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D'ARCHÉOLOGIE
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ET BU MUSÉE HISTORIQUE LORRAIN.
TOME XLI[ (8' SÉHIB, XX" voluiie).
RBKB WIEHER, LIBRAIRE - ÉDITEUR
RUB DBS DOMINICAINS, 53.
NANCY. — IMIMUMKrUE G. CRÉIMX-LEBLO.ND. PASSAGE DU CASINO.
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a l'Egli«a da RoviEny.
"î^t^t MONOGRAPHIE
L'ÉGLISE DE REVIGNY
PAU
M. l'abbé A. BOUILLET
EST au xir
siècle que
remonte la
plus an-
c i n n e
mention de
RevignyC ),
Vers le mi-
lieu de ce
siècle, cette
localilé ap-
partenait à
l'abbaye de
St - Denis,
près de Pai'is. L'abbé la céda alors « avec Laimont el
(I) Uevigny-auic-Vaekts, chef-lieu de canton du départe-
(Oeol de la Mente, arroadiBsement de Çar-le-Duc.
^ 10 -
Neuville-sur-Orne, à Frédéric l*f, comte de Bar, en
échange d'autres villages situés aux environs de St-
Denis, et qui provenaient de la dot de Béatrix, son
épouse (1) ».
La paroisse de Revigny faisait partie, avant la Révo-
lution, du Diocèse de Toul (2), deVofRcialité de Bar-le-
Duc et du Doyenné de Robert-Espagne. Elle a été^
depuis le concordat, réunie* au Diocèse de Verdun,
auquel elle appartient aujourd'hui comme chef-lieu
d'un Doyenné.
Avant d789, le patronage de la cure de Revigny
appartenait aux chanoines et au chapitre de Ligny, qui
« D*aprè8 le Cte Hipp. de Widranges, dit M. Ronnabelle,
ce surnom de : aux vaches^ lui viendrait de la fécondité de
son sol et de ses gras pâturages, ainsi que de la grande
quantité de vaches et de génisses qu*on y élève {Statisti-
que des communes du canton de Revigny ^ in-iî, p, XCI)»
— D'un autre côté, Pierson et Loiseau (Géographie de la
Meuse^ 1862, in-8°, p. 112), disent que ce bourg a portait
encore le nom de Revigny-aux-Vaches, par corruption de
son nom primitif, Revigny* aux- Vages (vages^ dans Tidiome
du pays, signifiait landes^ terres incultes) ».
Revigny porta successivement les ^noms de Ruviene (Bulle
de Pascal II, 1106), Ruvignei (Cartulaire de Jeand'heurs,
1141), Revigney (Chambre des Comptes de Bar, 1321),
Ruvigny (id. 1311), Revigneyum (Reg. Tullens, 1402).
Revigneyum (Stemmat. Loihar.t 1580), Revigny ' aux- Vaches
(Carlo des Etats, 1700), Reviniacus (pouillés de 1711 et
1748), Ruvtniacus (Dom Calmet), Ruvigni-aux -Vaches (id.
1756) .
(1) Vie de St-Gérard, par le P. Benoit, p. 270.
(2) Le diocèse de Toul {Tullum Leucorum)^ érigé au iv«
siècle, était suffragant de Trêves. L*évêque de Toul était,
en 1780, comte de Toul, Doyen des Evoques de la Province
de Trêves, et conseiller-né au Parlement de Nancy. {La
France ecclésiastique pour l'année 1780, p. 249).
recevaient trois des onze parts que Ton faisait de la
dîme. Les autres décimateurs étaient le curé du Heu, le
chapitre de St-Pierre de Bar (1), le prieuré de Dieu-
en-souvienne (2), l'hôpital de«Revigny (3), la chapelle
Sainl-Honoré de Neuville, et MM. de Burges et d'A-
lençon. La princesse de l'Islebonne, à qui appartenait,
en toute haute, moyenne et basse justice, la Seigneu*
rerie de Revigny, avait aussi une légère part delà menue
dîme (4).
(l) Ce chapitre avait pour doyen le premier chanoiue du
chapitre de Saint-Maze de Bar, fondé en 957 par Frédé-
ric I*% duc de Bar, et sa femme Béatrix de France, sœur de
Hugues Capet. (La France ecclés, pour HBO, p. 250-25L)
(8) flc Dieu^en-Souvienne ou Dieu-en^Souveigne est un
prieuré de Tordre du Val-des-Ecoliers, bâti entre les bois,
dans une solitude, à une demi-lieue de Louppy-le-Château,
trois lieues de Bar-lo-Duc. Ce prieuré est situé dans le ban
et la communauté do Louppy,«bailliage do Bar.
<E Nous ignorons Tépoquo de la fondation de ce prieuré. On
croit que les seigneurs de Louppy en sont les fondateurs ;
ils ont fait en différons tems beaucoup de bien à ce monas-
tère. En 1342, Raoul, seigneur de Louppy, fonda en ce
prieuré trois messes par semaine.
Qt Le même Raoul de Louppy donna encore au prieuré de
Dieu-en-Souveigne trente livres de terre sur les rentes de
Revigny, à charge que le Prieur ferait célébrer tous les
jours une messe pour lui à Tautel de sainte Catherine, qu'il
avait fondée ; de faire son obit le jour de S. Jacques et S.
Philippe, etc. Ces lettres sont du 28 avril 1381 ». (Dom
Calmet, Notice de Lorraine, Tome I, Supplément, col.
124-125.)
(3) L'hôpital (ou Maison-Dieu) de Revigny, fondé en 1334
par Jacques Massart, chanoine du chnpitre de Saint-Maxe
de Bar-le-Duc, fut supprimé en 1790. Il a été l'objet d'une
intéressante Notice historique publiée en 1865 par M. J.-F.
Gaudé (Nancy, libr. Lepage.)
(4) Archives de Meurthe-et-Moselle. — Etat du temporel des
/
- 12 —
«
La nef de Téglise devait être entretenue sur les revenus
de la fabrique. A défaut de ces revenus, les habitants
étaient « obligés de contribuer subsidiairement pour
la décoration de l'église «t pour fournir ce qui était
nécessaire. » (i) '^
Quant au chœur, le chapitre de Ligny devait l'entre-
tenir conjointement avec les autres décimateurs (2). La
fabrique devait même y contribuer pour sa part. La
collégiale de St-Maxe de Bar était coUatrice des cha-
pelles et avait la charge de leur entretien et de leur
construction.
D'après l'Etat du temporel des paroisses, dressé en
1707, et qui nous a fourni ces renseignements, le bourg
de Revigny, autrefois fort peuplé, avait perdu de son
importance « depuis. les guerres ». Ces mots font sans
doute allusion aux dommages causés vers 1640, alors
que les Suédois, pendant la Guerre de Trente alis,
ravagèrent le pays et incendièrent l'église.
« Les Suédois, qui, depuis 1636, ravageaient la
Lorraine, pillant tout ce qu'ils trouvaient^ vioUant
femmes et filles, bvuUant esglises, metant a grande
géhenne hommes prisonniers, fesant mourir gens
paroisses : Diocèse de Toul,* doyônnô de Robertespagnc,
(1702-1713). B. 291, f°> 47-51.
(1) Id.
(2) Le chapitre de Ligny nommait à la Cure de Rovigny,
depuis sans doute que c Hamon, archidiacre de Toul, avait,
à la prière d'Agnès, comtesse de Bar, donné à perpétuité,
aux chanoines de Ligny, afin de former leurs prébendes,
réglise de Revignei et la chappelle de Roncourt, et le droit
de patronage d'icelles églises, sauf les droits de l'Evêque et
de l'Archidiacre. » (Biblioth. de Bar-le-Duc. — Fonda
Servais,)
- 18 —
desgllses par tourments inoySj les Suédois, dis-je,
dévastaient les environs. Le jour du vendredi-saint,
21 avril 1639, des habitants d'Huppémont (1) qui
étaient en fuite, annoncèrent à la population de Revi-
gny que des bandes de Cravactes venaient de livrer
aux flammes leur village et celui de Vroil. Apprenant
tels cours et ravages, les pauvres gens se retirèrent
au proffond des bois, aultres se retirèrent à Bar, de
sorte que le jour de Pâques, fesglise estait désert (2).
» Les Suédois ne tardèrent pas à arriver ; ils esca-
ladèrent facilement des murailles qui n'étaient pas
défendues (3), et pénétrèrent dans le bourg, qu'ils
livrèrent aux flammes, après y avoir commis les plus
horribles cruautés (4).
Il faut lire les historiens du temps pour se faire une
idée des ravages que commirent les Suédois dans un
pays déjà éprouvé par la famine et la peste.
A Revigny, en particulier, les envahisseurs mirent
le feu à réglise, dont le clocher et \ei voûtes du chœur
furent détruits. Nous dirons plus loin par quelle suite
(1) c Ce village, situé au bas de la côte du même nom que
Ton voit à deux kilomètres et demi à peu près au Sud de
Nettancourt, et dont on aperçoit des vestiges sur le terrain,
fut rasé complètement par les Suédois, et, depuis cette
époque, il n*a pas été rebâti ».
(2) Notes trouvées sur la couverture on parchemin d'un
livre ayant appartenu à Pierre Fleury, curé de Revigny de
1630 à 1670.
(3) D'ailleurs elles avaient été démantelées en 1636 par
ordre de Richelieu {Hist. de Lorraine, par Digot, tom. V,
p. 267. — Hist, des duchés de Lorraine et de Bar, par E.
A. Bégin, tome II, p. 194 et 195.)»
(4) Notice historique sur VHôpital de Revigny^ par M. J.-
F. Gaudé, p. 11-12.
- 14 ^
de circonstances ce désastre ne fut entièrement réparé
que de nos jours.
L^histoire de notre église s'interrompt alors, faute de
documents, jusqu'à l'époque de là Révolution française.
Alors, le 23 janvier 1791, en présence du maire et des
offîciers municipaux (1), le curé, « François Husson,
en exécution du décret de l'Assemblée nationale du 27
novembre, sanctionné par le Roy le 26 décembre sui-
vant, a prononcé à haute et intelligible voix et la
main levée, le serment solennel de veiller avec soin
sur les fidèles de la paroisse confiée à ses soins,
d'être fidèle à la nation, à la loy et au roy, et de main-
tenir de tout son pouvoir la constitution décrétée par
l'Assemblée nationale et acceptée par le Roy (2) ».
Le 14 Juillet suivant, il y eut fête à l'église, où, sur
la demande du Maire, furent célébrées la grande messe
et les vêpres, auxquels assistèrent tous les habitants.
Cependant la proclamation de la Constitution avait
lieu le 16 octobre 1791, et, à partir de ce moment les
choses se passèrent avec moins de calme. Un an plus
tard (17 octobre 1792), le maire Louis Hugot, accom -
pagné du procureur de la commune, Jean Bala, et du
secrétaire de la municipalité J.-B. Poriquet, se rendit
à la cure pour < faire Tinventaire des meubles, effets et
ustensiles en or et en argent employés au service du
culte ». Le 10 novembre, ce fut le tour des registres
contenant les actes de baptêmes, de mariages et de
(1) Claude-François Thomas, maire ; Jacques Alexis
Contant, Louis Hugot, Pierre Hannion et Philibert Ficatier,
officiers municipaux ; Jean Moat, procureur de la commune.
(2) Registres des délibérations de la mairie de Revigny.
- 15 -
sépultures, que Ton transporta à la mairie au nombre
de 23.
Au témoignage des vieillards du pays, le mouve-
ment favorable à la Révolution et hostile à la Religion,
fut excité, à Revigny. par des étrangers qui bientôt y
tirent des adhérents. Parmi ces derniers on cile notam-
ment Pierre Le Rouge et Jean Brunelte. S'érigeant en
terroriste s, ces hommes plantèrent sur la place de la
Grand Ci oix un arbre de liberté pavoise aux couleurs
nationale s, se rendirent ensuite à Téglise qui avait été
ferméeau culteen exécution d'un décret de la Convention,
et vouh rent la convertir en Temple de la Liberté. Après
avoir de scendu les cloches, ils profanèrent et mirent
en pièces ce qu'ils trouvèrent de vases sacrés et de
reliquaires, en proférant des blasphèmes. Ils mutilèrent
et brisèrent les statues de saints qui ornaient l'intérieur
et l'extérieur de Téglise. Jean Brunette, qui était char-
pentier, voulait, avec sa hache, « voir ce que le Christ
avait dans le ventre».
Pendant ce temps, un de ces forcenés montait au
grand orgue et, au chant de la Marseillaise^ plantait
au sommet du buffet une pique surmontée d'un bonnet
phrygien.
Us terminèrent leurs exploits en brûlant sur la place
de l'église tout ce que celle-ci possédait de livres et de
registres de toute sorte. Cetactedevandahsme explique
la pénurie de documents et de pièces d'archives à
laquelle nous sommes réduit.
Cependant les fidèles continuaient à pratiquer la
religion et à suivre les offices dans une grange (1) où
(1) Cette grange, aujourd'hui détruite, s'élevait sur rem-
placement de la[ nouvel le école des filles, en face le presby»
tèpfi actuel.
- 16 -
Ton avait pu transférer les objets et les ornements
nécessaires.
Les révolutionnaires rencontraient parfois de la résis-
tance. Lorsqu'ils avaient brisé les statues de Téglise, le
peuple s'était armé pour les empêcher de toucher, à
rimage de la Vierge.
Enfin le 19 février 1793, à la demande de Jean Fran-
çois Gana, receveur de la fabrique de Revigny,
demande sanctionnée par le Directoire du District de
Bar-sur-Ornain, le Conseil général du Département
accorda à la fabrique une rente annuelle de 546 livres.
C'était rintérêtà 4 pour cent de la somme de 13,600
livres, produite par la vente, faite les 30 avril et 20
juin 1792, des biens de cette fabrique.
Nous dirons plus loin comment les dommages subis
par réglise de Revigny tant au xvi' qu'au xviii* siècle,
furent réparés de notre temps.
I
Toutes les parties de Tédifitie présentent les caractères
dislinctifs de Tépoque qui Ta vu construire. L'art
gothique régnait encore en maître, mais il avait perdu,
avec sa simplicité primitive, sa grâce et sa légèreté.
L'ogive s'était élargie et surbaissée ; les piliers, privés
de leurs gracieuses colonnettes et de leurs chapiteaux
aux délicates sculptures, n'étaient plus que de lourdes
colonnes ; les nervures étaient devenues grêles et angu-
leuses ; les meneaux des fenêtres traçaient des méandres
savants et compliqués ; la sculpture, à force de vouloir
fouiller la pierre et comme l'assouplir, n'offrait plus
qu'une ornementation maigre et recherchée ; tout
PLAN DE L'ÉOLISE DE REVIGKÏ
— 17 —
Fensemble s'était alourdi. Tels sont, dans leurs grandes
lignes, les caractères de l'art qui construisit notre église.
Le portail occidental est à deux portes, séparées par
un trumeau à base et nervures prismatiques. Un vaste
tympan les surmonte, coupé, au-dessus du trumeau,
par une haute niche surmontée d'un dais sculpté à jour
et d'une grande richesse. Les pinacles et les accolades
y sont reliés par un réseau de fines nervures décou-
pées comme une dentelle. La niche renferme une statue
polychromée de la Vierge-Mère, postérieure en date à
la construction de Tédifice. Sur le contour du tympan
se profile une jolie arcature à redents trilobés,
malheureusement incomplète et mutilée.
Tout cet ensemble est encadré dans trois archivoltes
ou voussures profondément fouillées en nervures pris-
matiques et concentriques d'une grande sécheresse. La
plus intérieure retombe de chaque côté sur uno niche
à dais en accolade ornée de choux frisés. Chaque niche,
vide de sa statue, repose sur une colonnette à nervures
torses. Quant aux deux archivoltes extérieures, elles
retombent sur des contreforts surmontés de pinacles
et ornés de délicates sculptures. Une accolade, ornée
d'énormes choux frisés et se terminant par un fleuron
incomplet, suit la voussure extérieure et se détache sur
le nu du mur. Devant le fleuron se voit un écu
martelé.
Une rose à huit compartiments, surmontée d'un tore
brisé, s'ouvre derrière ce couronnement, au-dessus
d'un cordon en glacis en arrière duquel s'élève en
retrait la masse de la tour. Celle- ci, fort lourde et
disgracieuse, a été construite en 1705, pour remplacer
le clocher détruit par les Suédois, et qui s'élevait an^
2
— 18 —
dessus de la croisée du transept (1). Elle est percée
sur chaque face de deux ouvertures jumelles en plein
cintre, au-dessus desquelles la flèche aiguë, couverte
en ardoises et très élancée, porte son sommet à 56" de
hauteur.
De chaque côté du portail principal, le mur droit qui
termine les bas-côtés est percé d'une fenêtre basse et
large, à tracerio flamboyante. De part et d'autre, le
rampant du toit s'appuie, à sa partie inférieure, sur un
contrefort formant avec les murs un angle de 45'', et
surmonté d'un gable à choux et à crête découpée, dont
les rampants ne dépassent guère en hauteur le mur
des collatéraux. Un ressaut en glacis coupe la face
antérieure de ces contreforts aux deux tiers environ de
leur hauteur.
Cinq autres contreforts correspondent, sur les faces
latérales de l'éghse, à autant de piliers intérieurs de la
nef. Faisant corps avec le mur du bas-côté, sur lequel
ils iont saillie, ils offrent, en montant, un glacis sem-
blable à ceux dont nous venons de parler, puis une
gargouille en forme d'animal grotesque, recevant les
eaux du toit du collatéral. Plus haut, une seconde '
gargouille correspond à la culée de l'arc-boutant qui,
passant au-dessus du toit, s'appuie sous le larmier du
grand comble et épaule les hautes voûtes de la nef.
Toutefois le cinquième de ces contreforts n'a pas d'arc-
boutaut et contrebute dans toute sa hauteur le mur
latéral, plus élevé à cet endroit. La description de
(l) D*après une tradition locale, les fidèles furent convo-
qués aux offices par le son de la trompette jusqu'à ce que le
nouveau clocher fût^ coiïstruit et les cloches installées.
— 19 —
Tintérieur de l'église donnera la raison de cette dispo-
sition.
Enfin tous ces contreforts, sauf le dernier, ont pour
couronnement un toit à deux rampants, orné de cro-
chets et surmonté d'un épi, le tout en assez mauvais^
état.
Entre les arcs-boutants, supportés par un pilastre
carré appuyé au mur, s'ouvrent les étroites fenêtres de
la nef. Au-dessus règne un tore continu, puis un lar-
mier qui supporte la charpente du grand comble.
La toiture du chœur est plus élevée que celle de la
nef ; celle du transept s'élève à une hauteur intermé-
diaire. Chacun des bras est contrebuté par trois contre-
forts à ressauts et larmiers, couronnés par des gables
sous la corniche du toit. Cependant, à l'extrémité du
croisillon méridional, un de ces contreforts est rem-
placé par une tourelle octogone (1) renfermant un esca-
lier aujourd'hui sans usage, mais qui devait conduire
au clocher primitif. On peut encore le descendre depuis
les combles, mais on est arrêté par la voûte d'un
(1) A droite de cette tourelle, on lit sur le mur rinscrip*
tioQ suivante, gravée sans doute à Tépoque où Téglise était
entourée du cimetière de la paroisse :
PASSANT • PENSE * TV ' PAS ' PASSER * PAR * CE * PASSAGE
SI • TV • NE • PENSE ' PAS ' PECHEVR * TV ' NES * PAS
SAOE
On lisait autrefois à Paris, à rentrée du cimetière de
St Séverin, Tinscription suivante, plus complète que celle de
Revigny :
Passant^ penses^tu passer par ce passage
Où pensant, f ai passé ?
Si tu n'y penses pas, passant, tu n'es pas sage ;
Car en n^y pensant pas, tu te verras passé*
— 20 —
réduit pratiqué à la partie inférieure pour servir de
sépulture. La porte extérieure de Tescalier, murée
maintenant, est remplacée par une autre porte, percée
dans rintérieur de Téglise. Sous le toit en poivrière
qui couronne la tourelle est sculpté un cadran solaire
portant la date de 1687.
Contre le mur occidental du croisillon septentrional,
on remarque la trace du toil d'une ancienne construc-
tion, qui communiquait avec Tintérieur de Téglise par
une porte murée depuis. C'était la chapelle « des Bar-
bitons (1) », démolie par arrêté pris sur la demande des
citoyens agent et adjoint de la Commune de Revigny,
le 11 Nivôse an 7 (31 décembre 1798).
Le chevet de l'église de Revigny en est la partie la
plus riche et la plus ornée. Il est à cinq pans, percés
de hautes et larges fenêtres qui occupent tout l'espace
compris entre les contreforts qui en butent les arêtes.
Ceux-ci sont décorés à profusion de pinacles, de niches
et de dais ornés avec soin et délicatement fouillés. Les
gables qui les couronnent portent des crochets d'un
beau travail, et reposent sur une corniche formée d'un
(1) Ce nom serait-il, comme on Ta cru, celui d'une confrérie
qui aurait eu là sa chapelle et dont sainte Barbe aurait été
la patronne t
D'autre part, nous avons trouvé, aux Archives de Meurthe-
et-Moselle, dans les Inventaires de la Chambre des Comptes,
Tindication d'une sentence en date du 14 décembre 1613,
« qui condamne Jean Barbiton, demt à Revigny, de payer
2^ 4 onces de cire, pour cens annuel, et aux dépens ». La
chapelle en question aurait-elle été construite par un
membre de la famille Barbiton ? Quoique rien ne nous auto-
rise à admettre de préférence l'une ou Tautre de ces deux
hypothèses, nous serions plutôt porté à adopter la seconde,
à défaut d'analogied en faveur de la première.
— 21 —
large damier. Un autre damier court sous le bord du
toit, et se continue sous celui du transsept.
Les niches des contreforts sont vides de leurs
statues. Cependant Tune d'elles contient encore deux
personnages à longue barbe, accroupis, les mains
jointes ; un troisième personnage, mutilé, semble se
tenir debout derrière les deux premiers.
Quelques-uns des dais qui surmontent les nichessont
remplis par ces coquilles qui deviendront, pour les
artistes de la Renaissance, un joli motif d'ornementa-
tion d'un usage fréquent.
Ajoutons qu'un cordon, se rattachant au mur par une
retraite en larmier, court à la partie inférieure des
fenêtres de l'abside, et se contourne sans interruption
autour des contreforts.
Outre le portail occidental, deux autres entrées
donnent accès dans l'église. Elles sont percées entre
le quatrième et le cinquième contreforts de chaque
collatéral, et se font face l'une à l'autre.
Celle du Nord est une simple porte à arcade surbais-
sée en anse de panier. On a supprimé au-dessus d'elle
une fenêtre dont les traces existent encore.
Au Sud, le portail a deux ouvertures séparées par un
trumeau à nervures prismatiques. Le tympan est enca-
dré dans une accolade tronquée et mutilée comme à
plaisir. On a découvert sous le badigeon qui couvrait
le tympan des traces de peintures. L'ensemble forme un
porche abrité par un auvent qui recouvre une voûte en
croisée d'ogives. A la clef est sculpté un bras bardé
de fer et brandissant une épée (1). Le tout, resserré
(1) René II, comte de Vaudémont, qui fut duc de Lorraine
de 1473 à 1508, fît frapper des médailles portant ce < bras
— 22 —
entre deux des contreforts, est o rné, à la partie anté-
rieure, d*un fronton très surbaissé.
Constatons, avant d'entrer dans notre église, que
son ornementation extérieure accuse en général une
grande inexpérience ou une grande timidité. Il semble
que le sculpteur ait craint de fouiller la pierre et de
compromettre sa solidité. Il en résulte, dans l'ensemble,
un air de lourdeur, remarquable surtout au portail
principal et aux deux élévations latérales. En outre, la
forme surbaissée des fenêtres ne contribue pas peu à
accentuer ce caractère.
Cependant l'élévation orientale des bras du transept
et celle de l'abside semblent s'alléger davantage, et
l'ornementation y est plus hardie et fouillée avec plus
d'audace. Les grandes fenêtres du chœur ont leur tra-
cerie bien dessinée ; les pinacles et les dais des contre-
forts sont fouillés avec soin, et produisent des jeux
d'ombre et de lumière de beaucoup d'effet.
II
L'intérieur de l'église de Revigny, avec ses colonnes
vigoureuses et les nervures fortement accentuées qui
s'étalent à la voûte, ne manque pas de hardiesse et de
grandeur. Toutefois, la nef, plus sobre de décoration et
éclairée d'une façon plus discrète, a un aspect plus
sévère que le chœur avec ses larges fenêtres qui l'i-
armésortaot d*une nue,» entouré de la légende: fecit
POTENTIAM IN BRACHio SUC (De Saulcy, Numismatique
lorraine, PI. XIII, n<» 8). — Cf. Léon Germain, Le lit
d^Âr.toine^ duc de Lorraine^ 1885, p. 14-15. (Extr. du Bul-
letin monumental).
— 23 —
nondent de lumière à travers leurs meneaux aux riches
ramifications.
Six travées précèdent le transept. Six piliers y sépa-
rent la nef principale des collatéraux. Trapus, cylin-
driques, privés de chapiteaux, ils s'épanouissent chacun
en un faisceau de nervures prismatiques qui forment,
outre rogive des arcades basses, les diverses nervures
des collatéraux, où les arcs doubleaux, ogives et for-
merets retombent sur de simples consoles faisant sail-
lie sur le mur. Chaque pilier repose sur une base octo-
gone surmontée d'une gorge et d'un tore, et, entre les
arcades, continue à faire saiUie sur le nu du mur pour
recevoir les nervures de la voûte haute. Sous les for-
merets de cette d3rnière, dans les cinq premières
travées, s'ouvrent des fenêtres peu étendues, à un seul
meneau s'épanouissant en une tracerie flamboyante.
D'autres fenêtres, larges et bass?s au point de paraître
inscrites dans un triangle équilatéral, n'ayant aussi
qu'un seul meneau et une tracerie flamboyante,
éclairent les bas-côtés. Les voûtes de ces derniers,
aussi bien que celles de la haute nef, sont en croisées
d'ogives, avec des clefs ornées de fleurons sculptés.
Il faut faire exception cependant pour la sixième
travée, dont la voûte est à liernes et tiercerons, avec
cinq clefs, dont deux portent des blasons martelés. La
travée correspondante des collatéraux présente cette
particularité de porter sa voûte à la même hauteur que
celle delà nef principale (1), et d'être éclairée par une
haute fenêtre à tracerie flamboyante portée par un seul
(1) C*ust cô qui explique la disposition anormale que nous
avons signalée à Textérieur.
-. 24 -
meneau. La voûte y est aussi à nervures multiples. Au
Nord, la clef centrale porle un écu entouré d'une corde-
lière. Lechamp; parti, est meublé, à dextre, d'un lion
rampant, et à senestre, d'un croissant tourné (1), autour
duquel se voit une inscription illisible. Sur une autre
clef de la même voûte est sculpté un blason chargé de
trois pals (2).
Sur la clef principale de la voûte correspondante
dans le collatéral Sud, le buste d'un squelette élève la
main droite, et appuie la gauche sur sa poitrine. Là
(1) M. Moat (La commune de Revigny et ses environs,
1876, p. 15) et, après lai, M. Bonnabelle (Revigny, 1883,
p. 18^ note 2) ont vu là Talliance des armeR de Luxembourg-
LigDv et du duché de Bar, qui portent, Tun un lion ram-
pant, Tautre deux bars ou barbeaux courbés et adossés. Ils
ont expliqué la présence des premières par Tobligation où
était le chapitre de Ligny d'entretenir le chœur de l'église.
Malheureusement on ne voit nulle part que le chapitre de
Ligny ait fait usage d*armoiries. Le sceau dont il se servait
portait gravée une représentation de Téglise collégiale, et,
en contre-sceau, un château à trois tours, avec donjon
central. Sur le sceau de la collégiale était représentée la
Vierge, qui en était la patronne.
Quant aux bars, il nous est impossible de les voir. Il y a
un croissant, et pas autre chose qu'un croissant, entouré de
quelques caractères indéchiffrables.
La cordelière qui entoure Tensemble nous porterait à
croire, avec M. L. Germain, qu'il y aurait là Técusson
d'une femme, parti de celui de son mari.
Nous ne pouvons que gémir une fois* de plus au sujet de
l'absence de documents qui puissent nous suggérer une
attribution plausible.
(2) Ce blason a pu appartenir aux familles de Bouvigny
ou de Briey, dont une branche est connue sous le nom de
Landres.
— 25 —
eccore, deux autres clefs portent, Tune un écu meublé
de trois grappes de raisin, deux et une ; Tautre, deux
personnages placés dos à dos, tête contre pieds.
A la cinquième travée et aux suivantes, les arcades
qui séparent la nef des collatéraux montent à peu de
distance des formerets de la haute voûte. Les collaté-
raux de la septième et de la huitième travée sont
doubles, et forment le transept, plus large du côté de
TEvangile que du côté de l'Epitre. Dans toute cette
partie de l'église, les nervures des voûtes se prolongent
le long des murs jusqu'au pavé, au lieu de reposer sur
de simples consoles. Le transsept reçoit la lumière par
de hautes fenêtres à tracerie flamboyante pratiquées
dans les murs des extrémités et de TEst.
Vient ensuite le chœur, composé d'une travée rectan-
gulaire et du chevet à cinq pans.
De chaque côté du sanctuaire, le prolongement du
collatéral forme une chapelle en trapèze, celle du N.
plus large que celle du S., comme les bas-côtés dont
elles sont le prolongement. De hautes et larges fenêtres,
à remplage flamboyant, occupent dans le sanctuaire et
dans les deux chapelles l'espace compris entre les
points d'appui de la voûte (1). Elles reposent sur un
cordon continu faisant le tour du chevet. Une de ces
fenêtres a les ramifications de sa tracerie disposées en
forme de fleur de lys.
Les deux travées du transept ont leurs voûtes en
m
(1) Hauteur des voûtes :
Bas-côtés : 5"» 10.
Transept : 8«» 60.
Nef principale : 12™.
— 26 —
croisées d*ogives, tandis que celles du chœur et des
chapelles sont à nervures multiples à liernes et tierce-
rons. Toutes ces voûtes sont de construction moderne.
Primitivement l'éghse entière était voûtée. Mais
lorsque les Suédois Tincendièrent en 1640, la char-
pente du chœur et le clocher central s'écroulèrent, et
entraînèrent les voûtes dans leur chute. C'est alors que,
d'après une tradition locale, les habitants de Revigny
adressèrent au duc de Lorraine une demande « à l'effet
d'obtenir l'autorisation de couper dans les bois de la
Haie-Herlin, qui lui appartenait, les chênes néces-
saires pour refaire la charpente du chœur et le cou-
vrir (1) ».
Un siècle plus tard, le 24 décembre 1790, Jean
Moat, maire de Revigny, exposait à la municipahlé que
la toiture du chœur de Téglise était en mauvais état,
et rappelait qu'un marché fait depuis plus de deux
ans en vue de sa réparation n'avait pas été exécuté.
Nous avons dit plus haut que, le 11 Nivôse an VII, il
avait été question, au Conseil de la Commune, de
la démoUtion de la chapelle des Barbitons, qui tom-
bait en ruines. Les matériaux, évalués à la somme de
380 livres, devaient être vendus, et le produit consacré
à la réparation du « Temple », qui servait de lieu de
réunion pour les fêtes décadaires, et qui avait « besoin
d'une réparation urgente ».
Il faut venir ensuite jusqu'en 1855 pour voir l'admi-
nistration se préoccuper des travaux à exécuter à l'é-
glise de Revigny (2), et en particulier de la recons-
(1) Annuaire de la Meuse pour 1848, p. XCV.
(2) a La pensée de la restauration remonte à Tannée 1850,
et revient à son vénérable pasteur de ce temps (M. Tabbé
— â7 —
truction de la voûle du chœur et du transept. Par une
lettre du 24 juillet de cette année, le Maire, M. delà
Giraudière, autorisait le président de la fabrique à les
faire exécuter « par voie de régie, au fur et à mesure
de la réalisation des ressources et par ordre d'urgence,
sous la direction de M. Maxe, architecte à Bar-le-Duc,
et sous la surveillance du président et de deux membres
du Conseil municipal ».
Déjà, le 28 juillet 1853, le Gonseil municipal, recon-
naissant la nécessité-de faire exécuter des travaux pour
la conservation de l'église», avait demandé la rédac-
tion d'un devis. Ce devis montant à la somîne de 14800
francs, et M. de la Giraudière, dans sa lettre du 21
juillet 1855, annonçait au président de la fabrique que
le Conseil municipal, pour lui venir en aide, avait voté
un subside de 4,000 francs.
L'architecte hésita d'abord sur le choix des matériaux
à employer dans la reconstruction de la voûte. Crai-
Fontaine) ainsi qu'au membre de la fabrique (M. Hannion),
qui, comme instituteur intelligent et dévoué, a laissé de si
beaux souvenirs dans la population. » (Note adressée à Tau-
teurdu présent travail par M. Maxe.)
Les lieas qui nous attachent à ces deux hommes de bien
ne nous permettent pas de les louer aussi librement que
nous le voudrions. Le premier, qui nous avait donné le bien-
fait du Baptême dans Téglise même que nous décrivons,
nous a conservé jusqu'à sa mort une affection et un intérêt
tout paternels. A l'autre, à qui nous unissent étroitement les
liens du sang, nous devons, avec l'exemple constant d'une
vie droite, d*une âme élevée, d*une intelligence cultivée par
le travail et fille de ses œuvres, le bienfait d'une éducation
dont nous ne saurions trop nous honorer. Collaborateurs
l'un de l'antre dans l'œuvre de l'éducation de la jeunesse et
du maintien de la foi, ils ont laissé à Revigny un souvenir
que le temps n'a pas effacé.
— 28 —
gnant que la pierre fût trop lourde, il pensa d'abord à
employer le bois, il se décida ensuite pour la brique
creuse, reposant sur des nervures en pierre.
Enfin en 1859 on se mit à l'œuvre ; les travaux furent
poussés activement, et, le 10 avrill86â, l'entrepreneur
pouvait présenter son Mémoire (1).
Le devis approuvé en 4855 comprenait, outre la
reconstruction de la voûte, des réparations extérieures^
la réfection du porche et du pavage, la restauration
du chœur, du sanctuaire et des chapelles, l'enlèvement
du badigeon qui déshonorait toutes les parties de l'é-
glise. C'est en 1864 que ces divers travaux furent ter-
minés (2). A la même époque, on songea à établir des
(1) On a gravé, autour de la principale clef de voûte du
sanctuaire, rinscription suivante :
Sart. Tect. fornic, huj. TempL
in. Sanct. et, Transep. CompL
Et, au milieu :
«nno 1862
(2) c Les travaux de restauration ont commencé en 1859,
par la construction des voûtes de la croisée et du croisillon
méridional du transept, et ont été continués à peu près sans
interruption : le pavage des chapelles et des allées en 1861 ;
la construction des voûtes de Tabside, du dallage du sanc-
tuaire, du maître-autel, et rétablissement des tambours en
1862 ; les verrières du sanctuaire avec le redressement des
meneaux des fenêtres en 1864.
« Le projet de la construction des voûtes de Tabside
avait éveillé des doutes dans Tesprit des autorités de la
commune, qui ont demandé alors à Tarchitecte et à Tentre-
preneur l'engagement formel de répondre à leurs risques et
périls des événements qui pourraient arriver. Mais Tarchi-
tecte, qui connaissait les principes de la construction de
Tarchitecture ogivale, entreprit résolument Tœuvre, malgré
vitraux dans les fenêtres de réglise, et MM. Maréchal,
de Metz, furent chargés de ce travail, au sujet duquel
nous hésitons à formuler une appréciation. C'est là, à
notre humble avis, la partie faible dala restauration de
notre église, et nous ne saurions approuver sans
réserve ni le choix des sujets, ni l'exécution matérielle.
Il aurait fallu s'inspirer davantage des œuvres des
peintres verriers qui travaillaient à Tépoquo où Tédi-
fice fut construit, et ne pas s'exposer à commettre de
flagrants anachronismes. Il eût fallu aussi chercher à
atténuer des couleurs trop violentes et des oppositions
heurtées. La palette des verriers de la dernière moitié
du XV* siècle et du commencement du xvi* était assez
riche pour offrir de quoi charmer les yeux sans les
éblouir ni les fatiguer.
Après ces divers travaux, l'église de Revigny avait
repris une nouvelle jeunesse. Peu à peu son ameuble-
ment se transforma. Dès 1862, le maître-autel du xvii*
siècle, surmonté d'un lourd retable, avait fait place à
un autel plus en rapport avec l'architecture de l'édifice.
Aujourd'hui le mobilier est à peu près complet (1).
Malheureusement il ne reste ni pierres tombales, ni
autels anciens. Il ne subsiste de Tornementation primi-
tive, avec les clefs de voûte de la nef et des collatéraux.
un surplomb dans les contreforts déplus de 30 centimètres,
et l'entreprise fut couronnée d'un plein succès. » (Note de
M. Maxe.)
(1) Nous ne mentionnons que pour mémoire le volumineux
chemin de croix dont les stations s'étalent sur les piliers de
la nef. Son moindre défaut est de rompre les lignes de l'ar-
chitecture en chargeant les colonnes d'autant de hors-
d'œuvre et en déplaçant la ligne tracée sur les murs par le
cordon qui fait le tour de l'édifice.
— âO —
que trois curietises piscines de la Renaissance, restau-
rées avec soin.
La première, placée à droite du maître-autel, se
compose d'une console en cul-de-lampe surmontée
d'une niche dont la paroi porte des cannelures, et dont
la partie supérieure est remplie par un gros fleuron.
L'encadrement se compose de deux pilastres qui
montent de fond, et qui sont chargés d'arabesques. Ils
supportent, sur leurs chapiteaux, un entablement orné,
entre deux patères à ombilic^ d'un médaillon présen-
tant une tête de profil.
Dans la chapelle de droite se trouve la seconde
piscine. L'ouverture est carrée, et entourée d'un
encadrement en plein cintre. Dans le tympan sent
sculptés les emblèmes des vertus théologales. Autour
de l'encadrement, des coquilles et des fleurons sont
reliés par une torsade. Une autre torsade court sous la
pierre saillante qui sert de console.
La troisième se voit dans le transept méridional.
Dans un encadrement rectangulaire chargé de char-
dons et de grappes de raisin, deux colonnettes torses
à pinacles supportent une accolade à crochets. Dans les
écoinçons, deux oiseaux, retenus par des cordes atta-
chées au fleuron de l'accolade, cherchent à s'envoler.
Le fond de la niche est rempli par une coquille. Une
tiiblette intermédiaire a sa tranche garnie de poissons.
Le grand orgue a conservé son buffet, daté de 1731 (1);
1) On lit sur la boiserie du positif :
LiVDATE
DOMINVM
IN CHORDIS
ET ORGANO
1781
— 31 —
Il est attribué à un facteur allemand, et, quoique ses
sculptures soient assez grossières, Tensemble présente
néanmoins un certain caractère. La tribune qui le sup-
porte avançait autrefois jusqu'au troisième pilier de la
nef. Elle a été reculée en 1872 jusqu'au premier, et
Torgue, qui n'était primitivement qu'un huit-pieds, a été
complété et est devenu un seize-pieds.
La chaire, en chêne sculpté, est aussi duxvm* siècle,
et offre des panneaux heureusement traités.
C'est au XV® siècle et au commencement du xvi* que
fut construite Téghse de Revigny. Comme cela se pra-
tiquait généralement au moyen-âge, le chœur fut élevé
avant la nef ; c'est pour cela que les bases des deux
derniers piliers, piliers semblables aux autres pour le
reste, offrent des retraits et de petites consoles qui
attestent leur priorité. Mais, par une singulière anoma-
lie, le transept, si on en juge par le profil de ses colon-
nettes et la tracerie de ses fenêtres, encore en partie
rayonnantes; semble avoir été terminé avant le chœur,
qui lui-même est postérieur à la nef. Celle-ci pourrait
être rapportée aux environs de l'année 1510. L'édifice
tout entier doit avoir été construit entre 1490 et 1520.
Nous serions donc tenté de croire que, de la construc-
tion primitive , il ne subsisterait aujourd'hui que les
deux bras du transept et que le chœur, pour une raison
qui nous est inconnue, aurait été reconstruit après
l'achèvement de la nef.
Quanta l'église antérieure, nous ignorons si elle était
construite sur le même emplacement ; nous ne savons
pas davantage quel en était le plan.
»>-CS51^
LE TRAITÉ CONCLU EN 1497
ENTRE
RENÉ II, DUC DE LORRAINE
ET
ROBERT U DE LA MM, SEIGIOR DE SEDAN
PAR
M. P. MARICHAL
L'histoire de la guerre, qui, vers la fin du xv® siècle,
mit aux prises le duc de Lorraine René II et son voi-
sin Robert II de la Marck, seigneur de Sedan, a fait,
comme on sait, il y a quelques années, l'objet d'un
travail d'Henri Lepage (1), où se trouvent heureuse-
ment complétées au moyen de nombreux documents
d'archives les informations trop sommaires, presque
toutes fournies par le chroniqueur messin Jean Au-
{!) La guerre de Sedan ^ épisode du règne de René II
(1493-1496), par M, Henri Lepage , dans les Mém, de la
Soc. d'Arch. ^orr. de 1884, pp. 183-224.
— 33 —
brion (1), que s'étaient contentés de reproduire les rares
historiens qui avaient déjà effleuré le sujet (2).
Mais il est un point de la question sur lequel pleine
satisfaction n'a pas été donnée. Henri Lepage a prouvé
que la guerre de Sedan se termina par un traité conclu
entre le 20 octobre et le 10 novembre 1497 : mais le
texte de ce traité a échappé à ses recherches.
Le hasard nous a rendu plus heureux. La pièce
conservée sous le n** 23 de la layette Briey domaine de
l'ancien trésor des Chartes de Lorraine, laquelle est
aujourd'hui aux archives de Meurthe-et-Moselle (B. 593)^
porte au dos l'analyse suivante : « Vidimusdel'appoinc-
tement fait par le roy de Sicille (3) avec messire Robert
de la Marck de la seigneurie de Raconval en la prevosté
(1) Nous rappelons que le Journal de Jehan Auhrion a
été publié par M. Lorédaa Larchey (Metz, 1857, in 8°).
(2) H. Lopage ne paraît pas avoir connu la Notice hisiori-
que sur Robert II de- la Marck,,,, (Metz, 1865, in-8o), de
M. de Bouteiller : quelques pages (34 à 47) de cet ouvrage
sont consacrées au récit des hostilités entre Robert et
René II. Faisons observer que dans la 2* édit. de son His-
toire de Lorraine (V, 433 et 436-438), Dom Calmet avait
donné presque autant de détails sur le même sujet.
(3) Il nous paraît utile de résumer ici quelques recher-
ches faites par nous touchant le titre de roi de Sicile porfé
par René II, de manière à compléter ce qu'ont dit sur la
question MM. Briard et Lepage (Des titres et prétentions des
ducs héréditaires de Lorraine, dans les Mém, de la Soc.
d'Arch, lorr, de 1885).
Après la mort du roi René (10 juillet 1480), Yolande d'An-
jou, sa fille, duchesse de Lorraine, mère de René II, prit le
titre de reine de Jérusalem et de Sicile, et René II celui de
duc de Calabre. Yolande mourut le 23 février 1484. Deux
ans plus tard, René II fut appelé par les barons napolitains
à la conquête du royaume de Naples (V. pour les détails
8
— 34 —
deBriey. » Ajoutons que cet « appoinctement » porte la
date du 25 octobre 1497 : c'est dire assez qu'il faut voir
dans cette pièce une copie authentique du traité vaine-
ment recherché par Henri Lepage.
Il est superflu, croyons-nous, d'insister sur l'intérêt
que présente ce document. Grâce au travail du regretté
savant lorrain, on sait à quels événements il se rap-
porte : mais il n'est pas sans fournir sur ces événe-
ments quelques indications nouvelles, notamment sur
les causes des hostilités et sur les alliés des deux par-
tis : faisons observer à ce dernier propos qu'on igno-
rait jusqu'ici quels avaient été les alliés de Robert de
la Marck, car les documents publiés par Henri Lepage
sont tous de provenance exclusivement lorraine.
Henri Lepage a dressé une liste des combattants qui
furent faits prisonniers durant cette guerre : notre docu-
V Expédition de Charles VIII en Italie^ de M. H. -F. Dela-
borde. — Paris, 1888, iQ-40) ; jusque là il n'avait jamais
pria le titre de roi de Sicile, et s'était contenté, même après
la mort de sa mère, de celui de duc de Calabre. — Dans
quelques actes de 1486 et 1487, René II 8*intitule roi de
Jérusalem et de Sicile : mais ces actes, tous relatifs au
royaume de Naples, sont fort peu nombreux. C'est seu-
lement six ans plus tard que René II porta ce titre d'une
manière constante. Aubrion et d'après lui Dom Cal met
disent qu'au commencement du mois de janvier 1493 (n. s.),
René II fit publier dans ses Etats que désormais on l'appel-
lerait roi de Sicile. Le dire d'Aubrion est parfaitement véri-
fié par l'examen des registres des lettres patentes de René II,
conservés aux Archives de Meurthe-et-Moselle. L'acte le
moins ancien où René n'ait encore le titre que de duc (lo
protocole final porte par monseigneur le duc) est du 4 jan-
vier 1493 ; le premier où il s'intitule roi {par le roy) est du
8 (Arch. de M.-et-M., B. 4, fol. 150 v° et 152 v»).
— 35 —
ment permet, sinon de compléter celte liste, du moins
de Taugmenter de quelques noms.
Entîn, et c'est là ce qu'il convenait d'en attendre, le
texte du traité du 25 novembre 1497, permet de savoir
exactement à quelles conditions les hostilités cessèrent
entre René II et Robert de la Marck. Sur ce point,
Henri Lepage avait conservé quelques doutes, et avant
lui M. de Bouteiller avait été gravement induit en
erreur par un témoignage pourtant contemporain :
Philippe de Vigneulles dit en effet que « furent rendues
à messire Robert les plaices qu'il demandoit » (1). Tan-
dis qu'il ressort du texte du traité, que si le seigneur
de Sedan gagna à cette paix d'importants revenus,
René II obtint à rencontre de ses prétentions territo-
riales satisfaction complète.
Ce texte, dont nous donnons la reproduction, per-
mettra, bien mieux que les quelques lignes qui précèdent,
de juger si, comme nous l'avons pensé, le document
mérite l'attention de ceux qu'intéresse l'histoire lor-
raine. Il complétera la série de ceux qu'Henri Lepage
a publiés sur cette guerre de Sedan, jusque là si peu
connue.
Traité de paix entre René II, dnc de Lorraine,
et Robert II de La Marck.
25 octobre 1497.
(Vidimus de la cour de Nancy, en date du 28 janvier 1512).
Nous, les gardes du seel du tahellionnaige Monseigneur
le duc de sa court de Nancey^ faisons savoir a tous que en
(1) Gedenkbuch des MetzerBûrgers Philippe von Vigneul-
leSf,,. kerausgegeben von D»* Heinrich M ichelant (Stuttgart,
1852. in-8«), p. 131.
— 36 —
l'an de grâce nostre Seigneur mH cinq cens et unze (1), le
vingt-huitième jour du mois de janvier^ vehume, tenumes
et leûmes bien et diligenment de mot a mot une l tire en
parchemin sainne et entière en seelz et escripture^ de
laquelle la teneur s'ensuit :
Jehan, seigneur de Baudricourt, mareschal de France (2),
a tous ceulz qui ces présentes lettres verront, salut (3).
Comme il ait pieu naguerres ^u roy nostre siro nous
envoyer par deçà, pour appoincter les guerres, questions et
différens estans entre illustre prince le roy de Sicile, duc de
Lorraine et de Bar, nostre tresredoubté seigneur, d'une
part, et messire Robert de la Marck, seigneur de Sedau,
d'autro, a cause de ce que ledict messire Robert demandoit
et requeroit estre restitué et réintégré de la place, terre et
seigneurie de Dun-ie-Chastel (4) et pareillement de la sei-
gneurie de Raconval (5) en Harrois, que (0) disoit a luy
appartenir a certains moyens, et ledit seigaeur soubsteuoit
du contraire, demandoit estra restitué des donmaiges a luy
fais et inférés en la guerre que luy avoit fait icelluy messire
Robert, sans congnoissance de cause ne sans Tavoir sonmé
ou poursuy par justice, laquelle il luy avoit tousjours
offerte (7), et il soit que nous, obéissant au bon plaisir
(1) 1512, n. s.
(2) Jean, fils de Robert^ seigneur de Baudricourt et
d'Aléarde de Chambley, — seigneur de Baudricourt, Choi-
seul, La Fauche, Vignory et Biaise, bailli de Chaumont
(1479), gouverneur de Bourgogne (1480) , maréchal de
France (vers 1488). Mort le 11 mai 1499 (Anselme, VII,
112-113).
(3) Nous rétablissons ce mot, omis par le copiste.
(4) Dun-sur-Meuse, Meuse, a. Montmédy, Ch.-l. c.
(5) Ranguevaux, Alsace-Lorraine, a. et c. Thionville.
(6) Le vidimus porte qui.
(7) H. Lepage a signalé plusieurs des tentatives faites
pour rétablir la paix entre René II et Robert : il y eut
• • »
— 37 -
dudit seigneur, ayons longuement et par pluseurs fois vacqué
sur ce et ouy ce que chacune desdites parties a voulu dire et
alléguer pour justificacion de son droit, savoir faisons que
fînablemen^ par vouloir et assentement desdict-'s parties,
avons dit, appoincté et rapporté, et par ces présentes disons,
appoinctons et rapportons en la manière que s'ensuit :
Premier, que toutes les guerres, hostilités et oeuvres de
fait que ont esté entre lesdictes parties (1), pour les occa-
sions dessusdictes ou autres, cesseront du tout entre elles,
leurs aidans, favorissans, serviteurs el complices, d'une part
et d'autre ; et seront toutes execucions faictes pendant
icelles et depuis, tant en murtre, feuz boutez, prinses de
corps, d'hommes (2), do bestial, comme toutes autres, mises
a néant et du tout abolyes, comme de choses (3) non adve-
nues.
Item, lesdictes parties feront taisans leurs parens, am^'s,
alliez et serviteurs d'une part et d'autre, de toutes les que-
relles, actions et poursuytes qu'icelles (4) ou l'une d'elles
pourroient faire a l'occasion dessusdicte a l'encontre dez
parens, amys, alliez et serviteurs do l'autre : c'est assçavoir
ledit messire Robert, les siens, a rencontre dudit seigneur
notamment deux journées amiables tenues les 15 septembre
1494 et 4 février 1495, à Vitry, mais auxquelles Robert de
la Marck s'abstint de comparaître. Il y eut en cette même
année 1495 trois autres journées, tenues également à Vitry,
la première antérieurement au 4 mai, la seconde le 16 juin,
et la troisième le 27 juillet (Arch. de la Meuse, B. 520,
fol. 141, 142 v» et 143 v®). — René II s'efforça en outre de
faire intervenir le Parlement de Paris dans l'affaire, ainsi
que l'atteste un curieux passage des registres de cette cour,
que nous donnons en appendice,
(1) Le vidimus porte partes,
(2) Homme,
(3) Chose.
(4) Qui celles.
— 38 —
roy de Sicile, de measeigaeurs le bastart de Vaudemont (1\
messire Loys de la Marck, seigneur de Rochefort (2), Ryart,
Engelbrech et Loys de la Marck, enffans dudit messire
Loys (3), et tous autres alliés, amys, serviteurs et complices
dudit seigneur roy de Sicile, et pareillement ledit seigneur
(1) Jean de Lorraine, bâtard de Vaudemont, fils d*Antoine,
comte de Vaudemont, et de Marguerite île Geneletce ; légi-
timé par lettres de René II, en date du 20 mai 1488 (Arch.
de Meurthe-et-Moselle, B. 3, fol. 156 v»).
(2) Vraisemblablement Louis de la Marck, fils de Louis,
seigneur de Rochefort et de Neufchâteau, et marié en 1467
â Agnès, fille de Guérard, seigneur de Rodemach (Bibl. nat.,
ms. Lorraine 212, fol. 157) ; il était cousin germain du père
de Robert II. Relativement à son alliance avec René II, il
convient de signaler, outre les pièces publiées par H.
Lepage, un document analogue, conservé â la Bibliothèque
nationale (ms. Lorr. 11, fol. 18): nous voulons parler de
l'appointement conclu le 23 novembre 1493 par l'entremise
de Thomas de Pfaffenhoffen et de Huin Roynette pour
René II, et de Henri Guy de Masbourg pour Louis de la
Marck, et revêtu des signatures de ces trois mandataires;
la note qui suit, écrite sur cette pièce quelques années plus
tard, permet de fixer approximativement la date de la mort
de Louis de la Marck : t Les lettres que ledict seigneur de
Rochefort avoit sur ce baillées ont esté baillées par ordre du
roy au receveur de Bar, pour les rendre casses a qui il
appartient, pour ce qu'il est mort. Fait le ix jour de jan-
vier mil cccc iiij" xix » (1500. n. s.).
(3) Une des pièces publiées par Henri Lepnge atteste
Talliance de René II avec Evrard de la Marck, seigneur
d'Agimont et de Durbuy, Engelbert de la Marck« seigneur
d'Orchimont, ainsi qu'avec Philippe de la Marck, seigneur
de Florenville, dont il n'est pas question ici. — Louis est le
nom du seul enfant de Louis de la Marck et d'Agnès de
Rodemach qui soit mentionné par le P. Anselme (VII,
166 D.). — Henri Lepage n'a pas connu les causes qui ame-
nèrent ces proches parents de Robert de la Marck à faire
alliance contre lui avec René II. Nous les ignorons égale-
— â9 ~
fera taisans les siens à l'eucontre dudit messire Robert, de
monseigneur d*Arberg (1) efc son frère damoiseau Robert,
monseigneur le viconte d'Kstoges (2), monseigneur de Son*
ment. Mais qu*on nous permette de citer à ce sujet un fait
assez curieux : un document, antérieur d*un peu plus de
cinq ans à celui qui nous occupe, et relatif â des événements
tout différents^ montre qu*it existait dès lors , entre Robert
et Louis de la Marck, sinon un antagonisme déclaré, du
moins une divergence ' bien marquée de vues politiques.
Nous voulons parler d'un traité conclu à Maestricht, le 5
mai 1492, entra les La Marck (Robert II, son oncle Evrard,
seigneur d'Arenberg, et son cousin Jean, seigneur de Lu-
main) et révêque de Liège : Louis de la Marck et ses
enfants les seigneurs d'Agimont et d'Orchimont sont nom-
més dans ce traité : mais ils n'y paraissent qu'en qualité de
membres de la noblesse du pays de Liège, comme ratiflca-
teurs du tiaité. Signalons un détail qui ne seia pas ici sans
quelque intérêt : ce traité fut conclu sur la médiation de
M. d'Orval, gouverneur de Champagne, et de René II, qui
se fît représenter en cette circonstance par le bâtard de
Vaudémont et par Petit-Jean d'Harcourt, seigneur de Chau-
vency le- Château : le sceau de René II fut apposé au traité,
à la demande de l'évêque de Liège. V. le texte du traité du
5 mai 1492, pp. 852 â 851 des Documents relatifs aux trou-
bles du pays de Liège publiés par X. De Ram dans la col-
lection des Chroniques belges inédites (Bruxelles, 1844,
in-4o).
(1) Il s'agit sans doute d'Evrard de la Marck, seigneur
d'Arenberg et de Neufchâteau, second fils de Jean l**", sei-
gneur d'Arenberg, et d'Agnès de Vernebourg, mort le 19
juin 1506 (Anselme, VII, 170 E).
(2) Simon, dit Saladin d'Anglure, vicomte d'Etoges,
second fils de Simon, seigneur d'Etoges, et d'Isabelle du
Châtelet, mort en août 1499 (Moréri, art. Anglure), — Le
maréchal de France Robert de la Marck, seigneur de Flo-
range, fils de Robert II, fait allusion, dans le prologue de
ses célèbres mémoires, aux bons rapports qui existaient
entre son père et Saladin d'Anglure.
- 40 -^
breth (1), le conte de Neuveberg, messire HoppLs, et tous
autres alliez, amys, serviteurs et complices dudict seigneur
do Sedan.
Item tous prisonniers prins d'une part et d*autre pendant
ladicte guerre, et depuis a l'occasion d'icelîe (2), seront mis
a délivre purement et franchement, s'aucuns sont detenuz,
et les autres quictes de tous serremens, promesses ou obli-
gacions qu'ilz pourroient avoir faictes, ensemble leurs
plesges et cautions, s^aucunes en avoient baillées, et nom-
meement, pour la part dudit seigneur rcy de Sicile, Jehan
de Hous (3) Verdellet, Conflaas (4), Petit Jehan, gens
d'armes, maistre Andreuq, Petit Jehan Migon, monseigneur
(1) Nous lisons ainsi Sonbreth, plutôt que Soubreth,
pensant que c'est le nom de Sombref ou Sombreffe qu'on a
voulu écrire. En 1494, René II avait traité avec Frédéric do
Sombreffe, seigneur de Kerpen (anc. Très, des Ch. de Lor-
raine, lay. Traités III, n° 24, actuellement Bibl. nat., ms.
Lorraine 250, fol. 20). — L'expression monseigneur de Son-
breth semble plutôt désigner un seigneur de Sombreffe : le
nom de Gilles, seigneur de Sombreffe, figure dans le traité
de 1492 ( De Ram, op. cit., p. 859).
(2) Icelles,
(3) La Chronique de Lorraine mentionne un capitaine
suisse, au service de René II, nommé Jean de Housse. — Cf.
Henri Lepage, Commentaires sur la Chronique de Lorratne^
dans les Mém, de la Soc. d'Arch, lorr. de 1859, p. 403. —
En 1499, Jean de Housse, lieutenant de la garde, était
pourvu d'uDe pension annuelle de 200 francs, monnaie de
Lorraine (Arch. de M.-et-M., B. 996).
(4) On a des lettres patentes de René II, données à
Nancy, le 2 juillet 1505, et portant assignation d'une pen-
sion de '70 francs à Confans [sic), serviteur dn feu bâtard
de Calabre (Arch. de M,-et-M., B. 10, fol.9v<»),
— 41 —
de Sillery (1), Henri Sionne (2), Louys de Staiûville (3),
Demenge de Serocourt (4), Jehan de Lescave et tous autres,
et pour la part dudit seigneur do Sedam, Pierre de la Court,
Petit Jehan le Gascon, et tous autres, s'aucuns en y avoit:
pareillement seront quictes tous appatis, reançonnemens de
feuz et toutes autres composicions faictes et prinses par
lesdictes parties, leur alliez, serviteurs et complices d*uno
part et d'autre .
Item, les procédures faictes jusques cy entre lesdictes par-
ties par devant le roy et son conseil, a l'occasion que dessus
cesseront du tout et y sera renoncé, sans ce qu'elles y puis-
sent procéder aucunement.
Item, ledit messire Robert renoncera et quictera pour luy,
ses frères et seurs, ensemble leurs hoirs et ayans cause,
desquels il se fera fort, a tout tel droict, querelles et
actions qu'il pouoient (5) prétendre ez place, ville, terre et
seigneurie de Dun-le-Chastel et pareillement Ranconval-en-
Barrois, leurs appartenances et deppendances (ô) et a tout
autre droit qu'il pourroit quereller a l'encontre dudit sei-
gneur roy de Sicile, de tout le temps passé a quelque occa-
sion que ce soit, et de ce passera et fera lectres en la plus
(1) Louis de Neufchâtel, seigneur de Sillery. — Cf. H.
Lopage, la Guerre de Sedan, p. 220.
(2) Le même sans doute que Henri Sien, de Saint-Mihiel
(Lepage, la Guerre de Sedan, p. 223), et Henri Sienne
(Arch. de M.-et-M., B. 994, fol. r^l).
(3) Stainville, Meuse, a. Bàr-leDuc, c. Ancerville.
(4) Seraucourt, Meuse, a. Bar-le-Duc, c. Triaucourt, ou
Serocourt, Vosges, a. Neufchâteau, c. Lamarche.
(5) Pouoent, avec un signe d'abréviation.
(6) c II (Robert de la Marck) vouloit que ledit roy
(René II) ly rendit Dun-le-Chastel, Chavencey, Rombair,
Ranconval, qu'il disoit a lui appartenant > (Aubrion, éd.
Larchey, p. 333 ; cf. Dom Calmet, 2* éd., V, 423, et Bou-
teiller, op, cit., p. 35).
— 42 —
ample et seure forme que faire se pourra, seellées et signées
de luy, (ludit seigaeur mareschal. et d*autres qu'ilz seront
advisez, pour la seureté dudit seigneur roy, ses hoirs et
aïans cause.
Item, se on temps advenir escheoit et obvenoit audict sei-
gneur de Sedan quelque droit par hérédité, succession ou
contraitz, ou pour injures et oultraiges que pretendroit ou
pourroit prétendre a luy ou aux siens estre fais, ou quelque
autres querelles ez pays et seigneuries dudit seigneur, et il
en sourt débat, il pcursuyvra les cas et actions en justice,
par devant les juges (I) ordinaires des pays, soit contre
ledit seigneur roy, les nobles, gens d*eglise et gardes de ses
pays, et ne pourra procéder pour lesdictes querelles et ac-
tions par voye de hostilitez, ne de guerres, ne par autres
voyes , fors que par devant lesdiz juges, laquelle justice
ne luy pourra estre denyée par ledit seigneur roy.
Item, pour ce que ledit messire Robert, en la seigneurie
d*Âstoule (2), commune audit seigneur roy de Sicile et a
(1) Tout ce qui suit, jusqu'à ces mots : laquelle justice,
d'abord omis par le copiste, a été écrit à la suite de Pacte,
sous forme de renvoi, précédé du mot aprobo et suivi de la
signature Friart*
(2) Il faut, pensons- nous, lire Estante , forme ancienne du
nom de la petite ville d*Ëtalle, dans le Luxembourg belge.
Possédée pour deux tiers par les ducs de Luxembourg, et
pour l'autre tiers par les ducs de Bar, la prévôté d'ËtalIe se
trouvait, par conséquent, à la fin du xv« siècle, indivise
enlre l'archiduc d'Autriche Philippe le Beau et René II. On
conserve aux Archives du royaume de Belgique (Chambres
des comptes^ 6118) une série de comptes rendus, par Gabriel
de Giencourt, receveur des prévôtés de Chiny et d'Etallc
pour l'archiduc. Au v<> du 13* feuillet du plus ancien de ces
comptes commence l'état de la recette du « terme S^ Jehan,
l'an XV®, en la prevosté d'Estable, ou monseigneur prend le
tier, messire Robert de la Marck l'autre tiers en gaigière de
mond. 8', et l'autre a ung duc de Bar>. Cette indication
-^ 43 —
luy, c'est parforcé depuis certains temps ença, prendre et
lever sur les subgectz de ladicte seigneurie grand somme de
deniers, oultre le demainne, et de Tapplicquer a luy pour le
tout, ce que ne puet sans le consentement dudit seigneur
roy et de ses officiers, dont pourroit naistre débat et ques-
tion, ne pourra ledit messire Robert ne i^es ofllciers dores-
enavant prendre ne exiger aucune chose outre sa part dudit
demainne sur les subgectz de ladicte seigneurie sans le gré
ou consentement dudit soigneur roy ou de ses officiers, ne
pareillement ledit seigneur roy sans le consentement dudit
messire Robert ou de ses officiers.
Touchant monseigneur l'archiduc d'Austriche (1), ledit
messire Robert ne le servira de sa personne, ne de sa place
de Sedam a rencontre dudit seigneur roy de Sicile ; mais
s'il a de luy quelque fied, il Ten pourra faire servir selon la
nature du fied.
Et touchant ceulx de Metz, combien que ledit messire
Robert soit obligé a eulx, si ne les servira il aucunement a
rencontre dudit seigneur roy de Sicile, ses pays et seigneu-
ries, et pareillement, il ne servira icellui seigneur a ren-
contre desdiz de Metz, si donques n'estoit que quelquefois
ledit seigneur de Sedan tenist quelque terre de fied dudit
seigneur, onquel cas seroit tenu le servir.
Et pareillement, combien que' ledit messire Robert soit
alliez avec le duc de Juilliers (2), si ne le pourra il servir a
prouve qu'en 1500, par suite de Tabandon temporaire par
Philippe le Beau de la moitié de sa part, René II et Robert
de la Marck étaient coseigneurs d'Etalle. Il n*est pas invrai-
semblable de supposer qu'il en était de même trois ans plus
tôt, c'est â'dire précisément à l'époque du traité qui nous
occupe.
(1) Philippe le Beau, archiduc d'Autriche, fils de l'empe-
reur Maximilien et de Marie de Bourgogne.
(2) Guillaume YIII, duc de Befg et de Juliers, fils de
- 44 —
rencontre dudict seigneur roy, ne aussi ledict seigneur a
rencontre dudit duc de Juilliers.
Item, en tant qu*il touche le fait de Jannot le bastart (l)
ledit seigneur le mettra a délivre, et ceulx qui ont estuz
pris avecquesluy, réservé ceulx qui furent tuez a sa prinse,
avecques leurs biens qu'ilz avoient quant ilz furent prins,
desquelz biens, ledit Jannot le bastart fera serrement de
ceulx qu'il avoit a sa dicte prinse, aussy ledit seigneur roy
de Secille fera examiner par serrement le cappitainne de sa
garde et tous les compaignons estans a la prinse dudit
Janot, pour savoir quelz biens ilz avoient quant ilz furent
prins, lesquelz il leurs fera restituer selon leursdiz serre-
mens, et pareillement les biens des mors pour prier Dieu
pour eulx.
Item, ledit Jannot priera ledit seigneur de Sedam et
requerra avant sa délivrance par lettres missives, qu'il
v^uUe ratiffier et consentir a tout ce que ledit Jannot bas-
tart promettera audit seigneur roy de Sicile, tant de sa
Gérard VII et de Sophie de Saxe-Lauenbourg. Mort vers
1511 {Art de vérif, las dates. III, 184-185).
(l) Ce personnage était gendre du célèbre Guillaume de la
Marck ; il avait pris une part très active à la lutte que les
La Marck soutinrent contre les évêquos de Liège (Cf.
De Ram, op. cit. y passim). Notre traité fait allusion ici à
son arrestation, opérée le 20 mars précédent, à Juvigny-sur-
Loi?on (Cf. Lepage, Lx Guerre de Sedan, p. 208). Les docu-
ments que nous avons eus sous les yeux le mentionnent
diversement : Johannotius , bastardus de Scadous (De Ram,
p. 725) ; Johannes, dictus Jenot le hastard (id., p. 77(5) ;
Johannot bastardus , gêner domini Willeltni , strenuus
miles^ capitaneus castri de Longhe (id., p. 103) ; Johannot,
dxctus le Bastart (id., p. 105) , Jennont le bastairt, cappi'
tainne dudit 5' Robert (Aubrion, p. 387) ; le capitaine Jen-
not ou le bastard gascon , lieutenant de cent hommes
d^armes dti la compagnie de monsieur de Sedan (Mémoires
de Florange, prologue).
— 45 -
personne que de sa place de Longue (1) et ledit seigneur de
Sedam, ceste prière faicte, sera tenu de ce faire (2) .
Et en tant qu'il touche les compaignons qui ont esté
prins avec ledit Jannot le bastard, ledit seigneur de Sedan
ratiffira Tappoinctement que ledict Jannot en fera, a sa
prière.
Touchant le viconte d'Estoges, je Tay prins en ma
charge, en tant qu'il touche le fait des raarchans et mar-
chandies de Lorrainne, moyennant que ledit viconte rendera
les lectres et tiltres qu'il a touchant la seigneurie de
Vienne (3).
Item, au inoien et en considération de toutes les choses
dessusdictes, ledit seigneur roy de Sicile paiera content
pour une fois audit seigneur de Sedan la somme de dix
milz florins d'or, en ce comprins la debte du bastart de
Vaudemont pour le mariaige de sa femme, lequel paiement
se fera quant les lettres de cest appoinctement se délivre-
ront (4).
Item, et afôn que ledit seigneur de Sedan soit doresena-
(1) Cette localité, mentionnée par Aubrion, est identifiée
par M. Larchey, avec le hameau de Logne, au canton de
Metzerwisse. Les fréquentes mentions qu'on en rencontre
dans les documents publiés par De Ram nous portent à
croire qu'il s'agit de l'un des deux écarts appelés Logne et
Longue, dans la commune de Vieux-Ville (Belgique, prov.
Liège, arr. Huy, cant. Perrière).
(2) En 1499, Jeannot le bâtard était pourvu par René 11,
d'une pension annuelle de 300 francs, monnaie de Lor-
raine .
(3) Vienne-le-Château, Marne, arr. de Sainte-Menehorld,
cant. Ville-sur-Tourbe. — Par lettres patentes données à
Baugé, le 17 mai 1469, le roi René avait concédé viagère-
ment la jouissance de cette terre à Baladin d'Anglure et à
son flls René (Arch. de M.-et-M., B. 724. ti° 191).
(4) Cf. Lepage, La Guerre de Sedan, pp. 209-210 et p. 211
(note) .
— 46 -
vaot tenu et obligié de servir ledit seigneur roy de Sicile
contre tous et envers tous, réservé le roy et les dessus nom*
mez, est appoincté que ledit seigneur roy luy baillera, la
vie durant dudit seigneur de Sedan, par manière de pension,
la somme de douze cens frans, monnoye de Lorrainne et de
Barrois (l), a deux termes Tannée, assavoir Sainct Jehan et
Noël, dont le premier terme commencera a la Saint Jehan
Baptiste prochiennement venant (2).
IDn tesmoing de ce nous avons à ces présentes, sigiiées de
nostre main, fait appendre notre seel.
Et nous René, par la grâce de Dieu, roy de Jherusalem et
de Sicile, etc., ducde Lorrainne et de Har, etc., et je, Robert
de la Marck, seigneur de Sedan, parties dessus nommées,
cognoissons avoir accordé, passé et accepté toutes les articles
cy dessus insérées, pour Tonneur du roy, lesquelz et chacun
d'eulz nous promettons avoir, tenir et entretenir bons,
valables, fermes et estables, sans y contrevenir en manière
que ce soit ou puisse estre, et en signe de ce nous avons a
cesdictes présentée, signées de noz mains, fait appendre
noz seaulz avec le seel dudit seigneur mareschal.
Donné le vingtz cinquième jour d'octobre mil quatre cens
quatre vingtz et dix sept.
Ainsi signé Jehan, René et Robert.
Et pourtant que cestuy présent vidimus et transcript soit
a tousjourmais plus creable, ferme et estable, nouSf les
gardes dessus diz, avons mis et appendu a ces présentes le
seel du devant dit tabellionnaige de nostredit seigneur le
(1) Cf. Aubrion, p. 395, et d'après lui Dom Calmet, 2*
éd., V. 438, et Bouteiller, p. 47.
(2) D*après Aubrion (p. 395), Robert devait renoncer aux
gages de la cité de Metz : rien de semblable, on le voit, n'est
stipulé dans le traité.
— 47 —
duc de sadicte court de Nancey, sauf son droit et Cautruy,
que fut fait et transcript les an et jour dessusdii.
FRIART
(Scellé en cire verte sur double queue. Arch. de Meurthe-
et-Moselle, B. 593, n« 23) (1).
(1) Nous avons eu sous les yeux deux autres textes de ce
traité, conservés, Tun aux Archives de Meurthe-et-Moselle
(B. 349, fol. 76), l'autre aux Archives de la Meuse
(B. 239, fol. 70 V*»). Mais comme ces textes ne sont que des
copies exécutées, celle-là au xvi* siècle, celle-ci au xvii*,
du vidimus que nous venons de reproduire, nous n*avons
tenu aucun compte des variantes, uniquement duos à des
distractions de copiste, qu'ils peuvent fournir.
48
APPENDICE
Plainte portée devant le Parlement de Paris, au nom de
René II, contre Robert II de la Marck.
Aujourd'uy (1), le duc de Lorraine a escrit certaines
lettres missives dont la teneur s'ensuit :
oc Messeigneurs, je me recommande à vous. Je vois
a qu'estes assez informez comme il a pieu pieça a monsei-
a seigneur le roy appoincter le différent d'entre messire
a Robert de la Marche et moy en justice par devant lui en
« donnant ses lettres et commissions a certains juges
c royauix d'en instruire le procès afin que icelui parfait il
c en fuist par lui dit et jugé par droit, ce nonobstant, et
« avant la décision dudit différent, ledit messire Robert,
« contempnant et contrevenant a Tordonnance et appoincte-
a ment dessus dit, puis aucuns jours a fait amas de grand
c nombre de gens de guerre tant a pied comme de cheval, et
c partant du royaume est venu en mes pays, mis les feux en
c plusieurs villes, prins corps d'ommes et bestial tant qu'il
oc a peu avoir, et puis quant il s'est trouvé pressé de mes
« gens, s'en est retourné avec sa proye ondit royaume et y
a fait son butin tout a son plaisir. A cette cause, j'ay
(1) 8 août 1496.
— 49 —
« donné charge a mon conseiller r»bbé de Sainct Ëpvre
c vous remonstrer les oultrages et dommages qui me sont
« faiz par ledit messire Robert et ses complices partans et
a rentrans ondit royaume contre et sur ce qu'estions en
<c justice, comme dit est, vous priant bien afTectueusement
c que attendu le bon debvoir en quoy je me suis mis, veuil-
a lez de vostre part tenir main envers monseigneur le roy
c que la raison m'en soit faite ainsi que ledit de Sainct
a Epvre vous priera de par moy, lequel vuellez croire
« comme moy mesmes, et en ce que je vous pourray faire
« plaisir en gênerai et en particulier, je le ferai de bun
a coeur, aydant Dieu qui vous donne ce que plus desirez.
« Escript au Pont , le vingthuitième jour de juillet
a iiij" xvj >. Sic subscriptum : « Le tout vostre, René » ; et
in dorso est scriptum : « A raesaeigneurs de la court de
c Parlement ».
Après la lecture desquelles, pource qu'elles portoient
créance sur Tabbé de Sainct Epvre de la maison dudit duc,
fut fait venir ledit abbé, lequel pour exposer sa créance,
remonstra a la court que troys ans a messire Robert de la
Marche voulu faire guerre au duc de Lorraine son maistre^
pour certain différent qui estoit entre eux a cause de la
seigneurie du Ncufchastel (l) ; ce venu a la congnoissance
du roy, pour obvier a ce qu'aucun inconvénient n'en peust
advenir, du consentement des parties retint la congnoissance
de ceste matière ; ce nonobstant depuis peu de temps ledit
messire Robert a fait amaz de gens de guerre tant a pied
que a cheval, jusques au nombre de trois ou iiij"^ hommes,
entre lesquelz estoient plusieurs gentilzhommes du païs de
Champagne, voysins des pays dudit duc et sont violentement
et en façon de gens de guerre entrez en le duché de Bar, ont
brullé V ou vj bons villages, tué plusieurs gens, prins pri-
sonniers, pillé et ravy beaucoup de biens, et après, pour
(1) Sic. 11 faut Ccirtainement lirô de Dun le chasteL
4
- 50 —
doubte de la pourBuite qu'il estoit vraysemblable que Ton
leroit, se retirèrent es pays du roy à Reims, Ohaalons et os
environs avecque« leur proye, et la ont party leur butin, que
ledit duc a trouvé bien estraoge, actendu qu*il est parent du
roy et a bien servy le roy et le royaume sans avoir jamais
fait chose parquoy on luy deust faire telz oultragés, lui
avoit escrit ledit duc son maistre remontrer les choses des-r
susdictes a ladicte court et luy supplier ordonner commission
estre baillée audit duc pour informer des choses dessusdictes
pour icelle information estre rapportée devers icelle court,
et y estre pourveu ainsy qull appartendra pour r&ison,
lequel abbé a esté fait retirer. Si a semblé a ladicte court
ladicte requeste estre raisonnable, toutesfois attendu la qua-
lité de la matière a esté ordonné que les lettres dudit duc,
ensemble la recreance dudit abbé, seront envoyées devers le
roy avec les lettres missives que ladicte court lui escrira.
(Extrait des registres du Parlement de Paris, Conseil, —
Arch. nat., X*» 1502, fol. 413 v«>).
FERRI DE BITGHE
PAR
M. le Comte M. de PANQE
Parmi les questions auxquelles tous les historiens
lorrains se sont appliqués, et qui cependant ne sont
pas encore tranchées d'une manière satisfaisante,
aucune n'a été aussi souvent agitée que celle-ci :
Simon II, duc de Lorraine en 1176, a-t-il eu pour
successeur son frère, Ferri de Bitche, ou bien son
neveu, Ferri de Bitche, fils du premier ?
Les anciens documents de notre histoire (1) n'admet-
taient pas Ferri I" de Bitche au nombre des ducs de
Lorraine, et Dom Calmet est le premier qui ait osé
dire : « Nous ne faisons nulle difficulté de le ranger
au nombre de nos souverains ». Cette assurance
devait être bien justifiée (2) pour permettre à Dom
(1) Richerins Senon., Genealogia S.-Arn., Albéric. Tp.
Font.
(2) Les preuves sur lesquelles s'appuie Dom Calmet
sont :
1» Une pièce de 1206, dans laquelle le duc Ferri se dit
fils de Mathieu.
2° Une charte originale du duc Ferri IIL 1295, dans
— 5:2 —
Galmet de mépriser ainsi, non seulement nos anciens
historiens , mais encore des savants , tels que le
laquelle il parle du duc Ferri, fils du duc Mathieu (ces
deux pièces aux preuves de Calmet).
3<» La chronique des rois de Pologne, par Mathias de
Michovie.
4« Une inscription de Tabbaye de Sturzelbronn.
I. Si le^ premier document était authentique, D. Calmst
aurait raison. Mais il ne s*est pas aperçu de Torigine plus que
douteuse de cette pièce que, longtemps auparavant, Aubert
le Mire déclarait suspecte. Nous en prouvons plus loin la
fausseté. Les autres documents sont d'une bien moindre
importance, puisque le plus ancien est postérieur de près
d*un siècle à la mort de Ferri de Bitche.
II. Dans la charte de 1295, Ferri 111 donne à son bisayeul
Ferri, fils du duc Mathieu, la qualité de Duc. D. Calmet,
rapprochant a document authentique de la charte fausse
qui précède, en a conclu que Ferri !•' de Bitche a été réel-
lement duc en 1206. Nous n'en tirons pas la même conclu-
sion : Ferri III pouvait sans inconvénient donner à son
arrière-grand- père un titre dont il n'avait jamais été légiti-
mement investi, mais qu'il s'était attribué en 1199 et 1202.
III et IV. — La chronique des rois de Pologne et l'épi-
taphe de Sturzelbronn sont des documents encore moins
probants. Us sont relativement modernes, car l'épitaphe du
sire de Bitche n'a été composée que longtemps après sa
mort (Benoît, Orig., p. 258). Du reste, le texte de cette
inscription dit seulement que Ferri, qui y est nommé
comte (a)- de Bitche, « Lotharorum dux fuit idem » ; sans
dire que ce titre fût légitime.
a) II n'y eut pss de comtes de Bitche de la Maison do Lor-
raine. Ce titre a été pris bien plus tard par les comtes do
Deux-Ponts, sires de Bitche.
Quant à la chronique de Mathias, outre qu'elle est étran-
gère à notre pays, et bien postérieure à ces événements,
elle a pu, comme le faisait en 1295 le duc Ferri III, donner
après coup, au sire de Bitche, un titre dont il n'avait été
- 53 —
P. Benoît Picart^ François de Riguet et J.-C. Som-
mier, archevêque de Gésarée.
C'est ce que pensèrent tous les écrivains qui ont
abordé cette question : les auteurs du Traité de
Diplomatique, ceux de TArt de vérifier les dates et
M. Digot ont admis le règne de Ferri I*^
Cependant, malgré Tunanimité de ces auteurs (1),
un doute a été exprimé en 1790 par M. de la Porte du
Theil (2) et ce doute est suffisant pour autoriser le
travail que nous présentons.
Nous allons d'abord résumer Tensemble des docu-
ments et en tirer les conclu sions qui seules, à noire
avis, peuvent les concilier. Ensuite, nous signalerons
les pièces fausses qui ont trompé nos devanciers.
Mais pour comprendre le règne de Simon II et les
luttes qu'il eut à soutenir contre son frère Ferri, il
faut remonter aux premières années de leur jeunesse
et étudier le milieu dans letpiel ils ont grandi.
Les premiers documents où figurent les enfants du
Duc Mathieu P' et de Berlhe de Souabe, sont des
années 1155, 1156, 1159, 1160et 1161. Acette époque,
TEmpereur Frédéric I" Barberousse , frère de la
(1) Déjà en 1775. les Bénédictins, auteurs de THistoire de
Metz, Teviennent, t. ii,p. 314, à l'opinion d'Albéric : « Thié-
baud, comte de Bar et beau-père de Ferri I*^ successeur de
Simon II, dans le duché de Lorraine », d'après Albéric,
ad ann. 1206 et 1207.
(2) Notices et extraits des manuscrits, tome III.
que l'usurpateur. Nous laissons au duc Ferri, fils de Ma-
thieu II, le nom de Ferri III, pour ne pas jeter la confusion
dans Tordre chronologique de ces princes tel que le donnent
les auteurs de TArt de vérifier les dates.
— 54 -
Duchesse Berthe, était dans tout Téclat de son régne,
et le Duc de Lorraine sans être des plus assidus parmi
les fidèles (1) de TEmpereur, subissait l'ascendant
qu'assuraient à Berthe Ténergie de son caractère et
son crédit à la cour impériale. De l'étude des
chartes les plus anciennes, oii paraissent les fils de
Mathieu I", il résulte qu'en H 56 la Duchesse et Simon
sont témoins d'une charte du Duc pour St-Gengoul
de Toul (2). Mais en 1155, 1159, 1160 et 1161, la
Duchesse intervient (3) dans les chartes du Duc avec
ses fils Mathieu et Ferri, sans parler de Simon.
Ce (4) fait est d'autant plus remarquable qu'une
de ces chartes (1159) est la confirmation par
l'Evêque de Toul de celle de 1156 et par conséquent le
nom de Simon a été remplacé à dessein par celui de
ses frères cadets. D'autre part, quand le Duc paraît
sans la Duchesse Berthe, en 1163 et peu avant 1163,
vieux style (5), c'est Simon que le Duc appelle seul à
signer à côté de lui.
(1) Il ne 8*éloigna jamais de ses Etats et ne prit part à
aucune des expéditions dltalie, TËmpereur soutint contre
lui TEvêque de Metz et TArchevêque de Trêves (Gesta) .
(2) Benoît, Supplément, p. 33.
(3) Elle paraît dans l'intitulé des chartes, ce qui ne s'était
jamais fait en Lorraine. Chartes de l'Etanche 1148, 1149, de
Glairlieu et de St-Gengoul 1159, Ste-Marie-au-Bois 1160.
(4) L'Evêque de Toul était f'ivorable à Simon ; il lui avait
donné en 1153 la vouerie de Burthecourt (Richer. Sen.).
C'est donc Berthe seule qui lui est contraire. Richer aurait
dû écrire : Symon postea dux. Comparez charte 24 de Balei-
court, Simon Duc 1177.
(5) Chartes pour St-Mansuy de Toul et pour Haute-Seille,
Gall. chr. xiii, pr. ; original abbaye de Haute-Seille.
_ j
— 55 -
On peut conclure de ces sept chartes que la Duchesse
avait une préférence marquée pour ses fils cadets et
que le Duc ne faisait prévaloir ses propres (1) sympa-
thies que lorsqu'il échappait à Tinfluence de Berthe (2).
Aussi, quand ses fils sont en âge de paraitre à
la cour de FEmpereur leur oncle, c'est le favori de
Berthe, Ferri, que le Duc (3) conduit avec lui à
Kaiserlautern en 1173, tandis que c Simon filiusducis »
reste en Lorraine et figure comme témoin d'une
charte donnée, « apud Bellum pratum » (4), le 22 mars
1174, par son frère Télu Thierri de Metz « in presencia
comitis Moncionis Henrici ».
(1) Dans la suite et avant la mort (1165) de Henri de Lor-
raine, Ëvêque de Toul, Simon est toujours nommé avant Ferri.
Voyez les chartes du dit Ëvêque Henri et les diplômes de
Mathieu pour St-Bénigne de Dijon, 1166, pour Clairlieu et pour
Ghastenoy, 1172.
(2) En 1162, charte du Duc pour S^«-Marie-au-Bois, la Du*
chesse n'y paraît pas. Hugues, Comte de Dagsbourg, se ré-
volte en 1162 contre l'Empereur et est soutenu par Etienne,
Eyêque de Metz, qui deux ans auparavant avait été le com-
pagnon d*armes du Duc contre le Comte de Saarwerden.
Après cinq ans d'absence de TEmpereur, le Duc ne parait dans
aucun diplôme à la suite de son beau-frère, 1162 et suiv. ;
mais seulement en 1166. C'est sans doute à ce moment, 1162,
que le Duc affecta de blesser la fierté de son épouse en se
montrant publiquement avec sa maîtresse.
En 1162 (Stuoipf, die Reichskanzler, 8946, ouvrage dési-
gné plus bas par les lettres St.), l'Empereur écrit à Mathieu
de Lorraine de se trouver à la fin d'août au Concile de Saint-
Jean «de-Losne. Le duc ne s'y rendit pas (St. 3967. Prutz
Kaiser Friedrich '1, tome I. 314).
(3) Ch. pour Beaupré. (Archives de M.-et-M., H., 331).
Original.
(4) Original, abbaye de Gorze, à Metz, H 875, et Cartulaire
du 12* siècle, folio 263 verso.
— 56 —
Celte charte nous fait voir Tabandon dans lequel était
tombé Simon depuis que la Duchesse (1) avait obtenu
de son frère TEvêché de Metz, pour son fils Thierri.
Elle avait par là regagné toute son influence et le Duc
avait été si heureux de cette élection qu'il avait aban-
donné à l'église de Metz (2) son château de Sierck et la
vouerie d*Epinal. Cette charte nous permet aussi de
supposer que Simon, pendant ses mauvais jours., avait
reçu l'hospitalité dans l'abbaye de Beaupré, à laquelle
il témoigna toujours une grande bienveillance (8).
Mais ce qui est aussi très remarquable, c'est que le
Comte de Bar, possédant la moitié de tout le pays
de Lorraine, neveu de la Reine de France et des deux
gendres du Roi, cousin germain de Théritier du trône,
était seul assez puissant pour qu'avec son appui
Simon pût un jour triompher de ses ennemis. Dès lors
on doit supposer que Tidée vint au jeune prince lor*
rain de s'appuyer plus tard sur cette maison de Bar
pour combattre l'ambition de son frère ; car, si les forces
dont disposait le Duc de Lorraine pouvaient à peine
lutter contre celles de la maison de Bar, le sire de
Bitche, malgré toute sa valeur, devait être écrasé par un
aussi puissant ennemi : c'est ce qui arriva en effet.
Telle était la situation des deux frères quand le Duc
vint à mourir le 13 mai 1176 (4). Très peu de jours
(1) Fia de 1173. Benoît, Supplément, p. 37.
(2) Oesta Bp. Met.
(3) Il se dit c fraler conscriptus et unus de fratrihus in
eadem professis >. Chartes de 1176, 1194, 1195 presque dans
les mêmes termes.
(4) Jour de TAscension, 3 des Ides de mai, chartes de
Simon pour Beaupré 117% 1194. Il fut enterré à Clairlieu le
lendemain 14, 2 des Ides. Charte de l'Evêque de Tout pour
Clairlieu.
- 57 -
avant sa mort, il avait fait une donation au Prieuré de
St-Nicolas : c Matheus dei gratia Lotharingie dux et
€ Marchio et Bertha ducissa huius doni testes qui
« et datores nobiscum fueruut filii nostri. Domnus sci-
« licet Theodericus Metensis electus Symon et Fridericus
« et Matheus fratreseius et sororeorumAdelidis ducissa
€ burgundie Actum legittime, publiée recitatum,
« canonice confirmatum apud Ghermes anno domini-
« ceincartionisM. C. LXX. VI indictione VIIII (1) con-
« currente IV Epacta VII régnante Domno Friderico Ro-
« manorum Imperatore gloriosissimo^ anno regni eius
€ 25 imperii vero 22 actum féliciter in nomine domini
« amen » (2).
D'après ce que nous venons de dire, on prévoit ce
qui devait arriver à la mort du Duc Mathieu. La
Duchesse Berthe ne se résignerait pas à renoncer au
pouvoir et moins encore à le remettre à Simon (3). Elle
tenta par tous les moyens possibles de conserver la
régence.
Nous ne voudrions pas admettre entièrement ce que
dit à ce sujet M. Digot (4). Du reste ses efforts furent
(1) Pâques tomba, en 1176, le 4 avril; déplus, la 25« année
du règne commence le 9 mars 1176, mais la 22* de TEmpire
le 18 juin seulement. Cette pièce doit donc être bien peu
antérieure à la mort du Duc.
(2) Original scellé, Archives de Meurthe-et' Moselle,
G. 449.
(3) Elle fit frapper dcb médailles en son nom et, dans une
charte du 13 juin 1176, un mois après la mort de Mathieu,
obligée de donner à Simon le titre de Duc, elle parle cepen-
dant du Duc Mathieu comme s*il était encore vivant, cher-
chant par là à diminuer à son profit Tautorité du Duc
(Baleycourt, n» 21).
(4) Tome !•' p. 342.
- 58 -
inutiles et Simon resta en possession de ses droits (1).
« Juste desiderio et vocatione légitima virorum nobi-
lium terrœ et hereditario jure ». La Duchesse ne le lui
pardonna pas; aussi, dans la même charte, Simon,
prévoyant les diffîcultés contre lesquelles il aurait à
lutter, dit que le Duc son père Ta laissé en mourant
<K multis curarum nexibus irretitum ». Cette appréhen-
sion n'était que trop justifiée. Dès son arrivée au pou-
voir, Simon avait écrit à Pierre de Brixey, Evoque de
Toul, pour lui demander son appui (2). L'Evêque s'oc-
cupait alors de la reconstruction du château de Liver-
dun et cette forteresse pouvait être une menace conti-
nuelle ou un appui certain, suivant que le Dnc serait
considéré comme ennemi ou comme allié de TEvêque.
De plus, d'accord avec sa mère, et peut-être avant
d'avoir éehappé à son autorité, il écrivit (8) la même
année à ce prélat en rassurant qu'il pouvait compter
sur l'appui du duc de Lorraine pour la reconstruction de
Liverdun.
Mais c'est ici que Simon ressentit le premier etlet de
l'animosité de Berthe. L'année suivante, en effet (1177),
TEvêque (4) associait à la reconstruction de Liverdun,
non pas le Duc, mais le Comte de Bar^ et le traité fait à
ce sujet est dirigé personnellement contre le Duc de
Lorraine. On peut voir dans ce fait une vengeance de
Berthe ; car la reconstruction de Liverdun (5) avait été
(1) Charte du Duc pour Beaupré, 1176.
(2) Benoît, Orig. p. 245.
(3) Benoît, Orig., p. 246 et Hist. de Toul, p. 423.
(4) Voyez aux preuves.
(5) Dipl. de 1178, daté par erreur 1168 dans les pr. de
Calmet : « laude et assensu nostro hoc fecit. »
— 59 —
favorisée par son frère, l'Empereur Frédéric, et le
Comte de Bar, qui figure parmi les témoins du diplôme
impérial, prêtait foi et hommage à l'Empereur comme
comte de Bourgogne, au mois de septembre 1178.
C*était donc a la faveur de la Maison de Souabe que le
Comte de Bar devait ce traité si avantageux et il est
permis de supposer que Berthe n'y fut pas étrangère.
Nous arrivons à ce qui fait l'objet principal de cette
étude : la lutte de Simon contre son frère Ferri de
Bitche. Le plus ancien document concernant cette
rivalité est le traité du 2 mai 1179, par lequel le favori
de Berthe, Ferri; obtenait une situation jusqu'alors sans
précédent en Lorraine; aussi la Duchesse était-elle
présente à ce traité, quoiqu'il fût passé à Ribemont, en
Vermandois, bien loin de la Lorraine et des Etats de la
Maison de Souabe. Les deux frères, qui s'étaient (ait
une longue guerre, la terminaient par ce traité. Mais
l'ambition de Ferri, loin d'être satisfaite par un accord
aussi favorable (1), en devint, au contraire, plus insa-
tiable et la lutte entre eux ne faisait que commencer.
Cependant, ce fut contre l'Archevêque de Trêves que
Ferri tourna d'abord ses armes. Ce prince de l'Empire,
devenu, par le traité de 1179, vassal de Ferri de
Bitche^ avait sans doute trouvé dans son nouveau
(1) Il avait toute la Lorraine allemande et la promesse
de succéder au Duché si le Duc mourait sans enfants. Sur ce
dernier point, Ferri étant Théritier légitime de Simon, il
est probable que sqs droits à la succession du Duché ne lui
furent garantis que parce qu*il les avait compromis par »a
rébellion. Sa seconde révolte, en 1202, les lui fit perdre défi-
nitivement. Même remarque pour la déclaration des nobles
lorrains. — Digot, 1, p. 847.
— 60 -
seigneur un suzerain trop exigeant et certainement
dans son nouveau voisin un pillard trop déterminé ; la
guerre fut déclarée.
L'Archevêque s'allia à la Maison de Bar et Thiébaud
do Bar lui amena des troupes dont, en l'absence de son
frère, il était le chef. Il prit le commandement de
l'armée, infligea à Ferri une défaite (1) complète et le
fit prisonnier ainsi que Ferri, son fils aîné.
La Maison de Bar commençait, on le voit, en abais-
sant le prestige des sires de Bitche, à rétablir l'auto-
rité de Simon. Dès ce moment, dans les chartes du
Duc, comme dans celles de Ferri de Bitche, les deux
frères agissent absolument comme s'ils ne se connais-
saient pas. Jamais l'un d'eux n'est témoin d'une charte
de l'autre et, sauf une pièce de Mathieu, prévôt de
St-Dié, 1188, une de Henri, Comte de Bar, 1190, et le
diplôme royal de 1188, jamais ils ne paraissaient
ensemble.
(1) LesGesta : Mart. ampl. coll. iy,211, ne donnent pas de
date, disent que Ferri avait fait de fréquentes incursions sur
les terres de TArchevêque, ne parlent pas de la prise de
Ferri et de son fils, ni du commandement de Tarmée par
Thiébaud de Bar. C'est Brower, livre 14, p. 75-76, qui
donne ces détails, mais son récit est plein de confusions :
la date 1172 est (iémeotie, puisque Mathieu, Duc de Lor-
raine, était déjd mort. Donc, après 1176, nous croyons qu'il
faut lire hclxxx, car en cette année Ferri ne guerroyait ni
contre les Gottereauxy ni contre son frère Simon; il était
déjà en possession du fief de TArchevêque et enfin Henri,
Comte de Bar, prit part cette année 1180 aux fêtes du cou-
ronnement de son cousin Philippe-Auguste (Gilbert de
Mons). C'est ce qui explique pourquoi Thiébaud comman-
dait les Barrisiens. Du reste, avant cette date, Ferri, fils
aîné de Ferri de Bitche, aurait été bien jeune pour porter
les armes.
— 61 —
Nous avons, pour arriver à cette conviction, consuUé
toutes les chartes de Simon et de Ferri, tant aux
archives de Meurthe-et-Moselle, que dans tous les
autres dépôts.
Ferri, cherchant à s'assurer la faveur du futur héri-
tier de l'Empereur Frédéric, quitta la Lorraine où il
était encoreen 1186 (1) et rejoignit le Roi Henri en Italie ;
nous le trouvons témoin de deux diplômes de ce prince
datés, le premier près d'Ostricoli, le 24 juin 1187 (2)
et le second à Pavie, le 17 septembre de la même
année. Il revint avec le roi et ce retour semble avoir
produit un rapprochement entre les deux frères, car
ils figurent ensemble comme témoins d*un diplôme de
Henri VI, à Toul, le 4 mars 1188, et d*une charte de
Mathieu de Bitche, grand prévôt de St-Dié, de la même
année.
C'est sans doute* alors qu'eut lieu le mariage du fils
aîné de Ferri de Bitche, avec la fille de Thiébaud de
Briey, depuis Comte de Bar, car on sait que ce
mariage est antérieur au départ de Henri, Comte de
Bar pour la Croisade, en 1189 (3).
(1) Stumpf III, numéros 181, 182. Dans ces deux diplômes
et dans celui de 1188, on a lu : Dux de Bites. Mais il résulte
des chartes originales pour Beaupré, etc.. que Ferri ne por-
tait, en 1186 et 1188 (Sommier, Hist. de St-Dié, p. 403), que
le titre dedominus doBite. Gomme, dans ces diplômes Ferri
passe avant les Comtes de Nassau, de Dagsbourg, etc., le
copiste a sans doute pensé qu'il fallait lire dux au lieu de
dns, qui est la forme usitée dans les documents originaux
émanés do Ferri de Bitche.
(2) Chartes pour Beaupré, datées deGerbéviller etdeRam-
bervillers.
(3) Catalogue Marchand, pièce sans date, u? 77 et par
erreur n9 IfiO.
— 62 --
Aussi, cette année 1189, (1) ie Comte Henri de Bar,
faisant, avant de partir pour la Terre-Sainte, une dona-
tion à TAbbaye de Ste-Marie-au-Bois, la fit souscrire
par Simon, Duc de Lorraine, Ferri de Bitche et Ferri
de Bitche, le jeune.
A peine une sorte d'entente s*était-elle rétablie dans
la Maison de Lorraine, l'Empereur Frédéric mourut
(10 juin 1190). Tant qu'il avait vécu, la Duchesse
Berthe, à défaut du pouvoir, devait se flatter d'exercer
en Lorraine une grande influence ; mais aussitôt son
frère mort, elle eut à subir une preuve bien' cruelle de
son abandon. Bertram, Evoque de Metz, revenu de son
long e^il à Cologne et soutenu de la faveur de
Henri VI, exigea de Berthe (2), frappée d'une sentence
d'excommunication, qu'elle vînt à Metz et là, seule au
milieu de tous les dignitaires du Chapitre, des princi-
paux chevaliers et officiers de la cour de Bertram, elle
reconnut ses torts envers l'Evêque. Elle perdit, en cette
occasion, tout son prestige.
Le Duc Simon la traite comme une étrangère (3) et
dans la charte d'Eudes de Vaudémont , Evêque de
Toul , et du Duc Simon pour Remiremont , du
18 octobre 1194 (Benoît, Hist. de Toul, Gall. chr. xiii),
(1) Cette charte, dont roriginal ne se trouve plus, est pu-
bliée d'après une copie dont la date est erronée. Le Comte
dit qu'il part pour la Croisade, ce qui eut lieu en 1189. En
1180, il était aux fêtes du sacre de Philippe- Auguste (Gil-
bert de Mons).
(2) 20 septembre 119L (Elle ne voulait pas rendre à
TEvêque la cour de Faux que son fils, TËlu Thierri, lui
avait engagée, latin 10021, fol. 2ô5''o.)
(8) B. ducissa. A. filia sua (charte du Duc Simon, 1191,
vieux style).
— 63 —
elle ue paraît que tout à la fin des témoins : Malhaeus
cornes TuUensis et mater ehis ducissa.
Elle mourut, dit-on, Tannée suivante.
La disgrâce de Berthe offrait à Simon une occasion
favorable de revendiquer près du nouvel Empereur le
rang auquel il avait droit. Il sut en profiter, car
Henri VI voulant, avant de partir pour Tltalie en
mai 1194 (1), réunir autour de lui tous les grands de
son royaume, donna pendant cette assemblée, qui eut
lieu à Trifels le 9 mai 1194, trois diplômes (2), dans
lesquels Simon parait le premier des laïques avant les
propres frères de TEmpèreur Othon et Philippe.
C'était, surtout dans une réunion solennelle des princes
de TEmpire, une faveur spéciale pour Simon, puisque,
quelques jours seulement auparavant, à Aix-la-Cha-
pelle, le 19 avril 1194, ce même Philippe passe avant
les Ducs de Brabant et de Limbourg. Aussi Ferri de
Bitche ne paraît dans aucun de ces diplômes. Son
absence est d'autant plus remarquable que Trifels était
tout près de Bitche, dont Simon avait dû traverser la
seigneurie pour se rendre auprès de l'Empereur.
Cependant, Ferri ne se tenait pas pour battu e^
espérait bien rentrer en faveur auprès d'un prince
dont il avait été le compagnon d'armes en Italie. Aussi,
dès le premier voyage que Henri VI fit sur la rive gau-
che du Rhin après la mort de la Duchesse , nous
voyons les deux princes lorrains figurer Tun après
(1) Cunctos regni sui evocavit principes^ Kaiser Henrich
VI, von Theodor Toeche. Leipzig, 1867, in-8o, p. 331.
(2) Voyez ces trois diplômes aux sources indiquées par
M. Tœche, p. 667, et aussi Mittelrhein. Urkundenb.,2, 177.
— 64 —
l'autre, en évitant de se trouver ensemble, à la cour
impériale. Ferri, à Brumath, le 21 juin 1 196, et Simon (1),
à Bruyères, le 28 du même mois. Il semble que Ferri
fut mieux accueilli, car il obtint pour son vassal, Sige-
bert de Franckenbourg, le Landgraviat de la Basse-
Alsace. Cette faveur fortifiait beaucoup son parti.
Le manque de documents nous empêche de dire s'il
y eut, dès ce moment, des hostilités. Ferri était retiré
dans son château de Bitche cette année 1196 (2), tandis
que Simon, à la même date, se trouvait à Rosières et à
Nancy (3). Le Duc était déjà âgé et sans enfants, TEmpe-
reur avait donc intérêt à favoriser Ferri-; mais Simon,
dont la patience était lassée, n'entendait plus tolérer
aucun empiétement sur son pouvoir ; c'est lui-même
qui nous le dit, avec une recherche de style qui prouve
l'importance qu'il attachait à cette déclaration : < In
« nomine sancte et individue trinitatis. Quoniam dies
« maU sunt et laudatur peccator in desideriis anime
a sue et iniquus benedicitur. Ego Symon dei provi-
« dencia Lotaringie dux et Marchio forUssimus qui a
« domino potestatis potestatem accepi esse super capita
« hominum ad vindictam malorum laudem vero
« bonorum decrevi illorum propulsando maliciam
« istorum pacem et quietem fovere continuam ».
Après la mort de Henri VI, (Messine, 28 sep-
(1) Simon était sûr de ne plufi trouver son frère à la suite
de l'Empereur, car Ferri ne paraît ni dans le diplôme du 25,
ni dans celui du 26. Alsatia dipl. et Mon. germ. Voyez
Sturapf, 5010, 5011, et Tœche, n<»= 420, 421.
(2) Calmet, pr.
(3j Charte de Ste-Marie-au-Bois.
— 65 —
tembre 1197), Tanarchie qui signala la lutte des
Maisons de Souabe et de Brunswick , jointe à la
misère (1) qui; pendant quatre années entières, désola
notre province, permit à Ferri de déclarer ouvertement
ses prétentions et, dans la lettre du 28 mai 1199 (et
non 1198), adressée au Pape Innocent III (2) par les
partisans de Philippe de Souabe, il ose prendre la
qualité de Duc de Bitche. C'était la guerre déclarée
contre Simon. Mais celui-ci, qui se donnait, en 1196,
l'épithète de fortissimus, avait mis son courage au
service de Tancien ennemi de Kerri , Thiébaud de
Briey, devenu Comte de Bar, et l'avait aidé à faire valoir
(1) Sur cette famine de quatre ans, voy. PhiC, de Souabe,
par Winkelmann, p. 43 44. Digot, I, p. 361, dit lig*?- 1198.
Voyez la Famine dans le diocèse de Trêves, 1196-1197,
Mittelrhein. Regest., n» 785, et en 1198, ibid , n? 842.
« Eoquod terra pauper et sterilis esset et bella ferre non
valeret >, Qesta, Trev. ampl., 4, 224.
Hoc anno (1198) famés valida. Venitquartafru menti xx, so-
lidisetfactaest mortalitas maxima (Chron. brève. Sancti Vin*
centii metensis, ap. Labbe, Bibliotheca manuscriptorum). --
Mais si le âéau était à son (*.omble en 1198, dès Tannée 1195 le
pain manquait dans les environs de Nancy : < In territorio
de Moncellis... anno 1195, cum panis inopia multum angus-
taretur idem Wirrirus (de Muriviler) obtulit predictas
iornales deo etSancte Marie belliprati et habuit pro hoc
Wirricus xx^^ wigas annoneetv sol. tull.,etc...». Cartulaire
de Beaupré, latin 11024, folio 110.
Pour éviter les désordres à craindre pendant un tel fléau,
Bertram, Ëvêque de Metz: c litteris oo anno (1196), testatur
burgenses do Vico ob securilatem villam suam mûris
cinxisse a>.6alliachr. xiii ; original, abbaye de Trois-Fon-
taines (Archives de la Marne).
(2) Bohmer , Regesta imperii, t. V, edid. J. Ficker,
Innsbruck, 1879^ p. 11.
5
— 66 —
ses droits à la succession de Namur (1). Reconnais-
sant de ce secours et craignant sans doute que le Duc
ne punît la félonie de Ferri en le privant, lui et ses
descendants, de la succession au Duché, le Comté de
Bar, pour qui, dans ce cas, la cession de Longwy,
Stenay et Amance (2) aurait été un sacrifice inutile,
conclut, dès le 26 juillet 1199, un traité de paix avec
les Comtes de Flandre et de Namur (3). Par ce
traité (4), le Luxembourg et une grande partie du
Comté de Namur restèrent à Thiébaud, et Ferri se vit
menacé à la fois par le Luxembourg (5), au Nord, et
par les Comtés de Briey et de Mousson, les états du
Duc de Lorraine, à TËst et au Midi. Ce fut le commen-
(1) Benoît, Orig., p. 252. Galliot, Hist, de Namur, t. I
(1788), folio 182.
(2) Cédés à sa fille ea la mariant à Ferri de Bitche, le
jeune. '
(3) Albéric (Mon. germ, SS. 23., folio 871) uoua montre
bien que ce traité de paix (qui permit à Thiébaud d'attaquer
Ferri de Bitche), fut Torigine du crédit que le Comte de Bar
obtint auprès du Duc Simon, car il parle de la cession du
Duché à Ferri, en 1206, comme d'un événement associé
dans son esprit â ce traité. Le Comte de Bar prit à cœur
cette guerre contre Ferri de Bitche. En effet, après la mort
du Comte de Champagne, son cousin (1201), les croisés
français lui proposèrent d'être leur chef ; il refusa, et Ville-
hardouin, qui blâme le Duc de Bourgogne d'avoir aussi
décliné cet honneur, ne fait aucun reproche â Thiébaud.
C'est que la guerre contre Ferri était une excuse suffi-
sante.
(4) Thiébaud racheta aussi les droits du Comte de Bour-
gogne sur le Luxembourg.
(5) La châtellenie de Thionviile, dépendant du Luxem-
bourg, touchait à la châtellenie de Siorck.
— 67 —
cernent de sa perte, car, dès Tannée suivante (1200),
Simon sentait son frère assez affaibli pour lui refuser
aucun droit à recueillir après lui le Duché de Lorraine
et ne reconnaissait (1) pour ses héritiers que son frère
Mathieu, Comte de Toul, et Ferri de Ktche le jeune,
son neveu.
C'était user de son droit, puisque Ferri de Bitche
était coupable- de félonie, mais c'était surtout très
habile, car cette mesure frappait toute la descendance
de Ferri de Bitche et la menaçait de voir passer le
Duché à Mathieu dé Toul. Aussi la division se mani-
festa bientôt dans le camp de Ferri, et dès Tannée
suivante (1201) celui-ci qui, en 1200, comptait autour
de lui tous ses fils (2) : « Matheus TuUensis eiectus,
Fridericus, item Matheus, Philippus j», se voyait aban-
donné des deux plus puissants d'entre eux : Mathieu,
alors Evêque de Toul, et Ferri (8).
Cependant, il ne perdit pas courage; il lui restait
encore ses deux autres fils, Mathieu et Philippe (charte
originale à Coblence où il se dit : « divina gratia
Bitensium Dominus (4) »). Il continua la guerre^ sou-
tenu par TArchevêque de Trêves qui avait tant de
motifs d'inimitié (5) contre Thiébaud de Bar ; enfin
(1) Benoît, p. 111-112.
(2) Charte pour Villers-Betûach, 1200.
(3) Charte de 1201 pour Clairlieu, où ils figurent avec le
Duc Simon.
(4) Dominus^ encore écrit : Dns»
(5) Cet archevêque Jean avait supplanté Folmar, Tami de
Thiébaud. de Bricy ; de plus, Thiébaud venait d'entrer en
possession de Théritage du Comte de Namur et de. Luxem-
bourg, son beau-père, qui avait déjoué les efforts tentés par
TArchevêque pour se faire attribuer Tabbaye d*Epternach
(libertas epternacensis vindicata).
— 68 —
voyaat sa cause perdue, il voulut réaliser au moins un
instant le rêve de toute sa vie, el le 30 juin 1202 il
prend dans une charte de TArchevêque (1.) la qualité de
Duc de Lorraine et Marquis. Ce n'était qu'une satisfac-
tion d'amour-propre, car Ferri n'avait fait aucun
progrès en Lorraine. Simon n^avait pas cessé d'être le
maître du Duché (ducatum tenere, traité Bar-Toul,
nov**" 1202), et Ferri le jeune traitait xjuelques mois
après avec le Comte de Bar, son beau -père, auquel il
promettait entre autres avantages < ligeitatem Gomitis
Wadanimontis si deo volonté ducatum Lothoringie
fuero adeptus ».
L'exécution de cette clause, quand Ferri eut succédé
à son oncle, confirme fortement le texte d'Albéric.
Ferri de Bitche dut alors se contenter de sa petite
seigneurie (2). 11 était définitivement exclu de la succes-
sion du Duché (3).
Aussi, dès l'an 1203, nous le voyons, qualifié simple-
ment seigneur de Bitche, approuver les donations que
Simon avait faites du temps de l'insurrection (1200) ou
paraître comme pleige dans les chartes (4) du Duc, son
frère. Quant à Ferri le jeune, on voit par les titres de 1200
(1) Mittelrhein. Urkundenb., t. 2, p. 236.
(2) N'ayant jamais été légitimement Duc de Lorraine, il
ne put laisser à ses fils d'autre nom que celui de Bitche.
Aussi, l'un d'eux, Philippe, dans un diplôme du Roi Frédé-
ric, 6 sept^'''^ 1215, est appelé c Philippus de Bitsch » ; il
était seigneur de Gerbéviiler et non de BitcLe, ce nom lui
est donc donné parce que c'était le seul que son père avait
eu le droit de porter.
(3) Charte de Simon pour Chastenoy, 1204.
(4) Titres de St-Dié.
• — 69 -
et 1204 que le Duc avait réservé ses droits au Duché,
mais en leur préférant ceux de Mathieu de Toul. Cepen-
dant par une charte (1) de cette même année 1204,
nous voyons que Ferri le jeune était assez en faveur
auprès de son oncle. Ce jeune prince sentait que le
nom de son père lui nuirait auprès de Simon. Aussi,
dans le traité de nov**"* 1202 (2) il se dit : « Fridericus
gêner comitis Barrensis Theoba'di », et en 1204:
« Fridericus junior » (3).
C'est là qu'en était arrivé ce Ferri de Bitche, si puis-
sant vingt-cinq ans auparavant ; ses fils le reniaient au-
près de son frère triomphant. Ce triomphe, que Tautorité
ducale venait d'obtenir grâce au Comte de Bar, donnait
aux conseils de ce dernier un grand poids sur les déci-
sions du vieux Duc. Que ferait-il ? laisserait-il le Duché
à celui qu'il nomme en première ligne parmi ses héri-
(1) A Metz, abbaye de St-Symphorien, liasse Arey, ori-
ginal scellé : « Fridericus junior.», favore domini Symonis
ducis patrui nostri ».
(2) En 1196 : c Fredericus miles tullen dyoc a> (Celestin 3,
bulle pour Saint-Pierremont. (Le Comte de Toul, dans son
traité de novembre 1202 le nomme encore : « f. de bites. »
Fridericus junior, 1204, (Charte de Saint-Symphorien.
Sigillo domini frederici junioris, 1204. Prieuré de Flavigny,
Moreau, 106, fol. 126. (collection Moreau, Bibl. Nat. Mscr.)
(3) Le premier effet du traité passé entre le comte de Bar
et Ferri le jeune, nov**'« 1202, fut d'obtenir du duc de Bour-,
gogne, ami du Comte, sa renonciation aux conventions pas-
sées entre ce Duc et les Bitche, relativement au partage de
la Lorraine. On comprend que cette renonciation était tout
à Tavantage du Duc Simon. Elle est datée du 1*** janvier
1202f vieux st. Elle rappelle, en plusieurs points, le texte
du traité de novembre : oc Processus temporis... quod pro
bono pacis et concordie fuit ordinatum » Voy. Preuves IV,
— 70 —
tiers, . Mathieu Comte de Toul ? C'eût été livrer la
Lorraine à un prince bien faible et qui aurait trouvé
dansFerri le jeune un trop puissant ennemi, car celui-ci
possédait, ou du moins était assuré de posséder, après
son beau-père , Longwy, Stenay et Tancien comté
d'Amance, aux portes de Nancy. De plus, le Comte de
Bar, loin d'approuver ce choix, ne se déclarerait-il pas
pour son gendre contre le Comte de Toul, cadet des
enfants de Mathieu P^ ? Tandis qu'en cédant de son
vivant le duché à Ferri le jeune, Simon récompen-
sait le Comte de Bar, laissait le pouvoir en des mains
dignes de le faire respecter, et n'exposait pas son
héritier aux revendications éternelles d'une branche
aînée dépouillée de ses droits. C'est là ce que le Comte
de Bar fit comprendre à Simon qui, en 1206 (1), cédant
à ses conseils se démit du duché en faveur de Ferri le
jeune et se retira à l'abbaye de Sturzelbronn.
Ainsi, les anciens historiens, qui refusent à Ferri !*•*
de Bitche la qualité de Duc de Lorraine, se trouvent
conciliés avec la charte de 1295 et la Chronique polo-
naise, qui lui accordent, après coup, un titre qu'il
avait usurpé.
Pièces fausses imprimées par Rosières et reproduites
par Dom Galmet.
/ Une seule pièce s^oppose à notre système. Nous nous
étions proposé de prouver qu^elle est fausse, et nous avions
préparé dans ce but une démonstration basée sur le8 lois de
la diplomatique. Mais nous nous sommes aperçu que cette
(1) Entre le 15 juillet et la fin de septembre (Benoît,
Réplique^
- 71 -
pièce, ainsi que plusieurs autres que noua comptions atta-
quer, est tirée de Touvrage du célèbre faussaire Rosières.
Néanmoins, nous signalons ces cinq chartes, dont aucune
ne nous est parvenue en original. Elles ont dû être faites
par le même faussaire, sans doute Rosières lui-même, car
elles tombent toutes dans les mêmes fautes de diploma-
tique :
1» Charte du duc Thierri pour Bouxières, 1120. Ce duc est
mort en 1115, De plus la charte est datée du S août, façon
alors inusitée. Enfin, dans cette charte comn^e dans les
quatre autres, la formule d'invocation est terminée par le
mot Amen.
2» Charte de Simon 1*' pour Bouxières, 1130. « Sub magno
meo sigillo », formule inusitée avant le 14« siècle dans les
chartes lorraines. Invocation terminée par : Amen.
3» Charte du duc Mathieu, datée du 21 mars (sic) 1156.
Invocation terminée par : Amen. Aussi pour Bouxières.
4<> Charte du duc Simon II, encore pour Bouxières,
8 juin {sic) 1176. Invocation terminée par : Amen. Dans
cette charte, Terreur historique se joint aux fautes de diplo-
matique, puisque Simon dit sa mère fille et non sœur de
Tempereur Frédéric.
5° Charte du duc Ferri , toujours pour Bouxières,
12 août {sic) 1206. C*est le document dont nous contestons
absolument la valeur (1). Cette charte a la plus grande ana-
logie, dans le fond et dans la forme, avec celle de 1176.
Elle est datée suivant la méthode actuelle, Tinvocation est
terminée par : Amen, et elle est scellée : <c cum nostro
magno sigillo >.
Ces cinq chartes de Rosières ont été reproduites par
D. Calmet, mais cette erreur de notre historien n*est pas
sans excuse. Nous savons en effet que D. Calmet a consulté
et utilisé pour ses ouvrages la Bibliothèque Séguier. Or,
(1) Aubert le Mire le déclare suspect*
— 72 —
dans un volume de cette Bibliothèque, aujourd'hui fonds
Français 18849, nous trouvons, fol. 122 et suivants, les cinq
chartes pour Bonxières, qne nous venons de critiquer (1).
Ces copies sont toutes, d'après un vidimus, notarié en 1628,
« Cuiusdam transumpti signati Y. de hault. », et sans date.
C'est, on le sait, la méthode usitée en pareil cas : Dom
Calmet a sans doute publié ces pièces d'après ce manuscrit
et perpétué, sans le savoir, les erreurs de Rosières. On ne
peut donc pas ajouter foi à cette charte de 1200, où le duc
Ferri se dit fils de Mathieu (2).
(1) Ces cinq chartes ont dû être fabriquées d'après un
acte authentique de Ferri le jeune, pour cette même abbaye
de Bouxières, en 1206. Le P. Benoît Picart (Orig., p. 261 ;
Bupplémt I, p. 51) a vu, dans les archives de Bouxières,
cette charte de Ferri le jeune, qui résume à elle seule la
confirmation de toutes les donations des ducs, tandis que le
faussaire a fait de chacune de ces donations une pièce ima-
ginaire.
(2) Nous devons encore signaler deux pièces fausses
concernant les Bitche : Schœpfiin , Âlsatia Diplomatica,
no> cccxiv et cccxli. Dans la dernière la fin seule est fausse.
-__U
— 73 —
PREUVES
I.
Pierre, évêque de Toul, associe le comte de Bar à la
reconstrnction de Liverdun, 1177.
(Bibl. Nat^*» fonds Fr., 11853, fol; 168. Coll. Lorr., 718,
fol. 150, lettre de la réédification de Leberdun.)
Necessaria litteramm recte indicatnr scientia, qua preteri-
torum gesta temporum fuint {sic) preseneia : futuris illibata
presentium conseruatur noticia. Ëa propter ego petrus dei
gracia lenchorum humilis minister. Notum facio presentibus
et posteris quod consilio tocius cleri tullensis militumqne et
ciuinm disposai reedificare liberduni castram. quod ab anti-
quis rétro temporibus iniquorum machinatione fuerat dira-
tum. quod ut melius facero possemus. placuit nobis abstriu-
gère in auxilium nostrum et amicitiam uenerabilem comitem
barri henricum potius quam aliquem alium. presertim cum
idem cornes et predecessores sui extiterint fidelissimi ecclesie
tullensi et adiutores ipsius. Et bec conuentio interposita
est inter nos et predictum comitem. inter homines ipsius et
nostros data utrinque fide et prestitis juramentis ab ipso
comité et hominibus suis et nostris. uidelicet quod assensu
iam dicti comitis prefatum castrum quandocumque oportu*
nius poterimus reedificabimus. et cum castrum reedificatum
fuerit : si forte contigerit quod aliquit potens uel aliqui
ipsum obsederint. comes per se et per homines suos obsi-
dionem solnere festinabit. et ad hoc pro posse suo laborabit.
si autem per se et per homines suos hoc efficere non poterit.
— 74 —
Boldariog consilio domini tulleoBis conducei. et dns tnllensis
expensas soldariorum perqoluet. et si cornes g^emm
babuerit. et prefata munitione indigaerit. peripsam et habi-
tatores eius se adiunabit contra amnem hominem prêter
quam contra clemm tullensem. et homines de familia beati
stephani. preterea qui in tnrre predieti castri uel in ipso
Castro, nel in snburbio commorabnntur. secnritatem comiti
facient. qnod qnandocnmqne prefata munitione. indiguerit.
ipsumet suos récipient, et adiuuabunt. ita quod cornes finita
gnerra sua. castrum dimittet liberum. et nichil per se uel
per alios macbinabitur. unde tuUensis ecdesia amittat cas-
trum. Dum etiam in ipso Castro cornes uel homines eius pro
gnerra morabuntur. nullam rébus beati stephani infèrent
molestiam. uel inferri sustinebunt. iSt uero ex eo quod
dns tullensis comitetn barri in castra prefata susceperit
aliquis guerram aduersus eum mauerit : idem comes pacem
nullam cum aduersario suo iaciet sine tullensis episcopi
assensu. nec episcopus sine ipso, hanc autem prescriptam
conuentionem quam cornes nobis et nos eidem fecimus. suc-
cessores nostri et homines ipsorum heredibus comitis barri
facient. et eius heredes et ipsorum homines eamdem
conuentionem nos tris facient successoribus et hec conuentio
in perpetuum consernabitur. née' licebit tuUensi episcopo
flimilem conuentionem de predicto Castro facere cum alio.
Et si forte contingeret quod aliqua discordia de prefata
emergeret conuentione. ad cyrographum recurrendum erit.
et iuxta tenorem et testimonium ipsius firma conuentio per-
manebit. Et ut huius rei factum immutabile in posterum
permaneat sigilli nostri munimento nec non et sigillo
comitis barri, sigillis quoque tullensium ecclesiarum robor^*
tum oonfirmatur. harum conuentionum testes sunt. frede-
ricus decanus Symon de borleinmont. fridericus ; frfiter
episcopi. Stephanus aduocatus tullensis. hugo de cbanen
• ual. Letardus de taiseio. Garnerus de iaulons. fulcho.de
iaulons. fulco asper. hugo de chatunru. Guiardus de saint
— 75 —
baslemuDt. Galterus de vodio. Isti (1) omnes iuranerunt se
tenere captionem bai^ri. si* forte predicta conuentio ab épis-
copo non adimpleatur. Àctum anno in<;arnati uerbi
Si. Ô. LXX. VIL
C'est sans doute pour mieux indiquer cette associa-
tion que le bar, armes parlantes du comte, figure au
revers des monnaies que Pierre, évêque de Toul, frappe à
Liverdnn. (Robert, évoques de Toul, pi. IV. N« 1. — Des-
cription de la collection Robert, n*" 9*70 à 973.) On sait, par
une charte originale (Archives de Meurthe-et-Moselle,
layette Briay, n<> ].), qu*eu 1189 ce comte Henri de Bar et
son frère Thiébaud de Briey portaient les bars. La disposi-
tion du scel équestre de Henri n*en laisse voir qu'un seul.
Mais le sceau armoriai de Thiébaud porte les deux bars.
IL
Traité (2) entre Ferri le jeune de Bitche et le comte de
Bar, son beau-père. Novembre 1202.
(Fonds Frai853, foL 262^0 ; Collect. Lorr.719, toi. 148^« .)
Ne processu temporum. obliuionis humane periculum
incurrat. quod pro bono pacis et concordie fuit ordinatum.
Ego F. gêner comitis barrensis. Th. presenti pagine com-
mendaui quod cum propter guerram quam Idem comes
contra patrem meum et fratres meos habebat ego longo
tempore erga eumdem comitem in longa fuissem discordia
tandem ad eum rediens. cum ipso me per bénigne pacis
reformationem paciiicum reddidi in hune modum. quod ego
F. dicto comiti iuramento mediante creantaui quod contra
omnes homines qui uinere possunt uel mori ei subfragabor.
(1) L'autre partie du cyrographe. devait contenir le nom
des otages que le comte de Bar donnait à l'évêque.
(2) Cette pièce était à La Motho en 1634. Pacquet France,
première production, T. B., n* 15 (Documents, III, 87).
Elle est aujourd'hui aux Archives impériales à Vienne.
— 76 —
Et si quod deus auertat in hoc deficerem ego ferricus et
Agnes uzor mea ipsius comitis barrens is filia. adquitauimus
ei licet de iure hereditario nobis ex parte nxoris nostre
peruenire deberent. Asmanciam. Lonwicum. Sathenayum.
cnm eorum appendiciis. et de eis idem cornes snam ad plé-
num facere posset uoluntatem. et ego et uxor mea euntes
per dicta castella adquitauimus tam hereditarium quam
fidelitates. si in prefatis conuentionibus deficerem. preterea
predicto comiti creantauimus quod si deo uolente ducalnm
Lothoringie fuero adeptus, dictus cornes barri ligietatem
comitis wadanimcntis. et homagium domini Arardi de
sorceio. cum feodis inde dependentibus. cum illis feodis que
de duce antea tenebat laude nostra tenebit in casamentnm.
Dictus uero comes b^rrensis mihi in bona fide creantauit :
quod ad retinendum ius et hereditarium mei^m. mihi erit
in auxilium saluo creanto quod idem comes comiti
tullensi. creantauit cui de chastenoy et de Gonderuilla-(l)
débet esse adiutor tam in guerra quam in placito. Pro bis
autem conuentionibus firmius obseruandis memoratus comes
barrensis. in turribus et munitionibus de ulmis et de Gir-
beruillari custodes suos si uoluerit reponet per creantum
nostrum. Ut autem huiusmodi conuentiones ad bonum pacis
ordinate stabiles et inuiolate permaneant. Ego Fridericus et
Agnes uxor mea sepedicti comitis filia présentes litteras
sigillorum nostrorum impressione confirmanimus. Anno
uerbi incarnati millesimo ducentesimo secundo. Mense
nouembri.
III.
Traité entre Mathieu, comte de Toul, et le comte de Bar.
Novembre 1202 (F. Fr. 11853, fol. 264; Coll. Lorr. 719.
fol. 148.)
0) Le comte de Bar n'obtint pas ce démembrement du duché
pour le comte de Toul. Il préféra faire céder par Simonie
duché intact à Ferri, son gendre.
_j
- 77 —
Quoniam obliviionis humane fragilitatem scriptL uendica
tenacitas rocompensare consueuit. Ego Maherus cornes tul*
lecsis présent! pagine commendaui quod castrum meum
fonteniacum cum appendiciis et blaireuillam a dno comité
barri Tbeobaldo recepi in hominium. et inde ligius homo
factus sum ipsîus comi)is post tuUensem episcopum contra
omnes bomines et filius meas Renaudus oui fontiniacum
cum blareuilla contuli. Fonteniacum et blareuillam ab ipso
comité barri recepit et inde ligius homo ipsius contra omnes
bomines factus est. Et post dictum comitem ôlio suo henrico
de dictis casamentis cum integritate ab ipso receptis fecit
bominium contra omnes bomines et ligietatem. boc addito
quod si deo uolente dictus comes barri et filius suus b . esse
desinerent et ipse comes de uxore sua bermensende bere-
dem babuerit. ego comes Tuliensis et filius meus R. et
quicumque Fonteniacum et blereuillam tenuerit ab berade
bermesendis de comité barri recipere et tenere tenebimur.
Si uero dictus comes et filius suus b. esse desierint et ber-
mesendis dicta de comité beredem non babuerit. ego comes
tuliensis et beredes mei quicunque fonteniacum tenuerint a
filia comitis Agnete uxore. f. de bites et ab beredibus suis
tonteniacum et blereuillam cum integritate appenditiorum
recipere tenebimur et tenere in ligietatem. Memoratus uero
comes bàrrensis et filius suus b. mibi et filio meo in bona
fide creantauerunt quod qu^m cicxus Symon dux Loth,
ducacum quocumque modo tenere desierit de bereditario
nostro de Cbatenoi et de Gonderuilla contra omnes bomines
in placito et in guerra nobis suffragari tenebuntur. Predicte
uero conuentiones de berede in beredem sicut dispositum
est superius stabilité sunt in perpetuum conseruande. et
ego dd biis firmius obseruandis. per iudicium a Sauarico de
bello ramo factum ostagios constitui. Gerardum de fonte-
niaco. Aubertum dictum de darneio. sauaricum dnum de
bello ramo. Stepbanum aduocatum tullensem. Lebaudum de
befromonte. Ferricum de ualle coloris, in bunc modum quod
— 78 -
si ego uel heredes mei contra iuramentum meum quod absit
ab hiis cornueationibus ecederemtis nec eas teneremus dicti
hostagii cum feodis suis ad dictum comité m barrensem et
ad heredes suos transire tenebuntur. omnes antem près-
cripte coQuentiones per iuramentum comitis sepedicti et
nostrum sunt confirmate. Et ego M. tuUensis cornes ad id
melius confirmandum présentes litteras sigillé meo conflr-
e o
maui. Âctum anno uerbî incarnati M. GO. secundo.- Mense
nouembri.
IV
(Arch. de la Meuse, H. 256, fol. 253. Imprimé: Généa-
logie de la Maison du Ghasteler, seconde édition, 1777,
aux preuves.)
Plerumque processus temporis ea que fiunt in tempore in
obiiviosam consuevit sepelire cecitatem si memoriali Litte-
rarum tenacitati non tradantur, ego quidem Odo dux ber-
gondie quod pro bono pacis et concordie fuit ordinatum
volons inviolabiliter observari per presentem paginam pre-
sentibus et' futuris notum facio quod quicquid juris heredi-
tarii in Ducatum Lothorengie reclamabam et quicquid per
convenliones inter me et Fredericum Ma)orem de Bithes et
Fredericum fiUum ejus habitas secunduQi tenorem carte ab
eis mihi tradite acquisieram resignçtvi et penitus acquittavi
pro me et pro heredibus (1) mois hoc adjuncto quod si frater
meus Alexander supra eodepo ducatu qnerimoniam moverit
ego in nulle penitus meum ei consilium vel auxilium exhi-
bebo. quod ut firmius ot stabilius observetur présentes lit*
teras Sigillo meo confirmavi anno Incarnat ionis Dominice
M. ce. secundo, prima die Mensis Januarii.
Préambule de la charte pour Roncourt. Cartulaire de Bar,
fol. 26 :
In nomine sancte et indiuidue trinitatis. Ne processu tem-
(1) Impr. heridibus
— 79 —
porum in oblîuiouem sepeliatur quod celebri poslerorum
dignum est Recordacione . Ego Tbeobaldus com. barri et
Iticebourgis bec autem acta sunt et ordinata Anno
Incarnacionis daice millesimo ducentesimo secundo. Mense
Januario. La cbarte IV paraît donc émanée, comme les deux
précédentes, de la cbanceUerie du comte de Bar. Cette ré-
daction 0st absolument étrangère au style de la chancellerie
du duc Eudes de Bourgogne. On peut donc reconnaître là
r « industria « qu*Albéric de Trois-Fontaines attribue dans
toute cette aifaire au comte de Bar.
V.
Hugues,, comte de Vaudémont, se reconnaît vassal du
comte de Champagne, après le comte de Bar-le-Duc. Avril
1219. Latin, 5i^93. fol. 87. voy. les sources indiquées par
M. d'Arbois de Jubain ville. Catalogue des Actes des comtes
de Champagne, n? 1192 (1). .
(1) L'hommage lige du comte de Vaudémont appartenait
anciennement au duo de Lorraine. Dans les fiefs de Cham-
pagne vers 1172 (n** 1851) li cuens de Vaudesmons liges
après le duc de Loorraine' Nous avons vu par la pièce a? II
que cet hommage devait appartenir au comte de Bar si
Ferri le jeune parvenait à succéder au duc Simon. Aussi,
dès les premières années du règne de Henri II, comte de
Bar, successeur de Thiébaud, Hugues, comte de Vaudé-
mont, lui fit rhomm^ge auquel il était tenu par la
mort (1214) de son seigneur et Tavènemeat du nouveau
comte. Voyez cette charte en français, mars 1216, Benoît,
Réplique, p. 199, Cette pièce de 1219 confirme le même
fait, ainsi que le jv* IV. Vaudémont n*a jamais cessé depuis
lors d'être fief lige de Bar c contre tous homes qui puent
vivre et morir ». Nous avons insisté sur ce fait, parce qu'il
nous semble le nœud de la question. On ne connaît aucun
acte par lequel les ducs de Lorraine aient cédé aux comtes
do Bar- la mouvance de Vaudémont. Cet abandon résuite
— 80 —
Ego hugo cornes wadaai montis notum facio tam presen-
tibus quam fataris quod ego deueni homo ligius karissime
due mee Blanche comitisse Trecen et karissimi domini
mei Th. comitis campanie et Brie nati eins. salua ligeitate
comitis barri diicis. Pro homagio antem isto dederunt comi-
tissa et cornes michi et illi heredum meorum qui comitatum
wadanimontis tenebit. sexaginta libras in feodo in nitndinis
Barri assignatas. et ibidem annuatim percipiendas. Juraui
siquidem dictis comitisse et comiti quod dé me et de cas-
tellis meis et Je gentibas meis bona fide eos juuabo contra
dominum Erardum de Brena et contra fîlias comitis henrici
qui decessit in partibus transnmrinis. et contra heredes
eorum. et contra omnem creaturam que possit niuere et
mori. preterquam -contra comitem barri ducis. Simili modo
tenebitur eos juuare contra omnes predictos. preterquam
contra comitem barri dt^cis, hères meus qui comitatum
wadanimontis tenebit. et qui feodum dictarum sexaginta
librarum habebit. Comi tissa autem et comes tam me quam
heredem meum qui comitatum wadanimontis tenebit. simi-
liter tenentur juuare sicut homines suos ligeos. quam diu
parati erimus in eorum curia juristare. Actum anno gracie
M. ce. nono decimo. Meuse aprili.
VI.
Hugues, fils aîné du comte de Vaudémont, reprend du
vivant de son père Vaudémont et Ghatel-sur-Moselle, du
comte de Bar, 1227. (Fr. 11853, fol. 130; Lorr. 718,
fol. 173).
Ego hugo comes wadimontis. Notum facio omnibus pré-
sentes litteras inspecturis. quod hugo primogenitus filius
meus laude et assensu meo Recepit in feodum ligium
donc de ce que la clause du traité de 1202 avait reçu son
application en 1206.
— 81 —
contra omnes qui uiuere possunt et mori. a comité barri
ducis wadimontem cum appeadiciis omnibus et Gastellum
super Mozellam cum appendiciis omnibus similiter. Excepta
morioguiUa que est de feodo comitis burgondie. In hune
modum quod ego omnia snpradicta sicut tenebam tempore
confectionis presentium litterarum quamdiu uixero possi-
debo. Ita etiam quod cornes wadimontis et heredes ipsius
milites el burgenses de predictis castellis et castellaniis
comiti barri ducis et heredibus ipsius fidelitatem facere
tenentur contra omnes qui uiuere possunt et mori. In cuius
rei testimonium présentes litteras sigilli mei munimine
Roboraui. Actum anno dni millesimo ducentesimo vicesimo
septimo monse augusti.
ô
LE BERCEAU DE NANCY
ESSAI HISTORIQUE ET ARCHÉOLOGIQUE (1)
PAR
M. J.-B. Paul HANNION.
Dans Les transformations de Nancy, 1res intéressan-
tes annales publiées en 1879, un laborieux archéologue
résume en ces termes — mais sans le résoudre encore —
le problème historique, nombre de fois examiné déjà,
qui va faire l'objet de celte nouvelle étude :
« On doit se demander tout d'abord quelle est Tori-
(1) La Commissioa nommée par la Société d'Archéologie
Lorraine pour la publication du présent Mémoire s'est trou-
vée en dissentiment avec Tauteur, dans un grand nombre de
passages, pour l'appréciation do certains faits historiques,
et surtout relativement aux systèmes philologiques qui s*y
trouvent exprimés. Liée par le vote de la Société qui ordonne
Timpression, elle croit cependant devoir dégager par cette
note toute responsabilité au sujet de théories qu*elle estime
difficiles à justifier, tout en rendant hommage au labeur
considérable de M. Hannion et à Toriginalité de Thypothèse
émise par lui sur les premiers temps de Nancy.
- 83 —
« gine et queU furent les premiers temps de Nanc/.
« Est-ce une ville relativement moderne, coînme la plu-
(£ part de nos historiens Tont prétendu, ou bien sa nais-
« sance remonte-t-elle à une époque reculée ? — Cette
ce dernière opinion est celle de quelques antiquaires qui,
« faisant dériver son nom du mot celtique naul, . . . pré-
« tendent qu'elle existait déjà durant la période gallo-
« romaine. — Suivant d'autres, son existence serait
« constatée dès les temps mérovingiens, c'est-à-dire
« avant 753, par la découverte d'un trions ou tiers de
a sou d'or sur lequel on lit : NANGIAGO ; d'où il résuU
« terait que Nancy aurait eu alors un atelier monétaire. »
Aucune des solutions proposées jusqu'en 1879 ne
paraissait donc satisfaisante, acceptable, définitive à M.
Henri Lepage. Nous serons encore et complètement de
son avis après avoir relu, dans les principales Histoires
de la Lorraine ou de Nancy, publiées jusqu'à ce jour,
les passages exclusivement relatifs à rapparition de
notre ville sous ses premiers Ducs héréditaires.
LES HISTORIENS
I
€ La ville de Nancy. . . n'est pas ancienne, et il n'est
a pas croyable que, dès l'an 1000, c'ait été une Souve-
« raineté particulière. — Nancy n'est point du tout
« connu aux anciens Géographes. . . Ge qui est certain,
« c'est que le Prince Odelric, frère du Duc Gérard
« d'Alsace, porte le surnom de Nancy dans les titres de
« Tan 1069. Il transmit ce nom à sa postérité. Gertrude
< Duchesse de Lorraine est qualifiée Duchesse de Nancy
— 84 —
« en 1060 (i). Thierry le Vaillant son époux, Duc de
a Lorraine, fonda vers Tan 1080 le Prieuré de Notre -
« Dame près Nancy. Le Duc Simon en 1130 avait son
« Palais pi'ès de la même ville. — On croit que la
< Ville ou le Bourg de Nancy appartenait en propre aux
c( descendants d'Odelric (2) : car Drogon de Nancy, en
« 1155 où 1153, selon d'autres, échangea son Château
« de Nancy et la Ville contiguë contre le Château et la
« Châtellenie de Rosières, Lénoncourt, le Ban de Moyen
« et Haussonville ; se réservant néanmoins pour lui et
« ses successeurs le nom de Nancy et la charge de
a Sénéchal de Lorraine. . . Au commencement du trei-
(1) Cette date, 1060, cueillie parDom Calmet dans Albéric de
Tpois-Fontaines, est quelque peu erronée : Thierry I*' n'a
succédé à Gérard d*Alsace, son père, qu'en 1070 et ne s'est
murié qu'en 1080. — D'ailleurs, Albéric de T rois-Fontaines
ne dit pas que Gertrude était duchesse (fo Nancy en 1060 ;
voici le texte même de sa chronique : a 1060. Roberius autem
« Friso Gertrudem Fresonum Comitissam duxit in uxo^
a rem,,, et genuit ex eâ Comitem Rohertum,,, et dtms soro-
a res ejuSy Adalam.,, et Gertrudem Ducissam de Nanceio
« quœ peperit,,. Ducem Symonem et Theodericum nobilem
« Flandriarum Comitem et Principem. » {Monumenta Ger^
a maniœ historica,..^ Tomus XXIII).
Traduisons : En 1060, Robert le Frison épousa Gertrude,
Comtesse des Frisons ; de cette union sont nés un fils et
deux filles. L'une de ces filles, nommée également Gertrude,
deviat Duchesse de Nancy, en 1080,par son mariage avec
Thierry I" dont elle eut deux fils, savoir : Simon I»' qui
succéda à son père en 1115 et le prince Thierry d'Alsace, qui
fut appelé, en 1128, au Comté de Flandres.
(2) Ou à ses successeurs. <c II n'est pas certain que ce frère
de Gérard d'Alsace ait été marié ni qu'il ait eu des enfants. >
Dom Calmet : Notice de la Lorraine. 1835. Tome I«' p. 476.
— 85 —
« zième siècle, Nancy appartenait certainement en pro*
a pre à nos Ducs.
« La duchesse Agnès, femme du Duc Ferry I" (1),
« avait reçu la ville de Nancy pour son douaire. Elle
« s'en dépouilla en faveur du Duc Mathieu II son fils,
« au mois de Juin 1220. Lorsque le Duc Mathieu II en
« 1249, maria son fils Ferry avec Marguerite, fille du
« Comte de Bar, il donna à cette Princesse pour
ce appanage Neufchateau, Ghàtenoy, Nancy, Port (St-
« Nicolas) et Varengéville. »
DoM Galmet (2) .
Les divers renseignements contenus dans ce dernier
paragraphe reposent sur des titres certains et con-
nus (3) ; aucun historien ne les contes' ant, je me
dispenserai de les reproduire à la suite des extraits que
je dois mettre encore sous les yeux du Lecteur pour
rédifler complètement sur Tétat actuel de notre ques-
tion.
Au temps de Gérard d'Alsace, « Amance était une
« ville forte et importante. Nancy n'existait pas ou
« n'était que quelques maisons champêtres. — Ghàtenoy
a fut la résidence ordinaire des premiers Ducs de
« Lorraine... — Gertrude, femme de Thierri est
« appelée dans les Chartres du temps Duchesse de
(1) Lisons ; Ferry II, d*après la chronologie généralement
admise aujourd'hui.
(2) Histoire ecclésiastique et civile de la Lorraine^ 1*728.
Tome I«', col. 1104, 1105 et leurs preuves.
(3) Ibidem, Tome II, page 243 et preuves, col. 429, 430
et 475.
— 80 —
< Nancy (i). Nancy n'était alors qu'un château ou une
I maison de campagne : villa (2), Thierri lenail sa cour
c à Chàtenoi. — Par son testament, Mathieu I" donne
L à l'abbaye de Glairlieu sa vigne de Nancy. »
L'abbé Bexo?( (3).
« On prétend que Nancy n'était pas connu avant le
' XII* siècle ; que ce n'était alors qu'un château qui
I nppartenail à Drogon de Nancy qui l'échangea, en
( H53, avec Mathieu I", Duc de Lorraine, contre le
[ L'iiâteau et la chàtollenie de Rosières..., réservant
< néanmoins le nom de Nancy... Odelric, frère du duc
I Gérard d'Alsace, porte le surnom de Nancy dans les
1 titres de l'an 1069. — Nancy subsistait donc au
[ commencement du Xi* siècle, mais plutôt comme une
I Forteresse ou un château qui s'aggrandit par la
' résidence qu'y firent les ducs Simon I" et Mathieu
i son fils. »
L'abbé LiONHOis (4).
(!) Mais CD ne préieote aucune <3e ces chartrea ou chartes,
dont parlent plnaieurs hiatoriens probablement sur la foi
tl'Albéric de Trois -Fontaines.
(2) I Ce mot signifiait, aous les Qallo-Romains, une
grande propriété particulière, composée de bâtiments et
1 lie biens rursux ; il prit plus tard le sens de domaine
« collectif ou village. Soua les Mérovingiens, il aigoiâait
« une terre en général et les personnes qui l'habitaient ;
i soua lea Carlovingiens. c'est très souvent un village et
• déjà même une paroisse. ■. M. Clesse : Le canton de
Conflam... 1891. Tome 1". p. ~ et 8.
{3) Hitioire de Lorraine, lilT. Tome I, p. 10,20 et 27.
(4) Biliaire des villes vieille et neuee de Nancy. Tome 1,
p. 9 et 10.
— 87 —
« Simon I"... se réfugia dans le château de Nancy (i).
« La ville qui porte aujourd'hui ce nom n'existait pas
a encore. Il y avait seulement une forteresse où les
« Ducs de Lorraine résidaient quelquefois^ et qui, selon
a toutes les apparences, était située sur remplacement
(i de la rue de la Monnaie et des quartiers voisins ;
a près du château se trouvait une bourgade apparte-
a nant aux descendants d'Odelric, frère de Gérard
a d'Alsace ; au nord-ouest de cette bourgade, et près
a de ses murailles, si elle en avait, on voyait le prieuré
a de Notre-Dame ; et plus loin, au pied des collines
a fermant, du côté de TOuest, la vallée de la Meurthe,
a était le bourg ou village de Saint-Dizier, que l'on
(c appelait aussi Boudon ville {Bodonis villa) parcequ'il
« avait appartenu, en tout ou en partie, à Bodon Leudin,
a qui fut évoque de Toul au VIP siècle. Enfin, mais à
« une assez grande distance, du côté du midi, et sur le
« bord d'un ruisseau ombragé par des saules, on avait
« construit un autre château, qui était aussi la pro-
a priété des Ducs. Il est probable que ce château
« existait déjà sous le règne de Simon P'et se nommait
<i le château de Saulru (ou du ruisseau des Saules)*
« Telle était, vers la lin du premier tiers du XI' siècle,
« In situation des deux bourgades et des forteresses
« dont la réunion constitua plus tard la capitale du
« duché de Lorraine. »
A. DiGOT (2).
(1) Suivant Dom Calmet et d'après les textes authentiques
que nous citerons bientôt, il faut lire ici : c dans un château
situé auprès de Nancy.... apud Naneiacum,.., juxta Nan^
ceium.
(2) Histoire de Lorraine. Tome !«', p. 310 et 317.
— 88 ^
<i L'histoire de Nancy la ville ducale, la ville polie et
« la ville élégante par excellence, ne date pas de bien
a loin... Quand on étudie l'histoire des temps obscurs
ff qui suivirent la décadence de la race mérovingienne,
« il faut savoir se résigner souvent à laisser comme
« insolubles des problèmes qui ne portent que sur des
a faits d'un intérêt secondaire. L'origine du nom de
« Nancy (1) nous paraît rentrer dans cette catégorie ;
« nous nous bornerons donc à mentionner les faits les
« plus anciens qui se rapportent à cette ville^ laissant à
a de plus habiles le soin de chercher une origine dont
« il est permis, ce nous semble, de ne pas se préoccuper
« plus qu'elle ne le mérite. — Gérard d'Alsace, premier
« duc (héréditaire) de Lorraine, avait un frère nommé
a Odelric, lequel devint la souche de la noble maison
a de Lénoncourt, etc., etc. »
De Saulcy (2).
Vingt autres historiens, également estimables et non
moins désireux que nous de percer les ténèbres qui
enveloppent le berceau de Nancy, ne fournissant rien
de plus complet et de plus précis, nous bornerons là
nos citations.
II
Or, est-il croyable (suivant l'expression de Dom
Calmet) que le silence des anciens Géographes prouve
qu'avant l'an 1000 Nancy n'était pas une souveraineté
(1) Et sans doute aussi Torigine de la ville même qui
portait ce nom ?
(2) Histoire des villes de France,., d'Aristide Guilbert.
1845. Tome IV page 526. Nancy, par M. de Saulcy.
- 89 —
particulière, qu'il était inconnu ou même qu'il n'existait
pas, comme on Ta admis jusqu'à présent? — Mais, « on
« sait que les géographes anciens ont quelquefois
« négligé de mentionner certaines villes... quand elles
« étaient éloignées des grandes voies de communica-
a tion... L'importante ville de Gvan dans le départe-
« ment des Vosges en est un exemple... Grand où,
4 cependant, les Romains entretenaient une garnison
a permanente très nombreuse » (1).
Est-il croyable que, sous Gérard d'Alsace, 1048-1070,
Nancy n'était encore qu'une W/Za composée de quelques
maisons champêtres et qu'en fondant cette bourgade,
vers le XP siècle seulement, on aurait eu l'idée d'aller
lui chercher un nom dans le celtique, langue oubliée
depuis plusieurs centaines d'années ?
Est-il croyable que notre premier Duc héréditaire,
possesseur d'immenses domaines en Lorraine, en Alsace
et dans l'archevêché de Trêves, n'en aurait distrait
qu'un misérable village au profit du Prince Odelric,
son frère, et que ce Prince s'est trouvé assez honoré du
chétif apanage que lui assignent nos historiens pour
adopter aussitôt le surnom de Nancy : Odelvieas de
Nanceio, en 1069, et même pour se qualifier plus
modestement encore : Advocatus de Nanceio^ en
1073? (2).
(1) L. Beaulieu : Archéologie de la Lorraine j Tome I.
page 13 et Tome II page 243.
(2) c Comment Odelric doviat-il possesseur de la terre de
a Nancy ? On ne peut former à cet égard qu'une supposition :
ce cest que le Duc de Lorraine (Gérard d'Alsace) avait donné
oc ce domaine à son frère, à titre d'apanage ; que ce dernier
a s'y fixa, en prit le nom et y construisit un château que, plus
-- 90 —
Est-il croyable qu'en 1060, Gertrude de Flandre, du-
chesse de Lorraine, femme de Thierry I''', aurait pris
aussi le titre de duchesse de Nancy, si cette locaHté
n'avait pas alors été autre chose qu'une humble bour-
gade (1) ?
Est-il croyable qu'en moins d'un siècle, à compter de
1069 environ, ce Nancy, jusque-là inconnu, sans im-
portance, sans illustration, aurait acquis, a l'insu de
l'Histoire, assez de valeur, pour faire l'objet de l'échan-
ge sérieux rappelé sous l'année 1155 et assez de gloire
pour que Drogon, successeur médiat d'Odelric, ait
tenu à stipuler expressément le maintien et la perpé-
tuation dans sa famille du surnom de Nancy (â) ?
a tard... ses descendants cédèrent an successeur de Gérard
c d'Alsace. » (H. Lepage : Beeherches sur l'origine et les
premiers temps de Ncncy, page 166.)
c (1) Nous ne devons pas cependant omettre ici de men-
a tionner un fait bizarre et dont nous ne saurions donner
c Texplication, c*est que Gertrude, femme du duc Thierry-
c le- Vaillant, prenait en 1060 (lisons : 1080) le titre de Du-
« cbesse de Nancy. Comme elle était fille du comte de Flan-
c dre, il est difficile de comprendre comment elle se trouve
< qualifiée de la sorte, tandis qu*Odelric prenait lui-même
c la qualification d'OdeIric de Nancy dans des titres posté -
a rieurs de neuf ans. > (lisons : antérieurs de onze ans.) — (De
c Saulcy : Nancy page 527.)
Le prince Odelric étant mort après 1073, son successeur,
contemporain de Gertrude de Flandre, devait également, en
1080, porter le surnom de Nancy puisqu'en 1127, Drogon,
dernier successeur d'OJelric, dans le domaine de Nancy,
signait encore : Drogo de Nanceiaco, — Les confusions de
dates n'enlèvent rien de sa valeur à Tobservation de M. de
Saulcy.
(2) En 1342, suivant Mory d'Elvange {Mémoire sur la
— 91 -
Est-il compréhensible qu'en 1155, Mathieu P' ait été
obUgé d'acquérir ce Nancy, bourgade et château, alors
qu'il devait être déjà sa propriété après avoir été cer-
tainement celle de Simon P% son père et de Thierry I",
son aïeul ?
Si notre ville, au XIP siècle, n'était encore qu'une
villa entourant peut-être un chateau-fort, et si le Prince
Odelric n'en était que le Voué, advocatus (en admet-
tant même que Gérard eût, en faveur de son frère, ren-
du héréditaire cette fonction inexpliquée), est-il croya-
ble que Mathieu P' n'aurait pu recouvrer ce minuscule
apanage qu'en cédant à Drogon des propriétés beau-
coup plus importantes que le Nancy de nos historiens
(1) et qu'en accordant a ce même Drogon, pour lui et
pour ses descendants, le droit de porter a perpétuité le
surnom de Nancy ?
Est-il croyable enfin que Nancy, centre et siège du
gouvernement de nos Ducs depuis 1155, a pu ensuite
appartenir à titre de douaire : de 1213 à 1220, à la du-
chesse Agnès de Bar, veuve de Ferry II ; — de 1220 à
maison de Lénoncourt) un membre de cette famille, qui se
prétendait issue de Drogon et même d*0de1ric, signait encore :
Gérard de Nancy. — Voir aussi Dom Calmet : Notice de la
Lorraine, Tome I page 477.
(l) La situation géographique de trois seulement des do-
maines cédés à Drogon : Lénoncourt, Rosières et Hausson-
ville, autorise à supposer que ces villages ne formaient
alors qu*un seul tenant et à leur attribuer une surface to-
tale de plus de 10.000 hectares ; sans compter le ban de
Moyen dont nous ne pouvons aujourd'hui évaluer Tancienne
étendue. — Château, villa, bourgade ou hameau, le Nancy
des historiens est bien loin de justifier réchange de 1155
qu'aucun d'eux cependant ne révoque en doute !
— 92 —
1225, à la duchesse Gertrude de Dachsbourg qui, aus-
sitôt après la mort de Thiébaut I", se remaria d'abord
à un comte de Champagne, puis à un comte de Linange,
auxquels elle aurait successivement porté la jouissance
de tous les droits attachés à ce douaire ; — et qu'en
1249, Mathieu II, mariant son fils Ferry avec Margue-
rite de Navarre, fille d'un comte de Bar, a pu égale-
ment donner à cette princesse pour apanage Neufcha-
teau, Châtenois, Saint-Nicolas-du-Port, Varangéville
et Nancy, la nouvelle capitale de la Lorraine ?
Singulière capitale qui, dans l'espace de trente-six
ans, de 1213 à 1249, serait passée, réellement ou condi-
tionnellement, entre les mains de cinq personnes parmi
lesquelles ne figurent que dtiuxDxxcs régnants de Lor-
raine : Ferry II, de 1206 à 1213 ; Agnès de Bar, de 1213
à 1220 ; — Gertrude de Dachsbourg, veuve de Thiébaut
I", remariée ensuite à Thiébaut IV, comte de Champa-
gne d'abord, puis à Simon, comte de Linange, de 1220
à 1225 ; — Mathieu II, de 1225 à 1249 ; — et Margue-
rite de Navarre, en 1249 !
Quelqu'idée qu'on se fasse de l'organisation politique
et des institutions sociales du moyen-âge, il nous sem-
ble que le plus simple bon sens déjà répond négative-
ment à toutes ces conjectures sur la création, le déve^
loppement et les destinées du premier Nancy.
Cependant, il doit y avoir du vrai dans les divers
renseignements recueillis et arrangés si laborieusement
par tous les historiens pour établir l'origine de notre
ville ; mais aussi combien de contradictions , com-
bien d'anomalies déjà et combien d'autres encore res-
sortiront des documents authentiques, antérieurs au
XIV* siècle, qui sont parvenus jusqu'à nous.
93 —
LES TEXTES LATINS
I
Les titres en langue latine, où le nom de Nancy
apparaît sous diverses formes, sont assez nombreux ;
mais la plupart ne représentent que les signatures de
personnages ou de fonctionnaires ayant habité cette
localité ou servi de témoins dans certaines circons-
tances : Waltevus^ Lietavdus^ Drogo, Raynerus.,,. ;
d'autres rappellent que les actes terminés par les
mots : datum, data, actuWy acla, ont été libellés soit à
Nancy, soit auprès de Nancy. Quelques-uns seulement
se rattachent à l'objet particulier de ce travail.
Mais tous bien certainement concernent notre ville et
c'est à tort, pensons-nous, que plusieurs commentateurs
ont cru devoir appliquer aux Nançois (Meuse) cette
phrase assez vague d'une bulle du pape Pascal II
confirmant, en 1106, les privilèges de l'abbaye de
Saint-Mihiel sur « Apud Nanceyacum porlïonem quan-
dam » (1), alors que d'autres textes indiscutables, de la
même époque, nomment Nanciacum en 1080, Nanccia"
cum en 1127, Nanceyacum en 1145, le Nancy que nous
cherchons et dont ces commentateurs semblent ne pas
vouloir admettre l'existence. Ou bien Pascal II, en
écrivant les quatre mots ci-dessus, avait réellement en
vue une parcelle de terre voisine de Nancy, ou bien il
a commis une erreur de nom, car partout ailleurs que
(1) Dom Calmet : Histoire.,, Tome I, preuves, col. 522.
— 94 —
dans la bulle de 1106 les Nançois sont dénommés :
NanceiiSj Nanceium saporosum, Nanceium supra
Ornaàï, Nanceium^ Nancioris car Us, Nanselum^ Nan-
siium, Nansoyuaiy Nanzeiacuaiy Nasitum{i) et jamais
Nanceyacum,
Four abréger, je ne donnerai de chaque texte latin
que les mots indispensables et que les passages, mal-
heureusement trop rares, intéressant notre ville.
II
Vers Tan 600 de notre ère : Naaciaco = Medoald.
« Le nom de Nancy, sous sa forme primitive, dit
« M.- Godron (2), apparaît pour la première fois sur un
« tiers-sol mérovingien que M. Ponton d'Amécourt
« nous a fait connaître (3) et qui porte très distincte-
« ment sur l'avers le mot Naaciaco et sur b revers
< Medoald, Les savants qui ont étudié scientifiquement
« cette monnaie la rapportent au temps de Theode-
c( bert II, roi d'Âustrasie, qui a régné Je 596 à 612. »
€ Un diplôme de Gharles-le- Simple (4) — roi de
« France de 898 à 923 — dit encore M. Godron, porte
(1) Dictionnaire topographique de la Meuse, par M. Félix
Liénard.
(2) De r origine des noms dé plusieurs villes et villages
de la Lorraine,,, par D. A. Godron.
(3) Annuaire de la Société française de Numismatique et
d'archéologie pour 1866, page 153, tabl. VIII.
(4) Diplôme découvert par M. Henri Lepago dans les
Archives de la Collégiale Saint-Oeorges et publié in-extenso
par M. H. d'Arbois de Jubainvillo dans le Journal de la
Société d'Archéologie lorraine, n<> de novembre 1852.
— 95 —
« donation en faveur de l'Abbaye de Salonne (prè^
« Gtiâteau-Salins) de différents biens et notamment les
« suivants :
« 896. Et in Nanceiaco mansos XII cum vineâ ad
modios G. ».
1069. Signum Odeirici de Nanceio,
1071. Signum Odeirici de Nanceio,
1073. Signum Odeirici advocati de Nanceio (I).
Ces trois derniers textes présentent les deux diffé-
rentes signatures d*Odelric. Ce Prince n'était-il donc à
Nancy que le voué ao?KOca/ws, c'est-à-dire le mandataire
de Gérard d'Alsace^ son frère ; ou bien, en 1073. une
partie du iVa/i//acw/22 appartenait- elle soit à une abbaye,
soit à révêché de Toul ?
1070. Wallerus Nanceiatensis villîcus (2) ; viliicus
signifiant régisseur, administrateur ou maire.
1076. Lietardus de Nanceio (3).
1080. Notum sit... quod Theodoricus dux, in allodio
suo apud Nanciacunij dédit Deo et Béate Marie... cam-
pum quemdam ad continendam ecclesiam (4).
1106. Apud Nanceyacum porlionem quandam. Texte
examiné précédemment.
1126. Data apud Nanciacum, die sancto Paschse (5).
(1) Dom Calmet : Histoire.,, Tome I, preuves, col. 468,
472, 414.
(2) Collection Moreau, Tome XXX, fol. 78.
(3) D. Calmet : Notice,, Tome 1, col. 634.
(4) Charte-notice rapportée par Vignier dans : La véritable
origine de la Maison d* Alsace^ de Lorraine et d' Autriche, , ,
page 112.
(5) Ibidem, page 214.
^
— 'il*. —
lii±. hàjsoTiï^ -iii .Vîzsfiçjr. — Dtoç^ :!* Xinii^^. —
ftitv'riiéJÇï^ Tïe est 9zi^ 3'*c^i?jrxii rs^anizi cne^^zi. oic^-
Par ©eiK/e: ^rôàné, Hi'.L.-sii I^ racoeL* et eioadrxne les
àû^^i, a rèp^ïse Nortr^-Iteiï:^; é^Lse cocLâtnL:e, rers L'an
lO^X p^aiT Tr**erry I** i^ns 5«>a trjpre allée aoprês eie
X'i:,cy : apod SaBcia^um,.. îox^ S^ncemm^ comme
'livrât le* textes de 1(^ et de 11*^.
lli^, Drogo de Xaneeio 7 .
1155, Ifahu = SsmceL Moanaies de Ifaihîea I".
lld(l, Henadoduâ de Xaoceio. — Waitems viiiicus
de NaiyeioiH;.
1 1^, Daia \aacei ''9 .
^1} Charte de k'abbaje de Beaopré citée par M. H. Lepage :
Dictionnaire topographique du tUpartemeni de la Meurtke^
page tKf,
f2) D Calmet : Histoire... Tome II, presTes, co). 290.
'3; Ibidem, Ciî. 318.
';4; Ibidem, col. 319.
^&y D. Calmet : Histoire.,. Tome II, preufes, col. 322.
^6} H* Lepage : Recherches sur f origine.. . page 181.
H) D. Calmet : /6td., col. 333.
(8) Ibid., col. 456.
:il; /e^i<;., col. 8M».
u.
- 07 —
1168. Apud Nance i rohorari curavimus. — Drogo de
Nancei{i).
1176. Drogo videlicet de NaDcei(2).
1177. Drogo de Nanceio (3).
1190. ... infra menia Kanceii (4).
1214. Actum apud Nanceyum, — Actum apud Nan-
cei (5) .
1220. Ego Agnès, Ducissa LotharingisB, notuin facio
universis... quod Nantiacum cum omnibus pertinenliis,
quod nomine dotalitii possidebam... totum reddidi et
quittavi Mathseo, Duci Lotharingise, filio meo, ... co-
ram domina Gomitissâ Trecensi et Theobaldo comité,
nato ipsius ; ipse vero filius meus prsefalum Gomitem
et Gertrudem, uxorem ejus, de Nantiaco et de omnibus
pertinentiis... investivit. Datum anno gratise miliesimo
ducentesimo vicesimo, mense Junio (6).
1220. Th. Dei gratiâ Trevirorum archiep universis...
salutem in Dominura. Noveritis quod... Agnès... Ducissa
Lotharing...., in nostrâ prœsentiâ constituta, cognovit
se reddidisse et quittasse in perpetuum nato suo Mathseo
Duci Lotharing... Nantiacum cura omnibus pertinentiis
suis et quidquid ibi habcbat... quse omnia nomine dota-
litii possidebat. — Actum anno gratise MGGXX mense
Junio (7).
(1) Ibid., col. 363.
(2) Ibid,, col. 368.
(3) Ibid,, col. 378.
(4) Charte do Tordre de Malte citée par M. H. Lepage :
Les communes de^ la Meurthe, Tome II, page 96.
(5) D. Calmct : ibid,, col. 425.
(6) Ibid., col. 429.
(7) D. Calmet : Histoire.,. Tome II, preuves, col. 430.
7
— 98 —
1240. Gertrudem ducissarn de Nanceio,
Nous revenons sur ce texte déjà cité et analysé pré^
cédemment, car on nous paraît outrepasser ia logique
en traduisant trop littéralement le latin du chroniqueur
Albéric de Trois-Fontaines qui vivait au commence-
ment du XIII* siècle.
Si, en 1080, Nancy n'était encore qu'un groupe de
maisons champêtres, une bourgade presque inconnue,
entourant peut-être une forteresse, le titre de Duchesse
de Nancy n'ajoutait guère de relief a la qualité de
Duchesse de Lorraine : Gertrude aurait pu facilement
trouver un nom plus illustre déjà dans les vastes états
du Duc Thierry, son époux.
Le texte d'Albéric n'est sans doute qu'une abrévia-
tion^ abréviation suffisamment claire, mais cependant
regrettable au point de vue qui nous intéresse : parlant
d'un fait accompli en i080, il écrit vers 1240 : Gertrude
devint Duchesse de Nancy au lieu de : Par son mariage
avec Thierry t% Gertrude devint Duchesse de cette par-
tie de ïaacienne Lorraine dont Nancy est maintenant
{en 1240) la capitale. Les seuls mots : Ducissa dsNanceio
épargnent au lecteur la peine de chercher de quelle Lor-
raine (Haute ou Basse) Gertrude a pu être Duchesse.
Mais, nous le répétons, on ne présente aucun acte
authentique à l'appui de ces trois mots et, parmi toutes
les duchesses de Lorraine, je ne sache pas qu'aucune
autre que Gertrude ait porté (si toutefois elle l'a vrai-
ment porté) le titre de Duchesse de Nancy ; tandis que
plusieurs passages de la même chronique (1) démon-
trent que son auteur employait volontiers l'expression
de Nanceio pour désigner la Haute-Lorraine.
(1) Aux années 987, 1126, 1238, etc.
— 99 —
m
Le plus ancien nom latin de Nancy, Nanciacus ou
NantiacuSy réclame naturellement une place dans Tétude
des textes. Ce vocable a-t-il une cause, une raison
d'être, un sens particulier ? (i)
1"* « Il y a assez d'apparence, dit Dom Galmet (2),
« que le nom de Nancy, Nanceium, Nancey^ vient du
« celtique Naut qui signifie un amas d'eau, une mare,
« un marais... On sait qu'il y avait autrefois une grande
« mare au lieu qu'occupe aujourd'hui la Carrière, j»
Cette explication du savant historien de la Lorraine
est malheureusement aussi inexacte qu'incomplète, car
Nancy s'appelait primitivement en latin Naatiacus et
non Nanceium (3) ; car Nantiacus existait, croyons-nous,
bien avant que l'emplacement actuel de la Carrière
servît de cuvette à un marais ; car le mot celtique Nant
signifie vallée (4) et non pas marais, ni mare, comme
(1) c La majorté des noms de lieux dérive des trois sour-
c ces suivantes : l*' les saints qui sont les patrons des
c églises; 2<> les premiers seigneurs ou possesseurs des
« domaines qui ont constitué le noyau des villages ; 3° les
«c circonstances physiques, s (A. Digot : Histoire de Lor-
raine, Tome l«', p. 285.)
Le mot Nancy découle- t-il de Tune de ces trois sources ?
(2) Notice de la Lorraine y Tome IL col. 71.
(3) Voir les textes des années 600, 896, 1127 et 1220.
(4) « Nflftf (vallis ; cf. Nantuates, Caes). — Nantuates (i-e
c Yallenses). — Nans vallis. » J. C. Zeuss : Qrammatica
cellica,^. 764,814, 1077.
La forme Nans du a^ot celtique Nant appartient au dialecte
de Cornouai|leB.
. V
- 100 —
on le répète aujourd'hui encore sur la foi de quelques
commentateurs.
2** Le très érudit M. H. d*Arbois de Jubainville eslime
que Nantiacus fut le nom primitif de notre ville et que
ce vocable vient de Nantius, Nantus ou NanloSy nom
d'homme qui aurait été porté soit par un Romain, soit
par un Gaulois. — « La forme la plus ancienne du
« nom de Nancy est probablement Nanl-iacus dérivé
« du gentilice romain Nantius. Nantius est lui-même
c dérivé du nom d'homme gaulois Nantos parfaitement
« reconnaissable dans le nom de lieu dérivé NanteuiL
« Les inscriptions romaines de Bordeaux. . . nous offrent
t sous les numéros 209 et 277 deux exemples du génitif
« Nanti d'un nom d'homme qui, au nominatif, était
« évidemment soit Nantius^ soit Nantus ou Nantos^
« dont Nantius lui-même vient. — Nancy a dû être
a primitivement Nantiacus, (1). »
Les Celtes et les Romains avaient-ils donc emprunté
ce même radical Nant à une langue plus ancienne
encore, au sanscrit par exemple? Ou bien Nantius,
Nantus, Nantos était-il l'arrière-petit-fils de l'un des
compagnons de Bellovèse ou de quelque autre Bren-
nus?
Quoi qu'il en soit, si le radical de Nantiacus est
vraiment d'origine celtique, notre ville aurait eu la
double chance d'être fondée, probablement sous les
Gallo-Romains, dans une superbe vallée et par un
personnage appelé lui-même Vallée ou Lavallée, Val
ou Levai. Cette coïncidence n'est- elle pas extraor-
dinaire et cette famille de Nantius, Nantus ou Nantos,
(1) RevtM celtique, tome X> p. 229 et tome XI, p. 253.
— 101 —
restée si longtemps introuvable, inconnue, aurait-elle
aussi donné son nom aux Nantaates qui habitaient
certaines vallées des Alpes et aux localités appelées
Nant (Aveyron), Nanleuil-en-VaUée (Charente) (1),
Nanteitil'la-Fosse (Aisne), Nanteuil-le-Haudouin (Oise),
Nanteuil-notre-Dame (Aisne), Nantais (Meuse), Naniua
(Ain), etc., etc., toutes situées également dans des
vallées?
Il me semble plus simple d'admettre que le person-
nage révélé par les inscriptions bordelaises était ori-
ginaire ou propriétaire d'un domaine sis dans une
vallée et que. par cette raison, son domaine portait un
nom commençant par le monosyllabe Nant^ dont la
signification est aujourd'hui bien établie.
3** Sur le même radical « Tabbé Marchai suppose que
< Nant dérive du nom de la reine Nantechilde, femme
« de Dagobert I" (née vers 612) répudiée par lui en
« 629 et qui peut-être aurait construit ou habité le
a castrum nanciacum pendant son veuvage. — Le
« trions frappé au temps de Theodebert II (entre 596 et
« 612), renverse cette hypothèse » (2).
4° a Sans vouloir nous prononcer sur cette question
« linguistique, continue M. Godron, nous ferons obser-
« ver que Nancy est situé dans une magnifique vallée.
« — Le suffixe ac se montre dans le nom de beaucoup
« de villes anciennes, par exemple Mogontiacam, Bri-
(1) Le nom N anteuil- en- V ailée ^ véritable tautologie,
équivaut à Vallée-en^ValUe et prouve qu'à Tépoque d • la
translation en français de ce vocable on ne connaissait déjà
plus le sens du radical Nant,
(2) D. A. Godron : De V origine des noms,,.
N
— 102 —
« siacum^ SoUmariaoum, Turnécum, etc. Il se rencontre
« un grand nombre de fois dans les vieux noms de
« localités de la Lorraine et du Pays messin et se trouve
a très répandu dans le reste de la France. — Parmi les
« différentes séries de modifications qu'a subies la
< particule âo, la série que les Lorrains ont le plus
a souvent adoptée est celle qui de ac aboutit définiti-
« vement à e/ et à /. — Enfin la désinence um de
« Nanciacum est d'origine latine. »
C'est parfait ; mais encore aurait-il été bon de nous
apprendre ce que pouvaient signifier le. suffixe gaulois
ac ou iac, les suffixes français e/, y ou cy et pourquoi
le Nanciacus des plus anciens textes est redevenu
Nantiacus en 1220.
5° « L'opinion la plus plausible sur Tantiquité de
« Nancy, dit M. Lejeune (1), est celle qui la prouve
a par la conformité de son nom avec sa situation. Le
« mot Nant est gaulois et signifie un lieu où beaucoup
« d*eau se rassemble. . . Il n'y a donc pas de doute que
« cette ville doive son origine soit aux Gaulois, soit
« aux Belges qui avaient dépossédé les premiers...
« Le mot Nanciacum a évidemment une origine gau-
« loise... »
IV
Pour être complet, nous devons exposer aussi les
principales interprétations de la particule ac ou iac^
particule que Ton ne saurait négliger et au sujet de
(1) Mémoires de la Société des Antiquaires de France,
tome VII: Notice sur les antiquités du département de la
Meurthe,
*
— 103 --
laquelle M. J. Quicherat s'est, depuis longtemps déjà,
prononcé en ces termes :
« Désinence iacum et ses équivalents, iaca^ iacas^
« iacua^ iaga, iagas, iagus. — Il n'y en a pas de plus
d fréquente, car elle affecte peut-être un vingtième des
« noms les plus anciens. Elle représente un sufûxe
« celtique qui a servi pour la composition au moins
« jusqu'au septième siècle de notre ère... (1) »
1° La particule celtique ac, dit-on, est aliribulive de
propriété. — Cette explication, admissible pour cer-
taines dénominations de lieux, tels que Tarnac, Bran-
naCf Juliac, Naiitiae (2)... ne nous semble pas applical)le
aux noms de personnes et de peuples : Dumnacy Nep*
tac, Divitiac, Valetiac, SegontiaCy Teutobodiac. ni à
certains autres noms de lieux : Mogontiac^ SoiimariaCy
GosoriaCy Nantiac (3)..., car il n'y a plus ici relation de
propriété : Divitiac et Valetiac n'appartenaient sans
doute pas a d'autres Graulois appelés Divit et Valet , ni
Solimariac à la déesse Solimara, ni Gesoriac et Nantiac
a des personnages appelés Oesor et Nanty ces deux
derniers mots, incontestablement celtiques, se tradui-
sant respectivement en français par les mots port de
mer et vallée,
2"* J. C. Zeuss constate (4) que les particules ac et
(1) De la formation française des anciens noms de
lieux.,., p. 34.
(2)* En supposant, avec M H. d*Arbois de Jubainville,
que Nantiacus vienne du nom d'homme Nantius^ Xantus ou
Nantos.
(3) Dans Thypothèse, préférable suivant nous, qui fait
dériver Nantiacus du mot celtique Nant signifiant vallée.
(4) Grammalica celtica^ page 806.
- 104 —
r
iac se rencontrent fréquemment dans les dénominations
d'hommes et de peuples gaulois ; GalcacuSy DamnacuSy
Neplacus, Magiacus^ DIvJiiacus, Valellacus, Segontiaci
et qu'elles sont adaptées parfois à des noms de divinités
celtiques : Solimariacum, Magon{iacum et parfois à
des noms de personnages gaulois, fondateurs ou posses-
seursde villes, bourgs et villages, tels que : Turnacum
de TurnuSf Brennacum de Brennus^ Nemetacum de
Nemeij etc. — Mais ce n'est encore qu'une constatation
et non l'explication, la traduction littérale de ces deux
particules.
3** a Le suffixe acos tient dans l'onomastique celti-
« que une place considérable, dit M. d'Arbois de Ju-
<i bainville (1). Sa valeur un peu vague est analogue à
tf celle du suffixe français ier, ière qui sert à former no-
« tamment : des adjectifs dérivés d'adjectifs...., des
« adjectifs dérivés de noms...., des noms d'agents
c exprimant d'ordinaire une profession...., des noms
« de lieux dérivés de noms communs...., des noms de
« lieux dérivés de noms d'hommes.... — Le suffixe ier
< a donc un sens très général et peu déterminé ; il a
€ cela de commun avec le suffixe acos, — Le suffixe
« acos a servi à former des noms de personnes, de
a lieux et de peuples : Dumnacus , Divitiacus ,
« Valetiacus,,.,^ Segontiaci , Teutobodiaci Un
« nombre assez notable de ces noms de lieux est déri-
« vé de noms d'hommes. Avant la conquête romaine,
« les Gaulois vivaient de pâturage et de guerre.... Les
« Gaulois vaincus abandonnèrent la guerre pour Tagri-
(1) Etude» grammaticales sur les langues celtiques^ pa-
ges 16, 17, 18.
- 105 -
a culture ; une grande partie des terres affectées à la
« pâture commune devint l'objet de la propriété pri-
€ vée et souvent le propriétaire donna son nom au
« groupe d'habitations élevées par lui pour lui-même,
« pour ses clients et pour ses esclaves, sur la portion
« du sol cullivable qu'il s'était fait attribuer. — De là
a une partie des noms de lieux en acos qu^on trouve dès
a le temps de l'empire romain.... Les autres noms de
« lieux en acos sont d'origine différente ; car le suffixe
a acos n'a pas, même dans les noms de lieux, le sens
€ exclusif de « propriété de » comme certains savants
et paraissent le croire. »
Ces observations très ingénieuses ne nous donnent
pas non plus la signification primitive et précise de ce
suffixe acos, qui tenait une place si considérable dans
l'onomastique des OeUes, c'est-à-dire dans une langue
répandue en Gaule avant la conquête romaine» Ne sont-
elles pas aussi trop savantes pour concorder avec les
lois, plus simples sans doute, qui devaient régir le
bégaiement d'un peuple enfant ?
4** Quelques auteurs déduisent iacas du mot latin
viens (bourg), dérivé lui-même du grec oikos (maison).
Nant'iacas, contraction de Nanti- viens, signifierait
donc : le bourg de Nantiiis ou le bourg de la vallée.
Mais, la contraction naturelle de Nanti-vicus ne devait-
elle pas produire Nantieus et non Nantiacus^ -- Quel que
fût le genre: masculin, féminin ou neutre du mot radical,
le suffixe i'acMs, équivalent de viens, ne devait il pas rester
invariable et le bourg construit sous la protection de So-
limara, par exemple, être appelé Solimarse viens ou
Solimaricus et non Solimariaea ? — Au surplus, le mot
latin viens n'explique pas les mots : Divitiacus, Vale-
— 100 -
liacus^ SegontiacL.,, et son iotervention ne ferait reinoa*
ter le nom et probablement la fondation de Naniiacus
qu'au temps de Toccupation romaine. Bien que très
respectable déjà, cette ancienneté ne satisfait pas Tes-
pèce d^intuition éveillée en nous par le radical celtique
Nant et par les trouvailles néolithiques dont nous au-
rons bientôt à invoquer le témoignage.
De ces quelques commentaires, choisis entre vingt
proposés, il résulte que la signification absolue du
sufQxe îac n'a pas encore été trouvée. En fouillant les
dialectes celtiques^ ne la découvrirait-on pas dans un
adjectif analogue à notre mot bon ? Alors le NanUiac
des Gaulois serait la ville de la Bonne- vallée, de même
que Vallombreuse doit son nom a Vallis umbrosa^ Val-
romey a Vallk romana^ Vaucluse à Vallis eiausa^ Mont-
médy à Mons médius ou Mons malediclus^ etc.
V.
L'étymologie du nom de Nancy a bien peu élucidé
notre problème. À la diûérence de THistoire cepen-
dant, les textes authentiques nous prouvent que cette
ville devait exister avant le xi' siècle : car, vers Tan
600, on a mis son nom sur une pièce de monnaie ; en
896, son territoire renfermait certainement un vignoble ;
loin d*ètre une bourgade ou seulement une forteresse
sous les premiers Ducs héréditaires de Lorraine,
Nancy, par son étendue et sa population justifiait déjà
la présence d*un Villicus (maire) en 1070, d*un Advo-
caius (voué) en 1073 et d'un Prwposiius (prévôt)
en 1142.
Mais, à moins de supposer au territoire de notre
■J
~ ia7 —
ville, on 896, une très grande superficie, comme le fait
remarquer si justement M. Godron (1), personne ne
soutiendra qu'à cette époque on aurait pu trouver un
vignoble dans Tintérieur ni même dans les environs
immédiats de la bourgade historiquement connue jus>
qu'à présent, sachant que, sous. le règne Charles II
(1890 à 4431) Nancy Ville-vieille était encore borné,
Hu nord, par le gros village de Saint-Dizier, devenu
aujourd'hui le faubourg des Trois-Mais^ons ; à Test, par
la Meurthe souvent débordée et plus puissante qu'à
présent, et, de tous autres côtés, par des marais que
ce Duc de Lorraine commença à faire dessécher. Même
en 1400, il n'y avait pas là un terrain favorable à la
culture de la vigne. Cependant le diplôme de 896 porte
bien et avec raison : in Nanceiaco,.. viiiea, une vigne...
dans Nancy^ sur le tervHoire de Nancy et non sur
celui de Tune des communes qui alors pouvaient entou-
rer Nancy.
• Il doit donc y avoir malentendu entre THistoire et les
Textes authentiques, puisqu'il est impossible d'appli-
quer tous ceux-ci à un lieu quelconque, unique, rai-
sonnablement circonscrit ; plus impossible encore de
les faire tous converger sur le chétif Nancy admis par
les Historiens. Nécessairement, il faut chercher ailleurs
qu'autour de la place Saint-^^Epvre actuelle la germe,
l'emplacement et les ruines de Nanliacus,
(l) « Lo territoire primitif de Nanciacu7n paraît donc avoir
oc été assez étendu et soumis à de nombreuses cultures.... 3>
D. Â. Godron: De V origine des nome,.,.
— 108
VI.
De tous les renseignements fournis par l'Histoire et
par les Textes, que subsiste-l-il maintenant d'incontes-
table ? Bien peu de chose, mais assez, heureusement,
pour nous permettre de rattacher le présent au passé
ethnographique le plus lointain, car il reste acquis que
Nancy doit son nom aux Celtes ; que, vers Tan 600 de
notre ère, Nancy existait et possédait très probable-
ment un atelier monétaire ; qu'en 896, on cultivait la
vigne dans Nancy même et qu'en 1069 Odelric jouissait
de ce Nancy soit en pleine propriété, soit comme vas-
sal ou voué, dans tous les cas très largement, puis-
qu'il put transmettre cette seigneurie à des héritiers ou
successeurs connus qui, eux-mêmes, la rétrocédèrent
par la suite et sous des conditions assez onéreuses à
un descendant de Gérard d'Alsace. — Nous savons en-
core qu'auprès de Nantiacus, vers 1080, le duc Thier- *
ry I®' possédait un alleu allodio suo apud Nanciacum
dont il détacha le terrain nécessaire à l'établissement
d'une église et que celte égUse, détruite seulement à
la fin du siècle dernier, occupait à peu près la place
actuelle de l'Arsenal (1). — Nous savons également
que Simftn I*' et Mathieu I^ ont daté plusieurs actes
d'un château sans nom particulier^ situé tout à la fois
auprès de cette église et auprès de Nantiacus, que
Simon P' y soutint un siège et que Mathieu I"^ y trans-
porta le centre do son gouvernement : Ecclesia ante
iVfl/2cej'w/2i castrum meum.... Coram castre meo Nan-
(1) Voir Les transformations de Nancy , § 1.
j
-- 109 —
ceyo.,,. Gaslrum juxta Nancewaïf ante Nanceium,
apud Nanciacum (1).
Qu'était-ce donc que Nanliacus ? Qui l'avait fondé ?
Où existait-il ? Qu'est-il devenu ?
L'histoire, les textes, les monuments matériels, tout
à présent nous fait défaut. Il ne nous reste .plus qu'à
interroger le soi lui-même. c... Les pierres doivent
parler. »
LA GÉOLOGIE.
L
Entre Messein, Toul, Liverdun, Frouard et Laneu-
ve ville- devant-Nancy, la Moselle et la Meui the forment
aujourd'hui une sorte de presqu'île dont le massif de
la Haye occupe tout l'intérieur. Le point culminant de
ce monticule domine d'environ deux cent cinquante
mètres le fond des vallées qui rencei|;nent ; une vaste
forêt couvre son plateau très accidenté et sur ses flancs
(l) Le seûs donné k juxta au moyen-âge précise, pour la
même époque, la signification des mots ante et apud em-
ployés dans les textes que nous rappelons : de même que Nova^
villa juœla Nanceium désignait alors Laneuveville^ \i\\a,ge
situé à cinq kilomètres de Nancy ; de même les mots castrum
juxta Nanceium, ante Nanceyum, apud Nanciacum^ indi-
quent assez nettement que le château sans nom des premiers
Ducs héréditaires de Lorraine était situé dans le voisinage
et non dans l'intérieur du Nancy dénommé tantôt Nantia-
eus, tantôt Nanciacus et même Nanceium. Tandis que la
phrase m Nanceiaco vinea montre bien que la vigne, donnée
par Gharles-le-Simpleaux religieux de Salonne, en 896, était
dans Nancy même, le Nancy plus ou moins vaste du ix*
siècle.
^ 110 —
iadioés, entre la forêt et les rives des deux fleuves,
s'étalent maintenant vingt-cinq villes ou villages.
Mais tel n'a pas toujours été l'aspect de cette pres-
qu*île. Grâce aux patientes investigations de savants
Géologues, nous pouvons, en quelque sorte, assister à
la superposition des diverses couches sédimentaires,
marines ou fluviatiles, qui constituent le sol lorrain,
puis à leur dislocation partielle sous l'action des eaux
sauvages produites par la fonte des épouvantables
glaciers qui couronnaient autrefois les Vosges (1) ;
torrents impétueux qui creusèrent leurs lits de plus en
plus profondément dans les parties les moins résis-
tantes des immenses dépôts laissés par les anciennes
mers (2).
Toutefois cette dislocation ne s^opéra qu'avec une
extrême lenteur, car le volume des eaux et la rapidité
de leur cours subissaient la double influence des tem-
pératures les plus variées et des obstacles de tous gen-
res qui entravaient leur descente vers TOcéan (â).
(1) Aujourd'hui encore la cîme des Vosges dépasse i'en-
viron mille mètres les plus hauts sommets des monticules
qui entourent Nancy.
('^) Entre le plus haut sommet de la Haye et le fond actuel
de la Meurthe, la différence de niveau est d'environ 250
mètres. Ce chiffre représente donc le minimum de Taffouil-
lemeat opéré par les eaux sauvages dans la masse sédimen -
taire dont une couche ou strate constitue Tassiette de la
ville actuelle.
(3) Aux amateurs de détails intéressants plus complets et
plus scientifiques sur la formation du sol lorrain, on ne
saurait trop recommander les œuvres de M. le docteur Blei-
cher et particulièrement son étude intitulée : Nancy avant-
l'histoire à laquelle je me peroiets d'emprunter le tableau sui-
Ainsi, de siècle en siècle, se formèrent par atlouil-
lement et par érosion les (Jivers vallons qui séparent
aujourd'hui les monticules de la Haye, de Malzéville,
de Dommartemonr, de Tomblaine (1), de Pont-Saint-
Vincent, de Toul, de I^ompey, etc, valions qui ont
constitué autour de nous le thalvsreg de la Moselle et
celui de la Meurthe à peu près tels que nous les voyons
maintenant.
Dans notre presqu^île, le massif de la Haye émer-
geant peu à peu de la nappe d'eau qui Tentourait, se
couvrit de plantes, d'arbustes et de forêts, préparant
ainsi un asile aux animaux supérieurs et aux hommes
qui devaient un jour venir le peupler.
H.
« L'Europe (dans ses parties exondées) était alors,
« comme la Gaule, couverle de forêts vierges, où
< n'eussent été les fleuves débordés, l'écureuil aurait
vant : «-Les eaux semblent donc, depuis la fin des temps
« tertiaires, avoir obéi à un mouvemeat de descente qui a
« transporté leur cours du sommet de nos plateaux à mi-
<K côte des collines dont elles ont modelé les contours et où
c nous les trouvons dans les commencemt nts de Tépoque
oc quaternaire. C'est déjà la Meurthe, mais avec des propor-
« tionà gigantesques, qui passe dans la vallée percée entre
• Boudonvillo et Malzéville dans le massif jurassique »
vpage 17).
(1) a Lé solde ce village (Tomblaine), qui est composé de
« sable et d'argile, a dû être beaucoup plus élevé il y a deux
< mille ans qu'aujourd'hui et il a pu être entraîné en partie
c par les eaux des pluies ou celles des rivières. » H. Lepa-
ge ; Le département de la làeurthey 2* partie, page 559.)
-^ 112 —
t pu courir de l'Oural à l'Ucéan sans jamais toucher
I terre. — Les Celles, sortis des steppes de la haute
« Asie.... s'eogagèrent résolument dans l'insoudable
a proTondeur des grands bois ; ils prirent à i'Ouest el
« marchèrent dans cette direction tant qu'il y eut de
« la terre pour les porter (1). »
L'ethnographie estime que cette migration de l'Est à
l'Ouest, que cette propagation de proche en proche
franchit le Rhin quinze à vingt siècles avant notre ère,
que nos premiers ancêtres hietoiiques (2), trouvant les
montagnes et glaciers des Vosges encore inabordables,
furent obligés de les tourner par le Nord ou par le Sud,
et qu'après avoir occupé les rives occidentales de la
Moselle, une de leurs tribus ne put pénétrer que par
i'Ouest dans le bassin de la Meurthe.
Des témoignages certains et nombreux révèlent
qu'après avoir traversé la Moselle, les Celtes s'établi-
rent d'abord sur le versant occidental de la Haye, puis
dans la vaste forêt qui couvrait le sommet de ce massif
et enfin sur son revers oriental. — Alors, la Meurlhe
était un fleuve majestueux, un véritable gol/e, baignant
d'une part l'ilc de la Haye, d'autre part les collines de
Malzéville et de Dommartemont ; ses rives aux contours
(1) Victor Duruj : Histoire des Romains , tome III, pp.
77 et 18.
(3) L'Histoire, en eRet, ne counait encore que les Celtes
ou Guulois ('('mine premier» occupaets do notre région ;
mais la Paléontulogie sait parfaitement quo d'autres géoé-
ratioDs humaJoeH' (Troglodytes, Iticrea, Ligures) so sout
BDCCcdé en Gaule avant l'immigration celtique, dont le
Qom et la race aubaistaient au temps de la couquête
- H3 -
variés, ici en pente douce, là taillées à pic, achevaient
de constituer une vallée, Nant^ grandiose et vraiment
admirable avec ses forêts vierges, ses rochers superbes
et ses promontoires verdoyants.
NANTIACUS.
I.
 la lisière orientale du grand bois (1), dans le canton
occupé aujourd'hui par les villages de Vandœuvre et de
Villers'les Nancy, les Celtes trouvèrent une zone de
terrain doucement inclinée, récemment abandonnée
peut-être par les eaux et par conséquent recouverte
encore de jeunes végétations et d*un limon fertile. Il
leur eut été difficile de choisir, sur ce versant de la
Haye, une installation plus commode, plus agréable et
surtout mieux défendue contre les dangers extérieurs.
C'est donc là, pensons-nous, qu'un de leurs clans fonda
cette bourgade à laquelle, par la suite et en raison de
ses mérites, fut donné le nom de Nant-iachj probable-
ment la Bonne-Vallée (2).
(1) On sait que Kel tes signifie Hommes des forêts: « Leurs
« maisons furent d* abord les grottes naturelles ou le gourbis
c de nos populations algériennes, des huttes rondes de bran-
< chages recouvertes de terre pétrie ou gazonnée, avec un
« trou au sommet pour la fumée et dont Tintérieur était
c souvent creusé en contre-bas du sol.... Ils plaçaient volon»
< tiers leurs demeures au confluent de deux rivières, dans
« les île3, les presqu'îles, près d'une source ou dans le voi-
« sinage des forêts.... » V. Duruy : ibidem, page 95.
(2) Cette hypothèse ne semblera pas étrange, je Tespère,
si Ton veut bien se rappeler que, depuis les temps géologi*
8
~ 114 -
La bande de terre ainsi occupée^ pâturage d'abord,
culture ensuite, s'élargit de jour en jour à mesure que
la Meurthe, affouillant son lit, s'éloignait de la Haye
et sur cette zone, se déroula pendant plusieurs siècles
la civilisation rudimentaire de nos aïeux : les Kymris
y succédèrent aux Celtes et les Belgs aux Kymris;
puis les Romains s'y mêlèrent aux Belgs et les Francs
enfin vinrent englober dans le royaume de Clovis ce
territoire qui avait déjà vu et devait voir encore passer
tant d'invasions .
Examinons maintenant s'il est possible d'appliquer
aux bans actuels de Vandœuvre et de Villers les rares
documents authentiques en notre possession, derecons-
tituer sommairement sur ce point la topographie du
Nant-iach et d'y retrouver les divers quartiers qui cora.
posaient la première cité nancéienne.
ques, le niveau des fleuves descendus des Vosges ne s'est
abaissé que peu à peu entre les collines qui limitent au-
jourd'hui leurs bassins A un moment donné, c'est-à-dire
au temps de r.immigration celtique, le niveau de la Meurthe
pouvait parfaitement se trouver à la hauteur de Vandœuvre
et de Villers et par conséquent Tassiette actuelle de ces
deux villages était réellement au fond même d'une vallée
plus ou moins large, en contre-bas d'environ 200 mètres
par rapport au sommet de la Haye. — Quant au vocable
très significatif appliqué par les Celtes au campement, puis
à la bourgade qui a précédé Vandœuvre et Villers, est-il
plus étrange que tant d'autres de notre géographie tels que :
Valbonne, Bonneval, Belval, Beaulieu, Vauxbons, Vaucluse,
Bellecroix, Belle-Fontaine, Belle-Eglise, etc, etc. ? — Est-il
plus étrange enfin de voir Nant devenir Nant-iach, Nanita-
cus^ Nanciacus, Nanceiacus, Nancei, Nanceium et enfin
Nancy, que de voir TJxellodun (la haute montagne) devenir
le Puy d'Issu lu, Brannodun (la montagne des corbeaux)
Brancaster, Lucotet (la bourgade des marais) Lutèce, puis
Paris, etc, etc. ?
115 -
IL
Le séjour, sur le monticule de la Haye, des plus
anciens habitants connus de la Gaule est prouvé d'une
manière absolument incontestable par les nojnbreux
objets (silex éclatés et polis, outils, ustensiles, orne-
ments en bronze, en fer, etc.), par les monuments
(tumuli, alignements, nécropoles, etc.) et par les divers
retranchements (camp d'Affrique, enceinte de la
Fourasse,etc.) dont M. F. Barthélémy vient de publier
le très curieux inventaire et la répartition par commune
pour notre département (1).
Tandis que, sur les territoires de Vandœuvre et de
Villers, les trouvailles d'objets préhistoriques sont
variées et presque innombrables, on n'en relève aucune
dans la région occupée par Nancy au xvii" siècle, alors
que son enceinte était mieux déterminée qu'aujourd'hui
par les fortifications construites sous Charles III (2).
(1) Recherches archéologiques sur la Lorraine avant
Vhistoire,
(2) <K C'est vers le sommet des plateaux et des colliaes,
<t dit M. Barthélémy, qu'on a signalé le plus grand nombre
c de stations néolitiques, et quelquefois encore sur les ter-
oc rasses élevées, au voisinage des rivières poissonneuses. Il
oc ne semble pas toutefois que les néolithiques aient recher-
cç ché précisément les points culminants des plateaux ; au
oc contraire, ils s'installaient de préférence au pourtour, mais
c toujours dans des positions dominantes, ayant des vues
oc sur les pays d'alentour. » Ibid. page 63.
Notre savant Archéologue so serait-il exprimé autrement
s'il avait voulu décrire les pentes de Vandœuvre et de Villers
telles qu'elles pouvaient être il y a trente siècles, c'est-à*
dire à mi-côte de la Haye et au bord de la Meurthe ?
— 116 -
Une telle disparité, au point de vue archéologique,
entre ces territoires contigus corrobore le système de
formation si merveilleusement retrouvé par nos érudils
Géologues et nous dit aussi qu*au temps des Paléoli-
thiques et des NéoHthiques le sol actuel de Nancy, en-
tièrement recouvert par laMeurthe, devait être inhabité
et inhabitable. S^il en avait été autrement, les Celtes,
ces insatiables chercheurs d'air et d'espace, ne se
seraient-ils pas répandus également dans le fond de la
vallée et aujourd'hui n'y découvririons -nous pas, com-
me au pourtour des collines voisines, quelques restes
authentiques des civilisations disparues de l'ancienne
Gaule ?
Sous la domination romaine et sous les Mérovingiens,
Nant-iach, devenu Nanliacus, ne fut ni un pagus, ni un
vïcuSy ni une ville urbs, mais resta sans doute une
simple cité champêtre, yilla (1), ce qui explique jusqu^à
un certain point le silence des anciens Géographes et
pourquoi « ce serait en vain qu'on espérerait y trouver
« des antiquités sacrées ou profanes : bâtiments, mo-
« numents, tombeaux, statues, anciens vestiges de la
c magnificence romaine ou précieux restes des ouvra-
c ges des rois d^Austrasie et des premiers Ducs de
« Lorraine (2). » Son territoire situé entre les camps
(1) Complurium iQ agris mansionum vel sedium collectio.
— Du Gange.
('^) L*abbé Lionnois : Histoire des ville vieille et neuve de
Nancy, Tome I, page 11. — Cette réllexion s^applique aussi
bien à Nantiaoh qui ne fut jamais une capitale sous les
Gaulois, les Romains et les Mérovingiens qu*à Nancy Ville-
Vieille dont la fondation, suivant nous, ne remonte pas au-
delà du XI' siècle de notre ère. En s^éloignant de la Haye,
. m—J
— 117 —
d*Affrique et de la Fourasse embrassait, sans aucun
doute, une grande partie de la Haye et de jour en jour
s'accroissait de tout le terrain abandonné par la Meur-
the. Le campement primitif est devenu un village ; le
village s'est transformé en cité champêtre ; la cité elle-
même a pris les proportions d'un canton, enfermant
dans son circuit non seulement des centaines d'hecta-
res de bois, mais encore tout le terrain laissé à sec, au
nord, à Test et au sud, par le reflux latéral et rabais-
sement graduel de l'ancien torrent.
Et, dans l'étendue de ce canton, où l'existence hu-
maine a laissé tant de traces certaines^ ne pouvons-
nous raisonnablement admettre la création d'une ou
plusieurs maisons-fortes, abris si nécessaires au temps
des épouvantables invasions qui détruisirent l'empire
rom.'iin et donnèrent naissance au royaume des Francs ?
— Comme tant d'autres cités champêtres, Nantiacus a
dû disparaître nombre de fois sous le fer des barbares,
dans les incendies qu'ils semaient sur leur route et
dans les guerres de la période mérovingienne (1).
la Meurthe semble aToir arrêté les développements qu'aurait
pu prendre la bourgade celtique, empêché qu'elle devienne
une ville comme Trêves, Strasbourg, Metz, Reims, Besan-
çon.... et entraîné son dépérissement. Il est à remarquer, en
effet, que les grandes villes sont presque toutes situées soit
au bord de la mer, soit sur les rives d*un fleuve plus ou
moins important.
(l) Nous croyons devoir reproduire ici une observation de
M. de Beaulieu, tout en faisant remarquer qu'elle n'est
absolument juste que pour les temps antérieurs au xii* siè-
cle : « Il y a peu de provinces on France qui soient aussi
< dépourvues que la Lorraine de documents historiques....
c Quelle contrée.... fut dévastée aussi souvent, avec autant
c d*acharnement et par tant de peuples divers ? Dés le y*
— 118 —
Mais, rinvasion passée, Nantiacus renaissait de ses
cendres.
Vers le vi' siècle, nous le retrouvons gouverné peut-
être par ce seigneur Medoald (1) qui y possédait pro-
bablement un atelier monétaire et sans doute aussi un
castrum.
En 896, Nantiacus renfermait certainement un vigno-
ble assez important et de quelque mérite, pensons-nous,
puisque Gharles-le-Simple en prélevait une partie au
profit de Tabbaye de Salonne. — Le nom latin de Van-
dœuvre, Vindopera (2), nous dispense de chercher
oc siècle, sa population disparaît presque entièrement,
oc foulée aux pieds par les hordes de barbares que TËurope
a et TÂsie vomissaient : Alains, Huns, Suèves, Vandales,
<c Franks, Bourguignons,... Partout on voyait régner la mi-
oc gère et la désolation.... Plus tard les Hongrois, les Suédois,
oc les Allemands, les Français même la dévastèrent à l'envi ;
a tous semblaient avoir conjuré sa ruine.... Les titres, les
oc chartes et les chroniques des monastères étaient brûlés ou
a perdus.... et Ton ne savait (même) plus le nom (primitif)
a de la plupart des lieux dont les habitants étaient nôu-
oc veaux ou étrangers, lorsqu*en 16Sf7 ce duché fut rendu à
a son légitime souverain. > {Archéologie de la Lorraine,
Avant- propos.)
(1) c Le nom franc du seigneur Medoald qui a fait frapper
<x dans cette ville la première monnaie qui soit arrivée jus-
a qu'à nous. » (D. A, Godron : Be Vorigine des noms,,,,
page 38.)
(2) Vindopera, Vendopera et Vandopera dont rétymologie
nous paraît être : vindemiarum opéra (vignoble). — Les vi-
gnes de Vandœuvre sont, en effet, mentionnées nombre de
fois dans les titres originaux, tandis qu*on demanderait
vainement aux actes et aux traditions quelques renseigne-
ments sur la forteresse de Vindus (Vindo-briga) autour do
laquelle, disent d'autres commentateurs, ce village aurait été
construit par les Gaulois.
— 419 —
remplacement de ce vignoble qui se trouvait bien ainsi
jn NanceJacOy dans Tintérieurmême du Nancy que nous
reconstituons (1).
Une charte de saint Gérard, rapportée par le P.
Benoît Picart (2), nous apprend encore qu'un Berardus
de Vendopera était comte de Toul au x* siècle. — Ce
quartier de Nantiacus aurait-il eu aussi uno seigneurie
subalterne et un castrum particulier ?
III.
Appuyé sur les données générales de l'histoire des
Gaules, sur les découvertes de la géologie et sur deux
ou trois textes authentiques seulement, nous arrivons
au temps où le prince Odelric est devenu Seigneur et
Voué de Nantiacus piar la munificence de son frère
Gérard d'Alsace, premier Duc héréditaire de la Haute -
Lorraine ou Lorraine Mosellane. Loin d'être Tapanage
dérisoire que je n'ai pu m'empêcher de signaler, la
cité naacéienne, par son étendue et par sa population,
comportait dès lors la présence d'un Voué et d'un
Maire. En 1142 nous y voyons même un Prévôt (3) et
(1) Rappelons aussi que Mathieu I'% par son testament,
donua à Tabbaye de Glairlieu sa vigne de Nancy (l'abbé
Bexon) et que, pour les raisons indiquées précédemment,
cette vigne ne pouvait pas plus que Nantiacus lui-même
exister alors sur le territoire actuel de Nancy Ville-vieille.
(2) Histoire de Toul,,.. page 66.
(3) <K Les Prévôts.... étaient des officiers à là fois civils et
« militaires chargés de commander et d'amener à Tarmée
« ducale le contingent de leur circonscription territoriale,
« de rendre la justice en temps de paix, de poursuivre et de
« punir les malfaiteurs, d'observer et de contenir les sei-
c gneurs dont les ducs de Lorraine commençaient, dès le
— 120 —
tien ne prouve que cette charge n'existât pas depuis
un certain temps déjà dans le canton donné à Odelric.
— S'il n'est pas croyable qu'avant Tan 1000, Nancy
(le seul Nancy qui pouvait géologiquement exister) ait
été une souveraineté particulière (D. Calmet), on re-
connaîtra du moins qu'il présentait depuis longtemps
tous les éléments constitutifs d'un domaine seigneurial :
une forêt immense, des pâturages, des terres arables,
un vignoble, des maisons de serfs et d'artisans grou-
pées ou disséminées, le tout sous la protection d'un
castrum au moins et des deux camps qui dominaient la
vallée de la Meurlhe.
Au commencement du x® siècle, t les Hongrois re-
a nouvelant les atrocités commises par les Normands,
c firent de nouvelles invasions dans notre pays. On en
« compte au moins quatre ou cinq entre les années 910
a et 936 ou 937. Les maux qu'ils commirent furent tels
ff que les peuples, abandonnant les villages, se reti-
c raient dans les montagnes et les villes fortifiées^ em-
« portant avec eux ce qu'ils avaient de meilleur. Ces
c barbares pillaient, saccageaient, mettaient tout à feu
a et à sang. Les plus anciens monuments du pays nous
<K apprennent que la plus grande partie des habitants
< des diocèses de Metz, Toul (dont Nantiacus dépen-
a dait) et Verdun 'périrent dans ces temps malheu-
« reux (4). »
c règne de Mathieu !•', à mioer sourdement la puissance,
oc Dans la suite, les Prévôts.... furent en même temps gruyers
c et receveurs c'est à dire officiers des forêts et des finan-
c ces. » (H. Lepage : Les Etats de Lorraine en vers artifi-
ciels, page 15, note 1.) '
(1) Ravold : Histoire démocratique,,,, page 210. — Ces
— 121 -
En faut-il davantage pour expliquer la destruction à
peu près totale des titres antérieurs au x* siècle, des*
truction que nous déplorons, car elle nous empêche
d'être plus explicite et plus affîrmatif dans la descrip-
tion du Nantiacus gallo-romain et franc, d'indiquer
exactement les limites de cette cité champêtre, de con-
naître enfin le rôle qu'elle a pu remplir dans Thistoire
des Leukes, des Francs et des Austrasiens ?
IV.
Enl618, la famille de Lénoncourt (voir page 90 note 2)
produisait en justice un Mémoire contenant ce qui
suit :
ce Die XI décemb. 1155. Drogo princeps supremus et
c possessor Nanceianse civitatis dederat Duci Lotharin*
« gorum Mosellanicorum castrum suum de Nanceio,
« villam subter illud constructam et appenditias eorum
« in escambium castri et castellanise Roserise Salinitse,
« curtis Leonis comitis, banni Medii castri et Essonis
« Villae, reservavitque sibi senescalchum et posteris
« suis nomen de Nanceio » (1).
quelques lignes résument parfaitement les longues et nom-
breuses pages consacrées par nos Historiens aux ravages
épouvantables exercés en Lorraine par les Normands et les
Hongrois.
(1) D. Calmet : Histoire,,,, tome H, col. 1105 : oc Le 11
« décembre 1155, Drogon, prince souverain et possesseur de
c la cité nancéienne, cédait à Mathieu I*', duc des Lorrains
« mosellans, son château de Nancy, la villa (bourgade) cons-
oc truite au-dessous et leurs dépendances on échange du
«c château et de la châtolienie de Rosières-aux- Sali nés, de
a Lônoncourt, du ban de Moyen et d'Haussonville, réservant
oc pour lui-même la charge de Sénéchal et pour ses descen-
a dants le surnom de Nancy. >
— 122 —
Après avoir examiné, discuté à fond et presque rejeté
cette charte-notice, M. Lepage finit par reconnaître que
< dégagé des circonstances dont certains Généalogistes
« se sont plu à Tentourer et des termes sous lesquels
« ils Tont présenté, l'acte d'échange (ci-dessus relaté)
« devient un fait historique qui ne paraît pas devoir
«t être mis en doute (1). » Nous, ne saurions être plus
sévère ni plus exigeant que cet infatigable et conscien-
cieux Lotharingiste.
Sans doute Texposé de 1618 n'a pas toutes les qua-
lités voulues pour constituer un acte authentique ; son
auteur a employé une expression probablement inusitée
en 1155 : Mosellanicorum, et une formule trop obsé-
quieuse : pr inceps supreaius et possessor. Mais, à part
ces détails de style, sans importance au point de vue
historique, le Mémoire de 1613 peut très bien ne ren-
fermer que le récit exact, sincère, traditionnel peut-être
d'un fait absolument vrai, car aucun autre titre original
ne contredit ce rapport et aucun Historien postérieur
n'esfe parvenu jusqu'ici à le réprouver.
Malgré le silence des archives lorraines, nous com-
prenons que Mathieu !•' dût désirer le retour de Nan-
tiacus à son alleu situé auprès de cette seigneurie ;
quO; dans ce but, il ait remis à Drogon, troisième suc-
cesseur d'Odelric, un domaine à peu près équivalent,
et qu'avec la charge de Sénéchal de Lorraine, il lui ait
maintenu ses droits au surnom de Nancy i
(l) Recherches sur V origine, »>^ page 208.
128 -
V.
C'en était fait de l'agglomération que la charte-notice
de 1618 appelle : Nanceiana civitas. Mathieu P' ni ses
successeurs ne Thabitèrent probablement jamais d'une
manière suivie : un château-fort construit non loin de
là était plutôt leur résidence. (Voir les textes latins des
années 1080, 1126, 1130, 1145.) — Réintégré dans le
domaine des Ducs de Lorraine, Nantiacus, ses bois,
ses terres, ses châteaux, ses villages et tout ce qui en
dépendait, ne doivent plus désormais sortir de ce do-
maine que pour servir momentanément de douaire ou
d'apanage à quelques princesses de la famille ducale.
La Nanceiana civitas d'Odelric se désagrège ; une
partie de ses habitants Tabandonne, son nom même lui
sera bientôt enlevé (1) : le castrum de Drogon devient
le Chaslellet ; Vendopera est érigé en commune ; la
villa va former Villare (Villers-les-Nancy) et immédia-
tement au-dessous de ce dernier village, nous allons
seulement voir poindre^ dans l'histoire de notre canton,
cette ma\son-forte de Vancien Saurupt, qui peut-être
existait déjà depuis longtemps et qui nous a conservé
la souvenir de la vielle Nancy.
La cure de Vandœuvre continua à desservir la cha-
pelle du castrum ou Chastellet jusqu'en 1583 et celle
de Villers-lès-Nancy jusqu'en 1606. Cette commu-
(1) De tels changements ne devaient pas être rares au
temps des constructions en branchages, en bois et en pisé ;
nombre de villages, en Lorraine surtout, ont été déplacés,
transformés et anéantis, même depuis les temps histori-
qucH.
- 124 —
nauté religieuse ne prouve-t-elie pas encore qu^à l'ori-
gine le castrum^ Vendopera^ la Villay le Saarupt de la
vielle Nancy et leurs dépendances ont pu ne constituer
qu'un seul domaine seigneurial, une seule aggloméra-
tion, en un mot un canton unique, connu sous le nom
de Nantiacus (1) ?
Le plus ancien titre authentique concernant la com-
mune de Villers ne remonte pas au-delà du xiu* siècle,
soit à cent années après l'échange de 1155 et après la
dislocation de la Nanceiana civitas^ dont nous allons
maintenant voir les deux châteaux tomber en ruines et
se relever peut-être pour la dixième fois .
VI.
Que devint le castrum de Drogon entre les mains de
Mathieu V^ et de ses successeurs ? Placé à l'entrée de
la forêt de Haye, leur servit-il parfois de rendez-vous
de chasse, de château ou de maison de campagne ?
Tant qu'il fut habitable, quelques membres de la fa-
(1) oc On.lit dans l'Etat da temporel des paroisses : a La
c paroisse de Vandœuvre est composée de ce village et de
c celui de Houdemont, du fief de Bricliambaut et de la ber-
c gerie de Brabois. Villers dépendait aussi de cette paroisse,
c mais il en a été détaché.... La communauté est composée
c d'enviroQ 50 ménages, parmi lesquels peu de laboureurs,
a et le reste vignerons, » H. Lepage : Les communes de la
Meurthe. Tome II, pi^g^ 614.
« Uoe charte d'Henri de Lorraine, évêque de Toul de 1127
a à 1168, confirme à l'abbaye de Clairlieu.... les dîmes des
c vignes qu'elle avait ou pourrait acquérir dans la paroisse
« de Vandœuvre in parrochia Vendopere. » (Ibid. page 610.)
Cette charte est le plus ancien document connu relatif à
Vandœuvre.
— 125 —
mille ducale y résidèrent-ils, entre autres de 1213 à
1220, Agnès de Bar, duchesse douairière de Nantiacus,
comme le donnent à supposer (voir les textes) les actes
qu'elle a signés en 1214 et 1220 (i) ? — Mathieu I*' et
ses successeurs négligèrent-ils ce castrum avec inten-
tion, soit parceque le retrait, Téloignement de la Meur-
the lui avait fait perdre son aUcienne importance stra-
tégique, soit parce que le maintien de cette seigneurie
aurait pu retarder le peuplement et la prospérité de la
nouvelle ville iVa/2ceiafl2, qui avait leurs préférences?
Tout cela est possible, vraisemblable ; mais rien ne
nous éclaire. Quatre siècles de ténèbres historiques ont
succédé à Pacte de 1155 : nous saurons seulement que,
dans cet intervalle, le castrum nanceium d'Odelric et
de Drogon a pris le nom de ChastelIeL
Le 24 mai 1527, Antoine, duc de Lorraine, accor-
dait à son médecin des lettres patentes dont nous
extrayons :
c L'humble supplication de nostre trescher et féal
« conseiller et médicin ordinaire maistre Jehan Geof-
(1) oc Aux plaids annaux tenus à Vandœuvre le 13 jaa-
c vier 1653, les habitants reaouvelleiit, dans les termes
« suivants, les droits, usages et coutumes dont ils avaient
« accoutumé user de toute, ancien ne té : c Nous soûlions être
« d'ancienneté à une dame de Bar Et depuis, sommes
« tant allés et venus que nous sommes maintenant à nostre
a souverain seigneur Monseigneur le Duc de Lorraine et de
«Bar....)* H. Lepage : Les communes de la M eurthe
tome II, page 611.
Si je ne mo trompe, cette « dame de Bar » pouvait bien
être la duchesse douairière Agnès, veuve de Ferry II, dont
le souvenir, à Vandœuvre, s'était transmis par tradition de
1220 à 1653.
— 126 —
c froy, docteur en médicine, avons receue, contenant
c que... . il désire soy retirer des en avant et arrester
« du tout en résidence soub nous et en nos pays
c suppliant humblement.... lui vouloir donner en pur
« don.... une nostre pièce de terre, laquelle a été de
« long temps et est encores de présent délaissée, inhabi-
c tée, inculte et stérille et n'est en autre nature que
« d'espines, rapaille et menu bois ; toutesfois il y a eu
« aultrefois (comme les fossés et ruynes et aultres ves-
« tiges et enseignes le démonstrent) maison forte, ap-
c pelée du commun des villaiges voisins le Cbasiellei,
« scituée et assise entre noz villaiges de Vandœuvre et
« de Viller, auprès de nostre ville de Nancey, du costé
f du soleil couchant, avec toutes ses appartenances et
« despendances ; pour icelles place et terre appro-
c prier et à ses propres coustz et despens remectre sus
< en nature utille et profittable.... pour lui, tous ses
« hoirs et successeurs.... à perpétuité avec permis-
a sion.... d'y reedifOer et refaire ladicte ancienne forte
c maison, ou d'en ériger et bastir une aultre comme ilz
« verront le meilleur et icelle maison avec tout ledict
€ lieu, place et terre.... vouloir douer, décorer et enri-
« chir de privilèges, droietures, franchises et libériez...
« Scavoir faisons que nous avons donné et
« octroyé.... au desf^usdict maistre Jehan Geoffroy....
« ladicte place et pièce de terre dicte et appelée le
« Ghastellet....avec son ban et toutes ses appartenant
« ces.... voulans.... que dores et duy en avant tout le
€ porpris et comportement de terre dudict Ghastellet
« retiengne.... à jamais droict, nature et estât de franc
a et libre alleud audict maistre Jehan Geoffroy, ses
« dicts hoirs, successeurs et ayans cause.... Nous vou-
- 127 —
« Ions et désirons "icelliiy (ban) estre restably et
« recouvrer son extendue légitime.... jusques à deux
« cens jours de terres.... pour icelles estre joinctes....
« avec ladicte place.... du Ghastellet.... séparées ... de
« tous bans circunvoisins.... ; et lequel ban du Chas-
« tellet voulons.... estre...* ban à part.... et dores en
< avant estre.... appelé la maison, ban, finaige, terre
« et franc aileud du Moniet et non plus du Ghastellet,
a pour en jouir.... avec droit.... d'y faire et avoir four,
« pressoir, molin, columbier, garennes et aultres com-
« modités et toutes espèces de manoirs, maisonnemens
A et bastimens.... y créer.... maire, juges, doyens,
« gardes et tous aultres officiers nécessaires à Texer-
« cice.... des juridictions et justice... (1). »
« En 1533; le prieur de Vandœuvre.... permit au
c Seigneur du Montet de bâtir une chapelle, d'y avoir
un chapelain avec pouvoir d'y administrer les sacre-
c ments audit Seigneur et à tous les résidents.... (2). »
« Le Montet est qualifié, en 1710, de château-fief et
« censé ayant son ban particulier.... La vue en a été
€ gravée parPérelle. La légende de cette gravure le
a qualifie de village... (3). »
Vendu en 1629 à François de Fisson par un succès -
(1) H. Lepage : Les communes de la Meurthe. Tome II,
page 57. — Ces lettres patentes, octroyées sans doute à la
suite d'entretiens amicaux entre le duc Antoine et son mé-
decin, n'autorisent-elles pas à supposer que Jehan Geoffroy
avait formé de grands projets pour la reconstitution de Tan-
cien Ghastellet ?
(2) Ibidem, page 58.
(3) H. Lepage : Le département de la Meurthe. Tome II,
page 290.
— 128 —
seurde Jehan Geoffroy, « ce domainis continua, jusqu'à
ce la Révolution, à appartenir à la famille des Fisson,
« dans laquelle il est rentré, depuis quelques années,
« par suite de Tacquisition, qu'en a faite M. René de
« Landrian, allié à cette noble et vertueuse famille (1). »
Ainsi donc, en remontant le cours des siècles, nous
apercevons, au-dessus de Vandœuvre et de Villers, le
joli castel du Montet récemment construit ; puis le
Montet des Fisson et des Geoffroy ; puis le Chastellet
en ruines donné par le duc Antoine à son médecin ;
puis le castrum Nanceium de Drogon et enfin le manoir
du seigneur Medoald. — Mais, dans ce rayon, où Thistoi-
re ne nous montre, d'une manière certaine et à de trop
longs intervalles, que cinq ou six édifices, ne pouvons-
nous admettre, sans forcer la vérité et sans rien ima-
giner, que les Celtes avaient précédemment établi, en-
tre les camps bien connus d'Affrique et de la Fourasse,
un premier refuge auquel succédèrent sans interruption
les casleJISj maisons-fortes, chaslellels ou châteaux
qui, depuis les temps les plus reculés, servirent de
résidences aux seigneurs de Nantiacus et avaient été
construits, sinon sur les mêmes fondations, du moins
dans un périmètre assez restreint, où quelque jour, soit
par hasard, soit au moyen de fouilles raisonnées, on
retrouvera leurs derniers vestiges (pj ?
(1) Ibid. : Les communes,, . Tome II, page 59.
(2) Je ne pense pas qoe ces vestiges puissent être autre
chose que des cachettes d'ustensiles, d*arnieset de monnaies,
des fondations et ruines de donjons, de chapelles, d'habita-
tions primitives et sans doute aussi des nécropoles gauloises,
romaines et franquos, car tout ce canton a été bien bou-
leversé depuis 1155, notamment par la circonvallation de
1688.
129 —
VIL
D'autres lettres-patentes du même duc Antoine, da-
tées du 9 septembre 1532 (les précédentes sont de 1527)
nous renseignent sur le Saurupt :
€ Gomme tresillustre princesse, notre tréschière et
« trésamée compagne et espouse, dame Renée de
€ Bourbon...., désirant pour son estât et pour auculnc
a foys prendre récréacion près et à Tentour de nostre
« ville de Nancy, bastir et faire quelque lieu plaisant,
« nous ait déclaré avoir choisi ,el esleu pour ce faire
« une place où il y a démonstracion ou apparence y
« avoir eu par aultre fois bastiment ou commencement
« de demourance, comme par Tinspeclion du lieu et des
« fossez qui y sont peult apparoir, appelé et nommé
« communément par ung chacun la Vielle Nancy, située
a en notre bois deSorroy, ban dudit Nancy.... ; à ceste
< cause, complaisant ànostre dicte épouse.... lui avons
a cédé et transporté — icelle place dicte la Vielle
« A^a/2C7....etavec ce... trois cens journaux de terre...
« ens et à Fentour de nostre dit bois de Soroy ; à pren-
€ dre de part et d'aultre part dudit lieu de la Vielle
« Nancyj assavoir une partie depuis ladicte Vielle
« Nancy..., jusqu'à un chesne.... et encore.... en ma-
« nière que.... il puisse souffîsamment avoir j)our faire
« deux cens jours de terres labourables et cent faul-
« chiés de preix ou environ pour enjoindre à ladicte
a Vielle Nancy.... (1). »
(1) H. Lepage: Recherches sur l'origine...^ pag. 147 et 148.
De ces deux donations presque simultanées (1527-1532; il
ressort évidemment qu*au commencement du xvi*' siècle, on
9
— 180 —
Ces mois, la Vielle Nancy^ répétés cinq fois, ne
sauraient être le résultat d*une erreur quelconque :
erreur de piuine, de nom ou de lieu. — La plupart de
nos historiens cependant n'y ont fait aucune allusion.
Dom Galmet a-t-il connu ces lettres-patentes ? — Le
doux abbé Lionnois se borne à dire : « J'ignore ce que
c'était que cette Vielle Nancy » et continue sa paisible pro-
menade (1). M. Henri Lepage, plus attentif, a scrutéce vo-
cable, mais trop prudent, il n*a vu, dans la Vielle Nancy àe
i532, que les ruines d'un château abandonné ou d'une
ville détruite : « Nancy était-il, dans le principe, à la
« place où nous le voyons maintenant ; ou plutôt, les
« premières habitations qui en furent comme le germe,
a ne s'élevèrent-elles pas sur un point qui fut ensuite
« abandonné pour des causes que nous ignorons ?
« Cette dénomination la Vielle Nancy avait bien certai-
<c iiement une origine ancienne et il me semble tout
« naturel de supposer qu'elle était due à l'existence,
« dans ce lieu, soit d'un château, soit d'un certain
c nombre d'habitations qui, sous le nom de Nancy,
« avaient précédé la ville actuelle, dont le nouvel em-
« placement fut jugé plus convenable que le premier,
a Ne serait-il pas possible aussi que la localité primi-
« tive ayant été détruite, à la suite d'événements qui
roûcoiitrait entre Vaadœuvre et Villeis les ruines, fossés et
dépendances de deux châteaux- forts ou manoirs bien dis-
tincts : que la propriété du château supérieur fut attribuée
à Jean Geoffroy. et celle du château inférieur à Renée de
Bourbon. — D'autre part nous avons vu que du premier
domaine est sorti la franc-alleud du Montet qualifié village
en 1710 et nous allons voir le second faire place à Tancién
Saurupt détruit en 1671.
(1) Histoire des villes...., tome I, page 575.
— 131 —
< nous sont inconnus et dans un temps fort éloigné, on
« Tait, plus tard^ reconstruite ailleurs (1) ? »
Pour nous, il n*y a pas eu, sur le promontoire de
Vandœuvre, ébauche, existence réelle ni disparition ou
destruction d'une ville proprement dite qui aurait porté
le nom de Nancy ; mais d'abord un campement humain
à ciel ouvert succédant à l'installation de nos plus loin-
tains aïeux dans les grottes et cavernes de la Haye ;
puis un éparpillement de huttes, de cabanes et de
chaumières groupées sous le nom de Nant-iach (2) ;
puis des constructions plus perfectionnées constituant
une souveraineté particulière dont nous ne connaissons,
il est vrai, que cinq titulaires: Medoald.... Odelric,
Herman, Simon et Drogon, et enfin cette dislocation de
l'année 1155 quia produit Vand'jeuvre,Villers, le Chas-
telletou Montet et l'ancien Saurupt. Pour nous, la Vielle
Nancy est la dernière ombre du Nant-iach celtique,
devenu Nanliacus sous les Gallo-Romains et celte déno-
mination nous prouve que les Nancéiens du xvi* siècle
n'avaient pas complètement perdu le souvenir de leur
berceau, la tradition de leur antique origine (3).
« Nos Historiens conviennent tous, dit l'abbé Mar-
« chai, qu'il y avait aux environs de Nancy — le Nancy
(1) Recherches sur l'origine,*,,, pp. 147 et 149.
(2) « Chaque demeure (celtique) était entourée de haies
« faites avec des arbres abattus ; plusieurs de ces enclos
c réunis par une pareille enceinte formaient un village ou
« une ville. » V. Duruy : Histoire des Romains,,, . tome III,
page 96.
(3) La création de ce vocable, probablement au xri" siècle,
ne fut-elle pas imposée alors par le besoin de distinguer
la Vielle Nancy de Drogon de la nouvelle Nancy (aujour-
d'hui Nancy Ville-vieille) que Mathieu I" faisait construire,
à quelques kilomètres plus au nord, sur les nouvelles rives
de la AÂeurthe ?
.aa^z_ji_^,_^_„_^. __
— i:i2 —
« de 185tJ — deux localités qui portaient le nom de
• Stulru : l'une... . près de Viller ; i'auire à 350 toises
« delaplace{c'eâl-à-dire de la perle St-Nicolas actuelle).
« Les divers plans de Nancy imprimés ne font aucune
€ mention de Vuncien Ssalru.... Je o'ai vu un dessin de
I l'aucien Saulru que sur deux grandes cartes topogra-
i phiques d'une partie de la Lorraine. Ces caries ma-
B nuscriles datent de 1730 à 1740. Elles sont proba-
a blement du géographe Bugnon : elles placent l'ancien
€ Saulru droite de la route du Mootet, un peu au-
i dessus de la Chiennerie, vers le village de Villers.
« L'ancien Saulru existait donc encore à cette époque...
( Saulru, la vieille censé, a totalement disparu ; l'on
a ne sait plusoii en trouver les débris dispersés... (1). *
Les textes étant aussi rares que ces débris eux-
mêmes , nous en sommes réduit aux jmsomptions
quant à l'origine de cette autre maison-forte du pre-
mier Nancy.
Dans le principe, le easlrum Asnceyum, construit à
une certaine hauteur, entre les camps d'Affrique et de
la Fourasse, Kuffisait sans doute pour défendre la N^n-
eeiana civitas conir'e un ennemi survenant soit par les
bois, soit par le fleuve qui coulait à ses pieds. Mais,
lorsque le niveau des eaux, étangs et marais, laissés
lerrière elle par la Meurthe se fut abaissé et éloigné
ie ce caBlrum, lorsque le canton primitif fut devenu
plus vaste, on Jugea nécessaire probablement d'éltver
jn second fort au-dessous du premier, afin que A's/i-
iaeus se trouvât encore protégé du côté du fleuve, vers
est, comme il continuait à l'être, vers l'ouest, du côté
le la forêt, par le castrum supérieur.
(1) Notice historique et descriptive sur le faubourg et la
taroisse St-Pierre de Nancy, 1858.
— 133 —
Géologiquement, la création de l'ancien Saiirupt pa-
rait donc postérieure à celle du caslrum qui défendait
Vandœuvre, Vendopera^ connu dès le x* siècle, et
Villers, probablement la Villa mentionnée dans la
charte-notice de 1155. Bien que le Mémoire de 1613 ne
désigne pas no'nmément cette forteresse, il y a lieu
de croire qu'elle existait longtemps avant le xii' siècle
et qu'alors elle était comprise daas les dépendances
appenditias de la villa cédée par Drogon.
Un titre de novembre 1312 rappelle « la maison de
« Soiruy devant Nancy, ses fossés, ses pourpris et ses
a bois » (1).
« A la mort de Ferry IV (1328), la tutelle n'ayant
« pas été fixée par testament du Duc, furent en la plaine
« qu'est proche Nancey, entré la susdite ville el cer-
« tain chastel qu'a nom Saulru, ajournés gentilshommes,
« chevaliers et escuyers et fut la mainbournie (tutelle
« et régence) acquise et baillée à puissante Dame et
« haulto princesse Isabelle (d'Autriche, veuve de
« Ferry IV et mère de Raoul) » (2). •
Enfin, « il paraît, dit M. H. Lepage, que ce château
« fut n-^gligé par les successeurs de Raoul et ne tarda
« pas à tomber en ruines, car au mois de janvier 1366,
« le duc Jean P'' (1346 à 1390) donna aux cha^ioines de
« St-Georges, pour les aider à parfaire leur église (3)
(1) Trésor des chartes de Lorraine, layette Harbonnières.
(2) De Haraucourt : Mémorial des grands faits et gestes en
la province de Lorraine,
(3) Cette église collégiale, commencée vers 13'40, occupait,
dans Nancy ville-vieille actuelle, une partie du terrain qui,
depuiâ 1742, constitue la Place ou Square de la Petite-
Carrière.
— i84 —
« toute la pierre de la tour de Soirui davant Nancey et
a tous les autres édifRces appartenans à ycelle, laquelle
« tour et édiffices sont descheus et alleir à ruyne de
a long temps (1). »
Ajoutée aux invasions, pillages, guerres, dévasta-
tions et incendies des époques antérieures, cette nou-
velle manière d'accommoder les ruines ne facilitera
certainement pas la tâche aux plus dévoués et opi-
niâtres Archéologues !
Quant au nouveau Saulrupt, construit après 1532
par Renée de Bourbon, autre part que sur remplace-
ment de Tancien, « c'était — dit Lionnois rapportant
ce les paroles de Claude Guillemin, auteur d'une His-
« toire du Duc Charles IV — une maison de plaisance
« à un coup de mousquet de la porte St-Nicolas De
« Fer, Le Rouge, Moitey et Mique donnent un dessin
« du nouveau Saulru.... Le nouveau Saulru était un
« petit fort au xvii* siècle ; il n'est plus aujourd'hui
« (1858) qu'une très belle maison de campagne.... On
« découvre encore facilement les restes des fossés de
« cette forteresse- lorraine, ruinée en 167i, par les or-
« dres du farouche maréchal de Créqui (2). »
m
NANGEIUM
L
Au temps des Celtes, avons-nous dit, l'emplacement
actuel de Nancy Nanceium devait être submergé, raaré-
(1) Les communes de la Meurthe^ Tome II, page 520.
(2) L'abbé Marchai : Notice historique et descriptive,,,.
j
- 135 —
câgeux et par conséquent inhabitable : de là cette
absence complète, absolue de tous vestiges paléolithi-
ques et néolithiques dans notre vallée.
Mais, dans la suite des âges, le fleuve créateur con-
tinuant son gigantesque travail d'érosion, a brisé les
obstacles qui entravaient sa marche vers TOcéan ; peu à
peu les eaux se sont abaissées entre les hauteurs de la
Haye et de Malzéville et leur rive occidentale s'est
éloignée de plus en plus de l'ancienne bourgade celti-
que.
Au dessous de Nantiacus, l'afTouilIement avait engen- .
dré ici et la dans la masse sédimentaire divers marais
et étangs où venaient aboutir et séjourner cent ruisseaux
descendus de la Haye, et le trop-plein de ces bas-fonds
dont le dernier (l'étang St-Jean) n^a disparu que de
nos jours, allait ensuite se jeter dans la Meurthe.
Ces renseignements topographiques nous sont four-
nis non seulement par la Géologie, mais quelque peu
aussi par l'Histoire : en 1516, la place de la Carrière
était encore un marécage ; au commencement du xv""
siècle, le duc Charles II faisait « aggrandir la ville de
c Nancy et dessécher autour de ses murs les marais
« qui rendaient Tair malsain » (1) ; plus anciennement
aussi, la Grande-Rue actuelle de Nancy était occupée
par le ruisseau de Boudonville, dont elle rappelait en-
core le nom, rue de la Boudière, en 1589. Ce ruisseau
était même assez puissant au xiip siècle pour faire mou-
voir un moulin (qui a laissé son nom à la rue du Mou-
lin actuelle) avant d'aller également se perdre dans la
Meurthe, qui avait transféré son lit sur l'emplacement
de la future Pépinière.
(1) L*abbé Bexon : Histoire de Lorraine, page 110.
— 136 -
La science et Thistoire générale nous montrent bien
le rôle joué par les eaux dans la formation de notre ma-
gnifique vallée, dans les destinées de Nantiacus et dans
la création de Nânceium ; malheureusement, la des-
truction des documents authentiques laisse ignorer
trop de détails qui ne manqueraient pas non plus d*in-
léresser.
A qui appartenait, en 1048, le village de Boudon-
ville fondé, croit-on, au vu* siècle, sans doute sur son
propre domaine, par Bodon Leudin, évêque de Toul ?
, Quelles étaient alors les bornes de ce village ? Quelles
étaient aussi, vers 1070, les limites du Nantiacus, Tapa-
nage donné par Gérard d* Alsace au prince Odelric, son
frère ? En quelle année remplacement actuel du Palais
ducal émergea-til du sein de la Meurthe? Vers 1070
encore, quelle surface de terrain embrassait Talleu,
qui auprès de NantiacuSy appartenait en propre à
Thierry I" ? Alors, cet alleu renfermait-il déjà un
château- fort ? Par qui et sur quel point très précis
du domaine ducal ce château avait-ii été construit ?
II.
Les Historiens s'accordent à dire que Ghâtenois,
Amance, Bitche, Gondreville, Neufchâteau et Remire-
mont furent de 1048 à 1115, les diverses résidences de
nos deux premiers Ducs héréditaires. Aucun ne les
fait demeurer à Nantiacus ni à Nanceium (1).
(1) oc Nancy était un anciea château. On ne scait en quel
temps il fut bâti. » Le P. Benoît Picard : Histoirf. de la
ville et du diocèse de Toul^ page 30.
« Nancy n*ét8it qu*un château sous Thierry I" (1070 à
1115) > J. B. Ravold : Histoire démocratique, page 297.
— 137 -
Nous \e comprenons maintenant en ce qui concerne
Nantiâcus, la Vielle Nancy que Gérard avait aban-
donnée à son frère et que les successeurs de ce der-
nier possédèrent jusqu'en 1155.
Quant à Nanceium, aujourd'hui Nancy ville-vieille,
il est probable qu*avant Tan 1000 son territoire était
trop marécageux pour que l'on ait pu y établir quoi que
ce soit : une forteresse, une bourgade ou .inême quel-
ques maisons champêtres. — On sait qii*en 1048,
Amance était 'une ville forte et importante, mais aucun
titre ne révèle Texistence de Nanceium avant la fin du
xi« siècle (1).
«
(i) oc L^existence d'Atnance est plus ancienne que celle de
oc Nancy ; Mercator l'appelle Aniiqua Lotharingiœ cancel-
«a laria, ancienne chancellerie de Lorraine, s H. Lepage :
Le département de la Meurthe^ 2« partie, page 14.
Si le quartier de Nancy, appelé aujourd'hui encore la
ville-vieille, avait été jadis le territoire dénommé Nant ou
Nantiach par les Celtes» Nanciaco ou Nanceiaco par les
textes des années 600 et 896, il nous semble incontestable
que les fuuilles, faites en tous sens et à diverses profon-
deurs dans ce carré, auraient dû amener au jour quelques
objets qui attesteraient soit Texistence, soit seulement le
passage de tribus ayant appartenu aux couches humaines
connues sous les noms historiques de Celtes, Belgs, Kym«
rfs, Gallo-Romains, Francs et Austrasiens. Il n'en est rien :
cent générations auraient donc occupé ce quartier sans y
laisser ou égarer ni une arme, ni un ustensile, ni un or-
nement quelconque ! Est-ce admissible , alors que sur
les moindres collines qui entourent Nancy, on a recueilli
mille preuves d'établissements paléolithiques ? Est il ad-
missible que, dans noire vallée, on n'ait pas trouvé jusqu'à
présent la moindre trace des relations amicales ou hostiles
qui ont dû exister entre les habitants des plateaux de la
Haye et de Malzéville ? •— A l'appui de ces observations,
voir le Répertoire archéologique pour le département de la
Yerà l'an 1080 de notre ère seulement nous voyons
11
naître là un Prieuré consacré à Dieu et à la bienheu-
reuse vierge Marie : « Notum sit.... quod Theodoricus
« dux in allodio suo apud Nanciacum dédit Deo et béate
« Marie.... campum quemdam ad continendain eccle*
c siam. x>
De son alleu, situé auprès de Nantiacus, Thierry I"
détacha le lerrain nécessaire à Tédiflcation d'une église.
Or « ce prieuré — détruit à la fin du siècle dernier, —
« occupait la partie nord de la place actuelle de l'Ar-
« senal et son cimetière longeait la rue des Etats
« qu'on appelait pour cette raison la rue des Morts (1). »
Le texte de 1145, complétant ceux de 1126 et de
1180, démontre que cette église était voisine du châ-
teau ducal : ante castrutt2,,,.coram castroei que le châ-
teau lui-même était auprès et non dans l'intérieur de
l'ancien Nantiacus : apud Nantiacum,..juxtaNancemm,
De ce qui précède nous pouvons déduire avec certi-
tude que la place actuelle de PArsenal était comprise
dans l'alleu de Thierry P' (2).
Meurthe de M. F. Barthélémy, aux mots : Houdemont,
Vandcduvre , Villers - lès - Nancy, Boudonville, Maréville,
ChampigneuUes, Malzé ville, Saint-Max, Sainte-Geneviève t
Dommartemont, etc.
(1) Les transformations de Nancy,
(2, Par une charte datée de Tanaée 1147, — antérieure
par conséquent à réchange de 1155, — Mathieu I*' accor-
dait diverses faveurs à « la très sainte maison de Thôpital
de Jérusalem » dénommée plus tard : Commanderie de St-
Jeao-du-vieil-Âître. Pourrai t-on déduire de là quo cette
Maison avait été également fondée dans Talleu de nos pre-
miers Ducs héréditaires et que, dans cette direction, le ruis-
seau de St-Thiébaut et l'étang St-Jeao séparaient alors le
domaine ducal du Nantiacus d*Odelric ?
- 139 —
Mais il est seulement présumable que le premier
édifice construit dans cet alleu fut une forteresse, que
cette forteresse fut bâtie entre 1070 et 1080 et qu'elle
était à peu près inexpugnable. — On sait, en effet,
qu'après la bataille de Frouard, vers 1182, Simon !•',
vaincu se réfugia dans un château-fort près de Nancy
où vinrent Tassiéger inutilement les troupes réunies do
ses vainqueurs : l'archevêque de Trêves, Tévêque de
Metz et le comte de Bar (i). — Des cinq emplacements
attribués par divers Historiens au premier donjon de
Nanceium, nous écarterons d'abord : lé coin occiden-
tal de la place St-Epvre, la rue de la'Monnaie et l'an-
cien Saurupt. Si la place de TArsenal pouvait, en 1080,
constituer le parvis d'une église, c'est qu'elle n'était
plus exposée aux inondations de la Meurthe : à plus
forte raison, vers 1132, les trois emplacements ci-
dessus désignés devaient-ils se trouver en pleine cam-
pagne et assez éloignés du fieuve pour ne plus présen-
ter les conditions exceptionnelles de résistance révé-
lées parle siège que soutint Simon I*'. — On a suppo-
sé également (2) que l'ancienne Tonderie, n^ 96' et 98
actuels de la rue St-Nicolas, aurait été construite sur
les ruines de la première forteresse élevée près de
(1) c II paraît, dit M. Henri Lepage, que ce château était
« assez bien fortifié, car, entre 1132 et 1135, Simon I" y fut
c assiégé par les troupes d*Adalbéron de Montreuil, archevê-
4 que de Trêves, que commandait le comte de Faulquemont,
a sans que celui-ci pût parvenir à s'en rendre maître. »
Recherches sur Vorigine^ page 204. Voir aussi : Dom Gal-
met : Histoire.,, tom^ II, col. 6 et 7 et A. Digot : Histoire,..
tome 1«", page 317.
(2) Mémoires pour servir à Vhistoire de la Lorraine^ par
F. J. B. Noël, n» 6, page 69.
— 140 —
Nantiacus. Cet endroit nous semble trop éloigné (S.OOO
mètres environ) du Prieuré de Notre-Dame pour cor-
respondre aux expressions: anle caslnim corsm
Castro.... qui indiquaient la position de l'église par
rapport an château ducal.
Si nous interrogeons encore la Géologie, elle réponde
A un certain moment, la Mearlhe confournait la butte
actuelle de l'Arsenal ; plus tard, ees eaux continuant à
s'abaisser, le sol occupé aujourd'hui encore par le Pa-
lais ducal émergea entre trais bas-londs bien connus,
savoir: le ravin qui est devenu la Grande-Rue (1)
(1) t L'exhaussement du sol, qn'on remarque partout dana
I les villes sDcienues, se rencontre ansai à Nancy. Trois
■ pavés l'un sur l'autre, construits, sans doute, à de« époques
■ peu éloignées ; l'ancienne porte Saint-Nicolas |,aujour-
( d'hui place Vandémont) dont les sovies étaient plus bas
c que le sol moderne, de neuf â dix pieds, prouvent évidem-
■ ment les différt^ntes catastrophes ot ruines que cette ville
i a éprouvées anciennement- » (Lejeune : Notice sur les an-
tiquités dtt département de la Meurthe.)
( Lorsqu'on a démoli, en 1847, l'aDcienne porte Saint-
I Nicolas, ou a rais au jour des parties qui accusaient d'une
■ manière positive le m* siècle, s H. Lepage : Recherel^s
sur l'origine..., page 217.
Ces renseignements corroborent l'idéeque, d'après la Géolo-
gie, on doit se faire du ravin qui a précédé la Orande-Rue
actuelle ; mais ils uo prouvent nullement > loa différentes
catastrophes et ruines que Nancy a éprouvées anciennement s
puisque Naoceium, la Villa-vieille actuelle n'eiistait pas et
ne pouvait pas exister, une grande partie de son emplace-
ment étant occupé p<ir des eaux courantes ou stagnantes.
S'il est vrai que les Celtes peuplaient le promontoire de
Vandœuvre quinze siècles avant notre ère et que vers l'an
1100 après J.-C. l'emplacement actuel du Paluis ducal appa-
rut à fleur d'eau, un calcul très simple montre que, ilans
cet intervalle, le niveau de la Meurtbe est descendu, en
— 141 —
après avoir été d'abord le lit du ruisseau de Boudon-
ville, puis la rue de la Boudière ; — le marais qui, au
xvi* siècle, devint la place de la Carrière ; — et enfin
le parc de la Pépinière actuelle dont la Meurlhe s*est
aussi peu à peu retirée. Trois cents mètres à peine
séparaient alors du Prieuré Notre-Dame Tîlot ainsi for-
mé (îlot dont le sous-sol, respecté par Paffouillement
des eaux, devait et doit encore être très consistant,
car, depuis Tan 1300, à la connaissance de l'Histoire,
il n*a pas cessé de supporter les divers palais de nos
Ducs). Borné vers Touest par un ravin assez large,
assez profond et rempli d'eau ; vers Test par le fleuve
lui-même, ce terre-plein est tout indiqué comme ayant
servi de plate-forme, dès \en* siècle, au premier don-
jon de Nancy Ville-vieille (1).
Nous pensons que' ce castnim existait en 1080 et que
sa création dut précéder celle du Prieuré, suivant
l'usage général à cette époque de placer et d'édifier les
églises, abbayes et monastères sous la protection de
forteresses royales ou ducales préexistantes. D'autre
moyenne, de trois centimètres par année et, mathématique-
ment, ferait remonter à 8 ou 9.0C0 ans le premier aifouille-
ment de la masse sédimentaire qui constitue les massifs
montagneux entre lesqu«)ls le fleuve a creusé son lit.
(1) La tradition confirme, sur ce point, les données géolo-
giques :
c Le château du prince Simon 1" était près de la ville. Il
« y soutint un siège en 1131.... Ce château était, dit-on, où
<c est à présent le Jardin de la Court, à l'extrémité orientale
« du nouveau Palais. » D. Calmet : Histoire..,,^ tome H,
page 1.
Cet emplacement est occupé aujourd'hui par le jardin et
les écuries du Gouvernement et pnr la partie de la Terrasse
de la Pépinière qui leur est contiguë.
— 142 —
part, la puissaace de ce même château, vers 1132,
donne à supposer qu'il aurait porté un nom particulier
et qu'il en serait fait mention dans l'histoire de Gérard
d'Alsace, s'il avait réellement existé avant Tannée 1070.
Après les travaux de M. H. Lepage, il faîut renoncer à
Tespoir de découvrir cette simple mention. Les guer-
res intestines qui remplirent tout le règne de notre
premier Duc héréditaire ne lui permirent sans doute
pas d'apporter la moindre pierre à 1 1 construction des
nombreux édifices qui surgirent partout ailleurs au
lendemain de l'an 1000. Amance et. Ghâtenois étaient
les principales résidences de Gérard et il n'eut que
trop souvent l'occasion d'en sortir pour aller combattre
les seigneurs lorrains sans cesse en révolte contre son
autorité. — Les huit premières années du règne de
Thierry P% son fils (1070-1115), furent également très
agitées ; mais ensuite, ce prince put consacrei* le reste
de sa vie (37 ans) à l'administration de la Haute-Lcr-
raine. C'est alors, croyons-nous, qu'après avoir assuré
la défense de Nantiacus et celle de son alleu personnel
par l'établissement d'une puissante forteresse dans un
îlot de la Meurthe, en face la trouée de ChampigneuUes
(1), il créa dans ce même alleu le prieuré de Notre-
Dame. Cette dernière fondation prouverait encore que
Thierry songea le premier à améliorer et embellir son
(1) Les invasions normandes des siècles précédents, inva-
sions dont M. Ravold donne le résumé (op. cit., pp. 198, 201,
205, 218), n'ayant pas plus épargné les rives de la Meurthe
que celles de la Moselle, il est probable que la crainte de les
voir se renouveler dut également conseiller à nos ducs la
construction d'un donjon dans cet alleu qui leur appartenait
en propre auprès de Nantiacus.
— 143 —
domaine. Enfin, si Ton veut admettre que Gerlrude de
Flandre a porté le titre de duchesse de Nancy, con-
cluons-en seulement que cette princesse, par une déli-
cate et touchante attention, désira consacrer et ennoblir
Tune des créations favorites de son époux (1) et non se
parer d'un titre absolument sans lustre encore, alors
qu*il lui était facile, je le répète, de trouver, dans
la Haute-Lorraine, d'autres noms et souvenirs glo-
rieux.
III.
Quoiqu'il en soit de ces hypothèses, le domaine privé
de nos Ducs, auprès de Nanliacus, renfermait certai-
nement une église vers 1080 et un cas tram en 1130. —
Ce caslrum était-il autre chose qu'une forteresse ? La
réponse à cette question sera affirmative si l'on croit
avec D. Galmet que «le Duc Simon, en 1130, avait son
« Palais près de Nancy. » Mais aucun autre Historien
ou Chroniqueur ne fait résider à Nanceium nos deux
premiers Ducs héréditaires ; Simon I*', le troisième,
(1) Thierry l^', surnommé le Vaillaat, ne fut pas seule-
ment un guerrier, mais aussi un législateur et un homme
politique remarquables, oc La fermeté d'esprit, la modéra-
tion et l'amour de lajustice formaient son caractère Les
Lorrains qui n'avaient pas voulu accepter la domination du
père (Gérard d'Alsace) obéirent au fils. » (Ravold : Histoire
démocratique ..., page 297.)
DomC&ïmet {Histoire,. »K, tome I, col. 1119 et suivantes)
lui attribue la construction du château d* Arches, Tagran-
dissement de la ville de Neufchâteau, Tédification de plu-
sieurs églises et abbayes : à i*Etanche en 1148, à Ciairlieu
en 1159, etc.» etc ; sans parler des avantages et faveurs qu*il
accorda à plusieurs autres établissements religieux, tels que
Ste-Marie-aux-Bois, Bonfay, St-Epvre, etc., etc.
^ * >* j "*
— 144 —
paraît y avoir séjourné quelquefois (voir les textes de
1126 et de 1130) et ce serait seulement son fils Mathieu
(1139 à 1176) qui aurait choisi ce lieu pour y établir le
centre du gouvernement ducal.
De même que la Vielle Nancy n'est venue à notre
connaissance que par les Lettres patentes qui ont con-
sommé Tanéantissement de ce vocable, de même la
résidence princière de nos premiers Ducs héréditaires
à Nanceium, Yantiqaam palatium n'apparaît aussi dans
un titre authentique que le jour où Ferry III, sixième
successeur de Mathieu I", abandonne aux Dames prê-
cheresses ou Dominicaines, en 1298, « domum suam
dictam Palatium Ducis sitam in castre de Nanceio (1) »
et va habiter le nouveau palais qu'il avait fait recons-
truire, croyons-nous, sur l'emplacement probable du
vieux donjon de Simon I".
Nous avons vu quelles furent pour Nantiacus les
conséquences de l'échange rappelé sous Tannée 1155
par le Mémoire de 1613 (2) ; Tinverse dut se produire à
Nanceiuin, la nouvelle et défmitive résidence des Ducs
de Lorraine.
En effet, Mathieu I" (1139-1176) s'empresse d'y
(1) H. Lepage : Les communes de la Meurthe, 2* volame,
page 99. — a Sa maison appelée le Palais du Duc et située
« dans Tenceinte fortifiée de Nancy. »
(*2) oc Ce qui sans doute fit désirer à ces princes (les Ducs
« de Lorraine) la conclusion de rechange qui devait les
« mettre en possession de Nancy (notre Nantiacus), c'est
« qu*ils avaient un palais (?) auprès de cette ville ; ce fait
« est mis hors do doute par une charte datée de 1130 et qui
« nous apprend que le du3 Simon résidait près de Nancy. »
(De Saulcy : Histoire des villes de France, tome IV,
puge 527).
— 145 —
faire frapper monnaie sous ce nom de Nancei que
Talleu de son père et de son aïeul empruntait et peut-
être disputait depuis trois quarts de siècle au domaine
d'Odelric ; il construit probablement, rue actuelle de la
Monnaie, ce Palatium qu*une charte de 1299 nous mon-
tre déjà en partie ruiné ; il entoure de murailles la
nouvelle cité et attire dans son enceinte ceux des habi-
tants de Nantiacus que le château délarssé et décapité
de Drogon ne retenait plus dans l'ancienne Nanceiana
civitas. Bientôt « il y a un hôpital hors des murs (de la
« nouvelle ville) ; à l'intérieur un oratoire ou une cha-
« pelle servant de paroisse, indépendamment de la
« paroisse du bourg de Saint-Dizier. — Les ducs font
« battre monnaie à Nancy, qui est devenu, de fait, la
a capitale de leurs Etats (1147-1180). — Mathieu II
« (1220-1251) y établit quatre tabellions ou notaires. —
a II y a une halle et un poids pubUc. » (1).
(l) L'enceinte de Nancy Ville-vieille, dénommée menia
iVanctfn dans le texte de 1190, est donc asiez bien délimitée,
à la mort de Mathieu V* (11*76) par trois édifices : l'ancienne
forteresse de Simon l'^ (jardin actuel du gouvernement) dont
l'existence est incontestable ; Vantiquum Palatium (aujour-
d'hui les Archives, rue delà Monnaie) déjà ruiné en 1298, et
l'ancienne porte Saint-Nicolas (maintenant la place Vaudé-
mont) dont l'architecture « accusait d'une manière positive
le XII' siècle. »
Aux[v« siècle seulement « les Bourgets (rue du Haut et
c du Petit Bourgeois) et le prieuré de Notre-Dame (partie
« nord de la place actuelle de l'Arsenal) sont renfermés dans
« l'enceinte de la ville, reportée jusqu'à l'extrémité de la
Œ Grande-Rue que Ton pave devant le Palais ducal. » Les
transformations de Nancy*
10
— 146 —
IV,
Toutefois, le nom de Nantiacus ne disparut pas aus-
sitôt après l'échange de 1155, car nous le retrouvons
encore dans les deux textes de l'année 1220. A cette
dernière date, le vocable de Nanceium était bien acquis
à la ville qui, depuis un siècle et demi environ, s'éle-
vait et grandissait auprès de l'église Notre-Dame,
ainsi que le prouvent les textes de 1155 Mahus-Nancel,
de 1162 Data Nancei et de 1190 infra meniaNancei. —
S'il s'était agi de cette ville nouvelle, comme le croit
Dom Galmet : « La Duchesse Agnès, veuve de Ferry III,
avait reçu Nancy pour son douaire, » les deux actes
authentiques de l'année 1220 renfermer? ient-ils exclu-
sivement le mot Nantiacus ?
En 1220, Nantiacus n'était plus une seigneurie, -mais
ce nom seul suffisait encore pour indiquer d'une ma-
nière assez précise l'emplacement et la composition du
domaine qui constituait le douaire de la duchesse
Agnès, domaine qu'elle abandonna à son fils Mathieu II,
que celui-ci remit aussitôt à Gertrude de Dachsbourg,
veuve de Thiébaut I" et que cette dernière enfin porta
en dot, de 1220 à 1225, d^ abord à un comte de Cham-
pagne, puis à un comte de Linange.
La méconnaissance de la Vielle Nancy, Nantiacus^ a
tellement égaré nos Historiens qu'elle fait écarter com-
me invraisemblable et inexplicable, aussi bien par
M. H.Lepage (1) que par M. Noël (2) cet incendie qui,
(1) Recherches sur l'origine,,. y pp. 215 et 216.
(2) Mémoires pour servir à l'histoire de la Lorraine, n?6,
page 69.
- 147 -
en 1218, détruisit complètement Nancy, Nanceium :
incendie rapporté par deux écrivains qui en furent pres-
que les témoins oculaires, oc Illud oppidum totum igné
succendenmt » dit Richer de Senones (1) contemporain
de cet événement. — « Et ne resta maison que fut en-
tière et qui ne fut en flame dans la ville dudit Nancei »
disent les Mémoires attribués à Errard (2) valet de
chambre du duc Thiébaut, dont le règne embrasse les
années 1213 à 1220.
Voici- le raisonnement de M. Noël, raisonnement
accepté par M. Lepage:
« On. a écrit que Blanche, comtesse de Champagne,
« aurait fait brûler Nancy par ses troupes. Nous n'en
« croyons rien. Elle aura fait brûler et détruire le ohâ-
« teau que s'était réservé le duc Thiébaut sur le terri-
« toire de Nancy et qui se trouvait alors sans défense.
« La ville et l'ancien château qui appartenaient à Agnès
a de Bar, duchesse douairière de Lorraine, avec la-
« quelle Blanche n'était point en guerre furent néces-
« sairement respectés Une preuve encore que la
« ville de Nancy et son ancien château.... n'ont point
« été brûlés, c'est que le duc Thiébaut, mort dix-neuf
« mois après l'incendie de son château, temps dont une
« partie a été passée hors du duché et le surplus dans
« un état de maladie, n'a pu avoir ni le temps ni l'ar-
« gent nécessaires pour reconstruire ville et château
(1) Monumenta Germaniœ historica, Tomua xxv, p. 299.
(2) Monumenta..,, ibid. — Alors même que Ton récuserait
les Mémoires d'Errard, il nous suffit da posséder, sur le fait
que nous examiaons, le récit du Moiae de Senones dont la
chronique est considérée comme un monument historique
digne de toute confiance.
~ 148 —
a et qu'à sa mort (en 1220) il existait encore un château
« et une ville de Nancy qui faisaient partie du douaire
« de la princesse Agnès et que celle-ci céda à la prin-
« cesse Gertrude (de Dachsbourg) devenue veuve du
a duc de Lorraine (Thiébaut 1"). Certes Gertrude n'au-
« rait pas demandé pour son douaire une ville incendiée
« et un château démantelé. Il est donc évident que
« c'est à tort que les historiens prétendent que lacom-
« tesse Blanche de Champ)agne détruisit la ville de
« Nancy ; elle n'a pu détruire que le château que le
a duc de Lorraine s'était réservé. »
Et, en note, M. Noël donne à supposer que ce dernier
château était situé vers les n° 96 et 98 actuels de la
rue SainA-Nicolas.
Notre hypothèse sur les emplacements respectifs et
distincts de Nantiacus et de Nanceium, en 1218, non
seulement résout la question discutée par M. Noël,
mais encore elle restitue aux récits de Richer et
d'Errard le caractère de sincérité, dont la critique his-
torique les a inutilement dépouillés et explique un fait
de guerre en apparence seulement incompréhensible.
Rétablissons la situation. — A la mort de Ferry II,
en 1213, sa veuve, Agnès de Bar, se retire à Nantiacus^
la Vielle Nancy, qu'elle avait reçu pour son douaire et
qu'elle habita jusqu'en 1220. Les actes de 1214 et 1220
signés par elle en font loi. — Thiébaut P' est proclamé
duc de Lorraine à Nanceium^ c'est-à-dire à Nancy
Ville-vieille, érigée en capitale depuis l'échange de
1155.
En 1218, le nouveau duc déclare la guerre à l'em-
pereur Frédéric. Celui-ci pénètre en Lorraine ; Thié-
baut quitte Nanceium , marche contre Frédéric et
— 149 -
va s'enfermer dans la ville d'Amance. L'empereur
met le siège devant cette dernière place et de là
mande à Henri, comte de Bar et à Blanche, com-
tesse de Champagne, ses alliés, de venir le rejoin-
dre, avec lem's troupes. — Ces dernières ayant
pénétré dans Nancy, Nanceium^ qui se trouvait alors
sans défenseurs (puisque Thiébaut et son armée étaient
enfermés dans Amance), y passèrent la nuit et au point
du jour incendièrent entièrement cette Ville, dit lo
chroniqueur de Senones.
Il reste donc admissible que Nànceium la nouvelle
capitale a pu être complètement détruite par un incen-
die en 1218, tandis que Nantiacus, la Vielle Nancy,
résidence d'Agnès, aurait été respecté.
M. Noël ajoute même que, dans son château (de Nan-
tiacus,) Agnès, paraît avoir reçu Blanche de Champagne
et Gertrude de Dachsbourg, la duchesse régnante que
Thiébaut avait laissée à Nànceium et que, dans leur en-
trevue, ces trois princesses projetèreht sans doute le
mariage qui devait, deux ans plus tard, être contracté
entre Gertrude, veuve de Thiébaut I" et le comte Thi-
baut IV, fils de Blanche de Champagne.
Remarquons encore qu'en 1126, Simon I" qui, sui-
vant nous, résidait à Nànceium, près Téglise de Notre-
Dame, terminait ainsi ses actes : Data apud Nanciacum
et qu'en 1214, Agnès de Bar, retirée à Nantiacus, écri-
vait : Actum apud Nanceyum.,,. Actum apudNancei, —
Le contraste symétrique de ces deux textes fait ressor-
tir le changement qui s'est opéré entre 1126 et 1214 :
avant 1155, l'alleu de Thierry I" et le château-fort de
Simon I" sont indiqués auprès de Nantiacus, juxta...,
apud,.., ante ; après 1155, les divers quartiers de l'an-
— 150 -
^ien Nantiacus, (le Gastrum Nanceium d'Odelricet de
Drogon, le vieux Saurupt, Vendopera ou Vandœuvre,
la Villa ou Villers) sont désignés : apud Nauceyum ....
apud NanceL... devant Nancy ^ le Nancy qui était deve-
nu la capitale de la Lorraine de par la volonté de Ma-
thieu I".
Il est vrai qu'un titre de 1168, signé par ce même
Duc, porte : « Apud Nancei roborari curavimus. » Mais
cet acte, dans lequel figure encore Drogon, n'a-t-il pu
être libellé soit pendant un séjour de Mathieu P"" dans
l'un des châteaux de l'ancien Nantiacus, soit partout
ailleurs autour de Nanceium, au nouveau domicile de
Drogon, par exemple ? — Cette interprétation se jus-
tifie par l'emploi que faisait un peu plus tard et exacte-
ment des mêmes mots apud Nanceij là duchesse Agnès
qui, suivant nous, résidait soit au Ghastellet soit à la
Vielle Nancy.
Nantiacus et Nanceium, dont le degré de voisinage
se traduisait par les mots juxln.,,. apud.,,, ante, for-
maient donc au xi* siècle et plus tard encore, deux
localités absolument distinctes : la première éparpillée
sur le versant oriental de la Haye et protégée par le
camp d'Affrique, par l'enceinte de la Fourasse et par
ce castrum qui fut ensuite le Ghastellet, puis le Montet ;
— la seconde, construite beaucoup plus tard vers la
place actuelle de l'Arsenal, mais se rattachant intime-
ment à la première par son origine historique, par les
phénomènes géologiques qui ont creusé notre admira-
ble vallée et par les modifications stratégiques et socia-
— 151 —
les qu'entraîna, aux temps préhistoriques, le mouve-
ment rétrograde de la Meurthe (1).
A défaut de preuves écrites, la fondation de Nantiacus
par les Celtes, sa magnifique installation au pourtour
oriental de la Haye, ses agrandissements successifs, ses
résidences seigneuriales ne nous expliquent-elles pas
pourquoi Drogon désira perpétuer dans sa famille le
surnom de Nancy, pourquoi Talleu et le donjon de nos
premiers ducs héréditaires restèrent jusqu'en 1155 sans
dénomination connue, pourquoi enfin les fondateurs de
la nouvelle ville, Nanceium^ lui ont transféré ce nom
dont l'origine — si Ton admet que les Celtes occupaient
le sol lorrain environ 1500 ans avant notre ère, — ne
remonterait pas aujourd'hui à moins de trente siècles,
donnant ainsi à la capitale de la Lorraine une noblesse
de race égale à celle des plus anciennes cités de la
France ?
VI
Dans cette reconstitution du Nantiach, du Nantiacus,
de la Nanceiana civitas, de la Vielle Nancy, de l'ancien
Saurupt et de Nanceiurn ou Nancy Ville-vieille, imagi-
nant aussi peu que possible, je me suis efforcé de ne
(1) Nancy, Nanceiurn^ n'est donc pas et n*a jamais été
dans Nancy, Nantiach ou Nantiacus* Constatons toutefois
que ces deux localités ont toujours été reliées Tune à Tautro
par des domaines historiques : Thôpital de Jérusalem, la
commanderie du Viel-Aître, Tétang Saint-Jean, la Vielle
Nancy, Taucien Saurupt, la Chiennerie.... et qu'après avoir
été brusquement transférée au nord de son premier empla-
cement, la vilfe fondée par Mathieu I''^ tend de plus en plus
à regagner le versant oriental de la Haye.
- 152 —
rien avancer qui ne puisse être ratifié, un jour, par la
découverte de documents originaux. L*examen de quel-
ques textes authentiques démontrant qu*un autre Nancy
a précédé celui que nous habitons aujourd'hui et les
conceptions de nos Historiens ne satisfaisant pas une
curiosité bien naturelle, j'ai cru devoir en appeler aux
lumières d'autres sciences.
Depuis longtemps, en effet, de laborieux Archéolo-
gues recueillaient sur le monticule de la Haye les plus
anciennes preuves de la vie humaine en Gaule, lorsque
la Géologie est venue révéler le mode de formation du
promontoire qui nous semble avoir été Tassiette du
Nantiach. Depuis longtemps aussi l'Histoire avait
reconnu aux Celtes le titre de premiers occupants quel-
que peu civilisés de notre région, lorsque dans le nom
du premier Nancy, la Linguistique a retrouvé le voca-
ble celtique qui dépeint le mieux son ancien empla-
cement.
A ces découvertes et coïncidences scientifiques, ajou-
tons l'impossibilité d'expliquer autrement que par
l'existence d'une cité, bourgade ou villa abandonnée la
Vielle Nancy de i 532, d'appliquer à une seule localité
tous les textes qui font mention de notre ville et nous
devrons admettre que le Nant-iach des Celtes n'a pu
voir le jour que sur les pentes du Montet.
Le résultat de ces investigations aurait certainement
été beaucoup plus intéressant s'il avait révélé qu'une
ville est enfouie sous le promontoire de Vandœuvre et
de Villers-lès-Nancy, que cette ville renfermait des mo-
numents gaulois, romains et francs et par conséquent
promis aux Archéologues quelques merveilleuses exhu-
mations. Mais je ne crois pas à un tel enfouissement :
— 153 —
la découverte d'objets celtiques à la surface même du
sol doit faire écarter celte hypothèse el, d*autre part,
Nantiacus n'a jamais été probablement qu'une cité cham-
pêtre composée de plusieurs hameaux ou villages
construits, ruinés et reconstruits autour des divers cas-
tra, donjons, manoirs et châteaux qui se sont succédé
sur ce point de la Haye.
.. i-.v ■ . - <> ■
LA
COMMUNAUTÉ DES ENFANTS-PRETRES
ET
L'INVENTAIRE DES FONDATIONS
DE LA PAROISSE DE MIRECOURT
V
PAR
M. Gh. GUYOT.
On a souvent fait remarquer la variété infinie des
institutions locales au moyen-âge: non seulement d'une
contrée à Taulre, mais d'une ville au bourg voisin
apparaissent des formes caractéristiques, parfaitement
appropriées au but à remplir ; dès qu'il fallait pourvoir
à quelque besoin social, l'ingénieuse prévoyance de nos
pères savait organiser aussitôt le mécanisme le plus
•
complet et créer des ressources dans la forme la plus
solide. Quelques-uns ont pensé que ces hommes du
XII* au XV* siècle étaient esclaves ; il nous semble au
contraire que chez eux la liberté vraie se pratiquait
sans entraves, sinon dans la sphère des intérêts politi-
-^
— 155 —
ques, du moins dans celle, plus importante peut-être, de
la famille et de la cité.
C'est une de ces institutions lorraines que nous
voudrions tirer de l'oubli, en étudiant la formation, le
fonctionnement et les vicissitudes diverses de la com-
munauté des Enfants-Prêtres de Mirecourt. Ce titre,
quelque peu bizarre, éveille Tattention, et provoque
les recherches. On le rencontre dans plusieurs villes
du duché, et H. Lepage donne excellemment, en quel-
ques lignes, le caractère général de ces collèges de
clercs séculiers :
a Dans quatre villes : Epinal, Mirecourt, Nancy et
« Rosières, il existait des communautés de prêtres
cf chargés de seconder les curés des paroisses dans
« l'exercice de leur ministère , ou d'instruire la
« jeunesse... » (1)
Nous verrons en effe^ que telle fut la double mission
des Enfants-Prêtres de Mirecourt. Ce caractère a été
méconnu par le seul auteur qui se soit occupé d'eux :
M. Yverneau, auquel on doit un recueil fort curieux
d'anciens documents (2) sur la capitale du bailliage de.
Vôges, s'exprime delà manière suivante :
(1) Pouillé de Touly p. 425. Mém. de la Soc. d*Arch.
Lorraine, 1863. D'après les notes de Chatrian, on les rencontre
encore à Lunéville, Remiremont, Pont-à-Mousson, Toul,
Plombières, Charmes, Mattaincourt, Blâment, Ghâtel. Gerbe-
viller, Rambervillers. (Renseignement fourni par M. l'abbé
Ë. Buisson.)
Dans d'autres provinces françaises on les appelait Prêtres-
fiUeuls (d*aprèsune requête de 1765, dans un procès dont il
sera parlé plus loin).
(2) Ce recueil, resté manuscrit, appartenait à feu M™^ Car-
rière, de Mirecourt.
— 156 -
ff II y avait à Mirecourt une maison destinée à rece-
« voiries prêtres qui, à raison de leur âge, se trouvaient
« hors d*état de continuer leur ministère. Oa n'y recevait
a que les prêtres qui étaient nés à Mirecourt. C'était une
« espèce d'hospice dont l'administration appartenait
d exclusivement au Conseil de ville. »
Ce passage renferme presque autant d'erreurs que
de mots : bien loin de vivre confinés dans un hospice
d'inflrmeS; les Enfants-Prêtresavaient un ministère très
actif, ei formaient une partie importante du clergé de
la paroisse. Mais avant d'entrer dans le détail de leur
institution, il nous semble nécessaire de donner quel-
quesnotions sur l'église deMirecourt qu'ils contribuaient
à desservir.
La description et l'histoire de cette église n'ont pas
encore été tentées. Le monument n'a rien en effet de
comparable aux grandes cathédrales et aux chefs-
d'œuvre d'architecture que nous a légués le moyen-
âge, dans d'autres parties de la Lorraine. Il ne s'est
rencontré ici aucun de ces hardis bâtisseurs tel que
Symon Moycet à Saint-Nicolas-de-Port, aucun riche
donateur comme le cardinal Huin à Etain, aucun sei-
gneur tenant à perpétuer par une œuvre de ce genre
son nom et celui de sa famille. Mirecourt était du
domaine propre des ducs de Lorraine, et pourtant il ne
semble pas que ces princes se soient fort inquiétés de
contribuer à l'embellissement de leur bonne ville. Peut-
être enfin le voisinage de Poussay, et de sa grande
abbaye nuisait quelque peu aux établissements religieux
que l'on eût pu créer à une aussi faible distance.
Quoiqu'il en soit, l'église de Mirecourt fut et resta
— 157 —
toujours un édifice exclusivement municipal, — s'il est
permis d'employer ce mol trop moderne, pour marquer
que la communauté avec ses seules ressources, et ses
bourgeois avec leurs seules offrandes, durent assumer
la lourde charge de bâtir un monument dont Téreclion
ne laissait pas que d'entraîner de sérieuses difilcullés.
Lorsque le développement de la population, coïnci-
dant sans doute avec la construction d'une enceinte de
murailles et de tours sur la rive gauche du Madon, eut
rendu insuffisante l'ancienne chapelle Notre-Dame,
siluéa de l'autre côté de Teau, (1) on se décida, vers le
commencement du xiv* siècle, à créer une église
nouvelle sur un terrain donné à cet effet par le maire
Henriet et Idète sa femme (2). La situation n'était pas
heureusement choisie ; l'énorme déclivité du sol rendit
nécessaires des travaux de soutènement considérables,
et l'espace n'en resta pasmoins fort étroitement mesuré,
malgré les reconstructions multiples qui intervinrent
dans le but d'augmenter l'édifice primitif.
Quoiqu'il en soit, et quelque justifiées que puissent
être les critiques adressées à cette église pour sa pau-
vreté architecturale, elle n'a pas moins été, depuis
bientôt cinq siècles, comme le cœur de la petite cité,
conservant encore, en dépit de tant de changements
(1) UUrà flumen, D*oû le nom de chapelle de la Outre^ con-
servé encore aujourd'hui à ce petit édifice, qui servit longtemps
de chapelle du cimetière, jusqu'au transfert du Campo Santo
au nord de la ville, du côté de la route de Neufchâteau.
(2) L'acte de fondation, en latin, est daté du dimanche
Esto mihi de Tan 1304 n. s. Cet acte avec sa traduction est
reproduit par M. Ch. Laprevote. Notice sur Mirecourt, p.
1*72-174 (Mém. de la Soc. d'Ârch. lorr. 1877).
— 158 -
imposés par la mode ou la nécessité, de nombreux
souvenirs de l'histoire locale qui fut écrite sur ses
murs ou dans ses archives.
C'est là que se réunissaient, jusqu'au xvui® siècle, les
assemblées communales (1) ; c'est là que les corpo-
rations de métiers, nombreuses et florissantes à Mire-
court (2), célébraient leurs fêtes et invoquaient leurs
patrons : grâce à leur piété, des tableaux et des statues,
les uns et les autres supprimés aujourd'hui, peuplaient
les voûtes et en cachaient la nudité. Peu à peu,, des
notables ou de riches marchands, des seigneurs voisins
tels que les Bassompierre, le chapitre de Poussay,
avaient fondé et doté un grand nombre de chapelles que
pouvaient à peine contenir les dimensions restreintes du
monument (8). Enfin. Tobituaire de la fabrique nous
(1) En 1736, requête à S. A. des officiers de Thôtel-
de-ville de Mirecourt, représentant qu3 les assemblées com-
munales et de police se sont toujours tenues sous les voûtes
de l'église^ faute djemplacemont, et demandent, à titre
d'acensemeut perpétuel, moyennant 200 francs annuellement,
d'occuper le derrière de la Maison de S. A., dont le devant
est occupé par le bailliage. Accordé. (Inv. sommaire des
Archives dép. des Vosges, CC, 49).
(2) Voir, pour les chartes de ces corporations, M. Lapre-
vote, op. cit. p. 187-193.
(3) oc L'estat des autelz et chappelles, en Téglise parochialle
de Mirecourt » (Arch. mun. GG. 8), vers 1612, n'indique pas
n^oins de douze chapelles ; mais le nom des collateursn'y est
pas toujours porté. MM de Bassompierre a pourvoient » à
la chapelle St-Nicolas et à une autre dont le nom du patron
n'est pas lisible, oc Mmes de Poursas v (les chanoinesses de
Poussay) sont coUatrices pour St-Cosme et St-Damien,
proche les fonts baptlsmalz. La chapsUe St-Didier et celle
'e St-Michel « sont de la collation des Roucelot dudit
— 159 —
donne la longue liste des institutions pieuses de dix
générations de fldèles, riches ou pauvres, nobles ou
bourgeois : c'est vraiment un livre d'or sur lequel
chaque famille tenait à voir inscrire son nom, pour
l'honneur des ancêtres et le soulagement des défunts.
Cet obituaire a été composé vers 1610, par le curé
Paris (1) : il contient les extraits d'un assez grand
nombre de testaments concernant des fondations pieu-
ses, puis une* énumération sommaire des autres titres
en vertu desquels l'église perçoit des rentes et des
redevances ; enfin les obils se trouvent classés par
chaque mois de l'année, de manière à rendre plus
facile la recherche des services à acquitter. Postérieu-
rement à 1610, les indications de l'obituaire peuvent
être complétées par un inventaire général de 1757, dont
nous aurons à parler plus loin.
Les documents do ce genre présenteraient un grand
intérêt si leurs mentions étaient moins sommaires ;
malheureusement pour nous, des dispositions faites en
faveur de l'Eglise, on ne retenait que ce qui é*ait d'une
utilité immédiate, et même lorsque des copies de
testaments s*y trouvent insérées, ce ne sont que quel'
ques phrases, qui ne nous apprennent pas tout ce que
Mircoupt. » Oa cito encore la famille Flament pour N. D. de
Pitié ; les sieurs Daily procho Dompaire pour St-Jean-
Baptiste. Restent les chapelles Notre-Dame, St-Glaude,
St-Dominlque, St-Jacques, Ste -Catherine.
(1) Arch. mun. GG. 8. Cahier de 45 feuillets dont 39 seu-
lement sont remplis. Une copie meilleure est faite dans un
autre cahier qui a pour dimension 31 sur 10 cm. et compte
42 feuillets. Ces cahiers contiannent, outre Tobituaire, des
pièces diverses, et notamment TËtat {mentionné à la note
précédente.
— 160 —
nous voudrions savoir sur la famille des testateurs ou
les conditions de la libéralité. Nous ne pouvons donc en
tirer des renseignements complets, et d'ailleurs la
situation relativement modeste des constituants enlève
à ces recherches la valeur qu'elles auraient si elles
s'appliquaient à des personnages historiques (1). Il
convient donc de nous borner a donner une idée géné-
rale des fondations relatées dans cet obituaire.
La première en date est de 1885 ; elle concerne la
fondation d'une chapelle (2) . Vient ensuite une simple
mention relative à la « messe journalle » créée le
2 novembre 1429, et mise à la charge de la confrérie
de Notre-Dame ; on ne fait connaître ni le chiffre de la
dotation, ni même le nom du fondateur ; nous voyons
seulement ensuite que^ par contrat du 17 janvier 1636,
« demoiselle Claudine Marchai, veuve du sieur Joseph
Moitessier, docteur-médecin, donne 1.400 fr. pour trois
messes de requiem, et afm d'aider à dire la messe
journalle. » Dans l'espace de deux siècles, l'abaissement
du signe monétaire avait eu pourconséquence de rendre
insuffisante la somme primitivement assignée, et pour
éviter une réduction dans les services religieux, un
surcroît d'émoluments devenait nécessaire.
Ënl5i3, nous trouvons la fondation de messire Didier
Tallard, sur laquelle nous aurons l'occasion de revenir,
lorsque nous arriverons à l'institution des Enfants-
Prêtres. En 1541,ThierriotGraboyel ouGraboué, d'une
bonne famille bourgeoise, donne une maison et une
(1) Cpr. Les testaments au profit de V Eglise de Toul^ par
M. de Morière (Mém. de la Soc. d^Arch. lorraine, p. 141-
182, 1884).
(2) Nous en parlons plus longuement dans V Appendice,
— 161 —
somme d'argent (1). A partir de cette époque, les dispo-
sitions deviennent de plus en plus nombreuses et nous
devons nous borner aux principales. Ainsi, Thouvenin
le Comte, en 1549, donne 42 jours de terre, bans de
Mazirot et de Chauffecourt, plus 3 jours à Mireeourt,
pour une messe haute tous les mardis. En 1661, Mar-
guerite Richard fonde la messe du jeudi, moyennant
un capital de 1.000 fr. Par une série de dispositions des
14 avril 1681, 13 avril et 12 juillet 1682, 9 février 1683,
le sieur Guyot, de Mircourt, doyen des professeurs en
droit de TUniversité de Pont-à-Mousson, établit la
iQesee du St-Esprit, qui doit se célébrer « dans la
chapelle érigée en l'auditoire du bailliage, à 7 heures
et demie en esté et 8 heures et demie en hvver, à moins
que les juges ne le demandent autrement» ; la rétribu-
tion suffisante est assurée par un gagnage à Diarville,
de 17 paires, — un à Maroncourt, de 3 paires i \2, —
un à Mattaincourt, de 3 paires ; — deux contrats de
1.700 fr. de capital et un cens de 25 fr. Citons encore
le sieur Lhuillier, curé de 8t-Léger, qui donne 3.600 fr.
pour trois messes basses par semaine et trois obits par
an (21 oct. 1691) ; — le sieur Mathieu, avocat, pour
douze messes basses, « savoir six pendant les six mois
d'été en l'église de la Oulre^ les six autres pendant les
six mois d'hiver en îa paroisse de Mireeourt » (du
33 oct. 1735) ; 700 fr. de capital, plus un gagnage à
Mireeourt, du rapport de 2 paires et un demi resal
d'orge) ; — enfin, en 1*33, M"* de Thilly établit la
messe quotidienne dite d'on;ire heures, et assigne pour
cette messe une somme de 7.000 livres tournois à
prendre sur son gagnage de Maroncourt.
(1) Cf. Ch. Laprevote, op. cit. p. 185.
11
— 162 —
Nous âvoos choisi, dans les exemples qui précèdent,
les plus fortes sommes données à l'église ; mais combien
d'autres, plus modestes, pourraient être signalées dans
la longue liste des obits ! Habituellement le donateur
s'assure un service de messes hautes ou basses, à une
époque déterminée ; parfois il y joint d'autres messes
au jour de fête de son patron ou à certaines dates de
Tannée. Mais plusieurs de ces .rétributions sont fort
minimes : ainsi le service de Menne Vincent, veuve de
Claude Alba (1) (1687), n'est assuré que par une rente
de 3 fr. ; celui d'Anne Goinot, veuve Bourlié (1691)
produit 2 fr. seulement. Le temps aggravait l'insuffi-
sance de redevances aussi modiques, et Ton ne trouvait
plus de prêtres consentant à accomplir pour si peu les
charges imposées par les fondations. En 1749, le clergé
de Mirecourt, profitant de la présence de l'évêque de
Toul, MgrBégon, lui proposa une réduction des services
correspondant à la valeur actuelle des émoluments ;
cette réduction fut approuvée, et l'ordonnance de Mgr
Bégon servit de règle à cet égard jusqu'à la fin de
Tancien régime (2).
Avant de quitter cet obituaire, nous signalerons
encore, parmi les noms qui s'y trouvent énumérées,
(1) V. sur la famille Alba, la notice bibliographique
donnée par M. Ch. Laprevote (op. cit. p. 122), qui commence
à François Alba, anobli en 1663.
(2) Pour donner une idée de l'importance de ces réductions,
nous citerons la fondation de Didier Tallart, dont les émo-
luments étaient de 60 francs pour une mesbe quotidienne en
1513. Il y eut d'abord, à une époque qui nous est inconnue,
une première réduction à 40 messes par an, puis à 32, en
vertu de l'ordonnance de Mgr Bégon.
— 16J -
ceux des familles nobles ou remarquables à quelques
égards pour l'histoire de la cité. En 1528, les enfants de
noble Jean des Pilliers, jadis lieutenant du bailli de
Vôges (1), fondent la messe de la Croix, qui doit se
dire chaque vendredi de Tannée, et y affectent le demi-
tiers des dîmes de Mattaincourt et Hymont. En 1607,
testament de noble Jean Parisot, chirurgien (2). En
1609, celui de noble Philippe Vuillaume, veuve de feu
noble Mengeot Gennetaire, désignée ailleurs sous le
nom de Philippe de Portsas (3). En 1611, nous trouvons
les obits d'Anne Abram et d'Etienne Husson, son mari ;
Barbe Abram. veuve de Sébastien Royer, qui paraît
en 1673, était sans doute de la même famille, et toutes
deux parentes d'Etienne-Charles Abram, avocat dis-
tingué, anobli par Léopold (4). En 1614, testament de
noble Claude de Pont, veuve de Claude Guérin de
Mirecourt. En 1624, dispositions de Marie Rousselle,
« femme de M. Canon, premier juge au bailliage de
Vôges (5). »
Le testament d'Anne Ferry, veuve de feu Georges
La Salle, ancien mayeur de Mirecourt, est un peu plus,
explicite que les autres et a été transcrit moins sommai-
rement ; à la date du 21 avril 1633, honorable Anne
Ferry fonde à perpétuité une messe solennelle « à
célébrer annuellement en l'église parochiale, au jour de
(1) V. Ch. Laprevote, op* cit., Biographies, p. 145.
(2) Eod loc, p. 142.
(3) Eodloc,,^, 153.
(4) Eod loc, p. 121.
(5) C'est le jurisconsulte auquel on doit le Commentaire
sur les Coutumes de Lorraine, imprimé à Epinal en 1634.
V. Ch. Laprevote, p. 126.
■ ^ i V' ■ *■ ^^^ - . .w -- .-
-. 164 —
feste Ste-Anne, en l'honneur d'icelle, qui échoit au
26* du mois de juillet, surTautel de Notre-Dame, proche
duquel ladite fondatrice a fait ci-devant poser Timage
etreprésentation de ladite Ste-Anne (1). » A ce moment,
on subit dans toute la Lorraine les horreurs de la
guerre, de la famine et de la peste ; voici une mention
(sans date précise) qui rappelle les misères de cette
triste époque : « Testament fait en tems de peste, reçu
par les frères Biaise et Anaclet, capucins d'Arches,
confesseurs des Loges, par Claude Vincey, pestiféré,
qui légua 2,000 fr... » Enfin, nous terminerons cette
nomenclature, forcément incomplète, par deux fonda-
tions du xviu* siècle : celles de Nicole Mathieu, veuve
de Louis Thiriet (2), écuyer (1788), — et d'Anne Ninot,
veuve de noble Léopold Pochard (1747).
Toutes ces dispositions créaient à Téglise de Mire-
court un patrimoine considérable, dont Tadministration
était confiée à un bourgeois, sans doute désigné par le
mayeur et les commis de ville, et à partir de 1609, par
le Conseil de Ville. Cet administrateur portait le nom
à'écbevin de Téglise ; ses fonctions étaient annuelles,
et il rendait, en sortant de charge, ses comptes de
recettes et dépenses, que vérifiaient les membres du
Conseil. Les comptes de Téchevin de l'église de
Mirecourt existent encore, à partir de 1681 ; on y trouve
(1) hHmage due à la piété d'Anne Ferry est celle, croyons-
nous, qui existe encore à la place indiquée. Elle a été
heureusement épargnée dans les restaurations modernes de
réglise de Mirecourt.
(2) Est-ce la famille Thieriet, mentionnée par M. Laprevole
(p. 149) jusqu*en 1723 seulement ?
— 165 —
plusieurs renseignements curieux (1). Ils ne compren-
(1) Les Comptes de la fabrique de Mirecourt comprennent
un grand nombre de cahiers cotés aux Archives municipales
GG, 3 à *?. Voici quelques mentio:i3 qui donneront une idée
de rintérêt qu*ils peuvent présenter.
Compte de 1631 : « Chacun bourgeois dud. Mirecourt et des
faubourgs doit au jour de Pasques, au devant de ladite
Eglise, lors du payement du cierge bénit, denier et maille,
pour suppléer à l'achapt d*huile en la lampe de la chapelle
du cimetière dicte la Oultre...» Il en résulte que le montant
de cette collecte peut nous renseigner exactement sur le
nombre des bourgeois de la ville. Or, en 1633, année
désastreuse, signalée par une grande émigration, conséquence
de la peste {V. Ch. Laprevote, op. cit, p. '75), la recette du
jour de Pâques n'a donné que xxiij gros ij deniers, qui
correspondent à 185 bourgeois seulement.
Le produit des quêtes de chaque dimanche montre aussi
que cette détresse ne fit que s*aggraver pendant les années
suivantes ; on trouve en effet que
a les aulmones » pour 1634 ont donné cxxv^' vij** iiij<'«"-
— 1635 — iiij"iij v iiij
— 1636 — Ixij IX viij
— 1637 — 1 V vij
— 1638 — XXX vj V xiij
Dans la plupart des Comptes, un chapitre spécial est
consacré aux recettes « pour sépultures accordées en TEglise
parochialle. > Les concessions de sépultures, sous les dalles
mêmes de Téglise, sont plus fréquentes qu'on ne pourrait le
supposer : on en trouve de deux à cinq par an, de 1632 à
1638, et il ne faut pas croire que c'était une faveur réservée
aux familles riches : nous voyons par exemple, en Tannée
1632:
pour un soldat de Tarmée du roy ijf'' vj ^
pour rhostelain de la fleur de lys v » etc.
Voici encore deux mentions qui ont leur importance :
Compte de 1732.34, dépense : « Six cents cinquante-neuf
f rans deux gros, payés à François Lafosse et Charles Morpas,
orphèvres à Mirecourt, pour a voir faict un reliquaire d'argent
— 166 -
nent, bien entendu, que la partie des recettes revenant
à la fabrique, car les communautés religieuses, même
séculières, avaient leurg revenus gérés par des comp-
tables spéciaux : il en était ainsi des confréries (1), et
notamment de la Communauté des Enfants-Prêtres,
dont rhistoire sera plus facilement comprise après les
détails qui précèdent.
La plus ancienne mention des Enfants-Prêtres que
nous connaissions se trouve dans des lettres patentes du
duc Antoine, portant la date du 14 juin 1513, et dont
voici le principal passage :
« Anthoine, par la grâce de Dieu... Gomme notre
amé et féal aulmosnier et auditeur en n" chambre
des Comptes messire Didier Tallart, prestre, chantre
et chanoine en n*"* église Monsieur St-George de
Nancy, ayt puis certain tems en ça acquesté à Heni*y
pour mettre la relique du Bienheureux père de Mattaincourt,
suivant le traité faict avec eux le S* mars 1733. # (La
béatification de P. Fourier est du 6 octobre 1729.)
En vertu d*un décret de Madame Régente du 3 mars 1732,
construction de bancs uniformes, contenant en tout 545
place», de 13 pouces l'une. Dépense 1855* 13* , à raison de
3' 8* par chacune place. Ces places ont été ensuite
vendues aux enchères, et la recette provenant de cette vente
monte à 4162* 1> 6<^. Le comptable fait remarquer que
beaucoup de familles avaient déjà payé des emplacements à
perpétuité, qu'elles continuent à occuper sans être taxées à
nouveau .
(1) Les comptes de la fabrique nous font connaître la
Confrérie de Notre-Dame, celles de St-Joseph, des Agonisants.
Il devait encore en exister d'autres. Enfin l'hôpital de
Mirecourt, dont l'acte de fondation date du 28 septembre 1455,
avait un patrimoine distinct et ses gouverneurs à part.
— 167 -
Le Clerc, fils de feu Henry Le Clerc, en son vivant
grenetier de Joinville, la somme de 60 frans de rente
annuelle sur le proffit et revenu de nos salines de
Ghâtel-Salins.... et que d'icelle rente ledit Tallart ait
dévotion et dési r d*en fonder, faire dire et célébrer par
chacun jour à perpétuité une messe en TÉglise paro-
chialle de notre ville de Mircourt, et sous tiltre de
bénéfice, par les gens d'Eglise célébrans qui auront été
nez et baptisez es fonts d'icelle Eglise parochialleet qui
feront leurs demourances audit Mircourt et aux condi-
tions que en la fondation de ladite messe sera déclaré
plus amplement... Scavoir faisons... » (1).
La principale condition à laquelle cet acte fait allusion
consiste en ce que : « si le curé du lieu est résident et
veut aussi dire la messe, il le fera à son tour. »
Telle est pour ainsi dire la Charte initiale des
Enfants-Prêtres de Mirecourt : nous y voyons une
association de prêtres originaires du lieu, y habitant,
et concourant avec le' curé pour la célébration du
service divin. Bien que des textes plus anciens nous
fassent défaut, il n*est pas douteux que cette institution
(1) Copie aux Ârch. mun. G. G. 11.
11 est remarquable que cette fondation primitive subsista
sans changemeut jusqu^à la fin du xviii* siècle. On lit en
effet dans une liasse de pièces provenant de la Chambre dos
Comptes de Lorraine (Arch. Meurthe, B. 1862). c Ëx<=« 1774,
n» 156. Renies anciennes. Bordereau de 60 fr. barrois, faisant
en livres 25^ 14" 3d. Je soussigné Louis Léopold Frichelet,
prêtre, receveur de MM. les Ënfans- prêtres de la ville de
Mirecourt, reconnais avoir reçu de M. Pierre Rousseau,
conseiller du roi, receveur général ancien des domaines et
bois de Lorraine et Barrois, la somme de 25* 14<> 3<*, pour une
année de rente, échue au dernier décembre 1774... A Nancy,
le 2« février 1777. »
— 168 -
fonctionnait déjà, depuis longtemps peut-être, dans des
conditions identiques. C'est ce qui est attesté par de
nombreuses pièces postérieures, qui, sans fixer de dates
précises, font toutes remonter à une époque plus
éloignée la fondation de cette compagnie. Nous savons
que celle de Rosières existait au xiv* siècle, et il est
permis de présumer pour Mirecourt une date aussi
reculée. Les lettres patentes de 1513 sont donc invo-
quées simplement comme un acte écrit précisant la
nature des obligations et des services de la communauté,
acte sur lequel sont venues se modeler toutes les
dispositions de nombreuses libéralités analogues.
Par conséquent, il serait faux de dire que c'est le duc
Antoine qui a autorisé rétablissement des Enfants-
Prêtres : ce serait se faire une idée fort peu exacte des
relations qu'avaient au moyen âge les pouvoirs publics
avec les bourgeois des villes ou les communautés, tant
laïques que religieuses. Celles-ci se formaient et
pouvaient vivre sans aucune intervention nécessaire du
prince ou de ses officiers. Elles existaient en fait par la
libre et spontanée agrégation de leurs membres ; elles
pouvaient dès lors se constituer un patrimoine, l'admi-
nistrer et le défendre par les voies légales ; de
nombreuses décisions judiciaires en font foi, et dans
les procès assez nombreux que les Enfants-Prêtres
eurent à soutenir, on voit les juges admettre sans
difficulté leurs représentants, sans leur demander de
justifier des origines de leur institution.
Si, dans l'espèce, le donateur Didier Tallart requiert
1 homologation ducale, c'est qu'il s'agissait d'une rente
due par le domaine, et dont il était nécessaire d'auto-
riser le transfert au profit des nouveaux titulaires.
— 169 —
C'est pour le même objet que, le 28 juin 1702, de
nouvelles lettres furent données par le duc Léopold ;
nous n'en connaissons pas la teneur, mais on peut
présumer qu'elles furent nécessitées par une modifica-
tion que nous révèle l'inventaire de 1757 : au lieu d'être
assignée spécialement sur les salines de Château-Salins,
vers cette époque, la rente de 60 fr. fut payable
simplement sur les revenus du domaine de Nancy.
Une autre cause d'intrusion des officiers ducaux dans
les affaires de la communauté résultait de l'assiette et
du paiement des impôts auxquels elle se trouvait
astreinte, comme tous les gens de mainmorte, notam-
ment en ce qui concerne le droit d'amortissement et de
nouvel acquêt (1). Mais jamais nous ne voyons qu'il
soit nécessaire d'une permission expresse pour la
création d'une communauté nouvelle. Le droit public
ne fut à cet égard modifié en Lorraine qu'en vertu d'un
Editde Stanislas, promulgué en 1759 (2).
(1) Lettres d'amortissement du 8 octobre 1754, entérinoes
à la Chambre des Comptes le 12 mars 1755, au profit du curé
et de la communauté des Enfans-prêtres de la ville de
Mircourt. Quittance de 19^ 15» 3*^ pour le droit d'amortisse-
ment et nouvel acquêt d'immeubles sur le ban de Mattain*
court, estimés 85^ \k^ S'* acquis par échange de Claude
Berlot, suivant acte du 24 mai 1735. — Autre quittance de
2121 6(1 à quoi a été modérée celle de 235i 8» 4<i à cause d'un
gagnage du rapport de 2 paires et un demi resal d'orge, situé
au ûnage de Mircourt, de valeur de 1,000^ , à ladite com-
munauté donné et légué pour fondation tant dans FËglise
paroissiale que dans la chapelle de la Houtre, par J. Fr.
Mathieu, avocat audit lieu, suivant codicille reçu par
Boulanger, tabellion, le 23 octobre 1735 (Arch. Meurthe, B.
11.379.)
(2) Edit de Stanislas du mois de septembre 1759. - Art l•^
Tout établissement de chapitres, maisons ou communautés
— 170 —
A partir de 1513^ les mentioQS relatives aux Enfants-
Prêtres deviennent de plus en plus fréquentes. Dans les
fondations pour services religieux faites au profit de la
fabrique de Téglise de Mirecourt, les constituants, à
Texemple de Didier Tallart, ne manquent point d'ordi-
naire d'associer au clergé de la paroisse la communauté
ou la compagnie des Enfants-Prêtres, ou plus ordinaire-
ment encore de spécifier que les donations sont faites
« aux sieurs curé et Enfans-Prêtres de Mircourt. »
Leur patrimoine alla donc sans cesse s'accroissant, et
il serait trop long d'énumérer les titres souscrits en leur
faveur, d'autant mieux que nous n'aurions guère qu'à
répéter les mentions données précédemment au sujet
de l'obituaire. Nous nous bornerons à rappeler une
disposition importante qui vint améliorer notablement,
au XVII* siècle, les finances de la communauté.
Par testament du 27 août 1517, Husson Thouvenelou
Chauvenel, de Remoncourt, ancien receveur du
Domaine à Mirecourt, avait doté largement la chapelle
de « Notre-Dame de Pitié et St- Antoine de Pade »^
érigée en l'église paroissiale. Un siècle plus tard, les
bourgeois de Mirecourt entreprirent d'affecter cette
dotation au curé et aux Enfants-Prêtres : il fallait pour
cela obtenir d'abord l'autorisation épiscopale, puis le
oonsenitement du chapelain pourvu du bénéfice, ainsi
que des collaleurs. On s'adressa d'abord à l'évêque de
Toul, et les termes de cette supplique, qui ne porte
religieuses... érection de chapelles ou autres titres de
bénéfices, ne peut avoir lieu qu*eii vertu de lettres patentes
dûment enregistrées... — Art. 13. Ces dispositions s'appli-
quent rétroactivement à tous les établissements fondés depuis
le mois de décembre 1736 (Rec. des Edits, x, 18.)
— 171 —
point de date, sont assez caractéristiques pour que nous
croyions utile d'en reproduire le passage suivant :
« Exposent humblement (les mayeur et conseillers)
pour tout le corps de ladite ville, qu'il y. a une seule
église paroissiale en ladite ville sous Tinvocation de
Notre-Dame, St-Nicolas et St-Didier, laquelle, bien
que chargée de grand nombre de paroissiens, n*a néan-
moins revenu fixe que du tiers es dixmages gros et
menus du finage dudit Mircourt, qui ne peut monter
annuellement qu'à i5 ou 16 paires pour les gros, et à
quasi rien pour les menus ; qu'à raison de la grande
charge de ladite église, à laquelle un sieur curé ne peut
suffire, ladite ville aurait dès un très long temps affec-
tionné d'obliger des enfans originaires du lieu, promus
à Tordre sacré de prêtrise, à y faire résidences per-
sonnelles, afin de secourir et soulager ledit sieur curé
en ses fonctions spirituelles ; et à ce dessein successi-
vement, par obits et autres dispositions pieuses (aurait)
constitué quelque fond, lequel néanmoins n'étant que
de quelque 80 paires de grain ou environ de revenu
annuel, jaçois qu'ils soient pour le présent au nombre
de six, et que par événement ils se puissent rencontrer
en plus grand nombre, ils prévoyent que le peu de
moyens qui en revient auxdits prebstres pour en vivre
commodément, les pourra occasionner de chercher
party ailleurs et déserter ladite égUse, s'il n'y est obvié
par augmentation dudit fonds ; à quoi lesdits exposans
incitant leur pensée, comme aussi les moyens d'agrandir
de quelque chose le revenu fixe et certain d'icelle église,
et considérant qu'un moyen se présentoit si certaine
chapelle de patronage laie, fondée sous l'invocation de
N.-D. de Pitié et de St-Antoine de Padoue, par feu
- 172 —
Husson Chauvenel de Remoncourt... pouvant valoir
annuellement âOOfr.... s'unissait à ladite église.... > (1).
Cette pétition reçut un accueil favorable : l'autorisa -
tion fut accordée à la date du 20 mars 1630 par le
cardinal Nicolas-François ; le chapelain, messire Jean
Simonin, sans doute indemnisé par la ville, avait déjà
donné son adhésion. Restait à obtenir celle des colla-
teurs, les sieurs Flament père et fils, qui formulèrent
d'abord une opposition par Torgane de François
Flament, bourgeois de Verdun ; mais ils finirent par
s'en désister, comme ilrésuite d'un actedu4 juillet 1630.
Les biens de la chapelle furent attribués de la manière
suivante :
« Une maison en dépendant pour servir de résidence
f perpétuelle au sieur curé de la paroisse, et les autres
€ bieas, rentes et revenus à la Compagnie des Enfans-
« prebtres, moyennant l'acquit du service y affecté et
c charges y appartenantes, d
Il ne faudrait pas croire cependant, malgré le nombre
considérable de fondations auxquelles participèrent les
Enfants-Prêtres, que leur communauté arriva jamais
à une véritable opulence. Nous avons essayé de faire le
(1) Arch. mun. GG. 18. — Retenons de ce document que
la communauté se compose alors de six prêtres. Quant â la
mention par laquelle la ville aurait Thabitude d'obliger les
enfants du lieu, promus à la prêtrise, à y faire résidence,
nous croyons qu'il ne faut pas l'appliquer à la lettre : on ne
voit pas en effet par quels moyens, au xvii» siècle, des fils
de bourgeois auraient pu être empêchés de changer de
domicile à leur guise ; ils n'étaient obligés â la résidence que
s'ils voulaient participer aux émoluments.
En 1769, nous trouvons onze Enfants-Prêtres, y compris
le curé (Ms. de Chatrian, La Lorraine ecclésiastique, s. d.)
— 173 —
relevé de tous les actes mentionnés à Tinventaire de
1757 et d*estimer la valeur des legs et des donations qui
s y trouvent exprimés. Cette opération n*est pas
susceptible d*une grande rigueur, parce (jue rentes et
capitaux proviennent de fondations faites à des époques
très diverses, et aussi parce que ces derniers consistent
tantôt en sommes d^argent, tantôt en fonds de terre
dont le revenu n'est pas aisément appréciable. Quoiqu'il
en soit, en ramenant ce revenu de 1757 à sa valeur
intrinsèque actuelle, nous ne dépassons pas 3. 100 fr. (1).
C'est peu assurément, si Ton réfléchit que les partici-
pants, qui étaient au nombre de six en 1607, sont treize
y compris le curé à Tépoque de l'inventaire. Il y a donc
loin de ce modeste émolument aux riches dotations de
certaines communautés religieuses sous l'ancien
régime.
Nous n'aurions que peu de chose à ajouter pour
compléter l'histoire des Enfants-Prêtres de Mirecourt,
s'ils n'avaient été mêlés à plusieurs procès dont les
pièces sont parvenues jusqu'à nous. Ces documents, à
travers le langage prolixe de la procédure, nous laissent
apercevoir certains détails intéressants que nous allons
résumer de notre mieux, en faisant tout d'abord obser-
ver que ces pièces ne sont pas complètes, et qu'elles
n'émanent que d'une seule des parties (les Enfants-
Prêtres), de sorte qu'il convient de se tenir en garde
contre les développements oratoires d'avocats enclins
(1) Nous nous sommes servi, pour ces calculs, des Tables
de M. de Riocour, en ce qui concerne les sommes d'argent, et,
relativement aux fonds de terre, des résultats de notre tra-
vail sur V Aisance relative du paysan lorrain, Nancy, 1889.
— N.
— 174 -r-
à charger la partie adverse, afin de faire mieux valoir
la cause de leurs clients. En comptant bien, nous trou-
vons au moins six affaires dans un peu moins décent
ans, ce qui prouve que le goût de plaider fut toujours
assez vif en Lorraine, même chez les ecclésiastiques.
Circonstance aggravante, la plupart de ces affaires sont
motivées par des difBcultés entre les Ënfans-prêtres et
leur chef naturel, le curé de Mirecourt.
On ne s'en étonnera pas trop si Ton réfléchit combien
étaient vagues les termes des fondations, attribuées
sommairement « aux sieurs curé et Enfants-Prêtres. » On
ne disait pas quelle serait la part des uns et des autres,
quelle devait être l'organisation de la communauté,
comment devaient être admis les nouveaux membres :
toutes ces questions ne pouvaient se résoudre, à défaut
d'entente amiable, qu^à coup dé décisions judiciaires,
qui dévoraient en pure perte le patrimoine commun et
laissaient derrière elles de longues inimitiés, difficiles
à oublier. Somme toute, la question d'argent et la ques-
tion d'étiquette, furent les origines de ces trop fréquents
débats.
Le premier en date, — le seul où le cuié ne soit pas
en cause, — concerne l'admission d'un sieur Maurice,
qui ne remplissait pas les conditions de la fondation du
chanoine Tallart. Un arrêt du Parlement de Metz, du
10 septembre 1672 (l), déclare la nullité de toute
réception dans laquelle Télu ne peut justifier qu'il est
né et qu'il a été baptisé à Mirecourt. Le' curé de la
paroisse est seul dispensé de cette double preuve.
(1) Relaté dans l'Inventaire de 1757.
f
-j
- 175 —
Quelques années après, les Enfants-Prêtres sont en
discussion avec le curé de Mirecourt, qui était alors
Nicolas- François de Germiny « au sujet du partage et
division des rentes et revenus appartenant à la commu-
nauté. » Nous n'avons que cette indication sommaire
sur Tobjet du litige et nous voyons seulement que les
parties ayant voulu soumettre à TOfficial de Toul leur
différend , un jugement du Bailliage , rendu le
28 juillet 1681 (1), sur les réquisitions du sieur Alba,
substitut du procureur général, revendique Taffaire,
faisant à tous juges ecclésiastiques les plus expresses
inhibitions et défenses de s'en occuper. C'est donc un
simple conflit de juridiction qui ne nous apprend rien
sur le fond du débat. Cet incident n'engendra pas de
mauvais souvenirs, car nous voyons qu'en 1693 et
1694, M. de Germiny remplit les fonctions de receveur
des Enfants-Prêtres, charge qui se conférait par l'élec-
tion de tous les confrères.
Des difficultés plus graves s'élevèrent avec son
successeur, Louis-François Payen, qui régit la paroisse
de 1704 à 1710. H s'agissait, autant que nous pouvons
le présumer d'après une mention sommaire, de décider
si le curé était en droit d'appeler des prêtres du dehors
pour les services mortuaires, messes de confréries,
corps de métiers et autres semblables. Il intervint en
1705 une transaction (2) qui semble tout à l'avantage
des Enfants-Prêtres: le curé déclare qu'il se conformera
à la pratique ancienne et qu'il ne pourra employer
d'autres ecclésiastiques que ceux de la communauté.
(1) Copié dans le recueil ms. d^ M. Yverneau.
(2) Mentionné dans les pièces du procès de 1765.
— ne —
Dans ces conditions, on ne comprend pas bien pour-
quoi i'animosité continua, toujours plus vive de la part
des Enfants-Prêtres, qui se permirent des attaques au
moins fort déplacées à l'égard de leur pasteur. Ils firent
imprimer notamment, sous le titre d'Avis au public,
un placard dans lequel ils accusent celui-ci de ne pas
remplir les devoirs de son ministère, et de faire payer
ses services plus cher que ne le permettait le tarif du
diocèse ; en revanche, la communauté des Enfants-
Prêtres est louée pour sa modération et sa discipline (1).
Il résulterait de ce libelle la preuve d'une sorte de con-
(1) Avis au public. — Les 26 et 27 juin 1709. M. do
Camilli, évêque de Toul, étant dans cette ville dans le cours
de ses visites, MM. les magistrats et officiers de THôtel-de*
Ville présentèrent à S. G. deux requêtes remplies do
plusieurs plaintes contre leur curé, notamment au sujet des
rétributions et honoraires qu*il exigeait, de sa négligence
à visiter les malades, ne les visitant pas dans les derniers
momens de la vie, etc. Sur quoi, lesdites deux requêtes
vues, information sommaire faite, le s' curé et MM. les
magistrats ouïs par Mgr, il fut ordonné, réglé et statué ce
qui suit :
(Cest un règlement avec tarif pour le Conseil de la
paroisse. Le placard se termine ainsi :)
La Communauté ecclésiastique vulgairement dite des
Enfans- PRÊTRES n'ayant jamais donné occasion de ciier
contre ses rétributions et honoraires, il ne s'est jamais va
aucun règlement particulier contre elle ; sa règle sont {sic)
les statuts du diocèse... Elle perçoit ses droits comme
s'ensuit...
Pour Tassistance de chaque prêtre aux enterrements, 7gr.
valant 5 sols ; — pour deux messes solennelles, vigiles, les
laudes, obsèques et le libéra, 14 fr. valant 6 livres ; — pour
chacun àe MM. les prêtres qui funt diacre et soudiacre aux
trois messes des services, 6 sols, ce qui fait 3G sols ou
1' 16» .
(Arch. m«ï"G. G. 11.)
- 177 --
currence déloyale, particulièrement odieuse eu égard à
la nature des intérêts en présence. Puis venaient des
accusations d'un autre genre, qui nous font souvenir
que nous sommes au temps du Jansénisme et de ia
bulle Unigenitus : le curé aurait dit, en parlant de
l'ouvrage de Mgr de Cambrai (1), qu'il aimerait mieux
être débaptisé que de croire à l'infaillibilité du pape ;
dans ses sermons, il tend à supprimer la dévotion
envers la sainte Vierge et les saints ; il dit que Ton doit
s'adresser directement à Dieu, que le jeûne est inutile
sans l'aumône, que le prône est aussi nécessaire que la
messe... (2). Bref ses adversaires le font passer pour
un franc hérétique ; montée à ce point, l'irritation dura
sans doute jusqu'à la mort da curé Payen, et nous ne
pouvons dire jusqu^à quel point étaient fondées d'aussi
âpres critiques.
Suit une longue période de calme, qui ne prend lin
qu'eu 1743. La cure de Mirecourt était alors occupée par
Jean-François Gouvenot, d'un caractère emporté, très
jaloux de ses prérogatives et impatient de toute contra-
diction. Le receveur des Enfants-Prêtres, le sieur La-
traye, étant venu à mourir en novembre 1742, le curé
requit d'abord un inventaire en forme des titres et papiers
de la communauté (8), ce qui fut accordé ; il prétendit
(1) S*agit-il du livre de Fénelon sur les Maximes des
Saints, condamné par le pape en 1699 ?
(2) Inventaire-sommaire des Arch. dêp^* des Vosges, DD.
38 (Registre contenant un ensemble de pièces de 169!;^ à 1706.)
(3) Après de nombreuses péripéties, dans le détail des-
quelles nous ne pouvons entrer, cet inventaire ne fut achevé
qu'en 1756, et accepté seulement le 14 juin 1758. Ont signé .'
Gouvenot (curé), Arthaud (doyen), Lanvers (receveur),
Bourgeois, Vernet, Cabasso, Dubois, Gaillard, Pierson,
i2
— 178 —
ensuite que ces documents ne devraient plus être laissés
à la disposition du seul receveur, mais qu'il convenait
de les enfermer dans un coffre à deux serrures, dont
lui, curé, aurait une des clefs. Cette marque de défiance,
contraire à la pratique ancienne, souleva une vive
opposition et dès ce moment les host^ités furent
engagées.
Entre temps, un jeune prêtre nommé Frichelet, étant
venu se fixer à Mirecourt, son lieu d'origine, requit du
receveur de la communauré son inscription au nombre
des Enfants-Prêtres. Or, la coutume voulait que le nouvel
entrant fît auparavant visite à chacun de ses futurs
collègues ; Frichelet s'étant dispensé de ce devoir, sur
les conseils, paraît-il, du curé Gouvenot, le receveur
lui refusa son immatriculation. Aussitôt le curé conduit
Frichelet à THôtel-de- Ville, se plaint auprès des officiers
de l'abus de pouvoirs dont son protégé est victime et
leur persuade de prendre fait et cause pour ses intérêts.
Il parvient à obtenir une requête dans laquelle, attendu
la négligence des Enfants-Prêtres à remplir leurs
devoirs, on demande, pour les y contraindre, la mise
sous séquestre de tous leurs biens. Il serait curieux de
savoir sur quels motifs était fondée cette prétention
exorbitante ; nous voyons seulement, en marge d'une
des pièces, la solution fort sage donnée par le chancelier
La Galaizière :
« Cette affaire est de nature à être réglée par
Henry, Frichelet, Legros et Verdun (Elnfans-prêtres). C*est
cet inventaire qui nous a été particulièrement utile pour
notre travail, et que nous avons fréquemment cité dans les
pages qui précèdent.
- 179 —
« l*Ordinaire entre le curé et les Enfaiis-prebstres,
€ sans que THôtel-de- Ville doive s'engager pour cela
« dans les frais d*un procès en justice réglée. Fait à
« Lunéville, ce S4 janvier 1758 (i). »
Une transaction intervint, aux termes de laquelle
Frichelet dut fournir communication de ses titres pour
être admis dans la communauté ; on ne nous dit pas
s'il fit enfin ses visites.
Les contestations ne tardèrent pas cependant à
renaître sous une autre forme. Les Enfants- Prêtres
accusaient Gouvenot de ne point annoncer en chaire les
fondations à acquitter chaque semaine, laissant entendre
qu'il omettait volontairement de dire les messes qui
étaient trop peu rétribuées. Le curé se défendit en allé-
guant que s'il avait fait quelque omission, c'était
involontairement, unj liste exacte et complète des
services dûs par l'Eglise n'ayant jamais été dressée. Les
Enfants-Prêtres se hâtèrent de composer celte liste et de
l'afficher à la sacristie dans des cadres ou tabulaires
qu'ils disposèrent à cet effet. Messire Gouvenot se
fâcha tout à fait : ne le laisserait-on maître nulle part ?
Obligé déjà de souffrir des auxiliaires à l'Eglise, serait-
il encore forcé de les subir jusque dans sa sacristie ?
Sans plus tarder, il fit arracher et détruire les tabulaires ;
en même temps, il ordonna d'enlever une console
sculptée que les membres du Conseil de ville avaient
fait mettre au-dessus du banc destiné au doyen des
Enfants-Prêtres, dans le choeur, à l'opposite de celui du
curé : il entendait avoir seul droit à cette marque
d'honneur. Cet acte d'autorité fit grand bruit dans la
(i) Archives ma»*», GG. n.
— 180 -
ville et Taffaire des tabulaires eut un retentissement
pareil à celle du Lutrin de la Sainte-Chapelle, immor-
talisé par Boileau.
Enfin M. Gouvenot éJev.i la prétention de se faire
suppléer par son vicaire dans tous les actes du minis-
tère sacré pour lesquels il devait requérir l'assistance
des Enfants-Prêtres, tandis que ceux-ci soutenaient que
le curé devait toujours officier en personne. Tous ces
griefs et d'autres secondaires furent portés à la fois,
d'abord devant lès juges de Mirecourt, puis en appel
devant la Cour Souveraine de Nancy. Les parties firent,
appuyer les conclusions prises en leur faveur par de
volumineux mémoires dans lesquels l'adversaire était
aussi peu ménagé que possible. Nous avons retrouvé la
Reqaelte demploy (1) libellée au nom des Enfants-
Prêtres ; c'est un beau et long morceau d'éloquence
juridique, dans lequel on discute l'un après l'autre les
cinq chefs de demandes produits par a Messire Gouve-
not A ; nous pouvons par ce moyen apprécier d'une
manière suffisante les prétentions réciproques.
Le curé commence par dénier aux Enfants-Prêtres la
personnalité juridique ; on lui répond facilement sur
cette question purement théorique, en argumentant du
vieux droit lorrain et de l'Edit de 1759. Ce point vidé,
on s'attaque à sa prétention d'être seul maître et chef
des Enfants-Prêtres : il n'est et ne peut être que primas
inter pares^ associé au même titre que ses collaborateurs
pour le service des fondations, devant par conséquent
ces services en personne, obligé comme les autres
prêtres de se soumettre aux règlements épiscopaux et ,
(l) Cette pièce porte la date du 13 mars 1765.
- 18i -
notamment au tarif des oblations de la paroisse. On
revient ensuite longuement sur tous les griefs accumulés
depuis plusieurs années : les préséances, TafFaire
Frichelet, les tabulaires, et le mémoire se termine par
des conclusions dont voici quelques passages :
« Ce considéré, Nosseigneurs, plaise à la Cour
« donner acte aux suppliants de la présente requête, et
« en conséquence mettre Tappellation de Messire
« Gouvenot au néant... Emendant, condamner Jean-
c Claude Mathon, sacristain, à rétablir les tabulaires...
a Ordonner Texécution de la transaction passée en 1705
€ avec M* Payen... Condamner M* Gouvenot à acquitter
« a son tour les fondations, si mieux n*aime renoncer
«aux rétributions correspondantes... »
La Cour souveraine Sù-elle justice en accordant aux
appelants leurs conclusions? Comme il arrive assez
souvent dans ces recherches, nous n'avons pu lire la
pièce essentielle, Tarrêt qui vint clore cette longue
procédure. Nous ne savons donc comment elle se
termina ; mais comme déjà au xviii* siècle la marche
des instances n'était pas fort rapide, nous pouvons
supposer que celle-ci se prolongea jusqu'à la mort de
Topiniâtre curé, qui arriva dans l'année 1767.
On trouvera sans doute que nous nous sommes attardé
trop longtemps au récit de pures chicanes, qui si elles
rappellent certains traits de mœurs de l'époque, ont
pour inconvénient de jeter quelque peu de ridicule sur
les hommes dont nous venons d'esquisser l'histoire.
Nous ne voudrions pias cependant qu'on les jugeât
uniquement sur ces misères. Dans les trois ou quatre
siècles d'existence de la communauté des Enfants-
Prêtres, les procès, quelqu'ait été leur nombre, ne furent
if
'»
en somme que des intermèdes qui ne doivent pas faire
oublier les longues années de services dévoués et de
piété charitable. De même qu*à côté du curé Gouvenot,
toujours prêt à la bataille, nous pouvons placer son
saint prédécesseur, M. de Germiny, qui consacra sa
fortune à la construction de Thôpital actuel de
Mirecourt (1), de même aux agitations regrettables de
quelques meneurs, nous pouvons opposer par exemple,
la mission acceptée et remplie par les Enfants -Prêtres
dans les dernières années de leur existence légale, et
les origines peu connues de Tœuvre des Apprentis
dans la petite ville lorraine.
(1) Voir, sur cet hôpital, M. Ch. Laprevote, op. cit., p.
205-207, et notre Notice historique, en préparation.
On trouvera ci-après, en Appendice, une liste aussi com-
plète que possible, des curés de Mirecourt.
L*abbé Chatrian, dont les manuscrits, conservés à la
bibliothèque du grand Séminaire de Nancy, sont une mine
si précieuse d*informations pour Thistoire ecclésiastique, se
montre fort dur pour les Enfants-Prêtres. Voici quelques-
unes des appréciations de cet irascible auteur : n En
novembre 1768, mort de M. de Noncourt, curé de Mirecourt
depuis dix*huit mois ; on prétend que le chagrin que lui ont
causé les mauvaises façons des Enfans-prêtres et le regret
d*avoir quitté Neufchâteau, Tout conduit au tombeau... En
1769, mort de M. François Arthaud... obligé de se retirer à
Mirecourt, il s'y est montré constamment le chef des ennemis
de son curé, grand plaideur et le plus zélé partisan de
Tanarchie et de Tindépendance.
a En 1771, Tabbé *Boulay, précepteurdes jeunes enfans du
comte de Fresnel,... se retire à Mirecourt où, en attendant
la Providence, il restera Enfant-prêtre et apprendra l'art
de persécuter M. le Curé.. . »
Ces passages noua ont été signalés par notre confrère
M. Tabbé E. Buisson.
- 183 -
Dans le testament de Bonne Thiriet, à la date du
8 mai 1760, se trouve le passage suivant :
a Je prie le plus âgé des prêtres nés, baptisés, icy
demeurant, de se charger de la somme de 2.500^, pour
les placer et en employer la rente à faire apprendre un
métier à des enfans nés icy, pauvres garçons et filles
alternativement et perpétuellement choisis à la pluralité
des voix des prêtres nés icy et y demeurant, auxquels
seul chaque année le susdit ancien rendra compte du
capital qu'il pourra placer seul avec les sûretés de
droit, et il aura chaque année un louis pour ses soins.
Et comme les sieurs curés sont chargés d'obligations,
mon intention est qu'il ne soit pas (sic) de cet établis-
sement, qui n'est pas une fondation dans la paroisse,
mais pour les anciens à perpétuité àeô prêtres nés,
baptisés, résidants icy, m'en rapportant à leur probité
pour ce sujet...- (1). »
Ainsi les Enfants-Prêtres se réunissent pour choisir
les apprentis et pour entendre les comptes de leur
ancien^ qui est chargé des détails de l'administration.
Cette organisation est simple, logique, et fonctionnera
sans difficulté. Qu'on remarque encore, en passant,
l'entière liberté dontprofitentà ce moment les testateurs.
Bonne Thiriet, fille d'un simple bourgeois, a Texcellente
idée de créer une œuvre éminemment utile : elle peut
choisir pour l'exécution de ses volontés telle commu-
nauté qu'elle estime la plus propre à entrer dans ses
vues ; elle ne risque point de voir son testament brisé
ou ses intentions méconnues, et aucune loi ne lui
impose un mandataire forcé dont elle pourrait ne pas
(1) Archives ma»*»» GG. 11.
-- 184 —
vouloir ; stimulant énergique dont il serait sage de ne
point se priver de nos jours.
Une seule modificatiou fut apportée aux clauses si
précises du testament de 1760. En 1773, les Enfants-
Prêtres imaginent que Texclusion du curé est chose
blessante et fâcheuse ; que par ses fonctions le curé de
la paroisse a une connaissance plus parfaite des besoins
de tous, et qu'il convient de l'admettre au choix des
apprentis, nonobstant la disposition contraire de lu
testatrice ; quelle différence avec le temps où les Enfants-
Prêtres repoussaient avec toute Ténergie que Ton sait
ringérence du curé Gouvenot : on était au mieux avec
son successeur. La Cour souveraine voulut bien homo-
loguer la requête à elle présentée ; ce lut la seule
circonstance dans laquelle la nouvelle fondation motiva
une décision judiciaire (1).
Les comptes de V ancien des Enfants-Prêtres men-
tionnent, avec plus ou moins de détails, les marchés
d'apprentissage passés pour le placement des pauvres
choisis par la communauté. En 1782, traité avec
(l) Du 4 mars 1773. Requête au nom de Claude-Dominique
Lauvers, François-Gabriel de Vernet, Joseph Gabasso, Louis-
Léopold Frichelet, Jean-Baptiste CoUin, Georges Boulet,
tous Enfans- prêtres de la ville de Mircourt (François Fier-
son, l'un desdits Ënfans -prêtres, ayant refusé de se trouver
en la convocation)... Supplient la Cour qu'il lui plaise
admettre dans le nombre des prêtres le sieur Curé, pour les
raisons dessus dites. ... Et pour, de la part du s<^ Lauvers,
donner des marques de son désintéressement, mettre dans
la requête qu'il se déporte du louis a lui légué (comme plus
ancien) pendant sa vie durante, pour être ledit louis réuni à
la rente du capital de 2.500i . — L'homologation de la Cour
est du 18 mars 1773.
— 185 —
Laurent, charpentier j un autre en 1784, moyennant
2 louis et demi : un autre encore, pour trois ans, en
1786, avec Charles Pierrefitle, tailleur d'habits,
moyennant 200^ pour toute la durée de l'apprentissage.
A Dominique Lanvers succéda, comme ancien, en
1789, le sieur Elophe, dont les comptes sont plus
explicites. Ainsi, pour cette année 1789 :
« Jour pris avec M. le procureur du roi pour
rassemblée, le 18 mai, laquelle fut annoncée au prône
dimanche 17. Personne ne s'y trouva que M. le curé
et moi. Remise au jour de TAscension, entre nones et
vespres. Furent présens MM. le curé, Elophe, Mougenot,
Salle, Le Clerc. Remise au lundi 25, annoncée de
nouveau au prône. Enfin^ lundi 25, se trouvant à
l'assemblée MM. le curé, Mougenot, Salle et moi, nous
avons choisi cinq garçons pauvres. Le sort a favorisé
le nommé J.-B. Belval dit Beaufrène, âgé d'environ
16 ans, lequel a choisi le métier de menuisier. En
conséquence, marché fait le 26 avec J^ Philippe, maître
menuisier, pour trois années consécutives, pendant
lesquelles le jeune homme sera nourri, logé, chauffé,
moyennant six louis, dont Philippe a touché la moitié,
aujourd'hui 26 mai 1789. »
Mais Belval se trouve d'un tempérament trop faible
pour le métier de menuisier ; on résilie le marché
passé avec Philippe, et le 3 janvier 1791, Tapprenti est
confié à François Lagage dit Namur, cordonnier, qui se
charge de lui apprendre le métier dans six mois,
moyennant 7* 15* pour nourriture par chaque mois.
Voici maintenant le choix et le placement d'une
apprentie :
« Le 10 mai 1790. Assemblée oii se trouvèrent
— 186 ~
MM. le curé, Mougenot, Le Clerc, Gablan, Lagrange
et moi. Aucun des gens du roi ne 8*y trouva, quoique
M. Delpierre, avocat du roi, en Tabsence du procureur,
ait pris jour afin qu'on annonçât le tirage au prône,
comme fut fait lo 5* dimanche après Pâques. Sept filles
se présentèrent. Le bon billet échut à Jeanne-Glolilde
Huel, âgée de 13 ans, flUe des défunts Henri Huel et
Jeanne-Ursule Rémi, laquelle a choisi le métier de
tailleuse d*habits. Traité fut fait avec sa sœur, Marie-
Elisabeth Huel, fille maîtresse tailleuse à Charmes, pour
trois années d'apprentissage, moyennant six louis d*or
une fois paies, dont elle a reçu la moitié en signant le
traité. »
On voit parces exemples qu'une nouvelle modification
s'était introduite depuis la mort de Lanvers : on
admettait à l'assemblée « les gens du roi, » sans doute
dans le but de contrôler la sincérité des opérations.
Mous ne savons en vertu de quelle décision cette inno-
vation fut acceptée.
La dernière mention du dossier est la suivante :
c Du 20 germinal an IL Inventaire fait par Jean-
François Demay, officier municipal de la commune de
Mirecourt, des titres et papiers dépendant de la
fondation de feue Bonne Thiriet... lesquels ont été
déposés par le citoyen Claude-François Elophe, ancien
des ci-devant Enfans-prêtres, et directeur de ladite
fondation depuis 1789 Jusqu'en 1793... »
C'était la fin. La dotation de Bonne Thiriet fut
naturellement confisquée par la Nation. Aux 2.500* du
testament de 1760 était venu se joindre un supplément
— 187 —
de 200\ provenant de la demoiselle Alba (1). Sans cette
suppression inopinée, Tinstitution se fût sans nul doute
fortifiée peu à peu, et Jes donations ne lui eussent pas
manqué, car elle répondait à un besoin réel.
Depuis, l'œuvre des Apprentis a été momentanément
reprise à Mirecourt, et si les circonstances n'en ont
pas permis le maintien, cependant les résultats obtenus
en 1875 n'étaient pas moins précieux qu'en 1780 et
en 1789. Lorsqu'un jour, que nous souhaitons prochain,
cette utile institution sera enfin rétablie, les nouveaux
fondateurs pourront se rappeler qu'il y a plus d'un
siècle une fille de Mirecourt leur a donné l'exemple, et
sans doute ils aimeront aussi à se rattacher à la com-
munauté des Enfants-Prêtres, dont nous avons cru in-
téressant de renouveler le souvenir.
(1) Du 15 sept. 1784. Testament de Mlle Alba, sœur de
de M« Alba, avocat à la Cour, léguant 200' pour augmenter
la fondation de Mlle Thiriet, en faveur des pauvres
enfants.
APPENDICES
I.
Liste des curés de Mirecourt (l).
Aubriel (Jehan). — Témoin de la donation faile le
25 juin 1423, par Richard le Favart à l'hôpital de
Mirecourt.
TramoDzanl (Villaume). — De Rosières-aux-Salines,
curé de a Téglise parochiale de Mirecourt » en 1461
(Testament de Hawy, femme de Richard le Favart,
fondateur de rhôpital).
Tallart (Didier). — Aumônier du duc Antoine, audi-
teur en la Chambre des Comptes, etc. Mort en 1518.
C'est à lui que l'on doit la première fondation connue en
faveur des Enfants- prêtres. Il est désigné comme curé
de Mirecourt dans l'Inventaire de 1757 mentionné ci-
dessus.
• Paris (Arnoulf). — Cité comme curé de Mirecourt
dans le testament de Jacques Pasticier, du 20 août 1598.
A signé l'obituaire rédigé en 1611.
(1) Nous avoD9 puisé les principaux éléments de cette liste
dans des travaux de feus MM. Ch. Laprevote et ^e président
Bastien» de Mirecourt ; nous les avons complétés par nos
recherches personnelles, notamment dans les archives de la
ville, dans celles de Thôpital, et dans les manuscrits de
Tabbé Chatrian {Pouillé du diocèse de Tout, 1780 ; Notice
du diocèse de Nancy, 1805, etc).
*.
— 189 —
Paticier (Claude). — Bachelier en théologie ; a
occupé la cure de 1613 à 1635.
Hucher (Nicolas). — Curé de 1636 à 1638.
De la Hotte St-Jean (Barthélémy). - Curé de
1638 à 1642.
Martin (Didier). — Ancien curé de Girecourl-les-
Viéville, prolonotaire apostolique, doyen de Jorxey.
Curé de Mirecourt de 1643 à 1667.
De Garminy ou Germiny (Nicolas-Fi*ançois). —
Docteur en théologie. Démissionnaire en 1704 ; mort
le 29 mars 1707, à l'âge de 82 ans. Inhumé au pied et en
face du maîlre-aulel. Second fondateur de Thôpilal
(selon Chatrian, il serait sorti de la cure, par permuta-
tion, en 1700 ; cependant, des lettres d'amortissement
du 2 mars 1703 lui donnent encore la qualité de curé
de Mirecourt (1).
Grandoien (Jean-Dominique) (2). — Natif des Trois-
Vallois. Docteur en théologie. Aurait occupé en la cure
1700 par permutation du précédent (Chatrian).
Payen (Louis-François). — Docteur en théologie.
Curé de 1704 à 1710. Mort le 2 août 1710, âgé de 56 ani5.
Inhumé au chœur.
Didelot (Joseph). — Natif de Crévic. Docteur en
(1) D'après son acte de décès, il a gouverné la paroisse
Tespace de 37 ou b8 ans : eu supposacl qu*ii ait été nommé
en 1667, Tannée même de la mort de son prédécesseur,
Tannée de sa démission est bien 1704.
(2) Son existence ne nous est signalée que par Chatrian.
Mais on trouve, à la date du 17 novembre 1703, une quit-
tance signée Payen, curé. Nous avons des raisons de douter
que Grandoïen ait jamais été curé de Mirecourt.
■ti— •; . <
— 190 —
théologie. Ci-devaût curé deCeinlrey. Curé deMirecourt
au concours du 10 septembre 1710. Mort subitement
en chaire le 22 novembre 1722, âgé de 60 ans. Inhumé
au chœur, côté de TËvangile.
Gros (François). — Désigné comme administrateur
de la cure en 1722-23.
Hichelet. — Natif de Nancy. Docteur en théologie.
Mentionné à cette place dans les pièces du procès de
1765. D'après M. Laprevote, il avait été curé d'Harau-
court, et il a occupé la cure de Mirecourt de 1723 à
1724.
Foissey (Joseph-Etienne- Sébastien). — Natif de
Mirecourt. Docteur en Sorbonne, aumônier de S. A. R.
le duc de Lorraine. Curé de 1724 à 1742. Mort le
7 août 1742, âgé de 52 ans. Inhumé au chœur, côté de
TEvangile (du côté de l'Epître, suivant M. Laprevote).
Gouvenot (Jean-François). — Natif de Nancy. Prêtre
de 1736, ci-devant vicaire à Saint-Amand de Toul.
Curé au concours de 1742. Promoteur du doyenné de
Jorxey. Mort le 27 juillet 1767, âgé de 55 ans, inhumé
au chœur, côté de TEpître.
De Noncourt. — Natif de Neufchâteau. Docteur en
théologie de la faculté de Pont-à-Mousson. Vicaire à
Saint-Laurent de Pont-à-Mousson, puis curé de Neuf-
château. Curé de Mirecourt au concours de 1767. Mort
en novembre 1768; âgé de 56 ans.
Chevresson (Joseph-Nicolas). — Natif d'Illoiid-en-
Barrois. Prêtre de septembre 1756, curé au concours
du 18 janvier 1769. Mort à Nancy, où il s'était retiré, le
31 (29 d'après Chatrian) décembre 1791, âgé de 60 ans.
— 191 —
— • Ghevres6ori avait été chassé d^ Mirecourt pap les
révolutionnaires, vers le mois d'octobre 1791. (Voir à
ce sujet un [>amphlet intitulé : La tolérance consUiu-
tionnelîe dans les provinces, ou relation de ce qui s'est
passé à Mirecourt le 12 octobre 1791... In-8, 47 p.,
Paris, 1791).
Frichelet (Louis-Léopold). — Né à Mirecourt en
1732, ci-devant curé légitime de Ravenel et Enfant-
prêtre de Mirecourt, est établi en avril 1791 adminis-
trateur de cette paroisse par Tévêque constitutionnel
Maudru, en attendant les élections populaires (Ms. Gha-
trian. Plan du croquis d'une histoire du clergé du
diocèse de Nancy pendant la Révolution). Il passa
ensuite à Poussay .
Poirot (Remy). — Curé constitutionnel de Mirecourt,
depuis 1791 jusqu*en Tan IL La brochure sur la tolé"
rance constitutionnelle signale déjà en 1791 : f Poirot
intrus à la cure, Mougenot à Thôpital. » Bien que
désigné de la sorte par les réactionnaires du temps,
Poirot fut envoyé au tribunal révolutionnaire de Paris,
avec cinq autres citoyens de Mirecourt, comme suspects
de fédéralisme et de modérantisme, par arrêté du
représentant Faure, du 5 frimaire an II, à la suite de
la Journée des Cloches, qui causa dans la ville une
vive émotion. Par un hasard fort rare à cet!e époque,
les accusés furent acquittés le 25 nivôse — 14 janvier
1794 (V. H. Wallon, Hist, du trib. révolutionnaire de
Paris, II, 534;.
Démange. — Curé constitutionnel. — Nous n'avons
sur son compte aucun autre renseignement.
Perrin (Joseph-Pierre). ^ Né à Laneuveville-sous-
■ :?■■"•■
- 192 —
Ghâtenois, le 18 mars 1751. Ëx-lazariste. Déporté
pendant la Révolution. Guréà Ghâtenois en janvier 1803,
à Mirecourt en mai suivant (Cf. Chatrian, Notice
ecclésiastique du diocèse de Nancy, 1805). Mort le
1" juin 1816. A été transporté de l'ancien cimetière
dans le nouveau.
Collin-Hathieu (Nicolas -Antoine). — Né à Remire-
mont. Curé de Mirecourt de 1816 à 1821. Mort le
2 avril 1821, âgé de 60 ans. Inhumé à gauche de
la porte du vieux cimetière.
Parisot (Pierre-Michel). — Né à Laneuveville-les-
Nancy. Chanoine honoraire de Saint-Dié. Curé de
Mirecourt de 1821 à 1868. Mort le 22 juin 1868, âgé do
77 ans. Inhumé au pied de la croix du nouveau
cimetière.
Gravier (Nicolas- Auguste). —Chanoine honoraire de
Saint-Dié. Installé le 1" mai 1868.
II.
Observations au sujet d'un acte du XIV*" siècle concernant
une fondation dans Téglise de Mirecourt.
Cet acte est daté du 23 septembre 1385 ; il est rédigé
en latin, et il ne nous en reste qu'une copie du
2i mai 1762(1). L'affaire qui s'y trouva relatée est fort
simple : ce sont les exécuteurs testamentaires d'un
nommé Albert, de Mirecourt, qui, pour remplir ses
dernières volontés, réalisent une fondation dans
l'église paroissiale de celte ville. Us dotent d'une
maison et de nombreux revenus l'autel déjà construit
aux frais du défunt en l'honneur de saint Didier et
sainte Catherine ; ces biens serviront à l'entretien d'un
chapelain qui doit être désigné par la famille, et
autant que possible parmi les descendants du fondateur;
si la présentation n'est pas faite dans les quarante jours
de la vacante, le droit de désignation appartient au
curé de la paroisse.
Toutes ces dispositions sont entièrement confoVmes
aux habitudes du temps et nous donnent un exemple
de ces érections de chapelles, si nombreuses au moyen-
âge, qui ont assuré largement dans nos églises le
service divin, et créé successivement une partie du
domaine ecclésiastique confisqué par la Révolution.
Cet acte, émanant de simples particuliers, est sans
doute, au point de vue civil, une donation avec charges :
(1) Arch. ma»« G. G. 18.
13
— 194 —
le chapelain nommé profite des émoluments de ia
fondation, et est tenu en éqhange de dire, trois fois par
semaine, à Tautel Saint-Didier et Sain te- Catherine, une
messe pour le repos de Tâme du défunt ; — mais il y a
là bien plus qu'un simple contrat de droit civil, la
constitution d'une de ces personnes morales si
fréquentes dans la société de l'ancien régime, et dont
nous avons trouvé déjà un exemple dans la communauté
des Enfants-Prêtres. Ici, le bénéficiaire n'est pas tel
chapelain nommé, c'est la chapelle, être perpétuel,
impérissable (au moins dans la volonté du donateur),
qui devient propriétaire, qui jouit, qui administre,
conformément aux intentions des constituants. Cette
liberté laissée à l'initiative individuelle par le droit
public du moyen-âge, liberté si complète que le pouvoir
central ne la réglementa qu'assez tard, — si féconde
que toutes les formes de la charité et de la dévotion de
nos ancêtres purent s'en accommoder, contraste pénible-
ment avec le formalisme exagéré de la législation
moderne qui arrête toutes les bonnes volontés et entrave
la bienfaisance.
Mais nous avons déjà rencontré ailleurs ces considé-
rations, et c'est pour d'autres motifs que nous voulons
attirer Tattention sur l'acte de 1385. Il peut nous servir
à étudier certaines particularités curieuses, à notre
avis, concernant les noms de lieux, les noms de
personnes, la nature des rentes et redevances usuelles
en Lorraine, et enfin la composition de la fortune d'un
bourgeois de cette époque : petites questions sans
doute, mais dont la solution n'est pas inutile lorsqu^on
veut se rendre compte de ce qu'était alors notre pays.
Pour déterminer les noms de lieux et les noms de
I
i
— 195 —
personnes, une difficulté assez grave résulte de ce que
notre texte est écrit en latin ; le rédacteur a dû sMngé-
nier pour revêtir d'une désinence classique des termes
assez rebelles à cette transformation ; il les a souvent
défigurés au point de les rendre méconnaissables. Ce
défaut est beaucoup moins sensible pour les rentes et
redevances.
Le premier nom de lieu est celui de Mirecourt, sous
deux formes : MirecurlaeiMyrcuria. Il est à remarquer
que l'omission de Ve dans la seconde syllabe est très
fréquente et s'est perpétuée communément jusqu'à la
fin du xviii* siècle. Notre titre qualifie Mirecourt de
villSj terme qui peut sembler impropre, si l'on se réfère
à rétymologie ancienne ; en effet, villa signifie le domaine
rural, et par extension le village ; or, au xiv' siècle,
Mirecourt ne comptait plus sans doute qu'une minorité
de cultivateurs; son finage a toujours été assez étroit,
et en 1303 elle avait déjà son enceinte de murailles (1).
Le terme de v///a, employé dans ces circonstances,
montre qu'il avait changé sa signification ancienne et
qu'on commençait à l'appliquer aux villes, dans le sens
moderne, fortifiées ou non. Notons encore que la
chapelle est dite exister dans l'église paroissiale érigée
en l'honneur de saint Nicolas ; ceci est en désaccord
avec Tacte de fondation de cette église qui lui donne
pour patronne unique la Vierge Marie, aussi bien
(1) « Unam areaiu quam habebaat extra muroa dictée
villse. j) 1303. — Fundatio ecclesise Mircuriensis. V. Ch.
Laprevote» Notice sur Mirecourt^ p. 172. — Au mot villa
correspond villicus, le chef, le représentant du seigneur,
le maire en un mot, et non le fermier, comme traduit à
tort le copiste de la charte de 1234, trancrite par M. Lapre-
vote, op, cit. p. 161-167.
avec un autre titre, celui-ci du xvii* siècle, dans
uel la même église a trois patrons : Notre-Dame,
nt Nicolas et saint Didier. Il y eut donc, à plusieurs
irises, des changements à cet égard ; aujourd'hui
me, saint Nicolas, l'unique patron de 1385, a été
aossédé de l'autel qui lui avait été dédié, depuis
■ntôl six siècles, et relégué dans une niche creusée à
3 certaine hauteur, dans le mur septentrional de
iiflce (1).
Parmi les noms de lieux éniimérés dans notre titre,
uns sont orthographiés tels que nous les lisons de
sgours, les autres ont reçu une désinence latine.
ns la première catégori9 nous rangerons Domèvre
PUS Monlforl), Rozerotte, Viviers (lès-OITroicourt),
aceile {localité détruite, près de Gripport). Dajis la
;oode, nous reconnaissons facilement dans Oftroearia,
froicourl ; dans Manillus propc Bazolhs, le Ménil
3S Bazoitles qui fait maintenant partie de la commune
Rozerotle ; enfin la forme de BazoUis désigne
rativemeot le village île Gazoilles près Mirecourt.
)ux noms seuls peuvent prêter au doute : PasueJz
us semble désigner Puzieux (à 5 kilomètres de
recourt); quant à Poiirli, c'est la forme génitive de
jurlus ou Porliis, sans doute Poi'liissusvis, Poussay,
lèbre par son abbaye. Sauf Viacelle, située dans la
[1] Cetta transtation, fài'hnuse au point de vue des sonve-
rs que rappelait l'ancieû aulol du patron de la Lorraine,
eu pour coD-équence la disparition de deux atatues do
intCrépin et aaiat Crépinien, qui ea trouvaient à la place
cupée par ta douvdIIg olche. Ces deux statues étaient
38 doute d'exécution médiocre; mais elles rappelaient
sistence de la corporation des cordonnierH, et étaient
ut-être contemporaines de la Charte qui leur fut octroyée
1595 (Ch. Laprevote, . op. cit., p. 191).
— 197 —
vallée de la Moselle, tous ces lieux sont autour et très
voisins de Mirecourt.
Les noms de personnes sont bien plus nombreux :
les débiteurs de rentes sont pour la plupart des habi*
tants de Mirecourt, et c'est seulement sans doute pour
les forains qu'on a soin de spécifier le domicile. Dans
cette énumération de plus de quarante personnes, nous
pouvons apercevoir les procédés par lesquels se sont
formés les noms patronymiques, en Lorraine comme
dans toute la France. Originairement, il n'y a qu'un
nom de baptême, qui suffit à désigner un individu, et,
pour éviter les confusions, on le fait suivre parfois du
nom du père ou d'un autre ascendant : Reverus, ûlius
domini Gagnonis ; Vautrinas et Catherhm^ lihevi
Thureli; Thoveninas ûlius Joannis ; PhiUpinus gêner
Tuton] ThoveneUus ûlius Sibillee. Plus fréquemment,
le nom unique est suivi d'un surnom, qui va se perpé-
tuer après la mort de celui qu'il a désigné le premier,
et qui deviendra le nom de famille. Ce surnom est tiré
quelquefois d'un caractère physique ou du métier
exercé : Joannes carpent'ariuSy Jean le charpentier,
— Thimetes faber, Thimès le forgeron ; Joannes magnus
carpeniariuSf le grand Jean le charpentier ; — Belinus
Vannerius, Bélin le vannier ; — Albertus quadrigarius^
Albert le charretier, ou plutôt le charron. Ailleurs, le
surnom ne présente pas de sens susceptible d'une tra-
duction: Albertus dictus Vassaul ; — Jannoninus dictus
Granzires; Andréas dictus Enseriery ; Joannus dictus
Ghallemaine {\) ; — Girardus dictus Chipons (2); —
(1) Ghallemaine, syn. de Challemastre ? terme d'injure,
emploi vil et uas. (Dict' de Godefroy, hoc v*»).
(2) Chipons, syn. de chipier, ouvrier qui se sert de Talène,
sellier; ou de chipoe, chipaue, grimacesi, mines, façons (Ib.)
Thomasol dictas Courant ,- Gerardinus dictas Bobelins;
is diclus Tavillieri, alias TravUliers; — Thuretes
Graterel; Vailleminus diclus Ata!eims{i). Daos
■oisième série, dous rangerons les noms pour
Is la transfonnation est opérée, el Ik surnom
1 UD vrai nom de famille ; la forme est identique
usitée de nos jours : Joannes Henriet ; — Joan-
ubrieli ; — Girardus Siremairc ; — Joannes
anll ; — Joannes Ferions. D'autres enfin sont
tels qu'autrefois et n'ont encore subi aucun
ïmerit : Franqaignonns, Tuton, Bogenl, A voisel,
fus, ainsi encore tous les noms de femmes : Poin-
xor, Janola, Isabellis, Meta uxor.
'Av" siècl'3 est donc, à cet égard, une période de
mnation intéressante à saisir ; on voit facilement
rmes de la progression : Jean ; Jean, fils de
l ; Jean le charpentier ou Jean dit Grandsire ; —
n Jean Aubry ou Jean FourcauU. Cent ans plus
'évolution sera terminée, et les désignations
lies partout définitives, au moins dans notre pays.
>ons maintenant aux dispositions essentielles de
icte de 1385: les biens, rentes et redevances
, l'objet de la fondation. Et d'abord, que savons-
le la situation sociale du donateur ? à peu près
sinon que les exécuteurs testamentaires lui
tnt la qualification de dominas ; ce n'est pas sans
à la légère ; tandis que la plupart des débiteurs
ésignés par leurs noms purement et simplement,
tt d'entre eux reçoit aussi le même qualificatif :
ïs Cugiion. Voilà donc parmi cinquante per-
; au moins, habitants de la ville ou de la campa-
îatenas, ayn. de Atalentable ? agréable, plaisaiit. (Ib.)
— 199 —
gne, deux seulement qui semblent mis. à part et au-
dessus des autres. Nous ne pensons pas cependant
qu'Albert et Gugnon soient des seigneurs^ dans le
sens attaché à ce mot pendant les siècles de féodalité ;
ce ne sont sans doute que des bourgeois, plus riches
que les autres ; il peut fort bien se faire qu'ils soient
prêtres, ou tout au moins clercs : le mot dominus
devrait alors se traduire par messircy désignation ordi-
naire des membres du clergé à cette époque et dans les
temps postérieurs.
Ainsi Messire Albert, dit Vassal, prêtre habitant
Mirecourt, consacre une partie de sa fortune à doter la
chapelle de St-Didier et Ste-Catherine. Nous n'avons
pas rinventaire complet de sa succession, mais par
rénumération contenue au titre^ nous pouvons nous
faire une idée de la composition de cette fortune bour-
geoise. C'est d'abord une maison à Mirecourt, avec
jardin et dépendances ; point de gagnages ou autres
héritages ruraux : le testateur en avait sans doute dis-
posé en faveur de ses héritiers naturels ; en revanche,
un grand nombre de rentes en argent et de redevances
en nature, qui constituent la partie mobilière, et qui
nous donneront l'occasion d'observations intéressantes.
Les redevances consistent en poules et chapons, puis
en blé (frumentum), chènevis (canabus ou canabum),
et oignons (cepa ou cœpum). Les mesures de capacité
sont le resal (environ 120 l.), la quarte (moitié du resal
environ), l'imal (8« du resal), et enfin le vaxel, qui fut
d'assez bonne heure réservé pour le sel, mais que
nous voyons appliqué ici au blé et au chènevis (moitié
do la quarte, environ).
— 200 -
Les rentes sont principalement évaluées en sous (i)
(solidi, solidi denariorum) ; on compte aussi par
deniers (denarii fortes) (2), par gros tournois (3) et
enfin par petits florins (4). Ije sou et le denier ordinaire
sont des monnaies de compte ; le denier d'or, le florin
d*or et le gros d'argent sont des monnaies réelles. Cha-
cune de ces rentes est assez faible ; aucune d'elles ne
dépasse, en valeur intrinsèque, 20 fr. de notre monnaie;
beaucoup sont très minimes, et descendent jusqu'à 1
ou 2 francs. Néanmoins, vu leur nombre, elles finissent
par former un total assez respectable pour l'époque, et
si on les joint aux redevances, on peut croire que le
revenu annuel du chapelain, s^^ans compter le logement,
approchait de 200 fr. de notre monnaie (5), revenu à
peine suffisant, si on le compare aux 300 fr. barrois
qui, au xvu^ siècle, formaient la dotation d'une autre
(1) Le sou est le 20* de la livre et vaut à cette époque
environ fr. 50 c.
(2) Le denîer est le 12* du sou ; comme celui-ci, c*est une
monnaie de compte. Le denier foH serait-il le denier d*or à
Tagnel frappé en France au xiii' siècle et valant environ
14 fr. ? Ce serait une somme considérable, à côté des autres
redevances beaucoup plus faibles.
(3) Le gros, monnaie d*argent, valait alors environ f. 70.
C'est le 12* de la livre tournois.
(4) Le florin vaut à cette époque environ 10 fr. ; c'est le
florin de Florence ou du Rhin, appelé petit florin, pour le
distinguer d'autres, valant plus de 16 fr.
(5) Pour les monnaies et mesures, voir M. de Riocour,
Monnaies Lorraines^ dans les Mémoires de la Soc. d'Arch.
lor.. 1883 et 1884.
Pour les estimations de denrées, voir notre travail sur
VAisan(ie relative du paysan lorrain^ dans les Mémoires de
r Académie de Stanislas, 1888«
- 201 -
chapelle de la même église, celle de N.-D. de Pitié et
de St- Antoine (1).
Ainsi, au xiv* s iècle, au lieu d'avoir comme de nos
jours de la rente sur l'Etat, des obligations hypothé-
caires ou de simples billets sur des particuliers, le
bourgeois d'une petite ville lorraine composait son
actif mobilier de rentes perpétuelles dues par d'autres
bourgeois ou par des paysans. Mais ces rentes ou rede-
vances, quelles en étaient les garanties ? C'est ce qu'il
serait important de connaître, et c'est ce que notre
titre ne dit pas, car il se borne à l'énumération des
revenus et aux noms des débiteurs. Alors pourtant,
comme de nos jours, à côté de la dette personnelle on
connaissait la garantie immobilière ; la seule différence
consistait dans la perpétuité de la rente, l'échéance du
remboursement n'étant point habituellement prévue
entre les parties.
Nous pensons que la simple créance consistant, uni-
quement dans la reconnaissance du débiteur, devait être
alors assez rare. Presque toujours les actes font men-
tion d'immeubles qui servaient de garantie pour l'exé-
cution des engagements stipulés aux contrats, et cette
garantie, bien que participant de la nature de nos
hypothèques modernes, en était cependant différente.
Au lieu d'une relation personnelle, et de droits direc-
(1) V. suprà, p. ITfO.
Ces 300 fr. barrois représentaient, vers 1607, environ 540
fr. de notre monnaie. Mais la fondation primitive d'Albert
Vassal a dû s'accroître postérieurement par des legs succes-
sifs. Quant au loyer de la maison et du jardin, qui doit
s'ajouter aux rentes et redevances, les éléments d'estimation
nous font défaut.
— 202 —
tement fondés sur rengagement d'une personne, ou
créait une charge réelle, de telle sdrte qu'un immeuble
déterminé, non seulement se trouvait affecté au paie-
ment, mais bien plus devenait le véritable et perpétuel
débiteur, en quelques mains qu'il fût ultérieurement
transféré. C'est ce qu'expriment ces termes anciens de
soudées^ danrées, florénées... de terre. C'est-à-dire
tant de sous, de deniers, de florins, dus annuellement
et perpétuellement par tel héritage, qui se transmettait
ensuite grevé de cette charge. Plus tard, on spécifie
très fréquemment dans les actes que telle rente est
assise sur tant de jours de terre, telle redevance sur
tant d'omées de vigne, etc. Sans pouvoir affirmer que,
dans notre titre de 1385, il n'existait aucune dette pure-
ment personnelle, nous croyons que les rentes dues au
chapelain de Mirecourt étaient des cens, suivant le
terme vulgaire employé pour indiquer la garantie dont
il s'agit. Avec plus de vérité (1), nous dirons qu'au
XIV* siècle, à côté de quelques rentes constituées,
c'étaient surtout des rentes foncières qui se trouvaient
dans le patrimoine des bourgeois et composaient à cette
époque la fortune mobilière.
Cette étude de l'acte de fondation de la chapelle
St-Didier semblera peut-être bien longue, puisqu'elle
ne soulève aucune question nouvelle ; notre excuse
sera que de semblables monographies, fréquemment
(1) Le cens, dans son acception étroite, suppose toujours
la relation entre un seigneur et un détenteur d'immeubles ;
la rente foncière existe quelle que soit la qualité dos con-
tractants. V. à ce sujet Riston, Des différentes formes de
la propriété en Lorraine (Paris, 1887), p. 199 et suiv.
^ 203 —
répétées, sont le meilleur moyen de pénétrer et de
comprendre sous ses difiérents aspects, la vie civile de
nos pères, si rarement envisagée à ce point de vue
éminement instructif et trop longtemps dédaigné.
Erratum. — Dans la liste des curés de Mirecourt,
p. 191, supprimer Frichelet (Louis-Léopold), mentionné
à tort comme ayant été nommé à Mirecourt par Tévêque
constitutionnel Maudru. C'est pour Charmes que cette
nomination a été réellement faite. En conséquence,
Poirot dut succéder immédiatement à Ghevresson, en
octobre 1791.
NOTE SUR J.A FAMILLE
:hrétien de chastenoy
M. Raymond de SOUHESMES
Les travaux généalogiques, n'oiTront pas un intérèl
énôral, sont d'une lecture assez dilHctle, mais la tâche
st ingrate surtout quand on se trouve en présence
'erreurs et de confusions tellement nombreuses qu'elles
ont peut-être voulues. Aussi, n'aurais-je pas songé à
ublier cette note si le rôle joué par Chrétien de
Ihastenoy, à l'époque la plus glorieuse de notre his-
)ire nationale, ne donnait de l'intérêt à tout ce qui le
oncerne.
Le tome V des Bulleliiis dû in Société d'archéologie
jrraine contient une notice d'Henri Lepage sur les
ecrélaires de René U, Jean Lud et Chrétien de Ghas-
3noy. Notre savant et regretté confrère a emprunté au
lobiliaire de Dom Pelletier les renseignements généa-
— 205 —
logiques qu'il donne sur la famille du second, or il
semble résulter des procès-verbaux rédigés par Didier
Richier dit Clermont, dans sa Recherche de 1577, que
Dom Pelletier, trompé par une triple similitude de nom,
de prénom et de profession, a confondu non seulement
des personnages différents mais encore des familles
distinctes et « sans consanguinité aucune », suivant les
termes mêmeb de la déclaration reçue par le poursui-
vant d'armes.
Voici, d'après Dom Pelletier complété par Henri
Lepage, la généalogie de Chrétien de Chastenoy :
I. — Warry Simonin de Chastenoy, secrétaire de
René 1*', mort le 31 juillet 1459, laissant pour fils a selon
toutes les probabilités » :
IL — Chrétien Simonin, natif de Chastenoy (1) (ou
Chrétien de Chastenoy). Nommé secrétaire de René II
et tabellion des ville et prévôté lîe Nancy, le 24 février
1473 (2) ; envoyé en Suisse, en 1476 (3) ; il assiste, en
1477, à la bataille de Nancy (4). Le 15 janvier 1482 (5),
et non le 5 comme le dit Henri Lepage, il est nommé
contrôleur des haut-conduit (6) et passage de Nancy.
(1) Chastenoy ou Châtenois, aujourd'hui chef-lieu de
canton de rarrondissement de Neufcbâteau (Vosges).
(2) Arch. de Meurthe-et-Moselle, Pat. de 1473-78, f«« 76
v° et 77. — H. Lepage renvoie par erreur au f° 8.
(3) Ibid., Rec. gen , 1476-77.
(4) H. Lepage. ^ Notice sur Jean Lud et Chrétien
{BulL de la Soc, d'Arch, /orr., année 1835) p. 238.
(5) Arch. de Meurthe-et-Moselle, Pat. de 1478-86,
fo 264.
(6) Le haut-conduit était un droit de péage sur les den-
rées et marchandises traversant la Lorraine. — (Cs, Guyot,
Dict, de Jurisprudence, VIII, p. 432.)
— 206 —
Le 20 février 1488 (1), il est anobli par René II, et
reçoit pour armes D'or au favJer de sable ; enfin, il
est nommé auditeur en la chambre des comptes, le
12 février 1496 (2), et non en 1508 comme le dit Dom
Pelletier. Chrétien de Chastenoy meurt en 1510, ayant
épousé Âuleix Duban (3) dont trois fils et une fille :
1** Thomas, qui suit.
2** Jean-Chrétien, qualifié d'huissier au conseil, le
28 janvier 1528 (4) ; nommé secrétaire du duc Antoine,
le 22 janvier 1531 (5) ; il meurt, en 1556, ayant
épousé Claudon le Briseur, dont trois fils et une fille :
a. — François, b. — Georges, c. — Alexandre, d. —
Antoinette.
3** Beatrix, mariée à Claude de Vandœuvre, prévôt
de Nancy.
4^ Jacques, nommé secrétaire et tabellion du bailliage
de Nancy, le 17 janvier 1507, et confirmé en cette qua-
lité par le duc Antoine, le 24 février 1508 (6).
III. — Thomas, tabellion juré du bailliage de Nancy^
le 1®' mars 1504 (7), puis contrôleur du passage de
(1) Arch. de Meurthe-et-Moselle, Pat. de 1486^9, f» 225.
— Aucune incertitude ne peut régner sur la date des lettres
d*anoblissement de Chrétien de Chastenoy, puisqu'on en
possède le texte. Dom Pelletier (p. 121) a bien donné la
date du 20 février 1488, et c*est par erreur que le Complet
ment au Nobiliaire indique celle du 20 février 1489
(p. 258) ou même de 1490 (p. 349).
(2) Ihid,, Pat. de 1497-98, fo 75 v«.
(3) Appelée plus loin Annet du Han.
(4) Arch. de Meurthe-et-Moselle, Pat. de 1529-30, f» 162.
(5) Ibid., Pat. de 1531-32, f«> 26 v°.
(6) Ibid., Pat. de 1506-09, £«- 192.
(7) Ibid,, Pai. de 1502-05, f» 133.
K:
— 207 ~
Naocy, le 10 novembre 1510 (1). Il est qualifié de ^
conseiller et secrétaire ordinaire du duc Antoine, le .j
27 juin 1527 (2), et il obtient, le 9 décembre 1531 (3),
la charge d'auditeur en la Chambre des Comptes. Il ,1
avait épousé Marguerite de Naves, dont : <
IV. — Chrétien (II), seigneur de Han-sur-Seille (4)
qui épousa Jeanne Pierson, dont postérité.
En résumé, suivant Dom Pelletier et Henri Lepage,
la famille de Chastenoy s'app elait en réalité Simonin.
Elle avait pris le nom du village d'où elle était origi-
ginaire, et avait été anoblie en 1488.
Lionnois parait avoir soupçonné une autre extraction,
quand il dit, en parlant du tombeau de Wary de Chas-
tenoy, mort le 31 juillet 1459 et inhumé dans la cha-
pelle du Saint-Sacrement de Tancien Sainl-Epvre:
« sous les pieds de Tange, de part et d'autre, se voit
« reçu de Chatenoy, d'or au favier de sable, tel que
« D. Pelletier l'attribue seulement en 1488, vingt-neuf
a ans après, à Chrétien de Chatenoy (5). »
Si l'on en croit le procès-verbal de Didier Richier, il
' y avait plusieurs familles du nom de Chastenoy (6).
L^une d'elles était d'ancienne noblesse et portait D^or
(1) Ibid., Pat. de iSiO-i4, f» 46 v».
(2) Ibid., Pat. de im-ltO, f> 16.
(3) Ibid., Pat. de ibSi-SÏ, f» 5.
(4) Aujourd'hui commune d'Arraye-et-Han, arrondisse-
ment de Nancy.
(5) Lionnois, Hist. de Nancy y I, p. 251, — Voir aussi
Henri Lepage, Notice sur Jean Lud et Chrétien^ p. 234,
2« note.
(6) Nous verrons plus loin qu'il y eut, je crois, quatre
familles de ce nom.
> - \-
— 208 —
au tavier de sable ; l'autre avait quitté le nom de
Simonin pour prendre celui de Ohastenoy, elle avait
été anoblie en 1488 et avait reçu les mêmes armes que
la première.
En 1579, Chrétien (III) de Chastenoy, qui prétendait
-descendre de Tancienne maison de ce nom et n^avoir
rien de commun avec la famille Simonin de Chastenoy,
fut recensé par le poursuivant d'armes chargé d' « in-
« former et enquérira la vérité... de toutes et chas-
« cunes les personnes qui se disent nobles ». Chrétien
n'ayant pas comparu en personne, Didier Richier ouvrit
une enquête, reçut les dépositions des témoins et
rédigea un premier procès-verbal où il accusa Chrétien
et ses cousins d'usurpation de nom.
« Tous se surnomment et disent de Chastenoy et
a néantmoins leur surnom estSymonin », dit le pour-
suivant d'armes, et plus loin : « ... Pour être mieux
« informé de Torrigine desd. surnommés de Chastenoy
« passant ez led Chastenoy, le XXVP d'aoust mil
« v^'lxxix, estant au chasteau déliée que est présente-
« ment de Jehan Cannot, preuost dud. lieu, Robert de
a Chastenoy, sieur de Mandre sur Vaire, m*a heu juré
a et affirmé le susnommé Chrestien Symonin(l) estre
« natif dud Chastenoy et que estant jeune se yssit (?)
€ pour aller demeurer où fortune lui donneroit et se mit
a au service d'hommes de lettres (?), dont enfin il fit sy
« bon debuoir qu'il fut faict tabellion de Nancy, coe
« il est sy dessus déclairé, et après secrétaire et venu
« au service des princes, come il se peult voir par les
<c pattentes qu'ils en ont par deuers eulx. Lequel n'a
(1) Probablement Chrétiea Jl).
- 209 -
c jamais cependant signé en toutes les despeches qu*il
f a heu faict que Ghrestien, corne il se peult veoir ez
tf registres des patentes de Ghateauneufs et ailleurs.
« Et après auoir demandé aud Robert sy le susd.
« Ghrestien Symonin estoit fils d*un nommé Warry de
« Ghastenoy, inhumé en une chappelle de TEglise
< Saint-Epvre de Nancy, m'a dit et affirmé que non, et
c que, toutes les fois qu'il plaira à Monseigneur le
« comte (i), qu'il luy fera paraistre que led. Ghrestien
< Symonin, quand il sortit de Ghastenoy, s'appeloit
c Ghrestien Symonet, de nom de son père, et qu'aud
c Ghastenoy estoient encor viuans plus de vingt
< persones tant homes, femes, jeugnes fils que filles
« qui sont yssus tant du père dud. Chrestien que de ses
« frères, les quels sont tous surnommés Symonin.
< Mesme il me montra la maison d'oii il estoit venu et
« où son feu père demeuroit. »
Voilà qui est bien formel et confirme entièrement les
dires de Dom Pelletier. Diaprés cette déposition,
Ghrétien Simonin n'aurait même aucun lien de parenté
avec Warry de Ghastenoy qu'Henri Lepage pensait
être son père.
Robert de Ghastenoy, si sévère pour ses homonymes,
appartenait, comme nous le verrons plus loin, à une
troisième famille de Ghastenoy qui n'avait rien de
commun avec les deux autres. Robert se prétendait
ff sorty d'ancienne gentillesse » et il en apporta la
preuve au poursuivant d'armes, le 25 mai 1583 ; c'est
(1) Jean comte de Salm, baron de Viviers, etc., maréchal
de Lorraine et gouverneur de Nancy ; chargé de faire la
Recherche de la noblesse, il avait délégué ses pouvoirs à
Didier Richier.
14
— 210 —
donc par erreur que Dom Pelletier (1), sur la foi du
Nobiliaire de Gallois dit que sa 'famille fui anoblie en
1473 (2).
Didier Richier consigna soigneusement cette déposi-
tion dans son procès-verbal de 1579, mais quatre ans
plus tard, en 1583, il reçut de Chrétien (III) de Ghastenoy
une déclaration tellement difTérente de la première qu'il
modifia sa première rédaction. Cependant celle-ci figure,
quoique raturée, dans la copie que M. de Haldat a bien
voulu me communiquer. Dans celle que je possède au
contraire, on a intercalé quatre feuillets pour recevoir
les nouvelles déclarations de Chrétien (III) qui établit
ainsi sa généalogie :
I. — Warry de Ghastenoy, secrétaire du roi de
Sicile puis du duc Jean, qualifié de « noble homme »
dans un échange du 23 novembre 1458, mourut le
30 juillet 1469 (3) et fut inhumé à St-Epvreoù son tom-
beau portait ses armes Uor au tavier de sable. Il eut
pour fils :
II. — Simon qui mourut probablement en accompa-
gnant à Naples la duchesse Ysabeau (4). Il eut pour
fils:
III. — Chrétien (I), secrétaire du duc Jean, le
20 juin 1465, puis du duc Nicolas, le 13 octobre 1471.
Il eut deux fils et une fille :
(1) Cf. D. Pelletier, p. 123, et le Complément, p. 251.
(2) Callot dit le 20 février 1465.
(3) Le 31 juillet 1459. — Cf. Lionnois, loc, cit. ; P.
Grand'Eury et L. Lallement, L'Eglise St-Epvre (Bull, de la
Soc* d'Arch, Ijr., année 1855, p. 325.)
(4) Isabelle 8*embarqua, le 18 octobre 1435, pour aller
prendre posseBsion du royaume de Naples, échu à son mari,
le roi René, par la mort de sa belle-sœur.
- 211 -
1** Chrétien (II) qui suit.
2" Warry (II), curé de Malzéviile, mourut le 2
septembre 1511, et fut inhumé dans son église.
3"" Claude, épousa Simon LiébauU d'Ormes. Elle
est citée dans un bail du 28 février 1485.
III. — Chrétien (II), secrétaire de René II, puis
contrôleur du passage, et enfin auditeur des comptes
en 1496. Le 20 juillet 1480, il reçut une pension de
20 francs, et une autre de vingt florins d*or, le 5 jan-
vier 1503. •— Il laissa six fils et deux filles :
l' Thomas, qui suit.
2* Jacques, secrétaire du duc Antoine, le 2i
février 1508.
3"* Jean, dit Chrétien, secrétaire des ducs Antoine
et François, puis des régents de Lorraine,
le 1^' juin 1546. Il épousa Claudon Briseur,
dont trois fils et une fille.
a. — François, argentier de S. A. (1).
A. — Georges, conseiller et secrétaire ordi-
naire de S. A., pensionnaire de S. M.
Catholique.
c. — Alexandre, trésorier de S. M. de Danemark.
d. -— Antoinette, épousa noble homme Claude
Willermin, receveur et gruyer de Luné-
ville, anobli le 26 octobre 1572.
4<' François, maître d'hôtel de Louis de Lorraine,
mort dans le voyage de Naples (2).
(1) y. Lepage, Les offices des duchés de Lorraine et de
Bar (Mém, de la Soc. d*Arch, lorr,^ année 1369, p. 363, n.).
(2) Louis de Lorraine, fils de René II, d'abord évêque de
Verdun, prit du service dans l'armée française et mourut au
siège de Naples, le 11 septembre 1528.
-^.ji
'■ ■ i ■- l"' '■ .' t.- ^"' •
' ï
-. 212 —
5" Claude, conseiller.
6° Nicolas, curé de Malzéville.
V Beatrix, épousa Claude de Vandœuvre, prévôt
de Nancy.
8® Marguerite, religieuse aux Sœurs grises de
Nancy.
IV. — Thomas, secrétaire du duc Antoine, le 24
février 1508. Il eut un fils et une fille:
1® Chrétien (III), qui suit.
2** Anne, épousa noble homme Joseph Friche,
cellérier de Nancy et écuyer de cuisine
de Madame.
V. — Chrétien (III) écuyer, seigneur de Han-sur-
Seille, qui comparaît devant Didier Richier, en 1583.
Il peut être intéressant de rapprocher cette généalo-
gie de celle qui était peinte sur un vitrail de la chapelle
de Chastenoy, dans Tancienne éghse Saint-Epvre (1).
Suivant 6elle-ci :
I. — Wary de Chastenoy, secrétaire du roi de Jéru-
salem et de Sicile, épousa Valence de Barizy, dont :
IL — Simon, qui mourut àNaples où il avait accom-
pagné la duchesse Ysabeau. Il avait épousé Anne de
Châteauneuf, dont :
III. — Chrestien, secrétaire des ducs Jean et Nicolas
en 1471. Il eut pour fils :
IV. — N., auditeur des comptes du roi René de
Sicile, épousa Annet du Hau, dont il eut deux fils :
1° Thomas, qui suit.
(1) Monographie de la basilique Saini'EpvrCf p. 11.
La pi. IV donne la reproduction de ce vitrail d'après un
dessin communiqué par M. A. de Roche du Teilloy.
•^:-
- 213 —
2* Jean Chrestien, secrétaire des ducs Antoine,
François et Charles, épousa Claude Brizeur,
dont il eut trois fils:
a. —% François, argentier de S. A.puis auditeur
des comptes, épousa Marie Vaillot.
b. — George, secrétaire de S. A., épousa Fran-
çoise de Viller.
c. — Alexandre, trésorier de la reine de J)ane-
mark.
V. — Thomas, secrétaire du duc Antoine, puis audi-
teur des comptes, épousa Marguerite de Nayves, dont:
VI. — Chrestien, sieur de Han, épousi Jeanne
Pieresson.
On remarquera que cette généalogie, qui paraît dater
de la fin du xvi* siècle, ressemble beaucoup à celle que
Chrétien (III) de Chast^noy présenta au poursuivant
d*armes, en 1583.
A Tappui de sa déclaration, il fournit à Didier Richier
plusieurs pièces justificatives, et le poursuivant d'ar-
mes donne copie de six d'entre elles. Ce sont : 1° Les
lettres du duc Jean, en date du 20 juin 1465, donnant
la charge de secrétaire à « Chrestien nepveu de...
Warry de Chastenoy. » — 2° Les lettres du duc Nico-
las, en date du 13 octobre 1471, maintenait le même
Chrétien de Chastenoy dans ses fonctions. — 3° Les
lettres du duc René II, en date du 20 juillet 1480, accor-
dant une pension de vingt francs à Chrétien (II) de
Chastenoy. — 4° Les lettres du même, en date du 5
janvier 1503, accordant à Chrétien (II) une autre pension
de vingt florins d'or. — 5* Les lettres du duc Antoine,
en date du 24 février 1508, donnant la charge de secré-
— 214 —
tairQ ordinaire à Thomas de Ghastenoy, < Als de...
Ghristien de Ghastenoy ». — 6** Enfin les lettres de
Chrétienne de Danemark et Nicolas de Lorraine, en
date du 1^'juin 15i6, confirmant « Jehan Ghrestien de
Ghastenoy » dans la charge de secrétaire ordinaire du
duc.
Après une argumentation établissant son droit au
nom de Ghastenoy et au titre d'écuyer, Ghrétien (III)
déclare ce qui suit :
« Enuiron le même temps desdz de Ghastenoy
« suruint ung nome Ghrestien Symonin, natif de Ghas-
a tenoy, duquel Ton presumoit lesds de Ghastenoy estre
* yssus et descendus ; mais les tiltres douant declrez
« tesmoingnent le contraire. Car ce Ghrestien Simo-
« nin, coe il fust arriué à Nancy, s'estant adonné à la
« praticque de la plume, y fut faict tabellion par le Roy
€ René (1), le 24* feburier 1473. Et depuis, pour
« scauoir bien escripre et estre homme d'entendement,
« fut retenu par led* Roy en estât [de] Secrétaire, en
a Tan 1488 (2).
« Et au contraire led* premier Ghrestien de Ghaste-
« noy, petit filz dud' Warry de Ghastenoy estant dez
flc aij parauant au seruice des priées obtint du Duc Jean,
« filz dud* Roy René (8), son Secrétariat, le xx* Juing
a 1465^ que sont vingt trois ans au parauant que led^
(1) René II.
(2) C'est une erreur, les lettres patentes nommant Chré-
tien Simonin de Chastenoy aux fonctions de Secrétaire sont
du même jour que celles qui le nomment tabellion, c'est-4-
dire du 24 février 1473. (Cs. Arch, de Meurthe'et'-'Moselle,
Pat. de i473'78, fo 77.)
(3) René I.
— 215 —
« Ghrestien Simonin y ait esté receu. Ainsy, c*estoient
«c deux familles diu:erses et séparées, sans consangui*
« nité aucune.
« Aussy tient on que led^ Ghrestien Simonin qui, en
<( lan 1495(1), entra en ests^t d'auditeur de compte à
« Nancy, vacquant par le trespasdung [nommé] Thierry
« Morcel qui estoit aussy procureur gnal de Lorraine
« et dont le feu président Huyn Roynette receut le i
« sairement, fut en Tan segnier 1496 fait procureur
« gnal de ia barronnie du Maine^ où il se retira, lais-i:
« sant son estât d'auditeur de compte, duquel estât
« led* Ghrestien de Ghastenoy, secrétaire du Roy.
« René (2) de Sicille, contrôleur du passage de Nancy,
« fut poui*veu. Et en laquelle baronie du Maisne led^ .
« Simonin mourut luy succédant en son estât de pro-
« cureur gnal en icelle (en faueur d'un Euesque de.
« Metz (8) que le feu Roy Rçné de Sicille appeloit
ce son oncle) ung nommé maistre Pierre Gotteblanche.
(c La, femme dud^ Simonin appelée dame ' Glande
a. Liebault (4) est enterrée aux Soeurs grises D'orinea
« oii elle sestoit retirée, corne il ma esté vériiié. d
Il est inutile de faire ressortir - les divergences nom-
breuses qui existent entre la généalogie dressée par,
Dom Pelletier et les déclarations de Chrétien de . Ghas-:
tônoy. Si ces dernières sont exactes, il faut reporter sur
(1) Le 12 février 149d. (Cs. LeU pat. de 1497-98, f» 15,
(2) René II.
(3) Henry (II) de Lorraine, évêque de Metz de 1484 à
1501; il était fils d* Antoine de Yaudemont et par suite oncle
de René II.
(4) A rapprocher de la mention du mi^riage de Claude de
Ghastenoy avec Simonin Liébault d^Ormes.
— «16 —
Chrétien (II) plusieurs actes attribués par Henri Lepage
à s:on collègue et homonyme Chrétien Simonin. Sauf la
patente du 24 Février 1478 qui est adressée à « Chres-
tien Symonin de Chastenoy, • tous les documents cités
par Henri Lepage sont au nom de « Chrestien de Chas-
tenoy » et peuvent concerner Chrétien (II) aussi bien que
Chrétien Simonin. Ainsi, la nomination à l'office de con-
trôleur des haut-conduit et passage de Nancy, en date
du 15 Janvier 1482, paraît devoir être appliquée à Chré-
tien (II) ; tandis que la charge d'auditeur des comptes
pourrait bien avoir été conférée à Chrétien Simonin qui
remplaça certainement Thierry Morcel. Sur ce dernier
point, les dires de Chrétien de Chastenoy sont confir-
més par le texte des lettres patentes de 1496 (1). Main-
tenant, Chrétien Simonin abandonna- t-il cette charge
en la même année 1496, et eut-il pour successeur Chré-
tien (II) de Chastenoy, comme le prétend le petit-fils
de celui-ci, c'est ce que je n*ai pu vérifier.
Outre les deux familles de Chastenoy dont nous ve-
nons de constater l'existence, il y en avait encore .deux
autres du même nom, et, si Dom Pelletier et Henri Le-
page ont confondu les Chastenoy avec les Simonin de
Chastenoy, le Nobiliaire manuscrit de la bibliothèque
de Nancy connu sous le nom de Nobiliaire annoté de
Dom Pelletier di fondu ces quatre familles Tune dans
l'autre.
On y lit, au P* 264 V° : « Chatenoy. maison de l'an-
« cienne chevalerie, actuellement éteinte. George
« Chrétien de Chatenoy fut déclaré gentilhomme par le
« Grand duc Charles, le 6 de Septembre 1593. — Porte
(1) Let. paU de i497-98, f» 75 V°.
— 217 —
a De Gueules à trois têtes de loup arrachées, S el i,
n mises en front, *
Remarquons tout d'abord que Georges et Chrétien
sont deux personnes difTérentes. La table des lettres
patentes de 1593 porte, sous la date du 6 Septembre
1598, « déclaration de gentillesse pour le S' Chrétien
de Chastenoy, seigneur de Surseille (IJ » et pour « le
S' George de Chastenoy, seigneur DaiTOacourl (2). »
Je n'ai pu consulter le texte môme des lettres patentes,
les f»" 131 et 132 auxquels renvoie la Table ayant été
enlevés. Dom Pelletier (p. 122) reproduit la même date
pour la déclaration de gentillesse de Georges ; cepen-
dant^ suivant MM. Lepage et Germain (3), ces lettres
seraient du 6 avril 1592. — Quant aux armes indiquées^
elles paraissent appartenir, en transformant les têtes de
loup en têtes de léopard, à une troisième famille de
Chastenoy qui était d'ancienne chevalerie et semble
n'avoir rien de commun avec Georges et Chrétien.
Ceux-ci portaient D*op au favier de sable.
Au f*» 265 du même Nobiliaire annoté on lit t Cha-
« TENOY, autre maison de l'ancienne chevalerie. George
« de Chatenoy, seigneur d'Armoncourt, se trouva à la
« journée de L'Epante, l'an 1571. Celte maison est
tt éteinte. Porte D^or à un jambon de sable ; cimier, le
a jambon. »
Il s'agit évidemment du même Georges de Chastenoy,
cousin-germain de Chrétien. Le copiste aura lu
jabon pour fabuler y de même qu'il a transformé
Armaucourt en Armoncourt.
(1) Evidemment Han-sur-Seille.
(2) Armaucourt, arrondissement de Nancy,
(d) Complément auNob. de Lorraine, p. 849.
— 218 —
Au verso du même f<> 265, on lit : « Ghastenoy.
c Robert, reconnu noble par le grand-duc Charles, en
€ 1584. Porte D'azur à la croix engrclée dt argent, —
« Georges et Ghrétien de Ghatenoy, seigneur d^Ar-
« moncourt, furent déclarés gentilshommes par le
« grand- duc Charles, le 6 septembre 159S. — Chrétien
c Ghatenoy, seigneur de Haute-Seille, mourut à
« Escuaille (1), le 2 juillet 1610 ; il avait épousé Jeanne
c de Guebensons (?), morte en 1592. L'un et l'autre
€ sont enterrés à Bouxières-aux-Chênes ; on voit leur
c tombe devant Tautel du Rosaire. »
Ici, la confusion est complète et les erreurs abon-
dent. Robert appartenait à une quatrième famille de
Ghastenoy, signalée à tort par Dom Pelletier comme
ayant été anoblie en 1473 ; elle portait D'azur à la croix
ancrée (etnonengrelée)6rar^(e/2/(2), tandis que Georges
et Chrétien portaient, comme nous l'avons dit, Dor au
favier de sable. Répétons que le Complément au Nobi-
liaire donne aux lettres de gentillesse de Georges la
date du 6 avril 1592 et non celle du 6 septembre 1593.
Chrétien de Ghastenoy était seigneur de Han-sur-
Seille et non de Haute-Seille, qui était une abbaye.
Enfin Dom Pelletier donne pour femme à Chrétien,
Jeanne Pierson et non Jeanne de Guebensons (?) dont
le nom, probablement estropié, est peut-être Gueben-
housen, famille mentionnée par Dom Pelletier sans
indication d'alliance avec les Ghastenoy.
Le Héraut darmes de Gallot indique bien l'existence
(1) Ecuelle, annexe de Bouxières-anx-Chênes, arrondis-
sement de Nancy .
(2) Didier Richier dit Clermont arrondit les crochets de
la croix et les transforme en pommettes»
t
— 219 —
de plusieurs familles de Ghastenoy ; mais, lui aussi,
confond, je crois, deux d'entre elles. Aux (^ 452 et
464, il signale une maison de Ghastenoy, portant
De Gueules à 3 têtes de léopard (Tôt (1) et faisant partie
de Tancienne chevalerie. — Au ^ 466, il porte le nom
de Ghastenoy sur la liste des gentilshommes déclarés
en 1593. — Enfin, aux f*' 386 et 468, il fait figurer
parmi les anoblis : c Jean Ghastenoy [secrétaire du
c Roi René] (2), annobli le 20 feburier 1465, portoit
« D'or à un favier ou tiege de febves de sable. »
Ge Jean Ghastenoy parait être celui que mentionne
Dom Pelletier comme ayant été anobli en 1473(3), et il
est probable que Gallot lui a donné par erreur le favier
au lieu de la croix ancrée.
En résumé, il y aurait eu quatre familles de Ghaste-
noy : la première était d'ancienne chevalerie et portait
De Gueules à ti*ois têtes de léopard d*or ; la seconde
aurait eu pour auteur Warry de Ghastenoy et portait
D*or au favier de sable ; la troisième serait également
d'ancienne extraction, contrairement aux dires de
Gallot et de D. Pelletier, et portait D'azur à la croix
ancrée d'argent ; enfin, la quatrième aurait été anoblie,
en 1488, en la personne de Ghrétien Simonin de
Ghastenoy et portait, comme la seconde, D'or au favier
de sable.
Quelque invraisemblable que cela paraisse, René II
semble avoir eu quatre secrétaires (4) du nom de Ghas-
(1) A rapprocher des armes que le Nobiliaire ms. de Nancy
attribue par erreur à George-Chrétien de Ghâtenoy.
(2) Ces quatre mots sont rayés dans le manuscrit.
(8) Cf. D. Pelletier, p. 123, et le Complément, p. 251.
(4) Eu 1607, Charles III avait 2 conseillers-secrétaires des
— 220 —
appartenant à trois de ces différentes familles.
en (II) de Chastenoy serait de la seconde, Jean
roisiètne, Chrétien Simonin de Chastenoy et son
cques seraient de la quatrième. Enfin quel était
étien de Chastenoy qui prit part à la bataille de
et en fut le premier historien (1) ? Quoi qu'en
hrétien (III), les lettres patentes du 24 février
)t les lettres d'anoblissement du 20 février 1488 (2)
ttent de croire, avec H. Lepage, que c'est bien
en Simonin de Chastenoy qui eut l'honneur de
ttre, aux GÔtés de son souverain, à la journée de
e opinion semble confirmée par les déclarations
3 du secrétaire de René II. c Ne vous souvient-il
it,dit JeanLudà Chrétien, que quand vous etmoy
mes premier par deçà, peut auoir enuiron qua-
,e ans, au service de feu très noble et généreuse
loire le bon duc Jehan de Calabre et de Lor-
e, comme nonobstauts qu'il fut empesché à la
su et conqueste du royaume de Sicile, par le
ndemSDfB, 2 autres secrétaires des commsudements'
li lier -secrétaire et 34 secrétaireH tous dépeDdants du
l d'Etat. (Lepage, Les o/fiees dts Duchés de Lorraint
3ar — Mém, de la Soc. d'Âteh. lorr., anaée 1S69,
I. Lepage, Notice sur Jean Lud et Chrétien, Le.
2* note ; Commentaires sur la Chronique de Lor-
'Mém. de la Soe. di'Arek. lorr,, aDoée 18S9, p. 413 et
Les offices des Duehit de Lorraine et de Bar (Ibid.,
1S69, p. 412).
'■os lettres rappellent les services ■ que, en maintes
es, il a fsict par le passé à ooz prédécesseurs dacs de
ae et à nous en bataille et BUtrement... i
— 221 —
« commandement du Roy René son père... » (1).
Gayon suppose que Chrétien, de môme que son col-
lègue Jean Lud, était originaire de la Provence et qu'il
avait été amené en Lorraine par le duc Jean, vers 1458;
M. Léon Germain incline au contraire à penser qu'ils
étaient tous deux alsaciens, Lud portait le surnom de
Pfaffenhoffen et Ghrétien pouvait tirer le sien du vil-
lage de Ghatenois, près Schelestadt. Dans ce système,
l'expression « par deçà » employée par Jean Lud signi*
fierait « sur l'autre versant des Vosges ». Ge qui paraît
certain, c'est qu'ils n'étaient lorrains ni l'un ni l'autre,
tandis que Ghrétien (II) de Ghastenoy était fils, petit-
fils et arrière petit-fils de secrétaires de la maison
ducale.
En terminant on peut se demander si Ghrétien (III) a
fait au poursuivant d'armes une déclaration exacte.
Robert de Ghastenoy prétendait qu'il s'appelait Simonin
et ne descendait pas de Warry de Ghastenoy. Ghré-
tien (III) soutient au contraire que Warry, mort en
1459, était le trisaïeul de son père Thomas, lequel fut
nommé secrétaire du duc Antoine en 1508. Ginq géné-
rations en un demi-siècle, c'est beaucoup. — Entre ces
deux déclarations contradictoires, Didier Richier a donné
la préférence à celle de Ghrétien (III), mais la situation
que la famille de ce dernier occupait à la cour de Lorraine
permet de suspecter l'indépendance du poursuivant d^ar-
mes, et on peut se demander si Ghrétien descendait
réellement de Warry dans la ligne masculine. Son bis-
aïeul, Chrétien (I), est désigné, dans les lettres patentes
(1) J. Cayon, Chronique de Joannes Lud et Chrétien^ p.
p. IX et 5.
du 20 juin 1465, comme neveu de Warry,; et Chré-
tien (III) s*empresse d^ajouter : « aultremet son petit
« filz, car de ce temps là, Ton appeloit les petitz filz
« nepveu comme encore pntement en certains lieux. »
Cette insistance ne masquerait-elle pas une reprise
du nom de Chastenoy par un descendant du côté mater-
nel ? Ces reprises étaient déjà fréquentes, et il faut recon-
naître que le nom et les armes octroyés à Chrétien
Simonin, par les lettres de noblesse de 1488, donnent
quelque vraisemblance à cette hypothèse. D'autre part,
s'il eût encore existé d'anciens Chastenoy, en 1488, ils
n'auraient pas manqué de protester contre la collation
de leur nom et de leurs armes à un anobli qui leur eût
été complètement étranger, et je me demande si Chré-
tien (III) de Chastenoy qui déclarait en 1583, n'avoir
€ consanguinité aucune » avec Chrétien Simonin de
Chastenoy, a bien dit la vérité.
Quoi qu'il en soit, les renseignements contenus dans
la Recherche de Didier Richier complètent, s'ils ne les
corrigent pas, ceux que donnent Callot, le Nobiliaire
manuscrit, Dom Pelletier et Henri Lepage, et, à ce
titre, ils méritaient je crois d'être signalés.
il
I.
LE R E T A B L-E
DE
L'ÉGLISE D'AINGERAY
PAR
M. Victor RISTON
Le petit village d'Aingeray, dont la population
s'élève à peine à 450 habitants, est situé sur la rive
droite et sur les bords de la Moselle, sensiblement à
égale distance de Liverdun et de Fontenoy.
Son église vue de l'extérieur ne semble pas de nature
à attirer l'attention de Tarchéologue, qui ne pourra' que
regretter son aspect insignifiant, mais une agréable
surprise attend le visiteur lorsqu'il pénètre dans le
monument.
L'église actuelle se divise, au point de vue de sa
construction, en deux parties fort distinctes : le chœur
et Pavant-chœur d'une part, la nef de l'autre. Celle-ci
qui est toute moderne, ne mérite aucun examen. Le
chœur et l'avant-chœur au contraire sont anciens et
datent de la dernière époque de l'architecture romane.
Les deux travées, dont ils sont composés, sont
— 224 —
soutenues par des piliers encastrés dans la muraille, et
présentent des chapiteaux à abaques très développés
consistant en corbeilles garnies de feuilles à crochets.
LMntérêt que présentent ces deux travées est certain ;
mais ce n'est pas à beaucoup près la pièce capitale, et
nous avons hâte d'arriver à la description du retable,
qui, à lui seul, sufïit pour individualiser Téglise d'Âin-
geray, si nous pouvons nous exprimer de la sorte.
Tout d^abord en entrant dans Tédifice, alors même
que l'on est prévenu, ce morceau de sculpture ne
frappe pas la vue, car il est malheureusement placé
dans une position déplorable, et encastré dans le mur
au-dessus du tambour de la porte d'entrée, à environ
trois mètres du sol, de telle manière qu'il est très
difficile de l'examiner à son aise et comme il le mérite.
Nous devons avouer qu^en dirigeant nos pas vers
Aingeray le hasard seul nous guidait, et que nous ne
nouQ attendions guère à trouver une œuvre semblable.
Des recherches faites lors de notre retour, il résulte
qu'à notre connaissance du moins, ce rétable n*a
encore été signalé que par notre regretté collègue
Olry dans son t Répertoire archéologique de t arron-
dissement de Toul », cantons de Domèvre,Toul-Nord et
Thiaucourt (Mém. de la Soc. d'arcb. lorr., 1871, p.
363). La statistique du département de la Meurthe est
complètement muette à ce sujet, et il nous a semblé
d'une part qu'en présence du laconisme de M. Olry,
qui pour ainsi dire n^a fait que mentionner ce retable
en deux lignes, et de l'autre de la valeur de l'œuvre,
il ne serait pas inutile d'en entretenir quelques instants
la Sociélé d'Archéologie lorraine et d'en publier la
reproduction.
a.
La destination de ce chef-d'œuvre ne paraît pas
devoir susciter la moindre difficulté, et sans aucun
doute, l'on se trouve en présence d'un ancien retable
complétant la décoration d'un autel. Quant à 8ion ori-
gine, malgré toutes nos investigations il nous a été
impossible jusqu'ici de la déterminer d'une façon abso-
lue. D'où provient ce rétable ? Ni les archives de l'église,
ni celles de la commune ne donnent à cette question
une réponse satisfaisante, et à défaut de documents
écrits, on est obhgé de recourir à la tradition locale
transmise de père en fils. D'après ce qu'ont entendu
raconter par leurs ancêtres les plus âgés des habi-
tants d'Aingeray le retable proviendrait de l'ancienne
église de Molzey, dont la destruction remonterait au
xvu® siècle. Molzey (Molisiacus), Malzey ou encore
Marley était un village situé sur le plateau qui sépare
Liverdun d'Aingeray et à deux kilomètres de cette
dernière localité. Remontant à une très haute anti-
quité, celte agglomération fut ruinée en même temps
que son église, et il n'en subsiste plus actuellement
que d'informes monceaux de pierres au milieu des
vignes
Aingeray, centre proche de Molzey, reçut naturelle-
ment la plus grande partie des habitants du village
démoli et il y a tout lieu de croire que ces pauvres
exilés aient tenu à sauver du désastre cette sculpture
qui pour eux était comme une relique, et qu'on l'ait
placée à l'endroit indiqué lors de la reconstruction de
la nef actuelle. La tradition est donc en parfaite harmo-
nie avec la raison, et rien ne nous empêche de l'accepter
comme exacte.
Le retable d'Aingeray est taillé dans un seul bloc de
15
;; » '
— 226 —
pierre, provenant du pays autant que Ton peut en juger;
^ il mesure dans sa partie la plus large 2"*^01*' sur 0",92®
de hauteur. Le cadre, qui entoure la partie principale,
est formé dans le haut par une forte moulure accom-
pagnée par une triple baguette, et porte comme fronton
un cul-de-lampe à relief peu accentué. La partie basse
de l'entourage consiste en un simple bandeau formant
entablement.
Le retable proprement dit mesure 1"*,94*^ de longueur
sur 0°*,50* de hauteur. Il se compose de six niches pla-
cées de front, acccolées les unes aux autres et séparées
entre la troisième et la quatrième par une niche cen-
trale plus importante.
Chacune des petites niches, large de 0*" 25 centimè-
tres, est coiflée par un dais formé d'une ogive en acco -
lade ornée de choux et abrite deux statuettes en pierre
d'égale grandeur (0" 25* de hauteur). La niche du
milieu conçue sur le même plan est occupée par trois
personnages, et le triple dais qui' la surmonte résulte
de la Juxtaposition de trois ogives en doucine.
Les dais découpés à jour sont couronnés par une
ravissante et délicate grille en pierre également
sculptée à jour et dont les motifs d'ornementation diffè-
rent tous d'une niche à l'autre. Il y a là un travail admi-
rable et une finesse surprenante de dessin et d^exécu-
tion, étant donné surtout le grain des matériaux
employés.
Ajoutons enfin que les niches, les dais et la grille,
font partie intégrante du bloc et qu'ils ont été sculptés
dans son épaisseur.
L'efTet produit tant par l'ensemble que par les détails
est très réussi ; malheureusement les petites statuettes
LE RÉTABLE DE L'ÉGLISE D'AINGERAY
(détail)
— 227 —
ont été, à une époque relativement récente, horrible-
ment enluminées avec les couleurs les plus criardes ;
aussi ne pourrions-nous trop désirer voir enlever ce
disgracieux badigeonnage multicolore.
Les personnages qui se trouvent deux par deux. dans
le3 six petites niches, figurent vraisemblablement les
douze apôtres ; tous sont drapés à la façon tradition-
*
nelle et portent, à l'exception d'un seul, longue cheve-
lure et barbe abondante. Ils n'ont, ni sur eux, ni à côté
d'eux» aucun emblème de nature à permettre de les
reconnaître.
La niche principale est occupée par trois personna*
ges : à droite, en regardant le retable. Dieu sous la
forme du Père éternel, la tète couronnée, tenant de la
main gauche le globe du monde et bénissant de la main
droite une jeune fille ou une jeune femme agenouillée
devant lui les mains jointes, tandis qu'un ange placé à
gauche dépose sur sa tête une magnifique couronne»
Que représente ce groupe ? Faut-il y voir, comme cela
se rencontre souvent, le couronnement de la Vierge,
ou plutôt ne pourrait-on pas considérer cette œuvre
comme la représentation allégorique de Dieu bénissant
son Eglise en lui promettant une durée aussi longue
que les siècles, un empire universel et assurant à ceux
qui lui seraient fidèles une récompense éternelle?
Cette dernière interprétation, qui pour nous d'ailleurs
reste une simple hypothèse, nous semble toutefois ca-
drer avec l'ensemble du sujet.
Le retable d'Aingeray appartient au style ogival
tertiaire ou flamboyant ; aussi, à défaut de documents
historiques , est-il possible d'en faire remonter Texécu'
tion avec vraisemblance au commencement duxvi' siècle.
— 2S8 --
1 n'eu connaU pas l'auteur, mais ici encore ta Iradition
ut que l'ancienne église de Molzey, dépendant d'un
mastère d'hommes, ait élé desservie par ses roli-
iux, qui dans le but d'orner leur sanctuaire, auraient
iRé, pour un de leurs autels, ce retable dont ils
raient à la fois conçu le dessin et exécuté la sculp-
re.
Quoi qu'il en soit de cette question et quoique l'on
isse regretter de ne pas connaître le nom de l'artiste
]ui nous devons ce petit chef-d'œuvre, il nous est
rmis de constater que le retable d'Airigeray est
iwatestablement fort intéressant et qu'il mérite de
endre place dans l'inventaire des richesses archéo-
^ique de nos églises lorraines.
LA SUEUR ANGLAISE
EN ALSACE ET EN LORRAINE
Notes à propos d'un imprimé lorrain, présumé
de 1529.
Par m. Jules ROUYER
Nous devons à robligeance de M. Léopold Delisle la
connaissance de la pièce qui motive plus particulière«-
ment ce mémoire.
Il s'agit d'une demi- feuille de papier, des commen-
cements du xv!"" siècle, sur laquelle est imprimé, en
deux pages de format in-4'', un remède contre la
suette, ou sueur anglaiscy maladie contagieuse, origi«
naire d'Angleterre, en effet, d'où elle se jeta sur le
continent pour y exercer également les plus désas-
treux ravages. La communication que M. Delisle a
bien voulu nous faire reposait sur cette remarque de
réminent savant, que l'exemplaire conservé à la Biblio-
thèque nationale sous la cote Te^^-i2 (-Reserre), et
peut-être unique aujourd'hui, de l'imprimé dont noua
parlons, est établi sur la partie laissée inoccupée, et
en blanc, d'un exemplaire de certaine formule de lettres
— 230 —
•
d'indulgences, à Tusage des quêtes que i'Hôtel^Dieu de
Paris faisait de toutes parts, pour l'aider à subvenir
aux besoins de ses malheureux assistés ; formule dont
un approvisionnement tout entier, sorti en 1511 des
presses lorraines de Saint-Nicolas-de-Port, était tombé
en rebut, et demeuré pour compte à l'imprimeur, à
cause, sans doute, d'un vice de forme dont nous avons
déjà expliqué ailleurs la gravité (1). M. Delisle expri-
mait avec toute raison le vœu qu'il fût possible de bien
constater l'origine commune, quant au lieu d'émission,
des deux imprimés ainsi couchés sur un même papier
volant, l'un au rectOy l'autre au verso.
A la condition de reprendre le sujet plus loin, nous
devons nous borner, pour le moment, à cette observa-
tion que la composition des deux imprimés a été faite
au moyen de caractères qui existaient, les uns comme
les autres, dans l'officine de Pierre Jacobi, à Saint-
Nicolas-de-Port, et que, particulièrement, ceux du
texte du Remède contre la Sueur d^ Angleterre sont,
non seulement pour les lettres, mais jusque dans les
moindres détails, comme pour ce qui concerne, par
(1) Voiries Mémoires de la Société d'archéologie lorraine ^
année 1883, p. 235. Nous rappellerons en peu de mots de
quoi il B*agit :
La formule rebutée commence par le mot Universis^ et
r 17 initial consiste en une grande letire grise au centre de
laquelle est gravée Timage de saint Nicolas avec les trois
enfants. En l'espèce, c*était comme une sorte de non-sens,
attendu que l' Hôtel-Dieu de Paris se trouvait sous la pro-
tection de patronage, non pas de ce saint, mais bien de
saint Christophe, pour sa chapelle, et de saint Jean-Baptiste
pour ce qui concernait plus particulièrement Tadministra-
tion de l'établissement.
— 231 —
exemple, les abréviations, la ponctuation, et tous signes
accessoires, tout-à-fait les mêmes que ceux dont Jacobi
a fait usage eii 1518, pour Timpression du texte de la
Nancéide, de Pierre de Blarru.
Ce n'est guère avant 1529, autant que nous en
pouvons juger, que Ton trouve bien précisément des
traces de la sueur anglaise en Lorraine et dans les
contrées voisines. En Angleterre, au contraire, cette
maladie s'était très cruellement manifestée dès 1485,
dans l'intervalle de la mort du roi Richard III, tué
dans la bataille de Bosworth, le 22 août, au cou-
ronnement de son successeur, Henri VIL Nous ne
pouvons mieux faire que de rapporter ce que contient
sur ce sujet V Histoire du règne de Henri VH, roi
d'Angleterre, traduite du latin de François Bacon
par La Ïour-Hotman, Paris, 1627 (1) :
« En la saison de l'automne, et sur la fin de sep-
tembre (1485), la ville de Londres et quelques autres
endroits du Royaume furent affligés d'une maladie
qu'on n'avoit point encore connue, et qui fut appelée
Sudoriâquej à cause des symptômes et des accidens
qui Taccompagnoient. Le cours de cette maladie fut
prompt, tant en la personne de ceux qui en furent
affligés que pour le regard du temps de sa durée, car
ceux qui en étoient frappés, ayant échappé les vingt-
quatre heures, se tenoient comme assurés de n'en
(1) Ce n*est pas cette édition de 162*7, déjà qualifiée rare
en 1724, que nous avons eue entre les mains. Notre citation
est tirée deTédition de Bruges, 1724^ in-12, pp. 12 à 14.
Nous n^avons pas tenu à conserver absolument Torthogra-
phe, assez douteuse, de cette réimpression, ce qui eût, été
sans intérêt ici.
— 282 —
mourir pas. Pour ce qui est du teçips de ce mal conta-
gieux, il commença environ le 21 de septembre et cessa
sur la fin d'octobre ; si bien qu'il n'apporta point d'obs-
tacle au couronnement du Roi, qui fut fait le dernier
d'octobre (1), ni même à l'assemblée des Etats, qui ne
commença que sept jours après. G'étoit une fièvre pes-
tilentielle qui, se^on les apparences, n'avoit son siège
ni dans les veines, ni même dans les humeurs, pour ce
qu'il ne s'ensuivôit pas de charbon, et que, en la per-
sonne de ceux qui en étoient travaillés, on ne remar-
quoit aucune tache livide. Tellement qu'on pouvoitbien
conjecturer que ce n'étoit qu'une vapeur maligne qui,
enveloppant le cœur, se saisissoit des esprits vitaux et
ainsi forçoit la nature à un combat violent, pour la
repousser au dehors par les sueurs. Aussi l'expérience
fit voir que celle maladie étoit plutôt une surprise de la
nature qu'un mal qui s'obstinât contre les remèdes,
puisqu'il en étoit susceptible si l'on y pourvoyoit de
bonne heure. Car si Ton avoit soin d'user d'une égale
modération envers le patient, ensemble de le couvrir
et le faire boire assez chaudement, lui faisant prendre
des breuvages propres à fortifier le cœur, et empêcher
que, ni l'opération de la nature ne fût irritée par la cha-
leur, ni retenue en ses fonctions par une froidure exces-
sive, il ne lardoît guères à recouvrer sa santé. Cela
n'empêcha pas qu'un grand nombre de personnes ne
mourût soudainement de ce mal, devant que la méthode
requise à leguérir fût connue... »
Plus loin, Bacon revient sur ces faits pour rappeler
le présage que le. « commun peuple » en avait tiré,
tl) En réalité, ce fut je 30 octobre.
■%
— 233 —
quant à Henri VII lui-même, « que son règne seroit
pénible^ à cause qu^ il Pavoit commencé par une maladie
pleine de sueur (1) ».
La citation que nous devons faire encore est
empruntée à un ouvrage technique :
« Suette ; nom donné à une fièvre éruptive, conta-
gieuse, presque toujours épidémique. Cette maladie
éclata en Angleterre en 1486 (2) pour la première fois,
et y exerça ses ravages à quatre reprises jusque vers
le milieu du xvi* siècle : fle là son nom de Sudor angli-
eus. Elle ne se borna pas à TÂngleterre et passa sur le
continent. Dans les premiers temps cette fièvre offrait
une sueur profuse, mais peu ou point d'éruption. Le
danger en était très grand, et les épidémies de suette
anglaise doivent être comptées panni les plus formi-
dables qui ont désolé les populations (3). »
On conçoit que, précédée d'une réputation dont on se
fait aisément l'idée, la suette, quand elle se répandit
sur le continent, ait été accueillie avec les sentiments
d'inquiétude les plus marqués et les plus justifiés, de
la part des habitants des pays envahis ou menacés par
le fléau. Les autorités de ces pays recouraient aux
médecins les plus habiles, ou qu'elles considéraient
comme tels, pour obtenir d'eux les meilleures recettes
curatives ou préservatrices. On faisait imprimer ces
recettes, afin de les mettre, autant que possible, à la
portée des intéressés.
(1) P. 54 de réd. de Bruges, de 1724.
(2) Lisez : 1485. Le témoignage de F. Bacon qae nous
avons relevé plus haut, ainsi que des autres historiens
anglais, ne peut laisser aucun doute sur ce point.
(3) Dictionnaire de médecine, publié par Baillière; 18«
édition, par Littréet Robin, Paris 1873.
— 234 —
Ici se termine Texcursion que nous avons été obligé
de faire en dehors de la Lorraine et des pays voisins,
etqueTintérêt même des recherches que nous avions
entreprises ne nous a pas permis de rendre plus rapide.
Voyons ce que, rentré chez nous, ou à peu près, nous
trouverons de relatif à notre sujet.
M. Gh. Schmidt a publié dans les Annales de fEsi,
année 1890 (1), au sujet de Laurent Pries, de Colmar,
c médecin, astrologue^ géographe », une étude de haute
valeur et qui a été très remarquée ; elle méritait, sans
nul doute, de Tètre à tous égards, et notamment pour
les documents nouveaux ou mal connus jiisqu'alors, au
moyen desquels on peut bien dire que l'auteur a fait
revivre son personnage. Quant à nous, il ne nous était
pas possible, à la lecture du travail de M. Schmidt, de
ne pas en extraire le passage suivant :
«Enl529,lamaladieditesue/^e, qui d'Angleterre s'était
répandue sur le continent dès 1525, était aussi venue à
Metz. Craignant que cette épidémie nouvelle ne s'étendit
jusqu'en Alsace, l'évêque Guillaume, de Strasbourg,
fit demander une consultation à Pries, qu'il connaissait^
et à Jean Brunon de Isidbruck. qui depuis 1520 était
médecin stipendié de Metz, et plus connu comme diplo-
mate que comme disciple d'Esculape. Ils envoyèrent
au prélat un petit traité, rédigé à la hâte et, selon
toute apparence, par Pries ; il fut aussitôt imprimé à
Strasbourg... (2) ». Le traité est en latin. Voici l'indi-
cation qu'en donne M. Schmidt : Sudoris anglici exi-
tialis pestiferiqiie morbi ratio^ prœsevvaiio et cura^
(1) Pages 523 à 575 (fascicule n<» 4, du mois d^octobre),.
(2) AnnalêB de VEst, 1890, pp. 534, 535.
— 285 —
Joanne Nidepontano et Laurentio Frisio, inelylœ civi-
tatis Metensis medieis, autoribus^ prsecipiiû ealamo
conscripta. Argent, J, Knoblocb junioVy 1529, 12
feuillets in-.4°. — Voici, en outre. d*après M. Schmidt
égalemeot, la traduction d'un passage relatif au traite-
ment du mal nouveau^ par le moyen, disent nos deux
praticiens, des armes que leur ont fournies contre
cet ennemi furieux les traditions des anciens^ et leur
propre expérience : « Il faut coucher le malade dans
un lit chauffé, Tenvelopper jusqul&u cou, le préserver
du contact de Tair, lui donner une potion sudoriflque ;
après six heures, on l'essuiera, puis on Tenveloppera
de nouveau de linges bien chauds ; il pourra boire un
peu de vin mêlé d'eau, mais avant douze heures il ne
mangera rien, et pendant trois jours il s'abstiendra de
viande. Il lui faut des gardes ; ils l'empêcheront de
dormir en le tirant par les cheveux et par la barbe, en
lisant à haute voix, en chantant, en faisant du
vacarme (1). » Nos auteurs se livrent ensuite à une
digressiion qui sent un peu l'esprit de secte, et qui
n'aurait véritablement que faire ici, sur les qualités à
rechercher dans les gardes.. .
A titre de comparaison, on rapprochera ce qui vient
d'être exposé, si l'on veut bien, du Remède consigné
dans la rareté typographique dont nous donnerons la
copie pour terminer ce mémoire ; il y a là plus d'un
point de rapport'que permet de saisir le plus simple
examen.
L'opuscule de Fries et de son collègue était, nous
l'avons dit, rédigé en latin, et ne pouvait, par consé-
(1) Loc. cit., p. 555.
— 286 —
quent, convenir à la très-grande majorité du public
alsacien ; celle-ci n'y aurait rien compris. C*est pour
cette raison, sans doute, qu'il parut en langue alle-
mande, à Strasbourg, dans la même année 1529, et sur
le même sujet, un livret imprimé en 16 feuillets in-4**,
dontTauteur, HansMelbrey, nous fait savoir M. Schmidt,
était courrier à cheval de la Chambre aulique de Spire,
à laquelle il a dédié son traité. Nous en conclurions
assez volontiers que l'édition strasbourgeoise du livret
de Hans Melbrey po«rrait bien être déjà une réimpres-
sion. L'établissement de l'imprimerie à Spire remonte à
1471 (1).
Nous avons vu la préoccupation causée par la suette
à Metz et à Strasbourg. Le hasard nous montrera
cette même préoccupation, à la même époque, répan-
due, en France, vers la frontière lyonnaise ; nous ne
saurions expliquer autrement l'existence d'un dernier
opuscule qu'il nous reste à signaler, avant de donner
le texte de l'imprimé lorrain dont la découverte a
motivé nos recherches.
Comme nous parcourions V Etude biographique et
bibliographique, de P. Allut,sur le lyonnais Symphorien
Champier (2), que l'on sait avoir été fort longtemps le
premier médecin du duc de Lorraine Antoine, notre
attention fut arrêtée sur l'endroit où il est question de
l'exemplaire, à toutes marges et dans sa première
reliure, que conserve la Bibliothèque publique de
Nîmes, de V Antiquité^ origine et noblesse de la très
antique cité de Lyon, Lyon, 1529, in-4** gothique.
(1) Voir le Dictionnaire de géographie^ de P. Deschamps,
à l'article Augusta Nemelum.
(2) Lyott, 185S*, in-S». Voir aux pp. 227 et 228.
-- 237 — *
A la suite de cet ouvrage se trouvent, dans Texem-
plaire dont il s'agit, deux opuscules que Ton a pu
considérer comme faisant partie du livre même, tandis,
au contraire, que ce sont deux pièces indépendantes de
toute publication, et d'une rareté exceptionnelle Tune
comme l'autre. Allut croit pouvoir d'ailleurs affirmer,
en se fondant sur la similitude absolue du papier^ du
format et des caractères d'impression, qu'elles sont
sorties des mêmes presses lyonnaises que Y Antiquité
de Lyon, Une des deux pièces n'a aucun rapport avec
notre sujet (1). Voici, d'après Allut, le titre et Vexplicit
de la seconde, qui est un pe tit in-4<» gothique de quatre
feuillets non chiffrés :
Du docteur Pierre Wild de Ysny remède consola-
toire contre la nouuelle maladie nomee Sueur angloys,
laquelle règne a présent au pays de ûandres ^ allemai-
ffne, ^ est a craindre que cy après elle ne règne plus
amplement, tant aux dessusditz pays que par tout luni-
versel monde. Au vertueux Sénat ^ pour la commune
utilité de la noble cite de Wormbs.
Après le titre, une figure en bois, et au bas : < Faicte
pénitence car le royaulme de dieu s'approucbe. »
A la fin : Donné le jour de Sainct Michel (2) ar-
change, 1529.
Tout-à-rheure, c'était l'Allemand Hans Melbrey, qcte
nous voyions offrir à la Chambre aulique de Spire ses
(1) C'est une plaquette de 4 ff. iii-4» goth., publiée eu
1530, relativement au retour en France, et au passage par
Lyon, de ceux des enfants de François l**^ qui étaient restés
en ôtago à Madrid après la captivité de leur père, et à la
suite du traité de Cambrai.
(2) 29 septembre.
— 238 —
moyens curatifs pour le traitement de la sueur anglaise.
Ici nous sommes en présence d'un autre Allemand, le
docteur Pierre Wild, dlsny, que nous ne connaissons,
au surplus, que de nom, offrant, à son tour, au Sénat
deWorms ses élucubrations sur le même sujet. En
rapprochant ces circonstances, on peut juger aisément
de quels côtés Tépidémie suivait surtout son cours.
Nous n'avons pas trouvé de trace du texte original de
Wild, qui devait être bien évidemment en allemand ou
en latin ; mais le £aib de la traduction en français qui
en a été donnée à Lyon, dès 1529^ dit assez combien le
néfaste renom que s'était acquis la suette en faisait déjà
craindre l'apparition de ce côté également.
Pendant que la maladie nouvelle étendait ainsi ses
ravages sur le continent, la Lorraine partageait l'épou-
vante générale, ce dont elle n'avait que le trop juste
sujet. Les titres de la collégiale de Saint-Georges, de
Nancy, ont conservé le souvenir de processions qui
furent faites dans la ville, en novembre 1529, et où
furent portés le Saint Sacrement, ou Corpus Dominiy et
le cuissal ou couxa saint Georges (i), « pour la mala-
die chaude et aultres adversités ». C'est ce qui résulte
des travaux historiques de notre regretté président
Lepage, qui désigne indistinctement le même mal sous
les dénomi nattions de t maladie chaude » et de
(i) Cette relique de saint Georges, célèbre en Lorraine,
consistait en un os de la cuisse [coxa) ; elle était conservée
dans le trésor de la collégiale placée soas l*invocation du
même saint. Voyez Lionnois, Histoire de Nancy , t. I,
1805, p. 8, et H. Lepage dans les Bulletins de la Société
d'archéologie lorraine^ t. I, p. 276, dô Tédition de 1853.
^
-^ 239 ~
€ chaude maladie », d'après les documents qu'il a
compulsés (1).
(1) Les Archives de Nancy^ 1865, t. I, p. 174 ; Inven-
taire sommaire des Archives départementales de Meurthe-
et-Moselle, t. IV, p. 73 (série G. 628).
M. Léon Germain à bien voulu vérifier pour nous, aux
Archives du département, les sources qu*avait utilisées
M. Lepage. Elles sont au Registre G, 623, des rentes, cens
et revenus de Téglise collégiale Saint-Georges, pour Tannée
commençant à la Saint- Jean -Baptiste 1529, finissant à pareil
jour de 1530, et consistent en ces deux articles du chapitre
des dépenses extraordinaires :
— c Le xiije jour de novembre, acheté du ruban de soye
pour pendre une branche de choral après le vessaux du .
Corpus Bominiy pour pourter à la procession que Ton fit
ledit jour pour la paix {de Cambrai), et contre la chaude
maladie, pour ce xij*^ . x>
— c Le XV* jour de janvier, , compté à Margo de Tonnoy
pour cierges et torches quelle a fourny pour les processions
que furent faictes en novembre pour pourter Corptis Domini
et pourter le couxa saint George, et pour les commemo-
racions que Ton fit oudit moys porr la maladie chaude et
aultres adversités, pour ce iij.** xvj*'.»
Les expressions c maladie chaude » et a chaude maladie >
se trouvent donc bien, daçs le même registre, pour dési*
gnerle même fiéau.
Quant à la branche de choral, c^est-à-dire de corail, que
nous lisons avoir dû être attachée à Tostensoir ou autre
vaisseau eucharistique renfermant le Corpus Domini, comme
il fut porté dans la procession du 13 novembre 1529, contre
la c maladie chaude », on ne peut guère y voir autre chose
qu^une sorte d'amulette ayant pour mission d*écarter les
artifices des démons, auxquels il n*était que trop permis
d'attribuer, au moins en partie, les adversités que les pro-
cessions et autres prières publiques donnaient Tespoir de
pouvoir conjurer. A cette époque on reconnaissait encore
certaines vertus particulières à chacune des pierres quali-
fiées précieuses, ou des gemmes, au nombre desquelles le
m.'^':
V' •••
/
I .^
r. ;.
'<■■• " ■■
r.
— 240 —
 notre gMnde confusion, nous sommes trop étranger
à toutes connaissances médicales, anciennes ou moder-
nes, pour nous croire autorisé à prétendre que la
sueur anglaise, nonobstant ses symptômes sudorifiques,
fût toujours de soi une maladie chaude ; mais la
manière dont on la traitait, en faisant endurer aux
malades « challeur véhémente » , afin de provoquer
des sueurs plus fortes, aurait suffi, sans nul doute,
pour que Ton pût, vulgairement, lui appliquer cette
appellation.
Ce que nous avons dit en dernier lieu montre assez
comment on s'est trouvé, en Lorraine, avoir eu à
corail était compté. Nous avons sous les yeux, de Tédition
de Cologne, 1589, le poème de Marbodœus, auteur qui
vivait au xi'* siècle, de gemmarum lapidumque pretiosorum
formis^naturis, atque t7trt6u5, avec les commentaires d*Alard
d'Amsterdam, contemporain de l'édition. Parlant du corail,
Marbodseus dit :
Timbras dcemonicas ac Thessala monstra repellit,
vers qu^AIard fait Tobjet de ce commentaire : « Umhras
dœmonicas,,». lege Dioscoridem : Atque ab omni maleficiOf
atque umbris dœmonum, et inanibus studils custodit. Non
est igitur ociosum, nec ab ratione prorsus alienum, cur
sacras coralii bacculas, quibus in numerandis precibus
utimur, prudens instituit vetustas s. — Alard désigne ici,
comme on le voit, les grains des patenôtres de corail et le
motif pour lequel ils étaient faits en cette matière, qui a
toujours été assez recherchée, même en dehors des vertus
qu'on lui supposait. — Ajoutons, comme dernière obsérvatioi/,*
ce que M. Anatole de Barthélémy, de l'Institut, nous disait
récemment, mais d'ailleurs en simple causerie, qvte bien des
Italiens ont encore aujourd'hui, pendant à la chaîne de leur
montre, quelque bijou de corail, sur lequel ils se hâtent de
porter la main aussitôt qu'ils se supposent menacés de
malencontre ou de quelque mésaventure *; c'est comme une
sorte de conjuration.
I
t
f — 241 —
p imprimer et à rendre publique quelque recette pour
[ traiter les sujets atteints de la sueur anglaise, comme
, aussi à Teffet de prémunir contre le fléau ceux qui en
î* craignaient les attaques. L'édition du Remède signalée ici
I d'après Texemplaire de la Bibliothèque nationale dénote
f tellement/ au plus simple aspect, son origine lorraine,
que, loin d'avoir à la prouver, on se demande plutôt
[■ s'il serait seulement possible de la contester. Imprimée
■
sur un papier provenant de formules rebutées, mais que
l'on sait être sorties, en 1511, des presses de Pierre
Jacobi, à Saint*Nicolas-de-Port, auquel tout l'appro-
visionnement avait été laissé pour compte, composée
elle-même, identiquement, avec les caractères ronds
qui avaient servi à Jacobi, en 1518, pour l'impression
de la Nancéide, nous ne voyons pas ce qui pourrait
bien manquer encore pour démontrer moralement quel
a été le berceau de la pièce.
Les bibliophiles savent de quelle grande rareté, sans
exception , sont les divers produits que Ton a pu
retrouver du premier établissement typographique de
Saint-Nicolas-de-Port.La liste de ceux que l'on connaît,
datés, s'échelonne, avec des lacunes considérables dans
l'ordre des années, de 1501 à 1528 (1). On nous accor-
dera aisément, sans doute, que l'établissement devait
bien exister encore l'année suivante.
A cette dernière époque le matériel de l'imprimerie
de Saint-Nicolas-de-Port était toujours celui qu'avait
organisé Pierre Jacobi, mais on ne trouve plus, que
nous sachions, le nom de celui-ci après 1521 ; en
(1) Beaupré, Nouvelles recherchas de bibliographie lor-
raine, Nancy, 1856, chap. I", pp. 12 à 19. #
I.--.
— 242 —
1525 parait le nom d'ua autre typographe, Jérôme
Jacob ; et le seul livret que Ton connaisse portant la
date de 1528 est anonyme en ce qui concerne l'impri-
meur (1). Quanta la demi-feuille sur laquelle s'étale le
Remède contre îb Sueur d'Angleterre^ imprimé que
nous devons, assurément, nous croire très-Butorisé à
classer à 1529, on y reconnaît bien toujours encore,
et sans conteste, les caractères ronds de la Nancéide^
naguère si beaux ; mais, par la double raison, peut-on
penser, de l'usure et du manque de soin^ ils se
montrent ici empâtés et encrassés. Au^si nous a-t-il
semblé que, dans ces conditions, nous devions nous
borner à donner une transcription de la pièce, sans
recourir au moyen dispendieux d'une reproduction en
fac-similé, le phncipal intérêt qu'elle présente consis-
tant dans le fait de pratique médicale dont elle fournit
r échantillon.
Une observation que nous devons faire encore; c'est
que les deux pages que comporte le texte de la pièce
sont placées en regard Tune de l'autre, de telle sorte
que la formule de '1511 imprimée de l'autre côté dis-
paraissait entièrement quand on jugeait à propos d'afA-
cher en placard le Remède.
Pauvre formule, quant à sa destinée, que celle de
1511 dont il s'agit ! Et combien a-t-il donc fallu qu'il y
en ait eu d'exemplaires pour que le stock n'en fût pas
absolument épuisé dix-huit ans après le rejet de la
livraison ? On en avait fait des feuillets de garde pour
les livres qui sortaient des ateliers de Jacobi, et, au
besoin, du carton pour la rehure de certains volu-
., (1) Beaupré, loc, cit»^ p. 19.
i
— 243 —
mes (i). La remarque de M. Léopold Delisle, que nous
tenons à remercier encore de son obligeance, devenue
proverbiale, nous en fait voir d'autres exemplaires utiii-
sés,corameilen était jadis, pourrait-on dire, du parche-
min des manuscrits palimpsestes, à la réception d'un
second texte, en remplacement d'un texte précédent.
On se demande quelle valeur relative pouvait avoir
alors le papier, pour qu'il en fût disposé avec un sem-
blable esprit d'épargne. Mais, quoi qu'il en soit, l'ar-
chéologue n'aura pas à se plaindre de ce qui, de notre
temps, pourrait être considéré comme un bien singu-
lier exemple de parcimonie, puisque ce n'est qu'à l'em-
ploi des divers expédients que nous venons de rappe-
ler que quelques exemplaires de la curieuse formule
ont dû d'être conservés, et de parvenir jusqu'à nous.
Il est temps de donner la copie du Remède. On la
trouvera à la suite de cette notice, que nous terminons.
Nous ne saurions déterminer, d^ailleurs, à quel praticien
est due la rédaction que nous allons ainsi mettre sous
les yeux du lecteur. Nous avions d'abord pensé à Sym-
phorien Ghampier, qui était^ nous l'avons dii, premier
médecin du duc de Lorraine ; mais on ne voit, dans
le libellé du Remède, rien qui précise le caractère
officiel de la pièce, à supposer qu'elle en ait eu un.
Ajoutons que, à l'époque où elle remonte, Ghampier,
fixé régulièrement à Lyon, ne devait plus venir que
rarement à Nancy (2) et que le duc avait un autre
(1) Beaupré, Recherches sur rétablissement de Vimpri»
merie en Lorraine ; Nancy, 1845, p. 53 à 56.
Voir en outre les Mém. de la Société d'archéologie lor-
raine, 1883, p. 135, et 1884, p. 214 et 217.
(2) Voir H. Lepage, dans lo Journal àe la Société d'ar-^
chéologie lorraine, année 1860, p. 218.
— 244 —
édeciD, jouissant à la cour ,de Lorraine d'un cer-
in crédit : c'était le mystérieux Bartoloineo Gastel-
iQ-Nazar (1). Tout cela, en somme, est bien vague.
issi ne saurions-ooua mieux faire que de laisser en
n ealier, à qui voudra reprendre la question de
ternité de l'opuscule, le soin de la résoudre.
(l) Voir U'notice de M, Fourier de Bacourt au sujet do ce
raoanage, dans les Mémoires de la Société d'archiologi*
■raine, année 1887, p. 5 à 35.
— 245 —
Remède contre la malladie
nommée la sueur Dengleterre
Régnant en plusieurs lieux (i).
Il est nécessairement requis que incontinent que
quelcun se sent mal dispose par auoir troup chault,
Iroup froit, ou tremblement, ou par troup grant mal
destomach, ou de teste. Comme ceste malladie com-
mence. Il se retire en son loug'is. Et que soubdainement
il face chauffer des linceux et accoustrer ung lict. Se
despouiller le plus tost que sera possible devant le feu
et se coucher et couurir modereement ne troup ne troup
peu, mais comme dugne couuerte commune Et de
quelque Robe doublée, et qu'on se garde dy mecttre
fourrure aulcune. Couche quil sera faull mettre ses
bras au long de ses coustes sans se bouger et sans
dormir. Et que Ion garde bien quil ne sendorme. Car
si lespace dun aue maria il dormoit se seroit faict de
sa vie. Aussi quil ne mette hors du lict membre quil
aye fors la teste. Aultrement s'il estoit atouche daer
en quelque aultre partie de son corps il seroit mort.
Douze heures passées après quil aura endure challeur
véhémente, luy fauldra demander sil peult remuer les
(l) Pour plus de clarté, nous avons supprimé les abré-
viations qui existent en grand nombre dans le texte original,
abréviations que les caractères typographiques actuels n'au-
raient pas toujours permis de reproduire bien exactement.
— 246 —
mains et les piedz a son aise. Si ainsy le peult faire.
Adoncques fauldra commencer a eschauffer des
seruietes ou aultres draps de linges et faire quelque
brouuet sans espices, demy heures auant que le leuer.
Mais après les xii heures passées encor faut il quil
demeure couche iii ou iiii heures. Et fault quil y aye
iiii ou cincq personnes auprès du pacient Iheure xvi
approuchantes Affîn que sil perdoit entendement
(comme iay veu en aulcuns) ou quil se voulcist leuer,
que Ion le tint par force. Et le malladé estant au lict
Ion prendra de leauue Roze ou de Lavande : et la
chauffera on vng peu auec vng petit drap de linge. Lon
luy en mecttera par fois deuant le nez et aux oreilles,
et de quelque bon vinaigre aussy. Et si luy peult on
bailler a boire, mais peu a la fois, de ceruoyses
chauffée, ou eauue cuycte, ou luy bailler en la bouche
du succre candy, quant il a troup grant soief. Lheure xvi
passée Lon le viendra essuer avec les seruiettes ou
draps chauffes dessusdictes par tout le corps. Et quant
il sera essue fauldra lenuelloper en quelque linceux
chauffes et dune robe ou cappe sans fourrure. Et le
leuer et mectlre en vne chayere deuant vng moyen feu.
Luy présenter incontinent a menger de ce brouuet sans
espices que Ton aura appresle auant que le leuer. Et
pendant qu'il mengera retourner le lict chauffer des
blancs draps. Et quant il aura menge le recoucher et
laisser dormir s*il poura deux ou trois heures pen-
dentes lesquelles fauU lesueiller trois ou quatre fois.
Apres il poura demeurer au lict tant et si longuement
qu'il vouldra ou se leuer tout à son plaisir. Mais il est
nécessaire quil liengne la chambre huict iours durant.
Ce faisant il sera garanty.
— 247 —
m
([ Contre icelle mallaldie est bon de prendre de la
fleur de nois muscade, du poyure, des Rozes rouges, et
de la muscade autant dung que daultre. Et après lauoir
pille ou broyé ensemble le meclre en vne demye chop-
pine de vinaigre dedans quelque fîolle ou bouteille. Et
de celle boire vnecuillier auant que sortir du logis.
HARANGUES
I
DES
lîOûlAKïS DE P()iî-*-»011SS0N
AU DUC DE LORRAINE HENRI II
1614
Par M. J. FAVIER
Le duc Henri II passe pour avoir été prodigue des
finances de la Lorraine. Les constructions et les res-
taurations qu'il commanda pendant les premières
années de son règne coûtèrent, disent les historiens,
des sommes énormes. Mais ces dépenses semblent avoir
eu leur raison d'être, car les états généraux, tout en
se faisant prier, consentaient toujours à accorder les
aides qu'on leur demandait pour construire des châ-
teaux, embellir et fortifier les villes.
Les jésuites de Pont-à- Mousson que Charles III avait
un peu gâtés par ses largesses, ne se firent pas défaut
de profiter de la générosité de son fils, et ce dernier
n'avait nullement l'intention de se montrer intraitable
à l'égard d'une institution qui était l'honneur du règne
de son père. Les historiens ont pu constater souvent
qu'en ce qui concerne l'Université lorraine, Henri II
a été le digne successeur de Charles III.
« Ce prince, dit le P. Abram, en racontant sa mort,
a toujours aimé notre Université. Il était d'une lar-
— 249 -
gesse et d'une libéralité toute royale ; il avait coutume
de' dire : « Notre langue n'a qu'un seul mot pour
« exprimer le refus, et cependant ma nourrice n'a
« jamais pu me l'apprendre. » (1).
C'était dans des cas toujours très pressants, par
exemple au lendemain d'une catastrophe quelconque
qui ne se pouvait réparer qu'à prix d'or, que le P.
recteur avait recours à la « royale libéralité » .
« La septième année du rectorat du P. Bouvet (en
1613), pendant la nuit du 11 décembre, le feu prit au
chauffoir des séminaristes, et de là se propagea du
côté de la salle d'académie et des chambres des pen-
sionnaires, en réduisant tout en condres. Peu s'en
fallut que le feu ne dévorât encore deux autres bâti-
ments et ne gagnât les maisons voisines. Par bonheur
les efforts des habitants accourus au secours parvin-
rent à concentrer l'incendie dans son foyer.
» L'année suivante, les ravages de l'incendie furent
réparés, grâce à la libéralité du prince. La grande
salle fut rebâtie, et près d'elle on construisit une fort
belle classe pour la théologie. » (2) On ajouta à cela une
maison de campagne très confortable et la note s'éleva
à plus de deux mille écus. Cette fameuse salle - des
actes peut se voir encore aujourd'hui: c'est celle qui
occupe le fond de la cour du collège de Ponl-à-Mous-
son ; il est vrai qu'elle a beaucoup perdu de son
antique splendeur : Elle mesure environ trente mètres
sur treize ; à l'une des extrémités s'élevait une plate-
(1) L Université de Pont» à-Mousson, publiée par le P.
Carayon. Paris, 1870, in-8o, page 479.
(2) Ibid, page 434.
— 250 —
forme du haut de laquelle les rhétoriciens prononçaient
des discours en public ; à côté s'étendaient des gradins
en amphithéâtre pour les étudiants en théologie et en
philosophie lorsqu'ils soutenaient des actes; et un peu
au-dessous se trouvait la place pour les écoliers qui
assistaient à ces séances solennelles. Le plafond était
peint en rouge semé de fleurs. Celte construction était
plus élevée que les voisines, d'environ trois pieds. La
porte d'entrée ornée de deux colonnes latérales était
surmontée des armes de Lorraine ; les initiales des
noms de Jésus et de Henri étaient peintes au-dessus de
chaque fenêtre.
La façade en a été représentée par Appier Hanzelet
dans la planche principale qui accompagne le Sacra
atque hilaria du P. Wapy. Elle se trouve à droite de
la gravure ; on y aperçoit, à travers la porte large
ouverte, une foule compacte qui assiste à une fête quel-
conque. Cette salle d'honneur servait à tout : Examens,
soutenances de thèses, joutes littéraires, représenta-
tions théâtrales, réunions plénières de l'Université,
réceptions officielles du Souverain. Il faut croire qu'on
en ouvrait souvent les portes, car la vie universitaire
était intense à Pont-à-Mousson, au commencement du
xvn* siècle ; on profitait de toutes les occasions pour
la manifester ; les fêtes y étaient fréquentes et souvent
même éclatantes.
Une salle des actes, vaste, commode et richement
décorée, méritait bien une inauguration solennelle. Le
duc ne pouvait faire autrement que de rehausser la
cérémonie par sa présence ; c'est encore l'inépuisable
P. Abram qui nous le raconte (1).
(1) Ibid, page 446.
— 251 —
c Ea 1614, les écoliers de FUniversité étaient au
nombre de quinze cents, sans compter ceux qui sui-
vaient les cours de droit ou de médecine... Jamais les
classes supérieures n'avaient réuni un aussi grand
nombre d'étudiants ; plus de cent suivaient les leçons
de théologie scolastique. Quand le duc de Lorraine
Henri vint nous voir, au retour d'un voyage (1),
vingt et un jeunes gens, choisis parmi ses condisciples
de classe, le complimentèrent en autant de langues
différentes, et presque tous dans leur langue mater-
nelle. Cet exercice plut infiniment et montra en com-
bien de contrées étrangères s'était répandue la répu-
tation de rUniversité, puisqu'elle appelait dans son sein
des représentants de langues si diverses ».
Jusqu'ici, on avait dû croire l'historien' sur parole;
on se contentait, de dire avec l'abbé E. Martin :
« Nous aimons à croire que les harangues étaient
courtes».
Aujourd'hui nous pouvons nous faire une idée très
précise de ce qu'étaient ces harangues, ou plutôt ces
compliments, car la Bibliothèque publique de Nancy
vient d'avoir l'heureuse fortune d'acquérir un recueil
où ces morceaux si variés de littérature ont été
conservés.
Dix-neuf langues seulement sont représentées dans
ce volume ; il en manquerait donc deux à l'appel ; mais
ce qui reste suffit pour modiRer un peu ce que nous
dit l'historien quand il affirme que les jeunes gens ont
parlé presque tous dans leur langue maternelle. D'un
autre côté, nous avions admiré la patience dont le duc
(1) Ce fat vers le milieu du mois de décembre ; Henri II
revenait des Etats généraux de Bar.
— ass-
it fait preuve en écoutant tous ces écoliers, cepen-
t nous étions encore bien loin de compte : on a
lé vingt et une langues, c'est possible, mais il n'y
pas qu'un seul orateur pour chacune d'elles. Nous
sédons en etTet cinquante-trois compliments, dont
; seulement sont signés par des étrangers; les
rante-cinq autres portent des noms Trançais et
tout des noms lorrains. Le nombre des contrées
ingères représentées parles orateurs, n'était donc
aussi grand qu'on aurait pu le croire; mais le
àonnel enseignant qui, lui, était cosmopolite avait
iité pour préparer cette belle mise en scène,
faut aussi remarquer que les étudiants appelés à
rmer le duc par leur éloquence, étaient exclusive-
it des élèves du collège et delà faculté des arls (I) ;
X des autres facultés ont sans doute célébré cette
te d'une autre façon, et même il est à supposer que
étudiants en droit et en médecine n'y ont Joué
un rôle de spectateurs, car les bâtiments que l'on
jgurait ne devaient pas servir à leur usage.
is avons vu. en effet, dans la description de la
nde salle, que le P. Abram ne parle que des places
snagées pour les exercices des rhéloriciens, des
losophes et des théologiens.
lenri H n'était pas polyglotte, paralt-il, car, à la
te de tout compliment qui n'était ni en français ni
latin, venait un autre compliment qui en donnait la
juclion ou au moins l'explication, en l'une ou en
l) Au point de vue du nombre de» étuiliaata étranger*,
fsctilté de droit aurait ceitainement présenté plui de
u>nrce8, si l'on en croit H. Lepage, Annuaire de la.
■tr'ke, 1865, pages 33-40.
r
HARANGUE de PHILIPPE des ARMOISES
'«TT
- 253 —
l'autre de ces deux langues. Le duc qui avait été
étudiant de l'Université comprenait certainement le
latin que lui récitaient ses anciens condisciples; mais
il n'entendait pas même le patois lorrain, la langue de
son peuple.
11 nous serait difficile.de dire dans quel ordre les
orateurs ont pris la parole ; les pièces qui composent
notre recueil sont un peu pèle-mèle ; il n'est pas pro-^
bable qu^elles aient été reliées suivant un classement
quelconque.
Ce doit être une coutume déjà ancienne que celle de
faire écrire par l'enfant bien sage, une lettre parfaite-
ment soignée, sur un beau papier à fleurs, à l'adresse
de son père pour lui souhaiter une bonne fête. Les
compliments des écoliers de Pont-à-Mousson ne sont
pas nuire chose :
Quelques vers (quatre, six, huit et quelquefois plus)
calligraphiés sur une grande feuille de papier (1) ;
tout autour des guirlandes de fleurs et de fruits ; en
haut les armes du duc, tantôt peintes, tantôt gravées ;
en bas celles de l'orateur, lorsqu'il en avait.
En général les armes de Lorraine y sont asses
correctes ; la gravure notamment nous a semblé remar-
quable, nous supposons qu'elle a été faite pour la
circonstance : elle mesure 215 sur 140 millimètres; au
centre, les armes pleines supportées par deux aigles ;
à gauche, la figure de Mars ; à droite, celle de
Minerve ; et au-dessus de la frise, des anges formant
deux groupes et soutenant les armes simples de Lor-
raine et celles de Jérusalem .
(1) Ces feuilles mesurent 490 millim. sur 310,
— 254 — .
Malheureusement, toutes les feuilles ne sont pas
restées intactes de ce côté : il n'y en a plus que sept
avec les armes peintes et onze avec la gravure ; on a
enlevé cette partie décorative dans les autres, en res-
pectant toutefois et le texte et les armoiries des étu-
diants. Ces dernières sont rarement exactes ; elles
renferment bien, la plupart du temps, les pièces que
leur attribuent les armoriaux, mais le dessin et la
peinture n^y sont pas toujours conformes aux règles
de Fart .héraldique.
La personne qui a fourni la note pour la rédaction du
catalogue annonçant la mise en vente du recueil,
semble bien connaître l'histoire de l'Université de
Pont-à-Mousson. Après avoir dit à quel propos les étu-
diants avaient composé ces sonnets, ces épigrammes et
ces madrigaux, elle ajoute : « On réunit en un volume
bizarrement orné toutes ces pièces de vers écrites et
signées par les auteurs et on les offrit au duc de Lor-
raine » (1).
Que sont devenus pendant plus de deux siècles, ces
chefs-d'œuvre d'un art enfantin ? Par quel hasard
sont-ils venus échouer chez un libraire de Paris ? Nous
l'ignorons. Quelques notes, des renvois au nobiliaire
de Dom Pelletier, d'une écriture du xviii* siècle, nous
font supposer que notre album a été en la possession
d'un amateur qui en faisait beaucoup de cas et qui a eu
soin de recoller les déchirures, de rassembler les lam-
(1) Catalogue de la librairie Téchener, à Paris, janvier
1892, page 25. Ce volume faisait partie de la bibliothèque
J.-J. Téchner; il est déjà décrit au t. II, page 102 de la
Description raisonnée de sa collection choisie d'anciens
manuscrits, Par4.86is, 1
— 255 —
beaux^ de reboucher, avec du papier blanc, les trous
qu'on avait faits en enlevant les armoiries.
En publiant la liste des orateurs avec Tindication de
la langue dont ils ont fait usage, nous n'avons pas la
prétention de combler une bien grande lacune dans
l'histoire de la Lorraine ; mais les archives de notre
ancienne université ne sont pas tellement riches que
l'on ne doive en recueillir avec soin toutes les épaves.
En prévision de l'ennui que pourrait causer cette
nomenclature, il serait peut-être bon d'emprunter à
l'étudiant Jean Wasselin de Paris, la précaution oratoire
par laquelle il a réclamé la patience du duc. Après avoir
exposé, dans trente alexandrins^ cette idée que d'au-
tres, plus pressés, résument dans ces deux motè « no-
blesse obUge », il termine :
c Endurez^ permettez et admettez V hommage
Que ceste infanterie en faict jeune et en aage
Veult vous rendre ; elle a droict de demander cela
Vostre Altesse pouvoir de dire le kola ! m
Un autre orateur, Gabriel Mercier de Ghaumont, a
développé dans le même but cette autre adage « bien-
fait oblige », et a conclu :
Voyez ces jeunes gens.,
Recevez^ oyez-les^ ce sont autant d'agents,
De légats, d*crateurs qui de diverses terres.
Se rencontrent ensemble après lointaines erres
Pour vous rendre l'hommage et vous rendre Vhonneur
Et la reconnaissance et grâce du bonheur
Qu'amplement votre Pont, votre cité très sage
Leur a soub vous fourny sans loyer ^ sans payage.
Us seront trop heureux, Prince, de saluer
Votre Altesse et en peu de peur de f ennuyer.
— 256 —
Voilà ce qui a fait dire à Fauteur du catalogue de
Téchener : « Il paraît que les élèves et les professeurs de
rUniversilé de Pont-à-Mousson s'occupaient rare-
ment de poésie (ajoutons: française). Les vers français
de ce recueil sont d'un style à faire frémir les Muses. »
Les jésuites ne se faisaient pas d'illusions à ce sujet ;
Tun d'eux, le P. de Jouvency ne disait-il pas : « Je ne
conseillerai jamais à nos maîtres de composer leurs
tragédies en français ; car dans ce genre, nous sommes
généralement maladroits et ridicules (i) » ?
Onze orateurs ont pris la parole en latin (2) :
1 (2) Jacques Le Moleur de Clermont, qui devinf
plus tard chanoine de la Primatiale de Nancy et
chancelier du duc Charles IV. — Six vers avec ce
titre : Henrico II oh vestitutam Mussiponti absumplam
incendio aulanu — Armes de l'orateur (D. Pelletier,
p. 471).
2 (3). Guillaume le Pasticier, de Pont-à-Mousson.
Probablement de la famille de Jean-Philippe le
Paticier qui fut anobli le 27 janvier 1616. — Six vers.
Voici, à titre de spécimen, ces trois distiques qui
certes auraient pu être plus mauvais ; ils sont assu-
rément meilleurs que les vers français reproduits plus
haut.
Le duc y est comparé à Apollon,' il fallait s'y
attendre ; et par un de ces jeux de mots si fréquents à
(1) E. Martin, op. cit., page ^ 10.
(2) A la suite du numéro d*ordre de cette liste, nous
avons mis entre parenthèses celui que porte la pièce dans
le recueil.
— 257 —
répoque» les écoliers /liussiponlains se comparent aux
Muses .
Henrico II
Cumdoclas intercersatur ApoUo cohortes.
Ex animo Musis carmina docta fluunt.
Mussonios inier quando versaris alumnos^
riurima Castalio carmina fonte fluunt,
Anne sacras nobis cupis exundare liquores ?
MussonioUf Princeps, sœpe révise lares,
Tihi addiciissimus atque aubditus
humillimus
Guillemus le Pasticier
Mussipontanus .
3 (4). François Regnaull, de Pont-à-Mousson ; de la
famille de Nicolas Regnault, précepteur des pages du
marquis de Ponl-à-Mousson. — Quatre vers. —
Armes ducales peintes soutenues par deux anges. —
Armes de l'orateur (D. Pelletier, p. G86).
4 (5) Abraham de Landres, dit de Briey ; de Tan-
cienne chevalerie de Lorraine. — Huit vers en lettres
d'argent, sur fond pourpre. — Armes de l'orateur.
5 (7). Simon Messier de Montmirail. — • Traduction
de l'hébreu du même auteur (voy. n® 17 [6]). — Huit
vers. — Armes ducales gravées.
6 (20). N. de Véroncourt, petit-fils de Thierry Alix.
— Quatorze vers en lettres d'argent, sur fond pourpre*
— Armes de l'orateur (D. Pelletier, p. 6).
7 (48). Jacob de Bermand, second fils de Jean de
Bermand et de Beatrix de Bourg ; il devint le chef de
la branche des seigneurs de Pulligny* — Quatre vers
en lettres rouges, intitulés: Austrasiœ gralulaloria,
17
8 (49). Le nom a disparu. — Quatre vers, en lettres
rouges, sous le titre Gueldna que supportent deux
lions d'or.
9 (50). Le nom de Porateur qui se dit de Florence,
a disparu. — Six vers, en lettres rouges, sous le titre :
Sicilia gloriatur. — Armes ducales gravées .
10 (51). Nicolas Mengin de Nancy. Il devint conseil-
ler-secrétaire d'Etat et garde du Trésor des Chartes
(D. Pelletier, p. 561). — Huit vers, en lettres rouges,
sous le titre : Terra sancta.
11 (52). Masselin de Nancy, l'un des deux fils de
Charles Masselin et d'Antoinette La Ricq (D. Pelle-
tier, 542). — Six vers, en lettres noires sur fond
pourpre, surmontés de deux lions d'or soutenant l'écu
de Bar.
Quatre en grec :
12 (1). Pierre-Ernest Molart (le comte), de Vienne,
Autriche. — Deux vers, en lettres d'argent sur fond
pourpre. — Armes ducales peintes. — Armes de
l'orateur.
13 (12). Pierre Thouvenin. Le nom du lieu d'ori-
gine a disparu. — Six vers. — Armes ducales gravées.
14 (14). JeanMauljean, natif du Pont, petit-fils de
Jean Mauljean, lieutenant de conservateur des privi-
lèges de l'Université. — Quatre vers. — Armes de
l'orateur (D. Pelletier, p. 548).
i5 (46). Charles Chalmian(?). — Le texte est dis-
posé en forme de croix de Lorraine, eu lettres blanches
sur fond pourpre. — Armes de l'orateur.
— 259 -
Deux en hébreu :
16 (i7). Louis de Mouzay. ~ Deux versets en lettres
blanches sur fond pourpre. — Armes de l'orateur
(Grandmaison, col. 190).
17 (6). Simon Messier de Montmirail. — Huit ver-
sets.
Un en syriaque :
18 (21). N. Martiny, de la famille de Claude Marliny,
châtelain de la Garde, anobli en 1595, par le cardinal
Charles de Lorraine, évêque de Metz et de Strasbourg
(D. Pelletier, p. 541). — Le texte et la dédicace, en
lettres blanches sur fond rouge, sont disposés de façon
à former la lettre H. — Armes de l'orateur.
Un en bohémien :
19 (11). Philippe-Baltazar de Dalbourg. — Six vers.
— Armes de l'orateur.
Un en allemand :
20 (23). Pierre-Ernest de Neyss de Huma (?). —
Huit vers en lettres rouges. — Armes ducales peintes.
— Armes de Forateur.
Deux en écossais :
21 (42). Jean de Weisse dont le père avait été anobli
en 1601, devint conseiller d'Etat et procureur général
du bailliage d'Allemagne. — Quatre vers, en lettres
d'or sur fond pourpre. — Armes de l'orateur (D.
Pelletier, p. 830).
22 (35). Philippe des Armoises, qui devint seigneur
— 260 —
d'Haaoacelles, baron d'Anderny et Mureau, pair de
l'évêché et comté de Verdua. — Six vers en lettres
d'or sur faiid pourpre. — Armes ducales peintes. —
Armes de Torateur.
Un en anglais :
23 (87). Hénart. Christophe Hénarl fut conseiller et
sénéchal de Tévêché de Toul. — Six vers en lettres
d'argent sur fond pourpre. — Armes de l'orateur (D.
Pelletier, p. 358).
Un en flamand :
24 (25). Le nom de Tauteur, qui se dit sujet français,
est rogné et illisible. — Seize vers en lettres rouges.
Un en wallon :
25 (44). Hermolaus (?). — Le texte est écrit sur le
pourtour de deux cœurs dessinés en rouge, Tun dans
l'autre. — Armes ducales gravées. — Armes de Tora-
leur.
Un en italien :
26 (28). Joseph Arnoltini de Lucques. — Quatorze
vers en lettres rouges. — Armes de l'orateur.
Un en osque :
27 (26). Ghrestien d'Anglure de Ghambrey, fils de
Jean d'Anglure et de Marie de Saint-Ligier. — Sept
, vers en lettres d'argent sur fond pourpre. — Armes de
l'orateur.
Un en espagnol :
28 (33). Philippe-Théodore de Manderscheidt Keyll,
— 261 —
cVune famille autrichienne. — Dix vers en lettres d'or
sur fond pourpre. — Armes de Torateur.
Un en turc :
29 (89). Antoine de Bourg. — Deux vers en lettres
d'argent sur fond pourpre ; au-dessous du turc ces
deux vers français :
* Le turc encore qu*obscur imite le lorrain
Ne vous étonnez pasy vous le rendez humain »
— Armes de l'orateur.
Un en polonais :
30 (40). Snietoslausky. — Quatre vers en lettres
d'or sur fond pourpre. — Armes de l'orateur.
Vingt en français :
31 (15). Jean Vasselin de Paris, humaniste. —
Trente-quatre vers en lettres rouges, avec ce titre
IJenlréeà Son Altesse. — Armes de l'orateur.
32 (16). Gabriel Mercier, chaumontois. — Trente-
huit vers, en lettres rouges. — Armes ducales peintes.
— Armes de l'orateur.
33 (9). Claude Notaire, natif du Pont. Auditeur des
comptes de Lorraine, il fut anobli par Charles IV, en
1634. — Trente-deux vers. — Armes de l'orateur (D.
Pelletier, p. 599).
34 (10). Jean Lut... (le reste du nom a disparu). —
Trente-deux vers, sous le titre A son Altesse sur le
même sujet de la salle rebastie. — Armes ducales
gravées.
— 262 —
(13). Galaade de HauU, champenois. — Quatorze
(18). Louis de Mouzay. — Six vers donnant la
ition du texle hébreu du même (voy. n° 16.) —
n ducales peintes.
(19). Alexandre Le Grand (ie nom du lieu d'orï-
disparu). — Vingt-huit vers en lettres rouges.
(ââ). Erard Humbert, second (ils de Jean Hum-
3t de Christine Bouvet, fut conseiller d'Etat et
nant général au bailliage d'Allemagne. — Six
lonnant l'explication du syriaque (voy. n°18). —
s de l'orateur (D. Pelletier, p. 391).
(24). Pierre de Rutaiit, qui fut conseiller d'Etat
cour des Grands jours de Saint-Mlhiel. Il est de
mche des Rutant seigneurs de Pullenoy. — Huit
en lettres rouges. — Armes de l'orateur (D.
lier, p. 724).
(27). François Perin, de Nancy. C'est sans doute
me que nous retrouvons, dix ans plus tard, ban-
et second conseiller de la ville de Nancy. — Six
donnant l'explication du lorrain, de l'oscain et du
Tiien. — Armes ducales gravées.
(29). Barthélémy Arnolphini de Lucques ; sans
i le frère de l'orateur du même nom cité plus
— Quatorze vers, sous le litre : Sonnet italien
lé en français (voy, n' 26). ^ Armes de l'orateur.
(31). Jean de Blaive, barrisien. — Quatre vers
int la traduction du gascon du même auteur
n'51).
(32). François. Marchai de Bar. La famille Mar-
ie Bar fut anoblie en 1700 (D. Pelletier, p. 532).
— 263 —
— Huit vers expliquant le flamand (voy. n° 24). — Armes
ducales gravées.
44 (34). François de Gourcy ; de Tancienne cheva-
lerie de Lorraine ; il devint lieutenant-colonel et gou-
verneur de Vildestein, pour le service du duc Charles IV.
— Vingt-deux vers avec la dédicace : A Son Altesse
au retour des estais généraux,
46 f36). Paul des Armoises, de Tancienne cheva-
lerie de Lorraine, fut plus tard capitaine-lieutenant
d'une compagnie de chevau- légers, dans Tarmée de
Charles IV. — Vingt-quatre vers donnant là reddition
de Pescossois du n°22.
46 (38). Jean Badet de Nancy ; probablement le fils
de Dominique Badet, avocat et conseiller de la ville de
Nancy, lequel fut anobli en 1605. — Huit vers, explica^
tion de Vanglois du n** 23. — Armes ducales gravées.
47 (41). Charles Didier; rien n'indique à quelle
famille de ce nom il appartenait. — Six vers en lettres
rouges, donnant la translation du polonais du n** 30. —
Armes ducales gravées.
48 (43). Luc Lombard de Verdun. — Quatre vers en
lettres rouges, donnant la traduction de l'écossais du
n«21.
49 (45). Jean-Baptiste Dimercelz (?). Seize vers en
lettres rouges, contenant l'explication du wallon du
n«25.
50 (47). Chrestien d*Anglure deChambrey, le. même
qu'au n° 27. — Six vers. — Armes ducales gravées.
Un en gascon :
51 (30). Jean de Blaive (Janot de Blebe) ; plus tard
— 264 -
seigneur de Tannoy et conseiller auditeur des comptes
de Bar. — Quatre vers. — Armes ducales peintes. —
Armes de l'orateur (différentes de celles que donne D.
Pelletier, p. 58).
Un en provençal :
52 (53). Mourot. — Six vers. — Armes ducales
gravées.
Un en patois lorrain :
53 (8). Jean Huin ; de la même famille que Baltazar
Huin, conseiller à la Cour Souveraine, et intendant de
la duchesse Marie-Louise d'Apremont, seconde femme
de Charles IV. — Huit vers.
Les monuments de la langue populaire de la Lor-
raine sont assez rares pour que celui-ci mérite les
honneurs de la publication :
A très ha très pouchant chignon
Monchieu le brauve^ voyant
Seygey Prince âe Lorraine
Monchieu Son Altesse
Dey H donne boine vie et longe
Se je svo let brauve paslure (Tin Ciceron esloquan
Ou cCVirgil Vinvantion^ Messieu, fesro foche effaire
Espanse bin que fen posro ercontet ce qu'en a veu fere
Let gernation lorraine so Prince en santet voyant
May sot coutet sraje erpry ou srasge heuchie esleudhy
D'moset mantret sy hesdhy, que d^ly d*net in ptet escry
Non non quat je li dvant Chonnou^parme tortot noste pesy
In sy voyant f in sy dou, in sy brauve prince que vassy.
Vaut valot
Chan Huin
— 265 —
En voyant ce texte, on pourrait croire que Huin a
paHé en iroquois, mais son seul tort est d'avoir écrit
son patois sans ortographe, c'est-à-dire sans tenir
compte des racines des mots qu'il emploie.
Voici la tradiiction littérale de ce compliment,
pour les personnes à qui cette langue n'est pas fami-
lière :
« A très haut, très puissant Seigneur Monsieur le
brave, prudent, sage prince de Lorraine, Monsieur Son
Altesse. Dieu lui donne bonne et longue vie.
« Si je savais le brave langage d'unCicéron éloquent,
ou (si j'avais) l'imagination de Virgile, Messieurs, j'au-
rais fort à faire. Je pense bien que j'en pourrais
raconter sur ce que j'ai vu faire par celte génération
lorraine» à la vue de son prince en bonne santé. Mais,
sans conipter, serai-je blâmé, serai -je loué de me
montrer assez audacieux pour lui donner un petit écrit.
Non, non, car nous lui devons l'honneur dans tout
notre pays, à un si prudent, si doux, si brave prince que
voici. Votre serviteur. Jean Huin »,
CONTRIBUTION
L'ÉTUDE DES CAMPS VITRIFIÉS d^ CALCINÉS
PAR
M. F. BARTHÉLÉMY
Les premières publications relatives aux enceintes
vitrifiées remontent déjà à un siècle. C'est en Ecosse,
on le sait, que furent signalés d'abord plusieurs
ouvrages de ce genre; puis on en découvrit d'analogues
en France, en Allemagne et en Danemark. La biblio-
graphie des travaux auxquels ils donnèrent lieu serait
trop longue pour le cadre modeste de cette note ; qu'il
nous suffise de citer parmi les archéologues français
qui s'en sont occupés : P. Mérimée, Rallier, MM. de la
Pylaie, Mangon de la Lande, Goudert de Lavillatte, de
la Sicottière, Noêlas, Darcel, de Montaiglon, J. Marion,
général Prévôt, et plus récemment, MM. Geslin de
Bourgogne, P. de Gessac, Thuot, P. Mayaud, etc.;
enfin M. le professeur Daubrée qui étudia le procédé
de vitrification des roches, et M. le colonel de la Noë,
dont les recherches sur la classification des enceintes
antiques sont connues de tous.
Pendant de longues années, Tétude de ces monu-
ments étranges, dont aucun document écrit ne men-
tionne l'existence, avait passionné les archéologues ;
— 267 —
f
aujourd'hui, ils sont retombés dans Toubli, et pourtant
le problème de leur origine et de leur antiquité n'est
point encore résolu. A quelle cause attribuer cet aban*
don? Serait-il téméraire de le rapporter à la divergence,
à la multiciplité des opinions émises, divergence qui a
découragé les plus hardis ? Chaque auteur, en effet,
limitant ses recherches au seul monument qu'il explo-
rait, ou tout au plus, aux enceintes d'une même région,
appuyait ses conclusions sur Texamen d'un cas unique.
Aussi se trouve- t-on en présence des hypothèses les
plus variées au sujet de l'antiquité relative de ces
singuliers ouvrages. Il n'en pouvait être autrement,
faute de points de comparaison.
La découverte toute récente de murailles de défense
construites, non plus en roches cristallines, mais en'
matériaux calcaires transformés en chaux sur place,
remet en question l'origine des parapets élevés avec
l'aide du feu, quelle que soit la nature minéralogique de
la roche employée, car, dans l'un et l'autre cas, le
même procédé a été mis en œuvre pour obtenir la prise
en masse des matériaux. La destination défensive de
ces enceintes n'étant plus en cause, cette étude aura
pour principal objet de rechercher leur origine proba-
ble, ou du moins la date de l'application du procédé sur
notre soU Dans ce but, nous passerons successivement
en revue les enceintes les mieux explorées et nous
utiliserons les documents archéologiques fournis par
chacune d'elles.
On compte en Europe plus de vingt camps vitrifiés ;
ils sont répartis de l'Allemagne à l'Ecosse et du
Danemark à l'Aquitaine. En France on a signalé les
— 268 —
enceintes de Péran (Côtes- du-Nord), de la Courbe
(Orne), de Ste-Suzanne (Mayenne), du Puy de Gaudy,
de Châteauvieux et de Thauron, dans la Creuse, et enfin
le Harlmannswillerkopf, dans Tancien département du
Haut-Rhin.
Les camps à murailles calcinées actuellement connus
sont au nombre de cinq : le camp d'Affrique, la Fou-
rasse et la Butte Sle-Geneviève, tous trois dans le
voisinage de Nancy, l'enceinte de Céneret (Vienne), et
le camp de Vœuil, près d'Angoulême (Charente).
Tous les monuments que nous venons de citer ont
été l'objet d'explorations et de fouilles dont les résultats
se trouvent consignés dans de nombreuses publications.
L'ensemble de ces travaux, dus pour la plupart à des
archéologues éminents, fournit des renseignements
descriptifs très complets, mais en même temps nous
met en présence des conclusions les plus diverses au
point de vue de l'attribution d'époque. Basant leurs
hypothèses sur le caractère des objets recueillis dans
les fouilles, certains auteurs font remonter la cons-
truction des enceintes vitrifiées aux temps de l'indé-
pendance des Gaules, tandis que d'autres la reportent
aux débuts de la féodalité. Nous ne parlerons pas de
l'opinion qui attribue la vitrification des matériaux à
l'incendie de poutres de bois intercalées dans la muraille,
il n'est plus personne, en France du moins, pour la
défendre. L'examen d'une coupe pratiquée dans l'un
quelconque des parapets vitrifiés démontre que la fusion
a été produite intentionnellement ; et du reste, il
suffirait de calculer la quantité de combustible néces-
saire à la production d'un volume donné de blocs
fondus, pour en démontrer l'inanité.
— 269 —
Il résulte de cette discordance d^opinions émises,
qu'à rtieure actuelle, les éléments indispensables font
défaut, lorsqu'on veut étendre des conclusions géné-
rales à l'ensemble des ouvrages de défense vitrifiés ou
calcinés. Mais telle n'est point notre intention, nous
tenons à le rappeler ici pour éviter toute équivoque, et
notre but sera de rechercher à quelle époque la plus
ancienne ce mode particulier de construction apparut
et fut appliqué pour la première fois en Gaule.
Lorsqu'on entreprend l'étude des murailles en roches
agglutinées par le feu, la première question qui se
présente à l'esprit, c'est l'utilité, la destination de ce
mode de construction. Quelques-uns ont vu, dans les
cendres et calcaires brûlés inclus dans les murailles,
des restes de ces foyers de cuisine qu'on retrouve
partout, disposés réguUèrement au pied du parapet des
enceintes antiques ; d'autres pensèrent y reconnaître
les vestiges de sépultures à incinération. Ni l'une, ni
l'autre thèse n'est soutenable, car, en examinant
attentivement une coupe pratiquée à travers une muraille
calcinée ou vitrifiée, on se rend facile^nent compte du
dispositif employé pour obtenir la fusion oulacalcination
du massif: le charbon et la roche superposés par lits
alternatifs, indiquent bien que l'intervention du feu fut
intentionnelle et qu'elle eut pour but de consolider le
parapet par la prise en masse des matériaux.
Ce premier point étant admis, on recherchera pai'
quels hommes, et à quelle époque, semblable procédé
fut mis en œuvre. Le problème a été formulé en ces
termes : Doit- on rapporter les camps vitrifiés à un
même peuple ayant envahi progressivement toute TEu-
— 270 —
rope occidentale ? Ou bien, les populations autochtones
qui les élevèrent durent-elles recourir à un, mode de
construction particulier, à défaut de matériaux propres
à bâtir des murs en terre, pierres et bois ?
Si la première proposition demeure non résolue, par
contre, la découverte de camps à murailles calcinées,
c'est-à-dire faits de calcaire intentionnellement trans-
formé en chaux, est contraire à la seconde. Elle per-
met d'éliminer de prime abord la conjecture qui limite
aux seuls pays dépourvus de calcaire, ou de moellons
propres à bâtir, l'utilisation de la chaleur appliquée aux
matériaux. Telle était, en efïet, Topinion la plus accré-
ditée jusqu'au jour où une tranchée pratiquée dans les
remparts du camp d*Affrique, près de Nancy, prouva,
sans doute possible, que le feu fut également mis en
œuvre pour rédifîcation de murailles calcaires, aussi
bien que pour la construction de murailles en roches
granitiques.
Plusieurs découvertes, plus anciennes cependant,
avaient passé inaperçues. Dès 1842, au Congrès scien-
tifique de France tenu à Strasbourg, V. Simon signa-
lait la trouvaille d'objets en bronze (épingle, hache à
douille et faucilles), au sommet du coteau de Lessy,
près de Metz, « dans les ruities d'une construction anti-
que ». Il décrit en ces termes la muraille dans laquelle
les objets se trouvaient enfouis : « Cest un mélange
de galets calcaires, ramassés pêle-mêle sur le sol, et
de chaux sans sable ^ faite avec le calcaire de la forma-
tion oolithique.,, et cuite d'une manière très grossière,
à en juger par les débris de plantes charbonnées mêlés
avec la chaux,,. U origine celtique^ ajoute Simon, paraît
confirmée par les instruments en bronze mis au jour
— 271 —
par les fouilles, » D*après celle description, on doit
penser qu'il est question ici déjà d'une muraille à noyau
calciné.
Mais rétude critique des murs d^enceintes construits
à Taide de calcaire transformé en chaux est bien plus
récente, elle dale de quelques années à peine, à la
suile des publications de MM. Gaillard delà Dionnerie,
sur le camp de Géneret (Vienne), Lièvre, sur le camp
des Anglais, à Vœuil (Gharente) et les nôtres sur les
enceintes lorraines. Enfin, c'est en 1886 seulement,
quand le génie militaire fit passer une route stratégi-
que à travers les énormes remparts du Camp d'Affrique
(près de Nancy), que Ton reconnut dans ses murs cal-
cinés (1) une œuvre comparable, sinon identique
aux murs vitrifiés. Depuis lors des ouvrages analogues
ont été découverts dans la même région lorraine, à la
Fourasse et à Ste-Geneviève.
Les rares spécimens des murs calcinés, actuellement
connus, se trouvent répartis aux deux extrémités de la
France, dans les régions même où Ton connaissait déjà
des enceintes vitrifiées ; impossible donc de les consi-
dérer comme le résultat d'un accident ou comme une
manifestation sporadique d'un procédé appliqué au
hasard et sans principes. Bien plus, la distance qui
sépare des ouvrages identiques fait naître la certitude
que bien d'autres seront signalés avant longtemps.
Si Ton compare les enceintes à vitrifications les mieux
étudiées aux enceintes à calcinations que nous venons
(1) La découverte due â MM. Millet et Bleicher, profes-
seurs â la Faculté de Nancy, a été publiée dans les comptes
rendus de rAssocialion française (Congrès de Nancy, 1886) .
— 218 -
citer, on observe que la méthode employée pour
Are les roches crislallîaes, ou pour tranErormer le
caire en une masse homogène de chaux, semble
)ii' été pai'lout la même. Les produils obtenus ne
fèrenl entre eux qu'en raison de la nature variée des
tériaux soumis au ft;u. Dans tous les cas décrits, le
nbustible se retrouve, a l'état de charbons et de
idres, intercalé à plusieurs niveaux dans les blocs
liés ; d'où il est permis de conclure que la chauffe
pérait en entassant alternativement des lits de bois
des lits de pierres. Un autre détail mérite d'être
evé : avant d'élablir leurs foyers, les constructeurs
valent un bourrelet de terre ou de pierres brutes
lire lequel ils appuyaient ensuite le massif à sou-
tire au feu. Ce fait a été constaté à Péran et au Puy-
-Gaady, comme au Camp d'Affrique.
Par leur profli, les parapets qui ont subi l'action du
1 ne se distinguent en rien des levées eu pierres
:hes, toutefois plusieurs d'entre eux sembleraient
]ir mieux conservé leur relief primitif que ces der-
ires.
Le tracé des ouvrages calcinés ou vitrifiés corres-
nd a tous Jes types connus de fortification préhis-
ique : éperons barrés par un mur sans fossé, enceintes
puyées à une falaise, oppidums, etc. De la ressem-
ince de quelques enceintes à matériaux brûlés avec
les que l'on considère comme prototypes, ou serait
ité de conclure que l'application de la chaleur aux
vrages de défense est aussi vieille que les enceintes
irées les plus anciennes. On objectera, il est vrai,
3 la fusion ou la calcination peuvent être dues à un
naniemeul postérieur ; mais, après examen, il sera
— 273 —
impossible de prouver un pareil remaniement dans les
éperons barrés par un mur sans fossé de Vœuil ou de
la Pourasse. Par conséquent, lorsqu'on cherche à dater
ces ouvrages ou à les comparer entre eux, il importe
de tenir compte, non seulement de leur tracé et de leur
superficie, mais surtout des objets d'industries carac-
téristiques trouvés dans chacun d'eux. Dans le cas de
trouvailles d'objets de plusieurs époques, les pièces
qui, par leur gisement ou par leur type, paraissent se
rapporter aux plus anciennes occupations des enceintes
offrent seules de l'intérêt. Les silex taillés ou même
polis ne doivent être considérés qu'autant que le sol
enclos ne renferme aucune trace d'industries plus
récentes; car les emplacements que la nature elle-
même a pris soin de fortifier avaient été presque tou-
jours occupés antérieurement à la construction des
remparts.
L'importance en surface des enceintes fortifiées
n'aurait que peu de valeur si Ton admettait qu'elle
correspond simplement au chiffre de la population à
abriter. Mais la faible superficie de certains forts vitri-
fiés, ceux de l'Ecosse, de Ghateauvieux et de Hart*
mannswiller, par exemple, ne répond pas à cette
donnée, et M. le colonel de la Noë assimile à juste titre
ces dernières aux châteaux forts du moyen-âge. Il en
résulterait que Tart d'édifier des murailles â Taide du
feu fut pratiqué à plusieurs époques fort distantes
puisque leur superficie correspondrait à différents états
de civilisation.
S'il est difRcile de comprendre tous ces ouvrages
dans une même étude et de leur appUquer des conclu-
sions générales, on peut tenter cependant de rechercher
18
— 274 —
oque d* leur première ou plus ancienoe utilisation ;
lans ce but, il coavieat de rassembler tous les ren-
inements fournis par l'exploration des principales
finies calcinées ou vitrifiées.
Enceinte de Cènent
près les nombreux travaux relatifs aux camps du
de Gaudy et de Péran , travaux qui remontent
3ommencement de ce siècle, la découverte la plus
enne en date émane de M, Gaillard de la Dion-
B, qui publia en 1884, dans le Bulletin de la Société
Antiquaires de i^Ouest, le résultat de ses fouilles au
p de Géneret, dans la Vienne. I/enceinto de Géuerel,
; de Quinçay et deVouilié, occupe une presqu'île
lée par un repli de l'Auzance ; la supertide serait
hectares environ (d'après M. Lièvre)- Les faces
urées par la rivière ne portent aucune défense
Icielle ; seul, le coté de la plaine se trouve barré
loyen d'un parapet précédé d'un fossé,
'après la coupe pratiquée par M. Gaillard, le
ipet, dont la section présente 12 mètres de base sur
40 de hauteur, est formé pour la plus grande partie
lierres jetées au hasard ; mais, dans l'intérieur du
, on découvrit à 0.30 centimètres au-dessous de la
3, « ane couche de cbaui épsisse d'un mèlre for-
t une sorte de banc incliné vers rinlérieur. La
\i est compacte, résistante et sans mélange de sable
te terre. On y trouve seulement quelques rares
r oubliés au milieu des calcaires qui ont été réduits
baux. Le maasif calciné, ajoute l'auteur des fouilles,
séparé des pierres sèches par une couche de terre
— 275 —
(^'environ 0.15 centimètres qui a subi Faction d'un feu
des plus violents il demeure évident que la chaux a
été faite sur place, » Près de Tendroit où M. Gaillard
opéra ses recherches, on avait découvert auparavant
« et presque sur la couche de chaux, une hache en fer,
une pointe munie dune douille et une barre de même
métal. » Dans Tintérieur du camp on trouva un bracelet
et une statuette en bronze, enfin dans le . voisinage,
mais au dehors de Tenceinte, une sépulture à char
avait été exhumée (1).
Il est fort difiicile d'apprécier la valeur des décou-
vertes faites à Géneret, car les objets trouvés au-dessus
de la chaux avaient été recueillis longtemps avant les
fouilles, et Ton est en droit de les croire plus récents
que la calcination puisqu'ils n'ont, pas été déformés par
le feu. La présence de silex dans le parapet ne prouve
rien autre chose, sinon qu'il s'en trouvait sur le terrain
d'où proviennent les matériaux employés.
Camp des Anglais
L*enceinte de Vœuil, près d'Ângoulème, connue
sous le nom de Gamp des Anglais, occupe un promon-
toire bordé de falaises à pic. Elle ligure un triangle
de trois hectares de superficie, dont la base est fermée
par une levée rectiligne de 210 mètres de développe-
ment, sans fossé extérieur. La section du parapet (2)
mesure 5 à 6 mètres de hauteur, sur 25 mètres de base.
A rintérieur du camp, le sol inculte et très plat ne
(1) Bulletin des Antiquaires de TOuest, 188i.
— 276 —
3ute aucune trace de construolîoDS, tumulus, etc.,
autre chose que de rares éclats de silex,
le coupe pratiquée dans le parapet, sous la direc-
de plusieurs archéologues (1), a permis de recon-
e les éléments de sa construction : * A an mètre
'essous de la crête, composée de pierrailles et de
e, nous avons découvert, écrit M. Lièvre, une couche
•.baux hydratée épaisse de 0,80 centimètres en
enne, renfermant des cendres et charbons et -des
menls de poteries et de silei. La base du parapet
'brmée de pierres et de terre amoncelées, et les
iriaux qui supportent immédiatement la cbaax sont
ement colorés par Faction du feu. » Le massif cal-
présente une section lenticulaire dont le grand axe
aisse vers l'intérieur de l'enceinte. La calcioation
ationnelle et pratiquée sur place n'est pas douteuse ;
u reste, l'eiTet obtenu démontre bien le but pour-
i, puisqu'il en est résulté ua noyau solide, imoiua-
qui contribue à conserver le relief du mur. dont
roflt est encore très régulier et nullement affaissé,
ctuellement, la chaux a presque repris la dureté du
aire, nous avons pu le constater nous-mêmes dans
visite récente, car dans la tranchée ouverte depuis
i, on voit le massif calciné, dénudé peu à peu par
e d'éboulements successifs de la blocnillle qui i'eo-
e, se maintenir en surplomb.
es objets recueillis dans le rempart à l'occasion des
) Le résultat des fonillles, exécutées de ISâti k \%6B loua
irection d'une commisaion de la Société archéologique
a Gbsrente, a été pablié dana le Bulletin de cette So-
i, («onée 1886).
— 277 -
fouilles consistent en (1) : c des silex taillés de la pé*
riode néolithique et de menus déiris de poterie, dont
deux ou trois portent des ornements qui peuvent les
faire attribuer à Page du bronze. A différentes repris
ses, dit le rapport précité, on a trouvé des grattoirs,
des Sèches, des haches en silex, dans le camp et dans
son voisinage, et tout ce que la jetée recèle en ce genre
a dû être apporté avec les terres ramassées sur le pla^
ieau pour la former. Ces objets, par conséquent, indi^
quent une date au-delà de laquelle on ne saurait faire
remonter sa construction i>. Et les explorateurs con-
cluent en ces termes : « Il résulte de cet ensemble de
faits que c'est entre la période de la pierre polie et
r arrivée des Romains que les contreforts ou promon-
toires de nos plateaux, depuis longtemps utilisés comme
lieux de refuge, ont vu s'ajouter un retranchement à
leurs moyens naturels de défense ». Nous adoptons
entièrement les conclusions de M. Lièvre, et nous pen-
sons avec lui, que si le parapet calciné de Yœuil ne
remonte pas aux temps de la pierre polie, la position
de l'enceinte, la simplicité de ses défenses et l'absence
de toutes traces de constructions dans l'intérieur ne
permettent pas de l'attiibuer à une époque postérieure
à la civilisation gallo-romaine.
(1) Le camp de Vœutl, rapport présenté à la Société
archéologique de la Charente, par M. Lièvre, — Angoulême,
1889.
La Fonrasae-
/enceinte de la Fourasse (I), près de Nancy, prê-
te la plus grande analogie avec le camp de Voeuil ;
ît aussi un éperon barré par un mur établi sur un
ss'ir de chaux. Elle e&t assise à l'extrémité d'un
mQDtoire élevé qui domine ta vallée de la Meurthe,
re GhampigneuUes et Nancy. La surface enclose,
nviron 6 hectares, se trouve entourée de trois côtés
' des pentes raides sans défenses aftiflcielles ; tandis
3 la face accessible a été séparée du plateau par une
ée rectiligne sans fossé extérieur. Cette levée, longue
338 mètres en ligne droite, présente en coupe (2)
3 section triangulaire de 9 mètres de base, sur 1 m.
de hauteur moyenne. Elle est constituée par un
ssif de chaux très homogène entièrement recouvert
blocaille non calcinée. Les charbons de hêtre, répan-
i à profusion dans la masse de chaux montrent clai-
aent que la calcination s'est effectuée sur place.
Plusieurs tumulus en pierres sèches se voient dans
environs ; l'un d'eux, situé dans l'intérieur même
l'enceinte, nous a donné quelques restes humains
les fragments d'un vase funéraire, sans aucun objet
métal. En outre, nous avons retrouvé, le long de la
1) Noua avoua précédemment décrit cette eQceiiit« dani
publications iuivantes : Nancy et la Lorraine, Berger-
rranlt, 1886, p. 33& ; Compte rendu de l'Assac. franc,
tr Cavancement d«$ gcienca; Nancy 1886 ; tt Rtehtrehei
ihiotogiques sur la Lorrain» avant Fkhtoire, 3,-B. Bail*
re, 1889.
S) Planche I.
— 279 —
levée, du côté intérieur, une série de foyers recouverts
par les éboulis de la muraille ; ils renferment des os
d'animaux, des éclats de silex et des débris de poterie
noirâtre et peu cuite, de tous points semblable à celle
du camp d'Affrique dont il sera parlé plus loin.
La Butte Ste-Creneviève.
L'enceinte deSte-Geneviève (1), située de l'autre côté
de la vallée de la Meurthe, sur le territoire d*Essey-les-
Nancy/occupe tout un plateau d'une superficie d'envi-
viron 20 hectares, lin^ité au pourtour par des pentes
raides probablement régularisées de main d'homme.
Les bords de la crête ne présentent aucune trace de
défenses ou de relèvements ; seul, le point d'accès
naturel par le col qui relie ce plateau à la montagne voi-
sine, est barré par un énorme épaùlement. La section
de cet épaùlement (2) figure un triangle irrégulier de
22 mètres de base, sur 15 mètres de côté pour le revers
extérieur et 10 mètres seulement pour le revers inté-
rieur ; hauteur moyenne environ 3 m. 50. L'irrégijila-
rite de la figure est la conséquence de la pente du
terrain, le talus naturel qui entoure la plateforme se
continuant aussi sous le rempart.
Une coupe pratiquée jusqu'au sol naturel montre la
disposition suivante (3) : une couche de blocaille et de
(1) F. Barthélémy, Recherches archéologiques, Paris, J.-B.
Baillière, 1889.
(2) Planche L
(3) IjQ Bulletin de géographie ^historique et descriptive,
1890, n« 3, rend compte de nos fouilles exécutées avec le
concours de notre ami, M. V. Riston.
— 280 —
terre, épaisse de 0,20 à 0,50 centimètres, recouvre un
véritable mur de pierres sèches, de 10 mètres de base
sur 3 m. 50 de hauteur moyenne, fait de gros moellons
disposés à peu près horizontalement. Et, vers l'exté-
rieur, le pied de ce mur repose sur un massif de chaux
qui atteint jusqu'à 1 m. 35 d'épaisseur. La chaux,
entremêlée, comme partout ailleurs, de charbons et de
bûches incomplètement carbonisées, est placée préci-
sément au^ milieu de la pente raide du sol naturel, mais
en dehors de Taxe de la muraille. On ne peut pas dou-
ter ici du but recherché par les constructeurs du rem-
part ; le pied de la muraille, établi en porte-à-faux sur
un sol incliné, se fût bientôt éboulé, si la chaux n'eût
empêché par sa cohésion le glissement des matériaux
entassés sur la pente. Les trouvailles faites au cours
de la fouille se bornent à quelques fragments d'os
éclatés en long et des débris de poterie noire et gros-
sière, sans ornements. L'intérieur du camp a produit
déjà beaucoup de silex taillés ou polis ; nous y [avons
retrouvé récemment aussi des fourneaux à fondre le
fer, avec leurs scories.
De l'étude des défenses de la Butte Ste-Geneviève, il
convient de retenir une première indication, c'est que
la chaux fut produite en vue de solidifier les murailles.
Mais le fait de l'existence de matériaux calcinés dans le
parapet a une autre portée. En effet, cette enceinte
possède, d'une part, tous les caractères de l'oppidum
gaulois, on n'y découvre même aucune trace d'occupa-
tion gallo-romaine ; d'autre part, nous ayons constaté
que sa muraille n'a jamais subi de remaniements ; il
est donc permis de conclure que l'emploi de matériaux
calcinés dans la construction était usité en Gaule dès
avant Tère romaine.
- 281 —
Le Puy de fiaùdy
Malgré les nombreuses publications et les discus*
sions passionnées auxquelles il a donné lieu, il nous
faut cependant dire quelques mots du Puy de Gaudy,
qui est peut être le mieux conservé et le plus intéres-
sant parmi les camps vitrifiés.
Par son tracé, le Puy de Gaudy, qui couvre le som-
met d'une colline granitique, présente tous les carac-
tères de Toppidum gaulois. Les flancs abrupts du
coteau étaient garnis d*un mur de soutènement en
pierres sèches, dont on aperçoit des lambeaux de place
en place sous les bruyères touffues, et en particulier
sur la pente raide qui regarde Touest. Le front nord,
où la déclivité plus faible permettait un accès facile,
est barré par un parapet à noyau vitrifié dont les
extrémités viennent se souder au mur de soutè-
nement.
Au point où le chemin d'accès pénétrant dans l'en-
ceinte traverse le mur vitrifié, la muraille dessine
deux angles rentrants destinés à flanquer la porte,
disposition qui se retrouve ailleurs, au Beuvray, à
Ludres, à Ste-Geneviève. En avant du rempart vitrifié
se dresse un second parapet, isolé, qui commande le
chemin d'accès ; cette contre-garde obligeait l'assail-
lant à diviser ses forces et à passer inévitablement à
portée des défenseurs.
Dans Tintérieur de l'enceinte et surtout au point
culminant de la position, se trouvent des tumulus, des
ruines gallo-romaines et un cimetière mérovingien qui
servent actuellement de carrières aux habitants du
voisinage.
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— 282 —
En 1870, M. Thuot, professeur au Collège de Guéret,
fit pratiquer une tranchée qui traverse de part en part
la iimraille vitrifiés. Bien qu'en partie remblayée,
cette fouille permet de voir encore (nous avons pu
nous en assurer récemment), la section du parapet et
son mode d'édification. En coupe, le mur a environ
10 mètres de base, sur deux mètres de hauteur au*
dessus du sol intérieur ; du côté de ^extérieur, le talus
se confond avec la pente iuQlinée du terrain et présente
par ce fait une grande élévation. Les blocs de granit
fondus et soudés entre eux occupent le milieu du
massif ; ils sont recouverts d*un blocage beaucoup plus
épais à Textérieur qu*à Tintérieur et qui n'a pas subi
Taction du feu. Les impressions de bois en creux, sur
les blocs, les cendres et charbons jâparpillés dans la
masse; ne laissent aucun doute sur le procédé mis
en jeu.
Le mur de soutènement et le parapet vitrifié qui
entourent Tenceinte sans discontinuité semblent bien
une œuvre unique, exécutée d*un seul jet; l* assiette et
le tracé des défenses montrent toutes les dispositions
de la fortification gauloise ; cependant M. Thuot
{Revue des Sociétés Savantes^ 1873, page 305), recueil-
lit dans ses fouilles « un bloc fondu renfermant un
fragment de tuile romaine et aussi de la poterie de la
même époque provenant de la muraille » . Cet explora-
teur, il est vrai, ne désigne pas exactement le gisement
des pièces ; mais, dans un article publié en 1878 (1),
de Cessac, parlant des mêmes trouvailles, écrit :
(I) Qe Cessac, L'oppidum duPuyde Gaudy, Autun 1878,
p. 8 et If.
— '283 -
« iTai Vu deux fragments dé tuiles saiàies pir le
granité fondu, fan dans la grande muraille près de la
■porte d^ entrée de f •oppidum y f autre dans le bloc isolé
du terrassement du Nord, en face du village duTHeil,.,.
Malheureusement, ajoute-t-il plus loin, e^si débris
n*ont pas de caractères bien précis ». Ailleurs (1) le
même auteur constate quelles matériaux éboulés au
pied du parapet vitriûé recouvrent un sol jonché de
débris romains dont on ne trouve aucune trace dans
la muraille elle-même ». Ces observations d'un homme
d'une haute compétence diminuent de beaucoup la
valeur archéologique des découvertes de M. Thuot,
découvertes qui ne pouvaient l'autoriser à rapporter,
sans autres preuves, la construction de Tenceinte aux
Wisigoths. Le Puy de Gaudy fut certainement occupé
depuis la période néolithique jusqu'au moyen-âge, les
objets recueillis en font foi ; mais, à défaut de fouilles
plus complètes, il semble assez difficile, à Theure
actuelle^ dQ discerner exactement la part qui revient
à chaque époque. Toutefois, on se gardera de confon-
dre dans une même attribution les ruines gallo-
romaines et le cimetière franc retrouvés au sommet du
Puy de Gaudy, dans le camp, avec les remparts de
Tenceinte elle-ménie dont le tracé révèle une antiquité
bien plus haute.
A Texceptibn de M. Thuot, qui attribue cet ouvrage
aux Wisigoths, tous les archéologiies qui l'ont exploré,
(Mangon de la Landeen 1887, Coudert de la Villatte en
(1) Bulletin de la Société des Antiquaires de France,
février 18*77.
— 284 —
1844f de Gessac (1) et M. BuUiot qui le visita en
1865 (2)y en font remonter la construction à l'époque
de l'indépendance des Gaules (3). Ils appuient leurs
conclusions sur le tracé qui englobe dans une même
courbe tout le sommet de la montagne, comme au
Beuvray^ sur l'unité de plan et la liaison parfaite
du mur vitrifié, avec le mur de soutènement qui
protège les flancs. Ce dernier mode de défense, s'il
n'est pas particulier aux enceintes gauloises, a été
signalé dans un certain nombre des plus connues et des
mieux étudiées.
Le camp de Pèran.
Le résultat des fouilles pratiquées dans les rempaHs
du camp de Péran,.près de Saint-Brieuc (Côtes-du-
Nord), ne concorde pas avec les conclusions relatives
au Puy de Gaudy. En effet, lors des recherches entre-
prises en 1866 sous la direction de M. Geslin de Bour-
gogne (4), on découvrit « aux environs et au-dessous
même du foyer une assez grande quantité de briques à
crochets. »
(1) Voir les communications de M. de Cessac, relatives
an Puy-de-Gaudy, aux Congrès de la Sorbonne et à la
Société des Antiquaires de France.
(8) Congrès archéologique de France, à Ghiéret, 1865.
(8) Sur le même sujet : Recherches sur les murs vitrifiée ^
S. P. Mayaud, Sens, 1883.
(4) Geslin de Bourgogne. Rapport sur les fouilles au camp
de Péran, Mémoires lus à la Sorbonne, avril 1886. La com-
mission était composée de MM. Geslin de Bourgogne, Gaul-
tier du Mottay, Dujardin, ingén. des ponts, Gttéry, cap. du
génie, Guépin, architecte.
— 285 --
L'enceinte de Péran occupe le point culminant d'un
plateau qui sépare les vallées du Gouet et de TUrne;
elle figure une courbe ovoïde fermée dont les axes
mesurent respectivement 1 10 et 18i mètres. Les défenses
consistent en un double rempart avec fossés, Pun exté«
rieur, l'autre séparant les deux murailles ; cette dispo-
sition particulière se retrouve au camp d'Affrique, près
de Ludres (Meurthe-et-Moselle), et, dans l'un et l'autre
cas, la levée intérieure seule a subi l'action du feu.
La section du parapet vitrifié de Péran donne 12
mètres de base sur 2"*30 de hauteur movenne ; il est
constitué par un épaulement, formé des déblais du fossé
qui le précède, contre lequel s'appuie le noyau de
roches vitrifiées : le tout est recouvert d'un blocage qui
ne porte aucune trace du feu. Le massifde blocs fondus,
entremêlés de cendres et de charbons, mesure en
coupe 1"*50 de base, sur 1 mètre de hauteur. Un fossé
large de 3 mètres le sépare du parapet extérieur, qui
n'a que 0°*50 centimètres d'élévation au-dessus du sol
naturel.
Cette enceinte nous intéresse surtout parce qu'on y
retrouve la même complication de défenses qu'à Ludres,
c'est-à-dire un double parapet avec fossé en avant de
chaque muraille. Mais contrairement aux profils de
l'enceinte calcinée lorraine, le parapet intérieur vitrifié
de Péran est bien plus élevé que celui qui le précède
vers l'extérieur et sa crête commande effectivement le
glacis environnant.
Si le tracé ovale de l'enceinte est conforme aux plans
de plusieurs oppidums gaulois, en revanche, l'exis-
tence de briques romaines au milieu des blocs fondus,
paraît contraire à cette attribution. La découverte de
/■*
-r- 286 —
ces vestiges gallo-romains autorise pleinement M. Ges-
lin de Boui^ogne à rapporter la construction de la
muraille: aux premiers siècles de notre ère. Que les
briques à clrocbets aient été jetées dans le foyer à
l'occasion d*un remaniement de la muraille ou pendant
son édification première, aucune objection sérieuse ne
vient à rencontre de cette appréciation. Toutefois, si
Ton admet, comme nous somme.i tenté de le faire, une
assimilation complète entre tous les ouvrages vitrifiés
ou calcinés, est-il permis de penser que les construc-
teurs de Péran furent les imitateurs, les descendants
peutrêtre des Gaulois qui élevaient des murailles avec
l'aide du feu. Dans cet ordre d'idées, le tracé de Péran
fournit un argument favorable au génie gaulois, c'est
Je doublement des levées de défense ; en effet, de
pareilles dispositions se constatent au camp d'Âfffique,
où des fouilles nombreuses dans le massif calciné et
Sous^ses parements éboulés, n'ont produit aucun objet
sûrement postérieur à la conquête romaine.
Le camp d'Affrique.
L'enceinte connue sous les noms^ de camp d'Affri-
que (4) ou de Ludres, camp des Sarrazins, de César,
est située à dix kilomètres au sud de Nancy ; elle se
compose de deux ouvrages distincts, reliés par une
des lignes de défense, mais séparés l'un de l'autre par
un ressaut du terrain ; la différence de niveau entre les
deux plates-formes excède 5,0 mètres.
(l) Nancy et la Lorraine, Berger-Levrault,; 1886. Congrès
pour ra,vancement des Sciences, 1886. -^ Recherches
archéologiques sur la Lorraine^ J. B. Baillière, 1889.
- 287 —
L'enceinte inférieure (dite le Vieux-Marché), annexe
du camp calciné, ne comprend que 70 ares de super-f
ficie et ne possède aucune valeur au point de vue
défensif, puisqu'elle est entièrement dominée par le
plateau voisin qui porte la forteresse principale. Bien
qu'un même système de murailles entoure les deux
enceintes, on peut se demander si le Vieux-Marché ne
fut pas construit longtenlp's après le canjp supérieur
dans le hut d'agrandir l'enceinte ou plutôt d'assurer, en
temps de siège, la possession de l'unique source qui'
coule au pomt le plus bas du fossé. On découvre, de
temps à autre, sur la plate-forme déboisée du Vieux-
Marché, des monnaies romaines et des poteries plus ou
moins récentes ; mais de pareils vestiges recueillis sur
le sol; en un heu où se réunissaient les marchands, et
non dans la muraille même, ne peuvent servir à dater
cette dernière. Rien ne s'oppose à l'idée d'occupations
successives, et les preuves d'antiquité, qui font défeut
ici, nous seront fournies par l'exploration de la forteresse
principale qui occupe le plateau.
Celle-ci est assise au-dessus de la falaise, tout au
bord de l'abrupt. Le tracé de ses défenses figure un
trapèze aux angles arrondis, qui mesure 360 mètres sur
225, soit environ 7 hectares de superficie. Les retranr
chements, comme nous l'avons dit déjà, consistent en
deux épaulements parallèles; de 18 mètres de base sur
5 à 6 mètres de hauteur, précédés chacun d'un fossé
d'une profondeur presque égale à leur relief.
Les levées, très semblables de dimensions et de
profils, diffèrent essentiellement dans leur mode de
construction. L'épaulement extérieur est simplement
formé des déblais du premier ; fossé tandis que le
rapet intérieur montre en coupe (1) : d'abord ua
mbtai de terre et blocailles, coutre lequel est adossée
le couche de calcaire transformé en chaux, épaisse
: 2 à 3 mètres ; et le tout est recouvert d'un manteau
moëllous et de terre qui n'ont pas subi l'action du
Li. C'est le même dispositif qu'à Péran, qu'au Puy-de-
mdy, aussi bien que dans les murs calcinés précé-
mment décrits ; mais ici la masse calcinée est
orme et renferme même des blocs scoriacés et vitri-
iB, indiquant l'action d'un feu violent et très prolongé.
On voit dans l'intérieur de l'enceinte, outre de longs
gnements de pierres sèches d'une destination incon-
le, plusieurs tumulus fouillés au commencement de
siècle. Deux ou trois d'entre eux se trouvent au
ilieu du terrain, d'autres contre le talus de la muraille,
lutres eafUi sont placés au fond même du fossé qui
pare les deux parapets. Ceux-ci, ouverts par Beau-
u vers 1840, contenaient < des ossements décomposés
coinpagaés de poterie noirâtre très grossière » {2^.
i place qu'occupent ces dernières sépultures prouve
l'elles sont sans aucun doute postérieures au creuse-
snt du fossé, et si, comme il est permis de le sup-
ser, elles appartiennent au premier âge du fer, leur
éseoce fait remonter au moins à cette époque la
nstruction du rempart calciné.
Le résultat de nos fouilles vient du reste appuyer
Ite théorie. Sous les éboulis qui comblent en partie
> fossés, nous avons recueilli une grande quantité de
iterie grossière et des ossements d'homme, de bœuf,
[1) Planche II.
(2) Beanlieui Archéologie de la Lorraine, t. I, p. 81.
— 289 —
de sanglier et de lièvre. Dans les foyers de cuisine
qui existent en ligne continue au pied du parapet inté-
rieur, on retrouve au milieu des charbons, des os et de
la poterie brisés, des éclats de silex et même des frag-
ments de bronze indéterminables* La poterie recueillie
dans les foyers a tous les caractères de celle que Ton
rencontre exclusivement dans les tumulus du premier
âge du fer, si nombreux dans la même région.
L'ensemble de ces faits autorise donc à affirmer avec
assez de certitude que le camp d'Affrique existait déjà
avant la conquête et qu'il fut occupé à une époque qui
correspond dans notre pays à la civilisation de Halls-
tatt. Des preuves d'une occupation postérieure à l'ère
romaine n'infirmeraient en rien cette attribution ; c'est la
coutume des vainqueurs de se substituer aux vaincus
et de tirer profit des travaux de leurs prédécesseurs.
Nous avons dû laisser de côté un certain nombre
d'autres forts vitrifiée de la France : pour les uns (La
Courbe et Sainte -Suzanne) les documents publiés sont
incomplets et, partant, les éléments de critique font
défaut; pour d'autres, la superficie réduite de l'enceinte
ne permet pas de les prendre comme termes de compa*
raison. Parmi ces derniers, les forts vitrifiés de Hart*
mannswiller en Alsace, de Cliâteauvieux et de Thauron,
dans la Creuse, furent cependant l'objet d'études
sérieuses.
Le Hartmannswillerkopf •
L'enceinte des Fitzethanne (1), au dessus de Hart^
(1) Faudel et Bleicher, Matériaux pour une étude préhis-
torique de l'Alsace. Colmar, 1880.
19
- â90 —
manswiller, domine de 500 mètres la plaine du Rhin
et se compose d'une muraille dessinant un fer à cheval
dont les deux branches s'arrêtent à l'abrupt. Elle a
70 ares de superficie. La muraille, établie au pourtour
d'un mamelon, est constituée par un amoncellement
de blocs de porphyre réduits à 1 état pâteux et vitreux
au moyen d'un feu assez violent pour fondre l'amphi-
bole.
L'étude minéralogique des matériaux a été faite par
MM. Faudel et Bleîchcr, puis par M. Daubrée (1) ; mais
on n'a tenté jusqu'à ce jour aucunes recherches au
point de vue archéologique.
Les autres forts de la Creuse, Châteauvieux et
Tbauron ne fournissent pas plus de renseignements
utiles. L'enceinte de Châteauvieux, qui renferme
moins d'un hectare, '■ n'a donné jusqu'à ce Join- de
débris d'aucune sorte, » dit de Cessac (2) ; mais cet
auteur constate (3) que le dispositif, « parements et
blocage », fut ici le même qu'au Puy-de-Gaudy.
A Thauron, le docteur Cancalon signale des tuiles à
rebords, des poteries et des débris de fer sous la
muraille vitrifiée. Mais de Cessac fait remarquer • que
les osseaienls rencontrés dans les mêmes fouilles sem-
blent indiquer des sépultures qui, placées comme à
(1) Daubrèe, Esnmen minéralogique et chimique des
matériaux vitriâéa {Revue archéologique, 1881.)
(2) De CeBBac, Mémoirea lus à la Sorbonne eu 1867.
(31 L'oppidum du Puy-de-Gaudj, 1878, p. 10. — Pour la
description de Châteauvieux, voir Recherches sur tet tnurs
vitrifiés, S. P. Majaud, Sens, 1883.
^
— 291 —
Ghàteauvieux, près de la muraille^ ont été recouvertes
par ses ruinés. Ici donc encore la position de ces restes
porterait à supposer qu'ils sont postérieurs à la cons-
truction des murailles (1). »
Les tumulus vitrifiés de la Butte Sainte-Austrille.
qui servirent de soubassement à une forteresse du
moyen-âge, sont aussi muets au point de vue de nos
recherches. De Gessac les considère comme des tumulus
gaulois, « attendu, dit-il, que cela est attesté par leur
mode de construction et par les objets celtiques qu'ils
renfermaient (2), » Ils furent utilisés plus tard pour
Térection de tours féodales en bois, et les derniers
occupants creusèrent les buttes jusqu*au sol afin
d'établir les fondations et les celliers; puis, dans la
suite, Tincendie de ces édifices occasionna un mélange
de toutes les époques antérieures.
L'idée de faire intervenir le feu dans la construction
des murailles peut se comprendre, si Ton considère le
résultat de Topération : la cohésion produite par la
chaleur avait pour effet immédiat de suppléer à l'ins-
tabilité de matériaux entassés pêle-mêle. La méthode
fut peut-être appliquée pendant longtemps dans notre
pays et, à ce point de vue, il n'est pas sans intérêt de
rappeler qu'un procédé analogue de vitrification des
murailles était encore en usage dans l'Hindoustan, au
(1) De Ceasac, /oc. cit.
(2) De Cessac, Mémoires lus à la Sorbonne, 1865.
_ 292 —
commencement de ce siècle. M. Daubrée (1) menliomie
le fait en ces lennes, d'après Legoux de Flaux (2) :
I Quand le mur est élevé, on le renierme entre deux
murs de gazon ; on remplit rintervalle de combustible
que l'on remplace à mesure qu'il a brûlé et Jusqu'à ce
que tout le mur soit cimenté en une masse unique. »
Mais, il faut en convenir, la persistance d'une pareille
coutume jusqu'à nos jours rend d'autant plus diflicile à
expliquer te choix de ce procédé de construction de
préférence à tout autre. On a dit souvent que les murs
calcinés en masse sont l'œuvre d'hommes qui ne
connaissaient pas l'emploi du mortier (3), et aussi que
les murs vitrifiés se trouvent cantonnés dans des
régions où manquent les matériaux propres à faire du
mortier de chaux : ignorance d'une part, impuissance
de l'autre, les deux propositions sont acceptables. On
peut, il est vrai, conjecturer que les auteurs de ces
monuments obéissaient à d'antiques traditions, lors-
qu'ils élevèrent des murailles agglutinées par le feu
en un seul bloc résislanl ; mais c'est là une hypothèse
toute gratuite sur laquelle nous nous garderons d'in-
sister.
La méthode employée partout procède évidemment
(1) Daubrée, Bévue archéologique, 1881, page 18.
(2) Eztiait du Nickoison Journal, 1804.
(3) A Ste Oeueviéve, la calcination, qui affecte uniquement
la base de la muraille, en aérait une preuve. Eu effet, dans
cecBS particulier la cohésion produite par la chaleur supplée
aux fondatioQH, impossibles ou inutiles sans mortier ;
l'adhérence parfaite au sol a été obtenue au moyeu de
la calcination des matériaux qui reposent directement sur la
pente.
— 293 ■-
d'un même génie ; le dispositif (i) ne varie jamais et
les matériaux mis en œuvre sont calcinés, vitrifiés ou
scoriflés, suivant que leur composition minéralogique
s^y prêtait. « Le procédé mis en jeu a été dune puis-
sance si surprenante y dit M. Daubrée {Revue archéol.^
1881), qdil est difficile d admettre qu'il ait été inventé
dune manière indépendante dans des contrées aussi
distantes que celles oii nous en voyons les résultats.
Il est plus que vraisemblable qu'un procédé si ingé-
nieux a été transporté successivement de Pune de ces
contrées aux autres. Les enceintes vitrifiées pourront
ainsi servir à marquer les étapes de certaines migra-
tions j>.
A ce point de vue encore, nous sommes réduit aux
conjectures. Pour rapporter avec certitude Tintroduc-
tion du procédé à un courant de civilisation déterminé,
il faudrait avant toutes choses posséder l'inventaire de
tous les ouvrages existant sur le sol de l'ancien conti-
nent. Or, à l'heure actuelle, on peut tout au plus en
citer une vingtaine d'exemplaires répartis en Allema-
gne (Mecklembourg et Taunus), en Suède, en Dane-
mark, en Ecosse et en France. Ajoutons que la pre-
mière découverte remonte à peine à un siècle ; ce n'est
qu'à de longs intervalles que Tattention est appelée sur
quelque nouvelle enceinte, cachée jusque là par des
bois épais ou bien assise sur une crête peu acces-
sible et, par conséquent, peu visitée. Il se passera de
longues années avant que l'on possède un nombre
(l) Au sujet du dispositif employé aa Puy de Gaudy et à
Chateauvieux, voir P. de Cessac, U oppidum du Puy de
Gaudy, kwiMXi 1878, p. 7 à 10.
— 294 —
d'observations eufllsanl pour établir la distributior
géographique de ces camps.
Mais si une enquête relative à l'origine de cetteappli-
cation du feu doit paraître prématurée, du moins est-ii
permis de rechercher à quelle époque elle fut intro-
duite et mise en pratique dans notre pays; en d'aulres
termes, à quelle date la plus ancienne renionlenl h
construction ou Foccupation première des camps vUri-
ûés ou calcinés coniiiisen Gaule. L'étendue el le trac^
des enceintes et surtout les trouvailles archéologiques
constituent les seuls documents sérieux à cbusuUer.
L'importance en surface dut être en relation avec le
chiffre de la population à abriter. Le périmètre réduil
de certaines enceintes n'est pas eu contradiction avec
cette donnée, si l'on tient compt3 de la multiplicité el
du rapprochement d'ouvrages d'un même type dans
une même région. Les éperons barrés par un mur sans
fossé ayant presque toujours une étendue bien infé-
rieure à celle des oppidums, et fournissant, en général,
des traces d'industries plus anciennes que ceux-ci, on
pourrait en déduire un état de civilisation moins
avancé, prouvé par la division en groupes ou clans peu
nombreux.
Si l'on considère la variété, la dissemblance présen-
tées par ces ouvrages dans leur tracé, on est tenté de
conclure que chaque type correspond, d'après s^n plan,
à une époque donnée, néolithique ou gauloise, de la
même façon qu'on daterait des monuments de Tarchi-
tecture classique. Mais possède-t-oo la preuve que des
peuples si peu avancés en civilisation se soumet*
taient à des règles fixes et précises ? Evidemment la
méthode de classification d'après le tracé est applicable
n
— ^295 ■«
aux enceintes ^nurées en pierres sèehes; puisque les
trouvailles archéologiques démontrent que les éperons
barrés sont plus anciens que les oppidums dont Toc-
cupation à Tépofjue de la conquête est affirmée par les
textes. Point n*est besoin de rappaler à ce sujet les
remarquables travaux de M. le colonel de la Noë, sur
les enceintes préhistoriques. Ce genre de classement
convient-il également lorsqu'il s'agit de murs vitrifiés,
c'est-à-dire de constructions bien difficiles à exécuter
pour des hommes disposant de faibles moyens d'action,
comme ceux de l'âge de la pierre ? Au contraire, de
semblables manifestations ne peuvent se comprendre
que chez des populations denses, assez civilisées pour
s'unir dans un commun effort. Et dans cette pensée,
ne pourrait-on pas établir un rapprochement entre les
premières exploitations métallurgiques dans nos pays
et l'application du feu aux murs de défense ? N'est-il
pas permis de supposer que l'effet produit par une
chaleur intense sur les parois des fourneaux de forge
et sur la roche encaissante indiqua aux premiers jnétal-
lurgistes (1) l'avantage à en tirer et l'application qu'ils
pouvaient faire de la chaleur aux constructions les plus
importantes pour eux ?
(1) Ea faisant ce rapprochemeiit, nous ne songeons nulle-
ment à remonter jusqu'à Tâga du bronze, car le bronze ou
au moins un de ses éléments constitutifs, Tétain, étaient
importés en lingots, et la fusion de ^ Talliage, dans des
creusets, à une température relativement faible (900o) pou-
vait s'obtenir sans grandes difficultés dans de petits foyers.
Au contraire, le traitement direct des minerais de fer, qui
fut pratiqué en Europe aux époques préhistoriques, néces-
sitait une température bien plus élevée (1600^) et Tinstalla-
tion do vastes foyers.
_ 296 -
AiDBi que nous avons eu l'occasion de le dire plus
haut, l'étude de la valeur des forteresses calcinées ou
vitrifiées, au point de vue défensif, la comparaison, de
leur tracé en regard des refuges et oppidums ceints de
murailles â sec, ne fourniront que des résultats néga-
tifs car, d'une part, les moyens de défense les plus
simples et les plus primitifs ont été employés à toutes
époques, et de nos jours, la fortiRcalioa passagère ne
s'écarle guère des mêmes règles ; d'autre part, l'as-
siette des ouvrage de défense est pour ainsi dire immua-
ble, le choix de la position étant imposé par l'orogra-
phie de la région.
Si l'on admet en principe une assimilation complète
de temps et de méthode entre les ouvrages calcinés et
les ouvrages vitrifiés (et il semble que cette idée s'im-
pose puisque, dans les deux cas, la méthode est iden-
tique), le seul élément de critique certain, positif, que
nous puissions utiliser pour la recherche de l'époque
où ce mode de construction fut appliqué en Gaule, se
borne aux documents archéologiques fournis par les
différentes enceintes connues et étudiées. Laissant de
côté les périodes archaïques de l'âge de la pierre, qui
ne peuvent être mises en cause, nous passerons en
revue les objets d'industrie laissés en place par les
populations qui occupèrent les forteresses vitrifiées et
calcinées ; et, comme on le verra, rien ne s'oppose de
ce côté à la contemporanéilé d'ouvrages ayant entre
eux une commune destination et dans lesquels on
reconnaît l'unité de méthode pour la mise en œuvre
des matériaux.
CÉNEHET ne fournil aucune preuve archéologique per-
mettant de conjecturer les périodes d'occupation ; les
-\
- 297 —
objets en fer trouvés sous la couche superficielle de la
levée ne prouvent rien ; il en est de même d'une sépul-
ture à char (i), exhumée à quelques pas de l'enceinte,
mais en dehors.
Le parapet de Vœuil renferme des éclats de silex et
de poteries dont quelques-unes ont été attribuées à
rage du bronze. Ce serait là les seuls témoins, venus
jusqu'à nous, des civilisations qui précédèrent immé-
diatement la construction et Tincendie de la muraille.
L'enceinte de la Fourasse, près de Nancy, montre
des traces de l'occupation pendant le premier âge du
fer et n'a livré aucun débris postérieur à cette époque ;
les poteries exhumées des foyers et de l'épaisseur de
la levée sont identiques à celles qu'on a retirées des
tumulus répandus sur le plateau voisin.
A Ste-Geneviève, trouvailles analogues de poteries
dans le parapet, et de silex et de scories ferrugineuses
dans l'enceinte.
L'oppidum du Puy-de-Gaud^ fournit des preuves
d'occupations successives, préhistorique, gallo-romaine
et franque. La trouvaille d'une brique fondue dans une
partie indéterminée du parapet vitrifié reporterait la
date de la vitrification après lère romaine ; cependant
de Gessac, qui a le mieux et le plus longuement étudié
le camp de Gaudy, constate que si le sol recouvert par
les éboulis de la muraille est jonché de débris romains,
on ne trouve jamais trace de ceux-ci dans la muraille
elle-même (2). Plus tard, il est vrai, le même auteur
revenant sur cette appréciation, proposait de répartir
(1) Bulletin de la Société des Antiqtuiiires de C Ouest , 1884,
(2) De GessaCi /oc. eit.
la consti'uctioQ des enceintes vitrifiées, entre les vi' et
VIII* siècles de notre ère (1).
I^ tracé de l'enceinte de Pékan et le doublement de
ses défenses sont-ils des arguments en faveur d'une
origine également gauloise? L'existence de briques
romaines sous |e massif vitrifié vient à l'enconlre de
cette hypothèse. Le fait, dament constaté par une
réunion d'hommes compétents, prouverait ou cons-
truction postérieure à l'ère romaine ou remaniements.
A l'exception de Péran, toutes les données relatives
à la date de première occupation des enceintes que
nous venons de citer et que nous avons explorées,
paraissent conforme à une attribution pré-romaine ;
les documents s'échelonnent de l'âge du bionze au
premier âge du fer. Les constatations effectuées dans
le Camp d'Affrique permettent de seirer la question de
plus près.
Le Camp d'Apfriqub, en effet, présente un ensemble
de preuves d'occupation par les Gaulois de l'âge du
fer, non seulement dans les objets d'industries carac-
téristiques, mais surtout dans les tumulus établis dans
le fond même des fossés et, par conséquent, bien après
le creusement de ceux-ci et la création des murs de
défense.
Enfin, à l'appui de ces diverses considérations, vient
s'ajouter un éiément de comparaison des plus sérieux,
c'est le monument connu depuis plus d'un siècle sous
le nom de Briquetage de la Seillb (2). On nomme
(1) Voir: Les forts vitrifiés de la Creuse, p. t.
(2) Les îloti dn firiquetage sont répartis aur 18 kilomètres
de longueur dani la vallée de 1r Seille, entre Mariai et
Burtheconrt (Lorraine auneiêe).
— 299 —
ainsi une série d*îlots artificiels, constitués par des
morceaux d'argile cuite disposés en épaisses plates-
formes dans les marais de la âeille. L'ouvrage est
certainement pré-romain puisque la forteresse romaine
de Marsal fut édifiée sur un de ces îlots, et que la voie
romaine de Strasbourg à Metz, qui passait en ce lieu,
est séparée du Briquelage par une couche d'atterris-
sements. Habitées par des populations fort denses, ces
sortes de terramares ont conservé, comme preuves de
longue occupation (1), des débris de cuisiné et des
fragments de bronze et de poteries ; et les échantillons
de céramique récoltés à la surface du Briquetage mon-
trent la même pâtegrisâtreetles mêmes ornementations
que les poteries trouvées dans les foyers de cuisine du
camp d'Âffrique ou de la Fourasse, en même temps que
dans les tumulus qui s'élèvent au milieu de ces en-
ceintes et sur les plateaux voisins^
Ne semble-t-il pas permis de conclure, d'après ces
multiples preuves, que Briquetage, camps calcinés, et
tumulus sont l'œuvre d'une même race et d'une même
civilisation datée par les sépultures ? En d'autres
termes, que le mode de construction à l'aide de maté-
riaux agglutinés par le feu était connu et pratiqué en
Gaule dès avant l'ère romaine ?
C'est à cette dernière conclusion que nous croyons
devoir nous arrêter^ sans oser toutefois comprendre
dans une même attribution tous les ouvrages édifiés
(l) Beaulieu mentionne la découverte de sépultures au
point où l'îlot de Marsal rejoint la terre ferme. On exhuma
vingt squelettes ornés de torques et d*anneaux de bras et de
jambes, en bronze. Archéologie de_ la Lorraine, tome I,
pages 89 à 44.
— 300 —
: Taide du feu. Il est possible, en effet, que lon^
16 plus tard, après la conquête des Gaules par 1
lares, le même procédé de construction ait pu et
lOuveau employé dans notre pays, soit par l<
[uérants eux-mêmes, soit par les populations gai
)s revenues par la force des choses à un état i
isalion antérieur.
^.y
NOTICE
SUR
ETIENNE BOURGEOIS
ABBÉ DE SAINT-VANNES DE VERDUN
1417-1432
Par M"« BUVIGNIER-GLOUET
Etienne Bourgeois (Wassebourg dit avec raison sur-
/20/i2zz2é Bourgeois) naquit à Pont-à-Mousson ; ii était
fils de Jacquemin Petaul atd'Aignel Paillardel, sœur de
Renaud Paillardel, abbé de Saint-Vannes de Verdun (1).
Nous n'avons pu découvrir aucun renseignement sur
l'origine de Jacquemin Petaul ; mais ii est certain que
les Paillarde! existaient déjà à Pont-à-Mousson au
xui* siècle, ainsi que le prouve un acte du mois de sep-
tembre 1276, acte par lequel « Mathieu de Tremble-
» court et Béatrix sa femme vendent à Adouvenet dit
j) Paillardel bourgeois du Pont la seigneurie de Trern-
» blecourt à condition que ledit Mathieu et sa femme
(1) Histoire manuscrite de Saint- Vannes, depuis la fonda-
tion de Tabbaye jusqu'en 1508, par un moine anonyme.
Cette histoire, écrite vers 1732, nous fournira la plupart de
nos renseignements ; nous la désignerons en note, sous le
nom de : Histoire anonyme.
— 302 --
» en jouiront leur vie dqrant pour laquelle ledit Mathieu
» payera à Paillardel 8 sols de fors de cens (I) ».
Dans son Inventaire des Archives de Meurlbe-et^
MoselleyH, Lepage fait aussi mention : l"" de Donas
Paillardel qui, de 1347 à 1363, fut prévôt et receveur
de. Gondé (aujourd'hui Custines-sur-Moseile) ; 2° de
Renaut Paillardel, ancien receveur de ce même Gondé
en 1401-1404 (2).
Dès son enfance, Etienne Bourgeois fut placé à Saint-
Vannes, auprès ds son oncle, Tabbé Renaud; qui le fit
élever sous ses yeux.
La renommée de Saint- Vannes avait alors beaucoup
perdu de son éclat. L'école de cette abbaye n'était plus
la brillante pépinière comparée, par Hugues de Flavi-
gny, à une ruche attirant toutes les laborieuses abeilles
qui, après s'être chargées de miel et de cire, allaient
enrichir les provinces voisines d'où elles étaient par-
ties (3) ; bien loin était le temps où, de l'Allemagne, de
toute la Belgique, et même de contrées plus lointaines,
ditlepèrePagi, on accourait avec l'assurance d'y acqué-
rir des connaissances en tous genres de littérature et
d'y avoir l'exemple de toutes les vertus. Plus de trois
siècles s'étaient écoulés depuis que le « bienheureux »
abbé Richard, rélève et le meilleur disciple du célèbre
Gerbert, avait, par sa science, ses lumières, sa haute
sagesse et la droiture de son jugement, élevé cette ins- *
' (1) Duionrny. Inventaire des archives de Lorraine, T. X,
2« partie, page 48 (ma. de la Bibliothèque publique de Nancy,
n°» '754-7Ô5).
(2) Inventaire des Archives de Meurthe-et-Moselle, par
H. Lepage : B. 481$, 4816 et 4824.
(3) « More scilicet prudentissimœ apis, quse circuit diver-
sorum florum arbusta, ut mellis dulcore sua repleat recep-
— 303 —
litution au premier rang, et en avait fait le modèle
dont la réputation fut soigneusement et justement main-
tenue par son successeur, Tabbé Valeran, comté de
Breteuil. Les guerres civiles occasionnées par la juri-
diction régalienne dont les évêques venaient d'être
investis; la division entre les partis, excilée et entre-
tenue par les querelles des investitures; le relâche-
ment et la mauvaise administration de quelques abbés,
amenaient peu à peu la ruine de cette maison jadis si
florissante ; il était temps que la main ferme et sage de
Renaud Paillardel vînt, momentanément du moins,
rétablir la régularité et mettre un frein aux folles dé-
penses déjà enrayées par son prédécesseur Henry de
Passavant.
L*abbé Renaud gouverna Saint-Vannes pendant
vingt-cinq ans; sous la direction d'un tel maître,
Etienne Bourgeois puisa les plus solides principes et
acquit vite les connaissances qui lui assurèrent cette
suprématie incontestée de tous, et à laquelle il dut,
plus tard, la crosse abbatiale.
On ne peut préciser à quelle date il fut pourvu pat
son oncle de l'aumônerie du monastère ; ce que Ton
sait c^est que, dans les fonctions dépendant de cette
charge, il se fit remarquer par son désintéressement et
par le zèle qu'il déploya afin de rendre à Tâbbaye, au-
tant du moins qu'il était alors en son pouvoir, quelque
chose de son ancienne splendeur. Au détriment même
de ses propres intérêts, au lieu d'appliquer à son usage
personnel les revenus de l'office qu'il venait d'obtenir,
taenia. » Chronieon monachi S, Richarii centuynsis^ publiée
dans le Spicikgium de d'Achery, n. édit., t. ii, page 331.
— 304 —
il les employa à réparer et à eotretenir tous les biens
lui en dépendaient. Il fit aussi construire, igoute l'au-
,eur anonyme de l'histoire manuscrite de Saint- Vannes,
I deux chambres basses, belles pour le temps », dans
l'appartement dudit office. Ces chambres servaient en-
core, à l'époque ou l'auteur précité écrivait (vers 1732),
le demeure au garde-magasin de la citadelle.
Renaud Faillardel mourut le 1 décembre 1417 < et
fut pleuré non seulement de ses religieux mais encore
le tous ceux qui aimoient le bien >.
On ne vit pas alors se renouveler ces regrettables
braillements qui, précédemment, s'étaient produits
intre divers piétendants : la conduite prudente et sage
lont Etienne Bourgeois avait fait preuve comme aumô-
lier lui assura tous les sufTrages, et, dix Jours après la
nort de son oncle (17 décembre), t il fut élu toutd'une
'oix(l) ■ pour lui succéder ; il était alors âgédetrente-
:inq ans.
Placé à la tête de l'abbaye et en ayant ainsi la direc-
jOQ pleine et entière, Etienne, dit Wassebourg, « fut
( homme très vertueux et bon administrateur. Car du
I commencement il feit circuire quasi tout le monas*
I tere et la vigne circumvoisine de haultes murailles, et
I si reppara le clochier qui avoil esté brûlé. Et de la
I plus petite cloche que son oncle avoit faict en feit
( faire la plus grosse de l'église *.
Outre cette cloche, il en lit refondre quatre autres
[1423-1430), et veilla à la réparation de tous les bâti-
ments intérieurs et extérieurs du monastère ; il cons-
(l) Hiitoi^ anonynu.
— 305 —
truisil le pressoir qui se trouvait devant l'église Saint-
Remy (1) et fit a voulter la grande cave » placée sous
le réfectoire des religieux, œuvre sans doute fort im-
portante puisque, comme nous le verrons plus loin, elle
est mentionnée dans son épitaphe. Une « grande
chambre située au fond de la cour >. chambre appelée,
plus tard, « le grenier pavé i>, fut aussi établie à cette
époque, ainsi que l'escalier de pierre qui y donnait
accès. En même temps, tout en élevant « plusieurs
autres maisons, moulins, dépendances », il rebâtissait
complètement les grands gagnages de Belleray et de
Frana, puis veillait au défrichement des terres et des
prés qui en dépendaient, mais avaient été abandonnés
sous ses prédécesseurs.
Cependant, au milieu de toutes ces améliorations, un
vaste projet surgissait encore dans Tesprit d'Etienne
Bourgeois et devenait bientôt Tobjet principal de sa
solHcitude. Le pieux abbé regrettait de ne pas voir,
dans Tenceinte de son abbaye, l'un de ces superbes
monuments dont certaines administrations, moins mou-
(1) L'église paroissiale Saint-Remy était située devant
Tabbaye de Saint-Vannes. En ltS6, lorsque le cardinal de
Vaudémont, évêque de Verdun, établit les Capucins dans
cette ville, il leur céda Saint-Remy qui devint la chapelle de
leur couvent et qu'ils conservèrent jusqu'en 1626, époque à
laquelle la construction de la citadelle les força à l'abandon-
ner. Quand, après le 1""^ juillet de cette dite année 1626, ils
eurent quitté leur maison pour s'installer provisoù'ement
place de l'Estrapade, où fut ensuite le baillage royal, l'église
Saint-Remy, transformée, servit d'habitation à Marillac.
Le nouveau couvent des Capucins ne fut terminé qu'en
1629 ; les religieux y entrèrent le 1*' novembre et y furent
installés par le R. P. Général de l'Ordre, qui se trouvait à
Verdun ; ils y restèrent jusqu'à la Révolution.
20
— 306 —
vementées et plus prévoyantes que ne Tavait été trop
longtemps celle de Saint-Vannes, avaient doté quelques
monastères voisins ; il songea donc à faire élever un
temple digne de Fantique renommée de cette maison
qui, jadis, avait brillé d'un si vif éclat.
Il est vrai que, deux siècles auparavant, l'un de ses
prédécesseurs, Louis, frère de Tévêque de Verdun,
Albert de Hirgis, avait eu la même pensée. Louis ren-
dit Tabbaye très prospère, grâce aux fonds considé-
rables qu'il se procura « par la faveur des Prélats et
des grands qui le chérissoient », dit Roussel ; cepen-
dant, malgré son rare mérite et tous les talents dont il
était doué, peut-être manqua-t-il un peu de prévoyance.
Le plan grandiose qu'il adopta aurait fait de son église
l'un des plus remarquables édifices de TEurope ; mal-
heureusement son âge avancé ne devait pas lui permet-
tre d'en voir rachèvement et il ne songea point que,
plus tard, l'abbaye pouvait non-seulement se trouver
réduite à ses seules ressources, mais encore être de
nouveau bouleversée par quelques-unes de ces compli-
cations, si fréquentes à une époque de troubles et de
contestations. Quoique son œuvre ait été continuée par
son successeur, Guillaume, précédemment prieur de
Flaviguy puis abbé de Saint-Mansuy-lès-Toul, elle ne
put être terminée ; les murailles^ seules, furent en partie
construites, et le mauvais et a t. des finances ne permit
même pas d'y poser une couverture, grâce à laquelle
elles auraient été préservées des injures du temps (1).
(1) Louis fut abbé de Saint- Vannes de 1197 à 1238. Son
successeur, Guillaume, mourut en 1259; Thistorien ano-
nyme de Saint-Vannes lui fait un reproche que nous résu-
mons ici : U eût été à souhaiter, dit-il, que Tabbé Guillaume
— 307 —
Etienne Bourgeois voulut, tout d'abord, reprendre
dans leur ensemble et sans y rien changer, les travaux
et le magnifique plan du xiii" siècle ; mais les pluies
et les tempêtes avaient tellement endommagé la cons-
truction abandonnée, que, de l'avis des personnages
les plus habiles et les plus compétents de tout Je pays,
les fondements eux mêmes n'avaient plus assez de
solidité pour supporter un nouveau bâtiment. Il dut
alors se résigner « quoique à contre-cœur » à se servir
seulement des matériaux qu'il en pourrait tirer. Vers
la fin de l'année 1430, l'édifice des abbés Louis et Guil-
laume disparut donc, à Texception des deux tours et du
portail, de style roman, auxquels fut adaptée l'élé-
gante église gothique que nos pères purent encore
admirer dans son entier, mais dont nous chercherions
vainement, aujourd'hui, quelque « vestige à la citadelle
de Verdun (1).
bornât ses soins à Fouvrage magnifique qu'il faisait bâtir^
puisqu^ainsi il aurait pu Facheyer ; mais son zèle et son cou-
rage qui n'avaient « presque pas de bornes y> lui firent entre-
prendre en même temps d'autres ouvrages dans le menas»
tère.
Il est juste d* ajouter que, pendant la guerre communale de
J246, les bourgeois démolirent presque toute la grande
muraille de clôture de Tabbaye, ainsi que la maison du por-
tier ; il «e servirent de ces pierres et de celles destinées à
terminer V église^ pour se fortifier eux-mêmes ; malgré cet
incident, Guillaume ne se découragea pas et, à sa mort, les
travaux étaient encore en pleine activité.
(l) Dès qu'il y eût une citadelle, ce beau monument fut me-
nacé : en 1552,ondécouronnà les tours pour y établir des plates-
formes à mettre du canon. Plus tard, Mavillac projeta de raser
Saint-Vannes ; mais sa disgrâce fit avorter son plan. De
nouveaux projets de démolition furent vainement mis en
avant sous Louis XIV ; le roi, après avoir visité Téglise en
Uoe fois son projet mûrement arrêté, l'abbé Bourgeois
it de sérieuses dispositions afia d'éviter les fautes
inmises autrefois par ses prédécesseurs.
Le monument qu'il entrepreuait n'avait plus les vas-
i dimensions de celui qui venait de disparaître; ne
ulant y employer que les revenus de son abbaye,
xquelsil ajouta ceux des quatre olïices claustraux
[■évôt, ceilérier, pitancier et infirmier) qu'il conserva
iT, défendit de la détruire. En 1140, à la suite d'uQ coup
foudre, on posa sur les tours de disgracieuses coupoles;
is, â la Révolution, l'édifice fut remis au Génie. Eu 1817,
colonel ThiêbauC proposa, pour réparations urgences à la
tare, une dépense de 4,500 fr., qui fut rejetée par le
mité des fortificatioas, sous prétexte que ee monumeat
lyant d'intérêt qu'au point de vue de l'art et des souve-
ra, c'était à la ville â en assurer la conservation. Celle-ci
)uva étrange qu'on fît retomber sur elle une charge pro-
blemeut considérable pour l'avenir, à cause du mauvais
it des choses; les ressources municipales étaient d'ailleurs
uisées par la grande famine de cette année même. Lors-
'en 1818 le duc d'Angonlême visita Verdun, on essaya
inement de l'intéresser à sa conservation : en 18S0, une
cision ministérielle proscrivit d'enlever la toiture, béante
l'extrémité ouest et menaçant, disait-on, d'ôtre emportée
r le veut; enfin une autre décision du 11 octobre 1826,
donna la démolition complèce. Malgré tout, les colonels
ry et Petitot luttèrent pendant quelques temps, mais inu-
ement : en 163I-183S, cette majestueuse basilique dispa-
rut de notre sol. aux regrets des amis des arts et de l'an-
[uité. (D'après l'Histoire de Verdun, de l'abbé Cloiiet, 1. 1,
ge 499).
Aujourd'hui, il ne reste plus que le bas d'une des tours
maaes de beaucoup antérieures à Etienne Bourgeois ; en
raolissant l'autre, on trouva, dans les fondntions, des débris
sculptures qui paraissaient d'origine gallo-romaine et
LÏ provenaient peut-être lie quelque temple païen dont les
bris auront été jetés dans les fondations des tours (Note
l'abbé Cloiiet, Bibliothèque de Verdun, manuscrit n* 190j.
— 309 —
à cet effet, du consentement de tous les religieux,
jusqu'en 1450, il le proportionna aux ressources dont
il disposait. Ensuite, la première pierre ayant été posée,
le 9 avril 1431, il mena les travaux avec une telle rapi-
dité qu'en peu de temps les murs du sanctuaire furent
complètement élevés (1).
Ici, la prévoyance d'Etienne se montra tout entière,
car, avant de poursuivre la construction desautres mu-
railles, il fit voûter et couvrir ce sanctuaire, en même
temps qu'on y posait les fenêtres et le pavé. Il acqué-
rait ainsi la certitude que si quelque événement imprévu
venait mettre obstacle à la prompte réalisation de la
tâche qu'il s'était imposée, le travail déjà exécuté pour-
rait, en attendant destempsmeilleurs. braver les intem-
péries, et n'aurait pas le sort regrettable de cette cons-
truction ruinée avant d'avoir été utilisée et qu'il avait
dû forcément renverser.
Il agit avec autant de précaution pour le chœur, puis
pour les collatéraux (ju'il entreprit ensuite, mais qu'il
n'eut pas la satisfaction de voir entièrement terminés.
Ce ne fut, du reste, qu'en 1520. soixante-huit ans après
sa mort, que la dernière pierre du monument fut posée ;
cependant, dès 1438, il devait déjà être fort avancé,
car, le 21 janvier de cette même année, le corps de
l'abbé Louis put y être solennellement transféré : on le
plaça sous l'autel de la Vierge, situé, à cette époque,
derrière l'autel principal.
(1) Getto église, dit Tabbé Cloûet, était «i solidement
construite qu'il fallut employer la mine peur ébranler les
murs lors de la démolition : j'ai vu, ajoute-t-il, une colonne
vaciller après Teiplosion de la mine puis reprendre son
aplomb (Manuscrit n<> 190 de la Bibliothèque publique de
Verdun).
— aïo -
Quelques semaines avanl cette cérémoaie, le IS no-
enibre précédent (i2 novembre 1438 avant Pâques),
Itienne Bourgeois, en qualité d'abbé de Saint- Vannes,
t ses reprises et rendit foi et hommage à l'évdque
Guillaume Fillaslre, pour les llers que l'abbaye tenait
e l'évêché de Verdun.
Le 21 janvier 1431, lors de l'entrée dans cette ville
e l'évèque Louis de Haraucourt, prédécesseur de
iuillaume Fillastre, Etienne se trouvait au nombre des
ersonnages en présence desquels le prélat fit le sér-
ient accoutumé ° tant à ta porte Saint-Victor, que
evant l'église sainte Croix (1). »
Tout en donnant la plus grande partie de ses soins à
I construction de son église, le pieux abbé s'occupait
ncore des nombreux détails qui s'y rapportaient et ne
égligeait pas les choses de moindre intérêt devant
onlribuer à en accroître le trésor. Il fit bâtir le sacraire
sacristie), à la voûte duquel ses armes se voyaient
ncore lors de la démolition. Les quatre colonnes de
uivre qui entouraient le maître-autel furent faites de
on temps, ainsi qu'un retable en bois • qu'il fit dorer
de lin or en deliors > ; ce retable était orné de figures
'albâtre représentant les douze apôtres. Parmi les
utres objets dus à sa munificence, on cite « plusieurs
chasubles, aubes, et autres paremens d'autel *, puis
eux chapes « de couleur blanche >, et une « d'or >
ont on se servait aux jours de grandes fêtes.
Sa charité était fort grande. Malgré les dépenses
ytraordinaires occasionnées par toutes les améliora-
ions qu'il apportait à sa maison, il secourut toujours
{!) HouBsel, Histoire de Verdun, 1" édition, page 377,
j
311 -
très largement les nécessiteux qui s'adressaient à lui.
Pendant la famine de 1438-39, il nourrit, chaque semaine,
sept ou huit cents pauvres, sans que ses aumônes habi*
tuelles fussent en rien diminuées.
Peu après, songeant q^ue la mort pouvait venir le
surprendre et que, dans ce cas, l'avantage qui lui avait
été fait à propos des offices claustraux serait peut-être,
plus tard, faussement interprété par ses successeurs,
s'ils arguaient qu'un abbé les avait possédés sa vie
durant, il voulut rétablir chaque chose dans l'ordre
habituel; il désigna donc les religieux qui devaient dès
lors exercer les fonctions qu'il jugeait utile, pour le
bien général, de résigner immédiatement. Il était temps
que ces précautions fussent prises, car le monastère
allait être sérieusement éprouvé.
La peste de 1452 se fit cruellement sentir à Verdun ;
près de trois mille personnes y moururent, dit-on, et
la maison de Saint- Vannes, que sa situation sur l'un
des points culminants de la ville semblait mettre quel-
que peu à Tabri des redoutables miasmes, fut atteinte
l'une des premières. Quatorze ou quinze personnes,
a tant domestiques que religieux », avaient été enlevées
T en peu de temps ; aussi la plupart des moines, fuyant
la contagion, furent autorisés à se retirer au prieuré de
Chaude-Fontaine (1) où ils séjournèrent environ deux
mois. Etienne lui-même, cédant à de pressantes sollici-
tations, s*installa à Rarécourt(â). De là, il lui était facile,
tout en faisant réparer sa maison seigneuriale, d'aller
visiter ses religieux et de veiller à ce que la régularité
(1) Aujourd'hui département de la Marne, arrondissement
et canton de Sainte-Ménehould.
( 2) Arrondissement de Verdun, canton de Glermont.
— 312 —
monastique n'eût pas à souffrir de ce déplacement forcé.
Bientôt, la décroissance du fléau semblant avoir éloi"
gné tout danger, il tint à rentrer dans son monastère,
le 9 novembre, avec tous ses religieux, afin d*y célé-
brer pompeusement la fête de Saint-Vannes. Ce fut la
dernière fois qu'il prit part à cette solennité ; quelques
mois après, en cette même année 1452 (1), le vingt-
quatrième jour du mois de mars, « indiction première,
« épacte neuvième, le nombre d'or dixième, le onzième
a jour de la lune, le dix-septième du sicle solaire, le
« samedy veille des Rameaux et de la fête de TAnnon-
« ciation de la Sainte- Vierge, le neuf des kalendes
« d'avril », explique Fauteur anonyme de Thistoire de
Saint-Vannes, au moment où, vers onze heures du
matin, on se préparait à chanter la grand'messe, « le
a bon abbé Etienne passa de celte vie à une meilleure »
après avoir reçu très dévotement les derniers sacre-
ments.
Il fut inhumé devant le maître autel de Téglise en
construction. Son épitaphe, gravée sur « une table de
cuivre », fut scellée dans la muraille à Tendroit où Ton
plaça, depuis, un tableau représentant la « cène de Jésus
Christ ]>, tableau qui la masqua tout à fait. »
(1) 1452 avant Pâques. Ce fut seulement eu 1581 que rou
commença, à Verdun, Taunée au 1" janvier, comme ou le
voit en consultant les registres des délibérations munici-
pales : « Du vingt- deuxième jour de décembre 1580. Mes-
« sieurs aians veus ledit de monseigneur de Verdun par
<c lequel il change le miliaire et remet le commencement de
oc l'au an premier jour de janvier ont advisé quil ne leur est
oc rien mande par ledict et que quand il sera adressé à eulx
oc ils le feront gardé en la Cité ». Il le fat certainoment peu
de jours après, puisque les délibérations du 10 janvier sui-
vant, les premières prises depuis le 31 décembre, sont indi-
quées à Tannée 1581.
— 313 —
Cette épitaphe était ainsi conçue :
Dessous le tombel devant le grand autel git feu de
digne mémoire vénérable Père Seigneur Etienne Bour-
geois du Pont a Mousson jadis abbé de cean qui moult
loyablement gouverna trente cinîj ans, fit commencer et
faire le cûer et la nefe de cette présente église jusquau
portai de la cour, le sacraire, les chapelles collatérales
du cûer, les verrières, voultes, et couvertes, le dossel du
grand autel, les colonnes de cuivre environ, la plus
grosse cloche et le plus gros moinet, plusieurs chappes
et chasubles 'de soye et autres ornemens notables, les
édifices pour Tétat de Tabbé environ la haute chapelle,
la closure du mur environ la vigne ou enceinte dudit
monastère, voulter la cave du grand cellier, le chau-
queure(l) devant Saint-Remy, lesgaignages et maison-
nemens de Belleraye et de Franoy qui de long temps
avoient été en ruine fut aulmonier avant qu*abbé, et fit
les basses chambres pour Tetat de Taulmonerie et plu-
sieurs autres édifices dedans et hors la cité, lequel
trépassa de cet siècle bien amé pour les mérites et hon-
nêtetés de sa personne Tan de grâce mil quatre cent
cinquante deux le vingt quatrième jour du mois de
mars. Priez Dieu pour Tamede luy Amen, que Dieu
Toctroye (2).
Cette épitaphe était à peu près la traduction du pas-
(1) Chauqueur (pressoir), de Tancien français chaucher,
fouler. Ce mot est encore usité en Lorraine sous ces dif-
férentes formes : chauqueur, chaucheu, chauchu, chaucu
et chaucheuie.
(2) Nous ne savons à quelle époque ce cuivre a disparu ;
nous reproduisons Tépitaphe d'après la copie donnée par
VHi8toire anonyme, dont nous conservons Torthographe.
— su -
sage suivant que nous extrayons du nécrologe de l'ab-
baye (1).
1452. Nono kalendas aprili». 24 martii.
Anne Dominiez incaraationis 1452, obiit Douiaus
Venerabilis et recolendœ mémorise Abbas Stephanus
Burgensis de Pontemoncionis qui hujus modi inonae-
terio Sancti Vitoni Virdunensis, triginta quinque aanis,
tribus measibus et duodecim diebus pi-tefuit, et idem
adeô virtuose et laudabtliter gubernavit, quod non
obstantibus guerris formidabilibus, inpartibus undique
medio tempore vigentibus, ex quodam antiquo opère
sumptuoso a fere ducentum- annis per quondam bonse
memoriEe Domnum Abbatem Lodoiciiin incœpto, et
post decessum sui successoris, videlicet Domni Abbatîs
Guillermi neglecto, idem Domnus Abbas Stephanus
meliores ipsius antiqui operis, quasi ad ruynam deducti
lapides capiendo, chorum ecclesiœ ejusdem monasterii
ciim navi iisque portale introilua commuais bine iode,
nec non sacrarium, capellas collatérales chori, altaria
tabulai» ymaginatam majoris altaris, columpnas ciipri
in ipsius altaris cirnuitu existentes, pavimentum chori
et capellariarum, verierlas, volluraset cooperturam ad
longum hujus novi operis notabiles, duas sonorosas
campanas, grossiorem videlicet, et grossam mediam,
nonoulla vestimenta, cappas et casulas sericeas ac alla
eccle&ÎEe ornamenta nec non œdlficia ad statum abbalis
circa capeliam in alto coustructam conrecta, clausu-
ram murorum vineœ magnas io ipsius monasterii am-
bitti, voltam in celario magno, et torcular ante eccle-
siam sancti Remigii; nec non, antequam abbas eflice-
retur, ipse officium elemosinanœ actu regens, cedificia,
(1) Manuacrit n» 7 Je la Bibliothèque publique de Ver<)uD.
— 315 —
âulas videlicet, et caméras in basse constructas ad ele-
mosinariam et usum elemosinariorum ordinatas et
pertinentes, suis bono regimine et industria, fleri et
complerifeeit. Gaingnagia verôdeBallereyo, et Frasnido,
cum mansionibus,a longissimis annis ruynata, acquam-
plurirna sedificia, dornos grangias, et alia ecclesiffî
hereditagia, intra et extra civitatem existentia, reedifl-
cari ac meliorari procuravit, ipsiusque ecclesiee jura
manutenendo deffensavit, et multa bona in copia huic
monasterio acquisivit, et suc in transita reliquit.
SepuUus est autem ante maj us altare huj us novœ ecclesiae.
On croit que le marbre noir, qui se voyait sur la sé-
pulture d'Etienne, n'y fut placé que plusieurs années
après sa mort, par Mathieu de Dammarie élu abbé en
1475 (1).
Sur ce marbre, la figure d^Ëtienne, de grandeur na-
turelle, est gravée au trait. Il est représenté vêtu de la
chasuble antique ; le manipule et l'étole sont brodés ;
à la partie inférieure de Taube, Taigle de S* Jean, avec
cette inscription : S. Johanns Aps. {Sanctus Joannes
apostolus), La tête est nue ; les mains jointes sur la
poitrine, le bras droit retenant la crosse abbatiale
(1) U Histoire manuscrite de St^Vannes dit formellement:
c Mathieu de Dame Marie succéda à Antoine de Serrières Van
c i47S » ; Dom Calmet et le chanoine Rouas. 1 le font aussi,
sans remarque aucune^ succéder immédiatement à Antoine
de Serrières, et Roussel ajoute qu*il « est nommé ci-dessus
c à Van i417, page 402 », c'est-à-dire que, page 402 de son
Histoire de Verdun, on voit que cet abbé assista, en 1477,
à la translation des reliques de Saint-Madalvé, et non qu*il
fut nommé abbé en cette même année 1477.
M. Tabbé Robinet qui, dans son Fouillé du diocèse de
Verdun^ a écrit que Mathieu de Dammarie fut élu en 1477,
durait-il donné une interprétation erronée de ce que dit
Roussel, page lij (liv. ii) de son Histoire de \erdun f
- 316 —
1 ampie fanon ; les pieds reposent sur deux
lurnés l'un à droite, l'autre à gauche. Cette
trouve sous une arcade ogivale surbaissée,
ivolte en accolade ornée de crochets et sur-
un fleuron. Dans le tympan, une rosace cen-
isant sur un bandeau garni de fleurons; le
ni sur des piliers gothiques à nervures pris-
el terminés par des pinacles. De chaque côté
1, un écusson aux armes d'Etienne, posé sur
e : on y voit, dans le champ, deux étoiles,
neslre et l'autre en pointe, avec un franc
;hargé de Irois pattes de lion, mouvantes des
. chef et de la pointe (1).
du marbre se lit celte légende :
it feu be bigne mémoire ■ monôigucur (Sétieune
bu laont a mouéon ■ (|ui 3abit estant abbe bc
'M fommciifier faite et e«orer ceôte présente
iiSqueê au portai be la court ■ et treôpoô^ait be
; (e ■ XXIIII Sour t>u moiê be maxé tan mi(
»i étoileB A six rais, avec un franc quartier chargé
ittes <9e lion > : telle est la description Buccincte,
te, des armes d'Etienn?, faits par les continua-
onssel. Il est à remarquer, en rffet. que ai nous
, dans le champ, que deux étoiles, la troisième
certainement, mais est masquée par le franc
lom Le Court n'a pas fait cette remarque, dans son
t S* Vannes que nous n'avons pas i apprécier
a description, quelque peu fantaisiste qu'il ea
que nous reproduisons parce qu'elle indique les
I Les armoiries de l'abbâ Edeone sont en champ
e chargé de deux étoiles d'argent, une en face et
u pointe : au cartier d'azur chargé di trois griffes
l'or, deux en face et l'autre en pointe, surmonté
is»e >. (Manuscrit daté de 1745. N* ï3t do la Bi-
I publique de Verdun.)
— 317 —
quatre cenô cinquante benô ' ^ïik€ bien ^)our lame be
(U9 (1).
En 1822, lorsque l'église, tout à fait abandonnée et
sans toiture depuis près de deux ans déjà, menaçait
ruine, la sépulture d'Etienne Bourgeois fut ouverte et
sa pierre tombale reléguée au milieu des décombres ;
mais, en 1833, M. François Cloiiet, bibliothécaire de
la ville, obtint de l'autorité militaire Tautorisation de
la faire transporter dans l'église du Collège. Elle est
maintenant au Musée municipal.
Dans la tombe, se trouvait une crosse du xiii® siècle,
fort remarquable. 11 est probable, cependant, que, lors
de la mort d'Etienne, les moines en faisaient peu de cas
et que, tout en voulant ensevelir leur abbé avec les insi-
gnes de sa dignité, ils trouvèrent préférable, dans l'in-
térêt de leur monastère, de conserver la crosse gothique
alors en usage, plutôt qu'une crosse démodée et hors
de service dont on n'appréciait plus le mérite. En voici
la description, telle qu'elle figure au catalogue des ob-
jets qui étaient à l'Exposition rétrospective de l'art
français au Trocadéro, en 1889.
« Grosse : Douille décorée de fleurons polychromes
à tige en réserve sur fond bleu; nœud formé de
quatre, médaillons encadrant une sirène à queue feuil-
lagée découpée à jour ; crosseron à section carrée à
crête, termine par un fleuron à trois pétales aigus,
décoré sur chaque face d'une inscription pseudo-arabe
(1) Nous devons témoigner ici notre reconnaissance à
M. Leher, prpfessour au Collège de Verdun, qui a bien
voulu faire, avec autant de soin que. de talent, lé dessin
que nous reproduisons de cette pierre tombale.
— 3i8 -
i avec quelques fleurons polychi-ômes sur
i«) ■■
le temps que la crosse, on trouva daos la
'abbé Bourgeois, ud cabce en étain dont la
forme cylindrique, était comprimée ; il est à
que celte compression existe dans la plu-
aciens calices en étain. Dans le fond de la
voit l'empreinte d'une médaille sur le pour-
uelle se trouve la légende : SU nomen do-
iiclum.
i de la crosse et du calice sont l'un et l'autre
aunes. Ces deux objets font partie de l'intê-
ïinet de M. G. Loustau, ingénieur civil, qui
lent a bien voulu nous en remettre les pho-
, mais nous a aussi autorisée, fort gracieu-
3n donner communication à la Société d'Ar-
inant notrç Notice, on nous saura gré de
ilques détails sur cette célèbre église S^ Van ■
iiice qui, ceut ans après la mort de son Ton-
trouva déjà menacé par les travaux de dé-
ville devenue française et qui, pendant les
\s et demi qui suivirent, ne dut sa conserva-
splendeur de son ensemble.
église, dit l'abbé Gloiiet, fermait le cdté,
. ouvert, du cloître de la vieille caserne, et
)eauDoup au-delà, vers l'est, le chœur tout
lant sur le jardin du couvent. Sauf le portail
.,elle était du style gothique dit flamboyant ;
rena arquer que les auteurs du catalogue ont mal
é Is nom de Saint- Vannée, ce qui a pu amener
iterprêtation aur le lieu d'origine de cette crosse.
— 319 —
ses hautes fenêtres ressemblaient, en grandes dimen-
sions, aux ogives du cloître de la cathédrale. Un ancien
toisé, dans œuvre, attribue à Tédiflce 172 pieds de
long, 561/2 de large, non compris les chapelles, et 58
de haut sous clef. On entrait, à l'ouest, par une large
arcade romane, à colonnettes groupées et archivoltes
sculptées ; sur ce portail, une vaste rosace gothique,
de même style que l'église. De cette porte du fond, on
avait la vue d'un intérieur dont nous ne pouvons mieux
donner l'idée qu'en la comparant à celui de Téglise du
Collège, en supposant à celle-ci une longueur à peu
près double, un chœur arrondi en abside, et une ar-
chitecture ogivale. Les deux nefs latérales s'élevaient
à la même hauteur que celle du milieu ; les grandes
arcades, qui séparaient les nefs, retombaient sur des
colonnes cylindriques ; les hautes fenêtres, à vitraux
peints, correspondaient à ces arcades : très belles
voûtes à clefs sculptées ; Tune de ces clefs, au-dessus
de l'autel, était armoriée d'une aigle à deux têtes, avec
restes de couleurs et de dorures. Aucun badigeon : les
larges pierres de taille se voyaient de leur couleur na-
turelle, à teintes rosées; cette pierre, au dire des
architectes, provenait de carrières épuisées, peut-être
de la Falouse, ou du Ghâtelet de Châtillon. Surtout
l'extérieur, à l'exception du portail, s'élevaient, entre
les fenêtres, des contreforts à clochetons et à sculptu-
res, portant chacun, vers le sommet, une gouttière en
gargouille, à forme d'animal ou d'oiseau bizarre ; ba-
lustrade à trèfles, bordant tout le haut circuit des
murs, chapelles assez petites, occupant les intervalles
entre les bases des contreforts. »
Il paraît cependant que, dans cette magnifique cons-
truction, il y avait un défaut, mais si léger que l'œil
ne pouvait le saisir à première vue : ua des collaté-
raux a'avnit que douze pieds et demi de largeur, tandis
que l'autre en avait quatorze et demi. Oa attribue ce
défaut à ^adaptation qui dut être faite des tours et du
— rtail anciens, à l'église nouvelle,, sans rien changer
cloître qui y communiquait et qui ae permit pas de
rtager également les deux pieds qui se trouvaient en
js du côté du midi.
i
I
1
LA FAMILLE HÉRAUDEL
D'iprès les archives dn bailliage de Bassigoy*
PAR
M. J. MARCHAL
Au commencement du xvi* siècle, Didier Héraudol,
de la Mothe, est désigné comme père de Jean Hérau-
del et beau-père de Jeanne Mercier. Celte mention
forme le point de départ de notre généalogie D'autres
enfants du même nom existaient déjà en ce moment,
car on trouve des Héraudel à Brainville età Graffîgny :
nous ne nous en occuperons pas ; la branche type qui
a illustré le nom sort réellement de Jeaii. Dans ce
petit travail, nous laisserons de côté les filiations des
femmes qui se sont alliées à des familles nobles du
(I) L i famille Héraudel, originaire du Hassigay, eut deux
de ses membres honorés de lettres de noblesse en 1555 et en
1611 ; autre chose, toutefois, a rendu son nom populaire par
t')Ute la Lorraine, je veux dire cotte Elégie^ si triste et in-
contestablement si vraie, par laquelle Jean Héraudel fait
entrevoir les inexprimables malheurs de notre province pen-
21
— 322 —
pays, et ne signalerons que la postérité masculine des
Héraudel jusqu'à Textinption du nom.
1
Jean Héraudel, marchand à la Mothe, fut époux de
Jeanne ou Jeannette Mercier : il décéda avant 1555. De
ce mariage sont issus trois fils et quatre iilles.
1® Jean Héraudel, docteur en médecine à la Mothe,
marié à Philippe de Vbrnay, mort vers 1580 et sa
femme vers 1590. D'où une fille unique, Marguerite
Héraudel, épouse dé Robert d'Orgain, sieur de Rogé-
ville et de Saint-Ouain en partie.
2" Nicolas Héraudel, sieur de Mandres sur Vair et
d'Ozières, anobli le 7 juillet 1555, époux de Amprosne
dantet après la guerre de Trente-Ans. {*), Les deux articles
du Nobiliaire de Dom Pelletier sur cette famille ne tien-
nent pas une page entière et sont particulièrement incom-
plets ; on acceptera donc avec gratitude Tessai suivant de
généalogie, dressé sur pièces, d'après les archives non clas-
sées du bailliage de Bassigny, conservées à Bourmont ; il
nous est adressé par M. Marchai, ancien magistrat, notre
confrère. Nombre de personnes s'occupent do recherches
généalogiques ; mais, parmi les travaux de ce genre qui
s'impriment, combien en existe-t-il qui sont en partie fau-
tifs par suite de Tignorance, ou volontairement faussés par
la vanité et Tintérêt pécuniaire ! Aussi ee repose-t-on avec
plaisir sur les généalogies de familles éteintes qui sont
établies sur documents authentiques, dans le seul but de
servir à Thistoire. A cette catégorie appartient, sans doute
possible, la communication suivante de M. Marchai.
L. G.
(*) Sur cet auteur et ses œuvres, v. : Dom Galmet, Biblio*
Ihèque lorraine; Michel, Biographie de Lorraine, et Noël,
Catalogue raisonné, n» 4417, 4418, 4419, 6379.
— .328 —
Daucy, fille de Ferry Daucy, seigneur de Vroa-
court près de Boiirmont, et de Anne Béget. D'où six
enfants, quatre filles et deux fils.
A. Jeaiine Héraudel, qui épousa le 16 juillet 1564
François Voillot, avocat, fils de Claude Voillot,
de Damblain, décédé en 1565 après huit mois
de mariage. Sa veuve se remaria à Jean de
Houdreville, sieur de Saint-Léger, receveur des
recettes de Ghâtenois et Neufchâteau.
B. Catherine Héraudel, épouse de Claude Sara-
zin, avocat au Parlement de Saint-Mihiel, veuve
avant 1610.
C Renée Héraudel, mariée à Hector de Lespine,
écuyer, lieutenant des gardes de S. A., décédé
eu 1622, avec quatre enfants.
l>. Amprosne Héraudel, qui fut mariée le 22
septembre 1579 à Christophe d'Orgain, sieur de
Villers-en-Haye et Rogéville en partie, gentil-
homme des gardes du roi de France. Il décéda à
Monchenault en 1589, laissant une fille, Pier-
rette d'Orgain, qui devint épouse de Jean de
Montarby sieur de Damrémont. — Amprosne
Héraudel épousa e» deuxièmes noces François
des Noyers, écuyer, seigneur voué de Saulxures
et Bréchainville en partie (1), gentilhomme ser-
(1) Bréchainville est un fief qui existait dans la commune
de Liffol-le-Petit (canton de Saint-Blin, Haute- Ma ne), rele-
vant de la baronnie de la Fauche. Le \^^ août 1614, Am-
prosne Héraudel en donna son dénombrement à Madame
Marguerite, princesse de Lorraine, baronne de la Fauche. Il
ne s'agit pas de la commune de Bréchainville près Neufchâ-
teau.
— 324 —
vant de Monseigneur de Vaudémont, qui inaurut
en 1612, avec deux enfants. Amprosne décéda
vers 1625.
E, Nicolas Héraudel, dit le jeune, puis surnommé
Archenaux, était mineur à la mort de sa mère
et fut émancipé en 1582. Il se maria peu après à
Catherine ; son domicile était la Mothe
et Outréuiecourt. Il mourut vers 1596. Il eut un
fils Jean Héraudei, qui va suivre.
F. Henry Héraudel , 6' et dernier enfant de
Nicolas Héraudel et d'Amprosne Daucy. fut
aussi émancipé avec son frère Nicolas à la fin de
1582. Il fut seigneur de Bonnelet et demeurait
à Sauville. Il avait épousé Yolande de Jainville,
fille de Henry de Jainville, sieur de la Créague
Barbévelle, dont il eut deux filles : Tune, née
posthume, morte jeune, Tautre, Marguerite Hé-
raudel, née en 1589, mariée le 19 novembre 1609
à François d'Ourches, seigneur de Vidampierre
Delouze, Sauville, Parey-sous-MonIfort et Roziè-
res-en-Blôis ; décédée en 1623 avec deux en-
fants. — Henry Héraudel étant mort en mars
1591, Yolande de Jainville se remaria en 1602
à Christophe de Salvan, seigneur de Bouzey,
Villiers et Bourbevelie.
3° Didier Héraudel, 3' fils de Jean Héraudel et de
Jeanne Mercier, était apothicaire à la Mothe. Il fut d'a-
bord époux de Jeanne Daulvin, décédée en janvier
1575, laissant son mari et trois mineurs. Use remaria à
Nicolle Piumeret et mourut vers 1608. Les enfants de
son premier mariage sont :
A. Jean Héraudel, né vers 1561 (Il avait 14 ans à
— 825 —
la mort de sa mère en 1575). Il fut notaire et
bourgeois de la Molhe, dont il est élu mayeur en
1588. Marié à Marthe Barrois, il décéda vers
1633, et sa femme en 1636. De leur mariage était
née une fille unique, Philippe Héraudel, épouse
en premières noces de Claude Thouvenel, avocat
à la cour, lieutenant des sénéchaussées de la
Mothe et Bourmont : d*où deux enfants. Veuve
en 1612, Philippe Héraudel se* remaria en 1615
à Claude Gérard, gruyer de Dompaire et Valfroi-»
court, et en eut deux filles.
B^ Anne Héraudel née en 1565.
C Lucie Héraudel née en 1568, épouse de Jean
Petitjean de Suriauville, anobli le 15 février
1590, capitaine- enseigne au gouvernement de la
Mothe de 1595 à 1607, année de sa mort. D'où
quatre enfants. Lucie Héraudel épousa en
deuxièmes noces Mengin Pageot, dit le capitaine
Festin, qui avait perdu une jambe au siège de
Châteauvillain et mourut à Levécourt en 1625.
Ea 1637, on voit Lucie Héraudel épouse de
Antoine Calaque, sieur de Potensac, demeurant
à Levécourt.
II
Jean Héraudel, fils de Nicolas Héraudel , sieur de
Mandres et de Catherine.. , petit-fils de Nico-
las Héraudel et d'Amprosne Daucy, est le personnage
mentionné dans la biographie nancéienne, de Cayon,
comme auteur d'une élégie latine et française, sur les
malheurs de la Lorraine pendant le règne de Charles IV,
imprimée à Nancy en 1660. Jusqu'alors la filiation de
t écrivain était inconnue ; nous sommes heureux de
>uvoir la fixer d'une manière certaine.
Ainsi qu'il le dit lui-même dans son épitre dédica-
ire, Jean Kéraudel avait 75 ans en 1660 : î) serait
iQC né à la Molhe vers 1585 : ce qui coïncide parfai-
ment avec le mariage de son père dont nous avons
irlé plus haut. H ajoute encore qu'il aurait eu six fils
)Rt trois morts et trois vivants : c'est ce qui va être
infirmé dans la suite de cet article.
Après avoir fait ses études de droit, Jean Héraudel
ivint à la Mothe, où on le voit, en 1609, licencié ès-
ix et avocat. Son séjour y fut de courte durée ; car,
luf quelques comparutions dans des conseils de fa-
ille où il ligure avec Jean Héraudel le bourgeois, sod
lusin, on ne trouve plus aucune mention de lui dans
s papiers de l'époque. Il n'exerce pas sa profession
avocal à la Molhe, et ne représente point les parties
ins des procès judiciaires ; on ne le mentionne plus
imme bourgeois de la ville, il ne paraît point dans le
aniement des aflaires de la communauté. Pendant les
èges et l'occupation française, on ne rencontre nulle
Après un voyage eu France et en Italie, dit-on, Jean
éraudel dut s'établir d'abord à Gondrecourt, puis à
ancy, où il possédait une maison rue du Haut-Bourjet.
a preuve manifeste de son abandon dusol natal résulte
une requête qu'il adressa à S. A. et par laquelle :
mn Héraudel, avocat à la coar de Saint-Miliiel, bz
ioB DE NANCY, soUîcite la permission, pour lui et ses
itants, d'hériter et tenir biens qui leur écherront au
în do la Molbe, malgré la foifuyancc et i-edr nok
£iDEHCE... Celte supplique fut agréée par décret du
— 327 --
24 février 1616. N*est-il pas évident qii^une telle faveur
n'aurait pas été demandée, s*il eût encore été bourgeois
de laMothe?
Par lettres patentes du 28 janvier 1611, Jean Hérau-
del fut anobli et reçut les mêmeâ armoiries que son
grand-père. Il est dit dans ces lettres qu'il est extrait
de famille honorable^ tant du côté du père que de la
mèrej ayant eu plusieurs de ses parents de même nom
qui ont possédé ûefs/vivani noblement^'en gens d'hon-
neur, et de bonne réputation, dont un a èervi le public
en qualité de docteur en médecine à laMothe et d'autres
ont servi S, A. au fait dès armes pendant les dernières
guerres, » Il demeurait alors à Saint- Mihiel.
Vers 1610, Héràudelavait épousé Héllowy Mauljean,
fille de Jean Mauljean, sieur de Liouville, et de sa
deuxième femme Françoise Renel. Il en eut trois en-
fants.
A, Jean Héraudel, sur lequel nous n'avons aucun
renseignement ei que nous mentionnons d'après
M. Dumont; né le 4 août 1612, dont le parrain
avait été Charles Sarazin, avocat à la cour, et la
marraine Françoise Renel, grand'mère.
B. Charles Héraudel, prévôt des. chanoines de la
Mothe, prieur de Relanges, qui va suivre.
G. Louis Héraudel, major au. régiment du -comte
de Ligniville ; époux de Annei Richard ; mort
sans enfants en 1682 à Nacicy^eU qualifié de sei-
gneur de Manoncodrt, fief provieiôant de la suc-
cession des Mauljeàh. Avec lui s-êleignit le nom
des Héraudel. T ^ ^.
Pendant la minorité de ces enfantsdont il fut gardien
inlil(> s^rès la mort de Hellowy Mauljeaii, Jean Hérau-
einaria a demoiselle Jeanne Plumerel. (1). Dans
ment de compte qu'il eut à rendre à ses deux
irles el Louis, de la succession de leurs mère et
des dinicultés surgirent et furent tranchées
a transaction que les enfants acceptèrent par
pour leur père et pour ne pas le mécontenter,
ms laquelle ils furent lésés de plus de 20 à 25
ancs (2). A partir de ce moment, les liens de
, qui étaient tendus depuis le second mariage, se
iai complètement et toutes relations ceseèreut.
aîné, Jean, devait être décédé, 'car il ne parti-
lint à cette succession.
)n deuxième mariage, Jean Héraudel eut trois
François Héraudel, époux de Madgeleine Mon-
ligny, qui mourut vers 1675, sans enfants, en
donnant à sa femme tout ce qu'il poavait lui
donner et privant ainsi sesfrèi-es du 1" lit de sa
succession, et les obligeant à se rendre ses héri-
tiers bénéHciaires.
Jeanne Héraudel, mariée à N , qui
n'avait pas encore d'eiifanls en 1673 el appa-
ianne Plumeret était fille de Tbobie Plumeret, bour*
a la Mothe et de Anne Morel; sceur de Jean Plumeret
en théologie chaDolne de la Mothe et mortcuré de
Sur la tombe He ce dernier sont gravées ses arrooirieB :
à un vol d'or svrmonîé en chef de trois étoiles d'or.
t d'un livre de raison appartenant à M. Deligny, de
>ntO
'est Charles Héraudel qui nouB fitt connaître ces par-
.tés dans son testament,
— 829 —
remment lien doit point avoir y dit une clause du
teslament de Charles Héraudél.
G. Une autre fille (1) dont le prénom n'est point
cité et qui pourrait être celle dont parle M. Si-
monnet, dans les notes biographiques qui accom-
pagnent sa relation des sièges delà Motba- (édi-
tion de 1861, page 449.) Elfe aurait été mariée en
1662 à M. Villiaume, prévôt de la Châlellenie de
Gondrecourt, d'où sortiraient les familles Vil-
liaume, Dinet et Mutel, bien connues en Bassi-
gny. Dans son testament, Charles Héraudel ne
fait aucune mention de cette sœur utérine et ne
lui laisse nul souvenir. Elle était déjà probable-
ment décédée.
Jean Héraudel publia son élégie en 1660 et dut
mourir à Nancy en 1662.
m
Charles Héraudel, prêtre, d'abord simple chanoine
de réglise collégiale Notre-Dame de la Mothe, en
devint prévôt par élection du chapitre, après le décès
de Guillaume Lonchon, pendant les derniers jours de
l'occupation française. Le duc Charles IV confirma cette
élection par patentes du 17 mai 1641. Charles Hérau-
del était alors à la Mothe qli'il continua d'habiter jus-
qu'à la ruine.
La tradition raconte que le 20 juin 1645, dans la
soirée, étant en faction sur le boulevard Vaudémont
(1) D*après le livre de raison de M. Deligny, elle se nom-
merait Marie Magdeleine Héraudel.
"V. ■*, ■.. ■ ■
f*** '■'■-. ' . ' /*
^ _ 880 —
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n
dont les ecclésiastiques avaient la garde, Charles Hérau-
del aperçut un officier supérieur, monté sur un cheval
blanc, qui activait l'attaque faite à la droite du bastion
Saint-Georges. Il le coucha en joue, en appuyant le
mousquet sur l'épaule de son domestique et fut assez
heureux pour le tuer. Cet officier était Magalotti , le
général en chef de Tarmée française. Mazarin mit à
prix la tête du meurtrier : mais Héraudel put s'évader
de la villO; au moment des préliminaires de la capitu-
lation et se retira auprès de Charles IV qui, le nomma
vicaire général de ses armées.
Quelques années après le démantèlement de la
Motlie, Héraudel vint rejoindre . ses chanoines qui
avaient été transférés en l'église Saint-Florentin de
Bourmont et s'établit en cette ville, en une maison
qu'il avait fait reconstruire et qui existe encore aujour-
d'hui, remarquable par sa belle façade en pieires de
taille et ses deux loups en gargouille.
Avant 1654, il fut nommé prieur commandataire du
orieuré de Relanges. Ce bénéfice lui ayant été disputé,
Héraudel ne put en avoir la possession paisible
qu'après de grandes plaidoiries à Rome. L'égUse, les
bâtiments, les usines, l'étang, la grange d'Âttigny, les
moulins de Vivier et d'Iche, dépendant de ce prieuré,
étaient en ruine. Héraudel fit tout réparer et y dépensa
des sommes fort supérieures au revenu. Aussi , dans
dans son testament, sentant sa conscience bien décliar-
gée et seulement pour F honneur qu'il a eu de posséder
ce prieuréj il se contenta de léguer à cette église sa
chapelle entière qu'il avait rapportée de l'armée, en
ordonnant que le calice serait fondu et qu'il en serait
— 831 —
fait un autre de môme pesanteur avec ses armes gra-
vées.
Jusqu'à sa mort, ii parut peu à Relanges et résida
toujours à Bourmont, où il avait recueilli une de ses
tantes, Elisabeth Mauljean, veuve de Jean Barrois,
lieutenant au bailliage d'Hatton-Châtel.
Il mourut à Bourmont, le 6 avril 1678, et fut inhumé
en réglise Saint- Florentin, à la droite du maître-autel.
Son épitaphe, gravée sur marbre noir et en lettres
d'or, avec ses armomes, était ainsi conçue (1) :
Hic jacet nobilis ac venerabiHs D. D. Garolus Herau^
del, capellanus Sancti Florenlini, canonicorum prsepo-
situs, prier commendatarius Sancti Pétri de Relangiis
et S"»» Lg'« Ducis Eleemosinarius , qui francos qua-
dringentos constituit, ut ex reditu annuali 20 franco-
rum servitium solemne a canonicis celebraretur ; si
forte capitulum ex ac capellà exiret, voluit ut capellani
(1) Cette épitaphe a disparu en 1751, lors de la recons-
truction de l'église 8aint-Florentin. Nous en relatons Tins-
cription d*après une copie faite par les officiers de Thôtel de
ville de Bourmont.
Tous les documents de cette notice sont extraits des
archives de Bourmont et du testament de Charles Héraudel
en date des 18 janvier, 17 et 29 mars 1678. — Dans ce tes-
tament, Héraudel institue son seul frère germain Louis Hé-
raudel, pour son héritier en ce qui concerne l'estoc des Hé-
raudel, avec l'usufruit des biens venant de sa mère et de
Françoise Renel qui retourneront aux Mauljean, parce qu*il
n*a pas d'enfants. Malgré le peu de satisfaction qu'il a eu de
ses frères et sœurs utérins, il laisse à MagdeleineMontigny,
veuve de son frère François, une somme de mille francs. Ses
armoiries étaient : d'azur à la bande d*or chargée de trois
trèfles de gueules.
igareotur et Irancus udus ex istis vigioti campaaos
nti, el aller operibus darelur ; pauperes vivens et
inssummo amore prosequens obiit VI. non. spvril.
CLXXVUI.
LETTRES DE GRÉGOIRE
JÉRÉMIË- JACQUES OBERLIN
PAR
M. Ch. PFISTER
Le célèbre professeur de Strasbourg, Jéréinie- Jacques
Oberlin, qui mourut le 10 octobre 1806, légua à la
bibliothèque impériale de Paris ses manuscrits et ses
papiers. Parmi ceux-ci, figuraient les très nombreuses
lettres, écrites en toutes les langues, qu'il avait reçues
des savants de TEurope entière. Ces lettres, rangées
par ordre alphabétique des correspondants, occupent
aujourd'hui 13 volumes du fonds allemand de la biblio-
thèque nationale, n** 192-204 (1). L'un des correspon-
(1) Quelques lettres provenant de ces manuscrits ont été
publiées par M. Arguste Krœber dans la Revue d'Alsace :
Lettre de Schœpflin, année 1867, p. 48 ; lettres de Paul-
Louis Courrier et d'Ânsse de Villoison, ib., p. 84 ; de la Tour
d'Auvergne et de J. le Brigant, ib. p. 193; de Koch, 1868,
p. 86 et 326, de Ph. Ruehl, ib, p. 334.
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^ »*'•
j
— 334 —
dants les plus haut placés d^Obejlin fut assurément Tabbé
Grégoire. Ces deux hommes, d'un esprit si libéral et sî
religieux, si amoureux de la science et des belles-let-
tres, étaient faits pour se comprendre et s'estimer.
L*abbé Grégoire apprit à connaître le gymnasiarque
c'est-à-dire le directeur du gymnase protestant, Oberlin,
pendant un voyage qu'il fit en Alsace en 1784, alors qu'il
n'était encore que curé d'Ëmbcrmesnil (1). Lorsque plus
tard, il fut nommé député aux Etats-généraux, lorsque,
malgré ses soucis politiques, il se livra avec ardeur à
la recherche de divers problèmes scientifiques, il s'a-
dressa au professeur de Strasbourg pour avoir diffé-
rents renseignements. Dès lors des lettres assez nom-
breuses furent échangées entre les deux amis. Nous
publions ici 25 missives ou billets adressés par Gré-
goire à OberUn, tels qu'ils nous sont conservés dans la
collection citée (biblioth. nat. fonds allemand, n*" 195,
fol. 151-187). Nous donnons en note tous les rensei-
gnements qui sont nécessaires à la claire intelligence
de ces lettres.
No I
Paris, 22 août (1).
Monsieur, peut-être vous rappellerez-vous l'abbé Grégoire
qu'autrefois vous avez accueilli avec bienveillance à Stras-
bourg et qui en conserve une tendre reconnaissance. Je sais
(1) Il visita en même temps au Ban-la-Roche, le frère de
Jérémie-Jacques Oberlin, le célèbre pasteur Oberlin. Sur les
relations de Tabbé Grégoire avec ce philanthrope, voir un ar-
ticle d*Aug. Stoeber, Revue (TAlsMe, 1874, p. 117.
Lettre 1* — (1) La lettre ne porte pas de millésime ; mais
elle a été sûrement écrite en 1790.
— 385 —
que dans l'immeasité de vos çoQDaissances vous avez em-
brassé les idiomes patois (2), je me propose un travail rela-
tif à ces divers objets, j'ai fait imprimer ea conséquence uncT
série de questions dont je vous envoyé plusieurs exemplai-
res, pour vous et vos amis (3), en vous suppliant ains^
qu'eux de m' accorder quelques renseignemens. Depuis mon
séjour dans ce pays, j'ai enfanté quelques petits ouvrages
que je vous enverrai sous peu de jours (4). Je vous prie,
Monsieur, de me rappeler au souvenir de nos amis communs,
et spécialement de M' votre frère du Ban de la Roche et de
son vénérable devancier (5), qui a eu la bonté de m*écrire,
à qui je n'ai pas encore pu répondre ; voyez si je suis excu-
sable; je reçois par jour environ 40 et 60 lettres ou paquets,
joint à cela le travail de l'assemblée, celui des comités, etc.
Soyez, je vous supplie, l'interprète de mes sentiments affec-
tueux et respectueux, en les partageant avec eux. Grégoire.
Paris, le !•«• septembre 1791.
J'ai reçu, bon ami, Tenvoi que vous m'annonces par votre
(2) Jacques-Jérémie Oberlin avait publié en 1776 un re-
marquable Essai sur le patois lorrain^ des environs du
comté de Ban- la- Roche,
(3) Cette lettre circulaire, imprimée à l'imprimerie de Cl.
Simon, Paris, comprend 4 pages in-4o et porte la date du 13
avril 1790.'
(4) Grégoire a fait imprimer au début de 1790 les ouvrages
suivants: Lettre aux Citoyens de la Meurthe (sur les salines)
10 mai 1790. — Mémoire sur la dotation des cures en fonds
territoriaux^ lu à la séance du 11 avril 1790, — Observations
sur te décret de V Assemblée Nationale qui ordonne une
nouvelle circonscription de paroisses j etc.
(5) Le prédécesseur de Jean-Fréderic Oberlin au Ban-la-
Roch était Jean Stuber. Voir sur lui la brochure de Baum.
/.-(t. Stuber der Vorgœnger Oberlins im SteinthaL Stras-
bourg 1846.
— 836 —
ottre du 29 août dernier (II. Tons les examplaires qui le
«mposeut seront distribués aujourd'hui. Je suis si occupa
[ue ne pouvant voue éiirire moi-roême, j'ai recours à nae
a&ia étrangère pour prévenir les inquiétudes que uion
«tard vous pourroit occasioner : ja vous verrai bioatdt à
jtraabourg ; en atten<laat. je voue salue e» toto corde et
luis, bon ami, avec les sentiments que vous couiviisBez tout
L vous [et à. nos amis que j'embrasse ainsi que le savant
Monsieur Oberling].
Grëooirb évéque (2).
(Les mots entre crochets autographes).
H" 3
Paris, 1" frimaire, l'an 3* de la république une et
indivisible (!}.
Mon cher ami, tes lettres font une diversion agréable à
uea fiitignos et, quoique j'écrive brièvemant et rarement, tu
la me priveras pas, j'espère, du phijîr de recevoir tes let-
;res. Combien je sais charmé que Blessig soit libre (2) ; je
Lsttra2.— (1} U s'agit sansdoutede l'envoi du programme
jn'Oberlin devait lire  la prochaine rentrée du Oymnase et
isDs lequel il célébrait laconstitution de 1791.Surce program-
ne voir Rod. fteuss; Histoire du Oymnaseproleilant pendant
!a Révolution, p. 40.
(2) Orégoire avait été élu le 15 février 1791 évéque des
ieux départements de la Sarthe et du Loir-et-Cher et il
»vait opté pour le dernier. Cf. A. Gazior, Eludes s»r l'hit'
toire religieuse de la Rinduiion française, p. SI .
Lettre 3. — (1) 31 novembre ]-94. Grégoire était à ce
moment député du Loir-et-Cher â la Convention.
(â) Blessig, l'un des personnages les plus éminents de
Strasbourg, était pasteur au Temple-Neuf et professeur de
théologie. Il fut incarcéré pendant la Terreur. (Voir sur ce
pasteur la biographie faite par Cari Max. Fritz, Leben D.
— 337 —
lui écrirai le plutôt possible aiasi qu*à Muller (3).
Il y a trois jours que faute de loisir je n'ai pu achever ma
lettre, en date du 1«' : je continue au moment où un citoyen
du Ban de la Roche m'apporte une lettre de ton excellent
frère que j'embrasse avec toute sa famille.
Tu sais que sur mon rapport la Convention N^* a
décrété une somme de trois cent mille livres en récom-
pense aux savans, etc (4). Chénier (5) prépare un rap-
port sur l'application , et certes je ferai mon possible pour
placer sur cette liste les noms d'Oberlin, Herman (6) et Ëhr-
man (7).
Le courrier d'aujourd'hui te portera ce que tu me deman-
des : l^ plusieurs exemplaires de mon rapport sur Tanéan-
tissement des patois, etc (8) ; 2<» le rapport sur la bibliogra-
Johann Lorenz Blessigs. Strasbourg, 1818, 2 vol. in-8o.
Oberlin lui-même avait été arrêté dans la nuit du 2 au 3
novembre 1793 et il était resté 10 mois prisonnier à Metz.
C'est seulement en août 1794 que le comité du salut public
avait consenti à le rendre à la liberté.
(3) Millier était un ancien professeur au Gymnase.
(4) Le rapport de Grégoire a été publié à part sous le
titre : Rapport sur les encouragemens, récompenses et pen-
sions à accorder aux savants, aux gens de lettres et aux
artisans. Séance du 17 vendémiaire, Tan III, 22 p. in-8^.
(5) Joseph Chénier, le frère d'André qui avait péri sur
l'échafaud pendant la Terreur.
(6) Hermann (Jean), professeur de médecine à l'Université
de Strasbourg, plus tard professeur à l'Ecole centrale du Bas-
Rhin, auteur de nombreux ouvrages sur l'histoire naturelle.
(7) Ëhrmann (Jean-Chrétien), naturaliste. On lui doit la
publication de l'Histoire des plantes d'Alsace par Mappus.
Son frère, Jean-Frédérîc Hermann, jouera un important
rôle politique. Il sera membre des Cinq-Cents, puis maire
de Strasbourg. Dans les lettres de Grégoire, il est tantôt
question de l'un, tantôt de l'autre.
(8) Rapport sur la nécessité et les moyens d'anéantir les
patois et d* universaliser Vusage de la langue française*
Séance du 16 prairial an II, 28 pp. in-8o. 22
— 888 —
a (9) : 3> je crois devoir t'adresRer encore des exetnplai-
de l'instruction da la commission temporaire des arti,
la feuille sapplétiva qne j'y ai fait joindre (10); et }a
I m'assnrer li lea postes sont fidèles. Accuse-moi la ra-
tion du tout. Ces instructions répondent à toute objec-
I sur le mode de confectionner les catalogues et quand
s la classification .par ordre de matières, c'est l'objet
ne distribution régulière d'une bibliothèque ; le travail
la bibliographie ne demande que des cartes.
I t'ai demandé ai tu avais des occasions faciles pour
oyeren Suisse divers opuscules patriotiques, je te prie
'■n conséquence des détails que tu m'as donnés sur Mon-
(11) et la municipalité, sur l^s destructions et dégrada-
is de votre bibliothèque, etc. j'ai fait prendre à la com-
sion des arts un arrêté portant qu'il serait écrit i l'admi-
;rateur du district qui n'a point encore répondu, «t au
jeteur des subsistances dont je t'eavoje la réponse, afin
)) Instruction publique. Rapport sur la bibliographie.
Dce du 32 germinal an 11, 16 pp. in -8°. A la suite de ce
port, la Convention nationale ordonna aux administra-
is des districts île lui rendre compte dans la décade sui-
te du travail relatif au catalogue de chacune des
itcthèques de leur ressort.
10) Ces instructions, 4 pages in-4°, ont été envoyées par
comité d'instruction publique aux administrateurs du dis-
:t. Grégoire insiste pour que, sur chaque carte, le titre de
Lvrage soit exactement copié et le contenu du livre briè-
lent indiqué.
H) Le vrai nom est Monet. Monet, jeune homme origi-
ra de la Savoie, avait été maire de Strasbourg pendant la
■reur. Voir sur lui Séinguerlet, Strasbourg pendant la
totuiion, p. 137 et Bs. Les sculléa avaient été mis par
net sur la bibliothèque et de la paille avait été emmaga-
ie BOUS l'édiâco. A c6té, dans le Temple-Meu<, on avait
é des porcs.
— 839 —
que tu m'en dises ton avis ; je me propose de citer à la Con-
vention Monnet et consorts d'après ta lettre.
Les papiers publics t'auront transmis les rapports et dé-
cret sur les écoles normales et primaires ; j*ai reçu une let-
tre d'Eissen (12) ; j'étais si accablé d'affaires que je doute si
je pourrai de sitôt lui répondre. Salut, embrassement et
fraternité à Oberlin et à tous nos amis. Je te prie de me
répondre le plutôt possible. Grégoire.
N» 4
Paris, 13 nivôse l'an 3 de laRépublique une et indivisible (1).
Mon cher Oberling, je suis un détestable correspondant,
écrivant rarement et en poste, mais ton amitié est indul-
gente : tu sais d'ailleurs que dans ma position je suis excu-
sable : j'espère bien un jour me dédommager dans des en-
tretiens assaisonnés par le charme des arts et de l'amitié.
Tu as du recevoir mon dernier rapport sur les destructions (2);
je te prie d'en transmettre un exemplaire à Wedekind qui
m'a adressé une lettre intéressante sur les horreurs commi-
ses dans votre basilique : j'ai cité son témoignage; il faut
que son imprimé subsiste comme un mouvement qui attes-
tera son goût pour les arts et l'étornelle infamie des scan-
daleé (3); j'ignore sa demeure, je réclame ton entremise :
».
(12) Nous ignorons quel est ce personnage.
Lettre 4 — (1) 2 janvier 1795.
(2) Troisième rapport sur le Vandalisme. Fait à la Con-
vention nationale, au nom du comité d'instruction publique,
dans la séance du 24 frimaire, Tan III, 21 pp. in-8<».
(3) Voici le passage du rapport au<][uel il est fait allusion,
«c A Strasbourg, au dix-huitième siècle, on a surpassé les
Alains et les Sarrasins , l'immense et superbe basilique de
cette cité est méconnaissable : des statues par milliers sont
tombées sous le fer destructeur. . . »
a Un ami des arts (Wedekind) a publié en allemand un ou-
— 340 —
lonae-moi an juste l'adresse de Blessig à qui j'écrirai bqus
len ainsi qu'à Mu lier.
Je n'ai encore vu qu'un ou deux de ces hommes estima-
>leB arrivés pour l'école normale et je ne les ai vus qu'an
noment : mais dodb devons noua revenir et il me sera donx
le converser amplement avec eux.
Tous les jours j'attends ie décret qui répartira les 3 cents
nille livres qui ont été accordées d'après mon rapport : le
'■' sera fait par Chénier. L«b poms d'Oberling et de Her-
nann sont sur la liste présentée par le comité. Je te prie
.UBsi d'envoyer à ton brave frèro de Valderapach (4) et des
irochures et des amitiés. Salut cordial à nos amis. Je t'em-
(Ën souscription à la 1" page : l'ami Oberling.)
'aris, 28 pluviôse, l'an 3 de laRépubliqueune etindiviHible(l)
Mon cher Oberling,
Je vous écris sur le bureau du comité (3) et an milieu
l'une discussion. Y aura-t-il du bon sens dans ce que je
rOQS dirai ?
J'ai déposé au bureau des dépêches votre lettre de remer-
Tage qui doit transmettre à nos neveux cet horrible ta-
>leau. Quelques ornemens ont échappé ; il désire qu'on let
assemble à côté d'une pyramide, sur laquelle oti graverait
'inscription suivante : Citojens de Strasbourg, que ce mon-
ceau de ruines soit pour vous une leçon salutaire de ne
amais permettre que le système de terreur renaisse pariai
'ous. Songez au jugement de la postérité. ■
(4) Walderapach ou Walbach était le principal centre d«
a paroisse du Ban-la-Roche.
Lettre 6. — {!) U février 1795.
(3) Le comité de l'instruction publique.
— 841 -
ciemens à la Convention N»* (3) ; vous êtes peiné de ne
pas avoir vu sur cette liste le nom du savant Barthé-
lemi (4) : vous devez croire que, connaisgant personnelle-
ment cet écrivain et son mérite, j'ai dû ne pas l'oublier ;
tout le monde partage vos sentimens et les miens â son
égard ; mais on a douté si sa fortune était trop modique
pour rinscrire sur cette liste, et, comme de nouveaux dou-
tes s'élèvent à cet égard, je crois qu'on y reviendra. Plu-
sieurs autres savants distingués n'y sont pas placés par les
mêmes raisons.
On a renvoyé à la l'« section du comité ce qui concerne
votre Gymnase : rien encore de décidé à cet égard (5).
J'ai vu vos envoyés de Strasbourg qui m'ont remis votre
lettre en date du 12 courant ; il m'est toujoiu's agréable de
parler de vous avec des hommes qui comme moi vous esti-
ment et vous aiment. Salut cordial à vous et â vos amis
Blessig et Mulier dont j'ai reçu les envois intéressans. Je
leur répondrai le plutôt possible.
J'oubliais de vous dire que lors de la confection de la
U* liste des savans, j'avais proposé les citoyens Ehrman
(3) Dans la séance du 14 nivôse an 3, la Convention na-
tionale partagea les 300,000 livres qui avaient été précédem-
men,t assignées aux savants. Elle donna 3. 000 livres à Oberlin
et autant à Hermann. On trouva en général que la liste
des savants, dressée par le comité, était incomplète : mais
on se proposait de distribuer plus tard de nouvelles récom-
penses.
(4) Il s'agit ici de l'auteur du Voyage d*Anacharsis qui
«mourut peu de temps après, le 30 août 1795.
(5) La question qui se posait alors était la suivante : Le
Gymnase de Strasbourg subsisteraif-il, à côté de l'école
centrale qu'on allait établir dans le Bas-Rhin ? Les ancien-
nes fondations protestantes resteraient-elles affectées à, son
entretien ?
— 342 —
et Schweighaeuscr (6) : j'espère que pour cette seconde liste
ils seront adoptés et j'ai fait, je ferai de nouveaux efforts à
cet égard. Je vous embrasse. Grégoire.
Sans doute mon discours sur la liberté des cultes (7) aura
été envoyé à mon brave Oberling du Ban-de-la- Roche.
N«6
Paris, 10 germinal Tan 3 de la Rép. une et ind. (1).
Mon cher ami.
Pardon du retard de mes réponses ; je ne dirai pas mea
ct«(pa, car c'est bien malgré moi. Le torrent des affaires
absorbe mes nuits et mes jours ; oh ! quand pourrai-je, au
sein du repos, être mon maître et goûter le plaisir de voir
mes amis, de converser avec eux !
Millin (2), quelques amis et moi avons à cœur de concou-
rir en tout à vos vues patriotiques ; il y a même projet de
vous attirer ici : réussira-t-on 1 Je l'ignore.
Le comité a pris un arrêté pour faire payer les professeurs
jusqu'à l'organisation définitive des écoles centrales (3).
(6) Jean Schweighœuser, le célèbre helléniste, avait déjà
donné ses éditions de l'Electre et d'Œdipe-Roi, de Sophocle,
d'Andromaque et d'Oreste d'Euripide et ses trois volumes
d'Appien. A ce moment même, il mettait la dernière main
à son édition de Polybe.
(7) Discours sur la liberté des cultes par Grégoire, prO"
nonce à la séance du premier nivôse an II L Nous avons
sous les yeux la cinquième édition, 22 pp. in-8<».
Lettre 6. — (1) 30 mars 1795.
(2) Aubin-Louis Millin. célèbre antiquaire et numismate.
Sauvé par le neuf themnidor, il venait d'obtenir la place de
conservateur au cabinet des médailles.
(3) Au gymnase, le traitement des professeurs n'avait pas
été payé pendant la Révolution ; en février 1795 seulement,
la municipalité voulut bien les rembourser. Reuss, Gym^
k
— .343 -
J*ai imprimé récemment une lettre pastorale â mon dio-
cèse (4) et si je ne vous Tai pas envoyée, c'est que j'ai cru
cet ouvrage étranger à vos goûts.
Salut, bon ami, je vous embrasse tendrement. Grégoire.
(En sbusicription en bas de la lettre : le cit. Oberlin).
N«7
Billet sans date (1).
Souvenir de Tamitié à mon bon ami et confrère à l'Insti-
tut national Oberling. Nous possédons déjà avec lui les cit.
Brunck et Schweighauser ; bientôt d'autres Strasbourgeois
seront sur la même liste.
nase» p. 146. Le comité de l'instruction publique venait de
décider que leur traitement leur serait continué, au moins
jusqu'à la formation des lilcoles centrales.
(4) Lettre pastoiale de Henri Grégoire. 22 ventôse an III.
17 pages in-4o. Grégoire flétrit très énergiquement dans cet
écrit les terroristes qu'il appelle c des persécuteurs couverts
de sang. »
Lettre?. ^ (1) L'institut fut réorganisé à la fin Je 1796 et
divisé en trois classes : 1° Sciences physiques et mathémati-
ques ; 2'* Sciences morales et politiques ; 3® Littérature et
beaux-arts. Au début de K/QT, on nomma les membres associés
et dans cette liste se trouvèrent Oberlin (3' classe, section des
antiquités et monuments), Schwaigha^usor qui avait déjà fait
partie de l'ancienne académie des inscriptions et belles-let-
tres et Brunck (section des langues anciennes), Brunck,
commissaire aux armées de la République, est le célèbre
helléniste, Téditeur d'Appollonius et de Sophocle. Ce billet
de Grégoire par lequel il félicita Oberlin de son entrée à
l'Institut est certainement du début de 1797.
Paris, 39 mara 1797 l'an 5 de la République (t).
jher ami, j'aurais un besoin aeaez ^urgent de l'ouvrage dn
nr de Bsltbasar le père de Lucerue, iotitulé : de jwe Hel-
iori»t ciri-a sacra; jB le cherche vainement â Paris ; il
ii p>i même à la bibliothèque N" : peut-être pon-
-vouB me le procurer , aoit en l'achetant et alors
rqnez-moi le prix, soit, à défaut de ce, ri on ne trouve
I à l'acheter, au moins en me le prêtant ; comme il est
9 petit, il est susceptible d'être envoyé par la poste,
'ourrez-vous me dire si l'on contioue le journal latin bi-
}thèque ecclésiastique de Fribourg que je lisais avec grand
irêt? (3).
L. qui i-ec«urir pour des renseigne mens de ce genre sinon
iB amis: atiEBi je m'adresse à Oberllng :jeme serois adressé
même â Blesaig qui m'oublie, m^is que )e n'oublie pas
]ae j'embrasse tendrement ainsi que vous. Grégoire,
e voua ai envoyé dernièrement l'opuscule que vous dési-
? L'ave!!-vous reçu? Je me méfie des postes.
«ttre 8. — (1) Grégoire était i . ce moment membre du
iteil dei Cinq -Cents.
î) De Balthazar (Félix), membre du Conseil souverain
Ijucerne. Son ouvrage; DeHelvetiorumjuribascircafaat'a,
té traduit par Viend sous ce titre ; Les lioertés do V Eglise
aitique. Lausanne 1770. Cet écrit excita une vive iadigna-
n â Rome et y fut condamné.
3) Ce journal étaitrédigé par les professeursde la Faculté
Utêologie.
— 345 —
N«9
Paris, 6 frimaire Tan 6 de la Rép. (1).
Cher collègue et ami, permettez que je commence cette
lettre par me plaindre de vous à vous-même, de ce que voui
affranchissez les lettres que vous m'envoyez ; puisqu'une in-
demnité nous sera accordée pour suppléer au contreseing,
elle doit être appliquée surtout aux correspondances qui in-
téressent les sciences et Tamitié ; quant aux paquets, nous
saisirons, nous nous indiquerons mutuellement les occa-
sions des voyageurs qui peuvent se prêter à nous obliger. Les
paquets ci-joints vous seront envoyés ou remis par un membre
du conseil des Cinq-Cents, le cit. Nogué-Malijai (2), qui va
passer quelques momens à Strasbourg.
Je suis vraiment touché de la lettre du citoyen Maeder (3) ;
elle annonce un homme éclairé et religieux. Ces deux qua-
lités qui s*allient si bien, se rencontrent malheureusement
chez peu d*hommes de lettres : je vous prie de lui transmet-
tre le paquet qui est à son adresse, auquel j*ai joint une
lettre.
Sans doute vous avez quelques fois des occasions pour
Berne et Lucerne. Dans cette présomption, je prends la li-
berté de faire déposer ■ chez vous deux petits paquets pour
mes amis Meyer et Fellenberg (4), qui en partageront le
Lettre 9. — (1) 26 novembre 1*797.
(2) Député des Bouches- du -Rhône. Nous ne sommes pas
tout-à-fait sur de la lecture.
(3) Pasteur protestant qui sera bientôt nommé à TEglise
de Lyon.
(4) Meyer (Joseph- Rodolphe-Valen tin). Il fut mêlé aux
troubles dont la ville de Lucerne était le théâtre à la fin du
xvin* siècle. <- de Fellenberg, patricien de Berne, créa à
Hofwyl un établissement agricole modèle.
-.■f-ff.-i- •».•".. .-^«Ti».'. re V*" H "♦'••1
- 846 -
contenu avec M. Baltassar et M. Stapfer (5). Je viens de
recevoir des lettres intéressantes de ces citoyens.
Le cit. Gamns (6), notre collègue à Tïnstitut me charge
de vous transmettre la note suivante : c Le cit. Oberlin a
donné un petit écrit latin qui contient plusieurs tables pour
indiquer les hommes célèbres et leur contemporaneité (7),
Cet ouvrage s'annonce comme l'introduction à un autre
ouvrage du même genre, mais un peu plus développé et dont
il «embleroit même qu'il y auroit eu une première édition
antérieure à la publication des tables. Le cit. Camus désire-
rait savoir si cet autre ouvrage a été publié par le cit. Ober-
lin : il a celui où sont les tables ; il voudrjit avoir l'autre. »
Je recommande à votre complaisance cette note d'un savant
bien estimable : vous n'êtes pas au bout des actes de com-
plaisance» voici pour mon compte.
Je vous prie de me donner une liste des ouvrages du
coadjuteur Mayence (8). Savez-vous où il est, ce qu'il
fait ? on le dit bien disposé on faveur des idées républi-
caines.
Publie-t-on encore à Fribourg les acta ecclesiastica ? Et
dans le cas où ils ne seraient pas continués, à quelle époque
ont-ils cessé? Nous n'en &vons ici que quelques vol. à la
(5) Balthassir, voir la lettre précédente, note 2. Il mourut en
ISIO.— Jean Stapfer, prefesseur de théologie à l'Académie de
Berne, connu surtout par ses sermons, plus tard ministre de
l'instruction publique en Suisse.
(6) Camus était entré à l'Acaiémie des inscriptions et
belles^ettres à la suite de sa traduction de l'Histoire des
animaux d'Aristote. Ildevintmembre de l'Institut réorganisé.
Il joua aussi un importantiôle politique et fut pendant quel-
que temps président du conseil des Cinq-Cents.
(7) Il s'agir du petit opuscule : Litterarum omnis œvi
fata fabulis synopticis eœposita, Strasbourg, 1789, in-8<».
Nous ne pensons pas que l'ouvrage plus détaillé ait existé.
(8) Nous ne savons pas de qui il s'agit.
- 347 —
bibliothèque N^», c*est. je crois, M. Kupfelin que j*ai
vu àFribourg qui les rédigeait (9). Quel est le titre d*une
brochure format in-4« qui contenait des anciennes lois de
Strasbourg rédigées, je crois, sous Tevêque Gérard et dont
un article me parut assez brave ; car, en dernier résultat, il
signifiait que quand un homme seroit condamné à être
pendu, on le pendroit.
Vous ai-je dit que j*avais découvert une traduction fran-
çaise des libertés helvétiques que vous avez eu .la bonté de
me procurer et pour lequel ouvrage je vous réitère mes re-
merciemens (10). Dans le cas où je ne vous aurais pas
envoyé la brochure de Pougens sur les langues du nord (11)
vous en trouverez ci-Joint un exemplaire avec quelques
opuscules, entre autres mon compte-rendu (12), dont Tédi-
tion a été si m«l signée que plusieurs fautes en rendent le
sens absurde. J*en joint un second exemplaire pour Tami
Blessig. Dites lui, Je vous prie, qu'il aura dan^ quelque tems
deux rapports de ma façon au concile national, l'un sur Tad-
mission de là langue vulgaire dans la liturgie où j*ai eu
occasion de citer un ouvrage qu'autrefois il m'avait prêté,
l'autre sur l'amélioration et l'uniformité de la liturgie ; il y
verra que je propose pour modèles de décence religieuse
dans la récitation des prières les ministres protestans (13).
(9) Professeur à la Faculté de théologie de l'Université de
Fribourg.
(10) Voir plus haut, lettre 8, n» 2.
(11) Pougens (Marie-Charles- Joseph), membre de l'Insti-
tut. La brochure dont il est question ici est intitulée :
Essai sur les antiquités du Nord et les anciennes langues
septentrionales. Elle avait paru en 1796. Il y eut une seconde
édition en 1799.
(12) Compte-rendu par le citoyen Grégoire au concile
national des travaux des évéques réunis à Pai is, Paris,
1797, 1 broch. in-12, 84 pp.
(13) Ces rapports, semble-t-il, n'ont été adressés qu'au
ipi«7-T0UB dea occasiona pour Erfordt (14) et Bamberg
) voudrai! envoyer quelque choaa à daa hommea de let-
qui m'ont lait quelques demandes ?
, Baër préparait uue traductiân de l'abbé Jérnaaism et
nouvelle diaaertattoti sur l'Atlantide (15). Les avait-il,
véa avant de mourir?
lut ot amitiéa aux citoyens Bruuck, Bleasig, Hafoer (16),
1 (H), Turkeim (18), Arbogaat (19), Spialraan (20);
nan, EhrmanD et votre frère. J'aime à croire que ces
mea respectables m'ont conservé un petit coin dans leura
'S. J'embrasse en voua un aavant distingué, un républi-
religieux et un ami sincère. Grégoire.
n aouacription au bas de la première page : le citoyen
lin).
id concile en 1801. Qràgoire flt paraître à part le se-
soua le titre : Traité de l'uniformité et de l'amHiora'
de ta liturgie. Paris, 1801, in-8».
i) Liaex Brfurt.
i) Baer, docteur en théologie, mort à Strasbourg le S3
1797, La traduction des Vérités de (a religion, de l'abbé
lahm, théologien allemand du xtui' siècle, n'a pas vu
ur, non plna que la diseertation sur l'Atlantide,
i) Haffaer (laaac), pasteur à Strasbourg, plua tard pro-
ur i l'Académie protestante, connu surtout pour son
ige sur l'Education littéraire, Strasbourg, 1792.
r) Koch (Christopbe-Guillaume), ancien prefeaseur de
versité ; ancien membre de la légïalatkve, l'auteur de
«ire des Traités de paix,
I) Le baroa Jean de Tiirckheim, ancien député de Stras-
g & la Constituante.
i) Arbogast, gé:}mètre, né à Mutzig en 1759, ancien
té du Bas-Rhin à la Législative et à la Convention,
■ut à Strasbourg en 1803.
)) Spielmann le fils du célèbre chimiste, fut lui-même
lédecin distingué. Son jeune frère devint un remarquable
isseur de droit.
— 349 -
NMO
Paris, 5 prairial an 6 (1).
Cher ami, je suis bien en retard de réponses à votre égard :
j*étais accablé de besogne et j*ai compté d'ailleurs sur votre
indulgence. Depuis longtems le cit. Laquiante (2) a dû
recevoir le ms. que vous m'aviez fait parvenir de sa part. Je
Tai remis moi-même à Tadresse qui m*avait été indiquée et
j'y ai joint une lettre en réponse. Sans doute, il se propose
de faire usage do ce travail qui, avec quelques légers chan-
gemens, peut servir à éclairer le peuple, à lui donner des
notions justes sur la religion. Veuillez bien le saluer de ma
part ainsi que le citoyen Rumpler, en leur transmettant mes
remercîmens sincères (3). Même chose â diro au citoyen
Walther (4) que j'ai vu un moment et dont auparavant je
connaissais déjà les travaux scientifiques.
J'envoye un petit paquet au cit. Maeder de Mulhouse et
c'est encore la complaisance de l'ami Oberling que je ré-
clame pour le lui transmettre.
Ehrmann, mon ancien collègue (5), qui est un excellent
. Lettre 10. — (1) 24 mai 1798.
(2) Laquiante (Jean-Thomas d'Âquin) était à ce mv^ment
président du tribunal civil du district de Strasbourg. Il était
beau-frère du chanoine Rumpler. Voir Et. Barth, dans la
Revue (T Alsace, 1880. p. 431.
(3) C'est le fameux Rumpler, d'Obernai si célèbre par ses
procès. Voir sur lui la brochure de J. G., Canonicus
Rumpler und seine Erlebnvise vor und wœhrend der
Revolutionszeitf 1890, in-8°.
(4) Walter, auteur, avec Masse net, d'une Description du
Ban'de- la 'Roche qui a paru à Strasbourg chez Levrault, an
VI (1798), in-S».
(5) Ehrmann (Joan-François), parent de celui qui a été
cité lettre 3, avait été collègue de Grégoire à la Convention.
— 850 -
me, vouB remettra le tout avec ua petit paquet pour
. Précédemment, lui ou Hermann a dûvona envoyer un
Dplaire de mon dernier opuscule sur la coniervation des
et métiers. (6)
)ua avons ici le cit. Stapfer de Birne, nommé ministre
instruction publique de la népttblipue helvétique. C'est,
'oia, le premier ministre de l'instruction publique et le
qu'il y ait en Eniope, et on a fait un excellent chois,
ni confiant cette partie. Je vous quitte pour converser
loment avec l'ami Blessig. Mes com pli mens à votre digne
) et  tous nos amia. Je vois quelquefois votre fils, j'ai
de croire qn'il sera digue de son père que j'embrasse
efTuaiou de cœur et d'amitié. Qrégoire.
H" 11
Paris, 26 vendéMiaire, an 7 (I).
ler et estimable ami, quiconque se présentera ici avec
recommandation signée Oberling, Blessig ou tel autre
aussi cher est sûr d'être accueilli. M. Lindal de Kor-
ng que voua m'avex adressé est très coûtent de son
ge en France; il va partir et je lui remets dea lettres et
lets pour divers savants du nord.
mon tour, je vous adresse M. Leutz de Ootha (S), dont
érite éminent est relevé par une extrême modestie. Je
^hé que noua le perdions si tôt ; il se réjouit de faire
9 connaiaaance, celle dn cit. Blessig et des autres sa-
de Strasbourg. Ces communications fraternelles entre
) Rapport fait au nom d'une commission spétiale, tur
nservatoire des Arts et Métiers. Paris, an VI, iD-8°.
lUre 11. — (1) n octobre 1798.
I Ptofeasenr â Ootha et archéologue connu. Il dirigea
ant trois ans la National Zeitung.
- 351 —
les hommes éclairés des divers pays me font grand plaisir ;
elles semblent les préliminaires de rnnion si désirée des
peuples.
Vous me marquez que vous avez bien voulu faire les com-
missions dopt je vous avais prié. Vous avez dû recevoir :
l» une lettre, 2^ une autre lettre dans un petit paquet que
j*ai remis aux relations antérieures et qui a dû vous parve-
nir par quelque courrier envoyé à Rastadt; 3» un paquet
assez volumineux adressé par la messagerie avec prière de
le transmettre à Tadresse indiquée sur Tenveloppe intérieure :
M. Schwartzel, professeur de théologie à Fribourg en Bris-
gau (3). Tout cela vous est-il parvenu ? M. Schwartzel, à
ce que j*apprends par un ami de Hollande, n'avait encore
reçu ni lettres ni paquet il y a peu de tems ; je crains qu'au
delà du Rhin, ou n'intercepte les envois. Veuillez bien, mon
cher ami, me tranquilliser à cet égard, et me dire en outre si
vous ayez déboursé pour moi quelque chose, afin que j'y sa-
tisfasse. Votre réponse aura un double mérite si elle est
prompte.
J'ai lu dans le magasin encyclopédique vos observations
intéressantes sur le patois messin (4). Depuis qi;elques an-
nées, j*ai recueilli beaucoup de notes et de renseignemens
précieux et sûrs sur les divers patois de la France et c'est
vous qui autrefois m'en avez donné l'idée par vos écrits :
mais je n'ai pas le loisir de mettre en œuvre ces matériaux.
Si vous entreprenez quelques travaux à cet égard, ce que
j'ai vous sera communiqué. Je saisirai quelque occasion pour
vous envoyer bientôt des brochures.
J*ai reçu avec reconnaissance et lu avec intérêt les impri-
mes du cit. Laquiante ; il aura pu lire le compte rendu
(3) Professeur de théologie à Fribourg-en-Brisgau, alors
université autrichienne.
(4) L'ouvrage a aussi paru à part sous ce titre : Sur Van-
cien langage messin, in-S».
— 352 -
de ces ouvrages dans les mémoires qui ont succédé aux
annales de la religion. Veuillez bien le remercier de ma
part.
J'ignore si le citoyen Vauprat de la bibliothèque nationale
vous aura écrit; je lui ai recommandé Tacquisition d'un
ouvrage espagnol qui doit se trouver dans la bibliothèque de
feu M. Leibold et qui n*est pas à la Bibliothèque Nationale
las excellentas de los Hehreos etc., par Gardoso (5).
Salut, estime et amitié inviolable à vous et à tons nos
amii. Grégoire.
(En souscription au bas de la 1^ page : le cit. Oberlin,
professeur et bibliothécaire à Strasbourg),
No 12
Paris, 27 vendémiaire, an 7 (1).
Cher collègue et ami, hier je vous écrivis une lettre de
trois pages qui vous sera remise par M. Lentz, médecin de
Ootha. Il doit partir d*ici sous peu de jours ; il est probable
que celle-ci vous sera remise auparavant par le cit. Thére-
min (2) à qui ses talens et ses écrits politiques assurent un
rang distingué dans la république des lettres et qui, après
avoir rempli une mission diplomatique en Espagne, part
pour TAllemagne avec mission du gouvernement français
pour les affaires commerciales. Je vous prie, cher ami, de
lui faire connaître les autres savans de Strasbourg et les
richesses littéraires de votre cité. Quoiqu'il se réjouisse de
voir, de compulser la bibliothèque publique, il attache bien
(5) Cardoso était un hagiographe portugais, mort en 1669.
Lettre 12. — (1) 18 octobre 1798.
(2) Théremin (Charles), publiciste, a fourni une série
d'articles à la Décade littéraire et philosophique (1794-1807).
— 353 —
plus d'intérêt à converser avec le bibliothécaire qui d'ail-
leurs pourrait la suppléer.
Vous avez beaucoup de relations en Allemagne ; je vous
prie de lui faciliter la connaissance des sayans de cette
contrée et de lui donner des lettres pour vos amis : je par-
tage d'avance les sentlmens de gratitude que votre complai-
sance lui inspirera.
Mes compliments affectueux à nos bon? Strasboùrgeois,
surtout à votre frère ; je vous embrassa avec les sentimens
de Testime la plus juste et de Taffection la plus tondre.
Grégoire.
Je vous prie do me tirer d'inquiétude sur le sort de la
lettre et des deux paquets que j*ai pris la liberté de vous
adresser pour M. Schwartzel, professeur à Fribourg en
Brisgau et qu*il n'a pas reçus.
N« 13
Paris, 2 ventôse an 7 (1).
Cher et estimable ami, j'ai mille remerciemeas à vous
faire pour les imprimés que vous avez eu la bonté de m'envo-
yer, pour Taccueil que vous et Tami Blessig avez fait au cit.
Théremin (2) qui est parti de Strasbourg rempli de recon-
naissance àvotre égard, pjur la transmission de mes paquets
à M. Schwarzel de Fribourg. J'apprends par la voie de Hol-
lande que tout lui est parvenu ; mais le despotisme de la
cour de Vienne qui pèse sur cette université contraint sa
volonté et la crainte de se compromettre Tempêche de répon-
dre ; car vous savez sans doute qu'à Vienne on a fait un
crime aux professeurs de Fribdurg de s'être prononcé en
faveur du clergé républicain : ils ont néanmoins envoyé,
Lettre 13. — (») 20 février 1799.
(2) Voir la lettre précédente.
23
— 854 —
m'assure- t-OD. un mémoire dam lequel ils éUbliaient ai
force 1& vérité de leura premièrei atiertions ; ce nouvel ai
rie courage leur fait honneur.
J'ai eu le plaisir da voir un jeune et interesaaat militai
fils do cit. Laquianta. Depuis notre entrevue, je lui
adressée uoe lettre pour son père à qui je vous prie d'off
mea remercîmeus et mea complimens. Précédemment, j'av
remis son dernier manuscrit à son fils.
Vous aveï reçu sans doute une lettre que je vous ai écr
il f a quelque teins concernant le ni, Oerboin prem
candidat désigné pour adjoint à la chaire de chjmie (9)
demandé par le professeur quis'yintérease. Ce profeaaeBr,
cit. Masujer (4), doit partir bientôt pour se rendre à Stri
bourg ; noue avons remarqué et eonnn dans l'un et l'au^
les talena, le patriotisme et l'aménité du caractère ; je vc
prioia de prévenir en leur faveur les antres professeurs ;
voua réitère cette demande : il importe que dans un établ
sèment scientifique l'uniou des cosurs entre cen\ qui
dirigent, assure le succèe de l'enseignement.
Je remarque, cher collègue et ami, que sans casse,
réclame votre bienveillance, que je vous cause de l'erobar
et que jamais vous ne rae mettez à portéedeme venger ; eto]
que personne n'est plus sensible qne moi aux procédés
l'amitié ; vous m'en avez comblé. Je vous réitère pour vt
et nos amis tous les sentimens qu'inspira l'estime et l'amiti
je viens d'écrire à l'ami Blessig. Grégoire.
Vous recevrez sous peu un nouvel opasenle contre l'i
quisition (5) ; je croia cependant que la chnte de ce mons
(3) Oerboin avait été nommé profeeaenr-adjoint à l'Eci
de médecine de Strasbourg, le 1*7 février. Il mourra à Stri
bourg le S3 mai 1827.
l4) Maeuyer, professeur à l'Ecole de médecine depuis
13 septembre 1798, est connu par plusieurs ouvrages, en
autres par un éloge hisloriqnede Th. Lanth. ; Levranlt,t8'
(5) Il s'agit de l'ouvrage suivant ; Lettre d don Jîam»
— 355 —
n'est pas éloignée. Je vous confie pour vous et Blessig que
d*icL j'ai sur demande rédigé le plan de Tédit de suppression ;
j'ai conseillé entre autres de faire comme à la suppression
des jésuites ; à la même heure, dans toute l'Espagne, on
mit le scellé sur toutes leurs maisons ; le gouvernement
espagnol a provoqué secrètement le vœu des évêques ; on
en cite entre autres huit qui ont envoyé des mémoires vigou-
reux contre l'inquisition. Elle allait succomber, une intrigue
de cour qui sera dévoilée quelque jour a fait pour le moment
échouer le projet (6). Dites cela, je voua prie, à l'ami Blessig,
Haec inter nos, \
(En souscription au bas de 4a l'* page : Le cit. Oberlin,
bibliothécaire 4 Strasbourg.)
N«14
Paris, 13 ventôse an 7 (1).
Mon cher confrère et ami, vous aurez sans doute ainsi que
l'ami Blessig reçu plusieurs lettres de moi dans lesquelles
entre autres je vous parlais du cit. Masuyer qui veut bien se
charger de ce petit paquet. Professeur de chymie à votre
école centrale, le voilà désormais un des vôtres ; il réclame-
ra votre complaisance pour connaître ce que votre cité offre
de curieux et je sais combien vous êtes bienveillant. J'en ai
tant de preuves qui excitent ma gratitude. Je désire bien
savoir si l'ami Blessig est remboursé des avances qu'il a
Joseph de Aree^ grand inquisiteur- général d'Espagne,
Paris, 1798, in-8.
(6) L'Espagne était alors commandée par Charles IV.
L'inquisition continua de .survivre, jusqu'au moment de
l'occupation française en 1808.
Lettre 14. — (1) 3 mars 1799.
— 356 —
'oDvrBge de M. Menke (S) ; je lui en ai parlé
rnièreB lettres. Permettez qoa celle-ci lui soit
'il n'était pas remboursé, qu'il veuille bien me
ta l'instant j'y fais face. Je lui parle ainsi qu'à
coap d'objets littéraires, etc.
erez ci-jointa poar lui et pour tous un noutel
certé avec quelques espagnols, pour livrer une
este et nouTelle à l'inquisition ; je vons enverrai
lia traduction en espagnol qu'on imprime en ce
Soyez sûr qne je meeratnpoDna hhf cette odienae
it ceci n'est pas la dernière attaque, si Dieu me
mes amis avec la tendresse la plus vive et la
surtout m''B chers Oberlin et Blesaig. Grégoire.
N* 15
Paris, 6 nivôse an 8. (1)
lectable ami, qn'aurez-vouspensédemonsilence?
lu l'indulgence de supposer {avec raison) qu'4
ci je m'étois trouvé noyé pour ainsi dire dans
dea affaires arriérées et présentes ? Je me trouve
is libre, les fonctions législativos me laisseront
si me voilà tout à vous et à l'amitié^
is, pénétré comme moi de vos marques de bien-
s fera venir de Copenbagne l'ouvrage de Mierup ;
I saDrioDs dire de quel ouvrage de Mencke il
it-Stre du De eharlataneria eruditorum decla-
». Leipsig, IliS.
ut en 1799. Nous avons donné plus haut, lettre
tre de l'ouvrage français.
- (1) 27 décembre 1799. Après le 18 brumaire,
: entré au corps législatif.
— 357 —
mais comme les trajets sont longs, que souvent (je le sais*
par expérience) du Danemark ici des paquets ont été perdus,
il serait possible de vous procurer cet ouvrage par emprunt.
Si vous êtes pressé de Ta voir, j*en ai ^un exempli^ire que
m*avait envoyé M. Munter, je Tai donné à mon collègue
Camus qui a paru curieux de le posséder; si vous le désirez,
je le lui demanderai ; à cet égard, j*attends vos ordres, en
tout et partout comptez sur mon empressement à faire ce
que vous désirez : cela est dit une fois pour tout.
J'aurai ce matin Tavantage de voir votre ûls ; il veut bien
se charger de vous transmettre un paquet d'opuscules auqu6|
sont joints d'autres paquets pour nos amis de Strasbourg,
Blessig, Laquiente, Petersen(2),etc; à ces noms je joins ceux
deTurckheim, Herman, Ëhrman, Thomas (3), Brunk, Salz-
raan (4), Schweighseuser. Soyez près de tous, je vous conjure,
Tinterprète de ma reconnaissance ; vous ajouterez par là un
nouveau titre à toute celle que je vous dois. J'ai quitté Stras-
bourg en pleurant ; après les orages de la révolution, j*ai
retrouvé dans cette ville nos savans et excellens amis ton*
jours aimans, toujours complaisans, toujours religieux,
malgré les fureurs de l'athéisme persécuteur.
J*ai été privé de voir les cit. Koch et Herman ; puis-je être
plus heureux sur cet article une autre fois ? J'ai reçu pour le
Conservatoire des Arts une caisse contenant six paniers ou
sacs à ouvrage en paille venant du Ban de la Rocho : aucune
lettre d'avis n'en marque le prix. Il m'importe de le savoir
au plutôt, afin d'envoyer le montant. C'est par la voye de
(2) Petersen, Pierre, était ministrd de l'Eglise réformée à
Strasbourg.
(3) Thomas, le curé de Saint- Pierre, dont il est question
plus loin.
(4) Salzmann, Raoul, l'un des citoyens les plus distingués
de Strasbourg à cette époque, l'un des meilleurs amis de
Blessig.
— 358 —
•Strasbourg que le paquet est venu : veuillez bien, mon ami,
demander à votre estimable frère à qui je dois faire parvenir
Targent. La caisse était faite très artistement en sorte que
renvoi n*a rien souffert dans le trajet ; elle aur^ été arran*
gée ou à Valderspaeh ou sous la direction de cette respectable
M^ Ziegler qui ainsi que son époux m'a comblé d'amitié.
Le cit. Thomas, curé de St-Pierre, que j*embrasse, a bien
voulu me promettre une notice historique, concernant la
persécution ; je me recommande au souvenir de ce digne
pasteur; j'écris â TamiBlessig. Recevez toutes les assurances
de ma gratitude et de mon attachement invariable, Grégoire.
(En souscription au bas de la l'* page : Monsieur Oberlin).
N«16
Paris, !•' ventôse an 8. (1)
Mon cher ami, je suis comme vous, surpris et affligé que
dans les nominations nouvelles on ait oublié Testimable
Herman, qui réunit les qualités de cœur et de l'esprit. Quant
à l'instruction publique, vous l'avez observé avec raison, on
a coupé l'arbre par la racine, en voulant l'isoler de toute
idée religieuse et en lui otant des fonds pécuniaires. Les
établissemens du culte, de l'instruction, de la bienfaisance
ont une sorte d'existence précaire, quand ils ne sont pas
dotés de manière que la hausse ou la baisse du trésor public
n'influe pas sur leur sort.
J'ai la conviction intime et la connaissanee de tout ce qu'on
peut alléguer en faveur de votre cité pour y former de grands
établissemens d'instruction (2). Je le dis sans cesse et je ne
Lettre 16. — (1) 20 février 1800.
(2) Strasbourg demandait alors la réorganisation de son
ancienne Université. Elle désirait que l'ancien fonds Saint-*
Thomas continuât d'être affecté aux établissements d'instruc-
tion publique.
— 359 —
cesserai de le répéter ; il n*est pas en France après Paris une
ville où Ton puisse enformer plus avantageuse ment. Vous savez
que le gouvernement a l'initiative de» loix, lé Conseil d*Etat
prépare la rédaction ; j*ignore où ils en sont pour Tinstruction
publique. A cette occasion, je verrai Chaptal (3), homme de
beaucoup de mérite et chargé précisément de cette partie. Si
vous jugez à propos de faire un petit mémoire à cet égard,
je le lui remettrai et j'y ajouterai tout ce que le zèle du,
bien peut inspirer. Nous nous trouvons ensemble à Tinstitut.
En écrivant au cit. Blessig, j'ai oublié de lui dire que je
Tavoif rappelé ainsi que le cit. Hafner au souvenir du respec-
table Ouenée (4) qui est venu il y a un mois passer quelques
jours à Paris ; il prépare la traduction d*un opuscule anglois
concernant la religion et il se propose de l'imprimer à la
suite d*une édition nouvelle de sa traduction de l'ouvrage de
Lyttelton.
Le cit. Poirier (5), savant ex-benedictin, vous prie de lui
donner un mot sur la note cy incluse.
Le cit. Laquiante m*a écrit concernant le tribunal d'appel
à fixer à Strasbourg (6) ; j'ai remis en conséquence une note
à plusieurs membres du conseil d'état ; j'ignore ce qu'ils
auront statué à cet égard. L'organisation judiciaire va nous
être présentée.
(3) Le célèbre Chaptal, chargé en ce moment au Conseil
d'Etat de faire un plan d'instruction nationale.
(4) L'abbé Guenée, alors âgé de 83 ans, s'était retiré à
Fontainebleau. Il a fait connaître en France l'ouvrage de
Lyttelton : Observations sur la conversion et ^apostolat de
saint Paul, Paris, 1754.
(5) Dom Germain Poirier, qui a publié le xi® volume des
Historiens de France. Il était à ce moment sous-bibliothé-
caire de l'Arsenal. — La note n'est pas jointe à la lettre.
(6) L'ancien Conseil sou\erain était à Colmar et là a été
placée la Cour d'appel. Aujourd'hui, on a repris le projet
de transférer à Strasbourg le siège de la Cour.
- 560 —
-e vona sera remÎKe par le cit. Gerboio, adjoint du
yer à la chaire de cbymie. Nouvel arrirant i
;, il ne coonait paa encore cette ville ni les aavani
isède ; je le recommande à votre bienveillance,
ua tendre d nos amia et aurtout an aavaat et rea-
berlio qne j'erobresie. Grégoire.
H" 17
Paria, 1" pluviôse an X. (1)
eatintabla ami, je ne voua ai paa écrit depuia
pas même pour voua fair« mes remercie mens pour
|ue envoi de votre Tacite (S) ; i'airae à croire que
rez ma reconuaiEsaoce sur mes srntîmens connus,
r la fréquence de mes lettraa. Je vais plus que
serrer le cercle de mes occupations pour me livrer
Dent à dea travaux littéraires qui sont sur lecban-
■ longtemps et pour être plus exact dans met
.vec des amis tels que voue. Blessig, Petersen, etc.
I au Tacite qui a fait grand plaisir â l'Institut ;
infatigable, mon respectable et savant ami ; je
personne qui rerapUsie mieux que vous et 1res
rempli aussi bien que vous leurcarrière littéraire ;
lus et quelques autres hommes distingués avez
Strasbourg le goût des bonnes études et de l'ern-
plus profonde. On cite ici avec respect les noms
Schweighauser. Koch, Brunck, Arbogast, etc.,
malgré ce tribut d'éloges mérités, ce Paris ren*
trop petit liombro d'h<>mmes voués à des travaux
7.— (1) 21 janvier 1802.
itioD de Tacite, due à Oberlin. a paru A Leipiig,
: vol. in-8°. Elle a été réimprimée avec dea notet
de l'auteur dana la collection Lemaire.
— 861 —
utiles. Des romans, des farces, des vaudevilles : voilâ la
pâture de ces Parisiens, qui ont trois besoins : panem,
circenses et remper.
J'ai reçu des lettres de Tami Turckheim, de mon ancien
collègue à la convention Hermann, de M. Massenet (3). Il est
douteux que je puisse à travers mes affaires trouver le
moment de leur répondre ; promettez-moi que vous voudrez
bien me suppléer et leur exprimer à chacun individuellement
messentimens de reconnaissance et d*attacberaent.
Comme vous, je désire bien Torganisation r'éfinitive des
Ecoles publiques ; il y a un projet imprimé, mais non
encore publié avec cette note marginale : T* rédaction.
Combien il est à souhaiter que bientôt cette branche essentielle
d*administra< ion publique ait une forme invariablement fixée ;
je crois néanmoins que le jury de Colmar peut nommer
votre fils, sauf â se concerter avec le ministre pour ne le
rendre à sa destination que lorsque Texistence de la place
sera bien assurée pour Tavenir.
J'ai envoyé â votre digne fils un paquet d'opuscules pour
vous et nos amis. J*ignore si j*y ai joint Tbymne en hébreu
et en français du jeune Elie Levi. Si cette pièce vous manque,
marquez-le moi, je réparerai cette omission.
Votre jeuce et savant compatriote Sulzer (4) est venu plu*
sieurs fois chez moi, et plusieurs fois je suis allé chez lui, sans
que nous ayons pu nous rencontrer. Je lui exprime tous mes
regrets. M' et M^^ Dubois vous saluent. Quand reviendrez-
vous à Paris, mon excellent ami ? Après tout le voyage n'est
(3) M. Massenet est l'auteur, avec Fr. Walter, d*une
Description du ban de la Roche, II était à ce moment pro-
fesseur d*histoiro à TEcole centrale de Strasbourg.
(4) Peut-être Charles -Michel Sultzer, docteur en médecine
depuis 1801, plus tard agrégé libre à la Faculté de méde-
cine de Strasbourg.
— 362 —
pas si loDg. Peut-être irai-je à Strasbourg dans le cours de
cette année ; mais de loin comme de près, il m'est doux de
sentir que vous voulez bien m*accorder de Tamitié ; je vous
paye d'un juste retour ; c'est un tribut que je veux acquitter,
tant que je vivrai. Grégoire.
N« 18
Paris, 7 prairîai au X de la republique. (1)
Le sénateur Orégoire (2) au citoyen Oberl'n son confrère et
son ami. Cher et estimable ami, agréez quelques opuscules
que vous remettra un estimable ecclésiastique du bas Rhin,
le cit. Schekr. Je connais et estime le cit. Maeder qui va,
dit-on, résider à Lyon comme ministre de la communauté
protestante de cette ville. 11 fera bien, je pense, d'adresser
un mémoiro pour demander au gouvernement la place que
vous désirez au prytanée pour son fils ; je ferai mon possible
pour seconder ses désirs et les vôtres ; mais je suis bien loin
d'en garantir le succès ; vous connaissez les hommes et les
affaires et vous savez, mon respectable ami, que souvent les
espérances sont déçues, malgré les efforts pour les faire cou-
ronner par la réussite.
J'ai remis à leur adresse les exemplaires du programme(3);
je trouve toujours à m'instruire dans ce que vous publiez.
Votre fils digne d'un si bon père vous aura dit quelles
espérances à mon tour j'avais conçues devons voira Paris
pour des fonctions importantes et certes des hommes amis
Lettre 18. — (1) 27 mai 1802.
(2) Grégoire, présenté par le corps législatif et le tribunal
venait enfin de recevoir de Bonaparte le titre de séna-
teur, en 1802.
(3) Programme pour la rentrée du Gymnase.
^^
;.•
— 368 —
des vertus et des talens, puisqu'ils vous sont attachés y ont
porté le môme zèle, j*ai presque dit le même acharnement
que moi« Le regret d*avoir échoué ne nous ote pas la reso-
lution de revenir â la charge. Mes complimens les plus
tendres à nos amis Biessig, Petersen, Laquiante, Herman^
Turkeim, Spielman, etc., etc. À propos de Turkeim, j'ai eu
du guignon. Cinq fois, il a eu la bonté de venir chez moi,
sans jamais me trouver, mais aussi sans jamais laisser son
adresse. Je fus sur le point d*aller à la police, pour tacher
de le^ découvrir. On fait cela quelquefois pour les gens
suspects ; moi je Taurais fait pour un des hommes les plus
estimables que je connaisse, lorsqueMetzger(4)mela donna;
j'allai pour le voir, il était parti. Je vous prie de lui expri-
mer tous mes regrets.
Ce matin est venu chez moi le cit. Saurine(5), votre nouvel
évêque : je suis fachô de ne pas m'y être trouvé : j'aurai
voulu lui recommander quelques personnes entr'autres l'es-
timable Thomas ; j'irai le voir demain. J'embrasse très ten-
drement mon très cher ami Oberlin : il m'est doux de penser
que j'ai une place dans son cœur. Grégoire.
Roederer avec qui j'ai parlé d'instruction» a fort à cœur de
bien montercette organisation (6). Quelle ville est plus digne
d'attirer les regards que Strasbourg ? Si je puis faire à cet
égard quelques démarches ou commissions qui soient
agréables, ordonnez.
Post-scriptum. Nous venons de converser longtemps, M.
Savine et moi ; je Tai félicité d'aller dans un pays où il
trouvera proportionnellement plus d'excellents qualités que
^4) Il s'agit sans doute de Jean-Daniel Metzger, médecin,
né à Strasbourg en 1739.
(5) Saurine, prêtre assermenté, ancien évêque du
département des Landes, fut nommé, après le concordat,
évêque de Strasbourg.
(6) Sur Rœderer, voir plus loin, lettre 20, note 1 .
— 3M -
cuoe autre coDtrée de la France ; je lui ai donna tous
auieignemeus que je crois utile dans cette contrée ;
l'esprit de tolérance, d'union ; je lui ai recommandé
ble Thomas que je salue. Dieu veuille que tout le
loit satisfait.
Bowood en WilUhïre, â8 juillet an X. (1)
cUble ami, Mylord Lausdown fils et M' Dumont (3)
iter Strasbourg; je reclame toute votre complaisance
re connaître au savant genevois et à ce jeune sei-
iglois qui est intéressant à tous égards ce que votre
s de curieux, les monuments, les bibliothèques, les
d'histoire naturelle, etc. De là probablement ils iront
dans les Vosges. J'ai tracé un plan pour la partie
ind de Saverne à Lusenil et je n'ai pas oublié le
a Roche; mais comme je connais peu la chaîne in-
de Saverne jusque vers Wissem^oui^, je voua prie
er l'itinéraire qui peut être le plus convenable poor
ibles voyagOiirs. C'est moi que vous obligez, en pr>-
à ces Messieurs tous les secours que le talent, les
ancea et l'aménité du caractère de mon ami Ob«rlin
fournir à des voyageurs aussi distingués. Je suis
Bsé pour vous donner des détails de mon voyage en
m, TOUS les aurez et peut être même de vive voix
I 19. — (1) S8 juillet 1808. Le Wiltshire est sitné
ôts sud de l'Angleterre et a pour cheMien Salis-
régoire avait fait un voyage eu Angleterre, après la
imont, né à Genève, l'ami et le collaborateur de
1, profita de la paix d'Amiens pour visiter la France.
- 365 -
à Strasbourg. Les Anglais avaieût droit à mon estime ; cette
estime s'est fortifiée et je dois y ajouter le sentiment de la
reconnaissance. Salut et embrassement cordial- Grégoire.
No 20
Paris, 4 novembre 1802, an onze.
Très cher confrère et ami, je crains toujours que vous ne
me regardiez comme un malhonnête vu la rareté de mes
réponses à vos épitres toujours instructives, toujours aima-
bles. Pourrai-je jamais vous remercier assez pour Tenvoi de
votre Tacite ? J'aime â croire que votre édition sera désor-
mais celle qui servira de type pour rcimp^rimer ce prince des
historiens. J'ai fait dans le tems vos diverses commissions
entre autre au cit. Rooderer (l)de qui vous avez la confiance ;
mais vous Tlivez certes également de ce brave Foucroy (2) qui
lui succède dans la direction de l'instruction publique. Mon
voyage en Angleterre a été délicieux ; combien de fois je
vous ai souhaité avec moi, surtout dans la salle de la société
des antiquaires de Londres où Ton n'a parlé que de vous, au
Britisch Muséum où sont déposés depuis peu des monumens
très précieux d'Egypte qui nous out été enlevés, à Oxford
au milieu des marbres d'Arundel et dans la bibliothèque bod-
leinne, etc.
Lettre 20. — (1) Rœderer, l'ancien rédacteur du Journal
de, Paris, se rallia à Bonaparte et joua un rôle dans les
événements du 18 brumaire. Il entra ensuite au conseil
d'Etat, y devint directeur général de l'instruction publique,
puis président de la section de Tintérieur.
(2) Le célèbre chimiste Foucroy succéda en 1801 à
Rœlerer dans la direction générale de l'instruction publi-
que, sous l'autorit') du ministre de Tintérieur.
— 366 -^
M' Maakeline (3), directeur de l'observatoire de Greenwicb,
me prie instamment de lui trouver un buste ou au moins
une gravure de Kepler. Au cabinet des estampes de la bi-
bliothèque ni* 'est une gravure de ce Keppler in-4<> en buste
et de 3/4, gravée par J. Heyden, marchand d'estampes à
Strasbourg vers 1600 et avec 6 vers latins. Si le bazard
vous fait rencontrer chez quelque marchand cette gravure,
ayez la bonté de la procurer à M' Maskeline. C'est moi qui
vous remettrai le prix de l'ouvrage.
Je n'ai pas encore pu voir M'* Lobstein et Scheffer (4) ;
j'étais absent, quand ils sont venus chez moi ; je vais les
chercher.
Je pense bien que M' Saurine aura à lutter, comme vous
le dites, entre l'ultramontanisme qu'on tâche de nous greffer
de toutes parts; mais j'espère aussi qu'il aura le courage de
se roidir contre les obstacles. Mille complimens à nos
amis, surtout à l'excellent Hlessig ; je vous envoyé pour lui
et pour vous des exemplaires de l'annuaire pour l'an XI. J'em-
brasse votre digne fils et surtout son vénérable père que
je m'honore d'avoir pour confrère et ami. Grégoire.
N« 21
■
Paris, 16 floréal 1804 (1).
Cher et respectable ami, je vous adresse deux exemplaires
(3) Maskeline (Névir fut l'un des astronomes les plus
célèbres du XYIII*' siècle et du début du XIX«. H mourut
en 1811.
(4) Jeunes gens, d'origine strasbourgeoise. Le premier
est sans doute le fils de Frédéric Lobstein, ancien profes-
seur à la Faculté de médecine, de 1768, à 1784.
Lettre 21. — (1) 6 avril.
■w
■»
— 367 —
de mon histoire de l'agriculture au xyi* siècle (2), Tun pour
vous, Tauire pour la Société académique qui a bien voulu
m'adopter au nombre de ses membres (3) ; je regarde comme
un des plus mal faits l'article qui concerne l'agriculture en
Allemagne â cette époque et Je désire recevoir à cet égard et
en général sur l'ouvrage les observations critiques de cette
société savante ainsi que les vôtres ; je sollicite d'elle et de
vous cette marque de bienveillance. Je n'envoyé pas à nos
autres amis des exemplaires de cet ouvrage tant parce que
le tirage à part s'est borné à un très petit nombre d'exem-
plaires, que parce que l'objet que j'y ai traité n'est pas de
nature à intéresser tout le monde.
J'ai reçu avec reconnaissance votre discours d'ouverture (4)
et vous promettez ou du moins vous faites espérer un mé-
moire sur la vie de Sturm. Personne assurément n'est
plus à portée que vous d'approfondir tout ce qui le concer-
ne. Je désire bien aussi qu'un jour vous nous traitiez d'une
manière précise la constitution de l'ancienne république de
Strasbourg. Je n'ai pas encore eu le loisir de lire Berneg-
ger (5). Que pensez- vous de cet ouvrage ?
(2) Essai sur Vétat de l'agriculture en Europe au xvi*
siècle (Extrait des Mém . de la Soc. d'agriculture)^ Paris,
M»»« Huzard, 18Ô4, in-4<».
(3) La Société des sciences, agriculture et arts du Bas-
Rhin.
(4) L'Académie protestante de Strasbourg, décrétée en
mai 1803, ouvrit ses cours par une séance solennelle, le 7
noyembre de cette année. Oberlin fut chargé du discours
d'ouverture dans lequel il esquissa une histoire des scien-
ces en Alsace. Il a pour sous titre : Discours prononcé à
l'ouverture de V Académie des protestants de la Confession
d'Augsbourg, le 15 brumaire an XII. Strasbourg, Heitz,
1804, 48 p. in-8«.
(5) Forma reipublicœ Argentinensis. Strasbourg, 1667,
in-4«. Le fils de Bernegger donna une autre édition de cet
ouvrage, in-32. Strasbourg, 1674.
aisBez-voui uae collection sur les domaineH parFrère
ra qui y a inséré l'ouvrage de la Casas : ulrutH rtgts
Hpssjure aliquo, etc. (6). Il eiiate en outre troia
I de cet ouvrage de laa Caaaa, à Franctort anr le
Tubingea et léna, et cepeadant jusqu'i présent je n'ai
'ea^r à me procurer un exemplaire de ce livre, et de
ra autres que je ne trouve pa« A PariS' Pourriez-voni
uer à Strasbourg quelque libraire versé dao* ce
e recherches, à qui j'adresserais une note des livres
poursuis 1
i quelque loisir dans la Journée, j'écrirai à l'ami
que j'embrasse ainsi que M.' Turkheim, Schvei-
r, Spielman, Salzman, Hafner, etc. Agréez, cher et
it ami, les salutations cordiales d'un homme qui voua
ïèrement attacbé. GrL'goire.
Paris, 3 thermidor i
xa 12. (l)
remise par
1 savant de mes aiuis. M' Oeisner (3) qui
fera quelque
e litre complet de l'ouvrage du célèbre
îque est : Ulrum reges et principal jure aliquo vel
tsalva conscientia cives ac tubditoi a regxi carona
t tt cdttriua dominii particularis ditioni subjieere
. L'ouvrage parut à Francfort sur le Meio en 1571,
-4°, âTubingueen 16:i5, à lena en 10'I8. Grégoire
lit le 22 floréal an Vlll une lecture à l'Institut :
i> de Barthélémy de Laa-Casas , tirage à part ,
in-4°, dans laquelle il démontrait que l'cvêque
pa n'avait en aucune façon conseillé aux Espagnols
«32. —(1) 22 juillet 1^04.
Parles- Ernest Oeisner, d'origine silésienne, a traduit
mand les œuvres de Sieyès- Il venait de publier en
— 869 —
séjour dans votre ville. A qui pourrais-je mieux Tadresier
pour lui procurer Tavantage de voir ce qu*elle offre de cu-
rieux ? G*eet la seule ville de France dans toute cette contrée
où se soit perpétuée depuis plusieurs siècles sans aucune
interruption une succession de savants distingués, depuis
Sturm (3) jusqu'à Oberlin, Brunck, Schweighseuser, Blessig,
les Spielraann, etc., etc., etc. Je recommande a vo.re bien-
veillance «mon bon ami M' Oelsner.
Je serai charmé de recevoir de la soclété^surtout deM' Ham-
mer (4), des observations sur mon histoire de Tagriculture.
Je partage la douleur que vous éprouvez relativement au
cabinet do ce savant, M' Herman que nous avons connu,
aimé et qui était si digne de Têtre ; mais je ne puis rien
pour empêcher qu'il passe à l'étranger. (5) M^ Her.nan, votre
maire, est venu chez moi, sans mo laisser son adresse que
je cherche. J'aurais été bien aise de revoir cet ancien col-
lègue, et je vous prie de lui dire; car j'ignore si je pourrai
le découvrir avant son départ.
Agréez mes remercîmens pour la dissertation de M' Mur-
rer, pour les programmes toujours curieux, toujours instruc-
tifs que vous m'envoyez ; vous m'avez gratifié de vos dis-
sertations, d'une foule d'exellens ouvrages sortis de votre
français une brochure intitulée; Des opinions politiques du
citoyen Sieyès et de sa vie comme homme public, Paris,
1800.
(3) Jean Sturm, le fondateur du Gymnase protestant.
(4) Membre de la Société d'agriculture, sciences et arts,
à ce moment professeur d'histoire natur:lle et des médi-
caments à l'Ecole de pharmacie.
(5) Jean Hermann, frère aîné du maire de Strasbourg,
était décédé en 1800. Le cabinet d'histoire naturelle qu'il
avait formé resta à la ville de Strasbourg, qui le mit à la
disposition de la Faculté des sciences. Cf. Jean-Frédéric
Hermann, Notices sur la ville de Strasbourg, II, 383.
U
Inme. Je suii votra débiteur, votre admirateur et votre
Ditea, je vous prie, à cet excellent M' Laqnisnte que j'ai
lit de mon mieux Bea commiBBioni et que son fils de latré-
orerie s'eat chargé de répondre aux deux dernières lettrea.
Agréez et partagez avec M' votre fila et non autres amia
Bi embrasiemens de TaffectiOD la pluB sincère. Grégoire.
Paris, 13 novembre I80S.
Respectable ami et confrère, je ne puis entrer dans ma
libliothèque sans me rappeler avec reconnaisBance combien
out l'avez enrichie de vos dons et de vos ouvrages. Le
lésar (1) s'est placé à. cfité du Tacite; ils pourraient bien se
•attre, s'ils étaient vivans. L'un et l'autre passent successi-
rement par mes mains et ces uorns célèbres s'associent â
«lui d'Oberlin. Agréez de nouveau mes sentimens de re-
tonaaissance.
J'écris à M. Schweighanser pour lui rendre compte de me*
lémarchea concernant les manuscrits d'Hérodote (9). J'entre-
'ois qu'on n'en permettra pasle déplacement etqu'onenfera
le même pour ceux deJuatin (3). Si la déciaion dépendait de
noi, voua savez qu'elle serait conforme à son vœu et an
rôtre. 11 serait fâcheux cependant que la littérature fût par
« contretens privée do deux bonnes éditions et j'aime i
Lattre 23- — (1) Les Commentaires de César, édités par
>berlin, ont paru à Leipzig en 1805, 8°,
(S) On voit que Schweigh»uier travaillait dès 1805 i bk
^ande édition d'Hérodote, qui devait paraître A Strasbourg
:hez Trenttel, en 1816, 6 tomes en 12 vol. ta-8*,
(3) Oberlin préparait une édition de Ja»tin, lorsqu'il fut
lurpris par la n ort, le 10 octobre 1806.
— 371 —
espérer que soit par eux-mêmes soit par leurs fils qui mai^
cheutdaus la même carrière, les deux savaas colla tionaeroiit
ici les manuscrits. Je serois bien flatté que ce fût pour
nous une occasion de vous posséder à Paris.
Vous n'avez plus reçu la notice des travaux des classe
qu'on distribuait aux séances publiques^ parce qu'on ne les
imprime plus séparément, celles du premier trimestre de
Tan onze sont, je crois, les dernières ; communément, on les
insère dans le Moniteur ou le Magazin(4) ; du reste, aux séan-
ces publiques, on se borne à distribuer la liste des lectures
qui auront lieu et Ton y joint l'indication des prix rem-
portés et des concours ouverts. Si ces maigres notices peu-
vent vous être agréables, dites un mot et désormais je vous
les enverrois.
Eu arrivant à Paris, je m'empressai d'adresser à M. Bor-
das (5) la note concernant M. Brue, juge suppléant ; en vous
adressant sa réponse du 8 vendémiaire cy incluse, je m'aper-
çois qu'il repond concernant M. Beur que je ne connais pas,
parce qu'apparemment il aura mal lu le nom propre. Dites-
moi, je vous prie, si cette affaire est terminée et si je puis
quelque chose de plus pour obliger cet estimable homme.
En 1778 on a imprimé à Strasbourg un opuscule : de ser»
vis œthiopum in coloniis americanis par Eberlen ; c'est, je
crois, à la bibliothèque de Heidelberg que je l'ai vu, sans
avoir le tems de le lire; comme rien ne vous échappe en
fait de littérature, dites-moi, je vous prie, si l'on peut le
trouver encore à Strasbourg et ayez la bonté alors de donner
commission à l'un de vos libraires pour le chercher.
Vous n'êtes pas au bout de mes importunités. J'ai ouï dire
(4) Le Magasin encyclopédique, recueil scientifique et
littéraire, publié par Millin, de 1792 à 1816.
(5) M. Bordas était, au département du grand-juge mi-
nistre de la justice, chef de la deuxième division, qui
nommait les fonctionnaires de l'ordre judiciaire.
— 372 —
qu*à Strasbourg dans lo tems de la Terreur une demoiselle
avait et) gaillotinée, parce qa*elle n'avait pas voula faire le
rôle de la déesse Rai80^, L'anecdote est-elle vraye ? et en cas
d*afôrmative, le nom de cette victime. Pardon, cher confrère
et ami, de Tembarras que je vous cause ; mais, si cela vous
ennuie, rappelez-vqus le conseil de J. -Batiste Rousseau
concernant les vers de la Mothe-Houdart :
c Rendex-les coarts, en ne les lis&nt pas. »
Agréez pour la famille de Strasbourg et du Ban de La
Roche, pour nos amis Turkeim, Blessig, Ht<fLor, etc., pour
M' Laquiante, Hammer, etc. et pour vous spécialement tout
co qu^inspireTestime, lamitié, la reconnaiesance.*}* Grégoire.
(Adresse : à Monsieur Monsieur Oberlin, professeur, biblio-
thécaire, membre de Tlnstitut n* Strasbourg;.
N« 24
Orégoire embrasse ses bons amis Oberlin et Blessig à qui
il écrira le plutôt possible. 11 envoyé Touvrage sur les canaux
à Oberlin, qui a travaillé sur cet objet. (\)
(Billet sans date).
K«>25
Je n'ai que le loisir de saluer et d*embra&ser mon cher et
bon ami Oberling. Vous savez déjà peut-être que vos com-
missaires, lo ministre de la Guerre, le comité militaire se
sont tous ainsi que moi trouvés d^accord d'opinion pour vous
Lettre 74. — (1) Nous ne savons pas quel est cet ouvrage
sur les canaux envoyé à Oberlin. Oberlin avait écrit autre-
fois : Jungendorum marium fluviorumque omnis œoi mo-
limina, Argenioratiy 1707-1775, 5 part. in-S».
t.
J
- 373 —
envoyer des gardes nationales qui doivent bientôt vous
arriver, (l) Iterum salut. Amitié aux deux excelleos frères
de Strasbourg et de Ban la Roche. Grégoire.
(En souscriptiou ; M' Oberling).
Lettre 25. — (1) Ce billet a été sans doute écrit on 1791.
Leb commissaires arrivés à ce moment â Strasbourg étaient
Custine, Chasset et Régnier. Des gardes nationaux furent
envoyés à cette date dans les campagnes du Bas -Rhin pour
y rétablir Tordre.
TABLE D'HORLOGES SOLAIRES
GRAVÉE PAR JKAN APPIER HANZELET
Par M. Léon OERMàlN
Avec la collaboration de M. Ch. MILLÔT
La série des Objets de précision ne forme pas la
moindre des curiosilés du Musée historique lorrain (1) ;
à côté des majestueux instruments astronomiques du
règne de Stanislas, — conservés jusqu'il y a quelques
années au lycée de Nancy, — et des étalons des an-
ciennes mesures légales, déposées naguère par les
Archives départementales, le Mu^ée possède d'impor-
tantes horloges provenant de différents châteaux ainsi
qu'une riche collection de montres, de sphères, de
cadrans et de boussoles.
Parmi tant d'objets divers, il en est un qui attire
particulièrement l'attention des amateurs, par sa ra-
reté, l'intérêt de ses figures variées, son mérite artis-
(1) Voir L. WioDtr, Catalogue du Musée historique lor-
rain; Nancy, 1887, p. 15M57.
TABLE DE BRONZE
f^
r
— 875 —
tique et la signature qu41 porte : c'est une table de
bronze chargée d'horloges solaires, décorée de plu-
sieurs images symboliques et qui offre en outre le
nom du célèbre graveur Jean Appier Hanzelet (1). On
ignorait la destination primitive de cet objet. Mais
rétude des armoiries que Ton y remarque nous a in-
diqué la voie qu'il fallait suivre ; puis Texàmen des
figures astronomiques, faites par MM. Gh. Millot et
Floquet a confirmé, en la développant, l'hypothèse
émise, tandis que le travail de M. J. Favier sur les Ap-
pier (2) donnait plus de précision à certaines de nos
idées. Il ne paraît plus y avoir de doute : si ce gno-
mon n'a pas été gravé pour TUniversité de Pont-à-
Mousson^ il est la copie, la réplique, d'un appareil fait
spécialement pour elle, où Ton aura à peine opéré de
minimes modifications, telles que, au prix de l'aggra-
vation d'une erreur de longitude, le changement du
nom de Pont-à- Mousson en celui de Couvonges.
Par suite de l'intérêt qui s'attache actuellement à
l'histoire des anciennes institutions scolaires de notre
province, et en particulier de l'illustre Université des
Jésuites, fondée au xvi* siècle par le grand cardinal de
Lorraine, la publication de la table d'horloges du Musée
devenait tout-à*fait opportune. La question héraldique
nous avait porté à commencer le travail ; nous ne l'au-
rions pas poussé au delà sans l'insistance obligeante
de plusieurs de nos confrères et sans l'aide qu'ils nous
(1) V. ibtdem, p. 153.
(2) Favier» Jean Appier et /. Appier Hanzelet, graveurs
lorrains du XVII* siècle, dans les Mémoires de la Soc,
d'Arch. lorr., 1890. p. 321.
- 376 —
ont apportée sur les points qui échappaient à notre com-
pétence.
Après avoir fait connaître sommairement l'objet dont
il s*agit, nous en reproduirons la description scienti-
fique, due à M. Millot, puis nous étudierons les armoi-
ries, les monogrammes, les sentences ; nous parlerons
ensuite du graveur ainsi que des propriétaires, pour
terminer par Texamen de la valeur scientifique et de la
destination.
I.
L'objet dont nous avons à nous occuper est une
table de bronze épaisse de °^ 03 et formant un carré,
de " 560 de côté.
On y voit gravées différentes figures, à commencer par
cinq horloges solaires^ disposées deux en haut, une au
milieu et deux en bas ; leur forme générale peut se dé-
crire ainsi : un rectangle plus large que haut, avec
doux grandes échancrures symétriques tenant lieu des
côtés en haut et en bas ; ces fîgures sont chargées de
lignes géométriques et garnies latéralement de bandes
droites, oii sont placés des chiffres et autres indica-
tions. Les quatre horloges d'en haut et d*en bas sont
d'égale dimension ; celle du milieu, plus grande, pré-
sente une seconde bordure latérale extérieure, où l'on
voit^ artistement dessinés, les douze signes du Zodia-
que. Dans les échancrures supérieures sont inscrites les
désignations de chaque horloge et, un peu plus bas,
fait saillie un petit style ou aiguille verticale.
La disposition de ces figures essenti elles laissait libres
six places : deux en haut et deux en bas dans les
— 377 —
échancrures extérieures des horloges, puis deux plus
grandes sur les côtés de l'horloge du milieu. A ces
dernières places sont représentés, debout, Mars et
Pallas, soutenant, en s'y appuyant, des cartouches hé-
raldiques. En haut, on voit les noms de Jésus et de
Marie; en bas, des cartouches oblongs offrant des sen-
tences horaires.
IL
Notre confrère, M. Ch. Millot, a bien voulu se char-
ger de décrire, au point de vue scientifique, les cinq
figures astronomiques. En le remerciant de sa com-
plaisance, nous somnies heureux de pouvoir reproduire
textuellement son travail, nous bornant à y joindre en
notes ridentiflcation, — autant que nous avons pu y ar-
river, — des anciens noms géographiques passés d'u-
sage.
Nous laissons la parole au docte professeur :
{o — Le cadran, en haut à gauche, porte pour lé-
gende : Horloge contenant les Méridiens de quelques
villes principales du Monde.
C'est un cadran solaire horizontal ordinaire, tracé
pour la latitude de 48° 30', sur le méridien de Couvon-
ges (canton de Revigny, Meuse), que l'auteur place à
21 degrés à l'est du méridien de TIle-de-Fer (Iles For-
tunées), pris comme point de départ. C'est une erreur
de 4 degrés en trop, inexplicable même à la fin du
XVI* siècle.
Au lieu d'indiquer les heures, ce cadran montre les
angles que font avec le méridien de Couvonges les mé-
— 378 —
ridiens des localités suivantes, énumérées en allant de
l'orient à l'occident.
Gamboya 134
Gochin(i) 123
Goa(2) . 106
Zabaspa de Turchestain .... 98
Ormuz(3) 92
Babylone de Ghaldée 83
Ninive 78
Trébizonde 72
Hiérusalem 66
Alexandrie d'Egipte 60
Gonstantinople 56
Lacédémone 50
Gracovie 42
Rome . 36 1/2
Gouuunge (Gouvonges) .... 27
Alger 20
Fez 12
Lisbonne 5
Isles Fortunées (4)
Isles Açores 350
Port Royal au Brasil 340
Isle des Sept Gitez 329
Brest de Ganada 320
(1) Port de riadoustan anglais^ présidence de Madras.
(2) Indes, chef-lieu des possessions portugaises.
(3) Ile de Perse, dans le détroit du même nom, côté «ud
du Mogasthan.
(4) Les Iles Canaries, suivant quelques géographes.
~ 379 —
Picora 810
Détroit de Magellan 300
Gusco 289
Le style de ce cadran, formé d'une pièce mobile, a
disparu. Il devait avoir la forme d'une plaque triangu-
laire dressée verticalement sur Tun des côtés de Tan-
gle droit, dans le plan du méridien et de façon que le
sommet de l'angle 48' 80' (latitude approximative du
lieu) coïncidât avec le point de rencontre des lignes
droites convergentes. L*ombre portée à midi par le
plan du style se rangeait dans le méridien de Couvonges
et, quand l'ombre de l'arête inclinée parallèlement à
l'axe du monde tombait sur l'un des méridiens quel-
conques tracés sur le cadran, il était midi dans les
lieux situés sur ce méridien.
2* Le cadran, en haut à droite, est intitulé ; DélinétH
lion gnomonique des Azimuths et Almycantaratbs.
Ces deux termes, dont le premier seul est encore en
usage aujourd'hui, sont empruntés à l'astronomie
arabe.
Les azimuts sont des plans verticaux passant par la
verticale du lieu : leurs traces sur l'horizon forment
des hgnes droites divergentes comme les rayons d'une
roue, tout autour du pied de la verticale ; leurs inter-
sections avec la voûte céleste sont des demi-cercles
verticaux, se coupant tous au zénith, comme les ba-
leines d'un parapluie ouvert. Les azimuts servent à
mesurer la distance angulaire à laquelle se trouve,
par rapport au méridien, un astre quelconque.
Les almicantarats étaient des petits cercles horizon-
taux équidistanls, tracés sur la voûte céleste. Leur rayon
- 380 —
allait donc en diminuant de Thorison au zénith . Ces
cercles servaient à mesurer la hauteur d'un astre au-
dessus de rhorizon. La position d'un point du ciel était
donc déterminée par Tintersection de son azimut et de
son almicantarat, comme un point de la surface terres*
tre est défini par sa latitude et sa longitude.
Dans le cadran du haut à droite, les lignes droites
convergentes sont les azimuts ; les arcs concentriques
sont les almicantarats. Le style était ici tout simple-
ment un gnomon, c'est-à-dire une tige verticale, sans
relation directe avec Taxe du monde. Toutefois, sa lon-
gueur était déterminée de façon que Tombre portée
par son extrémité indiquât sur le cadran la position du
soleil dans le ciel.
3* Le cadran du milieu est un cadran solaire hori-
zontal ordinaire, tracé pour la latitude de 48* 1/2. Il
porte de chaque côté les signes du zodiaque à la place
indiquée par leur lever et leur coucher héliaques. Le
style de ce cadran était une lame triangulaire verticale,
orientée dans le méridien, et dont Tarète inclinée était
parallèle à Taxe du monde, c'est-à-dire que, prolon-
gée, elle aurait rencontré l'étoile polaire et qu'elle fai-
sait avec le plan horizontal du cadran un angle égal à
la latitude de 48*30*.
La légende dé ce cadran est la suivante : Horloge
horizontal auec les Arcs des signes du Zodiaque à
laleualion de 48 degr 30 mi,
4* Le cadran, en bas à gauche, est intitulé : Horloge
antique auec les Arcs qui monstrent la grandeur des
jours et desnuicts. Il porte une graduation qui indi-
que, à droite, la longueur des nuits, à gauche, la
longueur des jours d'un solstice à l'autre ; de telle
•y
— 381 —
façon que la somme des deux nombres inscrits aux
extrémités d'une division courbe quelconque du cadran,
soit égaie à 24. La ligne droite horizontale correspond
à l'équinoxe.
Ce cadran porte encore des lignes droites conver-
geant, deux à deux, au loin vers le haut et numérotées
en chiiîres romains. E^les divisent le diagramme en
douze paHies inégales et portent, pour ce motif, le nom
d'heures inégales. Le style de ce cadran était une tige
verticale, un gnomon ; l'ombre de son extrémité se
projetant sur une des lignes horaires inégales, indiquait
le nombre d*heures du jour déjà écoulées et, par suite,
celui qui restait encore à parcourir.
5** Enfin, en bas à droite, se trouve une Horloge ita-
lique (graduation à droite) et babylonique (graduation à
gauche). Le style est encore un gnomon vertical. Les
chiffres romains indiquent les heures italiques, c Les
Juifs, les anciens Athéniens, les Chinois, les Italiens,
etc., commençaient le jour au coucher du SoleiK Jus-
qu'à ces derniers temps chez les ItaHens, on comptait
tout d'un trait vingt-quatre heures entre deux couchers
consécutifs du Soleil, et non pas deux périodes de 12
heures. » (Arago , Astronomie populaire^ T. I,
page 268.)
Les chiffres arabes donnent les heures babyloniques.
« Les Babyloniens, les Syriens, les Perses, les Grecs
modernes, les habitants des Iles Baléares, etc., ont pris
pour commencement du jour le lever du Soleil. »
Arago, Astronomie populaire^ T. I, page 269.)
Les lignes convergentes vers le bas montrent l'équiva-
lence des heures différentes du système italique et du
système babylonique.
C. MILLOT.
m.
Sur les cdtés de la ligure du milieu sont représentés,
avons-nous dit. Mars et Pallas, debout, s'appuyant sur
des cartouches armoriés. Le dieu de la guerre est en
costume romain, tel qu'on le comprenait à l'époiiue de
la Renaissance ; du sommet de son casque, retombent
des plumets autour de son visage ; un manteau agraffé
sur l'épaule droite voltige en arrière ; une épée pend
presque horizontalement à son côté ; sa main droite est
posée sur la hanche, et l'autre sur le cartouche, garni
de volutes et d'enroulements déchiquetés en manière
de feuillages, et offrant un écu ovale à la croix ancrée.
Nous pensons que ce /â/]«a/ (pour nous servir d'un
terme héraldique) représente lo dieu de la guerre ; tou-
tefois, ainsi qu'il sera dit plus loin, M. Favier a fait re-
marquer la ressemblance de son costume avec celui du
Minos (Antoine de Gouvonges) que Gallot a gravé dans
le Combat à la barrière.
Pallas, aux vêtements arlistemenl drapés, les avant-
bras découverts, porte une cuirasse et un casque
antique à plumet ; elle s'appuie de la main droite sur
une lance et de la gauche sur un cartouche ovale
présentant les armoiries suivantes, avec une bordure
chargée d'une lignede clous: Ecartelé, à deuxbalaaees
'ine sur l'autre, et à trois barres.
Dès le premier examen que noua avons pu faire de
table en question, notre sentiinenl a été que les ar-
oiries devaient se rapportera deux époux : le mari,
I la maison de Stainville, la plus célèbre en Lormue
— 388 —
qui ait porté à la croix ancrée (1) ; la femme, de la fa-
mille de Montpezat ou Moatpesat, seul nom connu
dans la même province auquel, croyons- nous, se rat-
tache la représentation héraldique d*une ou de deux ba-
lances (2). Nos recherches pour la vérification de cette
opinion ne nous donnèrent pas satisfaction toutd*abord ;
mais, à présent, sans qu^elles aient atteint, en elles-mê-
mes, un résultat entièrement satisfaisant, nous sommes
parvenu à en faire ressortir un ensemble de probabilités
très favorable à notre conclusion, étant donné surtout
la difficulté, sinon l'impossibilité, d'en trouver une
autre.
Antoine de Stainville, seigneur de Couvonges (3),
époux de Françoise de Montpezat, vivait vers la fin
du XVI* siècle et le commencement du suivant. Stain-
ville portait : d'or, à la croix ancrée de gueules ; il n'y
a aucune difficulté de ce côté. Mais, Husson-rEscossois
donne aux ancêtres de Françoise de Montpezat les ar-
mes suivantes, fort diflérentes de celles qui figurent
sur notre monument métallique : « d^or^ à la bande de
gueulJe, de trois pièces (4), au chef dC azur ^ paré de trois
(1) Comme portant à la croix ancrée^ nous trouvond :
dansCayon, Boulay, Chables^ Damas, Fligny du Fay (la
croix est chargée de cinq écussons), JSainvtlle ou Ainville
(ce doit être une mauvaise lecture de Stainvtlle et une con-
fusion avec le nom d'Einville), Mont-Saint- Lig ter, Pittan^
ges, Sirey ou Sirech, Stainville ; dans Dom Pelletier, Chas-
tenoy (Jean de) et Perrin (Nicolas) .
(2) Ce «c meuble », comme on dit en blason, est évidem-
ment par/an< et répond aux deux dernières syllabes du nom.
(3) Dans la suite, § VII, nous donnerons de plus amples
renseignements sur ce personnage.
(4) Ancienne formule pour désigner trois bandes.
- 384 -
estoiles d^or ». Ces armoiries sont-elles bien exactes?
Si nous consultons le Dictionnaire Lêraldique de M.
Ch. Grandmaison, nous y voyons citée une famille de
ce nom, qui pourrait bien n'être qu'une branche de la
même : « Montpesat, De gueules, à une balance d'or,
alias dor, à une balance de gueules» Gascogne (1). »
Mais, dans les planches d'armoiries qui font partie
de la fameuse Encyclopédie de O'Âlembert et Di-
derot, nous trouvons (au n«> 546), avec le nom de
MoNTPEZAT, reçu sulvaut : Ecortelê, d'azur à deux
balances, F une sur l'autre, et d'azur à S étoiles d'or.
Or, auparavant, en continuant à consulter le Dic-
tionnaire de Grandmaison, nous avions remarqué les
deux mêmes meubles du quartier principal dans cet
article : c Laugnac. De gueules, à deux balances Pune
sur Vautre dor, Bourgogns. » Ce nom de Laugnac
semble appartenir, non pas à Test, mais au sud-ouest
(1) A cette famille se rattachait sans doutée Jean de Mont-
pezat de Cor bon, 102* Archevêque de Bourges (1620-1686) »,
dont M. Chautard dit la famille originaire cie la Guyenne.
Un jeton, avec la divise cym. pvndere. tirtys, représente
ses armoiries, dont le même numismatiste décrit ainsi Técu:
Ecartelê, fi au 1 et 4, de gueules à la balance d*orqui est de
MoNTFEZAT ;aufet 3, de gueules au Uon rampant d'or qui
est le Saint Paul ; sur le tout, d'azur au monde dor, > —
L*auteur ajoute : « Les meubles de ces armoiries, la balance
et le lion, s'harmonisent d*une façon très élégante et fort cor-
recte avec la devise du prélat, que nous traduisons ainsi :
Etre énergique avec mesure, ou bien : Joindre le courage à
la prudence, d {Revue belge de numismatique, 1890, p.
478-479.) — Dans son édition de V Armoriai du héraut Berry,
au chapitre du Languedoc, Vallet de Viriville décrit ainsi le
n» 1137 (p. 153) : t Le sire de Monpezat, ou Montpezat. De
gueules à la balance d*or, »
!
».!
'i
11
— 385 -
de la France (1). li nous fallait aller plus loin, et, dans
un autre ouvrage, nous avons enfin trouvé cette des-
cription qui correspond exactement à Técu en question i
sauf changement des bandes en barres, mutation des
plus fréquentes et tout à fait négligeable : « deLauonaGi
Gascogne. Ecarlelé : aux 1 et 4, de gueules, à deux
balances d'or, posées tune sur F autre ; aux 2 et 3, de
gueules, à S bandes d'or (2). »
On remarquera que les 1 el4 correspondent, avec
deux balances au lieu d'une, aux armoiries de Mont-
pezat citées par M. Grandmaison, et que les S et 3
sont semblables aux armoiries indiquées par Husson-
TEscossois, sauf transposition des émaux et suppres-
sion du chef {9).
Tous ces écussons ne se rattacheraient-ils pas à la
même famille? Nous nous en sommes quelque peu
persuadé en faisant de longues et inutiles recherches
sur la généalogie, voire même l'existence d'une famille
du nom de LaugnaC; et en voyant Domin. Gallot qua-
lifier le père de Françoise : « François de MONTPE-
ZAT, seigneur de LAUGNAC (4). » De là, nous pen-
(I) En vérifiant, nous ne trouvons, en effet, qu^une com«
mun3 de ce nom, canton de Prayssac, arr. Agen, Lot-et-*
Garonne.
(2; De Magny, Science des Armoiries, p. SU.
(3) Encore cette transposition n*existe-t-elle pas si Ton
s*en rapporte à la Science des Armoiries de M. de Magny ;
il indique les deux blasons de Montpesat et Montpezat, et
voici la description du premier : <c de Montpjssat, Langue-
doc. De gueules à trois bandes dCor ; au chef cousu d*azur^
chargé de trois étoiles d'or.
(4) Une indication identique se trouve dans le Héraut de
25
1
sons que le blason décrit par Husson^rEscossois ne se
rapporte qu'au quartier de la branche de Laugnac, dont
qlle a peut-être fait usage isolément. Si la description
qu'il donne est exacle, il faut en conclure que la fa-
ipille a supprimé ou ajouté le chef et transposé les
émaux. Nous croyions d'abord que ce pourrait être là
les armes primitives de la famille ; mais, les balances
qui sont parlantes ont éloigné cette présomption (1).
Lorraine, ms. de F. Perrin de Dommartin (1654), à Tart.
Livron,
Notre étude était terminée lorsque le Catalogue d*auto-
graphes de la xnaiBon Ëug. Charavay, d'octobre 1892, nous
a apporté cette indication :
« 198. LoiGNAC (Montpejat, baron de), capitaine du xvi«
siècle, mignon de Henri III, un des assassins du duc de
Quise à Blois, mort en Gascogne. — Lettre signée, avec la
souscription et un post-scriptum de 6 lignes autographes, à
M. de Rambouillet (Nie. d'Angennes) ; Laugnac (Lot-et-Ga*
ronnè), 2 décembre 1579, 1 p. in-fol, cachet à ses armes.
Rare^
c Lettre historique, c Sa Majesté (Henri III) me commande
a>. par sa lettre de temporizer encores jusques à la fin de cette
» année prèz du roy et royne da Navarre « (Henri IV et Mar-
guerite de Valois, engagés dans la guerre des Amoureux).'»
Cf. le Dict, de Moréri, au mot « Lognac ou Loignac, ou plu-
tôt Laugnac... » ; il y est parlé du même personnage, mais
sans mention du nom de Montpezat.
(1) Il existe six communes du nom de Montpezat : Basses-
Alpes, Ardèche, Gard, Gers, Lot-et-Garonne et Tarn-et-
Garonne. — La Chesnaye-des-Bois (Dict. de la nobL) ne
parle d'aucune famille de ce nom, mais de deux terres, en
Languedoc, dans les diocèses de Nîmes et d'Uzès, qui furent
toutes deux érigées en marquisat pour la famille Trétnolet,
Tune en 1665, Tautre en 1745. — Au chapitre des maréchaux
de France, le P. Anselme (I, 629) parle de <c Raymond, sei-
gneur de Prez, qui épousa Bonne de Montpezat, héritière de
— 387 —
Nous ne trouvons rien de plus certain sur les deux
écussons de notre table, et cette solution, si probléma-
tique qu'elle paraisse, est la seule qui découle naturel-
lement des éléments recueillis (1).
IV.
Vers le haut de la table existent, dans des circonfé-
rences rayonnantes, qui représentent la lumière et son^
le symbole de la gloire, les noms de Jésus et de Marie,
c'est-à-dire les monogrammes ÎHS (IHesuS) et MA
{AiariA), chacun surmonté d'un sigle d'abréviation en
forme d'oméga surbaissé ; au-dessous du premier se
trouvent les trois clous de la Passion (2) se touchant
par la pointe, popularisés par les Jésuites, et, au-des-
sous du second, un cœur (3).
Gaillard, seigneur de Montpezat en Quercy, son frère ». Elle
testa en 1280. La famille des Prez se fondit dans celle de
Lettes, à laquelle appartient le maréchal de France, et qui
conserva le titre seigneurial de Montpezat.
(1) Hâtons-nous de dire que l'exactitude de nos conjec-
tures héraldiques a été amplement confirmée par le nom de
Couuunges (Couvonges) lu ultérieurement, en place d'hon-
neur, sur la table d*horloges.
(2) Les clous de la Passion sont toujours au nombre de
quatre aux hautes époques ; ils furent réduits à trois à par.
tir de la fin du xiii« siècle. (V. notre Etude hist. sur la croix
d'affranchissement de Frouart, 1882, p. 12-13). C'est par
allusion aux instruments de la Passion, nous en sommes
persuadé, que les clous ont été mis au nombre de trois dans
les armoiries ecclésiastiques de Verdun ( Urbs clavorum) .
(3) A partir du xv* siècle, la dévotion aux cinq plaies du
Christ amena la représentation fréquente du cœur da Sau-
veur ; celle du c(eur de Marie en fut probablement un co.
rollaire.
— 388 —
Nous avons résumé trop récemment Thistoire de la
dévotion aux saints noms de Jésus et Marie pour y re-
venir ici (1); on sait de quelle vogue jouissaient ces
images dans la première partie du xvii* siècle.
Celte considération suffirait pour expliquer leur pré-
sence sur l'objet que nous étudions ; mais, ce sont les
Jésuites qui, à Tépoque indiquée, dirigeaient plus spé-
cialement cette dévotion, et c'est pour eux, pour leur
Université de Pont-à-Mousson, que la composition de la
table d'horloge a dû être faite (2). Enfin, à côté de ces
motifs, très suffisants par eux-mêmes, on peut se deman-
der si une idée de symbolisme n'a pas contribué à faire
placer fréquemment le nom de Jésus sur les cadrans
solaires, et en particulier sur le nôtre. C'est la lumière
naturelle, c'est le soleil, qui opère sur de tels instru-
ments ; mais c'est Jésus-Christ, suivant la bible et la
liturgie catholique, qui est le soleil d'en haut (3), la
(1) Anciennes cloches de Saugues ; Nancy 1890, p. 39-52
et 59-67.
(2) V. des monogrammes analogues sur des étendards
figurant aux lêtos de TUniversité de Pont-à-Mousson,
planche reproduite par la Lorraine Artiste^ n<» du 10 mai
1891, p. 505 (non chiffrée). Ces étendards sont portés au-
près du c char du globe céleste >. — D'autres, un peu
variés pour les détails, se remarquent sur les vantaux do
'l'ancienne église des Jésuites, à Dole.
(3) Oriens ex alto (Luc, I, 78) ; oriens, splendor lucis
œternœ et sol justiciœ (Aat. de TAvent) ; Jesu^ sol justi"
ciœ (Litanies du saint Nom de Jésus) ; Sol justiciœ.,. (An-
tienne du Magnificat aux vêpres de l'Iramaculée-Concep-
tion) ; etc- — En Anjou, pour obtenir le feu nouveau, le
Samedi- Saint, « on se servait d*un bérille ou pierre grossis-
sante, à travers laquelle on faisait passer un rayon solaire ».
(Mgr X. Barbier de Montault, U appareil de lumière, p.
185.)
— 389 —
vraie lumière (1), le créateur des astres (2) : au nom de
Jésus^ dit saint Paul, tout genou doit fléchir, dans le
ciel, sur la terre et dans les enfers (3).
De même que le soleil représente Jésus, le symbo-
lisme du moyen-âge offrait la lune comme Temblème
de Marie ; mais, si Tastre des nuits peut agir sur un ca-
dran, ce n'est pas d'une manière utile. On a pu cependant
placer, non sans motifs, le nom de la Vierge en regard
de celui de son Fils, car, dit la liturgie, elle est Taurore
qui apporte le jour (4) : reine du ciel (5), brillante
(1) JesUf lux veia (Litanies du S. Nom de Jésus). Voir
les citatioDs faites dans notre article Bainville-sur-Madon^
1890, p. 8, note 5 ; v, en outre : Revue de Vart chrétien^
1890, p. 520; Mgr X. Barbier de Montault, La croix pro*
cessionnelle de Montaubariy p. 10; Le vitrail de lacrucifi»
xion à la cathédrale de Poitiers, Tours, 1885, p. 9; L'ap-
pareil de lumière de la cathédrale de Tours, 1885, p. 185 ;
Le râteau à trois cierges de la cathédrale de Tours, Tours,
s. d., p. 15.
(2) Creator aime siderum — yEterna lux ci edenlium.
(Hymne de S. Grégoire; vêpres du temps de TAvent.)
(3) In nomine Jesu omne genu flectatur cœlestium, ter-
restrium et infernorum, (Office du S. Nom de Jésus, introït de
la messe ; tiré de S. Paul, Philipp., II, 10.)
(4) Voici quelques textes sur ce symbolisme assez oublié :
Aurora, quœ solem paris (Hymne des vêpres de la Na-
tivité de la Vierge, dans Tancien bréviaire de Nancy, 1846).
Sic aurora novi nuntia luminis... Sol in virgineo pectore
prœviis — Ardorem radiis suscitât intimum (Hymne In-
fans puisa, aux vêpres de la Présentation, même bréviaire).
Ex te enim ortus est Sol justiciœ, Christus Deus noster (An-
tienne du Magnificat aux vêpres de l'Immaculée-Conception
et graduel de la Nativité de la Vierge). Ex qud mundo lux
est orta (Ant. Ave Regina cœlorum) .
Tu régis alti janua
Et aula lucis fulgida,
(Hym^ e glortosa, de S. Fortunat, dans Toffice de la
— 390 —
comme Taurore (i), éclatante comme le soleil (2).
Au bas de la table d'horloges, oa remarque deu x
cartouches rectangulaires, oblongs et renforcés d6
volutes fleuronnées, qui offrent ces deux sentences
horaires, dans le goût du temps :
Puis que la mort te doit surprendre.
A tout' heure il te faut r attendre.
Vierge, cité par liigr X. Barbier de Montault, Revue de
V Art chrétien^ 1883, p. 46, note
BoYnum quant Inhabitet
Xox è quâ nos visitet^
Ornât sol justiciœ
Quot micat luminibus.
Suis Deus usitus
Quod vos fingit glorice.
(Prose Gaudii primordium pour rimmaculée-^Conception
et la Nativité de la Vierge, dans le Paroissien romain à
Tusage de Metz, 1858.)
(5) Regina cœli lœtare (Ânt. de la Vierge, du temps de
Pâques à la Trinité). Ave, Regina cœlorum (Idem^ de la
Purification au Samedi-Saint).
(1) Quasi aurora valdè rutilans (Ânt. du Magnificat aux
l'*» vêpres de l'Assomption, cf. Cant., VI, 9).
(2) Electa ut sol (Gant., VI, 9, que Le Maistre de Sacy
traduit par oc éclatante comme le soleil ») ; c*est Tune des
inscriptions qui figurent, au XVI* siècle, dans Ticonographie
de rimmaculée Conception ; on retrouve ce texte à la se-
conde ant. des vêpres de la Nativité de la Vierge dans les
anciens bréviaires du diocèse Nancy (1846) ; v. aussi, dans
la liturgie romaine actuelle, aux laudes de l'Assomption,
ad. Bentid. Ant, «
— 891 --
Douze heures mesurent lejovr
Quelle unira ton séjour ? '
f
i.
Gomme ies cadrans solaires et horloges astronomi-
ques étaient faits à T usage de personnes possédant une
certaine culture intellectuelle et non des illettrés, il
était d'usage de les orner de sentences, qui font allu-
sion à la marche ou au prix du temps, à la brièveté de
la vie, et offrent soit des pensées morales, soit des ci-
tations de l'Ecriture sainte. Avant le xvn* siècle, elles
sont généralement rédigées en latin ; mais, ensuite,
Tusage de la langue française s'y introduit large-
ment.
Très fréquemment, ainsi que sur notre table, ces de-
vises font allusion à la mort et à l'incertitude du
moment où elle arrivera, mais le xvi • siècle et la fin
de la Renaissance ont été particulièrement hantés
d'idées funèbres : les tombeaux cessent de s'inspirer
des sentiments du repos éternel et de l'existence d'un
monde meilleur, pour offrir des images lugubres, rela-
tives au néant et au désespoir (i) ; des objets funèbres
sont figurés sur des bijoux (2) ; au château d'Anet,
bâti pour Diane de Poitiers, le couronnement des che-
minées est en forme des sarcophages ; même sur les
marques des libraires, on voit une tête de mort dire au
lecteur : Mibi heri et tibi hodie (3).
(1) V. notre Note sur le tombeau de Warin de Gondre~
court, 1882, p. 12-13, note.
(2) Chacun connaît, entre autres, les bijoux macabres créés
par Pierre Woeiriot.
(3) V. nos Monuments funéraires de l'église Saint- Michel
à Saini'Mihielf 1686, p. 76, note 1. — Le plus curieux des
exemples retrouvés depuis cette époque, nous a été
— 392 —
Nous avons déjà cité ailleurs quelques sentences de
ce genre, relevées sur des cadrans solaires, mais dont
les dates sont rarement connues :
TACmS SENESCmUS HORIS (1).
VIDES HORAM
NESGIT HORAM (2).
EX ms VNA TIBl (3).
GRAINS LA DERNIÈRE (4).
LA DERNIÈRE EST CACHÉE (5).
VULNERANT OMNES, UNA NECAT (6).
HEAM VIDE UMBRAM
TVAM VIDEBIS VITAM (7).
offert au Musée de Dole. Sur une cheminée remarquable,
place singulièrement choisie, on voit, entre autres inscrip-
tions, ces deux sentences peu réjouissantes :
HODIE MIHI CRAS TIBl
YIGILATE, QYIA NESC1TI8 DISM NEQVE HORAM
Cette cheminée porte la date de 1565.
(1) Bozel, Savoie.
(2) Environs de Vire, Calvados.
(3) Châteaulaudren, Côtes-du-Nord.
(4) Moissac, Tarn-et- Garonne.
(5) Châteauneuf-de-Gadagne, Vaucluse.
(6) Serezin, Isère ; Les Avenières, Isère ; variée par
VULNERANT OMNES, ULTiMÂ NECAT, ainsi que uous Tavons lue
sur réglise d^Urrugne, prés St-Jean-de-Luz.
(!) Cadran au Musée lorrain ; nous Tavons cité, dans nos
Devises horaires, p. 10, sans avoir bien pu Texaminer, à
cause de la place obscure où il se trouvait alors ; les carac-
tères sont de hauteur uniforme ; la date doit être lue 1732.
— 398 —
On en trouvera beaucoup d'autres dans le recueil de
M. le baron de Rivières (1).
VI.
On voit enfin, tout au bas de la table, dans le coin à
droite et écrite en sens inverse, la signature du graveur:
A . Hanzelet^ ce qui nous amène à dire quelques mots
sur cet artiste. Nous n'aurons pas à chercher loin ; car,
il y a un an, M. J. Favier, Conservateur de la Biblio-
thèque publique de Nancy, a publié le catalogue des
œuvres de ce graveur et de son père, Jean Appier (2).
Jusqu'alors, on avait généralement confondu ces deux
personnages, et comme Hanzelet, plus rapproché de
nous, a laissé des travaux d'un nombre très supérieur,
— à cause aussi de la similitude des noms, — on lui
attribuait en grande partie les travaux de son père ;
mais, par un examen attentif, on devait flnir par recon-
naître que, si Hanzelet a été plus fécond, Jean Appier
a été plus artiste.
Cet examen, M. Favier Ta fait, et dans une intéres-
sante introduction à son catalogue, il a résumé la vie de
ces deux graveurs ; nous pourrons nous borner à ex-
traire quelques renseignements de l'étude de notre
confrère.
(1) B^° de Rivières, Inscriptions et devises horaires ;
Tours, 1881, in-8, 117 p., ôg. — Ce travail est extrait du
Bulletin Monumental, où des suppléments ont été publiés
postérieurement par le même auteur. On lira d'autres ins-
criptions analogues dans : Mgr X. Barbier de Montault,
Traité pratique de la construction des églises y I, 77*78 ;
Blayignac ; La cloche, p. 70. 81, 82, 83, 86, 88 ; etc.
(2) y. la troisième note de cet article.
— 394 —
Durival dit posivement, en pariant d'Haraucourt-iez-
Saint-Nicolas : < C'est la patrie de Jean Appier Hanze-
lel, mathématicien et graveur, né le 15 novembre 1596,
mort en 1647. » Il était fils de Jean Âppier, également
graveur, qui habita Nancy et vivait encore en 1615 ;
dans un document de 1605, celui-ci est qualifié d'ingé-
nieur. Le surnom de Hanzelet apparaît pour la première
fois en 1619; le jeune graveur le reçut, ou le prit, proba-
blement afin d'être distingué de son père : c'est un dimi-
nutif de Hanz^ synonyme de petit Jean^ qui ne tarda pas
à primer complètement sur les noms de baptême et de
famille. « Si Hanzelet, dit M. Favier, n'a pas été un
chalcographe bien remarquable, c'est sans doute parce
qu'il faisait trop de choses à la fois. Dès 1620, nous le
voyons publier un recueil de machines plus ou moins
ingénieuses, à l'invention desquelles il avait dû consa-
crer beaucoup de temps. En 1626-1627, il est « maître
« des feux artificiels », joignant la pratique à la
théorie.... De 1623 à 1628, il est imprimeur juré de
l'Université de Pont-à-Mousson. Il ne put continuer ce
métier plus longtemps, sans doute à cause d'une
disgrâce qu'il encourut de la part du recteur... »
Hanzelet semble avoir habité Pont-à-Mousson au
moins de 1618 à 1630, époque depuis laquelle il ne
donne plus signe de vie en Lorraine (1). Aurait-il quitté
(1) Nous trouvons, dans le Journal de Gabriel de Mar^
lorat (Bar-le-Duc, 1892, p. 205), la curieuse mention suivan-
te, que M. Favier n*a pu connaître : « Le 23 janvier 1630,
ont esté entérinées (^en la chambre des comptes de Bar) les
lettres patentes de S- A. octroiées à Jean Appier, dit Hanze-
let, sculpteur en taille douce, demeurant au Pont-â-Mousson,
fils de Jean Hanzelet, vivant peintre, demeurant à Bar, de
de l'état de contrechevaucheur en la gruyerie du Pont ; le
— 395 —
sa patrie à cause des misères amenées par la guerre de
Trente-ans ; se serait-ii retiré en Italie, y prostituant
son burin pour vivre ? C'est oe que porterait à croire
le Dictionnaire des graveurs de Basan, où il est dit de
lui : c Graveur médiocre, qui n'a exercé son art qu*é
des pièces obscènes ; il est rare qu'un habile artiste
avilisse ses talents sur de pareils sujets. » Nous avons
hâte d'ajouter qu'il n'existe encore aucune preuve à
l'appui de cette allégation ; Basan parait rrailleurs
se tromper en appelant notre chalcographe Augustin
et en le faisant naître à Toul, en 1609.
Vers la fin de son étude, dans le catalogue des
pièces sans date, M. Favier en lait connaître une qui
est analogue à la gravure de notre table d'horloges et
dont il convient par conséquent de reproduire la des-
cription. Après avoir parlé de l'objet dont nous nous
occupons, il s'exprime ainsi :
c A la suite de cette planche nous devons en signaler
une autre (1), de dimensions beaucoup plus petites,
qui, sans être signée, nous semble pourtant avoir été
gravée par Hanzelet. C'est également une figure astro-
nomique, mais destinée, cette fois, à l'impression. Dans
W angles supérieurs de l'estampe, à gauche, le mono-
gramme des Jésuites ; à droite, celui de la Vierge, ab-
solument comme dans la pièce qui précède, et, ce qu'il
y a de plus caractéristique encore, dans l'angle infé-
rieur de gauche, les armes de Stainville semblables à
serment pri» par Maillet, président. S. A. luy donne gratis
ledit estât, moyannant un livre en taille douce de plusieurs
machines qu'il a présenté à Sad. A. »
(1) « Collections Lucien Wiener. >
— 396 -
celles que tient un des personnages du cadran solaire.
H. 111, L. 143. »
Notre table d'horloges solaires est certainement Tune
des pro'luctions les plus honorables de Hanzelet.
VU
Nous avons étudié successivement les différents mo-
tifs iconographiques et les inscriptions de )a table
d*horloges. Il convient mainteant d'exposer le résultat
de nos recherches sur les personnages dont elle porte
les armes.
€ Antoine de Stainville, seigneur de Gouvonges, con-
seiller d^Estat de S. A., 1*' gentilhomme de sa Cham-
bre, bailly de Bar et capitaine de la compagnie des
Ghevaulx-légersdesadite A. (1) », était fils de Charles
de Stainville, seigneur de Couvonges, et de Françoise
du Châtelet, fille de Renaud du Châtelet et de Marie de
Fresneau (2). La maison de Stainville, qui paraît s'être
éteinte vers la fin du siècle dernier, était Tune des plus
considérables du duché de Bar ; d'ancienne chevalerie,
noble de nom (3) et d'armes, elle s'allia â nombre des
meilleures familles de la Lorraine.
Vers la fin du XV* siècle et le commencement du sui-
(1) HuBson-rEscoBSois, Simple crayon^ 1674, art. Stain-
ville ; Bur la même famille, voir le Hérault d'Armes de
Dominique Callot (me. Bibl. publ. Nancy) ; J. Cayon, An-
cienne chevalerie; \e Dcm Pellitter annoté; La Chesnaye-
des-Bois, etc.
(2) Cf. Dom Calmet, Maison du Châtelet, p. 185 et 186.
(3) Stainville est une commune du canton d'Ancerville,
MeuBe.
■\
— 397 —
vaat vivait Louis, seigneur de Stainville, dont deux en-
fants, un fils et une fille, sont connus. La fille, Louise,
épousa Jean VIII^ comte de Salm ; leur petite-fille, Chris-
tine deSalm, fut la femme du duc François II, chef de la
Maison de Lorraine et dont la postérité existe toujours.
Lefîis fut Antoine I" de Stain ville, seigneur de Cou-
vonges, bailli de Bar, mort en 1531 ; mari de Béatrixde
Savigny. Ils eurent pour fils Antoine II de Stainville, sei-
gneur de Couvonges, époux d'Anne d'Hangost, et pour
petit-fîls Charles de Stainville, dont il vient d'être parlé.
Ces personnages ne possédaient-ils plus la terre de
Stainville, ou bien portaient-ils le nom de Couvonges
parce qu'il désignait une seigneurie plus considérable ?
Nous ne savons. Toujours est-il que c'est à une bran-
che cadette, issue d'un frère puiné de Charles, que la
terre de Stainville paraît avoir appartenu dans la suite.
Au XVII*, les chefs des deux branches prirent, sui-
vant l'usage, la qualité de baron, en l'attachant à leurs
deux seigneuries principales ; un peu plus tard, ils por-
tèrent le titre de comte, sans que nous sachions s'il y
eut érection légale. La branche de Stainville s'éteignit
en 1720, dans la maison de Ghoiseul, pour laquelle cette
terre fut érigée en Marquisat le 7 avril 1722 (1).
Nous avons retrouvé mention de quelques acles rela-
tifs à Antoine^ III :
1597 ou 1598. t Donation de la seigneurie de Morley
à Antoine de Stainville, comte (2) de Couvonges (3). »
(1) Dom Calmet, Notice; La Chesnaye-des-Bois ; F.
Liénard, Dict, topogr, de la Meuse,
(2) Ce titre n^est pas admissible à Tépoque indiquée; v.
la note suivante.
(3) H. Lepage, Inrent, somm. des Archiver de laMeurthe,
B. 69 : Lettres pateotes, 1597-1598. — Nous avons tenu à
— 398 —
— c Antoine de Stainville, chevalier, seigneur de
Couvonges, Morley, etc., gentilhomme du cardinal de
Lorraine, et sa femme Françoise de Mont pesât repren-
nent Morley. 1598 (1). » — « Françoise de Montpezat,
épouse d*Ântoine de Staiuville, seigneur de Gouvonge
et de Morley, en 1598 (2). • Antoine « reprend en flef
en 1602 (3). » La même année, le 4 décembre, c An-
thoine de Stainville, chevalier, seigneur de Couvonges.
etc., » fournit son dénombrement « pour Couvonges,
etc., et pour moitié des moulins de Beurey et bois sis
au finage dudit lieu appelé le Cout-de-Dombrules(4). »
Le 27 octobre 1606, fut fait un rapport t sur la re-
quête présentée au duc de Lorraine par madame de
Stainville au sujet de la justice de Beurey (5). » An-
toine fit, en 1612, des reprises semblables à celles de
1598 (6). Dans les OfSces de Lorraine, à Tarticle des
examiner cet acte (f. 27) ; il témoigne qu'Antoine n*était pas
qualifié comte, ni encore niarié :
c Lettres de confirmation et ampliationde la seigneurie de
Morley pour Mons' de Couvonge.
9 Charles.. • Comme le vingt deuxiesme de janvier de Tan
présent quatrevingtz et dixhuict, pour plusieurs bonnes
considérations, nous ayons donné, ce Mé et transporté â An-
thoine de Staioville et damoiselle Françoise de Montpesat,
sa future femme, en faveur de leur mariage, la terre et
seigneurie de Morley... etc, Nancy 25 janvier 1598. »
(1) Dufourny : Table des noms di personnes, renvoyant
aux : 1. 1, p. 892; t. VIIÎ, p. 463, 4G4.
(2) Dufourny: t. II, p. 448.
(8) Ibidem: t. II, p. 144 et 448.
(4) C. Bonnabello, Be'irey, 1885, p. 5, diaprés Archives
de la Meuse, B. 314, f> 20.
(5) Ibid,y p. 3, d*après les mêmes Arch., B. 347, f* 390 v«.
(6) Dufourny : t. I, p. 475.
1-:
— 399 —
Baillis de Bar, M. H. Lepage cite : a Antoine de Stain-
ville, seigneur de Couvonges, conseiller d'Etat, pre-
mier gentilhomme de la Chambre. 18 juin 1616 (1). »
Le même seigneur fait d' < autres reprises en 1614 (2) ».
On trouve, dans les comptes du trésorier général des
finances, mention d^une somme payée en 1619, à t M.
de Couvonges, conseiller d'Etat et bailli de Bar, pour
un voyage à Tours vers le roi de France (3) ». —
« Antoine de Stainville, chevalier, seigneur de Cou-
vonges et de Morley, premier gentilhomme de la Cham-
bre du duc de Lorraine, bailly et capitaine de Bar, re-
çoit à vie un bois dit le Poncel, proche de Mussey.
1620 (4). > Il est témoin en la même année (5). « Le
duc Charles IV lui donne une pension en 1628 (6). »
Nous croyons qu'Antoine III de Stainville mourut
après 1630 (7) ; voici pourquoi. Vers 1631-1632, était
(1) Mém. Soc. Arch, lorr., 1869, p. 117.
(2) Dufourny : t. I, 765.
(3) Lepage, Inv, somm., B. 1406.
(4) Dufourny : t. II, p. 55.
(5) Ibidem : t. IX, p. 325.
(6) Ibidem : t. II, p. 595. — On trouvera beaucoup d'au-
tres renseignements sur Antoine III de Starnville dans le
Journal de Gabriel Le Marlorat, auditeur en la Cham-
bre du conseil et des comptes de Barrois {1605 à i63%) ; Bar-
le-Duc, 1892 (publié par la Société des Lettres... de Bar-le-
Duc) ; y. la table des noms de personnes, au mot Couvon-
ges. Cet ouvrage a paru postérieurement à la rédaction de
notre travail, dont il nous paraît corroborer les conclu-
sions.
(7) Cette opinion, énoncée avant la publication du Jour-
nal d-i Marlorat (v. la note précédente), nous semble con-
firmée par ce qu'on y lit à la page 219 : v Ce dimanche,
2* novembre 1631, a esté leue en nostre chambre la commis-
— 400 -
lieutenant des mousquetaires du duc Charles IV un
€ Monsieur do Gouvonge (1) », ou le « sieur de Cou-
vonges(2) », qui ne saurait être que le ftlsd' Antoine III;
ce grade militaire semble une position de début et
indique un homme encore jeune, tel que devait Têtre,
à cette époque, Antoine IV de Stainville. C'est donc,
pensons-nous, Antoine III, qui^ dans les Institutions
militaires d'H. Lepage, figure avec les titres de capi-
taine d'infanterie vers 1622 (3), de capitaine de che-
vau-légers en 1627 (4), puis de colonel d'infanterie et
maître de camp vers 1629 (5) ; on pourra trouver sin-
gulier de le voir servir presque à la fois dans la
cavalerie et dans Tinfanterie, mais le fait n'est pas ex*
ceptionnel : aucun autre seigneur ou baron de Cou-
vonges (qualité que Ton remarque à la dernière date)
ne pouvait, à cette époque s'appeler autrement qu'An-
toine de Stainville, et puisqu'il ne peut être question
d'Antoine IV, alors simple lieutenant de mousque-
taires, c'est donc bien de son père qu'il s*agit.
Mais cette observation entraîne des conséquences
importantes. M. A. Benoit, qui a consacré un ar-
sien de Mi* le duc Françoi». ... signé pour secrétaire Jaaiu,
qui le commet, en Tabseace du S^ de Co^vonge, bailly de
Bar, eu Texercica de ladite charge... s Autoinede Stainville
était- il seulement absent ou décédé? Il est curieux que, dans
le même Journal^ on voit son fils porter le titre de baron de
Gouvonges du vivant de son père.
(1) H. Lepage, InstituUons militaires, p. 164, noie 3.
(;?) Ibidem, p. 166.
(3; Ibidem, p. 255.
(k) Ibidem, p. Si78.
(5) Ibidem, p. 274, 277, 282, 236.
— 401 —
ticlo à Antoine IV de Stainville (1) a cru que c'est lui
qui figure dans le Combat à la barrière, en février
1627, et qui reçut, en 1629, « une mission assez déli-
cate : celle d'annoncer à Louis XIII l'arrivée intempes-
tive à Nancy du fameux Gaston d'Orléans et de calmer
les inquiétudes justement motivées de Richelieu, dont
les vastes plans étaient menacés par des cabales et de
misérables intrigues (2) » .
Il ne saurait être question que d'Antoine UI de Stain*
ville, s'il ne mourut que vers 1630 ; on sait d'ailleurs
qu'antérieurement, vers 1619, ce gentilhomme avait
déjà été chargé d'une mission auprès du roi de France.
On a vu (§ 111) qu'il existe au moins six terres appe-
lées Montpezat, et peut-être plusieurs familles de ce
nom ; il nous serait difficile de préciser l'origine de
celle à laquelle se rattachait Françoise, femme d'An-
toine III de Stainville ; les renseignements que nous
avons recueillis sont trop fragmentaires, sinon contra-
dictoires, et, quoiqu'on dise le Dictionnaire héraldique
de Grandmaison, le nom de Laugnac nous paraît ap-
partenir au sud-ouest de la France, nullement à la
Bourgogne ; Talliance du premier de la famille qui vint
en Lorraine fut faite dans une branche de la famille de
Livron, qui habitait le Limousin (3) : les alliances anté-
rieures paraissent désigner la même région.
(1) Arthur Benoit, M. de Couvonge, de la Maison de
Stainville, dans Mém. Soc. Arch. lorr, Id^S, p. 368.
(2) Ibidem, p. 372-873.
(3) F. Perrin de Dompmartin, Héraut de Lorraine, ms.
de 1654, et le Dom Pelletier annoté disent la famille de Li-
vron originaire du Limousin ; Husson-rËscossois et J.
26
•jf^ivT^.''
— 40-2 —
Le Hérault d armes et Husson-l'Escossois remontent
la généalogie de Françoise à son bisaïeul: I. Charles
de Monipesat, époux de Jeanne de Ro(]uefeuille ;
II. Alain de Montpesat. seigneur de Thonairs, époux de
Marie de Maulesun ou Montlesun ; III . François de
Montpesat, seigneur de Laugnac, époux de Nicole de
Livron, fille de François de Livron, seigneur de Bour-
bonne, et de Bonne du Châtelet (1); IV. Françoise de
Montpesat.
Nous n'avons fait aucune recherche sur la postérité
d'Antoine III de Stainville, car cela nous aurait en-
traîné trop loin ; un tel sujet mériterait une étude spé-
ciale (2). Disons seulement qu'Antoine IV, sonfilsainé,
parvint, le 26 janvier 1646, augrade de lieutenant-géné-
ral et mourut le 25 novembre suivant, d'une blessure
qu'il avait reçue le.^, au siège de Lérida (3).
Gayon disent du Dauphiné. Dans un article de journal re-
latif à la mort du marquis de Livron, décédé à Limoges^ le-
2 septembre 1882, nous lisons : a La maison de Livron, ori-
ginaire du Dauphiné, possédait la seigneurie de ce nom....
Vers 1236, elle quitta le Dauphiné, lorsque Bernard de Li-
vron fut nommé par le roi grand s^énéchal du Limousin...
et s'établit dans les seigneuries de Wars. Larivière et Au-
biac (actuellement Abjac, Corrèze).... C'est de là qu'est sor-
tie la branche des marquis de Bourbonne et de Ville....,
branche éteinte en 1728.... v
Cette branche est précisément celle de Lorraine.
(1) Cf. Dom Calmet, Maison du Châtelety p. 201. Il dit
que oc François de Montpezat, Seigneur de Longnac (sic)., »
épousa Nicole de Livron en 1564.
(2) Consulter Â. Benoit, /. c, p. d'*^7, et suiv., etc.
(8) Â. Benoit, l, c, p. 377. Cf. Dom Calmet, Maison du
Châtelet^ p. 18Ô, qui le qualifie : « Comte de Couvonges,
— 403 -
M. J. Favier a insisté sur la ressemblance qui
existe entre le costume du tenant des armes de Stain-
ville, qu'offre notre table d'horloges, et celui du Minos
(Antoine de Gouvonges) que Gallot a gravé dans le
Combat à la barrière, pour V Entrée de MM. de Cou-
vonges et de Cbalabre (1).
Le choix de ce travestissement est caractéristique :
en se faisant représenter sous les traits de Minos, An-
toine de Stainville voulut sans doute, suivant la remar-
que de M. Favier, montrer qu'aux incontestables vertus
guerrières de sa famille; il savait joindre les vertus ci-
viles. Ce fait, uni à la présence de ses armes sur Tob-
jet que nous étudions, dispose à voir en lui un homme
épris du goût de la science et possédant un esprit cul-
tivé.
VIII.
Il nous reste à examiner quelle est la valeur techni-
que du curieux objet qui nous occupe, et quelle a pu
être sa destination.
La série des horloges solaires figurées sur la table
du Musée lorrain a-t-elle, au point de vue de la science,
l'importance d'un document original ? Peut-on, non-
Marêcbal des Camps et armées du Roi, Gouveroeur de Ca-
sai, marié à N.... le Danois, Dame de Komberes et du Mont
S. Père. »
(1) J. Favier /. c, p. 362; Tauteur a commis, croyons-
nous, une légère inexactitude en ajoutant que cet Antoine
est le même qui fut blessé mortellement au siège de
Lérida : ce ne fut pas Antoine III, mais son fils, Antoine
•A
~ 404 —
ulement leur assigner un rang hoDOiable parmi les
itmments similaires, mais encore y conslaler un
ogres sur ceux qui avaient précédées ? Nous ne le
oyons pas. Toutefois, en considérant cet objet sous
specl qui lui convient, savoir l'application des théo-
ts en usages et l'imitation de modèles connus, nous
éciserons son intérêt réel et nous arriverons peut-être
léterminer son origine ; les moditications, les aitéra-
<ns volontaires que nous y reconnaîtrons serviront à
er sa ilestination précise.
Nul doute que le graveur, ou l'auLeur du dessin qui
fut fourni, ait pu s'inspirer de modèles courants,
erts par des ouvrages que possédait évidemment la
rissante Université de Pont-à-Mousson. Nous ne
uvons citer une figure contemporaine pour la « Déli-
alion gnomique des Aztmuths et AImycantaraths » ;
ne faisait apparemment plus guère usage de ces
rnières horloges astronomiques dans les cadrans ;
is, le tracé dés quatre autics horloges se retrouve
[is l'ouvrage d'un Jésuite, le P. Olavius, imprimé à
me en 1581 (1). Les ligures, garnies de beaucoup
1) L'obligeance de M, Favier noua a. permis de le con-
ter à la Bibliothèque publique de Nsdc; : Gnomoniees
'i ûcio, in quitus r.on sclum horclogiwvm solarum, sed
irum quoque rerum qtiœ ex gr.otnonis umbra cognosei
aunt, deseriptiones Gtomelricè demonstv^tur. Auctore
■istophoro CJBvio, BambirpienÉi. Societatis Jesu. Runite,
id Praociacum Jaaettum. 1581, in-fol. — Sur la construc-
1 des horloges solaireB, voir aussi : Oronce Fine, De Sola-
'iS horoCogiis et guadrantibus Libri quatuor ; Paris, 1533,
1°. — Dora Pierre da Sainte-Magdeleinu d'Abbeville,
\ité d korlogiograpkie ; Paria, 166d; autres éditions en
5, 1671, 1691 et 1701. — Salomon de Caus, Lu pratique
-405 —
moins d'inscriptions, mais compliquées des lignes né-
cessaires à la démonstration et à la construction, ont le
texte explicatif précédé des titres suivants :
Meridianos, scu circulas longiiudinnm civitatem^ in
eodem horologio horizontale describere.
Horologium Italicum Horizontale constituere,
Horologium Babylonicum horizontale constitrere,
Horologium Antiquum horizontale constituere .
Le rayon du milieu de la première de ces figures est
accosté du nom de Roma, la capitale du monde chrétien
z.- . :\ '••ji
et démonstration des horloges solaires, avec un disco rs
sur les proportions^ tiré de la raison de la 3S, Proposition
du premier livre d'Euclide et autres raisons et Proportions y
et V usage de la Sphère Plate; Paria, Hyerosme Droûart, 16*24,
petit in-fol. — Jacques Dudict, Le nouveau sciatère pour fabri-
quer toutes sortes d* horloges solaires sans centre avec une
seule observation du soleil /Blois, Gaucher-Colas, 1631, pot
in-go. — Méthode wAverselle pour faire des quadïans 50-
laires de toute sorte; 1639, in-8° fig. — A. Bosse, La ma-
nière universelle de M. Desargues, Lyonnais^ pour poser
Vessieu, et placer les heures et autres choses aux cadrâtes au
soleil ; Paris, Des Hayes, 1643, in-8«, 31 pi. — Le P. Pierre
du Heaulme, Principe curieux pour faire tous cadrans so-
laires; l^^k. — Pierre Robinet, Uhorographie ingénieuse
contenant des connaissances agréables dans la composition
des cadranSy etc. ; Paris, 1663, in-12. — Le P. Ignace Gaston
Pardie, S. J., Deux machines propres à faire les cadrans
avec une grarde facilité ; Paris, 1687, in-12. — De La Hire,
La gnomonique ou méthodes pour tracer des horloges so-
laires ou cadrans ; Paris, 1698, in-12, pi. — Biaise, La
gnomonique ou sciences des cadrans ; Paris, Boudet, 1744,
in-8» 6 pi. — Dom Bédos de Celles, La Gnomonique pra-
tique ; F sltïb, 1760, 1764, 1774, 1777, 1780 et 17ro, in.8o. —
V. aussi Abbé R. Charles, Horloges et cadrans solaires du
Maine; Le Mans, 1888, 8 p., etTélâgante plaquette deM. Ju-
- 406 -.
el le lieu d'impression de l'ouvrage ; sur riostrument
lorrain, ce nom se trouve remplacé par un nom local
et la figure a été adaptée à la situation géographique
désignée, — c'est-à-dire, pense-t-on , à la ville de
Pont-à-Mousson, — malgré une erreur de longitude de
quelques degrés, existant généralement d'ailleurs sur
les cartes de Tépoque : c'est, a la vérité, non pas le
nom de la petite ville universitaire, mais celui de Cou-
vonges, orthographié inexactement par l'artiste mussi-
l68 Planté, Gnomons et clepsydres ; Laval, 1890, 10-4°, SI
p., ôg. — Dernièrement, le journal La Natwe (n<»> du 13
décembre 1890 et du 4 avril 1891, Les Cadrans solairtis) a
publié, en les expliquant scientifiquement, de très curieux
instruments portatifs de la nature de ceux qui nous occu-
pent.
Nous trouvons, dans le récent catalogue Archéologie mo-
numentale du Musée de Troyes (par M. Louis Leclert ; 1890,
p. 140, n<» 744), cette description d*un objet analogue :
a Fragment d*un curieux gnomon ou cadran solaire en
pierre, de fvrme cubique, trouvé dans les fondations de la
maison n» 5, rue du Petit-Chaillouet» à Troyes. — XVII* s.
« Il portait sur trois faces de nombreux cadrans dont Tun
est horizontal, Tautre incliné, d*autres creusés en forme de
demi-sphère ou de demi-cône. Le même style sert pour le
cadran horizontal et pour le cadran incliné ; il est remplacé,
pour les autres, par un des c5tés des diverses cavités. Au-
tour de chacuD d*eux était gravée une incription différente
Nous n'avons pu lire que celle-ci : Sans t pinsbr. »
Voir aussi I9 curieux cadran solaire décrit récemment
dans le Bulletin de la Soc» archéoL du midi de la France
(séance du 2 décembre 1890) ; Toulouse, série in-80, n<» 7,
1891, p. 15. Il cite le P. Maignan, de Tordre des Minimes,
Perspectiva horariœ, Rome, avant 16&0*
Nous avons récemment remarqué d^intéressants cadrans
anciens au musée de Bâle (Suisse). Cs. en outre les tables
du Magasin pittoresque»
— 407 -
pontain : govvvnob (ou Couvungé) ; toutefois, appliquée
à ce lieu, l'erreur géographique serait encore très*
forte et ne paraîtrait guère excusable.
Notre dévoué confrère M. le conseiller P. Lallemand,
— qui, originaire de la Meuse, s'intéresait particulière-
ment à rétude de notre table d'horloges, — a bien
voulu faire, dans d'anciens ouvrages de géographie, des
recherches minutieuses, dont nous lui sommes fort re-
connaissant, nous élant, relativement à cette question,
rapporté entièrement à lui. « Je ne puis pas partager »,
nous disait-il, lorsque nous commencions la rédaction
de notre travail, « Topinion qui fait de ce cadran un
simple instrument de démonstration ; je crois bien qu'il
a été fait pour le château de Gouvonges.
a. Hanzelet, ou l'auteur qu'il a copié, a dû puiser
tous ses renseignements dans TAtlas de Mercator. .
« C'est là seulement que je trouve les noms, aujour-
d'hui inconnus, des villes de Zabaspa, Port-Ftoyal du
Brazil, Brest du Canada, Picora, et de Tîle imaginaire
desSept-Citez. Je dois dire cependant que les longi-
tudes qn'il assigne à ces lieux et à d'autres portés sur
rHovîoge contenant les méridiens de quelques villes
importantes du monde ne concordent pas exactement
avec celles de Mercator.
« Mais je crois qu'Hanzelet s^est fort peu préoccupé
de Texactitude : plus artiste que géographe, il a tenu,
avant tout, à rendre son dessin élégant et symé-
trique.
« Sur la ligne médiane de ce cadran est inscrit le nom
de Couvonges, ce qui, pour moi, lève tous les doutes
sur sa destination.
« Dans un tel cadran, en effet, le style, comme celui
I
— 408 —
du cadran des heures, doit couvrir de son ombre, à
midi vrai, la perpendiculaire a la ligne de base. Les
deux styles ayank la même orientation, Taccordne peut
se produire que dans le lieu pour lequel a été construit
l'instrument.
< Peut- on tirer argument des indications erronées en
latitude et en longitude ? Je ne le pense pas, car, au
commencement du XVII« siècle les connaissances
géographiques étaient bien rudimentaires.
« Mercator, tout en fixant à l'Ile-de-Fer le méridien
initial, donne pour Paris la longitude âS^'âO' ; pour
Bar-le-Duc, 26^Sr ; pourPont-à-Mousson, ê7»82'. D'à-
près ces données, la longitude de Couvonges serait
environ 26"30'. En la portant, en nombre rond, à 27",
Hanzelet ne s'écarte pas trop de la vérité ; Terreur
serait un peu plus forte, mais de signe contraire, s'il
s'agissait de Pont-à-Mousson.
« Quanta la latitude 48*30' indiquée en tête du cadran
central, elle ne diffère que de 10' de celle que l'on peut
tirer de l'Atlas de Mercator qui assigne à Commercy,
ville située a peu près sur le même parallèle que Cou-
vonges, la latitude 48"40 ; pour Pont- à-Mousson, il
donne 48*54' ; l'erreur serait plus forte encore.
« Pour mettre en évidence le peu d'exactitude des
géographes du XVII* siècle, j'ai relevé sur quelques
cartes la longitude de Metz et je trouve :
D'après Jolivet : 28*25' (1).
Fabert : 28*4' (2).
(1) Vieille carte de France.
(2) Description du Pays Messin et de ses confiDs.
- 409 —
Mercatop: 27M0' (1).
Jansonius: 27M5' (2).
Nolin : 26M0' (3).
a Au XVIII* siècle, l'accord n'est pas parfait, mais les
erreurs deviennent moins grandes. D'après la carte
dressée en 1724 pour la première édition de l'Histoire
de Dom Calmet, la longitude de Metz serait 28*59'.
a Postérieurement, Robert de Vaugondy (4) et Vos-
gien (5) donnent 23^51'. Ce dernier nombre serait
exact s'il étaitvrai, comme l'admettent ces géographes,
par une sorte de convention que je ne m'explique pas,
que la différence entre le méridien de l'Ile-de-Fer et
celui de l'Observatoire de Paris fût rigoureusement de
20*. Dès avant 1724, cependant, les astronomes de l'A-
cadémie des sciences avaient reconnu qu'elle devait
être portée à 20*30'. (Légende d'un plan de Paris publié
en 1724 par Danet, gendre de N. de Fer.) »
Relativement à la destination locale de notre table
d'horloges, il s'élève en somme une double présomp-
tion : ou bien il s'agit d'une œuvre originale, faite pour
l'Université de Pont- à-Mousson et offerte par le sei-
gneur et la dame de Gouvonges, dont on aura inscrit
par reconnaissance le nom féodal en lieu d'honneur,
(1) Cette donnée est adoptée par Sanson d*Abbeville et
plusieurs autres géographes.
(2) Lotharingia ducatus.
(3) Les duchez de Lorraine et de Bar.
(4) Carte de Lorraine dressée en 1756 pour la lecture du
mémoire de M. Durival Taîné.
(5) Dictionnaire géographique, édition de 1763.
^f.K' p ' "i^T- 7^ ;
opinion soutenue par plusieurs de nos confrères, ou
bien ce cadran est la réplique d'un autre, destiné à
cette institution, et sur lequel, outre des modifications
possibles du décor, Tartiste aura remplacé le nom de
Pont-à-Mousson par celui du château d'Antoine de Stain-
ville, sans avoir suffisamment égard à la différence de
longitude. Même dans cette hypothèse, que person-
nellement nous croyons la plus probable, Tinstrument
conserverait une valeur sérieuse, surtout en Tabsence
de son congénère ; ajoutons qu'il a été découvert, il y a
huit ans, à Ligny-en-Barrois (1), beaucoup plus près
de Couvonges que de Pont-à- Mousson. Si nous sa-
vions qu3lles relations a pu avoir Antoine III de Stain-
ville avec l'Université lorraine et avec Appier Hanzelet,
le problème s'éluciderait peut-être, mais notre igno-
rance à cet égard est complète. Ce gentilhomme a pu
d'ailleurs, après avoir terminé ses études chez les Jé-
suites, leur faire don d'un cadran de ce genre, et en
commander un semblable pour lui-même (2).
Quoi qu'il en soit, notre table d'horloges solaires a
une relation incontestable avec l'Université de Pont-à-
Mousson ; cette circonstance, surtout à l'heure actuelle.
(1) Chez M. Lacottri seliier-bourrelier. Il a été acquis par
le Musée lorrain sur les obligeantes indications de M.
L. Maxe-Werly. Voir Journal Soc. Arch. lorr. , 1884,
p. 196.
(2) La publication du Journal de Gabriel le Marlorat
vient (p. 144) nous fournir une preuve des attaches d*An-
toine de Stainvilie avec la Compagnie de Jésus : « Led.
jour, 28 mars 1624, a esté mise la première pierre de TégUse
des Jésuites de Bar, en la rue des Juifs, par M' de Couvon-
ge et s' abbé de Liste. »
— 411 —
ajoute un très grand intérêt à celui que cet objet offre en
lui-même , grâce à ses figures astronomiques , aux
emblèmes qui le décorent, enfin par le nom du graveur
et Part qu'il a mis dans son travail (1).
(1) Nous devons, de plus, à M. P. L&llemand l'identifica-
tiou des six localités suivantes portées sur V « Horloge
couteuant les Méridiens » :
Camboya, Cambodge.
Zabaspa de Turchestain, au t0<* de la mer Caspienne.
Port Royal au Brazil^ sur la côte orientale du Brésil, à
rembouchure du San-Francisco.
Isle des Sept Citez, île imaginaire que Mercator place
entre les Bermudes et les Iles du Cap Vert.
Brest de Canada, au nord du golfe de Saint- Laurent, sur
la côte méridional du Labrador.
Picora, au Brésil, au confluent du fleuve des Amazones
et du Purus.
\
\
413 -
f »
LISTE DES SOCIETES SAVANTES
AVEC LESQUELLES LA SOCIETE d'aUCHÉOLOGIE ÉCHANGE SES
PUBLICATIONS (1)
Amiens. — Société des Antiquaires de Picardie.
Angers. — Société industrielle d'Angers et du dépar-
tement de Maine-et-Loire.
Angers. — Société nationale d'Agriculture, Sciences et
Arts d'Angers.
Annecy. — Société florimontane d'Annecy.
Arras. — Commission départementale des Monuments
historiques du Pas-de-Calais.
AuxBRRE. — Société des Sciences historiques et natu-
relles de TYonne.
Bar-le-duc. — Société des Lettres, Sciences et Arts de
Bar-le-Duc.
Beâuvais. — Société académique d'Archéologie,
Sciences et Arts du département de
rOise.
Belfort. — Société Belfortaine d'Emulation.
Besançon. — Société d'émulation du Doubs.
Bordeaux — Société archéologique de Bordeaux.
(1) Les présidents des Sociétés dont le nom est précédé
d'un astérisque, ont été nommés membres honoraires de la
Société d*Archéologie, en souvenir des preuves de sympathie
qu'elle a reçues de ces Compagnies à la suite de Tincendie
de 1871, qui a partiellement consunr.é b Palais ducal, au-
jourd'hui restauré.
ifm-^Jys^sj^^^i'
r.''
— 414 -
BouROEs. — Société des Antiquaires du Centre.
Caen. — * Société française d'archéologie pour là con-
servation des monuments historiques.
Chalon-sur-Saône. — Société d'Histoire et d'Archéo-
logie de Chalon-sur-Saône.
Chalons-sur-Marne. — Société d'Agriculture , Com-
merce, Sciences et Arts du
département de la Marne.
Chambéry. — Académie des Sciences, Belles- Lettres
et Arts de Savoie.
Chambéry. — Société savoisienne d'Histoire et d'Ar-
chéologie.
Chartres. — Société archéologique d'Eure-et-Loir.
Ghateau-Thierry. — Société historique et archéolo-
gique de Château-Thierry.
CoLMAR. — Société d'histoire naturelle de Colmar.
CoMPiÈGNE. — Société historique de Gompiègne.
CoNSTANTiNE. — Sociéto archéologiquc de la province
de Gonstantine.
Dax. - - Société de Borda.
Dijon. — * Commission des Antiquités du département
de la Côle-d'Or.
Draouignan. — Société d'études historiques et archéo-
logiques de la ville de Draguignan.
ËPiNAL. — * Société d'Emulation du département des
Vosges.
Fontainebleau. — Société historique et archéologique
du Gatinais.
Grenoble. — Académie delphinale.
Le Havre. — Société nationale havraise d'études di-
verses.
Lanores. — Société historique et archéologique de
Langres.
-- 415 -
Limoges. — Société archéologique et historique du
Limousin.
Maçon. — Académie de Mâcon.
L« Mans — Société historique et archéologique du
Maine.
Marseille. — Académie des Sciences, Belles-Lettres
et Arts de Marseille.
Marseille. — Société de Statistique de Marseille.
Metz. — * Académie de Metz.
MoNTAUBAN. - Société archéologique de Tarn-et-Ga-
ronne.
MoNTBÉLiARD. — Société d*Emulation de Montbéliard.
Mulhouse. — Musée historique de Mulhouse.
Nancy. — Académie de Stanislas.
Nantes. — Société archéologique de Nantes et do la
Loire-Inférieure.
NÎMES. — * Académie du Gard.
Orléans. — * Société archéologique de rOrléanais.
Paris, antérieurement Lyon. — Musée Guimet.
Paris. — Société nationale des antiquaires de France.
Paris. — Société des Etudes historiques.
Pau. — Société des Sciences, Lettres et Arts de Pau.
Poitiers. — * Société dos Antiquaires de TOuest.
Reims. — Académie nationale de Reims.
Saint-Dié. — Société philomathique vosgienne.
Senlis. — Comité archéologique de Sentis.
Sens. — * Société archéologique de Sens.
Strasbourg. — Société pour la conservation des monu-
ments historiques d'Alsace.
Toulon. — Société académique du Var.
Toulouse. — Société archéologique du Midi de la
France.
* ■ ^ ^ ■' .^ * ■ ^ ■•
- 416 —
Troybs. — Société académique de TAube.
Verdun. — Société philomathique de Verdun (Meuse).
Vitry-le-François. — Société des Scicînces et Arts de
Vitry-le-François.
SOCIETES ETRANGERES
Anvers. — Académie d'Archéologie de Belgique.
Arlon. — Institut archéologique du Luxembourg.
Bruxelles. - Société belge de Numismatique.
Bruxelles. — Société des Bollandistes.
Bruxelles. — Société d'Archéologie de Bruxelles.
ËNGHiEN. — Cercle archéologique d'Enghien (Bel-
gique) .
Gand. — Comité central de publication des Inscriptions
funéraires et monumentales de la Flandre
orientale.
Liège. — Institut archéologique liégeois.
Liège. — Société libre d'Emulation de Liège.
Luxembourg. — "Institut royal grand-ducal de Luxem-
bourg (section des sciences histo-
riques).
MoDÈNE. — R Academia di Scienze, Letlere ed Arti
in Modena.
Namuu. — Société archéologique de Namur.
Rome — Commissione archeologica comunale di Roma.
LISTE DES MEMBRES
DE LA SOCIÉTÉ D'ARCHÉOLOGIE LORRAINE
ET DU MUSÉE HISTORIQUE LORRAIN
au i" Janvier 1893
Bureau de la fiociété élu pour Tannée 1893 - 1803.
Président, Charles Guyot.
Vice -président^ Léopold Qttintai'd.
Secrétaire perpétuel ) t ^ #.
, I LeoQ Germain.
Bibliothécaire- Archiviste )
Secrétaire annuel, Raymond de Souhesmes*
Trésorier, René Wiener.
Secrétaires adjoints : Pierre de Lallemand de Mont et
Emile Davernoy.
Conservateur du Musée lorrain, Lucien Wibneh
Conservateur honoraire, Charles Cournault.
illeilibres boitoraires*
Montesquieu (le vicomte de;, ancien préfet de Meurthe-et-
Moselle, ancien conseiller d*Etat, à Paris.
Joybert (Madame la baronne de) au château de Saulture's-
les-Nancy.
27
Il
Le Directeur de la Société française d* Archéologie pour la
conservation et la description des Monu«
ments (1).
Le Président de la Commission des Antiquités du départe-
ment de la Côte-d'Or.
— de la Société d*EmuUtion des Vosges.
— de TAcadémie de Metz.
— de TAcadémie du Gard.
— de la Société archéologique de TOrléanais.
— de la Société des Antiquitaires de l'Ouest.
— de la Société archéologique de Sens.
— de rinstitut royal grand-ducal de Luxembourg
(section des sciences historiques).
Membres perpétuels (â).
*' Gonrcel (Valentin de) rue Vaugirard, 20, Paris.
* Florange (Jules), 21, quai Malaquais, Paris.
^ Germain (Léon), membre de TAcadémie de Stanislas, rue
Héré, 26.
*i* 60117 (Jules), ancien magistrat, membre de l'Académie de
Stanislas. (Mort à Nancy le 16 février 1892).
* fkvjot (Charles), professeur à TEcole forestière, membre
de TAcadémie de Stanislas, rue Girardet, 10.
(1) La Société a conféré le titre de membre honoraire aux présidents
des Sociétés qui, après l'incendie da Palais dncal en 1871, ont bien
▼oulu loi donner des témoignages de sympathie, soit en souscrivant pour
la reconstruction de l'édifice, soit en envoyant la collection de leurs
publications à la bibliothèque du Musée.
(2) Le titr» de membre perpétuel est acquis par le versement en une
seule fois d'une somme de 200 francs. Il donne droit à la distribution
gratuite des Mémoires et du Journal de la Société. (Arrêté ministériel du
16 juin 1891, autorisant cette disposition additionnelle au Règle-
ment.)
Les noms précédés d'un astérisque sont ceux des membres abonnés
au Jotirnal mensuel de ia Société.
Les personnes dont le nom n'est suivi d'aucane indication de lieu, ont
leur résidence à Nancy.
III
* Langlard, directeur d'assurances, 30, rue des Tiercelios.
*i* Laprevote (Charles), ancien secrétaire perpétuel de la So-
ciété (mort à Nancy le 12 juin 1886).
* Larguillon (le commandant), faubourg Saint-Georges, 49.
i* Heaume (Edouard), avocat, professeur à 1 Ëcole forestière
(mortii Paris lo 5 mars 1886).
* TUéry (Emile), artiste peintre, à Maxéville près Nancy.
* Wiener (Lucien), rue de la Ravinelle, 28.
Aieiiibres tilulairee.
* Âbel (Charles), ancien député, président de la Société
d'Archéologie de la Moselle, rue Nexirue, 18, à Metz.
Adam, président de chambra à la Cour d'appel, boulevard
Sévigné, à Rennes.
Adam, ancien maire de Nancy, rue Victor Hugo, 2.
* _ Alsace, prince d*Hénin (le comte d'), au château de Bour-
lémont, par Neufchâteau (Vosges), et 20, rue Washing-
ton, Paris.
Ambroise (Emile), avoué, docteur en droit, rue Gambetta,
16, à Lunéville.
* André, père, ancien entrepreneur, rue du Manège, 6.
* André, architecte du département, rue d'Alliance, 12.
Angenonx, président de chambre à la Cour d'appel, cours
Léopold, 49.
* Arth, propriétaire, rue de Rigny, 7.
* Asher, libraire, Unter den Linden, 5, à Berlin.
* Anbry, propriétaire de la manufacture de faïence de Bel-
le vue, près Toul.
Andiat, doyen des conseillers à la Cour d'appel, membre
de l'Académie de Stanislas, rue de la Ravinelle, 35.
Anthelin, professeur au Lycée, rue des Tiercelins, 44.
Avout (le baron Auguste d') ancien magistrat, rue do
Mirande, 14, à Dijon (Côte-d'Or).
Baradez, ancien adjoint au Maire de Nancy, ancien pré-
sident du Tribunal de commerce, rue du Monte t, 6.
Barbai ^Eagéne), commiodant an 133* dt ligne, i Reima,
6, rue Lafayette-
Barbsy (Adrien), me Sainto-Catheriae, 5.
Barbey (George), à Corre (Hiute-Sadoe).
Barbier (l'abbé), curé de Saint- ViDcent-Saïut-Pincre,
impasse Saint- Vin cent, 7,
Barthélemr (Pran^is), membre de l'AcBdémie de Stanis-
IsH, rue du Faubourg des Trois- Maison s, 33 bis.
Bastien (Félii), banquier, rue de Phaisbourg, Paris.
Bastien (Pierre), greffier en chef de la Cour d'appel, rne
Désilies, 4.
BanUremant-Conrteiiay. duc d'Atrisco(le prince de), rue
deGrenelie-Saint-Oemain, 87, Paria.
Baïuaont, principal dn Collège de Lunéville.
Bansaon (l'abbé), curé de Frolois, parCeiDtrey(M.-et-M.).
Beau, avoué su Tribunal, Grand'Rue (Ville-Vieille), 35.
Beandeuan, directeur des contributions directes, rue de
la Source, 31.
Beanminy [Chrestien de), place de la Carrière, 45.
Beanpré (Emile), propriétaire, rue de Serre, 18.
Beanzée-Plnsart, sculpteur, à Stenay (Meuse).
Bénard (l'abbé), aumônier de la Chapelle ducale de Lor-
raine, rue TrouilUt, B.
Benoit (Arthur), homme dn lettres, à Rerthelming, par
Fénétrange (Lorraine).
Benoit (Charles), doyen honoraire de la Faculté des let-
tres, membre de l'Académie de Stanislas, rue Le Pois, 9.
Bergeret, lithographe, rue de la Salpêlrlére, 3
Bernard de Jandin, ancien magistrat, rue Montesquieu, 16.
Berger -LeTranlt (Oscar) , imprimeur-libraiie , rue des
Glacis, 7.
Bertier (Emile), avuué à la Cour d'appel, place de la
Carrière, 8.
Berlin (Charlea), propriétaire, rue Le Pois, 6.
Bengnet (l'abbé), profeasenr au grand Séminaire.
* Bibliothèque (la) de la Ville de 6ar-le-Duc (Meuse).
* Bibliothèque (la) du Britieh Muséum, à Londres.
" BibUpthèque (la) de la Ville d^Epinal (Vosges).
" Bibliothèque (la) de la Ville de Longwy (M.-ct-M.)
' Bibliothèque (la) de la Ville de Lunéyille.
* Bibliothèque (la) de TUniversity Library, Cambridge.
" Bibliothèque (la) de la Ville de Verduri (Meuse)
* Bigorgne, professeur au lycée Condorcet, 24, i ue de Ghâ«
teau-Landon, Paris.
* Bizemont(Ie vicomte de), ancien officier supérieur, au châ-
teau du Trembloye, commune de Bouxières-aux- Chênes.
Bleicher, professeur d'histoire naturelle médicale à TËcole
supérieure de pharmacie, membre de l'Académie de
Stanislas, cours Léopold, 9.
Bloch (J.)» grand Ilabbin du Consistoire israélite, 18, rue
de TEquitatiod.
Blondlot, maître do conférences à la Faculté des sciences,
quai Claude le Lorrair, 8.
BoUemont (Alfred de), rue de la Primatiale, 30.
Bonnabelle, correspondant de la Société pour l'instruction
élémentaire, rue Nève, 37, à Bar-le-Duc (Meuse).
* Bonneau (l'abbé), curé de Buroy-en*Vaux, par Vaucou-
leurs (Meuse).
* Bonnejoy, docteur en médecine, rue de Marimer, 15, à
Chars-en-Vexin (Seine-et-Oise).
Bonvalot, ancien magistrat, rue Cassette, 3, à Paris.
* Boppe (Auguste), secrétaire de la légation à Lima
(Pérou).
Boppe (Lucien), sous-directeur de l'Ecole forestière, rue
de la Commanderie, 21.
Bossert, bijoutier, rue Saiot-Dizier, 45.
' Bossu (Lucien), procureur de la République, à Boulogne
(Pas-de-Calais).
* Bœswilwald, architecte, inspecteur général des monu-
ments historiques, rue Hautefeuille, 19, à Paris.
TI
Boncher (EmUe), Graad'Rue (Ville- Vieille), 76.
BoQÎllet (l'abbé), rue de la Trinité, 3, à Paris.
* Bonlangé, aacien magistrat, à Remiremont (Vosges).
Bout (Ch irles), propriétaire, cours Léopold, 18.
Bonrcier (le comte Charles de), au château de Bathelé-
mont-8ur-Seille, par Marsal (Lorraine).
* Bourgeois , archiviste du département de Loir-et-Cher,
avenue Paul Reneaulme, 3, à Blois (Loir-et-Cher).
Bourgogne (Frédéric de), propriétaire, à Lamarche
(Vosges).
* Bonrgon (Désiré), architecte, élève de 1** classe de rBeoIe
des Beaux- Arts, rue des Michottes, 11.
* Boursier (Charles), notaire, rue SaintrJean, 54.
' BoaYOt (ie baron de), à St-Remy-en-Bouzemout (Marne).
Bouvier (de), conseiller honoraire à la Cour d'appel, rue
TrouiU t. 7.
* Boyé (Pierre), licencié en philosophie, rue Baron Louis, 1.
* Brassart, archiviste de la ville de Douai, rue du Caute-
leux, 63, à Douai (Nord).
Brenier (l'abbé), curé d'Epinal (Vosges).
' Branx (Gabriel de Plat de), àBoucq, parFoug (M.-et-M.).
* Bretagne (Ferdinand), contrôleur des contributions di-
rectes, rue de la Ravinelle, 41.
* Briard (Emmanuel), avocat, rue des Carmes, 34.
* Brice (le général), place de TAcadémie, 8. t
* Briey (le comte Herbrandt de), chambellan de S. M.
Tempereur d'Autriche, 41, rue Godot de Mauroi, Paris.
* Brinconrt (J.-B.), rue Blanpain, 2, à Sedan (Ardennes).
* Bmllard (le doctour), château de Gondreville (M. et-M.).
Bmyères (Ch. de), avocat, à Remiremont, (Vosges).
* Buffet (Aimé), inspecteur général des Ponts-et-Chaussées
en retraite, quai Henry IV, 46, Paris.
* Bnffet (Louis), membre de l'Institut, sénateur, ancien mi-
nistre, rue de Saint-Pétersbourg, 2, Paris.
* Bnffet (Louis), ingénieur des Ponts -et-Chaussées, rueSte-
Catherine, 19.
VII'
* Buffet (Paul), rue Casîette, 18. Paris.
" Boisson (Pabbé), 14, rue Legeudre, Paris. f
* BnrUn (V.), avocat, rue Mably, 3.
Bussieime, propriétaire, à Dieulouard.
' Bayignler-Gloaet (\flle Madeleine), rue Saint-Maur, 11,
Ver d un-sur- Meuse .
Carrière (le vicomte de), à Mouzorgues, par Briatexte
(Tarn).
Castez (le vicomte Maurice de), ancien officier d'état*
major» rue de Penthièvre, 6, Paris.
Cerf, notaire, à Rosières-aux- Sali nés.
Clianel (l'abbé), professeur au pensionnat de la Malgrange.
* Gliapeiier (Pabbé), curé doyen de Lamarche (Vosges).
Ghassignet, sous-intendant militaire en retraite, membre
de TAcadémie de Stanislas, rue de Boudonville, 18. .
* Chariot (Alexandre), ancien magisrtrat, rue des Domini-
cains, 5.
* Qiàtelain (E), professeur de philosophie au Lycée, rue de
Boudonville, 24.
Cliatelain (Fabbé), professeur de philosophie, à Ste-Croix,
boulevard Victor-Hugo, 15, Neuilly -sur-Seine.
* Cliatton (Fabbé), curé de Velaine-sous-Amance (M.-et-M.)
* Clienut (Bmile), juge de paix du canton ouest de Naucy,
rue de la Ravinello, 16.
Clievreiiz, archiviste, rue des Bourdonnais, à Paris.
Cliicoilian, proviseur au Lycée d'Annecy.
* Cliristophe (Henri), lithographe, rue d*Amerval, 10.
Ciaadot, entrepreneur de bâtiments, rue du Joli-Cœur, 3.
* Ciaadot (Camille), inspecteur-adjoint des forêts. 14, rue
Grand ville.
" Cioud (Victor), négociant, Grande-Rue, 30, à Blâmont.
* Coêtiosqnet (Maurice du), rue Sur Broué, à Rambervillors
(Vosges).
* Coiiez (Emile), docteur en médecine, à Long wy- Haut.
* CoUenot (Félix), ancien magistrat, rue d'Alliance, 9.
Tin
Collignon, médecin-major, rue de la Faix, 42, à Cher-
bourg: (Manche).
Çollignon, professeur â la Faculté des Lettres, rue Jeaune
d*Arc, 2 bis.
Colline notaire, rue de la Hnche, 64.
Coudé (baron de\ directeur d'assurances, rue Gambetta, 38.
* Contai (Edmond), avocat à la Cour d'appel, rue Sainte-
Catherine, 29.
Cordier (Julien), député de rarrondiseement de Tonl,
boulevard Latour-Maubourg, 19, à Paris.
* Costé, ancien conseiller de Préfecture, rue Stanislas, U4.
* Counumlt (Charles), rue de la Rivière, â Malzéville.
* Courtois, avocat â la Cour d*appel, place de la Carrière, 41.
* Crépin-Leblond, imprimeur-éditeur, passade du Casino.
CrOTOisier d*Hlirbach6 (René de), avocat à la Cour d'ap-
pel, place de la Carrière, 9.
Cuny (V.), artiste peintre chez M. Majorelle, rue Girar-
det, 4.
* Cnvier, ancien pasteur, membre de TAcadémie de Stanis-
las, faubourg Stanislas, 29.
* Dannreuther, pasteur de l'Eglise réformée, rue de la
Banque, 51, à Bar-le-Duc (Meuse).
Dartein (l'abbé de), ancien professeur â Técole Saint-Si-
gisbert, rue de Rigny, 22.
Dayid (Louis), à Vaucouleurs (Meuse).
OaTid (Paul), ancien sous-préfet, quai Claude-le-Lorrain,
12.
Debuisson (Eugène), â Bayon.
* Degermaim (Jules), rentier, â Sainte-Marie-aux-Mines
(Alsace).
Déglin (Henri), avocat à la Cour d'appel, rue Saint-Geor-
ges, '79.
Degontin (Maurice), château de Remonvaulx, près Bayon-
ville (M.-et-M.).
* Délavai (Albert), à Saint-Max, près Nancy.
^
IX
Démange (l'abbé), directeur de Técole Saint-Léopold, rue
de la Pépinière, 26.
Demango (fabbé), curé de Blénod-les-Toul.
Denis (Albert), président du Cercle sténographique de la
Lorraine, avocat, à Toul.
Denig (Charles), lieutenant au 3« bataillon d'infanterie
légère d'Afrique, au Kef (Tunisie).
Denis (Paul), président du Tribunal de Toul.
Depautainei docteur en médecine, membre uu Conseil
général de la Meuse, à Gondrecourt (Meuse) . ^
Didierjean (le comte), directeur des cristalleries de Miinz-
thal-Saint-Louis, par Lemberg (Lorraine).
Didier-Laurent (l'abbé), ancien directeur de Técole Saint-
Joseph, à Reims (Marne), curé de Thiéfosse, par Vagney
(Voeges).
Digot (Alfred), propriétaire, rue des Ponts, 48.
Oinago, conseiller de Préfecture de la Haute-Saône
(Veeoul).
Domgermain (le comte de), rue de Lille, 3, à Paris, et à
Phlin (M.-et-M.).
Donreanz (Paul), bibliothécaire de TËcole supérieure de
pharmacie, avenue de l'Observatoire , 4, à Paris.
Doyotte (l'abbé), curé de Haroué (M.-et-M.).
Domast (le baron Guerrier de), conservateur des forêts
en retraite, place de la Carrière, 38.
Dumoot (Paul), docteur en droit, sous-bibliothécaire uni-
versitaire, place de la Carrière, 16.
Dnrand (G.), archiviste du département de la Somme, rue
des Jacobins, 71, à Amiens.
Duval (Louis), négociant, rue Notre-Dame, à Bar-le-Duc.
Davernoy (Emile), archiviste du département de Meurthe-
et-Moselle, hôtel et rue de la Monnaie-
Eauclaire (l'abbé), curé de Rosières-aux-Salines (M.-et-M.).
Ebel (Charles), rue Saint-Dizier, 140.
Elie (Robert), inspecteur des forêts, Neufchâteau (Vos-
ges).
* Elle-Lettre, aacîeB offîcidr de cavalerie, eoura Léopold, 43.
* Espée (la baron Marcien de T), rue Casimir Périer, Il
bis, à Paris.
* Errard (Jules), banquier, à Mirecourt (Vosges).
* FaTÎar, conseryateur de la Bibliothèque publique, rue
Jeanne-d*Arc, 2.
* Ftny, notaire, à Saint-Loup (Haute-Saône) ^
* Feyen, ancien notaire, à Pont-à-Mousson.
* niche (Paul), professeur à TEcole forestière, membre de
r Académie de Stanislas, rue Saint-Dizier, 9.
Florentin (Jules), à Forcelles-sous-Qugney, par Diarville
(M.-et-M.)
* Fonld (Alpb.), maître de forges, rue Qirardet, 4.
* Fonrier de Baconrt (le comte Etienne), rue Cortambert
à Passy- Paris.
* Fourmann (l'abbé), curé de Bionville (M.>et-M.).
* Fonmier, docteur en médecine, à Rambervillers (Vos*
ges).
François, ancien notaire, rue de Thionville, 5.
Frémotte, peintre-yerrier, rue St-Jean,.50, à Neufchâteau
(Vosges).
Fringant (Fabbé), curé d'AUamps, par Vannes-Ie-Châtel,
(M.-et-M.)
Fringnet (Alphonse), proviseur du Lycée Lakanal, rue
Houdan, à Sceaux (Seine).
* Friot, docteur en médecine, rue Saint -Nicolas, 29.
* Froment, ancien magistrat, à Epiual (Vosges).
Fmminet (Fabbé), curé-archipretre de Saint- Jacques, à
Lunéville, place de TEglise, 1.
* Galle (Emile), industriel, membre de TAcadémie de Sta-
nislas, avenue de la Garenne, 9.
* Gallois (Kabbé Théophile), vicaire à Montmédy (Meuse).
* Gandelet (le comte Albert), chambellan de S. S. Léon XIII,
place d* Alliance^ 5 bis.
* Ganier, juge au Tribunal civil de Nancy, rue du Mon-
tet, 5.
XI
* Gargam (Louis), commandant d*infanterie en retraite, rue
lie Strasbourg, 87.
Garnier, ancien juge au Tribunal civil, rue de la Sour-
ce, 8.
Gauobier (Christophe), peintre, à Moyenvic (Lorraine).
Gegoilt (Emile- Bernard), à Vezelise.
* Gegout, conseiller à la Cour d*appe], faubourg Saint-
Jean, 21.
* fitnay, architecte, inspecteur des édifices diocésains, rue
Baron-Louis, 21.
* Genay (Paul), agriculteur, à Bellevue-Chanteheux, par
Lunéyille.
Génin (André), capitaine au 26* de ligne.
* George (Amédée), rue de Toul, 12.
Gérard (Albert), arocat, à Saint-Dié (Vosges).
Gérard, inspecteur principal aux Chemins de fer de TEst,
à Troyes.
Germain, conseiller à la Cour d*appel, rue de Metz, 24.
Gigout (Léopold), architecte, rue Oambetta, 10.
* Gilbert, conservateur du Musée de Tout.
* Gillant (Pabbé), curé d'Auzéville, par Clermont-en-Ar-
gonne (Meuse).
* Gironcoiirt (de), conducteur des ponts et chaussées, rue
Désilles, 5.
Gomien (Paul), sous -intendant militaire, à Limoges
(Haute- Vienne).
Gondreconrt (le comte René de), ancien conseiller de
Préfecture, rue Saint-Michel, 26.
* Gossé (rabbé), vicaire à la paroisse St-Jacques, à Lunéville
(Meurthe-et-Moselle) .
* Goury (Gustave), avocat à la Cour d'appel, rue des Tier-
celins, 5.
* Goatière-YemoUe (E.), rue de la Pépinière, 7.
* Gouy de Bellocq-Fenqniéres (Albert), ancien officier
d'état-major, rue d'Alliance, 9.
XII
Grand-Eury (l'abbé), curé do Champigneulles (M.-et-M.).
Grassot (Fabbé), curé de Choiseul, par Merrey (Haute-
Marne).
Gr08)eail-Manpin, libraire, rue Héré, SO.
Gnérin (Raoul), pharmacien aide-major au 1*' corps 4*ftr-
mée, 47, rue de Flandre, au Tréport (Seine -Inférieure).
Gnérin (Edmond), rue des Capucins. 6, à Lunéville.
Gnillon (Auguste), ancien sous-ofiicior, voyageur et pro-
priétaire, au Carel, à Cormolain (Calvados).
Guinet (A.), entrepreneur do bâtiments, rue de Serre, 8.
Guichen (Eugène de), 59, rue Pierre Charron, Paris.
Gntton (Henri), architecte, rue Gambetta, 42.
Guyot (A.), contrôleur principal, chef de bureau des
douanes, rue du Tapis-Vert, 1.
Hslly (le docteur), maire de Champenoux (M.-et-M.).
Hàldat dtt Lys (Cliarles de), cours Léopold, 36.
HamonVille (le baron Louis d'), conseiller général, maire
de Manonville, au château de Manonville, par Noviant-
aux-Prés (M.-et-M.).
Hanneqnin, ancien magistrat, me de la Ravinelle, 25.
Hannoncelles (Gérard d), président de chambre hono-
raire à la Cour d*appel, rue ce la Source, 6.
Harbulot (Louis), juge suppléant à St-Dié (Vosges).
Harmand (l'abbé), supérieur de TOrphelinat agricole, à
Haroué (M.-et-M.).
Hansen (d'), chat, de Sainte-Maria, parBlâmont (M.-et-M.)
Haassonville (le comte d*), de T Académie française, ancien
député, rue Saint- Dominique, 41, à Paris.
Hautoy (du), chaussée de Doullens, 45, à Amiens
(Somme).
Heitz, percepteur des contributions directes, à Vézelise
(M.-et-M.).
Henneze'. (le comte d*), à Villers-lès-Nancy.
Henriet (Joseph), avocat, rue des Michottes, 11.
Henry, professeur à TEcole forestière, quai Claude le
Lorrain, 8 bis.
XIII
Héraole (de T), place de la Carrière, 27, Nancy.
Hermerel, 13, rue OberkampfT. Paris.
Hertz (Adrien), ancien magiHtrat» rue Ste-Elisabeth, 41,
à Lunéville, et à Sarreck, par Berthelming (Lorraine).
Houx d*Hènnecoiirt (du), propriétaire, à Pont-à- Mousson
(M.-et-M.). .
Honzelle, instituteur à Montroédy (Nfeuse).
Huber (Emile), manufacturier, à Sarreguemines.
Hnlot (le baron Joseph), 9, impasse Ste-Cécile.
Hambertdaade (Pabbé), cnrè de Taintrux (Vosges).
Hasson (Auguste), sculpteur, à Bievaincourt, par Vré-
court (Vosges).
lohmaim, bijoutier, rue des Carmes, 1 .
Jacob, archiviste du département de la Meuse et conser-
vateur du Musée, place St-Pierre, 29, à Bar-le-Duc
(Meuse).
Jacques (rabbé Victor), agrégé de TUniversité, professeur
à TEcole Saint-Sigisbert, place de TAcadémie, 11.
Jacquet (Albert), luthier, rue Gambetta, 17.
Jasson, architecte de la Ville, rue de la Monnaie, 8.
Jeandel, greffier au Tribunal de commerce, rue Isabey, 89.
Jérôme (rabbé), professeur au Grand Séminaire.
Joly de Morey (Léon), au château de Morey, par Nomeny
(M.-et-M.) et à Paris, 2, rue Miroménil.
Jouve, bibliothécaire à TArsenal, impasse Excelmans,
4, Auteuil-Paris.
Joybert (le baron G. de), propriétaire, rue de THospice, 49.
Kaller (Edmond), propriétaire, rue de Lorraine^ 61, à
Lunéville.
Kesseling (le baron de), rue de Guise, 17.
Klopstein (le baron Antoine de), conseiller général de
Meurthe-et-Moselle, au château de Châtillon, prés Cirey-
8ur-Ve?ouse (M.-et-M.).
Kools (Vabbé), curé de Lorquin (Lorraine).
Konarski (Wlodimir), vice-prénident du Conseil do Pré-
fecture de la Meuse, à Bar-le-Duc
>
XIT
Krag*Ba8se, conseiller à la Cour d*appel, rue de Serre, 7.
* Kxûm (Fabbé Hermann), curé de Québlauge, par Dieuze-
(Lorraine).
* Labourasse, inspecteur de renseignement primaire en
retraite, à Arcis-sur-Aube (Aube).
Lacaille (Edmond)^ «irocat à la Cour d*appel, rue Dom
Caliaet, 13.
La Cautpalle (de), rue de Boudonville, 14.
Lâchasse, secrétaire de la Faculté de droit, place Car-
rière, 20.
* Lacour (Pabbé), chanoine honoraire, aumônier de Ste-
Rose, rue du Manège, 13.
Lagrange, ex-administrateur de la manufacture de glaces
de Cirey, rue Bergère 18, à Paria.
^ La Crrandville (de), au château de Tumejun, commune de
Bulligny, près Toul (M.-et-M.).
Lahant (de), directeur des contributions indirectes en
retraite, rue de la Rivière, à Verdun (Meusd).
* LaUemand (Paul), conseiller à la Cour d*appel de Besan-
çon, quai Veil-Picard, 55.
* LaUemand de Mont (Pierre de), ancien secrétaire général
de Préfecture, rue Girardet, 1.
" Lallemant de Liocoort (Frédéric de), rue des Domini-
cains, 40.
* Lallement (Léon), 34, cours Léopold.
* Lamasse, peintre, à Lunéville.
* Lambel (le comte Alexandre de), maire de Fléville, ancien
conseiller général.
* Lambertye, marquis de Gerbéyiller (de), château de Ger-
béviller (M.-et-M.).
* Lambertye (le comte Gaston de), Compiègne (Oise).
LandreyiUe (le marquis de), ancien conseiller général, rue
Stanislas, 51.
Landrian, baron du Montât (le comte de), rue Bailly, 7.
* Lantemier, architecte, faubourg Stanislas, 3d.
XV
* LaprdTOto (Léon), ancien inspecteur-adjoint dea forêts,
quai Glaude-le-Lorrain, 20.
* Laroohe (rabbé), curé de Damas-derant-Dom paire (Vosges).
* Latouohe (le baron Georges de), ancien sous-préfet, rue
Qirardet, 8.
* Laurent (A.), médecin-major au 48* d'infanterie, à Guin-
gamp (Côtes-du-Nord).
* Laurent (Jules), sculpteur, rue du Montet, 19.
* Lauron (F.-H.)t employé des Postes et Télégraphes, à
Uzès (Gard).
Lasar-Nathan, professeur, rue de TËquitation, 48.
* Le Bègae de Germiny (le comte Marcel), avenue d*Antin,
37 (Champs-Elysées), à Paris, et château de Béneau-
ville, à Bavent (Calvados).
* Leblanc (Henri), marchand d'antiquités, rue Stanislas, 9I«
* Lebrun (Léon), avocat, à Lunéville.
Lederc (René), ancien magistrat, avocatàlaCourd*appel,
rue de la Commanderie, 11.
* Leiebvre (Heuri), contrôleur des contributions directes
en disponibilité, rue de Rigny, 17.
Lederlin, doyen de la Faculté de droit, membre de 1* Aca-
démie dé Stanislas, faubourg Stanislas, 12 bis.
^ogay, marchand d'antiquités, rue Stanislas, 26.
* Legrand (l*abbé), curé de Beaumont-et-Louvemont, par
Chamy (Meuse).
Legin (l'abbé), curé de Stûtzheim (Basse-Alsace) .
* Lejenne (Jules), secrétaire perpétuel de l'Académie de
Stanislas, rue de la Ravinelle, 22 bis.
Lenglet (Paul), banquier, place de la Carrière, 88.
* Lepezel, docteur en droit, juge de paix du canton de Lon-
guyon (M.-et-M.).
* Le Picard (Ch.) avocat, rue Giraidet, 2 bis.
* Leroy (l'abbé), curé d'Archettes (Vosges).
* L'hôte (l'abbé), professeur au Grand Séminaire de Saint-
Dié (Vosges).
I
XVI
Lhnillier, curé d*Âbreschwiller (Lorraine).
L'hoillier, curé de DamUain (Vosges).
* Lhnlière, ancien entrepreneur, rue des Carmes, 40.
Lignmlle (le comte Gaston de), rue d'Alliance, 15, Nancy.
Lombard (Paul), avocat, professeur à la Faculté de droit,
rue Gambetta, 38.
* Loppinet, inspecteur des forêts, à Verdun (Meuse).
Loraux (Pabbé Arthur), cuié de Grand -Yerneuil, par
Montmédy (Meuse).
Lorrain (l'abbé), doyen du Chapitre de la Cathédrale, à
rEvêché.
Lorrain (Aristide), juge de paix du canton de Nomeny
(M.-et-M.).
Lorta, sou8-dirocteur des contributions directes, à St-Dié
(Vosges).
* Loysean dn Boalay (Joseph- Auguste), ancien conducteur
des Poots-et-chaussées, à Auzéville (Meuse).
* Ladre (le comte Gaston de), membre de TAcadémie do
Stanislas, château de Ludres, à Richardménil (M.-et-
M.), et avenue Montaigne, 43, à Paris.
* Lnxer, conseiller à la Cour d^appel, rue Le Pois, 15.
Lozoir, surveillant général au lycée Lakanal, à Sceaux.
* MagnienTÎlle (de), secrétaire-adjoint de la Société histo-
rique de Compiègne (Oise), rue Saint-Lazare, 15.
Magot, avocat, à Pont- à-Mousson (M -et-M.)*
* Majarelle (Louis), industriel, place d*Alliance, 8.
* Malhortyi chef d'escadrons au 8^ chasseurs, à Verdun
(Meuse).
* Manginot (l'abbé Eug.), professeur au Grand Séminaire.
* Marchai (l'abbé), curé de Dieulouard (M.-et-M.).
Marchai (Eugène), docteur en droit et en médecine, an-
cien adjoint au Maire de Nancy, rue Saint-Michel, 23.
* Marchai, ancien magistrat, à Bourmont (Haute «^Mar ne).
* Marcot (Léopold), ancien maire de Réméréville, Grand'-
Rue (Ville- Veille), 13.
XVII
Marcot (René)» membre du Conseil municipal, rue de la
Ravinelle, 18.
* Margo (Gaspard) , membre de la Chambre de com-
merce, rue des Tiercelins, 16.
Margon (le comte de)» lieut.-colonel au 11* chasseurs, à
Vesoul.
* Mariclial (Paul), archiviste-paléographe, rue Cail, 23,
Paris.
Maringer, Maire de Nancy, conseiller général, faubourg
Saint-Jean, 28.
* Marly, ancien adjoint au Maire de Metz, rue Le
Pois, 11.
llarqais, sénateur de Meurthe-et-Moselle, conseiller gé*
néral, à Thiaucourt, et rue de Lille, 45, à Paris.
* Marsal (Fabbé), curé de Dieuze (Lorraine).
* Martin (l'abbé Eugène), docteur ès-lettres, professeur à
TËcole Saint-Sigisbert, place de T Académie, 11.
* Martin (rabbé Nu ma), curé de Lisle-en-Barrois (Meuse).
* Martimprey de Roméconrt (Mme la comtesse Ed. de),
château de Ludres, par Flavigny (M.-et-M.).
* Marton (rabbé), ancien aumônier militaire, place d*Al*
liance, 4.
* Martz (René), Procureur de la République, faubourg de
Montbéliard, 2 à Belfort.
* Marx (Roger), homme de lettres), inspecteur des Beaux-
Arts, rue Saint-Lazare, 24, à Paris.
* Mathieu (Ch.), ancien magistrat, rue de la Ravinelle, 33.
Mathieu (fabbé), curé de Ste-Geneviève, par Pont-à-Mous-
son (M.-et-M.).
Mathieu (S. G. Mgr.), évêque d'Angers (Maine-et-Loire).
Mathiot (Paul), rue de Metz, 6.
Mathis de Grandgeille (René), rue de TUniversité, 25, â
Paris, et au château de Grandseille, par Blâment.
* Mathis, préposé en chef de Toctroi, rue Saint-Jean, 54.
* Maure (Marcel), avocat, cours Léopold, 5.
28
* Kazant (Eugène), graffier de chambre à U Cour d'appel,
rue St-Dizier. 161.
■aza-Warlj, corroapondaut da ministère de l'inatructioD
publiqus, rue de Renoea, 61, i Paris.
Heizmoroii de Dombasle (Charles de), directear de la
fabriqua d' instrumenta aratoires, président de la Société
centrale d'agricnltnre de Meurthe-et-Moselle , membre
de l'Académie da Stanislas, rne de Strasbourg, 19.
Heixmoron de Dombaale (Raoul de), ruedeStraabourg, 19.
Hallier, inspecteur d'Académie, membre de l'Académie de
Stanislas, rue Saint-Dizier, 138.
■éiMitral (F.), inspectenr des forêts, à Darnej (Vosges)
■engin (Henri), avocat à la Cour d'appel, place des
Dames, 19.
Masmin, ancien magistrat, me Ste-Catherine, 6.
Metz [le baron Emmaauel de), lieutenant an 2" régiment
de cuirassiers, Niort.
Metx-Noïlat (Antoine de), membre de l'Académie de
Stanislas, rue de U Ravinelle, 21.
Hézièras (Alfred), professeur de littérature étrangère à la
Faculté des lettres de Paris, membre de l'Académie
française, député de l'arrondissement de Briey, boule-
vard St-Michel, 57, i Paris.
Hlchant (Gabriel), ancien conseiller général, rne de la
Gare, 18, i LunéviUe.
Michal (F.), cultivateur à Ugny, canton de Longujou, par
Cons-la-OrandvLlle (M.-et-M.).
Michon (Alfred), colonel d'artillerie, commandant le 6<
régiment, rue Lafajelte, 8.
HieUe, ancien magistrat, rue Paisible, 6, àPont-à-Mons-
son (M.-et-M.).
■illot (Charles), ancien officier da marina, chargé de
cours à la Faculté des sciences, membre de l'Académie
de Stanislas, rua Gilbert, S.
HirlKtch (le comte de), è, Hartf (Prusse rhénane).
XIX
Miscanlt (de), rue d*Alliaiioe, 5.
* Mitry (le comte Henry de), capitaine-commandant au
6« chasBenrs, Saint- Nïihiel (Meuse).
* Mitry (le comte Georges de), commandant au 8* d'artil-
lerie, rue du Haut-Bourgeois, 4, Nancy.
Moidrey (Léon Tardif de), ancien magistrat, au château
d'Hannoncelles, par Manheulles (Meuse).
* Montjoie (de), au château de Lasnez, près Villers-lès-
Nancy (M.-et-M.).
* Horeau, brasseur, à Vézelise.
Morlainconrt (de), colonel d'artillerie en retraite, fau*
bourg Saint-Jean, 28.
* Mortet (Léon), 54, faubourg Stanislas.
Mossmaim, archiviste de la Ville de Colmar (Alsace), rue
Saint-Martin, 1.
Mottet de la Fontaine, avocat à la Cour d*appel, rue
Sainte-Catherine, 3.
* Movrot (rabbé), chevalier du Saint-Sépulcre, curé de
Vomécourt^sur-Madon, par Mirecourt.
Munier, ancien député, à Pont^à-Mousson, et boulevard
Saint-Michel, 48, à Paris.
* Munier-Jolain, avocat à la Cour d'appel, rue Saint-Roch,
17, à Paris.
* Nachbaur, avoué à Mirecourt (Vosges).
* Nettanconrt-Vanbecourt (le marquis de), au château de
Nettancourt, par Revigny (Meu«e) .
Nicolas (Eugène), avocat à la Cour d*appel, place Saint-
Georges, 80.
Noël, dentiste, rue des Carmes, 33.
Noël, ancien magistrat, rue des Jardiniers, 2.
* Noiriel (J.), libraire de la bibliothèque publique de
Strasbourg, rue des Serruriers, 27, Strasbourg.
Norberg, membre de la Chambre de commerce, rue des
Glacis, 7.
* O'Gorman (le comte), rue Saint-Dizier, 19.
* Oleire (E. d*), libraire, Munsterplatz, Strasbourg.
Olry (rabbé) aumônier de l'hôpital civil et militaire, â Toul.
Pange (le comte Maurice de), La Maison-Verte, à Saint-
Germain-en-Laye (Seine-et-Oise).
* Paquatte (l'abbé), directeur des sœurs de la Doctrine
chrétienne.
Parisel (V.\ instituteur en retraite, à Malaincourt, par
Bourmont (Haute-Marne).
* Pariset, maître de conférences à la Faculté des lettres,
7, rue St-Lambert.
* Parisot (E.-S.)i agrégé d*hiBtoire, rue des Tiercelins, 52.
* Paul, notaire, rue de la Monnaie, 4.
* Panlus (Fabbé), à Puzieux par Delme (Lorraine).
* Pèlerin (Â), bibliothécaire à la Bibliothèque municipale,
rue Saint-Jean, 51.
Pellot (Paul), premier commis greffier au Tribunal, à
Rethel (Ardennes).
* Pernot, propriétaire, à Tramont-Emy (M.-et-M.).
* Pernot dn Breoil (Auguste), ancien magistrat, à Mirecourt
(Vosges).
* Perot, intendant militaire en retraite, rue St-Léon, 14.
Permchot, docteur en médecine, à Mellecey, par Givry
près rOrbije (Saôae-et-Loire).
* Petit, receveur de Tenregistrement en retraite, place
d* Armes, 75, à Verdun (Meuse).
* Petitdemange (l'abbé), curé-doyen de Monthureux-sur-
Saône (Vosges),
* Pfister, professeur à la Faculté des lettres, membre de
l'Académie de Stanislas, rue du Bastion, 11.
* Picard (Fabbé), chanoine titulaire de la Cathédrale, rue
Saint-Dizier, 92.
* Pierfitte (Fabbé), curé de Portieux (Vosges).
* Pierre (Paul), peintre, rue des Dominicains, 20.
Pierron (H.), docteur en médecine, à Pont-à-Mousson.
lierron, libraire, rue Saint-Dizier, 112.
XXI
Pierrugnes (P.-D), membre de la Société archéologique
de Fiesole, 5, via délia Piazzuola, à Florence (Italie).
Pierson, sculpteur- statuaire, à Vau couleurs (Meuse).
Pierson de Brabois. au château de Brabois, commune de
Villers-les -Nancy, et rue de la Visitation, 1.
Pimodan (le marquis de), au château d'Echênay (Haute-
Marne), et rue de l'Université, 18, à Paris.
Piqaemal, ancien capitaine d*artillerie, au château do
Gentilly, commune de Maxéville, par Nancy.
Polrel (l'abbé), curé de Mandres - aux- Quatre - Tours
(M.-et-M.).
Poirel (Paul), ancien magistrat, à Rosières-aux-Salines
(M.-et-M.)
Poirine (l'abbé), chanoine, 19, faubourg Stanislas.
Poirson, receveur municipal en retraite, rue Kléber, 13.
Pommery (de), rue de Boudonville, 18, Nancy.
Prost (Auguste), membre de l'Académie de Metz, boule-
vard Malesherbes, 19, à Paris.
Paton (Bernard), substitut du procureur de la Républi-
que, Saint-Mihiel (Meuse).
Quenet (Edmond), mécanicien à Beaumont, par Gharny
(Meuse).
Qnintard (Léopold), rue Saint-Michel, 30.
Qnintard (Lucien), rue Gilbert, 3.
Rampent (E.), avoué au Tribunal, rue des Michottes, 1.
Rance (l'abbé), ancien professeur à la Faculté de théologie
d'Aix, à Sainte-Magnance (Yonne).
Rayinel (le baron Charles de), ancien député, au château
de Ville, commune de Nossoncourt, par Rambervi tiers
(Vosges).
Ravinel (Maurice de), ancien préfet, 9, rue Gi'rardet, à
Lunéville.
Remy (Fernand), à Saint-Nicolas- de-Port (M.-et-M.).
Renard (René), avocat, rue St-Dizier, 142 bis.
Renauld (Albert), avoué, à Bar-le-Duc (Meuse).
xxn
* Renaold (l'abbé Félix), professeur d'histoire à TEcole
Saint- Sigisbert, place de TAcadémie, 11.
* Renanld, banquier, rue Saint-Dizier, 21.
* Benanlt (Edmond), 10, place de la Carrière.
* Renanx, agent>Toyer à Arracourt (M.-et-M.).
* ReiUS, inspecteur des forêts, 2, rue Colbert, à Alger.
* Richard, notaire, Grande-Rue, 81, à Remiremont (Vos-
ges).
Ring (le baron de), conseiller â la Cour d'appel, place
Darcy, à Dijon (Côte-d'Or),
* Rioconr (le comte (Edouard da Roys de), commandant
d'artillerie en retraite, au château d'Aulnois (Lorraine).
* Riston (Victor), avocat, docteur en droit, rue d'Ëssey,
Malzéville.
* Robert (Louis), dessinateur, rue de la Poterne, 15, à
Pont-à-Mousson.
* Robert, fondeur de cloches, me Pichon, 12.
* Robert (i'abbé V.), curé do Chauvancy-Saint-Hubert, par
Montmédy (Meuse).
* Robert (F. des), membre de l'Académie de Stanislas, villa
de la Pépinière, 1.
* Robert, juge au Tribunal civil, rue des Carmes, 44.
* Robinet (l'abbé), chapelain de la Cathédrale, place Made-
leine, 13, Â Verdun (Meuse).
Roche du TeiUoy (Alexandre de), professeur au Lycée,
rue de Rigny, 5.
Rollin, propriétaire à Gerbéviller (M.-et-M.).
Roqnefenil (Mme la vicomtesse de), née Fourier de Ra-
conrt, place de la Carrière, 12.
Rougieux (Antoni), architecte, rue Dom Calmet, 5.
* Ronyer, ancien directeur des Postes, à Thiaucourt
(M.-et-M.).
Rozard de la Salie (Ludov ic), rue du Haut-Bourgeois, 35.
* Royer, lithographe, rue de la Salpêtrière, 2.
* Rosières (Charles de), rue du Manège. 13.
k'
xxni
* Rosières (Antoine de), rue du Manège, 13.
Sadonl, Premier Président de la Cour d*appel, rue Victor
Poirel, 1, Nancy-
* Saintignon (le comte F^ de)^ maître de Forges à Longwy*
Ba9.
* Saint-HUlier (Henri de), lieutenant au S* régiment de
hussards, rue Duguesclin, 101, à Lyon.
Saint- Joire (Paul), avocat à la Cour d*appel, rue Saint-
Diziet, 25.
* Saint-Joire (René), avocat à la Cour d*appel, rue Saint-
Dizier, 25.
* Saint-Remy (René Ckdot de), ancien magistrat, rue des
Loups, 6.
Saint- Vincent (baron de), juge à Saint-Mibiel (Meuse).
Sanssnre (Henri de), Cité 2%, â Genève (Suisse).
* Save (Gaston), artiste peintre, à Saint-Dié (Vosges) et rue
des Dominicains, 33.
* Schandel, capitaine des douanes â Grand^Combe de Mor-
teau (Doubs).
Schmidt (Ernest), maître de verreries, à Vannes-le-
Châtel (M.-et-M.).
* Schneider, ancien avoué à la Cour d'appel, rue de la Ravi-
nelle, 18.
* Schnler, architecte diocésain, faubourg Saint- Jean, 37.
* Selliére (le baron Frédéric), avenue de TAlma, 61, à
Paris.
* Serot AlmérasLatonr, conseiller à la Cour d*appel, rnede
la Commanderie, 1 1 .
* Serre (Mme la comtesse Marie de), rue Las Cases, 8, à
Paris.
Sicard (Camille), rue du Quartier-Neuf, 1, à Toul.
* Sidot (Louis), libraire, rue Raugraff, 3.
Simette (Théodore), ancien adjoint au Maire de Nancy,
rue de Strasbourg, 5 bis.
Simonin (Fernand), ancien magistrat, rue des Carmes, 29.
XXIV
Simoilin (Prosper), ancien magistrat, place de la Car-
rière, 86.
* Sonrier (le docteur), à Poussay (Vosges).
* Sorlat (E.), avocat, 28, rue des Capucins, à Lunéville
(M.-et-M.).
Souhaut (l'abbé), curé-doyen de Ligny-en-Barrois (Meuse).
'* Soohesmes (Raymond des Godins de), place St-Oeorges, 93.
Spillmann (le docteur), professeur à la Faculté de méde-
ci&e« rue des Carmes, 40.
* Staemmel (l'abbé), secrétaire général de TEvêché, place
Stanislas, 4.
Stainville (Edmond), conseiller à la Cour d*appel, place
de l'Académie, 8.
Stéhelin, préfet de Meurthe-et-Moselle .
Stein, architecte, à Toul .
Straten-Ponthos (le comte van der), de l'Académie de
Metz, rue de la Loi, 17, à Bruxelles (Belgique).
Thomai (Gabriel), conseiller à la Cour d'appel, membre
de l'Académie de Stanislas, rue Stanislas, 82.
* Thomas (Stanislas), rue Charles III, 80.
* Thomas-Mallarmé (Léon), ancien sous-préfet, 6 bis, rue
des Chanoines.
Thomassin (l'abbé), curé du Val-d'Ajol (Vosges).
* ThouYenin (Paul), à Rosiéres-aux-Salines (M.-et-M.).
* ThouYenin (le docteur), maire d} Vézolise (M.-et-M.).
Tonrdes (le docteur), doyen honoraire de la Faculté de
médecine, membre de l'Académie de Stanislas, faubourg
Stanislas, 2.
* Trancart, ancien préfet, rue Sainte-Catherine, 27.
* Tnrinas (S. G. Mgr), évêque de Nancy et de Toul, place
Stanislas, 4 .
* Vacant (l'abbé), professeur au Grand -Séminaire, membre
de l'Académie de Stanislas, rue de Strasbourg, 94.
Vagner (René), gérant du journal VEspêrance, rue du
Manège, 3.
* Valentin, docteur en médecine, rue Saint- Jean, 8.
Vanter (Paul), notaire à Blâment.
* Vanson (l'abbé), vicaire général honoraire, 23, rue du
Montet.
** VernéTille (Louis Httjrn de), avocat à la Cour, rue de la
Source, 27.
Vienne (Henri de), ancien magistrat, rue d'Alliance 6.
* Vienne (Maurice de), chef d^eacadrons au 8* régiment
d'artillerie» rue d'Alliance, 1.
Villelotse (Et. de), ancien archiviste de la Nièvre, rue
Foumorigny, 4, à Nevers (Nièvre),
Vincent (Henri), docteur en médecine, rue du Moulin,
I, Vouziers (Ardennes).
Vivier, conservateur des forêts en retraite, rue Stanis-
las, .5.
* Voirin (Jules), artiste peintre, rue des Michottes, 7.
* VoUrom, négociant, rue Saint-Dizier, 117.
Volland, ancien maire de Nancy, sénateur de Meurthe-et-
Moselle, rue de la Ravinelle, 20, Nancy, et cité Vanneau,
II, à Paris.
* Warren (le vicomte Lucien de), ancien capitaine d'artil-
lerie, place de l'Arsenal, 3.
Welche (Charles), ancien maire de Naiicy, ancien minis-
tre, conseiller d'Etat honoraire, à Ivfontauban-aur-Hou-
demont (M.-et-M.) et avenue d'Antin, 67, à Paris.
Weyland, curé de Quermange, par Langenberg (Lorraine).
Wiener (René), négociant, rue des Dominicains, 13.
* Wolfram (le docteur), directeur des archives, à Metz.
Xardel, ancien président de la Chambre de commerce, à
MalzéviUe (M.-et-M.).
* ZsBpffel (Edgard), ancien vice-président du Conseil de Pré-
fecture, place de l'Académie, 3.
Zanetti (E., aine), artiste peintre, rue du Puty, 11, à
Verdun (Meuse).
Zeller, recteur de l'Académie de Chambéry (Savoie).
XXVI
Membres correspondants.
Barbier de Motitanlt (Monsignor), prêtât de la maison de
S. S. Léon XIII, à Poitiers (Vienne).
Bertolotti, directeur des Archives d'Etat, àMantoue (Italie).
Bonnin, inspecteur des monuments historiques pour le dé-
partement de l'Eure, à Evreux.
Bouille (lé marquis René de), à Paris.
BoYet président de la Société d^Emalation de Montbéliard,
à Valentigney (Doubs).
Chalembert (V. de), à Paris.
Herlnison, libiraire à Orléans (Loiret) .
Jnlllac (le vicomte), ancien officier supérieur, secrétaire de
FAcadémie de Toulouse (Haute-Garonne).
Lory, bibliothécaire- archiviste de la Commission archéolo-
gique de la Côte-d'Or, à Dijon.
Marsy (le comte de), directeur de la Société française d'Ar-
chéologie, à Gompiègne (Oise).
Mignard, membre de la Commission archéologique de la
Côte-d'Or, à Dijon.
Soland (Aimé de), secrétaire-directeur de la Société lin-
néenne de Maine-et-Loire, à Angers.
Wagner, chef d'institution, à Philadelphie (Etots-Unis d'A-
mérique).
ERRATA ET ADDENDA
15. P. Mettre en note : « Ce travail a été lu à TAca-
demie des Inscriptions et Belles^Lettres le 6 octobre
1882. »
P. 69. Rétablir ainsi la dernière ligne de la note 2 :
« (Bibl. nat. Collection Moreau, 106, fol. 126.) »
P. 73. Les mots c Lettre de la réédification de Le-
berdun », ligne 4 du texte, doivent être placées en
titre.
P. 75. L. 7, au lieu de « frappe », lire « frappées >.
Ajouter à la suite du même alinéa :
« Un accord entre Tévêque de Toul et le comte de
Bar, 1332, rappelle que Liverdun avait été réédifié
a avec Taide du comte Henri de Bar qui pour le temps
« estoit et par la force et puissance dMceluy Henry ».
Cet accord vise les clauses du traité de 1177. (Collection
de Lorraine 613, fol. 16.) »
P. 316, ligne 1 : au lieu de « muni », lire « munie ».
TABLE DES MATIÈRES
CONTENUES DANS CE VOLUME.
Pages
Monographie de Téglise de Revigny, par M. l'abbé
Â. BOUILLET 9
Le traité conclu en 1497 entre René II, duc de
Lorraine, et Robert II de la Mark, seigneur de*
Sedan, par M. P. Mabichal 32
Ferri d.e Bitche, par M. le Comte M. de Panoe 51
Le berceau de Nancy, essai historique et archéolo-
gique, par M. J.-B. Paul Hannion '82
La communauté des Enfants-Prêtres et Tinventaire
des fondations de la paroisse de Mirecourt, par
M. Ch. Guyot 154
Note sur la famille de Chrétien de Chastenoy, par
M. Raymond de Souhbsmes 204
Le rétable de Féglise d*Aingeray, par Victor Riston. 223
La sueur anglaise en Alsace et en Lorraine. Notes à
propos d'un imprimé lorrain, présumé de 1529, par
M: Jules Rouyer 229
Harangues des Etudiants de Pont- à-Mousson au duc
de Lorraine Henri II, 1614, par M. J. Favier 248
Contribution à Tétude des camps vitrifiés et calcinés,
par M. F. Barthélémy 266
Notice sur Etienne Bourgeois, abbé de Saint* Vannes
de Verdun, 1417-1452, par Mlle Butignier-Clouet. 801
Lft famille Hérandel, d'après les archives dn bnitliage
da Bassigny, par M. J. Mabchal
Lettres de Grégoire  JérémieJacqueg Oberlio. par
M. Ch. Pfistir
Table d'horloges solaires, gravée par Jean Appier
Uanzelet, par M. Làon Oernaih, avec la collabora-
tion lie M. Ch. Miixot
Liste des Sociétés savantes avec lesquelles la Société
d'Archéologie lorrain» échange ses publications...
Liste des membres da la Société au 1" janvier 1803 . .
Errata et addenda
PLANCHES & FIGURES
Portail de l'Eglise de Reviguy
Abside de l'Eglise de Revigny
Plan de l'Eglise de Revigny
Le ré table de l'Eglise d'Aiugeray (ensemble)
Le rétabio de l'Eglise d'Aingeray (détail)
Harangue de Philippe des Armoises
Pierre tombale d'Etienne fioni^eois
Calice et crosse trouvés dans lo tombeau d'Etienne
Bourgeois
Table de bron;ie gravée par Appier Han7«let
ftuoy — [mp. iJré|iiii-Lab]oiid, paau^a ia Gaaia<