là, follicitoit la marche de ces Troupes-là,
Par la reponfe qu'on lui fit , l'on vid enfin que les retardemens ne venoient,
qu'en vue d'avoir quelque Avantage. Celui-ci confiftoit à exiger qu'on four-
nît à ce nombre de Troupes du pain 6c du fourage. L'Envoie de ce Roi-là
n'eut fa première Audience que le 7. de Juillet. Elle avoit été différée, à
caufe de la nouvelle Roiauté , qui changeoit le Cérémoniel , 6c qui fut enfin
réglé. Cet Envoie fit la même Demande du pain 6c du fourage pour ces
huit mille hommes , ce qu'on voulut bien accorder.
Outre deux Régimens qu'on avoit pris du Landt-Grave de Hefle-Caffel on
trairoit auflï avec ce Prince pour quelques autres vieilles Troupes. Le Gou-
verneur du jeune Prince fon Fils, qui étoit revenu d'Angleterre avec le Roi,
eut ordre d'infinuer à Sa Majefté de porter l'Empereur à permettre au Landt-
Grave fon Maître de mettre des Troupes dans l'importante Forterefle deRhin-
feldt. Comme Sa Majefté Impériale ne trouva pas à propos d'y aquiefeer, il
falut en venir à bout par d'autres voies, 6c cela quelque année après, ainfi
qu'on le dira en fon tems.
On tacha aufli d'engager la Suéde à donner quelques Troupes. On fit
pour cela pufieurs Démarches. Cependant , l'Ambafladeur Lillienrooth ,
bien loin de paffer fes bons offices pour cela , infpiroit à fa Cour des Senti-
vnens François. Pour même parer le coup il fe mit à folliciter de bouche
les Secours ftipulez dans le dernier Traité. Comme l'on lui répondoit qu'il
étoit impoffible à l'Etat de fe défaire des Troupes, puis qu'au contraire on
étoit obligé d'en acheter, il infifta qu'on lui donnât un Equivalent en argent.
L'Angleterre contribua quelque chofe pour contenter le Roi de Suéde. Ce
Monarque avoit fait acheter en ce Roïaume-là pour cent mille Ecus de Drap
pour fon Armée. Sa Majefté Britannique fit paier cette lomme-là. Cela
fut
ET RESOLUTIONS D'E T A T. j-z?
fut pris en bonne part par le Roi de Suéde. On étoit bien difpofé en Hol- 1701.
lande de faire de (on coté quelque chofe j mais , on y craignoit d'irriter le ■
Czar. L'Ambaftadeur de Suéde demanda la Garantie des Etats Généraux
pour un Emprunt de trois cent mille Ecus. Le Roi de Suéde offroit pour
hipoteque les Revenus de la Doiianne de Riga. La Garantie fut accordée ,
& l'Emprunt fait. Il faut dire à la louange des Suédois , qu'ils accomplirent
de bonne foi leur Engagement , tant pour le paiement des intérêts , que des
portions du Capital , qui devoit être rembourfé par termes. Lorfque le Czar
prit enfuite cette Ville-là, il ne rcltoit qu'un petit refidu à paier , qui donna
lieu enmite à quelque débat avec le Czar , ainfi qu'on le dira en (on tems.
L'Ambafladeur de ce Monarque Rumen Ht des Plaintes verbales fur cet
Emprunt.
L'Ambafiâdeur de Suéde fut en ce tems-là averti qu'on faifoit faire quanti-
té d'Armes à Amiterdam pour fon Maître. Il envoïa là-deffus fon Secrétaire
en cette Ville- là, fans qu'il pût découvrir le fondement de l'Avis. De forte
qu'il craignit que ce ne furfent les Mofcovites , qui en fiflent faire fous fon
nom. Auffi cette crainte fe trouva- 1- elle dans la fuite fort bien fondée. Ce
qui faifoit voir à cet Ambaflâdeur que le Czar ne méditoit pas fincérement de
faire la Paix. C'eft non obftant une Lettre qu'il écrivit au Roi d'Angeleter-
re pour preffer fa Médiation pour faire la Paix. L'Ambaffadeur du Czar tra-
duifit lui-même cette Lettre de la manière qui fuit.
Tranjlatïo Literarum , Magni 'Domini Sua Tzarea Majejia- Lettre
tis , ad Magnum Domïnum , fuam Regtam Majejiatem au Roi
Magna Brïtanniœ. d'Angk-
0 terre.
Poft titulos utriufque Majeftatis.
pRaterito anno 1700. Decembris die 8. inNoflris, Magni Domini ', noftrœ Tza-
rea Majeftatis literis ad vos , dilecliffimum fratrem noftrum , Magnum Do-
minum , veflram Regiarn Majejiatem nos ad propofitam in conàiiatione controver-
fiarum inter nos & Majeftatem Suecia exortarum , exoptandam Veftram Media-
tionem &f ajfecurationem (quod nempe Veftra ob Conftlia Rex Suecia in eâ re ob-
fecuturus fit &? nobis juftâ in re fiatisfatlurus fit , modo ut locus afiignaretur , ubi
ha Controverfia amicabili modo componi pojfent, eà confidentes fpe y fore , ut bas
contrôler fias toliendi non difficile erit , nobifque à Coronâ Suecïcâ jufta fiatisfac-
tio fieri pofiit) fcripfimus, perdiktle refpondendo quod nos , Magnus Dominas no f-
tra Czarea Majeftas, illam, Veftra Régi a Majeftatis adnosfaclam de Pace pro-
pofi/ionem cum Coronâ Suecicâ in fufeepto bello ob multas nobis injeclas ab illis in-
jurias, non detreclaremus fcf m àefignatione loci huic rei faciendâ ad compofitio-
nem Pacis , poft comunicationem fecundum obligationem faderis inter nos patli cum
Regiâ Majeftate Polonia inftitutam , Veftra Regia Majeftati abfque morâ indi-
caturi ejficmus , qnamobrem nos Magnus Dominus Noftra Czarea Majeftas nunc
"jobis dileclifiimo Fratri Nofiro Magno Domino, Veftra Regia Majeftati bis Nof-
tm
fi4 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
1701. tris Czarea Majcfiaiis dilcilis Lit 'cris , fraternè fignificamus, quodnosjuxta obli-
— .. gatïoncm commuais fa devis cum Fratre Nofiro Magno Domino fuà RcgiàMaje-'
ftate Polonia ad dejideratam propofttionem Veftram , ad componendam ïllam Pa-
ccm cum Majeftate Suecia , diîetlis intcr nos infiitutis communicationibus ad com-
Kiunem militât cm, utrifque nobis Magnis Dominis Paci cum fatisfaftione praftan-
da infervientcm , Veftram Fratris Nojiri Magni Domini, Veftrâ Regia Maje-'
ftatis, Médiat iofiern conjunclim perdileilè accipiamus , praoptantes as ptnitiu in
co confidentes quemadmodum 13 Vos, nos ajftv'eratis, ut Corena Suecica, Vejira
ob Confilia , propter multas nobis ab illis illatas injurias in omni re jufiâ , pr opter
Veftram Regia Majejiatis erga nos, diîetlam afteverationem £5? Mediationem Vef-
tram, nobis pro defidcrio noflro fatisfecerit ob quam noftram JàtisfaSlionem, Vos
Magnus Dominas Vejira Regia Maje fias tanquam Chriftianas Pacificus Médiat or
ad congre [Jus , comodum huic rei locum ajjignare atque indicare condignemini , ubi
ha controverfta, Médiat ione Veftrâ in prefentiâ communiant Plenipotentiariorum
felici &f cum fatisfatione conjunclâ Pace cum Coronâ Suecicâ componi poffint , quâ
de te, Nos à Vobis Fratre Nofiro , Magno Domino , Veftrâ Regiâ Majeftate,
dikcliim Refponfum expe&amus, Nos autem ex parte noftrâ ad hune à Vobis de-
ftgnatum huic rei oportunum locum Plenipotentiarios Nofiros ad Pacem concilian-
dam in tempore cum nobis à vobis indiclum fuerit , Nos , Magnus Dominus Nof-
trâ Czarea Majefias mittere non cuntlabimus ad hac precantes nos Magnus Do-
minas Nofira Czarea Majefias à Domino Deo , Vobis , Fratri Nofiro , Magno
Domino Veftrâ Regia Majeftati diuturnam incolumitatem , aefelix in Regnis
Veftris Imper ium-y Dabantur Imperii noftri in aulâ Imper ante noftrâ Magnâ urbe
Mofcovia Anno a nativitate Chrifti Domini 13 Redetnptoris nojiri Jefu Cbri*
fti 1701. Menfis Maii die 11., Imperii nofiri 10. Anno.
C e qui confirment cette Penfée de l'Ambafiadeur de Suéde étoit que le
Roi de Pologne offrait bien auffi de faire la Paix ; mais , fous des conditions
que les Suédois traitoient de ridicules. Quelques unes d'icelles étoient que le
Fort de Dunamond refteroit aux Polonois ; que la Livonie retournerait à la
Pologne, en cas que la Lignée Mafculine du Roi de Suéde vint à s'eteindre>
St que la Religion Romaine y ferait rétablie. Les Suédois s'écrioient contre
ces Propositions , -& fur-tout par raport à la Livonie, qu'ils difoient n'être pas
annexée à la Famille Roïale , mais à la Couronne de Suéde. L'Ambafiadeur
de Suéde afluroit que l'Envoie des Etats Généraux , qui après être arrivé à
Vaifovie & avoir eu une longue Conférence avec le Roi de Pologne, étoit
parti en diligence pour fe rendre en Livonie auprès du Roi de Suéde , perdrait
Ses pas. Comme cet Ambafîàdeur s'attendoit a l'arrivée du Roi de la Gran-
de-Bretagne, il trouva à propos de préfenter aux Etats Généraux ce Mé-
moire.
Mdmoi- CELSI AC P RJEPOÏENÏES DOMINI.
rede .
bafïTdc Praterire non poteft Sacra Regia Majefiatis Suecia Legatus Extraordinarius
Suéde quo minus menions reddat CC. ac PP. DD. VV. qttemadmodum Rex ac Do-
minas
ET RESOLUTIONS D'ETAT. ^
minus ej us démenti ffïmus banc meritb fpem j 'ovcrit , fe cor.tr a ho/les fnos , vigore 17OI.
Fœderum, quibus cura Celfts ac PP. DD. FF. inviccm obfiringhur , jam pri-
dem auxilio fuifje potiturum. Cum auîem nibïlbominus ipfi in bunc tifque dicm eo aUxE.
carere , & neque ad tôt S. R. M. proprias literas refponfum fubfequi, neque tôt G. , du
ipfius jufju bîc exbibitos libellas Mentor iales effeclum bahuijje , contigcrit , Sacra p-J"'1-
R. M. diclo fuo Légat 0 Extraordinario injunxit ut Celfas ac PP. DD. FF. eo et"
nomine denub quant iiijlantiffimè compcllaret. Vidclicet baud ignorant ipfie , quid
jubeant Fœderum leges , quibus dtfertè eautum aux Ma intra tcrtium menfem, a
■prima requifiticnc computandum , quin imb citiiis fi ficri pofj'et , prœfiari opor-
tere , cum t amen jam integri fedecim menfes 13 amplius effluxerint , ex quo Sa-
cra R. M.primum, nuntiato periculo, opem fibi ferre expetiit. Neque dubittm
quin CC. ac PP. DD. FF. pro eo ac par eji reput aturœ fint anïmis, quid.amici-
tia , quid communis hic utilitas fuadeat atque requirat , ita ut vel hoc intuitu ,
tametfi fœdera deejfent , fubfidia bine expeclare liceret ; prœfertim cum hifee cau-
fis meritb aàjungenda fit ratio, fummis certè Poieflaiibus digna, quarum unam-
quamque Cbrifiianœ fidei-, ne c non œqui boneftique fenfu imbutam , hoc fibi offi-
cium ultra imponere deceret ut juvandum tuendumque fufeiperet eum , qui culpœ vel
minimœ experj, vint tamen & injuriant patitur bonis omnibus detefiandam. De
aetero CC. ac PP. DD. FF. dijudicandum relinquitur , quanta amicitiœ illa-
rum firmitas , fœderibus autboritas fit accefj'ura, fibâc occafione validis fuppetiis
S.*R. M.fublevent, & ex adverfo fi eamdem deftituant, quantum roboris ami-
citiœ , quantum dignationis fœderibus earum decederet , £5? quantum denique in
pr opium decus quin &? propria commoda peccaietur. Si enim prœfentis tempo-
ris babitum juxtà perpendant CC. ac PP. DD. FF. & quid de S. R. M.
amicitïa fibi viciffim polliceri queant , procul duj/io agnofeent , quantopere fuis
rébus expédiât ita adminiculo effe S. R. M. ut bac , laudabile exemplum fecu-
tura , vicem cxfolverc valeat. Nec facile quifquam dijfitebitur , quin arcla
inter S. R. M. (3 CC. ac PP. DD. FF. atnicitia , quin mutua utilitas
Regnorum, ditionum £5? fubjeclorum fecuritas, propria œftimatio , fœderumque
dignitas ejufmodi fint rationes, quibus CC. ac PP. DD. FF. non poffint non
induci ad prœfianda ea , quœ S. R. M. Jummo jure , parique fiducia defide-
rat : nihil equidem quod alicujus fit momenti, hic vel dubitandi anfam p'rœbere
poffe videtur. Nam nec bello haclcnus difiritla fuit bœc Refpnblica , ttec vi-
lium defeclum ferio caufabuntur, quos confiât, caufam fuan, >, eâ quœ prœ ocu-
lis eft, potentiâ, etiam contra validiffimum quemque nulle non tempore defenfuros.
Accedit quod lucrnm prœfentiffimum ad fit , ubi ojjicii prœfiili gratiam non peritu-
rum , fed cum infigni fœmre reddituram. Neque profeltb S. R. AL amicitia eo
Ioco babenda èfil quaft opéra: pretiuni vis fit , follicitïus canàem tueri, cum non tan-
tum fœdera inita aliud évinçant , fed & S. R. M. ea jamdv.dum ediderit virtaHs
fpec:;)ji:i.i , qu<e dubitare non finunt quid impofleriim Orbi de eo fit expetlandum.
£uo pr.it erea affeclu in Rempublicam feratur, ac quo aninto confervanda augen-
dàque iuilmiori amicitiœ fludeat (3 id CC. ac PP. DD. FF. cegnitum habent.
yJbfit itaque unius vel altenus, five privatas rationes, five erga hofies S. R.
M. propenfionem, major is fieri pofj'e quam publicam militât em ac public ar,t fi-
dem, quant utiqv.e où talia deferi, (3 minus dignum 13 valde anceps futur uni ,
font:!. S il" CC.
5i5 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
170 1. CC. ac PP. DD. VV. pro fvlitâ fuâ prudentià fpontè judicabant. Subintellexit
quidem memoratus Légat us Extraor dinar lus ejfe qui afferere fuftineant , jamfa-
tisfaclum effe fœderibus eo quod anno fuperioti ClaJJis Navium Bellicarunt ver fus
Fretum Orefundicum mijfa fit. Aft verb non animadvertunt hi taies , fe una ex
parte vehementer imminuere infigne aliàs CC. ac PP. DD. VV. in ducem Holfa-
tiœ meritum, verumque illud decus , ex Guarantià fideliter ei prœfiità par tum-, ex
altéra verb fruftra CC. ac PP. DD. VV. tribuere velle ea quœ ipfie quâ finit
aquanimitate jibi vendkare dedignabuntur , haud isgre cognofeentes nondum libera-
tam ejfe fidem, S. R. Aï. Suecicœ ex fœderum prajeripto acifiriclam. Hœc Jiqui-
demnonjolum Mari , fed & 'Terra auxilia ferri prœcipiurtt ; eaque pro periculi
tnagnitudine {quod poft finit am expeditionem Holfiaticam, quant maxime eviden s
fuiffe ^ nemo negabit ) utrobivis in duplum vel triplum augenda , neque poft pere xi-
gui temporis fpatium domum reverfura , fed ad belli ufque finem permanfura; quo-
rum quidquam faclum ejfe non apparet. Quod cesteroquin caufam Holfaticam , cu-
jus Claffis ifta miffa unice fuit , attinet , CC. ac PP. DD. VV.fibi haud dubie
in mentem revocabunt , quoties fubinde S. R. M. in antece/fum declaraverit , fe
taufam hanc non alio , quant r cliquas Paclorum Holfaticorum vindices & fpon fo-
res, nomine fujeepturam, feque adeo in toto hoc negotio nihil quidquam acluram,
nifi quod communi confilio atque fuffragio gereretur. Et rêvera quoque rem ita pe-
raclam fuiffe , vel hinc liquida confiât , quod appellentibus ifthic Claffibus Anglica ,
Belgicaque , ratione Imper ii Navalis , eo demum modo ageretur qui conveniens in
primis videbatur fociis ex eo quo , &? ita ut nullius pra altero potiores partes efi-
fent rem gerentibus j id quod obfonum utique fuiffet , fi tanquam fiubfidiariœ ad'
ventaffent , cum nimirum fœdera , more etiam alioquin perpétué ufitato , eum ca-
fum difertis verbis ita definiant ut auxiliares five naves five copia1 à requirentis
fœderati aufpicïis dutluque omnino dependeant. Id interea pro eo , <yio Ducis
Holjatia rationes compleElitur afeclu , perlubens agnofeit S. R. M. hanc Guaran-
tï£ prœftationem ) oppido acceptant fibi fuiffe , quamobrem etiam gratum ammumy
lum erga Serenijf. ALBrit. Regem, tum erga CC. ac PP. DD. VV. profitai non
dubitavit. Unde tamen neutiquam colligi débet , prœftita ei ejfe auxilia , vi fœ-
derum contra Hoftes. Nam S. R. AL Bellum cum Serenijf. Reg£ Daniœ nullum
intercejjlt , quâproptcr etiam opus non fuit pacem inîer altiffïme memoratas Ma~
jefiates conciliari , reftitutâ nihilo fecius publicà tranquillitaîe. Nihil prorfus igi-
tur obftat quo minus confidat S. R. AL in prœfentiarum non tantum auxilia fibi
quamprimum fubmijfum- iri, fed £5? CC. ac PP. DD. VV. abfque ulteriori mo-
rd apertè, graviter que denunciaturas cj/'e prœfatis hoftibus , quemadmodum tant
artlis fanclifque cum S. R. Aï. jungantur fwderibus ut nullo modo à ferenda ei ope
defiftere , integrum ipfîs fit , antequam S. R. AL tanquam fœdè adeo ac cnormiler
lœjg conveniens fatisfatlio obtigerit quod & ipfum Paclorum tabulis exprefse in-
fer tum , & pralerea apud I/oftes, rem ferib demum agi fen/uros , maximum abf-
que dubio pondus habebit. Cum denique fiepius memorata fœdera , prœfert'nn tw-
viffimum die |-| Januarii Ànni 1700. hic pereuffum %. tz.idinter alla fiatuant
tet ejufmvdi occafionibuS) quales prxfens rerum faciès offert , pacifient 'es , tum de
tollendo Commet c.orum ufu,, cum hofie fœderati bello implicitij tum etiam de me-
diist dicloHofii, quovis modo nocendi , virefque ejus imminuendi confilia confé-
rant
ET RESOLUTIONS D'E T A T. fi7
tant. Itaque S. R. M. id mince contenait ut cejfent omnino commenta inter hanc 1701.
Rempublicam £5? hofles R. S. M.t idque eb magis quoi futit, his apparatum belli- — ; ■
cum hïnc fubvehi , quant acunque rei impedienda folertia adhibeatur. Demum
etiam.fingulari cum fiduciâ hoc requirit ut committantur qui CC. ac PP. DD.
VV. nomine , cum Legato fuo Extraord. délibèrent rationefque junftim ineant ,
quibus potij/tmum modis , diclis hojîibus damnum inferri, vire/que eorum infringï
pojjïnt. Super quibus omnibus infrafcriptus S. R. M. Suecia Legat/ts Extraord.
gratam CC. ac PP. DD. VV. Declarationem , ah [que temporis difpendio ut fpe-
rat , fibi impertiendam ,quâ par efi obfervantiâ prajiolatur. HagœCom.die th-ju-
lii 1701.
HAUTS ET PUISSANS SEIGNEURS, ™uc-
piécé-
L'Ambaffadeur Extraordinaire de Sa Majefté Rorale de Suéde ne peut pas dent Mé-
s'empêcher de faire reflbuvenir à Vos Hautes PuhTances , comment le Roi moire,
fon Maître a eu à jufte titre l'efperance de jouir depuis long-tems des fe-
cours contre fes Ennemis, en vertu des Alliances aux quelles on eft réci-
proquement obligé. Cependant en aïant été jufques aujourd'hui privé, &
tant de propres Lettres de Sa Majefté Roïale aïant été fans reponfe, 8c tant
de Mémoires prefentez par fon ordre n' aïant eu aucun effet , Sa Majefté
Roïale a chargé ledit Ambafladeur Extraordinaire de reprefenter très-inftam-
ment de nouveau à Vos Hautes Puiffances à fon nom; favoir qu' Elles n'igno-
rent pas ce que les Articles de l'Alliance portent , par lefquels il eft ex-
preffement déclaré, qu'on doit donner les fecours dans trois mois après , à
compter de la première requifition, 8c même plutôt s'il eft poffible. Ce-
pendant feize mois 8c même plus font déjà écoulez depuis que Sa Majefté
Roïale*, après avoir reprefenté le danger où Elle étoit , a demandé pour la
première fois qu'on lui donnât du fecours. Et il ne faut point douter que Vos
Hautes Puiffances ne confiderent comme il faut ce que l'Amitié , 8c la com-
mune utilité prefente infpirent 8c demandent , de forte qu'à cet égard , quand
même il n'y auroit aucune Alliance , on devroit s'attendre à être fecouru,-
particulierement fi on ajoute à ces raifons celle qui eft digne de tous les Sou-
verains, dont chacun de ceux qui font imbus du Chriftianifme auffi-bien que
de ce qui eft jufte 8c honnête, fe feroit un devoir d'entreprendre de fecourir 8c
de défendre celui qui étant exemt de la moindre faute, ne laiflè pas que de
fouffrir, par la force 8c par des injures deteftables par tous les gens de bien.
Au refte on laiffe à juger à Vos Hautes Puiffances combien leur Amitié re-
cevra de force , ,8c combien leurs Alliances aquerront de bonne réputation ,
fi Elles affilient dans cette occafion Sa Majefté Roïale par de puiffans fecours j
8c au contraire fi Elles l'abandonnent , combien leur Amitié perdra de leur
vigueur 8c combien leurs Alliances perdront de leur eftime , 8c enfin com-
bien Elles agiraient contre leur propre gloire, 8c contre leur propre bien. Car
û Vos Hautes Puiffances examinent bien l'état des Affaires prefëntes , 8c ce
qu'Elles doivent fe promettre réciproquement de l'Amitié de Sa Majefté
Roïale, Elles connoîtront fans heziter combien il y va de leur intérêt d'affi-
fter en forte Sa Majefté Roïale qu'Elle, voulant fuivre un louable exemple,
S ff 1 puifle
fiS MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
1701. puifle y reciproquer. On ne difconviendra pas aifement que l'étroite Amitié
— entre Sa Majeité Roïale & Vos Hautes Puiflances , l'utilité mutuelle des
Roïaumes & Etats , la fureté des Sujets , la propre gloire, & la réputation
des Alliances ne foient des raifons aviez fortes pour porter Vos Hautes Puiflan-
ces à accorder ce que Sa Majellé Roïale demande par un très - grand droit
Se avec une pareille confiance. Il n'y a en vérité ancune chofe qui foit de
quelque poids, qui puiffe donner lieu à en douter. Car cette Republique
n'a pas été jufques ici engagée en aucune Guerre , ni les forces manqueront
à Vos Hautes Puiflances qu'on fait, par leur puifTance prefente , quelles dé-
fendront toujours leur caulè, même contre le plus fort Ennemi. D'ailleurs l'u-
tilité prefente fe trouve, puifque qu'il paroit que 'a faveur d'un fervice rendu
ne fera point oubliée ; mais rendue avec ufure. Certainement l'Amitié de
Sa Majellé Roïale ne doit pas être regardée, comme fi elle devoit à ncinc
être cultivée, puifque non feulement les Alliances contractées convainquent
du contraire -, mais Sa Majellé a déjà donné des marques de fa vertu qui
font voir ce que le Monde doit attendre à l'avenir de fa valeur. Vos
Hautes Puiflances , favent fort bien d'ailleurs avec quelle affection il eft
porté pour cette Republique & avec quelle ardeur il tache de conferver ce
d'augmenter une plus étroite Amitié. A Dieu ne plaife qu'on fafle plus
d'état de l'intereft particulier ou de l'inclination de quelques perfonnes pour
les Ennemis de Sa Majefté que de l'utilité Se de la foi publique, & l'aban-
donner pour de telles Raifons: ceferoit, félon que Vos Hautes Puiflances
pourront juger félon leur prudence accoutumée, une chofe moins honorable,
& beaucoup incertaine.
Ledit Ambaiïàdeur Extraordinaire a été informé qu'il y a quelques perfon-
nes qui foutiennent qu'on a fatisfait aux Alliances par l'envoi qui a été fait
l'année paflee, de l'Efcadre de Navires de Guerre au Sur.d. Mais ces perfon-
nes ne prennent point garde que d'un côté ils diminuent extrêmement le mé-
rite d'ailleurs fignalé de Vos Hautes Puiflances envers le Duc de Holflein , 6c
la véritable gloire, aquiié par la guarantie fidèlement accordée} & de l'autre
ils veulent attribuer en vain à Vos Hautes Puiflances , ce qu'EUes par leur
juitice dédaigneront s'attribuer , connoiflant aifement qu'on n'effc pas encore
dégagé de la foi, engagée à Sa Majellé par les Alliances. Car Elles portent
des fecours non leulcment fur Mer, niais fur terre , & félon la grandeur du
péril ( lequel après la conclufion de l'expédition de Holflein a été notoire-
ment très-évident) les mêmes d'une manière & d'autre devant être augmen-
tez au double & au triple, & non pas s'en retourner après un petit efpace
de tems, mais relier jufques à la fin de la Guerre, ce qui ne paroit pas avoir
été exécuté ni en tout ni en partie. Quant à l'Affaire de Hoîftein pour laquel-
le l'Efcadre a été uniquement envoïée, Vos Hautes Puiflances fe fouviendront
fans doute , combien de fois Sa Majellé Roïale avoit auparavant déclaré ,
qu'EUe n'entreprendroit cette caufe-la fous d'autre nom, que comme les au-
tres Garands des Traitez de Hoillein , & qu'Ellc ne féroit en cela que ce
dont on conviendrait d'un commun accord. Et que véritablement la cho-
fe ait été faite de la forte , il paroit clairement de ce que les Efcadres An-
gloiie bi. Hollandoife arrivant en ce lieu-la, à caufe du Commandement Ma-
ritime ,
ET RESOLUTIONS D'E T A T. fz?
mime, on convint d'agir félon qu'il avoit paru en premier lieu félon la jufti- 1701.
ce convenable aux Amis, 6c .en forte qu'un n'avoit pas la préférence fur Pau- ■
tre dans, Paftionj ce qui n'auroit pas été convenable, fi Elles avoient été en-
volées comme auxiliaires, puifque les Alliances , félon même l'ufage , qui a
toujours été pratiqué, expliquent clairement que les Navires ou les Troupes
auxiliaires doivent abfbiurnent dépendre de la conduite & du commandement
de l'Allié qui feroit la requifition. Cependant Sa Majefté Roïale, par l'affec-
tion avec laquelle elle embraffe les intérêts du Duc de Holftein,reconnoit de
bon cœur que l'exécution de la Garantie lui a été agréable, & n'a point he-
zité pour cela'de témoigner auifi (a gratitude tant envers le Screnitîîme Roi
de la Grande-Bretagne, qu'envers Vos Hautes Puiffances. D'où on ne doit
cependant jamais inférer, que les fecours lui aient été donnez contre fes En-
nemis en vertu des Alliances. Car il n'y avoit point de Guerre entre Sa Ma-
jefté Roïale & le Sereniffime Roi de Dannemarck , c'eft pourquoi auffi il n'a
pas été neceffaire de faire aucune Paix entre Leurs Majeftez , aïant cepen-
dant autrement rétabli la tranquilité publique. Rien donc abfbiument n'em-
pêche que Sa Majefté Roïale s'attende non feulement de recevoir au plutôt
les fecours, mais auffi que Vos Hautes PuiÏÏances notifieront fans délai , ou-
vertement & ferieufement auxdits Ennemis, qu' Elles font unies avec Sa Ma-
jefté Roïale par des Alliances fi étroites & fi fainétes , qu'il n'eft nullement
en leur pouvoir dé s'abftenir de lui donner du fecours avant qu'on ait donné,
une fatisfacrion convenable à Sa Majefté Roïale, comme aïant été fi honteu-
fement & énormément offenfée. Ce qui elt même clairement exprimé dans
les Traitez d'Alliance , & cela fera fans doute d'un grand poids auprès des
Ennemis, qui verront qu'on agit enfin ferieufement. Et comme lefdites Al-
liances particulièrement la dernière contractée ici le ~. de Janvier 1700.
§. ii., entre autres chofes établiffent que dans des occafions pareilles à cel-
les qu'on a à préfent , les contracïans conviendront tant d'interrompre le
Commerce avec l'Ennemi du Confédéré qui fera engagé dans la Guerre ,.
que les moïens de nuire en quelque manière que ce foit audit Ennemi, Se de
diminuer fès forces. C'elt pourquoi Sa Majefté Roïale demande inftamment
qu'on interrompe abfbiument le Commerce entre cette Republique & les En-
nemis de Sa Majefté Roïale, & ce d'autant plus qu'Elle fait qu'on leur trans-
porte d'ici ce qui eft neceffaire à la Guerre , quelque diligence qu'on faf-
le pour l'empêcher. Il requiert enfin auffi avec une confiance particu-
lière .qu'on députe des Commifîaires qui au nom de Vos Hautes Puifîàn-
ces délibèrent conjointement avec fon Ambaffadeur Extraordinaire , 6c
conviennent par quels moïens on puiffe principalement endommager lefdits
Ennemis & reprimer leurs forces. Sur toutes lefquelles chofes le fouffigné
Ambafiàdeur Extraordinaire de Sa Majefté Roïale de Suéde attend avec u-
h'e dûë révérence, qu'on lui donne fans délai, ainfi qu'il efpére , une a-
gréable Déclaration de Vos Hautes Puiffances. Donné à la Haïe le ~. de
Juillet 170 1.
Signé,
Ll LLTENROOTH,
Sff 3 Pour
S.M.Cz.
H3 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
1701. Pour contenter en quelque manière cet Ambafladeur qui s'étoit d'ailleurs
— ■ ■ plaint au Confeillcr-Penfionnaire fur une prétendue complaifance que les Etats
Généraux avoient pour le Czar , on prit, deux jours après la préfentation de
fon Mémoire, une "Réfolution qui regardoit le Czar, & dans laquelle l'on ne
hézitoit pas de lui infinuer qu'on étoit en Alliance avec la Suéde, & qu'on
ne pouvoit pas s'en départir. Voici la Réfolution.
Réfolu- T E s Députez pour les Affaires Etrangères, aïant examiné endiite, & pour
tiondes Jl-j Satisfaire à la Réfolution commifforiale du 16. Janvrier 6c 9. Fevr. paf-
E- G. , fez ? une Lettre de S. M. Cz. qui eft une Reponfe fur la Lettre de LL. HH.
Juillet ^" ^u ^- Sept, pafie, touchant les troubles furvenus entre S. M. Cz. 6c S.
en Ré- M. le Roi de Suéde, & les deux Mémoires de Mr. Andréas Artemonides
ponfc à Matthiewic, Ambafladeur Extraordinaire de fadite M. Cz. concernant le mê-
me fujet} comme il eft plus amplement dans les notules du 16. Jan. 6c 9. Fé-
vrier de la prefente année ; furquoi aïant été délibéré, il eft refolu , qu'il fera
repondu à S. M. Cz. que LL.HH. PP. ont vu avec douleur, que les déplaifirs
entre S. M. Cz. 6c S. M. S. foierit convertis en une Guerre ouverte. Que
LL. HH. PP. auraient fouhaité de tout leur cœur , qu'on eut pu obvier à
cela; que pour cet effet, ils ont emploie tous leurs bons Offices auprès de S.
M. Cz. 6c auprès de S. M. S. afin, s'il étoit poflîble , de terminer par un ac-
cord amiable plutôt , que par les Armes , les differens 6c les chagrins furve-
nus entre Leurs Majeftez. Qu'aufli-tôt que S.M.Cz. a donné à connoîrre le
tort que S. M. Cz. croit avoir reçu de S. M. S., LL.HH. PP. l'ont commu-
niqué à S. M. S. Qu'en aïant reçu la reponfe , par laquelle S. M. S. te-
moignoit être portée d'entretenir Paix 8c Amitié avec S. M. Cz. , 6c décla-
rait avoir donné ordre à fon Ambafladeur ici, de traiter fur ces plaintes, LL.
HH. PP. par la Lettre du 29. Sept, de l'an pafle ont communiqué à S. M.
Cz. 6c prié de vouloir autorifer aufli fon Ambafladeur pour negotier 6c ter-
miner les differens furvenus par un accord amiable ; mais qu'ils content pour
un très-grand malheur, que les Affaires foient venues aux extremitez 6c à une
Guerre ouverte avant que leur Lettre fut remife entre les mains de S. M Cz.,
que de puis ils avoient bien reçu la Reponfe de S. M. Cz. ; mais les Affaires
étant changées par la Guerre LL. HH. PP. n'ont fçû d'abord , comment s'y
prendre, puis que leurs bons Offices qu'ils emploïoient pour la confervation
de la Paix, aïant été infructueux, ils n'efperoient point, que parmi les bruits
des Armes, on voulut les écouter. Que c'eft par ces raifons que LL. HH.
PP. furent obligées de laifler pafler quelque teins avant de repondre à la Let-
tre de S. M. Cz. Que LL. HH. PP. n'ont pas pour cela abandonné leurs
penfées pacifiques , non plus que la promptitude pour féconder félon leur
pouvoir les moïens à finir la Guerre, 6c à rétablir la Paix 6c l'Amitié. Que
S. M.Cz. 6c S. M. S. avoient bien eu la bonté d'accepter leur bons Offices ,
pour accommoder les differens qui ont caufé cette Guerre , 6c cela pour la
prévenir, s'il eut été poflîble ; mais n'en aïant eu aucun bon fuccès , ils é-
toient obligez de s'en départir en tant, que cela regarde d'empêcher la Guer-
re. Que la Guerre étant furvenuë, S. M. Cz. par fa Lettre a bien voulu
témoigner que la Médiation de LL. HH. PP. pour recouvrer laJPaix lui fe
roit
ET RESOLUTIONS D'ETAT. nr
roit agréable; mais attendu qu'après la Guerre LL. HH. PP. n'ont pas été 1701.
recherchées par S. M. S. pour être Médiateurs, ni leur Médiation acceptée, — —
& LL. HH. PP. ne pouvant être Médiateurs que par le confentement des
deux Partis; c'eft pourquoi n'étant point reconnus pour tels, ils ne fauroient
Elire autre chofe, que de féconder par leurs bons Offices , les expediens qui
pourraient être propofez, par ceux qui font choifis Médiateurs par les Hauts
Partis j ou qui pourraient être agréez , 6c qu'ils confeilleroient toujours la
Paix comme une chofe fort agréable. Que dans cette vûë LL. HH. PP.
ont envoie Mr. Haerfolte en Pologne 8c en Livonie , pour être à portée à
profiter des occafions qui pourraient fe prefenter , pour faire connoître les
bonnes intentions de LL. HH. PP. pour l'avancement de la Paix. Que
LL. HH. PP. ont donné même ordre au Refident Hulft d'en faire part à
S. M. Cz. Que LL. HH. PP. efperent, & fe confient dans la grande Sa-
geffe & Capacité de S. M. Cz. qu'Elle jugera que LL. HH. PP. n'ont pu
faire autrement après que les Affaires font venues jufques aux Hoftilitez. Que
LL. HH. PP. déclarent derechef, que ce leur eft une fenfible douleur , de
voir les extremitez entre S. M. Cz. 8c S. M. S. aïant l'honneur d'être Amis de
toutes deux, étant outre cela engagées dans une Alliance avec S. M. S. 8c y
aïant été depuis plufieurs années. Que LL. HH. PP. fouhaitent de tout
leur cœur, que le plutôt le mieux, cette Guerre finifle, 8c la Paix ancienne
entre S. M. Cz. 8c S. M. S. foit entièrement rétablie, 8c conftamment entre-
tenue. Que LL. HH. PP. quoi qu'ils ne foient point Médiateurs ne laiflent
pas que d'être portées de contribuer autant qu'il eft en leur pouvoir , dans
î'efperance de faire revenir les efprits des Hauts Partis oppofez -, Que LL.
HH. PP. par la grande eftime qu'ils font de S. M. Cz. 8c de fon Amitié,
font portez de faire tout ce qui peut produire le but propofé. Qu'ils efpe-
rent S>c fe flattent de l'affection que S. M. Cz. a pour cet Etat qu'elle fera
fatisfaite de tout ce que LL. HH. PP. ont fait jufqu'a prefent ; 8c com-
me LL. HH. PP. font prêtes, à rendre à S. M. Cz. des fervices agréables
ils font aflèurez , que S. M. Cz. ne prétendra rien d'eux , qui ne puifie fe
faire, ou qui puifle donner une jurte fujet d'offenfe à S. M. S. dont ils ne
fauroient quitter l'Amitié 8c l'Alliance fans des raifons fortes &C équitables.
Néanmoins que LL. H H. PP. comme ils fe trouvent obligées d'entretenir
Amitié 8c Alliance avec S. M. S. ne lailfcront , autant qu'il eft poffible, que
de donner des preuves de la vraie eftime qu'ils font de l'Amitié de S. M. Cz.
Se qu'ils conteront pour un grand bonheur , quand ils auront contribué ou
qu'ils contribueront encore quelque chofe, pour le retablifîèment de la Paix
8c de l'union, entre S. M. Cz. 8c S. M. S. Que l'extrait de cette Réfolu-
tion de LL. HH. PP. fera donné par l'Agent Rofeboom au Sr. Ambaflà-
deur Andréas Artemonides Matthiewic, pour feivir de Réponfe à fes Mé-
moires. Et qu'on lui ferait auffi remettre la Lettre qu'on écrivoit au' Czar
en conformité de la Réfolution, afin qu'il l'envoiât à Sa Majefté Czarienne.
Donné le if. Juillet 1701.
Qu elque tems après , rAmbafTadeur Ruffien préfenta aux Etats Gé-
néraux
ffi MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
1701. néraux un Mémoire fur quelque inconvénient arrivé à Archangel par des Ar-
r— mateurs Suédois. Paricelui, il vouloit inilnuer que de pareilles Entrepnfes
feroient fore préjudiciables au Commerce dès Hollandois. C'eit ainlï qu'on
peut voir dans le Mémoire même de la teneur fuivante.
Mémoi- CELSI AC PRMPOTENTES DOMINE
te de
bail de J-JEfiernâ die juxtà Mandatant Czareœ Sacerrimœ M. Glem. Met D. communi-
Moico- catum efi mihi Mufcovià , prêter lapfi Julii die oclava notificancli gratiâ quod
vie aux ggx Sueciœ prœfenti 170 1. anno Junii 11. die in Portum ad Urbem divi Archan-
dii i6. &ciï àtt/èril feptem ex fois bellicis Navibus, quorum in numéro duo gauli incendia-
Août." riifuerunt , qua circa ingreffum ojlii cœperunî in Mari ea pifeatorum navigiis nau-
tam quem fe dùcere in fluvio Duina cum tribus navibus coegerunt , reliquis autem
ad ojiium manentibus , quœ cum fecundo vento navigarent tenentes aplujlria Bre-
mcnfia , ad cos exivit ex noftris excubiis illius Urbis divi Archangeli Centurio cum
fuis militibus interrogans juxta modum confuetum , cujus Regni illts Naves Mer-
catoria efj'ent, tune illi abfque ullà refponfione ifium Ccnturionem ad fe in N averti
captum pênes fe detinuerunt , milites autem qui cum illo miffi erant abfque ullâ ur-
gente caufâ occiderunt , quo comperto in propagnacuhs circa Fluvium , parva Dui-
na nominatum , extrutlis , in quibus multa tormenta pofta erant , expeclarunt ibi-
dem eos in metam, atque t or mentis eos impetere incœperunt , duofque ex 'illis ità
Jabefaclarunt , ut in littus impingere coati if uerint, quo vifo , hofies Naves reli-
querunt, aufugientes infuper omnes , fed Cz. S. M. milites, ingreffi in parvis
cymbis perfecuti funt if as hofliles perfonas , quas etiam curfu afecuti, duos pra-
feclos tftarum Navium ac multos alios Officiâtes cœperunî , reliquis autem eo-
rum fe opponentibus occifts. Ex navibus autem apluflria , tormenta , atque alias
res bellicas hoflium captas in Urbem ad Gttbematum iflius Portas divi Ar-
changeli adduxerunt , infuper ad per/equendum reliquos e or uni, militares copia
adhuc mifle fuerunt. Cujus relationcm juxtà obligationem vefira veteris atque
per -confiant 1 s amkitiœ , quœ vobis Dominis Meis cum fua Cz. S. M. inter ce-
dit , non potv.i non communicare. Hàc etiam occafione meum Vobis CC. ac
PP. Meis DD. débitant confilium dechrare coati us fum , quod ejufmodi hofti-
Jis invajio VV. CC. ac PP. DD. fubditis qui fua commercia , circa prafa-
tum Portum in Regno S. Cz. M. S. Cl. DD. exercent , admodum damnofa,
nec non ipfs in commerciis eorum pr&cifio fit , qupniam fubditi vefiri commer-
cia exercent es, in omnibus urbibus Regni S. Cz. S. M. tàm in imper ante Me-
tropoli Mufcoviâ quam in cateris , varias ac necef arias ad commercia illorum
merces apud fubditos S. Cz. S. M. ententes , folum jgm pro illis prœfenti pr<e-
iio, ex ilii s omnibus Urbibus, fuis propriis fumptibu s ad Portum divi Archangeli
veniunt, ubi bas merces navibus importas in Batavia»! dimittunt ; nifi verà pro-
'videntia juxtà divinum auxilium à S. Cz. S. M. adhibitâ , cum pertinent i pr<e-
cautione Gubernatoris ifiius Urbis , non pnevenifiet tune ifia omnia innumerabilia
damna fecuta fu.fient , exceptis S. Cz. M./ubfidiis vefiris DD. Mcorum incolis,
quamobrem in ejufmodi occafonibus ne ce (Je efi vobis DD. Meis fuà prudent i provi-
dentiâ,
ET RESOLUTIONS D'E T A T. n%
dentià, bonaque prœcautione condolentibus de fuis fubditis, bas impofterum futur as 1701,
miferias atque perniciofas ruinas , in hoc portu ad urbem D. Archangeli faciendas ■
ab ijiis in commerciis fubditis veftris averterc, ne loco fubditorum S. Cz. M. ma-
jus sis periculum ab Mo hojie fequatur , £5? commercia ifla tam illorum quant Re-
giœ Majeflatis Magna Britanniœ fubditorum., omnimodo ex talibus Maris hoftili-
bus invafwnibus , prœcifa relinquantur . Script a Hagœ Corn, Anno Domini 170-1.
die 16. Aug.
Signatum , 6cc.
Dans la fuite les Etats Généraux reçurent une Réponfe du Czar fur leur
Rélblution du 1 f . Juillet. Voici la Traduction de cette Réponfe , faite par
PAmbafTadeur du Czar.
JsJObis Magno Domino , Noftrœ Czareœ M. Veftrarum Celfarum ac Prœpoten- Tranfla-
tum Dominationum literis conftgnatum refponfum , fecundum defiderium Me- tio Lite-
diationis VV, CC. ac PP. Statuum, de compofttione p-œfentis belli inter Nos & rarutn
Coronam Suecicam allatum eji , in quo autem declaratis Nobis Magno Domino ^Ordi-
inclinationcm Vcftram quod VV. CC. ac PP. DD. cum Coronâ Suecicâ in de- nés Uni-
fenfîvo fœdere fitis &? de tempore belli qilod non putaftis quod eft inter utramque tiBelgii,
partent nunc injlat doleatis , ciijus autem ad comprejfionem ante fufeeptum illud , :9- AuS-
médiat ores in conciliât ione utriufque partis effe promififtis \ quoniam veto fumptis
Armis , ad Mediationem à Coronâ Sueciœ non requifiti -eftis , ideo Médiat ores «-
triuf que partis effe non vakatis, fed defidereth & polliceamini variis Veftris Stu~
dûs Nobis Magno Domino Noftrœ Czareœ Majeftati ad reftitutionem felicis pacis
ex fua parte juxtà aliorum Mediationem ad fiitisfaclionem intentionis noftrœ apud
contrariant partent , quoniam Vos illorum Confœderati efis, confilio atque auxilio
fuccurrere, ob quam etiam intentionem VV. CC. ac PP. DD. extraordinariunt
fuum Ablegatum -van Haerfolte in Poloniam &? Livoniam miferitis ut propius
negotio inter effet , omnefque occaftones obfervaret , de quo etiatn Refidenti Veftro
v.wder Hulft apud aulam noftram commoranti Nobis Magno Domino referre
juffiflis, afte curant es fir miter quod VV. CC. ac PP. DD. pro Veftrâ erga nos
defiderandâ indinatione ad tollendum bellum £s? componendam decentem atque pro-
ficuam pacem in fatisfaclionem noflrœ partis quoad in viribus veflris pofitum eft 9
-vefira accepta fiudia prœftare promittatis ; quà de re etiam Refidens Vefter man-
der Hulft defiderium veftrum ad avertendum prœfens bellum cum Çatisfaclione
■rwflra , Nobis Magno Domino Noflrœ Czareœ Majeftati retulit , rjf Nos Magmts
Dominas Noftra Cz. M. illum veftrum CC. ac PP. DD. deftderatum favorem
& Refidentis Veftri vander Hulft relationem bénévole accepimus , &? peramice
Vobis antea demonftravimus &f demonftramus , quod fecundum ebligatiomm com-
anunis fœderis cum Fratre noftro Magno Domino , fuâ Regiâ Majeftate Poloniœ
fecundum deftderandam propofttionem veftram ad compofttionem illiits pacis cum
Coronâ Sueciœ ad communent noftram utilitatem utriufque noftris Magnis Regnis
convenientem &? ad delendum bellum , Nos Magnus Dominas fufficientem pa-
cem more Chriftiano antea &? nunc non reeufamus fcf ad mediationem VF. CC.
Tom. L Ttt as
H4 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
1701. ac PP. DD. jam pridem accepimus , qttcmadmodum qttoque antea declaravi-
• mus, in Noftris Cz. M. ad Vos datis literis £5? deftderamus ut VV. CC. ac
PP. DD. , fecundum fuam erga, Nos afjecurationem , ficuti Nobis promiftfiis ,
Coronam Suecham Nobis Magito Domino propter Conftlia 13 Officia Vefira
funt f.bi cotifœdcrata &? nobis per arnica , ob multas nobis illatas ab Mis inju-
rias, in omni te juflâ fatisfaclionem prœftituram efje , ob illam noftram fatis-
faclionem confultà VV. CC. ac PP. DD. atque accepta à vobis Mediatione ,
defegnaretur ad Congreffum idoneus locus , ubi omnes conlroverfue in Confilio
Veftro , £5? in prafentiâ communium Plenipotentiariorum & Noftrorum , nec non
aliorum Médiat orum ad hoc advocatorum , ex utrâque parte benevolorum , felici
fufficienti pace cum Coronâ Suecia definiantur , confidentes in veftrâ perconftanti
ad hoc Mediatione , abfque aliis adjiciendis cuilibet parti quibufdam adjuvandi gra-
tiâ ad bellum , quandoquidem fecundum acceptionem mediationis nunquam jufla
hac ejfe poffunt-3 de que 6? Refidenti Veftro poft acceptionem VV. CC. ac PP.
DD. de hâc mediatione primarum ad Nos li ter arum, noflra ad hoc propenfa in-
tentio relata eft, & de hoc Nos VV. CC. ac PP. DD. , fecundum noftram
propofttionem peramicum refponfum &f è Livoniâ per Extraor dinar ium Ablega-
tum Veftrtwi de prœfenti progreffu communie ationem , & Reftdeniis Veftri re-
lationem femper expetlavimus £5? expeelamus. Ex noftrâ autem parte ad defigna-
tum idoneum ad hoc locum, Plenipotentiarios noftros ad compofitionem pacis mitte-
re , ficuti de hoc Nobis indicaturi fint , vel Vos Nobis fignificabitis. Nos
Magnus Dominas Noftrâ Cz. Majefias volumus 6? confidimus ut VV. CC. ac
PP. DD. fecundum acceptionem mediationis fita infuper apud alios Médiat 0-
res erga ATos in conciliât ione pacis , quemadmodum ex parte noftrâ in félicita-
te ad fatisfaclionem promittitis , benevolentiam veftram exhiber e ipfà veritate
impleatis. Mufcovia die ip. Menfis Augufti St. vet. Anno 1701.
Le même Ambafladeur préfenta aufîï là defliis un Mémoire que voici.
Mémoi- CELSI AC PRJEPOTENTES DOMINE
rede
Laffd jNfrafcriptus Czareœ Sacerrimœ Majeftatis Legatus , Veftris Celfis ac Prapo-
Mofco- tentibus Dominationibus indicat, quoniam CC. ac PP. DD. VV. perpétué,
vie aux fecundum prudens veftrum ftudium , pacis obfervatores & affiduarum ubique exi-
E. G. , fient ium inter altè belligérantes in orbe poteftates defiderabiles diremptores eftis , £5?
Qû' *n onm^us celeberr irais veftris ailionibus , acumine providentiœ & illuftris pruden-
tiœ vefira in toto orbe inclarefcitis , hâc pcrfpicaciâ , Vos Illuftres Domini , fe-
cundum antiquum ntorem , cum Czareâ Sacerrimâ Majeftate Clément iffimo ejus
Domino immutatam VV. CC. ac PP. DD. amicitiam perfpicientes, ante in-
captam £5? nunc prafentem apud fuam Cz. altè diclam Majefiatem cum Coronâ
Suecicâ inimicitiam , voluifiis fu* Czareœ Majeftati fuperioribus fuis Literis pra-
terlapfo anno 1700. offerre ipftmet ad abolit ioncm illtus incoepti belli £5? ad conve-
nient em fatisfaclionem fu<e Cz. Sacerrimâ Majeftatis ex parte Suecicâ , mediatio~
nem; de quâ etiam ipfe Rex Suecia apud Vos Celfos ac PP. DD.fuis literis &?
per fuum Légat um Haga Comitis commorantem cum magnâ inclinât ione rogavit.
, Poflea
ET RESOLUTIONS D'E T A T. ftf
Poflea Vos Domini àfuâ Cz. S. M. ad Mas veflras fupra memoratas literas in- 1701.
telleclâ fecundum literas in bis incœptis rébus per accepta £s? clementijjimâ inclinât io- ■
ne, itérant volttiftis hoc fuum flagrans atque peramicum defiderium , ad bonam ho-
rum incœptorum determinationem , fuis fecundis literis prœterilo Menfe Julii à die
14. bujus 1701. Ami & adfuam Cz. M. tranfmifjis , offerre , amicè pollicentes
fuœ altè memoratœ Cz. M. per omniafua bona fludia auxiliari, diletlis fuis pr<e-
ponenàis correfpondentiis , quœ inpoflcrum ejfe pojfunt felici effetlu , ad reftitutio-
nem illias pacis apud ohtnes bas altè memoratas partes , £s? in omni propenfi effe
vultis , ut hoc veflro conatu , opère ipfo , hâc hoflilitate prœcifâ , pacem fcli'cent
conjunclionem inter bas altè belligérantes Potejlates evirefcere curetis. Imprimis
quod etiam ver a amkitiœ obfervatores Vos Celfi ac PP. DD. honorantes fuam
Cz. S. M. hoc perpetuo ac per confiant i amoris affetlu fuo erga part em fuœ Cz.
M.fingulari more vos geritis , & in poflerum illam fuœ Cz. M. erga fs Clemen-
tiam onmimodl multiplicabitis , ad quas Veflrarum CC. ac PP. DD. fupradic-
tas ad altè memoratam Cz. M. tranfmijfus literas , pojl traditionem e arum fuœ
Cz. M., Mufiovia ad VV. CC. ac PP. DD. digno refponfo à S. Cz. S. M. il-
le Legatus cum veredario tiudius tertius hâc veniente adeptus efl refponforias lite-
ras atque clément ijjïmum fui Magni Domini fîbi illius adjuntlum mandat um , in
quofua Cz. S. M. ClementiJJÏmus illius Dominas jujfit Mi fuo Legato , Vos Cel-
fos ac PP. DD. perdileclè falutare , ac Mas fuis refponforias literas vobis inft-
nuare, quas nunc Me Legatus Vobis Celfis ac PP. Dominis cum honore ac véné-
rât ione tradit, & ob meliorem cognitionem fer ipt arum in bis rerum , commttnicat
earum in Latino idiomate wpiam, & fecuros reddit vos Illuftres Dominos Me Le-
gatus , quodfua Cz. altè dicla Majeftas neccejfariam (S jujlam veflram media-
tionem , tam fecundum primum quarn etiam modernum perdileclarum Vejlrarum
Lit er arum fuœ Cz. M. allât arum tenorem, per arnica confilia & propofttiones antea
nullatenus reeufat , & nunc banc compofitionem pacis , fecundum obligationem com-
munis fœderis cum Fratre fuo Magno Domino Regiâ Majeflate Poloniœ à Coronâ
Suecicâfub honejlis conditwnibus compétent is fatisfatlionis non detr éclat, & pro-
penfo fertur animo in vos Celfos ac PP. DD. , accipiens fibi tanquam pacificos ac
veros ad banc conciliationem Pacis Mediatores , immutabiliter débet fervare ne
ullâ minimà re ex parte fuœ Cz. M. ifta Veftra CC. ac PP. DD. Mediatio re-
linquatur. In hoc teftimonium noflrum verœ ac intégra amkitiœ à fuâ Cz. M. ob
petitionem Veflram , in hâc incœptâ à Veftrâ parte Mediatione , velitis inteïïige-
re, quod fecundum Ma peramicabilia confilia Veflra, fua Cz. M. adverfus Coro-
nam Sueciœ ufque ad hoc tempus ojfenfivè bellare noluit , jam pridem expetlans
notitiam à Vobis CC. ac PP. Dominis ad fe Magnum Dominum ad Tratlatus
de defgnatione congrejj'us , ad bas fuœ Cz. M. traditas vobis Celfis ac PP. Do-
minis fuas literas, imper avit Legato fuo à Vobis Dominis tanquam apud antiquos
13 ïntegros amicosfuos, celêrem ad fuam Cz. M. deftderare refponjionem , quod
promit fit Me Legatus à Vobis Celfis acPP. Dominis ob citiorem fecundum obliga-
tionem fuam fuœ altè memoratœ Majejîati tranfmijjionem , tanquam apud pruden-
tiffimos &? fapientes horum negotiorum difcujfores , abfque dilatione temporis expec-
tandi, poflquam illius Legati pertinentem , vobis Illuflrijfimis Dominis rclationem
ob Veflram ajfiduam Celfle Potentum DD. erga fe Légat um magnam inclinatio-
TtC 2 ne m
fiS MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
i 701 . nem £5? propter fmgularem in iïïum Amicitïam Veflram , manet ad Officia admo-
- dum obfiriclus. Haga Comit. die 4. Oblobris 1701.
On reprendra ce qui regarde la Guerre du Nord, dans la fuite. C'efë
pour parler de ce qui te palfoit pendant ces Affaires en Italie.
La remife , que le Duc de Mantouë avoit fait de fii Capitale entre les
mains des Troupes des deux Couronnes, avoit fort irrité l'Empereur. C'elt
pourquoi , il fit diihïbuer un Monitoire pour citer ce Duc Se ies deux
Miniftres de comparoître dans un certain tems devant la Cour Aulique,-
pour rendre raifon de leur conduite. Voici ce Monitoire.'
Moni- L E 0 P O L D \U S ,
toirede
reurcon- TsJUllum plané omnium Nofirorum Sacrique Imperii Vaffallorum ac SubditorumT
tre le vel ex Sacro Sanclo Homagii elogio nobis praflito , cummunibufque fubjeclionis-
Duc de Clientelaris ac Vaffallagii Legibus & Confiitutionibus latere poîeji , quam nobis Sa-
^ „" , croque Romano Impcrio debeant fidem & obedientiam, quemque in modum commo-
îoM'ai. da Nojîra promovere , damna verb avertere , lg fi quid contra Nos, Perfonamr
honorem, dignitatem aut flatum nofirum à quoeunque agi intelligant , omnibus vit
ribus impedire, No/que ut primlm monere teneantur.
Quanquam igitur nihil nobis certius , fancliùfque perfuadere potuijfemus quam
ut & Ferdinandus Carolus Mantua Dux ejufque Confiliarii fibi femper cordi ha-
bilitent, ac eâ qu'idem imprimis occafione, quâ Dux Andegavenfis poft pramatu-
rum Nojîri quondam Fratris &?. Nepotis Caroli II. Hifpaniarum Régis Catbolicï
tbitum, Régna ditionefque Hifpanicas ac omnia feuda Imper ialia, interque illa
Ducat um quoque Mcdiolanenfem violenter ufur paver at atque avi fui Galliarum Ré-
gis Ludovici XIV. armis occupaverat , eidem omni pojjibiii modo reflitijfent eaque
cmnia feci(fent ,. qua in ejufmodi cafibus fidèles Imperii Vajfallos ac fubditos dé-
cent ; Nihiio tamen minus jam tum per univerfas , Germania , Italia , totiufque Eu-
rope plagas fama percrebuit , imb res ipfa atque éventas dveuit, quam criminofà
abjecli animi vilitate . memoratus Dux ejujque Confiliarii , prafertim verà N.
Beretti & N. Fiani, Nos facr unique. Imper ium circumvenerint , ac interea dirai
Duxfuam SanMitatem Roma per Ablegatum fuum Beretti-, Nos verà per alios
de devotionis fua confiantiâ certiores redderct , feque nihil in Noftrum ac Sacri
Imperii prajudicium permifurum , nihilque fine prafeitu £5? confenfu Noftro fac-
turum , per omia Sacra juraret , per pra fatum Fiani aliofque cum Gallia Mini-
fris perfide convenerit, ci [que non obftantibus omnibus fui ut aribus dchortaiionibus,
auxilioque militari à fui Sanclitate oblato atque accur faute Exercitu Noflro Ca-
farco, folâ auri Ga/lici aviditate fortalitium ac- urbèm Mantua ,fummo cum fiatuum
&? fubditarum mœrore, nullà fmdente ratione, nullo urgente periculo, imb ne vel
unico hojlilis tormenti globo vel aliâ minime violent id provocatus tradiderit , pro-
que eorum cowitatu aliquot centena boum paria fubmini/îraverit. Cum igitur ne?
fanda ejufmodi felonia , non modo ad ultimum Italia excidium Chriflianique Sai.gui*
nis humant profufionem tendat tfed ad maximum NoJlri Sacrique Imperii détriment
tum vergatj eoque in Cafarea Majefiatis Nofira & rebcllionis crimen abeat, at-
qtie
El" RESOLUTIONS D'E T A T. ftf
qne id circo gravifiîmam indignationis Noflra Cafarea aliafque pœnas Iniperiali- 1761V
bus conflitutionibus prafcriptas mereatnr. Hinc eundem Ferdinandum Carolum — — - —
ejufque Coufiliarios , imprimis verb diclos N. Eeretti & N. Fiani vigore prafen-
tium citamus & votamus , ferio diJlriBeque mandantes , ut intra termmum duorum
menfium à die Citationis Noflra Cafarea eifdem infinuata proxime • fubfequentium ,
quorum 20. dies pro primo , alios 20. dies pro fecumdo , reliquos vero 20. dies
pro tertio , ultimo & peremptorio termino prafigimus , attt fi ifle diesjuridicus
non effet ad proximum fubfequentem coram nobis Confiliove Noflro Imperiali aulico
ubicunque locorum illud fuerit , per fe vel per Procuratorem Juum legitimunr&
fufficienti mandat 0 inftruEliim certb £j? infallibiliter compareant, audituri & vifu-
ri omnia bona fua feudalia & allodiaîia ab ipfis poffefjd refpeclivè caduca & Fifo
Noflro £a[areo delata efie fc? deelarari,. aut cur ejufmodi declaratio contra eofdem
fieri non debcat , caufasjuri confentaneas allegaturi £5? probaturi , diâiumque pro-
ceffum per juris terminos ex legum praferipto ufque ad fententia publicationem pro-
fecuturi, certi cateràquin^ qnod five ità comparuerint Jive non abfentïâ vel contu-
macià eorum non obfiante , nihilo fecius ad ulteriorem Fifcalis Noftri Imperialis
infiantiam^ ad eaprocedetur r qua juris & juflitia rationi confient anea videbun-
tur. P rater ea quoque capitulationem feu traclatum cum Gallicis £5? Hifipanicis
Minijîris initum harum vigore cajfamus & annullamus , feribque & fub banni Im-
perialis ejufque publicationis & executionis pana mandamus ut ab iis penitus abfli-
neant, parte/que Gallicas & pratenfias Hifpanicas cenfeflïm déférant^ eor unique
militiam dimittant , imb &? armispropulfent atque ordinationibus No/lris Cafa-
rds in omnibus fe fubmittant , niji diiiam banni Imperialis ejufque Publicationis
& executionis panant incurrere mahterint , de quo eofdem certio^es redditos volui-
mus per pr a fentes manus Noflra fubfcriptione , 6? Sigilli Nofiri Cafarei appreffio-
ne munit as & d-atas. Laxcmburgi zo, Mail 1701.
Les Généraux de l'Armée des deux Couronnes firent diftribuer un Ecrit
contre le Moratoire, & ils y ajoutèrent la Copie d'une Lettre de l'Electeur
de Cologne fur ce iujet-là. Voici l'un ôc l'autre.
J7Sfie;zdo pervenuto à notizia dt' Generali délie Armate délie due Corone , che Fogli
fi f offero diffeminati per il Mantovano edaltrove, alcuni Placardi e Serit- publics
/;* infinitamente abufivi , à difegno di portaf del terrore neW ignoranza df Po- ll da'
poli, fi è giudicàto à propofito, fenza entrar ml detaglio di tutte le ragioni del f^^f"
Sereniffimo Duca di Mantova , che probabilmente , quando farà citato legiti- Armata
mamente, & da chi avrà diritto di farlo^ non mancarà già di produrre am-ài Fraa»
piamente , e di far conofeere al mondo ï ' infiuffiftenza , calonnia , e falfità di detti z™ dal
Placardi; di far loro intendere che il contenuto de" Placardi medefimi non hà di* Goito-
ver un f on dament 0, poiche S. M I. non Im ragione alcuna di trovar àridire à n. Lu-
la condotta del fudetto Sereniffimo T>uca di Mantova , corne lo pruova à bafian- g'io
za la Lettra feritta dal Sereniffimo Signor Elettore di Colonia , di eut è qui*!01,
appreffo la Copia. Per altro le due Corone , che hanno fempre avuto per og--
gctto il mamenimento délia tranquillità d'Italia , conofeendo quanto ella farebbe
nwfolamtnte alterata, ma perjo contrario tutta in guerra, s 'Elleno non pre-
Ttt 3 w»;»"
5-J8 MEMOIRES, NEGOCIATIONS, TRAITEZ,
1701. vcnivano le minaccte faite da' Minijlri dell' Imper adore, e fopra il tutto dal
■ Signor Conte di Caftel-Barco , che S. M. I. voleva impadronirfi di Manto-
va, per farvi la prima fua Piazza d' Armi, par facilitare probabilmente an-
ticipât a la Guerra in Italia , le Loto Maeflà hanno trovato buono di far mar-
chiar T'ruppe alla detta Mantova , e di sforzar queflo Duca à rïceverle, neW
unica e pur a intenzione d'opporfi al flagello d'effa Guerra , di oui Vlmpir adore
minacciava il ripofo deW Italia , corne pare ch' oggidi vi operi attualmenie .
Egh è percib che i Popoli devono aver meno di riguardo aile fuppofizioni che loro fi
prefentano per la propria ruina, che alla vcrità, colla qualefi vuol loro prevenir-
la e difendcrli, ede queflo ancora che li Generali délie Armate délie due Corone
hanno giudicato à propofito di far publicare per intelligenza dé' Popoli e per im-
pedire cl? effi non fi lafcino forprendere da finifire infiuenze , che loro potrebbero
ejfere totalmente contrarie.
Carlo Enrico di Lorrena. Il Maresciallo di Catinat.
Copia di Lettera Circolare fcritta dal Screniflïmo Elettore di
Colonia alli Sereniiîimi Elettori di Mogonza, Treve-
ri, e Baviera.
<iO ho ricevuto ieri fera per la pofia Impériale una Lettera del? Imper adore,
J data à Laxemborgo li 10. del Mefe di Maggio paffato concernente il Duca di
Mantova , nella quale io ho intefo , che alla Corte di Vienna fi imputa il delitto
di le/a Maeflà à queflo Duca per avère ammejè Truppe Straniere nella fua
Città, èfuo Ducat 0 di Mantova, e che digia fia egli Jlato citât 0 per comparire
alla detta Vienna , nel termine di due Mefi , ad audiendum & videndum fua &
Confiliariorum &c. Quantunque io ignori in quai maniera, e fotto quali con-
diztoni, pofia quefto Prencipe efjerfi mpegnato con potenze Straniere , e molto
piu ancora le ficurezze che pub egli aver date à S. M. I. fotto la fede de
giuramenti , e che percib io non fia gia in iftato di giudicare fe egli veramen-
te è colpevole de1 fatti di eut è caricato , e fe il fuo Trattato colle dette Poten-
ze contenga cofe , perlequalt debba ejfere decaduto da' fuoi Feudi dependenti dalf
Imper 0.
Corne tuttavolta nonfi pub punto dubitare che fe queflo Duca poteffe effer conv'tn-
to di una ver a fellonia contro l' Imper 0 e l'Imper adore corne Capo dell' lmpero , vi
farebbe grand' occafione di procéder gli contro per parte dell' Imper adore e dell'
lmpero corne verfo un Ribelle •> il mio parère altreù e che bifogna convenir e che
la Corte Impériale non deve precipitarfi , ne far cofa alcuna di fua te fa, priva-
tivamente a' Diritti e Coftituzioni delP lmpero in u» affare che riguarda un tan-
to confiderabil Prencipe e Fafiallo del medefimo lmpero, e ch' egli è d'un gran-
difiïmo interejfe per tutti quegli che ne compongono il Corpo , di tener la mano,
perche queflo affare fia trattato con tut te le formalità requiftte , à fine che la Cor-
te Impériale in auvenire non fi arroghi il diritto d*una fimil proceditura , e di
deciàere fola in fimili cafi nelle cofe importanti e Jènza la participazione de-
gli
ET RESOLUTIONS D'E T A T. ft9
gli Elettotï, Prencipi , e Stati deW Jmpcro, corne da quahhe tempo in quà ne 1701.
abbiamo molti efempi , e pare che fi voglia fiatttirlo in ufo. — ■ —
Jofcrivo confidentemente tutio quefto alla Voftra Dikzione , pregandola di
■volerci communicare con la medefima fmcerità quanto pih prefto potrà li fuoi
[entiwenti.
"J
Traduction de la Lettre précédente.
Ai reçu hier par la pofte Impériale une Lettre de l'Empereur datée à
r Laxembourg du 20. Mai, au fujet du Duc de Mantouë , par laquelle
„ j'ai apris, que ce Duc eft taxé à la Cour de Vienne, comme coupable de
„ crime de Leze-Majefté, pour avoir reçu des Troupes étrangères dans là
„ Ville Se Duché de Mantouë ; 6c qu'il étoit cité pour ouïr les plaintes
„ portées contre lui. N'aïant pas encore apris, fur quel pied, Se à quelles
„ conditions ce Prince s'eft engagé avec des Puiflances Etrangères , ôc ne
„ fâchant pas quelles aflurances il peut avoir données à l'Empereur en prê-
„ tant ferment, je ne fuis pas en état déjuger, s'il elt véritablement coupa-
„ ble de ce dont on Paccufe; 6c fi la conduite envers ces Puiflances, con-
„ tient des chofes qui puiflent le rendre déchu des Fiefs de l'Empire dont il
„ eft revêtu. Que fi ce Duc eft véritablement coupable de haut crime con-
„ tre l'Empire, 6c par confequent contre la Perfonne de l'Empereur, qui en
„ eft le Chef, on ne peut pas douter qu'on n'ait lieu de procéder contre lui
„ comme Rebelle. Autrement, j'eftime qu'on doit avouer, que la Cour
„ Impériale ne doit pas fe hâter de rien faire de fon propre mouvement, fans
„ le (ecours des Loix 6c des Conftitutions de l'Empire; 6c qu'il eft extréme-
„ ment important à tous ceux qui compofent ce Corps, que cette Affaire le
„ faffe avec toutes les formalitez convenables ; afin, qu'à l'avenir, la Cour
„ Impériale ne s'aproprie pas le droit de procéder , en ces fortes d'Affaires fans
„ les avoir communiquées aux Electeurs , Princes, 6c Etats de l'Empire, com-
„ me nous en avons vu plufieurs exemples depuis quelque tems , 6c qu'il fem-
„ ble qu'on en veuille introduire la coutume. Je vous écris ces chofes,
„ me confiant en l'affection que Vous me portez, 6c vous priant , de vou-
„ loir me communiquer vos lëntimens, avec la même fincerité , & le plû.-
„ tôt qu'il fera poffible , 6cc.
OuTREces Pièces, ces Généraux - là firent diftribuer un autre Ecrit de
la teneur fuivante.
VOus me mandez, Monfieur, que depuis que vôtre âge &c vos incommo- Traduc-
ditez vous ont fait préférer la douceur d'une retraite honorable 6c vo- t|0" de
lontaire à l'embarras des emplois que vous avez remplis , vous vous contentez la Rj:"
d'apprendre les nouvelles dans les Gazettes publiques , fans raifonner fur ce d'un
qu'elles contiennent, à moins que les faits qu'elles raportent ne foient fingu- Gentil-
lieis ou contre les régies. Mais vous dites qu'alors vôtre ancienne curiofite fe homme
ranime , que vôtre imagination s'échauffe , 6c que vos amis vous manquent ^une
pour en parla librement & fans partialité avec eux. Vous me marquez en- Lettre
fuite
toue.
f4o MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
1701. fuite que vous avez trouvé, que les procédures de l'Empereur contre le Duc
... de Mantouë font de cette nature , vous m'en dites vôtre fentiment , vous me
d'un de demandez le mien , 6c' je vois que fi les Affaires du monde demeuroient dans
fes A- l'ordre 6c dans l'iifligc ordinaire, on ne recevrait jamais de vos Lettres. Quel
mis, fur qUC f0jt ]e motif de la vôtre , j'aime encore mieux la devoir-» vôtre curiofi-
la VIe:. té, que de n'en recevoir aucune, 6c pour vous le faire connoître , je vais re-
tendue » ? , •■•.. 3 v > 1 ■>
Profcri- pondre régulièrement a toutes vos v^ueitions.
ption du Vous me demandez quel crime le Duc de Mantouë a commis pour s'attirer
Duc de cette difgrace ? Vous voulez fçavoir fi l'Empereur a pu procéder feul 6c avec
Ma?" tant d'authorité contre ce Prince? Et enfin vous me priez de vous dire mon
opinion fur les confequences de cette procédure.
Le Duc de Mantouë a prévu les maux que les prétentions de l'Empereur
fur la Monarchie d'Efpagne alloient attirer en Italie. Il a jugé que fon Païs,
comme voifin du Milanois , ferait expofé des premiers aux malheurs de la
Guerre. Il a vu de plus, que les Troupes de France 6c d'Efpagne, aïant
prévenu par leur diligence l'arrivée de l'Armée de l'Empereur en Italie, ne
fui donneraient pas le tems d'être fecouru. Dans cette extrémité, privé de
toute dperaiice d'être affifté par l'Empereur, dont les Troupes étoient à pei-
ne avancées çn Tirol , il a été contraint de céder à la néceffité. Pouvoit-ii
faire autrement à la vue des Armées. de France & d'Efpagne déjà arrivées
dans fon Pais, 6c portées autour de Mantouë, qu'il n'étoit point en état de
deffendre par lui-même ? Voilà fon crime. On avoit regardé à Vienne Man-
touë comme une place d'Armes qui ferviroit beaucoup au fuccez des Projets
qu'on formoit, 6c des Conquêtes qu'on méditoit. Quel contre-tems, Mon-
iteur? Qu'elle matière pour noircir un Prince , qui a plus penfé à fa propre con-
fervation, qu'au Progrez des Deffeins de la Maifon d'Autriche] Demande-
rez-vous après cela quel crime il a commis ? En vérité il y a une paflion vifi-
ble dans ce procédé de la Cour de Vienne; 6c s'il avoit lieu, il n'y aurait pas
un Prince de l'Empire à qui elle ne pût faire de même un crime énorme du
refus de fuivre aveuglement fes volontez, dans les occafions même, où, com-
me en celle-ci, le Duc de Mantouë s'ell trouvé contraint de céder à une né»
ceffité preffante 6c inévitable.
Pour noircir encore d'avantage la Rélôlution de ce Prince, la Cour de
Vienne a voulu faire paffer pour une Aliénation l'entrée des Troupes de Fran-
ce 6c d'Efpagne dans Mantouë ; mais c'ert un artifice qu'il a été facile de dé-
truire : 6c la France a déclaré par tout , que bien loin que ce Duché ait été
aliéné en fa faveur, il fera laide 6c remis en l'état où il a toujours été ious la
dépendance 6c le Gouvernement de ce Duc, auffi-tôt que le Milanois fera en
fureté contre les Entrepriiës de l'Empereur..
Je viens après cela, Monfieùr, à vôtre féconde Queftion.
En cas que le Duc de Mantouë fût tombé dans la félonie qu'on luhmpute
injultement , vous me demandez quelle cil l'étendue du Pouvoir de l'Empe-
"eoccafion, 6c les formalitez qu^il eil obligé d'obferver ? Les
fentimens des Auteurs ne font point partagez fur ce fujet. Ils décident tous
que le Prince aceufé doit être préalablement cité pour venir rendre compte
de fa conduite. Il y en a même qui montrent par pluHeurs exemples , que-
ET RESOLUTIONS D'E T A T. f4i
cette citation fe doit faire par un Prince, de même rang au moins, Se tous 1701'.
conviennent qu'on doit enfuite examiner Tes raifons, & que le jugement ne '
peut être rendu qu'avec la participation 6c du confentement de l'Empire.
S'il y a quelques Docteurs qui en ont parlé moins affirmativement, c'eft par
un effet de leur dévouement pour la Cour de Vienne. S'il y a quelques exem-
ples contraires, comme font la profeription deJean-Frideric Electeur de Saxe,
6c de Philipes Land-Grave de Hefle , faite par l'Empereur Charles V. en
if 46. j celle de Chriftian Duc de Holftein faite par l'Empereur Rudolphe
II. en. ..... , & celle de Frideric V. Electeur Palatin 6c de fes adhé-
rants, faite par l'Empereur Ferdinand II. en 1611.; on s'eft toujours for-
tement qpofé à leur exécution , 6c il n'y a qu'à lire l'Hiftoire pour voir les
Troubles que ces injuftes entreprifes ont caufez. Il n'y a de même qu'à exa-
miner les Suffrages des Electeurs de Saxe & de Brandebourg, 6c la Réponfe
faite par tous les Etats contre la profeription de Frideric V". Electeur Pa-
latin, que l'Empereur entreprit de fon chef fans le confentement des Etats. Et
fi l'on veut remonter plus haut dans l'Hiftoire du paffé, on verra que tous les
Princes qui ont cté proferits ou mis au Ban de l'Empire , pour parler dans
•les termes de la Nation, l'ont été du confentement des Etats , ou qu'on s'y
eft toujours oppofé avec force , & que ces entreprifes contraires à leurs pré-
rogatives ont toujours été fuivies de Troubles , ou n'ont point été exé-
cutées.
Comme l'étendue d'une Lettre doit avoir de certaines bornes, je ne vous
raporterai point ici ces exemples, mais pour fatisfaire vôtre curiofité, & vous
mètre pourtant en état de les fçavoir , je vous les marquerai à part à la /
fin de cette Lettre, où vous pourrez les examiner à vôtre commodité. /
Je me bornerai feulement ici aux Traittez de Weftphalie , aux Avertifîê-
ments apellez Monita des Etats de l'Empire fur cette matière, 6c fur tout ,
aux Capitulations de l'Empereur aujourd'hui régnant , 6c du Roi des Ro-
mains fon Fils , comme à deux Actes récents qui décident la Queftion ,
quand même il fe trouverait quelques exemples douteux dans les tems
précédents.
Les Traitez de Weftphalie difent que dans la première Diète de l'Empire,
qu'on devra convoquer fix mois après leur Ratification , on y devra régler
l'ordre 6c la manière qu'on doit obferver dans la Déclaration d'un Etat au Ban
de l'Empire , outre ce qui eft déjà marqué dans les Conltitutions du même
Empire.
Les Avertiflements ou Monita des Princes fur la Capitulation de l'Empereur
Léo pold marquent précifement, que fi un Etat de l'Empire ou toute une
Communauté s'étoient tellement rendus coupables qu'on pût 6c dût agir par
-voie de profeription , on doit en ce cas procéder contre eux à une Diète gé-
nérale, les citer auparavant fuivant les formes du Droit, les entendre fuffifa-
ment dans leurs raifons , 6c faire examiner le fait par quelques Membres des
Etats tirez des trois Collèges en pareil nombre de Religion qui prêteront un
ferment particulier pour cela, 6c prononcer enfin un Jugement conforme à la
Réiblution unanime de l'Empereur 6c de tous les Etats.
Tcm. I. Vvv Et
f# MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
I7«i. Et enfin il eft pofitivement dit dans la Capitulation de l'Empereur Article
■ — zS., & dans celle du Roi des Romains Article 27., que l'Empereur empê-
chera 6c ne permettrra point , qu'à l'avenir aucune Perfonne de haute ou baf-
fe condition, Electeur, Prince, Etat, ou autre , foit mis & déclaré au Ban
de l'Empire fans raifon légitime 6c fuffifante , fans être entendu , & fans le
Sçû préalable, le Confeil , 6c le Confentement des Electeurs qui n'auront
point eu part au fait: Qu'en ce cas, cela fe fera 6c fe décidera dans les for-
mes , conformément aux Conftitutions de l'Empire, 6c à l'Ordonnance de re-
. formation de la Chambre Impériale de l'année ifff.j aufîî bien qu'aux Re-
cés faits fur ce lu jet, 6c à ce qui pourra être réfolu de plus dans la Diette à
venir, par les Electeurs, Princes, 6c Etats fur la manière 6c l'ordre de le fai-
re, ainii que cela y a été réfervé; Que fi cependant l'Affaire étoit telle que
le fait fût en foi - même notoire 6c manifefte , 6c que le perturbateur de la
Paix perfiftant avec opiniâtreté dans ton crime, quoiqu'alors il ne fût pas né-
ceffaire de lui faire particulièrement Ion procès , l'Empereur promet néan-
moins en ce cas, qu'avant de parler à la Déclaration réelle du Ban de l'Em-
pire, il en communiquera en la manière exprimée ci-devant avec tous les E-
lecteurs qui n'y feront point intereflez, 6c qu'il ne fera rien fans leur Confeil
6c leur Confentement exprès 6c préalable.
Ce font là, Monfieur, les bornes que les Etats de l'Empire ont mifes fur
cette matière à l'Autorité de l'Empereur en confentant à fon élection. Ce
font les précautions qu'ils ont prifes en fe donnant volontairement un Chef
qui ne l'cit point par Succeffion , mais de leur choix 6c avec de certaines ré-
ferves qu'il eft obligé d'obferver. Les entreprifes du paffé leur en ont fait
craindre avec raifon de nouvelles , 6c enfin la forme du Gouvernement de
l'Empire, le maintien de leur Souveraineté, 6c la confervation de leurs Pré-
rogatives qu'on a fi fouvent attaquées, demandoient ces juif es précautions.
Autrement , s'il étoit au pouvoir de l'Empereur de mettre un Prince au Ban
de l'Empire de fa propre Autorité 6c fans le confentement des Etats , il n'y
en auroit pas un en fureté contre le reffenti rient de la Cour de Vienne, aufîî-
tét qu'il ne feconderoit pas lès defirs 6c fes vues , 6c ils ont tous un intérêt
fenfible de s'opofer à de pareilles entreprifes-
II faut examiner préfentement fi toutes ces conditions ont été oblervées à
l'égard du Duc de Mantouë. J'ai déjà commeheé de vous faire voir, que dans
l'état où font les choies, il ne peut en aucune façon être regardé comme
coupable de félonie: c'eit de quoi vous ferez encore plus perfuadé, fi vous
confidérez que comme Piince Souverain de l'Empire, 6c en vertu du 8. Ar-
ticle de la Paix de Weftphalie , il ell en droit de taire des Alliances avec les
Puifiances étrangères dans des cas, eu, comme dans celui-ci, l'Empire n'a
rien décidé au contraire ; qu'en cette qualité il a pu fuivre fon intérêt parti-
culier, en cédant à la nécdilré 6c en recevant des Troupes de France 6c d'Ef-
pagne dans Mantouë pour fa propre deffenfe ; que c'elt ce qu'ont fait en di-
vers tems plufieurs autres Princes de l'Empire, 6c encore depuis peu le Duc
de Holftein en apellant les Anglois 6c les Hollandois jufques dans fes Etats*
que c'elt de quoi les fix mille Danois, qui font de même entrez dans l'Elec-
torat
ET RESOLUTIONS D'ETAT. j-45
torat de Saxe pour le deffendre contre l'irruption des Troupes Suedoifes dont
il étoit menacé , nous viennent encore de fournir un exemple tout récent;
& que c'eft ce que l'Empereur fait lui-même aujourd'hui en recevant dans
fes Places du Rhin ce même Corps de Troupes étrangères de Danem.irck.
Adjoutez à cela, Monfieur, que l'Empereur ne fait point la Guerre en Ita-
lie comme Empereur , mais en qualité d'Archiduc d'Autriche & pour des
prétentions domeftiques qui (ont étrangères à l'Empire; Qu'autrement, & s'il
agiflbit en qualité d'Empereur, ilauroitdû, fuivant fa Capitulation Article
15. avoir auparavant le Contentement de l'Empire: 6c vous trouverez fans
doute, que ne l'aïant ni requis-ni obtenu, il ne peut être confideré que com-
me un Prince particulier qui fait la Guerre pour fes intérêts perfonnels; Qu'il
n'eft point ainfï en droit d'impoier aucune Loi au Duc de Mantouë fur ce
fujet, 6c que par conféquent il n'a pu jufqu'à prêtent procéder contre ce
Prince par voie de profeription. Mais fupoié même , contre la vérité du
fait, que le Duc de Mantouë pût être regardé par l'Empereur comme cou-
pable de félonie, il faut examiner fi les formalitez requilés en pareil cas. ont
été obfervées à fon égard : 8c il eft facile de faire voir par les Ecrits mê-
mes qu'on a produits à Ratisbonne, que c'eft ce qui n'a été fait en au-
cune façon.
Au lieu d'une fimple citation préalable, qui ne peut ôter à un Prince ni fa
dignité, ni fon rang, ni les égards qui lui font dûs en cette qualité, on le
traite dans le titre de cet imprimé de IVeyland^ qui en Allemand fignifie de-.
funt, ou au moins ci-devant Duc de Mantouë. On fe fert dans la citation
même des termes injurieux de deteflable 6c d'âme fervile , 6c l'on y déclare
dès à préfent fes Etats caducs 6c dévolus au fife Impérial. Eft-ce ainfi qu'on
doit traiter un Prince qui ne feroit que fimplement cité , 6c qui jufqu'à la
condamnation conferve fa dignité ; 6c n'eft- ce pas le regarder comme déjà
condamné? Mais on fait plus. Par un autre Aéte du même jour ; on le nom-
me de même autre-fois Duc de Mantouë , quondam Dux &c. ; 6c l'Empereur
délie dès à prefent fes fujets de leur ferment 6c de la fidélité qu'ils lui doivent.
C'eft faire marcher l'exécution devant la fentence; 6c -fut- il jamais un procé-
dé plus contraire aux régies ordinaires, à la Capitulation de l'Empereur, &
aux Prérogatives des Princes? Tout cela eft fans réponfe , Monlieur ; 6c il
les Princes le foufFrent , une tolérance fi manifeftement contraire à leurs pré-
rogatives ne les en rendroit-elle pas juftement refponfables à leur pofterité ?
Mais on a fujet d'attendre toute chofe de leur amour pour le maintien de
leurs Droits en la perfonne d'un Prince de ce rang ; 6c il y a lieu de croire
qu'ils s'opoferont à cette entreprife par quelque Afte public 6c autenti-
que, qui établiflant la nullité de cette procédure mette la Cour de Vien-
ne hors d'état de fe fervir un jour de cet exemple contre eux-mêmes, s'ils
le pafTbient fous filence, comme c'eft peut-être ce qu'elle efpére 6c le but
qu'elle a.
L'indignhé même avec laquelle ces Ecrits ont été rendus publics à laDict-
te doit reveiller leur attention. Le Concommilîàire de l'Empereur avoit or-
dre de les communiquer aux Ele&eurs , Princes , 6c Etats de l'Empire.
Vvv : Dans
170 r.
f44 MEMOIRES, NEGOTI ATIONS, TRAITEZ,
1701. Dans l'impofîîbilité de le faire avec les formes ordinaires, parce que le mu-
" veau Miniitre de M.uence, Directeur de la Diète , n'étoit pas encore auto-
rité, le Concommiffiirc auroit pu au moins donner cette communication par
fon Secrétaire ou par le Chancelier de laCommiiîîon Impériale-, mais, au lieu
de cela, qu'a-t-il fait? Il les a donnez a imprimer avant que Perfonne en eût
connoiffânec ; 6c çà été le Garçon Imprimeur qui avec fa permifîîonles a por-
tez dans les maifons de tous les Miniitrcs, auxquels il a fait païer les exemplai-
res qu'ils en ont voulu avoir. Irrégularité fans exemple! pour ne pas dire da-
vantage; 6c n'eft-ce pas traiter les États d'une manière , comme j'ai dit, in-
digne, & qui fait voir clairement les vues ôc le mépris de la Cour de Vienne
pour la Diète?
Voïons à prefent les procédures dont on a accompagné ces Ecrits. Il étoit
d'une necefîîté indifpenfablede confulter auparavant les Etats de l'Empire. L'a-
t-on fait? On ne voit qu'une Lettre du même jour par laquelle l'Empereur
donne part aux Electeurs de ces A6r.es. Etoit-ce pour Givoir auparavant leurs
fentiments ôc avoir leur aprobation ? Rien moins. C'a été pour leur donner
une fîmple communication d'une chofe déjà faite ; 6c il y a lieu de croire
qu'ils s'opoferont à une atteinte qu'on donne fi vifiblement à leur Droits, ôc
qu'ils connoîtront les conféquences d'une démarche fi irréguliere. Les Mi-
nilb.es de l'Empereur, ne pouvant difeonvenir de toutes ces circonftances, fe
font depuis retranchez à dire que ce n'efr qu'une citation, & que la décla-
ration qui y a été faite que les Etats de Mantouë font caducs 6c dévolus au
fiic Impérial eft de ftile. Pourquoi donc y emploïer les termes injurieux dont
clic eft remplie? Dira-t-on qu'ils font aufîî de ftile? Oeil vouloir impofer au
public, & en effet en n'a point vu qu'ils aient eu rien de folide à répondre,
ni fur l'indécence de ces termes , ni fur la démarche prématurée de délier dès
à prefent les fujets du Duc de leur ferment & de leur fidélité.
Il ont aufîî voulu établir une diftinétion entre les Princes de l'Empire qui en
font Etats, 6c ceux qui, comme les Princes d'Italie, ne le font pas; mais
c'elt une différence qu'ils ne pourront jamais appuïer par aucun Exemple au-
thentique. La Capitulation de l'Empereur ne fait point cette diftinétion. Il
y eft dit au contraire fans nulle exception , qu'aucun Electeur , Prince , ou
autres, de quelque qualité qu'ils foient, ne pourront être mis au Ban de l'Em-
pire (ans le contentement des Electeurs ; 6c ces termes indéfinis comprennent
fans difficulté tous les Vafîaux directs de l'Empire, foit qu'ils en foient Etats,
ou non. Mais , outre cette raifon , l'ordre 6c l'ulâge des Fiefs font , qu'un
VafTiil ne peut être aceufé ni condamné pour crime de félonie, que fur laréqui-
fition 6c du confentement du Seigneur dont il relevé : 6c par conféquent les
Princes d'Italie 1 élevant de l'Empire aufîî bien que de l'Empereur, ils ne peu-
vent être aeeufez 6c jugez en pareil cas , que fur les inltances 6c au nom du
même Empire. Ces maximes font confiantes; 6c, comme l'Electeur de Bran-
debourg l'a fort bien répreiènté en 162.}. dans ion Suffrage raporté ci deffus,
fi l'Empereur avoit feul cette Autorité , la condition des Princes de l'Empire
ferait pire que celle d'un Gentil-homme de Pologne, qui ne peut être jugé ni
eondamné, que par une Diète générale du Roïaumc.
Mais
ET RESOLUTIONS D'ETAT. f4f
Mais, la Cour de Vienne fe met peu en peine de toutes ces formalités. Ce 1701.
ne font pas les premières qu'elle a tâche d'abolir. ^ On en a des exemples ré- *™ ■ ■
cents dans l'Affaire du IX. Electorat au grand préjudice des Princes. Elle ne
fonge qu'à établir de pareils exemples, pour parvenir à l'Autorité fuprême &
monarchique qu'elle envilage depuis long-tems dans l'Empire. Et c'eft à
quoi elle parviendra enfin, fi on ne s'opolé pas fortement à de pareilles entre-
prifes.
Les Electeurs ont un intérêt particulier à celle dont il s'agit. Ils font feuls
nommez, dans l'Article delà Capitulation qui concerne le Ban de l'Empire.
Les Princes s'y font à la vérité oppofez fie prétendent que cette connoiffance
eft dûë à tout l'Empire. C'eft. un différent particulier entre ces deux Collè-
ges, auquel on ne prend point de part j c'eft leur Affaire. Et le Duc de
Mantouë eft teulemcnt en droit d'attendre des uns & des autres qu'ils ne fouf-
friront point le préjudice qu'on leur fait en fa Perfonne , auiïï bien qu'en celle
de fes Confeilleisj fie qu'on connoîtra que le but de la Cour de Vienne, dans
cetre démarche, a principalement été d'infpirer à ces Princes & à leurs Mi-
niftres la vaine crainte d'un pareil traitement , & de leur monftrer le dévoue-
ment aveugle qu'elle veut qu'on ait dans toutes les Cours de l'Empire pour
fes volontez.
Voilà, Monfieur, quelles font les conféquences de cette procédure irrégulie-
re contre le Duc de Mantouë. Et c'eft laRéponie que j'avois à faire à la troi-
fiéme 6c dernière Qucftion de vôtre Lettre. S'il y a quelque autre point fur le-
quel vous déliriez d'être éclairci , vous n'avez qu'à commander. Je le ferai
toujours avec la même fincerité. Et je vous prie de croire qu'en toute occa-
fion vous me trouverez prêt à vous donner des marques de la reconnoiffance
& de la vérité avec lefquelles je fuis &c.
On infinuoit cependant, que l'Occupation de Mantouë avoit été faîte par
une aprobation tacite de la République de Veniië. Celie-ci la defavoùoit.
Le Comte de Berka , qui y étoit Ambaffadeur de la part de l'Empereur,
maltraita l'Agent du Duc qui étoit le Comte de Cremona. Il alla vers cet
Ambaffadeur pour exeufer fon Maître. Ce Miniftre demanda à l'Agent fi le
Duc avoit encore quelque chofe à vendre , fie enfuite le maltraira Se le chaffa
de fa préfence. 11 en fit autant à un Gentilhomme de Mantouë. Comme
il alla pour faire une Vifiteau Comte, celui-ci lui fit dire que s'il ofoit s'a-
procher de là maifon, il le feroit jetter par les fenêtres. L'Empereur même
dit qu'il feroit une haute vangeance du Duc de Mantouë. Comme Sa Ma-
jefté Impériale envoïa une nombreufe Armée en Italie , Elle ne doutoit point
que fes Troupes ne fufiënt en état de s'en vanger. Elles avancèrent par des
chemins fort difficiles. Les François, pour les empêcher d'entrer en Italie,
allèrent fe camper vers Pcfchiera fur le Lac de Garde. Ils s'étendirent vers
Rivoli & au Fort de la Chiufa, Place forte prés de la Rivière de l'Adige. Le
Prince Eugtne arriva le 18. Mai à Roveredo pour commander les Impériaux.
En y arnv.,i.t, il en donna part par un Exprès à Venife. Le Sénat prit cet-
te Démarche en bonne part. Le Général Palfi, apiès avoir effuié de gran-
V vv 5 des .
f4<5 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
1701. des peines pour paffer le Mont Bertola, defeendit dans le Vicentin fie étendit
" même fes Quartiers dans le Padoùan. C'étoit avec la Cavallerie. L'Infan-
terie marcha par Montebello. Le Prince Eugène avoit mis fes Quartiers
dans la Vallée de Polifelli, dans le Veronois. Il trouva enfuite moien de fai-
re un Pont iiir l'Adige qu'il paffa. Sur la difficulté de la pénible marche des
Impériaux, on fit ce Diftique:
Alpihis Italiam pemtrat Gemanïa fraiïis:
Cœfareœ incajjum^ Galle , refiflis yfyi.
Il y avoit bien des Italiens, qui par h haine des Affaires courantes , fie par'
le defir de quelque Changement , fe réjouïïToient de leurs propres Périls ; ce
qui flattoit les Impériaux.
Comme l'on voioit l'Empereur engagé dans la Guerre en Italie , on fut-
dans l'entière difpofitiôn de le féconder 6e de faire avec lui une Alliance of-'
fenfive 8c défenfive. Pour tacher de détourner ce coup , l'on infinuoit aux
Etats Généraux, qu'à la Cour d'Efpagne on étoit difpofé à donner les mains
à quelque Démembrement. On fpécifioit même, que fi l'Empereur pouvoit
être fatisfait par le Duché de Milan , on ne feroit pas grande difficulté à le
lui céder. D'ailleurs, de la part de la Cour de France , l'on faifoit infinuër
que Sa Majefté Très-Chrétienne aïant accepté le Teftament par la Promefîe
de conferver la totalité de la Monarchie , Elle ne pouvoit pas propofer Elle-
même quelque Démembrement} ainfi, qu'il falloit avoir recours , pour en-
faireun, à la Cour d'Efpagne, qui, pour éviter une Guerre, ne feroit pas
là-deffus fort la revêche. On ajoutoit même , que le Cardinal Porto-Carre-
ro, qui s'apercevoit de cette difpofitiôn de la Cour de Madrid , feroit éloi-
gné des Affaires, afin qu'il ne fût pas en cela une fâcheufe pierre d'achope-
ment. .Cependant, les Politiques difoient qu'on ne pouvoit l'éloigner, puif-
que la Roïauté même , qu'on avoit acceptée, n'étoit qu'un Don de fa main
fie de les foins . Auffi , bien loin d'une prochaine Difgrace de ce Cardinal , fon
Crédit parut-il augmenter , par l'apui qu'il donna a la Propofition du Roi
fon Maître d'accorder aux Ducs 6e Pairs de France , qui .viendroient à fâ
Cour, les mêmes Honneurs & Traitemens, dont les Grands d'Efpagne jouif-
foient. Après toutes les ferviles Complaifances des Efpagnols, qui par la Ré-
volution de la Monarchie , s'étant dépouillez des anciennes manières fie de
leur Grandeur , n'attendoient que les ordres de leur Maître , l'on trouva qu'il
ne leur manquoit plus que cette feule efpece de Flatterie. Auffi , le Décret
fut-il fait Se publié en ces termes :
^cre? 3> "CN continuation de ce que le Roi Très - Chrétien mon Aïeul tâche
d'Efren n ^ d'établir Une Union étemelle entre les Sujets de cette Couronne & la
faveur „ fienne -, à cette fin , il a refolu d'accorder aux Grands d'Efpagne, fie à
des Ducs j? leurs Femmes , les mêmes Honneurs en fa Cour dont jouïffent les Ducs
^ pairs „ fie Pairs en fon Roïaume. C'eif. pourquoi , defirant pareillement de con-
clu i,,n" „ firmer cette parfaite Union , j'ai réiblu d'accorder auffi aux Ducs de ce
„ Roïau-
ET RESOLUTIONS D'E T A T. r47
„ Roïaume-là , 6c à- leurs Femmes, qui viendront en Efpagne , les mê- 1701.
„ mes Honneurs 6c Traitemens , dont jouïflent ici les Grands d'Efpa- — — —
„ gne, 6cc.
L e Confeil d'Efpagne eut lieu d'être auflî mécontent de la Déclaration
que le nouveau Roi fit de fon Mariage avec une Fille du Duc de Savoie.
C'étoit que ce Prince l'avoit conclu fans fa participation, félon les anciennes
Coutumes d'Efpagne. Il en avoit d'ailleurs ufé de même par le Traité qui
avoit enfin été conclu avec le Portugal , non-obfhnt le peu d'inclination de
ce dernier, 6c même contre fes véritables Intérêts. Voici l'Extrait de ce
Traité.
„ I. /'"VU'on renouvelle tous les Traitez faits ci-devant entre PËfpagne 6c f xî,r?'t
„ V^ le Portugal, 6c particulièrement celui qui a été fait avec le Roi îjance
„ D. Sebastien devant la Réunion 6c avec le Roi D. Alphonse VII. offenfi-
„ en Tanné 1668. ve &c
II. Que le Roi d'Efpagne donnera fatisfaérion à la Compagnie Portu- J?effen"
„ gaife, touchant le Commerce des Nègres, de la manière qu'on convien- conclue
„ dra dans un Traité fepari. entre le
„ III. Que le Roi d'Efpagne renoncera à tout fon prétendu Droit fur Roid'Ef.
„ St. Gabriel , proche los Buenos Ayres , 6c que les Portugais y relieront Pa£ne
„ dans lapaifible pofîèflion. pb V &
„ IV. Que le Roi de Portugal garantira le Teftament du feu Roi d'Ef- leRoi'de
„ paene Charles II. touchant la Succefïion du Roi Philip- Portugal
," pE v. - ; °™*£
„ V. Que le Roi de Portugal fe déclare Ennemi de ceux qui feront jujn>'
la Guerre pour ladite Succeffion au Roi Philippe V., en réfutant
fes Ports à leurs VaifTeaux tant Marchands que de Guerre .
„ VI. Que le Roi d'Efpagne, 6c celui de Portugal, ne protégeront pas
les Rebelles ou Criminels de Tune ou de l'autre Couronne ; 6c qu'on les
renvoiera à la première requifition. Que ceux qui fraudent les Droits du
Tabac , 6c dont il n'eu: pas fait mention dans les anciens Concordats , y
„ feront compris maintenant.
„ VII. Que fi le Bled manque en Portugal, le Roi d'Efpagne fera lever
les défenfes, pour pouvoir y en tranfporter.
„ VIII. Que cette Alliance fera pour io. ans , 6c garantie par le Roi
„ de France.
„ Le Traité touchant les Nègres doit contenir XIV. Articles , dont les
„ principaux font , Que le Roi d'Efpagne paiera du premier argent qui vien-
„ dra avec la Flote 300000. Ducats v monnoïe de Portugal , à la Compa-
„ gnie , pour la dédommager} Que la Compagnie renonce au Contraét des
„ Nègres, non-obftant qu'il devoit encore durer deux ans j 6c le Roi d'Ef-
„ pagne en fait autant, en faifant reftituer le 2,00000, Ecus avec les Ren-
,, tes, que la Compagnie a été obligé de païer à la fignacure dudit Con-
fraét
15
55
748 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
I701, „ traét. Cet argent fera rembourfé au retour de la féconde Flote , ou des
„ Galions, ou de la Flotille, avec 8. pour cent d'intérêt, jufques au jour
„ du paiement j Que tous les Arrêts 6c Saifies fur les Biens de la Compa-
„ gnie Portugaife dans les Ports de l' Amérique feront d'abord levez, 6c
„ que tout l'argent qu'on lui doit pour la vente des Nègres , ou autre-
„ ment, fera paie dans deux mois de tems , 6c qu'il lui fera libre d'em-
„ porter tous fes Effets dans un terme convenable, pour les faire tranfpor-
„ ter à Lisbonne, ou ailleurs.
„ Le Traité , qui contient les Articles Secrets , doit limiter le cas de
„ la Guerre 8c les prœjlanda en Troupes 5c en Vaiffeaux de part ÔC
„ d'autre.
O n eut la confirmation de la Conclufion de ce Traité , "dont on avoit
quelques mois auparavant proné fans fondement la Nouvelle, par le Miniftre
même du Roi de Portugal. Cet Envoie, aiant reçu fes Lettres , alla le if.
d'Août repréfënter aux Etats Généraux le defir que le Roi fon Maître avoit
de voir la continuation de la Paix. C'étoit fur-tout pour celle de la Républi-
que, 6c qu'il y contribuerait de tout fon pouvoir. Cependant, fi cette Paix
venoit à être troublée, il déclaroit que fes Intérêts vouloient qu'il fût atta-
ché au Parti des deux Couronnes d'Efpagne 6c de France. Il fut dire la mê-
me chofe à 1'Envoïé d'Angleterre Stanhope. Les Etats Généraux furent af-
fêmblez fur cela fort tard , pour examiner le bien 6c le mal de cet Engagement
du Roi de Portugal, à quoi le Parti du Duc de Cadaval l'avoit porté. L'on
ne prit là-deflùs aucune Réfolution , par ce que l'on ne defefperoit pas de
regagner dans la fuite du tems ce Roi-là , en faveur de l'Empereur. Suivant
ce que le Parlement d'Angleterre avoit dit au Roi , pour faire une Alliance
Offenfive 6c Défenfive avec Sa Majefté Impériale , on continua la Négocia-
tion qui avoit déjà été entamée en cette vûë-là. De la part de la Cour de
Vienne , pour mieux y réûffir , on fit imprimer les Droits de la Maifon
d'Autriche fur la Monarchie d'Efpagne. On en fit part à la Cour de Ro-
me , 6c à toutes celles , fur lelquclles cet Ecrit pouvoit avoir de l'in-
fluence. Le Comte de Goé'z le fit même imprimer en Hollande , dans
la vûë de faire voir qu'il y auroit de la juitice d'apuïer par la for-
ce ces Droits. Comme ce Maniferte elt une Pièce folemnelle , 6c pu-
bliée par ordre, on va la raporter , quoi qu'EUe contienne une affez lon-
gue Déduction.
MA NI-
ET RESOLUTIONS D'E T A T. f4i,
MANIFESTE ~
DELA
MAISON D'A U T R I C H E,
Qui démontre clairement /es 'Droits à la Couronne d'Efpagne.
DEpuis la mort du Roi Catholique Philippe IV., toutes les fois qu'on -Récit i-
a parlé de la Succeflîon à les Roïaumes Se Etats, il n'y a eu perfonne, bresé de
tant foit peu verfé dans les Affaires du Monde, fi ce n'eft quelques François, §^^M
accoutumez félon le génie delà Nation à flatèr lâchement leurs Rois, qui qui font
n'ait été très-perfuadé que le Roi Très-Chrétien & tous fes Defcendans é- arrivées
toient exclus a perpétuité de tous les Roïaumes 6c Etats de la Monarchie depuis la
d'Efpagne. Les fameufes Renonciations, faites depuis long-tems par les pmLt£.
deux Infantes d'Efpagne Anne & Marie-Therese, dont la première qui pe IV.
étoit Fille de Philippe III. fut mariée à Louis XIII. , & la féconde qui touchant
étoit Fille de Philippe IV"., à Louïs XIV., l'un & l'autre Roi de Fran- la£uc"
ce, ont toujours été tenues par un chacun pour fî claires , fi amples , 8c fi d'Eipa-
valides, que leur feule lecture, fans rien plus, a fuffi à ceux qui aimoient la gne.
juflice , pour les confirmer dans ce fentiment. Et fi la curiofite a pouffé quel-
ques perfonnes à rechercher plus foigneufement les autres apuis qui par une
plus grande précaution avoient été ajoutez par les Rois d'Efpagne Se de Fran-
ce, par lefquels la chofe étoit contractée, perfonne de bon Cens n'a pu com-
prendre avec quelle affurance aucun homme, non feulement inlïruit-de la vé-
ritable Religion & aïant la crainte de Dieu devant foi , mais doiié du ieul bon
fens, Se qui ne voudrait pas renverfer fondamentalement tous les droits de
l'humanité, ait pu ouvertement témoigner le moindre panchant d'attaquer ,
même légèrement , tant de Conventions & Confirmations répétées des Traitez.
Qui plus eu-, le même Roi Très-Chrétien, après que la Guerre qu'il avoit
entrepris depuis la mort du Roi Philippe IV. contre quelques Provinces
des Pai's Bas Efpagnols fut affoupie , femble avoir fouvent reconnu la validi-
té de ces Renonciations, Se s'être abfolument défait de toute efperance à. la
moindre partie de la Monarchie d'Efpagne, tant pour lui que pour lès En-
fans ; laiffant le foin d'entrer en fon tems dans cet héritage à ceux , auxquels
il pouvoit échoir par differens cas, plus proches ou plus éloignez, félon l'or-
dre de la Succefficn reçu dans la Famille d'Efpagne. C'elt pourquoi , ce fut
d'autant plus contre toute attente que l'on aprit il n'y a pas long-tems que du
vivant même du Roi Charles II. le R<SÎ Très-Chrétien lollicitoit avec Peua-
inftance le Roi de la Grande-Bretagne, Scies Etats Généraux des Provin- vant !*
ces-Unies des Pais-Bas , d'obliger conjoinctement Sa Majefté Impériale de charC-
partageravec lui la Succeflîon d'Efpagne, en cas de mort du Roi Char- xes 11.
Tom. I. Xxx les
5-p MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
1701- les Second fan: pofterité} & qu'il avoit même obtenu, fuivant un
" Traité Eut entre Eux pour cela , que Sa Majefté Impériale y feroit appcllée
de leur part, & que tous les Princes & Etats de la Chrétienté feraient invi-
tez à joindre leurs fbrces^pour garantir ce Partage. Mais depuis très-peu de
tems il n'y a eu perfonne, qui n'ait été furpris & étonné de la Nouvelle qui a
été bien-tôt vérifiée par l'événement, que le Roi Charles II. déjà aftbibli
d'efprit, avoit été induit, comme étant le feul remède pour empêcher le Dé-
membrement de la Monarchie Efpagnole , delbufcrire, de quelque manière
que cela ait été fait, un Teftament , que d'autres lui avoient prefenté contre
fon gré, par lequel, important les Renonciations-, dont on a parlé, au feul
Et après Dauphin de France 8c à fon Fils aîné, le Duc d'Anjou fon fécond Fils étoit
\IdIIc' aPPeu^àla Succeflîon d'Efpagne ; que le Roi Très-Chrêtien avoit auflî ac-
d'Am- quiefcé à cette telle quelle difpofition, & que par fon Autorité fon Petit-Fils
,ouaiant avoit commencé d'agir comme Roi d'Efpagne , & s'en étoit allé dans ce
IeCC"jL R°ï;Ulme là , pour en envahir le Trône j Qu'aufli plufieurs Gouverneurs des
média- &ôSanraes & Etats annexez ou fujets s'étoient fournis à fes ordres , non fans
mentoc- un grand deplaifir fecret de plufieurs, tant parmi les Efpagnols que parmi
cupéla les autres Sujets qui s' attendoient à toute autre chofe. Depuis ce tems-là,
Monar- prefqUe tout le monde, depuis le plus grand jufques au plus petit, n'a égale-
d'Efn. ment parlé que du tort extrême & fans exemple qu'on a fait , non feule-
La " ment au Très-Augufte Empereur, à fa Très-llluftrc Famille, & aux autres.
apartient Maifons, qui félon l'ordre doivent fucceder, mais à toute l'Europe ou plutôt
ila Mai- à tout le Genre humain. C'eft pourquoi, joignant enfemble les Armes ôc les
ton Confeils de tous les Etats & même de tous les hommes , fous la protection
thé""'" C'U Tout-Puillant , quand même l'Empereur ne le voudrait pas ou qu'il y re-
fiitàt, il faloit vanger ce tort, & en même tems tâcher de garantir le ialut
public de l'extrême danger où il étoit réduit. Toutes ces choies font telle-
ment avouées Se connues à tous ceux qui ne négligent pas tout-à-fait les Af-
faires publiques, & dont l'efprit déréglé ne les a pas encore fait égarer, que
fi l'on devoit feulement avoir égard à ceux qui font à prefent en vie , il ne
ferait point du tout neceflaire de travailler ou d'amaflèr avec foin les Raifons
êc Pièces neceflàires pour publier d'avantage l'injuftice des François, & pour
prouver que la Sereniffime Maifon d'Autriche eit la plus proche à la Succef-
fion d'Efpagne, par le principal droit, entre tous ceux qui de bon droit é-
roient proches parents du fciî Roi Charles, tant à l'égard de la Parenté
que des Alliances. Mais , comme il peut facilement arriver , que quelques
circonftances , quoique très-dignes d'être fçûes , ne font pas encore venues
à la connoiflance de tout le monde , & qu'il faut auflî en cette Affaire avoir
de l'égard pour tous les fimples ou les ignorans , & pour la pofterité après
nous, on expofera très-palpablement tout ce qui cft arrivée, & on rendra é-
ternelle la mémoire des choies qui peuvent fervir, tant à connoître de premier
abord la juftice de cette Caufe, qu'à donner de la confufion & de la honte
aux François mêmes & à leurs Adherans, & qui du moins peuvent réveiller
les autres à éviter leurs pièges continuels , avec certaine efperance qu'étant
lues ou ouïes , ceux qui l'ont imprudemment tombez dans les filets par la
trom-
ET RESOLUTIONS D'ETAT. ffi
tromperie d'autrui , tâcheront d'abord enfemblç de s'en délivrer, 6c peut- i/01-
être même que ceux qui ont brafle l'iniquité ou ceux qui font connus y avoir *
donné volontairement les mains , reviendront de leur égarement. Et afin de pour !e
plutôt y parvenir, il fera bon de raporter en peu de mots pour premier fon- montrer
dément, comme une chofe commune parmi les hommes, & qui eft prife de Pjjis cu"
laRaifon naturelle même, & aprouvée parmi toutes les Nations, favoir qu'at- ment>
tendu la.néceflité de l'introduction de la Vie Civile comme d'une forme, I.
félon laquelle elle devoit être gouvernée par un feul ou par^plufieurs, il a été on av!n-
dans une très-libre volonté de chaque Nation , là où la Principauté ou la "j^r"
Roïauté a été agréée, de la déférer à un feul homme, ou enfemblç à toute prlnci-
la Famille qui en defeendroit. En ce cas, la Succeflîon de la Famille Roïale pesgé-
étant perpétuellement établie, félon l'âge, les degrez ou les lignes, foit avec jj^Sj1^'»-
l'exclufion totale des Femmes , après l'extinûion de tous lesMâies, ou du u 1C
moins de ceux qui auraient été dans la même ligne Se le même degré , foit
par leur admiflion ; ou avec l'addition d'autres conditions relatives aux per-
fonnes Régnantes, à leur naiflànce, leur état ou leur mariage, 6c la manière
de régner , félon qu'il aurait été trouvé le plus à propos. 11 n'eft pas moins
évident que la forme de la Succeflîon étant une fois agréée , les Peuples Sc-
ia Famille Roïale ne font pas bornez en forte qu'elle ne puifle , par le con-
fentement mutuel de ceux qui furvivroient dans un tems, être ou totalement
abrogée ou en partie altérée, de forte qu'on n'y puifle fubftituer ou une nou-
velle forme de Republique ou une autre manière de fucceder , à laquelle toute
la pofterité eft fucceflivement obligée jufques à ce que de commun confen-
tement on en ait de nouveau établie une autre.
Or nul Roi, ni autre Membre de la Famille Roïale, ni le Peuple, ne doit
ou peut ôter à un Membre fui-vivant de la Famille Roïale le Droit qui lui eft
actuellement dévolu par la première ou la féconde Convention faite avec le
Peuple , ni le frauder malgré lui de l'efperance qu'il a acquife par fa Naiflan-
ce. Au relie, ce ferait être dépourvu de toute raifon, que d'ofer révoquer en
doute que les Princes 6c Etats qui fe font la Guerre , renoncent, cèdent, 6c
tranfportent , pour l'amour de la Paix, 6c félon l'ufage de tous tems 6c par-
mi toutes Nations, des Provinces 6c Roïaumes, des Biens, 6c" tous autres E-
tats prefens, pofledez par les parties qui font en Guerre 6c par, leurs Sujets ,
ce qui s'étend même à des chofes au de là de l'efperance , 6c même deman-
dées à tort ou par Droit ; 6c que tels Traitez 6c Tranfaclions s'apuient du
Droit des Gens , 6c qu'elles n'ont jamais été violées fans la ruine 6c l'exécra-
tion du Genre humain. Par où femblablement il paroit, 6c l'ufage de tous
les fîécles l'enfeigne, qu'un Roi d'un Roïaume peut auflï acquérir d'autres
Roïaumes 6c Etats, enforte qu'ils foient unis ou aflujettis au Premier Roïau-
me, 6c que les uns 6c les autres échoient à un 6c même perpétuel Succefleur,
ou qu'ils foient pofledez félon l'ancienne raifon de Succeflîon qu'il y a dans
chacun d'iceux , 6c félon aufli les autres Droits , 6c fuivant cela ils parvien-
nent fouvent à diffèrens Succefleurs. Et qui plus eft qu'il y a fouvent des do-
maines ou biens, de quelque prix qu'ils foient , qui apartiennent à un Roi
ou à un Prince, par Droit d'un Domaine particulier ou de Patrimoine, dont
Xxx i ou
ff* MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
1701. ou lui même de fa propre volonté, ou en cas de fa négligence ou de (a remi-
• &i quelqu'un de (es Succeffeurs peut difpofcr, Se même les attache:- à la Fa-
mille pour fon utilité, par'le lieu d'un Fidci-Commis Eternel, ce qui ne
peut être ôté,enfraint,ou changé en aucune manière que ce foit fucceffive-
ment par aucun des Succeftèurs, au dommage de ceux qui y font appeliez
fans l'intervention de leur 'confentement. Enfin , il n'y a aucun de ceux qui
favent les Droits connus fur les Terres qui apartiennent à la Sainte Eglife Ro-
maine, ou au Sacré Empire Romain, foit par Fief ou par d'autres raifons,
qui puifie douter que toutes les Familles Nobles , & fur tout les Illuftres, pour
conferver ou augmenter leur luftre & pour prévenir toute dilpute , en con-
fervant en fon entier Se fins changement le Droit de Domaine direct ou Sou-
verain , n'aient accoutumé de faire entre Elles certaines Conventions pour la
Succeflîon, qui font ou pour toujours, ou à tcms,ou personnelles, fans qu'au-
cun s'y oppolé, Se qu'elles font Couvent confirmées par les Couverains Pon-
tifes Se parles Empereurs, Se qu'elles ne laifTent pas auffi de Cubfiiter Cans
, leur confirmation particulière , pourvu qu'on n'y trouve rien qui tende à
frauder l'EgliCe ou l'Empire, Se que par-là auffi les réfutations qu'on appel-
le, des Fiers leur apartiennent. Or en ces lieux- là les Renonciations des Fil-
les nobles Se illuftres faites lors de leur mariage, foit qu'elles foient générales
ou limitées, Se même connues ailleurs, reftent dans leur vigueur , Se font
exactement obfervées, quoi qu'avant leCdites Conventions , il y ait dans la
Famille une autre Corme de Cucceder. Or, ce qu'on vient de dire fur les pre-
miers Principes tirez du Droit, étant fuffifant pour décider laQueftion dont
on traite, il faut à prefent en fécond lieu examiner fuccinétement la manière
de fucceder qui a été introduite dans la Monarchie d'Efpagne, après qu'Elle
eft venue , comme de plufieurs parties ou membres comme en un corps , quoi
II. qu'il femble qu'on ne doive point auffi tout-à-fait négliger ce qui a été par-
Lesdif- ticulierement établi de ces Provinces , qui Coût tenues en FieC par les Rois
ferentes d'ECpagne. Or en cette vue nous devons raporter en même tems les
fc&e- moiens i°lt différais Se même oppoCez, dont les ECpagnols Se les François Ce-
cederen ^n ^a coutume de ces deux Nations en preCque toute autre choCe, Ce (ont Cer-
Eipagne vis pour établir la Succeflîon, puiCque ceux-ci ont depuis long-tems Coûtenù
& en avec un extrême Coin par diverfès raiCons la Succeflîon Mafculine de la Fa-
France, mille Roïale félon les lignes, à l'exclufion de toutes les Femmes, non feu-
Cette ^ Iément du Roïaume de France , mais même des Etats qui feraient venus en
conte-' S P°fl"eÛïon des Rois de France par le moïen des Femmes } Et qu'au contraire
nain la les Efpagnols après les Mâles de la même ligne Se du même degré , ont auffi
Succe/- admis les Femmes venant de la Famille Roïale, qui fe marieraient cependant
r.cale'" * tOUt autre» exceP.ré qu'à aucun de ceux de la Famille de France > auquel
JMaiculi- cas> tant Pour conlen;ei* l'égalité entre l'un Se l'autre Roïaume, que pour
né du d'autres motifs, elles étoient éternellement éloignées avec toute la pofterité
côté du Françoifc, du confentement même de la France ; la prérogative de l'âge fub-
Pere- fîftant ainfi dans les autres, tout de même que dans les Mâles de la Famil-
Et la pre- le Roïale. Et comme à prefent même tout le monde convient de la par-
Kiicrc tie principale de ce qu'on yient de raporter, Se de fon dernier uCage, { quoi-
que
ET RESOLUTIONS D'E T A T. fj-j
que les Aragonois aient par le pafle communément foûtenu le Droit de la Pa- 1701.
rente Mafculine, ce qu'à préfent on ne doit pas négliger,) il ferait fuperflu ' -
de s'y arrêter d'avantage pour la prouver, on rapportera &C on foûtiendra feu- prefe-
lement la vérité de l'exception qui a été ajoutée , à laquelle il a plu aux "mli
François de s'opofer , en violant le Droit, par la convoitife d'étendre leur ^ll^"
Domination, & laquelle tout récemment quelques Efpagnols poullèz par de à Pcx-
pareils principes ont entrepris d'obfcurcir 6c même de renverfer, s'il avoit clufion
3cn-
été poffible, non feulement par écrit, mais par les Armes, contre les coûtu- *jepcr,
mes propres 6c anciennes : ce que nous ferons fucceflîvement & ample- t„"s ]e°
ment d'abord que nous aurons rapporté en troifîéme lieu , aufli brieve- Princes
ment qu'il fera poffible , la liailbn de la Parenté 6c de l'Alliance qu'il y a Fran-
entre l'une & l'autre Branche d'Autriche, aflavoir d'Allemagne 6c d'Ef- S01S#
pagne. Il n'eft pas même necefTaire d'en faire ici une fuite 6c un détail Et chez
long 8c exact, mais il fuffira de dire en abrégé que tout de même que le Roi 1oesAl7a"
Charles a tiré fon origine de l'Empereur Charles-Quint, né en Flan- feprjncï-
dres, & l'ainé de la Famille, ainfi Sa Majefté Impériale Leopold I. def- pal Droit
cend, par un ordre fucceffif des deux cotez par des parens prefque toujours Mj'c>u"
de la même Famille, de l'Empereur Ferdinand !.. Frère audit Charles- '"•"•
Quint, Infant & rejetton d'Efpagne, qui faifoit les délices de leur Aïeul teint
Ferdinand le Catholique } 6c l'un 6c l'autre tiraient leur origine de Phi- dans la
lippe, à caufe de fa beauté, furnommé le Beau , Fils de Maximilien I. jl"n,'1Ie
ôc de Marie, Héritière de Bourgogne, 6c ds Jeanne Fille de Ferdi- 01ale*
nand 6c d'IsABELLE les Catholiques. C'eft une chofe encore affez re- "'; Unc
cente que la Mère de Sa Majefté Impériale , étoit Marie Fille du Roi q^çy .
Philippe III. 6c Sœur de Philippe IV., mariée à l'Empereur Ferdi- tionde
nand III. Père de Sa Majelté Impériale. Et fadite Majefïé Impériale a eu la Gé-
en Mariage Marguerite, féconde Fille du même Philippe IV., 6c de nçalogje
fa Femme Marie-Anne d'Autriche, propre Sœur de Sa Majefté Impe- CheUtqui
riale, de laquelle il a eu Marie-Antoinette mariée à l'Electeur de Ba- fe ra'por-
viére, qui lui a enfanté un Fils , qui aïant à peine furvecu fix années à là te à ceci.
Mère, l'a fuivie au Ciel. Et fa Sacrée Majefté Impériale , après le decez
de Marguerite d'Efpagne a eu de l'Impératrice Magdelaine Palatine
plufïeurs Enfans de l'un 6c de l'autre fexe que Dieu par fa bonté divine veuil-
le conferver. Et comme l'on n'a pu fe difpenfer de cette courte Narration '
pour montrer le Droit de Sa Majefté Impériale 6c de toute fon Augufte •
Pofterité Mafculine 6c Féminine à la Succefhon d'Efpagne j auiîï le Roi
Très-Chrêtien 6c fes Entans ou fon Frère n'en font pas rejettez , comme
fî l'on nioit qu'ils fuftent venus de Filles d'Autriche d'Efpagne, puifquc
nous-mêmes en avons amplement parlé} mais parce que, ainlrque nous Tal-
ions prouver, par ces mêmes Mariages François , fa Mère Anne, 6c Ma-
rie-Thérèse Femme du Roi Très-Chrêtien, defquelles on a parlé, ont On
été éternellement exclufes avec toute la Pofterité de France de quelque or- prouve
dre, degré, ou fexe qu'Elle fût à l'infini, même en cas de Veuvage, de quel- i^f^**
que partie que ce foit de la Monarchie Éfpagnoie, par les Loix 6c Coûtu- f]on des
mes d'Efpagne, par les difpofitions des Rois precedens 6c par les conven- Fran-
X x x 3 tions Ç°is-
5T4 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
1701. tions faites. 6c jurées tant par Elles-mêmes, que par leurs Maris. Ceux qui
favent comment par les plus anciennes Hiitoires d'Efpagnoles, les Roïaumes
I. Parles d'Efpagne ne doivent jamais s'unir à la France, ni être gouvernez par aucun
Loîk& François ou Françoise, ne trouveront pas que ce foit une chofe nouvelle,
an^n". que par le paflé les'Pcres 6c les Etats du Roïaume, même par les Avis folem-
"^cs" ae^s des Juges, très-eckbres par la faintetc de leur vie, par leur doctrine &
d'Efpa- par la pratique des Affaires, 6c enfin par la volonté 6c concurrence de toute
fine, la Nation, ont préféré la Cadette à la Fille ainée des Rois d'Efpagne mariée
en France , 6c à lés Enfans, ôc ont pareillement donné la préférence aux En-
fans des Frères 6c Sœurs, nez de la Famille d'Efpagne fur les Filles Roïales
Mariées aux François, 6c à leur pofterité , les excluant par fes Loix , par
des Teftamens 6c des Renonciations. Tant les Efpagnols lbigneux de la Li-
berté 6c de l'Honneur de la Patrie, avoient déjà alors li ardemment à cœur
qu'un Prince François ne devoit ni pouvoit commander aux Efpagnols avec
plus de Eh-oit, que les François n'en donnent chez eux aux Efpagnols pour
y régner ; 6c ce fous quelque nom ou prétexte que ce fût , 6c qu'on ne de-
voit même épargner aucun travail ni danger pour détourner les machinations
contraires s'il y en avoit. Ce fut donc fur ce fondement que la foigneufe 6c
H. fage prevoïance de Philippe III. Aïeul Maternel de Sa Majefté Impériale,
Parle pouflé même par plufieurs autres nouvelles raifons , pour laitier d'autant
Con- moins de fiijet de difpute, fit en forte qu'il fut dreffé un ContracT: de Maria-
M^iage ge à Madrid en 161Z. entre Anne d'Autriche & Louïs XIII. Roi de
entre France, par les Miniitres Efpagnols 6c l'Ambaffadeur d'Efpagne, en prefen-
Anke ce de l'Archevêque de Capouë de l'Illultre Famille des Gaetans 6c Légat
d'Autri- ju ponrj|.e ^ je l'Ambaffadeur du Grand Duc de Tofcane comme Médiateur
Louïs 6c Entremetteur, 6c de plufieurs Grands d'Efpagne, Confeillers d'Etat, 6c
Xljrj. d'une foule de Nobles, lequel ContracT: efl de la teneur luivante.
AU Nom de la Sainte Trinité , du Père, du Fils , £5? du benoît Saint Efprit, trois
Perfonnes en un féal Ci? vrai Dieu, pour fa gloire ci? fervice, fj? pour l'avan-
cement de ces Roïaumes. Soit notoire à tous ceux qui veront cette prejente écritu-
re Ci? infrument , contenant V accord 6? traité de Mariage qui s'enfuit.
Comme ainfi foit qu'en la Fille de Madrid , Cour de Sa Maje fié Catholique ,
en fon Palais Roïal , le Mercredi 20. d'Août de l'An 161 2. en la prefence de
l'IUuJlre Don Antoine Cayttan , Archevêque de Capoùe Légat à latere de notre
Saint Pire le Pape Paul V. fon Nonce Apoftolique en ces Roïaumes au nom de
fadite Sainteté ; ci? en la prefence du Seigneur Comte Orfo Delzi , Ambaffadeur
du Grand Duc de Tofcane en ce qu'il pofjede ; ci? en la prejer.ee des Seigneurs Ducs
de l'Infant ado & d'Alburquerque , des Marquis de Caftel- Rodrigo ci? de Filla-
Franca, tous quatre du Confeil d'Etat de Sa Majefié Catholique, du Duc d'Uze-
da , Amiral de Caftille , Prince de Tingri , du Duc de Maqueda , Duc de Pe-
naranda, du Duc d' Alla, du Duc SeJja,Duc de Feria, Duc de Montait 0 , Duc
de Filla - Hermofa , Duc de Varaguas , de Don Juan de Idiaque Grand Com~
mandeur de Léon , du Coufeil d'Etat de fadite Majefié ci? Prefident des Ordres , ■
de Don Anguft'm le Mezie auffi. du Confeil d'Etat, & du Liccntié Don Diego
Lopes
ET RESOLUTIONS D'E T A T. f)T
Lopes de Ayala , auffi du Confeil d'Etat (3 Grand Chambellan de Sa Majefté, (3
de plufteurs autres Seigneurs (3 Chevaliers. Par devant moi Antoine d'Arofie- •
gny , Chevalier de l'Ordre de St. Jaques , Secrétaire d'Etat , Ecrivain (3 No-
taire de Sa Roiale Majejlé Catholique : comparant ï ' Excellent ijjîme Seigneur Don
François de Sandoval , du lignage de Rozas, Duc de Lerma &c. (3 c. du Con-
feil d'Etat de Sa Majeflé (3c. (3c. Gouverneur (3 Premier Maître d'Hôtel de
Très-Haut (3 Triomphant Philippe Prince d'Efpagne (3c : An nom (3 comme
Procureur de Très- Haut , Très- Excellent, (3 Très-PuifJ'ant Prince Don Philip-
pe III. de ce nom nôtre Seigneur , par la Grâce de Dieu Roi de Caftille (3c:
En vertu du pouvoir que ledit Sieur Duc de Lerma a reçu de Sa Majejlé Catho-
lique, par Brevet (3 Provifion /ignées de fa Roiale main , fee liées de fon Scel
Roïal, (3 contre/ignées par moi fujdit Secrétaire Roi al , fait (3 paffè à Saint
Laurens de î'Efcurial le 30. Juillet audit audit An, comme Roi, Père, (3 lé-
gitime Adminiffrateur de la Sereniffime Infante fa fille , (3 de la Majejlé de la
Reine Marguerite/? légitime Femme (3 Epoufe, d'une part. Et d'autre part,
comparant l ' Excellent iffî me Seigneur Henri de Lorraine, Duc de Maïenne (3
Id'Eguillon , Pair (3 Grand Chambellan de France , (3 avec lui pour l'afjïfler ,
font performcllcment prefent (3 comparans le Sieur Vicomte de Puiftcux (3c, fon
AmbafJ'adeur Extraordinaire d'autre part, exprès pour cet effet vers Sa Majeflé
Catholique; (3 le Seigneur Baron de Vancelas , Confeiller d'Etat de Sa Majejlé
Très-Chrêtienne : pour (3 au nom de Très- Haut , T'es- Excellent ,(3 Très- Piaffant
Prince Louis XIII. par la Grâce de Dieu Roi Très-Chrétien de France & de
Navarre, (3 de Très- Haute , Très-Excellente, (3 Trcs-Puiffante Dame Ma-
rie, Reine Très-Chrêtienne de France (3 de Navarre fa Mère, Tutrice, (3 Ré-
gente enfes Roiaumes. En vertu de leurs Pouvoirs qu'ils ont exhibez, (3 repré-
sentez, écrits originairement en langue Françoife , fiignez de leurs Roïales mains
(3 feeltez de leurs Sceaux Roiaux , donnez (3 oclroïez en leur Roiale Fille de Pa-
ris ; c'efi affavoir celui du Roi Très -Chrétien le 17. du mois de Juillet de la pre-
fente année^ (3 celui de ladite Reine Très-Chrêtienne du 19. defdits Moif (3 An\
les Originaux defquels pouvoirs deffus-dits demeurent par devers moi prefent Se-
crétaire d'Etat , pour être inferez confecutivement après le prefent Ecrit. Le dit
Duc de Ferme , au nom de Sa Majeflé Catholique ; (3 lefdits Sieurs Duc de
Maïenne , Vicomte de Puifieux , (3 Baron de Vaucelas , au nom de leurs Majejlez >
comme Rois Très-Chrétiens (3 Catholiques , auxquels touche le bien de leurs Roiau-
Vies, (3 pour affûrer la Paix de leurs Couronnes (3 de toute la Chrétienté , la-
quelle a été obfervce depuis qu'elle fut conclue (3 arrêtée entre Sa Majejlé Catho-
lique le feu Roi Don Philippe II. nôtre Seigneur , (3 Sa Majeflé Très.-Chrê-
tienne deffunt le Roi Henri IV. Pérès de Leurs Majejlé Catholique (3 Très-
Chrétienne à prefent Régnants, defirant qu' Elle fe perpétue (3 continué, non feu-
lement durant la vie de Leurs Majefez j mais auffi de celle de leurs defeendans (3
Succeffeurs , Elles n 'auraient eftimé plus propre ni plus convenable moien que celui
des Mariages, ni qui fut de plus grande efficace, quand ils Je peuvent accomplir
par doubles (3 renforcez liens , moiennant la grâce de Dieu , à l'augmentation
de fon divin fervice; (3 même qu'avec le Mariage de l'Infante, (3 avec la bene-
diclion de nôtre Très- Saint Père le Pape Paul V. (3 l'eut remife aujft. du Grand
Duc
1701.
575 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
1 70 1 . Duc de Tofcane , fibiit déjà traitées £<f accordées les Epou failles & Mariages du
■ ■ Serenijjïme Prince d'Efpagne Don Philippe, avec la Serenijjïme Isabelle,
Sœur £5? Fille ainée de Leurs Majeftez Très - Chrétiennes : Comme aufji du Roi
Très-Chrétien Louis XIII. avec la Serenijjïme Infante, Dame Anne, Fille
ainée de Sa Aîejefié. Catholique. Afin qu'avec ces nouveaux liens s'allient plus
étroitement, & je confirme davantage, l'Amour, l'Amitié, £5? Fraternité qui
fft £s? qu'on defire être confervez entre Leurs Majcjlez, afin aujji qu'elles ref-
Jbrtijfent leur plein & entier effet , les fujdits Seigneurs Commijfaires es
Noms ci-dejfus , en ce qui concerne le Mariage du Roi Très-Chrétien avec la
Sereniffime Infante Dame Anne, ont capitulé £57 confenti ce qui s'enfuit.
Qu'avec la grâce £s? beneditlion de Dieu, préalablement obtenue difpenfe de
fa Sainteté, à raifon des Proximitez £<f Sanguhiitcz qui font entre le Roy
Très-Chrétien £5? la Serenijjïme Infante , fi tôt qu 'Elle aura atteint Pâte de '
douze ans accomplis , ils fajfent célébrer leurs Epou failles £5? Mariage -, par
paroles de prefient , felun la forme & en la fclemnité prejcrïte par les Sacrez Ca-
nons £s? Confit ut ions de l'Egllfe Catholique , Apofiolique , £5? Romaine : Et fe fe-
ront lefdits Epou faille s £■? Mariage e;: la Cour, Palais, & Mai/on de Sa Maje-
fié Catholique, oit fa Serenijjïme Infante, Dame Anne fait fa refidance j & ce
en vertu du Pouvoir & Commijfion du Roi Très- Chrétien ; £5? comme il fera fait
le Roi Tr es-Chrétien le ratifiera if} accomplira en Perfonne, quand la Serenijjïme
Infante Dame Anne, fera amenée & arrivée en France , Sa Majefté fe joi-
gnant avec Son Attejfe : > £îf fe fera ladite folemnité des Epoufailies , fait par
pouvoir fpecial ou en prefence , quand le tems de l'accomplir fera concerté & arrêté
entre Leurs Majeftez.
Que Sa Majeflé Catholique promet £5? demeure obligée de donner , £<? donnera-
à la Serenijjïme Infante , Dame Anne en dot -£5? en faveur de Mariage avec '
le Roi Très-Chrétien de France, £jf paiera à Sa Majefté Très-Chrétienne ou à ce-
lui qui aura pouvoir & commijïon a' Elle , la fomme de cinq cent mille Ecus d'or
de la valeur de feize realles la pièce, & ce en la Fille de Paris un jour avant la
célébration dudif Mariage.
Que leurs Majeftez Très-Chrétiennes s'obligeront d'affiner , £5? affûreront le dot
de la Serenijjïme Infante, Dame Anne , fur rentes bien a (Jurées £î? bonne s, 13
fur fonds £s? afjïgnations valables &c.
Qiie la Serenijjïme Infante Dame Anne , fe tiendra pour contente £5? conten-
: ter a du fufdit dot , fans que par ci- après Elle put ffe alléguer aucun fien autre
droit , ni intenter aucune autre Action ou Demande , prétendant qu'il lui apartien-
ne ou puijjè apar tenir autres plus grands Biens , Droits, Raifons , & Aélions
pour caufe des héritages, 6? de plus grandes Succeffwns de Leurs Majeftez Ca-
tholiques fes Père tîf Mère, ni pour contemplation de leurs Perfonnes confide-
les en quelle autre manière , ou pour quelque caufe (3 titre que ce foit,
foit qiïElle le fait ou qu' Elle l'ignorât; attendu que de .quelque qualité £5? con-
dition que lefdites Actions £5? ebofies ci-dejfus foient , Elle pourtant ne laijfcra
i 'en faire la Renonciation en bonne (3 dite forme, £$? avec toutes les a far an-
ces, formes , £5? folemnitez qui y feront requifès if necejfairts', laquelle dite
Renonciation Elle fia avant' que d'être mariée par Parole de frefent. Qu' El-
le
ET RESOLUTIONS D'E T A T. fr7
Je aujji-t'ût après la célébration du Mariage approuvera Ï3 ratifiera conjointement 1 70 1 .
avec le Roi Très -Chrétien, avec les mêmes formes & folemnitez qu'Elle aura fait ■ ■ ■
à la fufdite première Renonciation , voire avec les claufes qu'ils verront être les
plus convenables , 13 neceffaires à l'effet & accompliffement : de laquelle Renon-
ciation Leurs Majeftez demeureront & demeurent dès à prefent comme pour lors
obligées. Et au cas qu' Elles ne faffènt ladite Renonciation £5? Ratification en ver-
tu du prefent Contrat! par Capitulation , icelles fufdits Traitez , Renonciation &
Ratification font tenues & cenfées dez à prefent , comme pour lors, pour bien (3
deucment faites , pafjèes, i3 oUroiées. Ce qui fe fera en la forme la plus authenti-
que , (3 ejficacieufc que faire fe pourra pour être bonnes & valables , enfemble avec
toutes les Claufes dérogatoires des dérogatoires , de quelconques Lois , Jurifdicfions,
Coutumes , Droits, 13 Conflit ut ions au contraires , ou qui empcchajjènt du tout ou
en partie le faites Renonciation & Ratification , aux quelles à l'effet & validité
que de fus Leurs Majeftez Catholique (3 Tres-Chrêticnne dérogeront , & dez à
préfènt Elles y dérogent entièrement; & pour /' ' /Iprobation & Ratification qu' El-
les feront dès à prefent co?nme dès lors Elles entendront & entendent avoir dérogé
à. toutes exceptions cideffus.
Que d'autant que Leurs Majeftez Catholique &? Très-Chrêtienne font venus 13
tiennent à faire ces Mariages , afin de tant plus perpétuer & afjurer par ce
fort nœud & lien la Paix publique de la Chrétienté; £5? entre Leurs Majeftez
r amour & la fraternité que chacun efpere entre Elles ; & en contemplation auffi
des juftes (3 légitimes caufes qui montrent & perfuadent l'égalité (3 conve-
nance défaits Mariages , par le moien defqucls , & moyennant la faveur &
la grâce de Dieu, chacun en peut efperer de très-heureux fuccès, au grand bien&
augmentation de la Foi 13 Rehgion Chrétienne , au bien &? bénéfice commun des
Roiaumes, Sujets, (3 Vaffaux des deux Couronnes , comme auffi par ce qui traite
13 importe au bien de la chofe publique (3 confervation d'icelle. Confideration de
telle importance qu'il ferait à craindre que les occafions qui fe prefentent de tels
Mariages, m fuffent prévenus ou tollez : donques attendu la qualité des fufdite s
(3 autres juftes raifons qui fe pourroient dire ou alléguer : fleurs Majeftez accor-
dent 13 arrêtent par contrat! (3 pache tonventionelle entre-Elles qui fortira (3 au-
ra lieu, force, 6? vigueur de Loi ferme 13 fiable à tout jamais , en faveur de leurs
Roiaumes 13 de toute la chofe publique àPiceux. Que la Serenïffime Infante d'Ef-
pagne , Dame Anne , 13 les Enfans procréez d'Elle , foient mâles ou femelles ,
13 leurs De feendans premiers ou féconds , troifiémes ou quatrième?, nez ci-après
en quelque degré qu'ils fe puiffent trouver , voire à tout jamais, ne puiJJ'ent venir
nifucceder es Roiaumes, Etats , Seigneuries & Dominations qui apartiehnent (3
apartiendront à Sa Majefté Catholique , (3 qui font compris au de fous des lettres
(3 qualitez mentionnées en cette prefente Capitulation , ni en aucun de fes plus
Grands Roiaumes, Etats, Seigneuries, Provinces, Ifles adjacentes , Fiefs, Ca-
pitaineries, ni es Frontières que Sa Majefté Catholique poffede des prefent ou qui
lui apartiennent , ou pourront apartenir dedans (3 dehors le Roiaumc d'Efpagne ,
que par ci- devant Leurs Majcdez Catholiques &? leurs a feendans Predeceffeurs eu-
rent , poffederent , (3 leur apartinrent , ni en tous ceux qui font compris en iceux ou
dépendant d iceux , ni mêmes en tous ceux qui par ci- après en quelque tems que ce
Tom. I. Y y y fit,
f$ MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
1701. foit, Elles pourroient aquerir ou accroijlre , ou ajouter aux fufdits fiens Roiaumes,
Etats (3 Dominations , ou qu' Elles pourraient retirer, ou qui leur pour oient échcoir
p.ir dévolus ou par quelques autres titres , Droits ou rai/on que et foit ou qu> Puif-
fe être ; encore que ce fut durant la vie de la Sereniffime Infante , Dame Anne,
ou après fa mort, en celle de qui que ce foit de [es defeendans premiers , féconds ,
ou troifiémes nez, ou en quelque manière qui puiffe avenir; ou que le cas ou les cas
par lefquels ou par droit ou par Loix 13 Coutumes défaits Roiaumes Etats (3 Do-
minations, foit par difpofition du titre, par lefquels ils puiffe nt fucceder ou préten-
dre pouvoir fucceder es dits Roiaumes , Etats, (3 Dominations ; en tous lefquels
fufdits cas des à prefent ladite Dame Anne Infante , dit & déclare être & de-
meure bien 13 deuement exclufe , enfemble tous fes Enfans & Defeendans, mâles
13 femelles ; encore qu'ils fe vouluffent dire ou puffent dire, (3 prétendre qu'en
leur Perfonne ne courrent ni ne fe peuvent & doivent confdercr icelles fai/ons com-
me de nulle valeur de la ebefe publique, ni autres es- quelles ladite Excluftonfe
pourrait fonder, ou qu'ils vouluffent alléguer ( ce qui à Dieu ne plaife) que la
fucceffion du Roi Catholique ou de fes Serenifjîmes Princes & Infantes, 13
d'abondant des mâles qu'il a , ou pourra avoir pour fes légitimes Succeffeurs ,
eut manqué 13 défailli, par ce que comme en aucun cas ni en aucun tems, ni
en quelque manière qu'il pût avenir , Elle ni eux , fes hoirs & defeendans n'ont
à fucceder ni prétendre pouvoir' fucceder fans prejudicier aux dites Loix, Cou- .
tûmes, Ordonnances, (3 difpofitions en vertu desquelles il afuccedé en tous fes
Roiaumes, Etats, 13 Seigneuries, que ce ne foit prejudicier auffi à toutes les
Loix des Lieux t3 Coutumes de la Couronne de France ; lefquels au préjudice
des Succefieurs en icelle n'empêchent cette fufdite Execution, auffi bien à pre-
fent comme en tems , (3 en cas qui défèrent lefdites Succe 'fions. A toutes lef-
' quelles confiderations enfemble 13 à chacune en particulier d'icelles Leurs Ma-
jeflez dérogent en ce qu'elles contrarient ou empêchent le contenu en ce Contrat!, ou
f ' accompliffcment & exécution d'icclui. Et que pour l' Aprobation 13 Ratification de
cette prefente Capitulation , Elles y dérogeront i3 dérogent , veulent (3 entendent que
la Sereniffime Infante , (3 les Defeendans d' icelle, demeurent à l'avenir (3 pour jamais
exclus de pouvoir fucceder en aucun tems ni en aucun cas es Etats du P aïs de Flan-
dres, Comté de Bourgogne & de Charolois , leurs apartenances (3 dépendances ,
lefquels Provinces (3 Etats furent donnez par Sa Majeflé Catholique à la Sere-
niffime Infante Dame Isabelle , & qui doivent retourner à Sa Majeflé Catholi-
que (3 à fes Succeffeurs. Pareillement auffi ils déclarent très-exprepment qu'en
cas que la Sereniffime Infante demeurât veuve (ce qu'à Dieu ne plaife) fans en-
fans de ce Mariage, qu'Elle demeurera libre (3 franche de la fufdite Exclufion, 13
partant déclarée Perfonne capable de fes Droits, & de pouvoir fucceder en tout ce
qui lui pourra apartenir ou écheoir, en deux cas feulement : fi Elle demeurant veu-
ve de ce Mariage & fans enfans, venoit enEfpagne: l'autre, fi par raifon d'Etat
pour le bien public (3 pour jufies confiderations Elle fe ramarieroit par la volonté
du Roi Catholique fon Père ou du Prince des Efpagnes fon Frère, efquels deux
cas Elle demeurera capable (3 habile à pouvoir fucceder (3 hériter.
Que fi têt que la Sereniffime Infante , Dame Anne , aura accompli Page de
douze ans, (3 avant que de célébrer le Mariage par paroles de prefent , Elle don-
nera ,
1
ET RESOLUTIONS D'E T A T. rfP
«w, promettra , (3 octroyer a, fon Ecrit , /><«• lequel Elle s'obligera , aw/ pour 1701.
£//<? £«? /car y9/ Succejfeurs , « P accompli (fcment (3 obfervation de tout ce que def- ~
fus , '(3 d? /«)« exclu/ton (3 de celle de fes defcenclans , aprouvant le tout filon
comme 'il efi convenu en ce prefent Contrat (3 Capitulation , avec les claufcs (3 ju-
remens necejfaires (3 >'£f«*V : 6? en jurant cette pre fente Capitulation (3 /# fufdite
Obligation (3 Ratification , £»* _/»# Altcffe aura faite (3 donnée , £//,? en fera
une autre pareille & femblablc avec le Roi Très - Chrétien, fi tôt qu' Elle fera ma-
riée (3 époufée , laquelle fera enregijlrée au Parlement de Paris félon fa forme
(3 teneur y comme au [fi dès à prefent Sa Majefié Catholique fera aprouver & ra-
tifier ladite Renonciation (3 Ratification en la forme accoutumée , la fera aujfi
enregifier en fon Confeil d'Etat, (3 fit que le [dites Renonciations , Ratifications ,
(3 -dprobations f oient faites dès à prefent en vertu de cette Capitulation (3 prefent
Contrat , 13 du Mariage qui s'enfuivra , 13 en contemplation de toutes les cho-
f es fuf dites, Elles foient tenues (3 cenfées pour bien faites (3 deu'êment oclroiées
(3 pajfèes.
Que Leurs Majcftez Très-Chrétiennes donneront à la Sereniffime Infante, Da-
me Anne p9ur fes bagues 13 joiaux jufques à la valeur de cinquante mille
Ecusfol (3c. (3c.
Que Leurs Majeftez Très-Chrétiennes félon V ancienne (3 louable Coutume de
la Maifon de France , aligneront 13 constitueront à la SereniJJime Infante ,
Dame Anne, four fon Douaire vingt mille Ecus d'or fol par chacun
an. (3c. (3c.
Que S Majejlé Très-Chrétienne donnera 13 alignera à la Sereniffime Infante ,
Dame Anne, pour la dépenfe de fa Chambre (3 entretenement de fon Etat (3 de
fa Maifon fomme convenable (3 telle qu'apartient à Fille (3 Femme de tant de
Grands (3 Puiffans Rois 13 c.
Que la SereniJJime Infante aiant accompli les douze ans de fon âge , ils époufe-
ront (3 marieront par Procureurs qu' envolera le Roi Très-Chrétien (3 la Serenif-
fime Infante par Paroles de prefent. Ce qu'étant fait , Sa Majejlé Catholique
la fera mener à fes fraix (3 dépens jufques à la Frontière du Roiaume de Fran-
ce (3c. (3c.
Qu'en cas que le Mariage fe diffolve (3 rompe entre- Sa Majefié Très -Chré-
tienne (3 la SereniJJime Infante , Dame Anne , (3 que Son Alteffe furvive
Sa Majefié Très-Chrétienne , en ce cas Elle s'en pourra retourner (3 retirer libre-
ment (3 fans aucun empêchement es Roiaumes cPÊfpagne (3c (3c
Qu'attendu que le Traité (3 Pourparlé du prefent Mariage a été defirê (3
puis concerté (3 promeu par Nôtre Saint Père , (3 par fes entremifes achemi-
né en l'état ou il efi à prefent: fera bien à propos de fuplicr fadite Sainteté,
comme dès à prefent Leurs Majefiez la fuplient , de trouver bon (3 avoir agréa-
ble d'en donner la benediclion (3 intervenue de fon Jutopité ylpojlolique ; (3
ce prefent Contrat (3 Capitulation la vouloir aprouver (3 inferer dans fes
Bulles, enfemble les approbations qu'en auroient faites Leurs Majefiez (3 fon
Altejfe : aujjî avec les Ecritures (3 juremens qui font données (3 oclroiées y
Bref tout ce qui a été fait (3 paffé pour Vascomplijfement (3 fureté d>i-
celui.
Yyy z Que
j-5o MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
1701. jSW Leurs Majcflez Catholique & Très -Chrétienne aprouveront & rat if e-
r ont cette prejente Capitulation, promettront fur la- Parole &? Foi de Roi, de
la garder & accomplir inviolablement , délivreront à cet effet leurs Brevets en
la forme accoutumée avec les dérogatoires à quelconques Loix , Jujlices , &? Cou-
tumes qui font ou feraient à ce contraires , £5? étant raifonnable. Lefquels dits
Brevets de Ratification de la pre fente Ecriture , ils bailleront y délivreront
l'un à l'autre refpeblivmént dans deux mois , à compter du jour & de la date de
la pre fente , & ce par le moien dis Ambafjadeurs Ordinaires , es Cours de Leurs
Majeflez Catholique & "Très-Chrétienne.
De tout ce que de (jus le f dit s Sieurs Commiffaires es dits Noms, promirent , con-
fentirent, {3 accordèrent félon qu'il eft contenu en la prefente Capitulation, s^y étant
obligées Leurs Majejlez Catholique £5? Très-Chrétienne , enfemble fort Altcjjè avec
l'obligation & le lien de leur Foi & Parole de Roi qu'ils effectueront £5? garderont:
commanderont qu'il J'oit gardé & accompli entièrement , jans qu'en tout ou en par*
tie il faille ou manque chofe quelconque , ni iront ni viendront au contraire ; même
né confentiront aller ni venir dïreclement , ou indirectement , de quelque façon ou
manière que ce foit : car a>infi Vont promis lefdits Commiffaires en îertu des Pou-
voirs qii'ils ont de Leurs Majcflez, à quoi furent prejens lejdits dénommez au com-
mencement de cette Capitulation ; & lejdits Seigneurs ,_ prometans £5? oélroians ce
que dcfjïiS , l'ont figné de leurs mains & de leurs noms, £f? me requirent que dt
tonte cette Capitulation , je leur en baillafjè Copie , & de toutes celles qui feront
traduites ci? tranfatées qui Uur feront necejjaires.
Ainfi Jîgnf,
Le Duc de Lerme Sec. Henri de Lorraine &c.
Par lefquels Articles l'exclufion illimitée à la Succeffion d'Efpagne , non
feulement d'un SuccefTeur prochain au Roïaume de France, mais de tout au-
III- tre du Sang de France venant de ce Mariage Se même du dernier & du plus
^aip éloigné delà Succeffion de France, ou de celui abfolument rejette à caufe
par une du Sexe féminin, fans aucune dittinétion de Sexe, ordre ou degré, ne pouvoit
Renon- être plus clairement exprimée , ni l'obligation qui y eft attachée , pouvoit
dation faxt plus étroitte. Auffi aïant été confirmée avant & après la conlbmma-
i0}^m: tion du Mariage, par l'Infante Anne <k par le Roi Très - Chrétien même
l'urée de par dc facrez Sermens, Se aïant été envegiitrée entre les Loix éternelles d'Ef-
tous pa"ne Se Se France , dans les Actes publics de l'un & l'autre Roïaume, El-
Droits. le n'a jamais depuis été révoquée en doute par aucun homme vivant. Au
- contraire, fon utilité Se fa neceffité aïant été mûrement confiderée brique les
Etats ou Ordres Généraux du Roïaume s'affemblerent à Madrid en i<îi8.,
ils reprefenterent Se fuppliercnt le Roi Philippe, qu'il confirmât de nou-
IV. veau par une Loi perpétuelle cette Renonciation} Se qu'en vertu d'icelle
Par.la tous les Enfans en général de l'un Se de l'autre Sexe , qui étoient venus ou
Vcfe*" viendraient de ce Mariage, fufTent éternellement exclus de toute la Succef-
d'irp fion d'Efpagne. Et alors le Roi Philippe, après avoix derechef examiné
Se
à
ET RESOLUTIONS D'E T A T. j-tfi
& mûrement pefé la chofe, fit & publia la Loi qu'on avoit demandée, dans 1701.
laquelle font répétées, ainfi qu'il cil rapporté dans le nouveau Code des Loix, •"
imprimé à Madrid en 1640., l'exception faite en cas que le Mariage fut dif-
fout, 6c que l'Infante fut reliée fans Enfans, Se la Renonciation jurée, ainfi
qu'on l'a dit , de tout Droit à la Succefïïon dans les mêmes mots 6c termes
dudit Contraél de Mariage , ôc de la Renonciation qui y étoit relative
fous le titre qui' fuit.
Loi douzième. Que Dame A N n e Reine Très- Chrétienne de France , £5? fes
Enfans £5? Defiendans de fon Mariage avec Louis XIII. Roi Très- Chré-
tien , ne puijfent fucceder aux Roiaumes d'Efpagne £5? fes Dépendances : Ex-
cepté le cas contenu dans cette Loi.
Ce qui eil exprimé dans le Contraél de Mariage fait en i6fo. entre l'Infante „ Y-
Marie-Therese, Fille de Philippe IV. 6c Louis XIV. à prefent Re- Contradl
gnant en France, s'accorde entièrement & eil de pareille efficace avec celui de Ma-
qu'on vient de raporter, pour exclurre , par plufieurs raifons , tous Defccn-. nage de
dans François à l'infini, Mâles ou Femelles , de toute portion de la Monarchie lintantc
d'Efpagnej de forte que le Contraél précèdent fuffiroit feul d'être vu, n'étoit Ther "
qu'on a ajouté quelques nouvelles Claufes pour déclarer avec plus de force la se ma
volonté des Contraélants , 6c pour faire, s'il étoit poffiblc, de plus étroits en- ^^
gagemens dans le Contraél iuivant.
AU nom de la très Ste. Trinité, Père, Fils, & St. Efprit, trois per-
fonnes en un feul Dieu véritable, à fon honneur & gloire 6c au bien
de ces Roiaumes ; foit notoire à tous ceux qui ces prefentes Lettres vc-
ront , 6c cet accord de Mariage : Que comme en l'Ifle appellée des Fai-
fans, fituée dans la Rivière de Bidaffoa , à demi lieuë du bourg d'An-
„ daye , Province de Guyenne , 6t autant de la Ville d'Irura , en la
Province de Guipufcoa, & dans la Maifon qui a été cette année bâtie en
ladite Iile , pour y traiter de Paix, entre leurs Majeflez Très - Chrétien-
ne & Catholique , ce jourd'hui fèptiéme du mois de Novembre de
l'année que l'on compte, depuis la naiffance de Jefus Chrill, Nôtre Sei-
gneur 6c* Rédempteur ,. mil fix cent cinquante neuf. Par devant moi
Pedro Coloma, Chevalier de l'Ordre de Saint Jaques, Seigneur des Villes
de Chozas, de Cavales, 6c de, Junchihers , du Conlèil des Indes, Secré-
taire d'Etat, Efcrivain, 6c Notaire de la Catholique Roïalc Majcfléj ont
comparu, très- Eminent Seigneur Meifire Jules Mazarini, Cardinal de la
Ste. Eglife Romaine , Duc de Mayene , Chef de tous les Confeils du
très-Excellent , 6c très-Puiifant. Prince Louis XIV. par la grâce de Dieu
„ Roi Très-Chrêtien de France 6c de Navarre, en verta du Pouvoir qu'il
„ a de Sa Majeflé Très^.Chrêtiennne, écrit en langue Françoifê ; fignc"de
„ fa Roïale main , 6c feelé, de ion Seau Roïal , contre figné ^par fon Secre-
„ taire d'Etat, le Sieur de Lomenie ; , donné à Paris le vingt unième jour de.
55 Juiu i6f 0. lequel Pouvoir ell demeuré en mes mains, 6c dont la copie fe-
Yyy ? „ va.
ERE-
LoulS
XIV.
V
55
)rti MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ, "
1701. „ ra inférée à lu fin des preléntes, d'une part: Et de l'autre, très-Excellent
„ Seigneur Don Louis Mendez de Haro & Guzman , Marquis de Car-
„ pio , Comte Duc d'Olivarez , Gouverneur perpétuel des Palais Roïaux
„ & Aliénai de Seville , Grand Chancelier perpétuel des Indes , du Con-
„ feil d'Etat de Sa Majellé Catholique, Grand Commandeur de l'Or-
„ dre d'Alcantare , Gentilhomme de la Chambre de fadite Majellé , 6c
,, Ton Grand Efcuyer. Et au nom du Très- Haut , très-Excellent, 6c
„ très - Puifiant Philippe IV. auffi par la grâce de Dieu Roi de
„ Caflille , Léon , Arragon , des deux Siciles , de Jerufalem , de Por-
„ tugal , de Navarre , 6c des Indes , &c. Archiduc d'Autriche , Duc de
„ Bourgogne, de Brabant, 6c de Milan, Comte de Hasbourg, de Flandre,
8c de Tirol, ôcc. 6c en vertu du Pouvoir qu'il a de Sa Majefté Catholi-
que, par Aéte figné de fa main Roïale, feelé de ion fçeau Roïal, 6c con-
tre-ligne par Don Fernand de Fonfeca Ruyz de Contreras, fon Secrétai-
re d'Etat j fait à Madrit le cinquième jour de Juillet de la prefente année >
33
„ comme Roi, Père, 6c légitime Adminiftrateur de Serenilîîme Infante Da-
„ me Marie-Therese, la Fille ainée de la Majefté de la feue Reine Eli-
jj
Î3
33
33
Jï
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53
33
sabeth fa légitime Efpoufe. Et le dit Seigneur Cardinal Mazarini, au
nom de Sa Majefté Tres-Chrêtienne ; 6c le dit Marquis Comte d'Oliva-
rez, au nom de Sa Majefté Catholique, ufans de leurs Pouvoirs fufdits,
ont dit Se déclaré que leurs Maîtres, comme Rois Très-Chrêtien 6c Ca-
tholique, qui ont fort à cœur le bien de leurs Roïaumes, 6c d'affermir la
Paix, qui s'établit aujourd'hui entre les deux Couronnes ; defirans que la
durée de cette Paix ne s'étende pas feulement à celle de la vie de leur Ma-
jeftez, mais parte avec la même fermeté à leur Succefleurs 8c Defcendantsj
„ 8c jugeant que le plus efficace moïen pour parvenir à cette fainéte fin, eft
de renouer étroitement leurs Alliances par le lien d'un Mariage : leurs
Majeftez avec la Grâce de Dieu, 8c à fon fervice ont traité 6c accordé les
Epoufailles 6c Mariage de Sa Majefté le Roi Très-Chrêtien, avec la Sere-
niffime Infante Dame Marie- Thérèse, Fille ainée de Sa Majefté le Roi
Catholique ; afin de confirmer d'avantage , par ce nouveau nœud , l'a-
mour, l'amitié, 6c l'union qui eft , 6c que l'on defire conferver entre
leurs Majeftez. Et pour cet effeét, lefdits Seigneurs Plénipotentiaires,
aux noms fufdits, ont traitté 6c accordé les Articles qui fuivent.
11
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»3
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33
33
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1-
•3
I. /~\U'avec la grâce 6c bénédiction de Dieu , 6c préalablement obtenue
Vs^ difpenfe de fa Saincteté, à raifon de proximité 6c confanguinité,
qui eft entre le Roi Très-Chrèticn, 6c la Sereniffime Infante , ils faflènt
célébrer leurs Efpoufàilles 6c Mariage, par paroles de prêtent, félon la for-
me 6c folemnité prefente par les facrez Canons, 6c Conftitutions de l'E-
glifc Catholique, Apoftolique, 6c Romaine. Et fe feront lefdites Efpou-
fàilles 6c Maringe en la Cour de Sa Majefté Catholique , où Elle fera,
avec la Serenifîïme Infante Dame Marie-Therese; èc ce en vertu
du Pouvoir 6c Commiffion du Roi Très-Chrêtien, qui le ratifiera 6c ac-
complira en perfonne , quand la Sereniffime Infante Dame Marie-The-
55 RESE *
ET RESOLUTIONS D'E T A T. f<î$
rese, fera amenée en France ; Sa Majefté fe joignant avec fon Altcfie, 6c 1701.
recevant les bénédictions de l'Eglife : Et la conclufion 6c ratification dudit ■
Mariage, (bit par pouvoir fpecial, ou en prefence, fe fera quand & dans
le tems accordé & concerté entre leurs Majeftez.
„ II. Que Sa Majefté Catholique promet & demeure obligée de donner,
& donnera à la Sereniflîme Infante Dame Marie-Therese , en Dot 6c
en faveur de Mariage avec le Roi Trè-Chrêtien de France, 6c paiera à
Sa Majefté Très-Chrétienne , où à celui qui aura pouvoir ou commifïion
d'elle, la fomme de cinq cent mille efeus d'or fol, ou leur jufte valeur, en
la Ville de Paris. Et la dite fomme fera païéc en la manière fui vante : le
le tiers, au temps de la confommation du Mariage} l'autre tiers, à la fin
de l'année depuis la dite confommation; 6c la dernière troifiéme partie,
fix mois après : en forte que l'entier paiement de ladite fomme de cinq
cent mille efeus d'or fol, ou leur jufte valeur, fera faite en dix huit mois
de tems, aux termes 6c portions, qui viennent d'être fpecifiées.
„ III. Que Sa Majefté Très- Chrétienne s'oblige d'affûrer, 6c affurera le
Dot de la Sereniffime Infante Dame Marie-Therese, fur rentes bonnes
6c bien affinées , 6c fur fonds 6c affignations valables.
„ IV. Que moïennant le paiement effectif fait à Sa Majefté Très-Chrê-
„ tienne des dits cinq cent mille efeus d'or fol , ou leur jufte valeur , aux ter-
„ mes qu'il a été ci-devant dit, la dite Sereniflîme Infante fe tiendra pour
contente, & fe contentera dudit Dot, fans que par ci-après elle puiffe al-
léguer aucun fien autre droit , ni intenter aucune autre action ou de-
mande, prétendant qu'il lui appartienne, ou puiffe appartenir autres plus
grands-biens, droits, raifons , actions, pour cauiè des héritages 6c plus
grande fucceffion de leurs perfonnes en quelque autre manière , ou pour
quelque caufe 6c titre que ce foit , foit qu'elle le feeut , ou qu'elle, l'igno-
rât ; attendu que de quelque qualité 6c condition que lefdites actions 6c
chofes ci-deffûs foient , elle en doit demeurer exclufe , 6c avant l'effectua-
„ tion de fes Efpouiàilles, elle en fera la Renonciation en bonne ôc deûe for-
me, & avec toutes les afturances, formes, 6c folemnitez qui font requifès
6c neceflaires : Laquelle dite Renonciation elle fera avant que d'eftre ma-
riée, par parole de prefent ; qu'elle , auffi-tôt après la célébration du Ma-
riage , approuvera 6c ratifiera conjoinctement avec le Roi Très -Chré-
tien , avec les mêmes formes 6c folemnitez qu'elle aura fait à la fufdite pre-
mière Renonciation , voire avec les claufes qu'ils verront eftre les plus con-
venables 6c neceflaires : A l'effectôc accompliffément de laquelle Renoncia- '
tion, Sa Majefté Très-Chrêtienne6c Son Alteflë demeureront 6c demeu-
rent dès à prefent , comme pour lors obligez ; 6c au cas qu'elles ne fafiènt
ladite Renonciation 6c Ratification, en vertu du prefent Contract , par Ca-
pitulation, Iceux fufdits Traitez, Renonciation 6c Ratification, feront te-
nus 6c cenfez dès à prêtent, comme pour lors, pour bien deiiement faits ,
paffez 6c odtroïez. Ce qui fe fera en la forme la plus autentique 6c efficace
que faire fe pourra, pour être bonnes 6c valides; cnfcmble avec toutes les
„ claufes dérogatoires de quelconque Loi , Jurifdiction, Coutume, Droits,
„ Se
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554 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
I701- ,, & Conftitutions , à ce contraires, ou qui empêchaflent du tout, ou en
"' „ partie, lefdites Renonciations & Ratifications} Auxquelles, à l'effet & vali-
„ dite que délias, leurs Majeftez Très - Chrétienne 6c Catholique deroge-
„ roht, 6c dès à préfent elles y dérogent entièrement : Et par l'Approbation
,, & Ratification qu'elles feront de ce préfent Contract & Capitulation , des
„ à préfent comme dès lors, elles entendront 6c entendent avoir dérogé à
,, toutes exceptions ci-deflus.
,, V. Que d'autant que leurs Majeftez Très - Chrétienne 6c Catholique
„ font venues 6c viennent à faire ce Mariage afin de tant perpétuer 6c aiîûrer
„ par ce nœud Se lien la Paix publique de la Chrétienté, 6c entre leurs Ma-
„ jeftez, l'amour 6c la fraternité , que chacun eipere entre elles ; 6c en con-
,, templation auffi des jultes 6c légitimes caufes, qui montrent 6c perfuadent
„ l'égalité 6c convenance dudit Mariage, par le mo'ien duquel 6c moïennant
„ h faveur 6c grâce de Dieu, chacun en peut efperer de très-heureux fuccez
„ au grand bien 6c augmentation de la Foi Se Religion Chrétienne, au bien
„ 6c bénéfice commun des Roïaumes , Sujets, 6c Vafiaux des deux Couronnes j
„ comme auiîî pour ce qui touche 6c importe au bien de la cho'è publique,
.„ 6c confervation des dites Couronnes ; lefquelles étant fi grandes 6c puiiîan-
„ tes, ne puiffënt être reunies en une lèule, 6c que dès à préfent on prenne
„ les occafions d'une pareille conjonction : Donques, attendu la qualité des
„ fufdites 6»: autres jultes raifons , 6c notamment celle de l'égalité qui fe doit
„ conferver, Leurs Majeftez accordent 6c arrêtent, parContraét ÔcPaéte con-
„ ventionel entre Elles, qui fortira, 6c aura lieu, force, 6c vigueur de Loi
„ ferme 6c ftable à tout jamais, en faveur de leurs Roïaumes, 6c de toute la
„ chofe publique d'iceux ; que la Serenifïïme Infante d'Elpagne , Dame
„ Marie -Thfrese , êc les Enfltns procréez d'elle, foit maies ou femel-
„ les, 6c leurs Defcendans , premiers ou féconds, trois ou quatre, nez ci-
„ après, en quelque degré qu'ils fe puifTent trouver, voir à tout jamais , ne
j, puiffent fucceder, ni fuccedent es Roïaumes, Etats, Seigneuries, 6c Do»
„ initiations, qui appartiennent 6c appartiendront à Sa Majefté Catholique,
,, 6c qui font compris au deffbus des Titres 6c Qualitez mentionées en cette
„ prefente Capitulation , ni en aucun de fes autres Roïaumes , Etats , Sei-
„ gneuries, Provinces, Mes adjacentes, Fiefs, Capitaineries, ni es Frontie-
„ res que Sa Majefté Catholique poffède dès à préfent , ou qui lui appartien-
„ nent, ou pourront appartenir, tant dedans, que dehors le Roïaume d'Ef-
„ pagne } 6c qu'à l'avenir fa dite Majefté Catholique, ou fes SuccefTeurs ,
„ auront , pofléderont , 6c leur apartiendront } ni en tous ceux qui font com-
„ pris en iceux, ou dépendent d'iceux ; ni même en tous ceux qui par ci-
„ après, en quelque tems que ce foit , elle pouroit acquérir, ou accroicre ,
„ 6c ajouter aux fufdits fiens Roïaumes, Etats, 6c Dominations, ou qu'elle
„ pourrait retirer, ou qui lui pourrait échoir par dévolution ou par quelques
„ autres Titres, Droits, ou Raifons que ce puiffé être, encore que ce fut du-
„ rant la vie de la dite Sereniffime Infante Dame Mari e-T h e r e s e , ou
„ après fa mort, en celle de qui ce foit de les defeendants, premiers, féconds,
„ troifiimes nez ou ultérieurs , que le cas ou les cas, par lefquels , ou de
Droit,
ET RESOLUTIONS D'ETAT. f6r
„ Droit, ou par les Loix £c Coutumes defdits Roïaumes , Etats, Se Do- 1701.
„ minations, foit par difpolîtions de Titres , par lefquels ils puiflcnt fuc-
„ céder , ou prétendre pouvoir fucceder es dits Roïaumes, Etats, ou Do-
minations, leur dût appartenir la Succeflîon, en tous lefquels fufdits cas,
dès à prefent ladite Dame Marie -Thérèse Infante dit Se déclare être
Se demeure bien Se deùement exclufe , enfemble tous fes Enfans , 8c def-
cendans Mâles ou Femelles, encore qu'ils fe voulurent ou peujfent dire 6?
prétendre , qu'en leurs perfonnes- ne courent, ni ne fe peuvent ci? doivent conji-
derer le [dites raifons de la ebofe publique , ni autres es quelles ladite exclu/ton Je
pourroil fonder , ou qu'ils voulurent alléguer (ce qu'il Dieu ne plaife) que
la Succefjion du Roi Catholique, ou de fes Serenifiimes Princes 6? Infantes &
d'abondant des Mâles , qu'il a 6? pourra avoir les légitimes fuccejfeurs , eut
manqué &? défailli-, parce que comme il a été dit en aucun cas , ni en au-
cun teins, ni en quelque manière qui peut advenir, ni elle, ni eux, fes
Hoirs Se les Defcendans n'ont à fucceder ; nonobstant toutes Loix,
Coutumes , Ordonnances , Se Difpolîtions en vertu defquclles on a fuc-
cedé en tous lefdits Roïaumes , Etats , Se Seigneuries : Et nonob liant auf-
fï toutes les Loix Se Coutumes de la Couronne de France, qui au pre-
„ judice des Succédons en icelle , s'oppofent à cette lîifdite exclufion ,
„ aulîî-bien à prefent, comme aux tems. à venir, Se aux cas qui auroienc
long-tems différé lefdites Succédions 5 à toutes lefquelles confidera-
)5
„ tions enfemble , Se à chacune en particulier d'icelles , leurs dites Ma-
„ jeftez dérogent , en ce qu'elles contrarient ou empêchent le contenu en
ce Contracl, ou l'accomplifîément Se exécution d'icelui : Et que pour
„ l'Approbation Se Ratification de cette prefente Capitulation, elles y de-
„ rogent , Se les tiennent pour dérogées : Veulent Se entendent , que
„ la Serenifîime Infante, Se les Defcendans d'icelle demeurent à l'avenir Se
„ pour jamais exclus de pouvoir fucceder en aucun tems, ni en aucun cas,
„ es Etats du Paï's de Flandres, Comté de Bourgogne Se de Charolois, leurs
„ appartenances Se dépendances. Pareillement auïli ils déclarent très-exprefle-
„ ment, qu'en cas que la Serenimme Infante demeure veuve (ce qu'à Dieu
„ ne plaife) fans Enfans de ce Mariage , qu'elle demeurera libre Se franche
„ de ladite exclufion j Se par tant déclarée perfonne capable de fes Droits,
„ Se pouvoir fucceder en tout ce qui lui pourra appartenir ou efcheoir eu
„ deux cas feulement : L'un, fi elle demeurant veuve de ce Mariage, fans
„ Enfans, venoit en Elpagnej l'autre, fi par raifon d'Etat, pour le bien
„ public, Se pour juftes confiderations , elle fe remariât, par la volonté du
,, Roi Catholique fon Père ou du Prince fon Frère: Efquels deux cas elle de-
„ meurera capable Se habile à pouvoir fucceder Se hériter.
„ VI. Que la Sereniflîme Infiinte Dame Marie-Therese , avant que de
„ célébrer le Mariage, par paroles de prefent , donnera,, promettra, Se oc-
„ troïera fon Ecrit, par lequel elle s'obligera , tant pour elle, que pour fes Suc-
„ cefieurSjSe Héritiers, à raccompliffement Se obier vat ion de tout ce que def-
„ fus, Se de fon exclufion, Se de celle de fes Defcendans j approuvera le tout
„ félon comme il ell contenu en cette prefente Capitulation avec les claufes Se
Tom. L Zzz „ ju-
f66 MEMOIRES, NEGOCIATIONS, TRAITEZ,
1701. „ juremens neceilaires Se requis. Et en inférant la fufdite obligation Se ratifi-
- „ cation, que fon Altcfle aura donnée Se faite à la prefente Capitulation, Scelle
,, en fera une autre pareille femblable conjointement avec le Roi Très-Chrê-
„ tien, fî-tôt qu'elle fera enregistrée au Parlement de Paris, félon la forme ac-
„ coutumée, avec les autres claufes necefTaires. Comme aullî de la part de Sa
„ Majefté Catholique, elle fera approuver Se ratifier la Renonciation Se Ra-
„ tification en la forme Se force accoutumée avec les autres claufes necefTaires;
„ la fera auffi enregiltrer en fonConfeil d'Etat. Et foit que lefditesRenoncia-
„ tions, Ratifications, Se Approbations foient faites, ou non faites, dès à pre-
„ fent,en vertu de cette Capitulation Se du Mariage qui s'enfuivra,Scencom-
„ templation de toutes les fufdites chofes, elle feront tenues Se cenfées pour
„ bien Se deuëment faites Se oélroïées, Se pour pafTées Se enregiftrées dans
„ le Parlement de Paris, par la publication de la Paix dans le Ro'iaume de
„ France.
VII. Que Sa Majefté Très- Chrétienne donnera à la Sereniffime Infante
,, Dame Marie-Therese, pour fes Bagues Scjoïaux, la valeur de cin-
„ quante mille Ecus d'or fol. Sec.
„ VIII. Que Sa Majefté Très- Chrétienne, fuivant l'ancienne Se louable
„ coutume de la Maifon de France, afîîgnera Se conftitiiera à la Sereniffi-
,, me Infante Dame Marie-Therese, pour fon Douaire, vingt mille Ecus
„ d'or fol Sec.
IX. Que Sa Majefté Très-Chrétienne donnera Se affignera à la Sereniffime
„ Infante Dame Marie-Therese, pour la dépentè de la Chambre Se entre-
„ tenement de fon Etat , Se de fa Maifon , une fomme convenable , telle
,, qu'appartient à Femme Se Fille de fi grands &C Puiffans Rois èzc.
„ X. Que le Roi Très-Chrétien Se la Sereniffime Infante Dame Marie-
„ Thérèse, s'épouferont Se marieront par Procureur, qu'envoïera le Roi
„ Très-Chrétien à la Sereniffime Infante par parole de prefent. Ce qu'étant
„ fait, Sa Majefté Catholique la fera mener à les fraix Se dépens jufques à
„ la Frontière du Roïaume de France Sec.
„ XI. Qu'en cas que le Mariage fe diflblve entre Sa Majefté Très-Chrê-
„ tienne Se la Sereniffime Infante Dame Marie-Therese, Se que fon AI-
„ telle furvive Sa Majefté Très-Clirêtienne, en <:e cas elle s'en pourra re-
„ tourner librement, Se fans autre empêchement quelconque, au Roïaume
„ d'Efpagne Sec.
„ XII. Ce Traité Se Contraél de Mariage a été fait, avec deflein de fu-
„ plier nôtre Saint Père le Pape ; comme dès à prefent Leurs Majeftez l'en
„ fupplicnt, qu'il ait agréable de l'approuver, Se lui donner fît Bénédiction
„ Apoftoliquej comme aufîî d'en approuver les Capitulations Se les Ratifica-
„ tions qu'en auront faites Leurs Majefté Se ton Alteflc, Se ces Ecritures Se
„ juremens qui fe feront Se oélroïeront pour fon accompliflèmènt, les infe-
„ rant en fes Lettres d'Approbation Se Benediéfion ; Que Leurs Majeftez
„ Très-Chrétienne Se Catholique, aprouveront Se ratifieront cette prefente
„ Capitulation, Se tout ce qu'elle contient; prometront Se s'obligeront fur
„ leur foi Se parole Roïale3 de la garder Si accomplir inviolablcment , déli-
„ vreront
5)
55
ET RESOLUTIONS D'ETAT. ffy
vreront à cet effect leurs Brevets,- ou Lettres, en la forme accoutumée, 170 1.
avec les dérogatoires de quelconques Loix, Juftices, 6c Coutumes qui fe- - ,
roient à ce contraires, Se auxquelles il convient déroger. Lefquels fufdits
Brevets ou Lettres de Ratification de la prefente Ecriture, ils fe délivre-
„ ront l'un à l'autre refpectivement dans trente jours, à compter du jour 5c
„ date de la prefente, par le moïen des Ambafladeurs ou Mini (très qui refi-
„ deront dans les Cours de Leurs Majeftez Très-Chrétienne, 6c Catholique j
„ avec l'obligation 6c lien de leur foi Se parole Roïale, 6c qu'ils effectueront
„ 6c garderont > commanderont qu'il foit obfervé & accompli entièrement ,
fans qu'en tout, ou en partie, il y manque choie quelconque, 8c qu'ils
n'iront, ni confentiront aller ni venir au contraire directement ni indirecte-
ment , ni en autre façon, ni manière aucune j car ainfi l'ont promis 5c fti-
pulé lefdits Seigneurs Plénipotentiaires , en vertu des pouvoirs qu'ils ont
,, de Leurs Majeftez. A quoi furent prefents , de la part de la France,
„ Meilleurs le Duc de Guife., Comte d'Harcourt, Grand Efcuïer de Fran-
„ ce , 6c Gouverneur d' Alface & de Philsbourg ; le Marefchal de Clerem-
„ baud, Gouverneur de Berrij le Duc de Crequi, Premier Gentilhomme
„ de la Chambre dudit Seigneur Roi Très-Chrétien ; le Bailli de Souvré ,
„ le Comte d'Olonne , le Marquis de Vardes , Capitaines de cent Suiffes
„ de la Garde de ladite Majefté; le Marquis de Soyecourt , Maître de la
„ Garderobe de fadite Majefté j de Lyonne, Miniftre d'Etat ; Courtin , -l'un
„ des Maîtres des Requeftes de l'Hôtel de Sa Majefté} d'Avaux, aufli Maî-
„ tre des Requeftes dudit Hôtel : 6c plufieurs autres Seigneurs 6c Cavaliers.
„ Et de la part d'Efpagne Meffieurs le Marquis deMondejar, Gentilhomme
„ de la Chambre dudit Seigneur Roi Catholique 5 le Duc de Naxara 6c de
„ Maqueda j le Marquis de los Balbazez , Capitaine-Général des Gens d'Ar-
„ mes de l'Etat de Milan : le Licentié Don Jofeph Gonçalez, du Confeil
„ 6c Chambre de fadite Majefté 6c Prefident de fes Finances j le Licentié
,, Don Francifco Ramos de Mançano, du Confeil de fadite Majefté , dans
„ le Souverain de Caftille } le Baron de Vateville, du Confeil de Guerre de
„ fadite Majefté, 6c fon Capitaine-Général dans la Province de Guipufcoaj
„ Don Rodrigo de Moxica, du Confeil de Guerre de fadite Majefté 6c Maî-
„ tre de Camp Général de l'Armée d'Eftrémadure : 6c plufieurs autres Sei-
„ gneurs 6c Cavaliers. Et lefdits Seigneurs contractans l'ont figné de leurs
„ mains 6c noms ; 6c m'ont requis que de toute cette Capitulation je leur
„ en baillaffë copie, 6c de toutes celles qui feront traduites , 6c tranilatées, >
„ qui leur feront necefTaires. Signé, fe Cardinal Mazarini , &C Don Louis
„ Mendez. Fait 6c pâlie par devant moi Secrétaire ci-deflus-dit , Ecrivain
„ 6c Notaire public, les ans 6c jours fufdits. Signé, Pedro Colonna , pour
„ témoignage de vérité , Pedro Colonna , avec Paraphe.
L'Infante Marie -Thérèse a fatisfait exactement 6c autant qu'il étoit
bienfeant à une Princeflè du Sang d'Efpagne à cette Convention , a-
vant que d'être foûmife au Pouvoir de la France 6c qu'Elle fût obligée
d'obeïr à fes Commandemens : 6c aïant atteint l'âge de vingt ans , 6c étant
bien verfée dans les Affaires du Monde, Elle la confirma (ce qui eft digne
Zzz z de
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5»
5»
5»
5)
\
56*$ MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
1701. de remarque) par deux Initrumens ou Actes foufcrits de fa main, & qui
"• font avec le Contract de Mariage entre les Actes publics des Confeils d'Ef-
p.igne, dont un eft un Acte de Renonciation de tout l'Héritage , & de
tous Droits & Demandes-, 6c l'autre eit un Acte de Ratification pour l'Ex-
clufîon 6c Ccffion de toutes les Provinces 6c Roïaumes , 6c les confirma
par ferment, & abjura abfplument en même tems toute faculté de deman-
der ou ufurper aucune exception, reititution , abiolution, du difpenle Papa-
le ou autre, qui feroit demandée volontairement par Elle, ou par d'autres.
Le premier Acte de Renonciation eit en ces termes.
MAdame Marie-Therese Infante des Efpagnes , & par la grâce de
Dieu Reine future de France, Fille ainée du Très -Haut , Très-
Excellent, 6c Très-Puiflant Prince Philippe IV. par la même grâce Roi
Catholique des Efpagnes Monfeigneur, & de la Très -Haute , Très- Ex-
cellente , & Très-Puiflante PrincefTe Madame Isabelle Reine Catho-
lique qui foit en gloire ; par cet Inrtrument 6c Acte de Renonciation , 6c
du furplus qui y fera contenu, foit notoire & manifefte à ceux qui en au-
ront connoiifance , de quelque façon que ce foit, que par les Articles 2. &
„ 4. du Traité de mon Mariage promis avec le Très-Haut , Très-Excellent,
„ 6c Très-Puiffant Prince Louis XIV. Roi Très -Chrétien de France,
conclu dans l'Ifle nommée des Faifans dans la Rivière Vidafoa , du ref-
fort de la Province de Guipufcoa 6c confin de ces Roïaumes avec celui de
France, lefept Novembre de l'année pafTée iôfp., il a été refolu 6c ar-
reité que le Roi Monfeigneur ( à caufe 6c au regard de ce Mariage , 6c
afin que j'y porterais mon dot 6c mes biens propres ) a promis qu'il me
donnerait cinq cent mille écus d'or au Soleil, qui fe paieraient 6c délivre-
raient au lieu , 6c aux termes Ipecifiez dans ledit Article, au Roi Très-
Chrétien, ou à la perfonne qui aurait fon pouvoir , 6c qu'avec iceux je
me devrais contenter , 6c tenir pour contente de tous 6c quelconques
„ Droits, 6c Actions qui m'appartiennent, ou pourraient appartenir à pie-
„ fent ou à l'avenir, fur les Biens 6c Hoirie de la Sereniflime Reine Madame
Isabelle ma Mère, 6c fur la future Succeffion du Roi Monfeigneur,
( que Dieu ait en fa garde ) 6c fur tout ce qui me pourrait competer 6c ap-
partenir comme à Fille 6c Héritière de leurs Majeitez Catholiques , 6c
pour leur Droit, 6c Chef, 6c pour quelconque autre Titre pente, ou non
penfé, fçû, ou ignoré, tant pour la Ligne Paternelle , que Maternelle,
droite ou tranfverfale , mediatement 6c immédiatement, 6c que devant
de célébrer le Mariage par parole de prefent j'aurais à céder, éc renoncer
tous mes Droits, 6c Actions au Roi Monfeigneur , 6c aux perfonnes qui
auront la fienne, 6c que Sa Majerté voudra, 6c aura agréable , ainfi qu'il
3>
11
11
11
il
11
11
11
3>
»
„ eit itipulé & déclaré plus particulièrement par leldits Articles 2. 6c 4. que
,, j'ai lu, 6c ouï lire plufieurs fois devant que de confentir à ce que l'on for-
11
meroit cet Acte, lefquels je veux qu'ils y foïent inibrez 6c mis de lettre à
„ autre, 6c de mot à autre, dont la teneur eit la fuivante.
„ Que Sa Majerté Catholique promet, 6c demeure obligée de donner,
„ 6c qu'elle donnera à la Serenilfimç Infante Marie-Therese, en dot 8c,
„ Ma-
ET RESOLUTIONS D'E T A T. f6j>
,y Mariage avec le Roi Très -Chrétien de France , 8c paiera à Sa Majeflé 1701.
„ Très-Chrêthnne, ou à qui aura fon pouvoir ■& commiffion , cinq cent — — —
„ mille ecus d'or au Soleil, ou leur jufte valeur dans la Cité de Paris, 6c
„ cette fomme fe paiera en la façon fuivante ; le tiers au tems de là confom-
„ mation du Mariage, l'autre tiers à la fin de l'Année après ladite confbm-
„ mation, & le dernier tiers fix mois après ; de forte que l'entier paiement
„ de ladite fomme de foo. mille écus d'or au Soleil fe fera dans dix huit
„ mois, aux termes & portions qui font fpecifiécs.
„ Que moïennant le paiement effectif à Sa Majefté Très-Chrétienne, ou
„ à la perfonne qui le d^vra recevoir par fon ordre , defdits fooooo. écus
„ d'or au Soleil, ou leur juile valeur dans les termes fufmentionnez , la Se-
,, reniffîme Infante Madame Marie-Therese aura à fe contenter , 6c fe
„ contente avec le dit dot, fans qu'il lui relie aucun recours, Action , ni
,, Droit, pour demander, ou prétendre qu'il lui appartiendraient, ou pour-
,, raient appartenir d'autre bien, ou Droits fur les Hoiries de leur Majcftez
„ Catholiques fes parens, foit au regard de leurs perfonnes, foi: en quelcon- ,'■
5, que autre façon , ou quelque autre tître , fçû ou ignoré , parce qu'elle.
„ doit demeurer exclu fe de tout s Droits de quelconque condition , nature , ou qua-
„ lité qu'ils fuient; 6c devant d'effectuer les Fiançailles, elle en fera Renon-
„ ciation en forme avec toutes lesafîurances, fermetez, & folemnitez qui font
„ requifes, 6c necefTaires, ce qu'EJle fera avant de fe marier par paroles de
„ prefent, & après elle l'approuvera, 6c ratifiera conjointement avec le Roi
„ Très Chrétien, auffi-tôt qu'elle aura célébré fon Mariage, avec les mêmes
„ afTurances 6c folemnitez, avec lefquelles elle aura foit la première Renoncia-
,, tion 6c celles qui fembleront plus convenables 6c necefTaires } à quoi doivent
M demeurer, 6c demeurent obligez dès à prefent 6c pour lors Sa Majefté
j, Très-Chrétienne, 6c fon Altefle, 6c qu'en cas qu'ils ne fafient pas ladite
„ Renonciation , elles la tiennent pour faite 13 expédiées dès maintenant pour
„ lors , feulement en vertu de ce Traité : lefquelles devront être en la forme la
„ plus efficace Se convenable que faire fe pourra pour leur validité ^ 6c fer-
„ meté avec toutes les cl.iufes, dérogations, 6c abrogations de toutes quel-
„ conques Loix, Ufages, 6c Coutumes, Arrêts, 6c Conftitutions y contrai-
5, res , ou qui l'empêchent en tout , ou en partie, auxquelles à cet effet
„ Leurs Majejlez Catholique (3 Très-Chrétienne doivent déroger , & que l'on en-
„ tendra demeurer derogées des à prefent pour lors par V approbation qu'elles fe-
„ ront de ce Traité.
„ Et comme, par la grâce de Dieu , je me trouve en âge majeure de plus
„ de vingt ans, 6cque dans peu de jours, s'il plait à Dieu nôtre Mariage fe
„ doit effectuer par paroles de prefent , 6c que je fuis certaine, advertie, 6c.
„ informée à mon entière fatisfaction de la fubftance , 6c effet defdits Arti-
„ clés, 6c reconnois , 6c ai reconnu que de la future Succeffion du Roi
„ Monfeigneur , 6c de l'Hoirie de la Sereniflïme Reine ma Mère, il ne me
„ pourrait competer , ni appartenir en rigueur, pour Héritage 6c Légitime.
,., ladite fomme de foo. mille écus d'or au. Soleil, 6c que quand même elle
„ me pourrait appartenir, c'eft un dot fort compétent , 6c le plus grand
Zzz 3 „ que
1701.
570 MEMOIRES, NEGOTI ATIONS, TRAITEZ,
„ que l'on. ait donné jufques à prefent à aucune Infante d'Efpagne , & que
„ le Roi Monfeigneur s'eft incliné 6c. porté à me le donner fi grand
„ pour me gtatifier , 6c en confideration 6c contemplation de la perlbnne
„ du Roi- Trcs-Chrêtien, afin que par le moïen de ce Mariage l'on obtien-
„ droit les effets mentionnez dans le dit Traité de Mariage, lefquels font fi
„ importans au bien public de la Chrétienté, 6c au contentement 6c fatisfac-
„ tion de ces Roïaumes-ci. Partant, de ma certaine feience, 6c fçavoir, <k
„ d'agréable 6c fpontanée volonté j'aprouve 6c veux, que l'on obferve 6c ac-
„ complifie ce qui a été refolu 6c arrêté par lefdits deux Articles, 6c que
,, l'on entende, que ce Mariage fe devra conclurre 6c effèétuer fous les con-
„ ditions y contenues, ^C déclarées, 6c que fans icelles conditions il n'auroit
,, pas parvenu à l'état, où il ert ce jourd'hui, 6c dès maintenant je me tiens
„ pour contente 6c pour païéc entièrement, abfolument, 6c fatisfaite de tout
„ ce qui m'appartient, ou pourroit appartenir, à prefent ou à l'avenir, par
„ quelconque Droit fçû ou ignoré, de la future Succeffion & Hoirie de leurs
,, Majeftez Catholiques mes Parens, 6c à caufe de la Légitime Paternelle 6c
„ Maternelle, ou pour leur fupplement , ou à caufe des Alimens , ou de dot,
„ tant des biens libres comme de ceux de la Couronne de leurs Roïau-
,, mes, Etats, 6c Seigneuries, fans qu'il me refte à moi , ou aux miens au-
„ cune aérion pu recours contre Sa Majefté , oir fes Succeffëurs , pour
„ demander ou prétendre que je devrois avoir une plus grande valeur 6c
„ importance que lefdits foo. mille écus ,* 6c je veux que cette Renon-
„ dation s'entende auffi de quelconque autre Droit , ou Aérions , qui me
„ pourroient competer, ou appartenir par Hoirie, ou Succeffion de quel-
„ ques Droits , ou parent de Ligne droitte ou tranfverfale par tête , ou
„ par perfonnes , comme à Fille de leurs Majeftez , 6c que je les aban-
„ donne 6c quitte tous les uns ci? les autres , de quelconque condition , na-
„ tare , qualité , valeur , & importance qu'ils J "oient , ^ les cède , renon-
„ «, cjf tranf porte ait Roi Monfeigneur & à fes Héritiers , ci? Succeffëurs uni-
„ verfels ci? finguliers , lefquels auront fon Droit , 6c afin qu'il en puifîe dif-
„ pofer comme il lui plaira, 6c que bon lui femblera tant par donation entre
„ vifs, comme par Teftament , 6c dernière volonté, fans que Sa Majefté
„ foit obligée de nfinflituer , ou laiffer fon Héritière, ou Légataire, ou de faire
„ mention de moi, par ce que pour lefdits effets je me déclare, 6c dois être
„ tenue' 6c réputée pour EJlrangere, 6c comme à telle il ne m'y doit de-
„ mearer aucun recours j afin de pouvoir reclamer , ou propofer quelque
„ complainte, nonoblb.nt que l'Hoirie que lairra la Majefté de mon Père,
„ foit très-opulente, 6c de fi grande valeur 6c importance que d'icelle , 6c
„ comme un de fes Enfans, que nous fommesà prefent, ou ferons à l'ave-
„ nir, il m'en pourroit appartenir une fomme plus grande, 6c plus haute
„ que celle defdits foo. mille écus , pour fi grand, ci? extraordinaire que foit
„ l'excès ; 6c encore que le cas arriveroit ( ce que Dieu ne permette pas)
„ qu'au tems de fa mort je demeurerois 6c viendrois à être fa Fille unique, à
„ caufe que mes Frères, 6c les autres fiens Defcendants légitimes, feroient
„ morts auparavant, afin qu'en nul cas , ni pour aucun événement l'on ne
„ puifle
ET RESOLUTIONS D'ETAT. fji
„ puifle demander ni prendre pour moi, ou en mon nom , ni fur le Droit 1701.
„ de ma perfonne, aucune autre portion plus grande de légitime des biens, ■
„ 6c Hoiries du Roi mon Seigneur, je promets qu'en nul tems, ni pour au-
„ cune raifon , foubs quelconque prétexte que ce (bit , je ne confentirai ni
„ permettrai, que l'on agiflè contre cette mienne Renonciation & Déiîftance
„ que je rais de mefdits Droits, actions, ou prétendons) 6c je defifte con-
„ jointement , 6c renonce à tous, £5? quelconque remède , ordinaires, & ex-
„ traordinaires , qui m'appartiennent, ou pourraient appartenu- par Droit ,
„ commun, & Loix de ces Roïaumes, ou par fpecial Privilège, 6c particu-
„ lierement à celui de la réfutation in Integrum, fondée fur le manquement de
,, mon âge, ou fur la Le [ion énorme , ou très- énorme , ou fur dire que le dot au-
„ roit été caufe de ce Contrat! , ou fur V incertitude de ce que je renonce , afin que
„ nul defdits remèdes ôc recours fufmentionnez me fervent , ou puifTènt fer-
„ vir en voie de Juitice, ou en conteftation , ni que par iceux moi 6c mes
„ Enfans 6c Héritiers puiflîons y être ouïï, 8c admis, 6cque l'on nous en de-
„ nie 6c ferme l'accès, pour les pouvoir déduire 6c propolèr judiciellement,
„ ou-extrajudiciellenient, ni par voie de grief, ou de recours , ou de fim-
„ pie complainte , ainfi que toujours 6c en tout tems l'on obferve 6c ac-
„ compliflè ce qui eft difpofé par lefdits Articles fufmentionez, 6c ce que j'ai
„ promis par cet acte touchant leur confirmation 6c approbation, èc promets
„ en toi de ma parole Roïale , qu'il fera maintenu, accompli , 6c obfervé
„ en tout tems inviolablement , fous l'obligation que je fais de mes biens 6c
„ rentes que j'ai, 6c aurai, 6c je donne pouvoir au Confeil de Sa Majefté,
„ 6c aux Seigneurs Rois fes Succeffeurs, 6c aux perfonnes auxquelles ils en-
„ chargeront l'exécution de cet Acte, à ce qu'ils le fafient obferver ôc exe-
„ cuter : 6c pour plus grande validité , je jure par les Saints Evangiles con-
.,, tenus dans ce Mlifel , ( fur lequel je mets ma main droite ) qu'en tout
„ tems, 6ç autant qu'il pourra dépendre de moi, je l'obferverai, 6c accom-
„ plirai, fans dire, ni alléguer, que pour le faire 6c accorder j'ai été indui-
„ te , attirée , ou perfuadée par le refpect ou vénération que je dois 5c
„ porte au Roi mon Seigneur, lequel m'a tenu, 6c me tient encore foubs fa
,j punTance paternelle j d'autant que je déclare que Sa Majefté s'eft toû-
„ jours remife à mon franc arbitre , 6c volonté , 8c que je l'ai eu li-
„ bre , 6c nullement refpective , en tout ce qui a touché à ce Con-
„ tract , 6c je promets de ne point demander difpenfe de ce Serment à
„ nôtre très-Saint Père 6c au Saint Siège Apoftolique , ni a fon Nonce, 6c
„ Légat à Latere, ni à autre Perfonne qui ait pouvoir ou faculté de me l'oc-
„ troier, 8c que fi elle venoit à être demandée à mon inftance , ou de quel-
5, que Perfonne tierce , ou à être dctroïée tnotu proprio, je n'en uferai point,
„ ni ne m'en prévaudrai , encore que ce ne ferait feulement que pour entrer
„ en juftice , fans toucher à la force 6c fubftance defdits deux Articles de
„ Mariage, ni à celle de cet Acte que je fais pour les confirmer, nonobftant
5, que ce foit avec quel- conque clauiè dérogatoire de ce Serment. Et en cas
„ que l'on me l'accorde , une ou plufieurs fois , je fais de nouveau d'autres
„' Serments, 6c tant qu'il y en demeure toujours un fur toutes lefdites difpen-
„ fesj
f7i MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
1701. „ fcs; £c fur le même je déclare & promets , que je n'ai fait ni ferai aucune
„ Proteftation , ni Réclamation en public, ou en fecret, contraire à cette
„ mienne promeffe & obligation , pour l'affbiblir , ou diminuer fa force, &
„ que (I je venois à la faire, encore que ce fût avec un autre Serment contrai-
„ re à celui-ci, qu'elle ne me puiffe point fervir , ni être d'aucun avantage 1
„ & je promets, & m'oblige, qu'aufll-tôt que l'on m'aura menée, 6c que je
„ ferai en Compagnie du Roi Très-Chrêtien, en fuite defdits Articles, ferai
„ conjointement avec Sa Majefté un autre Acte , avec toutes les Claufes , Ser-
„ ments, 6c Obligations neceflaires , avec Infertion èc Ratification de celui-
,, ci , qui a été fait en cette Cité de Fontarabie , où fe trouve à prefent le
„ Roi Mon Seigneur avec fa Cour, 6c Palais, le 2. jour du mois de Juin de
„ cette année 1660. en prefence du Roi nôtre Maître, lequel en continua-
,•> tion de l'Octroi fufmentioné dit, que Sa Majefté Catholique fupleoit avec
„ fa Roïale Autorité , 6c voialoit que l'on tint pour fuppléez quelconques def-
„ fauts, ou omiifions de Fait, ou de Droit , de fubrtance , ou de qualité,
„ de ftile, ou de Coutume, qu'il y pourroit avoir dans la formation de cet
„ Aftede Renonciation des Légitimes , 6c futures Succeffions qu'a fait , 6c
„ accordé la Serenifllme Infante Reine promife de France, fa très -chère 6c
„ très-aimée Fille, 6c que de fa pleine 6c abfoluë puiffance, comme Roi ,
„ qui ne reconnoiffoit aucun fuperieur dans le temporel , elle la confirmoit ,
„ 6c approuvoit , 6c la confirma , 6c approuva avec dérogation pour cette
„ fois de quelconques Loix, Ordonnances, Ufages , 6c Coutumes qu'il y
„ auroit au contraire, lefquels pourroient empêcher fon effet 6c exécution,
„ 6c pour plus grande affûrance commanda que l'on le fcelleroit avec le Seel
„ Roïal, étant témoins à ce appeliez, 6c requis Don Louis Mendez de Ha-
„ ro, Marquis del Carpio , Comte-Duc d'Olivaresj Don Ramiro Nunez
„ de Guzman Duc de Médina de la Tories ; Don Gafpar de Haro , Mar-
„ quis deEliche> Don Jean Dominicq de Guzman , Comte de Monterey }
„ Don Diego de Aragon , Duc de Terranova ; Don Guillen Ramon de
„ Moncada, Marquis de Aytona} Don Pedro Puerto Carrero , Comte de Me-
„ dellin; Don Pedro Colon de Portugal, Duc de Veraguasj Don Antonio
„ de Peralto Hurtado de Mendoza, Marquis de Mondejari Don Alonfo Pe-
„ rez de Guzman, Patriarche des Indes; Don Alonfo Perez de Vivero, Com-
„ te de Fuenfaldagne, du Confeil d'Etat} Don Jean de Caravajal , 6c Sardi,
„ du Confeil 6c Chambre ; Don Diego deTajada, Evêque de Pampelune*
„ 6c plufieurs autres Seigneurs 6c Cavaliers qui fe trouvèrent prefens.
Etoit f'gnéj
Je le Roi, Mahie-Therese.
„ TE Don Fernando de Fonfeca Ruiz de Contreras, Marquis de la Lipalla,
„ J Chevalier de l'Ordre de Saint Jaques, des Confeils de Guerre, des Indes,
„ 6c Chambre d'Icelles, de Sa Majefté Catholique , Secrétaire d'Etat, 6c de
1, la Dépêche Univerfelle, ôc Notaire dans (es Roïaumes 6c Seigneuries, qui
„ ai
ET RESOLUTIONS D'ETAT. sn
„ ai été prefent au Serment, Octroi , 8c à tout le furplus ci-defîlis contenu, 1701.
„ en fais foi, & que lefdits Articles 1. Se 4. du Mariage ainfi qu'ils font ci-defTus ' ■— '-
„ mentionnez , ont été tirez fîdellement , & collationnez avec l'Original qui
„ eft en mon pouvoir. En témoignage de vérité je l'ai figné Se foûfcript de
„ mon nom.
Don Fernando de Fonseca Ruyz de Contreras.
L'autre Infiniment ou Aétc d'exclufïon 6c de ceffion desRoïaumcs 5c Etats Parl'Ex-
d'Efpagne, dans lequel l'Infante Marie -Thérèse, comme un Juge juré, <jlufion
nflis dans Ton Tribunal, a prononcé cette belle Sentence : §ue toute ufurpation, \es ^tatJ
ou attentat au contraire , doit être tenue pour une violence illicite, une invafion Fc Pro-
injiifte, faite contre la raijon £5? la confeience, & pour une ufurpation tiranniqUey vinces
13 qu'au contraire, ce qui fe feroit poijr y uftfier , ferait qualifié de forcé jufie , au"
licite y permifeJS que tous les Sujets d'E/pagne ou defes dépendances aient à fai- condi-
re tous leurs efforts pour cela j efl conçu , fans aucune Condition de dot ou tion de
autrement, en ces mêmes mots Se termes qui auvent, dot ou
autic-
„ "\ TAdame Marie -Thérèse Infante des Efpagnes , Se par la grâce de del'Ab-
„ 1VJL Dieu Reine future de France, Fille ainée du très-Haut , très-E\'- folutioa
„ cellent, 6c très-Puiûant Prince , Philippe IV. , par la même grâce Roi ^3PaIe
„ Catholique des Efpagnes mon Seigneur, (que Dieu ait en fà garde 6c pro- Reft^0
„ fpere très-heureufement ) 6c de la très-Haute, très-Excellente , 6c très-Puif- tion.
„ fante Princefîè Madame Izabelle Reine Catholique , de gloricufé Me-
„ morie, ma Mère 6c Dame (qui eft au Ciel)} par la Relation 6c Notice
„ de cet Infiniment 6c Aéte d'Approbation, Confirmation, 6c Ratification,
„ 6c du furplus qu'il s'y contient , 6c afin qu'il demeure en éternelle Memoi-
„ re, je fus notoire 6c manifefte aux Rois , Princes, Potentats, Republi-
„ ques, Communautez, 6c Perfonnes particulières , qui font ou feront aux
„ Siècles à venir, que d'autant que le- très- Haut, très-Excellent, 6c très-
„ PuifTant Prince Louis XIV. Roi Très-Chrêtien de France , mon Cou-
„ fin Germain, 6c en fon nom 6c avec Ambafïïide particulière le Maréchal
„ Duc de Grammont, demanda 6c propofa mes Fiançailles 6c Mariage pour
„ ledit Roi Très-Chrêtien mon Coufin au Roi Catholique, mon Seigneur ,
„ 6c que Sa Majefté Catholique faifânt une jufle eftime de cet office 6c pro-
„ pofition , 6c aïant les égards dûs aux fujects de décence , égalité , 8c conve-
„ nances publiques, qui concourrent en ce Mariage , l'accorda 6c y confen-
tit, aïant à précéder la difpenfe de fa Sainteté pour leParentage 8c Confan-
guinité que j'ai avec le Roi Très-Chrêtien mon Coufin, & que par après
enfuite de cet Octroi #r Accord , 6c avec pouvoir des deux Majeftez,
Catholique 8c Très-Chrétienne, l'on a arrêté 8c figné nôtre Traité de
Mariage le 7. Novembre de l'année pafiee i6fo. dans Pille 'nommée des
Faifans, lituée fur la Rivière de Vidafîba du refTort de la Province de Gui-
pufcoa, 6c confins de ces Roïaumes avec celui de France , 8c que dans
les Articles f. 8c 6. dudit Traité il a été refolu , 6c arrêté de commun
„ accord, 8c de même volonté, Se comme une chofe très-convenable, après
l'avoir confiderce attentivement , 8c avec meure délibération , que moi
Tom. I. Aaaa „ 8c
•>■>
574 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
1701. „ 8c les Enfans 8c Defcendans, que Dieu nous donnera de ce Mariage,
„ lbions &c demeurions inhabiles 8c incapables , 8c abfolument exclus du Droit
„ 8c efpoir de fucceder à aucuns des Roïaumes , Etats, 8c Seigneuries dont
,, fe compofe cette Couronne 8c Monarchie d'Efpagne, 8c à ceux qui s'y
„ pourraient agréger par Sa Majefté Catholique, 8c (après fes longs , 8c
„ heureux jours) par les Rois l'es SuccefTeurs ; 8c quoi que pour s'être re-
„ duit à paftion conventionelle par des Princes &c Rois Souverains ( lequels
,, dans le temporel ne reconnoiflent aucun fuperieur) par grâce, 8c en faveur
„ de la caufe publique des deux Roïaumes , te en condefeendant à ceci avec
„ ledefir, 8c lbuhait commun de leurs Sujets, Vaffàux , 8c Naturels, qui
„ veuillent, qu'il ait la force, 8c vigueur de Loi, 8c Saétion Pragmatique,
„ 8c qu'elle foit reçue 8c obfervée comme telle; 8c pour ce fujet fembloit,
,, que pour fa fermeté il ne ferait pas befoin d'aucune autre folemnité, mais
„ toutes fois leurs Majeftez voulurent, que iî mon Approbation pouvoit être
„ convenable pour quelque confideration, je l'aurois à taire incontinent, que
„ le cas arriverait, que le Mariage accordé fe devrait célébrer, 8ç -traiter
,, par paroles de prêtent, 8c que mon Approbation fut avec toutes les claufes
„ 8c folemnitcz neceflaires , félon, èc comme il eft ftipulé 8c déclaré , par-
ticulièrement par l'Acle de dix Articles dont la teneur du f. 8c 6. tirée de
fon Original eft inférée ici de mot à autre, 8c eft la fuivante.
„ V. Que d'autant que Leurs Majeftez Catholique , 8c Très-Chrêtienne,
ont confenti, 8c confentent à ce Mariage, afin de rendre perpétuelle par
ce lien , èc aflurer davantage la Paix publique de la Chrétienté , 8c l'amour
8c fraternité qui le fouhaite entre Leurs Majeftez , 8c en confideration des
„ juftes caufes , qui font connoître , 8c periuadent les convenances dudit
„ Mariage, moïennant lequel 8c avec la faveur 8c grâce de Dieu, on peut
„ efperer des heureux fuccès , au grand Bien 8c AccroifTement de la Foi 8c
„ Religion Chrétienne, 8c au bénéfice commun des Roïaumes , Sujets, èc
„ Vaflaux des deux Couronnes ; eu égard à ce qu'il importe à l'Etat public,
„ 8c à leur confervation , qu'étant iî grandes , elles ne viennent pas à fe
„ joindre, 8c que l'on prévienne les occafions qu'il y pourrait avoir de les
„ joindre, 8c en confideration de l'égalité, 8c autres juftes raifons , l'on ar-
„ rêta par Accord conventionel , que Leurs Majeftez veulent, qu'il ait force
„ 8c vigueur de Loi établie en faveur de leurs Roïaumes, 8c intérêt public
„ d'iccux, que la Sercnilîîme Infante Madame M arie-The rese , 8c
„ les Enfans qu'elle aura , Mâles ou Femelles, 8c leurs Defcendans, tant
„ Fils ainez, comme 1. 3. 8c 4. 8c de -là en avant en quelconque degré
„ qu'ils fe trouvent , pour toujours , 8c à jamais, ne puiflent fucceder, ni
„ fuccedent aux Roïaumes, Etats, 8c Seigneuries de Sa Majefté Catholi-
„ que, fpecifîez dans ce Traité, ni aucun de tous les antres Roïaumes, E-
„ tats, éc Seigneuries , Provinces , Ifles adjacentes , Fiefs 8c
„ Frontières, que Sa Majefté Catholique a, 8c pofiede à prefent, &c qui lui
„ appartiennent , ou puifient appartenir , tant en Efpagne que hors d'icelle,
„ 8c qu'à l'avenir Sa Majefté Catholique, 8c (es SuccefTeurs auront , pofië-
„ deront, 8c qui leur appartiendront, ni à tous ceux y compris, inclus, 8c
„ aggregez à iceux, ni à tout ce qui s'aquerra en quelconque tems que ce
„ foit,
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ET RESOLUTIONS D'ETAT. f7r
foit, Se s'accroitra auxdits Roïaumes , Etais , S? Seigneuries, & qui fe 1701.
recouvrera ou y fera dévolu, pour quelconque titre ou caufe que ce foit
ou puiffc être, encore que pendant la vie de la Sereniffime Infante Mada-
me Marie-Therese, ou après pendant celles de quelconques fîens Def-
cendans, ainez , féconds, ou autres arriveroit ou efchoiroit le cas, Scies cas,
auxquels par Droit, Loix, ou Coutumes dcfdits Roïaumes , Etats, &
Seigneuries Se par les difpofitions, Se titres par lcfquels on fuccede & pré-
tendrait y fucceder, la Succeffion leur devroit apartenir , parce que l'on
déclare dès maintenant que ladite Sereniffime Infante Marie-Therese
demeure exclufe d'icelle, Se du Droit, 6c de l'efpoir de pouvoir fucceder
à ces Roïaumes, Etats, Se Seigneuries Se à chacun d'iceux , Se tous les
Enfans, Se Defcendans, Mâles , Se Femelles , nonob fiant qu'ils diraient.
„ ou pourraient due, ou prétendre qu'en leurs perfonnes ne concourraient ,
„ Se ne fe pourraient confiderer les raiibns de la caufe publique , ni autres
„ fur lefquelles fe pourroit fonder cette exclufion , Se qu'ils voudraient alle-
„ guer que la Succeffion de Sa Majeilé Catholique, Se des Sereniffimes Prin-
„ ces Se Infantes, Se des autres Enfans qu'il a, Se aura de tous les légitimes
„ Succefleurs ( ce que Dieu ne veuille, ni permette) ferait venue à man-
„ quer, d'autant que ce nonob liant ils ne devront pas fuecceder, ni preten*
„ dre de fucceder en aucun cas , tems, ni accident, ni événement , Elle ni
j, fes Enfants, ni Defcendans, fans avoir égard auxdites Loix , Coutumes,
„ Ordonnances , Se Difpofitions,en vertu defquelles l'on a fuccedé, Se fe fuc-
„ cède à tous lefdits Roïaumes, Etats, Se Seigneuries, & à quelconques
„ Loix , Se Coutumes de la Couronne de France , lefquelles empêchent
„ cette Exclufion au préjudice des Succefleurs d'icelle , tant à prefent, com-
yy me aux tems Se cas que la Succeffion fe différerait, à toutes lefquelles, Se
„ à chacune d'icelles Leurs Majellez devront déroger, Se abroger en tout ce
„ qu'elles feront contraires, Se empêcheront le contenu en ces Articles , Se
„ fon accompliflement, Se exécution, Se que l'on entende, que par l'appro-
„ bation de ce Traité elles y dérogent , Se les tiennent pour derogées , Se
„ que le même foit , Se s'entende, que Madame l'Infante Se fes Defcendans
,-, demeurent exclufe Se exclus de pouvoir fucceder en aucun tems, ni cas
„ aux Etats, Se Païs-Bas de Flandres Se Comté de Bourgogne Se de Charo-
„ lois , avec tout ce qui y eft adjacent , Se leur appartiennent. Mais auifi
„ on déclare exprelTement, que s'il arrivoit ( ce que Dieu ne veuille , ni
„ permette) que la Sereniffime Infante viendrait à être veuve, fans avoir
„ Enfans de ce Mariage , qu'en ce cas elle demeurera libre de l'Exclufion fuf-
„ mentionnée, Se pourra jouir des droits de fucceder à tout ce qui lui pour-
„ roit appartenir en deux cas. L'un, fi elle s'en rctournoit en Efpagne étant
n veuve de ce Mariage, Se fans Enfans j l'autre fi pour convenance du bien
„ public, Scpourjuites confiderations elle fe marioit du confentement du
j, Roi Catholique fon Père , Se du Prince d'Efpagne fon Frère ; aux-
„ quels cas Elle demeurera capable, Se habilitée à pouvoir hériter Se fucceder.
„ Que la Sereniffime Infante Madame Marie-Therese aura à faire de-
„ pêcher un Acte , avant de célébrer Se contracter le Mariage par parole de
„ fentj s'obligeant pour foi, Se fes SuccelTeurs, à l'accomplilTement , Se ob-
Aaaa i „ fer-
J7<S MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
1701. „ fervance de ce que deiTus , 6c de fon Exclufion, & de fes Defcendans ; ap->
" „ prouvant le tout félon, & comme il eft contenu en ce Traité avec les clau-
„ les neccffiires, 6c ferment, & à ce qu'inférant ce Traité, 6c l'Aéte d'obli-
„ gation 6c approbation, que fon AltefTe aura fait faire, elle en fera un au-
„ tre fcmblable conjointement avec le Roi Très-Chrêtien aufîî-tôt qu'elle fe-
,, ra mariée avec Sa Majefté , lequel devra être enregiftré , 6c pafîe par le
„ Parlement de Paris, en la forme, 6c avec les claufes accoutumées, 6c Sa
„ Majefté Catholique devra approuver ladite Renonciation èc Ratification
„ en la forme, 6c avec les claufes accoutumées 6c autres neceiïàircs , la fai-
„ iànt auflî paffer 6c enregiftrer par le Conléil d'Etat : 6c lefdites Renoncia-
„ tions 6c Approbations étant faites, ou obmifcs de faire , dès à prefent, en
„ vertu de ce Traité , 6c du Mariage qui s'enfuivra en vertu d'icelui,
„ on les tient pour faites 6c expédiées , pour paffées , 6c enregiftrées par
„ le Parlement de Paris par la publication de la Paix en ce Roïaume-là.
„ Et d'autant qu'après le Traité fufmentionné , nôtre très Saint Père
„ Alexandre VII. a difpenfé pour les degrez de Parentage, qu'il y a en-
„ tre ledit Roi Très- Chrétien 6c moi, 6c approuve par fon Autorité 6c Be-
„ nedicYion Apoftolique nôtre Traité de Mariage, 6c les Articles, 6c que le
„ cas 6c tems eft venu, que le Mariage fe doit célébrer, 6c contrafter avec
„ la benediétion de Dieu, 6c à ce que l'on doit efperer pour fa gloire 6c fer-
„ vice , exaltation de la Sainte Foi , 6c tranquillité de la Republique Chrê-
„ tienne; moiennant quoi le cas, 6c tems eft auflî arrivé, que je dois accom-
„ plir pour ce qui me touche (avant mes Epoufailles 6c Mariage) le conte-
„ nu aux Articles f . 6c 6. qui font inferez en cet Acte, 6c qu'il eft ainfi que
„ je me trouve en âge majeure de 20. Ans , 6c que dans icelle il a plû à
„ nôtre Seigneur de me donner capacité 6c difcretion , pour entendre, 6c
„ comprendre la fubftance 6c l'effet defdits Articles , dont je fuis certaine 6c
„ advertie, d'autant que je m'en fuis fouvent informée, 6c de leur conve-
,, nance pendant le tems de fix mois, qu'il y a que l'on les a arrêté 6c pu-
„ blié, 6c qu'ils ont été refolus 6c arrêtez , 6c qu'il fuffilbit , afin que j'au-
,, rois la fatisfaciion que je dois, de leur juftification de fçavoir que c'a été
„ une affaire examinée 6c accordée par le Roi mon Seigneur, lequel iouhai-
„ te 6c procure mon contentement, 6c mon bien, avec tant d'amour, 6c de
„ foin, prenant conjointement égard au public 6c commun des Roïaumes
„ que Dieu lui a enchargé, lefquels 6c ceux de France font également inte-
„ relfez, à ce que la Grandeur 6c Majefté qu'ils foûtiennent, 6c confervenr.
„ en eux mêmes depuis tant d'années 6c avec tant de bonheur , èc de gloire
„ du nom de leurs Rois Catholiques 6c Très-Chrê tiens, ne foit point dimi-
„ nuée 6c ne décheoit point, comme necefiai rement elle le diminuerait 6c
„ defcheroit, fi par le moïen, 6c à caufe de ce Mariage ils fe viendraient à
„ unir, 6c conjoindre dans quelqu'uns des ■Enfans 6c Defcendans, dont le
„ fuccès cauferoit aux Sujets 6c Vaifaux le mécontentement 6c afHiclion ,
„ qui fe peut confiderer , 6c dont juftement on pourrait craindre qu'il reful-
„ teroit les dommages 6c inconveniens qui fe rencontrent 6c fe reconnoifîent
„ plus facilement avant qu'ils ani\rent, qu'ils ne les repaieraient 6c remedie-
„ raient , après qu'ils icroicnt arrivez , 6c que l'on les auroit cxpcrimen-
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ET RESOLUTIONS D'ETAT.
T77
tez ; & partant il a convenu prévenir les remèdes à ce qu'ils n'arriveroient
pas, 6c que ce Mariage ne foit caufe d'effets contraires à ceux que l'on fe "
promet , 6c que l'on doit efperer , que l'on obtiendra par icelui } outre
qu'avec cet exemple , & à fon imitation on facilitera d'orenavant les Ma-
riages réciproques entre mes Enfans , 6c Defcendants , 6c ceux du Roi
Mon Seigneur, ce qui m'eft une coniideration de particulière confolation,
6c contentement, d'autant que ce fera le moïen d'ctroicir, 6c renouveller
pluiïeurs fois le lien du lang , 6c du Parcntage, & d'afîurer, 6c affermir
plus fortement & efficacement les Alliances, Amitiez, 6c bonne correfpon-
dance , lefquelles ont été liées par de fi heureux Principes , & contractées
entre ces deux Roïaumes , 6c fe continueront à la gloire de Dieu, 6c de-
meureront glorieufement entre iceux , 6c les Rois Catholiques 6c Très-
Chrêtiens, ce qui étafit le bien public 6c commun fe doit par bonne raifon
préférer au mien particulier, 6c à celui de mes Enfims 6c Defcendansj le-
,, quel dans l'Etat prefent doit être tenu un peu en confideration ; d'autant
„ qu'il eft fort éloigné, ainfi qu'il fe reconnoit; A quoi il concourt pour ma
„ plus grande fatisfaction , 6c Âéte, que je me conforme 6c fuis, en Taccor-
„ dant, l'exemple de celui qu'oclroïa pour fon Mariage, 6c avant icelui, la
Très-Haute, Très-Excellente, 6c Très- Puiflante Princefie Madame An-
ne Infante d'Efpagne, & aujourd'hui Reine Très-Chrétienne de France,
8c ma très-aimée, révérée Tante 6c Dame, 6c qu'outre les confiderations,
6c caufes publiques fufmentionées , 6c celle de conferver 6c affûrer la Paix
entre les deux Couronnes (lefquelles concoururent auffi, 6c s'alléguèrent
dans ledit Traité, 6c Renonciation) il a concouru dans l'Etat prefent, 6c
a été confideré comme caufe publique, la plus principale, 6c la plus gran-
de, pour la Renonciation accordée dans mon Traité de Mariage , que
l'Accord de mon Mariage auroit été notoirement le moïen 6c caufe plus
principale de la pacification d'une Guerre de vingt cinq ans entre les deux
Couronnes, Catholique 6c Très -Chrétienne (dans laquelle s'étoient inre-
reffez , par Alliance ou Dépendance les plus grands Potentats de la Chré-
tienté) 6c fon bien univerfel 6c la caufe publique, 6c fupreme de la Reli-
gion Catholique; le tout aïant pati notablement par la Guerre, 6c ne s'y
pouvant remédier que par la Paix accordée par le moïen, 6c à caufe de ce
Mariage, lequel ne s'accorderoit point, 6c le Roi Monfeigneur n'y confen-
tiroit point fans la Renonciation accordée , ainfi qu'il a été confideré dans
l'Article premier de mon Mariage, 6c dans le 33. de k Paix des deux Cou-
ronnes, lequel en cette confideration fe réfère au Traité particulier fait fur
les Conditions de mon Mariage, 6c tous deux ont été fignes en même jour
6c date, 6c dans ledit Article 33. de la Paix, l'on a déclaré que ledit Traité,
fait fur les conditions de mon Mariage, nonob fiant qu'il fût feparé, auroit
la même force, 6c vigueur que celui de la Paix; comme en étant la partie
plus principale, 6c les Arrhes plus precieufes pour fa plus grande fureté,
6c durée. Partant de mon propre mouvement, libre, fpontanée, 6c agréa-
ble volonté, 6c ïl'iant certaine feience , 6c connoiflance de l'Afte que je
„ fais, 6c de ce qu'il importe, 6c peut importer mon confentement , j'aprou-
„ ve, confirme, 6c ratifie en là voie, 6c forme que mieux je puis, 6c dois,.
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1701,
f7S MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
I701. „ ledit Accord fclon , & de la façon qu'il efl contenu plus particulièrement
„ dans ledit Article f . Se en cas qu'il fembleroit neceffaire, 6c convenable ,"
„ je donne mon pouvoir abfolu & fuffifant au Roi Mon Seigneur , 5c au Roi
„ Trcs-Chrêtien , à ce qu'ils le puilîent arrêter, Se accorder de nouveau.
„ Quoi qu'en vertu, 5e accomplifTement dudit Article je me déclare & tiens
„ pour exclufe , éloignée , Se les Enfans 8c Descendants de ce Mariage ex-
„ clus, 6c inhabilitez abfolument, Se fans limitation, différence, ou diftinc-
„ tion des perfonnes, degrez, fexes, Se tems de l'Action & Droit de fucce-
„ der aux Roïaumes, Etats, Provinces, Terres, Se Seigneuries de cette Cou -
„ ronne d'Efpagne exprimez , & déclarez par icelui, 6c que je veux, 6c con-
„ fens pour moi , 6c pour lefdits miens Defcendants , que dès maintenant
5, comme pour lors l'on les tienne comme cédez , 5c. transferez à celui qui fe
„ trouvera le plus proche en degré (à caufe que moi, 6c eux fommes exclus,
„ inhabiles 6c incapables) 6c immédiat au Roi par la mort duquel il vaquera,
„ 6c fe devra régler, 6c déférer la Succeffion defdits Roïaumes , 6c afin qu'il
„ les tienne 6c poffede comme légitime , ôc vrai Succeffeur de même façon
„ qui fi moi , Se mes Defcendants ne fuffions pas nez , ni étions au Monde,
„ parce que nous devons être tenus, 8c reputez pour tels, afin qu'en ma per-
„ fonne , 6c en la leur l'on ne puiffe confiderer , ni faire fondement de re-
„ prefentation aéHve ou paflive , principe , ou continuation de lignée effec-
„ tive, ou contentive de fubftance, de Sang, ou de qualité, ni tirer la Défi»
„ cendance, 6c computation des degrez de celle du Roi Monfeigneur, ni de
„ celle des Glorieux Rois ks Predeceffeurs , ni pour aucun autre effet , afin
„ d'entrer en la Succeffion , ou préoccuper le degré de proximité, 5c d'en
„ exclurre la perfonne qui fe trouvera (comme dit eft) proche en degré} Se
„ je promets, 6c m'oblige en foi 6c parole Roïale, qu'en tout ce qui dépen-
dra de moi , 6c de mes dits Enfants 5c Defcendants , l'on procurera tout
6c en tout tems , que l'obfervation , 6c accomplifTement dudit Article, 5c
de ce mien Acte, que je fais pour fon approbation, ôc confirmation, foit
inviolable , fuis permettre, ni confentir que l'on aille , ou agifiê au con-
traire, directement, ou indirectement, en tout, ou en partie} 6c je de fi-
fle, Se cède tous, 5c quelconques remèdes feeus , ou ignorez , ordinaires,
ou extraordinaires, 6c qui nous pourraient appartenir par Droit commun,
ou Privilège fpecial , à moi ou à mefdits Entants 5c Delcendans pour récla-
mer, dire, 8c alléguer contre ce que deffus, 5c je renonce à tous, 5c fpe-
cialement à celui de la Reftitution in integrum , fondée Car l'ignorance , ou
inadvertenec de ma Minorité, ou fur la Lefion évidente, énorme 5c tiès-
enorme que l'on pourroit confiderer , être intervenue dans laDefifhnce,8e
Renonciation du Droit de pouvoir fucceder en aucun tems à tant, 6c à de
fi grands Roïaume;, Etats , 6c Seigneuries, 6c je veux que nul defdits re-
mèdes, ni aucuns autres de quelconque nom , caractère , importance, 6c
qualité qu'ils foient,nous fervent ou nous puiffent fervir judiciellement, ou
extrajudiciellement, 6c que fi nous les intentions, ou tafehions de les dé-
duire en voïe de juhuce 5c conteftatiohs l'on nous defnfe,c8çi ferme toute
forte ù'audiance, 6c fi de fait ou fous quelconque couleur mal prétendue ,
deffiuit de la Juftice (parce que nous n'en avons aucune pour fucceder aux
„ dits
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ET RESOLUTIONS D*E T A T. f7<>
„ dits Roïaumes) nous les vouluffions occuper par force d'armes, faifant, 1701.
„ ou mouvant Guerre ofFenfive, que dès maintenant comme pour lors, l'on — —
„ la tienne, juge, 6c déclare pour illicite, injufte, 6c mal attentée, & pour
„ violence, invafion, Se ufurpation tiranique 6c faite contre raifon, Se con-
„ feience ; 6c qu'au contraire on juge , 6c qualifie pour jufte , licite , 6c
„ permife celle qui fe viendrait à faire , ou mouvoir par celui qui y de-
„ vroit fucceder , à mon Exclufion , £c de mes dits Enfants 6c Defcen-
„ dans, lequel les fujets 6c habitans devront recevoir 6c obeïr , lui fiuïe,
„ 6c prêter ferment , 6c l'hommage de fidélité , 6c le fervir comme à leur
„ Roi 6c Seigneur légitime 5 6c j'affirme, & certifie, que pour oétroïêr
„ cet Acte, je n'ai été induite, attirée, ni perfuadée par le refpect , 6c ve-
„ nei ation que je dois , 6c ai pour le Roi Monfêigneur , comme à Prin-
„ ce fi puiflant, 6c comme à Père qui m'aime tant, 6c que j'aime, 6c qui me
„ tient, 6c m'a tenue fous fa PuifTance Paternelle, parce que véritablement
„ en tout ce qui fe pafTe, 6c s'eft pafie au regard de la conclufion, 6c effet
„ de ce Mariage, touchant ledit Accord, 6c Article de mon Exclufion, 6c
„ de celle de mes Defcendans, j'ai eu toute la liberté que j'ai pu fouhaiter
v pour dire, 6c déclarer ma volonté, fans que de fa part, ou d'aucune autre
„. perfonne l'on m'ait fait aucune peur ni menace, pour m'y induire, ou at-
„ tirer à faire aucune chofe contre elle, 6c que pour plus grande validité, 6c
„ affûrance de ce qui eft dit, 6c promis de ma part , je jure folemnellement
„ par les Evangiles contenus en ce Miffel (fur lequel je mets ma main droi-
„ te) que je le garderai , maintiendrai , 6c accomplirai en tout , 6c par
„ tout , 6c que je ne demandrai point de difpenfe de ce Serment à nôtre très-
„ Saint Père, ni au Saint Siège Apoftolique, ni à fon Légat, ou à aucune
„ dignité qui auroit faculté de me la pouvoir octroïer , 6c que fi l'on me l'oc-
,,. troïeroit à mon inftance, ou de quelconque Univerfité, ou perfonne p.ir-
„ ticuliere ou motu proprio , encore que ce lèroit feulement afin de pouvoir
„ entrer en jugement fans toucher à la fubftance defdts remèdes, 6c de la for-
„ ce de cet Acte, 6c du Traité, que j'approuve par iceiui, je ne me prevau-
„ drai point, ni m'en fer virai ; au contraire, en cas que l'on me l'octroïe-
„ roit, je fais un autre fèmblable ferment, afin qu'il y en ait, 6c demeure
„ toujours un fur toutes les difpenfes qui me feront octroïées, 6c fous le mê-
„ me je dis, 6c promets que je ne fais , ni ferai aucune protelf ation, ou rccla-
„ mation en public, ou en fecret, qui puifle empêcher, ou diminuer la force
„ du contenu en cet Acte, & que fi je la fais (encore qu'elle foit fous fer-
,, ment,) qu'elle ne fera d'aucune valeur, 6c ne puiffe avoir aucune force, ni
„ effet, 6c je fupplie fa Sainteté, que puifque ce Mariage, 6c fon Traité, a été
„ conclu, 6c accordé avec fa Sainte 6c Apoftolique Approbation, 6c fe doit
„ effectuer, 6c célébrer avec fa bénédiction, elle foit fervie d'accroitre lafor-
„ ce du lien , 6c Religion de ce ferment par l'autorité de fa confirmation
„ Apoftolique: 6c ie promets, 6c m'oblige qu'en conformité, 6c accomplif-
„ fement de l'Article 6. fufmentionné, auffi-tôt que j'arriverai au lieu, où le
„ Roi Très-Chrétien me doit recevoir, je ferai 6c ferai faire avec fon inter-
„ vention, 6c autorité, 6c conjointement avec Sa Majefté Très-Cbrêdenne,
„ 6c avec toutes claufes , fermons , 6c conditions neccflltircs, 6c convena-
„ blcs,
580 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
170 1. „ blés, un autre femblable Acte de Confirmation, 8c Ratification de celui
1 „ qui a étte fait, & dépêché dans cette Cité de Fontarabie, où fe trouve
,, à prefent le Roi Catholique Monfeigneur, avec fa Cour, 6c Palais , le fè-
„ cond jour de Juin de cette Année, mille fix cent 6c foixante, en preiénee
„ du Roi nôtre Maître. Et pour plus grande folemnité , autorité , 6c vali-
„ dite de cet Acte, Sa Majelté Catholique a dit pour l'accompliflement des
„ Articles f . 6c 6. y inférez, que pour ce qui regarde la caufe publique 6c le
„ bien commun de fes Roïaumes, Sujets, 6c Vaflaux d'iceux , elle confir-
„ moit, 6c a confirmé cet Aère félon 6c en la forme que l'a fait, 6c fait de-
„ pêcher la Serenifîime Infante Madame Ma r ie-Therese, Reine pro-
„ mile, 6c future de France, fa très-chere 6c très-aimée Fille, 6c que de fon
„ propre mouvement, certaine feience, pleine, 6c abfoluë Puiflance 6c com-
,, me Roi 6c Seigneur, qui ne reconnoit point de fuperieur dans le tempo-
,, rel, elle fuppleoit, 6c vouloit que l'on tint pour fupléez par faRoïalle au-
„ torité quelconques défauts, ou omifilon de fait, ou de droit , de fubitan-
„ ce, ou de qualité, de itile, ou de Coutume, qu'il y pourroit avoir en
„ cet Acte, 6c qu'elle confirmoit, 6c approuvoit fpecialement 6c particulie-
„ rement ledit Article f . 6c ce qui eif. refolu , 6c arrêté par icelui entre Sa
„ Majelté Catholique, 6c Très- Chrétienne de France , Se qu'elle vouloit,
„ 6c commandoit qu'il auroit force 6c vigueur de Loi , 6c de Sanction prag-
„ matique, 6c que comme tel il feroit reçu, 6c fe garderait, 6c obferveroit
„ 6c exécuterait dans fes Roïaumes , Etats , 6c Seigneuries , fans prendre
„ garde aux Loix, Ordonnances, Ufages, 6c Coutumes qu'il y auroit , ou
„ pourroit avoir au contraire, auxquelles elle derogeoit , 6c veut que pour
cette fois elles foient tenues pour abrogées, Se derogées, encore qu'elles fe-
5»
„ raient telles, 8c de telle qualité, que pour leur dérogation feroit requife, 6c
„ neceflaire, une autre plus expreffe , 6c fpeciale mention, 6c commanda que
,, l'on le fcelleroit avec fon Seel Roïal, 6c qu'il feroit enregiitré,8c publié en
„ fon Confeil de Chambre 6c dans les autres auxquels il appartiendra} de tout
„ quoi ont été témoins à ce appeliez , 6c requis , Don Louis Mendes de
„ Haro, Comte -Duc d'Olivares : Don Ramiro Nunnez de Guzman, Duc
de Médina de las Torres : Don Gafpar de Haro , Marquis de Eliche :
Don Juan Domingo de Guzman, Comte de Montcrey: Don Diego d'Ar-
55
„ ragon, Duc 'de Terranova: Don Gillen Ramofi de Moncada, Marquis de
„ Ay tona : Don Pedro Portocarrero , Comte de Medellin : Don Pedro Co-
Ion de Portugal , Duc de Veraquas : Don Antonio de Peralta Hurtado de
Mendoza, Marquis de Monde jar: Don Alonço Pères de Vivero, Comte
, de Fucnfaldagne , du Confeil d'Etat : Don Juan de Caravajal 6c Sandi du
„ Confeil, 6c Chambre: Don Diego de Teada, Evêque de Pampkine, Se
„ plufieurs autres Seigneurs , 6c Cavaliers , 6c Domeftiques de Sa iMajetté
„ qui fe trouvèrent prefens.
Signé,
Je le Roi, Je Marie-Therese.
7'
f
ET RESOLUTIONS D'E T A T. r8i
}E Don Fernand de Fonfeca Ruyz de Contreras , Marquis de la Lapille , Che-
valier de V Ordre de St. Jaques , des Confeils de Guerre , Indes (3 Chambre
d'icelles , Secrétaire d'Etat (3 de la Dépêche Univerfelle , (3 Notaire dans fes
Roïaumes 13 Seigneuries qui ai été prefent au Serment , Oclroi, (3 tout le furplus
ci-dejfus contenu , en fais foi, (3 que les Articles ci -dejfus écrits, ont été copiez
fidèlement, & collationez avec l'Original qui efi en mon pouvoir. En témoignage
de la vérité , je l'aifigné & fouferit de mon Nom.
Don Fernand de Fonsëca Ruyz de Contreras.'
Cet Aéte a encore été fortifié par la Paix des Pirenées , dont il étoit non v ï '•
feulement la partie principale & plus digne, félon l'Article 33., mais auffi le E"^*
plus grand Se le plus précieux gage de la fureté de fa durée. Auffi le Con- pirenccs.
tract, de Mariage 8c fon obfervation y ont été exprimez , comme s'ils y é-
toient mot à mot. De forte que tout ce qui a été mis en ufage par les deux
Rois pour apuïer 8c fortifier la Paix , doit être cenfé avoir donné une nou-
velle force' 8c vigueur au Contract de Mariage , comme auffi l'abdication ,
ceffion 8c tranfport de tous les Droits, contenus dans le Contraét de Maria-
ge 8c dans la Renonciation , doivent être entendues pour faites 8c répétées
dans le Traité de Paix j 8c par confequent de tout ce qui a été rapporté ci-
deffiis touchant la force de la Paix, fondée fur le Droit des Gens , doit pa-
reillement avoir lieu en cette occafion. On trouve à propos de rapporter ici
tout ledit Article 33. avec la Conclufion du Traité.
ARTICLE XXXIII.
~pff afin que cette Paix ci? Union, Confédération , (3 bonne Correfpondance , foit ,
comme on le deftre, d'autant plus ferme, durable ,& ind i(fo lubie ; lefdits deux
Principaux Mini/Ires Cardinal-Duc, 13 Marquis-Comte- Duc , en vertu du Pou-
voir fpecial qu'ils ont eu à cet effet des deux Seigneurs Rois, ont arrêté 13 accordé,
en leur nom, le Mariage du Roi Très-Chrêtien, avec la SereniJJïme Infante, Da-
me Marie-Therese, fille ainée du Roi Catholique: £5? ce même jour , date des
Prefentes , ont fait & figné un Traité particulier , auquel on fc remet touchant
les conditions réciproques du dit Mariage , 13 le tems de fa célébration : Lequel
Traité à part ci? Capitulation de Mariage , font de la même force 13 vigueur que
le prefent Traité de la Paix, comme en étant la partie principale (3 la plus digne,
auffi bien que le plus grand & le plus précieux gage de la fureté de fa durée.
CONCLUSION
Du Traité de Paix des Pirenées.
JZT pour plus grande fur été de ce Traité de Paix £3 de tous les Points 13 Arti-
cles y contenus , fera ledit Traité vérifié , publié , &? enregifirê en la Cour du
Parlement de Paris, 13 en tous autres Parlemens du Roïaume de France 13 Cham-
Tom. I. Bbbb bre
fSi MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
1701. bre des Comptes du dit Paris: Comme femblablement fera ledit Traité vérifié ', pu-
• blié , fj? enregifîré tant au Grand Confiai) (3 autres Confieils & Chambre des
Comptes dudit Seigneur Roi Catholique , aux Pais- Bas qu'aux autres Confieils des
Couronnes de Cafiitle & d'Arragon : le tout fiuivant & en la fiorme contenue au
Traité de Vervins de l'an iyoS. , dont feront baillées les Expéditions de part (3
d'autre , dans trois Mois après la publication du prefient Traité.
Lefiquels Points 13 articles ci-defifius énoncez , enfiemble tout le contenu en chacun
d'iceux , ont été traitez , accordez , pafijez , 13 flipulez entre lerfufdits Plénipoten-
tiaires defdits Seigneurs Rois Tres-Chrêtien & Catholique, au nom de Leurs Ma-
jeftez : lefiquels Plénipotentiaires , en vertu de leurs Pouvoirs , dont les Copies
font infier ée s au bas du prefient Traité , ont promis fj? promettent , fibâs l'obligation
de tous & chacun les Biens & Etais prefiens 13 à venir des Rois leurs Maîtres ,
qu'ils fieront par Leurs Majeftez inviolablement obfiervez rj? accomplis , (3 de les
leur faire ratifier purement (3 Jimplement , fans y rien ajouter, diminuer , ni re-
trancher, & 'd'en bailler & délivrer réciproquement l'un à l'autre Lettres au-
thentiques (3 fiéelées , oh tout le prefient Traité fera inféré de mot à autre , & ce
dans trente jours, du jour (3 date de ces pre fentes, & plutôt fi faire fie peut. En
outre ont promis (3 promettent le/dits Plénipotentiaires , auxdits Noms que le faites
Lettres de Ratification étant échangées 13 fournies ledit Seigneur Roi Très-Chré-
tien, le plutôt que faire fie pourra , 13 en prefience de telle perfionne ou perfionnes,
qu'il plaira audit Seigneur Roi Catholique députer , jurera folemnellement fiur les
Croix, Saints Evangiles, Canon de ta Mefife , (3 fur fion honneur, d'obfierver &
accomplir pleinement , réellement ,i3 de bonne foi tout le contenu aux Articles dit
prefent Traité. Et le femblabk fiera fiait aufijî, le plutôt qu'il fiera pofijible par
ledit Seigneur Roi Catholique , en prefience de telle perfionne ou perfionne s qu'il plai-
ra audit Seigneur Roi Très-Chrétien députer. En témoin defiquelles chofes lefidits
Plénipotentiaires ont fiouficrit le prefient Traité de leurs Noms , (3 fait apofier le ca-
chet de leurs Armes. Dans l'îfile appellée des Faifians le 7. Novembre i6fp.
Signé,
Cardinal Mazarin &: Don Lou'i's Mendez de Haro.
Il auroit véritablement mffi , pour confirmer aufïï la Renonciation de Ma-
rie-Therese parle Confentement des Etats d'Efpagne, de ce que la Paix
VIII. des Pirenées & le Contract de Mariage furent faits & publiez en prefence de
I'arpla- tant ^e Qranc]s & d'autres perfonnes , & qu'ils furent enregiftrez dans les
Âi'pro- Actes des Confeils. Cependant on le lèrvit d'une folemnité plus particulière
bâtions Se plus expreffe dans les Etats du Roïaume, afTemblez en 1662,. , 6c dans la
dp Etats fuite pOU1- \c fa[rc p\us autentiquement. Et comme on en a parlé ci-deffus
diifp. en traitant de la Renonciation d'ANNE , pour éviter la longueur, nous le
parferons fous filence , nous contentant d'y renvoier le Lecteur.
IX. H eft tems à prefent de traiter du Confentement & de la Ratification de la
Etparle perfonne même du Roi Très- Chrétien, qui ne manquèrent pas , quoi qu'El-
Confen- ]cs rïe fufîènt point du tout neceffaires pour donner d.e la force aux Actes de
teraent i'jnf;iatc Marie- Thérèse qui n'étoit pas encore liée avec ce Roi. Car
Elle
ET RESOLUTIONS D'E T A T. fSj
Elle a pu toute feule avant de contracter le Mariage par le droit commun de 1 701 .
nature 6c des gens, s'obliger de faire en toute liberté, ce qui après le Ma- -
riage pouvoit tendre au bien de la Maifon Paternelle , & à la fureté & à du Roi
l'honneur de la Patrie j d'autant plus qu'avant Elle d'autres Infantes d'Efpa- Très-
gne, qui dévoient être mariées dans la Famille Françoife, avoient fait la mê- C)irê"
me chofe, par l'approbation & applaudifTement des Etats de l'un 6c de l'au-
tre Roïaumc , 6c de tous les Peuples , 6c par la congratulation même des
Princes Etrangers > & qu'Elle favoit d'ailleurs, que la même chofe avoit été
fouhaité ci-devant par fes Ancêtres, 6c qu'elle étoit pratiquée communément
dans les Païs Etrangers. Or, pour ce qui regarde le Contentement du Roi
Très-Chrêtien, nous ne pouvons aviez nous étonner, de l'Imprudence, ou
pour mieux parler de l'Impudence des Ecrivains François, qui ont ofé mettre
en avant que le Cardinal Mazarin avoit confenti à la Renonciation 6c à l'Ex-
clufion fans en avoir d'ordre ; puifque l'ordre général qu'il avoit , quoique
illimité 6c avec une caufe de fupplement ne pouvoit fuffire pour une Affaire
de fi grande confequençe qui requerrait un ordre particulier s'il n'y avoit d'au-
tres expreffions. D'ailleurs , le même Contraft de Mariage montre que, tout
ce qui y eft contenu a été fait en vertu des Pouvoirs 6c Ordres de l'un 6c de
l'autre Plénipotentiaire ; 6c le Roi Très-Chrêtien a inféré dans fa folemnelle
Ratification le même Contraér, 6c même mot à mot. Nous parlons à pre-
fent de la Ratification particulière du Contraét de Mariage , dont le com-
mencement 6c la fin font en ces termes.
LO u ï s , par la Grâce de Dieu , Roi de France ci? de Navarre , à tous ceux
qui ces pre fentes Lettres verront : falut.
Comme ainfi [oit que le 'traité de Mariage d'entre nous fj? la SereniJJîme Infan-
te d'Efpagne, Dame Marie-Therese Fille aînée de nôtre très-cher &? très-
aimé Frère & Oncle le Roi des Efpagnes Don Philippe IV. de ce nom, ail été
conclu, arrêté , & fignê, par nôtre très-cher & très-aimé Coufin le Cardinal Ma-
zarin de nôtre part, & le Seigneur Don Louis Mendez de Haro de la part dudit
Roi d 'Efpagne , le feptiéme jour de Novembre dans rifle dite des Faifàns, dans
la Rivière de Bidajfoa , aux confins des deux Roiaumes , de France £5? d'Efpagne,
en vertu de leurs Pouvoirs ci? Commiffions : par le dernier article duquel Traité
nôtre dit Coufin le Cardinal Mazarin, aiant promis & flipulé en nôtre Nom, de
faire fournir nos Lettres de Ratification, en la forme & manière accoutumée, ci?
de la faire délivrer en trente jours, avec les dérogatoires à quelconques Loix,
Coutumes , ci? Difpofitions , qui feroient au contaire dudit Traité, duquel la te-
neur enfuit.
„ Au nom de la très-Sainte Trinité &c. 6cc. „ Tout le Contraft de Ma-
nage eft. rapporté mot à mot ; 6c , après avoir auffi rapporté les Pleins-
Pouvoirs des Rois Très-Chrêtien 6c Catholique, le Roi Louïs XIV.
continué de la forte.
2\[Ous de l'avis de la Reine , nôtre tres-honorce Dame ci? Mère, de nôtre très-
cher £5? très-aimé Frère unique le Duc d'Anjou , plufmirs Princes , Ducs,
Bbbb 2 Pairs
fS4 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
1701. Pair s, (3 Officiers de nôtre Couronne (3 autres Grands (3 notables Perfonnages de
*■ ■ nôtre Confeil : après nous être fait lire de mot à autre ledit Traité, avons icelui^
en tous (3 chacun [es Points 13 'Articles agréé ,aprouvé,& ratifié , agréons , aprou-
vons , & ratifions par ces pre fentes /ignées de nôtre main : promettant en bonne foi
& parole de Roi, de l'accomplir , faire garder ,& entretenir mviolablement , fans
jamais aller 13 venir au contraire , directement ni indirectement en quelque forts
13 manière que ce foit , dérogeant à cette fin comme nous dérogeons à toutes Loix,
Coutumes, i3 Difpofitions au contraire : car tel efl nôtre plaifir. En témoin de quoi
nous avons fait mettre nôtre fécl à ce [dite s Prefentes. Donné à Thouloufe le vingt-
quatrième jour de Novembre , Van de Grâce mil fix cent cinquante neuf , (3 de
nôtre Régne le dix-feptiéme.
. Signé,
louis;.
Et plus bas y
Par le Roi,
De L o m e n i e.
Ce ContraéV. de Mariage fut ratifié de la même manière dans tout
fes Points Se Articles par le' Roi Catholique , pour lui & fes Succef-
leurs , fes Roïaumes & Etats , dérogeant à toutes Loix , Coutu-
mes, Se Difpofitions au contraire, à Madrid le 10. Décembre io"fp.
Et par la (~\^ ne ^xmoit même difeonvenir , que ce Contraér. n'ait encore été ratifié
Ratifka- >— ' une féconde fois par le Roi Très-Chrétien, & par une autre raifon fo-
tion de hde, puifque nous avons dit ci-devant que le Contract aïant été rapporté
laPa|x dans le Traité de Paix des Pirenées, il en faifoit la principale partie, & ainfi
en ratifiant ladite Paix, on le ratifioit en même tems Se de la même manière,
Cette Ratification de la Paix fut faite en ces termes.
des Pire-
nées.
LO uï s , par la Grâce de Dieu , Roi de France & de Navarre : A tous ceux
qui ces prefentes Lettres verront : falut. Comme en vertu des Pouvoirs re-
fpctlivement donnez par Nous, & 'très-Haut, Très- Excellent, (3 Très-Puifant
Prince le Roi Catholique des Efpagnes, nôtre très- cher {3 très -aimé Frère (3 On-
de, à nôtre très- cher & tres-aimé Coufin le Cardinal Mazarin, & au Seigneur
Don Louis Mendez de Haro Gufman : ils aient dans ï'Ifle dite des Faifans , en la
Rivière de Bidaffoa , aux Confins des deux Roiaumes, du côté des Pirenées, le
fephéme du prefent mois de Novembre , conclu, arrêté, (3 figné le Traité de Paix
(3 Réconciliation , duquel la teneur enfuit.
La
1701.
ET RESOLUTIONS D'E T A T. j-8f
La Paix des Pirenées fuit tout du long.
XfOus aïant le Traité fufdit agréable , en tous (3 chacun les Points ci? Articles,
qui y font contenus ci? déclarez: avons iceux, tant ■pour nous que pour nos Hé-
ritiers, Succefeurs, Roiaumes, Pais, Terres , Seigneuries , ci? Sujets, accepté •,
aprouvé, ratifié, & confirmé , acceptons, aprouvons , ratifions, ci? confirmons, ci?
& /o/tf promettons en foi ci? parole de Roi, & fous l'obligation ci? hypoteque de
tous ci? chacuns nos biens prefens ci? à -venir , garder, obferver, 13 entretenir in-
violablement , fans jamais aller ou venir au contraire, directement ou indirecte-
ment , en quelque manière que ce foit : En témoin de quoi nous avons '/igné ces pré-
fentes de nôtre main, 13 à i celle s fait mettre (3 apofer nôtre féel. Donné à Thon-
loufe le vingt- quatrième Novembre Van de Grâce milfix cent cinquante-neuf 13 de
nôtre Règne le dix-fept.
Signé,
* LOUIS.
Et plus bas,
Par le Roi,
De Lomenie.
Et féellé du Grand Sceau de Cire jaune.
A ces choies, faites avant la confommation du Mariage, furent ajoutez les Et par h
Sermens de la Paix, qui furent enjoints à l'un 8c à l'autre Roi, & qui furent Confir-
prêtez auffi-bien par le Roi Très-Chrêtien que par le Roi Catholique, avec ma^on_
toutes les formalitez fi folemnelles qu'on ne pouvoit en trouver ni penfer de nient,
plus grandes entre des Rois Chrétiens, & même entre des hommes, lefquel-
les néanmoins il fêroit fuperflu de rapporter ici , puis qu'il y a déjà long tems
qu'elles font connues , 8c qu'elles ont été par le palTé en ufage en pareil-
les occafions.
On étoit de plus convenu par les Articles lufdits du Contract de Mariage, S.eTli
qu'au tems des Epoufailles , ils feraient de nouveau ratifiez , 8c confirmez, quefuffi-
par Serment, tant par le Roi Très-Chrêtien, que par l'Infante M a r i e- fant pour
Thérèse, 8c qu'ils feraient enregiftrez dans les Actes du Parlement de favaidi»
Paris. Nous ne defavoiions pas , mais plutôt nous nous plaignons avec le tc *^u01r
Roi Philippe IV. (qui étoit prefque à l'Article de la mort, 8c qui ne fon- omis de
geoit plus qu'aux chofes éternelles, ce que nous recommandons pour l'éclair- réitérer
eiflement de la fuite à la mémoire des Lecteurs ou des Auditeurs , ) que le ,e ',out
Roi Très-Chrêtien , ni fon Epoufe , n'ont rien fait de tout ce qu'ils avoient M^aee
promis par deux ou trois fois réitérées. Cependant nous foûtenons en même
tems , que cela n'a point diminué la vigueur 8c la force du Contraél de la Re-
nonciation, 8c de l'Exclufion, non feulement parce que perfonne n'eft aqui-
té d'une obligation par fa propre Négligence, ou par fa Perfidie y mais auilî
Bbbb 5 parce.
f$6 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
1 701 . parce que dans le premier Contrat ratifié, on avoit exprciTement énoncé, qu'u-
1 ne telle omiflîon, fi elle arrivoit, ne prejudicieroit en aucune manière aux
Conventions & aux Actes* 8c que nonobstant cette omiflîon, le tout refte-
roit en fa vigueur & force, 8c qu'à cette fin on devoit tenir le tout pour ac-
compli par li publication même de la Paix. Mais, afin que ces chofes fafiènt
plus d'impreffion dans l'efprit des gens, il ne fera pas hors de propos de rap-
porter les paroles mêmes du Roi Philippe, qu'il prononça non pas avec
la langue d'un demi-mort, mais d'un efprit exempt de toute diffimulation
8c hipocrifie, 8c déjà tout dilpofé pour aller au Ciel, en ces termes.
(l'Ji promis par une autre CAaufe de ladite Capitulation à r Infante ma Fille, cinq
J cent mille Ecus d'or fol pour dot , y compris fa Légitime paternelle & maternel-
le, & tout autre Droit; (3 cela fut fait fous Condition que ladite Renonciation
/croit aprowvée £5? ratifiée par Serment £5? avec toutes les Claufes neceffaires par
Elle, cnfemble avec le Roi Très-Chrétien d'abord après la célébration de fon Ma-
riage, & qu 'Elle ferait acceptée par le Parlement de Paris en la forme (3 maniè-
re accoutumée , 13 qu'on en envoieroit des Ables à moi ou à mon Succcjfeur ; ce qui
cependant jufques ici n'a pas été accompli par le Roi Très-Chrétien ij par ma Fil-
le , par ouf ai été & fuis dégagé de l'Obligation de paier le dot que j'avois promis.
Néanmoins , par ce que fcfpcre que le Roi Très-Chrétien , & ma Fille, s'aquite-
ront de cette Obligation , ainfi qu'ils y font tenus en juftice & en confidence , puis
qu'il eft hors de doute que je n'aurois jamais confenti audit Mariage , que fions les~
dites Conditions; j'ordonne (3 veux, que quoique le Roi Très-Chrétien & ma Fil-
le n'aient fat is fait à leur devoir, le dot que j'ai promis fioit paie , toutes 13 cha-
cunes des Conditions exprimées dans la Capitulation refilant , ainji qu elles doivent
refter, fermes 13 valables, ainfii qu'il eft expédient pour une plus grande gloire de
nôtre Religion Catholique, & pour la Paix & la Tranquillité entre l'une (3 l'au-
tre Couronne.
ce que nous avons jufques ici rapporté pour prouver
sang de France à la Succeflîon Univerfelle d'Efpagne,
Le Droit Or, regardant tout ce
ffantes 1,Excluficm de tout le San£
&àleur' Se qui eft déjà trop étendu, nous nous empêcherions volontiers d'en parler
Poftéiïté d'avantage, n'étoit qu'il rcite encore des chofes qui contiennent un Abrégé
Françoi- Jes Statuts précédons, 2>c qui montrent en toute évidence 8c en paroles prè-
le , a cj(-cs je i}rojt jncontellable de la Maifon d'Autriche. La première chofe eft
télé1/"" ^ée de 'a Convention de la dot faite entre l'Empereur Ferdinand II. 8c
lui des le Roi Philippe III., pour Ferdinand III. pour lors Roi d'Hongrie 8c
Sœurs, de Bohême 8c l'Infante Marie, qui ont été les Père 8c Mère de l'Empc-
&Prr reur Leopold en 162.8. en ces termes.
corne-
toute la TOT parce que la Serenifiîme Reine de France, Dame Anne Infante d'Efpagne,
Poitcritc *** en 'vertu du Contrat! de Mariage £5? de la Renonciation faite par confiente-
^ '.? ment {3 permiffion du Serenififime 13 "Tris-Chrétien Prince Louis XIII., Roi de
d'Auu-1- France , fionMari, cfil £ff refle exclu fe en forte de tout Droit de Succefifwn que tous
che qui fies Enfuis qui viendront d Elle , tant maies , que femelles , (3 tous fies Deficen-
eft Ye- dans tant premier , que deuxième (3 troifiiéme né, même à l'infini , en quelque de-
%ré
ET RESOLUTIONS D'E T A T. f87
gré qu'ils ' [oient à tout jamais , ne -peuvent ni doivent , fous quelque titre ou pre- 1701.
texte que ce foït , fucceder dans aucun Roiaume , Etat, Province, Domaine, ou
Lieu du SereniJJime Roi Catholique, & fer Héritiers (3 Succeffeurs legitt.ms,tar,t nuë
dans les Roiaumes d'Efpagne , que dehors d'icelle dans les autres Provinces, (3 d-'Elles.
Roiaumes que le même Sereniffime Roi Catholique (3 /es Succeffeurs poffedent , ou Selon le
poffederont ou leur apar tiendront ci -après ; c'efi pourquoi la SereniJ/îme Infante 4?^™^
Dame Marie , fe referve fon Droit naturel, enfemble avec celui qu'Elle a ac- riagede
quis par ladite Renonciation faite par la Reine de France fa Sœur , fous l'aproba- Ferdi-
tion (3 confirmation qu'en a fait le même Sereniffime Roi Catholique pour lui (3 m^nd .
tousfes Héritiers (3 Succeffeurs , ce qui doit tenir lieu (3 avoir force (3 vigueur i-xnVante
d'une Loix fiable, inconte fiable , (3 inviolable ; excepté néanmoins le Droit qui lui Marie,
convient, (3 qui e fi refervé dans ledit Héritage (3 Succejjion, dans les deux cas donteit
raportez dans ledit Contrat! de Mariage fait entre le J dit s Sereniffime s Roi & Rei- ï~nu
ne de France j affaveir le premier , fi ladite Sereniffime Reine de France fur vécut au reur pe~
Roi Très -Chrétien fon Mari, (3 qu'Elle étant veuve fans avoir aucun Enfant , Léo-
retournât en Efpagne; (3 l'autre fi pour le maintien du bien public (3 pour d'au- pold,
très jufies caufes ou confiderations, Elle vint à fe remarier par la volonté (3 coa-
fentement du Sereniffime Roi Catholique , fon Frère ou de fies Succeffeurs.
Toutes & chacune defquelles chojes ont été traitées (3 arrêtées entre les fuf-
nommez Sereniffimes (3 très-Puiffans Princes (3 Seigneurs , le Seigneur Fer-
dinand III. Roi d'Hongrie (3 de Bohême , & de la Sereremffime Dame
Marie Infante d'Efpagne, leurs refpeUifs Fils (3 Sœur, en vertu des Pleins
Pouvoirs ci-deffus raportez , avec promeffe réciproque (3 flipulation folemnelle ,
en parole d'Empereur (3 de Roi de tenir pour établi 13 ratifié tout le conte"
nu dans le/dits articles , (3 de faire qu'ils feront pareillement aprouvez (3
ratifiez par les Sereniffimes Roi Ferdinand , (3 l'Infante Dame Marie,
afin qu'ils aient un plein (3 entier effet. En témoin de quoi ils ont figné les
Prefentes de leur propre main, 13 y ont fait apofer leurs Seaux, en prefence
de Don Ramire Philippe de Guzman, aine de la maifon des Guzman, Duc
de Médina de las Torres , Marquis de Toralte (3c. Grand Echanfon du Roi
Catholique d'Efpagne , Grand Chancelier des Indes , Capitaine des cent No-
bles (3c. , Treforier General du Roi (3 du Roiaume d'Aragon > de Don Au-
guftin Msffie , Confeiller d'Etat de Sa Majefié Catholique (3c. (3c. Don
Juan de Mendoza (3 Lima (3c. (3c. Gentilhomme de la^Chambre du Roi
Catholique , Confeiller d'Etat , (3 premier Prefident du Confeil Souverain
d'Aragon (3c. (3c. Don Philippe de Guzman Marquis de Leganez , Gentil-
homme de la Chambre de Sa Majefié , Confeiller d'Etat , Capitaine General de
la Cavalerie légère de Flandres (3 de l'Artillerie d'Efpagne : (3 Melchior de
Molina , Confeiller de la Chambre (3 d'Etat du Roiaume de Cafiille (3c. (3c
Donné à Madrid dans le Palais Roial le Dimanche 3. de Septembre , l'an
de Grâce mil fix cent (3 vingt- huit.
Une autre Inftru&ion de celles qui appartiennent à nôtre Affaire cfr. la partie
du Teftament fait par Philippe III., qui s'y accorde tout-à-fait du $0.
Mars 162.1., & qui eft d'autant plus remarquable, parce- qu'elle exprime clai-
rement qu'après la Renonciation ou Abdication d'ANNE mariée auRoiTrès-
Chrê-
f88 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
1701. Chrétien, & laquelle félon fa naiflîince étoic l'ainée, Marie fa Sœur mariée
. , . à Ferdinand III. doit être cenfée l'ainée , ou comme fi Elle fut reftée
feule. Ce qui eft traduit mot à mot de l'Efpagnol ainfi.
T7T puis qu'il a plu à Dieu de me donner deux Filles , dont l'ainée T Infante
Dame Anne , par des jujles Confiderations du bien public de ces Roiau-
mes & de la Chrétienté, a été donnée en Mariage au Roi Très- Chrétien de
France , fous les Conventions (3 Conditions qu'on peut voir dans les articles
du Contrat! de Mariage 13 de la Renonciation. Ceft pourquoi, à l'infiance
de ces miens Roiaumes, une Loi fut faite fuivant lefidits Articles flipulez dans
le Contrat! de Mariage , auxquels ladite Serenifjîme Infante a confenti à Bur-
gos le 16. Otlobre i6if. Ainfi confirmant , confient 'ant , & approuvant les
chofies fiufdites , &f ladite Loi , je commande 13 déclare qu'on doit confierver
en tout &? par tout lefidites Conditions du Contrat! de Mariage , &f les au-
tres Ecrits à1 Aprobation faits à Burgos , auffi-bien que ladite Loi, car ainfi eft
convenable pour le bien de ces Roiaumes &? de U Chrétienté , aujfi pour plu-
fieurs autres raifions exprimées plus amplement dans le Contrat! de Mariage ,
que je ne raporte pas , les fuppofiant connues , (3 par d'autres raifions.
Far où par confequent V Infiante Dame Marie refieroit dans l'état prefient
comme ma Fille ainée (3 unique, laquelle je déclare (3 commande devoir fiucceder
en ces Roiaumes 13 Etats, Elle (3 toute fa Pofterité légitime après l'extintlion
àesperfonnes 13 deficendans defidits Princes Don Philippe , & des Infants Don
Charle t3 Don Ferdinand 13 de leurs deficendans.
La troifiéme Inftruc~Hon , qui peut tenir lieu de tout, & qui doit fuffi-
rc à nôtre intention , eft le Teftament du Roi Philippe IV. non feulement
pour l'autorité Se la Puiftance de celui qui l'a fait, fondées fur les Loix & les
Conventions} mais parce qu'il à été fait avec une Délibération plus grande,
plus meure , & plus pefée qu'aucun autre qui ait jamais été fait ; & qu'il ex-
plique très-clairement la penfée la plus intérieure Se la volonté la plus efficace
du Roi & Legiflateur en ces termes.
CY cependant , ce qu'à Dieu ne plaifie, le Prince mon Fils vient à mourir avant
ou après qu'il aur oit fiuccedé à ces Roiaumes , fans laiffer d'Enfans où autres defi-
cendans légitimes mâles où femelles ; j'inftitue pour mon Héritier Uniyerfiel dans
tous mes Roiaumes , Etats , (3 Seigneuries , le fécond Fils mâle que Dieu me don-
nerait par ce Mariage ou par un autre , 13 fies deficendans légitimes , (3' nez (3
procrées d'un légitime Mariage , mâles ^3. femelles fielon le même ordre d'ainefifie :
(3 à défaut d'iceltii ou d'iceux , j'apelle le troifiéme Fils mâle de ce Mariage ou
de quelque autre , (3 fes Enfant (3 Defcendans , mâles ou femelles , légitimes Z3
nez d'un légitime Mariage , afin qu'ils fiuccedent félon l'ordre d'ainefijè. Ce qui
doit être aujfi entendu des Ënfians mâles légitimes, (3 nez d'un Mariage légitime,
que Dieu m' aur oit donné , même après ma mort , fi je lai [fois la Reine enceinte ,
13 qu'an mâle fut né, afin qu'il fiuccede enfion lieu. & félon fon degré.
Si le Prince , ainfi qu'on vient de dire, vient à mourir, ce qu'à Dieu neplaife,
fans lai/fer d'Enfans ou Deficendans mâles ou- femelles, légitimes i3 venus d'un
Maria-
ET RESOLUTIONS D'E T A T. ;8p
Mariage légitime , eu fi Dieu m'aiant donné plufieurs En/ans mâles du Mariage
prefent ou de quelque autre , ils vinfj'cnt aujfi à mourir, fans laiffir d' 'En fans ou
Defcendans , félon ce qui a été dit , à leur défaut j'infitué pour mon Heritiéte
Univerfelle de tous niefdits Roiaumes , Etats , 13 Seigneuries Y Infante Donne
Marguerite ma Fille (3 de la Reine Dame Marie- Anne ma tres-chere &
trls-aimée Epoufe , (3 fes Fils & Filles 13 Defcendans mâles (3 femelles , légiti-
1-01.
me Mariage , que Dieu m'aurait donné, & même les pof -humes de ce prefent Ma-
riage, ou de quelque autre, (3 les Defcendans légitimes de chacune d'icelles , qui
fucceder oient dans le même ordre d'aine (je, préférant Vaine au cadet , 13 le mâle
à la femelle de la même ligne (3 degré.
Et venant à manquer me f dit s Enfans, mâles 13 femelles, de ce Mariage pre-
fent ou de quelque autre à l'avenir , que f appelle , je déclare que la Succeffion de
tous me [dit s Roiaumes , Etats , & Seigneuries doivent appartenir £5? appartiennent
aux Enfans & Defcendans légitimes mâles i3 femelles de P 'Impératrice Infante
Marie ma tres-chere £5? tres-aimée Sœur, qui ef déjà dcceJée, (3 en la même
manière que f ai déclaré dans Vlnfiitution de mes Fils 6? Filles. ■
Et à défaut des uns ci? des autres de fa Ligne, je déclare aujjî que h Succefjîon
de mejdits Roiaumes , Etats , ci? Seigneuries appartient à la Ligne de l'Infante Da-
me Catherine ma Tante, Duchefje de Savoye , & à fes Enfans {3 Def-
cendans légitimes, 13 venus par un légitime Mariage , tant mâles que femel-
les , préférant la ligne de l'aine aux autres , en la manière ai? on a dit ci-
deffus.
Dans tous les tems (3 âges pâjfez on s*eft fervi d'une particulière circon-
fpeBion en faifant les Mariages des Infantes d'Efpagne avec les Rois de France ,
à caufe des inconveniens qui rcfulteroient de la conjonction (3 de l'union de ces deux
Couronnes ; car, l'une & Vautre (3 chacune à part étant fi grandes qu' Elles ont
confervé leur grandeur avec tant de gloire de je s Rois Catholiques & Très -Chré-
tiens, étant unies leur élévation fe diminuerait 13 tomberait , & en rcfultcroit
à? autres grands inconveniens pour les Sujets 13 trajfaux & pour le bien public &
Vétat de Vun 13 Vautre Roiaume (3 de toute la Chrétienté. Ce que pour éviter ,
(3 pour faciliter les Mariaget entre les deux Couronnes, pour l'utilité des Vaffaux
réciproques {3 des Etats en général, on a empêché leur Union par une Convention
qui a force de Loi fable i3 ferme en faveur des Roiaumes [3 du bien public d'iceux;
(3 particulièrement dans le Contrat de Mariage , fait à cette Cour le il. d'Août
1611. entre le Roi Mon Seigneur (3 Père, Ï3 Louïs XIII. Roi Tres-Chrêtien
de France , à caufe du Mariage, que j ai contracté avec la Reine Dame Isabel-
le de Bourbon ma très -chère 13 aimée Epoufe & de celui que ledit Roi a contrac-
té avec la Reine Très-Chrétienne Dame Anne,w« très chéref3 aimée Sœur, il
fut convenu (3 établi , que les deux Couronnes ne fe joignirent ou puffent fe join-
dre, (3 l'a' à cet effet V Infante ma Sœur dût renoncer {3 renoncerait pour Elle {3
fes Defcendans de ce Mariage à tous 13 chacun des Droits qui lui apartiendroient
ou pourraient lui apartenir de fucceder à mes Roiaumes , en forte qu'en nul cas
Tom. 1. Ce ce penfê
f9o MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
1701. penfé ou ignoré Elle y fuccedroit , i3 que la Succeffion pafferoit à l'ordre qui fu't-
-■ vroit , puis que la dite Infante Dame Anne £5? tous Jes Dépendants mâles & fe-
melles a été déclarée exclufe de cette Succeffion , (3 de toute efperance de fucccder ,
Leurs Majeflez Catholique 3 Très-Chrétienne aiant aboli toutes Loix, Droits,
Coutumes , Difpofitions , 13 'Titres de/dites deux Couronnes , par le/quels on fuccede
ou on peut prétendre de fucceder auxdits Roiaumes, Etats, {3 Seigneuries, tant à
prefent qu'aux tems a venir , 13 aux cas de déférer la Succeffion , en tant qu'el-
les /croient par quelque rai/bn contraires ou d'empêchement à ladite Renonciation
13 Exclu/ton de ladite Infante Dame Anne, avec P addition d'une Déclaration,
que Leursdites Majeflez dévoient par Paprobation dudit Contrat! de Mariage , y
déroger (3 les avoir pour derogées. Et en exécution de ce Contrat! ladite Reine
Très-Chrétienne ma Sœur, avant les Epoufailles par paroles de prefent , fit une Re-
nonciation de la manière la plus folemnelle (3 par Serment en la Fille de Burgos , le
17. Oélobre 161 f. en prefence du Roi Monfcigneur (3 Père qui Vaprouva par
devant Antoine d' Arefigny fon Secrétaire 13 Notaire public de ces Roiaumes , 13
moiennant (et te dite Renonciation , le Mariage eut fon effet , (3 le Roi Monfei-
gneur (3 Père commanda qu'Elle fût gardée , (3 accomplie , 13 mife en exécution
par une Loi générale , qu'il fit 13 publia à V infiance 13 prière de ces Roiaumes le
3. de Juin de 161 p. (3 par la Claufe 38. de fon Tefiament , par laquelle il dé-
clara que ladite Reine ma Sœur , & fes Enfans Defcendans de ce Mariage, mâ-
les & femelles", étoient exclus de tous lefdits Roiaumes, Etats, i3 Seigneuries. Et
fumant cet exemple , auffi bien que d'autres , on a ajouté entre autres les deux
Chapitres y. (3 6. (qu'on a raporté ci-deflus) aux Traitez contrariez par moi
(3 par le Roi Très-Chrétien Louis XIV. mon très-cher Neveu par ma Sœur,
touchant la Paix (3 le Mariage , qui a été contrarié , entre l'Infante Dame
M arie-Therese ma très -chère (3 aimée Lille (3 le même Roi, moien-
nant la Grâce de Dieu (3 à fon plus grand honneur, (3 pour le lien général des
Couronnes, &? pour leur repos & leur tranquillité ; ainfi qtPH confie par ledit
Traité de Mariage , qui a été contraUé pour moi (3 à mon nom par Don
Louis Mendez de Haro , Comte-Duc d'Olivarez , mon Grand Ecuyer d'une
part, 13 de- f 'autre au nom du Roi Très-Chrétien par le Cardinal jule Ma-
zarin, en vertu de l'ordre donné le 7. de Novembre 1659. fou fer it par Pier-
re Coloma mon Confeiller de Guerre, (3 Secrétaire d'Etat, Notaire public de
ces Roiaumes. Et dans le Traité de Paix fait par les mêmes Plénipotentiai-
res le même jour par devant ledit Pierre Coloma , il a été mis un Chapitre fous
le nombre 33. de la teneur fuivante (on peut voir ce Chapitre 33. ci-defliis).
Et pour P accompli [Jèment de ces Traitez , ladite Infante Dame Marie-Therese
ma Fille a en effet fait 13 juré ladite Renonciation dans la Ville de Fonta-
rabie le z. de Juin \ 660. fous le témoignage du Skur Ferdinand de Fonfeca
Ruyz de Contreras mon Confeiller de Guerre , Secrétaire d'Etat & des Dépêches
Univerfelles, (3 Notaire public de ces Roiaumes. Et quoique j^ef père que P In-
fante via Fille 13 le Roi Très-Chrétien fon Mari accompliront (3 obfcrveront tout
ce qui a été raporté, & tout le contenu dans ledit Imité de Mariage , (3 dans la
Renonciation, puis que la ju (lice 13 la confeience le veut; néanmoins, puifque
la Paix {3 la tranquillité de la Chrétienté en dépend, afin que l'accompliffement
fit
ET RESOLUTIONS D'ETAT, r9t
[oit affàré par tous les mo'iens connus par les Loix, comme Père fcf Maure naturel 1701.
de tous mes Roiaumes , Etats , 13 Seigneuries , en vertu du Souverain Pouvoir ,
dont je me fers 13 que j'ai de difpofer (3 d'ordonner pour le bien de mes Vaf-
faux 13 de la Caufe commune , comme aujji de pourvoir à fa bonne admini-
f ration , (3 d'éviter les dommages , qui pourraient refulter de la conjonction des
deux Couronnes 3 des Roiaumes i3 Etats , à chacune d'icclle , de mon propre
mouvement, de certaine feience, & par un plein pouvoir Roïal abfolu, dont je veux
me fervir & me fers , étant pleinement infruit des exemples de mes Predecef-
fiurSf qui ont difpofé, changé , £g" renverfé Tordre de la Succeffon de mes Roiau~
mes 13 Etats par l' exclufion des Ainez & de leurs Defccndans; en vue (3 à caufe
des Traitez de Paix & de Mariage, & par autres jufies considérations ,\ Je dé-
clare que ladite Infante Marie -Thérèse ma Fille , (3 tous fes Défendons de
ce Mariage, tant mâles que femelles , feront , referont , &? font exclus, k3 au-
tant qu'il eft neceffaire je les exclue de tout Droit ou Efperance qu'ils pourroient
avoir , eu ont , par quel cas que ce fait , de fucceder dans chacun de mes Roiaumes ,
Etats, & Seigneuries, à perpétuité, tout de -même que s'ils n'étoient pas nezj (3
je déclare que cette Exclufion (3 tout ce que j*ai difpofé 13 difpofe touchant icelle à
l'égard de ladite perfonne de V Infante Dame Marie-Therese ma Fille £5? de
fes Defcendans de ce Mariage, tant \ mâles que femelles, doit être obfervé , £5? ou
il fer oit neceffaire ,je veux, commande,& ordonne d'être obfervé, accompli y& exé-
cuté à V égard de la Reine Très-Chrêtienne Dame Anne ma Sœur & fes Defcen-
dans, fuivant Je s traitez de Mariage £5? la Renonciation qu'Elle fit , & fuivant
la di/po/ïtion du Roi Don Philippe III. Mon Seigneur &? Père, raportez dans
ladite Loi fer" dans fon Tefiament, dont le tout a eu vigueur de Loi fiipulée entre
Tune 13 l'autre Couronne, 13 laquelle f aprouve avec & fous la même qualité qui
ejl dans les Loix conventionelles entre les Princes Souverains , ufant de mon Plein-
Pouvoir, 13 re fiant abolies (3 annullées toutes les Loix, Statuts , Dr oit i, Difpo-
fitions ,£3 Coutumes autant qu'il fera neceffaire ,& qui pourraient en quelque ma-
nière que ce foit empêcher ladite Exclufion, ni plus ni moins que fi chacune d'elles
était ici exprimée, & qu'il en fut faite une mention particulière. Je déclare néan-
moins, je veux, (3 commande , quefi (ce qu'à Dieu ne plaife) le Mariage de l'In-
fante Marie-Therese ma Fille venant à être diffout fans En fans, refiant veu-
ve Elle revint en Efpagne , ou fi refiant veuve , en vue du bien public (3 par de
jufies confiderations , Elle paffàt à de fécondes noces par mon confentement , ou après
ma mort par celui du Prince mon Fils , V Exclufion 13 la Renonciation ne lui fe-
ront point contraires, 13 qu'Elle & fes Enfans (3 Defcendans de ce fécond Maria-
ge, pourvu que ce ne foit point en France , feront capables de fucceder auxdits
Roiaumes £3 Etats.
Par une autre claufe de ladite Capitulation j' .zi promis pour dot à' ladite Infante
ma Fille cinq cent mille Ecus d'Or aufolcil avec le refie raporté dans le Contrat!
de Mariage. Toutes le [dites quelles chofes je commande qui foient accomplies, gar-
dées , 13 exécutées dans la Succeffon de mes Roiaumes 13 Seigneuries , par tous mes
Sujets 13 Vafjaux de quelque qualité qu'ils foient , 13 par tous mes Roiaumes ,
Etats, (3 Seigneuries , & qu'ils'l'obfervent & gardent en force comme une Loi, (3
un Statut fait dans VAffemblée des Etats, (3 qui fera publié félon la forme (3 les
folemnitez ufitées dans chaque Roiaume , Etats, (3 Seigneuries.
Ce ce 2 Tout
fpz MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
1701 . Tout ce qu'on a rapporté julques ici, Se qui a été répété à caufe de la plu-
— ralité des Infractions qui contiennent la plus part la même chofe, regarde la
Les Fiefs Monarchie Univerielle d'Efpagne Se n'admet point le moindre Droit du Sang
fontaufil François à la moindre ni à aucune de Tes parties: aufiî, tout le Sang de Fran-
compris ce cn général eft, non pas une fois, ni en un lieu particulièrement, exclus de
Rénon- tous 'es ^c^> ^°'t qu'ils aient été conférez à d'autres par les Rois d'Efpagne,
dations foit qu'ils les tiennent d'autres : entre leiquels , fans aucun doute, les princi-
pe Ex- paux étant ceux qu'ils ont reçu de la Sainte Eglife Romaine Se du Sacré Em-,
dufions. p|rc Romain, perfonne ne niera qu'ils ne foient compris dans la tranflation de
Nom- toute laSucceflion d'Efpagne en faveur de Sa Majefté Impériale & de fes En-
ferment fanS) çous ce noni5 par la difpofition exclufive des François, Se parce qui la
nhe tant fu& PRr ou on vo't clairement, que rien ne peut être allégué au contraire,
du Pape ni prétexté par les termes des Inveftitures, foit Pontificales ou qui regardent
que de le Roïaume de Naples , foit Impériales du Duché de Milan , le'Marquifat Se
1 Empi- port cje pmai? ]a Principauté de Piombin, le Vicariat de Sienne, & les Fiefs
de Montfort, Sec, qui ont été accordées ; foit que ces Inveftitures foient
pu0'1 tant vieilles que nouvelles, qui félon l'ordre d'aineffe défèrent la SuccefTion
le.vlnvef- tant aux mâles qu'aux femelles: au contraire, ces termes doivent plutôt être
tituies ils interprétez de la forte , affavoir que les Traitez particuliers contractez par
foient l'Autorité des Papes, & les Loix publiées pour exclurre le Sang de France
aux^AU mtifou intrus, reftant en leur force, le Droit qui en eft tranfporté à d'au-
nez. très doit toujours être gardé en ion entier. Enfin, par la même raiforf on
LeDroit ^ra derechef, félon le Teftament de Philippe III. rapporté ci-deffus, que
Kc le les Infantes ainées d'Efpagne, mariées en France, ceflént d'être telles par les
Nom Loix Se les Contracte} 6c que ceux ou celles qui font plus proches aux Prin-
d'Ainef- ces du Sang d'Efpagne entrent en leur lieu Se place , s'aquerant en même tems
Infantes le nom d'ainez, oud'ainées: c'eft de la forte que le Patriarche Jacob , qui
mariées étoit le jumeau puîné, Se qui devoit cependant devenir le Père des autres Pa-
en Fran-triarehes & de St.Jofeph, après qu'Efau fon Frère aîné lui eût vendu fort
ce,-,nt Droit d'aînefie pour un potage de lentilles, il répondit à Ifaac fon Père qui
tranfpor-.,. . r . , r. t> .i- • - 1 t-» •> »-i ' x ■
té a ccux linterrogeoit qui il etoit ? il répondit, dis -je, a bon Droit qu il etoit
d'Aû- fon Fils aîné Efau , ainfî que cela pafle pour une vérité incontestable tant
triche, auprès des Juifs que des Chrétiens , Se que la bénédiction divine obtenue
par Ifaac fon Père , 8c qui même rejaillit fur nous , le montra. Il faut
plutôt avertir l'Empereur , quoi qu'il voulut négliger les Affaires de fa
Maifon , de ne pas prodiguer mal-a-propos les Affaires de l'Empire , en
conférant ou biffant les Fiefs Impériaux à une Famille qui depuis long-
tems lui a été ennemie , Se lui a ravi de fes principales parties par des
voies injuftes Se par des tromperies qui lui font naturelles, Se qui fous le pré-
texte de l'obéïffance due à caufe du Fief , n'afpire pas à moins que de dé-
pouiller l'Empire de tous fes Fiefs d'Italie, Se de mettre à la fin toute l'Ita-
On dit la lie fous le joug, Se d'arracher aux Allemans la Dignité même Impériale, pour
même ja tranfporter aux Succeffeurs de Capet. La même chofe s'entend de la Flan-
jChpjn.e dre, Se des Provinces qui lui font annexées, dont il eft fouvent parlé dans les
drc. Inftruétions ci-deffus rapportées , tant parce qu'elles font avantageufes , non
feulement pour donner lieu aux François de fubjuguer les Peuples voifins,
que
ET RESOLUTIONS D'ETAT. rf}
que pour/infpirer de l.i terreur aux éloignez 6c leur enlever leur commodi- 1701.
tez, que parce qu'outre le lien du Fief de quelques-unes qui font par là at>
tachées à l'Empire, 6c la Succellîon reçue anciennement en icelles^ des feuls
mâles même les plus reculez, elles appartiennent toutes tellement à l'Empi-
re & à la Maifon d'Autriche, qu'Eiles font un Cercle particulier de l'Em-
pire, appelle de Bourgogne, & ^appartiennent aux Rois d'Eipagr.e leursPof- Vft qu'il
fëflèurs que fous le titre d'Archiduc d'Autriche, 6c c'eft par là qu'Eiles ont "ren"^
feance Se voix avec les autres prérogatives 'de PÀuguite Maifon d'Autriche un.brbit
aux Aflemblées de l'Empire. Une preuve très-évidente qu'Eiles n'ont appar- plus par-
tenu aux Rois d'Efpagne par d'autre raifon , qu'elles ne peuvent écheoir ticuhcrà
qu'aux Archiducs d'Autriche font, pour patTer fous filence d'autres, les ter- fonMïi*
mes & mots mêmes de la Tranfaftion connue faite à l'AiTemblée d'Augsbourg d'Aut'ri-
le 16. dejuin if48. entre l'Empire 6c l'Empereur Charles V. touchant la che.
Flandre 6c les Provinces qui y ont annexées ; 6c que Charles V., comme A.infi
Empereur 6c Seigneur des ces Provinces , 6c au nom de l'Empire les l'Elec- qu'il pa-
teurs deMaïencc & Palatin, l'Archevêque deSaltzbourg 6c le Duc de Bavière, roftpar
l'Abbé de Wingartz, le Comte de Furilemberg, 6c le Magiitrat de la Ville JjJ^;
d'Augsbourg, pour eux 6c pour les autres Electeurs, Princes, Ecclefiaftiques d'Aus-
6c Séculiers, Prélats, Comtes, 6c les Villes immédiatement Impériales, à la bourg.
requifition de l'AiTemblée de tous les Etats, lignèrent, 6c mirent parmi les
Statuts de l'Empire, 6c qu'enfin comme éternelle fut enregiflrée 6c acceptée
par la Chambre Impériale , qui eft reliée à Spire jufques au tems de la ruine
de cette Ville, 6c qui ell à prefent à Vezlar , 6c qui fut auffi pareillement
ratifiée par les Etats defdites Provinces , en ces termes.
\JOus Charles V., par la Grâce de Dieu , Empereur des Romains , toujours
Augujle, Roi d 'Allemagne , de Ca/lille, d Arragon (3 c. &c. Archiduc cl' 'Au-
triche , Duc de Bourgogne (3c. (3 c. faifons [avoir (3c. (3c. Nous fommes auffi
convenu en vertu de ces Prefentes , en la meilleure manière (3c. (3c. £hte nous
comme vrai Héritier (3 Seigneur territorial de nos dites Héréditaires Provinces de
Flandres , pour nous , nos Héritiers (3 Succefjéurs , enfembk avec nos Provinces
de Flandres qu'on nommera fucceffivement , [avoir (3 c. (3 c. font à l'avenir (3 per-
pétuellement fous la proteclion , defence, garantie , & fecours des Empereurs, des
Rois des Romains, (3 du facré Empire , (3 qu' Elles jou'iffent de fes Privilèges
13 Droits , (3 feront toujours par lefdits Empereurs , Rois , (3 Etats du Sacré Em-
pire, de même que fes autres Princes , Etats , (3 Membres protégées , défendues , (3
aidées avec fidélité , (3 qu'Eiles font auffi invitées (3 appellées à toutes les Affan-
klées'de l'Empire , Et nous (3 eux avec les autres Etais d"1 avoir h pouvoir d'y com-
paroitre , ou félon qu'on le trouve à propos d'y envoler ; 13 Nous , (3 nos Héritiers
{3 Succefjéurs, nos députer 13 les leurs devons être admis à la Séance, 13 y avoir
voix à caufe defdiïes Provinces , comme Archiduc d'' Autriche , 13 fous le nom
d'Archiduc d'Autriche. De plus auffi Nos Hereticrs 13 Succejfeurs de nôtre dite
Province, avec tous les Princes qui leur appartienent su dépendent (3e. (3c. de-
vons V ériger (3 conflit uerjn un Cercle particulier fous le nom de Cercle de Bourgo-
gne, fous lequel Elles feront toutes comprifs, quoi eue quelques unes d'entre Elles
aient été ci-devant comprifes dans d'autres Cercles de l'Empire (3c. (3c Ccpen-
C c c c 5 dan!
f94 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
1701. dant toutes le/dites Principautcz & Provinces qui fous le nom (3 la qualité de
.. Fiefs conférez far ï 'Empire ont été ainfi pojfedez ou poffedées, iceux (3 icclles doi-
vent être receus (3 pojfedez à l'avenir tout de même qu'il a été pratiqué par le
paffé (3 c. 13 c. C'eft pourquoi nous promettons (3 donnons nôtre parole Impériale
pour Nous, nos Héritiers, (3 nos Succejfeurs , (3 toutes no f dit s Provinces Hérédi-
taires de Bourgogne, que cette Tr an faclion , Compofttion, (3 Convention dans toutes
(3 chacune partie , points , claufes , (3 décrets qui nous concernent nous ou les nô-
tres, feront par nous (3 par Elles, fermement, perpétuellement, çjr inviolablement
obfervées (3 exécutées , (3 on n'y contreviendra en aucune manière que ce fait , ni ■
on permettra que cela fe fajfe par les nôtres ou par d'autres, 'toutes les ebofes pa-
reillement qui ont été tentées, ordonnées , établies , 13 obtenues contre ce Traité, qui
pourront être tentées, ordonnées ci-après (3e. (3c. font (3 doivent être cajfées,an-
nullées , 13 invalidées (3c. (3c.
-, 1 Ce que Philippe III. & Philippe IV. ont eu foin de faire par leurs
Te^ta- Teftamens par précaution pour les Provinces de Flandres qui appartiennent
mens de aux Rois d'Efpagne entant qu'ils font delà Maifon d'Autriche , ôc eil con-
Phiup- çû en jes termes il conformes qu'une claufe prife du Tellament de Philip-
^Eivî' pe IV. peut fervir pour les deux, 8c elle eft en ces termes.
"PTje déclare particulièrement que les Etats de Flandres (3 tous autres, qui ont
été pojfedez ci-devant par la Serenijfime Y Infante Dame Isabelle ma Tan-
te (3 lefquels étant enfuit e dévolus à ma Couronne , j'ai poffedé (3 poffede , doivent
félon ma volonté refier toujours unis avec mes autres Ro/aumes (3 Seigneuries ,
(3 qu'ils ne doivent être divifez ou feparez par aucun cas que ce foit . Je charge auf-
fi (3 commande à mes Succejfeurs qui feront en quelque tems que ce foit ci - après
an' 'ils protègent ferieufement , affifcnt de tout leur pouvoir, (3 défendent le (dit s
Etats, (3 leurs Faffaux, puifque cela regarde beaucoup l'exaltation de la Foi
Catholique, la confervation (3 la Paix de mes autres Roiaumes , Etats, (3 Sei-
gneuries, (3 les Droits de la Maifon d'Autriche, dont je poffede la qualité a" ai-
ne ainfi qu'il eft connu par tout h monde.
Tantles Enfin, pour mettre la dernière main à cette partie de nôtre Déduction,
Garands nous avons trouvé à propos d'ajouter que comme tontes ces chofes inférées
qu'en dans les Traitez de Paix , dans les Conventions, & Sanctions, ont été con-
premier grmées Se ratifiées & munies d'un pouvoir fuffiiànt, tant par les Souverains
Soùvc- Pontifes que par les Empereurs, les uns les autres font obligés à la vangean-
rains ce & à la defence des dites Conventions, auffi bien que le? autres Garands
Pontifes je tous les Traitez de Paix ou des Conventions particulières ; 8c ce d'au-
5"tp"s tant plus que non feulement félon le«Contrac"ts d; Mariage raportez, les uns
la defen- Se les autres Contra&ans l'ont demandé avec uns révérence filiale aux Souve-
fedcfdi- rains Pontifes, mais auffi par ce qu'Eux mêmes ont volontiers accepté ces
tes Con- priércs félon le témoignage des claufes des Renonciations, 8c ont réellement
*en* confirmé les Contrats par l'Autorité Apoftolique : Pour ne pas repeter avec
lïrfbut ennui ce qu'on a déjà dit des Empereurs qui ont ftipulc ces chofes pour eux
les Papes Sç leur pofterité. Après
ET RESOLUTIONS D'ETAT. w
Après toutes ces Conventions, Sanctions, Renonciations, Cédions , 6c 1701.
Sermens, perfonne n'auroit pu fe mettre en tête, ou fi par hazard cela étoit -■ ■■'■■
arrivé à quelqu'un, fans coure il lui auroit auffi paru incroiable, que le Roi qui les
Très-Chrêticn & fes Eâfàas, négligeant 6c rrïéprifânt ce que defius, ne fe fe- qnta-
roit fait aucun fcrupule, le cas arrivant, de chicânner Sa Sacrée Majeité ^nC(ies-
Impériale 6c les Enhus fur la Succeffion d'Efpagne, ou de s'en aproprier firnû4s.
quelque partie, fi l'expérience ne l'eut fait voir. La couleur, dont on s'eit
fervi pour pallier cette injuftice , ne pourroit être mieux découverte que
dans les Ecrits que les François ont ci-devant mis en lumière, comme auffi
d'autre côté les Réponfes qui y furent faites par les Efpagnols mêmes font
très-bien voir, combien ces couleurs Françoifes étoient altérées de leur na-
ture: Auffi on trouve fort à propos de raporter en abrégé ce qui a été impri-
mé de part & d'autre, 6c d'ajouter à la fin une Chufe prife du Teftament,
qui aiant été fait par le Roi Charles , a donné un nouvel Argument à la
France, 6c dont cependant le feui Récit peur fervir de Réfutation.
Après la mort de Philippe IV, le Pais-Bas Catholique aïant été envahi ,
les François mirent toute leur application, quoi qu'en vain, pour perfuader
aux autres ce qu'eux - mêmes ne croïoient pas : favoir que les Héritages des
Pérès 6c Mères appartenoient aux Ehfàns par le droit de Nature, 6c par le
droit divin, humain, 6c civil , 6c particulièrement par le droit Romain ;
& qu'on ne pouvoit fans un très -grand tort en priver les Filles. Que
c'étoit contre les bonnes mœurs de faire des Conventions fur l'héritage d'une LesOb-
perfonne vivante, parce que les Renonciations des Filles répugnent autant Je^ions
à icelles qu'à la jultice, puis qu'Elles doivent être contentes de leur dot , F"n_
fans pouvoir efperer ni demander quelque chofe des biens Paternels. C'eft ç0is.
pourquoi elles n'ont point été admîtes par le droit Romain. Qu'il eft vrai
qu'enfin le Pape Boniface huitième les avoit confirmées, lorsqu'elles étoient
laiffé par tout une méchante renommée. Néanmoins , que cette demefuréc
Decrctale étoir. exorbitante Se abfurde, 6c que fa force ne s'étendoit pas fur
les Rois 6c les Princes ou fur les Principautcz 6c Empires qui font hors de
prix. Que nommément cette Renonciation dont il s'agit, quoi qu'EUe ait
été fardée par plufieurs raiibns inventées par le Confeil d'Efpagne , 6c munie
de claufês non accoutumées , étoit defiituée de tout droit 6c équité à caufe
de la Minorité de celle qui renonçoit, 6c de fon énorme lefion: mais princi-
palement qu'elle n'a dû dès le commencement fubfilter, ou qu'elle a été de
nulle valeur , ou qu'elle eft dans la fuite tombée , 6c le premier droit revenu
à Marie-Therese, par ce qu'on n'avoit pas paie la dot au tems dont on
étoit convenu. Cependant, il a déjà été demonttré avec folidité par les Mini-
ftres 6c les Ecrivains d'Efpagne, 6c il a été prouvé par l'évidence des choies, sont rc-
qu'on ne demande pas avec plus de droit la decifion des queltions publiques futées
par le Droit Civil ou Romain , reçu par tout preique en toutes choies, ou Par!es
par quelque autre, fait pour les affaires privées des Sujets, que les difrerens jjjjasgf.
pu-
596 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
1701. publics entre les Princes Souverains puiffent être décidez ou jugez par leurs
Tribunaux particuliers: on peut même plus appliquer à ceux-ci les fineffes
pagnols des Juris-Confultes Privez. Il y a à la vérité dans les Contrafts de Mariage
lors de diverfcs ckufes abrogatoires Se dérogatoires des Loix particulières, & des cou-
1 in va- tûmes municipales, qui félon l'ccorce des mots auroient peut être femblé con-
parla traircs, touchant la dévolution ulïtée entre des particuliers dans quelques Pro-
France! vinces du P.ûs-Bas. Mais tout cela n'a été fait feulement que par une plus
dans le grande Se furabondante précaution , Se afin que les Contracîans emploiafTent
Fais-Bas jcur jus pran(j f0jn p0Ur ôter ou prévenir avec plus de clarté tous les pretex-
a quoi r ^-1 r t -' <r »- » • - * r .
on ajoù- tes pofliblesj non pas que ces Loix euilent pu autrement être appliquées à la
te à pré- fucccflîon des Princes plus convenablement que les Ecrivains François vou-
fent peu droient adopter ici les Décrets des Papes. Mais il feroit très-abfurde de ra-
^ccho" porter les choies qui ont été miles pour valider la difpofîtiou des Contractais,
ou plutôt qui ont été ôtées pour la renverfer. Au contraire, il faut confide-
rer ièlon ce qu'avouent les Ecrivains même les plus fages parmi les François,
le Statut, quia été fait dans chaque Roïaume touchant fa Succeflion, par
ceux qui avoient le pouvoir de le faire, Se ce qui a été tranfigé pour l'utili-
té mutuelle des Peuples, Se le repos commun entre des Rois ou Princes,
qui ne font fujets qu'à Dieu, 6c par le confentement du Peuple, de la Suc-
cefîîon duquel il s'agiffoit. Comme il fuffit pour cela un âge capable d'ac-
tions humaines, Se telle quirft convenable à la Dignité Roïale tant en Efpa-
gne qu'en France, fans compter celle qui eit eftimée en plus d'un lieu de la
Monarchie d'Efpagne, capable d'admin fixer les Affaires d'une famille ,Se que
les Anciens ont appelle un âge prochain à une jeuneffe très-robuite, on peut
recueillir très-clairement des formules des Renonciations l'âge que l'Infante
Marie-Therese avoit lors de fon Mariage. Il a été permis à la France, Se
d'autres Roïaumes , même à de moindres Etats, Se à des familles, toutes
fois qu'ils le trouvoient convenable à leurs intérêt:, de changer la manière,
receuë d'ancienneté, un: de l'Election que de la Succefîîon , Se par des Loix,
même par des Traitez, là où ils avoient lieu Se où on n'ôtoit le droit com-
petant aux autres contre leurs volontez, Se par des Telbimens d'unir com-
me en une maffe , ou en un affemblage , Se d'incorporer tous les biens ou les
Provinces qu'on poffedoit , quoi qu'elles fuîfent auparavant de différent ref-
fort, Se qu' Elles fufîènt aquifes par différentes Succefîîons,Se par d'autres ti-
tres, Se tant d'exclurre d'icelles toutes fans diftinction les deuxièmes nez Se
Cadets, par une afîîgnation d'alimens, ou par les apanages, qui en tiennent
lieu, que d'en forclorre à jamais les femmes Se leur poiterité en donnant une
dot modique, ou de defigner la Succefîîon fous d'autres conditions. La Fran-
ce s'eft fervi de ce droit contre l'Efpagne, Se contre d'autres Roïaumes Se Etats
aufîî bien contre leurs Princes, mêmes par des Renonciations expreflês faites
de tems en tems par fes Filles, Se particulièrement dans le Contractde Maria-
ge d'Ei.iZABETH de Bourbon, Première Femme de Philippe IV. Roi
d'Efpagne, laquelle a été exclue à perpétuité, avec tous les Enfans Se Defcen-
c'ans de ce Mariage là, de la Succefîîon de tous les Roïaumes, Se Seigneuries
Patc.nclles, Se de celles-mêmes, aux quelles après l'extinction des Mâles les
Fem-
ET RESOLUTIONS D'E T A T. 5^7
Femmes ont droit de fucceder, auffi-bien que de tout l'héritage de la Reine 1701-.
de France fa Mère. Or pourquoi n'eft-il ou n'a-t-il pas été permis à l'Efpagne *"~ —
de faire la même choie contre la France? puis qu'Elle y étoit non feulement
portée, mais contrainte, non pas par une feule, mais par plufieurs particuliè-
res raifons, publiques 6c privées, comme pour ne pas feparér ou divifer ,
mais pour tranfmettre par une Succeflïon unie 6c indivife, à la pofterité futu-
re, tant de Roïaumes & Etats qu'Elle poflede , 6c ainû* par confequent
d'exclurre de tous & chacun d'iceux les Filles de fes Rois qui fe marieroient
en France, 6c toute leur Pofterité mafeuline & féminine. Bien loin que le
droit de nature preferive quelque chofe, qui doive être perpétuellement ob-
fcvé touchant les héritages des Pérès , Mères , 6c Frères ou autres parents ,
ou que les Conventions 6c Loix qui en établiflent les manières, foient con-
traires au droits de nature, tout le monde convient que par ce droit-là, les
Pères 6c Mères ne font tenus à rien autre envers leurs enfans, qu'à l'éduca-
tion &c aux alimensj 6c le droit Divin, publié aux Ifraëlites, a non feulement
exclu les Filles du Roïaume 6c du Patrimoine public j mais il a même donné
dans les Succefïïons privées ou des particuliers le principal droit aux mâles.
Les Anciens Romains ont été beaucoup plus rigides, qui outre les très an-
ciens droits des acquifitions qu'ils avoient retenus , 6c les autres droits de la
puiflance paternelle, auffi-bien que les pleins droits des émancipations d'une
famille, 6c l'éloignement perpétuel des femmes de toutes les charges, par la
Loi faite par le Sénat Romain à la perfuafion de Caton , ont éloigné lefdites
femmes des héritages , en forte, que nul dénombrement des Cenfeurs ne pouvoit
faire héritière aucune Vierge ou Femme, mais pas même le Père ne pouvoit
faire héritière fa fille unique, même dans le tems que le pouvoir de faire des
Legs ou de tefter de fes biens , étoit en fa force entière dans le Père de fa-
mille. Il eft vrai que cette feverité fut de tems en tems tant (bit peu adou-
cie : cependant , à l'égard des héritages les femmes 6c leurs^defcendans ont
toujours été de pire condition que les mâles 6c leurs enfans , jufques à ce
qu'enfin la voie étant ouverte aux femmes, non pas de prendre le foin de
l'Empire ou d'afpirer aux charges de la Republique, mais d'avoir part aux
héritages privez, on ôta la différence du fexe 6c des enfans qui étoient fous
puiflance 6c tutele. Cependant un Soldat pouvoit faire un Teftament inoffi-
cieux ou defavantageux à fes enfans, foit par un droit militaire ou civil, ainfi
qu'il lui paifoit , 6c alors lès fils ne pouvoient fe plaindre de ce que le Père
ne leur avoit rien laifle du tout ; par où on pouvoit à plus forte raifon exclur-
re ou impunément des- hériter les filles. C'eft une chofe aflez connue, fans
qu'il foit neceffàire d'en faire un détail , combien , après l'introduction des
Fiefs, la diverfité d'y fucceder a été différente parmi divers Peuples} & com-
bien le droit des femmes a été limité, particulièrement dans les Fiefs qui
viennent de l'Empire, ce qui prouve évidemment qu'on n'a arrêté là deflus
aucune chofe par le droit de nature. Si ce n'étoit la vérité de ce dogme, les
Loix 6c Coutumes qui tant en plufieurs autres pais, que dans la Sicile auflï-
bien qu'en Italie, Se nommément dans le Duché de Milan, privent les Voïa-
geurs ou les Enfans nez ailleurs ou les Etrangers des Succédions privées , ne
feraient point exemptes de crime: du moins l'avidité des François connue
Tom. L Dddd par
f98 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
1701. par tout le monde feroit tant moins excufable dans ces héritages que le Fi(c
— ■ ■ s'attribue' par le droit d'Aubaine , excepté dans les lieux où l'utilité plus
grande & plus fréquente, l'ufige du commerce journallier,ou de quelque au-
pre commodité, a extorqué quelque modération. Pendant quelque tems les
conventions faites fur les héritages des perfonnes vivantes ont été tenues par
quelques koix Romaines être contre les bonnes mœurs, parce qu'elles exci-
toient le defir de leur mort: mais ce n'étoit que celles qui fe faifoient fans le
fû ou contre le gré de la perlbnne de qui l'héritage dépendoit, 6ç qui lui
ôtoient le pouvoir de tefter, 6c non pas celles qui fe faifoient de fon gré, 6c
lors qu'elle perfeveroit dans la même difpofition jufques à la fin de fes jours ;
non plus que celles qui fe faifoient entre les Soldats par une promte faveur des
Princes Romains, ou par lesquels l'héritage feroit abdiqué. On a même beau-
coup plus accordé à la fuite des tems, ôc non feulement les fiefs ont été tranf-
portez, ou cédez entre vifs, à d'autres compris dans la première invefliture ,
6c que ceux-ci ont toujours pu recevoir; mais les autres biens 6c leur efperan-
ce font aujourd'hui accoutumez d'être remis, tranfportez, 6c aquis par des
Traitez 6c des Contracts tant de Mariage qu'autrement , particulièrement
entre les perfonnes illuitres. Il y a des volumes étendus des Jurifconfultes
François du premier calibre, par lefquels il paroit qu'en France auffi -bien
qu'ailleurs , même entre les Nobles ordinaires , les droits d'ainefle des mâ-
les fonr en force, auffi-bien que les Renonciations des filles, 6c que c'eft
là-deiïùs, plus que fur toute autre précaution, batîr le maintien des famil-
les nobles dans leur entier. On voit auffi par les fentimens des mêmes Jurif-
confultes que les Arrêts Souverains de France ont prononcé plus d'une fois ,
que les Renonciations de cette nature, même entre les particuliers, ne peu-
vent point être révoquées, ni à caufe de la minorité de l'âge, ni à caufe
d'une lefion énorme, particulièrement fi elles tendent à la confervation
des familles Illuftres ou des familles nobles privées. Il confie amplement par
les Canons 6c Loix Romaines, que tous les fermens des Femmes qui font en mi-
norité, ne doivent pas moins être accomplis que ceux des autres, lors qu'on les
peut garder fans danger de damnation éternelle , 6c on appelle perfidie 6c par-
jure lorfqu'un mineur prétextant l'âge de rétracter le ferment qu'il avoit fait
pour fes affaires, ou qu'il demande feulement d'en être délié, 6c que pour cela
il ne doit pas être entendu. Mais quand même on admettroit en certains cas,
foit à l'égard des Princes ou des particuliers la nullité d'une Renonciation, à
caufe de la petitefTe de la dot, cependant dans le cas que nous avons entre les
mains, on ne doit pas avoir égard à la fomme de la dot , quoi qu'Elle ait
été la plus grande de toutes celles d'Efpagne, 6c à ce qui d'ailleurs a été alors
donné, ou fourni auparavant, à l'Infante Marie-Therese, mais â caufe de
l'Union de la Paix des Pircnées 6c du Mariage, eftimée necefiai.e 6c infepara-
ble par les contractans , il faut en même tems coniïdercr les biens immenfes
6c inertimables qui ont été tranfportez 6c cédez à la France par l'Efpagne par
cette Paix en vue de ce Mariage, ce qui même a fervi d'un moïen très- pro-
pre pour avancer 6c conclurre la paix. La faute de ce que , comme la dot
n'a pas été demandée par les François , n'a pas auffi été paiée par l'Efpa-
gne au jour defigné, ou en autre tems, vient de la France, parce que l'Acte
de
ET RESOLUTIONS D'ETAT. fî>9
de Ratification qui dcvoit être fiait par le Roi 8c là Reine de France incon- 1701,
tinent après la célébration de leurs noces , n'a pas été fait avant le jour de
la reprefentation de la dot , ainfi que les Traitez portoient , ni celui de
la Renonciation qu'on dévoie réitérer , & faire enregiftrer dans les Monu-
rnens & Acles publics du Parlement de Paris , n'a pas été délivré au Roi
Philippe jufques à fa mort} ni, félon l'aveu des François cette Ratification
promife, ou la réitération , ni la publication n'ont point été accomplies, 8c
l'Invafion de la Flandre a été préférée à la dot qui avoit été offerte de
fon propre mouvement par Philippe Quatrième dans fon • Telle-
ment; 8c cette faute de la France, ou plutôt félon qu'on aperçoit clairement
par les Ecrits des François , cette Fourberie préméditée de longue main, la
violation de fon propre ferment méchamment concertée, 8c l'Invafion violen-
te fur le bien d'autrui,ne doit en aucune manière lui donner de l'avantage , ou
nuire à l'Efpagne. Et quand même on pourroit par un Droit très-ievere,
aflavoir très-defavantageux , imputer quelque chofe à l'Efpagne, ce que pour-
tant, après avoir bien confideré toutes les circonftances, ceux qui cherchent
avec foin les pointilleries des fillabes, 8c qui tendent des pièges aux actions de
tout le monde, font voir qu'il n'aiment pas de fuivre les intentions ni l'équi-
té, ne fauroient faire fans fe couvrir de honte, elle pourroit être juftifiée par
la pratique journalliere, puifque dans les autres promclTes faites pour un jour
limité, fur tout pour le paiement de la dot, on peut , 8c il arrive d'ordinai-
re , de fe fervir de quelque délai , lequel ne fauroit faire autre chofe qu'im-
pofer quelque forte de peine avec le paiement dû , ou obliger le débiteur
de reparer le dommage , qu'on aurait reçu par le délai , 8c non pas d'a-
bolir tout-à-fait la convention même Se toute l'obligation mutuelle. On
ne peut fous - entendre ou fuppléer dans aucune convention une Loi
de dévolution : mais pour être valable , il faut l'exprimer en termes ex-
près, 8c alors même elle eft odieufe, ou félon les propres termes de la Loi,
elle doit déplaire 8c être reprimée. Nous ne trouvons dans toute la fui-
te des Affaires que nous avons raporté ci-deffus aucune claufe pareille, ou
qui y tende , mais plutôt un pouvoir refervé feulement de demander la
dot promife , jufques à ce qu'Elle foit païée , 8c qu'avant ledit paiement
celle qui a renoncé ne peut point être obligée de fe tenir en repos 8c d'ê-
tre contente. On voit clairement par les Articles f. 8c 6. du Contracl
de Mariage, que la promefîe de la dot 8c la demande ou paiement étant é-
noncée dans l'Article deuxième, ce n'a pas été en vertu d'icelle , mais par
d'autres raifons très-juftes 8c de très-grande importance , dont une- partie é-
toit la tranquillité univerfelle de la Chrétienté, qu'a été faite l'Exclution du
Sang de France de tous les Roiaumes 8c Etats de la Monarchie d'FJ pagne ,
non feulement par une Renonciation arbitraire de la Fille, 8c d'ailleurs éter-
nelle, immuable, prefente, 8c abfoluë, 8c qui ne pouvoir être fuipenduc par
la promeffe ou le paiement de la dot, mais même confirmée feparement par
une Loi qui étoit déjà en Ufàge. L'Infante Màrie-Therese, ainfi qu'on
l'a apris ci-deffus, a fouferit avant la confommation du Mariage deux Âéles
tant de Renonciation que d'Exclufion ou Celîîon. Par l'un Elle abandonna
Dddd a tou-
6oo MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
toutes les Succeflîons, 6c par l'autre elle abdiqua les Roïaumes 6c Principau-
tcz, fans faire la moindre mention de la dot , ou plutôt Elle fe fournit à la
Loi établie là-deflus qui l'autorifoit. C'elt pour cette raifon qu'en nremier
lieu l'Article 3?. de la Paix des Pirenées, conçu de la manière que nous avons
dit ci-deflus, & la Renonciation, 6c la Ceflîon 6c Tranfport répété en icelle,
6c tout ce qui a été tranfigé de la forte ont été reçus , conjointement 6c lè-
parément en diverfes occafions dans le nombre des Loix perpétuelles. Pour
faire ces chofes, quoique dans le Tranfport mutuel des Droits des Sujets, afin
de finir la Guerre Se de faire la Paix, on ait de coutume de prendre rarement
garde à leur confentement ou à leur opofition , l'Infante Marie -Thérèse
n'a point été pouflëe par un Père , non feulement tres-complailant 6c plein
d'Amitié, mais même très-doux avec tout le monde, ni jamais il n'a paru
en aucune occafion le moindre indice d'une pareille choie ; mais félon tout
ce qui s'eft pafle , 6c d'ailleurs par fa Déclaration même on voit que le tout
a été fait de fa très-libre volonté, Se pareillement le même Roi Très -Chré-
tien a confefle fans doute volontiers que toute crainte 6c force étoit bannie ,
lors qu'il a contracté, 6c ratifié tous ces Actes: Hormis peut-être que pour
rompre 6c éluder toutes les Conventions, Tranfactions , 6c Pacifications, il ne
veuille appeller crainte, violence, 6c force, défendues parles Loix, ce que
nous avons indiqué ci-deflus, aflavoir que fans cette Renonciation, Abdica-
tion, 6c Ceflîon, non feulement le Mariage n'auroit pas eu fon effet, mais la
France n'auroit pas auffi acquis par la Paix tant d'avantages ; 6c qu'il n'ait eu
en vûë de recevoir 6c retenir les avantages 6c cependant de décliner ou rejet-
ter ce qu'il y avoit d'incommode dans les obligations mutuelles 6c réciproques.
On ne fauroit entendre ou comprendre- plus ailément que par lu lecture des
Ecrivains François combien font légers, vains, 6c frivoles tous les fubterfuges,
les objections, interprétations, détours, 6c pour parler plus jufte, les trompe-
ries, avec lefquelles, félon le génie 6c la pratique de la Nation, ils s'efforcent,
quoi qu'en vain d'attaquer ferieinement , de réfuter, invalider , 6c renverfer tous
les Traitez, Conventions, Alliances, Promeflès , Difpofitions , Teftamens,
Claufes , Loix, Canons , Sermens, 6c Imprécations > 6c comment chicanant fur un
petit mot ils tâchent de le tordre, de l'éluder, 6c fouvent même de lui donner
un fens contraire, ou de s'en mbquer ouvertement 6c de le caiomnierjjufques là
qu'ilsfè glorifient de leur tromperie, 6c de ce qu'ils ont faufle leur foi,6cenfui-
te ils n'ont point de honte de s'enfervir pour défendre leur caufe. Aprefent pour
une plus grande explication nous ajoutons en peu de mots , comme cette Af-
faire regardoit non feulement le Roi Philippe, mais tous les parens de Droit
inconteltable , 6c tous les Roiaumes 6c Provinces qui lui étoient fujettes , Se
que félon la coutume, qui a été toujours obfèrvée dans la Sereniflime Maifon
d'Autriche de l'une 6c l'autre Branche, Sa Sacrée Majefté Impériale ou fes pa-
rens, n'ont point confenti aux "Mariages de France qu'on devoit faire avec les
deux Rois Louis , autrement qu'en confervant toujours cette Loi dans fon
entier , 6c qu'on n'y contrevint jamais, le Droit de la famille d'Autriche de
la Branche d'Allemagne, 6c particulièrement de Sa Sacrée Majellé Impéria-
le 6c fes Enfans 6c des autres familles parentes, leur étant une fois acquis 6c
suant
ET RESOLUTIONS D'E T A T. 601
aïant été en fuite fou vent renouvelle , n'a pu 6c ne peut leur être arraché par 1701.
aucune démarche faite enfuire , foit par Philippe ou fes Miniftres, ou par ■
quelques autres, & encor moins par leur omiffion ou faute, ou par quelque
délai que ce foit, n'a pu 6c ne peut être changé au préjudice des Roïaumes
d'Eipagne & des Etats annexés ; mais non obltant toutes omiflnns ou faits
des autres, auxquels tous 6c chacun des Parens, appeliez à la Succelîîon, auffi
bien que les Roïaumes d'Eipagne 6c leurs Etats n'ont point do:iné de confen-
tement, tous leurs Droits qui leur apartiennent, 6c tous leurs avantages, font
toujours rettez , 6c refteront à jamais en leur entier.
Il refte en dernier lieu de rapporter 6c examiner les paroles qui regardent
cette Affaire , 6c qui font tirées du Teftament qui a été publié fous ie nom E.n <jer-
du Roi Charles, 6c cela aved une très-grande modération 6c autant que la orm^l"
chofe peut fouffrir d'être quelque fois appellée par fes noms , quoi que ceux porte le
qui félon le bruit public les ont machinées en foient eftimez indignes. Elles Tefla-
font de la teneur fuivante. ment
publie
Aïant remarqué) conformément au refuJtat de toutes les Confultations tenues par Nom de
Nos Miniftres d'Etat &? de Juftice , que les raifons, pour le/quelles les Infan- Char-
tes Dame Anne & Dame Marie- Thérèse, Reines de France , mes Tan- tu **•
te, (3 Sœur , ont renoncé à la Sfucceffion de ces Roïaumes , n'étaient fondées que fur
le danger £j? le préjudice fi ce Roiaume venoit à être uni avec celui de France ; 6?-
aiant confideré que la Raifon fondamentale ne fubftftoit plus, le Droit de la Suc-
ceffion et oit dévolu au plus proche Parent félon les Lois de ces Roiaume s, & que
ce cas eft maintenant vérifié en la perfionne du fécond Fils du Dauphin de France.
Cefi pourquoi me réglant fur le faites Loix , je déclare pour mon Succejfeur , fi
Dieu me retire fans avoir laijfé d'Enfans, le Duc d'Anjou, fécond Fils du Dau-
phin , &? en confequence de ce je rétablis 6? le nomme pour fucceder dans tous mes
Roiaumes & Etats , fans en excepter aucun. Je commande & ordonne à tous mes'
Sujets & P'affaux de tous mes Roiaumes 13 Etats que le cas arrivant que je meure
fans hiffer d'Enfans , qu'ils le reconnoifiént fjf le reçoivent pour leur Roi & Sei-
gneur naturel , &f que fans délai ils le mettent actuellement en poffeffion d'iceux ,
pourvu qu'il faffe £«? prête les fer mens accoutumez, d'obferver les Loix , Ordonnan-
ces , y Coutumes de mu [dits Roiaumes £s? Etats. Et mon intention étant que pour
le bien de mes Sujets , £s? pour maintenir la Paix de la Chrétienté £s? de toute V Eu-
rope , cette Monarchie foit toujours feparée de la Couronne de France , je déclare
que fi ledit Duc d ' Anjon venait à mourir , ou à être apellé à la Succefjion de
France , préférant la jouïffance de cette Couronne à celle d'Efpagnc , alors la Suc-
ceffion de la Monarchie fera fous le mêmes Conditions dévolue au Duc de Berry,
îroifiéme Fils du Dauphin. Et en cas que le Due de Berry vint à mourir ou à
hériter la Couronne de France, je déclare & je nomme à la Succefjion V Archiduc
fécond Fils de P Empereur mon Oncle, excluant par les mêmes Rai/ons , 6f par les
mêmes inconveniens , contraires à l'intérêt de mes Sujets, le Fils aine dudit Empe-
reur mon Oncle; Et en cas que V Archiduc vint aufji à mourir , je déclare (3 nom-
me à ladite Succefjion le Duc de Savoie (3 fes Enfans. Et c,efi ma volonté que
ceci foit exeaité par tous mes Sujets de la manière que je l'ordonne; car il eft expe-
Dddd 3 tient
mine 6c
refuté.
Soi MEMOIRES, NEGOCIATIONS, TRAITEZ,
1701. aient pour leur bien qu'ils ne fouffrent pas que h Monarchie foit partagée ou dimi~
" nuée\ mais qiïElle demeure dans le même état que mes Ancêtres font glorieufement
fondée. Et comme j 'ai beaucoup à cœur (3 que je foubaite uniquement le maintien
de la Paix (3 de f Union fi profitable à la Chrétienté entre f Empereur mon Oncle
{3 le Roi Très- Chrétien , je les prie (3 exhorte que cette Union foit plus fermement
cimentée par le lien d'un Mariage entre le Duc d'Anjou & f Archiduchejfe afin que
P Europe jouïjfe du repos qui lui efifi necefiairs (3 c. (3c le z. d'Otlobre 1700.
Lequel Pcrfonne ne lira ou entendra ces chofes, qui ne plaigne en même tems le
eft exa- fort J'un Prince d'ailleurs très pieux, 8c, pendant qu'il étoit en famé, très-
tendre pour la Mailbn , en ce que peu de perfonnes , attachez, feulement à
s'enrichir, ou iacrifiant le tout à la haine Se l'envie , ou d'ailleurs méchants
en eux mêmes, aient pu tellement abufer de fa maladie, 8c de la foiblefle de
fon efprit, que de commettre une méchante action fous fon nom , & de le
faire devant tout le monde coupable non feulement d'ingratitude , mais d'in-
juftice la plus criante de toutes à l'égard de fa propre Famille qui a toujours
obligé (a Perfonne & fon Etat , laquelle tâche ne fiuroit être effacée par
aucune longueur de tems. Car comment peut-il paraître vraifembable
que ce Prince , s'il avoit été dans fon bon lens Se qu'il eut pefé le con-
tenu de la Claufe ci-deflus rapportée , ou qu'il l'eut même légèrement
fçûc, eut pu être induit à faire une chofe fi indigne contre les innombra-
bles promefles 8c aflùrances qu'il avoit faintement faites 8c même plus d'une
fois, en plufieurs rencontres , & peu avant le Teftament qu'on lui attribué",
8c ce de bouche 8i par des Lettres écrites j & qu'il eut voulu en même tems
par peu de mots pleins de faufTeté renverfer tant de Traitez 8c Sanctions
dreffées avec tant de foin par les commus Ancêtres , 6c rachetées par beau-
coup de Sang de la Maifon en général , 6c par la perte de plus d'une Pro-
vince entre celles qui lui appartiennent d'ancien Droit. Aïant remarqué,
dit-il, conformément au refultat de toutes les confultations tenues par les Mini-
flres d'Etat 13 de Juflice ( favoir de ceux qui étoient ou des Prévaricateurs
connus, ondes Transfuges, ou des gens qui dégénèrent de leur noble Fa-
mille, ou autres dont les Ancêties, ou peut-être eux-mêmes, font nommez
dans les Contraéts de Mariage & dans les Teftamens des precedens Rois
d'Eipagne, & ont été prefens à PAiTemblée'des Etats du Roïaume , ouïe
font emploiez. à réfuter Se rejet ter les prétendons précédentes des François)
que la raifon pour laquelle les Infantes Dame Anne (3 Dame Marie-The-
rese (3c ont renoncé à la SucceJJion (valide même félon lui 8c qui ne doit
en aucune manière être attaquée, nirenverfée) la raçon en que fe funda la
Renuncia n' étoit fondée que fur le péril de l'Union de la Monarchie d'Efpagne avec
la France. Cependant ion Grand-Pere & fon Père, par l'approbation & l'ap-
plaudiffcment de tout le Roiaume , 8c même de tout l'Univers, de l'aveu
mêmes des Ecrivains François, dans les Contraéts de Mariage 6c ailleurs, di-
fent ouvertement que cen'étoit pas par la feule caulé déloigner l'Union 6c d'é-
viter les occafions qui y tendoient, mais auffi pour retenir l'égalité de laSuc-
ee{fion entre l'un 8c l'autre Roïaume, 6c qu'outre les autres raifons fus-alle-
guées ,
ET RESOLUTIONS D'ETAT. 60?
guées, il y en avoit eu encore d'autres, qui les avoient portez à établir cet- 1701.
te Exclufion. Certainement fi la raifon d'éviter l'Union eut été la feule, cl- ■
le n'auroit jamais perfuadé l'Exclufion des Femmes de France & de leurs Def-
cendans de la*§ucceffion d'Efpagne, puifqu'Elles ne font pas moins exclûtes
des Roïaumes d'Efpagne, que les Mâles de France. Le Roi Charles
continue ainfi : qu'a tant confideré que la raifon fondamentale ne fubftftoit plus , le
Droit de la Succefjion était dévolu au plus proche Parent , félon les Lois cPEf-
pagne , & que ce cas eft vérifié en la perfonne du fécond & troifiéme Fils du
Dauphin , aflavoir parce que d'autres avant eux , font appeliez à la Succef-
fion de Fiance, & cédant ou manquant la raifon de la Loi, la même Loi doit
auffi celfer. Mais qui eft-ce qui a jamais fait place à cette commune règle du
Droit là où plufieurs raifons concourrent en établiilant une Loi , lefquelles,
à juger par cette Loi-là du prefent cas, font connues, ne pas cefier toutes ?
Ou qui eil-ce qui affirmera auffi à fon péril que cette crainte d'Union eft '
éloignée du fécond & troifiéme Fils du Dauphin? Que répondra- 1- on enfin
au Père Se Grand-Pere, qui étoient fans contredit de très-bons interprètes de
leur volonté, de leurs conventions , & des Loix qu'ils fiiifoient , ou plutôt
que répondra-t-on fans calomnie & impiété à l'une & à l'autre parties des
Contractans qui ont clairement exprimé dans les Contraéfo de Mariage 6c ail-
leurs, que tout les Enfans & Defcendans mâles ou femelles de Infantes mariées en
France dévoient être exclus , £s? tenus pour exclus , quoique ceux-ci ou quelqu'un
d'eux voulurent ou puffent prétende e que dans leurs perfonnes ne courent , m fe
peuvent £s? doivent confiderer les raifons exprefjes ou autres , efque'lcs ladite Ex-
clufion fe pourr oit fonder. Au relie, nous ne nions point qu'on ne doive fuivre
les Loix d'Efpagne pour la Succeffion du Roïaume, comme fi nous voulions
nous faire fort fur leur prefeription, mais en même tems nous foûtenons que
par de nouvelles on déroge aux antérieures, & que ces nouvelles Loix font
tant contenues dans les Contraéfo de Mariage fuivant les paroles exprefles qui
y font de Loi fiable & ferme h jamais, que trouvées dans le nouveau Code
des Loix d'Efpagne, publiées dans les Aflemblées plus récentes des Etats du
Roïaume. C'elr. très-mal , & contre la Teneur de ces Loix , que Charles
enfuite continue: que par cette rafon, venant à mourir fans Enfans, il de-
- claroit £j? appclloit pour Succeffeur dans les Roïaumes le Duc d' Anjou fécond
Fils du Dauphin; & en cas de mort dudit Duc, le troifiéme Fils dudit Dau~
phin, Puifque par ces mêmes Loix, non pas une mais plufieurs fois, les
Infantes mêmes, non feulement le Mariage François Habilitant ; mais mê-
me étant difibut non fans Enfans, £jf tous leurs Enfans François ma les £5? fe--
melles , & leurs Defcendans , premier , z. 3. £5? 4. nez & tous à l'infini ,
fans aucune difliclion de degré , quand même la race , non feulement mafculine , .
mais en général des Rois Catholiques qui feraient alors, ou qui fuccederoient en
quelque tems que ce fait, viendroit à être éteinte, fans aucune exception de cas
penfé ou ignoré , de tems £sf de manière , font exclus £5? déclarez exclus de
toutes les parties de la Monarchie d'Efpagne, prefent es, paffées , ou à venir ,
même des parties féodales , tout de même que s'ils n'étaient jamais nez. Mais ,
pourquoi fuivant cette vaine manière d'argumenter, n'a- 1- on pas auffi
ap-
604 MEMOIRES, NEGQTIATIONS, TRAITEZ,
1701. appelle parle même moïen le Duc d'Orléans à la Succeffion , mais pour-
— quoi a-t-il été abiblumcnt négligé, fi la vérité même n'avoit pas obligé d'a-
vouer, qu'on n'a pas eu d'égard à ion ordre le plus éloigné pour fucceder en
France Se que cependant il eit aufîî-bien que le Roi Très-Chrétien , le Dau-
phin & ion Fils aine, entièrement exclus de la Succeffion d'Efpagne , par la
validité illimitée des Renonciations ? On peut plutôt inférer ielon la Régie
du Droit citée par le Roi Charles que, quoique cette Difpofition ou De*
claration eut été en fon pouvoir, ainfi qu'on voit qu'Elle n'y étoit pas, félon
les Teftamens contraires ; 6c félon le Grand- Père, Se le Père, 6e félon tant de
Loix oppofces, 6c de Conventions jurées, 6c confirmées par le Siège Aposto-
lique; lui-même n'auroit pas voulu qu'Elle fut valable, s'il avoit pu clairement
voir, que la raifon qu'il rapportoit, Se fur laquelle feule la Déclaration étoit
fondée, ne fubfiftoit pas clairement; ainfi, ni le Duc d'ANjou,ni le Duc de
Berry , ne doivent être cenfez avoir été par lui appeliez. Ce qui eft encore la
chofe la plus-injufte 6c la plus abfurde de toutes, eft que T Archiduc fécond Fils
de F Empereur ef appelle , avec /' Exclu/10» de l'Aine le Roi des Romains & fe s En-
fant ^ par la raifon ci-devant rapportée , £î? pour conferver l'égalité, 6c les Filles
d'Autriche font abfolument omifes, en fubflituant enfin à V Archiduc en cas de
mort , le Duc de Savoye Gf fes Enfans. Nous comptons auffi ce Duc entre les
Succefîèurs d'Efpagne, mais après la Maifon d'Autriche: c'eft pourquoi nous
tenons pareillement qu'on lui a fait tort, en préférant deux Princes François
qu'il faloit exclurre , ainfi qu'ils le font. Or quand même nous relierions
dans le filence , il n'y a perfonne qui ne voie que de ne vouloir admettre
d'une autre manière la Maifon d'Autriche de l'un 6c l'autre Sexe, 6c de quel-
que dignité que ce foit à la Succeffion d'Efpagne , & d'en ouvrir l'entrée à
la Famille de France, félon les rares Auteurs d'un nouveau Droit , n'eft au-
tre chofe que dire 6c confefler ouvertement, qu'ils ne veulent pas , s'il dé-
pendoit d'eux que pas une des Loix d'Efpagne, anciennes ou modernes, pas
une des Difpofitions des Rois precedens , 6c pas un des Contracts de Maria-
ge, auifi-bien que d'autres Conventions, plus même qu'ils ne voudraient ,
ibient favorables à la Maifon d'Autriche , 6c nier enfin contre les exemples
anciens 6c modernes que les Rois d'Efpagne n'ont jamais été revêtus de la
Dignité Impériale, ou n'y ont jamais penfé, ou n'ont jamais pu y afpirer.
On ajoute à la fin, non feulement pour conferver la Paix fjf la bonne intelli-
gence entre F Empereur & le Roi Très-Chrétien, mais au fi pour mieux les cimen-
ter par fon Mariage. Il étoit necefTaire au Roi Charles de faire ce qu'on
vient de rapporter pour donner quelque couleur, comme fi par ce Confeil 6c
cette inftance il eut amplement fatisfait à fa confidence lefée , & que tout le
tort qu'il venoit de faire à la Maifon d'Autriche , eut été par-là pleinement
reparé : mais perfonne n'ignore quelle eft l'obligation de chacun pour exer-
cer la juitice , 6c à qui elle doit être rendue ; non plus que ce qu'un Père
doit à les Enfans, 6c un légitime Prince à fes Sujets, auifi-bien que ce que
l'Empereur doit faire, quoique três-afFeclionné pour la Paix, afin d'en jouir
honorablement. Or quelque tromperie ou violence qui ait été faite jufques
ici , ou qui fera faite à l'avenir, Dieu qui eft l'Auteur, le Témoin, 6c le Con-
ferva-.
ET RESOLUTIONS D'E T A T. tfor
crvateur des Traitez affiliera par fon fecours la juftice de la Caufe: les Prin- ijoi.
ces êC Etats de l' Europe , & particulièrement les Protecteurs & Garands dé !a ' ■
Paix des Pirenées, 6c des autres Traitez, , s'élèveront pour reprimer la convoi -
tife demefuréc de la M aifon de Bourbon pour plus d'un Monde. Les Peuples
mêmes, qui -à prefent ne eberiflènt pas plus qu'ils détellent la main étrangère,
qui les opprime, fe fouvenant de la douceur d'Autriche, qu'ils ont éprouvée
par tant de Siècles, 6c en même tems de leur devoir, retourneront bien- tôt
ouvertement à leur première obéïïîance, 6c les perfides Violateurs 6c Infrac-
teurs de la Juftice, Se les Tyrans , avec tous leurs Adhérais , Statellites, 6c
Miniftres , n'échaperont certainement pas aux punitions divines & hu-
maines.
ADVERTISSEMENT.
La plus part des Pièces ont été mifes félon qu" 'Elles font dans leur Original;
Et on a été oblige , pour conferver Je fens^ de faire dans d'autres endroits des Pé-
riodes un peu longues , à quoi le LecJcur efi prié de fupléer.
Don Bernardo de Quiros, après qu'il en eut Fait l'Examen, travailla à
un Ecrit , pour démontrer la Nullité des Droits du Manifefte. Il le fit im-
primer fous un grand fecreti 6c le voici.
REFLEXIONS
SUR LES
Mouvemens de l'Empereur , au iîijet de la Suc-
ccfïîon d'un Prince de France à la Mo-
narchic d'Efpagne,-
AVEC UNE
'Dc'monjlration de la Nullité de fes Trétenjions fur les EJfaçnies ,
Milan, & le T aïs. Bas.
LA Vertu de l'homme ne tient pas toujours contre les grands coups: le plus
ferme chancelle, ou fe trouble, quand ils lui viennent avant de les avoir
prévûs. La Juftice inefpérée que Charles II., Monarque des Efpagnes,
vient de rendre à laPoftérité directe de Philippe IV. fon Père, en remettant
à un Fils de France, fon Neveu, le Thrône dont la mort le faifoit defeen-
dre, eft pour l'Empereur, qui s'attendoit d'y afleoir fon Fils, un Evéne-
ment allez furprenant 6c fenfible , pour croire aifément que fa tranquillité m-
fom. I. Eeee, turelle
6o6 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
1701. turellc en a été interrompue. Les Mouvemens, qu'il fait depuis ce tems-là,
■ font allez connoître qu'il en eft un peu déconcerté. Ce grand Prince parut
magnanime dans les rudes Extrémitez où l'avoit réduit un formidable Enne-
mi} mais, il l'avoit venir vu venir, il le foutint avec force, Se le repoufîîi
d'une manière glorieufe , aidé de fa bonne Caufe 6c de fes Amis. Au-
jourd'hui, qu'une Roïale Succeflîon , échappée de fes mains, tombe fou-
dainement, & contre fon attente, dans celles de l'Héritier légitime, & dans
une Augufte Muifon qui lui fait ombrage , il ne faut pas s'étonner qu'un
grand 6c impreveu Evénement ait un peu rabattu de cette Modération qui l'a
autrefois fait admirer, 6c de cette égalité de Juftice qui a toujours été l'étoi-
le de fon Régne. Pas content de fe plaindre aux Princes de l'Europe, il
les follicite d'entrer dans des Intérêts qu'il fe forme fans raifon : il arme , il
tâche de faire des Ligues, pour traverfer une Succeffion que les Loix du Sang
& de la Nature, 6c celles de cette Monarchie, autorifent, quoi qu'elles foïent
les mêmes qui ont mis ce Sceptre aux mains des Princes de fon Augufte Mai-
fon, 6c par qui il rentre aujourd'hui en une autre, fur le même principe , &c
par la même voie. Mais, fi le Ciel fut favorable à ce grand Prince, quand
il défendoit le fien, en rendant inutiles de terribles efforts d'un Ufurpateur
infidéle, la mauvaife réuffite de celui-ci, qui attaquoit injufteraent , eft un
Exemple inftruifant pour détourner ceux qui courent aux armes par un ref-
fentiment mal fondé.
Les deffeins d'un Prince, que de vains prétextes animent, font fouvent
renverfez par cette Puiifance fouveraine qui préfïde aux Armées. La pafîïon
peut fomenter une Guerre, 6c jetter celui qui l'entreprend, dans de fâcheux
embarras : la main pourtant du Seigneur n'eu pas toujours tendue pour l'en ti-
rer. On connoît l'équité, la fagefle, 6c la douceur du tempérament de l'Em-
pereur ; 6c l'on attend de ces grands caraétéres , des réfolutions modérées ,
6c un dégagement des préjugez humains qu'on peut lui avoir infpirez. On ne
peut p:.s même croire qu'un Prince pacifique veuille troubler cette Paix éter-
nelle que l'Union indifibluble de deux Monarchies va affermir pour le repos
de la Chrêtienneté. D'ailleurs, ce grand Empereur ne peut ignorer que le
Roi Très-Chrêtien veut rendre fa mémoire immortelle, autant par faire ré-
gner la Paix pendant 6c après fa vie, qu'il. l'a rendue par un long cours de
victoires -, 6c que ce puiflant Monarque ne fouffrira pas qu'on détruife un Ou-
vrage qu'il n'a achevé que pour ce louable delîein de la tranquillité publique.
Il a cédé, en cette vûë, aux importans avantages de fon Roïaume } il a re-
noncé généreufement à de grands Etats, 6c à des Couronnes qui alloient s'u-
nir à la fienne par l'exécution du Partage concerté: toujours pour établir èc
cimenter cette fainte Paix, qui fait fou point de vûë. ïlvoïoit, par les dif-
pofitions des Princes , qu'on ne pouvoir déchirer la Monarchie d'Efpagne
fans violence, oc fans porter le feu dans le voiiinage. . Il voïoit que l'Europe
alloit devenir le Barreau tragique où l'on eût dû plaider, avec Pépée, la caufe
de ce Partage : mais elle lui tomba des mains des qu'il apprit , par le Tefta-
ment de l'Augufte Charles II. l'on Beaufrcre, le tendre lbuvcnir qu'il avoit
eu pour fon Neveu, Enfant de France, 6c la juftice qu'il rendoit à un Del-
cendant
ET RESOLUTIONS D'E T A T. 607
cendant de Phili ppe IV., en l'appcllant à la Couronne. Et quoique cet- I701-
te Difpofition régulière n'étende en rien les bornes de la France, il en a bien ' '
voulu poftpofer l'agrandifïêment au dernier défir d'un Beufrere mourant, 6c
à la confideration du calme de l'Europe.
Vouloir donc traverfer le digne projet d'un fi Grand Roi, ce fera l'irriter
vivement. La force de fes Armées, (es fages Confeils à les faire agir, fes Fi-
nances inépuifables, enfin fa puifTance 6c là bonne fortune, font des confédé-
rations, juitifiées par le tems paffé, capables de faire tenir la bride aux con-
feils précipitez de ceux qui veuillent troubler la fête du Couronnement de fon
Petit-Fils. S'il a accordé ce jeune Prince, qu'il aime tendrement , à la voix
mourante de cet Augufte Oncle qui l'appclloit , aux initances de tant
d'excellens 6c prudens Seigneurs, qui font la grandeur 6c l'ornement de la
Nation Efpagnolej aux vœux empreffez des Peuples de ce vafte Empire,
qui tous demandoient, félon leur Loi, un Roi defcendu de la Tige Roïale:
c'eft pour l'y maintenir de toutes fes Forces, qui n'ont pas plié autrefois con-
tre tant de Puiflances conjurées contre lui. Le caractère connu de ce grand
Roi, eft une pénétration fans égale, accompagnée d'une prudence confom-
mée dans le choix d'un Parti à prendre, 6c une réfolution 6c fermeté inébran-
lable à le foûtenir. Ainfi quiconque entreprendra de rompre le plus facré
nœud de Paix 6c d'Union qui ait jamais été ferré depuis la naiffance de deux
Monarchies, doit s'attendre de trouver en tête un Louis XIV. armé, 6c cou-
rant aufecours de fon Petit- Fils 6c des Efpagnes, qu'il défendra déformais avec
la même vigueur que fa propre Couronne : 6c les Forces unies de ces deux
Monarchies font afiez redoutables pour faire revenir la modération 6c la pru-
dence à ceux qui méditent préfentement le défordre 6c la confufion.
Princes vofins, qui êtes peut-être follicitez de favorifer le mécontentement
d'autruij 6c vous Electeurs d'Empire, qui par l'Article XI. de la Capitula-
tion Léopoldine, devez confentir à la Guerre: c'eft à vous à bien pefer , s'il
eft de la convenance -de vos Etats d'y prendre part. Vous devez même,
avant tout , faire attention au fondement de la Caufè; puifque le Ciel be-
niflant les Forces humaines, décide fouvent en faveur de la jultice, qui n'eft
point du côté de l'Empereur, dont les prétenfions paroilTent creufes 6c (ans
poids. Il eft vrai, que fes Miniitres ne les proiuifent encore qu'en bloc, 6c
par des proteftations générales , fondées fur des titres que Sa Majefté Impé-
riale doit avoir pour la Succeffion aux Roïaumes des Efpagnes , 6c qu'à
l'égard du Duché de Milan il doit être, félon eux, caduc 6c réuni à la
Couronne Impériale, parla mort de Charles II. Oins Enfans: même fi
l'on doit écouter des bruits répandus, fa Majelté prétend auiïi la caducité du
Duché du Haut Gueldre.
Qui confidére la foiblefle de ces prétenfions, 6c ne fait pas que l'Empereur
poffede un grand fond de Religion, pourroit croire qu'on lui a infpiré la
Maxime de Tacite.- Sua retinerc privata domûs, de alienis certare^ Regiam ef. Lib. <.
fe laudem. On fçait pourtant qu'il eft trop attaché aux Maximes 'du Ciel Annal-
pour écouter des leçons Païennes. Celle de St. Grégoire eft fins doute Lib. w>.
plus convenable à fa pieté : Summum in Regibus bonum effe juftitiam cokrs, Epift.
de fua cuique jura fervare. txo.
Eeee 2, Et
<So8 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
1701. Et c'eft par celle-ci , qu'en attendant que fon Manifefte , vanté par les
" ■■ Nouvelles d'Hollande , paroifle , on ne croit point l'offenfer de faire par
avance quelques Réflexions fur les titres dont on flate fes prétenfions.
Pour PEfpagne, on convient univerfeliement que le Roïaume efl fucceffif.
Je me fers de ce terme pour décliner cette Diffërtation-inutile au fujet , (ba-
voir j Si la Succeffion des Efpagnes tombe fut les Defcendans par voie héré-
ditaire, ou par les Loix du Sang: recherche curieufe, où les Sçavans de la
Nation, partagez en fentimens, raffinent fans neceffité , mais qui ne change
pas le fifteme de notre queftion : Non pugnat enim ut roque modo Juccederc.
Martha Succejf. q. 1. art. if. ». 14. par. 4.
On convient encore, que la prérogative êc la primogeniture des mâles a
tout l'avantage de la Succeffion à la Couronne : mais il n'eft pas moins cer-
tain que, ceux-ci manquans, elle ne tombe fur la tête d'une Fille, fous l'a-
vantage de la primogeniture , s'il y en a plufieurs. L'Efpagne a toujours
écouté en cela la voix de la Nature , qui parle pour les Delcendans , fans
exclufion de fexe: Loi jufte 6c naturelle, confirmée par le Droit écrit, que
les Goths, autrefois pofféffeurs de ce Roïaume, ont mis au rang des leurs.
Ludovic. Molina /'» annot. ad finem fui operis adjeèlis n. 1. ad fine m verf. po-
firemo ctiam Gothi,
Ce ferait même un crime littéraire de douter de cet ordre de fucceder ,
après que les plus célèbres Ecrivains de cette fige Nation l'ont affiné en
tant d'endroits , Se qui ont pour fondement les Conftitutions du Roïaume.
Covarruv. Var. lib. 3. cap. f . ». f. verf. rurfus feptimo.
Ce n'eft. pas une différence , que ce DocTreur traite de Majorats : car ceux-
ci fe règlent fur l'ordre de fucceder à la Couronne, 8c le raifonnement de l'un
à l'autre efl également reçu. Orena difftrt. Jur. 4. «. 27.
Peinez^ qui eft au rang des premiers Docteurs d'Efpagne, en fon excel-
lent Traité fur les Majorats, tient comme les autres pour conclufion infail-
lible, que les Filles fuccedent aux Roïaumes des Efpagnes, en même rang
que les mâles, quand ceux-ci manquent, parla Loi H. tit. 6. livre f. Re-
copilat. Pelaez de Majorât, par. i.q. 6. n. 106.
Si par un faux raifonnement on oppofe que cette régie p:ut avoir lieu , lorfi-
qu'il n'y a plus dePrinces de PAgnation ou de la Famille Roïale> que Char-
les V. a eu deux Fils , Philippe II. ce Ferdinand ; que la pofterité
mafculine du premier e(t finie par la mort de Charles II. ; que l'Empe-
reur régnant eft defeendu du fécond ; & qu'ainfi cette Ligne d'Agnation exi-
flente aujourd'hui , excîud les Defcendans de Philippe IV. par l'Infante
Marie-Therese Reine de Fiance. Si, dis- je, on forme cette objection,
la Mailbn d'Autriche perd la caufè > parce que , quand Philippe Père de
Charles V. fucceda à la Couronne d'Efpagne par fit Femme Jeanne "Fil-
le du Roi Ferdinand, il ne manquoit point d'Enfans mâles des Familles
collatérales de CafHllc Se d'Arragon , qui habilitent encore aujourd'hui ,
& qui félon l'objection erronée , excluoient la Maifon d'Autriche de la
Succeffion.
Oeil donc une vérité confiante , que Philippe I., Prince d'une Maifon
étrangère, n'a eu d'autre Droit à Efpagnc que celui de fa Femme , & que
Char-
ET RESOLUTIONS D'E T A T. 6c9
Charles V. n'a été aflîs fur le Trône, que par le titre de fa Mcre, par pré- ijoi,
rogative de Defcendante du dernier Roi. • ^ -
Ainfi l'on doit conclure, que fi Charles V. a été Roi légitime des Ef-
pagnes de par la Reine Jeanne fa Mère, à l'exclufion des Collatéraux de
l'Agnation de Callille & d'Arragon, l'Empereur doit fubir la même Loi dans
lés Defcendans & la Ligne effective de Philippe IV., qui font de la tige
direéle de Philippe II., dans laquelle le Sceptre des Efpagnes eft enraci-
né, depuis que Charles V. fe dépouillant de la Couronne, la mit fur la
tête de fon Fils Philippe.
Là decifion de ce fameux Compromis entre Frédéric , Fils naturel de
Martin Jacques d'Urgelles, ôc Ferdinand de Callille, eft encore une
preuve convaincante de l'exclufion des Collatéraux , de l'agnation ascendan-
te, lors qu'il y a des plus proches de la tige où la Couronne a pane, fuis
différence du iexe j puifque, fans confiderer l'agnation de Jacqjjes, qui
étoit Fils de Jean Oncle paternel de Martin défunt, Ferdinand
de Cartille fut légitimement préféré, comme Fils de Leonore Sœur de
Martin.
Jugement établi fur la règle fondamentale du Roïaume, qui excîud l'agna-
tion collatérale quand il y a une proximité defcendante ou fuperlative , mê-
me en la Perfonne d'une Fille Roïale , ou dans fa patienté. Lixealem enim
SucceJJiomm , ait Mariana , iîa in Hifpmiis placuijfe , ut fororis filins iis qui
fratre , Jed remotiore gradu veniebant , prœferrelur , lib. 15". cap. 13. lib: 10.
cap. 21. lib. 20. cap. 2. 8. Additionator ad Grotium lib. 2. cap. 7. in fine.
Les raifons que le Jurifconfulte Gonfâlve Gariîa de Ste. Marie donna au
Public , pour appuier la jufticc . de cet ordre de fucceder . eurent tant de
poids, que le Roi Alphonse y ajouta celui de fon Autorite , & lui donna
force de Loi. Un autre Jurifconfulte ancien , dit & appuie une penfée re-
marquable là-deffus. Le Roïaume (dit -il) ne paffe pas au mâle, à caufê
qu'il eft du nom & agnation du Roi , mais parce qu'il efb fon Fils. Etre
donc de l'agnation du Roi défunt , ne contribué' rien, & ne donne aucun
titre à la Succeffion Roïale, où il y a filiation, de laquelle l'Agnat collatéral
n'eft pas. C'effc ainfi que raiforme Oldradus de Ponte Cou fil 94. n. zi.
Que l'Empereur régnant £t l'Archiduc fon Fils, foient donc defeendus de
Ferdinand , Frère de Philippe II. , cela ne conclud rien. La Monar-
chie d'Efpagne a paffé à celui-ci , Se elle y a fait fouchc, pendant que le Frè-
re en a fait un autre en Allemagne. Et tandis que la filiation, Descendance,
& Pofterité de Philippe II. comme elle fait en la perfonne du Dauphin ,
Se des Princes fes Enfàns , venus en Ligne dùccte de Philippe IV. > ce fe-
roit une intrufion monftrueufe de vouloir placer des Collatéraux où la nature,
& les vœux communs dés pères appellent les Defcendans. Velafquez CW-
Bl.i\.n. 4.7. Tranchedini Milanenfis Confil ff. ». 33.
Il eft vrai que l'Empereur defeend de Charles V., qui a porté le Scep-
tre des Efpagnes, 6c qu'il eft de la pofterité mafeuline : mais après que les
Enfans de Charles V. ont fourché, 6c fait deux Lignes différentes , que
les Efpagnes ont paflé à Philippe IL, qui n'eft pas le parent afeendant dé
Eeee 5 l'Em-
<Sio MEMOIRES, NEGOT1ATIONS, TRAITEZ,
ijSU l'Empereur régnant} tout le tems que cette Ligne effective & directe de
. » i ■■«■ Philippe II. fubfiftera, la Ligne contentive , qui eft. collatérale , ne peut
pas entrer en Succeffion de celle de Ferdinand, qui elt la Ligne- effecti-
ve; par ce principe certain, que tandis qu'une ligne n'eft pas éteinte , l'au-
tre n'y peut entrer, quand même ceux de la Ligne où là Succeffion "cil: def-
cenduë , feroient en degré plus éloigné, par rapport à la première tige.
Martha de fuccejf. Légat, par. 5. quaft. 1. art. z. n. 46. Florez de Mena ad
decij. Gamme jfp. verf. quint a efi. Ramon Confil ioo. «. 484. Le iexc ne
faifant en ce cas différence aucune, ni par la Loi de la nature, ni par le Droit
écrit, ni par la coutume de fucceder aux Roïaumes des Eipagnes , qui paf-
fent toujours aux Defccndans de celui qui les a poffèdez, aux mâles s'il y en
a, £c aux Filles a leur défaut } & s'il n'y en a pas, au plus proche du dernier
qui a porté la Couronne, fans confiderer l'agnation collatérale de la tige fu-
perieure. Molina de Majorât. îib. 1. cap. 2. n. ix. .&f lib. 5." cap-, p. «. 71.
Baetiac/e non mellor. cap. z]. ». f. Martha de fuccejf. par. 1. q. 11. art. 1.
». 18. 2,0. Legibus Hifpania Ï3 aliis authoritatibus probat Pater Ludov. Mo-
lina de Juftitia 6? Jure difput. 6if. ». 3. Lopez lih. 3. tit. 13. par. 3.
verbo Mugeres.
Soit donc qu'on rafle attention à l'exemple, au Droit naturel, à la Cou-
tume-& Obfervance du Roïaume, l'agnation collatérale de Philippe II.
eft exclue de la Succeffion, tandis qu'il y a des Defcendans de fa Ligne, fins
différence du Sexe, à défaut de mâle dans ladite Ligne, dont la Pofterité
continue aujourd'hui en la perfonne de l'auguite jeune Prince Philippe
de France, que Charles II. fon Oncle de glorieufe mémoire a ap-
pelle à la Couronne, ôc en faveur de qui Monfeigneur le Dauphin a bien
voulu céder.
S'il y eût, comme on publie, quelque Pacte de Succeffion réciproque en-
tre ces deux Branches Efpagnole Se Allemande , qui donnât l'exchffîon d'un
Enfant defeendant , en faveur d'un mâle collatéral; cette convention fuccef-
Ibire auroit le même fort que celle entre les Rois d'Arragon & de Majorque ,
laquelle pafla pour nulle Se invalable. Mierez de Majorât, par. 4. qiuejî. 1.
n. 217. in fine.
Ces Pactes de Famille & de Succeffion de l'une à l'autre font pofitivement
reprouvez par la Loi f 2. §. idem répondit-il primo pro focio , où le grand Papi-
nien condamne le contraft qui préfere le plus éloigné au plus proche , en
matière d'hérédité ou de Succeffion. S'il le trouve cependant des Provinces
qui en reçoivent l'ufage, cela ne fait pas une confequence neccflàire ailleurs,
ni en cas" de Couronne, bien moins en celui de la Monarchie d'Efpagne.
Ntillitatem pacli talis lati filme demonfirat Tranchelini Conflit. z6.
Pour légitimer des Dilpoûtions Contractuelles , ou Teffamentaires, il faut
le concours de deux choies eflentielles , la volonté , :&C le pouvoir : Or les
Rois d'Efpagne font Adminiftrateurs du Roïaume , mais ils n'en font pas
Seigneurs pour en difpoferà leur volonté. Le Roïaume eft le premier •& le
Chef des Majorats, & ceux-ci étant inaliénables, le Roïaume l'eft de mê-
me. Pelaez par. 4. quafi. 1. n. 240. &f Jeq. Non enim perjona efi Regnum,
fed
ET RESOLUTIONS D'ETAT. 6n
fed Regiœ Majeftatis , fcf ideb de illo contra Leges Regni irmtilïter difponeret : i-jùi,
ibidem ». 230. Les Loix du Roïaume, conformes en cela au Droit naturel , —
6c à celui de l'Ecole, déférent la Couronne aux Defcendans du Roi qui l'a
portée le dernier, «ou à fon plus proche , fans exclufîon des Femmes, quand
il n'y a pas- de mâles, 6c elles ne reçoivent point de collatéral agnat , ou au-
tre, tandis qu'il y a pofterité de la Ligne ou elle eft entrée. Reyn. lib. p.
tit. i. p. z. i. z. tit. if. pag. 2.. I. a. tit. n. pag. 3, Gregor. Lopez lib. o.
tit. 7. pag. 2. Velafquez confit. 97. ». 104. &? feqq.
Ces Loix font fondamentalles Se inaltérables, parce qu'elles font attachées
à la Roïauté. Carolus Tepia decif.-zo. an. 1. ufque ad 20. Stirnius de conflit.
Princip. tit. 4. §. 9. Régna enim Hifpaniarum non tam funt Régis, quant Rè-
gne Dignitatis, ideoque non valet difpofitio de illis à Rege facla contra Leges Re-
gni. Poft Abbatem Roxas de incompatib. in appendice ad partent 8. cap. 2. ».p.
Lopez antecitat. loco per omnia Scholia. Les Roïaumes palfant donc à la po-
fterité defeendante de la Ligne où la Couronne eft entrée} toutes les paétions
qui fe font contre les Loix de la Succeflîon , font reprouvées. Benedici. in
cap. Raymitius verbo in eodem Teftamento n. ifo.
Les Efpagnols ont eu pour Rois, des Caitillans, des Arragonois, des Au-
trichiens , qu'ils ont également rêverez , parce qu'ils étoient defeendus du
Sang Roïal, 6c que la Couronne leur étoit due : Mais , ni la Raifon d'Etat,
ni le bonheur des Peuples, ne les lie précifément à aucune Maifon Souverai-
ne. C'eft aflèz pour eux qu'elle paffe à celui que le Sang & la Loi appellent.
Si ceux de cette dernière Maifon qui ont été fur le Trône, les ont gouvernez
avec douceur, ils en ont béni le Ciel, & ils lui addrefferont prelentement
leurs prières les plus ardentes, pour que celui de la Maifon de Bourbon, que
l'ordre de fucceder leur donne aujourd'hui, panique auffi, pendant fon régne,
les Roïales vertus des Auguftes Héros dont il eft forti.
Ce n'eft donc fur aucun pacte de famille que l'Empereur puiflè appuïer le
fondement de fes prétendons : En vain produira-t-on en là faveur quelque
Teftament dePmLipPElV.,ou d'autre Roi qui puiûe avoir ordonné une fub-
ftitution de la Maifon d'Autriche Allemande à celle d'Efpagne, en défaut de
mâles : Les Raifons font les mêmes pour la nullité des fubititutions , comme
pour celle des pactes de familles. Toutes les difpofitions Contractuelles , ou
Teftamentaires , qui fe font contre l'ordre de fucceder à la Couronne , font
des actes inutiles , 6c fans force j parce que les Rois n'en font que les Admini-
ftrateurs , 6c nullement les maitres 6c les arbitres abfolus : 6c comme ils ne
peuvent pas inftituer autre que celui que le Sang appelle. Baldus in L. ex hoc
Jure n. 11. d. de Juflitia & Jure, & Confit. 27$-. n. 6. lib. \.& in C. unico de
feudo Marchiœ & cap. §. 1. hoc quoque -defuccejf. feud. ibi quod filius non fuc ce-
dit patri in Regno , fed ipfum evellit à manu populi vi confuetudinis , au t potins
à jure gentium , quo communi confenfu conflit ut uni eft régna fuccefjiom ckferri.
Tradit latè Peralta in L. 3. §. qui fidei commiffum ». f2. & 95. d. de haredib.
inflit. Ils n'ont point par confequent le pouvoirde fubftituer. Subftitutio enira-
illi prohibetur, cui inflit uere non permit titur.
Le Diadème d'Efpagne ne fut jamais une matière de volonté des Rois.
Les
6it MEMOIRES, NËGOTIATIONS, TRAITEZ,
1701. Les Grands de -cette Monarchie ne pourraient même foufrrir que l'objet Je
' ■ -"- leur vénération devînt le caprice d'un Roi : leur fidélité eft inviolable, mais
elle ne s'accommode guéres avec le renverfement des Loix, qui ne permet-
tent pas qu'un Roi , vivant ou mourant , puifle difpofer de fes Etats contre
les Régies de la SuccefTion naturelle , au rapport de Molim, Mierezy Paz,
Roxas , & de tous les meilleurs Ecrivains de leur Nation : Maxime qui n'a
pas été ignorée de cet ancien à Monteferrato , qui traitant la matière des Suc-
celîîons Roïales, à l'occafion de celle de la Maifon d'Orléans , confirme leur
fentiment.
Si l'on dit que Chaules II. de gloricufe Mémoire a fait une Difpofition
teftamentaire de fes Roïaumes Se de fes Etats , Se qu'on tire confequence de
là , que les Rois ne font pas bornez : Je répons, qu'il n'a pas forti des Loix
qui en règlent la Succeffion à l'égard de l'Héritier du Sang qu'il a nommé. Il
eft vrai que le Dauphin , & après lui le Duc de Bourgogne, conformément
à ces Loix, auraient dû régner en Efpagne, Se dominer dans les autres Etats
du Roi défunt : Mais comme c'eft une maxime d'Etat en Efpagne , bien ou
mal fondée, que la poffeflîon de deux Monarchies eft incompatible en même
perfonnej ce Roi confiderant que l'un ou l'autre de ces Princes , ou tous les
deux fucceflîvement, doivent, félon l'ordre de la mortalité , remplir le Trô-
ne François, il a fatisfait à même tems à cette maxime, à la juftice, Se à la
Régie de Succeffion, qui appelloit les Enfans de fa Sœur confaqguine, Fille
du Roi Philippe IV. en choiflant celui qui félon l'ordre de la nature ne doit
pas porter la Couronne de France : Et fi par quelque événement elle vînt à
tomber fur fa tête, il a pourveu à la prétendue incompatibilité de deux Mo-
rarchies, par la nomination du Duc de Berry , dernier Fils de fa Sœur. En
tous cas , fi la difpofition de ce Roi , qui préfère le fécond Fils de Monfei-
gneur fût oppofée a l'ordre de la Succeflion d' Efpagne, ce ferait à l'égard de
l'Empereur l'exception d'un tiers, Se nullement la fiennej puis qu'il n'eft pas
SuccelTeur ab inteftat.
D'ailleurs ceux qui y ont intérêt aïant confenti , comme ils ont fait , la
difpofition fubfifte, & ne répugne pas aux Lois de la Monarchie , le Prince
nommé étant Fils du Succeflcur légitime.
Lors qu'en matière de Fidci-commis deftiné à une famille par ordre fuccef-
fif, le Teftatcur le trouble, en appcllant un plus éloigné, quoique compris
dans la vocation , il ne viole pas la Loi de la volonté du Fidei-committent,
il intervertit feulement cet ordre : Préjudice qui regarde le plus proche, fon-
dé de reclamer , fans qu'un autre plus éloigné foit en Droit de fe plaindre.
Bellonus junior Confil. 1. ». 35". j6.
La Renonciation du Dauphin , & du Duc de Bourgogne, qui font ceux
que l'ordre fucceflif appelloit, étant donc une réfutation efFeétive , en faveur
d'un compris dans la vocation de la Loi du Roiaume, perfonne ne peut cri-
tiquer La volonté de l'Augufte Défunt. Giurba de Jeudis cap. u8. § 1. G lof.
14. ». 10". 17.
Ce ferait aujourd'hui une objecuon inutile , d'oppofer la Renonciation de
Louis le Grand, après la force des raifons données au Public pour preuve de
fa
ET RESOLUTIONS D'ETAT. tfij
Ci nullité, & après qu'un Juris-Confulte Hollandois a montré depuis peu, par 1701,
des autoritez folides, qu'en la fuppofant valable en faveur de Charles II. & " ' ■
de fà pofterité mafculine [fi Dieu lui en eût donnée] elle n'ôtoit pas aux En-
fans de la Reine Marie-Therese le Droit légitime de fucceder ab inteftat
au défaut des Enfans, qui en étoient l'objet Sç la caufe finale.
Mais qu'ell-il befoin d'autre témoignage , que celui que ce pieux Monar-
que défunt vient de rendre lui-même , en un tems que les confideratiohs fur
l'Eternité l'emportent fur les humaines, quand par fon Teftament il a fait
connoître à toute la Chrêtienneté , que le refultat Se l'avis des Confultes d'E-
tat 6c de Juftice que Sa Majefté a faites, a été, que les Loix du Roïaume dé-
feroient la Couronne à la pofterité de la Reine de France fa Sœur, Mère de
Monfeigneur le Dauphin, nonobftant la Renonciation.
CesSçavans du Roïaume, qu'il a afîemblez pour mettre fa confcience en re-
pos, & pour fe conformer aux Loix dans la deiîgnation de fon Succefleur ,
en connoiflent trop les fondemens 6c la force, pour pouvoir douter de la ju-
itefTe de leur Réfolution folemnelle ; & leur réponfe eft un argument de con-
viction fans le lècours de l'autorité des Livres.
Les raifons, qui détruifent la prétention de l'Empereur fur les Efpagnes, dé-
couvrent la foiblefle de celle fur le Païs-Bas, fi quelque mal inftruit lui en eût
jnfpiré quelqu'une. - Perfonne n'a jamais douté que toutes Se chacune Provin-
ce, dont ils font compofèz , ne ibient Héréditaires : Elles font devenues un
Corps , par Union fucceffive d'une Province à l'autre, par Mariage, ou Hé-
rédité, excepté quelques-unes venues par achat ou acquifition. Les Fem-
mes ne furent jamais exclues de la Succefllon en défaut de Mâles. Au contrai-
re, ces Provinces ont parle à la Maifon de France- Bourgogne, par le moïer»
d'une Femme Héritière , ôc de cette Maifon à celle d'Autriche par la même
voie de Mariage de Maximilien , qui époufa Marie Fille de Charles de
Bourgogne, Héritière des Païs-Bas. Après ces deux exemples, qui ont fait
le Titre de la Maifon d'Autriche , ce feroit un foin inutile de faire voir par
détail que chacune de ces Provinces eft Héréditaire , & qu'elles ont pane , à
défaut de Mâles , aux Femmes ., & toujours aux Héritiers les plus proches.
Zypeus contra Cajfanum, Mireus, Hazeus, & alii.
Tant de gens éclairez, qui compofent l'Etat & les Tribunaux de ces Païs,
connoiflent cette vérité fi foncièrement , qu'ils ont applaudi folennelement à
la juftice de l'intronifation de Philippe V., lorfqu'étant infinuez de laDifpo-
fition teftamentaire de leur Augufte Roi défunt, ils ont répondu qu'elle étoif
conforme aux Loix de Succefllon de leur Païs.
Enfin , vouloir combattre une Difpofition fi légitime, ce feroit fe former des
idées metaphyfiques , & des êtres de raifon, qu'un fage Empereur n'eft pas
capable de produire.
Les pretenfions fur le Duché de Milan, que les Miniftres de l'Empereur
prônent avec éclat dans les Cours des Princes pour, attirer des partifans , ne
fervent que de prétexte à ceux qui fe forment des fraieurs 6c des fpeélres
pour l'Union de deux vaillantes Nations, & qui établifient leur fortune dans
leur Difcorde.
Tm. I. Ffff Mi-
614 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
I70[i Milan (difcnt-ils) eft un Fief de l'Empire : l'Auguftc Vaflal, qui le pofie-
» 1 doit, eft mort fans Enfans: donc, l'Empereur, Seigneur directe , peut faiûr
ce Fief, du chef de la caducité.
Lorfqu'il s'agit d'une métairie , ou de quelque petite Gentilhommière, le
Seigneur directe n'emploie pas beaucoup de formalité pour la préhenlîon du
Fief> l'intervention de quelques Pairs de fa Cour, & l'envoi d'un Receveur
en achèvent la folemnité. 11 n'y a pas les mêmes facilitez pour le Milanois,
où il faudra quarante mille bons Huiiîîers pour faire l'exploit.
Philippe V. Roi des Efpagnes , en eft le Poflèflêur : Il ne convient pas
du Sillogifme des Mini lires Impériaux. Il n'eft pas d'accord de la propofi-
tion majeure, ni de la confequence : appuie de la juftice de fon Droit. Il
retient une poflefllon qu'il croit légitime : il eft en état de repoufler les Ex-
ploiteurs par foi-même, aidé d'ailleurs d'un Augufte Avocat, qui eft celui du
monde qui appuie plus fortement une caufe , 8c qui pratique le mieux les
deux chofes que l'Empereur Juftinien recommande au commencement de fes
Inftituts. Par delTus la fçience du Droit public , il poflède fuperlativement
celle des Canons & des Fiefs Majeurs. Il voudra, avant d'entrer en la quef-
tion principale, en agiter deux préliminaires. La première, fi l'Héritier du
Vaflal (en iùppofant une caducité, qu'il nie formellement ) n'a pas Droit de ré-
tention , pour les impenfes 8c les deniers expofez à munir 8c défendre le Fier.
Le Paragraphe fi Vafalîus au titre ht c finit ur Lea Feud. lib. 2. décide claire*
ment que le Seigneur directe eft obligé de paier à l'Héritier du Vaflal les me-
liorations & les impenfes que celui-ci a faites pour l'augmentation , ou pour
la confervation du Fief} 8c l'on convient univerfellement qu'il y a pour cela
Droit de rétention. Richters Felitat. Academicar. tit. de Jure rctent.fub §. 16.
eirca mcd. Et quand le Fief eft une forterefle qu'il a fallu munir par des Bâti-
mens & Fortifications, 8c pour laquelle le Vaflal a dû faire dépenfe pour la
défendre contre quelque Ennemi , l'Héritier du Vaflal a Droit de rétention
jufques à ce qu'il foit definterefle. Schraderus de fendis là. part. $<e. partis
principal. Je 51 '. z. n. 22. 25. Menochius recuper.pojjejf. remed. 11. n. 18.
Or Philppe V. étant Héritier médiat des Philippes qui l'ont précédé
dans la Monarchie d'Efpaghe , 8c immédiat de Charles II. s'il y eût ca-
ducité du Duché de Milan, que non, il ferait en Droit de retenir le Fief
jufques à reftitution de tant de millions emploiez aux Fortifications 8c defen-
fe des Places de ce Duché, 8c des fommes immenfes confommées aux Fortc-
refles de Morbegno , Sondrio, Neva, Riva , 8c de tant d'autres, 8c em-
ploiées dans la Guerre de la Valteline, qui n'a été foutenuë par les Rois d'Ef-
pagne, que pour la fûreté du Milanois.
Ces fommes, dira-t-on, ne font pas liquidées , 8c l'on conclura, par des
maximes vulgaires, que la rétention ne peut être appuiée que fur des pré-
tenfions liquides. Il eft vrai que le calcul n'en eft pas fait , 8c qu'à peine
f)ourroit-il fe faire, pour Pexceflive quantité de la dépenfe , laquelle lurpaflè
'Arithmétique: mais parce que les Fortifications des Places font de notorié-
té publique, que l'Hiftoire prouve l'origine 8c la durée des Guerres foutenues
pour la deffenle 8c la fûreté du Milanois } d'ailleurs le Tcftament que Char-
les
ET RESOLUTIONS D'ETAT, 615
les V. fit à Bruxelles, eft une autre preuve de l'exceffive dépcnie que les 1701.
Roiaumes d'Efpagne ont fournie pour conquérir 5c garder le Milanois , la —
prenant pour motif de la ceffion qu'il en avoit faite à Ion Fils Roi d'Efpagne.
Tant de preuves fumTent , pour que la liquidation précife ne foit pas necef-
faire pour fonder le Droit de rétention. Rofenthal de feudis, conclu/. 43,
». 138.
Ce fentiment , dit ce fçavant Ecrivain , eft celui des plus fameux Doc-
teurs, 6c c'eft auffi le fien, lors qu'il y a des circonftances & de l'atention à
faire par rapport à la chofè, 6c aux perfonnes: Dans le cas , fi le Roi d'Ef-
pagne ( toujours dans la fuppofition metaphyfique de caducité ) abandonnoit
le Droit de rétention, il ne pourrait contraindre l'Empereur à la reftitution
de ces impenfès que par une groffe Guerre : Circonftance qui le difpenfcroit
d'abandonner ce qu'il ne pourrait recouvrer que par un épuifement de finan-
ces, & par l'effufion du Sang humain.
Ce n'eft pas même faire tort à la grandeur de Sa Majéfté Impériale, fi l'on
croit que la longue Guerre qu'il a glorieufement foutenuë contre le Turc, a
vuidé les coffres, 6c qu'il n'eft pas en état de païer tant de millions qu'il con-
viendrait de rendre àl'Efpagne: Et partant l'Héritier du Vaffàl n'eft pas obli- _ -
gé de fe dépouiller du Droit de rétention du Fief. Hartman. pifior. lib. z.quœfl.
far. z. queft. 42.. ». 10. 14.
La féconde Queftion Préliminaire demande auflï beaucoup d'attention. El-
le eft, fçavoir, fi le Seigneur directe n'eft pas obligé de donner l'Inveftiture
du Milanois au Roi Philippe V. qui n'eft pas feulement Héritier écrit de
Charles IL, dernier PofTefleur de ce Duché , mais encore un Defcendant
directe de Philippe IV., 6c de la Ligne où ce Duché eft entré depuis Phi-
lippe II. ; 6c s'il peut la refufer lors qu'il la demandera: Le cas n'eft pas nou-
veau auprès des anciens Pères de la Jurifprudence j 6c Decitis^ qui eft un du
premier ordre , refoud que le Seigneur directe eft tenu d'en inveftir le plus
proche Defcendant. Confil. 131. Et cela fans différence d'agnation ni de co-
gnation. " Ruinus Confil. tfi.'n. 16. vol. j.
Auguftin Beroius , qui eft encore un ancien Docteur de la première claflê ,
traitant la queftion de caducité de Montferrat par défaut de Mâle Defcendant
de la Ligne des Paléologues , répond que le Seigneur directe eft obligé de
donner l'Inveftiture à une Princeflè Defcendante, quand il n'y a pas de Mâles
de la même Ligne où le Fief eft entré. Confil. 6j. ». fi.vol. 1 . ,
Difant que fi le Seigneur ne le fait pas, la Fille Defcendante en peut appcl-
ler : Il oublie de nommer le fuperieur d'appellation j mais en cas Souverain,
je crois que c'eft au Tribunal d'une longue 6c roide épée.
Tyraqueau, autre fameux Docteur , fait un long récit de ceux qui tiennent
cette opinion , qui eft aufîî la fienne de retrait, in prœfat. ». 41. Ce fera, en
ce cas, un Mâle Héritier 6c Neveu de Charles II. Petit-Fils de la Fille d'un
Duc de Milan, en faveur de qui le Père , Enfant de cette Fille, a refuté le
Fief qui demandera l'Inveftiture, 6c à qui elle ne peut pas eftre refufée , h
demandant dans l'année , félon la Confultation de cet excellent Docteur
des Univerfitez, de Bologne 6c de Padouë Parifîus. Confil. zi. ». x6. vol.
Ffff 1 10.
616 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
1701.. 10. où il traite le même cas pour les Duchez de Mantouë 6c de Mont-
■ " '■ ferrât.
Enfin, c'eft allez pour l'Oracle tutelaire des Efpagnes , que cette opinion
de tant de fameux Jurifconfultes dont Rofenthal de fendis conclu/. 24. //'//. f. in.
allegat. fait le Catalogue , convienne avec lui. Il icaura bien après cela l'ap-
puïcr par fa propre autorité , malgré celle des Partifans du fentiment op-
pofé.
D'ailleurs, il ne manque pas d'exemple de Succeffion de Fille dans le Duché de
Milan. Francisque Sforce l'a tenu à titre de Blanche-Marie Fille natu-
relle de Philippe-Marie ViscoNTi,defcendu dejEAN-GALEAS Duc de Mi-
lan. Francisque en a continué la poiïèffion fans Inveftiture, dit Guicciardin
fol. 10. de même que Galeas fon Fils, & Jean-Galeas fon Petit-Fils. On
fçait que le titre de Sforce étoit une occupation de fait, 6c qu'en établiflant
en une naiflance illégitime, il firifoit force auxLoix. Cela pourtant ne falefie en
rien les Droits du jeune Monarque. Jean-Galeas Duc de Milan maria fa
Fille Valentine avec Louis Duc d'Orléans, Fils de Charles V. Roi de
Fiance. Par l'un des Articles du Traité de Mariage , il fut ftipulé, qu'elle
& fes Defcendans fuccederoient à ce Duché , en cas que la Ligne malculine
de Galeas vint à manquer. La condition arriva pendant la vie de Valentine,
par la Mort de fes Frères. La voilà donc Héritière naturelle 6c coutraétuel-
. le : Qualité qu'elle a tranfmife à fes Enfans , qui en ont pris, & porté juste-
ment le titre , que Louïs XII. defeendu de Valentine a continué , 6c à qui
l'Empereur Maximilien donna l'Inveiliture l'an ifof. comme au vrai 6c légi-
time Succefl'eur de cet Etat par Valentine fon aïeule.
On a voulu objecter autrefois , que cette fubftitution manquant d'Octroi de
l'Empereur, ne pouvoit point fubfifter :. Mais parce qu'elle fc faifoit en fa-
veur de la perfoane qui devoit fucceder à fon Père, la condition n'étoit que
l'opération même du Droit du Sang. Molineus ad Confult. Parif. Ht. 78,
Glojf. 1 . n. 76.
On iatisfit pourtant à la folemnité pour autant qu'elle pouvoit. être necef-
faire, 6c on obtint l'Octroi du Pape, à caulê que l'Empire étoit vacant: Et
cela valablement, dit Paul Jove. in vita Joann. Galeat.
On ne peut pas nier que Louïs XII. 6c fon Succeifeur furent troublez en.
leurs Droits : Mais Charles V. Empereur , qui en connoifioit la force ,
préfenta plus d'une fois à Velly Ambalfadeur de François I. , d'en inveftir
le Duc d'Angpulême troifiéme Fils de ce Roi, ce qu'il réitéra publiquement
en plein Coniîftoire dans la Harangue qu'il fit en préfencedu Pape, la plus
Voyez outrée qu'il s'en fit jamais. François I. eut le malheur d'être fait prifon-
duPlaix. nier à la Bataille de Pavie , 6c par ce moïen il fe fit le Traité de Madrid de
if2<5. par lequel ce Roi prifonnier , Succeifeur de Louis XII. 6c delà
Maifon d'Orléans, céda à Charles V. fon Droit fur le Duché de Milan.
Cefilon qui fe fit, 6c qui a été renouvellée par des Traitez fuivans', en quali-
té de Charles Roi des Efpagnes, pour lui, fes Succefleurs , 6c aïans caufe ;
ce qui paroit de l'Article 7. dudit Traité , dont le huitième elt une fuite où
la cefiion du Milanois fe trouve faite à Charles en la même qualité que fe.
fitiiôit celle pour le Roïaume de Naples. Cet- ■
ET RESOLUTIONS D'ETAT. 617
Cette cefîîon de l'an ifi6. pouvoit alors être atteinte de quelque vice de 1701.
crainte ou de force, L. qui in carcerem d. qubd metus cauf. Mais étant de- — — —
puis ratifiée par divers Traitez; faits de plein gré , elle a donné un titre legiti-
time à la Couronne d'E/pagne, comme aïant par là acquis les Droits des véri-
tables Héritiers du Milanois.
Philippe II., Roi très fage, a bien connu cet avantage de l'Efpagne ac-
quis par la cefîîon des Rois.de France ,.& que l'Empereur n'y pouvoit rien
pter ni ajouter, lofque par fon Teftament de l'an ifP4- il jnftitua fon Fils
Philippe III., ordonnant que ce Duché de Milan feroit à perpétuité 6c in-
feparablement uni aux Couronnes de Caftille & d'Arragon. C'eft donc le. -
devoir de ce jeune Monarque de ne pas aller contre la volonté d'un grand Roi
fon devancier afeendant , oc de ne pas défiler les perles de fes Couronnes.
L'argument qu'on avance en faveur de l'Empereur , que Milan auroit été
érigé en Duché par un Empereur , & qu'il feroit Fief d'Empire. , n'appuïe
pas la caducité prétendue. Les Empereurs ont érigé en Roïaume le Danne-
marck, & depuis peu la Province de Pruffe,, qui eitle patrimoine de l'Ordre
Teutonique : Cela pourtant ne lui donne aucun Droit d'y fucçeder, tandis
qu'il y a des-Defcendans de la Ligne des Maifons de Holftein & Brandebourg.
La qualité de Fiefs d'Empire n'ell pas aulîî un argument xle conviction poul-
ies prétendre , à l'exclufion des Enfans de la Ligne où les Fiefs font entrez.
Il y a des exemples afîez dans les grands Etats de l'Empire qu'on a vu paiîer
à d'autres familles par les Femmes.
Entre tant d'autres, on fçait que le Sercnifîîme Père de l'Augufte Impéra-
trice Régnante, & l'Electeur de Brandebourg, ont fuccedé par cette voie
aux Duchez de Juiliers, de Cleves, ScdeBerg, à la vue de l'Empereur.
Celui qui a donné au public depuis peu un Libelle intitulé, Recherches Ht*
Jioriquesfur la .Queftion fi le Duché de Milan feji Eef de r Empire, & s'il e fi ma-
fçulin^ s'arrête à cette qualité de mafeulin , difant que la Maifon d'Orléans en
auroit été exclue par Jugement. Mais qui l'a porté? Cette Maifon "s'eft-elle
tenue pour exclue? L'inveftiture accordée à Louis XII. , & tout ce qu'on
vient de dire, montrent qu'on n'eft point d'accord de fon aflertion. C'efl
même une preuve qu'il n'y a pas eu de Jugement légitime pour l'exçlufionjde
Valentine, que la iùnefle Guerre que l'Écrivain avoue avoir été entreprifè
pour ce Duché entre Charles V. & François I.
Une autre preuve fe tire encore de la celîîon du Traité de Madrid, où
l'Empereur Charles V. reçoit la cefîîon de François L, fans parler d'au-
cun Jugement qui fût porté en fa faveur , l'acceptant de plus comme Roi
d'Efpagne , & pas comme Empereur : Qui eft un point très-remarquable
pour la queftion.
Je ne prétens pas de fouiller l'Antiquité pour faire voir que Milan en fon
origine vient des Gaulois* que dans les Partages des Enfans , Se depuis, des
Neveux de Charlemagne, le Milanois a patte toujours pour une pièce de
patrimoine des Carlovingiens ; que les Berengaires l'ont poflëdé en titre de
Roïaume d'Italie , & point comme partie de l'Empire. On trouve même ,,
qu'il n'y a pas encore quatre cent ans que ceux de Milan choiment eux-mê-
Ffff 3 mes,;
6i8 MEMOIRES, NÉÔ'OTI ATÎONS, TRAITEZ,
r70i. mes, & fans intervention de l'Empereur, un Recteur Général, Se Seigneur
■ de leur Etat, qui fut Mathieu' dit le GYartd. Ce qui fait douter de fa qualité
féodale, ou qu'elle n'eft pas d'une ancienneté-impénétrable.
Il cil vrai qu'au Traité de Crepy , Article- |f. , Charles V. pfennant
toujours les deux qualitez d'Empereur Se de Roi d'Efpagne, fous lefquelles il
traitoit avec la France ^ Stipule, qu'en cas de Mariage du Duc d'Orléans avec
la Fille du Roi des Romains , il cédera Se transportera le Duché Se Etat de
Milan, ce qu'il fait carnivWRoi d'Efpagne, puis qu'il en avoir acquis com-
me tel les Droits par lé Traité de Madrid ; Se s'il dit comme Empereur qu'il
en donnera l'Inveitituré pour le Duc d'Orléans Se fes* hoirs mâles, 'cette der-
nière claufe n'altère pas les Droits premiers. C'étoit une Loi que le maitre
de la chofe mettoit à la donation, ghi non alla hge rem fuam alienari patieba-
1ur. Mais ce Mariage n'aïant pas été accompli, les conventions matrimo-
nielles ont été anéanties d'elles mêmes avec toutes leurs claufes , Se le Duché
de Milan a demeuré dans la Seigneurie Se Domaine du Roi d'Efpagne fans al-
tération quelconque, puis qu'il n'étoit promis qu'en cas Se à condition des
Epoufailles avec la Fille du Roi des Romains , félon le texte exprés de la Loi
6. cl. de condiiï. canf. dat.
La prétention de l'Empereur fur le Duché du Haut Gueldre fe détruit par
les mêmes raifons, que celle fur le Duché de Milan. Cet Etat qui eft fitué
dans la balle Allemagne a été un patrimoine des Carolovingiens : ceux de la
Maifon de Pont l'ont enfuite polTedé comme héréditaire, Se le dernier n'aïant:
eu qu'une Fille nommée Alix , mariée à Othon de Naflàu : Celui-ci fut mai-
tre du Pais de Gueldre à titre de fa Femme. Ce fut aufli du Chef de Ma-
rie Fille de Renaut I., que le Duc de Juliers le devint de Gueldres, après
qu'EpuARD fon Beaufrcre fut tué à la Bataille de Baefviller , entre le Rhin
oc la Meufe. Preuve remarquable que les Fiefs d'Empire ne font point
caducs à défaut des Mâles, Se qu'ils paSTent aux 'Sœurs Se à leur po-
stérité.
Jeanne de Juliers époufir le Seigneur d'Archet, elle eut un Fils nommé
Guilleàume: La mort prévint fa Succeffion au Duché, étant decedé avant
le Père : Il fit place à Marie Sœur de Jeanne , qui pofTeda le Duché de
Gueldres avec Arnoult d'Egmont fon Mari , fans que l'Empereur ait pu
empêcher ces SucceSîions de Femmes collatérales', ni prétendu aucune cadu-
cité de ce Fief, nonobstant le défaut d'Enfans Se de Mâles des Poffeffeurs.
Cet Arnoult eut Adolphe I. Fils impie Se dénaturé, qui jetta fon Père en
prifon, Se l'y retint fept ans. Il en fut délivré par les Armes de Charles
de Bourgogne Prince des Païs-Bas , à qui ce Père vendit ce Duché, 8c de-
puis l'nititua Héritier , exheredant à julte caufe , approuvée des Loix, un
Fils Barbare , violateur des Loix de Dieu Se de la Nature. Depuis ce tems-
là, le Duché de Gueldres a demeuré Héréditaire dans les SuccelTeurs des Païs-
Bas , Se Philippe II. par fon TeStament l'a tenu pour infeparablement
uni à la Couronne d'Efpagne , avec le Milanois , Se les Provinces du
Païs-Bas.
Enfin, on n'a pas encore vu des réunions d'Etats à l'Empire par défaut des
Ma-
ET RESOLUTIONS D'ETAT. 6i9
Mâles, 6c ce ferait une pratique dangereufe pour ceux des Electeurs & Pria- 1701.
ces feculiers, qui feraient les feuls Sujets à reverfion j pendant que les Princes — ; —
Ecclefiailiques feraient à l'abry de la .caducité. : L'Empire aggrandi par de
telles réunions ferait formidable aux Princes qui fubfi lieraient encore , qui
doivent pourtant examiner meurement s'il eil de leur intérêt d'appuïer une
maxime, & de porter le feu dans l'Empire pour un intérêt particulier de fa-
mille, que les Anglois & Hollandois feront bien-aifès d'allumer, pour des
vues d'ombrage mal fondé, qui n'ont rien de commun avec le repos de l'Em-
pire.
C e qui avançoit aufîl le Traité i avec l'Empereur étoit que les deux Cou-
ronnes firent faire des Lignes à demi lieuë d'Anvers; Elles tiraient depuis le
bord de l'Efcaut jufques à Lier. Elles dévoient être munies de Forts Se Re-
doutes, d'efpace en efpace. On prétendoit par-là de mettre à couvert , non
feulement Anvers ^- mais même tout leBrabant , du côté de la Hollande. On
obligea même :les habitans-' d'Anvers de prendre1 la pioche. Des perfonnes di-
flinguées en donnèrent l'exemple. L'Evêque même leur infinua en chaire,
qu'il s'agifToit de la Patrie , 6c y ajouta l'aiguillon de la Religion, qui a le
plus d'influence fur la Populace ignorante. On traça, aufli des Lignes vers
l'Eelufe. On travailla à relever le Fort Ifibelle , 6c quelques autres Portes,
qui n'étoient pas d'une moindre conféquence. On ne pouvoit regarder cette
nouvelle Manœuvre, .que comme une Rupture. C'efl puis que cela failbit
-brèche aux Articles LVIIL, LXVIII., LXX. 6c LXXVI. , du Traité de
-Weflphalie , fait entre Philippe IV. Roi d'Efpagne , 6c les Etats Géné-
raux. Par-là, l'alarme augmentoit ; ce qui fît hâter la Conclufion du Trai-
té avec l'Empereur, i
Avant cependant que d'en venir là, il y eut de grandes Difficultez. Elles
confifloient principalement en ce que l'Empereur prétendoit de ilipuler que
l'on s'engagerait à lui faire avoir la totalité de la Monarchie d'Efpagne.
L'Angleterre , 6c les Etats Généraux, ne vouloient abfolument pas entrer
dans des engagemens fi étendus. D'ailleurs j ces deux PuifTances vouloient
exiger que. les Conquêtes qu'Elles pourraient faire dans les Indes Efpagnoles
leur relieraient en propre. L'Empereur régimboit à ce dernier Article. C'é-
•toit à caufe qu'on y ferait de l'altération fur le fait de la Religion. Comme
l'on inlîiloit avec fermeté fur la propriété de ces Conquêtes, Sa Majeflé Im-
périale voulut du moins exiger que l'on n'y abolirait pas la Religion Romai-
ne. Les deux Puifîànces le promirent fur leur bonne foi ; mais , Elles ne
voulurent pas s'engager dans le Traité. Par raport à ce grand Article de la
totalité de la-, Monarchie , on ne voulut abfolument pas y entendre. On fê
bornoit à s'obliger de faire les plus grands Efforts, pour reprendre les Pais-Bas
Efpagnols , pour fervir de Barrière à la Hollande, 6c de conquérir le Duché
de Milan avec fes Dépendances. Dans la fuite de la Négociation, on le laif-
fa aller à s'obliger de même pour la Conquête des Roïaumes de Naples 6c de
Sicile. Pour porter l'Empereur à fe contenter de cet Engagement , l'habille
Mr. de Dyckvelt, qui étoit chargé de la Négociation , fit de folides Repré-
fenta-
6io MEMOIRES, NEGOTIATIGSNS, TRAITEZ,
1701. Tentations aux Comtes de Gocz Se de Wratiflawv Il leur dit que l'Empereur
— devoit réfléchir, qu'il s'agiflbit de taire entrer la République dans une Guer-
re, dont le Succès étoit incertain, Se qui ne s'étoit guère bien trouvée des
deux précédentes, finies par les Traitez de Nimegue & de Ryswickj Que là
République le trouvoit encore furchargée des onéreux fardeaux de- ces deux
Guerres-là; Qu'Elle ne fubfiiloit que par le Commerce, qui par une nouvel-
le Guerre rfouffriroit un préjudice extrême > Que cependant Sa Majefté Im-
périale pouvoir s'atTûrer que fi une . fois la République entroit- en Guerre, Se
fi le fort des Armes venoit à être favorable, l'on prendroit des mefures conve-
nables pour la fatisfa&ion de Sa Majefié Impériale , Se l'on s'étendroit fuivant
les Evenemens. Auflî, efl-ce ce qui arriva dans la fuite , ainfi qu'on le dira
en fon tems. Le Comte de Goez Envoïa fon Secrétaire à Vienne, pour y
porter ces Repréfentations , avec ^Ultimatum de ce que l'Angleterre Se les
Etats Généraux vouloient faire. Il en fut de retour le Lundi zy. d'Août.
Comme il porta une Réponfe fatisfaifante , on travailla à drefler le Traité.
Après qu'on fut convenu de tous les Articles d'icelui , on le mit au net,
fut figné le fept de Septembre 1 701. de la manière qui fuit.
ryUandoquidcm mortuo fine liberis
*^~- non ita pridem gloriofijjïmœ mé-
morise Carolo Secundo Hif-
paniarum Rege , Sauta Sua Cœfarea
Majeftas SucceJJivnem in Régna &
Provincias Régis defuncli Domui fua
Augafîœ légitimé deberi afjerwrit ;
Rex autem ChrifiianiJJtmus pro tiepo
Si il
Traité
«l'Allian-
ce entre
l'Empe-
reur, le
Roi
d'Angle-
terre , Se
JesE-
tats Gé-
néraux
des Pro-
vinces-
Unies.
D'Autant que le Roi d'Efpagne
Charles II. de glorieuie mé-
moire , étant mort fans Enfans , Sa
Sacrée Majefié Impériale' a allure que
laSucceffion desRoïaumes Se Provin-
ces du Roi défunt appartiennent lé-
gitimement à fon Augufle Maifon >
Se que le Roi T. C. defirant avoir la
te fuo Duce Andegavenfi ean'dem Suc- même Succeffion pour le Duc d'Ax-
cejjionem ambiens, ci? jus illi ex Tefia- jou fon Petit-Fils , Se alléguant qu'el-
mento quodam Régis defuncli natum ef-
fe praferens , pro rnodb diclo Duce An-
degavenfi poffeffionem univerfe hare-
ditatis five Monarchiœ Hifpanica ar-
rtputr.it , Provincias Hifpano - Belgi-
cas , Ducatumque Mediolanenfem ar
le lui vient de Droit en vertu d'un
certain Tefiament du Roi défunt, il
s'efl d'abord mis en pofièffion de tout
l'Héritage ou Monarchie d'Efpagne
pour le fufdit Duc d' Anjou, Se s'efl
emparé à main armée des Provinces
m
mis occupaverit , Clajfem
Caditano parafant teneat , Naves plu-
tes bellicas ad Indias Hifpano paren-
tes miferiî , atque hoc modo , aliif-
que plurimis , Régna Galliarum &
Hifpaniarum tam arclè inter fe a-
niantur & coalefcant , ut pofthac non
aliter quàm pro uno eodemque Regno
confideranda effe videantur ; adeb ut
tiifi profpeclum fuerit , fatis appa-
rent Cafareee Sua MajeJIati abji-
cien-
Porta du Pais-Bas Efpagnoi, Se du Duché
de Milan, Se qu'il tient une Flotte
dans le Port de Cadix, toute prête à
faire voile, Se qu'il a envoie plufieuis
VaifTeaux de Guerre aux Indes qui
font ioûmifes à l'Elpagne, Se que par
ce moien Se pluiieurs autres , les
Roïaumes de France Se d'Efpagne
font fi étroitement unis, qu'il femble
qu'ils ne doivent plus être regardez à
l'avenir, que comme un icul Se mê-
me
ET RESOLUTIONS D'E T A T.
62.1
ciendam efie omnem fpem unquam fi-
bi de pratenfione fua fatisfatlum tri,
facrum Romanum Imperium jura fua
in Feuda , qua funt in Italiâ (3 in
Belgio Hifpanko perditurum , Brit-
tannis 13 Belgis fœderatis hberum Na-
vigationis cjr" Commerciorum ufum in
Mare Mediterraneum , in Indias (3
alibi funditus periturum , Unitum-
que Belgium deftitutum in fecuri ta-
ie , quant ex intcrpofitis inter fe (3
Gallos Provindis Hifpano - Belgicis ,
vulgà Barrière tenebat ; denique Gal-
los (3 Hifpanos ita conjunclos adeb
omnibus formidandos brevi evafuros ,
uî iotius Europe imperium facile fi-
bi vindicaturi fini. Çhium autem ob
hune procedendi modum Régis Chri-
fiianiffimi Cafarea Sua Majeftati ne-
ceffitas impofita fuerit exercitum in I-
taliam mittendi , ad confrvanda tant
Jura fua privata , quàm Feuda Im-
perii , Rex Magna Brittannia ne-
cejfarium exiftimaverit copias fias auxi-
liares mittendi Bclgio Fœderato , cu-
jas res eo loco funt , ac fi reipfa
jam aggrefum foret, 13 Domini Or-
dines Générales Uniti Belgii , quorum
fines undique fere patent effratlo (3
remoto Obice , vulgà Barrière , qui
Gallorum vicinitatem arcebat , coac-
ti fint ea cuncla pro fecuritate & fa-
illie Reipublkte fua facere , qua bel-
lo impetïti facere debuiffent vel po-
tuiffent ; §>uumque tam anceps re-
riim confiitutio ipfo bello periculofior
fit , & hoc rerum fiatu Gallia &
Hifpahia abutantur , ut fe magis 13
fnagis inter fe de-vinciant ad oppri-
mendam Europa libertatem , &? tol-
lendum Commerciorum ufum: His ra-
tionibus adducli , Sacra Sua Cafa-
rea Majefias , Sacra Sua Regia Ma-
jejlas Magna Brittannia , & Cel-
Ji 13 Prapoientes Domini Ordines
Jom. I. Gcw~
me Roïaume , tellement que fi on ijoi.
n'y prend garde, il y a bien de l'ap- — —
parence que Sa Majefté Impériale ne
doit plus efperer d'avoir jamais aucu-
ne fatisfaction de fa prétention } Que
l'Empire Romain perdra tous fes
Droits fur les Fiefs qui font en Italie,
Se dans le Païs-Bas Efpagnol , de mê-
me que les Anglois & Hollandois per-
dront la liberté de -leur Navigation
Se de leur Commerce dans la Mer
Méditerranée, aux Indes, 8c ailleurs >
Et que les Provinces-Unies feront pri-
vées de la fureté qu'elles avoient par
l'interpofition entr'elles & la France
des Provinces du Païs-Bas Efpagnol ,
appellées communément la Barrière -,
Et qu'enfin les François & les Efpa-
gnols étant ainfi unis deviendroient en
peu de tems fi formidables qu'ils pour-
roient aifément foûmettre toute TEu-
rope à leur obéïffance & empire. Or
comme cette conduite du Roi T. C.
a mis Sa Majefté Impériale dans la
neceffité d'envoïer une Armée en Ita-
lie , tant pour la confervation de fes
Droits particuliers , que pour celle
des Fiefs de l'Empire} de même, le
Roi de la Grande - Bretagne a jugé
qu'il étoit neceflaire d'envoïer tés
Troupes auxiliaires aux Provinces-
Unies, dont les Affaires font dans le
même état, que fi on en étoit déjà
venu à une Guerre ouverte , Se les
Seigneurs Etats Généraux, dont les
Frontières font prefque de toutes parts
ouvertes , par la rupture de la Barriè-
re qui empêchoit le voifinage des
François , font contraints de faire ,
pour la fureté & pour la confervation
de leur République , tout ce qu'ils
auraient dû & pu faire , s'ils étoient
effectivement attaquez par une Guerre
ouverte. Et comme un état fi dou-
teux Se fi incertain en toutes chofes ,
Gggg eft
I
6it MEMOIRES, NEGOT
1701. Générales Unit} Belgii tant i s malis
- hinc furrecluris obviant tendentes , &
pro viribus remédia aflerre cupicntesy
arctam inter fe conjunclionem 13 con-
fœderatior.em , pro depelknda com-
muais periculi magnitudine , necef-
fariam ejfe exiflimaverunt , & hune
in finem mandatis fuis inflruxerunt
fcilicet Sacra Sua Cafarea Majejlas
NobiliJJimos , Iltâflrijtmas , ta Ex-
cellentijfimos Dominos , Dominum Pe-
trum Sa cri Romani Imper ii Comi-
tem à Goejfen , Dominum de Ca-
relsbcrg , Sacra Cafarea Majefia-
tis Camerarium , Confiliarium Jm-
perialem Aulicum , 13 ad Celfos 13
Prapotentes Dominos Ordines Géné-
rales Uniti Belgii Ablegaium extraor-
dinarium ; (3 Dominum Joannem
ïFencejlaum Sacri Jmperii Romani Co-
mitem IVratiJlau à Mitroivitz , Do-
minum de Ginclz (3 Mallexhitz,
Sacra Romana 13 Hungaria Regia
Majeflatis Camerarium , intima Can-
cellaria Aulico-Bohemica Coufiliarium
(3 AJfeJforem^ nec non Sacra Cafarea
Majeflatis ad SereniJJimum Magna
Brittannia Regem Ablegatum extraor-
dinarium , Legatos fuos extraordina-
rios £5? Pienipotentiarios ; Sacra Sua
Regia Majcftas Magna Brittannia
Nobiliffimum , lllufirijjimum , atque
Excellentiffimum Dominum , Domi-
num Joannem Comitem de Marlbo-
rough , Baroncm Churchill de San-
dridge , Sacra Regia Majejlati à
Conftliis intimis , copiarum pedeftrium
Ducern , %'ulgb Gêneraient , fummum
Exercitus memorata Sacra Regia Sua
Majeflatis in Belgio Prafeclum , Le-
gatum ejus extraor dinarium , Co?n-
mijfarium , Procuratorem , (3 Ple-
nipotentiarium j Et Domini Ordi-
nes Générales , Dominos Didericum
Eck de Panteleon
Dominum de
Gent
IATIONS, TRAITEZ,
eft plus dangereux que la Guerre mê-
me , & que la France & l'Efpagne
s'en prévalent pour s'unir de plus en
plus , afin d'opprimer la Liberté de
l'Europe , & ruiner le Commerce ac-
coutumé ; Toutes ces raifons ont por-
té Sa Sacrée Majefté Impériale, Sa
Sacrée Roïale Majefté de la Grande-
Bretagne , 8c les Hauts 8c Puiflàns
Seigneurs Etats. Généraux des Pro-
vinces Unies , d'aller au devant de
tous les maux qui en proviendroienti
8c defirant d'y apporter remède félon
leurs forces, ils ont jugé qu'il étoit
necefiairede faire entr'eux une étroite
Alliance 8c Confédération pour éloi-
gner le grand 8c commun danger.
Pour cet effet ils ont donné leurs Or-
dres 8c Inftru£t.ions, à fçavoir Sa Sa-
crée Majefté Impériale , aux très-No-
bles , très-Illuftres , 8c très - Excellens
Seigneurs , le Seigneur Pierre de Goes
Comte du Saint Empire Romain , Sei-
gneur de Carelsberg , Chambellan de
Sa Majefté Impériale, Confeiller du
Confeil Impérial Aulique, 8c Envoie
extraordinaire auprès des Hauts 8c
Puiffans Seigneurs les Etats Généraux
des Provinces-Unies, 8c le Seigneur
Jean Wenceflas de Wratiflau Mitro-
witz, Comte du Saint Empire Ro-
main , Seigneur de Gin&z 8c de Mai-
lexhitz, Chambellan de Sa Majefté le
Roi des Romains 8c de Hongrie , Con-
feiller 8c AfierTeur de la Chancelerie
Privée 8c Aulique de Bohême, 8c En-
voie extraordinaire de Sa Majefté Im-
périale auprès de Sa Majefté Britanni-
que, tous deux fes Ambafladeurs ex-
traordinaires 8c Plénipotentiaires > Sa
Sacrée Majefté le Roi de la Grande-
Bretagne, au très- Noble, très-Iliuftre,
& très- Excellent Seigneur, le Seigneur
Jean Comte de Malborough , Baron
Churchill deSandridge, Confeiller du
Con-
ET RESOLUT
Gent & Erlekum ; Fredcricum Ba-
ronem de Rheede , Doviinum de
Lier , Agri Sti. Antonit £s? de Ter-
Jée , Commendatorem Bura , unum No-
bilium , £s? in Ordine Equefiri Hol-
landia fc? ÏVefifrifia confcriptum ;
Antonium Heynfittm , Dominorum Or-
dinum Hollandia & tVcftrifiœ Con-
fdtarium £5? Syndtcum eorundem ma-
gni jigilli cufiodem , ac Ftudorum
Praftdem ; Wilhelmum de NaJ/au,
Dotninum de Odyk , Cortgiene , &Y.
Primum Nobiletn 6? reprafentantem
Ordinem Nobilium in Dominorum Or-
■dinum Zelandia Ê5? eorundem Dépu-
tât or um confejjiis ; Everhardum de
IVeede , Dom. num de IVeede , Dyk-
•velt , Râtelés , (3 V. Fundi Civita-
tis Oudewater Dominum \ Capitu-
li S. Maria , quod T'rajeïli ad Rhe-
num efl , Decanum , Confiliarium pri-
' marium , (3 Praftdem Con/ejfus Pro-
v incite UltrajeSlina , Aggeritm fiumi-
wis Lecca Prafeclum (3 Pralorem ;
Wilhelmum van Haren , Agri Bil-
tani m Frifia Grietmannum , Uni-
ver fitatis Franequerana Curatorem ,
à parte Nobilium in Confejfu Domi-
norum Ordiuum Frifite Députât um ;
Burchardum Juftum à Welvelde in
Buckhorfl £•? Molchate , Toparcham
in Zallick £5? Fekaten , IJfelmuyda-
ni Agri S at râpa m , £5? Wicherum
Wichers , civitatis Groningenfis Se-
natorem refpecTroe Dominorum Ordi-
num Geldria , Hollandiœ, (3 Weft-
frijia , Zelandia , Ultrajefti ad Rhe-
num , Frifia , Tranfyfalania , £5? Gro-
ninga (3 Omlandorum ad Convcntum
Dominorum Ordinum Gcneralium U-
niti Belgii Députât os , qui vi manda-
torum
IONS D'ETA T. <U?
Confeil Privé de Sa Sacrée Roïale Ma- 1 70 1 ,
jelté, Général de fonInfanterie,&Gé- — — —
néral de routes Tes forces aux Païs-Bas,
fon Ambaffadeur Extraordinaire, Com-
rniffaire, Procureur, & Plénipotentiai-
re. Et les Seigneurs Etats Généraux ,
aux Seigneurs Dietrick Eck de Pan-
teleon, Seigneur de Gent & Erlcck;
Frrderick Baron de Rheede, Seigneur
de Lier , Dyck -Graef de Saint Anthoi-
nc & de Terlée, Commandeur deBu-
ren , l'un des Nobles aggregez dans
l'Ordre des Chevaliers de Hollande;
Anthoine Heynfius , Confeiller-Pen-
fîonnaire des Seigneurs Etats de. Hol-
lande 8c de Weftfrife , Gardé de leur
Grand Sceau, & Prefident des Fiefs;
Guillaume de Naflau , Seigneur d'O-
dyck , Cortgiene , Sec. premier No-
ble, & reprefèntant le Corps des No-
bles dans les Affemblées des Seigneurs
Etats de Zeelande & de leurs Députez;
Everhard de Weede , Seigneur de
Weede,Dyckvelt, Râtelés, Scc.Sci-"
gneùr Foncier de la ville d 'Oudewa-
ter, Doyen du Chapitre de Sainte Ma-
rie d'Utrecht fur le Rhyn , Premier
Cdnieiller & Prefident de l'Affemblée
de la Province d'Utreclît,Dyck-Graef
du Leck ; Guillaume van Harcn ,
Grietman du Pais deBilt en Frife, Cu-
rateur de l'Univerfitc de Franekerk ,
Député des Nobles à l'Affemblée des
Seigneurs Etats de Frife; Burchardju-
fte de Welvelde , Buckhorfl , & Mol-
chate , Seigneur de Zallick & Veka-
ten , Grand Baillif du Pais d'Iffelmun-
de;& Wiker Wikers, Sénateur de la
Ville de Gi oningue,rcfpclivement Dé-
putez des Seigneurs Etats de Guel-
dres, de Hollande & Weftfrife, Zee-
lande , Utrecht fur le Rhyn , Frife,
Over-Iffel, Se Groningue & Omlan-
de , à l'Affemblée des Seigneurs Etats
Généraux des Provinces - Unies du
Gggg z Païs-
6h MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
1701. torum fuorum in fequentes fœderis le- Païs-Bas , lefquels en vertu de leurs
ges cohvenerunt.
1 . Sit maneatque inter Sacram
Cajaream Majeftatem , Sacram Re-
giam Majeftatem Magna: Rrittan-
nia , t3 Dominos Ordines Généra-
les Uniti Belgii conftans , perpétua,
(3 inviolabilis amicitia (3 correfpon-
dentia , teneaturque alter atterius com-
moda promovere , damna verh 13 in-
commoda pro pojfe avertere.
1. Sacra Sua Cafarea Majeftas ,
Sacra Régla Majeftas Magna Brit-
tannia , (3 Domini Ordines Généra-
les , cum nulla res ipfts magis cordi
fit , quàm pax 13 tranquillitas gene-
ralis totius Europe, judicaverunt , ad
eam ftabiliendam nib.il efficacius futu-
ri'.m , quàm procurando Cafarea Sua
Majcftati , ratione prœtenftonis fua
in fuccejjionem Hifpanicam , fatisfac-
tionem aquam 6? rationi convenien-
tem , (3 ut Rex Magna Brittan-
nia , fj? Domini Ordines Générales
fecuritatem particularem (3 fufficien-
tem , pro Regnis , Provinciis , Di-
tionibus fuis , 13 pro Navigatione
13 Commcrciis fubditorum fuorum a-
dipifeantar.
5. Propterea Fœderati ante omnia
eperam dabunt quantam pojfunt maxi-
rnam ad obtinendam via amicabili &
per tranfaciionem folidam & firmam,
Cafarea Sua Majeftati fatisfaclio-
nem aquam £i? rationi convenientem ,
in caufa memorata fuccejfionis (3 fe-
curitatem modo indigitatam Regia Sua
Majeftati Magna Brhtannia 13 Do-
minis Ordinibus Gencralibus Uniti Bel-
gii , impendentque Fœderati in hune
finem omm fiudio 13 abfque ulla in-
termijjione , fpatium duorum menftum
à die quo ratificationum tabula com-
mutabuntHT numeranclmn,
4. guod
ordres , font convenus des Articles
d'Alliance qui fuivent.
1 . Qu'il y ait dès à prefent & à l'a-
venir, une confiante, perpétuelle, èc
inviolable Amitié , entre Sa Sacrée
Majeilé Impériale, Sa Sacrée Roïale
Majeflé de la Grande-Bretagne , 6c les
Seigneurs Etats Généraux des Provin-
ces-Unies, 6c qu'ils foient tenus réci-
proquement de procurer ce qui leur
fera avantageux , 6c d'éloigner ce qui
leur feroit nuifible 6c dommageable.
z. Sa Sacrée Majeflé Impériale, Sa
Sacrée Roïale Majeflé de la Grande-
Bretagne, 6c les Seigneurs Etats Gé-
néraux des Provinces- Unies, n'aïant
rien tant à cœur que la Paix 6c la tran-
quillité de toute l'Europe , ont jugé
qu'il ne pouvoit rien y avoir de plus
efficace pour l'affermir , que de pro-
curer à Sa Majeflé Impériale une fa-
tisfaclion jufle 6c raifonnable , tou-
chant fes prétentions à la Succeflîon
d'Efpagne , 6c que le Roi de la Gran-
de-Bretagne , 6c les Seigneurs Etats
Généraux obtiennent une fureté par-
ticulière 6c fuffifante, pour leurs Roï-
aumes , Provinces , Terres , 6c Pais de
leur obéïfîànce , 6c pour la Navigation
6c le Commerce de leurs Sujets.
3 . Pour cet effet les Alliez mettront
premièrement en ufage tous les moïens
poffibles , 6c tout ce qui dépendra
d'eux , pour obtenir amiablement , 6c
par une Tranfaélion ferme 6c folide,
une fatisfaélion jufle 6c raifonnable
pour Sa Majeflé Impériale , au iujet
de ladite Succeffion , 6c la fureté dont
il a été fait mention ci-defîus , pour
Sa Majellé Britannique , 6c pour les
Seigneurs Etats des Provinces- Unies j
Et à cette fin , ils emploieront tous
leurs foins 6c offices pendant deux mois,
à compter du jour de l'échange des
Ratifications de ce prefent Traité.
4. Mai?
ET RESOLUTIONS tf'ETAT.
61$
4. Quod fi prêter fpetn fj? •vota,
intra tempus prœfinitum res eo quo dic-
tum eft modo tranfigi nequeat , Fœ-
derati ftbi invicem [pondent fj? pro-
mut unt , fe alter altcrum omnibus vi-
rions adjuturos , idque juxta fpecifi-
cationem peculiari in convenùone de-
îerminandam , ut ita acquirant fatu-
faclionem 6? Jecuritatem ante mémo-
ratas.
f. Fœderati ad procurandam fatis-
faclionem &? fecuritatem ante diclas
inter alla omnes nervos intendent ut
récupèrent Provincias Hifpano - Belgi-
cas , utfint Obex 6? repagulum, vul-
go Barrière , Galliam a Belgio fœde-
rato removens fc? feparans pro Jecuri-
tate Dominorum Ordinum Generalium ,
quemadmodum ab omni tempore infer-
vierunt , donec Rcx Chrifiianifiimus
nuper eas milite fuo occupavit , ut
& Ducatum Mediolanenfem cum de-
pendentiis ejus^ tanquam Feudum Im-
perii atque fecuritati Provinciarum
huereditariarum Cœfareœ Suœ Maje-
Jlatis inferviens , praterea Régna Nea-
polis £j? Siciliœ & Terras atque /«-
fulas circa or a Fletruria in Mari
Mediterraneo , quœ funt ditionis Hif-
paniœ & ejufdem ufus ej/e pofjunt ,
ut cjf prodejfe Navigationi & Com-
merças Subditorum Régis Magna Brit-
tannia & Belgii Uniti.
6. Licitum fit Regiœ Suœ Maje-
fiati Magna Brittannia & Domi-
vis Ordinibus Generahbus communi
confilio , pro utilitate y commodo
Mavigationk &? Commercn Subdito-
rum
4. Mais fi dans ce tems- là les AI- 1701.
liez viennent à être fruftrez de leur — ■ ■ ■
efperance ôc de leurs defirs, tellement
que l'on ne puiffe pas tranfiger dans le
terme fixé , en ce cas ils promettent
& s'engagent réciproquement de s'ai-
der de toutes leurs forces, félon ce qui
fera réglé par une convention parti-
culière, pour obtenir la fatisfaction 6c
fureté fufdite.
f . Et afin de procurer cette fatis-
facïion & cette fureté , les Alliez fe-
ront entr'autres cbofes leurs plus
grands efforts pour reprendre & con-
quérir les Provinces du Pais- Bas Efpa-
gnol , dans l'intention qu'elles fervent
de Digue, de Rempart, 6c de Barriè-
re pour feparer ôc éloigner la France
des Provinces- Unies , comme par le
paffé , lefdites Provinces du Païs-Bas
Efpagnol aïant fait la fureté des Sei-
gneurs Etats Généraux jufques à ce
que depuis peu SaMajefté très-Chrê-
tienne s'en ell emparée , & les a fait
occuper par fes Troupes. Pareillement
les Alliez feront tous leurs efforts pour
conquérir le Duché de Milan avec
toutes fes dépendances , comme étant
un Fief de l'Empire fervant pour la
lûreté des Provinces Héréditaires de
Sa Majeiïé Impériale , êc pour con-
quérir les Roïaumes .de Naples & de
Sicile, Se les Mes de la Mer Méditer-
ranée , avec les Terres dépendantes de
l'Efpagne le long de la Côte de Tof-
cane , qui peuvent fervir à la même
fin & être utiles pour - la Navigation
& le Commerce des Sujets de SaMa-
jefté Britannique & des Provinces-
- Unies.
6. Pourront le Roi de la Grande-
Bretagne, & les Seigneurs Etats Gé-
néraux , conquérir à rbree d'Armes,
félon qu'ils auront concerté entr'eux ,
pour l'utilité §c la commodité de la
Çggg 3 Na-v
6i6 MEMOIRES, NEGOTI
1701. rum fuorurn , quas poterunt in Indiis
-. ■■ ■- Hïjpania dittonis terras & urbes ar*
mis occupai e , quicquid autem occupa-
•verint, ip forum manebit ,
7. Neceffitate exigente ut Fœdcrati
ad obtincndam ante diclam Sua Cafia-
rea Majefiatis fatisfacîionem, & Ré-
gis Magna Brittannia ac Domino-
rum Ordinum Generalium ficcuritatem ,
bcllum fubire adigantur ,- fideltter in-
ter je confilia communicabunt de opera-
tionibus belliçis , & de omnibus re-
lus ad caufam banc communem fpetlan-
tibus.
8. Neuiri partium fas fit bello fe-
niel fufcepto de pace cum hofie tratla-
re , niji conjunclim & commmica-
tis confiliis cum altéra parte , nec pax
ineatur nifi adepta prius pro Cafiarea
Suâ Majeftate fatisfatlione tequa &
rationi conveniente , & pro Regia Suâ
Alajeftate Magna Brittannia ci? Do'
minis Ordinibus Generalibus fecurita-
te particulari Regnorum , Provincia-
rum , Ditionum , Navigationis &
Commerciorum fuorurn , £5? nifi ju-
fiis cautelis antea provifum fit , ne
Régna Gallia ci? Hifpania unquam
fub idem Imperiiyn -oeniant (5? unian-
inr , nec unquam unus & idem «-
triufque Regni Rex fiât , & fpecia-
tim ne GalU unquam in pofjefjïonem
Indiarum juris Hi/panici veniant , ne-
que ipfis ibidem Navigatio Mercatu-
ra exercendœ eau fa finb quoeunque pra-
textu direfte vel in'dirctlè permit tatur ,
G? deniqm nifi patlà pro fubditis Ré-
gis Magna Brittannia & Fœdcrati
Belgii facultate plenà utendi ci? fruen-
di omnibus iifdem privilegiis , juri-
bits , immunitatibus & libertatibus
commerciorum terra marique in hifi-
pania ,
ATIONS, TRAITEZ,
Navigation & du Commerce de leurs
Sujets , les Fais & les Villes que les
Efpagnols ont dans les Indes , & tout
ce qu'ils pourront y prendre fera pour
eux , & leur demeurera.
7. Que fi les Alliez fe trouvent obli-
gez à entier en Guerre pour obtenir
ladite fatisfaétion à Sa Majeité Impé-
riale , 6c ladite fureté à Sa Majeité
Britannique , & aux Seig. leurs Etats
Généraux, ils fe communiqueront fi-
dellement les avis & refolutions des
Confeils qui fe tiendront pour toutes
les entreprifes de Guerre, ou expédi-
tions militaires, 6c généralement tout
ce qui concernera cete affaire com-
mune.
8. La Guerre étant une fois com-
mencée , aucun des Alliez ne pourra
traiter de Paix avec l'Ennemi, ii ce
n'en: conjointement avec la participa-
tion & le confeil des autres Parties.
•Et ladite Paix ne pourra être con-
clue, fans avoir obtenu pour Sa Ma-
jeité Impériale une fatisfaétion julte
& raifonnable ; êc pour le Roi de la
Grande-Bretagne, & les Seigneurs
Etats Généraux la fureté particulière
de leurs Roïaumes , Provinces , Ter-
res, & Pais de leur obéiïfance, Navi-
gation & Commerce 5 ni fans avoir
pris auparavant de juites mefures , pour
empêcher que les Roïaumes de Fran-
ce & d'Efpagne , foient jamais unis
fc.vi un même Empire, ou qu'un feul
& même Roi en devint le Souverain >
& fpecialement que jamais les Fran-
çois le rendent maîtres des Indes Es-
pagnoles, ou qu'ils y envoient des
VaifTeaux pour y exercer le Com-
merce, directement ou indirectement,
fous quelque prétexte que ce fou. En-
fin ladite Paix ne poura êire conclue
fins avoir obtenu pour les Sujets de
Sa Majellé Britannique & pour ceux
des
ET RESOLUT
pania , - Mari Mecliterraneo , &? in
omnibus terris & locis , quœ Rex
Hifpaniarum pofremo defunclus tem-
pore mortis , tam in Europâ , quant
alibi pojfedit , quibus tum utebantur
ci? fruebantur , vel quibus amboriwi
vel fingulorum fubditi jure ante obitum
dicli Régis Hi/paniarum quaftto per
traclatus , per pacla conventa , per
confuetudines vel per alium quemcum-
que modum uti 0 frui poterant.
p. Tempore qui dicla tranfaclio
vel pax fiet , Fœderati inter fe con-
venient , de omnibus Us quœ ad Jla-
bilicndam Navigationem £5? Commer-
cia Subditorum Régis Magtiœ Brit-
tanniœ , Ci? Dominorum Ordinum Gê-
ner alium in terris ti? ditionibus acqui-
rendis , &? à pofremo defunclo Hif-
paniarum Rege poffeffs , necejfaria e-
runt , quemadmodum etiam de mo-
do , quo Domini Ordines Générales
per Obicem ante diclum , vulgb Bar-
rière , fecuri reddentur,
10. Et quoniam controverfîa quœ-
dam Religionis ergo exoriri poffcnt in lo-
cis à Fœderatis , uti fperant , armis
occupandis , de exercitio ejus inier fe
etiam eodem quofupra diclum eft tem-
pore convenient.
1 1 . Fœderati fe invicem omnibus vi-
ribus juvare &? opem ferre contra ag-
grejforem teneantur , fi Rex Chriftia-
nifpmus vel quifquam alius aliquem
Fœderatorum ex caufabujus fcockris ag-
gredi fuftineat.
1 z. Quod fi vel nunc fuper fepe in-
digitata fatisfaclione , & fecuritate
tranfigi queat , vel pofl fufceptum ne-
ceffarib bellum pax iterum coalefcat ,
pofl talem vel tranfablionem , vel pa~
cem
IONS D'E T A T. 617
des Provinces-Unies, une pleine Se I70r-
entière faculté , ufage 8c jouïflance de
tous les mêmes Privilèges, Droits,
Immunitez , Se Libertez de Com-
merce tant par Terre que par Mer ,
en Efpagne Se fur la Mer Méditerra-
née , dont ils ufoient Se jouïfïbient
pendant la vie du feu Roi d'Efpagne
dans tous les Païs qu'il pofledoit tant
en Europe qu'ailleurs , 6c dont ils
pouvoient de Droit ufer Se jouir en
commun ou en particulier , par les
Traitez, Conventions , 6c Coutumes,
ou de quelque autre manière que ce
puifTc être.
y. Lors que ladite TranfaéKon, ou
Traité de Paix fe fera , les Alliez con-
viendront entr'eux de tout ce qui fe-
ra neceflaire pour établir le Commer-
ce Se la Navigation des Sujets de Sa
Majcfté Britannique , 6c des Seigneurs
Etats Généraux , dans les Païs 6c lieux
que l'on doit acquérir, 6c que le feu
Roi d'Efpagne pofledoit. Ils convien-
dront pareillement des moiens propres
à mettre en fureté les Seigneurs Etats
Généraux par la Barrière fufmention-
née.
10. Et d'autant qu'il pourroit naî-
tre quelque controverfe au {lijet'de la
Religion, dans les lieux que les Al-
liez efperent de conquérir , ils con-
viendront entr'eux de fon exercice ,
au tems fufdit de la Paix.
1 1 . Les Alliez feront obligez de
s'entraider 6c fecourir de toutes leurs
forces , au cas que le Roi de France ,
ou quelque autre que ce foit , vint à
attaquer l'un d'entr'eux à caufe du
prefent Traité.
1 1. Soit que l'on puifle maintenant
tranfiger fur ladite fatisfaétion & fu-
reté, ou foit que la Paix fe faflè 'a-
prèsque l'on aura entrepris une Guer-
re neceflaire , il y aura 5c demeurera
toû-
i
6z8 MEMOIRES, NEGOTIATiONS, TRAITEZ,
1701. cent conclufam, fit & mamat femper
— inter partes contrabentes fœdus defenfi-
vum pro guarantiâ ejufdem vel tranfac-
tiortis vel pacis.
15. Ad hujus fœderis focietatem ad-
mittentur cuntli Reges , Principes , &
Status qui volent , & quibus pax gene-
ralis cordi eft : ^uoniam autem Sacri
Romani Imperii peculiaritcr interefi
paccrn publicam fervari , £5? hic inter
alia agatur de recuperandis Imperii Fen-
dis , ad hujus fœderis focietatem dic-
tum Imperium fpeciatim invitabitur ,
praterea Fœderatis conjunclim vel fin-
gulis feorfim licitum fit acceffionem ad
hoc fœdus requirere eorum , quos requi-
rere ipfis vifum fuerit.
14. Ratihabebitur hoc fœdus ab om-
nibus Fœderatis intra fpatium fex fepti-
manarum vel citius fi fieri poterit .
In quorum fidem nos fupra memorati
Plenipotentiarii prafens fœdus fubfcrip-
tionibus & figiUis noflris munivimus.
Hagœ- Comitum die feptimo Septembris
anni millefimi feptingentefimi primi.
Signât um erat in fingulis Injlrumen-
tis feparatim , fcilicet à poste Cafarea
Sua Majeftatis , Petrus Cornes à
Goeflcn , Joanncs Wenceflaus Comcs
Wratiflau à Mitrovitz > à parte Regia
Sua Majejlatis Magna Brittannia ,
M.irlborough ; £5? à parte Dominorum
Ordinum Generalium Uniti Belgii D.
van Eck van Panteleon , Hr. van
Genr. F. B. van Rhcede. A. Heyn-
futs. W. de Naflau. E. de Weede.
W. van Haren. B. J. van Wel-
velde. W. Wichers. Appofitis ft-
gillis fingulorum nominibus.
toujours entre les Parties contractan-
tes une Alliance défenfive , pour la
Garantie de ladite Tranfaéb'on , ou
de ladite Paix.
13. Tous les Rois, Princes, 6c E-
tats, qui ont la Paix à cœur, 6c qui
voudront entrer dans la prefente Al-
liance , y feront admis. Et parce
qu'il elt particulièrement de l'intérêt
du Saint Empire Romain , de confer-
ver la Paix publique, 6c qu'il s'agit
ici entr'autres choies de recouvrer les
Fiefs de l'Empire , on invitera fpe-
cialement ledit Empire d'entrer dans
la prefente Alliance. Outre quoi tous
les Alliez enfèmble, 6c chacun d'eux
en particulier , pourront y inviter
ceux qu'ils verront bon être.
14. Ce Traité d'Alliance Sç Con-
fédération fera ratifié par tous les Al-
liez dans l'efpace de fix fèmaines , 6c
plutôt fi faire fe peut.
En foi de quoi , nous Plénipoten-
tiaires fufnommez avons figné le pre-
fent Traité de nos mains , 6c l'avons
muni de nos Sceaus 6c Cachets. A la
Haïe le feptiéme du mois de Septem-
bre de l'an mil fept cens un.
Etoit figné en chacun des Inftru-
mens feparez ; fçavoir , de la part de
Sa Majefté Impériale , Pierre Comte
de Goes ; 6c Jean ÏVenceJlaus Comte
de Wratiflau £5? Mitrowitz. De la
part de Sa Majefté le Roi de la Gran-
de-Bretagne , Marlborough. Et de la
part des Seigneurs Etats Généraux
des Provinces- Unies, D. van Eck van
Panteleon , Hr. van Gent. F. B. van
Rheede. A. Heynfius. W. ds Naf-
fau. E. de Weede. W. van Haren,
B. y. van Welveldc. W ; Wickers.
Le
ET RESOLUTIONS D'E T A T. 619
Le Comte Je Goez prit la réfolution de porter lui-même le Traité à 1-01.
Vienne. Auffi, partit -il pour cela le ip. Le -Comte de Wratiilau relia —
pour vaquer pendant fon abfence aux Affaires qui pourroicut furvenir.
Dès que l'Empereur eut ce Traité, il vaqua à le fortifier par d'autres Al-
liances. Il y invita plufieurs Princes. Il écrivit fur-tout au Roi de Suéde,
pour y entrer > la Lettre fuivante.
LEO P O LDU S, &î; éç, Inviu.
tionde
QUmjlatim àfatali e vivis exceffu Caroli II. Hifpaniarum fc? Indiarum quen- l'Empe-
dam Régis Catholici, affinis &? Nepotis Nofiri ," fub pratextu cujufdam ab eo x£fxf?
conditi Tefiamentï , Rex Chriftianiffimus Univerfa Hifpania Régna & Provin- Sued/
cias , etiam eas qua Clientèle jure à Romano dépendent Impcrio, tlujis, fpretif- du 10/
que Patlis, TranfacJionibus , Renunciationibus , Juramentis, Legibus, anterio- Novem-
rumque Regum Hifpania Declarationibus ,pro Nepotefuo Duce Andegavenft ufur-
par et , non poteramus propenft noftri in tranquillitatem 13 Pacem pubîicam animi
[pecimen dure luculentiùs quant declarando tàm fummo Pontifia quam Sereniffimo
Magna Britannia Régi , (3 Ordinibus Generalibus Uniti Belgii Noftram amicè
tranfigendi promptitudinem , ubi in aquas ire conditiones pradiclo Régi Chriftia-
nifftmo vifum foret ; fed rejecla plane fuit omnis Nobifcum cum Minijlris Neflris
Traclatio, &? vix alia, tùm Haga-Comitis, tum Roma 13 alibi audit 'a Galli-
corum Miniftrorum voce s , quam decretum efje Chrijlianïfjhno Régi, omnia fine
àiminutione tueri , qua Nepoti fuo , vi dicli Tefiatnenti , verè nullius, commettre
exijlimaret.
Perpendentes igitur Nos &f Supramemoratus Magna Britannia Rex uti £5? Or-
dines Générales Fœderati Belgii quanti noftra , omnium 13 fingidorum, imb &
ttniver forum Europe Principum interfit , îam immoderaîa Unius Régis cuncla
pro arbitrai 'u fuo , répudiât â omni aquitatis ratione , fibi aut fatnilia fia haben-
4i, aliifque Principibus dominandi, cupiditati, modum aut obicem, quantum in
Nobis effet , ponere , (3 commune falutis , libertatifque periculum conjuntlis anj-
mis viribufqut propulfare : Coivimus tandem, afpirante Divin 0 Numine cumfu-
pradiclis Potentiis fœdus , cujus Exemplar Serenitati Veflra (quam pro arclioris
Nobis cum eâdem intercedentis amicitia jure , nihil ejufmodi celare volumus) bif-
ce annexum mittimus-y Et quandoquidem juxta hujus fœderis Articulant decimum
tertium placuit ad ejufdem focietatem admittendos & invitandos effe cunclos Re-
ges, Principes, (3 Status, quibus pax generalis cordi eft, pratermittere non pof-
fumus quin Serenitati Feftra , pro fpeclato fua jufiitia, falutis, fecuritatifque
publica Jludio , neceffarii httjus vinculi communioncm amiciffimè off cramas. Per-
fpicit liquida fumma Serenitatis Feftra prudentia , quam in extremo diferimine
verfetur Sacrum Romanum Imper ium , occupât â Armis Hifpano-Gallicis , non
tantum ipfâmct Hifpaniâ cum Indiis, fed etiam Italià, 13 Univerfo Circulo Bur-
gundico , ab Auflria Noftra Principibus olim Hifpanicœ Corona inferto, qua
etiam ex ejufdem Circuit feu Belgii Catbolici amiffione ïnevitabilis ruina Fœdera-
tas Batavorum Provincias mantat £5? quàm certa denique tum Commcrcioruni ,
tùm libertatis 13 dignitatis jatlura cœteris Europa Regibus, Principibus Ï3 Re-
Tom. I. Hhhh lus-
<?;? MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
1701. bu s- Publia s impendeat , fi qu<e jamdtulitm omnibus , prafettim vicinis tàm gravis
■ fuit Burbov.icœ dtnuis patent ia , totius Hifpana Monarchice acceffione contra jus ,
fafque omne augeatur ; Et quemadmodum J/uflriie, Habsburgi , y T'yrolis titulos
fibi u fur pare cccpit , ità etiam ajferio Oceani , Martfque Mediterranei , uti {§
maximœ in utroque Orbe partis Terrœ-Firmœ Domino, cuicumque alu Populo
jura pro more five libidine ilia dandi , ejufque fëta quodammodo difpcniandi,
poteltatem nafta fuerit. T'alita itaque pericula & imminentia publicae rei mala
Serenitatem Veflram infuper non habit uram , fed ils efficaciter amoliendis, tuen-
daeq-tie juftitiae & communi Canfae , pro eâ , quâ inter Cbrifliani Or bis Reges y
Imper ii Romani Membra pollet dignitate & potentiâ , curas , vires , 6? auxilia
fua Nobifcum &? cum Fœderatis No/lris flrenae conjuncluram cfje certb confidimus,
atque ut eum in finem fupramemorati fœdcris nexum, a:ceffione fua arcliks contra -
bere & firmare velit , fraternè rogamus. Recreabit nos plurimbn atque Serenitati
Veflrae fummopere devinciet , prompt a , fiduciacque Nojîrae congrua Déclarât io ,
quant ab ejufdem aequo amicoque in Nos, Sociofque Noflros animo expeclantes,
Serenitatem Veflram Divinae Tutelae enixè commendamus. Viennae i o. No-
vembris 1701.
Il ordonna, en faifant remettre cette Lettre, de faire reflbuvenir du Mé-
moire que le Miniltrc Impérial avoit préfenté au Roi de Suéde en 1697. tou-
chant la Paix de Ryswick , 6c fa Garantie , dont voici la Copie.
P. P.
ÇAcra Caefarca Majeftas , Dominas meus Clementifjîmus , per Tabellarium ex-
preffum , mihi demandavit , ut Majeftati Veflrae Regiae eâ , quâ par efl , bu-
mi llimâ obfervantiâ referrem, Sacram Gaefaram Majeflatem nullo modo dubitare,
Regiae Majeflati Veflrae fore adhuc in recenti memorid , Regiae Majeftatis
Veftrae defunclum Purent cm Gloriofae Memoriae , die 2p. Mail fuperioris anni
declaraffc , quod Corona Galliae promiferit , fe non folum Traclatum Pacis TVefl-
phalicac &? Neomagenfis , fine alla mutatione , nifi quam Regia fua Majeftas ju-
dicaverit, ad majorent borumTraclatuiim confirmât ionem profutur am, reftitutu-
rameffe, fed etiam alti finie memorata Regia fua Majeflas' nullam diclis Trac-
tât ibus Paa's refragrantem mutationem admiffura, vel pro utili acceptura fit , ut
inde omnis fcrupulus Sacrae Caefarae Majeflati Ejufque Confœderatis eximeretur,
qwn per Regiam Médiat ionem omnimoda redintegratiâ obtineri poffït . . ghtae De-
claraiio pofîea a Ccronae Galliae apud Aulam Suecicam commorante Legato appro-
batafuit; Sacra Caefura Majeflas tamen, ut amputaren'tur omnes Gallicae ini-
quae interpraetationes , & ad promovendhm opus Pacis , de/ideravit clariorem
Gallici promiffi expîicatiomm , anneclendo Rcccffum Execuiionis Norimbergenfis,
fua tamen Regia Majeflas flagitavit, ut rcfpeclu illarum Declarationum , quas
Regia fua Majeflas à Coronâ Galliae obtimififct, & ipfamet adjunxifjet, Tracla-
tuum initium fieri deberet , ad péri cul um eà commodius faciendum , fi quid occulti
ixl dubii fttb Gallicà Dcclaratione lateret ; fimul Sacram Caefarcam Majeflatem
Dominum taenm Clementiffimam fecuritm rcddendo , quod Majeflas fua Regia- bas
ET RESOLUTIONS D'ETAT. 6tx
à Galliâ fafias Déclarations, & praediftos Trailatus 10 mugis tuituva & prapu- 1701.
gnatura fit, quoniam nulla alla Pax I-Feftphalica agnofcatur , quant quae vï Re-
ceffus Norimbergenfis Executionem fit nacla, unde. Sacra, Caefara Ma je ft as jàm
menfe Otlobri anni praeteriti ftatuit Regiam Suecicam Médiat ionem cum Referva-
to Guarantiae recipere , tum etiam jufjit , ut haec Aulae huic nota facerem , id
etiam polie a cum reliquis D. D. Confœdcratis repetivit , quà ratione mot a altè
înemorata Regia fua Majefias non folum cum acceptât ione Mediationis Guaran-
tïam r tir fus promlfit , fed etiam Majefias Vcftra Regia porro per fuam ad Media'
tionem deflïnatam Legationem Hagae , vi feripti adiuncli , declaravit fe quoqus
hanc Guarantiam & obligationem in fe fufeepiuram effe , cum itaque bine merito
fperandum effet , Coronam Galliae tam proprias , quam Rcgias Suecicas per Lega-
tum Gallicum in Aula Eorum agnitas Declarationcs impleturam effe , in Traclatu
Hagenfi tamen contrarium omnino apparet > tautum enim abeft , ut, fecundum
Projetlum Gallicum , Corona Galliae cogitet de reftabiliendà Pace TFcftphalicâ ,
quin ne quidem , quod lmperium tempore Pacis Neomagen/is poffedit , a ut quod il-
la pofi conclufionem ejus fibi ipft tribuit, fed, excepto Argent oral 0 , £s? Dînant '0 ,
folummodo id , quod pofi initam Pacem Neomagenfem , fub tituio &? practextu a
Caméra Metenfi, Vefontinenfi , £5? Brifacenfi Faéarum Reunionum, fpecie juris'
adjudicaverit , rejlituere velit , eb omnino progreffa, ut fibi hanc fententiam pro->
pofuerit , omnem difeuffionem Pacis TVeflphaliae rejiciendi , quoniam ex itlis Veri-
tas tam clarè elucet , tum etiam pro lubitu tempus &? terminum praefigendi ,
ut cuncla prifiinis tenebris immerfa hacreant , pofi id enim tempus elapfum obla-
tis conditionibus fatlis amplius flare aut obligari non vult.
ghiid ténor e Pacis Weftphalijac Imper io fit refiituendum clarifilmis verbis ,
partim in Infirumento Pacis Ofnabrugen/îs multis locis, tum praefertim §. De-
inde ut inferior Palatinatus totus 14. §. Liberam bnperii Nobilitatem. zf.
§. Princeps Ludovicus Philippus 28. §. Principes quoque ÏVirtemberqici
Lineâe Mompelgardenfis , 31. §. Fiudericus Marcio Badcnfis 33. §. Para-
graphi.Duxde Croj.$. Rex tamen praeter protecliouem. 77 . §. Statim a rejfitu-
tione 81. & feqq. teneatur Rex Çhriflianiffimus 87. expreffum eft. Unde quo-
niam omnes h'i Articuli, non fine ratione, tam évident er &? clarè in mcmora~
to TratJatu Pacis inferti fuere, verus eorum fenfus eo minus m, dubium voca-
ri pote fi, quoniam ipfa Corona Galliae immédiate pofi conclufionem Pacis {cum
adhuc , quid initum foret , in recenti memoria baer.eat: ) per fuam ip/ius ad-
impletionem fine ullâ contradiction eum agnovit & per multorum annorum ob-
fervantiam corroboravit.
Hifce omnibus nullatenus per Pacem Neomagenfem derogatur , quin potins
omnia in variis Articulis irréfragabiliter confirmatur, & quidem Art. z. Re-
fiituetur Pax tVeftphalica in omnibus &f fingtdis priflino fuo vigori, manebit-
que in pofterum farta tecla , tanquam fi hic ejufdem Pacis Inftrumentum de
verbo ad verbum infertum léger etur , ni fi quatenus eiclem hoc Traclatu expref-
fè derogatum eft. Art. 27. juxta Pacem Monafter. , Art. 2. in omnibus confir-
mât um reciprocè reflituantur , & reftituenda loca évacuent ur bonâ fide Art. 31.
Licet fatis deelaratum fit Art. z. Hujus Traélalus , Inftrumentum Pacis Mo-
nafier. in omnibus & fmgulis confirmdri &c. Unde etiam & ad ejus fimili-
Hhhh i tudi-
6ji MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
1 70 1 . tutlimm , in ReccJJ'u Executionis Neomagenfis , inter îoca Imperii , ex quitus'
Sacra Caefarea Majeftas copias fuas tducere deberet , Landavium & Cronweifen-
burgum enumerantur his ver bis Imper at or Exercitus fuos & copias quant oc i us de-
duci curabit ex omnibus Imperii ditionibus ad Domum Auftriacam jure haeredita-
rio non fpeclantibus , & nominal im ex Circulis Sueviae £s? Franconiae, uti £5?
Circulis Rhenano Eleclorali , £5? Rheni Supcrioris , Urbibufque & Fortalitiis in
iisfitis^ Bonnâ, Argentine , Offenburgo , Hochberg, Landavio , Croniveift/en-
burgo , ne c non gêner aliter ex quibufcunque aliis locis , neque Pace Monajlerienfi ,
neque Neomagenfi Sacrae Caefareae Majeflati competentibus.
Quoniam vero Corona Qalliae quidquid jam diclum efi flocci facit & contem-
nit, quin etiam quafi pernegat & agnojcere detr éclat Sacrae Cefareae Majeflati a
defunbli Régis Regia Majeflate datam Declarationem, tum, quod magis eft, cona-
tur Impcrium per eju/modi pro lubitu ejus £s? propriâ voluntate praeftitutas termini
anguflias ad ejufmodi Pacem cogère, quae fine rerum omnium jaclura £5? exitio ini-
ri nequit , Sacra Caefarea Majeftas Dominus meus Clementiffimus omittere non
potuit, quin inftantijjimè efflagitet promiffam à Corona Sueciae Guarantiam , eu-
jus praeftationem eo citius ftbi pollicetur, quoniam in eumfiatum res jam dedutlae
funt, ut fi unquam animus eft Coronae Sueciae hujus Guarantiae Romano Imper i a
reapfe exhibendae, hoc jam ficri debeat nec amplius differrï poffit.
In tanta Petiti hujus aequitatis & Regiorum Promifttrum AuSioritate , quibus
Sacra Caefarea Majeftas adducla fuit , ut Pacis Negotium inciperetur , humilli-
■ me fpero , Majeftatem Feflram Regiam me gratiofijfimo fuo Refponfo dignaturam
ijfe, qui hmnillima fubmijjîone permaneo*
Signatum,.
F. COxMES DE StAREMBERG.
Pour le Roi de Dannemarck , l'Empereur avoit fait avec lui un Traité
pour quelques mille hommes de fes Troupes. Ce Traité avoit été négocié
parle Miniftre de ce Roi, nommé Jeflen , qui avoit été éloigné dans cet
Emploi illuftre. On attribuoit à Jeflen tous les Defordres de la Cour de
Dannemarck. Pleflen fon Antagonifte lui fucceda. Comme il avoit le cœur
droit, on s'attendoit de fon Miniftere toute forte de bien. Il eft vrai que ce
Roi n'étoit guère content de ce que le Chapitre de Lubeck s'étant aflemblé,
, & aiant procédé à l'Eleâion d'un Coadjuteur , partie des Capitulaires avoit
nommé le Frère du Duc de Holftein pour l'être. Une autre partie , qui
ctoit plus nombreux d'une voix, avoit élu le Prince Charles Frère du Roi
de Dannemark. L'Empereur pancha à l'Approbation de la première Elec-
tion. Cétoit parce qu'elle étoit fondée fur des Conventions & Traitez par
lefquels. l'Evêché devoit continuer pendant fix Générations dans la Maifon
Ducale de Holftein. Cette Difficulté faillit quelques années après d'allumer
un fâcheux Incendie, ainfi que l'on dira en fon lieu.
Quant au Roi de Pologne , l'Empereur trouva des Difficultez. Ce Roi
demandoit à k Cour de Vienne h Ceffion pour quarante ans d'une certaine
Lan-
ET RESOLUTIONS D'E T A T. 6*5;
Langue de Terre en Siléfie, qui rapportoit fo. mille Ecus de Rente annuel- 1701.
le. Moiennant cela, il offroit d'envoier huit mille hommes au Service de
l'Empereur. Celui-ci ne vouloit point aquiefeer à cette Ceffion , offrant à
la place un Subfide pécuniaire & annuel de la même Comme. Ce Roi -là ne
donna même au Comte de Straatman Envoie Extr. de l'Empereur que quin-
ze jours de tems pour avoir Réponfe. Le Comte envoia un Exprès là-deffus
à Vienne pour favoir fa dernière Réfolution fur ce point. Les François ne
laiilbient pas de leur côté de traverfer les Négociations du Comte. C'étoit
en jettant des hameçons garnis de friands Appas. Ils offrirent à ce Roi - là
600. mille Ecus contant, & cent mille Ecus par mois pendant la -Guerre,
pour vu qu'il voulût entretenir 24. mille hommes en Allemagne pour foûte-
nir l'Intrigue de la Neutralité 8c l'entêtée Opofition au neuvième Eleétorat.
D'ailleurs, cinquante mille Ecus par mois à durer pendant cinq années après
la Paix. Auffi , fût-ce fur le fondement de ces offres , que le Roi de Pologne
fit faire à Ratisbonne des menaces. C'étoit fur l'apprehenfion d'une préten-
due Irruption des Suédois en Saxe. Le Roi de Pologne fît dire à la Diète,.
que fi l'Empire ne tâchoit de la prévenir, il ne manquerait pas d'être affilie
par fes Alliez j ce qui allumerait une Guerre dans l'Empire qui pourroit être
d'une malaifée extinction. Il étoit véritable que les Suédois avoient un bon
Corps de Troupes campéee à Stetin en Poméranie. L'on ne doutoit nulle-
ment que cette Armée ne fût deftinée pour faire une Invafion en Saxe. Auf-
fi, fut-ce dans cette crainte, que le Dannemark y envoia des Troupes Auxi-
liaires, auffi-bien que le Roi de PrufTe. Les Suédois prenoient à tâche de
confirmer cette Opinion. Ils difoient que le Roi de Pologne, aiant attaqué
la Livonie , fans le confentement de la République , ils ne pouvoient faire la.
Guerre au Roi Auguste dans la Pologne , qui ne s'étoit point déclarée
contr'eux. Ils prétendoient par-là s'attirer l'Amitié de la République. El-
le avoit pris l'alarme de l' Entrevue qu'il y avoit eu entre fon Roi 6c le Czar.
Ce dernier avoit promis au Roi de Pologne un million de Rixdallers pour
continuer la Guerre à la Suéde. C'étoit dans l'attente de réparer l'Echec
de Narva. Les Polonois ne pouvoient digérer ce point. Ils croroient qu'il
avoit en vue de donner atteinte à la Liberté de la République. Celle-ci
étoit troublée dans la Lituanie. La Noblefle s'y étoit attroupée contre la
Maifon de Sapieha. Le prétexte en étoit la Cbégalité de la Noblefle en ce
Duché-là. Oginski, qui en étoit à la tête, ainfi qu'on l'a ci - devant dit ,
porta fon Parti à commettre des excès inouïs , pour le faire opiniatrer dans
le Tumulte, par la crainte des peines dues à la cruauté qu'on avoit exercée
contre la Maifon de Sapieha. Comme Oginski n'étoit pas aflèz confide-
rable pour être Chef d'un Parti fi redoutable, 8c qu'il n'étoit ni riche ni
Homme d'Etat, on vit par la durée de cette Confédération, que les Confeils
& les Sommes venoient d'une autre fource, 8c par d'autres reflbrts. On en
devina, ou du moins en foupçonna-t-on deux. L'un étoit un certain Crif-
pin de Coningsberg. Le Roi Jean SoBitsKi l'avoit élevé fi haut , 6c il
étoit devenu fi opulent, que ce Roi -là en aaignit lui-même la puiflànce>
Crifpin s'étoit retiré en Lituanie, £c le Roi Sobieski fut obligé de. lui lâ-
, Hhhh 3 cher
634 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
i-r0I. cher dcflus- la Maifon de Sapicha pour l'abbattre. Crifpin , trouvant l'occa-
. fion pour s'en vanger, il appuia par fon argent, & par Ton génie, Oginski,
& le refte de la Noblefle. L'autre reflbrt étoit attribué au Roi Auguste
même, qui étoit bien aife de lafTcr par les Difcordcs civiles ce Grand Duché-
là, afin d'y mieux dominer. On étoit généralement feandalifé en Pologne
de ce que le Roi avoit mis une Garniion Saxonne dans une Place aparte-
nant à la Maifon de Radzcwil. La Noblefle confédérée de Lituanie dvef-
fâ des Demandes. Elis les envoia dans tous les Palatinats du Grand Duché,
pour y être mis en Délibération dans les petites Diètes, pour être enfin por-
tées à la grande, qui devoit fe tenir en Mai. Voici ces Demandes.
Deman- „ I- /^~YUe tous les Nonces ou Députez à la Diète s'obligeront par ferment
des de la }J V^ de ne point defilter de leurs Demandes touchant la Cocgalité.
Noblefle *. jj QyC to|JS jes ]sjonccs s'aflémbleroient à Wilda le i. Mai, pour y con-
thiun'ie. » fronter conjoinétement leurs InftruéHons. III. Que l'on propofera les
intentions du Grand Duché de Lituanie contre les Officiers de la Couron-
ne, pour être inférées dans les Inftruétions du Roïaume. IV. Que l'on
agira avec beaucoup de précaution à l'égard de la Guerre contre la Suéde,
5)
5)
,, pour ne point choquer le Roi, ni auffi le flater, d'autant que cette Af-
„ raire regarde la Republique en général. V. Que les Députez infirmeront
pour taire remplir les charges vacantes par ceux qui les auront mieux me-
„ ritées. VI. Que ceux de la Maifon de Sapieha feront tenus pour Enne-
„ mis de la patrie, qu'ils ne jouiront pas du Droit commun , moins encore
„ de celui d'aflifter au Confeil, quand même la Diète devrait être rompue
„ pour ce feul fujet. VII. Que dans l'Inftruétion des Députez il fera fait
,, mention d'un prompt départ des Troupes Saxonnes , du dédommagement
„ des pertes qu'elles ont caufé, & d'une entière fatisfaéHon fuivant les Con-
„ ftitutions faites en 1699. VIII. Que le Général Flemming qui occupe
„ la Charge de Grand Ecuier, étant étranger , & par confequent incapa-
„ ble de l'exercer, fe démettra incefiamment de cette Charge en faveur d'un
„ originaire du Pais > -Se que les Nonces ne pourront paiTer à la délibération
„ d'aucun autre point , avant que d'avoir reçu une Rcponfe pofitive du Roi
„ fur les Articles ci-deffus. IX. Que l'on prendra garde que perfonne de la
Maifon de Sapieha ne ibit élu pour être Député a la Diète.
■>■>
Cette NoblefTe pafla même plus loin 5 car Elle envoia en même-tems au
Roi un Député, fuivi de 500. hommes pour lui demander de ne pas accor-
der fa Protection à la Maifon de Sapieha. Cependant , il en vint peu de
jours après d'autres de la part des Palatinats de Cracovie & de Sendomir, qui
avoient tenu leur Diète à cheval au nombre de fix mille Gentilshommes ,
pour demander le contraire. Enfin, le 30. de Mai l'ouverture de la Diète
Générale fe fit à Varfovie. Cependant, la confufion y domina, partie par
des vétilles & des ponctilles, 8c partie par l'efprit de Faction. Il y fut refo-
lu, à la pluralité des voix, d'envoier des Députez au Roi, pour lui remon-
trer la necefiité , pour le repas de la République , de renvoier les Troupes'
Saxon-
ET RESOLUTIONS D'E T A T. %
Saxonnes dans leur Païs, de faire la Paix avec la Suéde , de faire retirer du 1701.
Confeil les Allemans qui y avoient été admis , 8c d'affoupir les Differcns c'c ■
la Lituanie au iùjct de la Mailbn de Sapieha. Le Roi répondit , qu'il étoit
prêt à rcnvoier fes Troupes, 8c même de rendre les Places qu'il avoir, conqui-
ses en Livonie, & de faire la Paix avec la Suéde. Cependant, ce feroit à
condition que la République le garantît que le Roi de Suéde n'entreprît rien
contre lui; que par raport aux Troubles de la Lituanie, il étoit prêt de con-
courrir avec la République en tout ce qui feroit néceflaire pour les appaifer.
On ne fut guère content de cette Réponfe. Ce Roi n'en avoir pas fait don-
ner une fatisfiiifante à une Harangue qu'un Député de la Grande Po-
logne lui avoit faite. L'Efprit de Liberté qui y brille fait trouver à propos
de l'inférer ici.
„ S I RE, Haran-
gue d'un
„ ^TOusnousprelentons devant vous de la part d'une Province qui a toujours Député
„ IN la Majelté de fon Roi devant fes yeux & la Liberté clans le cœur. Jrande-
„ Nous fommes prêts de facrifier pour la profperité de V. M. nôtre bien, Pologne.
„ nôtre fang , nôtre vie, 6c ce qui pourrait nous être encore plus cher,
„ pourvu que nous confervions cette Liberté 8c nos Droits. C'eft ce que nous
„ fouhaitons d'infinuè'r de la manière la plus refpectueufe à Vôtre bénigne
„ Majefté, afin qu'Elle fe difpofe à faire ientir fous fon glorieux Règne d'au-
„ tant plus d'affection pour la Liberté de nôtre Nation & pour le bien pu-
„ blic. Nous voudrions même qu'Elle voulût, comme un bon Père de la -
„ Patrie , pénétrer nos penfées , que la douleur ne nous permet pas d'ex-
„ primer.
,, Nous nous plaignons d'un cœur rempli de confiance, que les Loix qui
„ ont été données ne s'obfervent point 5 Que ce qui a été arrêté à la dernière
„ Diette générale de tout le Roïaume n'eft point exécuté ; Et qu'au con-
„ traire la Diète , qui a été promife par des Conftitutious nouvelles, paraît
„ par fes frequens délais, £c jufques ici fins exemple en ce Pais , plutôt abo-
„ lie que différée. C'eft pourquoi, nous fuplions trés-humblement V. M. que
„ par l'efperance de cette Diète, il lui plaife rendre à nôtre République la
„ Vie qu'Elle ne fauroit conlerver fins cela.
„ La Conftitution de la Diète qui traite de la fureté des Etats de la Ré-
„ publique, 8c où il a été itipulé que les Troupes Etrangères fortiroient de ce
5, Roïaume fans y pouvoir rentrer, tire fa fource de l'ancienne Intégrité 6c
„ Fidélité de nos Peuples envers leur Roi 8c Seigneur. Quoi que cette Con-
„ ftitution n'ait pas été obfervée, nous n'avons pourtant pas d'abord recours
„ aux moïens qui nous ont été accordez du contentement de Vôtre Majefté,
efperant d'obtenir par nos prières le remède à nos griefs.
„ Nous fuplions donc V. M. de nouveau, que fon cœur invincible pour fes
Ennemis fe laifle fléchir aux inftantes prières de fes fidèles Sujets, 8c faf-
„ fe enfin fortir de ce Roïaume toutes les Troupes Etrangères, ians qu'elles
„ puiffent jamais y rentrer.
„ Vos
55
V)
6tf MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
1701. „ Vos PredecefTeurs de bien-heureufe Mémoire ne rempliflbient point les
„ . Villes de Garniibns nombreufes. Us les confident à l'affection 6c à la fide-
„ lité des Bourgeois , perfuadez qu'il leur iraportoit beaucoup plus d'être ai-
„ niez que craints de leurs Sujets.
„ C'ell cette Nouveauté , qui a fraie le chemin à la Guerre de Suéde fi
„ malheureufe & fi fatale, de laquelle la République fent déjà tous les maux,
„ bien qu'elle n'ait eu aucune part aux Réfolutions qui l'ont produite.
^, Nous fommes obligez de reprefenter à Vôtre Majefté avec une foûmif-
„ fion très-profonde , que dans le tems que fon cœur héroïque Se fon ame
„ magnanime l'ont poufîée à vouloir reconquérir ce qui a été autrefois détaché
„ de ce Roiaume, elle n'a pas fait reflexion que c'eft une de nos Loix prin-
„ cipales 6c fondamentales de n'entreprendre aucune Guerre fans le confente-
,, ment de la Republique. Nous fuplions donc trés-humblement V. M. de
„ remettre à la Decifion des Etats de la République un point fi délicat , qui
„ nous donne matière à des reflexions fi profondes, Se des allarmes fi gran-
„ des pour nôtre Liberté.
„ Nos Loix, Sire, ne font pas écrites fur des Tables de Marbre, aifées à
„ brifer contre quelque rocher: elles font gravées dans le cœur des" fidèles
,, habitans de ce Roïaume ; 6c le cœur étant la partie de l'homme qui re-
„ çoit la première la Vie, 6c qui la perd la dernière, nous mourons avec les
„ Loix de nôtre Liberté, comme nous vivons avec elles.
„ Le trifte fort de la Lithuanie nous applique cet Emblème affligeant}
„ à peine avons-nous connu le Père que nous perdons 6c enterrons la
„ Mère. Dés le commencement du Régne de V. M. nous avons vu la
„ mine delà Republique en Lithuanie, qui ne nous fauroit faire croire que
„ la Guerre civile fe fera pour la confervation de nôtre vie 8c de nôtre prof-
„ peiïté.
„ Que le cœur héroïque de V. M. foit touché de l'efRifion de ce noble
„ fangj Que l'affection que vous avez promis à cette République vous pouffe
„ aux foins d'éteindre ce terible embrafèment } Que la compaffion & la jufti-
„ ce dûë à la grande 6c illuftre Maifon des Sapieha, vous porte à la reitituër
„ dans fes dignitez 6c jurifdictions, 6c qu'elle réunifie à jamais la Républi-
,, que avec la confervation des Grands de ce Roïaume, 6c de leur bien 6c de
„ de leur administration.
,, Nos Provinces étant lenfiblement touchées de l'état confus 6c déplorable
„ de la Lithuanie, fuplient V. M. d'y rétablir non feulement l'ordre 6c les
„ anciennes Loix ; mais aufli de donner à ceux qui n'ont point de part à ces
„ troubles la fureté de leur bien 6c de leurs honneurs , pour les empêcher de
„ devenir complices, 6c ne les obligeant point au ferment exigé d'eux. Je
„ parle de M. le Caftelan de Wilda Vice- Connétable de la Lithuanie, qui
„ s'efl: aquis un fort grand mérite tant auprès de la Lithuanie, qu'auprès de
„ toute la Couronne de Pologne, non feulement aux occafions de la Guer-
„ re , mais auflî en tems de Paix. Je parle de même de M. le Vice-Chan-
,, celier de Lithuanie 6c Gouverneur Bobozgoki.
„ Ce que nôtre Province délire, Se ce que nous croïons être auflî le fou-
„ hait
ET RESOLUTIONS D'E T A T. 637
]. hait ardent 6c unanime de toute la NoblefTe de la Republique, c'efl de la 1-701.
„ pouvoir laifler à nôtre Pofterité telle que nos Ancêtres l'ont tait parvenir
„ jufques à nous : Gens libéra fiwius , nemini fervivimns unquam.
„ Pour confirmer ce que j'ai dit, je lirai mon Jiiftruétion. Vous y remar-
querez, Sire, un fort grand zèle, non feulement pour la fplendeur de la
République, mais auffi pour la gloire de fon Augufte Chef, qui cil V. M.
Se en même tems beaucoup de déplaifir de ce que l'Electeur de Brande-
bourg fe donne le titre de Roi de PrufTe. Nous fuplions très*-humblement
V. M. de donner ordre que la Chancellerie de la Couronne ne commette
point d'erreur là-deiïus, 6c qu'il n'en arrive point de préjudice, nia V.
„ M. , ni à la Republique.
„ Nous mettons aux pieds de V. M. cette Inftruction, mais nous n'aban-
„ donnons point nôtre -efperance, étant refolus de foûtenir avec V. M. nos
„ Droits Se nôtre Liberté , qui, nous aïant été aquis par le fang de nos An-
„ cènes, feront confervez par. nous avec tout le foin poiTible.
Cette Diète, qui finit fans conclufion , fut enfuite déclarée nulle par
le Roi ôc la République. La raifon de cette Annullation étoit pour éluder
ceux qui avoient été renvoiez pour quelque fatisfaction à cette Diète , afin
qu'ils ne'priiTent pas le prétexte de dire que la Diète n'avoit pas fatisfait à. ce
qu'on avoit promis. C'étoit, parce qu'étant annullée , elle étoit cenfée de
n'avoir pas tenu fa Séance. La vûë principale étoit afin que le Roi de Pruf-
fè ne prît pas le prétexte de fe refaifird'Elbing, à caufe qu'il avoit été ren-
voie à la Diète Générale pour lui donner fatisfaction fur ce qu'on lui avoit
promis pour l'évacuation de cette Ville-là.
Il arriva la nuit du 18. au 1 0. de Juillet que le Roi de Suéde fit pafTer la Du*
ne à Riga à un nombre de fes Soldats. Le Roi étoit à leur tête. Le Parta-
ge fe fit avec dix-fept Barques qui avoient de Parapets de bois , qu'on bailli
pour débarquer. Le Roi avoit fait charger d'autres Barques de matières com-
bustibles. Le vent en portoit la fumée vers les Saxons, qui gardoient le
bord de la Rivière. Par-là, ils n'aperçurent point le Trajet des Suédois, qui
étoient fécondez par l'Artillerie de Riga, & par celle qui étoit fur les Bar-
ques. Les Saxons s'avancèrent pourtant au nombre de cinq Bataillons & dix-
fêpt Efcadrons ; mais, après un Combat de trois heures , les Saxons furent
défaits. Comme les Suédois les pourfuivirent , ils prirent la fuite vers le
gros de leur Armée, qui fe retira fous le Canon de Birtzen en Lituanie, aban-
donnant divers Portes. Le Roi de Suéde envoia un Détachement à Mitrau ,
Capitale de la Courlande, où l'on trouva une quantité confiderable de bled,
de farine, des habits 6e équipages pour 5000. hommes , Se des Armes pour
le double, 6c quelque argent. Les Suédois impoférent à ce Duché -là une
Contribution de 60. mille Ecus 6c d'une grande quantité de Provifions. Ils
prirent aufïi divers Places , 6c fur tout Birtzen , d'où les Saxons avoient dé-
campé avec un gros de Mofcovites qui étoit venu à leur fecours. On eut une
Nouvelle particulière. C'étoit que le Roi de Pologne , aïant. apris la Défaite
de fes Troupes pendant qu'il étoit à Cheval, poufià cet Animal jufques à le
Tçm. I. Iiii met-
6tf MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
1701. mettre fur les dents. lien defeendit ; &, tirant fbn Sabre, lui coupa la
■ tète. C'étoit un coup de force comparable à ceux du fameux Scander-
berg, Roi d'Albanie. Comme le Roi Augvste crût que celui de Suéde
pourfuivroit fon Armée en Lituanie ôc en Pologne , par le Droit de cher-
cher fès Ennemis là où il pouroit les trouver , il dit fa crainte au Cardi-
nal Primat. Celui-ci écrivit là-deffus une Lettre au Roi de Suéde de Ix
teneur fuivante.
Lettre SACRA REGÎA MAJ^SfAS,
du Cai> -
<li"aI ÀSfuetus genîi nojlrœ erga vicinos fincera amicitia cultus , tanto magis confiant
Fnmat Religio initi Sacri cum Regno Sueciœ fœderis , monebant ejus fidem ne inten-
logne au tato prœfenti Refpublica Polona fe immifeeret Bello^ autjuftitiœ amore^ aut fati-
Roide dico rerum eventu. Accejfêre es congregatis proximè ac dilatis Comitiis patetic*
Suéde, candoris vofiri documenta , induclam effe Sacrant Regiam Majeftatem Pokniarum
ad cogitât iones eorum quœ Pacis funt ut nihil aliud deftderari , pofi commijfum ob
utrinque virium diferimen nifi finem cruenti certaminis conc'ordiam & amorem. Si
veto vel Dits difponentibus vel fortuné faventiori darentur Sacra Regite Majeftati
Veflra fuccejfus votivi folatia , ha -c fine periculo fecuturi deinceps dubii eventusfu-
fient anda, fortunam autem moderandam fuaferim. ghtod fi perfuaderi nequeat hoc
unicum pro Jlatione meâ totius Reipublica nomint ac vote efflagito ut Sacra Régi*
Majeftas Vejlra limites Regni hujus &f annexarum ei Provinciarum , fi quâ iter
belli daretur , non infeftet , tanto magis non tranfgrediatur , fervando eam nobis
viciffim amicitiam , quam in prafenti cafu^ nullo navo infperfam coluimus. Ge-
minatis id expofeendo Majefiati Fefira humillima incîinor Feneratione. Dabantut
Varfavia zf. Julii Anno Domini 1701»
Traduc- » S I R E,
tion de
la Lettre }J T A lîncere Amitié que Nôtre Nation a accoutumé d'entretenir avec fë*
Sente* " Voifins, Se à plus forte raifon la foi du Traité conclu avec le Roïau-
„ me de Suéde , avertiffoient affèz la République de Pologne , de ne pas
„ s'engager dans la Guerre prélènte , foit par l'amour de la Juûice , ou par
„ un preffentiment de l'avenir. Auffi avons Nous donné des marques écla-
„ tantes de nôtre Candeur, dans la dernière Diète générale, qui a été con-
voquée & enfuite diferée , où il a paru que S. M. Polonoife , entrant dans-
les fentimens de ceux qui font portez pour la Paix, ne fouhaitoit rien tant,
après l'effai périlleux qui a été fait des forces de part & d'autre , que de
voir cette fanglante Guerre tei minée par le rétabliffement de la bonne
intelligence, & d'une Amitié réciproque. Si y néanmoins , le Ciel en dif-
pofânt autrement , perrnettoit que le lort des armes fécondât les defirs de
Vôtre Majcfré , j'eitimerois qu'Elle devroit ufér avec modération de fà
Fortune , quand même Elle ne leroit pas expofée aux rifques d'un nouvel
Evénement douteux. Que fi V. M. ne peut fe laiffér perfùader, je la
conjure au moins très-inltamment, par le devoir de ma Charge x au Nom
•>■>
35
»
M
»
ET RESOLUTIONS D'ETAT. <sî9
„ & félon les vœux de toute la République, qu'il ne foit point fait de dorr>- 1701,
„ mage, & encore moins d'invafion , dans les Frontières de ce Roïaume , -
.„ & les Provinces qui en dépendent , en cas que la Guerre porte Vos Armes
„ de ce côté-là. En forte que V. M. conferve avec Nous la même Amitié,
n que Nous avons inviolablement entretenue de nôtre part dans la Conjonc-
„ ture préfente. Ce que lui réitérant avec inflance , je demeure avec une
„ profonde Vénération,
„ De Vôtre Majeure,
„ Le très-humble & très-obéùTant Serviteur ,
. „ Le Cardinal Radzieiowski, Primat.
„ A Varfovie le z6. Juillet 1701.
L e Roi de Suéde en reçût une pareille du Prince Sapieha , à laquelle il
fit cette Réponfe.
NOS CAROLUS, D. G. SUECORUM REX, &c. Réponfe
du Roi
Jjftulerat nobis Nuntius Literas ejufdem Tikocinii datas , quibus teflari placuit , de pUedc
. quod inter hos motus , ( quorum temerarius , non minus quem impius Autor *£ s'a'_ "
Rex ipfe Poloniarum cenferi débet ) , inclyta Vefira Refpublica inconeuffam nobifeum pieha.
alere amicitiam , fidamque viciniam colère confiituerit ; quod cum gratum nobis
■cognofeere , nos quoque femper fuerimus initorum fœderum , dataque fidei religio-
fi obfervatores , adeb ut in eo nulli hue ufque locum fecerimus quœrelae ; ita quo-
que in pofterum providebimus , ne à parte noflrâ quicquam admit 7 'al 'ur , quod pro
infraclione Pacis , "veterumqut paelorum violât ione reputari jure poffit, nift con-
trario aliquo ipfius Reip. conatu ad id fuerimus coacli. Cum autem mentem nojlram
hâc in re IUuftri Reipubliae amplius exponi jam nunc curavimus, ejus itaque
refponfum quantocyus expeïïamus , eoque reddito adaequatas inibimus rationes ,
praefenti rerum ftatui , eoque acceptior erit Reipublica Déclarât io , quo magis corn-
muni fecuritati ac bone congru a intelligatur. De ceetero nos eandem Dco commen-
datam , &? quam diutifjimè incolumem cupimus.
C e Roi fit auiîî la Réponfe à celle du Cardinal Primat, telle que voici.
re
Nos Carolus, Dei gratiâ Suecorum , Gothorum , Wandalorumque Rex &c. Lettre
Jllujlriffimo , Eminentifjîmo , ac Reverendifjîmo Domino Michaeli Cardinali du Roi
Radzieiowski ,, Archiepifcopo Gnefnenfi ac Primati Regni Polonice, Amico no- rfe Suéde
bis finctre dileclo, falutem & profpera quœvis. cihnl""
Primat.
jLlufiriJJime , &c. Quac nobis à Rege Poloniae contra Paila, Jusjurandum,da-
tamque fidem illata fit "vis atque injuria , quantumque damni & laefionis eo
ipfo Vefira perpeffa ef Refpublica , notius Eminentiae Veflrae efl , quàm ut ils re-
lui 2. ce n fendis
<î4o* MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
1701. ctnfindis immorari operae ducamus pretium-, certi^ Eminentiam veftram ifta du-
——— ditm omnia aequo confiderafie anima ^ atque aegrè tulijjè, cum vider ït Reipublicae
neque pauca neque exigita enata fut (Je imommoda ex bello , quod^ eâ tamen infeiâ
atque invita 6? fine ttllà dijjenftonis caufià caeptum gejiumque eji. Speramus
itaque Emincntiae Veflrae haud levi fuiffe laetitiae ac dileclamento cum infignem
inaudiverit , quam ab ho/le noflro fmdifrago fummi numinis auxïïto nïiper reporta-'
vimus vicloriam ; quâ tant féliciter ce/us fugatufque boftis fuit , ut incertum fit ,
turpiorne fuga nunc ejus an iniquior terrarum nofirarum invafio fuerit. Non folum
liberata fie eft , incurfionibus ejus hojiilibus Livonia , fed etiam multum eommodi
13 emolumentï Vefirac allatum Reipublicae , quippe quae hinc fpem certam conci-
pere pot eft , fe à multis magnifque imminent ibus periculis , nec non jura ac liberta-
tem ejus à minitante opprefiionem ac interitum ufurpatione vindicari hâc occafione
optimepojfe. P cr pendit e, rogamus , Bellum hocce citrà Reipublicae confenfum ,
ut credere fus eft, fufeeptum^nec non aliorum conflits quam qui Reipubl. non bene
eup'.unt décret um geftumque tffie : Quin 13 Rex vefier fiecreta cum aliis Poteftati-
bus pereufijerat fœdera , 13 traStatus confecerat non paucos , quorum nec habuit
notitiam Refpublica , nec bono public p & feopo ejufdem falutari erant adaequata ,
pro lubittt difpofuerat , quae è diametro cum Senatus Confiait is & Reipublicae pu-
gkant Conftitutionibtts.
Pacla Conventa eludere quovis modo 13 artificio fiategerat , curamque adhibue-
rat maximum , quo inter praecipua Regni Polonici membra dificordias & internecina
pelia concitaret (3 aleret ; Ex quibus omnibus aliifique quibus fiuperfiedendum nunc
putamus, lu ce meridianâ evadit clarius nihil Régi Veftro futjfe délibérât lus quid-
quam , quàm formidandas fibi acquirere utrinque vires , debilitare Cives & Regni
incolas , Eorum attre tiare paulatim jura , Conflit utione s publiais perrumpere ac
deflruere, & fupremum tandem arripere cum Reipubl. everfione arbitrium atque
Dominium. Hocce immoderatum vafti animi defiinatum nunc quidem noflra viko-
'ria exi ft intari poteft , quodam modo reprejfum, fed artibus ejus non confidendum ,
tempeftivis Confiliis , fort ibus remediis 13 cita executione opus eft , fi falva jura
regni (3 incorruptam libertatem Feftram cupitis. Dubio enim caret , poflquam
in animum fiemcl induxerat abfiolutum Regimen fibi vindicare, ne conceptâ fpe fuâ
magnifque au fis excidat , nihil eum quicquam reliclurum intentatum , quo illud
per/iciat) nil penfi habens , fi finis , quem fibi propofuit obtinendi gratiâ & totam
Rempubl. 13 praecipuè ejus membra noxa & interitui immolaret j Huic 'igitur
malo mature praeficindendo médium accomodatius vix adhiberi poteft ullum , quàm
fi Rex ifte Throno quàm primum dejictatur, quippe quô fie infraclâ toties legum (3
juratae Capitulations fîde reddidit indignum. In quo cum non minus Reipubl.
(rcjlrae quam noflra pofita fit fecuritas , non poffumus non huic Rei perficisndae
fuwimopere infiftere , neque quifquam rcrtim périt us Rempublicam propterea ini~
quitatis aceufai/it ; aceufiabit eam fortafjïs pojleritas nimiae lenitatis ac impruden-
tiae , fi id infeclv.m rcliquerit. Nec- nobis imputari poterit culpa , fi. necejfitate a-
daili hoftem nofirum perfiecuti fuerimus , ubicumque ipfi fecuritas & fuftentatio
contingat praefiari ; cum fatis fuperque conftet , Nobis nihil magis in votis efifex
quàm ut quies duarum nationum , quas nativa quaedam 13 perpétua communiî
titiiitatis ratio propiori amicitiae nexu conjunxit , quantum in nobis fit um eft , non
l.:r,bilur. D? hâc h tùta in Literis Noftris ad Rcmpubl. perficripfimus pro-
lixitiSy,
ET RESOLUTIONS D'ETAT. 641
lixius , quas opportuno t empare traclandas Eminentiœ Veflrœ commendamus , fi- 1 70 r .
mulque ab eo bénévole & amicè contendimus , até iïfdem pondus authoritatis fuœ , ■
fummœque quel pollet prudentiœ & Confiliorum dexteritatem adjungere non grave-
tur. 6)uod fi fiât , nulli ambigemus quin & vim habeant efficacifiimam £5? nobis
optatum adveniat quantocius refponfum. Si quid opis & auxilii à nobis defidere-
tur , lubentes promittimus nos pr a fente nunc exercitu nofiro eodem Reipublïcœ pro rei
exigentiâ adfuturos , nec immemores erimus aut zeli (3 laboris ab Eminentiâ
Vefirâ prceftiti , aut teflificandi erga cam quacunque occajione grati animi Regiœ- •
que nofirœ benevolenfiœ. De cœtero Eminentiam Veflram Divinte T'atelts etiam
commendatam (3 quant diutiffime incolumen cupimus. Daba/Hur in Cafiris nofiris
prope Bantske die 30. Julti 1701.
A Rege Sueciœ
ad
Cardinahm Primatem
Regni Polonia.
Peu de tems après, le Roi Auguste écrivit aux Etats Géncnux , St
au Roi d'Angleterre, ce qui fuit.
P- P- Lettre
r'Elfi & Prœpotentes Domini Jmici Nofiri Charijfimi. Celfitudines Fejîras la- dePoIo-
tere non volumus, nos contra Regem Sueciœ eo animo (3 intentione arma ce- Ineaux
pijfe, ut tam infavorem Régis Daniœ, vï initi fœderis vires Suecicas fer diver- q^.
fionem diflraberemus , quant patratas contra fanclam pacem Olivenjem injurias iâllx, &
•vïndicaremus ; 13 quamvis viclricia no/ira arma ulterius proferre, optatefque no- au Roi
bis exinde polliceri potuiffemus fuccefjus , id tamen Infiantiœ Mediatorum dedimus , d"Angle-
ut paci amicitieeque priftinœ cum Rege Suecia refiituendœ pnsterlapfo jam anno tîire*
promptiffimos nos declaraverimus , eumque infinem à devafiatione urbis Rigœ per
injeclionem ignis, quorfumjam omnia parafa erant , aliifque hoftilitatibus ceffare ,
(3 ad promovendam reconciliationem , evitandamque majorem animorum exacerba-
tionem, opérât iones bellicas defenfivè faltem profecuti fuerimus , adeoque feduïum
ubique paci reducenda adhibuerimus operam. gfuœ verb è contrario Rex Suecia
animo voluerit, & quàm longe ejufdem intentio ab <equa intunda pace , remota
fit , exinde manifeftum efi , quod nonfolum omnium Exterorum Principum Able-
gatis more haftenhs plane inufitato aditum (3 audientiam denegaverit , (3 hoc ipfo
ifiorum vilipendium palam tefiatus fit , fedt3 alla inhonnefia fummifque Princi-
pibus indécent ia excogitaverit média, adeo ut pofiquam è Cancellariis Suecicis to-
tusfere Or bis Libellis famofis , quos haclenus contemtuvindicandos ejfe duximus ,
jam tum repletus fit ,eo quoque procefferit, ut Lit cris hifee in copia junclis ad Car-
dinalem Regni Nofiri Primaient tranfmifiis fuaque manu fignatis cumulatis ei fini
falfifiimis imputationibus fedit iones in Regno Nofiro contra Nos, concitare non eru-
i-uerit. Nec dubitandum efi , ea, quœ ratione abfoluti alicujus à Nobis pratenfi
Domïnii contra nos \ Rege Smi<e finguntur , èdogmatibus 'fui Parentis^ ante-
iiii 3 ' ceffa-
«4* MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
1 70 r . ccjforumqut praceptis ortuvn traxiffe , quorum tyrannica principia non adcb longs
- abhinc iempore in ijiis Regionibus executioni mandata omnium aàhuc mémorise in-
fixa barent. Cum è contrario Nos ctiamfi optimà forte occafione dcducendi talia
ad effeclum exoptatum haud defiituti fuerimus ,nibilominus cxponcndo propriamfa-
lutem noflrafque fortunas perennem Reipublica bujus félicitaient indefeffe quafive-
rimas, Libertatifque Jubindc vigorem modis omnibus foverimus , quorfum fi opus
forets facla &? adliones nofiras in teftimonium vocare , & reliqua Régis Suecia
' figmenta leviter fpernere pofiemus , nifi eo ufque impudent iâ progreffus fuiff'et ut
quod apud bar bar as gentes turpe 13 inhoneflum, apud Chrifiianos veto Principes
inauditum eft, deturbationem tioftra Perfona de folio follicitare horumque contra
nos attentatorum pramium conjiitucre non abftinuerit. Nos equidem Dei omnipo-
tentis auxilio freti 6? de Polonorum Noftrorum fide ergà Reges fuos fmgulari , fe-
curi,hac (3 aiia tanti non curamus ,& fi opus fuerit malo ifti remédia fufficientia
inveniemus. Cum tamen infidiofi hi Conatus cum omni focietate bumanâ (3
omnium ge rit ium jure è diametro pugnent , ità prudcntiffimo al i or uni Principura
Judicio illos fubjiciendo , fpem fovemus certlfjimam, fore , ut graves bafce ma-
chinât icncs, tanquam communem caufam (3 pullulantes exindè cuilibet regimini
fumme nocivas confequentias , facile confideraturi fint , cum non fit dubitandum
in quolibet Regno inveniri refratlarios Ï3 perfidos fubditos, qui talifmodi crimi~
tmm protetlorcm ampletlendo cmne genus malitia explere non intentatum relin-
quent : &? cum certb confidimus Celfitudines Feflras praprimis hancce Régis Sue-
cia intentionem deteftaturas , £5? ut quies bifce regionibus reddatur , nec incen-
dittm illnd qusd jam proprias Celfitudinum Feflrarum invafit oras , latifjimas
muhque flammas deinceps nonnifi maximo cumpericulo extinguendas concipiat , al-
laboraturas ,infimulque ex indigna & inconvénient i exceptione Ablegati Celfitudinum
Vejlrarum vilipendium ingratumque Régis Suecia animum pro praflitis hablenus
officiis fatis perfpeclum habit tiras, indeque facile judicaturas effe quid de vajlo il-
lius deflinato & tumidà fpe , nifi in ipfo ortu fujfocetur , impoflerum expetlandum
fit. Tum Celfitudines- Feflras pro eâ qu<e hatlenus iifdem Nobifcum intercefft
amicitia, enixè requirimus, ut fuis bac parte confiliis , 13 benevolà fi opus fuerit
affiflentià nobis haud decffe vclint , ne alias ad ejufmodi média quibus tamen hatle-
nus abfiinuimus , contra Regem Suecia Ejufque Perfonam procedere cogamur , qitœ
quœvis occafio nobis fubminiflrabit , quaque ad fecuritatem Per fonce £s? Rcgni
vofîri ab omni vi injuflà confervandam idonea 13 jufla judicabimus. ghiibus Cel-
fitudines Veflras Divine Protetlioni commendamus 13 profpera quavis animitiis
'tppreCiimur. Dabantur in arce nofirâ Varfavienfi die p. Septembris 1701.
Ai
Status Confad. Belgii.
In fimili ad Regem Anglix nifi mutato paragraphe) feqq. in fine.
TÛT cum certb confidimus Majcfiatem Feftram praprimis hancce Régis Suecia in-
tentionem eo mugis deteflaturam effe, quo (3 ea fublimi cogitatione expende-e
13 pracavere mceffe habet, ni' ejufmodi refraclariis (3 perfidis fttbditis latiffîms
ad
ET RESOLUTIONS D'Ë T A T. . 64$
ad inobedientiam aperiatur campus , fuorumque fcekrum tutum prejîetur afylum 1701.
£5? facrata Regum Perfonœ quafi in pretium ponant ur infimulque immoderatum —-
hoc Régis Suœciœ deftinatum in tempore reprimatur , ne is qui omnia fibi li-
cere putat in bis maxime Europai Status conjunfturis etiam leges dare fer-
ttntet.
Comme dans cette Lettre, à laquelle il avoit joint la Copie de la Rc-
ponfe au Cardinal Primat , 6c qu'il y avoit d'atroces Inveétives contre le Roi
de Suéde, l'Ambafladeur Lillienrooth fit d'abord travailler à y faire des Ré-
flexions, qu'il fit même imprimer pour diftribuë'r aux Membres des Etats
Généraux & aux Miniftres Etrangers, telles que voici.
I N
EPISTOLAM
REGIS POLONIiE,
Q.U A M
AD CELSOS ET PRiEPOTENTES BELGII
FOEDERATI ORDINES,
De Bello Livonico y Anno MDCCI. die jx. Septembris
fcriplèrar,
ÀNIMADVERSIONES SUBITANEiE.
Çlrcumfertur Epiftola quœdam Régis Poloniœ ad Celfos £5? Prapotentes Belgii Remai--*
Fçedcrati Ordines fcrtpta , quâ Sua Regia Majeftas Sueciee eo potiffimum nomi- quesfur
ne tràducitur , quod Matas fibi haBenus injurias non œqui Ironique faciat , neque la ^ ure
patientiam tam diu prœfiare velit, donec Ma, quœ temerario aufu in fe ($ Rem^ Augus-
pubticam Polonarnfufceptafunt, à Rege Poloniœ patrentur perficianturque ; fed te aux
potius eam confiliorum viam infijiat , quœ conata h&c difturbent , atque ea quo- E- G- »
que perficiendi omnem ipfi facultatem in pofterum eripiant. Anfam hujus crimina- f1 9'
lionis cepit ex Literis , quas ad Primatem Regni Poknia Sua Regia Majeftas Sueciœ brc. Ç™~
miferat : in quibus perniciofœ hœ machinationes Jincerè deteguntur, atque fine cir-
(tiitione ejufmodi confilia in médium proferuntur , quœ cum ad ajferendam utriufque
Regnifecuritatem, tum ad mutuam amicitiam confervandam , fola vi fa f itérant
idonea. Equidem ut nemim miruni effe poteft, parum grata inimico Régi hœc ac-
eidiffe; ita optandum quoque foret , ipfum talent ejfe hoftem, qui, more apud gén-
ies ufitatOy arma, intulijfet , ne que ^ prœdonum ritu, medià in pace. Provincial
Sut'
644 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
170 1. Sueckas inopinatis & fubdolis incurfibus cxpilaffet ; qui etiam in reliquis eamfi-
■ — demferyafiet , /.'/, pojlquam fatis dccertutum fuerit , pax aï que amicitia cum ill»
refiaurari tuto poff'ct. Ncmo utique diibitaverit , quin tranquillitati Orbis Chri-
(liaui dolorent fuum lubenter Sacra Regia Majeftas Suecia condonafiet , neqste ad
afperiora remédia animum adjeciffet. dm vtrb omnià mente circumfpiciens , nul-
lam rationem inventât fida pacis cum Mo habenda , cttjus inconftantiam tôt docu-
mentis exporta efiy atque adeb pravtdeat, fe ab illius infidiis mtnquam fore tu-
tam, quamdiu aliqua nocendi faiultas fiiperfit : non exijlimat vitw fibi datum m.
faltciii ab aquis reritm aftimatoribus , fi contra infolitas artes non vulgari modo
cAHtuin fecuritati fua efje cttpiat. Notum enini eJJ, atque toto orbe pervulgatum ,
quant inhttmauo prorfus more in hoc bclîum progreffas fit Rex Polonia. Qui
cognât uni Rcgcm , quem fua atas , & innocent ta , & propinquitas fanguinis ei
commendabant , ab aliorum injuriis pot lus defenderet ; idem adolefcentine ejus in-
fuliatus , illicitis doits circumventum pane opprefierat. Ut avitum ejus Regnum
difeerperet , aut funditus everteret , non nef as habebatur , occulta cum altis
confilia inire\ Provincias alias fibi , alias Mis occapandas affignare , proditorum
£5? infamiv.m operâ uti , cive [que àd defetlionem fèlicitare. -Qua cum ab initio
clancuîtim agitarentnr , fuftinuit etiam Suecis , ut eos ab infidiarum metu tanto
inagis averteret, arclius amicitia fœdus offerre. Citm in hoc adornando utriufque
Principis Minifiri Varfavia £s? Drefda occuparentur , copia Saxonica in Livo-
niam fubito funt immiffa , ut Rigam per infidias occuparent. Inde licet cum igno-
minie rejeela , Provinciam tamen latè depopulantur , 13 munimenta , prafidiis
jujlis non infiruEla , intercipiunt. Atque hac in mediâ pace perpétrât a funt ,
citm arnica omnia fimularentur , & priufquam ulla ofienfa cauja indicata ejfet.
Cum à Ducibus Saxonicis- caufam hujus incurftonis , S cujus jujfu hac acla ef-
fient, qnxrcrct [upremus Livonia Prafeclus , ifii Mudentes , loco refponfi ineptas
quafidam fabulas repofuerunt. Adeb impotenter & fuperbè Sacra Regia Majc-
flati Suecia ubique infultatum efl , .quafi digna non effet , cui jura gentium ferva-
rentur; fed quàm ludibrio habere, &? contemnere, impuni poffent. ghtœ verè
poftca acla fint ;quot feditiofis Literis Livonorum fuies tentata-,quot calumniisSueci
ficlifque criminationibus lacer ati; quibus conflits Poloni implicaii; quibus artibus
À/o/cus , dubius adhuc 13 nutans , in belli hujus focietatem impulfus ; quibus vafra-
mentis Succi appetiti^ut iterum in infidias allicerentur ; longurn efi hic enarrare.
Ccrtc ab eo die quafi juratus in exitium Suecorum, hofies toto orbe in illos excitare,
mque ipfim Acherontem commovere, fimmis fiudiis annixus eft. £hia citm fu-
fius alibi expofita inveniantur , tetigifje hicjufiicit^ ut confiet , jufliffimam Sua
Regia Majeflati caufam effe , quart tôt atroces injurias , illuftones , (3 intolerabi-
leni fui contemtum non gratis devorare debeat, neefidem ei habere qucat, qui tôt
indignis modis eam polluer at. Sed hac planiora fient, fi Epiflolam ipfam oculis
fubjiciamus: quam fi eàdem liber tate, quà fcripîa efl , bis paulifiper excutiamus,
«on eft, quare magnopere quifiquam mirari pojfit. Commodiffime autem hoc fie t,
fi verba tpfius Epiftola proférant ur, 6? Rcfponfum juxta ponatur. Sic ubi fucus
lateat, facile apparebit.
Cel-
ET RESOLUTIONS D'E T A T. 647
1701.
Celfi ac Trœpotcntes (Domini ,
Arnïci nofiri carïffimi.
CElfitudines Veflras latere non vo- J^Oas in hac EpiftoU inva/ioni fine
lumus , nos contra Regem Sue- caufas prœtexit ; unam , ut', vi
cïx., eo animo & eâ intentione arma fœderis cum Rege Daniœ initi , Sueco-
fufcepifTe, ut tam in favorem Régis rum vires difiraheret ; altérant , ut in-
Danice, vi initi fœderis, vires Sueci- jurias contra pace?n Olivenfem patratas
cas diftraheremus, quàm patratas con- vindicaret. Licet hic primum obferva-
tra lan&am pacem Olivenfem inju- re mutantem Protea vultus, & tôt for -
rias vindicarcmus. mas, qaot vult, afjitmcntem. Alios ab
initia prœtextus attulit ; alios progrefiu
temporis, cum ad irritum cecidiffe incepta fia cerner et : neutres pianos unquamfa-
cere potiiit. 'tune enim prœfidium Rigenfe , quod ad defenfionem fe adverfus copias
ejiis , in Lïvoniam irruent es , componeret , huic bello occafionem dediffe , per Mi-
■nifiros [nos in Aulïs Europœis confiant er affirmavit. Idem Duces iftius exercitus,
fuis Diplomatis , Janiftœ die jx. Febr. M D C C. feriptis, divulgarunt. Idem ip- '
fe Rex in Libella criminofo , quo neceffitatem bujus belli poflea manifeflare voluit ,
in^eminavit. Quare de hac caufà, quœ ei tune palmaria erat , jam reticuït ? In
prompt u ratio efi. Cum Livoniam fibi vindicare ftatuiffet , non opus erat dicere ,
illam Reipublicœ Polonœ caufà h fe occupari, quœ fibi privât um bellum gèrent i in
prœmium armorum céder et: poftquam vero infidiœ , quas urbe Rigenfi firuxerat ,
irrita fuifjint , non è re vifum efi , huic commenta mordicus inharere. Tune enim
■alio pratextu opus erat , ut Serenijfimam Rempublicam Polonam in focietatem belli
traheret. Tum quoque tôt fibilis ubique explofam fuïffe banc fabulam comperit, ut
fiultum foret, iterum eandem in feenam inducere. Itaque cum gratiam ifiius cri-
miriis Suc eus faciat ; illœ tatum caufie, quas EPifiola hœc exprefjit , hic expendan-
tur : quarum prior efi fœdus cum Rege Daniœ pereuffum. Quàm pium illui fos-
dus fnijfet , non vacat hic examinare : Hoc tantummodo feire libet , quœ necejjitas
ei tune erat impofita Suecorum vires diftringendi , cum illi bellum cum Rege Da-
niœ non haberenti Controverfia Holfatica agitabatur , quam componere Principes
Orbis Chrifiiani fummo fiudio quœrebant. Quieverunt interea Sueci : SereniJJi-
mus quojue Rex Daniœ, ad quem i(la controverfia maxime fpeclabat , tamdiu ab
armis abflinebat , quoad Saxones in Livoniam non irruperant. Atque ita , cum
nufquam bellum effet, quid opus diverfionem facere ? Si fœderato auxilium tantum
ferret, quareipfe, qui fecundarias partes in hoc bello habere voluit , bellum prior
inchoavit , quiefeente illo , qui auxilium fiipulatus efi? Qui enim fociorum nomen
gerunt , cum , qui principes partes agit , fequi , non antevertere fiaient. Sed &
pacificatoris per fana , quam in controverfia hac fufiinuit , debebat ipfum monere ,
ne prior arma corriperet. Nihilominus fi neceffarium hoc cenfuiffet bellum , quare
Suecos potius aggreffus efi , quàm Britannos, quàm Batavos , qui eafdem partes
in Negotio Holfatica fibi fumebant ? Sponfionem illi fufeeperant pacli jiltenocnfis <,
£s? ad ilhul defenàendum , œque ac Sueci operam fuam conîuhrunt . Neutri autem
in animum induxerant , ut Danis propterea bellum faurent , fed ut ad paila ob-
Tom. I. Kkkk - fer-
64S MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
1701. fervanda, 6? controverfiam banc tollendam, ïllos permoverent : Quod ctiam ab il-
• Us , quetnadmodum eventus do cuit , obtinuerunt. Jnjuftiffimus igitur hic prœtëxtus
ejl : Nec tam.fubdolam in Lïvoniam irruptionem excufat , quàm prurit um infe-
rendis bellis dctegit. Alteram hujus belli caujam facit violationem pacis Oliven-
/ÎS) quant vhidicare fe debuijfe dicit. Licct hic pri muni intcrrogare , à quibus de-
mandai'11 in hoc negocium habuit? A Republicà Polonâ? Atqui in hune ufque dicm
nullam bac querelam prot nierai , quâ lœfam Olivenfem pacem argueret : Contra
confiant: [finie haclenus tejlata eft , fe mtllas in hoc bello, quod, infeiente ipfà^fu-
feeptum, partes fumer e , fed cupere, ut antea , pacem eu m Suecis illibatam con-
fervari. Quomodo igitur effari poteft , fe injurias , quœ nullœ funt , vindicatum
ire ? Deinde tralatilium eft , 6? notum omnibus , nullum belli jus in Republicà
Polonâ Régi competere : quod cum, infeiâ eadem 6? invita , nihilominus fufeepif-
fit, leges Reipubliae fondamentales ab eo convulfas, liquido patet . Ita geminato
fe critnine objlrinxit , ciint , arrogato fibi. belli arbitrio , patla conventa , qutefer-
vaturum fe jur avérât , infringerct , & Suecos , Reipubliae amicos, & innoxios,
perfide fimul aggrederetur. Au/us quidem eft Criminationes quafdam , poft quant
bcllum incepiffet , typis divulgare : Sed easy oppofito Refponfo , toti orbi Sueci de-
monftrarunt , nieras efife calumnias, eo fine à Rege hoc excogitatas , ut Rempubli-
cam Polonam fui periculï fuccedaneam faceret , quo feffa po/lmodum & exhauftœ
Art. 55. ultimum fpiritum interciperet. Tum vero fanclam pacem Olivenfem , cujus hic me-
§. 2.. 3. minit, quart ipfe tant audatler violavit ? Diclitat Ma expreffis verbis , fi lis ali-
qua inter Régna Suecia & Polonik oriatur , non ideb licere lœfo ad arma recurre-
re , fed a-micam ejus componendœ rationem ineundam effe : Indicandam injurïam ,
monendos de eâ pacifient es, fatisfatlionem petendam: Hoc objervato ordine,fi lae-
fus in reparandp damno tergiverfetur , tum demum , faclâ prius légitima belli de
nunciatione, jus armis profequendum. Anborunt quidquam obfervavit Rex Polo-
niae , qui pacem banc à Suecis violât am tradit ? Ipfe igitur iftius pacis , quae
inconcufja haclenus fictif , turbator atque ruptor eft j cujus temeritas, juxta eaf-
dem pacis leges , ciim Polonorum , tum omnium pacifeentium viribus dudum cafli-
gari debuerat. Quaprupter nemo erit , qui non liquidifjlme bine intelligat , nullâ
juftà caufà , fedfotà hbidine proritatum , Rcgem Poloniae in banc arenam defeen-
dïffe , 6? quidquid buic belle praetexat , exeufandis ejus injuriis adeb non Jufficere ,
;// omnium potins odium ac deteftationem mereatur.
Et quamvis vi&ricia noftra arma Ne praeclarae hae vicloriae ignoren-
ulterius profeire , optatofque nobis tur , juvat eas in compendium hic re-
exinde polliceri potuiflemus fuccef- digère , donec ils jufto volumine ex-
iusj plicandis par aliquod ingenium exiftaf.
Liceat tamen hic diffimulare Pannoni-
cam cladem, cum dutlu fuo EleSlor Saxoniae exercitum Caefarianum perderet :
ghiae fuis aafpiciis gefferat , exponant ur. Primum igitur trophaeum Lithua-
nia vidit, quae copiis Saxonicis direpta , turbifque internecivis à Rege ipfo im-
plicata , aeternam , ut creditur , iftius expeditionis memoriam confervabit. Al-
ter triumphus aclus eft de Curlandid , quae pari folertiâ correpta eft. Quare
publicâ etiam devetioiie iftis in Regionibus Saxonicum nomen colitur. Et bas
ET RESOLUTIONS D'ETAT. 64y
quittent palmas de civibus retulit, à quibus vexât iones injuria/que ctrecre dcbuif- 1701.
fet : Externac autem militiae grandior furgit moles. Nam cùm folitudinem — —
demi vaftitatemque feciJJ'et , popukbundam manant in fines Suecorum tnifet , eo
videlicet tempore , que- pace confidentes , & fimulato amicitiae fœdere deceptos ,
exercitum procul babuijje illos mverat. §)uo ei facilius erat, patentes agios
incurfare, & duo Cajieîla opprimere. Nam à mœnibus Rigae , quant praeci-
puè petebat , fortiter depulfa eft. Haec ciim Holmiam mtficifta cJJ'ev.t , îegiones
Hnnicae eçprejfîs fuppetias ire juJJ'ae , primo adventu fuo ita latrones bofie ter-
ruerunt , ut , reliclà praedâ , locifque opportunis , quae muniverant, defertis,
trans Dunam refugerent. Haec primo vere gefla funt. Sequenti aeftate , ciim
Sacram Regiam Majeftatem Sueciae comperijfet in Selandiam exercitum tra-
duxijje , tant a jam anxio &? trépidant i redit in praecordia virtus , ut , colleclis
majoribus copiis , ipfe Dunam trajiceret , exiguâ Suecorum manu infeffani , &f
haud procul Riga cajlrametaretur. Quant cum obfidere deftinaret , fama pacis
Travendalenjis animum ejus ita perçut it , «/, ut reliclis operibus , qna exftruxe-
rat, magno pavore in Poloniam fe redperet ; ru'mofo tanturn Caftello , quocl ad
Dunam '.Jitttm efl , prias occupato. Hic armorum ejus ambittts efi^ qui quot gra-
dus, tôt opprobria babet: de quo tamen, gloriofi inflar militis, jaclare Je non ve-
retur. Certe erubefeeret ea viclricia appellare arma, quœ ut ignavis turpibufque
dolis aliquem progrejfum in initio debuerunt ; ita fœdum exitum fortita eJJ'e uni-
•verjus novit orbis : cum paucarum borarum fpacio exercitus Saxonicas, tôt Cafiris,
tôt Munimentis , tanto Apparat u bellico exutus , totâ Curlandiâ expelleretur.
Id tamen inftantice Mediatorum de- Quis magnâ animi moderaiione bel-
dimus , ut paci amicitiseque priftinae latorem banc fuiJJ'e neget , qui in ipjo
cum Rcge Sueciae reftituendae , praî- vicloriarum curfu, fi Dis placet, pacem
tcrlapfo jam anno, promtiffimos nos cum Suecis reftaurare cupiverat. Sed
declaraverimus , eumque in finem à id tamen in flantia- Mediatorum dederat.
devailatione Urbis Rigœ , per injec- Quinam autem illi faerunt ? Cum nulli
tionem ignis , quorfiim jam omnia pa- unquam Mediatores nominali , aut ac-
rata erant , aliifque hoftilitatibus ceC- cepti ejfent ; quomodo ad illorum infian-
fare , & ad promovendam reconcilia- tiam pacis conditiones offerre potuit ?
tionem , evitandamque majorum ani- Qua vero ratio ettm fubegit , ut ita lo-
morum exacerbationem , operationes queretur ? Imb , ut in Suecos , qua/i à
bellicas defenfivè faltem perfecuti fue- pace abborrentes, omnem invidiam con-
rimus, adeoque fedulam ubique paci ver ter et; & fponfores fœderis Olivenfis
reducendas adhibuerimus operam. obligatione illâ , quâ eum , aggrejfurem
turbatoremque iftius fœderis , perfequi
debebant , folutos ejfe perfuaderet . Si pacis defiderium aliquando pra Je ferret ,
cognitum eft , meta armorum Suevicorum eam mentent induiffe : quamprimum is
ceJJ'avit , à pacifici animi ftudio longiffîmè abfuijfe. Quod ad'eo certum explorât uni-
que illis erat , qui apud ipjum degebant , ut teflari boc ubique non dubitaverint.
Neque enim difficile erat divinare, vapido fiub peilore tegi vulpem, cum ver bis pa-
cem creparet , re vero ipfâ illam impediret. Nam quœ exterorum Principum Le-
gatis aliquando propofuerat, alio die immutata £5? à prioribus prorfiis aliéna in-
Kkkk 2, ven-
6fo MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
1701. venta fait: adhac quœ de fatisfaclione dixerat , tam abfurda fuijfe atque ignomi~
niofa, ut facile apparerct, ludos agi, & tempus tant uni quari neclendis novis do-
lis. Sjhiare nugamcnta ifia neque tutb, neque honefle, Sua Regia Majejias Sue-
cia admit t ère potuit: quœ etiam cre débat fe meliori jure Rcgem Gallia,caterofque
(perfores , monere poffe , ut , juxta tabulas pacis Olivenfis , aggrefforem junclis
vhibus ad aquam honcfia~'nque pacem adigerent : cùm jam non de avertendo
bello, ne inciperet , fed de fœdifrago , qui boftem fe jam diu gefferat , coèrcen-
do ageretur. At vero , qui Suecos tantis injuriis oner avérât , fi ptci, ut hic
traditur, reflaurandœ promtiffimun fe dcclaraffet , an laudtm propterea merea~
tttr ? an veto Sueci reprehenfioncm , quod pari propcnfione pacem admittere no-
luerint'i Scilicet tam abjeclœ fortis Sueci funt, ut à Rege Polonia impune laceffi
k3 vexari , atque illudi tam diu pojf.nt , quamdiu fatis ipfi vifum fuerit : cum
vcrb , îafj'ata lubidine , amicitiam rurfus obtulerït , vituperari etiam debeant , ni-
fipronis animis tantam bcnignitatem fufpiciant atque exo feulent ur? £)uis aquita-
tem in illo laudet , qui poftquam damnum atque contumeliam mibi gravijfiman in-
tulcrat , bac conditione mecum in gratiam redire cupit, ut finem ille injuriarum fa-
ciat , fi ego injurias haclenus illatas œqui Ionique confulam? Aut quisjuflam la-
tronum orationem pronunciet , fi fupervenienti Domino, cujus œdes expilaverant ,
clament fe amicos ei pofibac vitluros, fi cum intégra pr a dâ Mis abire permiferit ?
'Talent pro cul dubio pacem Rex Polonia optaffet , quee non modo inulta pateretur,
quœcumque ab eo haclenus pat rat a funt, fed etiam januam aperiret, quandocun-
qtie commodum vider et ur, ad cuudem ludum iterandum. Sed neque fubitus difeef-
fus , quo moenia Riga déferait Rex Polonia , ullam pacis cupiditatem arguit.
Obfidere urbem potuit , non oppugnare , partim inopiâ pulveris tormentarii impedi-
tus, partim famâ advenientis Régis Sueciœ conflematus. Nove'runt, qui tune
ederant, quanta trépidât io tous caflris erat , quanto ipfe mètu pereuffus , tor~
ment a bellica pr opère amoveri juffit , cum de pace Travendalenfi primutn , mox
etiam de conf petits navibus , qui militera Succicum vehebant, rumot vulgaretur.
Ad bac ijlo jam prœfidio Rigam inveniebat firmatam , ut minas fuas non tantùm
impune pojfet fpernere, fed & obfefiforibus non minora, quàm Mi Riga , inferre
détriment a. ^anquam , quâ efi calliditate , tune obtendere plaçait, Bat avis id
fe beneficii dediffe , ne , injeclis ignibus , merces fimul eorum perderet. Cui de-
nique perfuadebit , fe amore pacis ab omni hoflili atlu poftea abjlinuiffe , £s? pro-
pulfando tantum bello fuiffe intentant ? Cerlè tôt excurfiones, quas in agrum
Suecicum miles ejus feccrat aliud docent. Tôt quoque adhortationes , cùm alibi,
tam in nuperis comitïis, ad Rempublicam Polonam , ut avulfa recuperaret ; tôt
ntunimenta pajfim excitât a ; tantum rei bellicœ congejlum penu j Caflcllà , quœ
Suecis eripuerat , ftrmiffimis prœfidiis infeffa ; tôt machinai iones ; fœdus dcniqiie
arclifjimum cnmCzaro pereufum; & viginti millia Mofcorum in auxillum acci-
ta, fatis évinçant aliam ipfi mentent fuifj'e , nift invicla Sacra Regia Majefiatis
virtus immancs iflos conatus , juvante Deo , fort i ter reprefjiffet. Ex bis igitur ,
quœ dicta funt, manifefium efi , cùm Médiat or es nulli fuiffent , quorum operâ,
pax cuire potuifj'et ; ne que conditiones aquas unquant obtulifjet Rex Polonia ; ne-
que fignum ullam paciftei animi dediffet : fincerum reconciliationis fludium in il-
Is nunquam fuiffe ,. fed omnia infidiofa .0 fimulata , ut Suecos. pariter & co~
rttm
ET RESOLUTIONS D'E T A T. 6ft
rum focïos f aller et ; & illos quidem ab inftdiarum metu avocaret, hos vero à fe- 170]
rendu ope, quant ex paclis debcri novit , retineret. . •
' Qu£E vero è contrario Rex Sueciîe Quemadmodmn igltur ab infidih iflis,
animo volverit, & quàm longe ejuf- quas tenàebat Rex Poloniae , cavere
dem intentio ab sequa ineunda pacc fibi Sua Regia Majeftas Sueciae de-
remota fit , exinde manifeftum eit , buit : Ha ab aequà pace nunquam
quod non iblum omnium exterorum aliéna fuit , fed cujus obtinendae nul'
Principum Lega,tis , more ha&enus lam fpem vidcbat , quoad ifii ad no- \
plané inufitato , aditum & audien- cendum vires fuppetcbant. Frujlrd au~
tiam denegarit , èc hoc ipfo iftorum tem contrarium inde arguitur , quod ex-
vilipendium tcihvtus fit. tcrorum Principum Legatos in cafiris £#
acie fecum verfari, è re non futarit Sua
Regia Majeftas Sueciae; Cum cxercitu enim in Lfiuoniam trajeclura , publiée de-
claravit , & fibi 13 Mis incommodum efje ,ut in remotas Mas or as, & jam maxi-
mam par tem ab hofte vaftatas , abirent : Conflit ut uni efje Holmiae Goncilium1 ,
aucloritate juftâ infiruclum de omnibus Negociis cum Mis traclandi. Jtaquc ut;
hoc eompendio poterant , fi quid de pacew monere voluiffent : Nec opus erat in ea ,
quae funclioni eoriim plané inepta erant , loca divertere. Quamquam fuper baeç
antea Mis conflabat , omnes alicujus momenti res , quae Pacem &? fœdera tangant,
ad hoc Concilium remitti folcre. l'um qua fronte traditur , Legatos efie "viles ha-
bit os à Sua Regia Majejlate Sueciae , quae quamdiu in Hybernis degebat , c os ad
fe excurrentes lubenter audivjt ? Cum vero ad perfequendos hofles exercitum duce-
ret , non vacajfe tune intcrpellationibus eorum , quo tempore inflans diferimen onmes-
occupabat curas , nemo paulo aequior mirabitur. Nec more inufitato. hoc contigiffe
noveraut alii, qui Jus Centium paulo reclins interpretantur , ac obfèrvant, quàm
haclenus Rex Poloniae. Quam enim rationem adferet , quare non licuiffet Sacrae
Regiae Majeftati Sueciae uti hic arbitrio fuo , locumqae & Miniflros , quos vel-
let , Negociis fuis expediendis defignare ? Aut quis palronum in bac cdufà eum cun-
ftituiti Certè non confiât Principes illos, qui Legatos miferant, unquam ei accu-
fationem hanc demandaffe. Quibus à Rege Poloniae tantum concedi aequum erat,
ut fi quidquam, quod à confuétudine ac acquit ate alienum efj'et , Légat is eorum eve-
nijfet , ipft pofj'ent de hoc fablo expoftulare. Cum vero iniquum obtretJatoris judi-
cium nemo eorum fecutus fit , pat et neque exifiimafiè illos, à moribus cultiorum gen~
tium àiferepare, fi Princeps, ad quem Légat i mifjl faut , juftas ob caufas petat,
ut invita,' £5? al iis Negociis iniplicito, comités ifli fe non adjungant. Ghtapr opter
iniqua £j? calumniofa criminatio eft, aut à pacis Negocio propterca abhorruiffe Sa'
cram Regiam Majeftatem Sueciœ, aut vili pependifje exterorum Principum Lega-
tos, quod illos in ipfum diferimen fecum non duxifjet.
Sed & alia inhonefla fummifque Sed porro audiamus inhonefia Ma me-
Principibus indecentia excogitaverit dia, ut appellat , quae Sueci ad impe-
media, adeoque ut, poftquam èCan- diendam Pacem excogitarunt. In bis
cellariis Suecicis totus ferè orbis Li- ~ primo loco ponit Libellas famofos , qui à
bellis famofis , quos haclenus con- Cancellariis Suedicis prodierant. jit~
tcmtu Kkkk 3 qui
'■)
6fi MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
I70I. temtu vindicandos efle duximus, re- qui taies inde nulli provenerant. Sed
- pletus fit, eo quoque proccflerit , ut cum ipfe" non erubefccret , primum ner
Literis hilce in copia jun&is ad Car- Duces fuos ncfaria Diplomata in Livo-
dinaîem , Regni noitri Primatem , nia fpargere > de'inde ad Provinciales
tranfmiflîs , i'uaque manu fignatis, Poloniae conventus Literas circummitte-
cumulatis ci fini talfilTimis imputatio- re , ineptis nugis calumniifque faftas j
nibus , feditiones in Rcgno noftro Jimiles quoque in publias Regni comitiis
contra nos excitarc non erubuerit. recitare , ut Polonos in Suecorum odium
exftimularet ; déni que typis Libellum di-
vulgare , in quem , propudiofa commenta , fraudes ^ineptias^ ac in Reges gentem-
que Succicam tcterrima convicia conflipaverat : CoaEli funt Sueci ad ea re/ponde-
rer ci? caufam famamqtie fuam contra impudcntiffimas malevolentiffimafque obtrec-
tationcs vindicarc. Ferfantur Ma Scripta in omnium manibus ,-.6? prae ejusfero-
ciây qui provocaverat , nihil axer bi & immoderati habere inveniuntur. Tamfo-
lidis rationibus vafras ijlius Régis criminationes refellunt , tam dilucide & perfpi-
cuè anle omnium oculos afta ejus exponunt, ut nemo fit , qui non Suecorum inde
innocent iam percipiat , & ijlius fimul port eut ofam in fingendo libidinem averfctur.
Quare famo forum Libeller um nomme aliter non pojfunt venir e, nifi quatenus infâ-
mes aggrefforis acliones compleclantur . ghtae cum contemtufe dicat vindicare, nae
eo ipfo ofiendit,- famae fibi curam ejfe exiguam: Cum tamen^ fi ullàfui mifericor-
dià tangerclur , doleret potius , juflis hominum judiciis fe tam malè audire , nec
meliori nota memoriam fui pofleris commendaffe. Ex bis igitar Orbis cognofcet,
fi unquam quidquam factura fit , quod fummos Principes non deceat in Mo idipfum
reperiri.
Quod ad Literas , q une ad Primatem Regni miffae funt , attinet, nihil Mis coa-
ti net ur, quod non ver uni fit , ac omnibus notum. Qui s nefeit fubdola incurfione
vafiatam effe Livoaiam., intercepta mummenta^ folicitatos ad feditionem incolas j
proditores receptos; ci? hofles nndequaque Suecis quaefitos'i ghtis etiam ignorât Re-
gem Poloniae violajfe juramentum & pacla couvent a , cum bel/um, inconfultà Re-
publicâ , inchoaret ; peregrinis copiis Poloniam & Lithuaniam miferrimè evifeera- "
ret ; diffidia nociva inter illuflres Domos fereret ; Mofcis tranfitum per Reipubli-
cae folum concéder et ; Curlandiam Rcipublicae Provinciam, feduclis incolis , fé-
déra belli conftitueret > tj? omnia Confilia ad libertatem Polonorum opprimendam
diriger et? Quae omnia tam manifefia funt , ut fi negare audeat, tôt us mundus
contra eum teflimonium ditlurus fit. Nihil igitur falfi Régi Poloniae in iftis Lite-
ris imputatur-y fed quibus candide , cjf fine fuco , fuum dolorem Ci? Rcipublicae dif-
crimen Sua Regia Majeftas indicare voltiit j non ut. Seditiones inter Polonos exci-
tarct , fed ut feditiofum illud caput , quod tant or um malorum caufa efi, tôlier et ur;
cum convenientius meliufque remedium non reperiretur ; fi fax & quics inter
utramque gentem flabilienda effet , ci? Ubertas Rcipublicae Polonae , quam pro
fttmma neceffitudine fflvam e£e cupit , ullimo pwiculo cripienda.
Ncc dubitandum efi ca , quœ, ra- Cum autem Sacra Regia Majeftatis -
tione ablbluti alicujus à nobis pnvten- Suecia perfonam fibi oppugnandam J'u-
ii dominii , contra nos à Rcge Suc- meret, quœ rabies Muni in mânes glo-,
ciae wtfiÛh.
ET RESOLUTIONS D'E T
c\x finguntur, c dogmatibus fui pa-
rentis antccclforumque prxceptis or-
tum traxttîè , quorum tynuinica prin-
cipia, non adeb longo ab hinc tein-
pore in iftis Regionibus exfecutioni
mandata , omnium adhuc memorire
infixa haïrent.
a t. r,n
antecefforum ■ il- :
riofijjimorum Regum,
lias, egit ? jfhiod fi qui s illim Dôwuty^
unde or i mu! us Rex Poloniœ , fa mari
vellet; forte objici poffent , qua gentil
litia ejfe in fe ip/è agnofceret : Jcd ut in
multis innocens il/a fiierit ; ei tamen op-
probrio erit , inter pojleros i/lum ba.be-
re , qui , quicqnid in i/la laudandum ,
defereret; eorum autem; qtt<e culpari poffent , ex affe bières fit. Meruerant ail-
lent Rcges Suecice rébus domi forifque prœclarè gefîis y ut memoria eorum civibus
cara, apud exleros in perpétua vencratione baberctur : ncc fas effet ijlius Régis
ore inquiet ari , cujus totavita nibil baùet, quod cum laudatiffmis eorum virtn-
ttbus conveniat . Qui ehm ea potefiate uterentur , qu£ legibus Regni , & confonfn
omnium civium , delata eft, tyrannidis non magis infîmulari pofjhnt^ quant aita-
runt gentium Rege s ^ quibus & olim, (3 bodie, fummum imper tum cives fui per-
mifcrunt. Quis ncgabit liberum fufjje civitatibus formant imper ii^ quant vellent,
confit uere ? At conflit ut am contra earundem volant atem to/lcre , id demunt tyran-
nicum efl. Longe Regni Suecici indolcs à Repablicâ Polcnâ diffidet , ehm illud
Reges bareditarios liberamque petcflatem babentes admittat ; bac vero divifum
cum Rege fuo habeat imper iutn , qui precario régnât , nec, illa inconfulta , raajo-
ris quidquam momenti fufcipere débet. Itaque in bunc tyranni mmen paido me/ius
quadrabit ,qui alienigena & extraneus ^majeflatcm -Reipublicœ ^ cujus legibus te-
netur, obterere; juraque populi , qui reclorem fibi illitm adfciverat , ad Je trabe-
ref toties violato jurejurando tent avérât.
w-
Cum c contrario nos , etiamfi op-
tima forte occafione deducendi talia
ad efFeéhim exoptatum haud deftitu-
ti fuerimus} nihilominus exponendo
propriam falutem noftrafque fortunas ,
perennem Reipublicœ felicitatem in-
defefle qurefiveritnus j libertatifque
fubinde vigorem modis omnibus fo-
verimus , quorfum , fi opus foret ,
fa&a, £c aftiones noftras in teftimo-
nium vocare, 6c reliqua Régis Sue-
ciae figmenta leviter fpernere pofle-
mus.
Scd ficlum boc crinten effe dicit. Cum
potuifjet dominationem obtinere , amï-
cior liber tati Reipublicœ fuit j cujus vi-
gorem omnibus modis fovere quJfiverat,
ghiis credidiffet tantam in Rege Polo-
niœ fuiffe modifiant , ut boc fortune
incrcmentum faflidiret , quod alius cu-
peret ardentiffime. Certè Polonis fuis
cegre boc pcrfuaferit , qui ita concionan-
temfinc rifu vix audircnt. An mcmo-
riâ eorum putaverit excidiffe iniquas
cxaclioneS) quibus Regiones intégra ex
baaflœ funt : oppreffam Reipublicœ
autîoritatem pcregrino milite : pernicio-
fa conftlia cum aulicis quibufdam &f proditoribus capta ? An latere eos crediderit
fomitem diffidiorunty quibus Litbuania ardet , ab eo fubditum effe? Et denique
quo lo£c omnia tendant ? Unde , quafunuts , tôt imprecationes , tôt querela , tôt
motus gementis fub bac oppreffione populi? Unde, ehm ad if a obfurdefceret , tôt
comitiorum décréta , ut vaftator miles , & Miniftri Saxonici , £5? reliqna inftru-
menta fervitut'u , Regno expellerentur? Hœc nift récent i memon â gefla effent , ni-
fi
6f4 MEMOIRES, NEGOCIATIONS, TRAITEZ,
1701. fi quoque in omnium oculos incurrcrent , potuifet forte diffmulare ; jam verb ma-
__ ', juriS aiiquanto audaciae efi , ea jaclarè , quaè noverit omnium irriftonem provoca-
tura elle. P ardus igitur, fifaperet, acliones fuas in teflimonium vqcaret : quas
Ut alto filent io premi, ipfi confultum foret, ita omnium cognitioni mtdâre eas, Sa-
crae Régla Majefiatis Sueciae interefi, quant tïihil hic finxijfe liquet.
Nid eoufque impudentise progref- Citm igiutr , ut démon ftratum efi, tôt
fus fuiflet , ut quod apud barbares ïmmanis perfidique animi documenta
rentes tiirpe -Se inhoneihim , apud chn adverfus Sacram Regiam Majefta-
CJhriilianos vero Principes inauditum tan Suecia , tum adverfus Rempubii-
eft deturbationem noftfee peribnie cam Polonam dedijfet Me, ut nul la am-
de tolio folickare , horumque contra plius fides ei haberi poffet, eut mirum
nos pnemium conftituere non abili- videbitur defperato morbo acriorem me'
nuerit. dicinam quart? Aut ofiendat alius mi-
tiorem modum, quo die abolcretttr. Si
dicat aliquis malum hoc ex parte fublat uni eJJ'e , chm copia Saxonica Poloniâ ex-
cejferint: an idem affirmare fufiimt , cafdem non redit uras eje'i Fallitur genero-
fa Polonorum gens, fi feras beftias ejje Ulas cogitet. <%uamvis excucurrerint , re-
vertendi tamen antmum non depofuerunt. gjub invïtius bas copias Rex dimi-
Jlt , eb ciipidius celcriufque eas revocabit , quamprimum metus paululum confé-
déré. An in pcrpetuum illis car ère poterit , quibus unicè frétas , deftinata fua
exfequi Ù poteft , & audet. Atqui Refpublica prohibent , ne illud unquam
lier remetiantur. Utinam ca animorum hic conjunclio effet, ut in commune con-
fuleretur ! Satis ejfe fortiffima huic Reipublica virium ad conata Régis fui coerce;.-
da nerno diffideret : at chm experientia docet, mille artes callere Regem inefeandi
cupiditatem levium quorumdam fcf dijfolutorum civium : inanem hancfpem efje li-
quido palet. Non opus hic conjecluris : ipfa res loquitur. Chn exercitu fuo antea
Poloniam inundaret , qui s refit It? Chm cadibus& rapinis totumRcgKum vafiaret;
chm ea faccret ,qua vix infefiiffmus kofiis poffh-,cumvicinis be'.lum inferret ; quis
per triennium graffantemfmque vifeera Regni favientem,prohibere potuit ,autfuf-
tinuit? Auditi funt incola cœlum'ipfum lamentationibus lacefere : Querela ad Au-
lam, ad Sénat uni, delà ta : Cohiones fada : Ingens ubique tumultus , clamores , commi-
nationes : Ccmitia couvocata,l3 in illis Décret a, tj Conflit ut iones f 'incita de popula-
toribus cxturbandis.Num hifee commovebatur Rex? Novit , quibus artibus uteretur, N
Sicut tinnitu & ' exiguo pulveris jaclu apum ira fedantur ; ita pellacibus promijfis,
fc? verfutiloqua baiignitate, mirif.ee adeb calluit quorundam animos delinire, eam-
que nubem oculis objiccre , ut mentis in praceps Reipublica diferimen non vidè-
rent. 9uod fupprejfone noilumâ laborantibus accidere folet , idem inclyta huic
Reipublica evenit. Pondère incubante fe premi fenfit :- fed integris licet viribus
illud excut ère non poterat, antequam ab aliis excitaretur. Interea ufque ad ojja
laarata efi: Nec laniatis membris anguem it.harentem potuit amovere, antequam
clava fila hydram iftam cor.tudit Borcalis Hercules. Non ad invtdiam Pobr.arum
hac adfcruntur : At tamen iidem fatcantur , neceffe efi , à Republicâ vix potuiffe
hanc fentinam exhauriri , fed oîium ac libertatem , qua tantifpcr fruitur, vïc-
tricibus Régis Suecia armis deberi. guo minus fuccenfere debeftt ji nlhil pue fi-
dii
ET RESOLUTIONS D'E T A T. 6fr
dii in illis ponat Sacra Regia Majefias Suecia, quamdiu ipfa radix mor-bi ré- 1701.
fideat. Nam cum fit idem apparatus , eadem artes , iidem homines , eadcm ■
quoque via pateat , q ua anîea , Poloni , pro fua prudentia judicabunt , num
difficile fuerit Régi eandem Scenam reflaurare. Intendant animum ad ea qu<e
moliatur. Copias dimifijfe creditur : At quantum virium fub nontine cohurtis
pratoriana latet ? In quam non nifi Ordinum duclores adfcivit , ut haberet ,
qui novis copiis conducendis praeffent. Quot putant in Prujfia alibique latere ,
qui , quocunque nomine jam colligantur , facramento Régis mox adigendi funt.
Quàm facile igitur poterit , & Rempublicam iterum obruere , & fines Suecia la-
cejfereî gfuamobrem cum ex tôt aftutijfimis machinationibus confiliifque provider et
Sacra Rtgia Ma je fias Suecia, qua mala propediem refurreclura fuerint , & fibi
& inclyta Reipublicœ in perpetuum cavere voluit , ne recidivam paterentur.
Nec inhoneftum, ut vociférât ur ille y-qui[quam judicaverit fe adverfits ejufmodi
infidias munir e : Contra jure naturali permijfum cjfe , imo ipfi natttra infitum &
ingeneratum , nemo negaverit, ut falutem qui/que J'uam tucatur ,&* imtninens ma-
lum , quod ei abfque utla eau fa improbitas alterius intentât , quocunque modo de-
pellat. Aut quomodo jam non honeflum cenfebitur , à Republica Polona pofci , ut
improbum illum Principem , fub larva Régis , fibi & vicinis ïnfidiantem, remo-
veat; cùm turpe £5? inhonefium idem Rex non putajfet, Livonos Sacra Regia
Majefiatis cives , ad defeïïioncm folicitare ? Non veritus ille ejl pollicitationibus,
dolis, literifque calumniofis quaquaverfum fparfis , eorum fidem tentare , ut à
legitimo Rege ftto deficerent. Sacra Regia Majefias Suecia à Primate Regni ,
cui juxta leges competit videre , ne quid Refpublica détriment i capiat , atque ab
omnibus Polonia Ordinibus petit , ut communem hojlem & infidiatorem , qui tôt
injuriis utrumque Regnum affecerat , poteflate illà, quâ abufus efl , & porro abu-
teretur, deturbent. Quare exemplum fuum damnât ? Et quod ipfe moribus fuis
aquum procul dubio judicavit , jam turpe ac ab honefiate remotum clamitat ? La-
fa erat Sacra Regia Majefias Suecia , cum hoflis fui everfionem flagitarct : At
ipfe nullâ injuria affeclus erat , cum amicum £5? innoxium civibus fpoliare volue-
rct. ^uanto autem gravius ejl fubtrahere cives jufio Régi, quam iniquum Regem
fc? tyrannum civibus oppreffis ? In ilh cafu injuria £5? crimen inefi ; in hoc ami-
ce mentis Jludium cognofeitur. Praterea folicitavit Rex Polonite cives Suecicos ,
ut àfide, qua Regifuo obfiritli erant, defeifeerent , atque adeb, quantum in ilh
erat, ad hortendum flagitium eos allicere voluit : At in IJteris ad Primatem mlf-
fis Ordines Polonia illius tantum officii, quod neceffarium erat, quod juflum , nec
uïïam in fe turpitudinem babet , commonentur. Nam regali folio dudum excidiffè
Regem illum , ex jurejurando patet , quod hic apponi opéra prêt htm ejl : Et fi
(quod abfit) in aliquibus juramentum violavero, nullam mihi incolse Rcgni,
omniumque dominiorum uniufcujufque gentis , obedientiam prœftare debe-
bunt ; imo ipfo facto eos ab omni fide , 6c obedientia Régi débita liberos fk-
cio, abfolutionemque nullam ab hot meo juramento à quoquam petam, nec
ultra oblatam fufeipiam. Sic me Deus adjuvet , 8c h±c Sanéta Chrifti
Evangelia. Non igitur iniquum erat à Polonis id poflulare , quod obedientia
vinculo foluti, jacere poterant. Neque opu s erat illum deturbare , qui juxta fen-
tentiam, quam ipfe fibi dixerat , re verâ deturbatus ejl. Reflat tantum, ne ipfi
Tom. I. LUI fibi
6S6 MEMOIRES, NEGOCIATIONS, TRAITEZ,
1 70 1 . fibi defint , fed ultimam manum negocio huic imponant. Nec eft , quod inaudit um
m hoc exemplum ejje obtendat. Intégras prof eclo Cent/trias c ont exere facile effet, eo-
rum Regum, qui ob crimina fua, faftigio iflo excufft funt : Sed Us recenjendis im-
morari hic non attinet , cum in omnium populoi um hiftorïts reperiantur. Saltem
tie credat domeflica Polonis exempla deeffe , Uladiflaum isf Micciflaum, Bokjlai
tertii Filios , memoriâ répétât , qui h<eredilarii Reges ob longe leviora crimina ,
quant extraneus jam patr avérât , folio paterno dejecli funt. Lefcum etiam V. &?
Uladiflaum Loclicum, aliofque, remim fcatur , qui fimile in Poloma fatum exper-
te funt. Addat denique Henrici Valefii cafum , qui cum ad capiendum avi-
tttni fceptrum , quod pofl fratris mortem vacuum erat , in Galliam abiifjet ; nec ad
prtsflitutum tempus reverteretur , quamvis revert i omnino fiatuiffet , publicà lege ,
anno MDLXXV. abdicatus eft. Quo magis idem de illo , qui Rempublicam
ipfam evertere aggreffus eft , fie ri pot eft , & débet. Prœmiis autem ad patriam
fuam liberandam alleclos eflfe Polonos , calumnia eft : Cum , qui eorum eft pro
lilertate animus , créât pofjînt fponte fuà tant praclarum facinus occupa-
turi.
Nos equidem Dei omnipotentis
auxilio freti , & de Polonorum no-
ftrorum fide erga Rcges fuos fingula-
ri fecuri , haec ralia tanti non cura-
&, li opus fuerit, malo iiH re-
mus.
média fufficientia inveniemus.
Quod fi hic de Polonorum fide , quos
lot enormibus faclis iaferat , fecurus ef-
fe poffit , fatendum eft , confident ts illum
animi cffe : Si juftiffimam quoque ultio-
nem, quam merucrat, evadere calleat,
inftruclum ejfe plus quàm Circœa arte
Polonorum animos fafcmandi , nemo ne-
gabit. Sed credere licet, tam fimplices illos 13 inconfideratos non effe , ut difcri-
me» cervictbus fuis imminens non videant. Magna illorum fuerit in Reges fuos in-
dulgent ia , fed qui emendari poterant :. At cum in neminem haclenus inciderant ,
qui major i audacià , pluribufque artibus fiipattts , ad Rempublicam peffundandam
accefferat , videant tandem an mitioribus conflits locus fit. Ipfa certe Refpublica ,
quœ opprcffa eft ad ipfos fupplices tendit manus , ne intempeftivâ lenitate falutem
fuam prodant. Libertas quoque , quam tanto labore , &? majorum virtute afi'er-
tam acceperant , indignos, quos poftmodo refpiciat , judicabit ; & defiderabile no-
■men invocantes , culpam tantam fera pœnitentià déplorantes, non audiet. Interea
Suecorum armis acceptum référant, quod aliquâ ex parte fuhlevata eorum Refpu-
blica fit : quam ut inpofterum falvam &? incolumem habcre pojfint , auxilium eo-
rum paratum inventent . Utcunque res cadat , Sacra Regia Majeftas Suecitefe
confolatur , quod boni fidique vicini officium pr.tftiterit : Nec ab eo difcedet , nifi
Refpublica Polona , hoftem communcm protcgendo , invitum in alla confilia impu-
ter it, quœ malo huic, non minus , quàm Rex Poloniœ jaclat, fufficientia inve-
fiientur.
Cum tamen infidiofi hi conatus Cum vero nullos unquam infidiofos co-
cum omni focietate humana, 6c com- natus Sacra Regia Majeftas Sueciie fo-
muni gentiutn jure è diametro pu- verit, fed hoftem accrbijjimum , qui in-
gnent j ita prudentiifimo aliorum fidiisis ' nefandis dolis ad perniciem fuam
Prin- graf-
ET RESOLUTIONS D'E T A T. 6f7
Principum judicio illos fubjiciendo , grajfatur, aperte oderit; nihil h fie com-
fpem fovemus certifiîmam, fore, uc miffum putat , quod jure gentium non fit
graves hafce machinationes tanquam licitum, 13 Mi focietati, quant natura-
exinde cuilibet regimini fummè noci-
vas confequentias, facile confideraturi
fine
communem caufim , &c pullulanres lis ratio hominibus colendam imperat ,
non conveniat. Proinde ad judic'mm alio-
rum Principum appellantem eo lubentius
fequitur, quo magis confidit, eos, fiju-
Jii fint (3 œq ni , non pofife non deteflari
inaudit am perfidiam , qttâ in Se innocmim ujus eft Rex PolonieS : nec inficiaturos
efiè, tranquillitati gencris humani maxime confiait um fore , fi finguhre in illum
exemplum fiatuatur , qui iftud vinculum , quo omnis fiocietas & fialus morte,*-
lium continetur , tam protervè abrupit. Sic enim alii, quos mala mens (3 im-
proba libido vexât , hoc exemplo territi , dificent fidem & paila fervare , atque à
pacifias populis impia abflinere arma. Certe nihil periculi bonis populorum reclori-
bus inde provenifife, in hune ufque diem comperlum eft , quod pravi & perver-
fi Principes à gubernaculo civitatum remoti fiunt : fied potius fiabilitum fuifije
publicam tranquillitatem , 13 crevifife mutuum illum inter Principes cive/que
amorem , cum Mi cogitpverint , fie hominibus hominum caufiâ imper are. Contra
à fidei pailorumque contemtoribm , à turbulent is (3 impiis retïoribus maximas
calamitates orbi inflitlas effe , omnis atas teflatur. Ex horum numéro ciim jam
evicJum fit, efije Regem PoloniiS; facile profipicient Chrifiiani Principes , fi tur-
bat or Me removeatur, quanta fiecuritas Septentrionali Cœlo redierit , quanta po-
pulorum quies, (3 nova quadam lux Regionibus ifiis repente afulfierit.
Cùm non fit dubitandum,in quolibet
Regno inveniri refra&arios ôtperfidos
fubditos, qui ejufmodi criminum pro-
te£borem ampleclrendo, omne genus
malitias explere non intentatum relin-
quent.
Nec dubitandum e/l , qui» optimus
quifque Polonorum 13 Reipublicœaman-
tifflmus , hoc omnibus votis fiudiifique
optaverit : quos etiam credibile eft de
liber andâ patriâ cogitaj/e , fi per fiatTic
nés eorum licuifjet , qui à Rege corrup-
ti^ alios fieducunt , privatumque com-
modam public* utilitati pr a ferunt. Jftorum pietas , & prudent ia, ut fiua lande
defraudari nequeat : attamen cum Mis nihil privatim egerat Sacra Regia Ma-
jeftas Suecice , fed univerfia Reipublicœ fiuam operam palam offerre vuluit, non
alia ratione ad id adducîa , quàm ut de Rege eligendo ulterius poJJ'ent , qui
pabla 13 fidem obfiervando , utriufique gentis amicitiam perpetuarct. Nullum
emolumentum fibi petit: tantum rogat, ut fierenijfima Refipublica fibi profipiciat ,
nec fiuâ ruina vicinos involvat. Perfidos autem (3 rebelles , quos in Ma efie
Rex Polonice crédit , protegere nunquam in animum induxit. Hoc proprium ef-
fie iftius Régis reclius affirmât ur, qui proditores & infâmes , carnificifque main-
bus elapfios , non tantum patrocinio , fied- etiam intimiori confilio dignatus eft.
Et cùm certo confidimus, Celfitu-
dines Veftras praeprimis hanece Régis
Suecins intentionem teftaturas, & ut
quies hifee Regionibus reddatur, nec
in-
Longe igitur opinionefallitur Rex Po-
loniœ , ft prudentifiimis viris , qui Bel-
gium fœderatum gubernant , verba fie
daturum fiperat. An nefeit cùm il-
Llll z los,
1701.
658 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
1701. incendium illud , quod jam proprias
Celfitudinum Veftrarum invaiit oras,
• latilfimas undique flammas, dcinccps
non nill maximo cum periculo ex-
tinguendas, concipjat, allabdraturas,
los , tum reliquos toto orbe populos }
adeb detejlari ejus acliunes^ adeb etiam
de fummâ Sacra Regiœ Majefiatis o ue-
ciœ juftitia efje perjuajos , ut non pof-
fint non meliort caufœ , & manifejld
infimulqueex indigna écinconvénienti Dei ope approbatœ^ accéder e? Quid re
Ablegati Celfitudinum bus fuis convemre exi/lirnaverint , ma-
îngratum-
cxceptione
Veftrarum vilipendium ,
que Régis Suecix animum pro prae-
ititis haclenus orficiis fatis perfpeëtum
habituras , indeque facile judicaturas
elfe, quid de vafto illius deftinato Se
tumida fpe, ni Ci in iplb orcu fuffoce-
tur, inpofterum éxfpectandum fit.
turè provickbunt , quamvis à Rege Po-
lonia non moneantur . Non autem in-
tclligunt barbarum illud vilipendium ,
quod toiles crepat , Ablegato eorum con-
tigiffe : quem honorificè à Sacra Regia
Majefiate Sueciœ admijfum irit quant
prirnum à perfequendis fugientium la-
tronum tergis vacarit , fatis fuperque
fibi perfuadent. Nec dubitant, fi quid officii prœfiitum fit , quia grati animi fen-
fttm , 13 fua vicijfim fludia , cùm res £s? occafio tulerit , abunde declaraiura
fit. Interea nunquam aquum cenfebunt , curfum fortijfimi Régis , tantis juc-
cefiîbus ad juftifiimam vindiclam tendent is , fufflaminare. Cum in illo nihil va-
num , nihil tumidum experiantur , fed fîupendis inufitatifque vitloriis modera-
tius, quàm ab iUa atate fperari potuiffet , illum uti; Deoque ruptorum fœderum
ultori humiles propterea gratias agere , eique tribuere , quidquid haiïenus à fe
profpere gejîum fit. Unde prtsfagium lœtifjîmum capiuut , illum ejfe provident ici
cœltfti deftinatum , qui ejufmodi monftra, quœ orbis quietem impiis deftinatis fo-
luit are andeant , cum œternà mminis Jui glorià domiturus fit.
Tum Celfitudines Veftras pro eâ,
qux haclenus iiidem interceffit , ami-
citiâ enixè requirimus, ut fuis hac
parte confiliis Se benevolâ , fi opus
aflîftcntiâ, nobis haud deefle
Quamvis autem dttbium non fit^quin
inclita Batavorum Refpublica reducendœ
in Septentrionem paci , fedulam nava-
tura fit operam : tamen pro xquitate fua>
& prudentiâ non aliam cuptet , quàm
quœfecura videatur £5? honefla. Qu<&
ut haberi poffit , tteque laboranti Régi
aaxiïtum, de quo paclis convenerât, fubtrahet: nec iniquiffimo aggt effort contra
fœderatum Regem ullarn opem ferre poterït.
ruent
velint.
Nec alias ad ejufmodi média, quibus
tamen haftenus abftinuimus, contra
Regem Suecice , ejufque perfonam
procedere cogamur, quee qurevis occa-
fio nobis fubminiftrabit ,quaeque ad fê-
emitatem perfonae & Regni noftri ab
omni vi injufta confei vandam , idonea
Scjufta judicabimus. Quibus Celfitu-
dines Veftras divins: proteûioni com-
mendaraus, Se profpera quïtvis appre-
ca-
Definat autem Rex Peloniœ illum
verborum minïs territare, cujus invic-
tum animum tôt confpirantium armis
non potuijje frangi vider at. Satis vi'
rium (3 confilii ef]e experietur , ad ne-
far ios ejus conatus retundendos , ficam-
que illam , quam minai 'nr, retorquen-
dam. A moribus autem fuis nihil alie-
num faciet^ fi nullum nef as ^ fiait hac-
tenus intentât um relinquat : at cum fit
ET RESOLUTIONS D'E T A T. 659
camur. Dab. in Arce noitra Vaifo- Numen, quod Chriftiani colimtts , quod 1701.
vienfî die p. Septemb. 1701. potcns eft, quod juftum , omnia fia-
gitia abominatur &? punit > quid Jibi
polliceri debeat Rex Polonix , feriâ cogitations pirpènd&t-,
Interea ex iis , qua ad hanc Epijlolam monere vifum efl , omnes liquida cog-
nofcent, non aliud egiffe Sacram Regtam Majcjlatcm Sucette , quàm quod aaje-
curitatem fuam maxime neceffarium , & jure omnium licitum effet: contra ve-
ro Regem Potonia id unice machinari , ut quem faclis atrooffinns antea, lafe-
rat , nunc quoque calmuiis juis atque convie iis apud altos Principes populo j que
in o'di'um adducat. Scd ifio molimine non aliud affequetur , quàm ut vanitas
ejus &? malevolentia , qua haclenus fatis cognita erat , eo lucidius jam pate-
fiat; {s? honorificent'iffimum illud judicium, quod optimus quifque mortalium de
jujiiffimis Sacra Regia Majefiaîis Suecia arrnis eonceperat , eo magis confirmc-
tur atque flabiliatur. Debebat hoc faltem Regem illum fua iniquitatis convia-
cere, quod, prater facliànis fua confortes , nemo inveniatur , qui aclione ejus
non vituperet ; nemo quoque fit , qui fummam Sacra Rigia Majefiatis Suecia
innocentiam non agnofeat , & virtutes invtdiofis laudibus celebret &? extollat.
Maledicli; autem, qua in Suecos effundit , eos invitabit ad illa quoque dete-
genda , qua alioquin propalare in animum non induxerunt. ghiapr opter illi qua
bic dicta funt , exeufare fupervacaneum ducunt ; ckm probe feiant à nemine
finiflre aceceptum iri, nifi qui veritati ac juflitia aperte je bo/lem profiter i
velit. Equidem rêver entiam adverfus illos , qui fummum in terris faftigium
tenent , adbtbendam effe nemo diffitebitur : fed utinam taies illi femper efj'ent ,
tit venerationem , qua ifli apici débet ur , ipfi faclis indecoris ex animis aliorum
non excufjerit. De illis hone /le femper loqui & ftntire oportet, ut iamen Veritas
non ladatur : qua in re atroci^etiam cum mitijfimis ver bis profertur,acerba~eJI-.
C e qui animoit le plus le Roi de Suéde , qui aimoit fa Religion , étoit le
péril, ou il prévoïoit que la Saxe étoic par la perfuafion du Pape, pour fai-
re changer de Religion le Prince Electoral. Il en avoit été convaincu par le
Bref fecret du Pape au Roi Auguste fur ce fujet,ôc dont il eut la Copie
qui fuit.
CHARISSIMO IN CHRISÏO F IL 10 NOSTRO « f,
AUGUSrO ILLUSTRI CLEMENS P.P. XL „„£
Pape au
QHariffime in Chriflo Fili Nofer , Salutem. Prohibere labia noftra non /x#iî- i'dô°ne.
. mus nunc , quando Paternae noflrae erga Majeftatem tttam charitatis ratio
&? injuncli nobis (licet immeriti) officii débit um nos admonet, ut Jpojiolica liber-
taie loquamur verba falutis. Innotuit quidem nobis , non fine ingenti atque inti-
ffio animi dolore Te Filium tuum , tenerrimae adhuc aetatis puerum , baereticis
homïnibus injliluendum tradidiffe : Quod cum ex 'raefcripto facrarum kgum fieri,
atque abj'que gravi Dei offenfa & animae detrtmento nequent , plane dif repare
videretur ab e» (incerae erga Dei Ecclefiam fidei tejlimont» , quod tante apud -:c-
L 111 3 . w
66o MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEE,
1701. quos rerum aeftimatores nominis tui lauàc , tant a, deinde honorum ac dignitatis ac-
ceffione tune edidifti , cum ortbodoxam vsritatem ultro agnofcere atque ex animo
complecli prof e fus es. Proinde non ambigimus, quin re maturius expenfa intel-
le cl mu s fis , quod cum provide Ecclefia Dei Fidelibus interdicat hereticae pravi-
tatis fetlatorum confortium, ne contingat pie credentium mentes labefaclari eorum
alloquiO) quorum fer mo ut cancer fer pit ac hunùliter irrepens blande capit ac lai en-
ter occidit, id mullb magis timendumftt, ubi aetas illa in qua tyrocinium pietatis
ineundum efl , & addifeenda funt Chriftianae rudimenta militiae , defertorihis
verae fidei commit tatur. Cave igitur, Cbarijfime in Chrijlo Fili Nofter , min
tum praefens £5? manifeftam diferimen Filii tui, quem diligis, animam adducas,
ne eorum operam adhibeas , quorum Jludio procul dubio erit , ut fui ftmilem effi- ,
eiant, qùem efformandum fufeeperunt , non enim tam fatagent ut congruis Princi~
pi viro animi coporifque excercitationibus (quibus artibus edocendis eus forte prae-
fecifti) ejus indolem excolant , quum ut ipfius ingenium fenfim in eos traducant er-
rores ac tenebras , in quibus iident mifere caecutiunt , £5? à quibus Tu ( miferentis
Dei ope ) féliciter evafifli.
Amore itaque ftatim ab innocentis Filii latere tam exitialem perniciem fujfec'
t if que probatis Chat olicif que inftrniloribus acceptijftmum Deo exhibe facrificïum :
agr.ofces, ut credimus, ex hoc etiam vigilem ejfe in Te benevolentiam ac valde fol-
licitam , ne ofendas ad lapident pedem tuum , id eft ne cenfuram fubeas humanam ,
£5? quod longe major is momenti ejl , ne omnipotentis diftritlique Judicis viam in-
curras : Cum e contra enixe cupiamus tuae pietatis famam apud bomines, tuaque
apud Deum promeut a in dies cumulari, ut dent tir capiti tuo augmenta gratiarum,
ipfique nato perornamenta virtutum non interitura félicitas comparetur. Et Ma-
jejlati tuae in hune feopum Apoftoïuam benediclionem amantiftlme impertimur.
Datuni Romae 30. Julii 1701.
Qu e l qju e peu de tems après , le Cardinal Primat fit une Reponfe à la
Lettre du Roi de Suéde du 30. Juillet. Cette Reponfe tendoit à faire éloi-
gner du Roiaume de Pologne les Suédois, dans la fupolîtion que les Saxons en
étoient fortis. Voici cette Reponfe.
Reponfe nEcepi Literas Majeftatis Veflrœ de data 30. Julii St. Vet. ad quas tardius
d'UnaiPri- t'efpondeo, cum ad anteriores meas fub dato 2,6. ejufdem menfis ad Maje-
mat de ftatem Veflram feriptas refponfum prœftolari &? materiœ gravitas fuadebat , £jf
Pologne populorum fufpirabat anxietas ; communicanda infuper erat jlatibus cjf ordinibus
au RQ1, regni eadem Epiftola , quœ non prias quam duôdecimâ prœfentis per loca Pro-
ue e" vincialibus Cumitiis celebrandis folita , innoïïfcere valait : Scripferam , cum
militâtes Majeftatis Veftrœ acies limitibus Reipublicœ noftrœ viciniores inaudive-
ram,metuens ne pro f péri or i fiante BorcA tumida fortunœ vêla martialem Majefta-
tis Veflrœ animant ultra gradivi Martis metas evehant am'icœque viciniœ armo-
rum invehant fragorem. Prœcifunt hoc quidem , non tamen provifum celeriori
Majeftatis Veflrœ curfu quam opinïone nvftrA, cum non modo occupât am, fed &f
armis ac milite injeffant Curlandiam inaudivimus : Scd cum obliqua interpretatio-
ne Majeftatis Veftrœ gejla premere conftans hucufque amicitiœ ac benœ vicimtatis
< euh
ET RESOLUTIONS D'E T A T. 661
cuit ura non pr a fumât , facile apud nos excufatum , dum Saxonicus villes vicinior 1701,
oberraret; & militari Majeflatis Feftra prudentia adfcripta cautela: Cum veto
eundem jam non modo e ditionibus Litbuania,fed & toto Rcgno ceffiffe, & ad pro-
pria rediiffe^ Majeflatis verb Feftra milite m , gravius Provincia ïncumbentem
conflet , cum jam Majcftati Feftra hofiis défit , uti Majeftati Feftra in profe-
quendo , ita & Reipublica Noftra in Juftinendo qmnem ccfiare debere moleftiam ,
crediderim.
Prompti'orem hune recejfum prateriti Publia Nofiri congreffus evicit délibéra-
tio : Aliment um quippe proveUiori flamma adimere , opéra pretium diclabat &
non alun continuandurum confihorum noftrorum in prêter itis Comitiis fuit obex ,
quam externo milite gravât a Regio , pacatioribus Confiliis obnoxia.
Cum verb reaffumenda propediem eadem Confilia Publica confona quaque ac
placida requirantu , placebit Majeftati Feftra Rempublicam interius jam folutam
curis etiam ex ternis liber are , non modo à finium ejufdem recefju , [ed& ' feriâ
Pacis cogitât ione , cujus nufquam fpes major quam fefja per cadefiva.
Oblivifci incipit prateritorum Refpublica , amore hue ufque ac obfequio nunquam
odio in Princepes fuos fpeclabilis , meliorum fpe , & fi quid dilatandorum finium
ac gloria [limulo , inconfulta eadem à fereniffimo noflro cœptu difplicuit, authori-
tati ejufdem ceffum facile compenfat , & hinc inaudit um hucufque dethronifationis
vocabuhm, quod vel ipfa cogitât ione duodecim feculorum enervaret gloriam^ labo-
riofius reftaurandam quant damnandum délicat iores gentis noftra aures non tantum
permovit , fed & teneretudinem auxit , qua dévia fi qua in Principe reperiren-
tury Privilegio liber tatis corrigerez non extremis fanare , Religioni haclenus duxit.
Eandcm moderationem Excelfo Majeflatis Feftra animo , uti Sacrorum Myfta ,
emni infinuo veneratione , ad eandem tanquam fupremum gloria culmen^ hortor :
Non deerit Reipublica ftudium in reducenda ferenifjïmi Régis nofiri priftina cum
Majeftate Feftra amicitia , y peraget tranquilla poteftas , ut rupta eadem , fir-
miori nexu coalefcat.
Eft quod adbuc Majeflatem Feftram nomine Publico bumiliter exorem^ ut vi-
delicet rem tormentariam fub Eleclorali Regia Poloniarum Majeflatis jlcmmate
exiftentem , & omnem bellicum apparatum ceu in caflris repertum ceu alibi repe-
riendum^ bellicis fpoliis annumerare non dignetur ; donata hac quippe folenni in-
ftrumento flatibus ac ordinibus Reipublica ad perpetuum momimentum, extinclo
bello Turcciofub dato \%.Menfis Augufti 16pp. Brevem ac indemnem ejufdem con~
ira Majeflatem Feftram ufum, citra Reipublica placitum, nec ex ejufdem arma-
mentario edutlum credat , gravioris quippe fin fus , publico foret damnum tam in-
figne aliéna offenfa pati : Hoc Jujlitia in amicam gentem Majeflatis Feftra Do-
cument um incor rupta gratitudinis trophaum perennius pofterttati erit. Cui Ion-
gavam atatem nunquam morituram gloriam exoptans humillima inclin or •venera-
tione. Dabantur Lovicii die ap. Septembris A. 1701.
Sacra Regia Majeflatis Feftra
humillimus &f obfequentiffimus Servus ,
M, Cardin alis Radziowskt Primas.
Pen-
66i MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
1701. Pendant le cours de ces Affaires, celles en Allemagne pavoirToient le
- ■■■ - brouiller. L'Empereur , niant apris par un Exprès du Prince Eugoe que le
Duc de Savoie avoit pris le Commandement de l'Armée des deux Couronnes
en Italie , fit dire par le Comte de Mansfeldt à l'Envoie de ce Duc, „ que
„ Sa Majcilé Impériale étoit à bout de fa patience à l'égard de la mauvaife
„ Conduite du Duc fon Maître , 6c qu'Elie ne pouvoit plus diflimuler fon
„ Reflèntiment,voiant que ce Prince s'étoit joint en personne avec lès Trou-
„ pes à l'Armée de France 6c d'Efpagne, pour s'opofc ■ enfemble à lès jufles
„ Armes. Ainfi, Sa Majefté Impériale ordonnoit audit Envoie de lortir
„ dans huit jours de la Ville de Vienne, 6c dans huit autres de tous les
„ Pais Héréditaires.
On fit faire le même Compliment, par le Secrétaire du Grand Maré-
chal de l'Empire, au Miniftre que ce Duc avoit à Ratisbonne. Le mê-
me Secrétaire en fit un femblable au Miniftre que l'Efpagne avoit à la
Diète générale -de l'Empire pour le Cercle de Bourgogne. Il falut que
ce' dernier fe fournît à l'ordre , non-obftant que les Miniftres de France
s'écriaflènt contre cet ordre de l'Empereur auprès duquel celui de Cercle
de Bourgogne n'étoit pas , mais feulement auprès de la Diète générale.
L'Eleéteur de Bavière lui donna auflï en vain la Protection .
On publia même à Ratisbonne, 6c cela fans opofition , un Décret, Se
enfuite un Monitoire, contre ledit Duc de Savoie, que voici.
Décret LEOPOLDUS, &c.
delà '
RauV JSjOJïris cjf S. R. Imperii fidelibus dilettis N. N. Feudorum noftrorum Impe-
bonne rialium Ducatus Sabaudi* Prœftdibus , Magijlratibus , Officialibus , ac
contre le omnibus cujufcunque Status £5? Ordinis Subditis ê? Incolis gratiam nojlram
Sa"oie Caejaream & omne bonum.
Palam cft ac publïcum , quem in tnodum vefter quondam Dominus & Sa-
baudiae Dux Viclorius Amadaeus praeter omnem exjpeclationem nojlram , clu-
fifquc omnibus falutaribus monitis , atque argumentis eidem nomine nojlro fœ-
pius pmpofitis contra Nos Sacrumque Imperium , arma fufeeperit , ii/que cum
nojlrorum , Sacrique Imperii Jurium ufurpatoribus , Galliac Rege & Andcga-
venfium Duce , conjunclis , Imper ialia Nojlra Ducatus Mcdiolani, aliar unique
Ditionum , ac fidelium Vafallorum Nojlrorum Jura , Feudaque involare , at-
que convellere non erubuerit. Quemadmodum autem ob gravijjîmam ejufmodi
in laefae Majeftatis Nojlrae Caejàreae , rebellionifque crimen abeuntem jeloniatn
ïpfe non minus , ac ejufdcm Confiliarii nefario confilio fuo , fludioque ad id con-
currentes, pœnas legibus communibus 13 Conflituîionibus Imperialibus praeferi-
ptas commerentur-y ita quidem illos, ad videndum bona fua Feudalia (3 Allô-
dialia refpetlivè caduca (3 Fifco Noflro Caefareo delata ejfe , £5? declarari\
hodierna die citavimus. Vos autem omnes (3 fingulos harum vigore Paten-
tium Nojlrarum , à Jurammto eidem Fitlorio Amadaeo praeflito ejufqae eb-
fervantia , omnique objequio , (3 obedientia abfolvimus , flritle ferioque , ci? fub
gravi fflma indignatione Nojlra Caefarea' aliijque pœnis in refratlarios 6? inobe-
dientes Imperii Fajallos ti? Subditos Jlatutis , firmiter inhibentes , ne eidem
awplius
ET RESOLUTIONS D'E T A T. 663
amplius adhœreatis , neque vos ftibmittatis , obcdientiamque prœfietis , aut ul- ijoi'.
lum ipfi tribut uni , cenjumve ant reditum pendatis , *#«//d wz//w <zw<? G«//« - ■ —
Hifpanifve annonam , comment 'uni , apparat umve bellicum, aut aliud auxilium^
quocunque etiam fub pratextu prabcatis , quin potius illos , illor unique Copias à
Cervicibus veftris armât a manu, atque omni, qao potejîis robore &? vi propulfe-
tis, 13 arma -vcftra cum Nojlro Exercitu conjungatis. Cœterum vero nobis folis,
jujîbufque Nojlris Imperialibus vos obedienter fubmittatis , nec ullam Jurifdiclio-
ncm,nifi Cœfaream Noftram agnofcatis, coque gratiam Noftram Cœfaream &? one~
rum fublevai ionem , quant quidem clementer vobis offerimus ,mereamini ,nifi fequio-
rem in eventum, interitum,{3 ruinam vefiram vos ipfimet vobis par are & adfcri-
bere , gravijfimafque pœnas fupradiclas incurrere volueritis. De quo vos certiores
reddere voluimus per prafentes manus noftra fubfcriptione , (3 Sigilli nojîri Cœfa~
rei appreffione munitas, qua dabantur Plenna 1 1 . Augufti, 1 701 .
L E O P O L D U S, (3c Moni_
toirede
\JUllum plané omnium nofirorum Sacrique Imperii Vafallorum ac Subditorum J» Diète
vel ex facro fançlo homagii elogio nobis praftito , communibufque fubjeclionis ,con*e1%~
cïïentelaris ac Vafallagii legibus & conjlitutionibus latere potefl , quant Nobis Sa- contre le
croque Imperio àebeant fidem £5? obedientiam, quemque in modum commoda noftra Duc de
promovere, damna vero avertere , (3 fi quid contra nos , perfonam, honorem,SiV01c'
dignitatent , aut fiatum , quocunque modo agi intelligant , omnibus viribus im-
pedire, Nofque ut primum monere teneantur. Quanquam igitur nihil nobis cer-
tius fancliufque perfuadere potuiffemus , quam ut Viclorius Amadcus Sabaudiœ
Dux , ejufque Conftliarii fibi femper cordi habuiffent, ac ea quidem inprimis occa-
fioae, qua Dux Andegavenfis poji pramaturam nojiri quondam Fratris & Nepotis
Caroli II. Hifpaniarum Régis Catholici obitum , Régna, Ditionefque Hifpani-
cas , ac omnia feuda Imperialia , interque illa Ducatum quoque Mediolanenfem
violenter ufurpaverat , atque avi fui Galliarum Régis Ludovici XIV. armis
occupaverat , eique omni pofftbili modo reftitijfent , eaque omnia fecifjent , qua in
ejufmodi caftbus fidèles Imperii vafallos ac fubditos décent j Nibilo tamen minus
jam tum res ipfa , atque eventus docuit , que m in modum antediclus Dux Viclorius
Amœdeus , j racla omni quam Nobis Sacroque Imperio debebat fide , atque abolit a
tôt tamque luculentorum beneficiorum atque ovnamentorum à Nobis fibi, familia-
que fu£ concejforum memoria , Nos armis cum G allia Rege ac Andcgavenfium
Duce conjunïïis perfequatur , quamque nefarie Imperialia noftra Ducatus Medio-
lani, aliarumque ditionum ac Vafallorum nofirorum fidelium jura inyolare atque
convellere non erubuerit. Cum igitur nefanda ejufmodi felonia non modo ad ultimwn.
Italie excidium, copiofique fanguinis humjtni profufionem tendat, fed £s? ad maxi-
mum nofirum Sacrique Imperii cletrimentum vergat , eoque in Cafareae Maje*
fiatis nofirae &? rebellionis crimen abeat , atque idcirco gravifjimam indignationis
noflrae Caefareae, aliafque pmias Conftitutiortibus Imperialibus praefcriptas me-
reatur ; bine eundem Vitlorium Amaedeum , ejufque Confiliarios vigore praejen-
tium citavimus 13 vocamus , ferio difiintleque vocantes , ut intra terminum
cluorum tnenfium à die citât ionis hujus noftra Caefareae Eifdem infinuatœ proxi-
Tom. I. Mmmm mt
664 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
1701. me fubfequentium , quorum 10. dies pro primo , alios 20. dies pro fecundo ,-r>-
— — ■ //?«w wk zo. *#« />?'ô f#-/*o , ultime & peremptorio termino prafigi-
mus, aut fi îfte dies juridicus non effet, ad proximum fiubfiequentem cor a m No-
Bis , Confiiliove nojîro Imper iali aulico , ubicunque ïocorum Mud fucrit , per
fe vel procuratorem fitum legitimum £5? fiufficienti mandata ' inflrutlum , certo
6? infallibiliter compareanî, audit uri & vifuri omnia fua bona fieudalia & allô-
dialia ab ipfis pofifcfija refpetlive caduca, & fifco noftro Cafiareo delata efifie, fcf
declarari, aut cur ejufmodi déchirai io contra eofdem fieri non debeat, caufas juri
confient aneas allegaturi &f probatv.ri , ditlumque procefifum per juris terminas ex
legum prafcripto , itfique ad fient entiœ publicationem profiecuturi , certi cateroquin ,
quodfive ita comparucrint, vel non , abfientia vel contumacia eorum non obftante
nihilo fiecius ad débit am Fificalis noftri lmperialis infilantiam ad ea procedetur quae
juris fcf juflitiae rationi confentanea videbuntur. Praeterea quoque fœdera &
traclatus eatenus cnm Gallis &? Hifipanicis mites harum vigpre caffamus & annui-
lamus, fieri oque & fiub Banni lmperialis ejufique publication! s & executionis pœna
mandamus, ut ab iis pcnitus abjlincant^ partefique Gallicas 6? practenfas Hifipa-
tiicas cenfeftim déférant , eorumque militiam dimittant, imo & armis propulfient ,
atque ordinationibus Noftris Cœfiareis in omnibus fie fiubmittant , deque prompt a,
plenaque hujus paritione intra eundem tcrminum bimeftrem légitime doceant , nifi
diclam Banni lmperialis , ejufique publicationis &? executionis pœnam incurrere
maluerint. De quo Nos eofidem certiores reddere voluimus per pr a fente s Ma nus
Nofilrœ fubficriptione , & Sigilli Nofilri Cafiarei apprejfione munitas &? datas
Viennae 2, . Augufli , 1 70 1 .
Comme il paroiffoit neceffaire de s'afîurer des Villes fur le Bas-Rhin,
prope
très choies à l'Electeur de recevoir des Troupes Alliées dans Bonn , Keilers-
vvaert, Se Rhinbergue, pour la fureté du Bas- Rhin. Mais, l'Electeur,
qui étoit prévenu, 6c avoit d'autres penfées, ne lui fît que des Réponfes é-
quivoques. La Ville de Cologne entra aufîî dans l'Affociation des Cercles.
Mais, tant cette Ville, que le Chapitre, prenoient ombrage de grandes Le-
vées que l'Electeur faifoit. Us firent même demander à ce Prince , par une
Députation expreffe , de vouloir faire connoître à quoi il les deftinoit. Quoi
que la Garnifon de la Ville fût affez forte, on trouva à propos de l'augmen-
ter. On y fît pour cet effet entrer d'autres Troupes du Roi de Pruffe , de
Munfler, 6c Palatines. Cette méfiance qu'on avoit de l'Electeur l'aigrit con-
tre le Chapitre. Il alla le 1. de Juin s'emparer de force de la Ville de Zons,
qui dépendoit du Chapitre, pour lui avoir été engagée par un Electeur. Le
Chapitre, offenfé par cette irrégularité, s'en plaignit à l'Empereur & au Pa-
pe. Cet Electeur fît auflî entrer de fes Troupes , nouvellement levées, dans
Nuys, & fit renforcer les Garnifons de Rhinbergue 6c de Kaiferswaert. Il
fît le 18. d'Août hure à Bonn l'ouverture d'une Diète du Païs. Il y fit fai-
re par le Chancelier des Piopofitions pécuniaires pour le maintien du Repos
public.
ET RESOLUTIONS D'E T A T. 66?
public. Apres cela, il affûra lui-même les Etats & la NoblefTe , qu'il con-
tribueroit de tout fon pouvoir au Bien public , même en y facri fiant (il vie
en cas de néceffité : cependant , qu'il ne fe laifieroit jamais perfuader de caf-
fer les Troupes, qu'il avoit nouvellement levées pour la même fin. Le Cha-
pitre aïant délibère là-deflus, déclara quelques jours après que l'Electeur, par
ces Levées étrangères fans fon confentement, avoit agi contre la Capitulation
qu'il avoit jurée, 6c contre les Prérogatives de l'Archevêché. C'efr. pour-
quoi, à moins de les cafTer, on n'entreroit en aucune Délibération. Sur quoi
il entra dans une grande colère. Il allégua que quelques femaines auparavant
il avoit fait part au Chapitre de ces Levées. Il eft vrai que quelque tems au- i
paravant il etoit arrivé à l'improvifte à Cologne. Il voulut y aflèmbler le ■
Chapitre; mais, la plus part des Capitulaires fortit d'abord de la Ville. Il
n'en étoit refté que cinq des plus jeunes. L'Electeur propofa à ce petit
nombre ces Levées , à quoi quatre donnèrent les mains. Le cinquième lui
objecta, que les Chanoines étant la plus part abfens , on ne pouvoit traiter
d'aucune chofe. Il lui remontra d'ailleurs le peu de néceffité de faire ces
Levées, pour lelquelles il faloit de gros Fonds, qu'on n'étoit pas en état de
fournir. L'Electeur dit qu'il n'en avoit pas befoin. Le jeune Chanoine lui
répliqua, qu'il faloit donc qu'il les prit ailleurs, 6c que cela pourrait être
d'un grand préjudice aux Etats, qui lui appartenoient comme Chef du Cha-
pitre. La Diète de Bonn n'aiant rien voulu réfoudre , non obflant les leur-
rantes Propofitions de l'Electeur , de Neutralité 6c d'Aflbciation , en fe
feparant l'Electeur demanda qu'on lui paiât douze fimples, ou qu'il les feroit
exiger par Execution Militaire. On ne voulut rien lui accorder. C'efi:
pourquoi il ufa de force envers fes Sujets. Le Chapitre protefta contre cet-
te violence par l'Ecrit public que voici, avec une Lettre du Chapitre 6c une
Réponfe de l'Electeur.
LE Chapitre a vu avec déplaifir par la Déclaration de Son Altefle Êlecto- Maniïef-
raie du 6. de ce mois, que nonobstant les plaintes par nous faites (tou- te du.
chant un mal auquel on n'a pas volu apporter de remède , c'elt- à-dire, tou- dec'^
chant les Troupes étrangères qui ont été levées dans l'Archevêché fans le con- Io«ne."
fentement du Chapitre , 6c malgré nos proteftations faites par écrit le 7.
May ) on n'a jufques ici donné aucune Refolution cathegorique ; Que d'ail-
leurs on néglige ce point important qui auroit pu donner toute forte de Sa-
tisfaction au Païs, 6c lequel S. A. E. avoit offert, de fa grâce, par les Com-
miflàires , de remettre entre les mains de ceux que le Chapitre 6c les autres
Etats députeraient ; cette même promefle aiant été donnée au Chapitre au
nom de S. A*. E. avant la Diète , par Mr. le Prince de Murbach, 6c Mr. le
Comte de Konigfcck ; 6c comme depuis ce tems-là les Députez du Chapitre
6c des Etats ont toujours été à Bonn dès le commencement de la Diète , où
fims relâche ils ont infiité pour obtenir cette fatisfaétion promife , ils n'ont
pourtant rien pu obtenir jufques ici ; 6c qu'au lieu de cela les Commifîàircs
de Son Altelfe Electorale ont donné le feptiéme de ce mois aux Députez du
Chapitre & des Etats, une propofition par écrit , dans laquelle ils tachent de
M m m m z repre-
666 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
1701. reprefenter de telle manière ce que S. A. E. a fait de fa propre autorité, dans
— — le fait de la Guerre, que quiconque n'en ferait pas mieux informé , s'imagi-
neroit que le Chapitre & les Etats feraient la caufe de tous les malheurs, pour
avoir refuié le fubfide, & qu'ainfi ils ne devraient pas le plaindre, que dans
une neceflité aufh* prenante , Son AltefTe eut cherché les moïens de fournir
aux befoins du Pais. Mais, voici le véritable état de l'Affaire, c'eft que le ij>.
Février le Confciller privé Solimacher propola en premier lieu au Chapitre,
que puis qu'il n'y avoit point de munitions de Guerre , ni d'autres choies ne-
ccflaires, dans les deux ForterefTcs de Rhimberg, & de Keyfersweerth , ' Son
AlteiTe demandoit que l'on y envoïât quelques provifions de farine 6c de pou-
dre: fur quoi le Chapitre repondit, que puis qu'auffi bien à la dernière Diè-
te , qu'aux précédentes, on avoit accordé ce qu'on demandoit pour ces mê-
mes fins , & même plus qu'à l'ordinaire , le Chapitre trouvoit étrange que
ces Forterefles ne fuflént pas fournies des munitions nécefTaires \ qu'ainfi , il de-
firoit qu'on lui rendît compte, comme les autres Electeurs avoient fait fans au-
cune difficulté, des chofes à quoi cet argent avoit été emploie, attendu qu'il
devrait y avoir une furfifante quantité de munitions , fi l'on avoit emploie
l'argent accordé pour cela à en achepter.
En fuite, fçavoir le z6. Février, le Sieur Solimacher remontra , que pour
faire lefdites provifions on devoit toujours accorder par avance, ou fur le con-
fentement de la prochaine Diète, izooo. Ryxdaelders. A quoi le Chapitre
fit la même reponfe qu'auparavant , Se les louables Députés des Etats s'excu-
ferent, fur ce qu'ils n'étoient pas autorifés de leurs Principaux, pour délibé-
rer fur cette Affaire.
Mais, quand là deffus ledit Sieur Solimacher préfenta au Chapitre un autre
Ecrit de S. A. E. & qu'il le communiqua aux louables Députés des Etats ,
ceux-ci s'exeuferent encore le 5. Mars fur le défaut de mandement 5 mais
pour le Chapitre, il envoïa fa Reponfe par écrit à l'Eleéteur, en date du 4.
Mars, & la conclut par cette humble prefentation , fçavoir qu'il travaillerait
de tout fon pouvoir, pour faire fournir tout ce qui ferait néceffaire pour le
bien commun du Saint Empire Romain , & fur tout- pour celui de l'Arche-
vêché, & qu'en confequence il ferait toujours prêt à fecourir S. A. E. daus
tous les befoins de l'Etat, & que comme de bons Patriotes , ils ne manque-
raient jamais de lui donner des preuves de leur fidélité.
Et comme le 7. Mars en fuivaiit ledit Solimacher demanda encore la même
choie au Chapitre par un Ecrit de fon Altelfe , le Chapitre déclara auffi-tôt,
& dès le même jour, qu-'il ne manquerait dans ledit befoin, de faire tout fon
poffible, autant que le Païs pouroit le fupporter, pour convenir avec les Dé-
putés des Etats des moïens , pour fournir un petit fubfide, pour cette fin }
qu'au refte, ce n'étoit pas pour lui, (comme les Commilfaires de S. A. l'ont
infinué dans leur Ecrit) qu'il prenoit ces précautions , mais qu'il étoit obligé
de le faire , dans toute l'équité , & félon tous les Droits fondamentaux du
Diocéfe, afin que ce nouveau fubfide fût emploie feulement à la véritable
fin , pour laquelle on l'accorderait , fçav.oir pour détourner les dangers qui
njenaçoient l'Etat , & non autrement. Que ces précautions n'éto'ient pas dans
les
ET RESOLUTIONS D'E T A T. 667
les formalibus , comme les Commiflaires de S. A. l'ont fait glifler dans leur 1701.
dit Ecrit, mais dans les fuivantes. A (bavoir que Ja Reveuë & la Montre de
la Milice qui étoit alors fur pied, Ce feroit en préïence des Députés du Cha-
pitre, & que les rolles leur en feroient communiquez } que lefdits Députés
pouroient fans empêchement prendre connoiflance de l'Emploi de l'argent ,
qu'ils pouroient voir fi les, munitions acheptées à cette fin feroient mifes en
lieu de fureté , qu'ils pourroient en faire la vifite , 6c voir en tout tems fi
elles étoient bien entretenues, 8c bien gardées •-, laquelle Déclaration le Cha-
pitre fit auffi rendre par le Sieur Solimacher à fon Âlteflè le p. Mars.
Or comme le iz. dudit mois, avant que d'avoir vu aucune réponfe de
l'Electeur , le Sieur Sierftorf propofa au Chapitre fur ledit Ecrit dudit Sieur
Solimacher , que fon Altefle demândoit qu'il allât à Bonn quelques Députés,
tant du milieu du Chapitre , que des Députés des Etats qui étoient alors à
Cologne, fans néanmoins produire aucune Commiffion de Son Altefle pour
cela ; le Chapitre conclud qu'il ne voïoit pas ce que l'on pouvoit ajouter
à la Déclaration qui avoit été donnée S. A. E> qu'au refte il prioit S. A. d'ac-
cepter cette offre, & de donner une Déclaration par écrit ; que le Chapi-
tre étoit prêt de s'obliger envers tous 8c un chacun , pour ce qu'il avoit pro-
mis, & qu'il feroit en forte, que le tout feroit fourni avec toute la diligence
poflible, par les autres Etats.
Là-deflus, Solimacher, êc Propper,deux Commiflaires de S. A. rendirent
au Chapitre k 16. Mars un Ecrit de S. A. du 14. du même mois, dans le-
quel le fubfide qui avoit été démandé, & qui ne montoit au commencement
qu'à douze mille Ecus, s'étendoit à 2.0000. 8c à «30000. 8c où il étoit dit ,
que S. A. avoit offert au Chapitre ces deux chofes , de lui permettre de
drefler l'Etat de Guerre , 8c que quelques - uns du Chapitre afliftaflent aux
Revues. Mais tant s'en faut que cette Communication ait été faite cum ef-
fetlu , que ces Commiflaires n'ont fait que montrer ledit Etat ; mais, en
même tems, fans qu'il eût été lu, encore moins examiné , ils le reprirent
avec promefle d'en donner copie au Chapitre ; ce qui n'a pourtant pas été
fait, quoique ledit Chapitre en ait écrit à S. A. le 14. Mars une féconde
fois dans les formes ; qu'auffî-tôt qu'il auroit la dite Copie, il ne manque-
roit pas d'y faire de refpeétueufes reflexions, avec très - humbles prières
qu'il plût à S. A. de faire avoir au Chapitre une Réfolution néceflaire fur
leldits points, afin de concourir par ce moien avec le Chapitre pour faire
accorder l'argent néceflaire.
Mais c'eft furquoi il n'y a pas eu la moindre communication avec le
Chapitre 8c les louables Etats. Et comme cette complaifante Offre des
bons ôc fidèles Patriotes n'a pas été acceptée , il s'enfuit que ni le Chapi-
tre ni les louables Etats ne font refponfables en aucune manière des mal-
heurs que l'on a raifonnablement à craindre de ces Levées de gens de Guer-
re, Si que l'on n'en doit attribuer la faute, qu'à ceux qui y ont concurru,
8c qui ont été du Confeil.
Et quand le prétendu but de ces Levées auroit été véritablement pour
conferver le repos 8c la fureté du Pais , comme on le dit , il eft cer-
Mmmm 3 tain
658 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
1 701. tain que l'on n'auroit pas dû agir de cette manière , -pour le procu-
— — fer.
Mais, quant à ce que lcsCommiflaires peuvent dire, comme fi l'on n'avoit
rien fait contre l'union du Pais, cela paroit clairement ex ipfo fafto-, ce qui
cft tout à fait contraire aux intentions de cette union, comme il a été fuffi-
fammait remontré ex parte Capituli le 2.3. du mois d'Août.
Se'mblablcment , cela ne fait rien , que S. A. ait attendu cette Deputation
pendant trois femaines, comme le difent ces CommiiTaires, puifque les Dé-
putez du Chapitre 8c des Etats ont attendu depuis le 18. Août que la Diète
commença , jufqu'au 7. Septembre, que les CommiiTaires de l'Electeur com-
muniquèrent premièrement par écrit , la propofition que la veille ils avoient
faite de bouche Se qu'ils ont humblement demandé une Rélblution ; ainfi lef-
dits Commiflaires auraient pu faire leur propofition, puifqu'elle ne confiftoit
que dans une répétition des premières, 6c cela auflî facilement, fût-ce le pre-
mier, ou le fécond jour} 6c il n'auroit pas été befoin de les amufer pref-
que pendant trois femaines: ainfi, ce n'eft pas aux Députez du Chapitre,
qu'il faut attribuer ce retardement.
Mais qu'au lieu de la prefente fureté de ce Diocefe les Seigneurs Commif-
faires produifent une Aûociation de S. A., comme ils difent , c'eft encore
une infraction aux anciennes conventions & revenus, 6c contraire à cette li-
mon du Païs j £c partant de tels Paiïa Fœdcra , ou comme on voudra les ap-
peller, ne fe font point , 6c ne peuvent être commencez par lefdits Sei-
gneurs fans la Condeputation du Chapitre , ni être conclus à fon infçû 6c
fans fon confentement. C'eft pourquoi le Chapitre laifle là ladite Afîbcia-
tion pour ce qu'elle vaut, 6c fe réglera au contraire Proteflando , félon les
Loix fondamentales du Diocefe.
Mais quand en confiderant tout ce que defilis il paroitra évidemment, par
l'Union de ce Diocefe , par tant de Reverfalia , de Traitez , par la reli-
ligieufe obfervation que 1 on en a toujours faite, & par l'Uiàge & les Coutu-
mes de tous les Archevêchés de l'Empire Romain, qu'en vertu de fa charge,
Se des Droits, 6c des Privilèges de TEglife, 6c de ce Diocefe , le Chapitre
eft contraint de fe tourmenter à caufe du ferment fi chèrement prêté, à l'oc-
cafion de cette levée de Gens de Guerre , 6c qu'il eft obligé de s'y oppofer
vigoureufement, afin de ne pas donner lieu à fes Succefléurs d'entreprendre
de pareilles choies, qui doivent plutôt faire appréhender la ruine du Païs,
que l'on n'a lieu d'en efperer fa confervation.
Ainfi, le Chapitre fait fupplier humblement, 6c pour l'amour de Dieu, S.
A. E. d'avoir la bonté de confiderer, que l'Equité 6c la Conlcience l'obli-
geant de s'oppofer à ces fortes de Levées , de renoncer à cette Aflbciation 6c
Alliance, 6c autres chofes femblables, en quelque autre occafion que ce foit,
mais fur tout lors qu'elles auront été entreprifes abf'que fuo feitu & confeufw ou
qui pouroient être entreprifes; comme étant nulles Se de nulle valeur en foij
6c cela pourtant avec expreflè refervatiou du refped dû à S. A. E. de pro-
tefter dorefnavant à l'encontre, afin que jamais on ne puiflè citer de telles
choies pour exemple , 6c que la Pofterité n'ait point à fe plaindre que le
Cha-
ET RESOLUTIONS D'E T A T. 669
Chapitre ait manqué à fon devoir, 8c à fa charge, qu'il ait porté aucun fçan- 1701.
dale, ôc que l'Eglilèjie reçoive jamais aucune atteinte dans l'es Droits 8c dans - ■ ■■
fes Privilèges.
Et comme le Chapitre n'a jamais eu envie de fe mêler , ni de prendre la
moindre part dans la conjoncture prefente, mais feulement de conferver par
ce moien les Droits du Païs & de l'Eglife dans leur entier; auflî a-t-il été
réfolu unanimement d'enregîtrer dans les Archives, & au Protocolle, cette
prefente Proteftation ad perpétuant rei memorïam , 8c de l'cnvoier à la pro-
chaine Diète de ce Diocéfe aux Députez du Chapitre pour leur pins grande
Infr.ruc~r.ion , & afin qu'ils fe règlent là-defius, & de leur faire fçavoir en mê-
me rems, que fi après av oit tant attendu contre toute efperance , le vérita-
ble remède ne s'enfuit pas, ils aient à fe retirer de la Diète. En foi de quoi
fcellé du Sceau du Chapitre. Donné à Cologne le Mardi 13. Septembre 1701.
ILLUSTRISSIME SEIGNEUR ET ELECTEUR, Lettre
du Cha-
pitre à
^TOus les très-humbles 6c très-fournis Sujets de V. A. E. prenons la liber- s. A. E.
S té de reprefenter à V. A. ce que nos Députez 8c ceux des Louables
Etats lui ont déjà fait voir , à fçavoir que par une prenante necefîîté nous
nous fommes trouvez obligez de rappelles nos Députez de la Diète qui avoic
été commencée, laquelle eft, que malgré les plaintes que nous avons faites,
loin de nous" accorder le remède, que nous demandions, on n'a pas difeonti-
nué jufques à cette heure, de lever des Troupes pour la prétendue fureté du
Païs; ce qui n'eft pas prétendre de V. A davantage que des autres Princes 8c
Etats qui font auffi-bien qu'lille compris dans ta même Afibciation, de quoi
nous ne pouvions nous difpenfer fans faire tort aux Droits de l'Eglife. C'eft
pourquoi nous efperons que V. A. ne trouvera pas mauvais, que nous ayons
tait ce rappel fi néceffaire, 8c comme forcé , 8c qu'Elle nous permettra de
lui remontrer avec déplaifir, 8c unanimement , l'entière ruine dont vos E-
tats font menacez, non feulement au moien de l'argent étranger dont on a
fait des Levées, mais aufïï à caufe de l'entretien continuel 8c de la fubfiftance
des Troupes 8c des Soldats, fur tout en cas de rupture; parce qua nous croi-
rions charger nos confcicnces, fi nous taifions une chofe qui elr." connue dé
tout le monde, 8c que Vôtre Altefiè pourrait même un jour nous aceufer
d'avoir manqué au ferment de fidélité , qui nous oblige de faire ces très-hum-
bles Remontrances à V. A. 8c qu'au refte il n'y a pas plus de fureté dans la-
dite Afibciation, qu'il y en a dans le pauvre Païs, dont les Sujets auront tou-
jours fujet de craindre la perte de leurs biens. D'ailleurs, il ialloit confiderer
s'il y a plus de fureté dans une nouvelle Afibciation particulière de quelques
Electeurs ou Princes , que dans l'Union fondamentale 8c ferme , ipfâ rei na-
turâ de l'Empereur 8c de l'Empire. Item fi une telle Afibciation contre tou-
tes les parties , comme les Commifiaires de V. A. l'ont infinué , peut fubfi-
fter contre l'Empereur nôtre Souverain, 8c Chef de l'Empire, ou fi. elle peut
être pour le bien public ; fi par une telle Afibciation particulière, quelques
membres de l'Empire peuvent fe feparer à Commune Corpore , 8c du Chef
même , auquel ils font u étroitement attachez par le ferment de fidélité 8c
par
670 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
1 701. pur l'hommage. Mais (ans parler de tout cela , nous dirons feulement , que
" ladite Aflociation d'Heilbron , comme il a été dit, n'étoit pas encore con-
firmée, £c n'avoit qu'été Amplement intimée aux Cercles. Non» reprefen-
terons à V. A. qu'il n'en eft pas ici de même que des autres Princes 6c Etats
Ecclefiaftiques , qui ne font rien contre les Loix fondamentales, ni contre
les Privilèges de leurs Eglifes , Chapitre , 6c Pais , 6c qui n'entreprennent
rien au deffus de leurs forces, & fans neceflîté , encore moins de lever des
Troupes avec de l'argent étranger j mais , qui lèveront 6c entretiendront leurs
Troupes de leurs propres revenus} toutes lcfquelles chofes ont manqué dans
les Levées de V. A. Car on ne fçait que trop , 6c avec douleur, avec quel
argent ces Troupes ont été levées Se entretenues. Mais à quelles conditions
tout cela s'eft fait, c'eft ce que nous laiflbns à Dieu, Se à Vôtre Con-
fcience , parce que ce font ces deux qui peuvent le mieux fçavoir ce
qui s'eft pafTé à Bruxelles , quand vous y avez été la dernière fois.
Tout cela vaudra peut-être mieux que l'ouvrage de cette Affociation , qui
ne fera jamais en état, comme vous dites , de reùifir contre toutes les par-
ties} 6c Vôtre Alteffe verra , qu'elle va être delaiffée feule avec fes Sujets in-
noeens, & avec fon Païs, 6c que par confequent les uns 6c les autres ne pour-
ront manquer de périr.
Au contraire, fi V. A. avait la bonté de faire quelques ferieufes reflexions,
, 6c de rentrer en foi-même, Elle verroit qu'il lui feroit facile d'exécuter ce
ferment qu'Elle a fait à Dieu fur les Evangiles , dans cette Union du Puis
qui eft félon l'ancien ufage, 6c qu'Elle auroit pu heureufement mettre tous
fes Etats hors de danger, £c auroit rejouï tous fes Sujets, à qui cela va coû-
ter les biens 6c la vie } enfin , Elle auroit été fans reproche devant tout le
monde au dernier jour. Nous ne fçaurions comprendre de quelle fatalité Vô-
tre Efprit eft agité , néanmoins nous ne voulons pas manquer à nôtre de-
voir , 6c nous réitérons nos prières avec beaucoup de foumiflion , pendant
qu'il eft encore tems d'y penier. V. A. peut être aflurée que tous les Etats 6c
Sujets feront tout leur poflible, en cas que cela arrive comme nous le déli-
rons, pour fe mettre en état de n'avoir rien à craindre de quelque part que ce
foit. Au refte , nous nous trouvons obligez de nous en tenir aux Proteftations
que nous avons fi fouvent faites, 6c de maintenir 6c conferver expreffement
tous nos Droits, nous remettant patiemment du refte, à la Providence , 6c
nous en attendrons l'iffuë avec beaucoup d'inquiétude} mais, pourtant, avec
cette confolation, que nous n'avons aucune part, 6c ne fommes aucunement
refponfables du malheureux état des Affaires , 6c de la ruine totale tant fpiri-
tuelle que temporelle de tous les Sujets 6c Habitans , qui s'en enfuivra.
Cependant nous recommandons V. A. à la Protection de Dieu.
De V. A. E.
Cologne le 16. Septembre ïjoi.
Les affetlionncz & fournis Sous-Doïen,
& Capitulaires prefens , de /' arche-
vêché & Haut Diocefe de Cologne.
Nous
N
ET RESOLUTIONS D'E T A T. 671
1701.
Ous T o s e p h Clément, par la Grâce de Dieu Archevêque de Co-
logne, Archi-Chancelier du St. Empire pour l'Italie, & Elefteur, Le- fe'™c
gat Né du St. Siège Apoilolique de Rome , Evêque de Ratisbonne & de rEiec-
Liege, Coadjuteur^d'Hildesheim , Adminiilrateur du Diocefe de Bergtefga- teur de
den, Duc de la haute & bade Bavière , & du haut Palatinat, d'Engrie en Col°-
Weftphalic, Se de Bouillon , Comte Palatin du Rhin, Lantgrave de Luch- £nc'
tenberg, Marquis de Franchimont, Comte de Lohe, Hoorn-, Sec.
Sçavoir faifons par ces prefentes à tous Se un chacun des Etats, Hauts 5c
Bas Officiers, Prévôts, Sujets, Se Hfcbitans de Nôtre Eleérarat de Cologne ;
Comme par un Ecrit imprimé Se rendu public le premier jour du mois d'Oc-
tobre de la prefente année , au nom des Sous-Doïens Se du Commun Chapi-
tre de nôtre Diocefe de Cologne, Se içêllé du fçeau de, nôtre dit Chapitre ,
nous avons appris avec deplailïr , que quelques uns de ceux qui fe tiennent
préfentement dans nôtre Ville de Cologne , defquels pour l'amour d'eux , Se
pour leur honneur nous taifons les noms, fe font ingérez fous divers prétextes,
en partie faux , en partie erronez , d'envoïer par tout le Pais à nofdits fidè-
les Sujets, une dangereufe Rempnftrance ; ce qui ne leur appartient en aucu-
ne manière de frire , contre noutjeur Légitime Seigneur Se Souverain Tem-
porel Se Spirituel, Se cela fans avoir égard à leur état ni à leur condition, Se
fans l'avis de ceux du Confeil Se des Officiers. Que femblablement , une telle
Affemblée générale du Chapitre , qui n'a aucune infpe&ion fur Nous, Se qui
Sede plena ne peut fe mêler de nôtre de Régence , ne fçauroit être confideréc
que comme une Exhortation à la Révolte , Se à la DefobeïfTance ; Se qu'un
Procédé de cette nature répugne auffi bien à la Raifon naturelle, qu'à l'Or-
donnance Divine Se aux Droits divins Se humains j mais fur tout au Serment
Canonique de nos Sous-Doïens, Treforiers, Se de leurs Adherens, par lequel
ils nous ont reconnu par leur Seigneur Se Souverain , Se qu'il eft directement
contraire Se oppofé à la pure Vérité. De forte que, quoique les Procédures
qu'ils ont tenues dans la dernière Affemblée , inutilement pendant fix femai-
nes, au grand préjudice du Pais, n'aient eu d'autre vûë, que d'introduire, Se
de maintenir leur impertinente Se prétendue Condomination , Se que cependant
ils ont abandonné le foin de pourvoir à la fûperé de la Patrie ; Néanmoins,
nous n'avons pas laiffé de leur remontrer de bouche Se par écrit , Se cela avec
une douceur Se une patience inexprimables , Se nôtre foin paternel, Se leur
devoir} Se pour leur donner des marques finçeres de nos bonnes intentions, Se
difliper tous les finiftres préjugez , Nous avons offert de nous en rapporter à
des Juges non fufoects de partialité , ce qu'ils auraient dû recevoir avec fou-
miflion Se Actions de grâces, Se à quoi ils devraient avoir fait de ferieufes re-
flexions; afin que , maintenant que le Danger preffe , la levée d'un fubfide
extraordinaire, que l'on demande pour la fureté duPaïs,ne fût point retardée
on empêchée, par des Procez de longue haleine, par des Commiffions defa-
vantageufes, Se par d'autres Allégations frivoles Se hors de faifon; Se particu-
lièrement dans le cas dont il s'agit ici , où pour détourner le dernier malheur
qui nous menace, comme il^ le fçavent très -bien, fans préjudiciel- au cours
T'ont. I. Nnnn de
67i MEMOIRES, NEGOTTATIONS, TRAITEZ,
de la Juftice ordinaire, êc feulement par nôtre Autorité, & par l'Amour que
17CI- nous portons ia Pais, nous avons impofé un fi léger fubfîde, que celui d'un.
Simple par mois , dont nos Etats êc nos Sujets n'auroient pas eu fujet de le
plaindre, même en tems de Paix.
Ainfi nous eilimons, que c'en; une chofe necefïàire , d'expofer par ces pre-
fentes , aux yeux de toute la terre, l'Entreprife defdits Sous-Doïens & Capi-
tulaires, non feulement, 8c de leur enjoindre fous peine d'encourir nôtre In-
dignation, êc nos Procédures inévitables, contre leurs Perfonnes, leurs Biens,
êc leurs Revenus, incontinent après la Publication de ce prefent Mandement,
de révoquer <êc rétracter publiquement* ce qu'ils ont fait , & cela tout de
bon , Se dans les formes ordinaires } mais aufîi de faire fçavoir à tous & un cha-
cun par ces prefèntes, qu'attendu que les Sous-Doïens êc Capitulaires , aflem-
blez à Cologne le 4. de Mars dernier , ont abfolumcnt rejette la proposition
que par un amour 8c un foin paternel pour la Patrie , nous leur avions faite ,
de faire des levées de Soldats, êc qu'ils n'ont voulu confentir à ce petit fubfi-
de provifionel propofé de nôtre part, pour fubvenir aux necefîïtez indifpenla-
bles de Bonn , Rheinberg , & Keyferfwaert , qu'à des Conditions que nous
fçavons devoir être perpétuellement préjudiciables à nous 5c à nos SuccefTeurs,
ce qui ne peut être qu'une ufurpation , très icuvent condamnée auffi-bien du
St. Siège que par Sa Majeflé Impériale, 6c qu'une Anticipation injufte d'une
Condomination contre nous, 5c contre tout droit êc raifon.
Nous nous trouvons obligés , fans plus ample retardement de la part des
hauts Officiers, de penfer tellement au repos êc à la fureté du Païs, que nous
puiffions de bonne heure garentir nos Forterefîès de toutes furprifes, êc que
tant que tout le Corps de l'Empire Romain ne fera pas oblige de s'embar-
rafîèr dans les démêlez à Toccafion de la Succeflîon d'Efpagne , êc d'y pren-
dre part , à l'exemple de tant d'autres Princes êc Electeurs de l'Empire, êc
des Cercles tout entiers , nous nous tenions à l'écart , êc que nous tâchions
autant qu'il fera en nôtre pouvoir, d'empêcher, qu'avenant quelque rupture,
ce qu'à Dieu ne plaifê , nôtre chère Patrie y foit mêlée, êc ne devienne la
Proie des autres êc le Théâtre de la Guerre, comme cela efi déjà arrivé au-
trefois, êc que félon l'exigence des chofes , elle foit mife dans le meilleur
état de defenfe , qu'il fe pourra , contre qui que ce fût qui la voudrait
attaquer.
Que fi avenant cet extrême danger , lefdits Sous-Doïens êc Capitulants
perfiltent au préjudice du bien de la Patrie à foutenir leur prétendue hérédi-
taire êc fondamentale Condomination qui n'a aucun fondement} attendu que
tout leur Droit confifte feulement , l'emparé Sedis vacant is , en une fimple
Tittoria Aàminiftratio : êc comme il fera facile de juger, que îa conduite, que
nous avons tenue jufques ici , ne peut être honnêtement décriée par lefdits
Sous-Doïens Capitulaires êc leurs Adherens, comme un fait injufte, êc qui
ne peut fe juftifier , car c'eft ainfi qu'ils en parlent dans leurs Formalia j fur
tout lorfque les Couftïtutions fondamentales de l'Empire rélultantes du Droit
naturel, êc plufieurs Déclarations Impériales, à l'égard du Temporel , parti-
culièrement dans les caufes de Bamberg , de Wurtzbourg, Mecklcrabourg,
Wui-
ET RESOLUTIONS D'ETAT. 67;
Wurtemberg, 6cc. 6c même pour nous, fpecialçment celles des dates du zp..
Octobre 1699. ^u i0. Décembre 1700.; & dans l'Affaire du Chapitre &
du Spirituel, le Bref du Pape Urbain VIII. émané le 16. Juin 1642.. ad
perpétuant rei memoriam , contre l'Election Capitulaire du dernier Electeur
de Cologne nôtre PredecefTeur d'heureufe mémoire, & la Constitution d'iN-
nocent XII. qui s'cnfuivit en i<Î9f. 6c les Deci fions rendues depuis peu à
Rome dans l'Affaire du Chapitre de Saltzbourg, utraque parte informante, le
f. Mars 6c le p. Juin 1701. en faveur de l'Archevêque de Saltzbourg au-
jourd'hui régnant, font inconteftablement en nôtre faveur. Toutefois c'efl
une chofe qui ne fe peut nier en Droit , qu'entant que les fufFrages de nos
Capitulaires , ou des autres Etats qui nous font fournis , font abfolument re-
quis de jure , vel ex quacunque confuetudine , unione , au Conventione •, pour
trouver les moiens necefTaires pour la defenfe du Pais } le refus que l'on en
fait eft plus que fuffifànt , lorfque le Prince l'a recherché quoi qu'inutile-
ment, comme nous l'avons fait fouvent , tant devant que pendant la tenue
de l'Afiemblée, ou Diète, 6c fur tout dans les chofès , dont la négligence
peut caufer la ruine totale du Pais , ou faire craindre au moins les plus grands
de tous les dangers.
Pour ne pas parler de ce que dans leur prefente union , il ne s'eft rien dit
des chofes necefïàires pour la defFenfê du Païs qui peut-être interprêté à ren-
contre de la fufdite levée de Soldats fî neceflàire, ni des hommes enrôlez pour
la coufervation des Droits du Païs , ôc de nôtre Afîbciation approuvée pour
la même fin, par le confentcment de la dernière Aflèmblée du Cercle des E-
lecteurs du Rhin, tenue à Francfort 6c jugée convenable fer Circulare Con-
clufum au préjudice de nôtre Jus Fœderum & Armorum pour la défenfe 6c h
protection de nôtre Electorat 6c Principauté, avec la moindre apparence de
Juftice. C'eft pourquoi nous déclarons d'abondant par ces prefentes, que
nous voulons bien foumettre de telle manière, le procédé que nous avons te-
nu jufques ici dans nôtre Régence fpirituelle 6c temporelle , à des Juges non
fufpeéts de partialité, 6c auxquels il appartient d'en juger, qu'un tel recours
convenable au Droit naturel 6c à celui de l'Empire, n'empêche en la moin-
dre chofe la levée d'un fubfide neceflàire pour la confervation de la Patrie ;
6c ne préjudice à l'autorité Archiepifcopale , 6c de Prince de l'Empi-
re qui Nous a été inalienablement commife , 6c aux Droits qui y font an-
nexez.
A ces caufès , nous déclarons ledit Ecrit de nôtre Chapitre une fcandaleufc
6c feditieufe Ufurpation de nôtre Souveraineté dans le Païs privativement; 6c
que partant aucun de nos fidèles Etats, Sujets, 6c Habitans n'y aïent aucun
égard, 6c n'y faffent la moindre reflexion, tant s'en faut qu'ils permettent
qu'on y obéïfTei mais que fans y avoir égard, ils paient librement, 6c fans
difficulté, l'impôt que nous avons mis de douze Simples par an, dans les Ter-
mes prefix ; à faute dequoi on agira contre eux par exécution , 6c on regar-
dera les Refraétaires comme complices } de même que ceux qui fouffiiront
ledit Ecrit dans le lieu de leur dépendance, le fçachant: 6c on avertit qu'on
traitera de même ceux qui en aïant quelques exemplaires , ne les déchireront
Nnnni pas,
170*.
674 MEMOIRES, NEGOTIÀTIONS, TRAITEZ,
fyoï. pas, ou qui les garderont en cacheté, ou en public , pour les communiquer
aux autres, ou qui en donneront des Copies. Surquoi chacun aura à fe ré-
gler, Se à prendre garde à foi, de peur d'être puni exemplairement. En té-
moin de quoi nous avons figné les préfentes de nôtre propre main 6c fait
appofer notre Sceau Electoral à Bonn le if. Octobre 1701.
Signé)
Joseph Clément Electeur.
Cet Electeur fît faire cette Réponfe à cet Ecrit ; mais, il ne la fit affi-
cher que de nuit en quelque peu d'endroits. Le contenu en fut méprifé
par ce que l'on y voioit , que cet Electeur étoit l'Inventeur d'un nouveau
Droit de Souveraineté indépendante du Chapitre.
Le Réfident de cet Electeur préfenta aux Etats Généraux en ce tems - là
un Mémoire, avec des Plaintes fur quelque Fortification qu'on faifoit faire à
Maeftricht. Le contenu en eft.
liimm- „ HAUTS ET PUISSANTS SEIGNEURS,
redu
ÂS-eT* » Q°n Altc{re Sereniûime Eledorale de Cologne Evêque & Prince de Lie-
kdeur j) ^ ge» aiant; été informé que vos Hautes Puitfances font travailler à la con-
<te Co- „ ftruction d'un Fort fur la Montagne de St. Pierre fituée près de la Ville
loên£ m de Maeftricht fur la jurisdiction de fon Evêché de Liège, qui félon qu'on
Gêné-3'' » SV Prend pourra comprendre près de dix buniers de terre, qui doit renfer-
ma. „ mer des Cafemattes à l'épreuve des Bombes, Se être achevé au premier du
„ mois de Mars prochain, fins qu'il en ait jamais été parlé à ladite A S. E.,
5, bien moim qu'Elle y ait conienti , a ordonné au foûffigné fon Confeiller Se
„ Réfident d'en porter ks plaintes à VV. HH. PP. Se de leur reprefenter le
„ tort que cette Entreprife fait à fon dit Evêché: Se comme VV. HH. PP.
„ font trop éclairées que de ne pas voir les confequences préjudiciables , qui
„ en pourroient refulrer, au cas qu'il n'y foit pas promptement remédié, S.
„ A. S. E. fe promet de leur équité Se jullice, qu'Eiles ne feront pas de dif-
„ ficulté de lui donner cette fatisfaction Se de correfpondre ainfi par tout à
a
„ la bonne Intelligence Se Amitié, qu'Elle a toujours entretenue, Se veut
„ encore entretenir, avec Elles inviolable ment.
Sifflé,
N O R F
„ Fait à la Haie le 14. Septembre 1701.
Comme les Etats Cénéraux ne lui firent point de Réponfe, ce Réfident
leur préteiua par ordre le fécond Mémoire qui fuit.
„ HAUTS
ET RESOLUTIONS D'ETAT. 675
1701.
„ HAUTS ET PUISSANTS SEIGNEURS, -——
„ T E foulfigné Confeiller & Rendent de fon Altefle Sereniflîme Electorale RéJjcnt
„ lU de Cologne Evêque & Prince de Liège aïant été obligé par ordre ex- de l'E-
„ près du Prince fon Maître de porter fes plaintes à VV. HH. PP. par un leftenr
„ Mémoire du 14. du mois pafle contre la conitruftion du Fort fur la Mon- de <^°-
tagne de St. Pierre près de la Ville de Maeitncht , comme Je faifant fur ë
le Territoire de Liège à l'infçû & fans le confentement de ladite A. S. E.,
a représenté en même tems les inconveniens qui ne manqueroient pas d'en
arriver, au cas que VV. HH. PP. nifent continuer les travaux dudit ou-
vrage. En fuite de ces Remonltrances il lui eir. ordonné de nouveau, de leur
faire connoître les plaintes que le Magiilrat de Herck vient de faire à fa-
dite A. E. de ce que l'Ingénieur François dans la Ville de Halen Fron-
tière de Braband a fait favoir le 16. de ce mois aux Habitans de maifons fi-
tuées proche de la Ville fur le territoire de Liège qu'ils fanent battre in-
cefTamment leur, grains & les tranfporter avec leurs meubles & autres effets
ailleurs , puiiqu'il avoit ordre du Général de les faire abattre & d'applanir
le terrain , pour y faire des ouvrages qui ferviront des Fortifications pour
ladite Ville de Halen ; cette Entreprife n'étant caufée que par celle que
VV. HH. PP. ont ordonnée pour la conuruétion du Fort fus -mention-
née: & comme fon A. S. E. ne manquera pas d'en faire fes plaintes par
fon Miniftre à Bruxelles , le foufïigné a ordre de renouveller en même
tems les fiennes envers VV. HH. PP., en les priant iterativement qu'El-
les veuilllent faire ceffer lefdits ouvrages de leur côté , pour ôter aux au-
tres Puiffances voifines tout prétexte d'empiéter fur la jurifdiélion de fadi-
te A. S. E. laquelle a d'autant plus julte raifon de fe plaindre de ce pro-
cédé, qu'on n'a pas pris la peine feulement de l'avertir dès le commence-
ment du dclTein &de la rechercher pour y confentir,fous l'aifurance que le
danger étant paffé , ledit Fort feroit démoli , Se que les Propriétaires des
„ Terres comprilès dans cet ouvrage en feraient dédommagez.
Signé,
N O R F F.
„ Fait à la Haïe le zz. d'Octobre 1701.
Les Etats Généraux ne répondirent à ce Refident qu'en date du z6. de
Novembre par une Réfolution priie ce jour-là. Elle portoit en fubftance.
„ /^\U'on donnd-oit en Réponfe aux deux Mémoires de ce Refident , que Réfalu-
„ V^ l'Ouvrage qu'on quahfioit de Fort dans les Mémoires n'étoit qu'un non des
„ Battion détaché ou un Ouvrage extérieur de la Ville de Maeltricht, pour E-G- du
„ en tenir plus éloignez les Ennemis. Que fur l'examen des deux Mémoi- 20-NoY'
Nnnn î „ res
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33
676 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
1701. » rcs, LL. HH. PP. n'avoient pu trouver que le travail de cet Ouvrage
■ ■■ ■ „ fait fans la connoiflance 6c le confentement du Prince de Liège , ait fait
„ brèche à fbn Droit, ni donné fujet d'en faire de juitcs Plaintes. Qu'il é-
„ toit vrai que l'Ouvrage étoit fitùé fur le Territoire de Liège, 6c dans la
„ Seigneurie de St. Pierre -, mais , qu'il étoit fi f rès de la Ville âc Mae-
„ ftricht , qu'on ne pouvoit le confiderer , que comme une extenfion des
„ Fortifications qu'il y avoit déjà. Que la Ville de Maeftricht avoit deux
„ Seigneurs, dont LL. HH. PP. en étoit l'un, 6c avoient particulièrement
„ fur le Prince de Liège le Jus Prtejtdii &? Fortalitii, 6c par confequent le
„ pouvoir d'y faire toutes les Fortifications, iuivant qu'il étoit pratiqué par
,, le Droit commun. Qu'en confequence de cela LL. HH. PP. avoient de
„ tems en tems, 6c avec de grandes depenfes , fait tous les Ouvrages neceflai-
„ res pour la defenfe de la Ville > fans regarder fi les fonds où ils étoient ,
„ appartenant à la Ville de Maeftricht étoient privativement àLL. HH.PP.
„ ou à l'Evêque 6c Prince de Liège. Que pour l'Ouvrage de queftion fur
„ le Territoire de Liège, fans vouloir alléguer que les Fortifications de Mae-
„ ftricht avoient été accordées d'ancienneté par les Princes de Liège , il
„ devoit être connu à l'Evêque 6c au Réfident que LL. HH. PP. étoient
„ en une bonne paifible pofleiîîon d'ufer de ce Droit, fans que jamais il ait été
„ pratiqué en faifant de nouvelles Fortifications d'en devoir donner connoif-
lance au Prince de Liège , ni lui en demander fon confentement. Que
plufieurs Ouvrages détachez, fituez depuis plufieurs années fur le Terri-
toire de Liège peuvent en fervir de preuve. Que le Roi de France, dans
le tems qu'il étoit le Maître de cette Ville -là, avoit en confequence du
même Droit fait élever divers Baftions, 6c même fait une entière inonda-
tion du côté de St. Pierre fur le Territoire de Liège, fans donner aucune
notification 6c fans qu'il y ait eu de l'opofition. Que l'ouvrage de queftion
contigu aux Fortifications n'occupe pas la dixième ou vingtième partie du
terrain, que les François avoient occupé dans leurs ouvrages 6c dans l'inon-
dation. Ainfi LL. HH . PP. ufant de leur Droit dans l'ouvrage de queftion ,
qui ne fervoit que pour mieux fortifier la Ville , s'attendoient que
le Prince de Liège, qui en étoit Confeigneur , apercevrait avec com-
bien peu de fondement les François prennent cet Ouvrage pour prétexte
de fe fortifier dans le Paix de Liège , 6cc.
»
J5
n
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>î
55
M
5»
»5
î>
Comme l'on regardoit ces Plaintes de l'Eleéteur comme un prétexte,
auffi vit- on peu de tems après, que c'en étoit en effet un pour faire occuper
la Ville 6c la Citadelle de Liège par les François. L'ordre fut donné par
l'Elefteur au Comte de Berlo qui en étoit le Gouverneur de les recevoir.
Ce fut le tt. de Novembre au matin, que le Marquis de Montrevel, s'étant
prefenté à la porte avec dix Bataillons 6c fept Efcadrons , fut introduit dans
la Ville 6c dans la Citadslle. L'ordre de l' Electeur pottoit.
n /^Omme il vient de tous cotez à l'oreille de Son Alteflê Electorale ,
„ V»-/ que les Seigneurs Etats Généraux des Provinces-Unies ont deffein de
„ s'em-
ET RESOLUTIONS D'E T A T. 677
„ s'emparer de la Ville de Liège, àuffi-tôt qu'ils auronc mis leurs Troupes 1701!
„ dans le Duché de Juliers, & peut-être auparavant) & que pour cet effet ils ■
„ ont refolu de mettre dix Bataillons dans le Bourg de Herftal , afin de fa-
„ ciliter cette entreprife par la fecrete intelligence qu'ils peuvent avoir dans
„ la Ville > pour prévenir ce mal 8c ne point expofer la Ville à aucune fur-
prife, S. A. E. aïant trouvé bon de fe fervir de l'afîîfrance du Cercle de
Bourgogne , vous ordonne d'en recevoir les Troupes d'abord qu'Eues fe-
ront prêtes d'entrer en cette Ville Se de les introduire fans aucune opofî-
tion dans les Lieux où vous croirez trouver moins d'obftacle, aurïï-tôt que
vous aurez vu cet otdre , que le Commandant defdites Troupes Vous re-
mettra entre les m£ns. Et d'abord que ces Troupes feront dans la Ville,
Vous leur ferez prêter le ferment de fidélité au nom de Son AltefTe Elec-
torale. Vous aurez foin fur tout d'exécuter cet ordre avec tout le fe-
„ cret Se la fidélité qui font requis en pareils cas fous peine de defobéif-
fance.
53
33
33
35
»
35
55
35
33
Signé,
Joseph Clément.
„ Donné à Bonn le 10. Novembre 170 1.
Aphe's que ces Troupes furent entrées St portées dans Liège, l'Electeur
écrivit une Lettre de Remerciement au Marquis de Montrevel dans les ter- '
mes qui fuivent.
„ TE vous fuis très-fenfiblement obligé, Monueur, de la diligence extraor- Lettre
„ J dinaire que vous avez apportée par ma dernière Lettre, & je ne manque- del'Eyê-
„ rai pas d'en témoigner au Roi vôtre Maître ma jufte fatisfàétion. Je vous Liegeau
„ recommande cependant de vouloir bien faire obïerver par les Troupes qui Marquis
„ font fous vôtre commandement une bonne difeipline , & d'empêcher deMon-
„ que les 'Bourgeois de ma Cité de Liège 6c mes autres Sujets n'en foient ttevcl-
„ moleftcz , aïant pour eux tous une véritable affection paternelle , dont je
„ cherche à leur donner des marques en toute rencontre êc principale-
„ ment dans cette dernière où il s'agiiîbit de procurer par -là leur lïïre-
„ té êc confervation. C'en: ce que je fuis perfuadé que Vous ferez en
„ toute exactitude j & en attendant je fuis, Monfieur, très -véritablement;
„ tout à vous,
Joseph Clément Electeur,
„ A Bonn ce 14. Novembre 1701.
Les Etats de Liège, s'étant plaints à l'Empereur de cette violence, puis
que c'étoit contre leurs Ihflances réitérées auprès de l'Electeur , de leur pro-
curer'une Neutralité, Sa Majefte Impériale leur fit cette Réponfe.
'„ Nous
Réponfc
de l'Em-
pereur
678 MExMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
*
L E O P O L D, &c.
„ La uj yj l v^^iv,
„ *\TOus avons reçu vos Lettres par lefquelles vous nous avez informé de
auxE*- >? -*-^ l'Entrée des Troupes Françoifes dans la Ville te Citadelle de Liège,
tatsde „ par ordre de vôtre Evêque & Prince, Se reçues par le Gouverneur Berto
Licfi«- „ malgré vos oppolitions Se defenfes. Ces Nouvelles nous ont été fort defa-
„ greables, à caufe de la turpitude du fait, Se du fort déplorable de vôtre
„ malheureufe Patrie ; mais pourtant agréables en ce point, qu'elles nous font
„ connoître que vous n'avez eu aucune part à une fi vifeine Se pernicieule ac-
,, tion. Il faut remettre à Dieu, Se au tems , le palTé qui ne peut être rap-
„ pelle, & qui efl tans remède; mais il ne faut pas delefperer d'un fort plus
favorable , ni de la recompenfe différente qui fuivra les bonnes & les mau-
vaifes aérions. Il vous demeurera fans doute autant de gloire de vôtre fidé-
lité inviolable, qu'aux autres d'ignominie d'avoir violé leur devoir. Oeil
pourquoi nous vous recommandons de fupporter conllamment Se coura-
„ geufèment vôtre prefente difgrace , & nous n'omettrons rien pour vous
„ délivrer d'oppreffion, Se vous rétablir tous en général & en particulier,
„ dans vôtre première Liberté, 8c dans vos Droits. Cependant, nous vous
aflurons de la continuation de nôtre bien-veuillance Se Protection Impéria-
le. A Vienne le 17. Décembre 1701.
5)
»
Qjj e L <vp e s jours après , on enleva de Liège le Grand Doïen Mean.
C'étoit une Perfonne vénérable par fa NaifTance , par fon Caractère , par fa
Probité , Se par fon Age. Son Enlèvement fut dételle par le rude traite-
ment qu'on lui fit.
Le Chapitre de Liège en écrivit à 1'Elcéleur qui fit la Réponfe fui-
vante.
Réponfe «JOSEPH C L E M E N T, Sec.
del'Evê-
^uedc » \7Enerables, Nobles, très- Chers Se bien Aimez. Vous ne devez pas
Liège au ^ y douter que Nous n'emploierons tous Nos foins pour l'élargifTement
de cette „ de Nôtre Grand Doïen: auquel effet Nous redoublerons encore nos in-
VUlc. „ fiances, par tout où il fera belbin, Se rien n'y fera négligé de nôtre parti
mais quelque devoir que Nous aions pu faire jufques ici pour découvrir la
caufe de fon Enlèvement , Nous n'en avons pu être éclairci à fond , non
plus que de ce qu'on prétend qu'on ait voulu entreprendre contre d'autres
„ Chanoines de nôtre Chapitre Cathedral,à quoi Nous nous oppoierons toû-
„ jours de toutes Nos forces; Se Nous donnerons la Com million à nôtre En-
1?
»>
voie Extraordinaire le Baron de Simeoni de s'emploier ferieufement à dé-
terrer le véritable motif d'en ufer comme on a fait Se de folliciter puiflàm-
ment la liberté de nôtre fufdit Grand Doien.
„ Quant à la fureté que vous demandez pour vôtre Corps en général Se pour
chacun de vous en particulier , Nous tâcherons de vous la procurer au-
„ tant
ET RESOLUTIONS D'E T A T. 679
„ tant que nous pourrons} mais cependant nous fommes perfuadez que la 170L
„ plus grande affurance dépend abfolument de vous-mêmes, & que vous n'au- — —
„ rez rien craindre , tant que vous vivrez d'une manière qui ne vous rende
„ point fufpects aux deux Rois alliez , à l'affiftance defquels nous avons été
„ oblige de recourir dans la preiènte conjoncture. Oeil tout ce que nous
,, vous dirons par cette Lettre pour repondre à la vôtre du p. de ce mois,&
„ nous prions Dieu &c. Bonn le 13. Décembre 1701.
Cet Electeur écrivit quelque femaine enfuite au Chapitre le Billet fui-
vant , qui eft accompagne de la Reponfe que les Parens du Grand Doïen y
firent.
LE Nonce Apoftolique nous a écrit au nom du St. Père Ton Maître , Billet de
qu'on attendoit avec impatience à la Cour de Rome, que le Grand jEïe-3"c
Doïen de nôtre Eglife Cathédrale de Liège fût mis en liberté, ou qu'au auCha^"
cas que le Roi T. C. voulût abfolument fa détention pendant tout le tems pitre.
„ de la Guerre, on le remette au moins entre fes mains, pour être enfuite
„ envoie à Rome, où l'on fera enforte qu'il ne pourra point s'évader ni fe
,, mêler d'aucunes Intrigues contre les deux Couronnes Unies. Vous pour-
„ rez en parler à fes Parens, pour . fçavoir s'ils font de fentiment, que félon
„ l'intention de nôtre St. Père nous fartions cette propofition à 3. M. T. C.
„ Et vous nous informerez inceflament de leur Réponfe.
„ T Es proches Parens du Grand Doïen remercient très-humblement Mr. Répon-
„ L~i l'Electeur de Cologne , de ce qu'il leur a fait communiquer touchant fedesPa-
„ ce Prélatj Et fe fentant apuïés de la puifTante Interceflion de S. A. E. ils resdu ,
„ ne fe prometent pas moins de l'équité du Roi T. C. que l'entier élargifle- ^kan
„ ment du Grand Doïen. Mais ,au cas que S. M. T. C, contre leur atente ,
„ voulût qu'il fût détenu en' Arreft pendant tout le tems de la Guerre, & re-
„ mis entre les mains du Nonce du Pape à Cologne , pour y demeurer fous
„ les ordres de ce Pontife, ils ne fçauroient que s'y foumetre, puifque c'eft
j, lui qui eft ion premier Juge , devant lequel ils font perfuadez , que le Pri-
„ fonnier fe juftihera fans peine de tout ce dont on pourroit mètre à fa char-
„ ge, fes Parens n'aïant pu encore fçavoir le fujet de fa détention. En ce
„ cas là, on efpere, que Monfr. le Nonce aura la bonté d'envoïer à Namur
„ un de fes Officiers, pour y prendre en fâ garde Monfr. le Grand Doïen,
„ & pour l'enmener en fureté a Cologne.
C o m m t l'Enlèvement de ce Grand Doïen a paru aux yeux de toute l'Eu-
rope un Attentat des plus atroces, 6c que l'on en a parlé diverfement dans les
differens Pais , l'on trouve à propos de raporter la Relation qu'on en eut de
bon endroit. On l'a même étendue jufques en Avril 1703. } & on la donne
avec cette extenfion, pour ne pas fatiguer le Lecteur, lorfqu'on en fera aux
Affaires de ce tems-là par une redite : ainfi la voici. (
Tom. I. Oooo Le
Doïen
Mcan
680 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
1701.
LE 17,. Novembre 1701. les Troupes de France Se d'Efpagne, fous le nom
du Cercle de Bourgogne, étant entré dans la Ville Se Citadelle de Lie-
kvc^n" 8e ' Mr. *e B'al'on de Mean Grand Doïen de Liège , fut voir plufieurs fois
ment du Mr- Ie Marquis de Montrevel Commandant les Troupes, pour le prier de
Grand faire tenir le bon ordre j Se le Sr. Marquis lui aïant rendu la vifite le 17. du
même mois accompagné de plufieurs Officiers, il lui dit publiquement , qu'il
avoit ordre du Roi fon Maître de l'afîûrer de fa Protection , de lui faire tous
les plaifirs poifibles, pas feulement à fa perfonne, mais auffi à toute fa Famille
Se a fes Amis ; Se , qu'au premier jour , il lui apporterait des Sauvegardes
du Roi.
Le premier Décembre 1701., toute la Garnifon de Liège, pour lors nom-
breufe, aïant été mife fur les Armes, Se le Canon pointé à chaque rue, Mr.
le Comte de Lanion fit demander, entre les quatre Se cinq heures du foir, de
pouvoir faire la Révérence à Mr. le Grand Doïen. Il fut donné pour répon-
fe, qu'il pouvoit venir quand il lui plairoit. Il vint un moment après, ac-
compagné de plufieurs Officiers , Se fuivis de trois Compagnies de Grena-
diers, qui étant entrez dans la Cour , la Baïonnette au bout du Fufil, criè-
rent, tue ,/«ë,Se fe faifirent de tous les Domeftiques, & de toutes les Cham-
bres Se Portes de la Maifon. Dans ce même tems , Mr. de Lanion dit à
Mr. le Grand Doïen , qu'il avoit ordre de l'arrêter de la part du Roi Se de
fon A. S. , Se le fit à l'inftant defeendre entre les Officiers qui l'accompa-
gnoient , Se conduire à la Porte , où fe trouvant fur la rue , fans chapeau,
làns gands, Se fins manteau, fon Secrétaire le Chanoine de Longrée, qui au
bruit des Soldats étoit couru au Quartier de fon Maître , aïant été rencon-
tré dans une Sale en haut par des Grenadiers , fut jette à coups de bour-
rades en bas , jufques fur la Cour ; d'où aïant apperçu fon Maître dans la
rue, il fe glifTa entre les Soldats près de lui , fe plaignant aux Officiers qui
gardoient fon Maître, du mauvais traitement qu'on faifoit à fes Domeftiques,
Se qu'on pilloit la Maifon. Mr. de Lanion repondit qu'il en étoit fâche, Se
qu'on y mettroit ordre. Pendant ces difeours, il arriva une Chaife de Pofle,
Se il fut dit à Mr. le Grand Doïen de monter dedans. Son Secrétaire l'af-
fifta à monter dans la Chaife, lui donna un Chapeau, Se demanda à Mr. de
Lanion , s'il ne feroit pas permis à un Valet de fuivre Ion Maître. Il parla
là-defTus avec fes Officiers, Se dit enfui te au Secrétaire, Ouï; faites 'venir
un Falet: à quoi ledit Secrétaire répondit, Monjieur, en voilà »», que vos
Soldats tiennent dans la Cour: Commandez , s'il vous fiait , qu'ils Pammenent.
Il envoïa un de fes Officiels le prendre, Se on le fit monter derrière la Chai-
fe. Ainfi fut mené Mr. le Grand Doïen au travers des Troupes Se des Ca-
nons portez à chaque rue, Se conduit à Ste. Walburge derrière la Citadelle,
où il y avoit une grotte Troupe de Cavallerie Se Dragons. Il fut là mis fui-
un Cheval , lié Se garotté avec une corde au travers du Corps , qu'un Sol-
dat tenoit par derrière. Un autre marchoit devant , tenant les longes de la
Bride du Cheval. Il fut mené dans cette polture, en foutanne , fins bottes',
fans manteau , Se fans gands , pendant toute la nuit qu'il ne cefla de pleuvoir,
au
ET RESOLUTIONS D'E T A T. 68 1
au plus rude de l'hiver, jufques à Namur, qui efl à dix lieues de Liège ; 1701-
après avoir tombé avec le Cheval qui le portoit dans un Fofle plein d'eau 6c — —
de boues , où il faillit de périr.
Le Secrétaire, aïant vu partir fon Maître de la rue, rentra dans la Cour
de laMaifon, Se trouva les Soldats François qui maltraitoient deux Grena-
diers des Troupes de Liège qui étoient en faction comme de coutume à la
porte de Mr. le Grand Doïen. Il leur dit de ne pas faire de tort à ces deux
Grenadiers, qui étoient à leur devoir ; mais, au lieu de défîfter, ils fe jette-
rent fur le Secrétaire, lui donnant des coups de bourrades, ôc. fur les deux
Grenadiers qu'ils percèrent de coups de Baïonnettes , dont un en mou-
rut.
Mr. le Grand Doïen fut mis au Château de Namur , étroitement gar-
dé, fans avoir eu, pendant fix mois & quelques jours qu'il y a été renfer-
mé , la permiffion de parler ni d'écrire à qui que ce foit de fes Parens ou
Amis.
De-là, il a été conduit au mois de Juin de l'an 1702., en Avignon , fous
bonne Efcorte , où il a été pareillement renfermé dans une Tour du Châ-
teau , fans qu'il lui ait été permis d'écrire ni parler à qui que ce foit.
Au mois d'Avril de l'an 1703., il fut tiré d'Avignon , Se reconduit fous
Efcorte à Namur, où il efl encore à prefent chez l'Evêque , avec un Offi-
cier du Pape, fans autre Garde. Il lui efl; permis à prefent d'écrire, de par-
ler , Se de fortir avec l'Evêque , qui efl caution pour Mr. le Grand
Doïen.
Dans le tems de fon Enlèvement, les trois Compagnies de Gcnadiers vé-
curent à diferétion dans fa Maifon , enlevèrent toutes les Provifions , tous
les Domeftiques furent arrêtez: les Chambres , Buffets, Efcribannes , Se les
Coffres furent ouverts, & le tout fut apporté hors la Maifon avec tous les
Papiers ; mais, on doit dire à l'honneur de Mr. de Ximenes qui efl venu
quelques femaines après à Liège commander, que tout ce qui a été recupe-.
rable a été reftituéj & il fit fortir les Soldats de la Maifon.
Le Secrétaire, après avoir été très-maltraité dans la Maifon, fut conduit à
la Citadelle de Liège où il a été trois mois Se demi dans une Caferne , gardé
à vûë par deux Moufquetaires Se deux autres à la porte. De-là , il a été
conduit fous bonne Efcorte au Château de Gand. On lui a fait païer le loïer
Se les dépens des Chevaux dont il s'eft fervi , avec le Valet qui l'y a accom-
pagné. Il a été quatorze mois renfermé dans ledit Château de Gand , avec
trois Gardes nuit Séjour, fans fortir du lieu où il étoit. On lui a fait païer
tous les jours pour la Prifon deux Efcalins ; pour le Prévôt , un Efcalin ;
pour le feu Se lumière de fes Gardes , un Efcalin Se demi ; fans parler d'au-
tres fraix extraordinaires , auxquels il a été forcé , ni de fa nouriture qui mon-
te à une fomme très-confiderable.
Après cela, il a été renvoie à Bruxelles avec un Officier , Se puis à Na-
mur ave une Efcorte , toujours à fes dépens. Enfin, aïant encore été rete-
nu deux mois à Namur , il a été renvoie à Liège au mois d'Août de l'an
170}., pour y être échangé contre le Sr. Kaukol Secrétaire de Son Altefle
Oooo 2 Sere-
68z MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
1701. Sereniflîme Electorale de Cologne, qui avoit été Elit Prifonnier de Guerre
■ > en Allemagne.
Ce qu'il y a de plus fâcheux eft que cet Enlèvement , & tous les mauvais
Traitemens enfuivis, ont été faits pendant la Paix, fans qu'on en fçache la
raifon. L'on a omis dans ce Racourci beaucoup de chofes defagreables, ,
qu'il feroit trop long de déduire , quoi qu'auffi véritables que les pre-
mières.
O n travailloit cependant à détourner l'Electeur de Cologne d'introduire
des François dans fes Places du Rhin , parce qu'un pareil coup aurait ref-
ferré la Hollande , Se aurait pour ainfi dire coupé le Paflage du Secours que
la Republique pouvoit efperer de l'Empire. On envoia de nouveau de la
part de l'Empereur le Comte de Stirum vers cet Electeur. Le Roi d'Angle-
terre y dépêcha auflî par deux fois le Droflàrt de Meurs. La première fois,
il avoit été chargé de Promefies ; la féconde , avec des Menaces : le tout fut
fans fuccès. L'Electeur ne fe bornoit qu'à dire qu'il vouloit garder la Neu-
tralité, 8c conferver la Tranquillité du Corps Germanique.
L'Eleéteur Palatin donna avis aux Etats Généraux par une Lettre en date
du zg. de Novembre de la Marche des François par l'on Pais de Juliers- pour
entrer dans ceux de la Dépendance d'Efpagne 6c de l'Electorat de Cologne.
Il repréfentoit qu'une pareille Démarche , fans le confentement de l'Empe-
reur 6c le fien , ne pouvoit être prife que pour une Rupture. Qu'il viendroit
par-là à être enfermé dans fa Capitale , ôc par confequent coupé de la com-
munication avec fes Voifins bien intentionnez , Se particulièrement avec les
Etats Généraux. Ainu" , qu'il leur laiflbit à confidérer , s'il ne falloit pas
pourvoir à la fureté commune , ne donner pas le tems aux François de fe
fortifier, 8c prendre quelque bonne réfolution. Il conclut par fa Lettre que
de fon côté il ne manquerait pas de contribuer à cette fin tout ce qui dépen-
drait de lui. Cet Avis fit prendre la réfolution d'envoier des Troupes Hol-
landoifes dans le Pare de Juliers. On porta auflî la Ville de Cologne à en
recevoir quelque nombre. Cette prevoiante Manœuvre fervit de prétexte à
l'Electeur de Cologne de faire entrer ainfi qu'on l'a dit des Troupes Françoi-
fes dans Nuys, Zons, 6c Kaiferswaert , trois Villes du Bas - Diocefe de Co-
logne. Deux jours après il en fit auflî entrer dans Rhinbergue, Linn, 6c
Ardingen , 6c peu de tems après il en reçût dans la Ville de Bonn, On pré-
texta de la part de la France les Railbns iuivantes..
Raifons „ /^\Ue les Troupes envoiées par LL„ HH. PP. les Etats Généraux des
desFran- M V^_ Provinces- Unies dans le Duché de Bergue , à la requin" tion de l'E-
ir{aTUr " lec^eur Palatin, aïant caufé une grande alarme à l'Electeur de Cologne,
desPla- 55 qm depuis long tems voioit fa Perfonnc 6c fes Etats menacez , ce Prince
tes de „ avoit envoie auprès de l'Electeur Palatin, pour lui demander de faire cef-
l'Elec- }j ferla jufte inquiétude que la marche des Troupes étrangères devoit caufer
Colo- " aux P''mces ^e l'Empire : Que les Réponfes équivoques de S. A. E. P.
gne. ?> n'avoient fait qu'augmenter les foupçons de l'Electeur de Cologne ; Qu'il
au-
5>
ET RESOLUTIONS D'ETAT. 685
„ auroit dû dès ce tems-là demander aulli des Troupes pour la fureté de fes
„ Places; mais , qu'il avoit mieux aimé les laiffer expofées, que de s'attirer
„ le reproche de contribuer à exciter la Gucitc dans l'Empire > Que cepen-
„ dant l'Electeur Palatin aïant fait patTer le Rhin aux Troupes que Leurs
„ Hautes Puiffances lui avoient données, pour les faire entrer dans le Pais
35
33
de Juillers, l'Electeur de Cologne avoit été forcé de demander au Roi de
France des Troupes, que cet Electeur faifoit entrer dans (es Places fous le
„ nom de Troupes Auxiliaires du Cercle de Bourgogne j Qu'elles n'étoient
,, point deftinées à faire la Guerre > mais qu'elles n'étoient entrées dans ces
îj
33
33
Places , que pour leur fureté ôc celle de la Perfonne de l'Ele&eur de Colo-
gne, Se pour maintenir la Paix dans l'Europe, déclarant qu'elles fe retire-
raient dès que toute apparence de Guerre feroit celTée.
O n a aufïï écrit d'autres Lettres à quelques - uns des mêmes Miniûres ,
dont les termes font un peu différends de ceux que vous venez de voir j
mais qui au fonds ne lignifient que la même choie. On y dit .
3
v /^\Ue le Roi a apris que fes Troupes étoient entrées non feulement dans
„ V4 les Places de l'Electorat de Cologne , à l'exception de Bonn ; mais
„ aufli dans la Citadelle & dans la Ville de Liège : Que tout a été fait en
„ exécution des Ordres donnez par l'Electeur de Cologne, & qu'ils ont été
» accomplis fins obftacle : Qu'il n'y a pas lieu de douter , qu'on ne lui ré-
„ proche d'avoir introduit des Troupes étrangères dans l'Empire ; mais qu'ou-
„ tre le Droit que la Souveraineté & les Conftitutions de l'Empire lui don-
,, nent de recevoir des fecours des Puiflances1 qui ne font point ennemies de
„ l'Empire, il elt certain que l' Electeur Palatin avoit appelle le premier des
„ Troupes étrangères} qu'elles font entrées dans les Etats, & qu'elles ont
paffé le Rhin dans le deffein d'attaquer les Places de l'Electeur de Colo-
gne} Qu'elles marchoient à Liège, lors que les Troupes du Roi y ont été
introduites; Que la prudence auroit voulu que l'Electeur de Cologne eût
3>
33
3»
„ moins différé à prendre une rélolution , qu'il ne pouvoit plus (ûfperidre ,
„ fans expofer fa perfonne , & fes Etats, à un péril évident. Et enfin, que
„ l'on elt perfuadé que ceux qui raifonneront fans pafîion fur l'état des AfFai-
„ res, avoueront que l'Electeur Palatin a donné lieu, par fa conduite, à
,v faire entrer les Troupes du Roi dans l'Electorat de Cologne } 8c que fi
la partialité fait parler autrement, il vaut mieux pour l'Electeur Cologne,
de- fe voir expofe à de faux jugemens, que menacé de la perle de fes Etats,
& d'un danger continuel pour fa peifonnev
33
33
Les Etats Généraux faifoient en attendant bien des Efforts pour conten-
ter l'Eleéteur Palatin. Il avoit deux mois auparavant fait faire inltance par
fon Envoie Hetterman pour être fatisfait fur d'anciens Subfides dûs dès l'an
1676. On avoit déjà le 18. Octobre 1700. aquiefeé à lui en faire quelque
paiement. Enfuite, le 10. d'Août le Confeiller - Penfionnaire rapporta aux
Etats Généraux que le Roi de la Grande - Bretagne avoit fortement recomr
Oooo 3 mandé
684 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
170 1. mandé qu'on paiàt inceflamment l'argent pour les Troupes de cet Electeur *
— — — dont on venoit de l'aflurer , afin qu'elles puiflent defcendre dans les Terres de
la Republique. On prit d'abord la réfolution de faire inftance auprès des
Provinces de Zelande & de Groningue , rétives au paiement , d'y contri-
buer leur contingent.
Cette facilité des Etats Généraux , comme un effet de leur bonne foi ,
donna lieu à cet Electeur de demander enfuite qu'ils eufient à fournir le four-
rage à leurs propres Troupes , qu'ils avoient envoie à fon fecours. C'eft d'autant
Îu'ils étoient rares & par confequent d'une grande Cherté. L'on trouva cette
)emande fort irrégulicre. Auflî, les Etats Généraux prirent-ils le 8. de Dé-
cembre la Réfolution de lui répondre , ainfi qu'ils firent en fubftance,
„ Que c'étoit contre toute attente, qu'ils apprenoient cette prétenfion j que
„ c'étoit à S. A. E. à y pourvoir, & à en régler le prix; & qu'il n'étoit pas
„ raifonnable que les Etats dûffent avoir foin du fourrage par deflus la folde
„ ordinaire de leurs Troupes qu'ils avoient laiflees 6c envoiées à fon fecours
„ fans en devoir être furchargez, &c. ôcc.
La levée de bouclier de l'Electeur de Cologne donna lieu au Comte d^
Wratiflau d'infifter qu'on déclarât la Guerre à la France. C'étoit non ob-
ftant que les deux mois ftipulez dans le Traité ne fuflent pas expirez. On
s'exeufa de le faire. C'étoit par ce que l'on n'étoit pas prêt. Car , quoi-
que le Traité pour les Troupes de Dannemarck fut ratifié , elles ne mar-
choient pas , par divers incidens. La Zélande pretendoit de modérer l'Arti-
cle du Traité, qui donnoit trop au Dannemark touchant le Commerce pen-
dant la Guerre. Cela ne plaifoit pas à cette Province- là, à caufe de fes Ar-
mateurs , qui n'auroient pas pu tant profiter. Leur marche paroiflbit ce-
pendant fi réglée, que de la part de l'Angleterre on avoit dépêché le Bri-
gadier Cadogan à Hambourg pour les recevoir. Les Etats Généraux avoient
même chargé deux de leurs Miniftres d'une pareille Commiflion. D'ailleurs,
ils avoient paie la fomme ftipulée pour leur départ , montant à 75-0. mille
florins , & une pareille fomme étoit prête pour être livrée dès que ces Trou-
pes feroient arrivées fur les Terres de la République. Ils avoient même fatis-
fait à une difficulté que le Roi de Dannemark avoit faite. Elle confiftoit en
ce que ce Roi vouloit qu'on lui remît les Obligations du Roi fon Père Fre-
derick en faveur de la Province de Hollande & de la Ville d'Amfterdam ,
fuivant le neuvième Article du Traité. On prit d'abord la Réfolution en da-
te du quinze du mois d'Août de faire donner par le Confeil d'Etat des Ob-
ligations pour un Million , à laquelle fomme celles de queftion montoient ,
qui feroient à la charge de l'Union, & importées dans l'Etat de Guerre. Les
Obligations du Confeil d'Etat étant dépêchées furent remifes aux Etats de la
Province de Hollande. Ceux-ci les échangèrent avec la leur , &: avec celle
d'Amfterdam , afin qu'elles fuflent envoiées au Roi de Dannemarck. Il y -
eut cependant encore quelque ponctille. L'Envoie de ce Roi ;préfenta là-
defllis un Mémoire , pour avoir une Conférence. Elle fut tenue. Le fujet
en étoit que ce Miniftre vouloit qu'il y eut une Quittance fur les Obliga-
tions
ET RESOLUTIONS D'E T A T. 685
tions du Roi Frederick III. On fie là - defîlia un Projet de Quittance, 1701,
avec une réciproque de cet Envoie de les avoir reçues. Encore fe referva-t- — —
il d'en envoier la Copie à fa Cour, pour en avoir l'approbation. D'ailleurs,
il demanda un Aéte de la Province de Hollande , pour afliirance du Paie-
ment du Subfide courant. On réfolut le même jour d'écrire à ce Roi -là ,
pour le requérir de ne plus apporter des délais au départ des Troupes , puif-
que du côté de la République on avoit fatisfait au contenu du Traité fait pour
icelles. On avoit fait de la part de ces Troupes une Propofition. Elle con-
fiftoit en ce qu'on donnât à chaque Compagnie d'Infanterie, pour le trans-
port, deux cent Ecus à bon compte. D'ailleurs, que les Etats Généraux
donnaient un Paflèport libre pour le Drap, Baie, Fil, Chapeaux, Bas, Sec,
J>our l'habillement Se la Monture des Soldats. Les Etats Généraux aïant dé-
iberé là-dertus, y répondirent que leur intention étoit donner aux Troupes
Danoifes le premier mois de paie, qui montoit au delà de la Demande ; que
par-là il feroit plus avantageux pour les Troupes qu'elles eufTent Elles-mêmes
le foin de leurs Proviiîons. Par raport à une fomme réglée pour le transport
de leurs chevaux, les Etats Généraux n'y regimbèrent point; mais, chargè-
rent leur Réfident d'en convenir avec le Brigadier 6c Quartier- Maître -géné-
ral Cadogan , qui avoit la Commiflîon du Roi d'Angleterre pour recevoir
ces Troupes-là. Il y eut cependant encore une Difficulté. C'étoit par ra-
port au Partage des Troupes. Le Roi d'Angleterre, 8c les Etats Généraux,
dévoient le demander aux Princes , fur le Territoire defquels elles dévoient
palier. On écrivit pour cela aux Princes , pour requérir ce Partage. C'é-
toit fur-tout pour la Cavallerie ; car, pour l'Infanterie, on devoit la trans-
porter par Mer. L'Electeur de Hannover écrivit aux Etats Généraux du
13. Septembre, qu'il avoit accordé le Pafiage fur fes Terres pour huit Ré-
gimens Danois. On le remercia d'abord par une Lettre fort reconnoiflante
L'Evêque de Munfter accorda auflî ce Partage.
Nonobftant toutes ces Précautions , & nonobftant toutes les Satisfactions
qu'on donnoit au Dannemark , fes Troupes ne marchoient pas. Le prétexte
public en étoit parce que cette" Cour-là demandoit le paiement dont on étoit
convenu, en argent de Banque, qui portoit quatre ou cinq pour cent de
plus , au lieu qu'on ne voulok païer qu'en efpeces courantes. Le véritable
reflbrt de ce Retardement venoit de ce qu'on apprehendoit à Copenhague le
Roi de Suéde. Ce n'étoit pas tant par rapport au Dannemark même , que
relativement au Roi de Pologne. On en fut éclairci par l'Envoie même de
Dannemark. Il demanda le z6. de Septembre une Conférence aux Députez
des Etats Généraux. Il parla en icelle fort clairement. Il demanda „ qu'on
„ obligeât le Roi de Suéde à faire la Paix avec le Roi de Pologne, Se de le
„ détourner des menaces de la détrôner, fuivant qu'il en avoit écrit au Car-
„ dinal Primat. Qu'on pouvoit bien voir , que dans une pareille fituation
„ des Affaires , le Roi fon Maître ne pouvoit pas fe défaire de fes Troupes ,
„ è moins qu'on ne portât celui de Suéde à une Paix, qui pourroit difiîper
„ les juites ombrages, qu'on devoit avoir de fes Viftoires. Du moins, ajou-
„ ta-t-il l'Angleterre 6c les Etats Généraux dévoient accorder à fon Maître
„ une
<S86 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
1701. „ une Garantie contre la Suéde, „ Il affura cependant, que l'Officier nom-
mé. Tramp , que le Roi de Pologne avoit dépêché au Roi de Prufle & à Ton
Maître, 6c dont on avoit pris de l'ombrage, avoit fait aux deux Cours des
offres très-avantageufes , pour les engager dans fou Parti ; mais, qu'il n'avoit
demeuré que quatre jours à Copenhague , Se qu'on l'avoic renvoie fans entrer
dans d'autres Engagèmens , que ceux qu'on emploierait tous les bons Offices
imaginables pour procurer à fon Maître la Paix. On apperçût même aux
dilcours de cet Envoie, que s'il fe fût agi de la Saxe, le Roi de Dannemark
auroit pris des mefures en faveur du Roi de Pologne. C'étoit à caufe de la
conformité duLuthéranifme.dont il étoit fort zélé, non feulement pour- faire
plaifir aux Eccléilaftiqucs de fon Roiaume, mais auffi par les principes de fa
Croïance. C'eft ainfi qu'on pourra voir par la belle Lettre que ce Roi é-
crivit à celui de Pologne , lors que le Prince Electoral fon Fils changea
de Religion.
Ces Troupes Danoifes marchèrent cependant vers la fin de l'an 1701. L'on
donna des affûrances de la part de la Suéde qu'Elle n'avoit aucun deflèin con-
tre le Dannemark. Le Roi de Suéde le dit précifement à l'Envoie des Etats
Généraux Haerfolte de Cranenbourg , auquel il donna après plufieurs refus
une longue Audience.
Lefdites Troupes de Dannemark furent reçues à Hambourg par les Com-
miffaires d'Angleterre 6c des Etats Généraux. On trouva qu'il n'y avoit que
trois mille 6c trois cent Cavaliers , 6c cinq mille quatre cent 6c quatre vingt
6c dix Fantaffins. Les Commiffaires ne donnèrent leur Quittance , que fur
ce qu'il y avoit d'effectif , 6c ne voulurent s'engager à quelque prétention
furnumeraire du Commiffaire Danois. La Quittance, qu'on ne raporte pas
comme fuperfluë, étoit datée de Hambourg du 3. de Novembre.
L'on fut bien aife en Hollande de l'arrivée de ces Troupes. C'étoit d'au-
tant plus qu'on fut averti que l'Ambaffadeur de Suéde Lilllenrooth avoic tâ-
ché par plufieurs fineffes d'empêcher leur venue. On lui attribuoit même
d'avoir fuggéré au Roi fon Maître dans cette vûë-là d'écrire au Cardinal
Primat la Lettre qui parloit du Détronement, en date du 30. Juillet. Cet
Ambaffadeur fit auffi eipérer que le Roi fon Maître pourrait entrer en Négo-
ciation pour dix mille hommes pour le Service de l'Angleterre, 6c des Etats
Généraux. Cela fit qu'on commença à lui donner de bonnes paroles j mais,
lorfqu'il s'aperçût que fes Infinuations avoient porté quelque coup, il recom-
mença fes Plaintes fur ce qu'on ne donnoit point fatisfaction au Roi fon Maî-
tre touchant le Secours ftipulé dans le dernier Traité. Il difoit même haute-
ment, que fi le Roi d'Angleterre ne lui donnoit que des Réponfes amufantes
fur ce chapitre , ainfi qu'avoit fait le Confeiller-Penfionnaire , il écrirait au
Roi fon Maître de fe pourvoir ailleurs, puiiqu'il n'aurait rien à efpérer du cô-
té de ces deux Puiffances Maritimes. Il porta même le Secrétaire de Hol-
flein Petkum , qui venoit de faire une Courfe à fa Cour , de faire la faufie
Confidence au Confeiller - Penfionnaire , que la France tâchoit de gagner le
Duc fon Maître, en lui offrant une greffe fomme pour le porter à garder les
fix mille hommes qu'il avoit fur pied , 6c ne point les négocier avec l'Angle-
terre
ET RESOLUTIONS D'ETAT. 687
terre & les Etats Généraux} D'ailleurs, afin aufli qu'il s'emploiât auprès du 17°'-
Roi de Suéde, pour lui perfuader de n'entrer en aucun Engagement avec les
deux PuifTances Maritimes.
Cet Ambafladeur Suédois eut une Audience particulière du Roi d'Angleter-
re, qui le reçût fort bien } mais , elle ne fut pas aufli longue qu'il Tauroit
fouhaité. C'efr. par ce que Sa Majefté fe trouva fatiguée de tant d'autres Au-
diences} 6c l'Ambafladeur l'aiant remarqué eut la diicretion de fe retirer. 11
préfcnta le 14. de Septembre une Lettre du Roi fon Maître aux Etats Géné-
raux. Il y ajouta un petit Mémoire. La première n'étoit que pour notifier
fa Victoire fur les Saxons près de la Dune. Le Mémoire finiffoit par l'efpe-
rance que le Roi fon Maître avoit de recevoir bien-tôt le fruit des Alliances,
à fin qu'il pût y fatisfaire de fon côté. On tint là-deflùs une Conférence le
XI. My-Lord Marlborough fut ce jour-là à onze heures du matin chez cet
AmbafTadeur, pour le prier de s'y trouver fur le foir. Comme il s'y rendit,
il s'y trouva peu fatisfait du Confeiller-Penfionnaire , ainfi que celui-ci en fut
de même à l'égard de l'Ambafladeur. C'étoit fur une Difpute , qui confi-
ftoit en ce que ledit Ambafladeur vouloit qu'en premier lieu on convint de la
fatisfàction du Roi fon Maître par raport aux Engagemens du dernier Traité,
& qu'on traiteroit enfuite des Troupes. Le Confeiller-Penfionnaire , qui con-
noiflbit fon homme , 6c qui prevoïoit que fon but ne tendoit qu'à avoir une
fomme d'argent pour la Satisfaction, infiftoit qu'on eut à traiter en même
tems pour la Satisfaction & pour les Troupes. Comme My-Lord Marlbo-
rough prenoit cette Affaire à cœur, il fit en forte qu'on renouvella le lende-
main la Conférence. Le Comte de Wratiflau , qui en avoit été informé ,
s'y trouva aufli. On n'y avança cepandant pas beaucoup, 6c My-Lord Marl-
borough partit le même foir pour Loo, pour en parler au Roi. L'opofition
la plus forte à ne rien conclurre avec l'Ambafladeur de Suéde venoit de la
Ville d'Amfterdam. C'étoit à fin de ménager le Czar , dans les Etats du-
quel les Trafiquans d'Amfterdam avoient quantité d'Effets , 6c y avoient un
grand Commerce. L'Ambafladeur de Suéde fe fervit d'une rufe pour porter
a la docilité cette Ville-là. Il fupofa une Lettre fecrete, qui portoit que le
Roi de Suéde avoit formé le deffein d'envoier encore quelques Frégates a Ar-
changel pour y empêcher le Commerce. Il porta le Secrétaire de Holftein
Petkum, capable de jouer toute forte de perfonnage, d'en aller faire la Con-
fidence à Mr. de Dyckvelt. Celui-ci la fit voir aux Etats Généraux, qui,
donnant dans le panneau, la communiquèrent à la Ville d'Amfterdam. Les
Magiftrats de cette Ville, pour parer le coup d'Archangel , confentirent à
ce qu'on pouflàt la Négociation avec l'Ambafladeur de Suéde. Dans une
Conférence, il y eut quelques paroles entre My-Lord Marlborough 6c celui-
ci. Ce dernier aïant dit qu'il étoit bien aife de voir qu'on fe mettoit au bon
chemin, My-Lord Marlboroug lui répondit, qu'on étoit toujours bien aife
de recevoir. Soit que la manière de s'exprimer déplût à l'Ambafladeur Lil-
lienrooth, ou que celui-ci crût de pouvoir étonner ce Lord, le croiant
moins verfé dans les Affaires, il s'en fâcha, 6c répliqua que les deux Puillàn-
ces Maritimes dévoient être aufli aifes de recevoir de la Suéde, que la Suéde
Tom. I. PPPP l'étoit
688 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
1701. l'étoit de recevoir d'Elles. Il ajouta, que fi l'on vouloit revenir de tous les
- Traitez , 6c fe rendre réciproquement les Obligations mutuelles stipulées
dans le Traité, il étoit prêt de le faire fur le champ. C'étoit d'autant plus
qu'il en étoit autorifé par des ordres qu'il avoit reçus du Roi fon Maître a-
vec ceux de traiter pour les Troupes, après la Satisfaction. Cette rulée Ma-
nœuvre étonna les autres , qui s'entreregarderent. Cependant , l'Affaire le
raccommoda le lendemain ; 6c l'on convint , que pour la Satisfaction du Roi
de Suéde les Etats Généraux donneroient deux cent mille Ecus, outre 6c par
deifus la Garantie des trois cent mille , que les Suédois négocioient à Amfter-
dam. On ne devoit cependant pas paier cette fomme qu'après qu'on feroit
informé que le Roi de Suéde auroit agréé cette Convention , qui fut mife
par écrit 6c fignée. L'Ambafladeur de Mofcovie tâcha en vain de détour-
ner ce coup, par de fortes Repréfentations qu'il fit, tant au Confeiller-Pen-
fionnaire qu'au Préfident de Semaine. On lui répondit , qu'on étoit de bon-
ne foi, 6c qu'ainfi l'on ne pouvoit pas fe difpenfer de fatisfaire aux Traitez.
On communiqua en ce tems-là à l'Ambafladeur Lillienrooth le Traité -fait
avec l'Empereur. On lui en avoit jufques-là fait un mifterc. On s'en excu-
fa fur ce que julques- là les Ratifications n'avoient pas été échangées. Elles
le furent au commencement d'Octobre. Ce fut après que celle de l'Empe-
reur fut arrivée, auffi-bien que celle du Roi de la Grande-Bretagne, qui l'a-
voit envoiée à Londres pour y appofer , félon la coutume, le Grand Seau.
Cependant, la véritable raifon qu'on eut de ne plus s'en cacher fût que la
France en avoit reçu la Copie , 6c on l'avoit imprimée à Paris , d'où quel-
ques Miniftres en reçurent des Exemplaires. Cet Ambaffedeur Suédois fit ef-
pérer de recevoir bien-tôt l'approbation de la Convention pour la Satisfac-
tion. Il afTura que la Chancellerie de Suéde l'avoit drefîée 8c l'avoit envoiée
au Roi pour la'figner. Il infifta là-deflus , qu'on eut à entrer en paiement
des Sommes promifes. C'eft puifque le Duc de Marlborough l'avoit afluré
que l'argent en étoit prêt. Il en reçût là-deffus environ quarante mille Ecus
à compte. C'étoit ce que la Couronne de Suéde lui devoit pour quelques an-
nées de fon Ambaflade, dont il n'avoit pas été paie , 6c qu'on lui avoit per-
mis de prendre fur ces Subfides. Auffi étoit - ce le plus grand reffort , qui
l'avoit fait agir tout ce tems-là. On païa enfuite le relie} mais, il trouva
depuis des fubterfuges pour éluder de faire un Traité pour les Troupes. Il
allégua, entre autres frivoles ex eufes , qu'il attendoit fon Rapel.
Pendant le Cours de cette Négociation , Sa Majefté Britannique vaquoit
aux Affaires, nonobftant fes Divertifiemens de la Chaffe à fa Maifon de Loo.
On y eut l'Avis que le Comte Bofclli , fameux Coupe - jarrets de Bergame
s'étoit fauve de la Baftille. Le Roi de France l'y avoit fait mettre après la
Paix de Riswick. C'étoit fur ce que ce Scélérat avoit propofé à ce Roi -là
de tuer celui de. la Grande-Bretagne, à qui Sa Majefté Très - Chêtienne en
donna avis, 6c qu'on reçût en bonne part. Comme les Affaires avoient chan-
gé de face, 6c que les occurrences d'alors diffipoient la bonne intelligence
véritable ou affecrie entre la Cour de Fiance, 6c celle d'Angleterre, on crût
de devoir fi méfier de la fuite du Comte Bofclli de la Baftille. Ceft d'au-
tant
ET RESOLUTIONS D'ETAT. 689
tant plus qu'on regardent pour afFe&ées les diligences de la Cour de Fran- 1701.
ce pour l'attraper. Des Lettres, que le Marquis de Torci écrivit à ce fujet ■•
au Marquis de Bedmar, & qu'on pronoit , n'effacoient pas le foupçon de
quelque connivence. On doubla la Garde à Loo , 8c on y examinoit avec
foin les Etrangers, qui y alloient. Un Italien s'y étoit rendu d'Amfterdam
avec fon Hôte pour y voir la Cour, ainfi qu'il difoitj &, ne rendant pas bon
compte de fa perfonne, on trouva à propos de l'arrêter. Il étoit même foup-
çonné d'être le Comte même. Un Officier François Réfugié nommé Carmel,
qui étoit à la Haïe, 8c qui connoiflbit perfonnellement Bofelli , fut mandé
Eour aller à Loo. Après l'avoir vu , il afliira que ce n' étoit pas le Comte.
.e prifonnier fut cependant conduit à la Haïe. Il y fut examiné par My-
Lord Rummey , & d'autres. Par fes Réponfes on crût de découvrir qu'il
étoit d'intelligence avec Bofelli , & qu'il n' étoit allé à Loo que pour décou-
vrir Païs. On le foupçonna d'autant plus , qu'aiant dit entre autres chofes
qu'il étoit connu par l'Ambafladeur de Venife Mocenigo , celui-ci, après l'a-
voir vu, dit que véritablement il le connoiflbit, mais pour un Bandit & un
Brave. On fe fert à Venife de ce dernier mot , pour dire un Coupe -jarret.
Cela fut caufe qu'il fut continué dans fon Arrêt.
Le Roi de la Grande-Bretagne fouhaitoit fort de gagner l'Electeur de Ba-
vierre. En cette vûë , il lui dépêcha un Colonel Suiflè de Ncufchâtel
nommé Montmoulin. Cet envoi devoit être fort fecret, afin que la Négocia-
tion ne fut pas traverfée par les deux Couronnes. On fût cependant fa defti-
nation, avant même fon départ , par le Colonel même, qui ne put empê-
cher la demangeaifon qu'il avoit de faire parade de fa Commiffion ; de forte
quel' Electeur en fut averti avant fon arrivée. Entre les Propofitions qu'il devoit
faire à ce Prince, il y avoit celle de la reftitution des Bijoux qu'il avoit en-
gagez à Amfterdam pour cinq cent mille Ecus , même fous la Garantie des
Etats Généraux. Ce Prince ne pût être détourné des Engagemens , où il
avoit crû devoir entrer en faveur du nouveau Roi d'Efpagne , qui lui
étoit plus proche que la Maifon d'Autriche , puis qu'il étoit fon propre
Neveu.
On reçût en ce tems-là la Nouvelle de la Mort de Jaques II. , qui avoit
été Roi de la Grande - Bretagne , & qui s' étoit retiré en France. Elle ne
caulà aucune furprile, mais bien celle que le Roi Très-Chrêtien avoit après
cette Mort reconnu pour Roi d'Angleterre le Prétendu Prince de Galles. Les
Etats Généraux firent repréfenter a Sa Majefté Très- Chrétienne par leur
Ambaflâdeur, qu'un tel pas contrevenoit au Traité de Ryswick. Le Roi
de France donna en Réponfe la fubftance d'un Mémoire qu'il fit auf-
û diftribuër dans toutes les Cours de l'Europe dans les termes fuivans..
LE Roi d'Angleterre étant mort à St. Germain le \6. de Septembre 170 1. Mémoi-
le Prince de Galles a pris aufli-tôt le titre de Roi appartenant à ce Prin- "delà
ce , comme Fils & Héritier du feu Roi fon Père. Le Roi Très-Chrêtien pjjjj?
n'a pas fait difficulté de le reconnoître en cette Qualité > Se même quelque touchant
teins avant la mort du Roi d'Angleterre , Sa Majefté T. C. l'avoit aflïiré la Rc-
Pppp 2, qu'El-
690 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
17OI. qu'EUc le fèroit. Comme Elle l'a toujours traité eomme Prince de Galles,
" la conféquence eft naturelle de l'appeller Roi d'Angleterre auffi - tôt que le
connoif- r0j fon pere meurt. Nulle Raifon ne s'y oppofe, lors qu'il n'y a point d'En-
Prince gagement contraire > Se il eft certain qu'on n'en trouve aucun dans le Traité
de Gai- de Ryswick. L'Article IV. de ce Traité porte feulement que S. M. T. C.
Jesponr ne troublera point le Roi de la Grande-Bretagne dans la pofleffion paifible de
K°' fes Etats j qu'Elle n'afliftera , ni de Troupes, ni de Vaifleaux , ni a'autres fe-
terrc cours, ceux qui le voudraient inquiéter. L'intention de Sa Majefté T. C.
eft d'obferver ponctuellement cet Article , Se il eft feur que le titre de Roi
d'Angleterre que le Prince de Galles ne pouvoit fe difpenier de prendre, ne
lui procurera d'autres fecours du Roi T. C. que ceux que le feu Roi fon Pe-
re en recevoit depuis le Traité de Ryswick feulement pour fa fubfiftance Se
pour le foulagement de fes malheurs. La generofité de Sa Majefté T. C. ne
lui a pas permis d'abandonner ni ce Prince ni fa Famille > Elle n'eft point ju-
ge entre le Roi de la Grand-Bretagne , Se le Prince de Galles ; Elle ne peut
décider contre ce dernier en lui refufant un titre que fa NaifTance lui donne :
enfin , il fuffit qu'Elle obferve exactement le Traité de Ryswick , & qu'Elle
s'en tienne precifement aux termes de ce Traité dans un tems , où la Condui-
te du Roi de la Grand-Bretagne 6c des Etats Généraux , la fortie de leurs
Flotes, les affiftances fecretes qu'ils donnent à l'Empereur, les Déclarations
qu'ils font en faveur de ce Prince , les Troupes qu'ils lèvent de tous cotez,
pourraient être regardez avec bien plus de raifon comme une véritable con-
travention aux Traitez.
Au refte, il n'eft pas nouveau que l'on donne aux Enfans les titres des
Roïaumes que les Rois leurs Pères ont perdu j quoi qu'on foit en Paix
avec ceux qui les pofledent. L'Hiftoire en fournit plufieurs exemples dans
les Rois de Naples Se dans ceux de Navarre. En dernier lieu, les Rois
de Pologne de la Maifon de Vafa , aïant perdu le Roiaume de Suéde ,
ont été traitez par la France comme Rois de Suéde jufques à la Paix
d'Olive, dans le tems même de la plus étroite Alliance avec le Roi Gu-
ftave , 6c avec la Reine Chriftine. Je ne crois pas qu'il foit neceflaire de
citer ces Exemples ; perfonne ne pouvant contefter que la conduite que le
Roi a tenue ne foit jufte , digne de fa generofité , conforme aux Trai-
tez, 6e à ce qu'il a fait pour le feu Roi d'Angleterre depuis qu'il a cher-
ché fon azile en France.
Quoiqjje l'Article IV. du Traité de Paix de Ryswick entre l'Angleter-
re 6c la France ne porte pas explicitement une Promefle du Roi de France
de ne pas faire une pareille Démarche , elle avoit cependant été ftipulée ver-
balement. Comme PAmbaiîàdeur de Suéde Lillienrooth devoit pendant la
Négociation de cette Paix avoir inféré dans fon Protocolle, même à l'inftan-
ce des Ambaflideurs de France , qu'Elle ne reconnoitroit point le Prince de
Galles, on demanda à ce Miniftrc-là d'être éclairai là-deflus. L'on fut fur -
pris qu'il fe fervit du Subterfuge que le Protocolle avoit été envoie à la Chan-
cellerie de Suéde. Cependant, s'apercevant qu'on n'étoit pas content de cet-
te exeufe, il fit entendre que la ReconnoifTance du prétendu Prince de Gal-
les
ET RESOLUTIONS D'E T A T. 691
les étoit véritablement une Infraction au Traité de Ryswick. Le Roi Guil- 1701,
laume s'en trouva fort fâché. Auffi, envoïa-t-il d'abord ordre au Comte de ■
Manchefter fon Ambaflàdeur en France d'en partir fans prendre congé. Ce
Comte , qui avoit eu quelque Entretien là - deflîis avec le Marquis de Torci ,
dont le Comte de Wratiflau avoit pris quelque ombrage , fe contenta d'écrire
au Marquis le Billet fuivant.
«MONSIEUR,
„ T E Roi mon Maître, étant informé que Sa Majefté Très-Chrétienne a
„ IL/ reconnu un autre Roi de la Grande-Bretagne , ne croit pas que fa
„ Gloire & fon Service lui permettent de tenir plus long-tems un Ambaffà-
„ deur auprès du Roi vôtre Maître j & m'a envoie ordre de me retirer in-
„ ceflàmment; dont je me donne l'honneur de vous donner Avis par ce Bil-
„ let, 6c en même tems de vous aflurer que je fuis, &c.
L e Marquis lui fît le même jour la Réponfe fui vante.
«MONSIEUR,
„ TE ne puis rien ajouter à ce que j'eus l'honneur de vous dire il y a 8.
„ J jours , du defir fîneere que le Roi a toujours eu de conferver avec le
„ Roi vôtre Maître la Paix établie par le Traité de Ryswick. Je vous prie
„ feulement en mon particulier d'être bien perfuadé, qu'en quelque lieu que
„ vous foiez, vous n'aurez perfonne qui foit plus véritablement que je le fe-
„ rai toute ma vie &c.
L e Roi de la Grandc-Bre.tagne envoïa auffi ordre à Mirmandc fon Secré-
taire à Bruxelles d'en partir fans délai. Les Etats Généraux en firent autant
à leur Ambaflàdeur Heemskerk , qui trouva cependant à propos de notifier fon
Départ par un Mémoire.
Ce qui fut auffi trouvé mauvais fut que la Cour de France fit infifter en
plufieurs Cours fur la même Reconnoiffànce. Le Roi de Portugal , auquel
le Miniftre de France en avoit fait la Demande , lui répondit qu'il étoit refo-
lu de conferver l'Amité & la bonne Correfpondance avec Sa Majefté Très-
Chrêtienne, 8c d'obfcrver religieufement les Alliances qu'il avoit avec Elle j
mais, qu'il ne pouvoit fe réfoudre à une chofe de cette nature, qui pourroit
entraîner de fâcheufes fuites. Il fit même de plus ; car, il fit aflurer l'En-
voie d'Angleterre, ainfi qu'il le manda, que l'on ne devoit craindre la moin-
dre altération dans la dipofition où il étoit touchant cette Affaire. Pour évi-
ter même qu'on ne lui fit une folemnelle Notification, foit par Lettres ou
autrement, de la mort du Roi Jaques , il prit de fon propre mouvement le
petit deuil. Ce Roi refufà auffi d'accepter un certain Maréchal de Camp
nommé Cuiffbn , que la Cour de France avoit envoie à Lisbonne, pour lui
en donner connoiflance , & qui fut préfenté au Roi par l'Ambafiàdeur de
Pppp J Fran»
6<ji MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
1701. France, pour difcipliner les Troupes Portugaifes. Afin qu'on ne fçût pas ce
refus, qui fut pourtant fait d'une manière honnête , on publia de la part de
la France qu'on rapelloit ce Maître de Camp, dont on avoit à faire ailleurs.
Le Dannemark refufa auffi au Comte de Chamilli la ReconnoifTance du pré-
tendu Prince de Galles.
Le Roi de la Grande-Bretagne, qui étoit à Loo, vit avec plaifir le Com-
te de Macklefields. Il arriva de la Cour de Hannover où il avoit porté l'Ac-
te de la Succefiîon. Il en revint chargé d'honneurs & de préfens. Outre
quarante grofles Médailles , il eut de l'Eleétrice Douairière fon Portrait en-
richi de Diamans de la valeur de feize mille Ecus ; & , avec les autres Prc-
fents, le tout montoit bien à z8. mille Ecus. Ce Comte n'en jouît pas long-
tems; car, d'abord qu'il fut de retour en Angleterre, il mourut. Le Roi
eut auffi le plaifir d'aprendre le départ de France du Comte de Manchefter,
fuivant les ordres qu'il lui en avoit donné. Sa Maiafté envoia d'abord ordre
aux Lords Régens en Angleterre de faire fortir du Roïaume le nommé Pouf-
fin. Il étoit refté à Londres au départ du Comte de Tallard , pour faire les
Affaires de France. Il s'étoit bien mis à fa Cour, par le peu de fidélité qu'il
avoit obfervée au Cardinal de Bouillon , dont il avoit été Secrétaire, & qui
caufa la Difgrace de ce Cardinal. On fit fignificr cet ordre à ce Secrétaire
par le Maréchal des Cérémonies. Il voulut préfènter au Secrétaire d'Etat
Vernon le Mémoire par lequel la France prétendoit de juftifier la ReconnoiG-
fancej mais, il fut refufé. Comme les Jacobir.es firent imprimer ce Mémoi-
re, on arrêta les Diftributeurs & même l'Imprimeur. L'infolence du Parti
alla fi loin , que quelques-uns s'aviférent de proclamer ce Roi titulaire dans
quelques lieux de Londres. Il s'étoient habillez avec les Ornemens du Roi
èc des Hérauts d'Armes, qui font d'ordinaire cette fonction. Cependant,
pour n'être pas entendus, il firent cette clandeftine Proclamation en Langa-
ge du Païs de Galles, qui eft un Idiome entièrement différent de celui d'An-
gleterre. Comme l'on s'en aperçut ils s'échapérent.
Quoi qu'il fembloit qu'à la Cour de France, 6c à celle d'Angleterre, Ton
ne gardoit aucune mefure, on tâchoit cependant de pas être le premier à fai-
re des Actes d'hoftilité ouverte . Il arriva cependant une Affaire , qui auroit
pu donner lieu à la France, d'imputer aux Anglois d'en avoir fait une. C'é-
toit qu'il y avoit dans la Meufe devant Rotterdam le Yacht qui devoit trans-
porter le Roi en Angleterre, appelle le Peîegrin Galey , que le Marquis de
Carmarthen avoit fait bâtir. L'Ambafladrice de Suéde Lillienrooth alla , avec
d'autres Dames, à Rotterdam pour le voir. Le Marquis les y régala fort
fplendidement. Ces Dames en étant forties , les Officiers les avoient accom-
pagnées, & il rie relia avec les Matelots que le Pilote. Un Navire François,
paflànt dans la Rivière , n'abaifia point la voile pour làluër le Yacht. Le Pi-
lote lui fit tirer là-deffus un coup de canon à baie , qui lui fit faire le falut.
Le Pilote n'en fut pas content, & lui envoia une chaloupe après, pour l'obli-
ger à paier la poudre du coup de canon , ainfi que c'eff. la coutume de la
Marine d'Angleterre. On fut fâché de cet Incident j & , pour le defavouër,
le Marquis fit mettre le Pilote aux fers. Il arriva cependant à l'AmbaiTadri-
cc
ET RESOLUTIONS D*E T A T. <J9Î
ce de Suéde une Affaire , qui larendoit inconfolable. Au retour de Rotterdam , 1701^
Elle perdit un Diamant de mille piftoles, de ceux, qu'Elle avoit reçus de la
France pour la Médiation de la Paix de Ryswick. Les recherches qu'on en
fit aiant été inutiles, on eut recours à quelque Art vain 5c illicite , qui n'a
de fondement que dans la ridicule crédulité des Efprits foibles, fort fufcepti-
bles de Superftition , pour favoir s'il avoit été dérobé. Sur quelque indice,
on fit mettre en prifon le Cuifinier, qui s'en défendit.
On avoit cependant plus de lieu d'imputer à la France 6c à l'Efpagne des
Démarches d'hoftilité. On avoit de leur part, ainfi qu'on l'a déjà dit, fait
des Lignes à quelque diftance d'Anvers. D'ailleurs, on faiibit fortifier, à un
Camp que les François avoient formé à Richelles , quelques villages , '; qui
appartiennent aux Etats Généraux en vertu du VIII. Article du Traité de
JNirhegue, & qui font connus fous le nom de Rédemption. Les Etats Géné-
raux en firent faire des Plaintes à la Cour de France. Elle ne donna autre
réponfè, fi non qu'Elle feroit examiner ces Plaintes au Confeil de Brabant.
Celui-ci , qui prenoit fes Infpirations de cette Cour- là, trouva une Diftinc-
tion, pareille à celle de l'Efprit 6c de la Lettre, alléguant une différence de
Jurifdicfion 6c de Terrain. On découvrit que ce Camp de Richelles étoit pour
favorifer , 6c profiter d'une Confpiration , formée pour livrer la Ville de
Maeftricht aux François. Le Général Dopft, qui commandoit en cette
Ville-là, en avoit bien en quelque vent. Cependant, il n'en fut certain que
le 2.6. de Septembre. Ce fut à l'occafion de deux Barils de Poudre qui fau-
tèrent près de la Porte de Bruxelles. Le Général Dopft fit là-deflus arrêter
quelques Soldats , dont il fe défioit. Ils furent interrogez 8c en chargèrent
d'autres. Plufieurs, hors des fers 5c des tourmens , avouèrent la Confpira-
tion. Le nombre de ces Scélérats alloit à deux cent Se cinquante. Ce Par-
ti étoit la plus part de Soldats de la Garnifon , & féduits à cet effet par des
gens qui fe difoient envoiez 6c autorifez par le Maréchal de Boufflers. Ces
lonfpirateurs dévoient s'affembler derrière les Eglifes de la Place d'Armes.
De-la , ils. dévoient marcher fous la Conduite d'un nommé La Violette &
d'un Cadet, auparavant Officier en France ,pour fe faifir de la porte de Ton-
gres, en y maffacrant la Garde, 6c la livrer aux François. Quelques autres
du même Parti dévoient enclouër le Canon, Se mettre le feu au Quartier du
Général Dopft, afin d'y attirer la Garnifon, 6c de faciliter par -là l'Entrée
des François. Cette Découverte fauva cette Place. Les Chefs de ces de-
fefpérez furent en divers tems rouëz 8c écartelez , après une ingénue Confef-
fion qu'ils en firent au tems de leur Execution. L'Examen 6c la Confeffion
de ces malheureux, auffi-bien que leur Sentence, furent imprimez en 1703.
dans un Livre , fous le Titre de Recherche modefte des Caufes de la $rt-
fente Guerre.
La Guerre en Italie s'étoit cependant allumée de bonne manière. Le
Prince Eugène s'étoit avancé en forte qu'il y eut diverfes Efcarmouches , ôc
même des Combats. Il y en eut à Chiari, 6c à Carpi , 6c auparavant en d'au-
tres endroits. L'un 6c l'autre Parti s'attribuèrent l'Avantage. Il courut mê-
me de part 6c d'autre des Imprimez. Ce qui paroiflbit décider le plus en
fa-
6i>4 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
1701. faveur des Impériaux, étoit qu'ils avançaient toujours , & que les François
■ ■■- reculoient , 6c avoient tellement du Defavantage , que le Prince de Vaude-
mont Gouverneur du Milanois fut obligé de demander au Prince Eugène de
convenir d'un Cartel pour l'échange des Prifonniers. Il fît cette Demande
par la Lettre qui luit.
55
MONSIEUR,
»
55
COmme les chofes pourroient devenir plus férieufes entre les Armées ,
je ne balance pas à être le premier a vous propofer un Cartel. Ce
Lettre
du Prin-
Vaude- » ^era> ^ vous ^e voûtez , Monfieur, ou celui des dernières Guerres du Pie-
mont. „ mont, ou celui qui fe pratiquoit en Alface. Je me fers avec plaifir de
cette occafion , pour vous prier de me faire l'honneur d'être perfua-
dé de la vénération avec laquelle je fuis, 6cc. Au camp de Goito le ij.
S)
„ Juillet 1701.
Le Prince, qui étoit campé à Provegiano, y repondit le même jour de
la forte.
«MONSIEUR,
Réponfe
du Prin-
>5
JE reçois dans ce moment vôtre Lettre. Il eft fur qu'un Cartel eft éga-
lement à fouhaiter pour les deux Armées. Quoique je n'aie aucun or-
ne. „ dre de Sa Majefté Impériale mon Maître fur ce fujet , en attendant , je
ne ferai aucune difficulté d'entrer en Traité } 6c je crois même , Mon-
fieur, qu'on en fera bien-tôt d'accord, (bit fur le pied de celui qui fe pra-
tiquoit dans la dernière Guerre en Piémont , ou fur le Rhin. Il fe fera
„ donc au nom de l'Empereur mon Maître, 6c de Sa Majefté le Roi de
„ France. Vous me ferez favoir, Monfieur, Vos intentions, Vous affinant
„ que j'embrafle avec plaifir cette occafion, pour vous faire connoître l'efti-
„ me ce la vénération , avec laquelle je fuis , 6cc.
L e Comte de Wratiflau faifoit fort valoir les Avantages que les Troupes
Impériales avoient en Italie. C'étoit en vûë de porter les Etats Généraux à
garantir un Emprunt que Sa Majefté Impériale vouloit faire à Amfterdam
fur l'hipoteque de l'argent vif, ainfi qu'Elle en avoit fait un autre en iô"po.,
6c qu'Elle avoit aquitté. La Négociation rouloit fur cinq cent mille Ecus.
Les Etats Généraux demandèrent là-deffus l'Avis du Receveur Général d'El-
lemeet, qui en fit un Rapport favorable. Cela détermina les Etats Géné-
raux à accorder cette Garantie. L'Empereur avoit envoie pour cela en Hol-
lande un fameux Banquier de Vienne nommé Peffalozza, qui ménagea habil-
lement cet Emprunt. Il en fit tenir bonne partie de l'argent au Prince Eu-
gène en Italie.
On voulut bien accorder cette Garantie , nonobftant toutes les Dépenfes
qu'on
ET RESOLUTIONS D'E T A T. 69s
qu'on vcnoit de faire. C'étoit tant par rapport aux Troupes de Danne- 1701.
marck, de l'Electeur Palatin, du Duc de Mecklembourg, du Prince d'An- — ■
fpack, 8c d'autres. C'eft nonob liant auiïi celles pour l' Armement de Mer,
qu'on avoit fait, & dont les Vaifîèaux de Guerre s'étoient joints à ceux de
la Grande-Bretagne. Il eft vrai que l'on trouva que cette dernière Dépenfe
avoit été faite trop prématurément. C'étoit puiique que cette Flote combi-
née n'entreprit rien. Elle fervit 'feulement à infpirer d'autres fentimens à la
Cour de Portugal. A la vûë de cette nombreuse Flote, il y eut uns furieu-
fe Alarme à Lisbonne. Tout s'y mit fous les armes, & l'on y fit des difpo-
fîtions de défenfè. Cependant , voiant qu'Elle ne voltigeoit point fur ces
Côtes-là en qualité d'Ennemie, la tranquillité fe rétablit. La Cour de Por-
tugal, informée du Traité d'Alliance fait entre l'Empereur, l'Angleterre, 6c
la Hollande , 6c voiant les grandes Forces Maritimes de ces deux dernières
PuifTances, fe trouva dans des difpofitions favorables d'y entrer. Elle fouhai-
toit feulement qu'on fît en forte , qu'on pût conjecturer, que c'étoit la con-
trainte qui l'y portoit. Elle s'en expliqua confidement au Comte de Wal-
deftein. Elle lui allégua que Je Traité qu'elle avoit fait avec l'Elpagne & la
France n'étoit au fonds que pour la Neutralité. Le Comte dépêcha là-def-
fus un Exprès à Vienne, & donna auffi part de tout cela au Comte de Wra-
tiflau. C'efl dès ce tems-là qu'ont commencé les Négociations pour faire
entrer dans la grande Alliance cette Cour-là , ainfi qu'il arriva environ une an-
née & demie après, comme l'on le rapportera en fon tems.
Comme il s'agifîbit de drcfîèr un Etat de Guerre pour l'année fuivante , le
Conflïl d'Etat prefla de (avoir de combien de Navires feroit la Flote, &c à
quel nombre monteraient les Troupes de l'Etat. Les Etats Généraux , fixè-
rent leur nombre de Vaifîèaux de ligne à quarante-huit , lavoir fix du pre-
mier rang, douze du fécond, dix- huit du troifiéme, Se douze du quatrième.
C'étoit fans conter fix Frégates, fix Brûlots, 8c fix Galiotes à Bombes. Le
nombre des Matelots devoit monter à dix-huit mille cent 8c huit hommes.
Il devoit d'ailleurs y avoir fix gros Navires 8c fix Galiotes qu'on devoit louer.
Cet Armement étoit fuputé monter à cinq millions, trois cent dix neuf mille,
deux cent, & foixante quatre florins de Hollande, fans conter dix-huit mille
florins pour la réparation des Brûlots. On écrivit vers le 2j. du mois d'Août
à l'Amirauté d'Amfterdam de faire mettre en état fon contingent de ce nom-
bre des Navires. Celle-ci y repondit en date du 29. fuivant , qu'Elle n'y
manquerait pas; mais, qu'il fâlloit qu'on lui remît les fommes néceffaires :
même , qu'il falloit longer à fournir les Subfides des Navires de la Flote de
l'Etat de cette année-là , qui étoit fous les Vice- Amiraux Allemonde 8c de
Callenberg, dont fon contingent montoit à neuf cent 8c cinquante -fix mille
florins. Ce Collège de l'Amirauté d'Amfterdam n'avoit pas encore reçu en
ce tems-là que trois cent Se vingt - cinq mille florins de la Province de Hol-
lande, 8c dix mille, cinq cent vingt 8c deux de celle d'Utrecht, èc rien du
tout des Provinces' de Gueldre, d'Over-Yffel , 8c de Groningue. Les Dé-
putez des Collèges refpe&ifs de l'Amirauté fuient mandez à la Haïe. Ils y
propoférent de conièrver au Service l'Etat neuf mille Matelots à dix fols par
Tom. 1. Q.qqq j°ur»
6»6 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
170 1. jour, pendant l'hy ver, afin que la Flote pût être en état de bonne heure au,
1 Printems. Les Etats Généraux chargèrent là-deflus le Confeil d'Etat , en da-
te du 1 f . de Novembre , de leur préienter pour cela une Pétition , pour
être envoiée aux Provinces. La fomme en montoit à cent 6c trente cinq mil-
le florins par mois, pendant Pefpace de trois mois, en commençant du pre-
mier Janvier iyoz. 6c finifTant le dernier jour de Mars.
Le Confeil d'Etat s'aquitta, non feulement de cette commiffion , mais mê-
me fe préfenta en corps avec le Roi de la Grande-Bretagne à l'Affemblée des
Etats Généraux, 6c y préfenta l'Etat de Guerre pour l'année fuivante de
1702. La Préface de cet Etat de Guerre étoit en ces termes.
Préface „ HAUTS ET PUISSANTS SEIGNEURS,
de l'Etat
repoi"" 55 T ^ Grand changement arrivé fur la fin du Siècle qui vient d'expirer, 6c
l'Année n -L* la fituation des Affaires de l'Europe i les grands préparatifs de Guerre,
1702. Jy 6c le mouvement des Troupes, qui s'en elt fuivi dans le Voiffnage, 6c mê-
„ me jufques aux Frontières de l'Etat ; ont donné plufieurs juftes raifons à
„ VV. HH. PP. de regarder la continuation du Repos public , 6c particu-
„ lierement celui de l'Etat , comme fort incertain. Par-là d'examiner ferieu-
„ fement, 6c de prendre les moiens neceffaires, par lefquels le Pais puiffé être
„ mis dans une raifonnable fureté , 6c à l'abri de toutes les Entreprifes qu'on
„ pouvoit appréhender.
„ L'augmentation des Forces Militaires, que VV. HH. PP. avoient con-
„ tinué dans leur fervicc, depuis les derniers Traitez de Paix a été en cette
„ vûë fur tout jugée néceffàire. C'eft d'autant que depuis ledit changement
„ l'Etat fe trouve privé des Barrières que les P aïs-Bas Efpagnols avoient ac-
„ coutume d'étendre. Que leurs Frontières étant nombreufes 6c d'étendue,
„ 6c que par la rupture la Guerre, principalement dans fon commencement,
„ doit fe faire fur les Frontières, qui pour cela doivent avoir de plus fortes
„ garnifbns, pour les aflurer d'autant mieux , aufîî - bien que l'Etat contre
„ les attaques 6c l'invafion des Ennemis, VV. HH. PP. ont trouvé fort juflc
„ de devoir y proportionner l'augmentation des Troupes par de réitérées re-
„ crues, 6c de les renforcer notablement, en prenant à leur folde divers au-
„ très, tant de nouvelle levée qu'étrangères.
„ Depuis, HH. 6c PP. Seigneurs, le danger bien loin de diminuer, a
„ plutôt augmenté de beaucoup par tout ce qu'on prévoit, 6c qu'on aprend
„ généralement. Du moins la tranquillité de cet Etat efl Ci incertaine 6c fi
„ douteufe , quoique les Affaires n'aient pas encore éclaté de ce côté - ci en
„ une Guerre , ou que ce qu'on appréhende aujourd'hui ne puifle pas arri-
„ ver demain, que Sa Majetté Britannique 6c le Confeil d'Etat , aiant fè-
„ rieufement réfléchi fur la prefente fituation des Affaires, ont jugé d'une in-
„ difpcnfable néceflité, pour avancer la fureté 6c le bien de l'Etat, qu'on ne
„ doit faire aucune diminution du nombre des Troupes, que VV. HH. PP.
„ entretiennent à prérènt , mais qu'on doit les continuer. Ainfi , tant à leur
„ rapport , qu'à celui des autres charges de l'Union, tout eft amplement
„ con--
J»
ET RESOLUTIONS D'E T A T. 697
contenu dans l'état ordiuaire & extraordinaire de Guerre qu'on préfente à 1 701 ,
VV. HH. PP. conjointement avec cette Pétition. C'eft avec la prière
qu'il plaife aux Confédet-ez d'y concourir avec promtitude, Se qu'il plaifê
à VV. HH. PP., que Sa Majefté Se le Confeil d'Etat font perfuadez con-
venir avec eux fur ce point , de féconder ce but auprès des Provinces par
leur ferieufe recommandation Se leur interceffion , ccc.
Le Roi fit là-deffiis un court Difcours , fur lequel les Etats Généraux
prirent la Réfolution fuivante.
„ C A Majefté de la Grande-Bretagne 5c le Confeil d'Etat comparant en Refolu-
„ iJ corps à l'Affemblée ont en leurs qualitez Se fuivant leurs foins ordinai- £°ç_ cs
res délivré à LL. HH. PP. une Repartition générale de confentement, au 4."
comme auffi les Etats de Guerre ordinaire Se extraordinaire pour l'Année Novem-
prochaine 1701: laquelle Repartition aiant été leiie en préfence de ladite brc-
Majefté Se du Confeil d'Etat , Sa Majefté a enfuite reprefenté en fubftance
à LL. HH. PP. afin qu'elles puiftènt remarquer par la leéture de cetteRe-
partition générale, que les Etats de Guerre étant formez fur la reflexion
d'une Guerre prochaine, qu'à ce fujet Sa Majefté Se le Confeil d'Etat ont
fuivi de tems en tems les Refolutions prifes par Leurs Hautes Puiffances
pour la fureté de l'Etat, Se pour le mettre en état deffence. Et le peu
de tems qui a été emploie à prendre les Refolutions néceffaires , doit être
»
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ta
„ regardé comme le maintien de la Republique , Sa Majefté aiant du regret
„ que, dans un tems de Paix, l'on foit obligé d'exiger de fi grandes Char-
»
ges aux habitans de l'Etat , mais que ce tems ne pouvoit que mal-aifément
porter le nom de Paix, toute efperance d'Accommodement à l'amiable étant
,, ôtée, Se que félon toute apparence, il falloit prendre des mefures comme
en tems de Guerre , vu qu'il s'eft approché des Frontières de l'Etat des
forces nombreufes ; que l'on tâchoit de détourner toutes les Alliances ,
troubler le Commerce , Se le rendre infructueux ; que l'Etat étoit tenu
comme aifiégéi Se que félon l'opinion de Sa Majefté une Guerre valloit
mieux qu'une dangereufe incertitude, les Affaires étant venues à tel point
qu'il femble qu'il n'y peut avoir d'Accommodement que par le moien des
Armes, Se que pour cet effet il falloit pouffer les Affaires avec vigueur pour
maintenir l'Etat dans fa Liberté Se Religion. Que Sa Majefté ne doute
point que LL. HH. PP. Se les Seigneurs Etats des Provinces refpectives
ne le confiderent ferieufement , Se que pour cette Repartition générale, Se
, Etats de Guérie Se autres Repartitions doivent être accordées promptement,
„ Se fans délai pour la conduite des Affaires tant par Mer que par Terre, Se
,, principalement qu'il falloit mettre en effet ces confentemens unanimes par
„ des fatisfaélions réelles, afin que le but pour lequel Elles font deftinées ait
„ fon entier effet. Enfuite, Sa Majefté ajouta qu'elle prenoit congé de LL.
„ HH. PP. puifque fes Affaires demandoient qu'EUe repaffât en Angleterre j
„ qu'EUe avoir déjà donné ordre , Se qu'Ellc fe donnerait à l'avenir pour
„ tout ce qu'il ferait nécefîaire pour le bien de l'Etat Se qui dépendrait de
CLqqq z » Sa
35
•>■>
3?
6p8 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
,, Sa Majefté. Que fes Sujets étoient difpofez à mettre Sa Majefté à fon re-
„ tour en état d'appuier fortement les intérêts que les Roïaumes ont en com-
„ mun avec ce Pais, & avec ce qui concerne la liberté de toute l'Europe;
y que Sa Majefté efpcroit avec l'aide de Dieu de revenir de bonne heure 6c
„ au commencement de l'anné pour vacquer ici à fo fonction , fe recomman.
„ dant en outre à la bonne affection de LL. HH, PP. étant perfuadée qu'il
„ n'eil pas befoin de réitérer à LL. HH. PP. fon affection & Amitié iïnce-
„ re pour le bien de la-Patrie 6c de LL. HH. PP. puifqu'elles en font con-
„ vaincues. Sur quoi il a été délibéré par LL. HH. PP. de remercier fadi-
„ te Majefté 6e ledit Confeil d'Etat au Sujet des foins, peines 6c attachc-
,, meis p;is pour former la Repartition générale 6c Etat de Guerre, 6c piïn-
„ cipalement Sa Majefté de l'honneur qu'EUe leur faifoit de venir dans leur
„ Aflemblée, & qu'elles regardpient la recommandation qu'il avoit plu à
„ Sa Majefté de leur faire au Sujet de l'Etat de Guerre comme l'inviolable
„ vk conftante Amitié que Sa Majefté a toujours témoignée pour le bien de
„ l'Etat, LL. HH. PP. en aiant par le paiTé retiré de h" grands avantages ,
„ que la reconnoiffimee nefe départirait jamais de leurs coeurs ; qu'EUes s'é-
„ toient toujours bien trouvées des hauts 6c fages Confeils de Sa Majefté ,
n qu'EUes étoient refoluës de s'y conformer à l'avenir 6c d'emploier toutes
,, leurs forces pour les fuivre, perfuadées qu'EUes font qu'ils ne tendent uni-
„ quement que pour le bien public de l'Europe & principalement pour le
„ maintien de l'Etat & de la Religion. Que LL. HH. PP. auroient ibuhai-
„ té que les Affaires de S. M. lui euffënt permis de demeurer plus long-tems
„ en ce Pais ; que fa prefence leur eft toujours très - agréable 6e leur donne
„ beaucoup de repos : toutefois qu'EUes étoient pleinement perfuadées des
„ juites raifons qui portent Sa Majefté de repafter en Angleterre, 6e par con-
„ fequent Elles lui fouhaitent un heureux voiage , 6c que Sa Majefté trouve
„ à ton arrivée en Angleterre le cœur de fes Sujets plein d'affection ce de
,, fourmilion pour Sa Majefté, & prêts de fuivre ce de féconder fes bonnes
„ Intentions de toutes leurs forces, comme LL. HH. PP. le feront toujours
„ de leur côté , 6c conferveront l'eftime inviolable qu'elles ont toujours eue
„ pour Sa Majefté, 6c prieront Dieu pour fa precieufe Perfonne , qu'il la
„ veuille conferver en fanté 6c la ramener ici au Printems, 6c qu'il lui plaife
„ de, bénir toutes fes juftes entreprîtes pour le bien de fes Roïaumes, de cet
„ Etat , 6c de toute l'Europe : 6c cnfuite à été trouvé bon 6c entendu que
„ ladite Repartition 6c Etat de Guerre feront envoiez aux Seigneurs Etats
„ des Provinces Reipectives pour Te conformer audit confentement , ou bien
„ donner ordre félon que leidites Provinces Refpectives le trouveront bon ,
„ 6c foit à cette fin ladite Repartition 6c Etat de Guerre envoiez au plû-
,, tôt 6c fans perdre de tems auxdites Provinces pour s'y conformer.
Lors qjj e Sa Majefté Britannique alla aux Etats Généraux de fon Apar-
tement par la Gallerie de communication, pour l'Etat de Guerre, il y avoit
une grande affluence de monde pour la voir. On remarqua que le Secrétaire
iiu Comte d'Avaux , Barré , b'itoit fourré parmi la foule. C'étoit pour
voir
ET RESOLUTIONS D'E T A T. 699
voir l'état de ce Roi. C'eft que , comme pour jouïr du repos, il ne fe mon- 170t.
troit point, bien des gens le croïoient malade. A la vérité , ce Monarque fe
trouvoit par fois incommodé l'après-diné. C'étoit par ce qu'il mangeoit
trop de fruits & autres metz de difficile digeftion. Auffi, ion Médecin Fla-
mand, Bidloo, lui donna t-il là-deflus une petite touche en paflantj car, le
Roi lui aïant dememandé comment fe portoit la Femme du Frère du Comte
d'Albemarle, ce Médecin lui répondit que cette Dame iè porterait bien, fi
elle ne mangeoit des Raifins verds, des Poires, des Pêches, des Huîtres, &
du Cabilliau, qui eft de la Morue traiche; ôc enfin, qu'elle faiibit une Diè-
te Roïale. Cela fit rire le Roi, qui lui dit qu'il l'entendo;t bien. Il y avoit
cependant bien des gens, qui foupçonnoient que Sa Majefté n'affectoit de fe
faire croire malade, que pour gagner un grand point fur la Province de Hol-
lande. C'étoit pour lui faire accepter le jeune Prince de Naffàu , Stadhou-
der Héréditaire de relie de Frilc, pour lui fuccéder dans la Charge de Stad-
houderde celle de Hollande, qui étoit la feule entre les autres Provinces,
qui y regimboit le plus. Cette Affaire fut mile fous main fur le tapis , mais
fans pouvoir y avancer. Auffi , Sa Majefté s'en lafla - 1 - elle , Se déclara un
jour, qu'il falloit donc attendre après la mort pour en venir à une Affaire Ci
falutairc pour la République. Cependant, les Ambaffadeurs de Suéde & de
Venife follicitoient pour avoir une Audience de Sa Majefté. Ce dernier avoit
même de l'inquiétude , fur ce qu'il ne pouvoit pis l'obtenir. Il alléguoic
qu'il y alloit de ià tête fi l'on ne lui donnoit lieu de s'expliquer fur fes Com-
miffions. Pour éviter de la donner à l'Ambaflàdeur de Suéde, le Roi lui en-
voia My-Lord Marlborough. Il h donna cependant le 4. Novembre à ce-
lui de Venife, à la Mailbn du Bois , où ce Roi étoit allé dîner.. Elle ne
roula cependant que fur la Neutralité que fa République étoit réfoluë de gar-
der. Ce qui porta le Roi à donner l'Audience à cet Ambafiadeur , fut les
Plaintes qu'il fît, que pendant qu'on la lui refufoit, le Roi l' avoit accordée
au Comte de Wratiflau. Dansicelle, ce Comte lui montra une Lettre que
le Prince Eugène de Savoie avoit écrite à l'Empereur. Elle tendoit à repré-
senter qu'il lui feroit impoffible d'hyverner en Italie , parce que la France y
envoioit renfort fur renfort. Ainfi, il feroit obligé de repaffer les Montagnes
pour n'être pas accablé par le nombre. Ce Comto lui montra même la co-
pie des quartiers, que l'Empereur affignoit aux Troupes du Prince Eugène,
au cas qu'il fût obligé de quitter l'Italie. Il repréfenta là-deffus que la Diver-
fion en Italie étoit de trop grande conféquence pour l'abandonner. Le but
de ces Repréfentations étoit pour preffer la Rupture avec la France. Auffi,
le dit-il ouvertement , comme le feul moien pour continuer la Guerre en
Italie. Il ajouta même qu'il y avoit plufîeurs Princes 6c Cercles du Corps
Germanique, qu'on pourroit porter pendant l'hyver à fe déclarer pour laCau-
fe Commune ; mais, qu'on ne pourroit venir à bout de rien, tandis qu'on
ne fe déckreroit point, ^ Ce Comte repréfenta auffi les mêmes chofes aux
Miniitres des Etats Généraux. Cependant , les Affaires ne furent pas trou-
vées affrz avancées en maturité, pour aquiefeer aux emprefiemens du Com-
te. Le Roi fouhaitoit fort aufli de voir le Comte de Gocz , qui étoit allé
Qjjqq 3 por-
7oo MEMOIRES, NEGOCIATIONS, TRAITEZ,
1701. porter à la Cour Impériale le Traité d'Alliance. Il envoia le matin du 8.
Novembre pour s'informer G ce Comte étoit de retour ; mais, il ne le fut que
le foir, Se le Roi ne le vid que le Samedi iz. Il accorda ce même jour Au-
dience au Baron de Schmettau , Plénipotentiaire du Roi de Pruffe. Il té-
moigna même qu'il l'accorderoit aufîi à l'Ambaffadeur de Suéde, mais feule-
ment parce qu'il favoit que ce Miniftre du premier ordre ne pouvoir pas l'a-
voir, fe trouvant fort malade au lit. Celui du Roi de PruiTe offrit de la
part de fon Maître d'entrer dans la Grande Alliance. Cela donna lieu à
négocier avec ce Roi-là pour quelques Troupes , ainfi qu'on le dira dans
la fuite.
Comme Sa Majefté Britannique avoit différé fon Départ, à caufe des vents
contraires , elle fut avertie qu'on fe flattoit en France fur fon peu de fanté.
Cela étoit fondé fur ce que Don Bernardo de Quiros s'étoit imprudemment
avifé de faire faire une Confultation de quelques Médecins fur la fanté de Sa
Majefté. Il avoit là-deffus mandé en France qu'Elle ne pourroit vivre que
trois ou quatre femaines. Cependant, Elle fe portoit fort bien, 8c trois jours
avant que de partir , foupant avec bon apetit , Elle dit là-deffus que Don Ber-
nardo de Quiros trouverait fans doute, qu'Elle étoit bien hardie de man-
ger fi bien. Ce Miniftre Efpagnol avoit mandé la même choie en Ef-
pagne , où l'on avoit expofé fur une table chez le Secrétaire des Dépê-
ches Univcrfelles ■ la Lettre de Don Bernardo de Quiros', afin que tout
le monde la pût lire. Le vent aïant tourné à l'Eft , le Roi s'embarqua
le 14. à onze heures du matin, 8c débarqua le lendemain à neuf heures à
Margate.
Dès que ce Roi fut arrivé à Londres on débatit dans le Confeil la Caffation
du Parlement. La Propofition y fut faite fur de nombreufes Adreffes de la
plus part des Provinces de la Grande-Bretagne, 8c de la Ville même de Lon-
dres, qu'on ne raporte pas , par ce que leur multiplicité porterait à une en-
nuiante longueur. Elles ne contenoient toutes qu'un vif Reffentiment , qu'on
avoit généralement de l'Affront que la Fiance venoit de faire à l'Angleterre,
par la Reconnoiffance du prétendu Prince de Galles. D'ailleurs 5 plufieurs
d'icelles tendoient à délirer la Convocation d'un nouveau Parlement. C'étoit
fur ce que celui qui fubfiftoit alors avoit retardé les Affaires importantes, par
des Incidents mal digérez Se hors de failbn. My-Lord Godolphin s'opofa vi-
vement à cette Caffation. Comme il étoit alors Chef des Thoris , voiant
qu'elle étoit cependant conclue, il fe démit d'abord de toutes fes Charges. Il
fut fuivi par d'autres. Cependant , le Roi forma de deffein de propofer au
nouveau Parlement un Acte d'Amniftie 8c de Pardon pour tous ceux, qui
pouvoient être reponfables de quelque Malverfation paffée, véritable on préten-
due. C'étoit pour ôter par-là l'occafion aux Incidens qui pouvoient retarder
les Affaires , comme dans la Se(?îon précédente. La Proclamation pour la
Diffolution du Parlement étoit dans les termes fuivans.
„ GUIL-
55
55
35
5)
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33
55
ET RESOLUTIONS D'E T A T.
„ GUILLAUME ROI,
D'Autant que nos amez Sujets ont unanimement témoigné par leurs fi-
dèles Adreflès leur RefTentiment de l'Injulîice & de l'Indignité , qui
nous ont été faites, auflî-bien qu'à nos Peuples, par le dernier Procédé du
du Roi des François , en entreprenant de reconnoître 6c de déclarer le pré-
tendu Prince de Galles, Roi d'Angleterre, d'Ecoffè, 6c d'Irlande ; & que
nofdits Sujets ont auffi témoigné par-là d'une manière tres-fidcle leur affec-
tion pour nôtre Perfonne 6c nôtre Gouvernement , 6c leur ferme refolution
de faire en cette occafion tout ce qu'on peut fouhaiter de tous bons An-
„ glois 6c Proteftans> Nous avons reçu leur témoignage avec une grande fa-
„ tisfaétion , 6c Nous avons trouvé à propos dans cette conjoncture extraor-
„ dinaire de donner à nos Sujets l'occafion de choifir telles perfonnes, qu'ils
„ jugeront les plus propres pour les reprefenter en Parlement , 6c pour exécu-
„ ter leurs juftes 8c pieux deffeins ; 6c en confequence de diflbudre le pre-
„ fènt Parlement, qui a été prorogé au 13. Vieux Stile du prefent mois de
„ Novembre. A ces caufes , de l'avis de nôtre Confeil Privé , Nous publions
„ cette Proclamation Roiale, par laquelle Nous cbffblvons le Prefent Parle-
„ ment 6cc. 6c Nous faifons fwoir à nos Sujets, que nous avous deffèin d'or-
„ donner au Garde de nôtre Grand Seau d'expédier les Writs ou Lettres
,, Circulaires , pour convoquer un nouveau Parlement qui s'affèmblera à
„ Weftminfter le Mardi 30. de Décembre prochain 6cc.
Cette Caflâtion mortifia les Thoris, 8c rehauffa le cœur des Wighs ,
qui avoient été l'objet de l'Animofité des Thoris dans la précédente Selfion.
Les gens convenoient cependant qu'il n'y auroit point de Brouilleries dans le
nouveau Parlement, 6c que les deux Partis concourreroient à l'envi à de bon-
nes mefures contre la France. Sur-tout les Thoris le feraient d'autant plus
promtemént, que faifant . autrement , ils donneraient par-là lieu à faire voir
que le Roi avoit eu raifon de cafler le Parlement pour n'être pas bien inten-
tionné. D'ailleurs , la Nation étoit trop irritée contre la France, pour que
quelques Membres ôfaffënt s'opofer à l'inclination générale des Peuples.
Ceux-ci, fur- tout les Trafiquans 6c les Manufacturiers, étoient piquez au vif
de ce que la France , en prenant le parti de la Reconnoifîànce du prétendu
Prince de Galles , avoit défendu l'entrée des Marchandifes d'Angleterre, 6c en
avoit chargé d'Impôts quelques unes. Cette Défenfe étoit trouvée d'autant
plus irreguliere, qu'elle devoit avoir lieu par anticipation, favoir de plufieurs
jours avant fa Publication , ce qui faifoit de grands torts aux Marchands An-
glois. Ceux-ci n'étoient pas moins irritez contre l'Efpagne. C'étoit que
par ordre de la Cour de Madrid on avoit fixifi à Malaga tous les Effets des
Anglois , aux quels on envelopa auffi ceux des Hollandois 6c des Hambour-
geois. Les Marchandifes furent d'abord vendues à moitié de leur prix. Le
prétexte en étoit qu'en 1680. on voulut augmenter le Droit d'Entrée. L'En-
voie des Etats Généraux j qui l'étoit auffi de l'Angleterre, préfènta contre cet-
te
7oz MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ.,
1701. te Nouveauté un Mémoire. Il porta coup ; car, le Confcil d'Etat en fu'pen-
dit le deflein. Cependant, la Cour de Madrid venoit de le renouveller, pré-
tendant qu'on devoit païer depuis ce'tems- là. On fit même arrêter les Mar-
chands & les Eactcuis. Ils fuient cependant relâchez fur un Mémoire que
le même Miniftre de l'Angleterre 6c des Etats Généraux préfenta. On ne
lui donna pourtant pas la. moindre Réponfe fur les Marchandifes , qui avoient
été. vendues.
Environ ce tems-là, on mit fur le tapis à PAffemblée des Etats Généraux
de la part de la Régence d'Amfterdam , de défendre que les Navires de l'Etat
ailaffent charger des Marchandifes en France. La Ville de Rotterdam s'y
opol'a. On prit fur cela le deflein de défendre les Vins 6c Eaux de vie de
Fiance > mais , on y trouva la même opofition. Du moins voulut-on éta-
blir un Impôt fur ces Liqueurs. 11 devoit être de foixante florins de Hollan-
de fur chaque Tonneau de Vin , 6c à proportion fur les Eaux de vie. Ce
n'étoit pas en vûë d'aucune Rupture, mais feulement pour foulager une infi-
nité de Marchands , qui dans la crainte de la Guerre s'en étoient chargez
d'une groffe quantité. Ceux-ci, iàns ce contrebalancement aux Vins & Eaux
de Vie qu'on feroit venir , auraient été abfolument ruinez , 6c par confé-
quent cela aurait porté un cotip fatal au Commerce , qui étoit le principal
Nerf de la République. Tout cela relia cependant accroché par l'opofition
de la même Ville de Rotterdam. Cette Ville Te flattoit encore qu'il n'y au-
rait point de Guerre. Des Emifiaires lui avoient infirmé que la France avoit
lait fonder le Cardinal Portocarrero , s'il ne pouvoit pas porter les Grands
d'Efpagne à conlëntir à quelque Démembrement de la Monarchie , afin d'é-
viter la Guerre. Une pareille Démarche flattoit cette Ville-là de la continua-
tion de la Paix. Véritablement , l'on avoit reçu des Avis que le Cardinal
avoit été chargé de difpofer les Grands à donner les mains à quelque Partage ;
mais , l'on mandoit en même tems que le Cardinal avoit répondu que les
Efpagnols avoient reconnu de bon cœur pour Roi le Duc d'Anjou, en
vûë de cenferver là Monarchie dans ion entier ; 6c qu'ainfi l'on ne con-
fentiroit jamais à aucun Démembrement. Quoi que cette Réponlè dût
être du goût des Efpagnols , plulieur^ des plus confiJerables de ceux-ci, ne
faifoient pas grand fond fur la iincerité du Cardinal. C'étoit d'autant plus
qu'il leur avoit caché ces Infinuaticns de la France , qu'ils avoient fçû par
d'autres voies. Aufli , ces Mécontens s'abouchèrent -ils avec d'autres qui
étoient exilez, pour confulter enfemble fur les Conjonctures où l'Efpagne fè
trouvoit. Quoi que leur Affemblée fût fort ciandeftine , le Cardinal en fut
averti, 6c en prit de l'inquiétude , craignant qu'on n'en voulût à fa perfon-
ne. C'étoit d'autant plus que le Roi Philippe aiant entrepris d'aller en
perfonne à Barcelonne , pour- où il partit le 5. de Septembre, laifla la
Direction totale de la Monarchie à cette Eminence-là. Cela donna un Mé-
contentement général aux Grands , fans en excepter le Connétable de Ca-
ftflle fon Ami. Le Cardinal en donna l'Avis au Roi de France. Ce Mo-
r ;.ie fit à-deffus une Démarche pour mettre a couvert ce Prélat-là. Il
ordonna au Secrétaire Barré, d'aller trouver l'Arabalîàdeur de Suéde Lillien-
rooth,
ET RESOLUTIONS D'E T A T. 703
rooth, Se de lui dire que par ordre il lui faifoit favoir, que Sa Majefré Très- 1701.
Chrétienne n'étoit pas fatisfaite du bruit qui courroit qu'Elle vouloit faire
des Propofitions de Paix , qui tendraient a quelque Démembrement de la
Monarchie d'Efpagne. Il lui ajoute que fadite Majefté n'avoit jamais eu un
pareil Deffein, ni l'aurait} 6c que c'étoit aux Hauts Alliez d'aller lui en fai-
re, ou au Roi d'Efpagne, & cela avec foûmiflïon. La Cour de France trou-
va à propos de faire cette Infînuation à l' AmbafTadeur de Suéde , fichant bien
que par la longue expérience, il auroit pénétré dans fes vues 6c en aurait fait
lèlon icelles un ufage aufll étendu , qu'Elle auroit pu fouhaiter. Auffi cet Am-
bafTadeur prona-t-il à tous les Miniltres Etrangers cette Déclaration , que le
Secrétaire Barré lui avoit faite. Ce qui donna même lieu de s'en aquitter fut
une Converfation que l'Envoie d'Angleterre Stanhope eut à table chez cet
AmbafTadeur de Suéde avec Don Bernardo de Quiros. Ce dernier avoit été
trouver cet Ambafladeur-là. C'étoit pour lui témoigner la crainte qu'il avoit
qu'on ne lui donnât un ordre pareil à celui, qui avoit été donné , deux ans
auparavant, au Marquis Canales à Londres, 6c tout récemment au Secrétai-
re Pouffin. Cette crainte étoit fondée, fur ce que par la volonté de la Fran-
ce , le Roi Philippe avoit reconnu le Prétendant. Pour prévenir un tel
ordre, Don Bernardo de Quiros faifoit deflein de partir de la Haïe, 8c il lui
en fit la confidence. L'AmbafTadeur de Suéde voulut le régaler > mais, afin
de ne pas en donner à connoître le fujet, il invita en même tems les autres
Miniftres Publics du premier 6c du fécond rang, ainfi qu'avoit fait l'Envoie
de Portugal. Don Bernardo de Quiros, pour cacher fon chagrin, s'avifa de
faire le joyeux, & de dire de bons mots. Il en dit fur-tout fur le Traité de
la Grande Alliance. Il dit que l'on y ôtoit à l'Efpagne fon Jufl- au -corps ,
pour le donner à l' Empereur} defignant par-là les Païs-Bas 6c ce que l'Efpa-
gne avoit en Italie. D'ailleurs, qu'on lui ôtoit le Pourpoint , pour le don-
ner aux Anglois 6c aux Hollandoisj entendant par -là les Indes ; 8c que par-
là l'on laiflbit la pauvre Efpagne en chemife. L' AmbafTadeur d'Angleterre,
qui avoit pénétré que Don Bernardo de Quiros vouloit partir , lui dit en
riant qu'il lui confeilloit de ne pas revenir. C'efl parce qu'aiant jufques a-
lors foutenu la Totalité de la Monarchie , il i ferait obligé en revenant de
donner les mains à un Partage.
Les tentatives faites auprès du Cardinal Portocarrero pour quelque Dé-
membrement n'aiant pas porté coup, les deux Couronnes Unies embraflèrent
un autre Expédient. Celui-ci confïfta à tâcher de femer de la défiance en-
tre les Alliez. En cette vûë Elles firent courir le bruit , que le Comte de
Guifcard, qui avoit été rappelle de Suéde, alloit en Hollande pour y faire
des Propofitions, par lefquelles l'on n'entrerait pas en Guerre. Pour donner
Îlus d'éclat à ce bruit, on le fit infinuër parmi les Aftioniftes d'Amfterdam.
,c Minifixe de l'Empereur en prit l'alarme , 8c en parla aux principaux des
Etats Généraux. Ceux-ci l'afrurerent qu'ils n'en favoient rien. Cependant,
ce Miniftre-là, ne s'en contentant pas , détacha desEfpions, même auprès du
Secrétaire Barré, pour découvrir la vérité. Il fe trouva que cela n'étoit pas,
Se que ce Comte n'avoit fait que pafTer à Wolfenbuttel pour encourager les
Tm. I. Rrrr deux
704 MEMOIRES, NEGOTI ATIONS, TRAITEZ,
1701. deux Frères conregnants à tenir bon contre le neuvième Ele&orat. C'étoit
'" d'autant plus qu'on devoit avoir remarqué , que cette Oppofition avoit eau-
fé quelque mefintelligence entre les deux Frères. Ceux-ci écrivirent là-def-
fus à leur Rélïdent, qui montra leurs Lettres aux Membres des Etats Géné-
raux, qui étoient au timon des Affaires. Ces Lettres portoient que le Prin-
ce Cadet, qui avoit paru le plus échaufé contre le neuvième Elcélorat , n'é-
toit point en mefintelligence avec fon Frère aîné. Que tous deux étoient at-
tachez aux Intérêts de l'Empire ; que tous deux aimoient la République de
Hollande, & avoient de la vénération pour le Roi de la Grande-Bretagne.
Ils ajoutoient l'affurance qu'ils n'avoient aucun deffein contre ou fur leurs Voi-
fins. Ainfi, ceux-ci pouvoient envoier fans crainte leurs Troupes au fecours
de la République. On répondit au Réfident qu'on avoit pourtant fujet de
foupçonner Tes Maîtres, puis qu'on étoit bien informé, qu'outre les Trou-
pes, qu'ils avoient fur pied , ils en faifoient de nouvelles, & qu'on (avoit que
c'étoit avec de l'argent étranger. Cela étoit 11 vrai , qu'il falut dans la fui-
te prendre des mefures violentes pour les defarmer & les remettre fur le bon
chemin} ainfî qu'on aura lieu de le dire en fon lieu. C'étoit fur-tout le Duc
de Wolfembuttel le Cadet , qui , comme l'on vient de dire , étoit le plus
échaufé contre la Branche de Hannover. On fçût qu'il avoit fait tout fon
pofîîble, par le moien de Duc de Holitein fon beau Frère , pour engager la
Suéde avec la France, ou pour la Neutralité, fans cependant y avoir pu réuf-
fîrj & cela, difoit-on, par deux raifons. L'une étoit que l'on ne faifoit pas
au Roi de Suéde les Proportions , l'argent à la main ; &c l'autre , qui étoir.
la plus forte, étoit la propre inclination de Sa Majefté Suedoife pendant ce
tems-là pour la République de_Hollande 8c pour le Roi de la Grande - Bre-
tagne. On reçût même agréablement l'Avis que Sa Majefté Suedoife avoit
enfin accordé Audience à l'Envoie des Etats Généraux de Cranenbourg, &
lui avoit donné à connoître, qu'Elle étoit prévenue que la France fomentoit
la chaleur de la République de Pologne contre Elle. Enfin, Elle envoia la
Ratification de la Convention pécuniaire , qu'on avoit faite avec fon Am-
baffadeur Lillienrooth , relativement aux Subfides pour le fecours ftipulé
dans le Traité conclu l'année précédente , afin de pouvoir en tirer l'ar-
gent.
Cette bonne intelligence fit efpérer qu'on pourroit en établir une entre ce
Roi-là &c celui de Pruffe: auffi, fe difpola-t-on à négocier pour cela. La rai-
fon qu'on en avoit étoit qu'après plufieurs Conférences avec le Plénipotentiai-
res du Roi de Pruffe, on étoit convenu de prendre au Service de l'x'Vngleterre ,
êc des Etats Généraux , cinq mille hommes. Jl eft vrai que le Traité n'en
fut figné que le 50. de Décembre par des raifons qu'on dira dans la fuite. Le
Roi de Pruffe offroit d'envoier encore vingt mille hommes contre la France.
C'étoit pourvu qu'il n'eut rien à craindre des Armes viétorieufes du Roi de
Suéde. Il y eut là-deffus des Conférences entre le Confeiller- Penfionnaire &
l'Ambaffadeur de Suéde Lillienrooth, & enfuite avec le Plénipotentiaire du
Roi de Pruffe. Celui de Suéde s'engagea de faire tout fon polîîble pour cela
auprès du Roi fon Maître. On efperoit même que ce feroit avec fuccès. C'eft
d'au-
ET RESOLUTIONS D'E T A T. >cr
d'autant plus que l'Envoie de Prufle, Printz , revenant de la Cour du Czar, ïyoï.
avoit fait demander une Paflèp ort au Roi de Suede.^ Celui-ci l'accorda fort "
généreufe menti mais mit dans le Pafleport le feul titre d'Envoié Extraordi-
naire, fans fpecifie'r de qui. Il ne voulut pas mettre qu'il l'étoit de l'Elec-
teur de Brandebourg, afin de ne pas donner du chagrin > ni aiiffi voulut-il y
mettre du Roi de Prufle, afin de ne pas reconnoître fi à la légère cette nou-
velle Roïauté. Cette Négociation n'eut cependant pas pour lors aucun lieu.
Elle ne fut renramée que quelque tems après entre l'Ambaflâdeur de Suéde Se
le Comte de Wartemberg premier Miniltre du Roi de Prufle , ainfi qu'on
le dira en fon tems.
En attendant, le Roi de Suéde pouflbit fes vues en Pologne, L'Envoie
du Roi Auguste préienta aux Etats Généraux de la part du Roi fon Maî-
tre deux Propofitiorïs. L'une étoit que fon Maître donnerait vingt 8c qua-
tre mille hommes à l'Empereur, fi celui-ci vouloit lui donner le Commande-
ment d'une de Ces Armées. La féconde étoit, que fi la première n'étoit pas
acceptée, ce Roi-là donneroit au Roi d'Augleterre & aux Etats Généraux
quatre mille hommes d'Infanterie 6c autant de Cavallerie. C'étoit toujours
en contant fur la Paix avec le Roi de Suéde. Cette féconde Propofition au-
rait été d'abord acceptée, fi l'on eut été fur que le Roi de Suéde voulût la
faire, & fe defifler du deflein du Détronement. Mais, bien loin de- là , ce
Roi-la y perfiftoit fortement, ne pouvant trouver de la fureté par quelque
autre moïen. Auflî fut-ce là-deflus que le Roi de Pologne dépêcha un En-
voie Extraordinaire vers Sa Majelté Britannique, pour le prier d'emploier fes
bons offices auprès de celui de Suéde , pour le détourner de ce deflein-là.
Cet Envoie ne réuflît point dans fa Commiflion. L'on trouva même étran-
ge qu'il n'eut dépêché qu'un Envoie Extraordinaire vers le Roi de la Gran-
de-Bretagne pendant que les Nouvelles publiques difoient qu'il envoioit un
Ambafladeur au Roi de France. L'on ne pouvoit pas conjecturer quel train
prendraient les Affaires du Roi Auguste en Pologne. La Diète générale
étoit convoquée pour la fin de l'an. Les Palatinats dévoient en attendant
tenir leurs Diétines, ainfi qu'on les y appelle. Le Cardinal Primat leur écri-
vit une Lettre circulaire, pour leur repréfenter le Danger où la République
fe trouvoit d'avoir à effuier une cruelle Guerre Sec. Cette Lettre étoit en ces
termes , traduits du Polonois.
DAns le tems que le cours de mes jours eft paflàblement avancé , nôtre Lettre
Patrie eft menacée d'un très grand Orage, que je tâche de détourner du Gr-
avée tout le foin poffible. J'avoue qu'il me fera très -difficile de redrefler Prinïw
ce que les autres onf gâté par leurs Confeils mal digérez, d'appaifer les ^s de"
„ Efprits emûs , & de parer ou prévenir les fuites d'une cruelle Guerre. Pologne.
„ Quand je confidere la chofe en Elle-même, je ne puis conclurre, fi non
„ que Dieu eft courroucé contre Nous. Des Troupes étrangères ont defolé
„ de tous cotez nôtre Païs. Le commencement de la Guerre contre la Sue-
„ de, dans laquelle la République n'a jamais voulu entrer, a été fatal à nôtre
j, égard > mais , les fuites pourront en être encore plus funeftes. Car le
Rr rr a „ mau-
7o6 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
'701' » mauvais fuccès des Armes du Roi intereffe en même tems toute la Répu-
"J i» blique,qui eft auffi étroitement unie avec lui, que la tête l'eft avec tous les
„ autres membres du corps humain. Ce pefant fardeau m'eft tombé fur le
„ dos; c'eft pour ne pas me rendre reponfable de rien, que j'ai tâché de dé-
„ tourner le Danger , dont on eft menacé. C'eft pourquoi je me fuis apli-
„ que avec foin aux moiens d'accommoder les Partis , qui étoient en ar-
„ mes, 6c de pourvoir à la fureté de la République. D'abord que j'eus apns
„ que les Suédois , qui avoient paflë la Dune , etoient entrez dans la Cour-
„ lande , je priai par écrit le Roi de Suéde de vouloir épargner les Frontières
„ de ce Roiaume, & de vouloir vivre en bonne intelligence avec nous, con»
„ ibrmement aux anciens Traitez conclus entre les deux Etats ; en lui repré-
„ Tentant, qu'il y étoit d'autant plus obligé, que la République n'avoitja-
,, mais voulu donner les mains à cette Guerre. Cependant , ce que j'apre-
„ hendois eft plutôt arrivé, que ma Lettre parvenue à fon Adreffe; les Sue-
„ dois s' étant déjà emparez de la Ville 6c du Château de Mittau en Cour-
„ lande. Et, quoiqu'on ne fâche pas encore s'ils s'y tiennent comme Amis
„ ou Ennemis , on a cependant tout à craindre de leur part , particulièrement
„ lors qu'ils fauront que nôtre Roi aura retiré toutes les Troupes , non feu-
}, lement de Courlande, mais aufli de Lituanie. Ainfi, Sa Majefté fe voiant
„ à prélènt deftituée de Troupes, recommande la Garde de fa Perfonne à la
„ Fidélité 6c à PAffèétion de la République. Il eft bien vrai que j'ai reçu
„ une Lettre du Roi de Suéde, en Réponfe à celle , par laquelle je le priois
„ de ne pas pourfuivre plus loin fes Ennemis; mais, il a pénétré jufques dans
3, les Provinces de ce Roiaume. J'en envoie des Extraits conjointement
„ avec celle-ci à Vos Illuftres 6c vénérables Seigneuries, afin qu' Elles puif-
„ lent prendre là - deflus les mefures convenables pour détourner le Danger
„ évident où l'on eft. Quant à la Diète générale on pourra difficilement la
„ tenir, par ce que le cas eft imprévu , 6c que d'ailleurs le Parti triomphant
„ a déjà les Armes en main , au lieu que nous avons encore à les prendre.
3, Le Danger n'eft pas préfentement à la Porte, mais dans la Maifon. C'eft
„ pourquoi, il faut penfer aux moiens de s'en délivrer promtement, fans per-
„ dre le tems à de longues Délibcratious. J'attends avec impatience les Ré-
„ folutions de VV. SS. , 6c les Règles qu'elles me preferiront. Sur quoi je
„ me recommande à vos bonnes grâces.
Signé,
Radziowskv.
„ De Varfovie le premier Septembre 1701.
L e Roi écrivit de même des Lettres circulaires aux Palatinats. Elles pro-
duinrént l'effet, que la plus part d'iceux prirent des Réfolutions fort favora-
bles à leur Roi. 11 n'en fut cependant pas de même de la Grande Pologne.
Elle
ET RESOLUTIONS D'ETAT. }o7
Elle donna à fes Nonces des Inftru&ions fcabreufes pour la Grande Diète qui 170»»
devoit fe tenir. Elles étoient dans les termes fuivans. —
I. T Es Députez infifteront à ce qu'il foit envoie un Ambafladeur à Sa Ma- Inflruc-
Lj jefté le Roi de Suéde , pour lui demander par quelles raii'ons Elle a p°0nv°neL*
fait Invafion fur les Terres de la République , 6c pour lui dire qu'Elle ait à de ]a
s'en retirer. Grande
II. Qu'on fera le Procès à ceux qui ont confeillé la Guerre contre la Sue- Cologne
de, & qui fe font trouvez devant Riga avec Sa Majefté. f *^ Qc~
III. Que ceux , qui fans le fû de la République ont levé des Troupes con- Nonces
tre la Suéde, ou qui en ont fourni, feront déclarez infâmes. à la Dié-
IV. Que Sa Majefté fera remerciée du foin qu'Elle a pris pour que l'Armée tepro.»
de la Couronne foit contentée} & qu'en même tems Elle fera priée de païer clume#
les Millions promis , & de faire reparer le dommage qu'a fait fon
Armée.
V. Que l'on demandera aux Miniftres , envoiez dans les Cours Etran-
gères , raifon & compte de leurs Commiffions , 6c que l'on ne doit point
faire bon les depenfes faites pour ces Ambaflades , à l'infû de la Répu-
blique.
VI. Que les Généraux cafteront les Troupes qui ont été levées à l'infù de
la République.
VII. Qui Sa Majefté fera priée de remédier aux defordres qui font en
Lituanie.
VIII. Que l'on reléguera les Miniftres Saxons 6c leurs Adberens.
IX. Que l'on interdira à ceux qui ne font pas de la Religion Catholique ,
l'exercice public de leur Religion.
X. Que l'on ne permettra point aux Lituaniens d'agir dans la Chambre des
Nonces avant que de s'être accordez.
XI. Que fi les Troupes de Saxe reviennent dans le Roiaume fans le con-
fentement de la République , les Généraux s'y opoferont avec les Troupes
qu'ils ont fous leur commandement.
XII. Qu'on priera Sa Majefté de ne faire aucunes Alliances avec des
Potentats Etrangers , fans le fçû 6c le confentement de la République j
Se que fi Elle en a fait , Elle s'en départira par un Ecrit ou Inftrument
public.
XIII. Que le Duc de Courlande fera jugé à la Diète comme Auteur de la
Guerre de Suéde.
XIV. Qu'en cas que l'on ait fait traiter par Commiflaires avec Sa
Majefté le Roi de Suéde , 6c qu'il fe trouve qu'ils aient négocié contre
l'intention de la République , ils en pourront être recherchez criminel-
lement.
XV. Que les Nonces demanderont pourquoi 6c par ordre de qui l'Echan-
fon de la Couronne Towiansky a félicité l'Electeur de Brandebourg fur fon
Couronnement.
XVI. Qu'en cas que quelques Nonces n'aient pas encore protefté
contre ce Couronnement , ils aient à le faire 6c à en donner Acte.
Rrrr 3 XVII.
7o8 MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
1701. XVII. Qu'ils n'approuveront en façon quelconque le Traité d'El-
bing.
XVIII. Qu'il ne faut donner à perfonne le Droit de Naturalization ou de
Noblefle.
XIX. Que l'on éloignera d'ici les Refidens des Princes Etrangers.
Ce Roi fit cependant traiter à la Haïe pour donner des Troupes aux Al-
liés. On lui offrit un Subfide de deux cent cinquante mille Ecus pour quatre
ou cinq mille hommes. On étoit bien aife de prendre beaucoup de Troupes>
car, l'on prevoioit bien qu'une Guerre étoit inévitable. On envoïa un Ex-
près aux Electeurs de Maience 6c Palatin , pour (avoir precifement les efforts
Militaires que chacun d'eux pourroit faire pour foutenir les Droits du Chapi-
tre de Cologne. Le Dimanche 27. de Novembre les Etats Généraux reçu-
rent un Exprès du dernier de ces Electeurs. Il demandoit du renfort pour fe
mettre en fureté contre les Troupes de France, qui venoient d'inonder l'Elec-
torat de Cologne. Les Etats Généraux s'affemblérent là-deffus au fortir de
• l'Eglilé. Il ne fut cependant rien réfolu, fi non de demander le fentiment de
Sa Majefté Britannique fur ce qu'il y auroit à faire, & on ordonna à des Trou-
pes de s'avancer fur les Frontières, & de fe tenir prêtes à marcher au premier
ordre. Les Comtes de Wratiflaw 6c de Goë'z conférèrent ai.ffi fur le même
fuject avec le Confeiller-Penfionnaire. Celui-ci leur répondit qu'il faloit at-
tendre l'Avis là-deflus du Roi de la Grande-Bretagne ; après quoi on concer-
teroit les mefures les plus néceffaires pour conjurer l'imminent Ora.°e. Il en
paroiffbit auffi un relativement à Aix la Chapelle. Un Corps def Troupes
des deux Couronnes s'étoient avancées vers cette Ville Impériale-là. On re-
joint de prévenir leurs vues , & d'y faire entrer quelques Troupes. Cette
Réfolution ne fut point exécutée , par la retraite du Camp des François.
On travailla même dans la fuite à convenir d'une Neutralité de cette Ville-la,
dont on dira le fuccès en fon tems. Cependant, les Troupes des deux Cou-
ronnes dominoient en Maîtres dans les Villes de l'Electorat de Coîoo-ne.
L'Electeur de ce nom, en les y faifant introduire, les traitoit de Troupes du
Cercle de Bourgogne. C'eft ainfi qu'on peut le voir par les ordres qu'il don-
na à ceux de Alpen , 6c qui font.
„ Q On Altefle Electorale de Cologne Joseph Clément, Duc des
„ lJ deux Baviéres , nôtre très-benin Seigneur , voulant faire achever les
Ouvrages de Rhinberg 6c de Kaiferwaert , 6c jugeant félon la très-humble
Requête 6c Remontrance de fes Sujets qu'il leur iëroit avantageux de pou-
voir dans les conjonctures prefentes, 6c pendant l'hyver, vaquer à leurs Af-
faires, S. A. E. les a bien voulu exempter des courvées aux quelles tous
les Sujets desBaillages 6c Seigneuries du Bas-Diocele avoient été comman-
„ dez. Et comme par une fuputation jufte 6c équitable la quote part de la
Seigneurie d' Alpen fe monte à huit écus par quinze jours, S. À. E. or-
donne aux Magiitrats de ce lieu de tenir les mains afin que les fufdits huit
Ecus qui commencent dès le quinzième de ce mois l'oient régulièrement
paiez de quinze en quinze jours au Secrétaire de la Ville 6c à l'Auditeur
„ Detz-
M
V5
ET RESOLUTIONS D'E T A T. 709
„ Detzhaufen jufques à nouvel ordre, §C cela à peine d'exécution mi- I70I>
„ li taire. ~"
(L. S.) Joseph Clément, Electeur}
Et plus bas,
C. L. Kaukol.
„ Donné à Bonn le if . Décembre 1701.
55
5>
55
55
55
55
55
55
»)
S On Altefîe Electorale de Cologne Joseph Clément, Duc des deux
Baviéres nôtre très-clement Seigneur , ordonne à tous les Magiftrats,
Commandans , 6c Bourgeois d'Alpen de recevoir dans leur Ville 6c Château,
fans aucune opofitionou remifé, le Porteur des prefentes, Officier commandé
à cet effet par le Comte Coigni avec fesSoldats, aufli-tôt qu'ils auront prê-
té le Serment ci-joint , 6c de leur fournir logement , lit , feu , 6c lumière
d'hôte , 6c de leur donner de bon cœur le relte pour un prix raiibnnable de
leur folde, fous peine d'indignation 6c peines irremiflibles. Donné à Bonn
le if. Décembre 1701.
(L. S.) Joseph Clément, Electeur $ '
• Et plus bas,
De Simon Eitzemberg,
Préiênté à Alpen le Lundi de
Noël 1701. devant les Portes, par
le Lieutenant du Roi Comman-
dant à Rhimbergue.
Serment que les Officiers £s? Soldats du Cercle de Bourgogne prêteront
avant leur Entrée dans les Places de fort Altejfe Eleclora~
le de Cologne.
„ MESSIEURS LES OFFICIERS ET SOLDATS,
„ T TOus jurerez d'être ridelles 6c obéiflans à fon Alteffe Sereniff Joseph
„ V Clément, Electeur de Cologne, Duc des deux Baviéres, 6c en
„ tout ce qui regarde fon Service, de concourir à fon bien, 6c d'empêcher
„ tout dommage de fa Sereniffime Perfonne, auiîi bien que de les Etats, tant
„ que vous ferez pour aflïïrer fes Pais. Ainfi Dieu m'aide , 6c tous les
„ Saints.
Mr. le Capitaine Olive aiant prêté le Serment ,
ejl entré avec cinquante hommes.
Le
7To MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
1701. Le Réfident de cet Electeur, Norff, continuoit toujours à aflurer que
»■'■' " fon Maître ne faifoit rien qui pût nuire aux Alliez, Se qu'il ne prendrait point
de Troupes dans Bonn, afin de ne pas expofer faPerfonne aux Avanies Fran-
çoifes. Comme ce Réfident étoit regardé fur le pied d'un bon Charlatan
Politique, on n'y ajoutoit point de foi. D'ailleurs, fouvent les Miniftres font
les premiers à être trompez par leurs Maîtres ; ainfi que la fuite fit voir que
celui-ci l'étoit.
Celui du Duc de Holftein faifoit auffi de fon côté des Insinuations de la
bonne intention du Duc fon Maître. Cependant , les Etats Généraux étoient
dans une extraordinaire prévention contre ce Duc. Us avoient eu des Avis,
que non-obfhnt le: obligations qu'il leur avoit, il avoit prêté l'oreille à des
Propofitions de la France, & qu'il s'étoit même chargé de faire fon pofllble
d'y attirer le Roi de Suéde. C'étoit le Comte de Welling, qui négocioit
là-deflus avec l'Abbé Bidal Minifhe de France à Hambourg. Le Secrétaire
de Holftein Petkum eut là-deflus une Difpute avec Mr. de Dyckvelt, à qui
il dit avec fon aflurance étourdie, qui lui étoit ordinaire, que c'étoit la Mai-
fon de Lunebourg qui jouoit ce tour au Duc fon Maître , pour le rendre fu-
fpecL Cela fut caufe que le Duc, en étant averti, tacha de fe mettre bien
avec les Etats Généraux , Se leur fit offrir un Corps de Troupes qu'on prit
dans la fuite.
On conclut auffi le Traité avec le Roi de PrufTe pour cinq mille hommes.
Le Plénipotentiaire de ce Roi , le Baron de Schmettau , qui avoit négocié ce
Traité conjointement avec le Baron de Spanheim , 6c qui l'avoit pouffé à fa
fin après plusieurs Conférences & délais, prefenta le 28. de Novembre fes
Lettres de Créance au Président de Semaine , n'aiant pas voulu les remettre
dans une Audience publique. Ce qui avoit retardé la conclusion de ce Trai-
té venoit de ce que les Etats Généraux ne pouvoient pas aquiefeer à certaines
Demandes touchant les Officiers de ces Troupes. D'ailleurs , le Plénipoten-.
tiaire de PruSTe leur imputoit qu'ils ne diftëroient la conclusion de ce Traité,
que par un efprit de de ménage, voulant que la paie de ces Troupes ne fut
pas plus prématurée, que le befoin qu'on en avoit. Voici ce Traité.
Traité Les Etats Généraux des Provinces-Unies Sec.
entre le
hGrïn- f^Omme Sa Majefté le Roi de PrufTe a offert à Sa Majefté le Roi de la
de-Bre- V^ Grande-Bretagne, & à LL HH. PP. les Etats Généraux des Provin-
tagne,& Ces-Unies,de leur remettre un corps de cinq mille hommes de bonnes 8c vieil-
GénéatS les Troupes, 8c cette offre aiant été bien reçue, on eit convenu de part 8c
rauxdes d'autre des conditions fuivantes :
Provin-
C9S"U- I. Le Corps confiftera en deux Regimens de Cavallerie , faifant enfemble,
k RÔi de avec VEt'xt Ma'or & Primes Planes ' 8?4- hommes » & en cincl Regimens
PrufTe , d'Infanterie, chacun de douze Compagnies, faifant enfemble avec l'Etat Ma-
pour des j0r, 8c primes planes 41? f . hommes ; 8c le total en Cavallerie 8c Infanterie
Troupes. j.j2_p, hommes.
II. Les Troupes feront bien habillées Se bien armées , 8c la Cavallerie fe-
va
ET RESOLUTIONS D'ETAT. 711
ra fournie de bon chevaux j & Elles feront en tout traitées 6c paiées fur le 1701.
pied que l'Etat traite les fiennes propres. ..,,, ,«»»..«./,
III. Lefdites Troupes feront paiées , moitié de la part de Sa Majeite le
Roi de la Grande-Bretagne , 6c l'autre moitié de celle de LL. HH. PP.
Ce paiement fera auffi promt 6c fur le pied des Troupes de Sa Majefté le
Roi de Pruffe, qui ont été au fervice de LL. HH. PP. durant la dernière
Guerre. . ,'
IV. On fera paier à ce Corps un mois de gage pour ion traniport, des
qu'il fe mettra effectivement en marche. ^^
V. Sa Majefté le Roi de Pruffe fera fortir des quartiers7^4?"iettre en mar-
che, ledit Corps de Troupes, quinze jours après la fignature de ce Traité -, 6c
plutôt s'il eft poffible.
VI. La folde de ces Troupes ne commencera que du jour qu'elles feront
entrées dans les limites des Etats de LL. HH. PP. C'eft alors qu'on en fera
la revûë par les Commifîaires de Sa Majefté Britannique 6c de LL. HH.
PP. 6c que lefdites Troupes prêteront ferment au Roi de la Grande-Bre-
tagne 6c à l'Etat.
VII. A l'égard des revues defdites Troupes on en ufêra fur le pied queLL.
HH. PP. feront avec les leurs propres. Et d'ailleurs on laiflèra de part 6c
d'autre auxdites Troupes la liberté de faire leurs recrues , où il leur fera
le plus convenable , auflî-bien dans, les Etats de Sa Majellé le Roi de Prude
que dans ceux de LL. HH. PP.
VIII. En tems de Guerre on fera paier à ces mêmes Troupes en argent
pour chariots 6c autres équipages, ce qu'on paie de la part de LL. HH. PP.
à leurs propres Troupes \ 6c au refte on traitera lefdites Troupes en tout éga-
lement à ce qui fe pratique envers celles de LL. H H. PP.
IX. Au cas qu'après un Accommodement ou Paix fiiite avec les Couronnes
de France 6c d'Efpagne, Sa Majefté le Roi de la Grande-Bretagne, 6c LL.
HH. PP. veuillent renvoier ledit Corps de Troupes , Sa Majefté le Roi de
Pruffe fera avertie deux mois avant qu'il fe mette en marche pour s'en re-
tourner.
X. Si Sa Majefté le Roi de Pruffe venoit à être attaquée dans (es propres
Etats, éloignez du Rhin , 8c feroit obligé de redemander là-deffus lef-
dites Troupes, on les lui renvoiera inceflamrnent , fans aucune contra-
diction.
XI. Quand Sa Majefté de la Grande-Bretagne 6c LL. HH. PP. renvoie-
ront ledit Corps de Troupes , en ce cas , il lui fera paie un mois de gage
pour le retour 6c tranfport ; mais au cas que Sa Majefté le Roi de Pruffe le
rapelle , on ne lui paiera que le refte du mois de gage , dans lequel le ra-
pel fe fait.
XII. Au cas de rapel ou de renvoi de ces Troupes , Sa Majefté le Roi de
la Grande-Bretagne 6c LL. HH. PP. ne paieront ni remplaceront point les
fimples Soldats qui pourroient alors y manquer î 6c ce fera aux Officiers dudit
Corps d'en repondre à Sa Majefté le Roi de Prufîê.
XIII. Audit cas de renvoi ou de rapel defdites Troupes , ce qui fe trouve-
ra». /. Sfff r*
7ii MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
1701- ra alors leur être dû, fera paie promtement & autant qu'il fera poûible, avant
' qu'elles le mettent en marche pour leur retour.
XIV. La prefente Convention fera ratifiée , & les Ratifications feront
échangées de part Se d'autre dans l'éfpace de fix femaines à conter du jour
de la fignature.
Eti foi de quoi nous foulfignez Plénipotentiaires de Sa Majefté le Roi de
la Grande-Bretagne, de Sa Majefté le Roi de Prufle, & des Seigneurs Etats
Généraux , en vertu de nos Plein-Pouvoirs avons conclu, figné & féellé du
Cachet de nos Armes , la prefente Convention, à fçavoir moi le Comte de
Marlborough de la part de Sa Majefté Britannique à Londres le 9. Jan-
vier 1701. Vieux Stile. Nous le Baron de Spanheim Se le Baron de Schmet-
tau de la part de Sa Majefté le Roi de Prufle } le premier à Londres
le 9. Janvier Vieux Stile, 8c le fécond à la Haïe le 30. Décembre 1701.
Nouveau Stile; & Nous fouflîgnez Députez des Seigneurs Etats Généraux
de leur part , à la Haie le 30. Décembre 1701. Nouveau Stile.
(L. S.) Marlborough. (L. S.) Spanheim. (L. S.) J.van EJfen.
(L. S.) Schmettau. (L. S.) J.B.vanReede.
(L. S.) A.Heinfius.
(L. S.) F.deNafau.
(L. S.) Du Tour.
(L. S.) H. Lemker.
(L. S.) S. L, Gockinga.
My-Lord Marlborough ne le figna qu'à Londres, où il s'étoit rendu
avec quelques autres Miniftres Etrangers auprès de la Cour Britannique. Par-
mi ceux-ci étoit le Noble Vénitien Mocenigo. On ne pouvoit pénétrer fes
Commiflîons. C'eft d'autant plus qu'outre le fecret raifterieux , que ceux
de fa République affectent en toute^ chofe , on n'avqit guère de converfation
avec lui. Car tous les Envoiez s'étoient alfemblez & avoient rélblu de ne
point lui rendre de vifite. C'étoit fur ce qu'il prétendoit de ne pas leur don-
ner la main chez lui , 8c eux précendoient l'avoir , à caufe qu'il n'étoit pas
reconnu en Hollande pour Ambaffadeur. D'ailleurs , quand même il auroit
été reconnu pour tel , il y avoit une Difpute fur ce point du Cérémo-
nial , qui n'a été enfuite terminée que par une Convention entre quelques
Quoique la Guerre n'eut pas encore été déclarée , du côté des deux Cou-
ronnes on faifoit des Démarches qui paflbient pour des Infractions de la
Paix. Outre les Lignes du côté d'Anvers, les François commencèrent à
bâtir un Fort à Selfate à portée du Canon du Sas de Gand. Le Gouver-
neur ou Commandant de ce Pofte menaça ces nouveaux Battiflèurs de leur
tirer deflhs, s'ils ne fe defiftoient de leur Travail. On en eut la Nouvel-
le par un Exprès, que le Maréchal de Boufflers envoioit à Don Bernardo de
Quiros
ET RÉSOLUTIONS D'ETAT. 715
Quiros & au Secrétaire de France , Barré. C'étoit pour faire des Plaintes 17°'^
contre les menaces du Commandant du Sas de Gand. L'Exprès trouva en -— —
chemin Don Bernardo de Quiros, qui alloit à Bruxelles, & qui renvoïa à la
Haïe fon Secrétaire, pour faire ces Plaintes conjointement avec Barré. Le
Confeiller-Penfionnaire, auquel ils les firent, leur répondit que le Comman-
dant devoit l'avoir déjà fait. Aufîï , outre que c'étoit une Infraction mani-
fefte de plufieurs Articles du Traité de Weftphalie, cette nouvelle Confhuc-
tion paroilToit-elle d'une trop grande conféquence. C'étoit parce que par - là
les François auraient pu fe rendre Maîtres des Eaux. On écrivit d'abord là-
deflus au Roi de la Grande-Bretagne. La Réponfe en arriva la nuit du Mar-
di 1$. Décembre. On dépêcha là-defTus un Exprès au Réfident des Etats
Généraux à Bruxelles, & au Commandant du Sas. Le premier étoit char-
gé de faire des inftances afin qu'on démolit ce qui avoit été fait à Selfate.
Le fécond étoit chargé de tirer defius les Travailleurs, au cas qu'on ne dé-
molît pas ce Fort. On ne répondit au premier à Bruxelles qu'en termes amu-
fans, qu'il faloit examiner la chofe, Se entrer pour cela en Conférence. Enco-
re ftloit-il confulter là-deffus la Cour de Madrid. Cela fut caufe que le
Commandant du Sas tira quelques Coups de Canon fur les^ Ouvrages de
Selfate. Cependant , pour ne pas répandre du fang , il envoia avertir les
Travailleurs de prendre garde à eux , & de fe retirer. Un Exprès appor-
ta aux Etats Généraux cette Nouvelle , le Lundi ip. Décembre. D'abord
ils envoiérent ordre à une Compagnie de Canoniers de Bois -le -Duc de
marcher du côté du Sas 8c de l'Eclufe. On donna d'ailleurs ordre aux Of-
ficiers de l'Artillerie qui fe trouvoient à la Haïe , de fe tenir prêts à mar-
cher. Comme Don Bernardo de Quiros en écrivant à fon Secrétaire à la
Haïe fe plaignoit de ce qu'on avoit tiré du Sas pendant qu'on étoit un-
ie point d'entrer en Conférence pour examiner l'Affaire , les Etats Géné-
raux trouvèrent à propos de donner des ordres à leur Secrétaire à Paris. Ils
portoient de préfenter un Mémoire à la Cour de France , pour juftifier ce
qu'ils avoit fait faire par le Commandant du Sas. Ce Secrétaire s'en aquitta
de la manière fuivante.
„ T E foufïïgné Secrétaire des Seigneurs Etats Généraux des Provinces-U- Mémoi-
„ 1— < nies des Païs-Bas à la Cour de France , a ordre d'y reprefenter que rc du Sé-
„ Leurs Hautes Puiffances ont lieu de s'étonner de la conduite de l'Efpa- cJétv r%
„ gne, & de ce qu'elle paroit mal interpréter que le Commandant du Sas àlaCour
„ de Gand a tiré fur les nouveaux Ouvrages qu'lille y fait conflruire tout de Fran-
„ auprès , dans un tems qu'Elle auroit pu le prévenir en les faifant fufpen- ce • du
„ dre du moins jufques à ce que la Conférence offerte à ce fujet eut été 27-Dec.
5, tenue.
„ Que Leurs Hautes Puiflànces n'ont donné ces ordres qu'en vertu de
„ leur Droit, pnifque de nouveaux Ouvrages conflruits fous la portée du
„ Canon , 6c fous celle même du Moufquet de leur Fortereflé , doivent
„ être regardez comme des Batteries qu'on élevé pour les attaquer; ce qui
„ ne répugne pas feulement au LXXXV. Article du Traité de Muniterj
Sfff z „ mais
7H MEMOIRES, NEGOTIATIONS, TRAITEZ,
l701' « mais en général à 1* Raifon naturelle, qui Nous porte à nous défendre ,
r ,) Se à l'ulàge commun de tous les Souverains.
„ Que Leurs Hautes Puifîances , pour témoigner leur amour pour la Paix,
„ n'y ont procédé qu'avec la dernière modération.
„ Qu'Elles ont fait remontrer allez à tems au Gouvernement Efpagnol le
„ tort qu'on leur faifoit , avec in (tance de faire cefler lefdits Ouvrages °
„ Qu'Elles ont donné un terme plus long qu'il n'étoit requis, pour y ap-
„ porter les ordres nécefiaires , £c ont fait avertir qu'a la fin Elles feraient
5, obligées d'ufer de leur Droit.
„ Que nonobitant ces remontrances on a toujours continué ; ce qui a été
„ caufe que les ordres de Leurs- Hautes Puiffances donnez en tel cas ont été
„ exécutez ; mais avec toute la retenue poffible , puis qu'on a commencé
„ par avertir, & fini dès qu'on a ceffé les travaux.
„ Que Leurs Hautes Puiffances fe perfuadent que leur manière d'agir fera -
„ approuvée de tous ceux qui en jugeront fins prévention , puis qu'Elles
„ font reliées dans les bornes de la detënfe naturelle ; & qu'Elles ont offert
„ d'entrer en Conférence fur ce différent, comme anffi fur les difficultez qui
„ pourroient. être faites à l'égard des autres Forts, pourvu cependant qu'El-
„ les n'euffent pas été obligées de fouffir qu'on achevât un ouvrage , qui
„ leur fèroit fi préjudiciable.
„ Que Leurs Hautes Puifîances font encore portées d'y entrer, aïant don—
„ né pour cet effet les Inftruétions néceffaires à leur Miniltre à Bru-
„ xelles.
m Que Leurs Hautes Puifîances ne fâchant pas ce qu'on entend pour vou-
„ loir traiter fur l'inoblèrvation générale du Traité de Munfter , Se de celui
,, du Commerce qui a été fait enfuite , leur dit Minifire pourra néanmoins
„ écouter les propofitions qu'on lui en fera. Leurs Hautes Puifîances étant
„ affinées que lefdits Traitez ont été plus religieufement obfervez de leur cô-
„ té, que de celui de l'Efpagne.
„ Et fur ce qu'un Officier de Selfite aïant été envoie au Commandant du
Sas de Gand , pour demander au nom du Maréchal de Boufflers pourquoi
il avoit tiré, auroit fait connoître par manière d'avertiffement , qu'on a-
voit intention de bombarder cette Place & PEclufe , que Leurs Hautes
Puiffanccs devront regarder une telle Entreprife pour un Aéte publie
d'hoftilité, 8c une rupture manifefte , £c feront alors contraintes d'oppo-
fer la force à la force , fans qu'Elles croient qu'avec aucune juftice ou
fous aucun prétexte , on pourra leur en imputer la caufe par ce qui
vient d'être fait de leur- part.
r
Signé,
J. Vroesen.
„ A Verfailles le vj. Décembre 170 x.
Les Etats Généraux avoient fait mettre par leur Secrétaire dans le Mé-
moire
5>
5J
S5
3>
»
ET RESOLUTIONS D'E T A T. çriy
moire l'Article du Bombardement de l'Eclufe , parce qu'en ce cas -là, on 1701}
n'auroit pas pu les blâmer, s'ils avoient Fait lâcher les Eclufes , & par con- - ' *
fequent Caufer par les eaux plus de dommage au Pais voifin , qu'on n'en rece-
vrait par le Bombardement.
Le Secrétaire Vroefen écrivit du 30. Décembre aux Etats Généraux que
le Lundi précédent il s'étoit adrefle par ce Mémoire au Marquis de Torcr j
que ce Secrétaire d'Etat lui avoit dit là-deffus ces termes :
„ (~\Ue quoique l'Infoler.ce d'avoir ôfé tirer fur les Ouvrages d'un auflî Reponfe
„ V^ puiflànt Roi fût infuportable , Sa Majefté néanmoins vouloit bien, dllMar-
„ par la grande bonté , accorder les Conférences demandées à ce fujet , Se xoici,
„ cependant faire cefler les Travaux. Que la menace d'un Bombardement
„ avoit été faite fans la connoiflànce de Sa Majefté ; & que le Maréchal de
„ BoufHers l'avoit auflî defavoiiée, quoi qu'on l'eut bien méritée. Et que
„ pour ce qui regardoit l'amour de la Paix , dont les Etats Généraux Ce van-
„ toient, il étoit très perfuadé qu'ils n'attendoient que le fecours de l'Angle-
j, terre pour entrer en Guerre.
L e Secrétaire ajoutoit dans fa Lettre ce qui fuit.
" f~Y^'^ aV°'t Pn'S 'a ^erté de répondre au Marquis , que la Conferva- ReP1.1"
„ V£ tion de leur Droit , avec tant de Modération , ne pouvoit jamais sécrdui-
„ mériter le nom d'Infolence parmi les perfonnes defintéreflees. Que c'étoit re des
„ pour cela que Leurs Hautes Puiflànces fouhaitoient d'en traiter à l'amia- £• G»
„ ble, pour conferver la mutuelle bonne intelligence. Qu'on ne pouvoit
„ auflî point penfer que Sa Majefté voulût recompenfer leur Modération par
„ un Bombardement. Et enfin, que Leurs Hautes Puiflànces avoient don-
„ né trop de preuves pour leur penchant pour la Paix , pour le révoquer en
„ doute, ou pour croire que fans une néceflîté indifpenfable ils cherchent le
„ fecours de leurs Alliez pour leur Défenfe. ,
Le même Secrétaire concluoit fa Lettre en rapportant que des perfonnes -
confidérables lui avoient dit en confidence , que l'Entreprife d'élever le Fort de
Selfate, fi près de la Forterefle des Etats Généraux, ne devoit être attribuée
a perfonne qu'au Maréchal de BoufHers, qui l'avoit faite fans le fû du Roi &
du Miniitre d'Etat pour les Affaires Militaires.
Comme cette Affaire eft la dernière , qui arriva en l'an 1701.; on ne fau-
roitfe difpenfer de rapporter ici mot à mot la faillie de l'Auteur de l'Efprit
ou Nouvelles des Cours, Gueudeville. Ce mot, d'Infolence , que le Mar-
quis de Torci avoit prononcé, lui émût la bile, & là-deflus il mit dans Ces
JNouvclles du mois de Janvier 1702 ces propres mots :
" (^ET.Sécré,tairf d'Etat ne fêroit-il point étranger dans fa propre Lan<n,e? •
" n^t EntendJ laCorcf d^s Tfr,mes ? Du moins ne fait-il P™ trop bien fon
„ Didfaonaire Miniftenal. Qu'il fe donne la peine de le confulter, il y trou-
Sfff ? » vera,
716* MEMOIRES, NEGOTIATÏONS, TRAITEZ, &c.
Ï7QI. „ vcra, j'en fuis fur, que ce gros mot àHInfolent ne s'applique jamais à des
Souverains. Ce Seigneur , qui palfe d'ailleurs pour avoir beaucoup d'ef-
prit, de politeffe, Se même de bonté , refpecte-t-il fi peu ce raïon de la
Puiflance Divine, qui réfide dans ceux qui tiennent le timon de l'Etat? Le
terme Ùlnjolent ell un de ces mots, qui ne fauroient perdre leur fignifica-
tion. S'il ne convient pas à la Perlbnne défignée , il relie à celui qui le
5»
ï)
„ donne, 6c ce terme lui convient à proportion qu'il s'en fert mal.
L e Confeiller-Penfionnaire pria cependant l'Ambafiadeur de Suéde d'écri-
re en termes forts au Roi fon Maître touchant les Procédures de la France,
tant à l'égard de l'Ele&orat de Cologne Se de Liège, que par rapport au Fore
de Selfate. Il ajouta de porter ce Roi-là d'en témoigner fon Reffèntiment,
puis que ces Démarches étoient autant de Brèches au Traité de Ryswick ,
dont il avoit été le Médiateur.
Fin de l'Année M D C C I.
TABLE
TA B LE
DES
P I E CE S
Contenues dans ce
I. VOLUME.
ANNÉES MDCXC. — M D C X C I X.
TJArangue du Comte de la Tour , Ambaffadeur de Savoye , pour
noiffance de Guillaume III. Roi d' 'Angleterre , le ii.
la Recon-
Novembre
1690. Pag. 2.
Mémoire & Déduclion préfentez par le Comte d'Avaux à la Cour de Suéde , pour
lui offrir la Médiation de la Paix. 3, 4, &c.
I. Traité de Partage de la Monarchie d'E/pagne , conclu entre le Roi d'Angle-
terre, le Roi de France , & les Etats Généraux, à la Haïe "le 11. Oclobre
1698. 12
Mémoire pré fente aux Lords Régens d'Angleterre contre le Traité dé Partage,
par le Marquis de Canales en 1 699. 1 1
Mémoire pré fente par le même Marquis fur l'Invafion de- D arien , /s 5. Mai
1699. 2.2
Mémoire pré fente aux Etats Généraux contre le Traité de Partage , par Dont
Bernardo de Quiros Ambaffadeur d'Efpagne, en 1699. 24
Réfolution des Etais Généraux du la. Oclobre 1699. fur une Lettre du Roi
d'E/pagne. 16
Réponjè de Dom Bernardo de Quiros à cette Réfolution. zS
Convention entre la Suéde J* Angleterre ,& la Hollande, du 14. Mai 169%. 32,
Lettre de Remerciment des Etats Généraux au Roi de Suéde , touchant fa Mé-
diation au Traité de Rysivick, du 13. Décembre 1697. 34
Lettre des Etats Généraux au Roi de Suéde en faveur des François Réfugiez , du
6. Novembre 1698. 35
ANNEE MDCC.
'JfRaitê entre la Suéde, l'Angleterre , & les Etats Généraux, du i}. Jan-
vier. 3 6
Relation de ce qui arriva à Mr. de Ferioles Ambaffadeur de France à la Porte le
y. Janvier, 41
Dif-
T A B L E
Difcours àe.VJmbaffadeur de Maroc au Roi de France, en Mari. 47
Extrait d'une Lettre du Bey de l'unis aux Etats Généraux , du 3. Février. 48
Commiffion du Duc de Holftein à P Amiral d' Angle terrre , du zz. Juin. j-o
Projet d'un Rochelois pour le Bombardement de la Flotte Danoife. j"i
Traité de Paix entre le Roi de Dannemarck & le Duc de Holftein , à Traven-
âal, le 18. Août. . fz
Lettres Recrédentiales du Dus de Holflein au Miniflre d'Angleterre , du 27.
Sept. <îo
Lettres Requifitoriales du Duc de Holflein au Roi d'Angleterre , pour la Garantie
du Traité de Travendal, du 27. Septembre. 61
Lettres Requifitoriaks du même Duc au Roi de France ,pour la même Garantie ,
du zj. Septembre. 6z
Manifefie du Comte de Flemming entrant en Livonie, du 20. Février. 64
Lettre du Comte de Flemming au Comte de Halberg, du 2,6. Février. 66
Réponfe du Comte de Halberg au Comte de Flemming. 66
Lettre du Roi de Suéde au Roi de France , fur l'Jnfraclion de la Paix par le Roi
de Pologne, du 14. Mars. 6j
Manifcfte du Roi de Pologne touchant fon Irruption en Livonie. 69
Mémoire de V Ambajfadeur de Suéde contre ce Manifefte, du p. Juillet. 88
Décret des Sénateurs Polonois contre le Secours propofé pour le Dannemark. po
Raifons pour lefquelles l' Electeur de Brandebourg refufe Paffage aux Saxons. 9 1
Traité pour la Reftitution d'Elbing par l'Electeur de Brandebourg. 92.
Difcours de l'Evêque de PFarmie aux Habit ans d?Elbing, du 3. Février. pz
Conventions faites avec la Fille d'Elbing. P4
Lettres Rêver [aies de l'Electeur de Brandebourg à la République de Pologne. 9 j
Mémoire fecret de la France au Roi d'Ej pagne .' 95
II. Traité de Partage de la Monarchie d'Efpagne, conclu entre le Roi de Fran-
ce , le Roi d'Angleterre , & les Etats Généraux , à Londres & à la Haïe le
3. £5? 2f. Mars. P7
Difcours de Air. de Bonrepaux aux Etats Généraux dans fon Audience de Con-
gé. 108
Lettre de Rappel de Mr. de Bonrepaux. 109
Invitation des Etats Généraux au Roi de Dannemark d'accéder au Traité de Par-
tage, du ^.Juillet, iop
Notification du Traité de Partage faite au Roi d'Efpagne par le Roi d'Angleter-
re , du 9. Septembre. 110
Repréfentations des Etats Généraux pour empêcher les Troupes Impériales d'entrer
en Italie , du %6. Sept. 1 1 2
Réponfe de l' Empereur par rapport au Traité de Partage, du 18. Août. 113
Prétendu Traité entre les Etats Généraux & l'Electeur de Bavière , du 28.
Août. 1 1 ?
Harangue de Dom Bernardo deQulros aux Etats Généraux dans fa première Au-
dience, du 8. Novembre. 122
Réponfe à cette Harangue. 1 zz
Mémoire de V Ambaffadeur de Mofcovie, touchant les Plaintes du Czar contre la
Suéde, du 2. Septembre. 124
Ecrit
DES PIECES.
Ecrit contenant les Griefs du Czar contre la Suéde. i if
Réfolution des Etats Généraux d'offrir leur Médiation au Roi de Suéde , &f au
Czar. 118
Lettre des Etats Généraux au Roi de Suéde , du 3. Sept, 128
Mémoire de P Ambaffadeur de Suéde aux Etats Généraux , du 10. Sept. 149
Lettre du Roi cP Angleterre au Czar , pour lui offrir fa Médiation entre lui &
le Roi de Suéde, du zt,. Oclobre. ifi
Réponfe du Roi de Suéde aux Etats Généraux, du f. Sept. îf f
Mémoire de P> Ambaffadeur de Suéde aux Etats Généraux, du 28. Sept. ij6
Mémoires du Comte de Guifcard à la Chancellerie de Suéde, du iz. Septembre, &
du 6. Octobre. 1 f 8
Mémoire du Minijlre de Pologne aux Etats Généraux, du 28. Sept. 160
Lettre des Etats Généraux au Roi de Pologne, du 29. Septembre. 160
Lettre du Czar au Roi de Pologne. 1 Si
Représentation du Minijlre de France à la Diète de Ratisbonne , du 14. Scptem-
. bre. 163
Mémoire du Minïflre de Pologne aux Etats Généraux, du 4. Oclobre. 164
Mémoire de P Ambaffadeur de Mofcovie aux Etats Généraux , du 6. Oclobre. 16 f
Manifefie du Czar touchant [es Griefs contre le Roi de Suéde , du 18. Septem-
bre. 1 68
Mémoire de Y Amhajfadeur de Suéde aux Etats Généraux , du 8. Oclobre. 169
Mémoire de P Ambaffadeur de Mofcovie aux Etats Généraux ,du 13. Oclobre. 170
Réponfe des Etats Généraux à ce Mémoire, du if. Oclobre. 171 & fuiv.
Lettre du Comte de Halberg, Gouverneur de Livonie, fur les Plaintes des Mof-
covites, du 8. Mars. . %j^
Mémoire de V Ambaffadeur de Suéde aux Etats Généraux, du 1 8. Oclobre. 182
litre & Précis de la Réponfe des Suédois au Manifejle du Czar. 183
Mémoire de P Ambaffadeur de Suéde aux Etats Généraux , touchant les Préroga-
tives des Ambaffadr'ues , du 30. Novembre, 1S4
Mémoire de P Ambaffadeur d 'Efpagne aux Etats Généraux, touchant la mort du
Roi Charles IL, &? P Avènement du Duc d'Anjou à la Couronne, du
24. Novembre. 188
Tefiament de Charles II. Roi cl Efpagne , avec fon Codicille. 191, 210
Lettre du Roi de France à PE/ccleur de Brandebourg fur P Avènement du Duc
d'Anjou à la Couronne d" Efpagne , du 21. Novembre. 218
Lettre de P Empereur aux Milanais, du 22. Novembre. 219
Mémoire de P Ambafjadeur de Hollande au Roi de France fur la Traité de Par-
tage 13 k Teflament de Charles II., du 25-. Novembre. 220
Mémoire du Comte de Briord aux Etats Généraux, du 4. Décembre. 221
Lettre du Roi de France aux Etats Généraux, du 29. Novembre. 221
Réponfe de la Cour delrance au Mémoire de P Amba (fadeur de Hollande. 221 &c.
Lettre de la Reine Douairière &? de la Régence d' Efpagne aux Etats Généraux
du 22. Novembre. 227
Deux Ré [dations des Etats Généraux , du 8. Décembre. 228
Quatre Lettres de la Junte ou Régence d' Efpagne au Roi de France, avec une
Réponfe de ce Prince. 229 & fuiv.
Tom. I. Tttt Pro-
TABLE
Profefiations des Ducs d'Orléans &? de Chartres contre Je Tejîament de Char-
les IL, du ■premier Décembre. 2,34
Difcours du Comte de Briord aux Etats Généraux, du 31. Décembre. 239
Réponfe à ce Difcours. 240
Lettre du Roi d'Efpagne aux Etats Généraux, du 18. Décembre. 241
Mémoire de V Ambajfadeur d'Efpagne aux Etats Généraux. 241
Lettre de Mr. N.... d'Anvers à Mr. P.... en Hollande, du 29. Décembre, z^z
Réflexion fur cette Lettre. 2f0
ANNEE MDCCI.
ACfE pour rendre le Parlement d'Angleterre triennal. z<z
Proclamation du Roi d' Angleterre pour la Caffation du Parlement, &? la Con-
vocation d'un nouveau. 2^4
Relation de la Bataille gagnée à Narva par le Roi de Suéde fur les Mofcovi-
tes. 2ff
Déclaration du Roi de Suéde après cette Vicloire. 2j"8
Mémoire de V 'Ambajfadeur de Suéde aux Etats Généraux pour leur notifier cette
Vicloire, du premier Janvier. 25*9
Traduction Françoife de Mémoire. 2fp
Mémoire de V Ambaffadeur de Suéde , pour demander du Secours aux Etats Gé-
néraux, du z. Janvier y z6o
Traduclion Françoife de ce Mémoire. 261
Mémoire de Y Ambaffadeur de Mofcovie aux Etats Généraux touchant VABion de
Narva, du z$. Janvier. z6$
Lettre ou Réponfe du Czar aux Etats Généraux. 264
Mémoire de r Ambajfadeur de Suéde aux Etat s Généraux, du 27. Janvier. z66
Mémoire de V Ambaffadeur de Mofcovie aux Etats Généraux, du 9. Février. %Gj
Traduclion Françoife de ce Mémoire, 270
Remarques fur le Mémoire de r Ambajfadeur de Mofcovie , par Gueudeville. 275
Réponfe à l'Ecrit publié par le Général Flemming lorfqu'il envahit la Livo-
nie. 286
Réponfe au Manifefie du Roi de Pologne rapporté ci-deffus pag. 69. 207
Mémoire de l'Envoie de l'Empereur au Gouverneur du Malinez. 26 f
Réponfe du Gouverneur du Milanez à ce Mémoire. 266
Autre Réponfe à ce Mémoire par le Chancelier du Milanez. 266
Protejlations du Comte de Harach , Ambaffadeur de F Empereur à la Cour d'Efpa-
gne, contre le Tejîament du Roi Charles II. \6j
Réfolution des Etats Généraux, du iy. Janvier. 269
Réfolution des Etats Généraux, du 19. Janvier. 371
Mémoire de P 'Ambajfadeur d'Efpagne aux Etats Généraux, du 7. Février. 374
Réponfe des Etats Généraux au Mémoire précédent, du z. Février. yj6
Proclamation du Roi de Pruffé, le ij. Janvier. 280
Lettre de l'Empereur au Roi de Pruffé , du zz. Février. 382
P rote fiât ion du Pape contre la Roïauté de Pruffé , du 9. Avril.
383
Pro-
DES PIEGES.
Pr déflation d'un Prince de Radziivill contre cette Roiauté , du p. Mars. 38 3
Compliment de V Introducteur des Ambaffadeur s en France au Connétable de Caf-
tille. 385-
Di/cours du Connétable de Caftille au Roi de France , le 14. Mars. 386
Réponje du Roi de France au Connétable de Caftille. 386
Audience de Congé du Connétable de Caftille, le 24. Mars. 387
Réponfe du Roi de France à cet Ambaffadeur. 387
Lettres Patentes du Roi de France , pour conferver au Roi d'Efpagne fes Droits
à la Couronne de France. 388
Préface de la Déclaration du Roi de France pour VEtabliffement de la Capitation
dans fes Etats, le iz. Mars. 39a
Mémoire du Comte d'Avaux aux Etats Généraux , du 13. Février. 391
Second Mémoire du Comte d'Avaux aux Etats Généraux , du 16. Février. 392
Réponfe des Etats Généraux aux deux précedens Mémoires , du 2.1. Février. 294
Réfolution des Etats Généraux touchant la Reconnoiffance du Roi d'Efpagne, du
xz. Février. 39?
Lettre du Roi de France aux Etats Généraux, du 3. Mars. 396
Mémoire du Comte d'Avaux aux Etats Généraux, du f. Mars. 396
Réfolution des Etats Généraux, du 9. Mars. 397
Mémoire de V Ambaffadeur d'Efpagne aux Etats Généraux , du p. Mars. 395
Réponfe à ce Mémoire, du p. Mars. 399
Harangue du Roi d'Angleterre à fon Parlement, du ta. Février. 400
Réponfe du Roi d'Angleterre aux Communes. 40 z
Mémoire des Etats Généraux au Roi d' Angleterre , du z. Mars. 402
Demandes propofées au Comte d'Avaux par les Etats Généraux , le 22. Mars. 403
Demandes propofées au Comte d'Avaux par l'Angleterre. 405
Réfolution des Etats Généraux, du iz. Mars. 409
Lettre du Pape au Roi d'Efpagne, du 6. Février. ■ 41 z
Extrait de la Lettre de Pape à l'Empereur, du 7. Mars. 41 3
Réfolution du Sénat de Venife , du if. Mars. 414
Réponfe du Sénat de Venife à V Ambaffadeur d'Efpagne, 414
Traité d' Alliance entre la France & la Caftille, & le Portugal, 415"
Lettre du Roi de Portugal aux Etats Généraux, du 11. Mars. 415
Lettre du Roi de Portugal au Roi de Dannemarck, du premier Janvier. 417
Mémoire de V Envoie de Dannemarck aux Etats Généraux, 418
Lettre du Roi de France à P Electeur de Bavière, du 9. Mars. 420
Lettre du Roi d'Efpagne à la Reine Douairière , pour l'éloigner de Madrid. 420
Diverfes Pièces & Fragmens fur les Affaires pref entes de l'Empire , fç avoir
Fragment d'un Député. 421
Harangue du Comte de Leweftein. 42 z
FIL Dialogues fur l'Etat préfent de F 'Allemagne. 450
Manu fer it trouvé dans la Bibliothèque de ***** 431
Relation de la Négociation du Comte de Schlick à Bonn, du 10. Avril. 437
Mémoire de V Ambaffadeur de France aux Cantons. 440
Mémoire de l' Ambaffadeur de l'Empereur aux Cantons. 441
Mémoire de l' Ambaffadeur d'Efpagne aux Cantons. 44Z
Tttt z Pro~
TABLE
Propofitiotts faites aux Cantons de la part de l'Empereur. 44.4,
Mémoire des Anglais & des Hollandais fur le trouble apporté à leur Commerce fur
les Frontières de Suifje par les Commis Impériaux. 446
Mémoire Latin du Sr. Muys van Holy fur le même fujet. 448
Lettre du Prince de faudemont au Duc de Mantoue , du premier Avril. 45* 1
Lettre du Comte de Tefjé au Duc de Mantoue , du f. Avril. 472
Mefjage du Roi d' Angleterre aux Communes. 45y
Ré joint ion des Etats Généraux , du 4. Avril. 4j-j*
Autre Réfolution du même jour. 4f6
Traité d'Alliance &c. entre Charles II. Roi d'Angleterre , &? les Provinces-
Unies* en 1678. 4^5
Traité d'Alliance, entre le Roi d'Angleterre Guillaume III., & les Provin-
ces-Unies, en 1689. 460
Réfolution & Fôte de la Chambre Baffe du Parlement d'Angleterre. 464
Mémoire de V Ambaffadeur d' Angleterre aux Etati Généraux , du 21. Avril. 465"
Réfolution des Etats Généraux , du 23. Avril. 46 f
Lettre du Roi d'Angleterre aux Etats Généraux , du 25". Avril. 4.66
Lettre du Comte de Melfort au Comte de Pertb , Gouverneur du Prince de Gal-
les, du 18. Février. ^6j
Réfolution des Etats Généraux, du 2. Mai. 473
Mémoire du Comte d'Avaux aux Etats Généraux, du 10. Mai. 474
Lettre des Etats Généraux au Roi de la Grande-Bretagne , du 15. Mai. 47^
Réponfe du Roi de la Grande-Bretagne aux Etats Généraux, du 27. Mai. 477
Mémoire de i Ambafjadeur de l'Empereur au Roi d'Angleterre ,du 22. Mai. 478
Réfolution des Etats Généraux , du 6. Juin. 479
Réfolution des Etats Généraux , du 7. Jui». 480
Réfolution des Etats Généraux , du 16. Juin. 481
Réfolution des Etats Généraux , du 20. Juin. 482
Raport fait aux Etats Généraux , du 11 . Juin. 48 2
Mémoire du Comte d'Avaux aux Etats Généraux, du z6. y aille f. 483
Lettre de Rappel du Comte d'Avaux. 487
Réfolution des Etats Généraux, du premier Août. 487
Mémoire du Comte d'Avaux aux Etats Généraux, du \\. Août, 496
Réponfe des Etats Généraux à ce Mémoire. 497
Lettres Ré cré denti aie s des Etats Généraux au Comte d'Avaux. 497
Atle pour étendre la Succeffion de la Couronne d'Angleterre , & pour mieux affu-
rer les Droits & les Libériez des Sujets , du 1 o. Février. 499
Proteflation de la Ducbeffe de Savoie contre l' Atle précédent. fo$
Requête de la Province de Kent au Parlement. 504
Lettre à Flarlei, Orateur des Communes. 50^
Mémoire de divers Gentilshommes &V. au Parlement d' Angleterre. fc 6
Déclaration de la Province de Warvoick. f 1 1
Remerciment du Peuple d'Angleterre aux Seigneurs Anglois. fi 2
Difcours du Roi d' Angleterre aux Etats Généraux affemblcz. f 1 3
Réponfe des Etats Généraux au Roi d'Angleterre. j- 1 4,
Traité d'Alliance entre le Dannemark Kçj les Etals Généraux , le 10. Janv. 5-17
DES PIECES.
Lettre du Czar au Roi d' Angleterre , du 12. Mai. 5-23
Mémoire de l' AmbaJJadeur de Suéde aux Etats Généraux , du 1 2. Juillet. J-Z4
Traduction Françofe de ce Mémoire. f 27
Réfolution des Etats Généraux , du if. Juillet, en Réponfe au Czar. 530
Mémoire de V AmbafJ'adeur de Mofcovie, du 16. Août. 5-32
Lettre du Czar aux Etats Généraux , du ip. Août. 5-55
Mémoire de PAmbaJfadeur de Mofcovie aux Etats Généraux , du ^..OBobre. f 34
Monitoire de r Empereur contre le Duc de Mantoue, du 20. Mai. 7-36
Ecrit contre ce Monitoire par les Généraux de France & d'Efpagne, du 22. Juil-
let. S $7
Lettre de PEleileur de Cologne aux Electeurs , de Mayence , de Trêves , & de
Bavière. f 38
Traduclion Françoife de cette Lettre. j- 39
Traduction Françoife de la Lettre d'un Gentilhomme Italien fur la prétendue Prof-
cription du Duc de Mantoue. 530 &c.
Décret du Roi d'Efpagne en faveur de Ducs £s? Pairs de France. f4<5
Extrait de l'Alliance offenfive 13 défenfive entre le Roi d'Efpagne &f le Roi de
Portugal, en Juin. f-47
Manifejle de la Maifon d'Autriche, qui démontré clairement fes Droits à la Cou-
ronne d^Efpagne. 5-49
Contracl de Mariage de Louis XIII Roi de France 13 ^'Anne d'Au-
triche. f54
Contrat! de Mariage de Louïs XIV Roi de France &? de Marie-
Therese d'Autriche. fô"r
Renonciation de Marie-Therese à la Succejjion d'Efpagne. y68
Autre Acte de Renonciation de la même Princeffe. yj$
Articles de la Paix des Pirennées touchant la Renonciation de Marie-
Therese à la Succejjion d'Efpagne. f S 1
Confentement du Roi de France à la Renonciation de la Reine fon Epoufe
à la Succejjion d'Efpagne. 5- 1 2
Réflexions fur les Mouvemens de l'Empereur au fujet de la Monarchie d'Efpagne ,
par D. Bernardo de Quiros. 6fo
Traité d'' Alliance entre l'Empereur, le Roi d'Angleterre, & les Etats Généraux,
du 7. Septembre. 620
Invitation de l' Empereur au Roi de Suéde d'accéder à la Triple Alliance. 629
Mémoire du Mini (Ire Impérial au Roi de Suéde en 1 6pj. , touchant la Garantie
du Traité de Ryswick. 630
Demandes de la Noblejfe de Lithuanie. 634
Harangue d'un Député de la Grande Pologne au Roi. . 63 f
Lettre du Cardinal Primat de Pologne au Roi de Suéde, du 25. Juillet. 638
Tnadublion Françoife de cette Lettre. 628
Réponfe du Roi de Suéde au Prince Sapieha. 6$p
Réponfe du Roi de Suéde au Cardinal Primat de Pologne, du 30. Juillet. 6-39
Lettre du Roi de PolognWaux Etats Généraux 13 au Roi d'Angleterre, du 9.
Sept. 641
Remarques de Y Ambajfadeur de Suéde fur cette Lettre. 64g
Tttt 3 Bref
TABLE DES PIECES.
Bref fecret du Pape au Roi de Pologne , touchant l'Education &? la Religion de
/'on Fils, du 30. Juillet. . ^p
Réponfe du Cardinal Primat de Pologne au Roi de Suéde, du 2p. Sept. 660
Décret de la Diète de Ratisbonne contre le Duc de Savoie, du \x. Août. 66 2
Monitoire de la Diète de Ratisbonne contre le Duc de Savoie, du 12. Août. 66 1
Manifejle du Chapitre de Cologne, contre le Procédé de l'Electeur, du 1 ^.Sept. 66 f
Lettre de ce Chapitre à F Electeur , du 16. Septembre. 669
Manifejle de l'Electeur de Cologne, du if. Octobre. 671
Mémoire du Réfident de Y Electeur de Cologne aux Etats Généraux , du 24. Sep-
tembre. 6jj.
Second Mémoire de ce Réfident, du il. Oclobre. $yr-
Ordre de l'Evêque de Liège de livrer cette Ville aux François , du 10. Novem-
bre. 677
Lettre de VEvêque de Liège au Marquis de Mont-Revel , du 24. Novembre. 677
Réponfe de l'Empereur aux Etats de Liège, du 17. Décembre. 6j$
Réponfe de l'Evêque de Liège au Chapitre de cette Fille, du 13. Dec. 678
Billet de cet Evêque au même Chapitre. 6j$>
Réponfe des Parens du Baron du Mean, Grand Doien de Liège. 679
Relation de V Enlèvement du Grand Doïen de Liège. 680
Raifons des François pour fe faifir des Places de l'Electorat de Cologne. 682
Mémoires de la Cour de France , touchant la Reconnoijdnce du Prince de Galles
pour Roi d'Angleterre. 6p0
Billet de Milord Manchejler à Mr. l'or ci. $9X
Réponfe de Mr. de Torci à ce Lord. <5pj
Lettre du Prince de Vaudemmt au Prince Eugène , pour convenir d'un Car-'
tel. 694
Réponfe du Prince Eugène. 694
Préface de l'Etat de Guerre des Hollandois pour l'Année 1702. 696
Réfolution des Etats Généraux, du 4. Novembre. 6ç>j
Proclamation du Roi d' Angleterre pour la Caffation du Parlement, &f la Con-
vocation d'un nouveau. 701
Lettre du Cardinal Primat aux Diétines de Pologne, du premier Sept. 70 f
Inftruction de la Grande Pologne à fes Députez à la Diète. 707
Ordres de V Electeur de Cologne de recevoir dans fes Villes les Troupes de France
&? d'Efpagne. 7° 8, 709
Serment que faifoient ces Troupes. . yop
Traité pour des Troupes entre le Roi d'Angleterre 13 les Etats Généraux , & le
Roi de Pruffe, du 30. Décembre. jX0
Mémoire du Secrétaire des Etats Généraux à la Cour de France , du 27. Décem-
bre. - 715
Réponfe du Marquis de Torci h ce Mémoire. j^
Réplique du Secrétaire des Etats Généraux. 71 f
Réflexions de Gueudeville fur le Terme //'Infolence du Marquis de Torci. 71 f
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